L E JOURNAL scavÀns, POUR VANNEE M. DGC. XXX F^ JANVIER. A PARIS, Chez CHAUBERT, à l'entrée du Quay des Auguftins, du côté du Pont Saint Michel, à la Renommée & à la Prudence. ' mTd'ccTxx^v. """ AVEC AFFROBATION ET TKJVILEGE DU ROY, eh fii y ' ^ r LE JOURNAL DES SCAVANS JANVIER M. DCC. XXXV. HISTOIRE ECC LESI^STIQVE , POVR SERVIR DE Continuation à celle de Ai. l'^Jùi^è F llvky. Tome XXXI II. depuis l'année i^6z. jupjiien 15^8. A Paris , chzzVicxK-ican Mariette ^ rue Saint Jacques, aux Colonnes d'Hercules. 1734. /«-4°. &:/«iz. pp. 59. pour le Difcours qui eft à la tête de ce Volume, pour le corps de l'Ouvrage, pp. 57^. MF L E U R Y s'étoit attaché clcfiaftiquc, que la manière dont . à faire voir dans fon cin- oncnfcignoit dans les Univcrfircz quiénie Difcours fur l'Hiftoire Ec- au commencement du treizième jAnvier. A ij 4 JOURNAL DE fiécle , ctoit peu propre à rendre ceux qui s'appliquoicnt à l'étude véritablement habiles dans les Sciences qui conviennent aux Ec- clefuftiques- Le Difcours qu'on a mis à la rête de ce V'olume eft pro- prement une fuite de ce cinquième Difcours de M. Fieury, L'Auteur fe propofe d'y expliquer de quelle manière les études qui conviennent principalement aux EcclelialHques ïefonr renouvcllces depuis le qua- torzième fiéclc , & comment elles font parvenues au point où nous ïcs voyons aujourd hui. On en a l'obligation aux foins qu'ont pris les Gens de Lettres d'étudier les Langues fçavantes , de pcrfcdion- ner les Langues Vulgaires , de lire les anciens dans leurs fources, de s'appliquer à l'Hiftoire , à la Criti- que , à la recherche des Livres ori- ginaux , à l'étude des anciens Mo- numensi Les Ecclefiaftiques Se les Moines ont toujours étudié la Langue La- tine s mais cette Langue éroit tel- lement dégénérée pendant les fié- cles d'ignorance, de la noblelfe, de l'élégance &c de la pureté de cel- le qu'on parloit dans le fiécle d'Au- gufte , qu'il fcmble que ce fut une autre Langue. Ce ne fut que dans le quatorzième fiécle , que quel- ques génies plus heureux & plus pénétrans , s'appliquèrent à lire les Ecrits de Ciccron , de Saluftc , de .Tite- Live , qui avoient été long- tems oubliés ou extrêmement né- gligés. La le(ihire de ces anciens Auteurs rendit par - là le ftile plus poli & plus élégant. Laurent Wale, S SÇAVANS; qui cft prefque le premier qui ait fait remarquer la barbarie des fié- cies précedens , eft auflî l'un des premiers qui apprit à l'éviter. Chryfoloras, quoique Grec d'ori- gine , rendit le même fervice à la Langue Latine. C'cft de fon Ecole que font fortis Léonard Aretin , François Barbare , Guarini , le Pogge , 5c plufieurs autres. Après ces Si^avans notre Auteur nomme Erafme, Hermolao - Barbaro, le Mantouan , Pic delà Mirande, An- ge Politien , le Cardinal Bembe , les Manuces, Sadolet , Muret, &c.- Un défaut qu'on peur reprochée avec raifon à plufieurs d'entre ces- Sçavans qui fe font attachés à culti- ver la Langue Latine , cft d'avoif imité trop fervilement les Auteurs Payens. C'eft pourquoi notre Au- teur a cru pouvoir les diftinguer en Ecrivains Prophanes ik. en Ecri- vains Ecclefiaftiques , quoique tous fiflcnt proteliîon du Chriftia- nifme. Les premiers ont afFed:é de parlera d'écrire en ftile de Payens en toute rencontre fans avoir égard aux circonrtanccs des tcms , des lieux , des perfonnes , & de l'état prefent des chofcs de leur fiécle. 3> De-là , dit L'Auteur , l'affcda- jj tion ridicule de plufieurs Sçavans 5) des quinzième & feiziéme fiécles, 39 de ne prendre que des noms Ro- n mains , de rejetter ceux qui les » taifoient connoîtrc de leur famil- aie , que la naiffince leur avoit » donnés , & que le ChriiHanifme n même avoit confacrés. Dc-là en- » core ces alTemblées prefque tou- » tes payennes qu'ils formoicnc en- J A N V » tre eux ', où l'on changeoit la 3) deftination des études dont le » but eil: de nous faire rechercher « la vérité pourla connoître &: l'ai- j> mer davantage , en un commerce M d'amour propre , de vanité & aofouvent de pédanterie. Dc-là cn- 3» fin CCS abus énormes de la fcicnce » qui fe font trouvés dans ces Sça- » vans qui n'ofoient lire l'Ecriture »» Sainte dans le Texte Latin., de » peur de gâter leur propre Latini- 0» té ; qui ne pouvoient fouffrir les 3» Livres qui traitoient des matières » de la Religion , de peur d'altérer s» leur goût pour les Antiquitez aoGréques &C Romaines , qui ne « pouvoient fe refoudre à lire leur 3» Bréviaire en Latin , parce qu'ils « ne pouvoient fouffrir celui de la » Bible & des Offices deTEglifca D'autres plus judicieux n'ont em- prunté des anciens que ce qui pou- voit s'appliquer à l'ufage du tems auquel ils écrivoient , & à la matiè- re qu'ils traitoient. Ces derniers ont eu le plus d'Imitateurs depuis ie fciziéme ficelé^ particulièrement en France. La Langue Gréque , quelque utile qu'elle foit pour bien enten- dre le Nouveau Teftament 5c pour lire les Ouvrages des Pères , ctoit abfolumcnî ignorée , avant que les Grecs chafTés de leur Pays par les Turcs fe futTent réfugiés en Italie , où Chryfoloras enfeigna cette Lan- gue avec fuccès. C'efî par ces Grecs & par leurs Difciples , qu'on vit dans le même fiécle la Langue Gré- que cultivée prefque dans toute .l'Europe. 1ER. I755-. _jr Les Prolcflans voudroient fc faire palier pour les premiers Re- ftaurateurs de la Langue Hébraïque en Europe ; mais l'Auteur leur faic voir que c'eft auxCatholiques^donc les pïcmiers d'entre les Hérétiques qui ont été habiles dans cette Lan- gue font redevables de leur Science. Jean Reuchlin qui avoit appris les premiers élémens de l'Hébreux de Jean Weflel de Groningue ^ fc rendit très-habile dans cette Lan- gue, &c la reduiht le premier en art. Pic de la Mirande avoit beaucoup contribué à l'étude de cette Lan» gue en Occident. Le Pape Clé- ment V. avoit ordonné qu'on l'en- feignât publiquement dans les Unt- verfîtcz , de même que l'Arabe & le Chaldéen. Ces vues de Clément V. ont été parfaitement remplies en France par l'établifTement du Col- lège Royal fous François I. fi le concours de ceux qui y vont pren- dre des Leçons n'approche pas de celui qu'on y voyoit dans le fcizié- me iiécle , c'eft moins par la faute des Profeffeurs , dit i'Auteur du Difcours , qu'à caufe du relâche- ment pourTétude des Langues fça- vantes , & d'un grand nombre d'é- tablilTemens prefque femblables en differens endroits de l'Europe. Avant la fondation du Collège Royal, l'invention de l'Imprime- rie avoifbeaucoup contribué au re- nouvellement des Lettres. La Bi- bliothèque de Fontainebleau avoit été un avantage particulier pour les Sçavans de France. Après ces' Obfervations , notre Auteur fait voir combien l'étude (j JOURNAL D des Langues Vulgaires efl: utile pour étendre la Religion Catholi- que , & pour l'entretenir dans les Pays où elle eft établie. Il parle à cette occafion des Académies qui fe font formées d.ns le fciziémc & dans le dix-feptiéme (îécle ; quoi- que plufieurs , dit - il , ayent fuivi le fort ordinaire des chofcs humai- nes , de dégénérer avec le tcms , on ne peut nier que leur établilTe- ment n'ait été très utile pour l'a- .vancement des Lettres. L'Auteur venant enfuite aux tra- dudions , alTure que tant que le bon goût fubdftera , on cftimcra la traduction Françoife de la Biblç que M. le Maître de Sacy a donnée Se pour laquelle il a été aidé par quelques-uns de fes arnis. Il ajoute que l'on n'eftimera pas moins les tradudions en la même Langue de tant d'Ouvrages des Pères de l'E- glife tant Grecs que Latins qui ont coûté dans le dernier fiécle , tant de veilles &: de foins, aux Solitaires de Port-Royal &c à leurs amis. U avoiie néanmoins que depuis ces Solitaires , on a donné au public des traduclions, finon plus fidèles, du moins plus élégantes. La connoilTancc des Langues fçavantes a facilité l'étude de l'Ecri- ture Sainte , qui avoir été aupara- vant (î négligée , même d.ins les Ecoles de Théologie. Le nombre des Commentaires qui ont paru depuis le quatorzième ficelé eft in- fini -, notre Auteur prétend que cette multitude de Commcnraircs a plus chargé l'Eglife & la Répu- blique des Lettres qu'elle ne leur a ES SÇAVANS, fervi. La plupart ne lui paroifîent bons qu'à confulterdans le bcfoin , encore veut-il qu'on ufe dans le choix d'un grand difcernemcnt. On trouve dans les Ouvrages des Pères, la chaîne de la tradition dont on ne peut s'écarter fans s'é- garer. Cependant l'étude des Ou- vrages des Pères avoit été négligée par les Théologiens. C'cft par le zélé avec lequel des Théologiens desderniers fiécles fe font appliqués à la ledure des anciens Auteurs Ecclefiaftiques , qu'ils fe font mis en état de rendre de grands fervices à l'Eglife. Notre Auteur met au nombre de ces Théologieits , Eraf- me , Salmeron , Bellarmin , les Frères Walembourg , &: M. Nico- le , à caufe de fon grand Ouvrage fur la prefence réelle de J. C dans l'Eucharillie. Notre Auteur avertit néanmoins qu'il y a de ces fçavans Théologiens du dernier fiécle , comme Bellarmin , que leue éducation ou des cngagcmcns par- ticuliers ont porté à trop favorifet les prétentions de la Cour de Ro- me. A l'égard de la Théologie Scola- ftique, notre Auteur ne l'eftime qu'autant qu'elle eft fondée fus l'Ecriture Sainte 5: furlaTradition, qu'on y examine des queftions utiles de dodrine & de morale , qu'on les traite d'une manière claire , folide & dcbarradée des termes inutiles de la Philofophie & des qucftions épineufcs d'une Mé- taphyfique trop lubtile, Se qu'on n'employé la méthode des Ecoles que pour donner de l'ordre , de lit J A N V I force & de laprécifion auxraifon- ncmcns. On peut juger par-là de ce que l'Auteur penfc de ces Théolo- giens du quatorzième fiécle&du commencement du quinzième , aufquels on a prodigué les titres les plus magnifiques , & qui s'en font parés férieufemcnt , comme s'ils les enflent mérités. L'étude des Percs a conduit na- lurellemcnt à celle des Canons des Conciles , qui eft neceflaire, & pat rapport aux dogmes , & par rap- port aux réglemens pour les mœurs & pour ladifcipline Eccle- fïaflique. Pour bien entendre les Pères, les Canons des Conciles , même pour bien connoître les dogmes de l'E- glifc , il faut bien fçavoirl'Hifloire Ecclefiafliique , & même l'Hiftoirc Prophane qui eft fouvent liée avec l'Hiftoire Sainte &c avec celle de l'Eglife. Notre Auteur dit, que depuis la fin du dernier fiécle , nous avons d'exccUcns Ouvrages fur ce fujet. Mais qu'avant ceux de M. de TiUemont & de M. Fleury , il n'y avoit point enco* ïc d'Hiftoirc fuivie de l'Eglife qu'on pût étudier , fans crain- dre de s'égarer , fi l'on en excep- te peut - être celle de M. Godeau qui n'eft point à méptifer. On peut profiter du travail de Baronius ; mais il auroit fallu à l'Auteur , pour rendre fon Ouvrage véritable- ment utile , plus de critique , de difcernement, de juftefle d'efprit , &C moins de prévention. Les Centu- riateurs de Magdebourg , dont il appelle les Centuries un |\ecuçil infiarme , n'étoient point meilleurs Hiftoriens que Théologiens , quoi- qu'ils ayent affedc de paroître l'un & l'autre. Mais la partie de l'Hiftoire Ec- clefiaftique qui a été la plus mal- traitée, fuivant notre Auteur, eft celle de la Vie des Saints. Le Mi- roir de Vincent de Beauvais , la Légende dorée de Jacques de Vo- ragine , les Vies des Saints de Ri- badnéira , quoique bien écrites en Efpagnol , & les autres Livres de Contes dévots & de Romans Spiri- tuels { ce font les expreftlons de l'Auteur } ont fait plus de mal à l'Eglife qu'on ne l'a crû , fans doute jlorfque l'on a pcnfé que l'on pouvoit tolérer leur licence. Car outre que ces Auteurs ont abufé de la crédulité &c de la fimplicité des peuples, ils ont donné lieu aux li- bertins de douter des véritez les plus importantes , &: de les con- fondre malicieufement avec ces fortes de fixions. Heureufemenr on a fubftitué à ces Ouvrages rem- plis de fables & de puerilicez , des Vies de Saints écrites avec goût Se fuivant les règles de la critique , comme celles de M. Baillet. L'Au- teur fait aufli l'éloge du Recueil des Ades lînccres des Martyrs , de celui des Ailes des Saints de l'Or- dre de S. Benoît, du Recueil des BoUandiftes : ce n'eft pas que tou- tes les Pièces contenues dans ces Recueils foient également authen- tiques , mais il eft facile aujour- d'hui d'en faire le difcernement. A l'occafion de ces Recueils d'Aitçs des Saints, notie Auteur 8 JOURNAL D parle des recherches qu'on a faites dans le dernier (iécle , pour décou- vrit le plus que l'on pourroit d'an- ciens Monumcns , des Voyages qui ont été entrepris dans cette vue , &: d'un grand nombre de dé- couvertes qui ont été faites de Pie- ces qui font très-utiles à ceux qui s'appliquent à l'étude de la Théo- logie. Notre Auteur vient enfuire aux Cafuiftes , entre lefquels il y en a très - peu pour lefquels il falTe pa- roître de l'cftime. Il ne traire gué- rcs mieux les Myftiques , à l'excep- tion de Sainte Théréfe , pour la- quelle il fait paroître une vénéra- tion particulière. Il n'y a de Prédi- cateurs, dans le feiziéme fiécle, que Grenade & S. Charles Borromce qui ayent mérité fon ellimc -, de ce n'efl: que dans le dix-fepticme fiécle qu'on a recommencé à prêcher d'une manière utile & folide. Une deschofes qui a fait le plus d'honneur aux derniers fiéclcs eft la critique à laquelle on s'cft appli- qué , pour apprendre à bien juger des faits , & fur-tout des Auteurs & de leurs Ecrits. C'cft cet art cri- tique dont l'Auteur fait l'éloge , & dont il fait voir les avantages , qui a produit de bonnes Editions des Ouvrages des Pcres de l'Egiife. Erafme & l'Abbé de Billy ont travaillé utilement en ce genre. Pa- méhus & Rhénanus n'ont pas (î bien rcullî •■, ils n'étoient pas fi bons Critiques que les premiers. Ri- gnaud & Goulîainville ayant eu plus de fccours qu'Erafme & de Billy ont enrichi fur ceux-ci. L'Au- ES SÇAVANS, teur palTe aux Editions de Fevar- den , de Voilius , d'Héinfuis ; des Jcfuites , Sirmond , Fronton-le- Duc -, de celles des Pères Coiri- bcfy , le Quicn & Qiiénel ; de Meflîeurs , Cottelier , Dupin , Baluze , & de celles des Pcres Bé- ncdidins de ia Congrégation de S. Maur, La critique s'eft étendue jufques fur les Bréviaires , d'où l'on a re- tranché une quantité d'inepties §C de fauffes Légendes , pour y fubfti- tuer des Morceaux choifis de$ Saints Percs , les traits les plus re- marquables de l'Hiftoire Ecclcfia- ftiquc , les plus beaux fentimens des Saints , Se les Canons des Con- ciles les plus utiles pour la conduite du Clergé. Comme nous nous fommes beaucoup arrêté fur le Difcours , qui eft à la tête de ce Volume, nous pafferons légèrement fur le corps de l'Hiftoire. Elle contient la plus grande partie de l'Hiftoire Eccle- fiaftique pendant les années 15^2. &- 15^3. ce qui renferme propre- ment une continuation de l'Hiftoi- re du Concile de Trente. L'Auteur a tiré ce qu'il en dit , comme if avoit fait dans le Volume précè- dent j de Palavicin & de Frapaolo, des Aiflcs du Concile de Trente , par Nicolas Pfeaume Evéque de Verdun , qui aflifta au Concile , & des Lettres de Conti. Comme c'eft dans le tems dont l'Hiftoire eft renfermée dans ce Volume que le Cardinal de Lorraine eft entré au Concile , que les AmbalTadcurs de France y ont tait différentes propo- fitiops J A N V I :îitions de teformation fur la difci- pliiic au nom du Roi leur maître , & qu'ils ont eu de grand diffcrcns •avecrAmbafradcur dn Roi d'Efpa- gnc , au fujet de la [)réréance , l'Auteur a tiré pluficurs endroits des Mémoires &c des Inflrudions pour le Concile deTrente recueillis par M. Dupuy. Les faits qui ne regardent point directement le Concile de Trente dans ce Volume , font un morceau fur i'Hii^oire des Socinicns , un autre fur les troubles e>;citc5 en France en 15^1. par IcsCalviniflcs, ôc fur la bataille de Dreux , un eroificme fur les affaires d'Angle- terre entre la Reine Elifabeth t<; la ■Reine Marie d'^Ecofie. L'Auteur parle auffi de quelques perfonnes diltinguées dans l'Eglife qui font mortes pendant l'année ïj6i. comme les Cardinaux de Tournon, de Lénoncourt , de Gaddi , de la Cueva, de Mcdicis , de Jean Ar- borcus , &c. L'Auteur rapporte aulïï ce qui s'eft palTé dans la Facul- té de Théologie de Paris, au fujet de ce que le Docteur Dépenfc avoit avancé fur le culte des Ima- <^es. Nous rendrons compte dans un autre Journal du trentc-quatriém'î Volume de cette Hiftoire qui a pa TU en même tems que celui dont nous venons de rendre compte. Comme il n'y a point de Difcours •Préliminaire à la tête de ce Volu- me , 8c qu'il y a beaucoup plus de variété dans les narrations, nous entrerons dans un plus grand dé- tail par rapport à ce Volume que nous n'avons fait par rapport a« ■trente troiliémc. CyESARlS MAC ATI S C A NDÎ ANENSIS IN ALMO Ferraiienfi Gymnado Mcd.Dodoris & ProfciToiisceleberrimi, de rarâ Medicatione vulncrum , feu de vulneribus raro rradandis , Libri duo, in quibus nova tradifur meihodus quâ fclicilîime ac ciiiiis quam alio quovis modo fanantur vulnera : quxcunquc prxterca ad vcram & perfedtam eorum curationem attincnt diiigenter excutiuntiir : hxc autcmduplici qua;ftione. 1°. Utrum mclius fit vulnera qiiotidiefolve- re ac procurare, an piuribus intcrjcdtis diebus. 2°. Utrum Turunda- rum , 6c pcnilcillorum ufus in -curatione vulnerum fit ncceffaTius. Accetlit Joannis Baptift.T Magati Tradatus quo rara vulncrum curatio contva Sennertum defcnditur. Cum Prif-atime Fridciici - Chriftiani Cregut , Medic. Dodoris lUuftriir. ac Cclcilf. Hanovria; Comitis Confiliarii , Arcliiatri , Aula:que Mcdici , &r. de Iralorum in Remp. Litterariam , pvxcipue vejo Mcdicam mericis maximis. Vcneunt in Nund. Franc. Lipf & Amft. Apud. Joh. P. Semidi. 1735. <3'eft à-dire : Traité de Cèfar- A4-igatiis , fur le befbin de pa-nfer rarement les pLiyes , oit l'on ex.imine deux ans avant que de recevoir Lt Aie- » decme ; mais après l'avoir ejfayée » ils la ch^Jferent de leurFille var l'en- » tremife de Caton le Cenfeur. La hai- « ne de ces Ecrivains envers \x » Médecine , gagna bien-tôt, com.- n me une contagion j toute la Flan- » dre & plufieurs autres Pays. Mais. » il fe trouva d'illuftres Médecins » qui ne purent fouffrir qu'une Ci n grande faulTcté eût un G grande •> cours. Us repouflcrent la calom- » nie , Si comme en France les Me- " dccins ont la liberté de parler en » plein Parlement,' ainll que kre- 5> marque dans lès Lettres , Gui- » Patin , qui a deux fois plaidé en y perfonne, au Parlement de Paris M de même il arriva , que le feptié- » me de Juillet de l'année 1^71. le » Sieur Châles Drelincourt ,, Me- » decin ordinaire du Roi de France » & enfuite Profefleur en Medeci- »ne à Lcide , plaida de vanr le Sé- » nat de Leide & devant toute l'U- «nivcrfitéde la même Ville contre » ceux qui foûtenoient aufîî fauffe- M ment qu'injuricufement , que » pendant Jix cens ans les Âdedecins » Avaient été exclus de Rome,, Soknni die , mnis nimirim JuJiis ', s4 JOURNAL DE leyi' y^piid Scmjtores , Vrbanos , & Academicos , cAnfam , non pnvatam, fed ijHdt, omnium A'iedicomm erat , contra illos egit , ijiti non minus falso qmm injimosè , Aïedicos fexcemis annis Româ f^ijfe puifos pmmlgave- rant. y II faut lire , continue notre An- » leur ^ ce que Gafpar de Rejes, » dans fon Livre intitulé : Elyfins- » Campus jticund. Qn^xftionum , a » écrit fur un menfonge fi mali- «» gnement & fi grolTiercment in- » venté. M. Crégut remarque ici que Ciceron , Sénéque , Suétone , Plutarque , Horace , Juvénal , Martial, & nombre d'au'res Au- teurs anciens font mention de plu- iîeurs Médecins llluitres qui florif- foient à Rome bc dans le refte de l'Italie 3 vers les tems de Caton j tels que furent , i°. Erafiftrate , Héropbilc , Antiftius, celui qui en prefence du Sénat vifita le cadavre deCéfar; 1°. Afclepiades ami fa- milier de Pompée , Thémifon , & du tems d'Augufte- Antome Mufa, à qui les Romains élevèrent une Statue auprès de celle d'Efculape , 5i qui fut magnifiquement recom- penfé par Auguftc pour l'avoir guc- li d'une dangereufe maladie ; car ce Prince lui donna en reconnoif- fance , une grande fomme d'or & d'argent, & lui accorda le privilè- ge de porter l'anneau , honneur qui ne s'accordoit qu'aux Cheva- liers Romains. Dion-Cailîus , Liv. 5J. de fon Hiftoire Romaine, dit qu'Augufte voulut encore qu'An- toine-Mufa , & non feulement lui, îiiais tous ceux qui excrçoicnt alors S SÇAVANS , ou qui exerceroienc à l'avenir , It Médecine, joiiilTent pour toujours, desimmunitez. Tels font les témoignages qu'al- iégue M. Crégut pour prouver contre Corneif Agrippa, &^ontre Michel-Montagne , que du tems de Caton le Ccnfeur , les Médecins étoient très-icfpedlcs à Rome, bien loin d'en avoir été chaffés. Notre Auteur accufe là deifus Agrippa de calomnie , 6c lui reproche d'avoi» mal interprété un palTage de Pline concernant les Médecins ; comme il ne rapporte point le paflage, & que l'endroit elt d'ailleurs curieux, les Le(5t:eurs ne feront peut-être pas fâchés de le trouver ici tout d'uu coup, fans l'aller chercher dans Pline : ils pourront par-là , juger d'abord de la queftion. Mais nous ne ferons point nous-mêmes la tra- dudlion du paffage , nous la pren- drons dans Dupinetqui en lé^oS. a traduit toutes les Oeuvres de Pli- ne : elle eft énergique , la voici mot à mot , en fon vieux langage. Nous reprendrons le pafTage d'un peu haut, mais cela eft neceiTaire pour mettre mieux les Lecteurs en état de juger , Ç\ les Médecins ont toujours été aullî refpedésà Rome que le prétend M. Crégut , & fi pour foûtenir le contraire on ne peut s'appuyer du témoignage de Pline fans mal interpréter cet Au- teur : l'endroit eft du vingt-ncu- viémc Livre de Pline , Chapirre i. nous fuivrons jufqu'à l'orthogra- phe du Traducteur. »> Du règne de l'Empereur Né- jj ron, Theflalus ofta le bruic à tous J A N V I clcs Médecins au pafTc , contre » lefqucls il crioit comme un en- j) ragé ; de forte qu'il abbatit & » renverfa toute leur doiflrinc , & » ce par une grande prudence & B dextérité. .... & de fait il n'y 30 eut lamais Baftcleur ni Coche à 3> trois chevaux mieux fuyvie, ni a> plus ententivemcnt regardée , » qu'cftoit ce ThefTalus , & néant- » moins Crinas de MarfeiJlc le paf- »fa en 'oruit & en authorité , par so deux grands moyens qu'il inven- » ta , car fe voulant monftrer , &C » plus cérémonieux , & plus fpécU' • latif que tous les préccdens Mc- sjdccins, il obfervoit le cours des 3» Aftres , & choifilfoit les heures >♦ bonnes , félon les éledions des nEphemerides & Almanachs ; en 3» tout ce qu'il ordonnoit , jufques » au boire &c au manger defes pa- >• tiens •, par lefquels moyens il irvintàfi grand pouvoir qu'il lé- 3> gua par fon teftament , dix mille 3» fefterccs pour les fortifications -■» de Marfcille En fomme il » attira tellement le monde à fon » opinion , que rien ne fe faifoit 3) que par le cours des Aftres. Sur » quoi un autre Marfilot nommé » Charmis ^ fejetra en campagne , » lequel renverfa non feulement la «manière de procéder des anciens >» Médecins , mais aufli défendoit sles étuvcs & vouloit qu'on fe » baignafl: en eau froide , même en » plein hy ver, & de fait j'y ayveu »> de vieux Sénateurs , ayans efté a» autrefois Confuls , qui tranfif- »> foy ent de froid en leurs bains , Sc » néanimoins ies enduroyent poui E R , 175 r. ir » fe monftrer encore gentils com- » pngnons . . . . . & néanrmoins il »3 n'y a point de doute que tous ces >5 Médecins qui ont tâché d'aquerir "bruit par quelque nouvelle in- s> vcntion , n'ont eu d'autre dcflfein « que de s'enrichir , dez en dez , » au danger de noftre vie. De - là 3> font venues ces malhcureufes & î> maudites confultations des Me- » decins , où ordinairement l'un « dit d'un ^' l'autre d'autre , pour >t fembler fervir de jaquet les uns » aux autres. De -là aufli vint la M deffortunée mort de celui qui fit » graver fur fon fépulchre : Turbc » Aiedlconim perii : ks confitlsMions X des Aiedecins ont canfé ma mort % » & de fait nous voyons , comme w c'eft eftat cft tous les jours chan- » gc & ravaudé , de forte que s'il fe » rencontre quelque Medecinot , 3j qui fâche baDillcrj nous mettons » incontinent 6i noftre vie Si no- 4» ftrc mort en fa main , & luy »j obciflons comme un Soldat fc- »roit à fon Capitaine. Et néant- » moins nous voyons tant de Na- » tions qui fe portent bien, qui X toutes fois ne favent que c'eft de » Médecin , encores qu'ils enten- « dent bien les remèdes propres à » leur fanté. mefmes le peuple Ro- » main , ( qui néantmoins a efté » fort prompt à recevoir toute n bonne difcipline , & tous ars ne- >) cefTaires ) demeurera bien fix » cens ans depuis la fondation de » Rome , fans Médecin : & enfin ; » ayant prins grande fantafie d'en » avoir, & cognoiflant que c'cftoit,, » s'en dégoufta entièrement. Poym^ .1.6 JOURNAL DE lus Romanus ultrli fexcentefimitin an- tJum , nec ipfe in acclplendis artibiis lentus j AieMcin£ vero az'idus , do- .nec expertum damnavit. Qn peut comparer ces dernières paroles avec les pafùges d' Agrippa &: de Montagne , iSc voir h elles ne .femblent pas tavorifer ce que ces deux Auteurs ont avancé au fujec des Médecins. Ce qui fuir ne paroî- .tra peut-être pas moins fort. Nous fuivrons toujours la Tradudion de Dupinet. » Cairius-Hémina , Hiftoriogra- » phe fort ancien ^ afferme que l'an » du Confulat de Lucius .^milius, » & de Marcus-Livius , qui fut « l'an prins à la tondation de Ro- « me Dxxxv. Archagathus , fils de •' Lyfanias , ifTu de la Morée , fut »Ie premier Médecin qui vint à » Rome & dit qu'il fut receu » Bourgeois à Rome , & qu'on luy » acheta une boutique au Carre- » four d'Acilius , aux defpens delà V Ville. Dit auffy que du commen- i> cernent , on l'appclloit GuériiTeur » de playes , & qu'il tut le tort bien » venu à fon arrivée ; mais que j> pour autant qu'il avoit la main » rude à incider & à cauterifer , on s» le commença àappeller bourreau, w & même on (c talcba tant deceft » eftat à Rome qu'on appelloit >» tous les Médecins Bourreaux , & p l'eftat de Médecine Bourreleric. » Ce qui fe voit clairement aux .» Oeuvres de Caco , en l'autlionté » duquel , fes triomphes &: fa cen.' A' furc ne font tant refpecT:ables de » beaucoup , que la grande vertu V qui efboit en luy , qui me fait in- S SÇÂVANS; » ferer icy de poind en poinifl , ce » qu'il dit touchant ce tait , efcri- » vant .1 Marius-Caton fon fils. Ll » dit donc ainfy .... Tiens cela de » moy, comme de la bouche d'un » Prophète , que dellors qu'on re- «cevra la Philofophie Grecque à « Ro.ne , elle gaftera tout, & plus ». encore 11 on donne accès à leurs » Médecins contente -toy » donc de ce feul poindt , que ]c » détends les Médecins. Ce Cato j» mourut âgé d'odant & cinq ans "l'an fix cents cinq , prins la fon- 1) dation de Rome. En quoy on » peut voir qu'il ne diioit rien y qu'avec bonne expérience , car il >) avoit l'aage &C eftoit d'ailleurs » bien pratic es affaires publiques. » Que dirons - nous donc î faut - il » eftimer par cela , qu'il ait blafmé » une chofc ii ncceffairc à cette vie, » que la Médecine î ja n'advienne, >scaril met incontinent après, pat » quels moyens & médicamens ii » s'entretient & fa femme auffy , » pour parvenir au grand aageau- » quel tous deux moururent , qui » n'eftojt autre chofe que l'ufage «dcstimples. Mefmcsildit , qu'il »i avoit fait un Traité exprès de re- 3> ceptes pour entretenir fon fils & «j fes ferviteurs en bonne fantc & » difpoflîion. ... en quoy on peut » allez ccgnoiltre que les anciens » ne blafmoient point les médica- » mens de foy , aiiis avoientfeule-. =0 ment en horreur ceux qui trait- » toyentk Médecine par art& mé- » thodc, & ilsciais^novent fort de » recevoir entr'eux celte forte de »» gens qui ne tafchent qu'à s'cnri- » chir J A N V I E * diit au danger de; la vie des hom- ■» mes. Dell vint que quand Efcu- ■« lapius fut mis au rang des Dieux , •*> on luy drelFa l'on Temple hors de » Rome : mefmes le fécond Tem- » pie qui fut fait à fon honneur , » hu bafti en une Kle à part. Item ») lorfque , par Edit du Sénat, tous i> les Grecs furent banis d'Italie , "» les Médecins furent refervez , •» mais néantmoins cela fut long- » temps après le décez de Cato. Nous remarquerons fur cet en- droit de la Tradu(flion de Dupincf, xjue le Texte de Pline porte : Et cttm Gncos Italiâ pellerent , din pojî ■Catonem, cxcepijfe Medicos. Ce qui paroît devoir être rendu en la ma- nière fuivante : Et les Grecs ayant tté chajjès d'Italie , ce mfitt cjue long- tems après la mort de Caton que Us Médecins y furent reçiis. Pour fenttr que c'eft - là le vrai fens de Pline , il faut obfervcr, 1°. Qjie les Médecins dont il s'a- git, éroicnr Grecs, & qu'en cette qualité ils croient odieux aux Ro- mains , & fur tout à Caton ■, té- moin ces paroles que Caton adref- fe à fon fils , te que nous venons de citer : » Tiens cela de moy , » Que deflors qu'on recevra la I) Philofophie des Grecs à Rome » elle ga(k-ra tout , & plus encore » frou y donne accès à leurs Medc- « cins : QuAndocun^ue iflagensfuas itttir.ii dabit^ onmia corrumprt , thm ttiam lii.-igh fi Meâicos [nos mittet ■". 2°. Il faut taire attention à ce que Pline dit enfuite , fçavoir que les i^omains déteiloicnt ii tort les Mé- decins que lorfque Efculape fut Janvier^ R, 17? y. 17 regardé comme un Dieu , ils nî voulurent pas cependant fouffrit que l'on bâtît fon Temple dans leur Ville ; après quoi il ajoute im- niédiatemcntjpour faire voir jufque où cette haine alloit : Traduntitr ^ & CHm Grttccs Italia, pellerent , din etiam poJî Catonem excepijfe Aîedi- cos : » Et on dit que les Grecs ayant » été chaffcs d'Italie , les Médecins » n'y turent reçus que long - tems » après la mort de Caton : a il tauc lire le Texte entier pour voir que c'eft là le fens de Pline : Non rem antiqui damnahant , fed anem. Ma- xme vero cjmftum ejfe immani pretia vtt£ recHfabant , ideo Tcynplnm fiJei( peremotorio ediUo dirimit : Hxc. quippe aurea nncia- libus lilteris cedro confignania verbit ■profert ^ & cum Gracos Italiâ petlc- rent ,- din etiam poji Cdtonem , exce- perttnt Medicos. Tel Cit le raifonne- ment de Charles Drelincourt^dans la Harangue citée par M. Crégut. Mais y a - 1 - il apparence , objede- ront quelques Ledcurs, que Piine, quifepiopole ici de rapporter un exemple qui talTe voir la haine que les Romains avoient. pour les Mé- decins , s'avife de dire pour taire comprendre jufqii'oii alloit cette haine , que lorfqu'ils chalTerent les Grecs, ils exceptèrent les Medc- «jmî.C'eft fans^outc une reflexion S SÇA-VANS, femblable qui aura porté le Pcre Hardouin , à intcrpietcr le mot excipere dont il s'agir , dans un fens tout contraire à celui à' excepter ^ ainfi qu'il fc trouve fouvent dans les Jurifconfultcs. Quoiqu'il en foit j voici comme continue Pli- ne : c'eft toû'ours la Tradudion de Dupinet. y Encores que nos Romains fe " foyent rendus confommcz en » toutes les autres Sciences des » Grecs , ce néantmoins , leur gra- >3 viré n'a pu porter de s'adonner à » cefte-cy ( de Médecine ) de forte " qu'encores qu'il y ait un monde » de proht , toutes iois on voit peu » de Citoyens Romains qui s'adon- » nentài'art de Médecine . .. L'art" » de Médecine a cela de propre & y> de particulier , qu'il fait ajouter » foy au premier venu , qui s'ad- 3» vciie Médecin, ik néantmoins ii- " n'y a menfonges plus cher ven- 3 dus j ni plus dangereux que ceux » des Médecins •, & toutes fois » nous n'y regardons point j, tant, "eft le malheur grand ^ qu'un " chafcua prens plaifir à fe nourrir. j> de vaine efperance. Il y a encores » un autre malheur , c'eft qu'il n'y » a ni Loy ni Ordonnance qui pu- 3> nilTc l'ignorance d'un Mtdecin ^ N encore qu'il faffe mourir un » peuple ;. &c n'a on vcu encore j> perfonnc qui fe foit vengé de » l'ignorance & mauvais traite- i> ment d'un Médecin. Aufli fc » font- ils Savans &: expérimentent » leurs rcceptes au danger de no- » lire vie. Et de fait ces Mcdeci- M no:s feuls onc ce privilège qu'on J A N V I E 4»nc lenr dit mot quand ils font «« mourir un homme ; ains au con- » traire , (i on Jeur veut remon- a» llrcr , ils viendront à débagouler » contre le pourc patient , difant M que c'eltoit un homme fubjet à • fa volonté , ne tenant ni régime » ni ordonnance ; de forte que le ^ poure homme qui fera mort^au- »»ra encore le plus grand tort da n monde. Mais quoy ! on n'admct- a» tra point un Confeiller en la » Chambre Criminelle, que le » Prince ne foit bien & duëment » informé" qui il eft , jufqu'à s'en- 3» quérir particulièrement maifon 3» par maifon. Item on va bien » chercher jufqu'à Calis 5c au de- os droit de Gilb etar , des gens pout » fe refoudre fur la ligue de la mon- 3» nove , 5c demeurera-on bien qua- » rantc jcUrs avant que les cinq dc- » putez aycnt l'Arrell: conciu pour » le prononcer à un Cytoycn Ro- » main qu'on voudroit banir ; 5c » ncantmoins on ne tient conte » d'examiner qui font , ni de quci- » le qualité ceux que nous eftablif- » fons Juges de noûie vie ; encore )> que par leurs confultations ils » nous dépefchent bien - toll , & j» certes fi ir.nl nous en prent , c'cft »» bien erriplc>yc ; car il n'y a pièce i» de nous qui fe (oucic de cognoi- » ftrc & entendre les cbofcs qui fer- ij vent à noftre fsatc. Nous mar- !» chons au pied û'iutruy , & ne ■a voyons rien que par les yeux des » autres. Nous rciTemblons ceux i> qui faluans quelqu'un , dcman- » dent aux autres de leur compa- j» gnic , le nom de cciuy qu'ils ont R ; 1 7 î r- \9 o falué. Toutes lefquellcs chofes » me font arrefter à mon Cato , le- » quel j'ay prins pour pavois con- » tre ceft Art tant ambitieux ; &c " moins me départiray de l'opinion » du Sénat, qui en jugea de mefmc » que Cato , encore que je n'aye » entrepris de mettre en avant tou- » tes les nialhcurtez qui fe cora- » mettent fous ceft Art , ainfy que ^ pluficurs peut-eftre , pourroyent » pcnfer ■■, 5c néanrmoins il n'y a » cllat qui face faire plus de Tcfta- " mens que ceftuy toutes fois » ce que j'en di , n'eft pour blaf- » mer l'Art , ains les malheurtes »> de ceux qui en font protefîîon. Ce témoignage de Pline fur la conformité des fentiraens du Sénat avec ceux de Caton au fujet des Médecins , eft d'autant plus à re- marquer , que Charles Drelincourt dans la Harangue dont nous avons fait mention plus hâur , foîiticnt que Caton tenoic fccrette l'aver- fion qu'il avoit pour les Médecins „ 5c qu'il ne s'en ouvrit jamais au Sé- nat. Cependant Pline dit ici for- mellement que, le Sénat fut de même fentiment que Caton fur le fait des Médecins : Non déférant Cfltonem tkm ambitiofit ariis invidlji À me objeElwn^ aitt Senatum illum aui i(a cenfebat. Pline continue en la manière fuivante fcs déclamations contre les Médecins. » Je ne djray rien de leur avari- » ce extrême &c des rapines qu'Us " font quand ils voyent les paticns » en danger , &c des marchez qu« j'Ces trompeurs font en ce temps- Cij 90 JOURNAL DE » là. . . . tous Icfquels malheurs fe 3>doyvent imputer nux hommes, n & non à l'Art. D'avantage je ne » me veux arrcfter à monilrer la » fondrée fc beftifedecepopulas , » ni le peu de régime qu'ils ont en " leurs manières de procéder , Oiv » donnant maintenant les eftuves', «ou bains chauds à leurs patiens , x> &c une autre fois les alTujettilTans »à une diére fi eftroite , que le plus »> fouvent ils leur demeurent entre » les mains , de forte qu'ils font re- 3> contraints leur donner fouvent à N manger le jour fans avoir égard à » la première viande qui n'eft en- » core digérée. En fomme, ils font ÏJ&; dciTcnt ce qu'ils ont bit, & 5> viennent à brouiller les viandes «des poures patiens ; les foiilli- j> quant de drogues & de parfums , » car il n'y a furperfluitez que ces « gens ne mettent en œuvre. A l'occafion de cesfupcrfluitez, P]Lne déclame beaucoup contre la théfiaque &: le méthridat , ayant toujours foin d'oppofer aux Méde- cins, l'autorité de Caton & du Sé- nat Romain. L'endroit eft impor- tant & mérite bien que nous le rapportions pour faire voir encore une fois , fi lorfque Agrippa &c Montagne ont dit que les Romains avoientétc fix cens ans fans Mede- dccins , drc. ils l'ont dit faute d'a- voir bien interprété Pline. 3» Or puifque fommes tombez M, fur le propos des drogues , je »crois que les anciens n'y prc- •inoycnt point de plaifir , ni aux 9>;autres danrées des el^ranges ré- fugions qui cQuilent tanjt & d'acbeç S SÇAVANS.. »& de voiture, ^' riens pour ce»- » tain , que Cato penfoit bien pctt "aux drogues, m aux autres mi» «ftions, quand il blafmoit ainfy » l'Art de la Médecine. Et néant- » moins nous ne faifons casque da^ =» Triade , qui eft une compofition • faite feulement pour fuperflui- » té. Vray eft qu'elle eft compo- » fée de drogues &: denrées qu'on » apporte de bien loin ; mais => nature nous a donné devant nos «yeux, un monde de remèdes, » qui font aulli bons refpedive- wment, que fçauroit eftrc le Tria* » cle. Touchant le mithridat , il y » entre de cinquante-quatre fortes » de drogues , & toutes en divers «•poix , mêmes il y en a telle donc »> il n'y a que la foixantiefme partie » d'un denier j mais je vous prie » de quel Dieu ont ils appris cette » piperie. ( Ono Deomm ferfidïam » iflam monflrante ; ) car il n'cft pof- » fible quercfp-.it de l'homme , fe » foit eftendu jufques là , de calcu- »ler ainfy la vertu des drogues,, » jufqu'au dernier fcrupulc j & par » ainfy, on peut aifémcntcognoi- » ftre , que toutes ces monllruofi- »> cez ne font que parades , & pouc » donner luilrc à cefte Science , la- » quelle même n'eft entendue de » ceux qui en font profcifion ; car r> je vois qu'ordmairement nos . » Médecins mettent,au lieu du ciii- » nabre des indes ( qui elT: le fang ■ de dragon ) le vermillon , qui »eft vraye poifon , ainfy que mon- » ftrerons au Traitez des Couleurs^ » ce qui vient de cela , Qu'ils n'en- H tendent la propriété des motSj ôc J A N V I wneantmoins cecy touche h fanté * d'un chacun en pai riculicr. Qiiant » aux autres malheurs de TArt de M Médecine , que Cato craignoit , » & lefciuelsil prévoyoit , les prin- »cipaux de celt Art les confeircnt wbicn entr'eux , pour ce qu'il n'y » a tant de mal &c ne font fi dange- » rcux que les autres. . . . Mais que «dirons-nous des eftuvesféchcs & » ardentes qu'ils difent eftre fi fin- Mgulieres pour la digeftion î Je » n'en vci jamais fortir homme , » qui ne s'en trouvaft plus pefant -, » mcfmes j'en ay vcu rapporter, ou 9> morts , ou bien malades plu- » fieurs, qui fe gouveinoient en- » fièrement par les Médecins. Et »> les bruvagcs qu'ils ordonnent à ■ jeun pour faire vomir & eftre »plusprcfts à boire d'autant, & » leurs réfines & ongucns dont ils » cffémincnt nos hommes , leur « faifant tomber le poil , qu'en fe- j»-race; &c. Voilà que c'cft. De » forte que voyant qu'il n'y a cor- »ruption plus grande que celle » que caufe la Médecine , nous » pouvons bien connoiftre à veuë » d'oeil que Ja prophétie de Cato » s'accomplit tous les jours , qu'il 3» fuffit de voir en paflant les Li- » vrcs des Grecs fans s'amufcr à les »fe mettre au cerveau. Ce quedef- «fus jiîftifie alfez & le Sénat d'a- j* lors , & le Peuple Romain , qui, •«avec grande raifon , demeura- 3» fix cens ans fans ouir Médecins , a» car il n'y a eftar où il y air plus de »5 danger 5c plus de tromperie , «qu'en ccftuy ; joint auiTi , que 5> tout le crédit ôc avoir qu'a cette E R , i75r. 21 » canaille , vient feulement de la » bonté des gens de bien. On voit par tous les endroits du palTige de Pline , combien Caton le Cenfcur, & de fon tems, le Sénat de Rome, étoient oppofés aux Mé- decins ; ce que bien des Ledeurs croiront fuffire pour difculper ici Agrippa & Montagne, du reproche d'avoir ma! interprété Pline-, fur- tout fi l'on fait réflexion à ces paro- les par Icfquclles fe termine le paf- fagCj&queDupinet n'a pas traduites dans toute leur force. Nacfuennt dicenda pro Senatu ilh^ fcxcentifcjtte populi Romani annis adverfus ariem. C'eftà-dire, voilà ce t]ne j'avois a dire pourJHftifier le Sénat & le Peu- pie %omain de s'être oppofé pendant fix cens ans , a l'Art de la Medccine-t ce mot adverfus mente attention. De la manière dont M. Crégut ' fe déclare contre ceux qui croyent ' que les Médecins ont été autrefois ' en mauvais renom à Rome , & qu'ils en furent chafTés , il femble que l'on ne puiffe admettre un tel point fans faire injure à l'Italie ; mais bien des Ledeurs penferont' peut-être que le fait en qucftion- tourne à la gloire des Romains puifque s'il eft vrai qu'ils furent fi long- tems oppofés aux Médecins. Grecs, cette oppofition ne vint , . félon Pline , que de ce que les Ro- mains ne pou voient s'accommoder ^ de gens qu'ils fçavoicnt prévari- quer lans cefTe dans leur profeiTion.-. Au furplus que ces Médecins Grecs ■: ayent été chafTés de Rome ou non , il n'en eft pas moins vrai que ceux d'Italie fe font diftingués parkuii ,2 JOURNAL D fcience Se par leur probité. M. Crcgut en cite en général un grand nombre d'exemples comme nous ivons remarqué. Après quoi il fait voir en particulier les ilrvices que les Médecins mcdcrnes d'Italie , vont rendu à la Médecine dans tou- tes les parties de cette Science , & entre autre dans ce qui concerne j'Anatomie , la Botanique, & la Pratique. Qiiant à l'Anatomie , il remarque que fi la Flandre a un Ruifch , ritalic a un Bianclii ; il .parle à ce fujet, de ces Anatomies en cirocoloice , où les parties du corps humain font Ci bien )cpvefen- tées que les yeux s'y riompent ; Anatomits dans klqucllcs M. Bianchi s'eft diftingué , après le cé- iébre Gactano-Giulio Zumbo , Si- cilien , ^ que M. Deinoues , Ana- tomifte François , a enfuite portées au dernier degré de perfciilion , comme on l'a vu depuis quelques années à Paris. M. Bianchi ne s'en eft pas tenu à ces fortes d'Anato- mies , & c'eft quelque chofe de furprenant que les foins qu'il s'ell (donné pour faire apperccvoir par Je moyen de différentes injeiflions de liqueurs , les diflerens vailTeaux du corps. M.Crégut décrit au long Je magnifu^ue Amphithéâtre où ce grand Anatomifle faifoit les dé- monftrations à Turin , puis l'ordre .des Tables fur lefquelles il démon- troit , 6c qui étoient au nombre de 28 ; il décrit de même les diverfes Pièces que chaque table reprefen- toit , entre lefquelles étoic une oreille fcpt fois plus grande que xiature , pu l'on découvroit fans la ES SÇAVANS; moindre peine , jufqu'aux plus pe- tites parties de cet organe. Sur une autre table on voyoit la baie du cerveau , avec l'origine des dix pai- res de nerfs, leur dir:nbution,'lem entrelacement , &c. Douze autres tables reprefcn- toicnt les parties de l'osil , dans une groffeur dix fois plus grande que U naturelle. Les dix autres conte- noient les difTercns phénomènes de l'Optique , de la Catoptrique & delaDioptrique. A ces démonflrations fucce- doient celles de toutes les autres parties du corps humain. Pour ce qui efl de la culture de la Médecine par rapport à la Prati- que , M. Crégut prétend tout de même , que l'Italie ne cedelà-def- fus à aucune Nation. Témoin en- tre autres , l'Ouvrage de Torti fur le Quinquina -, témoin l'EditioQ que Ciriîle célèbre ProfefTcur à Naples, a donnée en 172S. dans la même Ville , d" toutes les Oeu- vres d'Ettmuller en cinq Volumes in -folio , Editions qu'il a enrichies de fçavantes Notes , tant fur la Pra- tique de la Médecine que fur la Pratique de la Chirurgie , témoin par rapport à cei.e dernière, les foins que s'eft donné Denis - An- drè-Sancalfmus pour marcher fur les traces de Magatus , i< corriger les erreurs étranges de la Chirurgie dans ce qui concerne le traitement des blelîez , où fous prétexte d'é- vacuer le pus d'une blelTure , la plupart des Chirurgiens n'apprc- henJent pas de la r'ouvr't , deux & trois fois par jour , ce qui às~. J A N V I range Touvrage de la nature,mulri- plie les panfemcns^ épiiife la bour- fe des bk-lTcz , Si le plus fouvent les conduit à la n:ort. La Préface de M. Crégut eft di- verfifiée par trois digreflions irn- portanres que la longueur de cet Extrait nous oblige de palier, l'une fur le mérite des anciens au-delfus des modernes par rapport à la Mé- decine j l'autre fur la vertu du Quinquina pour la guérifon des fièvres intermittentes , & l'autre fijtle nombre innombrable des mé- dicamens introduits dans la Phar- macie , & qui font plutôt un ob- ftacle qu'un fecouis pour la perfec- E R , I 7 5 r. 25 tion de la Médecine ; ce dernier ar- ticle n'eft pas un des moindres de 'la préface ,,& nous croyons là-def- fus ne pouvoir mieux terminer no- tre Extrait que par ces excellentes paroles de notre Auteur : Modi- eus medicamentornm apparatits [mum intmrnero fatis parco vere confijïcre & mhihmïnus fufficere , alicjuandg firfan Ojîeridam ) in manu periti Me- dici , morbïs feri cjuihujlihet fanabi- libiisfanandisfarefl. C'eft àdire un novibre médiocre de remèdes fuffu entre les mains d'un habile Aïe- dec'n four gticrir toutes les maladies- eifii fe peuvent guérir, ■ ELOGE HISTORIQVE DE LA CHASSE. TA R M. Beneton de Pïrrin. a Pari: , chez Merel le jeune , Grand'Salle du Palais -, Gonichon , rue de la Huchcttc j au Sacrifice d'Abraham j, C^t, ■ 1734. Brochure in-ii. pag. ioj. L'H O M M E ayant perdu par fa faute l'empire qu'il a voit fur tous les animaux , nos premiers percs lurent obligés de chercher à détruire les animaux qui leur étoient nuifibles , d'où M. de Pcr- rin conclut que la Chaffe eft la plus ancienne de toutes les occupations, & qu'elle a été , comme Xcnophon le remarque , une image de la guer- re. On ne décide point ici quelle eft là véritable étymologie du mot François Ch^ijfe. Des Auteurs le ti- rent , dic-on , du mot Cttfnar ^c^m en vieux Celtique lignifie celui qui fOHrfuit cjHelque chofe. Quoiqu'il en foit , les Payens ayant érigé en Divinité la plupart des parties de cet Univers j & me-.' me leurs propres pallions, la Guer- re & la Chalfe eurent aulîi leurs Divinitez; Apollon & Diane prélî- derentà laChaiïe. n N'étant autre » chofe que le Soleil &; la Lune,, »on ne pouvoit pas choifir d'A- » lires plus necell'aires aux Chaf- 3' feurs pour les favorifer tant de » jour que de nuit. Toutes les Nations , depuis les- plus policées jufqu'aux plus barba-- rcs , fe iont adonnées à la ChaUe,- L'Ecriture fait mention de. Nem- brod, d'Ifmacl & d'Efali comme de grands Chalfeurs. Si des Hébreux &c des Arabes on • palTe aux Grecs & aux Romains , on verra que ces peuples aimoienc- 2^ JOURNAL DE aiilîi cet exercice , 2c qu'ils le re- ■gardoient comme une chofe ^ui procHre tout à la fois la famé & la réputation. lA. de Perrin cite Hora- ce en preuve de cette vérité , & pnt l'exemple d'Adonis , de Méléagre, d'Hercule ; il montre qur les Poè- tes étoient dans l'ufage derrprefcn- ,ter les Dieux & les Héros de leurs •tems comme de grands Chaffeurs. Diane , dit- il , aimoit fi fort fcs Chiens , qu'elle couronnoit dans une folemnitc annuelle à la fin de .chaque Automne, ceux qui avoient Je mieux fait l:ur devoir. Elle leur impofoit autîi des noms con- venables i Xénophon , dans fon Livre fur la Chafle , explique la Signification des noms qu'on don- noit de fon tems à la plûpait des Chiens de Chaffe. Et notre Auteur cft bien perfuadé » que quiconque • entendroit bien le vieux langage •: Gaulois , verroit que les noms de u Miran , Srifaii , &c. fi communs «aujourd'hui parmi nos Chiens de • Chafie , n'ont fignifié autre » chofe que ï'Arrèteur , le Pilleur ^ »» toutes qualitez propres à ces » Chiens. La Chafic , félon Pline , a don- né naillance aux Etats Monarchi- ques. Les hommes dans les pre- miers tems n'ayant d'autres enne- mis que les bêtes fauvages , ils pre- noicnt pour leur Chef celui d'entre eux qui, étùit diftingué par fa force & par fon adreflei mais enfuite ces troupes de Chafieurs étant venus à fe difputer les lieux les plus abon- dans en gibier , ils [c battirent & les vaincus dcraeurereixt afiujcttis aux vainqueurs. S SÇAVANSi C'ell ainfi , fclon M. de Perrin J que fe formèrent les premières do-* minations : les premiers Conquc- rans furent des ChalTcurs; ce qu't^ prouve par l'exemple de Bacchus qui conquit les Indes en chalfant, éc qui par fes vidoites mérita le nom de Sahaziun qui rcvenoit à ce- lui de Zabaoth ou de Dieu des Ar-e mées. M Un Antiochus, Roi de Syrie ^ » fut furnommc Sidties njot déri- 3> vé de l'Hcbrcu Tfada ou du Sy- •♦rien Ziiah , ou Zaittt , qui fig- » nifioit un Guerrier ou un Chaf- "feur. Ce qui fait que le Prophète » Ezechiel ( ch. 51. v. 30. ) donne » ce nom à tous l.-s Princes étran- rt gcrs, qui s'étoisnt rendus le fieau « des Juifs en leur faifant laguer- » rc. Ainfi les premiers h.ibitans da ■monde n'euicnt point d'autre Âdé- tier que celui de Chafieur. Grand nombre de peuples aujourd'hui , tels que les Lapons , les Tartares , &- les Indiens de l'A.mérique ne fubhfient que de la Chaffe Sc de la Pêche. Selon notre Auteur ^ les Germains & les Gaulois nos ancê- tres ne vivoient point autrement, &: comme leurs ufigcs doivent plus noustoucher que ceux des au- tres peuples , il dit quelque chofe de leur manière de chaiTcr. Mais il s'étend beaucoup plus fur les Di- vinitezqui furent en général l'ob- jet de leur culte. Il remarque que \cs principales Diviniccz des Germains 6i des Gaulois étoicnt Héfus , Teutarez, Bélénus , Camulus , Taranis, Alcés oa J A N V I ou Alcis , Kîs , EvrilTa , Ardhuina & Néphalenia. Il examine en particulier fi Hcfus qui étoic le Dieu de la guerre des Gaulois , leur avoir été apporté de Grèce ou d'Italie , ou il ce Dieu étoit originaire du Pays , & il ajoute qu'il aura peut-être occallon de faire fur tous les autres Dieux >des Gaules , le même examen qu'il va faire fur Héfus , ou Héfos. L'Auteur répand ici l'érudition Gréque & Celtique à pleines mains , mais pour l'ordinaire fans oter fes garans , Si. faitdifparoîrre ^iTez long-tems fon fujet de vue par le plaifir qu'il trouve à s'arrêter fur îios Antiquitez Gauloifes ; il re- ■vient cependant à fon objet , & Trouve qu'il dîi fort difficile à tra- vers l'obfcurité qui enveloppe notre ancienne Mythologie de démêler quelle ctoit la Divinité qui pré- fidoit à la Chafle. Il croit néan- moins qu'il n'y en avoit qu'une feule, qui fuivant les Pays diffe- rens étoit adorée fous difiercns noms; S>' comme il a tait voir que la Lune fous le nom de Nehdennia étoit la DéeiTe des eaux , il fe pro- pofe de montrer cys Arduina ou Arduenn* réclamée ordinairement par les anciens ChalTcurs étoit en- core cette même Lune. Après beaucoup de fçavantes re- cherches qui naiffent les unes des autres , fuivant qu'elles fc prefen- tcnt à la mémoire de l'Auteur , il nous parle des animaux qu'on chafToit le plus communément dans notre climat-, parmi ces der- niers il compte les Ures , ou Boeufs Janvïtr. E R , 17? r. 2; fauvages, les Cerfs , les Elans, ou les Dains , les Loups , les Ours , les Sangliers , & même les Lions -, il cite quelques Hifto- ricns pour prouver qu il y a eu au- trefois dans le Nord , &: dans les Gaules de cette dernière cfprce d'Animaux. Mais leurs Textes n'étant pas tort précis en faveur de cefcntiment, il ne nous le donne que comme une fçavante conjeâiu- re. Il parle enfuite de l'Arbre Sacré qui étoit un Orme ou un Chêne placé au milieu de chaque Bourg,. Cité , ou autre lieu contenant plu- fieurs familles Gauloifes réunies enfemble. C'étoit là que les guer- riers fufpendoient les dépouilles de leurs ennemis , & les ChalTeurs, quelques parties des animaux qu'ils avoient pris à la chafTe , & cet ufa- ge a fubdfté jufqu'à ce que le culte ii. le refped; qu'on avoit pour ces Arbres, a enfin été banni dans ces derniers tems comme un refte de la fuperftition Paycnne. Il prétend que le droit de Leyde^ en Latin Lsyda , ou Lefia , droit qui permet à tout Seigneur Haut Jufticier de percevoir quelque chofe fur tout ce qui fe vend dans les Fermes , Marchés , ou Foires de fa terre , confilloit dans fon origine à recevoir des Bouchers ^c deî Chaffeurs certaines parties des ani- ir^aux qu'on tuoit dans Tétenduc de leur Fief. A l'égard du droit que les NobleiE fe font attribués de joiiir feuls du privilège de rhalTcr fur leurs terres, il dit qu'il pilTeroit \ts bornes qu'il D zS JOURNAL DES SÇAVANS; fe prefcrit dans cet Ouvrage, s'il bouchers, 5c fur leurs cottes cî'ar- en rccherchoit l'origine. La ChafTe étoit autrefois commune à tout le monde. Le feul privilège des grands Seigneurs étoit de pouvoir le la referver fur les terres incultes Si danslt&bois. Nos premiers Ivois en ufeiciit de même , & s'atrri- buoicnt le droit de chalTer {cuis dans les grandes forêts ou dans des parcs qu'ils faifoient entourer de murailles. Mais il faut avolicr, dit- il, que II la Chalfe a toujours fait ics dvlices des Princes. Elle a fou- vent abrégé la vie ou altéré la bonté & le caractère de ceux qui s'y font livrés a-vec trop de pailîon. Ce qu'il prouve par quelques exemples. Il obferve encore que la ChalTe fervoit à'intermédes ou de condu- fîon à ces aflemblées de la Nation que nos Rois tenoicnc autrefois fous le nom àt grands Parlemens. De - là l'origine des fêtes des Chafleurs. D'abord ils prirent faint Martin pour leur Patron , mais le Royaume l'ayant quitté pour fe mettre fous la protection de Saint Denis , les ChalTeurs voulurent avoir un Patron qui eût pratiqué Itur exercice , êc ils jettercnt pour cela les yeux fur S. Hubert, » qui ss'étoit, dit on, converti par l'ap- 30 parition qu'il eut en chaflant, » d'un Cerf qui portoit une croi.x » encre fcsbois. A peu - prùs dans le même tems que la dévotion de S. Hubert s'é- tabliflbit , c'eft-à-dire dans l'on- zième fiécle , l'ufage vint de diftin- guer les familles nobles par cert'ai- acs pièces qu'Us poitoient fui leurs mes , & elles devinrent héréditai- res fous le norn d'armoiries. De-là vinrent enfuite les habits blazon- nés que les Grands 5c les Nobles portoient à la guerre , à la Chaffe , & dans les grandes cérémonies. M. de Perrin qui s'étend à fon ordinaire fur tout ce qu'il rencon- tre de curieux en fon chemin , re- grette beaucoup la perte de ces- ha- bits blazonnés, qui devinrenttrès- comnuins , même pour les femmes dans le quatorzième & quinzième lîéclei outr^ie bel effet qu'ils pro- duifoicnt fur ces habits , co.mmc on le peut voir par deux miniatu-; res qu'on confcrve à Ja Chambre des Comptes de Paris , un étranger qui srrivoit à la Cour rcconnoilfoit tout d'un coup le nom , la dignité, & les alliances des pcrfonnes qu'il voyoit , an lieu ijWà prefent on ne les comiott four ainji dire ^u'à la mi-' Ke , & cjHO, l'indication. Puis revenant .i fon fujet , il fait voir que la Chaffe a toujours été tellement l'occupation de la No- blelfe , qu'à la guerre-même , dans les combats & dans les Sièges , les Nobles portoient l'oifeau fur le poing. L'épée & l'oifeau étoient (i bien les marques inféparablesd'un> Gentilhomme que par des Capitu- laircs de nos Rois , il étoit défendu- de s'en dclTaifir , & de les donner même pour le prix de fa rançon , fî on vcnoit à être fait prifonnier. Cette coutume devint fî générale que depuis l'onzième iîccle les Da- mes n'allèrent plus que l'oifeau fut le poing , parce que cette marque J A N V I extérieure annonçoit leur nobleffe & celle de leurs maris. L'Auteur qui revient afTcz vo- lontiers fur fes pas , lorfqu'il croit n'avoir pas épuifc les matières dont il a déjà parlé , traite de nouveau ce qui regarde la limitation du droit de chaiTer. Les premiers re- giemens inférés dans le Code fur cette matière , font , à ce qu'il croie , de Charles VL Aiais comme je pourrais , ajoCitc-til , me tromper fur le tems an jufte ijn'ils ont été faits, mes LcEîeurs examifieront ce point vins k fond. Il montre encore que de tous tcms les plus grands Princes fe font fait honneur d'être bons ChalTeurs. Quelques - uns- même , comme l'Empereur Frédéric I L Gafton- Phxbus Comte de Foix , & Char- les IX. ont écrit fur la ChalTe. » Un jeune Prince qui aime cet Mcxercice donne par là d'heureufcs » prémices de ce qu'il fera dans E R. 175 r. 27 » d'autres tems , où il ne bornera » pas fa valeur à combattie fcule- j> ment contre des bêccs lauvaiTes.c« Et lî quelques Cafuiftes , continue- t-il , ont condamné l'ufage trop fréquent de la ChafTs pour trois raifons qu'ils en apportent , & qu'on trouvera ici ; notre Auteur , par les réponfes qu'il donne à ces raifons , démontre fans peine qu'ils ne condamnent que l'abus de la Chalfe & non la ChalTe en elle-mê- me. En finiffant , M. de Perrin don- ne encore quelques éclairciffemens fur differens points qu'il croit n'a- voir pas fufiîfmrment expliqués dans le cours de fon Ouvrage, mais dont quelques - uns , quoiqu'alfez curieux , n'y font pas abfolumenc ncccdaires , tels que deux traits d'Hifloite qui montrent jufqu'oii vont quelquefois le courage &c la valeur des Dames. ORDONNJNCESDESROIS DE FRANCE DE LA troifume Rtce , recueillies par ordre chronologi^jne. Qu.itriéme F'olume contenant dijferens Siipplémens pour le règne du Roi Jean , & les Ordon- nances de Charles y. données pendant les années 116a,. 1^6^. & 1^66. Par M- Secousse, ancien Avocat au Parlement & ajfocié a l' Académie Royale des Infcriptions & Belles-Lettres. A Paris , de l'Imprimerie Roya- le. 1734. in folio, pp. 751. pour les Supplémens , pp. Z47. pour les Ordonnances de Charles V. LE troifiéme VoJume de ce grand Recueil que M. Se- coulTe a publié en 1731- contient les Ordonnances du Roi Jean I. que quelques Auteurs appellent Jean II. depuis le commencement de Vannée 135J, jufqu'à fa moït arrivée le S d'Avril 13^4. les Or- donnances des premières années du règne du Roi Jean laifoient partie du fécond Volume dont on cil re- devable à M. de Lauriere &c à M. SecoulTe qui l'ont publié. Le dernier &YQiC leîblu de donner à la Bn du Di) aS JOURNAL D troificme Volume un Snpplcnienr pour tout le règne du Roi Jean ; parce qu'il avoit entre les mains un- erand, nombre de pièces qu'on navoit pu mettre dans leur rans;. 11 avoit tiré une partie de ces pièces du Regiftre 84 du Thrélcr des Chartres , qui étoit depuis iong-tems en déficit , & qui a été remis dans ce dépôt par M. de Fourqueux , Procureur Général de la Chambre des Comptes de Paris, lequel avoit trouvé ce Regiftre dans la Bibliothèque de M. Rouil- lé , Confeiller d'Etat fon oncle. Mais comme les Ordonnances que M, SecoufTe avoit inférées dans le troificme Tome ^ fuivant l'ordre de leur date depuis 13(^5. jufqu'à la mort de ce Prince compofoient un jufie Volume , il fe contenta d'y ajouter ce qu'il avoit recouvré d'Ordonnances concernant les Etats tenus fous le Roi Jean , dont il, avoit.donné une Hiftoire détail- lée dans fa Préface , & il renvoya a.u Volume fuivant les autres pie- ces qu'il dcltiiioit pourfon Supplé- ment. C'eft ce Supplément qui forme \z première Partie de ce qua- trième Volume. Les Ordonnances qui la compofent commencent à r.année 1 5 50. qui eitla première du règne du Roi Jean , & finiilent en jj6:i. cependant comme il cft tombé entre les mains de M. Se- coufTe des Pièces qui n'ont piictre inférées dans ce premier Supplé- ment , foit parce qu'il ies a eu trop tard', foit parce qu'il avoit bcfoin àc. quelques éclaircifiemens avant ES SÇA VANS;. que de les publier , il s'cil viÀ obli- gé de faire un fécond Supplément pour les Ordonnances du règne du Roi Jean qui commence encore à la première année du rcgne de ce Prince. La dernière des Ordonnan- ces comprifes dans ce Supplément- efl: du 25 Novembre 15(51. Ces deux Supplémens font prefqueles. deux tiers du corps de l'Ouvrage, Le refte contient les Ordonnances des trois premières années du rè- gne de Charles V. Ceux qui ont lu les Volumes: préccdens , ou qui ont tait quelque attention fur les Extraits que nous en avons donnés , iorfqu'ils ont. paru , fçavcnt alTcz quels font les- dépôts dont ces Ordonnances ont; été tirées, & fur quel fujct roulent Ja plupart de ces Ordonnances des» premiers Rois de la troilicme Race. C'cft pourquoi nous nous borne- rons à rapporter ici quelques exem- ples des notes de M. Secoufic fut ces Ordonnances. Le Roi Jean confirma au com- mencement de fon règne les Privi- lèges &c les Coîitumes qui avoient; été accordés à la Ville d'Aigues- Mortes en 1079. parle Roi Philip-- pe I. dont les Lettres-Patentes font inférées en entier dans celles du, Roi Jean. Ces Lettres font tirées du Thréfcr des Chartres , Regiftre. 80. Pièce 4(^5. Ce qu'elles contien- nent n'eft point abfokiment nou- veau pour les perfonnes qui fe font attachées à rechercher ce qu'il y a d'anciennes Chartres & d'ancien- nes Ordonnances imprimées dans diffcrens Ouvrages. Car Augufte- J A N V I «Galànd avoit fnit imprimer à la fin de fon Traité du Franc AJleu, des Privilèges accordés à h Ville d'Ai- oucs- Mortes par S. Louis en 124^. cjuifont prefqiie entièrement con- formes à ceux qui avoient été ac- cordés à la même Ville par le Roi Philippe I. Il eft très - lingulier , ainfi que le remarque M-Secouflcj que les Lettres de S. Louis aycnt été rédigées , comme fi c'étoient de nouveaux Privilèges & de nou- velles Coutumes fans faire aucune mention des Lettres de Philippe l. qui y font cependant copiées , prefque mot pour mot. Il y a aulli lieu d'être étonné que le Roi Jean n'ait point die un feul mot des Let- tres de S.Louis dans fa confirmation des Lettres de Philippe I. en faveur des habitans de la Ville d'Aigues- Mortes. Mais ce ne font pas ces fingula- ritez qui rendent plus interelTantcs & plus utiles, ces Lettres de Phi^ lippe L en faveur de la Ville d'Ai- gues-Mortes , que M. Secoufie a ti- rées le premier duTréfor des Char- tres pour les rendre publiques , ce qui attirera le pljs l'attention de li. part de ceux qui aiment à faire des recherches fur l'orii^ine des an- ciens ufages j c'elt qu'ils y verront, comme l'obferve notre Auteur , que dès l'onzième ficcie , & pref- que au commencement de la tioi- (îéme Race , on obfervoit déjà plufieurs ufages , fur l'origine def- quelslcs A.utcurs modernes quifc font attachés a l'étude de l'ancienne Jurifprudcnce ne fonr pas d'ac- cord. Cenioïceau mérite d'autant E R , 1 7 3 f . zp plus d'attention , que s'il s'cft con- iérvé des Privilèges de Villes &: des Coutumes rédigées par écrit fous les premiers Rois de la 3' Race , elles font en très-petit nombre. Les Lettres de Philippe I. telles que M. Secoufle les a trouvées au Tréfor des Chartres font défigurées par un grand nombre de fautes. Se il y a plufieurs mots oubliés. Le Texte des Lettres de S. Louis don- né au Public par Galand , a fcrvi à M. Secoufle à former un Texte plus exaâ: , en mettant à la marge la leçon du Texte de Galand. Il y a auffi quelques difpofitions dans ces Lettres-Patentes qui ne font pas dans celles de S. Louis , comme il s'en trouve quelques-unes dans les Lettres- Patentes de S. Louis , qui ne font pas dans celles de Philip, pe 1. Notre Auteur a mis dans fes- notes, ce qui fe trouve dans les Lettres de S. Louis de plus que.' dans celles de Philippe I. Voici une des notes de l'Auteur' fur le Texte de cette Ordonnance dont les Critiques qui fe livrent' trop aifément à des conjedures , en exphquant les anciens titres ou les anciens Auteurs pourront profi- ter. Philippe I. détermine par l'arti- cle 3. de l'Ordonnance quels font' les cas où les droits de lors &c ven-- tes font dûs par les acquéreurs des fonds &c ceux où ils n'en doivcntt point. Entre ces derniers cas l'Or- donnance met les donations entre- vifs , & les Teftamcntaires , les • partages , vel domiis inaflimatis. li.. Secoulle, qui travailla d'abord fur. cette Ordoanance telle qu'il l'a.*- 30 JOURNAL D voit tirée duTréfordcs Chartres , fans avoir fous les yeux celle di S. Louis que Galand a publiée , foupçonnoit que le Texte pour- roit être conompu en cet en- droit. Cependant comme il vit que CCS termes fe lioient aflez bien , au moins quant au régime avec les précedens , il fit des efforts pour découvrir ce qu'ils pourroient figni- fier , 5i il imagina un fens qui n'é- toit pas dénué de vraifemblance -, mais ayant confronté le Texte avec celui de Galand , il trouva qu'au lieu de domus in^ftimatis , il falloit lire doiibus insftimatis , & que ces Cermcs fignifient que les hibitans d'Aiguës - Mortes ne payeroient point de droits Seigneuriaux des piens donnés en dot qui ne feroient point eftimés , ce qui fait un très- bon fens èc très -naturel. M. Se- couffe dit que la même chofe lui étoit arrivée par rapport à un autre patfage. Ce qui l'a abfolument dé- goûté des conjedures , » aind do- » rénavant , ajoûte-t-il , avec mo- » deftie , lorfque je trouverai un w endroit que je n'entendrai pas , » foit que cela vienne de ma taute j» ou de la corruption du Texte , je »> ne bazarderai plus de conjedurcs » à moins qu'elles ne me paroilTcnt » prefque certaines , & je me con- » tenterai de marquer fimplement » que je n'entend point le partage ; Afin d'éviter du moins le repioche que l'on fait ordinairement aux Commentateurs , qui eft de s'éten- dre beaucoup fur les chofes que tout le monde entend , & de palTcr fans y toucher , fur celles qui font de la dilEcuité. ES SÇAVANS, Selon l'aiticle 1 1 de cette Or- donnance , il étoit permis aux ha- bitons d'Aiguës - Mortes , qui croyoicnc que le Bailiy de Beaucii- re,qui neleur avoir pas rendujnilice dapp-iler du lugement de ce Bailly au Sénéchal Royal , & d'appeller au Roi du jugement du Sénéchal. ^d S-'nefcallum noftrum & ad mi fioflea lice.it appellare. M. SecouiTe doute s'il s'agit en cet endroit de l'appel au grand Sénéchal du Royaume qui au commencement de la troifiéme Race de nos Rois avoir droit de juger les appels des Juges Rovaux inférieurs , fuivant M. BrulTcl dans fon Traité de l'u- fage des Fiefs , ou de l'appel à ua Sénéchal Royal dans le Languedoc. Ce qui peut donner lieu à cette difficulté, c'eft que M. BruficlSc quelques autres Auteurs croyent les Sénéchaux établis dans les Pro- vinces beaucoup moins anciens que le règne de Philippe \. D'un autre côté on trouve les mêmes termes dans l'Ordonnance de S. Louis , rems auquel on ne doute point qu'il n'y eût un grand Sénéchal de Languedoc. Le terme de notre Sé- néchal , ajoûte-t-il , étoit employé pour (ignifier deux Officiers diffe- rens dans les Lettres de Philippe L & dans celles de S. Louis, il eft parlé dans l'article 2 de cette Or- donnance de la Sénéehauifée de Beaucaire. La manière dont eft conçu cet article dans l'Ordonnan- ce de Philippe I. prouve qu'on pouvoir appcUer du Sénéchal aa Roi i la chofe n'crt point fi claire dans i'Oïdonnîince de S. Louis . J A N V I iquî permet à celui qui croit avoir fujet de fe plaindre de h fentcncc du Bailly d'appellcr, ad SenefcaUim nojlrum , vel ad nos. L'article 25 permet aux habitanS' d'Ai^ues - Mortes de tranfportcr partout où ils voudront les bleds qu'ils recueillent , de [uïs terris & facheriis. Au lieu du mot facheriis , Galand a lu dans l'Ordonnance de S. Louis Sachariis. Ducange a mis ce mot dans fon GlolTairc fans l'expliquer, & en rapportant feule- ment le palfage de Galant. Mais il ùutWïç Fticheriis. L'Auceur expli- que le terme Facheria , comme l'expliquent les Bénédidins , qui travaillent à la nouvelle Edition de Ducange, & qui lui oat commu- niqué cet article. Facheria eft un héritage donné à ferme , fous la condition que le produit fc parta- gera également entre les propriétai- res & le Fermier. Les héritages qui font donnés à ferme fous cette con- dition fe nomment encore Fâche- ries à Marfeille, L'Ordonnance du Roi Jean qui confirme celle de Philippe I. eft datée Lugduni. Notre Auteur croit que e'eft la Ville de Lyon dont il s'agit en cet endroit. Ce qui peut en faire douter , e'cft que l'on voit d'autres Ordonnances du même Roi datées près d'Avignon dans le mois de Janvier 1350. d'autres de Compiegncs du 5 Février fui- vant , & de Paris du 4 Mars de la même année. Ce Roi auroit-il fait un voïagc àLyon au mois deFevrier de la même année ? Mais nous avons déjà rendu compte de ce que E R ; I 7 5 j: 31 dit M. Secouffc dans fa Préface du troifiéme Volume fur les difficul- tez que produifcnt les différentes, manières de dater IcsOrdonnanccs^ & fur l'efpcce d'impoffibilité qu'il y a de découvrir iî le Roi étoic véritablement dans le lieu d'oij l'Ordonnance cfl: datée , au jous marqué par l'Ordonnance. Nous nous fommes un peu éten- du fur l'Ordonnance de Philippe L par rapport aux privilèges & aux Coutumes d'Aigucs- Mortes , par- ce que c'cft une des pièces du Vo- lume qui peut le mieux fervir à fai- re connoîrre combien M. Secouflc prend de peines pour donner un Texte exad , & quelles recherches il fait pour éclaircir enfuite par fes Notes , ce qu'il peut y avoir d'ob-. fcur & d'cmbarralTant dans le texte. Ceux qui font des Commentai- rci fur les anciens Auteurs , n'one ordinairement qu'à choifir entre lesobfervations de ceux qui lesonc précédés. Il n'en eft pas de même d'un Auteur qui entreprend d'ex- pliquer les anciennes Ordonnan- ces , il trouve peu d'Ecrivains qui. fe foient attachés à développer ces Antiquitez de la Jurifprudence Françoife , il faut qu'il explique les Ordonnances les unes par les autres , & qu'il ait recours fur plu. fleurs matières , à d'anciens Ouvra- ges que peu de perfonnes fe fone donné la peine de lire. Notre Auteur n'a point mis dans ce Volume de Table particulière quicontienne^comme celles qui fe trouvent dans les Volumes précé- dens , année par année ^ le prix dw- ja JOURNAL D marc d'or &c d'argent en œuvre &C en billot , le nom des efpeccs , leur loi , leur poid & leur valeur. Mais il fe propofe de donner dans le cinquième Volume une Table générale de la valeur du prix & de l'argent monnoyé depuis le commencement de la troifiéme Rice , jufciu'à la fin de la troifiéme année du rcgnc de Charles V- Cet- te Table fera faite , tant fur les Mandemens par rapport aux mon- noyes qui font inférés dans les quatre premiers Volumes de ce Recueil , que par rapport à ceux de ces Mandemens que Monfieur Secouffe a recouvres depuis l'im- preffion des premiers Volumes, & ■qu'il fe propofe de faire encrer dans le Supplément des deux premiers Volumes qu'il donnera au public. L'Auteur alfu^e que cette Table générale fera beaucoup plus am.ple & plus exade , que celle que le Blanc a donnée dans fon Traire des monnoyes. Il ajoute qu'il reforme- fa quelques erreurs de calcul qui étoient échappées dans les Tables particulières. L'Auteur avoit annoncé dans la ES SÇAVANS, Préface de fon j' Tome qu'il ne pouvoir fe flatter de donner exadle- ment les anciennes Ordonnances qui concernent la Cour des Aydes; parce qu'on crovoit dans le tems que ce troihéme Volume parut que les anciens Regiftres de cette com- pagnie étoient perdus ; mais M. Boulin qui travaille àl'Hiftoire de cette Cour , &: qui avoir cherché inutilement ces Regiftres dans les Greffes , les a depuis trouvés. Ils font defuite ^ en bon ordre depuis le II. de Mars 1 3S3. jufqu'auy de Novembre i4i,<. tems auquel la Cour des Aydes tut transférée à Poitiers à caufe des troubles du Royaume. Il ne fe trouve qu'un leul Regiftre fait à Poitiers qui ne contient que fix années , depuis 1456'. jufqu'à prefent , il n'y a que les Kcgil'cies de trois années neuf mois qui font en déficit. Mais ces premiers Regiftres ne contiennent que les inftitutions des anciens Gé- néraux , Se des autres Officiers de la Chambre ^ des Arrclls rendus fur les plaidoiries , ou au rappoïc i il n'y a point d'ordonnance. L'ORIGINE JANVIER, T755.. S3 rORIGINE ANCIENNE DE LJ 7HrS/QVE NOVFELLE ; oli l'on vaii dans des Entretiens par Lettres , ce cjue la Thyfique nouvelle a. de commun avec l'ancienne , le degré de -perfiUion de la Phyft^jite nou- velle fur l'ancienne , les moyens ijni ont amené Li Pbyjîcju; à ce point de perfeUwn. Par /« P. R e g n A u l t , de la Compagnie de Jefiis. A Paris , chez C/(7«cw, rue S. Jacques , à l'Eciide France. ^1754. in-n. 3. vol. Tom.I. pp. 529. To:n. II. pp. 39Z. Tom. III. pp. jj8. fans compter les Tables qui font à chaque Tome. CE T Ouvrage eft an même Auteur qui a donné en 1729. -à Paris , les Entretiens Phyjï:jucs d'Arifte & d' Endoxe , ou Phy/ijtie Uouvelle en Dialogues, dont il s'eft fait une féconde Edition à Londres en 17 j I. laquelle eft Angloifc, une troifiéme à Paris en 1732. une qua- trième à Amfterdam la même an- iiée 1732. 6c une cinquième dans la îTicme Ville en 1753. Nous avons parlé de cette Phyiîquc dans îc journai d'Aoufl: 1730. & dans ce- lui d'Odobrc 1752. Arifte & Eu- doxe qui fe font entretenus de vive voix dans k Phy/i^ue en Dialogua^ j'entreticnncnt ici par Lettres , & ce qu'ils difcnt dans leurs Lettres , qui font au nombre de vingt- fix\ eft une fuite de ce qu'ils ont dit dans leurs premiers Entretiens, La première Lettre eft d'Arifte , il y marque qu'il ne peut goûter que la Nouvelle Phyfique , & qu'il ne <:roit pas que l'on ait beaucoup per- du d'être venu après les anciens. Eudoxe répond à Arifte que la Phylicii'.e Nouvelle n'eft' peut-être cas aulîî nouvelle qu'on le penfc ; il fait là-delfus plulicurs rcflexioos qui donnent occafion à Arifte de demander à Eudoxe de i'inftrui- Ja nvier. Te à fond fur cette matière. Eu- doxe pour fatisfairc à la demande d'Arifte , le conduit depuis le der- nier fiécle jufqu'.i la naiftance de la Phyfique. Il lui fait lecaradierc : ce que i'UniveiS fcnfibie a de plus frap- J A N V I pant. Il pafle cle - là à Mofchus Phcniden', qui, avant k Siège de Troye ,c'eft-à'-dire ,■ environ dou- ze cens ans avant J> C. parla des Atomes , dont Epicure & GafTendi enr enfuite parlé -, il vient cà Her- cule-même, qae l'on fait naître un fiécle avant l'incendie de Troyes , &: qu'Hérodote dit avoir été un. grand Phyficien , fur quoi il fait cette réflexion , fçavoir ,. Qu'un Phyficien de cette force pouvoit faire honneur à la Phyfi- que i mais il obfcrve en même tems ,. qu'à peine Hercule avoit-il ouvert les yeux à la lumière , que ïa- Pbylîque étoit célèbre en Egyp- te. Pour le prouver , il cite Ho- mère qui attribue aux Egyptiens la connoilfance des fimples ; puis il renvoyé Arifte à ces momies , à ces cadavres rendus incorruptibles , aufqucls l'art fembloit donner une efpece d'immortalité, i» Thébes , » lui dit-il , cette Ville à cent por- »tes, ces Labyrinthes, où l'indu- S) ftrie ^ la magnificence cclatoienr^ s> & dont l'on voit encore des tra- M ces, CCS Pyramides énormes, fi » anciennes, ôique le tcms refpec- » ta toujours , demandoient des » connoillances où la Phylique de- SB voit avoir part. Les anciens Prêtres d'Egypte qui obfervoient les effets de la na- ture , & en recherchoient les cau- fes fecrettes , Mercure Trifmegilfe qui compofa plufieurs Ouvrr.gcs fur ce fujer , & que l'on place, ainfi qu'Atlas , vers le tems de Moyfe , c'cft-à-dire environ feize cens ans avant J, C, Moyfe lui-même qui E R ; r 7 5 5-, j^ apprit des Egyptiens , comme l'af- fure Clément d'Alexandrie , C3 qui regarde IcsAftres , rien de tout eelan'elf lailTè en arrière par Eudo-- xc , & il remarque au fujct de Moyfe que lorfque l'Ecriture dio qu'il étoit habile dans toutes les Sciences de l'Egypte , il n'y a pas d'apparence qu'il en faille excepter la Science de la nature. D'ailleurs ' dit-il , à eonfidcrer la manière dont Moyfe parle des Animaux 6c de leurs qualictz particulières , oa voit affez qu'il étoit initié dans l'Hiftoii-e Naturelle. Mais ce qui frappe le plus ici Eudoxe & qui lut paroît véritablement un trait da Phyficien , c'cft le dèveloppemene que fait Moyfe de tout ce qui con- cerne la création du monde. De la Genéfc, l'ami d'Arifte pafTs au Livre de Job ; il remarque qua fi cet Ouvrage n'cfl; point de Moy^ fe , comme le prétendent Orioêno & beaucoup d'autres Sçavans ii efl: apparemment plus ancien que Moyfe, ainfi que le croyentdes Critiques habiles qui n'y- voyent nulles traces de la Loi. Or dans ce Livre de Job, Eudoxe trouve pref- ' que à chaque page les exprdÏÏons d'une Phyfique toute divine. On v peint, dit-il, la terre comme fiif- pendue fur le néant, parce qu'elle eft environnée de toutes parts^i'un liquide infenfible. On y conduit l'efprit jufqucsdans l'intérieur du Globe terreftre ,. pour y obfervcx les pierreries , les veines d'arc^ent ' les veines d'or, & une efpece de pierre qui fe change en cuivre , la- quelle pouKoit bien êweje virrioh^^ 38 JOURNATT de puifque le vitriol fournie effedive- ment du cuivre. Notre Auteur continue la def- cription , & nous ne croyons pas devoir fuppiimcr ce qu'il ajoure là- ;deirus ; ceux qui aiment les pein- tures vives treuvcrrnt fins doute ici des traits qui ne leur dépiairont pas ■, ce que nous dilons en particu- lier de ladefcriptiondont il s'agit, nous le difons de toutes celles qui font répandues dans ces Lettres: on y voit que la Philofophie n'cfl: pas incompatible avec l'éloquence. Voici donc comme continue Eudoxe , pour montrer que le Li- vre de Job eft véritablement un Ouvrage Phyfique. Lorfque dans le Livïc de Job , »> on nous alTurc que les oifeaux » ignorent la route des endroits qui » renferment des minières, n'ell- »)ce pas nous apprendre que les »exhalaifons des minéraux rendent M la terre & les plantes ftérilcs ? Mais que l'on fait bien concevoir •comment l'eau va porter la nour- riture aux plantes , lorfqu'on nous dit , qu'à l'odeur de l'eau la plante s'emprcfle d'éclorre , & fe couronne de branches. » j4d ociorem atjita germinabit & »faciet comam. Onobferve que les » rochers - même donnent tantôt w de l'eau & tantôt de l'huile. On » touche la ftrudure du corps hu- >5 main, on nous le reprefente com- M me un tilîu d'os & de nerfs. Offi- » h\is & nervis compegi/ii me. Qucl- «i qucfois c'cft le génie des animaux s» jaloux de leur liberté , quelque- î« fois on tranfporte notre efprit S SÇAVANS, » jufqu'auY cxtremicez de l'Inde .J » j-our admirer le vif éclat de fes » couleurs ; non cnferetur tinthi » InJix col^rihm. Prcfque point de » météores qu'on n'offre à nos fcnsi » on en cherche ia. caufe : qu'cit- w ce qui force la pluye à luivre » certaines loix ? Si les nuages dif* » paroiflcnt ians arrolcr nos cam- » pagnes , c'cft un vent qui les em- « porte •, on élevé nos regards plus » haut ; jufqu'aux brillantes étoiles *> des playadfs & vifs ; s'il s'agit de la grandeur de » l'Univers , pourfrit Eudoxe , oq » lui prefcrit des bornes. Enfin , i> cherchez-vous la caufe générale » de tant de Phénomènes , interro- » gez , dit -on , dans le Livre d« i> Job ; interrogez les animaux , U » terre-même, ils vous répondront 5> qu'ils font faits avec tant d'art, »>& qu'ils font lî au-dclTus d'une " intelligence créée, qu'Us ne fçau- »roient venir que de la main de » Dieu. Vous diriez que les amis » de Job , eifaycnt de s'élever en » Phyliciens avec lui , jufqucs dans " le fein de Dicu-méme. Eudoxe conclut de tout ce Dif- cours , que fi , du tcms de Job , li Phyfique élevoit l'efprit jufqu'i Dieu , il falloir qu'elle le fit du tenis d'Abraham & de Zoroal^re ; il remarque que toute l'Antiquité J A N VIE ■feit d'Abraham qui étoit Chaldécn & de Zoroaltre qui étoit de Badria- ne, deux grands Aftronomes, deux mille ans avant la Naiiïanee du Chriftianifme. Quelques Auteurs font de Zoroa- ftre y le premier Aftronome; Eu- doxe dit ne fçavoir s'ils croycnc voir cette qualité dans i'étymolo- gic du nom de Zoroaftre , mais il prétend qu'avant cet Aftronome , la beauté des étoiles & des Cieux avoit des Obfervateurs aflidus , & ce qui le porte à le croire , c'eft , i'. Qiie la Tour de Babel , élevée ecnc cinquante trois ans après le Déluge 5 z°. Qiie les plaines des Ghaldéens , les nuits où l'on refpi- Toit un air frais après les chaleurs du jour , un Horifon libre , un Ciel pur & ferein fuffifoient pour engager les fiécles les plus reculés à contempler rétendue des deux & les mouvemens desAftres.il re- marque à ce fujet , que le Philofo- phe Callifténe , qui fuivit jufqu'à Babyîone , le vainqueur des Perles, trouva dans cette Ville des obl'er- vations Aftronoraiques de dix-neuf cens trois ans ^ Obiervation donc Ariftote , pour perfed:ionncr fi rhyfique , fe fervit plus de trois cens ans avant J. C, Croirons - nous , demande là- deftus Eudoxe, que ceux qui por- toient (î haut leurs regards cu- rieux ^ aycnt négligé tout-à-fait, ia connoillance des êtres qu'ils voyoienc de près ? Eudoxe fe trouve infenfiblement arrive au Déluge , c'eft - à - dire à deux mille trois cens vingt-huit ans au-delà de J. C. A cette occa- fion il parle de l'Arche , 5: pour montrer que celui qui l'avoitbatic fçavoit la Phyfique , il fait le rai- fonnement fuivant: n Ne falloit-il » pas que Noé fçiàt du moins , j> qu'un Vaiftean chargé comme le M fien, demeureroit fufpendu fur' » les eaux malgré fon excès de pe-: » fanteur, parce qu'il feroit avec » l'air qu'il renfermeroif , un volu- »me total plus léger qu'un éo^al >j volume d'eau ? N'e fiUoit- il pas- qu'il eût bien d'autres connoiffan- cesphyfiques des proportions Srde l'équilibre des liquides ^ des foli-- des ; Eudoxe rie veut pas qu'cin jTe' borne à.confiderer l'Arche 5i lès^ eaux du Déluge , il veut qu'ivre Jofcphe , on aille au-delà , & que l'on jette les yeux fur deux colotj- nes , l'une de briques , l'autre de pierres, où l'on verra des gravures qui mdiqueront & les arcs & lèr Obfervations Aftronomiques du- premier âge du monde. En effet ,, dit-il, on avoit dès le premier â^e du mondé , la connoilfance de bien des Arts : on chantoit , on joiioit des Inftrumens' ,. on tou- choit le Luth & les Orgues, on difcernoit les endroits de la terre où il' y avoit des veines de fer &c de cuivre, on sravaiîloit de routes les^ ftçons , le cuivre & le fer , on fça- voit élever des Edifices , bâtir niê- me des Villes, porter fes regards: vers les Cieux , & en obferver les Phénomènes. Enfin voilà Eudoxe parvenu juf~ qu'à Adam, croirons- nous, dit- il que ce premier Homme j ak yû 40 JOURNAL D dans l'efpace tle neuf cens trente ans , qu'il fut fur la terre , tant de Phénomènes &: fur la terre Se dans les Cieux , fans réfléchir un mo- ment fut le rapport des effets & la caufe des maladies , c'eft l'alte- » ration d'un fang qui coule dans « les veines fans garder les règles , n de fa circulation ordinaire. . - Eudoxe remonte encore plus haut, il va jufqu'àHippocrate qui. au fécond Livre des Epidémies, dit en termes exprès, que le fang circu- le dans les veines , que les humeurs ont leurs cours ordinaires & circu- lent dans les vaificaux qui. vien-- nent aboutir dans l'endroit même où ils commencent , que la cir- culation cit prompte dans la jeu- nclfc, & lente dans la vicillcflc. Mais ce qui paroîtra extraordinaire c'eft qu'il y a plus de quatre mille ans. que l'on connoît à la Chine ^. J A N V I E :ich circulation du fang , &:. la du- rée de chaque révolution du iang ; Eudoxe cite là-dcnTus pour garand Voiîîus, qui s'explique ainlî ■ fin- VHinis circnliitionem jarn à quatuor mille & phmùtis atmis fcnbits mtam fitijfe teft.wtnr illortm libri ... . revo- Imiones vero JinguUs meiiuntur 270 refpinttionibus , c'eft-à-dire , les Li- vres des Chinois , font foi que la circulation du fang a été connue de. cette nation, il y a plus de quatre mille ans , & ces peuples mcfurent chaque révolution du fang par le tems que l'on met à refpirer deux cens foixanre & dix fois. Après plufieurs autres 'articles •quela crainte de nous trop étendre nous fait fupprimcr à regret , Eu- doxe vient à ce qui concerne le fentiment des modernes fur l'ame des bctes. La penfée de Defcartcs fur ce fujct , paroît belle à Ariftc , hardie & nouvelle. Pour hardie , Eudoxe en convient , mais pour nouvelle , il n'en demeure pas d'ac- .cord •■, & voici fes raifons. n Avant Defcartes , dès le feizié- » me ficde , en 1554- un Médecin » Efpagnol avoir ofé attenter à l'a- j> me des bêtes , c'eft Gomés - Pe- « reira. Ce Philofophe prétcndoit «qu'un pur méchanifme faifoit » dans les bêtes , les fondions d'u- w ne ame , & fa penfée n'étoit pas » tout à fait neuve , puifque S. Au- » gultin trouvoit du ridicule dans »• l'opinion de certains Philofophes K> qui ne vouloient pas que la vie »de l'animal fupposât une ame « dans le corps de l'animal. Il vous j> lemble , dit ce Père , qu'il n'y a K ; 17? J- 4? » point d'amc dans le corps d'un •> animal vivant. Cette opinion nie n paroît infenlée ; cependant elle a » eu fes défenfeurs , 6i je crois » qu'elle en a encore. » Des le tems de S. Auguftin, w l'opinion qui anéantit l'ame deg n bêtes pouvoit paroître ancienne. » Et fur ce point les Stoïciens , Si » Ariftote-même , étoient un peu » Cartéfîens. Ceux-là difoient que » les bêtes n'ètoient pas fufceptt- » blcs de pallions , celui-ci refufoic » la ConnoilTancc à plulîcurs , Sc n Ciceron parle d'un certain Phéré- » crate qui vouloir non fculemeijit nque les bêtes n'eulTcnt. point d'à-»- » me , mais qu'une certaine confi- » guration des parties de leur corps " fût l'unique principe de leurs n opérations. N2(jue ejfe . . .animam in beftia .... e^idppe (juit ( anima. ) ntdlajît , necfît qmd^u.im mjï corpus fguratim.Cktt. Tufcul. Lib. i. Ces témoignages fLiffifcnt pour faire voir que l'opinion de Defcar- tcs fur l'ame des bêtes , n'eft pas nouvelle. Notre Auteur parcourt ainfi dans fon premier Tome, un grand nombre d'autres points dont les Phyficiens modernes fe font hon- neur , &: qui ont été également connus des anciens ; tels font k pcfanteur & le relloi t de l'air , la Lune caufe du flux &: reflux , les fenfations attribuées au corps , & qui fe font uniquement dans l'ame, les couleurs qui ne confident que dans les différentes reflexions de la lumière , à l'occafion delà diverfc configuration des parties d'où h, 44 JOURiîAL DE lumière réfléchit , la chalçur qui n'eft point formellement dans le feu , non plus que le froid dans la glace , le fon dans la cloche , la fa- veur dans les alimcns , rattraàion de l'aiman , laquelle n'eft pas pro- prement une attradion , mais une impulfion réelle , la tendance de tout corps à demeurer en repos fi auçlquc autre corps ne le met en, mouvement., &c.. Nous verrons dans l'Extrait que nous donnerons des deux autres tomes ce qu'il refte à penfer , félon Eudoxc , fur la conformité de la Phyfique Nouvelle avec l'Ancien- nç. Nous dirons feulement ici , pour ne pas finir cet; Extrait fans donner une notion générale du Li- vre, qu'Eudoxe, dans le fécond tome , expofe ce quelaPhyfique Î^Jouvelle & la Phyfique Ancienne «nt dé commun fur ce qui regarde les.Aftres, les Syftcmes du Mon- de, les Eclipfes, les Comètes. II. montre le concert de la Phyfique Nouvelle & de l'Ancienne , i°. par rapport à l'Auteur de la Nature, & à.rQrig!ne de l'Univers, z°. dans la manière de s'exprimer, &: dans le goût qu'elles ont infpiré pour elles. Puis, il fait voir que les femcnces de l'Hypothéfe de Defcartcs & de f^ Méthode même font cparfes chez pluiîeurs Philofoph'es qui ont vécu long tenis avant Dcfcartes. 11 s'étend cnfuite fur l'éloge d'Ari- ftote , & Ariftç furpris de voit dopner par Eudoxe , à la Phyfique ATicienne,tant de traits de la.Phyfi- que Nouvelle , . accufe fon ami de • whu.içs.intçïêts.dç i» Phyfique S SÇAVANS. Nouvelle , pour relever la gloire fîe l'Ancienne i mais Eudoxe calme bientôt là-dciTus l'inquiétude d'A- rifte ,,en lui bifant obferverquc Ci laPhyfiqueNouvelle a des richefles. qui lui font communes avec l'An- cienne , elle en a aufîî beaucoup qui lui font propres. Et qu'ainfi là. Phyfique Nouvelle eft beaucoup^ plus parfutc. Dans le troifiéme tome Eudox.e montre comment la Phyfique : Nouvelle eil parvenue à cette pcr- fcdion qui l'élève lut l'Ancienne. Nous parlerons en particulier de • tous ces articles dans l'Extrait que- nous donnerons des deux Tomes, dont il s'agit. On peut dire, en général que de- la manière dont le Père Regnaulc reprefente la Phyfique Ancienne &C là Phylique Nouvelle, celle-ci pa- roît plutôt une Phyfique renouvel- léequ'une Phyfique Nouvelle , &: que la principale différence qu'il y a entre nous 5: les anciens , c'eil- que nous> faifons beaucoup de bruit de chofcs. , qu'à peine, croyoicnt-ils mériter qu'ils en par-- lalTent , tant ils les ti envoient évi- dentes; & pouc s'en tenir à.l'cxem" pie de la circulation , il faiidroit en effet, qu'ils cufient eu l'cfprit bien bouché i fi la feule enflure delà veine audclfousde lalisature dans la faignée du bras , ne leur eût pas fait voir que le fang circuloir. \% chofe eft palpable par pluhcurs au- tres endroits , & il n'a guéres été plusdifticile de connoître que le fang circuloit dans le corps , que de connoître que dans le corps il y J A N V I avoit (3u fang. Ceux qui voudront voir lur ce fiijcr 8c fur pluficurs auî.ri.-3 concernant rAnatonùCjCom- bien les anciens , contre ce qu'en pe nient les modei nés , ont excellé dans cette Science , doivent lire le fcavant & protond Ouvrage intitu- lé : Difqttifitiones Hifioricx de Re jinatomicâ veteriim , ijnnrum prima Origines yinatomicas , fecunda peri- tiarn veterum AnAtonacam inaenere ténia perninm "veterum yînatomicam m fpecie , completlitur. A Philippe- Jacobo Hartmanno^ Phil. & Med. D. &c. Regiomonti. 1653. ««-4°. PROPOS iriON D'VNE MESVRE DE LA TERRE ^ dont d refidte n>2e diminution cot:Jîlerable dans fa circonférence fur Us pa- rallèles. Par M. d'Anvilk , Géographe ordinaire du Roi : dédiée à Aion~ feigneurle Duc de Chartres. A^^ns , chez C haubert ^ Quai des Auoii^ ftins , à la Rénommée & à la Prudence. 1735. in- 11. pp. 147. fans l'Epître Dédicatoire &: l'Avertiflement qui en remplirent xxix. Plan- ch.I. L'A U T E U R , en propofant cette nouvelle mefure de la Terre , avoit eu dc(Tein d'abord de garder un profond filcnce fur les différentes opinions des Sçavans toucli.int quelque inégalité dans le diamètre terreftte-, 6i cela, d'au- tant plus volontiers. , qu'elles n'a- voient rien de commun avec le fondement fur lequel il prétend établir la ficnne. Mais il a cru de- voir changer d'avis fur ce point ^ pour éviter lé reproche ou de trop de prévention en faveur de fa dé- couverte , ou de trop peu d'égard pour des fcntimens rcfpedablc? pat le grand fçavoir de ceux qui les foûtienncnt- U ouvre donc fon Atcriifcment par l'expo/îtiou des deux Syftémcs fur la iigure de la Terre. Suivant le premier fondé fur la force centrifuge de ce Gkibe plus fo:tc fur l'équatcur que fur tout autre iercle parallèle , la Terre a du prendre la figure d'un Sphéroïde applati ; ce que femble confirmer lajieccHité d'accoqrcir le Pendule pour lui faire battre vers la ligne les • mêmes fécondes de mouvement moyen qu'à Paris : d'où MM. fJity. gens &c Newton ont conclu i'appla- tiffement de la Terre par les pôles, & en confcqucnce , l'inégalité de fes diamètres , dont le premier de ces deux Mathématiciens fait mon- ter la différence à une 578^ partie &: l'autre à une 23 o^ Suivant le fécond Syftcme qui- refulte des grandes opérations dc' MM. CaJftTii fur le Méridien de Pa- ris i les degrez de laticudc terreftrc allant en diminuant du Sud air- Nord, la figure de la Terre doir être allongée vers les pôles ; en for- te que la différence entre l'axe de la-. Terre & le diamètre de l'équatcur foitla 95^ partie de ce diamètre; ce. qui peut monter environ à 14-, iieuës de cellts dont 2c font un-dc^- 4^ JOURNAL DE ç^ré. D ou il paraît , que la Terre eft plus fenliblcment allongée dans cette hypothcfe , qu'elle n'ell ap- platic dans la précédente. Onop- pofe à la dcrnieie rinfufrifance des rneilleurs inftrumens connus juf- qu'ici , par rapport à la précifion rcquife pour déterminer au Julie Ii différence ou l'inégalité des degrez ■de latitude : inluffifance telle , qu'on n'a pu [ dit-on ] prendre au- cun angle qu'à piulicurs fécondes près de la certitude. Mais , reinar- 4S JOURNAL DE ^êné de l'Eft' à rOiieft que dans l'autre fens , on multiplie mal à propos la différence de longitude', d'où il fuit que l'étendue de l'Ell à rOiicft s'accroît plus notablemcnr. Il cft vrai qu'au moyen des longi- tudes déterminées allronomique- ment , on a corrigé des erreurs énormes de ce dernier genre dans les Cartes les plus eftimées. Mais il telle encore infiniment à reformer fur cet article. M. d'Anville cft perfuadé qu'on peur prévenir a peu près quelques-unes de ces détermi- nations aftronomiqucs de longitu- de , à l'aide des mefures indiquées par les anciens , & par un ufags circonfpecT; des diftanccs itinéraires & des courfesou mefures de Ma- rine : ce qui impofe à un Géogra- phe la neceiïïté d'un travail exad & perfévérant , pour la vérification «ics longitudes. C'eft donc précifémcnt cette difficulté Géographique qui a frap- pé notre Auteur le plus vivement, èc qui l'a tenu en défiance fur les déterminations de longitude, qu'il a trouvées fouvent trop disantes, eu égard à la mefuie a6l"uellc ou à fon équivalent. M. d'Anville ne s'eft pas rendu aux premières appa- rences de l'erreur fur ce point ; mais il lui a fallu céder ^nfin au concours d'une infinité de circoii- Ilances , qui le conduifoient tou- tes au même but , c'eft - à - dire à fentir le befoin indifpenfable de rétrécir le Globe Terreftrc en plii- fîeurs endroits d'Orient en Occi- dent, Il s'en ouvrit il v a plufieurs années à quelques peffonnes diiUn- S SÇÂVANS. guées par leur capacité & pîr1?Ht rang , entre autres à M. l'Abbé Bi- GNON.qui parut (dit-il) entrer dam fcs viàes. Notre Auteur dès lors [ en 1731. ] agit contormément à ces idées , en drcftant pour {'Orient ChrtftiaftHS du ftu P. le Onien , une Carte de FEglife d'Afrique , 011 il retrancha près de deux minutes & demie ou près d'une 14' partie fut l'intervalle de chaque méridien d'un degré à l'autre. Il en aufé de même dans une Carre du Paraguai faite en 1735. pour le Recueil des Lettres idifia^ites & curienfes des Milîîonnaires de la C. de J. La pa- rallèle de rObfcrvatoire de Paris , mefurée dans l'ctendue de la Fran- ce par M. Cijfini , s'eft trouvée d'accord avecThypothcfe de l'Au- teur fur le retrccilTcment de la Terre. Celui-ci prévoit qu'en fai- fant i'Analyfe d^ plufieurs diftan- ces par rapport à divers Ouvrage* de Géographie qu'il médire , il re- viendra fouvent à cette même hy«. pothéfè. Mais il fe borne ici à produire une feule pièce , qui n'a frit que le confirmer dans un parti déjà pris , & lui femble très-propre à donner une plus jufte idée du retrecille- mentdont il eft iciqueition. Cette pièce eft due .1 la compofition d'u- ne Carte du Dioccfc de Blois, en- treprife en 1752. par l'Auteur pour feu M. de Caumanin ^ Evêquedc cette Ville- là. Ce Prélat raftembla pour cette Carte un grand nombre de plans particuliers levés & ar- pentés en divers endroits par des gens de la profellion. Paarini ces J A N V I E plans il s'en eft trouvé un très-im- porunt qui eft celui du bord de la Loire , en fuivant la levée fans in- itcrruption , depuis Orléans juf- qu'au bord de l'Aurhion , près des ponts de Ce 5i d'Angers ; & c'cft l'Ouvrage de M. de Regemorte , dont on vient de parler. Il a pris , en levant ce plan fur les lieux , une ligne pour dixtoifes ; & la réduc- tion qui en a été communiquée à M. d'Anville ^ efl: fur le pied d'une ligne pour cent toifes; ce qui don- ne pour un degré de latitude éva- lué à 57oS'o ou 80 toifes, trois pieds onze pouces & près de fcpt lignes, c'ell;-à-dire,prcfque huit fois autant que l'échelle des Cartes de la Méridienne de Paris , telles qu'on les a publiées. Notre Auteur regarde ce plan , comme fournilTant une mefure ac- rueile & pofitive d'un grand cfpa- ce , prefque entièrement dirigé d'Orient en Occident , & qui fe joint naturellement à la diftance entre Orléans & la méridienne de Parisi diftance connue par les trian- gles employés à l'établilTcment de cette méridienne. A cet cfpace il a joint la diftance depuis Angers juf- qu'à Nantes , éloignée de Paris d'environ quatre degrez de longi- tude i & cette mefure étoit pour lui d'autant plus eft^entielle , qu'il n'étoit point encore queftion alors des opérations pour la parallèle de Paris , commencées l'année derniè- re , & terminées celle ci. Mais l'Auteur ne prétend point fe bor- ner à l'intervalle du Méridien de Paris à Nantes , ôi en pculFant juf; R ; 173 y. 4^ qu'à Breft , il embraffera un efpucc d'environ fept degrez. Au furplus , il juftifie par les extraits de deux Lettres que lui a écrites feu M. de Blois. qu'il avoic prévenu ce Prélat touchant l'opi- nion du rctreciffement de la Ter- re , & qu'il lui en avoit annoncé d'avance une preuve qui devoir re- fulter de h mefure de la levée. Il fc flatte que fi d'un fait de cette na- ture il a pu tirer quelque vanité , il mérite qu'on la lui pardonne , en faveur des preuves qu'il allègue de la vérité d'un tel fait. L'Auteur nous avertit , que dans la petite Carte ci jointe , & qui eft très-proprement gravée , il a pris pour échelle celle des Cartes de la méridienne de Paris , inférées dans la fuite des Mémoires de l'Acadé- mie Royale des Sciences de l'année j718.cn y faifant néanmoins quel- que addition pour fupplécr au ra- courciftement caufé par le dtftcche- ment du papier, après l'imprcfllon. 11 nous fait obferver en fécond lieu , que la parallèle du 48^ degré de latitude , qui traverfe cette Carte dans fa longueur , eft une portion de cercle, fur laquelle tous les méridiens de cette Carte tom- bent perpendiculairement, & ne paioiiîcnt tous , à l'exception de celui de l'Obfervatoire , qu'un fim- ple fil de points, comme devant être effacés fuivant le refultat de cet Ouvrage , qui doit changer leur diftance, fixée, félon l'hypothèfe commune, à 38 mille 180 toifes, fur le 48' parallèle. Après ces préliminaires , M. So JOURNAL DE d'Anville entame fon fujet, Se nous xend un compte fidèle & circon- ftancié de toutes les opérations qui l'ont conduit à déterminer h vraye pofition de tous les lieux que prefcnte fa Carte, depuis la méri- dienne de Paris iufqu'à la Ville de Nantes , en fuivant le cours de k Loire ; de laquelle pofition il rcful- te , fclon lui , un retrcciflement no- table de la Terre de l'Eft à l'Oiieft. C'eft un détail, dans lequel il ne nous eft pas polTible de le fuivre ici. Nous nous contenterons d'ob- ferveren général, que pour vérifier cette découverte , il s'efi: aidé tort ingénieufement de tous les fecours qui pouvoient lui être les plus uti- les , & que luioffroient la Géogra- phie 6c l'Adronomic. Parmi ceux du premier genre tels ont été les triangles qui ont fervi à tirer la méridienne de Paris ;. une Carte de la Forêt d'Orléans &; àes environs , levée très - cxaâiemenc fur les lieux ; le plan de la levée , dont nous avons déjà fait mention^ la Carte du Diocéfede Blois; deux Cartes particulières , l'une de la terre îk ancien Duché de la Fcrcé- Sénererre , l'autre , de Baugenci ; un Plan particulier de la Terre de Fonfpertuis & des environs ; une Pièce drelTée géométriquement aux environs de Blois par une per- £bnnc très-intelligente ; un carton particulier Se un plan original de Chambort ^ levé par M. Aîathis ;. line Carre arpentée de la Terre de ia. Ferté-faint-Aignan -, une Carte particulière de la Terre de Chau- aoont fur Loire & des environs y S SÇAVANS , deux Cartes particu-licres des envi- rons d' A mboife i un Plan manuf- crit des environs de Tours; une Carte particulière du Diocéfe d'Angers ■■, la Carre du Diocéfe du Mans; deux excelle ns Cartons des Parroifics de Conan & de la Cha- pelle S. Martin ; un autre de Ven- dôme ; plu.'ieurs autres Cartons de diverfes ParoilTes , très-bien faits, &: relatifs à la pofition de cette même Ville ; d'autres Pièces de même genre faites pour Saint Si- gifmond , Tournoih, Villamblain, Pré-Nouvelon , Ozoir-lc-Brcuil , & Château- Dun; une Carte parti- culière du Diocéfe de Nantes ; la belle Carte des Ccites de Breraenc; une Carte particulière de ce qui eil compris entre l'Ifle de Noir-Nfoù- tier ik l'entrée de la Garonne; &c. Aux mefurcs très-exadles desdi- ftanccs fournies par routes ces Pic- ces Géographiques , & aufquelks nous renvoyons ; l'Auteur a joins pluiieurs déterminations Aftrono- miques pour les latitudes (5; les lon- gitudes de divers lieux ; & de ce nombre font la longitude dc Tours; la latitude d'Angers ; celles de Loudun, de Brion près Beau- tort. Se Ai la Flèche , déterminées par MM. Picard Se Cajfini le père j les longitudes d'Angers , de la Flè- che &deBrion; la latitude duMans^ Se fa longitude; la latitude de Nan- tes , & fa longitude ; les latitudes de Cordouan & de la Rochelle ; la longitude de Bre/l tondéc fur trois obfervations correfpondantcs do l'immeriion du premier Sitciiitede Jupiter , entre chacune dcfquelles J A N V I on ne remarque qu'une ou deux fécondes dedivcrfité; la longitude de S. Malo , &c. De toutes ces dé- terminations Aftronomiques com- parées ou combinées avec la mefurc la plus exadic des diftances , M. d'Anville trouve lieu deconclurre un rcrrecilTement confiderable de la Terre , en mettant le tout fur le pied le moins avantageux à fon Sy- stème. Mais le retreciffement de la Ter- re cft plus fcnûble par la détermi- nation Aftronomique de Breft que par aucune autre. La longitude ob- servée en ce lieu , & qui mérite une confiance particulière, eft de 6 degrez 54 minutes, à l'égard du méridien de l'Obfervatoire. Ce- pendant , ce qu'il y a de diftance Géométrique entre Paris & Bteft , en confequence des opérations de M. CiiJJJm jufqu'à S. Malo îk de la Carte levée géométriquement fut les Côtes de Bretagne , n'occupe réellement que é" degrez 36' minu- tes & demie de la longitude fur le pied ordinaire. Ainfi (dit l'Auteur) voilà 17 à 18 minutes de moins qu'il ne faut à la détermination Alhonomique , & dont on doit , par conféquent , rabattre la valeur fur l'efpace attribué ci-defTus à la longitude , qui dans l'intervalle, dont il eft ici qucftion en dernier lieu , paraît avec plus d'une vingt- (incfuiéme partie de trop. S'il ne s'agilToit que de deux , trois ou quatre minutes de degré , on pourroit peut-être l'attribuer à quelque défaut de précifion dans les obfeivatÎQns. Mais toutes les E R , 17 ? 5". yi déterminations Aftronomiques de longitude données par l'Acadé- mie Royale des Sciences , & pro- duites ici fans referve , ont inva- riablement hitparoître que la dif- fcicnce entre la difknce géométri- que &: le lieu agronomique, ctoic plutôt hvorable que contraire 2 l'hypothéfe du rétteciffement ; ce qui ncpeutctre cnvifagé [ dit no- tre Auteur ] comme un effet du fcul hazard. li ne héfite donc point à donner la préférence fur l'article •n quertion à la détermination de Brefl: ; en prenant toutefois un mi- lieu entre 14 & ^d. C'eft-à-dire , qu'il diminue la circonférence de la Terre, d'une trentie'me partie,, qu'il faut rabattre , félon lui , fur l'étendue qu'on y a fuppofée juf- qu'à ptefcnt. A l'appui des preuves employées ci-delTus pour mett;e hors de dou- te le Syftême de l'Auteur; celui-ci fait venirquantitédc circonftances propres à rendre fa conviiflion plus entière fur ce point. Il nous allè- gue la Carte d'une Contrée de Normandie , dont il travailloit il y a 5 ou tf ans à établir la longitu- de par rapport à celle de Paris ; il nous parle d'un intervalle de plus de trois degrez de longitude qu'il a ( dit-il ) fondé dans les Pays bas, &C dont il fera queftion dans 1" Analyfe d'une Carte d'Allemagne , qu'il prépare en deux grandes feuilles : il nous cite l'Italie , comme ayant beaucoup contribué à lui faire croi- re que la Terre doit être moins étendue de l'Eft à l'Oiieft , qu'on ae le fuppofe j en confirmation de G ij ja JOURNAt D quoi il mettroit principalement en ceuvrecc qu il y a d'intervalle entre Turin & Bologne , &rendroir par- là beaucoup plus intereilàntc une Carte de l'kalie qu'il a tort à cœur. Se qu'il nous fait cfpercï. Il a racé [ pourfuit il ] ce retreciilement de la Terre , dans des latitudes plus voillnes de l'Equateur , par exem- ple . dans l'intervalle d'Alexandrie «Egypte à .lerafalem ; & toujours avec un pareil fuccès. Il en produit enfin une démon- ftrarion , qui termine cet Ouvrage, & que lui fournilTent les Carres des Provinces de la Chine , levées fur les lieux par les RR. PP. Jefui- tes , fous le règne du feu Empereur Kam hi. C'eft fur quoi , pour abré- ger , nous fommes obliges de ren- voyer au Livre même , qu'on lira fans doute avec d'autant plus de plaifir ,. que le Libraire le prefente au public fur de beau papier , qui ES SÇAVANS, ne fera par coniequenr rien perdre" à la netteté des caraélcres.- Les obfervations ajoutées à l'Ou- vrage fe reduifent à trois points. Par le premier on tait voir que l'in- tervalle du méridien de Paris à Nantes pourroit foutTrir un allon- gement coniidîrable , fans que ce- la nuisît à la propolition dont il s'agit. Par le fécond , il paroît , que la Carte des Côtes de Bretagne,, dont on a tiré l'intervalle d^ Saint Malo à Breft , doit être aulli exade dans l'étendue en longitude qu'elle l'eft en etfet dans le fens de la lati- tude. En dernier lieu , l'Auteut s'explique fur le trentième de ré- duction à faire fur l'étendue ordi- naire de la longitude. 11 obferve' que la propriété de la figure ellip- tique peut mettre quelque inégali- té dans la quantité de cette réduc- tion , fuivant la différence des lati- tudes. MARTINI GURISCHII TRACTATUS HISTORICO-MEDICUS de Chylo humano , five fucco hominis nutritio, quo appetitûs nimii §c voracitatis , rerum haud efculentarum concupifcentix ^ naufex ôc inedii diuturnx , cultrivororum , vitrivororum , venenivororum, & pyrophagorum exempla recenfcntur. Farrago rerum prxter naturam in ventricule Se inteftinis latitantium aut vomitu rejeclarum fuppedita- tur. Excrcmentorum hominis refolutio chyniica , cum ufu Medico & Magico oftenditur , annexis quxftionibus MedicoForenlibus, & Indice locupletiffimo. Lipfix , fumptibus Mauritii Georgii Veidraanni, Soc. Reg. Pol. Maj. ac Eled. Saxoni^ Bibliopolx, anno 1730.- C'eft-à-dire : Traité dit Chyle , ouditfuc nourricier de L'homme , d.ins lequel on rapporte plujïeurs Hiftoires de fétims cani?!es^ d'appétits déréglés^ de jcknn excejfifs j de gens i^ni ont avalé des couteaux^ du verre ^du poifon , dufeit^ & *«' l'on cite un grand nombre d'exemples de chofes extraorainaires contenues dans les tnteflins ^ ou rejettèes par le vomijjiment. On y a joint diverfes Oh-^- firvations fur la refolution chymi^ue des fuperfluitez. ^ui fedéchargent par Ses mtefiiris ^ & ^Ittjieurs ijaefiigns de jHrifprudtfice Médicale ^ avec u»9^ JANVIER; lyj;-. j^ Tahletrh-amf le des matières. Par Maurice Gttrifihius. A Lcipfîc , aux frais de Maurice-George Weidmam, Libraire. 1730. vol. in-j°. pp. 5 n. QUINZE Chapitres parta- gent ce Traité. Il s'agit dans le premier, de l'appétit excclTîf ; dans le fécond , de 1 appétit pour diverfcs choies abfurdes ; dans le troiiîéme , de la répugnance pour certains alimens ; dans le quatriè- me , de l'abftinence de toute forte de nourriture pendant des tems confiderables ; dans le cinquième , du conduit du boire & du manger &C de l'adion par laquelle on avale; dans le (îxiéme , de reftomac& de !a manière dont s'y fait le chyle; tes d'appétits exceffifs , fçavoir une faim qui pafTe Amplement les bor- nes ordinaires , &; qu'on appelle grande taim ; une autre qui va plus loin , & qu'on appelle faim cani- ne , une troiûcme qui excède enco- iPe celle-là , & qu'on nomme bou- limie. L'Auteur explique avec beaucoup de foin les différences de ces trois fortes d'appétits , & ce qu'ils ont chacun de propre. Il examine en pafTant , d'où peut venir le terme de Boulimie , & Ci la première fyllabe de ce mot, déri- dans le feptiéme , du vomifTement; ve, comme le prétendent quelques^ dans le huitième , des inteftins ou ""^ , du mot grec bSç , Bœuf, par boyaux ; dans le neuvième, des cxcrèmens , &: des voyes par lef- quelles ils s'évacuent; dans le di- xième , de diverfes chofes contre nature qui occupent quelquefois les inteftins ; dans le onzième , de i'analyfe chymique des excrèmens du corps humain ; dans le douziè- me , des lignes qui fe peuvent tirer de ces mêmes excrèmens , par rap- port à la famé & à la maladie; dans le treizième , d^s ufages aufquels fcs excrèmens dont il s'agit, peu- vent fervir en Médecine ; dans le quatorzième , des excrèmens des animaux ; & dans le quinzième en- fin , de diverfes qucftions de Jurif- prudence Médicale. Quant au premier Chapitre , où comme nous venons deleremar- Muer , il s'agit de l'appétit immo- déré. M. Gurifchdiftmgue d'abord ivectous les Médecins, trois for-? ce qu'il fcmble à ceux qui font at-*; taqués de cette faim dévorante; qu'ils avaleroient un bœuf entier. Il croit que le mot de Bou-limie tire fa première fyllabe non du grec bSç, Bœuf, mais du grec bS, qui llg- nifie excejfif , immenfe , grand , beaucoup; ils'autorife là-deffus du témoignage de plufieurs Auteurs, & prétend que le Cheval Buce- phale , que montoit Alexandre , n'étoit point ainfi nommé pour aucune relfemblance que la tête de ce cheval eût avec celle d'un bâeuf, mais feulement parce qu'il avoit la tête d'une grodeur extraordinaire. M. Gurifch remarque outre cela qu'anciennement au lieu du moe Bulimos, Boulimie, on àifoxtPulivios,- terme abrégé de Polylimos , qui fignifie attaqué d'une grande faim, il renvoyé fur ce fujet à Philippe Camerarius, Horar. Subcifiv.Ccnf,' ^4; JOURNAL DE 11. cap. 93. Après quoi il examine les caufes de la faim canine Se de la Boulimie -, fon fentimcnt eft que ces maladies font excitées par un acide extraordinaire rentfcrmc dans l'eftomac , Se qui picote rudement les fibr-es de ce vifcere; acide corro- fif produit par l'abus de divers lues aigres qu'on aura pris immodéré- ment, tels que ]us de citron, vi- naigre , efprit de fel , efprit de vi- triol , &c autres chofes femblablcs, ce que notre Auteur confirme par l'expérience , ceux qui font atta- qués de ces fortes de faims , étant fujets à des vomiffemens d'où exha- le une odeur extrêmement aigre , & ces perfonncsfentant outre cela dans leur eftomac des picotemens viokns caufés pour l'ordinaire par des acides comme plufieurs ouver- tures de cadavres en font foi , & qu'on s'en peut convaincre par l'exemple fuivant que rapporte notre Auteur, Un homme de 45 ans extrêmement maigre , étoit tourmenté d'une faim que rien ne pouvoir appaifer ; il fentoit outre cela dans fon eftomax: un mouve- ment extraordinaire , 5i toutes les fois qu'il mangeoit il lui fembloit que la nourriture qu'il venoit de prendre étoit aufC-tôt dévorée par quelque animal, il mourut de cette maladie , & fon corps ayant été ouvert , on trouva l'eftomac d'une grandeur excelîive & rempli d'u- ne humeur extrêmement aigre , dont l'odeur fe répandit de tous cotez , on n'appcrçut ni ver , ni au- tre infedc; c'étoit uniquement cet «ivide qui en picquanc les fibres de S SÇAVANS. l'eftomac, avoit fait croire au ma- lade qu'il avoir quelque animal ca- ché au - dedans de lui. On voit tous les Jours des gens qui difenc fentir dans leur eftomacun animal qui les dévore : l'exemple précé- dent doit les rendre plus attentifs dans le jugement qu'ils portent ^ puifqu'il ne but qu'une humeur corrofive ^piquante pour produire l'effet dont ils fc plaignent. Les caufes de la faim canine 5c de la Boulimie ne font pas toujours les acides. Notre Auteur tait voit que la bile eft fouvcnt de la partie , fur-tout lorfque certains conduits la portent direcffcment du foye à l'eftomac, comme on le voit fou- vent dans les loups. Un grand nombre de caufes peuvent pro- duire la faim canine , les unes viennent de la nature de certaines humeurs contenues dans l'eftomac, Si les autres d'un vice de corforma- tion dans ce vifcere ou dans les intc^ fUns : M. Gurifch en tait le détail , & entre là delTus dans des particu-. laritez très - importantes à remar- qu£r pour la pratique de Médeci- ne ; on y voit entre autres celle-ci: 11 ouvrit il y a quelque tems le corps d'un homme qui étoit mort d'idropille , il y trouva le conduit inteftinal Ci court , que ce conduit n'avoit que l'étendue qu'il falloit pour aller droit de l'eftomac à l'a^ nus. Or cet homme avoit eu toute fa vie , une taim fi grande , qu'il étoit obligé de prendre de la nour- riture à toutes les heures du jour ,' & que même pendant la nuit il ne pouvoit fe paifer d'avoir auprès dç J A N V î E îuî du pain pour en manger lorf- qu'il s'évcilloit : notre Auteur rap- porte cnfuite plufieurs exemples , non feulement de faims extraordi- naires , mais de voracitez piodi- oieufcs : il raconte entre autres , que Milon de Crorone , ce Milon fi célèbre dans l'Hiftoire pour fa force, 5c qu'on dit avoir porté un taureau fur fes épaules , mangea ce taureau même dans l'efpace d'un feul jour. Il ajoure que Mirridatc Roi de Pont , étoit un des plus étrans^es mangeurs de f:n tems^ &c qu'il eftimoit Ci fort cette qualité qu'il avoir établi des prix pour ceux qui fe diftingueroient par une plus grande voracité ; Prince en cela bien différent de deux autres dont parle notre Auteur , lefqucls tirent pendre deux hommes pour cela feul qu'ils mangeoient & buvoient en un repas plus que dix autres hommes. On a vu des pofTcdez manger jufqn'à trente poules en un jour , & n'être pas encore contens. Notre Auteur rapporte un grand nombre d'autres exemples de vo- racité , tant pour le boire que pour le manger : ceux qui en feront cu- rieux les peuvent voir d-.ins le Lt- vre-mcme , p^g. 30. &fuiv. Le Chapitre fécond concerne les appétits déréglés qu'on a pour cer- taines chofes abfurdes , comme pour du plâtre , de la craye , du charbon , de l'encre , du poiffon cru, de la chair crue , du pain non cuit Se autres chofes femblables , ou qui ne font point du nombre desalimens , ou qui étant de ce nombre , n'ont pas la préparation qu'il leur faut pour fcrvir de nour-' riture. Ces fortes d'appétits dépra- vés , connus parmi les Médecins fous le nom de pica & de malacia font affez ordinaires aux filles atta- quées de pâles-couleurs, & aux femmes enceintes. M. Gurifch en examine les différentes caufcs^ nous palTons à regret les remarques qu'il fait fur cette matière impor- tante , mais les loix de la brièveté ne nous permettent pas de le fui- vrc par-tout, c'cfl: affcz que nous indiquions à nos Lcâ:curs,les prin- cipaux endroits d'un Ouvrage , lorfque ces endroits ne peuvent être rapportes fans trop de lon- gueur. Les feuls exemples que cite M. Gurifch de ces goûts dépravés demanderoicnt un Extrait entier. On y voit entre autres,des hommes & des femmes , avaler avec avidité des anguilles toutes vivantes & les rendre cnfuite par bas toutes vi- vantes j on en voit avaler des fcor- pions , des araignées , & plufieurs autres infedcs femblables fins en reffcntir la moindre incommodité. D'autres manger des poulets en- tiers avec la plume , les pattes , le bec, ^ tous vivans. D'autres avoir un extrême appe-" tit pour des cheveux , & en avaler tous les jours des pelotons,d'autres manger des gands & y trouver un goiJt délicieux. Notre Auteur ne fe contente pas dé rapporter des exemples de ces fortes de maladies.^ il y joint de tcms en fcms , des ob- fervations utiles fur la manière de: les guérir. En parlant, parexem»- $6 JOURNAL DE pie , de CCS mangeurs de cheveux , il obferve qu'il n'y a rien de plus efficace pour empêcher les mau- vais effets de ce goût dépravé que de faire avaler à ceux qui en font atteins , beaucoup d'huile d'aman- des douces. Cette huile s'alTocie avec les cheveux avalés , & les en- traîne enfuite par les felles. L'antipatic que quelques perfon- nes éprouvent pour certains ali- tnens , comme pour le lait , le fromage , les choux , les fraifes , les pommes & autres femblables fait la matière du troifiéme Chapi- tre ; on y trouve une infinité d'e- xemples fur ce fujet , tous plus cu- rieux les uns que les autres , & ac- compagnés de reflexions utiles & fçavantes. Notre Auteur a rappor- té ci-devant des exemples de gens qui mangeoient avec avidité des anguilles toutes vivantes , il en rapporte ici de tous contraires a ceux-là. Ambroife Parée fait mention d'un homme de qualité qu'il dit avoir connu^lcquel^dès qu'il voyoit uneanguille^s'évanouifloit &c tom- boit comme mort : un autre, au rapport de Wenrichius , tomboit dans le même état non feulement à l'afpedl d'une anguille , mais étant dans une chambre où il y en avoit quelqu'une de cachée. Nous partons une foule d'exem- ples femblables rapportés par notre Auteur ; on y voit entre autres ce- lui d'une Dame de Ferrare âgée de 3} ans , laquelle toutes les fois qu'elle étoit groffe , fentoit une ivetfion fi grande pour les anguii- S SÇAVANS, les , qu'elle ne pouvoir même vois un de ces poilTons fans erre atta- quée de violens vonuirtmcns , & qui étant accouchée , non ièule- ment n'avoit plus de répugnance pour les anguilles, mais fe faifoic même un piailîr d'en manger ; ea forre que la feule averhon pour ce poiflon , étoit en elle un (igné in- faillible degrolTcfle. Dans le Chapitre premier M.' Gurifch a rapporté divers exemples de voracitcz cxtiaordinaires , il en rapporte dans le quatrième de tout oppofés à ceux-là , il s'y agit d'ab-. ftinences excellivcs de toutes for- tes d'alimens. Il cite là - dcffus divers exemples tiiés de l'Hi- ftoire Sacrée & de l'Hilloire Pro- fane. Parmi ces derniers , on voit nombre de perfonnes de tout âge &c de tout fexe, paffer les unes trois ans , les autres cinq , les autres dix fans boire ni manger. La plupart de ces perfonnes étoient pâles, fans force &c extrêmement maigres,' Mais notre Auteur en cite aufli quelques-unes, quinonobflant des abftinences fi longues , ne lailToient pas de fe bien porter , d'aller & de venir. Se d'avoir de l'embonpoint, il rapporte fur ce fujet , l'exemple d'une jeune fille dont fait mention Guillaume - Fabrice Hildan , dans fcs Obfcrvations Chirurgiques. Cent. 2. Obferv. 40. & dont il par- le en ces termes. » On amena à » Cologne ep 1595. une fille de 14 » ans , que fes parens atteftoicnc >j n'avoir ni bu ni mangé depuis 4 » ans , ce qu'ils confirmoient par i>des certificats authentiques, &c n dignes J A N V I ^M<3ignes de foi. Je voulus voit .î> cette fille : elle avoit un vifage » rrifte & méhncholique , toure »rhabitude du cor['>s allez charnue, » à l'exception du ventre qui ctoit » très - déprimé ,& fembloit pla- » que contre l'épine du dos. Je tà- » tai le foye , la rate & les autres » vifccres ; ils me parurent durs & » comme chirreux : elle avoit , au s refte , une fi grande averfion a» pour tout ce qu'on lui prefentoit » à avaler , qu'une perfonne qui M rétoit venu voir par curiofitc , » lui ayant mis un peu de fucre j> dans la bouche , elle tomba fur M le champ en fyncope. Mais ce » qu'il y a de merveilleux , c'elt s> qu'elle alloit & venoit , loiioit » même avec d'autres filles de fon "âge, & danfoit avec elles. Elle i> avoit outre cela bonne couleur. II Elle parloit , refpiroit &c clevoit » fa voix fans aucune peine. Son npere £\' fa mcre interroges d'où w venoit une abftinence (1 extraor- n dinaire , répondoicnt à ceux qui » leur fjiloicnt cette qucftion, que M leur fille à l'âge de fix ans avoit « été attaquée d'une grande mala- » die , &: qu'en étant relevée , elle » perdit peu à peu & infenfible- » ment l'appctit, étant tantôt deux » jours , tantôt trois , & tantôt »> quatre fans le foucier déboire ni u de manger , que quelques années 55 enfuite lui ayant pris envie de »> boire un peu de lait récemment » tiré , elle tomba dans un fi grand J-- dégoût , qu'elle pa(Toit quclque- « fois fix ôc quelquefois fept jours ^ fans nourriture -, qu'enfin ayant » mené cette vie pendant quatre » mois , elle étoit venue dans l'k- E R , T 7 5 j. 5-7 )> tat où on la voyoit , n'ayant alors »ni btmi mangé depuis trois ans. Nous fuppvimons une infinité d'autres exemples curieux que les bornes d'un Extrait ne nous per- mettent pas de rapporter. Notre Auteur prend occalion dans ce Chapitre , de parler de divers ani- maux qui palTcnt un temsconfide- rable fans nourriture, tels que font les Loirs, les Marmottes , les Cro- codiles , les Ours , les Rats de montagnes i les Tortues, lesSer- pens , les Hirondelles , les TourtC' relies , les Grenouilles , les Ciga- les , les Mouches , les Lézards , les Versa foye , Ic^ Efcargots , &c. M. Guriich a foin fur toutes les matières qu'il traite , de citer les Auteurs qui en ont parlé , &: on peut dire qu'il le fait avec une grande exaditude. Il a omis eftjen- dant de citer fur celle dont il s'a- git dins ce quatrième Chapitre , le fçavant Licetus qui en a écrit (1 am- plement Se Cl doétement , dans fon Livre intitulé : t'ortKnii Liceti Ce- niis/ijîs Philofophi acA^ledicioiimPrO'- (efforts , nnnc in Patavino Lycco Phi- lofophiam docentis. De his jk- grain père , & Pierre Martin^ Qiiai des Augullins , Commentaire Litté- ral , Hijioricjue & Moral fur la Rè- gle de S. Benoit^ avec des remarques fur les diffcrens Ordres Religieux , qui fuiventla Régie de S. Benoîr. Par le R. p. Dom Auguflin Calmer^ Abbé deScnones. 1734. /«-4°. 2 vol. Les Oeuvres de Salvien Prêtre de M-trfeille , contenant fes Lettres & Traitez fur l'efprit d'intérêt, Se fur la Providence. Traduites en Fran- çois par le R. P de la Compa- gnie de Jefus. Chez J. B.Delefpine^ ïuë S.Jacques,! S. Paul. 1734. /«-i 2, Traité démonflratifde la Onudra- ture du Cercle , avec figures. Divifé en quatre Livres. Dédié au R o y , p.i.r M. 'BaJJelin , Profcrfcur Eme- rrre dans l'Univeriité de Paris. Chez BriaJJan , à la Science , ôc Hemy , vis-à-vis S. Yves , ruéS. Jacq^ues, 173^. /«-4-°, ^0 JOURNAL DE s SÇAVANS, Le même Briajfon a en vente les S. J icqiies. 4734. /'«- 1 z. 4. vol. Oeuvres de Théâtre de M. de Brueys. J73 5. en 5. vol. /«-12. Recueil général des Opéra ^ repre- fentés par l'Académie Rovalc de Mufique depuis fon crabliff.mcnc. Tom. XII. XIII. & XIV. Ch;-z J.B. Chriftophc BalUrd ^ ruii S. Jean de Bcauvais. Effuis fur les Honneurs & fur les Jlioniimens accordés aux lUuflres Sçiivans fendant la fuite desfiécles -, où l'on donne une légère idée de l'origine &: du progrès des Sciences & des Beaux Arts. Par M. Titan du Tillet. Chsz -Chaiihert ^ Libraire du Journal , la Veuve Pijfot , Quai de Conti , & Jean de Nully , au Palais. 1754. ;«i2. Code Adiittaire^ ou Compilation ■ des Ordonnances des Rois de Fran- ce , concernant les Gens de guerre. Par M. de Bricjnet , Chevalier de l'Ordre de S. Midiel , & l'un des premiers Commis de M. à'yJnger- villiers Secrétaire d'Etat de la guer- re. Chez J. B. Coignard fils , rue Fautes à corriger dans le Alois de Décembre dernier. Ph.gt-j<-)S.co\. i.lig. II. Sydeham , /;/! Sydcnham : Pag. 80Ï. col. i, iig. 1 5. après le même moment , lif. après le même tenis : Pag. 802» col. î.lig. 34. font ,/// font : Pag. 805. col. z. Iig. itf. des irritations de nerfs. Des fonges effrayans, Hf. des irritations de nerf", des fonges ef- frayans : Pag. ^06. col. i. îig. 17. Blahmore , lif. Bladcmore. Corrigez iamême faute , pag. 8oé, col. 1. Iig. i7.mêmepag. 80^. col. i. jig. 37, îe traduit , lif l'a traduit: Pag. 807. col. i. Iig. î. Qii'à , lif qu'à. Même pag. 807. col. I. Iig. 25. peut être d'autres pourront ils être aufli heu-; reux , /{/î peut-être d'autres feront ils aufli heureux : même pag. 807. col. 1. Iig. 59. donnent , /i/^ donne : Pag. Szj. coi i. Iig. 3. fans, lif; fous : Pag. 847. Poligraphi , ///. Polygraphr TABLE DES ARTICLES DU MOIS DE JANVIER 1733. H/j}oire Ecclejîafliij/ue , page 3 Nouvelle^ j? Traité de Cefar- Magatiis , 9 Fropojiiion d'une Mcfure de la Terre E'oge Hiftoricjue de la Chajfe ,13 jLt Ordonnances des Rois de France , 17 Traits du Chyle , Scc. iz 1/ Origine Anaenns de U Phyjïjue Nouvelles Litterairfs ^ j9 Fin de la Table. ^iDié: EcdefiAflit^uc , ou Inftruc- tions fur i: Propre du Tems, &: fur le Prop:c &:Jc Conm'un des Saints, avec une E>plication des Epîtres & des EvangiK-s qui fciifent dans le cours de l'Année EccJeiîallique, dans les Egiifes de l\ome & de Pa- ris. Tom. III. Chez Lottin^ rue fainÇ Jacques. 1734. in n. Injlruflions fuy Us Dimanches & les Fêtes en général , &jHr tontes les Fê- tes cjui fe célèbrent dans le cours de l'Annie Ouvrage utile à toutes les Familles Chrétiennes , fur-tout aux pcrfonnes qui font chargées de l'in- ftruiflion de la JeunelTe. Par M. P. C. Doifleur de Sorbonne. Chez Henry, ij^^.tn-iz. Calculs d'ufige , pour les Compta-^, hles , Tréjoriers , Marchands , Ban~ ^Kiers, Financiers & Officiers de }u- dicature. Nouvelle Edition , reviàë, corrigée & augmentée par l'Au- teur , le Sieur Maffon. Chez le mê-' me Henry. 1735. /«-8°. L E JOURNAL scavÀns, FOUR VANNE'E M. DCC. XXX T- FEVRIER. A P A R I S , Chez CHAUBERT, à l'entrée du Quay des Auguftins , du côté du Pont Saint Michel, à la Renommée ôc à la Prudence. M. DCC. XXXV^ ■ÎVMC AJ'FROBATION ET PRIVILEGE DU liOT. LE JOURN DES SCAVA FEVRIER M. DCC. XXXV. HISTOIRE ECCLESIASTIQUE , POVR SERFIR DE Continuation à ce Us de A'f. l'Ahbè Fleur y. Tome XX XIV. depuis l'an i ^6i.jiif~^n'cn 15^9. A Paris , chez Pierre- Jean Â'ianette ^ rue Saint Jacques , aux Colonnes d'Hercules. 1734. iit-i^". pp. 666. êci:i-iz. CE Volume contient l'Hiftoi- re des dernières années du Pontificat de Pie IV. Si des pre- mières années de celui de Pie V. ce qui eft renfermé en cinq Livres, pevrieTa en commençant par le foixante- fixiéme de toute l'Hilloirc Ec clefiaftique , tant de M. l'Abbé Fleury que de fon Contiiniarcur. Les Livics foixantc-fept ik foixari- 6^ JOURNAL DE te- huit contiennent ce qui s'eft ■parte au Concile de Trente depuis la vingt-quarriéme Seflion , jnfqu'à la clôcuie du Concile. L'Auteur y donne une traduiîlion des Dccrcts de CCS deux dernières Sellions.. Il y joint quelquefois des Obfervations fur ceux de ces Deere es concernans la difcipline qui n'ont point été reçus en France , &c fur ceux dont i'Obfervation a été prcf- crite même par des difpofi- tions des Ordonnances du Royau- me. On voit dans la fuite de ce Volume de quelle manière le Con- cile de Trente a été reçu dans plu- fîeurs Etats Catholiques , & les premières tentatives que l'on a fai- tes pour qu'ilKit reçu en France, même par rapport à la difcipline. Ce qu'il y a d'ailleurs de plus re- marquable dans ce Volume , par rapport à l'Italie , cft une par- tie de l'HJftoire de S. Charles Bor- lomée , les Décrets des deux pre- miers Conciles que ce faint Arche- vêque a fait tenir à Milan , &c l'é- tabliilemcnt des Prêtres de l'Ora- toire de Rome par S. Philippe de Néri. On y voit pour la France la continuation des troubles qu'y avoicnt excité ks Calviniftes , le grand procès de l'Univerfité contre les Jefuites , au fujet de l'Ecole que ces Percs avoicnt établie dans la Ville de Paris -, les mefures que . prit l'Univerfité de cette Ville pour exclure de fon Corps ceux qui croient fufpeds de Calvinif- mCj la Cenfure que fit la Faculté de Théologie en l'Univerfité de Pacis j de p lufieuis endroits as U. S SÇAVANS. traduction de la Bible par Renc- Benoift èc de quelques - unes des notes de ce Doiilcur qui accompa;- gnoient fa traduction. Par rapport aux Pays-Bas il y î deux obiets importans qui four- nidcnt une matière abondante pour les trois derniers Livres de ce Volume. Le premier de ces objets efl: celui des troubles qui s'élevc- rent dans ce Pays-là à l'occafion de la Religion , & aufqucls la récep- tion du Concile de Trente fervie de premier prétexte. Le fécond efl: l'affaire de Baïus & la Bulle qui condamna plufieurs Propofitions tirées des Ecrits de ce Dodcur. L'Hiftoirc des principaux d'en-3 tre les Antitrinitaircs , leurs Con- férences avec le's Catholiques , & ce que fit le Cardinal Commcn» don en qualité de Légat , font ce qu'il y a de plus remarquable dans ce Volume parrappori: à la Polo- gne. Le Cardinal Commendon fc diftingua aulli dans la Diette d'Aufbourg & dans l'affaire du Pa- pe PicV. avec l'Empereur Maxi- milien an fujet de Côme de Médi- cis Grand Duc de Tofcanne. L'Au- teur parle encore de h réception du Concile de Trente en Efpagne , & du commencement de la FLeforme des Carmes en ce Royaume due aux foins de Sainte Théréfe. A h fin de l'Hiftoire de chaque année l'Auteur donne une idée de la Vie des Cardinaux , des Auteurs Ecclt- fiâftiques , même des Ecrivains Hérétiques qui font mons dans le cours de l'année dont il fait l'Hi- ftoJJC Nous allons joindre quel- F E V R I E qucs traits paniculiers à l'idée gé- nérale de ce qui eft compris dans ce Volume^ Le Pape Pïc ÏV. avoit fait paioî- tre dans les Bulles beaucoup de zclc pour la Difcipliue EcclcfiaftiqucSc pour la Rétormation , fur -tout dans les Bulles par laquelle il revo- quoit toutes Icscxcmptions 5c tous les privilèges contraires auxdifpo- fîtions du Concile de Trente , & par celle dans laquelle il défendoit «l'employer la Brigue pour parve- nir aux Prélatures & au Cardina- lat , fous peine d'excommunica- tion , de privation des Bénéfices & même d'infamie perpétuelle. » Mais Pie IV. dit notre Auteuï ; 3> gâta ces apparences de zélé pour 3> la Réforme , par une ardeur en- 33 core plus grande pour l'élévation » de fa famille. Frédéric Borroméc ïjfilsdcfafœurétant mort en rj^j. * à la fleur de fon âge fans pofteri- j> té , & le Cardinal Borromée frère » de celui - ci s'étant retiré dans fon 5î Diocéfe de Milan après la con- y> clufion du Concile , il fit.venir » auprès de lui Annibal- Altemps » Marc Sittich deux autres de fes 5>neveux. Le premier fut fait Gou^ » verncur de la Sainte Eglife Ro- « maine , & il donna au fécond le j» foin & l'adminiftration des affai- 3» res. Il deftina de plus à Altemps 3> une riche dot , & pour femme la wfœur du Cardinal Borromée , 3» quoique fa proche parente. Pour 3t avoir de quoi remplir ces projets, » on le vif tout occupé du foin d'a- » mafler du bien , charger Rome ^ §5 ;out ce ^uj étoit fous fa 4o': " mination , d'impôts cxorbitans » & fufcicer bien des affaires à plu- '^ fleurs Gentilshommes , qui fc »ï virent opprimés par les procès n qu'iyccnouvella. Les Bagno^ les Vitelli , les Cornia, les Bcntivo- glio, éprouvèrent te relTentiincnt de ce Pape. II vendoit les Charges & on a prétendu qu'il avoit fait Cardinal Alexandre Sforce pour vendre bien chèrement la Charf^e de Clerc de la Chambre,dont Sfor- ce étoit pourvii lors de fa promo^ eion au Cardinalaf. Pie IV. étant dangereufement inaladc , S. Charles Borromée fe rendit à Rome , il annonça à fon oncle que fa fin approchoif, 3c il lui dit en lui prefintant le Cruci- fix : » Très-faint Père , vous devez » prefentemenctournef toutes vos » penfées vers le Ciel , Se met- » tre toutes vos efperances dans M celui qui eft notre vie & no- » tre refurredion , lui qui eft notre » Avocat&le Sacrifice offert pour » nos péchez -, il ne rejette aucun » de ceux qui touchés fincerement » de leurs fautes,mettent toute leur' «confiance en lui : il eft doux , M patient , plein de mifericorde , il » ne rejette point un cœur contriê » & humulié. Ce fut S. Charles qui adminiftra le Saint Viatique à. Pie IV. & il ne le quitta point jufqu'au .moment de fa moft, il expira eu prononçant ces paroles du Canti- que du Vieillard Simeon : C'efi maintenant , Seigneur^ ^ue vous laif. fez. mourir en paix votre Strviteur ' fuivant votre farok. Ce ^ue l'Auteuï difrde Sixte ç}g 66 JOURNAL D Sienne mort en 15^9. dans fa qua- rante neuvi'^me année nous tourni- ra un fécond exemple, li étoit né de parcHS Juifs , &: il avoit lui-mê- me vécu quelque tcms dans le Ju- daifme. Le Pape Pie V. n'éRnt en- core que Général de l'Ordre de Saint Dominique , l'avoitinftruit dans la Religion Chrétienne , l'a- voit fait baptifer & l'avoit reçu dans fon Ordre , dont il lui avoit lui-même donné l'habit.ll y palTalc sefte de fes jours, occupé à la Prédi- cation , Si à la compofition de plu- Ceurs Ouvrages ; comme il joi- gnoit une folide pieté à une pro- fonde érudition èc à une grande connoiffance des Langues Hébraï- que, Gréque & Latine , le Pape Pie V. conferva toujours pour lui une grande amitié. Il n'y a que deux Ouvrages de Sixte de Sienne qui foient imprimés , le premier qui eft ie meilleur & qui l'a fait eftimcr non feulement par les Ca- tholiques , mais encore par les Hé- rétiques , eft fa Bibliothèque Sa- crée , où il fait la critique des Li- vres Saints , & où il donne les moyens de les expliquer. Cet Ou- vrage fut imprimé pour la premie- ïe fois en ijéô^. la meilleure Edi- tion eft celle de Cologne de l'année 157^. L'Auteur traite dans le fé- cond Ouvrage imprimé de l'art d'interpréter les Saintes Ecritures. On a encore confervé en Manuf- crits plufieurs autres Ouvrages de Sixte de Sienne , un Traité fur l'u- fage des concordances de la Bible , des Queftions Aftronomiques , Géographiques, & Phylîqucs fui ES SÇAVANS, plufieurs endroits de l'Ecriture J des Sermons, des Homélies, des Queftions fur plulieurs partages de l'Ecriture , & en particulier fut l'Epître aux Romains. Quelque eftime que notre Au- teur ait fait paroître pour la Bi- bliothèque Sacrée de Sixte de Sien- ne , il n'a pu s'empêcher de remar- quer qu'il y a bien des fautes dans cet Ouvrage , & d'obferver , d'a- près M. Dupin , qu'il feroit à fou-; haiter que l'Auteur eût traité cer- taines matières plus à fond , qu'il eût paftc fur d'autres plus légère- ment. Se qu'il en eût omis qui ne font d'aucune utilité , ou qui ne viennent point à fon fujet. L'Hiftoire de la Vie de Charles Dumoulin fait partie de i'Hiftoirc de l'Eglife de fon tcms , à caufe des fuites qu'ont eu &: du bruit qu'onç fait en France & dans les Pays voi- fins fon Commentaire fur l'Edit des petites dates , fcs Confulta- tions fur le Concile de Trcnte,con- tre les Jefuites , &: pour la Noblef- fe de Picardie fur la nomination de Pierre de Crèquy à l'Evcché d'A- miens , &c pluheurs autres Ouvra- ges fur les Matières Ecclefiafti- • ques. Notre Auteur a eu occafion de parler de ce Jurifconfulte eij plufieurs endroits de ce Volume , & particulièrement fous l'année ï 5 <6. qui eft l'année de fa mort. Ij y donne un abrégé de la Vie Je Du- moulin , 6i il fait connoître les conteftations qu'il avoit eues avec les Calviniftcs, dont il avoit quitte le parti, après a vroir été engagé av^'ç eux pendant quelques années. No; F E V R I tre Auteur afTure , fur la foi des Ecrivains les plus dcfinfercfTés, que Dumoulin cft mort non feulement dans la Communion de l'Eglife Catholique , mais encore dans des fentimens très orthodoxes, & après avoir reçu les Sacremens de l'Egli- fe avec beaucoup de pieté en pre- fence du Codeur Claude Dcpenfe, de René Bonel Principal du Collè- ge du Plellis 5 & de François le CourtCuré de laParoifle dcS. André des Arts qui l'aflîfterent à la mort. Notre Auteur croit encore que Dumoulin , avant fa dernière ma- ladie , pendant laquelle il reconnut fcs égaiemens , n'avoit été ni bon Cathohque, ni zélé Calvinifte , ni ïigide Proteftant. On pourroit ajouter à ce que dit l'Auteur , que Dumoulin avant fa dernière mala- die s'étoit fait un Syftéme particu- lier fur pluficurs points de dogme , pour lequel heureufement , il n'a point eu de Sénateurs. Barcélémi de Las-Cafas mourut la même année que Dumoulin. Il étoit né à Séville. Ayant fait un premier voyage aux Indes avec fon père , il revint en Efpagne , y con- tinua fes études , & s'étant engagé dans l'état Ecclefiaftique, il repaifa en Amérique , où il fut ordonné Prêtre en 1 5 1 o. il fe livra alors tout entier aux Millions. Mais ce qui lui faifoit le plus de peine dans l'exer- cice de fes fondiions \ c'eft qu'il .voyoit que les Gouverneurs & ceux des Efpagnols à qui ils confioicnt fautorité fe fcrvoient du prétexte de la Religion pour fatisfaire leur avarice , & qii'oQ cmployoit pour E R ; I 7 î y. Reine , du Mont S. Michel, & qui donnèrent à quelques gens l'idée de former entré eux une Société pour reprefenter une efpece de Poème en Dialogue , fous le titre de A'fyjïcre de la Pajfwrt; ce qui fut autorifé par des Lettres-Paten- tes de Charles VI. Ces Confrcres de la Ptijfion '[ c'cfl: le titre qu'ils pre- noient] drelTcrent leur premier Théâtre dans l'Hôpital de la Trini- nité , où ils donnèrent en fpedlacle pendant du tems diffcrens Myfte- ires', mais d'où ik furent obligés de fe tranfporter à l'Hôtel de Flan- dres , ( fitué pour lors vers la rue Cocjmlliere ) puis à celui de Bourgo- gne , qu'ils achetèrent , & qu'cn- fuite , pour obéir à un ordre du Parlement qui teuf défcndoit de reprefenter à l'avenir aucun fujet tiré de l'Ecriture Sainte , ils ioiic- rent à une troupe de Comédiens , forméeà cette occalîon. Après cela nos Auteurs vienne! t aii;!: Pièces de ceis premiers Théâ- tres -, deiqiiblfci: ils nous donnent "de^ extraits circonllanciés & ac^ compagnes de Notes , dans la vue "de nous faire-cbnnoître plus parti- culièrement les Auteurs &• les Ac- teurs de CCS Po'imes, de nous épar- gner en même rer»s l'ennui infépa- rable de la letflure des originaux ., & de nous inftruire de plulîeurs faits qui font liés à l'Hiftoire dont il s'agit. Ces Pièces étoientles My- flercs de la Conception , Paiîîon & R^fiirreélion de N. S., partages en fix Poèmes , dont les reprefrnt.\- tions rempliffoient fix journées, & dont les extraits occupent la plus K 70 JOURNAL D grande partie de ce Volume. On ne LiilTe pas , à force de patjence ( di- fenr nos Auteurs ) de trouver 'daiis ces Poèmes Dramatiques ^ des fi- tuations ménagées avec alTcz d'art, Si. des morceaux de ve;rlîfication très - poétiques. Ils s'appliquent cnfuite à juftihcr la iongueur des extraits qu'ils en donnent ici ; èc cette juftihcation eft fondée fur la curiofité des uns qu'il falloitfatis- faire en leur espofant un plan exaét de ces Pièces dont à peine connoif- fent-ils les titres ; & fur la parcltc des autres , q^u'il falloir foulager , tn leur facilitant une Icdrure qu'ils négligent ou n'ofent entrepren- dre , quoiqu'ils poflTedent actuel- lement quelques - uns de ces My- fieres. Nos Auteurs profitent de ï'àçr eafion favorable qui fe prefente ici de venger ces Poèmes du mé,pns où ils font tombés depuis trcs-long- Cems , moins par leur propre défec- tuofité ( dit-on ) quepat l'ignoran,- ce ou la malice de quelques parti- culiers, qui leur ont fuppolé fauf- fement quelques paflages très- pro- pres à fcandalifer les ilqiples & à prévenir défavantsgeufcment les gens du monde. Tel eft le paffage rapporté par DaJJhncy , dans fes uivanturei , & allégué par Bayle dans l'article de cet Auteur. Il eft qneftion dans ce palTage , de J. C. qui vient appeller S. Matthieu à L'Apoftolat , &c qui le fait en ces eermes. D I E o. Matthieu. ES SÇAVÂNS, Matthieu; Plait-d j Dieu, Die u^. Pifeas ton bâton & ton épieu , . -Et me fuis en Galilée. Matthieu. Fr:ndrai j; aujfi mon Epée > Ce trâit^& quelques autres encore plus mépri'fables ( continuent nos Auteurs) & qu'ils délient de trou- ver dans aucune Pièce de Théâtre ^ foit ancienne ou moderne, font tel- lement répandus , que l'on ne peut allez en taire voir l'impertinence Sc la fauiTcté. Ils avouent que ces Pie- ces ont réellement affcz, de ridicule par elles-mêmes, fans qu'on leur en prête de purement imaginaire. Mais fans vouloir excufer toutes les inep- ties qui s'y, rencontrentinosAuteurs aiïurcnt qu'il ne laifle pas de s'y trouver des rriorceâux qui ne foric pas fans mérite. Ils prétendent de plus,que fi les LecSeurs fe plaçoient dans le point de vue necellairc pour juger équitablemcHtde ces Pièces: la plupart des défauts qui nous bief fcnt aujourd'hui _, difparoîtroienr. Or ce point de vûë favorable dont on parle , feroit le (léclc où ces Speàaclcs prirent naiflance , c'eft- àdire un fiécle où regnoient l'igno- rance , la barbarie , &: où la France étoit déchirée par des guerres civi- les ou étrangères. Quoiqu'il en foir^' les extraits de ces Poèmes Dramati- q^ueSj comme nous l'avons déjadit. F E V R I terminent le premier Volume de cet Ouvrage. ' Le fécond débutera par l'Hiftoi- re des Clercs de la Bazochc , depuis le tems où ils .commencèrent à joiicr des Pièces de Théâtre , jufqu'à celui où ces Sped:acles celTercnt : & l'extrait d'une Moralité joint à une Farce complectc , achèvera de don- ner une jufte idée de cette Société. A cet article fuccedera celui des Enfans fans fouci , non moins cu- rieux que le précèdent , & fuivi d'une de leurs Pièces imprimées en entier, & pour laquelle nos Au- teurs demandent quelque indul- gence , accompagtjpe de beaucoup d'attention. Paroîtront après cela tous les faits Hiftoriques &: Anec- dotes qu'on a pu rallembler tou- chant les Auteurs Dramatiques & les Adeurs depuis 14ÏZ. jufqu'à 1547. & dans cet article les Notes fupplécront au Texte. Enfin des extraits fort concis, mais en même tems rrcs-inftrudifs rempliront le refte du Volume. Ces extraits dif- pofés chronologiquement feront rangés fous différentes chlfes, dont la première comprendra les Myfrc- rcs de l'Ancien & du Nouveau Te- llament, quelques autres d'un gen- re différent, fuivis de ceux de Saints & de Saintes : la féconde , les Moralitcz & les Farces : la troi- fiéme , les Jeux de Pois-pilés ou Sottifes. Dans les Volumes fuivans, nos Auteurs conduiront leur Hi- ftoirc Théâtrale de France depuis 1^47. jufqu'à 1700. Ce que nos Auteurs nous don- nent d'abord fur l'origine du Théâ- tre François , fur les Trouverres ou Troubadours & fur leurs différentes Poëfies , fur les Conteurs, Chan- teurs , Jongleurs , Joueurs & Ba- teleurs •, fur les Vies de douze Poè- tes Provençaux les plus célèbres dans le genre théâtral -, fur cinq Tragédies Satiriques de l'un d'en- tr'eux nommé Parafais , compo- fées contre Jeanne I. Reine de Naples & de Sicile , & Comteffe de Provence ; fur la Bazoche ; fur les premières reprefcntations en Mufique ; fur l'établiffement des premiers Théâtres à Paris , fur leur forme , fur leurs décorations , &c. ils l'ont recueilli avec grand foin &C grande exadlitude , de Noftrada- mus , de Faucher, de la Croix du Maine , de du Verdier-Vauprivas , de Brantôme , de Belle-Forcll , de Mézcray , de Mervezin , du Trai- té de la Police, de l'Hiftoire de la Ville de Paris, &c. Entrons dans quelque détail fur quelques-uns de ces articles. L'origine de la Comédie en France ne remonte pas plus hnut que le commencement du xii. (ié- clc , difcnt nos Auteurs. Ils la di- ftinguent des Jeux obfcénes que donnoient fous la première Race de nos Rois 'les Hiftrions , qui lu- rent fupprimés par une Ordonnan- ce de Charlemagne : & Us ne ju- gent pas non plus devoir la con- fondre avec la fête des faux , laquel- le fous les Rois de la féconde Race s'étoit glifféc jufques dans les Egli- fes ; ce qui fubfiftoit encore l'an 1444. Vers la fin du xi. fiécle parurent Ki; 72 JOUR.NAL D les Pûëtes Provençaux ou Trouva- dnurs , qui hxercnt la rime où elle ii trouve aujourd'hui, & q.iit com- pofer'nt ciiverfcs fortes de Pocfies, donc les trois efpeces nomméesi)'^- Virues ,Tenfo»s ^ & Comédies Qntteut dins le fujer t|ue traitent ici nos Au- teurs.Ces Poetesjdans. \e\icsS,yrven- tfs, raclés de louanges & de fatires, célébroieDt • les vidroires" de nos Princes Croifés : dans leurs 7Vff/ô«x ils propofoienn. des quellions fines & délicates fur Tamour & fur les Artiants,.&: nos Auteurs cjrrappor- rent ici quelques unes. Gela faifoit naître des niiputesingcnieufes ap- pelées Jenv mi partis & jugées par- une Société djc Dames nommée / public. Si l'on s'en rapporte à la Croix di* Mayne , ce fut Jcan- Michel, Angevin, qui écrivit en vers François le Pocmc Dramati- que de la PalTion de N. S. joiié en la Ville d'Angers , en 148e. Mais [ remarquent nos Auteurs ] il n'en fat tout au plus que le revifcur , puifqtie dès l'an 1402. ce Poëme étoit connu , & occafionna le pre- mier établilTement à Paris des Con- frères de la Paflion. Le but de ce Spedacle étoit de rappeller au peu- ple ignorant, tel qu'il étoit alors , le fouvenir desMyfteres de la Re- ligion; mais ce projet excellent pai lui-même , fut mal féconde par ceux qui fe chargèrent de l'exécu- tion. Ces Poètes fuivoicnt mot à mot les Evangiles, dont ils dialo- guoient lesévenemens , paraphra- fant le Texte, avec une fimplicité fî naïve , qu'elle dégénéroit très- fouvent en groilîcreté. Les Dia- bles, dans ces Poèmes , rendent leurs hommages à Lucifer en vo- miiïant contre lui les injures les plus atroces; 5c Lucifer leur parle fur le même ton. Le Pocte a jugé à propos de faire Hcrode Payen , & Cirinus Gouverneur de Judée, Ma- hométan. Malgré les défauts énor- mes qui regnoient dans ces Pièces , elles turent très-applaudies , grâce à l'ignorance & au mauvais goût du fiécle , & on les regarda corn-; pietrès-refpedables. LIaemplairc de cet Ouvrage R , ï 7 3 j". 7Î dont fe font fcrvis nos Auteurs pour compofcr leurs extraits,, & qui cft un des plus complets qui fc puiffe trouver , eft un petit in folio^ avec des figures en bois, contenant 351 feuillets , c'eft à dire 704 pa-, gcs à deux colonnes chargées cha- cune de^S vers. Voici le titre de cet Exemplaire." Le A'!y(iere de la Conception CT NO' livité de la glorieufe Vierge Marie ' avec le mariage d'icelle , la Nativité PaJJion , RcfiirreBion & Afcenfion de Notre Sauveur & Rédempteur Jcfns-Chrifl , jouée à Paris , l'an d« grâce mil cinq cens & fept , imprimée audili lieu , pour Jehan Petit ^ Geof- froy de Marnef ^ & Michel le JS!oi,r^ Libraires ^'trei^ en l' Univer/iié de Paris , demeurants en la garant rué S.'jactjucs..£.x. à la fin de ce même Livre , on lit ceci. Cy fine le Myfle-^^ re de la RefitrreBion de Nojire Set* gneur^efus-Chrifl ^ par perfonnages^ nouvellemint imprimé à Paris , pa^ jilain , Lotr'tan , & Denys Janot ' demeurans en la rué Nojîre-Dame k l'Enfeigne de V Ecu de France, Pour donner maintenant une idée plus jufte de k Poëfie qui compofe cette Pièce Dramatique , nous tranfcrirons ici quelques mor- ceaux de ce genre , tels que nous les offrent les extraits de nos Au- teurs : ôi nous prendrons ceux qui fe ptefenteront les premiers. De ce nombre eft le Monologue de Luci- fer, qui à l'occafion du Myltere de la Conception de la Vierge qui va s'accomplir par le mariage d'Anne & de Joachin ; appelle à fon fe- cours fes fuppôts en ces termes » 74 JOURNAC DES SÇAVANS; Diables d'Enfer, horribles & cornus. Gros & menus, ors regards bajtli^ues. Infâmes chiens , quefles-vous deve- nus î Saillez. tous nuds , vieiilx , jeunes & chanus ^ Bofîis , tortus , ferpens diaboliques , Afpidiques , rebelles , tyranniques , p^os pratiques de jour en jour perdez. Traîtres , larrons d'Enfer , fartez. , vuidez, Pitrles-tii point , Sathan accufateur , Perfecuteur de tout humain lignaige ? Toi Bélial , notre grand Procureur, F aulx rapineur , infâme détraBeur , Et inventeur de larcin & ^lUaige ? Diables d^ Enfer , a vous je me com- ^lains , &c. Les vers que fe difegt Anne Se Joachin , lorfqu'ils fe rencontrent à la porte dorée du Temple , font d'un ftile allez convenable à une pareille entrevue : les voici. Anne. joachin , mon amy très-doulx fionneur vous fais & révérance. Joachin. y4nne ma mye , voflre prefence Jlievlaiji très-fort , approchez, vous. Anne. Hélas ! que j'ai eu de courroux Et de foucy pour votre abfence. Joachin , mon amy très-doulx. Honneur vous fais & révérance, Joachin, Dieu a huy befongné fur nous , Et monflré fa grand préférance ; Cueur fioul ne fcet que lejun penje^ fleurs fouhaits ri ont les hommes tous. Anne, jfoachin , mon ami trèsrdoulx^ icc', Joachin. .Anne ma mye , votre prefence , &c.' Le Poète fait dire ces vers - ci à Hérode , au fujet des Juifs , qu'on lui confeille de traiter avec ri-. gueur : Je les tiendrai comme en hoflaige ; Subjets , captifs , maugré leurs dens t Et en dépit de leur vifaige , J'auray deffus eulx avantaige ^ Qu.elque lien qu'ils foient réfidens. D'un autre côté Achin & Meî- chy, domeftiques d'Anne , s'entre- tiennent de la grolTcde de leur maîtrelTe , & fe réjouillent par avance du plailir qu'ils auront pour lors : les brebis ( difcnt-ils ) iront paître aux rneiUeurs hcibaç ges : ce n'efl: pas tout ^ M E L C H Y. Les Paftourelles chanteront. Achin. PajioHreaux jetteront œillades. M E L c H Y. Les Nymphes les efcouteront , tt les Driades dan feront , uivec les gentes Oréades. Achin. Pan viendra faire fes gambades , Revenant des Champs Elifées. Orphcus fera fes fomiades , Lors Mercure dira ballades , Et chanfons bi-n aiitorifées, M E L c H Y. Bergères feront opprejfées Soudainement fous lespa(is,&çe. F E V R I En voilà fuffifnmmcnt pour pi- qner la curiofué des Ledcurs qui feront fcnfibks à cette forte de Pocfîc , tk pour les engager à re- courir au Livre - même , où les nombreux extraits de nos Auteurs leur fournironE en ce genre la plus abondante moilTon. On doit cer- tainement tenir grand compte à ceux-ci de leurparience & de leur zélé à défricher des recoins de Titre- rature Françoife Ci peu connus & fi incultes. '^NATOMIE CniRVRGlCAtE , OU DESCRIPTION exaRe des parties du corps htimmin , avec des Reman^ues utiles aux Chirur- giens dans la Pratique de leur Art ^ publiées ci - devant par M. Palfin > Chirurgien Juré, Ânatomifte ^ & LeUeur en Chirurgie à G and. Nouvelle Edition , revue , corrigée & augmentée ^ accompagnée de Notes dans le premier Volume & refondue dans le fécond. Par 5. B o u d o n ^ DoSleitr en Médecine. On y a joint les Obfervations Anatomiques & Chirurgicales) de M. Ruifch , & celles de M. Briffe au , avec pi ufieur s figures en taille- douce. A Paris , chez Guillaume Cavelier ^ rue S. Jacques , au Lys d'orJ 1734. deux Volumes /h-8°. Tom. L pp. 457. Tom. IL pp, 403. à quoi il faut ajouter 17^ pages pour les Obfervations Anatomiques de M,' Ruifch j & 3 ^ pour celles de M. Briffeau. 'Anafomie Chirurgicale de M. / Paliîn dont voici une féconde tdition Françoife , fut publiée pour la première fois , en Flamand a Leide en 1718, par l'Auteur, & depuis traduite en François par le même, en 1726. Le débit qu'a eu la première Edition Françoife , a engagé le Libraire à réimprimer cette TraduÛion ; mais comme la t)remierc étoit fort inexa<île à caufe qu'elle n'avoit pii être imprimée fous les yeux de l'Auteur , il étoit d'une grande confequence qu'un Ouvrage fi utile fiJt corrigé avec cxaâiitudc. M. Boudon Dodeur en Médecine , qui s'eft chargé de la nouvelle Edition que voici , ne s'cft pas contenté de la rendre cor- rede , il l'a mife dans un meilleur goût , & dans un oïdre plus convc^ îiable, il y a même ajouté des Notes pour éclaircir ou pour redifier di- vers endroits qui avoient befoin de ce fccours. C'efl de quoi il s'cft acquitté dans le premier Volume , qui renferme le Traité des parties fimilaires , & toute la Splanchno- logie. Ce Volume , ainfi que le Traité des Os qui le fuit a été impri- mé dans le courant de l'annéei73 1. M. Boudon avertit , 1®. qu'il n'a pas cru devoir dans ce pre- mier Tome , rien retrancher de ce qui pouvoir pafler pour arbitraire ^ z°. Qu'il s'eft contenté de corriges ce qui étoit vifiblcmcnt défec- tueux 3 de mettre quelques notes au bas des pages , comme nous ve- nons de le remarquer , de faire quelques légers changemens dans ie Texte & quelques petites aug-. l6 JOURNALDE mentations qui lui ont paru à pro- pos : 3°. De redifier la didlionen divers endroits , avec l'orthogra- phe des termes de l'Art, &: celle des noms propreSjlefquelles étoient ex- trêmement fautives. Voilà pour ce qui regarde le premier Tome. A l'égard du fécond , qui com- prend l'Oflcologie , la Myologie , l'Angeiologie &r la Neurologie, M. Boudon a joint au Traité des Os, les additions de la nouvelle Ofteo- Jogie de l'Auteur , laquelle a été imprimée féparément en 1731» in-\i. à Paris; ces additions aug- mentent le Livre d'environ un tiers -, l'Editeur y a corrigé plu- fïcurs fautes , tant pour le fond que pour le langage , &: a eu foin d'accompagner tout cela de divcr- fes remarques. Au regard des autres parties contenues dans le fécond Tome , Icfquelles avoient été prifes pref- que toutes de l'Anatomie de Ver- rheyen , M. Boudon dit les avoir trouvées en fi mauvais ordre qu'il n'a pCi fe difpenfer de le? refondre entièrement. 11 avertit qu'il a puifé pour cela dans les Anatomiftes les plus recens & les plus exafts , & il dit qu'il donne cet avis afin qu'on n'attribue pas à M- Palfin , ce qui n'eft point à lui, n'y ayant de cet Auteur dans la fixiéme partie, oià il eft traité des mufcles , & dans k feptiém.e où il eft parlé des artères, des veines & des nerfs , qu'un petit pombre de Remarques Chirurgica- les , que l'Editeur a encore pertec- «icnnées & augmentées en divers endroits. 5 SÇAVANS; Il nous refte à dire un mot def planches du Livre. Elles font les mcmcs que dans l'Edition précé- dente. M. Palhn les a prefque tou- tes tirées deVcrrhcyen. L'Editeur a ajouté dans cette nouvelle Edition, huit planches concernant les Os , 6 il déclare les avoir tirées de U nouvelle Ofteologie de M. Palfin, Il a fait graver en grand , avec beaucoup d*exaâ:itude , fur l'origi- nal de M. VieulTens , & fur celui de Verrheien , la planche 48 con- cernant les nerfs, SC qui dans la première Edition étoit fort mal gravée; il a corrigé auffi fur l'origi- nal latin , l'explication Françoifedc cette planche. Il a corrigé tout de même fur les originaux non feule- ment l'explication de chacune des autres planches en particulier, mais encore les planches mémcô qui avoient été fort négligemment gra- vées. M. Boudon fait ici d'utiles Ob- fervations fur les figures Anatomi- ques en général, c'eft i". Qu'on en trouve très- peu de parfaites, 2°. Qii'il faut un certain goût pour en donner de bien exadres : 5°. Qiie les planches de Refile &: celles à.'Euflachc^ quoique fort anciennes, font néanmoins les meilleures de la plupart de celles qui ont paru jufqu'à prefent , du moins pour ce qui concerne les Os , les mufcles , & la fituation des vifceres : 4°. Qii'on trouve encore de bonnes fi- gures originales , de différentes parties du corps humain , dans Ici Ouvrages de pluficurs autres célè- bres Anatomiftes ^ tels que Caffe- riuf F E V R I tius , Graaf ^ Willis , Lo'orer, Du- verney , Ruifcli , VieulTens , Rid- lev , Valalva , Drake , Clicfeldcn, Morgagni , Bianclii , Santorius , Heifter , Se quelques autres : 5°. Qu'il y en a auffi d'excellentes dans les Mémoires de l'Académie Roya- le des Sciences de Paris , dans les tranfadions Philofophiques de la Société Royale de Londres , dans les Ephemerides des curieux de la Nature imprimées en Allemagne : 6^. Que les petites planches font en général de peu d'utilité , à caufe de la peine qu'il y a d'y reprefenter bien diftindlement les parties : 7'. Que plufieurs Auteurs ont publié , fous le nom de figures tirées de l'homme , des reprefentations pri- fes des animaux : 8°. Qiie la diffi- culté de donner des figures qui foient de la dernière exaditude eft caufe que de très-habiles Anatomi- ftes ont mieux aimé publier leurs Ouvrages fans aucunes planches , comme l'a fait Riolan dans fon Anthropographie : 9°. Qu'il feroit donc àfouhaitet que quelque Ana- tomifte du premier ordre , voulût donner un Recueil de figures origi- nales, tirées d'après nature, fous fes yeux , & d'une grandeur convc- nabie,fur toutes les parties du corps humain , avec leurs explications. Que c'eft ce que fe propofe l'illu- ftre M. Winflow , ainfi qu'on ic voit dans l'AvertilTement de for» Expofition Anatomique ■, Qiie fi ce grand Anatomifte exécute fon deffein , on aura alors ce qu'on peut attendre de plus excellent en îiiit de planches Anatomiqucs. Février. E R ; ï 7 5 j; 77 M. Boudon vient de recomman- der les figures qu'ont données , CalTerius, Graaf, Willis , Lowcr, Duverney,Ruifch & les autres qu'il a nommés à cette occafion , mais il n'en demeure pas là , il indique les Ouvrages où l'on trouve ces figu- res ; il en marque les différentes Editions, & donne là- deHus une HiftoireLitrerairetrcs-cxade, nous y renvoyons les Ledeurs, c'eft pag, XI. xii. xm. de rAvertilfement. On trouve à chacun des deux Volumes de cette nouvelle Edi-. tion , quatre différentes Tables,' fçavoir au commencement , une Table des Chapitres; & à la fin, une Table Alphabétique des matiè- res , laquelle e(i fort ample , une autre des Auteurs cités , & une quatrième des explications des planches , félon leur rang. Ces quatre Tables faciliteront confidc- rablement l'ufage de cette Anato- mie; mais la Table des matières principalement doit être d'une grande utilité , parce qu'on y trou- ve , fous le nom de chaque organe une récapitulation des différentes parties qui dépendent de cet otr gane. Il nous reftc à parler des obfer-" varions Anatomiqucs & Chirurgi- cales de feu M. Ruifch , que M. Boudon qui les a traduites du la- tin , a miles à la fin du fécond Vo- lume , Si de celles d^' M. BrilTeau , les premières font au nombre de cent , & ont beaucoup de rapport avec cette Anatomic , où M. Pal- fin les cite fouvcnt. Elles furent publiées en latin en 1^91. pai 7§ JOURNAL D M. Ruifch. Leur nombre mon- teroit plus haut , dir ce grand hom- me par la bouche de fon Traduc- teur : » Si certaines perfonnes ex- >■> citées par la déinangcaifon d'écri- 3> re , & dépourvues de matières il fufiîfanres , ne m'avoient enlevé j> furtivement pluheurs chofcs cu- » rieufes que j'avois remarquées, » & dont j'avoiS fait Texpcrience ^ X & ne Jes avoient déjà publiées à 30 mon infçû , 6c même fans m'en =» faire honneur. 3> Il ne fera pas difficile , pour- » fuit M. Ruifch , à tous ceux qui 3> connoiflent jufqu'oii va la vanité » de la plupart des hommes, &c 3> combien eft grande l'audice de » certains efpriîs ridiculement en- 3' fiés d'eux-mêmes , il ne leur fera 3> pas difficile de deviner fi l'on m'a 39 dérobé mes Ecrits par lacharita- 3 ble intention de me décharger du » foin de les faire imprimer moi- z) même , ou par l'envie de fe parer a» des plumes d'autrui. Je confens » volontiers qu'on fe repaiffe d'une n gloire ufurpée avec tantd'injufti-^ ^^ce , & par des moyens fi bas -, » comme elle eft née à la faveur »des ténèbres ,. les fruits qu'elle 3> produira mourront auili dans 30 t'obfcurité. Pour moi le me con- » tente d'offrir aux Sçavans & aux s> honnêtes gens , ce que j'ai pu ra- i> maffer de ce qui m'ell refté. On voir dans ces paroles de M. Ruifch, une image bien naturelle, de certains plagiaires de nos jours, gens ignares & non lettrés , qui après avoir affifté aux fçavantcs Le- çons des plus habiles Anatomiites ^ ES SÇAVANS; publient des Livres où ils fe parene des plumes qu'ils ont en levées. Il eft. permis & fouvent même très à pro- pos , foit en Chirurgie , foit en Anaromie , foit en Chymie & en quelque autre forte de Science que ce foit , d'emprunter ce que ce fça- vans Hommes ont dit , mais de le faire fans leur rendre l'honneur qui^ leur eft dû , c'efl une conduite di- gne de tout mépris. Les Obfervations de M. Ruifch^ defquclles il s'agit ici , font toutes plus curieufes & plus importantes^ les unes que les autres. On y voitr entre autres, l'Hiftoire d'une opéra- tion faite fur une femme de 8o ans^ à laquelle l'on tira quarante-deux pierres de la veffie. On y voit l'Hi- ftoire d'une fuperfcEtation ; celle d'une épingle avalée , & fortie en- fuite par un abfcès furvenu à l'ai- ne : celle d'une contufion confide- rable , arrivée à k tête , &: heureu- fement guérie , au moyen feule- ment d'une fomentation fans qu'on fût obligé de recourir à l'incifion ^_ celle d'un rétréciffement prodi- gieux de l'eftomac .Si des inteftins j, caufé par une longue abftinence , celle d'une faim canine , excitée par une grande relaxation du py- lore , &c. Quant aux Obfervations de M.'- Briffeau célèbre ProfelTeur d'Ana-r tomie & de Botanique à Douay ^ elles furent imprimées en iji6. pour la première fois à Douay- mcme. Comme cette Edition tft devenue très rare, & qu'elle étoic pleine de fautes d'imprcifion , M. BrilTeau s'eft donné auiourd'hui i& F E V R I foin de la revoir , & c'eft cette Eiiition ainfi corrigée que l'on pu- blic ici. Les Obfervations dont il s'agit , font au nombre de iix , la première concerne un cas des plus furprenans, au fujet d'une playe de tête. On a vu £c l'on voit encore communément , guérir des playes de tête , avec enlèvement d'une partie confidcrable du crâne , & de quelque portion delà fubftance du cerveau. On voit aulîî aiTez or- dinairement des playes où les os du crâne fe trouvent frai5turés & même brifés en plulieurs endroits, avecenfonçurcs &c détachemcns de pièces d'os, ce qui donne lieu à des piqueures &c à des déchiremcns de la dure -mère. On pourroit citer des exemples de coups de feu gué- ris,dont les balles ou éclats de bom- be de de grenade , avoicnt pénétré jufques dans la fubftance du cer- veau même. Mais toutes ces guéri- fons , quoique merveiilcufes , le font bien moins que celle dont par- le M. Brilfeau dans fi première ob- fervation. On y voit , à n'en pou- voir douter , que la fubftance du cerveau, peut être confidcrable - ment endommagée & même dé- truite en partie , ou emportée, fans que la mort s'enfuive. Il s'y agit d'un coup de flèche , qu'un jeune homme de vingt- (ix ans , étant au Jardin des Arbalé- triers de Douay , pour y voir tirer au but , reçût il y a quelques an- nées à la partie moyenne Se latérale de l'os pariétal , du côté droit, vers la future coronale , à quatre grands Sravers de doigt , au-deflus du con- E R , 1 7 3 r. 7p duit de l'oreille. Le blc (Té n'eut pas plutôt reçu le coup , qu'il porta la main à la tête pour arracher la flè- che dont le fer avoir percé les tégu- mens & le crâne. Il ne put la reti- rer qu'avec violence , &C après l'a- voir calTée auprès du fer. Pendant les premiers jours , il ne fc plaignit d'aucune douleur, il mangcoit & beuvoit à pe\i-près comme à fon ordinaire ; il jouoic même avec fes amis ; mais le fep- tième jour de la blelTure on s'ap- perçut que les rebords de la playe fedilaceroicnt ; on lafonda, & le Chirurgien ayant trouvé quelques inégalitez fur la furface du pariétal, ne balança pas à taire dans Tinftant une grande incifion. L'os étant découvert , fut trouvé perforé d'un trou partaitement rond , fans le moindre éclat de la table exté- rieure , au-dell"us de laquelle on voyoit & on touchoit aifément les pointes du bois de la flèche rom- pue. On appliqua le trépan , & la pic- ce d'os étant enlevée, le bout de la flèche s'enfonça très-avant dans la fubftance du cerveau , fins qu'il tût poftibled'v remédier, parce que le bout de la flèche n'étoit pas foû- tcnu, & que la diireincre n'étoit plus tendue comme auparavant. Cet accident inopiné détermina à appliquer une féconde couronne de trépan , & la plus grande qu'on pût trouver , afin d'élargir l'ouver- ture, & d'emporter en même tems un angle d'os qui auroit pu caufer de l'embarras. Cette opération fu- té ^ on tira cjuantité d'efquilles afc Lii Bo JOURNAL DE fezconfiderables , qui provenoient de la table interne du pariétal , 1?,^ quelle fe trouvoit route brifée en cet endioit. On coupa enfuire la dure - rnerc dans toute la circonte- tence de la grande ouv . rture qu'on avoit faite. Puis on panla le bieffé. Mais à peine l'cut-on panfé , qu'il tomba dans une par.ilvlîe de la moitié du corps , & ccia du côté oppofé à la bkfTurc. Il avoit aure- fte , toute la prcfence d'cfprit pofli- ble , & paroitfoit même afièz gai lorfqu'on l'inteirogeoit. La fuppuration devint tous les jours plus abondante , & fi abon- dante , qu'on fut oblige de panfer le bleiïc des dix fois par jour. Le vingt -cinquième jour de la blelTuie , commencèrent à paroître des champignons de la groffeur d'u- ne petite noix , lefquels débor- doient la furface du crâne malgré l'appareil. Ces excroilfances que l'on coupoit à meiure qu'elles pa- roilToient , auroicnt excédé la pe- fanteurde-fix onces, fi on avoit pu les ramalTer toutes en une feule malTie. - M. BrifTeau, qui , dans tout ce récit j,, que nous avons confidera- blement abrégé , parle comme té- moin , ne doute nullement que cesexcroilTinces ne fulTent produi- tes par la fubftance même du cer- veau., & ce qui tavorifc fon fenti- ment c'eft qu'en ouvrant ces cham- pignons , on y diftinguoit par- feitement les deux fubllances du cerveau , la grife & la blanche , de même que les vailTcaux q^ui s'y ra- S SÇAVANS i Un mois après la blelTure , la fuppuration parut belle , ôc on s'appciçut que le blelTé remuoic un peu la jambe du côte paralyti- que ; mais pour le mouvement da bras, il ne revint qu'au bout de deux mois. Pendant prcfque tout ce tems , qui fut d'environ troiS' mois , le blelTé ne trouvoit aucua goût aux almicns , ce qui l'ayant réduit à prendre à peine la nourri- ture la plus indifpenfable , l'avoic: jette dans une extrême maigreur. Pour y remédier on s'avifa de lui faire boire pendant dix ou douze jours , une chopine de lait de va- che le matin à jeun , ce qui pro- duifit un bon effet , car l'appétit fe reveilla , &: les forces revinrent dans peu. Au commencement du quatriè- me mois de la bleffure , le ftilef 5, qu'on y avoit déjà introduit d'au- tres fois , y tut introduit de nou- veau , & on toucha de rechef le corps étranger , qui étoit placé fort profondement. Le ftilet, en choquant contre ce corps , fit un bruit, que le blelTé , le Chirurgien, & les airill:ans même entendoient ,, ce qui détermina le Chirurgien à couper en rond la dure -mère, d'en- viron la grandeur d'un liard , au Bioins. Par ce moyen il fit une nou- velle tentative pour retirer le corps étranger; mais des convul- fions confiderables qui dans le mo- ment furvinrent au bieffé , obligè- rent de remettre à un autre jotit l'extiaftion de ce corps. Dix ou onze jours cnfuite , le bieiré fut attaqué pendant la nuit. F E V R I 'i.c deux autres convulfions trcs- violcntes quoiqu'on eût panfc la pUye , de lamcme manière que les jours précedens , c'ed-à-dire, tort phtciuent , (^ uns rien irriter. De nouvelles eonvulfions plus forces que toutes les précédentes furvin- ïent treize jours après , fçavoir le 25 d'Aouft. Mais le trente du mê- me mois , l'appareil ayant été levé, il arriva un cas bien extraordinaire : le corps étranger fe prcfenta de lui- même au centre de l'ouverture qu'on avoit faite en dernier lieu à la dure-mere. On ne lailfa pas échap- per une occafion li favorable 6i li peu attendue , le Chirurgien prit promptement des pincettes, & tira ce bout de flèche , qui étoit le dard de fer tout entier tenant à une por- tion de l'extrémité du bois de la flèche. Après l'extradion le blefle fe trouva confiderablemcnt foulage d'une douleur qu'il fouffroit à l'œil oppofé à la bleffure , & fa bouche qui étoit devenue difforme^ reprit en peu de jours fa figure na- turelle : comme le corps étranger avoit occupé dans le cerveau un ef- pace confiderable , on introduifit dans le vuide qu'il lailfa , une tente de deux travers de doigt de long , imbibée d'cfpritde vin, &c enduite de miel rofactiedes, après avoir eu auparavant grand foin de pomper par de taulfes tentes , les matières qui pouvoient fe trouver dans la playe : les jours fuivans on diminua peu à peu la longueur &c la groffeur de la tente , à proportion que le diamètre de la playe djminuoit ^ E R , 175 ;, 8r car ce vuide fe remplilToit à vile d'œil. Le zo Septembre h pLiye fe trouvant entièrement cicatrifée , le blelTé fut en état d'aller fe prome- ner par la Ville , où on le rcgar- doit comme un relTufcitè. M. Brirteau obferve que pen- dant tout le rtms de cette longue cure , le-blefTc n'eut pas le moindre accès de fièvre , qu'il dorraoit tran- quillement , Se s'éveiUoit de mê- me. J'ai bien vii ^ dit- il, des fUyes de tête dam les Hôpitaux d'armées j & particulièrement pendant hait Jté- ges en Flandres ok je me fuis trouvé ■par ordre de la Cour , mais je n'ai ja- mais vît de cas approchant de celui- ci & dont les fuites ayent été ailjji heureufes. ^e n'ai rien vît dans aucun Auteur ^ ni oui dire par aucun du grand- nombre d'habiles Chirurgiens que j'ai conflit es , ciu'il leur foit tom- bé entre les mains un blejfé , dont le cas ait pît être comparé avec celui- ci. M. Brilîeau ne fe contente pas de rapporter le fait que nous venons d'expofer , & dont , comme nous l'avons déjà remarqué, nous avons,, autant qu'il nous a été pofîîble, abrégé ie récit de peur de nous trop étendre , il entre dans l'expli- cation de tous les faits , & de tous les fymptomes eifentiels qui ont accompagné un événement fi ex- traordinaire; Il examine , 1°. pourquoi le blelfé n'eft pas tombé du coup , & n'a pas perdu dans le moment , toute cor^noifTance. 2^. Pourquoi il n'a pas été atta- qué de vomilTement , ou dcfoule- vement d'cftomac ,, accidens cjui> g2 JOURNAtD arrivent prefque toûjoars dans les grandes blefTures de tête. 3°. Pourquoi il eft furvenu au bleffe une paralyfic peu de tcms après le trépan ■■, 8c pourquoi le mouvement de la cuifTe & de la jambe , du côté paralytique eft re- venu trois Semaines enfuite ou en- viron , au lieu que celui des par- ties fupcrieures paralytiques n'a été rétabli que trois mois après l'opé- ration du trépan , le corps étranger néanmoins reliant toujours dans le centre du cerveau , dont on avoit oté une alFez grande quantité , par l'amputation des champignons qui étoient furvenus ? 4°. Pourquoi la paralyfiefurvc- nue au blelTé , a attaqué le côté op- pofé à la blcflure , plutôt que l'au- cre î 5°. Pourquoi le bleffé a confervé toute fa railon pendant le cours de cette longue cure ? 6°, Pourquoi les convulfions n'ont para que fort tard , & d'où elles provenoient; 7". Pourquoi le blelTé a toujours été exempt de fièvre. 8°. Pourquoi il avoit un dégoût fi univerfel pour toutes fortes d'a- limens excepté pour le laie ? 9°. Comment s'eft pu remplir , & fi promptement , le vuide qui s'étoir fait dans le cerveau tant par l'amputation des champignons qui étoicnr une portion de la fubftance même du cerveau , que par l'ex- tradion du corps étranger î M. Unlfeau rép.md fçavammcnt à toutes ces queftions ; nous ne rapporterons point fes réponfes , ES SÇAVANS; nous y renvoyons les Leifleurs.' Après tout ce qui vient d'être rapporté on ne doit pas croire que les playes de tête qui entanu-nt la fubftance du cerveau quoiqu'ac- compagnées de circonlbnccs trc-s- fàcheufcs doivent toujours être regardées comme incurables ; c'eft la confequence qu'en tire M. Brif- feau , & il eft pcrfuadc avec raifon, <|u'un grand nombre de bleflurcs confiderables à la tête, ne devien- nent mortelles que par la préven- tion des Chirurgiens , qui ne poa- vant s'imaginer que de telles blef- fures puiffent guérir , les traitent avec négligence. Le grand fecret pour réuflîr dans le traitement des grandes playes de tête , lorfqu'il y a fradu- re , épanchement , fracas , CTc. c'eft comme le remarque lagement M. Brifleau", de trépaner dabord , de ne pas épargner le nombre des cou- ronnes, d'ouvrir en tout fcns , de couper & d'emporter des portions même de là durc-inere fans fe met- tre en peine de ce qu'ont dit fur ce fujet les anciens. En un mot on ne fçauroir trop ouvrir , trop débri- der , & trop débarra (Ter dans ces cccafions , afin d'ôtcr jufqu'au moindre obftacle qui pourroit dé- ranger le mouvement du cerveau. La féconde obfervation de M. Brif- feau , eft fur un fuintcmentde ma- tières purulentes , à travers les fu- tures du cr.îne. La troihéme , fut une tumeur coniîderable dans le centre du cervelet. La quatrième , fur la guérifon d'une extravafarion de fàng &: de pus encre la dure- F E V R I ïTtere & ïe crâne , dans toute l'é- tendue de fîbafe, La cinquième , fur une conform.irion nionftrucu- fe du cerveau. La fixiéme , fur des poils iortis par l'opcration de la pa- raccnthcfe. Cette nouvelle Edition de l'Ana- tomie Chirurgicale de M. Palfin , eft , comme on voit, confidera- blement aiigmentce ; les fçavantes Notes de M. Boudon n'enrichilTent pas peu les augmentations dont il s'agit. Unousrefteà donner quel- que exemple de ces Notes. M. Palfin , dans la defcription qu'il fait des parties propres aufe- xe , pafTe fous filence la membra- ne nommée Hymen. M. Boudon iupplée à cette omiflïon par la No- te fuivante. » L'Auteur , dit M. Boudon ^ ail- wroit dû parler ici de l'Hymen, » pour fuivre l'ordre des parties "dont il traite ; ainfi comme il » n'en parle point ailleurs non » plus , il eft à propos que j'en dife p quelque chofe. » Les Anatomiftes ont fort dif- »j puté autrefois pour & contre w l'exiftencc de l'Hymen , de niê- 30 me que fur fa fituation Se fa figu- *»ife , comme on le peut voir dans » Riolan , Bayiholtn , de Graaf , &c. » Mais aujourd'hui que l'Anato- s> mie eft éclairée par des recher- i> ches très-exaftes , on eft certain »> de de l'cxiftence Si de la lîtuation 3» de cette partie. L'on donne à pre- s> fent le nom d'Hymen à une » membrane , tantôt fémilunaire , » tantôt circulaire , &c quelquefois a d'une autre figure, qui eft placée E R. ; I 7 5 S*- S? » à l'orifice de la partie propre au » C;xe , & en rétrécit l'entrée. Cet- 3> te membrane ou du moins quel- » que chofe d'analogue fe trouve «toujours aux jeunes pcrfonncSj, M dont ccC orifice n'a point été at- » taqué de maladie ou d'accident » qui ait pu la détruire , & qui n'y » ont permis l'introduârion de » quoi que ce foit qui ait été capa- » ble d'y faire violence. Voyez la » reprefentation de l'Hymen dans » Svammerdms [ Miraculura natu- » ri , tabul. I. fig. z. 3. & 4, ] . . . , » on en peut voir la figure en d'au- "tres Auteurs , comme dans Spige- » liHS j dans Panarolus , dans Santo- » rini , & dans les Ephémérides des "Curieux delà Nature , Ccntur. » VII. VI II. fig. 4. fuivantla def- » cription de M. Heifter. Au refte, »> comme on l'a déjà dit , la figure »> de cette membrane varie bcau- » coup , dans les differens fujers , » de forte qu'on ne peut rien établir »dc pofitifà cet égard. D'un autre » côté il eft rare de trouver l'Hy- » men dans les perfonnes qui ont » pafte l'âge de puberté , & cela 5> pour des raifons que je me dif- i> pcnferaide rapporter. J'auroisen- »> core bien des chofes à dire au fu- » jet de cette membrane , comme 35 aufiî de la Virginité , mais les x> bornes étroites de ces Notes ms »j me permettent pas d'entrer dans » un plus long détail. Je renvoyé le » LeÂeur aux Auteurs qui en ont » parlé , Se particulièrement à M. » Schurig , Médecin de Drcfde , « qui y a public depuis peu un » Livre in-if^. intitulé Panhemhgia^ 84 JOURNAL D » où cette matière cft amplement » traitée. Voici à peu-près fur le même fujet une féconde Note de M. Bou- don. Il s'y agit des caroncules myr- tiformcs ; M. Paliîn les regarde comme des parties diliindies de l'Hymen , & M. Boudon qui pré- tend qu'elles ne font que l'Hymen même déchiré , fait là - delTus U î^ote que voici. » Des recherches plus exadles » convainquent aujourd'hui les » Anatomiftes , que ces caroncules » dites rayrtiformes , ne font autre n çhofe que des portions de l'Hy- « men déchiré , lefquelles après »> s'être cicatrifées , forment de pe- » tits corps triangulaires , charnus a» & membraneux : le nombre de *> ces petits corps eft indéterminé , M puifqu'on en trouve tantôt deux, » trois , quatre , & même cinq. »C'efl; fans fondement qu'on les a w fixés au nombre de quatre. Riolan M & Mitnnich font les premiers qui s> ayent remarqué que ces caroncu- » les n'ctoient formées que par le » déchirement de l'Hymen , ce »qui eft auflî le fentiment de 5» MeffieursMorgagni , Heiftcr , Se 5> autres , quifoûtiennent qu'on ne ^ les trouve point ordinairement j» dans les jeunes pejrfonnes , mais ES SÇA VANS, ii feulement dans les femmes. If » paroîc de - là qu'il ne faut pas r> compter fur ce que dit ici à ce j> fujec , M. P-.djiti , après quelques » autres Anatomiftes , car bien » loin que lt;s caroncules mymfar- » mes foient la marque de la Virgi- » nité , elles font une marque tou« ffl te contraire , &c. M. Boudon , dans la première Note ci deifus , renvoyé les Lec- teurs au Traire de M.Schurig, inti- tulé V cinhenoiogta , nous avertirons à ce fujet, que nous en avons rendu compte dans le Journal du Mois d'Aûuft dernier. Les Notes de M. Boudon &: les ïêponfes qu'il a faites dans plufieuïS endroits de cette Anatomie Chi- rurgicale de M. Palfin , la rendent d'une extrême utilité non-feule-, ment pour les jeunes Chirurgiens ,' mais encore pour les jeunes Mede-. ci.ns. Le Livre eft dédié à M. Winf-; low , DodeurRégent de la Facul- té de Médecine de Paris , &c. On trouve peu d'Epîtrcs Dédicatoires qui renferment des éloges bien ju- ftes & bien convenables j celle qui eft à la tête de cet Ouvrage paroic avoir tout ce qu'il faut pour être mife de ce petit nombre. HISTOIRE FEVRIER, I7JJ. 8; HISTOIRE ANCIENNE DES EGYPTIENS, DES Carthaginois , des AJfynens , des Babyloniens , des Audei & des Perfes, des Jl^acédoniens , des Grecs. Par Aï. Ko\[m , ancien Refi.'ur de l'VnivcrJt- lé de Pitris Profejfenr £ Eloquence , au Collège Royal ^ & AJfocié à l'A- cadémie Royale des Infcriptioiii & Belles-Lettres. Tome Vil A Paris, chez Ja Veuve £?/>««£•, Libraire , rue S.Jacques, vis-à-vis la rue du Plâtre, à la Vertu. 1734. /«-12. pp. 6^0. L'Expofition du cara(fi:cre 5: du plan de l'Hiftoire contenue dans ce feptiénic Volume , fait le fu,et d'un Avant Propos, où l'Au- teur fe plaint d'abord amèrement , Mie n'avoir plus à montrer la nature humaine que par des endroits qui la deshonorent , 5c qui ne peuvent qu'affliger & qu'indigner fecrcte- mentceux qui en deviennent les Speiflateurs. Telle eft (fclon lui ) l'Hiftoire dcsSuccelTcurs d'Alexan- dre le Grand , comprife dans l'ef- pace de 293 années; c'e(l-à-dire , depuis la mort de ce Conquérant julqu'à celle de Cléopatre , donc le Royaume fut réduit en Province de l'Empire Romain. Cette Hi- ftoire ( dit-il ) offre aux yeux tous les fentimcns d'honneur 6c de pro- bité , toutes les loix tant divines qu'humaines, facrifices fans rcferve • à une ambition démefnrce , qui femble aurorifer les crimes les plus atroces. On y voit les Capitaines d'Alexandre conjurés contre fa fa- mille , la détruire fans en épargner tin feul rejetton; déchirer un Empi- re pour rét.ibliflemcnt duquel ils avoient vcrfé kui propre fang , & des débris de ce varte corps , en former differens Etats par les voyes les plus injuftes & les forfaits les Fevriir, plus crians. Quel moyen ( pourfuit l'Auteur) de répandre de l'agré- ment fur une fi trifte narration > N'cft-il pas même dangereux fcon- linue-til ) de familiarifer l'clprit du commun des hommes avec le fpeRacle ajfidu de crimes trop heu- reux , &.' dont le fucccs femble aux perfonncs toibles accufer la provi- dence ? Mais (ajoute M. Rollin) ce qui lette un nouveau dcfagré- mentfur cette Hilloire , c'ed l'ob- fcurité SiC la confuhon qui y ré- gnent, & aulqucllcs il eft prtfquc impoffiblc de remédier : écutil in- évitable à quiconque entreprendra d'écrire l'Hiûoire de dix ou douze Capitaines qui fe font la guerre Se fe croifcnt niutuclicmcnt pour le partage des conquêtes , aufqueilcs ils avoient eu tant de part. Pour furcroît d'embarras , les anciens Hiftoiicns qui jufqu'à prefent ont guidé notre Auteur , lui mancpirnt au bcfoin. Il fe voit bien tôt aban- donné p:ir Diodore , & il le trouve trop heureux , lorfque Poiybe ou Plurarqne daignent venir à fon fe- cours. Mais à leur défaut il a re- cours aux Ecrivains modernes, tels c^uVjJirius , VmlUm & P rideaux , &: fou vent mêmeii ne fait [ dit jlj que copier ce dernier. M é^ JOURNAL DE Pour dcbroiùUer plus efficace- ment un tel cahos hiltorique , M. RoUin donne en premier lieu un shïC'yé Chronologique des princi- paux événemens , dont le détail eft renfermé dans ce feptiémeVolume: '&, c'eft d'un pareil Abrégé que nous devons d'abord un compte au public; , pour fixer fes idées. Le partage des Etats de l'Empire d'A- lexandre fait immédiatement aprcs la mort de ce Conquérant entre fes Généraux, ne fut pas de longue durée i Ci l'on en excepte l'Egypte ,, où Ptolomée fils de Lagus, qu'A- lexandre , pendant fa vie, en avoic établi Gouverneur , fe maintint conftammcnt , fans relever de per- sonne. Ce partage ne prit une for- me réglée , qu'après la bataille d'Ipfe en Phrygie , où Antigone & fon fils Démetrius furnommé Po- liorche ou le Preneur de failles , fu- rent défaits, & où le premier perdit la, vie. Ce fut alors que cet Empire fut. divifé en quatre Royaumes , par un Traité folcmnel. Ptolomée eut l'Egypte, la Libye, l'Arabie , liCélé-Syrie &: la Palefline : Caf- fandre fils d'Antipater , la Macé- doine &: la Grèce : Lyfimaque , la Thrace, la Bithynie , & quelques Provinces au delà du Bofphore : & Séleucus, la Syrie & la grande Afie pat del.i l'Euphrate Se jufqa'au Fleuve Indus. De ces quatrcRoyau- mes , celui d'Egypte Se celui de Syrie fublîftcrcnt ptefque toujours dans les mêmes familles , fous une langue fuite de Roi?. Le Royaume de Macédoine eut fuccelfivement piuficurs niiîtxes de dificrenies tX-; 5 SÇAVANS. milles. Celui de Thrace , partagé bien-tôten diverfcs branches , cefr fa de faire un Icul corps , 6i n'en. lailTa aucuns velliges. Le Royaume d'Egvpte eut 14;. Rois ( y conjpris la Reine Cléopâ- tre J ayant tous le nom â^ Ptolo- mée avec differensfurnoms, &C di-, ftingués ordinairement par le fur- nom général de Lagtdes , à caufc de Lagus père du premier Ptolo- mée. On ne trouve , dans ce Vo- lume , que l'Hiftoire des quatre premiers de ces F^ois , fçavoir So- ter , Philadelphe , Evergett , »P Philopator; Si ces quatre règnes., félon l'Auteur , rempliiîent l'tfpace de HZ ans. On compte jufqu'àzy Rois de Syrie, appelles Seleucides du nom de leur premier Roi , & parmi lefquels il y eut lix Séleucus &c treize Antiochus ,diftingués par divers furnoms. Il n'eft parlé dans, ce Volume que de fîx de ces Rois -, trois Séleucus, NicAtor^ Ciilli^i^jne 6 Cénuifie ; Se trois Antiochus , Soter , 7'héos , & le Grand. Le Royaume de Macédoine , malgré le partage folemnel dont on vient de parler, changea fouvcnt de maîtres , Se palTa par les mains de. CalTandre , de Démétrius-/'o//0/-cc- te , de Pyrrhus , de Lyhmaque , de Séleucus - /V/ctîM/', de Ptolomée- Céraune , de Soflhéne , Se d'Anti- gone-Gonatas j dont la pofterité y régna fans interruption fous quatre Rois jufqu'à Pcricc qui vaincu & pris par Paul- Emile , vit fon Royaume devenir une Province Romaine. Outre ces quatre grands Royaa-'- T E V R I ïUcs , il s'en forma plufieurs autres «noins confiderables , indépendans des Grecs , & dont la puillance s'accrut beaucoup dans la fuite ; mais qui furent prefque tous ré- duits en Provinces Romaines. Tels furent i°. celai de Bithynie , fous fixRois,&: dont Zypéthes futlc Fondateur : z°. celui de Pergamc , fondé par Philctére , &C où regnc- jrcncllxou fept Rois : 3°. celui de Pont , érige par Darius premier en faveur d'Àrtabafe , &C gouverné fucceflivement par \é Rois : 4°. ce- Jui deCappadoce ; 5°. celui d'Ar- ménie : 6°. celui d'Epire , dont on ne conrK>ît guéres que les fept der- niers Rois : 7". les Tyrans d'Héra- clée : 8°. les Rois de Syracufe : 9°.ceux duBofphore Cimmérien^de Thrace , de Cyréne ,de Paphlago- nie , de Colchide , d'Ibérie , d'Al- banie : teux des Parthcs , Ôi des Baétriens , &c. Après cette notice hiftorique , l'Auteur entre en matière fur i'Hi- floire des premiers Succeffeurs p.ai la vigpureufe dcfenfe d'£«jH«i:' <}& JOURNAL DE ne , entra en négociation avec ce- lui ci, qui mena cette affaire avec tant de dextérité , que fans préju- dicier à fes engagemens avec la fa- mille Royale , il fortic de fon Châ- teau , &C fe retira proniptcment avec fa petite Troupe en Cappado- ce , où il fe prépara de nouveau à ■foûrcnir la guerre. Polyfpcrchon le -déclara Capitaine Général de l'Afie Mineure contie Antigène regarde comme rebelle aux Rois : & Eu- méne profitaEt de l'affedion de fes Troupes , jreprit pour ces Prin- ces la Syrie & la Phénicie , que Ptolomée leur avoit enlevées très- injuilcment. Mais la Flotte de Po- Jyfperchon , laquelle devoir ap- puyer l'entreprik d'Euméne, ayant (été battue par la Flotte d'Antigo- ne ; Eu mène fe vit contraint d'al- ler prendre des quartiers d'hiver en Méfopotamic. Au Printems il mar- cha vers Babylone , & faillit à y perdre fon armée par un ilratagê- me de Séleucus , dont il fe garantie par fon adredi -, après quoi ayant pénétré jufqu'à Sufe , il foUicita des fccours auprès de tous les Gou- verneurs des Provinces voiiînes , aufquels il notL'îa les ordres des Princes. En ce même tems arriva une gran- de révolution en Macédoine , où Olvmpias fe défit de Philippe- Aridée , qui regnoic depuis dx ans, d'Eurydice fa femme , de Nicanor frère de Caflandre , Se de cent de ieurs principaux amis. Elle en fut punie par CalTandre , qui la fit con- jdamiKr à mort par les Macédo- oieçs - mêmes. Pouï s'affurcr le S SÇAVANS, Trône de Macédoine, il fit la guer- re au Régent , & rétablit la Ville de Thébes ruinée de fond en com- ble par Alexandre. Antigone d'au- tre part , travailioit à fe délivrer d'un puiffant advcrfaire en la per- fonne d'Euméne. Après divers combats où il éprouva l'une & l'au- tre tortune , il fut trahi par fes Troupes , & livré à fon ennemi Antigone, qui le fit mourir. M. Rollin ne lailTe point fans éloge ua il grand Capitaine. Après la mort d'Euméne ,Sélen- cus , Ptolomée , Lyfîmaque ÔC Caflandre fe liguèrent contre An- tigone, quj fe regardant déformais comme le maître de l'Afie , cafla, tous les Gouverneurs dont il fe dé«! fioit , & mit de fes Créatures ea leurs places. Il enleva à Ptolomée la Syrie , la Phénicie, Se prit après dix mois de Siège la Ville de Tyr qu'Alexandre avoir détruite 19 ans auparavant , &: qui en fi peu de tems s'étoit prefque rétablie dans fon ancienne fpkndeur. Ce fut alors que Démétrius fils d'Antigo- ne , & qui n'avoit encore que it ans, commença à fe faire connoîtrc dans l'Afie - Mineure. M. Rollin nous donne ici , d'après Plutarquc, le caradere de ce jeune Prince. » li » avoit (dit-il) une taille avanta- » geufe & une beauté iinguliere. >» On voyoit fur fon vifage de I4 » douceur mêlée de gravité , quei- » que chofe de ferein , &; en mê- N tems qui infpiroit de la terreur ; X une vivacité de jcunefie tempérée 3» par un air héroïque & par une w majefté véritablement Royak». F E V R I s»Gn trouvoit le même mélange a dans les mœurs , qui étoient » également propres à étonner 6c à a> charmer. Pendant qu'il n'avoic » rien à hire , il étoit d'un com- «merce délicieux : rien n'égaloit » h ibmptuoficé de fes teltins , de w fon luxe &i de toute fa manière »> de vivre : c'étoit le plus magnifi- »que , le plus voluptueux Se le 4> plus délicat de tousles Princes. S) D'un autre côté , jnalgré ces vo- «luptez, & ces délices , quand il 3) étoit qucftion de quelque entre- »prife, c'étoit le plus adif&le }y plus vigilant de tous les hom- »• mes.- Rien n'égaloit fa vivacité & » fon courage ^ que fa patience & j» fon aflîduité au travail. Diftingué j»au furplus de tous les Princes de 3»fon tems , parle profond refpedt » qu'il avoit pour fon père &c pour " fa merc ; refpeA , qui n'étoit «point limulé ni de fimple céré- » monie , mais qui partoic du cccut » & étoit fincere & réel. Pendant qu'Antigone étoit oc- cupé contre CafTandre , dans l'Afie "Mineure, Ptolomée enleva au pre- niier l'Ifle de Chypre prcfque en- tière. Dc-là , il palfa en Phénicie & en Syrie, après avoir battu Dé- mctrius à la Journée de Gaza , où celui-ci perdit tout fon argent Se tout fon équipage , que Ptolomée lui renvoya généreufement. Démé- trius pria les Dieux de lui faire naître promptement l'occahon de rendre la pareille à fon ennemi. Elle ne tarda pas à fe prefenter ; car ayant défait à fon tour un des Gé- Bcxaux de Ptoioraée , l'ayant fait E R. 173 r. $t prifonnier & s'étant faifi de tout le bagage , il renvoya l'un 5c l'autre à ce Pnncc. Cependant Séleucus , à l'aide de quelques Troupes qu'il avoit obtenues de Ptolomée , fe rendit maître de Babylone ; & c'eft à fon entrée dans cette Ville - là que commence l'Ere lameufe des SéleHcides qui a eu cours dans touc l'Orient. Apres quelques autres ex- péditions , il fe fit entre les Confé- dérez & Antigone un nouveau trai- té de paix , quifutrompu prcfque fur le champ. CalTandrc fit mourir- ië jeune Roi Alexandre avec Roxa- ne fa mère. Hercule autre fils d'A- lexandre le Grand fut tué avec fa mère Barfinc par Polyfperchon. Antigone en fit autant de Cléopâ- tre fœur de ce Conquérant. Ainlî périt fans reflburce toute fa famil- le. Antigone & Démétrius , dans la' vi^iif d'affranchir la Grèce entière - que Caffandre , Ptolomée & Po- lyfperchon tenoicnt comme en fer- vitude , fe rendirent maîtres d'A- thènes , y rétablirent le Gouverne- ment populaire , en chalîerent Dé- métrius le Phalèrécn . qui fe retira à Thébes, puis en Egypte , &que les Athéniens condamnèrent à mort après avoir renverfé toutes fes Sratucs , & avoir rendu à Antigone & à fon fils des honneurs excelfifs. Ce dernier avec fa Flotte battit Ptolomée , puis s'empara de Sala- mine &; de toute l'Ifle de Chypre ^ &i après cette vidoire le père & le fils prirent le titre de Roi, ce que les autres Princes firent à leur exemple. Mais Antigone ayant faiç. ^2 JOURNAL D fur l'Egypte une tentative qui lui léulïît mal , fut obligé de retour- ner en Syrie.; &c ce fut le dernier affaut que Ptolomce eut à elTuycr |)our la Couronne d'Egypte : c'ett aulll où l'on 6xe la première année de fon règne. Démétrius enfuite forma le Sié- ;ge de Rhodes , qu'il fut oblige de lever au bout d'un an , par un trai- ■té honorable à la Ville. Nous ren- voyons à l'Auteur fur la defcription de ce fameux Siège, qu'on lira chez lui avec plaiûr , ainfi que celle de la formidable Machine appe]lée Hélépolc j deftinée à prendre les Villes , & de l'invention de Dé- métrius , qui avoit employé près de 30 mille hommes à cette con- ftrudion & à celle de plulleurs au- tres Machines. M. Roilin nous par- ie ici de l'eftime de Demétruis pour tous ceux qui exçelloient dans les beaux Arts , & il en allè- gue pmir preuve le foin qu'eut et Prince à garantir de toute hofti- litc , pendant ce Siège , le célèbre Peintre Protogéne , qui avoit fon attelicr dans un des Fauxbourgs de la VilJc , & qui travailloit alors à ce merveilleux tableau nommé l'Ialy/hs , Si. qui fut fon chef-d'œu- vre. L'Auteur, dans le dernier para- graphe de fon premier article, nous raconte l'expédition de Séleucus dans les Indes ; qui eut peu de fuc- ccs i la levée du Siège d'Athènes que faifoit CafTandre , & que Dé- jnétrius le contraignit d'abandon- ner ; les honneurs que les Athé- f^us ^.en( 4 ce |.lbéiatcui i h U- ES SÇAVANS; gue conclue entre Ptolomée^ SeJ Icucus , Caffandre , iSc Lylîmaqut contre Antigone & Démétrius; enhn la bataille d'Ipfe , où périt Antigone à l'âge de plus de 80 ans, 6c où fon fils fut mis en fuite. II. Pour éviter une longueur exceUlve , nous nous contenteions d'indiquer très fommairement les faits hiHoriques les plus mémora- bles , cont M. RoJlin nous fait p.a.rt dans le fécond & le troifiémç artirlt de fon i6' Livre : ce qui termine Ce Volume. On voit donc dans le fécond article , i °. les qua- tres Princes Vainqueurs partagée l'Empire d'Alexandre le Grand en quatre Royaumes ; Séleucus bâtijc plufieurs Villes , Sèleucie , A pâ- mée , Laodicéei Athènes fermant les portes à Démétrius ; celui-ci fe reconciliant avec Séleucus , puis avec Ptolomée ; la mort de Caltaij-, dre , après avoir gouverné la Macé- doine pendant 19 ans ; les com- menccmcnsde Pvrrhus , devenu le plus grand Capitaine de fon llèclej la prife d'Athènes par Dcmétrius, qui perd enfuite prefqu'en mêniic tcms tout ce qu'il polTedoit. 2°. On y voit de plus , la difputc ■ des deux fils de Cadandre , pour la Couronne de Macédoine ; Dé- métrius appelle au fccours d'Ale- xandre le plus jeune des deux, fe défaire de lui , être cnfuire procla- mé Roi par les Macédoniens , & fiire de grands préparatifs pour la conquête de l'Alie ; une puiflantc Ligue formée contre lui , & en confequence Lyfimaque &: Pyr- rhus qui lui wile veut laMacédoine, Se F E V R & h partagent entr'eux ; mais Pyr- rhus contraint bien-tôt d'en fortir; & la trifte fin de Démctrius qui meurt en prifon à l'âgede 54303. 3". L'Hiftorien palle de-là aux affaires d'Egypte , & nous parle de Ptolomée-Soter , abdiquant la Royauté en faveur de fon fécond fils Ptoloméc - Philadclphc ; de la Tour du Phare bâtie en ce mcmc tems ; de l'Image de Sérapis appor- tée à Alexandrie -, de la famcufc Bibliothèque établie alors dans cette même Ville, avec une Aca- démie de Sçavans , & où ptélide Démétrius de Phalére ; de la mort de Ptolomée-Soter , âgé de 84 ans. 4°. Il joint au détail de tous ces faits une exade dcfcription de la Fête magnifique donnée par Phila- delphe à fes Sujets , après l'abdica- tion de fon père ; ^ il emprunte d'Athénée ce morceau curieux. Il nous entretient après cela [ j°.] des commencemens du règne de Philadelphe ; de la mort de Démé- trius de Phalére -, de Scleucus cé- dant fa femme & une partie de fon Empire à fon fils Antiochus , devenu amoureux de fa belleme- re-, de la guerre de Séleucus contre Lyfimaque , lequel y périt ; de Sé- leucus lui-même affaffmé par Pto- lomée-Céraune , qu'il avoir com- blé de bienfaits -, du meurtre des deux fils d'Arfinoé parCéraune fon frcre , & de l'exil de cette Princef- fè ; de l'irruption des Gaulois en Grèce , où ils tuent Céraune dans un combat ; de leur vaine tentati- ve contre le Temple de Delphes ; At l'établiffement d'Antigone-Go- Fcvrier, I E R , r7j 5-, p5 natas fils de Démétrius , dans la Macédoine : 6". des Livres Saints traduits en Grec par l'ordre de Philadelphe , & connus fous le nom de Verfion des Septante. 7". Il vient enfuite aux diverfes expéditions de Pyrrhus; 1°. en Ita- lie , où il bat deux fois les Ro- mains; i". en Sicile , où il fe rend maître de Syracufe & de plufieurs autres Places ; 3°. une féconde fois en Italie , où il cft vaincu par les Romains ; 4°. en Macédoine , dont il s'empare pour un tems , après la défaite d'Antigone ; 5°. dans le Péloponnéfe , où il forme inutile- ment le Siège de Sparte , puis celui d'Argos , où il cit tué. L'Auteur n'oublie pas la députation de Phi- ladelphe aux Romains, & de ceux- ci à Philadelphe. %°. A ces évenemens détaillés fuccedent le Siège 6c la prife d'A- thènes par Antigone ; lajufte puni- tion dcSotade , Poète Satyrique , noyé dans la mer -, la révolte de Magas Gouverneur de la Libye & de la Cyrénaïque contre Philadel- phe ; la mort de Philétére Fonda- teur du Royaume de Pcrgamc ; celle d'AntiochusSoter, à qui fuc- cede fon fils Antiochus-Théos ; les travaux de Philadclphc pour faire fleurir le commerce •, l'accommo- dement de Magas avec ce Prince ; la mort du premier ; la guerre en- tre le Roi de Syrie Si celui d'Egy,- pte -, la révolte de l'Orient contre Antiochus ; la réunion des deux Rois ; &c la mort de Philadelphe , dont M. RoUin fait l'éloge, ( 9°. ) en examinant & en balançant N ^4; JOURNAL DE Its bonnes 6c !cs mauvnifes quali- tez de ce Prince. Il mourut âgé de é'î ans , après 38 ans de règne. III. Le troi fleure article de ce Volume n'offre que l'Hiftoirc de 25 ans , & c'eft précifément l'cf- pace de tcms que régna Prolomée- Evergcte , Roi d'Egypte. On y voit d'abord 1°. Antiochus-Théos em- poifonné par fa femme L.iodice , qui fait proclamer Roi fon fils Sé- leucuS'Callinique , après avoir fait mourir Bérénice féconde femme du défunt Se fon fils ; cette mort vengée par Evergète , qui fait mou- rir Laodice & s'empare d'une par- tie de l'Afie ; Antiochus Hierax & fon frère Séleucus unis contre Evergète ; la mort d'Antigone- Gonatas, Roi de Macédoine , à qui fuccede fon fils Démétrius IL la guerre entre les deux frères An- riochus &: Séleucus -, la mort d'Eu- méne Roi de l'ergame , à qui fuc- cede Attale-,, rétablillément de l'Empire des Parthes , par Arface; Antiochus tué par des voleurs; & Séleucus fait prifonnier par les Par- thes ; le crédit de Joicph nevcir d'Onias , auprès d'Evergète ; la mort de Déraérrius IL Roi de Ma- cédoine , fon Thrône occupé à ti- tre de tuteur par Antigone Do/ou ; & la mort de Séleucus. 1°. Delà M. Rollin pa(Te à l'é- tabliffement de la République des Achéens -, il nous parle d'Aratus , qui délivre Sicyone de la tyrannie ; . il nous peint le caradere de ce jeu- ne Grec, lequel aidé par les libera- ILtez d'Evergète , appaife une Sédi- cionpKte àédate? daosSicyoncicn- S SÇAVANS, lève Corintheà Antigone Roi de Macédoine ; tait entrer plulleurs Villes dans la Ligue des Achéens, Mégiie , Trézéne , Epidaurc, Mé- galopolis , nuis ne peut y faire eni trcr Argos, 3°. Il nous raconte enfuite la fii- nellc cataftrophe d'Agis Roi de La- cédémone , qui entreprend de re- former cette Ville , en y faifant revivre les anciennes Loix de Ly- curgue , à quoi il réuffit en partie : mais au retour d'une campagne faite avec Aratus contre les Eto- liens, il trouve tout changé à Spar- te, y eft condamné à mort & exécu- té. 4°. L'Auteur vient après à Cléo- méne , autre Roi de Sparte ^ qui: engage la guerre contre les A- chéens , 5c remporte fur eux pju- ficurs avantages ; qui reforme le gouvernement de Lacédémone & rétablit l'ancienne difcipline ; qui bat de nouveau les Achéens Scieur: Chef Aratus ; lequel de fon coté appelle à fon fccours Antigone Roi de Macédoine , qui lui fait gagner pluficurs vidoires Se pren- dre pluiicurs Places fur les enne- mis. 5°. Enfin notre Auteur décrit la célèbre bataille de Sélafic gagnée par Antigone contre Cléoméne ^ qui fe retire en Egypte; & fuivie de la prife de Sparte, dont Anti- gone le rend maître , Se qu'il traite avec bonté. M. RolHn nous parle aulîl de la mort de ce Prince , à qui fucccdc Philippe fils de Dém.é- trius II. de celle d'Evergète , qui eut pour SuccelTeur Ptolomèc-Phi- lopator ; du grand tremblement de. FEVRIER; i 7 ? j. -j;- ifcrre arrivé à Rhodes ; de la L;éné- qu'elle avoit fouflerfes ; Si il nous rofité des Princes &c des Villes , à apprend quel fut le fore du fameux dédommager cette Ifle des pertes Coloirc. C ONSVLTATIONS ET OBSERFATIONS SVR la Coûiume de Bretagne. Par feu M. Pierre Hevin , ancien Avocat au Parlement de la même Province. A Rennes , chez Guillaume J^atar ^ Im- primeur ordinaire du Roi &: du Parlement, à la Palme, & à l'Impri- merie Royale. 1734. /«-4". pag. yio. M Hevin qui a été pendant rS . ans Doyen des Avocats du Parlement de Bretagne , s'étoit ac- quis l'cftime &C la confiance de la Province par la noblelfe de fes fen- timens , par une grande érudition jointe à fon expérience , par la folidité , & par la juftelTe de fes raifonncmens. Pour pénétrer l'efprit de fa Coutume , & pour découvrir l'origine de fes dif- pofitions qui lont fouvent fin- gulieres , il s'appliqua particulière- ment à l'étude de l'Hiftoire de la Province, &des ancienstitres. Ses Annotations fur les Plaidoyers de Frain qui parurent en léSi. con- tiennent les preuves de ce que l'on vient de remarquer par rapport à l'érudition & à la juflefle des dé- cifionsde M. Hevin. On fçavoit qu'outre ces Anno- tations furies Plaidoyers de Frain, notre Auteur avoit fait un grand nombre d'Obfervations fur la Cou- tume de Bretagne , &: qu'il avoit confervé des copies de plufieurs Confultations qu'il avoit données fur des qucftions difficiles par rap- port aux difpofitions de la même Coutume dont on lui avoit deman- lirez , Pierre III. fon SuccelTeur, » &: Dom Sanche Infant de Caftil- » le fécond tris d'Alphonfc le Sage. wL'un & l'autre fçurenc mettre » en ufage de grandes vertus & de 3> grands crimes pour fatistaireleur » ambition. Pierre acquit le Royau- j) me de Sicile par une cruauté >} foûtcnue de beaucoup de politi- » que & de valeur.. Sanche ufur- M pa celui de Caftille par une inju- » ftice Si un attentat qu'il fit paf- »,fer pour nccclTaires. Mais Pierre » ne fit éclater le ficti qu'au mo- M ment de l'exécution. Sanche fit «d'abord éclater des démarches î> do.nt.lcs gens ccbifés conclurent » qu'il iroit plus loin. On rapporte enfuite les intri- gues par iefquciles ce Prince après- la moit de Ferdinand de Laccrda fon frère aîné , trouva le moyen de fe taire déclarer par les Etats de Call:ille héritier préfomptif de la Couronne , au préjudice de fes ne- veux. » Si le Roi fon père eut phi- » lofophé auflî prudemment fur les » affaires d'Etat qu'il philofophoit » fubtilement fur les fecrets de la »ï nature, il l'auroit anêté au pre- j> mier pas, mais Alphonfe étoit de w ceux qui fçavent tout, hors ce qui >'fc patTe chez eux. Et il n'apprit le complot de Dom Sanche que lorf- qu'il n'éioit plus polfible de l'arrê- ter, bien-tôt après ce fils ambi- tieux non content d'avoir fait éta- blir fon droit à la Couronne par les Etats du Royaume , n'y laiffa à fon perc qu'une ombre d'autorité , de- là naquirent des guerres civiles ; l'Aureureft obligé d'en fufpendre le récit pour raconter la manière artificieufe fv.' cruelle dont Pierre d'Arragon enleva en 1 z8i. la Sici- le à Charles d'Anjou. ^ Evénement "li mémorable dans l'Hiftoirc , lî » funeftc au repos de l'Empire , & V dont à peine quatre fiécles ont w pu arrêter k déluge de fang qui ï E V R I E » a inonclc la Sicile 5c Tltalic. La " Monarchie Efpagnole en a reçu , n (ijoiite-t-il^ un accroiffement con- » (Idcrable , mais l'Efpagne en a » été affoiblie, & à bien apprécier » toutes chofes dans l'état où elles î> font aujourd'hui , on peut dire » que c'eft une de ces conquêtes n qu'elle devoit fouhaiter à fcs en- » nemis. Le malheur de la France «elt de l'avoir conteftée ,. 6i s'il sj ne lui eft pas glorieux d'avoir î5 fuccombé dans cette famcufe » querelle , il eft avantageux » pour elle de n'y avoir pas pré- « valu. Après avoir raconté tout ce qui prcccda & ce qui fuivit cette iCrucUe fcène , & entr'autrcs le fa- meux duel accepté par les deux Rois , on revient aux troubles que caufoit en Efpagne l'ambition de Dom Sanche Prince de Caftille. Al- phonfc fon père fe vit forcé de fe lier avec les Maures, &: d'emprun- ter leur fecours pour réduire un fils rebelle ; mais la mort l'enleva lorfque fon autorité commencoit à fe rétablir : C'eût été , dit M.iria- na , un Prince très pntdent, s'il afoit vâ l'être pour lui même. Par fon Tc- ftament il déclaroitfuccelîivement héritiers de la Caftilk fes deux pe- tits fils Alphonfe & Ferdinand de Lacerda,aufquels il fubftituoit Phi- lippe Roi de France. Cette difpo- fîtion obligea Dom Sanche à re- chercher l'amitié du Roi de France, &C lailfa Pierre d'Arragon feul ex- polé à toutes les forces de ce Prin- ce. Il entra dans le RouifiUon avec »ne armée confidcrable , mais R i i7îr- ^ 105 après avoir remporté quelques avantages , les maladies contraigni- rent Philippe de fe retirer, & il en mourut lui - même .1 Perpignan. Son tival^ ne lui furvccut pas long- tems i la mort le furprit à Ville- franche à l'âge de 46 ans , lorfqu'il méditoit de nouvelles conquêtes en Italie. w Quelques - uns écrivent que » l'excommunication que le Pape » avoir lancée contre lui pour avoir » envahi la Sicile , l'inquieta au » dernier paffage , quoique l'Evê- » que deTarragonelui en eût don- ^ né l'abfolution \ &i Mariana dit , » qu'il importe pour l'exemple pu- » blic qu'on le croye. Il eft encore » plus important , reprend le Père "d'Orléans, que l'Hiftoire fafle » obferverque ce Roi mourut dans » la force de fon âge , & que les » Princes foient perfuadés qu'il cn- » courut les châtimcns dont Dieu » menace dans l'Ecriture ceux qu'il » appelle des hom?nes defan<^. Cbul- M qu'un adit affez fpirituellemcnr , » qu'il avait eu plus de célébrité , j> (jit'il navoit mérité de lok.mge. Alphonfe le Chaftc fon fils & fon Succeffeur fut d'un caraderc tout différent , mais fa modération étoic moins un elTet de fon tempéra- ment , que de fa prudence &: de fa raifon. Ce tut par ce principe qu'il lailTa la Sicile à Dom Jacques fon trere qui s'en étoit fait couron- ner Roi à Mclfine , & qu'il con- clut une paix entre ce Prince & Charles le Boiteux fils de Charles d'Anjou. Ainfi la Sicile refla àl'Ar- rigonnois aux conditions qu'oa 104; JOURNAL D verra dans l'Auteur avec toutes les circonftances remarquables qui ac- compa^ncrenr cette paix. Ce Prin- ce étant mort a i âge de zz ans , Jacques IV. qui étoit déjà Roi de Sicile , lui fucceda , &: fuivant le même plan , trouva le moyen d e- Joigner la guerre de fcn Pays , &C de s'y rendre redoutable & puif- fant. De-là on paffe aux affaires de Ca- ftille , on décrit les divers mouve- mens que les prétentions des Prin- ces de la Maifon de Lacerda y cau- fercnt ; on n'oublie pas la mort furprenante de Ferdinand IV. fur- nommé l'Aiourné , parce qu'il mourut fubirement 30 jours après qu'il eut fait exécuter à mort deux Gentiliiommcs , qui en mourant l'avoient cité à comparoît'e à pa- leil jour au Tribunal de Dieu. Il laiffa fes Etats <à Alphonfe XI. qui ctoit encore au berceau , fon ayeuJe prit le gouvernement de fes Etats , les conduiiît avec une prudence ÔC un courage au delTus de fon fexe, & donna une Ci bonne éducation à fon pupile , qu'il eft compté par- mi les plus grands Rois qui aycnt occupé le Trône de Callillc. La fu- nefte pafllon qu'il prit pour la fa- meufe Elconore de Gufman ternit un peu fa gloiic , di en arrêta mê- me pendant quelque tems le cours. Il ne iaiffa pas cependant de taire d'étonnantes conquêtes fur les Maures. Allarmés de les progrès , ils alTemblerent une armée prodi- ■eieufe qu'ils levèrent pour la plus grande partie en Airique. Le Roi Se Caftille fe vit obligé de deman- ES SÇAVAN S, der du Iccours aux Princes Chré- tiens , pour s'oppofer à la rapidité le Moine Berthaud , à qui on en «attribue l'invention en 1355. ne j>peut avoir que perfedionné cet » art de détruire le genre humam 30 plus digne d'un démon que d'un 3> Moine. Par la prife d'Algezire le Roi de CaftiUe fut en état de former le liè- ge de Gibraltar; mais la pcfte s'é- tant mife dans fon armée , il en fut lui-même attaque , Si laiiTa à rage de 5 S ans le Trcine de Caftille à un héritier qui devint le Tyran & le fléau de l'Éfpagne. Ce Prince étoit Pierre le Cruel qui mérita ce nom odieux par les fanglantes exécutions qui ont ren- du à jamais fa mémoire exécrable 5 fa cruauté étoit plutôt l'effet d'un tempérament fanguinaire auquel il s'abandonnoit, que d'une coupable E R, Ï7 5 y. ,oy politique conduite par l'ambition , comme on l'a reproché à Pierre IV Roi d'Arragon qui regnoic dans le même tems. La jaloufie & l'intérêt diviferent long - tems ces deux Princes. Le dernier trouva fur-tout dans le Comte Henri de Tralbnu- re fils d'Eléonore de Guzman maî- trelfe d'Alphonfe XI. un inlbu- ment propre à fe venger de fon ri- .vai. La France fe joignit à lui pour accabler le Roi de'Caftille. Ce monftre avoit époufè Blanche fille de Pierre l'Duc de Boui bon & Ca- dette de Jeanne Reine de France femme de Charles V. Blanche étoit d'une grande beauté, & avec une vertu févére avoit une douceur charmante : tant de charmes ii'a- voient pu adoucir la férocité de fon mari , & il l'avoit fait périt cruellement à l'âge de 12 ans dans un Château , où il l'avoit tenue quelque tems enfermée. Cet atten- tat engagea la France à foûtenir les prétentions du Comte de Trafta- niare contre Pierre le Cruel. Le cé- lèbre du Guefclin dont on nous donne ici le portrait , eut le com- mandement desTroupes qui furent deftinées pour cccre expédition. Le fuccès en fut d'abord extraor- dinaircment heureux ; mais le Roi de Caftille qui paroi/Toit perdu fans relfource , ayint avec le fc- cours du Pnnce de Gilles , l'un des plus grands Capitaines de fon tems, gagné la bataille de Navarrete con- tre Henri , ce Pnnce fut obligé de céder à fon tour à la fupenorité que cette vidoire donna au Roi de Calliilt; i il l'auroJt cûnfcrvée , ù. io5 JOURNAL D la férocité de fon naturel, lui avoit permis de ménager l'amitié des <îrands & da Peuple qui étoicnt irevenus fe foû mettre à fe3 Loix. Son frère narurel profita de letir mécontentement , éc fécondé d'ua nouveau renfort de François que Charles V. lui donna , il rentra en Efpagne , gagna à fon tour une ba- taille contre Pierre, le fit prifon- nier & le tua de fa main de la ma- nière qu'on le verra dans notre Hi- ftorien. Ce Liv'requi eft le cinquiè- me eft très-curieux , & il faut y lire le détail de tous les évenemens , que nous n'avons fait qu'effleurer. Henri fut reconnu en qualité de Roi par tous les Caftillans , nuis ( Liv. é. ) il ne conferva pas fans peine un titre qu'il avoit acquis avec aflez de facilité. Le Roi de Portugal , les Ducs de Lancaflrc , & de Cambridge , du chef de leurs femmes, lui difputerent cette CouroHne ; îc les Rois de Navarre & d'Arragon firent en même tems valoir diverfes prétentions qu'ils âvoienr contre lui , Mahomcd-La- çus Roi de Grenade , prit aufli les armes pour profiter de la conjonc- ture favorable que cette fituarion lui offroit, & le nouveau Roi étoit perdu û tant d'ennemis euffenr agi de concert , mais leur jaloufie mutuelle lui donna le tems de con- jurer la tempête , dont il éioit me- nacé. » Il ne falloit pas une moin- j> dre valeur , une moindre con- » ftance , de moins grands talens , 1) moins d'adreife , moins de bonne ■ fortune que celle qui l'accompa- «gnoit, pour fe foûtcnir iur ua ES SÇAVANS, >' Trône encore chancellant par a tant d'endroits. 11 mit tout en » œuvre pour s'y affermir , & le » fuccès qu'il eut à conferver , ce "qu'on peut appeiier le fruit de j> fon crime , en effaça dansl'efpric " des hommes d'autant plus aifé- n ment la tache , qu'il n'y emplova » que fes vertus. Ce Prince mourut comblé de gloire , &r îaifTa fon Royaume tranquille à Dom Juan fon fils , il lui donna en mourant plulleurs avis , parmi lefquels nous remarquerons celui-ci, » que com- » me il y avoit de trois llrtes de » gens en Caftille , les uns quis'é- « toient attachés à fes intérêts con- 2J tre ceux du Roi Pierre , d'autres M qui avoientfuivi ce Prince, quel- " ques-uns qui étoicnt demeurés » neutres , il falloit maintenir les » premiers dans les biens dont ils -» étoient en poirellîon , mus qu'il = ne s'y fiât pas tellement qu'il ne i> craignît leur légèreté , qu'il fe » fervît fans crainte des féconds » dans l'adminiftration des affaires, » leur fidélité à un mauvais maître, >» étant un gage à un meilleur, de X celle qu'ils auroicnt pour lui ... . » Se qu'il éloignât les troifiémes » des Charges publiques, comme "gens qui n'avoient en vue que n leurs intérêts particuliers. Ceux qui ont écrit, dit notre Hiftorien, que ce Prince ne rcfTembloit pas à fon père , ont plutôt comparé la fortune de ces deux Rois que leurs qualitez. Elles étoient preique auîH grandes dans le fécond que dans. le premier , mais les circonftances différentes dans kfquellcs il fc F E V R I îrouva, ne lui permirent pas d'en riter rout l'avantage qu'il devoir iiaturellemcnt en attendre ; & s'il n'étoit mort d'une chute de cheval à l'âge de 3 3 ans dans la douzième année de fon règne , on peut croi- re qu'il auroit profité des malheurs qui lui étoient arrivés, & que la tranquillité qui commençoit à ré- gner dnns fes Etats , y eût rétabli l'ordre & l'abondance : il lailfa un fils en bas âge , qui étoit d'un tem- pérament llinfirme qu'on lui don- na le fumom de valétudinaire. Sa vie qui ne fut pas longue fit que le Royaume éprouva deux fois prcf- queconfecurivementies maux que eaufe la minorité. Mais avant que de toucher aux cvenemens qui en furent la fuite , on reprend ici ce qui regarde l'Hi- ftoire d'Arragon. Ce Royaumes'é- toit fort augmenté par la profon- deur du génie de Pierre IV. qui laiira à fon SuccefTeur 4 Royau- mes , 011 il étoit prcfque entière- ment le maître. Les Ifles Baléares , celles de Corfe, de Sardaigne, ik de Sicile , on verra par quelles révolu- tions ces differcHS Etats turent réel- lement réunis à la Monarchie d'Ar- ragon fous le règne de Martin fcul de ce nom , & Succe fleur de Jean fils de Pierre IV. On y trouvera auGl un morceau aflez étendu fur l'origine & fur l'autorité du grand Jufticitr d'Arragon nommé com- munément le fitjlice Majeur ^ di- gnité que Philippe V. a entière- ment abolie en foûmettant l'Arra- gon aux loix de Calfille. De-là on revient aux affaires de E R. ,• 175;. ,07 ce Royaume, elles furent dans une grande-agitation pendant la mino- rité d'Henri III. mais la douceur &: la fermeté avec laquelle il gou- verna fes Etats lotfqu'il fut majeur, ïcparerent en peu de tcms les de- fordres que l'a^nbirion des Grands y a voit caufés.. MalJieureufément pour fes Peuples fon règne ne fut pas de longue durée , fa fintc qui étoit naturellement très-foible, fe trouva fi languilfante, qu'à lâge de zyans elle ne lui permit plus de s'ap- pliqueraux affaires, & iobligcrenc de nommer l'Infant fon frère Ré- gent du Royaum.e. Ce Prince ne le gouverna pas long-tems en cette qualité , Henri mourut la même année , ne laiftànt^qu'un fils en bas âge. Les Etats craignant de tombée dans les maux où la minorité pré- cédente les avoit plongés , offrirent la Couronne à l'Infant Dom Ferdi- nand. Mais ce Prince généreux rc- jetta cet offre avec indignation., & (\ la Reine qui fut nommé:e'Ré.? gcntc avec lui, avoit imité fa mo>- dération , -cette minorité n'eût été agitée d'aucunes tadfions. C'e(^ ici , c'eft- à-dire à là page 449 de ce fécond Volume , que fi- nit le travail du Pcre d'Orléans ; ce qui fuit, camme nous l'avons déjà remarqué dans l'Extrait de ce pre- mier Volume j jufqu'à la page 225 nn anno fuperiori édita „ 1x6 JOURNAL D niwc recognha & plnrimis fiovis ar- mimentis firmioribus aud.t , AuUore Godofredo Erneflo Frirfcliio , Conjî- liario illuftnjfima Domits Loeiven- fteiniolfi^ertheimicie. /ipud Jo. Ru- dolphitm CrocKerum 1734. i» 8°. De T u b I n g e. ^acol/i-iVHhelmi Imhofii Notitia Sacri Romani Imperii procerum , tkm Ecclejtaflicoi-um cjuam facularium Hiftortco ■ Heraldico-Genealogica ad hodterrmm Imperii StatHm accommo- deita. Editio cjHinta. Partim ex an~ notât lonihus & Scbedis ipjîns ^uElo- ris vantm ex propriis Obfervationi' bus & cnlUElts multis fttpplementrs inflauraia , miEla. , correBa , locu- pletata jludio & ep:rÀ Jo. Davidis Koclcri , H'Jloriarum & polit. Pro- fefforis Publici & Bibliothecani in Umverfitate Altorjinà. Siimptibus Jo. Georgii Cottx. ly^^. i»- folio z, vol. Le premier Volume de cette nouvelle Edition avoit déjà paiu dès l'année 17^ i. De h a l l. Joannis Gottlieb Heinecciijw»''/- confulti , Soc. Reg. Maj. Pruf. Cou- filiarii intimi , & Jttris ac Philofo- phia in Ilhtftri Fridericiana Profcffo- ris ordinarii , HiSTORIA JuRIS Cl- VILISROMANI AC GeRM ANICI,^«.Î Htriitpjue origo & itfits in Germanià ex ipjts font ib lis ofiendttur : commod auditoribits methodo adornata , midtipjHe Obfervatiomhus haitd vui~ ■garibus pajfim illuflrata. Sumptibtts ES SÇ A VA NS. Jo.tn. £>-wy?/ Fritlch. 1755. /«-S". Trulhitus ijuatuor Anatomici dt Aure Humana , tribut figuranim tabulis illuflrati ^ AuP-ore ^oun. Fri- denco Cnilebhom , Atsd. D. & Profef. Public. Suwpttbits Orphano- tiophei. 1734- '«-4". ANGLETERRE. De Londres. On diftribue aux Soufcriptcurs le Catalogue des NLinufcrits de la Bibliothèque tle S. M. Ji. c'eft un Volume ;«-4°. SUISSE. De B a s l e. Le premier Tome de l'Hiftoir^ de la Suide par Gilles Tjchudi , pro- pofé par Soufcription il y a envi- ron deux ans , eft fur le point de paroîtrc avec des Remarques Se des additions conlidcrables. DeGeneve. Bottfèfuet &c Compagnie viennent de diftribuer en forme de Lettre l'annonce d'nn grand Ouvrage , dont l'imprellïon fera incelTam- mcnt achevée. Il eft de M. Giben célèbre Canoniftc de Paris , dont on a déjà un grand nombre d'Ou- vrages du même genre. 11 fera en trois Volumes in -folio Se intitulr; : Corpus Juris Ciinonici , per régulas Katuralt ordine digejias , ex eodem Jure j & Conciliis , Patrib-us ati^ue altitude ■ T E V RI etiunde eiefumptas ^ expojlti. Opus , tum in rébus ohfcHris claritate ^ tum Aifperps CoUeEiione ac dele^u , in contrariis conciliittione eximium i Jî- mnlque indicibm ac Prdfdtionibus , Notiffftie ^uàm pluritnis & exquijïtis iUuftratum. Authore Joanne - Vetro Gibert , DoBore Theologo & Cano- mfla. Ce Livre, pourrimprefllon duquel les Libraires afTurent qu'ils ont pris toutes fortes de foins , afin de le faire paroître dans la plus grande perfection , fe vendra 55 livres argent de France , & on le ■donnera à meilleur marché ii on en prend ploficurs exemplaires à la fois. FRANCE. De Paris. Cèogyaphie Phyflcjue , ou Eflay fur l'Hiftoire Naturelle de la Ter- re , traduit de l'Anglois de M. IVoûdivard^ par M. Nogitez , Doc- teur en Médecine ; avec la réponfe aux Obfervations de M. le Doc- teur -Camerariiis ^ pluficurs Lettres écrites fur la même matière ■, 8i la diftribution méthodique des foûi- Ics j traduits de l'Anglois du même E R ; I 7 5 y, j 17 M. IVoodivard ^ par le R. P. Nice- ron , Barnabitc. Chez Biic.fon , rue Saint Jacques j à la Science. 1735. in - 4°. Fie de l'Empereur Julien. Deux Parties. Chez Prault père , Quai de Gêvres. 1755. in-ii. Lettres fur divers Sujets de Mo- rde & de Pieic. Tome V. Se Vî. Chez CuiUaume Cavelier ^ rue Saint Jacques, au Lys d'or. 1734. ■in - 1 1. Amufemens Hifloriofues. Clicz Promit perc ; le Clerc , Grand'Sal-ie du Palais , Sc Promit hls , Qi;ai dt Conty , à la Charité. 1735, /«-li, 2. vol. DiJJert.ttions de Aùdcch'.c. Tonje IL contenant une Dijfertationfur la Goàte , & la méthode de la guérir Tadicalement , avec vn Recueil d'Obfcrvations fur les maladies dé- pendantes du défaut de Ifi pcrfpira- tion. Par Vieiie Default , Dodcur en Médecine , agrégé au CoTlége des Médecins de Bordcuiv. Ch.z Jacques Gusrin , Quai des Augu- ftins. 1735. in-ii. Les Avanmres de Zellm ■& de Damafine. Hiftoire Atriquaine. Chez Aiaudouk , Qiiai des A-ugu- ftins. 1735 f«i2. Fautes à corriger dans le Journal de janvier 1755- PAg. 9. dans le titre, lig. 12. Hanovrix , lif. Hanovix' : Ibid. lig. 1 5, Joh. P. Semidi, lif Joh. B. Schmidt : Pag. 10. lig. 8. Schmidi , ///. Schmidt : Ibid. col. première , lig. 13. pour, lif. . Pour : Ibid. lig. 1 9. Salufte , lif. Sallufte : Ibid. col. 2, lig. 15. Toricellc , //yC Toricelli : Pag. II. col. I. lig. 21. Afllcurate, ///! DiAflîcuratt : Ibid. col. i.lig. itf. ies Marchetis , lif, les Demarciièitis : Ibid, lig. a. Valalva , lif Vaiialva , Février,, Q, ii8 \bïà. lig. II. Santorinus, lif. Santotînî : Ibid. lig. OS. Valifnierî ; llfei^ Vallii'nieri : Ibid. lig. 3 1. corrigez la même faute : Ibid. lig. 31. Lcuve- noech, /;/^^ Leeuwenoeck : Ibid. lig. 53. Artfoclier , lif. Hartfoeker ; Pag. 15. col. 2. lig. 51. CliP.les, lif. Charles : Pig. 14. col. ilig. 27. d'Au gufte- Antoine- M ufa , lif. d'Augufte , Ancoinc-Mufa : Ibid. col. 2. lig. fix , Corncil , Uf Corneille : Pag. 1 5. col. 2. lig. 1 2. & 13. pour fembler, lif. pour ne fembler : Pag. 16. col. i. lig,. 4. expcrtum , lif. cxpertam : Ibid. col. 2. lig. }. Marius-Caton , /// Marcus-Cato : Ibid. lig. ii.& 12. )e dcnends , lif.]c te dcfens: Pag. 18. col. 2. lig. 19. prens ,lif. prcnt; Pag. 2u. col. I. iig. lë. Méthridat , lif Mithridat : Pag. a. col. i. lig. 12. la. Flandre , lif. h Hollande : Pag. 34. col. 1. lig. 10. ÔC ri:, les Arabes mêmes , lif. les Arabes même : Ibid^ lig. 11. les premiers du , lif. les premiers tems du : Pag. 5 2. col. 2. lig. 1 3. Playades , lif. Plaïades : Pag, 39. col. 1. lig. 30. Obfervation, /// Obfervations : Pag. 41. col. 2. lig. 33, Frapaolo, ///^.î, Fra-Paolo : Pag. 54. col. 1. lig. 33. d'idropifie , lif d'hy- dropilîe : Pag. 55. col. i. lig. 12. MitridateRoi de Pont, lif Mithridate Roi de Pont : Pag. jtf. col. i. lig. zÉ. Parée ^ lif Paré : Pag. 57. col. I. lig, ïo. Chirreux , lif Schirreux. ^ r / 5. Nous avons oublié d'avertir que îe Livre de M. Gurifch dont il eft parlé p. 5i. & qui eft imprimé à Leipfic, fe vend à Paris , chez Jol- lai». Libraire, Quai de la Tourneile. TABLE Des Articles contenus dans le Journal de Fev. 173X. Hlfioire EccUfîafti^He 1 pour fervir de Continuation à celle de M. L'j4l;bé ïlcmy ,Tom. 34. page ^j Hiftoire du Théâtre François , 6Z Anutomie Chirurgicale fiw Defcription exaEîe des parties du Corps humain ^j^ Hifioire .Ancienne des hgyptiens , des Carthaginois , des yiffyriens ^ des Ba. hyloniens ^ ëjbray ^ MM. Baro>i &: de Ttllars ^ Médecins de Luçon , & quelques autres. Quant aux nombreufcs planches qui accompagnent cet Ouvrage , & qui n'en tont pas le moitulre mérite , M. de Réaumur a foin de donner aux Deflînateurs & aux Graveurs dont il s'eft fervi, lesloiianges qui leur font fi légiti- mement dûè's pour l'exactitude & l'élégance d'un travail fi délicat &: fi épineux. L'Auteur nous avertit , en finif- fant fon premier Mémoire, que fon delTeiu avoit été d'abord de tracer ici un plan détaillé de l'or- dre où il avoit cru devoir placer les différentes claffes d'Infeiles : mais qu'il y avoit renoncé , pour ne point tomber dans des redites cn- nuyeufes , en décrivant deux fois chacun de ces animaux. Il nous dé- clare encore, que bien loin de bor- ner l'Hiitoire des Infedtes à celle des animaux qui ont des incifions, & d'où le nom d'InfeÛe tire fon origine ; il ne fuit pas même l'e- xemple de Moitfet , en la bornant comme lui à celle des animaux qui ont une certaine petitefle. Il pré- tend que la grandeur d'un anûqal MARS, ne doit pas fuffire pour le retran- cher du nombre des Infc<5i:es ; que des Araignées auflî grolles que des Moineaux , telles qu'en ont vu certains Voyageurs, de même que des Papillons , dont l'étendue des aîles furpalTe celle qu'occupent en volant certains petits Oifeaux , n'en font pas moins des Infeiftes : qu'à la vérité ce feroit un furieux Infede qu'un Crocodile; mais qu'il ne feroit pas difficulté de lui don- ner ce nom, qui lui efl:dû,en qualité de Reptile. Il range auffi parmi les Infedes les Orties de mer , les Li- maces & autres Coquillages , les Lézards , les Grenouilles , les Cra- pauds , &c. IL Le fécond Mémoire de ce Volume roule fur les Chenilles en général , dont il contient les divi- fions en dalles & en genres. Les Chenilles font de ces Infcftes qui paroiflent les premiers au Prin- tems , &: qui tont une clafTe des plus nombrcufes. Leur état de plus eft partager, & elles doiventtoutcs devenir des Infedes allés. Ce font ces deux confiderations qui ont principalement déterminé l'Acadé- micien à commencer ces Mémoires par les Obfcrvations qui concer- nent cette forte d'Infedes , & qui fervent à les diftribuer en leurs clalTes & en leurs genres. Mais il fe prefente fur cela une difficulté. Quand on trouve la defcription d'une Chenille , on eft curieux d'apprendre en quelle forte de Pa- pillon elle fe transformera ; & quand on voit un Papillon , l'on eft en peine de fçavoii de quelle Chenille il eft forti -, ùé îilûn.'r's qu'on aime à voir , autant qu'il eft poffible , chaque Chenille accom- pagnée de fon Papillon : ce que ne permet pas toujours la diftribution des unes Si des autres en leurs claf- fes Se en leurs genres. Car il arrive fouvent j qu'en prenant pour ca- raderes clajfiejues Se génériques ceux qui nous frappent le plus ■■, les Ciicnilles de même claffe , ou de même genre , donneront des Pa- pillons de différentes claftes , & que les Chenilles de différentes clafTcs donneront des Papillons de même clalTe & de même genre : Se il en fera de même de la diftribu- tion des Papillons , par rapport aux Chenilles. Si chaque Papillon fe rencontre avec fa Chenille , ou les Papillons ou les Chenilles ne feront pas en ordre ■■, Se c'eft un in- convénient inévitable. Mais l'Au- teur y trouve un remède qu'on peut voir chez lui , & que pour abréger nous ne particularifcrons pas. Il aime mieux fuivre les claffes des Chenilles , que celles des Pa- pillons , parce qu'en commençant par celles-là , il eft plus facile d'a- voir complettes les Hil1:oires des unes & des autres ; & que l'Hiftoi- re des Papillons ne donneroit pas l'Hiftoire générale des Chenilles. Il parcourt donc d'abord les Va- rierez que les Chenilles nous font appercevoir , Se principalement celles de ces fingularirez qui pa- roifTent les plus favorables à l'éra- bhffement des claffes & des genres. Le corps des Chenilles , beaucoup pitis long que large , eft compofé Si} Ï30 JOURNAL D d'anneaux membraneux , circulai- res oiî ovales, au nombre de douze, en y comprenant la partie qui tor- me l'anus , & au premier delqucls la têrç écailleufe de l'Infede ell: at' tachée. Les Chenilles ont des jam- bes de deux efpeceSj les unes écail- leufes , les autres membranenfes. Il cft commun à toutes les Chenilles d'avoir fix jambes écailleufes^ trois de chaque côté , ' parrant des trois premiers anneaux , & nommées ■premières jambes ow jambes antertiu- res, Qiielque nombreufes que fuient les différences qui diftin- gucnt les lnfe'of««o?'«w-^^fwor«w,5'«?/- fiones ^ Sotjfons , la Ville nommée ^ugiifla-Suejfwnum , &c. & c'eft ce que l'on rencontre fouvenc dans l'Itinéraire , 6i fur quoi Clavier n*a pas manqué d'infifter. Par delTus tout cela , une bonne partie des noms desVilles&rdesGîtes y ont des dénominations indéclinables, ufa- ge qui bien qu'antérieur à Con- ftantin , eft devenu très-commun après lui , comme il paroît par les Ecrivains de ce temslà. Mais quoique la difpofition pré- fente de l'Itinéraire ne femble pas pouvoir remonter plus haut que le quatrième (iécle ; cela n'empêche pas que l'origine & tes premiers ef- faisn'en puifTent erre plus anciens. II. feroit fupcrflu d'en apporter pour preuves les routes frayées &. rendues praticables aux hommes & aux voitures , dans les Provinces de l'Empire nouvellement conqui- fks ; ce font des faits fuffifamment ES SÇAVANS, connus. Mais on doit obferver qu'Agrippa gendre d'Augulle ayant expcfé aux yeux des Rou- mains une Carte Géographique, où toute la terre étoit rcprefentée dans, toutes fes dimenfions, comme l'af- fure Pline; on peut tirer de là cette confequence , que fous Augutk , la terre avoit été déjà mefurée , quoiqu'impartaitement , à caufe des parties qui en reftoient encore inconnues. Il y avoit des grands chemins tracés par route l'It.ili-; ; la voye Eg7iatia , qui depuis long tems conduifoit en Orient par la Macé- doine , éroit ornée de fes colonnes miUiaircs d'efpace en efpacc ; la voye Aurelia menoit droit en Efpa- gnc. Mais plufieurs Pays étoicnt encore demeurés incultes à cet égard. Dans la fuite , Dcnvs , Straboii,. Mêla & Pline ajoutèrent beaucoup en ce genre aux travaux de ceux qui| les avoienr précédés ;"en forte que fous Domiti«n , Metius-Pom- polîanus fut en état de faire voir publiquement toute la terre repre- fentée fur une feuille de parche- min. Marin de Tyr & Ptolomée, qui vinrent après ceux - là , firent de nouveaux progrès, quoiqu'avec un fuccès quelquefois moins favo- rable , à caufe de la grandeur de i'entreprife ; en quoi ils ne furent pas médiocrement aidés par les continuelles viftoircs dcsRomains, qui avoient pénétré jufqu'au fond de la Grande - Bretagne , fous la conduite d'Agricola , & jufques dans la Dace , l'Arménie , la Mé- fopotamie, & l'Arabie fous Trajan. M A R Ce fut alors [ dit l'Editeur ] que tout l'Empire Romain put être exaiftemcnt mcfuré , &: cjuc tous les grands cheniius furent non feu- lement parragés de diftance en di- ftance , en Gîtes & en Portes , mais encore réduits en Cartes ab- folumcnt necelfaires pour faciliter la marche des troupes ii des voitu- res : en forte que le General pou- voit annoncer deux mois d'avance le jour & l'heure de fon départ ; & faire afficher la Carte de la route qu'il dcvoit tenir jour par jour. C'eft: ainfi qu'en ufoit l'Empereur Alexandre-Scvcre , qui employoit Acholius pour écrire les marches de l'armée ; fonction que remplif- foit auprès d'Alexandre le Grand un nommé Baiton , dont parle Athénée. Peut-être [ ajoute M. WeiTeling ] cet Achoiius de Sévè- re étoit-it du nombre de ceux qui mirchoient devant l'armée pour reconnoître les endroits propres à camper ou à faite alte ; car un Géné- ral ne pouvoit connoître avec trop de détail les différentes routes &: la fituation des lieux par lefquels il devoit conduire fes troupes : fur quoi notre Editeur cite un paffage de Végéce ; d'où il fuit que les rou- tes étoient non feulement écrites , mais tracées & rcprefentées l'ur Je papier j ce qu'il confirme par un paffage de S. Ambroife & un autre de S. Hilaire fur le Pfeaume cxvni. Il eft donc très-pofTiblc [conti- nue l'Editeur ] que les Itinéraires étant d'une necelFité indifpenfable pour les expéditions militaires , le nôtre foit originairement de ces an- ciens , dreiïeS ^' mis en œuvre dans l'Empire, 6c lequel par fuc- ceffion de tcmsfe fera beaucoup ac- cru 3c enrichi de nouveaux noms de Villes. Cet Itinéraire ne peut remonter plus haut que le tems de Septime-Sé-Vère & de Caracalle , à caufe de plufieurs chemins de la Grande Bretagne que l'on y voit partir du mur qu'y firent conftrui- re ces Emnereurs \ ni defcendre plus basque le Grand Conftantin , puifqu'on n'y trouve qu'un petit nombre de cesfurnoms de Villes, lefquels prirent alors la place des anciens noms. C'eft ainfi qu'on n*y rencontre nulle part Conflumhie , qui eft le nouveau nom de Cirte Ville de Numidie , non plus que Nies en Thrace , dénomination que prit Ofludiz-um , fous Confian- ce; Ântarade n'y eft jamais appellée Confiance^ nom que lui donna le même Prince. VoiU ce qui fc peut dire de plus probable & de plus fenfé au fujet de l'origine &: du progrès de notre Itinéraire. Mais prétendre en déterminer l'Auteur , ce feroit vouloir deviner , & l'Edi- teur avoiie de bonne foi qu'il l'i- gnore parfaitement: en quoi il s'af- focieroit volontiers Velfer de Enr. ton , s'ils n'avoient marqué trop de confiance en la Préface d'^thicus. Thomas Gale a pris là-deiïus un meilleur parti, dont Horfley ne s'ell prefque pas éloigné. Durcllcj ce n'eft nullement l'in- tention de M. Wcffeling, que tout ce qu'il vient d'avancer au fujet de l'Auteur de l'Itinéraire , foit appli- qué à ïïlinernire mariùm! , dont. il I40 JOUPvNAL D ne nous refte aujourd'hui uue des fragmens , mais dcfqucls on ne fçauroit faire trop de cas : Tcleft celui où font décrits les ports & les rades de vaijfeaux depuis Rome jufques dans la Gaule , &c. Miis ©n y a coufu dans le moyen âge divers lambeaux empruntés d'Ifi- dore de Séville & des Scholiaftcs des Poètes ; car notre Editeur aime mieux le croire ainfi [ & il en dit la raifon ] que d'accufcr Ifidore d'avoir pillé cet Itinéraire, quoi- que le procédé de plagiaire foit af- fez familier à cet Ecrivain. Maintenant, comme Vcgécedi- ftingue deux fortes d'Itinéraires.Ies uns feulement écrits , èc les autres peints : M. Weffelmg recherche de quelle cfpece pouvoir être le nôtre. Celui que Velfer a publié fous le nom de Table de Peutinger, eft peint fans difficulté. L'on y voit repre- fentés , quoique grofllerement, les gîtes , les montagnes , les fleuves , &c. & la plupart du tems d'une manière affez conforme à notre Iti- néraire , auquel celui - là donne beaucoup de jour , & en reçoit aulTî beaucoup en échange. Gui de Rûvenne [ appelle vulgairement l'Anonyme ] a eu cette Table en fa pofleffion , & en a fait grand ufage dans fa Géographie , comme il clt aifc de le reconnoître en confron- tant l'une avec l'autre , &: de dé- couvrir en même tems la fraude de l'Auteur , qui pour donner le chan- ge à fes Ledeurs ^ allègue en preu- ves des faits Géographiques qu'il met en avant , l'autorité de plu- fieurs Géographes entièrement iii- ES SÇAVANS, connus, pend.int qu'il copie rr's- fidéiement la Table de Peiiti;2£er. Quoiqu'une telle fupcrchcric dût taire perdre toute créance à un pa- reil Ecrivain ; notre Editeur cepen- dant le regarde comme pouvant être utile aux amateurs de la Géo- graphie , en ce que fa Table peinte paroît avuir été plus entière que la nôtre , principalement quant à l'A- frique , à l'Efpagne &: à la Grande- Bretagne. Or comme notre Itinéraire n'a jamais été peint ojj delllné , il s'en- fuit qu'il eft du nombre de ceux qui étoientfimplcment écrits. Ce- lui de Jcrufalem eft de même gen- re que celui çl'Antonin, avec cette différence feulement que les noms des Gîtes & des Portes font par-tout marqués exactement, & que le Catalogue des divers giftes. eft plus nombreux : différence , au furplus , que notre Editeur ne fçait à qui attribuer ; perfiadé pourtant d'ailleurs que les Gîtes & les Poftes étoient bien plus fréquentes fur les grandes routes , que ne le montrent ces Itinéraires ; puifque fclon Végcce , une journée ordi- naire chez les Romains n'étoit que de vingt mille pas; au lieu que les Villes & les autres Stations fur ces mêmes Itinéraires font quelquefois à 30 , 40 , 50 mille pas & plus, de diftance les unes des autres. Nous pafTons par deffus ce que dit ici M. WelTelingau fujet d'une traude à'An.iJlafe ou de quicon- que a écrit VAbre^é des Chroni- cjiies du Mont - Cajfm , [ publiée par M. Miiratoïi dans le fécond To- MARS •ms des Ec-'-hrins d'Italie J haiidc à laquelle no:r„' Itinéraire a fcrvi mcrvcillcLfonicnti &c nous venons enfin au compte particulier que M. WciTelin»; nous rend de cette nouvelie Edition. Ilpaflc d'abord en revue toutes les Editions préccdentes:cclles d'Aide, desJuntcs&deLyon^toutes trois des plus rautives : celle deChriftophle Lofigitceil , beaucoup plus corrccle, imprimée à Paris en 1 5 1 z. celle de ioius Sknler ^ publiée à Bafle , en 1 575. d'après un Manufcrit de Pi- thoii Si un autre de GxWcsSchud^ & accompagnée de Scholics qui r.e font pas à négliger : celle de Colo- gne , la meilleure de routes , pro- curée par les foins d'André Schott, avec fes Notes & l'excellent Com- mentaire deS/irita , auquel celui-ci malheureufemcntn'avoit point en- core mis la dernière main , comme i! n'efi: pas difficile de s'en apperce- vc ir : & qu'il auroit été plus capa- ble que perfonne de conduire à fon point de perfection , fur-tout , s'il ciâteu communication de la Table de Peutinger. Depuis l'Edition de Schûtt ^ on n'a point travaillé fur l'Itinéraire en entier. Rertius l'a in- féré dans fon Ptolomce de l'an ifi'iS. mais tel que le reprefentoit l'Edition de Schott , c'eft - ï - dire avec toutes les fautes d'impreflîon , dontC/wwfra voulu rendre Bertius refponfable. Vers la fin du dernier (îécle , Schelfti-ate fit entrer l'Itiné- raire dans l'es Antiqmtez. Ecclefiijli' çtt«;5:quoiqa'il paroifie n'avoir vu que l'Edition de Lyon , il n'a pas hific de rendre aux gens de Lettres î I75 5-. X4i và-\ important fcrvice en conférant ce Texte furie Manufcrit du Vati- can , dont il leur a par ce moyen communiqué toutes les f^ariantes. Plufieurs autres Critiques ont corrigé , chemin faifant , divers endroits de l'Itinéraire; tels font Abraham Ortelins , Charles de Saint Paul ^ Chï.Cdl.iriiis^ Cliivier Luc de Holftein , Paul Mérula ^ par rap- port à l'Efpagnc, la Gaule &rita. Ile ; Schiid & Sinder , par rapport aux Alpes ; Giulliman ^ pan apport àla'Suilfej Bertius de hi-cnÇo Alting^ par rapport à la Germanie -, Ha- drien de ralois , dans fa Notice des Gaules ; Honoré Bouche , dans fa C horographie de Provence ; Guillau- me Catel ^ dans fes Mémoires du Languedoc -, Arn. Ohiénan , dans fa Notice de Gafco^e., Pierre de Mar- c.J, dans iun Hijioire de Bearn & dans fa Marca-Hiffatiica ; Roder. Caro j dans fes Antitjidtez. de SeviL le ; Refendius S>C Fafconcellos ^ dans leurs j^mi^uitez de Portugal ; Bur- ton , Gale Se Horfley , par rapport à la Grande-Bretagne , &c. C'eft donc dans toutes ces four- ces que notre Editeur a puifé de quoi corriger ou éclaircir le Texte de fon Auteur ; ce qui a fourni une ample matière à quantité de fça- vantcs Notes , où il propofe fes conjcclurcs fur les changemens qu'il jugeroit convenables au Tex- te, mais qu'il fe garde bien d'y fub- ftitueraux anciennes Leçons , pour n'induire perfonne en erreur. Il examine aufiî dans ï^s Notes les fcntimens des divers Critiques, fur le fujet dont il s'agit , & s'il les 142 JOURNAL DES SÇAVANS. combat quelquefois j c'cft toujours avec toute la franchife & toute la liberté qui doit être permifc entre Gens de Lettres , mais fans y mêler aucune aigreur , à l'excrption ce- pendant [ dit-il ] d'un CL! iL' deux de ces Critiques , iefqucls par leur pétulance , fe font uiftement attiré unecenfureun peu plus vive. M. WeiTeling a fait au.Ti dans fes No- tes pluficurs excutfions , pour ex- pliquer par occafion divers palfages obfcurs des anciens Auteurs ; en quoi s'il s'eft «.juelquc-f-ois trop écarté de fon dillvid: •, il fe flatte que le public voudra bien lui faire grâce. Qiiantau Texte de fon Auteur, il l'a fait imprinici avec l'attention la plus fcrupuleufe , & en prenant par-tout pour guides les Manuf- crits. Ily a lellituéleurscas^ leurs inflexions aux nojns de Villes que Surita , pour plus de contormité aux règles de la Grammaire , avoit mis tous à l'acculanf. 11 y a retran- ché les aJîerif^Hes ^qm dans l'édition de Schott , faifoient croire fauffe- ment que ce Texte étoit mutilé. Il a eu foin de faire provillon de f^a^ riantes tirées de divers Monufcrits ; & qui lui ont été d'un très - grand fecours pour la corredion de ce même Texte > & il n'oublie pas de nommer avec éloge & avec de grands témoignages de rcconnoif- tancc , ceux qui i^slui ont fournieSi tels font MM. Barman ^Oudendorp, Aiarki^ni, J. Alb. Fabricms , d'Or- ville , Se ran-de-Wal. Il a aulîî [ dit-il ] grande obligation à fon arai M. Hemftcrhiys , qui a biea voulu fe charger de la fatigue de corriger les épreuves. Comme le compte que nous avons à rendre de l'itinéraire d'An- tonin , nous a infenûblemcnt me- nés beaucoup phis loin que nous ne peniîons , & n'a peut-être déjà que trop étendu cet Extrait ; nous renvoyons à un fécond ce qu'il nous reftcà dire concernant l'/.'/«e- raire de Jempdem , & le Compagnon de Voyage du Grammairien H iéroclésy à quoi nous joindrons quelques- unes des Notes de M. WeiTeling, pour offrir au public une idée , & comme un avant goût de l'érudi- tion de cet habile Editeur. CHRONICON SIVE ANNALES PRIORATUS DE DUNSTAPLE unà cum exccrptis è Cartûlario ejufdem prioratus. Thomas Hcarnius è Codicibus Manufcriptis in Bibliothecâ Harleiana defcripfit primus qux vulgavic , accedit appendix. C'eft-à-dire : Chronique on annales du Prieuré de Dunflaple , avec des Ex- traits tirés du Cartidaire du même Prtntré,& un Appendix : publié par M. H E A R N. A Oxfoic \-ii }. /«-8°. pp. 519. fans la Préface. VOICI le quarante-deuxiè- me Ouvrage dont M. Hcarn aewichi le Public depuis 1702. la plupart de ces Ouvrages font , comme on l'a vu par les Extraits que nous en avons donnés de tems en MARS f n tems , dcsHiftoires , des Rela- tions & des Chroniques , dont la ieélure eft très-utile à ceux qui veu- lent apprendre à fond l'Hiftoire d'Angleterre. Comme M. Hearn s'eft fervi dans l'Edition de cette Chronique de la copie qu'en avoit faite M. Wanley fur un ancien Manufcrir. Il donne dans fa Préface une idée de la Vie de M. Wanley quis'étoit fendu célèbre en Angleterre par la connoiflance particulière qu'il avoit des anciens Manufcrits ^' des caractères des difFerens ficelés , fur- tout par rapport à l'Angleterre. Voici les principaux traits de cet Eloge. Hunfrey-Wanley étoit fils de M. Wanley , Vicaire de l'Egli- fe de la Sainte Trinité de Covcn- try , de qui eft Auteur d'un Livre Anglois imprime à Londres in-fblio intitulé le Microcofme , ou VHiftoi- regénémle de l'Homvie. NotreWan- ley naquit à Coventry. Ayant été obligé dans fa jeunclTe de s'appli- quer à difFerens Arts Mcchaniques, il s'occupa à fes heures de loifir à feuilleter les anciens Manufcrits &: à imiter exacStcment les caraAcfes des difFerens âgcs^ & par ce moyen il fe rendit habile dans la connoif- fance des caradcrcs de chaque fié- cle. M. Lloyd , qui étoit alors Evê- que de Litchfield & de Coventry, entendit parler de ce talent du jeu- ne Wanley -, & ayant eu avec lui un entretien , dont il fut d'autant plus content que ce jeune homme parloit avec facilité , il l'envoya à Oxfort où M. Mil voulut lui ap- Mars. . 175 5; 14 J prendre a fond la L.ir.gue Gréque & la Latine. Mais il quitta M, Mil pour entrer dans le Collège de l'U - niverfité où il examina un grand nombre de Manufcrits ^ fur - tout de ceux de la Bibliothèque Bod- Icienne. Il apprit à lire les Manuf- crits des Langues Orientales , il s'appliqua aux anciennes Infcrip- tions , fur-tout à celles qui fe font confervées dans la Grande-Breta- gne. Il avoit refolu de donner au Public une cfpece de Diplomati- que dans laquelle il devoit joindre fes reflexions à des exemples qu'il auroit donnés , des caraderes de diiTercn^âgcs , par rapport aux Manufcrits que l'on conierve dans les Bibliothèques d'Angleterre. Notre Auteur cfl perfiiadè que fi les occupations de M. Wanley & fon caradere inconftantlui avoient permis d'exécuter fon projet, l'Ou- vrage auroit été utile au Public , parce que les Manufcrits dont les caradercs font fouvcnt difFerens de ceux de France , lui auroient don- né lieu de faire des obfervations dans cette Diplomatique, que le P. MabiUon n'a pu faire dans la fien- ne. Notre Auteur croit auilî que les Graveurs dont s'efl fervi le P. Ma- biUon n'ont point été alFez exads à reprefcnter fidèlement les carade- res des pièces que le fçavant Bene- didin leur a rcmifes fous les yeux. M. Wanley quitta l'Univerfitè d'Oxfort fans y avoir pris de de- grcz , & il fe mit à parcourir les différentes Bibliothèques d'Angle- terre : ce qui lui donna lieu de pu- blier le Catalogue dont notre Au- V 144 JOURNAL D teut a fouvent fait mention avec éloge. Il fut enfuite chargé par Mi- Iprd HarleyComted'Oxtorr de tra- vailler à ranger fa Bibliothèque Sc d'en faire le Catalogue. M.Wanley employabcaucoupd'annéesàcetar- rangementjparce qu'il s'endctourna fouvent pour s'appliquer à d'autres Ouvrages , entre lefquels on aiTu- re qu'il y en a beaucoup qui niéri- toicntpiusfon attention que celui qui fembloit devoir être fon prin- cipal objet. Notre Auteur met en- tre ces Ouvrages la copie que M. Wanley a faite de la Chronique de Dunftaple , avec quelques Notes à ia marge , & quelquestnots qu'il. a mis au-deffus des lignes pour la correction du Texte. Une autre rai- fon qui retarda beaucoup le Cata- logue de la Bibliothèque du Com- te d'Oxfort fut que M. Wanley ^ qui fans être fort fçavant , s'étok sccoûtumé à difcourir de tout avec beaucoup de facilité , étoit tort re- cherché dans les Compagnies , on aimoità l'cntendre.C'étoit fur-tout à table qu'il fe plaifoit à faire briller ce talent. Il mourut au mois de Juin \-ji6. étant âgé de 5 î ans. De M. Wanley l'Auteur palTe à la Chronique de Dunftaple. Cette Chronique avoit déjà été citée avec éloge par plulîeurs Hiftoriens An- glois. Mais 'V/anley eft le premier qui ait découvert que Robert de Morins, quatrième Prieur ce ce Prieuré , en foit l'Auteur , du moins pour la partie de cette Chro- nique qui précède l'an 1 241. Robert de Morins avoit été Chanoine de Mercthon qui étoit ES SÇAVANS, un Prieuré de Chanoines Réguliers fondé en 1 1 17. par le Roi Henri V. il fut Prieur de Dunftaple en 1211. deux ans après il hit nommé Vill- rcur des maifons des Chanoines Réguliers de la Province d'Iork. Enfuite unLègat duPapc le nomma Vifiteur de touslcs Monafteresdu Dicccfe de Lincolne, à l'exception dcsMonafteres des Templiers, des HofpitalierSj de ceux de l'Ordre de Cîteaux Se de Prémontré. Il afllfta au nombre des Prieurs nu Concile de Larran tenu en m 5. fous le Pontiticat d'Innocent III. en revenant du Concile il pafta une annèfi entière à Paris dans les Eco- les de Théologie. Notre Auteur croit que le Prieur de Dunftaple i'.trrcraunc aanéeà Paris, pours'in- fttuirede la méthode qu'on fuivoit alors dans l'Univerfitè de cette Vil- le,ahn de la faire obfervcr dans fon Monaftere. Il fe démit de fon Prieu- ré en 1:140. & il mourut au mois d'Avril 1241. fuivant la Chroni- que. Tant qu'il fut Prieur il eut plufieurs procès à foûtenir pour fonMonaftcre,ô: il paroît qu'il étoit. t;cs -zélé pour en faire valoir les droits & les prétentions i ce qui a fait dire à M. NX'anley que Robert de Morins étoit chicaneur , mais notre Auteur ne peut fouffiir qu'on donne une qualité fî odieufeà un Chanoine Régulier qui s'ètcitfait eftimer non feulement en Angle- terre, mais encore dans les Pays étrangers , & qui paroît dans fa Chronique plein de fentimrns , ^e probité & de Religion. Cette Chronique cojnmencc M A R avec l'Ere Chrétienne , mais de- puis ce tems-Jàjufqu'nu commen- cement du treizième lucic , on n'y voit qu'une Chronologie des Papes , auquel l'Auteur )oint quel- quefois des traits de leur vie , &c quelques Remarques tort courtes furrHillûire d'Angleterre. Il pré- tend que ce fut S. Clément qui vers l'an 85 envoya S. Denis à Paris, S. Régule à Senlis , S. Nicaife à Roiien, S. Martial à Limoge, faint Julien au Mans , & S. Lucien à Beau vais ^ pour y annoncer l'Evan- gile.Notre Auteur avertit qu'il but lire Belviicenjîbus au lieu de Behia- cmjibiis , qui eft marqué dans le Texte en parlant de S.Lucien. Cette Chronique forme un Ou- vrage alTcz fuivi depuis rani2i04 jufqu'en l'année i ^^6. on y voit les principaux évcnemens arri- vés lous chaque règne par rap- port à l'Angleterre , & aux Pays voifîns i quelquefois on y a joint des Bulles de Papes , & d'autres Pièces qui ont rapport à l'Hiftoire du tems ou des faits particuliers qui regardent l'Hiftoi- re Ecclefiaftique d'Angleterre , fur- tout celle du Prieuré de Dun- ftaple. Depuis l'an i ■l<)6. jufqu'en r 5 8 1. qui eft l'année à laquelle finiftent ces Chroniques , il n'y a que des morceaux détachés fur quelques années fans aucune liaifon. Ce qu'il y a dans ces Chroniques de Robert de Morins ne va, fuivant toutes les apparences , que jufques vers l'an 1 140. M.Hearn ne nous dit rien fut l'Auteur ou i\\t les Auteurs de la S , 173;- ï4i' Contmuation. Ces fortes d'Ouvrages qui ne contiennent qu'un récit d'évene- mens expofés d'une manière auffi feclie que fuccintc ne font pas fuf- ceptibles d'un Extrait détaillé. Il fuftîr d'en avoir indiqué le fuiet , pour que ceux qui veulent s'in- ftruire de la date certaine de quel- ques évcnemens , & d'autres cir- conftanccs de cette nature par rap- port à l'Hiftoire d'Angleterre pen- dant le treizième (lécic , puiflent avoir recours au Livre. Le Cartulairc du Prieuré de Dun ftaple étoitcompofé de Chartes c^: d'autres Pièces originales , avec quelques Notes Huloriques. M- Wanlcv en a donné la Notice , il n'y parle pas de toutes les Pièces comprifes dans ce Recueil. Mais feulement de celles qui lui ont pa- ru avoir quelque chofe de /îngu- lier. M. Hcam a inféré cette Noti- ce entière dans ce Volume , & quelques Pièces qui font tranfcri- tes furie Cartulaire. Dans l'Appendix qui contient différentes Pièces, il y a deux Dif- fertations Latines de M. Sellith qui n'avoient point encore été pu- bliées. La première fur deux Inf- criptions Gréques , qu'on a trou- vé gravées fur .deux morceaux de marbre proche de Pcrfepolis. La féconde fur le mot barbare Ono- choetes , qui fe trouve dans Tertul- lien , qui eft le titre fous lequel un Juif vouloit faire connoître le Dieu des Chrétiens. M. Sellit croit qu'il faut lire ONONTXilTITHr , & il eftperfuadé qu'on ne trouvera plus 1^6 JOURNAL DE S SÇAV ANS. li.n dans h manière donc Tcrtiil- Dieu des Chrétiens, qui ne rcpon- Uen dit que ce Juif reprefentoit le de à l'Inlcription. MEMOIRES BV CHEVALIER V ARVIEVX , ENVOTE' Extraordinaire du Roi à La Porte ^ Confnl d'Alep , d'Alger , de Tripoli ^ & autres Echelles du Levant , concernant fes Voyages a Conftantinople ; dans l'Ajie , la Syrie , la Paleftine , l'Egypte & la Barbarie, la Dejcription de ces Pays , les Religions , les Adtœurs , les Coutumes , le négoce de ces Peu- ples , & leur Gouvernement , l'Hiftoire Naturelle & les évenemens les plusconjiderables; recueillis de fes Mémoires originaux ^ & mis en ordres avec des reflexions. Par le R. P. Jean - Baptifle Labat , de l'Ordre des Frères Prêcheurs. A Paris , chez Charles - Jean - Baptifte de Lefpine , Libraire , rue S. Jacques , vis-à-vis la rue des Noyers , à la Victoire. ;'«- II. fix Volumes, Tom. I. pp. 470. Tom. II. pp. 511. Tom. IIL pp. 55S.T0m.lV.pp. 571. Tom. V. pp. ^13. Tom. VI. pp. 6^15. L étoit naturel que le Père La- bat donnant au Public les Rela- tions des Voyages du Chevalier d'Arvieux tirées de fes Mémoires, il commençât par taire connoîcre celui qui lui a fourni le fond de cet Ouvrage , c'ell ce qui fait le prin- cipal fujet de fa Préface. En voici le précis. Le Chevalier d'Arvieux étoit d'u- ne famille noble & très - ancienne d'Alexandrie de la Paille en Lom- bardie , dont le nom en Italien eft Arveo. Cette famille a été diviféc en plufieurs branches , qui fe font établies en diflerens endroits de l'Italie , en Piémond , en Savoye , en Provence , en Languedoc & mê- me en Angleterre. La branche éta- blie en Provence avoitpris le nom d'Arviou, &: ce ne tut que quand le Chevalier dont il s'agit ici parut àlaCourqu'on lui donna le nom d'Arvieux , dont la prononciation parut moins dure que celle d'Ar- vioui Laurent d'Arvieux [c'efl: le nom du Chevalier ] naquit dans le ter- liroirc de Maileille le 21. Juin de l'année 1^3 5. on le mit au Collège de Marfeilleà l'âge de huit ans. Le Père Labat alfure qu'il y fit de grands progrès dans les humanjlez, quoiqu'il employât des lors une partie de fon tems à l'étuaie des Mathématiques & des Langues étrangères. Il alloit entrer en Phi- lofophie , quand la pefte dont la Ville de M.ulcille fut affligée , Lobligea de fe retirer à la campa- gne ; ce fut pendant ce tems-là que Louis Arviou fon père fut tué par les cnians d'un de les voifins con- tre lequel il avoit eu un procès. Après la mort de fon père , fa fa- mille voulut le charger de faire va- loir les biens de la fuccellîon pa- ternelle qui croient en ca.mDagne. Mais ce détail des biens de campa^ gne étoit contraire à fes inclina- tions. D'ailleurs il apprchendoit de le broiiiiler avec fa niere qui ai- M A R î moit les procès Se h dépcnfe , vC qui didîpoit les biens dont fon nuri l'avoic rendu la maîtreirc par fon Teftament. Ce qui lui hc pren- dre le parti de fc livrer au commer- ce du Levant que les Provençaux regardent comme leurs Indes. Un Gentilhom'ne de fes parens nom- mé Bertandié qui avoit fait une fortune conhdcrable dans ce com- merce , qui étoit depuis peu de tems de retour à Marfeille , & qui avoit envoyé un de fes frères à Smirne pour y tenir fa place , lui donna les premières teintures du commerce ëc l'envoya à Smirne. Il s'embarquale tf 0(Slobre 1^53. n'é- tant âgé que de 1 8 ans & quelques riois. Depuis i fccrcts. » Ceux qui ont trouvé le » moyen de les parcourir aflurcnt » qu'ils contiennent des abfurditez 1) étranges , qui vont toutes à nier » i'exiftcnce d'un Dieu. Ils con- »j viennent pourtant qu'il y en a eu »un autrefois , qui après avoir » créé le Cic! £c !a Terre , fe hulîa. » (urprendre par ies vents qui l'cm- » portèrent fi loin , que depuis ce » tems-là on n'en a eu aucune nou- » velle. Ils font donc fans Dieu dc- "puis ce tems-là. Mais ils ont parmi »eux une Tradition qui leur pro- wmet qu'il leur viendra d'Egypte » un Sage qui les inftruira & leur » donnera une Loi. Ces Peuples font aifés à recon- noître à la figure de leurs têtes , parce qu'ils ferrent & allongent la tête des enfans des qu'ils viennent au monde. Ils demeurent dans les montagnes , ils y font endurcis dès leur jeune.fTe aux travaux les plus rudes , leur manière de vivre eft très-frugale , ils n'ont ni Chirur- giens, ni Médecins C^ par me fuite necejfdire , ils vivent fort long-tems. C'eft la reflexion du Chevalier d'Arvieux , ou du Père Labat. Les DrulTes font hardis , braves & adroits , ils fe fervent à la guerre defabres & de moufquets , fe font d'affcz bonnes gens , quand on n'a point de démêlez avec eux , mais ce font de dangereux ennemis & qui ufent cruellement de leurs avantages. Ils font fi jaloux de leurs femmes , que fi quelqu'un leur en parle , ils fe croyent en droit de les afibmmer. Ces femmes fçavcnt pour la plupart écrire l'A- ijo JOURNAL DE rabe qui cit la Langue de ce Peuple. Mais les hommes regardent ces connoiffances avec mépris, comme un amufemcnt propre au fexe. Pour eux ils ne s'attachent qu'à travailler & à faire la guerre. La Tradition du P.îvs eft que les DrulTes font François d'origine , & qu'après que les Sarafins eurent pris la Terre Sainte fur les Chré- tiens , un corps de François com- mandé par un Comte de Dreux fe retira dans les montagnes , d'où ils ne purent être chaffés par les Sara- fins. Ils enlevèrent , dit-on , des femmes de tout côté , 5c ils multi- plièrent il prodigieuiemïnt, qu'ils s'étendi; ent de montagnes en mon- tagnes , depuis le commencement du Liban juiqu'à la Mer morte, où ces montagnes fe terminent. PIu- ficurs elTains de ces Peuples ont changé de nom •, & obéiflent à. des Princes qu'ils fe font fait eux-mê- mêmes. Tous en général ont plus de penchant pour la Religion Chrétienne que pour la Mahomé- tane. L'on alTure qu'il efl: aifé-de découvrir que leurs ancêtres ont été Chrétiens, & que l'ignorance , ie défaut de Miniftres Se le liberti- nage leur ont fait oublier leur an- cienne Religion. Ceux de l'Anri-Liban ont rete- nu le nom de Drufles. Leurs Emirs fe difoient ilTus des François , ils les aimoient , ils les protegeoient. Les Drulfes taifoient avec eux un grand commerce de foye , ils fouf- troicnt les Miflîonnaires , & ils ne trouvoient pas mauvais , quand «quelqu'un d'eux embralToit la Re- 5 SÇAVANS, ligion Crétienne. L'Emir Fekhcrdin ctoit de h Maifon de Maon qui prétcndoit defcendrc de Godctroy de Bouil- lon , & il fe faifoit gloire d'être parens de Meilleurs de Guife. Ce Prince dont le nom fignihe la gloi- re de la Loi , étoit monté fur le Trône à l'âge de fix ans , il demeu- ra fous la tutelle d'un de fes on- cles, jufqu'à ce qu'il fût en âge de gouverner par lui-même. Ayant été bien élevé , il aimoir les Sciences 6 les beaux Arts, il fçavoit plu- fleurs Langues , Se il donnoit des appointcmens confidcrablcs aux Sçavans qu'il faifoit venir d'Euro- pe. Sa bravoure , fa bonne condiai- te , fon efprit , fes manières douces & équitables, l'avoicnt fait aimer non feulement par fcs fujcts , mais encore par tous les Chrétiens du Pays , en particulier par les Fran- çois qu'il avoir toujours favorifés.- Il avoir augmenté fes Etats par un grand nombre de troupes qu'il ne manquoit pas d'employer centre les Turcs , fous le prétexte fpé- cieux de faire la guerre aux Arabes Se d'empêcher leurs incurlions dans fon Pays. Les Pachas de Damas Se des Pi o- vinces voillnes jaloux des grands avantages que FeKherdin rempor- toit fur les Arabes , & irrités de fes expéditions contre les Turcs', firent porter des plaintes contre ce Prince à la Cour du Grand Sei- gneur , comme contre un rebel- le , un infracleur de la Loi de Mahomet, qui ne faifoit plus au- cune profeflion de cette Loi , Sc qui MARS qui ctoit le protedcur déclare des Chrétiens. Le Grand Seigneur en- %'oya des Galères &: des VaifTeaux à Sevdc & ordonna de lever des trou- pes pour anêrcr l'Emir Ftkhcrdin Se le conduire à Conftanrinoplc. Ce Prince vit bien qu'il ne pour- roit redller à ces forces , il prit le parti de la retraite , & il lailTa le Gouvernement à fon fils Ali , qui fuivant les inftrucîlions de fon pè- re , fie un Traité avec le Pacha, par lequel il s'obligea à taire Thomma- ge au Grand Seigneur & à payer les <;ontributions. Cependant Fckher- din s'embarqua fur un ValHeau François ,& paifa en Italie où il fut fort bien reçu par le Grand Duc de Tofcane & par le Pape Paul V. après cinq années ce Prince retour- na en fon Pays , & ayant été pen- dant quelques jours à Seyde iticog- vito , il reprit le Gouvernemcntde l'Etat que fon fils lui abandonna fans conteftation. Ce fut alors que FeKherdin re- commença fes incurfions fur les Arabes , fur les Pays voillns de fes Etats. Il emporta même par le moyen des Ingénieurs Chrétiens qu'il avoit amenés avec lui , le Château de Tripoli & celui de Boabber , que l'Écriture appelle la Tour du Liban. Pour fe rendre maître d'un Prince Arabe qui ctoit fon ennemi depuis long-tems , il cpoufa fa fœur , & fc fervit de cet- te occafion pour mafTacrer ce Prin- ce , enfuite il renvoya fa nouvelle époufe ; adion indigne de fon courage & dont il devoit craindre Jes fuites. Elles lui furent en effet Mars, funcftes. Car rEmir-Turabey,Chef des Arabes du Mont Carmcl ^ fc ligua avec les Pachas de Syrie , de Galilée, de Samarie , ôcdePale- ftine , qui l'accuferent auprès du Grand Seigneur d'avoir des Intelli- gences avec les Chrétiens ëc avec desCorfaires , de les vouloir met- tre en po(Telîîon de la Terre Sain- te , de s'être emparé des places des Turcs (Se d'avoir ruiné par des con- tributions les fidèles fujets de la Porte. Le Grand Seigneur envoya des ordres pour lever une armée confi- derable ; cette armée fut de trente mille hommes; après deux batail- les qui fe donnèrent en deux jours confeciitits , & qui furent des plus fanglantcs. Aly fils de Ftkhcrdin qui n'avoit eu que douze mille hommes pour s'oppofer aux Pachas fut abandonne p:!r les fiens 6c pris par un Soldat qui l'étrangla avec la mèche d'un moufquet ^ pendant que ce Prince dormoit. L'Emir ayant fçu la perte dek bataille , fans être inllruit de la mort de fon fils , fc retira à Seyde : la place fut alliégée , mais Fckher- din voyant qu'une partie de fes Su- jets l'abandonnoit , /orrit de la Ville de Seyde qui fe rendit depuis aux Turcs , &c fe retira dans les montagnes. Il avoit dans ces mon- tagnes quatre forts , le Pacha de Damas afficgca l'un de ces Forts nommé Nifca , & fut obligé de lever le fiége après trois mois de travaux. L'année fuivante le Grand Seigneur envoya un grand nombre de Galères &c des ordres pour atta- X j.;2 JOURNAL DE quer l'Einir. En même tcms il lui fie promettre que s'il vouloit :.llcr à Conftantinople pour fe jufiifîer, il y f'croit bien reçu. Il fembloic que l'Emir qui avoit beaucoup d'efprit & d'expérience ^ qui con- noiiloir le caradcrc des Turcs n'au- roit pas dû être furpris par de pa- reilles ptomclîcs : cependant il fe rendit à Conftantinople avec une fomme d'argent confiderable qu'il vouloit employer à gagner les OBi- ders de la Porte. Il fut fort bie.T reçu , durant quinze jours , pen- dant lefquels on inftruifoic fon procès. Enfuite on l'appella au Divan , & on lui fignifia fon arreft de mort. Il demanda quelques mo- mens pour s'y préparer , on les lui accorda , mais comme il le tourna vers l'Orient pour fiire fa prière , on crut qu'il étoit Chrétien , le Grand Seigneur ordonna autîî-tôt à fes muets derétrangler,&l"ordrefut exécuté fur le champ. Ce qui ache- va de pcrfuader qu'il avoit embraf- fé la Religion Chrétienne , c'cil qu'en le dépoiiillant après fa mort, on lui trouva une croix d'or fur la poitrine. Ce fut ainfi que mourut l'Emir Fesheidin âgé de 70 ans en i(î33.toiis fes enfans ayant été pris & tués par les Turcs. L'aîné de fes petits fils qui étoit avec lui , fut coufu dans un fac 6c jette à la mer , le plus jeune fut mis cJns le Sérail, où il fit une fortune confiderable , mais il ne retourna point dans fon Pays. L'Emir Mélheni^ neveu de Fekherdin fut Prince des Drufles après lui, & vécut toi'ijours fournis a,u Grand Seigneur j on peut voir S SÇAVANS, fo;a Huloire S<. celle de fes deux fils dans le Livre-même. C'eft en- core un morceau qui m.érite l'atten- tion des Leâreurs. Le fécond Volume contient la P.elation du Voyage que le Cheva- lier d'Arvieux fit par devorion à la Terre Sainte. Il y décrit l'état où étoient en i^^o. Jerufalem & les autres Villes de ce Païs-là , même les ruines des Villes & des Chà- îeauïqui ne fubiifient plus- Il par- le de tous les lieux où lei habitans du Pays difent qu'il s'efi: pjlfc queL ques évenemens mémorabl.s de l'Ancien ou du Nouveau Tefta- ment , & des Monumens qu'on prétend y conferver , foit par rap- port aux Myfteres, foit par rapporc aux Miracles^ LesPélci'ins ne pour- roient conrcfter ce que les habitans du Pays leur difent là dcffus , fans {: rendre fufped:s par rapport .à la Religion. Mais le Chevalier d'Ar- vieux ne parle point comme un homme qui fût abloluinent con- vaincu de la vérité de routes ces traditions , il ne s'attache néan- moins à en combattre aucune ou- vertement. Il n'en cft pas de même du feu que les Grecs difent qui dclccnd du Ciel dans l'Eglife du Saint Sépulchrc le jour du Samedi Saint. En décrivant les cérémonies que les Grecs pratiquent ce |our-là, il dit bien clairement que ce pré- tendu Miracle efi une pure fuper- cherie , mais qui ell un des fonds des plus alfurés du revenu des Evê- qucs Grecs qui fe trouvent ce jour- là à Jerufalem. Le Chevalier d'Arvieux fut fait M A R Chevalier du S. Scpiilchre par le P. Cordelicr Cuftode de la Tcne Sainte , qui lui en fit expédier des Parenrcs , dans laquelle l'Hiftoirc de cet Ordre Militaire cft rappor- tée , fuivant la Tradition des Pères qui gardent le Saint Scpulchre. Ou y en attribue l'inftitution à l'Em- pereur Charlemagne. On a joint à ces Lettres de Chevalerie un état des Privilèges dont ceux qui les délivrent prétendent que doivent joiiir ces Chevaliers , & une Or- donnance qu'on prétend erre de Godetroy de Bouillon , pour la conceflion ou le renouvellement des Privilèges de cet Ordre. On ne dit point en quelle Langue cette S, iTîy. ry? prétendue Ordonnance a été rédi- gée. Si elle étoit en François ^ il auroit été facile de rcconnoître , Ci elle auroit été à peu-près dans le ftile & dans le Langage des Afllfes de Jerufalem. Ce qu'il y a de fur , c'eft qu'elle contient des articles que les Princes ne pourroienc tolérer , lî l'Ordonnance étoit véri- table , comme celle qui porte que les Chevaliers prendront le? armes contre les Souverains que les Papes auront excommuniés , &c dont ils auront livrés les Royaumes en proyc au premier occupant. Nous rendrons compte dans ufi autre Journal de ce que contien- nent les quatre Volumes fuivans. MARTINI GURISCHII TRACTATUS HISTORICO-MEDICUS de Chylo humano , five fucco hominis nutritio , quo appetitûs nimii 5c voracitatis , rerum haud efculcntarum concupifccntix , naufex & inedix diuturni , cultrivororum , vitrivororum ^ venenivororum, Sc pyrophagorum exempla reccnfentur. Farrago rerum prxter naturam in ventricuio & inteftinis latitantium aut vomitu rejedarum fuppedita- tur. Excrementorum hominis rcfolutio chymica , cum ufu Mcdico &: Magico oftcnditur, annexis qurcftionibus Medico Forenfibus, & Indice locuplctilîimo. Lipfix , fumptibus Mauritii-Gcorgii Vcidmanni, Soc. Reg. Pol. Maj. ac Eled. Saxonix Bibliopolx , anno 1730. C'eft-à-dire : Traité du Chyle , oitdnfuc nourricier de l'homme , dansle(juel on rapporte plujîeurs Hiftoirss de faims canines , d^ appétits déyéglés , de jeû- nes excejfifs j de gens t^iii ont avalé des couteaux ^ du verre ^ du poifon , du feu , & oit l'on cite un grand nombre d'exemples de chafes extraordinaires contenues dans les inteflins ^ ou rejettêes parle vowijfement . Ony a joint di- verfes Obfervations fur la refolution chymi^ue des fuperfuitez. (jui fedéchar- gent par les inteflins , & plnfieitrs queflions de J urifprudence Médicale ,; eivec une Table très-ample des matières. Par Maurice Gurifchius. A Leip- fic , aux frais de MauriceGeorge W^'eidmann , Libraire. 1730. vol. in-^f. pp. 9 II. Ce Livre fe vend à Paris, Qiiai de la Tournelle , chsz^oltain, DANS le Journal de Janv. der- Ouvrage , qui en renferme quinze; nier nous avons rendu compte voici de quoi il s'agit dans les au- des cinq premiers Chapitres de cet très. M. Gurifch confidere dans le Xij îj4 JOURNAL D fixiéme la fîtuation de l'eftomac , fa grandeur , fon cpaiffeur , &c comment fe fait la converfion des alimens en chyle. Qiiant à la fîtua- tion de ce vifcere , elle fe trouve quelquefois dificrentc de l'ordinai- re , foit naturellement , foit par certains accidens ; notre Auteur en rapporte divers exemples. On a vu des eilomacs fitués dans la poitri- ne , & Rivière parle d'un jeune homme de 14 ans de la Ville de Montpellier , lequel avoir i'efto- mac placé dans La partie laterals droite de la poitrine , comme ori îe découvrit après fa mort. Ce côte de la poitrine étoit fans poumon ; £<. ce qu'il y a de particulier , c'cll que le jeune homme avoir eu pen- dant toute fa vie une rcfpiration alTez libre. Un Marchand de Wefphalic âgé de 27 ans , fut trouvé après fa mort , ayant l'eftomac dans le mi- lieu de la poitrine, avec une partie confiderablc des inteftins - grêles. Ce jeune homme , peu avant fa mort , fut attaqué de grands vo- milTcmens. Il arrive quelquefois que le dia- phragme étant bleffé , l'eilomac & î'intcitin - colon montent dans la poitrine par la playe du diafragme, & que cependant les malades ne laiflent pas de vivre encore quel- ques jours. Notre Auteur en rap- porte divers exemples que nous paffons. L'orifice fuperieur 5c l'orifice inférieur de Tcltomac fe trouvent aulfi quelquefois déplacés de m.a- oicr€ que l'inférieur tft du côté où ES SÇAVANS; doit être le fuperieur , & le fupe- rieur du côte où doit être l'inté- rieur , autrement appelle pylore. Quant à la grandeur de l'efto- mac , il s'en eft trouvé qui eonte- noient jufqu'à 18 livres d'eau , &. notre Auteur dit en avoir vu un, femblablc dans un cadavre qui fuc diffcqué à Leipfic , il y a quelques années : c'étoit l'eftomac d'un fa-: meux buveur. S'il fe trouve des eftomacs au- dcfTus de la grandeur ordinaire , il s'en trouve auiîi de tort aii-deffousj & M. Gurifch parle d'un homm.3 qui ayant toujours été fort petit mangeur , &i fujet outre cela à des vomilîemenscontinuels , fut trou- vé après fa mort avec un eftomac dont la groiTtur ne palfoit pas celle d'une noix-mufcade. Au regard de PépaiiTeur , il y.a des eftomacs qui n'en ont pas plus que le papier le plus fin , & notre Auteur rapporte là-de(Tlis l'exem- ple de ITmpereur Ferdinand l'II. & du Comte de Solms. Il eft extraordinaire de trouver des eftomacs Ci minces , mais ill'eft bien plus de trouver des corps où ce vifcere manque abfolument. François de Loebewald dans fcs Obfervations , tait mention d'une femme de 40 ans dans le cadavre de laquelle on n'àpperçûc aucun cftomac , quelqiîc recherche qu'on en fit , fi ce nVft que l'inteftin duodejiHm paroiftbit un peu plus dilaté qu'il ne doit l'être naturel- lement _, d'où cet Auteur conclut que l'eftomac n'eft point abfoiu- raent necelTaire à la vie. Mais pour- M A R qaoi ; dertlande avec raifon M. Giirifch , ne pas conclure queTin- teftin duodénum ainfi dilaté , faifoit la fondion de l'cftomac ? 11 y a des corps où l'eftomac efi: double j ces cas ne font pas tout-à- fait rares dans l'homme , &; notre Auteur rapporte làdelTus diverfes Obfervations. Pour ce qui cft des animaux qui ruminent , on fçait qu'ils en ont quatre , mais à propos de ruminer , M. Gurifch remarque qu'il n'eft pas fans exemple que des hommes ruminent ; & il dit après Rhodius qu'on a vu dans le Mona- ftere deS. JultinàPadolic un Moi- ne qui ruminoit de la même ma^ nierc que font les bœuls. Ce Moi- ne au refte , à ce qu'affure Thomas Bartholin , qui l'avoit appris de la propre bouche de Rhodius , avoit deux cornes à la tête. On peut voir Jà dclTus Bartholin , de Vnicor. cap. 1. On lit dans Hierôme - Fabrice d'Aquapendcntc deux exemples fcmblables , ôcâms Jacques Sachs de Leiuehein ^ celui d'un père de famille qui ruminoit , & dont tous les cnfans ruminoient comme lui. L'eftomac cft fujet à des fchirres, à des ruptures , à des abcès , & à d'autres maladies dont notre Au- teur parle au long. Ce qu'il dit fuï ces articles ne fçauroit être lu avec trop d'attention par les Médecins. Il vient enfuite à ce qui concerne la digeftion des alimens dans ce vif- cere. Quelques - uns attribuent cette digeftion à la chaleur, d'au- ttcs à un acide , d'autres à la fer- mentation, j d'autres à la putrcfac- S 3 ï 7 3 ?• ITT tion , &c. M. Gurifch examine toutes CCS opinions , Se enexpofe fans partialité le fort Se le foiblc. Puis il traite diverfes queftions fur la manière dont le chyle fort de de l'eftomac , fur le féjour plus ou moins long qu'il y fait , Se fur les embarras qu'y forment certains ali- mens Se certains médicamens ava- lés. Quant à ce dernier article nous croyons qu'on ne fera pas fâché de voir les Obfervations fuivantes , qui bien conlidcrées pourront être d'une grande utilité pour certaines pcrfonnes trop peu attentives fiir ce qu'elles admettent dans leur eftomac. Un jeune garçon , fils d'un Artifan avala un jour beau- coup de grains de raifm fans les écrafcr dans fa bouche. C'étoit au mois d'Oèlobre. Trois mois fe palTerent depuis fans qu'il en ref- fenrît la moindre incommodité ; mais au bout de ce terme, il tomba dans des défaillances fi grandes , qu'on croyoit à tout moment qu'il alloit expirer -, le fçavant Kerc- kring , Auteur fi célèbre parmi les Médecins , fut appelle au fccours du malade. Il lui ordonna fur le champ une légère potion purgati- ve, qui lui fit rendre dix de ces grains de raifins tous entiers , Se dans le même état qu'ils avoient été avalés , ce qui fut fuivi d'une pat- faite guérifon. Un malade qui fe fentoit un grand befoin d'être purgé , prit de fon chef des pilules purgatives qui refterent dans le corps. Il ne voulut plus effaycr d'aucune médecine , Sc il pafia un an dans cet état _,, après j^S JOURNAL D quoi il lui furvinr un vormlTtmeni: qui lui fie rendre les pilules qu'il avoir pnles , & k-s lui fit rendre fi entières , qu'elles étoient encore recouvertes de l'enveloppe dorée qu'on y avoit mife. Qu'il nous foit permis de rap- porter à cette occafion deux exem- ples dont nous avons été témoins , il n'y a pas bien long-tcms. L'un eft d'un malade attaqué d'une fié- vïc-tierce , auquel on donna plu- ficurs bols de Qyinquina , & qui les rendit au bout d'un mois dans le même état qu'on les lui avoit donnés. ' L'autre eft d'une Dame qui ayant pris pendant long-tems des pilules de limaille de ter , dont elle fut enfuite violemment incom- modée l'cfpace de deux ans , les rendit au bout de ces deux ans fans prefque aucune diminution de poids. Mais revenons à notre Au- teur qui nous parle ici d'un Eccle- fîaftique conftitué en dignité , le- quel s'étant affoibli l'cftomac par une grande quantité d'eau froide dont il avoit ufé pendant un tems confiderabie , & voulant remédier aux cruditez qu'il enrcffentoit , fe mit à prendre tous les jours de la conferve de Gingembre , & en conluma pendant un certain tems, environ une livre en tout. Mais il ne put fe guérir , &.' il mourut faute de pouvoir digérer aucun ali- ment, fon corps fut ouvert , on y trouva les runinucs de l'cftomac extrêmemenr rcL'.ciiées , &: dans le fond de ce vifcer'^ , lalivre de Gin- gembre qu'il avoit avalée. ,Une Dame de qualité ayant man- ES SÇAVANS, gé pendant une dyftenterie qu'elle avoit, force laitues , avec des Hturs de capucines & de borrache les rendit quatorze jours après , fans qu'elles tuilent changées en rien. Notre Auteur bit encore men- tion d'une Dame qui fept mois après avoir mangé de la laitue & des cérifes noires , les rendit [larlc vomifiement. Nous laiffons plufieu?s autres Obfcrvations pour venir au Chapi- tre feptiéme , où il s'agit des cau- fes du vomilTem.ent , de fes diffé- rentes efpeces, &c de la manière dont il fe p;oduit. Ce Chapitre eft rempli d'Oblervations curieu- fcs , principalement pour ce qui regarde les différentes efpeces de vomiffemens , tels que ceux où l'on vomit des chenilles , des arai- gnées , des rats , des limaçons , des grenouilles , du verre , des cail- loux , des aiguilles , des doux , & autres chofes aufiî extraordinaires. M. Gurifch explique avec beau- coup d'exactitude toutes ces fortes de vomiffemens, & fçait démêler l'artifice d'avec la vérité. On dit quelquefois de certaines gens qui fe laiffent aller à de grands emportemens de colère , qu'ils jet- tent feu & flame ; mais il y en a , remarque notre Auteur , qui fans s'émouvoir Si. demeurant très-tran- quilles en jettent effectivement du fond de leur eftomac. Thomas Bartholin , dans fon Hiftoire Anatomique , parle d'un Gentilhomme Polonois , qui après avoir bû deux verres d'un vm ex- trêmement ardent , vomie de ïp. MARS flamme &: en fat confumé. Il t.iic mention d'un autre qui pour avoir avalé une certaine quantité d'cfprit de vin, eut peu après, la bouche remplie d'un feu lumineux qui fe répandit au dehors , mais qui s'é- teignit audî-tôt par le fccours d'un peu d'eau bûë fur le champ. Jacoba'us rapporte qu'une fem- me de Paris , qui pendant l'efpace de trois ans avoir bil beaucoup d'efpiit de vin , fut confumce par un feu qui s'alluma un foir dans fon eftomac, comme elle s'étoit retirée dans fa chambre pour dor- mir , &c qui s'étant répandu par- tout fon corps la reduilk en cen- dre , à l'exception du crâne & du bout des doigts ; enforte, comme l'obferve notre Auteur, que ce fut un feu de la même nature que ce- lui de la foudre , puifque le feu or- dinaire n'auroit pas confumé en li peu de tems jufqu'aux os , comme ût celui-ci. Cette Obfervation au refte , pa- roît abfolument la même que celle qu'a rapportée M. le Marquis Sci- pion-MafFey , pour confirmer la poffibilité d'un fait femblable fur lequel il a publié une Lettre dont nous avons parlé amplement l'an- née dernière dans le Journal de Septembre , &: qui eft intitulée : Lettre de M. le À'iay^uis Scipion- JUajfey , contenant le récit & l'expli- catun d'un feu rare & (ingidier , fen.hlable a celui de la foudre , ou du tonnerre , le<^uel s'efl formé dans le corps d'une fenme de la Ville de Cé- fenne en Italie , & l'A reduiti tn çsn-^ (Ire, . 1 7 3 y. 15:7 Notre Auteur remarque que dans la Pologne , dans la Rallie ^ dans la Livonic , & autres Régions Septentrionales, où l'on boit beau- coup d'efprit de vin & d'efprit de froment , il n'efl: pas rare de voir des gens rendre de la flamme par la bouche. Ce n'efb pas feulement de l'ertomac ou de la bouche des corps vivans qu'il fort quelquefois du feu , il en fort aulîl quelquefois de celui des corps morts ; Se Tho- mas Bartholin rapporte qu'à Lyon, des Médecins examinant le cadavre d'une femme , pour voir de quelle maladie elle étoit morte , n'eurent pas plutôt ouvert l'eftomac qu'ils en virent fortir une grande flam- me , mais qui s'éteignit dans le moment. Cette femme peu de mois avant fa mort, avoit bu beaucoup d'eau thériacale , par l'avis de fon Méde- cin, &: ceux qui ouvrirent fon corps attribuèrent à cela la caufe de cette flamme. La ftrudture des inteftins , leur fituation , leur largeur , leur lon- gueur , leur mouvement , leur ufage , &c les differens accidens auf- quels ils font lujets , font la matiè- re du huitième Chapitre. A l'égard de ce dernier article, on a vu fouvent les inteftins fortir ab- folumenr hors du ventre par des bleffures , fans que les bleflcz en foient morts. Notre Auteur en rapporte des exemples , & celui- ci enrr'autres. Un Officier nommé Starkorter , homme extrêmement brave , reçût dans un combat feize WclTures avi bas-Yçntre , fes ijaîç- ij8 JOURNAL D ftins fortirent , & on les voyoit pendre hors du ventre; un Payfan qui fe trouva là , & qui étoit Jar- dinier de fa profcflîon, les remit dans leur place , puis lia avec un ofier bien fouple les blefl^jres ■■, ce qu'il fit fi habilement , ou fi l'on veut , fi heureufement , que l'Ot- ficier guérit en peu de jours. Notre Auteur , après avoir exa- miné les inteftins, vient à ce qui concerne les matières qui s'cva- cucnt , tant de ceux de l'homme que de ceux des animaux. Il fait fur ce fujet , dans les neuvième , dixième , onzième , douzième , treizième & quatorzième Chapitre un nombre infini d'Obfervations non moins importantes que cu- lieufes. Nous y renvoyons les Lec- teurs. Nous nous contenterons d'inférer ici un ayis qu'il donne fur ES SÇ AVANS, le fujct des enfans, qui efi: de nr jamais fouffrir qu'on mette de h cendre chaude fur les excremens qu'ils rendent , ou qu'on jette ces excremens dans le feu , comme font la plupart des Nourrices ■■, cet- te coutume , dit-il , peut avoir de pcrnicieufes fuites à l'égard des en- tans. Le quinzième Chapitre , oui eft le dernier , roule fur des fujets bien differcns de ceux dont il s'agit dans les prècedcns. Ce font diverfes quc- ftions de Jurifprudcnce Médicale , fçavoir par exemple , s'il y a des Hernies qui rendent impuilfans ; s'il y en a "qui doivent empêcher ceux qui en font attaqués , d'être mis à la torture , & autres fujets que notre Auteur traire d'une ma- nière peu fufceptible d'abrégé , 8c qu'il faut voir dans le Livre-même. L'ORIGINE ANCIENNE DE LA THYSIOVE NOVVELLE ; m Von voit dans des Entretiens par Lettres , ce cjue la Phyfi:jne nouvel- le a, de commim avec l'ancienne , le degré de perfeSlwn de la Phyfiqtie nou- velle fur l'ancienne , les moyens qui ont amené la Phyfùjue à ce point de perfeHion. Par le P. Kbgi^ au n , de la Compagnie de Je fus. A Paris, chez Clouder ^ rue S. Jacques , à l'Ecudc France. 1734. /«-iz. 3. vol. Tom.I. pp. 319. Tom. II. pp. 392. Tom. III. pp. 358. fans compter les Tables qui font à'chaque Tome. NOUS avons donné dans le Journal de Janvier dernier, l'Extrait du premier Volume de cet Ouvrage , nous allons rendre compte ici du fécond. Eudoxe y fait voir d'abord à Arifte , la con- formité de la Phyfique Nouvelle & de ia Phyfique Ancienne fur ce ce qui regarde les Planètes , les Aûres, les Syllêmes du Monde, les Ecîipfes & les Comètes ■■, puis il lui montre le concert de l'une &c de l'autre par rapport à l'Auteur de la Nature , Se à l'origine de l'U- nivers. La convenance de la Phyfi- que Nouvelle Se de la Phyfique Ancienne dans la manière de s'ex- primer , & dans le goût qu'elles ont toutes deuxinfpiré pour elles, fait le fujec d'un autre article; après quoi MARS, -quoiEudoxe venant à l'Hypothc- fe de Dcfcartes , obrcrve que les principes de cette Hypothcfc & cette méthode fe trouvent cpnrs dans les Livres des anciens. Par exemple fi la matière , félon Dcf- cartes, n'a point de bornes. Jour- dan le Brun danslefeizicmc iicclc ^ a prétendu la même chofe , don- nant à l'Univers une étendue infi- nie , &: les premiers Phyficicns de la Grèce , Xénophane, Anaximcnc, & Anaximandrc en ont fait autant. Quelle ctoit chez les anciens l'ori- gine matérielle des Cieux & du Monde entier ? C'éroit une terre, une nature, un air, un élément infini. Pourquoi les premiers Phyfi- cicns refufoient - ils des bornes à la matière ; C'eft parce qu'au-delà de toutes celles qu'on lui peut a(lî- gner , on conçoit toujours quelque étendue. Pourquoi Lucrèce ne (donnoitil point délimites à l'U- nivers ; C'eft parce que la vue peut s'étendre au-delà de tous les luni- tes imaginables. Omne qiioà efi , igitur , nullÀ rations •viArum Fimttm efl \ namque extremnm debe- bat habere. Extremum -porro nuU'tus pojfe videtur ejfe , nifi ultra fit .... Quo non longiàs hic fenfus nattira fequetiir, Platon tient le même langage lorfqu'il dit que la matière n'a d'el- Mars, 1 7 î y- li^ le-même nulle qualité , nulle for- me , & qu'elle ne devient un corps qu'en prenant quelque forme , ou quelque qualité particulière; Eu- doxc remarque qu'Ariftotc-mêmc étoit un peu Cartéfien fur ce point. A l'égard du vuide , Guillaume de Paris ne voyoit dans le vuidc que des contradiiftions : fçavoir., dit- il , desdiftances fans diftanccs., des globes qui fans s'applatir, fc touchtroient dans tous les points des furtaces convexes qui fe rcgar- deroicnr. Nous paffons un grand nombre d'articles femblablcs , où l'on fait voir par divers pall^rges que la Phi- lofophie de Dcfcartes a fes fonde- mens dans l'Antiquité, & qu'avant Dcfcartes il y avoit des Cartéfiens. La méthode que Dcfcartes a fait régner dans fa Phyfique , cette méthode qui pafie pour être fi nou- velle , n'eli pas plus récente, que le tonds de fa Phyliquc,fi l'on en croit Eudoxe. En effet cette méthode confifte premièrement à douter , a'efl:- à-dire à lufpendre fon juge- ment , à examiner jufqu'à ce que l'évidence ne permette point de douter, & force l'efprit à fe ren- dre à la vérité. Elle confifte en fé- cond lieu , à divifer autant qu'il faut pour connoître les différentes faces que l'objet peut offrir à l'efprit. En troifiéme lieu, à aller comme par degrez , de ce qu'il y a de plus général , de plus fimple , de plus évident , à ce qu'il y a de plus compofé , de plus embarralTé , de plus obfcur. En quatrième lieu , à difcerner les difficultez : enfin à Y 3 do JOURÏTAL D mettre en ufagele plus exademcnt qu'il Ce peut, les moyens Je trou- ver le vrai. Telle cft la Logique de Delcarrcs ; & cette Logique , à ce que remarque Eudoxe , fc trouve prefque mot à mot dans les Livres d'Arilloce , c'cfl: - à - dire plus de deux mille ans avant que Defcartcs vit le jour. Notre Auteur , .i cette occafion, entreprend l'éloge d'Ariftote, par rapport à la Fhyfique. » Jettczles s> yeux , dit-il , fut les Ouvrages de -'o ce Philofophe célèbre , vous y )> verrez d'abord huit Livres fur les » principes , fur le mouvement , " fur le premier moteur, &c. purs » quatre livres fur le Ciel & les »Eléiiiens, deux fur la naifTance »j 6i la deftrudion des corps , qua- rt tre fur les Méthcorcs , & les » corps terrelires inanimés , fur les « Comètes , les Nuées , la Pluyc , » la Mer , les Vents , le Tonnerre, » les Tremblemens de terre , les » Tempêtes , les Ouragans , les Pâ- « rhclies , l'Arc en Ciel , &c. un »> fur l'Ame , fur les Organes des » fens , Si fur leurs objets -, un fur » la Veille &C fur le Sommeil , un » fur les Songes , un fur la duicc » de la vie , un fur h Jcuneffe & la » Vieilleire , fur la Vie & la Mort : » un fur les Couleurs -, deux fur les «Plantes, un fur le mouvement » progrefllf des Animaux ; quatre » fur les différentes parties des )» Animaux •■, cinq fur la génération »des Animaux; dix fur l'Hiftoire » des Animaux , un enfin fur TU- j> nivers entier. Dites après cela ,' ncontinue Eiidoxç _, qu'au lîécie ES SÇA VANS; » d'Ariftote , la Pbyfique étoit xeî- » ferrée dans des bornes étroites. Il' » y a à craindre au contraire que » l'étendue feule de la Phylîque » Ancienne ne vous effraye , ne » vous fafle perdre courage , & ne » vous détourne de fuivrc Ariftotc « dans fcs recherches fur la nature;. Notre Auteur foûtient ici qu'A- l'iffote ne fit point fans méthode les recherches dont il s'agit , & pour le prouver il obfcrve que ce Philofophe commença par les prin- cipes les plus fîmples ; qu'il pafla des principes les plus fimples au mouvement en général; dumoi^î- vement en général aux mouvemens des Cieux en particulier , & au.^ Elcmcns; de- là aux Méthéores , à la defcription générale de l'Uni-^ vers ; puis à l'examen des corps animés , &c. en forte que les con- noiffànccs qui précèdent répandent le jour fur celles qui les fui vent. Si l'on doute qu'il faille compter parmi les richeffès de la Phyfique , les Obfervations détachées ou fui- vies qui fc trouvent dans les Livres d'Ariftote, Eudoxe fait remarquer que ce Philofophe a donné trente- huit Scellions de Problêmes, où l'on voit un grand nombre d'Obferva-- tions curieufes , dont les unes rou- lent fur les maladies , fur les caufcs des maladies , fur la voix , les fons, la Mullque , les odeurs, les cou- leurs, les yeux, les oreilles , la lan- gae , la bouche , les dents , le tou- cher ; les autres , fur tout le corps, . fur les Plantes, les racincs,les fruits, l'Air , les Eaux , la Mer , la Lune,^ le Soleil,. ^c. M A R Apres avoir montré ce que la •Phylique Nouvelle a de commun cvec l'Ancienne , Eudoxe fait voir, 1°. que la Nouvelle cfl: plus p.ii t.ii- ■te , éc il détermine le degré de pcr- iedtion qu'elle a fur l'Ancienne; 2°. Qii'il talloit un génie co.r.me Defcartes pour réunir comme il a fait les parties de fon Hypothele-, 3°. Qu'Arillote étoit habile dans la connoilTance des effets fenfibles; mais qu'il l'étoit peu dans celle de leurs caufes. Qiiant au premier point, fçavoir que la Phyfique Nouvelle cft plus parfaire que l'Ancienne, l'Auteur en donne pludcurs excmples.Nous nous contenterons d'en rapporter xjuelques - uns : les anciens vou- Joient comme les modernes que la différence des figures dans les par- ticules , & la différence des mélan- ges j fiffent le caradere fpécifique ^es huiles, des fouphres & des fels; mais les modernes déterminent cette différence de figures & de mélanges -jils difent , par exemple, précifément autant que le tuyau a> fans le Mercure. Dans le plat , je » mets un poids d'une livre ; ce «poids n'élevc pis le tuyau; donc "l'air qui defcend fur le fomniet 3> du tuyau , l'empêche par fon » poids , de s'élever , & de céder » à l'effort du poids d'une livre , 3» donc la colonne d'air qui def- ■) ccnd fur le tuyau, péfe une livre. >' On peut fixer d'une manière j' plus fimple , le poids de l'air. » Car le Mercure fufpendu dans 5» le tuyau , pefant une livre , &c la » colonne d'air extérieur de même » diamètre , laquelle tient le Mer- » cure fufpendu , pefant autant, il » s'enfuit que cette colonne péfe » une livre. » Une colonne de Mercure hau- » te de vingt-huit pouces eft en n équilibre avec une colonne d'eau n de même diamètre , & haute de n trente-deux pieds environ ; une n colonne d'eau de trente - deux » pieds cubiques , péfe plus de »dcux mille livres : donc une co- 55 lonne d'air de même diamètre « pefant autant que la colonne » d'eau , il s'enfuit que cette colon- » ne d'air péfe plus de deux mille » livres. Donc fi notre corps eft lar- 3» gc d'un pied en tout fens j il faut S , Ï735- 163 » conclure qu'il porte un poids de » plus de iooo , & fil'on a ècrard 55a l'ait dont il eft environné & »prcfle de tous cotez , on fera 55-iiirpris de voir qu'il eft preffé par 55 un poids de plus de douze à quin- » ze mille livres fans qu'on le fen- » te , parce que ce poids prefTant *> également de tous cotez & en «5 dedans & en dehors , il ne chan- » ge rien dans la difpofuion àis » organes. Si l'on demande après cela ' qu'eftce qui fait monter l'eau dans les pompes afpirantes .131 pieds , il eft lacile de juger par les expé- riences que vient de rapporter Eu- doxe, que ce n'eft , félon les mo- dernes , ni la plénitude de l'Uni- vers , ni l'horreur du vuide , mais lefeul poids de l'air. Un autre ufage récent que l'on fait du poids de l'air , & que notre Auteur n'oublie pas de faire remar- quer , pour montrer combien la Phyfique Nouvelle a perfectionné l'Ancienne, ce font les prognoftics du Baromètre. Notre Auteur s'ex- plique là - dcffus à Arifte en cette manière : » Le Baromètre nous an- » nonce tantôt le beau tem$,tan- » tôt la pluye , les vents , les ora- »i ges ; le calme ou la tempête , le » péril ou la fureté, les agrémens » ou les défagrèmens d'unvoyage, » d'une promenade. Par quel char- 53 me fecrct un tuyau de verre ^ 30 prefquc plein de vif - argent , >3 nous dévoile til l'avenir? Arifto- »j te n'a pas donné la folution de ce » problême , & vous pourriez le rtlr-refoudre à l'inftant. LcMerCH- j6^ journal D i> re , diriez vous , monte ou dcf- -» cend à proportion que l'air ptfe » plus ou moins. Dans un tcms «pluvieux l'air pcfe moins, parce a» qu'il fe décharge de beaucoup de » vapeurs infenfibles. L'air péfe »> plus dans un tems fcrein , parce «qu'il contient plus de vapeurs " répandues en de plus grands cer- » clés , comme le prouve affez la 3» fecherelTe de la terre , & la lan- »• gueur des plantes. Par confc- ».quenc lorfque le tems devient f> pluvieux , l'air commence à pe- »fer moins , & lorfque le tems dc- ï) vient ferein l'air commence à pe- aofet plus. C'cft pourquoi le Mcr- y> cure eft plus bas dans le tems plu- os vieux , & plus haut dans le tems » ferein. De-là , Ci le Mercure bailTc ■ c'eft un figne de pluye. Le Mer- » cure monte-t-il? c'cft un figne 3B de beau tems. Voilà le charme » ignoré des anciens , Se connu des 3> modernes, lequel nous fait pré- » voirie beau tems ou la pluye, le >> calme ou la tempête c'eft la pe- iïfanteur de l'air. Notre Auteur palTe de-là à ce qui concerne le rcfiort de l'air , il remarque que Scnéque n'ignoroic pas l'exiftence de ce reffort , puif- qu'il difoir que l'air fe comprimoit, qu'il faifoit effort pour s'étendre , éc qu'il fe dilatoit. Mais quels édairciffcmens, demande Eudoxe, les anciens ont-ils laifTés là-deflus î aucun, répond-il, au lieu qu'au- jourd'hui les expériences les plus curieufes , nous démontrent non feulement le reflbrt de l'ak , mais l'ufage de ce relTort , ainfi qu'on le ES SÇAVANS. voit dans la Machine Pneumatique inventée en Allemagne , dans le " dernier fiéclc par M. GueriKCon- fulde Magdcbourg, & pertcdion- née en. Angleterre par M. Boile, puis en France par divers Phyli- ciens. Notre Auteur prend ici occa- fion de décrire ce qui fe palTc dans la Machine Pneumatique lurfcju'on y met une pomme ou un veric d'eau. La dtfcription qu'il en fait mérite que nous la rapportions pour donner une idée de la maniè- re dont il s'y prend pour expofet les thofes dont il parle £< les ren- dre fenhbles aux jeunes Lcdteurs qu'il veut inftruire , car c'eft prin- cipalement ce que nous devons nous propofer dans cetExtrait. Voi- ci donc fa defcription. »On pompe l'air d'un vailTeau » de chryftal & nous féparons l'air » de la matière fubtile ; mettez » dans le vailTeau de chryftal , une » pomme ridée. Pompez l'air , elle » s'enfle & fe déride comme d'elle- » même , fa furface devient polie , » vous diriez qu'elle reprend fa » première fraîcheur. Eft - ce un n fruit récemment cueilli ; Le ref- » fort de l'air , qui fe trouve dans » les fucs de la pomme , l'étend , » lui redonne en apparence fa pre- » miere fraîcheur , & produit par » la dilatation des lames d'air , cet- » te efpece de fruit nouveau. Vou- » lez-vous voir , pour ainfi dire , à » l'oeil , le jeu du reftbrt de l'air ? » Mettez dans la Machine Pneuma- » tique , un verre à moitié plein w d'eau tiède. Voilà des milliers MARS ryiXe petites bulles d'air qui demeu- ;> roient embarrafiées , Se reflcrrées a dans les interllices de l'eau, mais » c]ui délivré enfin de la prcllîon «de l'air liiperieur le dégagent & »fe dilarent. Dégagées & dilatées, » elles en ont plus de légèreté rcf- "peiflives, & l'eau les élève par » Ion excès de pefanteur. Faites » rentrer l'air extérieur ; l'air fupc- "lieur prelTc comme auparavant , »& l'eau & l'air dilaté en petites » bulles. Vous les voyez ces petites » bulles fe refferrer &c difparoîrre. M Pompez l'air à plufieurs reprifes : » les petites bulles reparoilîent , }> montent rapidement , augmen- n tent de volume à mefurc qu'elles •» montent , parce qu'un moindre a poids d'air & d'eau les prelfc. uCiiaque bulle d'air groflit , fou- wléve , emporte brufquement une » pellicule d'air, une furface d'eau » très- mince. Ce font de gros » bouillons qui jaillilTent hors du " verre -, & l'eau bout beaucoup j> plus vite Se plus fort que fur un s> grand teu. Nous joindrons à cette defcrip- tion celle que notre Auteur fait d'un phénomène encore plus frap- pant , du refTort de l'air. » Par le » moyen d'une petite pompe fou- 3> lante , de quelques foupapes , & 3> d'une clef mobile , on fait entrer » de l'air à diverfes reprifes dans la y> chambre ou dans l'ame de la can- " ne à vent ou d'une nouvelle forte » de fufil. On y comprime l'air 3> trente fois , cinquante fois, cent »fois plus qu'il n'eft comprimé »dans fon état naturel -, on fait » couler une bâle dans le canon du » fufil nouveau ; vous tournez Ja ^ clef mobile : déjà la baie a percé «de part en part, une planche. Eft- » ce là l'effet du rclTort de l'air , oui » de la poudre à canon ? Notre Auteur répond que c'eft l'effet du reffort de l'air , & il dit qu'on a obfcrvé récemment que le redort de l'air enferme dans cha- que grain de poudre , & dans les angles que ces grains laillènt entra eux, eft félon routes les apparences, la caufe générale , ou du moins la caufe principale des effets étonnans de la poudre. En effet il y a beau- coup d'air Ôc dans les grains de poudre & dans les angles qu'ils laiffententr'eux. Se cet air a une force furprenante ; on en peut ju- ger par la force qui le comprime dans les mortiers des moulins à. poudre , & quand on charge un fufil , ou un canon , cette force de reffort croît encore dans le premier inftant de l'inflammation, car la. chaleur qui dilate l'air libre doit refferrer d'abord l'air condenfé parce que , comme le remarque notre Auteur , les corpufcules de feu qui pénètrent d'abord les lames d'air libre , ne trouvant point d'ac- cès d'abord dans l'air refferré ' exercent quelque tems leurs forces fur la furface extérieure , & le corn* priment ; c'eft pourquoi , continue notre Auteur , les refforts de l'ait violemment tendus , joiient pref- que tous à la lois. Car enfin , bicrr- tôt la force de reffort eft-vidorieu-^ ï55 JOURNAL DE fe , Se lance de toutes parts la flam- me &c le falpêtre , de- là la force in- concevable de la poudre à canon. Si l'on demande à notre Auteur ce qui fe paffe dans k poudre mê- me quand on y met le teu , il ré- pond que le fouphre de la poudre , déjà plein de matière (ubrile tort agitée , prend d'abord feu ■■, Qiie l'adion du feu , par fon mouve- ment brufque , fait tendre de nou- veau les rcrforts de l'air , déjà ten- dus ; Que ces rclTorts tendus jet- tent de tous cotez le falpêtre en- flammé ; Que de là , les grains de poudre pr;n nt fucceflîvement feu , avec une vîteffe inconcevable, s'enflammenc prefquetous au mê- me inllant ; Qu'ainfi les relTorts d'une intinitc de lames d'air em- prifonné dans les grains Sc dans les angles, ioiientprefque tous en un inftant &: lancent de toutes parts , une multitude de parties dures , sondes, & folides de falpêtre, lef- quelles réunilTent leurs forces , vont choquer brufquement tout ce qui s'oppofe à la direction de leur mouvement , font voler les fufées, partir la bàlc , reculer le f ufil ou le canon, joiier les machines inferna- les & les mines , fauter les baftions, les remparts , les habitans des Vil- les , & les Villes prefque entières. L'Auteur achevé cette defcrip- tion en faifant remarquer que » le j> reflbrt de l'air qui agit de tous » cotez dans l'inflammation , pouf- » fe à la fois , la bâle en avant , Se »» la culafle en arrière -, Que de-là » vient le départ de la bâle & le re- S SÇAVANS, >' cul du canon -, Qiie la fufcc vo- » lanre eft un tuyau chargé qui re- » cule , qui s'élève en reculant , Sc » va faire briller de nouvelles étoi- " les dans le Ciel ; Que fur ce » principe, l'art produit mille i'cux "divers, les uns pour nous r.l'ar- » mer , les autres pour nous ré- » joiiir ; Qu'ainfi la Phylîque Nou- » vellenous guidant , pour > s'allumer , gronder . s'élancer du y> fein de la nuée , voltiger au gré » des vents , frapper la cime des » montagnes , fendre les arbres , 51 renverfcrles édifices, difllpcrles » métaux & effleurer à peine les r. corps les plus tendres. En voilà fuflifamment pour don- ner une idée de ce fécond VolumCj nous rendrons compte du troifîé- me dans un autre Journal. Zij î7o JOURNAt DES SÇAVANS, TEMPLUM TRAGEDIE CARME N,d- un ftile fimple , nour- M ri des Saintes Ecritures , une fu- t> blimité , une élévation dans les » penfèes , qui ne nuit en rien à la 5> clarté & fur tout une ondlion qui s> auroit dû fermer la bouche à tous » fes ennemis. On y reconnoît par- » tout , ajoûte-t-il , le génie & la »)main de M- PélilTon , de cet ad- 9 mirable Ecrivain , qui a toujours JB été , & qui cft fur tout aujour- Marf. ^sd'hui le plus excellent modèle » que l'on puifle fe propofcr pref- » que dans tous les genres. Comme on n'attend pas de nous l'Extrait d'un Ouvrage de cette nature , il nous fulïira pour donner une idée du goût qui y règne de tranfcrire ici une de ces Médita- tions , nous prendrons celle de la trentetroifiéme Semaine. » C'efl; donner &: refufer en mê- »> me tems , Seigneur , c'cfl: m'ap- » peller & me rebuter tout enfcm- >» ble , quand vous m'ordonnez de » m'éxamincr & de m'éprouver » moi-même avant que de venir à A a ,7<5 JOURNAL D 30 votre Table Sacrée. Je vois J'Ar- » bre de vie ; mais le Chérubin , » l'épée de feu à la main , n;e dé- wfend d'en approcher. Eh ! Sei- » ^ncur j que pourroir vous dire la » poudre &: h cendre , après s'être »bien examinée & bien éprouvée^ >» finon qu'elle n'cft que poudre &C » que cendre ? Oui. Seigneur , fi la » mifére extrême elt digne de vo- » tre miféricorde ; la pauvreté de 5> vos richefles ; la nudité^ d'être re- 3> vêtue de vous -, le vuide , d'être î> comblé de votre grâce i l'impu- » roté , d'être purifiée ; la corrup- » tion , de l'incorruption ; Si la » mort, d'être vivifiée : je fuis di- » gne de manger ce Pain , & de boi- » re ce Calice. Voilà tout ce que 3 j'ai à vous prefenter. O , fourcc 30 éternelle de boutez , faites ea » moi ce que vous voulez de moi , » qui ne puis rien que par vous, & j> donnez -moi plijtôt la mort que » de vous ofienfer , & que de vous " outrager , quand je n'ai delTein 3» que de vous obéir ô£ de vous 3" plaire. Au rcfte l'Editeur croit devoir avertir le Public que cet Ouvrage eft véritablement de M. PélilTon, & que ce n'cfl: point une Edition furtive qu'on donne ici ; on a im- primé, dit-il , fur les originaux de l'Auteur , & ces originaux on les tient de l'héritier-même, fans quoi on n'auroit jamais penfé à les ren- dre publics. Nous joindrons à ces Médita- tions un autre Ecrit du même Au- teur qu'on vient de donner au Pu- blic fous le titre de Pricns fur les ES SÇA VANS, Efltres & fur les Evangiles , par feu M. Féliffon de l' Académie Françoife^ in \6. pag. 194. à Paris , chez. Mathey, &c. 1735. Tout ce que nous venons de dire de l'Ouvrage précèdent convient parfaitement à celui dont il eft ici queftion. On en jugera par la prie- le qui eft marquée pour le fécond Dimanche d'après l'Epiphanie. Eiie eft conçue en ces termes.. » Le premier de vos Miracles l » Seigneur , nous a figuré & an- 30 nonce le dernier. En commen- M çant votre Miniftere fur la terre , »i vous avez changé l'eau en vin : » en finiftant le même Miniftere » terreftre , pour en aller commen- » cer un Célefte , vous avez changé » le vin en votre propre Sang.Nous » vous adorons , Seigneur , encore »que nous ne vous comprenions » pas. Achevez vos miracles au de- » dans de nous ! Changez notre » cœur de pierre en un cœur de » chair ! changez notre chair de » mort en efprit de vie ! L'eau fc- M ra moins difterente du vin, que » nous ne le ferons de nous-mêmes, » fi les joycs & les douleurs de tous » nos prochains deviennent les n nôtres; fi nous comptons nos en- » nemis entre nos prochains ■■, Ci » nous benifibns ceux qui nous » perfecutent & qui nous maudif- » fent -, fi au lieu d'afpirer aux cho- » fes les plus hautes , nous conlén- y> tons de tout notre cœur à toutes » les humiliations qu'il vous plaira. « de nous envoyer , par une vcri- » table foûmifiion de notre volon- » té à la vôtre» MARS Ce qui caraderife cet Ouvrage , pour emprunter encore ici les paro- les de rÉditeur , Se le diftingue de tous les autres Ecrits de la mê- me nature , c'eft l'unité qui y règne dans les différentes parties , de l'arc avec lequel eft fondue' , fi on peut . ' 7 î 5". 177 ufer de cette exprelHon ; toute la fubftance des Epîtrcs & des Evan- giles. Avec un peu de reflexion, on y apprendra encore quel aétéref- prit de l'Eglife en joignant dans fon Office public telle Epître à tel Evangile en particulier. NOVVELLES LITTERAIRES, RUSSIE. De PeterscouRg. MB A Y E R de Koeniperg en . Prufle & Membre de l'Aca- démie de Peterfbourg , a publié i'Hiftoire de l'Ofrhoëne &c d'Edel- fe , illuftrce par les Médailles, fous ce titre : Theophili Sigeberti Bayeri Regiomontani , Hiftoria. Ofrhoéna & Edejfena ex nummis Hluftrata. 1734. in - 4°. ECOSSE. D' Edimbourg. Thomas Ruddimatt & quelques autres Libraires de cette Ville débi- tent le premier Volume de VHiftoi- re des affaires Ecclejîafiiques & Civi- les d'Ecoffe depuis le commencement de la Reformation fous le Règne de Jacques V. jufqu'a la retraite de la Reine Marie en Angleterre ^ en 1 5^ 8. in-folio i-j^if. On attribue à M. Ro- bert Keith , Evêque d'Ecoffe , cet Ouvrage qui eft écrit en Anglois , & qu'on dit êtie compofé fur les aiftes publics & autres Mémoires authentiques. ANGLETERRE. De Londres. Il paroîr chez les Knaptons une nouvelle défenfe en Anglois de la DilTcrtation fur fEclipfe dont il ejî parlé dans Phlegnn, contre les ob- jcrtions de M. Chapman^ & contre celles de l'Auteur de la Lettre au Dodeur Sik^es ; par le même M. Sikes. 1734. Brochure in-%°. Dtniotmarium Britanmcum : Or a more compleat etymological Englnh DiElionary than any extant , &c. C'eft-à-dire, Didionnaire Anglois Etymologique , le plus complet qui ait encore paru. Ouvrage enri- chi de près de 500 planches gra- vées , deftinées à donner une idée claire des chofes qu'on ne fçauroic bien décrire par des mots. Par M. Bailey. Chez T. Cox gros Volume in - folio. DiUionnarium Polygraphicum : Or the >" ou l'on voit fon origi- a> ne. Ces privilèges & exemptions, »le T.v,if des droits de réaprécia- jîtion & domaniale des marchan- » difes qui fortent de cette Foire , )» & qui y font lujettcs , & ce qu'il «faut obferver pour joliit de fa » ftanchife. " De l'Imprimerie de Jean-Pierre Sr^^/off. 1734. Brochu- Ke in - 4°. De Paris. Oraifon Tunèbre de Louis Hector Duc de Villars , Pair ôi Maréchal Général de France , prononcée k Pa- ris dans l'Egltfe de S. Sulpicefa Pa^ roiffe ^ le r-j janvier 1735. far M. l Ahhé^k^'^ , Prédicateur du Roi ^ Ahhi- de Genlis , Chanoine de la Ca- thédrale de Maux. Chez Prault pè- re , Qiiai deGêvres. 1735. in-^°. Nouvelle Ecole Militaire , ou la Fortification moderne , divifécen quatre Parties , ornée de cent cin- quante planches en taille - douce , Ô'c. dédiée à S. A. S. Monfeigneur le Prince deConty , par P. S. Def- preT^de S. Savin , Ingénieur Si Pro- fèflcur des Mathématiques. Chez P. G. le Mercier ^ rue S. Jacques , au Lion d'or. 173 5. /»-8°. oblong. Le SfeUacle de la Nature , ou Entretiens fur les particularitez de l'Hiftoire Naturelle , qui ont paru les plus propres à rendre les jeunes gens curieux , & à leur former i'ef- prit. Tomes denx & trois. Chez la Veuve Eflienne , rue S. Jacques , Jean Defatnt , rue S. Jean de Beau- vais. 1735. in- 11. 1. vol. Hifieire Ancienne des Egyptiens , ^7^ S- 17$ des Carthaginois ; ^'c. Par M. /?»/. lin. Tome VIII. Chez la même Veuve Eflienne. 1735. in \^. Hifînire Sainte , félon l'ordre des tems , depuis la C ré. mon du n.nnde pifcjiCa J. C. « Pour lervir à l'édi- » fication des Pcrfonnes de pieté , »& principaJemenc à l'mftrftion » de la jeuneiïc , tirée des feules «paroles de l'Ecriture , avec de a courtes Notes pour l'éclai ici (fe- » ment des endroits les plus diffi- "ciles. « Kuë S, Jacques , chez Charles 0/W25»/ j à l'Olivier, J3.c- qiies Cloitjfier , à l'Ecu de France, & Worle Henri ^ à S. Louis. 1735! in-ii. 1. voL La F'ie de S. Ignace , Fondateur de la Compagnie de Jefits. Troifiénie Edition. Chez Louis ^oJ}e , rue S.Jacques, à k Couronne d'Epi- nes. 1735. '"-I2' JHijîoire de Gil-Blas de Samillane. Par M. le Sage. Tome IV, Chez Pierre Jacques Kibou , vïs-à-vis k Comédie Françoifc. 173 ^. in-iz. Anecdotes Galantes & Tragiaues de la Cour de Néron. Chez Rollin fils, Quai des Auguftins, au coin de la rue Gift-le-Cœur , à S. Atha-, nafe. 1735. in-ii. VAminte du Tajfe. Paftorale. Chez André Cailleau , Quai des AuguRiPS , & Grégoire- Antoine. D.ipuis , Grand'Salle du Palais. 1735 '" ■ ï^- L'Académie Françoife a propofé pour le pri)? d'Eloquence de cette année 1735. Lefujetfuivant -.com- bien il importe d'acquenr l'efprit de Société \ conformément .1 ces pa- roles de l'Ecriture ; Fir amabUis adi i8o JOURNAL DES SÇAVANS, focietatem magis amicus erit quam ^f^««'«^* Louis le Grand , font le frater.VîOS.ca^. lî. vcrf. 24. £'u)etdii prix de Poëlie jioui k mê- Les Progrès de la Mufiquefous le me année. JFaHtet i iorriger dam le Journal du Mois de Février \n- ^° . 1735. PAgeyj. lig. i î- Ruifch, Hfez. Ruyfch , corrigez la même faute par- tout où elle fe trouve : Pag. -jC. col. i. lig. 25. & par-tout ailleurs Verrheycn, ///^ Vcrheyen : Pag. 77. col. i. lig. i. Graat , ///.de Graaf: Ibid.lig. J. Vafalva , lifez. Valfalva : Ibid. lig. 4. Santorinis, /i/lSantorini: Pag. 83. col. I. lig. 5. paracenthefe , ///f^ paracentefe : Ibid. col. z. 1. 13. Swammerdans ,/// Swaminerdam : Pag. 84. col. i. ). 16. Munnich, /// Munnicks ; Ibid. col. 2. lig. 18. réponfes , lif. corredions : P.ag. 87. col. prem. lig. 37. &:qui , lif. ce qui : Pag. 92. col. i. lig. z6. l, Hf.de : P. loo. col. 2. lig. i?- Pauline en lui reprefcntant , ///. Pauline lui reprefente : Pag. loi. col. 2. iig. 18. comme nous avons fait, le jugement , lif. com- me nous avons fait. Le jugement. TABLE Des Articles contenus dans le Journal de Mars 173^^ MEmoire pourfervir à l'Hifloire des InfeEles , pag. 121 Les anciens Itinéraires des Romains , &:c. 132 Chroniijue ou Annales du Prieuré de Dunflaple , &c. 14Z Mémoires du Chevalier d' Arvieux , Sfic. 14^ Traité du Chy le ^ Sec. I53 L'Origine Ancienne de la Phyfijue Nouvelle , &c. 1 5 8 Le Temple de la Tragédie , &c. 170 Grande Bibliothèque Eccléflaflique , &c. 172 Prières au faint Sacrement de i" uimel pour chaqne femme dtVtiméefiCc. 175 Nouvelles Littéraires ^ i7Z Fin de U Tihlt, L E JOURNAL DES CAVANS, 0 FOUR L'ANNEE M. DCC. XXX T. AVRIL. A PARIS, Chez CHAUBERT, à l'entrée du Quay des Auguflins, du côté du Pont Saint Michel, à la Renommée & à la Prudence. M. DCC. XXXV. AVEC AVFROBATION ET PRIVILEGE DU ROY, f LE URN A DES SCAVANS A V R I L M. D C C. X X X V. MEMOIRES POVR SERVIR A L'HISTOIRE J)ES INSECTES, par M. de Rè.iumur , de l'académie Royal: des Sciences. Tome I, Sur les Chenilles & fur les Papillons. A Paris , de l'Imprimerie Royale. 1734. ;«-4°. pp. 654. planches détachées 50. CE T Ouvrage , rempli d'un fi nouveauté , a déjà fait la matière grand nombre de dccouver- d'un Extrait alfez étendu , publié tes cuiieufes , utiles , aufquelles on dans le Journal de Mars dernier, & ne s'attendoic point , S< qui par où nous avons rendu compte des conféquent ont toute la grâce de la deux premiers Mémoires de ce Vo- Avril, B b i; î84 JOURNALD lume ] dans lefquels l'Auteur a traite de l'Hiftotre des LifeRe s en gé- néral^ de .1 diftribtié les Chenilles f^ Icws cLiJJcs & en leurs genre.! . III.. 11 examine dans fon troifié- nie Mémoire , les différentes par- ties de cts Chenilles , & en donne une anatomie des plus exadcs. i. Il commence par la ftructure de leurs jambes, compofées de qua- tre tuyaux écailleux ou cartilagi- neux de différent diamètre unis &c articulés bout à bout , & qui renferment les mufclesneceflaircs aux mouvemens de ces quatre pie- ces , analogues à une bafe plus 1 ir- ge que tout le rcfte , à une cujile , à une jambe proprement dite & à un pied , terminé par un- ou deux crochets. Leurs jambes membra- neufes , qui n'ont rien de dur dans leur compolîtion, & font ca- pables d'allongement & de ra- courcilTcment jufqu'à pouvoir dif- paroîtrc tout-1-fair, reprefentent en général un cône tronqué , au bout duquel cil: un pied charnu , fufcep- tible d'une grande variété de figu- res. H prend fouvent celle d'une palette triangulaire , garnie d'on- gles ou de crochets de conllftence de corne ,. & de couleur brune , rangés avec ordre ' en forme de palilTade , jufqu'au nombre de 40 & même de 60. Mais pour conce- voir bien clairement toute la fine méchanique par laquelle s'exécu- tent les divers mouvemens de ces pieds , foit pour la progrelTion , foit pour les autres bcfoins de l'In- féâre , il faut confulter l'explica- tion détaillée qu'en donne M. de ES SÇAVANS, ^ Réaumur , & avoir en même tems les figures fous les yeux. On com- prendra facilement alors comment ilell pollîbleque ce pied s'élargilTe en forme de difque dans Ion em- pattement; que ce qui paroît être la plante du pied , en devienne le delfus, &: réciproquement ; enfin que le pied puifTc rentrer dans la jambe membianeufe , comme la jambe peut rentrer dans le ca:ps;fv: l'on découvrira les niufcles em- ployés à tout ce méchanifme; Telle cft la ftrudure la plus ordi- na-ire des jambes membrancufcs; des Chenilles. Mais comme elle eft fujctte à pluficurs variations , celles-ci ont donné lieu à l'Auteur de partager la clafTe des Chc4iillc5 <à 16 jambfs en trois clalTts fubor- données , fuivant que ces jambcs- font ou plilTées , n'ayant qu'une demi-couronne de crochets ; ou af- fez mal façonnées, mais envirotr- nées d'une couronne complette ou prefque completre de crochets ; ou fortement tendues, avec la couron • ne de crochets complette , &: alFcz- femblablcs à une jambe de bois. z. Des jambes de ces Infectes», M. de Réaumur monte à la tête, qui n'efl pas [ointe au premier an- neau , comme on le croitoit d'a- bord , mais qui tient à un col pour l'ordinaire fi court & fî re- plié , qu'il n'efl pas viiîble. Cette tête cil compotcede deux grandes pièces é'caillêufes , égales Se fem- blibles , reprefentant chacune comme une calotte un peu pliée , plus par un bout que par l'autre. Ces deux calottes forment par leurs A V R I fnoitiez fupérieurcS le ficluis ùc li tête ou le ciàne , & le delTous, par leurs moitiez inférieures -, en lorce que ces mêmes cilotres ne font jointes que par leurs portions les moins applaties , qui tont la par- rie pofteneuie de la tête ; pendant que leurs portions les plus compri- mées , & qui ne fe touchent point en font le devant. Elles lailTent en- tre elles un efface triangulaire, que remplit une pctire pièce écaillcufe , aiadellous de laquelle refte une Cavité , où eft la bouche de la Che- jiiile. Cette bouche , dont la ftruclure cft alîez unif-orme dans une infinité d'autres Infecies , ofire d'abord, i". une lèvre fupérieure , charnue, cchanctéc parle milieu , & mobile plus ou moins en avant-, i°. une lèvre intérieure , partagée en trois mammcions pyramidaux , réunis pr.r leurbafei 3°. deux mâchoires lltuées perpendiculairement aux lévi'cs , &c armées d'une feule dent chacune ; & ces deux dents paroilfcnt toujours à découvert , s'écartent l'une de l'autre horizon- talement, puis venant à le rencon- trer, hachent les feuilles deftinées à la nourriture de la Chenille -, 4°. une convexité charnue & rougcâ- trc , qui dans l'intérieur de la bou- che s'élève jufqu'à la hauteur du milieu des dents, & que notre Au- teur prend pour la langue de l'In- fede -, 5°. lîx petits grains noirs &c tranfparcns poics prefque circulai- rement , & un peu latéralement fur le devant de la tête , Si. qui paffent pour ks yeux de la Chenil- le. L . 173 5- lÈf M. de Réaumur recherche ici- très - cuiicufement les ufages de toutes ces parties , & s'attache principalement à celui des dents dilpoféesde la manière la plus fa- vorable à l'Infcèlc pour ronger en peu de tems beaucoup de feuilles à l'aide des autres parties tant de la' bouche que du refte du corps, lef- quellcs entrent pour quelque cho- fc dans la méchanique de cette' 7niifiicatio/i décrite par l'Autcut avec beaucoup d'exadâudc & de détail. Il obfcrvc , à ce propos , qu'il y a des Chenilles , qui pen- dant toute leur vie ne rongent que le parenchyme des feuilles , fans toucher à leurs fibres.: mais que la plupart attaquent toute l'épailTeut des feuilles : que la grande & bel- le Chenille du Tithymale à feuilles de cyprès , ne manque jamais de prendre une de ces feuilles parla pointe, &; la mange auflî vîte juf- qu'à la fige Se de la même manière que nous mangeons une rave : qu'il y a des Chenilles fi voraces , qu'elles mangent par jour plus du double de leur poids -, & qu'un ver à foye , fuivant la remarque de Mafpighi , mange fouvent en une journée aulTi pcfant de feuilles de nieurier qu'il pcfe lui-même. La lèvre intérieure de la Chenille mé- rite encore une attention particu- lière , par rapport à la pyramide charnue qui en occupe le milieu, 8c au bec de laquelle cft la filière, où' fc moule la liqueur , qui , après en être fortie , eft un fil de foye. A l'égard des petits grains noirs , pris vulgairement pour ks yeux dee- 185 JOURNAL D Chenilles, V.illifn:n n'en convient pas , fut ce tondcmcnc , que ces petits tubercules s'apperçoivent fur des vers qui n'ont pas befoin de voir , tels que ceux qui habitent le centre des troncs d'arbre. Mais M. de Réaumur s'eft alTuré par des ob- fervations bien convaincantes & qu'on peut lire chez lui , que les vers qui vivent dans l'intérieur du hois, voyent ou peuvent voir. 5. Il nous entretient après cela de ces taches ovales qui paroilTent de côté &C d'autre fur chacun de neuf des 1 1 anneaux qui compo- fent le corps de la Chenille , &: qui peu remarquables par leur figu- re , le font infiniment par l'impor- tance de leur ufage , découvert par le fameux Malpghi , lequel les a défignés par le nom de fligmates. Il a prouvé que ce font autant de bouches, par où l'air eft introduit dans les poumons de ces Infedtes, qui , par conféquent , en ont i8 , 9 de chaque côté, ou , fi l'on veut, ils ont de part & d'autre , un pou- mon , compofé de neut differens paquets de trachées , & qui règne tout le long de leur corps. Ces tra- chées , qui ne laitfent épancher au- cune liqueur, qui fcmblent carti- lagineufes , & dont la couleur pour l'ordinaire eft comme argen- tée , font très-faciles à découvrir & deviennent très - vifibles, dans la difiedion. Notre Auteur en décrit ici d'après les Obfervations de Malpghi &c les ficnnes , les nom- breufes ramifications , de les mer- veilleux eutrelaceniens , qui four- oiffent un fpedacle dont on ne fe ES SÇAVANS, Lilfe point. Or que ces ftigmates Se ces trachées foienc les véritables organes de la refpiration dans les Chenilles -, c'eft ce que met hors de doute l'application de quelque li- queur gralfe fur tous ces lligmates, laquelle fuffit pour faire périr fut le champ ces InfciSes ■■, Se ce qui pa- roît tort fingulier dans cette expé- rience , c'eft que fi l'on n'huile que les lligmates de la partie antérieure, elle devient paralytique , pendant que la pofterieure confervc fon mouvement ; & l'effet eft récipro- que : fi l'on huile tous les llig- mates d'un côté , il tombe en para- lyfie , fans que l'autre coté en fouf- fre , & réciproquement. L'eau ne produit rien de pareil dans ces In- fedes , & Malpighi a tenu da'ns l'eau pendant des heures entières des vers à foye , qui n'y font point morts, & quiexpofésà l'air & au Soleil y ont repris leurs mouve- mens Se leurs forces. Mais s'il eftfuffifamment prou- vé [ dit M. de Réaumur ] que l'air entre dans les trachées des Infccles par les ftigraatcs , eftil aufiî indu- bitable qu'il en forte par ces mêmes ouvertures; C'eft de quoi ne con- vient nullement l'Académicien , qui montre par plus d'une expé- rience , que les ftigmates loin de donner la fortie à l'air , femblenc plutôt la lui rcfufer , & qu'il s'é- chappe par les dernières extremitez des trachées diftiibuées fur toute l'habitude du corps de l'Infcde : ce que prouvent fur tout quelques ex- périences faites dans la Machine Pneumatique, aufquelles nous ren- A V R I voyons , ainfi qvi'à une dcfcription plus particulière de la llrudure des ftigmatcs. 4. Nous pafTons légèrement fur ce que M. de Réaumur nous ap- prend ici 1°. touchant le canal , qui nans les Chenilles répond à l'élb- phage , àl'eftomac & aux intcftins, & qu'il décrit d'après Malfighi;z°. touchant ce qu'il nomme le corpt graijfeiix^ fubftance tendre , molle, ordinairement blanche, qui rem- plit tous les vuides que les aunes parties laifTcnt dans la capacité du ■ventre , & que notre Auteur foup- çonne d'un ufage important pour les tems des transformations, dont il parlera dans la fuite. Mais nous nous arrêterons davantage fur la ftrudure des vaiffcaux où fe prépa- re la matière de cette foye , qui fournit fi abondamment à nos be- foins & à notre luxe , dit l'Auteur. j. Ces vailTeaux , au nombre de cleux , occupent une grande partie du ventre , ayant , dans quelques efpeces de Chenilles ,, plus de vo- lume que l'eftomac & les inteftins enfemble. Pour fuivre commodé- ment ces vailTeaux dans leur route , c'eft une précaution bien neceffaire [ & imaginée par M. de Réaumur] de faire périr l'Infede dans l'efprit de vin , & de l'y laiffer pendant deux ou trois jours. La liqueur con- tenue dans ces vaifleaux s'y endur- cit au point de devenir calTante , & permet d'enlever tout d'une pièce chaque vaiflTeau à foye. On fe trouve ainfi à portée d'en voir les progreflions & les divers contours pu enuelacemens , après quoi ces L ,. 1 7 î ;. 187 vaiilcaux devenus très-déliés ^c pa- rallèles l'un à l'autre fe terminent à la filière. Ils font pleins d'une li- queur épailTe , gluante , & de diffé- rente couleur , fuivant celle de la foye que la Chenille file ; & cette variété de couleur fe remarque dans les diverfcs portions d'un mê- me vailTcau , ic dépend apparem- ment des diverfes qualittz des feuilles dont fe nourrir l'Infcde. Cette fove n'efl: pas d'une égale beauté : il y en a d'une extrême fineffe , & telle eft celle de la Chi- ne : il y en a de trcs-grolllere , & cette différence ne peut guéres pro- venir que de la nature de l'aliment; puifqu'on a obfcrvé , qu'en un mê- me lieu, les vers nourris de feuilles de meurier blanc filent une foye plus fine , que ne font ceux qui le font de feuilles de meurier noir. M. de Réaumur a remarqué que bien qu'ordinairement les coques filées pat les Chenilles donnent une foye trop foible pour être employée à nos tilfus , il fe trouve de ces co- ques , dont la foye pourroit être mife en oeuvre , fans doute à caufe de la qualité des feuilles qui ont nourri les Chenilles -, &c cette ob- fervation engage à éprouver , Il en ne nourriffant que de certaines feuilles quelques efpeces de Che- nilles, telles que la comynune 3c h livrée , on ne pourroit pas les met- tre en état de filer utilement pour nous. Mais l'examen de la liqueur à foye conduit notre Auteur à des reflexions phyfiques également cu- rieufes & intereffantes. Cette liqueur gommeufe a des i88 JOURNAL D qualitez qui doivent inviter à des recherches très unies , que d'autres travaux ont empêché jufqu'ici M. de Rcaumur de pouvoir fuivre. El- le eft remarquable fur tout par ces trois proprietcz , i°. de fe fecher prefque en un inftant , pour ne point fe rompre & pouvoir être dçvidée fans fe colkr ■■, i°. de ne fe point ramollir ni par l'eau , ni par d'autres dilfol vans-, 3°. de n'être point ramollie par la chaleur i fans ■quoi cette liqueur fuyeufe nous fe- roit ablolumeiit inutile. Cela don- ne occalîon à l'Auteur de nous communiquer fes Obfcrvations fut les v.rnis. Il remarque d'abord que les artirtcs qui ont travaillé le plus ingénieufement en ce genre font fort éloignés d'avoir encore décou- vert des dlifolutions de gommes Se de réfines , quifechent auffi prom- ptement que la liqueur gommeufe de la foye. Il paroît par plulieurs expériences, que cette liqueur eft plus gommeufe que rédneufe , qu'elle peut être ramollie par l'eau, puis en fe fechant , devenir impé- Rétrable à l'humidité ; ce qu'elle a de commun avec plulîcurs fortes de pierres , telles que l'ardoifc. Si l'on pouvoit donc parvenir {dit l'Auteur ] à rendre impéné- trables à l'eau des vernis ou totale- ment ou prefque gommeux , ils auioienc cet important avantage fur les réhneux , qu'un degré de chaleur capable de ramollir ceux- ci , n'agiroit en nulle façon fur ceux-là. Or on peut regarder la liqueur foyeule comme un vernis , jqui au lieu d'être tiré çn Éis déliés. ES SÇAVANS, étant étendu fur une furface très- lilTe la rendroit parfaitement ver- nie.: & c'cft ce que M.de Réaumur lui-même eft venu à boutd'exccu- ter en petit. D'où il conclut que fi l'on avoir l'art de tirer non feule- ment des vers à foye, mais de quan- tité d'efpeces de Chenilles, la li- queur foyeufe qui s'y trouve , on en £roit des amas de vernis les plus beaux, les plus flexibles , lej plus durs , les moins altérables àla chaleur & à l'humidité ; pendant qu'on détruiroit en même tcms ceux de ces Infectes qui ravagent nos campagnes & nos Jardins. L'Auteur reconnoît ki que l'idée de tirer des vernis du corps des In- fedes, n'eft pas nouvelle , comme il l'avoit crû ; puifque dans la Pro- vince d'Yucatan au Mexique, on employé un fort beau & fort bon vernis fourni par certains vers. De cette vue touchant les vernis M. de Réaumur palfe à une autre plus grande &c plus utile , qui fe- roit de fabriquer de la (oye avec nos gommes & nos refînes , puif- que la foye n'eft qu'une gomme li- quide qui fe delTéchc. Il ne s'agiroit pour cela que de tirer ces vernis en fils alTez fins pour en faire des tif- fus-, ce qui ne paroît pas moins polVible que de réduire le verre , la plus roide & la plus caftante de toutes les matières , en fils aftcz dJiès pour en faire des échevaux-, & c'cft à quoi l'on a réuflî. D'où il fuit , que fi l'en pouvoit avoir des fîls de verre audlfins que ceux des araignées , on en pourroit faire des tiiTus. Mais U ne fuit nullement de- là AVRIL ïï que le verre fût malléable; & M. * charmé divers Curieux nu poirft de leur "faire acheter des ailes de certains Papillons à un prix, qui au- roir pu leur acquérir d'affez beaux diamans. Mais [ obferve l'AuteurJ ■il n'y a rien à conclure descou- ieurs des Chenilles pour celles des Papillons qui doivent en fortir ; puifqu'il y a des Chenilles toute* brunes qui donnent des Papillons ornés des couleurs les plus éclatan- tes , & au contraire ; àc c'eft àz quoi l'on produit ici quelqEws exemples. I. C'eft le caradcré générique des Papillons & qui les rend très- reconnoilTables , d'avoir quatre ailes tranfparcntes , mais couvertes d'une efpece de pouffîere ou ferine^, qui les rend opaques , qui s'atta- che aux doigts, ■& à laquelle ces mêmes ailes font redevables de leurs plus belles couleurs. Ces pouffîcres dignes de l'attention des Phyficiens, font un atTemblagede grains de figures régulières & re- marquables. Ils ont différentes for- mes non feulement fur Its ailes de divers Papillons , mais encore fur divers endroits d'une même aile. On rronvc les varierez de ces figu- res bien reprefentées, fur-tout dans la Micrographie du P.Bonanni^ qui regarde ces petits grains vus au Mi- crofcope , comme agitant de {jetitee plumes : mais que M. de Réaumur prétend n'avoir rien de commua avec des plumes , n'étant que de petites lames , de petites palettes plus ou moins évafées , dentelées ou allongées, & garnies d'un coure pédicule , qui s'engage dans la fub- C.cij t^i JOURNAL DE ftance de l'aile , ce qui les rend beaucoup plus femblabics à de pe- tites écailles. L'allongement excef- fifdans quelques-unes de ces peti- tes lames, leur fcroit donner volon- tiers la dénomination de poils. On voit avec plaifir l'arrangement de ces petites écailles lui les deux fur- faces d'une aile , où elles font auill Êxaiftemcnt aUignécsque les écail- les des poihons iîc que les ardoifes ou icî tuiles des toits. Elles lot- tnent au bout de la plupart des ailes une efpece de frange -, & fur quel- ques - unes , où elles fc trouvent des plus nombreufes , elles font prei'que cachées fous une forêt de CCS poils écailleux , dont nous ve- nons de parler. L'Auteur a tait gra- ver ici les diverfes figures de ces petites écailles jufcp'au nombre de trente-cinq. L'aile dépouillée de fes écailles , prcfcnte à nos yeux pluficurs gref- fes nervures de fubftance cruflacée qui en font la charpente , &: qui fe ïamifient en plulleurs branches , dont les efpaces font remplis par une feuille mince , blanche , tranf- parente & friable , d'une nature alTez analogue à celle des grolTes nervures. Ces ailes folides par leur conllrudion, & Icgéres, m.ilgré les millions d'écaillés qui les couvrent, fans prcfque les appefuitir., font capables par leur grandeur de foû- tsenir en l'air pendant long-tems les Papillons ,. dont le vol d'ailleurs n'a rien d'agréable ni de régulier, étant dirigé perpétuellement en zig zag , de haut en bas &: de droit à gauche : iricgularité , qui empê- 5 SÇAVANS, che fc'UVcnt le Papillon de devenir la proye de l'oileau. A l'égard de la caufc de cette variété de couleurs qui le remarque fur ces ailes, 6c qui eft due aux pouilleres ou- petites écailles ; notre Auteur n'en décou- vre point jufqu'ici de plus vrai- fèmblable , que la différente qua- lité des fucs qui nourrilTent ces* écailles , & qu'exige la corulitution intime du Papillon. 2. Des ailes des Papillons, M. de Réaumur paffe à leurs autres par- ties principales , qui font la tête, la poitrine qu'il nomme collet ^ & le ventre ou la parrie polterieure à laquelle il lailTe le nom de corps,. Celui-ci qui a la forme d'une olive, eft vilibiement compofé de plu- fieurs anneaux écailleux ou cartila- gineux , qui s'emboitent les uns dans les autres , étant recouverts de longs poils &: de petites écailles femblables à celles qu'on voit fur les aiks. Le corcelet folidement conftruir, & compofé de pièces écailleufcs , épaiffcs & (i bien liées enfemble qu'elles n'ont aucun jeu , porte les quatre ailes du Papillon 6 fes fix jambes , dont les deux premières en quelques efpeces , ne leur fervent point à marcher &: re- lient appliquées contre leur corps. La tête des Papillons doit être conlîderée avec grande attention par rapport à deux parties que l'on prend avec raifon pour les yeux de ces Inlcdes. Ces parties font deux portions de fphére qui fortentdes deux cotez diamétralement oppo- fés. Elles ont été curicufement ob- fervées au Microfcope par le Père I AVRIL ^Tufiet ^ qui en ont tait graver de bclics hgures. Les yeux de prefque tous les Infcâies ne différant en rien d'eflenricl de ceux des Papillons j ce que dit ici de ces derniers M. de Réaumur peut s'appliquer à tous les autres. L'extérieur de ces yeux cft une efpece de cornée brillante & tranfparente , taillée pour ainll dire à facettes convexes , qui for- ment une infinité de cryftallins ou de petites lentilles à 4 ou à 6^ côtés encadrées dans une matière pareille à la leur. A l'aide du Microfcope , Leewwenhoek^ en a compté fur la cornée d'un Scarabc, environ 3 181, & plus de 8000 fur celle d'une Mouche -, & M. Vuget , 1 73 z 5 fur chaque cornée d'un Papillon : en forte qu'au lieu de deux yeux , que quelques Sçavans accordoient à peine à ces Infed:es , nous devons peut-être leur en donner 34^50, fuivant le calcul de M. fiiget. Celui-ci , à l'exemple de l'Abbé CateUn & de Ltewwenhoek , a eu l'adreffe de détacher les cornées de divers Infedes , &: de les nettoyer au point de les rendre parfaitement tranfparenccs. Après quoi mettant une de ces cornées au foyer d'un Microfcope dirigé vers quelque objet , il fe procuroit un fpedacle furprenant. Car cette cornée pom- téc vis-à-vis un feul Soldat , faifoit voir à i'Obfervateur use armée de Pygmées : pointée vers les arches d'un pont , elle montroit une quantité de rangs d'arches les unes au deffus des autres, furpaffant in- finimenc les plus grands Ouvrages entrepris pour conduire les eaux ; &c. Sous chacune de ces cornées Lsewwenhockji obfcrvé un amas de petits corps oblongs tous fcmbla- bles , dont chacun aboutit à un des cryftallins , & qu'il regarde com- me autant de ncrh optiques -, au lieu que ( félon notre Auteur ) ib renferment probablement tout ce qui eft nccefOiire à la compofition d'un œil. Il prétend que les objets pourroient paroître hmples à des Infedes qui les verroient avec des milliers d'yeux , comme ils le pa- roilTent aux deux nôtres. Mais la convexité de leurs cornées ne leur permet pas de voir à la fois de tous leurs yeux les mêmes objets. Quant à l'ufage de tant d'yeux pour les Infeâes , M. de Réaumus avoiie que dans l'ignorance où l'on eft encore de la ftrudure intime de ces organes 5 il eft difficile de rien décider abfolument fur cette ma- tière. Mais il trouve de la vraifem- blance à croire que parmi cette quantité innombrable d'yeux , les uns font deftinésà voir de loin , & les autres à voir de près , en forte qu'on pourroit les regarder comme autant de Télefcopes & de Microf- copes attachés aux yeux-mêmes de l'Infedc. Pour ce qui eft de l'opinion de M. de la Hire , qui prenoit pour les véritables yeux des Mouches , non ces maffes de cryftallins , mais quelques petits corps fphériques &: rranfparcns fitués entre ceux-làj M. de Réaumur n'auroit nuléloi- gnementà les regarder aufti comme des yeux , fans préjudice des pre^ iP4 JOURNAL D niiers ; auquel cas une Mouche s'en trouveroic prodigieufement fournie. Mais malgré tant de dé- . couvertes & d'heureufcs conjectu- res fur ce point d'Hiftoire naturel- le ; notre Auteur reconnoît de bonne foi, que rexiftence des yeux ■mêmes eft peut-être ce qui reftc ici de moins établi. 3. Les antennes des Papillons occupent à leur tour M. de Réau- mur. Ce font ces deux cfpeccs de cornes qu'ils portent fur la tête , mais qui différent pourtant des vrayes cornes , en ce que celles-là font mobiles fur leur bafe, qu'elles ont dans toute leur longueur quel- quefois jufqu'à 45 articulations , qui leur permettent de fe courber , ;^e fe contourner , de s'incliner en divers fens. Notre Auteur fait de ces antennes Ci\ clalTes confidera- blement différentes par leur con- formation. Il met dans la première les rf»- tennes à majfes ou à boiuons , ainfi nommées à caufe de la figure de leur tête. Il place dans la féconde ks aniennes en m.ijfue communé- ment plus courtes que les précé- dentes , & dont Je diamètre croît infenfiblement depuis leur bafe jufqu'à leur extrémité. Dans la troifiéme clalTe il raflemble les an- tennes qui ne différent de celles de la claffe précédente , qu'en ce que celles - ci font plus larges qu'épaiffes , au contraire des au- tres , & qu'étant plus contournées, elles reflemblenc aflez aux cornes de bélier. Il range dans la quatriè- me celles qu'il nomme antennes ES SÇA VANS. prifmattques , parce que la plus grande partie de leur étendue eft une efpecc de prifme qui a pour bafe un fedeur de courbe. La cinquième claffe comprend iss an- tennes à filets coniques & graines , ainfi appeliées parce qu'elles ne font qu'une fuite ou un fil de plulieurs grains rangés les uns aa bout des autres , comme ceux d'uti chapelet , en forte que ces anten- nes vont toujours en diminuant de la bafe à la pointe. Enfin les anten- nes de la fixicme claffe ont la ftruc- ture la plus fingulicre de toutes , d'où elles empruntent le nom à' antennes en plumes. \\ faut fur tout cela confulter le Mémoire- même de M. de Réaumur accompagne des figures qui reprefcntent toutes ces différentes organifations , fi dé- licates & fi merveilleufcs. A l'égard des ufagcs que divers Naturaliftes leur attribuent , notre Auteur n'y trouve nulle vraifem- blance; & avoiie que c'eft un point ignoré jufqu'à prefent. Néanmoins quelque peu d'envie qu'il ait de bazarder fur cela des conjedurcs j »ces antennes £ dit-il^ feroient-el- n les l'organe de quelque fens à » nous connu , comme l'odorat : » fi elles étoient [continue-t-il ] les » organes de quelque fens qui nous » a été rcfulè , il nous feroit abfo- n lumcnt impoffible de nous faire » aucune idée des avantages que les » Infcéles en tirent. Des hommes » nés fourds ne devinent pas que » les oreilles font les organes d'un i> fens , dont ils ne fe f5aYent pas » prives. A V R I 4'. Une partie dont nous con- nollTbns beaucoup mieux l'ufage que celui des anrennes , c'cft ii trompe , employée par plufîeurs Papillons à fuccer le lue des fleurs; car tous ne l'ont pas , témoin celui du ver à foye. Cette partie ell fituée précifément entre les deux yeux , où elle tient très- peu de place ^ même lorlqu'ellc eft des plus lon- gues. Elle eft , comme le refTort des montres , roulée en fpirale. Sa longueur eft inégale, & va depuis un tour & demi jufqu'à dix. Qiiand elle eft roulée , on ne voit qu'une partie de fa circonférence ; le refte eft caché dans une cavité formée par deux parties nommées cloifons barbues ou barbes du Papil- len. Il faut voir dans le Mémoire la idefci iption de tous les mouvemens que rinfede donne à fa trompe pour tirer le fuc d'une lleur; com- me il la déroule , commeillare- drelFe , comme il l'introduit juf- qu'au fond du calice de cette fleur^ quelque profond qu'il pu i (Te être i comme il la recire un mftant après & la contourne quelque peu en fpirale , pour la redrelTer fur le champ & la replonger dans la mê- me fleur ; manège qu'il répète fept ou huit fois avant que de voler fut une autre , qui lui fournit une nou- velle pâture. Les plus volages de tous les Papillons (dit M. de Réau- mur ) font ceux qui ne s'appuyent jamais fur une fleur pour la fuccer , mais qui n'en pompent le fuc qu'en volant & en planant pour ainfi dire, comme des oifeaux de proyc. La trompe dont il s'agit çft une cf- L » 175 y. \9T pcce de lame plus large qu'épai/Te, d'une matière alfez analogue à cel- le de la corne. On peut la dérouler fans faire grande violence au Papil- lon ; mais quand elle eft déroulée, pour peu qu'on la comprime en la tiraillant on la voit fe fendre vers la pointe en deux parties égales & toutes femblables ; en forte" que fi le tiraillement continue , la fen- te gagne jufqu'à la bafe. On a été jufqu'ici en peine de fçavoir fi cet- te fente eft un déchirement d'une partie mince & fragile , ou fi ce n'eft que la défunion de deux efpe- ces de trompes appliquées l'une contre l'autre. Notre Auteur avoiî ' cru d'abord être bien fondé à em- brafferle premier fentiment ; mais de nouvelles expériences faites fur des Chryfalides prêtes à paroître fous la forme de Papillon , l'ont ramené au fécond avis. Pour nous faire mieux compren- dre la rriéchanique de cette réiï- nion , il nous donne des idées plus ■ complettes de la ftrudure de cette trompe , dont il faut voir chez lui tout le détail , qui feroit peu intel- ligible fans i'infpeiffion des figures. Il en refuke donc que chaque moi- tié de la trompe a un canal propre à conduire quelque liqueur i com- me on peut le découvrir à l'oeil ai- dé d'une loupe. La ftrudure'du milieu de la trompe ou de l'endroit où fe joignent les deux branches eft plus difficile à déterminer. L'indu- ftrieux Académicien eft venu à bout de dévoiler ce myfterc , & a reconnu que la jondion de ces deux moitiez fe faifoic par l'union ' ïp5 JOURNAL D (de leurs lames minces garnies d'une infinité de petits filets qui s'appli- quent fi jufte les uns contre les au- tres , qu'ils font un corps qui pa- roît continu -, qui s'unifTcnt en un mot comme le font les barbes des plumes , & qui forment un tilTu impénétrable à l'eau & à l'air. Or delà réunion des deux moitiez de la trompe naît un troifiéme canal plus étroit au milieu que fur les cotez. M. de Rcaumureftfort por- té à croire qu'il y a de ces canaux deftinés à conduire l'air que le Pa- pillon refpire , en forte que la trompe cxerceroit les fondions de la bouche &: du nez : & c'eft de quoi il s'eft affuré par une expé- rience. Mais par lequel de ces trois con- duits monte le fuc des fleurs , & lequel eft refervé ' au partage de l'air J L'Auteur grâce aune expé- rience fortuite , eft parvenu enfin 3. fe convaincre par fes propres yeux , que les deux canaux des rnoitiez de la trompe ne condiii- foient que l'air pour la rcfpiration de rinfede , & que celui du milieu n'étoit préparé que pour y faire xnonter le fuc nourricier. L'exad Obfervateur n'oublie pas d'aflîgner ici l'utilité dont le roulement & le déroulement alternatif de la trom- pe peut être au Papillon pour faci- liter ou accélérer le mouvement du fuc trop lent à monter & à -obéir à la fudion de l'Infede. VI. Nous palTcrons fort légère- ment fur le fixiéme Mémoire , oîi jl s'agit de l'établiiTement des ca- iradercs qu'on peut employer pour ES SÇAVANS, la diftribution des Papillons es clalTcs , en genres & en efpeces. C'eft un détail qui pour être bien entendu , exige la prefence aduel- le de beaucoup de figures. On par- tage d'abord les Papillons en deux grandes clalTcs ; celle des Papillons qui ne volent que pendant le jour j & qu'on peut nommer «sf/wr» nés ; & celle de ces Infedes , qui ne volent guéres que pendant la nuit , & qu'on appelle Phalènes ou Papillons noBurnes : & ces derniers font confiderablement plus nom- breux que les premiers. 11 n'eft que- llion ici que des diurnes. Outre la circonlHnce de ne voler que le jour ou la nuit , qui différencie ces deux claftes générales , elles ont encore une différence tirée de la variété de leurs antennes, dont les trois pre- mières claffes caraderifent les Pa- pillons diurnes; & les trois derniè- res font refervées pour les nodur- nes. La forme des trompes pcuE encore fcrvir à diftmguer les Papil- lons en plufieurs claffes ; tous les diurnes en étant pourvus , &: plu- lieurs genres de Phalènes en étant dénués ou paroiffant l'être. Mais ks ailes fourniffent un bien plus grand nombre de differens carade- res , foitque l'onconfidere la figu- re de ces parties , foit qu'on ait égard à leur port , ou à leur pofi- tion fur l'infede , iorfqu'il mar- che , ou qu'il fe tient en repos : ce qui engage notre Auteur à une def- cription trcs-particularifée des ailes des Papillons , principalement des fliperieures , fur lefqucUes il faut recourir au Mémoire & à fes plan- ches. En A V R I En gcncrAl toutes ces ailes , tan- tôt plus grandes , tantôt plus peti- tes , forment des efpcccs de trian- gles rediligncS , curvilignes ou mixtiiignes , dorit le fommct tron- qué eft articulé avec le corcdet du Papillon , & des trois cotez IVwc'- rieurzd le plus proche du corps de rinfefte ; ['extérieur en eft le plus éloigné , & le rroiGcme côté ou la bafe oppofce au fommet fait le tout de l'Aile ., tantôt dentelé ou dé- coupé avec art j tantôt comme dé- chiré inégalement & reprefentanc une efpece de queue. Qiiant aux différences tirées du port des ailes , iJ s'en trouve enco- re un grartd nombre, fdon que ces ailes font drejTées perpendiculaire- ment au plan fur lequel eft pofé le Papillon i ou qu'elles font parallè- les à ce même plan i ou qu'elles font pendantes ; ou qu'elles tor- mcnt fur l'Infede une efpece de toit , tantôt élevé ou aigu , tantôt écrafé ou arrondi -, ou qu'elles em- braffent différemment le corps du Papillon. C'cft donc de tontes ces différences & de quelques autres , .que M. de Rcaumur tire d"s carac- tères fuffifans pour établir fept daf- fesdcs Papillons diurnes. La première eft compofée de ceux qui font pofés & marchent fur fix jambes -, qui portent des an- tennes à maftes ou à boutons; dont les ailes fuperieurcs font perpendi- culaires au plan , &c dont les infé- rieures embrafTcnt de leur bout in- férieur ledeftbus du corps. Dans Ii féconde clafte font compris ceux dont les quatre ailes font pcrpcn- L , 173 ^ *$7 diculaires au plan de pofition, dont les inférieures embraftent aufll le deiïous du corps , mais qui ne le pofent que fur quatre jambes, foit en marchant, foit enfe repofanr. On range dans la troifiéme claflc les Papillons qui ne différent de C£ux des précédentes que parce que leurs deux premières jambes non terminées en cordons de pala- tines , font laites comme les autres jambes , excepté qu'elles font (1 petites qu'elles échappent prcfqu'i h vijc. Dans la quatrième clalTc font ralTcmblés ceux qui fcmbJi- blcs en tout aux précédens n'eti font diftiiigucs que par le bas des ailes inférieures , lequel fe recour- be pour embrafter &: couvrir le deftiis du corps, biffant a nud tout le refte. La cinquième claffe con- tient les Papillons à antennes à maf- fes, à fix vrayes jambes, mais qui tiennent pour l'ordinaire leurs ai- les parallèles à l'horizon , ou du moins , jamais affez rcdreffèes pour s'appliquer l'une auprès de l'autre au deffus du corps. Ceux de la û- xiéme claffe font caraAcrifcs par leurs antennes en maffue ■■, &c ce font eux , qui planent far les fleurs en les fuçant , qui en volant font beaucoup de bruit, &c qu'on appel- lePapillons- hourdons.V Auteuï place dans cette claffe les Papillons mou- ches. Il met dans la feptième ceux dont les antennes font faites en cor- nes de bélier. M. de Réaumur , au furplus , ne caradcrife pas toutes ces claffcs auffi fechemcnt que nous venons de le faire , pour abréger. Il a foia D4 '■'-■■■'- ip» JOURNAL DES SÇAVANS, de les rendre plus intereHantcs &c des fcptcl.ilTes offrent quelque cho* plus inftruiflives pour les Ledeurs en y joignant des dcfcriptionstrès- exaifles de plufieurs genres ou efpe- ces de Papillons qui dans chacune fe de (îngulicr. Nous renvoyons les Extraits des autres Mémoires aux Journaux ful- vans. HISTOIRE DES REVOLVTIONS D'ESPAGNE , DEPVIS LA dcflruclion de l'Empire des Çoths jiifcju'h l'entière & parfaite réunion des Royaumes de Caflille & d'jirragon en une feule A'tonarchie. p.irlePcrt Jofeph d'Orléans de la Compagnie de Jefits ^ & publiée par les Pères Rouil- lé & Bnmoy. 1754. A Paris , chez Rollin hls , Quay des Auguftins ,, à S. Athanafe. Trois Vol. /«-4°. Tom. I. pp. 575. Tom. H. pp. 644, Tom. III. pp. (^55- ON volt dans ce dernier To- me , qui eft divifé en trois Livres , comme les deux autres Volumes dont nous avons rendu compte dans nos Journaux des mois de Janvier & Février der- niers, par quelles furprenanres ré- volutions les Couronnes de Caftil- le , d'Arragon , de Valence , de Sicile, & de Sardaigne furent réu- nies fur la tête de Ferdinand d'Ar- ragon , & d'Ifabelle deCaftille. L'Hiftorien s'attache d'abord à fixer l'époque de leur naifPance pour découvrir la mauvaife toi de Varillas qui voulant à toute torce décrier Ifabelle , ne fe contente pas de lui faire mettre en œuvre les plus grands crimes pour fatisfai- re fon ambition, mais veut enco- re lui donner le ridicule d'avoir re- cherché pour époux un Prince dont elle auroit pu être la mère. Comme les malheurs du Prince de Viane furent une des premières caufes de la réunion de la Caftille & de l'Arragon ; c'cft par cette ctuclk Txagédie que l'Auteui ou; vre la Scène. Ce delTein l'oblige de reprendre la fucceflion des Rois de Navarre depuis Charles II. fur- nommé le Mauvais jufqu'à Blan- che de Navarre. Cette Princefle^, par fon fécond mariage avec Dom Jean Roi d'Arragon, porta la Cou- ronne de Navarre de la Maifon d'Evrcux dans celle d'Arragon- CaftiUe ; elle auroit dû s'y perpé- tuer fur la tête du Prince de Viane, fon lils , mais fa fortune ne ré- pondit pas à fes belles qualitez qui le rendirent l'admiration & les dé- lices de fon ficelé. Tous les Auteurs Efpagnols , & Mariana lui même entraîné par le torrent , ont fuppofé comme un fait inconteftable que le Roi d'Ar- ragon avoit un droit dcfurvivancc à la Couronne en vertu d'un arti- cle de fon contrat de mariage avec Blanche de Navarre , Obiénarc dans fa Notice des deux Nuvarres , eft le premier qui ait ofé contredire un fait fi généralement attefté , &■ il renvoyé fur ce point aux Archir ves de Pampelune Se de Pau, * A V R Le P. Alezon Jefuite , dans fa ■nouvelle Hilloirc de Navarre , compofée en Efpagnol , cite en preuve de cette vérité le tertaincnt de Blanche de Navarre , où après avoir confirmé le droit immédiat du Prince fon fils à la fucceirion de cette Couronne , elle l'exhorte à ne point prendre le titre de Roi , ni la polTeflîon du Royaume que •fon père ne lui ait donné aupara- vant fa benedi^ion , fon agrément & fon confentement. Le Prince de Viane obéit fidèle- ment aux volontez de la Reine , & le Roi fon pcre , lans lui remettre ■la Souveraineté de la Navarre ^ lui en laiffa le gouvernement avec une autorité abiolue , tandis qu'il ad- miniftroitl'Arragon , &^ qu'il fai- foit la guerre en Caftilie, mais cette déférence mutuelle qui faifoit le bonheur des deux Princes , 5c des Peuples dégénéra bientôt dans une rupture éclatante; Dom Jean épou- ia en fécondes noces DonnaHenri- quez fille de l'Amirante de Callil- le , cette PiincelTe prit d'abord une vive jaloulie contre le Prince de Viane, & cette palTion fc changea bien-tôt dans une haine implaca- ble. Le Roi d'Arragon entra infcn- fiblement dans les viîës de fon époufe , & traita fon fils avec tant de dureté & de rigueur que ce Prince céda aux Sollicitations des Navarrois qui le prefloient de pren- dre le titre de Roi de Navarre. Ce Royaume étoit depuis long- tems divifé entre les Beaumontois & les Grammontois qui formoient deux puilTantes fadionj. La prc- I L , ryj j-, inp miere ainll appcUce du nom cic Charles de Beaumont fils naturt 1 de Louis Comte de Beaumont le Ro- ger, frère de Charles le mauvais-, la leconde tiroitfon nom du Marquis de Cortez aullî fils naturel du Roi de Navarre , parce qu'environ 15 ans auparavant les Seigneurs de Grammont avoient été chefs de partis dans une guerre civile ^ comme les Marquis de Cortez le furent dans celle-ci. Ces derniers fui virent le parti du Roi , & les Grammontois celui du Prince de Viane. li étoit encore appuyé pat les Caftillans qui ne l'aidoient que dans la vûtid'aftbiblir le Roi d'Ar- ragon leur ennemi. Aullî le Prince fuccomba dans toutes fes entreprifes , &: pafla une partie de fa vie tantôt en prifon, &; tantôt en exil , mais enfin après des guerres & des négociations qu'on lira avec d'autant plus de plaifir qu'elles font tirées des Lettres du l?rince-même que le nouvel Hifta-f rien de Navarre a le premier dé- couvertes ; le Roi le rappella d^ Sicile, où il étoit depuis la mort d'Alphonfe Roi de Naplc, &fous prétexte d'une entière reconcilia- tion , il l'attira à la Cour ; le Prin- ce de Viane paya chèrement tant de confiance , & fa mort qui arri- va peu de tcms après tut regardée comme un effet de la haine de fa marâtre , £c de celle de l'ambition de la Comteffe de Foix fœur de ce Prince. » Je trouve , dit notre Hiflorien ^ » dans Mariana une contradiction » qui ae paroît pas pardonnable à D d i] s^o JOURNAL D »un Hiftorien fi judicieux, mais «qui fait afTez fentir combien ceux » qui écrivent l'Hiftoirc de leur » Pays doivent erre en garde con- »tre les préventions populaires, de 3> encore plus contre les égards j> trop flatteurs que ceux dont ils 30 tirent leurs Mémoires ont eu »> pour les perfonnes qui gouver- 5» noient de leur tems. Mariana î> convient i°. que le Roi n'accor- » da au Prince en traitant avec fcs » AmbafTadeurs qu'une très- petite 5> partie de fes demandes. x°. Que >» des promelTes qui lui furent fai- » tes fous la foi d'un ferment fo- »lemncl, il y en eut très-peu qui 3» ne tulfent violées dans la fuite, a> }". Qiie ce fut une opinion alTez 31 généralement reçijc , qu'après » qu'il fe fut livré entre les mains » du Roi , la Reine travailla fans » relâche à le taire périr , ne vou- 3»lant pas qu'après la mort de » Dom Jean il devînt fon maître , s> & celui de fes enfans. Gepen- »dant Mariana fait un crime à- »Dom Garlos de fes défiances, & » il traite d'une légèreté infuporta- » ble les incertitudes qui l'agitèrent » avant la conclufion du Traité. =0 L'emprifonnement de ce mal- 5» heureux Prince qui fuivit de fi- wprès fa foijminîon , &c fa mort' » qui parut à tout le monde lui » avoir été préparée dans le der- » nier repas qu'il fit avec cette » PrincelTc , dévoient bien fuffîrc • pour juftifier des irréfoluticns a» qui auroicnt été un effet de fa fa- =»geffe , fi elles avoient pu l'empor- V'Setfuifon inclination à Jiapaix). ES SÇAVANS, » Mais lous le règne de Ferdinand M & d'ifabelle , il eût été -, ajoute » notre Auteur , dangereux aux « Hidoriens de rendre une entière » jufnce à celui par la mort duquel » ils avoienc hérité de fix Royau- » mes. Le Prince deViane étant mort à. 40 ans fins lailfer d'cnlans légiti- mes , inftitua pat fon tellament li Princcde Blanche ù focur pour hé- ritière de la Na.varre , mais elle cuc- le même fort que lui , elle fut traînée de Châteaux en Châteaux , & mourut , encore de l'aveu même. desHiftoriensEfpagnols , du poi- fon que lui fit donner la Comtede de Foix. Les Beaumontois ne révo- quèrent point en doute ce double attentat , aulfi ne voulurent-ils ja- mais reconnoître cette Princeff© pour leur Souveraine , & ce refus- donna lieu à de cruelles guerres qui confondirent l'injuflice des vues du Roi d'Arragon , & firent le malheur continuel de fon règne, La Caftillc n'étoit pas plus tran- quille que l'Arragon , comme no- tre Hiftoricn le tait voir dans les différentes rencontres où les affai- res de ces- deux Royaumes conti- nuellement mêlées enfemble , l'o- bligent de pafler fréquemment de l'un .1 l'autre. La Gafîille malgré la foiBleffe du Roi Jacques IL avoit perdu en cliangeant de maître. Henri IV. fon fils , furnommé rimpuifîant , fit regretter fon pré- decelTeur. ^ L'un avoit été toute fa »vie incapable décommander, & «l'autre s'en rendit indigne ; tous «deux niéprifables , l'un par fom A V R I :*'îmDccilitc, l'autre par fcs dcbau- «chcsi le premier ne fit jamais de jDbien , & laifTa faire beaucoup de » mal faute de talens & de vertus , M le fccond abruti par des vices » honteux fut le fcandalc (Se la rui- » ne de fon Etat. y Pendant la jeuneffe d'Henri on »ïcrut lui entrevoir de l'elprit de »-des fentimcns -, mais cet efprit ne n parvint jamais à maturité , il n'en «conferva qu'une vivacité malre- » glée qui en fit le plus léger, de » tous les hommes. Son malheur voulut encore qu'après avoir ré- pudié fans fujet Blanche fille du Roi de Navarre, il époufa l'Infante Ifabclle fœur du Roi de Portugal. Une conduite peu mÂrée , & les privautez qu'elle eut a^c Bertrand de la Cuéva la firent accufer d'a- voir eu de ce Gentilhomme &C d'intelligence avec le Roi fon ma- ri qui paffoir pour impuiffant, une fille nommée Jeanne,que le peuple par dcrifion nomma la Bertranée. Ce foupcon fervit de fondement aux révoltes desGrands.La foiblefle de Henri , fcs honteufes débauches & l'indécence qui regnoit à fa Cour le firent tomber infenfible- rrtent dans le mépris , èc plongè- rent la Caftille dans une efpcce d'Anarchie qui la mit en proye à autant de Tyrans qu'il y avoit pour lors de Seigneurs &c même de Gen- tilhommes titrés. Pachcco , Marquis de Villena , & Carillo Archevêque de Tolède, partagèrent entr'eux les premiers lôles pendant ces troubles , & fe J0iieient de la ciédulité du Roi I- , I 7 5 î- 2^f avec autant de perfidie que de hau- teur. Il faut lire dans l'Auteur,, comment l'un &: l'autre vinrent à bout de s'emparer tour à tour de toute l'autorité , l'indolence que le Roi témoignoit dans l'aviliffe- ment où il croit réduit , & qui- obligcoit fouvent ceux qui lui étoient reftez fidèles de fe joindre: aux rebelles dans la crainte j qu'a- bandonnés du Roi , ils ne devinf- fent la viiftime de fes ennemis. Le Marquis décidoit de la paix Se de la guerre en Souverain , fui- vant que l'un ou l'autre s'accordoic avec fes vues ambitieufes. Ce fut par ce motif qu'il engagea fon maî- tre à fecourir les Catalans qui no pouvant pardonner à Dom Jean' d'Arragon la mort du Prince de Viane , avoient refolu de fccouer fon joug ,.& de former une Repu» bliquc i mais enfin gagné par ce Prince , le Grand-Maître de Caftil- le engagea fon maître à prendre Louis XI. pour arbitre des difïe- rens qui duroient depuis longtems entre la Caftille Se l'Arragon. Louis Se Henri fe rendirent fur la rivière de Bidaftoa entre S.Jean de Luz & Fontarabie , le Caftillau par déférence pour le Roi de Fran- ce pafTa de l'autre côté de la riviè- re qui fépare les deux Royaumes. Mariana a trouvé ce que Philippe de Comines dit de cette fameufe entrevue , fi fage & fi jufte qu'il l'a traduit dans fon Hiftoire , fie notre Auteur le donne ici tel qu'on le lit dans l'original. Nous ne difons rien de la Sen- tence arbitrale que Louis XL pro-" fl02 JOURNAL D nonça ; on la verra dans l'Ouvrage- même. Elle n'eue prefqu'aucune exécution , & ce Prince s'en mie peu en peine. Son but étoit non de mettre la paix parmi fes voillns, mais de les divifer , de connoîcre leurs foibies , d'en profiter , de ga- gner leurs fidèles Serviteurs pour -s'en fervir dans l'occafion , & il y réuffir. Ce fut peu de tcms après cette conférence qu'éclata la fameufe Li- gue des Grands contre Henri. Elle étoit formée fous le prétexte ordi- naire de travailler à la reformation de l'Etat , & à l'extenfion de la foi, & dans le fond ceux qui en étoient les auteurs ne penfoient qu'à ufur- per l'autorité que le Roi abandon- noit à fes Favoris. Le premier pro- jet des Ligueurs fut de mettre le Roi de Portugal à leur tête ; mais Dom Jean d'Arragon qui depuis longtems penfoit à marier fon fils à l'Infante Ifabellc , trouva le moyen par fes émiflaires de s'en faire déclarer le chef. Ils commen- cèrent par fe rendre maîtres des perfonnes de l'Infant Alphonfe frè- re d'Henri , & de l'Infante Ifabel- îe , firent déclarer le premier Prin- ce des Alluries , & fuccefleur de la Couronne. On tait à ce fujet une reflexion que nous croyons devoir rappor- ter. ^ Si les grands de Caftille eof- M fent fui VI ^ dit-on ici ^ le projet de i> s'addrefTer au Roi de Portugal spour être appuyés dans la préten- » due reformation de l'Etat , il eft M certain que les plaintes & les ma- p Difeftcs qu'ils -mirent au jour ES SÇAVANS, » n'auroient point interefTé l'hon- » neur de leur Souverain , car il » écoit trere , comme nous l'avons » dit de la Rein; d: Caftille , h » prétendu commerce de cette » PrincefTe avec le Comte de Le- » defgma auroit été regardé comme '» une galanterie fins confequence, » 5c l'on fe fcroit bien donné de » garde d'attaquer la nailTance de n Donna Jeanne. Ce fut donc le » caprice , l'inclination ou l'intérêt » des Seigneurs qui décida de la re- » putation de la Reine pour les » fiécles à venir &: du fort de la •> Princefle des Afturies , & cet » exemple eft une preuve bien fen- » fible que bgloire , ou l'ignomi- » nie des tJRfe couronnées ne dé- j> pendent pas toujours de leurs » vertus feules , ou de leurs feuls » vices. Quoiqu'il en foit , les Seigneurs conjurés après avoir elTiyé en tou- te manière de rendre le Roi odieux & ridicule à fes peuples , après avoir extorqué de lui des condi- tions qui le dégradoient entière- ment , portèrent l'excès de la ré- volte jufqu'à un attentat qui fut fi énorme que , comme le dit Maria- na , la feule penfée en fait frémir. Il nous fuffira de dire qu'ils firent élever un Théâtre fur la grande Place d'Avilaoùils s'étoienralfem- blés , qu'ils y placèrent un Simu- lacre de Henri allas fur fon Trône , & revêtu de fesornemens Royaux. Là après qu'un Héros eut lu la Sentence de dépofition , dans la- quelle on imputoit des crimes atro- ces au foible Roi ; l'Archevêque de A V R I Tolcde s'approchant tk- l'effigie , lui ôta la couronne, deux autres Seigneurs l'épée & le fccptre , & un troificnie renverfa le Simulacre en chargeant le Roi de malédic- tions , & pour achever cette ridi- cule cérémonie , ils déclaiTrcnt Roi le jeune Alphonfe frère d'Hen- ri qui n'avoit alors que douze ans , èc qui paroilToic digne de foûtcnir Un jour ce titre. Mais ce jeune Prince , après avoir été quelque tems l'inftru- ment de leur pallîon , mourut à l'âge de i^ ans, non fans foupçon de poifon , car , comme le remar- que l'Auteur dans une autre occa- fîon , cette mort & plujîeurs autres femhlables ifui arrivaient dam ces tems malheureux à point pommé com- me pour fervir de dénouement aux grandes intrigues , doivent parottre au moins fort JufpeBes . Le Roi d'Arragon qui fut accu- fé d'avoir abrégé les jours d'Al- phonfe dans le deflcin de marier l'Infant Ferdinand avec Ifabclle, en profita pour hâter une alliance fi avantageufe à fa maifon , & il trouva le moyen d'y réuflîr. Le Prince fe rendit fccretement à Val- ladolid où il époufa la Princefle , quoique par un traité conclu avec les Seigneurs dans lequel Henri rcconnoiffoit Ifabeile pour Prin- ccffe des Afturies à l'exclufion de fa propre fille , la première eût promis de ne fe marier que du con- fentcment du Roi fon frère. Piqué de ce mépris & animé pat le Grand-Maître de S. Jacques , qui ccoit outié de ce qu'une ajETaiie de L , I 7 3 5*' 205 cette nature s'étoit conclue fans fa participation , Dom Henri déclara avec grand appareil , qu'Ifabelle s'étant rendue indigne de fes bon- tez, elle étoit déchue de tous droits à la Couronne , & qu'en fa place il reconnoifToit pour fon héritière Donna Jeanne; & la Reine ayant fait ferment auîfi bien que lui que la nouvelle PrinccfTc des Alturies étoit vérirablemcnr leur fille , toijs les Seigneurs lui baiferent la main en cette qualité , furent abfous par le Cardinal d'Alby , AmbalTadeut de Louis XI. des fermens qu'ils avoient prêtés à Ifabeile , & le Comte de Boulogne fiança Donna Jeanne , qui pour lors n'avoit que neuf ans , avec le Duc de Guienne firere de Louis XI. mais le Duc fc dégoûta bien-tôt de cette alliance, & mourut quelques années après fans l'avoir conclue. D'un autre côté Ferdinand & Ifabeile fe virent obligés de foûtc- nir leurs prétentions les armes à U main ; l'Efpagne fe trouva alors dans une horrible confufion. Par une longue fuite d'intrigues qu'on trouvera ici mieux développées & traitées plus à fond que par - tout ailleurs , on engagea enfin Henri à s'aboucher avec fa fœur Ifabeile , & avec l'Infant Dom Ferdinand. Cette entrevûif fe pafiaavec un ait de confiance , dont les peuples fc promettoient les plus heureufes fuites. Dom André Cabrera qui avoit ménagé cette réconciliation; invita chez lui à diner le Prince &: la Princeflc avec le Roi ; mais après le repas Henri fe fentit attaqué ^•4 JOURNAL D d'une douleur violente de cotcac- .coçnpagnée d'autres iîmptômcs qui .firent croire qu'il école empoifon- né. Mariana ne dilîîmule pas qu'on .n'en ait rejette le foupç in fur Fer- dinand 8c Ifabelle , mais il fe con- tente de dire que leurs profperitez conftantes font une preuve de li protedion de Dieu , dont ils au- roicnt .été .indignes , s'ils cuITcnt été complices delà mort du Roi de Caftille , fuppqfé qu'elle n'ait pas été naturelle. Quoiqu'il en foit , ils en rc- eueillirent Je fruit , mais nqn fans peine ; car Henri en mourant dé- clara Donna Jeanne pour fon héri- tière , &c après avoir reçu les Sacre- mens , piotefta en prefence de fon Confcfleur , que /a nailTance n'é- toit point fufpedie , cependant Mariana eft le feul des Hiftoriens Efpagnols qui oze laiiTer douter de la fubrtitution de Donna Jeanne , & cet aveu eft d'un grand poids dans " une bouche Efpagnole. Après la mort d'Henri , la Cour fe partagea entre Donna Jeanne , &: Donna Ifabelle. Mais fa conduite mâle & vigou- reufe , la valeur & la prudence de l'Infant fon époux , l'amour des peuples qu'ils s'étoient acquis l'un & l'autre joint à leur aftivité, les rendirent triomphans des efforts de leurs ennemis. En vain le Roi de Portugal elTaya-t-il de relever par la force des armes le parti de Jean- ne & dejuftifier fes droits dans un Manifefte qu'on trouvera ici en en- tier , cette malhewrcufc Prince ife lalTe d'avoir pour ainfi dire à fc plaindre de tous les hommes , foie ES SÇ AVA NS, amis , loit ennemis , le )crta entre les bras de Dieu , & prit le voile de Religieufe à Conimbre dans le Monalterc des Clarifies i elle [on- tint ce parti avec desientimcns de Religion qui ne lui permirent ja- mais de regretter les faulTcs efpe- rances que le monde lui avoit don- nées jufqu'alors. En confequence du Traité de Paix qui avoit précédé la retraite de Jeanne la Nonnain, car c'cll ain- fi qu'on la nomma depuis , Ferdi- nand fe vit tranquille podeffeur du Royaume de Caftille -, il l'étok déjà de l'Arragon par la mort du Roi Dom Jean Ton pcre qui écoit arrivée cette même année. 11 trou- va encore le moyen après la mort de Louis XI. de retirer de Charles VIII. les Comtez de Cerdagne& de RouffiUon , fans payer ics loo mille écus d'or pour lefqutls ils étoient engagé? ; il en fut quitte ■pour donner des paroles qu'il qc tint pas fuivant fa coutume. On anticipe ce dernier fait com- me plufieurs autres , & en particu- lier la réunion de la Navarre à la Couronne de Caftille ; » ahn de » faire appercevoir au Ledtcur , = comme dans un lointain , par » quels refTorts de politique & de » bonheur Ferdinand vit les mem- » bres épars de l'Efpagne fe rap- » procher les uns des autres & for- » mer ce corps redoutable & puif- » fant , dont il tut en quelque ma- » niere le créateur &c le chef ; la conquête du Royaume de Grenade fur les Maures n'y eft pas oubliée j mais COinme ellcparoît liée à celles qu'on qa on vient de décrire on a cru en devoir donner une idée aficz étendue pour n'en rien perdre d'cf- fenticl , &c affez fuccinte pour la prefcnter plus vivement aux yeux du Lefteur. On finit par un précis des évcnemens les plus nicmora- bies du règne de Ferdinand & d'I- A V R I L ., 173 y. loy fabelle. L'exftitude des Editeurs, les recherches particulières dont ils ont enrichi cet Ouvrage , & le délmterelTement avec lequel il efl: écrit, engageront fans doute le Pu- blic à leur en demander la Conti- nuation. MEMOIRES DV CHEVALIER B'ARVIEVX , ENVOYE' Extraordinaire du Roi a la Porte , Coufnl d'Alep , d'Alger, de Tripoli ^ & autres Echelles du Levant , concernant fes Voyages à Confiant inople ; dans l' Ajîe , la Syrie , la Palefline , l'Egypte & la Barbarie , la Defcrip- tion de ces Pays , les Religions , les Mœurs , les Coutumes , le négoce de ces Peuples, & leur gouvernement ^ l'Hifloire Naturelle & les évenernens les plus confiieralÀes\ recueillis de fes Mémoires originaux ^ 0' mis en ordre avec des r.-fljxions. Par le R. P. Jean ■ Baptifte Labat , de l'Ordre des Frères Prêcheurs, A Paris , chez Charles Jean Baprifte de Lufpine , Li- braire , rue S. Jacques , vis - à - vis la rue des Noyers , à la Vidloire. in^^ lîx Volumes, Tom. I. pp. 470. Tom. II. pp. 521. Tom. lil. pp. 5 58. Tom. IV. pp. 571. Tom. V. pp. 613. Tom. VI. pp. 6\y NOUS avons rendu compte dans le dernier Journal des deux premiers Volumes des Mé- moires du Chevalier d'Arvieux , où l'Auteur rend compte de fes Voyages en Egvpre , en Syrie , Si. dans la Pjklline , où il vifita les Saints Lieux , & où il fut fait Che- valier du S. Sépulcre. Il étoit re- tourné à Seyde , quand on y apprit que l'armée navale de France s'é- toit rendue mâûrelTe de Gigery. Cet événement qui pouvoit avoir des fuites fâcheufes pour le com- merce des Maures &: des Turcs , irrita les uns &c les autres contre la Narion Françoife. Le Chevalier d'Arvieux ne crut point devoir s'expofer à devenir l'une des vifti- nics de leur reffcntiment. C'cft Avril. pourquoi il prit le parti de fe reti- rer pendant quelque rems chez l'E- mir-Turabey Prince des Arabes du Mont-Carmel. Les prefens qu'il fit à l'Emir & aux principaux de fa Cour , la manière dont il vécut avec eux , s'accommodant à leurs mœurs ii à leurs coûtumcs^pcrlant & écrivant leur Langue, lui atti- rèrent l'amitié du Prince &' de fes Sujets. Il y fit pendant quelque tems lafoniftion de Secrétaire d'E- tat de l'Emir , & chercha toutes fortes de moyens pour l'engagera s'établir chez ces Arabes. A l'occalion de ce Voyage chez l'Emir-Turabey , le Chevalier en- tre dans un détail curieux & inte- lelTant des mœurs &: des coutumes des Arabes , en particulier de ceux Ee ao6 JOURNAL D qui habitent le Mont - Carmcl ôi les environs , de leur Religion & de h manière dont ils adminiftrent la juitice. Mais comme ce morceau qui nous a paru le plus intereflant & le plus curieux de ces Mtmoi- les, cil déjà connu par la Relation que M. de la Roque a publiée en 1717. du Voyage du Chevalier d'Arvieux chez l'Emir - Turabey, pous lailTerons au Ledieur qui voudra fe donner la peine d'exa- miner ces deux Relations à faire fes réflexions fur ce que dit le Père La- bat , que il dans la Relation de ce Voyage telle qu'il l'a publiée , le Public perd quelque chofedu cô- té du ftile , il y gagnera infailli- blement d'un autre côté, qui n'eft pas moins important. Le Chevalier d'Arvieux s'éroit enrichi par le moyen du commerce qu'il avoit fait à Seyde.mais voyant en 166^. que le commerce des François y étoit en alTez mauvais état , qu'il y avoit même quelques- uns d'eux qui avoient fait banque- route , &c que fes affaires n'étoient plus dans un état fi floriffant , il prit le parti de quitter Seyde pour retourner à Marfeille. Peu de tems après que le Cheva- lier d'Arvieux fut arrivé à Marfeil- le , M. d'Oppodc premier Préfl- dent du Parlement d' Aix & Com- mandant pour le Roi en Provence, le ehoifit pour aller à Tunis avec M. Dumoulin Ecuyer de la Reine, qui étoit chargé de porter à Tunis la ratification du Traité de Paix que M. le Duc de Bcaufort avoit conclu avec la Régence de Tunis ES SÇAVANS, au mois de Novembre lëë^. & de faire exécuter tout ce qui étoit por- té par le Traité. Il paroît par ce qu'on fait dire au Chevalier d'Ar- vieux fur ce Voyage de Tunis que dès qu'il fut arrivé en Afrique , il fe brouilla avec M. Dumouhn, qu'il profita de la connoilFance qu'il avoit des Langues Orientales pour s'attirer la confiance du Divan &C du Day de Tunis , & pour fe faire honneur de cette négociation. Ce Voyage à Tunis donne litu au Chevalier d'Arvieux de parler de Mahomct-Bcn Hamonda - Beig Pacha de Tunis , l'un des plusfu- pcrfliticux Obfirvateurs de la Loi Mahométane , du Day-Hagi-Mu- ftapha-Garagus , & de Mehemed- Cheleby,appellé Dom Philippe fils du Day-Ouzou - Ahmed - Khoagc. Ce dernier étant venu en Europe , y avoit einbrairé le Chriflianifme , Se il avoit été baptifé. Mais étant retourné en Afrique, il y fît une profeflîon publique du Mahomé- tifme. Notre Auteur alfure que Dom Philippe confcrvoit de l'in- clination pour la Religion Chré- tienne , &: qu'il portoit toujours fur lui une croix d'or dont le Pape lui avoit fait prefent. La defcription de la Ville de Tunis, des maifons de campagne des environs de cette Ville , de l'é-. tat de la Goulette &c des ruines de Cartagc font k fujet des trois pre- miers Chapitres du quatrième Vo- lume. Le quatrième Chapitre re- garde le Gouvernement de Tunis, Cet Etat ell une République à la- quelle on donne le nom de Royau- A V R me , dit notre Auteur, comme on le donne à celle de Pologne. Cette République cfl: compoféc de Sol- dats , de toute forte de Nations , pourvu qu'ils foicnt Mahométans. Dès qu'un Mahométan demande à être aggrégc à la milice , il y eft re- çu. Sa paye augmente Se il monte aux Charges & aux dignitez à pro- portion de fesfervices , ou fuivanc Ion rang d'ancienneté. C'ell l'af- fembJéc de ces Soldats qu'on ap- pelle le Divan. Le Day qui eft réel- lement le Chef de la République , & le Colonel Général de la Milice eft élu parles Soldats. Cette Place eft à vie , à moins que quelque ré- volution extraordinaire ne falTe abréger le règne de celui qui a été élu , il eft obligé de prendre l'avis- même des Soldats , dans tout ce qui concerne l'intérêt de la Repu- blique. Mais il eft ordinairement fur que les fuffragcs s'accorderont avec ce qu'il propofe ainlî. Le Pacha eft nommé par le Grand - Seigneur , & il reprefentc faperfonnc; on lui bit beaucoup d'honneur , mais il n'a aucune au- torité pour le Gouvernement , 8c fa foniSion fe borne à recevoir les contributions que la République paye au Grand-Seigneur tous les ans. Il ne peut fortir de fa maifon fans la permilîîon du Day , s'il té- moigne quelque répugnance à fe foûmettre à cette Loi , ou s'ilpa- roît vouloir fe mêler du Gouver- nement , le Divan le fait embar- quer & le renvoyé à Conftantino- ple. Le Mufti, le Cadi& leslmans ou Marabouts des Mofquces , ju- I L , r7î y. 207 gent toutes les affaires qui regar- dent la Religion, nicaie les affaires civiles. A l'égard des affaires cri- minelles , ils les rcnvoyent au Day ou au Divan. Quand il faut faire un Bcig ou Général des Troupes , la Milice élit «rois Sujets , entre Icfquels le Gi and - Seigneur en nomme un qu'il choilît pour Beig. L'exercice de h Religion Chré- tienne fe tait à Tunis avec liberté toute entière , & même avec beau- coup de Solemnitez dans l'Eglifc du quartier des François , &C dans les baignes ou logemens des Efcla- ves qui ne font p.is logés chez leurs Patrons. Dès que le Chevalier d'Arvicux fut de retour de fon Voyage de Tu- nis, il alla .\ la Cour, où il aifure que M. Collart^auquel il rendit compte de ce qui s'étoit palTc dans le voyage, le reçut beaucoup plus favorablement que Monfieur Du- moulin. Cependant on ne lui prc- fenta aucun emploi , il fut obligé de fe retirer chez M. Thévenot , où il travailla aune Tradudion & à», des Mémoires pour une Grammai- re & pour un Didlionnaire de la LangueTurque. On l'engagea à fol- liciter uneChairedeProfelTcur d'A- rabe au CoUégeRoyal. Il fe confoli d'autant plus aifément de n'avoir pu l'obtenir, qu'il afture que ja- mais il n'avoit eu de goût pour une pareille place. Il alloit paffer en Angleterre pour y demander de l'emploi , quand il obtint la place d'Ecuytr de Madame la Maréchale de la Motte , qu'il regarda comme un moyen qui pourroit le condui- Eeij flo8 JOURNAL D reàde plus grands emplois. M. de Lionne fe fervit du Che- valier d'Arvieux pour les négocia- tions avec Soliman-Aga , Envové en France de la part du Grand-Sei- gneur , &i pour toutes les difficul- tezaufquelles donna lieu l'audian- ce qu'il plut au feu Roi d'accorder à Soliman. L'idée que le Chevalier d'Arvieux donne à cette occahon de ceux qui remplilToient alors la fondlion d'Interprètes des Langues Orientales ne leur eft point fort avantageufe. Il faut au contraire que la Cour de France fe foit alors formé une grande idée du mérite du Chevalier d'Arvieux , puifquc quand on vit en France que M. de Islointel Amballadeur à Conllanti- rople n'avoit pu obtenir du Grand - Seigneur les capitulations , aux conditions que le Roi fouhai- toit , on y envoya le Chevalier d'Arvieux. Il ne fut pas content de la maniè- re dont M. de Noinccl le reçut , ni des conférences qu'il eut avec l'AmbalTadcur -, & ce font , fuivant les apparences , ces mécontcnte- mens qui ont donné lieu à l'Auteur de parler d'une manière auffi fcche qu'il l'a fait de M. de Nointcl & des perfonnes quiétoicntàfa fuite. Cependant le Chevalier d'Arvieux ne réullît point dans la négocia- tion à Conftantinopk , & ce ne fut que quelque tems après qu'il fut de retour à Paris que M. de Nointel obtint les capitulations qu'il demandoit. Dans la relation de ce Voyage és Turquie l'Auteur donne la dcf- ES SÇAVANS, cription particulière de Conftanti- rople 3c des environs depuis les Dardanelles jufqu'à la mer noire ; il V joint une dcfcription de la Vil- le d'Andrinople , il y parle du Bai- rjn ou de la Pàque des Turcs , de la fortie du Grand - Seigneur pour aller (aire fon oraifon .1 la Mofquée principale , de la manière dont le Grand Seigneur campe hors de la Ville d'Andrinople avant que de fe mettre en campagne. A la fuite de ces defcriprions on voir le portiait du Sultan MchemetlV. Empereur des Turcs , & un abrégé de l'Hi- ftoire de Mano Tiet-Cupruli Grand Vifujôc de fon fils Ahmed qui lui a fuccedé dans cette place fous- l'Empire de MehemctIV. Le peu de fucccs du Voyage du Chevalier d'Arvieux n'empêcha pas qu'il ne fût très bien reçu , fui- vant ce qu'il alfure^du Roi& de fes Miniftrcs. On lui déclara même que le Roi vouloit l'employer eiî d'autres affaires dans les Pays étran- gers i il profita du féjour qu'on lui permit de faire à Paris , pour fe fai- re recevoir Chevalier de l'Ordre de S. Lazare. Enfuire on l'envova Conful à Alger ; le Chevalier d'Ar- vieux crut que comme il avoit été àConftantinople en qualité d'En- voyé , on ne pouvoit l'envoyer à Alger en qualité de Conful. Mais les Miniftres lui répondirent que quand il s'agilfoit du fcrvice du Roi il ne falloir pas s'arrêter au titre fous lequel on le fervoir,i?ique ce ne feroitpoint à la qualité, mais aux fer- vices que IcRoi proportionncroit la. rccompcnfe. Malgré la connoifTan- A V R I ce de la Langue &c des mœurs du Pays , le Clievalier d'Arvieux n'eut pas de fuccès plus heureux à Alger qu'en Turquie ; il hit obligé de forcir d'Alger & de revenir en Fran- ce. Il fe vengea des Algériens en difant bien du mal de ceux qui les gouvernent &c des habitans du Pays. Il donne à fon ordinaire dans h relation de ce Voyage une def- cription de la Ville d'Alger , &c des environs, avec des obfervations fur les mœurs des Algériens 6: fur le gouvcrncmenf delà Ville. Le Chevalier d'Arvieux fut en- fuite nommé ConfuI d'Alep. La relation que donne le Chevalier d'Arvieux de fon Voyage à Alep ^ & de ce qui s'efl: paffé pendant fon Confulat confifte dans une defcrip- tion particulière de la Ville d'Alep, dans quelques Lettres oià M. Pi- quet , qui avoit été ConfuI d'Alep, éc qui ctoit depuis devenu Evêque de Céfarople , Vicaire Apoftolique de Babylone &c Vilîteur Général de la part du Pape en Orient, fait L j I 7 ? y* 20^ une relation de fon Voyage en Perfe. C'cft ce que l'on a déjà vil dans la Vie de M. Piquet , donc nous avons parlé dans nos Jour- naux. Le Chevalier d'Arvieux rap- porte aulfi dans fon dernier Volu- me les conteftations qu'il a eues avec les Jefuitcs an fujetde la Cha- pelle du Confulat d'Alep , & fes différends avec M. Julien fon Suc- celTeur au Confulat d'Alep qui l'a fort maltraite. Les Ordonnances' rendues en faveur du Chevalier d'Arvieux contre M. Julien par l'AmbaHadeur de France en Tur- quie, par l'Intendant de Provence, & les ArreftsduConfeil qui confir- ment ces Ordonnances , font des Pièces qui juftifient le Chevalier d'Arvieux contre fon SuccefTeuE au Confulat d'Alep. Comme le Chevalier d'Arvieux B'a point fait de Voyages depuis celui d'Alger , fes Mémoires finif- fent avec l'Hiftoirc de fon Confu- lat. MICHAELIS-BERNHARDI VALENTINI ; ARCHIATIS Afllaci , & Prof. Medici Gifleni , Hiftoria fimplicium reformata feu Mufei Mufcorum titulo antehac in vernaculâ édita , jam autem in- gratiam exrerorum , fub dircdlione , emcndatione, Se locupletationc Autoris ,à D. Joh. ConradoBeckero Medieo Alsfeklenfi , latio refti- tuta. Accedit India Litterata , è Lingu.î Bclgicâ primum in Germani- cam tranflata , nunc vero addefiderium exterorum , Latinitate dona- ta, longe audior reddita , novifque tiguris ilhiftrata à Chriftophoro- Bernhardo Valentini M. B. Filii. Veneunt pofthac Offenbaci ad Moe- num , apud Joannem-Ludovicum Konig, Bibiiop. 1733. vol. in-foJ. C'e(ï-à-dire : L'Hifloire des Simples reformée , de Michel -Bernhard Valen- tini , laejuf/le a paru ju/cfit'ici en la Langue du Pays , & varoit à prefent en Latin. Par les foins de Jean Conrad-Becker. On y a joint Pinde Litté- raire , ci-devant palpites en Flamand , pw/j tn Allemand , & à prefent ai-Q JOURNAL DES SÇAVANS, traduite en Latin , beaucoup augmentée , & enrichie de nouvelles fgitns. Par Chrifiophe - Bernhard Valentin , fis de Michel - BernhardV,iltmin. Chez Jean-Louis Kontg. 1733. vol. w/o/. pp. 6^4. fans compter k Table qui eft de 1 4 pages. ON expole dans cette Hiftoirc l'origine , les vertus & l'ufa- ge des (impies qui fe tirent des trois règnes , fçavoir du règne minerai , du règne végétal & du règne ani- mal ; l'Inde Littéraire qui y eft jointe contient des Differtations en forme de Lettres , lefquelles font écrites par divers Auteurs célèbres, tels entre autres que Georges Ebe- ihard Rumptrius, Herbert de Ja- get, André Cleyer j ces Lettres concernent les plantes qui croiflent dans rinde Orientale. On y traite de leur végétation , de leur culture & du commerce qui s'en fait. On trouve dans cette Edition plusieurs articles nouveaux concernant le Sel d'Ebfon , l'Alum de plume , l'Or- piment , la graine de Chcrmés ^ la Thérébentine de Vcnife , le Sel Armoniac, la pierre de Bezoar,er(.-. L'Ouvrage commence par la Terre figillée , le Bol d'Arménie , l'Argile, la Terre Antifcobutique , la Terre Solaire , le Cachou , l'O- cre , la Craye , le Tripoli , l'Indi- go , le Sel Gemme,le Sel commun, i'Alum , le Salpêtre , le Borax , puis viennent le Vitriol , l'Encre de la Chine , la Soude, le Souphre , l'Alphalte , l'huile de Pétrole, le Succin , l'Arfenic, l'Orpiment, &c. à quoi fuccedent les pierres , fça- voir le Diamant, l'Efcarboucle , le Rubis , ie Grenat, l'Hyacinthe, l'Ametifte, le Saphir, l'Emcraude, l'Opale , la Topafe , la Chryfolite , le Jafpe, la pierre Néphrétique, la pierre précieufe de Grenoble. Après ces articles l'Auteur parle du Chryftal , de la pierre Spéculaire , du Marbre & de toutes les autres pierres connues , telles que l'A- iebâtre , le Porphyre , l'Outre- mer , la pierre Ponce , la pierre de Mexique qui fert à tîltrer l'eau , la pierre d'Aigle, la Butonine, ou pierre de Crapau, le Gloftopctre & autres pierres figurées. Les métaux viennent enfuitc dans leur rang , l'or , l'argent, &c. puis les Marcalîkcs , le Bifmuth , le Zinch , l'Antimoine & fcs pré- parations, le Mercure & le Cina- bre. De ces articles , notre Auteur palTc à celuidesEaux Minérales, tant artificielles que naturelles , puis à celui des Coraux , & de la Coralline , ce qui termine le pre- mier Livre , car l'Ouvrage en com- prend trois. On peut juger par ce début , combien l'Hiftoire dont nous parlons eft étendue , puifque ce que nous venons d'indiquer ne regarde que les matières du pre- mier Livre , & que les fujcts des deux autres ne lont pas moins abondans. 11 s'agit à prefent de donner quelque exemple , par lequel on A V R I puifTc juger de la manière dont l'Auteur traite les matières dont il parle. Nous choiiîrons l'article du ter. Le fer eft un métal fort dur, qui fe fond difficilement. On en trouve beaucoup dans l'Allemagne. Il ne faut pas croire que toute forte de fer ait befoin d'être cuit & préparé quand on le tire de la mine. Il y en a qui iCi^oit de la Nature , dans la mine-mcme , toute la perfeft-ion que le fer reçoit ordinairement de l'art. J'en ai , dit M. Va- lentini , un morceau qui m'a été donné , lequel a été tiré de la terre , aufli cuit & auflî préparé que s'il avoir paffé par les mains des Forge- rons. On prétend que dans laNor- vége & en plufieurs autres Pays , il s'en trouve de cette forte , ce font Acsgueufes toutes faites par la natu- rc-mcme. Notre Auteur décrit ici Its préparations que le fer reçoit dans les forges , & il remarque que le fer d'Allemagne eft beaucoup meilleur que celui des autres Pays , parce qu'il eft moins fujet à la rouille. In Galliâ confeEla lamelU , ^Hod facile rubigmem comrahnnt , minons aflimantur çjHam Germano- rum. Nous remarquerons fur cela que par rapport aux ufages de la Médecine , le fer qui fe rouille faci- lement eft à préférer , mais que par rapport aux ufages mcchaniques , c'eft le moindre , & qu'ainfi pour ce dernier égard , il faut choifir le fer d'Allemagne. L'acier d'Allema- gne eft aufll par la même raifon le meilleur de tous , auftî eft - ce de celui-U dont on fç doit feivir pour faire des rafoirs , des lancettes & autres inftrumens de Chirurgie. Les couteaux d'acier de Damas font faits de ce même acier d'Alle- magne. La meilleure manière de le préparer eft de faire rougir plu- fleurs fois le fer , & de le tremper à chaque fois dans des fucs d'herbes fpiritucufes. Notre Auteur reriiaç- que h cefujet,que toutes les matiè- res qui abondent en fois volatils , font très- propres à procurer à l'a- cier les qualitcz qu'il doit avoir , ^ que c'eft pour cela que les Forge- rons , quand ils veulent donnera leur fer une grande dureté j ont foin de le plonger tout rouge dans de la corne de pied de cheval. Dans le Brabant , il y a une terre parti- culière pour produire cet effet, &C dont tous les Ouvriers en fer fe fervent à ce deffein. M. Valentipi dit en avoir un morceau qui lui a été donné en prefent. Il ajoute qaa Leide il y a eu un Coutelier nom- mé le Coutelier Cartéfien , qui par le moyen de cette terre donnoit au fer une dureté extraordinaire. On l'appelloit le Coutelier Cartéfien , parce qu'il paftoit pouï avoir ap- pris de Defeartes ce fecret. Il faifoit des rafoirs & d'autres inftrumens qui excelloient en bonté , mais il les vendoit bien cher. Rulandus aflure qu'auprès de la montagne de Fuftelberg , on tire de la terre un acier naturel , qui a toutes les qua- litez de l'artificiel. M. Valentini parle enfuite,de la limaille d'acieïj il obferve que la meilleure pour les Ouvriers qui travaillent en acier , fuH04jî,poi« ççux qui font des ai- 2t2 JOURNAL DES SÇAVANS. guilles, c'eft celle qui étant expofée Fer étant prife en poudre au poids la flamme de la chandelle , ne prend pas aifément feu & n'éteint pas la chandelle , fans quoi il but dire que cette limaille eft mêlée de fer. Notre Auteur n'oublie pas les ufages qu'on fait du fer en Méde- cine. Il parle à ce fujet , du Safran de Mars apéritif, &c du Safran de Mars alfringent , de la teinture d-e Mars , & de la fleur de fer. Ce qu'il dit fur ce dernier article n'eft pas moins utile que curieux. La fleur de fer eft connue de peu de perfonncs , Si il ne s'en trouve guéres que dans les Cabinets des Curieux , il feroit à fouhaiter qu'elle devînt plus commune , & on en pourroit tirer de grands fe- cours pour la guérifon de plufieurs maladies. M. Valentini obferve qu'on a déjà découvert que cette fleur de d'une demi drachme , ou de deux fcrupulcs , cil fouveraine con- tre la dyflenteric ; Wclfchius affu- re qu'il l'a vu emplover plufieurs fois contre ce mal & qu'elle a tou- jours réuflî. L'ufage extérieur de la fleur de fer ell; fort recommandé par notre Auteur contre la galle , contre les ulcères malins & autres léfions de la ^eau. Cette fleur appliquée fur le vifage le blanchit , & vaut beau- coup mieux . félon notre Auteur , pour le teint des Dames qu'un grand nombre de cofmétiques , dont elles tont tant de cas. Nous ne finirions pas fi nous voulions parcourir amii tous les autres articles de cette Hiif oire des Simples : ce que nous venons d'en ébaucher doit fuffire pour en don- ner une idée. L'ORIGINE ANCIENNE DE LA THTSIQyE NOWELLE ou l'on voit dar.s des Entretiens par Lettres , ce j ou folides qui pouvoient naître » dans l'efprit fur la nature •, 2°. »' par l'étude de la nature dans el- »le- A V R I L »ile mcmc , plutôt que dans les ■» Ouvrages des Pliyficicns , 3°.par «ik méthode , 4°. par les Inftru- » mens nouveaux ,& par les cxpe- »» rienccs de Méchanique , d'Opti- «•que, de Cliymie , d'Anatomie , i> &c. 5°. par rétabliireiiunt des » Académies , &: par l'inftitution «»dcs Journaux ou des Mémoires «dcftinés àieivir à l'Hiftoiredes »> Sciences. Eudoxe croit devoir entrer là- xlelîus dans quelque détail; il dit que la nature femble avoir pris plaifir de nous cacher les relTorts qu'elle fait joiier pour produire les effets qui frappent nos yeux, &C il remarque qu'ahn de découvrir ces rcfforrs , il faut eiTayer bien des ,penfées divcrfes, bien des conjec- tures ; mais qu'enfin une conjcâu- re en attire une autre -, que l'cfprit naturellement curieux & inquiet , les multiplie Â: les compare , Que la comparaifon fait mieux fentirce ■qu'il y a de foible dans les unes & de folide dans les autres , 6i qu'à force démultiplier & de comparer ics conjedures , on parvient à la connoiHance de la vérité. Notre Auteur obferve que c'eft ce que les Phy ficiens ont fait , & il le montre dans une forte d'Hiftoire abrégée des diverfes conjedures qui ont amené la Phyfique au point où elle eft. Dans cette vCië il introduit fur la Scène les Phyficiens anciens & les Phyficiens modernes, les faifant parler après leur mort, ic leur faifant dire pour le fond , ce qu'ils ont dit pendant leur vie. jOn leur voit débiter quelques rc- jivrsl. veries y mais de la manière dont l'udoxe rapporte ces rêveries , elles ne fervent qu'à donner du jour à la vérité même. Il affemble ces Philo- fophes dans les Champs Elyfées. Quoique l'alTemblée foit imaginai- re, elle n'en eft rpas moins inftruc- tive -, chaque Philofophe y parle félon fon génie, & d'une manière précife autant qu'il .;feft ncceffaire pour lailTcr voir fon opinion : voi- ci un échantillon de cet Entretien. Anaxagore , Anaximandrc , Thaïes , Phérécide, Anaximéne, Heraclite parlent les premiers , & commencent par ce qui concerne les principes des corps. Anaxagore. Comment dé- velopper les principes des corpsî Les corps ont une iniînité de prin- cipes. Anaximandre. Une infini- té ! non , ils n'en ont qu'un , maiï il eft infini ■■, c'eft l'infini - même. Tout vient de l'infini , tout va s'y perdre. T H A L E s. L'infini ! non , c'eft r^au , tout vient de l'eau , comme Homère l'a dit. En effet, les plan- tes, le Soleil , les Etoiles mêmes » l'Univers entier , tout fc nourrit de vapeurs. Donc tous les corps rcfultent d'un feul principe ^ & ce principe c'eft l'eau. P H E R E CI 1) E. L'eau ! non, c'eft la Terre. La Terre eft le fonds d'oii l'Univers entier eft forri. Anaximéne. LaTerre 1 non,' c'eft l'air. L'air eft la bafe de tout. A proportion qu'il s'atténue , ou qu'il fe condenfc , il fe métamor- phofe en différentes efpeces de corps. F f âT4' JOURNAL D Heraclite. L'air ! non , c'eft le feu. D'abord il n'y avoit que du feu. Mais une partie du teu s'étant éteinte, les particules «^rof- fieres fe font unies , &C elles ont donné la Terre. Enfuite , une par- tie de la Terre s'cft trouvée dillou- te en eau par l'adiion de la chaleur; & l'eau qui s'eft évaporée , a pris la nature de l'air. De-là le monde que le feu doit confumer. Archelaus. Non, ce qui fert de principe au corps , ce n'eft ni la terre précifément , ni l'eau , ni l'air, ni le feu. Xenophane. Car c'eft la terre & l'eau. H I p r o N. Ou plutôt l'eau & le f.u. O E N 1 p o D E. Ou plutôt le feu & l'air. Arckelaus. Ou plutôt J'air , l'eau & la terre. Zen ON. Ou plutôt l'alTorti- racnt de ces quatre cliofes. E M p En o c L E s. Zenon y iait- il attention "; la terre , l'eau , l'air & lé feu font des élémcns , il eft vrai ; des corpufcules quicompo- fent des corps fenfibles ; mais Ibnt- ce des principes ? Les principes n'ont point de princip'.s ; le feu , l'air , l'eau , la terre ont leurs prin- cipes , & ces principes font ceux des corps fenfibles. A R I s T o T E- Platon-mcme en convient, mais quels font enfin ces principes î Empedocles. La difcorde & l'amitié, ou l'antiparhie & la fympathie de certaines particules pJ US , déliées encore que ks éié- ES SÇA V ANS, mens, 6c qui font comme les élé- mens des éiémens. HippON. L'antipathie & la fvmp.uhie ! ces principes - là font- ils bien intelligibles > Je croyois que les vrais principes des corps étùient le froid &c le chaud. P a R M e N 1 D E. Je le croyois auRi. E M p e D o c L E'. Oh , oh , le froid & le chaud ! Les voilà les principes intelligibles. Mais que veulent dire Hippoir Se Parmcnidi par le froid & le chaud. H I p r o N- L'eau & le feu. Parmenide. La terre & le feu. Empedocles. Mais on a fait- voir, ce fcmble, que la terre , l'eau ^' le feu font des éiémens, non. des principes. L'eau &: le feu ! J'ai- merois autant que l'on dît comme un certain Zoratas Chaldéen, Que les v/ais principes font la lumière- & les ténèbres. P Y T H A G o R E. La lumière & les ténèbres , le froid & le chaud , l'antipathie & la fympathie ! Onfe plaît donc à chercher les principes des corps , dans des antithéfcs , dans des jeux de mots qui ncdifent rien 3 qui n'offrent rien à l'efprit , & qui ne l'échirent nullement , tandis que je les vois évidemment , ces principes , dans les nombres , dans l'égalité & l'inégalité qui font les élémcns des nombres •, dans les mefurcs , dins les proportions, dans les accords. Aufli règne • t - il dans l'Univers une harmonie mcrveil- Icufe; ^ toutes les parties qui le compofcnt , font dnfcinbie ud AVRIL. I 7 î ;• 2ïr concert mélodieux , une niulîque les Livres des Phyficicns, a ûc eu- charmante. Tel cft le commencement de l'entretien de nos Philofophcs ; nous en fupprimons la fuite de peur de nous trop étendre. Mais nous remarquerons que cet entre- tien tout f.ibulcux qu'il eft , ne iailTc pas d'éclaircir la vérité en re- traçant les anciennes opinions: c'ell corc d'un plus grand fecours. Les opinions des Phyliciens nous reprefentcnc la Nature telle qu'ils l'imaginent , fc fouvcnt tou- te autre qu'elle n'eil: en elle même, ce qui donne lieu à Eudoxe de faire les reflexions fui vantes : La Natuic ainfi reprefentée, dit-jl, cfl: une peinture agréable de l'Univers , ainfi , félon notre Auteur , que les laquelle il ne manque que la vérité ; elfais des penfées différentes & l'e- c'ell ime douce illufion. «Quelque xamen de ces penfées, ont contri- bué, ce femble, à amener la Phyfi- que au point de perfediion où elle eft. Il falloit , dit Eudoxe , que la foiblelfe 6c la force de l'efprit le montraffent tour à tour. Si les an- ciens n'avoientufé, pour ainfi dire, un certain nombre d'idées bizarres, dont le tems a fait voir le ridicule, en les montrant à diverfes reprifes, & fous différentes faces , on les faifiroit aujourd'hui ces idées, on s'en occuperoit un certain tems , peut être toute la vie; au lieu que leur bizarrerie connue en a fait chercher de plus folides , & la cu- riofîté de l'efprit a perfed:ionné celles-ci. Notre Auteur va montrer à prefent à quel point l'étude que l'on a faite de la Nature dans la Nature-même , a contribué à cette perfe(ftion. Si les elTais des diffcrentes opi- -nions , & l'examen de ces opinions foit folides ou bizarres , ont été de quelque ufage pour perfedionncr laPhyfrque , l'étude que l'on a fai- te delà Nature dans le Livre-mê- w traits naturels , hardis Ik frap- » pans préviennent , & la préveu- » tion fait approuver les autre* «traits dutabJeau. Pour les difcer- » ner , les approuver, & fe les » graver dans l'efprit, il en coûte nalfez peu. Mais pour en vérifier » la conformité avec la Nature- » même, il en coûreroit beaucoup. » Une certaine indolence , la crain- » te de ne point réullîr , la préven- >»tion, tout porte à s'en tenir au » tableau de la Nature , c'cft à-diic » au Syflême qu'on trouve tracé » par une main habile. On aime » mieux errer paifiblement fur les » pas d'un Auteur qu'on cltime , " que de fe gêner pour fc frayer »unc route pénible & dangcreufc »qui mène cependant à la vérité ; n l'on adopte donc une hypothéfe , » & fi l'on fait quelque rccher- » che , ce n'eft guéres que dans » la vije de la foûtenir. Pour s'c- » pargncr la peine de chercher 1» » vérité , ou le regret de ne l'avoir » pas trouvée , on fc perfuadc » qu'on la voit. Notre Auteur fait à ce fujet,unc me de la Nature , plutôt que dans reflexion qui paroît bien confior- F fi) Skt6 JOURNAL DE me à ce que l'expérience montre tous les jours. C'ell: que c'eft ainfi ^que les plus beaux génies , à force des'alTervir à des idées étrangères , deviennent inutiles pour la perlec- tion de la Phydque , imitant en 4juelqnt forte le lierre cjui rampe fur l'écorce d'un arbre , fans s'élever aii- dejfus de la fiante cjhi le nourrit. Vne crainte pujillanime , ou une eftiine fervile arrête également le progrès de settefcience. Eudoxe demande ici quel pro- grès elle a fait dans le cours de 14 à 1 5 fiécles , où l'autorité d'Arifto- te & celle de Platon faifoicnt la loi tour à tour ? Il remarque c^u'on re- gardoiï le génie d'Ariftote comme le génie - même de la Nature , & qu'on fe bornoit à elîayer de com- prendre ce Philofophe , <à l'inter- préter , fans le mettre en peine d'aller plus loin -, Qii'enftn la vie des Phiioroplies les plus capables de perfeâ:ionncr la Phyfique , fe paitûit alors à fçavoir ce que l'on a,voit penfé , plutôt que ce que l'on devoir penfer. Il obferve que le profond rcf- ped. des Platoniciens pour Pla- ton , n'a pas plus avancé la fciencc de la Nature , que la parfaite foû- milîîon des Péripatcticiens pour Ariftote, mais qu'entîn Jourdain- Ic-Brun , &: Defcartesenfuite , ont fccoué le joug •, Que Defcartesa trouvé plus de docilité dansl'efr prit de bien des Modernes, qu'il n'en avoit eu pour les anciens les plus célèbres ■■, pour Ariftote , par exemple , & pour Platon en parci- ÂiIkïï En effet , comme le.rcmax- § S ÇA VANS, que notre Auteur , plufieurs mo-' dcrnes , ont eu pour Defcartes k même déférence que les anciens avoient eue pour Platon & pour Ariftote -, la déférence des premiers n'a-t-ellc pas eu fes inconveniens , comme la déférence des derniers î L'on a vil dans les Ecrits de Def- cartes , des idées hardies & nouvel- les -, on y a vu des véritezmêmes , des découvertes réelles , un enchaî- nement de penfées fuivies , un Sy- ftême , une manière générale d'ex- pliquer tous les Phénomènes de la Nature, La vue de quelques véri- tez a tait prendre aifément les idées nouvelles pour autant d&véritcz, i la prévention , l'indolence , la crainte de ne pas rcudîr ont bit palferfur quelques reproches de la raifon , & l'on a mieux aimé s'at- tacher tout- à- fait à un Syftême tra- cé , que de prendre la peine de le retormcr ,, ou d'en eifayer un ai^r tre. Eudoxe en appelle ici à Ariftc- même , & lui demande s'il n'eft pas vrai qu'ila lallu s'étourdir pour tâcher de fe perfuader , par exem- ple , que le monde n'cil pas fuf- ceptible de vuide, que la puiiT.m- ce de Dieu - même , toute infinie qu'elle eft, ne fçauroit vcnirà hoi-ic d'-anéantir une feule des fubftances qui compofent l'Univers , fans anéantir en même rems , l'Univers, entier i. quoique Dieu ^ant infini- ment heureux , il ait créé & coa- fcrve librement tousJes êtres. lia fallu donner au repos autant de for- ce qu'au mouvement - même , & foûtcnir hardiment , qu'un corps AVRIL plus petit ne peut, quelque vîtclTe qu'il ait,en déplacer un plus grand. Qiiaiid il s'agit d'approuver de femblables Paradoxes , la raifon fe révolte d'abord ; mais enfin l'ef- piit prévenu fe fait à tout , &fai vu, die notre Auteur, foûtenir encore férieufcmcnt toutes les opi- nions de Defcartes , comme autant de véritez inconteftablcs , & avec autnn: de chaleur du moins , qu'il le faifoit lui-même, Eudoxe entre ici dans un dérail qu'on ne fera peut-être pas tâclié de voir. Il remarque que Newton n'a pas fuccombé de même fous l'autorité Cartéfiennc , que loin de s'y rendre , il a eu aflez de courage pour enfiler une autre route , du moins en bien des chofes. Defcar- tes avoit commencé par établir des principes , & des caufes naturelles pour en faire naître fuccelTivement les effets fenfibles , ou les phéno- ménes^de la Nature. Newton a cru qu'il falloit prendre le contrepied. Il a commencé par démêler les ef- fets fenfibles ou les phénomènes pour s'élever par- là , comme par degrez jufqu'aux principes & aux caufes naturelles. Defcartes avoit répandu dans tout l'Univers , la matière fubtile ■, Ne^wton l'a diffi- péc. Defcartes avoit mis autour des Aftres des Tourbillons à l'infi-c ni ; Newton les a tous détruits. Defcartes avoit refufé à Dieu-mê- tne, le pouvoir de faire le moindre vtiide dans toute l'étendue de l'U- nivers \ Newton a placé les Aftres & les a fait tourner dans des vuides jmmcnfes. Defcartes avoit profcrit . I 7Î T- 517 les attradions ; NeVton les a réta- blies. Defcartes avoit engagé dans fes lentimens bien des François , on a viî prefque toute l'Angleterre fe déclarer pour Newton. Le paral- lèle de Defcartes & de Newton ne fc termine pas à ces reflexions. Eu- doxe l'achevé en remarquant que fi la prévention pour Defcartes a fait donner dans quelques excès , la prévention pour Newton n't-n 1 guéres moins produits , & pour le prouver il demande fi l'on conçoit que la lumière puilTe venir fi vîtc des Aftres jufqu'à nos yeux , par des vuides immenfcs , & fans que les Cieux foient remplis d'une ma- tière déliée dont l'adion fucceftîve tranfmette la lumière jufqu'à nous» Il demande fi l'on conçoit bien comment les Planètes tournent dans des vuides à perte de vue quelque libres qu'elles foient , fans jamais décrire de lignes droites, tandis que fur la furface de la terre on voit les corps mus en rond , en- filer dans l'air , des qu'ils font li- bres , une ligne droite. Il demande fi dans les attradions on voit de véritables caufes de la fermentation des corps , des inquiétudes de l'ai- man , des mouvemens circulaires des Aftres , quand on confidere que Us corps font d'eux - mêmes indifterens au mouvement & a'j. repos , & qu'il leur faut pour chan- ger de place , une impulfion ma- nitefte. Il demande fi lorfquel'on s'eft laitfé éblouir par l'autorité d'un grand Homme , & qu'on s'eft une fois accoiàtumé à reconnoître pour vrais, des principes aufliobT^ 2i8 JO UllNAL D curs que ceux qui viennent d'être détaillés , on ett bien difpofé à ré- pandre dans la Pliyfique le nou- veau jour qu'on pourroit y porter. Il remarque , à cette occafion, que de tout tems la prévention pour les Ecrits des Auteurs , & pour les Auteurs - mêmes , accompagnée d'une certaine indolence, ou d'une certaine timidité naturelle, a retar- dé le progrès de la connoilTancede la nature. Où faut il donc étudier la nature, pour en perfectionner plus fûrement Se plus efficacement la connoiffance ? Dans la nature-mê- me , répond notre Auteur : mais qu'eft ce qu'étudier la nature dans la nature- même ? C'eft , répond-il, étudier fans préjugez les corps dans les corps-mcmcs , y démêler leurs proprietez , obferver les mouve- mens , les effets fenfibles , les phé- nomènes , les voir fous différentes •faces , les tourner de tous cotez , examiner les circonftanccs , en dif- cerner les rapports avec les caufcs qui pourroicnt les produire , cher- cher les caufes infenfiblesdans cel- les qui frappent les fens , & la con- noilîance des caufes inconnues dans l'intelligence de celles que l'on connoît , faire là-delTus des conjec- tures vraifemblables , en hazarder- même. Mais Ci l'on fe met à bazar- der des conjefturcs , ne court on pas rifque de s'égarer ? Notre Au- teur répond à cela qu'il faut de la referve , mais que d'un autre côté on doit prendre garde de donner dans un excès de timidité qui em- pêche qu'on ne choififlfe une lueur qui fexoitfuivie d'un grand jour. A ES SÇAVx\NS, force d'clTayer des conjeiffurcs , dit-il , on en fait de folides , &: les malhcureufcsoules faulTes que l'on bazarde , ont du moins cet avan- tage qu'elles empêchent quelques efprits attentifs,de perdre à les tai- re un tems qu'ils donnent à des conjeclures plus folides , & même à des découvertes réelles. Les exemples vietment ici à l'appui de ce que dit notre Auteur. Il cire ià- delTus les Defcaites , les Kirchcrs , les Rohaults , les Pafchals , les Newtons , les Mariottes , &c. En effet , comme il l'cbferve, Dcfcar- tcs a fixé les loix du mouvement , Kircher a trouvé dans l'Univers une efpcce de magnérifme univcr- fel , & nous a dévoilé l'intérieur des volcans de Sicile Si. d'Italie \ Rohault a déterminé les angles des rayons divers qui forment les différentes couleurs de l'Arc - cn- Ciel ; Pafchal a découvert les ref- forts fecrets qui opèrent les mer- veilles de l'équilibre des liqueurs ; Mariotte , ou félon quelques uns , Newton a démêlé le jeu des rayons pour les couleurs. A l'étude de la Nature dans la Nature-même, les Phyiîciens mo- dernes ont joint la méthode , fans quoi ils n'auroient pas réudî com- me ils ont fait à perfedionner la oPhyfiquc. Notre Auteur , à cette occafion, entreprend de montrer Si le bcfoin de la méthode Se ce que la Phyfî- que nouvelle lui doit. Quant au premier point , il obferve que fou- vent ce qui fait qu'on n'apprend rien , c'eft qu'on voudroittout ap- A V R I prcni^re à la fois , ou qu'on ne fçait ni par où débuter , ni quelle route tenir dans les études. On les com- mence , dit-il, pafoù on les de- vroit finir , on cmplove des moyens inutiles , parce qu'Us font hors de leur place ; on faifit de faux jours , .^: l'on ne peut compter fur rien. On fe remplit la mémoire de faits étrangers & de traits mal alfortis , peu propres pat conlé- qucnt à éclairer l'efprit qui les fcait , & à porter la lumière dans ctlui qui les ignore. Il faut de la méthode pour découvrir le vrai. Mais qu'eft-ce que cette méthode , Eudoxe s'explique là-de(Tus d'une manière claire & précife : il y a deux fortes de méthodes : l'analyfe & la fvnthéfe. Il expofe au longce que c'eft que la méthode analyti- que , & la méthode fynthétique. Puis il montre ce que la Phyfi- que Nouvelle doit à cesdeux for- tes de méthodes. Mais qu'eft-ce que la méthode fans les obferva- tions ; On a beau fe conduire mé- thodiquement fi on n'a pas par de- vers foi les lumières Je l'expcrience^ &c'cll ce que notre Auteur fait voir. La nature cache fes fecrets , il faut pour les découvrir la furprendre pourainfidiredansfesoperations.il faut un jurte amas de phénomènes pour établir un principe propre à expliquer ces phénomènes , il but des expériences pour vérifier les conjcfturcs. Les anciens en ont été convaincus : auffi , comme le re- marque Eudoxe j cmploycrent-ils des milliers d'obfervations pour connoîtrc , par exemple, ce qui regarde les animaux. Ariftotc , Au- lugeile , & Phne ont fait des Vo- lumes d'Obfcrvarions. Quant aiix modernes ils ne cèdent en rien là- deffus aux anciens , & il n'y a dans la nature même aucun recoin , où la curiofité & la fagacité des mo- dernes n'ait pénétré. Eudoxe le montre par plufieurs exemples : s'agit-il de donner quelque idée de la petiteflTe inconcevable des parti- cules de la matière î Boileobfcrve ces particules ; il apperçoit non feulement autour des corps tant li- quides quefolides, une atmofphé- re de matière imperceptible. Il trouve qu'il exhale de ces corps une matière extrêmement dé]iée,& que cette matière d'une petiteffc énorme , a une efficace étonnante ; ces Obfervations différentes font les fujets d'autant de Traitez capa- bles d'enrichir k Phyfique. On demandera fans doute com- ment Boile a découvert une atmof- phére autour des corps , de ceux- même qui ont de la confiftance î Voici, félon notre Auteur ^ com- ment il y eft parvenu. Il a tait attention , 1". que ieS' corps font pénétrés d'une matière très-mince, violemment agitée, & que cette agitation en doit déta- cher des particules : 2°. Qiie les fluides fenfiblcs s'évaporent & que les vapeurs voltigent autour des corps d'où elles fortcnt : 3". Que l'ambre gris , par exemple , & tous les corps aromatiques , n'ont de l'odeur que parce qu ils font envi- ronnés decorpufculcs qui viennent' frapper l'odorat- 4°. Que le>bois^ uio JOURNAL DE fec , Se la glace même , au fort de l'hyver , diminuent de poids à la balance : 5". Qiie le frottement donne de l'odeur au cuivre , au fer, au marbre, au verre , en ajoutant apparemment quelque furcroit d'a- gitation à l'agitation naturelle de leurs particules infenfiblcs : 6". Qu'enfin l'ambre acquiert à la cha- leur du Soleil & du feu , une force attradive. Boile conjeifture dc-là que les corps ^ même les plus durs, ont leur atmofphére de matière imperceptible. On demandera en fécond lieu , comment on peut fe former quel- que idée de la petitelTe de ces parti- cules ? Eudôxe répond, 1". Que dans cette vue Boile obferve que la matière étant divifiblc à l'infini , l'on ne peut donner de bornes à la petitelTe de fes parties : i°. Qiie ce Philofophe fait couler dans une Eo- lipile, une once d'eau , Qiic les f (articules de cette eau font aflez dc- iées& adez nombreufcs pour pro- duire pendant un quart d'heure, un vent -capable d'allumer un tifon : 3°. Qu'il allume la moitié d'un grain -de poudre à canon , dans un vailTeau de verre , large de huit pouces à la bafe , haut de vingt , plus large dans fa hauteur qu'un vafe conique , ayant les cotez un peu inclinés les uns vers les autres. La moitié du grain de poudre jette une fumée qui remplit tout le vafe, elle en fort par ondes pendant un demi quart d'heure , & occupe un efpace cinquante mille fois plus grand , que la fource qui l'a pro- duite : 4°. IldilTout avec de l'eiprit S SÇAVANS. de fel armoniac, un grain de cui- vre qui donne d'abord une couleur bleue à plus de deux cens cinquan- te mille parties d'eau , égales au grain de cuivre , Icfquclles pour- ront teindre encore autant de par- tics : 5°. 11 dirige perpendiculaire- ment àl'horifon, une verge de fer, longue d'un pied , ou d'un pied &c demi , dans un tuyau de verre fermé hermétiquement par les deux bouts. La verge de fer s'ai- mante , & rObfervareur ne peut douter que la matière magnétique ne pénétre le verre : 6". Il diflbut un grain de cuivre dans de l'efprit de fel armoniac , '&; la liqueur mi- fe dans une lampe de verre faite ex- près , s'imbibe dans la mèche qui donne pendant trente fix minutes une flamme verdâtre; par où on voit que les particules d'un fi petit volume , doivent être d'une étran- ge petitefle pour teindre une flam- me fi durable , pour colorer le ver- re , pour teindre tant d'eau , pour caufer une fumée fi vafte , &c. Il s'agit à prefent de déterminer la nature & la différence de ces corpufcules d'une petitelTe fi inac- ceflible à nos fens ; comment s'y prendra-t-on ; Voici l'expédient que notre Auteur enfeigne làdef- fus : c'eft un raifonnement qu'il faut faire d'après les obfcrvations : les vapeurs , par exemple , confer- vent la nature &c les proprietez de l'eau , puifque venant à fe conden- fer fur le marbre froid elles don- nent de l'eau \ les fumées du mer- cure dans l'alembic , donnent du xnercute dajis le lécipienc > les fu- mées A V R I vmccs de l'étain, donnent de l'étain. Il cil: donc vraifemblable que les particules qui exhalent dts divers corps , retiennent de la nature des corps , d'où elles exhalent. Notre Auteur confirme ce railonncment par une expérience bien fenliblc : mettez à une certaine dillance , à un pied , par exeniple , l'une de l'autre, deux phioles , l'une pleine d'efprit de fel commun , l'autre pleine d'efprit d'urine i ou de fel .armoniac ; vous ne verrez nul effet fenfible ; mettez les deux phioles .proches l'une de l'autre , les exha- lailons fe réuniront , s'accroche- ront , fe condenferont , ce fera dans -l'air une fumée , une efpece de pe- L , '175 r. ^ 22:1 tit nuage. Eudoxe aioûte à cela que les exhalaifons de l'opium endor- ment comme l'opium même. Nous paffons une longiie fuite d'obfervations , toutes plus cu- rieufes les unes que les autres , par Icfquelles notre Auteur fait voir ce que la Phyfique Nouvelle doit aux expériences des modernes. Qiie ne peut-on expofcr ici , ce qu'il dit, des avantages qu'ont procuré à la Phyfique lesinftrumens nouveaux, rétablilîement des Académies , l'inftitution des Journaux Se des Mémoires Littéraires 5 mais l'éten-î due de cet Extrait ne nous permet pas de lien ajouter de plus. RERUM ITALICARUM SCRIPTORES, &c. C'eft: - à - dire : Recueil des Ecrivains de fHtflotre d' Italie , depuis l'an ^00. JHf^it'à l'an 1500. par M. Muratori , Tome XXL A Milan , par la Société Palatine, i-jix.in-fol. col. 1251. LE S Auteurs de ce Recueil , pour fuivre l'ufage où ils font d'en mettre chaque Volume fous la protection de cequ'il y a de plus grand dans l'Europe , ont dédié ce vingt & unième Volume à M. le Cardinal de Fleury. On y trouve , 1°. des Annales qui vont depuis l'an 1360. jufqu'à l'an 1458. par Laurent Bonincontri de San-Miniato , Ville affez célèbre de la Tofcane , où les ancêtres de ^otre Auteur tenoient un rang con- iîderable dès le douzième fiècle. Il .naquit en 141 o. ayant été exilé 4e fa patrie à l'âge de vingt & un ,ans , il fervit long-tems avec hon- teux dans les Troupes de François ^vrd. S force, & fe retira en 1456'. auprès d'Alphonfe 1. Roi de Naples. Ce Prince qui aimoit les Sçavans ho- nora Bonincontri d'une protecftion particulière, fur-tout parce qu'il avoitla réputation d'être très habi- le dans l'Aftrologie Judiciaire ; cette Science trompeufc étoit alors fort à la mode parmi les Grands 6c dans les Cours. Notre Auteur v publia des Commentaires fur l'A- ftronomie du Poète Manilius , il compofa auOi un Trai:è divifé en trois Livres fous le titre : des Chofes Naturelles & Divine s\Vnn & l'autre ont été imprimés à Bâle. Lilio-Gy- raldi , dans fon premier Dialogue fur les Poètes j dit en parlant de G z 222 JOURNAL D cet Ecrit , que Bonincontri ctoit un homme qui n'étoic pas igno- rant , mais dont le fçavoir avoir quelque chofc d'extravagant ; Lu- cas-Gauric au contraire qui ctoit lui-même entêté de l'AftroIogie- Judiciaire , alTure que l'Ouvrage de Bonincontri eft prefque Divin. Il en a publié plufieurs autres, dont M. Muratori fait mention ; il rap- porte même dans la Préface qu'il a mife à la tête de ces Annales une Lettre de MarfileFicin qui fuppofe que ce Sçavant faifoit une eftime particulière de Bonincontri ; il le qualifie de Poète Si d'Aftronome. Pour ce qui regarde l'Ouvrage donc il ell: ici queftion , l'Edi-cur croit que le Manufcrit dontils'eft fervi eft unique , la narration com- mençoit en 903. mais l'Editeur ayant remarqué que dans ces tems reculés on n'y voyoit rien qui ne fe trouvât dans les bons Auteurs , & que le vrai y ctoit fouvent mêlé avec le faux -, il a cru devoir épar- gner à fes Lecteurs une compila- tion auiîi ennuycufe qu'inutikjainfi il s'cft contenté de retenir ce que Bonincontri a recueilli depuis la fin du 14' ficelé jufqu'au milieu du 15' , &: dans cet état il efpere que les Amateurs de l'ancienne Hiftoi- re en pourront peut-être tirer quel- que utilité. Jamais Editeur n'a par- lé plus modeftemenr de l'Auteur qu'il publie. Ainfi les perfonnes , qui ne feront pas contentes de ces Annales , ne pourront du moins accufer M. Muratori de leur en avoir voulu impofer. 2°. L'Hiftoire des allions de ES SÇ AV ANS, François I. Storce , Viiconri , Duc de Milan , divifce en 30 Livres , par Jean Simoneta. M. Muratori croit pouvoir égaler le Héros de cette Hiftoire aux plus grands Généraux 3 qui ayent paru parmi les Grecs & les Romains. Quoiqu'il ait fouffert des vicifiîtu- des de la fortune , il eft prefque toujours forti viiftorieux des com- bats qu'il donna ; Se fes vidoires ont été foûtenuës de tantdefagef- fe , qu'il a eu le bonheur de tranf- niettre la principauté de Milan & la Souveraineté de Gênes à fes défi» cendans. Ce Recueil feroit donc impar- fait, dit l'Editeur , ,fi on n^y avoit" fait entrer quelques uns des Ecri- vains , qui ont célébré de il gran- des adlions. On en compte plu- fieurs j entre autres , François Phi- lelphe j dans fon Poème de h Sfor- tiade , Se Bernardin Corio , dans fon Hiftoire de Milan. Mais ils font tous inférieurs à Jean Simonéta ; outre qu'il fçavoit parfaitement h Langue Latine , témoin des gran- des adionsde fon Prince , il lefui- vit conftamment depuis l'an 1444. jufqu'cn \^6S. qui fur celui de la mort de ce célèbre Duc de Milan. G'cft par cette raifon que le judi- cieux Editeur a préféré cette Hi- ftoire aux autres , quoiqu'elle ait été imprimée plulieiirs fois , Se mê- me traduite en Italien. Cependant pour donner un nou- veau prix à cette Edition , il a refti- fié fon Auteur en differcns en- droits , où il ne plaçoit pas les 6its fous les années , où ils étotient arri- A V R 1 L , 17? y. 22J vcs. Le îiazard lui ayant fait tom- auffi ies rigueurs ; mais ce Tyran bcr entre les mains un Manufcrit qu'il croit être autographe, dans lequel on voit certains endroits re- tranchés comme inutiles j Se d'au- tres changés par une airtre main; il a cru devoir les inférer ici dans des notes , quoique toutes les Edi- tions qui en ont été faites jufqu'à prefent fe foient conformées à ces premiers changemens. On trouvera peut-être ce travail fuperflu -, mais il eft toujours bon de voir les pre- mières ébauches des grands génies ; la vérité y efi: fouvent mieux pein- te. Se d'ailleurs elles ne font jamais ians quelque agrément. Jean Simonetaétoit deCalabrc ; ■François Sforce qui avoir déjà un de fes frères pour Secrétaire , le prit pour fon Chancelier , ou pour fe contenta de l'exiler à Vcrccil en 1480. il paroît cependant qu'il eft mort à Milan , où l'on voit fon Epiraphe dans VEgï\[c des Çmces. }". Des Annales de BreiTe , de- puis l'an 1437. jufqu'à l'an 14^8. écrites en Italien par Chriftophlc de Soldo de la même Ville. On a déjà vu dans le quatorziè- me Tome de cette Coliedion une Chronique de Breffc , ces Annales qu'on a imprimées fur un Manuf- crit de la Bibliothèque d'Eft , fer- viront encore à mieux faire cim- noîtrc l'Hiftoire d'une Ville fi cé- lèbre. Il ell vrai que parmi les Ecri- vains qui ont traité des guerres cruelles qui pendant le quinzième fiècle mirent la Gaule Cifalpine en feu , & qui exercèrent fi long- ion Seo-etair: Ducal , comme l'ap- tems le courage de la République pelle Philelphe. Ils jouirent l'un de Venife , 5c celui des Ducs de ifc l'autre d'une grande confidcra- Milan , Philippe - Marie Vifconti , tion auprès de François Sforce , &C & François Storce , on a dû trou- turcnt continués dans leurs em- ver la plus grande partie de ce qui plois fous Galéas-Marie Sforce fon regarde la Ville de BrelTe , celi fils ; après la cruelle mort de n'empêche pas néanmoins que ce Prince , la Duchcffe fa femme Chriftophle Soldo ne puilTe paroî- prit la tutelle de Jean Galéas qui tre avec affiîrance au milieu de fucccda à fon père dans le Duché tous ces Hiftoriens. Àz Milan -, comme cette PrincelTe II étoit de cette Ville, d'une fa- avoit une entière confiance dans mille diftinguée -, on voit par fon les deux frères , Louis Sforce fur- nommé le Maure , voyant bien qu'ils feroient par leur prudence & par leur fidélité échouer tous les projets de fa criminelle ambition , réfolut de s'en défaire. Il fit mourir le premier nommé Ciccho , après lui avoir fait fouffrir une cruelle Hiftoire , qu'il fuivoit la prot:tnion des armes , & qu'il eut part à tous les exploits s le cours de fa narration, on ne fera pas lurpris qu'il le comble de louanges, & (i même ilksoutve quclquetois. Delli-Berni ne fe bor- ne pas cependant à ce qui regarde la feule Ville d'Ugubio, il touche en pa liant ce qui- s'efl paifc de plus coniidcrable dans les autres en- droits de l'Italie. Du refte 11 la fim- plicité du (lile , 6c des penfées doi- vent don.ner bonne opinion de la finccriré d'un Hiftonen , on ne pourra s'empêcher d'ajouter une toi entière <à ctlui-ci. 3°. DcsEphémérides de Naples par un Anonyme. Napics , dit M. Mu-atori , a toujours eu beaucoup d-c fplendeur fous les Empereurs Romains & Grecs , & même fous les Rois Nûrmans& Suéves. Mais fa digni- té s'accrut principalement ,.lorf- qu'au rems de Charles I. d'Anjou , elle devint la Capitale du Royau- me, S>c h refidence de fcs Rois. AVRIL É'efl: pourquoi tout ce qui cft arri- vé depuis cette époque dans cette partie d'Italie a un rapport plus immédiat à Naples qui en ctoit la principale Ville j il ne doute donc pas que ces Ephéméridcs qui com- prennent une exade Se lidelle rela- tion de tout ce qui s'eft paffé de- puis le commencement du règne de Charles 1. jufqu'en 1478. ne faflenc autant de plaifir aux Le(fleurs , qu'elles lui en ont fait à lui-même. On ignore quel en eft l'Auteur. Mais on ne peut douter qu'il n'ait vécu vers l'an 1450. & qu'il ne ra- conte comme témoin oculaire tout ce qu'il dit depuis ce tems-là juf- qu'à l'an 1 478. pour ce qui regarde le fiécle qui l'a précédé , peut-être qu'on ne le trouvera pas Ci exaét. Mais pour lerefte, les Hiftoriens Napolitains louent le foin & l'e- xadicude de cet Auteur. Le langa- ge dur &: impoli joint à la dialcde Napolitaine dont il fe fcrt commu- nément , pourroit donner quelque dégoût au Le<5leur dédaigneux, mais ces déEiurs ne font pas allez conliderables pour y jetter de l'ob- fcurité , & fur-tout après que l'E- diteur s'efl: donné la peine d'en chanecr l'orrographc en nlufieurs endroits & quclquerois même d'en adoucir &: d'en polir le ftile. Ctt Ouvrage cft connu fous le titre de Li Dtumali deL Duca di J^dontelione , non qu'il ait eu pour Auteur le Duc de Montélcon,mais parce qu'il a été copié fur l'origi- nal , qui appartcnoit à Heâor- PignatelU d'abord Comte , & en- fuies Duc de Montéléon moit en . i7Jf- 22 j 1535. revêtu de la qualité de "Vice- Roi de Sicile. Quoique cts Ephé- méridcs ou Annales n'aycnt jamais été jufqu'alors imprimées , elles ne laiffent pas d'être célèbres parmi les Napolitains. Ange de Confiance qui s'en eft beaucoup fervi pour la compofition de fon Hiftoire de Naples en parle avec éloge. Jean- Antoine Suummontius les cite auftl fouvent dans fon Hiftoire de la Ville &: du Royaume de Naples. 6°. Un Commentaire fut la di- gnité de la Ville de Bologne par Jean Garzoni. Ce petit Ouvrage vient à la fui- te de plufieurs autres plusconfide- rables qu'on a déjà vijs dans ce Re- cueil & qui regardent la même Vil- le ; M. Muratori ne fe flatte point qu'il réponde à la dignité de fon objet, d'autant plus qu'on ne fait qu'y effleurer une partie des avan- tages qui élèvent Bologne au-deftiis de la plupart des Villes d'Italie , elle eft fur-tout diftinguée par la gloire qu'elle a eue de produire un grand nombre de Sçavans , arti- cle que cet Auteur ne touche que légèrement. Les perfonnes qui voudront en être mieux inftruites pourront recourir à ceux qui ont compofé l'Hiftoire Littéraire de Bologne. D'ailleurs Garzoni man- que quelquefois d'exaditude lorf- qu'il parle des fièclcs éloignés de celui où il vivoit; comme lorfqu'il dit , que les Bolonois détirent en bataille rangée Louis II. fils de l'Empereur Lothaire; mais en gé- néral on peut le regarder comme un excellent Hiftoiien rempli as- S26 JOURNAL DE fincerité & d'érudition , & capable de faire honneur à fa patrie. Garzoni étoit d'une famille no- ble de Bologne , Dodeur en Phi- lofophic &c en Médecine, d'ailleurs un des hommes .les plus eftimcs de fon tcms. Il remplit avec dignité les premières Places de fa Ville. Il avoir une érudition très - vafte & très-étendue , & a laifTé un grand nombre d'Ouvrages de Phyfique, de Médecine , d'Aftrologie , d'E- loquence , de Poëlle, de Morale ^ de Politique , & d'Hiftoire -, on en peut voir le détail entre autres dans le Livre intitulé Notizje degli Scrit- tori 'Bolognef ^ par Pcregrin -Orlan- di de l'Ordre des Carmes. Garzoni étoit grand Partifan de l'Aftrologie Judiciaire , qu'il con- fondoit avec rAftronomie. Il faut voir avec quelle admiration ou plutôt avec quel cnthoufiafme il en parle dans cet Ouvrage-même. Son nom n'étoit pas inconnu hors de l'Italie ; Gérard- Vodîus , San- dius & plufieurs autres en parlent honorablement. Il eft réellement étonnant qu'un homme qui pratiquoit la Médeci- ne , & qui en même tems Tenfei- gnoit dans i'Univerfité de Bolo- gne , ait pu tant écrire non feule- ment fur l'Hiftoire de fon Pays , mais encore fur celles des Nations étrangères. M. Muratori lailTant à part fes autres Ouvrages , s'attache à ceux qui font purement hiftori- ques , dont quelques-uns ont été imprimés , & dont le plus grand nombre eft confervé en Manufcric dans deux célèbres Bibliothèques 5 SÇAVANS. de Bologne. C'eft dc-là qu'il a tiré l'éloge dont il eftici quertion. 7". Difcours à la louange de la famille Doria , par Frère Adam de Montalde, de l'Ordre des Er- mites de S. Auguftm , compofé environ vers l'an 14S0. Le privilège des grandes & illu- ftrcs familles eft d'être connues non feulement dans le lieu où elles font établies , mais encore dans toute l'Europe. C'eft une gloire qu'on ne peut refufcr à la noble Maifon de Doria que les belles ac- tions de ceux qui en font fortis , le nombre des grands perfonnages qu'elle a produits , & les Villes qui leur ont été foûmifes , ont rendu depuis plufieurs fiécles fi éclatante. Ainfi ce petit Ouvrage ne doit point être tant regardé comme l'Hiftoire d'une famille particuliè- re , que comme l'Hiftoire - même de toute l'Italie , que cette Maifon a rempli du bruit de fa pu i (Tance 6c de fes vertus. L'Auteur de cet élo- ge qui vivoit vers l'an 1480. eft dé- jà connu par plufieurs Ecrits; ou- tre le Soprani & les autres , qiH ont écrit des fçavans hommes que la Ligurie a portés , Frcre Domini- que-Antoine Ganduife Génois, dans fa Diftertation Hiftoriquedes deux cens célèbres Ecrivams de l'Ordre de S. Auguftin , imprimée à Rome en 1704. en fait mention dans des termes très - avantageux , 6 nous donne un Catalogue com- plet des autres Ecrits de Frerc Adam. 8°. Commentaires de la guerre de Ferrare , par Pierre Cytnxus^ n AA_ lu Tu/muj- ciLtysi-te aes~penai£ulairemen&~. /.n Peait renversée . Une PM-fie ?u PertÙJuie , renversée. Le Pi>ye . l i^jicmaeJi Lu Ra/^ La Pai-ùe j'at/ic de L Cfiploan . Les L^nt! y^tiacAcS It^cunenieujeJ auc Souàennen/^ ta, Tumeuf^ ■ La T itrmtu- L,es CircortiyoUiùon aes [nie.^hns l fntedtui CoLm Le L ujartient ui/èfieiw ae ux Tumeur cuineran/ Mi reriùnne . A V R IL Clerc d'AIêria , depuis l'an 1482. jufqu'àl'an 1484. L'an 1482. il s'éleva entre la Ré- publique de Vcnife & Hercule I. d'Eft , Duc de Ferrare , une guerre cruelle , qui ht prendre les armes à prefque tous les Princes d'Italie. Les Ferrarois prétendent que le de- fir d'étendre leur domination en- gagea les Vénitiens à prendre les armes , ces derniers au contraire foûtiennent qu'ils ne cherchoient qu'à fe conferverdânsla poiTeffion de leurs anciens droits. Heurcufe- ment l'Hillorien qu'on donne au- DISSERTATION SVR LA PETRIFICATION D'VN Epiploon , par M. Mongin , Confeiller , Aiedécïn ordinaire du Roi j, Docteur "B^egent de la Faculté de Médecine en l'VniverJtté de Paris. A Paris chez Didot , Quay des Auguftins , près le Pont faint Michel^ , àla Bible d'Or. 1734. vol. inn. pag. 117, ♦ » 7 5 f" 227 jourd'hui n'étant né fujet d'aucu- nes de CCS deux PuilTanccs , c[t plus à portée de nous inftruire de la vé- ritable caufe de cette guerre. Qiioi- qu'il neparoiffe pas favorable aux Vénitiens, il étoit à Vcnife pen- dant ce tems-là, & il affurc qu'il n'a rien oublié pour s'inftruire de la vérité des faits qu'il rapporte. On lui trouvera d'ailleurs de l'élo- quence & de l'agrément , on parle- ra plus au long de cet Auteur dans le Tome fuivant , où l'on donner? fon Hiftoire de l'iile de Corfe. LA pétrification dont il s'agit, eft une partie flottante de l'E- piploon , durcie en forme de pier- re dans le corps d'une fille , âgée defoixante treize ans. M. Mongin avant que d'entrer dans le détail de ce Phénomène , donne une jufte idée de ce que c'eil: que l'Epiploon, il en indique la forme, la fituation, & les ufages , après quoi il vient à fon fujet. Jeanne-Marie Tardi , fille âgée d'environ foixante treize ans , d'un temperamment fanguin, graffe & fort vive , commença à fentir vers la vingt-neuvième an- née de fon âge , une grofleur com- me d'un œuf de Pigeon , trois ou quatre travers de doigt audelfus du nombril. Cette gtoffeur aug- menta peu à peu ppdant tiente- fept ans , & parvint dans cet efpa- ce de tems à un volume fi confi- derable , qu'en regardant la mala- de on croyoit voir une femme aU' terme d'accoucher. Cette fille pen- dant les trois dernières années ne s'apperçut d'aucune augmentation ni pour le poids ni pour le volume de la tumeur, laquelle flottoit dans le bas ventre , entre le péritoine Se les inteftins , &; defcendoit jufques vers le pubis. En la repouflant avec la main , elle fe portoit en haut' vers le Diaphragme & vers les cô- tes à droite & à gauche. Malgré le poids ôi le volume de cette tumeur , la malade quoique extrêmement âgée , fut toujours très - agilTante , fi ce n'eft fix mois avant fa mort , qu'elle coqimenç^ â2§ JOURNAL DE à fentir de grandes opprclîîonSj en confequence d'une chute violente qu'elle avoit faite fur le bas vcntrej le coup fit principalement fon impreffion dans la partie inférieure latérale & droite du bas ventre , & fut fuivi de fièvre , avec de grandes douleurs dans toute la circonférence où la chute avoic porté; mais il ne produidt fur la peau aucune éçhymole fenlible. Le défordre fe paffoit au dedans fur la membrane dont la tumeur étoit revêtue , &: fur la partie interne du péritoine qui dans la chute avoicnt •été meurtries l'une contre l'autre par le poids &. la dureté de la tu- meur. M. Mqngin appelle alors pour voir la malade , l'Hurrrogea fur l'origine de cette tumeur , & la malade lui répondit quV//i? croyait poHvorf Cattrikiter à un coup violent qu'ette s'était donné anciennement fur le nombril , en heurtant avec force contre un meuble ^ & ^u'un an ou deux après , elle avoit commencé à fentir une petite groffeur dans l'en- droit ok ce coup avoit porté , mais qu'elle y avoit fait peu d'attention ^ parce qu'elle n'en rejfentoit aucune douleur. Comme il n'étoit qucfiion dans ce moment , que de remédier à l'opprelTion où fe trouvoit la ma- lade , M. Mongin eut recours à deux faignécs , il fit frotter la par- tie douloureufe avec l'huile de mille pertuis , & l'eau vulnéraire. La fièvre l'opprefllon & la dou- leur diminuèrent; mais la malade devint languilfatite , le volume S SÇAVANS, du ventre augmenta , & les jam- bes enflèrent ; M. Mongin jugea alors qu'outre la tumeur dont nous venons de parler , il pouvoir y avoir de l'eau dans le bas ventre , il en trouvoit la caufe dans la chu- te violente qu'avoir taice la mala- de ; parce que la dureté & le poids delà tumeur devoierH: avoir brifc une infinité de petits vaiiTeaux lymphatiques , d'au la tranfuda- tion perpétuelle des férafiiez. (jui tombaient & s'accumulaient dans la capacité du bas ventre , ne pouvait manquer d'Avoir formé un dépôt con-, flderable. Cet état & l'âge avancé de la malade , joint au volume énorme de la tumeur, ne permirent pas à M. Mongin de flatrerla malade. Il eut foin de lui faire recevoir les Sacremens , après quoi il fe con- tenta de lui ordonner un opiat martial légèrement purgatif (3i fon- dant, des bouillons apéritifs, & un régime convenable , n'ayant en vue dans ces circonftanccs , que de s'oppofer au progrès de l'hy- dropifie. On fentit quelques jours après , une inondation d'eau dans le ven- tre , & la refpiration étant trcs- gcnée j notre Auteur fe détermi- na à faire faire la pondion. Il fut très-attentif au choix de l'endroit où le Chirurgien devoir pouffer le Troiquar &c cela afin d'éviter qu'on ne fît la ponction fur la tumeur. Comme cette tumeur avoit plus de pente du côté gau- che , le Médecin l'y retint lui- même avec les majns, non feule- ïutat A V R I nient pour permettre à l'eau con- tenue dans la capacité du ventre , de fc porter du côté droit , mais pour éparcjner à la malade la dou- leur qu'elle reirentoit dans la ré- gion du foyc , par le poids de la tumeur qui le portoit de ce cote- là. Il ne faut pas douter que fans ces raifons , M. Mongixi n'eût préféré pour l'opération , le côté gauche au côté droit ; parce que dans les bydropifies du bas ventre , le toye eji ordinairement la partie peccante , & qu'il y acquiert un fi gros vo- lume qu'il defcend même au-def- fous du nombril -, de forte qu'on eftenrifque de le picquer avec le Troiquar , au lieu qu'en faifant Ja ponction du côté gauche on eft à couvert de cet Inconvénient , parce qu'on ne peut percer alors que les tégumens , les mufcles & le péritoine , toutes parties qui fe confolident aifément. Notre Auteur en faifant faire l'opération vers le côté droit , eut foin que l'on portât le Troi- cat un peu plus bas, & plus vers les vertèbres des lombes , qu'on ne le porte d'ordinaire , & cela pour éviter le rifque d'être trompé par la defcente du foye , que le volu- me des eaux & la grande tenfion de la peau , ne permettoient pas de diftinguer aifément. La pondtion fut faite heureufement : l'on tira feize pintes d'une eau claire , & fans mauvaife odeur. Cette opération foulagea con- fiderablement la malade , & la ^efpiiation qui écoic auparavant Avrilp L . » 7 3 y-, 52^ trcs-cmbarraircc devint plus- libre mais au bouc de deux mois , une nouvelle quantité d'eau s'amafTa dans le bas ventre , &: gêna fi fort l'adlion du Diaphragme , que la malade ne pouvoit refpirer. Une nouvelle pondion étoit in- diquée dans cette rencontre ; mais l'épuifement où fc trouvoit la ma- lade , fut une contr'indication à laquelle il fallut fe rendre, le poids & le volume des eaux, joint à celui de la tumeur interceptèrent le mou- vement du Diaphragme , & cau- ferentun étouffemcnt fi grand, que la moit s'en fuivitpeu après. Le cadavre de cette fille fut ouvert le lendemain ; le Chirur- gien plongea d'abord un coup de biftouri dans la partie inférieure & latérale du bas ventre du côté droit , &c on en fit fortir plus de feize pintes d'eau : cetti; eau avoit la même couleur & la même con- fiftance que celle qu'on avoit tirée deux mois auparavant par leTroi- car. On fit enfuite une incifion de- puis le cartilage xi phoide jufqu'aii pubis , & depuis le nombril juf- qu'aux vertèbres des lombes de l'un & de l'autre côté , puis ayant rcn- verfé le péritoine , les mufcles & la peau , on vit d'un coup d'oeil cette grofle tumeur , que notre Auteur examine en la manière fui-» vante. On étendit le cadavre fur le dos , & cette tumeur parut alors pofce fur les inteftins , elle [es couvroit prefque entièrement. Le grand ?<. petit Epiploon de- puis les attaches de leurs bords fu- Hh ajo JOURNAL D pcricurs jufques à cinq poulces de large oui peu pics , en defcendant Vers le nombril, confer voient leur fituation , leur fubftance ëc leur couleur naturelle. Les membranes des feuillets de cette petite portion de l'Epi ploon , croient adhérentes l'une à l'autre. On n'y voyoit ni fac ni capacité, & ces feuillets croient feulement diftinguez par les atta- ches naturelles de leurs bords fu- perieurs. Les membranes n'avoient que peu de bandes graiiïeufcs , & CCS bandes étoient féparées de dif- îance en diftance , par des trous où l!on ne difcernoit aucune mem- brane,ce qui faifoit uneefpcce de Rczeau. Le bord inférieur de cette petite portion faine de l'Epiploon ïormoit une apparence dt demi- cercle , d'où l'on voyoit partir à deux oti trois travers de doigt de diftance l'un de l'autre , cinq pac- qucts ligamenteux , de la^grolTcur du poulce , & longs de trois tra- vers de doigt. Ils étoient unis & inferez à la membrane propre de la tumeur qui renfermoit tout le reftc de la partie inférieure & flo- tantc du grand fac epiploique avec toutes fes cellules adipcufes , lef- quelles s'étoicnt durcies & pétri- fiées. Notre Auteur cfTaye d'expli- quer comment s'étoit pii faire cet- te pétrification i nous rapporterons dans un moment ce qu'il penfe là-delîus ; il but continuer la defcription que nous avons com- mencée : elle renferme des faits îrnpôrtans à fçavoir : l'Efprit cft fécond en railonnemens , mais les ES SÇAVANS, faits font indépendant de l'Efprif , & c'eft: ce qui en rend fur quel- que matière que ce foit , l'expofé d'autant plus nécelTaire. Voici donc comment notre Auteur con- tinue à décrire ce qu'il obfcrva dans l'ouverture du cadavre de cette fille. De la partie inférieure latérale &c droite de la membrane qui couvroit la tumeur , direde- ment dans l'endroit où le poids du corps avoir porté par la-chute que cette fille avoir faite fix mois avant fa mort , on voyoit fortir un gros pacquet ligamenteux & membraneux , de la longueur de trois poulces , lequel adheroit à cette partie par une fupcrficie de la même grandeur. Le sros pac- qact ligamenteux mterieur etoit d'un rouge noir , M. Mongin croit que ce pacquet ligafricntcux- inférieur , n'étoit qu'accidentel , & n'avoit été produit qu'en con- fïqucnce de la chute , il en appor- te diverfes raifons qu'on peut voir dans le Livré. L*a tumeur dont il s'agit , & dont nous donnons ici la figure étoit ovalaire , un peu plus grofle dans la partie inférieure , qiie dans la fupericure. Se avoir à peu prèî- h figure d'un crâne humain; la par^ tie de la tumeur qui étoit pofée fur les inteftins , étoit Un peu ap- platie , ce qui !a rendoitplus glif- iante fur ces mêmes inteftins. La rncmbrane qui couvroit toute la tumeur , ctôit blanchâtre en de- hors , épaifîc de deux lignes ou environ, dure, polie Sc très unie. La ffic-mbrane du péritoine dans A V R h fuperflcie interne qui regarde les intcliins , écoit unie. Se blanchâtre comme un parchemin pâle. Cette tumeur roiiloit &i ^l'f" foit entre les intcftins Se le péritoi- ne , ce qui croit caufe, dit notre Auteur, que la malade mangcoit fans en être incommodée, parce que la tumeur par ("on propre poids , s'éloignoit facilement de l'eftomac, rempli d'alimens , Si qu'elle pou- voit à chaque inftanr , fe porter en haut ou en bas, à droite ou à gau- che, fuivant la fituation que cette ■fille prenoit. M, Mongin décrit à prefent ce qu'il appcrçut dans le foye. La fublhnce lui en parut compad:e , fchirreufe Se ferrée ; la vclUe du fiel proportionnée à la grandeur du vifcere. Il vient enfuite à ce qui concerne la ratte , les reins, la vef- fie , la matrice , & il obferve que ces organes n'avoient aucun vice marqué. Après ces examens , il coupa les ligamens fuperieurs de la tumeur ëc celui qui l'attachoit par en bas au petitoine , il pefa la tumeur en- core enveloppée de la membrane , & il la trouva du poids de treize livres neut onces, poids de marc Le dedans de la membrane étoit parfemé de petits vaifTeaux fanguins qui rouloient autour de la tumeur. M. Mongin ayant voulu porter le fcalpel dans le fond de cette tu- meur , la trouva fi dure , qu'il tut obligé de la fcier pour la féparer en deux. La partie fuperieure aux environs de les attaches , & à un /demi ttayers de doigt àe la fuper- I L , 175 y. art ficie, étoit encore molle 5^ remplie de leiiillets membraneux , affez femblable aux larmes olleufes du nez. VoiL\ en abrégé la defcrip- tion que notre Auteur donne de la tumeur dont il eft queftion. Refteà prefent à rendre raifon de l'origine &c du progrès de cette pé- trification : c'eft ce que notre Au- teur entreprend. Il |uge uis les Mémoires de l'Académie des Sciences de l'an- née 170 j. Bartholin , dans la 51= Hiftoire de fcs Centuries Anaromiques , parle d'un bœuf dont on trouva tout de même, le cerveau pétrifié ee bœuf étoic extrêmement mai- gre , au Heu que celui dont parle M. Duverney étoit fort gras. Il f a près de 3 oins que M.^Mongin dans fon Chymifle Phyficien '"^im- primé à Paris , chez d'Houry , a donné les raifons de cette différen- ce , en parlant de l'origine & da progrès de la pierre de la veffie. Oïl trouve dans les Ephémérides d'Al- lemagne , plufieurs Obfervations fur ces fortes de pétrifications. Nous ne devons pas oublier d'a- vertir que nous avons examiné nous-mêmes I'Epiploon dont il s'a^ git dans cette DilTertation , & qu'il nous a paru plutôt pétrifié qu'offi- fié. M. Mongin fait d'importantes reflexions fur ce phénomène esi- traordinaire , & propofe en habile Praticien , divers remèdes pour pré venir de telles maladies, ou pous en arrêter le progrès. «j4 JOURNAL DES SÇAVANS. TRAITE DE LA DEVOTION AV SAINT ESP P RIT , TIRE' des Livres Saints , far un Solitaire de Sept-Fons. A Paris , rue de la Harpe, visà-vis la rue des deux Portes , auBon Palleur, lyjj. vol. in-ii. pag. 4^. TROIS Chapitres partagent ce Traité. Dans le premier , l'Auteur fe propofe de donner une idée claire & dirtinfte des Dons du S. Efprit jfçavoir du Don d- Sa- gelTe , du Don d'lntelli;;encc , du Don de Confcil , du Don de For- jcz , du Don de Science , du Don de Pieté &: du Don de Crainte du Seigneur. Le Don de Sai^elTe , fé- lon qu'il l'explique , eft une con- noiflance de Dieu & de fes voyes , animée par l'amour . Le Don d'in- telligence, une connoiiTance pro- fonde des vantez de la Religion : Le Don de confeil , une diredion du S. Efprit laquelle fait toujours prendre le meilleur parti dans les .diverfes occurences de la vie par rapport au bien fpirituel , une lu- mière intérieure qui nous rend ca- pables de bien conftiUer les autres, & de nous bien confeiller nous mêmes : le Don de force, une fer- meté de courage qui nous tait exé- cuter avec intrépidité tour ce que Dieu exige de nous : Le Don de fcience , une connoiflance prati- que de nous-mêmes , des créatures & de leur dcftination : Le Don de pieté , une difpofition de cœur qui nous fait rendre à Dieu & à nos proches l'honneur que nous leur devons: le Don de crainte du Seigneur , une appréhenfion filiale de fes châtimens , & de tout ce qui peut lui déplaire. L'Auteur après plufieurs réflexions édifian- •tes fur ces differens articles , vient aux fruits du S. Efprit , qui feloa S- Paul , font au nombre de douze, fçavoir la Charité , la Joye , la Paix , la Patience , la Bénignité , la Bonté , la Longanimité, la Dou- ceur , la Foi , la Modeftie , la Con- tinence , la Chafteté. Notre Au- teur explique en détail ce qu'il faut entendre par ces douze Fruits : U dit en parlant du neuvième , que le mot Latin Eidei fignifie dans l'Ecriture , la Foi , la fidélité , la confiance Si la confcience. A l'oc- cafion de ce dernier article , il par- le de la confcience erronée , & cite là-delTus divers exemples de l'Ecriture. La confcience ell erro- née , dit-il , quand nous ignorons nos devoirs par notre faute , & que nous prenons pour devoir ce qui cft mauvais , S. Pierre fous prétexte de zèle & d'amitié , vou- loit empêcher fon Maître de fouf- fjrir la mort , & il en eff repris } les Juifs croyoient s'acquitter de leur devoir , en faifant mourir Ie> Apôtres , & en perfécutant les Chrétiens , ils n'en étoient pas moins criminels : S. Paul avant fa converfion , croyoit rendre fcrvicc à Dieu en exterminant ceux qui profelToient la Religion Chrétien- ne. Ils n'en éroient pas moins cou- A V R ï fables : Gédéon croyoic accomplir ion devoir en faifant un Ephod pour perpétuer le fouvenir de la Vicloire remportée fur les Ma- dianites ■■, mais cet Ephod devint aux Ifraelitcs un objet d'idolâtrie , & caufa la ruine de la Maifon de Gédéon : Saiil crut bien faire en offrant le Sacrifice fans attendre le tems marqué par Samuel , il n'en fut pas moins puni de Dieu. » Oza » crut bien faire en foutenant i'Ar- " che pour l'empêclier de tomber ; » il en fut puni de mort. Jofias » croyoit bien faire en déclarant la »> guerre au Roi d'Egypte , c'étoit « pourtant contre l'ordre de Dieu, » & il lui en coûta la vie. Combien » de Chrétiens aujourd'hui croyent » remplir leur devoir , & fuivre les n lumières de leur confcience, en » s'oppofant à leurs fupcrieurslé- » gitimcs , & aux décidons de » l'Eglife ? Ils n'en feront pas «moins reprouvez de Dieu,... i> combien d'Hérétiques s'imagi- " ncnt être dans la vraye Religion, » èc qui ne laifTeront pas d'être " condamnez. Ils ne feront pas » jugez félon leur tauffc confcicn- » ce ; mais félon l'Evangile. Dans le fécond Chapitre notre Solitaiie explique en quoi condfte la dévotion au S. Efprit. 11 prétend que le péché irrémiiîîble dont les Evangeliftcs parlent ', n'eft pas l'impénitence finale , mais une parole injurieufe ou un blafphême contre le S. Efprit , il ex pofe en combien de manières on en peut ctrc coupable. Dans k troifiéme Chapitre , il L . ï 75 5'- 23; fait voir au long,qui font ceux qui reçoivent le S. Efprit , qui font ceux qui ne font pas en état de le recevoir , &c quelles font les mar- ques qu'on l'a reçu. » A qui Dieu ^ donne-t-il fon S. Efprit ? à tous " ceux qui lui obéiflcnt , dit Saint M Pierre , Dieu veut qu'on exécute » fes ordres fans raifonner , & fans » les interprêter à fa fintaifie. Satil, » fur le point de combattre, voyant » que fes troupes l'abandonnoienc » offre lé Sacrifice fans attendre » l'arrivée de Samuel , comme » Dieu l'avoit ordonné & Dieu le » rejette fans avoir égard à fes ex- » cufcs. Samuel lui dit , qu'avez- » vous fait , vous n'avez point gar- » dé le commandement du Sei- » gneur votre Dieu. Si vous n'a- i> viez pas fait cette faute , le Sei- » gneur auroit affermi pour ja- » mais votre Règne fur Ifraël ^ » mais votre Règne ne fubfiflera » point à l'avenir. Dieu avoit or- » donné au même Saiil de marcher » contre les Amalccites , de les » exterminer entièrement , fans » épargner ni les hommes ni les » bertiaux , Saiil conferve la vie à » Agag leur Roi , & réferva ce » qu'il y avoit de meilleur parmi » les brebis & les bœufs , pour n les immoler au Seigneur , en re- » connoiffance de la Vidoire qu'il » avoit remportée. Ce motif pa- » roiffoit très faint. Mais Dieu le » rejctta &c il punit cette adlion » comme une défobéiffance. Dieu » envoyé à Jéroboam un Prophète » qui lui prédit le renvcrfcmcnt » de fon Autel facrilegc , &: pour- a5<î JOURNAL D » marque que le Sâgneur avoit » parlé par fa bouche, l'Aurcl fe » rompit fur le champ. Jéroboam » étendit fa main, en difant : Qu'on o l'arrête. En même tems la maiq » qu'il avoit étendue contre lePro- * phete fe fccha. Alors le Roi dit 5» à l'homme de Dieu : Offrez vos V prières au Seigneur^ priez le pour » moi , afin qu'il me rende l'ufage » de la main , l'homme de Dieu »> prie le Seigneur , le Roi retira V fa main à lui , &c elle devint » comme elle avoit été aupara- V vant. ....... » Le Seigneur ordonne à Jonas »» d'aller prêcher à Ninive. Le Pro- » phete fe mit en chemin ; mais il » réfolut d'aller à Tharfis pour H» fuir devant la ùcç du Seigneur , ES SÇAVANS, » & il tut puni de fa dclbbcilfancc. 10 Comment eft traité dans l'Evan- Dgile le fervircur à quifon maître » avoit confié un talent, avec or- » dre de le faire valoir , & qui le n cache dans la rcrre ? on le traite » de méchant fervircur , & fans i> recevoir fcs excufcs , on ordonne » qu'il foir jette dans les ténèbres » extérieures. Il eft donc vrai qu'on » ne peut plaire à Dieu , ni rece- » voir fon S Eprit, fins fe con- » former à toutes fes volontés &c. On peut par ces exemples, juger du fond de l'Ouvrage. Nous ajou- terons qu'on y trouve en plufîeurs endroits des traits d'érudition ,des portraits, des mœurs , des mouve- mens Se des fentimens affectueux & par tout beaucoup d'on(5tion. TRAITE' AVRIL, i 1 ) $. -37 IRAITE SVR LES MALADIES DE L'ORGANE iminé-lint de la vue , adaejje à Alcjficurs à; l'Académie Royale des Sciences à Paris. Par Jean Taylor, DoEleiir en Aiedecine , Chirurgien ÛOculfli Adentbre de la Factdté de Médecine de rVniverJtié de Baie en Suijfe. A Paris j chez Praultdh^ QuaideConti, à la Charité. 1735. ^^°- chure in-iz. pag. 51. L'AUTEUR diftingue en deux efpeces les maladies qui attaquent l'organe immédiat de la vue. Il appelle la première , efpece parfaite ; & la féconde , efpece im- parfaite. Il dit qu'il entend par l'efpece parfaite , cet état on Vœil privé de la lumière ne laiffe appercevoir an de- hors d'autre ifidice d'aveuglement , qu'une immobilité dans les mouvemens de l'iris , qu' une fitiuition contre na- ture j un retrec'iffement ou une dila- tation de la prunelle. Il dit qu'il entend par Vefpece imparfaite cette maladie cj ni fans oter à l'œil l'nfage de la lumière , ne fe manififte au dehors que par une alté- ration dans le mouvement de l'iris , sar une fitiiation contre nature , un retrecijpmeni , ou une augmentation du diamètre de la prunelle. Cela pofé , il diftingue en 28 ef- peces ïefpece parfaite , puis venant a ['efpece imparfaite , il divife celle- ci en deux clafles , fçavoir , les faujfes imparfaites & les véritables imparfaites. Il appelle y dilbncc ordinaire de la cornée , » mais elle h rend immobile , elle » la dilate environ une demi-ligne j) au-deli dé fou diamètre naturel. jj Ses progrès font de dix mois , » fans douleur au fond du globe , » ou aux parties voifines , elle alte- » re les mouvemens de l'iris , & 30. affoiblit infenliblement la vue. Troifiéme effcce : » Cette maladie " eft celle desavtugles-nés , la pru- » nelle eft à fa diftance narurclie ^ de la cornée , mais immobile , & » dilatée environ deux (ois au-dcLi " de fon diamètre naturel , dans les 3) degrez ordinaires de lumière. Q^arriewe efpece : » Elle vient » d'une caufe interne , elle fait per- » dre l'ufage de la lumière , elle » lailTe là prunelle dans fa diftance » naturelle de la cornée , mais elle » la rend immobile , elle Ja dilate "de tour fon diamètre ; quelques >i accès de fièvre l'ont précédée ; M fes progrcz font de quinze mois , » fans aucune douleur au fond du » globe ou aux parties voiiines , ei- » le altère les mouvemens de l'iris , ■» &: ai^olblitinfenfiblement la vûë^ Cuicjiiiém; efpece:. » Elle vient 3» d'une caufe interne , fes progrès j; font de trois mois , la prunelle » conferve la diftance ordinaire de «la cornée , mais elle devient im- 5» mobile ; fon diamètre fc reilcrrc ES SÇ AVANS, « d'un tiers de ligne , elle caufe de » rems en tems , des douleurs vio- n lentes au fond du globe & aux >' parties volhnes , elle altère les.» » mouvemens de l'iris. En voilà fuftifamment pour ce qui concerne les efpeces des efçeces p.trfntes : ce feroit ici le lieu de donner quelques exemples des ef- peces impayfiiites , mais ce détail pourroit ennuyer les Lecteurs , nous nous contenterons de remar- quer que l'Auteur fait de celles-ci comme des autres un long Chapi- tre , que ce Chapitre eft intitulé : des f.utjps i?nparf^a:es efpeces ^ Se que la méthode qu'on y fuit eft la mê- me. Notre Auteur finit par un Chapi- tre qui a pour titre : frr Us caufef d.'s maladies de L'o-rgjine immédiat de la vue. Il le commence par dire que toutes les maladies en qénéral qui affligent l'organe immédiat de la vue" peuvent avoir trois caitfes différentes Que la première vient dit cerveau foit qu'il fait naturellement trop froid^ ou trop chaud , trop fec ou trop humi- de^ foit que quelque accident , comme une chiite , des coups reç/ls à la tête' avccfraElif'-; & enfoncernent de crâ- ne^ ou bien des fontes^ des débordement d'hinneurs que l'on appelle hyiroci- phaion ou hydropif; de cerveau foit en un rnot qu'une fièvre maligne une attaque d'épilepfe , d'apoplexie ayent altéré le jiiftc temperamment des humeurs. Voilcà le début du Chapitre, puis paroît fur la fccnc la féconde caufe à laquelle notre Auteur attribue les maladies de l'organe immédiatdc A V R I la vue. Cette féconde caufe vient , •dit-il , des ch.tmb'es du ncrfopticjite ■tjue nom appelions Thalami ner- iVORUM OPTicoRi'M , foit par leur opprcjfion , a[lri6lion , affiitlion & 4;]njlip.iîion ,foit par férnjité , excroif- fmce , des abfcès , flagnation & ex- trAvafation du fing , &CC. LefjHcUes empêchunt les efprits animaux dans leurs pajfiges par le nerf & par les ■parties contigues diminuent à propor- tion^ la perfeUion de l'organe immé- diat de la 'vùé. L'Auteur dit qu'on trouve auffi nous trouvons dans cette partie » une liqueur brunâtre &c vitrioli- »>que dans une quantité confidera- » ble , quelquefois accompagnée »d'un changement contre-nature » de la glande pinéale , & qucl- » quetois d'un grolfiiTement , & » d'autrefois d'un flétriircment , » allongement & durciflemcnt du & nerf optique , quelquefois nous L , 1 75 y- ijP » trouvons cette altération dans » les chambres àc% nerts optiques » f'.ns qu'il paroifle de changement " à la configuration naturelle de t> ces ncrls. Nous voici arrivés à la troifiémc caufe alléguée par notre Auteur; il ne feioit pas jufte qu'après avoir rapporté les deux précédentes ^ nous lailTalfions celle-ci en arrière , & quand ce ne fcroit que pour ob- fervcr un certain ordre , nous croyons que ks Lcèleurs nous par- donneront bien de copier encore l'endroit fuivant. D'ailleurs quand on parle d'un Livre il faut le faire connoîtve , &c ce n'eft que par des exemples , qu'on en vient à bout. Voici donc mot à mot ce que notre Auteur dit. Enfin la troifiéme caufe vient des nerfs epticjues & des parties conti- gues , foit de ce ejii'on appelle un exo- fioce dans certaines parties de For A- MEN NERVORUM OPTICORUM , /ii/z de la compreffion , décadence & Jttb- fidence, fl.ifcjuemem ou rétréciffemeni ^ foit de la fecbereffè ou airopbée du nerf optique , foit par un épaiciffemcnt ou inflammation , gonflement ou élar- gijf.ment de ces vaiffiaux fanouins , ont cru que cette Loi étoit prife » des Rites &C des Coutumes des »> Egvptiens & des autres Gentils , »& l'on y examine par occafion » plufieurs chicanes des Déiftes j> contre la Révélation. Par M. Toung. in- 8°. 2. vol. Sermons on Several occajtons ^ Sic. ou : » Sermons fur divers Sujets ^ » par François Atterbury- ^ Dodeur » en Théologie, ci-devant Evêque » de Rochefler & Doyen de IVefl- » mitnfter : publiés fur les originaux » par Thomas Moor , Dodleur en "Théologie, fon Chapelain. /«-80 » deux vol. A neiu Account of Some -parts of Giiinea, &c. C'eft-à dire : x. Nou- » vellc Relation de quelques par- n ties de la Guinée & du commerce )■> des tfclaves , contenant i °. l'Hi- » ftoire de la Conquête du Royau- " me de Whidaiv faite depuis peu «parle Roi dcDahomé, Le Voya- » ge de l'Auteur au Camp du Con- » quérant , où il vit facrifier plu- » fleurs Captifs , &c. z° La manie- »re dont les Nègres deviennent »> Efclavcs ; le nombre qu'on en " tranfporte tous les ans de Guinée nen Amérique; que ce commerce » cft licite : comment ils fe font » mutinés dans les vailTeaux où M étoit l'Auteur , &c. 3°. L'Hiftoi- » re de la prife de l'Auteur par les » Pirates , ôi des dangers qu'il cou- = rur. Par le Capitaine Guillahme Snelgrave. in-8°« 1^2 J O U R N A L D E HOLLANDE. D'A M s T E R D A M. Defcnption de l'Ijle de Sicile & de fes Côtes Maritimes , avec les flans de toutes fes Forterejfes, nouvellement tirés , comme elles fe trouvent prefen- tement , fitivant l'Edition ^u'en a faite l' Imprimeur de l'Empereur a Vienne. Par Pierre Del Callcjoy- Angulo. On y a ajouté un Mémoire de l'Etat Folitii^ite de la Sicile , pré- fenté au Roi YiâoT - Amcdce par le Earon Ac.uin - Apary de la Ftlle de Catanca , d'après un Manufcrit Au- thentique. Chez J. W^etflein Si C Smith. 1734. /«-8°. Ce Livre fe trouve à Paris , chez Cavelier. Oeuvres dtverfes de M. Rottffsiui. Nouvelle Edition , revi^ic , corri- gée & conliderabkment augmen- tée par lui - même. Chez François Changuion. 1734. /«-iz. 4. vol. De Rotterdam. Ouvrages Politiijues de M. l'Ahbé de S.Pierre. Tomes VL VIL VIIL Se IX. Chez Daniel Béman. 1734. itt - %". Dj laHaye. Hlfîolre d'Angleterre de M. de Rapin-Thoyras , continuée jufqu'a Vavenement de Georges L à la Cou- ronne. Tome XI. cotttenant le Règne de Guillaume III. & de Marie , & tes deux premières Années du Règne d'hnnz. Chez Jean Fan-Duren &c S SÇAVANS, P. de Honât. 173 5. »«-4°. Les mêmes Libraires débitent Elementa-Phyfica confcripta in ufus Academicos à Petro Van-i Henry , vis-à-vis S. Yves. Ruëfaine Jacques. 1735./»-! 2. 2. vol. La Lujîade du Camoens ^ Poé'me Héroïque , fur la découverte des Indes Orientales , traduit du Por- tugais , p.ir M. du Perron de Cafie- ra. Chez Huart, Briajfon, Cionjier rue S. Jacques , 6c David ^ Quai des Augufiins. i73j./>M2. 3.vdl. Mémoires du Comte de Comminvil- le. Chez Jean - François Jojfe ^ rus S.Jacques. 1755. '«-12- Avantures de Flores & de Blait" chefleur ^ tirées de l'Efpagnol. Pat Madame L. G. D. R. Chez Grégoi- re Antoine Dufuis , Grand'Salle du Palais. iy}^.in-iz. Voyage Merveilleux du Prince Fan-Feredin dans la Romande ^ con- tenant plufieurs Obfcrvations Hi- Iloriques , Géographiques , Phyfi- quès , Critiques & Morales. Chez P. G. le Mercier j rue S. Jacques*- 1735. /«-i 2. 244 Fautes a corriger dans le Journal du Mois de Mars dernier. PAgc 155. col. 2. lig. antep. qui reftercnt , li^ez^ qui lui rcfterent : Pag. 159. col. I. lig- 1-2. à l'Hypothcfe deDcfcartcs , obferve , Uf. à l'Hypothéfe de Defcartes ?!C \ {\ méthode, obferve : Ibid. lig. 4. cette méthode , li[. de cette méthode. TABLE Des Articles contenus dans le Journal d'Avril lyjj*. MEmoire pourfirvir à l'Hiftoire des InfeElesl pag. i8j Hifloire des Révolutions d'Efpagne , &c. I9* Mémoires du Chevalier d'Arvieitx ^ &c. 20 J JJ Hifioire des Simples reformée , &c. 2oj U Origine Ancienne de la Vhyficjue Nouvelle ^ &c. x 1 2 Recueil des Ecrivains de V Hifloire d'Italie ^ 221 Jiiff. nation fur la Pétrification d'un Epi^loon , &c. 2 27 Traité de la Dévotion au S. tfprit ^ Sac. 254 Traité fur- les Maladies de la vue , &c, *37 NoHvillff Littéraires ^ i4i Fui de U Tshh' L E /\ JL DES CAVANS, FOUR VANNEE M. DCC. XXXF^ MAY. A PARIS, Chez C HAUBERT, à l'entrée du Qiiay des Auguftins, du côté du Pont Saint Michel, à la Renommée & à la Prudence. M» DCC. XXXV. AVEC APPROBATION ET PRIVILEGE DU ROY. L E JOURNAL DES SCA MAY M. DCC. XXXV. MEMOIRES POVR SERVIR A L'HISTOIRE DES INSECTES, par M. de Réaumur ^ de l' yicadémie Royal; des Scu»ces. Tome I. Sur Us Chenilles & fur les Papillons. A Paris, de rimprimeric Royale. 1754. ;«-4°. pp. ^54. planches détachées 50. DE S quatorze Mémoires qui compûfent ce Volume , il n'y a que les lu premiers , dont nous ayons rendu compte. C'cll: un dé- tail intcreffantquc nous continuc- May. rons ici , & nous ne l'achèverons que dans le Journal procham. VII. Il s'agit, dansle fcptiéme Mémoire, d'établir les c^iniEîei'es des cUjJJès & des genres des Phalènes K. k 1; 248 JOURNAL DE ou Papillons noElumes. Ces Papil- lons , foit libres à la campagne , foit renfermés dans des boites ou des poudriers , ne volent que la nuit ou Icrfquc le Soleil eft fur le point de fe coucher. Us demeurent tranquilles pendant le jour , paf- fant des heures & même des iour- nées entières , fans changer de pla- ce. Ils varient beaucoup plus que les Papillons diurnes , dans leurs çenrcs &: dans leurs efpeces. M. de Kéaumur cependant ne les divile qu'en fept clalTcs. Mais anrccom- penfe , il range fous chacune un grand nombre de genres , dont il nous donne les caraftercs dijhuilifs-^ obfervant d'abord en général , que parmi les Papillons nodurncs les uns ont des trompes & les autres n'en ont point ou n'en ont que de très-peu vifibles. Il place doncdans fa première clafle les Papillons à trompe , qui portent des antennes j^nfmaticjtiss ; dont les ailes fUperieurcs ont beau- coup de longueur fur peu de lar- geur , &C les inférieures font aflez courtes -, dont le corps eft gros & pelant-, & qui par le bourdonne- ment qu'ils font en volant, méri- tent le furnom de Boitrdons-Ph.ilL nés. Plufieurs des plus grandes & des plus belles efpeces de Phalènes • appartiennent à cette première ciaffe , & l'Auteur en décritquel- ques - unes , qui peuvent toumir des caraifleres pour divers genres. De ce nombre , eft le Papillon ilïïi de la Chenille appellèe belle par excellence, &; aff-z tare aux envi- rons de Paris : ce Papillon par fa S SÇAVANS. ■ beauté répond alTez bien à la Che- nille qui l'a produit, &: dans fa pofition ordinaire il a fes ailes in- térieures entièrement cachées par les fuperieures. L'Auteur obferve que la lon- gueur &: la figure des trompes peu- vent beaucoup fervirà rétablilfe- ment de divers genres de cette pre- mière clalfe , & il en donne pour exemples trois Papillons, La trom- pe du premier étant déroulée n'al- Ibit que jufqu'à l'extrémité de fcn corps : celle du fécond étoit près du double plus longue : celle du- troilîéme étoit arrondie & très-for- te , nîais II courte , qu'à peine at- teint-elle au bout du corcelet, fal- fant au plus deux tours de fpirale complets. Ces derniers Papillons portent fur leur corcelet une h^ure afTczfemblablc à une tête de mort, S>i caufercnt, il y a pluheurs années, . une grande frayeifr dans q'.iclquts Cajitons de la Bretagne-, où ils pa- rurent" en grand nombre , 6c fu- rent regardés comme ics avant- coureuFS &c même comme les cau- fes des maladies épidémiqucs 6c'de h mortalité qui regnoient alors dans cette Province. La figure des ailes peut encore aider à la diftinction de plulieurs genres &: de plufieurs efpeces des Papillons de cette même claflè ; félon que le ccité intérieur des ailes fuperieures eil: droit, ou convexe par rapport au corps , ou concave ou ayant plulieurs inflexions. M. de Réaumur remplit fi troi- fiéme clafie de Phalènes , de ces • Papillons pourvus auffi de tioiii- M A Y pts , & dont les antennes font à fi- lets coniques, fe terminant par une point^ allez fine. Il met dans la 3* les Papillons fans trompe , &c du rcfte femblablcs à ceux de là précédente : dans la quatrième , ceux qui ont une trompe & desan- tcnncs à barbes : & dans la cinquiè- me ceux qui fans trompe font pourvus de pareilles antennes. Pour dilhnguer les genres dans chacune de ces cinq premières claf- fes, l'Auteur employé les differens ports d'ailes qu'offrent aux yeux les Phalènes. Ces Papillons du pre- mier genre tiennent leurs ailes pa- rallèles au plan de pofition , mais en forte que les deux ailes fupe- lieurcs fe croifent , &c que les deux inférieures font comme plilTèes en évantail fous les fupèrieures. Celles des Phalènes du fécond genre font aulli parallèles au plan de polition; mais fins fe croifer. Les ailes des Papillons du troifième genre ne confervcnt leur j^arallèlifme que dans la portion de leuf largeur qui excède de part & d'autre celle du Corps, qu'elles cmbrairentexaèlc- ment par deffus , en s'y moulant four ainh dire. Les P.ipillons du quatrième genre portent leurs ailes fupèrieures encore parallèles, mais écartées du corps , qu'elles ne cou- vrent pas , laiiîant auiîî les ailes in- férieures à découvert. Le caradere d'un cinquième genre confiftc en ce que les deux ailes fupèrieures , par leurs cotez intérieurs , font ap- pliquées l'une contre l'autre , en forte qu'elles forment comme un toit j fous lequel ic corps eft caché-, ï 7 î r- ^4$ (?^ l'Auteur appelle ce port d'ailes en toit à vive arejie. Il met dans un fixiéme genre les Phalènes qui portent leurs ailes en toit arrondi -, & dans un feptiè- me , de petits Papillons , portant leurs ailes en toit écrafé ou prefque horizontalement ; mais qui font , pour ainfi parler , larges d'épaules. Il fait un huitième genre , pour les Phalènes, dont \zs ailes' s'appli- quent fi jufie contre leur corps , qu'elles Fembralfent & fe moulent deffus , comme font les ailes des oifeaux. De petites efpeces de Pha- lènes , dont les ailes, après s'ècit appliquées prefque fur toute la longueur de leur corps , s'clargif- fent 6c s'élèvent au delTus du der- rière en façon de queue de coq , forment un neuvième genre.Enfin, M. de Rcaumar trouve le caradere d'un dixième genre dans la manière finguliere dont les ailes fupèrieures de certains Papillons embraflenc non feulement leur corps , mais de plus , dont une de ces ailes , par fa partie pofterieure fe roule en fpira- le pour envelopper la partie pofte- rieure de l'autre aile. L'Auteur cftperfuadé, que ces dis genres , au moyen des différen- tes claffes \ peuvent fufirrc pour mettre en ordre un grand nombre d'efpeces de Papillons, lefqùellcs feront déterminées par le degré fé- lon lequel chacune participera au caraftere générique ; par exemple , félon que les ailes en toit le for- ment plus ou moins aigu ; feloil qu'elles s'écartent plus ou inoins du corps j félon le rapport qu'on*:' â;o JOURNAL D entre elles les fiipérieiires & les inférieures ; félon qu'elles font étendues ou pliées de diverfes ma- nières , &c. M. de Réaumur prétend auflî que CCS deux barbes ou cloifons barbues, qui renferment la crotn- pe , pourront donner au moins aos fubdivifions de genres -, fervir même dans la fuite à en caraderi- fer de nouveaux , & mériter d'être employées dans les caractères chf- fiques. Ilobferveque les barbes des Phalènes fournilTent des caradleres très-commodes pour une fubdivi- flon de ceux de la cinquième clalTe, en aidant à diftinguer ceux qui ont des trompes très- petites & bien ca- chées d'avec ceux qui n'en ont point du tout. Un caracîf ère encore [ obferve l'Auteur ] qui pourra multiplier les genres , ce font les huppes de poils que portent diffé- rentes efpeces de Papillons , Si qui varient par leur nombre , leur û- tuation & leur figure. L'Auteur ne dilllmule pas un in- convénient , qui pourroit accom- pagner l'ufage des caraifleres géné- riques qu'il vient d'établir; t Chryfdlides \ il nous informe delà manière dont les Chryfalides fe tirent du fourreau desChenille ^ & de Li rejpiration de ces Chryfalides. Les- précautions des Chenilles pour fe mettre en fureté contre les acci- dens , avant le tems de leur méta- morphofe , ne font pas les mêmes dans leurs différentes efpeces. Les- unes fe filent des coques de foye où elles fe referment ; les autres s'en préparent dâttcirc t>i de foye, eu même de terre feule , & s'y vons^ cacher. Il y en a un grand nombre qui fe fourrent dans des trous de murs, fous des cntablemensd'E- dihces , dans des creux d'arbres , fous de petites branches peu vifi- blcs. Elles y prennent différentes fituarions , qu'elles gardent con- ftammen: jufqu'à leurchangemettï de forme. On en voit de fufpen- dues en l'air verticalement la tête en bas , & arrêtées contre quelque corps folide par le fcul bout de leur quJue. D'autres font attachées con- tre des murs , la tête plus haute que la queue , &: cela fous toutes fortes d'inclinaifons. Pluficurs po- fécs horizontalement , ont le ven- tre appliqué contre le deffous de quelque corps faillant ou de quel- que voutc. Elles font affujetties ■ dans ces différentes lîtuations par divers moyens, qui méritent d'être obfervcs. Celles qui paroiffcnt fi- xées contre un mur par le fcul bout de leur queue , ont do plus une cf- pecc de ceinture , formée de hls de fove très ferrés les uns contre les autres j & qui les cnibralfant par M A Y le ilos' efl collcc pir fcs deux bouts .contre le bois ou la pierre : &z ce moyen , fur-tout, paroîc être d'u- ne très-diiKcile exécution , quilc- ri cxpliviuée d.ins U fuite. 'D'autres Chryfalides , fans tant de façon , fe collent par cjiiclquc partie de leur ventre contre quelque corps folide. De ces Obfervations générales , M. de Réaumur paiTe à ladcfcrip- tion de la manière dont la Chryfa- lidc fe dépouille du fourreau de Chenille , dans le cas le plus ordi- naire & le plus fimple : opération difficile, maistoùjours très prom- pte , &c qui pour cette raifon a échappé à la plupart des Obferva- •tcurs, ou n'a été décrite par eux que fort imparfaitement. Les Che- nilles s'y préparent par la dierte ., &c fe vuidcnt copieufemenr alors non feulement de leurs excrémens, mais encore de la membrane qui fervoic de doublure au canal de leur el^omac &c de leurs inreftins. Les couleurs de ces Chenilles , ou changent totalement, ou perdent toute leur vivacité. LcsfiUu/is com- mencent à fe âlcr des coques plus ou moins épaiffes j & où elles doi- vent refter pendant pluiieurs mois. L'Auteur a choifi pour fcs Obferva- tions ceux de ces lnfed:es qui ne font nullement cachés par les hls dont ils ne s'enveloppent que très- légéremcnt : & il en ramaiïe un fi grand nombre , qu'il pouvoit prefque à chaque quart d'heure en furprcndre quelqli'un dans le fort de l'opération. Elle cft annoncée par l'état ianguilTant des Chenilles, > I 7 ? r- 2 yf qui dure quelquefois 24 heures , quelquefois deux jours entiers. L'opeiation qui doit fuivre n'a pour le fond rien de différent de celles qu'elles ont eu à fairechaqua fois qu'elles ont changé de peau , & dont l'Auteur a parlé dans fon quatrième Mémoire. Il remet ici fous nos yeux par une expofition très-nette accompagnée des figures nccellaircs cette même manœuvre à laqiKlle il a foin d'ajoitter toutes les circonftances particulières qui peuvePiC la différencier, & qu'il faut voir chez -lui dans toute leur étendue. Il nous fufHra de recueillir en général, que le derrière & les deux dernières jambes de l'Infeèlc font les premières parties qu'il dégage du fourreau de Chenille , en les retirant vers la tcte : Que c'cft en gonflant Se en allongeant quel- ques - uns de fes anneaux polie- rieurs , puis en les contraétant & en les racourciffant , quelaChry- falide vient à bout de les tirer de ce fourreau Sc de les ramener aulli vers la tête; Que par cesmouve- racns réitérés fuccelîivcmcnt fur pluiieurs autres de ces anneaux , il arrive qu'ils fe trouvent tous n'oc- cuper que la moitié antérieure du fourreau , dont l'autre moitié de- meure vuide ; Qiie renfermés dans un cfpace fi étroit &c diftendus de nouveau par la Chryfalidc, ils for- cent la redftance de l'enveloppe, qui fe fend en defTus , vers le troi- fîéme anneau ; & que cette porte une fois ouverte s'élargilTant peu à peu , livre un paffage plus com- Ll i-) 2s6 JOURNAL D mode à la Chryfalide pour fortit de fa prifon. Tout cela b'éxccute d.ms l'efpace d'une miautc au plus, & n'c.l point retaidc par l'attouclie* nient de robfcrvateur ,. qui peut prendre entre fcs doigts l'Inicifle ïans craindre d'en ingcrronipre les mouvcmens , & qui peut aullî Is. plonger dans de l'cfprit de vin , îans que cette fituation l'cmpcche d'achever fon ouvrage, quoiqu'il périlTe bien-tôt après. Au fujct de l'arrangcnrent des ailes , des antennes , des jambes du Papillon & de fa trompe, étendues & ramenées fur la poitiine de la Ghryfalide , &: tout autrement pla- cées fur le Papillon , renfermé en- core dans le fourreau de Cluinllc : l'Auteur cbfcrve que tout'es ces parties ne doivent point leur arran- "gement particulier fur la Chryfali- de à celle-ci ; mais qu'il eft unique^ ment l'effet des mouvemens qu'el- le fe donne , pour fortir du tour- rcau de Chenille ; & il en fait voir toute la niéclianique. Il remarque de plus , qu'une Gliryfalide nou- vellement éclofe elt fi molle, que le moindre attouchement cft capa- ble de troubler l'arrangement des parties dont on vienrde parler, &. qu'il n'cft plus poillble de rétablir. Mais la liqueur qui fuinte du corps de l'InfeCtc , en enduit roUt l'exté- rieur &C en fedelTechant l'affermit d-e telle forte , qu'en moins de 24. heures , on peut le manier hardi- ment &■ fans aucun rifque de le blclTcr. L'Auteur nous avertit en- core , que 11 l'on ne fouftrait la BOUîiJtuie aux Chenilles que quel- E S SÇA VANS, ques jours avant le tems qu'eller: fe l'interdiroient elles mêmes , on. ne retarde point pat-là leur méta- morphofe , mais leulement qu'el- les donnent alors de plus petits Papillons. Le tems de cette transformation n'c il point uniforme pour les Che- nilles qui fe renferiTient dans des coques. Il y en a des efpeces qui au bout de 15 ou 16 jours paroilTenC fous la forme de Papillon. Il y en a d'.tutres qui ne prennent celle de Chryfili.ie qu'après plus de 15 jours ou trois femaines , & qui y patient Thiver entier &C même une partie du Printcms fans devenir Papillons. Les Chenilles à corne pficée fur le derrière annoncent leur prochaine transformation par, la tranfparence de cette corne , qiii- auparavant éroi: opaque , & par la chute fur le corps de la Chenille ^ au-deifus duquel on la vayoit éle- vée. Les ftigmates ou ces iS bouches, qui donnent entrée à l'air neceffai-- re pour la refpiration des Chenil- les , femblcnt fe fermer lorfqus le ■ tems de la mctamorphofç appro- che, &: c'cftainfi qu'elles paroiffent fur une Chryfalide de plulieurs jours : ce qui fait naître différentes qucfticns 5 fçavoir, hcesftigmates- confervcnt des ouvertures fuffifan- tes pour donner paffage à l'air ? C\ la Chrvfalide dans cet état d'cn- gourdiflement rcfpire encore ? Si le Papillon refpire , & fi c'eft par les ftigmates.'' L'Auteur inftruit par diverfes expériences qu'il a faites avec cette fagacité q^ui lui cil il. ■ M A Y tiaturelfe , & fur Icfquellcs il faut le confulrcr , croit pouvoir en conclure, i°. Que tcis les org.iius de h rcfpiiarion qvii croient elfcn- ticls à la Chenille , le font encore au Papillon, dans les premiers tenis où il ne fe montre encore que fous la forme de Chryfalidc; 2". Qu'une partie de ces organes fe bouchent dans la fuite : 3°. Qiic lorfque le Papillon s'cft fortifie jufqu'à un cer- tain poiryt^ il n'a plus d'ouvertures pour recevoir de l'air , qu'à la par- tie antérieure de la Chryfahde. Aufli le Papillon qui vole dans nos campagnes , ne refpire t il par au- cun des anneaux de fon corps, que l'on peut huiler impunément, mais on rétouffc fi l'on huile certains endroits de fon corcelct. • M. de Rcaumur s'cil convaincu par plufieurs autres expériences également décidves , & fur lef- quellrsnous paffons, pour abréger, que dans les Chryfalides l'infpira- tion & l'expiration fe font parles (ligmates ; au lieu que dans les Chenilles l'air entre par les ftig- mares , ôc fort par d'autres iffues ; & il a eu des preuves complettcs de cette façon de refpirer qui eft commune aux Chryfalides avec les plusgrands animaux, par plufieurs expériences faites dans la Machine Pneumatique , & dont ce Mémoi- re fournit tout le détail. Il nous y communique encore divcrfes ob- fcrvations cutieufes &c délicates fur les différences de ftrudure qu'on apperçoit entre les ftigmates de la Chenille &c ceux de la Chryfalide. S'il eft furprcnant [ dit - il en finif- fant fon Mémoire] que la circula- tion de l'air fe falTe h diffcreniiiicnc dans le même Infcde , félon fes différentes formes , il ne l'eft pas moins que la circulation du fang- ou de la liqueur qui lui eft analo- gue , fe talfc en des fcns direde- ment contraires : c'eftà-dire , du derrière vers la tète , dans la Che- nille , &: de la tête vers la queu& dans la Chryfalide & dans le Papil- lon. X. Mais rien ne mérite davanta- ge notre attention que Viridnflne des Che>iilUs ijni fe pendent vertica- lement par h derrière la tête en b.is - pour fe métamorphofer , en forte fite la Chryfalide fe trouve pendue tarlA (jiieuë dans la place oit était la Chei. nille ; & il n'cft pas moins curieux de découvrir de (juoi dépend la belle- couleur d'or de plufieurs efpeces de Chjfalides : &i c'eft l'explication de ces trois phénomènes qui fait 1& fujet du dixième Mémoire de M. de Réaumur. Comment eft-il pofîî- ble que la Chenille fe pende par la queue la tête en bas par le moyen de fils fortis de cette tête où fe trouve la filière ? Comment peut- elle en pareille fituatioii quitter totalement fon fourreau de Chenil- le , &: demeurer , fous la forme de. Chryfalide , pendue précifément à la même place où elle pendoit étant Chenille ; C'eft un myftere- de la nature, admiré par divers Ob- fervateurs qui n'y ont rien com-, pris , excepté M. Vallifneri , lequel- en a dévoilé quelque partie , mais fans en éclaircir les circonftances- les plus fingulieres. Tout cela s'e-- 2j8 JOURNAL D xecutc Cl promptemcnc , qu'il eft prcfqueimpoirible d'en rien apper- cevoir, à moins qu'on n'obferve à iafois un ^rand nombre de ces In- fectes; &: c'eft à quoi notre Auteur n'a point manqué. Rien de plus (Impie [ dit - il ] que le procédé de la Chenille pour fe pendre par le derrière. Elle com- mence par rapillcr d'une toile très- mince 6c faite d'un tilTu de plu- fieurs fils , l'endroit contre lequel elle veut fe lîxer.EUc ajoute fur une petite portion de cette furtace déjà tapiiïee , diiîerentcs couches de fils, qui toutes enfemble forment une efpece de monticule de foye , de figure à peu - près conique , Sc dont la tiffure efi: allez lâche. Ce monticule de foye étant achevé , la Chenille s'y cramponne avec fes deux pied' de derrière, à l'aide des nombreux crochets dont ils font armés , & lorfqu'clle fe fcnt bien folidement &c bien fiirement accro- chée , elle lailTe tomber fon corps verticalement , en confcqucnce de quoi la tête fe trouve en bas , Zc la Chenille ne paroît attachée que par le derrière , qu'excédent de très- peu les deux dernières jambes , puifqu'elles partent du dernier an- neau. M. de Réaumur s'eft donné plus d'une fois le plailir de décro- cher des Chenilles en cette fitua- tion , & de les racrocher fur le champ. La Chenille pendue & bien cramponnée, recourbe fi tête vers fa queuii , en forte que fon dos de- vient convexe. Au bout d'environ une demi-heure ^ elle iaiffc reteini- ES SÇ AVA NS, ber fa tête , qu'elle retire de nou- veau, & elle recommence pluheurs fois ce petit manège alternatif en fe courbant toujours de plus en plus. Tous ces mouvemens ne ten- dent qu'à faire fendre la peau du côté du dos ; & la Chenille n'en vient à bout qu'après plus de 24 heures de travail , (Si quelquefois après plus de deux jours. Quelque petite que foit d'abord cette fente, elle oRre un fpeftacle des plus amufans à l'Obfervateur , qui veut faivre attentivement tout ce que fait alors laChryfalide pour élargir la fente en déchirant fon fourreau de plus en plus , par les gonfle- mens réitérés de fon corps, en for- te qu'elle parvient à l'en taire for- tir depuis ia tête jufque par delà les dernières jambes écaillcufes. Après quoi la Chryfalide n'a plus à déchirer fon fourreau , pour ache- ver de s'en dépouiller. Elle met en œuvre pour cela une autre méchanique , toute fembla- blc à celle par laquelle nous dé- chauffons nos bas en les poufTanc jufqu'à la cheville du pied avant que de les tirer : ce qu'exécute li Chryfalide en s'allongeant & en fe racourcilfant alternativement ; à quoi fervent auflTi dans certaines Chryfalides , quelques épines ou crochets inclinés vers la queue , & qu'elles portent fur le dos. Au moyen de tout cela elle fait peu à peu , quoique pourtant afTez vîrc, remonter la dépouille , en la plif- fant comme un courcailler , &: en la poulTant toute contre l'endroit où les dernières jambes de la Che-: M A riille fc trouvent accrocluts , ck' où plie eft réduire en un paquet li pé- rit, qu'il ne couvre que le bouc clé h qui'.ië de la Chryfalide. Il rcfte à celle-ci à fe délivrer de ce paquet ; ce qu'elle fait bien-tôt en pinçant entre deux de fes an- neaux dépouillés & alors encore très - flexibles , une portion de la peau plilTée , qui lui ferc de point d'appui , pour achever , en fe re- courbant, de tirer fa queue du fourreau , fur lequel enfuite elle l'applique. Elle employé la même méchanique pour s'élever fuccefli- vement le long de fa dépouille , à l'aide de fes anneaux plus anté- rieurs qui pincent cette dépouille comme par degrés , &qui permet- tent à l'infede de porter fa queue jufqu'à l'endroit où la dépouille refte accrochée. La Chryfalide n'a pas plutôt fenti du bout de fa queuii le monticule de foye , qu'cl-- le s'y accroche , moyennant un amas de petits crochets qui la ter- minent , & que le (împle attouche- ment du doigt fait fentir , mais que l'on ne voit bien dillinârement qu'au Microfcope. M. de Réau- mur a fait dcsChryfalidesce qu'il avoir fait des Chenilles , c'eft-à-di- re qu'il en a décroché pluficurs qu'il a raccrochées enfuite. La Chryfalide n'eft pas plutôt accrochée , qu'elle travaille à fe débarralTer entièrement de la dé- pouille dont le voifinage l'incom- mode , & à la faire tomber. Pour y parvenir elle courbe en S la par- tie fituéc au-deifous de fa queue , &i de cette partie ellcfaifit &em- braffe la dépouille , après quoi fe donnant une fecoulfc , elle fait fiirc à tout fon corps une vinc;t.îi- ne de pirouettes fur fa queue , lef- quelles callent les fils qui atta- choicnt les crochets des jambes de la dépouille , & en dégagent ceux- ci. Il faut que la Chryfalide , pour achever l'ouvrage en certains cas réitère les pirouettemens julqu a quatre ou cinq fois. Mais ordinai- rement deux fuffifent ; après quoi elle eft tranquille pendant vingt & quelques jours, au bout defquels , le Papillon fe trouve en état de fc dépouiller de fa dernière envelop- pe ; &c notre Auteur décrit ce Pa- pillon , ainfi que plulkurs autres ifTus de différentes Chryfalides , qu'il nous fait connoître plus parti- culièrement , aulTi bien que les ef- peces de Chenilles d'où elles font forries. . Parmi ces Chryfalides décrites ici , nulles ne doivent s'attirer les regards des plus curieux Naturali- if es autant que celles dont la peau paroît dorée, foit totalement , foit en partie. M. de Réaumur s'eft ap- pliqué à découvrir la caufe de cette dorure avec d'autant plus de foin , qu'il ne connoîtperfonnequiaiten- core examiné ce point d'Hilloire na- turelle; fans compter, qu'en expli- quant en quoi confillc cette dorure dans les Chryfalides , on détermi- nera apparemment la vraye caufe de celle dont tant d'autres Infedes fe trouvent ornés. L'Auteur aver- tit d'abord que cette dorure n'eft qu'apparente, &i quec'eft en cette occaiïon que peut fe vérifier phy-^ 26o JO UHNA L D fîqiiement le proverbe que tout ce cpti reluit neji pas or. En effet , les dépouilles des Chryfalidcs les mieux dorées , n'en confervcnt aucune couleur des que les Papil- lons en font fortis : ce qui ht naî- tire à l'Auteur la penfce que la do- rure de ces Chrvfalidcs pourroit bien être fembiable à celle des cuirs dorés , qui ne paroiflent tels qu'en vertu d'un vernis particulier appliqué fur quelques corps d'un blanc éclatant. Pour julhher cette conjedure , iin'ctoit quelHon que de détacher une portion de la dépouille tranf- parente d'un Papillon , ik l'appli- quer exaftement fur une pièce d'argent poli \ ce qui étant exécu- té , l'endroit recouvert parut très- bien doré fur le champ. Voilà donc déjà la moitié de la compofition de cette dorure , la peau tranfparente de la Chryfalide tenant lieu du ver- nis qu'employent les Faifcurs de cuirs dorés. Il ne s'agit plus que de chercher une matière d'un blanc éclatant & argenté , analogue à celle que l'on tire de deflous les écailles de certains poilTons pour imiter les véritables perles , & que les Ouvriers de ce genre appellent ejfence d'0*'ient: Or M. Je Réauinur a trouve une telle matière fous la peau d'une Chryfalide des mieux dorées & quj receloit encore fou Papillon. La couche de cette ma- tière argentée elt très - mince ■, & l'on ne peut guéres décider fi c'cfl: une vrayc membrane , ou une li- ES SÇA VANS. queur vilqueufc échappée du Pa- pillon , 6c qui s'elT: épailHc dans la fuite. Une portion de la peau enle- vée dedeilus une Chryfalide avec fa matière blanche , perd au bout de quelques heures prclque toute fa dorure par le dellechcment de fon enduit intérieur. Humedcz cet enduit au point de lui rendre fa couleur argentée ; aulH - tôt vous ferez reparoître la dorure de la peau ; ce qui continue d'arriver pendant 8 ou lo jours &i plus. L'Auteur conformément au Sy- llêmc qu'il vient d'établir lî folidc- ment au fujct des caufes de cette dorure des Chryfalides, n'a pas de peine à rendre de bonnes raifons de toutes les varictez & de toutes les irrégiilaritcz qui fe remarquent à cet égard fur dinferentes efpcces de Chryfalidcs, n La couleur de quel- >) ques Chtyfdidcs (obfcfve notre » Auteur àla fin de fon Mémoire ) » eft fi belle , fi éclatante , fi haute^ » qu'il n'y a pas d'or poli plus » beau , & que leur couleur fur- " palTe cxcrcmcmcnt celles de nos » dorures laites fans ûr,commefonc » et lies de nos cuirs dorés. Mais ne "feroit-on pas quelque chofc de » plus beau en ce genre de dorure , » Il au lieu d'employer l'argent , :» on employoit cette m.ême matie- » re colorée , qui réullît pour les >» perles laulTcs tout autrement que » l'argent ? C'eft à quoi il y a ap- » parcnce , &: ce qui mériteroit d'e- ntre éprouvé. HISTOIRE M A Y , i7 3rv i<;i HISTOIRE GENERALE DE PORTUGAL ; PAR Mdi t a. C L E D E. A Paris j chez le Gras , au Palais ; Giffart^ rue S. Jacques ; &c Rollin fils. Quai des Auguftins. 1735. /w-4°. deux Vol. & /«-12. 8, Vol. Tom. I. pp. 554. Tom. II. pp. 58}.Tom. III. pp. 666. Tom. IV. pp. 5^^. Tom. V. pp. 56^5. Tom. VI. pp. tfj 8. Tom. VII. pp. 5 j8. Tom. VIII. pp. 5^1. NOUS avions déjà en Fran- çois une Hiftoire générale de Portugal que M. le Qiiien de la Neuville a donnée au public en 1700. en deux Volumes /«-4°. Cet Ouvrage a été bien reçu , & notre Auteur reconnoît qu'il eft eftima- ble par bien des endroits. Mais cet Ouvrage ne va que jufijues à l'an- née 1521 .tems depuis lequel il s'eft parte en Portugal de grandes révo- lutions , dont il eft naturel d'être d'autant plus curieux qu'elles ap- prochent plus de notre tems. D'ail- leurs M. delà Neuville a fuppri- mé , fuivant notre Auteur , un grand nombre de faits imporrans , & il a paffé légèrement fur plufieurs faits interelTans. La vue de M. de la Clede en compofant une nouvelle Hiftoirc de Portugal , a été de don- ner une Hiftoire plus complette & plus exacte que celle de M. de la Neuville. Notre Auteur alTure qu'il a tiré des meilleurs fources les faits qu'il rapporte ; qu'il a eu recours à plu- fieurs morceaux d'Hiftoire déta- chés , & à des Mémoires particu- liers 6i curieux qui lui ont été four- nis , ôi qu'il a lu avec toute l'atten- tion poflîble les Ouvrages de Mariana , de Faria , de Brandam , de Birago , de Banos, & ceux des May. Comtes d'Ericeira ô: d'Allegrette.' On ne fera point fâché de trouver ici un précis de ce que M. de li Clcde dit dans fa Préface de ces differens Auteurs. Mariana qui a fait l'Hiftoire de Portugal en même tems que celle d'Efpagnc, embralfe tant de chofes en même tems , qu'on perd de vue à chaque inftant le principal objet de fon Hiftoire , il entre dans un détail de minuties qui choquent k gravité de l'Hiftoire & quelquefois la vraifemblance , il n'a point eu af- fez d'exaditude dans le récit des faits. Mais fon imagination eft vi- ve , féconde & variée , & fon ftilc eft coulant & fententieux. Faria qui a donné l'Hiftoire de l'ancienne Lufitanie & des Rois de Portugal , celle des conquêtes des Portugais dans l'Alie & dans l'A- frique Orientale, &c celle des guer- res entreprifes dans la partie de l'Afrique fituée vis-à-vis l'Anda- loufie , eft plein de faits qu'il ra- conte en Orateur plutôt qu'en Hi- ftorien. Il s'épuife en dcfcriptions , en harangues , en reflexions. » Ti- " mide néanmoins il n'ofe pénctret » jufque dans le cœur de fes Héros, >> pour y découvrir les nuances de » fentimens & de partions , qui » différencient le caraftere , pour r M m a^2 JOURNAL D .•>» voir enfin l'homme &c le peindre » tel qu'il eft. Ses Héros font toû- M )OLirs Héios & prefque jamais -" hommes. Brandam & Birago ont écrit en Italien ce qui s 'ell palTé en Portu- gal ^, depuis que Philippe II. s'cit lendumaître de ce Royaume , juf- qu'au règne de Philippe IV. Notre Auteur reproche à l'un &C à l'autre l'enflure dans les petites chofcs& les cometti. Quand Brandam veut t-rre fimple , ce n'eft qu'un Gazc- ricr , Birago a plus d'tfprit , fon ftUe cft plus foûtenu , fes refle- xions font vives & ingénieufcs , il peint, il intcrclTe , il paroit mieux snflruit que Brandam, il développe mieux les caufes qui produifentles évenemensdontil parle. Dom Louis de Mencfcs, Comte d'Eiceira, explique dans fon Por- mgallo reflorado ^ les caufes , les progrès , & les fuites de la dernière révolution jufqu'à la paix , que la GaftiUe fut obligée de faire avec le Portugal en \66%. Notre Auteur aifuie que cette Hiftoire eft écrite en Langue Portugaife, avec toute la délicateire, la force & l'énergie ppllible. Mais il lui parok que le long détail dans lequel l'Au- teur eft entré , & qui pouvoit alors faire plaifir aux Portugais , rend à prefent l'Ouvrage moins interef- îant. M. l'Abbé de Vcrtot a donné en François l'Miftoire de la même Révolution qui fit monter le Com- te de Bragance fur leTrône de Por- tugal , mais M. de la Clede eft pcr- fuadé qu'il y a dans cet Ouvrage de M. de Vertot plus d'agrément que de fidélité. ES SÇAVANS. Barros qui vivoit dans le tems des premières conquêtes des Por- tugais en Alîe , palfe pour leTiie- Live de Portugal, il s'exprime fim- plement , mais fa firnplicité eft bien au-deffous de la (implicite no- ble S< nerveufe de l'Auteur Latin à qui on le compare •. il defcend dans un détail extrême. La plupart de ceux qui ont écrit fur les Indes, n'ont faitque le traduire ou l'imi- ter. Ce font , dit M. de la Clcde , de foiblcs copies d'un alTrz bon original. Du)arri Jefuite eft peut- être , ajoute notre Auteur , celui qui a le moins profité de Barros. On trouve dans fon Hiftoire Orienta- le , dont l'objet principal eft le progrès de la Religion Chrétienne parmi les Idolâtres, plufieurs laits interefîans dont Barros n'a fiit au- cune mention. Il ne manquer cet Auteur que de l'ordre & du goûr. Il peint vivement & pcnfe avec force. A l'égard de l'Hiftoirc dtî conquêtes des Portugais dans les Indes qui a paru l'année dernière en Seux Volumes /'»- 4°. L'Aureur fe contente d'en faire mention dans fa Préface , fans en porter aucun jugement. Piulicurs perfonncs auroienC fouhaité que M. de la Clcde ne fe iùi pas borné à citer en- général dans fa Préface les Hiftoriens dont il a tiré les faits qu'il rapporte. On auroit vu' avec plaiîir à la marge quel eft l'Auteur qu'il a fuivi par; raport à chaque fait particulier. Au refte il alTure qu'il n'a rien oublié pour fe mettre en état d'éviter les fautes fur tout ce qui regarde la. MAY Géogrâpliic , la Clironologic 6c Je détail lies faits. A l'égard du llile il déclare qu'il s'ei't attaché à y mettre le plus de netteté & de cor- rcdion , qu'il lui a été poflïblc'^ il sjoûte qu'ilaapperçu qu'il lui ctoic échappé quelques négligenceSjCom- me il eft prefque impolîîble qu'il n'en échappe dans un Ouvrage ii étendu i mais qu'il n'a point abufé de la maxime vulgaire , quel'Hi- ftoire plaît toiijours de quelque manière qu'elle foit écrite. Si l'Hi- ftoirc plaît toujours par elle-même, une Hiftoire bien écrite & une Hi- ftoire mal écrite font une impref- (îon bien différente fur l'efprit des Lecîteurs. C'eil lareHexion par la- -quelle M. de la Clede finit fa Pré- face. Elle efl: fuivie de deux Cartes Géographiques ■, l'une où l'on voit l'état de la Lufitanic & des Provin- ces voiiines qui tormenc aujour- d'hui le Royaume de Portugal , l'autre pour l'état prefent du mê- me Royaume , divifé en fes Pro- 'vinces avec fcs frontières. Le premier Volume /«-li. divifé en quatre Livres contient l'origine, les mœurs & les guerres des an- ciens Lufitaniens , leur état fous la domination des Romains , l'inva- fion des Goths & celle des Maures, jufqu'au tems de l'éredion du Por- tugal en Comté. - Mariana & de Parla adoptant les fables publiées dans les derniers fiécles fous le nom de Bérofe , re- montent jufqu'au tems du Déluge ■dans ce qu'ils rapportent des an- ciens Lufitaniens. Notre Auteur . I7Î J- 2(Î5 n'a poinr pris pour guide le fau'X Bérozc. S'étant contenté de piopo- fer quelques conjectures fur l'ori- gine des Lufitaniens qu'il fait venir des Celtes &des Ibériens , & fur l'origine du nom de Luficauie , ou des Lufons , qui fignifie , félon lui , des hommes d'une taille avanrageufe i il ne commence foa Hiftoire de la Luficanie qu'à ce qu'on en trouve dans l'Hiftoirc Romaine , c'ell-à dire au tems au- quel les Lufitaniens qui étoicnc compofcs de diffcrens peuples , fu- rent fournis aux Carthaginois envi- ron cinq cens ans avant J. C. les vidoires que les Romains rempor- tèrent fur les Carthaginois leur donnèrent lieu de fe rendre maîtres de la Lufitanie , fous le gou- vernement de Marius - Pontius- Cato- Cenforinus. Les Lufitaniens fe révoltèrent depuis ce tems là contre les Romains-, entre ces ré- voltes deux des plus fameufes dans i'Hiftoire font celles dont Vinatus &c Sertotius turent les Chefs , fous lefqucls les Lufitaniens donnèrent des marques de courage héroïque. Viriatus dont la mémoire ell: flétrie par les portraits odieux qu'en ont fait les Auteurs Latins , eft repre- fenté dans notre Auteur comme un Héros qui n'arme les Lufita- niens que pour venger ta patrie , à l'égard de laquelle les P^omains avoient commis la plus noire per- fidie &C violé les droits les plus fa- crés. Voici le portrait que M. de la Clede fait de Viriatus , après avoir rapporté la manière dont ce Géné- M m ij 354 JOURNAt DE lal a été aflailîné par trois Lufita- niens que Capion avoir engagés à commetrre ce crime. Il n'étoit que fimple Chafleur , lorfqu'il échappa à la fureur de Galba. » Son M habileté à fçavoir fe tirer d'un » danger le fit élire par fcscaniara- »des pour leur chet. Son premier >» foin fut de venger la niorr des » Lufiraniens que Galbi avoir iin- » moles à ja crmuté en ravapeant »les tencsdes alliés des Romains, » qu'il défit en tant de rencontres =0 que les peuples charmés de fes wviâoires, accouroient en toule » pour fe ranger fous fes étendarts. a> Viriatus, continue Ai. de la Clede^ y> ne fe laifTa point éblouir par l'é- » clat de fa nouvelle fortune , toiî- n jours fage , prudent & modéré , »fon élévation ne fervit qu'aie » rendre plus circonfpect &: plus » attentif à remplir fes tondions. » Il étoic ^rand èc bien fait , il » avoit les cheveux courts 6c frifés, » les yeux vifs & perçans , le nez » aquilain , & dans tout fon exre- » rieur on remarquoit un air d'au- » dace & de ma)efté,qui infpiroit la w cruauté & le refpeâ: tout enlem- »blc. Son cfprit étoit vafte S< fcrti- » le en reffources , fon courage fe 30 jouoit des. périls. Au rcfte il étoit » fimple dans fes habits, doux & "facile dans le commerce, familiet "avec le Soldat , grave avec fts » é^aux , niéprifant les richefles , » fa frugalité bifoit toute fon opu- »lence. Après les guerres de Viriatus & de Sertorius , notre Auteur vient À Jules - Céfar, 5c aux Empereurs S SÇAVANS, Romains fes SuccelTeurs rappor- tant fous chacun des règnes de ces Princes ce qu'il a pu trouver de particulier pour l'Hiftoire de la Lufitanic. Ce qui le conduit juf- qu'au tcms auquel l'Empire Ro- main fut envahi par les Barbares. Les Vandales , les AUains, les Suc- vi-s & les Goths entrèrent dans l'Efpagne £c furent fucceilîvement les maîtres de la Lufitanie. Enfin les Goths l'ayant emportée fur ks autres Barbares refttrcnt leuls en poirpllîon de toute l'Efpagne. Ainfi l'Hiftoire des Rois Goths dont l'Auteur nous donne un abrégé , comprend en même tems celle de l'Efpagne en général & de la Lufi- tanie en particulier. Il en eft de même du tems qui s'eft écoulé de- puis la conquête de l'Efpagne par les Maures lufqu'au tcms de l'érec- tion du Portugal en Comté. C'eft par cette révolution que commence le fécond Volume & l'Hifloire de Portugal , le Pays aa- quelon a donné ce nom ayant juf- qu'alors fait partie de l'Efpagne. Le premier de fes Comtes fe nom- moit Henri. Il avoit époufé en 1072. la Princeffe Thérefe fille d'Alphonfe VI.Roide Léon & de- puis Roi de Caftille; l'année d'après ce mariage il donna à Henri en pro- priété le gouvernement de Porto & ce qui en dépendait avec le titre de Comte. Le nom de Portugal tire fon origine , fiiivant notre Auteur de cette Ville de Porto qu'Henri fit rebâtir , & de celle de Cale qui cft de l'autre côté de la rivière vis- à-vis de Porto.Cette étvmologie lui MAY. paroît beaucoup plus vraifcmblable que toutes les autres qui ont été propofécs par diHerens Auteurs. A l'égard du Comte Henri fur l'origine duquel nos Auteurs ont été li partages , M. de la Clede fuit le fcntimenr de ceux qui le font defcendre de la Maifon de France. Il fe fonde fur le Manufcrit de l'Abbaye de Fleury , imprime à Franctûirpar les foins du tameux Pierre Pitou. L'Auteur de cet Ou- vrage , Moine Benedicftin , qui rapporte ce qui s'eft paffé depuis l'an S97. jufqu'à l'année 11 10. dit que Robert Duc de Bourgogne fils ■ du Roi Robert &c petit fils de Hu- gucs-Capet , eut un fils unique nommé Henri , &c que ce dernier étant mort avant fon pcre laifla cinq enfans mâles du nombre def- queis étoit Hugues l'aîné qui fuc- ceda à fon ayeul , &c Henri dont il s'agit ici l'un des puînés. Notre Auteur ajoute à cette autorité que les Compagnons d'Henri étoicnt tous François , qu'il y avoit alors une grande correfpondance entre la France & les Etats d'Efpagne fournis à des Princes Chrétiens , & que le Comte Henri communiqua au Portugal ks armes de Bourgo- gne. Les Efpagnols prérendent que le Roi Alplionfe donna le Comté de Portugal à Henri à la charge de le tenir en fief. Les Portugais foû- tiennent au contraire qu'Alphonfe donna à Henri la Ville de Porto Si fes dépendances , fans s'y refer- ver aucun droit de Vaffelage. No- tre Auteur fe détermine pour la '7 5 y. 2(r>- prétention des Portugais ; parce qu'il ne lui paroît pas probable que fi Alphonfe s'étoitrcfervé quelque droit fur le Portugal, on n'en trou- vât point de monumens dans les Archives de Léon & de Caftilk, où l'on a confervé fi foigncufement la mémoire de tout ce qui pouvoic être avantageux à la Monarchie Efpagnole. ♦■ Cette réponfe paroîtra à plu-' fieufs perfonnes plus conformé aux principes qu'on fuit dans toute l'Europe en matière de fiefs , que celle qu'aioûte M. de la Clede, que quand le Comte Henri auroit été ■ValTal d'Alphonfe, Henriqués fils d'Henri n'auroit point été fujet à ce Vaflelage , parce que les Por- tugais en le proclamant Roi pou- voient l'affranchir de tout Vaflela- ge, en rentrant dans les droits que la nature a accordés aux hommes , qui eft la liberté. Pour ce qui eft de la queftion fi Théréfe femme d'Henri étoit fille légitime d'Alphonfe , une Bulle de Grégoire VIL femble la décider en faveur de Théréfe. Mais d'un autre côté le Manulcrit trouve dans l'Abbaye de Fleury, &c qui eft d'un Auteur prefque contemporain , dit pofitivement qu'elle n'étoit point légitime. L'Auteur auroit - il pu avancer un hit de cette nature s'il n'en avoit point eu de preuve» Le Comte Henri mourut ea Il 12. après avoir gagné 17 batail- les contre les Maures ■_, & après' avoir gouverné d'une manière à fervir de modèle aux plus grands Pïinses, ji66 JOURNAL DE Alphonfe fon hls dit Henriqiiés gouverna le Pays pendant dix-fept ans en qualité de Comte , & pen- dant quarante-fix ans avec le titre de Roi. Ce furent , fuivant notre Auteur , les Etats atTemblés à La- mego avant la conquête de Lifbon- ne qui donnèrent ce titre à Alphon- Xe-Heniiqués , avec toutes les mar- ques extérieures de la Royauté. Il ajoiàte qu'on fit enfuite des Loix , 'tant pour la fucceflîon à la Couron- ne que pour le gouvernement de J'Etat & pour la police du Royau- me , qui furent publiées dans l'âf- femblée des Etats. L'Auteur rap- porte les principaux points de ces Loix. Il remarque enfuite que le Pape Alexandre lll. envoya une Couronne Royale à Alphonfe , & qu'il lui confirma par une Bulle le titre de Roi , à condition qu'il payeroit à la Chambre Apoftoli- que un cens annuel de deux marcs d'or. Voici ce qu'obferve fur ce S SÇAVANS. fujet M, de h Clede après avoir rapporté la Bulle d'Alexandre III. » 11 leroit inutile de faire des rcfle- » xions fur le droit ndtcule que le » Pape s'y arroge d'accorder un » Royaume , une Couronne, le n titre de Roi , &c. Les Portugais )> aujourd'hui plus éclairés qu'ils V n'ttoient alors , fçavent comme 30 nous que le pouvoir du Pape eft » borné au Spirituel , & que leur » Roi ne dépend que de Dieu feul, » il paroît même qu'ils craignent » peu les excommunications de la » Cour de Rome. Il y a dans ce Volume &c dans les fuivans plu- fleurs traits , qui ne font pas moins vifs que celui qu'on vient de voir. L'Hjftoire d'Alphonfe I. eft fui- vie de celle du règne de Sanche L & d'Alphonfe II. qui remplit le fixiéme Livre. Nous rendrons compte des Li- vres fuivans dans le Journal pro» chain. ESSATS DV CHEVALIER BACON , CHANCELIER d'Angleterre , fur divers Sujets d: Politique &■ de Morale. A Paris , c\ïCT.Emery ^ Quai des Auguftins. 1734.V0I. in-\z. pag. 408. A La tête de ce Volume , pa- roît , fous le nom d'Avertif- fement , un Difcours alTez long qui ïoule principalement fur le mérite de l'Ouvrage , & c'eft le Libraire qui parle dans cet Avertllfement. 11 dit d'abord que l'Ouvrage dont il s'agit , eft la tradudlion d'un ex- cellent original Anglois ; il pro- nonce que latradudion eft élégan- te ; puis il avertit qu'on ignore le £ioin du Tiadudeui ^ quant à ce- lui de l'Auteur il répète là deffus , ce qui eft dans le titre , fçavoir, que ces Eflais font du Chevalier Ba- con j Chancelier d' Angleterre , à quoi il a)oûte la qualité àt Baron de F'érulam & de Vicomte de S. Al ban. Il informe enfuite le ledcur qu'une perfonne de diftindion ayant ap- porté cette traduction au retout d'un voyage d'Efpagne, a bien vou' lu s'en défaifir en faveur du Li- braire qui la public aujourd'hui j MAY puis il donne fon justement fur tour l'Ouvrage : il dit >» Qii'oti y .-avoit en racourci , tout le génie .' de Bacon ; Qj-i'un efprit aifé , un " juj^cmcnt fain , le Philofophe » fenfé, l'homme de reflexions , y » biillent tour à touriQue c'eft un » des fruits de la retraite d'un hom- »me qui avoit quitté le monde ^ •■après en avoir loûtenu long-tems " les profperitez & les difgraces ; = Que (ï les maximes de M. de la » Rochcfoucaud ont été li long- s tcms goûtées par ce qu'il y a de »>plus fenfé, fi elles font encore »les délices de ceux qui aiment » les Ouvrages o\\ le vrai & le judi- »cieux font fubftitués à la place »des traits brillans de l'imagina- Btion, fou vent faux &: prefque toiV wjours peu.folides , on a droit >> d'efperer que ces ElTais ne feront »ni moins recherchés, ni moins » lus , ni moins utiles , Que tout y 3> paroît fi raifonnable que chacun' => croir penfcr de lui-même ce qu'il - » trouve exprimé dans fon Auteur; 3»Que la politique n'y eft point » contraire à la Religion i Que B celle-ci foûtient a fon tour la po- »>litique -, Que c'eft un Livre de » principes qui peuvent également » îervir à l'homme d'Etat & au » Philofophe ■■, Que ce ne font » point des maximes de fpirituali- =0 té , mais des reflexions faines , a> judicieufes , folides. Notre Libraire ajoiite (jue » l'Au- 5) teur parle avec liberté , que c'é- » toit aflez dans ce tems-là , le ca- «radere desAnglois , & que c'eft "cncoie celui de leurs Auteurs i . » 7 3 S"- 2^7 » mais (jue quand cette liberté n'a » rien que de conforme à la r.iifon » & aubonfens , quand elle ref- » peifle la Religion & la pieté , qui » doivent , dit-tl , être raifonnables » elles-mêmes , alors loin d'être » blâmable , c'eft l'afTaifonnement » le meilleur qu'on puilTe donner » à un Ecrit, fur- tout aujourd'hui" » que ce goût paroît régner de plus » en plus en France , &: même »dans prcfque route l'Europe ; »^«'un Ecrit qui a ce caratlere ne » peut manquer de plaire & d'être "Utile ; i^i'un Ouvrage qui ren~ » ferme plus de chofes que de » mots , peut ennuyer un efprit " fupcrficiel , qui n'aime que ce » qui flatte fon imagination , Sc »»qui cherche plus ce qui brille M que ce qui inftruit; mais que h «gloire d'un Auteur n'eft pas de » n'être agréable qu'à ces fortes de » Ledeurs ; ^e l'homme fenfé , "l'Auteur judicieux ne mettent » leur honneur qu'à être goûtés par » ceux qui leur reflemblent ; jQwc » puifque nous fomraes tous faits J3 pour raifonner , & pour raifon- " nerjufte , on ne doit pas chercher •> autre chofc dans un Ouvrage 5 » Q^ie celui-ci d'ailleurs donne en n peu de mots, tant de règles lu- i> mineufcs d'une fage conduite , >> qu'il plaît , qu'il inftruit , qu'il » charme ceux qui aiment à fe con- M noître , & qui craignent de fe » tromper ; Q^e s'il reprend des X, défauts , c'eft pour apprendre à ^ » les corriger ; Que s'il attaque des y abus, c'eft pour montrer à ks évi- 30 ter ; Q^ s'il donne desprccejgteS;, 268 JOURNAL D » c'eft pour faire difcerncr ce qui » eft de devoir , &c fuir ce qui n'eft u que de caprice & de fantaifie. Le Libraire , après avoir ainfi dé- claré ce qu'il juge de ce Livre , dit que Baile , » qui avec beaucoup >i de défauts , ne laifTe pas d'avoir n connu ce qui étoit préjugé , &c » d'avoir fait quelquefois une » guerre alTez heureufe , à beau- >j coup de préventions, avoir raifon » d'eftimcr ces Eflais; qu'il les loue w beaucoup ; & qu'il nous apprend » qu'il s'en fit en peu de tems un w alTez grand nombre d'Editions; » Que Jean Baudoin, l'un des pre- ji miers Membres de l'Académie oFrançoife, en avoit déia publié a» une Tradudion en 1^14. Qu'el- » le renferme une différence énor- u me d'avec celle que l'on publie » ici : ftyle mauvais dans la pre- » miere , additions peu dignes de «l'Auteur, ex prelTions louches, »>furannées & fouvent bizarres , n au lieu ( pourfuit le Libraire ) » que l'élégance , la pureté du hn- » gage , la précifion forment le wcaradere de la Tradudion que M voici. Il avertit qu'il a fait quel- ques retranchemens dans la Tra- duction , mais qu'ils font en petit nombre , & qu'il ne les a faits que fur l'avis d'un homme d'efprit , ^ui les a jugés necejftires pottrfe con- former à nos mœurs & aux loix re- çues dans le Royaume , & par refpeEl ■pour la vérité ^ut s'y trouvoit hlejjée. Voilà pour ce qui concerne l'A- vis du Libraire , & le jugement qu'il a cru devoir nous apprendre <^u'il porte du Livre : venons à ES SÇAVANS, l'Ouvrage. Les Sujets en font très- variés : ceux qu'on y traite d'abord font l'Habitude &: l'Education ; le Mariage & le Célibat; les Cliens & les Amis -, la Converfation ; la Nobleffe , les Magiftrats & les Di- gnitez j le Sage en apparence ; la Colère ; la Louange ; li Gloire Sc la Réputation ; les Riclieffes ; les Cérémonies, & les Complimens; l'Envie ; ce qu'on appelle nature dans les hommes; la Dillîmulation; les Voyages ; la Dépenfe ; les Grâ- ces &C ceux qui y prétendent. L'on parle enfuite des Pères & des Enfans ; de l'Ufure ; du devoir des Juges ; de la Vicillîtude des chofes ; du Confeil ; de l'Amitié; de la Difformité ; puis de la Vérité; de l'Adverfité ; de la Vengeance ; de l'Athéifme ; de la Superffition ; de la Bonté naturelle & acquife ; de la Mort ; de la Jeunelfe ; & de la VieillelTe. Les autres Reflexions re- gardent les Soupçons , l'Amour , l'Intérêt particulier , l'Etude , la Vanité, l'Ambition, la Fortune , l'Empire , la véritable Grandeur des Royaumes &c des Etats , les Troubles & les Séditions, les Fac- tions S< les Partis, les Colonies, l'expédition dans les Affaires , la Négociation , l'Audace & lesNou- veautez. On conçoit bien qu'il eft impof- fible de faire l'Extrait de tant d'ar- ticles differens , nous nous borne- rons à quelques-uns D E l'H a b itu de. Notre Auteur dit qu on voit tien MAY bien clairement h force & l'empi- re de riiabitude , dans la conduire de la plupart des hommes; qui tous les jours , promettent , s'engagent & donnent des p.iroles authentiques p.ir hdbititde feulement , fans ^ue cela fijfe aucune impnffion fur eux , m eju'ils changent en rien leur conduite^ comme s'' ils étaient des figues & des machines. Voici plufieurs exemples qu'il donne de la tyrannie de cette habi- tude. » Les Indiens [il parle des Gym- » nofophiftes ] fe mettent tran- » quiUcment fur un bûcher &: fe » facrifient par le feu. Les femmes » même fe font brûler avec les » corps de leurs maris. Les enfans » de Sparte étoient accoutumés à » fe iailfer fouetter fur l'autel de » Diane, fans fe plaindre. Notre Auteur dit qu'il fe fou- vicnt qu'au commencement du rè- gne de la Reine Elifabeth, un Ir- landois rebelle , qui fut condamné à être pendu , prefcnta au Viceroi un placer dans lequel il dcmandoit à être pendu avec une branche d'ozier ritorfe , au lieu de l'être avec une corde , parce que dans fon Pays c'étoit l'ufage de pendre ainfi les rebelles. L'Auteur joint à ces exemples celui de certains Moines de Mofco- vie , qui par pénitence fe mettent en hyver dans l'eau froide & y de- meurent julqu'à ce qu'elle foit ge- lée autour d'eux. . . . Do Mariage. » Qiielques - uns regardent une May, » femme & des enfans , feulement » comme un fujct de dépenfe ,'5 qui répondit : Vn jeune homme 55 tas encore ; un vieillard ^ point du » tout , celui-là , dis-je , eft mis au j5 nombre des Sages. Des Magistrats. Notre Auteur trouve que » ceux » qui ont les plus grandes charges , » font trois tois efclavcs-.efclavcs du » Prince, ou de l'Etat ; cfclavcs de 30 leur réputation -, efclavesdesaffai- n rcs; de manière qu'ils ne font maî- » trcs ni de It urs perfonnes , ni de 55 leurs adions , ni de leur tenis..... Il remarque que » la plupart des » hommes ne peuvent foûtenir 5' une vie privée , malgré la vieil- » lefle & une mauvaife fantc qui » demandent cependant l'ombre « &C le repos. 11 les compare à ces 35 vieux Bourgeois , qui , n'ayant » plus la force de fe promener dans » la Ville , s'alTcyent encore devant » leur porte, 6c fe donnent en fpec- » racle au public. . . Ceux qui font dans les grands emplois , remarque-t-il encore , j» ont befoin de l'opinion des au- » très pour fe trouver heureux. S'ils n jugent par ce qu'ils fentent eux- » mêmes , ils ne trouveront pas 39 qu'ils le foient -, mais s'ils font » attention à ce que les autres pcn- » fent , & combien l'on fouhaite 3» d'être à leur place , ils fe trou- » vent heureux par cette opinion wd'autrui , &: pendant qu'ils fen- » tent peut - être en eux - mêmes , ES SÇAVANS, 31 qu'ils ne le font pas ; car ils font 55 les premiers à lentir leurs dou- » leurs , quoiqu'ils foient les der- » niers à fentir leurs défauts. Les >• hommes en grand pouvoir ne fc 55 connoifTent pas ordinairement , 53 parce que diftraits par les affaires, » ils n'ont pas le tems de penfcr à n eux. Illi mors gravis incubât Qm noms nimis omnibus Jgnotus moritur Jibi, A ces maximes de fpéculation y notre Auteur joint des préceptes importans pour la pratique : Dans l'emploi quevous occupez , dit-il ^ 55 mettez-vous devant les yeux les 33 meilleurs exemples -, l'imitation « eft un globe de préceptes; pro- n pofcz - vous dans la fuite , votre >5 propre exemple , pour voir fi 30 vous n'avez pas mieux commcn- 30 ce que vous ne continuez , & ne 30 négligez pas non plus l'exemple 55 de ceux qui ont mal fait dans la 33 même Charge , non pas pour en 30 tirer vanité , mais pour mieux >5 apprendre à éviter le mal 30 Examinez les chofes dès leur }> commencement ; voyez en quoi 53 &c comment le mal s'cft intro- » duit , confultez l'antiquité pour 55 connoîtrc ce qu'il y a de meil- n leur , & le relie des tems pour 33 fçavoir ce qu'il y a de plus » commode Confervez les "droits de votre Charge , mais ne 55 cherchez point de difputc làdef- »> fus ; penfez plutôt à les exercer » rigourcufcment fans en parler , » qu'à faire du bruit & à vous atti- » rer des querelles par oftentation. « Défendez, dans leurs droits ceux »qui ont des places fous vous. 3} Comptez qu'il eft plus honora- » ble de diriger le tout que d'entrer » dans les petits détails. Recevez » bien &c attirez ceux qui peuvent » vous donner des confeils , ôc » vous aflïfler dans votre Charge , » ne cbafTez pas comme des gens » qui veulent fe mêler de trop de j> chofes ceux qui s'offrent à vous » aider Les repriman- » des d'un homme en place , doi- »> vent être graves & non picquan- » tes. Celui qui fe lailTe gagner „ par l'importunité , ou par de pe- » tites condderations, en trouvera » qui l'arrêteront à chaque inftant. » Avoir des égards eft une chofe » condamnable , dit Salomon , & )j celui qui en a fera le mal pour un M morceau de pain. Cette penfée » eft jufte ; la Charge montre » l'homme , les uns en beau , les Il autres en laid. . . . C'eft une mar- » que certaine de grandeur d'anie , 3» lorfque les honneurs rendent un M homme' meilleur. . . . On mon- < 9 te aux grands emplois par un ef- » calier à deux rampes. S'il y a des » fadions , il eft bon de fe mettre 3» d'un côté pendant qu'on monte, » mais quand on eft placé , on doit 3> fe tenir fur le repos & garder Fé- « quilibre. Il faut refpeder la mé- 3> moire de ceux qui vous ont pré- M cédés : fi vous ne le faites pas , 99 votre Succeffeur vous payera de » la même monnoye. . . . M A Y , 175 y. 2-, Du Sage en APrARENCf. C'cft , dit le Chancelier d'y^finle- terre , une opinion allez générale- ment établie : » Qiie les François » font plus fages qu'ils ne paroif- » fent , & que les Efpagnols pa- " roilîent plus fages qu'ils ne font. » Il remarque là-dcftus que quoi- '> qu'il en foit des Nations en gêné- » rai , cette diftindion peut fou- » vent fc fiire entre des particu- « licrs : Qu'on en voit de qui la fa- " gelTc rclTemble à la prétendue » (aintcté de ceux dont parle l'A- "pôtre , lorfqu'il dit ■.fpeciem pie- >' laiis hahcmes , fed virtutem eju» nabnegantes. Il y a des perfonnes , " fourfuit-il , qui s'occupent à des n riens avec beaucoup d'appareil& M de gravité. Il eft plaifant pour "Ceux qui les apperçoivent , de » voir les tours de ces prétendus » fages , & de quelle manière ils » fe mettent, pour ainfi dire , en » perfpedive , pour donner à une » fimple fuperhcie l'apparence » d'un corps folide ; les uns font fi » retenus & fi difcrets qu'ils n'éta- « lent jamais leur marchandifeau "grand jour , & qu'ils font toû- » jours femblant d'avoir quelque » chofe en rcferve. S'ils fentent » que ce qu'ils difent ne s'entend » pas , ils tâchent de perfuader » qu'ils ne fe permettent pas de » dire tout ce qu'ils fçavent. Il y en » a d'autres qui ont recours .à des » geftes & à des grimaces , ils font " fages en fignes, comme Ciccron » le difoit de Pifon N n ij aya JOURNAL D De l' a m I t I e'. ^ . . . " Les fruits principaux de » l'amitié , font de foulager les » douleurs , &c de calmer les in- » cjuit tudes. Les obftrudions & les 3> fuffccations font les plus dange- » reufes maladies pour le corps, ^ * de même auffi pour IVfprir. On i> peut prendre de la teinture de » rofe , pour l'opilation du foye •, » de l'acier , pour la rate ; de la M fleur de fouphre pour les poû- »mons ; duCaftoreum pour torci- » fier le cerveau ; mais pour re- » mettre 8i entretenir le cœur dans « fon état naturel , il n'eft de meil- »• leur remède qu'un vérita'ole ami, » auquel on puifTe communiquer » fes douleurs ^ fes joyes, les ap- » préhenfions , fes foupçons , Sc » gcncralemcnt tout ce qu'on ref- « lent avec plus de vivacité. . . . L'Auteur dit qu'il trouve trcs- véritablc cette ex prefûon fymboli- que de Pythagore : Car m édita , ne mange point ton cœur , comme fi ce Philo foplie vouloir dire ^ que ceux qui manquent de vrais amis avec lefqucls ils puiflent commu- niquer , font des Cannibatrcs de leur propre coeur. Il n'oublie pas de remarquer que ce qu'il y a de doux 8c d'admirable dans le com- merce de l'aminé , ■c'cft que cette union & cette communication d'un ami, produit deux effets con- traires , qui font de redoubler la joyc, Si. de di.minuer Icsaftliiiliions, n'y ayant perfonnc qui en taifant part de ce qui lui arrive d'heureux. ES SÇAVANS. ne fente augmenter fa joye par le récit qu'il en fait , & n'y ayant per- fonnc au contraire qui en verfint , pourainfi dire , fon cœur dans ce- lui de fon ami , lui racontant fes douleurs 8c fes afflidions , n'en rcf- fente diminuer le poids. . . . Un autre avantage que notre Au- teur remarque dans l'amitié , c'eft qu'elle eft auilî très - utile pour éclaircir l'entendement. .. , » Ce- » lui qui a l'efprir agité de p!ti- >» (leurs penfccs , fentira fortifier » fon entendement 6c fi raifon , » quand il ne feroit fîmplement s» que difcourir avec fon smi , & » lui rendre compte de ce qui l'oc- » cupc -, car il d^bat fes penfccs , il » les range avec plus d'ordre , il » voit mieux quelle hce elles oi;r , ■'quand elles font exprimées p.3r "des paroles , enfin il devient, >' plus prudent que foi-mcmc ; & = un raifonnement d'une heuiC >j fera plus d'effet fur fon entende- » ment , que la méditation d'un » jour entier. . . . Les reflexions que fait le Chan- celier d'Angleterre , fur l'Etude fur la Vanité , fur l'Ambition , fur • la Lefture, fur l'Expédition dans les Affaires , fur la Nouveauté, ne font pas moins dignes d'être rao- portces. De l' E t u d e. » Employer trop de tcms à la » Icdure ou à l'étude, n'eft qu'une » parefTe qui a bonne mine ■■, s'en » fcrvir trop pour orner fon dif- » cours eft une affectation ; former M A Y » fon juî>emcnt purcmcnr fur les » préceptes tirés des Livres , eft » trop l'cliolaftique &C trop incer- » tain. Les Lettres perfedionnent »la nature , & font perfed:ionnces » par l'expérience : les talens na- y> turelSj de même que les plantes, » ont befoin de culture ; mais les " Lettres apprennent d'une manie- » re trop vague , fi elles ne font de- » termmées par l'expérience. . . Ce » qu'on nefçauroit tirer des Lettres » feules, c'cft la prudence i elle 5>n'eft pas en elles , elle eft au-def- nfus d'elles , & on ne l'acquière » que par de fages reflexions » Il y a des Livres dont il faut >) feulement goûter , d'autres qu'il » faut dévorer; & d'autres ( mais i>cn petit nombre) qu'il faut mà- » cher & digérer ; c'eft - à - dire , » qu'il y en a dont il ne faut que li- »re des morceaux' , d'autres qu'il » faut lire tout entiers , mais en » paffant , & quelques autres, mais n qui font rares , qu'il faut lire & » relire avec une extrême applica- » tion. Il y en a aullî plufieursdont » on peut tirer des extraits. • . . » La ledure inftiruit , la difputc » & la conférence réveillent. En » écrivant on devient exaiît , & on » retient mieux ce qu'on lit. Celui » qui eft pareiïcux à faire des notes » a befoin d'une bonne ménioire ; «celui qui confère rarement , a » befoin d'une grande vivacité na- >5 tutelle , & il faut à celui qui lit a> peu , beaucoup d'adrcffe pour 3> cacher fon ignorance. Notre Auteur palTe ici à ce qui concerne l'Hiftoire ,1a Poëfie , les ï7 5 f- =73 Mathématiques , la Philofophie naturelle, la Morale, la Dialcdi- que, la Rhétorique. Il obfcrve que l'Hiftoire rend prudent , la Poefie fpiritucl , la Science des Mathéma- tiques fubtil , la Philofophie natu- relle profond , la Morale exadt &c réglé , la Dialedique & la Rhéto- rique pénétrant pour raifonncr Sc pour difputer. Il ajoute que pat rapport à l'efprit , il n'y a prefqùe point de défaut naturel qu'on ne puifte corriger par quelque étude particulière , comme il n'y en a prefque point par rapport au corps, qu'on ne puiffe corriger par quel- que exercice convenable. Joiier à la boule , eft bon pour la gravelle Se pour les reins ; tirer de l'arc, pour les poumons , Se pour la poi- trine ; fe promener doucement ,' pour l'eftomac ; monter à cheval , pour la tête ; de même , pourfuic- il , il eft à propos qu'un homme qui n'a pas l'efprit pofé & attentif, s'applique aux Mathématiques j Que celui qui eft brouillé ôc peu exaû dans fes diftini5tions , étudie les Scholaftiques ; Que celui qui ne fçait pas bien difcourir fur les affaires , prouver ik démontrer une chofe par une autre , étudie les Jurifconfultcs. De la Vanité'. Notre Auteur , pour faire voir le ridicule de ceux qui fans avoir part à aucune affaire font les im- portans , comme s'ils avoient part à tout , les compare à la mouche , qui étant pofée fur l'cffitu d'une 274 JOURNAL D rolic , difoit : combien de poujfiere f élève. Il obferve là-dclÎLis qu'il y a des gens fi vains & fi prcfomp- tueuXjqiie lorfquune chofe va d'el- le-même , ou par un pouvoir fupe lieur , s'ils y ont eu la moindre part, s'imaginent qu'ils ont tout fait. Nous palTons pluficurs refle- xions fur la fanfaronnade & la vai- ne gloire ; nous remarquerons feu- lement que l'Auteur finit l'article par cette maxime , fçavoir, que les ■perfonnes vaines font mépnfées des Sages j admirées des fols ^ les idoles & la proye des parafiies , & les ef- claves de leurs propres défauts. De t' Ambition. L'Auteur compare l'ambi- tion à la colère : il prétend que comme la colère , fi elle n'efl: pas arrêtée , rend un homme détermi- né , adif , remuant , au lieu que Ci on l'arrête dans fon cours , elle de- vient plus dangereufe & plus mali- gne , de même (i un ambitieux trouve le chemin ouvert pour s'é- lever , & qu'il aille toi'nours en avançant , il eft plus agilTant que dangereux ; mais que fi fesdefirs font arrêtés , il devient mécontent en fecret , il regarde de mauvais œil les hommes & les affaires , & n'eftbien fatisfair que lorfque tout va de travers , ce qui efl: le plus grand de tous les vices dans un Mi- niftre. L'Auteur tire delà une con- fequence importante pour le gou- vernement des Etats , fçavoir, qu'il efl: à propos , lorfqu'un Prince fe fert d'un ambitieux , qu'il le con- ES SÇAVANS, duife de manière que l'ambitieux aille en avançant fans jamais recu- ler -, fans quoi c'eft donner lieu à de grands inconveniens , & fi grands , dit le Chancelier , qu'il vaudroit beaucoup mieux ne point em- ployer cet ambitieux , parce que fi fes ferviccs ne le font pas monter , il fera en forte que fes ferviccs tom- bent avec lui. Au reft;e , notre Auteur confeil- le de ne pomt employer les ambi- tieux fans neceffirc: mais en quels cas eft-il neceflaire de s'en fervir î II prétend qu'à la guerre ri faut choi- firpar préférence les Généraux am- bitieux , pourvu qu'ils foyent bons d'ailleurs , parce que l'utilité de leurs fervices l'emportera fur tout le reft:e , &: qu'exiger d'un homme de guerre qu'il n'ait pas d'ambi- tion, c'efl vouloir lui oter les éperons. Il prérend encore qu'on peut tiret un bon ufage des ambitieux , en les faifant fervir comme des boucliers pour les Princes , contre les dan- gers & contre l'envie. IlalTure que perfonne ne joiiera bien ce rôle qu'il ne foit femblable à un oifeau qui a les yeux crevés, & qui va tou- jours en montant , parce qu'il ne voit pas autour de lui. On peut aulfi , félon notre Au- teur , employer avec avantage , l'ambitieux ■■, en fe fervant de lui pour en abailTer un autre qui s'élè- ve trop; c'eft ainfi , comme il l'ob- ferve , que Tibère , pour abbattre Séjan fe fcrvit de Macron. Les ambitieux étant ncceflaires dans tous ces cas , refte à fçavoir comment on peut s'y prendre pour MAY, ïcs rendre moins danç^creux lorf- qu'on leur confie le gouvernement: Ils le font moins , remarque le Chance lier d'Angleterre , i". lorf- c]u'i!s manquent de naiflance , i°. lorfqu'ils font d'une humeur bruf- quc «Se rude , 5°. lorfque leur élé- vation eft encore récente , & qu'ils n'ont pas eu , pour ainfi dire , le tems de prendre racine. Quelques pcrfonnes regardent comme une tbiblelTe dans un Prin- ce , d'avoir un Favori : notre Au- teur en juge autrement : il penfc qu'un Favori eft le meilleur de tous les remèdes contre l'ambition des Grands , & des Magilîrats ; parce que fi le pouvoir de faire du bien & du mal eft entre les mains d'un Favori , rarement arrive-t-il qu'un autre Sujet du Prince s'élève trop L'Auteur reconnoît cependant que l'élévation d'un feul , quelque utile qu'elle puifte être pour cer- taines raifons , ne laifte pas d'avoir quelquefois de grands inconve- niens , 6: il dit là-deffus qu'il arri- ve fouvent que celui cjtti veut être le feul chifre entre phifteurs Z.éros , ejî lapejîe defon tems. Il remarque enfuite , que les hon- news apportent trois avantages ; le premier , de pouvoir faire du bien ; le fécond , d'approcher des Princes & des Grands ; & letroifiéme, de faire fa propre fortuns ; Que le Su- jet qui cherche uniqtiement dans fon ambition , le premier de ces avantages , eft un homme de bien, & que le Prince qui fçait diftinguer parmi ceux qui le fervent , celui 173 r. 275- qui agit par un tel motif, ell un Prince prudent. Ces reflexions font fuivics d'un avis important pour les Princes & pour les Etats. » Que les Princes & » les Etats, dit l' /auteur , choififlenc » donc , autant qu'il leur fera pof- » fible , des Miniftres qui foient j> plus touchés de leur devoir que » de leur élévation ■■, qui entrent »>dans les affaires plutôt par con- » fcience que par oftenration , & ^ qu'ils tâchent au(fi de diftinguer y> un naturel remuant , d'avec un » homme qui n'eft rempli que de "bonne volonté. DelaFortune, Cet article renferme des reflcr xions que la plupart des évenc- mens de la vie juftifient tous les jours. 1°. On ne fçauroitnier , dit l'Auteur, qu'il n'y ait des accidens étrangers ou des hazards qui ne dé- pendent point de nous, & qui ce- pendant contribuent beaucoup à la fortune , comme la faveur des Grands, une conjondure heureufc, la mort de quelqu'un , ou erifin une occafion favorable à la vertu qui nous eft propre. 2". Cela n'empêche pas qu'à conlldcrer les cKofes d'un certain côté , chacun n'ait en lui-même le pouvoir de faire fortune , & que le Poète n'ait eu raifon de dire : Faber tjnifjue fortuna Cus, La faute d'un homme eft h caijfe la plus commu- ne de fon infortune , & c'eft en ftachant profiter de cette faute d'autrui qu'on avance le plus vite , z-jS JOUHNAL D Scrpem niji ferpentem comederit non fit draco. 3*. Les vertus émincntes & qui" ont beaucoup d'éclac attirent les loiianges ; mais il y a des vertus qui s'apperçoivent à peine &: qui font la fortune : telles font , dit notre Auteur , certaines manières déliées qu'on ne fçauroit bien défi- nir, ô: que les Efpagnols appellent de fon holtura. 11 ne faut pas qu'un homme foit d'un caractère rude ni difficile , il doit avoir l'cfprit fou- pie & propre à tourner avec la roiie de fortune. L'Auteur cite fur cela ce que dit Tite-Live du vieux Ca- ton -, fçavoir que c'étoit un homme qui eût fait fortune par-tout, & qui d^voitingenium verfatile , un ef- prit ployable à tout. 4°. Lorfque les Italiens parlent d'un homme propre à taire fortu- ne , ils demandent qu'il ait entre autres qualitez un poco dt maito , [ qu'il tienne un peu du fou. ] No- tre Auteur trouve ce mot fort ju- fte , & il dit qu'il n'y a point en effet , de qualité plus neceffaire p3ur parvenir , que ces deux-ci : c? avoir un grain de folie , & de ne- tre pas trop homiêie homme. 5°. Les hommes prudens vou- lant fe mettre à couvert de l'envie qui cft attachée à la vertu , attri- buent toute leur profperité à la fortune ■-, ils trouvent moyen par-là de joiiir de leur grandeur avec plus de tranquillité Céfar dans une tempête , dit à fon 'Mlore : Th por- tes Céfar & fa fortune. Sylla a prcté- ré le nom d'heureux à celui de Grand. ES SÇA VANS, Notre Auteur, à cette occafion, fait une remarque qui peut beau- coup fcrvir pour la conduite de h vie , c'eft que la plupart de ceux qui ont trop attribue à Icurfageffe, Si à leur politique , ont fini mal- heureufement. Timothée l'Athé- nien ne profpera pas depuis que dans un; Harangue , où il rcndoit compte de Ion gouvernement , il afFe£la de répéter , Cv" dans ceci la fortune n'eut point de part. D E l'E xperiekce dans les Affaires. Que d'avis importans contient cet article ! Une diligence affedtée efl: pernicieufc dans les affaires. No- tre Auteur la compare à la faufle digcft:ion qui remplit l'cftomac de cruditcz & d'humeurs propres , à caufer des maladies \ gardez-vous, dit- il , de compter, par le tems que vous employez , mais comptez par le progrès de l'affaire ', car com- me la vîtelTe de la courfe ne conlî- (le pas à taire de grands pas , ou à lever beaucoup les )ambcs , mais à courir également &: (ans relâche ; de même l'expédition dans ks affai- res , ne conlifte pas .à einbraffer beaucoup de chofes,mais à bien fai- re celle que l'on a cntreprife. Il y a des gens qui fe picquent d'être de grands travailleurs f^: fort expeditits-, ils ne cherchent qu'à avancer. Mais autre chofe cft de tronquer une matière , & autre chofe de rabrc^er. Quand les affai- res qui demandent pluficurs (can- ces îont étouffées, on eft obligé d'y MAY d'y rcrcnir à plufieurs fois. Notre Auteur dit là-defîus , avoir connu un homme d'efprir , cjui , quand il voyoit qu'on fe prelToittrop pour finir une chofe , avoit coutume de dire : attendez, un peu , vous achève- rez plus vue. Notre Auteur veut qu'on prête bien l'oreille à ceux qui nous don- nent les premiers avertiffemens d'une affaire ; il veut qu'on les aide à s'expliquer , & qu'on n'interrom- pe point le fil de leurs difcours. Ce- lui , remarque t-il, qu'on empêche de fuivre l'ordre qu'il s'étoit propo- fé , ne va plus que par fiuts & par bonds , & pour fe donner le tems de rappeller fes idées , il devient plus long qu'il ne l'eût été , s'il avoit fuivi fa route. Quelquefois celui qui veut redrefler , eft plus ennuyeux que celui qui s'égare. Bien des gens croyent que pour bien éclaircir une affaire , on ne fçauroittrop la divifer ; notre Au- teur tient le milieu là-delTus. Il dit que celui qui ne divife pas , n'en- trera jamais au fond de l'affaire , & que celui qui divife trop , n'en for- tira jamais bien. De la Nouveauté*. L'Auteur compare les nouveau- tez aux animaux qui ne font pas encore bien formés à leur naiffan- ce ; il prétend que ce qui eft établi par coutume fans être d'ailleurs trop bon , peut cependant être re- gardé comme convenable , parce que le tems & les chofes qui ont jnarché longues années enfemble , May. ont contradé pour ainfî dire une alliance ■■, au lieu que ce qui c(l nou- veau , quelque bon &c utile qu'il foit en lui-même , ne quadre pasfi bien , &C devient incommode par la non conformité. Il ne donne pas cependant cette maxime comme univerfelle; il avoUe que ce qu'il dit là feroit vrai fans exception , Ci le tems s'arrêtoit, mais que com- me le tems marche toû ours , fon inftibilité fait qu'une coutume fixe 8c ancienne ne lailTe pas quelque- fois d'être aufli propre à caufer du mecontentement,qu'une nouveau- té ; témoin ce qui arrive dans les differens fiécles , où le mêmï ufagc qui étoit applaudi dans le ficelé de devant, paroît ridicule dans le fié- cle qui vient après. Quand on veut introduire une nouveauté ^ il faut, remarque notre Auteur , fuivre l'exemple du tems qui n'introduit des chofes nouvelles , que peu à peu , & infenfiblemenr , fans cela , dit-il , tout ce qui eil nouveau cau- fe du boulverfement. Il obferve là- delTus que celui qui gagne au changement remercie la fortune, mais que celui qui y perd, ne man- que jamais de s'en prendre à l'au- teur du changement. Le Chancelier d'Angleterre con- feille ici aux Princes &c aux Mini- ftres, de ne jamais faire fans une ex- trême necellîté, & fans un avanta- ge vifible , aucunes nouvelles ex- périences pour racommoder un Etat i il les exhorte à bien prendre garde que ce ne foit plutôt le défit de reformer qui attire le change- ment , que le defir du changement Oo 278 JOURNAt DES SÇA VANS; qui attire la réforme. Il finit par ta. & ambuhmts tn eâ. xeprefenter que toute nouveauté fi elle ne mérite pas d'être rejettte, doit du moins être fufpedie , Si il veut qu'on ait toujours devant les yeux ces paroles de l'Ecriture : Ste- tnHsfuper vias anti^uas , atijue cir- eimf^tciamus cjudjit via bona & rec- Ces paroles terminent le Livre" & nous croyons ne pouvoir mieux finir notre Extrait , que par ces pa- roles- mêmes , qui, en fait de Reli- gion, doivent être une Loi inviola- ble. TRAITE DE MONSTRATIF DE LA QVADRATVRE DV Cercle , avec figures , dédié au Roi. Par M. BalTelin , Trofejfeur Emérite de Philofophie dans i"Vmverfité de Paris. A Paris , chez Brinjfnn , rue S. Jacques , à la Science , & chez Henri , à l'Image Saint Louis. 173 j. Brochure ;«-4°. pag. 48. CE Traité cft divife en quatre Livres. Le premier contient quatre Queftions. L'Auteur exami- ne dans la première , s^dy a long- tems cjH'on eft curieux d'avoir la Quairature du Cercle ? Dans la fé- conde , s'il était bien difficile de tron- •ver la Quadrature du Cercle'» Dans la troifiéme , fi la Quadrature du Cercle était d^une fi grande importan- ce à trouver ? Si dans la quatrième , s'il a été promis ^uel^ite prix pour la Quadrature du Cercle ? Quant à la première Qucftion , notre Auteur avertir que » fans » prétendre avoir fait aucune re- » cherche de ce qui fe trouve dans » differens Auteurs fur cette matie- " re , il peut citer là - delTus quel- » qucs paffages qui lui font tombés o fous les yeux en faifant déroutes » autres Icftures. « Cela pofé , il ajoute que » le plus ancien , & en 5> même tems , le plus rcfpeiett négliger iffie trop grande précifîon pour ne point paroure l'éttt- ilir par autorité. Les témoignages ne manquent point ici à M. Baffelin : il cire faiqt Clément d'Alexandrie , Diogéne- Laerce , Plutarque : félon S. Clé- ment d'Alexandrie & Diogéne- Laerce , Anaxagore fut le premier des Grecs qui publia un Livre fur cette matière , &c félon Plutarque il s'occupa dans fiprifon , à com- pofer un Ouvrage fur la Q_uadra- turedu Cercle. Nous copierons ici mot pour motjCe que notre Auteur dit immédiatement après ces cita- tions. » Il eft donc tout au moins vrai- » fembhble , que c'eft fur cette » matière qu'a roulé le premier »> Ouvrage qu'aucun Auteur Grec » ait jamais ofé faire paroître fous » fon nom. Mais ce qu'il y a enco- » re de plus vraifemblable , c'eft » que voilà un grand homme qui » ne nous aura pu donner la rela- » tien de fon embarquement fur * cette Mer orageufe , fans nous » faire connoître qu'il a fait nau- » frage -, mais fans nous arrêter à »> cette idée trifte , Ci on s'étoit » comporté à l'égard des Traitez » qui dévoient paroître les pre- » miers à la naiffance de l'érudition » Grecque , comme l'on a fait a » l'égard des premiers Ouvrages » par iefquels on a cru devoir ho- * '75 r- ?7^ » norer l'impreffion quand elle a » été inventée , cela marquer■> de ceux qui compofent quelque » Ouvrage , de reprefenter avec » exagération la difficulté du fujec » qu'ils traitent , pour faire valoir >» leur travail. Il faut au contraire » diftlmuler la difficulté de la Qua- » dracure du Cercle, f\ l'on ne, veut » pas voir taxer d'extravagance » tous les efforts qu'il a fallu faire, » pour avoir ce fecret. J'ai prtfque MAY «été otligé de me dillîmuler à *| moi même cette difficulté , pour » ne pas abandonner une entrepi ife, »>qu'unf efpece de del'cfpoir du luc- » ces fembloit rendre criminelle. Si jjj'avois écoiJté les fcrupulcs que »> me caufoit une prétendue perte » de tems , & l'emploi torr équi- N voque du peu de talent que Dieu « m'a donné , des travaux très- » confiderables auroient été abfolu- «0 ment fans fuccès , mes recher- » ches feroient retombées dans le *> néant, d'où j'avois eu bien de la » peine à les tirer , Se n'auroient » point produit le fruit que le Ciel u a bien voulu leur accorder. L'Auteur , comme on voit , ne doute nullement avoir trouvé la Quadrature du Cercle ; les peines qu'il s'eft données pour cela , font grandes", mais il s'en croit fuffifam- ment payé pour les raifons qu'il va expofer. » Je pourrois ajouter, dit-il, que «mes fcrupules n'étoient pas peu »> fortifiés par les dangers d'une » contention d'efprit , d'autant » plus gênante, qu'elle étoit moins «libre , & combien outre cela , » n'étoit-elle pas continuelle? mais » ce n'étoit là que les préludes du » fuccès. Après le fuccès-même , » ce qui femble rendre encore infi- » niment ingrat un pareil travail, » c'eft que l'on ne fait pas voir la *icent millième partie des peines » que l'on a prifes. Dans le fond » pourtant on eft parfaitement payé » par ce fuccès (î dcfiré , fi l'on » amené les chofes au point de ne » plus fenibler s'être prcfque don- 17 3 S' 281 » né de peine , & l'on eft trop hcu- » reux d'avoir eu du mal , quand i> c'eft un moyen fur de l'épargner »> déformais aux autres. M. Balfelin , après avoir marqué des fentimens fi généreux , s'appli- que à dilîlper l'éronncmcnt où l'on pourroit être de ce que le fectet qu'il compte avoir découvert , a été fi long-tems inconnu. » Ainfi , dit-il , que l'on ne s'al- » larme plus du grand nombre de » perfonnes du premier ordre pat » leur efprit & par leur fcience, » qui ont échoiié fur cet article ; » c'eft qu'ils ne cherchoient pas » comme il le falloir ; j'ai fait moi— » même des démarches inutiles ,' » fans nombre ; il n'y avoit de ne- » ceffaire que ce qui fe lira dans cet » Ecrit , & combien n'ai-je pas eu » de peine à m'y réduire ; Selon ces paroles de notre Au- teur , on pourroit regarder la dé- couverte dont il s'agit , comme une chofe d'un très-difficile ufage; mais M. Baffelin va au-devant de ce foupçon. » Que l'on ne croye pas , pour- T> fuit-il , qu'il fera donc très diffi- » cile de fe fervir de ma découver- »te , puifqu'elle m'a tant coûté à «faire. Pour la pratique, à peine » fera-t-il plus difficile de quarrer » un cercle qu'un triangle ; & les » Ouvriers le pourront faire , «quand on les aura ftilés , fans » fçavoir d'ailleurs , de Géométrie. Voilà qui eft confolant , mais voici quelque chofe qui l'eft bien davantage , c'eft que félon notre Auteur j la Quadiature du cercle ft82 JOURNAL D ne fera plus qu'un amufement. n Ce fera, dit-il , un véritable )eu »» d'enfant, & les Jardiniers font » plus difficilement leur ovalc » dans les parterres des grands Jar- » dins , qu'ils ne reprefentcrQnr à » l'avenir un cercle aflorti de fon »quarré, fans aucun mécompte. »> Je ne dcfefpere pas de voir bâtir » par les curieux , des Edifices » dans le même goijt. Mais , paur- afuit notre Auteur ^ ne nousarrê- a» tons pas à la bagatelle , il y a .» trop de chofes importantes, cha- »> cune en particulier , qui devront » leur perfedtion à cette découver- » te , pour n'en pas faire une que- ,*» ftion à part. M. Bartclin examine donc ici la iiroifiéme Queftion , fçavoir , fi la Quadrature du Cercle éioit d'une p grande importance à trouver ? Voici quelques obfervations qui lui paroilfent fuffifantes pour éta- blir , dit- il , la très-grande utilité de cette Quadrature. L' Aftronotnie, la Trigonométrie Sphérique , la Géographie , l'Hy- drographie , & des lors le commer- ce qui a befoin des Voyages de long cours ; tout cela cft fondé fur ia connoilfance du Cercle , &: la jnoindre imperfection dans les principes de ces Sciences , entraî- ne , dit notre Auteur, des confe- quenccs affreufes après elle. Quel inalheur,pourfuit-il, n'ell-ce pas, fi dans l'exercice de la navigation,ces imperfedlions font échouer contre les écueils. Ces défauts ne font- ils -pas eux-mêmes les écueils les plus tedoutabies , & n'eft-il pas infini- ES SÇAVANS, ment trille de périr d autant plus certainement, que \w\ fça t mieux les ref;les d'une faulle Science? La Quadrature du Cercle eft d'une necelîité abfolue pour éloigner ces inconveniens. L'Auteur entre ici dans le détai^: la rondeur de la Terre , dit- il , fut- tout aux endroits où la mer la cou- vre , donnera lieu de connoître au Julie & à coup fiàr, toutes les rou- tes maritimes. Les Aftres dans leurs cours décrivilTent-ils des El- lipfes , elles ne feront pas moins clairement connues que le Cercle. Tout de même le CyUndre, la Sphère , le Cône , les Corps annul- laires , feront mcfurés aulli certai- nement que les parallélépipèdes, les pyramides , & tous les autres polyhedres , dont tous les cotez font des plans. Le Cercle & les po- lygones les plus réguliers iront de pair pour donner une parfaite faci- lité de mefuret les corps qui dé- pendent d'eux. Mais tous ces avantages exi- gcoicnt- ils que le Cercle tût quarré en toute rigueur , &: ne trouvoit- on pas l'équivalent dans les appro- ximations î M. Baffelin répond, i°. qu'il a une trop haute idée de quelques- uns des approximateurs, pour par- ler autrement qu'avec eftimc de leur travail ; x. Qu'eux-mêmes ne difconvicnnent pas que la feule vraye Quadrature ne foit toutà- fait à prifer ; j". Q^i'aucune des ap- proximations qui ont paru , n'a fa- tisfaitla curiofité,ni fixé les recher- ches des Sça vans , qu'ils les ont juf- MAY qu'à prefcnt continuées avec plus ou moins d'ardeur , félon qu'ils ont vu luire plus ou moins rcTperance de rculTir ; 4°. Qiie c'cft: une nou- velle utilité de Ja Quadrature du Cercle , de terminer de fi grandes agitations , de rétablir tous ces Sça- vans dans la polTcflion tranquille d'eux-mêmes , après le longtems , peut être j qu'ils s'étaient oubliés pour fe livrer en entier à l'étude des vro- prieteT^ ohfcures du Cercle , de re- iTiettrc enfin les puilTances à portée d'employer plus utilement , les fujets excellens lauffe vertu , à paroître fortdé- » taché de toute vue, & tout-à-fait » éloigné de rien fouhaiter , que » l'on voudroit trouver mauvais » que prenant un parti contraire , » j'aye fait profeiïîon de ne pas re- » noncer abfolumentà toute efpe- » rance. Il eft certain du moins ^ que mes fentimens font beau- » coup plus d'honneur aux Têtes » couronnées , que ceux de mes 3» Contradideurs; N'eft -ce pas » comme MAY «comme un Prince porté à faire du » bien , que l'Empereur Tite paf- » foie pour les délices du genre » humain ? & quelle réputation B fut jamais plus a dedrer? Ce feroit peu d'avoir rapporté tous ces Difcouis de notre Auteur, fi nous négligions d'en expofer U conclufion. B Voici donc , dii M. "Bajfelin , r» ce qui s'enfuit de ces reflexions. » D'un côté , quand même les » Souverains n'honoreroient d'au- » cune gratification la découver- » te de Ta Quadrature du Cercle , » j'aurois dii, par eftime pour eux , » croire le contraire i & de l'autre ■ côté , fi j'eulTe été afTez mal avifé • pour avoir quelque défiance du » fuccès de la démarche que )e fais » ici à leur égard , j'aurois dû défa- » voiler & déteftcr ouvertement » de fi mauvaifes difpofitions. Ce » que n'auroit pas fait mon filencei »mais fi l'on veut abfolument dc- V laprouver que je me fois échappé » de parler fur cette matière ■■, on » ne défaprouvera pas apparcm- » ment que je m'en taife maintc- » nant. Je n'en dirai donc rien de » plus ; quoique je vove diftindle- » ment qu'il feroit aifé de la traiter a baucoup plus au long. C'cft ainfi que notre Auteur ter- mine fon premier Livre. Le fécond a pour titre : Expefition de la Qjta- drature du Cercle , M. Baffclin le commence par dire Qn'il y a bien des manières de chercher la Quadra- ture du Cercle par lef^uslles elle efl irfipojftble , mais iju'd (uffit /jumelle [oit fojfible far un jenl endroit , & que May. , I7î r. ûSj- l'on y tombe , pour (jue toutes les déci- fions (jiti ont été faites contre ce projet^ fi)ient tout a fait nulles^ & ne doivent plus alLtrmer p:rfonne. Apres ce début il fait le détail des différentes manières par lef- qucUesil eft impoffible de quarret le Cercle, 6c dont il prétend qu'on s'cft fervi jufqu'ici. Puis il établit l'état de la qucftion, & propofe le chemin qu'il a pris pour parvenir , comme il le compte , à la Quadra- ture du Cercle. Il s'agit pour quarret le Cercle , de trouver une figure plane &: rec- tiligne , ou bien , tout de fuite, un quarté dont on démontre l'égalité avec le plan où l'aire du Cercle. Voici le chemin que M. Baffelin dit avoir tenu pour cela. Nous ne changerons rien dans fes paroles : un abrégé pourroit, contre notre intention , les altérer en quelque chofe , une copie fcru- puleufe vaut mieux. » Les fegmens femblables font » ceux qui comprennent des an- » gles égaux. Euclid. L. 3. def. 1 1. » Que les Cercles foient inégaux, » & d'une proportion connue , des » figures femblables qu'ils renfer- » ment , ou , dont ils font immé- » diatcmcnt entourés , les lignes " droites qui en font des cotez fem- » blables & femblablement fitués, » ont une même raifon aux rayons » de leurs cercles ; i>c l'on connoî- »tra leur proportion des que l'on » connoîtra celle des rayons , Eu- »clid. Liv. 6. Prop. zo. 21. 31.&: » Liv. I 2. Prop. I. & 2. » Il ne s'enfuit point de - là que Pp »8tf JfOURNAt DE i> les cordes des arcs de cercle , »> foient toujours entre elles , com- » me leurs arcs \ ce feroit une pro- » portion ablurde. Je dis fcule- » ment , paice que je n'ai que faire «d'une concluhon plus générale , » que dans mes cercles proportion- » nels , k-s cordes femblabics font M entre elles & comme leurs arcs Se » comme les rayons de leurs cer- f> clés, Euclid. ibid. » Les redangles qui ont une di- 50 menfion commune ou égale , »> font entre eux comme leur autre » dimenfion. Euclid, Liv.é^.Piop.i. »j & par confequent taire fur cette » autre dmicnfion , les opérations » d'Arithmétique , addition ,fou- » ftraâ:ion , multiplication , dircc- î> tion , en négligeant la dimenfion y> commune , comme on en a le « droit, c'eft les faire fur les redaa- »gles. Euclid. L. 5. Prop. 15. 3>Et c'efl la méthode que je fuivrai >3 dans ce Traité , tant que je n'a- » veitirai pas du contraire. Elle « donne plus de facilité à comparer » cnfcmble différentes quantitez. » Le plus fimple fe doit toujours » préférer au plus compofé , fi l'u- » tilité du plus fimple n'elt pas cffa- » cée par quelque inconvénient qui » ne fe rencontre point ici. M. BafTeiin , pleinement per- fuadé qu'il a découvert la Quadra- ture du Cercle, dit qu'après Dieu, e'eft à cet ylbrégé (jit'il doit l'ejferniel de fit découverte. Il copfidtrc enfuite deux Cer- cles, dont l'uneft double de l'au- tre , & que nous appellerons avec lui , le Cercle z & le Cercle 4. 5 SÇAVANS, Dans le Cercle 2. le côté du quarré infcrit, forme avec le moindre arc, un legmcnt , que , par unecfpcce de définition de nom , quoique contre l'ufage , comme il en aver- tit lui -même, il appelle le grand fegment, en comparaifon de celui que nous allons lui voir former. Dans le Cercle 4 fon rayon qui avoit été le côré du quarré n dcfllis 6 qui eft maintenant le coté de l'hexagone infcrit, ce rayon forme avec le petit arc de fon Cercle , un autre fegment que l'Auteur nom- me le petit fegment. Sur le rayon qui fert de bafc à ces feemens il forme des redangles qui ont ce rayon pour longueur commune &c pour hauteurs celles des fegmens Ainh comme il y a grand & petit fegment , il y a auflî grand & petit reûangle qu'il ap- pelle : grande ) & C Figures toutes, petite ^ Ce que ces rcdlangles contien- ncntjoutre les fegmens, ill'appelle: grand ^ & \ Quadrilignes. petit ) Il nomme fous- fegment la diffé- rence des Segmens , fous-Qiiadrili- gnes la différence des Qiiadrili- gnes , & enfin Sous-figure toute j la différence des Figures-toutes. Voici comme il trouve moyen de combiner ces quantitez ; nous allons citer fcs paroles. » Dans la moitié de l'Hexagone MAY » infcrit au Cercle 4 j'ai le Cercle 1 » moins rrois petits Segmens. Si je i> loultrais cette quantité du Cercle » i revêtu de 4 grands Quadrili- »» qnes , il me reliera trois petits » Segmens, plus 4 grands Quadriii- Mgncs. Que j'ôte doncles trois pc- » tits Segmens , plus 4 grands Qiu- » driligncs , de 4 grandes Figures- » toutes , j'ai un petit Segment , » plus 4 Sousfcgmens. » Si i". je double cette quantité nSi que j'ôte du produit la petite » Figure-toute , j'ai l'excès du petit j> Segment par deffus le petit Qua- x>diiligne ( lequel excès je nom- » merai Quadrifcgment , parce que "l'on connoît évidemment par la » fimple infpection , qu'il cÙ. com- »> pofé de 4 des iz petits Segmens, » que forme avec la circonférence m du Cercle 4 le dodécagone qui » lui eft infcrit. ) J'ai , dis - je , le »> Quadrifegment, plus 8 Sous fcg- » mens. Jclesôrede S Sous-figu- »rcs-toutes , j'ai 8 Sous - quadrili- vgnes moins le même Quadtifeg- »menf. Si je joins , 1°. un petit «Segment, plus 4Soufegmens à » 5 petites Figures-toutes , j'ai 8 pe- » titsQuadrilignes, plus 4 grands (• Segmens. La différence de ce tout, » d'avec 4 grandes Figures toutes , » vaut un petit Quadriligne , plus »>4 Souquadrilignes. Que j'ôte » cette quantité de la petite Figure- j» toute , j'ai leur différence, )a- • quelle , quand elle fera placée » à propos , quarrera le Cercle , &C m par cette raifon elle va fe nom- » mer la Quadratrice , bien enten- » du qu'un pareil nom ne peut pas » fervir de preuve; car par les iioma » que l'on impofe foi même , on » ne prouve rien. "Lorfque dans cette opération 3» j'ôte un petit Quadriligne , plus "4 Souquadrilignes de la petite » Figure-toute , c'efl-à- dire d'un n petit Qiiadrilignc , plus le petit "Segment , il eft évident que c'eft » ôter 4 Souquadrilignes du petit » Segment. Ces 4 Souquadrilignes M font plus grands qu'un petitQua- » driligne , d'une quantité que j'ap «pelletai Souquadrifegment , par- » ce que la Quadratrice Se lui ,' » réunis , forment le Qiiadrifeg- " ment. » Voilà tour ce que je ferai obli- » gé de forger de noms , pour mo » faire entendre ; mais ceux là doi- » vent être connus familièrement , » fi l'on veut me fuivre fans diffi- » culte. Notre Auteur expofe ici le Théo- rème de la Quadrature du Cercle } il explique quelles parties font re- quifes , félon lui , pour compofet cette Figure ; mais il en remet au Livre fuivant , la démonftration , aufll-bicn que celle de pluficurs Corollaires qu'il donne. Il termine ce fécond Livre pat faire obferver qu'Hippocrate avoie dû trouver plufieurs manières ai- fées de quarrer la Lunule : & il en tire une méthode d'avoir pluficurs Cercles qui croilTcnt en raifon dou- ble , & outre cela des bandes cir- culaires égales à des Cercles, mais il faut voir le tout dans le Livre. Nous voici enfin au troifiéme Li- vre. Il a pour titre : Expojîiion &. zSS JOURNAt DE démonftration de la Qftadrature du Cercle par les nombres. Le Compas n'a dit mot dans le Livre précèdent ; l'Arithmétique va p.irler dans celui ci. Mais à cau- fe des racines incommenfurables , cftil facile de la taire bien parler? Notre Auteur en trouve le moyen. On verra mieux par fes paroles- mêmes , comment il s'v prend. 3» J'ai toûiours , dit-il , donné à »> mes fraftions pour denomina- » teur , le double de la racine plus 30 un , & pour numérateui ce qui x> reftoit i les entiers prélevés , » quand il a été queftion de ce » qu'on a coutume d'appeller les » racines incommenfurables. C'eft » toû)ours l'égalité du dénomina- 30 tcur d'une fraction de cette natu- " re , avec fon numérateur , qui » forme chaque unité de la racine , » comme le nombre d'unitez «qu'exprime ce dénominateur » forme avec le quarté précédent , 3> le quarré immédiatement fuivant » dans l'ordre des nombres. Et la M méthode que je fuis ne cède en «rien à l'exadirude qui fe recon- * noît par tout le monde dans les 30 fradions ordinaires, formées des 3» relies de divifion. Comme il n'y 3» a que cette voye qui ne foit point » arbitraire : c'efi: la Nature qui n nous veut elle • même conduire 30 par ce chemin , & je fuis pcrfua- »idé que perfonne au fait de ces 30 matières , ne l'évite qu'à caufe »des difficultez que l'on y ren- 3» contre , comme par exemple de » réduire fans perte ni gain, ces frac- » tiens à de moindres termes ; & 5 SÇAVANS. t> j'avoiie que des fraûions aufîIIoiT- » gués que les miennes , font extrè- » mement incommodes. Notre Auteur ajoute qu'il a vo- lontiers elfuyé ces incommoditez pour arriver .à ce qu'il chcrchoir. Voici comment il dit y être par- venu. Sur le ravon dix millions des ta- bles ordinaires de linus , &c. fe voyent dans le Livie^exprimécs en nombres 6i introduites par des calculs que nous omettrons , les quantirez fuivantes : Le finus de 45" Cercle 2 , le finus du complé- ment de 30° Cercle 4 la grande Fi- gure-toute , la petite figure toute , le Cerck 4 moins fix petits Seg- mens , la Quadratrice, & enfin un Cercle double du Cercle 4 , lequel Cercle double on a droit par confe- quénr , de nommer le Cercle î„ Le tout non feulement avec de» fradions de même dénomination, mais aullî (ur une lèuie ligne droi" te,en forte que ce Cercle 8 eft la vé- ritable circonférence du Cercle 4 , 6 comme les quantitez marquées fur cette ligne droite équivalent à des redlanglcs , ce n'cft que de redanglcs ; autant vaut , que fe compofenr les diffcrens Cercles dont on parle. Avant que d'entreprendre de dé- montrer que c'eft inconteftable- mcnt la circonférence du Cercle 4 que l'on a donnée , on tâche de prouver que ce Cercle a fon dia- mètre &: fi circonférence dans les limites d'Archiméde , & l'on pro- pofe dts rapports de quantitez, defquels on voudroit que la beauté MAY qu'on y prouve fût un prcjuj^é en faveur de la quadrature du Cercle que l'on prétend avoir trouvée. Mais enfin l'Auteur en rente la dé- monllration par un calcul d'une précilion à laquelle il cft impoflî- bie , félon lui, de rien ajouter pour h perfeélion. 11 donne l'explica- tion en détail , de ce qu'il appelle ici démonftration. Nous ne pouvons rapporter les nombres que contient le Livre, parce qu'ils font extiêmement grands; mais nous pouvons dire fans chifres , que par la démonftra- tion , le Souquadrifegment , le petit quadriligne , la moitié du pe- tit Segment ôi le Qiiadrifegment font , félon notre Auteur, en pro- portion Arithmétique croilTantc , & que leur différence eft un tiers de quadratrice. Cette vérité établie , félon lui , comme la quadratrice eft une q uan- tité ifolée & que le petit Segment borne le Cercle "intérieurement , pendant que le petit quadriligne le borne extérieurement , il ne refte plus par rapport aux bornes du Cercle , difons même, dans le Cer- cle entier , aucune partie qui , fé- lon notre Auteur , ne foit connue à fond & qui ne puifle , être quarrée fans difficulté. Ainlî ee n'eft plus merveille 3ue M. Baffelin donne beaucoup e manières de quarrer le Cercle ; il feroit furprenant au contrai- re , qu'avec des fccours , qu'il croit fi bons , quelque chofe pût l'arrêter , &c par cette raifon nous pouvons nous abftenir de donner le détail de fes Corollaires quelque utiles qu'ils lui paroilfent. Mais nous ne pouvons nous dif- penfer de faire mention des deux problèmes par Icfqu.ls il termine ce troifiéme Livre. Voici comme, nous exprimons le prenner pour en. faire voir le rapport avec le fécond. Ils fe doivent pratiquer l'un Sc l'autre par la règle & le compas fcul. Premier Problême : pour un Cercle quelconque trouver le quat- re qui lui eft égal. Second Problême : pour un quar- ré quelconque trouver le Cercle qui lui eft égal. Oit verra dans le Livre la maniè- re dont l'Auteur veut qu'on s'y prenne pour faire ce que prelcrit le premier Problême. Mais pour le fécond il n'eft exprimé qu'en énig- me. M. Baffelin efpere que pour quarrer le Cercle, on ne fe fer vira plus que de la règle & du compas. Le quatrième ou dernier Livr® eft intitulé : Suites de la Quadrature du Cercle. Il s'y agit donc des fuites de cette Quadrature , mais de ^ueU les fuites} Voici comme notre Au- teur s'explique là-defTus. " Comme il ftroit inutile, dit il » de faire par moi-même ce que » de grands Géomètres ont execu- » té avant moi d'une manière très- « fçavante , & dès lors fuperieure » à mes forces , laquelle manière » je fouhaite que l'on reçoive com- n me exade en toute rigueur , je » me contenterai de recueillir de » ces differens Auteurs , ce qu'ils i$& JOURNAL D »» auront , pour ainii dire , Icgué » comme des fuites de la Quadra- » turc du Cercle , à quiconque I» poarroit la trouver. Je laillirai » même , comme on le vcria , M beaucoup à glaner après moi , 3» dans cette récolte ; mais je pren- 3» droisce parti, de propos délibéré » dans les conjondlures où j-; me a» trouve, quand même )e ferois )» infiniment plus que je ne le fuis , » à portée d'en prendre un con- » traire. J'aime beaucoup mieux >ilaiircr mon Levîteur en appétit , »> pour parler ainfi, que de lui cau- » fer du dégoût. Et de plus , je ES S Ç A V A N s, «trouve mon compte à ménager » im peu mon travail , ^' n lailVet ji aux autres , quelqut-chofi à ta.re. Après cet avis , vRnntnt divers Ch.ipirrcs fur l.s ban les circulaires^ fur i'Eilipfi , iur la Cycloile , fur le Cone^ iur la Sphère , fur les Corps anyjul. lires ^ fur les m^inieres d'avoir en petits nombres le rapport iu diamè- tre du Cercle k fa c!rc«nf:tence iJc fur la manière d'àter les fraHiom des ^r.4nds nombres tjtti nous revrefentent le Cercle. Nous n'entrerons dans le détail d'aucun de ces articles , ceux qui en feront Curieux pourront confulterlc Livre-même. HISTOIRE VNIVERSELLE DE ,. Tom. IV. pp. 694. Tom. V. pp. 738. Tom. VI. pp. 730 Tom. VIL pp. 75S. Tom. VIII. pp. 730. Tom.IX. pp, 685. Tom. X. pp. 75 1. Tcm. XI. pp. 814. Tom. XII. pp. ^99, Tom. XIII. pp. 6C(>. Tom. XIV, pp. 116. Tom. XV. pp. 784. Tom. XVI. contient la Table des Matières. IL y avoit long-tems que l'on fouhaitoit une tradudiion de l'Hiftoire Univcrfelle de M. de Thou qui lût fidèle, & dont le ftile répondît autant qu'il feroit poffi- ble à celui de l'original. Du Ricr avoit entrepris de mettre cette Hi- ftoire en François , & il en avoit donné au Public trois Volumes in-folin ^ qui comprenoient les rè- gnes d'Henri II. de Fiançois IL SZ de Charles IX. Mais outre que du Rycr » a fait beaucoup de tautcs » dans ces trois Volumes , & qu'en «mille endroits il n'a point cnren- >> du fon Auteur , il i'a tait parier * (î mal qu'il l'a tout-à-fait désho- » noré. En effet rien n'eft plus en- nuyeux j ni iî mdpidc que l'Hiftoi- rt de M. de Tiiou dans cette mau- vaife Tradudion. L'Auteur des Mémoires & Avanturcs d'un hom- me de qualité avoit entrepris de- puis peu une Traduiîtion de la mê- me Hiftoire , mais il a abandonné ce de (fein , après en avoir pubhé le premier Tome. Celle-ci etl l'Ou- vrage de pluficurs pcrfonnes, qui ayant traduit chacune des parties de cette Hiftoire ont remis leur Ouvrage à l'une d'entre elles, qui a prélîdé, pour ainfi dire , àiaTra- MAY, dudion , & qui s'eft charge de re- voir e.vaiftcment ce que les autres avoient fait , de le comparer avec le Texte , d'en vérifier le rapport, & de n'y rien laifTer , s'il étoit pof- fible de foible , d 'obfcur & de né- gligé. On aiïure que cette perfonne a pris foin de polir tellement la Tradudtion en général , que rien n'y pût déplaire au Ledeur , & qu'il n'appcrçût aucune différence dans le ftile desTraduifleurs. Une autre perfonne s'eft chargée de réu- nir & d'examiner en détail tout l'Ouvrage par rapport à la fidélité de la Tradudion , & d'y mettre , s'il étoit pollible , la plus fcrupu- leufe exaiàitude , non à l'égard des niots ( ce qui auroit fait une Tra- duiflion fervilc) mais à l'égard du fens. C'eft ce qu'on expofe dans fa Préface , qui contient d'ailleurs un trop grand nombre de chofes inte- relfantes pour que nous n'en don- nions point un Extrait détaillé. On y obferve d'abord que » l'idée i> avantageufe que tout le monde a » de l'Hiftoire de M. le Préfident » de Thou eft fondée fur la rare j> érudition de l'Auteur , fur l'éner- » gie Se la majefté de fon ftilè , fut » la folidité & la liberté de fes re- » flexions , fut la hardielTe , & la " fidélité de fes portraits , fur fon » exaftitude , fa candeur , & fon «amour confiant pour la venté , » que jamais il ne fupprimc , m ne » déguife , enfin fur cet air de pro- * bité ôi de finccrité qui attire la n confiance du Ledeur , & qui le » pçifuade quelquefois mieux que 17 5 5' ' .291 » les plus folides preuves. On » y voit par-tout , ajoute l'A iiteut » de la Préface, un ennemi du vi- » ce , & fur-tout du faux zélé & » de la tyrannie , un politique hon- » nête homme, un Chrétien Pfii- » lofophc , un Citoyen également y> zélé pour la liberté de fa Patrie , » & pour la foûmifiion dijë àl'au- » torité légitime. Enfin un Ecri- » vain modéré , prudent & impar- » tial , qui loiie & ccnfure fans paf- » fion les Princes , les Favoris , les » Miniftres , les Prélats , les Capi-, »» taines, les Magiftrats , les Gens » de Lettres , tous ceux en un mot, » qui de fon rems ont paru fur la » Scène du monde. Voilà le vrai » Hiftorien , il doit inftruire ncJn » feulement par le récit exaâ: des »> laits , mais par la peinture fidèle » descaraderes & par la noble li- » berté des reflexions. M. de Thou, fuivant l'Auteur de la Préface , ,çfl: le premier , & dans un autre fens le dernier des Hiftoriens François. Ces juftes éloges de l'Hiftoiredu Préfident de Thou n'empêchent point que l'Auteur de la Préface , ne reconnoifle de bonne foi , quel- ques débuts que remarquent ceux qui en jugent fans prévention , mais en même tems il cherche à excufcr ces défauts. Il avoUe que le Préfident de Thou paroît quel- quefois fupcrftiticux & prévenu de preuves frivoles. Mais il ajoute qu'on lui pardonnera aifément cet- te toihkfit , fi l'on fait reflexion , que Ion fiécle étoit fort ignorant fur la Phyfiqiie. Le Préfident de Thou femble q.uelgviçfois un peu 292 JOUHNAL D diffus , & il entre dans des détails trop particuliers , mais l'Auteur a voulu écrire pour tous les Erars, & ce qui paroîtra inutile à rhomme deguerre , pourra êt^e très-utile à l'homme de robe ou auThcolo;;icn. Pour ce qui eft de ceux qui pré- tendent que le Prcfidcnt tie Thou, s'eft quelquefois appuyé (ur des bruits populaires, l'Auteur répond qu'il a cité au commencement de chaque Livre les Autcms qui ont écrit avant lui fur les faits qu'il rapporte , & qu'à l'égard des au- tres faits qui ne fe ti ouvrnt point dans ces Auteurs , il s'eft appuyé fur des Mémoires Manufcrits , ou fur ce qu'il a vu lui - même. On pouvoir ajoiiter , & fur ce qu'il af- fure avoir appris de perfonnes di- gnes de foi. L'Auteur de la Préface parle avec étendue des chai2;rins quj le Préfident de Thou a eu à eiïuycr à caufe des premiers Livres de fon Hiftoire qui ont été publiés pen- dant fa vie. Celui auquel l'Auteur paroît avoir été plus fenfible, lui venoit de la part de la Cour de Rome. Inftruitdes plaintes qu'on faifoit en cette Cour contre fon Hiftoire , il retrancha dans une nouvelle Edition , une partie de ce qu'il avoit dit contre h s Papes Ju- les II. Paulin. & Jules r.I. quoi- qu'il n'eût lien avancé d.ms la pre- mière Edition qu'il n'eût tiié d'Au- teurs Italiens , 6i il changea l'ex- prelTion dont il s'éfoit fervi en par- lant de la mort de MManifton.Mais ces retranchemens de quelques &its paiticulieis , Se des change- ES SÇA VAN S, mens dans les cxpre'lions en quel- ques enilroits , ne pouvoieiit con- tenter mis François quiavoicnt été atrach^b à 1 1 Ligue , m les Officiers les plus puilTansdc la Cour de Ro- me , qui ne pouvoicnt pardonner à l'Auteur fon zélé ardent pour les libcrtez de l'Eglifc de France , pour la tolérance civile en matière de Religion , & pour la tranquilli- té de l'Etat ■■, non plus que l'atten- tion quil avoir eu à dévoiler les pratiques de la Ligue , quoiqu'il n'eût pas refufé à ceux qui étoienc entré dans ce parti les juftes éloges qu'ils avoient mente d'ailleurs- On penfa donc férieufement à Rome à condamner ce qui avoir paru alors del'Hirtoire du Picfidenr dcThou; la première vue étoit d'en faire une ccnfure ditaillée , c'eft pourquoi Antoine Caradioli , Clerc Régu- lier , fut chargé d'extraire du Li- vre les Propofitions qu'on regar- d.-iit en Italie comme méritant la cenfure. Entre les Propofitions que le Ccnfeur a^pdlo'it fie Je pe/iilenies^ étoit celle Cl , t^rafimHS g>unde hiijits f1 de Thou , a qui plufieurs Catholi- ques Ecoffois réfugiés en France avoient affurc les faits qu'il avoit rapportés d'après Buchanan. Il fc contenta par cette raifon d'adoucir quelques exprelllons , & de faire quelques changcmens dans une nouvelle Edition , mais fans chan- ger le fond. Ce qui détermina le Roi Jacques à obliger Camden à donner fes Mémoires au Public pour les oppofcr à l'Hiftoire du Préfident de Thou. On demande auquel de ces deux Ecrivains on doit plutôt s'en rap- porter ; l'Auteur de la Préface ne doute point qu'onnedoive préférer le Préfident de Thou. Ce qui le dé- termine à prendre ce parti , c'efl; qu'on ne croira pas aifément qu'un Auteur fi impartial , fi homme de bien , fi ami de la vérité , n'aie écrit que fur la feule autorité de Bu- chanan , ou du moins qu'après qu'on lui auroit ouvert les yeux , il n'eût pas changé do fenti- ment. Il alfure qu'il s'éroi: inllraic à fond des affaires de la Reine d'E- coiïe , & on voit par plufieurs de fes Lettres qu'il avoit pris beau- coup de foin pour s'inftruire de la vérité par rapport à cette matière. Ce n'eft donc que la perfuafion où il étoit que ce qu'il avoit avancé étoit véritable , qui l'a empêché de céder aux reproches que lui faifoit le Roi Jacques & aux inllancesd-e Robert Cotton & de Guillaume Camden. D'un autre côté les Mé- moires de Camden font un Ouvra- ge de commande fait par un Sujet fous les yeux de fon Souverain qui 294 JOURNAL D voiiloit juftifier la mémoire de fa mère , & auquel ceux qui avoienc rapporté ce qui s'étoit pa(Tc à ce fu- jet en EcolTe , avoient eu bien des motifs pour déguifer la vérité. Mais ce qui paroît de plus fort , c'cft qu'on voit des Lettres de Camden au Préfidcnr dcThou^ où ce fçavant Anglois du que la fidélité du Pré- fident de Thou n'a pas befoin de défenfeur en Angleteirre , que tout le monde y admire fa candeur , & que le Roi qui hailfoit fort Bucha- nan , s'étoit lai(Tc prévenir par des perfonnes qui accufoicntle Comte de Murry d'être la fource ôc le pre- mier mobile des malheurs de la Reine Marie. A l'égard des Critiques faites par des particuliers , le Préiîdent de Thou ne crut pas devoir y ré- pondre. ScioptHs , difoit-il, efl un clabiîitd importun , il aura fa fureur four peine. L'Guvr-age que le Je- fuite Jean de Machaud publia en Latin fous un nom emprunté con- tre l'Hilloire du Prélident de Thou , &. qui contcnoit d'ailleurs des maximes féditicufcs , fut con- damné par une Sentence du Pré- vôt de Paris du 7 Juin 1^14. Le Livre de Scioppius intitulé Eccle- Jîjjiiciis , fut aufll condamne par un Arrêt du Parlement de Paris. Après la difculTîon de ces points jmportans , l'Auteur de la Préface vient aux Mémoires de la Vie du Préfident de Thou , à quelques cir- conftances des dernières années, Sc de la dernière maîadic de ce célè- bre Hillorien. Il parle enfuite de l'Edition de i'Hiltoirc du Prélî; ES SÇAVANS. dent deThou imprimée à Londres par les foins de M. Carte , connu à Paris fous le nom de M. Philipps, des fecours qu'a trouvé l'Editeur , & des peines qu'il a prifes pour rendre cette Edition la plus com- plette qui lui a été poflîble , & en- hn de cette Traduction. Elle commence parles fîx Livres des Mémoires de la Vie du Préfi- dent. Une Préface que Rigaud avoit compofé pour mettre à la tê- te de ces Mémoires , & qu'il n'a point cru devoir faire imprimer, porteroit à croire qu'ils ont été ré- digés par Rigaud , fur ce que le Préfident de Thou lui avoit racon- té. On s'en perfuaderoit d'autant plus aifément, que l'Auteur y par- le Cl avantagcufement de celui dont il donne l'Hiftoire , qu'il af- furc que le Préfident de Thou n'aurott fouff^rt qu'un étranger eût parlé de cette manière. Cependant l'opinion commune eft que ces Mémoires font du Préfident de Thou. On y reconnoît par tout fou ftile Sc fa manière de penfer. On y trouve des faits tcliem.jnt circon- ftanciés , Hi des entretiens particu- liers fi détaillés , qu'il hut ou que te foit l'Ouvrage du Préfident de Thou , ou que cet Ouvrage foit un R.oman. Mais ce que i'Au-teur ap- pelle une preuve fans réplique ,■ c'efl: qu'il y a dans la Bibliothèque du Roi deux Mnnufcrits entiers de ces Mémoires , l'un de la main de Mi de Thou & l'autre des Frères de Sainte Marthe, que l'un & l'au- tre font conformes , Ci ce n'cft que fur le dernier il y a des corrtdions MAY Jtc la miin de l'Auteur. Ce qui .prouve que ce fécond Manufciit cil appographc. Après les Mémoires vient l'Hi- ftoire de M. de Tiiou qui com- prend près de la moitié du premier Volume, & les 15 Volumes fui- vans. On y trouve les palfages qui avoient été retranchés de l'Edi- tion de Mamert. PatilTon rétablit les variantes du Manulcric de la Bibliothèque du Roi qui eft de J'Auteur-même , d'autres variantes ^u Manufcrit de MM. de Sainte- Marthe , d'autres de différentes Editions , en particulier de celle qui a ciïcntiellcment une racine , = pt ut - être une femence , & qui » produit le plus fouvent des feuil- »ics, des tiges, des fleurs, & des » fruits. M. Fabregou admet cette défi- nition quant à ces paroles : Vn corps organifé ejui a ejfcntiellement une racine , mais il la rejette quant à celles-ci : peut-être une femence , & qui produit le plus fouvent des feuilles , des tiges , des fleurs & des fruits. Il prétend qu'au lieu de ces der- niers mots , il faut dire : quipro- duit toujours fon femhlahle , & pour la végétation duquel le mouvement de l'air efi auffi néceffaire que le moHve- ment du fuc. Cela pofé , il avance comme une maxime indubitable /que tout végéta! contient en foi un principe pour la multiplication de fon ef- pcce s Qiie la multiplication des Plantes n'eft; autre choie que le dé- veloppement de leurs principes ; Que CCS principes ne font que de petits corps capables d'extenfion , lefquels , par le moyen de cette extcnilon dont ils font fufcepti- bles , & qu'ils acquièrent par fuc- cellîon de tems , forment , depuis le commerïcemcnt du monde , comme ils tormeront jufqu'à la fin> tous les individus de chaque ef- pece. Pour rendre ceci fcnfible , notre Auteur tait remarquer que toute- Plante tire fon origine de l'une de ces trois fources, fçavoir,ou d'un germe , ou d'une graine , ou du nœud d'une racine , &c qu'ainfî toutes les Plantes qui exiftent ne peuvent venir que de- là , comme toutes celles qui ont exifté n'ont dû venir que de la non plus,& comme celles qui cxifteront dans la fuite des tems ne pourront non plus avoir d'autre fourcc. Il obferve cnfuite , 1°. que dans les Plantes il y a des parties qui fervent uniquement à les régénérer MAY Si d'autres qui fervent feulement à: en compofer le corps, en forte qu'il fe trouve fouventnne Plante ou une branche qu'on doit appcl- kr rterile , parce que la partie qui devioit fcrvir à la génération ne s'y trouve pas. 1°. Qiie la partie nommée par les Botaniftes partie farineufe de la Plante eft toujours réunie dans le point fixe qui renlernie la Plante tiJturc, 3°. Qi'il faut divifer la Plante en mâle , temelle , & hermaphro- dite. 4". Que par la Plante mâle on doitentendre , contre le lentiment de la plupart des modernes , celle qui renferme toi^ijours en elle-mê- me , une ou plufieurs graines pro- pres pour multiplier l'efpece qui vient de graine. 5°. Que panni ces Plantes mâ- les il y en a qui portent des fleurs & dvS graines , comme le Pom- mier ; Se d'autres qui portent des graines fans fleur , comme la vigne -, ce qu'on appelle fleur dans la vigne , n'en ayant que le nom Se nullement la réalité , à ce que prétend notre Auteur. 6°. Que la Plante femelle eft celle qui ne porte jamais de graine, quoiqu'il y en ait qui viennent de graine , comme le chanvre-femel- le. 7'. Qii'on doit pour cette raifon diftinguer trois efpeces de Plantes femelles , premièrement celle dont on vient de parler, mais qui eft fte- rile , comme le chanvre - femelle ; fecondement , celle qui renferme » 173;- 2i>7 fort fcmblable dans une bulbe comme le véritable fafran & au- tres } troificmemcnt ^ celle qui renferme fon feniblable dans le nœud de fi racine , comme la fou- gcre-tcmellc. 8°. Qiie la Plante hermaphrodi- te eft celle qui porte des fleurs & des fruits de différentes efpeces. 9°. Qu'il y a deux fortes de Plantes hermaphrodites ; l'une qui porte des fleurs mâles & des fleurs tcmellcs fur la même grappe, com- me l'Erable des montagnes ; l'au- tre , qui ne porte que des fleurs mâles, niais des fleurs dont le fruit renferme pJulîcuis efpeces différen- tes , comme l'oranger hermaphio- dite qui efl: à Bercy , chez M. le Comte d'Onze-en Bray , & celui qui eft au Château de Madrid du Bois de Boulogne , car ils fontain- fi naturellement &c non par grefle. Notre Auteur ajoute , 1°. Que route Plante mâle renferme dans l'éminencc qui fc trouve en forme de nœud , à la branche , non feulement la partie farineufe de la femence , mais encore la femence future , qui doit fervir à multiplier l'efpece. Qiie dans les Plantes fe - melles de la féconde ou de la rroi- fiéme efpcce , le principe de leur produdion future , eft caché dans le nœud de la racine des unes , ou dans le germe des autres. 3". Que la fleur de l'Erable qui fe trouve ici hermaphrodite , parce qu'elle ren- ferme en même rems , la fleur mâ- le & la fleur femelle , n'cft telle , ni l'oranger de Madrid qui fe trou- ve Bergamote , Poncyrc & Bigar- 298 JOURNAL D rade , ni celui de Bercy , ne font tels que parce que les humeurs de la terre diveifcment préparées, ont changé la conftitucion primordiale de ces Plantes. Au refte , notre Auteur avertit que lorfqu'il a dit , contre le fcnti- ment de M. de Tournetort, que la Plante produifoit toujours ion femblab-îe , il n'a pas prétendu comprendre la Plante femelle llé- rile. Le fecon^ article dont parle M. Fabregou , concerne l'opinion de M. Malpighi touchant les véficu- Jes & les trachées des Plantes, opi- nion dont M. de Tournefort s'cft rendu le défenfeur , Se que notre Auteur entreprend ici de réfuter. Par trachées , Meilleurs Malpi- ghi & de Tournctort entendent des organes qui portent l'air à tou- te la Plante , 6>; ils les comparent aux poumons des animaux i voici la ftrudture qu'ils donnent à ces trachées ; ce font , félon eux , de petites lames minces &: un peu larges , qui , par leurs differens contours , fe roulant fur elles mc- mcs en ligne fpirale , ou en maniè- re de vis , forment des tuyaux alfez longs , tantôt larges & tantôt fer- rés , tantôt unis dans leur loa- gueur , Si tantôt partagés en plti- fieurs cellules. Quant aux véficules , ce font^ félon les mêmes Auteius , autant de petits eftomacs , qui fervent à cuire & à digeier le fuc de la Plan- te. M. Fabregou prétend que ces trachées & ces véûc.ules des Plantes ES SÇAVANS, font des erres nnaginés à plaifir ; H convient que tous les animaux font pourvLib de poumons ou d'or- ganes propres à la refpiration , & que ces poumons font compofés de trachées ou canaux cartilagi- neux , & de véficules inembraneu- fes fur lefquelles fe répandent un nombre infini de petits vailTcaux ; mais il eft d'un autre fentimentà l'égard des Plantes. Il loûticnt que les vifccres des Plantes ne font au- tres que les racines , les feuilles ^ les fleurs & les huits. Que les raci- nes puifent par trois fortes de po- rcs , comme par autant de bou- ches j le fuc de la terre , que ce fuc y cft broyé & digéré par le mouvement continuel de la matiè- re fubtile -, Qii'il y acquiert afTez de finelîe pour s'infinuer dans les fibres du colit delà racine, lef- quelles font des lacis & des con- tours difficiles à pénétrer, & où il entre par trois efpeces de tuyaux faits en forme de vrille , Icfquels par leur figure empêchent le reflux de la fève fur elle - même ; Que c'cft par ces canaux , que le fuceft tranfmis dans la tige, dans le tronc & dans les branches , où il fc digè- re de plus en plus ; Que de là , il eft porté dans les feuilles & dans les fleurs qui achèvent de le per- feélionner Se qui le rendent pro- pre à nourrir les fruits ; Que les feuilles ne lent qu'un tifTu de fi- bres i Que les fucs qu'elles reçoi- vent , s'y partagent en une infinité de routes , &c que prefentant ainll plus de furfaces à l'air , ils en font plus aiféinent pénétrés. MAY Nofre Auteur , aprts pluficurs autres reflexions fur ce fujet , dit un mot de la circulation de la fè- ve dans les Plantes ; il convient que cette fève , après avoir nourri les feuilles , les fleurs , les fruits , &c. rentre dans le corps de la Plante ; Qii'eile defccnd jufqu'aux racines, qu'elle s'y mêle avec le nouveau fuc qui vient d'être puifé de la terre, qu'enfuite elle remonte par les mômes canaux qui l'ont dé- jà conduite , ce qui tait une vérita- ble circulation ; mais il foûtient contre ce que penfent les moder- nes, que ce mouvement de circu- lation , n'cft nullement fcmblable à celui qu'on a découvert dans le fang des animaux : voilà en fub- ftance , ce que dit M. Fabrcgou pour faire voir que M. Malpighi de M. deTourncfort fon dtttnlcur , ve font point fondés dans Vétabliffe- msnt des trachées & des véfïcitles d^ Plantes. Pour ce qui efl du troificme ar- ticle , fçavoir , de la méthode de M. Touinefort pour connoître les Plantes, notre Auteur avance que la fleur & Je fruit ne font point ne- cefl^aires pour l'ctablilTement de tous les genres dont les efpeces portent des fleurs & des fruits \ il trouve outre cela cetinconvenient, dans la méthode de M. de Tourne- fort , qu'il faut attendre la faifon des fleurs & des fruits pour s'affurer du caractère de chaque genre. M. Fabregou pofe pour principe i"'. que la graine eft la feule partie abfolument ncceffaire pour l'éta- bliflemcnt de tous les génies , 1 7 ? y. 2PP dont les efpeces portent graines , maisc]uc pour celles qui n'en por- tent point , il faut avoir recours au port extérieur & au goût, les exami- ner telles que la nature les donne s'en former des defleins exaèirs, & n'en point prendre une pour pliu iieurs différentes : 2°. Que la grai- ne eft le principe & la tin des Plan- tes qui portent graine, qu'il n'y a donc que la graine qui puiffe les caraiflcrifer \ d'autant plus qu'on- la trouve dans tous les tems , & qu'elle ne change jamais de figure ni de goût; au lieu que la fleur &c le fruit varient félon le climat & Ja culture. M. Fabrcgou penfela mê- me chofe du port extérieur & à\i goût de la Plante , lefquels ne changent pas non plus. Il efpere que ceux qui fe donneront la peine d'examiner fi méthode ,■ la regar- deront comme la feule qui puilTe caraderifer les efpeces des Plantes, les réduire à leurs véritables gen- res , leur faire donner des noms qui leur conviennent , & empêcher qu'on ne multiplie les Plantes fans neceflité , comme font quelques Profeffeurs d'aujourd'hui qu'il s'abftient de nommer. Il s'agit à prcfent de rapporrer ce que penfc M. Fabregou du fenti- ment de M. GeofFtoy fut la niulti* plication des Plantes. Ce dernier , dans fa Théfe intitulée : ^n homi- nis primordia veïtnis ? foûtenue aux Ecoles de Médecine de Paris le 1 3 Nov. 1704. admet, comme l'onc faitplufieurs autres Auteurs avant lui , les deux fexes dans les Plantes,- £c il allègue pour prouver ce fentiJ 300 JOURNAL D£ ment, les mêmes raifons qu'eux. Il prétend comme eux, que les parties mâles des Plantes, font les étamines garnies de leurs fommets, & que les parties femelles font les piftils ; Que les fommets portent un nom- bre inombrable de petits globules contenant chacun en racourci, une Plante iemblable à celle où le fom- met croit ; Qiie par exemple , dans le Lis , les petits corps jaunes qui occupent le milieu de la fleur , ■font les fommets , que les petits filets blancs qui les foijtiennent , font les étamines , Se que ces par- tics enfemble font les parties mâ- les i Que la poudre jaune qui fe de- tache de ces fommets , & qui s'atta- che aux doigts quand on y touche , contient les germes du Lis j Que la tige verte & mince qui paroît entre ces petits corps jaunes , eft ce qu'on nomme piftil ; Q^ie cette tige cil creufe , & terminée en haut par trois coins arrondis 6c fendus , en- duits d'un fuc gluant ; Qii'elle re- çoit les germes qui fe détachent des fommets du Lis , &: qu'elle les con- duit jufqu'au refervoir des gramcs i car le bas du piftil ^ -à ce qu'il prétend , cache de petits œufs , ou autrement des véikuks féminaires qui font les graines de la Plante ; Que ces graines deviennent fécon- des par l'intromifllon des germes qu'elles reçoivent & que toute la partie entière qui comprend le haut , le milieu &: le bas du piftil cft la partie femelle du Lis. M. Geoffroy ajoute , comme ceux qu'il a copiés , que la plu- part des Plantes portçnt fur la mê- S SÇAVANS, me fleur, les deux fexcs , qu'on peut nommer celles-là Plant'.i An- drogynes ■■, Qii'il y en a d'autres où les deux fexes font féparés en diffe- rens endroits du même pied , Se d'autres où ils fe trouvent fur des pieds diffcrcns , Se tout-àfait déta- chés ■, Qu'entre les dernières , on peut appeller mâles,celles qui por- tent les étamines garnies de leurs fommets ; Se femelles , celles qui portent les piftils ; Qiie parmi les Plantes qui portent fur le même pied , les parties mâles Se les par- tics femelles , féparées les unes des autres , on compte le bled de Tur- quie , Se quelques autres i Qii'en- tre celles dont les parties mâles 5c les parties femelles croiflent féparé- ment fur differens pieds de la même efpece , on comprend la mercuriale, le chanvre, &c. Qiie dans les fleurs à feu.Ues, les étamines prennent leur origine des feuilles de la fleur , Q^ic dans cel- les qui font fans feuilles oc qu'on nomme Chatons , elles partent du pédicule, c'eft à-dire de la queue- même de la fleur , Se que quelque- fois elles fe trouvent li courtes , qu'à peine paroiflent elles. Qn'à. l'égard des fleurs où les deux fexes font réunis , le piftil eft placé entre les étamines ; Que cette lituation lait qu'il fe couvre aifémcnt de leur paupière féconde dont quelques grains s'infiniicnt jiilqu'au fond de ce piftil ; mais que lorfque les parties mâles & les parties femelles , au lieu de fe trou- ver enfemble , font féparées en dif- ferens endroits d'un même pied , ou MAY ou furdifferens pieds d'une même efpece , c'eft: par l'entrcmife du vent , que ces plantes conçoivent, parce que les fommers venant à être fecoiiés par le vent dans le tems de leur maturité , répandent leur poudîere^ & que cette poulîîe- re eft enfuitc portée par le moyen de l'air , fur les piftils , où une gluc qu'elle y rencontre à l'entrée , fert à la retenir ; Qhc c'eft alors que les petits grains de poufliere qui font autant 'de germes de la Plante , vont chacun s'infinuer dans une graine ou véficule fémi- naire , dans laquelle ils fe confer- vent comme dans un œuf, & com- mencent à prendre quelque ac- croilTement , en forte que les Plan- tes femelles où cette poufliere ne peut parvenir , demeurent fteriles, aulïïbien que celles dont les fleurs n'ont point de fommets. Les Partifans de ce Syftcme pré- tendent que fi l'on ôte à une Plante les fommets de fes fleurs avant qu'ils foient meurs , on lui ôte en même tems , tout moyen de mul- tiplier , & que c'eft ce qu'on éprouve dans le bled de Turquie & dans le Ricin ; Que Ci entre les Plantes d'une même efpece , dont les fleurs & les fruits croiffent fur des pieds féparés , l'on en cultive en particulier-quelqu'une de femel- le , en forte qu'elle ne foit point à portée de recevoir aucun grain de la poufliere qui fe détache des fom- mets du mâle , cette Plante foli tai- re ou ne conduira point de fruits à maturité, ou n'en donnera que de ûeriles , qui feront femblables à ces May. . Ï7Î J. îo. œufs que font les Poules fjns 11 le cours du Coq , dans lefqucisii ny a point de germe ; Qiie c'eft une expérience qui réufllt fur la Mercu- riale, fur le Chanvre, &: fur toutes les autres Plantes de cette nature. Voilà en abrégé les principales raifons que Us Partifans de la gé- nération des Plantes par mâle & par femelle , ont coiâtume d'allé- guer pour établir leur Syftême. Voici à prefcnt celles dont fe fert M. Fabregou pour le détruire. Selon ce Syftcme ; les cramincs garnies de leurs fommers font les parties mâles des Plantes, 6c ks piftils font les parties femelles , c'eft tout le fondement fur lequc 1 il eft appuyé , en forte que fi l'on renverfe ce fondement;, on rcn- verfe tout le Syftême. Or c'eft ce que M. Fabregou eftaye d'abord de faire par ce raifonnemenc : Les éra- mines , les fommets , & les pi- ftils , ne fçauroient être les parties de la génération des Plantes , s'il y a des Plantes fans étamines , fans fommets , fans piftils ; or il y en a , & en grand nombre , donc , les étamines , les fommets , les piftils ne font point les parti- s .1 li génération des Plantes. Qu'il ^ ait des Plantes fans étamines, fans fom- mets , & fans piftil , c'eft un fait qu'il faut prouver, & M. Fabregou citelà-delîus la fougère-femelle ,U vigne , le véritable colchique , &c. en forte que ces Plantes ne pour- roient multiplier Ci le Syftcme dont il s'agit étoit véritable , elles multiplient cependant, donc, con- clut M. Fabregou , le Syftême en R r 502 JOURNAL D uucftion eft infoûtcnablc. Quant au Lis qu'on donne pour evemple , notre Auteur apporte ■ i v.rfes raifons pour taire voir, i". que cette pouflîcre jaune des Commets du lis , n'eft que le fuper- ât! de la fève , & que bien loin de f- conder les graines , elle ne fert o l'àlcs dctriure •, 2°. Que les éta- niines revêtues de leurs fommets , ;ic font que des tu) aux excrétoires par où le fuperflu de la fève s'éva- pore ; 3°. Que le piftil n'eft que l'enveloppe de la graine , & ne fcrt qu'à confcTver la jeune graine. M. Geoffroy convientlui-même qu'on n'a pîi encore découvrir par le Microfcope , aucun germe dans cette poudkre des fommets. A l'égard du bled de Turquie , & de la Mercuriale qu'on apporte encore pour exemples, notre Au- teur prétend qu'il faut , pour ap- porter de tels exemples, n'avoir aucune idée de la ftrudure de ces Plantes. Il remarque là- delTus qu'il y a deux fortes de Mercuriales ; l'une , qui porte dans les aifTelles de fes pédicules , un fruit à deux capfules , lequel naît fur des pieds qui ne fleurirent pas, & dont chi- que capfule renferme une fcmcncc, le plus fouvent ovale ; l'autre , qui porte des fleurs à plufieurs étami- nes , foiJtenues par un calice à 3 ou 4 feuilles ramalTéesen épi , lefquel- Ics fleurs ne font fuivies d'aucun fruit. M. Geoffroy veut que le bled de Turquie produife fur le même pied , les parties mâles & les par- ties fenaelles fépaiées les unes des ES SÇAVANS, autres ; &c que dans la Mercuriale les parties mâles & les parties fe- melles croiffent féparément fur les differcns pifds de la même efpcce. Mais M. Geoffroy , à ce que foû- tient M. Fabregou , ne penfe pas , i°.que la première elpece de Mer- curiale porte un fruit fans le.fe- cours des étamines couvertes de leurs lommcts , Se fans le fecours du pimi j 2°. Que la féconde efpé- ce porte des étamines foûtenuës par un calice &c ne porte pointdc fruit; 3". Que la première efpece porte des fruits indépendamment de ces globules de pouflîere qui font fur les fommets ; Que le Ri- cin & le bled de Turquie portent des fruits ians le fecouis de cette même pouillirc, pa;ce qu'ils ne lailTent pas d'en porter lors même qu'on en retranche les étamines, pourvu que la fève qui doit nour- rir le jeune fruit, ne s'évapore pas entièrement ; 4°. Qu'il n'eft pas vraifemblable que l'Auteur de la Nature ait voulu confier aux vents la multiplication des Plantes. 5°. Qu'il eft difficile de com- prendre comment cette poulîlere à laquelle on donne tant de vertu , peut s'infinuer jufques dans le fond du piftil , & aller féconder les graines qui y font renfermées; qu'à la vérité la glue qu'on fuppofe à l'ouverture du piftil , peut rete- nir quelques-uns de ces grains de pouflîere , mais que cela même doit les empêcher d'entrer dans le piftil. 6°. Que fi M. Geoffroy & ceux dont il eft k SetStateur avoient fait MAY Il d.lTccllaiii des P-.intcs qui por- tent dcs-.étamincs , Llcsfommets.& des piilils , il auroit vu que les. ctamines font unies intimement aux jeunes graines ,. & qu'elles ne font que- des tuyaux par où s'échap' pe le refidu de la fève c^ui leur a fcrvi de nourriture. M. Fabrcgou conclut de tout ce Difcours , i". que la définition que M. de Tournefort a donnée de la Plante eft imparfaite ; i°. Que les ï 7î r. 30 ) principes de M'. Malpighi pour i'établiiïcmcnt des véiîcules tk des trachées des Plantes , font fans fon- dement i 3°. Qiie la méthode de M. de Tournefort pour connoître les divers genres de Plantes , eft fu- jette à erreur ; 4°. C^ue les preuves qu'on apporte pour pcrfuader que les Plantes fe multiplient par le moyen des deux fexes , font abfo- ment faulTes. Nous laiflbns tout cela à la difcuflion des Botaniftes. NOVVELLES LITTERAIRES. IRLANDE. De Dublin. ON a imprimé ici par Souf- cription TTie U^orki of J. S. J. S. D. D. D. S. P. D. in - faur Volumes. C'eft-à-dire : Les Oeuvres de Jonathan Swift , DoHeur en Théologie , Doyen de S. Patrice a, Dublin : en cjuatre Volumes , conte- nant I. les mélanges de l' jouteur en frofe. II. [es Po'éfus. 11 1. les Voyages du Capitaine Lemuel-GuUiver. IV. les Traite"^ ^ui regardent l'Irlan- de , in- II. On trouve dans cette Edition des changemens & des ad- ditions confiderables , & plufieurs Pièces qui n'avoient point encore paru. ANGLETERRE. De Cambridge. l.e DQ&.CUÏ Middleto» , premier Bibliothécaire de cette Univcrfité , a publié en Anglois une Dijferta- tion fur l'Origine de l'Imprimerie en Angleterre , oit l'on fait voir qu'elle a été premièrement introduite & exer. cée k IVejlminjler par Guillaume Eaxton Anglois ^ & non pas par nn Imprimeur étranger à Oxfuri. ui-^". De Londres. Les Knaptons doivent imprimer par Soufcription YHifloire de l'Em- pire Ottoman depuis fin origine juf- cju^à. prefent \ écrite originairement en Latin par Démetrius-Cantemir , Prince de Moldavie , & traduite en Anglois fur le Manufcrit de l'Auteur, pur N.Tindat , Maître es Arts, Vicaire de Great-Waltham dans la Province d'ElTex. Cet Ou- vrage dont l'original a été commu- niqué à M. Ttndal par le Prince jintiochus-C*ntemir , fils de l'Au- teur , 6c aduellement Miniftrc R rij 304 JOURNAL D Plénipotentiaire de la Czarine à la Cour d'Angleterre , fera d'un Vo- lume in-folio , & la Soufcription d'une guince , dont on payera la moitié d'avance. HOLLANDE. D'A MSTERDAM. Wetflein & Smith ont achevé & débitent la nouvelle Edition des Commentaires de M. le Clerc fur le Pentnteiiijtte. On aflure que cette Edition furpaffe de beaucoup les Editions précédentes du même Ouvrage &; en particulier celle qui parut à Tubingue ^ il y a environ deux ans. Les mêmes Libraires & les /!née Ecchjtajfijiic ,_ov\ In',} r.ic- S. Micheii 17 55, /'» 4°. tion fur le Propre du TTcms , & fur Oeuvres diverfes de M, Pelijfèn de lePropre & le Commun des Saints, l'Académie Fra>7foife. ChtzDidot ^ avec une Explication des Epî- Quai des Auguftms , près le Pont très cSi des Evangiles qui fe lilent S.Michel. i735./« II. 5. vol. dans le cours de l'année Ecclefiafti- Second Abrégé de U Carte gênent- que dans les Eglifes de Rome & le du Militaire de France , en for- de Paris. Tome ijuatriéme. Chez me de Supplément , depuis l'éta- Loitin, rue S. Jacques. 1754. /«ii. bliflement de la Monarchie juf- Catalogue des Arbres & Arbrif- qu'au premier Mars 1755- ^c- Par féaux ejui fe peuvent élever en pleine M. le Mau, de la Jaijfs. Chez Didot, terre aux environs de Paris. De Ciffkrt^ Gandouin, Sc autres Librai- l'Imprimerie de Jofeph Bullot yias tes. 17.55. '"•^°- ^^ laParcheminerie. 1735. '«-!5°. Fautes à corriger dans le Journal de Mars 1735. PAge 154. col. I. lig. 21. Wefphalie , lifez. Weftphalie : ibid. 1. 33. diafragme , ///i diaphragme : pag.i 55.C0I. 1. 1. 31. Schirres, lt[. Skir- rhcs : ibid. 1. 32. abcès, ///^abfcès : p. 157. col. i.l. 3-4. & 12. d'efpritde vin , lif. d'eau-de-vie : ibid. col. 2. 1. 5. & 6. d'efprit de vin & d'efpritde froment , Uf. d'eau-de-vic de vin , 6c d'eau-de-vie de froment : p. lotf. col. 1. 1. li. & coli u 1. 19. méthéores , Uf. météores ; p. itfi. col. 2. 1. 20. l'aimant, Uf. l'aiman : p. \6i. col. 2,1. 37. Sep, i(f3. col. i.l. (,. Toricelli , Uf. Torricelli : p. \6\. col. 2. 1- 5. Boile , /;/. Boyle : p,ig. itfj. col. 1. 1. 30. thércbentine , Uf. térébenthine. DAtts, le '^QHrnal d'Avril. Pag. 209. 1. I. & 2.du : Titre Archiatis Affiâci , ///Archiatri-Hafllaci : ibid. 1. 3. Mufcorum , ///. Mufcorum : p. 2 10. col. 1. 1. 25. thérébcntine, ///I térébenthine : ibid. 1. 29. antifcobutique , ///Cantifcorbutique : ibid. I. 3^. l'alphalte. ///; l'afphalte : ibid. col. 2.1. i. l'âmetifte , le faphir, lif. l'amethyftc , le fapphir : ibid. 1. 8. l'alebâtre, ///^ l'albâtre : ibid.l. 12; Bufonine , Uf. Bufonite : ibid. 1. 13. Pierre de Crapau , Gloftopctre , /(/I Crapaudine, GlolTopetre : ibid. 1. 19. Cinabre, lif. Cinnahrc : p. 219. col. 2. l. II. Boile , lif. Boyle ; corrigez, la même faute par tout où elle fe trouve ; p. 227. col. 1. 1. 35. temperammcnt , Uf. tempérament : p. 228. col. i.lig. 1 1. échymofe, Uf. ecchymofe : p. 231. col. 1. 1. i6. fchirreufe, lif. fKirrheufe : ibid. col. 2. 1. 3. larmes , Uf. lames : p. 232. col. 1. 1. 20. Nître , Uf. Nitie : ibid. lig. 27. & 28. dans les inteftins dont lesmucoH- 50? tez inteftinales font chargées , Uf. dans les mucofitez dont les inteftins font chargés : ibid. lig. 32. boulles , Uf. boules : ibid. col. x. 1. antepen. conclut, ///conclud : p. 231. col. 1. 1. 13. alongemcnt, ///] allongement: ibid. 1. 31. 1730. /'/ 1703- p. 234. col. 2. 1. 14. fidci , /// fides : p. 23^. col. 2. 1. antep. des portraits , des mœurs , otcz. la virgule après portraits èclif. des portraits des mœurs : pag. 238. col. 2. 1. 34. Hydrociphaton , lif. Hydrociphalon : pag. 240. col. 2. lig. 2. & 3. Coniq, Uf. Konig. Pag. 239. col. 2. lig. 23. & 24. exoftoce : lig. 28. atrophce : 1. 29.cpai- cilTcment : v^z. 140. col. i. lig. 4. & j. Amorofis : 1. 6. Goute-Seraine : col. 1. 1. ly. Tay loris , laiJJèz.toHS ces mots tunifl écrits .^ parce qu'ils ne le font point autrement dans l'Auteur. TABLE Des Articles contenus dans le Journal de May lyjj. MEmoires fourfervir à l'Hifloire des I»feSles^ pag. 247 Hifloire générale de Portugal , 2^1 EJfiiis du Chevalier Bacon , &c. z66 Traité demonflratif de la Quadrature du Cercle j &cJ ayS Hifloire Vniverfelle de M. de Thon , &c. z^o jivertiffemem fourfervir de Préface ah fécond FtlumC fie la Defcription des Plantes , &c. 2 jtf Nouvelles Littéraires ; 303 Fin de la Tablct L E JOURNAL scavÀns, FOUR L'ANNEE M. DCC. XXX F- JUIN. A P A R I S, Chez CHAUBERT, à l'entrée du Qiiay des Auguftins, du côté du Pont Saint Michel, à la Renommée & à la Prudence. M. DCC. XXXV. JVEC ArFROBATION ET FRIVILEGE DU ROY. LE JOURNAL DES SCAVANS j JUIN M. DCC XXXV. OEVrRES MESLE'ES DE M. LE CHLVALIR DE S. ]. A Paris, chez Didot ^ Qiiai des Auguftins, à la Bible d'or. 173 j. in II. deux Vol. Tom. I. pag. zStj. Tom. II. pag. 546'. DIVERSES Pièces de Pro- fe & de Vers compofent ce Recueil , ce font des Lettres , des Hiftoires , des Fables , des Dif- cours prononcés en public , des Odes , des Maximes de Morale , des Comédies , un Mémoire pour Dame Annc-Chrifiins Gomé , accK- fée d'adultère (S" d'avoir fait appa- roitye des efprits , contre Aiejfire Romain de Klinglin [on mari , Préfdent au Confeil Souverain d'Al- S f ij 312 JOURNAL D face. Un autre pour le Sieur Louis Rulhing de S. jory contre Made- moifelle de C. . . qui s'étoient en- gagés l'un à l'autre par une pro- mefTe mutuelle de mariage fous peine de trente mille livres de dommages pour celui des deux qui fe dédiroit , un autre du Sieut de S. Jory , Procureur du Roi au Bailliage de Meudon , contre le Sieur Lamet , Avocat aux Confeils du Roi , Baillif du même Siège , accufé par ledit Sieur de S. Jory de ne pas tenir audience aullî fouvcnt que les Loix le requièrent. Quant au premier Mémoire il s'y agit d'une jeune perfonne de i8 ans, qui à lë ans avoit époufé un homme de ^5 ans , & qui ctoit aveugle , lequel peu après l'accufa d'adultcre. Le fécond a pour objet de faire condamner la Demoifelle C. fille majeure , à payer la fom- me de n ente mille livres , pour s'ê- tre dédire de lapromeîTe de maria- ge qu'elle avoit faite au Sieur de S. Jory. Le troifiéme tend à obli- ger le Sieur Baillif de Meudon , à fuivre dans l'exercice de fa Charge ce qui eft porté à ce fujet par les Ordonnances. Ces Mémoires font écrits avec beaucoup de feu & de vivacité, & ceux qui aiment les traits vifs & picquanrs y trouveront bien des articles à leur goût. Dans le pre- mier Mémoire , c'cft la jeune Da- me elle même qui parle , & fur ce qu'un jeune homme qui lui étoit venu rendre vifite dans un tems de pluye &c qui le lendemain avoit en- voyé q^ucrir fon manteau à neuf ES SÇA VANS, heures du matin , étoit une des plus fortes preuves qu'on alleguoic pour la convaincre d'adultère , elle répond que (î un foupçon de cette nature trouvoit grâce dans le mon* de , la réputation des femmes dé- pcndioit bien-tôt de la pluye & du beau tems. Le refte de la Pièce eft rempli de traits à peu- près fembla- blés. Mais voici de la part de la jeune Dame une imprudence que fes accufateurs ne manquèrent pas de bien faire valoir contre elle. » S'amufant un jour à vifiter dans y> un grenier fa provifion de fruits, » elle jetta par la fenêtre des pom- » mes pourries. Une de ces pom- >• mes tomba fur une fonnctte qui "fervoit pour l'appartement du » mari. Le fil d'archal ébranlé fie » mouvoir dans la chambre les an- » neaux à travers lefquels il paiToir, » le mari qui étoit alors avec un P. » Auguftin & un Domeflique, leur » demanda qui fonnoit î L'un & «l'autre difent n'avoir touché à » rien ; le voilà aulTi-tôt faifi de » frayeur & fur le champ il refout » de quitter une maifon où il croit » que les efprits reviennent. Bien- » tôt après cet événement que la » Dame avoit préparée fans le fça- » voir , elle entre dans la chambre n de fon mari , qui lui fait une lon- n gue hiftoire du prodige arrivé, & » déclare qu'il veut aller demeurer » ailleurs. La maifon étoit fi in- » commode & fi trifte que la Da- = me ne put fe fçavoir mauvais gré » d'avoir fourni les incidens qui » obligeoient fon mari à déloger, »mais comme les efprits ne rc- JUIN » muoient plus , reniprcfTenient ») de changer d'habitation diminua. » Li Dame fe fouvint qu'il y avoit » encore dans le grenier du fruit » gâté , Se elle recommença alors K à dcflein ce qu'elle avoit fait la » première fois fans intention. Elle avoiie ici de bonne foi que pour le coup elle vifa à la fonnette , & l'on délogea. La Dame joignit enfuite d'autres rufcs à celle-là , pour faire accroi- re à fon mari que véritablement les efprits revenoient dans cette mai- fon , mais les précautions qu'elle prit pour n'être pas découverte la décelèrent. Le mari en fureur , cherche à la tuer , elle fe réfugie dans un Couvent , on reclame contre elle l'autorité des Loix & la févétité des Ordonnances pour avoir voulu faire peur des efprits à fon mari. La Dame qui fait au long ce récit en prend occafion de plai- fanter : je voudrois bien fçavoir , dit-elle , fi les Loix & les Ordon- nances ont prévu un cas fi fingulier, & quelles peines elles prononcent contre une femme de iSans, at- teinte & convaincue d'un attentat fi noir. Nous fupprimons le refte du Mémoire , l'expofé qu'il en fau- droit faire pour en donner une idée complette nous meneroit trop loin. Nous rapporterons feulement au fujet du ftyle de la Pièce , ce que la Dame déclare d'abord U- deffus. » Après avoir , dit-elle , inutile- » ment mis en œuvre ce que j'ai ^» cru de plus capable de toucher . 1 7 5 y. 5 » ? » mon mari , je fuis contrainte de » défendre ma réputation par les » voyes d'éclat qu'il a prifes pour "l'attaquer. Mais avant que cî'cn- » trer en matière , je voudrois rc- » gler avec moi-même deux chofes «délicates qui font ks égards que jjje dois confervcr encore pour 3) mon mari , & la manière detrai- » ter des faits ou ridicules, ou fcan- >3 daleux , dont il faut que je parle. » Si je prends le ton férieux , je pa- » roîtrai de mauvaife humeur , on «dira que je traite impitoyabJc- » ment mon mari ; fi j'écris avec j> quelque forte de gayeté on me » reprochera que je raille , & que » cela n'eft point en fa place; mais » enfin comme l'embarras eft égal » des deux côtés , je crois devoir » prendre le dernier parti. A coup » fur ilennuyera moins , & j'ai in- » terêt qu'on life mon Mémoire. Le fécond FaSlmn pour le Sieut Louis de Ruftaing de S. Jori , cft écrit comme le précèdent avec beaucoup de feu. Nous en difons autant du troi- fiéme. Quant à l'article des maximes de morale que nous avons dit être contenues dans ce Recueil , elles font toutes plus inftrudtivcs & plus intereflantes les unes que les au- tres , en voici quelques exemples pris au hazard. Ne farter point de fit. » Il eft difficile de beaucoup par-; » 1er de foi -même , fans tombei p_ dans le lidicuk. Se loiier, c'cft 3 14 JOURNAL DES SÇAVANS, » extravagance i fe blâmer, c'eft »> douleur, c'cft couraj^e &: force "folie : la vanité ouverte attire le wd'efprit. Nos malheurs , quand n mépris , l'excefllve humilité eft »> on ne les voit pas , font prefque » toujours fufpedle d'un orgueil » comme s'ils n'étoient point artU M fecret. » vés. Ne point négliger Us petits défauts. Fuir toute affsHation, i» Il y a des bagatelles , de peti- » tes négligences , dès geftes , des » manières , de mauvaifes habitu- » des , qui provoquent i'averfion. » Il eft aifé de s'en coniger , &C » honteux de ne le pas faire. Se plier aux ufiges. » Le langage & le goût chan- pgent, il faut s'ycontôrnier. Ac- » Côniniodons - nous du prcfcnt, j> quand même le pàffé nous fem- » bkroit plusraifontiable. Ne point négliger [on eX'teyiêUr. ^ Il y a dans le port , dans le re- " gard , dans la démarche , une » certaine autorité qui ne cedc » point à celle de la parole ; ce ca- » raftere de grandeur qu'on appor- » te eh tiaiffanr , ne vieillit jamais , »fi on tle l'a point négligé étant » jeune. Citchêr fes malheurs. » Ne publiez point trop vos dif- » grâces : les plaintes ruinent le j> crédit ; elles touchent peu de » petfonnes , donnent du plaifir à » quelques - uns , nous attirent le » méptis des autres. Diflimuler fa » Rien ne défigure tant le mérite » & la perfonne quel'afFedation , » mieux on s'acquite d'une chofe , n plus il faut cacher le foin qu'on » apporte à la bien faire. Ne point contredire. y> Ceux qui fe plaifent à contrc- »dire, ne font point faits pour le n monde , puifqu'ils ne peuvent » s'accorder avec les aunes. Vou- >' lez-vous conferver la paix avec » ces gens là; abandonnez la dif- >> pute avant qu'elle s'échauffe ; » toute la gloire vousreftera com- * me au plus fage. Connaître ceux à ^ui l'on parle. » La converfation eft l'exercice » le plus ordinaire de la vie , & ce- » lui de tous où l'on fait le plus de » fautes : le moyen d'éviter les M plus confiderables , c'cft défaire "comme les Joueurs d'Echets, de » bien conlîderer comment le jeu » eft difpofé , avant que de remuéH » aucune pièce. "Beaucoup pefer fes réfolutions. >> Dormez fur ce que vous avez » à faire. Vous ne ferez point éveil- JUIN » lé par une chofe imprudemment • faite. Pcnfer avant que d'agir, » c'eft fe mettre à portée de tous » ks évenemens ; ne penfcr qu'a- ie près avoir fait , c'eft courir après »des excufes. N'ttre point créMe, » C'eft une chofe très-ordinaire a» de mentir ; c'en doit être une » très-rare de croire. Mais fi vous » doutez de la bonne foi de celui » qui parle , gardez-vous de lui en >» laifler rien entrevoir ; ce feroit • joindre i'offenfe à l'impolitefle. » Il y a des menfonges dans les ac- » lions , comme dans les paroles, »> & cette tromperie eft plus perni- » cieufe que l'autre , plus fédui- » fante , plus difficile à démêler. » Tel nous perfuadc par fes manie- » res , qui nous rebuteroit par fes » difcours. Pour n'être point la du- » pe des dehors gracieux Se prcve- " nans de ceux qui s'attachent à "nous, il faut pénétrer ce qu'ils «gagneroient à nous fcduire. » Moins ils efpercnt de notre ami- » tié , mieux nous devons préfu- » mer de la leur. Se borner dans fes études. » L'avidité de tout apprendre » cft un obftacle au fçavoir. C'eft le » malheur des gens univcrfels , de » n'exceller en rien , pour vouloir • exceller en tout. Parler peu. » Apprendre à parier , cft l'ctu- .1755-. iix » de de nos premières années ; ap- » prendre à fe taire doit être celle » de toute la vie. L'opulence efl l'écueil de la verni.- _ »Vous defircz de grandes ri^ »chelTes, voici le chemin que vous » ferez , fi elles vous viennent. » Du neceiïaire vous paflèrez au » commode ; du commode au fii- " perflu , du fuperlîu à l'excès , de » l'excès au crime. Craindre les applandijfemens. » Défions - nous des loiiangcs »»que l'on donne à notre vertu, à «notre pieté , elles nous accoûtu- » meroicnt infenfiblement à nous » élever, avec un dédain faftueux , » audefTusdes perfonnesque nous » croirions moins parfaites que » nous -, & bien-tôt nous pafTerions » pour des dévots artificiels, qui 3j font plus méprifablcs , & plus » hais , que les libertins. Nous avons remarqué que ce Recueil contenoit divcrfcs Lettres^ en voici une fur un fujcr qui inte» reiTe trop de perfonncs , • pour qu'on ne foit pas curieux de la trou- ver ici. Lettre de l'auteur à une Dame ijiii voulait le marier. Voici , Madame , mes reflexions fut le mariage avanraj^cux que vos amis vous ont propofé pour moi. La Demoifelle , dit on , cft jeu- ne, jolie , vive , fpiruu,<-lle & fjgc,. ■}i6 JOURNAL D clic a destakns agréables , comme h Mufiqvie Si la danfe , & avec ce- la plus de vinj;t mille écus donc elle eft maîtrelfe , puifqu'elle n'a ni père ni mère. Voilà fans doute, un très bon parti , 8c c'eft parce qu'U eft trop bon qu'il ne me con- vient pas. Je m'explique. La Demoifelle n'a que dix-fept ans & j'en ai 40. Il me faut à mon âge une femme Se non une maî- trefle. Je me garderai bien de pren- dre une belle enfant dont il faudra que je fois tout enfemble , l'amant Se le précepteur. Je veux époufer une perfonne qui devienne mon amie & monconfeil, foit quej'a- gilîe, foit que j'écrive , qui nes'en- nuye pas de me voir très alFiduà la maifon , y manger très-regulicre- ment, me coucher de bonne heure, & me lever matin , une femme qui préfère le commerce folide des per- sonnes raifonnables que j'aime , aux airs btuyans des gens à la mo- de que je hais , qui aime le plaifir avec choix Se avec goût , qui ne le refufe point qviand il s'offre , & qui ne coure point après, qui foit pieu- fe fans humeur , fans bruit , fans fracas , fansfcrupule , fans grima- ce , fans fingularité , qui règle fa dépenfe par la modeftie Se fon CECononiie par la bicnféance : qui employé fes épargnes à obliger nos amis , Se h fouhger les malheu- reux : qui prudente & attentive à ma conduite , falfe la guerre à tous mes défauts, d'un air plus badin que dogmatique , qui douce Se docile reçoive avec amour les con- feils que je croirai lui pouvoir ES SÇAVANS, donner. Une femme qui fans être Auteur, ait affez d'efprit pour Je devenir , que je puifTc croire & fuivre dans les critiques qu'elle me propofera -, car je lerois plus cu- rieux de faire palfcr mon nom à la pofterité par de bons Ouvrages d'cfprit, que par des fils qui désho- noreroient peut-être ma mémoire. Vous voyez , Madame, par tout ce que je viens de vous dire , que la perfonne qu'on me propofe ,' toute aimable qu'elle eft , meuble- roit mal la maifon d'un Philofophe comme moi , qui ai fccouéle joug des préjugez qui cmpoifonnent notre fiécle , &c. Voici une Lettre fur un fujeî bien différent , laquelle ne plaira peut-être pas moins , elle eft placée dans le Recueil avant celle que nous venons de rapporter , mais l'ordre n'y fait rien , nous la rap- portons comme elle nous eft venue fous la main. Des Pièces mêlées ne fe lifen: pas de fuite. Lettre de l'yiuteur en envoyant fes Poëjiei a un ami. Vous voulez lire quelques-unes de mes Pocfîes , en voici : car je chante quand on m'en prie. Il n'appartient qu'aux gens qui excel- lent , de glacer le monde par des refus , qu'ils nous donnent à la vé- rité pour de la modeftie , mais que je n'ai jamais pris que pour une aifez platte minauderie de i'amout propre. Voici donc de mes vers , puifquc vous en voulex voir. Ils vous prou- veront JUIN, veront que je ne fuis pas Pocte , Se c'eft une preuve que je ne fuis point du-tout fâché de faire. Il ne me reftera que la qualité de vcrfifi- careur, & peut-êtie encore de verfi- ficateur profaïque : mais je ne de- fire rien de plus , je fuis content de n'être que cela. Et voici comme je raifonne : La Poëfie n'eft bonne qu'autant qu'elle renferme des penfées con- venables au fujet que l'on traite ; &C toute penfée , foit héroïque , foit comique , doit toujours être ren- due d'une manière naturelle. Cléopatre dit à Ptolomée fon frère , lui parlant de Ccfar qui arrive : Allez, lui rendre hommage & j'atten- drai lefun. Quoi de plus noble, de plus fier, de plus élevé que ce fentiment-là.'" &: quoi de plus uni que l'expref- lîon ? )e défie h profe d'être plus fîmple. Prenez-y garde , tous les beaux vers des Tragédies de Corneille & de Racine , je veux dire ceux qui frappent dans ks (ituations impor- tantes , font profaïques comme ce- lui- là. L'Auteur de la Lettre lai (Te ici le tragique qui n'eft pas de fon ref- fort , & il palTe au comique. Il ran- ge fous ce titre tous les fujcts fa- miliers > il remarque que lorfquc Defpreaux dit , en parlant de lui- même : Souvent j'halfilU en vers une maligne vrofe. Juin, 175 ;• m C'efl par- lit que je vaux , fi je vaux quelque chofe. Ce font -là deux lignes d'une profe très - fimple , très -coulante, laquelle compofe deux vers que Dcfpreaux,avec raifon, nous donne pour bons. Notre Auteur conclut de - là qu'il faut que les vers foient d'un ftile aifé , naturel , fimple comme la profe même , & que par confc- quent la poéfic qu'il donne dans ces Oeuvres mêlées , étant toute profaïque , il peut dire comme Defpreaux : C'efl par-là que je vaux , Jî je vaux quelque chofe. Mais il n'eft pas auftî facile qu'on fc l'imagine d'ordinîire , de faire de bonne profe , delà caden- ce &c de la rime , i?c c'eft ce que notre Auteur fe propofe de mon- trer par l'exemple même de Def- preaux , car il prétend que ce Poè- te ne foûtient pas toujours cette ad- mirable fimplicité qu'il exige non feulement des autres , mais de lui- même, & pour le prouver il com- pare ces deux vers de la neuvième Satyre du même Poëte : Ccji k vous mon efprit à qui je veux parler , Vous avez, des défauts que je ne puis celer. Il les compare avec ces deux au- tres qui les faivent immédiate- ment. Te 5,8 JOURNAL D yjlkz. & ifop long- terns mp longmtemt ma liche corn- plaifance ^£ vos jeux criminels a nourri l'info- lence^ Car , continue notre Auteur , , ce n'eft plus là de la profe , il y a »dans ce ftyle une élévation peu y, judicieufcqui ne fympatife point :„ du tout avec la fimplicité des ^ deux premiers vers : les deux qui V fuivent rentrent dans le naturel : Mais pitifjue vous potif.z ma pa- tience à bout , Vncfiis en lavis , il funt vous dire tout. Notre Auteur le répète , cette fimplicité , dit-il , fi chérie de Def- preaux , efttrcs-difficile à acquérir, puifquc malgré l'trtime qu'il en faifoit , on la remarque rarement dansfes Ouvrages. Je me fouvicns à ce propos , continue-t il , » de >, ce que lui dit Chappelle, ce Cri- » tique Solide & délié. Defpreaux »..ie prelTant un jour de lui dire ES SÇAVANS, » avec tranchife ^ ce qu'il penfoit » de fes Satyres , il lui ht cette ré- » ponfe finguliere : T» es un bon hmuf qui fait bien [on Jîllon. » Voulant dire que les vers de » Defpreaux fentoient le travail Sc »la fatigue v ce qui ne convient 2> point au ftyle fimplc & naturel. C'el' encore, à ce que remarque notre Auteur , ce que reproche à M. Defpreaux un lUulire contem- porain dans une belle Satyre, dont voici un fragment. Boileau > non , non , Boilean ne fçait tins que médire : Ç>mi(]u"il [oit ajfez. vieux , fa Mitfe d'aujourd'hui , De vingt ans pour le moins , efi plus vieille que lui , // veut polir fin vers , qu'il croit en- cor Jublime , Mais c'efl en vain , fin vers efi plus dur que la lime. Notre Auteur conclud de tout ce qu'il vient de remarquer , 1°. Qu'on a tort d'employer le mot de profâïque pour condamner la mauvaife poefie , & que par confequent oneft mal fondé, pour faire entendre le mépris que méri- tent certains Auteurs , de dire que leurs vers font de la profe : 2°. Qiie ces vers au contraire ne font mauvais que parce qu'on n'y apperçoit point du - tout de profe. Effedivemenr , continue- t-il, j'ai piis plaifir plus d'u- ne fois à dépecer certaines Pie- JU I N ces ée poëfîe ; que l'on traitoit de profaïques , & je n'y ai point du- tout trouve de proie , c'eft-à dire , qu'ôtant les inverfions , déplaçant la rime, fupprimant la mefure pour réduire le tout au langage que l'on parle pour fe faire entendre , il ne m'a pas été poflîble de mettre dans les phrafes , un fens fuivi , à moins que d'y changer des mots, d'y en tctrancher d'autres ou d'y en ajou- ter. Notre Aateur fait à ce fujet une demande qui paroît bien fenfée-, c'eft d'où peut venir la ridicule ntanie d'admirer en vers ce que l'on n'entend pas en profe > Scroit- ce , dit-il , que nous fommes plus fatistaits de notre intelligence quand on nous prefente des choies obfcures , que nous ne le fommes de notre cfprit lorfqu'on ne lui en xnontre que de raifonnablcs ? Qiioiqu'ilen foit , notre Auteur déclare qu'il ne fçait comment qualifier les Poëfies qu'il donne dans ce Recueil ; il avoiie que ce font de pures bagat intégral de yi.Stone^ triomphent, «brillent, & paroiffent dans tout » leur beau. Mais enfin , de quelque utilité que puiife être le calcul, il faut convenir de bonne foi , qu'en tou- tes fortes de Sciences & d'opéra- tions d'efprit , c'eft toiàjours le gé- nie qui fait & fur lefqucls s'élève enfin la Sta- »xw du grand Defcanes , avec cet- S SÇAVANS, » te infcription épiphonématîquc; >i alors on ouvrit Us yeux , CT* on s'a- j5 vifa de f enfer : ce qui atteint pref- » qu'au jtlutt terra. Car , en bon » François , cela veut dire , qu'a- » vant Defcartes , les hommes , » hommes Romains , hommes "/Grecs -, les Arijtotes , & les Pla- ntons ùm difficulté; mais les C/Vf- » rons , mais les Virgdes , mais les 3> Homère s ^ mais \zs Démofthènes , » &c. ne s'avifoient pas d'être » hommes, hommes raiionnables , » ni prefque d'être animaux. Car ») les animaux ont des yeux , & » malgré V-/JutoTnat'tfme Cartéfien , » s'avifent quelquefois de les ou- s> vrir pour faire au moins fcmblant » de voir. Mais après Defcartes, pet- » mis à chacun d'avoir des yeux Sc »d'enufer, pour tourner toute la = Géométrie en calcul , comme » toute la Phyfique en hypothéfc.,^ "Les Anciens n'avoient enfanté 30 que de ferviles Copiftes , & Def y cartes n'enfanta que de fublimes » Inventeurs. Quant au nouveau calcul , dont MM. Leibnitz. & Newton font re- gardés comme les pères, ils né l'ont jamais élevé au-delTus de la métho- de ancienne , & M. Neivton en particulier en a parlé avec aflcz de mépris , jufqu'à le traiter de Suplé- ment de génie ,de rcflourcemême de petit génie , & il ne s'en eft prefque point fervi dans fon Livre intitulé : Philofàphia Naturalis prin- cipia Adathematica .• ce qui eft (1 vrai, que dans ce Livre compofé de 5 10 pages pour la première Edi- tion , ce n'eft qu'au milieu de la JUIN Z50' page que paroît le fameux Lemnie Datkfluente ^ 6cc. qui con- tient le principe immédiat ducal- cul , foit dircd , foit réciproque des fluxions , lequel y eft plutôt géométriquement démontré qu'a- ralytiquement déduit ; & que l'Auteur dans la fuite procède uni- quement félon l'ancienne manière à'Euclide , A'j^pollonim , A'-^rchi- méde , qui eft la feule vraiment géométrique , qui fente le génie , & qui parle à l'cfprit. Or c'eft le génie , la méditation , le raifonne- ment qui inventent le calcul com- me tout le reftc : & l'on doit ad- mirer Defcartes , non pas précifé- ment pour nous avoir donné du calcul , mais pour l'avoir inventé, enrichi de fes découvertes , &: arti- ftement appliqué à la Géométrie. L'Auteur du Difcours Préliminai- re prétend même que ce tut con- tre fa propre inclination que M. Newton fe prêta au calcul , pour fe conformer au goût régnant , & ne pas fe voir enlever toute fa gloire par M. LeibnitT^, qui s'ctoit tota- lement livré au calcul. » Et alors » [ continue-t-on ] la Géométrie M ne fut plus qu'un reflaffement de » Lettres & de Symboles , de • Tables & de Formules , de Ta- 3» rifs , en un mot , & de Comptes 1» faits. On auroit pris le Cabmet » d'un Géomètre pour un Bureau sodé Finances , ou pour un Com- » ptoir de Commerce. Encore Çi a> c'eût été un vrai Commerce ou » une bonne Finance , la réalité » d'un calcul effediif dédommage- » roit le coeur de l'humiliation de » l'efprit. ; 17? r- 325 On compare le calcul dans k Géométrie aux troupes auxiliaires dans les Armées Romaines. » Tan- » dis que ces troupes [obferve t- » on ] ne furent qu'auxiliaires , 5c »> le tiers tout au plus d'une Lé- JBgion, Rome s'agrandit &: con- » quit l'Univers. Mais la parefTe ga- » gna les Légions avec les ridielles » des Nations. On dépofa donc le » cafque , îa cuirafTe & le courage, » & les troupes étrangères & bar- "bares, les Huns, les Gots , les » Vifigots , les Arabes , fous le î> nom d'auxiliaires , gagnèrent les » armées , les remplirent , les- » anéantirent •■, Si le tiers devenant » le tout, tout fut réduit à rien, » & il n'y eut plus enfin d'Empire » Romain. C'eft le train ( conti- »nue-t-on) que prend la Géomé- " trie , depuis qu'elle eft mctamor- 39 pliofée en calcul Arabe & prcf- »queOftrogot, & que le tiers eft y devenu auffi le tout. La tête pref- » que délivrée du foin de penfer , » devient parefteufe , ôc l'efprit M laiffe aller les doigts. On fe rcpo- I) fe de tout fur des formules ; on » fe contente de démonftrations à X pojleriori ^ qui ne font juger du » vrai des chofes que par l'évene- » ment , & non par le principe 5> intérieur & par l'idée. . . . Au dé» » faut de l'évidence , on fe paye » fort bien de la certitude , comme » le Quinze-vingt , qui fubftitue le » toucher au coup d'œil , mais » malgré lui , « & c'eji un abus [dit- on ] <^ui -perdra enfin la Géométrie ^fi en perjîfle de s'y opiniâtrer. Les Géo- mètres modernes [remarque-t on] ; 5^o JOURNAL D conviennent tous les jours i°. Que le calcul foulage l'efprit en le dé- chargeant du foin de penfer j i°. Que les démonftrations des nou- veaux calculs ne font jamais qu'di fofterion ; }°. Que dans les conclu- fions de la Géométrie moderne , l'efprit aime à fe retrouver avec celles de l'ancienne , qui le ralTu- rent dans l'incertitude où le laif- fent les nouveaux calculs , lefqucls ( de l'aveu même de M. de Fome- tielle dans la Préface de fes Elé- mens ) ne font guéres en Géométrie , ^He ce tju'ejl l'expérience en Phyft^ue, De - là [ l'Auteur du Difcours Prchminane ] paiïe à une féconde caufe de l'cbloililTement des mo- dernes en faveur de leurs calculs ■, &c cette caufe ( félon lui ) furent les découvertes de Çregoire de faim Fincem , contemporain de Defcar- tes ^ & qui enrichit la Géométrie d'un nombre inconcevable de vé- ritez nouvelles , de vues profon- des , de recherches étendues , de principes féconds , de méthodes même générales & très - régulières. Toute la Théorie de ce Géomètre fut donc revêtue du nouveau cal- cul , 6c fi bien mafquée , que le re- nouvellement joint à la nouveauté réelle fit paroître le calcul comm.e un Pérou inépuifible. D'un autre côté Archimede , yipollonius , Eit- clide , tout fut refondu , & reprk un air de nouveauté par le moyen du calcul. On tait à ce propos cette reflexion finguliere , Que la Géo- métrie moderne , dans fon propre caraa:ere& par i:i forme toute pro- blématique , efl une Géométrie- ES SÇAV ANS, Pratique , LiqueUc par confequent fuppofe une Géométrie-théorique, d'où elle ell cvidement déduite par voye de corollaire : au lieu que la Géométrie ancienne étoit prefque toute thcorematique. Cependant [ pourfuit - on ] h Géométrie mo- derne nullement théorique par fon calcul , n'eft ni pratique ni prati- quable par fon calcul algébrique ^ analytique , infinitéfimal : & la pratique même de l'Algèbre & de i'Analyfe ne peuvent jamais pafleï que pour une très haute , très-fu- blimc , très-quinteffenciée & très- abftraite fpécuhtion. On fc propo- fe donc ici de rendre l'hiftoire du calcul un peu pluscomplette qu'el- le ne l'a paru dans la Préface de i'Analyfe des infiniment-petits , & parla de rendre juftice à ceux qui fans cet étalage de calcul, n'ont pas lailfé de le perfedionner beau- coup, ainfî que la pure & faine Géométrie. Les fedions coniques en font (diton) comme le corps folideSc fubftantiel , étant le modèle de toutes les autres courbes , & le grand objet de tous ks profonds Géomètres. Apollonius en mérita le titre , pour avoir ébauché la Théorie de ces courbes. Mais Gré- goire de S. Fincem porta fi haut cette Théorie , que fon iiécle en fut ébloui , & jufqu'au point de le méconnoîtie lui-même. Nous avons perdu au moins la moitié de fes Ouvrages •> mais ce qui nous en rcftc remplit encore trois Volumes in-folio^ qui contiennent près de 3000 propofitions , dont près de JUIN 15-00 roulent fur les Serions coni- ques. Un tel Livre étoit bien cligne de la qualification que lui donne le ccichtc f^tviani , d'Ouvrage At- lantique, in Opère ^tlantico fnm- tni Geometra Cregorii a S. VtnceH' tio j &c. Il nous y donne non feu- lement quantité de découvertes , mais encore les méthodes , le génie dcrailonnement & peut - être auffi de calcul dont il s'eil fervi pour les faire , Se dont on s'eft fervi d'après lui. Ilavoit ( dit -on) principale- ment étudié les anciens , en vue de découvrir leur Analyfe-, & il avoit «u befoin de la deviner fouvent ôC prefque de la créer de nouveau, Audi avoiioit-il que la Géométrie , jufqu'alors , étoit fort imparfaite , Se que l'artifice des proportions étoit le point principal fur lequel la Géométrie demandoit à ccre portée plus loin. Ce fut donc pourfuppiccr à ce défaut qu'il compofa le Livre des Froportionalitez. en 172 propofi- tions toutes nouvelles , où il nous apprend à faire entrer dans les com- paraifons ou analogies géométri- ques , les difproportions mêmes & toutes fortes d'inégalitez & de grandeurs hétérogènes , incom- menfurables & même incompara- bles. L'infini devint fon ob)et auffi familier que le fini , & il le faifit pât les deux endroits , par où le calcul le plus moderne l'a failî , e'eftàdire , 1°. dans le progrès in- terminable d'une féne infime -, 2°. en lui-même dans le partage d'une grandeur quelconque en parties in- finiment petites. Son Livre des Séries . »7M. Î3Ï Géométriques en 177 propofitions toutes de lui , ell une méthode d'invention , qui a fervi de fonde- ment à la principale moitié des nouvelles méthodes du calcul infi-^ nitéjtmd , comme fon Livre fit? duc- tu plant in planitm en 246^ propo- rtions fut la funencede la féconde partie des nouveaux calculs & pour le moins du calcul intégral ; ce Livre étant en effet comme un calcul intégral de tête ^ dont la méthode n'a été développée qu'à demi parle calcul intégral , & dont la partie du génie n'a été alTujetrie au calcul que dans le Traité de M. CLiirattt fur les Conrbes à double courbure. Telles font les nouvelles méthodes géométriques de Grem- re de S. Vincent , qui frayèrent le chemin aux nouveaux calculs ; & qui le conduifirent lui - même à une infinité d'autres grandes dé- couvertes. De ce nombre furent , 1°. la quadrature de la parabole & de Ces divers fiegmens , tant extérieurs qu'intérieurs , faite fans aucun cal- cul & par le fimple raifonnemenC géométrique , en vingt ou trente manières différentes , & alors fou- vent , par une ou deux propofi- tions tout aulîi courtes que le pro- cédé du calcul moderne : 2"*. La fymbolifation de la quadrature de l'hyperbole avec celle du cercle , dont la redudion en calcul a com- blé de gloire les cinq ou fix Géo- mètres les plus célèbres du dernier fiécle: 3°. La quadrature d'un ef- pace infini rentermé entre deux hyperboles concentriques: 4°.Tous: 332 JOURNAL DE les fondemens des logarithmes hy- ■perboltqites , pôles en épuifant la matière des ejuadnlatéres & feclenrs hyferholicjues ; fi importante d'ail- leurs pour la rclolunon des problè- mes Phy/tco-Mathématit^ues: Ç.La fymholifation de la Jpirale d' Ardji- méde avec la Parabole d'y^polloniits^ qu'on peut regarder comme la dé- couverte favorite de Grégoire ; & que celui - ci par excès d'admira- tion pour les anciens ^ foîitenoit n'avoir pas été \gnoxkç à' yirchimé- de j quoique les plus habrlcs Géo- mètres protcft .iFent qu'Archiméde n'y avoir jamais pcn(c : procédé f'obferve-t-on } tort différent de la conduite de ceux , qui en fe parant de ce morceau fublime , n'ont tait aucune mention , ni d'^rchimede , ni de Grégoire : 6°. La cubature des onglets & la quadrature de Uurs fur- faces a, double courbure : découverte incomparable , pour la force de l'invention : 7°. Lafymbolifation de l'onglet infcrit dans un prifme & cir- confcrit à une pyramide , avec la Sphère infcrite dans un Cylindre & Circonfcrite à un cône : morceau[dit- on ] qui pour le moins va de pair avec la découverte d'y^rchiméde fur la comparaifon des trois derniers corps, dont il voulut qu'on ornât fon tombeau : 8"'. La grande difpu- tc fur l'angle de contingence , déci- dée en faifant voir que l'angle du rayon avec la circonférence du cer- cle étoit droit , & le même par confequcnt que l'angle du rayon avec h tangente: ^°. La duplication du Cube j problème infoluble par la régie 6i le compas , refoiu de 10 5 SÇAVANS. 6 30 manières différentes par la confttU(5tion de deux fedions coni- ques : 10°. Lifolittton du problême de la tnfeQion de l'angle , par le moyen d'une férie , qui eft d'un merveilleux artifice , & que le cal- cul a beaucoup remaniée: II''. Cel- le du fameux Problême de Zenon ^ comparable au nœud- Gordien ^ &c furnommé V Achille ^ pour fon ex- trême difHculté , &c. Nous nous contentons pour abréger d'indi- quer fommairement ces divers Ou- vrages de Grégoire de S. Vincent , Sc nous renvoyons pour les reflexions & les obfervations particulières fur chacune de ces découvertes , à l'Auteur même du Difcours Préli- minaire dont nous faifons l'Extrait. II s'étend enfuitc fur les éloges que Grégoire a reçus ( de M. Leib^, nitz. , entre autres ) & fur les criti- ques & les chicanes qu'il efluya de fon vivant , & dans Icfquelles ( dit- on ) fe doit trouver le vérita- ble tonds des louanges qui lui font ducs. Mais [ dira quelqu'un ] la Géométrie devroit-clle être fujettc à des chicanes ; On rt'pond, que ce fut alors qu'elle commença de l'être , parce qu'elle commença à être une fcience de calcul ; cat [ajoiite-t-on ] tout e[t lié , & la chicane l'a toû ours été , même en Géométrie, avec le calcul, dont Defcartes , qui venoit de le répan- dre , a été toute fa vie la première vidlime. Grégoire de S. Vincent fut encore plus vivement attaqué, au moins fur la Géométrie , par Mei- bom , Sylviiis , Lipftorp , le Perc Metfenn: , Rabervai , le Père Léo^ tand JUIN, taud , Hughens , & Defiartes lui- même ■■, dilputes , dont Jynfcom &c S^najfa Difciples de Grégoire , ibù- tinrcnt tout le poids fous les yeux de leur maître , qui ne daigna pas i'y prêter ouvertement. On a foin de nous peindre ici les divers carac- tères de tous ces Antagoniftes , & fur-tout du P. Merfenne , grand Conciliateur ^ & dont les négocia- tions littéraires aboutiflbient ordi- nairement à quelque brouiilcrie ir- réccnciliable , comme entre Def- tartes & Pafctl. On nous taitcon- noître en détail les diffcrcns fujets fur quoi rouloient toutes ces criti- ques , èc le peu de fuccès qui en re- fulta pour chacun des aggrelTeurs en particulier , pendant que l'un des défenfeurs de la Géométrie Grégorienne [ Sarajfa ] en recueil- lit une très-belle découverte. On difcut£ ici principalement i'accufation de plagtartfme intentée à Grégoire par le P. Aterfenne , au fujct de la méthode des indivifibles de Cavallieri, qu'il prétendit avoir trouvée dans l'Ouvrage du Géomè- tre Flamand fur la quadrature du Cercle. On foûtient ici que cette méthode n'y cft pas , & n'étoit pas digne d'y être; ce' qui eft ii vrai que perfonne, hors le P. Aferfenne^ n'a dit l'y avoir trouvée. Cette mé- thode [ félon M. Leihnttz. ] n'étoit qu'une VI aye enfance , un bégaye- ment de la Science renailTante. A ia vérité elle étoit ingénieufe, mais fi embrouillée , fi peu Géométri- que , fi philofophique , que tous les Géomètres la rejettercnt ; au Jicu que celle de Grégoire a palTé tout d'un coup. En forte que tou- tes les fois que les nouvelles mé- thodes font prefentées dans le point de vue de Grégoire de S. Vin- cent 5t à'Archiméde , elles ne fouf- frcnt aucune conrradidion de la part des plus habiles Géomètres ; au lieu que fi elles n'offrent que le côté philofophique des indivifi- bles , aufli - tôt [ dit - on ] tout le public & plufieurs Géomètres fc révoltent, & crient au paradoxe! à la contraditflion ! à l'crreut! Après tout ( continue-ton ) les deux métho- des font la méthode d'Archmêde , l'une manquée , l'autre élevée plus haut. On joint ici au fentimr-ntdc M. Leibnitz touchant les indivifi- bles de Cavallieri , celui de M« Newton , qui ne leur efl: pas plus favorable ; & on fait voir qu'au- tant que la mithode de celui ci s'é- loigne de celle des indivifibles, au- tant elle a de rapport & de conve- nance avec celle de Grégoire; & c'eft de quoi l'on produit plufieurs preu- ves , fur lefquelles nous palTons pour venir à un hit qui paroît dé- cififpour la juftification de Grégoire au fujet de I'accufation de plagia- rifine. Ce fait , allégué par Aynfcom ' l'un de fes Apologiftes , eft que le Livre où fe trouve la grande & pre- mière méthode de duElu , fut com- pofé en lézi. envoyé à Rome en \6n,. fa méthode foi'itenue dans une Thcfc imprimée en 1634. d'où il fuit que la méthode qu'on pré- tend avoir été prife de Cavallieri , a été compofée 14 ans , envoyée à Rome 1 2 ans , foûtenue en Théfe Xx 3Î4 J OURNAL D ^ publiée un an avant que celle lie l'Italie eût paru ; car fon Livre ne fut imprimé qu'en 1^15. Enfuire on nous par it delà dif- pute de Defcartes avec le Géomè- tre Flam-ind , engagée par Daniel Lipjiorp de Lubec , qui la foîitint avec alTcz peu de luccès pour lui 6c pour fon maître. 11 s'agilToit de la quadrature du Cercle fur laquelle avoir écrit Grégoire , Se que Dejcar- tes regardoit comme la fourcc des erreurs où Grégoire étoit tombé. D'autre part , jiytjfcom défendit fon maîcre avec tout le zélé que peut infpirer une bonne caufe , & îbûtint que de cette prétendue fource d'erreur , il n'en étoit dé- coulé aucune dans l'Ouvrage en queftion. On s'efforce de juftifier ici les recherches de Grégoire fur la quadrature du Cercle , par l'exem- ple des plus grands Géomètres , iefquels y ont travaillé toute leur vie. Defcartes , prévenu contre cet- te quadrature , qu'il jugeoit im- poffible , même avec le fecours de fa nouvelle Géométrie , n'avoit garde d'accorder fon fuffrage à un Livre où il étoit queftion de cette recherche , & qu'il négli- gea même de lire à tête repofée , ce qu'il n'auroit pu exécuter en trois mois ; au lieu qu'il ne mit ( comme il le déclare lui-même ) que trois jours à le parcourir. Def- etirtes ne hit pas le feul grand Géo- mètre prévenu par le préjugé géné- ral de l'impollibilité de la quadra- ture. HuM. de la Géom. del'lnf.pp. 5 1 5. CT 14.) & qui ne pcrfuade pas notre Au- teur, lequel en allègue plufieurs raifons qu'on peut voir. Il prétend, qu'entre les Géomètres qui ont en- trepris de démontrer la polîibilité de cette quadrature , nul ne l'a ten- té avec plus defubtilité & de pro- fondeur qu'un Allemand ou Fla- mand, Difciple ou contemporain de Grégoire , de nommé Délia Fail- li , qui dans une fimplc Théfe de Mathématique a tait voir, que le centre de gravité d'un arc ou d'un fegmcnt circulaire étant donné , le Cercle fcroit quatre. On con- vient pourtant ici de bonne foi , qu'il n'y a pas plus de démonftra- tion géomctrique de la poflîbiiité , • « 7 î ;• _ i i y que del'inipolTIbi.'itéde cette qua- drature. On doit la regarder [ dit- on J comme le but particulier & précis de la Géométrie ; auquel on peut abfolument fe paffer d'arri- ver , quant à l'ufagc pratique, mais qu'on doit toû)ours fc propofer , puiique la Providence lemble y avoir attaché les autres découver- tes , & les avoir toutes 'emées fujt la route qui conduit à ce but au- quel il eft fi diflîcile d'atteindre. Mais en propofant ce but à ceux qui fe trouvent dans la vafte carriè- re de la Géométrie , on le tait en vue A' aiguillonner plutôt les fujil- lanimes , que à' encourager trop les préfomptiteux. Les premiers font les Géomètres habiles qui fcntcnt en etfet la difficulté. Les féconds font les petits génies , les demi Géomè- tres qui entreprennent la quadra- ture avec trop de confiance , qui s'imaginent que le hazard pourra bien un jour enfanter cette grande découverte, & que ce fera peut- être un médiocre Géomètre de bon fens qui fera le coup. On s'ap- plique à rétuter ici cette propofi- tion , qui a prefque pafifé en pro- verbe , tjue c'efl le hazard ijui fait les découvertes , & que celle dont il s'agit , fera peut-être due à quel- que ignorant en Géométrie. On prétend donc que chacun tait des découvertes dans fon métier & dans la Sphère qu il habite : Que cette Sphère a fes ditferens degrez d'élévation : |Qu'un dcmi-Gèomé- tre , par exemple, ou un Géomètre parefleux , feront auflr peu de ces découvertes j qui font le fruit d'u- X xij 35(? JOURNAL D ne parfaite connoilTance ds la Géo- métrie , d'une longue méditarion, d'un travail épineux -, tjuun homme oui fem à la Chine fera la découver- te des mines du Potojt : Qu'un Géo- mètre monté par fon efprit &:. pat fo fciencc au niveau de la quadra- rurCj peut bien ne la pas trouver , s'il ne la cherche pas , ou qu'il s'en écanrte fans qu'il s'en apperçoive : Qu'il peut au(n fort bien la trouver comme par hazard & fans y pcn- fer : mais que ce n'cfl jamais qu'un demi hazard , puifque la caufe uni- que & prccife de la découverte con- fiRe toujours dans le génie , dans la Science , dans l'attention de celui à qui elle s'offre comme fortuitement. Que pour trouver cette quadrature ou quelque chofc d'équivalent, il faut donc fe mettre à portée d'y atteindre , & ne laifTer au hazard que la dernière démarche, qui eft de ne rcconnoître la découverte qu'au moment qu'elle fe prefente, mais d'être en état de ne la pas manquer : Que pour fçavoir au ju- fte le degré de capacité requis pour arriver à une telle découverte , il faut déterminer à peu-près le de- gré de difficulté du problême : Que la quadrature de la lunule eft évidemment du premier degré : la quadrature de la parabole , au moins du fécond : la trifediondc l'angle & la duplication du cube , du troifiéme ; la Géométrie de Grégoire de S. fincent^ &c celle de tous les nouveaux Analyftes , du quatrième; d'où il s'enfuivra que la quadrature du Cercle fera au moins du cinquième oxdxe 4e difficulté. ES SÇAVANS; & que pour y atteindre , il faut pofTeder parfaitement ces quatre degrez de Géométrie. Ils paroiiTent [ dit-on "] approcher du cinquième fit un mouvement centripète &: ac- céléré , Apollonius enchcnllant beaucoup fur Enslide , Arch,mé:{f autant lant la Géométrie avec le calcul , i> & faifant déformais marcher de » pair, & comme en front de ban- » diere , ces deux efpeccs de trou- » pes , Légionnaires & Auxiliaires, 3» Infanterie & Cavalerie , armes » pcfantes & armes légères ■-, la 3» Géométrie au centre , & com.- » me au corps de bataille , & » le calcul comme fur les ailes , oii M à l'avant & à l'arriere-gardcj pour » ouvrir les chemins , pour ébau- 3» cher les idées , les détailler en- » fuite , en épuifer les corollaires , » & en quelque forte faire des pri- » fes S: achever la viâroire. «• La le(5lure , par exemple, de Ruhnd ^ de Defcartes , de Reynaud , niar- cheroit en même tems que les Li le plus d'être lu dans fon ylrithtuéri, que des Infinis , qui eft comme le précis de l'Ouvrage de l'autre. nMais [ dit -on en finiffant la » Préface ] peut-être feroit-il bon » d'avertir ceux qui feront bien ai- » fes d'épargner la multitude des » Livres , la longueur du chemin , » & la difficulté du travail , que 3» l'Ouvrage intitulé Alathématique » VmverfelU , abrégée, à fnfage & » à la portée de , &c. (dont on ne » penfoit point à parler ici , & » dont quelques perfonnes veulent » qu'on falTe mention ) renferme » tout ce qui eft neceftaire pourli- » re Grégoire , Archimède , j4pollo- n mus & Eucltde , dont il contient » un précis aftez étendu, &c. a. Qn,- a oublié d'avertir ici , qu'en 1700. [<;uM.Carré, de l'Académie R. des Sciences , donna une Méthode pour la tnefure desfuy faces, la dimen- vres du Cercle , de l'Elipfe , de la Jion des folides , leurs centres de pe- Parabole , de l'Hyperbole de Gre- fanteur , de percujfion & d'efiilla- goire de S. F'incent , préparés par la (ton par l'application du calcul inté- ieâure de M. de l'Hôpital gral , imprimée à Paris Jn-^'^. Peur être, en laiftànt le VReynand^ Quant à l'Ouvrage de M. Stone vaudroit-il m.ieux fe )etter dans fur ce calcul intégral , qui fait pro- V ArithmétitjHe des Infinis du célèbre JVallts , dans les Séries de M. Ber- noulli , dans les Infiniment petits de M. dt l'Hôpital , dans les divers morceaux de calcul de M.Neivton, & dans la féconde partie des Infini- ment-petits de noue M. Stonc , en- tremêlant cette ledure de celle du DuiÎHs plant inpianum de Grégoire & de tout fon fécond Volume. On remarque ici que de tous les Au- teurs utiles pour l'intelligence de prcment le corps de ce Volume } comme une pareille matière n'eft point fufceptible d'Extrait nous nous contenterons d'annon- cer ici que ce Traité eft partagé en huit Scdions , dont la première contient la manière de réduire les fraElions & les cjuamitez.fi)Hrdes enSi- ries infinies : la féconde enfeigne à trouver les intégrales d'une expreffion difflrentielle donnée : la troifiémo oâre un nfage de la Méthode des >'»■» 358 JOUHNAL D téçrales , four la quadrature des efpet- ces curvilignes : la quatrième donne l'ufage du calcul intégral pour trou- ver la reSiification des Courhes : la cinquième contient Vufage du cal- cul intégral dans la cubation desfoli^ des , & dans la ejuadrature de leurs furfaces : la Çxùkmc, Vufage du calcul ES SÇA VANS, différentiel & intégral , pour trouver le centre de gravité des figures : la. feptiéme , ^'t/age du calcul difieren- tiel & intégral , dans la, recherche des centres de percHJfion des figures : la huitième renferme la rejolution de divers problèmes , far le calcul différentiel & intégral. RERUM ITALICARUM SCRIPTORES, &e. C'eft - à - dire : Recueil des Ecrivains de l'Hifioire d'Italie , depuis l'ait 500. jufcju'à L'an 1 5 00. par Ai. Muratori , Tome XXll. A Milan, par k Société Palatine, iji^.in-fiol. col. IZ84. QUATRE differens Hifto- riens qui voyent le jour pour la piemiere foiscompolcnt ce Vo- lume. La première eltTrillan-Ca- raccioli , noble Kapoluvn donc on nous donne ici quelque •> Traitez fous le titre d'0pitjcnles. L'Editeur s'étonne qu'un Ecrivain de ce ca- radere , aullî recommandable par les agrcmcns répandus dans fes Ouvrages , que par la foiidité qui y règne, n'ait pas encore trouvé perfonne qui en ayent enrichi le Public. Nous apprenons de lui- même qu'il étoit déjà en âge d'homme , ôc même marié , lorf- qu'cpris du defir de s'inftruire , il commença à étudier la Grammaire Se la Langue Latine dont il n'avoit pour lors aucune teinture. L'illuftre Maifon de Caraccioli , originaire de Naples , eft depuis long - tems divilce en deux bran- ches , celle des Rou(n , d'où eft forti le Prince de Torella , à qui l'Editeur doit le Manufcrit fur le- quel cette Edition eft faite , l'autre qui eft furnommce del Leone , ou Pifqfùtio , ou même Suiz.z.ero , c'eft de cette dernière que naquit notre Auteur environ vers l'an 1459. il fut marié deux fois , & eut un fils de fon fécond mariage , mais oti ignore s'il lailfa de pofterité. CaraC" cioli qui avoit long - tems rempli des Charges confiderables dans fa Patrie , y renonça fur la fin de fes jours pour chercher un honnête xe-^ pos parmi les Lettres. On ne fçait point au jufte l'année de fa mort, mais on voit du moins par fes Ecrits qu'il vivoit encore en 1517. M. Murarori craint que les élo- ges que donne Caraccioli à Jeanne première Reine de Naples dans le premier de fes Opufculcs , dont nous rendons compte , ne foit un préjugé dcfavantageux contre Ja iincerité de notre Auteur. Là mé- moire de cette Princeffe eft d odieufe qu'il femble que ce foit entreprendre de laver un Maure ^ que d'elTayerde la purger des cri- mes & des horreurs dont tantd'Hi- ftorierjs qu'on a vus dans ceRecueil l'accufent unaninvment. L'Editeur JUIN avoiie que la même idée lui étoit ve- nue d'abord dans l'cfprit. Mais il croit ccpf iidant qu'on peut excufer Caraccioli fur ce que quelques-uns de ceux qui avoicnt pris le parri de Louis Roi de Hongrie j &c les Par- tifans de Charles III. qui ht mourir cette Pi incefle , ont pu ou inventer des calomnies contre elle , ou don- ner de mauvaiies couleurs à toures fes actions. Certainement il fcmble que Trillan n'ayant rirn à efperer de Jeanne qu'il n'avoit jamais vue, &c qui avoit péri long tems avant qu'il eut pris naiflance , n'a eu au. cune raifon pour la flatter. Il le proterte lui - même à la tête de la Vie de cette Reine , &c nous alTure qu'il ne prend la plume que pour arrêter le torrent des Ecri- vains , qui fans apporter de preu- ves , entraînés les uns par les au- tres , fe font acharnes contre la ré- putation de Jeanne. Ce qu'il en dit au refte cft tort abrégé ; il s'en ex- cufe fur ce qu'il n'a pu trouver de Mémoires qui continlfent une fui- te de ces actions ; ainfi 11 les autres l'ont accufée fans preuve , comme il le dit , il la juftifie aulTi de même , ou plutôt il la reprefente comme une grande Reine auflî rcf- peâable par la fageffe de fon carac- îere que par ces vertus royales. ; La mort de fon mari , à laquelle il avoiie qu'elle confentit , eft fé- lon lui , le feul endroit de fa vie qui ait bcfoin d'apologie , mais comme félon le témoignage de Pé- trarque , André étoit un monftrc de férocité , Triftan croit qu'on f eut excufei la Reine fa femme ias '73 J- 53^ une crainte violente qui Toblicrea de prévenir un furieux qui l'autoit fait petir elle-même. Il prétend encore qu'on doit la regarder comme un modèle de chafteté, & qu'iln'y eut jamais que des raifons d'Etat qui l'engagèrent à fe marier quatre lois. La féconde Pièce comprife parmi ces Opufcules, cil laVie de Serzaa- Caraccioli , grand Sénéchal de Na- ples. Elle eft dédiée à fon petit fils, que notre Auteur traite de Sérénif- fîme Prince. Scrzan fe rendit fort célèbre dans toutes les guerres eau- fées par la fadion Angevine fous Jeanne II. Reine de Napks. Mais fa puifTance étant venue fi grande qu'elle faifoit ombrage à la Reine j cette Princefle fe prêta aux follici- tations de fes ennemis , qui de concert avec elle , le firent aflafli- ncr. Cette Vie eft fuivie de celle de Spinelli, Comte de Cariati. C'étoit un Jurifconfulte qui fe diftingua dans plufieurs Ambaflades , & dans les premières Charges de Judicatu- re qu'il exerça à Naples fous les règnes d'Alphonfe premier Roi d'Arragon , & de Ferdinand fon fils & fon fuccefleur. La quatrième Pièce eft un Traité delà variété de laFortune. L'Auteur en tire les exemples non des fiécles paffés , mais des évcnemens arri- vés de fon tems , mais principa- lement dans le Royaume de Na^ pies-même. Il commence à la prife & au pillage de Naples par AI- phonfe Roi d'Arragon , de l.i paf- ijnt à les Succelfeuîs ^ il montre ^40 JOURNAL D que ceux d'entr'eux dont le règne a été le plus heureux , ont tous été cxpofés aux traits de la Fortune, &C qu'il n'y en a aucun qui n'ait eu lieu de s'en plaindre. Des Rois de Naples , il vient aux Ducs de Mi- lan , Se enfuite aux Hommes Ulu- ftres dont il raconte les difgraces. Vient enfuite une Lettre deTri- ftan à un ami fut VlncjHtftion, c'eft- à dire fur les mouvemens & les troubles que 1 éredion de ce Tri- bunal caufa dans la Ville de Na- ples , lorfque Philippe , gendre d'Ifabclle & de Ferdinand qui l'a- voient établi en Efpagne , voulut aulfi le faire recevoir dans leRoyau- me de Naples. Ce petit morceau eft affcz curieux , maison n'y voit que la najlfance de ces mouve- mens. Cette Lettre eft fuivie de la gé- néalogie de Charles I. Roi de Na- ples. Ce qu'il y a de iîngulier, c'eft que parmi fes Succcffeurs , faifant mention du Roi André , ce même Auteur que nous avons vu fe décla- rer le vengeur de la mémoire de la Reine Jeanne , dit nettement qu'elle fit pendre le Roi fon é- poux , à Johanna Regina uxore fufpendio necatus efl. L'Ecrit fuivant roule fur Ferdi- nand depuis Roi d'Arragon & fur fa pofterué ; Caraccioli fe contente d'en montrer la fuite, & laifle, dit- il , à ceux qui ont plus d'éloquence & de lumière que lui à raconter ieuis adions. La dernière Pièce des Ouvrages de Triftan qu'on nous donne ici , eft une Défenfe ou plutôt un Elo- ES SÇ A VANS, ge de la NoblelTe de Naples , oa entreprend d'y prouver que les Nobles de cette Ville ont rempli les plus grandes Places, foit Ecclc- fiaftiques , foit Séculières dans les principaux Etats de l'Italie , & qu'ils fe font diftingués au- deflus des autres en tout génie de vertu. Outre les Pièces dont nous ve- nons Je parler , M. Muratori nous donne le Catalogue de pluiieurs au- tres qu'on trouve encore dans le Manufcritdu Prince de la Torella, & qu'il n'a pas jugé à propos de faire imprimer ; foit parce que quelques - uns ont penfé qu'elles avoient peu de rapport au but qu'il s'eft propofé dans cet Ouvrage ,' foit - même parce que lui même a craint qu'elles ne devinifent enfin à charge à fcs Lcdeurs. Nous croyons qu'on lui fçaura d'autant meilleur gré de fa difcretion ; que cet Hiftoricn , tantôt par la crainte de blelTer la réputation des autres^ & tantôt de bleffer la vérité, eft en général d'une referve fi grande qu'il ne nous apprend prefquc ja- mais rien de particulier. 2°. Des Annales de Forli depuis 1275. jufqu'en 1473. par un Ano- nyme. Tout ce qu'on fçait de cet Auteur , c'eft qu'il étoit de Forli- même. On voit aulfi par fon Hiftoire qu'il la compofoit, ou plutôt qu'il la recueilloit vers l'an 1485. on y appeiçoitévidemment différentes fortes de ftiles. Tout ce qui précède l'an 1 300. eft fi exade- ment détaillé, tant par rapporta ce qui s'eft paffé dans Forli - même que dans la Romagne , qu'il eft aile JUIN aifé de voir qu'il a été tiré de quel- que ancienne Chronique , &c en et- Kt , fans iadéfigner en particulier, on en cite une à la marge du Ma- nufcrir. Ce qui fuit ce tems paroît emprunté des Hiftoricns de la Vil- le de Bologne. On y trouvera peu d'exaditude , & fouvent même des erreurs aflez confiderables , avec de grandes obfcuriter. Depuis l'an I375. la narration devient plus abondante Si plus fuivic. Enfin vers l'an i^66- & fur-tout à la fin de l'Ouvrage , le ftile paroît entiè- rement changé. On fent bien qu'une Hiftoire de cette nature doit être fort éloignée de la perfection , mais la difette de meilleurs Auteurs fur cette matiè- re oblige de profiter de tout ce qui fe prefente. Quelques Ledeurs ne pourront peut-être au(îi s'empêcher de rire de ces ridicules fables qu'on trouvera ici au fujct de Guidone- Bonato fameux par fa fcience dans l'Aftronomie & dans l'Aftrologie , mais on fe relfouviendra que de pareils traits ne laiflent pas d'avoir leur utilité i ils fervent à faire con- noître le caractère de ce fiécle , où le goût des fables & l'amour de l'abfurde & du merveilleux l'em- poitoit fur les narrations écrites avec fimplicité. M, Muratori croit que nous ne fommes pas encore bien guéris de cette maladie , quoi- que nous foyons cependant beau- coup moins crédules qu'on ne l'c- toit alors, 3'. Journal de Parme depuis l'an I477. jufqu'en l'an 1451. On affû- te qu'il eft fort au-delTus des Ou^ i ' 7 î r. 341 vrages de ce genre. Ordinairement ils font remplis de minuties & de petits détails dont l'Hiftoire dédai- gne de fe charger. Ici au contraire , on trouvera du choix dans les ma- tières , & beaucoup de finccrité dans la manière de les raconter. On voit que l'Auteur étoit attaché à l'illuftre famille de Riibeis. Il en parle cependant fans partialité. Ou- tre ce qui regarde les affaires de Parme , ce Journal contient encore beaucoup de chofesquiontrapporc à l'Hiftoire de Milan, & à celle des Villes voifines. Quoique l'Auteur ne fe nomme nulle part, M. Mura- tori foupçonne que ce pourroit être Jacques Cavicée Jurifconfulte célèbre dans ce tems , qui au rap- port de Bonavcnture Angelo dans £bn Hiftoire de Parme avoir écrie fur la même matière , & qui vivoic dans le même fiécle , mais c'eft uu point fur lequel nous renvoyons à la Préface que l'Editeur a mife à 1& tête de TOuvragc-mcme ; il y re- ûe une grande lacune qu'on n'a pu remplir faute de Manufcrits ; le ftile en eft très- mauvais &: rempli de mots forgés fur l'Italien , qui par cette raifon font inintelligible» à ceux qui ignorent cette Langue ; on lit Coraziftas pour fignifier une Cuiraffc , fagnde un poignard, _/?blés .à Co- nimbre , où l'on avoit réfolu d'élire ;un Roi. Les uns vouloient pour Roi l'un des Enfans d'Inès de Caftro , les autres le Régent. Jean de Rogras Jurifconfultc Se Orateur y fit un difcours fort éten- du qu'il divifa en deux parties , dans la première il fe propofa de prouver que le Royaume étant fans légitime Succefleur , le Peuple pouvoitfe choifir un Roi , tel qu'il le jugeroit à propos. Il fit voir dans la féconde partie que perfon- ne n'étoit plus digne de la Cou- ronne que le grand Maître. Pour établir la première de ces deux pro- pofitions , il foûrint que fuivant les Loix fondamentales du Royau- me Béatrix ayant époufé un Prin- ce étranger , n'avoit plus aucun droit à la Couronne. Il alla même jufqu'à prétendre , que Beatrix n'é- toit point fille légitime de Ferdi- nand.A l'égard desEnfans d'Inès de Caftro, il prétendit qu'étant illégi- times , ils n'avoient point plus de droit à la Coiuonne que le Ré-; ES SÇAVANS. gent , en tout cas , que quand ils y auroient eu quelque droit ils l'au- roient perdu pour avoir abandon- né le Rovaume &c pris les armes contre fes intérêts. Il fondoit fa féconde propofition fur la fageflc avec laquelle Dom Juan avok gouverné pendant fa Régence. M. delaCléde taifant quelques reflexions fur le Difcours de Ro- gras , croit que ce n'eft que la paf- fion & l'envie de procurer la Cou- ronne à Dom Juan qui ont fait avancer à cet Orateur que Béatrix & les Enfans d'Inès de Caftro croient illégitimes. Il cft perfuadé que le mariage de Ferdinand 6c de Léonor étoit valable , & que celui d'Inès avec Dom Pcdrc avoit tou- jours parte pour certain. Il ajoute que les Enfans d'Inès n étoicnt for- tis du Royaume que pour éviter la perfécution d'une femme violente qui cherchoit à les opprimer , 8c que ce n'étoit que pour fe venget de cette PrincelTe qu'ils avoient fet- vi dans les armées de Caftille. Ce- pendant le Difcours de Rogr.is en* traîna la plus grande partie des fuf- frages Se Dom Juan fut dès lors Roi. Ce Prince parut retufer avec adrelTe l'honneur qu'on lui faifoir, en oppofant le défaut de fanai (fan- ce , l'état qu'il avoit embrafte ic fon incapacité , on vit qu'il vou^ luit être prefTé , dit notre Auteur,' on le prefta, & le fix d'Avril 1 384. il accepta la Couronne aux condi- tions que les Etats exigèrent de lui. La féconde révolution dont noiB parkïons eft celle pat laquelle la JUIN Couronne ie Portugal pafla fur la tête de Philippe II. Roi d'Elpagne. Notre Aurcur rapporte comme l'ont fait beaucoup d'autres Hifto- ricns, les troubles , Icsdividons , files intrigues aurquelles donnè- rent lieu fous le règne du Cardinal Henri les prétentions de diftcrcns Princes fur la Couronne de Portu- gal , après la mott du Roi Cardi- nal., la nomination des cinq Gou- verneurs pour adminiftrer le Royaumejufcju'à ce que lesEtats de Portugal eullent reconnu un Roi , le retus de Philippe U. de fe foû- mettre à la décifion des Etats , la proclamation faite par le peuple d'Antoine Prieur de Crato pour Roi de Portugal , la détaite de ce Prince 5; fa fuite , ôc la conquête de tout le Royaume de Portugal par Philippe II. Nous ne nous arrê- terons pas fur ces faits qu'on a déjà vus dans tant d'Auteurs. Nous nous bornerons à ce que dit M. de la Clede des moyens fur Iclqucls fc fondoient les Prétendans à la Couronne. Philippe II. étoit né d'Ifabelle àe Portugal , hls aîné du Roi Ema- nuel , Dom Juan Duc de Bragance avoit époufc Catherine de Portu- gal , fille cadette d'Edouard , fils d'Emanuel, Rainuce-Farnaife étoit fils de Marie, fille aînée d'Edouard & fceur de Catherine , le Duc de Savoye, de l'Impératrice Ifabclle , 'Antoine Prieur de Crato étoit fils as rinfant Dom Louis qui étoit fils d'Emanuel , Catherine de Mc- «licts , veuve d'Henri II. Roi de France icveiilant d'anciennes pré- , > 7 5 r- 547 tentions, fc difoit dcfccndante de Mathildc ComtelTe de Boulogne, Mais comme on étoit perfuadé que- Mathilde n'avoir point eu d'cnfans du Roi Alphonfe IV. on ne s'arrê- ta point à ces prétentions de Ca- therine de Médicis , non plus qu'à celles de la Reine d'Angleterre, ni même à. celles du Pape qui publia que ce ftroit à lui à difpolèr de cette Couronne apacs la moïc d'Henri comme étant la dépouille d'un Cardinal ; & un fiefmouvant du S. Siège. Pluficurs pcrfonnes prétendoiait que c'étoit au Peuple à élire un Roi , fc trouvant dans le cas dans lequel il avoit déjà faij uneéledion après la mort de Fer- dinand, Se ks Régences de Léo- nor & de Dom Juan I. Philippe II. qui étoit le plus en écît de foûtenir fes prétentions par la torce , difoit que le plus proche parent du dernier Polfeifeur de- voir toiâjours fucceder à la Cou- ronne , pourvii qu'il fût de la mê- même branche , &même qu'il au- roit dû , par cette raifon, fucceder avant le Cardinal Henri. La Du- chelle de Bragance foûtenoit que repjefentant Edouard fils d'Ema- nuel , elle devoir exclure le Prince de Parme , dont la merc ayant époufé un Prince étranger, n'avoit pu tranfmettre à fon fils le droit de reprefenter le Roi Edouard fuivant les Loix fondamentales du Royau me. Elle fe fervoit du même moyen contre le Duc de Savoye,& contre les autres Princes qui def- cendoient par filles du Roi Ema- nuel, eile fe prévaloit contre Donj 54S JOURNAL D Antoine du défaut de fa nailTance. Ce dernier fe prétendoit légitime , quoiqu'il n'eût été regardé jufqu'a- lors que comme bâtard. Mais le Peuple avoituneafFedion particu- lière pour le Prieur de Crato. No- tre Auteur fe déclare pat rapport au droit pour la DuchefTe de Bra- gance , dont un des defcendans eft parvenu à la Couronne de Portu- gal par la fameufe révolution arri- vée en 1^40. L'Hiftoirc de cette révolution qui fait le fujet du 16. Livre , eft un des morceaux des plus interef- faasde l'Hiftoiredc Portugal Aulîl l'Auteur paroît-il s'y être particu- lièrement appliqué , foit par rap- port au ftile , foit par rapport aux faits. C'eft un morceau qui mérite d'être lu avec d'autant plus derai- fon , que l'Auteur parle de cette révolution d'une manière diffé- rente de celle dont en ont par- lé ceux des Ecrivains François qui en ont donné l'Hiftoire : on y verra les caufes de ce grand événement , le caradere des principaux perfon- nagcs qui en ont été la caufe , foit Portugais , foit Caftillans, & la manière dont le projet qui en avoit été formé par quelques grands de Portugal a été exécuté. On fera fur- tout furpris de voir que cette conf- piration dans laquelle un (î grand nombre de perfonnes font entrées, ait pîi rcftcr fecrette pendant un tems affez confiderable qui s'eft écoulé depuis qu^elle a été formée, jufqu'à ce que le Duc de Bragancc ait été proclamé Roi. Des Auteurs François attribuent ES SÇAV ANS, la gloire de cette révolution au Cardinal de Richelieu , qui la conduifit , difent-ils , avec une fa- geffe admirable , par k- fecours d'un Joaillier nommé Bioual , qui s'étoit introduit chez les Grands de Portugal fous le prétexte de leur vendre des pierreries. Mais notre Auteur affure que tout cela eft avancé fans preuve pour ne rien dire de plus fort. •> Si le Cardinal, 3» dit M. de la CUde , avoit été le » premier moteur de la révolution, » n'eût il pas envoyé la flotte dont » il menacoit ce Royaume par rap- >s port aux Efpagnols, pour foûte- 3» nir les Conjurez , lorfqu'ils au- » roient éclaté. Du moins la pru- » dence l'eût demandé; néanmoins >> il n'en fit rien , d'où j'infère que » ce grand Cardinal , fi célèbre Se » fi digne d'être célébré, ignoroit » totalement le projet de la révolu- » tion , & qu'on lui en attribue » l'honneur mal à, propos. En effet, » continue l'Auteur , l'honneur j> n'en eft dû qu'aux Portugais eux-, » mêmes. Le titre du huitième Volume de cet Ouvrage annonce l'Hiftoire des règnes d'Alphonfe VI. & de Dom Pedre, &: celle du Roi Jean à prefcnt régnant. Mais on y trou- vera très- peu de chofes fur le règne de Dom Pedrc &: fur celui du Roi Jean. On fent affcz les raifons qu'un Hiftorien peut avoir pour ne pas donner le détail d'évene- mens trop proches de fon tems. L'Ouvrage finit par un éloge du Roi de Portugal , que nous allons rapporter en entier. »Le JUIN, » Le Portugal jouit d'une pro- j»'fonde paix , & le Roi n'cll ap- "pliqué qu'à faire le bonheur de » fes Sujets. Grand dans fes pro- »)ets , c'efl: à lui que la Ville de » LiAionne doit l'honneur d'avoir »un Patriarche , &: l'érablifTement » d'une Académie d'Hiftoire, com- »» pofée de piuficuis Seigneurs & «des plus habiles Perfonnages du " Royaume i Santaren lui doit " aulli fon Académie de los Laure- "Us , & Setabal celle qui porte le » nom à'Academia, - Ptoblematica. "Enfin Dom Juan ne forme de » defTein , ne conçoit de projets , >» qui ne tendent tous à l'honneur » de la Nation & au repos de fes » Sujets. Ferme Si magnanime , la 17? ;. M9 » hauteur avec laquelle il a foûte- " nu les droits de la Couronne con- » tre la Cour de Rome , a fait voir "avec éclat toute la grandeur de » fon amc , & les dépends immcn- » fes qu'il fait pour embellir Lif- » bonne ls: le Royaume , font des » preuves éclatantes de fa magnifi- ncence. A l'égard de la Juftice , "jamais Prince ne l'a fait exercer >• avec tant d'exacîlitudc. Le châti- » ment fuit de près le crime , & la wrecompenfele mérite & la vertu. .» Tel eft, ajoute l'Auteur, le Roi » que poffedcnt aujourd'hui les »s Portugais , Nation brave , coura- 3» geufe , ferme , intrépide , égalc- » ment propre & dans la guerre & » dans le Cabinet. SACRI ET CANONICI ORDINIS PR^MONSTRATENSIS Annales in duas Partes divifi. Tomus primus. C'cftà-dire : Les Annales de l'Ordre de Prémontré , dhnfécs eu deux Par- ties. A Nancy , chez la Veuve de Jean-Baptifte Cmj^«,& Abel- Denis Cujfoi} j au Nom de Jefus. 1734. in-fol. toi. 96^0. pour le corps &.z l'Ouvrage , pour les preuves cofL 73 2. fans lesTables & la Préface. LE M I R E , Vander-Scerre, le Page , Wagarre , & pluficurs autres Chanoines Réguliers de l'Or- dre de Prémontré avoient déjà tra- vaillé à donner une idée de l'Hifloi- re de cet Ordre. Mais ce qu'ils en avoient dit n'avoit pas paru alfe^ étendu. C'eft pourquoi le Chapitre Général tenu à Prémontré en 1717. rcfolut de faire travailler à une nouvelle Fliftoire, qui contînt la fondation des Monafteres , ce qui s'y eft pallé de plus remarquable , un Catalogue Hiftorique des Ab- bcz Se des Pïevôts, & la Vicies iain. Perfonncs qui fe font diftingués dans l'Ordre par leur pieté ou par leur érudition. On jetta les yeux , pour exécuter ce defTein , fur M. Hugo Evcque de Ptolémaïde & Abbé Régulier d'Eflival , dont les talens étoicnt déjà connus par plufieurs Ouvrages qu'il avoir donnés au Public, en particulier par la Vie de S. Norbert. Il s'étoit aufli diftingué en Cour de Rome , en y foûrcnant les privilèges de l'Ab- baye d'Eftival , <]ue le Pape Benoît XIII. déclara immédiatement fii- jett^ au S. Siège , & qu'il confirma Zz 3JO JOURNAL D tlans le droit d'exercer une Jurif- didlion Qiia(i-Epi(copale dans l'é- tendue de Ion territoire. Avant que de travailler à ce grand Ouvrage , M. Hugo s'étoit propofc de voir les Maifons de fon Ordre,& de tirer des Archives&des Mémoires qu'il y trouveroit tout- ce qui pourroit fervir à l'enrichir. Il vit en effet tous les Monafteres du Diocèfe de Liège , de la Flan- dres , du Hâinau , du Brabant, dc- l'Aitois , de la Lorraine & d'une partie delà France; maisfafanté ne lui permettant point de conti- nuer ùs Voyages , il dre(Ta un plan d-e Ton i-lilloire , &c il demanda des Mémoires aux Monafteres de l'un & de l'autre fexe de l'Ordre de Prcmontré. On lui en envoya en grand nombre de toutes les Mai- fons , avec des Pièces juftificati ves. Les Chanoines Réguliers Polonois de l'Ordre de Prémontré furent les feuls qui rekiferent d'envoyer des Mémoires , appréhendant, s'ils en envoyoientjde déroger à l'indé- pendance dans laquelle ils vivent du Général de leur Ordre. Les Ef- pagnols ne fuivirent pas cet exem- ple, quoiqu'ils aycnt un Réforma- teur général qui prétend n'être fournis ni à l'Abbé de Prémontré , îàau Chapitre général de l'Ordre. L'Auteur ayant ainfi recueilli le plus de Mémoires Si de titres qu'il lui étoit polTiblc pour fon Hi- itoirc , hit cmbarrailé pour fçavoir quel Ordre ildonncroità fon Ou- vrage. U avoit d'abord pcnfé à faire une HiÛoire fuivie, dans laquelle y. i rapporteroit , fuivant i'oidic ES SÇ AVANS, chronologique , ce qui conccrnoit les fondations des Monafteres , les Abbez. , les Pcrfonne« lUuftrcs , la difcipline régulière , &c. Mais on lui reprefcnta que fon Ouvrage fe- roit beaucoup plus utile à l'Ordre , s'il le divifoit en deux Parties dont la première conticndroit la Aiona- fleriologie ^ & la féconde l'Hiftoirc de l'Ordre. C'eft le premier Tome de cette première Partie dont nous allons rendre compte. Il y parle d'abord de l'Abbaye de Prémon- tré qui eftle chef de l'Ordre & de fes trois premières filles, S. Martin de Laon , Flore ffc &' Cuffy, dont les Abbcz font regardés comme les premiers Pcres de l'Ordre après ■ celui de Prémontré ; enfuite notre Auteur parle des autres Abbayes- & des Prevôtez , fuivant l'ordre alphabétique , pour ne point don- ner d'atteinte aux prétentions que pludeurs Abbayes peuvent avoir les unes à l'égard des autres, loit par rapport à l'ancienneté de k fondation , foit par rapport à la fi- liation. Sous chaqus article l'Au-" teur parle de la toiidation du Mo- naftere qui en fait le fujet , il don- ne une Lifte des Abbez & des Prc-» vôrs , un état des Bénéfices qui.en dépendent, le Catalogue des Re- liques & un autre des Manufcrirs qui y fontconfervés. Lorfqu'iln'a point trouvé d'ades autentiques pour fixer la fuite des Abbcz, il a eu recours aux Nécrologes & aux anciens Mémoires des ^lo^afteres. Par rapport aux Ahbez del'Hiftoi- le defquels il a été inftruit,il afTure qu'il les a reprcfcncé tels qu'ils é- JUIN toicnt, à en juger par leurs adions, fans aftoiblir la gloire de ceux qui fe font dilUngués par leur mérite , Se fans vouloir fairt- pafler pour des Saints des perfonnes d'une vertu médiocre. Telle eft l'idée que l'Auteur donne lui-même de fon Ouvrage dans la première Partie de fa Préfa- ce. Il a cru devoir parler dans la féconde Partie de la même Préface du Fondateur de l'Ordre de Pré- montré , de la manière dont cet Ordre s'eft étendu, & de fon gou- vernement , tant par rapport aux Monafteres d'hommes,que par rap- port à ceux des Filles. C'eft une tradition dans l'Ordre de Prcmontréque la Sainte Vierge prefcrivit elle-même à S. Norbert i'habir qu'il devoir faire porter à fcs Difciples. M. Hugo en donnant la Vie de S.Norbert en 1704. avoit rejette ccrte tradition comme une Fable. 11 s'étoit déterminé fur ce que des Auteurs contemporains de S. Norbert, qui ont écrit fa Vie , n'ont fait aucune mention de cet événement miraculeux , &C fur ce que cette tradition ne s'eft répan- due dans l'Ordre que fur la fin du quinzième ficelé. Ce qui leconfir- moit dans fon opinion , c'eft qu'il voyoit que S. Norbert ne s'étoit pas fervi de cette vifion pour ter- miner les conteftations qui s'étoient élevées encre fes Difciples au fujet de la forme & de la couleur de l'ha- bit qu'ils dévoient porter. Il ne pouvoir fc perfuader que la Fête de l'immaculée Conception dansl'E- glife de Lyon ayant été regardée comme une nouveauté du tcms de S. Bernard , Saint Norbert cijt fait porter à fes Difciples un habit blanc , en l'honneur de l'immacu- lée Conception, fuivant cette tra- dition de l'Ordre de Prémontré. Les Continuateurs de BoUandus avoient contefté cette tradition avant M. Hugo. Cependant on fit imprimer plu- fieurs Dilfertations pour foûrcniï l'opinion fuivie dans l'Ordre de Prémontré , & fur les plaintes qui furent faites de tout côté au Géné- ral de rOrdre , ce qui regardoit cet article dans la Vie de S. Nor- bert que M. Hugo avoit donné au public, fut fupprimé. La contefta- tion fe renouvella au Chapitre gé- néral de 1717. l'Auteur y fut ac- cufé, comme s'il avoit été coupable de crime de lez.e - Majefté ■■, enfin on ordonna que M. Hugo retradcroit dans fes Annales ce qu'il avoit dit fur ce fujet dans la Vie de S. Nor- bert. Ce qui hitainfi réglé du con- fentemcnt de l'Auteur , mais fans qu'il fût convaincu. Néanmoins pour ne point changer de fenri- ment fans uneiufteraifon , il con- fulta les perfonnes les plus habiles de fon Ordre , & en particulier l'Abbé de Noriegua , Abbé de Sa- lamanquc , qui lui adreffa fur ce point de critique une DifTertation imprimée en 172J. l'Auteur fc rendit après avoir lîl cette DifTerta- tion , en déclarant néanmoins qu'il ne fçait s'il a été entraîné par la for- ce des raifons ou par les manières polies &: engageantes de l'Autear de la Diflertation. fix fcio aura' Z z ij 5;z JOURNAL DE tionum pondsre , an comltate ratio~ cinantis m ejiis fentemi.im abrepim rverim. S. Norbert donna à fes Difciples pour règle celle de S. Auguftin, mais comme il a)oûta des conftitu- tions qui les airujettilfoient à de grandes aufteritei , quelques per- lonnes ont voulu contefter aux Prémontrez la qualité de Chanoi- nes Réguliers au moins dans leur origine, M. Hugo a répondu fur cet article au P. Chaponel par une Differtation qu'il a tait imprimer à Luxembourg en lyoo. pour alTurer aux premiers Religieux de l'Ordre de Prémontré la qualité de Chanoi- nes Réguliers qui leur étoit conte- ftée. Pour ce qui cft du régime de l'Ordre , S. Norbert voyant que la plupart des Monafteres étoient tombés dans le relâchement , par- ée qu'ils n'étoient pas unis en Con- grégation, & qu'ils n'avoient point de Chef Général qui y tîtobferver une difcipline régulière, il fournit' tous les Monafteres de fon Ordre 2. l'Abbé de Prémontré , il voulut que ce même Abbé fâr foûmis au Chapitre général , îk il établit pour Vificeurs de l'Abbaye de Prémon- tré les Abbez. de Saint Martin de Laon , de Floreffc iSi de Culfy. L'Abbé de chaque Monaftere confervoir une grande autorité fur leS' Monafteres de fa filiation , o'eft-à-dire fur les Monafteres qai avoicnt été établis par des Reli- gieux de fon Abbaye , & fi ces Ab- hea des filiations avoient commis «Jisfiutes qui duircBt ctte punies S SÇAVANS, par la peine de la dépofition , !c , & il prend la qualité fiflueufe de Primat de Germanie. Les Supérieurs de quel- ques Monafteres d'Allemagne où l'on n'admet que des Nobles qui étoient autrefois qualifiés Ab- hiycs , ne s'appellent plus que >' » 7 5 r.' 3n Prevôrez. Notre Auteur croit que ces Monaftercs fe fontainfi dégra- dés eux-mêmes pour ne point don- ner à leurs Supérieurs une qualué qui fut commune avec celle des Supérieurs des Moines. Car les Pré- vôts n'ont de rang qu'après les Ab- bez , ôi ces derniers jouilTcnt de pluiieurs prérogatives que n'ont point les Prévôts. La plupart des Monafteres dç l'Ordre de Prémontré étoient d'a- bord doubles , l'un pour les Hom- mes , l'autre pour les Filles. L'Ab- bé avoir ladiredion de l'un & de l'autre Monaftere , tant pour le fpiritucl que pour le temporel , & il fourniiroit aux Religieufes es qui étoit necelTaire pour leur fubfî- ftance. Dans la fuite les Chapitres généraux jugèrent à propos d'éloi- gner les Monaftercs de Filles de ceux des Hommes ^ on divifa les biens , on en donna une partie aux Religieufes. L'Abbé nomma deux de fes Religieux , l'un pour avoir foin du temporel , l'autre pour le fpirituel. Enfuite les deux fonc- tions turent réunies dans la plupart des Monaftercs de Filles dans la perfonne d'un fcul Religieux , au- quel on donna la qualité de Pré- vôt. D'autres Monafteres plus pau- vres n'ont qu'un Confefteur. Le Chapitre général de 1717. donna rang aux Prévôts des Mona- ftercs de Filles , fuivant le tems de leur promotion à la Prévôté avec les Prévôts des Monafteres d'Hom- mes. Ces derniers prétendoient qu'ils ne dévoient point concourisf avec ki premiers qui s'étoient , \ 5T4 JOURNAL D difoit-on , que comme des Vicai- res du Père Abbé. Notre Auteur rapporte les raifons qui furent alors alléguées de part &C d'autre, & il fe détermine pour le parti en la- veur duquel le Chapitre général s'eft déclaré. Les Religieufes de l'Ordre de Prémontré vivoient dans les pre- miers tems de i'inftitution de la manière la plus régulière &c la plus aurtere. Mais dans la fuite elles font bien déchues de leur première ré- gularité , comme il eft arrivé à la plupart des Ordres & des Congré- gations Religieufes. Tous les Monafteres de l'Ordre de l^émontré étoient compris au commencement du quatorzième fiécle en 17 Circaries,c'eft-à-dire, en diftrids de 17 Vi Tueurs. Il y avoit alors , comme il y a encore aujourd'hui des Royaumes qui ne formoient qu'une Circarie. Dans d'autres Etats , comme en France , il y a plufieurs Circaries , dont la première eft celle qui a retenu le nom de France. L'Ordre de Pré- montré a perdu non feulement plufieuts Monafteres , mais des Circaries entières, lorfque la pré- tendue réformation ,dc Luther ou de Calvin eft devenue h Religion dominante des Pays où ces Mona- fteres étoient fitués. La Circarie d'Efpagne vit dans une entière in- dépendance de l'Abbé-Géncral de Prémonrré,ayant un Chef particu- lier qui a la qualité de Rétorma- tcur général. Elle fe maintient dans cette indépendance par l'au- torité du Pape ii par ceJ,lc du J<.oi ES SÇAVANS, d'Efpagne ; les Religieux de cette Circarie portent un chapeau noit & une ceinture de cuir. M. Oudin qui avoit abandonne l'Ordre de Prémontré & la Reli- gion Catholique , a fort maltraité i'Oidre dont il étoit forri. lia ofc avancer dans ù Bibliothèque des AuteursEccleliaftiques que l'Ordre de Prémontré s'étoit formé dans l'ignorance , Se que depuis foa établiflement il étoit refté dans fon premier état d'ignorance. C'cft pour répondre à cette accufation que M. Hugo entre dans un grand détail des Religieux de l'Ordre de Prémontré, que leurfcience afaiç élever aux premières dignitez de l'Eglife , & de ceux dont on a con- fervé les Ouvrages , foit en Manuf- ciits , foit imprimés. Ce n'eft pas par vanité, mais pour confondre Oudin l'impofteur & le Sicophante, ( Ce font les termes de la Pictace;) que notre Auteur s'ed mis à la fuite des Ecrivains de l'Ordre de Prc- montré , & qu'il donne un Catalo- gue de fes Ecrits. Il a publié en iif^f. la réfutation du Syftême de M. Favdit fur la Trinité , en 1702. Ji réfutation de l'Apologie dumê- mc Auteur fur le même fujet , ca 1700. la rétutation de l'Hiftoire des Chanoines Réguliers du Pcrc Chaponel, en 1704. la Vie de Saint Norbett avec des netes , en 1725, 8c en 17 5 r . deux Volumes de Mo- numens d'Antiquité Sacrée. La Préface dont nous venons de rendre compte eft fuivie d'un In- dex des 27 Circaries de l'Ordre de Piémontré & des Monafteres com- JUIN pris dans chacune Ae ces Ciicaries, Sur une première colonne on trou- ve le nom du Monaftere avec celui de l'Abbaye d'où les premiers Re- Ijt^ieux ont été tirés , en lalecondc colonne le nom & la qualité du Fondateur, à la troifiéme Tannée de la fondation, à la quatrième le Diocéfe où leMonaftcre eft firué , à h cinquième le nom de la Ville la plus ptochaine de ce Monaftere, Pour donner un exemple de la méthode que l'Auteur a fuivie dans fa Monafteriolooie , nous pren- drons l'article de l'Abbaye de Saint Jocd. Ce Monaftere eft dans laVille de Braine fur la rivière de Vefle au Diocéfe de SoilTons. L'Eglife eft bâtie fous l'invocation de S. Jued Archevêque de Rouen. Cette Egli- fc bâtie dans le Château des Sei- gneurs de Braine étoit dans fon ori- gine une Collégiale feculiere. Les Chanoines étant tombés dans le re- lâchement, André de Beaudemonc Sénéchal de Champagne & dé Brie & Agnès fa femme , Seigneur & Dame de la Ville de Braine , re- Iblurent du confentement de IfTo- Hn Evcque de SoifTons de chalTer CCS Chanoines ôc de mettre à leur place des Religieux du Monaftere èc Prémontré , que leur pieté fai- foit alors fouhaiter en differens en- droits. Ils furent étdblis à Braine en 113©. leurs Fondateurs furent Ci touchés de l'exemple de ces Reli- gieux qu'Agnès fe fit Religieufe dans le Monaftere des Filles de Prémontréj &fon mari fit fes vœux à Clairvaux. Agnès fille de Guy Comte de Brame j nièce d'André, & mariée a Robert de Dreux , fille du Roi Louis VI. imita la pieté de fcs ancêtres , fit bâtir une Eglife qui eft des plus magnifiques da Pays , où le Corps de S. Jued fut tranfporté de l'ancienne Eglife. L'Auteur a vu avec douleur que l'Office de la nuit avoit cefté dans cette Abbaye , qu'elle étoir char- gée de plus de quatre-vingt mille livres de dettes , & qu'on pouvoic à peine y entretenir cinq Religieux, Mais il a appris depuis avec joyc que le Général de Prémontré avoit pris des mefures pour rétablir dans ion ancienne fplendcur cette Ab- baye de fa filiation. Meflîeurs de Sainte Marthe ap- pellent Gilbert le premier Abbé du Monaftere de Braine , mais notre Auteur alTure qu'il n'a trouvé ce nom dans aucune des Chartres de l'Abbaye, & qu'il eft au contraire bien juftifié que le premier Abbé s'appelloit Pierre. Il fut envoyé à Braine par le Bienheureux Hugues premier Abbé de Prémontré. La vie qu'il y mena avec fes Religieux fut fi édifiante , que les Seigneurs & les particuliers s'cmpre(rerentds faire des donations au Monaftere pour être aftociés à leurs prières. Louis Vn. leur donna les dixmcs de la Ville de Vailly. L'Auteur par-; le cnfuite des autres Abbez Régu- liers. Le dernier fut Michel Cou- pefou qui mourut en 1 540. il eut pour Succefteur le Cardinal de Gi- vry 3 depuis lequel il y a eu fept Abbcz Commendataires. Les filiations de l'Abbaye de Biaine,£ùnt le Monaftexe de Mont- ^^6 JOURNAL D cel dans le Diocèfe de Chàlons, Se celui de Bruyères qui eft une Ab- baye de Filles proche de Braine.Lcs bénéfices dépendans de cette Ab- baye ne font pas en grand nom- bre. Mais on conferve dans le Tré- for de l'Abbaye piufieuis Reliques dont l'Auteur donne le détail. Une des plus conlîderablrs & qui a donné lieu à l'établi (Tenient d'une Confrérie eft une Hoftie dans laquelle on dit que J. C. s'eft fait voir fous une figure humaine ^ à une femme ,Juive- de Mathérnatiejues, A Paris , ciiez P. G. le Mercier ^ Imprimeur-Libraire, luë S, Jacques , au Livre d'or. /k-8°. L'AUTEUR entend par le terme de foi-rihcation non feu- lement l'art de fortifier les Places , mais encore celui de les attaquer & de les défendre. Ce qui lui four- nit naturellement la divifion de fon Ouvrage en trois Parties. Dans la première l'Auteur fe propofe d'enfeigner comment on doit tor- tifier une Place , fuivant les diffe- tens Syftèmcs de fortifications an- ciens ou modernes , il fait connoî- irc les differens Ouvrages dont les fortifications d'une Place font compofées , il en fait connoître i'ufage , Se il indique ce qu'il faut obferver pour les conftruire. La fé- conde Partie où l'Auteur parle du Siège de la place,commence par des obfervations fur la manière de les invertir , fur la conftrudlion des li- gnes de circonvallation & de con- trevaliation,fur la préparation pour les attaques , fur l'ufage, le nom & la conftrudion des inftrumcns de guerre qu'on employé dans les Siè- ges , fur le parc de l'artillerie , «nfuitc M de S. Savin vient à l'ou- verture , à la conduite & à la con- ftrudion des tranchées , & il entre s par des liberalitez qui font inc- » puifables , qui couvrent toute la 30 terre, qui ne font que pour nous; >» puifque fi nous n'y étions pas , "toutes ces richelTes feroient fans » poifelTeurs Se fans admirateurs..., » Comme ce langage eft également » clair & intereffantjil y auroit de la » (lupidité à ne pas l'entendre , èc i> à n'y pas répondre. Après cette première viië , l'Au- teur s'ell propofé de procurer à la jeunefle la connoilîance même des chofes les plus communes & leî plus ordinaires.dont on fe reproche tous les jours à foi - même l'igno- rance. On les trouvera donc ici ces chofes communes , mais dites d'u- ne manière qui ne l'eft pas , quoi- que trèséloignée de toute affeda- tion. Ce Livre pourra même défa- bufer les perfonnes qui s'imaginent que notre Langue ne feauroit fans s'avilir, defcendre dans les détails^ 5^2 JOURNAL D du jardinage & de l'agriculture •■, peut-être que les Romains en di- ioient autant de la Langueiatine, avant que Virgile eût compofé fcs Georgiques. On revoit encore dans ce Vo- lume les mêmes Inteilocuteurs qui avoient paru dans le premier , &C leurs entretiens font au nombre de feize. Les trois premiers roulent fur les fleurs. On y développe d'abord en général la fin que l'Auteur de la Nature a eu en les formant , 6c l'on montre qu'il a voulu en les créant joindre les délices à l'utili- té. » La plupart d'entre elles ne fe » bornent pas à contenter notre » vue par la beauté deleurarran- >» gement & de leurs couleurs , el- » les s'emparent doucement de no- » tre odorat par un parfum exquis, » Si après qu'elles ont ralîallîé nos » fens d'une fatisfaeflion innocente, • l'efprit y découvre encore des » merveilles qui le ravilîent. On y examine les fleurs dans leur nailTance, dans leurs progrèsfic dans leurs fuites. Mais il faut fe reflbu- venit que par tout où il eft quef- tion des planteSjl'Auteur a évité de les ranger méthodiquement dans la claffe , dans le genre , ou dans l'efpece où M.Toumefort If s a pla- cées. Tant de divilîons & de fubdi- vifions qui font bonnes pour des Botaniftes , eulTent été très-inuti- les au plan de l'Auteur. Il s'attache feulement à la figure du feuillage , & de la graine , & l'un &c l'autre fuffit pour les démêler entre elles , & pour ce qui eft de l'ufagc ordi- naire. ES SÇAVANS. Après nous avoir peint en géné- ral les fleurs avec des traits prefque aufll vifs 8c auflî vrais que ceux dont elles font embellies. Il paflc dans le fécond Entretien à la place des fleurs ou au parterre j il donne la defcription de différentes fortes de parterres ,.la manière de con- ftruire les plates-bandes , les plan- ches , la préparation des terre* propres pour y recueillir lesdiver- fes fortes de fleurs dont on veut les orner , le tems propre à les femer, &c les attentions neceflaircs pour les entretenir. Dans le troifiéme Entretien la Comtefle qui aimoit les fleurs , inftruit le Chevalier des foins qu'il faut donner à l'oreille d'ours , à l'anémone , à la renoncule, à l'œil- let i & le Prieur y joint ce qui re- garde le gouveinement delà tuiip- pe, toutes fleurs qui méritent prin- cipalement l'attention des curieux, & aufqucUes on fe borne ici. On y trouvera l'hiftoire de ces fleurs, c'eft-à-dire, le tems où elles ont été connues en France , & par qui elles y ont été apportées, & tous les principes de l'art des Fleuriftes. En parlant des renoncules , l'Au- teur dit , qu'il connoît une Com- pagnie de Fleuriftcs qui avoit com- mencé à donner à chaque efpecc de renoncule le nom de quelque perfonnc de mérite difiinguée dans le monde. ... » La renoncule qui '> fur un beau fonds montroit » quelques traits noirs , ils la nom- » moient je ne fçai pourquoi la a Rouffeau. Celle qui avec l'éclac » des Rofespaiie dehors , montre J U I N »en dedans une candeur toute » unie, fans fard, ni mouchetures » ils l'appelloient la Rollin. Celles «où les mouchetures lont lî mul- =0 tipliées &c lî ferrées l'une contre «l'autre qu'elles empêchent de » voir le tond qui les foûtient 5 Mc'ctcit la de la Motte. Celle qui » avec une riche couleur embellit j> régulièrement d'un panache l'ex- » ticiiiité de chacune de Tes fcuil- » les ; c'étoit la Fontenelle. Mais le nombre des grands Hommes ne fe multipliant pas tous les ans comme les nouvelles efpeces de renoncule qui paroilToient tous les ans , ces Fleurilîes furent bien-tôt obligés de renoncer à cette pratique. Outre ces cinq genres de fleurs confiderables dont les curieux font leur amufement , on ne néglige pas ici abfolument ce qui regarde la culture des autres , & à l'occa- fion du lys l'Auteur rapporte ce qu'il y a de plus vraifemblable fur ce qu'on appelle fleur de lys dans les armes de nos Rois. Lesaccompagnemens du parter- re font la matière du quatrième Entretien. Ces accompagnemens font les arbrifleaux, les allées, les berceaux , les paliflades &c bof- quets. On apprend ici la manière de faire fuccedcr les uns aux autres les arbrifTeaux à fleur pendant tou- te l'année. On fait différentes obfer- vations fur les differens arbres tels que le tilleul ,1e marronnier , l'or- me , l'acacia , &c. dont on peut planter les allées & les contre-al- lées , fur les arbres ou arbrifleaux , dont on peut foimei les palifla- Le Chevalier dit qu'il a quel- quefois entendu dire qu'un Jardin cft une imitation de la Nature, n ][ » y a du vrai dans ce que vous di- » tes , répond le Comte , mais pcr- » mettez-moi de vous faire remar- »quer qu'un Jardin efl: moins une » imitation de la Nature , que la " nature même , & rapprochée » fous nos yeux , & mile en œu- » vre avec art L'art qui forme » les Jardins ne conlifte pas à con- » trefaire ks productions de h Na- » ture , ni à m'amufer d'une vaine » perfpedive , ou d'une fuite d'ar- » cades de bçis verd , ou delà vue wd'un Sallon incrufté de inarbre » ou de celle de quelque Naïade »- qui panche avec grâce fon urne y fur un baflîn prefque toujours à » fcc. Le mérite de l'art efl: de raf- n fembler en effet l'eau & la verdu- » re , de faciliter la promenade, de «donner du couvert. L'art n'imite » donc point ici la Nature , mais " il la met en œuvre -, c'efl: d'elle » feule qu'il emprunte les plaifirs 30 qu'il nous livre. On s'étend enfuite fur la ma- nière de corriger par l'art les ter- rains irréguliers , on en trouve dif- ferens plans , ûir lefquels l'Auteur fait l'application des principes qu'il a pôles dans cet Entretien. Le fîxiéme traite du potager il commence par un éloge de l'agri- culture & de la vie champêtre on s'étonne avec raifon que fur cette matière notre Langue ou du moins notre Poëfie Fran^oife n'ait pas le moindre Ouvrage de goût qu'on puifle coxnpaicr avec les Georgi- ^.64 JOURNAL D ques de Virgile , les Jardins du P. Rapin , de la Métairie du P. de Vaniere , Ouvrages dignes des louanges qu'on leur donne ici. Le •Chevalier les avoir fait relier en- femble , &c les appelloit fa Biblio- thèque de campagne. On foiitient -que la Pocfie Françoife y trouveroit un beau champ pour s'exercer , & que ce feroit pour un génie heu- reux le moyen le plus fîtr non feule- ment de plaire , mais de claire à tous les LeEleurs. Le Prieur & le Chevalier en ga- gnant peu à peu le potager , exa- minent d'où provient le goût natu- rel que les hommes ont pour la vie champêtre & pour toutes les peintures qui la reprefentent , il -faut lire ce morceau dans l'Auteur; on y verra que de tout tems les plus grands Hommes fe font diftingués par une inclination marquée pour la culture de la terre. Louis XIV. dit'On , après avoir entendu M. de Turcnne , où M. Colbert, fe plai- foit à s'entretenir avec M. de la Quintinie , &c façonnoit Xouvent un arbre de fa main. On arrive enfin au potager , on en admire l'ordre & la beau- té , la fécondité , la fuccellîon lies fruits & des légumes. On réduit les qualitez du terrain ne- ceiïaire pour former un bon pota- -ger à celles-ci , le bon fonds de terre , l'afped favorable , la belle diftnbution du terrain , l'eau & le choix des plantes. On enfcignc la manière de fuppléer à quelques- uns de ces avantages , lorfqu'on eft forcé de fe fcrvir d'un terrain qui en eft privé. ES SÇAVANS, On continue le même fujct dans les 6' , y' &c 8° Entretiens. On y fuppofe qu'on ait à former un pota- ger dans un terrain partait , c'eft- à-dire, qui réunille tout à la fois les cinq avantages dont on a parlé. On apprend la manière de connoî- tre les différentes fortes de terres ôc le moyen de les corriger les unes par les autres ,- quel fumier on doit employer félon la diverfité des plantes qu'on y veut élever , U forme qu'on doit donner aux car- rez fuivant les ufages aufquels on les deftine , & le moyen de les dé- fendre du vent du nord , ■> dont on "pourroit dire ce que l'Ecriture " dit d'un grand Conquérant , que » Dieu tait partir dans fa colère , » avi\>!t ^u'U vint la terre était uu » Jardin de délices : après fon vaffa- » ge,elle n'cfl plus qu'un defert affreux. On n'oublie pas ce qui regarde en général les efpaliers, le choix des arbres & ce qui concerne leur cul- ture. On paiïe enfuitc au Jardin cou- pé [7' Entretien ] c'elf à-dire, à ces endroits qu'on refcrve à côté du potager , fouvent dans des terrains peu réguliers , mais expofés au Le- vant ou au Midi , Se un peu en pente s'il eft poiHble ; on y élève pluficurs petits murs de fept à huit pieds de hauc , & affez rapprochés l'un de l'autre pour concentrer beaucoup de chaleur. Ce Jardin coupé avec le verger , la pépinière,' les différentes ferres, telle que la fruiterie , la ferre des légumes , la ferre des arbuftes , la ferre à feu qui eft celle où l'on met des poêles ,' fon£; JUIN font, félon l'Auteur , les accom- f agnemens du potager ; il traite de chacun en particulier , & on y trouve fur cette matière des chofes d'autant plus judicieufes qu'outre les cxcellens Livres dont tout ceci n'eft qu'un précis, il a eu recours à M. le Normand , Diredeur du po- tager de Verfailles , qui lui a com- muniqué les fecours & les lumières ncceiïaires pour bien traiter fon iiijet. Rien n'eft oublié dans ce pota- ger, jufqu'à la retraite ou avec tous les inftrumens du Jardinier , on loge les trebuchets , les lacets , les cpouvantailles , & toutes les ma- chines de guerre que le Jardinier met en œuvre contre les ennemis de fon travail. L'Auteur apprend à connoître ces ennemis , & les dif- ferensexpediens qu'on peut mettre «n pratique pour détruire les ani- maux qui nuifentau potager. Vient après cela un Mémoire de ]a façon du Prieur fur la manière de greffer. On en fait la ledure au Chevalier aufll-bien que d'un autre Mémoire fur la taille des arbres. { 8^ Entretien ] Nous renvoyons fur cela à l'Ouvrage-même , com- me fur tout ce qu'on y dit de l'O- Jtangerie , & delà figuerie. Le Prieur ne veut pas cependant que le Chevalier prenne fur lui le menu dét.iil des opérations de la .greffe & de la taille. » C'eft bien » aflcz , dit-il , pour vous d'y préfi- 3» der , en obfervant avec foin de «quelle façon on s'y prend dans » les Jardins renommés pour tail- »ler les efpaliicrs, les buiflbns, Juin. . '7 5 5-.^ 3<;; » les truits à pépin, & les fruits à «noyau, en faifant parier les Ou- » vriers & les ConnoilTeurs , en » comparant leur méthode Se leurs » principes , vous vous mettrez en » état de juger fainement de tout »» ce qui fe fera chez vous , fans dc-^ y> venir Jardinier , vous devien-; » drez l'infpcdeur de vos Jardins,' n&vous açquererez une juffeffe qui » mettra tous vos Ouvriers dans la ?» neceflîté de rechercher votre ap.^ w probation , & de redouter votre » cenfure : s'ils vous eftiment, ils » vous ferviront bien. Quoique le fruit de l'olivier ni puiffe pasmeurir dans nos Provin- ces, on ne laiffe pas de le faire con- noître , & de donner la manière dont fe fait l'huile. On finit dans le neuvième En-^ tretien ce qui regarde les précau- tions convenables pour avoir des fruits pendant toute l'année ; on marque ceux qui conviennent à chaque faifon , & ce que la pra- tique enfcigne fur les moyens de- les cultiver _, de les embellir & de les conferver. Mais on ne s'attache qu'aux excellens fruits dont le nombre eft borné , & félon la ma- xime du Comte, on ne s'accommo- de ici du médiocre, que quand l'ex- cellent manque. L'art du Jardinage qu'on doit moins , félon la remarque de no- tre Auteur , à la force du génie de M. de la Qiiintinie , dont lui ni perfonne ne connoiffoit alors le fond , qu'au dcfir qu'il avoir de plaire à un Monarque plein de goût, vC au meilleur de tous ict Dbb ^66 JOURNAL D maîtres j l'art du Jardinage en mé- nageant à propos le travail &c les prcduiftions de la Nature , nous donne une guirlande de beaux fruits toute l'année. Il nous en vient encore une autre , ajoûre-t il, qui pour n'être pas relevée par des couleurs aulfi brillantes ne lai (Te pas de plaire par une extrême va- riété, & par une fuite de plantes toirour^ nouvelles &: toujours uti- jes. Ces phintes font les légumes dont il eit queftion dans le neuviè- me Entretien •, elles ne commen- çoisnt autrefois à donner que vers îe mois de Mai . & finilfoicnt aux premiers troids.On les fait paffer ici toutes en reviâë ,, & on ne dit ici di' leur culture que ce qu'il eft ne- celfaire d'en fçavoir pour diriger le travail des. lardiniers , parce qu'il faut necefTairementf font proprement fon Jardin , lui » feul les a plantées,lui fcul lesen- « tretient C'eft lui qui a donné t> des aîles à la plupart des graines «»pour être plus aiféraent cmpoi- 1 7 î r. 3 ^7 »tées par l'air , & rcpandu.s en » plus de lieux. Il fuffi: pour s'en » convaincre de jctter les yeuxfur li }> graine du tilieul , de l'érable , & » de l'orme. C'eft lui qui en tire » enfuirc ces vaftcs corps qui s'éle- » vent fi majeftucufement dans les »airs. Lui fcul les affermit par de » fortes attaches,, & les maintient *> dans la durée de plufieurs fiécles «contre les efforts des vents qu'i4 » envoyé fur la terre. Lui feul tire » de fes tréfors des rofces & des "pluyes fuflifantes pour leur ren- » dre tous les ans une verdure nou- » velle , & pour y entretenir une »> efpece d'immortalité , &c. L'Auteur montre ici que la terre n'eft point féconde par elle-même,' Se que Dieu feul eft l'Auteur de l* fécondité. De-là on parcourt les utilités particulières aux arbres des forêts i on examine d'abord les diverfes proprietez de leurs feuilles , de leurs graines , comme les glands, les feines du hêtre , & les bayes des differens arbres , les noifettes , les noix , d'où l'Auteur prend occa- fion de parler de la noix mufcade ,' du macis , du caffé , fur lequel il s'étend , du cacao, du chocolat , du cachou , ^c.lldefcend enfuitc aux écorces , & après avoir marqué l'emploi qu'en font les Tannei!rs, il vient à celles qui font diftinguées par leur agrément ou parleur utili- té , telles que celles de la canelle , du quinquina, les écorces qui fc filent , comme celles du Lngetto, arbre de la Jamaïque , du liège, de la poix . des refines, des baumes ^^ Bbbi^ 3(S8 JOURNAL D & des gommes. Il montre l'utilité des racines pour la marqueterie , le charronna^^e , pour la teinture , & pour la Médecine : en général il développe tous les avantages que nous tirons du bois pour le tour , la menuiferie, la fculprure. Nous paierions ks bornes d'un Extrait Û nous luivions l'Aurcur dans cet examen , mais il va lieu de croire que le Ledeut l'y fuivra volon- tiers. On pourfuit la même matière dans le feiziéme & dernier Entre- tien. Puis venant au bois à b ûler , en donne l'Hil^oire des Forêts de France , & on fait connoître les fa- ges précautions de nos Rois pour les conferver, la manière de planter un bois , les efpeces différentes d'ar- bres que la diverficé des terrains demande i on conddere encore les bois comme la retraite des bêtes ES SÇAVANS, féroces , & tombant fur la cliaffe l on en découvre l'utilité ; c'eft fur- tout par la chalîe , dit l'Auteur, que nous exerçons le domaine qui nous a été donné fur les animaux. Pour ren cet Ouvrage plus utile on a fait graver fur des def^ feins la plupart d'après nature , les fleurs les plus belles , les divers ar- rangemens que nous donnons à nos parterres , enfuite les divers feuilla- ges des arbres toujours verds , des bois de charpente , de charonnage, de menuiferie , & de chauffage , les prelfoirs qui fervent à compri- mer le jus des railîns, des pommes, des olives , G'c. On trouvera à la fin de chaque Volume l'explica- tion de ces planches. Nous ne manquerons pas dç donner l'Extrait du troidéme Vo- lume dans le Journal fuivant. NOVVELLES LITTERAIRES. ANGLETERRE, De Londres. ON trouve chez J. Wilcox îe nouvel Ouvrage que M. Leaihetter ^ Maître de Mathémati- ques , vient de donner au Public fous le titi c de Uramfcopia , er the Cnnteniplation of H^avem , ^C. C'cft à-dire : » La Théorie du Ciel, » ou Démonftrarion de 1 Equation »dutems, avec la méthode d'oh- »fcivcs l'enciée du 5olui daas » chaque point de l'EcIiptique , de y> trouver l'Aphélie & l'cxcentrici- » té des Planètes, & de déterminer » le plus grand éloigncment du So- s» leil où fe trouvent Vénus & Mer- n cure , le mouvement moven de » la Terre, fes Aphélies & la rctro- » gradation de l'Equinoxe , le lieu » véritable & apparent du Soleil 6c « de la Lune par le calcul &c les ob- » fervations , & la véritable heure » de la nuit par les Etoiles , en fe u fervant d'un nouveau quart de » cercle : comme aufll TcxplicatioB JUIN » & la démonftration de la métho- nàe de Kepler & de Flamftead » pour fuppurer le tems des Eclip- 3> les du Soleil les plus remarqua- » bies. A cjuoi l'ona joint de nou- » velles Tables, la parallaxe delà » Lune, fa longitude Si h latitude. Rivington 3. imprimé a Jowney Over Land , from tbe G.'lph of Hon- duras to the great Soin h Sea , S:c. C'eft-à-dire -. Voyage par terre de- puis le Golphe d'Honduras jufqu a îa grande Mer du Sud , fait par Jean Cock^urn , & cinq autres An- glois qui avoient été pris fur un Vailfeau de cette Nation par un Garde Côte Efpagnol , &c. On a joint à cet Ouvrage une Pièce cu- ïieufe compoféc fous le règne de Jacques I. intitulée : Courte Rela- tion de ce cju'il y a de plus remar- quable dans les foyages de Nicolas fViihirigton , FaEleur dans les Indes Orientales. xn-Z". M. Befombe Chapelain de My- lord Baltimore, & fils de M. Be- fombe ^ Miniftre de l'Eglife Fran- ^ çoife , communément appellce de Londres , fe propofe de faiïeinî- primer par Soufcription la traduc- tion Françoife qu'il a faite d'un Li- vre Italien intitulé : l'Incredulofe»^ Zafcufa , c'eft - à - dire , ^Incrédule fans excufe , ou Vjnpie forcé juffues dans Ces derniers retranchemens , compofé par le P. Segneri, Jefuite. Le Tradufteur doit joindre à cet Ouvrage trois DiUertations de fa façon. La première fur la neceffité d'une révélation Si l'excellence du •Cbrillianiliaie > la féconde ^ fus l'infpiration de Mo'iTe & des Pro- phètes , & la troifiéme fur les Mi- racles. Le tout fera un Volume /«-4°. pour lequel on donnera cmq chelings en foufcrivant & cinq autres chelings en retirant l'exem- plaire. FRANCE. De P a r k. Robiiflel ^ Barbon , & Guillaume Defprez , rue S. Jacques, débitent l'onT^éme Tome des Oeuvres de Saint Cimfojiome , publiées par le R. P, Dom Bernard de Monifmcon. in-folio 1754. Hijhire de l'Eglife gallicane , pat ^e Père Jacques Longiuval , de la Compagnie de Jefus Tomefeptiéme depuis l'an 587. jufqu'à l'an loS^- TomL huitième , depuis l'an loS^. julqu à l'an 1 137. Chez Mwtalant & Rollin fils , Quai des Auguftins. J. B. Clmnard S<. Htppolyte-Louis Guerin ,iku'è Saint Jacques. 1734. . HipÊh 'Humaine. Odavien Cé- far furnommé Augufie, fécond Em- pereur , avec des Notes Hiftori- que , Géographiques & Critiques ; des gravijrcs en taille douce , des Cartes Géographiques , & plu- fieurs Médailles authentiques. Pat les RR. PP. Catrou & Roudté^ de la Compagnie de Jefus. Tome dix- neuvième , depuis l'an de Rome 721. jufqu'à l'an 7Ioifvelles Littéraires , j^^ Fiû 4c la Tabîèè L E JOURNAL scavÀns, à 1^ 0 U R VANNEE M. DCC. XXX r» JUILLET. A PARIS, Chez CHAUBERT, à l'entrée du Quay des Auguflins, du côté du Pont Saint Michel, à la Renommée & à la Prudence. M. DCC. XXXV. ^yEC APPROBATION ET FKIVILEGE DU KOY. LE JOURNAL DES SCAVANS 0 JUILLET M. DCC. XXXV. VEXERA ROMANORUM ITINERARIA, SIVE Antonini- Augurti Itinerarium , ciim integris Jof. Simleri, Hicron, Surit.T , & And. Schotti notis. Itinerarium Hicrofolymiranum , 8c Hieroclis Grammatici Synecdcmus. Curante Petro WclTclingio , qui & fuas addidit adnotationes. Amltelxdami, apud Wetfteniutn & G. Smith. 1735. C'cft-à-dire : Lei anciens Itinéraires des Romains , fçavoir l'Itinéraire de l'Empereur ylntonin , avec les notes entières de Jof. Simler ^ de Jérôme Surita & d'j4ndre' Schott : l'Itinéraire de Jerufalem ■■, & le Compagnon de voyage d' Hieroclis le Grammairien : le tout £nlplié de nouveau parlesfiin$ Juillet, C c c if 575 JOURNAL DES SÇA VANS; d; Pierre WcJfeUriq^ , Ucjticl y ajobit fes Rcmay^iis!. A Amftcr.km , cViei J. IVt-tfiiin ^ G. Swith. 1735. /«-.[.".pp-iîz. fans la Prcfacc 6c k's Tables. ES anciens Itinérsircs com- pris dans ce Volume font au noaibre de trois \ celui qu'on attri- bue vulgairement à l'Empereur Antonin , celui de Jcrufakni , Sc celui qu'Hierocles a publié fous le titre de Compagnon de l^oyage ( Sy- necdemus. ) Le premier a tait la ma- tière d'un Extrait a(Tez étendu, im- primé dans le Journal de Mars", & nous promîmes alors de rendre compte des deux derniers , dans un autre Journal , & d'y faire même connoîcre plus particulièrement les notes de M. Wclfeling, par quelques échantillons , qui fillent honneur à fon érudition. C'eft ce que nous allons exécuter ici , en comniençact par lltinéraire de Je- rufalem. Cet Itinéraire [ appelléauflî l'I- tinéraire de Bourdeaux , parce que cette Ville cft le terme d'où il part] cft fi femblable à celui d'Antonin, qu'il ne doit point en être féparé. Il conduit le Voyageur par les mê- mes Provinces, lui marque les mê- mes gîtes, les mêmes diftanccs de l'un à l'autre , & l'inftruit de plu- fieurs circonftances , qu'il ne doit point ignorer , & qu'on ne trouve point ailleurs. L'Auteur , félon toutes les apparences , ctoit d'A- quitaine , faifoit profeflîon du Ghriftianifme , & vivoit fur lafin de l'Empire de Conftantin le Giandi ce qu'on peut inférer du Confulat de Dalmacc 6c de Zéflo^ pbile , fous lequel il afiure avoir fait le Voyage de Conftantinople à Calcédoine. Cet Itinéraire paroîc avoir été drefle principalement en faveur de ceux qui entreprenoient le pèlerinage de Jerufalem, & pour lefqucls il devcnoit un guide des plus fûrs. A la vérité , l'ufage des Carres Géographiques étoit alors très-commun [ dk notre Editeur 3 Mais elles éroient renfermées dans un trop petit cfpace , pour pou- voir indiquer m détail au Voya- geur , tous les gircs , toutes les po- lies qu'il devoit rencontrer fur fa route, les intervales des unes aux aunes mefurés par milles •, &: c'eft pourtant de quoi il lui ctoit elTen- ticl d'être exactement informé , pour voyager commodémenr. Cette confideration rendoit les anciens très - attentifs à mefurer fcrupulcufement ces diftances pat milles , par (tadcs , &c. tic M. Weifeling le prouve par l'exemple de Galien le Médecin , qui pour empêcher de fe fourvoyer à l'ave- nir , [ comme il avoir fait en pareil cas ] ceux qui voudroient aller chercher la terre de Lemnos dans rifle de ce nom , leur fournit une cfpece de petit routier^ qui puifle les guider intailliblemcnt : foin que certainement il n'auroir pas pris , fi les Cartes euiTent pu l'en difpenfer. L'infuffifance de ces Cartes mettoit fouvent les Voya- geurs dans la neceffité de recourir^ J U 1 L L avant leur dcpnrc , à ceux qui avoient fait le même voyage, pour tirci d'eux quelques lumières tou- chant la route qu'ils dévoient te- nir -, ce que l'Editeur confirme par une élégante Epigramme Gréque , qu'on peut voir dans fa Diffcrta- tion Préliminaire. Un bon Itinéraire pour Jerufa- lem étoit dans ce tems là d'autant plus nccclTairc,que les pèlerinages à cette Ville famcufc ctoient alors plus fréquens ; &c c'eft de quoi M. \Venéling recherche ici curiculé- ment les caufcs. Il ne les trouve (dit- il) ni dans les devoirs que nous prefcrit la Sainte Ecriture, ni dans ce que doit nous fuggcrer la dioite raifon -, l'une & l'autre nous apprenant [ continue- 1- il ] que ce n'eft point le changement de Pays qui contribue à nous appro- cher davantage de Dieu , & à nous le faire invoquer plus efficacement. Mais un autre motif qui lui paroî- tïoit avoir été encore plus capable de détourner d'un tel voyage ces Pèlerins , c'eft le rifque qu'ils cou- roient non feulement par rapport aux fatigues & aux périls de la rou- le, mais beaucoup plus encore par le danger de fe corrompre , quant aux mœurs, après leur arrivée dans ce lieu tant defiré. En effet ( pourfuit - il ) on peut 3ire que Jerufalem alors étoit une Ville où rcgnoit fouverainement la corruption &c la licence la plus effrénée. Jerufalem étoit devenue le féjour des voleurs , des adultè- res , des empoifonneurs , des picurtriers , des Idolâtres , & de E T , I 7 J y. 577 toutes fortes de malfaiteurs. L'E- diteur ne prétend nullement en être crû fur fa parole, & pour ne lailTer aucun doute fur la vérité d'un bit de cette nature , il prend à témoin S. Grégoire de NyfTe dont il allègue deux palTagesconfi- derables & décififs fur ce point. Quelles pouvoient donc être les caufes d'un empreffemcnt fi ex- traordinaire à vifitcr une Ville fi corrompue de toutes façons ? No- tre Editeur en découvre plufieurs qu'il a foin de noiis développer ici. Il donne pour la première l'exem- ple de l'Impératrice Hélène, qui s'ètoit tranfportée à Jerufalem , & celui de Conftantin fon fils , qui avoit décoré de plufieurs Edifices cette Ville fameufe, ainfi que la petite Ville de Bethléhem. II re- connoît pour une féconde caufe le défit ardent de contempler les Lieux fanâiifiés par la prefence &c par les Miracles de J. C. fans com- pter que la vûë même des endroits dont il eft parlé dans l'Ecriture Sainte peut jetter beaucoup de jour fur quantité de paffages qui fe li- fcnt dans les Livres Sacrés , & qui demeureroient obfcurs & peu in- telligibles fans ce fecours. Or (dit- on ) rien n'étoit plus raifonnabltf qu'un pareil motif, s'il n'eiât point dégénéré en fuperftition. C'en étoit une [ félon M. Wef- feling ] & en même tems une troi- fiéme caufe , qui cngageoit au^ voyage de Jerufalem, que l'envie démefurée d'être baptifé dans le même fleuve où l'avoit été J. C. c'eft-à-dire , dans le Jourdain ; 8s. 378 JOURNAL D ce retard du baptême ctoit quel- quefois d'une très-dangereufe con- fequence pour le Voyageur , qui périfToit en chemin fans avoir reçu ce Sacrement : ce qui ne pouvoir être regardé que comme l'effet -lyct. Or comme cet Hie- roclès étoit poftericur à Strabon , & pour le moins contemporain' d'Etienne de Byzance , qui le cite jSo JOURNAL D «n quelques endroits , il n'y auroit point d'inconvénient [ dit l'Edi- teur ] à faire de ces deux Hiéroclès un fcul & même Auteur , d'autant mieux que les deux Ouvrages qu'on leur attribue paroiflent allez du même caractère. Mais quelques circonftances dé- rangent beaucoup un pareil Syftê- me. Car en premier lieu , dans no- tre Itinéraire , Callinique Ville de l'Ofrhoëne porte le nom de Léonto- jolis , qui ne lui fut donné que quelques années après la mort de l'Empereur Marcien. En fécond lieu , cette Notice range parmi les Villes de Pifidie celle de Juftinia- nople , qui ne put recevoir une telle dénomination que fous Juftinien j ce qui montre , que notre Hiéro- clès ctoit pofterieur de pluficurs années à Pulchérie & au Géogra- phe Etienne. De plus , la Provin- ce de Pannonie mife ici au rang des Provinces de l'Empire d'O- rient , ne lui appartenoit plus au tems de Marcien , où elle étoit de- venue la proye d'Attila & des Huns: fans compter qu'elle étoit du diflrid de l'Empire d'Occident & qu'elle ne fut annexée à celui -é/idens qui y gouvernoient auparavant ; & auf- quels Hiéroclès dans fa Notice conferve leurs anciennes dénomi- nations. D'où il refulte , qu'il doit être regardé comme antérieur à tous ces changemens, qui ne fe fi- rent , pour la plupart , que l'an 555. fous le Confulat de Bélifaire. Et ce qui confirme encore la juftef- fe & la vérité de cette époque ^ c'eft que ce même Empereur ayant aufti vers le même tems innove dans la divifîon ou la diftribution des Provinces , partageant les unes en plulieurs départeniens , & réu- nilTant plufieurs autres en une feu- le : Hiéroclès dans fa Notice ne fait nulle mention de ce partage ni de cette réunion , n'ayant aucun égarcj ni à l'un ni à l'autre ; ce qui prou- ve [ dit -on ] qu'il avoit compofé fon Ouvrage , avant la publication de tous ces nouveaux réglemens. A ces preuves qui paroillent aflez décifives , l'Editeur en joint quel- ques autres , qui ne font <\\izfubjt- diaires , & que nous pafTons pour abréger. Peut-être J U I L L E Peut-être Hicroclcs étant mort avant le Confuht de Bclifaire , n'eut il rien à changer dans l'Itiné- raire qu'il avoit publié. Peut-être fe trouvât il à portée d'y introduire tous les changemens faits dans l'é- conomie du Gouvernement par l'Empereur , & n'en voulut-il rien faire. Peut être l'exécuta - 1 - il dans une féconde Edition de fon Ouvra- ge, dont la première feule eft ve- nue jufqu'à nous. Quoiqu'il en foit , M. Weffeling examine , i°. Si nous avons aujourd'hui cet Iti- néraire entier & tel qu'il eft forti des mains de fon Auteur; i". Si cette Notice eft Civile ou Ecclefia- ftique. Touchant la première queftion Schel/lrate a pris le parti de la né- gative en vertude ces deux confi- derations , i". Que ce qu'allègue Conftantin-Porphyrogcnéte fur la Ville de Conftantinople d'après la Notice , ne patoît plus à prefent dans celle-ci : 2.°. Que cette Notice renfermoit 6^4 Préfigures ou Pro- vinces & huit ou neut cens trente- cinq Villes ; au lieu que la ncitre ne comprend que 51 des premières, & 7 5 1 des fécondes. Mais [ dit no- tre Editeur ] il n'eft pas difficile de faire fentir la foiblelTe de ces deux raifons. Car , en premier lieu, ce que Scbtlflrate prend pour une citation tirée d'Hiéroclès , font les propres paroles de l'Empereur , comme l'a fort bien remarqué D. Anfelme Banduri : en fécond lieu , le reproche des Provinces omifes dans nos Editions de l'Itinéraire, iie peut tomber que fur celle de T , I 7? r- 341 Charles de S. Paul , ces omi (lions ayant été remplies dans les Editions fuivantes d'après le Manufcrit de la Bibliothèque Farnéfe ^ comme on l'a déjà dit plus haut. Du rcfte , l'Editeur ne nie pas qu'il ne man- que à notre Itinéraire un grand nombre de Villes. Mais il ne faut s'en prendre [ félon lui ] qu'à la négligence des Copiftes , qui en ont fauté plufieurs que leurs noms détîgurés à l'excès rendoient mé- connoilTables , & qui ont eftropié ceux de quantité d'autres. Et il ne faut pas s'imaginer que cette dé-' pravation de Texte y foit bien ré- cente ; puifqu'il paroît que l'exem- plaire dont s'eft fervi Conftantin- Porphyrogcnéte étoit pour le moins auflî corrompu que les nô- tres. Sur quoi l'Editeur fe referve à difculper ailleurs plus pleinement notre Itinéraire. M. Wefteling vient enfuite à !i féconde queftion propofée, fcavoic fî cette Notice eft Civile ou Ecclc- fiaftique ? Le P. HardouinVa regar- dée comme Ecclefiaftique ; mais fans en dire les raifons; & plufieurs après lui ont été du même avis ; en quoi ils ont eu tort ( dit l'Editeur) puifqu'elle n'offre aucun caraderc particulier , qui puifte la mettre au. rang des Notices Ecclcfiaftiqnes ; qu'on n'y rencontre que très • peu de Métropoles , nulle Ville Patriar- chale , nuls Archcvêchez , nuls Sièges indépendans. Outre cela il y eft fait mention de plufieurs Villes qui ne furent jamais Epifcop.ilcs ; & l'on en produit pour exemple la Scythie , dont la Notice compte Ddd 342 JOURNAL DE jufc)ii'à 1 5 Villes , quoiqu'il n'y eût dans cette Province que le feul Evcclié de Tomes ; auquel cas il au- roit fuffi de le nommer dans une Notice Ectlclîaftique , fans y par- ler des 14 autres Villes. De plus , quelle neceiïïté de fpecifier les titres des Magifttats prt pofcs au gouver- nement de chaque Province dans une pareille Notice ? Qii'a de com- mun avec elle la dénomination de Synecicmus , Compagnon de l'^oy.ige^ que porte l'Itinéraire ? Il s'enfuit de toute cette difcuf- f on., que l'Auteur de cette Notice ne s'y cft piopofé d'autre but que celui d'offrir aux Vovageurs une dcfcription Géographique de l'Em- pire d Orient en racourci. Delà vient qu'il a confervé fcrupuleufe- ment l'ordre des Provinces , félon qu'elles étoient foûmifes à des Pré- fets & à des Vicaires, comme le fait voir notre Editeur, en paffant en revue ces mêmes Provinces tel- les qu'on les trouve rangées dans l'Itinéraire ; ce qui le diftingue ab- folument d'une Notice Ecclefiafti- que. Du refte , l'on doit la première Edition de notre Itinéraite à Char- les à'. Saint P^zitl , mais mutilée de 14 Provinces. Luc de Holftdn avoit raffemblé les matériaux ne- ceffaires pour une nouvelle Edi- tion, enrichie des 14 Provinces qui manquoient à la précédente , &C conteréc fur trois Manufcrits, ce- lui du Vatican , celui À'^lt.iernps , & celui de Faméfe ; mais fa more ayant rompu l'evecution de ce def- ic'm j Emmanuel Sckljlnite eut 5 SÇAVANS. foin tic tirer de la B bliothéque Pa- latine les papiers du détunt & de publier l'Ouvrage d'Hiéroclcs dans le fécond Tome de fes yînti^uitez. Eccl-'fî.ilhtjHes , p. 6'<9 ; après quoi Dom Anfelme B.tfiiuri ne le jugea pas indigne d'entrer dans le pre- mier Tome de Ion Empire d'Ortent^ p. 3 1. Au défaut de nouveaux Ma- nufcrits , M. Weffeling s'eft con- tenté de confronter enfcmble ces trois Editions & avec les variantes ^ pour choilir les leçons les plus con- venables , en rejettanrles autres à la marge , & retranchant la verhon Latine , pour ne point tropgrollir ce Volume. Il ne nous refle plus maintenant, pour achever de faire connoîrre le mérite de l'Editeur, qu'.i tranfcrire ici quelques - unes de fes Remar- ques , par lefquelics on pourra ju- ger de routes ks autres. Pag. 2. Bdciietes. ] ( Il s'agit ici de i'Atriquc en général , & de la Mauritanie en particulier. ) On lit dans deux Manui'crits de Paris ( dit l'Editeur) Bicai/etes ; &: dans un troifîéme , ainfi que dans celui du Vatican , Baccavates. Mais il cfH- me que le vrai nom de ce Peuple Barbare étoit Bacmites , guidé fur cela par l'autorité de Ptolomce , 5c par celle de Jul. Honorius , p. lo. de l'Edition de Jaq. G--of?ttvins , où l'on trouve Fluvim Aialda.,.. inter Barbara &f^dcitates vergit a4 mare; 6 où il faut tire Ad ni va &: Bacua- tes. Dans l'Auteur Anonvme des Générations d'A bien , mais fans refufer le ne- ncefiaire à perfonnc, pas même à » notre ennemi. Car ce n'eft pas » aux mœurs ni au caratîierc , c'ell » à l'homme que nous donnons. Telle étoit la morale de Julien fur l'aumône, &,il ne s'en relâcha jamais. Heureux, s'écrie là-de(Tus notre Auteur , fi ce Prince avoit confervé la Religion dans laquelle il avoit puifé cette morale ! E c e ^;o JOURNAL DE Nous avons remarqué que Ju- lien laiffoit entrevoir, dès les com- mencemens , quelque oppcfition au Chriftianifme. L'Hiftonen croit que la haine de ce Prince contre l'Empereur Confiance qui étoit un Chrétien très-zélé , quoique perfc- cuteur desCatholiqueSjCn fut peut- être la caufe , il reconnoît cepen- dant que la foûniinion qu'exige la Foi , pouvoit révolter un efprit curieux , & enlîc des fcienccs hu- maines ; Que d'aiikurs il étoit, fans doute , frappé des funcftesdi- vifions qui déchiroicnt alors l'Egli- fe ; CCS divifions concernoicnt , 1°. La difpute fcandaleufe où l'on mettoit en queftion , fi J. C.éroit le Dieu Souverain , ou une Créatu- re , 2°. Le relâchement des Chré- tiens , 3°. Les violences exercées contre les Orthodoxes par la Fac- tion Arienne , 4°. La politique & la foiblefle des principaux Mem- bres du Clergé. Julien en lifant nuit ôi jour les Auteurs Payens , s'étoit familiarifé avec leur maniè- re de penfer : l'eilime outrée qu'il faifoit des grands Hommes de l'Antiquité , le portoir infenfiblc- ment à fouhaitcr qu'ils euiîent tou- jours raifon. Kotre Auteur lait à ce fujcî , une reflexion qui paroît bien ffenfce : c'cft que c'eft ainfi qu'au commencement du fciziéme fiécle, quelques-uns de ces Scavans qui contribuèrent au rétabliflcnicnt • des Lettres, étoicnt , comme on le difoit alors, Payens danslecœur, plus par pédanterie que par liberti- nage , en forte que iuivant cet ef- çrit de pédanterie , il n'eut pas te- S SÇAVANS, nu à eux de ramener le culte des Dieux d'Homère 5c de Virgile. U remarque que cette tentation étoit bien plus délicate pour Julien. Les Edits de Conftantin avoient ébran- lé le Paganifme , mais ne l'avoient pas détruit. Les Sacrifices éroient interdits , mais les Temples les plus célèbres fubfiftoient encore. Il n'étoit plus permis d'y entrer, mais on les voyoit , 8c cette vîiè cntrete- noit le fouvenir des fêtes Payennes. Il y avoit même des Villes où ces Temples n'étoicnt pas fermes , &c Rome étoit du nombre de ces Villes. Le Sénat même autorifoic dans Rome les anciennes cérémo- nies. On y voyoit encore des Payens occuper les premières Charges de l'Empire. L'Idolâtrie- n'avoit point de meilleur appui que les gens de Lettres. Tous ceux quejuiien eftimoit parmi eux, Sca- vans, Grammairiens , Poètes, So- phirtes , Philofophes , fi l'on en- excepte un petit nombre, tcnoicnt pour les vieilles fuperftitions. Comme ils en fentoient le ridicu- le, ils emplovoient tout ce qu'ils avoient de littérature & d'cfprit , pour donner au Paganifme , un tour plaufible. Ils avoiioicnt que la Mythologie prifeà la lettre étoit infoiàtenable , mais ils t.îchoient de pcrfuaderque lous rciriblcme des fidlions elle contenoit les profon- deurs les plus rcfpeclablcs de la. Morale & de la Théologie. Notre Auteur entre ici dansdes cxplicarions que nous rapporterons fimplement comme Journaliftes ,, fans lien dire de l'abus qu'on en J U I L L ■pourroit faire. » Les Pjyens, dit-il^ » faifojent profcllîon de rcconnoî- •itre un feul Dieu fuprcme, four- «ce & principe de tous les Etres. » Les autres Dieux étoient,cn par- » tie , fes attributs perfonifics ; » en partie, des Miniftresfubalter- » nés , dont il ctoic le père 6c le n Roi. Il avoitemprint dans toute » la nature, l'image de fes perfec- » tions. On devoit regarder l'Uni- » vers comme un tableau , dont le » grand Dieu croit, à la fois , l'ori- wginal & le Peintre. Donc en ho- I» norant la créature , difoicnt les -M Payens , on rendoit hommage M au Créateur. La nature étoit peu- » pléc dcDieux ou deGcnies de dif- » terentes efpeces, qui en faifoient 3> mouvoir les rclTorts , & en re- 3» gloient les opérations. Ces intel- a'iigences préfidoient aux Aftres , »> à la terre , à la mer , aux Royau- 5» mes , aux Villes, aux lieux parti- n culiers , aux Sciences , aux Arts , « aux vertus ; chacune , félon le » poi^e que le Maître commun » avoit bien voulu lui confier. » Les âmes vertueufes , après * avoir quitté leur corps , croient » admifes au nombre des Dieux , » fous le nom de Héros ou de de- » mi-Dieux. Il étoit jufte d'hono- » rer les Dieux & les Héros , com- »me les Lieutcnans de la Ma)efté • Souveraine, & les diftributeurs » de fes bienfaits. K A l'égard du culte des Statues, » ils difoient que ce culte n'avoit » pour objet , ni le bronze , ni le o marbre , mais le Dieu à qui la » Sucuc étoit confaciée. Etant unis E T , 175;. j;, » comme nous fommes à une por- » tion de matière ; il nous f^illoit » difoient-ils , des fymbolcs corpo- » rels qui tutTcnt à portée de recc-' » voir des rcfpcds & des attentions » extérieures que nous ne pouvons » adrefler immédiatement aux "Dieux, à qui ce culte matériel » ne lailToit pas de plaire, parce "qu'ils en connoiffoicnt le motif : » c'eft ainfi , difoient ils encore ^ que «les Empereurs nous fçavcnt gré » des honneurs que nous rendons à » leurs images , quoiqu'ils pulTent » bien s'en palTer : on ne manquoit » pas d'appuyer ces raifonnemens ^ » d'Oracles & de prodiges préten- » dus , de traditions populaires » érigées en faits authentiques : on » ne manquoit pas de les appuyer » de l'exemple de tant de fiécles & » de tant de Nations ; enfin de 1& » profpcrité des Romains qui, par » leurs conquêtes , avoient , difoit' » on , affez )uftihé leur Religion. » Telle étoit la méthode qu'on » employoit pour fonder le Paga- ' o nifme , & pour en déguifer lc$ » égaremens. Notre Auteur, après ces paro- les, obferve que Julien ayant en Afic une entière liberté de voit toutes fortes de Sçavans , eut occa- fion d'entendre plufieurs fois de pareilles apologies faites avec art Sc fortifiées de tout ce que l'incrédu- lité Payenne objedoit contre U Religion Chrétienne. De telsdifcoursféduifirent peu à peu Julien , & nonobstant la for- ce de l'éducation , il ne fe foûtint dans la véritable Religion, que juf- E ce ij 352 JOURNAL DE qu'à l'âge de lo ans. Et voici , fé- lon notre Hiftorien , comment il fe laifla entraîner dans le précipice. L'envie de connoître l'avenir , porta Julien à confuker un Devin, qui , échappé à la rigueur des Loix , fe tenait caché dans Nico- médic : on ignore les prédirions du Devin , mais ce que l'on fçait, c'eft qu'elles prévinrent Julien en faveur de l'Idolâtrie. Le Platonifme de ce tcms-là, n'étoit pas la pure dodrine de Plaron; l'on y avoit introduit mille fuperftitions capa- bles de donner à des efprits peu attentifs , une idée avantagcufedu Paganifme, 8c il n'efl: pas étonnant qu'un Prince de 20 ans comme Ju- lien,pût s'y lailîer furprendre. Edé- iîas , alors chef des Platoniciens , dcnieuroit à Pergame Ville de Mi- fie. La réputation de fa dodrine at- tira Julien , quincpouvoitplusle quitter. Comnie ce Philofophe koit vieux , & qu'il' ne pouvoir plus fe donner les foins neceffaires pour infpirer à Julien le goût du Paganifme , il le mit entre les mains de Maxime d'Ephcfe , l'un des plus anciens Si. des plus habiles Difciples d'Edtluis. Ce Maxime , pour initier Julien aux Myfteres du Paganifme , le mena dans un Temple , où il le fit defcendre dans une grotte foûterraine , Se où il fit dîverfes évocations. Quand les é.vocations furent achevées , on en- tendit tout à coup , dit notre Au- teur , un bruit épouvantable , & on vit paroître des Ipedres de feu. Julien eftrayé du fpedàcle , fit par liabnudcjle figoe de la croix , & S SÇAVANS, aulli-tôt tout difparur. La même chofe étant arrivée juR]u'à deux fois, Julien ne put s'empêcher de dire à Maxime, qu'il admiroit la vertu de ce figne des Chrétiens. Maxime qui vit chanceler fon pro- felite , lui dit : Q^ot Trtnce, croyeZ.- •vouj avoir fan peur aux Dieux'imn^ mais les Dieux ne veulent -point avoir de commerce avec un prof me comme vous. Julien fe paya de cette rai- fonj il ne troubla plus la cérémo- nie, &: il Te lailTa initier. Les mer- veilles qu'il crut voir fous la direc- tion de Maxime, lui firent adopter le culte Payen , dans toute fon étendue , & fon ame crédule em- brafla ce culte extravagant , com- me l'unique qui pût honorer la Di- vinité. Julien, depuis ce tems-ll, ne fc regarda plus que comme un Prince appelle par les Dieux pour être le reftaur.ueur de leurs AuteiS. Il difoit quelquefois à fes amis , que s'il devenoitjanrais Empereur rUnivers feroit heureux -, & qu^il retabliroitla Religion des Payens , qu'il rcgardoit comme la vrave piété. Cependant il f.iu voit toujours les dehors du Chriftianifme, & fça- chant qu'on avoit .à la Cour quel- ques foupçons de ce qui s'étoir paf- fé entre lui & Maxime , il fe fit raferla tête pour éloigner ces foup- çons , & embralfa la vie Morrai^i- que. Par cette dillimulation ilréuf- fit à tromper Conibnce & Galliïs. Différentes révolutions que nous pafFons, & que notre Auteur décrit au long, engagèrent Julien de fe rctireràAthéncs,qui depuis tant de frécks^ ctoitlecentredeiaLittcra- J U I L L pure , & le rendez-vous de h )cu- ncfTe la plus brillante. Il y trouva S. Bdile & S. Grégoire de Nazian- zç. Ce dernier , cfui étoit defltné^ dit notre Auteur , à épmfer contre la mémoire de- ce Prince ^pofiat ^ tonte ta force de l'éloifuence dans des dif- coiirs comparables a:ux Ph/lippicjiies de Démojihéne & de Ciceron _, affiire qu'en le voyant ^il apperpttle dérègle- ment defofi cfprit dansja phyjtonomie & dans [on maintien. Notre Hillorien prétend que S. Grégoire de Nazianzc ne fe trompoit point en cela , & que lorfqu'on rapproche avec équité , les difFcrens traits que ce Père & les autres Auteurs nous ont laiffés de cette phyfionomie , il faut con- venir, que la figure de Julien & tout fon extérieur n'éîoient pas moins (înguliers que fon caradere. Mais quels font donc ces traits que notre Auteur trouve fi défavanta- gcux î Les voici , les ledeurs en jugeront. » Julien avoit une taille médio- »cre, le corps bien formé , agile i> & vigoureux -, la démarche peu » alTurée ; des épaules larges qui fe » hauiïoicnt & fe baiffoienîtour à «tour -, la tête toij jours en mouve- i> ment-, les cheveux naturellement » arrangés. Les fourcils & les yeux M parfaitement beaux -, le regard » d'un feu furprenant , mais où «onlifoitde l'inquiétude &c delà » légèreté ; le nez droit , la lévrc » inférieure allongée, l'air railleur, a>unc barbe hérifTée qui finiffoiten » pointe , du moins dans le tems ^ qu'il fut Empereur j il parloit & E T , 175 j-. 55-3 30 rioit avec excès-, comme fa lan- » gue , toute rapide qu'elle étoit , » ne pouvoit pas toujours fuivrc » fes penfées , fon difcours éroit » quelquefois entrecoupé , & fa » parole héfitante ; h vivacité lui » hifoit fouvcnt faire des queftions M& des réponfes hors de propos » ou qui manquoient de jufleflè. Voila un portrait de Julien; en voici un autre que notre Auteur rapporte -, auquel des deux ajouter foi î C'eft ce que nous ne détermi- nerons pas. On verra toujours en les comparant , ce que c'eft que la bizarrerie de l'cfprit quand on veut juger du caradere des hom- mes par certains dehors. " Ceux , dit notre Hiflorien , qui » n'avoient pas les mêmes lumières »-que S. Grégoire^ ne faifoient at- » tention qu'à ce qu'Us voyoicnc »' ou croyoient voir d'eftimable » dans Julien. Ils admiroient fa pé- » nétration , l'étendue & la variété » de fes connoiflanccs , la douceur » de fon commerce. Ils lui trou- » voient une éloquence modefte ' x> qui perfuadoit l'Auditeur , en ï> paroiflant le refpcder ; car Ci 35 l'on en croit Libanius , il ne 3) pouvoit parler fans rougir. Tel eft le fécond portrait qu'on nous fait de Julien. Les Ledeurs font à prcfent en état de juger du génie de ce Prince , fur-tout s'ils rappellent ce que nous avons rap- porté plus haut de l'inclination na- turelle qu'il avoit pour fecourirleS ■ pauvres. Nous avons dit que nous • ne déciderions rien fut le jugement qu'on pouvoit faire de Julien pas- j5'4- JOURNAt D rapport aux apparences. Mais qu'il nous foit permis de remarquer que fi Julien n'avoit pas été apoftat , ceux qui ont trouvé dans fa phyfîo- nomie tant de traits odieux , ne les auroient peut être pas trouvés tels. Tout jugement porté après coup eft fufpeL^. Nous interrompons ici le fil de l'Hiftoire dans ce qui concerne i'a- poftafiede Julien, pour cxpofer de quelle manière , félon notre Au- teur , Julien parvint à la dignité de Céfar ; Confiance qui étoit avancé en âge , & qui avoit fait trancher la tête àGallus, comme oous l'avons dit plus haut , ne fe fentant plus capable de gouverner feul , Se n'ayant point d'enfant mâ- le , refolut d'élever Julien à cette dignité, & voici comment la cho- fc fe palTa. Le fixiéme Novembre 555.c'eft- à-dire, un an après la trifte mort de Gallus , Conlhncc fortit de fon Palais pour fe rendre à un lieu où il avoit donné ordre à fcs troupes de fe trouver : là, fur un Tribunal, & tenant par la main Julien qui entroit ce jour-même dans fa 24' année , il déclara qu'il avoit refolu de le créer Céfar fi l'armée le ju- gcoit à propos ■■, fur quoi ayant été applaudi par une acclamation géné- rale , il le revêtit de la pourpre, & le proclama Céfar. Cette dignité devint un grand fardeau pour Julien. Qiie dcvoit- on fe promettre d'un jeune Prince élevé à l'ombre des écoles , lequel n'avoit jamais vu d'épée nue , ni connu ia gucne que dails les Li- ES SÇAVANS; vres ? Mais la ledure , à ce que ïc> marque l'Hiftorien , lui tint lieu d'exercices j comme elle en avoit tenu autrefois à Lucullus : Julien marcha contre les Allemands qui venoient de lever le Siège d'Au-; tun , & qui couroient encore le Pays. Il arriva dans Autun le 24 de Juin 3 56'. & montra dans cette oc- cafion , comme le remarque Am- mien , toute larefolution & toute la fagelTe d'un vieux Capitaine. U remporta diverfcs vidoires figna- lécs dont nous paffons le détail ,' pour éviter la longueur, & qui mé- ritent d'être lues. Apres quoi il vint palTerl'hyver à Pariscn 358. L'Hi- ftorien , à cette occafion , décrit ce qu'étoit alors la Ville de Paris : elle ne s'étendoit pas au delà de ce qu'on appelle la Cité. Cependant elle ne lailToit pas , foit dans fes dehors , foit dans fon enceinte,d'a^ voir tous les accompagnemens nc- ceflaires pour recevoir un Empe- reur avec fa fuite. On y voyoit un Palais, des bains publics, un champ de Mars , un Faubourg confidera- ble du côté du Midi. On croit que Julien y bâtit le Palais des Thet-i mes,dont on montre encore des re- ftes , fous le nom de Bains de Ju-j lien. . Julien, dans fon Mifopogon, ap-J pelle Paris , fa chère Lutece , & en parle avec effufion de cœur ; ce qui fait fentir qu'il s'y étoit pliî ^ & que le fouvenirlui en étoit cher. Quoique les Gaules fuffent pout lui un Pays froid en comparaifon de l'Afie Mineure & de la Gréée où il avoit toujours vécu , il s'obî J U I L L E iVina étant à Paris , à lutter contre la rigueur de Thyvçr j en voici un exemple bien remarquable. Comme il éroit en quartier d'hy- vcr dans cette Ville , un froid ex- traordmaire couvrit la Riviè- re , de glaçons. Julien ne voulut point foufïiir qu'on fît du feu dans fa chambre j tout ce qu'on put obtenir de lui , & encore avec bien de la peine , fut qu'il confen- tît q.i'on y portât quelques cliar- bons allumés. Le tcu tout médio- cre qu'il étoit,répandit une exhalai- fon qui lui donna à la tête & l'en- dormit. Il penfa en être étouffé. On emporta promptement le Prince dehors , 6c les Médecins lui ayant fait rendre, par le moyen d'un vomitif, le peu de nourriture qu'il avoir pris, il le fentit foulage , éc fut dès le lendemain en état d'a- gir. C'eft ainfi , ditl'Hiftorien que fa dureté pour lui-même, penfa lui coiîtcr la vie. Julien aima beaucoup les Gaulois , il n'en fut pas moins aimé. »» La fimplicité , dit notre » Auteur , la franchife , &: les • mœurs aufteres de ces Peuples » fimpathifoient extrêmement avec »fon humeur affable , populaire , » ennemie du faftc & des plaifirs. » Voilà une peinture qui donne xune grande idée de Julien; les » traits fuivans encherifTcnt encore > fur ceux-là.En changeant d'habit^ N dit l'yiuteur^ il ne changea point » de caradere. A l'exemple de M. a» Aurcle , il vivoit enPhilofophe » au milieu de la Cour , & à la tête » de Tes armées. Comme il a voit » pottt maxime , ce mot du vieux » Caton : Qu'«wf ame occupée de la » bonne chère ejl peu occupée de [es n devoirs ; il enchcrit encore fur les » leçons de frugalité qu'on lui » avoit données , &c il bannit abfo- » lumcnt de fa table les faifans , & » les autres mets délicats. 11 fe con- » tentoit de la nourriture de fîmple » Soldat ; quelquefois il la prcnoit «debout , & même en fî petite y quantité , qu'on difoit ordinaire- » ment de lu'i,qu'ilvivoit d'air com- ■^ me les Cigdes. 11 rougi (Toit des » befoins inféparables de l'humani- » té , jufqu'à dire , qu'un Philofo- » phe auroit dû pouvoir fe pafTet j> de refpircr ; il dormoit peu , & » s'éveilloit à l'heure qu'il vouloit j » fon lit étoit un tapis, ic fa cou- » verture une fîmple peau. Ilfele- M voit toujours à minuit , & après » avoir faitfecrettcment fa pciere à 3>Mercure,il travailloit aux affaires, «Sralloit vifîterles fentinelles. Sa » ronde finie , fi les affaires le lui » permettoientjil étudioit jufqu'au » jour. Il s'appliquoit avec une ar- » deur infatigable à la Philofophie, » dont il rapportoit l'étude princi- » paiement aux devoirs de fon » Etat. Ce portrait brillant cft un peu terni par ce qui va fuivre. On ne fçauroit douter , dit notre Auteur que Julien ne fe foit rendu trcs- habile dans la Philofophie , nj; qu'elle n'ait influé fur fes mœurs } mais elle ne le guérit jamais d'un fonds de légèreté & de variété re- connu des Payens-même , qui gâ- ta toujours fes adions les plus bril» lantes. Ce fonds de légèreté cep en» 5jé JOURNAL DE dant , fi l'on me: à part l'abandon que Julien fit du Chriftianiîme , n'eft marqué par aucune adion de fi vie > notre Hiftorien lui - même qui rcconnoît avec raifon qu'il ne faut point chercher de véritables ver- tus dans ceux ijui ignorent la véritable Religion , encore moins dans ceux i^iù comme Julien l'ont, abandonnée , rap- porte des circonftances de la vie de ce Prince , qui ne font pas voir qu'il fût léger en tout, & en voici oui marquent en lui une folidité peu commune. La Philofophic , dit notre Auteur, n'épuifoit pas tel- lement l'application de Julien , qu'il ne donnât du tcms aux autres Sciences, fur-tout àTHiftoire qu'il regardoit comme une méthode abrégée pour acquérir l'expérience, que l'âge ne nous donne qu'en dé- tail , à nos dépens , & quelquefois lorfqu'il n'eft plus rems d'en faire Vjfage. Dans toutes fes expéditions il portoit avec lui , comme une provifion neceffaire à un Général , •quelques Hiftoriens choifis. On. fent à la leâ:ure de fes Ouvrages , qu'il polTcdoit l'Hiftoire des Ro- irains , & celle des autres nations. Nous le compterions lui-même parmi les Hiftoriens célèbres , dit l'Auteur , Il fes Mémoires de la Guerre des Gaules avoicnt pafte jufqu'à nous. Mais voici des chofes qui regardent plus particulièrement fa manière de vivre, que tout ce qjje l'Hiftorien a rappoité jufqu'ici, & qui ne donnent pas de Julien l'idée d'un homme inconftant & léger. Jl^orfque Julien n'étoit pas à h S SÇAVANS; guerre, il employoit la journée à rendre juftice , ôi à s'exercer avec fes Soldats. Une danfe nommée la Pirrhique , faifoit partie des exerci- ces militaires chez les Grecs & chez les Romains ; un jour , qu'au fon des fifres , on montroit à Ju- lien à la danfer : Ah ! Platon , Pla- ton , s'écria-til, quel métier pour un Philofophe l II fe trouvoic moins déplacé fur fon Tribunal , où il dccidoit avec beaucoup de juftice. Il panchoit toujours du côté de la doucear : Notre Au- teur en rapporte deux exem- ples que nous ne croyons pas de- voir palfer. Les parens d'une fille enlevée J pourfuivoient la mort du raviffeur; Julien , ayant apparemment fait attention à des circonftances parti- culières , qui diminuoient l'cnor- mité du crime, fe contenta de ban- nir le coupable. Les parens crioient que c'étoit une chofe indigne , ôc que le Céfar étoit trop indulgent. Oui j je le fuis trop , repartit Julien, à ne confîderer ejue la difpojîtion des Loix. Mais un Prince eft une Loi vivante ejui doit tempérer par fa clé- mence , ce cjne les Loix mortes ont de trop rigoureux. Un ancien Gouvctr neur de la Gaule Narbonnoife ; nommé Numérius , étoit accufc d'avoir pillé la Province ; comme il fe tenoit fur la négative , & dé-- concertoitfesaccufateurs, un Avo- cat que notre Auteur traite d'Avo- cat célèbre , crut fupplécr au dé- faut de preuves , en s'ccriant : Qui efl-ce cjHifera coupable , Cesar, s'il fujjit de nier fes crimes ; Aiais , rc-; prie J U I L L E prit Julien ; Qni rjice cjn:fera inno- esntfipour cire coupable il [HJjit d'ê- tre accuft ? Ce Prince , au refte , avoic une fermeté extraordinaire pour pren- dre le pacti de la juftice contre ceux qui étant prépofés à la faire rendre, fe fervoient de leur pouvoir même pour la violer , & fouloient les Peuples. Des le premier quartier d'hyver qu'il p.ilîa à Paris, quoi- que ce quartier fut tort court, il trouva aiTez de tems pour examiner les états de dépenfe & de recette du tréfor public i le Préfet du Prétoire, nommé Florentius , foû- tcnoit qu'on avoit befoin d'une fubvention extraordinaire pour remplacer les non-valeurs de laça- pitaticn. Julien qui regardoit les nouvelles taxes comme la ruine des Provinces , & qui d'ailleurs fe re- prochoit d'avoir dilFmiulé trop long-tems les vexations de Flo- rentius , lui refirta en face , Se lui dit : Je perdrai plutôt la vie cjue de foiiffnr cet impôt. Là-delTus le Pré- fet fe mit à crier que les foupçons qu'avoir de lui Julien , retom- boient fur l'Empereur - même qui l'avoit mis en place. Julien , fans autre difcuffionjfit fur le champ,un calcul net & précis , par lequel il démontra que le feul produit de la capitation , fuffifoit au-delà pour tous les frais de la guerre. Sa vi- gueur arrêta pour lors le Préfet , qui ne lailfa pas quelque tems après, de lui envoyer un ordre tout dreffè pour exiger cette fubven- tion-, mais Julien, loin de le ligner, le jctta par terre , difant tout haut, îhillet. T . I 7Î J. 35-7 que la chofe étoit trop criante ; il s'explique au long fur ce pamt dans une de fes Lettres. Falloir il , dit-il, que je lailTafle de pauvres peuples à la merci de ces voleurs , qui parleurs indignes manoeuvres les ont réduits aux dernières extrc- mitez ? Nous punilTons de mort un Tribun , nous lui rcfufons même la fcpulture , pour avoir abandonne un porte qu'il ne pouvoir garder fans expoferfa vie , & nous aurions la lâclieté de quitter le nôtre en ceiïant de détendre ceux qu'on ne cefTe d'opprimer. Dieu nous y a placés, & combat lui-même avec nous. Si notre fermeté nous attire quelque difgrace , c'eft une gran- de relTource que le témoignage d'une bonne confcience. Je prie les Dieux de me donner un hom- me de bien tel que Salufte. Si l'on m'envoye un Succelfeur , je n'en ferai peut-être pas fâché. Il vaut mieux faire bien un peu de tems , que de faire long-tems mal. On demandera fans doute quel etoit cet homme de bien dont le Prince parle ici. Notre Auteur va au - devant de cette queftion , & fait de Sallufte le portrait fuivanr, " Sallufte , dont parle Julien , » étoit un Officier de grand mérite^ "Gaulois de nation, on ne fçait » pas bien quel emploi Confiance " lui avoit donné dans les Gaules ; » mais il eft fur qu'il en eut un con- » tîderable ; il étoit Payen , hom- » me de Lettres , très-habile danî li les affaires , & d'une probité rc- » connue . c'étoient bien des titres >> pour prétendre à l'amitié de Ju- Fff 3j8 JOURNAL D « lien. Salluile avoir le rare talent » de donner des avis lans humeur , » & fans un air de confiance qui ne M révolte que trop fouvent contre » la vérité , & qui révolte toujours » contre ceux qui la difcnt. La li- » berré avec laquelle il reprenoit • Julien , étoit afTaifonnée d'é- » gards , de cordialité , & de ten- »» dreffe. Julien le refpeûoit com- » me fon père , ^ l'on attribuoit à » Sallufte , tout ce que Julien fai- » foit de bon , fans que Julien en «fût jaloux. Te! eft le portrait que notre Hi- ftorien fait de Salluile. Nous l'a- vons rapporté d'autant plus volon- tiers qu'il contient des leçons dont il eft peu de prrfonnes qui ne puif- fcnt profiter. Ce talent , par exem- ple , qu'avoit Sallufte , de donner des avis fjns humeur , d: fans un air de confiance qui ne révolte que trop fouvent contre la vérité, 8c qui révolte toijjours contre ceux qui la difent ■■, cette grandeur d'ame au moyen de laqucUeJulicn voyoit fans jaloufie attribuer à un autre qu'à lui tout ce qu'il taifoit de bien font autant d'inftrudlions importantes que tout le monde peut s'appliquer. Mais revenons à Florenîius. Ce Prétet avoit écrit en Cour ce qui s'étoit palTé entre Ju- lien •& lui touchant l'impôt de li Capiration ; Confiance informé du différend, manda à Julien de mé- nager davantage le Préfet, &c de lui" témoigner moins de défiance. Julien répondit à l'Empereur , que c'étoit allez que les Gaulois, abî- înés comme Us étoicnr par les gens ES SÇAVANS, d'affaires , qui lesruinoient , payât fciit les anciens tributs , èc qu'exi- ger d'eux quelque chofeau delà , c'étoit leur demander l'impcftible. L'empereur n'inlifta pas : le projet de Florentins n'eut point de lieu y &c même dans la fuite , Julien di- minua tellement l'impôt dclaCa- pitation , qu'au lieu de vingt-cinq pièces d'or qu'on donnoit aupara- vant, par tète, on n'en donna plus que fept. La Province nommée féconde Belgique qui étoit dans un état plus pitoyable que les autres , toucha Julien de compailîon. Il fe chargea d'y lever lui-même les impôts , & engagea le Préfet à n'envoyer au- cun Oflîcierpour contraindre per- fonne à payer. Les Peuples char- més de l'équité & de la douceur de Julien , s'acquittèrent avant le tems de l'échéance , &c leur prom- ptitude montra , dit notre Hifto- ricn , que la manière dont on lève les tributs eft fouvent plus odieufe & plus à charge, que lestiibucs- mcme. L'Auteur , après plulîeurs autres articles que nous paflTons, raconte comment Julien parvint à l'Empi- re. Ce morceau mériteroit d'être rapporté en entier ; mais nous l'a- brégerons pour éviter la longueur. Confiance jaloux de la réputa- tion que Julien s'attiroit tous la jours par fon équité , par fa dou- ceur, & parfes exploits, envoyadcs ordres pour ôter à Julien tour ce qu'il avoit de meilleures troupes,. Se réduire ce Prince à la dernière extrémité. Mais les troupes ne pu- J U I L L rcnt jimais fc rclbiicire à quitter Julien: il eut beau les exhorter à obéir à l'Empereur -, fcs remontran- ces furent inutiles , il monta même fur fon Tribunal , 6c leur fit à ce fujct une harangue dans laquelle il leur reprefenta l'importance dont il ctoit qu'ils allaiïent trouver l'Em- pereur , qui avoit la volonté & le pouvoir de recompenfer leurs fer- vices; mais ils ne répondirent au difcours de Julien , que par un morne filcnce. Les Officiers fe reti- rèrent dans leur camp , inconfola- bles de quitter à la tois leur Patrie & un fi bon Prince. Les Soldats n'étoient pas moins affligés. Tous prennent les armes à l'entrée de la nuit , courent au Palais , & l'inve- ftilTent . crians d'une manière la- mentable : Julien- Auguste 1 &C le conjurant avec larmes , de fe montrer. Julien entendant du fond de fon appartement où il s'ctoit re- tiré pour prendre du repos, les cris & les lamentations des Soldats , ne voulut jamais paroîtrc & foûtint le Siéf^e toute la nuit , fans que les Soldats fe rcbutaffcnt. Le matin ils brifcrcnt les portes , & forcèrent le Prince de fe iaiffer voir. Dès qu'il parut , ils crièrent plus fort qu'auparavant : Julien-AuguSte ! H leur refiftoit à tous en général , Se à chacun en particulier , careffant, menaçant , montrant de l'indigna- tion , & les fupplisnt de ne point E T , I 7 j j. 3JP flétrir leurs lauriers par une dém.Tr- che (i imprudente , & qui fcroit fuivie d'une guerre civile. Tout fut inutile ■■, ils redoublèrent leurs cris, & commencèrent même à en venir aux reproches & aux menaces. Ju- lien , qui avoit tenu ferme jufqu'à neuf heures du matin, voyant que fa vie étoic en danger , &c qu'après fa mort ils éliroicnt un autre Em- pereur , les lailTa faire ce qu'ils voulurent. Ils relevèrent fur uti Bouclier , & le proclamèrent Au- guste , c'eft-à-dire , Empereur.. U manquoit un Diadème pour rendre la cérémonie complette- Julien protefta qu'il n'en avoit ja» mais eu. On voulut qu'il emprun- tât de fa temme un collier ou quel- que autre ornement de tête. Il ré- pondit que cela feroit de mauvaifç augure. Faute de mieux, on cher- cha une aigrette de cheval ; mais i! y trouva de l'indécence. Alors un Enfeigne nommé Maurus , s'arra- cha le collier qu'il portoit , qui étoit enrichi de pierreries , & le mit fur la tcte de Julien, C'ell ain(î que ce Prince fut élevé à l'Empire, vers le mois de Mars ou d'Avril j à rage de 28 ans & demi , érane lui-même Conful pour la troifiéme fois , &c Confiance l'étant pour la dixième. Nous expoferons dans un autre Extrait ce qui fc paffa après cettç élévation de Julien à l'Empire, Ff fij 5do> JOURNAL DESSÇAVANS, ANACREONTIS TEll ODJE ET FRAGMENTA , GRyECE ET Latine , cum Notis Joannis - Cornelii de Paiiw. Trajcdti ad Rhcnum , apiid Guiiielmum Kroon , Bibl. ijii. C'eft-à-dire : Les Odes & les Fragmens d'Anacréon ^ en Grec & en Laiin^ avec les notes de Jean Corneille de PaifW. A Utrccht , chez Guillaume Kroon , Libraire. 1731. ««-4°- pag. 315. fans l'Epître ptcliminaire Se la Préface. DEPUIS la première Edi- tion de cet agréable Poète Grec, donnée par Henri Eflienne , en i)j4. '«4°. d'après deux Ma- nufcrits , les feuls qui ayent paiu jufqucs ici , & que nous n'avons plus; les gens de Lettres à l'cnvi , îe font occupés du foin de corriger le Texte de fcs Poches , de les tra- duire en diverfes Langues, de les éclaircir par des Commentaires, &C démettre de. tems en rems au jour CCS fruits de leurs travaux. Ofi peut compter parmi ceux qui le ibnt le plus diftingués en ce genre , Guill. Morel^ Cbnft. Plantin, Corn- melin , Tanegui le Févre , Madame Dacier , le Baron de Longef terre , Barnes , Baxter , la FoJle , Gacon , tic. La plus finguliere de toutes ces Editions eft certàinementcelle de l'Abbé i^^ Rancé ( depuis Abbé de laTrafpe ) qui à l'âge de douze ans ,, publia en, 1^39.3 Paris /«-8°. les Odes d'Anacréon en Grec, qu'il accompagna de fes Scholics en la Hicme Langue , & qu'il dédia au Cardinal de Richelieu. Ce Livre fut réimprimé au même lieu & de la même forme en i6:^j. On n'y trouve d'un bout à l'autre aucun mot de Latin , excepté le lieu de lîimprefîion , le nom & i'cnfcignc du Libraire. Apres un fi grand nombre d'Editions , après tant ds Scholies , de Notes , de Com- mentaires, même très-étendus [té- moin celui àe Barnes , qui remplit feul un in-iz. de plus de joo pa- ges; ) s'imagineroit-on qu'il y eût quelque chofe encore à défirer pour la parfaite intelligence d'un Poète , qui paroît Ci fimple , Ci aifé ôc Cl naturel ; Cependant voici M. de PauW [que divers Ouvrages de Critique ont déjà fait connoître] qui vient nous apprendre combien jufqu'ici nous avons été peu clair- voyans ^ non feulement fur le vrai fens de plufieurs endroits difficiles & ob- icurs dans les Poëfics dont il s'agit, mais encore fur le Poète- même qui en eft véritablement l'Auteur.Touc le monde jufqa'à prefent les a crues d'Anacréon , fur la foi du ti- tre qu'elles pertoient dans les deux Manufcrirs d'HcjTri Eftienne ; & perfonne ne s'étoit avifé de trou- bler ce Poète dans la polTeflîon où tous nos Critiques modernes l'a- voient mis de cette Poèfie Ana- créontique. Mais M. de Pauw avan- ce ici fur ce lujet un paradoxe , au- quel perfonne ne fe feroit attendu, 11 prétend que dans tout ce Re^ J U I L L E cucil de petifes Odes en vers Ana- crconticjucs , à peine s'en trouve-t- iï quelqu'une qu'on pui (Te regarder comme étant l'Ouvrage d'Ana- crcon ; que tour le rcfte lui a été attribué fort gratuitement, & nous vient de difteicntes mains. Nous allons expofer fidèlement les rai- fons , dont il appuyé fcs doutes fur ce point , & nous en laiflerons le jugement au public Parmi toutes ces Odes Ana- créontiques [ die M. de Pauw ] il y en a plufiturs qui font indignes d'Anacréon , 8c qu'il ne feroit pas juftc de mettre fur fon compte. Mais que pcnfer de celles qui pa- toîrroient dignes de lui? doivent- elles lui appartenir ou non ? Dès que nous n'avons pour l'affirma- tive que le feul témoignage des deux Manufcrits de Henri Efîien- ne , & que ce témoignage eft également favorable à toutes ces Odes , tant bonnes que mauvaifes', il ell également rccufable [ dit l'E- diteur ] pour les unes & pour les autres : outre qu'il peut y avoir eu piufieurs génies , differens d'Ana- créon , qui ayent parfaitement léulîi en ce genre de Poëfie. Mais pour combattre plus efficacement le préjugé commun fur cet article , M. de PauW a recours à l'autorité de Suidas, qui dit formellement qu'Anacréon avoit compofé toutes fes Poëfies en Dialedle Ionique. Or dans toutes les Odes Anacréon- tiques dont il eft queftionj à peine, de l'aveu de tous les Sçavans , ap- perçoit on les plus légers vertiges «le ce Diaiede y A reconnoiffabie T; 17? y. i6t dans Hérodote & dans les autres Ecrivains qui en ont fait ufage. Et voilà quel eft l'argument péremp- totre , qui détermine l'Editeur à dépouiller Anacréon d'un bien mal acquis ( félon lui ) &c dont il ne croit pas pouvoir en confcience lui lailTer la moindre partie, pas même une feule Ode. Mais ( dira ton) Aulugelle en produit une qui paroît aujourd'hui dans notre Recueil. L'Editeur en convient , fans en être ébranlé. En effet ( dit-il) quelle preuve folidc peut-on tirer d'une Ode , où l'on apperçoit tant de variations , & pour les mots , & pour la ftrudu- re des vers ? où les Commenta- teurs fc font permis toutes les addi- tions & tous les retranchemtns qu'ils ont jugé à propos î Ce que ceux-ci ont'cu la hardieffed'allonger ou d'acourcir , d'autres ont eu cel- le de le compofer originairement S< de le mettre fous le nom d'Ana- créon. Mais ( repliquera-t-on ) Au- lugelle déclare avoir tiré cette Ode du Recueil des Poëfies de ce der- nier. Cela ne conclut rien en faveur du fentiment commun ( dit M. de Pauw).Car dès le tems d'Aulugelle il pouvoir courir de ces Recueils infidèles & fuppofés , foit pr des ignorans , qui croyoient d'Ana- créon toutes les Odes Anacréonti- qucs, foit par des fauflaires , qui les attribuoicnt au Poëte de Téos ^ pour les mieux vendre. Cette fii^ ponnerie (ajoûtet-on ) paroît ma- nifeftement dans l'Ode qu'Aulu- gelle nous a confervée , où l'on a fouiré vifiblcment le nom de Ba- 5^2 JOURNAL D thylle, pour en impofer an Lecteur peu attentifs h lui faire croire vé- ritablement d'Anacréon. Telle eft donc l'opinion de M. de PauW, au fujet de l'Auteur des Odes qu'il publie dans ce Volume, &c fur quoi il ne prétend gêner pcrionne. Il lailTe à chacun ta liberté d'en pcn- ferce qu'il lui plaira : & peut-être ceux qui ne feront pas de fon avis feront ils le plus grand nombre. Il pilTe de l'Auteur de ces Poc- fies à l'examen particulier du gen- re des vers quiles compofent , & parmi lefquels paroiflent le plus ordinairement les vers Anacréonti ques cataleEîi(jttes , c'cft-à-dire , qui demeurent courts , qui font mutilés d'une fyllabe. Or ces vers n'étant réellement que des demi- vers ïam- biques , l'on ne doit pas douter qu'ils ne foient précifément de la même nature que les ïambes en- tiers ou trimètres , compofés de fix pieds ; &c que par conféquent ils n'admettent les mêmes pieds & les mêmes fyllabes qui entrent dans ceux-là. C'efl: ainfi que les vers Anacréontiques peuvent commen- cer par un dadyle , par deux tribra- ques , par un anapefte & un tiib;a- que , par deux anapeftes , par un fpondée & un anapefte ; ils peu- vent recevoir au troifiéme pied un fpondée , même avec un autre fpondée au premier. De plus il y a des Odes Anacréontiques entières dont tous les vers commencent par un pied de deux fyllabcs , & d'autres , où un pied de trois fylla- bes fait le début de tous les vers : ce qui néanmoins ne s'obfctvc pas ES SÇAVANS, toujours tellement à la rigueur J qu'il n'y paroifle quelquefois à la traverfe un pied de trois fyllabes pour un pied de deux , Se récipro- quement : &c l'Editeur donne de toutes ces variations plus d'un exemple. Parmi les vers .Anacréon- tiques nommés catalenijms, il s'en trouve plulicurs à'acatcile^icjHss ou ^ui ne demnirent ■point court. Il y en a outre celadediversautresgenres, & qui fe fcandcnt ou fe mefurent par dtux pieds ou de 4 fvllabes cha- cun , tels que font l?s ioniens , le double trochée , le choriambe ^ les épitrites , Vanti/pa/ie , 'Kzpéons , le procéleufwnticju; ; ou l'un de 4 fylla- bes 5c l'autre de trois, tels que font le Bachicfuc^ V amphimacre , Vantiba- chique ^ le molojfe, Sic. C'eftdonc de la différente combinaifon de tous ces pieds poL-tiqucs que refulte la ftiuârurè des vers de toutes ces Odes : ôc c'ell de quoi l'Editeuc produit quantité d'exemples ,' qu'on peut voir, & fur lefquels il renvoyé .à fes notes, pour plus am- ple éclairciffement. Il remarque auflî que quelle que puilFe être la variété qui règne dans cette verfification , quant au nom- bre des pieds & des fyllabes -, cette variété devient nulle, fil'on confi- dere les teras & la quantité des fyl-î labes en tant que brèves ou lon- gues : de forte qu'il s'y rencontre toujours une entière égalité , & que ces vers font toujours des demi- vers i'ambes tout jufte. 11 n'y a donc rien dans cette diverfité de pieds qui déplaifc à l'Editeur j & elle ne fera jamais l'unique raifon J U I L L qui l'engage à faire quelque chan- oemcnt ou quelque corredion dans le Texte de fon Auteur. C'eft un principe auquel il le tixcra ( dit- il) jufqu'à ce qu'on lui ait prouvé bien clairement ces deux points : 1°. Qiie les anciens n'ont point pratiqué ce mélange de pieds : 2°. Qiie le caraclere de leur Mufi- qué n'auroit point comporté un tel mélange. Dès que l'on fera venu à bouc de le bien convaincre de ces deux faits j alors il s'empreffera de mettre h main à l'œuvre pour la correction des partages corrompusj &c peut-être ( continue-t-il ) n'y ferat-il pas plus malheureux que les autres l'ont été ou le feront à l'avenir. Que nos Critiques déli- cats ( pourfuit - il ) employcnt alors toute leur industrie, & falfent voir de quoi ils font capables. Ce fera une bcHe occaiîon pour eux de faire connoitre toute leur fagacité & de s'en faire honneur. A la fuite de toutes ces Odes Anacréontiques M. de Pauw a fait imprimer tout ce que les Editions précédentes ont pu lui fournir de fragmens d'Anacréon , parmi lef- qucis il s'en trouve plufieurs qui font véritablement de lui. L'Ed.i- teur les donne ici dans le même état où ils ont été déjà publiés ail- leurs ; Se il n'a point prisa tâche de les ramener aux régies de la vcr- fification ; inftruitpar l'expérience, que rien n'cft plus difficile ni plus hasardeux que d'elTayer à remettre en ordre des vers lyriques qui ont été une fois dérangés ; &i cette dif- Êculté ell une fuiîc inévitable de la E T, 175 y. ^g^ variété des pieds qui entrent d.ins la ihuiflure de ces vers. Si l'on cil en peine de fçavoir pourquoi l'oij ne trouve point ici fept de ces fr^c. mens que Bunies a tirés de la Poé- tique de Jul. Ccfar Scaliger pour les inférer dans fon Edition ; notre Editeur en allègue pourcaufc l'i- gnorance où nous lailfe Scaliger fur les endroits d'où il les avoit em- pruntés i ce qui donne un violent foupçon qu'il pourroit bien les avoir fabriqués lui-même , pour offrir des exemples ou des modèles des vers qu'il appelle Anacréonti- ques. M. de Pauw relevé ici une méprife groflîere du même Burnes qui cite comme un fragment d'A- nacréon un versd'Arirtophanc; & cela fur ce que le Scholiafte de ce- lui -ci obfcrve que le mot êùoxim dont k fertle Poète Comique , fc trouve employé dans le même fsns par Anacréon. Banw range encore parmi les fragmens de ce même Poète , trois vers cités par le Grammairien Hépheftion , dont le premier eft d'un Poète Anonyme & les deux autres fontdeTimo- créon , & nullement d'Anacréon. Quant aux notes de l'Editeur, il déclare qu'il y a difcuté avec tant de foin Se d'exacftitude tous- les partages du Poëte Grec qui pou- voient le moins du monde arrêter le Ledeur , que lefens en paroîtra clair aux moins éritdits. C'eft ce qu'il a tâché d'exécuter toujours en peu de mots ; & pour y réurtîr ^ il lui a fallu faire main barte fur rou- tes les inepties { dit-il ) & fur tou- tes les imaginations des Commen'-. 354- JOURNAL D tateuts , ou peu verfés dans la Lan- gue Gréque , ou peu rompus dans la Critique. Pour ne rien dire des autres en particulier ( pourfuit l'E- diteur ) les deux derniers Interprè- tes d'Anacréon , Barnes & Baxter^ ont entaffé fur ce Poctetant de re- marques frivoles j que s'il entre- prenoitde les repeter en détail , il lui en coiJteroit plus de papier ôc d'encre qu'il n'en a mis à tout ce qu'il nous a communiqué jufqu'à prefent fur la Littérature Gréque : ce qui lui feroit fort à charge , Se ne profiteroic en rien au Public II connoît trop le prix dutems, pour le perdre ainfi gratuitement. Il fe contente d'infiller fur les points qui lui paroifTent de quelque im- portance-, & paflc par deifus toutes les minuties, lesvifions, ksfuii. litez. des Commentateurs ; ( c'eft toujours M. de PauW qui parle. ) Il nous avertit à la fin de fa Préfa- ce , que de la quatrième Ode d'A- nacréon , il a cru devoir en faire deux , dont la première s'adreffe véritablement à l'Amour , ou tout au moins au mignon du Pocte , &c la féconde n'eft faite que pour un jeune Efciave qui fous le nom d'Eros efl: au fervice d'Anacréon, & auquel en cette qualité il con- vient au Poète de donner fes or- dres.NotreEditeur fe fçait très-bon gré du partage de cette Ode , & fe flatte qu'elle fera du goût des juftes cftimatcurs. Cela nous conduira faire connoître plus particulière- ment fes notes , dont nous produi- rons pour échantillons quelques- unes de celles qui roulent fur les ES SÇAVANS, endroits les plus difficiles du Poe'tè" Grec, ôc qui ont le plus exercé les Interprètes & les Commentateurs; &: par -là nous terminerons notre Extrait. Oil. III. vcrf. 14. (tç'pe , <^i,a-( , th- paj-w/Aêl'. Tci/^ê Tû^6V, èç-; p.o\ vuv , BXa- /3=1=e< fi)a.ySiT% l'Eupn. ] Sur ce paffagc corrompu l'Editeur fuit la correc- tion de Henri Ejiienne qui lit èi t/ 1/.% \vv, au lieu de tç-' M^« l'^f, qui ne hit aucun fcns ; «Si il la préfère à celle de Baxter qui corrige U t» (jufijH'àijuel peint ). Ces trois vers ainfi corrigés fignihentdonc : Al- lons , dit-il , ej[.ty::'i< un peu cet arc ^ pourvoir Ji U corde n'e/} point mouil- lée. Od. X. verf. % . o/am; cT'ai- !it/x«- .S-i)? îtSv. Et afin (jne vous foyez in- formé de tout. ] Tanegui le Févre corrigeoit élégamment & lifoit au lieu d'c/xa; , oTraç cT'àv tK/xa-^nç ttxv. Notre Editeur y donneroit volon- tiers fon fuffrage , fi Scaliger ne lui offroit cette variante tirée d'un exemplaire du Vatican ifcu? cT'a» £K/ia5-(iç vlv , où ce Sçavant litc/xùx J^'iv'tKiJLcld-iK rlv : mais afin que vous le connoijjiel^ mieux : ( il s'agit d'un Amour de cire : ) Il eft queftion ici dechoifir d'abord entre ces deux cxprellions rrxv & vîv ; & M. de Pauw donne fans difficulté la pré-; ference à la première. Mais le choix lui paroît plus difficile entre ces deux autres , o/«oç J^'iv , & ottuc cT'àV : il ne fçait quel parti prendrcj il héfite entre Scaliger Sc le Févre j tantôt il penche pour l'un, tantôt il fe déclare pour l'autre , il les jet- ceroit prefque à croix-pile. Il faut pourtane J U I L L pourtant fe déterminer pour l'un des deux ( dit - il ) car de vouloir cotiferver la leçon ancienne , ce ferait être né en dépit d'yipolhn. Od. XFII. verf. I. ToV ûL^yvfw TCfiua-ai H^xiç-i, fxoi itnnfor. . . . îlo- TYifw , ôcc. f^ulcain , en cifelam cet argent , fais -moi s une coupe , &c. ] Tous les Interprètes (dit l'Editeur) s'accordent à rendre le mot -to^wu^ par le mot cifclant , & ils ont rai^- fon. Mais de quel ufage ce terme peut- il être ici ? Vulcaincommen- ceroit-il par cifeler de l'argent , pour en fabriquer une coupe, dans la fuite ? On ne peut rien imaginer de plus inepte ; car les entansfça- vent qu'on donne à un vafe , à un inftrument la forme qu'ils doivent avoir , avant que d'y mettre les br- nemeos de la cifelurc i au lieu <]u'ici l'on commenceroit par où i'on devroit finir , ce qui feroit ridicule. Admettra-t-on ( conti- nue-1- il ) la corredtion de H. Ef- tienne , qui au lieu de Topeû Mais c'cft vouloir fauver une abfurdité par une autre ; car ( ajoûte-t-il ) on ne fabrique point au rour une ar- mure camplette ( Tra.vcTr'Kia.v ) comme le diroit cette Ode. Ces deux le- çons paroiflent donc également infoûtenables à M. de PauW, quoi- <]ue tous les Interprètes non feule- ment s'en foient accommodés , mais fc foient à ce propos recrics fur l'élégance, l'efprit & la politelTe du Poëte Grec , qui s'étoit expri- mé fi heureufement \ fuppofant , f ;ns doute , que Vulcain en qualité èc Dieu , pouvoit exécuter facilcr Juillet. ment L"S choies les moins nnturel les & les moins polTibles. M.iis il ne feroit pas jufte de mettre une pareille abfurdité fur le compte d'Anacréon. Il vaut mieux s'en prendre aux Copiftes; & en ce cas- là notre Editeur hazirde une cor- retftion ^ lit Ter d^ymw X''^^^^<^''-i * lî'; d.tnscjiiel cœur pourrois- /> contenir ^ fon^'^ir , fippurtcr tant d'amour} Cependant il naît de-là un neuve! inconvenicntiC'efl que la juftcd'e ne fubhlle plus dans la comparaifon que veut laire le Pocte entre le remède qu'il tiouve à l'ex- cciïive chaleur que lui caufe le vin^ bc qu'd adoucit par l'application des couronnes de fleurs ; & celui qu'il voudfOit apporter aux feux de l'amour qu'il nourrit dans fon fcm , & qu'il f'cgiroit d'adoucir !k de diflîper pliàtôt que de les renfer- mer au- dedans. M. de Pauw, pour fèift mieux cadrer cnfcmbk les S SÇAVANS, deux membres de la comparaifon- ^ lit donc To cTf KCfUfJ.X TUV tfti>T(ÀV KpatTi)) Tir» a-K-cJ^à^^ca ; avec ejud cœur , avec ijucl cour^ige , dijjîpemi^ je an dehors le feu de mon amour'- De- puis cette correction faite par l'E- diteurj il a fçû que feu l'Abbé Rég- nier des AiM-ais avoir donné cette même explication à ce palTagc dans fa veriîon Francoife d'Anacrcon. . Od. XXXlLverj. i8. Ti' Ofk iit' iciifud-^U i AJais cjHoi j tu parois fur- pris de me voir tant de Maitrejfes i ( traduit Madame Dacier. ] H s'agit dans cette Ode du dénombrement des Maîtrertts d'Anacréon, Le vers dont il elT; quclUon preftntemenc cft difficile & certamement cor- rompu. Henri Efliennez. corrigé T* tOH^ jours affoupt , endormi par l'amour > ce qui eft tout-à-tait/w^/î/f ( dit no^ tre Editeur) puifque l'amour loin d'endormir , rend beaucoup plus éveillé. Tancgui le Févre a mieux rencontré pour le fens , en lifant Ti* 41BS j TocHi; i^mIxç i Qjte dis-tu ? quoi un fi grand nombre d'atnours ; Mais { continue M. de Pauw ) c'eft poulTer trop loin l'audace de la correâiioH. Jofcph Scaliger avoit écrit à la marge de fon exemplaire T< (pHç ; ait yifciTeç ; Que dis- tu? toi). jours desainours} Mais notre nouvel Editeur n'en eft pas plus content : car (dit-il) cette énumération de Maîtrefles & d'amours ne fe faifant ici que par rapport aux lieux ca aux Pays, & non par rapport aux divers tems, l'adverbe àù [toujours) n'y convient nullement , & rien ac fcioit plus froid que h leflcxion,. J U I L L » Tl me vient quelque chofe dans «l'efprit ( dit l'Editeur ) que je «crois partir de rAutcur-même ; « voici ce que c'cft en trois mots : » T«' culateur d'Amans étonné du »i grand nombre , s'en e^cpliquc » en ces termes : Que me ditesvous- nlk'i Anacréon Un répond : il faut » bien i^ue tu augmentes le nombre^ la » fomme de ces amoiiri , pHifjHe je n n'^i point encore pajfé en revue ceux oo de Syrie , &c. Cela fait ( conti- » nue l'Editeur) un fens fî élégant »> & fi jufte , qu'il n'y a rien de • mieux. Car ces mots ae^'épcoTaç » ( multiplie encore ces amours ) «viennent rrcs-à-propcs accroître » l'étonnemcnt de celui qui les 3> compte i en forte que tout le re- » fte fuit de-là très-naturellement. 0» C'eft pourquoi , fi le Leâeur a » du goût ( conclud M. de Pauw ) » il approuvera ma conjcd:ure. Od. XXXFlll. verf. penult. 26,x«- Vov Iv fMiet'® X^f^iJ"''^ '■ J^ danferai ^umilieu des jeunes gem à l'imitation E T 1 7 3 y. 5^7 de S:!èie : ce qui a un rapport m.i- nifcftc avec le vers prccédenr Nfuc ttMov J^i TTivu : Je bois encore mieux ^ite les jeunes. Cette correc- tion lui paroît donc indubitable. Mais il refte encore ( félon lui ) quelque chofe de fcabreux &: d'ir- Mgulierdans la conltruétion. C'eft l'abfence de la particule «Te , qui devroit figurer après la particule fjiv qui précède. Barnes la place après fxtToii; , & à fon exemple M. de Pauw la mettroit après leV, vîon «r« : Ss. quoiqu'il ne la trouve pas là audl-bien placée qu'il la fouhaite- roif, il aime mieux encore l'y voir que de ne la point voir en tout. Mais il rencontre fort heuteufc- ment ( dit il ) dans les Hymnes at- tribuées à Orphée le motS rc , qui ne permet pas plus de »» fupprimer le vrai que de dire le ï> faux ( continue l'Auteur ) on n'a » point difljmulé les fautes du Vi- » comte de Turenne. La vertu trop » parfaite paroît inimitable ( pour- » luit on ) elle décourage les uns , » elle irrite les autres , elle eft fuf- »' pedc à tous ; parce que les hom^ ■«mes , quelque grands qu'ils a foient , font toujours marqués au »coin de l'humanité. « A l'égard du ftilc , loin d'y vouloir mettre ces ornemens afTcdés que ne com- porte jamais l'Hiftoire, il s'eft con- tenté de le rendre clair, fîmple, naturel , & par-là ( dit-il ) d'autant plus convenable à la Vie d'un homme , dont la (implicite faifoit le principal caradere. Cette Hiftoire eft partagée en fix Livres , renfermés dans le pre- mier Volume. Le premier Livre conduit le Vicomte de Turcnnc depuis fa naiiTance jufqu'à fa 34^ 570 JOUÎlNAt D année , où il reçut en 1643. le bâ- ton de Maréchal de France. Le fé- cond nous le montre pendant les cinq années fuivantes , c'eft-à dire , jufqu'à la paixdeWcftphalie , con- clue en 1648. Dans le troifiémc Li- vre , on nous expofe la conduite qu'il tint pendant les difcordes ci- viles qui agitèrent la France depuis l'année 1649. jufqu'à l'année 1651. que le Roi revint à Paris, Le qua- trième va depuis le mariage du Vi- comte en 1653. jufqu'à la paix des Pyrénées, qui en t554.termmaunc guerre de près de 24 ans. Le cin- quième Livre nous fait voir le Vi- comte en 16^60. revêtu de la nou- velle Charge de Maréchal Générai des Camps ScArmées du Roi,créèc exprès pour lui , au détaut de celle de Connétable qu'on lui offrit , & qu'il refufa , plutôt que d'aban- donnerfa Religion : &ce Livre eft terminé par ï évacuation de la Hol- lande en 1673. On trouve dans le fixiéme Livre les deux dernières Campagnes du Vicomte & fa mort arrivée en 16^75. Dans une Hiftoire comme celle-ci , remplie d'un fi grand nombre d'évenemens mé- morables , ce feroit entreprendre l'impolTible que de vouloir ici les faire tous connoître en détail ; & il faudroiî , pour cela , tranfcrirc la meilleure partie du Volume. Nous nous contenterons donc de nous prrctcr fur ceux qui nous paroî- tront les plus interelTans , & de nous borner pour les autres à une fimple indication fommaire , Se qui pourra fournir aux Ledleurs pomme un avant - goiît capable de ES SÇAVANS; leur faire fentir le mérite & l'habi-' Icté de l'Hiftorien , & combien foK Ouvrage eft digne d'être lu dans toute fon étendue. Livre I. Henri , Vicomte de Turenne, naquit à Sedan le n' Septembre 1611. de Henri delà Tour d'Auvergne , Duc de Bouil- lon , Souverain de Sedan , Se d'E- lifabeth de Nadau , hlle de Guil- laume de Naffau premier du nom ,' Prince d'Orange , & de Charlotte de Bourbon - Monrpenfier. Il fut élevé avec fon frère aîné le Prince de Sedan , auprès duDucleur père, qui n'oublia rien pour l'éducation de fes enfans , & dont l'Auteur nous peint ici le caradcre auquel nous renvoyons. Les deux frères furent élevés dans la Religion Pré- tendue Réformée , & le Vicomte , dont l'efprit étoit lent & tardif , ne s'appliqua d'abord à l'étude (dit l'Hiftorien ) que par pur coura- ge d'efprit ; mais il s'y affedionna peu à peu avec tant de fuccès , que fa mémoire dans un âge avancé lui rcndoit encore prcfens les plus beaux endroits des Poètes Latins Sc des Poètes François. Il avoir conçu dès fa tendre jeunefTc une fi haute idée d'Alexandre le Grand parTHi-! ftoire qu'il en avoir lûë dans Quin- te-Curce, qu'un Officier s'étant avij fède lui dire alors que cetHiftorien n'étoit qu'un Romancier ^ le jeune Vicomte après avoir difputé vive-; ment contre lui , fe mit vraiment en colère , Si le fit appeller fecre- tement en duel. Mais la Duchcffe de Bouillon, qui ravie dé ces mar- ques d'un couxage nalÛant^ansfoit J D I L L E fils, avoit exprès cchaufic la c]ue- rellc 3 convertit adroitement l'.ip- pel en une partie de challc. A ce courage le joignoicnr des lors une iài^tlle &c une raifon fore au-deffus de fon âge , un grand empire fur fes paillons , beaucoup de douceur Se de modération , l'amour de la vérité , l'horreur du menfonge, de la didimulation & des faulFes fi- nefTcs , un grand tonds d'humanité & de charité. Après la mort du Duc fon pcre, à peine avoit il 13 ans que la Du- cheiïe fa mère pritlarcfolution de l'envoyer en Hollande, comme on y avoit envayé fon frerc aîné ; ce qui donne occafion à l'Auteur de nous tracer ici un plan général de la fituacion où l'Europe fe trouvoir alors , par rapport aux guerres de Religion : plan ,. qu'il faut conftil- ccr chez l'Auteur- itiême , & qui met parfaitement au fait fur cette matière. Lé Vicomte de Turenne fervird'abord en Hollande comme volontaire fous fon oncle le Prince Maurice , qui conçut de lui les plus hautes efperanccs. Mais éranc mort au bout de trois mois , le Prince Henri fon frère prit fa pla- ce , & donna au jeune Vicomrc fon neveu-unc Compagnie d'Infan- terie , où celui-ci remplit les de-' voirs d'Officier aufTi parfaitement qu'il s'étoit acquité de ceux de Sol- dat. Il fervit donc en qualité de Capitaine à divers Sièges 6c dans la plupart des expéditions de fon oncle contre le fameux Spino- U ; marquant pendant trois ans , J^p^lication U plus aûldne è s'in^ T. 175 T. 571 ftruire par toutes fortes de moyens du métier de la guerre. Le Siège de Bois-le-Duc le mita portée de montrer avec plus d'éclat fes pro- grès dans l'art militaire ; & il paya de fa perfonnedans une adion vi- ve , où fon trere , à. la tctc d'un dé- tachement, défit un fecours, qui Vouloit fe jetter dans la Place. Le Vicomte, après cinq années de fervice en Hollande vint en France , à l'âge de 1 9 ans , & on lui donna d'abord un Régiment d'In- fanterie. Mais on n'a aucun détail de ce qui lui eft arrivé jufqu'au Siè- ge de la Motte , où il fervit 4 an5 après; & l'Auteur nous expofeic? quelle ctoit alors la (îtuation da Royaume. Cette forterelTc , la feu- le Place qui reftât au Duc de Lor- raine , fut aflîégée par le Maréchal' de la Force , & s'étant rendue au bout de cinq mois , on regarda li Vicomte comme la principale cau- fe de tous ks fuccès , & le Cardi- nal de Richelieu le fit Maréchal de Camp, grade qui éroit alors im- médiatement au - delTotis de celui de Maréchal de France. Il n'avoiE' encore que 23 ans. Le Cardinal s'en fervit utilement dans les différen- tes guerres qu'il eut à foiltenir contre la Maifon d'Autriche 8c dont M. de Ramfay nous donne ici un plan général bien dévelop- pé. ^ Apres là ruptuf centre les deux Couronnes , le Vicomte fut nom- mé Maréchal de Camp du Cardi- nal de la Valette, qui conduifaic une armée au fecours des Suédois' en Allemagne , & il fut d'us' 372 JOURNAL DE grand fecours aux Troupes , dans l'horrible retraite qui termina cette première Campagne , dont les commencemens avoient été alTez favorables. L'année fuivante , il fervit encore fous le même Cardi- nal , au Siège de Savernc , où il fut blette au bras droit , & faillit à le perdre. Il n'étoit pas encore bien guéri de fa bleflure , qu'il attaqua Galas au Bourg de JulTey , le défit, -& le contraignit de repaffer le Rhin. En 1^57. il affiégca le Châ- teau de Solre , le plus fort de tout le Hainault , &c le prefla fi vive- ment j qu'en peu d'heures , il con- traignit la garni fon , qui étoit de zooo hommes , de fe rendre à dif- cretion. Ce fut- là , que quelques Soldats ayant trouvé une femme des plus belles , l'amenèrent com- me la plus précieufc portion du butin à leur Commandant qui n'a- voit alors que 2.6 ans, &i qui loiiant beaucoup la retenue de fes Soldats, dont il teignit de ne pas pénétrer le delTein , fit chercher le mari de la prifonniere & la lui remettant en- tre les mains , lui dit <^ue c'était à U difcrétion de fes Soldats , tjH'd de- vait l'homieur de fa femme. L'année fuivante , le Vicomte alla fctvir fous le Duc de Weymar a,u Siège de Brifac , qui dura huit mois , &: où il fignala fon courage .& fa conduite , non feulement aux différentes attaques , mais encore aux iîx grands combats qui fe don- nesent pendant la durée de ce Siè- ge. A fon retour k CardinaJ le combla de loiiangcs , & lui offi it en mariage iin^dc fes plus proches S SÇAVANS, parentes ^ que la différence de Re- ligion empêcha le Vicomte d'ac- cepter. Le Cardinal , loin d'être mécontent d'un tel relus , admira la probité du Vicomte , & dans le deffcin de l'employer aux affaires les plusdiftîcileSjil l'envoya en Ita- lie , où la guerre s'étoitrenouvellée à l'occadon de la Ducheffe de Sar voye , fœur de Louis XllI. M. de Turenney fervit encore fous le Cardinal de la Valette , après la mort duquel , arrivée au mois d'Odobre ( kTJ;? ) , on s'at- tendoit que le Vicomte fuccedc- loit au Généralat. Mais les liaifons de fon frère avec le Comte de Soiffons déterminèrent le CardmaJ de Richelieu à choifir pourGcnéral en Italie le Comte d'Haicourti fous les ordres de qui le Vicomte eut la meilleure part à la vidloire remportée fur le Prince Thomas à la Route-de Qiiiers , prit quelques Places pendant l'hiver & ravitailla la Citadelle de Turin. La Campa- gne fuivante fut des plus glorieufes pour la France , par le fecours de CafaI , & le Siège de Turin , qu'a- voir confeillé le Vicomte, & au fuccès duquel il contribua infini-- ment , y ayant même été bleffé â l'épaule. Les circonftances de ces deux cvenemens font déduites avec tout l'ordre , toute l'éxaditu- dc & toute la clarté poffibic i & tel eft le caradere de la narration , dans toute cette Hiftoire. A l'en- trée de la Campagne de xSâ^i, le Vicomte fc trouvant fcul Généraf en Piémont , y prit Montcalvo &i commença lé Siège d'Y vice , qui J U I L L E à ^arrivée du Comre d'Harcourt fut levé pour fccourir Chivas, &C prendre enfuite trois autres Villes; le V icpmre travaillant pour la gloire de fon Général avec autant de zclc que pour la Tienne propre. Mais le Cardinal qui fçavoit tout ce que valoient ces deux Princes , crut dés lors devoir les féparer , pour les rendre plus utiles à l'Erat.Nous palTons l'artaire du Comte de Solf- ions & celle de Cinq Mars, racon- tées avec un détail intercffant Sc aufquelles le Vicomte n'eut d'autre part que le chagrin de voir fon frère le Duc de Bouillon engage dans deux aulîl mauvais partis. Le commencement de la Régen- ce d'Anne d'Autriche, qui fuivit d'alTez près ces deux cataftrophes , le confola d'autant plus efficace- jnent,qu'outre la joye de l'élargilTc- ment du Duc fon frère , qui avoit précédé la mort du Roi & du Car- dinal , il fe vit renvoyé en Italie, pour y commander fous le Prince Thomas devenu valétudinaire. Il y prit en Piémont la Ville deTrin, donnant le change à l'ennemi , par la feinte d'un autre Siège , &c reçut en 1^47 le bâton de Maréchal de France. » Tel fut ( dit l'Hiitorien ) 3> l'apprcntilTage du Vicomte de j> Turenne dans l'art militaire pen- »> dant l'cfpace de lyans, qu'il fer- j)vit fous plufieurs Généraux » diffcrens , fans commander en 3» chef II porta le moufquet un an X comme volontaire , fut 4 ans ~ » Capitaine , 4 ans Colonel , 3 ans >; Maréchal de Camp , Se 5 ans » Lieutenant Général. Rien ne lui Jmllet. T . T 7 ? r- S 7 > » fait plus d'honneur , que l'aveu » de ce qu'il crovoit devoir à cha- M cun de fcs Maîtres. « Cet aveu rappelle celui de l'Empereur M uc- Antonin, qu'on lit à la tête de fes Réflexions Morales, & qui eu. Ci glorieux à ce Prince. L I V R E II. L'année 1^44. s'ou- vrit par les préparatifs pour le Congres de Munller, fuivisdela bataille de Fiibourg, où le Général Merci à la tcte des Bavarois , fut défait en trois combats confécutifs par le Duc d'Enguien & le Vicomte de Turenne, qui le forcèrent dans fes retranchemcns , lui tuèrent 8 à 10 mille hommes, lui prirent tou- te fon artillerie & prefque tous fcs chevaux; après quoi les deux Gé- néraux formèrent le Siège de Phi- lifbourg , qui fe rendit au bout de 21 jours. On lira avec grand plailir le détail de cette fameufe bataille Se de ce Siège , fuivi de la prifc de Wormcs, de Mayence, de Landau, Se de divers autres lieux , qui ne fi- rent que très- peu de refillancc. Le Duc d'Enguien étant retourné en France, lailTa le commandement de l'armée d'Allemagne au Vicom- te, qui bien que fort inférieur en troupes à l'ennemi , trouva le moyen de conferver les conquêtes de cette Campagne , d'en faire de nouvelles , de pourfuivre l'armée de Merci jufqu'en Franconie, & de prendre des quartiers à Maricndal, en 1^45. Ce fut là qu'ayant divifé fon armée par trop de complaifince pour fes Officiers , qui vouloicnc remonter leurs Cavaliers ■, il fclaïf {?. malheureufement furprendre H h h 374 JOURNAL D par le Général Merci, qui le pre- mier Mai vint l'attaquer, & le mit tians la neceflité de combattre en lieu défavantageux ; ce qui ne i'empêcha pas de faire une belle re- traite , auHlî honorable pour lui que l'auroit été une vidoire ; &c c'eft un point que difcute ici notre Auteur avec beaucoup d'équité & fans aucune prévention. Telle fut donc la défaite de Maricndal, que l'on doit regarder comme le pre- mier échec qu'ait reçu le Vicom- te , commandant en chef. Après la jondion des troupes Françoifes, Hcflîenncs & Suedoi- fes , l'armée du Vicomte le trouva en érar de faire quelque entreprife, & de reparer la honte de Marien- dal. Mais il reçut ordre de la Cour de ne rien entreprendre avant l'ar- rivée du Duc d'Enguien ; & quoi- qu'il démêlât fans peine la mauvai- fe volonté du Miniftre , qui lui avoit refufé du fecours , dans lebe- foin , & vouloit alors lui dérober la gloire dufuccès, en lui donnant un rival , il facrifia volontiers fes reiïentimens à l'amour de la patrie. L'armée de France pafla le NecKer, s'empara de plufieurs Places , Se après la féparation des Suédois, qui fe retirèrent à Bremen dans la balTe Saxe , elle s'approcha de Nordlin- gue , pour attaquer le Camp du Général Merci. Il faut voir dans l'Auteur la dcfcription de cette ba- taille , où la fortune fe montra fort •variable. Le Général Merci y tut tué : l'aile droite des François tut défaite , & le Maréchal de Gr.a- mont fait prifonniei : i'aiie dioitc ES SÇAVANS, des Bavarois fut battue par le Vi- comte , & il prit le Général Giét n. Jean de Vert le fcul Général qui Tcftât aux ennemis fauva les débris de leur armée au-delà du Danube , pourfuivi par le Vicomte jufqu'au bord du fleuve. Après cette vicfloi- re , le Duc d'Enguien étant tombé malade, revint en France , iailTant l'armée fous la conduite du Vicom- te & du Maréchal de Gramont , qu'on avoir échangé contre le Gé- néral Gléen Le Vicomte pour ter- miner gloricufement une Campa- gne jutqu'alors équivoque , entre- prit le rctabliflîemcntde l'Eletfleur de Trêves , dépouillé de fes Etats depuis plus de douze ans, à caufe de fon alliance avec la France ; &c il y réuflît -, après quoi il revint en France, où le Cardinal Mazarin lui offrit le Duché de Château -Thier- ry , qu'il refufa , pour ne poinc préjudicier aux prétentions de fon frère le Duc de Bouillon. L'Hiftorien s'étend ici fur les né- gociations & les embarras du Con- grès de Munfter ; fur les demandes de la France , fur celles des Elec- teurs de Brandebourg & de Ba- vière -, fur les différends entre les deux Couronnes de France & d'Ef- pagne ; &: il donne un plan général de cette alTemblée , qui offre une grande confulionde vues , d'inre- rêts & d'intrigues que l'Auteur dé- mêle avec foin , obfervant » que le » Cardinal Mazarin à la Cour, & »lc Vicomte de Turenne à l'ar- » mée , mirent à profit ces divers » mouvemens pendant cinq années >• entières , &c s'en fer virent habile; J U I L L nment pour parvenir enfin au but »> qu'ils s'étoicnt toujours propofé. C'eft ce qu'il continue à prouver par le détail des évcncmens arrives dans les années 164(5 , 47 &i 48, Sc dont les plus importans furent la jondioD des François &c des Sué- dois en Allemagne , malgré le Duc de Bavière, par une marche longue & pénible du Vicomte i le palTage du Mein , par lequel cclui-cy s'ou- vrit une route dans les trois Cer- cles de Franconie , de Suabe &c de Bavière ; la prife de Rain ^ l'une des mcillcuresForterelTes de ce der- nier Cercle ; le Siège d'Aufbourg , levé aux approches de l'Archiduc & des Bavarois i la révolte des troupes Weymariennes , qui à l'in- iligation du Général Rofen , refu- ferent de fuivre le Vicomte en Flandres ; fes divers mouvemens pour tâcher de ramener les Wey- mariens , qui enfin l'abandonnè- rent i (on arrivée dans le Luxem- bourg , où il prit plufieurs Places , & d'où il retourna en Allemagne , rompit la neutralité avec le Duc de Bavière , par ordre de la Cour , fe joignit aux troupes Sucdoifes , défit les Généraux Mélandcr & Montécuculi , marcha vers la Ba- vière , y fit une irruption , & obli- gea le Duc à fe fauver de fa Capita- le ; repaiïa le Lech & le Danube , Se apprit la conclufion de la paix à MunRer. M. de Ramfay cxpofe ici les mo- tifs qui engagèrent les diverfes PuilTances à faire cette paix , &c nous en rapporte les principaux ar- ticles , avec des reflexions très-len- fées fur la conduite du Vicomte pendant ces négociations & les guerres d'Allemagne ; conduite , par laquelle il fçut (dit-on ) » mé- » nager tant de perfonnes difFeren- » tes , &: tant d'intérêts oppofés, •jfans blclfer ni le zélé qu'il avoit » pour fa Religion , ni la fidé- n lité qu'il devoit au Roi , ni » fon amour inaltérable pour la » juftice : s'acquittant de tous ces 31 devoirs avec une dextérité dont >' il y a peu d'exemples , & avec » un courage &c une fermeté inc- » branlable , malgré les intrigues » des politiques , la jaloufie de fes » concurrens , Sc les contradidions n même, du Miniftre. Livre III. La France depuis Charlemagne, nes'étoit point vue ( dit M. de Ramfay ) dans un état aullî glorieux , que celui où elle fe tiouvoit en ié'49. depuis le Traite de "Weftphalie ; redoutée de fes ennemis, refpedée de fes alliés, alTurée par une paix folide dans la poireffion de fes nouvelles conquê- tes. » Mais le cours de fes profperi- »tez (continue-t il) fut tout d'un » coup arrêté par les guerres Intefti- n ncs , &c par la fadtion de ceux , » qui préferoient leur intérêt parti- » culicr au bonheur des Peuples &c » à la grandeur de la Monarchie. « Il regarde les troubles & les révo- lutions comme les maladi-cs épidé- miques du Corps civil, c eft à dire, comme régnant en certains tcms , & devenant communes à pluheurs Etats : & il obferve que c'eft ce qu'on vit arriver vers le milieu du xvn'fiéclc, où l'cfprit de révolte Hhhjj 37(? JOURNAL D s'étoit répandu par toute l'Europe -, en Sicile j à Naples , à Gcnes, en Angleterre, à Conftantinople, & en France , où les plus grands Sei- gneurs du Royaume prirent les ar- mes contre leur Roi. L'Auteur , pour nous donner une id^e plus )u- fle de ces difcordcs civiles , nous en fait connoître les principaux ac- teurs , en nous traçant leurs vérita- bles caractères. Tels font ceux de la Régente Anne d'Autriche , du Duc d'Orléans , du Prince de Con- dé , du Cardinal Mazarin , du Car- dinal de Retz , tous bien reiïem- bhns , &■ qui méritent d'ctre lus dans le Livre-même. Nous paiïons , pour abréger ^ tout ce que l'Auteur ajoute fur l'o- rigine de ces guerres civiles, fur l'emprifonnement des Chefs , fur la première révolte du Peuple & les barricades, fur le zélé du Coad- juteur à ralTemhler ^ animer les Chefs de la Fronde , fur le dénom- brement & les vues de ces Chefs , fur le parti que le Prince de Condé prit d'abord de fe déclarer contre les Frondeurs , fUr le Blocus de Pa- ris, après que la Cour en tut forrie, ^ for la révolte générale dans les Provinces ; fur le choix que le Par- lement fit pour Généraliflime de fon armée du Prince de Conti , & des Généraux qui dévoient fervir fous lui , du nombre dcfquels fut le Duc de Bouillon. On voit ici la Lettre du Cardinal Mazarin écrite fur ce fujet au 'Vicomte qui étoit en Alkmaene. Ik la ré ponfe de ce- lui-ci au Miniftre. Mais les trou- bles s'ctant pacifiés aux Confcren» ES SÇAVANS. ces de Ruel ; Le Vicomte , à qui l'on avoit ôté le commandement en Allemagne, revint à Pans, où il reçut un Brevet par lequel il étoit ordonné que le Duc de Bouillon , le Vicomte de Turenne 6c leurs defcendans auroient en France le rang de Princes illus de Maifoa Souveraine. Cette pacification de Ruel ne fut pas de longue durée , & les troubles recommencèrent l'année fuivante (1650.) à l'occafion de l'emprifonnement des Princes. Le Vicomte touché des malheurs de Condé dont la perte lui paroifToit interelTer trop l'Etat , &c perfuadé qu'on pouvoit faire la guerre aa Cardinal , fans la faire au Roi , re- folut de procurer à quelque prix que ce fût la liberté des Princes ; & croyant ( dit l'Auteur ) n'être qu'ami généreux, il devint fujte infidèle, quitta Paris, &fe retira à Stenay avec la Ducheffe de Lon- gueville. On prétend ( continue M. de Ramfay ) que l'amour pour la fœur eut autant de part aux fauffes démarches du Vicomte ,' que l'amitié pour le frère. Il rama^ fa donc des tioupes pour délivret les Princes , & tira du fecours des Efpagnols , en traitant avec eux. Mais ce fut en confervant toujours une fidélité inviolable pour fa Pa- trie. S'étant mis à la tête des Efpa- gnols , il prit le Catclet & Guife , après quoi il entra en France , pour délivrer les Princes. D'un autre cô- té la Cour s'étoit rendue en Guien- ne , pour y reprimer la fédirion des Bouxdelois, qui étanc rentrés dans. J U I L L E ïe devoir obtinrent le pardon de leur révolte. Les troupes du Roi commandées par le Maréchal Du Plellîs-Praflin , dirent cnfuite le Siège de Rhétel , que le Vicomte avoir pris au mois d'Aouft précédent. Il vint au fe- cours de la Place ; mais étant arrivé trop tard , il fe vit dans la neceflîté de combattre , quoique la partie fût fort inégale. Malgré la plus vi- goureufe refillance , fon armée fut détaitc , & il eut affez de peine à fe fauver. Il y perdit la moitié de fes froupes ; douze cens hommes re- fterenrfur h place, & 3000 furent faits prifonniers. Long-tems après interrogé par un jeune homme in- difcret , comment il avoit perdu les batailles de Mariendal &c de Rhétel ; il répondit fimplement , par ma propre faute. Des Officiers prétendant qu'il n'avoit jamais mieux agi que dans ces deux com- batSi»Si je voulois (répondit-il_jme » Qirc juftice un peu févércment , » je dirois que l'affaire de Marien- » dal eft arrivée , pour m'être lailTé » aller mal-à-propos à i'importuni- » té des Allemands , qui deman- « doient des quartiers ; & que cel- » le de Rhétel eft venue pour m'ê- » tre trop fié à la Lettre du Gou- » verncur, qui promettoit de tenir "quatre jours h veille-même qu'il » fc rendit. Je fus dans ces occa- n fions trop facile & trop crédule. » Mais quand un homme n'a point n fait de fautes à la guerre , il \v: l'a « pas faite long tems. a En M 51. ks Princes turent élargis , ^ le Cardinal fortiî de Franco. Les né- T , 1 7 ? r- 377 gociations de paix avec l'EPpagne ayant été rompues , le Vicomte revint à la Cour ; fur quoi M. dé Ramfay fait cette reflexion : les nuages qui pendant un an avoient obfcurci^ fa gloire , font diflîpés pour toujours : elle va 1 éprendre tout fon éclat ; il ne fera plus dé- formais que le défenfcur de la Pa- trie & l'appui le plus alTuré do Thrône. En effet le Duc de Bouillon & Ife Vicomte de Tur.nne refuferent d'entrer dans les projets du Prince deCondé,qui recommença les ouer- rcs civiles.Nous n'en fuivrons ici le détail, qu'autant qu'il s'y agira du Vicomte , qui avec le Maréchal d'Hocquincourt commanda l'ar- mée du Roi en 1^52. après le re- tour du Cardinal. Le Vicomte Çv- gnala le commencement de cette Campagne par le Combat du pont de Gergeau où il battit les rebelles , en ramenant le Roi à Paris , & par l'affaire de Gien , où avec très peu de troupes , il arrêta le Prince de Condé , qui à la tête d'une armée viiflorieufe avec laquelle il venoit de battre le Maréchal d'Hocquii> court , prétendoitenlever toute la Cour avec le Roi: cequifitdire à la Reine s'adrcffant au Vicomta ^«'/7 venoit de remettre une fécondé fois U Couronne fur la tête de fon fils. Le Vicomte enfuite aflîégea Eftam- pes , &: ftit obligé de lever le Siège à l'arrivée du Duc de Lorraine , ce qui donna occafion au Vicomte de faire une retraite des plus glorieu- fes. Il ne fe paffa rien de fort con- fidcrable jufqu'àla bataille de faine 578 JOURNAt D Antoine donnée aux portes de Pa- ris entre l'armée du Roi & celle des rebelles commandée par le Prince de Condé. Le Vicomte s'y trouva engagé plutôt qu'il ne l'eût fou- haité , par la Cour , qui pour en être fpcïlitrice , s'étoit rendue fur la hauteur de Charonne. On verra ici cette aâ;ion décrite dans tou- tes fes circonftances & mife fous les yeux du Lcdeur par une Carte des plus exactes. L'Auteur raconte quelles furent les fuites de cette bataille i com- ment la Princeffe de Montpeniîer fouleva les Parifiens contre le Roi, le maffacre fait à l'Hôtel de Ville , l'arrivée d'une armée Efpagnole de 2oooo qui vient au fecours du Prince de Condé , la refolution prife par la Cour de fe retirer à Lyon , & à laquelle s'oppofe le .Vicomte , qui chalTe enfin de la VOYAGE MERVEILLEUX 1)V PRINCE FANFEREDIN ; dans la Romande , contenant plu/teurs Obfervations Fiifloriques , Cm- graphiques , Phyficjues , Critujues & Morales. A Paris , chez P. G. U Mercier , rue S. Jacques, au Livre d'or. 1755. voL /«-ii.pag. 275. ES SÇAVANS, France les Efpagnols -, la mort du Duc de Bouillon , la retraite du Cardinal Mazarin ^ qui fort une fé- conde fois du Royaume , pendant que le Duc de Lorraine y rentre ^ &: tâche , avec le Prince de Condé, d'enfermer le Vicomte dans fon Camp , ce qu'il ne peut exécuter ; après quoi le Vicomte , profitant des difpofitions favorables des Pa- rifiens pour la Cour ramené le Roi à Paris , pourfuit le Prince , l'obli- ge defortir de France, prend Bar- le-Duc , Château - Porcien , Vcfr vins. C'eft ainfi que fe termina cet-; te longue & pénible Campagne ,' oii le Vicomte de Tiircnne fauva plufieurs fois la Monarchie par fes confeilsS: par fa valeur. Nous rendrons compte des trois derniers Livres de cette Hiftoirc iians un autre Journal. CET Ouvrage, qui pourra plaire à bien des Ledcurs , n'Être pas du goût de beaucoup d'autres, & par le deifein véritable- ment ingénieux qui le caraiSerife , s'attirer, pour ce regard, les fuffra- ges même d: ceux qui le voudront cenfurer, cft une Critique moitié ironique & moitié férieufedes Ro- mans. Nous difons, moitié ironique & moitié férieufe , parce qu'il s'y ofFre peu d'endroits où tous les deux ne fe trouvent enfcmble , 6c où le ton ironique ne foit prefque immédiatement fuivi du ton fé- rieux. Les Maîtres d'Eloquence prétendent , & Quintilien eft de ce fentiment, que lorfqu'on a com- mencé par un certain genre d'allé- gorie , on doit le continuer , & ne pas l'interrompre tout d'un coup par une image différente : H qno-. la caufe de ce phénomène cft encore jplus merveilleufe : Un Amant des plus malheureux & des plus élo; Juillet. îSt qucns du Pays , "Vint un jour L-ur conter le tourment qu'il endurcit, fon rccit fut fi touchant que ces ro- chers qui étoicnt alors de la derniè- re dureté , ne purent refifler aun plaintes decet intortuné, & s'amol- lirent au point que nous venons de dire. Quelques rochers auprès de ceux-là fe fendirent de haut en bas; &c quelques - autres fe fondirent comme de la cire ; mais pour ceur dont ileft queftion , notre Auteur prétend qu'ils étoient d'une fub- ftance trop dure, pour fe fendre, ou pour fc fondre , Se qu'il ne leur re-i ftoit d'autre relTource pour témoi- gner leur fenfibilité,qucdc fe chan- ger en laine ou en gazon : peut-être eft celàunedecesobfcrvacionsphy- fiquesqu'annonceletitrc.Une autre fingularitéà quoi on nes'attcndroit pas, & qui concerne l'Hiftoire Na- turelle, eft la découverte que notre Auteur a faite fur le fujct des échos qui font dans la Romancie , fçavoix qu'il y en a deinâles Se de femel- les. Du moins nous croyons le pou- voir conclure des paroles fuivar- tes : ZJrie des grandes rcjfources , dit» il , 5'«'o» ait dans la Romancie ^ lorfju'on neffait k ijui cotifierfes vei- nes fecrettes , efl d'aller trouver un écho ^fiir-toutjtc'eflitn écho femelle^ & en voilà four aujjï longtems ^ite l'on veut. Que n'aurions - nous pas à dire ici des arbres de la Romancie , dont quelques-uns portent des ra- meaux d'or , quelques autres des pommes d'or,& qui^ gardés par des Dragons ou des Géans terribles font cependant de facile accès , I ii 382 JOURNAL DES SÇ AVANS, moyennant une petite herbe qu'on pêtrcs qui font leur demeures dans porte fur foi , un miroir qu'on montre au Dragon ou au Géant , une liqueur donc on les touche , ou un breuvage qu'on leur prefen- te ? le moindre petit charme les afloupit i après quoi il eft tacile de leur coupei la tcte , & de fe met- tre en polTeflrion de tous les tréfors dont ils font les gardiens. Notre Voyageur avertit pour- tant que ce qu'il endicn'eftquc fur le rapport d'autrui , & que comme ces arbres font tort rares , il n'en a point rencontré fur fa rou- te ; que d'ailleurs , il ne s'eft pas mis en peine d'en chercher, parce qu'il n'avoit aucun intérêt à en trouver. Mais une chofe dont il dit avoir été témoin , c'eft le goût qu'ont les arbres de k Romancic pour la Mulique : Un jour que dans un bocage , Fanférédin s'étoit abandonné au fommeil fous de jeu- nes maronniers , il fut fortfurpris, en s'éveillant , de fe trouver entiè- rement à découvert , fans pouvoir deviner ce qu'étoicnt devenus ces arbres qui un moment auparavant le couvroient de leur ombre ; mais en regardant de tous cotez , il les apperçut déjà un peu loin, qui mat- choient comme en cadence vers une petite plaine , où un excellent JoiJeur de Luth les attiroif à lui par l'harmonie de fon Inftrument. Quelques rochers s'étoient mis de la partie avec tout ce qu'il y avoit de Lions , de Tigres & d'Ours dans le canton. Notre Auteur n'oublie pas de parler ici de ces Divtaitcz cham- des arbres d'où elles fortcnt le foit & où elles rentrent le lendemain à la pointe du jour ; il n'oublie pas non plus ces ruiffeaux de miel & de lait j fi communs dans la Roman- de , & ces chevaux vifs dont les uns courent fur des terres couver- tes d'épis , fans en rompre un fcul^ & les autres volent dans l'air com- me des hirondelles ; il n'oublie pas ces troupeaux de Salamandres qu'on nourrit avec un feu clair , entretenu tout exprès pour cet ufa- ge j il n'oublie pas ces bandes de Cirênes qui croient enfermées dans un grand canal rempli d'une belle eau claire & tranfparente , où on les avoit logées comme dans une maifon de force pour les punir des débauches où elles avoient engagé par leur voix enchanterefle , quan- tité de Héros vertueux ; outre la retraite à laquelle elles étoient con- damnées pour pluficurs années, il leur étoit défendu de chanter , fi ce n'était ejuelcjue morceau de l'Osera d'H. . . . farce ^u'on jugeait ^u' il n'y avait pas de danger d'en être attendri. Mais elles en trouvoient le chant fi fauvage,qu'elles aimoient mieux fe taire; de forte, dit - il , qu'elles étoient en effet muettes comme àcs poiflons -, il n'oublie pas ces Tau- reaux aufquels on avoit ôtéles cor«. nés, pour en hire des cornes d'a- bondance, ni cesVaches admirables ilTuës de la fameufe lo ; il n'oublie pas les Chèvres Amalthées , les Chiens à trois têtes , les Chats bot- tés, les Singes verds, & l'Hydre à fept têtes. Il faut, fi l'on en aie J U I L L courage , lire tout cela dans le Li- vre pour en pénétrer le fcns. Notre Voyageur qui n'a rencontré juf- qu'ici que des bêtes , rencontre enfin des habitans ; c'eft un nom- bre confiderable de perfonnes tant hommes que femmes , qui pren- nent le frais dans une promenade ; il examine la contenance &c les fa- çons de chacun de ces Romanciens; Il n'apperçoit parmi eux ni enfans ni vieillards ; 6c il dit que la Na- tion n'eft compofceque d'une jeu- neife brillante ; il entre là - deflus dans un détail que nous palTons en faveur de la brièveté. Mais ce qui rend cette jeunefTe accomplie, c'eft que non feulement on n'y voit que des perfonnes d'une beauté parfai- te , mais qu'avec cette beauté elles ont toutes un air fin , une phyfio- nomie noble, quelque chofe de ma- jellueux & de gracieux tout enfem- ble ; de fier& de doux , d'ouvert & de refervé , &c. Le Prince Fan- férédin fe voyant au milieu d'un Peuple fi beau & fi bien fait , crai- gnit, quoiqu'il n'eût rien de dif- forme en fa perfonne , qu'on ne l'y regardât comme un homme ab- folument difgracié de la Nature. Mais ayant tiré un miroir de fa po- che pour voir s'il ne devoir point fe dérober aux yeux des pafians , il fe trouve embelli au point de ne plus fereconnoître lui-même : fes cheveux auparavant prefque roux, font du plus beau blond , fes yeux agrandis , fa bouche rappetidéc , fon menton arrondi , & toute fa phyfionomie charmante , on n'au- ra pas de peine à comprendre que E T, 175 y. 5gj c'eft à l'air du Pays que notre Prui- ce Voyageur fut redevable d'un changement Ci heureux. Tranfjior- té de joye , de fe voir Ci beau , il fe hâte de joindre les cimpa- gnies d'hommes Se de femmes qu'il avoir iailTces , & il refte af. fez long - tems dans ce lieu pour fe mettre au fait de leurs mœurs ôC de leur caractère. Nous nous contenterons de co- pier ce qu'il rapporte du goût des Romanciens dans ce qui concerne leurs converfations. On ne voit , dit- il , briller nulle part autant d'efprit que dans les converfations romanciennes , mais c'eft moins l'efprit qu'on y admire que les fentimens , ou plutôt la fa- çon de les exprimer. Ils ne s'entre- tiennent que d'amour, & comme ils font fort féconds , ils trouvent pour exprimer une chofe que nous croirions faire fullifamment entendre en quatre mots , des tours fi amples & fi variés, qu'un jour entier ne leur fudit pas, 8c qu'ils font toujours obliges d'en re- mettre une partie au lendemain. Ils oni fur-tout, le talent de découfer & d'anatomifer , poiirainfl dire , fi bien toutes les peft/ers de l'efprit , & tous les fentimens du cœur ^ } pelle invention , & qui fait trou- M ver quelque chofe qu'un aurrc » n'a pas dit avant eux; c'eft ce » qui fait qu'ils ne font que fe co- » pier tous les uns les autres >> Mais il faut avoiier que fi cela ne » fait pas l'éloge de l'Efprit des » Annaliftes Romanciens , c'elt du » moins pour eux & pour nous » quelque chofc de très - conimo- » de. La maladie des bâillemens atta- que de rechef le Prince Fanférédin, qui pour s'en délivrer accepte le parti que Zazaraph lui propofe de changer d'air. Ils partent tous deux & montent chacun fur une grande Sauterelle fellce & bridée. Ces montures plus douces & moins vî- tes que les Hipogriffes , ne font guéres , dit notre Auteur , que quatre ou cinq lieues par faut, mais c'eft afTez lorfqu'on n'eft pas prefTc, de forte qu'elles ne font faire que deux ou trois cens lieues par jour ; notre Auteur veut dire peut-être par heure, car il neparoîtpas que ce foit trop pour des Sauterelles comme celles-là, de faire au moins cinquante fauts dans une heure. Trois Chapitres aflez longs , l'un des Voitures &c des Voyages des Romanciens , l'autre des formali- tez qui doivent précéder les propo- firions de mariage , & un autre m- tirulé : D« grandes épreuves & ref- femhlance Jingtsliere cjui fera foHpçon- frer aux LeBsurs le dénoïtcment de cette Hijîoire, fuivent celui des bois d'amour. Nous nous difpenfcrons d'en ES SÇAVANS, parler de peur de nous trop éten« dre ; un Chapitre des Ouvriers , Afétners , 0' MantifaElures de la Romande , vient immédiatement après ceux-là ; nous nous y arrête- rons un moment. Nos Cavaliers courent toujours la campagne montes fur des Saute- relles , mais les voici qui en vont defcendrc pour entrer dans une Boutgade peuplée d'Ouvriers & toute remplie de boutiques. Ces Ouvriers font des Enfileurs, des Souffleurs, des Brodeurs, des Ra- vaudeurs , des Enlumineurs, des Faifeurs de Lanternes Magiques, des Montreurs de Curiofitez , & quelques autres encore. Les Enfi- leurs aflemblent de divers endroits un certain nombre de petits riens ^ qu'ils ont l'adrefTe d'enfiler & de coudre enfemble , moyennant quoi voilà leur ouvrage fait. L^s Souffleurs au contraire ne prennent qu'un feul de ces pe- tits riens , mais ils ont l'art de le grolîir & de l'étendre en le fouf- flant, à peu-près comme les enfans font des bouteilles defavon, en forte que d'une matière qui d'elle- même n'eft prefque rien , ils ont l'adrcffe d'en taire un gros ouvrage. L'occupation des Brodeurs cft d'une autre efpece. Us font vcnijt quelques moiceaux rares & cu- rieux dont ils ornent le fond d'une broderie de delfein courant , qui ne laiffe prefque plus diftinguer le fond d'avec la broderie même. Les Ravaudeurs font moins ingénieux j tout leur art confifte à donner quelque air de nouveauté à des J U I L L cliofcs déjà vieilles &c ufées , mais c'eft , dit notre Auteur, l'efpece d'Ouvriers qui eft en plus grand rombre. Les Enlumineurs s'occu- pent à relever de couleurs brillan- tes , foit les portraits , foit les fi- gures ou les tableaux d'imagina- tionj ils les chargent de rouge & de blanc , à peu près comme on en charge les poupées d'Allemagne. Les Lantcrnicrs ou Faifeurs deLan- ternes Magiques font ainfi nom- més , parce qu'ils font des ouvra- ges qui reffemblent à des Lanter- nes - Magiques ; l'on y voit les chofes du monde les plus incroya- bles , des tours d'airain , des co- lomnesde diamant, des rivières de feu , des chariots attelés d'oifcaux ou de poiflbns , des Géans mon- ftrueux. Les Montreurs de Curiofitez ramalTent diverfes chofes curicufcs qu'ils font venir des Pays étran- gers, & quand la matière fur la- quelle ils travaillent , eft trop in- grate , ils ornent leur tableau de di- vers objets interelTans qu'ils préfen- tent l'un après l'autre , comme le plan de Londres , U Cour de Por- tugal, le Gouvernement de Venife, les Temples de Rome , à peu-près comme un Montreur de Curiofité rous fait voir dans fa Bocte , la Ville de Conftantinople, i'Impe- tattice de Ruflie , la Cour de Pc-r Jcing , le Port d'Amfterdam. Notre Auteur fe rabat à dire de CCS Ouvriers , que leurs manières Ibnt fi obligeantes ^«'o» tje -peut guéres fe défendre d^acheter d'eux qucliue ehefe m han^rd de payer E T, 175 y: 587 cher de mauvaife marchandlfe , com- me il arrive le plus fonvent. C'eft parler nettement &: ians ironie. Entre les boutiques des Enfi- leurs , celle qui parut la plus acha- landée à Fanférédin , porroic pour enfeigne , ^ux Mille & une Nuits. Comme cette enfeigne a eu quelque fucccs , d'autres Enfileurs n'ont pas manqué de l'imiter, dans l'cfperance de réuiïir également } l'un a pris les Mille & un Jours, \'o.\.i' tre les A-fille & une heures; un autre. Us Mille & un qucirts d^heure. Le fil dont ils fe fervent pour enfiler , eft à peuprcs le même , mais ifs n'ont pas été aulfi heureux dans le choix des babioles. Notre Auteur die qu'il remarqua encore quelques enfeignes des plus diftinguécs , comme aux Soirées Bretonnes ; aux Feillées de TheJJalie ; aux Contes Chinois. Mais ces Ouvriers , dit-il, ont plus de fécondité , ejue de force d^ imagination , trop faibles pour f»- treprendre un Ouvrage d'unfeul fujet^ ils n'ont de reffource que dans la mul- titude ; à peu-près comme un homme qui n'ayant point ajfez d'étoffe pour faire un hahit , le compofe de diver- fes pièces rapportées. Bigarrure qui ne peut jamais faire a l'Ouvrier qu'un honneur médiocre. Voilà qui eft en- core fans ironie. Le quartier des Souffleurs eft prefque defert depuis long-tems » parce qu'il fe trouve peu d'Ou- vriers qui ayent l'haleine alfez for- te pour fournir à ce travail j il femble , dit notre Auteur , que leur enfeigne favorite , foit Cyrus j du mQÏï^ f ajoûte:t-il , plufieuis fc 588 JOURNAL D U font appropriée , & chacun l'a letournée à fa façon. Fanférédir» prétend que quel- ques-uns même de ces McfTieurs ^ trouvant que ce Prince étoit un fu- jet propre à ks achalander , l'ont obligé, fans trop confiderer fon in- clinarion,à courir le monde comme un Avanturier , pour leur apporter de tous les Pays étrangers , des ma- tériaux curieux , propres à être mis en œuvre ; notre Voyageur ajou- te , qu'il n'eft pas bien décidé ftCy rus^ après avoir ainfi couru le mon- de, en eft revenu ■^lus homme de bien. Mais que ce qu'il y a de certain , c'eft qu'9« ne peut douter ^u^ après de fi longues courfes , // n'eût befoin de fe mettre (juelcjne tems en retraite , & iju'il a hettreufement trouvé un nou- veau Mtîitre , homme d'efprit ^ cha- ritable , e]ui a retiré le pauvre F rince thez. lui , unicfuement jour lut faire prendre du repos. L'Auteur du Roman de Téléma - que, eft en recompenfe , magni- fiquement loiié , & tout cet article cft d'un fcrieux , complet : U y a quelque tems, dit le Prince Zaza- raph , en s'adreflant à Fanférédin , 3> qu'il parut dans ces quatiers ci , » un de CCS génies rares & fubli- » mes , tels que la nature en pro- » duit àj)eine un dans chaque fié- » cle. Il conçut que le travail »» que vous voyez faire à ces » Ouvriers pourroit être de qucl- » que fecours pour former le » cœur & l'efprit des jeunes Prin- n ces , s'il étoit bien fait & manié » avec art & avec fagefle. Il entre- ?• prit d'cn^onncr un inodéle. Son ES SÇA VANS. » enfeigne étoit au Prince d^lthaqttt y&C et lieu que vous voyez qu'il » femblc que l'on ait voulu confa- » crer par refpetîl: pour fa mémoire, » étoit le lieu où il travailloit. Il eft » vrai qu'il fie un chct-d'œuvrc ,' "Jqu'onj ne pouvoit fe lalfer de » voir , & où il trouva l'art de mê- » 1er cnfemble tout ce qu'il y a de » plus riant & de plus gracieux , » avec tout ce que la fagefTe & U » Religion ont de plus parfait & » de plus fublime. C'eft cet Ouvra- » ge qui devroit fervir aujourd'hui » de modèle à tous les Ouvriers^ & » quelques uns , en effet, fe font » efforcés de l'imiter ; mais on eft » réduit à loiier leurs efforts , & » toujours forcé de plaindre Icui » foiblcffe. Le goût de la Nation Roman- cienne . félon ces paroles, n'eft pas auffi dépravé , que notre Auteur , avec beaucoup de raifon néan- moins , a femblé d'abord le faire entendre , & que dans la fuite il le fait entendre encore , puifqu'on voit ici cette même nation faire cas des excellens Ecrits , eftimerle génie rare & fublime dont on vient de parler , confacrer à cet Ecrivain , un lieu exprès par ref- pecS: pour fa mémoire -, ne pouvoit fe laffer d'admirer le chef d'œuvrc forti de fes mains , &: qu'enfin des Ouvriers de la Nation font leurs efforts pour imiter un tel modèle. Si l'on joint à cela ce que Zi- îaraph dit de la prompte repu-! tation que s'acquit dans la Roman- de , une excellente Ouvrière dont il parle cnfuite , Ouvrière doiié» J U I L L E d'un efprit fin & folidc , laquelle avoit pour enfeignc Li Cour de Phi- lippe-AugHJîs , &: dont les Ouvra- ges furent achetés avec tant d'em- pre(Tementdansla Romancie , que fa boutique fut bien-tôt épuifée, on trouvera que félon notre Auteur, le bon goût n'eft pas banni du Pays des Ronianciens. Si l'on joint enco- re à ceci , le peu de cas que dans la Romancie , le même Zazaraph dit que l'on fait des Brodeurs ^ parce qu'ils nont point uj?cz, de talent pour créer quelque chofe de neuf,on ver- ra que , contre fon opinion même , les Romanciens ne font pas dépour- vus de difcerncmenr. Ce qu'il dit d'un Brodeur dont la boutique a pour enfeignc Dont Carlos , fçavoir que c'eft un Ou- vrier eftimé des Romanciens •, ce qu'il dit d'un autre , fçavoir , qu'il n'a pas fi bien réufiî à fc taire re- chercher , quoique fon enfeigne promette àtsamufemens H. ce qu'il ajoure d'une des plus belles bouti- ques de la Romancie , laquelle a pour enfeigne la Prrncejfe deCléves, & dont l'Ouvrier , dit-il , joiiit, à jufte titre , d'une grande réputa- tion, pour n'avoir jamais perdu de vue, dans un travail extrêmement délicat , les règles du devoir , & de la plus auftere bienféancc ; ce qu'il dit des Ravaudeurs , fçavoir , que ce font les Ouvriers Ls moins cftimés dans la Romancie, parce qu'ils ne s'occupent qu'à habiller , par exemple, à la Françoife, un Ou- vrage Anglois ou Efpagnol, ou à réduire à un prétendu goût modcr- jie j des Ouvrages faits dans le goût antique , en forte qu'il n'y a prcf- que pas un de ces Ouvriers qui dans la marchandife qu'il don- ne pour toute neuve , n'y mêle quelques vieux morceaux qu il a r'habillés & retournes à fa façon,ce qui eft caufe qu'ils n'ont prefquc point de pratique dans la Roman- cie ; tout cela mis enfemble fait voir que danscçtte Romancie , s'il en faut croire ici notre Ecrivain- même , on juge des Ouvrages d'efprit avec équité. Nous avons obfervé au com- mencement, que cet Auteur , qui prend d'abord le ton de l'ironie pour donner de l'cnjoiiement à fes critiques, ne lailTe pas de le quit- ter quelquefois , & de prendre le ton grave & fetieux. On peut déjà l'avoir appcrçû ; mais en voici ua exemple plus marqué : il s'agit de CCS Ouvriers qu'il appelle du nom de Faifeurs de Lanternes- Magiques. i> Ils ont , dit-il , l'imagination ex- » trêmement féconde , il ne leur » manque que de l'avoir réglée pat "le bon fcns &C la vraifemblan- Mce. ( voilà qui eft fans ironie ) » Il n'y a point d'invention fi bi- » zarre , pouyfiiit-il , dont Us ne s'a- » vifent &C qu'ils n'exécutent ou ne » paroifient exécuter avec une faci- "lité furprenante. U eft vrai oue .» lorfqu'on confidere leurs Ouvra- »ges de plus près, il eft aifé de » s'appcrcevoir que ce ne font one »des colifichets qui n'ont riei. d- » folide ni d'eftimable. Voilà qui n'eft pas plus déguifé. Notre Auteur , fans envelopper davantage fa critique, la continue N n n ?po JOURNAL DE ainfî : "Je ne pus m'empêcher de » tcmoicrner au Prince Zazaraph , ^aqiic je ne comprcnois pas com^ o nuiit ces Ouvriers pouvoient » trouver le débit de partiiles mar- :> chandifes. Mais il me détrompa. » Si les Marchands d'Europe , me » dit-il , qui étalent des boutiques » de poupées , de fiftlets, de pe- » tits moulinets , de petites fonnet- » tes , de marmoufets &c de mille sj autres efpeccs de ftmblables coli- «tîcliets que l'on aclictte pour les « enfans , gagnent leur vie à ce né,- »} goce ; pourquoi ne voulez-vous »pas que ceux-ci fafTent aulTï quel- » que fortune ? car vous voyez que ïj'leurs boutiques & leurs niar- »chandifes fc relkmblent partaite- >i ment. Dans l'Epître Dédicatoire , dont nous avons rapporté un échantil- lon , on dit qu'on ne veut pas , pour décrier les Romans , faire une Differttttion raifonni; , une controver- ft de Cafiiifle on dePhilofophe pédant^ mats cjHon veut , en homme d'efprit ^ donner à fes raifom un tour agréa- ble , & Us envelopper fous <]uelejue idée riants , les paroles fuivantes qui font la fuite de la critique fé- riculc que nous venons de cirer , pourront achever démettre lesLec- îcurs au fait fur cet article. » II w faut oblèrver , dit notre Auteur ^ »ï que. la plupart des perfonnes qui -■o s'occupent d'ouvrages de Rc- î> mancie , font des efprits oififs & » parcfTcux , qui veulent être amu- " les comme des enfans , parce » qu'ils n'ont pas la force de s'oc- ->cupcr eux - mêmes , & de leurs S SÇAVANS. » propres penfécs , ni même de «donner une application fuffifante » aux pcnfées d'autrui. Propofez- » leur quelque chofe à méditer, M un raiionncment à approfondir, » feulement une reflexion à faire , » vous les accablez , vous les cn- » nuyez comme des enfans , à qui » on propofe une leçon à étudier j » au lieu qu'une fuite de jolis cohfi' » che s , qu'on leur fait palfcr fuc- 3>ce(llvement fous les yeux , les » divertit & les amufc fans les fati- «•guer. Notre Auteur ne finit pas ici Çsi reflexions ferieufes fur le fujct dont il s'agit : "Voilà , pourjuit-il , ce- » qui fait le grand débit de cette •> marchandife. A peine les Ou- M vriers en peuvent - ils fournir af- » fez , & dès qu'il paroîr quelque » nouvelle Lanterne-Magique, ou »> colifichet nouveau , on fc l'arra- wche des mains. Il faut pourtant » avouer une cholè ; c'eft que du u moment que la première curioll- » té eft fatisfaitc , il arrive de ces »ouvragçs comme des colifichets i> d'entans , qui font défaits ou dé- » montés , on les lailTe traîner » dans un appartement fans que » perfonne fonge à les confervcr , oo & leur fort ordinaire çft d'être » jettes dehors pèle - mêle avec les «ordures. Nous pourrions citer quelques autres exemples de la gravité philo- fophique avec laquelle notre Au- teur s'explique de tems en tems- dans ce Livre , où il veut éviter de parler en Philofophci mais en voil.î iiiflîIaiBîaenc fur ce pouit : un fpcçi 5 U I L L taclc amufant fe prefcnte ; ce font des Bouffons & des Baladins, qui, tandis que Zazaraph & Fantcrcdin conhdercnt les diverfes boutiques donc nous venons de parler, paroif- fenr dans une grande place , oùils fe mettent à joiicr une Comédie. Nos deux Princes qui lesapperçot- Tent y accourtnr ; Fanférédin eft fort content du Spcdacle ; il trou- ve de TeCprir dans l'invention, dans la conduite 6: dans l'exécution de la pièce \ un certam Ragotin, dit- ii , y faifoit un des principaux rô- les , avec un nommé la Rancune. Toute la Pièce en général paroît à notre Prince , l'Ouvrage d'un homme d'efprit : ce Spcdacle fut fuivi d'une pente Pièce intitulée le DiMe Boiteux , qui eut aulîi beau- coup d'aplaudiffement. Nous paffons le refte duCbapi- tre pour venir aux deux derniers dont nous ne dirons qu'un mot. Il s'agit dans le pénultième , de l'ar- rivée de cette flotte que nous avons annoncée des le commencement de cet Extrait. Elle eft compofée de Héros & d'Héroïnes , qui , fous la conduite de divers Armateurs, ont couru le monde : im tribunal af- femblé fur le port,f3it rendre corn- .pte à ces Armateurs , du procédé NOVFELLE TRADVCTION FRANCHISE "DE L'AAÎINTE du Taffe , avec te Texte à coté. A Paris , chez Nyon fils , Quai des Augu- (lins , près le Pont S. Michel, à l'Occafion. 1734. vol. in- 11. pp. 189, UAminte du Taffe , Paftorale, A Paris , chez André Cailleau , Quai des Auguftins , à l'Image Saint André , & Grégoire - Antoine Dupuis^ Grand'Sâlie du Palais, auS. Efprit. 1735. vol. '»-iz. pp. 100. E T , r 7 j ;. :; 9 r qu'ils ont tenu à l'égard des Hcros & des Héroïnes qu'ils ont eo;»- duits i ce tribunal eft coinpofé d'hommes & de femmes , &: l'on j juge en dernier rclTort les Arma- teurs. Nous renvoyons fur cela au Chapitre même. On voit dans le Chapitre dernier le fort du Prince Zazaraph à l'égard de la Princelfe Anémone , 6c celui du Prince Fanférédin à l'égard delà. Princefte Rofebelle ; ce Chapitre eft plein d'Avantures extraordinai- res que nous nous difpenfons de rapporter. Qiiant au fongc qui termine le Livre , ( nous avons averti que l'Ouvrage finiffoit par le récit d'un fonge extraordinaire ) il a pour ti- tre , conclufion & cataftropbe lamen- table : nous n'avons autre chofe à en dire , que ce que nous en avons dit au commencement. Au refte , il y a peu d'Ouvrages qiiinefoient cenfurables : mais ce- lui-ci paroît mériter une indulgen- ce particulière , ert confideration du deftein ingénieux qui, comme nous l'avons remarqué au com- mencement , en fait le caiaiftcre ^ & le rend véritablement digne d'être lu. N n n ij ;P2 JOURNAL DES SÇAVANS; X 7 O 1 C î , prefquc cîansle mê- V me tems , dcuxTradudeurs d'une même Pièce. L'un a mis le Texte à côté de la Traduftion , l'autre l'a fupprimé. Le premier a cru que les Lcftcurs , étant tout d'un coup à portée de confronter la copie avec roriginal,nc manque- Toientpasde profiter de cettefacili- tc, & de fentir mieux par ce moyen l'exaiflitude & la fidélité du Copi- fte. Le fécond a jugé qu'en ne voyant que fa tof ie , on la goûte- roit mieux. Ce qu'il y a de certain au regard de ce dernier , c'eft que le foin qu'il a eu. de fouftraire le Texte aux yeux des Ledeurs , ne fçauroit faire tort aune verfion où il fe donne quelques libertez , comme celle entre autres, d'arran- ger les Scènes autrement que n'a, fait l'Auteur de la Pièce. » On fera peut-être furpris , dit- " // , de l'arrangement des Scènes ; 3) j'ai fuivi la méthode des Pièces » Françoifes , avec d'autant plus de jj confiance , que la Traduction 3> n'efl: point accompagnée du «Texte. C'eft une Paftorale Fran- »çoife , qui , à chaque raou- » vemcnt arrivé fur la Scène , de- » mande une Scène nouvelle. No- » tre Théâtre eft bien différent en 3> cela, de celui des Italiens , qui » ont deux Scènes au plus , dans 5^ chaque ade. Je ne prétends point » cependant m'èrigcr en cenfeur >» de cette partition -, ils ont de » belles Tragédies qui n'en fouf- a> frcnt point. Voilà pour ce qui regarde le dernier Tradudeur. Quant au pre- mier , comme il n'a point change l'ordre des Scènes , & qu'en tout il s'eft propolé de faire un poitrait , il a cru qu'il ne pouvoit que ga- gner à rapporter k Texte. Nous ne parlerons point ici dç ce que c'eft qtie l'Aminte du Talfe; nos deux Tradudeurs s'étendent au long fur l'éloge de cette Pièce &c ce qu'ils difent à ce fujet cft fufiî- fammcnt connu des gens de Let- tres. Mais ce qu'il eft important que nous fallîons connoître , c'eft le caradere de ces deux Traduc- tions , & comme nous ne fcaurions fatisfaire là - delTus la curiofité des Ledeurs , qu'en leur produi- fant des exemples de l'une & de l'autre : en voici quelques-uns. ACTE PREMIER. SCENE PREMIERE. Dafne', Silvie. Daine'. Pnmier TraduEleur. TEXTE. Vorray dunque pur , Silvia, Da i piaceri di venerelontana, Mename ta qiiefta tua giovanczza ? Nè'l dolce nome di madré udirai .' Ne intorno ti vedrai vczzofamente ! Scherzare i figli pargoletti ? ah , cangia. Cangia , prcgo , Gonfii;lio , Pazzarella che fci. Tradiinio». =0 Quoi , Silvie , toijjouTS en » guerre contre l'amour } tu lailTc- J U I L L t) ras couler tes jeunes ans fans en » connoître les plailirsî Tu ne t'en- » tendras jamais appeller du doux » nom de mère , & tu ne verras y jamais badiner autour de toi , de » tendres cnfans , gages précieux » d'un charte himenée ? De grâce » prends d'autres fentimens , &C » fois moins infenfée. Second TraduEleur, » Verrai - je donc Silvie toujours » éloignée des plaifirs de l'aimabJe j) Reine de Cythére f Laiffera-t- " elle ainfi couler £i;s plus beaux » jours ? Le doux nom de mère » ne la toucheroit-il pas ; N'aura- » t-clie jamais la joyc de voir de » jeunes enfans folâtrer autour » d'elle ? ah changez de conduite , n changez, petite infenfée que vous » êtes. Premier TradhlleHr, TEXTE. Altti fcgua i dilétti de l'aniore , ( Se put v'è ne l'amore alcun diletto ) Me qiiefta vita giova, è'I mio traftulo E' la cura de l'arco , c de gli iinli. Se guir le ferc fugaci , e le ftMtl 'Atterrar combattendo : e fe non manca- no , Saette a la faretra , o fere al bolco ; Non tem'io , ch'a me manchino diporti. TraduSlion. » Que l'amour falTc des heu- »rcux, fi pourtant il en peut faire; w pour moi je préfère mon fort a » tout autre. Mon arc & mes flé- » ches font toute ma joye , fuivre avune bête qui fuit , ou tcrralTer la » plus indomptable , font mes feu- «■ks délices ; Qc tant qu'il y aura E T , 173;-. jpj "des flèches dans mon carquois » & dans ces bois des ennemis à » combattre , je ne crains point les »>recours fâcheux de l'ennemi. Second TraduEieur. » Que d'autres goûtent les plai- » firs de l'amour , s'il en efl en ai- » mant •■, la vie que je mené me flat- » te plus agréablcwf»/ , un arc & » des flèches font mon unique amu- » kmcnt ; je me plais à pourfuivre » les animaux timides, à terraflet » les bctes les plus féroces. Et tant n que mon carquois fera fourni de » flèches, tant que les forêts nour- » riront des ennemis à vaincre je » ne crains point de manquer de » plaifirs. On peut comparer ces deux Tra- ductions , & voir celle non feule- ment qui fe rapporte le mieux à l'original , mais qui cft la plus élé- gante. Ces mots de la première : Je ne crains point les retours fâcheux de l'ennemi , répondent - ils bien au Texte : Non tem'io , ch'a me manchi- fw diporti; 8c ceux-ci de la féconde, je ne crains point de manquer de plaijirs , ne femblent - ils pas plus convenables ; Les Ledeurs en dé- cideront. Nous leur laiflx)ns tout de même le jugement de ces autres paroles ' le premier tradudeur fait dire à Silvie : Qjte l'amour f^Jfe des heureux Jl pourtant il en peut faire , pour moi je préfère mon fort à tout autre. Mon arc & mes flèches font toute ma joye , » & le fécond lui fait dire , que V d'autres ooûienths glaifirs delà- jçi- . JOURNAL DE » mour , s'il en eft en ûmant^ la vie " que je mené me flatte plus agréa- >' hlemem , un arc & des flèches ï> font mon unique amufe»»f«/. Le premier Traduâieur rend aind CCS paroles de la fin du premier Acte, Aniiain, chel fol fi muore c poi rinafce: A noi fua brève îucc S'afconde, e'I fonno eterna notte adJuce. » Le Soleil nous rend chaque » jour fa lumière ; mais le flambeau » de nos jours une fois éteint , ne ,- M fe rallume plus. Le fécond les rend ainfi : » La m vie n'eft pas comme le Soleil qui » meurt & qui renaît. Elle fe cache •» & nous entraîne vers la nuit éter- » nelle. Sur la fin de la féconde Scène du fécond Ade , Daphné dit : )vla 5 chi tiiiovail ben , s'egli no'lcerca ? Le premier Tradudeur exprime atnfi ces paroles : Quel efl le mortel ajfez. fortuné pour trouver fon honliiurfans le chercher , &: le fécond les rend ainfi : Qui ne les cherche pits (les plaifits } ne doit pas les trouver. La première Scène du quatrième Aâe , commence par le difcours fuivant : ,Ne porti il vento con la riaBOTelIa, Ciie s'era di te fparta, ognituomale £ prcfente , e futuro ; tu fci viva, E fana , Dio lodato : ed io per merta Pur ora titenca : in tal maniera M*avea Ncrina il mo cafo dipinto. Ahi , fofle ftata muta , ed altri fordo. Le premier Ttadudcur dit • S SÇ A VANS, » PuilTe , malgré la triftc nouvelle » quis'en étoit irèpanduc , net'êtrc » arrivé, &: net'avrivcr aucun mal- »heur ! Puilque )e te vois vivante »& fans mal, j'en bénis le Ciel } >» car au récit deNcrine je re croyois » périe. Plût à Dieu qu'elle eût été » muette ou qu'elle n'eût trouvé » que desfouidsl Le fécond dit : » Que le vent «emporte avec lui la trifte nou- " velle qui s'ètoit répandue , & » que le Ciel nous préfcrve de tout " malheur prefent de futur. Dieu » foit loiié , vous refpirez , Silvie , » & vous êtes fans bleffurc. Je vous » ai cru morte , de la façon dont » Nérine m'a conté votre accident. » Au refte plût à Dieu qu'elle » n'eût rien dit , ou qu'elle eût » parlé à des fourds. Dans la fuite de la même Scène on lit : O' Silvîa , Silvia , tu non fai , ne credi Quantîjl foco d'amor pofla in un pettOj Che petto fia di carne , e non ili pietra. La première verfion porte : » Sri" » vie , Silvie , ru ne fçais Si n'ima- X gines pas tout ce que peut l'a- » mour fur un cœur qui n'eft pas » comme le tien , un cœur de mai- »bre. Et la féconde: » Silvie, Silvie, » vous n'avez point éprouvé le » pouvoir del'amourjfur un cœur, » fur- tout , fur un cœur fenfible n &C non de marbre comme le vô- » tre. Au reft:e , le but du Théâtre doic être d'infpircr des fcntimens loua- bles _, bien loin de rien iaiflcyf J U I L t échapper qui en pmlu: inlinucr de pernicieux ; toute Picce qui s'éloi- gne de cette rcglc eft indigne de paroître. Quel |ugciuent doit-on Jàdeirus porter , de l'Aminte du Tslfe; C'crt cequenousne décide- rons point : mais on ne doit pas re- garder coniine fort utile aux moeurs une Pièce où l'on trouve pour ma- ximes, qu'il faut fuivre la nature en tout, Que ce ^uiplah ejl permis. Que les gênes de la pudeur font contrai- rcs à l'ancienne & loiiable implici- te. Qiie les Bergers & les Bergères doivent vivre cnfemble avcclibcr- xk , &c fans fe contraindre. Que ce que l'on couvre aujourd'hui du beau nom d'honneur , eft une chi-" mère qu'il faut mépriler , &ç. Nous palTons certaines defcrip- tions & ccrtaineTp^intures qui ne paroifTent gyéres tolérabks dans l'original , encore moins dans l'une & dans l'autre Tradudion, fur-tout dans la féconde. Témoin entre au- tres ce qui fe lit à la fin de l'Ade premier, & quelques lignes après le commencement de la féconde Scène du fécond. Nos Tradutilcurs ont joint ici les deux petits Poèmes intitulés l'un V Amour en habit de Berger, AmorE liM HABITU PasTORALÇ SC l'autre , ï Amour Fugitif-. Amqre FuGGiTiVû. Ces deux petites baoa- tcUcs paroilTent avoir fort occupé nos deux Tradudeurs. MOVVELLES LITTERAIRES. ANGLETERRE. D' O X F O R D. BEnediEliis Abhas Petrohurgerjjts de Fit à & geftis Henrici II. & Jifcard/ 1. è Çodtce Mf. in BUfliothe- ■câ Harleiana defcripjtt , & nuncpri- 'mum edidit Thomas Hearnius, è %hsatro Scheldoniano. 1735. "^-8°. 2. vol. C'eft le 43' Ouvrage, tant fur l'Hiftoire d'Angleterre que fur d'autres matierescurieufes dont M. Hi^rne a enrichi le public ; il fera bien-tôt fuivi d'un 44^, auflî en 2. vol. in - %°. qui aura pour titre •• Joamiis Beveri , Aionachi ff^ejlmo- fiaflerienfii Chronictn à Bruti ^rimi Rtgis introitu in hanc InfuUm , a/r t]ne ad annum Deminî 1306^. & Joannis Aétrylimh , Monacki Glo- ftomenjis , rerim ( in AngUâfpecia- timac Hihermâ) fnh novem primis- annis Joan'ms XX IL Romani gefia- rum defcriptio, FRANCE. De Dijon. Infiitm m Droit Costumier dn Duché de Bourgogne , avec le Texte de la Coutume , les Cahiers conte- nant l'interprétation &c déclaration des articles les plus obfcurs & am- bigus de ladite Coutume & les no- 3p(? JOURNAL DE ces omifes -, & ur^émoire des Vil- les & Villages qui ufent du Droit - Ecrit au Duché de Bourgogne. Nouvelle Edition , revue & cor- rigée. Chez Jean Sirot, I735./W-IZ. De Paris. P.G. le Mtrcier, ruii S. Jacques^au Livre d'or , diftribue aux Soufcrip- teurs: Defcriftion Géograplnijue ^ Ht- florique , Chronologique , Politique & Phy/t^ue de l'Empire de la Chine & de la Tartarie Chinoife , enrichie des Cartes générales & particulières de ces Pays , de la Carte générale & des Cartes particulières du Thi- bet 6c de la Corée , & ornée d'un grand nombre de figures & de vi- gnettes gravées en taille-douce. Par le P. J. B. du Hdde de la Compa- gnie de Jefus, I7JJ.4- vol. in-foL. papier grand raifin. Hijtoire générale des Drogue s fîm- ■pUs & compofées , renfermant dans S SÇAVANS, les trois claffes des végétaux ~ des animaux & des minéraux , tout ce quieit l'objet de la Phyfique , de la Chimie , de la Pharmacie & des Arts les plus utiles à la Société des Hommes. Ouvrage enrichi de plus de 400 figures en taille- douce ti- rées d'après nature , &c. Par le Sieur Pomet , Marchand Epicier & Droguifte ; nouvelle Edition , cor- rigée & augmentée des dofes ôc des Mfages , par le Sieur Pomet fils , Apothicaire. Chez EfltenneGanenH &c Louis-Eflienne Ganeau fils , rue S. Jacques, 173 ^.in-j^°. i. vol. Recherches fur les Théâtres de France ^ depuis Tannée 1161. juf- qu'à prefent. Par M. deBeauchamp. Chez Prault pcre. Quai de Gîvres. 173 5. /«-8°. 2. vol. Remarcjues de Chymie ^ touchant la préparation de differens remèdes ufités dans la pratique de la Méde- cine. Chez Didot, Quai des Augu-, ftins , à la Bible d'or. 1 7 3 5 . z»- 1 i. TABLE Des Articles contenus dans le Journal de Juillet 175/.' LEs anciens Itinéraires des Romains ^ &c. F'ie de l'Empereur Julien , Les Odes & les Fragmens d'Anacréon , &c. Hiftoire duVicomte deTurenne , &cc. Voyage Merveilleux du Prince Fanférédin , &c. Nouvelles Traductions Françoifes de l'Ammte du Taffe l Nouvelles Littéraires , 34tf 36^0 378 391 Fin de la Table. L E JOURNAL scavÀns, FOUR L'ANNE'E M. DCC. XXX F^ A O U S T. A PARIS, Chez CHAUBERT, à l'entrée du Qiiay des Auguftins, du côté du Pont Saint Michel, à la Renommée & à la Prudence. mTdCC. XXXV. ~~ AVEC Al'FROBATION ET IRIVILEGE DU KOY. 4J' P L E J DES SCAVA AOU ST M. DCC. XXXV. POESIES DE MADEMOISELLE DE MALCRAIS DE LA Vigne. A Paris, chez Chaubert , Libraire du Journal , Qiini des Au- guftins , du coté du Pont S. Michel , à la Renommée , &: à la Prudence ; la Veuve Vtffot , Quai de Conti \ Cloufier ^ rue S. Jacques ; Nemlly ^ au Palaisi /î/^a«, vis-à-vis la Comédie Françoife. 1735. vol. /'«-li.pp. 27:. M des For^cs-Maillard , dont . le raient Poétique n'étoit connu qu'au Croilïc en Bietat^ne , où cet Auteur faifoit fon léjour ^ jugea à propos , il y a quelques an- nées, de faire inférer quelques-unes de fes Pièces dans le Mercure ; Se pour leur alTurer d'abord , un ac- Lliij 400 JOURNAL DE cueil fivorable , il crut devoir les donner fous le nom d'une Dcmoi- felle , qui eft celui que l'on voit dans le titre. A la faveur de ce dé- ouifement , il lia un agréable com- merce avec l'Auteur du Mercure , & avec plulîeurs Gens de Let- tres , qui nonobftant certaines Pie- ces peu dignes d'une perfonne du fexe , comme nous le verrons plus bas , crurent de bonne toi , que l'Auteur de ces Pocfies éroit une jeune Demoifelle. QiiclqHes vers qu'il ht imprimer eniuite , dans le Ivicrcure, à la loiiangc de Meilleurs de Voltaire & des Touches , lui at- tirèrent de la part de ces deux Au- teurs , des Galanteries convena- bles au prétendu fexe de leur aima- ble Panégynlle. M. des Forges voyant la réputa- tion de fes vers fuffifammcnt éta- blie , eft venu enfin depuis quel- que tems, à Paris , où ennuyé de fon perfonnage , il s'eft avifé de fe dcmafquer, (au grand étonnement de tous les Galans de Mademoifelle de Malcrais.) Ce qu'il y a de fingu- lier , c'cft que fe repolant fur les éloges qu'il avoir reçus comme fil- le , il a cru pouvoir reprendre fon mafque pour l'impreflion des mê- mes Pièces -, mais foit que le voile ait été trop rranfparent, ou que le talent de la feinte Demoifelle^ bien examiné, n'ait pas tout à fait paru tel qu'on l'avoit cru d'abord , l'ar- tifice n'a plus rcuffi. Quoiqu'il en foit, voici quelques exemples de ces Pièces : qui , comme on peut bien juger , ne font pas toutes éga- las i les échantillons que nous en S SÇAVANS, allons rapporter mtttrcrt les Lec- teurs en état de juger de la differen. ce des unes &' des autres : 11 y en a de graves & de badines. One Ode fur la beauté , fe pre- fentc d'abord parmi les Pièces du premier genre, en voici les pre- mières ftrophes. — Beauté, fubti ! prifon de l'amc , Qui r.ous enclianas & nous perds , Tifon ; dont Ja rapide flamme Embrafa cent fois l'Univers, Quel Dieu vengeur, quel coup de fou-r dre , Réduira les Autels en poudre , Où ton Fantôme eil enccnfe ! Et déchirant ton Diadème , T'abatra deee rang.fuprême Où t'tkva l'homme infenfc ? Aux yeux furpris toujours mafquée. Tu m-ntres d'aimables dehors. Une ame interdite , oftufquée , Cède fans peine, à tes efforts. Mais par quelles lâches foibleiFes, Par quelles indignes ballellcs Faut - il acheter tes faveurs ? Impérieufe , tu ne donnes Le prix honteux de tes couronnes Qu'à des captifs & des fîateurs. Tourment dss cœurs, trompeufë merc Des dangereux & faux plaifirs , Vaine & féduifmre chimère , Tu nous confumes en deiîrs , L'impatiente jaloufie , L'efptit craintif, la fantaiiîe , L'audace aux projets effrcnez. , L'çflroi) la guerre, à l'œil funelt Ci L'adultère & l'infàine incefle Sont tes enfans infortunés. A O U S T , 175 5-. 40Ï Nous lailfons trois autres ftro- phcs non moins poétiques que Que de batailles , qued'allarmes,' Quels mœurs , quels crimes enfanta Le coupable encens qu'à tes charmes Le fils Je Priam prsfcnta ! Sa patrie aux flammes en proye , 5ous riicrbe la fainciire Troye Vit anéantir Ton orgueil , Et Pyrrhus bouillant décolère Du meurtre du fils & du père j Paya ton infidelle accueil. A ton gré , ton pouvoir perfide Produit des mouvcmens divers. Le Héros le plus intrépide Languit amolli dans tes fers; Annibal marche au Capitolc De viifloire en vidoire il vole ; Rome fe livre à la terreur : Tu parois , ton afpeft l'arrête 5 11 i:bandonne fa conquête , Et tu triomphes du vainqueur. Apres une fixiéme ftrophe que nous palTons pour abréger , & qui ne mériceroit pas moins d'être rap- portée , l'Auteur ajoute : Un feivl homme en arrête mille s Par toi feul il cfl abbatu , David te voit , David fragile , T'immole toute fa vertu. Son fils trompé par ton adrefle , Tombe du fcin de la Sagefl'e En des égaremens honteux ; Et de Jean qu'enflamme un faint zélé Contre une chaîne criminelle , La tête eft le prix de tes jeux. celles-là , pour venir à une Ode fur l'Aftrologie Judiciaire. Ode fur l'^fîrologie Judiciaire. Funelle & vaine Allrologie, Qui dans les ténébreux replis De ta féduifante Magic Tiens tant de cœurs enfevelis. Relie à jamais dans la Chaldée. Une coupable & faufle idée Nous a trop long-tems égarés. Les peuples qu'à tort on crut fages ,' Rendront bien, fans nous , leurs homma- ges Aux Aflres par eux adorés. Fantôme que mit en lumière L'avide curiofité , Tu nediista grandeur première Qu'à l'humaine crédulité ; Tu profitas de nos foiblelTes, L'appas trompeur de tes promefles Mafqua tes menfonges divers. La peur fit valoir ton audace , Et ta chimère prit la place Du Souverain de l'Univers. L'Auteur joint ici plufieurs re- flexions fur la ridicule métamor- phofc que les Aftrologues ont faite des Aftres en métaux , .& fur la vertu prétendue qu'ils attribuent à chaque planctte ■■, après quoi il dit en général : Croirai-je , étrange extravagance ! Que le Ciel à votre art fournis , Au point qu'il fut à ma naiflince j Puiilc à vos yeux être remis i 402 JOURNAL D Seul, de Ton compas infaillible, Dieu marque du temsinfenfîble , Tous les efj'aces écoulés. Eternel torrent ! cours immcnfe ? Pendant que mon clprit y pcnfe. Mille inlians fe font envolés. Si, (îiivant votre abfùrde fable, La même étoile au mémeafpeâ:, D'un bonheur , ou malheur femblable, Porte un préfagc non fufpeâ:-, Pourquoi ne font-ils pas infignes , Tant d'ho'mmes nés fous mêmes (îgnes , Que les Rois , & les Conquerans î Ou pourquoi le même naufrage Perd-il cent nochers à tout âge , • Nés fous des figrxs diftcrens'î Celui-là vit 5i meurt infâme , Cet autre eft porte vers le bien , Et l'Aftrefeul captive uncamc Sous ce doux & fiital lien. Maudit ton fort, miferable homme , Ta liberté n'efl qu'un fantôme. N'attends plus rien des immortels ; Tes vœirx font déformais ftériles , Détruis des Temples inutiles. Ravage & brife leurs autels# œ Non , la ronde & vafte Machine Du feul vrai Dieu connoit les loix , Le Ciel à fon afpcd s'incline ; Il pzrle & tout tremble à fa voix. Toujours unie à fajuftice. Sa volonté n'ell point complice. De l'iniquité des humains. Le libre arbitre qu'il leur donne , De la honte ou de h Couronne Laiilele choix entre leurs mains. ES S Ç A V A N S , Voici une Ode qui renferme une cenfiue d;tiill:e de prefque tous les vices. Nous voudnons pouvoir la rapporter entière •, mais il faut mcnigcr de h place pour d'autres articles. Elle commence par d'im- portantes leçons fur ks devoirs de la NoblelTe.' ODE A LA VERTU. Nok'illtas folit efl atjits unica virtus : Juven. Sat. 8. Vertu dont la fuurce de flamme Coule de la Divinité. Toi qui conduis une belle ame Dans le fentier de l'équité , DefcenJs de la voûte azurée. Viens de ton haleine facrce , Souffler la force dans mon cœut. Je vais confondre ta rivale , Dont la bouche aux humanis fatale Les charme fous un nom trompeur. Par toi la Noblefle enfantée Ne pouvoit fublîfter fans toi , Par elle toujours confultée. Tu la voyois fuivre ta loi , Mais depuis , fîere d'un vain titre ," Elle-même devient l'arbitre , De fes plus injuftes projets , Et fon audace qui t'atfrontc. Dédaigne ton joug , & te compte Au rang de fes moindres fujets. Enflez d'une coupable gloire Qui n'appartient qu'à vos aytux. A U O s T , I 7 5 y. 405 O^rez- vous toiis à capacité , Du bon fens nbllinés transfuges Tous leurs titres pour être Juges ^ C'eft que leurs ay eux l'ont été. Dignitez, Charges faftueufes Que"méconnoiffentks vertus , Tribunaux , Banques tortueufes j' Oviprcfide le feul Plutus , L'avarice aux mains infernales - Dans fes balances inégales , Pcfe le fang & la faveur. Et fouvent d'une Couitifane La bouche obfcéne fut l'organe Par où parla le Sénateur. Q? La Mufe de notre Poète porte fon zélé jufques fur les Miniftres de la Religion. Quevois-je? mon amefurprife S'allarme à ce fpettacle affreux : C'eft vous, fiers aînés dans l'Eglife, Autrefois cadets malheureux , Peu defireux du Sacerdoce , Ce n'eft que la Mitre & la Croffe Que cherche votre ambition ; Et les chartes agneaux patiffent. Tandis que les loups engloutiffent Les pâturages de Sion. Les injufticesduBareau paffent enfiiiteen rcvûë. Des faints vieillards qui le forment, Le nom v'.e Sénat fut tiré. De la juftice qu'ils aimèrent , L'intérêt feul leur fut facré , r.ravaot quelquefois ces exemples, 01? Le Poitc , quelques ftropHeS après , trouve à propos d'invec- tiver contre les Armoiries. Que vois-jc ? Dragons , Hipogtyphes, Li ns, Serpens, Aigles, Hiboux, Obfcursfymboles, Hiéroglyphes, Qi'C A O U s Que le peuple adore à genoux. Suis-jc arrive , Dieux ! quels prodiges! Sur ces bords , fcjour de prelligcs , Où les monftres font encenfcs î Erreur : ce l'ont des Armoiries Qui nourriflènt les rêveries De tant d'illuUtcs infenfés. A cette Ode , dont nous avons palTé plulîeins ftrophes de peur de nous trop étendre , en fuccede une en proie , adrelTée à M. de la Mo- the-Oudart, de l'Académie Fran- coife , fur ce que cet Académicien a prétendu que l'on pouvoir faire d'aulîî beaux Ouvrages de Pocfie , en profe , qu'en vers. Nous nous contentercns de rapporter le début & la conclufion de l'Ode. ODE EN PROSE. » Grand &: fameux la Mothe , » ait»le rapide dont l'œil noblement » audacieux , va délier les regards » mêmes du Père Brûlant , par qui » la lumière eft engendrée, foûticn » le vol timide d'un foible Tierce- » let j & vicn d'un coup de ton aî- »le fecourable , le poulTcr avec »toi , jufqu'au dévorant féjour du " feu. M Je parSj je quitte la terre bour- «beufe ; je traverfc , je fends les «immenfes campagnes de l'air. La .30 violence qui m'emporte me fait « perdre haleine. Quel bras puiffant « m'arrête ail-deifus du double a>fommct de la doâ:e montagne; 3» Un merveilleux fpedacle s'y dé- T , ^73 S' 4^f. » voile à mts yeux enchantés : la » majeftueufe Mclpoméne, la vive w& galante Polhymnie ^ la tète "panchée, & fléchiflTant devant >> toi un genoux refpcârueux , te «rendent des hommages qui te » comblent d'honneur. On trouvera peut-être que cette reflexion: :Q«/ te comblent d'honneur, auroif pu être laiiîée à entendre ; mais notre Poète Profaïque l'a crue apparemment necelTaire. U pour- fuit , & dit. » Comme l'indomptable Hercu- » le purgea autrefois l'étable infec- " rée du riche & fuperbc Augias ,' (l'Auteur a voulu dire apparem- ment^ Niable infeHe) » amfi tes tra- B vaux innombrables ont dégagé » DOtrePoélîe affreufement accablée »fous le joug tyrannique de la » rime. ( Le Poète vient de débuter com- me s'il alloit comparer la Rime au fumier de l'étable d'Augias , mais au lieu de fuivre fa première idée, il reprcfcnte cette rime fous l'image d'une chaîne ,ain(î qu'on va voir.) » Tu l'as tirée de la prifcn oîf- » cure & étroite dans laquelle » plongée depuis fi long - tcms : (plonge,' dans uni prifon , pour dé- tenue ! ) M elle poufloic des plain- » tes auilî touchantes que fteriks , 3ï ta main laborieufc a briféfesen- » traves cruelles ; & délivrée du » poids honteux de fes chaînes , "elle refpire l'air tranquille & fe- »rein de la liberté défiréc depui* » tant de fiécles. M m m 4o5 JOURNAL DES SÇAVANS, Nous fiipprimcns onze ftiophes pour venir à la conclufion. » Continue , ô généreux vain- »qutur de la rime , nioinoinne x » plein poing , les précicuies javel- » les des lauriers immortels. " ( à- plein poing poux àpUuie main -ponr-'-a bien n'être mis du goût de tans les LeEleurs. ) « Chemme à pas hardis » au Temple rayonnant de la gloi- X re , en dépit de tes rivaux con- "ftcrnés. Cours- y furpendre les » dépoiiiUes que tu leur a arra- » dues , encore foitillces d'une » poufllere honorable ; & qu'eux- » mêmes fe trouvent enfin lorcés »de couronner ton front triom- » phant de leurs pi opves mains. Cette e-xpreffion , couronner ton front triomphant de leurs -propres mains , pour couronner de leurs pro- propres mains , ton front triomphant , trouvera peut - être aufli les Cen- feurs. M. de la Mothe , à qui la pré- tendue Mademoifcile de Malcrais envoya cette Ode Profaïque , en fut Cl content , qu'il lui écrivit fur le champ , ces vers pour réponfe : Quelque difficulté, Malcrais , que l'arc t'oppofe , Tu i^ais en triompher par tes talens di- vers ; Tu f^ais être fubliiwe & mefûrée en profe , Et libre & naturelle en vers. Il eft tems de rapporter quel- ques exemples des Pièces badines lîécle de Louis le Grand ^ &c les » Hifloriens de ce Monarque l'ont 35 jugée alTez importante pour ne la » devoir pas omettre dans les taftes j> d'un règne non moins remarqua- » ble par le progrès que lesScien- » ces ont tait en France, que par >j> une fuite confiante de profperi- j> tez 5i de vidoires. Ils enlevei'cnt 3> dès leur nailfance , les fuffrages jo de tous les Sçavans , & foit que «la nouveauté du projet les tr.ip- a par , ou que l'exécution leur » j^'lût, les lûiiange^ furent prodi- » guées à l'Inventeur. Les Anglois » ne s'en tinrent même pas à une " fheule admiration , 6c avant la fin » de l'année i(îiS5. ils avoicnt dé)a » entrepris un Journal de Philofo- » pii'c , .à i'iniitacion de celui qui » fe failoit en France fur un plaa » beaucoup plus vaife. » l'émulation engagea peu à peu , » jufqu'aux Nations de l'Europe \ss " plus reculées ; à entrer dans la » même carrière , & ceux qui l'ont » fournie avec le plus de fuccès, fe » font fait honneur d'avouer que la » Republique des Lettres étoit re- » dcvable à un François , d'une irv » ftitution fi commode &dont les » fuites ont été d'abord fi avanta- » geufes au progrès de toutes for- » tes de Sciences, M. Camufat fait voir que la France a )0Lii paifiblcment de la gloire de cette invention , jufqu'en \6%^. que iM. Wolhus entreprit de la lui enlever, pour en revêtir Phorius. Enrrcprife qui ne fît pas fortune , &: dont notre Auteur montre au long , le peu de fonde- ment. Photius s'eft uniquement propofé de porter un jugement court & fuccinr des Livres qu'il avoit lus pendant le cours de fon AmbalTade d'Alîirie, & dont il avoit copié pluliturs morceaux. n Or , dit M. CamufM ^ ce n'cft » nullement là^le but ni la métho- » de desjournalifles; ils parlcntdcs. A O U s » Livres nouveaux ^ .\ niifurc que "cesLivres paroilfcntjih les annon- » cent d'avance , ils indiquent en » quels Pays & en quelle forme ils » lont imprimés. Ils en développent " le fujer,ils en expofent le plan, & 3> non content de cela , ils raffcm- » blcnt avec foin , tout ce qui peut » contribuer à l'avancement des «Lettres ; Nouvelles Littéraires , n Recherches curicufes , Phéno- » mènes extraordinaires , rien n'é- »chappe à leur attention , ce font » les yînnales Sçav^nies de leur Jié- * de , (ju'ils écrivent. Projet bien fli- " pericur à celui de Photius. . Après quelques pages employées à montrer que les Journaux ont commencé en France , & que c'eft M. de Sallo Confeiller au Parle- ment de Paris , qui en cft 1 Inven- teur. On donne la Vie de cet illu- ftte Ecrivain , laquelle mérite d'ê- tre lue. Mais que nous fommes obliges de paficr ^ de peur de nous trop étendre. Cet fut en i ^^5 . que M. de Sal- îoconmicnça à travailler au Jour- nal, le premier parut le lundi cin- quième de Janvier , & les autres de fuite tous les lundis de chaque Semaine. Le titre de journal des Sçavans ^ déroba d'abord à l'Ou- vrage j un certain nombre de Lec- teurs , qui ne fe fentant pas une érudition fort étendue, crurent que ce Journal n'étoit pas à leur portée. L'Hillorien remarque que cette prévention a été long-tems .à s'effa- cer , & qu'elle fubfiftoit encore du tcms de M. l'Abbé de la Roque , Succeflcur de M. de Sailo. Ce qui T. 17? r. 40P obligea l'Abbé de la Roque à aver- tir que » quoique le fjontifpice du » Livre fcmblâr ne demander pour »Leâ:curs, que des Sçavans de » proitirion;néanmoinsc)n pouvoit 3> aiïurer les ignorans, qu'Us y trou- 3» veroient toujours de quoi s'a- » mufer , te que la plupart Ats cho- » fes dont on y parloit , n'avoicnt " rien qui fût au - dcffus de la plus jî médiocre intelligence. M. de Sallo, s'affocia dans fon tra- vail pluficurs pcrfonnes fçavantes. Gui Patin met de ce nombre, Mef- fîeurs de Bourzéis , de Gombervil- le , & Chapelain -, M. de Fonte- lïelle donne encore à M. de Sallo pour Compagnon de fes fatigues , M. l'Abbé Gallois qui logeoit alors avec lui. On peut voir là-defl'us no- tre Auteur, pag. \6. du Tome pre- mier. Comme M. de Sallo ne vouloic pas être connu pour Auteur du Journal , il le publia fous le faux nom du Sieur d'Hédouvillc nom , qui , fclon quelques - uns étoit celui d'une Terre fîtuée en Normandie j & félon quelques au- tres , celui d'un des domeftiques de M. de Sallo. Le Père Niceron dans fes Mémoires pour fervtr à IHiftoire des Homnes lllujtres dam U RcpiiMi^ue des Lettres , cff de ce dernier fentiment. Gui-Patin , dans une de fes Let- tres^ c'ert la troificme du Tom. 111= dirqueledelleinde M. de Sallo en entreprenant le Journal des Sça- vans, étoit de faire valoir fes amis &i de nuire à ceux qui ne Tétoient pas. Mais M. Camulat loutient o . : 410 JOURNAL D CL- Médecin interprète mal les in- tentions du JoLirnalifte. M. de Salio , dans la vûë de fe rendre utile à tout le monde , par- loit de toutes fortes de Livres ^ &c .quelque grave que fût ce Magiftrat il n'a pas cru devoir exclure de fcs Journaux , la Conïedie d'Arlequin- Ptocureur , non plus qu'Aftrate , Othon j ni les premiers Contes de la Fontaine; cette condelcendance a été quelquefois imitée par fes Succe(Teurs, qui , de tems en tems, ont annoncé les Ouvrages les plus badins , jufques même aux Nou- velles Galantes. Quoiqu'il en foit , M. de Sallo , peu politique dans les jugemens qu'il portoit des Livres , s'attira une défenfe de continuer le Jour- nal. On peut voir dans notre Hi- ftorien, en quoi confiftoit ce man- que de Politique -, on y trouvera là- delTus un long détail -, détail fuivi de quantité de digrcffions,d'ailleurs attirantes, qui font piefque tout le tond du premier Tome , & à quoi nous ne croyons pas devoir nous arrêter. Apres ces digrefllons,qui contien- nent toutes des recherches curicu- fes , l'Auteur reprend le tîl de fon Hiftoire , & vient à M. l'Abbé Gallois, qui entreprit le Journal à la place de M. de Sallo. M.Caniufat à cette occalion , donne la Vie de M. Gallois; nous y renvoyons les Lt éteurs. Ce fecondjournalifte fut choifi par M. Colbcrt , pour rem- placer M. de Sallo , £v il entreprit les .lournaux le 4. Janvier 1666. c'elVà-dirc, l'année d'après ceux de ES SÇAVANS. M. de Sallo qui furent interrom- pus longttms avant la fin de i66u puifque le dernier Journal de M. de Salio tut le treizième de l'année 16^65. Se que le Journal paroilToic touslcs Lundis de chaque Semaine. M. Gallois travailla aux Jour- naux depuis le commencement de l'année iéC6 jufqu'à l'année 1674. qu'il quitta ce pénible tmploi. La première année , quicfl: celle de 166^. il donna un Journal le Lundi de chaque Semaine ; mais l'année d'après, fçavoircn ié6y. il ne donna que 16 Journaux dans toute l'année , 6c l'année d'enluite, fçavoir en 1668. il n'en donna que 13; les fix années fuivantes il n'en donna en tout que J6 , fçavoir, /^. en 16^9. un en 1670. trois en 1671. huit en 1^72. Enfin après s'être re- pofé toute l'année 1673. on lui en arracha un l'année fuivante , où il abandonna tout-àfait la partie. M. Cnmulat trouve plufieurs chofes à redire dans les Journaux de M . Gallois. Nous ne les rapport terons point. Cet Abbé fe donnoit rarement le plaifir de la critique , £c fa cou- tume étoit plutôt de loiieravecpo-i liteile , que de reprendre avec ai- greur. M. Camufat prétend même que la ccmplaifancedu Journalifte alloit quelquefois jufqu'à loiierdes Auteurs fi peu loiiablcs^ que l'on ne pouvoir s'empêcher de lui en vou- loir un peu de mal. M. Gallois a eu, au fujet de quelques- uns de fcs Journaux , di- vcrfes difputes à foiitcnir avec le Miniftreg laudc, avec M. de Vau- A O U s morin, S: avec M. le Févre de Sau- mur. Notre Auteur rapporte au Jong ces difputes ; les relations qu'il en donne , fi l'on en excepte quel- ques traits fatiiiques, qui fentent un peu trop la pallîon , méritent d'être lues. Dans ces difputes M. Gallois a «té rudement traité , de principale- ment dans celle de M. de Vaumo- rin , qui l'accabla de plailanteries, mais de plaifanteries pitoyables , parce que dans l'Extrait de laTibc- riadede Buxtorf, dont il paroiffoit une nouvelle Edition , ce Journali- ■fte ayant expofé , quoique tort fun plement , ce qu'il pcnfoit de la MalTore , avoit lailTé entrevoir qu'il n'ctoit pas du fentiment de M. Vaumorin fur l'antiquité de ce Livre. M. Gallois , quoique maltraité, fie jugea pas à propos de répondre à fon itdverfaire ^ & en cela ^ dit M. Camufat , il prit le parti le plus rai- fonnaUe. Les Journaliftes , remar- que-t-il , ne doivent point faire d'un Ouvrage pêriadicjue , un champ de bataille , toujours ouvert pour rompre une lance avec le premier venu. M. de Sallo avoit le premier donné l'exemple du mépris que les Journaliftes doivent faire des plain- tes des Auteurs , quand elles font injuftes & peu fages : c'eft un arti- cle dont nous avons oublié de par- ler dans le commencement de cet Extrait ; mais puifque l'occafion s'en prefente , nous le rappellerons, ici. Grégoire HuretpublialeS Jan- vicr \66y un Cahier intitulé : la Règle precife pour décrire le profil éle- vé du fuft des colon.nes. 11 chargea un de fcs amis d'engager M. de Sallo à adopter un Extrait favorable , que lui Grégoire Huret , avoir fait de fon propre Ouvrage. M. de Sal- lo ne trouva pas à propos d'em- ployer l'Extrait , qui étoit tort mal conçu ; &: il aima nueux pren- dre la peine d'en taire un autre ; il y établit des propofitions contraires à celles de l'Auteur , ilk indiqua les Ecrivains qui avoient approfondi avec plus de fucccs cette matière. Le Sieur Huret piqué de ce qu'on n'avoit pas été de fon fentiment dansle Journal j s'avifa le 5 Mars, 1 665. de lâcher contre M. de Sallo une brochurep/f/»i? d'épithétes inju- rieufes & de galimathias. M. de Sallo ne voulut pas fe com- mettre avec un Auteur qui igno- roit jufqu'aux plus indifpenfables bicnféances ; celui - ci , fçavoir , Grégoire Hurét , choqué de ce qu'on ne le lugeoit pas digne de ré- plique , en prit occafîond'infulter une féconde fois au Journalifte , & publia contre lui^une nouvelle Bro- chure/ous ce titre : Cin/j Avii don- nés par Grégoire Huret ^ aux j^utenry du Journal , dit des Sçavans , e:. coiifideration de ce cjii'ils Jont demeif r es fans réplique à fa réponfe dit citui Mars \66^. Le Sieur Hurét , dans cette fé- conde Brochure , fe déchaîna p i;j que jamais contre M. de Sallo J mais M. de Sallo ne s'en émut pas davantage ; il lailTa, comme paravant , fon ^.dverlaiie fac - 412 JOURNAL D plique , & la querelle finit à la con- {"ullop. du Sieur Hurét : Grand exemple de la modération que doi- vent avoir tous les Succelleurs de M. de Sallo. Nous n'avons point examiné fi le Sieur Hurét croit coupable d'autre chofe que d'em- porcemenf, mais il y a des Auteurs qui , pour donner , en defembla- bles occaijons , plus de couleur à leurs plaintes , vont quelquefois jufqu'à impofer. Nous remarque- rons là dclTus qu'un Journalifte eft encore plus autorifc alors à garder le filence -, il lui doit fuffire que par la fimple controntation , les Lec- teurs puifTent fe convaincre de la miuvaife foi de celui qui fe plaint du Journalifte. Le peu d'attention qu'apportoit M. l'Abbé Gallois à publier régu- lièrement le Journal , fit fouhaiter au Public qu'une autre perfonne habile voulût bien fe charger de cet emploi. Le Public fut enfin fa- tisfait là - delTus, & en 1675. M. l'Abbé de la Roque s'en chargea. Il continua jufqu'cn lÉSg. inclufive- mcnt , avec une aflîduité &c une cxaclitude , qui ^ s'il en faut croire notre Hiftorien prefque toujours mordant dans fes reflexions , cfi prefque la feule chofe cjus ion Pu'Jfe loiter dans ce Journalifte. M. de la Roque, dit notre Au- teur , n'avoit prefque aucun des ta- lens ncceffaircs pour s'acquitter de fon emploi, ^.ti examiné^ pourfuit- il , la plkpA't de fes Extraits en les comparant aux hivres-mèmes ^ & il m'a paru --pt^d y regnoit un: langueur & une fecherejfe bi:r. propre à dégoû- ES SÇAVANS, ter les Lcdeurs accoutumés à l'ai- mable vivaàté de Aï. de Sallo^&aux traits maies de M. iAhhi Çallois. M. Camufat reproche bien d'au- tres défauts à M. l'Abbé de la Pho- que ; mais un de ceux fur quoi il infifte le plus , c'eit le peu de dif- ccrnemcnt qu'il prétend que ce Journalifte faifoit paroître dans les jugemens qu'il porfoitdes Ouvra- ges. Voici comme s'explique là delTus notre Auteur, l'endroit mérite d'ê- tre rapporté. » Quoiqu'on en dife , " c'eft toujours par les jugemens " qu'un Journalifte porte des Au- "teurs & des Ouvrages dont il » parle , qu'on doit prononcer fuc » fon caraâere & fur fon difccrne- » ment. C'eft , en quelque forte , » la pierre de touche , c'eft la partie » délicate de fon emploi. S'il la i> remplit avec dignité , dès - là il a mérite toute i'eftime du Pubhc , » qu'il empêche d'être dupe des » Cabales , & des préjugez de ceux » qui s'mtercfTent trop vivement à j> la chijte' ou à la tortune de cer- >> tains Livres. Certainement on i> n'accufira pas M. l'Abbé de la •u Roque d'avoir été trop févérc : » loin de là , s'il y a quelque re- » proche à lui taire , c'eft d'être )> tombé dans l'extrémité oppofée ; 30 & d'avoir été trop indulgent en- " vers les mauvais Auteurs. ...M. de » la Roque, dit Vigncul MarviUe, » s'ell tué de bien faire , mais " quelques lotianges qu'il ait affeiflé » de donner dans fes Journaux à "certains Auteurs plutôt qu'àd'au- ^ très , il eu mort fans reconipen- »> fe. M, A O U s T M. Camufat , après ce difcours , dit que fi l'on doit reprocher ^itelcjue chofe à M. de la Rocjue , Çitr les louanges dont fes Jmimaux /ont in- feEIés (c'cù. Con terme) on doit plutôt lui reprocher de les avoir prodiguées à tout le monde indijferemment ^ t^ue de les avoir refervées pour certains /auteurs en purticulier. Notre Hiftoricn rapporte divers exemples des louanges outrées dont M. de la Roque , dans les commencemens , ctoit prodigue à l'égard même des mauvais Au- teurs , & des mauvais Livres, mais il remarque que fi l'on excepte les deux premières années des Jour- naux de cet Abbé , on ne peut plus lui faire le même reproche. M. l'Abbé de la Roque quitta le Journal à la fin de 16 86. M. le Pré- fident Coufin qui fut choifi pour ce travail , par M. le Chancelier Boucherat , l'entreprit le 17 Nov. I687. & le continua jufqu'en 1701, inclufivement. Il fut aidé dans cet emploi par quelques amis \ c'cft ce que fait voir l'Avertiflcment qui fe lit à la tête du premier Journal de cette année- là. >» Les Journaliftes, dit-on dans ttcet j4veriijfement , auront plus • d'égard à ce qu'ils doivent faire » pour la fatisfadion folide de » leurs Lcdeurs , qu'à ce que pour- »»roit fouhaiter un Auteur qui ne » fuivroit qu'une vainc ombre de » réputation ", ou à ce que pourroit » fouhaiter un Libraire qui ne rc- » chercheroit quefon intérêt. M. Coufin s'engagea à donner des Extraits fort exafts quand les ^Onft. Livres vaudroient la peine qu'on en fuivît pas à pas lesAutcurs , ôi qu'on marquât en abrégé Ce que ces Auteurs auroient traité plus au long; fans quoi il fe propofa feule- ment d'indiquer d'une façon géné- rale, le plan des Ouvrages , «Je d'en tranfcrire quelques endroits. Peut-être ne fera -t on pas fâché de voir ici quelques traits du tableau que notre Auteur fait de M. Cou- lîn par rapport au Journal. n Quand le choix feul des Ou- » vrages qu'il a fait entrer dans ic% "Journaux, ne fuffiroit pas à fon c- » loge, il ne hudroit que confiderer » attentivement quelques-uns de » fes Extraits, pourfentir bien-tôt " tout le mérite du Journalilte. U » eft aifé d'y reconnoître la main » d'un Maître qui pofledoit toutes » lesdiverfes matières dont il a voit >» à traiter. Cette grande variété de » connoifiance faifoit qu'on ne » pouvoit pas lui en impofer aifé- » ment ; la netteté de fon efprit , » lui prefentoit , a.u premier coup » d'oeil , toutes les vues d'un Au- » tcur. M. Coufin exccUoit princi- » paiement à expofer avec élégan- » ce , & avec précifion , toutes les » idées qu'il avoit à rendre. Il y a » même dans tous fes Extraits une » certaine chaleur répandue qui at- » tache Ôi qui perfuade Ce »Journalifte relcvoit fouvcnt des » fautes échappées aux Ecrivains, » dont il avoit occafion de parler , » mais il les rclevoir avec des «ménagemens capables de taire "goûter fes critiques. Au refte , » s'il s'eft mépris quelquefois , c'é» N n a 4»4 JOURNAL D » toir la faute de riuimanité à h- » quelle on tient toujours par » quelque endroit •, au furplus on » peut lui reprocher d'être lorri » quelquefois de ii douceur ordi- 5J naire , mais lorlqu'il l'a fait sjc'étoit uniquement à la vue de «certains principes qui lui paroif- »foicnt avoir de dangtreuftb con- 3> fequcnces. Il ne lui étoir pas pof- x> fiblc alors de fe raire , & il ramaf- 3> foit toutes fes forces pour com- »battie CCS principes. Il n'y a » point de bon FratUjOis , par c\em- » pie , dit M. Camufat ^ qui ne » vove avec pl.iifir l'apologie que a» cet Auteur a donnée du Chance- •»> lier de l'Hôpital contre les ca- » lomnies d'un Auteur ultramon- » tain. Quelques Cenfturs ont critiqué divers endroits des Journaux de M. Coulîn. M. Camuf.it rjpporte les Critiques qui en ont été laites, & il avertit qu'il ne garantit pas qu'elles foient |uftes. M. Coufin ^vant continué le Journal lufqu'à la fin de lyoï.M.le Chance lier dt Pont-Chartrain vou- lut bien fe de nncr la peine de for- mer unfCompgnie degensdeLet- tres pourtravàller à cet Ouvrage. \1. l'Abbé Bignon , plein d'ar- deur pour ce qui regarde les Let- tres & les Sciences , trouva bon que les afTtmblécs de la Compa- gnie fe tinl'ent chez lui une fois chaqtie Semaine , & que l'Ouvrage fe travailla fous fes yeux i il choi- {ît d'abord M. Dupin pour laThéo- logie , M. Radicod pour la Jurif- j)rudcnce , M. Andry pou? la Me- ES SÇAVANS, decinc &: la Phvfique , M. de Fon- tenelle pour les Mathcmariques, Sc les matières d'érudition , M. l'Ab- bé de Vertot pour l'Hilioi.e, & M. Pouchard pour les Langues & la Litterirurc. M. Dupin avant été exilé en 1703. on lui fubftitua M. l'Abbé Bigies Dodeur de Sorbonne. De- puis ce tcms-là entrèrent dans la Compagnie du Journal, Melfiturs Havard , Fraguier , Burette , Mi- ron , Raguet , Snirin , Terrafion , de Hericourr & P.ftel. Notre Auteur , à cette occafion ^ rapporte ks qualircz de M". Dupin , Rall^cod , Andry , de Fcn- tenelle, de Vertot, Pouchard , Fra- guier , Burette,Tcrra(Ton , de Héri- court, Miron , Pal^d ; mais il gar- de le hlence fur le chapitre de M. Raguet A l'égard de M. Terrafion, qui étoit un des Journaliftes, nous fommes obligés d'avertir que M. Camufat le confo d avec M. l'Ab- bé Tel ralfon , qui n'a jamais été de la Compagnie du Journal \ le pre- mier eft mort depuis peu , c'étoit un Avocat célèbre. Le nouveau Journal parut le Lundi Janvier 1702. avec une Pré- face , où les Auteurs expoferentle plan auquel ils croient refolus de s'attacher, ce qu'ils retrancheroicnt de l'ancienne méthode, iSc ce qu ils y ajoûteroient. Le Journal des Sçavans compofé fur le modèle que les nouveaux Au- teurs fe propoferent, fut univcrfel- Icmcnt bien reçu; ils pojjedent , dit M. Bayle , ( à ce que 1 apporte M. Canmlat ) nn fecret fembUbU ^ e» A O U s ^uelijue façon , à celui de la fameufe Médée ; pHifqutls ont rajeuni , du premier coup ^ ce Journal ^ ^ui lom- hoit dans les langueurs de l'âge caduc ^ & au ils lui ont redonné d'abord tome la force , toute la vivacité ejuil avait tués dans fan état le plus fioriffant ^ qui fut celui de [es deux OH trois pre- mières années. Il ne balance pas , non plus , à attribuer la g'oire de ce chan- gement k Al. l'Abbé Bignon , fous les yeux Û par les avis duquel cet Ouvrage fe forme & fe perfMionne , comme il efl remarqué dans la Préface du nouveau Journal. M. Camufat ajoute dans une note les paroles fuivanres : Les Connoif- fcurs s'apperçttrent aifément de la différence qu'il y avait entre le Jour, nal des Sfavans de i-joï.& celui de 1702. Ad. Bdjle difoit à un defes amis : J'ai lu le Journal de l'année courante , lyoz. qui me parait bien meilleur que ceux des années derniè- res , Tom.II. Let. i<)^.pag.-jj^i. M. Camufat donne enfuice fes propres reflejcions touchant les Journaux compofésfous les yeux de M. l'Abbé Bignon. » Lorfque » les Journaliftes , dit-il , trouvent » des Livres lufceptibles d'extraits "détaillés, ils les donnent d'une » manière à lailTer une idée nette » du fujet que l'Auteur a entrepris, M & de la méthode qu'il a fuivie. « Lorfqu'au contraire ils rendent » compte de ces Livres brochés à I» la hâte , & fans aucun goût , où »> l'on a voulu feulement amafler «beaucoup de chofes indigeftes , » fans exaditude& fans ordre , ils » rappoitent en peu de mots , ce » qu'ils trouvent de plus interef- » fant & de moins connu ; 5c ils » épargnent ainfi aux Sçavans , li »> peine de le démêler parmi une » foule de chofes inutiles , où cela » eft mifcrablcmcnt confondu. » C'efl: encore la méthode qu'ils » obfervent quand ils ont à faire " mention de Pièces de Poëfics , &c «d'éloquence. On voit alors pat » les morceaux qu'ils préfentent » au Ledeur , ce qu'ils penfent » de l'Ouvrage entier. A ces éloges de la manière dont notre Auteur prétend que les Jout- naliftcs fe conduifcnt à l'égard des Livres dont ils rendent compte, en fuccedent de plus grands encore , mais il ne nous convient pas de les rapporter. M. Camufat , après quelques ar- ticles peu confidcrables que nous palTons, fait mention drs difputes que les Journalises ont eues à cf- fuyer de la part de certains Auteurs peu contcns de ce qu'on avoit dit de leurs Ouvrages au Journal des Sçavans. Les difputes que M. Pou- chard a eues à foûtenir de la part de M. Simon , celles que M. Andry a elTuyées de la part de M. Lémeri 5c de M. Hecquet , ne font pas ou- bliées : nous remarquerons à cette occafion, que notre Auteur en rap- portant les querelles élevées entre M. Andry & M. Hecquet, attribue mal à propos à M. Hecquet , le Traité des Alimens de Carême , ce Traité étant de M. Andry & non de M. Hecquet. La méprife efl: confidcr.ible. On n'ell pas plus exad lorfqu'ca N n n ij 4i5 JOURNAL D donnant h Lifte de ceux qui de- puis que M. l'Abbé Bigrcs fut fub- hitué à M. l'Abbé Dupin , com- pofercnt la Compagnie du Journal, on omet M. Andry. Depuis ce tems^ dit-on , Meneurs HiiVard j Era- gmer j Burette , Ailron , Ragiiet , Sciurin , Terrajfon , de Hèncoun & ^a^lel , font ceux j'clTayoïs d'arrêter les pleurs d'un » vieux cep de viL;ne , que l'on 3» avoir taillé trop tard , & que je a» craignois de voir périr. « Apres plufieurs eflais infruâfueux il s'avi- ia ( continue-t il ) de mettre fur la coupe tranfvcrfale du cep un morceau de veille qu'il lia exade- menr tout autour -, Si peu après il s'appcrçut que la force de la fève avoit beaucoup dilaté la vedie ; ce qui lui fit naître la pcnfée d'atta- cher au cep , comme il avoit fait aux artères de plufieurs animaux vivans , un long tuyau de verre : & par ce moyen il eft venu h bout de découvrir la force réelle de cet- te fève ainfi que les divers phéno- mènes qui en font des fuites , & qu'il expofe dans les cinq premiers Chapitres de ce Livre. Comme les découvertes faites pendant le der- nier fiécle dansTèconomie anima- le ont rendu la Médecine (dit il ) un peu moins imparfaite ; des obfer- Vations plus approfondit s fur la na- ture des Végétaux perfeétionne- ront infailliblement l'agriculture & le Jardinage , en faifant fentir aux Amateurs de ces arts également utiles & amufans , que pour y taire des progrès , il faut neccffairement fuivre la route des expériences tel- les qu'elles font déduites dans ce iVolume. Lorfque M. Haies fe fur une bonne fois convaincu par quantité .17? 5' 419 d épreuves rapportées dans le Cha- pitre cinquième, que les Végétaux tirent beaucoup d'air, non ilule- ment par la racine , mais auflî par le tronc & les branches : il forma le dcifein d'approfondir par des re- cherches fuivies la nature de l'air , & de découvrir en quoi conliile cette qualité qui le rend d'une ne- celfité fi indifpenfable pour la vie & raccrollfement des Plantes. Le réfulrat de toutes ces expériences remplit le fixiéme Chapitre. On y verra confirmé ce que l'on fçavoit dé)a, que tous ks corps renferment beaucoup d'air. Mais de plus , on y apprendra ( cequiétoit plus igno- ré j que cet air exifte fouvcnt dans ces corps fous une forme différente de celle que nous lui connoiffons ; c'cft à-dire , dans un état de fixité, qui le rend capable d'attirer alors aufll puifTamment , qu'il rcpouffe dans l'on état ordinaire d'élafticité. On y verra encore, que ( fuivant la découverte qu'en a faite le Cheva- hcvNe'Wton) ces particules d'air fixe qui s'attirent mutuellement , font louvent expulfées hors des corps denfes , & métamorphofées en d'autres particules d'air éiaftique, en vertu de la chaleur ou de la fer- mentation , par l'adlion de laquel- le, ( & quelquefois fans ce fecours) ces particules aériennes reprennent leur première denflté. C'efl par cette propriété qualifiée à'amphi- bie par notre Auteur , que l'air opère fes plus grands effets dans la nature; où il deviendroit abfolu- ment fans adion , s'il n'étoit qu'un aflcmblage de molécules puremens 420 JOURNAL D attradives. Auffieft-ce par cette double propriété des particules de la matière que leChcvalierA^^o^fO» & le Doifleur Freind font parvenus à expliquer, l'un les principaux phénomènes de la nature , l'autre les ooerations de Chymie. On ne peut donc mettre dans une trop pleine évidence ces pro- prietez adtvesde la matière , que des expériences nouvelles & réité- rées font retrouver par tout , & quecelles qui compolentceRecueil prouveront manifeftement , en bi- fant voir toute la force avec laquel- le les parties acides & fulphureufes deviennent attradlives près de leur point de contad. Elles y agirent avec alTez d'efficace , pour fixer les particules claftiques de l'air , dont îerelTort eft néanmoins afTez puif- fant, comme l'on fçait , pour relî- fler aux fardeaux énormes dont el- les font quelquefois chargées. Ce- la montre que ces particules peu- vent palTer de l'état d'une forte éla- fticité à celui d'une grande attrac- tion -, d'où il fuit que-cette élafticité n'eft pas une propriété immuable de l'air. Autrement , par la grande quantité où il fe trouve dans la fub- ftance des Végétaux & des Ani- maux , il feroit capable d'en défu- nir 5c d'en brifer la tilTure en un inftant parla plus forte explofion. L'Auteur s'eftimeroit heureux s'il avoit fçu tirer les confequences de fes obfcrvations avec autant de jullelTe , qu'il a eu d'attention à les faire S< de fidélité à en donner les jréfultats. Mais quelque peu de che- min qu'il ait encore parcouru ( dit- ES SÇAVANS; il ) dans un Pavs qui offre une fi abondante moilTon de découvertesj il fe flatte qu'à l'aide de fa métho- de on pourra pénétrer beaucoup plus intimement dans la nature des Vé:^étaux & en développer plus partaitemcnt toute l'écono- mie. Du moins ( ajoute t-il ) cet Elfai pourra • t il inviter les Ama- teurs de la Botanique à la cultiver conformément aux mêmes vues» •» Le champ efl vafte ( continue t- D il ) : il faut pour le défricher plu-, D fleurs têtes ic plufieuis mains. » Le nombre des objets eft même » inlmenfc-, & lesopeiationsmer- » veilleufes delà nature font fi ca- » chées &: (\ éloignées de la portée n de nos fens dans l'état où elles pa- «jroilTent d'abord , & où elles fc » préfentent naturellement , qu'il » cft impollîble au génie le plus » perçant de s'y faire jour , à moins » qu'il n'ait pris la peine d'analyfer » la nature par une fuite nombreu- » fe & régulière d'expériences & » d'obfervations i feul tondemenc » fur lequel nous devons nous ap- » puycr , fi nous voulons taire des » progrès dans la connoilTance de «laPhvfiquc. Après ces Préliminaires, paroit fent les expériences de M. Haies , raffemblées ici au nombre de 144 , Si diftribuées en fept Chapitres , & une j4pj;endice -, fuivant les divers fujets fur lefquels elles roulent. Le premier Chapitre contient les ex- périences fur la quantité de liqueur que les Végétaux tirent & tranfpi- rent : le fécond rend compte de celles qui font voir la force avec laquelle A O U s laquelle les arbres tirent l'humidi- ■té : dans le troificme Chapitre le trouvent les expériences fur la for- ce de 1.1 févc dans le farmenr , pen- ,dant la failon des pleurs : dans le quatrième lonr compriles toutes celles qui nous tont connoîne le mouvement latéral & li commu- nication latérale des vailTcaux de la févc , la liberté avec laquelle elle palTe des petites branches au tronc, aullî bien que du tronc aux petites branches ■■, HC parmi ces expérien- ces , il y en a quelques - unes qui ont rapport à la circulation ou à la non circulation de la fève : vien- nent enfuite ( Chapitre 5 ) celles •qui prouvent que les Plantes tirent par infpirarion une grande quanti- té d'air : Chapitre 6 , celles qui re- gardent l'analvfe de l'air : Chapi- tre 7 , celles qui concernent la vé- gétation. L'appendice comprend treize obfervations & fept expé- riences fur différentes matières que nous indiquerons plus bas. Comme il feroit très-fatiguant pour le Journaiifte & très-peu in- terelTant pour la pliàpartdes Lec- teurs , d'entrer dans un détail cir- conftantié de toutes ces expérien- ces ; on fe bornera feulement à en (déduire ici quelques unes des plus importantes & des plus lîngulie- resi &c l'on aura fom fur-rout d'ex- pofer fidèlement les confequences que le curieux Obfervateur en pré- tend tirer. Nous commencerons par l'ex- périence qui fe prefente la premiè- re , & qui a pour but de découvrir \i quantité de liqueur tirée & tranf- Aouji. T , r 7 j ;•. 421 pirée par un grand Soleîi , de trois pieds & d. mi de hauteur , plante exprès dans un pot , & lorl'qu'il étoic encore jeune. M. Haies , après avoir bien bouché tous les trous du pot , le couvrit avec une pl.itinc de plomb laminé bien cimentée dans toutes fes jointures & qui ne don- noi: entrée à l'air extérieur que pat un tuyau de verre fort étroit, lonf» de neuf pouces, & fixé près de la tige de la Plante , communiquant librement de dehors en dedans fous la platine de plomb. Il cimen- ta aulfi fur cette platine un fécond tuyau de verre large d'un pouce &C long de deux , par où il arrofoit la plante, & dont il fermoit enfuite l'ouverture avec un bouchon de liège. Il pcfa régulièrement le pot ivec la plante matin S< foir pen- dant 15 jours pris entre le troifiémc Juillet & le huitième Août ; après quoi ayant coupé latigc de la Plan- te au niveau de la platine, il cou- vrit la coupe du chicot avec de bon ciment ; puis pelant le pot qui étoit poreux 6c non vernilTé , il trouva que la tranfpiration faite à travers ks pores ètoit de deux on- ces en l'cfpace de 12 heures de pun ce qui étant joint aux poids jour- naliers de la Plante & du pot , il parut que la plus grande tranfpira- tion faite en douze heures d'un jour fort fec &c fort chaud étoit d'une livre 14 onces, 6c que la tranfpiration prife fur un pied moyen étoit d'une livre 4 onces pendant un pareil efpace de tems. La tranfpiration pendant une nuit chaude j feche &: fans aucune ro- O ,00 422 JOURNAL D fée fenfible , étoit d'environ trois onces , mais pour peu qu'il y eût de roiée , il n'y avoir plus de tranf- piration \ &: lorfque la roféc ctoit abondante , ou que pend.'nt la nuit il tomboit un peu de pluye , le poids du pot & de la plante aug- mentoit de deux ou trois onces. ( Nota j ^ue les poids employés p-ir l'Ob/ervateur ctoient defetz.e onces à la livre. ) L'Auteur après cela vint à bout de mefurcr exadement la furfnce des feuilles 6c de la tige de la plan- te par l'application d'un rèfeaude fils qui fe croifoient à angles droits formant de petits quarrcz d'un quart de pouce chacun : & il trou- va que toute la furface de la plante hors de terre étoit égale à 55 pieds quarrés. Melurant cniuite & pcfant les racines d'un autre Soleil à peu- près de même taille &: arraché de terre-, leur furface fc trouva égaleà y de la furface de toute la plante hors de terre. Les 10 onces d'eau tranfpirées ( comme on vient de le dire) parla plante pendant douze heures , étant égales à 34 pouces cubiques ; l'Auteur a par le calcul ^ pour h hauteur du folidc d'eau tirée par toute la furface des raci- nes ; & ~ pour la hauteur du foli- dc d'eau tranfpirée par toute la fur- face de la plante hors de terre. D'où il fuit , que la vitclTe avec laquelle l'eau entre par la furf.icc des racines pour fournir à la tranfpiration , eft àlavîtclleavcc laquelle fc tait cette tranfpiration à peu- près comme 5 foiit.à 2 ; & i'airc de la coupe ho- ES SÇAVANS, rizontaJe de la tige étant d'un pon- ce quarré ; celle de la furface des feuilles , celle de la furface des ra- cines & celle de la coupe de la ti- ge font comme les nombres 56 kt , i2.i6 , i : &: les vitcffes à la luvfacc des feuilles, à celle des racines & dans la tige font données par une proportion réciproque des iurfaces. Mais leur tranfpiration étant de 34 pouces cubiques en douze heures de jour; il faut que ces 34 pou- ces cubiques pallent tous par la tige en ii heures ; Se par confe- quentla vitcfle de la fève dans la tige fcroit proportionnelle à ces 34 pouces en 11 heures, fi la tige étoit comme un tuyau tout-à-fait vuidc, L'Auteur en détermine la folidité, d'où il paroît que la vitelTe de la fève dans la tige fera de 45 p°— en 12 heures ( fuppofé qu'il n'y ait ici ni circulation ni retour de fève), c'cft-à-dire , d'un tiers plus gran- de que de 34 pouces cubiques qui' paffoient parla tige en 12 heures. Cela conduit M. Haies à com- parer les quantitez de nourriture , & de. tranfpiration de cette plante avec celles de la nourriture du corps humain •> & il découvre par le calcul ( que nous fupprimons pour abréger ) qu'à furfaces égales & en tems égaux la tranfpiration de l'homme eft à celle de ia plante comme 50 font à 15, dont la rai- fon eft qu'il y a toujours plus de chaleur dans l'homme que dans h plante, & que les degrez de cha- leur font comme là. i.Maispuif- que malTc pour malTc ( continue» A O U s r Auteur toujours guidé parle cal- cul j le Soleil tranfpire 17 lois plus que l'homme ; il entre donc en 14 heures dans les vaifleaux féveux d'un Soleil, 17 fois plus de nour- riture à proportion des malTes , que dans les veines d'un homme , éc ce fuc nourricier en tranfpite dans la même proportion. Puifquc les plantes , pour fe bien porter j ont befoin d'une tranfpiration fi abondante , il eft vraifemblable { dit l'Auteur) que cette tranfpiration interrompue par l'intempérie de l'air peut eau- fer plufieurs de leurs maladies. Au(lî a-t-il oblervé que fon Soleil ne le portoit jamais mieux que lorfque la tranfpiration de cette plante alloit de 1 6 onces à 28 en 1 2 heures de jour : de même que fui- vant l'obfervation du Dodcur lOd la tranfpiracion d'un homme en bonne fanté peut aller depuis une livre & demie jufqu'à trois. A cette première obfervation en fuccedcnt plufieurs autres , 2.°. fur la nourriture & la tranfpiration d'un chou \ 3 °. fur la tranfpiration d'un cep de vigne ; 4". fur celle d'un pommier ; 5°. fur celle d'un citronnier , de l'arbre nommé Âiu- fa , qui eft une forte de palmier, & d'un Aloës -, 6". fur celle d'une Menthe-, 7°. fur celle de divers ar- bres ; 8*^. fur celle d'une pomme & de fes feuilles -, 9°. fur celle des Houblons , 6i par occafion fur leur moilillure , fur la nielle , fur le mouvement des tiges de Soleil, CTf. ïO°. fur la tranlpirition des bran- ches, 6c 1 1°. fui fi force ; 11°. fur T , I 7 î r- 425 l'odeur qu'on peut communiquer aux arbres & à leurs feuilles ; d'où il paroît qu'elle ne fc communique point aux fruits ; 13°. 14°. ij". pour fçavoir fi les vaiHeaux qui portent la fève ont la force de la taire fortir au dehors ou de la faire tranfpirer-, & il trouve que cette force eft très foible & n'agit qu'à l'aide des feuilles tranfpirantes > 16°. pour fçavoir fi la fève monte en hy ver; &C il conclud pour l'affir- mative j 17°. pour recueillir la ma-. tiere que les végétaux laiftent tranf- pirer -, 1 8". fur la quantité de l'hu- midité de la terre; 19°. fur celle qui tombe tant fur la terre que fut l'eau i 20°. fur la chaleur de la ter- re à différentes profondeurs , avec plufieurs remarques trcs-curieufes. Dans le fécond Chapitre de ce Volume, il eft queftion des expé- riences dcftinécs à découvrir la for- ce des racines & des branches pour tirer l'humidité ; la force de la fuc- tion de la vigne & de celle des branches &: des fruits : à montrer que les branches fucent également des deux bouts ; à déterminer li force de fuction dans les branches ccorcées, dans les branches fans feuilles ; dans les branches par les feuilles , lorfqu'elles font fur l'ar- bre; dans les pois 5 à éprouver U force des feuilles & celle de diffe- rens arbres pour élever la fève , Se chemin faifint la force de l'attrac- tion dans les cendres &C dans le Aiinium. Les expériences du troifiémc Chapitre roulent , 1°. fur la force avec Lquelle la racine de la vigne , Oo o i; 424- JOURNAL DE dnnsic rcnis qu'elle pkurc,cha(Tcla lève au dehors; i°. lur cette nume forcCjdans les autres Saifons; 3''.fur 1.1 torce étonnante de la vigne com- parée avec celle de plufieurs ani- maux , d'où ilrefulte que cette for- ce eft environ cinq tois plus grande que la force du fangd.insla grande artère crurale d'un cheval , fept fois plus grande que la force du fang dans la même arrere d'un chien ^ & huit fois plus gvande que la force du faniT dans la nîême artère d'un Daim-, 4°. fur la force avec laquelle la fève eft pompée dans la vigne , force, qui à 44 pieds 3 pouces de la racine , eft égale à la force de la preftîon d'une colonne d'eau de 30 pieds II pouces Y de hauteur; & qui vient non feulement de la raci-' ne, mais de quelque puiflance in- hérente dans la tige &: les branches; 5°. fur le mouvement de la {évc dans là vigne. L'Auteur a voulu fçavoirfi fa ti- ge de la vigne fccontractoit &: fc dilatoit par la chaleur , le froid , l'humidité, la fecherefte , dans la Saifon des pleurs ou dans une autre- Saifon ; & il a trouvé par fes expé- riences , que la fève , même pen- dant la Saifon des pleurs , eft rete- nue dans les propres vailTeaux , 6t qu'elle ne traverfe pas en tout fens les interftices de la tige , comme il eft probable que le fait la pluye , qui en pénétrant par les pores de la rranfpiration dans tous les interfti- ecs de la tige, en caufe la dilatation. L'Auteur , dans fon quatrième Chapitre , qui renferme fept expe- fieiîecs j,, examine ce que l'on doit S SÇAVANS. penferfur le mouvement latéral dé la lève , fur la communication la- térale de fes vailfeaux , fur le libre palTage de cette liqueur des petites branches à la tige , &: de celle-ci à celles-là, & fur la circulation de ce fuc nourricier. Par la grande quan- tité de la fève fortie des entailles, tranfverfales faites aux branches de- difiierens aibres , M. Haies a recon- nu que la lève le communique la-- teralemcnt avec une très- grande facilité , de que par confeqcent , il- y a dans les plantes des vaifteaux. fèvcHX analogues aux ramifications' latérales des vailfeaux fanguins^ d'ans les animaux ; puifque ces- grandes quantitcz de liqueurs onC' neccflairement pafTé latéralement par les entailles tranfverfales des- branches qui interrompoicnt le cours direft de ces liqueurs. Une- autre expérience lui a tait voir que ks branches des arbres lefquelles trempent dans l'eau le haut en bas. tirent & tranfpircnt la liqueur auilî librement que dans leur lîtuation naturelle. Les quatre expériences fuivan- tes tendent à rendre fort douteufo la circulation de la lève dans les. plantes, & à faire voir qu'il elt très probable qu'elle n'y a d'autre mouvement que le progrellif de bas en haut , le rétrograde dans les mêmes vaifîeaux & le latéral. Il y a (fclonlui) grande apparence que la lève monte entre l'ècorcc & le bois de même que dans les au- tres parties , & qu'elle monte aufl'i . par les parties les plus expofèesau- Soleil j telle qu'eft J'ècoice ^où ra-» À o u s ircfiée comme elle l'cft par la cha- leur de cet Altre , elle doit être beaucoup plus dilpofée à monter t)ii*a deiccndre. L'ccorce du pied des arbres , nommcmcnt de la vi- gne ( remarque l'Auteur ) eft hu- lîieiflée avant celle des branches fii- petieures ; au lieu que ce devroit être celle-ci , fuppolé que la levé delcendîr par l'ccorce. Outre cela , vu la [grande quantité d'humidité ( continue-t - il ) que Icsarbres ti- rent & tranfpitent , quelle prodi- {^icufe vitefTe devroit avoir la fève , fi cette humidité , ou du moins fa plus !^rande_ partie devoir nccelTai- TCment monter au fommet de l'ar- bre, dcfcendie enfuitc , & enfin monter encore avant que de s'ex- haler par la tranfpiration ? Il prétend , de plus , que le dé- faut de circulation dans les plantes cft en qvielque façon compenfé par la quantité de liqueur qu'elles ti- rent beaucoup plus grande , que celle qui entre dans les veines de J?animal , & par-là capable d'acce- Icrcr le mouvement de la févc j outre que la vie purement vé- gétale des plantes n'exige point dans cette fcve le mouvement ra- pide elTentiel au fangdes animaux. D'ailleurs la puilTancc attraiîlive des tuyaux dans les plantes , & les vives ondulations produites dans la fève par la chaleur du Soleil, étant les principales caufcs du jnouvemenr &c de la raréfad;ion de cette liqueur tk de fa tranfpiration; elles paroillent très - peu propres { dit l'Auteur ) à faire defcendre la lève de la cime des végétaux juf- qu'à leurs racines. Ajoutez que fi elle circuloit , on l'auroic vu def- cendre & humcèlcr les parties fu- pcrieuresde ces larges entailles fai- tes dans ces branches qui trem- poientdans l'eau, & dont l'extré- mité des tiges fixées dans de longs tuhâs de verre étoient prelTècs par de grandes colonnes d'eau ( fur quoi on renvoyé aux Expériences 43 '^' 44 )• Quant aux preuves en faveur de la circulation de la fève tirées de ce que dans le Jafmin & la fleur de la piffion j les branches , quoique beaucoup au delfous de celles qui portent le bouton inoculé , pren- nent la même couleur que celles qui font au- delTus ; l'Auteur y a d'autant moins d'égard qu'il pré- tend que cet effet s'explique fore clairement par l'alternative des mouvemens tantôt progreflifs &: tantôt rétrogrades de la fève , donc les caufes font fuffifammcnt con- nues. La preuve empruntée de ce qu'il y a des efpeces de greffes qui intedent les fujets , & leur caulcnt des chancres,ne lui femble pas plus folide -, & il en allègue \z raifon. L'exemple du Chêne - vert greffe fur leChêneAnglois lui paroît four- nir un très - fort argument contre cette circulation ; car s'il y en avoic une bien libre à travers ces deux plantes , pourquoi les feuilles du Chêne tomberoient-clles en hiver i & non pas celles du Chêne- vert? Nous palTons pluficurs autres preuves qu'il faut voir dans le Li- vre-même : & nous venons à la plus forte objçdion que l'on puif- ^^^G JOURNAL DE i"c faire contre ce mouvement pro- nreffif de la fève que l'Auteur fub- llitue à la circulation : & cette ob- jection confifte à dire que s'il n'y a point de circulation , le cours de la levé fera trop précipité pour lui permettre d'acquérir le degré de di- geftion &: de confiftance propre à la nutrition de la plante. Niais ( ré- pond l'Auteur ) ce grand Ouvrage s'accomplilfant principalement foie pour les végétaux foit pour les ani- maux dans les petits tuyaux capil- laires , où la nature combine &: choifit les particules nutiitives bc adives les plus propres à fes dife- rcntes intentions , & que le mou- vement du liquide avoir tenues fc- parées jufqu'alors : on peut affurer que la nature a formé & placé dans la ftrudure des plantes tous les principes nccelfaires à la perfedion de cet Ouvrage , f uifqu'eiles ne font compofécs que d'un nombre infini de petits vailTeaux capillai- S SÇAVANS, res , de véficules ôc de parties glaa- duleufcs. De toutes ces Expériences l'Au- teur conclud qu'il n'y a point de circulation de fève dans les végé- taux , malgré les Expériences & les obfervations qui ont engagé beaucoup de fçavans Naturaliftes à fc perfuaderle contraire ; Expé- riences qui prouvent feulement le mouvement rétrograde d'une par- tie de la fève du fommet des plan-, tes vers leurs partiesinférieures. Du refte , quoique nous n'ayons fait qu'indiquer en général la plu- part des Expériences de ce Volu- me, relatives aux végétaux ; elles n'ont pas lailTé de nous mener plus loin que nous ne l'aurions penfé : ce qui nous oblige à renvoyer au Journal prochain les autres Expé- riences non moins curicufes con- cernant l'analyfe de l'air & quel- ques autres fujets. FIE DE VEMTEREVR JVLIEN. A Paris , chez PrW* père , Quai de Gêvres , au Paradis. 1735. vol. /«ii. pag. 523. NOUS avons parle , le Mois de Juillet dernier , de ce qui concerne la Vie de Julien , jufqu'au tems qu'il fut élevé à l'Empire ; nous avons rapporté les principales circonftanccs de fon éledion & de fon couronnement. Il nous refte à expofer ce qui fe palTa depuis qu'il fut monté fur le Trône. Le nouvel Empereur fe retira d'abord au fond de fon Palais , & prut accablé de chagrin. Il ne voulut point porter de Diadème ni donner ordre à aucune affaire. Il perfevera quelques jours dans cette inadion , ce qui enhardit les Créa- tures de Confiance à répandre de l'argent pour corrompre lesSoldats de Julien , ils fubornerent même un Eunuque pour attenter à la vie du Prince, ^l'Eunuquepromiide l'afraflincr. Julien fut averti de l'in- trigue ^ar un Officier de l'Impera-" trice , lequel n'étant pas autrcmcnc écouté , courut à la Place publi» A o u s qilé, en criant de toutes fes forces: Soldats , Etrangers. , Citoyens , m trahtjfez fas votre Ewpcrcur. A ces paroles les Soldats de Julien ac- courent en armes au Palais , & y tiouvant leur Prince en vie , ils pouflTcnt des cris de joye , l'cni- bralTent , le ferrent , & le portent fUr leurs épaules avec une cfpece d'enthoullafnic. ils l'environnent de toutes paits , demandant qu'on leur livre les Partifans de ConlUn- ce. Julien n'oublia rien pourfau- ver la vie à fes ennemis. Mais^com- itie il le raconte lui-même dans un Manifefte , il eut pour cela de grands adaurs à foûtenir -, fa clé- mence alla jufqu'à pardonner à TEu nuque qui avoit promis de ralTafllner. La première fois qu'il parut fur fon Tribunal avec l'appareil de la Majcfté Impériale , il déclara que fans égard aux recommandations il donneroit au feul mérite les em- plois civils tk les emplois militai- res. Dans le moment même les pé- tuhns & les Celtes croyant qu'a- près de telles paroles du Prince ils pouvoient tout cfperer de lui , parce qu'ils n'auroient plus à crain- dre d'être travcrfcs par des recom- mandations contraires , demandè- rent à Julien, des Gouvernemens pour les Intendans des vivres , demande audi hardie que fingulie- rc , mais qui n'cbranlapoint Ju- lien. Il ofi les refufer , & ce qui n'eft pas moins extraordinaire , c'eft qu'ils ne trouvèrent point piauvais le refus. Sur CCS entrefaites , le nouvel T . I 7 3 j*. ^27 Empereur , fans prendre d'autre qualité que celle de Céfar , écrivit à Confiance avec toute la modcflie &: en même rems toute la fermeté imaginable. Notre Auteur rappor- te les termes de la Lettie , nous les lupprimons en faveur de la briève- té ; mais lî l'on en veut croire Am- micn-Marcllin ; cette Lettre n'é- toit qu'odenfible , & le Prince y en joignit Une autre pour être rendue fccrettement , dans iaqucl. le il fc répandoit en injures con- ti:e Conrtance de qui il avoit en ef- fet reçu les plus trilles fujets de plainte , puifque Confiance avoir fait mourir le père de Julien. Confiance écrivit à Julien une Lettre pleine de reproches , lui di- fant qu'étant orphelin , il avoit trouvé en fa perfonnc (de lui Con- fiance ) un père tendre qui avoit pris foin de fon éducation. A ces mots de la Lettre qui fut lue à haute voix par un Qucfleur que Confiance avoit envoyé à Ju- lien , Julien s'écria : Si j'étais Or- fhelin , comment l'étois-je devenu ? efl-ce au bourreau de mon père & de toute ma Aîaifon à m'en faire le re- proche ? la playe efl toute fanglante. C'eft lui c]ui l'a faite ^ veut- il encore l'aigrir ? Confiance , dans la Lettre dont nous parlons , déclaioit qu'il ne refloir d'autre reffourcc à Julien pour mettre fa vie en fureté , que de quitter le Diadème. Je le quitte- rai ^ dit alors Julien au Quefleur (juand ceux de tjui je le tiens y confcn- tiront. A ces mots qui furent pro- nonces publiquement, les Soldats' ^28 JOURNAL D 6c le Peuple qui environnoicnt Ju- lieUjlui confirmèrent à grands ciis, le titre d'Augulle , c'cft-a-due ^ d'Empereur. Nous fupprimons ici plufieurs articles qui demanderoicnt d'être copiés en entier , ce que la brièveté d'un Extrait ne nous permet pas. Ces articles concernent la dé- fiance réciproque .où Confiance & Julien étoient à l'égard l'un de l'autre; car ils faifoient tout leur pollîble pourfe tromper mutuelle- ment, & ils n'y pou voient parve- nir-, mais il fe prefcntauneocca- fion où Julien ne put fc contrehire davantage. Confiance qui étoit en Orient , fongcoit <à venir en Occi- dent pour furprendre Julien ; & afin d'empêcher ce Prince de s'en défier il lui envoya un Evêque des Gaules lui promettre la vie ; la pa- tience échappa alors à Julien , il le- va tout à - tait le mafque , & dit publiquement qu'il remettoit le foin de fa vie , non à Confiance , mais aux Dieux. Enfuite il offrit à la Déeffe de la Guerre , un Sacrifice où il crut appercevoir des préfagcs favorables, il alîembla fes Soldats , leur expofa le deffcin qu'il avoit de ne plus ménager Confiance , &c ce qui ell bien à remarquer , il les conjura fur toutes chofcs , de n'ou- blier jamais que leur attention à ne point fouler les Peuples , leur avoit procuré plus de gloire que la défai- te de tant d'ennemis dont ils avoicnt triomphé. Notre Auteur rapporte ici un fait qui ne tourne pas moins à l'honneur de Julien par jtapport à la clémence finguliere de ES SÇA VANS, ce Prince , c'cll que les Soldats ayant voulu mettre en pièces un Prciet du Prétoire, nommé Nébri- dius , qui étoit créature de Con- fiance , & qui , tandis que toute l'armée s'engagea par ferment à verfer jufqu'à la dernière goûte de fon fangpourladcfenfe de Julien ,' refufa de faire la même protefta- tion , ce Prince courut à lui , 8c le déroba à la fureur des Soldats. Ju- lien , comme on voir , & qu'on l'a déjà vu par plufieurs exemples, étoit généreux. Mais fa générofité ne le portoit jamais à rien outrer,' &: ce qu'il fit à l'égard du même Nebridius après lui avoir fauve la vie , eft un trait véritablement di-. gne d un fi fage Prince. Lorfquc Julien revint au Palais,' il trouva Nébiidius qui avoit pris les devans, & le lupplioit à genoux, dî vouloir lui donner fa main à baifer , afin de le mettre par là en fureté ; mais Julien , remarque notre Auteur répondit fur le champ ,1 Nebridius : Si je vous don- ne ma main , c^ite gurderai - je four ceux e]ut m'ont é:é aitacbii ; 'î'/f? ' vous navel^ rien à craindre : retirez.- vaiis cjs il vous fLiira, Nous ne fçaurions nous empê- cher de rapporter ici un autre trait à peu- près fcmblable , mais dont le récit ne fait pas moins d'honneur à l'Hillorien qu'au Prince-même. C'eft pourquoi nous citerons l'en- droit fans y changer aucun terme: nous avertirons feulement qu'il s'j agit d'une marche de Julien pouc s'emparer de l'IUirie afin de faire la guerre contre Confiance avec des A O U s T êei forces plus égales , eu la paix à des conditions plus avanta- gcufcs qu'elle n'auroic pu fe faire fans cela. Voici donc comme s'ex- plique notre Auteur : on verra qu'il n'ell pas autant Orateur qu'Hifto- rien. » L'Armée de Julien n'étoit » compofée que de vingt mille » hommes , mais une entreprifc » comme la fienne dépend moins s» du nombre que de la célérité. Il » partage fon Armée en trois «corps, pour couvrir fa foibleire, n & répandre la terreur en plus »> d'endroits. Il leur marque diffe- » rentes routes , &c donne le ren- n dez-vous général à Sirmium, Ca- n pitale de riUirie. Lui-même à la «tête du corps le moins nom- » brcux , part du Pays des Raura- » ques , prend le chemin du Da- » nube , s'avance à grandes jour- w nées , par eau , par terre , tantôt » fur les bords du fleuve qui appar- » tiennent aux Barbares, tantôt a» fur ceux qui font foûmis aux Ro- » mains. Plus prompt que la Ré- » nommée , il s'ouvre par tout, un »>pa(rage ; moins par la force que n par le fecret de fa marche ; en V forte que dans Sirmium , au bruit »qui fe répand de l'arrivée de y> l'Empereur , on eft prefque tenté » de croire que c'cft Confiance lui- » même : avant que d'y arriver il » furprend dans fon lit , à la faveur » d'une nuit obfcure , le Comte »Lucilien , Commandant des «Troupes de la Province , lequel 3? fur quelque bruit confus , fon- » geoit à alTemblei des Soldats. U > 173 y- ^'^'J » fut amené à Julien , la peur de la »mort peinte fur le vifage : alors «l'Empereur, pour le raffurcr , » lui permit de baifcr fa pourpre. »> Le Comte aflez remis de fi » frayeur pour pouvoir parler, mais » non pour mefurer fes termes , fe «» bazarda de lui dire : Seigneur , il » y a de l'mdifcretion & de la teJ » mérité de vous JHter avec Jt peu de n monde , an milieu de vos ennemis. >» Julien lui repartit avec un fouris » amer : Gardez. , pour Confiance , » vos confeils -prudens & difcrets. ^s » «tf vous ai pas donné ma pourpre k » baifer pour recevoir vos avis , mais ^ pour vous guérir de la peur. »ll fut reçu le lendemain ca » triomphe dans Sirmium. Notre Auteur , après le récit dé- taillé qu'il fait de cette réception , dit que Julien s'étant rendu maître du Pas de Lucqucs , défilé très- étroit & très - efcarpé entre deux chaînes de montagnes qui féparent la Thrace d'avec l'IUirie , écrivit à plufieurs Villes de Grèce , entre autres à Athènes , à Lacédémonc, & à Corinthe pour juftifier fes dé- marches, parce qu'il tcnoic pour maxime : Qn il n'appartient cju'aux Tyrans de donner leur caprice pour règle , leur puiJfAnce pour preuves O' leurs fucch pour r'aifons. De tous les minifeftes de ce Prince , il ne reftc que celui qui eft adreffé aux Athéniens , Pièce élo- quente & parfaitement bien écrite, d'où notre Hiftorien a tiré , com- me il le déclare , bien des particu- laritez. Nous palTons plufieurs circoa- PPP 4Î0 JOURNAL D Itances , pour réunir des bits qui dans le Livre de notre Auteur font éloignés les uns des autres , & qui dans cet Extrait nous pàroiflent devoir être rafleniblés fous un mê- Bie point de vîië. Il s'agit de divers préfagcs tou- cliant la mort de Confiance, &la ruine du Chriftianifme. Des opérations Théurgiqucs quejulien avoit faites fécrettement avec Bribafe &: Evémcre , fous Ja direction d'un Pontife qu'il avoit mandé de Grèce , lui promet- toient les fuccès les plus heureux , & entre autres chofes , la mort de Confiance. Une nuit , étant à demi éveille , il lui fcmbla voir un fantôme brillant de lumiè- re, qui répéta plufiturs fois quatre vers, grecs dont voici Icfcns : Lorf- eue Jupiter fera a l'extrémité du ver'* Jfeaii , C (jue Saturne entrera dans le vingi-citicjuiénie degré de la Vierge , Confiance Empereur d'^Jîe , finirii triflemefit [es jours. Comme Julien , à ce que difent S. Grégoire de Nazianze & Sozo- méne , alîîftoit à un Sacrifice , on trouva empreinte dans les entrailles de la vuftime ^ une croix environnée d'une cfpece de cer- sle ou de couronne. Ce prodige déconcerta les Paveiis , qui regar- dèrent la chofe comme un prélagc du triomphe &: de la perpétuelle durée de la Religion Chrétienne, parce que la Couronne cft le f\ m- bole de l'Empire i & le cercle ce- lui de l'Eternité. Mais le Sacrifica- teur donna fur le champ une autre sxgUcation au prodige : ro»s n'y ES SÇAVANS, entendez, rien , dit-il , le cercle ejai cnfer?fie la croix ^ montre ejue le Chri. fitanifme ne peut pins s'étendre , & (juffon terme fatal ejl arrivé. Voilk' les Chrétiens nn'cjîis , ils ne nous échapperont pas. Julien obfervoit aiïîducmcntle vol des oifeaux , & les entrailles des vidimes ; employant tous les moyens par lefquels la crédulité Paycnnc s'imaginoic percer l'ave- nir. Souvent il recevoit des préfa- ges ambigus qui le plongeoient dans les plus cruelles incertitudes. Comme il n'y avoit qu'une liaifon arbitraire entre ce qu'il plaifoit aux Payens de prendre pour lignes des évenemcns futurs , & les évene- mcns mêmes , les lignes étoient d'ordinaire a. plufieurs ententes ; en forte qu'avec un peu d'efpiit , on pouvoit leur faire lignifier le pour & le contre. Enfin un Orateur Gau- lois , qui palloit pour être profond dans la Science des Arufpices , lui manda qu'il avoit trouvé le foye d'une vid:ime, enveloppé d'une double graiffe : c'étoit un figne heureux , félon les règles de l'art , mais Julien doutoit du hit , crai- gnant qu'on cherchât à le flatter. Tandis qu'il étoit dans ces agita- tions , un Soldat qui venoit de lui aider à monter h cheval , fit lUie chute & le Prince s'écria : Foilk par terre celui ijiit m'a élevé , faifant attention à Conftance qui l'avoit élevé. Cette parole , jointe à l'ac-- cident du Soldat, parut à tout le monde 6c à Julien-même, annon-; ccr clairement la mort de Con- ftance. Julien cependant , ne fe- A O U s détermina pas encore à quitter fon entreprife contre Conftince^ &à fortir d'IUirie , fa raifon étoit que les Payens les plus attachés à la di- vination en général , croyoient que dans le détail , il étoit aiféde prendre le change, non par l'infuf- lîfance de l'art divinatoire , di- foient - ils , mais par la méprife de ceux qui en appUquoient mal les règles. Ils citoient là - delTus l'e- xemple de la Grammaire , de la Médecine, ^c-dela Mufique. Un Grammairien parle quelquefois peu corredement, un Médecin ne con- uoît pas toujours une maladie , un Mulicien tait de faux tons , fans que cela tire à confequence contre la Grammaire , contre la Médecine, & contre la Mufique. C'cft ainfi que les Payens tâchoienc de répondre aux objeiftions qu'on leur faifoit contre la vanité & le ri- dicule de cette prétendue Science , leur réponfe eût été valable s'ils îvoicnt pu montrer que la divina- tion étoit appuyée fur quelque fondement réel -, mais toujours de leur propre aveu , il s'y trouvoit beaucoup d'incertitude. Julien n'ofantdonc rifquer une démarche décifîve fur ce qui ne pouvoit être , après tout , qu'une vaine conjedure, attendoit en deçà du Pas de Lacques , des nouvelles de Conftance , qui , par une com- binaifon d'évenemens fort (îngulie- re , lî elle eft vraye , avoit fini fes jours dans l'inftant même que le Soldatdc Julien étoit tombé. Voi- ci comment, félon notre Auteur , cette mort jtrriya. T. î75y. 4ÎI Conftance effrayé des propres de Julien , étoit parti d'Antioche , &c marchoit à grandes journées vers l'occident pour s'oppofer aux rapi- des fuccès de ce Prince. Etant arri- vé à Tarfe , Capitale de Cilicie , il fut attaqué d'une petite fièvre qu'il négligea &C qu'il crut qui fc dilîîpe- roit par le mouvement du voyage. II continua fon cntrcprifc , &C après avoir marché par des chemins diffi- ciles , il arriva dans un lieu nommé Mopfucrénes , à l'extrémité de k Province. Il voulut eu partir le len- demain : mais la fièvre qui aug- menta , l'obligea de s'arrêter -, elle devint lî bri'dante qu'on ne pou-, voit le toucher. Tous les remèdes furent inutiles ; il perdit la parole, & le troifiéme jour de Novembre jé'i. il mourut , après une longue le laborieufe agonie. Il n'avoir en- core que 45 ans , &rcn avoir régné 25 depuis la mort du Grand Con- ftantin fon père. L'Hiftorien fait ici le portrait de Conftance , portrait curieux que nous différerons de rapporter jufqu'à ce que nous ayons communiqué à nos Lecleurs une note de notre même Hifto- rien , laquelle n'eft pas moins cu- rieufe en fon genre. On examine dans cette note , quelle a pi^i être k caufe de la mort de Conftance. On remarque que félon S. Gré- goire de Nazianze , Julien fitem- poifonner ce Prince, mais on a de la peine à en convenir , & on dit que l'équité qui eft due à tous les hommes, oblige d'avertir que ce Père eft le feul des Ecrivains origi- naux , qui accufe Julien d'un tei Pppi) 45 2 JOURNAL D crime. On ajoute dins la note que ce Père fonde fon rccufacion fur un raifonnement qui n'elf pas démon- ftrarif, on citelc raifonnement^ & le voici. Juiien ^ dit S. Grégoire de Na- zianzc ,fç.tvoit la mort de Confiance avant aii'elle arrivât , donc il en efi l'auteur. Car fi les Démons connoif- foient l'avenir , s'ils avaient pu le lui ■prédire , ils ne lui auraient pas laijfé ignorer la mort funefle dJ" prochaine qui V attendait Uu-rncme en Perfe. Tel eft le raifonnement de Saint Grégoire de Nazianze. Notre Hillorien y répond en de- mandant fi l'on peut dire avec vcri- tt queDieu n'.iit jamais fait connoî- tre aux Démons quelques évene- mcns futurs , fans leur dévoiler en même tems l'avenirroutentier, & leur ouvrir, pour ainli dire, les tré- fors de fa toute-ScicnceîComme on ne peut foûtenir une telle propolî- tion , notre Auteur conclud que le Démon pouvoir donc prévoir la mort de Conftance , fans prévoir pour cela celle de Julien. Il déclare qu'il refpede infini- ment Saint Grégoire de Nazianze ^ mais qu'il craint que ce Père n'aie trop chargé la mémoire de Julien , comme d'un autre côté il a été trop favorable à Conftancc , dont il fait k plus grand Prince qui fût jamais ic même unS.unt. Voilà la note de notre Auteur , ■venons au portrait de Ccnftance. M Confiance , du - il ^ étoit un «très-petit génie ; qui avec quel- «ques vertus de particulier , n'en »a'eut prefque aucune de Piiuce ; ES SÇAVANS, » fans être naturellement cruel, èc » délirant même de palier pour hu- » main , il commit par timidité & » par foiblelfc des cruautez inouies. » Il fut. pare lieux & inappliqué,. J> vain & avide de louanges fans fe y> foncier de les mériter. Maître fier » &; prefque tvran de fes Sujets, » efclave de fes Eunuques , qui «conferverent toujours l'afccndanc «qu'ils avoientpris fur fon enfan- " ce, & lui firent exercer en taveut »derHérclie un pauvoirdefpoti- » que fur l'Eglife , fans qu'on puif- » fc dire autre chofe pour fa dé- » charge , linon qu'il fe conduifit '>roÛ!ours par des imprellîons é- » trangercs. On prétend qu'au lit de la mort il nomma Julien pour fon fuccef- fcur , voulant fans doute , remar- que là-delTus l'Hiftorien , fe faire alors un mérite de donner ce qu'il ne pouvoir plus ôter. La manière dont fe comporta Julien après la mort de Confiance y eft un article interelTant que nouy ne devons pas oublier. Il verfa quelques larmes en apprenant la mort de Confiance j & partit avec une extrême diligence pour Con- ftantinople. La nouvelle de fon ar- rivée combla de joye toute cette Capitale, qui l'avoit vu naître. Il y entra le onzième de Décembre accompagné du Sénat, des Soldats,. & du Peuple. On regardoit com- me un fonge , de voir ce Prince (i- jeune encore , &- d'une taille fi in- férieure à fa réputation , lequel ^ aptes être parti du tond des Gaules ôc a VOIS dompté les Rois & ics-Nar A O U s tions barbares , avoit roumis en courant , tour ce qui s'ttoit trouvé £ur fon padage i & lorfqu'il fe croyoit à la veille d'une guerre ci- vile , où il y a prefquc autant de malheur à vaincre qu'à être vaincu, dcmcuroit maître de l'Empire pat le droit de fucceiïlon , fans avoir fait répandre une goûte de fang. Le corps de Confiance , peu de jours après , fut apporté dans la Ville Impériale , ce que notre Au- teur raconte de Julien à ce fujer , fait voir le bon naturel de ce Prin- ce qui comme on l'a pureconnoîcre jufqu'ici , avoit infiniment plus lieu de fe plaindre de Conftance que de s'en loiier. Il fut recevoir le corps. En le voyant , Julien parue s'attendrir , & pleura même enco- re. U toucha le Cercueil avec ref- ped , & fit à Conllance une pom- pe funèbre digne d'un Empereur. Il fuivit le Convoy à pied, vêtu d'une iîmple cafaque de pourpre , £< fans diadème , jufqu'à la Bafili- q.ue des Saints Apôtres , lieu de la Sépulture de Conftantin & des Princes de fa Maifon. Notre Hiftorien parle ici d'une Chambre de Jullice que Julien créa contre ceux qu'on difoit avoir abufé de leur crédit fous le règne de Conftance, & il charge fort Ju- lien à cette occafion, faifant enten- dre que les Membres qu'avoir choi- fis le Prince pour compofer ceTri- bunal, étoient la plupart très- in- dignes de cette Place , & gens d'u- rc rigueur fi excelfive qu'ils punif- foient quelquetois les innocens- sncmes. T. i7?r.' ^ ^^ 4n L Hiftorien femble oublier ici de quel caraftcre étoit Julien , il l'a toujours reprt-fcnté comme un Prince doux , équitable & qui ne s'enlaitToit pas impcfcr^ cependant de la manière dont il parle de cette prétendue Chambre de Juftice , on diroit qu'il le regarde comme com- plice des injuftices & des cruautez- mêmes qui s'y commettoient. Mais cela eft reparé par le récit d'un fait bien glorieux à Julien , &: qui montre , comme un grand nombre d'autres qui font rapportés dans l'Hiftoire de fa vie, que ce Prince auroit été bien différent de lui-même, s'il avoit favorifc , en quelque occalion que ce ftit , ks excellîves rigueurs. Voici le fait dont il s'agit. Julien ayant cafTé les curieux on Agens du feu Empereur , c'étoit des perfonnes dont l'oflàce conlîftoit à s'informer fecrettement de tout ce qui fe palToit & à le rapporter au Prince , fondion dont ils abu- foient prefque toujours, & qui cau- foit des defordres étranges dans le Gouvernement. Julien ayant donc cafte ces curieux ou agens , deux d'entre eux lui offrirent de décou- vrir la retraite de Florentius Pré- fet des Gaules , qui , accufé de di- vers griefs dignes de punition,avoic pris la fuite , ils demandèrent pout rendre ce fervice à Julien , que Ju- lien voulût les rétablir , mais le Prince les traita de délateurs . di- fant qu'il étoit indigne d'un Em- pereur d'employer ces voves dé- tournées, pour découvrir des mal- heureux , cjue la crainte des fu^j 454 JOURNAL D pliccs rediiifoit à fe cachef. Grand exemple de fagefTe , comme on voit , &c tout-à-fait conforme à l'i- dée que 1 Hiftorien a toujours don- née de l'équité , de la clémence & de la modération de Julien. Nous voici arrivés à un article qui achevé de peindre les mceurs .de Julien. Ce Prince étoit extrême- ment frugal & ennemi du luxe , .comme nous l'avons déjà remarqué dans rxKrc premier Extrait , mais voici un exemple de fun & de l'autre, qui enchérit encore fur ce que nous avons obfervé à ce fu)et. Julien , en prenant polTellîon du Palais de Conftance , tut frappé de h multitude de bouches inutiles qu'il y trouva. On y comptoit mil- le Officiers de cuifme , autant de Barbiers , beaucoup plus d'Echanf- fons. Pour les Eunuques il n'étoit pas poffible de les nombrer. En donnant une fomme d'argent on devenoit Officier & penûonnairc de l'Empereur , dont la maifon fcr- Yoit d'azile .\ l'oifivetc , & les re- venus s'épuifoient à nourrir des fai- néans qui touloient les Peuples fans fcrvir le Prince. Julien ayant demandé un Barbier pour lui taire les cheveux , car depuis qu'il étoit Empereur il laiffoit croître fa bar- be , il en vint un Ci magnifique- ment vêtu , que ce Prince étonné , dit que ce n'étoit pas un Sénateur ejii'il demandait , mais un Burhier. Il qucftionna cet homme, & apprit que fon emploi lui valoit par jour, vingt rations de Paris , & de quoi nourrir vmgt chevaux , uncgrofle pcnfioH annuelle , avec beaucoup ES SÇ AVANS, de gratifications. L'Empereur juJ gea par cet échantillon , qu'il en coîitoit plus pour les domcftiques du Palais, que pour lafublllfancc des Armées. Il les congédia tous ^ en difant qu'un Barbier fuffifoità plufieurs pcxfonncs , que n'ayant point de femme ni d'envie de fe re- marier il n'avoit pas befoin d'EuJ nuques , non plus que de Cuili- niers, parce qu'il ne raangeoit que pour la neceffité. Cette conduite donna lieu à des difcours bien oppofés , £c ce que notre Auteur rapporte là-dclfus clt une peinture natarclle de ce qui fc pafTe tous les jours dans les conver- farions , à l'égard des Princes qui font confifter leur véritable gran-; deurà être vertueux. Les difcours qui fc tinrent là-delTus au fujet de Julien méritent d'autant plus d'ê- tre expofés ici qu'on y voit un combat de pour & de contre, qui n'ett pas inutile pour donner une idée jufte de la qucftion , & met- tre les Ledeurs en état de la déci- der. La plupart difoientque Julien étoit trop Philofophe pour un Prince : qu'il ne fçavoit pas tenir le juif e milieu , & qu'il outroit la fimplicité, comme fon prédeccf- feur avoir outré la magnificence ; qu'il avili iToit laMajefté Impériale en la dépouillant d'un extérieur qui frappe les Peuples , 6c les tient dans le refpeicer que punir , & corriger les hommes que les perdre. Qiie de traits curieux & dignes d'imitation , nous aurions à rap- porter fi rétendue de cet Extrait nous le permettoit , nous le ter- minerons par ce qui concerne li mort de Julien. Comme il combattoit contre les Perfes , un dard pouflé par un Ca- valier , lui effleure le bras , & per- çant les côtes, lui entre dans le foye. Il veut arracher le dard, mais il fe coupe les doigts , & fe lailTc tomber de cheval. On vient à fon fecours -, on l'emporte fur un bou- clier ; on panfe fa playe , & Julien fe fcntant un peu foulage , deman- de fon cheval & fes armes pour re- tourner à l'ennemi ; mais fa foi- blcffe l'arrêta. Toute l'armée de Julien fondoit en larmes , hc Ju- lien étendu fur une natte couverte d'une peau de lion, (c'étoit, re- marque l'Hillorien , fon lit ordi- naire ) montroit feul de la fermeté. Il harangua quelque tems fes tïoupes , notre Auteur rapporte au long cette Harangue , dont il n'y a pas un mot qui ne porte , elle com- mence par ces mots : » Chers Com- «pagnons, la nature me rcdeman- » de ce qu'elle m'a prêté. Je le lui «rends avec la joye d'un débiteur •» qui s'acquitte , & elle finit par »<;eux-ci : Je remercie le Dieu ES SÇAVANS; » Eternel de n'avoir pas permis que » je perilTe ni par une confpiration,' » ni par les douleurs d'une longue » maladie , ni par la cruauté d'un » Tyran : j'adore fa bonté fur moi » de ce qu'il m'enlève du monde » au milieu d'une courfe glorieufe, » puifqu'à juger fainement des y chofes , c'eft une lâcheté égale de » fouhaiter la mort, lorfqu'il feroit » à propos de vivre , & de regrette! » la vie lorfqu'il eft tems de mou- » rir. Mes forces m'abandonnent, » je ne puis plus vous parler. = Quant à l'éledlion d'un Empe- » reur , je n'ai garde de prévenir » votre choix ; le mien pourroit » mal tomber, & perdre peut-être, »fi on ne le fuivoit pas, le fujeÇ » que j'aurois défigné. Julien , après avoir bû un peu d'eau fraîche qu'il avoit demandée,' expira fans effort, un peu avant le milieu de la nuit qui précedoit le 27 de Juin 365. Il étoit âgé de 31 ans , 8 mois & 20 jours , ayant re-; gné un peu plus de 7 ans & demi ,' à compter du jour qu'il fur déclaré Céfar. Environ trois ans depuis qu'il avoit pris le titre d'Augufte ,' & feulement un an , huit mois & 23 jours depuis qu'il étoit paifiblc poffclTeur de l'Empire. Nous ne fçaurions finir fans rap- porter une adion bien finguliere que fit Julien un peu avant fablef- fure , & quitrouveroit peu d'imi- tateurs. Comme la famine étoit dans fon camp , 5.r commençoit à devenir fi extrême qu'on étoit obli- gé de diffribucr jufqu'aux vivres que les Tribuns & les Comtes avoicnt A O U s T . I 7 5 5-. ^ 4r7 avoient fait porter pour eux. L'Em- dans les tentes où la difette ctoic pereur fenlîble àlamiferc d'autrui, plus grande, les provilîons defti- i'e contentoic d'un peu de bouillie nces pour la bouche, pour fa nourriture &: répandoit LA LVSIADE DV CAMOENS , FOEME HEROIQVE SVR la découverte des Indes Orientales , traduit du Portugais par Ai. du Teron de Cafl<.ra. A Paris , chez Huart , Clouficr Se Briajfon , rue Saint Jacques. 17^5. in-\i. 3. Vol. Toni. I. pag. 315. Tom. II. pag. 424. Tom. III. pag. 334. L'AUTEUR, dans fa Pré- face , donne d'autant plus d'éloges au Pocme dont il cft le Traducteur qu'il ne peut ignorer que les loiiangesdes Traducteurs &: des Commentateurs ne tirent point à confcquence. C'efi: fans doute en vertu de ce double titre , qu'il fe croit permis d'afTurer le Pu- blic que la Lufiadc peur palier pour un des plus beaux Poifmes qu'on ait jamais lus depuis Homé- K & Virgile. Le Camocns a du moins cette rciTemblance avec Homère , com- me le remarque M. de Caftera dans k Vie de ce PoL-te qu'il a placée à la tête de fa Traduction , que plu- fieurs Villes fe difputcnt lagloire de lui avoir donné la naiflance. L'opinion la plus furc eft: qu'il na- quit à Lilbonne en 1517. d'une il- luftre famille , mais peu accommo- dée des biens de la fortune -, jamais Vie ne fut plus agitée que la hcnne, à pcme avoit-il paru à la Cour qu'il tut exilé à Santaren pour quelques galanteries dont on igno- le le fuiet \ dc-là étant palTc en Af- frique , il s'y fignala contre les Maures , & y pefdic un œuil. La Aouj}. réputation de valeur qu'il s'étoit acquife, jointe à celle que lui don- noicnt fes Poches , le hrent bien- tôt rappcller à la Cour ; il n'y fut pas long tems fans s'y faire de nou- velles affaires , de forte qu'il n'eut d'autre parti à prendre que celui de s'embarquer pour les Indes , où il fe diftingua dansdivcrfcs expéditions militaires. La fortune l'ayant cnfui- te conduit à Goa ^ quelques vers fatiriqucs qu'il lâcha contre les per- fonnes les plus confiderables de la Ville , obligèrent le Viceroi dcj Indes de l'exiler dans la Chine ; le Camocns ne lailTa pas cependant d'y trouver quelque protcâion , il fur revêtu à Macao d'une Charge alTez lucrative. C'eft-la que félon M. de Caftera il acheva fa Luilade , dontilavoïc compofé les premiers Chants en Portugal dans fa)eunriTe. Après 11 mort de Dom Francifco de Barreto Viceroi des Indes , lorfqu'il fe prc- paroit à retourner à Goa auprès de ion fucccfteur , il fit naufrage fur les Côtes de Malabar , 1er fur le front du jeune Prince , x> s'apprête à lui donner la plus » belle de fes filles pour époufe , & » leRoyaume de la mer pour fa dot. » Les grandes âmes de vos ayeux » vous contemplent du haut de ^rOlimpe, elles prennent plaific » à fe renouveller dans la vôtre ; ci- » les comptent que vous imiterez » leurs vertus guerrières & pacitî- »que?, êc dans cette juftecfperan- » ce elles vous gardent une place »au milieu du Temple de l'Eter- » ni té. Après ce début qui a été précé- dé d'une invocation , le Poète feint que Jupiter ayant appercu du haut des Cicux la Flotte Portugaife qui fous la conduite de Vafco de Gama voguoit dans l'Occident , convoque les Efprits Céleftes. Il leur dit qu'il n'ignore pas que le De/?!» veut élever dans les Indes la Nation Portugaife au-dejfits des Affj' riens , des Perfans , des Grecs & des Romains , & leur déclare le delTein où il eft de tavorifcr leur cntrepri- fe , Bacchus qui prévoit qu'on on. blitra la gloire qu'il s'ejl acqiùfeddiw A O U s l'Oritnt f! les Portugais y féuétrent ^ •forme la rcfolucion de leur en fer- mer l'entrée. La belle Venus au contraire prend leur parti parla redcmblance qu'el- le trouve entre les Portugais ^ les Romains qu'elle avoit jadis tant ai- més , ell^e ffiit d\ullenrs de la bouche des Parques cjn'ilj établiront fort culte dans tous les lieux oit leur pouvoir s'éienira ; Mars foûtient le parti de la DéefTe , foit que fon ancien amour l'y oblige , foie qu'il veuil- le favorifer une Nation que fa va- leur lui rend lî chère. La haine de Bacchus contre les Portugais , l'attention de Vénus pour rendre inutiles les mauvaifes intentions de ce Dieu font tout le nœud de ce Pocmc , on voit dès lors qu'il ne faut pas s'attendre à y trouver beaucoup d'invention , ja- mais Poëme ne fut plus fimple , ni moins rempli d'évenemens. Si l'a- nimofité de Bacchus ( Chant II. ) expofe les Portugais à quelques dangers dans les Ifles dç Mozambi- que & de Monbaze, Venus ne leur manque jamais au befoin. C'eft par le fecours des Néréides qu'elle les arrache de l'iHe de Monbaze, où ils auroient été la dupe de leur bonne foi &c de l'artifice des Mahométans. Jupiter , à fa prière , après avoir prédit la gloire future des Portu- gais,leur donne Mercure pourcon- dudeur ; fous fes aufpices ils arri- vent dans le Royaume de Mélin- de , ils y font reçus favorablement; Gama cède à la curiofité du Roi de i'Ille & lui raconte ( Chant IH. ) l'origine de fa Nation & fes ex- ploits guerriers. Les Portugais y font reprefentés comme un Peuple de Héros, non feulement fupcneur aux Caftillans , mais mè ne à rou- tes les Nations. On y verra l'Hi- ftoireTragique d'Inés de Cartro qui cft un morceau très - interelfant &c peut - être le plus bciu de toute h Lufiadc; le Poète l'a placée ici fort à propos pour dèlafler fes Lcdcurs d'une narration qui vraifcmblabic- ment ne doit paroître courte qu'aux feuls Portugais. » Belle Inès , s'ècrie -t - il ^ tu » étois dans une folitude agréable » fur la rive de Mondègo! Ta boi:^ » che enfeignoit aux échos des fo- «rèts & des montagnes le nom » chéri que tu portois gravé dans » ton cœur ; le nom de ton Prince, » dont la prefence faifoit tes déli- » ces 5 6c dont le moindre éloigne- » ment te coutoTt tant de larmes , » de fon côté lorfqu'il ne te voyoit » pas, le fouvenir flatteur des douK » momens qu'il avoit palfés auprès » de toi, remplilToit ton ame, &: » terépondoit de fa tcndreffe; loin » de tes beaux yeux tout ce qui » s'offroit aux fiens retiaçoit ton » image Qiiellc iurie put le- » ver les bras d'un grand Monar- " que fur la tète d'une infortunée >» qui n'avoit que des pleurs pour fc = défendre , & comment cette épéc nCi formidable aux Maurufiens , »> n'eut-elle pas horreur de fe trem- » per dans le fang d'une femme ? Gama continue dans le troilîéme Chant l'Hiftoire de Portugal , &c raconte de quelle manière il fut choifipar Emmanuel II. pour alleic 0.1 q 'J 4-.:^- JOURNAL D découvrir les Indes , & tout ce qui lui étoit arrivé dins fa navigation jufqu'au Cap-Verd. Ce(l-la qu'il vie fortir des eaux une eipece de phantôme nommé Adamallor tre- red'Encelade &deBriirée. C'étoit le 2,ardien ou le Dieu de ce fameux Promontoire , , qu'on apptlloic pour lors le Cap des Tourmentes. La defctiption de ce Géant torme un des tableaux les plus extraordinai- res Se les plus Poétiques que l'ima- gination puilTi fe reprefenrcr, l'idée en cft neuve, & toucliée avec une force de pinceau qui faifit & élevé l'cfprit , mais ce perfonnage fi fin- gulier, comme la plupart de tous ceux que le Camoëns introduit dans fon Pocme , n'cii: là que pour parler &i non pour agir, &fe re- plonge dans les eaux , après avoir prédit aux Portugais les dangers & les malheurs qiî'ils fe préparenc-à eux-mêmes &C à leur pofterité , en fc frayant une route fi darfgcreufe. Le Poëte finit le cinquième Chant par une inveélivc contre fon liécle. » Pour moi , dit-il ^ c'eftlefcul j) amour de ma Patrie qui m'infpi- y> re ; c'eftl'ardeur d'immortalifcr » ma belliqueufe Nation \ je tra- a vaille pour la renommée d'un » Peuple qui m'cfl: cher , malgré »fon ingratitude, ainfi donc que 3> Gama rende grâces à mes veilles, » à cet amour fi pur & fi noble , » ceux qui fortent aujourd'hui du ïj fang de ce Héros ne méritent ps » que pour leur plaire , les Mufes » abandonnent un moment leur rc- ?> traite. Les Portugais^ après s'cj:re dé-. ES S-ÇA V ANS, lalfés de leurs fitigues , quittent rifle de Melinde, &; continuent leur route vers les Indes. Tandis que la Flotte poulTée par un zcohir flatteur pourfuivoit joyeufement fa route. Le Camoëns qui a befoin de remplir fes dix Chants , ou plutôt qui ne veut rien omettre de tout ce qui fait honneur à fa Nation , fup- ■ pofe. que les Compagnons de Ga- ma pour charmer l'ennui de la na- vigation , fe racontent les prouefTcs des anciens Chevaliers Portugais. Mais enfin une tempête horrible les oblige de précipiter ^ & bien- tôt de finir leur narration. >' A ce coup , les Matelots pouf- " fent jufqu'au Ciel des cris lauiçn- » tables , ils fe troublent , un fou- »dain effroi s'empare de leurs 'j cœurs , & les empêche d'agir » d'intelligence. Le vaiflcau fe pan- »che, & reçoit fur fon bord une S) prodigicufe quantité d'eau. Qii'on X jette toutes les marchandifts dans 5i la mer , dit rutlemcnt le Pilote. w En même tems , courez à la 3» pompe, à la pompe! nous pc- » rilfons , l'eau nous gagne de tous " cotez. On s'emprefte , on travail- « h -, mais les roulis du navire font » h vioiens,que Soldats niMatelots » ne peuvent fe tenir fur leurs K pieds ; trois hommes des plus » robufles ne fufhfent pas pour ar- » rêter le gouvernail. On l'attache » inutilement avec de gros cables, » les flots s'en rendent maîtres , 5c » le font tourner au gré de leurs ca- " priées , qui triomphent del'indu- » ftric ^ de la force des Mariniers. » Si les cnfans d'Eole avoicntcula- A O U s *Toiir Je Babel à renverfer , ils a> laiiroient attaquée avec nioins de jj fureur. Le puilfant Vaiffeau de » Gama eft enlevé par les ondes wjufqu'à la région des nuages , Se œfur cette montagne liquide. Le j> refte de la Flotte ne l'appcrçoic » pas plus grand qu'une petite Bar- » que. Gama dans ce péril adrefTe fcs Vœux au Dieu ^w donna au Peuple d'Ifraël un refuge paifible diVns la mer rouue , &: le conjure de le protéger dans une entrcprife qui tend à fa gloire. Cette prière eft exaucée , mais qui croiroit , que c'eftpar le minillere de Vénus ; elle fe mon- tre avec fcs Nymphes aux enfans d'Eole , & leurs cœurs féroces en font attendris. Elle foj-te ,. les vents fc foùmeitetit , ils jurent tous en- ire les mains de Vénus qu'ils ne tra- verferont fins la cottrfe de Gama ^ & cette DéeJ]} en recortipenfe leur pro- met cjii'elle leur fera toiijours favora- ble. Le calme ayant bientôt fuccedé à l'orage , la Flotte Portugaife arri- ve à Calicut Capitale du Malabar. ( Chant Y ) Gama fe voyant reçu favorablement par le Roi du Pays, lui propofe de faire un traité d'al- liance avec le Roi de Portugal. Le Souverain de Calicut répond qu'il en délibérera avec fonConfcil , &c cependant envoyé quelques-uns de fes Officiers fur la Flotte Portugai- Ils font frappés d'y voir des ta- pis de pourpre , des bannières de ibye qui reprefcntent divers ex- ploits fameux , des avancures mé- morables, des batailles ^ desdutls. Le hère de Gama leur en doMic une longue explication , & le Pou- te trouve le moyen dv faire encore palTer en revue les Héros que- fa Patrie a produits , quoiqu'il les ait déjà célébrés pour la plupart dans les Volumes précedens. On pourfuit dans le 8° Chant TexpUcarion des bannières. Mais la nuit ayant obligé les Indiens de re- tourner à la Ville, ils font un fa- crifice à leurs Dieux pour les con- fulter fur l'alliance qu'on leur pro- pofe. Ils croycnt voir qu'elle leur fera funefte , & dès lors ils pren- nent la refolurion de brûler la Floe- te des Portugais , & de les faire pé- rir. Bacchus fe met de la partie , & fomente leurs foupcons , mais Ve- nus fert fi bien Gama qu'il élude par fa prudence tous les pièges qu'on lui tend; il trouve le moyen de lever l'ancre , Chant 9^ , d'em- porter dans fes navires plufieurs preuves certaines delà découverte des Indes comme differens aroma- tes. Se d'amener quelques Mala- bars prifonnicrs. Déia la Flotte avoit doublé le Cap Verd , lorfque Vénus touchée des fatigués &: des dangers innom- brables que les jaloufes fureurs de Bacchus ont fait elfuyer à fes chers Portugais les fait aborder dans une Ille enchantée , où elle a raffemblé les plus belles Nimphes de la mer ' & ce qu'il y a de fingulier, com- me M. de Voltaire l'a remarqué dans fon Effay fur la Poëfie Epi- que , après que le Camocns s'ell abandonné fans refe^ve à la dcf- 442 JOURNAL DE cription voluptueufe de cette Ifle , & des plaihrs où les Portugais font plongés -, il finit ce Chant par cet- te apoftrophc : ^ o vous, lâches ») humains qui rappeliez tout à vos » plaifirs , méprifable fardeau de la » terre qui ne vous porte qu'à re- n "ret , ouvrez vos yeux profuiesi »> cette Iflc mcrveilleufe , ces Né- » réides fi belles , ces fuperbes 5> couronnes , ces délices qui vous » tentent , ne font qu'une image » des honneurs , de la gloire & de 3> l'immortalité qui fuivenc les » grandes adions. Dans le dernier Chant Thétis qui ctoit tombée en partage à Ga- na, le conduit dans un magnifique Palais fitué fur le fommet d'une haute montagne , elle lui donne un grand repas , pendant lequel une Syréne folemnifc les exploits de plufieurs Héros Lufitains qui ne voyent pas encore la lumière, après le repas Thétis mené fes hôtes dans un lieu , d'où ils voyent les diffé- rentes révolutions des Sphères Ce- leftes , & les Royaumes qui feront le Théâtre de leur valeur & de cel- le de leurs Succeffeurs. Ce détail fini , les Portugais fe rembarquent fuivis des Néréides , & arrivent heureufement à Lifbo- ne. Gn voit alTez pat l'Extrait que S SÇAVANS. nous venons d'en donner qu'il n'y a rien de nouveau ni de régulier dans l'ordonnance de ce Poème ; c'eft en général le jugement qu'en a porté M. de Voltaire dans l'Ou- vrage que nous avons déjà cité , & nous laiffons aux Lcdreurs à déci- der de la jufteffe des recherches, &c delafolidicé desraifonncmens que le Traducteur employé pour le combattre. Mais la beauté des dé- tails , la force de l'exprclTion , la poc(îe du fti.le , la variété qu'il a jettée dans fes récits , la noblcffe & l'élévation de fes ftntimens feront toujours regarder le Camocns com- me un grand Pocte , par ceux-mê- me qui font perfuadés qu'il n'y a qu'un intérêt national qui ait pu perfuader aux Portugais que la Lu- fiade eft fuperieure au Taffe Sc à tout ce qui a été fait dans ce genre depuis Homère & Virgile. Pour ce qui regarde les longues &c fçavantes Remarques dont M. de Caftera a accompagné fa Traduc- tion, nous dirons feulement, qu'il nous a paru que lorfqu'U les a com- pofées , ou il ne connoiffoit pas le Livre qui a tant couru fous le titre de Chef- d'œitvre d'un Inconnu } ou que s'il le connoilToit , il n'en aura pas fans doute jugé comme le Public. ^§§f» A ou s T, 175/. 445 TRAITE' DE L'OPINION, ou MEMOIRES FOVR SERriR à L'Hiftoire de l'Effrit humain ; par M. Gilbert- Charles le Gendre Marquis de S. yiubin fur- Loire , ci -devant Alaitre des Rccjhèies. Secon- de Edition , revue, corrigée & augmentée . A Paris , c\\qz Bru-pn rue S-iint Jacques j à la Science. 1755. fix vol. /«-iz. Tom. I. pa^. 6ië. Tom. II. pag. 625. Tom. III. pag. 5(^8. Tom. IV. pag. 5 1 5. Tom. V. pag. 5^tf.Tom. VI. pag. 597. en y comprenant la Table qui efl; de 187 pages. NOUS avons parlé de la pre- mière Edition de ce Traité dans les Journaux de Juillet & Septembre 1733. Il nous rel^e à rendre compte de celle- ci qui eft augmentée de cinq articles princi- paux , fans parler de diverfes addi- tions répandues dans l'Ouvrage. Le premier regarde la pcfantcur& la chiite des corps i le fécond, le flux èc reflux de la Mer -, le troifié- me , le Syftcme Aftronomique du mouvement de la Terre \ le qua- trième , la Philofophie de Defcar- tes Se la Philofophie de Newton ; le cinquième , l'Infini-Géométri- quc. Nous allons rendre compte de chacun de ces articles. De la pefanteitr des Corps. M. de S. Aubin prétend que juf- qu'ici la caufe phyiîque de la pe- fanteur & de la chiite des corps toujours perpendiculaire au centre de la terre , n'a point été expli- quée ; Que cette tendance au cen- tre a même été regardée par quel- ques Phyficiens comme le myftere du Créateur dans les chofcs natu- relles. Defcartes, à ce que remarque M. de S. Aubin , explique la pe- fanreur par l'impulfion de la ma- tière éthérée, quircpoufle vers le centre les corps malllts , p,irce qu'ils ont moins de force centrifu- ge. On a tait une objeétion très- forte contre cette Hypothéfe , fça- voir, que les cercles décrits parle fluide circulaire j diminuant tou- jours depuis l'équatcur jufqu'aus pôles , la force centrifuge rappor- tée au mouvement circulaire du tourbillon , auroit des centres diffe- rens dans les cercles inégaux , & que les corps y devroient tomber , non pas perpendicuLiirement au centre de la terre, mais à des parties de fon axe moins éloignées du ccn» tre , ce qui eft contraire à l'expé- rience ; la chiite des corps fe faifant toujours dans la ligne du Zénith , à moins qu'il ne furvienne quelque caufe étrangère. La chiite des corps , dit M. de S. Aubin , ne peut pas non plus venir de ce que l'atmofphere cir- cule plus vite que le Globe de la Terre. Huguens a cru que cette at- mofphere a'ioit 17 fois plus vite que le Globe. Si cet excès de vitefle du fluide circulaire , continue no- tre Auteur , écoic la caufe de la 44^ JOURNAL D pcfanteur , la chute des corps fc- roit horizontale au lieu d'être per- pendiculaire. D'ailleurs un mobile entraîne par un courant, doit, à la longue , aller à peu-près , aullî vite , que le courant même. M- de S. Aubin prétend lever cesdifficul- tez, en difant que la maiieie la plus mobile confcrve fon mouve- ment direâ: au milieu des fluides circulaires , autant que les interfti- ces du troilîcme clément le peuvent permettre , l'impcnétrabilirc de la matière étant de tous les Syftè- mes. La diverfité des mouvemens dans cette Hypothéfe de M. de S. Aubin , procède des loix-mêmes du mouvement ; car tous les corps tendent à fe mouvoir en ligne di- redte , &( une partie de la matière la plus déliée doit conferver ce mou- vement dited. Cette matière éthc- rée qui eft beaucoup plus mobile , -traverfant donc l'armofphere avec beaucoup de rapidité en tout fens , Se par une infinité de lignes droi- tes, oblige les corps malTits dont les particules font en repos , ou ont très-peu de mouvement , à fe précipiter par le côté le plus foible, qui eft toiijours perpendiculaire au centre , parce que c'eft le côté d'où il arrive une moindre quantité de cette matière fort agitée. C'eft ainli, félon M. de S. Au- bin , que tour l'effort de la poudre à canon fc tait par l'endroit qu'elle trouve le plus foible. Le premier élément , dit il, &: la matiejre glo- buleufe même , doivent avoir un mouvement en ligne directe au mi- lieu des tourbillons , puifque la ES SÇA VANS. lumière traverfe direilement les fluides qui circulent. Telle eft en fubftance l'explica- tion que notre Auteur donne de la pefantcur des corps , il vient enfui: te à celle du flux de la Mer. Nouvelle f-iypothéfe df.fîux de Lî mer^ Defcartes , comme l'obferve M. de S. Aubin , attribue la caufe de ce grand phénomène à la prelîîoB des eaux de la Mer , par la Lune , lorfque dans la révolution que la Terre fait en 24 heures fur fon axe, les eaux de la Mer paflTent au def- fous de la Lune. Car alors la matiè- re cthérée , trouvant fon paffage reflerré par la rencontre du Globe Lunaire , doit appuyer fortement fur les eaux de la Mer , qui ctarïC plus comprimées , montent vers les bords , jufqu'à ce que leur pro- pre poids les tafle retourner fur el- les-mêmes. On a objedé aux Carter ficnSj que la même partie de l'O- céan ne paife qu'une fois chaque jourau-defTous de la Lune, & que cependant le flux arrive deux fois en 14 heures. Ils ont répondu que la prcllîon de la Lune éroit aflez forte pour faire defccndre perpen- diculairement de quelque efpace , le GlobeTcrreftre, qui nage dans la matière fluide de fon atmofphére, de forte que les eaux de la mer, en rcpaffant dans la partie oppofée à la prefllon de la Lune , y trouvent encore une fois leur pafl^ige rerré* ci , ce qui eft caufe que la même prelfion fe fait une féconde fois c« Z4 heures. Notre A O U s T Notre Auteur prércnd que cette ïéponfeeftmfoûtenablc , îk. voici fur quoi il fe fonde. Premieremenc, dit-il , la prcflîon n'a plus d'effet dès que le corps cède ; feconde- ment le flux ne peut être attribué qu'à une preflîon lur un endroit particulier de l'Océan , & c'eft ce qu'opère le Globe de ia Lune , qui étant plus petit que le GIobeTerre- ftre,étant t'Oit éloigné, ne comprime qu'une partie de l'Océan , en fot te que les eaux s'enfoncent au d. ifous de la Lune & s'élèvent vers les bords. Or en fuppofant le rccule- ment du Globe Terrcftre, la ma tiers éthérée comprime géné.ale- ment & également tout l'émifphe- re oppofé , &c cette pieflîon égale , au lieu d'imprimer aucun mouve- ment aux eaux , dcvroit les con- ferver dans une aflictte calme & immobile. M. de S. Aubin remarque qu'il fe trouve là-delTus dans le Journii des Sçavans du 9 Juin 1698. une autre objedion très- forte : fçavoir que les marées dcvroient arriver plus promptcmcnr à nos Côtes , lorfque la Lune ell dans le tropique de l'EcrevilTc, que lorfqu'cllc eft dans le Tropique du Capricorne ; les eaux qui font fous ce dernier Tropique , étant beaiTcoup plus éloignées -, Que cependant l'on voit le flux arriver aux mêmes heu- res quel que foit le parallèle où la Lune fe trouve ; il avertit qu'il y a dans le Journal des Sçavans du mois de Février de l'année lë^^. une réponfe à cette objedion , h lèponfe eft , que la Lune prcflant '> 1 7 î 5". 44; les eaux fur un parallèle de k Sphère , elles font preflees en mê- me tems, & par contrecoup fur la partie correfpondante du parallèle oppofé de l'autre côté du Globe ; ce qui fait que dans un même jour, on devroit avoir les deux flux du premier parallèle , & de l'oppofé , mais que ces deux flux devant fe faire en des rems inégaux à caufc des dillances inégales, ce qui ap- porteroit de l'oppofition entre eux &c leur reflux, ils fe font réunis & accordés à fe faire en même tems. Cette réponfe fondée , comme la précédente fur le reculement da Globe Terreftre paroît également infoiitenablc à M. de S. Aubin , pour les raifons qu'il a déjà expli- quées. L'accord parfait qui fe trouve entre le cours de la Lune & les va- riations du flux , engagent notre Auteur à chercher une explication qui puifle rendre vraifemblable le fond de l'Hypothèfe Cartéfiennci U fuppofe pour cela , que des deux cotez du Globe,, vers l'Equateur , &: fous deux méridiens à peu près correfpondans , il y a deux milieux de l'Océan où fes eaux font plus protondes , &: que la prcflîon eau- fée par la Lune fous les deux mi- lieux de l'Océan , lorfque ces deux méridiens paffcnt au defTous de li Lune , fait que le flux tire toujours fon origine des mêmes méridiens , 6c du même parallèle , foit eue la Lune fe trouve dans l'Equateur , ou dans les Tropiques ; ainfî il ne faut , félon M. de S. Aubin , fup- pofcr aucun reculement de ia Ter- R rr 44'^ JOURNAL D rc j & la prefiion alternative toutes hs 12 heures fur chaque milieu de i'Ocean fuffit pour caulcr un flux général & commun aux. deux Hé- mifphcresi en forte que ce mouve- ment périodique fe renouvelle deux fois par jour dans tout l'O- céan. L'Auteur ajoute qu'il n'y a aucuîi amas d'eaux courantes où d'eaux dormantes , foit lacs , rivières , étangs , gouffres , &c. qui n'aycnt plus de profondeur en certains en- droits, 6c que leurs bords font tou- jours moins profonds, ce qui le por- te à dire que c'eft une conjedlure approchante de certitude phy fique, qu'il y a dans certains efpaces des mers qui ont beaucoup plus de pro» fondeur, & que cette profondeur fe trouve aux endroits où ces mers ont une plus vafte étendue. Or de tous les efpaces compris entre les deux Tropiques , ceux qui paroif- fent indiquer davantage les milieux de rOcean font les Mers du Nord traverfées par notre premier méri- dien -, & les grandes Mers Orienta- les qui y répondent de l'autre côté du Globe ; d'où notre Auteur infé- le qu'il cft fort vraifemblablc que ce font là fous le colure des Eqr.i- noxes, les deux milieux de l'Océan, où fe fait roû)ours i'impreirion de la matière éthérée , puifque les ef- paces de rOccan qui ont le plus de profondeur , font les plus fuf- ceptibles de cette impreflîon , qui n'agit prcfque pas fur fes bords , di dont l'effet doit être proportionné au volume d'eau qui luieftexpofé. M. de S. Aubin iait Knarquex ES SÇAVANS, les rapports qui fe trouvent entre fe flux de la mer & le cours de h Lune ; i°. en ce que le flux journa- lier retarde de 49 minutes, comme le retour du même méridien au- deffous de la Lune ; 2°. En ce que les marées font plus hautes pendant tes conjonftions & oppolîtions ; parce qu'alors la Lune fe trouvant dans une ligne prefque perpendi- culaire avec le Soleil, les eaux font plus comprimées ; 3°. Qu'une aug- mentation plus grande du flux pen- dant les conjoné'Hons & oppofi- eions des équinoxcs , vient de ce qu'alors la Lune étant dans l'Equa- teur , la preflîon eft plus diredte fiir le milieu de l'Océan , l'efpacc qui eft entre l'Equateur & un Tro- pique , étant à la diftance de la Lu- ne environ comme 1 à 180- EnfiH pour abréger les reflexions de no- tre Auteur , les marées font plus hautes pendant les Solflices d'hy- ver , que pendant les Solftices d'é- té, parce que pendant les premiers la terre étant dans le périhélie , la proximité du Soleil caufe aufii quelque augmentation dans le flux de la mer. Au refte l'Auteur ne don- ne cette explication que comme >ane conjcdrure. Nous voici arrivés au rroifîéme article dont nous avons promis de ïcndre compte. Syjlême ^flronomi^ne du moHvemcrtf de la Terre, M. de S. Aubin prétend avoit rendu encore plus fimple , le Sy- ftême de Copernic déjà, fi lecom^; A O U s mandable par fa finiulicité. Il re- tranche deux mou venu ns des qua- tre que Copernic a attribués au Giobe Terrcrtre , & qu^on ne peut fe difpcnfer d'admettre dans la po- fition de l'axe de la Terre oblique par rapport à l'Equateur Célcfte. Le nouveau Syftcmc de M. de S. Au- bin n'abcfoin que du mouvement diurne autour de l'axe & du mouve- ment annuel dans l'Ecliptique. Sui- vant tous les Copcrnicicns le parai- lélifme de l'axe de la Terre eft la caufe de la variété des faifons ^ Sc de l'inégalité des jours. Jufqu'ici ce parallélifme a été expliqué par un troifiéme mouvement de l'axe de la Terre , qui fe détourne vers l'Oc- cident à mefure que le Globe avan- ce dans l'Ecliptique vers l'Orient. Copernic , &z Bion après lui , ont comparé ce mouvement de l'axe de la Terre à celui d'une aiguille aimantée, qui confervant toujours fa dire£lion vers le Nord , fe meut d'un mouvement contraire à la boette dans laquelle elle eft enfer- mée. M. de Saint Aubin fupprime ce mouvement par une pofition toujours droite de l'axe de la Terre. Le Zodiaque , félon l'Hy- pothéfe de Copernic , eft dans le plan de l'Equateur Célcfte , & fé- lon l'Hypothéfe de M. de S. Au- bin , il eft incliné fur cet Equateur, c« forte que l'équation terreftrc s'élève & s'abaiffe par rapport à FEquateur Célcfte , de tout l'efpa- ce compris entre les deux Tropi- «^ucs. Dans l'Hypothéfe de Coper- nic le cercle du jour eft invariable, ^ les pôles de la Terre palTcnt al- tcrnativemcnt des deux cotez de ce cercle ; dans celle de M. de S. Au- bin le cercle du jour eft- alternati- vement incliné des deux cotez de chaque pôle. Dans l'Hypothéfe de Copernic , le rayon dired du So- leil , ou une ligne droite tirée du centre du Soleil à l'Equateur Célc- fte , coupe l'axe de la Terre , tou- jours obliquement & par le milieu. Dans celle de M. de S. Aubin , le rayon dired: du Soleil , tombe tou- jours perpendiculairement fur l'axe de la Terre , & ce qui caufe , foit la variété des faifons , foit l'inéga- lité des jours , c'eft que le rayon direiSt du Soleil tombe fur le mi- lieu de l'axe dans les Equinoxes 8c fur un point plus ou moins éloigne du milieu -, fuivant li déciinaifon plus ou moins grande de la Terre. Car le cercle du jour eft toujours perpendiculaire à une ligne droite tirée du centre du Soleil au centre de laTerre, &c les jours font plus ou moins longs à proportion que le cercle du jour coupe plus inégale- ment tous les parallèles , à la refer- ve de l'Equateur , qui eft toiâjouis coupé en deux parties ég? les. M. de S. Aubin, dans fon Hy- pothéfe , retranche encore le qua- trième mouvement attribué à l'axe de la Terre pour rendre raifon de la precelîîon des Equinoxes & de la déciinaifon des étoiles fixes i ôc au lieu d'expliquer le progrès appa- rent des étoiles par une revolutioa fort lente des pôles de la Terre d'Orient en Occident , il en don- ne une defcription plus fimple , fan$ rien changer au parallélifme & R r r ij 44? JOURNAL D à la fituation toujours droite de l'axe, de la Terre ; en forte (tule- mcnr que la Sciftion cquinoxiale va toiijours en anticipant de 15 fécon- des fur l'Equateur Cékfte , à cha- i]ue Equinoxc. M. de S. Aubin ajoute que cet- te polition toiioui!) droite & inva- riable de l'axe de la Terre, eft plus contonne au méchanifme général de la Nature , puifqu'clle dépend du Tourbillon & de la flic des cor- piifcules qui entrent par un pôle & fortcnt par l'autre; & qu'on n'allè- gue aucune caufe de la dcclinaifon de ces corpufcules. La Terre eft un grand aiman dont les pôles doi- vent toujours fui vre également la raême vertu magnétique : plu- fieurs raifons particulières font va- rier l'aiguille aimantée , mais l'axe du Globe Terreftre , la bouffole , pour ainfi dire univerfelle, ne doit jamais décliner de fon Nord. Il eft tems de paffer à ce que dit M. de S. Aubin touchant Defcar- tes Si Newton. Comvaraifin de la Philofophie de Defcanes & de celle de Nenjuton, L'Auteur fc propofe de réfuter la Philofophie NeWtonienne dont les piincipes font -, que le vuideeft pollîble & me me ncccflaire , & que non feulement il y a du vuide dans les Cieux , mais qu'ils font entièrement vuides , que lesefpa- ecs font par kur eftence des lieux abfolus & primitifs. M. de S. Au- bin entreprend de prouver l'irapcf- ilbilité du V uidc ^ ëcil foûcient que ES SÇ AVANS, le lieu n'tft autre choie que le corps lui-même , ayant différentes relations aux corps qui l'environ- nent. Non feulement il traite l'at- rradion dt qualité occulte , mais il obfervc qu'on ne peut concevoir comme une caufe naturelle , une attradtion qui opère au-delà du vui- de , & lans un milieu réel; Que la Phvfique ne peut admettre l'adion immédiate d'un corps fur un autre corps éloigné , & qu'il y a même en cela de la contradidion dans les termes. Il ajoute que l'attradion , coniiderée comme caufe , n'eft pas plus foûtenable par fes effets. Nous paflons plufieurs autres reflexions pour venir aux couleurs élémentai- res établies par Newton. M. de S. Aubin marque un peu de défiance au fujet de ces couleurs élémentaires , elles lui paroiffent fufpedes par ce que Mariette n'a pu réuflîr là deffus à taire les expé- riences de M. Newton , 6c que M. Rizzctti au contraire en a faites qui vont à perfuader que tous les rayons de lumière font également refrangiblcs. Nous laiffons plu- fieurs autres objedions contre la Philofophie Newtonienne , pour venir à la dernière Partie de la comparaifon , où M. de S. Aubin entreprend de reparer ce qu'il croit manquer au Svftême de Defcartes, Il rejette d'abord deux excès de et tte Philofophie , le premier d'a- voir poulfé trop loin les effets des corpufcules , comme d'avertir eeux qui veillent ou qui dorment des événemens les plus éloignés; le fécond j d'atciibuei à fes dccoiO; A O U s T vertes ] une certitude non feule- ment Morale , mais encore Mcta- phvùque , fondée fur ce que les notions claires ne peuvent nous tromper- A l'opinion de Defcarres fur l'intînité du monde , M. de S. Aubin oppole cette proportion ; Que le monde étant extenfiblc de plus en plus , ne peut être aduelle- ment étendu à l'infini. Certe règle de mouvement, Qii'un corps perd autant de fon mouvement qu'il en communique , cfl combattue par divcrfes cxpcriences que nousfup- primons. M. de S. Aubin tâche de réfuter cette autre opinion de Def- cartes , Qu'il y a dans le monde une quantité de mouvemens tou- jours égale , il n'eft pas plus favora- ble à l'explication que ce Philo- fophe donne de la pefanteur par une plus grande force centrifuge de la matière fubtile , tandis qu'il compofe le Soleil de cette même matière fubtile , & qu'il le place au centre du monde. Nous voici arrivés au dernier ar- ticle qui fait une des additions du Livre de notre Auteur. De l'Infini Géométrique. M. de S. Aubin paroît avoir exa- miné avec foin les queftions qui concernent les infinis tant Géomé- trique que Phyfique , & même une cfpece d'infini Métaphyfiquc qui eft le tems. Il n'eft pas du fentiment de la plupart des Philofophes qui croycnt que ce dernier eft divifible à l'infini, il convient que le tems fit fans difficulté , piolongeable à , I 7 ? ?• ^ 44P l'infini , mais pour fa divifibiliré à l'infini, il ne trouve pas la même necefllté de l'admettre dans le tems que dans la matière : & comme le tems cft une étendue fiicciflîve dont l'écoulement conlifce dans un développement fucaffif de tou- tes les parties. Notre Auteur trou- ve qu'il s'enfui vroit de la divifibili- té du tems à l'infini , que l'inlhnt le plus court ne pourroit jamais finir. Il foûtientque l'Infini Géomé- trique ne peut être rc-gardc , que comme la fuite impoflible d'une analogie Se que toutes les fois que l'infini fe prcfente dans une fuppo^ fition , on eft averti par-là qu'elle eft ablurde. Le plus qu'infini lui paroît moins abfurde en un fens que l'Infini Géométrique , parce que l'Infini Géométrique cft fup- pofé àans un poim de rencontre aui ne peut rencontrer; au lieu que le plus qu'Infini a un point de ren- contre véritable , mais pris du côté cppofé à la première fuppofition; Notre Auteur obfervc que l'amour du merveilleux qui a caufé tant de ravages dans l'Hiftoiie , dans l'éloquence , & en tout genre litté- raire , fait depuis cent ans tous fes efforts pour corrompre la Géomé- trie même qui eft de toutes Scien- ces , celle qui paroît devoir le moins craindre cette contagion. M. de S. Aubin explique une nouvelle méthode d'un calcul dif- férentiel dont l'objet efl d'operet fur des grandeurs finies quelcon- ques, fans admettre les Infiniment- petits. Tout l'ait de ce calcul tit de 4?a JOURNAL D eoniîderer dans la réunion de deux fiii de pluficuis points, les rapports qu'.iuroient ces points féparcs , & par ces rapports fuppofés d'en trou- ver de véiir.vbies. li attribue l'invention de ce cal- cul à M. Rolialle de Boifgelon , Confciller au grand Confeil , & ii faii; remarquer plufieurs avantages de cette méthode fur celle de M". Leibnits &c de l'Hôpital , foit parce qu'elle employé deux caraâierifti- ques qui entrent dans le calcul comme des coëffeciens , foit parce que les triangles différentiels ont tous leurs côrex redilignes , & vé- ritablement analogues -, foit parce que les grandeurs qu'on néglige font effedivement nulles , foie principalement parce que les Infi- niment-petits, & les ordres infé- rieurs infiniment plus petits les uns que les autres , font rejettes ; ce calcul cft renvoyé à la fin du troi- fiéme Volume , & il eft traité fépa- rcmcnt comme n'étant intelligible que pour un petit nonrbre de Lec- teurs verfés dans l'Algèbre , & la Géométrie tranfcendante. Ce qui a donné lieu à ces dif- cullîons des différentes efpeces d'infinis ; c'eft un problême fur l'ef- fence de la matière inférée dans le Mercure de Novembre 1733. qui tendoit à démontrer parla Géomé- trie , qu'un corps peut être en mê- me tems dans tous les lieux de l'U- nivers. Nous finirons notre Extrait en remarquant que M. de S. Aubin combat en piufieurs endroits le fcntimenr des modernes, qui, à ce ES SÇAVANS, qu'il prérend , ont rempli la Géo2 métrie de propodtions mconceva- bles & impodiblcs , fondées fut un mélange prcfque continuel ds la divifibilitéarinfini , & desindi- vifibles. Il dit avoir été trcs-furpris de lire dans les élémens de Géomé- trie de M. NJalezieu , Que la divi- fibilité de la matière à l'infini cil certaine , & que cependant la con- tradiâ:oire de cette proportion , fçavoir , l'exiftence réelle des indi- vifibles , eft ceç^ame aulli. Qiiellc fource de Pyrrhonifme , s'écrie-t- il , fi ces deux contradiftoires fone compatibles ! M. Malézie» tire des incommenfurables , ladéiuonftra-, tion de ladivifibilitéde la matière à l'infini; M. de S. Aubin avoiie que ce Géomètre a raifon en cela. Mais il prétend que les raifonne- mens que fait ce même Géomètre pour démontrer la necefljté des in-' divifibles font des raifonnemens très-foibics. Nous allons rapportée d'abord les paroles de M. Malé- zieu , & cnfuite la réponfe de M. de S. Aubin. »> Si le point eft impoflîble , dil » M. Aïaléz.ieu , qu'ell - ce donc n que la rencontre des deux cotez » qui forment l'angle d'un quarréî » Si le point eft impoflîble , le cer- i> clereftaurtî. Car fi Dieu forme n une boule parfaite, & qu'il la po- 30 fe fur un plan parfait , le point » de contingence aura t il quel- » que étendue ? S'il en a , il elï fur- » face ; ou pour le moins , ligne,' » Ainfi la tansente & le cercle au-" » ront une étendue commune ^ » contre ce qui eft démontré. Di-:' I A O U s *fez votis que Dieu ne fçauroic » faire un cercle parfait ; Vous au- rt riez plutôt fait de dire ^ que "Dieu n'eft pas, j> D'ailleurs quand je confîderc « attentivement l'cxiftence des » êtres , je comprends clairement , »que l'exifencc appartient aux »3 unitcz , & non aux nombres. » Vingt hommes , par exemple, n n'exiftcnt que parce que chacun y d'eux exifte. Le nombre n'ell M qu'une répétition d'uniccz auf- « quelles feules appartient i'exi- » ftcnce. Cela bien entendu, con- 3> tinuc M, Adidézjeti , je demafide » fi un pied cubrque cft une feule » fubftance ou fi c'en eft plufieurs ? » On ne peut pas dire que ce foit » une feule fubftance , car on ne » peut pas feulement le divifcr en » deux. Si l'on dit que c'en eft plu- »»-fieurs orr ne peut difconvenir » que ce nombre , quel qu'il foit , a» eft compofc d'unitez. Or fi dans » ce cube il y a plufieurs fubftances »exiftantcs , il faut neceffairement 30 qu'il y en ait une , & cette une » ne peut en être deux. Donc Ja aj matière eft compofée de fubftan- » ces indivifibles. M. de S. Aubin répond à cela que le premierraifonnementdeM. Malézieu fe détruit par cette ob- fcrvation : Que la rencontre de deux cotez qui forment l'angle d'un quarré ,. rxe peut avoir une pré- eifion Géométrique exécutée maté- liellement , & réellement -, que le point de cette rencontre eft une ab- ftradionde l'cfprit, de même que ics autres points, les lignes & les T, 175 r- 4i'r furfacesi Qu'il eft pareillement im- polfible de faire un cercle matériel qui ait une perfedion géomérri- que , parce que cette perfection emporte précifément l'cxclufion de la matière par l'idée conrradic- toire de l'une & de l'autre. M. de S. Aubin trouve que les points nailTans & cvanouiftans dcNewtoii ne font pas plus poilîbles, les ex- tremitez de la matière ne pouvant ccre que matérielles elles- mêmes , &diviliblcs à l'infini. Il remarque qu'il y a même cette différence en- tre les points , les lignes & les fur- faces , qu'une furtace quoiqu'infé- parable d'une profondeur , donne cependant aux fens , une prife fé- parée, puilqu'on peut voir & tou- cher une furface , fans voir ni tou- cher une profondeur , au lieu que les points & ies lignes ne peuvent ni exifter féparément , ni être ap- perçusféparément.Ilobferve enco- re cette différence entre la ligne & le point , que la ligne eft un objet pofitif de l'entendement , parce qu'on trouve à la ligne une pofi- tion , & que la penfée a prife fur une longueur, au lieu qu'un point ne peut être conçu que par retran- chement , qu'il ne prefente riea que de négatif à la penfée , qu'on ne peut l'imaginer que comme ce qui n'a point de parties , comme ce qui n'a ni longueur, ni largeur, ni profondeur , & qu'il n'eft pas mê- me un objet pofitif de l'entende- ment. U eft donc auffi impoftîble, con- clud M. de S. Aubin , qu'un cercle ait un point de contingence 8c foit 45-2 JOURNAt D parfait: géométriquement , qu'il eft impolTiblc que la matière foit lépa- tée de fon sdence , ou que de la matière ne foit pas de la matière. A l'égard de la toute-puiffarice infi- nie de Dieu; notre Auteur dit qu'il cft évident qu'elle peut employer des moyens inconnus à nosfoibles lumières, mais que ce fcroit man- quer au profond rcfpedl qui eft dû à cette puiflance infinie & à l'efTen- cc Divine ^ que de lui attribuer ce qui cft incompatible avec elle , comme d'adm.ettre en même tems & dans un même fujct les conrra- didloires , de changer les effences des chofes , & d'agir contre fes propres décrets. Le fécond raifonnemcnt de M. Maléz.ieu , ne paroît pas plus con- vaincant à M. de S. Aubin. Il le re- garde comme une pure pétition de principe. Un pied cubique de ma- tière , dit il , cfl: auiïî indivifible qu'un homme , en tant que pied cubique , &c en tant qu'homme. Chacune de ces fubftances en ce fenseft une feule fubftance. Mais la matière ou le corps en général eft neceffairement une fubftance mul- tiple &: compofée de parties divifi- bles à l'infini. En ce casl'exiftence appartient nccclTairemcnt à des parcelles réunies , elle n'appar- tient donc pas toujours aux unitez, &: rette r f^podtion ne peut être donnée f oui une preuve , puifquc ES SÇAVANS, la queft;on cft de fçavoir <î en divi-' fant la matière on peut parvenir à une dernière unité indiviliblc. M. de S. Aubin convient qu'il ne peut y avoir de nombre qui ne foit compoié d'unitcz , qu'aufli dans la divilibilité a l'infini , il n'y a aucun nombre , qu'elle eft au contraire l'exclufion dctoutnom- bre fini , &: que le nombre ne peut devenir infini, pufqu'il cft fufcep- tiblt d'additions d'unitez. Il n'y a donc dans la dividbiliré à l'infini ni nombre fini ni nombre infini, m unité. M- Malczieu , à ce que prétend M. de S. Aubin , abufe encore du terme de fubftance. Une fubftance matérielle qui peut être anéantie par ladivifion n'exifte que par l'unité , ainfi un pied cubique de matière ou un homme divifé en deux , n'ont plus l'exil^ence d'un pied cubique ou d'un hom- me , mais la matière elle-même ne peut être détruire par ladivifioni & c'eft une fubftance qui ne fçau- roir être anéantie que par la toute- puilTance du Créateur, une fub- ftance qui bien loin d'exifter par l'unité, n'exifte que par la multi- plicité de fes parties. Nous avons cru à propos de rapporter au long cette réponfe de M. de S. Aubin , pour prévenir les Lcdteurs fur tout ce qu'ils trouveront dans la fuite de fon Traité de l'Opinion , au fujec de l'infini , & de la Géométrie. CHIRURGIA A O U s T . 173;. 4n GHIRURGIA THEORICO - PRACTICA , DE VULNERIBUS, Audore Petro Guifard , Doùoîc Mcdico Monfpelienfi. Avenionc apud Marcum Chave , Typographum 6i Bibliopolam , propc Fratres Minores Conventuales. 1755. C'eft-à-dire : Chirurgie Thèorico-PraEli^ue , des Playes ; far Pierre Gui- fard , DoEleitr en Médecine de Montpellier. A Avignon , chez Marc Chave , Imprimeur & Libraire , près le Convent des Frères Mineurs. Brochure /«-li. pag. 53. C'EST ici un de ces Ouvrages qui ne coûtent pas beaucoup de peine à leurs Auteurs , M. Gui- fard avolie lui - même qu'il n'y a rien mis du fien , & que tout ce qu'on y trouve cft un lîinple afîem- biage de ce qu'il a lu en divers Traitez fur les Playes. Pajfim apud vanos yluclorum Libres fiijiiis fpar- fg fermone hreviori collcgi. Il dit cependant que l'Opufcule dont il s'agit , cft le huit d'ua grand travail. Opnfculim non fine multo lahore p.îriuni.MMily a tra- vail & travail. Il faut de la peine fans doute, pour ramalTer de divers cotez j de quoi faire un Livre, ne fût-ce , comme dans le cas pre- fent , qu'une fimplc Brochure. On peut dire même que les moins amples Recueils ne font pas tou- jours ceux qui coûtent le moins de travail , parce qu'un petit Recueil demande d'ordinaire plus de choix qu'un plus étendu. ■M. Guifard commence d'abord par des gcnéraiitez de Chirurgie i il -explique ce que c'eft que fraCtu- xe, fêlure, carie, playe, ulcère , &c. Il prétend que ceux qui appellent indifféremment phye ou blelfure joute iblution de coatinuitc faite dans une partie molle , fe tro.Tt- pent confiderablement. La playe vient d'une caufe externe , & l'ul- cère d'une caufe interne. La blelfu-; re ou playe n'eft pis toujours ac- compagnée de déperdition de fub- ftance j &c l'ulcère n'eft jamais fans cela. Notre Auteur définit enfuite , ce que c'eft que playe , & en rapporte les différentes cfpeces. La playe eft une folution de continuité fraîche Se fanglante venant du dehors 6c faite fur une partie molle , ce qui la diftingue de l'ulcerc qui vient toujours du dedans. M. Guifard rapporte à cette détinition les morfures , les piqueures , les con- tufions. Il obfcrve que quoique les CGnrufions ne paroiirent pas fui- vies d'hémorrhagie il ne lailTe pas d'y avoir des épanchemens fecrets fous la peau , aufquels on doit rap- porter les échymofes , que tour de même , encore que dans les contu- fions, la peau ne foit pas déchirée , les parties internes ne lailîcnt pas de l'être. Il obferve encore que la playe eft fimplc ou compliquée ; que U fimplc eft celle qui n'eft accompa- gaée d'aycun fymptôme , &i h Sff 45-4 JOURNAL D compliquée , au contraire celle qui en eft accompagnée ; Qu'il y a des différences accidentelles dans les playcs , lefquellcs différences fe tirent par exemple de la grandeur de la pjaye , de fi petitelfe , de fa iiç^ure & autres circonftances que notre Auteur déiigne , Si que tout le monde fçait. M. Guifard remarque que les différences ertcntielles des playes fe tirent , i°. des évenemens qu'elles annoncent : car il y a des playcs exemptes de péril , d'autres qui ne prélagcnt que des fuites fàcheufes. 2.*^. De laléfion des fondionb. 11 y en a où les fonétions des organes fe trouvent Icfces abfolument , d'au- tres où elles ne le font qu'en partie: ce que l'Auteur a;oûtc enfuite, fur les caufes qui peuvent produire des playes , ne piroît pas plus par- ticulier , fçavoir , que ces caufes font des corps , ou qui picquent ou qui coupent , ou qui déchirent, ou qui font des contufions y un bâton , par cxi mple , dit-il , une pierre, une balle de moufquer , font ordinairement des conrunons. Il établit cnfuite le diagnoftic des playes-, il remarque d'abord qu'une playe qui n'eft point pénétrante eft auffî rôt apperçûë ,. au lieu que la playc protonde eft plus difficile à eonnoître. Il obferve outre cela que les Praticiens font fouvent embar- laffés pour déterminer fi une playe eft protonde ou non , la fonde eft d'un grand fecours dans ces cas, mais notre Auteur remarque qu'elle y eft auffi quelquetois trts- dangercufe , èc qu'il faut bien ES SÇAVANS, prendre garde qu'en fondant une playc on n'en faite une nouvelle. Ce qui demande beaucoup de pru- dence &: d'atrcntion. Il dit qu'il eft mieux de négliger la fende , pour examiner les fymptômes qui ac-. compagnent la plave, & la matière qui en fort. Quant aux 1\ mptômcs ils font idiopatiques ou fympathi- ques. Le délire , par exemple , comme le remarque notre Aureur,. furvient après l'entoncement d'une partie du cr;ine , ou après l'épan- chement de quelque humeur , foie' dans ia tcte , loit dans fes envelop- pes. Le délire cependant ne doit pas' toujours être regardé comme un effet de ces caufes , quoiqu'il iur- vicnne après , puifqu'on Içair que les bleff^urcs des tendons font fort fouvent luivies de délire j en forte que cet accident" eft alors unique- ment fvmpatiquc, M. Guifard donne le figne diag- noftic des playes de la tête ; celui des playes de la poitrine , celui' des playes de l'abdomen , & enfin celui des playes des autres partie;.. Il rapporte les fignes caradlériftiques de la blelTure de l'artcre , & de cel- le de la veine. Il pafTe delà aux plaves du col qui peuvent attaquer le larynx , l'œfophage , les )ugulai- res , les nerfs recurrens ; il obferve que s'il n'v a qu'un nerf récurrent qui foit blcffé ou coupé , la voix devient rauque , ^ que fi les deux font bleffés , elle s'éteint tout-à- fait. Il fait enfuite mention des plaves de la moelle qu'il obferve être fui vies de la ceflation du mou- vement dans les parues inférieuiesj A O U s yuis il pafTe aux playes des chairs , & aux contulions , il alfure que la contulion fe découvre au premier coup d'oeil , fi elle cft extérieure : qu'un lentiincnt de pefanrcur Se d'engourdilfement s'y tait apperce- voir, que la couleur de la playeeft tantôt rouge , tantôt roulTe , tantôt verte , tantôt plombée , tantôt noire; la contulîon , fans playeà la peau a les mêmes figncs à peu- près. Si la playe efl: protondt & qu'elle ne foir pas apparente , ou ne peuts'alTurer fi elle eft contufe , que par h relation que le maiade tait de ce qu'il lent. M. Guilard traire cnfuite des coups de mouf- quet , des playes faites par de fim- ples morfures , Si des playes véni- meufes. Les fymptômes des playes , k cure des playes , Si de leurs acci- dens, terminent le Livre , tout ce que notre Auteur dit là-defl'us eft bon , mais très-connu , c'eft pour- quoi nous ne nous étendrons pas davantage. 'ABREGE DE L'HISTOIRE SAINTE , AFEC LES PREVUES de la Religion , pay demandes & farréponfes. 175^. A Paris, chez la Veuve Etienne , rue S. Jacques i Jac &C David à mener paître des »' Moutons. Pour rendre fon fujet plus cu- rieux & plus interellmt, l'Auteur a ajouté quelques demandes fur les mœurs des ifraclites ; il avoiie que fur ce point le Livre de M. Fleury qui traite de la même matière, lui a beaucoup fervi -, mais un des princi- paux moyens qu'il a rais en œuvre pour diverfifier fon Ouvragc,cft d'y avoir fait entrer quelques vers de nos meilleursPoctes qui onrtravail- lé.fur des fujers tirés de l'Ecriture Sainte, ainll les Tragédies d'Elther & d'Arhalie, celle d'Abfilon par M. Duché , & celle des Machabécs par M. de la Motte , lui ont fourni plufieurs traits qu'il regarde com- S SÇAVANS, me un des principaux ornemcns ât fon Ouvrage , £c qui étant hillori- ques en deviennent en même tem^s une partie necclfaire. Il s'étend peu fur le Nouveau Teftament , parce que ce Livre n'e- xigeant pas les mêmes précautions que l'Ancien, on le met de très- bonne heure entre les mains des • cnfans. Mais pour rendre fon Ou- vrage plus complet , il le finit par un petit Traité fur la Religion , cà il ralTcmble les preuves les plus fenfibJesqui en établilfent h vérité; ^ fi quelqu'un craignoit qu'elles' ne lulTent pas à la portée des cn- fans , on eft perfuadé avec lui que l'expérience montreroit bien-tôtle contraire. Il a eu attention que la plupart des demandes rcpondiifent aux images de la Bible de Royaumonr , afin que ceux qui l'auront , & qui voudront en même tems fe fcrvir de fon Abrégé , diminuent la peine des enf.ins en leur faifant , pour' ainfi dire , apprendre par les yeux le contenu de [es demandes. En un mot on pourra regarder ce Livre comme une petite Biblio- thèque de Morale 6c de Religion à l'ufage des cnfans, quoiqu'en niê- me tems on ne puilTe rctufcr à co- lui qui l'a rallembléc , la louange d'être très - profond dans l'une iiS - dans l'autre de ces Sciences. L-^ A O U s T , r 7 5 J» 457 JSIOVVELLES LITTERAIRES, ITALIE. De Milan. LE Père Gratioli de Bologne ^ Clerc Rtgulier delà Congré- gation de S, Paul, doit publier in- ceffamment en Latin la Defmpiion dei anciens Edifices de la rilts de A^ilan. Cet Ouvrage fera enrichi d'un grand nombre de figures en taille-douce. ANGLETERRE, De Londres. The Atickinical-PraElice ofPhy- fic'n^ , i-ri iP'hich the Specifixl^Method is exdmind and exploded , &c. C'cft-à-dire : " Pratique Méchani- » que de la Médecine' , où l'on «examine Se rejette la Méthode »■ des Spécifiques , & où l'on réhi- » te l'Hvpothéfe de la Sécrétion 3> animale & du mouvement muf- 3>xuhirc de Bellini , avec quelques «Remarques & Scholies fur le 3>Trairé de la petite Vérole du 3> Dodlcur Lobb; fur le Livre de » l'oeconomic animale du Dodicur » Robinfon , & fur le Syftêmc du 3>'Do(5leur Bocrhaave touchant les s-efprits animaux & le mouvement 3> mufculaire. Par 7". Morgan^ Doc- 3» teur en Médecine. /'«-S". 7^}S Defcription^ and iife ofa new Jflronomical Iujimmem^ ^c. » Dcf » cription & ufage d'un nouvel In- » ftrumcnt Allronomique , pour «prendre la hauteur du Soleil & » des Etoiles fur mer fans horifon; » avec une Méthode aifce &: fure û=d'obferver les Eclipfes des S.ncl- » lires de Jupiter , ou de quelque )> Plancttc fur un Vailfeau pour dc- " terminer la différence des Mérf- >3diens fur Mer , à quoi l'on a » ajouté des Tables pour iiipputer » le rems que les Eclipfes du pre- y> mier Satellite de Jupiter-'arrivent 3> fous le Méridien de Londres. Par M.Caleb Smith. Brochure /« 4°. avec la figure de l'Inftrument en taille-douce. Deftderata ctmofa : or a ColleEîion &c. C'cft-à-dire : » Recueil de di- » verfes Pièces Manufcrites , rares » & curieufes qui regardent princi- » paiement l'Hiftoire d'Angleterre ^ dont plufieurs font tirées deS X, Manufcrits originaux , Se les au- « très d'anciennes copies Manuf- » crites , ou des Recueils de Ma- y> nufcrits de plufieurs fameux An- ^riquaires, &: d'autres perfonneS " célèbres tant du fiecle paflï que » de celui-ci. Par M. Teck^ in-folio deux Volumes , dont le prix eft de deux guinées. Roberti - Srephani Thefaurns Lin- çiiivLatin£. Editio nov4 ^ vnoribUs multo auHior & emendatior. Typis & expenjîi Samuel. Haiding. 173 4.' m- folio 4. vol. 45 s JOURNAL D On doit imprimer par Soufcrip- tion Aneiu Trcatife ofArchiieëitre^ re ^ &c. Nouveau Traité d'Archi- tetfliire, contenant les cinq Ordres, félon les quatre plus célèbres Au- teurs , Vignole, Palladio, de Lor- me & Scamozzi avec 125 planches .& l'explication de chaque planche. Traduit en Anglois lur l'orij^inal de M. àe Nativdle. Par M. Charles Rtvers. Cet Ouvrage fera imprime en deux Volumes in -folio fur de très - beau papier Impérial , & ta Soufcription el^ de iix guinées , dont on payera la moitié d'avance. HOLLANDE. D'A M s T E R D A M.' Extrait (tune Lettre, Ni l'Elien de yînimalihus , ni le Sophocle , ne font fous aucune Prcf- fe de Hollande , & on ne connaît perfonne qui parle de les donner. Le Lucien s'imprime chez- nous ( Les iVetJieins ) mais fi lentement que nous ne fçavons pas quand il pourra paroître. Il n'y en a qu'un tiers d'imprimé. M. Drak^embork}) fait imprimer leTite-Live , il y en a 200 feuilles d'imprimées , il faut encore qua- tre ans pour achever cette impref- fion , l'Editeur eft connu par fon Silius Italiens. M. ^Iberti , Auteur du Glofaire Grec fur le Nouveau Tejlament , /«-S", travaille à {' Hefychins , mais il ne commencera de l'imprimer ^uc lorfque fon Ouvrage fera ache^ >'é. ES SÇ A VAN S, M. Bnrmann donne une nouvel- le Edition du Sk^/o»^ de Graevius ;»-4''. avec de nouvelles Remar- ques. On va mettre fous Preflfe les Let- tres de Libanius^ in-folio. On y ajoii- te plus de mille Lettres qui n'ont jamais paru. L'Editeur eft M.U^olf FRANCE. De Rouen. ^. B. Machuel débite la F'ie 4i Monfieur Jean Baptijte de la Salle Jnfiituteur des Frères des Ecoles.in-^", 2. vol. & les devoirs d'un Chrétien envers "Dieu , & les moyens de s'en pouvoir bien ac^uiter. Par le même JM. J. B. de la Salle, in- 12. De Paris. RoUin fils , Quai des Auguftins J à S. Athanafe , fepropofc d'impri- mer une nouvelle Edition du Livre des InflruEîions Chrétiennes fur les Miflcres de N. S. J. C. & fur les Dimanches & Fêtes de l'année. Par M. de S. G. Cet Ouvrage , dont il y a déjà eu cinq Editions en cinq Vol. /«-8°. fera dans celle-ci en 12 Volumes /«-i 2. & fera augmenté de la Vie de l'Auteur qui n'a pas encore paru. Le prix de ces douze Volumes fera de vingt livres. Ceux qui voudront s'ajfurer d'avance d'uo nofifbre raifonnable d'exemplaires ,' pourront obtenir une remife honnête. liés de la Religion Chrétienne, où l'on explique fuccintementtout ce qui eft neceftàire pour être fauve. A O U s T Chez Vratiçoisjouenne , rue S. Jac- qius , à S. Landry. 173 5. /«• 1 z. ^hregé de l'Hijtoirs de t'j4>>cien Tejliinient , où l'on a confcrvé au- tant qu'il a été podible les propres paroles de l'Ecriture Sainte , avec des éclaircilTemcns & des nfle- iions. Chez Jean Defuint , rue fiint Jean de Beau vais. 1735. m- 11. deux vol. Le Doyen de Killerine , Hiftoire Morale compofée fur les Mémoires d'une lilullie Famille d'Irlande, &i ornée de tout ce qui peut rendre une Icdure utile & agréable. Par t'^iuieiif des A'iémotres d'un Hov,me de Qualité. Chez Didot , près le Pont S. Michel , à la Bible d'or. 1735. /«-i 2. Syftême de M. Herman Boerhaave fur les Maladies f'^éné^ietines. Tra- duit en François par M. de la Met- trie , Docteur en Médecine. Avec des Notes, & une Differtation du Traduifteur fur l'origine , la nature 6c la cure de ces maladies. Chez Frault fils , Quai de Conti. 17J5. in - 1 2. Le fécond & letroifiémeTomc de VHiJioire Littéraire de la fran- 17?^ 4;p ce, parles RR. PP. Bénédidins de la Congrégation de S. Maur , font tn vente chez Chatthert , Libraire du Journal ; GiJJey, rue de la Vieil- le Bouderie; Cloiijier , rucS.J.-.c- ques , fvi Ccwpagnie. Le quatrième Tome , qui con;mcncc au huitiè- me fiécle , eft aduclltmcnt fous PrelTe , & paroîtra incillamment. Les Adieux de Mars , Ccmcdic Héroïque en vers & en un Ade rcprefcntée avec fucccs fur leThca- tre des Comédiens Italiens ordi- naires du Roi , ne peuvent que faire honneur à leur Auteur. Cette Pièce juftement applaudie aux ré- préfentations , ne perdra rien à la iedure ■■, les grâces & la délicatcde du ftile , l'élégance de la verfifica- tion y font agréablement reconnoî- tre l'ingénieux Auteur de la Tra- gédie de Didon. On trouve l'une & l'autre Pièces imprimées chez Chaubert. Didot, Quai des Auguftins, à la Bible d'or , vient de mettre en ven- te : Remarijues de Chymie tmcha-nt la préparation de diffèrens Remèdes njttéi dans la Pratique delà AiedS'. cine, in- 11. Fautes à corriger dans le Journal de juillet 1755. PAge 160. lig. ^. Pâéliminaire, ///«?, liminaire : Pag. jô'î. col. i.I. i8„ demeurent courts , lifiz. demeurent court : Page ^66- col. i.lig. 10. C^KeW^w, lifiT^ (r«e7ra{ft) : Pag. 367. col. 2. lig. 25. Via.i/«'&- le pouvoii de l'amour ilii un cœur , Tui- tout fus un cœur fcnfible. TABLE Des Articles contenus dans le Journal d'Aouft 1737." POe/ies de Mademoifelle de Materais de la Figr,: ^ pag. j 59 Hijïoire Critique de s Journaux , 408 La Statiejue des Végétaux , &c. 4 1 G Vu de l'Empereur Julien , 42.(> La Lnfiade du Carnoéns , Sic' 437 Traité de l'Opinion , &:c. . 44 j Chirurgie Théorico - PraSlii^He ^ &Cc: ■ ' ■ 4^^ Abrégé de l'Hiftoire Sainte ^ &c. 45 j iJoHvelles Littéraires , 457 Fin de la Table; L E JOURNAL cavÀns, r 0 u R V ANNEE M. DCC. XXXT- SEPTEMBRE. A PARIS, Chez CHAUBERT, à l'entrée du Qiiay des Auguftins, du côté du Pont Saint Michel, à la Renommée & à la Prudence. " M. DCC. XXXV. AVEC APPROBATION ET FKIVILEGE DU KOY. LE JOURNAL DES SCAVA SEPTEMBRE M. D C C. XXXV. ESSAIS SVR DirERS SVJETS DE LITTERATURE ETDE Morale , dtvifês en deux Paittcs. 1755. A Paris , chez Bri.JJm ^ rue S. Jacijues, àla Science. /« II. I. Part. pag. 26^i. II. Part. pag. 188. QUAND on confidere cette multitude de Romans dont le Public eft aujourd'hui innondc , il femble que nos meilleurs Au- teurs foient perfuadcs que le mon- de à force de vieillir foit tombé en Se^temb. enfance -, les Ouvrages de reflexion qui faifoient autrefois les délices de nos Pères , n'ont plus rien qui pique la curiofité. Tout Livre pen- îc , & qui donne par cette raifon beaucoup à penfcr.cîlraye .\ prefent T t c ij 4é-t JOURNAL D le commun des Lcdeurs , & dé- goûte bien - tôt ceux qui ont le courac;e d'en entreprendre la ]e^ftêmes , des Ecrits dans lefquels, » fans trop chercher le neuf, & fans n l'éviter autfi , on tâcheroit de >i renfermer en peu de mots ce qui » a été dit , & ce qu'on a penfé » foi même de meilleur fur chaque » matière ^ Se àt rapprccier ainls » un grand nombre de vétirciî épar- » fes en divers endroits^ des Ecrits, irdisje^ds cette nature pourroienc « être goûtés des perfonnes intelli- o gcntes qui aiment la précifion , » qui fe plaifent à voir plufieurs » chofes à la fois , & pour aind di- >' re d'un fcul coup d'oeil. C'eft d'après cette idée qu'il s compofc plufieurs des Ecrits qui torment ce Recueil ; mais comme il fe propofe de donner des idées claires , plutôt que d'exciter des fentimcns confias , il craint que quelques endroits de fon Livre ne paroilTent trop abftraits ou trop métaphylîqucs , il n'annonce , dit- il , que de la Littérature & de la Morale , 2c fur cela le Lecteur ne fe prépare pas à beaucoup d'arten- tJon i /'/ ne cnnfi.tere pas c]ii'on peut parler de la Plnlofophi-e en OriUeur OH en Fuite , & parler de la Poéfl: «« dt l' El«(jiience en Philojophe^ s E P T E M Mais il montre tort bien qu'il eft impoffible , quelque matière que l'on traite , de l'approFondir un peu , de fixer clairement les idées , S>: de d-^mêler certaines dif- férences qui font entre les chofes , fans être un peu abftrait. » Mais 3> erre abftraic Se être obfcur , c'eft y> la même chofe pour ceux qui à font accoutumés à faire plus d'u- » f.ige de leur imagination que de » leur efprit. L'article fuivant où il s'agit de h converfation, traite de h facilité d'y bien parler , des grands par- leurs , de la nature de la converfa- tion , des moyens d'y plaire , de la manière de conter , de raifonncr , de plaifanter , G'c. Mais dans l'im- poflibilicé où nous fommcs de don- ner un Extrait fuivi d'un Ecrit qui n'ed: compofc que de penfées déca- chées , plus ou moins étendues , félon qu'elles ont fourni plus ou moins à l'Auteur. Nous nous con- tenterons d'en rapporter ici quel- ques traits, pour mettre le Ledleur à portée de juger du caracîlere qui règne en générai dans tout Ouvra- ge- " Un grand parleur cft un en- * fant chéri de la nature ; elle lui a w fait un don propre à aiTurer fon » bonheur ; elle lui a préparé dans » ce prétendu défaut la plusfécon- x> de rcflource contre l'ennui , qui ta cft un des plus grands maux de la » vie. » J'ai pitié d'un ennuyé qui 3> m'ennuye & je voudrois bien m pouvoir le défennuyer. Mais j'ai »de la peine à m!epipêehct de B R E , I 7 3 r. 46^ » concevoir quelque dépit contre » un ennuyeux qui s'ennuye d'au- » tant moins qu'il m'ennuye plus » lui-même. » On a ditjfi vous voulezêtre ai- » mé , aimez. Ce moyen cft bon ^ » mais il n'eft pas infaillible ; en » voici un plus fur. Si vous voulez » être aimé , eftimcz , ou du moins 30 paroidez eftimer -, l'cftime n'a ja- » mais fait d'ingrats ,. & d'ailleurs non la croit ailémcnt fincére. Ce » n'eif pas tout , & l'on pourroit » dire encore , Il vous voulez être » eftimé, eftimez ; par-là vous met- » fez l'amour propre des autres de '» votre coté. Bien- tôt ils vous edi- » meront ; fiez-vous-en à leur in- 3 terêt : ils font il fottement vains «qu'ils fcroicnt flattés de vôtres » cftime , quand même ils n'au- » roient pour vous que du mépris, M Mais elle vous flattera bien da- » vantage , s'ils vous eftimcnteux- » mêmes. Celui qui nous cftime a '> du moins dudifcernement , fur- » tout s'il méprife nos rivaux. Tantôt pour jctter plus de varie- té dans fon Ouvrage , il y fait en- trer des converfations fpiriruelleSj • &c des Scènes inftrudlives dont if a été témoin, tantôt il l'orne de por- traitsqui paroiffent deffinés d'après nature , & pat-tout on y trouve une jufte application des principes qu'il établit ,. foit aux ufages , ou aux préjugez reçus dans le monde ^ lorfqu'il eft queftion de Morale ^ foit aux Ecrits les plus célèbres^ lorfqu'il j'agitde Littérature. L'Auteur pafle de la converfa- tion an taltnt de farUr , & à ceim ^66 JOURNAL D d'écrire. Il fait fentir en quoi l'un & l'autre confiftc , 5c pourquoi ces deux talcns fe trouvent fi fouvent réparés clans des hommes qui ont cependant beaucoup d'efprit. On fouhaiteroit peut- être que l'Auteur eût plus approfondi le fui- vant où il ell queftion des ejuaUtez. necejpiires four Lifocietê. Il y corn pa- » rc les perfonncs féches, mais bon- » nés au fonds , à ces arbres qui »» donnent d'excellens fruits , mais M qui n'ont rien d'agréable à la vue, » leur place , dit-on , cft dans le » potager , ils figurcroient mal » dans le Jardin. Et ceux qui au •> fonds ont de l'cfprit , mais un ef- » prit lent & froid, qui s'animent » avec peine , mais qui brillent » dans leur chaleur , reflemblent » à CCS parfums qui ne répandent » leur odeur que iorfqu'on les brû- -Ic. L'article qui a pour titre de U Criti(fue des Ouvrages d^efpric , offre une infinité de reflexions judicieu- fes , on y montre que le grand nombre de ceux qui jugent bien des Ouvrages des autres lans avoir jamais nen écrit cux-memcs , lonc en quelque forte la dupe de leur difccrnement & de leur bon goiit ; ils ont tort , dit l'Auteur , fi je puis m'expritner ainfi de conclure du bien juger AU bien faire. Il montre que Cette confcquencc cft faulTe en toutes manières. • Tel qui corrige très - bien un » Ouvrage , n'en feroit jamais un » qui valût la peine d'être corrigé. » Les Auteurs médiocres font >» communs parmi les Auteurs > ES SÇA VANS, » mais les hommes capables d'être » des Auteurs médiocres font très- " rares parmi les hommes , je dis » parmi ceux qui fc picquent d'ef- » prit &: de littérature. » Tel Ecrivain eft uii homme n d'un cfprit médiocre compilé » aux Ecrivains du premier ordre ; » mais c'eft fouvent un homme de » beaucoup d'efprit comparé à li «plupart de ceux qui le jugent «avec tant de hauteur & de févé- » rite. » Comment , difoit quelqu'un «dans une Compagnie , où l'on n venoit de lire quelques endroits » d'un Ouvrage mêlé de grandes » beautez & de grands défauts , '» comment un homme qui a autant » d'efprit que M. de *** , a-t il pu «mettre & laider dans fon Livre » de fi mauvaifes chofes ? Afiuré- " ment cela ne fe comprend point. » Compofez vous-même quelque » Ouvrage , lui répondit un de » ceux qui l'écoutoient, vous don- » nercz lieu à une pareille que- »ftion , de peut- être trouverez- » vous par-là la refolution de votre » problême. Dans le premier des trois articles qui viennent enfuite , on examine pourtjfuoi la vite de ceux cjue mus avons ojfenfés nous eft défagréable , dans le fécond quels font les effets de l'habitude , de l'amour propre & de la moieftie , & dans le 7' on trai- te de la pmpliciti & des différentes fortes de modeflies. On nous y apprend à diftinguer entre elles des pallions qui paroif- fentles mêmes au dehors , quoiqu* s E P T E M dans le fonds elles roient tort diffé- rentes , on n'oublie rien pour en démêler les nuances les plus délica- tes & pourdévelopper les replis les plus lécrets du cœur humain. Il s'agir dans les quatre arricles fui vans de la neccjfué de fuivre Jon talent. De la prévention. De l'orgueil & de fis effets , 67" de la douceur. En parlant de la neccllitéde fuivre fon talent , M. l'Abbé Trublct prouve folidement combien il eft dange- reux de vouloir s'effaycr fur diffe- rens genres , il eft vrai cependant , ajoûte-t-il , qu'on pourroit citer quelques Auteurs , qui après avoir paru s'épuifer dans un genre, ont paru enfuite fe renouveljer dans un autre. Horace & Virgile en font des exemples. Le premier >» a fait « des Poëfies familières , & des » Poëfies fublimes , le fécond a 30 tiré les fons les plus doux de la » flûte Pàftorale , les fons les plus =» nobles de la trompette héroïque. s> Et pour parler des modernes, feu y> M. de la Motte de l'aveu de fes 3> Critiques les plus févéres , nous =0 a lailTé en plufieurs genres des • Ouvrages exccllens , ôi on l'a s> moins blâmé d'avoir écrit en jj trop de genres j que d'avoir trop » écrit ; mais il y a peu d'Auteurs • dont on ne pui(Tc dire la même » chofe 5 &c qui n'ayent fait quel- »' ques Ouvrages médiocres dans le 3> genre pour lequel ils avoienr le » plus de talent. . . . L'Hiftoricn de 5» Charles XII. eft le même homme » à qui nous devons la gloire d'a- a> voir en notre Langue un Poème »' Epique qui fe falTe lire,. M. de B R E , t 7 5 y. 467 .) Fonccnelle Mais j'ai tout dit, « quand je l'ai nommé , fon nom "fcul réveille l'idée d'un génie » univerfcl. Lecaradere &c l'apologie de Bal- zac qu'on trouve à la fuite des qua- tre morceaux dont nous venons de parler , forme un dilcours fuivi^ & d'une aflez grande étendue , l'Au- teur s'y-plaint de l'oubli & du mé- pris où font tombés les Ouvrages d'un homme qui a été regarde com- me le père de la Langue Françoifc , il convient néanmoins que la plu- part des reproches qu'on lui a faits, font jurtcs , mais il lui femble , dit- il , que les beautez l'emportent chez lui fur les défauts , que ces dé- fauts-mêmes ont leurs beautez , Sc qu'on peut en quelque force les corriger , & même aifément. . . . ^ Voici comme il s'en explique; ici »pour varier le ftile , je fupprime » une Antithéfe qui le plus fou- »> vent ne me déplaît que parce » qu'elle vient à la fuite de plu- » fie urs autres , & je la réduis à un » tour plus fimple. Là j'adoucis » une hyperbole trop hardie pour » la chofe dont il eft queftion , ou n je lui cherche une meilleure oc- "cafion , je l'applique à un autre » fujet , & je la tranfporre dans un » Ouvrage d'un autre genre. Mais fon plus grand fecret pour corriger Balzac , ou plutôt pour n'a' voir pas befoin de le corriger ^ & pour le trouver bon tel qu'il eft ^ conhfte à changer le titre de fes Ouvrages. A ne point regarder,' par exemple , fes Lettres comme des Lettres ordinaires , mais coni-. 4^8 JOURNAL D me des Pièces d'elprit qu'il a tri- valllées avec autant de foin quefes autres Ecrits. On finit cet endroit en mon- trant que Voiture n'eft pas li diffé- rent de Balzac qu'on le croiroit ïl'abord , &: on verra dans l'Ou- vrage que cette idcc toute fingulie- rc qu'elle paroiffe d'abord , n'en efl; pas moins vrayc. Les titres des articles fuivans (çinz du goût & du talent. Du bon- heur. Parmi un grand nombre de penfécs folides & profondes dont cet article , qui eft un des plus longs du Livre , efl: rempli. Nous n'indiquerons que celle-ci. Si f avais à trouver le plus heureux Ç^ le plus malh:u-^euK homme du mon, de^ je les chercherois dans un Cloître- Nous voiidiions pouvoir nous Ctendre davantage fur les articles où l'Auteur traite de Li UHnre , & de la mémoirs. D: la Noblep. Nous dirons feulement que cette pre- mière Partie finit par des >*.;^.-'.v/o;7/ fur le goût ou l'on examine la maxi- me cjit'il faut écrire pour tout le mon- de. L'Auteur , après avoir difcuté les differens fens qu'on peut lui donner , foûtient qu'elle n'eft vraye que dans la bouche de ceux qui veulent dire feulement » qu'un » Ouvrage , quelque bon qu'il jjfoit, s'il n'eft pas à la portée de » tout le monde aura peu de Lec- jj tcurs , encore moins J' Approba- K teurs , 6c par confcquent ne par- » viendra point à un fucccs gcné- »ralj ou du moins n'y parviendra 39 qu'après un long-tems. Ecrire i> pour tout le inoade eft , dit- il, le ES SÇAVANS, » moyen non précifément de bien *» faire , encore moins de faire au » mieuXj mais de réullïr beaucoup, » fi on fait bien. C'eft une maxime » que diiflc quclquetois la pruden- >3ce , plutôt qu'un précepte de » l'arr. Ce morceau nous a paru travaille avec d'autant plus d'attention que M.l'AbbéTrubletfemblc y avoir eu en vûcde taire l'apologiede certains Auteurs , qui ont voulu fe diftin- guer par un ftile qu'ils appellent vif, délicat, &c ingénieux ; ftilc, qui félon eux , n'eft blâmé que pat ceux qui n'ont ni aftez de finelTe , ni allez de génie pour en fcntir la beauté. Pour lui, quoiqu'il fe mon- tre par- tout grand adiiirateur de cette manière d'écrire , il fc garde bien de l'imiter. L'envie de dire des chofes fines , ne lui en fait jamais dire d'inintelligibles , il nefacrifie nulle part la lufteffe de l'expreffion, ni de la penfée au dofir de la renare brillante 8c finguliere. On pourroit dire de lui comme M. de la Motte l'a dit des Partifans outrés des an- ciens que (i la reconnoilfance Sc l'admiration lui en impofent , quand il s'agit dequelques modcr- nés , le bon goût & l'exatïte raifon l'éclairent , quand il ne s'agit que de lui-même. La féconde Partie ne plaira pas moins à tout homme de goût & de reflexion que la première , mais les bornes de cet Extrait ne nous per- mettent que d'indiquer feulement les titres des matières fur lefquellcs l'Auteur s'eft exercé. Les voici : di- ftinSïion de l'orgueil & de la vanité. De s E P T E M De ceux i^iiife Inïtent eux-r/iêines. Re- marcjues fur cjiicl^ites endroits ds la Préface de Al. Defpreanx. De lapa- litejfe. Dh naturel. De l'Efprit. Pa- rallèle de l'étude & de la vie. Incer- titude des jugemens fur les avions hu- maines : ejue l'homme n'agit cjue par fentiment. De l'incrcditlité. Sur les richejfes. M.i'AbbéTrublet finit par un petit morceau ,oùil prévientles faulfes idées qu'on pourroit pren- dre de fon Ouvrage. 11 femble apré- hender que les pcrfonnes qui fça- vent elles mêmes penfer, & qui ont lu & médité tout ce que nous avons de meilleur en ce genre ne le perfua- dentqu'on ne peut rien leur donner là-deirns de nouveau , que ceux qui ne font pas dans l'habitude de réfléchir ne prennent fouvent pour des penfées alfez communes des penfécs très-nouvelles, parce qu'el- les font fi vrayes & fi naturelles qu'il femble qu'elles ayent dû venir à tout le monde. Enfin que s'il arri- ve que quelques-unes de ces refle- xions paroiflent réellement neuves B R E , 1 7 5 y. ^6^ &c vrayes à quelques Ledeurs plufieurs autres. , parce qu'elles fe- ront d'un vrai plus fin , plus re- cherché , plus reculé des idées communes , ne les regardent com- me fauffcs , ou du moins comme trop fubtiles. Mais nous pouvons dire ici pour rafl^urcr l'Auteur qu'il n'a rien à craindre des premiers, pourvu que des préjugez injudes ne les empê- chent pas de lire & de méditer fon Ouvrage ■■, Se à l'égard des féconds, de deux chofes l'une , ou ils auront a(Tez de lumières pour compren- dre ce qu'il dit dans l'endroit où il difcute la maxime , s'il faut écrire four tout le monde , & dans ce cas ils lui rendront la juftice qui lui eft due i ou la pefanteurde Icurefpric les empêchera de fentir la vérité &C la finelle des reflexions qu'il fait à cette occafion , & dès lors il eft clair qu'il ne pourroit fans renon- cer à fes principeSjtrouvcr mauvais que de telsjuges lui rctufaflent leut fuffragc. REF LEXIONS CRITIQVES SVR LES HISTOIRES DES anciens Peuples , Chaldiens , Hébreux , Phéniciens , Egyptiens , Grecs , Sec. jnfcju'aa tems de Cyrus \ en trois Livres -, &c. Par M. Fourmont l'aîné , Profijfeur en Langue Arabe , au Collège Royal de France , y^fbcié de l'Académie Royale des Infcrtptions & Belles-Lettres, Interprète & Sous- Bibliothécaire du Roi ^ &;c. A Paris, chez Mufîer^zts , Qiiai des Au- ouftins , à l'Olivier -, Jombert ^ rue S. Jacques, au coin de la rue des Mathurins, 5>"M]?(3« , rué S. Jacques, à la Science; Bullot , rue delà Parcheminerie , à Saint Jofeph. 1735. /«-4°. 2. vol. To. I. pp. S5-383. fans la Préface de ^6 pp. Tom. II. pp. 503. LE defir de défendre & d'ex- pliquer avec plus de vraifem- blance qu'on ne l'a fait jufqu'ici le Septemb. fameux Fragment de i'Hiftorien Phénicien Sanchoniathcn mis au jour par Eufcbe , a produit les V vv 470 JOURNAL DE nombreufcs ^ très-curitufes reflc - xions critiques , rentcrmccs dans CCS deux Volumes. Le fçavanr Au- teur s'y propofe , i". d'établir in- contcftablcmenc l'autorité de cet Hiftorien , dans le Fragment qui cneft venu jufqu'à nous : z°. d'e- xaminer en détail toutes les parti- cularitcz hiftoriques qu'il contient, d'en prouver la vérité ^ & de s'en fervir pour la reforme de la My- thologie , &i pour découvrir l'ori- gine des Dieux-de l'Egvpte , de la Grèce, de la Phénicie, C^c. 3°. d'en tirer les conféquenccs neceiTaires & très-importantes pour fixer l'an- cienne Chronologie par rapport aux Antiquitez Gréques ,, Egyp- tiennes , Phéniciennes, Chaldéen- nes- , & même Hébraïques. CeJ trois principaux points font la di- vifion de tout l'Ouvrage en trois Livres , dont l'Auteur nous donne comme l'elquilTc ^ dans une Préfa- ce aflez étendue , & que nous al- lons abréger pour mettre feule- ment le Lcdeur fur les voycs ; après quoi nous viendrons au corps du Traité. I. Pour ne pas laifTer le moindre doute fur l'authenticité du Frag- jnent de Sanchoniathon, M. Four- iront obfcrve que ceux qui l'ont rejette , quoiqu'illuihcs dans la Critique , l'ont tait fans examen & fans fonilemenr : qu'ils ne font point encore le plus grand nombre: qu'ils ont contre eux des Critiques du plus grand nom , tels que les Bocharti , les Vofjlu! , les Cumher- lands , &c : que s'il leur cft permis d.'attaqucx. Eufebc Se tous ks axi- S SÇAVANS, ciens •, il ne doit p.is l'être moins à notre Auteur de détendre ces der- niers contre l'injuftice de ceux qui les condamnent fur l'article da Fragment fans l'avoir jamais com- pris &: par une pure prévention v qu'on doit regardcrSanchoniathon, non comme un Auteur fuppofé ou comme un Romancier , mais com- me un Hiftorien très- réel & très- inrtruit des affaires de fa Nation : que le Fragment qui nous en rcfte doit être lu , non comme un Texte original , mais comme une verlîon qui , pour être bien entendue , de- mande le fccours des Langues Orientales : que l'incertitude de l'âge de cet Hiftorien n'en doit pas rendre l'exiftence plus doureufe ,. que celle des Ecrivains à qui nous devons les Livres de Tobie, par exemple, &: de Judith. Mais une autre réflexion , à laquelle ( dit l'Auteur ) il n'y a point de répon- £c -, c'cft qu'il importe peu que THiftoire dont il s'agit ait été com- pofée originairement en Phénicie par Sanchoniathon, puis traduite en Grec par Philon de Biblos ; 00 qu'elle ait été écrite même dans la Grèce , mais par un Phénicien tel que Porphyre S< fur des traditions Phéniciennes : la chofe eft égale-, &c il en refultc toujours la même cer- titude pour les faits énoncés dans cet Ecrit hiftorique , dont toute l'Antiquité ( dit-il ) confpire à dé- montrer la vérité. En effet ( conrinue-t il ) on y appcvçoit non feulement l'origine de toutes les Fables , foit Phéni- ciennes , foit Egyptiennes , foiî-- s E P T E M B Gréques; mais encore toute l'éco- nomie & toutes les raifons des loix impofées par Moyie aux liraclites , pour les préfervcr Se les guérir de i'idolatne dont ils avoient contrac- té de daiigcrcufes impreffions dans lecommerce des Egyptiens: & c'ell ce que M. Fourmonc s'efforce d'é- ■claircir par un détail que l'on peut •voir chez lui , & qui montre la ne- HCellitc ou étoit Moyfc de tirer de l'Egvpte ces Hébreux comme il fit, &c de les lailfer vagabonds dans le defert pendant 40 ans. L'Auteur prétend en un mot que fans le fe- ■cours de Sanchoniatlion explique fuivant le nouveau Syftême qu'il propofe j on ne fcntira jamais la relation du premier Livre de Moy- fe avec l'Hilloive de tous les Peu- ples, & fur tout la fagc économie ,du Légiflateur, & la date fixe du tems de ces Dieux que la Fable a confacrés ; datte (i long-rems & fî vainement cherchée par les Mytho- logiftes. 2. C'eft pour la fixer, cette da- te, & pour donner en même tems une explication fatistaifante de toute la Mythologie , que Tintel- Jigence du Fragment en queftion cd abfolument neceffaire , & que pour y parvenir rien n'cft plus ef- fentiel qu'une connoiflance pro- fonde des Langues Orientales. C'eft, quant à ces Langues fdie l'Auteur ) un principe dont con- viennent aujourd'hui nos plus fça- vans Critiques en ce genre ; tels que le P. Tournemint , Hsinfius , £ochart^ M. //«<•/, le P. Thomajfin^ lA.le Clerc ^ M-l'Abbé Banier&c M. R E , ï 7 j y. 47 1 deLavair. M. Fourmont les paffe tous en revue , &c nous fait con- noître le caradcre & la méthode de chacun en paiticulicr , ain(î que leurs diflcrens progrès d-ms cette forte de Littérature. Il donne de grands éloges au projet du P. Tour- wfw/w^ fur l'explication des Fables^, dontl'origine bien connuif ferviroit beaucoup ( fcion ce Pcrc ) à éclair- cir l'ancienne Hiftoire , &: à décou- vrir l'antiquiré de la véritable Re- ligion. Il loiic le Syftême Oriental de Heinfuts pour l'explication de l'Hiftoire deBacchus. Il met pour CCS fortes de dénoiiemcns mytho- logiques , Bochart au - deffus de tous les autres. La vafte érudition de M. Hitet en tout genre ne fçau- roit faire approuver à notre Auteur l'imagination finguliere de ce Pré-, iat , qui dans fa Dèmouflration Evangelicjue , a cru voir Moyfe en la perfonne de tous les Dieux da Paganifme , ainfi que Séphora & Marie en celle de toutes les Déelfes de la Fable. Le Perc Thomaffin plus raifonnable que M. Muet ( dit M. Fourmont) eft un Compilateur, qu'on ne perd pas fon tems à par- courir. M. le Clerc ( dit-jl encore ) imitateur de Bochart , fur - tout pour la juftefte d'efprit , ne fe ré- pand point en cûnje<5tures frivoles; & bien ou mal , il tend à un but & s'y avance ; comme on peut s'en convaincre par lescxplications hi- ftoriqufs qu'il a données de l'expé- dition des Argonautes , des adionj d'Heraile,.de celles d'Adonis, dgs Myfteres deCérès , &c. quoiqu'i^! ait beaucoup moins réuftî dans ces V V v ij ^'^^ JOURNAL DE deux dernières explications. Mais malgré la fagacitc de M. U Clerc ^ tout fon Edifice ( dit notre Au- teur ) n'eft bâti que fur le fable , & peu de fecoulTes fuffifent pour le renverfer. Il n'en eft pas de même du Syftême Mythologique de M. l'Abbé Bamer ( félon M. Four- mont ) qui porte de lui ce juge- ment avantageux , qu'il devine or- dinairement jufte , èc qu'il eft ce- lui de tous qui aie marché le plus ferme dans ces chemins fcabreux. A l'égard de M. de Lavaw ^ fa Con- férence de la Fable avec l'Hiftoire Sainte offre differens traits fingu- Lers j qui prouvent que les Ecrits de l'Ancien Teftament ont été le fonds des grandes Fables. On ne fçauroit (dit l' A iiteur ) lui faire un crime , ni à perfonne , d'avoir montré dans les Patriarches les mê- mes Dieux , que le Paganifme a lefpedés. Cela ne peut tendre qu'au bien de la Religion , comme plulîeurs Critiques l'ont démon- tré. Sur quoi notre Auteur croit devoir poulTcr plus loin ce raifon- nement, 6c aller au-devant de quel- ques objedtions , qu'il faut voir ainfi que la manière dont il les ré- fute. Il n'a rien trouvé ( dit-il ) de plus répréhcnfibledans les explica- tions hiftoriques des Fables , que l'étrange bizairerie & le peu de liai- fon que l'on y remarque , foit d'u- ne Fable à l'autre , foit avec les tra- ditions publiques & autorifces. C'eft de quoi il donne ici une petite Lifte , qui ralfemble feulement les plus anciennes 5c celles qui fcm-. 5 SÇAVANS. blcnt avoir donné occafion à toutes les autres. Telles font la Patrie à'Oiiranos , de Cronos , de Saturne , àc Jupiter ; l'ctymologie de ZsJç , Jupiter; les Cabires & leur nombre; Cérh , Proferpine , &c ^fcalaphe ; Mercure , fon âge , fa généalogie 6 fon Hiftoire ; la fignilâcation du nom à'Jfis; l'idée qu'on doit avoir à'OJïris ^ de Bacchus & defes furnoms ; Silène ^ Siranus ^ les P.ins , les Scityres , les Cobales ; le nom d'Hercule , Héraclès ou Her- coles ; les Art mides ou les Dianes ^ &c. On trouvera ici ( continue l'Auteur ) ce qu'on chcrcheroit vainement ailleurs , c'cft-à-direunc fuite de générations ; d'un côté , fûtes par l'Hiftoire puifée dans le pafTage de Sanchoniathon ; de l'au- tre , prouvées par la critique tirée de l'Ecriture ou des Auteurs Pro- fanes les plus refpeftables. Il appel- le quelquefois à fon fecoursles éty- mologies, & il en tait gloire ( dic- il) malgré les préventions de l'i- gnorance. Ilfe propofe donc ici de faire à l'aide de Sanchoniathon re- monter l'Hiftoire Profane au-delà de tous les ficelés fabuleux , & d'en conftater les plus anciens faits avec tant d'évidence qu'ils ne puiflent plus être méconnus. 3. L'Auteur , de - Là , palTe à quelques remarques générales fur le caradlerc des principaux Chro- nologiftes , fur la variété de leurs Svftênies, & fur leur incertitude touchant divers points de Chrono- logie. U obferve d'abord que cet art tel que le donnent Scaliger Se le P. Pctaii , a q^uelque chofe de s E P T E M trop fubtil , Se renferme plus de délicatclle que àc folidité. li pro- duit à cette occalîon pour un exemple des variations entre les Chronologiftcs la réfutation en tout fens de la Période Julienne du premier par le P. Tetau , qui donne ailleurs cette Période com- me ce qu'il y a de meilleur &c de plus utile dans toute la doctrine Chronologique de Scaliger; au lieu que le P. Tonrnemine l'appelle une t}igé)iienfe ftîion •, & c'eftàquoine foufcrit pas notre Auteur. D'un autre côté Dodnvel n'attaque pas moins vivement le P. /'«.»< furies Cycles , &c foûtient que ce Pcre a fouvent fufcité à Scdiger de mau- vais procès. Il femble au refle ne s'attacher en Chronologie qu'à ce qu'il trouve de certain , abandon- nant les premiers fiécles de la Gré- ce , les Dynafties d'Egypte & tout ce qui a précédé la guerre deTroye, même celle du Péloponnéfe -, & cet abandon dédaigneux paroît à notre Auteur une nouvelle fource de va- riations. 11 regarde ce que dit le P. Tetau fur les Dynafties comme ehétifsn toute manière. Pour preuve de la diiTenfion in- finie qui partage les fentimcns des Chronologiftes fur la durée totale ou les années du Monde , il pro- duit le dénombrement qu'en a donné le P. Tournemifie lih fin de Ménochius ; où l'on voit que Mar- sham rétrécit les tems mal-à-propos. Si que le P. PeXron les allonge ou- tre mcfure , fans raifon. Ces Chro- nologues ne font pas plus d'accord ientie eux fui l'âge de Séfoftiis. Les B R E . 173;. 473 PP. Petati & Souciât font de ce Roi d'Egypte le SéfaK de l'Ecriture , contemporain de Roboam : les PP. Abraham &: Tonrnemine le font exifter avant Moyfe &le regardent comme le premier perfécuteur des Hébreux. On n'eft pas moins embarraffé fur le Canon d'Eratofthcne par rapport à la place que doivent oc- cuper les Rois Amiithantaus Si- fthofikermès & Sirins ; fur les Rois Pafteurs ; fur l'Epoque de la guerre deTroye déterminée par celle de Séfoftris-, fur les fameufes colonnes de Scth 5 fur la Terra Seriodica de Manethon ■■, fur la Terra Seirotha. dejofcph j fur les trois dilHcultc^ des Juges , des Rois & des AUcs ; fur les Synchronifmcs des Rois de Juda &c d'Ifrael , des Rois AlTy- riens , des Rois Babyloniens , & en particulier de Sardanapale, d'Ar- bacès , & de fes Succefleurs, tant Mcdes qu'AlTyriens. Par tout ce que l'Auteur doit: nous donner ici fur les Egyptiens , les Hébreux , les AlTyriens , les Médes & tous les petits Etats de la Grèce , il prétend faire voir que les Catalogues de ces anciens Souve- rains , quoique fautifs , peuvent être rétablis à l'aide de la Critiquei au lieu que les reflexions de ceux de nos Chronologucs qui vou-; droient les détruire, ont grand bc-; foin d'être redifiécs. Rien ( obfer- ve notre Auteur ) n'a plus contri- bué à divifer entre eux les Chro- nologiftes , que la différence des calculs ; les uns fe font entêtés du plus court , qui eft i'Hcbreu j, le? 474 JOURNAL DE autres ont pris parti pour les plus longs , tels que le Samaritain &; ce- lui des Septante : plufieurs fe font prévenus fans raifon contre l'Hi- floire 8i la Chionologie Chinoifc. M. Fourmont nous otfre des exem- ples de ces préventions également vicieufes , en la perlbnne du Père Aioriu^ du P. Perron ^ des Buxtorf^ à' Hottinger , de Alursham , de M. NeiLtan , &c. Notre Auteur fe flatte d'applanir ces diiTicultez & de faire difparoître toutes ces va- riations chronologiques par la nou- velle explication qu'il donne au Fragment de Sinchoniathon. I. Il paroît donc , ce Fragment , à la fuite de la Préface , imprimé en Grec tel que nous l'a confervé Eufébe , avec la verfion Françoife à côté , & partagé en onze articles. Après quoi M. Fourmont employé les cinq autres Chapitres de fon premier Livre à nous rendre un compte détaillé des divers juge- mcns qu'en ont portés it des diffe- rcns «fages qu'en ont faits ce qu'il appelle les Coryphées delà Littéra- ture. Il pafTc d'abord en revue Théo- doret , Suidas & Porphyre , parmi les anciens , puis yojfiits , le Père Thomajfm & le P. Pez.ron , parmi les modernes. Théodore! s'appuye du témoignage deSanchoniathon pour prouver aux Payens que Saturne , Rhéa, Jupiter &: Junon n'étoient que des hommes. Suidas nous parle de cet Auteur comme d'un Philo- fophe Tyrien ; qui félon Porphyre, yivoit au tenis de la guerre de Troyc&qui avoir écrit en Phéni- iCien de la Phyfiquc , fuivant les 5 SÇAVANS, Principes d'Hermès , l'Hiftoire des Tyriens , une Théologie Egyptien- ne , Se quelques autres Livres. f^ojfius le père nous le donne pou* plus ancien que tous les Hiftoriens de la Grèce ; il le loiie de fa con- formité avec Moyfe fur les noms des liommes 6c des lieux; il fait mention d'Abibal, à qui Sancho- niathon avoit dédié fon Ouvrage i il ne doute point que le Chry. for de celui - ci ne foit Vulcain , 6 il foupçonne que le Saturne du même pourroic bien être Abraham, mais il devient chancellant dans cette pcnféc , &c. Le P. Thomajfin ^ dans fon Traité de la Ledure des Poètes , parle de Sanchoniathon en vingt endroits j il afTure que l'Ex- trait de cet Auteur dans Eufcbe contient les principes de toute la Fable Gréque ; & j1 en allègue di- vers exemples ; mais fans tenter de réduire en Syftême le paffage de l'Auteur Phénicien. Le P. Pez.ron , plus Syftêmatique , cite Sancho- niathon avec éloge , & en donne un extrait , où il prétend trouver la fuccellîon fuivic de fes Princes Titans , idus ( félon lui j ^Our^. nos Se de Saturne , & qui fe rendi- rent maîtres de la meilleure partie de notre continent. Mais par maii heur , Sanchoniathon garde fur toutesccs conquêtes un profond H- lence , &c fait régner la famille de fes Héros dans la Phénicie , où il en établit la rchdence ordinaire; au lieu que les Titans du P. Pez^ott font des Princes Phrygiens : d'où il eft clair que le Fragment de Sanr choniathon n'a pu fervir de cancV I s E P T E M vas à iinr géné.iloe^ic de ces Princes. M. Fonrmont, après cela , vient aux remarques de Bochart fur notre Fragment. Ce célèbre Critique trouve que le ncm de Sanchonia- thon fignihe en Phénicien z.élépour fa loi; qu'il avoittiréfon Hiftoirc des Ntonumens Sacrés de fon Pays ; que le Roi deTyr Abibalà qui il dédie fon Livre étoit contempo- rain de Gédéon ; que celui-ci , quoique non Prêtre , a pu ctrc pris pour tel en qualité de Juge de fa Nation, par un Phénicien tel que le nôtre , qui , comme Payen , n'y re^ardoir pas de fi près ; fur tout Je mot Hébreu Cohen hgnifiant égale- ment Prêtre & Prince. Il obferve que bien que la fameufe Ville de Tyr fût poftericure au tcms de Gé- déon ; l'ancienne Tyr des Grecs [PaUtyrus ) étoit la Tfour de Jo- fué. Notre Auteur cnfuite tranfcrit ici toutes les notes de Bochart fur k Fragment de Sanchoniathon , pour faire voir que ce grand Hom- me qui épuife d'ordinaire tous les fujets qu'il traire , n'a rien expli- qué ici des véritables difficultez du Fragment , à l'exception de plufieurs étymologies qui font ju- ftes, mais qui ne prefentent rien de fuivi ni de fyftcmatique , fi ce n'cft le dernier article où Bochart prend Saturne pour Abraham ; le feul ar- ticle où il femble avoir deviné , parce qu'il n'eft pas poflîble de s'y méprendre. A l'examen du fentiment de Bochart fuccede celui des opinions d» P. Simon , de Dod'wel , de Stil- kngfîcet , du Pcre de Montfamtn ^ B R E - 17J5-. ^-j^ de ï'andale , du P. Calmet , de l'Auteur du Traité de l'incertitude des Sciences , du P. Toumernine ^ Sic. qui prétendent que le Fragment de Sanchoniathona été fuppofé. Le Perc Simon Se Dodivel s'ac- cordent à conjcdurcr qu'il a pu l'ê- tre vers le tcms de Porphyre; que les loiianges cxcrffivcs que donne à cet Hiftorien le plus grand ennemi des Chrétiens , deviennent trcs- fufpedles-, qu'il eil très poffiblc que les plus habiles Payens de ce tcms- là aycnt publié cet Ouvrage pour répondre aux objedions qu'on leur fiifoit de toutes parts fur ce que leur Théologie étoit une pure My- thologie -, en un mot , qu'à exami- ner avec foin les Fragmens de San- choniathon , l'on n'y appcrccvra qu'un mélange de la Théologie Egyptienne & Gréque avec celle des Chaldécns & des Phéniciens. Stillingfleet ( dansfes Origines Sa- cr-o- nuss, d'où Zéus, Bélus & Apollon ; Je quatrième prefentc la troiliéme lignée , à la tête de laquelle paroif- fent Ponms^ Typhon Se Nérée. Dans le Syllême du Içavant Anglois, le Chna de Sanchoniathon eft Cha- nattn \ fon frère Ijiris ç([Ojîris , & par confeqiicnt Mifraim ou Minés -, Cronus eft CloAm ; Gura:ius fon père eft Noë ; Protogoîius eft Adam -, Sy- «/yi^cft le premier des trois fils de Noé j Si Nérée eft le troifiéme ou Japhet; ty£on eft Eve; Genos, Catn; Citenea^ fa femme; la terre de Nod^ la Phénicie ; lux^ ignis ^fl.imma font des noms propres de cette fîgnifica- •tion ; Elion eft L.melij Bélits cd Chus ; Thabion eft un Siibien ^ &c. Cumberland trouve dans le mot Hébreu Tit l'ctymologie de Titaa ; celle de Cronos dans Keren , Corne; Cf lie â'Onis , dans Or , lumière ; celle de Betitlus dans 1' Arabe5»/»rf/, J>rave'j celle A'^^tlas , dinsT.;/^/, emmonceler ; celle à'Artémis ( Dia- .fie ) dass Chartonm^ rendre des OrOr cles ; celle de Pythius ou Appollon ^ dans Phmh , &:c. Il produit pla- ceurs fingularitez furie Baal-Méon .^c l'Ecriture ; fur les Paftcurs ; fur |cs Hercules , dont l'un ( félon lui) Seftemifg B R E , I 7 î r. 477 eft l'Arcles de la quinzième D\na- ftie Egyptienne ; fur les Peuplades del'Attique, &cc. Malgré tant de conjcclures ingc- nieufcs , & qui font honneur au Prélat Anglois ; fon Syllême(dic notre Auteur ) loin d'avoir toute la juftefte qui feroit à fouhaiter , eft ruineux ^ finon dans toutes fcs par- ties , du moins dans plufieurs qui entraînent les autres avec elles. M. Fourmont cependant ne laifTc pas de fe féliciter de s'être quelquefois, rencontré avec cet habile Criti- que. Mais voici les differens Chefs fur lefquels ne fçauroit être d'ac- cord avec lui notre Auteur. En premier lieu Cumberland n'a pas dii taire dans le Texte du Fragment une tranfpoficion aufll hardie que celle de mettre fans aucune autori- té Sydyk après Ouranos & comme un de fcs fils 3 & notre Auteur en allègue les inconveniens. En fécond lieu , d'où Cumberland ti-t-\\ appris que dans SanchoniathoniV^rf^ étoit un troifiéme fils à'Ouranos,S>Li3.\(o'\t une troifiéme branche généalogi- que ; 5°. Comment après avoir fait d'un fils de Noii ( fclon lui Ou- ranos ) \ç. Jupiter àz la Fable, a til tranfporté à Sem ce qui naturelle- ment appartenoit à C/j.î^j î 4®. Il trouve à propos de confondre AV- réezwecj^ipbet ; pendant qu'il pa- roît y avoir beaucoup plus de rela- tion entre ffaphet éc Pofeidon ou Neptune ; comme l'a prouvé 'Bo- chart. 5°. Enfin ( dit notre Auteur) ce qui détruit fans relTource le Sy- ftême de Cumberland , c'eft la fuite généalogique de Saturne , qui fui» 478 JOURNAL D vant les vues de Sancboniathon , eft Abraham , comme ne permet pas d'en douter le concours de ces deux circonftariccs , le Sacrifice S<. la Circoncifion, qui ne peuvent con- venir qu'à ce Patriarche. De tout ce qui précède, l'Auteur conclud, que quelque lumière qu'- ayent jettée fur le Fragment Phéni- cien les recherches duPrélacAnglois, ce Fragment avoir encore grand be- foin de nouveaux cclaircillemens , qui en formafTcnt un Syftéme plus vraifembiablc , en quoi /^'^"j//?!^, Bo- ehaft, &c les autres avoient échoiiéj comme femblent avoir hit encore ( dit l'Auteur ) les fçavans Anony- mes dans VHiftoire Vniverfelle qui vient de paroître. Quant à l'ex- plication donnée par M. Four- inont , elle a ( dit-il ) cet avantage, qu'elle eft fimple , naturelle , très- fuivie -, qu'elle ne dérange point le Texte du Fragment i qu'elle fe trouve confirmée par Tatien , par Clément d'Alexandrie , par Eufébc & tous les anciens Ecrivains Eccle- fiaftiques les plus fçavans -, qu'elle eft appuyée fur les autorité/ du Paganifme les plus refpedables , telles que font celles d'Homère , d'Hcfiode , d'Hérodote, de Dio- dore, de Plutarque , C^c. qu'elle çft curieufe pour tout homme de ES SÇAVANS, Lettres , & a toute la grâce de la nouveauté ; qu'elle répand une for- te de lumière fur des tems obfcurs & prefque abandonnés ; fur-tout , qu'elle peut devenir utile à la Re- ligion , non feulement parla folu- tion de plulieurs difficultez de l'E- criture, mais encore en offrant aux yeux des hommes les commence- niens de l'Idolâtrie , l'origine de ces Dieux qu'ils ont adorés (î lonc- tems fans les connoître \ & leur ap- prenant à fe tenir toujours en garde contre les nouveaux cultes. L'Auteur a mis à la tin de foa premier Livre deux Tables, l'une de Cumberland , drcffée fur le Sy- ftême de cet Anglois*; l'autre de M. Fourmont difpofée conformé- ment au (îen. Il donne aufli quel- ques obfeivations fur VHtfloire Vniverfelle , dont on vient de par- ler , lefquclles regardent le Frag- ment dont il s'agit , & aufquelles nous renvoyons. Il annonce encore une Diflertation nouvelle fur San- cboniathon compofée par le feu Père le Quien , mais qui ne lui eft point tombée jufqu'ici entre les mains. Nous rendrons compte des deux Livres fuivans dans un autre Jour- nal. SEPTEMBRE, 1737. ^^^ Z,£ SPECTACLE DE LA NATURE, ou ENTRETIENS SVR. les parttcularitel^de l' Hijloire Naiiirclle cjui ont pa'-u la plus propres à ren- dre les jeunes gens cti-ieux ^ & a, leur former l'efprit. Suite de lafeconde Partie j concernant ce cjiii regarde l:s dehors & l'intérieur de la Terre. Tome trois. A Paris, chez la Veuve Etienne , rue Saint Jacques , & Jean Defaint , vis-à-vis ic Collège de Beauvais. i755./«-i2, pag. 574. NOUS avons rendu compte dans notre Journal du mois de Juin dernier de h féconde Par- tie de cet Ouvrage. L'Auteur, en fuivant toijjours le but qu'il s'eft propofé , continue dans ce troifîé- me Tome d'exciter notre rccon- noillance par la vue des richefles que Dieu a répandues pour nous fur toute la Nature i elle donne plus, dit-il , dans un endroit , moins dans un autre , mais elle donne par - tout ; nous ta trouvons libérale JHpjues dans les Landes, Sa libéralité éclate fur-tout dans les pâturages qui font le fujet du 17' Entretien , & le premier de ce Volume. Une de ces defcriptions nobles & brillantes qui font fami- lières à l'Auteur donne d'abord une idée générale de la beauté &: de l'utilité des prairies. » Quelque » beau que foit un Jardin , on s'y » trouve à l'étroit , tous les lieux » qui refferrent notre vue paroif- is fent donner des bornes à notre «liberté. 11 n'en eft pas de même » de la Prairie. Il nous femble que » nous devenons en quelque forte V plus indépendans &c plus à l'aife , » à proportion que notre promeni- » de s'élargit &c s'allonge devant » nous. L'homme qui fent que la M terre eft faite pour lui ne peut » fouffrir long-tems qu'on le bor- »ne à une partie de fon domaine. » Se trouve t il au contraire dans n un terrain richement garni , & à » perte de vue , il croit entrer en » pofTedîon de toute l'étendue de » fon empire , & il voit avec une » fecrette fatisfaétion que toute la » nature s'offre à lui comme à fon » maître fans referve S>c fans con- » crainte. On defcend enfuite au détail dey beautez & des avantages qu'on ren- contre dans les Prairies, elles font parfemécs de différentes fortes d'herbes , dont les unes fervent à la Médecine , &c les autres font la nourriture des bœufs & des che- vaux. La prairie eft le plus par- fait des héritages ; elle ne deman- de ni labour , ni fcmaille. On nous apprend en quoi confifte la diffé- rence des herbages & des Prairies , & leur utilité paiticulicre , le gou- vernement que les unes & les au- tres demandent , l'ufage qit'on en peut faire , pour y entretenir des Harras , des bœufs , &c. yicnt en- fuite ce qui concerne les vaches & la laiterie. Si les Pays gras & abondans en pâturages ont leurs avantages , les terroirs les plus maigres n'en font pas dépourvus ; la volaille & le gU X .X X ij 48o JOURNAL DE hier y font meilleurs. Les huits y ont un goût plus fin , les abeilles y donnent un miel & de la cire qui l'empcftent fur les autres. Les bê- tes à laine s'y plaifent mieux ; ce que nous ne faifons qu'indiquer ici fe verra expliqué dans l'Auteur avec plus d'étendue. S'il ne dédai- gne pas de parler de tout ce qui compofe la balfe - cour , il le tait d'une manière qui paroît devoir phire, même aux Ledeurs les plus dédaigneux. Les pâturages conduifent natu- TellenKnt l'Auteur à traiter ce qui rct^ardc les rivières ( Entretien i8 ) rien ne lui échappe de tout ce qui peut nous taire admirer la bonté de la Providence , foit dans la fageffe de leurs Cours , l'a falubrité de leurs eaux qu'on compare avec cel- les des fontaines & des puits. On montre en paffant que l'eau de h rivière de S'.-inc e(l préfé- rable à l'eau d'Arcueil ; on parle même d'un projet ou par le moyen de deux pompes fituées l'une fur le Pont de la Tournelle, l'autre fur le Pont Marie , il feroit facile de faire couler cette eau dans tous les Qiiarticrs de la Ville , & de la diftribucr par lignes ou par pouces dans touces les raaifons des parti- ciilitrt. Les avantages qu'apportent les rivières aux Pays qu'elles arrofent tant poitr entretenir la propreté de nos demeurcs^que pour la técondi- té de nos terres., .engagent à parler des canaux qui ont été inventés pour y fuppléer.- Ceux d'Hollande n'y font pas oubliés , èi on y vet- 5 s Ç A V A N s , ra unedefcription csaifle du Canal de Languedoc pour la jondion dis deux mers. On examine en/uite la force & la vîtetTe de l'eau ( Entretien 19 ) Se l'ufage qu'on en fait pour les différentes fortes de Moulins. On recherche ce qu'elles rentcrment , ou ce qu'elles produifent de plus utile à l'homme. 11 y a quelques rivières &c même en France qui roulent de l'or dans leurs fables. L'Auteur croit même affez proba- ble que c'eft quelque trelor amalTc de cette taçon fur les bords du Pha- fe danslaCûlchide , qui aura don- ne lieu à la Fable de la Toifon d'or. Pour avoir lieu d'entrer dânsle détail d'une cfpcce de nchelfcs plus fures & plus aifées à nous pio- curer qui font les poilfons, on fup- pofe que le Prieur a fait alTemblci fur la rivière voifine différentes fortes de Pêcheurs. Ils étalent tout leur fçavoir au Chevalier. Les di- verfes efpeccs de- pêche Si de poif- fons de rivière font ici décrites en. peu de mots , mais très - agréable- ment. Il faut les lire dans l'Ouvra- ge même. Les tontaincs offi ent au Leiflcur des objets encore fore interedàns, 6 même de fçavantes fpcculations, » Le Souverain Etre, iiu l'^U' r> tenr\ . en faifant couler fous nos «yeux les rivières dont il nousca- >;che la naiifaace , fcnible avoir 35 pris plaifir à nous -peindre le ca- »ra(fi:ere de fa nature toujours té- » conde , & bien-taifante , niajs MtOLiiours inaccefiible a r.cs veux. s E P T E M B a>- la libéralité du Ciéateureflcom- s> me les rivières , continuelle , ma- 35 f^nifique , inépuifable. Elle eft » fans oftentacion &c fans referve. » Elle fe répand même furies indi- J5 gnes. Elle oublie ce qu'elle donne » Scie donne fans le reprocher. Ses D bienfaits font vifibles & com- » muns à tous. Mais ils coulent » d'une fource cachée , ils partent » d'une main qui aime à fe couvrir. Mais il ne nous interdit pas ce- pendant de chercher à connoître ce qu'il nous a voilé. Sur ce princi- pe on difcute les trois feiils fcnti- mcns qui méritent attention fur l'origine des fontaines ; après avoir réfuté les deux premiers , on fe dé- termine en faveur du dernier , qui confiftcàdirc que dcsriviereSj des lacs , Se de toute la mer, il s'élève continuellement une vapeur qui cft emportée dans l'étendue de l'air en forme de nuées & d.- brouil- lards ; qu'elle fuit l'impreflion des vents ,.& que félon qu'elle rencon- tre un air troid , ou fe trouve arrê- tée par les montagnes , elle fe con- denfe Se fe refouc en rofée , en pluyc , en neige •, que les eaux qui en proviennent , trouvent enfuite différentes ouvertures pour s'inh- nuer dans le corps des montagnes & des collines , où elles s'arrêtent fur des lits , tantc)t de pierre , tan- tcit de glaife , & tormcnt en s'é- chappanc de côté par la première ouverture qui fe prefente , uns fontaine palTagere ou perpétuelle , félon retendue , ou la profondeur du baflin qui les ralTemble. Ce morceau qui cft aflez étendu. R E ; I 7 5 j: 4S1 mérite bien l'attention du Lecffeur on y a lalTemblé les expériences &: les découvertes les plus récentes qui ont été faites fur ce fujet. Mais pour mieux approfondir ce méchanifmc , l'Auteur eft obli- gé de nous faire connoître l'a ftruc- ture intérieure des montagnes ( ce qu'il exécute dans le 21^ Entretien) qui fe palTe comme les prccédcns ^ les fuivans entre le Prieur & le Chevalier , fans que le Comte ou la Conitefle y ayent aucune part. Après avoir montré qu'un des principaux avantages des monta- gnes eft de fervir à la diRillation des fontaines , on cn^arcourt en- core les autres utilitez , elles nout- riflent plufieurs fortes d'animailx fauvages & diverfes plantes dont on donne quelque idée. On finie cet Entretien en remarquant » que » c'cft injuftement que bien des "gens fe plaignent de manquer de 00 connoiflances , de Livres , de 33 compagnies , & d'occupations à » la Campagne. Us ne feroient ni 30 feuls , ni fans fecours s'ils fça- » voient faire ufage du grand Livre » qui eft ouvert devant eux » La nature cft la Bibliothèque h n plus fure &c h mieux faite » Mais quoiqu'à portée de la con- » fulter on en fait ufagé à peu-près 55 comme on fefertdes grandes Bi- » bliothéqucs dans certaines Cora- il munaucez : on s'y promené &: ofi » en fort fins avoir lu. Des montagnes on^dcfcend à h mer ( Entretien 2.1^ ) on doit la ré- garder comme le badin qui ra(fe.Tl- ble , £e l'air, comme la pompe -çiii ■ 482 JOURNAL D élevé les eaux qui arrofcnt le va- fte Jardin où le Seigneur nous a placés. Le Chevalier étant fuppo- fé pour lors dans une terre éloi- gnée de la mer , ce qu'on lira dans les Entretiens fuivans nous eft don- né comme la defcription des ta- bleaux ralTemblés dans la gallerie du Comte , où il avoit fait peindre ce que la mer a de plus curieux. Le premier tableau reprcfcnte la vûë de la mer au coucher du So- leil , lorfqu'elle eft parée de fes plus belles couleurs ; dans le fé- cond on la voit agitée , & dans le troifiéme parfaitement calme , Sc couverte d'une multitude d'oi- feaux de mer , dont on indique quelques-uns. Le flux & lereflux de la mer , la divcrfité des marées , la falure de fes eaux , font des fu- jets , dont on développe la Nature & les avantages. On continue l'ex- plication des autres peintures : on voit dans celle qui reprefente l'Ar- fenal de Rochefort , la plupart des chofes qui regardent la fabrique des plus grands vaiiîeaux de guer- re , & des vaifTeaux Marchands de toute efpece & de toute grandeur. On nous avertit que M. Dupuy Maître des Requêtes & ancien In- tendant de la nouvelle France a bien voulu régler le choix de ce qui pouvoit fufïire ici pour la Ma- rine &c donner lui-même l'explica- tion des planches. On montre combien le radoub qu'on donne aux vaifleaux leur eft neceftaire contre le ver à tuyau dont on a tant parlé ; & que l'Au- teur décrit ici avec une infinité ES SÇ AVANS, d'autres matières qui ont rapport au commerce & à la navigation. Après avoir confideré la mer pat fes dehors , on vient à ce qu'elle renferme dans Ion fein. Les poif- fons en (ont la plus confiderable partie ■■, on parle d'abord des plus condderables , ?c de la manière de les prendre. On traite enfuite des poiflbns de pafTage , &c féparément des poiffons les plus recherchés pour la délicatelfe de leur goût. Ils font reprcfentés dans le ii° ta- bleau où l'on voit une large cuifi- ne qui en eft remplie pour les fer^ vir dans un repas de grand appa- reil. Mais quoique l'Auteur en par- coure rapidement un grand nom- bre, il ne prétend pas les faire con- noître tous , quelque foin que les Auteurs anciens & modernes ayent pris d'en diftinguer les genres & les efpeces par des caraderes qui les rendent reconnoiftables , tous les jours il en tombe dans les filets des pêcheurs qui dérangent par leur nouveauté le Syftême de nos Natu- raliftes. Souvent on ne fçait dans quel clalTe les loger , ni quel nom leur donner. Oe/i un agréable embarras , rcJ pond le Chevalier , & nous fommes réellement bien riches , fuifcjue nom ne -pouvons ff avoir tout ce que nom foffedons. Il en eft de même des coquilla- ges. Ils varient fi prodigieufement qu'on fe contente ici de faire men- tion des principaux genres aufquels on peut rappeller les poiftons à co- quille que nous avons le plus d'oc* s E P T E M cafions de voir. On palTe fous filence les Infec- tes de mer, dont le détail cepen- dant renferme des prodiges , &c qui feroit infini , mais il n'en efl: pas ainfi des plantes marines. On les diftingue en trois clalTes , les plantes molles , les demi pierreu- fcs, & les pieireufcs. Comme le corail tient le premier rang parmi ces dernières , l'Auteur s'y arrête davantage , & rapporte la manière de le pêcher. » A mefure que j'avance dans 3» l'Hiftoire Naturelle, il mefcm- B ble , dit le Chevalier , que ma » fortune va en augmentant. Je » m'apperçois que je fuis réelle- »> ment Roi &c propriétaire de la 3» terre Vous comprenez de » plus en plus, répond le Prieur,<:^uç » la Nature entière eft un tout dont » les parties s'entraident , parce » qu'elles ont été aflemblées par M une intelligence qui nous a eu en » vîië. Cette reflexion fuivie de plufieurs autres qu'il faut lire dans l'Auteur le conduit à parler de la nature de l'air ( Entretien zj ) on fuppofe que le Prieur a dans fon voifinagc cinq Ecclefiaftiques qui font de tems en tems des conféren- ces fur l'Hiftoire Naturelle ; on donne au Chevalier un difcours qui a été lu dans ces Conférences. C'eft ce qu'on appelle dans la Pré- face un EJJaifur l'opération de rair. La matière y eft: cependant appro- fondie i on y traite de l'évapora- eion des eaific & de tout ce qui en eft la fuite , comme les neiges , les biouUlaids , les pluycs , le Ton- B R E, 173 j-. 48i nerre , les tremblemens de terre les vents , des effets de l'air , pat rapport à la végétation des plan- tes , de la preflîon &c dureflbrt de l'air, de fonadionqui nous tranf- mct les odeurs , les fons , la lumiè- re, des refradions, fource de la lu- mière boréale , &c. des couleurs; on y combat Defcartes & les autres Philofophes qui par la plus dange- reufe de toutes les illufions , ont cru que l'air , le feu , la lumière, S>C la nature entière font une fuite réelle ou pollible du mouvement imprimé à la matière. On montre au contraire que l'air , le feu , la lumière 6c tous les êtres qui roulent dans une harmonie fi confia iite,ont été fabriqués par autant de voion- tez de l'Etre Souverain. Le Chevalier charmé d'examiner ce qui fe paffe dans l'air , tandis qu'il a pris l'effort , voudroit voya- ger dans le Ciel , & raifonner un peu fur ce qui s'y paffe , mais le Prieur l'arrête par les aîlcs , en lui faifant fentir la difficulté de péné- trer la nature de ces grands corps lumineux qui roulent fur nos têtes; » une diftiance effroyable nous [es » laiffe , dit -il ^ à peine entrevoir =• dans nos meilleurs Télefcopes ; » leurs opérations & même leuï » deftination font des connoiffan- » ces vifiblement refufées à notre jj état prefent. Revenons donc fut » la terre , elle eft faite pour nous u nourrir & pour nous exercer » c'eft notre véritable domaine. Le Chevalier fe laiffe perfuader, & loin de monter au Ciel, il def- cend ( Entretien 2^^ ^^"^ Tiotël 434 JOURNAL DE tii-'ur de la tene pour y cxa-rniner les t'olliles. 11 admire cette provi- dence affeclionnéc qui ne nous perd jamaisde vue, & quicn répandant la fertilité & l'agrémeiit fur les de- hors de notre demeure , en a parta- ge l'intérieur en une infinité de couches où elle a logé comme dans des tablettes , les richefîes dont el- le nous a pourvus fans nous embar- raffcr. Hcureufcment le Cabinet du Comte renferme en différentes claf- fes , les échantillons de la plupart des chofes que nous tirons du fein de la terre. Chacune de ces claffes y a fon armoire particulière. La pre- mière renferme les huiles & les fucs, ou liquides , ou épailîis qu'on trouve fous terre , le bitume , le fouffre , le naphte, &c. La féconde açmoire eft deft inée aux fels , le ni- tre , le falpêtre , l'alun , &c. L'Au- teur , félon fa coutume , v fait en- tier des chofes très-inftruclivcs fur la poudre à canon , fur le verre , ks glaces , S< la manière de prépa- rer toutes ces chofes. On y expli- que la différence des fels alcalis , d'avec les acides. Dans la troifiéme font rangées les terres qui font produites pat les différentes com- binaifons des trois fortes de terres primitives qui font le fable , l'ar- gile , & le limon , on les peut regar- der comme trois fortes d'élemens peut- êire aujjl/imples à noire égard que le fil , le feu &~ l\ur. On décrit la nature & Tutilité du fable pour la maçonnerie , pour la poterie , &c. Celles de l'argile pour dégraifler, pour la porcelaine, &c. Il refte- loic , dit l'Auteur , en finiiTant cet S SÇAVANS. Entretien , à parler des effets admi- rables du limon; j'en réduirai, dit- il , réloge à trois mors , il nous nourrit , c'ejî tout dire. On pourfuit la même matière dans le 25"^ Entretien qui ell inti- tulé les Carrières , après nous ea avoir donné une dcfcription , on fc réduit ici aux différentes fortes de pierres qu'on en tire , à la ma- nière dont elles fc forment fous terre, & enf.n aux fccours que nous en tirons. On divife en général Izs pierres, en précieufes & en com- munes. On donne quelque notion des premières , & on s'étend da- vantage fur les fécondes , telles que les pierres à bâtir , le marbre j on n'omet point ce qu'on peut dire fur les différentes efpeces de pétri- fications,fur la formation du criftal de roche^ de l'ardoife, ni fur l'élec- tricité de quelques pierres. îl faut voir ce qu'on y dit à l'occafion des pierres communes fur les grands chemins, tant anciens que moder- nes. On fait fentir les diverfcs rai-' fons qui pourroient même enga- gé les perfonncs picufes à faire des fonds pour l'entreiien des voyes publiques , rien n'cfî plus conforme àl'ejfrit de Religion c/ue ce qui fait dit bien à tout le monde. Un autre avantage de la pierre commune que l'Auteur ne man- que pas de faire valoir eft celui de fervir entre les mains des Seul-; pteurs à immortalifcr les perfon- ncs & les évenemens célèbres. Mais il montre combien par un faux amour de l'antiquité , & pat l'aveifion naturelle (jue nous avons pour s E P T E M pour le vrai , nous prolîtons mal des avantages que la fculpture nous offre ; cet endroit eft bien touché , & plein de vériccz renfiblcs , quoi- qu'elles paroiffcnc ignorées de ceux qui fe piquent de ^oût. Le 26' Se dernier Entretien nous découvre les richelîes cachées dans les mines. On y trouve les diverfes opérations qui regardent la prépa- ration du fer détaillées avec foin &C fur des Mémoires que l'Auteur a recueillis de plulîeurs forges. Ce qu'il dir de l'or , de l'argent , du cuivre , du plomb , &: de quel- ques autres métaux fadlices efl ti- ré principalement de l'Ouvrage de Georges Agricola dans fon Traité fur lestolliles, &C fur la métallur- gie ; quoique fait il y a plus de ■ deux cens ans , on nous aflurc dans une note que ce Traité , pour la Iseauté de la didtion , eft fuperieur à tout ce qu'on a écrit depuis fur le même fujet pour i'cxaâ:iiude,& l'étendue des connoillances. On fait ici un parallèle des Métaux^ & on prouve évidemment que le fer efl: plus utile aux hommes que l'or; on s'étend fur la vanité du grand oeuvre Si on touche une infinité de matières curieufes qu'il nous eft impollible d'indiquer , bien loin d'en donner un extrait fuivi. La Lettre qui finit ce Volume , ôi qui eft intitulée , Vufage dit Spec- tacle de La Nature cxpofe les inten- tions & la fin de tous les prefens que Dieu adreffe aux hommes ; on y donne pour ainfi dire , les pre- miers élemens de la langue qu'il nous parle , & dans laquelle nous B RE. I 7 3 r. 48y devons lui répondre j on y trouve- ra de plus des éclaircilTcmens fut quelques endroits de cet Ouvrage qui , félon l'Auteur , en avoient befoin. Il loile d'abord la bonne inten- tion de ceux qui fe fervent du Spedacle de la Nature pour prou- ver l'exiftcncc de Dieu , mais il les plaint de s'adonnera un travail in- utile j puifqu'ils fuppofcnc des athées qui ne font point, ou qu'ils s'adrefTent à des gens qui ne méri- tent pas qu'on leur parle. On doit pliitôt s'attachera faire bien fentir aux hommes l'unité , la puiftance , la fagefle, l'indépendance, la bonté &: la ProvidenceDivinej& l'Auteur prouve en détail que ces differens caraderes font répandus fur tous fes Ouvrages. L'unité de Dieu écla- te dans l'union & parla fin généra- le des différentes parties de la Na- ture -, il en eft de même de fa puif- fance & du refte de fes autres attri- buts. On répond aux objedions ti- rées des contradiiîlions, des inuti- litez , & des imperfedions appa- rentes que les cfprits forts croyent appercevoir dans l'Univers. L'Auteur montre enfuiteJe con- cert de la Nature avec la révéla- tion par rapport à la création de chaque chofe par une volonté fpé- ciale , 5c même par rapport au dé- luge univerfel & à l'cmbrafement futur de la terre. Il établit par des preuves Phylîques la vérité de ces 3 points , réfute avec étendue, les raifonnemensSi les faits qu'on em- ployé pour en diminuer la certitu- de. Si tîropofe enfin une conjeitu- Y;y;y 48^ JOURNAL DE S S Ç A V A N S, rc fur le changement arrivé à la pirer aux perfoiines qui auront jct- tcrre parle déluge. té les yeux fur les Viilumcs qui la' Voilà tout ce que lesborncsqiii précèdent le defir delà lire. On y nous font prefc'rites , nous permet- verra comme dans le refte de l'Ou- tent de dire de cette Lettre. Elle vrage , un Auteur qui cherche p contient près de 80 pages , Se me- tout à plaire , mais cependant r riteroit un plus long Extrait ,. mais ne cherche .à plaire que pour fercn- c'eft adez de l'annoncer , pourinf- cite plus infrrudif & plus utile. OEVFRES DIFERSES DE M. PELISSON T)E V ACADEMIE Françoife. A Paris , chez Dilot^ Qiiai des Aae:uftins. 173 5. iti-ii, 3. Vol. Tom. I. pag. 230. Tom. II. pag. 477. Tarn. III. pag. 517. NON feulement onaralTem- blé dans cette nouvelle Edi- tion tout ce qui avoir paru de M. Pelilfon , foit en feuilles volantes , ou même dans des Recueils parti- culiers ; mais on y a joint encore im grand nombre de Pièces de dif- rerens genres qui n avoient point encore été données au Public , & qu'on a corrigées exadlcmenc fur les originaux qui' font entre les mains de M. l'Abbé du Terrail. L'Editeur les a féparés en trois claffes , qu'il a diftnbuées en au- tant de Volumes. Dans le premier font les Poëfies , dans le fécond les difcours , dans le troifiéme les Mé- moires , ou ce qu'on appelle /ro- durions. Il a partagé les Poëfies en cinq Livres , fuivant leur étendue , ou leur caradlerc. Le premier com- prend les Pièces qui ont pour ob- jet la Religion ■■, elles font au nom- bre de 17 , & pour la plupart n'a- voîént point encore vu le jour. Il y a des Stances , des Odes , & àcs Sonnets. Eutimedon Poëme en j Chants & d'environ 1500 vers occupe !c fécond Livre tout entier, \c\le z.élt d'Eiiteiiy n'^tveitgle point ^ comme il le dit lui même, le Sçavant à qui nousdevons cette Edition. » Lorf- î> qu'on fçaura, ajoute t-il ^ que Ni.- a PelilTon étoit à la Baftille lorf- » qu'il forma le plan de ce Poëme, » que fon objet prefque unique » étoit d'écarter les ennuis toujours n inféparables d'une rigoureufe pri- n fon , & que pour écrire , il n'a- » voit de relfource que dans le » plomb de fes vitres , &i le papier » blanc qu'il arrachoit de fes Li- » vrcs , on fera peut-être étonné ,' » que tout innocent qu'il étoir, il . î* ait pu en de lî triftes circonftan- » ces exécuter un pareil delTein. C'eft une efpece de Poëme Hé- roïque dans lequel il cft aifé au ju- gement de l'Editeur qui nous en donne le plan , de s'appercevoir que M. Péliffon a dépeint fes pro- pres avantures fous le nom de fon Héros. L'Auteur , à l'exemple de' Virgile , quoiqu'à la vérité avec beaucoup plus de raifon , vouloir brôlei cet Ouvrage , niaisM.Bof-i s E f T E M fiict lui en déroba une copie i & c'eft fur cette copie , qu'il paroît aujourd'hui pour la première fois. On avoiic que ce Poème n'eft pas fans défaut du côté de la Confticu- tion', maison prétend qu'en détail il renferme des grandes beautez, ôc on le prouve par quelques endroit-s choifis qu'on en cite. On a placé dans le troifiéme Li- vre les Poëiîcs Morales , & dans le quatrième les Poefics Galantes qui étoient répandues dans difFercns Recueils. M. Peliflbn en avoit fait fans doute beaucoup divantage i mais dans la fuite livré à des études plus ferieufcs , il mcprifa & les Poclies de ce cara(il:ere & leur gen- .rc même , où il avoit excellé autant par la délicatelTe des fcntimens, que par la fagcfle & par la facilité •dercxprelîion- On a ralTcmblé dans le cinquiè- me Livre fous le titre de Poefies diverfes, celles qu'on n'a pas cru pouvoir facilement ranger dans les clalTes précédentes. Toutes ces Poe- fies en général font lî connues & fi eftimées , que nous croyons avec Je .judicieux Editeur fupcrflu d'enfai- .refentir le mérite. Le fécond Volume comprend .les difcours de M. PeliiTon. Quel- ques-unes de ces Pièces n'avoieut autrefois paru que fur des feuilles volantes &c étoient -devenues fort ■lares , même parmi les curieux'. Plufieurs autres n'avoient point en- core été imprimées. De ce nombre .font la Converfation de Louis XIT. devant Lifle. Un Mémoire y«r ojuel- ^ues travaux à propofer aux gens B B. E . 17 5?- 487 di Lettres. Deux Placcrs a,u Roi ^ des Lettres dont il y en a une /ïtr le Jubilé de l'armée , un autre ait Pape Linocetit XL fur lernenfonge,^ & plufieurs autres fur diverfes ma- tières. Voici quelques traits de la con- verfation de Louis XIV. où M. de Peliflon die qu'il eut l'honneur de fc trouver , &: où la modeftie de ce Prince fe trouvant vaincue par les follicitations de ceux qui lui parloient , il leur fit voir à fonds les fentimens de fon ame fur tous les fujets où la converfati(*a fc tourna. " Les Rois , dit - il , dans leur » conduite font bien plus malheu- » reux que les autres hommes , » puifque leurs cœurs ne font » point expofés aux yeux de leurs "Sujets , comme font toutes leurs " adions , dont ils ne jugent la » plupart du tems que fur leurs in- 33 terêts ., ou fur leurs paillons & » prefque jamais félon l'équité. . . , » Mais comme je ne fonge qu'à me » bien acquitter de tout ce que je » dois à mes Peuples , & à ma di- » gnité , j'ai mépiifé pour faire » mon devoir toute autre gloire.... » Comme je fçai , qu'il n'y a rien j> de fi aifé à furprendre qu'un Roi » qui croit jamais ne le pouvoiic » être, fans me fier à mes lumières, » j'écoute tout le monde , afin que i> perfonne n'abufe de l'honneur de » ma confiance. " Quand un Roi fe contente de M s'entendre continuellement loiier » & qu'il n'a pas le cœur plus déli- » cat que les oreilles , il cft fo«« Yy yjj 488 JOURNAL D » vent tout feulfacisfait de lui-mê- » me. .) Pour cela j'ai voulu at^ir » dans la guerre , comme j'ai hit » dans le gouvernement de mon 3> Royaume , en ne me repofant de w ma réputation fur perfonne que » fur moi même. Ce morceau eft écrit avec toute la grandeur & toute la dignité qui convient au Héros qu'on y fait parler. Les difcours de M. Pélilîon peu- vent être regardés comme d'cxcel- Icns modèles , les uns , pour l'élo- quence de"pur appareil , & les au- tres pour celle qui cil: propre aux affaires. Les difcours font remplis de penfécs brillantes , Se de tours agréables. Les détcnfcs de M. Fou- quet vont moins à frapper l'efprit par les ornemcns, qu'à le convain- cre par la raifon. Mais 5c dans les difcours , Si dans les détcnfes , ré- gnent également la bienféance &c la vérité. » Loin de vouloir impofcr 3> par la pompe des mots qui n'eft »au fonds que pure déclamation , » ou par cette licence qui cor- "rompt aujourd'hui notre é!o- 3>quence; M. Pélilfon ne s'attache >5 aux paroles que pour exprimer "'les pcnfées ; il n'employé que les » termes qui font dans l'ufagc ordi- 30 naire , & de l'union qu'il en fait 3>refultcnt toujours des images na- » turclles. Ces traits & pluficurs autres fem- blables qui font femés dans ia Préface de l'Editeur , nous font fauit. la juftefTe de fongoût, & ES SÇAVANS. lui attireront les applaudiflcmcns de tous ceux qui ne fc déclarent partions des bons Ecrivains du (îe- cle de Louis le Grand que parce qu'ils croyent y retrouver le carac- tère de ceux du ficelé d'Augulle. Dans le troiliéme Volume ci. font placés les Mémoires ou Pro- diiBions , on trouve une partie de ce qui regarde le procès de M. Foucquct, Se l'affaire du Prieuré de S. Orensd'Auch. La plupart de ces Picccs avoient dé|a vu le jour, mais on ne les trouvoit que difficile- ment , 5s: c'efl: ce qui a déterminé l'Editcut à les redonner ici. Il faut cependant en excepter les deux Pièces qui terminent ce Recueil, & qui n'y occupent point la place qu'elles auroient dû naturellement avoir , parce que l'impreffion en étoit prefque finie , lorfqu'on les a hcureufemcnt recouvrées. Ce font deux Requêtes où l'on examine l'importante queftion Ci les Chanceliers font au-deffus de toute recufjtion en matière crimi- nelle. AL Pélilfon s'y déchire pour la négative, mais quelque éloquen- te que foit cette Requête , elle ne perluada point. L'illuflre Magi- ftrat qu'on vouloit rccufer , fit va- loir auprès du Prince le privilège de fa dignité , & loin de s'abftenir àc juger , il prononça le jugement, L'Editeur , après avoir donné une idée générale, & fait même en quelques endroits la critique des Ouvrages qu'il a ralfemblcs dans cette Edition , nous rend compte de ceux que par différentes confi-' dcrations particulières , il n'a pas - s E P T E Î\I jûgc à propos d'y fnire entrer. Telle efl: i". la Pamphmfefitr les Jnflitutions dejuftimen , que M. Pé- lilfon compoia à l'âge'de 20 ans, & dont il y a déjà deux Editions. z°. La Relation contenant l'Hiftoi- re de l' Académie Françoife , Ouvra- ge extrêmement répandu , & fi gé- néralement applaudi , que l'Edi- teur croie qu'il fuffic prefque de renvoyer aux éloges que les meil- leurs Ecrivains de toutes les Na- tions ont donné à cette Hiftoire pour faire tomber les reproches que lui a fait l'Auteur du Temple du Go'it. . l°.Les Réflexions fur les diffsrends de la Religion , ce qui comprend plufieuts Pièces de ce genre impri- mées en diiterens tems , &r dans lefquelles , fi M. PélilTon a donné l'exemple d'une modération , qui lui a mérité les éloges de i habitoicnt la Vind licie ^ qnictoit le Pays qu'on appelle à prefcnt Souabe. 11 paroît tort probable à notre Auteur que les babitans de Vindclicie tiroicnt leur origine des Gaulois qui étoicnt palTcs en Alle- magne avec Ségovéfe , & parcon- fcquent que les Bourguignons étoient Gaulois d'origine. Les Bourguignons embraiTcrcnt îe Chnftianifme avant que d'en- ïrer dans les Gaules , fuivant notre Auteur. Il conclut de ce que difent Socrate & Orofe , qu'ils fu- rent d'abord bons Catholiques , quoique Grégoire de Tours feinble iniînuer qu'ils ont été Ariens , dès qu'ils ont embrafle la Religion Chrétienne. Il y a beaucoup de confufion âans ce que dilent la plupart des Hiftoriens fur la fuite des Rois des Bourguignons. Notre Auteur fe fixe à la fuite que Gondcbaud Roi de Bourgogne en donne lui-même dans fes Loix , où en parlant de fes prédccelTeurs , il fait mention de Gibica, de Gondomar, de Gifla- haire , de Gondahaire , de fon pe- ïe & de fes oncles. Gondebaud ne nomme point en cet endroit fon frère & fes oncles. Mais on fçait d'ailleurs que le père de Gonde- baud s'appeiloit Gondioc , & que fes oncles fe nommoient Gundoric & Hilderic. Gondebaud eut pour fils Sigifmond Si Godomar, Sigif- jnond fut père de Sigeric qui mou- ïut avant lui , & de Giflahaire & de Gondebaud qui furent les Com- pagnons de fon martire. M° Dunod. croit ç^ue ces noms ES SÇAVANS. déhgnoicnt des qualitcz particuliè- res à ceux qui les portoicnt;qu'Hil- deric par exemple , dans le langage du Nord , lignifie tris fort , que Sigifmond veut dire Bouche viRo- rieufe. Ce fut fous Gondahaire auc- les Bourguignons palferent le Rhin , ôc qu'ils s'établirent dans les Gaules , où ils formèrent un Royaume conlîderable , mais qui ne fut pas de longue durée. En parlant du mariage de Clo- tilde, nicce du Roi Gondebaud, & de Clovis , l'Auteur fe contente de rapporter ce qu'en a dit Grégoire de Tours. Il ajoute , » je palTe fous » filence les circonftanccs donc » Frcdegaire , Roricon & Aimoin ,, » ont chargé ce récit , parce qu'cl- » les fcntent la fable & le roman ; )>qu'elles ne conviennent point à la » prudence, ni à la dignité de Gon- » debaud , qui étoit l'un des Prin- »ces de fon tems le plus politique >» & le plus mefuré , & qu'elles » font injurieufcs à la mémoire de » Clotilde dont ces mêmes Au- j> teurs ventent la fageffe , qui a "mérité d'être mife au Catalogue » des Saints, &c qui devoir avoirde X la reconnoilTance pour Gonde- »baud, quoiqu'il eût fait mourir » fon père & fa merc , puifqu'il D l'avoir confervcejélevée comme »> fon enfant , & mariée au plus }> grand Roi qu'il y eût alors. Je ne 30 crois pas d'ailleurs , continue Mt » Dunod , que fur ce fait , ni fut » beaucoup d'autres qui concer- »nent nos Rois Bourguignons, on » doive ajouter une foi entière aux V AuteuïsFxançpis d'un teips pofte; s E P T E M stienir, pirce qu'ils ont écrit fans «dircernement , ni critique , qu'ils » ont adopté tous les contes du » Vulgaire , & que les enfans de «oClovis ayant afurpc le Royaume I» de Bourgogne , opprimé & fait » mourir fcs Rois , quoique leurs » proches parens ; on a cherché » après coup dans leur Nation à les a» excufer par des bits inventés à » plaifir , & à re)ecter la haine de » ces adions injuftes & barbares , » fur Clotilde qui n'en étoit pas ï» capable , parce que c'étoit une s PriiicelTe vcrtueufe &: modefte , ■» en un mot une Sainte. C'eft par une fuite de ce Syftêmc que M. Dunod ne fçauroit fe per- fuader , que quand les enfans de Clovis fe liguèrent pour fe rendre maîtres du Royaume de Bourgo- B R E , i7î y. 4P5' gnc , qu'ils y ayent été engagés pat Clotilde j quoique Grégoire de Tours le dife cxprcffémeni , 6c qu'il reprefente cette Reine tou- jours -remplie du defir de vengée fon pcre & fa mère , que Gondc- baud avoir fait mourir près de j» ans auparavant, n Ces fcntimens , >» dit-il^ ne conviennent point à une » Sainte , retirée à Tours , où elJc » paflolt fes jours en prières au-t » près du Tombeau de S. Martin; » l'anibirion de ks fils fuffifoic " pour les déterminer à s'emparec » du Royaume de Bourgogne. Nous rendrons compte dans UR autre Journal de la féconde Partie de ce Volume , qui contient l'Hi- ftoirc de l'Eglife de Bcfançon , & celle de quelques Abbayes de la Franche-Comté. TRAITEZ DES MlNORITEZ , DES TVTELLES ET Curatelles , des Gardes ^ des Gardiens de la fuiffance paternelle^ de laGarde d^ vatronnages féodaux ^ de la continuation de communauté à l'égard det Alineurs , & des droits des enfans mineurs & m.ycurs, ylvec les Régis- mens & Arrêts intervenus fur ce fujet ^ conformément aux différentes Coù~ tûmes & aux divers ufages du Royaume. Par M * * * , Avocat au Parle~ ment, A Paris , chez Denis Mouchet , à l'cntcée de la Grand'Siile du Palais j àla Juftice. i73 5./« 4°. pag. 724. CET Ouvrage eft dans le mê- me goût que celui du Trai- té des Scellez & Inventaires , tant «n matières civiles que criminelles. L'un & l'autre eft attribué par le privilège à M.Meflé Avocatau Par- lement. On J'eft particulièrement attaché dans l'un & dans l'autre à y rapporter en entier les Ordonnan- ces , les Edits 6c les Arrefts de Rè- glement , même les Artcfts partir culiers fur des qucftions importan- tes qui concernent la matière qui font l'objet de ces deux Trairez. Ea jettant les yeux fur la Table Chror nologique des Ordonnances & dc$ Réglemens qu'on a recueillis dans ce Volume , & qui font en très- grand nombre, concernant les Mi- noritez , les Tutelles , & les Cura- telles , il n'y a perfonne qui ne re- coQnoiuc d'abord , qu'il eft tiès-j Zz z i/ 4p5 JOURNAL D mile , pour ceux qui veulent s'in- ftruire fur cette matière , de voir réunis en un feul Volume ces Pic- ces dont plufieurs ne fc trouvent qu'en feuilles volantes, & d'autres qui font difperfces en differens Vo- lumes. A l'égard du fonds de l'Ou- vrage , l'Auteur y traite un grand nombre de queftions curieufes & intercflanrcs. Il eft divifé esï dix-fcpt Chapi- tres -, dans le premier , l'Aurcur traite des Tutelles S< des Curatel- les en général , de la pui (lance pa- ternelle , & par occafion de la puif- fânce maritale, des différentes ef- peces de Curatelles, teftamentairc, légitime &: dativc -, delàil paffeà l'adminidration des Tuteurs & des Curateurs , foit par rapport aux biens, foit par rapport àlaper- fonne des mineurs ; il explique en- fuite les différentes manières dont Jes Tutelles &c les Curatelles finif- fentjes caufcs qui exemptent de la Tutelle & de li Curatelle , la ma- nière dont le compte de Tutelle en s'adrejfa7it au Général cjn'ilveKt » fermer ^ de fçavoirplufieurs Lan- » gués pour pouvoir parler aux M Troupes de diverfes Nations qui «feront dans votre Armée &aux jidifferens peuples avec qui vous »• avez à traiter ; pour examiner par «vous-même les prifonniers & les » dcferteurs des ennemis ; & pour »lire les Lettres qui feront inter- « ceprées par vos partis , ou celles » que pourront vous écrire ceux M avec qui vous êtes en intelligence s5 dans le Pays ennemi , fans que » pour tout cela vous ayez bcfoin y> d'Interprète , en qui vous ne » trouverez jamais tant de fccrct » qu'en vous-même 5 nilesraifon- » nemens aufll juftes qa'ilsic font » dans l'original. Les exemples que M. de Santa- Cruz joint à ces reflexions , font ceux des Romains qui pendant leurs guerres contre les Tofcnns , faifoient apprendre la Langue Tof- eane à la jeunefle de Rome , &c de Mitluidate Roi de Pont qui par- k)it les Langues de 22 différentes Nations , lefquelles lui étoient foûmifes. Il obferveque Hernand- Cortés n'auroit pu faire de fi grandes conquêtes fans le fecours de Doni Marina & de Jérôme d'Aquilar qui lui fervoientdebons & fidèles Interprètes , & que Cor- tés laifia un de fes Pages à Zcm- poala pour y apprendre la Langue des Provinces qu'il méditoit de conquérir. L'Auteur cite enfuite l'exemple du grand Vifir Ibraïn , ^'néialdcs Armées de 5ollin%n IL RE, T 7 5 l'. 4p;> qui poffedoit plufieurs Langues , dont il fe fcrvit utilement en diffé- rentes occafions , celui de Jean III. Roi deSuedequi répondoitaux Ara- baffadeurs de différentes Nations fans avoir befoin d'Interprète , ce- lui de Philippe V. P^oi d'Efpagne , qui outre fi Langue naturelle parle parfaitement l'Efpagnolc , l'Ita- iienne & la Latine. M. de Santa - Cru-z ajoute que l'intelligence des Langues donne à un Général l'avantage de pouvoir lire dans les originiux les meil- leurs Auteurs. Avantage qui lui paroît d'autant plus conliderable ^ que dans les tradu6lions les Au- teurs perdent toujours de leur for- ce & fouvem de leur vérité , comme le dit Juflc-Lipfe. A cette occafion M. de Santa- Cruz fait voir qu'il cft important pour un Général de s'être appliqué à la ledurc , fur tout à celle des Livres qui traitent de l'art militai- re , ou de l'Hiftoire des grands Ca- pitaines. L'Auteur a bien prévu qu'on lui objedreroit que l'étude de l'Hiftoire ancienne ne paroîc pas fort utile , attendu que la ma- nière d'attaquer & de fe défendre n'eft pas la même que celle que l'on pratiquoit autrefois. Il répond à cette objection en rapportant ce que difoit le grand Guftave Adol- phe , que quoique les Armes à feu & l'art moderne de fortifier les pla- ces , ayent donné lieu à des diffe- rences entre la manière de faire Ja guerre chez les anciens , & celle des modernes , celui qui a le coura- ge des aftcicas Héros , peut faire 500 JOURNAL D comme eux des adiions grandes & illuftrcs. D'ailleurs , ajoute M. de Santa-Cruz , la moindre fcience d'un Général efl de fçavoir ce qui regarde l'artillerie Se les fortifica- tions. Ce qu'il lui importe le plus de ne pas ignorer ell la politi- que militaire &c civile qui n'a point chanoé. L'Auteur affurc * , '^ I r • j qu on rcconnoitra par la luite de fon Ouvrage que fur ce point de politique militaire & civile , la doâ:rine des modernes eft confor- me à celles des anciens , que L-s an- ciens ont inventé &C que les moder- Kes n'ont fait que les imiter ou les piller. ■Dans le feiziéme Chapitre du premier Traité M. de Santa Cruz le propofe de faire voir qu'il eil plus necclTaire à un Général de fc faire aimer que de fc taire craindre. Ce qu'il prouve par la raifon fui- vante. » Quand vous ferez aimé » de vos troupes , vous en ferez M bien fervi ■■, &c h vous en êtes hai , » elles n'exécuteront qu'avec peine 3i ce <.jui eft de leur devoir , afin » que rien ne fucccdant heurcufe- î> ment fous vos ordres , vous ne » receviez ni applaudilTemcnt , ni » recompenfe. L'Auteur cite quel- ques traits d'hiftoire pourjuftifier ce qu'il avance. Enfuite il s'objec- te que quelques Généraux ont pour maxime, ^«'o« me haijfe pour- vu qu'on me craigne. A quoi il ré- pond , après S. Thomas , dont il cite les paroles , que la crainte efl: un foiblc fondement de l'obéitTan- ce des fujcts. Parce que s'il arrive que ceux qui ne fonc foilmis que ES SÇA VANS, par la crainte trouvent des occa-' fions où ils puiflent efperer l'im- punité, ils ne manquent point de s'élever contre leur Chef D'ailleurs h crainte portée à un certain excès a précipité plufieurs perfonnes dans le defefpoir. Le Prince , fui- vant Tacite , doit fe faire aimer de fes Peuples, & craindre de fes en- nemis. L'Auteur donne enfuite les moyens qu'un Général peut pren- dre pour fe faire aimer. Les reflexions fur le paflagc des rivières nous fourniront quelques exemples d'une autre efpece que celles qu'on vient de lire. M. de Santa-Cruz ayant parlé des diffe- rens moyens qu'on peut employer pour faire pafTer la rivière à une ar- mée , indique dans le fécond Cha- pitre duTraité les précautions qu'il faut prendre pour pafler plus fûre- ment; quoique vous fçachiez , dit- il , que les ennemis aycnt un tiers ou moitié moins de troupes que vous n'en avez , & que vous ne ies croyez pas près de la rivière que vous voulez pafTer , vous ne devez pas rifqiier le palTage fans avoir fait pafler à l'autre bord des partis , qui aillent rcconnoîtrc par les flancs '?<: par le front , & qui vous donnent avis fi les ennemis n'ont pas à une certaine diflance, quel- que corps confidcrable pour venir fondre fur votre avant-garde avant qu'elle puifTe être foûtenuë par d'autres troupes. Si c'eft de nuit les partis doivent mener quclque.chien, comme l'Auteur l'a marqué en par- lant des ambufcadcs. Lorfque la rivière croît par les pluyes s E P T E M pluyes ou pir les neiges , l'Auteur confcille de ne pas s'engager à la palTer, qu'on ne ioit alTuré de pou- voir mettre à l'autre bord toute l'armée , l'artillerie , les munitions & les vivres , avant qu'il ccffe d'y avoir des guez. Ce qu'on doit ob- ferver , quand il cft à craindre que les ennemis ne furviennent , & qu'ils n'attaquent la partie des troupes qui eft palfée , ou qu'ils ne lui coupent les vivres 5c les fourra- ges de l'autre côté de la rivière. MeUta Capitaine des Vénitiens , ayant palîé l'Ada avec une partie de fon armée , fut attaqué par les ennemis, avant que fon armée fiât paffée, parce que les pluyes avoient Tait groflir la rivière extraordinai- remcnt. Son avant-garde n'eut pas d'autre moyen de fe fauver que de celui de pafler la rivière à la nage. Il eft très-fàcheux qu'après que l'armée a palTé une rivière , il refte encore alTez pcudejour pourrecon- noîtrcle terrain^pour porter favori- blcment les gardes , pour envoyer à chaque corps fon bagage.pourdi- ftribuer les parcs d'artillerie & des vivres , & pour aller chercher de l'eau, du bois & du fourrage.Quand on ne croit pas avoir un tems fuffi- fant pour toutes ces opérations après le paflagc , il faut attendre au lendemain. L'Auteur excepte ide cette règle le cas dans lequel «n fçait 3 que le jour auquel on a, B R E , I7Î j. 5"or refolu de palTer , les ennemis ne peuvent s'oppofcr au palTaqe , ôc qu'ils pourront s'y oppofer fi on leur donne encore un jour , parce qu'ils ne font qu'à une certaine di- ftance. Si le paflTage commence de jour & ne peut finir que la nuit , il faut envoyer le Maréchal de Camp de jour avec les premières troupes , pour porter les Gardes avancées &C reconnoître le terrain , avant que la nuit vienne. On peut aulîî pafler la rivière de nuit , s'il n'y a point de danger de trouver une forte oppofition de la part des ennemis , ou d'expofct plus de perfonnes à être noyées que fi l'on palToit le jour , fur - tout quand il y a en retardant le paflagc à appréhender quelque inconvé- nient plus grand que celui de la confufion qui feroit caufée par l'obfcurité , tel que celui de ne pas profiter d'une furprife , d'une arn- bufcadc , &c. M. Vergi donnera la traduâion des autres Traitez de politique de M. de Santa-Cruz , ivant de don- ner ceux qui regardent les bataillej, 8c les Sièges, qui font les princi- paux objets de l'art militaire. Il fi- nira par le Traité de la guerre dé- fenfive , qui au jugement de M de Santa - Cruz , eft la partie de fon Ouvrage la plus utile &C. la plus eu- rieufc» Scftmb. ^ %s4 J02 JOURNAL DES SÇAVANS, LES OEVFRES DE SALVIEN PRESTRE DE MARSEILLE;, contenant fes Lettres & [es Traitez, fur l'efprit d'intérêt & fur la Providence ^ traduites en François par le R. P.*** de la Compagnie de Jefas. A Paris chez Jean-Bapnlte Delefpine , Imprimeur ordinaire du Roi , rue Saint Jacques, à S. Paul 1734. /«-ii.pag. 610. LA Vie de Salvien qui eft à la tête de ce Volume rient lieu de Préface. Comme ceux qui ont fait quelque étude de l'Hiftoire Ec- clefiaftique & des Vies des Sainrs , font inftruits d'ailleurs des circon- ftancesde laVie de cet illulïrePictre de Marfeillc , nous nous bornerons à rapporter ce que dit l'Auteur de la Préface fur quelques points qui font conteftés entre les Critiques. Le premier regarde la Patrie de Salvien. Des Ecrivains ont cru qu'il ctoit né en Afrique , parce qu'il parle fouvent de ce Pavs là dans fes fes Ecrits , & des caiamitez qu'il avoit cfluyées. Mais S.ilviena audi parlé des Gaules avec beaucoup d'étendue. Il dit lui-même en re- commandant à fes amis un jeune homme de fes parcns , que ce jeune homme ctoit d'une famille confiderablc de Cologne , &c d'un nom connu dans le Pays. Ce qui fait croire à notre Auteur que S.il- vicn étoit de Ccilogne ou du moins de la Gaule Belgique. M. Baillct prétend que Pallarlie •était Paye une , quand elle époula Salvien , &C que ion mari Ja con- vertit à la foi. Mais M. Baillet n'ap- puyé ce qu'il avance fur aucune autorité. Notre Auteur croit qu'on ne peut tien aflurer de certain fur se fujtt.ll p3nch^.' r^éànuioins beau- coup à croire que Palladie étoit Chrétienne lors de fon mariage , parce qu'il n'ctoit point d'ufage dans le cinquième liécle que les Chrétiens époufaifcnt des femmes Payennes. Hypace perc de Palladie &: Qiiiete fa mère furent très-irrités contre Salvien , de ce qu'après avoir eu une fille de fon mariage avec Palladie, ils s'éroient féparés pour vivre, comme frères Ôi fœurs ainll que le pratiquoient plulîeurs Chrétiens zélés de ce (îecle. Après qu'Hypace & Quicte eurent em- bralTé le Chrillianifme, Salvien leur écrivit une Lettre en fon nom , & en celui de fa femme &i de fa fille , pour engager fon beau-pere Se fa bclle-mere à leur rendre leur ami- tié. Cette Lettre e(l regardée par les Connoiffeurs comme un chef- d'œuvre. On ne fçait pas Veffet qu'elle fit fur l'efprit d'Hypace & de Quiete. M. Baillet prétend qu'ils en lurent fi touchés , qu'ils rcpn'- renttous les fentimens d'afffétion paternelle pour leur fille ^?c pour leur petite-fille. Cependant on li'cn trouve aucuns pre-uvc daios' its Ecrits de Salvien , &c aucun ancien Auteur n'a parlé de ce tait, que M. Baillet avance avec confiance. Plufieurs Auteurs qui ont parlé de l'Abbaye de Lcrins , prétendent s E P T E M qî eft le p.emier qui l'ait inféré dans le Catalogue des Saints de France , fans marquer fur quoi il fc fondoir. Le Tradudlrcur trouve mauvais que M. Baillet le foit plaint que l'Eglife ait refufé I\it ce point à Salvien , cequ'elle a accordé à l'AbbéCafTien & à quelques autres Serviteurs de Dieu dont elle fait la Icte. Ces comparaifons paroi(fcnt à notre Auteur peu édifiantes , toujours inutiles &: le plus fouvent témérai- res. 11 y a eu plufieurs Tradudions en François des Ouvrages de Sal- vien i mais elles font toutesfuran- nées à la referve de celle de M. l'Abbé de Maupertuis, mais M. de Maupertuis n'a point traduit tous les Ouvrages de Salvien. Sa traduc- tion que notre Auteur afTure être de bon gcût tient le milieu entre une tradudion fidèle 8c Jae para- phrafe. A l'égard de notre Traduc- teur, il déclare qu'il s'cft attaché à reprefenter Salvien tel qu'il eft ,' fans lui faire dire autre chofe que ce qu'il dit en effet, ni plus qu'il ne dit, afin qu'il pariât tout entier en fon naturel. A l'égard des notes qui acconi- pagncnt la tradudljon des Lettres de Salvien , de fon Traité de l'cf- prit d'intérêt &c de fon Traité de la Providence ; les unes regardent les points de critique , ,d'a.utres le dogme Se d'autres la morale. Ce que dit Salvien fur la Providence, donne quelquefois occafion à l'Au- teur de s'élever contre le Syftêmc des Spinofiftes , autant que le lui ojQt permis les bornes qu'il vouloit A a a a i; 50i JOURNAL D donner à fcs notes qui font au bas des pages. Les juftes éloges qu'il donne à Salvien après tous les Ecri- vains qui ont parlé de cet Auteur , n'empêchent pas qu'il n'ait bit re- marquer que Salvien donne quel- quefois dans le rigorifme. Pour mettre le Leâ:eur en état de juger du mérite de cette traduiftion. Nous rapporterons en entier la tra- duction de l'article premier du Traité Air l'Efprit d'intérêt. » De toutes les cfpcccs de poi- * fon dont le vieux Serpent , cet 35 infâme Dragon qu'une jaloufe » rage acharne à votre ruine, tâche » de vous infeder , je ne fçai fi le » plus funefte aux âmes Fidèles , a> & le plus capable de vous perdre M n'eft pas ce venin de l'avarice , ^> qu'il exhale lans cclTe , ôc que »fon fouffle empcfté infpire à vos » enfans. Enyvrés de cet efprit de joconvoitife , ils comptent pour a> rien l'abus des biens dont Dieu »»leur a confié l'adminiftration , » pour en faire un faint ufage. Ce ES SÇ AVANS, «n'eft pasaiïcz pourcux de pafTet X leur vie fans produire aucun fruit »de mifcricordc ^ de charité. » Efclaves des richefles dont laPro- » vidcnce les a pourvus , ils en » font leur idole, fclon l'expreliîon »de l'Apôtre , & ils portent mên:c " en quelque ta<^on l'avarice au-de- » là du trépas -, vous cherchez peut- -être de quels lîcclcs je veux par- » 1er, fans beaucoup de recherches "il cft aifé de le fçavoir. Prefque » tous , oiii prcfque tous vos er ■ ■> fans font tels que je dis. L'heu- n reux tems n'efl: plus , où les "Chrétiens mettoicnt leur fouve- » rain bonheur à s'acquérir untré- " for éternel dans le Ciel , aux dé- » pensdes richelîes périlTables delà "terre, dans l'efperance des biens » à venir. Ils fe faifoient un plailir " de renoncer à l'ufage des biens y> prefens , Se ils fe condamnoient » pendant leur vie à une pauvreté- » volontaire , pour fe mettre en n polTeiîion de l'héritage des Saints » qui ne finira jamais. HISTOIRE GENERALE DES AVTEVRS SACRE'S ET Ecclejtafticjues , cjui contient leu'- F'ie , le Catalogne , la CriHcjue , le Jt'&; le cœur, femblablc à un grand » fleuve qui par la rapidité de fcs » eaux entraîne tout ce qu'il ren- n contre. S. Jérôme met les Ecritj y de S. Hikire en parallèle avec >» ceux des plus célèbres Orateurs » du Paganifme, & des plus élo* » quens Pères de l'Eglife , ilajoû- » te qu'il s'ctoit rendu recommen- »dable par-tout où alloit le nom » Romain , foit par le mérite de fa » contellion , foit par la fagelTede » fa conduite , foit par l'éclat de n fon éloquence. Sozoméne troii- » voit autant d'éloquence que de » force dans les Livres de S. Hilai- » re contre les Ariens. Ruffin dit » qu'ils font écrits d'une manière « très-belle 5i très-noble , & qn'iî » y inftruit parfaitement ceux qui » ne pouvoient pas l'entendre par- »ler de vive voix. Il cft fou vent «cité par S. Auguftin & toujours «avec éloge. Cependant le P. Ceillicr avoiic de bonne foi que le ftile de S, Hi- iaire eft obfcur , difficile , cmbar- rafle & quelquefois un peu trop enflé. L'obfcurité vient fouvent de ce que ce Saint Evêque voulant rendre fon difcours plus ferré , il unit fouvent éeux phra&s pat un So6 JOURNAL D ieul terme qu'il auroir fallu repeter dans chacune. L'Auteur ajoute qu'il n'éroit pas facile à S. Hilairc de traiter en termes clairs &: précis des Myfteres que nous regardons comme les plusiublimes&: les plus ibftrairs , la Confubftanrialité du Père & du Fils , Se la diftindion qu'il y a entre les deux Perfonnes. Quoique Saint Jérôme ait alTuré qu'il n'y avoit rien dans les Ecrits ûe. S. Hiiaire qui piit blelfer ou af- foiblir la foi ; il y a des Ecrivains qui ont cru trouver plufieurs er- reurs dans les Ouvrages du Saint Evêque de Poiriers. Avant que d'entrer dans la difcuilîon des diffé- rons points fur lefqucls on a accufé S. Hiiaire d'avoir avancé des er- itl urs contre la foi, l'Auteur obfcrve d'abord d'après Lanfranc qu'on ne peut flétrir en quelques points la doctrine de $. Hiiaire , fans noter beaucoup de grands Hommes qui l'avoient approuvé. Il ajoute que lorfque nous trouvons quelques endroits difficiles dans les Ecrits des Saints Pères, fur-tout de ceux qui ont été célèbres par leur vejrtu & par leur fçavoir , nous devons avouer que nous ne les entendons pas , plutôt que de leur faire dire des chofes contraires à la foi. En- fuite le Père Cellier s'attache à ex- pliquer les endroits difficiles des Ecrits de Saint Hiiaire. Quelques Auteurs ont prétendu que ce Saint avoit foûtcnu des erreurs par rapport à la Grâce qui cil une matière fur laquelle on trouve en differens endroits des Ouvrages 4c S. Hiiaire , plufieurs Propofi- ES SÇAVANS, tions qui font de la peine & qui ne paroilTent pas s'accorder avec la doctrine de S. Auguftin. Le Pcre Ceillier fe contente d'oppofer a ces paffages , d'autres endroits des Ecrits de ce Saint où il parle de la force & de la neceffité de la Grâce , de la foiblelTe des hommes , & du péché originel qu'il regardoit comme la caufe de cette foiblefle. Dans la Vie de S. Athanafe le Pcre Ceillier examine le point de fait , fi ce Saint étant enfant a bap- tifé d'autres enfans fur le bord de la mer , & il fe détermine à la re- jetter. Sa raifon eft que ceux qui rapportent ce fait le placent fous S. Alexandre qui fut élevé fur le Siège d'Alexandrie vers l'an 313. & que fi S. Athanafe n'avoit été qu'enfant en 3 1 3. il n'auroit pas été en état d'écrire fcs Traitez contre les Gentils , &: de l'Incarnation avant 319. de détendre la foi con- tre les Ariens en 323. & d'être éle- vé à l'Epifcopat en 326'. Théodoret qui parle fouvent de S. Alexandre & de S. Athanafe ne dit rien de ce prérendu baptême. On n'en trouve rien dans S. Grégoire de Nazianze, ni dans S. Epiphanc , quoiqu'ils s'étendent tous deux fur î'HJftoire de S. Athanafe. A l'égard de Ruffin qui dit avoir appris ce fait de per- fonnes qui avoient vécu avec Saint Athanafe , le Père Cellier répond, que ceux mêmes qui ajoutent for'à ce que Ruffin rapporte de ce pré-< tendu baptême , conviennent que cet Auteur eft peu exadl dans Jes faits qu'il rapporte , qu'il 3 écrit avec négligence , qu'il n'a point s E P T E M fravaillé fur des Mémoires authen- tiques, & qu'il a rapporté tout ce qu'il avoit oiii dire bon & mau- vais. Socrate & Sozomene qui ont pris de Ruffin ce qu'ils racon- tent du baptême donné à des en- fans par S. Athanafe par manière de jeu, ne rapportent ce fait qu'en doutant s'il étoit bien fondé. (Quelques Critiques Protcftans ont préfcnd'u que la Vie de S. An- toine inférée dans les Ouvrages de S. Athanafe étoit un Ouvrage fup- pofé &c tout différent de la Vie de S. Antoine que S. Athanafe avoit écrite. Sur quoi le Pcre Cellier ob- ferve d'abord que cette Vie a été traduite du Grec en Latin parle Prêtre Evagre , depuis Evêque d'Antioche , du vivant même de S. Athanafe , & qu'on trouve dans le Grec & dans la tradudlion d'E- vagre , tout ce que les anciens Auteurs en ont cité comme étant dans rOiwrage de Saint Athanafe. L'Auteur répondant cnfuite aux objcdions des Proteftans , dit que S. Athanafe a pu donner deux man- teaux à S. Antoine, que ce Saint Solitaire en a pu employer un à en- fevelir S. Paul Hermitc , &: ordon- ner en mourant qu'on rendroit l'autre à celui de qui il i'avoit reçu. S'il n'ert pas parlé de S. Paul Her- mitc dans la Vie de S. Antoine par S. Athanafe , c'cll que l'Auteur n'a point voulu tout dire comme il ie déclare lui-même. S. Jérôme qui ccrivoit peu de tems après S. Atha- nafe, dit que pcrfonne n'avoir don- né avant lui laViedeS. Paul Hcrn^ite. * A l'égard des faits rapportés dans B R E, 175 j-. ^07 »la Vie de S. Antoine qu'on dit «être incroyables, ils n'ont paru » tels , dit notre Auteur , ni à Saint » Chrifoftome , ni à S. Auguftin , 30 qui ne manquoient ni l'un ni l'an- » tre , ni d'efprit , ni de capacité, ni » de critique. Il ajoute que l'Hi- » ftoire des deux combats de Saint "» Antoine avec les démons n'a rien » de plus incroyable , que ce que >=nous lifons dans l'Evangile » qu'une légion entière de démons » obftdoit quelquefois un feu] » homme , que ces démons en- » troicnt quelquefois dans les corps » des porcs & les préeipitoient » dans la mer. S'il eit dit dans la » Vie de S. Antoine que le démon » lui apparoiffoit fous la forme hu- » maine , c'eft le fcntiment de plu- » fieurs Interprètes qu'il fe prefen- »ta à J. C. fous la même forme » pour le tenter. Enfin S. Athanafe "dans fa Lettre aux Evêques de >» Lybie affure que le démon , pour » nous féduire , prend fouvcnt une " forme étrangère. Le P. Cellier s'étend beaucoup fur la dodrine de Saint Athanafe qu'il tire fuivant fa méthode or- dinaire des Ecrits de ce Père , & il cite les principaux palfagesqui ont rapport à chaque point. Ce mor- ceau mérite une attention particu- lière, de même que l'éloge de Saint Athanafe. Dans le Chapitre neuvième qui regarde Marcel Evêque d'Ancy're. Le P. Cellier donne un Extrait dé- taillé de la profeflïon de foi que Marcel adrefla à Saint Athanafe en. fon nom & à celui de fon Eglifc , foS JOURNAL DE telle qu'elle eft inférée dans la re- Isrion de la dépiitation d'Eugène à S. Atlianafe à qui on avoir voulu rendre fufped la foi de Marcel d'Ancyre. Cette relation a été im- primée dans le fccond Tome de la Colleilion que le Père de Mont- faucon a publiée à Paris en l'année 1706. Notre Auteur alTure qu'après une profeffion de foi fi nette & fi précifc , on ne peut plus douter que Marcel ne foit mort dans des fcntimcns ortiiodoxcs. Il ajoute que (i quelques Sijavans du dernier fiécle en ont douté , c'eft qu'ils S SÇAVANS; n'avoicnt point vu ce Monumcnc de la foi de Marcel que le Pcre de Montfaucon a publié en 170^. fur un Manufcrit tonfervé dans la Bi- bliothèque de l'Efcurial. Notre Auteur cft perfuadé que cette Pièce a été inconnue à S. Hilaire , à SuU pice-Sévére & aux autres anciens qui onr taxé Marcel de l'Héréfie de Sabellius. On voit par ce que dit Saint Jérôme dans fon Livre des Hommes lUuftrcs , qu'il jugcoic favorablement de Marcel d'Aa» cyre. PENSE'ES DV PERE BOV RD jiLOVE DE LA Compagnie de Je fus ^fur divers fuj et s de Religion & de Aîorale. A Paris , chez CaiHeau , & Rolin ^ Quai des Auguftins; P^ault , Quai de GcvreJi & Bordeiet , rue S. Jacques , vis à vis les Jefuites , à S. Ignace. 1734. in- IX. 5. Vol.Tom. I. pag. 416^. Tom.II.pag. 3i3.Tom. 111. pag. 541. LE Perc Bretonneau s'eft appli- qué depuis près de trente ans à recueillir tout ce qu'il a pi!i recou- vrer d'Ecrits du Pcre Bourdaloiie. Le Public a via avec plaifir les Ou- vrages pofthumes de ce célèbre Prédicateur , dont il paroît que ces trois Volumes achèveront le Re- cueil. L'Editeur les avoir annoncés en publiant les deux Volumes d'Inftrndtions & d'Exhortations du Père Bourdaloiie. Ce font des Penfées détachées , des Reflexions, des Fragmens fur les Sujets annon- cés dans le titre , & des plans de Sermons, où l'on trouve quelque- fois des morceaux confiderablcs aufquels il paroît que l'Auteur avoit mis la dernière main. Ces Morceaux ferablent avoit été tous dcftinés pour la Chaire , car ils ont tous un air Oratoire. Entre ces Penfées il y en avoit de plus éten- dues que l'Editeur a liées les unes avec les autres , de manière qu'il en a fait des efpeces de Traitez , où l'on trouve , comme dans les Scï- mens de l'Auteur, des raifonns- mens folides expofés avec une élo- quence noble & prelTante. Il y a d'autres Penfées que l'Editeur s'eft contenté de réunir fous le titre de Penfées diverfcs , fans les lier les unes avec les autres. Le Père Bre- tonneau avoiie de bonne foi , qu'il a fallu cjiiU mit la main à l'œuvre ^ non feulement pour difpofer les matières , mais encore pour les lier & pour les développer , pour les finir & pour leur donner une cer- taine s E P T E M tainc forme. C'cft ce qu'il avoic dé- jà j dir-il , pratiqué à l'égard des Sermons, des Exhortations, des Inftrudions , &c de la Retraite Spi- rituelle du même Auteur. Ceux qui aiment à connoître les vérita- bles fentimens d'un Auteur dont la réputation eft auffi bien établie que celle du Père Bourdalciie , &C quicroycnt quelquefois en pouvoir juger par certaines exprcllîons , fouhaiteroient que le Pcre Breton- neau eiit pris la précaution de mar- quer les endroits où il a mis la main à l'œuvre. Les titres fous lefquels fetrou- ' vent recueillies les Penfées qui compofent le premier Volume font le falut , la foi iSc les vices qui îui font oppofées , le retour à Dieu & la pénitence , la vraye ou la faulTe dévotion , & la prière. Pour donner un exemple tiré de •ce premier Volume , nous ne nous arrêterons qu'au Traire qui regar- de la foi 5c les vices qui lui fontop- pofés. Le premier article concerne l'accord de la raifon & de la foi qui a fait dans le dernier iîecle le fujet de tant d'Ecrits chez les Catholi- ques &c chez les Proteftans. Il arri- ve fouvent , comme le remarque le Père Bourdaloiie , que quand on demande compte de fa foi à un 'homme du monde , il fe contente de répondre , je m raifonne point , mais je veux croire. » Ce langage ïjbien entendu peut être bon : 35 mais dans un fens aflez ordinaire » il marque peu de foi & même y> une fecrette difpohtion à Tincré- o dulité. Car i: qu'efl-ce à dire, je Septemh. B R E , 17 5 5"- ;op » ne raifonne point? Si ce prétcn- n du Chrétien f:avoit bien l.i dcf- » fus démêler les véritables f'.nci- » mens de fon cœur ou s'il les » vouloit nettement déclarer , il »reconnoîtroit que fouvent cela » fignifie : Je ne raifonne point , » parce que fi je raifonnois , je ne MCroirois rien : je ne raifonne » point , parce que (\ je raifonnois, » ma railbn ne trouveroit rien qui »me déterminât à croire : je ne rai- " fonne pas , parce que fi je raifon- » nois , ma raifon même m'oppo- » feroit des diftîcultcz qui m'em- » pêcheroient abfolument de croi- » re. Or pcnfcr de la forte & être ainli difpofés, c'eft , félon la remar- que du Père Bourdaloiie, manquer de toi. La raifon qu'il en rend efl que îa toi Chrétienne n'clt pomt un put acquiefcement à croire , ni une fimple foûmiflîon d'cfprit , mais un acquiefcement & une foûmif- fion raifonnable. Si cette foûmifîloa n'étoit point raifonnable , ce ne feroit plus une vertu , comment feroit - ce un acquiefcement , une foûmilllon raifonnable , fî la raifon n'y avoit point de part. Il faut donc raifonner , mais jufqu'à un certain point , mais non au-delà. On doit faire ufage de la raifon pour fc convaincre de la vérité des preuves de la Religion Chrétienne. n Mais quel eft le fonds de ces » grands Myfleres que la Religion » me révèle , & qui nous font an- » nonces dans l'Evangile ? En quoi » conliftent- ils ? Comment s'ac- » compiifTent-ils î C'eft-là que la » raifon doit s'arrêter , qu'elle doij Bbbb ;io JOURNAL DE j> réprimer f. taiie fen.ir à l'in- c>édule que pKis no; Mylleres lui paroilltnt hors de route créance, plus il doit nconnoître que cette Ciéance n'a pu s'établir , & qu'elle ne s'eft effeclivemenr établie que pat un effet miracukux de la Tou- te-puilfance & de la Sagelfe Divine. Le lécond Volume contient quatre Chapitres Le premier de rhumilité(i'-; de l'orgueil; le fécond de la chanté Chrétienne fie des ami- tiez humaines. Le troifième de l'E- glife , fie le quatrième de l'état Re- ligieux. Aptes Jesefpeces de T ai- tez fur chacun de ces Sujets , vien- nent à la tin de chaque titre des Penfécs détachées dont nous ne rapporterons ici que deux exem- ples. Nous les tirerons du. Chapir lie 4U1 icgarde l'E^lift. SEPTEMBRE. 17? y. yir On ne peut trop refpcdlcr la » guerre de paflîon. primitive Eglife , dit le Pcre Bour- Le troi/icnie Volume contient daloiie, mais la haute idée qu'on deux deiTeins généraux de Ser- cn a ne doit pas fervir à faire mé- mons , l'un pour l'Avent l'autre prifer l'Eglife des derniers lîécles. pour l'Odave du S. Sacrement. Le Dans la primitive Eglifc , parmi Père Bourdaloiie ne faifoit que beaucoup de lainteté , il ne lailfoit d'entrer dans le Minidere , lorf- pasde fe glilTcr des relâchemens ; qu'il forma ces projets. C'éroic & dans l'Eglife des derniers fié- alors la coutume des Prédicateurs clés , malgré les relàcheniens qui qui cntreprenoient de prêcher en s'y font glidés, il nelailfc p.is d'y Àvent , de fe propoferun delTcin avoir encore beaucoup de Sain- général pour tout le cours de l'A- tcré. vent , &: d'y rapporter les Sermons Une autre de ces Penfécs divcr- qu'ils avoient à faire chaque jour, fes roule fur le zélé pour les inte- Le Père Bourdaloiie fe propofoit rets de l'Eglife. L'Auteur obferve dans ce plan, qu'il n'a point exécuté, d'abord qu'on ne peut affcz loiier de prendie pour fu;et général d'un ce zélé ; mais il a;oûte que ce zélé Avent de parler de S. Jean Précur- cft une vertu , &i que toute vertu feur de J. C. & difpofant le monde confifte dans un milieu & dans un à la venue du Meffie. Dans la pre- jufte temperamment , qui évite miere Semaine il vouloir reprefen- toutes les extrémitez , enfuite il ter S. Jean annonçant au Peuple demande fi quelques perfonncs ne J. C. & le faifant con.aoîcre com- prennent point les intérêts de l'E- me Dieu & Homme tout enfem- glifeplus qu'elle ne les prend elle- ble , comme Auteur de la Grâce même. » Pourquoi ces abattemcns & de la fandification des âmes , n Si ces défolations où vous tom- comme In(1;ituteur des Sacremens, » bez ? Pourquoi ces inquiétudes Sc en particulier du Baptême , »& ces allarmes continuelles ? comme Juge de l'Univers , comme » Pourquoi ces aigreurs , ces amer- Rémunérateur de la vertu dans les 3» tûmes de cœur? N'omettez rien Juftes & les Prédcftincs , comme M de tout ce qui dépend de votre Vengeur des crimes dans les pc- » vigilance &c de votre attention, cheurs 8c les reprouvés. Ce qui «Parlez , agiiTez , mais au regard fournilToit la matière de fept Ser- » du fuccès , lailTez à Dieu le foin mons fur l'Incarnation , fur la Gra- »de fon Eglife , c'eft fon affaire ce, fur le Baptême , fur le Juge- j» plus que la vôtre. Le mal vient ment Univerfel , fur le bonheur »de ce qu'il fe glilTe dans la plupart du Ciel &c fur la damnation cter- » de ces difputcs , beaucoup de nelle. » naturel , beaucoup d'humain. Si La féconde Semaine reprefentoit «l'on n'y prend pas garde , cette S. Jean prêchant la pénitence , Sc » £ueire de Religion devient une fournifioic la matière de fept Set- ^ B b b b ij JI2 JOURNAL D mons fur la pénitence. Dans la troificme Semaine S.Jean prefcti- vant au Peuple les règles de la mo- rale -, donnoit occalîon au Père Bourdalolie de prêcher fur l'impu- reté , Tambirion , l'attachement aux richcfTes , la douceur Chrérien'- ne , la médifance de l'aumône. Dan? la quatrième Semaine S. Jean formant les peuples aux vertus les plus capables de les unir à J. C. drinnoit lieu au Père Bourdaloiie de parler de la foi^dela rédemption des hommes par J. C , de la dévo- tion envers J. G. , de la droiture Chrétienne & de la fréquente Confeffion. Ces projets finilTent jiar le plan d'un Sermon pour h Fê- te de Noël. Chacun de ces projcfs contient le Texte , la divifion ^ & des refle- xions fur chaque point propofé dans la divifion : ce qui peut être utile , fuivant la remarque du ES SÇAVANS. Père Brctonncau , non feulement aux Prédicateurs , mais encore à ceux qui cherchent à s'édifier par de bonnes ledures. Il en cft de même de l'EfTai pour rOdavc de la Fête du S. Sa- crement , où fon deffein étoitde reprefenter en huit Sermons J. C. prenant dans l'Euchariftie une fé- conde nailTance , y recevant nos adorations prcfcntées à Dieu dans ce Sacrement , y converfant avec les hommes, y nourrilTant les amcs fidèles , outragé & crucifié par des Communions indignes , viiftorieux Cv triomphant par les proceflions. Le projet par lequel finit ce Re- cueil ell celui d'un Panégyrique de S. Benoît deftiné pour un Couvent de Rcligieufe^. On voit par ce détail que ces Vo- lumes contiennent plus de chofes que le titre ne ferabloi: l'annoncer. HISTOIRE DE LA FILLE DE PARIS. A Paris , chez Pîerre'- François Çijfart ^ rue Saint Jacques , à Sainte Thérefe. ly^^. in-ir. 5. Vol. Tom. I. pag. 576". Tom. H. pag. 5é'7. Tom. III. pag. 575=. Tom. IV. pag. 579. Tom. VL pag. 578- PLUSIEURS perfonnes d'en- tre celles qui feroient curieufes d'apprendre l'Hiftoire de la Ville de Paris , n'ont point alfezde loi- fir pour lire la grande Hiftoire que le Pcre Lobineau en a donnée au public. C'ell: ce qui a engagé l'Au- teur de ces cinq Volumes à faire l'abrégé du grand Ouvrage du F. Lobmeau. Il s'efl attaché à prefen- ri.r aux Ledeurs ce qu'il a cru de- voir, être le plu» iincrcflant & le- plus curieux dans l'Hiftoire de Pa- ris, & il y a évité les détails qu'il a cru n'être point à la portée da plus grand nombre de Lecteurs; il y a même quelques endroits dans lefquels il entre dans un plus grand détail que n'avoit fait l'Au- teur dont il donne l'abrégé. Il f parle de ce qui regarde en particu- lier la Ville de Paris , & il y par<- le de certains faits qui concernent l'Hiftoire générale de France » s E P T E M quanti la Ville de Paris en a été le principal Théâtre , comme elle l'a été par rapport aux trou- bles arrivés fous le règne tie Char- les VI. pendant la Li£;ue fous les Rois Henri III. & Henri IV.Sc pen- dant la minorité de Louis XIV. Cette Hiftoire cft divifce en 18 Livres. Les cii"Ci premiers qui com- pofent le piemitr Volume contien- nent ce qui s'ed pa(Té de plus re- marquable dans la Ville de Paris , depuis le commencement de la Monarchie , jufqu'à la fin du règne de Louis X. L'Auteur dit peu de chofede l'ancienne Lutcce Capita- le du Peuple Parificn , SvT delà pri- fe de cette Ville par les Pvomains. On voit dans le fécond Volume, qui comprend aufli cinq Livres, ce qui regarde la Ville de Paris depuis le commencement du règne de Philippe VI. jufqu'à la fin du rè- gne de Charles VI. Lctroifiéme commence au règne de Charles VIL & finit avec celui dl^enri IV. ilnt contient que quatre Livres, kXI,leXlï,leXIII,&:leXIV. les quatre Livres fuivans ne rem- plirent guercs plus de la moitié du quatrième Volume , ce qui s'efl palTéfous les règnes de Louis XIII. Se de Louis XIV. de pendant les quinze premières années du règne de Louis XV. en font le fujer. Le dix- huitéme & dernier Livre finie avec l'année i7'3o. Quoique l'Auteur ait fuivil'or^^ dre Chronologique dans le corps de fon Ouvrage , il a cru qu'il étoit à piopos en parlant de ccr- sains établuremens confiderables , B R E, 175 r.; s^3 de réunir dans un même endroit tout ce qu'il étoit intereffant d'en' fçavoir. Après l'Hiftoire on voir dans le quatrième Volume un Recueil deS Privilèges de la Ville de Paris, établis par piufieurs Ordonnances. On a ajouté dans le même Volume une Lifte par ordre alphabétique des Rues, Ruelles , Carrefours , Cimetières, Culs de facs , Enclos, Fontaines , Halles , Marchez , Pla- ces , Ports , Portes &c Quais de la Ville de Paris. Les tenans & abou- tirtans de chaque rue & de chaque endroit dont il eft parlé dans cette Lille y font indiqués. Le Pcre Lobineau avoit joint à fon Hiftoire de Paris des Pièces ju- ftificatives. Ce que l'on donne dan? le cinquième Volume , comme un précis de ces Pièces juftificatives ; cft à proprement parler une dcf- cription abrégée delà Ville de Pa- ris 8i de fes Faubourgs. Nous di- fons une defcription abrégée , par- ce que celle de M. Btiee dont il y a eu plufieuTS Editions eft beaucoup' plus étendue. L'Auteur de la nou- velle defcription ayant parlé de h manière dont la Ville de Paris s'cfi; agrandie jufqu'au point où nous L voyons aujourd'hui, traite de diffe- rens Quartiers de cette Ville , des Edifices publics , des Chapitres Sé- culiers , des Chapelles & des Sé- minaires , des Monafteres d'Hom- mes &c de Filles , des Hôpitaux , des Collèges, des Académies , des^ Bibliothèques Sc des Fontaines pu- bliques. On fent affez que i'Hiiloite as- 5-14. JOURNAL DE P^ris Se la defcription de cette Vil- le n'étant que des abrégez ne font pas fufceptibles d'un Extrait dé- taillé. Nous nous contenterons d'en rapporter quelques traits pris dans differcns Volumes. L'Auteur parle de Sainte Gene- viève dans le premier Livre, & il rapporte ce qu'on dit dans la Vie de cette Sainte au fu|et d'Attila & de Childeric. » Ce dernier , félon » notre Auteur , mit le Siège de- »• vant Paris qu'il prit malgré la vi- 3> goureufe redftance des habitans , » & des Romains qui la dcfcn- » doient. Geneviève qui étoit alors «dans la Ville avoit procuré ptn- 33 dant le Siège , toute lorre de fc- » cours à fes Concitoyens. Le Roi » Childeric qui eftimoit la vertu , «quoique plongé dans les erreurs »>de l'Idolâtrie , ne pouvoit lui re- ») fufcr aucune des grâces qu'elle » lui deniandoit , & une chofe qui » cft alTez remarquable , eft qu'un » jour ayant condamné à mort des » coupables qu'il vouloir faire pé- » rir , il fortit de la Ville & en fit » fermer les portes afin que la Sain- ï>te ne piàt lui demander une grâce, » qu'il ne fe fentoit pas la torce >» de lui refufer. Notre Auteur ne dit rien de ce que pluficurs Ecri- vains ajoijtent à ce tait, que Sain- te Geneviève n'avoit point été re- butée par les précautions que Chil- deric avoit prifcs de faire fermer les Î)ortes de la Ville , qu'elle fe pre- enta à la porte au grand étonne- ment des Gardes qui la tenoient fermée , & qu'elle furprit ainfi le Prince qui fe vit contraint de lui S SÇAVANS, accorder la vie des criminels. Il y a desCritiqucsqui ne crovent pas que ce qu'on dit du Siège de Paris par Childeric , & de l'établiiremcnt de ce Prince dans cette Ville, puiffc s'accorder avec l'Hifloire. Notre Auteur n'a point cru être obligé de répondre à ces Critiques , en pre- nant un fcntimtnt contraire à celui qu'ils ont cmbralTé. C'eft à la pieté de Sainte Geneviève que l'on eft redevable , fclon notre Auteur , de la première Eglife bâtie fur le tombeau de S. Denis , &c du com- nirnccment de la Ville qui porte le nom de ce Saint. Dans le premier Volume l'Au- teur rapporte la fondation de plu- fieurs.Eglifes , de Monafteres , de Collèges dont il continue l'Hiftoi- re jufqu'à notre tems. Voici un abrégé de ce qu'il dit des Blanc- Manteaux. C'étoient des Reli- gieux Mandians qui prenoient le titre de Serfs delà Vierge Marie , ou At Frères de Notre-Dame dt Aiom-Ferd. Ils portoient un man- teau blanc. C'étoit à Marfeille que ces Religieux s'ètoicnt d'abord établis. LePapc Alexandre IV. char- gea Benoît Evêquede Marfeille, de donner à ces Religieux une Rè- gle. Cet E vêque leur donna la Rè- gle de S. Auguftin. S. Louis en fit venir de Marfeille à Paris en 1158. mais ce ne fut qu'en i 254. que i'E- vêque leur permit d'avoir une Chapelle & un Cimetière. Leur Ordre fut fupprimé dix ans après dans le fécond Concile de Lyon. Cependant il refta trois Blancs- Manteaux au Couvent de Paris. s E PT E M B Boniface VIII. pour les en clulTcr , permit aux GuiJlelmites de s'y éta- blir en ij 17. ces Gmllelmites re- connoilToicnr pour Fondareuis S. Guillaume Hermire , qui après avoir parcouru la Tofcanne s'ctoit établi en un- dans le Territoire de Sienne, où il avoir tornic une Communauté de laquelle s'éroicnt formés plulîeurs Couvcns. Ils em- bralTercnr depuis la Règle de Saint Benoît Le Pape Alexandre IV. leur accorda un privilège fingulier , qui fut de retenir |ufqu'à cent marcs d'argent de ceux qui avoient volé, & qui ne connoilloient pas ceux à qui ils dévoient reftirucr , & de recevoir la mcmefommcde ceux qui' voudroienr fe racheter de quelque vœu , à l'exception de celui du vovage de Jerulalem. Quoiqu'ils fulTent Mendians, on leur permit d'acquérir des rentes & des tonds. Il< furent admis dans rUniverlîté de Paris, & IcurMai- fon devint une efpece de Collège pour les Etudians de leur Ord'C. En léiS. ils unirent leur Maifon à la Congrégation des Bénédiâ:ins Reformés de France qui prit le nom de Congrégation d.es Bénédic- tins de S. Maur. Cette union fut exécutée nonobilant l'oppolîtion du général des Guillelmites. Leur Maifon fut rebâtie en 1685. par les foins & par les libcralitez du Chan- celier le TtUier. Voici ce que l'Aureur dit de .Guillaume Polkl (ous l'année 1 581. 3» Il étoit né à Barenton en Nor- » mandie , après s'cfc fait recevoir » Sachcliec cq Mcdt.cuic dans l'U- R E, 175 y: jj^ >.. niverfité de Paris, il parcourut »une partie de l'Italie. Il fe rendit » a Rome & entra dans la nouvelle » Société que formoit alors Ignace » de Lovoh : mais l'on efprit préoc- ij cupé du Rabinifmc & de l'Aflro. «nomiejudiciairekfit mépriferdu » nouveau Fondateur qui nevou- » ioit point déshonorer fon Oidre "nailTant, en y admettant un Fa- » natique. Poftcl exclu d'une So- » cierc où il s'étoit mis par lé^ére- " ré , fe confi>la du mépris d'Igna,- » ce , Ck repalTa en Fiance , où il » comincnça à enfeigner que le » lexc des femmes n'avoit point été "entièrement racheté par le Sang » de J. C. & d'autres abfurdircz »> qui lui filent des affaires. Mus » comme il éroir plus fou que mé- » chant, ( félon Scaliger qui efti- » moit fi vafte érudition & fes « profondes connoiifances J on fe » contenta de lui donner le Mo- » nafterede S. Martin des Champs » pout prifon. Les Sçavans le con- » fultoient dans cette retraite , Sc >» malgré les folies qui lui échap- » poient , il faifoit éclater un fça- x> voir prodigieux. D'ailleurs il M polfedoit tant de Langues, qu'il » alîura un jour au Roi qu'il pour- »> roit aller [ufqu'ala Chine fans fe wfervir d'Interprète. L'Auteur » ajoute quePoftei croit affez grand » & que fon vifage majellucux «étoit orné d'une longue barbe » blanche qui le rendoit trcs-véné- " rable. Les dernières années fu-' •> rent les plus fages de fa vie. I| »> mourut dans un âge très avan- »cé , &i l'ellime des Religieux ds- Si6 JÔURl^AL DES SÇ AVANS, "Saint Martin des Champs , lui gé de l'Hiftoire de Paris, qui fera » procura une fépulture dans la » Chapelle de la Vierge de leur » Eglife. Nous avons tranfcrit ce dernier morceau pour donner un échantil- lon du ftile de l'Auteur de cet abré- plaifir à ceux qui n'onr point alTez de tems pour s'inftruire de l'Hi- ftoire de cette Ville dans d'aulïï gros Volumes que ceux du Père Lobineau. PISSERTATIO MEDICA; SISTENS PLURIUM PEDIS mufculorum defeduni , quam folemni phiiiatrorum examinifub]icieç Gorofredus Salzmann D. M. Argentoratcnfis , ad dicm xxx.Decemb. 1734. Argentorati. Typis Johannis-Henrici Heitzii. C'eft - à - dire ; Dijfertation fur un manquement de plujîeurs mufcles du pied. Par Jean-Godefroy Salzjmann , DoEIeur en Aleiectne. A Strafbourg , de l'Imprimerie de Jean-Henri //«^»u. 1734. Brochure /«- 4". pag. 42, ON ne peut fçavoir trop de gré à ceux qui veulent bien prendre la peine de communiquer au Public les faits rares & curieux qu'ils obfervent dans ce qui con- cerne la Médecine, l'Anatomie & les autres fciences. Notre Auteur donna en 17 18. une Diflcrtation fur une fradure finguliere de l'os frontal , dans laquelle plufieurs fragmens de l'os s'étant féparés^ laiiîbient voir à découvert la dure- mere •, ce qui n'empêcha pas le JblefTc de vivre encore quarante an- nées. On lit dans les Ephémérides des Curieux de la Nature, Centur. X.Obfcrv. 48. l'Hiftoire d'un en- fant qui demeura quarante-fix ans au ventre de fa mcre fans fe corrompre , enfermé dans fa cocffe qui s'étoit ollihée , & qui faifoit comme l'office d'un coffre. Ces phénomènes font furpre- nans , mais le dernier l'eft d'aurint plus qu'on peut le regarder comme «nique. Si le cas dont il s'agit dans la Diiïertation dont nous allons rendre compte , n'eft pas aufll ex~ traordmaire ; il ne lailTe pas , dit notre Auteur , d'être du nombre de ceux dont la rareté mérite toute l'attention des Sçavans. M. Salz- mann déclare même qu'il n'a jamais rien lu de fcmblable dans aucune relation. Voici le fait en quefti^on , nous le détacherons d'un grand nom- bre d'autres qui font étrangers , & qui dans la DilTertation de notre Auteur, le dérobent long- tems à la vue. Un homme de 40 ans , qui , de- Duis un grand nombre d'années , marchoit avec beaucoup de peine du pied droit, mourut en 1735. d'une fièvre aiguë : on l'ouvrit , & la dilTcdion qui fut faite de fa jam- be droite , par l'ordre & en la pre- fcnce de M. Salzmann , Dorteuï ti Profcffcur en Médecine à Straf- bourg , découvrit aux allillans ce que nous allons rapporter d'après ce s E P T E M ce fçavant Médecin qui eft l'Au- teur-mcme de la Relation. Cette jambe droite ctoit deftiruée de la pliîpart de fes mufcles & les autres avoient à peine leur conformation naturelle. Notre Auteur met au nombre des mufcles qui manquoient , le petit glutêe ou fetit fejfier \ le quarré du fémur , le crutal , le mufcle du fafcia-Iata , le couturier , le grêle interne , le poplité , le jambier , poftcrieur ÔC prefque tout le fo- léairc. II n'y avoit à la plante du pied aucun mufcle , Se à la place on ne voïoit qu'une matière adipeufc. On ne trouva ni le fléchineur court des orteils , ni les lombricaux , ni les intcr-ofleurs , foit externes , foit internes ; ni les autres mufcles tant adducteurs qu'abdudeurs des orteils -, la malTc même charnue & tranfverfe de la plante du pied, n'y étoit point. Pour ce qui eft des mufcles dont on ne rrouvoit que quelques traces , notre Auteur ob- ferve , qu'à l'égard du grand fef- fier , la portion inférieure de ce mufcle étoit charnue , & que la fu- pcrieure qui tient à l'os des iles , & a l'os facruni,ne paroifToit point ; qu'à l'égard du moyen feflîer , la portion antérieure étoit en partie adipeufe , en partie tcndineufe , & la pprrion pofterieure à moitié mufculeufe. Pour ce qui con- cerne le vafte externe , & le vafte interne , le premier n'étoir mufcu- leux qu'à fa partie intérieure , & le fécond étoit garni d'un pacquetdc fibres long d'environ cinq travers Sepiemk B R E . 17 j y. pj de doigt , de gros à peu - près comme le périt doigt. Le dreit éroit très - petit , on n'y apper- cevoit des fibres mufculeufts qu'à la partie fupericurc, &: encore en petit nombre. A l'égard du tri- ceps il étoit beaucoup moindre qu'à l'ordinaire, fur tout le moyen. Pource qui efl: du biceps, du demi- mcmbrantux, & du demi-nerveux, ils n'a voient , les uns & les autres , qu'à peine la moitié de leurs fibres. Outre cela , les gaftre-cnémiens , ou jumeaux de la jambe, avoient, dans la partie moyenne & pofte- rieure , un failTeau de fibres très- minces & très-tendres. Le plantaire appelle par M. Winflov , jambier grefle , lequel eft toujours fort pe- tit , l'étoit beaucoup plus qu'à l'or- dinaire , & avoit très-peu de fibres. Notre Auteur joint à ce nombre, le jambier antérieur & le péroniep {)ofterieur , autrement appelle le ong , lefquels ne laifloient voir qu'un léger faifceau de fibres. Il y jointle long extenfeur commun des orteils qui avoit plus de fibres que le jam.bier antérieur , mais beau- coup moins nombreufes qu'à l'or- dinaire. Il y joint le court exten- feur commun appelle en latin f*- diaus , en François pedien , lequel fe divife en quatre portions , & qui ti'en avoit qu'une , fçavoir l'in- terne. Il y joint enfin le long flé- chifleur commun des orteils , qui n'étoit formé qu'à demi. Mais il re- marque qu'entre les fléchiffeurs de la cuilTe, l'iliaque & le pfoas étoicnO entiers -, qu'entre les rotateurs , le pyramidal étoit au (Ti dans fa per» C c ce 5-18 JOURNAL DE îcclion j & qu'entre lesadduûeurs le peâiint paroiiToit de même dans fa ftrufture naturelle. Il en dit au- tant du fléchi iTeur 6c de l'extenfeur propre du gros orteil , autant en- core de l'extenfeur du petit orteil.. Après quoi il fait trois remarques qui ne font pas à négliger ; la pre- mière : Qitelescfpaccsoù Icsmuf- clcs qui manquoient, foit en tout , foit en partie , ctoient occupés par une fubftance épailTe , de la nature de celle qui fe trguvc dans les tu- meurs cnkiflées , qu'on nomme ftéatomes -, la féconde : Que les fi- bres charnues des mufclcs qui étoient entiers, &: celles deceux dont on ne difcernoit que les pre- miers traits , paroinoient pâles , & rc(Tcmbloient plutôt à des fibres tendineufes, qu'à des fibres muf- culcufes ; la troifiéme : Que les tendons étoient la plupart dans leur état naturel , tant pour leur eouleur §c leur longueur que pour leurépaideur -, ce qui fait voir que G'étoit plutôt fur le corps des muf- cles que tomboit ici tout le defor- dre , que fur leurs extremitez. M.Salzmann avant que de faire ce détail , expofe en quoi confiftoit la difficulté que le malade éprouvoit en marchant , & voici ce que c'eft. Premièrement il portoit toujours en d.-hors, le pied droit, & lui faifoit faire un demi cercle , à peu- près comme fi ce pied , qui étoit d'ailleurs très flexible , mais para- lytique , avûit été un pied artifi- ciel. Secondement le tibia , & l'ex- tiémité du pied étoient deftitués de grefque toute aftion , Se obéifî S SÇAVANS, foient feulement , quoique d'une manière afiez imparfaite ^ au mou- vement de la cuifle. Le malade ne lailToit pas de fe tenir debout fut le pied droit ; mais lorfqu'il vou- loit fe tranfporter d'un lieu à un autre , il ne le pouvoir faire fans bâton i le tibia au refte, étoit cour- bé en dehors , l'extrémité du pied rentroit en dedans ^' la plante du pied étoit retirée , de raanitre qu'elle laifloit voir en fon milieu, une cavité confiderable \ la flexion de la cuifle fe faifoit aifément , & le malade mcttoit avec la même aifance , la jambe droite fur la gau- che ; .mais il ne pouvoit de même ^ faire l'cxtenfion & l'abdudion. Les Médecins ne purent pen* dant la vie du malade découvrir la caufe d'une telle incommodité j mais après fa mort , ils curent là- deflus plus de fucccs , ayant vu l'état où étoit la jambe intérieu- rement. Cependant comme la dé- couverte d'un tel état ne fufiîfoit pas pour s'éclaircir abfolument fur une caufe fi cachée , &: qu'il falloit outre cela fçavoir d'où pouvoit provenir le defordre intérieur qu'on remarquoit à la jambe , ils firent diverfes recherches. Us cru- rent d'abord que ce manquement demufcles pouvoit procéder d'un vice de conformation dans le fœ- tus , & ce qui fembloit favorifer leurfentiment , c'eft que le malade interrogé s'il n'avoit point eu de maladie confiderable à cette jambe^ foit par quelque coup ou autre- ment , répondoit que dès fon en- fance , il avoit eu la même im- s E P T E M puiffancc de marcher & qu'il ne fe fouvcnoit point d'avoir jamais oui dire qu'il eût eu aucun mal à la jambe dont il s'agilToit. On de- meura quelque tems dans la per- fualîon que le mal dont on cher- clioit la caufe avoir été contradé dès le ventre de la mère •, mais après de nouvelles perquifitions , on apprit une circonftance qui perfuada qu'on fe trompoit , & que le mal en queftion , étoit venu après la nailTance. Diverfes perfon- nes qui avoient vu le malade dans fon bas âge alTurerent que depuis l'âge d'un an ou de deux ans juf- qu'à celui de fix il avoir toujours été très-agile tant de la jambe droite que de la gauche , mais qu'à fix ans complets , il s'étoit fouvent diver- ti à fe taire porter fur les épaules d'un frère aîné qu'il avoir , avec qui il joiioit ordinairement , & qui le mcttoit à califourchon fur fon col en lui écartant les jambes , de manière que l'une pendoit fur un coté de la poitrine de celui qui le portoit , ôi l'autre fur l'autre. Ce jeu , pendant longtems , ne fit aucun iTial à l'enfant , mais un rcrtain jour ayant été recommencé à l'ordinaire , l^enfant fe fentit atta- .qué d'une foiblelTe confiderablc aux deux jambes. Les parcns s'en •étant apperçus , lui firent aufll- tôt les remèdes qu'ils crurent les plus capables de diflîper ce mal. ils employèrent pour ce deffein les linimcns, les onguens, les effen- ces , les eaux minérales chaudes , les bains préparés avec les fourmis, & avec la lie de via touge, cn- B R E, ^75 j. ji^ fin ils vinrent à bout de gtictir la jambe gauche , mais ils ne pu- rent guérir de même h jsnibc droite , laquelle demeura pr.i a lyri- que pendant huit ans; ils ne fe re- butèrent point , ils continucTcnc pendant tout ce tems là les niênics remèdes, & leur perfeverancecut un tel effet qu'elle mit le malade en état de marcher avec le fecours d'un bâton. Il s'agit à prcfent d'e- xaminer d'où a pu provenir ce dé- faut de mufcles , & c'ell à quoi s'applique notre Auteur. Il s'étend beaucoup fur cette matière , maie voici en deux mots à quoi fe réduit ce qu'il dit là - deifus. Il prétend que la véritable caufè du mal dont il s'agit , eft la violen- te tenfion que les mufcles de la jambe avoient foufferte lorfque le malade étoit porté fur les épaules de fon frère, les jambes pendantes, l'une d'un côté l'autre de l'autre , & il croit que le premier cfiet de cet effort a été de rendre la jambe paralytique , en en relâchant les mufcles , &: les privant par là de leur adion , ce qu'il explique pat de longs difcours qu'il feioit ce- pendant difficile d'abréger, & qu'il faut voit dans la Diflertation mê- me. Nous remarquerons feulemenc que M. Salzmann pour faire en- tendre fi penfée , fe fert de la comparaifon d'un arc dont la corde trop tendue fe lâche à la fin , & perd fa force. Cela fuppofé , il ef- faye de montrer que les mufcles dont il s'agit n'ont plus été en éiac de recevoir les fucs neceffaitet C c c c i/ ;20 JOURNAL D fOut leur nourriture -, Que les rerfs ont été comprimés ou ob- ftrués ; Que la circulation du fang a été dérangée -, Que la moelle de l'épine & tout le cerveau ont été affedés •, Que l'abondance de la matière épailTe , qui , faute d'ac- tion dans les mufcles & dans les nerfs, s'cft jcttée en divers endroits de la jambe , a produit des amas de fucs corrofifs & pourrKTans qui cnr confumé peu à peu divers mul- cles j les uns totalement , les autres en partie. Enfin M. Salzmann s'ef- force de faiic voir par une fuite de laifons tirées de l'Anatomie , que tous les accidcns de cette jambe ©nt eu pour caufe primitive l'ex- tenfion violente qui fut faite de cette partie lorfque l'enfant ctoit à califourchon fur le col de fon frè- re. Mais pourquoi la jambe gauche fut-elle guérie préfcrablemcnt à la droite , quoiqu'on fît les mêmes remèdes à l'une &c à l'autre ; Notre Auteur en rend une raifon qui, pour n'être que conjedurale, n'en pafoît pas moins naturelle -, fça- voir , qu'il faut apparemment que la ].imbe droite étant fufpendue eu. fouffert plus de violence que la gi che , ce qui efttrès-aifé à con- cevoir , ou que les vailTcaux de cet- te jambe cuffent par eux - mêmes plus de difpofition à être compri- més , ou obftrués ; ou bien que les remèdes fpiritueux appliqués fur les deux jambes, ayent trouvé dans la droite , des fucs nourriciers plus capables de fe diflîper par l'adiion de ces remèdes, que dans la gauche. ES SÇAVANS, étant certain que les topiques trop adits , ne fervent fouvent qu'à augmenter les embarras , en diiîl- pantlcs fucs les plus fins & les plus fluides , d'où il arrive qu'il ne reftc alors dans la partie, que les fucs les plus grofliers , & par confcquent les moins propres à la nourrir & à la fortifier. M. Salzmann met l'eau-de-vie au nombre des topi- ques qui furent employés dans l'occafion dont il s'agit. Hifce cah- Jis addimus , ^uod a diJcHtientihus & fprttmfis , jiraprimis fpiritu vint , aifms etiam thermalibus & nervinis^ particuU humons altmentarii , fub: tiliores difcHjfi & dijfipatit fuerint , reliElis crajfioribns nutmioni minus aptis. Nous ne croyons pas qu'il foic befoin de juftifier ici la tradudlioa dcfpiritu vint , par eau-de-vie ; peu de perfonnes ignorant que le mot de fpiritus vini , quand il n'eft pas joint à celui de reilificatits , fignific eau de -vie , & non ef^rit de vin. Au refte l'obfervation que fait M. Salzmann fur l'eaude vie , eft d'autant plus digne d'attention , qu'on abufe tous les jours de ce re- mède , qui , comme on l'a remar- qué dans une Théfe foûtenue aux Ecoles de Médecine de Paris, Je 7 d'Avril 1729. & intitulée : yin aqua, vitt, aqua mortis , mériteroit fouvent plus, le nom A'eau de mort^ que d'eaude-vie. On voit au refte , par le cas qui fait le fujet de cette DilTcrtation , combien il importe de prendre garde à ce qui peut ar- river aux cnfans quand on les porte avec trop peu de précaution , foic •SEPTEMBRE, 173 r. yar fur les bras , ou autrement, 6c qu'on fait violence à quelques parties de leurs corps. JACOBI - CHRISTOPHORI ISELII SS. THEOLO. D. ET PROF, in Acad. Balîl. Depulfio calumniarum in Diario Gallico , cuititulus: Bibltothécjue raifonnée des Ouvrages des Sçavans de l'Europe , Vol. XI, Partis I. Artic. 8. pag. 221. & feq. fibi impadarum. C'eft-à-dire : Réfutation des calomnies publiées dans la Bibliothèque raifon- née des Ouvrages des Sçavans de l'Europe, contre ^acijues-Chri/}ophle Ifelin , Doreur & Profcjfeur en Théologie dans iVmverjiiéde Bajle. 1734. ABaile, chez Jean- Henri û^c^r. Imprimeur de l'Univcrfité. Brocht- re /«-4°. pag. 38. M Ifelin protcfte qu'il auroit . foufferr patiemment les re- proches d'ignorance qu'un Anony- me répandoit depuis cinq ou lix ans contre lui. Cet Auteur a vou- lu perfuader au Public que M. Ife- lin citoit comme un Manufcrit de la Bibliothèque de Bâle une Pièce qui ne fe trouve que dans le Mo- naftere des Religieux de S. Bafile à Rome , & dont il eft parlé dans les 'Fragmensdes Hexaples d'Origéne, par le Père de Montfaucon , fous le titre àzManufcriptum Bafilienfe, Mais l'Anonyme qui ne peut être , à ce que prétend l'Auteur de cette Réfutation , que la perfonne qu'il défigne par ces lettres initia- les J. J. W. non content de re- nouvellet cette accufation dans l'onzième Tome de la Bibliothè- que raifonnée , y en a joint une plus confiderable qui ne permet plus à M. Ifelin de garder le filen- ce j il y eft accufè d'avoir fabriqué les Lettres qui ont été adreftces au nom du Collège des Théologiens & des Miniftres de Zurich à ceux ,i& l'Univetfiié de Bâle , aulîî-bien que d'avoir falfifiè les Ades qui concernent l'affaire de J. J. W. pu, bliés il y a 4 ans , & d'avoir fait imprimer ces mêmes Ades de lui- même , &: contre la dèfenfe exr preffe du Magiftrat Souverain. Mais avant que de répondre au dernier article , notre Auteur montre fort au long que c'eft très- injuftement que fon adverfaire triomphe de la prétendue erreur qu'il lui attribue au fujet du Ma- nufcrit dont nous venons de parler. Il paffe cnfuite de cette querelle Littéraire à celle qui regarde les Pièces & les Ad:es qui ont paru à l'occafion des démêlez que l'Ano- nyme a eu avec les Miniftres Pré- tendus Réformés de Bâle , & il foûtient & prouve que tout ce que fon adverfaire a avancé à cette occafion n'eft qu'une ca- lomnie groffiere démentie par tou•^' te la Suifte , & par le témoigna- ge des Magiftrats- mêmes , contre lefquels l'Auteur de la Bibliothè- que raifonnée l'accufe d'avoir agi; & pour le faire avec plus dr {ncch, il e;(pofe fans ménagement les er- 5'22 JOURNAL DES SÇA VANS; reurs qui ont obligé les Théolo- en forme une adiion contre lui, s'il giens Si les Mmiftres de Bâle d'o- ter à J. J. W. la fondion de Dia- cre qu'il cxerçoit dans une Eglife de cette Ville , & de le profcrire comme un homme convaincu d'A- ïianifme 5i de plufieurs autres dog- mes impies. M. Ifelin le fomme de levei le mafque , & d'inttnter le croit coupable des faulfett z donc il veut le ro'rcir, en un mot il n'oublie rien de tout ce qui pcuc d'un côté convaincie le Public de fon innocence , & de l'antre ren- dre fon ad^erfiire fiilpcd: de mau- vaife foi &: d'impofture. '2S10VVELLES LITTERAIRES. FRANCE. De D I ] o n. Allrejis notables duParUment de Di)on, recueillis par M- Fran- çois Perrier , Sttbflttut de yt. le Pro- cureur Général , avec des obferva- tions fur chacjue ijueflion, ^<î>* Guil- laume Raviot , Ecuyer ^ Avocat au Parlement & Confeil des Etats de Bourgogne. Chez Arnaud Jean- Baptijh Auge, i-j^^.in fol.i.. vol. De Paris. 2)if Sfiritalitate & Immortalitate anima humant. Oratio , ah mio e Magiflris Sacrt facuUatis Parifsn- Jîs. E Typis Pétri Simon. 1755- in - 4°. DiBionnaire Italien , Latin & Trançnis , contenant non feule- ment un abrégé du Dictionnaire de la Crufca , mais encore tout ce qu'il y a de plus remarquable dans les meilleurs Lexicographes , Ety- mologiftes & Glollaites qui ont paru en différentes Langues. Pal M. YAhhéAntontni. Chez Jacques Vincent^ rue Saint Severin. lyjj. in - 4° Defcription de J' Egypte , conte- nant plufieurs rem.irques curieufes fur la Géographie ancienne & mo- derne de ce Pays , fur fes Monu- mens , fur les mœurs , les coutu- mes , Se la Religion des habitans , fur le Gouvernement & le Com- merce , fur les Animaux , les Ar- bres, les Plantes, &c. compoféc fur les Mémoires âeM.de Adadlet^ Ancien Conful de France au Caire, ^n'^\.\'AbL-é le Mdfcrier. Ouvra- ge enrichi de Cartes & défigures. Chez Louis Genneau & Jact^ues Rot- lin fils , Qiiai des Auguftins. 173 j. in - 4°. Hiftoire Ancienne des Egyptiens ,' des Carthaginois , &c. par AI. Roi- lin , Tome nevvie'me. Chez la Veuve Etienne , rue S. Jacques , à la Vertu. 1735. /«-12. Le Romain Efpagnol ^ ou Nou- velle Tradutflion de la Diane ^ écri- te en Efpagnol par Aiomemayor. s E P T E M Cliez BnaJJôn , rue S. Jacques , à la Science. 1735. iniz. Obfervations fur la Sobriété , par M. Vj^bbéde S. Pierre. ChezGom- chon , rue de la Huchette. 1735- Brochure inii. Méthode four étudier l'Hifloire , avec un Catalogue des principaux Hiftoricns -'k des remarcjucsfur la bonté de leurs Ouvrages & furie choix des meilleures Editions. Par M. l'Abbé Langlet Ditfrefnoy. Nou- YEi-LE Edition , augmentée & or- B R E , 173;. S&^ née de Cartes Géographiques. Chez Pierre Gandouin , Quai des Auguflins. Lettre de M. VAbbê de Villefroy au Révérend Père *** , en lui en- voyant une Tradudion Françoife des Cantiques Arméniens compo- fés dans le cinq & fixiéme ficelé , pour la Fête de la Nativité de Saint Jean-Baptifte & du Myftcre de Ja Prcfentation de Jésus Christ ai,i Temple , Brochure /»-4°. Fautes à corriger dans le Journal d'Aoïifl 1735, PAge 400. col. 1. lig. 9. prifon, lifez. poifon : pag. 409. col. 1. lig, penul. & dernière , M. l'Abbé de la Roque Succefleur de M. de Sallo , Itf. Succeffeur de M. de Sallo après M. l'Abbé Gallois : p. 419. col. 1. 1. fi', on verra qu'il n'eft pas autant Orateur qu'Hiftorien , lif. on verra s'il n'eft pas autant Orateur qu'Hiftorien : pag. 430. col. i. 1. 12. Bribafe , ///. Oribafe : Ibid. col. i. 1. 5 1 . craignant qu'on cherchât : lifez. qu'on ne cherchât: pag. 451. col. z.l. 29. juiqu'à ce que nous ayons,///! jufqu'à ce que nous ayions : p. 434. col. 1. 1. antepenul. vingt rations de paris , /// vingt rations de pain : p. 43 5. col. 2. 1. 22. ne nous permet , ///. ne nous permette : p. 436- col. 2.1. 3^. pas un mot , ///f^pas un terme : ibid. 1. penul. & elle finit , lif. elle finit : p. 443. col. 2. 1. 1 8. moins , lifez. plus ou moms : p. 445. col. 1. 1. 11. étant fort , ///. &: fort : Ibid. col. 2. 1. 35. lors, /{/Tleur ; p. 446^. col. i. 1. 17. de certitude , lif. d'une certitu- de, p. 447. col. 1. 1. 3 fi. l'équation , /(/? l'Equateur : p. 448. col. 2.1. 23. Mariette , lif Mariette : p. 449. col. 2. 1. 34. toutes Sciences , ///. toutes les Sciences : p. 459. 1. dernière de l'errata , le pouvoir de l'amour fur un cœur , fur-tout fur un cœur fenfible , ///. le pouvoir de l'amour /«r ua CGBur , fur-tout fur un coeur fenfible. SH r TABLE Des Articles contenus dans le Journal de Sept. 1755*. ES fais fur divers Sujets de Littérature & de Morale , pag. 4^3 Rtflexions Critiques de M, Fourmom L' aine fur les Anciens F enfles, &c. 'Le SpeElaete de la Nature , &c. 479 Oeuvres diverfes de M. Pelijfon ^ icc. 485 Hifloire des Si^uanois , &c. 490 TraiteT^^ des Minorité t. , des Tutelles , &C. 495 Réflexions Militaires & Tolitiques , &c. 498 Z>es O'uvres de Salvien , Sic. 501 Utfloire générale des auteurs Sacrez. & Eccleftajliques ^ Scc'. ^04 Penfées du P. Bourdaloù; , &c. 508 Hiftoire de la faille de Paris , -511 Diprtation fur un manquement de plu/teurs mufcles du pied , j 1 ^ Réfutation des calomnies vuUiées contre Jdc. Chrijlofhle Jfelin , &c. jn Nouvelles Littéraires , jzi Fia de U Tabl^. L E JOURNAL cavÀns ? 0 UR VANNEE M. DCC. XXXF- OCTOBRE. A PARIS, :tez CHAUBERT, à l'entrée du Quay des Auguftins , du côté du Pont Saint Michel, à la Renommée & à la Prudence. M. DCC. XXXV. iVEC AFFROBATION ET FRIVILEGE DU KOY. L E OURN A L DES SCAVANS OCTOBRE M. DCC. XXXV. HISTOIRE DV riCOAïTE DE TVRENNE , M^RE'CHAL Générai des j4nnées du Roi. A Paris , chez la Veave Aîaz,iéres ^- J. B. Garnier , Imprimeurs & Libraires de la Reine , rué Saine Jacques à la Providence. 173 5. i-n-^°. 1. Vol. Tom. T. pag. 600. Tom. II. contenant les preuves en trois parties, pag. 109-88-150. planch. détach. XIV. DANS notre Journal de Juil- conduit i'Hiftoire du Vicomte dt let dernier , nous avons rcn- Turenne , depuis la nai(Tance de ce du compte des trois premiers Li- grand Homme en 1^1 1. jufqu'à vres de cet Ouvrage , lefciuels ont l'année 16^1. qui mit fin aux trou- C^ohe, D d d d ;28 JOURNAL DE blés du Royaume par le retour du Roi à Paris. Il nous reftc à donner ici l'Extrait des trois derniers Li- vres , où cette Hiftoire cft conti- nuée depuis 1653. jufqu'cn l'année iiîyj.qui termina la gioricufe car- rière du Vicomte. Livre IV. Après avoir épou- fé Charlotte de Caumont , fiile & unique hériricre du Duc de laFor- ce , Pair &c Mavéctial de France ; il ouvrit la canip2?,ne de 1^53. avec le Maréchal de la Fcrté par le Siège de Rhétel , dont la prife éroif d'aucant plus importante , que cette Place fervoit beaucoup à couvrir la Picardie , la Champa- gne & même rifle ^e France. Le Vicomte fut ravi ( dit l'Hiftorien) de fignalcr fon zélé pour le fcrvice du Roi dans un lieu qui avoitcté le Théâtre de fa révolte ; & il atta- qua cette Ville avec tant de vi- gueur , qu'il la contraignit de fe lendre au bout de trois jours. Cela rompit toutes les mefuresdu Prin- ce de Condé , qui engagea les Efpa- gnols à faire une irruption en Fran- ce avec une armée de 30 mille hommes; pendant que les troupes du Roi commandées par les deux Maréchaux ne montoient qu'à iz inille , & que la plupart des Places n'avoicnt que de foiblcs garnifons, ou n'en avoient aucune. M. de Ramfay décrit avec beaucoup de foin toutes les marches & les con- tremarches que firent les deux ar- mées pendant fix femaincs entiè- res; 6c il compare avec Fabius- Maximus le Vicomte de Turcnne , qui avec un nombre inférieur de S SÇAVANS; Troupes , campa toujours fur des hauteurs ou dans des lieux peu ac- ceflîblcs. » Us'nrrêtoit quandi'en- » nemi fe t^noit en repos. Et quand w l'ennemi marchoit il le fuivoit » & le côroyoit toujours \ une di- » fiance affcz grande 5c dans des » polies aflcz avantageux , pour » ne pouvoir être forcé dcconibat- jotre malgré lui. Condé, comme " un autre Annibal , employa tous 30 les ftratagêmcs , qui pou voient » engager Turcnne au Combat» "Tantôt il s'approchoit des Fran- i> cois de leur donnoit des allarmesi » tantôt il s'en éloignoit pour les n inviter à décamper Se pour les 3> furprendre dans quelque mouve- » ment dont il pût profiter. Le Prince, que le Vicomte te- noit ainfi en échec dans la Picardie, voyant qu'il ne pouvoit pénétrer en France parce côté- là , marcha à grandes journées vers la Cham- pagne , pour affiéger Rocroi der- nière Ville de cette Province du côté de la Flandre. Turenne laiiïa faire ce Siège , & alla former celui de Moufon , Ville plus importaiv te alors pour les François que n'é- toit Rocroi pour les ennemis. Le Siège de Moufon dura 17 jours, pendant des pluyes continuelles & des orages violens , qui faifoiene fouvent ébouler les terres , Sc inondoient la tranchée. Mais Turenne infatigable, malgré tous les obftacles , dirigeoit les tra- vaux lui même , & alloir régulière- ment les viliter trois fois par jour. Le rcfte de la campagne fe palTa au Siège de Sainte Manehould , pen- ± O CT O B dant lequel le Vicomte couvroit la Picardie , en oblervant les mouve- meiis des ennemis. La Place fe ren- dit au commencement de Décem- bre , après quoi les armées fefépa- xerent , Se Turenne revint à la Cour , qui pour prix des ferviccs qu'il avoit rendus à l'Etat , le gra- tifia du Gouvernement de Limou- fîn. Pendant l'hyvcr , le Prince de Condé lit à Bruxelles unTraité avec l'Efpagne, par lequel toutes les Places qui fcroicnr prifcs en France, dévoient lui appartenir : le Prince de Conti s'ctant racommodc avec la Cour,époufa une nièce du Cardi- nal Mazarin; & le Duc de Lorraine futempiil'onné parles Efpagnols. Après le Sacre du Roi , qui fe fit au printcms de l'année 1^54. Fa- bert eut ordre d'affiéger Stenai , & le Vicomte , d'empêcher le fecours de cette Place , qui appartenoit au Prince de Condé ■■, lequel par re- prefailles ^ engagea l'Archiduc à invertir Arras avec une armée de 50 mille hommes. Le Vicomte, avec le Maréchal de la Ferté , y marcha à la tête de 14 mille hom- mes feulement ; & malgré cette infériorité, ils vinrent à bout de jetter des fecours dans la Place, dont la garnifon étoit foible , & de couper la communication du camp Efpagnol avec toutes les Villes d'a- lentour. Après la jonction des Ma- réchaux de Turenne & d'Hocquin- court, qui s'emparèrent du porte important de S. Pol &c du Mont S. Eloi i la Cour envoya un ordre aux trois Généraux d'attaquer les lignes des Efpagnols , que notre R E , I 7 5 y; yap Hiftorien décrit ici fort exade- mcnt , ainfi que la difpofition des attaques , & toutes les circonrtan- ccs de cette grande adion. Le fuc- ccs en fut fi heureux pour l'armée du Roi , qu'il n'y eut que trois à 400 Soldats qui rerterent fur la Place , & très-peu d'Officiers Sub- alternes de tués ; au lieu que les ennemis y perdirent près de 3000 hommes tués ou hits prifonniers • ^3 pièces de canon , 2000 chariots, 5)Oûo chevaux , tous les équipages des Officiers, & les bagages de l'ar- mée entière. » Ce fut pendant ce Siège ( dit » M. de Ramûy ) que le Maréchal » de la Ferté ayant trouvé un Gar- » de du Vicomte hors du camp, lui M demanda comment il avoit ofé M forrir des lignes, & fans attendre » la réponfe , s'avança fur lui , & » le battit rudement. Le Vicomte « à qui le Garde tout en fang vint » fe prefenter , lui dit : il faut tjue n vous ayez, manqué à votre devoir , y> four avoir obligé M. le Maréchal n a vous traiter de la forte , & le ren- M voya aurtî -tôt par le Lieutenant » de fes Gardes , qu'il chargea de » dire au Maréchal de la Ferté » qu'// lui f ai fait excttfe de ce que cet » homme lui avoit manqué de refveil )■> (jr qu'il le mettait entre fes mains x>pour en faire telle punition qu'il lui 3j plairait. Toute l'armée fut éton- » née , & le Maréchal lui même j) furpris , s'écria ; Cet homme fera- » til toâjaurs fage , & moi toujours ^fou ; Le Vicomte , après avoir pris le Quefnoi & Binches , revint à la Cour , où fa piefence devenolç yjo JOURNAL DE ncccdaire , Si où par fa fageirc il fait prévenir de nouvelles difl'en- fions. Au commencement de la cam pa- gne fuivante ( 1655.) il fit, avec le Maréchal de la Ferté , le Siège de Landrecies , qui le rendit au bout d'un mois. Cette conquête fut fuivie de celle des Villes de Condé & de S. Guillain ; d'où le Vicomte ayant été rappelle à la Cour , qui étoit à Compiegne , il y fut confulté fur la trahiloii du Ma- réchal d'Hocquincourc , qui piqué contre le Cardinal , traitoit avec les Efpagnols pour s'engager dans leur parti. M. de Turenne porta le Cardinal à terminer fans violence une affaire , qui auroit pu avoir des fuites funeftes , Ci l'on s'y étoit pris autrement. En i6$6. Dom Jean d'Autriche fils naturel du Roi d'Efpîgne vint commander en Flandres , à la place de l'Archiduc j & le Vicomte mar- cha vers Valenciennes , pour inve- ftir cette Ville. Le Maréchal de la Ferté ne vint au Siège qu'après dix jours de tranchée ouverte : &c com- me fon quartier étoit le plus expo- fé aux infultes de l'ennemi, le Vi- comte avoit eu foin de le fortifier de lignes doubles Se palilTadées , dont le Maréchal fie rafer l'une , la croyant inutile. L'événement fit voir qu'elle ne l'étoit pas, non plus que les avis du Vicomte, de veiller avec diligence , Se de mettre des Gardes par -tout ; avertiflemens que le Maréchal regarda comme une injure & qu'il négligea. Peu de îems après, Dom Juan Se le Prin- S SÇAVANS. ce de Condé vinrent l'attaquer dans fes lignes , l'y forcèrent en un quart d'heure , le firent priionnicr avec plus de 400 Officiers & près de 4000 Soldats ; &: les débris de fon armée fe fauvcrcnt à Condé. Ce fut alors que le Vicomte fit cette furprcnante retraite , qui lui acquit tant de gloire -, attendant les ennemis , contre l'avis de tous fes Officiers , 8c refolu même de hazardcr un combat, piûiôt que de fuir ; continuant de camper, comme s'il n'eût rien appréhendé , Se laiffant fon camp découvert, quoique pourfuivi par le Prince de Condé éc par Dom Juan , qui n'oferent l'attaquer ; détachant , en prefcnce d'une armée vidiorieu- fe , mille chevaux de la fienne beaucoup plus foible, pour aller ravitailler Condé menacé d'un Siè- ge. Voici en quels termes le Tellier Secrétaire d'Etat en écrivit au Vi- comte. 30 Par votre prudence , 5' Monfeigneur , Se par une con- » duite vigoureufe , vous avez re- » tabli la réputation des armes du " Roi. En vérité il n'y a rien de M plus beau que votre campement n près du Quefnoi, après la dérou- » te de Valenciennes. D'avoir ainlî » fait tête aux ennemis fort or- as gueilleux jufques dans leur Paysr » même , & de les avoir obligés à 30 fe retirer , quoique vidorieux; o c'cft un coup qui n'appartient » qu'aux Grands- Maîtres dans l'arc i> militaire. Voici cependant avec quelle modeflic le Vicomte dans une Lettre à la VicomtelTe de Tu- renne , datée du Camp devant Ic O C T O B R Quefnoi , pnrle lui-même de cette adion tant admirée : L'armée des ennemis efl venue tout ■prvche d'ici : ils y ont demeuré deux jours _, (iprès moi ils ont mnixhé vers Condé. Il termina certe campagne par la pri- fe de la Capclle , par le fccours de S. Guillain , & repara la déroute de Valcnciennes , en arrêtant i'ardeut du grand Condé, en furprenant ks magâfins d'une armée viéloricu- fe & l'obligeant à reculer devant lui dans le même tcms qu'elle avoit entrepris de le pourfuivre. Revenu à la Cour, on lui accorda la grâce qu'il demandoit depuis long-tems , qui étoit de ne plus fervir avec le Maréchal de la Feité i & on le dé- clara Colonel Général de la Cava- lerie , Charge qui a toujours été depuis dans fa maifon. La Campagne de 1057. com- mença par une tentative du Vicom- te de Turenne furCambray. Mais elle fut déconcertée par le fccours inopiné que le Prince de Condé y jctta. Le Vicomte après s'être tenu fur les frontières pendant deux mois pour couvrir le Siège de Montmédi , que faifoit le Maré- chal de la Ferté , aflîégca & prit S. Venant , fecourut Ardres aflîégé par les Efpagnols , & fe rendit Diaître de Mardick. Les commenccmens de l'année 1^58. furent peu favorables aux François , par la défeftion du Ma- réchal d'Hocquincourt, qui livra Hédin aux Efpagnols; par laprifc du Maréchal d'Aumont, que trom- pèrent les habitans d'Oftende , en teignant de vouloir lui livret leuç Ville -, par pluficurs émeutes parmi la Noblcfle dans les différentes Provinces; par la hauteur infultan- re , avec laquelle CromMt'cl fom- moit le Cardinal de faire le Siège de Dunkerque , conformément à fon Traité avec l'Angleterre. La Cour fe vit donc dans'la ncccOîté de faire cette entreprife , malgré les inconveniens qui fembloicnt la rendre prefque impolîlhle ; & le Vicomte en fut chargé. Il faut lire le détail de ce Siège dans le Livre- même , ou on le trouvera trcs- cxadcment circonftancié, ainfi que la bataille des Dunes donnée près de Dunkerque entre l'armée de France commandée par le Vicomte & celle d'Efp.igne commandée par le Prince de Condé & Dom Juan d'Autriche qui marchoit au fc- cours delà Place afllégée. Les trou- pes du Vicomte , fans compter celles qui gardoient les bagages & les tranchées , montoient à fix mil- le chevaux & à 9 mille Fantaflîns : celles de l'armée ennemie coniî- ftoient en 6 mille Fantaflîns & huit mille chevaux. Elle fut entière- ment défaite tant Cavalerie qu'In= fanterie , par la faute des Efpa- gnols -, on pourfuivit les fuyards jufqu'aux porics de Furnes ; on fie plus de 4000 prifonniers , & cette armée fut diffipée au point, qu'à- peine les ennemis purent - ils raf- fembler 839 mille hommes pen- dant le rcfte de la Campagne. Après une viâ:oirc fi éclatante ^ le Vicomte écrivit de fa propre main le billet fuivant à la Vicomtefie de Turenne : Les ennemis /ont venus k ^32 JOURNAL D nous -, ils ont été hait us ; Dieu en fait loïié : j'^'it un peu fatigué toute lajour- tiée : js vous donne lehonfoir&je vais me coucher. Des le lendemain il retourna au Sicge i DunKerque fe rendit le 14 Juin , dix jours après la bataille &: 18 jours depuis l'ouverture de la tranchée : le Roi avec toute fa Cour arriva de Mar- dicK , entra dans la Place en triom- phe ; & elle fut remife aux Anglois fclon le Traité. La reddition de DunKcrque fraya au Vicomte le chemin à quantité d'autres conquêtes. Il prit Bergues, Fumes, Dixmude, Thielt, Oudcnarde i battit le Prince de Lignes près d'Ypres -, s'empara de cette Place après s'être rendu maî- tre de Menin \ prit Gramont & Nmove , & termina ainfi cette glo- rieufe Campagne. Notre Auteur , à la fin de fon quatrième Livre , nous entretient des difpofitions pour la paix entre la France & l'Efpagne ; de la Con- férence dans l'Ifle des Faifans \ des principaux articles du Traité ; des négociations du Vicomte , pour contribuer au retabliffement du Roi d'Angleterre , & de laconclu- fton du Traité des Pyrénées. L I V R E V. Au commencement de l'année i^é^o. le Vicomte de Turenne fut honoré de la Charge de Maréchal Général des Camps & Armées du Roi, créée en fa faveur, & qui lui donnoit les mêmes pré- rogatives que celle de Connétable. Il fe trouva à l'entrevue des deux Rois qui s'abouchèrent dans l'Ifle des Faifans. Ces deux Princes après ES SÇAVANS, s'être embraffés , fe prefenterent l'un à l'autre les principaux Sei- gneurs de leurs Cours. Le Vicomte de Turenne ne s'empreflant point à fe montrer , le Roi Catholique demanda à le voir , le regarda avec attention, & ne put s'empêcher de dire : voilà un homme ijui m'a fait piijpr bien de mauvaifes nuits. Peu de tems après le mariage du Roi , l'Efpagne ayant fait marcher des Troupes veis le Portugal, le Vi- comte confeilia au Roi de fecouric ce Royaume , & fit nommer le Comte de Schomberg ( depuis Maréchal de France ) pour v com- mander. Après la mort du Cardinal Mazarin arrivée en 1661. le Roi donna au Vicomte la conduite de l'affaire de Portugal ; & celui-ci pour cultiver h bonne intclligen-" ce entre la France & les Provinces- Unies , entra en liaifon avec le Penfionnaire de Witt. En 16^3. il raffermit l'alliance avec l'Angleter- re 6i le Portugal , & cette Cour, en reconnoiflance des ferviccs qu'elle avoir reçus de lui , traita du mariage de fa nièce avec l'Infant Dom Pedro frère du Roi, Mais ces négociations furent rompues pat les Miniftres de France , jaloux de ce que les affaires ne fe traitoieni point au Confcil, mais tête à tête avec le Roi. La Reine Mère étant morte en l6è6. ainli que la VicomtelTe de Turenne, le Roi confulra le Vi- comte fur les mefures qu'il dévoie prendre contre l'Empereur dans la guene qu'il étoit rcfclu de déclarée à l'Efpagne, pour taire valoir fes prétentions O C T O B prétentions fur les Pays Bas. Le Roi fit aflemblcr fes troupes fur les frontières , & dit au Maréchal ùe Turcnne : Qu'il vottlolt ir.^rrchcr en perfonne a la tète de fes arnées & apprendre [nus lui le métier de la guerre. L'Hiftoricn parcourt ici les conquêtes du Roi pendant les cam- pagnes de i/îéy. & i(j6 8. jufqu'à la pai>; d'Aix-la-Chapelle. Le calme dont jouit alors toute l'Europe lailTa au Vicomte tout le îoifir necelTairc pour s'inftruire plus à fond de la Religion Catho- lique , & convaincu enfin de la vé- rité , il fit fon abjuration entre les mains de l'Archevêque de Paris. Il voulut alors fe retirer du monde pour vaquer uniquement à la con- templation des viritez éternelles : mais le Roi s'y oppofa , & le Vi- comte refpeiTta l'ordre de Dieu dans la volonté de fon Maître , confervant toujours fon goût pour la folitude. » Libre des pallions qui attachent 3) à la Cour(dit notre Auteur) il paf- ï> foit fes jours dans la focicté d'un » petit nombre d'amis choifis, d'où » il ne fortoit que pour aller rendre Œ fes devoirs au Roi. Sa vie privée » ( continue M.dcRamfay ) n'cll «pas moins admirable que fa vie » publique. L'étude ôi laconvcrfa- »tion faifoient fes principaux 3j amufemens. Il fc plaifoit avec les » gens de Lettres fenfés & folidcs. » Mais il dédaignoit le bel efprit , » ceux qui cherchent à briller par 3> les bons mots , 5i qui veulent n parler de tout fans avoir jamais r> rien approfondi. Il étoit touché Oàobrc. "des produdionsd'efpîw; vives & » naturelles , aimoit la le-fture des- «bons Livres , en parloit avec » plailîr , mais fans affcdation. Il » avoit tous les jours une table ^ mais elle étoit modefte &l fru^-a- " le. Il aimoit à s'égayer dans les » repas ; il goûtoit alors les plai- » fanteries , & plaifantoit lui mê- » me aiïez, finement , mais toû- » jours avec prudence & politefTe j «peu de gens fçavoient plus de » contes , & racontoient mieux » que lui. Il vivoit ainfi à Paris » dans une grande fimplicitéjfem- " blable aux Héros de l'ancienne » Rome , qui ne fe diftinguoient n par aucun éclat extérieure L'Hi- florien nous rapporte ici plufieurs traits admirables du Vicomte qu'il faut voir dans le Livre-même. Le Maréchal de Turcnne , après plufieurs années de repos , fut obli- gé de reprendre fes fondions de Gé- néral pendant les guerres de Hol- lande , dont l'Auteur développe ici les motifs , faifant connoîtrc en même tems les intérêts des divcr- fes Puilfances , qui fe déclarèrent alors pour ou contre les Provinces- Unies. Il n'oublie pas \e% néoocia- tions de la Ducheffe d'OrIcans Henriette d'Angleterre avec le Roi Charles II. fon frère , pour le déta- cher de la triple alliance ; négocia- tions , où le Vicomte entra pour beaucoup, & où fa paflion pour une jeune Dame confidente de la Duchcdc lui fit révéler à cette nou- velle Maîtreffe lefecret de l'Etat. Il avoiiaingénuement cette foiblelTe au Roi , qui loupconnoit Louvoij Le "ce S3^ JOURNAL D de cette infidclité ^ Se il en rou- git le rcfte de fa vie ■■, en forte que le Chevalier de Lorraine ayant voulu lui en parler quelques années après •, commentons donc ( lui répli- qua le Vicomte ) par éteindre les toHgies. Nous paflerons fort légèrement fur les exploits de la Campagne de ïé-ji. pendant laquelle Louis XIV. fit la conquête d'une grande partie de la Hollande , leVicomte fervant d'abord dans l'a-rméedece Monar- que en qualité de Capitaine Géné- ral ; après quoi le Prince de Condé ayant été blelTé au paffage du Rhin, le Vicomte prit le commandement du corps d'armée qui agifloit fous les ordres de ce Prince , & avec le- quel Turenne s'empara de i(î Pla- ces tant Villes que Forts, parmi lefquellvs Nimégue qui pouvoit faire une vigoureufe refiftance , fe ïendit au bout de huit jours. Le Roi en partant pour revenir en France, le fit Gouverneur de Guel- dres , & le déclara Généraliïïîmc de fes Armées, avec ordre de s'a- vancer vers l'Allemagne pour s'op- pofer aux Troupes de l'Elcdeur de Brandebourg & de l'Empereur Léopold, quis'étoit déclaré contre la France : ce que le Vicomte exé- cuta , «mpêchant avec feize mille iiommcs deux Armées de 40 mille de palTer le Rlun & de venir fe- -Courir les Hollandois , & retenant i'Evêque de M unfter dans Talliance du Roi. Le Vicomte prit plufieurs Villes dans la Wcftphalie , chalTa les ennemis du Comté de la MarK, les contraignit de repalTeile Wefejc ES SÇ AVANS, & d'abandonner entièrement la Wcftphalie , & cela au milieu de l'hyver le plus rigoureux. Pendant la Campagne de ié'73. le Vicomte fut uniquement occu- pé à obferver les mouvemens & à déconcerter les entreprifes de Mon- técuculli Général de l'Empereur , foit qu'il voulut aller en Hollande, ou gagner rAlface,ne pouvant faire ni l'un ni l'autre , qu'il n'eût aupa- ravant battu l'Armée Françoife. Mais quelles que pufTent être les précautions du Vicomte , il ne put empêcher les Troupes Impériales de joindre le Prince d'Orange vers Bonn , & d'en faire le Siège , qui ne dura que neuf jours. Livre VI. La Campagne de 1^74. s'ouvrit par la Conquête de la Franche-Comté,que le Roi fit en perfonne & que le Maréchalde Tu- renne couvrit à la tête d'une Ar- mée de loooo hommes qu'il com- mandoit en Allemagne. Cette conquête achevée , il marcha à grandes journées pour empêcher la jondion du Duc de Lorraine , & du Comte Caprara avec le Duc de Bournonville Général de l'Empe- reur. Le Vicomte arriva le i<;de Juin à la vûë de Sintzheim petite Ville du Palatinat , & découvrit au-delà les ennemis au nombre de plus de neuf mille hommes. Malgré les difticultez prefque in- furmontablcs détaillées ici par l'Hi- ftorien , Turenne fe rendit maître de la Ville & ûu Château , marcha vers la montagne où le Duc de Lorraine & Caprara l'attendoient , les battit , leur tua près de 200c O C T O B hommes , leur en prir 5 à 600 , &c les chalTa au-delà du NcKre. Après cette déroute de Sintzheim , le Vi- comte ht piuficurs marches & con- tremarches , tant en deçà qu'au de- là du Rhin , pour obfervcr les mouvemens que les ennemis pour- roient faire du côté de la France Se pourvoir en même tems à la fubfi- ftance de l'Armée dans les endroits les plus abondans du Palatinat. Ce fut là qu'il reçut un renfort, qui joint à ce qu'il avoir de Troupes les faifoic monter jufqu'à 16 mille hommes. Les Impcriiux d'autre part ayant joint Bournonville étoient tous enfemblc au nombre de 1 5 à 1 4 mille hommes. Les Payfans du Palatinat ayant exercé toute forte de cruautez fur les Soldats François qu'ils pou- voient furprendre , les Anglois qui fervoient dans l'Armée irrités de cette barbarie , allèrent comme des furieux le flambeau à la main brûler plufieurs Bourgs & plufieurs Villa- ges , & même quelques petites Vil- les •, ce qui fut exécuté fi promp- teme nt que les Officiers ne purent les retenir. Le Vicomte fit un châ- timent exemplaire de ceux qui avoient commencé l'incendie , quoiqu'ils fulTcnt les plus braves Soldats de fon Armée : ce qui n'empêcha pas que l'Eledeur Pala- tin , réduit au defefpoir par ladé- folation de fes Etats , ne lui en- voyât un Trompette , avec une Lettre par laquelle , après les re- proches les plus vifs , il lui faifoit un appel. Mais la fage rcponfe de Turenne fit rentrer l'Eledeur en R E, I 7î ;-. ;^; lui-même : il approfondit le fait , le trouva tel que le Vicomte l'avoic mandé , & rougit de fon emporte- ment. L'Armée Impériale groUle pat les Troupes des Contédercs juf- qu'au nombre de 3J mille hom- mes , ayant paffé le Rhin , donna occafion à Louvois de blâmer la conduite du Vicomte , & de lui envoyer des ordres prelfans de quitter l'Alface ôc de couvrir la Lorraine. Mais le Maréchal en ayant reprcfenté tous les inconve- niens au Roi & prenant fur lui tous les évenemenSjfut pleinement jufli- fié par la fuite de la Campagne , & fa profonde manœuvre fut admirée du Mmiftre lui même. Le Maré- chal ayant mis Philifbourgcn état de dcfenfe , les Impériaux repaiïe- rent le Rhin , fans ofer avancer dans l'Alface. Mais ceux-ci, après avoir gagné les habitans deStraf- bourg , malgré tous les eflorts du Vicomte pour les retenir dans la neutralité , y paiTerent ce fleuve une troifiéme fois & rentrèrent dans la haute Alface , dont par la difpofition de leur Camp , ils deve- noient les maîtres , ayant déjà près de 40 mille hommes , & attendant l'Eledeur de Brandebourg avec 20 mille de rentort, pendant que iz mille hommes faifoient toute l'Ar- mée du Vicomte , qu'elle fe trou- voit dans la balTe Alface, où elle ne pouvoit plus fubfifter , & d'où elle ne pouvoit fortir fans expofer Brifac & Philifbourg , & fans ter- nir la gloire des armes Françoifes. Ces confiderations lui firent conce- E e e e ij S-,6 JOURNAL D voir le delfein d'attaquer prompte- iiient les Inipciiaux , avant la jonc- tion de l'EIedeur. Il marcha donc à eux , les trouva campés derrière le Village d'Ensheini , fous les or- dres du Duc de Bournonville & de pluficurs autres Princes Alle- niands-, leur donna bataille , où il y eut un carnage effroyable , & la gagna avec tant d'avantage pour lui & une perte fi conlîdeiable pour les ennemis , que hors d'état de tenir la campagne jufqu'à l'arri- vée de l'Elcdeur , ils ie retirèrent fous le Canon de Strafbouig & fe inircnr à couvert delà rivière d'Ill. La jondion des deux Armées en- nemies fe fit le 14^ d'Odobre , Sc lelS les îiuperiaux au nombre de 60 mille hommes marchèrent vers le Vicomte , qui fe retira la nuit à Dettweiler par une marche d'envi- ion 4 iieuiis faite fans aucun défa- vantage devant une Armée prefque trois fois plus forte. Outre que ce pofte le mettoit en pleine fureté, il s'y trouva à portée de couvrir Sa- verne& de fecourir Haguenau.Ily relia jufqu^au 20 de Novembre , qu'il en décampa ^ pour prendre fon quartier général à IngWciler -, & les Impériaux fe répandirent dans la haute AH'açe , & y prirent leurs quartiers. A la fin du mois, le Vicomte fit défiler fes Troupes vers h. Lorraine , vefolu de tout facrifier pour faire déloger les en- nemis ?^ iciir faire repafTcr le Rhin. Au mois de Décembre Turcnns :voyantqi:e lesennemis avoicHt fait t&utce qu'il- avoir prévu , & qu'il éteittcins de commencer l'exccu- ES SÇA VANS, tion du grand projet qu'il méditoit depuis près de deux mois, raffern- bla fes Troupes à Béfort à l'autre bout de l'Alface , après trois Q:- maines démarche par des monta- gnes couvertes de neiges , au mi- lieu des torrens débordés , & à tra- vers des chemifis prelque imprati- cables •, battit les ennemis dans le combat de Mulhaufen le 29^ Dé- cembre , les défit entièrement à la bataille de Tursheim , le cinquiè- me de Janvier , 1^75. ce qui les obligea d'abandonner l'Alface & de rcpaffer le Rhin. Il faut voir dans le Livre même le détail de tous ces événemens que nous ne faifons qu'indiquer en gros. Le Vicomte avoir trop bien fer- vi en Allemagne pendant la Can> pagne de I674. pour n'y être pas renvoyé la Campagne fuivanre -, & il y eue pour Anragonifte le Comte de Montécuculli Général de l'Ar- mée de l'Empereur , & très capable de rafTurer les Impériaux confter- nés des vidoircs de Turenne. «Cet- 3> te Campagne ( qui fut fa dernie- "re ) doit être regardée comme jsfon chef d'œuvre &; comme celui » de Montécuculli ( au fenciment » d'un grand Juge dans l'art mili- y> taire : c'eit le Chevalier Fot'Lr/f. ) » Il n'y eii a point de fi belle ( dic- 30 il ) dans l'Antiquité. Il n'y a que » des Experts dans le métier , qui 5J puilTent en bien juger. Combien 5) d'obftacles réciproques à furmon- " ter ? Combien de chicanes, de 33 m.arches & de contremarches- X de manœuvres protondes 6^' ru- 3» lécs ! C'eft par- là que l'on rccon- O C T O B 33 nott les Gr.Tnils Hommes , & » nullemenrpar la facilitcdc v^in- »cre &: par le prodigieux nombre » de Troupes. On verra tous ces divers movivemcns racontés ici avec beaucoup d'exaftitude , d'in- telligence & de netteté par l'habile Hillorien , auquel nous renvoyons^ &C qui a tracé auiîî avec beaucoup de jullelTe les caradtcres de ces deux grands Capitaines, qu'on lira chez lui avec plailîr. Nous nous contenterons de tranfcrirc ici en l'abrégeant , le ré- cit qu'il fait de la manière dont pé- rit M. de Turenne. n Ayant piis » enfin la réfolurion d'attaquer les 50 ennemis , il examina d'abord y> avec grande attention la difpofi- »tion du terrain , Si celle de leur » Armée , rant à la droite qu'à la 3» gauche. 11 appcrçiu à celle-ci un j' défilé , par où il pouvoir fc glil- 3» fer i 6i il forma le delTein de les M attaquer par cet endroit. Après 3} de protondes reflexions, rout lui 55 parut fi favorablement difpofé , 33 qu'il ne put s'empêcher de dire à PO quelques Officiers généraux ; ao C'en eft fan , je les tiens , ils ne 35 pourront plus m'echapper , & je 33 vais recHciLir le fruit d'une fî péni- 35 ble Camp.jgne Il continua 35 d'obferver, & découvrit dans le 33 gros de l'Armée ennemie beau- 35 coup de mouvemens qui mar- 3) quoient de l'inquienide Le a> Vicomte étant alléenfuirefe re- 30 pofer fous un arbre , où il déjeii- 35 na & demeura aflez long- rems , 33 on vint lui dire que l'Intanterie » ennemie étoit en mouvement du RE , 1 7 î $' S37 »côté de la montagne. Il fe leva ■5 monta à cheval, Se s'avancant M vers une hauteur pour confidercc 5' ce que ce pouvoir être , il défen- " dit à tous ceux qui étoicnt avec » lui de le fuivre , &c dit au Duc » d'Elbœuf : mon neveu demeurez. » ici , vous ne faites çjue tourner au- » tour de moi , vous me feriez recon- » muTe. Il trouva vers l'endroit » où il alloit Mylord Hamilton 3» qui lui dit : venez, par ici , on tire » oii vous allez. ; le Vicomte lui re- »3 pliqua : /> ne veux point être tué 33 .nijourd'hiti. 11 continua fon che- " min , & rencontra Saint Hilaire, » Lieutenant général de l'Artille- » rie , qui lui dit en tendant ïa 5' num: jette^Jes yeux fur cette hatte- 55 rie (jiuefaifdit mettre là. 11 retour- » na deux pas en arrière , & un '5 boulet des ennemis tiré au hazard 35 avant emporté le bras de S. Hi- » laire, donna au milieu de l'cfto- » mac du Vicomte. Le cheval re- »5 vint au lieu d'où il étoit parti, le, «ramena le vifage panché fur l'ar- '5çon i & s'étant arrêté à l'endroit " où la Compagnie étoit reliée , le » Grand Turenne tomba mort en- » tre les mains de fes gens, après » avoir ouvert deux fois les yeux. M. de Ramfay nous décrit la douleur & la confternation de l'Armée , qui au lieu d'attaquer fe retira de devant les Impériaux j les honneurs funèbres rendus au Vi- comte •■, & termine ce Volume par un éloge de ce Grand Homme, où fe trouvent ralTemblés tous les traits qui peuvent plus parfaite- ment le caraderifer. S]9 JOURNAL D Le fécond Volume de cctre Hi- ftoire en contient les preuves juftifi- catives divifées en trois Parties, La première nous ofFre les Mé- moires du Vicomte de Turenne , écrits de fa propre main , partagés en trois Livres , & compofés après la paix des Pirenées. » On y trou- » vera ( dit l'Editeur ) non feule- » ment des projets de campagne » bien concertés , les vues profon- w des d'un Général éclairé , les » motifs de fa conduite , les obfta- )» clés qu'il rencontre , & les » moyens par lefquels il les fur- » monte : mais on y reconnoîtra «encore une candeur a^m avoiie fes » fautes , fans aucun égard à l'a- » mour propre ; une ^o«;e généreu- i> fe , qui cache avec foin les défauts « de fes concurrens , & même de »fes ennemis-, une wo^iy?/!? rare, qui » taît fes plus belles adiions , ou » qui en parle légèrement i en un » mot , tous les cara»fteres d'une vtdme élevée , à qui le grand & le » beau font devenus Ci naturels , M qu'elle ignore fa propre vertu , » & croit n'avoir rien fait que de "commun , dans le tems même » qu'elle exécute ce qu'il y a de » plus admirable. C'eft ainfi que le «Vicomte fe dépeint lui-même » dans les Pièces originales qu'on i> donne ici au Public pour prouver "lavéritédefon Hiftoire. Onafait imprimer à la fuite de ces Mémoi- res la Relation de la Campagne de tribourg écrite par le Marquis deU MoHJfuye. Les Pièces qui forment la fécon- de Partie des preuves , font plu- E S SÇAVANS. fieurs Lettres , Brevets , inftruc2 tions politiques. On verra d.ins les Letrres du Vicomte .î fa lœur & à ii femme , ( ditrFdit<-u^ ) le fond de fon C3ra(5tere ■, fa (implicite , fa fenlîbilité , fa moddhe & fa Rcli-i. gion •, & Ion reconnoîtra dans les inftruâ:ions qu'il a drelTces, pat ordre du Roi , pour les AmbafiTa- deurs de France dans les diflcrentes Cours de l'Europe , la profondeur de ion génie , ik que fes qualitez politiques égaloient fes talens militaires. On trouve parmi les preuves de ce ftcond genre plur fieurs Lettres de la Marquife de Sévigné écrites à fa fille la Conteffe de Grtgnan \, les Eloges du Vicom- te par S. Evremont , & par le Préfi- dent de Lamoigmn dans fa Haran- gue à l'ouverture du Parlement de i^7f. &; fon Oraifon Funèbre pat l'Abbé Fléch'ur. Les preuves qui rempliffent la troifiéme Partie du fécond Volu- me, fe reduifent aux Mémoires du Duc d'YorcK ( depuis Jacques II; Roi d'Angleterre ) qui contien- nent plufieurs particuhrirez , plu- fieuvs adiions conliderables du Vi- comte de Turenne dont fes Mé- moires ne font nulle mention , & dont ce Monarque avoir été té-' moin pendant les Campagnes qu'il avoit faites dans l'Armée de France commandée par ce Général , ÔC dans celle d'Efpagne , jufqu'à la publication de la Paix des Pire- nées , & au rétablilTement du Roi Charles II. fon frère. Nous ne devons pas oublier d'à J vcrtir qu'on n'a rien omis de ce qui O C T O B toouvoit contribuer à l'cmbcllifle- ment & à l'cclaircilTcment de cet Ouvrage Hiftorique. Cela confifte en Cartes Topographiques qui mettent fous nos yeux des ficges de Villes , des batailles , des marches d'Armées ; en vignettes , qui re- prefentent à la tête de chaque Li- R E . 173;. j5^ vre quelques évenemens mémora- bles qui y font racontés ; en culs de lampe &: en lettres grifes, qui ont rapport aux divers Sujets dont il cft qucftion , &c. fans parler de la beauté du papiev & de la netteté des caraderes. HISTOIRE DE VEGLISE GALLICANE , DE'DIE'E à Nojfeigneurs du Clergé par le Père ^ac il 5io JOURNAL D » avoit plus d'intrigue pour obte- » nir une place que de prudence «pour s'y maintenir i & il atta- « quoit mieux qu'il ne fe dcfendoir, » parce qu'il ne fçavoit pas fc dé- » tendre de fang froid , fon feu }> l'emportant au-delà des bornes » que le refpcâ: pour les perfonnes » en place prefcric toûjouts. Le Roi qui avoit un intérêt particulier de ménager le S. Siège pour l'engager à ratifier le mariage du Prince Robert fon fils avec Ber- ihe, laifTa agir le Légat que le Pape avoit envoyé en Fiance pour tra- vailler au retablilTemcnt d'Atnoux. Air-fi l'affaire ne fouffrit prtfqu'au- cune difficulté. Il fe tint un Concile àRheims dans lequel l'éledion de Gerbert fut calTée ; mais cette dif- oracelui fut heureufe , mécontent de fe voir abandonné par le Roi , jlfc retira en Allemagne auprès de l'Empereur Othon I H. dont il avoit été Précepteur ; ce Prince lui donna peu de tems après l'Arche- vêché de Ravennes , &: enfuite le fit élever fur la Chaire de Saint Pierre. Le fort d'Arnoux au contraire n'en fut pas meilleur , Hugues ne crut pas devoir fe fier à la parole d'un homme qui l'avoit trompé tant de fois , & il le retint en pri- fon. Ce Prince après un règne glo- rieux qui avoit tait oublier aux François qu'il avoit été placé fur le Trône à Texclufion du légitime hé- ritier , laiffa la Couronne à Robert fon fils qu'il avoit déjà fait cou- ronner Roi. Ce Prince avoit de la. majefté , du goût pour les Sciences, ES SÇAVANS, de la bonté pour fes peuples , une pieté tendre , ôc un grand fonds de Religion. Il en donna des preuves , mal- gré la force de fa pallion dans tout ce qui fe pafla à l'occahon du mariage qu'il avoit contracté avec Berthe qui étoit fa parente , & qui d'ailleuiS avoir .ivcc lui une ailinité fpinruelie ; le Pape Jean XV. s'é- toit d'abord élevé avec zélé contre ce fcandale , mais la mort , ou peut-être les follicitations d'Hu- gues-Capet l'avoit empêché de ter- miner cette affaire , Brur.on qui prit le nom de Grégoire V. lui ayant fucccdé l'an ^^ë. la pourfui- vit avec une fermeté inflexible. Il commença d'abord par prefler Ro- bert de rendre la liberté à Arnoux,' qui nonobftant fon retablilTemcnt étoit toujours prifonnier à Orléans. Le Roi ne balança pas à le fatisfai- refur ce point dans l'efperance de le rendre plus facile fur l'article de fon mariage ; mais il fe trompa dans fes efperances. Grégoire V. fit alTembler un Concile à Rome en. 998. où l'Empereur Othon III. af- filia , on y fit huit Canons dont le premier eft conçu en ces termes: ijue le Roi Robert ait à fe féparer de "Berthe fa parente qiiHl a époiifé con~ tre les Loix , & qu'il faffe fept arts de pénitence \ s'il refufe d'obéir , qu'il fo;t excommunié aujfi-bien queBerthe ; & par le fécond on fufpendoit de la Communion Archambauld Ar- chevêque de Tours , qui les avoit mariés, aulfi - bien que tous les Evêques qui avoicnt confenti à ce mariage, ôi cela jufqu'à ce qu'ils vintTent O C T O B vînfTent fiire fatisfaélion au S. Siè- ge- Cette fenrcnce fut un coup de ibudre pour le Roi R .bert , il ai- nioit Berthe d'autant plus palîîon- nément qu'il en efperoit bien tôt un fils-, mais n'ayant pas la force de s'en féparer, il fe fournit hum- blement aux ccnfures de l'Eglife. » Pierre Damicn alTure en effet que » Robert fut excommunié , que » les François eurent tant d'égard à » cette excommunication qu'ils » évitoient d'avoir aucun commer- » ce avec le Roi , en forte qu'il ne » refta auprès de lui que deux Séna- » teurs ; encore , dit - il , qu'ils » avoient foin de faire paffer par » le feu les vafcs où ce Prince avoic » mangé ou bii , pour les purifier. «Mais , ajoute notre yJuteur ^ quoi- " que les François traitalTent le Roi » comme excommunié , ils ne ccf- » ferent point de le regarder cora- » me leur Roi. Cependant la Religion triom- pha enfin de fa foibleire ; il rompit tous les liens qui l'attachoient à Beithe, fit une confelfion publi- que de fon péché , l'expia par une pénitence auftere & époufa peu de tems après Confiance hlle de Guil- laume Comte d'Arles. Grégoire mourut l'année qui fi- nit la conclufion de cette grande affaire, & eut pour SucceiTcur Ger- iert qui prit le nom de Siiveflrc II. C'eft le premier François qui foit monté fur la Chaire de S. Pierre. Ses envieux l'accuferent d'avoir employé la magie pour parvenir à la première dignité de l'Eglife. Ils Oilohe. publièrent qu'il étoit Nécroman- cien -, apparemment que fon habi- leté dans les Mathématiques a don- né lieu à cette calonmie ; mais avec la proteélion de TEmptreur , il ne fallut à Gcrbert d'ancres pre- ftiges que its talens & f^s intrigues pour arriver à la Papauté. Au refte nous remarquerons ■avec l'Auteur que Gcrbeit efl: une grande preuve du penchant qui porte la plupart des hommes à faire quadrer leurs fentimens avec leurs intérêts ; ce Pape fe montra aulTi zélé pour maintenir les droits & l'honneur du S. Siège, qu'il avoit marqué de vivacité pour les com- battre , lorfqu'il fut dépofé de . l'Archevêché de Rheims par l'au- torité du Pape Jean X V. cet exemple fert en même tems à faire voir ce que peut la prévention fur les efprits. Les Hérétiques loiicnt fa fermeté & fa droiture quand ils l'entendent déclamer contre le Siè- ge Apoflolique ,. &: le regardent comme le plus méchant des hom- mes & comme un Magicien, quand ils lui voyent foûtenir les préroga- tives de ce même Siège. Ce que nous avons dit du dcf- fein de cet Ouvrage dans les Ex- traits que nous avons faits des Volumes qui en ont dé|a paru , fait affez fentir l'impoffibilité où nous fommes de fuivre l'Auteur dans tous les détails où fon delTein l'o- blige d'entrer. L'indépendance ovi la plupart des Seigneurs vivoitnc alors au mépris de l'autorité Roya- le , les accoûtumoit à méprifcr celle dv l'Eglife j cet efprit dere- Ffff S^z JOURNALD bellion 8c de dcfobcKTance aux Su- périeurs légitimes pafTa bien tôt des Laïques aux Ecclefiaftiqucs &: aux Moines ; l'on vit dans le Clergé & dans les Monafteres piufieurs di- vifions fcandakufes , qui donnè- rent lieu à la tenue de differens Conciles dont on trouvera ici l'Hi- ftoire , Si les principaux Canons. On y verra que fi dans ce fiecle de ténèbres & de defordre le nom- bre des Saints Evêques fc des per- fonnages diftingués par leur pieté & par leur érudition ne fut pas conllderable , Dieu ne laiffa pas cependant d'en fufciter quelques- uns , tels que Séguin Archevêque de Sens , Fulbert Èvêque de Char- treSj S. Fuîchram Evoque de Lodé- ve , S. Ansfroi Evêque d'Utrecht, le B. Guillaume Abbé de S. Bénig- ne , S. Mayeul ^ S. Odilon , S. Âb- bon , &c. Ces quatre derniers fe rendirent fur - tout recommanda- bles par le zélé avec lequel ils tra- vaillèrent à la reforme de divers Monafteres , & à établir la régula- rité dans ceux qui furent fondés de nouveau , & en grand nombre pat toute la France , fur tout par la li- béralité des Ducs de Normandie , & entre autres de Richard II. qui futfurnommé le père des Clercs & des Moines. Il faut voir dans l'Ou- vrage même avec quelle adrefie un Seigneur de ce Pays - là nommé Arifafte trouva le moyen de s'in- fmucr dans l'efprit d'une nouvelle Se6ke de Manichéens établis à Or- léans s comment fous prétexte d'entrer dans l'impiété de leurs dogmes , il arracha leur fecret ES SÇAVANS, qu'ils cachoient avec une grande diflîmulation ; le zélé avec lequel le Roi Robert travailla à confon- dre ces Hérétiques j & le fupplice que leurobftination leur attira. Au défaut des Saints Evêques qui devenoicnt , dit l'Hiftoricn , de jour en jour plus rares , Dieu avoir donné à fon Eghfe de faints Rois qui édifioient par leurs vertus les fujcts qu'ils avoient à gouver- ner. De ce nombre étoit le faint Roi Robert, k' père & l'exemple des François, & S. Henri Empe- reur d'Allemagne & Roi de Hon- grie. B Maître de l' Allemagne , de » l'Italie , & d'une partie de la Gau- » le par le Royaume de Lorraine , n il ne régna que pour faire régner »J. C. dans fes vaftes Etats. Le » bien de l'Eglife &: celui de fes » peuples étoient l'unique objet de » fes travaux &: de fes exploits mi- » litaires. Il fit toujours prélider la » Religion à fes Confcils, la bonne » foi à fes Traitez , & le zélé à k% M entreprifes. Ce 17' Livre finit par differens Conciles qui furent tenus à l'occa- fion d'une queftion affez inutile , mais qui devint cependant une af- faire importante pat l'ardeur avec laquelle elle tut foûtcnuc , & par l'intérêt que le Roi Robert & le Duc d'Aquitaine y prirent. Il s'a- gifToit de fçavoir fi S. Martial Evê- que de Limoge devoir être regar- dé comme le dernier des Apôtres , ou le premier des ConfciTeurs. Il eft encore queftion de cette difpute dans le Livre fuivant qui cftle vingtième. Le Pape Jean XIX. O C T O B confultc fur ce point , adrclTa une Lettre à Jourdain de Limooes , &c aux autres Evêques des Gaules , par laquelle s'appuyant fur les AÎtes apocriphes de S. Martial , il déclare qu'on peut le nommer Apôtre , & en faire l'office. Cette dccifion réu- nit prefque tous les efprits en fa- veur de l'Apoftolatde S. Martial ; dans un Concile tenu à Limoges, l'Evêque Jourdain leva le corps de Saint Martial de fon tombeau , & l'avant dépofé fur l'Autel de Saint Etienne , il célébra la Meffe en l'honneur de fon Apoftolat , & or- donna enfuite que dans fon Diocé- fe on en fît la fête comme d'un Apôtre. La même chofe fur encore décidée par plufieurs autres Conci- les ce qui marque qu'elle ne laifTa pas de trouver quelques Contra- diéleurs. On peut voir par tout ce qui nous reftc de ce tems là que l'i- gnorance étoit grande dans le Cler- gé ; c'eft ce qui eft fur-tout remar- quable dans les Ad:es du fécond Concile tenu à Limof^es en 103 1. dont les décifions, quoique pleines de vigueur Epifcopale , font la plupart appuyées de bits apocri- phes , & fuppofent peu de con- noiffance de THiltoire &c de la tra- dition Ecclefiaftique. Cette même année mourut le Roi Robert , après avoir donné pendant toute fa vie les plus gran- des marques de pieté. » Il tut, félon y> le Père de LongHCval ^ plus faint » Roi que grand Roi , plus père j> que maître, plus zélé pour faire » fervir Dieu que pour fe faire fer- 3» vir lui-même , il n'entreprit rien R E . r 7 5 y. ^4} » que pour la gloire de l'Eglife , &C y> que pour le bien de fcs Sujets. »Sa bonté & fa popularité nuifi- » rent à fon autorité , & il fut toià- "jours plus aimé que craint. Après fa mort le Royaume fut défolé de la plus cruelle famine dont l'Hiftoire ait jamais fait men- tion , la difette fut fi exceflîve qu'elle fit perdre tout fentiment d'humanité au commun du peuple. Les hommes alloient pour ainfi di- re à la chalfe des hommes , ils s'at- taquoient les uns les autres fur les chemins non pour fe voler, mais pour fe manger. L'Auteur ne rap- porte de pareilles horreurs que pour mieux faire fentir la charité que les Prélats & les Abbez firent éclater dans cette affreufe calamité. On en lira avec plaifir differens traits dans l'Ouvrage-même.La pe- lle fucceda à la famine , & les Evê- ques profitèrent de ces triftes con- jondures pour corriger les defor- dtes qui regnoienc alors , & fur- tout pour empêcher les guerres prefque continuelles que fe fai- foient entre eux les Seigneurs par- ticuliers. On tint à ce fujet des Conciles dans toutes les Provinces, les fages reglemens qu'ils firent &: qu'on trouvera ici > turent d'autant mieux reçus que le peuple regar- dant comme un jufte châtiment de Dieu les maux qu'il venoit d'ef- fuyer , fe trouvoit naturellement difpofé à la foûmiffion & au repen- tir. Le Royaume changea de face, la pieté devint comme générale , mais le peu de lumière qui regnoit alors donna lieu à des dévotions Ffffij 3*44 JOURNAL D peu réglées , telles que celle des Pèlerinages. Celui de Saint Jean de Jerufaltni devint fur-tout fort or- dinaiic. Les plus grands Seigneurs , les Prélats , les temmes-mcme du premier rang , s'expoferent fré- quemment aux fatigues de ce long voyage. Robert Duc de Norman- die fut de ce nombre ; & fit avant fon départ diverfcs fondations en faveur des Eglifcs i & entre autres ayant donné une terre confiderable aux Religieux de Saint Pierre de Préaux , il envoya fon fils Guillau- me encore enfant leur poi ter l'adle de donation, llavoit avec lui plu- iîeurs leunes Seigneurs qui étoient de fon âge poui fcrvir de témoins , $C afin qu'ils s'en fouviniTcnr , on leur donna .à chacun un foufflet fur la jolie. L'Auteur remarque que cet ufage étoit ancien , & qu'il eft mar- qué dans la Loi des Ripuaires , que quand on achetoit une tetre , fi on ne faifoit pas un contrat de vente , Tacheteut devoit la payer fur le champ , en prendre enfuire polTtf- ifîon en prefcnce de témoins , don- ner des foufflets , & tirer les oreil- les aux petits cnfans , afin qu'ils pulîent en rendre un jour témoi- gnage. C'eft , conthnic-t-d , appa- remment pour la même raifon qu'on donne un foufflet aux enfans à qui on adminiftre la Confirma- tion i on veut qu'ils n'oublient ja- mais qu'ils ont reçu un Sacrement qui ne doit pas être réitéré. L'arri- vée du Pape Léon IX. en France, où il vint pour la dédicace de l'E- glifc dé Rheims , le Concile qu'il y dat^ àix&. lequel plufieuis £yê^ ES SÇAVANS, ques furent dépofés , & l'Hiftoire des erreurs & de la condamnation de Bcrcnger , font ce qu'il y a de plus curieux dans ce Livre. Mais l'inconlhnce & l'opiniâ- treté de cet Héréfiarque qui rêve- noir toû|ours à fes erreurs après les retrav5lations les plus folemnel- les , obligèrent les Evêques & le Pape d'alTembler divers Conciles dont il ell: parlé dans le ii' &: dernier Livre de ce Volume. Vic- tor IL qui avoir fuccedè à Léon IX. envoya en France Hildebrand en qualité de Légat pour arrêter les progrès ^ue faifoit l'Héréne de Berenger qui avoir trouvé des pro- tecteurs à la Cour & même dans l'Epifcopar \ il éroir aulîi chargé de remédier à la hmonie qui étoit le vice dominant de- Ecclefiafti- ques de ce fiécle. Les foins du Lé- gat eurent un fucccs fi heureux qu'il y eut , félon un Auteur , 4J Evêques qui fe reconnoifiant cou- pables de fimonie renoncèrent d'eux mêmes à leur dignité , outre 27 autres Prélats , Prieurs ou Ab- bez qui prirent le même parti. Dans la fuite Hildebrand étant devenu lui-même Pape fous le nom de Grégoire VII. travailla avec ua zélé infatigable pour déraciner en- tièrement les abus qui regnoient en France parmi les gens d'Eglifc,auf- fi-bien que dans le rcfte de l'Eglife. On y verra que fi le Père de Lon- gueval s'élève avec raifon contre ce qu'il y a eu d'exceilif dans la con- duire de Grégoire VIL il rend en même tems toute la juftice qui cfl dûë à la fainteté 5c aux vertus de ce grand Pape. O C T O B Mais en voilà affez pour donner une idée de ce Volume, & pour montrer qu'on n'y a rien oublié de tout ce qui peut le rendre aulTî in- tcreiTant & auflî inftrudii:" que les 54i" RE. 17? r- fix autres qui le précèdent. Nous ne manquerons pas de par- ler du huitième Volume dans le Journal fuivant. DISSERTATION SVR LES TENTES , ou PAFILLONS DE guerre. Par Ai. Beneton de Perrhi. 173 5. A Paris , chez Gonichon rue delà Huchette , au Sacrifice d'Abraham ^ & fin<î^«, rue S. Jacques' à la Science. /«-i 2. pag. 147. de Perrin qui eft dans l'ufa- ^. gc de mettre un partage de l'Ecriture à la tête de fes Difîerta- fions , a pincé à la tête de celle dont nous allons rendre compte. Cet endroit de l'Ecriture tiré des Nombrcsch. 24. » Que vosPavil- jjlons font beaux, ô Jacob! que vos » tentes font belles ô Ifraël ! elles » font comme des vallées couvertes » de grands arbres, comme des Jar- » dins le long des fleuves toiîjours 3> arrofés d'eaux -, comme des tentes » que le Seigneur même a affermies, » comme des Cèdres plantés fur le » bord des eaux. En traitant des Tentes , il pré- tend aujourd'hui traiter une partie de ce qui regarde la Cafiramétation, ou la manière de camper & de pofer un Camp , & comme ce qu'il ^a dire, regarde toutes les Nations en général , il exhorte les Sçavans 3. donner une TaBtque Françoife compktte. Il remonte d'abord à la première origine des Tentes, & montre fans peine qu'elles font de la première Antiquité. Les Patriarches ne fe fi- soient guéres dans des demeures pexnuaentes ^ ils alloient de Coiis trées en Contrées plantant leurs Pavillons dans les lieux les plus commodes pour y faire fubfiftcr leurs troupeaux qui faifoicnt leurs plus grandes richeffes. Mais les Villes s'étant établies , à la referve de quelques Nations barbares qui continuèrent à mener une vie er- rante , les Tentes ne furent guéreS' d'ufage que pour les Armées , & c'eft aulTi principalement des Ten- tes militaires que l'Auteur parle ici. Il en marque les différentes figures félon les differens Peuples , la natu- re des étoffes dont elles étoient couvertes, & tous les ufagesauf- quels elles étoient deftinées ; mais entraîné par fa grande érudition il nelaiffepas d'entremêler fon fujet d'une infinité de chofes qui lui font étrangères à mefure qu'elles fe pre-: fentent à fon efprit. Ainfi il s'étend affez au long fut les Camps des anciens Grecs & La-' tins, fur la figure qu'ils leurdon- noient & fur la manière dont ils étoient retranchés. On trouvera dans cette Differtation des chofes affez curieufes , qu'on ne s'an viferoit pas d'y cherchei fux le t.\-i Ere qu'elle pojctç. S^^ JOURNAL DE On y verra par exemple un grand morceau fur la nature , la compofition &: les efFets du feu Grégeois. Il prétend prouver que ce feu étoil la même chofe que ce que nous nommons aujourd'hui poudre à dnon.Tonte la différence, dit-il , qu'il y avait entre cette matiè- re , & notre -poH-ire noire d'aprefent , e'efi cjue n'y ayant point dans la pre- mière de charbon écrafé , fon effet fe faifoit fans bruit , quoiqu'il n'en fût ■pas moins grand. Et il ajoute qu'il croit même avoir d^affez. fortes preu- ves pour faire conclure que ce qtCon nomme poudre a Canon a été connu de toute antiquité. Pour revenir aux Tentes , afin de me fervir d'une exprelîion , que les fréquentes digreOfions de l'Au- teur l'obligent fouvent d'em- ployer , il obferve que parmi cel- les qui compofoient le Camp Ro- main, il y en avoit une plus grande &: plus apparente qui fervoit de Prétoires ; après en avoir expliqué la forme Si les ufages , il paffe aux Pavillons fous Icfquels nos Rois de la première Race , tous les Souve- rains de ce tems-là , & particuliè- rement en Allemagne , comme on le verra plus bas , rendoienr la ju- ftice dans les affemblces générales de la Nation , qui pour l'ordinaire fe tenoient en pleine campagne -, c'eft-là qu'ils cxerçoient principa- lement leur autorité , & qu'ils re- cevoient les hommages de ceux de leurs fujets qui obtenoient de-s fiefs par recompenfc ; d'où il a, riva fé- lon lui , qu'on regarda le Pavillon Royal comme le lîmbole de la S SÇAVANS; Souveraineté , & qu'on en grava la reprefentation fur les fceaux & fur les monnoyes. Comme il y a differens degrez de puilTance , les pièces de ce Pavil- lon fervirent dans la fuite à diffé- rencier ces degrez. Les armes des Papes, des Empereurs, des Rois paroilToient fous un Pavillon en- tier ; & à l'égard des Ducs , des Pairs , & des autres grands Offi- ciers de la Couionne , ils envelo] ; poient leurs Armoiries dans les courtines du Pavillon , ce qui les faifoit paroître comme fous un manteau. Il montre que de tout tems les Souverains , tant anciens que mo- dernes , Petfans , Tartares , Chi- nois , Turcs , François , &c. fe font diftingués par la magnificence de leurs Tentes & de leurs Pavillons. Il efl: cependant trop judicieux pour approuver ce luxe, fur-tout dans les particuliers ; &: on verra ce qu'il penfe de ces chambres porta- tives de charpente que quelques Seigneurs ont fait faire dans la der- nière campagne , pour fe préfervet des incomnioditez ordinaires dans les campcmens. Mais il va plus loin, &c comme à propos de Tentes , il s'eft étendu quelquefois fur les Camps des an- ciens , en comparant la manière dont ils arrangeoient leurs Tentes avec celle qui eft aujourd'hui en ufage parmi nous , il propofe d'y faire quelques changemens. » Un « corps , dit-il , foit bataillon ou » efcadron campe ordinairement » fur autant de rangs de Tentes O CT O B • qu'il y a de Compagnies dans le » Corps -, & CCS Tentes font fur M des lignes qui font perpendiculai- »res à ce qui fait le devant du » Camp. Mais fi ces Tentes au lieu 30 d'être fur des perpendiculaires » ctoicnt fur des parallèles , je m'i- »magineque celaaugmcnreroit la » fîîreté Ik la commodité du Camp. M. Beneton développe ce Syrtcme, répond aux objedions dont il efl fufccpcible , & le met fous les yeux dans une planche,oii il a fait graver la pofition des Tentes arrangées fui- vant fes principes. Delà, comme fi fon érudition étoit encore plus étendue que fa mémoire , il revient à fon ordinaire fur fes pas , & ajoute diverfes re- marques à celles qu'il avoit déjà faites fur les figures qui fe met- roient au haut des Tentes. C'eft à cette coiJtume qu'il rapporte l'ori- gine du Jeu de la Quintame , ce qui lui donne occafion de parler de quelques autres exercices de cette nature. Il expofc enfuite comment du Pavillon militaire devenu infcnfi- blemcnt une marque de fouverai- neté, fe font formés le lit dejuftice & le Dais-, comment cette dernière marque de diftindlion a palTé du Prince aux grands Officiers de la Couronne. C'eft auffi de-là , félon lui , que font venues les Impériales de couleur dont les Reines , les PtincelTes , & les Duchefles ornent leurs carofles. Il croit que la couleur de pour- pre fcroit plus convenable pour les Dais de nos Rois que la violette î^ E , I 7 3 j; y^7 dont on les fait ordinairement &c tombant enfuite fur la couleur qu'ils doivent porter auffi bien que les Reines dans leurs habits de dueil , il remarque que Catherine de Médicis eft la première qui pour mieux marquer fa douleur dans la perte cruelle du Roi fon époux, en ait pris le deuil en noir, le blanc ayant toujours été jufque-là la cou-; leur des Reines veuves. Au refte ces Dais dontl'ufagea été permis aux Grands de l'Etat étoient toujours de la couleur de leurs livrées , & ornés de leurs blafons, de même que les carreaux dont les Dames Nobles de race militaire fe fervoient àl'Eglife & 3 la Cour. Elles feules avoient droit de les faire border de galon d'or ou d'argent , & la femme d'un homme de robe ne pouvoit embel- lir fon carreau que d'une broderie de foye. Ces diftindions qui n» s'obfervent plus , & que l'Auteur en toute occafion regrette ve- noient de ce qu'il falloit être Chc-,' valier pour porter de la dorure. Mais dans la fuite le Chancelier ayant trouvé le moyen de joindre le titre de Chevalier à i'cs qualitez il a participé à toutes les préé- minences de la Chevalerie , & les Chancelieres eurent des car- reaux d'Eglife & de Cour galonnés d'or. C'efl par elles cjue la porte a été ouverte aux autres Dames de la, Ra. be pour en avoir àe femhUbles dont elles ont aujourd'hui lajoùijptnce in~ comeflable ^ pourvu que les emploit de leurs maris Çoient compatibles avec, lAqnditéde Chevalier» 5-48 JOURNAL D Enfin après avoir fait à l'occafion des carreaux quelques remarques hiftoriques fur les OreiUiers & les Tabourets, M. Perrin retourne au Dais , d'où font venus i°. le Ciel Royal, 2°. le Lit de Jii/iice , 5°. le Lit d'appareil , 4°. le Lit de parade, ou Lit de payement , qui fe change en Lit Funèbre , & en Chape/le ar- dente ; toutes cts chofes trouvent ici leur explication , on n'y oublie pas le Citafal^ue , S>C on finit par le Parafol qui peut être regardé E S SÇAVANS, comiTn; un petit Dais , & qui clier les Nations les plus barbares a pafTé dans tous les tems pour une mar- que de puilTance & d'autorité, L'Auteur déplore YaviliJJement o\l il cft tombé en France , & propofe à l'exemple des Orientaux plufieurs différentes manières dont on pour- roit le fervir parmi nous pour di- ftinguer les diffèrens degrez. de ejuH" lue cjui fe trouveraient entre les Da- mes qui s'en ferviroient pour cela avec réflexion. BENEDICTUS ABBAS PETROBURGENSIS DE VITA ET GESTIS Henrici II. & Ricardi I. è Codice Manufcripto in Bibliothecâ Harleianâ defcripfit , & nunc primus edidit Thomas Hearnius. C'eft - à - dire : La V'ie & les ABions d'Henri IL & de Richard /. pa,r Benoifl Abbé de Bourg Saint-Pierre, publié par M. Hearne. A Oxfort. 1735. in -4°. deux Volumes, pag. 875. pour deux vol. CE T Ouvrage eft le quarante- deuxième de ceux que M. Hearne a donné au Public depuis 1701. comme la plupart des mor- ceaux d'Hiftoire d'Angleterre qu'il a publiés dans la plus grande partie de ces Volumes , ont été pu- bliés par des Moines , il s'attache à faire voir dans la Préface de ces deux Volumes, comme il avoir déjà fait dans d'autres Préfaces, qu'on a de grandes obligations aux Moines du lo'fiécle & desfiécles fuivans, parce que fans le fecours de leurs Chroniques & des Hiftoircs parti- culières,qui ont été confervées dans les Bibliothèques des Curieux , on ne fçauroit prefque tien d'alfuté de l'Hiftoire de ces fiécles , fur-tout par rapport à l'Angleterre. Le ftile barbare de ces morceaux d'Hilloi- re , n'empêche point que ceux qui veulent s'inftruire par la leéture des Auteurs contemporains de ce qui s'efl paffé pendant ces ficelés d'ignorance ne lilcnt cesEcrits avec plaidr. Ils y trouvent des faits qui les interelfent , & quelquefois des Pièces originales qui font inftruc- tives. D'où vient que les perfonnes les plus illuftres qui s'attachent en Angleterre à fe former des Biblio- thèques curieufes, ont eu foin d'y retenir le plus qu'il leur a été pollî- ble de ces morceaux d'Hiltoire compofés par des Moines. Ceux que M. Hearne a publiés ont fait connoître à ceux qui ne peuvent avoir recours aux Manufcrits l'a- vantage qu'on peut retirer de la leèture de ces Ouvrages. Après ces obfervations M. Hear- ne O C T O B ne parle d.iiis fa Préface de Benoît Abbé du Bourg S. Pierre. Mais il s'y arrête peu , fe contcnrant de renvoyer fes Ledcurs àl'Appendix de cette Préhce , dans lequel il a réuni, ce que dif.erens Auteurs ont dit de Benoît. Sous le nombre xi del'Appcndix , il rapporte ce que Swatham dit de Benoift dans fon Hiftoire du Monallcre du Bourg 5. Pierre, qu'il appelle fimplemcnc du Bourg. Cette Hilloire a été in- férée par Jofepli Spark dans fon fécond Volume des Ecrivains de i'Hiftoire d'Angleterre. Benoift avoit fait profefllon de la Règle de S. Bcnoilf dans l'Eglifc du Sauveur de Cantorberi. Comme il avoit été inftruit dès fa jeunelfe dans les Lettres humaines , qu'il étoit exaâ: Obfervateur de fa Rè- gle , & habile pour le gouverne- ment temporel "■ il fut tait Prieur de fon Monaflere de Cantorberi. Enfuite il fut élu Abbé du Bourg S. Pierre. Son premier foin dans fon Abbaye fut d'y rétablir la difci- pline Monaftique. Il ménagea par fon oEConomie des fonds pour ac- quitter les dettes que Guillaume fon prédccelTeur avoit contraftées. Il retira les Ornemens de l'Fglife qui avoient été mis en gage. Il tor- ma une Bibliothèque compofée de plufieurs Volumes qu'il fit tranf- crire ; la Nef de l'Eglife de fon Ab- baye fut reconrtruitc toute entière de fon tems. Il rentra dans plu- ficurs domaines de fon Monaftere, foit en pourfuivant en juftice ceux qui s'en étoient emparés , foit en les cha fiant à force ouverte. Car il OUebre. R E , I 7 3 5-. 5-49 ne faifoit pas diflîculté de prendre les armes pour ioûtcnir les dioits de fon Monaftere , il acquit même de nouveaux fonds , il enrichit fon Eglife d'ornemcns magnifiques pour le Service Divin , & il obtint pour fon Abbaye de grands [nivi-' léges qui lui furent accordés par le Roi Richard. Ce Prince cftimoit particulière- ment l'Abbé Benoift. Il fut du nombre des Abbez qui alfiftcrent au Sacre du Roi Richard : pendant que ce Prince éroit à la guerre de la Croifade , Benoift fut aftbcié au gouvernement du Royaume à Guillaume Evcque d'Elie,Chance- lier&c Garde des Sceaux d'Angle- terre. Ce fut auftî Benoift qui four- nit le moyen de tirer Richard de prifon : car le Duc d'Autriche ayant demandé une fomme confi- derable pour la rançon du Roi d'Angleterre , on propofa au Roi de vendre dix Villes' de fon Royau- me. Cette propofition parut trop honteufe à Benoift pour le Roi & pour la Nation , & il dit qu'il va- loit mieux vendre les va!es d'ar- gent d'Angleterre & en employer le prix à la rançon du Roi. L'Abbé Benoift ayant gouverné fon Ab- baye dix - fept ans , mourut l'an 1 1 95. le jour de S. Michel, fuivant S\»'asham , qui en ce point pouvoit être mieux inftruit que les Auteurs modernes qui difent que l'Abbé Benoift fleuriiîoit dans le douzième fîéclc fous le règne de Jean-fans- Terre. Outre I'Hiftoire des Rois Henri IL &: Richard I. Benoift a compofé Gggg 5;o JOURNAL D deiu' autres Ouvrages, l'un de la Vie , l'autre des Miracles de Saint Thomas de Cantorbcry. Ces deux Ouvrages ont donné lieu à des Au- teurs modernes d'Angleterre c]ui depuis le Schifme ont vii avec pei- ne que des Auteurs contemporains parlalTent de l.i Sainteté & des Mi- racles de S. Thomas de Cantoibery, d'accufer Benoift d'avoir cré un importeur qui trompoit le monde par des prcftigcs diaboliques. Ce font les termes de Balé. Mais le Lord Pitre & Volîius qui ont parlé de ces deux Livres de Benoift , n'en ont point eu une lî mauvaife idée. L'un d'eux afTure qu'elle eft écri- te avec élégance. Quoiqu'Henri IL Roi d'Angle- terre foit mort fur le Thrône en 1154. l'Hiftoire de Benoift ne commence qu'à l'année 1170. Ce qui vient ou de ce que Benoift n'a point jugé à propos de remonter plus haut , ou 'de ce qu'une partie de ce que l'Abbé du Bourg S. Pier- re avoit écrit fur les premières an- nées du règne de ce Prince a été perdu. Les principaux points de cette Hiftoirc depuis l'an 1173. jufqu'à la mort du Roi Henri arri- vée en II 89. font les conteftations de ce Prince avec S. Thomas de Cantorberi , la mort tragique de l'Archevêque , les honneurs faits 4 fa mémoire , les guerres du Roi d'Angleterre avec le Roi de Fran^ ES SÇAVANS, ce , 6c avec le Roi d'Ecofte , & fçs diffcrens avec les Princes Tes en- fans. Roger de Hovcdcn , Bronp- ton , Ik les autres Hiftoiicns tant Anglois que François qui ont écrie ce qui s'eft palTc fous le règne d'Henri IL ont rapporté les princi- paux faits écrits pat Benoît ; plu- fieuis même en ont rranfcrit des morceaux entiers. C'cft pourquoi nous ne nous arrêterons pas à don- ner ici le précis de cette Hiftoire. Celle de Ricard I. commence à l'avcnement de ce Prince à la Cou- ronne d'Angleterre. Elle finit avec l'année 1192. ainfi elle ne com- prend pomt les fept dernières an- nées du règne de Richard mort en II 99. l'Auteur y rapporte le voya- ge du Roi Richard pour la Croifa- de , & fes expéditions contre Sala- din , &c les conteftations qu'il eut dans ces expéditions avec les Prin- ces qui s'étoicnt auftl croifés con- tre le Soudan. Ce font des faits qui ne font pas moins connus que ceux du règne d'Henri IL C'eft pour» quoi M. Hearne déclare bien ex-; preftément dans fa Préface, qu'en donnant ce morceau d'Hiftoire , il ne l'a point publié comme conte- nant des traits qui duflent paroître nouveaux à ceux qui fçavent l'Hi- ftoire d'Angleterre,mais qu'il a cru faire plaifir de faire connoîtrc une des fourccs dont les Hiftoriens modernes ont profité. O C T O B R E , 1 7 } y. sSi RECVEÎL DE CO N SV LT^TIO N S SVR DIVERSES Matières , divifé en deux Folumes , contenant diffcrens Recueils fçavoir Tome premier i°. des M.itieres Eccle/îaflicjHes & Bénéficiales z°. des Ma- tières Féo.iales , Droits de Lods & autres Droits Seigneuriaux , i "». det Mariages, fécondes Noces & Dots , 4°. des Teftamens & S ucc'ejfions z\i inteftac , des Subjiitutions , éleBions & fideicommis. Tome fécond^ 1°. des SuhftttHtions^fideicommis&éleSltons, i°. des Légitimes & des Legs x°. des interefis , 4°. de différentes Matières mêlées , Ç. des Matières Criminelles, Par A^/ttre François de Cormis Avocat Conjiflorial au Parlement de Pro- vence. A Paris , chez ^/o«r,«/<î?2f Imprimeur- Libraire , Qiiai des Aimu- llins. ij^^.in-folio. 2. Volumes, Tom, 1. col. iSoo. Tom. II.col. 2092.' QUOIQUE les Parlemens de Droit - Ecrit foient tous régis par les mêmes Loix , il y a entre eux une grande différence fur la manière d'interpréter plulieurs de ces Loix , & fur la manière de les exécuter. C'eft pourquoi il eft à fouhaiter pour ceux qui veulent s inftruire à tond de la Jurifpru- dence des differens Tribunaux du Royaume , qu'il paroilTe de tems en tems des Recueils d'Arrefts ou de décidons de Magiftrats ou d'A- vocats de ces differens Parlemens , inftiuits des ufages qui s'y obfer- vent. Le premier Auteur qui ait traité des matières de droit fuivant les ufages du Parlement de Proven- ce , eft le Prciidcnt de S. Jean dans fes Décifions. Son Recueil n'a pa- ru que plus d'un ficcle après l'éta- bli(îcmcntde ce Parlement. Qiioi- que le Recueil de Duclapier Maî- tre des Comptes de Provence re- garde principalement les matières iîfcales , l'Auteur y traite parocca- fion quelques queftions de droit. On trouve dans les Ouvrages de M. du Vair Garde des Sceaux , quelques Arrefts qu'il prononça en robe rouge pendant qu'il étoit pre- mier Préfident du Parlement de Provence. Jacques Morgues Avo- cat au même Parlement a donné un Commentaire fur les Statuts de fon Pays. Il a éié fuivi de Duper- rier Avocat au même Parle- ment , à qui l'on n'a reproché d'au- tre début que celui d'avoir trop d'efprit & d'être quelquefois trop fubtil. Boniface a donné en diffe- rens tems cinq Volumes /'m -/;//» d'Arreflsdu Parlement de Proven- ce. Il y rapporte les moyens des parties , fur les Mémoires qui lui ont été fournis par les Avocats. Ce qui fait que les queftions , n'y font pas toujours également bien difcutées. Le Recueil de Confultations $c de décidons de M. de Cormis ne fera pas moins utile que celui des Arrefts de Boniface paT rapport aux ufages du Parlement de Provence. Les queftions font même ordinai- rement traitées avec plus d'exacSi- tude & d'érudition dans ce der- nier Auteur , que dans Boniface. G g g g ') SS2 JOURNAL DES SÇ AVANS. M. deCormis qui cft mort l'an- de la neceiritcdc rinfimir.rion avant née dernière âqé de quatre- vingt quinze ans avoir acquis une grande expérience, àlaquellc il avoir joint une étude conrinuelle des Loix. Pour mettre le Public en état de juger du mérite de fes Confulta- tions , nous donnerons l'abrégé de quelques unes pnfes à l'ouverture du Livre. Barnabe Tartone ayant été pour- vu delà Vicairie du lieu de la Co- fle au Diocéfc d'Apr en confe- quence d'une rclignation en la lé- gation d'Avignon , a propoféà M. de Corniis trois qutftions. La pre- mière s'il falloir à peine de nullité que la procuration pour tefigner fût miînuce au Grcflc deslnfinua- tions Ecclefiaftiques du Dioccfe d'Apt avant l'envoi à Avignon , s'il faut qu'un lieu appartienne au Roi pour que l'on ne puifle être pourvu de la Cure lans être gradué, la troi- fîéme s'il fuffit que le pourvu /« forma dignum , ait des grades dans le tems qu'il obtient fon vifà. M. de Cormis répond fur la pre- mière qucftion que l'article ii de l'Edit de 16^91. portant création des Greffiers des Infinuations Ec- clefiiftiqucs , prefcrivant de faire infinucrlcs procurations pour refi- gner ou pour permuter avant l'en- voi ne parle que des rciîgnations ou des permutations en Cour de Ro- me, qu'il p'y eft pas dit un mot des procurations pour rcfigner ou pour permuter entre les mains de l'ordinaire ou du Légat d'Avignon, que l'Edit du Controllc de 1657. ^ la déclaration de 1^46. ne parloic l'envoi que pour la Cour de Ro- me. D'où l'Auteur conclut que cette formalité n'cil: point necedai- re pour les procurations envoyées à la légation d'Avignon, parce qu'u- ne loi pénale qui porte la peine de nullité , ne doit point s'étendre d'un cas à un autre , & par confe- quent qu'elle ne doit avoir lieu que pour les cas qui y font claire- ment exprimés. Sur la féconde queftion l'Auteur décide que pour être pourvu d'une Cure d'un lieu muré , il faut être gradué , quand même ce lieu ap- partiendroit à un Seigneur parti- culier , parce que le Concordat ne diftingue pas entre les Villes mu- rées qui font Royales & celles qui font Seigneuriales. M. de Cormis va plus loin. Car il prétend que quand le lieu eft confiderable , il faut que celui qui eft pourvu de la Cure foit gradué , quoiqu'il n'y ait point de muraille , &<. qu'il n'en paroilTe aucun vertige. Il dit qu'on l'a jugé ainfi en faveur d'un dévolutaire pour la Cure de Lan- çon qui eft un lieu dépendant de la piincipauté de Martigues Par rapport à la troidéme que- ftion qui eft la plus difficile , l'Au- teur remarque qu'on peut dire pour le pourvu qui a obtenu fes grades depuis les provilions , mais avant le vifi doit être maintenu en poftctuon du bénéfice , parce que cette efpece de providon eft en quelque manière conditionnelle ^ pour avoir lieu en cas que Tordi- naire juge l'impétrant digne de U O C T O B grâce , de forte que Iniitc n'eil: ccn- lé conibmmé qvic par le vift. Ce- pendant il fe détermine enfuite à dire qu'il but avoir les degrez au tcms des proviiions expédiées à la légation , parce que le pourvu tire fon droit au bénéfice des provi- fions , & qu'il en refte titulaire en vertu de ces mêmes proviiions , s'il n'y a point d'incapacité en fa per- fonne , que dans la règle générale, il faut avoir les qualitcz rcquifes pour pofTcder un bénéfice , lorf- qu'on en eft pourvu. Il cire ce que difcnt fur cette qucftion Dumoulin fur la règle de infirmts lepgnantihus. Nomb. 280. La note d'Antoine Vaillant fur cet endroit de Du- moulin , & DucalTe au ritre de la Collation des bénéfices. L'Auteur ne rapporte point d'Arrefts du Par- lement de Provence fur cette dif- ficulté. Mais il traite par occafion la queftion , fi le tems d'étude dans une Univcrfité fans degré fuffit pour polfeder une Cure dans une Ville murée, & il foijticnt la né- gative avec Dumoulin. Il rapporte pour foùtcnir fon avis trois Arrefts du Parlement de Provence , dont il y en a un du trois Décembre i6'ii.& deux de l'année 1^37. Dans le Chapitre 55 de la fécon- de Partie l'Auteur traite la queftion fi la veuve fe peut faire payer de fon don de furvie avant la dot au préjudice de la caution de la dot. M. de Cormis étoit d'avis que la veuve ne pouvoir en ce cas fe faire payer du don de furvie avant fa dot , pour abforber la plus grande partie du bien du mari , ôc retom- bcr enfuite fur la caution pour fa dot. Les raifons fur lefqucilcs il fc fondoit éroient que la reflitution de la dot eft plus hvorable que le don de furvie , parce qu'il faut payer fes dettes avant que de faire une libéralité ; que la femme qui demande la reftitution de la dot répète ce qui lui appartient, & que pour le don de furvie elle n'a- git que pour fe procurer le paye- ment d'une libéralité. D'où ilcon- cluoit que la femme ayant une hy- pothèque de même date pour la re- ftitution de la dot Si pour le don de furvie elle devoir im,puter ce qu'elle toucheroit du prix des biens de fon mari , fur la dette qui eft la plus hvorable à fon égard, 6C fur fa dot ; autrement que cefcroic faire fupporter .à la caution de la dot le jofiiftcmcnt du don de furvie qui n'étoit point compris dans fon cautionnement. Il citoit là-deflus Louet & Brodeau lettre D , Cha- pitre 40. Cependant les Juges fe trouvè- rent partagés fur cette queftion en la Grand - Chambre du Parlement de Provence , & fur ce partage il intervint un Arreft le z6 Avril i6%i. par lequel on jugea que la veuve avoit pu fe payer de fes avantages nuptiaux avant que d'ê- tre payée de fa dot, & la caution fut condamnée à payer la dot. La première confultation des matières criminelles eft fur la que- ftion , fi un condamné à mort paï contumace , ayant prefcrit la con- damnation par Trente ans, peut re- couvrer fa part d'une fucceflîon ou y;^ JOURNAL DES SÇA VANS, d'un fideicommis échu après les 5 fils qui lui eft donne par les Loix ; ans de la contumace. L'Auteur dé- cide fur cette queftion que dans cette efpece celui qui a été condam- né , ne peut rentrer dans les fuccef- fions qui lui font échûës,parce que ce condamné à mort par contuma- ce , eft cenfé mort civilement du jour de la fentence , quand il ne s'ed pas reprefenté dans les cinq ans de l'exécution , qu'il eft deve- nu par là incapable de recueillir aucune fucceflîon , ni fideicommis, &: que le condamné s'eft reconnu lui-même incapable de les recueil- lir en ne fe reprefentant peint dî«s les cinq ans pour purger la contu- mace. La prefcription en ce casne regarde que la peine , & ne fait que mettre en fureté la perfonne du condamné , pour ne pouvoir plus être recherché ni puni du crime qu'elle a commis , mais elle n'an- nuUe pas le paffé , & elle n'ôte pas le droit acquis à un tiers. Dans une autre confultation fut les matières criminelles M. de Cor- mis décide que quand le fils eft condamné à mort , le père ne perd point l'ufufruit des biens de fon quoique la propriété du bien foit confifquée. 11 fe fonde fur ce que la mort du fils de famille , ne fait pas perdre le droit d'ufufruit que fon perc avoir fur fes biens , comme le décide la Loi dernière au Code de ufiifruUu ce qui doit comprendre la mort civile , comme la mort na- turelle. Ce qui eft encore fondé fur ce que (i le crime du fils préju- dicioit à l'ufufruit du pcre , il s'en- fuivroit que le père fubiroit une partie de la peine pour le cri.me de l'enfant; ce qui feroit contre la Loi Samimui 22 C. de fœnis ^ qui veut qu'il n'y ait que les coupables des crimes qui en fupportent la peine. Ces exemples fuffifent pour fai- re connoître ce grand RecueiL Nous avertirons en finiftant qu'ou- tre les confultations contenues dans ce Recueil, il y a des Mér moires & des écritures faites en differcns procès par M. de Cormis, & quelques Ordonnances des der- niers tems , mais on n'y a marque que l'enregiftrement au Parlement de Paris. HISTOIRE DES SEQVÂNOIS ET DE LA PROVINCE Sécjmnoife , des 'Bourguignons & an premier Royaume de Bourgogne , de l'Eglife de Befanfonjuf^ues dans le jixiémejiecle , & des ylhhayes nobles du Comté de Bourgogne ^ S. Claude , Beaume , Gigny , Château-Châlon ,' Beaume-les-Dames , Lons-le-Saunier , Migette & Moîttigny ^ depuis leur fondationjufjfu'à prefent. Par Af. F. J. Dunod , ancien Avocat au Parle- ment & Profeffeur Royal en l'Vmverfaé de Befançen. A Dijon , chez de Eay^ Imprimeur des Etats, de la Ville & de l'Univerfité, /«-4°. pp. 5 89. fans les Tables & les Préfaces. NOUS avons rendu compte dans le Journal précèdent du dclTein de M. Dunod , de donner une Hiftoire complette du Comté de Bourgogne. Nous avons enfuite parlé des deux premières Parties O C T O B R de cette Hiftoire , qui compren- nent ce qui regarde les Séquanois avant que les Bourguignons fe fuf- fent rendus maîcres de cette Pro- vince , & le premier Royaume de Bourgogne depuis fon origine juf- qu'au tems de fa deftruftion par les enfans de Clovis. Nous allons pre- fcntement donner une idée des morceaux qui concernent l'Hiftoi- re Eccleliaftique de la Franche- Comté que M. Dunod a £n: entrer dans ce Volume. Le premier eft l'Hiftoire de i'Eglife de Befançon jufques dans le fixicme ficelé. Notre Auteur fixe au commen- cement du troifiéme fiécle l'ctablif- femcnt de la Religion Chrétienne à Bcfançon. Il croit que S. Fcrréol & S. Ferjeux qui en hnent les pre- miers Apôtres , y avoient été en- voyés par S. Irenée , que ces deux Saints étoient Gaulois , qu'ayant fait un voyage en Grèce, ils avoient été convertis par S. Polycarpe , & qu'ils avoient amené avec eux dans les Gaules S. Irenée. On voit par l'ancien MilTel Gallican, où il y a une Meffe propre pour le jour de ia fête de S. Ferrcol & de S. Fer- jeux , que leur mémoire a été en grande vénération dans toutes les Gaules. La Préhice de cette Mefle porte qu'ils fouffrirent le feu 5c les ongles de fer , & qu'ils furent dé- capités. D'anciens Mémoires ajou- tent ce que difent les Martyrologes de Bede &c de Raban que ces deux Saints turent mis fur le chevalet &c flagellés , qu'ils eurent la langue coupée , qu'on leur enfonça' des clous dans ia tête ;, &c des alênes dans les jointures des mains Se des pieds. Les Bollandiftes marquent le martyre de ces deux Saints vers l'an 21 i. fous Aurélius-Caracalla. Ea fuivant cet époque I'Eglife de Bc- fançon a été établie la première dans les Gaules , après celles de Lyon & de Vienne, car notre Au- teur adopte le fentiment des Criti- ques qui difent après Grégoire de Tours que ce fut fous l'Empire de Déce en l'an 250. que S. Saturnin fut envoyé àTouloufe , S. Catien à Tours, Saint Trophime à Arles , S. Paul à Narbonne , S. Denis à Paris, S. Auflremoine en Auver- gne , & S. Martial à Limoges. Quoique d'anciens Monumcns ne donnent à S. Ferréol que la qua- lité de Prêtre; notre Auteur le mec à la tête des Evêques de Befançon, parce qu'il a trouvé un ancien An- tiphonier noté par des accens & par des virgules ou dans l'Antien- ne des premières Vêpres de la Fête de S. Ferréol , ce Saint eft quaUtîé Uierarcha Domini^ & S. Ferjeux eft qualifié Lévite. Or HUrarcha figni- fie Prince des Prêires ou Evêques. De trois Catalogues anciens des Evêques de Befançon , il y en a deux qui mettent S. Ferréol à la tête de ces Prélats. L'Auteur obfer- ve enfuite que pendant les premiers fiéclesde l*Eglife on faifoit Prêtres & Evêques en même tems ceux qu'on envoyoitdans les Provinces, pour y annoncer l'Evangile , afin qu'ils puftent donner la Confir^ mation & perpétuer par l'Ordina- tion les Eglifes qu'ils établiroient. Le P. Mabillon tejnarque c[ue dans S^6 JOURNAL DE hs MifTcls Gallicans les Evêqucs (ont fouvent appelles Sacerdotei. Après S. Ferrcol notre Auteur mec Lin , que la pKipart des Ecri- vains du Pays ont confondu avec S. Lin l'un des Succclîeurs de Saint Pierre dans le Siège de Rome. M. Dunod donne àLinpourSuccelTeur S. Ancide premier qui Ibuffrit le maityre dans le troifiéme lîécle , &C il le dillingue d'avec un Evêque de B^'lançon du même nom qui fut Succelleur de Cclidoine , auquel il alfure que Dieu avoir donné un crrand pouvoir fut les démons. Ce qui a donné lieu , félon lui, d'in- venter la Fable , que ce Saint Evê- que s'étoit fait potxer de Bc-fançon à Rome par le diable , pour don- ner un avis important au Pape. KL Dunod place après Antide L S. Germain , parce qu'il y a un vuide entre Antide & Maximin que les Catalogues mettent après Antide I. parce qu'il n'y a point de place pour le mettre , comme le font les Catalogues entre Dtliré & Léonce , parce qu'il fouffrit le martyre , ce qui marque qu'il a vé- cu dans le tems des perfécutions. Celidoine qui tut dcpofé dans un Concile aflemblé par S. Hilaire d'Arles , comme irrégulier pour avoir époufé une veuve , & pour avoir condamné à morJf, & qui fut enfuite rétabli par le Pape S. Léon , étoit , félon notre Auteur , Celi- doine Evêque de Bcfançon. Com- me M. Dunod cil: fur ce point de critique d'un fentiment oppofé à celui du Père Qiiefnel qui foûtient dans fa Dillertation Apologétique 5 SÇAVANS, pour S. Hilaire que S. Celidoine étoit un Evci^uede la Province de Vienne , il a cru devoir établir fon opinion fur ce point par une Dif- fcrtation particulière. En voici le précis. Les anciens Monumens de l'E- glife d: Befançon parlent de Celi- doine Evêque de cette Ville , du tems du Pape S. Léon & de S. Hi- laire d'Arles , t< l'un des Catalo- gues des Evêques de B^fançon met après Celidoine Importunus in- trus dans le Siège Epifcopal , & chaffé honteufement , ce qui ne peut convenir, félon notre Auteur, qu'à l'Evêque que S- Hilaire avoit ordonné à la place de Celidoine. Cet Evêque de Bcfançon avoit été à Rome , il étoit connu du Pape & de l'Impératrice, il rapporta de Rome plulîeurs Reliques. Ces traits conviennent à l'Evêque Celi- doine que S. Hilaire avoit dépofé. L'Auteur Anonyme de la Vie des premiers Abbez du Monaftere de S. Claude , qui fe dit contem- porain de Ouyan & qui écrivoit pareonfequent au commencement dufixiéme fiécle , dit que ce fut Celidoine "Evêque de Befançon l lequel avoit été dépofé par S. Hilai- re , & rétabli par le Pape S. Léon." Le P. Qiiefnel tâche à la vérité de prouver que l'Auteur de la Vie des premiers Abbez de S. Claude , a avancé faulfement qu'il étoit con- temporain de S. Ouyan, ou que l'on a inféré dans fon Ouvrage ce morceau fur l'affaire de S. Hilaire 6 de Celidoine. Mais notre Au- teur fe contente de répondre à ce que O C T O B que dit là- (.il (Tus le Père QCieincl , que des conjcclurcs & des raifon- nemens IlitHiles , ne dctrtiifcnt point la loi d'un Manufcrit ancien , fur un tait qui eft foûrenii d'ailleurs par d'autres titres. Ln de ces titres fur lefquels l'Auteur fait beaucoup de fond , cft une ancienne copie de la Lettre de S. Léon que le Père Sirmond avoit vue , & qui étoit adreiïee aux E vcques des Provinces Scquanoife & Viennoife. Or cette Lettre n'a pii être adrelfée aux Evê- ques de la Province Séquanoife , que parce qu'elle conccrnoit leur Métropolitain. Il eft confiant , ajoute M. Dunod, par la Lettre de S. Léon , que S. Hilairc d'Arles cntreprcnoit fur les droits des Mé- tropolitains , & par la nouvelle de l'Empereur Valcntinien, qu'il avoit dépofé des Evêques qui n'étoicnt point fournis à fa jurifdicflion , (tlios incompetemer rtmovh , ainfi il n'y a point de raifon de foûtcnir avec le P. Qiiefnel que S. Hilaire n'avoit point convoqué de Concile pour dépofer Célidoine , fî ce n'avoit point été un Evêque de la Province de Vienne. Le P. Qiiefnel n'a pu prouver , que du tenis de S. Hilai- re il y eût un Evoque de la Provin- ce de Vienne qui s'appelloit Céli- dgine, M. Dunod a conduit jufqu'au tems prefent , l'Hlftoire des Ab- bayes qu'il a inférées dans ce Vo- lume. La prennere dont il parle eft celle qu'on appelle à prefent Saint Claude. Elle a été fondée vers l'an < 30. par S. Romain. On la nom- ïjjoit d'abord Condat , parce Oilohre. I^ E . ,'7 3 y. 537 qu'elle étoit bâtie au confluent de deux petites rivières appcUées l'AJiere &: la Bienne. On l'a ap. pelle depuis S. Ouyan à caufe d'un Samt Abbé de ce nom qui au com- mencement du fixiéme fiéclc chan- gea la vie des Religieux d'créméti- que en cénobitique. On a continué de donner à l'Abbaye le nom de S. Ouyan dans les Ordonnances & dans les Adcs publics , jufqu'au dernier fiécJe ; quoiqu'on lui don- nât ailleurs celui de S. Claude, de- puis le corps de ce Saint Abbé de S. Ouyan & enfuite Archevêque de Befançon , eût été levé de terre à la fin du douzième fiécle. Ce fut fous S. Olimpe fixiéme Abbé que commença à fe former la Ville pro- che du Monaftere de Condat , la- quelle porte le nom de S. Claude. L'Abbaye accorda de grands privi- lèges aux habitans. Le premier Ab- bé Commendataire de S. Claude fut Pierre IV de la Maifon de la Beaume-Montrevel au commence- ment du fixiéme fiécle. Il a été de- puis Evcque de Genève , Archevê- que de Befançon , 5<: Cardinal. On obferve depuis un tems im- mémorial de n'admettre aucun Re- ligieux à l'Abbaye de S. Claude , qu'il n'ait fait preuve de noble iïe de huit lignées , quatre paternelles &:quatrematernelle5.Ccs Religieux ne mènent point une vie commune, cependant l'Auteur aflTure qu'ils ne fe diftinguent pas moins par leur vertu que par leur naiilance. M. le Cardinal d'Eftrées qui avoit été pourvu de cette Abbaye en i6-ja. avoit faii: en 1700. desReglemens ctx H hhh yjS JO URN AL DE qualité de Délégué par leS.Siégc.Ces 3e<;lemensavoienr été confirmés par des Lettres-Patentes enregiftrées au Parlement de Belançon. Le grand Prieur & quelques Religieux les avoient acceptés. Mais le Chapitre forma oppofition à i'Arreft d'enre- giftremcnt , & il interjetta appel comme d'abus de ces reglemens. Le motif qui détermina le Chapitre à prendre ce parti fut , fuivanr notre Auteur , la crainte que Faufterité étant plus grande à S. Claude que dans les autres Maifons nobles de la Province , les gens de qualité euffent de la répugnance à y entrer. La noblclTe de la Franche- Comté s'étant jointe au Chapitre fur i'op- pofition aux Lettres- Patentes & fur l'appel comme d'abus , l'affaire fut évoquée au Confeil du Roi^ où elle efl; demeurée indécife ; parce qu'on a demandé la lécularifation des Religieux ^l'éreftion de l'Ab- baye en Evêché , dont on pourfui- vit, dit l'Auteur , l'exécution en Cour de Rome. Les Souverains du Comté de Bourgogne ont accordé à cette Ab- baye plulieurs droits régaliens , en- tre lefquels il y en a dont elle jouit encore. Le grand Juge de S.Claude connoît des cas Royaux, comme ie remarque M. Dunod qui ajoute que M. le Comte de Clermont ôi MM. d'Eftrées fes prédcceffeurs , ont donné des Lettres de grâce &: de noblcffc. Il faut au fli faire preuve de \6 quartiers de noblefîe pour être ad- mis dans l'Abbaye de Beaume. Golut prétend qu'elle fut fon: S SÇAVANS. dée au quatrième fîécle du tems de Saint Defiré Evéque de Bcfançon-, mais comme l'Auteur de la Vie de S. Romain Fondateur du Monafte- re de Condat alTure qu'il introdui- fit le premier dans la Province Sé- quanoife la vie érémitique ou cé- nobitique , M. Dunod ne peut croire , que l'Abbaye de Beaume eût été fondée dans le quatrième fîécle. Il pcnfe que cette Abbaye aura été fondée par Saint Lauthein, parce que le Monaflere qui porte le nom de ce Saint a toujours dé- pendu de celle de Beaume. Cette dernière Abbaye fut autrefois foià- mife à celle de Clugny.Mais elle fe prétend depuis long-tems indépen- dante de l'Ordre de Clugny , lesr tentatives que les Supérieurs géné- raux de Clugny ont faites pour la viilter depuis que la Bourgogne eft fous la domination du Roi ont été inutiles. Le Prieure de Gigny où l'on ne peut être admis fans faire la preuve des i^ quartiers de noblefTe , fut fondé dans le neuvième fîécle pat S.. Bernon fils d'Audon Comte en Bourgogne. On ne reçoit que des Gentilshommes dans l'Abbaye de Lure , mais il n'eft pas neceffaire pour y être admis de faire preuve des 16 quartiers. Les Abbayes nobles de Filles & dans lefquelles on ne peut être re- çues fans faire preuve de 16^ quar- tiers de noblefle font Château- Châlon, &: Btaume-les- Dames, où l'on fait profellion de la Règle de S. Benoît ou de celle de S. Colom- ban j &^ celle de Lons-lc-Saunier ^ O C T O B Miç^cttc & Monti;2ny qui font dans l'origine des Rcligicufes Clariiles encore foàmifcs à des Supérieurs de rOrdie de S. François , quoi- qu'elles ne vivent point en com- munauté. L'Auteur entre dans le détail du tems de la Fondation de ces Abbayes , de leurs privilèges Se R E , I 75 j. ;3j> des Pvcglemcns pour cesMonal^e- ■ res , il y a eu des Lettres- Patentes pour le règlement de l'Abbaye de Montigny du premier Fe%'riet 1730. enregiftrccs au Parlement de Befançon que AL Dunod a fait in- férer toutes entières dans les preuT ves qui font à la fin du Volume. REFLEXIONS CRITIQVES SVR LES HISTOIRES DES anciens Peuples , Cbaldcens , Hébreux , Phéniciens, Egyptiens^ Grecs ^ Sic. jitfiju'au tems de Cyrus ; en trois Livres ; &cc. Par M. Eourrnom l'Sinè , Profeffew en Langue Arabe , mi Collège Royal de France , AJJocié de L'A- cadémie Royale des Infcriptions & Belles-Lettres , Interprète & Sons - Bi- bliothécaire du Roi , &c. A Paris, chez Mnfier\^ztz , Quai des Augu- ftins , à l'Olivier -, Jombert , rue S. Jacques , au coin de la rue des Ma- thurins ; BriaÇon , rue S. Jacques , à la Science ; Bullot , rue de la Par- cheminerie , à Saint Jofeph. 1735. in-^°. 1, vol. To. I. pp. 85 - l'èil lans h Préface de 5^ pp. Tom. II. pp. 503. E premier Livre de ces Refle- xions Critiques , dans lequel on tait connoître Sanchoniathon,5i où l'on donne une idée générale de fon Fragment , a taie la matière d'un premier Extraie , imprimé dans notre Journal de Sept, der- nier. Il s'agit prcfentement de ren- dre compte du fécond Livre , où i'Auteur examine en détail foutes les parricularitez hilloriqucs de ce Fragment, en prouve la vérité, s'en fert pour la reforme de la My- thologie & pour découvrir l'origi- ne hiftorique des Dieux de l'Egvp- te, de 1.1 Grèce, de laPhénicie,C7'£r. Ce Fragment hiftorique fe divife fore naturellement en trois Sec- tions. L.i première contient la Cof- mogonie ou la création du Monde racontée félon l'Hiftorien Phéni- cien,& dont l'Auteur fait appercc- voir le rapport avec la Cofmogonie de Moyfe.Dans la féconde Scdion,, où l'Hiftoire eft conduite depuis Adam ou Protogonos jufqu'à Sydyk. ou jufqu'au Déluge , on trouve , comme dans Moyfe , dix généra- tions , où paroiflcntles Inventeurs des premiers Arts. La troificmc Setftion s'étend depuis Sydyk^]v\Ç- qu'aux derniers defcendans de Kronos , dont la famille renferme , félon Sanchoniathon , prefque tous les grands Dieux. Et pour rendre fa Mythologie reformée plus com- plette , l'Auteur ajoute une qua- trième Section fur les Dieux parti- culiers de chaque Peuple ; ren- voyant à la conclufion de fon fé- cond Livre ce qui concerne T/iris ^ Chna &C Chufarthis. Section I. M. Fourmont trouve d'abord beaucoup de rcf- H h h h ij ^6o. JOURNAL D icmblance entre ces paroles du Fragment le foiiffls & l'efprh d'un air ténébreux ^ un cahos plein de con- fiifion & feins clarté , l'efprh devenu amoureux de fes principes & leur mé- lange ■■, Se celles qu'on lit dans les pfemiers verfcts de h Généfe , la Terre étoit une maffe informe , les té- nèbres étaient étendues fur la face de P abîme , l'efpnt de Dieu était porté fur les eaux. Djns la formation des Aftrcs^ Sanchoniathon fpccihe les Planètes , outre le Soleil, la Lune 8i les Etoiles -, au lieu que Moyfe obmet les Planètes. Lesw««, les nuées Se les pluyes chez l'Auteur Phénicien ont rapport avec ces palTages de la Gcnèfe Spiritus Do- mini ferebatur fuper aejuas ■■, faciès abyjft -, fton pluerat fuper terram ; Congreoentur acpt£ ; diviftt acjuas ab atjiiis , &rc. M. Fourmont joint à cela quelques obfervations tou- chant la nourriture des premiers hommes & le culte rendu par eux aux fruits , comme Sanchoniathon îe reproche ici en partant aux Egy- ptiens. Selon notre Auteur , ces paroles de Sanchoniathon du F'ent Kolpia & de fa femme Baau naiffent deux hommes , ty£on & Protogonos , ont beaucoup de conformité avec ce qui cft dit dans la Généfe , Que Dieu forma l'homme du limon de la terre , & /ju'il lui répandit fur la fa- ce un fouffle dévie. Le Vent Kolpia ( félon M. Fourmont ) n'eft autre chofe qu'un mot forgé de ces trois cxprellîons Hébraïques Kol-pi ya. , c'eft-à-dire , la voix de la bouche de Dieu , la parole de Dieu ,■ laquelle ( dit-on ) tient la place du mâle ou ES SCAVANS. du mari ; & Ba.'.u, qui efl: corrom- pu du mot Hébreu Bohou pris pour une mafTe informe , fera le limon ou la terre , qui tient ici lieu de la femelle ou de la femme. Section II. L'Auteur par- court ici en dix Chapitres autant de générations. La première eft celle èUyiyon , Se de Protogonos. Ce der- nier répond au Phénicien Bekor , qui fignifîe p>'tWf'--»f , & ne peut être c^n'Adam , le premier-né de la nature. Ayan eft le nom Phénicien à' Eve , cnWèhïtxx fihaiva. Ain-d yjyon Se Protogonos feront Adam Sc Eve. Leurs enfans , qui font la fé- conde génération Se que le Frag- ment nomme Çhenas Se Ghenea , font vifiblement ( dit on ) Cain & fa femme qui habitèrent la Phéni- cie , que notre Auteur croit la mê- me que la terre de Nad ^ donnée à. Cain pour fa demeure , par l'Ecri- vain Sacré. De cette génération na- quirent des enfans, nommés lumiè- re ^ feu Sefittmme ^ en Phénicien Or , Nour Se Lehava , à qui le froiffement des arbres fié trouves le feu dont ils enfeignercnt l'ufaee. Les Geans , qui formèrent la qua- trième génération , s'emparèrent des montagnes , chacun dans fon Pays , aufquelles ils donnèrent leur nom : & Moyfe ( dit M.Four- mont ) femble infmuer la même chofe. L'Auteur , à l'occafion de la cinquième génération dont il eft parlé dans le Fragment , s'étend' fut le prétendu Livre de HènoK, fur l'Hirtoire des Egrégores ou des Anges devenus amoureux des fcm- pies , fur kujs chefs dont il nous O C T O B apprend les noms &c nous les expli- que; indiquant les rapports qu'il imagine entre quelques - unes de ces circonftances &c le Texte du Fragment. Il y trouve même le premier Hercule couvert de peaux de bêtes Se armé de fa malTue. Il paiTe en revue les 4 généra- tions pofterieures de notre Frag- ment , la fixiéme defquclies in- vente la pêche , la chaiTe & leurs indrumcns ; la feptiéme le fer , l'himeçon , la brique , & cultive l'architedure ; la huitième conti- nue à pcrfedionner celle-ci , de même que l'agriculture , &c com- mence à établir des colonies ; la neuvième enfeigne l'art de faire des Parcs &c desVillages ; fous la dixiè- me on invente l'art de faire du Sel & la navigation , l'un & l'autre dûs principalement à Myzor Egyptien & à Syd.yks>\x le ^ufte , que notre Auteur ne héfite point à prendre pour Noé, Nous palTons , pour abréger , par deiTus tout ce que M. Fourmont dans ces cinq derniers Chapitres nous débite de fçavant & de curieux , entre autres , tou- chant le Tubalcam de la Généfe & le Chryfaor du Fragment , qu'il croit differens l'un de l'autre; fur les Titans des Orientaux & fur ceux des Grecs ; fur les courcurs(AX»Ta() dont il y a des Nations entières} fur les tailles gigantefjnes , fur les Magss &c Magiciens , Sec. Section III. Elle s'ouvre par de nouvelles obfervations au fujet de MiforScàt Sydyk., Si. par les réponfes de M. Fourmont à 4 ^tHcultez qui fe prefentent fus ce RE; 1755-. ;ac de Prolerpine,. ell le fils de ri:/if«r d'Abraham 3c d'Ifaac. Dc-là notre Auteur fe ra- bat fur l'explication de quelques autres articles où il ell qucftion de Nerée , de Pontus, de Neptune, (de Sidon , de Démarus , de Mcli- certe ou d'Kercule , d'Aths , des Hefperidcs : & il trouve tout cela dans l'Arabie , la Lybie Se h Phé- nicie. îl eft perfuadé que l'Hercule Oriental eft Efcol ^ un des Alliés d'Abraham , ëc qui le fuivit dans fon expédition contre Amraphcl 6c les autres Rois alliés de celui-ci. Nous ne difons rien ici des dix derniers Chapitres de cette Section, qui roulent fur divers points moins fuivis & moins coniiderables du Fragment. Section IV. L'Auteur y trai- te des Dieux particuliers de chaque Peuple -, ôi commence par des re- flexions fur l'Idolâtrie Se fur ùs caufes en général. Il en ailîgnc 5 principales , que l'homme porte dans fon propre fonds , & qui ont régné avant le Déluge , comme après. Ce font Vadmiraiion , la ten- drejfe ^ la crainte^ VefperavKe^ la fiate- rie; & l'Auteur tait voir en détail quelle eft la merveilleufe fécondité de chacune de ces caufes. II. donne enfuite une divifion ES SÇA VANS, des diffcrcnrcs Divinictz du Paga- nifme , & il palIc en rcvûë 1°. les grands Dieux ( Dit majores) ; z"- les Dieux inférieurs ( Dit vdnores ou Indigetes ) -, 5°. les Dieux Terre- ftres ; 4°. les Dieux Infernaux ; 5^. les Dieux de la mer , les Néréides, les Naïades ou Nymphes; 6'. les Dieux Maîtres & les Dieux Dome- ftiques ; 7"-'. les Dieux prépofes aux difterens Etats , aux diverfes profelllons de la vie humaine , à chaque adion , à chaque vertu , à chaque membre du corps. Viennent après cela les Dieux adoiés par chaque Nation Latine ou Gréque en particulier 5 &: les Dieux affedés à certaines Villes chez les Romains & dans la Grèce, à quoi fuccedentde courtes remar- ques fur la Théogonie d'Héfiodc , où l'Auteur obfcrve que les opi- nions des Grecs lur leurs Divinitez avoient dès lors près de mille ans. Enfuite il nous parle des Prêtres dont les Poètes ont fait mention 5 des Fctcs établies pour chaque Dieu en particulier, des différen- tes fortes de Sacrifices aux Dieux Céléftes , Tcvreftres & Infernaux j, & de leurs Temples 5 des Etres confacrcs à diffcrens Dieux. Il exa- mine le progrès de l'Idolâtrie , & le fait en rétrogradant d'abord des Romains aux Grecs ( ces deux Na- tions ayant eu prefque les mêmes Divinitez , la même tornied'Apo- théofe , les mêmes Fables & les, mêmes Hiftoircs; ) puis en remon- tant des Grecs aux Orientaux, après avoir légèrement parcouru les Dieux des Gaules ,_ de l'Angleter- O C T O Te , cîe l'Allemagne Se de l'ETpa- gne. Il fe renferme donc dans le dé- nombrement & l'examen des Dieux purement Orientaux , c'cft- à-dire, Perfans , Arabes , Chal- déens , Phéniciens , Egyptiens ; nous étalant fur tous ces articles une érudition Orientale des plus varices , à laquelle nous fommes contraints de renvoyer pour ne point trop nous étendre -, ik. il ter- mine cette longue énumération par des remarques curieufes lur les noms , la nature , les qualitez , l'i- dentité ou la différence de toutes CCS DivHiitcz Orientales. Il nous expofe les fentimens des Arabes &: des Hébreux fur les com- rK'nctmens de l'Idolâtrie 572 JOURNAL DE font aii{ri des plus belles par rap- port foit à leur matière, foit à leur conftrudion ; quoique d'autres Chtrniiles s'en fàbnquent,à la véri- té de moins utiles ^ mais de plus remarquables Se par la torme Se par l'inrelligcnce qui fcmble y régner ,' comme on le verra dans ce Mémoi- re &c dans k fuivanr. C'eft domma- ge ( dit notre Auteur ) que tant de Chenilles fi communes Si d'une fi prodigieufe fécondité filent inuti- lement pour nous , & fans que nous fçachions encore mettre leurs coques à profit. Il cil: vrai que la foye des unes eft trop fine & trop foible , & celle de pluficurs autres, trop forte &c trop grolîiere , une feule coque de ces dernières pefant plus que trois de celles des Vcrs-à- ibye. Mais ne pourroit-on pas les mettre les uns &c les autres à quel- que ufage. On obferve une grande variété dans la conftrudion de ces coques. Les unes ne font formées que d'un petit nombre de fils qui fe croifent en divers fens , laiflant entre eux beaucoup de vuides ^ & ne faifant que foiitenir la Chenille ou la Chryfalidc fans la cacher. Les au- tres compofées de fils plus nom- breux couvrent l'Infede fans empê- cher pourtant qu'on ne l'appct- coive. Les Chenilles renfermées fous ces coques tifiuës à claire- voye , femblcnt cependant n'aimer pas à être vues , puifqu'elles fe ca- chent le plus fou vent entre plu- fieurs feuilles repliées les unes fur les autres. Il y a même de ces co- ques aiïez foiidement travaillées 5 SÇAVANS, qui fe trouvent fous de pareilles enveloppes. Mais en général , les Chenilles qui fe filent des coques plus fortes & plus ferrées ne cher- chent pas à les couvrir , ou du moins à les couvrir de tous cotez, par des corps étrangers. Il y en a desefpeces qui font entrer dans la. fabrique de leurs coques de ces corps étrangers , ou qui ne les compofent pas de pure foye. La fi- gure la plus ordinaire de ces coques eii \' e II ip foi de on l'ovale, quoiqu'il y en ait auffi de figure prefque cy^ lindrique. Entre les coques de figu- re arrondie , les unes ne paroiiTent formées que d'une toile fine , min- ce & très - ferrée. D'autres plus épailTes & plus foyeufes refrcm- blent à de bonnes étoffes de foye.' Certaines , quoiqu'affcz fermes &: épaifies , ont l'apparence de ré-' zeaux. Les tiiïus de ces coques ne peu-' vent recevoir cette dénomination qu'abufivement , étant très diffe- rens des nôtres ; c'eft-à-dire qu'ils ne rélultent nullement de pluheurs fils entrelacés , mais qu'ils ne font que les tours & les retours d'un fciil fil replié & appliqué diverfe-: ment fur lui-même. Cette fabri- que , comme l'on voit , relfemble peu à celle de nos étoffes de foye i qui pourtant nous en offrent un exemple dans celle de ces petits rubans étroits appelles nompareilles 6 formés de plufieurs fils de foye ferrés S<. collés les uns auprès des autres par le moyen d'une gomme. Dans chaque coque de Chenille ij y a deux ariangemens du fil fenfi-j jilemenç O C T O B blcment difFerens. Les tours & les retours rie celui qui garnit l'exté- rieur de la coque a plus l'air d'une matière cotonneufe , d'une bourre, d'une efpcce de charpie , que celui d'un riiru -, 6c n'cft que comme l'échafaudage de la vraye coque. CelJe-ci, quoique formée d'unleul fil , ne doit point être regardée comme un peloton creux par la fa- cilité avec laquelle ce fil unique peut fe dévider juiqu'au bout. Cet- te roque eftcompoice de plufieurs couches de ce fil plié &c replié en zig-zag j pofées les unes fous les autres fans ordre en divers endroits de la furface concave ; & félon Malfighi , on diftingue fix couches différentes à la coque du ver à foye. Il a eu la curiohté de mefurcr la longueur du fil qui peut fe dévider de delTus une de ces coques •■, &c il l'a trouvée de 930 pieds de Boulo- gne. Les deux refervoirs de la matière fbyeufe dont elt pourvue chaque Chenille, concourent également à il produâion de ce fil , qui étant examiné au Microlcope paroît for- mé de deux cylindres plus ou moins applatis , qui lui donnent plus de largeur que d'épaifieur, & en font voir le milieu comme creu- fé en goutiere ; d'où il cfl: naturel de conclure que ce fil eft: compofé de deux brins : & il y a de ces fils où l'on appcrçoit diftindlcment la feparation des deux brins. Il arrive fouvent que le fil d'une même co- que eft de différentes couleurs ; ce qui provient de ce que la matière foycufe qui remplit chaque refer- Otlohe. i^ E ." i7?r. SI) voir eft pour l'ordinaire divtrie- ment colorée. Les couleurs oblér- vées le plus fréquemment fur les coques des différentes Chenilles font le blanc , le jaune , le brun ou le roux différemment nuancés : ra- rement le bleu celcfte & le vcrdà- tre. Le ver à foye paffe quelquefois deux jours & quclciuefoi:, trois à finir fa coque : mais il y a des Che- nilles qui achèvent les leurs en un feul jour i & d'autres les travaillent parfaitement en quelques heures. Plufieurs efpeces de Chenilles ; fans recouvrir leurs coques d'une forte de bourre ou de coton de foye , les font d'un tiffu fi ferré , qu'il paroît plutôt une membrane continue , ou une efpcce de cuir. L'Auteur foupçonne qu'il y a des Chenilles, qui pour rendre leurs coques plus fermes, les mouillent d'une liqueur gommeufe différen- te de celle de la foye , & qu'elles jettent par l'anus. Il croît même avoir découvert dans l'intérieur de quelques-unes les refervoirs de cet- te efpece de colle , qui donne à leurs coques une fermeté pareille à celle d'un bougran. Il fait ici une obfcrvation curicu- fe fur la Chenille que les Jardi- niers furnomment la Livrée à caufe de l'agréable variété de fes cou- leurs , qui fcmblent imiter ces touffes de rubans qu'on porte aux Villages pour livrées de noces. Il obferve donc que les coques de cette efpcce de Chenille font du nombre de celles qu'on a tort de négliger j qu'on en pourroit faire K k kk 574 JOURNAL DE d'abondantes récoltes à peu de frais dans certaines années & les carder pour les employer utilement à des tiirus. Mais ce qu'elles ont de fin- gulier, c'eft que lorfqu'on les dé- chire ,on voit s'en élever un nuage de pouflierc : £c l'on découvre en y regardant de plus près , que leur love ptefquc blanche par elle-mê- Tne efl: poudrée prcfque par-tout d'une poudre d'un jaune citron , comme les perruques le font d'une poudre blanche. Cette poudre jau- ne répandue dans tout le tilTu de la coque , la rend opaque , & em- pêche que la Chenille ou la Chry- falide ne foie vifible. Celle-ci ne l'y répand que lorfqu'il ne lui reftc aucun fil à y ajouter. Elle jette par l'anus & à diverfes reprifes cette matière jaune , molle & liquide même comme une bouillie épaide, & avec fa tête elle en enduit fuccef- fivement tout l'mterieur de la co- que , la faifant pénétrer dans Us ■vuides des cfpeces de mailles for- mées par les fils , 6i dans lefquel- les féchant fort vîte elle prend la forme d'une poudre légère. Elle a pourrefcrvoirs , du moins dans la Chenille Livrée , & dans celle du peuplier blanc , les vaiffeaux vari- queux qui forment une efpece de lacis autour des intcftins , près de l'anus , & qui ont été décrits dans le troiliéme Mémoire. Il y a des efpeces de Chenilles velues, qui peu tournies de matière foycufe 6c dénuées de cette poudre jaune , ont recours à un autre moyen pour ôter la tranfparence à leurs coques £c pour les rendre 5 SÇAVANS, plus folides. C'eft de faire entrer dans cette conftrucftion leii-rs pro- pres poils , qu'elles s'arrachent ou qu'elles fe coupent avec leurs dents , & qu'elles diftnbucni çà & là fur les parois intérieurs de leurs coques , où elles les arrêtent en fi- lant par dedus. Celles , qui lans Ce dépiler totalement fe contentent de fe couper les poils, fêles lailTcnc fî courts, qu'il femble { dit l'Au- teur ) qu'on leur ait fait le crin ^ & elles fe le font fait elles-mêmes, li nous décrit encore le procédé fin- gulier d'une efpece de Chenille ^ qui fe met fort à l'étroit dans faco- quc , y prenant tantôt la figure d'u- ne S , tantôt celle d'un anneau ap- plati , & paffant inlenfiblcment d'une attitude à une autre. Qiiand le titfu de fa coque eO: devenu une efpece de réfcau alfez ferré & afTez ferme , cette coque paroît tout à coup hérifTée de poils ; & ce fone ceux du dos de la Chenille , qu'elle a fait palTer au travers des mailles de cette coque , afin qu'y étant fortement arrêtés comme dans un étau , elle puilTe fe les arracher par les fréquentes vibrations de fon corps j après quoi les couchant fans peine fur la furface intérieure de fa coque & les y affcrmilfant par plufieurs fils de fa foye , elle fait difparoîrre toutes les pointes qui hérilfoient l'extérieur de la co- que , fur laquelle ces bouts de poils doivent ncccll.iiremcnt fe coucher 6 s'appliquer exactement. M. de Rcaumur termine for» Mémoire par la dcfcriprion d'une Chenille que lui a fait obfcrver M. O C T O D de A mais qui eft tout à la fois fatyriquc & moral. Comme Roman d'Amours , quoiqu'il y ait de tems en tems des maximes afiez fages femées dans ce Poëme , on avoiie cependant qu'on s'y rabat fouvent fur cet aînour de fenfibiliré ou la nature ne forte cjue trop ordinairement , c^ (jh''iI n'y eji point ^ueftion de cet amour de délica- teffs qui fait V accord des efprits & l'union des cœurs , & qui rendrait fenfiblc le plus refervê. On va même jufqu'à dire que la' Satyre y eft traitée plus fagcmenc que l'amour. Mais s'il eft aifé de faire voir que ce Roman eft fatyri-: que , nous avoiions qu'on eft obli- gé d'employer beaucoup d'efprit pour en faire un Roman moral. On' veut que le but de cet Ouvrage foie de montrer que l'Amant , après avoif O C T O B avoir efTuyé une infinité de chi- grins Se d'inquiétudes pour arriver à fon but , y eft à peine parvenu que le charme fcdillipe , îk. que le repentir fuccede au plaifir. » Tous ces embarras , toutes ces » peines , tant d'avis demandés, de M confeils écoutés , de chagrins rc<- 3> eus , de douleurs fupportécs , " tout aboutit à un inftantde plai- » fir. On s'éveille tout à coup de «cette létargie. A peine pcnfe-t on «qu'on ait eu quelques momens de » joye , on ne fe fouvient que des » peines qui ont été longues Se fati- =»guantes. C'elUe tond des mœurs * contenu dans ce Roman , & qui «n'eft développé par ces deux der- ï> niers vers que pour ceux qui fça- » vent y réfléchir. ^injîeuz. la Rofe vermeille , A tant fut jour ^ & je m'éveille. Mais ne falloir - il pas bien que l'Auteur s'éveillât enfin , puifque dèsles premiers vers de rOuvrage,il ne nous donne ce qu'il nous racon- te que comme un foiige ? D'ailleurs les traits de morale qui y font ré- pandus de l'aveu même de l'Edi- teur ne font point corps avec le plan du Poëme ; ils n'y font jetiés comme il s'exprime lui même que parce que nos pères voulaient ajfnfon- îier leurs Ouvrages les plus licentieux d'un ragoût de morale. A l'égard des principes de Chi- mie que quelques-uns orrt cru trouver dans ce Roman , on dit 4ju'il n'eft pas bien décidé fî l'en» RE. 17? 5". rSt droit dans lequel on les prétend renfermés , n'cft pas plutôt une Sa- tyre contre les Alchimiftes qu'une inllrudion en hvcur de ceux qui voudroient cultiver leur art. En général on foûtient qu'il ne faut examiner cet Ouvrage à la ri- gueur nicomme Roman, ni comme Poëme , quoiqu'il participe à l'un & à l'autre de ces deux genres. Ce qu'il y a de meilleur , c'eft le ftile i & l'on peut alTurer que de tous les Livres de ce tcms - là il n'y en a point où l'on trouve tant de clarté de noblelTe & de pureté. On avertit cependant que pour le fondsduftile, ilfe trouve quel- que différence entre les premiers Manufcrits & ceux des derniers tems. La raifon en cfl bien naturel- le , c'cft qu'à mefurc qu'on faifoit copier ce Roman on eliayoit de le rendre conforme au langage ordi- naire de la Cour , &: quelquefois même au ftile des Provinces où oti le tranfcrivoit. L'Editeur entre là- deiïus dans un détail où il ne nous eft pas poffible de le fuivre. Nous en difons autant de ce qu'il dit de la verfihcation de ce Roman , & par occafion du tems où nos pre- miers Poètes ont commencé à ri- mer. La fincerité l'oblige de convenir que ce Roman a eud'illuftres ad- verfaires , & c'cft pour lui une rai- fon de l'eftimer davantage. » Ger- » fon Chancelier de l'Eglife de Pa- 5» ris, & la plus grande lumière de » cette Univerfité écrivit contre » ce Poëme. Je n'ambitionnerois , xajoHietilj la gloire de l'Auteut Llli 5-82 JOURNAL D »que pour avoir tl'auffi célèbres » Ant.i^onirtes. 11 l'attaque du côté î> des mœurs ; peut être n'en avoit- » il pas pénétré le iyftéme & l'éco- " nomie ? C'eftau Leifleur à trou- ver le moyen de concilier cette ré- ponfe avec ce que l'Editeur avoit dit quelques pages auparavant , tjue ce Roman eft cjuclcjnefois égayé far des libertés, <]ui n'étoiem pas ^.'te- rne vermifes dans fin tems où notre Langue moins dhijîe cjuelle ti'efl ju- jpurd'hid , accordait beaucoup pltts à- l'imagination (qu'elle ne fiiit à prefent. 11 s'eft cependant trouvé un Au- teur qfti,par le moyen de l'aUégorie en a fait un Ouvrage moral & mê- me Chrétien , on lira volontiers dans cette Préface un trait de li pieufe extravagance de ce faux My- îVique. L'Editeur rend compte enfuitc du pian qu'il s'eft fait pour donner à cette Edition un degré de perfec- tion que ce Roman n'avoit pas en- core eu jufqu'iri , & il nous a paru que le fuccés avoit partaitement ré- pondu aux fages mefures qu'il a iuivies ; pour y réullir il a pris fut ES SÇAVANS, lui tout le travail te n'a point acca- blé fon Texte de variantes ptcfque toujours auiïl inutiles au Lcdicur qu'elles lui paroiilent ennuyeufcs. Enfin il a ajouré au Roman delà Rofe un troifiéme Volume qui contient outre quelques autres Ou- vrages de Jean de Méun pluficurs morceaux de Pocfie qui regardent le grand Oeuvre des Philofophes. Ces Ouvrages ayant été unis avec les Traitez de Jean de Méun dans un même Volume extrêmement rare , on a cru que les curieux les révércient ici avec d'autant plus de plaifir qu'on les leur prefentCj revus & corrigés avec foin. L'Editeur y a joint aulîî quel- ques Notes peu étendues à la véri- té , mais fuffifantes , félon lui ^ pour faciliter rintelligence de fon Auteur. Ceft aulfi par cette raifon qu'il n'a pas fort grolîî le GlofTaire des mots anciens qui fe trouvent dans le Roman de la Rofe , Si qu'il a paire allez légèrement fur pluficurs exprefljons qui auroienC peut-être demandé plus de recher^ ches & d'explications. BICTIONNAIRE ITALIEN , LATIN ET FR ANCHOIS ; contenant non feulement l'n abrégé du Ditîionnaire de la Criifca , mais «•»- core tout ce cju'il y a de plus remarquable dans les meilleurs Lexicographes ^ Etymoloaifles , & Glojfaires , ^ui ont paru en différentes Langues. Par M'. l'Abbé Antonini, 1735. A Paris , chez Jacques A'/'«cf«/ , rue Sc vis-à- vis l'Eglife S. Severin , à l'Ange. i« 4°. A réputation que" M. l'Abbé Antonnii s'eft déjà acqujfe par les fcavansOuvragcs qu'il a publiés, a fait fouhaiter qu'il donnât un nouveau Didionnaiie Italien, c'sft ce qu'il vient d'eMccuter hcureufe- ment , malgré les difficultez qu'on trouve neceflairement dans la com- pofition d'un pareil Ouvrage , Se l'impcffibilité qu'il y a de le porter O C T O B R E , I7Î r. ygj à toute ia perfeftion dont il efl: dans lequel on a compofé plu fieurs fui'ceptibJe ; mais s'il eft trop Ouvrages Burlcfqiies , qui ont eu judicieux pour fe flatter d'y être ar- de la réputation, rivé , il montre du moins très- Comme les accens &: la pronon-i clairement que fon Didionnaire ciation differentesde certaines let- ed fort fuperieur à celui qui porte très changent fouvcnt la fi^nifica- le nom de Vcnéroni , foit parce tion des mots , on les a marqués qu'on y trouve un bien plus grand ici avec beaucoup d'exaditude. nombre de mots, que l'orthogra- L'nfage étant l'arbitre Souve- pheen ell: beaucoup plus régulière rain des Langues vivantes , c'eft & qu'il n'en employé aucun qui ne aulîi fur l'ufage que notre Auteuc foit autorifé par les bons Auteurs ^ s'eft réglé , lorlqu'il a été queftion au lieu que les trois quarts des d'admettre ou de rejctter certaines mots qui fe trouvent dans Vénéro- cxprellîons fur lefquelles il pou - ni ne font ni appuyés par l'ufage , voit y avoir quelque diiSculté ; il ni par aucune autorité. efl: vrai cependant , dit-il , que Il convient que le fond de fon comme tout le monde n'efl: pas Dictionnaire eft tiré de celui de la d'accord fur les mots qui font ou Crufca , réimprimé en 1^91. en } Volumes in -folio , & il a voile hautement qu'il doit à ceux qui l'ont compile , les définitions des ne font pas du bel ufage , il ne pré- tend pas non plus être Ih - dellus d'accord avec tout le monde. On verra du moins pac la Table mots j leur explication Latine ou des Auteurs qu'il a confultés , oti Gréque, & les exemples qu'il a dont il a tiré les mots qu'il em rapportes , mais il affure en même tems qu'il a augmente le fien de plus de 2000 mots qu'il a eu foin de diftinguer par un ciraâcre par- ticulier. Il s'eft borné aux termes ufîtés dans le Romain , le Florentin & le Siennois , parce que des differcn- fies dialeftes qui onrcours en Ita- lie, ces trois feules font employées en Italie par les honnêtes gens dans les occafions férieufes. Il n'a pas cru devoir rcjetter de fon Didionnaire les mots ufités dans le Jargon que les Italiens ap- pellent Lingiia faba \ c'cft unecfpe- ce d'Argot qui a été tort à la mode en Italie dans le feiziéme fiéck , & ployé dans fon Didionnaire , qu'il n'a rien épagné pour n'y en mettre que de bon alloi. Il a renfermé l'explication Lati- ne qu'il donne de chaque mot Ita- lien entre deux crochets pour ne point arrêter les Dames &: les au- tres perfonnes ^ qui fins entendre le Latin , auront occaiion de fe fer- vir de fon Didionnaire. Il faut lire dans Tingénieufe Préface qu'il a mife à la tête de l'Ouvrage ce qu'il dit en faveur de la Langue Italienne , dont il a cru devoir prendre la défcnfe contre quelques François qui l'ont atta- quée. La réputation que les Italiens ont toujours eue dans les Sciences^ L 1 i 1 ij y84; . JOURNAL DE les a rendus , félon lui , de tous tems l'objet de la jaloufie des au- tres Nations ; il prouve par des faits inconteftables que c'cfl contre toute vérité , que M. Huct a avan- cé que l'Italie étoit encore couverte des ténèbres d'une épailTe ignoran- ce du tems que les Papes tenoient If ur Siège à Avignon -, & dcfccn- dant enfuite au ficelé de François I. il montre que ce Prince ne tut le jreftaurateur des Lettres & des Arts en France que par le fecours des Grands Hommes qu'il tira d'Italie, Se qu'il appclla à fa Cour. Les Sça- vans de ce Pays que les deux Rei- nes Italiennes Catherine & Marie de Médicis v attirèrent, & les fa- veurs dont elles les comblèrent, ne fervirent pis peu à ranimer entre les Ltaliens & les François cette ja- loufie Litteraiie qui de tous tems les avoit divifés. L'Auteur en ap" pelle fur ce point au Livre de Hen- ri Etienne intitulé , du Langagç François-Italien. M. l'Abbé Antonini ajoute qu'en continuant l'Hiftoire Littéraire de ces tems - là jufqu'à nos jours il pourroic faire voir que le même efprit a pu diéier à Boikau,. èc à quelques-uns de nos Ecrivains une partie des traits piquans qui fe trouvent dans leurs Ecrits contre le génie iSc le goijt des Italiens en matière de bel efprit. Mais fans trop approfondir les motifs qui les ont animés dans ces occafions , il examine ce qu'ils ont dit contre le génie de la Langue & de la Pocfie Italienne en général. Et comme ceux qui fe font S S ÇA VANS, le plus diftingués dans cette que- relle , ont adopté le fentiment du Père Bouhours qui prétend que le caraâiere de la Langue S< de la Poëfie Italienne eil d'abonder ea pointes 6c en cowcf;//, c'eft-à-dirc, en jeux de mors, en penfées bril- lantes, mais faufles, dont l'éclat trompeur n'cft capable que d'é- blouir & d'égarer , les réponfcs qu'il fait aux accufations de cet Ecrivain poli fervirontà réfuter en général tous ceux qui ont foufcriî au même jugement. Il prétend donc que le Père Bou- homs n'apporte pour preuve de ce qu'il avance que quelques palfagcs tirés des Auteurs Italiens les plus décrier, ou quelques fautes échap- pées aux Ecrivains les plus célèbres; mais y auroit-il de l'cquitc à dire par récrimination que les François n'aiinent que les CoUbcts ^ les jeti.v de mots , &:c. parce qu'on en trou- ve un Livre entier compofé par la Sieur des Accords fous le titre de Bigarrures , poun oit-on avec quel- que apparence de raifon accufer Corneille ou Racine de donner ea général dans le Phcebus , ou dans une enflure vitieufe , parce que le premier a dit : Pleurez, pleurez mes yeux & fondez- vous en eau , La moitié de ma vie a mis l'autre au. tombeau ^ S<.c. Et que Racine s'exprime ainfi : Brille de plus de feux cjue je n'en allumai. O C T O B En fuivantune méthode fiinju- fteilyauroitj dit l'Auteur ^ dans le fciil Pocme de la Madeleine de quoi fc venger a\xc avantage de tout ce qu'on a avancé contre nous er: France. Nous rayons , continue- t:] , de la Lifte des bons Auteurs la plupart de ceux qui ont paru d^ns le cours du dix-fepticmc iié- clc , 6c c'cft cependant dans ce ficcle que le Père Bouhours a prefque puifc tous fes exemples. Si l'on connoifToit bien le vrai génie de notre Langue & de notre Pocfie, on ne liroit que nos Ecrivains du quatorzième (lécle & ceux du fei- ziérhe , je défie qu'on y trouve des pointes Si des Concetti. De-là l'Auteur palTe aux avanta- ges qu'il prétend que la Langue Italienne a fur la Françoife tant par rapport à l'abondance de fes mots, qu'à la variété des tours & des tranfpofitions qu'elle admet à l'e- xemple de la Langue Gréque & de la Langue Latine. Ge que dit M. l'Abbé Antonini fur la pliàpart des autres reproches qu'on fait à la Langue Italienne mérite d'être lu avec beaucoup d'attention , & peut-être que tour bien pefé dans une )ufte balance, & tout intérêt de Nation mis à paît , on trouvera que l'Apologie qu'il en fait eft auflî modérée que judi- deufe. Il rend même à notre Lan- gue la juftice qu'elle mérite , &c déclare qu'en faifant l'éloge de la fienne il ne prétend aucunement diminuer le prix de la Langue Fran, tion continuelle de {' Ether ç^m les follicite d'agir, elles font obligées de rcfter dans un état fixcj;, iufqu'à ce que la chaux étant dilToute par quelque liquide , elles fortent avec violence de leurs prifons , & par leur adion & rcad:ion, caufentunc ébullifion qui ne ct(^e pas que les unes de ces particules élaftiques ne foicnt fixées par la forte atrradion du fouphrc , Se les autres chaffées hors de la fphére d'artradtion des premières & transformées en ait élaftiquc permanent. 11 paroît évident à M. Haies que les particules aériennes Se fulphu-: reules du feu pénétrent dans plu- fieurs corps Se s'y logent , par l'e- xemple du minium ou plomb rouge qui augmente en pefanteur d'envi- ron ^ partie par l'adion du feu. La rougeur qu'il acquiert indique l'addition d'une grande quantité de foutre; car le foufre agiiïane très-vigourcufcment fur la lumiè- re , eft par conféquent très-propre .\ en réfléchir les rayons les plus forts j qui font les rayons rouges. Mais outre ce foufre , le Minium s'approprie encore une bonne quantité d'air, quis'incorpore avec lui , Se contribue à l'augmentation de fon poids. Car l'Auteur a trouvé qu'en diftillant 19 zz grains de plomb , il n'en fortoit que 7 pou- ces cubiques d'air; au lieu que de i<)ii grains de Minium il en for-! toit dans le même efpace de tems 3 4 pouces cubiques d'air. Au fujet de h fermentation J l'Auteur eft perfuadé , que fi oa en reftiaint la notion ( comme on N n nn ;p8 JOURNAL DE le tait oiciinaiicnicnc ) aux plus orands degrez de cctrc fermenta- tion , il fera vrai de dire , que les fluides des animaux &: des végé- taux ne fermentent point dans l'é- tat de fanté -, mais qu'en la prenant ( comme on ie doit ) dans un fens moins étroit , c'eftà-dire en appellant fermentation tous les de- oxtï du mouvement inteftin des fluides , on fera forcé de l'admet- tre dans rérat même de la plus parfaite fanté des végétaux & des animaux -, puifque leurs fluides contiennent en abondance des par- ticules fulphurcufes 6c des particu- les élairiqucs. Il croit , en un mot, qu'on pourroic avec autant de rai- fon conclure qu'il n'y a point de chaleur dans les animaux , parce qu'une grande chaleur les détruira en féparant leurs parties , qued'af- furer qu'il n'y a point d'autre fer- mentation que celle qui peut auflî les détruire & les diiloudrc. Après diverfes obfcrvations au fujet de l'adion des m.arieres ful- phurcufes fur l'air dont elles détrui- lent l'élalficité , non feulement lorfqu'elles brûlent en fubflance , mais aullî lorfqu'elles ne tont que fermenter , & fur pluheurs autres faits inipottans &i relatifs à la mê- me matière ; l'Auteur y joint cette reflexion. " Puifque l'air ( ditil ) »fe trouve en fi grande abondance » dans prefque tous les corps ; s> puifque c'eit un principe fi aâif^ a> puifque les parties conftituantes » font d'une nature fi durable , 3> que l'adion la plus violente du M feu ou de k fermentation n'eft S SÇAVANS. » pas capable de les altérer jufqu'à. » leur ôrcr la faculté de reprendre 3> par le feu ou la fermentation » leur élafticité ( à moins que ce u ne foit dais le cas de la vitrifica- » tion J ne pouvons-nous pas adop- n ter ce Protêt , tantôt flxe , tantôt » volatil , & le compter parmi les » principes chimiques- , en lui don- » nant le rang que les Chimiftcs » lui ont rtfufé )ufqu'à prefenc » d'un principe rrès-adif , aufli- » bien que le ioufre acide ? La végétation des plantes fait l'objet du feptiéme Chapitre de ce Volume. On v prouve par diverfes expériences que les plantes attirent l'air j on y fait voir la manière dont croilfenr les branches des ar- bres 8c leurs feuilles , avec les ju- ftes proportions de leur accroilfe- ment : le tout fondé fur les expé- riences précédentes & fur celles, qui fuivent. Notre Auteur recon- noîrdans les végétaux cinq princi- pes , le foutre , les fels volatils ^ l'eau , la terre & l'air. » Ce font » (dit-il) les particules adives de » ce dernier qui fervent à condui- » re à fa perfedion l'ouvrage mer- «veillcux de la végétation 5 elles n fournillent par leur élalliciré l'ag- » grandilTement des parties dudi- »xles; elles aident à leur extenlion 5 ■D elles donnent de la vigueur à la » fève ; elles la vivifient -, & en fe » mêlant avec les autres principes «qui attirent & réagiflent , elles M font naître une chaleur douce & 5> un mouvement favorable, qui M façonne peu à peu les particules » de la fève , & qui les change en- N O V E M »i fin en particules telles qu'il les 3» taur pour la nutrition. Ces principes fe trouvent diffé- remment combinés & propoition- nés à la nature Se aux divers befoins des végétaux & de leurs différentes parties : par exemple, l'huile étant un excellent préfervatif contre le froid , les arbres Septentrionaux en contiennent beaucoup , de mê- me que les plantes dont les feuilles font toujours vertes. L'agréable odeur des fleurs Se le goût relevé des fruits nous apprennent qu'ils renferment beaucoup d'air joints à ijne huile trcs-fubtilc &:très-éxal- tce. Les femences doivent contenir aullî beaucoup de foutre Si d'air pour redller à la pourriture & pour aider à la germination. Il fuit des expériences & des obfervations précédentes que les feuilles aident infiniment à la végétation, qu'elles fervent comme de pompes pour -élever les parriculcs nutritives Sc les conduire jufqu'à la fphére d'at- tradiion du fruit ; qu'elles contien- nent les vaifTeaux excrétoires des végétaux, au moyen defquels elles réparent & chalTent le fluide a- queux fuperflu ; qu'elles tirent de la pluye & de la rofée une partie de la matière nutritive des plantes ■chargée d'air , de foufrc Se d'efprit acide, principes d'une il grande uti- lité à la végétation ; en un mot , qu'elles fervent aux végétaux com- me les poumons aux animaux, avec cette différence , que leurs infp'tra^ tions Se leurs expirations ne font pas fi fréquentes , & dépendent cntieienienc des alternatives du B R E , 1775-. 5-5;^ froid & du chaud , c'efl à dire, du chaud au froid pour l'infpiration , 6c du froid au chaud pour l'expira- tion. Comme le goût exquis des fruits Se l'odeur agréable des fleurs font dûs aux principes aériens fub- tilifés , il paroît alFcz naturel de penlcr ( dit l'Auteur ) que les bel- les couleurs de ces mêmes fleurs doivent aulli être attribuées à U même caufe. L'Auteur nous rend compte ici d'une expérience qui porte à croire que les tiges Se les feuilles des plan- tes tirent des particules élaftiques de l'air; Se dans les deux expérien- ces fuivantes , il nous communique les moyens ingénieux dont il s'eft fervi pour connoîcre au jufte en quelle proportion les différentes parties des tiges Se des feuilles des plantes prennent leur accroifTe- ment -, ce qui lui a fait découvrit beaucoup d'inégalité entre l'ac- croilfeinent des parties inférieures des tiges Si celui de leurs parties fupcrieures , qui croifTent de plus en plus à mefiirc qu'elles s'éloi- gnent de la racine. 11 faut lire tout ce détail dans le Livre-même , où les figures mettent diftincflemctit fous les yeux toutes ces particula- ritcz, qui ne peuvent s'expliquer en peu de mots fans un pareil fe- cours. L'Auteur compare l'accroif- fement des diverfes parties des ani- maux avec celui des végétaux , Sc il trouve que dans l'un Se dans l'autre la nature met en œuvre la même méchanique. Il fuit , après cela , guidé par les lumières que lui ont fournies N n ti n ij 600 JOURNAL D toutes fes expériences , la végéta- tion des plantes depuis l'Embryon jufqu'à l'état de parfaite maturité ; ians pourtant vouloir s'engager dans une defcription exacte de leurs parties Si de leur ftrudure •■, foin ( dit-il) que lui ont épargné Çreiv & Aîdpighi , aufquels il renvoyé , conmie nous renvoyons ici fur toute cette méchanique de végétation à l'Auteur même, qui {pag. 301. & 302. ) propofe des conjedures ingénieufes fur l'ufage auqu<;l cft deftinée cette pouffiere qui couvre les étamines des fleurs. 11 termine cette féconde partie «ie fon Ouvrage par une récapitula- tion des prmcipaux faits dont fes expériences l'ont pleinement in- ftruit fur l'article des végétaux ; ce qu'il accompagne de plufieursob- feivations très - importantes pour perfedionner l'agriculture , & qu'il faut voir chez lui. On trouve à la fin de ce Volu- me une appendice , qui contient treize Obfervations & fept Expé- riences relatives aux précédentes , & dont nous nous contenterons d'indiquer fommairement les dif- férentes matières , pour ne point tomber dans une exceflive lon- gueur. On examine , dans la première Obfervation , s'il eft plus mal fain d'habiter le côté méridional d'une rivière que d'en habiter le côté Septentrional ; & l'on décide qu'à tout prendre la différence paroît fi légère , qu'à peine mérite t-elle quelque arrention. On établit(dans ù féconde ) que dédudion faite de ES SÇAVANS. la quantité de roiée & de pluve qui fe confomme par la végétation & i'évaporation , il en entre aflez dans la tene pour fournir aux fon- taines &C aux rivières -, & que pat conféquent, il n'eft pas necelTaire de recourir à la mer pour en tirer leur origine. Dans la troifiéme ob- fervation il s'agit de la rarétadlion de l'eau : dans la quatrième , de l'adfion du Soleil au-dedans de la terre , & fur les végétaux & les animaux : la cinquiéme,la fixiémCj & la feptiéme roulent fur l'inter- ception , le mouvcnient &c la cir- culation de la fève : la huitième ,' fur la force de fudtion qui refide dans les branches de figuier ; la neuvième fur l'ufage de ces fibres fpirales appellèes trachées dans les plantes ; Si fur la caufe des nielles : il efl; queftion dans l'Obfervation dixième de la manière de diftillcr les fubftancesqui peuvent faire ex- plofion : dans la onzième , du fel volatil du charbon : dans la dou- zième , de la raifon pourquoi les rivières commencent à fe glaces par le fond , au lieu que le contrai- re arrive dans les eaux calmes : dans la treizième , de la chaleur de la terre & des caufes du dégel. A l'égard des expériences rafTem- blèes dans l'Appendice , la premiè- re concerne l'air enfermé dans les eaux minérales : la féconde , celui que contient la Bierre appeHée j4ik par les Anglois t la troifiéme &: la quatrième l'air abforbè par \çs matières fulphurcufes & acides : le cinquième article des expériences cft un recueil de celles de M. Mitf- N O V E M B cenhroek fur les fermentations : la fixiéine regarde la refpiration , & la fepticmc la vîtefle de l'air , qui fort d'un fouftlet , & la force avec laquelle il agit fur le feu. L'Appendice efl; terminée par la defcription d'un Inftrumcnt pour connoître les profondeurs de la mer aux endroits où on ne peut la fonder; Inftrument inventé Si mis R E , I 7 5 ^ (foi en pratique par M.DefnguWers de la Société Royale de Londres , fui- vant la méthode indiquée dans l'expérience LXXXIX , pag. 180. de ce Volume par notre Auteur qui la détaille ici avec les moyens de bien graduer cet Inftrumcnt qu'on peut appeller une Jauge dt Mer. HISTOIRE DE VEG USE GALLICANE , DE'DIE'E à Nojfeigncitrs du Clergé, par le Père f/ac^nes de Longiieval de la Compa- gnie de Jefus. Tome y I IL depuis l'an lo'ié- jufqu'à l'an 1158. A Paris ' chez François Montalant ; J. B. Coignard ; Hyppolite - Louis Guerin ; &c Jacques Rollin fils. 1734. /«-4°. pag. 558. non compris la Table des matières. LE Volume que nous annon- çons aujourd'hui va depuis i'an 108^. jufqu'à l'an 1138. On y trouve ( Liv. iz. ) l'Hiftoire du di- vorce de Philippe avec Berthe ; quoiqu'il en eût trois enfans il la ïepudia folemnellemenr & au fcan- dale de tout le Royaume , époufa Bertrade troifiéme femme de Fou- ques - Rechin Comte d'Anjou , PrincelTe qui à un efprit très-artifi- cieux joignoir une grande beauté. Yves Evêque de Chartres ne fut pas du nombre des Prélats quiau- toriferent une union fi criminelle, c'étoit une des plus grandes lumiè- res de l'Eglife de France , aulB le Roi n'oublia til rien pour le ga- gner , ou du moins pour l'engager à refter dans le filence.Mais voyant que fa fermeté étoir à toute épreu- ve , il lui envoya ordre de le venir trouver avec les Milices de fon Diocéfe à Chaumont , ou à Pon-; toile. L'Evêque de Chartres qui redou- toitla haine de Bertrade s'en excu- fa par une Lettre que nous avons encore : Je crains tout^ lui dit-il, de la colère d'un fexe tjui eflfouvent in~ fiJelle à [es amis : ijue fera-t-il a ceux qu'à regarde comme fe s ennemis ? Philippe, pour le punir de fa défobéi (Tance, déclara Yves fon en- nemi , ou comme on parloir alors^ il le défia , & mit au pilhge les biens de fon Evêché , il n'en fus pas même quitte pour la perte de fes biens , fa refiftancc lui coûta la liberté , & il ne fortit de prifon qu'à la prière du Pape Urbain IIj Philippe , en flattant ainfi le Pape ^ l'intimidoit en même tems & le menaçoit fecretcment de foûtcnic l'élcdion de l'Antipape Gibert ' s'il rrfufoit plus long- tems de rati- fier fon mariage -, la circonftancc lui pa-'ut d'autant plus favorable que Berthe mouiut dans ces entreri 6oi JOURNAL DE f.iircs , & que le mariage de Bcr- trade avec le Comte d'Anjou ctoit regardé comme nul , parce qu'il avoic répudié fes d(.ux premières femmes fans caufe lé;^itime. Mais Urb^m II. i'ans s'arrêter à toutes ces confiaerations , nomma Hugue Archevêque de Lyon fon Légat en France , & ce Prélat ex- communia Philippe dans un Con- cile tenu à Autun , où fe trouvè- rent trois Evêques. Qiielque attaché que le Roi fût à Bcrtrade , il eut cependant alTcz de Religion pour fe foûmettre à cette excommunication , il fouflrit patiemment que dans tous les lieux où il alloit on cefsât l'Office pu- blic ; lui-même depuis ce tems-là s'abftint de porter la Couronne & les habits Royaux &: fe contenta avec la difpenfe des Evêques des lieux de fe faire dire une MelTe baf- fe dans fa Chapelle. Comme » il en coûte moins , » dit le Pers Longueval , pour re- » primer les pallions des autres , » que pour modérer les fiennes » propres , & que les Laïques qui >) fe pardonnent quelquefois les » defordres les plus honteux , ne » pardonnent rien aux Religieux » qui oublient la fainteté de leur é- » tat, Philippe ne laifTa pas de mon- trer du zélé pour ôter les fcandales qu'on voyoït dans quelques Mo- naftercs, entre autres dans celui des Moines de S. Magloire , Sc dans celui des Rcligieufes de Fare- moutier ijni aii oient fait de leur Ado- najlere un lieu de débauches. Il don- na aulli les mains au retabliflement 5 SÇAVANS, de l'Evtché d'Arras , qui depuis S. Vaaft ctoit demeuré uni à l'Evè- ché de Cambrai. Malgré ces foins religieux , comme il perfiftoit toujours dans fon attachement pour Bcrtrade ^ le Pape étant venu en France , y célé- brai Clermont en Auvergne , un Concile , dans lequel il prononça contre Philippe une nouvelle Sen- tence d'cxcommunic.uion. Mais le principal ob)et du Pape en affemblant ce Concile avoit été de réunir les armes des Princes Chrétiens, pour la Conquête de la Terre Sainte. On verra dans l'Au- teur ce qui le détermina à cette grande cntrcprife , avec quel ap. plaudifltment elle fut reçue , & quelles en furent les fuites. On y fit un Canon par lequel on déclara que le voyage que l'on feroit à la Terre Sainte pour la délivrance de Jeruflem tiendroit lieu de toi tes les pénitences qu'on pourroit avoit méritées pour fes péchez. » Et ce j) fut la principale époque de l'affoi- wbiilTement de la dilcipline pour n les pénitences canoniques , que » nous avons vu jufqu'à prefent » être encore affez févéres. Il n'y » eut pas de pécheurs qui n'aimàc » mieux faire ce voyage , que d'ef- » fuycr les auftcritez , & l'humilia- ntion d'une pénitence publique. De- là le Pape Urbain parcourut plulîeurs Provinces du Royaume , il y fit pliifieurs dédicaces d'Eglifes 6 y célébra des Conciles ; dans celui qu'il tint à Nifmes oh vit oa- roître le Roi Philippe qui fur la piomeflc qu'il fit de rompre roue N O V E M commerce avec Bcrcradc dont il s'ctoit féparé , y obtint rahfolii- tion des Cenfiires qu'il avoit en- courues. Cet heureux changement ne du- ra pas long tems , Bertrade reprit bien - tôt fur le Roi tour l'afcen- dant qu'elle y avoir eu ; elle difpo- foit à fon gré des Evcchcz , & quelquefois les vendoit au plus offrant, i^afcal II. qui avoir fuccedc à Drbain II. ne tut pas plutôt alîîs fur h Chaire de S. Pierre qu'il lon- gea à remédier à undefordre fi pu- blic. 11 envoya en France deux Car- dinaux Légats avec ordre d'agir au- près de Philippe pour l'engager à renoncer à cette alliance fcandaleu- £e ; mais leurs remontrances ayant été inutiles , ils l'excommunièrent dans un Concile qu'ils tinrent àPoi- tierseu i loo. Si cette Sentence fut exécutée avec tant d'éxaâ:itude que le Roi étant allé à Sens quelque tems après, il en trouva toutes les Eglifes fermées, &: demeura quinze jours fans pouvoir entendre la Mcfl^e. Mais enfin touché d'un fin- ccre repentir & de concert même avec Bertrade , il fe prefenra nuds pieds malgré la rigueur de la faifon au Concile de Paris, le 5 Décembie 1104. &: là ayant promis avec fer- ment de n'avoir plus aucun com- merce avec cette PrincefTe , ils y reçurent l'un & l'autre l'abfolution folemnelle. L'Auteur touche enfuite les vio- lences que l'Empereur Henri IV. Bt aux Evêques de fes Etats qui ne vouloient pas reconnoître l'Antipa- pe Guibert , mais pour fe renfer; B R E, 175 j; ^^^ mer dans les bornes de fon Hiftoi- re , il ne parle que des perfccutions qu'il fit a ce fujct aux Evéquts du Rovaume de Lorraine dont il étoit le maître. Ce fut à la faveur de ce Schifme qu'un Laïque nommé Tanqudm ou Tanquelme , répandit prin- cipalement fes erreurs dans la Bel- gique; il enfeignoit que les Prêtres^, les Evêques, ôc le Pape-même [ n'avoient rien de plus que les Laï- ques. Il pubhoit que les Sacremcns' croient autant d'abominations & qu'il ne falloir pas payer la dixme. ^ Il s'appliqua d'abord à gagner les y> femmes , & par leur moyen il fé- » duifit bien tôt les maris. Le li- » bertinage le plus honteux étoit » le fruit , & fouvent l'amorce de »la féduftion. Car les perfonncs » d u fexe qu'il avoir gagnées dc- » venoient bien-tôtles vidlimes de » ù pafîîon , & fe croyoicnt fort " honorées de l'amour du prétendu » Prophète. Lesefpritsétoient tel- » lement fafcinés , que ce malheu- « reux abufoit des filles en prefen- » ce de leurs mères , & des femmes » en prefence de leurs maris , fans » que ni les unes ni les autres paruA » fent le trouver mauvais. La libéralité pour les intérêts de la Sede eft la première vertu que les Chefs de Parti infpirent à leurs Difciples. Les difcours de Tanque= lin , à ce fujet firent principale- ment fur l'efprit des femmes tout l'effet qu'il en pouvoit defirer. On verra dans l'Auteur de quel artifi- ce il fe fervit pour tirer de greffes contributions de ceux qu'il avoic 6oi JOURNALD malheureufcmenc féduits. Il parut aulli en France divers Hérétiques qui malgré l'extrême corruption de leurs mœurs en im- polercnt à la multitude toujours avide de nouveautez •, de ce nom- bre fut Henri , jeune homme bien fait qui tous un habit d'Hermite, & avec une morale févére en appa- rencCj fe fit regarder dans le Maine & fur tout par les femmes comme un Prophète envoyé du Ciel. A force de déclamer dans fes Sermons contre les vices des Ec- clefiaftiques , il les rendit fi odieux & Il méprifables au peuple , qu'il en penfa coûter la vie aux princi- paux du Clergé pour avoir eu le courage de s'oppofer aux erreurs de ce fanatique. Il prêchoit entre au- tres choies que les femmes qui n'a- voient pas vécu chaftement , dé- voient pour expier leurs péchez fe dépouiller toutes nues dans l'Egli- fe , &c brûler enfuite tous leurs ha- bits avec leurs cheveux. . . . On vit un grand nombre de femmes ne pas rougir de fe dépouiller ainli pu- bliquement. Un autre point de la morale de ce taux Dodleur étoit qu'on ne devoit ni donner ni re- cevoir de dot pour fe marier , & qu'il falloit peu fe foncier fi la fem- me qu'on avoit époufée étoit cha- fte ou non. Les efprits étoient fafci- nés à un point que les plus grandes infamies n'allarmoient plus la pu- deur. Pour contraciter publique- ment ces mariages , Henri vouloit que l'époux &c l'époufe fufient en- tièrement nudsjSc après la cérémo- nie il leur doonoic quelques vils ES SÇAVANS; habits. Nous nous fommes un peu étendus fur ces exemples , parce qu'on ne fi^auroit trop fe con- vaincre que quand le tanatifme s'eft emparé des efprits , il n'y a rien de fi indécent qui ne puifTc être regardé comme un aile de Re- ligion , ni rien de fi extravagant que l'efprit d'entoufinfme,tûû|ours fécond en allégories &c en figures ne rende enfin refpedable aux yeux du vulgaire. On voit dans le 15' Livre l'ar- rivée du Pape Pafchal en France. Il y venoit pour s'appuyer de la pro- tection du Roi Philippe contre les prétentions de l'Empereur HenriV. Ce Prince , après avoir mis Ion pè- re dans une rude captivité , fous prétexte de vangerrÉglile Romai- ne , en devint lui - même un des plus grands ennemis. Après une longue fuite d'intrigues &i de né- gociations que l'Auteur fe trouve obligé de rapporter ici , parce qu'elles ont une liaifon efientielle avec le fonds de fon Hiftoirc , Henri feignit de fe rendre aux vo-i lontez du Pape qu'il voyoit appuyé par les Rois de France tk d'Angle-; terre. Il marché vers Rome avec 30000 hommes fous prétexte d'y re- cevoir laCouronnelmpcriale. Avant que d'entrer dans la Ville il promit par ferment qu'il rendroit la liber- té des Eglifes , & qu'il n'attenteroit en rien à la liberté & à l'honneur du Pape. Le Pape de fon côté s'en- gagea de renoncer au droit qu'il prétendoit fur les Régales , mais il lui refufa la permilfion de faire in- humer en terre fainte i'Empereut Henri N O V E M B Henri qui ctoit mort excommunié, &c dont le cjrps depuis cinq ans renl:crmé dans un cercueil de pier- re , étoit dépofc dans un lieu pio- fane. Sur ces alTurances on donna de part &C d'autre des ôta:;cs , mais l'Empereur étant fommé de tenir fa parole, refufa tout ce qu'il avoit promis , & Pafchal de fon côté n'ayant point voulu le couronner , Henri le fit traîner dans une rude prifon ; mais les Romains indignés de cette trahifon fondirent à main armée fur les Troupes de l'Empe- reur i il fut obligé de forcir de Ro- me avec précipitation , amenant avec lui le Pape & les Principaux de fon Clergé , les mauvais t;aite- mens qu'il leur fit elTuyer les déter- minèrent à fupplier le Pape de cé- der à 11 neceilîté , il s'y refolut à la fin , &c accorda par écrit à l'Em- pereur le privilège de donner les Inveftitures Ecclcfiaftiqucs , & de plus il fut oblige de jurer qu'il n'excommunieroit jamais Henri , ni au fujet des Invcditurcs, ni pour l'avoir tait prifonnicr , après quoi le Pape le couronna Empereur. Mais Pafchal étant remis en li- berté affembla un Concile à Rome compofé d'un grand nombre d'E- vcques qui firent un Décret por- K' tant qu'ils condamnoietn par une cen- fure canonique & par le jugement de l'Efprit faint , le privilège que la, violence d'H:nri a extorqué du Pape^ & qui ejl moins un privilège qu'un travilege ■ pravilegium. Cette déci- flon fut confirmée parplufieurs au- tres Conciles , où l'Empereuf mê- Novemù, R E , I 75 f. CoT me fut excommunié &: les aftcs de ces Conciles parurent avec l'appro- bation du Pape. Pafchal étant mort pendant ces troubles , Gélafe II. & Calixte aufll fécond du nom fuivirent cette af- faire avec beaucoup de vivacité i & l'Empereur Henri V. avec l'An- tipape Bourdin furent de nouveau excommuniés dans un Concile très nomb eux tenu à Reims , où le Pape lui même préfida , de où Louis le Gros fe trouva ; outre l'af- faire des Inveftitures , on y en traita encore plufieurs autres qu'il faut lire dans l'Auteur. Dans le 24" Livre il reprend h fuite des Avantures d'Abailard dont il avoit dé|a parlé. On y voit quelle étoit pour lors la- célébrité des Ecoles de Paris , le nom 5c le caraftere des principaux Sçavans qui y tenoient Ecole publique. Les reproches qu'on fità Abai- lard de s'ingérer d'enfetgner fans avoir auparavant été déclaré Louis VL furnommé le Gros » mérita par fa tendrelfe l'amour » de fes Suiets , &c il fçut fe faire » craindre de fes ennemis par fa » valeur vraiment héroïque. Il ne » connoilToit pas de dangers quand » la gloire ou l'intérêt du Royau- » me l'appelloienr. Il eur prefquc » toujours les armes à la main , » parce qu'il lui fallut pour ainfî » dire , conquérir fon Royaume >' fur les Seigneurs particuliers, qui nie rcgardoienr conmie indépen- » dans du Trône ; un peu plus de » prudence en au oit fait un grand » Roi. Mais Louis avoir trop de » droiture pour ce qu'on appelle- » habile politique. Il fe laiità fou- .>vent tromper , & il ne trompa » jamais perfonne. Pour la Reli- » gion , malgré quelques démêlez » alTez vifs qu'il eut avec quelques «Evêques , on peut dire qu'il la » protégea , ;?c qu'il la refpefta toiî- «jours, il prit conftamment ladé- » fenfe du S. Siège , & voulut que » fon Royaume tût l'azile des Pa- >» pes perfécutés. DE SPIRTTALITATE ET IMMORTALITATE ANIM^ humanae , Orario , ab uno è Magiflris Sacn Faculratis Parifienfis. Pariliis , è Tvpis Pétri Simon , illullriffimi & Reverendilllmi Archic- pifcopi Parifienfis , Tvpographi. Via vulgo de la Harpe. 1735. C'ell-à dire : Di/couKi fur la Spiritualité & l'Immortalité de l'Ame de l' Homme , var un DriBeur delà Faculté de Théologie de Parts. A Paris, de l'Imprimerie de Pierre Simon^ rue de la Harpe, vol. /«-4°. pp. 203. M L'Abbé du Gard, Auteur lité de l'Amt , commence par la .de ce Difcours qui eft une difcuflîon de divers points concer- DilTertation diffufe & Scholafti- nant l'oiigine de l'Ame, dont les que fur laSpiiituaiité & ITraraojcta: principaux font i fi l'Ame eft tranf- N O V E M B mife par les parens, An fit ex tra- diice ? Si elle clt infufc parle Créa- teur ? r^t en quel ceins î II examine là-dellus l'opinion de S. Aiiguftin , & du Cardinal Noris ; à laquelle il oppofe le Concile de Latran qui a décidé que les Ames font infuies dans les corps , &: par confequent qu'elles ne viennent point des pa- reils. Ecclcfi.î m Concilia Lateranen- y?, exprejptntdidtt & docitit , Ani- mas infunii ^ & ideo a farentihus non trahi. Il conclud de-là qu'il n'eft permis à aucun Catholique de s'éloigner de ce fentiment \ il cite là-deflus , comme fur tous les au- tres articles de fon Livre , nombre de palTagcs tirés de l'Ecriture , des Pères & des Scholaftiques. Il foû- tient qu'il y a peu de différence en- tre dire que l'ame eft tranfmife par les parens , & dire qu'elle eft mor- telle. Après ces préliminaires dans le détail defquels nous n'entrerons point , il vient aux preuves de la Spiritualité &: de l'Immortalité de l'Ame. Il les divife en deux Parties; celles delà première font tirées de fix argumens ; i°. de ce qu'en cet- te vie , les bons , dit-il , font or- dinairement d:ins l'atïlidion, & les méchans dans la profpcrité, ce qui marque qu'il y a une autre vie où les bons font recompenfés , & les inéchans punis", i°. de la connoif- fance mtime que chacun a du bien & du mal , du vice &: de la vertu , de la juftice & de l'injuftice ; 3°. de la liberté de l'homme pour choifir ce qui eft honnête , ou ce qui ne i'eft pas , pour faire de RE, r 7 ? ;-. Cof bonnes ou de mauvaifes avions mais fur-tout du penchant qu il x pour la Science, pour h fclicité , & pour tout ce qui eft bon \ 4^. de la faculté intellcduelle de l'hom- me-, j°. du plaidr intérieur que relient l'Ame en ptatiquanr la ver- tu , en contemplant la vérité , &c. Les preuves renlermécs dans la féconde partie font tirées 1". du té- moignage de la riifon écLiirée pat la loi •, z". du témoignage des Ecri- tures ; 3°. de celui des Conciles ; 4". de celui des pères ; 5°. du com- merce de l'Ame avec Dieu ; 6°. des abfu.ditcz qui s'enfuivent fi l'on nie l'immoitalitc de l'Ame ; 7°, des diverfes opérations de l'Ame. Entre ces preuves nous choifi- rons principalement celles que l'Auteur tire de la nature & des fonctions de l'Ame. Quant à la Spiritualité , il remarque dans le quatrième argument de la première Partie , que la penfée étant le pro- pre de l'Ame , il eft impofTible que l'Ame ne foit fpirituelle , puifquc la penfée ne fçauroit être une ma- tière. L'Ame conçoit , raifonne , tire des conlequenccs , elle juge de ce qui appartient à chaque chofe, elle tait dcsdivifions, des défini- tions , elle établit des genres & des efpeces ', elle fépare ce qui eft ma- tériel d'avec ce qui ne I'eft pas -, elle compare les différentes qualitez des êtres ; en un mot , elle a l'idée de la vérité , & la vérité étant une chofc purement fpirituelle , il eft impollible que l'Ame foit maté- rielle : de plus , l'Ame fe tr.infpor- te où elle veut , & nulle diftancc O o o o ij 6oS JOURNAL DE ne l'en empêche. M. du Gard cite LVdefTus S. Chryfoftome , qui en expliquant cette paiole d'Iiayc , 'vidi Dominitm , dit : » L'Ame vole » dans les lieux les plus hauts ^ «les plus éloignés , &: quand elle »fouhaite aller jufqu'aux extrémi- »> tez de l'Univers , elle n'y trouve M nul obftacie Nous fommes 35 en Italie , & en même tems nous » penlons à ce qui fe p.ifTc dans »» rOnent t'c dans l'Occidi nti nous » conveifons avec les Perfans , & »? avec les Affricains. Nous accom- » pagnons nos amis dans leur dé- » part , nous les fuivons dans leurs 3» voyages. Nous fommes avec les «abfens , nous leur parlons , il » n'efl: pas jufqu'aux défunts que ^ nous ne rappcUions auprès de M nous , & que nous n'entretenions 30 quand il nous plaît -, nous les » embralTons , nous leur donnons 0» des témoignages de tcndrelTe. » C'eft donc par rapport à l'Ame aa que Thomme a été hit à l'image «de Dieu , &c non par rapport au » corps. L'Ame travcrfe les mers , ^ delcend jufqu'aux plus protonds 3» abîmes , §c en un moment par- « couft le monde entier. . . . Nous 3» avons une intcllii^ence dont la j» Ié;j;crcté & la vîtclfe palTe celle » des oifeaux , & des v^nts » Notre Ame fe fait palTage au tra- » vers des nuées , elle pénétre les » Aftres & monte jufqu'à Dicu- » même. ... Ce qu'elle ne fçauroit » faire fans être fpirituelle. Pluficurs Ecrivains allèguent en témoignage de la Spiritualité de l'Ame 6c de fa deftination pour le S SÇAVANS. Ciel ; 1°. la figure droite de l'hom- me , au moven de laquelle il re- garde naturellement le Ciel , au lieu , dilent ils , que les autres ani- maux font courbés vers la terre. 2° La fituation de fes yeux , qui paroilfcnt placés vis à- vis le Ciel. M. du Gard embralTe cefentiment, &c cite là-delTus ces vers fi connus. Prona^jue cumfpeBent animalia c£te- ra terram ^ Os homini fuhlime dédit , ccelumque tueri ^ujfit , & ere^los ad Syden tôliers vulttts. Comme ce point regarde l'Hi- ftoirc narurellevQu'il nous foit per- mis de rappoittrici ce que nous en avons dit dans le Journal d'Aoufii 1733. où nous avons remarqué après M. Brown Auteur de V EJfai Jur U' Erreurs Populaires ^ que la fituation droite du corps attribuécà l'homme préfér.iblcment à tous les autres animaux , cft une erreur po- pulaire , puifque , fans parler des oifeaux , qui font prelque droits , 5^ qui avancent la tête & la poitri- ne en marchant, n'étant inclinés que dans leur vol , puifieurs Natu- ralirtes alTurent que le Penguin ou l'Oye Germanique , l'ZJrhis de Bel- Ion ^ Si Tcfpece de Plongeon arpel- léc McrgHs major ^ marchent droits, formnntavcc le ventre & la poitri- ne,une ligne perpendiculaire à l'axe de la terre. M. Brown affure avoir vu plufieurs fois une efpece de Sau- N O V E M B terelle , qui loin de s'incliner , fc tient toujours droite , & a les parties de devant élevées. Les Naturalises l'appellent Agamis , & les Provinçaux laProphetelTeou la Sauterelle cfni prie , parce qu'elle pa- roîc d'ordinaire dans la fituation de Ceux qui élèvent les m.iins au Ciel. Qiiant à la (îcuation des yeux , le même M. Brown bit obferver que les PoilTons plats ,les cartilaf^incux Se les PeBinaiiXj fcavoir ceux dont les arrêtes font faites en forme de peignes , ont les yeux placés direc- tement vtis le Ciel, au lieu que ceux de l'homme ne le regardent qu'horizontalement , les oifeaux ont le même avantage , & encore plus commodément par la ftruc- Cure de leur paupière fuperieure. Pluiicurs quadrupèdes regardent tout de même le Ciel , en formant de leurs yeux un arc plus grand que Celui fous lequel l'homme dans fa fituation naturelle peut le regarder. Si M. du Gard admet au rang des preuves de la deftination de l'ame pour le Ciel , le prétendu privilège qu'on attribue à l'homme de regar- der le Ciel , il eft à croire qu'il le fait plutôt pour ne rien omettre de ce qu'on a coi^itume de dire pour prouver l'immortalité de l'Ame , que pour aucune autre raifon , & il fuffit de lire fon Livre pour voir que c'eft un Recueil , où il s'cft propofé de raffembler to\it ce qui s'eft écrit en faveur de la Spirituali- té & de l'Immortalité de l'Àmejfauf aux Lecteurs de démêler les preuves folidcb d'avec les autres ; & pour donner un exemple de ce que nous RE, 1755*. (?op remarquons, nous rapporterons ce qu'il dit des inconvenicns qui s'enfuivroient fi l'homme n'étoit pas fpirituel , & par conféqutnt immortel: fçavoir i ". qucce fcroit donc une folie à tant de perfonnes de l'un & de l'autre fexc^dc s'enfer- mer dans des Cloîtres pour s'y im- moler à Dieu , 6c une folie tout de même à tant de Martyrs d'avoir fa- crifié leur vie : 2". Qu'il faudroic donc que tout ce que les Pères de l'Eglife ont écrit fur le fujet donc il s'agit tût fabuleux , que tout ce que les Prédicateurs annoncent tous les jours là delTus fuiïcnt cho- fesauffi peu dignes d'attention que des Contes & des rêveries , &c. Quodjï j^nima non Jit imrnortalis Tôt SanEli Paires qui mimam inte- rittts expertem in fiiisfcriptis tnidide- runt fulfi injtmulantur^eorumqite avé- ra admirahilia , irrita funt & vana tôt ipforum aliontmve Prxdicatoriim conciones , imo & omnia Scriptnrt& Sacra Oracula , totidem funt aniles fabula & delirattones \ preuves ex- cellentes pour ceux qui profeifent la Religion Chrétienne , qui ne perfuadercnt jamais les incrédules. Venons aux preuves poficives. No- tre Auteur les emprunte de S.Tho* mas & de S. Bonaventure. Première preuve. Ritn n'agic que félon la nature de fon efpcce parce qu'en quelque fujet que ce ibit , la forme eft le principe de l'aiflion j fi donc l'Ame eft une fub- ftance corporelle , fon aftion fui- vra la narurc des corps , & par' conféqucnt l'Ame n'exercera fon intelligence qu'à l'égard des cho- 6io JOURNAL D E fcs corporelles , ce qu'elle ne fait cependant pas , puifque cette intel- ligence s'étend fur plufieurs chofes qui ne font nullement corporelles. Seconde preuve. Un être d'une intelligence prefque infinie ne fçau- roit être corporel : Or l'Ame cft en quelque forte infinie dans fon intel- ligence , elle connoît ce qui eft gé- néral , & univerfel, &c. Donc l'A- me n'eft pas matérielle. Troilîéme preuve. Toute fub- ftance intelleduelle eft immortel- le : Or l'Ame ell: une fubftance in- telleduclle , donc l'Ame cft im- mortelle. Quatrième preuve. Nul être ne oerittiar ce qui en taitlaperfeililion: Or l'abftradion de ce quieft corpo- rel, fait la perfedion de l'Ame , puifque l'Ame fe perteilionne par la Science & par la vertu , donc l'Ame ne fçauroit périr par lafépa- lation du corps. Cinquième preuve. Un defir na- turel is: inné ne peut être inutde : Or l'homme a un defir naturel Se inné , non feulement de vivre ac- tuellement^mais de vivre toû ours, donc l'homme , par rapport à l'A- me , eft i.-Timortel. Sixième preuve. Tout être qui eft reçu dans un autre , y eft reçu proportionnellement à la nature de l'être qui le reçoit : Or les formes ou idées des chofes font reçues dans l'entendement, entant qu'el- les font actuellement intelligibles, & elles ne font aiftuellement intel- ligibles qu'en tant qu'elles font im- matérielles,univcrfcllcs,& par con- féquen: incorruptibles , donc l'A- S SÇ A V ANS, me de l'homme cft incorniptible.' Septième preuve. L'Ouvrier eft plus que l'ouvrage. Or la pu! (Tance intellccliuelle de l'homme quand elle agir , eft ce qui rend les chofes adlueilcment intelligibles , cette puiftance ainfi adlueilcment agif- fante eft donc quelque chofe de plus que la chofe aclacUement 'm- telligible , or les chofes adtuelle- ment intelligibles , condderées par rapport à cet état , font incorrup- tibles , à plus forte raifon , la puif- fance intelligente qui les rend ac- tuellement intelligibles fera incor- ruptible elle-même. Donc l'Ame de l'homme qui poffede cette in- telligence aduelle fera incorrupti-- ble. Huitième preuve. Ce qui exer- ce par foi-même , une opération à laquelle le corps n'a nulle part, eft incorporel , &c fubfifte par foi-mê- me , car nul être ne peut opérer ppt foi-même , qu'il ne foit fubfift«c par foi même : Or l'Ame exerce une opération à laquelle le corps n'a nulle part , fçavoir l'operatioa de rcntendemcnt; donc l'Ame cft fpirituelle , incorporelle , fublï'- ftante par elle - même. Neuvième preuve. Ce qui con- vient à un être, félon fa rature, eft infèparable de cet être , or l'incor- ruptibilité convient à l'Ame felott fa nature , donc l'incorruptibilité eft inlèparable de l'Ame. Pre7ni':r3 preuve de la mineure ,' l'incorrupribilité convient naturel- lement à route fubftsnce à laquelle il convient naturel! Trient d'être par foi même : Or il convient de fa N O V E M nature à l'Ame d'être par foi- mê- me ; donc l'incorruptibilité con- vient de fa nature à l'Aine. Seconde preuve de la mineure. Il convient de la nature à toute fub- ftance d'être par elle même , à la- tjiK'Ile il convient d'être une forme par foi même fubiiftante: Or il con- vient à l'Ame , d'être une forme fubdilante pir foi-même & par fa nature ■■, donc il convient à l'Ame , d'êrrc par elle même. "I-otfiéme vrewve de la, mineuye. Il convient à toute fubftance d'être une forme fubiiftante par elle - mê- me , laquelle peut opérer par elle- même : Or l'Ame peut opérer par elle-même , c'eft à-dire a par elle- même une opération propre ( qui cft l'intelligence ) à laquelle le corps ne communique rien , car l'intelligence s'exerce fans le fe- cours d'aucun organe corporel ; donc il convient à l'Ame d'être une forme par foi - même fubfi- ftante. A ces preuves de l'Immortalité de l'Ame, M. du Gard ajoute celle- ci qu'on ne lui auroir pas fçu mau- vais gré d'accompagner de quel- que Commentaire. La corruption ne peut fe trouver que dans les chofes où il y a de la contrariété : Or dans l'Ame il n'y a point de contrariété , parce que ce qui eft reçu en elle eft fans contra- riété , ou autrement parce que dans l'Ame , c'eft-à-dire dans l'en- tendement , les raifons des contrai- res ne font pas contraires , rationes etntrariorum in anima feu intelleUu •nonfunt contrari* j cai il n'y a qu'a- B R E , I 7 5 j: e una Scientia contrarionan. Donc l'Ame eft incorruptible. Les preuves que nous venons de rapporter font empruntées de Saine Thomas, notre Auteur cite les en- droits où on les peur confulcer. En voici qu'il emprunte de S. Bona- venture. Nous choihrons les moins Scholaftiques. Dieu ne laifle aucun bien fins recompenfe , & aucun mal fans punition : On voit cependant dans cette vie , bien des aftions ver- tueufes non recompenfées, & bien des adions mauvaifes non punies ; il y a donc une autre vie à atten- dre après celle ci , & cette autre vie ne feroit pas , fi l'ame ne reftoic après le corps. Il eft de la Juftice Divine qu'au- cune adion véritablement bonne 6c louable tourne au dommage de fon Auteur : Or^ félon la Philofo- phie Morale , félon la Loi Divine & félon toutes les Scdes du mon- de , l'homme doit pliàtôrchoifirla mort que d'abandonner fon de- voir -, mais fi l'Ame ne reftoit pas après le corps , quel feroit le fruit de cette mort fî louable ? ne tour- neroit - elle pas au dommage de celui qui l'auroit foufferte ? & où feroit parconféquent la Juftice de Dieu ? Il s'enfuit donc, fclon l'or- dre de cette Juftice , que l'Ame eft immortelle. Rien de matériel & de corrupti- ble n'eft capable de réfléchir fut foi-même : Or l'Ame raifonnable réfléchit fur elle - même , elle fc connoît, elle s'aime , donc clie cft ^12 JOURNAL D immatérielle & incorruptible. Toute faculté ou puilTance quife fortifie par réloi;^nv.ment ikUfé- paration de ce qui eft corporel & corruptible , eft incorruptible de fi nature : Or l'Ame raifonnable eft une puiiïance qui fe fortifie &C fe perfectionne d'autant plus qu'el- le eft plus dégagée de tout ce qui eft corporel & corruptible •, donc l'Ame raifonnable eft incorrupti- ble. Il n'eft point de fubftance cor- ruptible dont les opérations ne s'affoiblllfent pat le tems -, mais les opérations de l'Ame, loin de s'af- foiblir par les années , reprennent une nouvelle force. La fagclfe £cia prudence s'accroilTent en vieillif- fant ; donc l'Ame n'clt point du nombre des fubftances corrupti- bles. 11 doit neccffairement y avoir de la proportion entre la fubftan- ce qui connoît , & la fubftance qui eft connue j ou, ce qui eft la même chofe , entre la puilTance &c l'objet. Le propre de l'Ame eft de comprendre & de connoi- tre la vérité : Or la vérité eft in- corruptible , comme le fait voir S. Auguftin dans fes Soliloques , Cette vérité étant de telle nature qu'on ne la fçauroit nier quelque part , qu'on ne fuppofe en gé- néral qu'il y en a une , d'où il faut conclure que l'Ame eft immor- telle , non feulement par rapport à la vérité de l'intelligence îk de la confcience , mais encore par rap- port à il véritéde h Juftice , la ju- ilicc étant une chofe iaimortcUc , ESSÇAVANS, d'où il luit que l'Ame qui eft capa- ble dejiifticceft immortelle auffi. M. du Gard avertit que ces rai- fonnemens lont tirés de S. Bona- venture , Liv. i. Sentent. Diftintfl. 19. Art.i.Qiieft. i. p. 235. en voici qu.lques autres dont il n'indique point les fources. i"^. Toute fubftance dont les opérations font fpirituellcs , e(t fpintuelle elle-même : Or les ope- rations de l'ame font fpirituelles , donc l'Ame eft fpirituelle. Preuve de la ntineure , les opérations qui ont pour objet des chofes fpirituel- les font fpirituelles . or les opéra- tions de l'Ame ont pour ob)et des chofes fpitittuelles , donc les ope- rations de l'Ame font ipirituelles. 2". Une fubftance qui a des idées de la vérité , de la fagcfte , de la juftice , eft fpiriruelle: Or l'Ame a des idées de la vérité , delafagffle & de h juftice, donc elle eft fpiri- tuelle. 3". Une fubftance qui fçait faire la différence du vrai & du faux , du bien &c du mal , eft fpirituelle : Or l'Ame fçait f.iire cette différen- ce, donc elle eft fpirituelle. 4°. Une fubftance qui eft capable de préférer l'honnête .t l'utile , & qui le piélere fouvent , eft fpiri- tuelle: Or l'Ame fait fou vent cette préterence , donc elle eft fpiri- tuelle. 5°. Une fubftance qui eft capa- ble de s'applaudir , cù de fe con? damner félon le bien ou le mal qu'elle a fait , eft fpirituelle : Oï l'Ame s'applaudit & fe condamne Ibuvent félon la nature des acliops qu'elle N O V E M qu'elle a faites , donc l'amc eft fpi- rirLidle. 6°. Une fubftance cipable de vi- ces fpiricucls , tels que l'orgueil , l'ambition , l'avarice , e(l fpirituel- le : Or l'Ame cil capable de ces vi- ces , donc , &c. Nous paiïons plufieurs autres raifonnemtnsfcmblables pour ve- nir à la preuve qui fc tire de la fim- piicitcde l'Ame. Ce qui n'a point de parties ne peut périr : l'Ame n'a point de parties , elle eft exempte de toute contrariété &c de tout ce qui eft fu- jet à corruption ; donc l'Ame ne peutperir. C'eit l'argument de Ciceron dans les Tufculancs , notre Auteur en cite au ion" le paffage , au com- mencement de fon Livre , pag. g 4. Il nousrcfte à dire un mot des ré- ponfes que tait M. du Gard aux objections d'un Epicurien fur la matière dont il s'agir. Ces objec- tions regardent les témoignages des Pères & de l'Ecriture fur l'Immor- talité de l'Ame. L'Epicurien débute par dire , 1. Que c'cft en vain que pour lui prouver l'immortalité de l'Ame , on lui cite un fatras de Docleurs qu'il ne connoît point , Se qu'il ne veut point connoître , 2. Qii'il n'admet point d'autre Dotftcut qu'Epicure , &c. Incajfiim -prarfits ^ in vanum , in médium additcumur pritterfî DoElores -^ imitilis plané & ntperflita tanta hominum nobis igno- tomm farrago. Hos omnes ignoramus ^ revrohamm. Solum Epicurum prd- tlarnm Philofaphnm omnibHS namerit B R E , 17 j y. 61 i abfoluntm novi??MS ^ illiiis folius Scc- tatores fumus. » Qiii que vous foyez , qui te- » nez un langage fi pervers , répond » M. dit Gard^ comment vous ap- » pellerai - je ? Sera-ce du nom de » mulet , d'âne ou de porc ? an mu- M lum , an ajtnum , an porcum , poji » San^îum Chryfoflomum te dixerim* »Car comme une bête brute vous » êtes tellement lié aux fcns &c à » la chair , que vous ne voyez que » par eux , 5c que dans toute la >' conduite de votre vie , vous n'a- M vez point d'autre guide ; vous » paroilTez fî dépourvu de la rai- » Ion qui vous a été donnée pat » l'Auteur de la Nature , que vous » fcmblez lui être abfolument op- » pofé, &c en cela , vous errez hon- » teufcment. Méchant Chrétien ! » c'eft vous principalement que re- » garde cette féconde partie de » mon difcours i dans laquelle , » après avoir cité l'autorité du cin- » quiéme Concile de Latran pour » établir la Spiritualité &c l'Im- j> mortalité de l'Ame , je cite les » Textes des SS. Percs , &c je m'é- » levé contre vous , cheval , âne, " mulet , porc , ou plûtc)tbête fé- » roce que vous êtes. /« te invehi- J3 murei^uum^ afiniim , mitlitm ^por- » cum , vel potins belluam ferocem, » Vous vous écartez du droit chc- » min , en ce que vousncfuivez » pas pour règle , ces fçavans Doc- » teurs de l'Eglife Catholique que " j'ai cités. Vous ne connoilîcz pas » de tels hommes , dires - vous , «vous avez en horreur leurs le- >» çons. Cela étant , vous voilà 6i4 JOURNAL DE » donc hors de la vraye toi &: de la 31 laine dodrine ; vous avez donc M en horreur la raifon naturLlle , 6c » par conféquenc vous voilà éloi- » gné du fentiment général des » hommes. Car fi l'on evccpre ce 50 que cts Saints &: fçavans Doc- r> teurs ont écrir Touchant les con- a> verfations de l'Ame avec Dku , » & touchant les effets admirables » de la Grâce Divine , prel'iue » tout ce que )'ai tiré de ces Souices «Sacrées, pour réfuter l'Epicurif- »me, prouve invinciblement & «démontre , par la feule lumie- 3>re naturelle , la fpirirualité de » l'Ame , & fon immortalité » Vous ne connoilTez pas de tels » hommes , dites-vous , c'efl: à dire » que vous ne connoitTcz pas ces »> hommes dont les fçavans Ecrits ôc 3> la fainte vie font & feront à ja- » mais en bcnédiftioni vous ne les 3> connoiffez pas, mais moi ;e vous » connois encore moins, & )'ai en- » core plus d'averlîon de vous ; » comment pourrions cmbrafler a» le parti de votre Maître Epicure, » dont la dodrine & la vie confi- » rte prefque route dans l'ordure î 3» C'efl un Maître dont la mémoire «exhale une odeur de mort , & M dont le nom même cft en abo- 3> mination chez prefque tout ce «qu'il y a d'hommes fur la terre : » car , félon le témoignage de faint 30 Ambroife , Epicure efl regardé 3>dc tous les autres Philofophes , «comme le Parron de l'impudici- 3» té, & en cette qualité il eft ex- » dus de leurs Ecoles. M. du Gard, après piuiîeurs réflexions fcmbU- S SÇAVANS, blés , rapporte une autre objcdion de (e)n Epicurien , laquelle conhlle à dire que perfonne n'cll revenu de l'autre monde , nous apprciielre ce qui s'y palTe , & pour réf-ondre à cet Epicurien qui nr veut éeoutct aucun i'ere de l'hgl.lc , il lui op- pnfe S. Pierre Chryii logue qui dit: » Nous Içavons qu'il y a une vie = p"f arée pour les bons , & des » tourmens préparés pour ks mé- » chans -, m.us aveugles que nous » fommes par le vice , nous fei- » gnons ne pas Içavoir ce que » nous fçavonsv nous voulons qu'il "revienne quelqu'un de l'autre » monde pour nous apprendre ce » qui fe palfe apri s la mort , quoi- » que cependant J. C. d^fctndu du "Ciel & remonté des enfers , nous » air révélé le bonheur qui attend » les Saints , &: le malheur qui at- »rend les méchans après cette vie. M. du Gard oppofc encore à l'Epi- curien , S. Bonaventurc , S. Chry- foftome , S. Athanafe , &c. c'efl de cette manière qu'il refout les objec- tions de cet impie qui n'admet pas même l'Ecriture Sainte, nous di- fons, qu il refont ^ car le Chapitre où il fait les réponfes que nous ve- nons de rapporter, a pour titre : Solvunmr homims impii oljtlîiones. Nous defcendons djns ce détail pour metrrc les LetT:eurs plus au fait de l'Ouvrage. Ce n'eft point par les reflexions des Journaliftes, mais par les cxpofez qu'ils don- nent , que l'on connoît le fort & le foible des Livres. Pour cette rai- fon , nous rapporterons encore ce l'Ame humaine cil: de n'avoii » point de parties , d'être exempte » de toute contrariété, & de tout ce » qui peut être fujet à corruption, » il s'enfuit que fi Dieu qui eft » fouverainement bon , ^v' qui dif- 30 pofe de tout fuavement ne veut » point s'éloigner de ce qu'il eft , )>il ne peut s'empêcher de confcr- » ver , de fortitîer , & d'affurer » pour toujours à l'Ame , la nature » Ipirituelie &c incorruptible qu'il D lui adonnée. Il n'eft point de dogme plus certain que celui de l'immortalité de l'Ame ■■, il n'en eft point en mê- me tems , dont il foit plus necef- faire à tous les hommes , d'être pleinement convaincus : ainfi on B R E , 17 3 5", <^i5" ne peut fçavoir trop de gré à M. du Gaid , du delTein qu'il s'eft propo- fé dans fon Ouvrage , où il Tait paroître tout le zélé pofliblc pour la àcicnl'c d'une vérité dont la connoiffancc importe fi fort. Il uie fouvent de redires & de répéti- tions ; mais il le fait fars doute pour inculquer davantage les cho- fes. Ses railonnemcns ibnt tiOus de Syilogiltnes en forme : Ce ne font dans la plupart des pages, que nii^jeures & minutres , une mcmc mineure s'y trouve quelquefois prouvée jufqu'à trois rcprifes dif- férentes : Prokatiirminor. , . .^dhue probatur niinor. . . . lierum frobatttr minor.... On ne rencontre prefque à chaque article, que at^uL... Ergo..., Mais il eft facile de voir que l'Au- teur n'employé ce ftile que parce qu'il le croit plus perfuafit^ L'Ouvrage , au refte , nonobftanc ce ftile,eft annoncédans le titre, fous le nom àOraiio , ce qui porte d'a- bord à l'efprit , l'idée d'une Oraifort ou Harangue ■■, quoique à en juger par les endroits que nous venons de remarquer , la pièce dont il s'a- git,ne paroilTe guéres du genre Ora- toire ; mais nous avertirons que M. du Gard ne laifte pas aullî quelquefois de s'cxpiimcr d'un fti- le d'Orateur-, témoin, entre autres exemples que nous pourrions citer là deftus , le début même de la Dif- fertation , laquelle commence par cette période mcfurée. 5/ ^ua urxjuam extttit tempomm circumftantia in (jua confoitancum fuit & opportunum poft ctare ajfer- tam , Ô" invite demonflratAm o/»- P p p p i; 6x6 JOURNAL D vium trrimam & anuqttijfimam^ alia- ruwcjue hajîm ac funâamentitm , de *Dio exï^tnte verttatem , de yinim- mercc régulier. Les premières Re- lations qui nous en vinrent , com- me l'obferve le P. du Halde , paru- rent fabuleulcs. On ne pouvoir fe perfuader qu'au de - là de tant de Nations à demi barbares, & à l'ex- trémité de l'Afie , il fe trouvât un puillint Etat qui ne le ccdoit gué- res aux Etats les mieux policés de l'Europe. N O V E M B Mais enfin dans le quinzième fiécle , lovlque les Millionnaires eurent pén-jtré dans la Chine, dont l'entrée jufqu'alors par des vicies politiques avoir été fermée à tous les étrangers , il ne fut plus podl- ble de douter de toutes les merveil- les qui s'en étoient répandues. Le dei'ir de connoîrrc un peuple fi efti- m ible devint général , & donna lieu à une inSnicé d'Auteurs , ou peu amis de la vérité j ou peu ca- pables de la découvrir, d'en publier de fiuiTes Relations , faites à la hâ- te , ou fur le rapport de gens mal inftruits. Cependant ces fortes de Rela- tions bites fans difcernement n'ont pas laiffé de faire de fortes impref- fions fur certains efprits , & pour en donner un exemple, combien de perfonnes ne croyent-elles' pas en- core aujourd'hui fur des témoigna- ges aulTi frivoles , que la Nation Çhinoife fait remonter l'origine de fon Empire bien au-delà du déluge, & même de la création du monde? Il fe trouve à la vérité quelques Chinois qui ont avancé une idée fi abfurde , mais de ce que certains Auteurs Européans ont alTuréque le monde a exiiié de toute éternité, pourroit-on en conclure qu'elle eft en général l'opinion de tous les Scavans,de l'Europe ? Quoique la préfomption doive être en faveur des Relations écrites par les Millionnaires , le Père du Haldeavoiie que l'attention qu'ils ont donnée au principal objet de leur voyage ne leur a pas toujours permis de prendre toutes les pré- R E , T75 y. gij cautions necelTaires pour s'aiïurcr exadement des chofes dont ils ont rempli leurs Ecrits, Sc qu'ils ont un peu trop compté fur les Au- teurs Chinois naturellement difpo- fés à exagérer les raretez &c les mer- veilles de leur Pays. C'eft principalement fur ce qui' regarde la Géographie que ces Li- vres leur en ont impofé. Les mé- prif:s dans lefquelles ils font tom- bés ic trouveront reiflifiées par les' Cartes qu'on donne ici &C qui ont été drcllées par les Pères Jefuites , qui par l'ordre de l'EmpereurCang, hi prédéceflTeur de celui qui règne aujourd'hui, parcoururent tout le- vafte Empire de la Chine , de qui- comme on le juge bien , n'oubliè- rent rien pour mériter de plus en- plus par l'exaditude de leur travail- la protedfion de ce Monarque. Outre ces Cartes qui ne font pas la partie la moins confiderable de l'Ouvrage , le Père du Halde a tra- vaillé fur une quantité prodigieufe de Mémoires venus de la Chine , il les a comparés les uns avec les au- tres -, & au deffautdeces Mémoi- res , les corrcfpondances conti- nuelles & necelTaires qu'il a depuis 24 ans avec les Mifllonnaires de la Chine, l'ont mis en état d'en rece- voir les fecours & les éclaircilTe- mcns dont il pouvoit avoir befoin^ Quelques ■ uns même d'entre eux ont bien voulu traduire certains Livres d'habiles Chinois qui four- nilTent la preuve de la plus grande partie des faits qu'il avance.ajoûte z à cela que fon Ouvrage étant fait, il a eu la fatisfadion de le faire revoix >^^ ^i8 JOURNAL DE par le Père Contancin qui avoit palTé trente-deux ans à la Chine , &C qui refta plus d'un an à Paris , où les ordres de fes Supérieurs l'a- voient appelle. On voit par-là que notre Auteur a eu tous les fecours qu'on pou- voit fouhaiter pour la compolîtion de ce grand Ouvrage , & qu'il n'a rien oublié de ce qui étoit neceffai- re pour le conduire à la perfedion, & pour ne tomber dans aucuns des défauts qu'il reproche à la pliiparc des Auteurs qui ont parlé de la Chine. A l'égard de l'ordre qu'il a fuivi dans la dilbibution de tant de ma- tières , on verra pariecompre que nous en rendions que cet ordre cft conforme au projet. Seulement il a cru que pour faciliter l'inrelligcn- ce de ce qu'il devoit dire dans la fuite , il convenoit d'inferer dans le premier Volume l'Hiftoire Abré- aée de la Monarchie Chinoile. C'eft encore par cette même rai- fon que tout l'Ouvrage commence par une Defcription fommaire de l'Empire de la Chine. » Ileft ccr- » tain , dit-il , que la Chine eft le » plus beau & le plus grand Rovau- » me connu ; car je ne voudrois » pas répondre qu'il n'y eût quel- » qu'autre Nation polie dans les » Terres Auftrales , ou dans quel- » ques autres Contrées inconnues. » Lorfqu'après avoir quitté l'Euro- » pe on aborde aux terres les plus » voifinesde l'Afftique, ne iemble- »> t il pas qu'on foit tombé dans un » autre monde ? Les Peuples inè- » mes des Indes, quoiqu'un peu S SÇAVANS, » moins grolTïers , ont tant d'im- K politciTe , lortqu'on les compare » à nos Nations civililées , qu'ils » peuvent palier pour demi barba- >» res. Qui auroir cru , qu'au bout » de tant de barbarie , fe trouve- » roit un Peuple puillant , policé, » habile dans les Arts j Rappliqué M aux Sciences? La Chine, de quelque fens qu'on la prenne , n'a pas moins en ligne droite que }6o de nos grandes lieues •, chacune des quinze Provin- ces qui la compofent eft fubdiviléc en différentes Junldidions. Le P. du Halde obferve que les difîerens relTorts de ces Jurifdiclions ^ font que la même Ville fe rouve quel- quefois nommée de trois différen- tes manières , d'où il eft: arrivé que quelques Auteurs ont fouvent compté une feule Ville pour trois , & ont ainll groilî faulfement le nombre des Villes de la Chine, on prétend ici que ce nombre en eft beaucoup moindre qu'on ne le fait dans prefque toutes les Relations imprimées. Ce qu'il y a de plus fînguliet dans le gouvernement de la Chi- ne , c'ell qu'outre le Viceroi , les Gouverneurs des Provinces , & les Chefs des grands Tribunaux établis àPeKing , il y a des Cenfeurs pu- blics de l'Empiie qui ont leur refî- dence dans la Capitale ; de tous les grands Mandarins ce font les plus redoutables Si quelque Man- darin dans les Provinces n.anque à fon devoir , Si que le Viceroi n'en avurtifTe p^sauplûiôr , ces Cen- feurs font obligés d'en inioimer les N O V E M B Cours Souveraines. On n'exige d'eux aucune preuve bien certaine , il fulïit que leur dénonciation ait une apparence de vérité qui puilfe donner lieu aux intormarions , qu'cnfuiteon a coijtumc de taire. Au refte , quelqu'autotiré qu'ait le Viceroi & les aurres Ju^esdes Provinces, le châtiment dont ils punilfcnt les coupables , ne doit jamais aller lufqu'à la mort , excep- te quand il s'a-^it de révolte ou de fédinon ; dans tous les autres cas ce droit ell rcfervé aux feules Cours Souveraines qui rélident à Peking, les autres qui font répandues dans l'Empire ne peuvent condamner qu'à la prifon , à labaftonnade, ou à l'exil. On palTe enfuite à la manière dont les tailles 6i les impôts fe lè- vent à la Chine i &c après avoir donné une Table des Villes de cha- que Province , & des lieux qui font fournis à leur Jurifdidion. On marque la nature de leur ter- roir , ce qu'ils produifent de plus rare en animaux , en plantes , en métaux S>c en marchandifes i mais par-tout l'Auteur paroît autant en garde contre le faux merveilleux que les faifeurs ordinaires de Rela- tions font avides de le chercher. Il convient » qu'on ne peut rien voir 3> de plus beau que les campagnes t> de certaines Provinces qui font 5» fituées fur le grand Fleuve , le >} grand Canal , ou même fur les w bords de la Mer. Elles font fé- ?> mées de Villes & de gros Villa- »geSj & coupées d'une infinité de «Canaux cous navigables fan$ » qu'on y puiife courre le moindre » danger; l'eau en eft belle & cx- » cellente à boire -, ces Canaux fe "communiquent les uns aux au- » très , & font couverts d'un nom- » bre incroyable de Barques , où » comme il le dit ailleurs , les Paf- » fagers trouvent des logemens » beaucoup plus propres )k plus «commodes que ne le font la plû- » part des maifons Chinoifes. Ces "campagnes font cultivées avec i> un loin & un travail dont il n'y » a que le Peuple Chinois qui foie » capable. Elles font du refte fi fcr- » rilcs qu'en plnfi:urs endroits elles " produifent du ris deux fois l'an- »»née , il arrive mémo fouvenc » qu'entre les deux récoltes elles » donnent encore de petits grains » & du froment. Mais d'un autre côté il remarque que fans l'occafion qu'ont eu les Milfionnairesde parcourir divcrfes Provinces de l'Empire pour en drelTer la Carte ; on ignoreroit en- core « que dans la plupart des » grands Gouvernemens on trouve » des Contrées de plus de zo lieues » très-peu peuplées , prefqu'incul- » tes & afiez fouvent fi fauvages » qu'elles font prefque inhabita- jo blés. La magnificence des Chinois éclate non dans leurs maifons Se dans leurs Jardins, qui font pour la pliàpart de la dernière fimplici- té, mais dans les ouvrages qui font faits pour la commodité du Public comme les Ponts , les Canaux , les Quais , les Digues , ou certains Axes de tiiomphe qu'ils éleve^ &a 620 JOUHNALD l'honneur de leurs Empereurs , ou de ceux qui fe font imniortalifés par leurs vertus , ou quelque Ser- vice important rendu à la Nation. Leur architcfture ei\ d'un goût en- tièrement différent de celle que nousconnoilTons, mais qui nelaif- fc pas d'avoir fa beauté , &C que l'habitude pourroir peut-être faire trouver préférable à la nôtre. Us ne fe fervent gucres de pierres ni de marbres que pour les Edifices pu- blics , où ils fe montrent aufli pro- digues qu'ils font économes dans leurs peifonnes & leurs logemcns particuliers. Après avoir donné une idée gé- nérale de la Chine , le Père du Hal- dc avant que de venir au détail de ce qui regarde chaque Province en particulier , a cru devoir parler , I. de la grande muraille qui fépare la Chine de la Tartarie : i. des Peuples nommés Si Fan , ou Tou- fan , qui formoient autrei-ois un Etat puiflTant &c redoutable aux Empereurs, mais qui déchiiésdans la fuite par des guerres inteftines , fe font vus forcés de s'ailujettir à la domination Chinoife : 5. desTar- tares de Coconor qui habitent à l'Occident de la Chine le long de la Province de Se-tchuen , entre cette Province & le Thibet : 4. de la Nation des Lo los , &c enfin de celle des MiaolTe , tous Peuples qui n'ont ni alfez de force pour fe- couer entièrement ic joug des Chi- nois , ni en même tems affez de foibleiTe pour plier entieremenc fous leur domination. Après c£s aiorccaux qui font ES SÇAVANS, très propres à interelTer la curiofitc des habiles Ledcurs viennent plu- fieurs routes faites par quelques Miflîonnaires Jefuites chargés de pai courir les différentes Provinces, pour drefTcr la Carre dont on a dé- jà parlé. La première route eft des Pères Bouvet , Fontanav , Gerbil- ion , le Comte, & Wifdelou de- puis le Porc de Nmg - po jufqu'à PcKing ; on y trouve une Defcrip- tion très-exacte &: très-circonflan- ciée de tous les lieux où ils pafTercnt dans les Provinces de Tche Kiang, de Kiaiig nan, de Chan tong, &: de Pe tcheli. La féconde eft du Perc Fontaney , depuis Feking jufqu'à Kiang tcheou dans la Province de Chan-fi, &c depuis Kiang tcheou jufqu'à NanKing , Villes où les Empereurs de la Chine failoient autrefois leur refidtnce. La troific- rneeft du Père Bouvet , depuis Pe- King jufqu'à Canton , lorfqu'il fut envoyé par l'Empereur Cang-hi en Europe en l'année iS^}. & la quatrième vient de quelques Chi- nois qui ont bit par terre la route depuis Siam jufqu'à la Chine. L'a- bondance des matières dont ce Vo- lume cft rempli nous oblige de palTer légèrement lut ces routes qui feules fourniroient de^ quoi remplir un long Extrait. Il cft tcms de venir à la Defcrip- tion particulière que notre Auteur fait de chaque Province , des prin- cipales Villes qu'on y remarque, SC de ce qui les diftingue par rapport à leur fituation , à leur commerce , & à la fertilité du terroir. On peut dire en général que toutes ces Vil- les N O V E M B les font prerque toutes fur le même modelé , elles font h plupart de forme quarrée , environnées de hautes murailles avec des Tours de diftance en dillance; on y voit de ces Arcs de triomphe dont nous avons parlé , des Temples alfez beaux , &C quelques Edifices pu- blics plus remarquables par leur valte étendue que par leur magnifi- cence. Ajoijtez à cela quelques Places , de longues rues , les principales fort larges , les autres fort étroites-, elles ont chacunes leurs barrières qui fe ferment le foir au fon d'une cloche, en forte que pendant la nuit , PcKing qui fourmille d'un Peuple innombrable , cft audî tranquille qu'une feule tamille par- ticulière rentermée dans fa maifon, car à moins d'une extrême necelli- té il eft défendu à toutes petfonnes de fortir pendant la nuit. Ces rues font bordées de maifons à rés de chauffée, ou qui n'ont qu'un feul étage , on y voit des boutiques ex- trêmement ornées , & qui font un effet admirable. C'eft en cela feul que confifte toute la beauté des Vil- les Chinoifes. Outre la Carte la plus générale qui renferme la Chine, la Tartarie Chinoife , &c le Thibet )ufqu'à la Mer Cafpienne : on trouve ici la Carte de la Chine feule & les Car- tes particulières de chaque Provin- ce avec plufieurs Plans des Villes qui frappent le plus par leurfingu- lirité. Il faut voir dans l'Ouvrage-mc- me la Defcription Géographique de K E , I 7 5 ?• <^2t toutes ces Villes. Cette Bcfci i pt:oii renferme des fingularitez qu'on lira avec plaifir. Enfin ce Volume finit parl'Hi- ftoire Abrégée de cette grande &C ancienne Monarchie. Le Pcrc du Halde montre &c dans fa Préface &: dans un Avertiflement qu'il a misa la tête de cet Abrégé , qu'il y a dû fuivre le fentiment univerfellc- ment reçu parmi les Chinois qui conduifent leur Chronologie de- puis l'Empereur Yao jufqu'au tems prefent. Tous conviennent que Fo hi i été le Fondateur de leur Empire, mais tous ne conviennent pas éga- lement du tems qui s'eft écoule depuis Fo-hi jufqu'à Yao, il fe trou- ve même quelques Critiques qui depuis cet Empereur dont on place le règne 1557 ans avant .]. C. dif- putent enfemble fur la durée plus ou moins longue d'un règne parti- culier ou d'une Dynnftie entière , mais le Père du Halde n'a point cru devoir entrer dans des difcuf- fions qui auroient répandu de la contufion &c de l'obfcuritédans le reftc de l'Hiftoire. Urépond folidement aux objec- tions que quelques Sçavans ont fait contre ce Syftême Chronolo- gique -, &C fur-tout à celle qui eft tirée de l'ordre donné par un Em- pereur de brûler les anciens Livrcf qui contcnoient les principaux m.o- numens de la Monarchie. 11 prouve d'ailleurs que fuivant la Chronologie qu'il adopte la vie des premiers Empereurs de la Chine eft trts-conforme pour la durée à Q.qqq 622 JO URN AL DE celle que l'Ecriture Sainte donne aux hommes de ce temsià ; & s'il eft difficile d'accorder cette Chro- nologie avec la Viilgate , il cfl: du iiîoins fort aifé de la concilier avec les Septante. Or il montre en mê- me tems qu'il eil permis de fuivre cette Verlîon en ce. point, & que plufieurs fçavans Critiques l'ont fait fans qu'on pui(Te les accufer de déroger à l'autenticité de h Vulga:- fe. Comme cer Extrait n'eft déjà que trop étendu , nous nous con- tenterons de dire que cer Abrégé renferme les principales adlions, & le caradere de tous les Empereurs de la Chine depuis Fo-hi jufqu'à Yong tching aujourd'hui régnant. On nous le reprefcnte comme un Prince » très-appliqué aux affai- » res de l'Etat , dont il s'occupe j3 tout entier , il eft ferme &: décilif, 3i toujours preft à recevoir des Mé- 33 moriaux & à y répondre ; il » gouverne entièrement par lui- » même , de fone qu'il n'eft pas » poiTiblc de voir un Maître plus » abfolu , ni plus redouté. Tout 3> aliéné que ce Prince paroifte de » h Religion Chrétienne qu'il a » profcrir dans fes Etats, on ne 3J fçauroir s'empêcher de loiier fon » application infatigable dans le s> travail; il pcnfe nuit & jour à » établit U forme d'un fage gour S SÇAVANS, » vcrnement , & à procurer le » bonheur de fes Sujets : c'cft lui » faiie fa cour que de lui pn.f.nter » quelque projet , qui tende à l'u- = tilité publique , & au foulage- » ment des Peuples ; il y entre auf- »-(I-tôt, & l'exécute fans nul »égartià la dépenfe. Il a fait plu- » fieurs beaux Rcglemens , foit » pour recompcnfer le mérite &C « honorer la vertu , foit pour niet- » rrc de l'émulation parmi les La- » boiireurs , ou pour fccourir les » Peuples dans les années ftcriles ; » ces qualitez lui ont attiré en peu » de tems l'eftime &: l'amour de » tous fes Sujets. Cet endroit , Se quelques autres nue nous avons rapportés , fuffi- lent pour montrer qu'il règne dans tout l'Ouvrage un air de noblelTc & de 'implicite qui donne partout bonne opinion de la hncerité& du jugement de l'Auteur , & à l'égard- de la manière dont tout l'Ouvrage eft imprimé il nous a paru que de- puis long-tems on n'a rien vu qu'oii puiffe lui comparer , foit pour k beauté du papier , la forme du ca- raélere , la netteté des Cartes , l'é- légance des Graveures & l'agréable diftribution de toutes les parties qui Iccompofenr. Nous donnerons l'Extrait du fé- cond Volume dans le Journal fuir vant. NOVEMBRE, 1735-. 62% TRAITE' DU BON CHYLE POUR LA VRODVCTION DV fing , OH l'on voit , outre les caufes ordi)taiyes ^iii le corrompent , plitjîsurs Vj.ilaMes (jit'ofi n'a pas comutes. Il contient atiffi les moyoïs de les prévenir^ & les remeJes pour les guérir. A Paris ^ chez les FieîcsO/mo/it , Librai- res , &c fe trouve chez Jean Zimmerli , Imprimeur à Laufaiine. 1735. deux Volumes i«-i 2. pag. é'jtf. I E N n'eft plus ncce (Taire à la fancé que la bonne dige- ftion. Les alimens mal digères font un mauvais chyle , Se le mauvais chyle fait un mauvais fang. Il eft donc lie la dernière importance de bien condderer ce qui peut nuire à ia digeftion , ou ce qui peut la fa- vori fer i c'eft à quoi M. Viridet, Dodlcur en Médecine à Morge , s'ell appliqué dans cet Ouvrage. Il examine d'abord de quelle maniè- re lesalmicns font préparés dans la bouche , le changement qui leur arrive dans l'eftomac par les diffe- ■ rens fucs qu'ils y trouvent , ce qu'il faut penfer des acides & des alcalis par rapport à la digeftion, ce que c'cll: que les fels volatils de l'eftomac , par quels moyens on diftingue les fels de la falive d'avec les autres , quelle eft la nature du fuc glanduleux de l'eftomac , quel- les preuves on a du fel acide conte- nu dans ce vifcere , fi la digeftion fe fait par les acides, parles alcalis, ou par la trituration , fi elle fe fait par la fermentation , Se autres que- ftions femblables. L'Ouvrage eft divifc en trois par- ties, & les articles que nous venons d'indiquer font le fujet de la pre- inicre : nous parlerons de ceux de la féconde , & de la troilïéme dans un autre Journal. Ce feroit trop entreprendre que d'entrer ici dans le détail de tous les articles de cette première Par- tie ; nous nous contenterons de donner un expofé du premier arti- cle •, cet échantillon fufhra pour mettre les Ledeurs en état de Juges des autres. Nous parlerons donc ici de la préparation des alimens dans la bouche , c'eft-cà-dire de cette prépa- ration qui eft le préliminaiic de tout l'ouvrage de la digeftion , Sc fans lequel il eft impoftlble qu'il fe produiib jamais un bon chyle. L'enfance , l'adolefcence , l'âge mûr , de la vicilleftc partagent la vie en quatre âges ; mais la vie ne parcourroit jamais ces differens âges , fi les alimens ne réparoient tous les jours la diflîpation qui fo fait de la fubibncc du corps ^ diftî- pation fi grande qu'elle forme , dit notre Auteur , une efpece de nua- ge autour de nous , comme on le voit aux miroirs & à l'étain qui forrent des poliiroirs , puifqu'aii moment qu'on les touche ou avec le poulcc , ou avec la paume de la main, on les ternit. Pour réparer cet écoulement continuel de fubftan- ce , le Créateur a voulu que les herbes , les fruits, &c la chair que l'on n;ange , produisît dans nos 62i JOURNAL D corps , une certaine quantité de lait , que ce lait nourrît toutes les parties, Se qu'il fournît les efprits necclTaires pour leur mouvement. C'cft de la produftion de ce lait , que M. Viridet fe propofe de par- ler. Il examine pour ce fujet les li- queurs & les organes que l'Auteur de la Nature a établis pour faire ce grand Ouvrage. Le lait dont il s'agit s'appelle chyle , &c les altmens pour fe con- vertir en cette fubftance laiteufe , reçoivent trois changemens ; le premier fe fait dans la bouche , le fécond dansl'eftomac, le troifiémc dans les inteifins , oij ce lait étant filtré , il entre dans les veines lac- tées qui le conduifent à un canal qu'on nomme Thorachique , d'où il va à une veine nommée axillaire gauche , oii il fe mêle avec le fang qui revient du bras , puis étant porté au ventricule dtoirdu cœur , & delà dans le poumon , il s'y rougit , & circule cnfuite par tout le corps. La préparation des aîimcns dans la bouche fc fait par les dents , les jolies , la langue & le palais. Les alimcns folide's font coupés par les dents de devant qu'on loomme in- cifives , brifés par celles qui font aux cotez , dont les unes font ap- pellées canines , parce qu'elles ref- femblent à des dents de chiens , & les autres machclicres , parce qu'el- les fervent à mâcher. La langue par fes difFercns mouvcmens pouife vers les dtnrs mâchelieres , les morceaux qui s'écartent i les jolies Oïfcmt autant » & la racine de la ES SÇAVANS, langue par Ion épailTeur , empêche les morceaux de couler dans le f o- fier , avant qu'ils loient réduits en pâte. Cette pâte doit erre molle pour parter dans ce détroit; elle le de- vient par le méhn;^e cr'un fuc qui humede la bouche &: qui fort de huit canaux ; notre Auteur déciit ces canaux , & en marque les ufa- ges , après quoi, venant à ce qui concerne la nature du fuc dont il s'agit , il obferve que ce fuc eftcc qu'on nomme falive , que la falivc eft un compofé de parties aqueufes, de fels acides , Se de fouphres cruds , que la partie aqucufe ou fcreufe y eft fort abondante , d'oii il refulte deux effets , le premier de rendre la fahve coulante , & de la; mettre en état d'anofer la bouche , k- fécond d'humedcr les alimena fecs ou durs , & d'en disjoindre les paitics , de manière que cesali'- mens étant féparés en plufieurs mo' lécules , fe dilTolvent plus aifément quand ils font defccndusdansl'e- ftomac. Cette partie aqucufe ou fereufc provient de la férofité du fang , 8c la férofité du fang provient noi» feulement d'e la boiiTon , mais des herbes Se des fruits , ce qui fait que plufieurs animaux vivent & fe por- tent bien fans boire ; notre Auteur rapporte là dcllus l'exemple de ces moutons qu'on tire par des cordes fur des rochers efcarpés , comme eft le Rubléà Rougemont, on les laiiTc pendant les mois les plus chauds & les plus fecs de l'année fur ces rochers , où ila fe noarnf- • N O V E M f;nt & s'cngrallfent fjns boire au- cune forte d'eau. 11 cite encore l'exemple de ces vaches qui, en quelques lieux des Alpes j fournif- fein pludeurs jours du lait en abon- dance , quoiqu'elles ne boivent point. La fraîcheur de l'air que ces sjiimaux refpirent en fe pofant le niann fur des Tertres , contribuent encore beaucoup à cet effet. CLuanc aux fels acides , M. Viri- dct remarque qu'ils font en petite quantité dans la falive, & outre cela fi enveloppés que la teinture desTournefols y fait peu d'impref- fion. Plufieurs Médecins croyent <}ue la falive n'eft acide que dans la vieillelTe ou en certains tempcra- mens , mais notre Auteur prétend qu'elle l'eft dans tous les âges , & en tous les tempcramens ; il appor- te pour preuve de ce fentiment l'expérience: fçavoir que quelque ûlive que ce foit étant mêlée avec de la tarine &c de l'eau , puis pai- tffie , fait lever la pâte. Puis pour montrer que ce gonflement n'eft pas caufé pai des alcalis, mais par des acides , il remarque que le pain où il y a trop de levain eft d'une aigreur infupportable. La falive fait fermenter non feu- lement la parc, maisjufqu'àl'eau- ffiême i M. Viridet le montre par plufieurs exemples : Les habitans du Pérou , dit il , compofènt leur Chica( qui eft leur plus excellente boilTonJ avec la farine du Mays , laquelle ne Itrmcnte point avec l'eau fi une partie de cette farine n'eft mâchée , &c qui quand elle ne fermente point eft infipidc ôc défa- £réabie. B R E , 1 75 j. 62^ Les Brafilicns font boiiillir les racines Aianioc & ^ypi avec une certaine quantité d'cau^ puis ayanr retiré l'eau de deftlis le feu , ils mâ- chent un peu de ces racines & les jettent dans la même eau , cette décodiion fermente alors & de- vient une boiftbn agréable. Dans les Antilles, plufieurs Ca- raïbes préparent leur boilTon avec le Manioc , qu'ils font un peu tor- réfier , & dont ils donnent une partie à mâcher à de vieilles fem- mes i cette boiffon ainfi préparée fermente ôc fait leur boiffon ordi- naire. Les Européans ne pouvant fouf- frir une telle préparation, ont vou- lu faire la même boiffon , fans que la racine fût mâchée ; mais ils n'ont pas réuffî, la boiffon n'a point fermente & elle a été fans goût & fans force. D'autres Caraibes pilent dans un; mortier de la racine de Caflave oa de Patates, ils en mâchent une par- tie , & après avoir mêlé le tout en- lèmble dans de l'eau , ils le font boiiillir & fermenter? Dans riflc Formofa les habitans font un peu griller l'épi du Ris, ils k pilent cnfuite dans un mortier jufqu'à ce que l'épi foir réduit ea pâte , puis ils mâchent de la farine de ris, & la mêlent à cette pâte,qui ne manque pas de fermenter avec de l'eau qu'on y met pour la pai- trir. Cette liqueur étant gardée api- prochc du vin d'Efpagne, & de» vient fi forte qu'elle eny vre. M. Viridet remarque à cette oc^ cafion^que les fruits qui font bouLU- 67.G JOURNAL D ionner Tenu fans le fecours de la falive, prodaifenccet effet, parce qu'ils abondent eux-mêmes en aci- des , & que c'eft pour cela que les fruits fauvages brifés 5: ccrafés font fermenter l'eau dont en plufieurs Pays , les pauvres font leur boif- fon. Il parle ici d'une petite poire commune en Charoilois , laquelle cft d'une aigreur 5«: d'une (lypticité fi grande, que les pourceaux-mêmes ne la pcuvcnrmanger.il dit que cet- te poire étant moulue fait fermen- ter l'eau comme fait le raifin , & qu'elle fournit une boilTon très- agréable j on met des monceaux de ce fruit aux pieds des arbres , & la fermentation que ces monceaux excitent d:.p:. la fève de ces arbres , hâtent la y taturiré de leurs fruits. M- Viridct répond à deux diffi- cultez qu'on a coutume de propo- fer contre les acides de la falive, fçavoir i. Qiie dans l'analyfe qu'on fait de cette liqueur par le moyen du feu , elle ne rend que des fels alcalis : 2. Que quand on fe porte bien on n'apperçoit pas que la fali- ve foit acide. Quaiir à la première objedion , il dit que fi le feu tiroit des mixtes toutes les parties dont ils font compofcs , la difficulté fe- roit bonne , mais que cela n'arrive pas toujours, il le prouve par ce qui fe palTe dans la diftillarion du mouft , d'où le teu ne tire aucun acide , quoique cependant le vin s'aigrilfe fi-tôt que les fouphres qui en enveloppent les acides vien- nent à s'en féparcr : c'eft ce qui fe yoit dans cette malTc blanche qu'on ES SÇAVANS, trouve au (ond des tonneaux , & qu'on appelle la mère du vinaigre ; il répond à la féconde que fi dans l'état de fanté on n'apperçoit pas que la falive foit acide , cela vient non feulement de ladélicatelTe des acides , &; de leur petite quantité , mais encore de ce qu'ils font enve- loppés de parties branchues qui les environnent; Qiie c'eft pour cette raifon que l'on fent le lait doux , quoiqu'il contienne beaucoup d'a- cides , auffi-bien que le miel qui paroît encore pliiy doux , 6i d'où l'on tire cependant un acide qui ronge le fer. Une autre laiion que notre Auteur joint à celle-là , c'eft que la falive ayant coulé dans les parties de la bouche dès L nailfan- ce , a mû le? f;l^-rs nerveux toujours delamèmi. manière , ce qui empê- che d'appcrcevoif fon aâion quand c IL n'eft pas fort vive , ainfi dit il , on vc lemaiyjH. point le mou- vement du cœur , mais bien celui d'ti- m plitme fur la peau , <]uoiqne ice dernier foit beaucoup moindre. Notïe Autfur , comme nous l'a- vons vu plus haut, admet dans la falive des fouphres cruds , il dit ici que ces fouphres non feulement enveloppent la pKipart des acides de cette liqueur , mais qu'ils font la matière de plufieurs changemcns qui fe font dans i'eftomac par le moyen de la fermentation. Ainfi , dit il , quand les fouphres grollîers font en trop grande quantité dans le vin , ils s'accrochent , le vin de- vient gras , & en coulant il file comme l'huile ; mais par le moyen du tartre qui fait bQuilionner le N O V E M B vin , les fouphrcs cuds font atre- riiKS , incifcs , Se le vin devient fpiritucux & agréable. M. Vn-idct compare en cela le fan^; au vin ; c'eft de cetre manière , dit-il, que les parties fpirirucufcs du fang, qui Font une colle blanche au com- mencement des fièvres intermit- tentes , difparoiirent peu à peu, en prenant par fon bouillonnement la couleur rouge du fang, comme on le voir p.îr les faignées que l'on fait pendant leur durée , en forte que les parties de l'iiuile , par un feu gradué , deviennent rouges. Pour Gonnoître combien le changement de ces fouphrcs grof- fîcrs eft neceffaire à la nourriture des parties, M. Viridct veut qu'on iette les yeux fur ce qui arrive dans la maladie nommée Anafarque où la pituite cft en (i grande quantité qu'elle rend le corps monfbrueufe- ment gros , quoiqu'il foit mal nourri , comme il paroît par la maigreur où fe trouvent ces fortes d'hvdropiques , quand on a vuidé cette humeur. Ceft ce qui piroît encore mieux quand ces fucs gluans font des dépôts particuliers. M. Vi- ridct dirlà-deffus avoir fou vent vu le côté droit de la poitrine, épais de trois travers de doigts n'être cou- vert que de la peau le jour fuivanr, parce que le malade s'étoit couché iuï- le côté oppofé. Pour faire voir combien les fou- phrcs cruds font inutiles à l'entre- tien des parties , notre Auteur exa- mine comment la nourriture s'o- père. Cet examen fait un peu per- dre de vue le fujet principal du I^ E , I 7 5 5-. ^27 Chapitre qui a pour titre : delà préparation des alimens d.r-is la hou- che ; mais M. Viridct , ainfi qu'on le voit dans tout fon Livre , n'eft pas efclave de la méthode , & pourvu qu'il dife des chofes utiles, il s'affranchit volontiers des réoics gênantes du ftyle qui veulent qu'on fuivc fa matière & qu'on ne s'écarte jamais. Voici donc com- ment notre Atcur explique le my- ftere de la Nourriture: il penfc que la nutrition s'opère par l'introduc- tion des différentes parties du fani dans les vuides des fibres des muf- cles , dans les vuides des fibres des membranes & dans les vuides des fibres des tendons. Il prétend que ces vuides ou efpaces fe forment par l'écart ou l'éloignement des molécules du fang : Qiiand par exemple, nous croiffons, la chaleur ou agitation naturelle des molécu- les du fang fait, dit notre Auteur , ces petits efpaces , qui fe remplif- fent enfuite. Dans les autres âges, pourfuit-il , les molécules quilesoccupoient font incifés par l'adion des fels acides , ou des fels acres , ce qui eft caufc que ceux qui ont le fang chargé de ces fels font fort maigres, fur-toutquand ils n'ufent pas d'alimcns fucculens; le fang trop agité produit le même effet , ce qui eft caufe , félon notre Auteur, que les bilieux ne font pas replets. Les violens exercices , comme font ceux des gens de la campagne, & de certains Artifans , donnant ' un mouvement confidcrable au fang , ii arrive que ces fels foot-' 623 J OURNAL D plus tortcmcnt pouffes , &c que dé- tachant par cet escès de mouve- ment , un plus grand nombre de molécules engagées dans les vuidcs donc nous parlons , les perfonnes CD qui fe fait ce détachement ou enlèvement de molécules, ne fçau- roient prendre de l'emboinpoinc, quoiqu'elles mangent beaucoup. Quand tous les vuides dont il s'agit font remplis par les molécu- les du fang , le corps fe confcrve dans fon état, comme il arrive dans l'âge moyen -, mais quand il n'y en a qu'une partie d'occupés nous maignffonsou nous vieilliffons, & lorfqu'il y en a encore moins qui foienc remplis , nous tombons dans la décrépitude ou le deffechement., Lorfque les fibres s'affaiffent, comme lorfqu'il y pafle peu d'ef- prits animaux , les parties du fang ne peuvent entrer dans les vuides trop étroits que lai lîent ces fibres,& alors le corps fe deffeche ; c'eft pour remédier à cet accident que dans les parai y fies on fait des fric- tions ; les bains fouphrés bien chauds fervent auffi beaucoup dans ces occafions , félon la remarque de notre Auteur, parce qu'ils di- latent ces vuides , ôi qu'ils en ren- dent l'entrée plus libre aux molé- cules du fang, lefquelles d'ailleurs, par l'adion de ces bains devien- nent plus fines & plus capables de s'infinuer dans les vuides dont il s'agit. C'eft par cette méchanique qu'après de violentes fièvres , oîi la dialcur interne mêlée à l'humide a agité beaucoup le fang , & l'a poulîé dans les vuides dont nous ES SÇAVANS, parlons , les jeunes gens ctoiffent quelquefois confiderablement fur tout en grandeur. Notre Auteur prétend que par une raifon op- pofée les habitans de la Lapo- nie & de la Scriffinie font fort petits , auOi-bien que les animaux du Pays , dont les bœufs ne font pas plus gros que des ânes ordinai- res. Les Romains qui faifoient en tout tems un fi grand ufage des bains chauds & des bains froids , femblent , félon notre Auteur , avoir fait cette remarque , en dé- fendant à leurs cnfans , les bains froids jufqu'à ce que leur raille fiât formée. C'étoit la coutume des an- ciens Germains de plonger dans le Rhin leurs enfans nouveaux nés , ils avoient en cela un fentimcnt bien différent de celui des Ro- mains , M. Viridet a paffé fous f\- lence ce fait , qui auroit bien méri- té quelques reflexions. Les vuides où doivent entrer les molécules du fang , étant differcns entre eux , il faut que ces molécules ayent des figures qui fe rapportent aux en- droits qu'elles doivent remplir; en forte , dit notre Auteur , que les cfpaces ronds , quarrés , ovales ,' angulaires , &c. foient remplis pat des particules qui conviennent tel- lement à ces figures que le courant du fang ne les puiffe entraîner -, car dit notre Auteur , fi leurs cotez ne joignoient pas bien ou que leur fu- perficie y fût trop haute elles pour- roient être enlevées par le mouvcr ment rapide de ce fluide. Au rerte il ne fuftît pas , félon M. Viridet , que les molécules qui entrent N O V E M B etifrent dans ces cavitez foient fi- gurées d'une manière convenable , il faut encore qu'elles ne foient point trop olilf^n tes , (ans quoi el- les s'échappent aifément des en- droits où elles font engagées, M. Viridet dit que c'eft la raifon pour- quoi dans les cacbexies & les pâles couleurs ( où le ferment de l'efto- mac n'agit pas fur ces fouphres cruds ) les parties du corps font bouffies par le dépôt qui fe fait de ces fouphres hors des petits efpaces où ils devroient entrer. Nous paffons ici plufieurs refle- xions de notre Auteur pour venir à ce qu'il dit de i'obftacle que les fouphres cruds oppofent à la fer- mentation du fang. Ces fouphres, remarque-t-il, ne nuifent pas feu- lement à la nourriture des parties lofqu'ils font trop abondans , mais encore au mouvement des parties infenfibles du fang , fçavoir, à la fermentation : »c'cft ce qui fe voit, s» ^/> /7, dans quelques convalefcens » & dans les perfonnes opilées , » dont le poiilx eft mol ôc foible. » Les fouphres cruds des émul- »» fions , continue-t-il ^ produifent » le même effet fur les tébricitans , »( contre le fcntiment de tant de » Sçavans ) parce que ces fouphres «enveloppent une partie des fels 3» qui font le bouillonnement du jj fang , & en bouchant une partie 3» des pores des alcalis qui font trop »> ouverts , lailTent moins de facilité » à ï'Ether d'agiter le fang. C'cft » ainfi que le fuc des cannes à fu- » cre ( qui n'occupe que le tiers du f fond de la chaudière avam qu'on ^ovemb. RE, I 7 î f. <Î2p » allume du feu dcfTous , s'élcve (î 30 fort lorfqu'on en a allumé, qu'il » palTe par dcffus les bords de la "Chaudière , & répandroit de tous » cotez , Il de tems en tems , on » n'y jcttoit une once d'huile ou » de beurre qui le fait defcendre Sc >> l'oblige à reprendre fa première » place dans le tems qu'on l'épure. M. Viridet compare l'effet des fouphres du corps à celui des fou- phres du bois , » qui , étant exaltés " nous réjouiffent par la flamme » agréable qu'ils produifent , mais » qui , quand ils font grofficrs , af-' » foiblifTent le mouvement de nos " efprits , comme il paroît par la » fumée du chaibon, laquelle nous » endort au point de nous caufet "quelquefois un affoupiflcment » mortel. Les fouphres branchus " de la pituite étant bien atténués, "lient feulement les différentes » parties du fang , ils n'envclop- » pent qu'une partie de fes fels , & » ne font ainfi nul tort à la fermcn- » tation ; mais quand ils font trop » cruds & en trop grande quanti- » té, ils arrêtent cette fermentation, » & caufent fouvent des cachexies » mortels. Qiiand les fouphres cruds vien- nent à fe lier dans le fang, ils ne produifent pas des effets moins dangereux , M. Viridet remarque qu'Us s'engagent alors quelquefois dans les carotides , dans les finus de la dure -mère, ou entre la dure- mere & la pie-mere : quand c'eft dans les carotides ils caufent des apoplexies ; quand c'eft dans le cœur j ils produifent des polypes.; R m 6]o J OURN AL DE quand c'efl dans les fiinis de la du- re mère, il s'eniuit des céphalalgies mortelles , quand c'eft entre la dare-mere & la pie-ruere , ce font di'S léthargies. Les dépôts pituiteux , c'tft adi- ré , comme l'entend notre Auteur,, les dépôts de fouphres cruds , pro- duifent d'étranges effets quand ces dépôts fe font fur les glandes : s'ils- fe font fur celles du poumon on devient afthmatique & phthifique. S'ils fe font fur les glandes du mé- zentere,ilcn arrive des fièvres chra- niques •, s'ils fe font danslefoyc , ils caufent des fchirrcs , dcsjaunif- fes i s'ils fe font dans le pancréas & dans la rate , il furvient des affec- tions hypochondriaqiies , & s'ils fe lont dans les reins ,on a desfup- preffions d'urine. De tous ces accidens notre Au- teur conclud qu'il eft tièsnecejfatre ^ue les fouphres cruds foyent incifés & (qu'ils foyent expofss à l'aBion du dif- folvam de l'efomac. Puis revenant à la falive , il en détaille les ufages, qui font i**. de réduire en pâte les alimens folides comme le pain , la viande , &c. i". de tirer la teinture dxs alimens , la- quelle ébranlant les fibres de la langue , produit le icntiment du goût : }". de faciliter le mouve- ment de la langue , lequel eft fi neceffaire pour mâcher &c pour parler : 4°. de prévenir la foif en humedant les fibres de la langue , celles du gofier , 6; celles de l'efto- mac : )°. de diminuer la chaleur de la bouche , & de ramollir la partie fupericurc de i'épiglote : S SÇAVANS, 6°. d'entretenir la flexibilité des capillaires des veines lacSées , Icrf- quc le flic ftomachal vient à man- quer : y", de nctroyer par une peti- te acidité , le corps de la langue , d'entraîner les parties branchucs de l'huile , du bearre , de la graiffe , &c de tous les mucilages qui s'y ar- rêtent. Notre Auteur , après ce détail des effets de la falive , vient à ce qui concerne les foncflions de la. langue : » L'épaiffcur de la langue »en fa partie poftericure étant aug- » mentée par l'aélion des mufcles » qui fervent à fon mouvement, "empêche que les alimens n'en- » trent avant le tcms , dans l'œfo- 3> phage; elle s'abailfe après; ce qui » procure la dcfcente de ces ali- » mens dans l'eftomac. Cet abaiffe- » ment fc iait par l'adion de deux » mufcles qui la dilatent & l'appla- ■Jtiffent ; deux autres la tirent en » dedans avec la pâte dont elle eft » chargée ; deux l'éievent & font » entrer la nourriture dans l'œfo- » phage , où elle çll: pouffée juf- » qu'au milieu parle muftle fphinc- j) terique, & de-là dans l'eftomac, » par les fibres fpirales du même » œfophage , lefquelles augmen- » tent fbn mouvement périftalti- M que. Le canal de l'œfophage eft com- pofé de trois tuniques , l'une inté- rieure , l'autre extérieure , S< l'au- tre moyenne : l'intérieure Ôc l'ex- térieure étant nerveufes & pour- vues de fibres droites , font les ten- dons de la tunique du milieu^ dont les fibres fgiraies & charnues font N O V E M le mouvement pcriftalrique de ce cnnil. La tunique inrcricuve cil ta- pIlFée d'une gumde quantité de glandes & de petits iiicts: ces glan- des humectent le canal , en forte que les alimens réduits en pâte y glilTentplus faciJemcnt. Quant aux filets, M. Viridctconjedure qu'ils fervent à modérer la dcfcente des alimens quand elle eft trop rapide. Dans ceitc defcente du manger &C du boire , on ne peut allez ad- mirer la fituation de l'épiglottequi ne permet qu'à l'air de s'infinuer dans la trachée artère , ce qui fait enfler les poumens : c'eft en imi- tant une économie fi fage , conti- nue notre Auteur, qu'on fait des foufflets à vent , par le moyen d'une nape d'eau qui tombe dans un entonnoir, & qui entraînant beaucoup d'air , oblige cet air à s'échapper par une foupape à côté , tandis que l'eau dcfcend. On peut par cet expofé du pre- mier Chapitre du Livre , juger de la méthode que l'Aurcur fuit dans tous les autres; car elle eft la même par-tour. Il ne nous refte qu'à dire un mot des divers fujcts qui font la matière du refte de ce premier Tome. L'Auteur y parle du charv- gement que les alimens fubifllnt dans l'eftomac ; il y parle de la tu- nique veloutée & des fels volatiles de ce vifcere. Il y enfeigne les moyens de connoître les fcls de la falive , & du fuc glanduleux de l'eftomac -, il efTaye de prouver qu'il y a des fels acides dans l'efto- mac, &c qu'ils font les plus puiftans agcns de la digeftion ; il examine B R E , I 7 3 5. 6^1 la nature de ces acides , Si com- ment ils entrent dans l'eftomac ; il entreprend de montrer que la di- gcrtion des alimens fe fait par la fer- mentation; il explique ce que c'eft, félon lui, que l'appétit ; comment fe fait le mouvement périftaltique des inteftins ; ce que c'eft que la bile &c le fuc pancréatique, & enfin comment fe filtre le chyle par les pores des inteftins. Il remarque que cette filtration ne vient pas uniquement de la conftridion paf- fagere du mouvement périftaltique des inteftins , puifque l'efprit de vin mis dans ces canaux,ne les peut pénétrer quelque compreiîlon que l'on falfc. Il faut donc , conclut- il , qu'outre cette preftlon , les fi- bres fpirales en fe relâchant , ou- vrent les pores des inteftins. Il s'é- tend beaucoup fur ce fuiet ; après quoi parlant de la couleur du chy- le , il dit qu'on ne fçauroit alfurer que le chyle de tous les animaux foit blanc. Il doute que celui des animaux de l'Amé'ique qui man- gent le fruit du J.ifiippa , lequel rend leur chair violette, foit blanc, non plus que celui des perfonncs qui mangent des figues d'Inde , Se donc l'urine eft fi rouge qu'elle nl- larme ceux qui ne connoitTent pas la qualité de ce fruit. On ne peut aftez admirer la fimplicité du chy- le , liqueur produite par tant de fortes d'herbes , de racines , de graines, de fruits , de chairs de toute cfpece , & qui toute fimple qu'elle paroît , fe change en chairs, en tendons , en cartilages , & en os de tant de figures, &c de confiftaii- R r r r i) ou(Tée à une telle ex- trémité , que le Prince ne pouvant plus douter de leurs mauvaifes in- tentions &c de leur infidélité à fon égard , les fit arrêter & condamner à la mort. Il y eut enfuite entre Philippe &c les Achcens d'un côté^ èc les Etoliens de l'autre , pluiîeurs S SÇAVANS. pourparlers au fujet de la paix, qui tut enfin conclue à Naupafte ; après quoi chacun fe retira en fon Pays. Cet événement arriva la mê- me année que les Romains perdi- rent la bataille de Thrafyraéne , ôc Antiochus le Grand celle de Ra- phia. La guerre des Romains &C des Carthaginois attiroit alors l'atten- tion de tous les Rois & de tous les Peuples -, & Philippe s'y trouvoit d'autant plus intereffé , que fes Etats n'ctoient féparés de l'Italie que par la Mer Adriatique. Après les trois viéloires confécutives rem- portées par Annibal fur les Ro- mains, Philippe ne héfita plus à lui envoyer des AmbaiTadcurs, qui étant malheureufemcnt tombés en- tre les mains des ennemis , fçurent s'en tirer adroitement , & conclu- rent un traité avec lui. En vertu de cette Ligue , Philippe équipa une flotte pendant l'hyver pour tranf- porter plus promptemcnt des trou- pes en Italie. Mais s'étant laiiTé fur- prendre par les Romains devant A pollonie qu'il afllégeoit , il y per- dit la flotte , où il mit le feu , &C près de 3000 hommes j & il eut lui- même beaucoup de peine à fe ùur ver. Ce Prince , depuis quelque tems laitToit appercevoir dans fon carac- tère &c dans fa conduite beaucoup de changement qu'on attribuoiç aux mauvais confcils de ceux qui l'environnoient. A cette douceur , cette fagefîe & cette modération qu'il avoit fait paroître jufqu'alors, il tir fucceder la Eerté , la hauteur , N O V E M B l'injuftice, la dureré; & devenu peu fenlible à fa lépuration , il s'a- bandonna fans retenue à la débau- che 6c au dérèglement. L'échec qu'il venoitdei-ecevoir ne fîtqu'ai- grir fon humeur , S: l'on auroit dit que ce Prince vouloit s'en venger fur fcs Sujets & fur fes Alliés. Il fe mit à ravager la Mcffénie contre la foi publique : & pour fe délivrer d'un Cenfeur trop incommode en la pcrfonne d'Aratus, il le fit em- poifonner. Telle fut la fin d'un des plus grands Hommes deforitcms , qu'on peut regarder comme le Fondateur de la République des Achéens , devenue un des plus puilTans Etats de la Grèce ; mais qu'il eut grand tort d'aflTervir aux Macédoniens , en les appellant à fon fecours- Vers ce même tems , Philippe fit une expédition en Ulyrie , qui fut accompagnée d'un heureux fuccès ■■, ayant pris par un ftratagê- me la Ville de LifTus & fon Châ- teau qu'on croyoit imprenable. D'autre part, les Etoliens firent une alliance avec les Romains, à laquelle fe joignirent Attale Roi de Pergame dc les Lacédémoniens, dont Machanidas devint alors le Tyran. Philippe joint aux Achéens ( l'an io8. avant J. C.) battit les Ètoliens en deux rencontres , & les obligea de fe renfermer dans les murs de Lamia. Mais ayant eu du pire devant Elis , où Philope- meh commença à fe diftinguer , il s'en dédommagea en quelque forte par la prife d'un Château , où il fit 4000 prifonnieis , & trouva vingt mille pièces de bétail ; après quoi il retourna en Macédoine , pour s'oppofcr à une irruption des Bar- bares. Ici M. Rollin nous rend compte de l'éducation & des «rran- des qualitezde Philopémen : c'cft un article curieux qui remplit 18 pages , & qu'il faut lire chez lui dans toute fon étendue. Au commencement de la cam- pagne fuivante , le Proconful Sul- pitius & le Roi Attale fe rendirent à Lemnos avec leurs flottes. Philip- pe de fon côté s'avança vers Démc- triade, pour faire face à l'ennemi, foit par terre , foit par mer : & pour pouvoir courir à propos au iecours des Allié-s qui feroient atta- qués , il établit dans la Phocide , dans l'Eubée & dans l'Ifle de Pépa- réthe des fignaux par le feu , & pla- ça de fon côté fur le Tifée, Monta- gne fort haute de Thedalie , des- gens pour les obferver , afin d'être promptement averti des divers mouvcmens des ennemis, & des lieux qu'ils voudroient attaquer. L'Auteur explique ici curieufement d'après Polybe , en quoi confi- ftoient ces fignaux : & pour rendre cette dcfcription plus intelligible,, il a fait tracer par M. Chevalier ProfelTeur Royal en Mathémati- que, la figure de l'Inftrument donc parle Polybe, &ce Mathématicien y a joint fon explication ; fur quoi nous renvoyons au Livre-même. Philippe ne put tirer de ces fignaux toute l'utilité qu'il en attendoit pour déconcerter les entreprifesdc l'ennemi ; & quelle que fût fa dili- gence, il n'ariivoit jamais à tems 6^6 JOURNAt D pour exécuter fes projets. Il dUlî- mula pourtant fon chagrin dans l'alTemblée des Alliés , où il parla d'un ton plein de confiance ; &c après avoir donné les ordres necef- faires &c fait quelques légères expé- ditions, il retourna en Macédoine, pour y reprimer les courfes des Dardaniens , Peuple de fon voifi- nage. L'année fuivante , Philopémen nommé Capitaine général des A- chéens , remporta près de Manti- née une célèbre vidoire fur Ma- chanidas Tyran de Sparte , qui y périt de la propre main de ce Gé- néral. Les Achéens lui érigè- rent une ftatuc de bronze , qui le rcprcfcntoit dans la même attitude où il avoit tué le Tyran , & qu'ils placèrent à Delplies dans le Tem- ple d'Apollon. Au Tyran Macha- nidis en fucceda un autre appelle Nabis j encore pire que lui , fans que les Spartiates fe donnalTent au- cun mouvement pour en pouvoir fecouer le joug. Il avoit pris à fa folde des étrangers tous afTalTins; 8c non content de reléguer fes Ci- toyens , il fit en forte qu'ils ne trouvaiïent , même hors de leur Patrie , aucun afyle alTuré , faifant maffacrcr les uns fur les chemins par fes émilTaires , & ne rappellant les autres d'éxil que pour leurôtei" la vie. Il inventa, pour fes extorfions pé- cuniaires , une Machine que décric Polybe , laquelle rcprefentoit une femme revêtue d'habits magnifi- ques , & qui rcfTcmbloit fort à fa femme. •> Toutes les fois qu'il tai- ES SÇ AVANS, » foit venir quelqu'un pour en tirer w de l'argent ( dit notre HiRoricn) j> d'abord il lui parloir avec beau- » coup de douceur & d'honnêteté » du péril dont le Pays Si Sparte = en particulier écoient menacés » par les Achéens ^ du nombre des "étrangers qu'il étoit obligé d'en- » tretenir pour la fureté de l'Etat ; » des dépenfcs qu'il tailoit pour le = culte des Dieux , & pour le biea » commun. Si on fe iaifloit tou- » cher par ces difcours , il n'alloic » pas plus loin : c'étoit ce qu'il fe » propofoit. Mais quand quel- i> qu'un refufoit de fe rendre , 8c » fe dcfcndoit de donner, ildifoit: » Peut - être n'aj-je pas le talent de » vous -perfH.xder ; mais j'efpere ^ cjn'ApégavoHSpeyfuadera. ( Apé- » ga étoit le nom de fa femme. ) » Apeine avoir il achevé ces paro- n les , que la Machine paroiîToir. »j Nabis la prenant par la main , la » levoic de fa chaife , & lacondui- » foit à fon homme. Elle avoit les » mains , les bras ôi le fein hérilfcs » de pointes de fer aiguës , cachées » fous fes habits. La prétendue » Apéga embrafToit ce pauvre mal- » heureux, le ferroit entre fes bras,' » l'approchoit de fa poitrine, lui » appuyant les mains fur le dos, & » lui faifant jetter les hauts cris. La j> Machine étoit fufceptible de >y tous ces mouvemens , par le » moyen des refforts fecrets , dont » elle étoit compofée. Le Tyran D fit périr de cette manière quanti- 3> té de ceux, dont il n'avoit pii » extorquer autrement ce qu'il dç- » mandoit. Ptolotnée N O V E M B "Pfoloméc-Philopator Roi d'E- gypte étant mort l'an 204 avant J. C Philippe &c Antiochus le Grand fe lignèrent enfenible pour envahir les Etats de Proloméc- Epiphane fon fils , qui fut mis fous la tutelle & la fauve garde des Ro- mains. Philippe fit la guerre con- tre les Rhodiens , fur Icfquels il lem porta un léger avantage dans un combat naval. L'année fuivante, il attaqua le Roi de Pergame , At- talc , j.ufques dans fa Capitale. Mais£n ayant été rcpoulTé , il dé- chargea fa colère fur les l,ieux Sa- crés des environs , qu'il détruifit jufqu'aux fondemens. Il n'eut pas plusdcfuccès contre les Rhodiens, qui le battirent fur mer. Se lui fi- rent perdre près de 1 2000 hom- mes , tant tués que prifonniers : ce qui ne l'empêcha pas de s'attribuer toute la gloire de ce combat. Il marcha enfuite vers la Thrace & la Qiicrfonnéfe , où pluficurs Villes fe rendirent à lui fans refiftance. Mais Abyde lui ayant fermé les portes v il en forma le Siège , ra- conté ici dans toutes fes circonftan- jces ; la prit d'alTàut , 5c y fut té- nioin de la fin tragique des habi- lans, qui périrent par leurs propres mains. Sur les plaintes : en- voyèrent contre lui en Grèce le Conful Manius-Acilius. Antiochus tint à Dcmétriade un grand Con- Ifil de guerre ou Annibal aflilèa. Il y donna de très fâlutaires avis à ce Prince, qui ne fçut pas en profiter. Ayant palTé à Chalcis , il y devint éperdumen: amoureux de la fille de. fon hôte^ ». Quoic^u'Antiochus ES SÇA VANS, » eut plus de 50 ans ( dit l'Auteur) » la pallion pour cette jeune fille » qui n'en avoit pas 20 , fut fi forte T> qu'il refolut de l'époufcr. Ou- » bliant les deux grandes entrepti- »afes qu'il avoit lorniées , la guerre » contre les Romains & la déli- » vrance de la Grèce , ii paifa tout nie rcfte de l'hiver endivertiife- »mens Se en fêtes à l'occafion de » CCS noces. Ce goût pour les plai- " firs palTa aifcment du Roi à tous » ceux de fa Cour, &C fit partout " négliger la difciplinc militaire. Il ne revint de cet afToupiflcment , que lorfqu'il apprit que le Conful Acilius marchoit à grandes jour- nées contre lui dans la Thefillie. lî partit aulîïtôt n'ayant que loooo hommes de fes Troupes & trcs-peU de celles des. alliés ; mais il crut s'être mis fufiifamment en fiàreté contre les approches des Romains , en fe failiffant du pas des Thermo- pyles & s'y fortifiant par de bons- retranchenicns. Les Romains l'y forcèrent ; & blelTé à la bouche d'un coup de pierre qui lui fracaffa les dents , il fut obligé de fe reti- re r^ &c toute fon armée fut mife en dtroute. Cette adion jointe à la prife d'Héraciée par les Romains détermina les Peuples d'Etolieàfe fûû mettre aux vainqueurs. Antiochus retiré à Ephéfc , fé prépara , fuivanflcs confeils d'An- nibal, à combattre par mer & par terre en Alîe & pour l'Afie. Il fit équiper une flatte ci.mfiderabie , dont il donna le commandement à Polyxénide , fortifia divcrfcs Places , pour empêcher lés Ro-- N O V E M mains de pafTct en Aiîe par l'Hcl- îefpont , & envoya fes ordres pour hâter la marche de fes Troupes d'Orient j qui n'étoient point en- core arrivées. Toutes ces précau- tions ne mirent point le Roi hors d'mfulte. Sa Hotte fut battue près du Mont Cory que en lonic par cel- le des Romains que commandoit Livius. L'année fuivarvte { 190 a^ant J. C. ) les Romains donnè- rent le comm.indcmcnt de l'armée deftinée contre Antiochusà L.Cor- nel. Scipion Conful/ous qui fcrvit fon trere Scipion l'Atriquain en qualité de Licutenanr. Arrivés en Etoile , ils fongerent à conduire leurs Troupes par la Theflalie , la Macédoine & la Thrace , pour les faire delà pafler en Afie. Philippe ( dit l'Auteur ) reçut l'armée Ro- maine avec toutes les marques de bonne volonté qu'on pouvoit at- tendre de l'allié le plus fidèle & le plus zélé. Il traita fes illuftres Hô- tes en grand Roi , avec une magni- ficence qui convenoit à leur digni- té & à la fienne , ôc qui fans rien avoir d'excclîlf , ni qui relfentî: le faite Se i'oftentation , faifoit voir par-tout une politcfTe qui n'étoit fas fan* mérite auprès de Scipion Africain. Le ConfuI 5c fon frère ( continue THillorien ) en rccom- ptnfe de la manière noble &: géné- reufe dont Philippe avoit reçu l'ar- inée, lui remirent au nom du Peu- ple Romain , dont ils en avoient jrecu pouvoir , le refte de lafomme qu'il devoir lui payer. D'un autre côté , pendant que la flotte Romaine s'avançoit veis ia B R E , 1753-. 641 Thrace pour favorifcr le pafTage des Troupes du ConfuI en Afic ;, Polyxenide Amiral d'Antiochus défit par un ftratagême Paufiftrate qui commandoit la flotte de Rho- des envoyée au fccours des Ro- mains. Mais les Rhodiens ayant promptement équipé une nouvelle flotte , battirent celle d'Antiochus que lui conduifoit Annibal. Le Roi de Syrie ayant tenté inutilement de mettre dans fon parti Prufias Roi deBithynie, envoya une féconde flotte contre celle des Romains avec âuflî peu de fucccs que la pré- cédente. Polyxenide y perdit 42 vaifleaux , tant pris que briàlés ou coulés à fond. Antiochus confterné par un tel coup retira fort mal à propos des Villes de l'Hellcfpont fes Troupes dans la crainte qu'elles ne tombaf- lènt entre les mains des ennemis , qui marchoient dé ce côté-là pour paiTer en Afie ; au lieu que le feul moyen de s'oppofer à ce paflage étoit de ne point déplacer ces Troupes : î 6^2 JOURNAL DE conftances, qu'il faut voir chez lui. Il luftît de dire que les Romains remportèrent fur Antiochus une viiîtoire dts plus coniplctcts, qui l'obligea de repayer en diligence le Mont Taurus & de regagner la Syrie. Il ne fut pas plutôt de retour à Anrioche , qu'il envoya une kcon- de Ambaifade aux Romains . pour leur demander la paix. Le Conful la lui accorda aux mêmes condi- tions que ce Prince avoit refufées d'abord , c'cft à-dire , qu'il évacue- loit toute l'Alîe en deçà du Mont Taurus i qu'il payt voit à divers ter mes fixés tous les frais de la guerre, taxés à 20 mille talens d'Eubce , évalués par Budé à un peu moins de 45 millions ; qu'il rendroit à Eu- méne les zo takns qu'il lui devoir ; qu'il donneroit lo Otages au gré des Romains ; qu'il leur livreroit Annibal & Thoas l'Etolien , qui avoit le plus contribué à exciter cette guerre. Toutes ces conditions furent acceptées. Ainfi fe termina la guerre des Romains contre An- tiochus , l'an 1 90. avant J. C. Tiois ans après , ce Prince, dans l'embarras de trouver l'argent qu'il devoit payer aux Romains , alla faire une tournée dans les Provin- ces de l'Orient pour y recueillir le tribut qu'elles lui dévoient. Etant dans la Province d'Elymaïde , il apprit qu'il y avoit un grand tréfor dans le Temple de Jupiter Bélus. Sous le faux prétexte , que les Ha- bicans de cette Provmce s'étoicnt révoltés contte lui , il entra de nuit (dans ie Temple , 6c en enleva tou-: S SÇAVANS, tes les richelTes. Le Peuple irrité de ce Sacrilège, fe fou leva contre lui, 6c l'allomma avec (ouce la fuite. D'aurres attribuent ce mtuitrc à quelques uns de les Officiers, qu'il avoit battus un our qu'il étoir ivre. "C'étoit { dit \! Rollin ) un n Prince tort luiiable pour fon " humanité , fa clémence & fa li- j> bcralitc. L'n décret qu'on rappor- » te de lui par lequel il permettoit » à fes Sujets , même leur com- i> mandoit de ne point obéir à [es n Ordonnances Ci elles le trou- » voient contraires à la difpofition » des Loix , marque qu'il avoir un «grand rcfpcd pour la Juftice, » Jufqu'à l'âge de 50 ans , il s'é- » toit conduit dans les affaires avec j> une valeur , une prudence &C » une application, qui avoient faiç » réuflir toutes fes enrreptifes , 6C » lui avoient mérité le titre de » Grand. Mais depuis ce rems , fa » fagelle & fon application avoienC » fort décliné, & fts affaires avoient » pris le même tram. Sa conduite » dans la guerre contre les Ro- » mains , le peu d'ufage ou pKitôc » le mépris qu'il fit des fages con- » feils d'Annibal , la paix honteufç » qu'il fut obligé d'accepter , ter- » nircnt tout l'éclat de fes preH " miers fuccès ; Si fa mort cauféc » par une entreprife impie &facr!- » lége , lailTa à ion nom & à fa méW " moire une tache ineffsejable. Notre Hifl:orien nous donne ici une longue explication des Pro- phéties de Daniel qui regardent ce Prince , ainfi que de celles qui concernent Antiochus - fpiphane N O V E M B R E; î7îr. 3 une efpece particulière , ce n'efl: » pas feulement une voye intro- 3>duite par le Gouvernement Ci- 3> vil pour terminer les procès, c'eft » encore une manifeftation du » Droit Public & des mœurs qu'un 55 Peuple reconnoît pour les fien- 50 nés : c'eft une inftrudlion fur la » règle qu'on fuit dans un Pays, & 3» fur la manière avec laquelle on » doit la fuivre ; c'eft la raifon re- n duite en ufage & en pratique 5 9> c'eft la plus faine explication des M Loix i c'eft la Loi même interprc- 3> tée & conEiméc p»r des cxçm- » pies, L'Auteur a bien prévii que ceux qui ne pouffent pas auftî loin la dé- férence pour les Arrefts rendus fur desefpeccs particulières , ne man- queroient point de lui objeâ;er,quc les Arrefts font des loix à l'égard des Parties entre lefquelles ils font rendus , mais que dans d'autres affaires , ce ne font que des exem- ples , ôc qu'il faut juger par les Loix & non par des exemples. Mais il répond » qu'il faut pour le »> bon ordre qu'il y ait de la foû- » million , parce que tous les bom- » mes n'étant point doiiés du mê- 3» me lens , & n'ayant point la rai- » fon dans le même degré de lumic- » re & d'intelligence , il faut s'a= 3> baiffer fous le joug de l'autorité- ^ » & croire que ce qu'on ne com- n prend pas , n'cft pas moins vrai x> ni moins jufte. Sans cette humble « foijmiflîon , ajoute l'Auteur il 30 n'y a plus de fubordination , ni i> par confcquent de liaifon parmi » les hommes, il y aura autant de »' régies que d'opinions. Cette j» Anarchie dans la morale & dans » toutes les Sciences - pratiques , 6^4, JOURNAt DE » n'ell: pas moins dangereufe que « dans la Religion & dans le Gou- » vernement politique. Chacun i> abonde en fon fens , on juge fui- i> vant fon intérêt & fon amour » propre. Le premier fond de cette gran- de Compilation , eft le Recueil ii'Arrefts rédigé par François Per- rier ancien & célèbre Avocat au Parlement de Dijon, Tout ce que notre Auteur nous apprend de cet Arretifte , c'eft qu'il étoit né à Beaune ^ qu'il avoit peu de takns ppur la parole , mais qu'il exccUoic dans cette partie de l'efprit qu'on appelle la Judiciaire, & qu'il étoit attaché à M. Brulard premier Préiî- dent au Parlement de Dijon , l'un des plus grands Magiftrats qu'ait eu la Bourgogne. Mais notreAuteur n'a point borné -Jàfes recherches fur la Jurifprudence du Parlement de Dijon. Il a eu recours à differens Recueils Manufcrits d'Arrefts, par- ticulièrement à celui de Nicolas Perricr mort au mois de Septem- bre 16^94. Nicolas Perricr né àfaint Jean de Laone n'étoit point parent de François, c'ell celui qui a donné en 1 6 S 8. des Obfervations de Droit & de coiitume, félon l'ufage du Par- lement de Di)on. M. Raviot alTure qu'il ctoit plus fçavam & plus Ju- rifcon fuite que François Perrier , mais que ce dernier étoit plus mé- thodique. La difficulté que Nicolas Perricr avoit à prononcer , l'empê- cha de briller dans la plaidoirie. "Mais il en fut dédommagé par les confultayons ^ où li fut fort em- ployé. 5 SÇAVANS, Notre Auteur a auflî puifé dans les Recueils de MM. de la Marr'ï 6 Mal'êtc , qui ont été des plus fameux Auteurs de leur tems au Parlement de Dijon , & il a pvofi- té des Notes que M. Efpiard h pre- fent Préfidenr à Mortier au Parle- ment de Dezançon , a faites fur le Recueil d'Arrells de Fran.çois Per- ilêr. À l'égard du Recue.il d'Arreïls du Parlement de Dijpn qui a été imprimé à Genève en 1613. & de la fuite du même Recueil qui a pa,- ru en lé'zS. notre Auteur n'a pas jugé à propos d'e^i faire mention dans fa Préface ; apparemment par- ce qu'il étoit convaincu de ce que dit M- Bouhier dans la Vie de Job Bouyot , qu'il y a dans fa Collec- tion plus de travail que de choix & de difcernement , que les efpeces fur lefquelles les Arrefts font in- tervenus n'ctoient point rapportées exadlcment, qu'il a écrit avec fl peu de netteté qu'il eft difficile de s'affurer des propofitions qu'il a voulu établir , & que quelques- unes des dattes de ces Arrefts fc font trouvées fauffes. Ce qui a fait fûupçonner que les Arrefts qu'il a cité? pouvoient être taux. M. François Perrier donne dans fon Recueil un précis des faits fut lefquels les Arrefts qu'il rapporte ont été rendus , & il rapporte un précis iti moyens employés pat les Parties. Les Arrefts compris dans ces deux Volumes font au nombre de 5 jo , le premier eft du mois de Janvier ï66y & le dernier du 2-1 Aouft 1699. Les Obferva- tian; N O V E M B tîons c'c M. Raviot font r.prcs cha- que article de Fr.mçois Pcrrier. Ce Xont des efpcces de DilTcrtations dans lefqueJles l'Auteur parle non feulement de la qucilion fur la- quelle rArreft cft intervenu , mais encore de ce qui a rapport en gé- néral à la matière traitée dont la qucftion jugée fait partie. L'Au- teur ne s'y propofe pas moins d'ap- profondir les queltions que de rap- porter les Arrefts du Parlement de Dijon fur la même matière qui ibnt venus à fa connoiflance. L'Au- tcur a travaille fuivant le goiii d^ns lequel Brodeau a fait fes Additions aux Arrefts de M. Louer. On a communique à M. Raviot des Notes fur fon Ouvrage , qu'il a fait inférer toutes entières à la tête de fon premier Volume, il y a joint des véponfcs à ces Notes , & de nouvelles additions. On ne pçuc douter qu'un pareil Recueil ne puiffe être utile à ceux qui veulent s'inftruire de la Jurifpiudcncc ac- tuelle du Parlement de Dijon. HISTOIRE GENERALE DES DROGVES SIMPLES ET xompofces ^ cnntcn mt dans les trois clajfes des Végétaux ^ des Animaux dy des Minéraux ^ tout ce i^ui eji l'ohjet de la Thyjicjue , de la Chymie , de Itt rharmacie^ & des Arts les plus utiles à lafocieté des hommes. Ouvrage en- richi de plus de 400 figures en taille-douce , &c. Par le Sieur Pomet ^ Marchand Epicier & Drogiiifle. Nouvelle Edition, corrigée , & augmen- tée des dofes , & des iifages , par le Sieur T omet fils , Apothicaire. A Paris, chez Etienne (jrfWMWj & Louis-Etienne G'îw^» , rue S. Jacques aux Armes de Dombes. 1735. deux Tomes m-^. Tom. L pag. 30^. Tom. IL pag. 40^. L'O N dit dans l'AvcrtiiTcment de cette nouvelle Edition , ç^u'elle a d'ajfez. grands avantages fur la précédente pour ne les devoir pas oublier , ii que A'f. Poinet le fils Apothicaire k S. Denis , ayant apris ^u'on étoit difpofé à réimprimer l'Ou- iirage de fon père , a bien voulu com- muni^uer les obfervations cfu'il avait commencé à y faire depuis plu fe tirs années i C[\\on les a jugé d'autant plus importantes^ (jue c'étaient comme autant de Supplémens , cjui faifeient connaître les propriétés de plufieurs J)roffues , dont fm M. Pomet avait dit peu de chofe , CT leurs dofei dam Novemh, les différentes maladies. Ces obfervations au rcfte qu'on ditqueM. Pomctlc fils a commu- niquées, fe reduifent à dix-huif, ea voici quelques-unes. M. Pomet le pcrc , en parlant à\i femen contra , autrement dit, poudre à vers , ne dit autre cho- fe de l'ufage de cette graine , finon qu'elle eft fi familière qu'il n'eft pas neceffaire d'en marquer l'ufage ; il ajoute feulement que comme elle ert amere ^ on la couvre de fucrc & qu'on en fait ce qu'on appc lie Bar- Icdine : M. Pomet le fils obferve U-deffas que » pour les vers il fauC T 1 1 c 6^6 JOURNAt D jj réduire la graine en poudie , & 3D la prendre dans quekjiie liqueur » convenable , depuis un demi- 3J fcrupule jofqu".. urc dragme , ou »>bien la prendre en boL M. PoiTiet le perc en parlant du Lnmmi , oublia de remarquer que cette fcnitncccft incifive ôi aperi- tive , «Se que la do!e en eft depuis demi-drarmc 'ufqu'i une ; M» Po- mcrle filsTuppléeà cette onun;on. M. Poniet le pcre , n'a tien dit de la plante ou racine que les Ja- ponois appellent ^'/i, les Sauvages C^nna, itsCh\no\% G ingging. M. Pomet le 61s fupplée à cela par l'obfervation fuivante qu'il dit lui avoir été communiquée autrefois par M. Bouidelot Médecin ordi- naire du Roi. » Le Ging-ging eft une plante 3» ainfi nommée par les Chinois , à » caufe qu'elle a la forme d'un » homme qui ouvre les jambes y » car ils appellent un homme 3>Ging. Elle approche aflez de la => Mandragore par fa racine, mais «elle eft plus petite , & fes feuilles 38 font voir qu'il la faut mettre fous » un autre genre , le Père Martini, 3 qui n'avoit vîi que la racine , en »» fait une efpcce de mandragore »> dans la defcription qu'il en don- » ne dans fon J4das de la Chine ^ » m.iis il eft tombé dans cette cr- »reur , pour n'avoir pas pu voit » de fes feuilles , comme il l'avoue 3» lui-même -, fa racine devient jau- 3» narre lorfqu'elle eft feche. Elle a> n'a prcfquc point de fibres ni de s» filamcns par où elle puilTe tirer ?» fa liiJurïiture ; elle eft toute par- ES SÇAVANS. » femcc de petites veines noire? » comme fi on avoir rire ces lignes »>avfc de l'encre. Quand on k ■*> inrLCi'e elle cû défagréable à cau- »fcde h douceur mclce d'un peu >» d'amerrume. Elle augmente » beaucoup les elprit;, vitaux i » quoique îa dofe rc foit au plus 3> que de d>uv fcrupuks. Si on en »pr nd un ^^eu davantage elle re-' :» donvc des foTLLS aux perionnes 5» débiles , & excite une chaleuK » agréable dans le corps. On s'en » ieit quand elle eft paffce par le =0 bain-marie , car elle rend une » odeur fuavc. Ceux qui font d'u- » ne conftirution lobufte &chau-; » défont en danger de leur vie s'ils M en ufent trop , à caufe de la gran- » de effervefcence qu'elle excite » dans les efprits. Mais elle eft mi-; » raculeufe pour les gens débiles ^ » ôi pour ceux qu'une longue ma- «ladie ou quelque autre accident a » épuifé. Elle reft itue tellement les »> efprits vitaux aux moribonds jj, j> qu'on eft alors aftez de tems >» pour pouvoir fe fervir d'autres » remèdes , & recouvrer la fanté. Notre Auteur répète en cela ce qui a déjà été redit par plufieur* autres. Il remarque au reftequela racine de Ging-ging eft comme la panacée des Chinois , mais qu'elle n'eft pas commune en France , ni même en Hollande , & que cette grande rareté eft caufe que la plan- te dont il s'agit, fe vend extrême- ment cher, il dit qu'il en a fait ve- nir d'Amrterdam , qui lui a coûté 2Ç liv. l'once, & qu'il ne s'en eft jû trouver que dans une feule hou- N O V E M B êique. M. Pomct donne ici la del- cription de cette phnte -, fa racine étant mife en terre , poiifTc une ti- ge qui devient haute d'environ un pied , & greffe à peu près comme la tige du bled ; il en fort des feuilles à peu - près femblablcs à celles du violier , après quoi naif- fent par boutons, des fl.urs rouges, lefquclles à mefure qu'elles s'cpa- nouiflenc , iai(Tcnt voir fix feuilles blanches , difpofccs par trois. Le Journal de Siam f.iifant men- tion de la racine de Nifi rapporte que » le Ging-ging eft une petite sj racine qui croit dans une Provin- ï> ce de la Chine , & qu'il n'y en a a> dans aucun autre lieu du monde. » Son principal effet , cft de re6li- i> fier le fang , & de rcndie les for- » ces à ceux qui les ont perdues. On » met de l'eau dans une talfe, on la a» fait bouillir àgros bouillons, on » y jette les racines de Ginfeng cou- ï> pées par petits morceaux , puis » on retire la talfe que l'on couvre » bien , & quand l'eau eft devenue » tiède, on la boit feule le matin n avant que d'avoir mangé i on y> garde le même Ginfeng , & le j» foir on fait bouillir de l'eau enco- » re une fois ; mais on n'en met 55 que la moitié de la taffe , on y » jette le même Ginfeng , on cou- » vre la taffe , & quand l'eau eft 5» d'une chaleur modérée , on la » boit. Enfuite on fait fecher le »mêmc Ginfeng au Soleil , & fi » l'on veut, on peut le faire infufer «dans du vin, & boire ce vin. On 35 met la quantité de Ginfeng à pro- » portion de l'âge de la pcifonoe R E , I 7 ? y. C4.J » qui s'en doit fervir. D-puis dix » ans , jufqu'à vingt , on en prend » chaque fois , le poids de la nioi- » tié d'un foang di demi , & de- » puis trente ans jufqu'à foixante & » dix , Se même par-delà , on en y prend le poid d'un mavon. Notre Auteur avertit ici que les nids d'oifraux de la Cochinchiiie -y étant mêlés avec du Ginfeng , font admirables pour les fiuffes & bons pour la fanté. Voici la préparation qu'il en donne : il faut choifir une poule d'eau dont la chair & les os foient noirs, la bien vuider & né- toyer , puis prendre des nids d'oi- fcaux , les amolir avec de l'eau , les déchirer par petits filets , y ajouter du Ginfeng coupé par petits mor- ceaux, mettre le tout dans le corps de ia poule, dont on coût le fonde- ment , puis enfermer la poule dans une porcelaine , que l'on couvre exadcment , & que l'on met dans une marmite pleine d'eau , enfuite faire bouillir cette eau jufqu'à ce que la poule foit cuite, laiffer la. marmite fur les cendres chaudes , pendant la nuit , &c manger la pou- le le lendemain matin , avec tout ce qu'on y a mis dedans , mais la manger fans fel ni vinaigre, puis fe bien couvrir pour favorifcr une fueur qui furvient quelquefois. Le P. Laffitau Jefuite , a donné un pe- tit Traité du Ginfeng en 1713. & nous en avons fait mention dans le Journal de la même année 17 13. M. Pomer dit qu'on peut auffî manger du ris cuit à l'eau avec les nids d'oifeaux & le Ginfeng , puiî doimii après. T t £ t i; 6^^ JOURNALD Il dit en fuite un mot de l'orge mondé, de la racine de Ronas , de celle d'Aninga , de la racine Bri- tannique , de celle d'Elfaye , du Moxa de la Chine , & de la maniè- re de préparer les bayes de Geniè- vre ; il finit fes additions par l'hui- le d'Affalifc-phœnia. Voie', ce qu'il dit fur ces deux derniers articles. Jidaniere de préparer les Bayes de dnlcvre. » Prenez telle quantité qu'il 3» vous plaira de graines de petit » Genièvre , bien meures , bien » choifies , & fechées à l'ombre : » lavez-les dans de l'eau de fontai- 3» ne , les frottant tout doucement » entre vos mains , pour en ôter 3> la pouflîere : lorfqu'clies feronc » bien nettes , expcfcz-les au So- ES SÇAVANS, « leil , & les y laifTez jufqu'à ce » qu'elles foient feches. Puis met- » tez les dans une terrine verniiréc» » jettcz par deiTiis , de l'eau d'An- » gclique , ou de Scoifonairc , oit » de chardon uni , ou de Scabieu- )' fe , jufqu'à ce que les bayes en- M foyent couvertes. Lailicz - les => tremper 24 heures ^ pour leur » faire perdre le peu d'amertume = qu'elles ont. Cela tait , frottez- }> les entre vos mains , uns les écra- "fer , & les mettez eaiuite fecher » au Soleil. M. Pomet ne dit point quel ufa- ge il faut faire de ces bayes ainfi préparées ; mais il y a de l'apparen- ce q\Je c'eft pour en mâcher de tems en tems quelques unes i car elles font fort ftomachiques. Voilà tout ce que nous avons pu tirer de cette nouvelle Edition. NOVVELLES LITTERAIRES. ALL EM AGN E. De L e I p s I 3C. SCriptores rei Ruftica veteres Lci- titîi Cato , Varro , Columella , Palladius i cjuibus intnc accedit Ve- getius de MuloMedicina & Gar- gilii Marrialis Frag'tnentum , cim Editionibit! pyope omm^us ô" 2lda- nufcnptis plunliita collât':. yidjcB£ notie y'iroritm CLtrif. Ltuegra. inm edi- tatiim inédit (S & Lexicon Rsi Rujii- c£. Curante Jo. Matrhip. Gtfncro , Eloqii. & Poef. F P. Gocttlng. Lipfiro. SumptibiiS Cafpari Fritfch. 173 c.- JW-4''. deux voL ANGLETERRE. D' O X F O R D. Xe'/inphontis de Cyri expeditiopK Libri fepteni. Graca recognovit , cur/i Codiahtis Alanufcripiis & omnihits fer-: Lihris editis ccntuiit ^ phrinis in locis emendavit , Verjlonem Latinam refonnavit , ohfervationibu^ fit:s^ Ta- bula Geograplnca & Dijfertatioire tîHxit & illuJtravit^NoMs H, Stepka- N O V E M fâ , Leunclavli , t^. Parti & A4u- rcli recenfitas & cafligatas , varian- t'ium Lrlliormm deUElum , irtdiceftjue neccjf.irios adjitKxit Thomas Hiit- chinfon. è Theatro Sheldoniario. in - 4". De Cambridge» M. Richard Daives Membre du Colleç;t d'Emmanuel , qui a entre- pris une Traduâiion en vers Çrecs du Parafas perdu de Mdton ^ fe propofe de la faire imprimer par Soufcriptions, De Londres. Roherti-Ste^hani Thefaurus Lin^ gHiz Latina. Editio nova , prioribus multo auclior & emendatior. Ty- fis & impenjis Samudis Harding, J734. in-folio ^ 4. vol. HOLLANDE, D'A M 3 T E R D A M. A^h. Seba LocHpletijfimus Renim Natitraliimi Thefaurus ^ &c. Tom. fecundus. C'cftàdire : Defcription exafle des CuriofneT^ Naturelles du riche Cabinet d'Albert Seba, avec de magnifiques figures en taille-douce. Tome fécond. Chez J. Ufetflein & Guil. Smith, iii^.in-fol. On trouve chez les mêmes Li- braires H KAlNtf AIAGh'KH. No- vum Teftamentum. Pofi pnores Ste- ph(i»i CurcelU , tam & DD. Oxo~ B R E ; I 7 5 j: ç^^ nienfinm Labores ; ^uibus parallela Scnptiira Loca ^ me non variantes LeEliones ex plus C. AJSS. Codd. & Anticjuis vc'fionlbus coIUUa exhihen- tur, ylccedit tantus Locor. Parallel. numerus , cjitantum nulLi adhuc , ac nevix cjuidem ipfaprofert prHe valorem aut origi- nem ad xLiii. Canones examinât G. D.T. M. D. cum ejufdemprolegome- nis ¬is in fine a.'jcEiis. Editio al- tcra, priori auUior ai^ue emendatior,. 1735. /«-S". PAYS-BAS. D' A N V E R s. '^Ela SanUorum ylugufli ex Latt- nis & Gracis , alia'-un:^Xj dont le dernier T'huons eft le Poty- ^f d'Homère : fept , dans la 21^ ou des Tanites : neuf, dans la vingt- deuxième ou des Bubiiftites : parmi lefquelsil y en a dix anonymes : 4 dans la vingt-troihème encore des Tanites , fous le premier defquels^ Pcmbaftes on place la 1'^ Olympia- de : un dans la vingt-quatrième ou des SaiteSj qui eft Bocchoris:tro\s dans la vingt-cinquième ou des Ethiopiens , qui font Sabacon , Sé- "véchos ( ou Sué ) & Tarcos ou Ta- râca. Il refaite du calcul des années qu'ont régné tous ces Rois , que Séfoflris a commencé fon règne 264 ans après Mifphragmutofis ; Se c'eft juftement à ce tems- là , c'eft - à - dire , à la quatriè- me année de la Judicature de Ja/r^ chez les Ifraëlites , que tombe le commencement de la guerre des Ammonites. L'Auteur s'engage à prouver dans la fuite que Séfojirts étoit Ammonite , & fut le conqué- rant fous lequel l'Egypte , la Palc- ftine &: la Syrie demeurèrent en fervi^ude pendant 18 ans : mais il croit neceiïaire auparavant de taire- ^;S JOURNAL D mieux connoître les Rois Paftcurs en général , & de difcuter plufieurs qucftionsquiks regardent. Il examine donc d'abord fi les 3 5Roisqu'il vient de retrouver, ont été des Rois Pafteurs Se ont palîé pour tels chez les Egyptiens -, ce qui rendroit tort douteux le paffage de Manéthon qui alfure que fous Aîifphr.^.gmuthojîs les Pa- rieurs furent entièrement chaiTés de l'Egypte. Mais M. Fourmont traite de chimérique ce fentimenc de Manéthon, fur ce principe; que l'Egypte a toujours été attaquée par des Peuples Nomades ou Pa- fteurs , tels que les Ethiopiens , les Libyens , les Arabes, les Iduméens, les Ammonites , &c. lefqucis y ont fait des conquêtes & porté le diadème. Uagite en lecond lieu la queftion , fçavoir , s'il y a eu un Royaume des Ifraelites en Egypte, S>c fi les defcendans d'Ephiaim y ont détrône les Monarques de Ta- Tiis \ comme l'ont avancé MM. 'Bot- vin l'aîné & Pcriz,o»ius , dont il ex- pofe ici les deux Syftêmes que nous ne détaillerons point i après quoi , il décide la queftion négativement, appuyant fa décilion iur divcrfcs preuves qu'on peut voir chez lui , & s'appliquant à refoudre toutes les objeâions. Vient après cela une troifiéme queftion , fur l'âge ou le tcms de Scfoflris. Eft-il le Séfac de l'Ecritu- re pofterieur à Salomon , comme le foiàtiennent M.irshAtn , les Percs Petau & SoHciet , & Neivton ? Eft- il Contemporain dcs.Iugesd'Ifrael, comme l'ont cru le Pete Pel^on &c ES SÇ AVANS, Périzonins ? Eft-il antérieur à Moy- fe , du tems d'Abraham ou de la Captivité d'Egypte > L'Auteur , après avoir parcouru les preuves alléguées, pour conftater ces diver- fcs opinions , Se les avoir réfutées pied à pied ( fur quoi il ne nous eft pas polFible de le fuivre ) fixe le règne de Séfojins non avant Moyfe, comme le Pcre Toumemine , & le Père Abraham , &c. non du tems de Moyfe, comme V Jpri us \ non immédiatement après jofué , com- me le Père l-éiaii ; non du tem* d'Eglon , Roi de Moab , ou du tems de Jabin , comme Périz.onius ; non immédiatement après Débora, comme le Père Pezjron -, bien moins du tems de Roboara , comme Aiarsham , Bochart , Neiuton j beaucoup moins encore du tems d'Ezéchiel, comme l'a cru Cape/le^ mais abfolument du tems des J uges d'Ifracl &c précifémcnt la quatriè- me année de Jair , lorfque les If- raelites gémiftbient fous la fcrvitu» de des Ammonites. L'Auteur tonde ce fcntiment fut trois preuves , que voici. La pre- mière cft tirée du véritable nom de Séfojlris , qui eft Séihos ou Setho/is , èc qui fignifie Prince de Seth en Egyptien. Or Seth^en Grec Séthron^ qui eft le Nome Séthrorie , confon- du par quelques Auteurs avec Pé- iufe, appartenoit alors aux Ammo- nites par droit de conquête ; ainfi Sethofts ou S èfoftri s ctoït Prince des Ammonites. La féconde preuve cft fournie par le nombre des an-, nées que les Dynaftics mettent en- tre Aiifphntg7nnihojïs &c Séehofis , &c qui D E C E M qui cft de ié'4. le nictne à peu de chofe prts qui fe trouve entre Moyfe contemporain deA'fifphrag- rriitthofis & Jatr , Juge d'Hracl. L'Auteur emprunte ù troilîéme preuve de la difl.mce entre Séfijiris & Tanos ou Taràca ^ où fini lient les Dynallics des Rois Pafteurs. Or cette diftance telle que la donnent les années des Dynallics ne diffère que de trois ans de celle qui refulte des autres calculs Clironcl: 'Tiques; &<. une différence (i légère; r méri- îe nulle attention. L'époque de Séfojlris une fois dé- t-erminée par l'Auteur , 5>.' qu'il doit confirmer plu? bis par de nouvelles preuves , lui ell; d'un «rand fecours pour h\er la guerre de Troye. Il tait plulîcnrs recher- ches lur les tems des Juges d'IiVael, fur la variété qui fe trouve dans le total de leurs années qui vontà 300, 480 Ck 450 , fuivant les Livres des Juges , des Rois &: des Acfles des Apôtres •, & il reconiioît que pour ces recherches les Dynaftics font de plus fùrs guides qu'Hérodote Se que Diodorc. Il découvre le viai tems des migrations d'Ina- chus , de Danaus , & de quelques autres : S< tout cela remplit le X^ Chapitre de ce Volume. Dans le onzième il ell queftion de difpofer félon l'ordre le plus convenïble les Dynaftics qui re- ilent à arranger : &: c'eft ce qu'exé- cute M. Fourmont avec toute la fa- eacité poffible , en fixant le tems de la Reine Nitocris qui regnoit 49 ans après la fortie d'Egypte , &: par elle celui de tous les Rois Thé-, Décemb. D R E , I 7 î 5. 6^9 bains nommés dans le canon d'tra- tùfthcne. Il confirme fon Syftême par 5/^///^ qu'il prouve être le mê- me i\\\Ojtns ou Efùi , & pir S:!iofi. Kermès^ qu'il foûtienr être Scfflris^ pour l'époque duquel il pioduit ici de nouvelles preuves , aufquelles nous renvoyons , & par Icfquelles il pnoi^ q^i'Amménémèf le cinquiè- me Roi de la dix-neuvième Dyna- ftie des Diofpolites ou Thébains eft le Mcmnon de la guerre de Troye. Des Dynaftics, l'Auteur ( ch. i i.) palTc aux Colonies Egyptiennes iC Phéniciennes , & il s'efforce de dé- broiiillerl'Hiftoirc de Cadmus,cel- les de Dardanus , de Cécrops , de Periée, d'Ogygès & de Deucalion, où il (emble que l'on n'ait rica compris. Il parle de la venue des LéUges S? des Pélafges , & prouve que ceux-ci n'étoient point diffe- retis des Philiflins. Il regarde Cad- mus & Dardanus comme contem- porains , fortis l'un & l'autre de l'Egypte ou de la Phénicie Egyp- tienne , avint Danaus , long-tenis avant les conquêtes de Séfujïris , 8c lorfquc fon ayeul Gcfongofés , pre- mier Roi de la douzièaie Dynaftic affujettiffoit fes voilîns. A l'égard d'Ogygès & de Deuca- lion, il propofe trois queftions, & les refout: fçavoir 1°. fiOgvgès&: Cadmus font le même homme ? 2". Suppofé qu'ils foyent differens, de combien Ogygès ctoit-il anté- rieur à Cadmus? 3". Quelle diftan- ce doit - on mettre entre le Déluge d'Ogygès 5c celui de Deucalion î Sur la première queftion , notre Auteur prend contre Stillingficct le X X X X 63o JOUPvNAL D parti de la ncG;arive. Sur la féconde queftion , il fe perfiudc qu'Ogygés n'eft autre que 1'^^'?^ Roi Amaié cire , dont il eft tait mention dans la Prophétie à% Balnam , & qui fe vit obligé de quitter fcs Etats , & de fe réfugier en Grèce , trop pour- fuivi par les autres Princes de la Race A'J^mdec. Quant à la troilié- me queftion, il décide que la di- ftance entre les deux Déluges clt de 25Z ans. On peut voir fes rai- fons ; car pour abréger nous fom- mes contraints de nous réduire à une fimple indication fommnire des faits difcutcs dans le rcfte de ce Volume. Au regard de Cécrops , notre Auteur le croit bien pofterieur à Inachus &; à i£gialée , î?c je le fait pas remonter jufqu'à Moyfe : ôC pour Perfée , il le fait vivre & ré- gner la feiziéme année de Samfon. Les Léléges &c les PéLifges ( félon lui) font une même Nation , & proprement des Coureurs Phtliflms d'origine , comme leur nom le fait voir , qui alloient porter les armes pour les uns & pour les au- tres y ou qui , dégoûtés de leur Pays , cherchoient des terres plus fertiles & plus commodes. L'Au- teur, au fujet de l'origine de ces Léleges , de ces Pélufges èc des Spartiates ou Lacédémoniens, s'eft rencontré fans le fçavoir , avec le Père Toiimemine dans une DilTerta- tion de ce fçavant Jcfuite dont M. Fourmont nous donne ici l'extrait, qu'il faut lire. Il t.^che , dans le Chapitre fui- vant { XIII, ) de réhabiliter les ES SÇA VANS, Rois de Sicyone ( qui paflfcnt pour fuppolcs , ainfi que les Dynafties Egyptiennes) ^ de faire voir i", que ces Princes font trcsrécls ; 1°, d'indiquer la place qu'ils doivent occuper dans la Chronologie. Il croit donc que le Royaume de Si- cyone remonte depuis la dernière année de Thuoris Roi de la dix- neuviémc DynalHe Egyptienne,ou depuis la hn de la guerre JeTroye, jufqu'à la première année à'n^gia- lée premier Roi de Sicyone ; ce qui fait l'efpace de 7^0 ans : d'où il eft clair ( dit il ) c^u'^y£gialés a quitté la Piiénicie lors & à caufe des guerres àOJîis ou Efaii , com- me Inuchit^ l'a quittée enfuire, lorf- que celles à' ^maie^j lifu du même Efaii l'y obligèrent. L'Auteur ( chap. 14. (5" 1 5. ) paf- fe en revue les Rois de Tyr & de Sidon, ceux de Damas ou de Syrie, ceux d'Arménie , d'âpxès Moyfe de Choréne \ ceux des anciens Perfes jufqu'à Alexandre , félon Texeira , Afirchund 6c les autres Auteurs Perfans & Arabes-, ceux d'Arabie , depuis fes premiers habitans juf- qu'à Mahomet : il nous donne des Liftes de tous ces Rois , & les ac- compagne d'Obfcrvations Criti- ques, Hiftoriqucs, & Chronolo- giques , qu'il faut lire dans le Livre même. A tous ces Rois Orientaux fuc- cedent ici ( chup. iô. ) ceux d'Af-. fyrie, pour l'arrangement defquels les fçavans Chronologiftes ont faic tant d'efforts inutiles, taure d'avoir pu tîxer une époque lufte aux pre- miers tenis de ces Rois j. en forte D E C E M que quelques - uns de ces Sçavans les ont abandonnés comme fabu- leux. i> Mais fur quel rondement » l'ont-ils fait? ( dit notre Auteur ) » le P. Pezion ( continue - t- il ) » n'a pas mal prouvé que le Cata- » logue des premiers Rois d'AlTy- » rie n'étoit pas une Pièce forgée à » plaifir. On voLidroit (pourfuitil) "des Rois plus illuftres ; maison j> le voudroit dans des (îccics , où » la plupart des Rois déroutes les » Nations n'étoienr que àcsDyn.t- '>y?« , & plutôt des Juges que des » Rois. Cette taçon de gouverner » n'a t elle pas duré chez les Grecs » jufqu'à la guerre de Troye & mc- » me au-delà , comme cela eft clair >' par l'Iliade Ik rOdylîée Se par » tous les Tragiques ? " Il prétend que ceux qui ont regardé ces Rois d'Alfyrie comme fuppofés ne l'ont fait que par l'impuilfance où ils fe trouvoienr de les placer ; au lieu que les Liftes de ces Rois nous ve- nant des Auteurs les plus refpec- tables , leur arrangeinent Si leur accord pour le tems de leurs rè- gnes avec les Princes voifins n'a dû paroître difficile que faute d'exa- men. La Monarchie AfTyriennc , l'une des plus anciennes que nous con- ncilîîons , remonte certainement jufqu'à Nemrod & à Chus ; & Ba- bylone en étoit l'ancienne Capita- le. Les Rois dont il eft iciqucftion font 1°. lesChaldéens , au nombre de fepti2°.IesArabes, au nombre de fix -, & 3°. les AfTyricns au nombre de 41 dont le dernier eft Tonos- Coticoleros ou Sardanapde : en forte B R E , 1 7 5 ;. c^i que la durée des règnes de tous ces Monarques eft de '15,52 ans. Mais Je détail de tous ces règnes fait naître de grandes diiîiculrcz , donc les plus emb-irraHantes viennent non feulement de l'incertitude où l'on eft fi dans ces Dynaftics il n'y en a point de collatérales , comme dans celles de l'Egypte ; fi IcsCo- piftes n'auront point confondu ou répété mal à propos les noms fcm- blables de pUificurs Princes : nuis encore de l'énorme variété des Chronclogiftes dans l'application de quelques - uns de ces noms à ceux qui fe trouvent dans l'Ecritu- re ou dans les Hiftoriens Profanes. Notre Auteur fait fur toutes ces difficultcz de courtes Obfervations qui tendent ou à les faire mieux fenrit , ou à les exténuer -, &: de ce genre font fes remarques Gramma- ticales fur les étyjTiologies des noms de ces Rois Àllyriens , qu'il découvre prefque toutes dans les Langues Orientales , bien loin de les aller chercher dans la Langue Giéque. Mais il reconnoît toujours combien il eft diflîcile d'arranger cette longue fuite de Rois , quiou remontera trop haut , où dcfcen- dra fi bas qu'elle ne pourra s'accor- der avec aucune autre Hiftoire. Il n'a garde de palier fous filencc les moyens employés pour faciliter cet arrangement par MM. Scvin Se Frèret dans leurs DilTertations im- primées parmi les Mémoires de l'a- cadémie Royale des Infcriptions & Bellei-LetiresTom. Ilî.fng. 343. C^ 7j6^.TomJ''.pag. 331. Il nous don- ne ici un Extrait de ces deux Pie- X X X X ij 662 JOURNAL I> ees , qui prcfcntcn; ci;ux SyftcmcSj fur lefqutls notre Auteur nous fait parc de Ces reHexions. Elles confi- dent à nous dire i o, que les preu- ves de M. Serin peur Le tcnis de Ninus & de Sémirutrj'-s , ont paru trop foiMcs à notre Auteur pour l'obliger de foulcrite à cette opi- nion : 2.°. que !e Svllcmc de M. Fréret ^ quoique plein d'érudition Chronologique S<. de fubtilité, p.i- loît augmenter ks doutes au lieu de les diminuer. Nous évitons d'entrer fur tout cela , dans un dé- tail qui nous mcncroit trop loin. M. Fourmont conclut de toutes ces reflexions , que ni M. Sev'm^ ni M. Fréret , ni le Peie Pci.ron , ni aucun autre n'ayant encore rien éta- bli de bien confiant fur la Chrono- logie de la Monarchie AfTyrienne ; il doit lui être permis , comme .î eux , de propofer fes con)e(flures , qui peut-être paroîtront fondées , éc jetteront quelque lumière fur ces premiers teins., en fixant du moins des époques ; ce que les au- tres Chronoiogucs n'ont encore pià faire. Il s'agit dorrc pour cela ( félon lui ), 1°. de diftinguer jS'il eft pof- iihie , K'S Princes étrangers d'avec lès véfitabk-s AlTyricns: 2°. de trou- ver des points fixes & inébranla- bles , d'où l'on puilfe monter & dcfccndre^ Pour ce qui efi: du prc- niier article il regarde cammePtin- ces^trangers non feulement y^rius & Seihiis , qu'il prend pour Sefo. jiris ^ mais de ^\k\^^ Xerxès^ Jliélo- chus , Balàaiis. , & phisbas yéfcuta- des ^ &: tous les autres jufqu'à M(~ ES S ÇA VAN S, thrsHs. Qiiantau fécond article, ■>! établit dans la Chronologie A (Ty- rienne quatre points fixes, dont oa devoit (dit-il) s'appercevoir , & qui font i". Anus , i°. Séthus , 5". Teittamos ^ ^.Sardanapale. Sur qiioi nous renvovons à fes preuves, ainti qu à laTable Chronologique dref- fte en confequcncc, di. où paroif- fent coUareralement faire chafl'er de l'Empire. Pendant un Ç\ long efpace d'années lesChirois fcu's de tous les Peuples ont vil le Trône Impérial occupé fans int(.rruptioi-! par 21 di'^.r mes Familles. Us compter.t ij.^ En'pc- reurs Chinois qui ont régné fuc- ceflïvement iiiiqu'à l'invadon du Roi Tartare qui s'empara de la Couronne il y a environ S 5 ans, & qui a donné jufqu'ici à la Chine trois Empereurs de fa Famille. Ainlî la Chine a cet avantage fur les autres Nations du monde , que pendant près de 4000 ans elle a été gouvernée prefque toij|ours par les Princes naturels du Pays avec la même forme d'habits , de mœurs, de Loix & de manières , fans avoir jamais rien -changé à ce que fes an- ciens Lcgiflateurs avoient fagement établi des la nallfAncc de l'Empire. Les Empereurs Tartares loin de changer les Loix & les Coutumes qu'ils ont trouvé établies dans la Chine ont obligé leurs anciens ES SÇAVANS, Sujets à s'y conformer. Ils fefont vus dans la neceliké de s'3p[>liquer à l'étude , afin de pouvoir entrer dans les Charges , & ne font pro- mus aux derniers degrez non plus que les Chinois , qu'après avoir donné des preuves de leur capacité dins les Lettres, fuivant l'ancien uirge de l'Empire. L'Auteur traite enfuite de l'é- tendue de la Chine , de l'autorité de l'Empereur , de fes dépenfes , 6z fes revenus , de fes équipages , d.; la magnificence de fon Palais & de fon ciitcge. Lorfqu'il fort, rien n'égale ic rcfpedl que les Chinois ont pour l;ur Empereur , ils le ref- pr.lent comme une Divinité, ils ne lui parlent jamais qu'à genoux. y Chaque Semaine ou chaque mois » il y a des jours fixés où tous les «Grands doivent s'alfcmbler en » habit de cérémonie dans une des " Cours du Palais pour lui rendre «leurs hommages. Quoiqu'il ne " paroi iTe pas en perfonne , ils fe » courbent jufqu'à terre devant "fonThrône. S'il tombe malade , " Hc qu'il y ait à craindr; pour fa » vie , l'allarme eft générale , on a » vu alors les Mandarins de tous » les Ordres s'alTembler dans une » vafte Cour du Palais , y palier le » jour & la nuit à genoux , pour » donner des marques de leur dou- » leur , & pour obtenir du Ciel le » retabliitemcnt de fa fanté fans 51 craindre ni les injures de l'air , ni » la rigueur de la faifon. L'Empc- » reur fouffrc , cela fuffit , tout n l'Etat fouffre dans fa pcribnne , B E C E M B Il cfl: vrai que l'Empereur lui- même affcdre une grande tendrelfe pour l'es Sujets. C'eft un prmcipe qui cft né avec la Monarchie que l'Eta: eft une grande famille, qu'un Prince doit être à l'égard de Tes ■Sujets ce qu'un pcre de famille eft à l'égard de fes cntans. Il eft , félon l'idée ëc rcxprelTion des Chinois ^ {e p:re & la mère à" fcs Peuples , & s'il fe rcndoit indigne de ce titre , il tomberoit dans la haine & le mé- pris, aufli n'oublie- 1 il rien pour marquer l'amour qu'il apourfon Peuple ; fi quelque Province cft af- fligée de calamitez il s'enferme dans Ton Palais , il leûne , il s'inter- dit tout plaifir , il lui procure des fecoursabondans, & employé dans {ts Edits les tetmes les plus énergi- ques , pour exprimer l'inrcrct qu'il prend au bonheur de fes Sujets. Il faut voir dans l'Auteur même tout ce qui concerne la magnificen- ce & les richcfles de l'Empereur de la Chine. L'article qui regarde la forme du Gouvernement de cet Empire, les differcns Tribunaux , les Mandarins , les honneurs qu'on leur rend , leur pouvoir & leurs foniflions offrent une infinité de chofes finguiieres , dont il ne nous cft pas pollîble de faire l'Extrait. Tous les Tribunaux font com- pofés d'un pareil nombre de Chi- nois & de Tartares ; ce fut un trait ide politique dans les premiers Em- pereurs de cette Nation , ils voulu- rent faire entrer leurs anciens Su- jets dans l'adminiftration de l'Etat, fans mécontenter les Chinois , qui avoient eu lieu de k plaindre, û on Décsmif. RE; 1 7 î jT. 66j les eût exclus des Charges de l'Em-; pire. L'cfpritde douceur qui caradfcri- fc le Gouvernement Chinois fc ré- pand dans tous les Membres nui le compofent , & oblige ceux qui ont quelque autorité dans les Provin- ces à traiter avec bonté & humani- té tous ceux qui vivent lous leur dépendance. Si un prifonnicr vient à mourir dans la prifon , il faut une infinité d'attclLitions qui prouvent que le Mandarin n'a pas été fubor- né pour lui donner la mort, qu'il cft venu le vifitcr lui-même, qu'il a fait venir le Médecin , qu'il lui a, fourni tous les remèdes convena-, blés , O c. car on doit avertir l'Em- pereur de tous ceux qui meurent dans les prifons & de la manière dont ils font morts. Lorfqu'on craint que la récolte ne manque ou par la fcchereffe, ou par l'abondance des pluycs , ou par quelqu'autre accident , comme par la multitude des Sauterelles , qui inondent quelquetuis le Pays. Alors le Mandarin du lieu , foie par affection , foit par intérêt, met tout en œuvre pour marquer com- bien il eft fcnfible aux malheurs du Peuple, il ne paroîr occupé que de trouver les moyens d'y remédier; il ordonne un jeune général , Se quoique pour la plupart ils déte- ftcnt les idoles de Fo & de Tao , ils vont à pied contre leur coutume dans leurs Pagodes , faire certaines cérémonies Se lesoflrandcs ordon- nées pour fléchir la colère cclefte. Comme chaque Mmdarin tient 4ansfon diftriift la place de i'Emr y y y y 662. JOURNAL DE perçut qui n'eft pas , difent Jes Chi- nois , fcukmenr Empereur pour CTouvenicr , &c Ponrite pour facri- fîer , mais encore Maîirc pour en- fei^ner , le Mandarin, à fon imi- tation , le premier & Je 1 5' de cha- que mois , alTcmblc le Peuple , &C lui fait une ample inibudion fur des fujrts qui Ibnr marqués en \6 Ordonnances de l'Empereur. Le Pcre du Halde a cru devoir nous donner ici un difcours fait par un Mandarm fur le troifiémc fujec propofé dans ces Ordonnances , îcavoir que l'union règne dans les ' ^ULrcres , c'eft le moyen d'en bannir les querelles & les procez. Ce diftours mérite d'être lu , il' eft plein de force ^ de bon fens , & fî )'ofe ainfi parler , d'une certaine onâiion très propre à faire impref- lîon fur la multitude. Qiiand il arrive quelque vol ou quelque aflalluiat, (i le Gouverneur du heu ne découvre pas les vo- leurs , il cftdclbtué de fa Charge , êi s'il fe fait un parricide , on dé- pouille tous les Mandarins du dé- partement , c'efl leur faute , dit on, ce malheur ne ferait pas arrivé, s'ils Avaient veillé avec plus de foin aux bonnes mœurs. Cependant il ne faut pas croire que tous les Officiers fuivent con- ftamment les Loix qui ont été fai- tes pour rendre les Peuples heu- reux , il y en a toujours un grand nombre qui trouve le moyen de les éluder &c de furprendre les Tribu- naux fuperieurs , 6i l'Empercur- même. On paffc dans Taiticie fuivant à S SÇAVANS; ce qui regarde le Gouvernemenî militaire , les forces de l'Empire , les Fortere lies , les gens de guerre, leurs armes , &; leur artillerie. Comme il y avoit autrefois enFran- ce des Chevaliers d'armes , & des Chevaliers es Loix , il y a à la Chi- ne des Dodeurs lettrés & des Doc- teurs Militaires , le Gouvernement politique de l'Empire roule fur les premiers , & les féconds font defti- nés aux fondions purement guer- rières. Il y a parmi ces derniers comme parmi les Mandarins lettrés ,. trois degrez par Icfqucls ils doivent paf- fer pour arriver aux premiers em- plois , le degré de Bachelier, celui de Licentié, celui de Dodeur aus armes. L'Auteur explique com- ment fe fait l'examen qu'ils font obligés alors de fubir & quels en font les Juges. L'Empereur a plus de fept cens mille hommes de guerre toi'ijours fur pied , outre plus de dix-huit mille Mandarins d'armes pour les commander. Mais , dit l'Auteur , » outre que les Chinois font natu- «rcllcmentmoux , & que les Tar- » tares font prefque devenus Chi- » nois , ces troupes ne font guère* " aggucrries. La longue paix dont » on jouit depuis long-tems à la » Chine , la préférence qu'on y » donne aux Lettres fur les armes, » (Se fur tout l'éducation grave & » férieufe qu'on y donne .i la jeu- » nefTe , n'eft guércs capable de ••» former des guerriers. C'eft à regret que nous palTons l'article où ion expliqucla police D E C E M B de la Chine , loic dans Jcs Villes pour y maintenir le bon ordre, foit dans les grands chemins pour la fureté , &c pour la commodité des Voiageurs des Douanes , des Po- ftes , &c. Nous ne dirons rien non plus de l'article où il s'agit de la nobleHequi eft d'autant plus fingu- liere qu'elle ne s'accorde qu'au mérite , & qu'elle n'cft point héré- ditaire dans les familles , fi on en excepte la feule famille de Confu- cius. Dans l'ordre du Peuple , les La- boureurs tiennent le premier rang, afin d'augmenter l'cftime que les Chinois ont naturellement pour l'agriculture ; l'Empereur va lui- même tous les ans à certain jour marqué , labourer un champ. Il y trace quelques filions , & y femc plufieurs fortes de grains. Nous renvoïons fur cela à l'Auteur-mê- me , auflî-bien que fur ce qu'il dit de l'induftrie des Artifans, & de celle du menu Peuple. » Comme il » n'y a pas dans tout l'Empire un » pouce de terre inutile , aulîî n'y » a-t-il perfonne ni homme ni fem- D me , quelque avancé qu'il foit en »j âge , quelque incommodité qu'il » ait , fût-il fourd ou aveugle , qui » ne gagne fa vie. L'intérêt eft le grand mobile du Peuple Chinois & leur donne un génie fouple & inventif qui les rend propres à tout , 6c capables d'imiter avec affez de perfedion nos Montres , nos Pendules , nos armes à feu , & les autres chofes rares qui leur font apportées d'Eu- rope. Le Père du Halde prétead î^ E , r 7 j y. (^^^ que les feuks Loix qui défendent leluxe, & l'habitude où l'on eft à la Chine depuis le peuple julqu'aux plus grands de mener dan;: l'aue- rieur de la maifon une vie limpk & frugale , empêchent les Ouvri^Ki les peuples de la Chine de faire éclater la magnificence & le bon goût qui règne dans nos meubles , ô: dans nos logemcns. Ce qui a rapport au Gouverne- ment politique de la Chine finit par divers articles où l'on touche , ce qui concerne le Commerce, la Police , les mœurs , les ufages & le Cérémonial des Chinois ; tout eft ft fcrupulcufement réglé parmi eux jufqu'au devoirs les plus communs de la Société , que ce n'eft pas une petite peine pour un Empe- reur d'apprendre les cérémonies qui fe pratiquent dans les vifites, dans les repas & dans les autres oc- currences de la vie. Il ne faut pas oublier que tous ces articles font remplis d'eftampes parfaitement bien gravées qui mettent fous les yeux une infinité d'objets curieux que l'imagination ne pourroit fc reprefentcr que difficilement. Oi\ trouvera aufll des Mémoires autant inftruclifs que curieux fur le ver- nis ^ la porcelaine ,fur les foyerics, ëc fur la manière d'élever 6c de nourrir les vers à foye. Comme les Sciences font les dc- grez neceflaires pour parvenir aux honneurs & aux dignitez. Le Perc du Halde nous donne une idée très-étendue de ce qui compole la Littérature Chinoife , mais pour le faiïe avec plus d'ordre , il commen- Y y y y ij ^7o JOURNAL D ce par nous faire connoîrre le véri- table caraiflere &; le génie de la Langue Çhinoifc v il montre com- me en doit prononcer & écrire les tfjS^ Chinois en caraâeres d'Eu- i^^ ; quoique la Langue Chinoife ne foir compoice que de mots indé- clinables , & tous monofyllabes , ielle ne laiffc pas d'avoir la Gram- maire & fes régies comme on le verra dans l'Abrégé qu'on en trou- ,ve ici. . Ce fujct conduit l'Auteur à ce ^ui regarde IV ncre , le papier , les pinceaux j l'Imprimerie, & la re- iicnre des Livres parmi les Chinois. Il tire ce qu'il dit fur le papier d'un Ouvrage Chinois qui parut fous b première Dynaltie; loin de pou- voir donner un Extrait de toutes les matières interelTantcs dont ce Volume eft remplira peinepouvons- nous fimplement les indiquer. Rien n'eft plus admirable que ce qu'on lit ici fur la manière dont on fait étudier les jeunes Chinois , fur les divers dcgrez par où ils palfent, ÔC fur la rigueur &i le nombre d'é- xamens qu'Us ont à fubir pour par- venir au Doâorat ; on en prendra une idée d'aurant plus jufte que le Père du Haldc place à la fuite de cet article l'Extrait d'un Livre Chi- nois qui traite des Ecoles publiques delà Chine, &; des matières qu'on y doitenfeignerà ceux qui afpirent aux degrez ■■, il eft difficile de lire cet article fans fouhaiter qu'on a- doptât dans nos Univerfitez quel- ques-uns de CCS ufages. Dode & Dodeur deviendroicnt peut être dans notre Langue des mots iino-; çimea. ES SÇAVANS, Les deux Traitez dont nous ve- nons de parler , & plulleurs autres dont on trouve ici le précis , font comme les préliminaires de~la Lit- térature Chinoife ; elle confifte dans l'intelligence de ces Livres qu'ils appellent King, Ce font comme leurs Livres Canoniques. Ils en comptent cinq du premier ordre & quatre du fécond. Le Ptre du Halde non content d'en donner des En traits , nous donne encore La traducftion de cer- taines pièces qu'il a jugées avec ral- fon dignes de la cuuofîté des Lec- teurs , telles font en particulier plufieurs Odes à la loiiange delà Vertu, & des Hommes lUuftres de la Chine. Pour donner une idée de ces pie- ces nous tranfcrirons ici l'Ode yÂO" la perte du genre humain. » Je levé les yeux vers le Ciel, » il paroît comme de bronze. Nos » malheurs durent depuis long- " tems : le monde ell: perdu. Le cri- » me fe répand comme un poifon » fatal : les filets du péché font » tendus de toutes parts : & Von » ne voit point d'apparence degué- » rifon. » Nous avions d'heureux champs, »> la femme nous les a ravis , tout » nous étoit foiâmisj la femme nous nz jette dans l'efclavage. Ce qu'elfe »hait , c'eft l'innocence , ce qrf'el- » le aime , c'cfl le crime. ï> Le mari fage élevé l'enceinte' » des murs , mais la femme qui » veut tout fçavoir , les renverfe. » O I qu'elle eft éclairée , c'eft un » oiTcau dont le cti eft funcâe -. D E C E M E * elle a eu trop de langue ; c'eft l'é- » chelle par où fontdefcendus tous «nos maux. Notre perte ne vient » point du Ciel, c'eft la femme qui » en eft caufe. Tous ceux qui n'é- * coûtent point les loix de la Sa- :o gcfle font fembhbles à cette mal- i> Hcureufc. ^ Elle a perdu le genre humain , » ce fut d'abord une erreur &: puis » un crime : elle ne fe reconnoît » feulement pas, & dit : qu'ai- je » tait ? . . . . " Le Ciel jette fes filets , ils font » répandus par-tout : l'homme eft j> perdu ; voilà ce qui m'afflige. » Le Ciel tend fes filets, ils ne font 35 pas loin : c'en eft fait , l'homme 3> eft perdu \ voilà ce qui fait toute 3» ma triftefte. » Ce ruifTeau fi profond a une » fource , d'où il eft forti ; ma dou- » leur lui reflemble , elle eft pro- » fonde , & elle vient de bien loin. » 11 n'a plus ce qu'il polTedoit 5> avant fa chute , & il a envelop- 3> pé tous les enfans dans fon mal- » heur. O Ciçl ! vous pouvez feul y » apporter remède , effacez la ta- 30 che du pcre 5c fauvez la pofte- 9' rite. Il s'eft fait une infinité de Com- ïnentaires fur ces Livres Canoni- ques ^ les Lettrés en font leur prin- cipale étude. Mais en général , on peut réduire leur Science à fix principales, fçavoir la connoiftan- ce de leur Langue qui ayant 8o milles caraderes , c'eft-à-dire , 8o mille mots eft une étude fans fin , ia Philofophie , foit naturelle , foit ^noxale , les Mathématiques ^ gc R E ; 175 j: ^7, fur-tout l'Aftronomic , la Médeci- ne , l'Hiftoire & la Poeiîe , mais en général ils s'attachent particu- lièrement à la connoifTance de leur Langue, des Loix , de l'Hiftoire & de la Philofophie Morale , parce que ces Sciences font abfolumcnt neceftaires à ceux qui veulent s'é- lever aux premières Charges. Il n'y a point de Science fur la- quelle ils aient plus écrit tk qu'ils aient plus approfondie que la mo- rale prifc dans fa plus vafte éten- due , pour tout ce qui peut contri- buer à mettre le bon ordre dans un Etat &c dans les particuliers qui le compofcnr. Pour s'en convain- cre , il fuffit délire le Recueil cu- rieux qu'on verra ici à la fuite des Livres Canoniques. Il contient les Ordonnances , les Difcours & les reflexions de ce qu'il y a eu de plus grand , de plus habile & de plus éclairé dans les différentes Dyna- fties, foit parmi les Empereurs, foie parmi l'eurs Miniftres , ces Pièces roulent principalement fut le bon , & le mauvais Gouvernement , fut l'application à l'agriculture, furies moïensde foulager les peuples, fut l'art de régner , fur la guerre , fur l'avancement des Lettres , fur le refped filial , fur la Religion , &c. La plupart de ces Pièces font ter- minées par de courtes reflexions de l'Empereur Cang-hi , Prince fi ha- bile en l'art de régner, qui les z tcntçsàn pinceaurouge ^ c'eft-à-dire de fa propre main. Notre Auteur joint à ceReeadî deux Extraits très-dignes de l'atten- tion des Lei^eurs , k premiei eft $12 JOURNAL D une Compilation faite fous la Dy- naftie des Aîyng qui a précédé im- médiatement la Dynaftie régnante, cet Ouvrage, comme le précédent, peut être regardé comme un corps de Politique , &; le fécond ell ntc du Livre intitulé les Femmes lllu- flres , &c montre que fous diffcrens reines les Dames Chmoifcs fe font conduites , & ont gouverné leurs familles félon les lages maximes qui font répandues dans les Ecrits dont on vient de parler. Cette ef- ES SÇAVANS, pcce de Tradition tera aifément connoître qut les principes fonda- mentaux du Gouvernement Chi- nois établis par les premiers Légif- lateurs fe font toiiiours maintenus par une obfecvation conltante, & qu'ainfi il n'eft pas furprenant , qu'un Etat fi vafte & fi étendu , ait fubfifté depuis tant de ficelés , & fubfifte encore d^ns tout fon éclat. Nous parlerons dans le Journal de Janvier 17}^. du Tome III. HISTOIRE DE CE QV I S'EST PASSE' DE PLVS mémorable en Angleterre fendant la Fie de Gilbert Burnet , Eisètjite de Salijbitry. A la Haye , chez Jean Néaulme. 173 5. in-^". deux Volumes Tome I. pag. 866. Tome II. pag. 756. TOUT ce qui eft contenu dans le premier Volume de cette Hiftoire avoit été imprimé pour la première fois à la Haye, chez Jean Néaulme en 1715. on l'a réimprimé enfuite en 1727. fous le titre à'Hiftoire des derniè- res Révolutions d Angleterre , tra- duite de l'Anglois de M. Burnet Evêque de Salifbury. Le pre- mier Livre de la première Partie de cet Ouvrage qui fut publiée en J7ZJ. contient un état des affaires d'Ecolîe depuis le règne de Jac- ques L julqu'au commencement du règne de Charles II. les quatre Livres fuivans comprennent ce qui ^ paru de plus mémorable à M. Burnet dans l'H.ftoire des règnes de Charles IL & de Jacques IL aïq- (\ le premier Livre n'eft propie- ment qu'une Incroduâion à cette Hiftoire^ & ce premier Volume qui renferme les deux premières Par- ties , n'eft qu'une réimpreflîon. Il n'en eft pas de même du fécond Volume qui renferme auiTi en deux Parties l'Hiftoire du règne de Guil- laume III. & celui de la Reine Anne jufqu'à la fin del'annéei7i3, les reflexions que l'Auteur a ajou- tées à l'Hiftoire de fon tems , contien- nent des avis qu'il donne aux An- glois de tout état & de toute con- dition. Ce fécond Volume finit pat la Vie de l'Auteur qui a été écrite par M. Thomas Burnet fon fils.' Nous en allons donner le précis. Gilbert Burnet naquit à Edim- bourg le 18 Septembre 1^43. fon père qui étoit Cadet d'une Maifon confiderable dans la Province d'A- berdéen , avoit bit long-tems la profeflîon d'Avocat. Comme il étoit attaché à l'Ordre Epifcopal, & à la perfonne de fon Souverain , D E C E M B il fut exilé trois fois , & il fut obligé de vivre au retour de fon dernier exil , avec obfcurité dans fon bien , jufcju'au retabliffement de la Famille Royale , qu'on le fit un des Lords de la ScOion , c'cft à- dire , ConfeiUer de la Cour Sou- veraine d'EcoiTe pour l'adminillra- tion de la Juftice. La mère de no- tre Aurcur étoit fœur du fameux Jonllon , autrement le Lord War- rifton qui dans le tems des guerres civiles le mit à la tête des Prtfbyte- riens. Notre Auteur eut fon père pour premier Maître. A 1 âge de dix ans, il poffedoit la Langue Latine ^ à 14 ans il étoit Maître es Arts. Les pre- mières vues qu'il eut en fortant du Collège d'Aberdéen furent de fui- vre le Barreau. Il étudia pendant une année le Droit Civil & les Loix Féodales. Mais l'année fui- Vantc il fe deftina à l'état Ecclefia- •ftique , & il étudia l'Ecriture Sain- te & la Théologie. Il y ajouta l'Hi- ftoire : on aflure qu'il donnoit alors quatorze heures à l'étude par jour. A dix-huit ans Gilbert Burnet fe prefenta à l'examen de propo- iant ou de Prédicatcur.C'efl; le pre- mier pas que font en EcolTe ceux qui fe deftinent au Miniftere , tant dans l'Eglife Epifcopale , que dans la Prelbyterienne. Après trois mois d'épreuve , il fut admis au nombre des Prédicateurs. Mais il ne voulue pas fe charger fi jeune d'une Cure , quoiqu'on lui en prefentât une qui étoit d'un revenu confiderabk. Après la mort de fon père qui arri- "tva en 1661, M. Naim Miniibc de R E, 175 j-. ^7^ l'Eglife Abbatiale d'Edimbour" le choidt pour Propofant. Ce Pa- fteur , l'un des plus iamcux Prédi- cateurs du Pays , prcchoit fur le champ , il accoutuma fon Propo- fant à fuivre fon exemple. La faci- lité qu'il acquit de parler fur le champ lui fit par la fuite beaucoup d'honneur dans des occafions im- portantes. M. Burnet quitta la place de Propofant de l'Eglife Abbatiale d'Edimbourg pour faire des voïa- ges à Londres , dans les Provinces Unies , & en France ; il fit connoif- fance dans ces differens Pays avec les perfonnes qui fe diftinguoient par leur érudition , & il fe confir- ma en Hollande au fujet de la Re- ligion , dans un efprit de Toléran- ce _, qu'il appelloit le fentiment d'une charité univerfelJe. De re- tour en Ecoffe , il prit polTcflion de l'Eglife de Saltoun , où l'on af- fûte qu'il rempliflbit tous les de- voirs d'un bon Pafteur avec beau- coup de zèle. Ce fut peu de tems après qu'il fit paroître un Mémoi- re , où après avoir propofé les plus forts argumens en faveur de l'Epif- copat tiré des Livres de S. Ciprien &c des autres Pères des premiers fiécles de l'Eglife , il foûtenoit que les Evoques ne fuivoient pas dans leur conduite les règles que les Saints Pères leur prefcrivoientr Les chagrins que lui attira cet Ecrit, l'engagèrent à fe renfermer, dans fa retraite plus qu'il n'a voit fait atipa-! ravant. Cependant on l'en tira pour l'employer en qualité de Commif- faiie de l'Eglife Epifcopale , dans ^74 JOURNAtD un projet d'accommodement entre cette Eglife & la Prelbyterienne. Ce tut alors qu'il fit connoilTance avec h Ducheffe d'Hamilton , qui toute Prelbyterienne zélée qu'elle étoit, vouloit palfer pour modérée. Le Régent de rUnivcrtité de Glaf- gow qui vit M. Buinet à la cam- pagne chez la DuchclTe d'Hamil- ton , conçut tant d'eftime pour lui qu'il lui fit donner la Chaire de "Théologie de l'Univcrfité. Sa pa- tience tut mife à de grandes épreu- ves pendant qu'il remphiroit cette Place. Les Prelbyteriens zélés le hailToient , parce qu'ils craignoient qu'il ne fit triompher le parci Epif- copal , ôi les Epifcopaux ne le pou- voient fouifrir , parce qu'il ne croïoir pas qu'il fût permis de per- fecuter les non Confonnirt:es. Etant protelfeur en Théologie , il continua d'aller à Hamilton , où il examina toutes les Pièces qui avoient rapport au Minil^ere du pè- re & de l'oncle de la Duchelfe ; il Bt même un voïage à Londres pour profiter des inllrudtions que lui promettoit fur ce fujer le Duc deLauderdile qu'il reconcilia avec le Duc d'Hamilton. On lui propo- fa pour recompenfe de cette négo- ciation un Evêché en EcolTe , mais comme il prévoïoic les embarras qu'une pareille Phce caufoit dans l'état où étoient les affaires , il ne crut pas devoir l'accepter. Etant de retour en Eco lie , il époufa Mar- gueritte Kennedi fille du Comte de Catfilles , qui comme la Du- cheffe d'Hamilton avec qui elle fe trouvoit fort liée , étoit déclarée ES SÇAVANS, pour les Prelbyteriens , fans avoir néanmoins un zélé outré pour ce parti. Peu de tcms après il publia fa Defenfe de l'autorité de la ConfU. tiition & des Lotx de V Eglife c^ ds la Couronne d'Ecoff;. Il y foûtenoit l'Epifcopat, mais il y condamnoit en même tems toute rehftancedans les cas où il ne s'agit que de Reli- gion. Cet Ouvrage parut dans des circonftances fi favorables qu'oa lui offrit encore un Evêché ea EcolTe qu'il refufa. Ayant tait un voïage à Londres, en 1^73. pour faire imprimer les Mémoires des Ducs d'Hamilton, il eut l'honneur de s'entretenir avec Charles n. £^ avec le Duc d'IorK , depuis Roi d'Angleterre. Il fe con- duilît en cette occafion en mauvais Courtifan , ayant parlé avec trop de liberté. Cependant le Roi le mit au nombre de fes Chapelains, & on lui permit de taire imprimer les Mémoires des Ducs d'Hamilton. Enfuite il retourna à Glafgow. Mais le Parlement d'EcotTe n'ayant point tuivi les intentions de la Cour , le Duc de Lauderdale accu- fa M. Burnet d'avoir été fous main l'inllrument de toutes les oppofi- tions qui avoient été faites aux vo- lontez du Roi. Il fut obligé de re- tourner à Londres en 1674. où le Roi qui voulut bien entendre ce qu'il avoir à dire pour fa juftifica- tion , ne lailfa pas de le faire raïer du nombre de fes Chapelains. Le Duc d'Ioi'*^ ayant- fait voir à M. Burnet le danger auquel il s'exj^pfe- roit s'il.rctournoit en Ecoffe avant que les troubles fulTent entière^ ment; ♦ D E C E M B snent ap-paifés , il fe dc-termina à demeurer à Londres , quoiqu'il n'y eut aucun établilTcment. L'année fuivnntc il fut fait Prédicateur or- dinaire d'une Chapelle particuliè- re , &: Prédicateur extraordinaire de l'Eglife de S. Clément de Lon- dres. La force du raifonncmenr, la vivacité de l'cxpredlon , &C la di- gnité dans le tour, lui attirèrent un grand nombre d'Auditeurs. En lÉ-jd. il publia une Relation de la Conférence que le Dofteur Sril- lengfleet &rlui avoient eu avec des Prêtres Catholiques qui étoient alors à la Cour. Mais ce qui lui fit !e plus d'honneur en Angleterre , ce fut fon Hiftoirede la Reformation qui parut en 1679. dans le tcms que les Anglicans croient les plus animés contre l'Eglife Romaine. Les deux Chambres du Parlement l'en remercièrent , honneur qui n'a- voit encore été fait, fie qui n'a été fait depuis à aucun Auteur. Le fé- cond Volumedecctte Hiftoire pa- rut deux ans après. Le Roi Charles qui le confultoit fouvent dans ces tcms de troubles , propofa de lui donner un Evcché , à la charge qu'il s'attacheroit cniicrcmcnt à fcs intérêts. Mais M. Burnetrctufa cet honneur en priant le Roi de le dif- penfer d'entrer dans des cngage- mcns vagues , Si il ne fe fcrvit de l'accès qu'il avoit auprès du Prince que pour lui écrire une Lettre plei- ne de reflexions très- vives,&qucM. Thomas Burnct qui la rapporte en entier, regarde comme un mor- ceau digne d'un Evêque Apoftoli que- Néanmoins il ne fe lailfa Déccwh, RE, 173;. JÎ7; point entraîner par les préjugez dans le tems de trouble , il s'tm- ploïa pour fauver la vie à Straley , & à Milord Straford , tous deux très-zélés Catholiques , fie on lut tait ici l'honneur d'avoir été dti nombre de ceux qui cherchèrent des tcmperamens , lorfqu'on pro- pofa l'exclufion du Duc d'IorK, Néanmoins quand le Minifterefuc changé en Angleterre en 1682. eu faveur du Duc d'IorK, M. Burnec ne voulut point renoncer aux liai- fons qu'il avoit avec le Comte d'Eifcx èi avec Milord RufTel, il accompagna même ce dernier à la prifon d<. fur l'échafFaut. Quoi- qu'on fçijt qu'il étoit dans le fcnti- ment de ceux qui étoient perfuadés que les Anglois n'étoient point alors dans les circonflances, où ceux qui font déclarés contre le pouvoir abfolu prétendent qu'on pcutrcfi- ller au Souverain , fes ennemis ne lailferent pas de fe prévaloir contre lui de fes liaifons avec ceux c|ui étoient oppofés au Duc d'iork. Ses amis lui avoient même confcillé de relier à Paris , où il avoit fait un petit voïagc. A fon retour à Loi^- drcs , il fut privé par Oidrc duRqt des deux polies qu'il y occupoit. ; Le Roi Jacques II. étant monté fur le Trône, M. Burnet demanda la pcrmilllon de fortir du Roïau^ me , & il l'obtint lacilenient , il palTa en France , fie cnfuiteen Ita- lie Si en Allemagne ; étant à Genè- ve , il tenta d'y faire abolir la fi- gnature du Confenfus , qu'il regar- doit comme dangereufc. Son def- fcin étoit de fe procurer une rctrai- Z zz 2 é]6 JOURNAL D te en Hollande. 11 y fut bien reçu par le Prince & par la PrincclTe d'Orana,e. Cependant M. Burnet âïant dcplû au Roi Jacques II. par la manière dont il avoir parlé des Catholiques" dans la Relation de fes Voïagçs , il ne put paroître pu- bliquement à la Cour du Prince d'Orange. On le déclara même en Ecorte criminel de Léze-Majefté^ Se en demanda aux HollanJois de le livrer aux EcolTois en confc- quenee de la condition portée par les Traitez de Paix entre la Hollan- de & l'Angleterre. Mais les Hol- landois prérendirent que M. Bur- net s'étant fait naturalifer , n'étoit point dans le cas prévu par les Traitez. Ces vives pourfuites faites eontre lui n'empêchèrent pas qu'il ne pafb.^t en Hollande à de fécon- des noces , en épouiant Madcmoi- felle Scor qui dcfccndcit du côté paternel d'une ancienne Maifon à' Eco (Te , & qui étoit du ccité ma- eernel de la Famille de Ruytcr. Notre Auteur marque en géné- ral j que ion père eut beaucoup de part à la révolution qui fit monter le Roi Guillaume ^11. fur le Trône d'Angleterre , renvoïant pour le détail à ce qu'il en a dit dans fon Hiftoire. Comme il avoit été le premier , à ce qu'on prétend , qui avoir fait l'ouverture d'appellcr la Mailbn d'Hanovre à la Couronne d'Angleterre , immédiatement .1- près les enfans de la PrincelTe de Dannemarc , ou après la PrinccfTe fi elle mouroit fans enfans , le Roi Guilkume le chargea d'en faire la gropodrion au Parlement , qui ne ES S C A V A 1SI.S , détermina jricn alors lur ce poin? que d'une manière implicite pzt l'exclulion des Princes Catholi- ques. Mais il fut en 1710. à la tcte du Comité des Pays où l'afTaire fut conclue d'une manière bien ex- plicite , après la mort du Duc de Gloceflre. Peu de tems après que Guillaume III. fut fur le Tiône , il lui donna l'Evcché de Salifbu- ry , que M. Burnet lui avoit de- mandé pour le Doâreur Lloyd Evê- que de S. Afapb. A l'occalion de la nomination de M^ Burnet à l'Epifcopat , fon fils entre dans le détail de la manière dont il gouvernoit fon Diocéfe. Il y parle du foin qu'avoit l'Evêque de vihrer exadlemeiit les ParoilT^s de fon Diocéfe , de prêcher lui- même , & dechoifirdes Piédica-- teurs habiles , de n'impofer les mains qu'à ceux qui lui don- noient des preuves de leur fcience Si qui avoient des certificats au- thentiques de vie & de mœurs, des Mémoires qu'il prcfentoit à la Cour pour faire rétablir la difcipli» ne Ecclefiaftique. Il étoit rrès-op- pcfé à la pluralité des Bénéfices , 6c il vouloir que chaque Bénéficier obfervât exactement la refidence. Il avoit établi dans fon Diocéfe un Séminaire à l'exemple de ceux qui font établis dans les Diocéfes de l'Eglife Catholique , il y faifcit des Conférences, & il y dirigeoit les études, mais il fe crut obligé, pour éviter les critiques , de laiifer tom- ber cet établinemcnt après qucli qucs années. Après la morf de la Reine Ma- D E C E M. ♦ie , le Roi Guiliaume compofT. une commillion pour la feuiUe des Béncficcs j & l'Evcquc de Salilbu- îy fut du nombre des Commiflai- res. En KfjS. le Roi le nomma Précepteur du Duc de Gloccftrc. Comme il a voit d'abord rehifé cet emploi , croïant qu'il le dctourne- roit de la refidcnce dans fon Dio- ccfe , le Roi confcntit qu'il pafsât les Etez à Wendfor , &i qu'il prît fîx Semaines chaque année pour la vituc de fon Diocéfe. Il époufa en troiliémes nôccs Mademoifelle Ber- ■Kclcy , Auteur d'un Livre qui a pour titre : Méthode de la Dévotion. M. BurnetpalTa dans une grande ïctraite les cinq ou (ix dernières années de fa vie. Quelque vcnéra- rion qu'il eût pour la Reine Anne, il ne put goûter le Traité de Paix que fit cette Princeiïc avec la Fran- ce , & quoiqu'il eût le premier parlé de la Maifon d'Hanovre pour Ja fuccelîîon à la Couronne d'An- gleterre , il ne pcnfa point à profi- ter de l'événement du Roi Geor- B RE, 175 5-. 6-/7 ge I. à laCouionnc. Il fe contenta de dédier à ce Prince le troidcmc Volume de fon Hiftoire de la re- formation. Il fut attaqué d'un rlm- mç au mois de Mars 1715. le rhu- me fe changea enfuite en pleureiic, dont il mourut le dix - fcptiéme dii mcme mois. On peut voir dans le Livrg- mcme le portrait que l'Auteur fl^ de fon pcrc , par rapport à la con- duite qu'il tenoit dans fon dome- ftiquc, il le reprefente comme un bon mari , un bon père Si un bon maître. Il eft à propos , en finilTant l'Extrait de la Vie de M. Burnet , d'avertir que l'Auteur renvoyé à l'Hilloire d'Angleterre compoféc par M. Burnet ceux qui voudront être inftruits à fond de la part qu'il a eue dans les affaires publiques avant & depuis fon Epifcopat. Nous parlerons dan? un autre .Journal de quelques endroits de l'Hiftoire , à la fuite de laquelle tif la Vie donc nous venons de donner le précis. TRAITE DU BON CHTLE , POUR LA PRODVCTION T)V ping , ou l'on voit , outre les caufes ordinaires tfui le corrompent , pliijieurs jnaliidies i^n'on n'a pas connues. Il contient aujfi les moyens de les prévenir , & les remèdes pour les guérir. A Paris , chez les Frères Ofmont , Librai- res j &; fe trouve chez Jean Zimmerli , Imprimeur .à Laufannc. 173 j. deux Volumes /«-li. depuis la pag. 277 , où finit la première Partie^ jufqu'à 3(^7. ^T O U S avons parlé de la pre- ^ miere Partie de ce Traité dans le Journal de Novembre der- nier, M. Viridet examine dans ce- lui - Cl , les défauts du chyle pir «apport au.x dilfoivans de i'cllo- mac , & comme la falive eil uti des principaux de ces dilfolvans , il commence par l'examen de la falive. Il trouve que ce liquide pè- che fouvcnt , ou par trop de flui- dité, ou pat trop d'épailTeur , oa Z z z z i; 6^^ JOURNAL DE par trop de douceur, ou par trop de falure, on par trop d'amertume, puis il vient au fuc que vcrfcntlcs olannes itomacales , lequel eft quelquefois trop gluant , Se aux autres caufes qui peuvent altérer lesdiiroivans des alimcns , ce qui t'engage à dire un mot du lue pan- à[éatique. Quant à la falivetrop liquide, A ebfervc qu'elle devient telle par l'excès des parties aqueuits que fourni iTent les fruits , les herbes , ^ les laitages dont on fe nourrir. Cette même caufe produit l'infipi- dité de la falive. Pour remédier cà Vuu & à l'autre , notre Auteur veut qu'on ufe d'épiceries, de falé, de vin pur , de féieri , d'oignon , de crelTon , d'eftragon , &: de capu- cnies. 11 confeille , pour te même fujet, la teinture d'y vette , & de chardon bénit , prife matin & foir en manière de Thé , il confeille encore le rrefle de marais. La falive trop fade , fe corrige , fclon lui , par les teintures &. les poudres de racine d'aulne S< de gentiane , racines qui purifient le fang. Pour ce qui eft de la falive trop épaiffe , elle contracte cette cpaif- feur, dans les fièvres .dans les dia- rhces , dans les hydropifies & dans les fiieurs. Elle la contiadle encore quand on dort la bouche ouverte , les alimens , dans tous cts cas , n'é- tant pas fuffifamment pénétrés par la falive , leur diffolution dans l'eftomacdoit être plus imparfaite. / Quand la falive eft trop douce , «Q- doit regarder ce vice comme 5 SÇAVANS, l'cfict d'une pituite qui cnvelopps" trop érroitcmcnr des acides ccrrc- fifs. Mais il ne faut pas croire que cette douceur foir fans danger, au contraire elle eft ordinairement fuivie d'érofions condderables , ce qui vient de ce que ces acides corro- fifs fe dé'^agcnt des liens où la pitui- te les tetioitembarraffes. La fa-livCjà ce que remarque notre Auteur j eît quelquefois (i douce qu'elle eft fu- crée , mais quand cette douceur continue elle caufe des ulcères. Il dit avoir vu une f?mme paralyti- que qui avoit la falive fucrée , & dont la langue & les lèvres étoieivt découpées en pluheurs endroits. Il parle d'une autre ferame qui étoit hyftéiique , laquelle avoir la falive 6 le lait d'une douceur de fucre , mais dont la langue étoit toute fendue , les gencives enflammées ,. les dents cariées , Se les mammel- les excoriées. Il parle encore d'une jeune fem- me qui fe plaignoit de ce que fa falive étoit toujours fucrée , cert& femme le confulta , parce qu'elle avoit une toux conllderablc. M. Viridet lui confeilla divers remè- des qu'elle négligea , elle tomba duns une phthifîe donc elle mou- rut. Pour corriger cette falive fucrée, qui toute fucrée qu'elle eft , eft li dangcreufe , parce qu'elle elT: trcs- corrofive , M. Viridet confeille le Mercure doux fublimé trois fois , mêlé avec le panchyniagogue -, il confeille encore le fuc de crdTon', & d'érifimum , dans les bouillons. Si la falive ell tjuclquetois lu- D E C E M crée j elle cft :>u(Ti quelquefois trcs- Cilcc , ce qui arrive , dic notre Au- teur , par le reflux des fels de l'uri- ne dans les j^Lindes falivaires. Cet- te lalure de la falive eft fort ordinai- re aux convaicfcens , & tait que la plupart d'entre eux trouvent falé prclque tout ce qu'ils mangent & tout ce qu'ils boivent. Pour corri- ger cette falive M. Viridet rccom- rn mdc les acides , comme les tran- ches de citron , l'alleluva , l'épine- vinetce , mais fur tout , la décoc- tion de la verge d'ûr,de l'herniaire, de la camomille , parce que la pro- priété de ces herbes eft d'emporter le tuf & les glaires qui bouchent les glandes des reins , ik font reHucr dans le fang les fels de l'urine. No- tre Auteur recommande encoie pour la même fin , les alimens doux , le bain , les émuifions , k faignée. Une remarque alTez finguliere qu'il tait ici , c'eft qu'il y a des fcorbutiqucs dont la falive du côté droit de la bouche , eft toujours fade, & celle du côté gauche, tou- jours falée ; il citelà-delTus l'exem- ple d'une Dame qui pendant trois ans eut la fali-vc de cette forte. Cette Dame tomboit en convul- fion à la moindre occafion. Il lui fuffifoit pour cela de parler un peu haut, de lever la main, ou de rire. Les convulfions duroient des deux à trois heures , & quand elles étoicnt près de finir , la malade fe plaignoit d'une violente douleur dans r79 mcment falée qui fe répandoit dans la bouche. La féconde fource des difTolvans qui fervent .î la digeftion , cil dans les glandes lîtuées entre la tunique nerveufe &: la tunique veloutée de l'eftomac ■■, ces glandes verftnt une liqueur qui eft quelquefois trop abondante, & qui nuit par-Là , à la digellion. M. Viridet prétend que l'abondance de cette liqueur vient de ce que les glandes dont il s'.agit , font trop ouvertes, mais qu'eft ce qui les rend trop ouver- tes ? il répond qu'une des principa- les caufes de cet accident , cft l'u- figedei'cau-dc-vie , durolToli, de l'eau cordiale, iSc autres femblablcs liqueurs. Il dit avoir connu un Magiftrae à qui l'ufage trop fréquent des li- queurs après le repas , avoir telle- ment ouvert les glandes ftomacha- Ics , qu'il devint hydropique. Il ajoute que les purgatifs trop réi- térés ouvrent auflî plus qu'il ne faut les orifices de ces glandes , ce qui caufe. des maux de cœur qui no guériiïcnt d'ordinaire que par le vomiffement : le trop grand ufacre du thé produit fouvent le mémo effet , félon notre Auteur , parce que cette boiffon relâche les an- neaux de ces petites glandes qui lailfent couler alors trop de férofi- tez dans l'eftomac. Le caffé pris avec excès ne paroît pas plus innocent à M. Viridet. Ce breuvage, félon lui , chatouillant par fon amertume , les glandes dont il s'agit , les excite à répandre en plus grande abondance la férolîr. 63o JOURNAL D té qu'elles contiennent. Ce qui tnit, dit-il , que le caffc n'cft bon qu'à ceux qui n'ont pas les glandes de l'elliomic alTer ouvertes , ou en qui ces glandes font bouchées par un fuc trop gluant , Se encore n'en faut-il ufer alors que fobrcment , fjns quoi il caufc des infomnies •, &: à ceux qui ont le fang acide , un rongement qu'Us ne peuvent cal- mer qu'en mangeant beaucoup. La connoitH'.nce de ces caufes indique alfcz les remèdes qu'il y faut apporter -, M. Viridet obferve feulement li-dcfTus que les perfon- nes qui ont les glandes ll;omaca]es trop relâchées -, doivent boire du vin rouge plùrôtque du blanc , ôc du vin rouge qui foit un peu dur. Quant aux purgatifs, s'ils en ont be- foin , il veut qu'ils choidflent ceux qui ont quelque aftriclion , tels oue les tanarinds, les mirabolans , & la rhubarbe. Une des principales caules de l'nnpeifedion du chyle eft le défaut du fuc glanduleux de l'eftomac , ce défa.it vient de la pe- titelfe des glandes de la tunique de l'eftomac , 6; cette petitelfe procè- de ou de la conlormarion naturelle de ces glandes , ou de leur rciTer- renient caufc , foit par un trop grand froid , comnfie par de l'eau à la glace , par de la limonade gla- cée , &e. ou par un trop grand ufage durolToJis , du ratatiat, &C autres efpeces de liqueurs qui par leur chaleur delfechent les orifices de ces glandes Se les froncent de manière qu'elles perdent une partie de leur diapiétre. M. Viridet fait fur cela une obfejcvation importari- ES SCAVANS, te : // dit avoir vn à Gtlly ttn jeune homme Attai^uc d'une fièvre maUgne , d'ans l'eftomac ducjud ^ il fe fit un dé- pot d'une hile brûlante ijui le dévorait^ Li^itelle dejpcbafi fort la tunique ve- loutée de ce vifcere , cjne ■pendant «« meii les hoiûllons ejue prenait le mAa- de ^ lui CMtfoienl de grandes douleurs, en nième tems une détention li grande de l'eftomac , qu';/ /<« com- parait h. celle cjiti fefait dans du par- chemin grillé. Il avait perdu abfolu- ment l'appétit ^ & il ne le recouvra cjH après avoir pris^ pendant plufieurs mois , des nourritures licjuides. Notre Auteur remarque que ces glandes fe flétriffent & fereftcrrent auffi parla vicilkfte . les vibrations du cœur n'ayant plus la force de poulTer alTez de fang dans les aJtff!^' res capillaires de ces glandes , pout faire les fécrétions necclTaircs. Cet- te flétrilfurc , ou ce reflerre- ment produit quelquefois une du- reté qu'on peut comparer à celle de la corne: M. Viridet dit là-def- fus avoir vu une femme de 70 ans qui avoit les valvules femilunaircs du cœur, (i calleufesque lorfqu'on les piioit elles faifoicnt du bruiç comme du parchemin fec : il pré- tend que c'cft plutôt à ces deux cau- fes qu'au manque de l'humide ra- dical ^ qu'on doit imputer la mort naturelle ^ l'humide radical ^ au rcfte, eft une chofe , qui, félon notre Auteur , doit être regardée comme un pur être de raifon. Car il dit que cet humide radical n'exi- fte peut ctre que dans l'imagina- tion , ce qui après tout , pourroit bien n'être qu'une queltion de nom. D £ C E M lî Le fuc glanduleux (\c l'eftomac jnanquc auili dans les hevrcs vio- lentes , à caufc du dcfTechcmcnt <]ue )a chakur de ces fièvres , cau- fe aux glandes ftomacales. C'eft pourquoi les malades font alors fi aiteiés. Qiiand les glandes de l'eftomac font petites naturclkmenr , M. Vi- ridct confeille d'éviter les alimens gluans S»: grolîîcrs , parce qu'ils fendent le fang trop épais ^ ik. d'u- fer de bouillons. On peut audî, félon lui, procurer par de petifS picotemcns , la (ortie de ce fuc glanduleux , &: ces pico- tcmens , dit-il, (e procurent par les raifins de cabas dont on ôte les Depuis , il fe procure par le Gin- gembre contât , par le miel , parle erefTon , par l'hydromel, & par le caffé. Lorfque les glandes de l'eftomac font relferrées par le trop grand ufage des aftringens , on vient à bout de les relâcher par les bouil- lons de poulets , par les avencats^ par les hordeats ^ & par la fleur de mauve dans les bouillons. Les liquides bus fort chauds , continue notre Auteur , ouvrent les glandes ftomacalcsTelferrécs par les boilfons trop froides, & ren- dent fluide le fuc ftomacal qu'elles renferment. M Les glandes qui s'affaiflenr par 39 la foiblelTe des mouvemens des » artères , fe relèvent ,. félon notre n Auteur, lorfqu'on a foin d'attirer »> fur ces glandes les efprits ani- 3> maux , hc de fortifier le mouve- M ment du cœur : mais comment s y prendre pour attirer ainfi les efprits animaux , &: fortifier le mouvement du cœur ? rien' n'cfl plusaifé ; il n'y a , félon M. Viri- det , qu'à manger des noix confi- tes , de l'écorce d'orange confite il n'y a qu'à prendre de l'extrait de genièvre, & du chocolat préparé avec de la canelle. Notre Auteur parle ici du fuc trop doux , & du fuc trop acide de l'eftomac par rapport à la di"e- ftion , m des moyens deremedîcr à l'un & à l'autre. Qiunt au fui, trop acide, peut ctrc-ne fera-ton pas fâché de voir ce queditlàdef- fus M. Vuidet , au fujet des pê- ches. » Une perfonne de condition ' n fut attaquée à Genève , d'une » fièvre maligne qui ne lui avoic » lai (Té que la peau fur les os. Cette « perfonne , dans le tems de la 1) maturité des pêches , en man- n geoit à toutes les heures du jour » les parties fibreufes de ces fruits » enveloppèrent tellement les » pointes tranchantes des acides &c » bouchèrent une fi grande quantité » des pores des akalis , que l'ef- » fervefcence du fa.ig fe ralen- »tit , la fièvre lente cefia , & » le malade prit des chairs , des » forces , &: même de l'embon- » point. C'eft par cette raifon qu'on » voit des fièvres lentesguerir quel- i> quefois par des fruits fondans. Voici un article qui n'eft pas moins favorable aux huitres. n Quand les acides font puiffans «ils ne peuvent être arrêtés que 3> par des alimens gluans. Gomme 582 JOURt*AL DE B on le voit par l'Obfcrvation hui- » tiènie du fécond Livre de Tul- »pius. Une femme cruellement » travaillée d'une douleur de coré, B depuis 4 mois , étoit devenue w extrêmement feche , on luiavoit » fait prendre pendant ce tems , » pludeurs potions rafraîchill^nies » & humedantes. Elle fouhaira » avec paillon , de manger des liui- » très. A peine en eut-elle mangé » que la fièvre & les accidens de la «fièvre diminuèrent, ce qui fut » fuivi d'une guérilon parfaite. M. Viridet ta:c là delTus fes ré- flexions : il dit que la nature parle fouvent par les gtands appétits , & il cite à ce fii)et l'exemple d'une Dame qui dans une fièvre maligne fouhaitoit pallionnément de man- ger de la crcme , elle fatisfit fon envie , &c elle guérit. Voilà les pê- ches , les huitres , & la crème bien vangés du certains reproches qu'on a coutume de leur faire. M. Vindet examine d'où peu- vent naître les acides trop abon- dans ou trop puilfans-, il croit qu'ils viennent premièrement de l'air , iorfqu'on demeure dans des lieux fort élevés , &c il attribue à cette caufe les affcdiions hypochondria- ques qu'on voit régner (1 ordinai- rement dans les hautes montagnes. Secondement de la nourriture ai- gre , comme font le pain trop levé, & les fruits aigres. J'ai vu , dit il , une jeune Dame devenue phthifi- que pour avoir mangé trop de ci- trons. Hannemannus parle d'une famille qui étoit tombée dans cet état par le trop grand ufagc des giofeilks. S SÇAVANS. Quand les acides de l'eftomac font légers , il eft tacile de les cor- riger , & notre Auteur confeiUe de fe fervir alors du remède fuivant : prenez demi once de craie blanche, demi -gros de pattes d'écrevilTes , autant d'ivoire , autant de nacre de perles & de ceraii blanc , le tout réduit en poudre , ajoutez - y fix goûtes d'huile de mufcade diftillée, mêlez le tout , &C en prenez une demi - dragme , une heure avant le repas , & en vous couchant. Mais fi les acides font trop fo ts il faut leur oppofer un remède plus puif- fant , ce remède , félon notre Au- teur , eft de prendre des dents de fangher , du corail rouge , du chryftal de roche &c de la part^p blanche de corne de cerf , de cha- cun trois dragmes , de la canelle une d.agme , réduire le tout en poudre impalpable , £i avec cinq onces de fucre diifous dans de l'eau de menthe , en faire des tablettes , chacune de" la pefanteur d'une dragme , & prendre une de ces ta- blettes trois ou quatre fois par jour. M. Viridet confeille làdelîus quel- qucs autres remèdes que uousçaj(- fons. Il y a des pcrfonnes qui ont dans l'eftomac un acide fi violent, qu'on ne les en peut délivrer qu'en leur faifant avaler de petits graviers. M. Viridet dit avoir vu en Hollande une Demoifelle qui étoit fi tour- mentée de cet acide ftomacal qu'el- le étoit obligée de manger du fable. Il ditaufli avoir vu un malade à qui il fut contraint de faite avaler du fer & des cailloux pour le gué- rit D E C E M B rir de violens maux de cœur , qui le tournientoient lans celle , ik ijuL provcnoient de cet acide. Il arrive quelquctois que le fuc glanduleux de l'cftomac cl\ trop gluanc , ce qui l'empêche de péné- trer les alimens & de les difToudre , faute de quoi il cft impolîible qu'il fe fafTe aucune digeftion , & par conféquent aucun chyle bien con- ditionné. Qiiand la quantité de ce fuc gluant, eft furabondante , elle produit des effets lîngu]iers,& voici ïà-delfus ce que rapporte M. Viri- der. Nous copierons fes propres paroles. » Etant à AUamant , on me con- »duifit auprès d'i-n homme qui 3> étoit alité depuis huit jours , fon 3> vifage me parut bon , fon pouls » mol , & fins fièvre , il avoir un 30 grand dégoiât , il ne pouvoit 3> rien avaler de folide ^ &: fi - tôt j> qu'il fe levoit , il tomboit en dé- ni faillance. Je lui demandai ce qui » l'incommodoit. Pour me répon- n dre il remuoit la langue & les lé- » vres , il bégayoit , il employoit » toute une refpiratlon pourprofe- » rer une fyllabe , & il lui fallut nbeaucoup de tems pour me dire 3» qu'il fentoit un gros poids au i> creux de l'eftomac. Je m'informai » de la conduite de cet homme,qui » étoit fort pauvre , on me dit qu'il » ne faifoit aucun excès , que fa » pauvreté l'obligeoit à travailler 30 beaucoup pour nourrir quatre cn- » fans ; & que pour épargner le » pain qui alors étoit tort cher, il » s'étoit nourri de choux , de ra- » vcs , de châtaignes , ôc de ficoma- Décemb. ^gei cequimefitconjcdurerque >' ces accidens pouvoient venir d'a- » ne pituite épailfe qui compri- y niant les nerfs ftomachiqu.s , •icaufoit la pefanteur qu'il fcnioic «encctendroit , & la défailla'icc ^ où il tomboit en fc levant , parce » que cette pituite cpaiflîe appuianc » lur l'extrémité de la tunique in- •» terne de l'œfophage , cmpcchoic "le malade d'avaler les alimcnS » folides , & de parler librement , »puifque cette tunique s'étend » jufqu'à la bouche. Dans cette penfée , je lui fis » avaler deux grands verres de » vin fort vif , dans chacun K defquels je mis vingt goûtes " d'efprit de fel ammoniac ; n pour dilToudre cette pituite. Le «lendemain je. lui envoïai de l'é- » métique pour la faire fortir par » haut ou par bas , mais ce remède » ne fut pas neccffaire , le premier » ayant tellement ramolli la vifco- » fité fufdite , & fortifié le mou- » vcrrtcnt périftaltique de l'cfto- " mac , que la pituite fortit par bas » en grande quantité, ce qui fuc » fuivi du retour de l'appctit , & » mit le malade en état de fe lever » le lendemain matin. Pour prévenir l'amas d'une pi- tuite épailfe dans l'eftomac , notre Auteur veut Scavecraifon , qu'oa s'abftienne des alimens gluans & trop froids , tels que font ks extré- mitez des animaux , le fromage frais , les fruits verds , les concom- bres , les mêlons , les bouillons d'avoine , les émullions , &c. ôc pour y remédier il conlcilie U A a 1 3 a 684 JOURNAL DES SÇAVANS, reintiue de fleurs de camomille , de un linge , de difToudre dans la co- pctite centaurée prife en manière de thé deux heures avant le diner , &c le fouper. Il confeille encore pour le même fujet,de taire infufcr dans une fuffifante quantité d'eau, deux dragmesdc fcnné, une drag- me de rhubarbe & autant de mira- bolans, puis de couler le tout par iature une once de IVrop de fleurs de péchez , & de boire cette méde- cine le matin à jeun. Voilà pour ce qui regarde la fé- conde Partie de ce Traité du Chy- le , ia trcificme eft beaucoup plus ample , nous en parlerons dans UH autre Joumal. ■. CORNELII - NEPOTTS VIT^ EXCELLENTIUM IMPERATO-^ RUM, ciim integris Notis JaniGebhardi, Henr. Ernftii, &: Jo. Andr. ■ Bofiii & leledis Andr. Schotti , Dion. Lambini , Gilb. Longolii , Hieron. Magii , Jo. Savaronis aliorumquc Doiflorum , necnon ex- cerptis P. Danielis. Hilce acccditlocupletiflîmus omnium vocabulc^- rum Index, ftudio & opéra Jo. Andr. Bofii contciftus. Curante Au- guftino van Staveren , qui & fuas Notas addidit. Lugduni Batavo- rum , apudSamuclcm Luchtmans , Academix Typographum. 1734. C'eft-à-dire : Les Vies des grands Capitaines ^ par Cornélius- Népos , avec les Notes entières de Gebhard , d'Ernjliits , & de Bofim ; les Notes choifies de Schott , de Lambin , de Longœuil ^ de Magius , de Savaron , de Pierre Daniel & d'autres. On y a joint la Table trh-arnple de tous les mots , drejjèe far Bojtus : le tout imprimé par les foins d'Aitgujlin van Staveren , & avec fes Remarques. A Leyde , chez Samuel Luchtmans, Imprimeur) de i'Univerfité. 1734. /«-8°. pag. 76^5. fans la Table. Avec figures- COrnelius-Népos a toujours été regardé comme l'un des Auteurs Latins, qui ont écrit en cette Langue avec le plus d'élégan- ce & de pureté. Auflî vivoit-il à Rome 3 dans ce fiecle poli , qui au fentimentdcsbonsJugeSjpaflepour le fiécle d'or de la belle Latinité ; c'cft-à-dire, qu'il fut contemporain de Jule-Céfar & d'Augufte , & qu'il l^ut en commerce de Littéra- ture avec les Ecrivains les plus efti- més de ce tems-là , tels que Cice- ron , Pomponius-Atticus , Catul- le & pluiîeurs autres. Il étoit com- patriote quoique celui - ci ait pu profiter du Livre de Corn. Népos publié fous le même titre, & que nous n'avons plus. Telle eft encore la verfion Latine du petit Livre fur lu pnfe de Troye ^ lequel, dit -on, avoit été écrit en Grec par Darés Phrygien Auteur luppofé , s'il en fût jamais & dont la prétendue Tradudion Latine que nous avons, eft indigne d'un Hiftorien aufti élégant & auffi poli que l'étoic Cornel. J<épos. Telle eft enfin la verfion Latine D E C E M B d'une prétendue Lettre fur les Aiervetlles des Indes écrite en Grec par Alexandre le Grand à fon Pré- cepteur Ariftote, Si dont l'original ne fe trouve plus. Après ce détail hiftorique tou- chant la perfonne & les divers Ecrits de notre Auteur , détail que nous devons principalement à l'ex- cellent Ouvrage de F'ofjïits le père fur les Hirtoriens Latins, & à la Biblioiheijuê Latine de i'exad: M. TabriciHs : venons prefentcmcnt au Livre dont il eft ici queftion , & à l'eftime ilnguliere des gens de Let- tres pour ces Vies des grands Capi- taines , foit par rapport à la pureté du ftile , foit relativement au choix & à la vérité des faits qu'on y ra- conte. Rien ne la prouve mieux (cette eftimc ) que le grand nombre des Editions de ce Livre, & la mul- titude prodigieufe de Notes Criti- ques, Kiftoriques& Politiques des Commentateurs, qui ont travaillé à la corredtion ou à l'éclairciffement d'un Texte infiniment altéré par la négligence ou l'ignorance des Co- piftes. M. Fabricius compte jufqu'à 75 de ces Editions de toutes les for- mes , parmi lefquellcs fe trouvent quelques traductions en Fran- çois, en Allemand & en Flamand. Les plus anciennes de ces Editions font celles de 1473. infol. de 14S0. &c de 1499. qui ont paru à Venife & à Parme : & parmi celles qui paffent pour les meilleures , fe di- îlinguent l'Edition de Lambin im- primée à Paris en 1 5^9. in-^°. cel- le de SavaroTtj imprimée au même RE; 1 7 5 r- 687 endroit en i<5o2. ;«-8°. celle de Francfort de lé'oS. in folio , celle de Cebhard , mife au jour à Am- fterdam en 1662. in-ii. celle de Bo^Hs publiée à Icne en 1675. /'» 8°.& que notre Editeur ( M.van Staveren ) regarde comme la plus parfaite de toutes ; celle de Lcy- de imprimée en 1687. /» 8°. que M. Fabricius qualifie d'Edition très riche ( locuplcujfmm ) l'Edition Dauphinede l>i\c. Cour tin qui parut à Paris en 1675. in-^°. puis à Lon- dres en i69\.in-'è°. & une féconde fois à Paris , en 1726^. ;>?-40. celle de M.Cellarius , à Lipfic , en 1694. iniz. &c. Qiiant au grand nombre des Commentateurs de Cornclius- Népos , nous nous contenterons d'obferver que le Commentateur Dauphin dans fa Préface , en nom- me plus d'une trentaine, fans s'y comprendre,non pius que quelques autres qu'il a oubliés dans fa Lifte. C'eft où notre Editeur a puifé en grande partie , les excellentes No- tes qui ornent cette nouvelle Edi- tion , que l'on doit certainement regarder comme la plus parfaite qui ait paru jufqu'ici , foit pour la cotretftion du Texte de l'Auteur , foit pour le choix des Comnrien- taires qui l'accompagnent , & qui font honneur au goût & au difcer- nement de M. van Staveren. On peut dire que fes Notes , par la ju- fteflc & la fagacité qui y régnent, fe diftinguent avantageufement dans la foule, quoiqu'il ne nous les donne que commefpn coup d'eJTai. C'eft un bonhpJP'^ur cette nou- y elle EditionT" qu'elle foit tombée <Î88 JOURNAL D en de fi bonnes mains , & que les follicitations réitérées du Sieur Luchtmans Librajre ayenc enfin fçû vaincre la répugnance naturel- le de l'Editeur à expolerfon érudi- tion au grand jour. 11 ell vrai , d'un autre côté , que s'agilTant ici de Corncl. Népos , avec lequel il s'é- toit familiarifé dès fes premières études ; cette confideration n'a pas eu peu de poids pourledécerminerà fe charger d'un travail que d'autres circonftances lui auroientfait paroî- tre plus pénible & moins agréable. Par le compte qu'il nous rend des fecours qu'il a tirés de divers en- droits pour perfectionner fon Edi- tion , nous apprenons , qu'il a confulté d'abord avec grand foin 4 Manufcrirs de la Bibliothèque de Leyde , Icfquels il nous décrit ici, ëc dont il a extrait toutes les va- riantes. A celles-là il en a joint plu- fieurs autres que lui ont tournies l'Edition de Francfort de 1608. & celle d'Oxford de lyo'i. & qui ve- noient originairement de la con- frontation du Texte avec le Manuf- crit de P. Daniel &c avec deux au- tres d'Angleterre , l'un de la Bi- bliothèque de Cambridge , l'autre de celle de F. Bernard Doiteur en Médecine &c de laSocietéRoyale de - Londres. A l'égard des Notes qui remplirent le bas des pages &C qui font empruntées des divers Criti- ques nommés dans le titre de ce Volume , il en a retranché la plu- part de celles qui ne roujoient que fur des réflexions politiques ; & telles font et^ft^JÂ^es celles de Loccenius ; & il a ramené fous le es^'S'Çâvans, Texte de fon Auteur les Notes Cri- tiques de Gebhard & celles du Ju- rifconfulte Etnftius que Bofius , dans fon Edition , avoit renvoyées à la Table du Livre. ,- ^\ .. 11 n'oubhe pas de juftifier fon Auteur fur le reproche qu'on lui a fait , d'avoir été peu exaâ à rendre fidèlement en Latin quelques noms propres des Grecs , & d'avoir pris le change fur certains faits hiftori- ques qu'il raconte différemment de ce que les ont rapportés des Ecrivains plus anciens que lui; ce qui pourroit rendre fa fidélité fuf- pefte. Ce peu d'exacSlitude de Cor- nelius-Népos ( dit notre Auteur ) à latinifer quelques noms Grecs, eft un vice qui lui eft commun avec tous les Auteurs de la bonne & fai- ne Latinité , & qui eft prefque in- évitable dans toutes les Langues. C'efl: ainfi que dans la Vie de Pho- cior» , notre Hiftorien y avance que ce grand Homme conduit au fup- plice , rencontra en fon chemin un de fes amis familiers nommé Em- phyletiis , qui fondant en larmes , lui dit j cher Phocto» , cjuel indigne traitement fo:» Vous • avcZjfans doute,été agréablement " furpriSj dit l'Auteur^ de ce qu'une » Nation , que nous avons regardé 35 jufqu'ici comme un Peuple Bar. 5> bare, a produit depuisle cinquie »;ine fiéclc , jufiju'au guinzicmê/ 6ÇO JOURNAL D nc^eft-à-dire , pendant jocs ans , » plus de gens de Lettres à propor- M tion que l'Europ.e entière n'en a » fourni pendant cet efpace de M temsv vous^avc^ vu des Rois &: n des Princes ■ de cette f.avante »> Nation , non feulement aimer j> & protéger les Lettres , mais les » cultiver eux-mêmes en s'appli- y> quant à la Théologie , à la Poëfie .j & la Grammaire. Vous avez été • charmé d'appercevoir en Arme- i> nie des Théologiens , des Com- » mentateurs de l'Ecriture , des »Controverliftes , des Philofo- i> phes , des Aftronomes , des Hi- » ftoriens , des Grammairiens , des 39 Fabuliftes , &: des Sçavans vcrfés n dans la conuoilTance des Lan- »>gues , Hébraïque , Chaldaïque , «Syriaque , Arabe , Perfanne , j> Ibéricnne , Abbanienne, Grec- » que & Latine. A ces Grands » Hommes rejoignent un nombre » confiderable de Poiites , entre «lefquels on compte non feule- »> ment des Patriarches de cette » nombreufe Eglife , mais encore j> le fçavant Roi Haiton , qui re- » gnoit dans la petite Arménie l'an » de J.C. 1 144. & dont nous avons » un Poème inféré dans la Bible » Arménienne d'Amfterdam , im- ï> primée en 1666. Enfin vous avez 1) remarqué non fans quelque » étonnement avec quel foin ôc » quelle ardeur ces habitans du » Mont Niphates , des Monts Gaf- » piens & Gordiens , duTaurus, » de l'Anti-Taurus , & de l'Ararait » ont cultivé les Arts & les Scien- !D ccSjpenclant queaaus écians dans ES SÇ AVANS, » une extrême rtérilité d'EcrivainsJ Les bornes que M. Villefroi s'eft prefcrite dans les Notices ne lui ayant point permis d'y inférer la Tradu'âion de quelque Morceau de Poélle Arménienne , il a em- ployé des momens de loifir à faire une veriion Françoife des Canti- ques fur la Fête de S. Jean-Baptifte &fur le Myftere de la Prélentation de J. C. au Temple , tirés du Re- cueil appelle Charal^eofi , ç'eft-à- dire , Livre des Canticjiies, U fait précéder fa verfion des Cantiques fur la Fête de S. Jean-Baptifte de quelques Obfervations curieufes fur la Poclie Arnjenienne dont voici le précis. ^ .- U remarque d'après Jean d'Ezc- nik Compilateur d'une Grammai- re Arménienne, qui vivoit vers la fin du treizième fiécle, que ce n'eft que dans le feptiéme fiécle . que les Arméniens tirèrent des Arabes l'art de compofcr des vers , foit fé- lon les règles de la quantité, foit fé- lon celle de la rime. A vant le feptié- me hécle la Poefie dcsArmenicns ne confîftoit , comme celle desPfeau- mes & des Cantiques des. Hébreu:^' que dans des «(prefllons, iiobJçs i des images vives,6ç,t©uab^|]itjpg, des idées fublimes. ' '' u .-:,;. <. Cette ancienne Poëfie Armé- nienne n'eft pourtant point defti-: tuée d'une forte de cadence nom-. breufe dont l'ufage eft propre à la Langue du Pays. Cette efpece 4e nombre & d'harmonie fe formoic par le moven delà voyelle auxiliai- re (/) que le Poète ^voit foin.de pla- cer en difeens ,en4xs»i«s.4es mots , pour D E C E M •pour donner du corps à ces mors , &: pour en rendre la prononciation plus agréable. Car la plûparr des mots Arméniens font conipofésde confonnes au nombre de fept ou huir, entre lefcjuclles il n'y a qu'u- ne voyelle. Le plaifiv de connoître rancicnnc Poëfie Arménienne , & de fçavoit les penfées de les tours qui y font employés pour y loiier les Saints , ou pour célébrer les Mifteresde la Religion , ne font pas les feuls avantages qu'on peut tirer des Can- tiques Arméniens. Us fervent à prouver l'antiquité des dogmes & des pratiques de l'Eglife Catholi- que , par ce qui s'en eft confervé chez les Arméniens. On voit par ■exemple l'invocation des Saints établie par les retrains des Canti- ques en l'honneur de la Nativité de S. Jean , &C par plufieurs Can- tiques Arméniens compofés dans le cinquième fîécle par Moyfe le Grammairien. La vénération des Reliques eft aufli établie par la dernière ftrophe du feptiéme Can- tique pour la Nativité de S. Jean, où il marque que c'efl à S. Grégoire i'iliuminateur que l'Arménie eft redevable de quelques ofTemens du S. Précurfeur. Ce fut au commen- cement du quatrième fiécle que S. Grégoire I'iliuminateur fut fa- cré premier Evèque de la grande Arménie par S. Léonce Archevêque de Céfarée. Les uns attribuent les Cantiques fur la Nativité de S. JcanBaptifte à Moyfe le Grammairien Archevê- ique de Korelnc ou Kherona fui- Décemh, B R E , I 7 5 ;, (5pr vant les modernes. Cet Archevê- que fleurilToit , félon notre Au- teur, vers l'an 470. de J. C. il ctoïc P^ctc , Muficien , & très ■ fçavant dans les Langues Arménienne , Grecque & Syriaque , ce qui l'a mis en état de faire avec le fecours de fes Difciples une Tradudlion des meilleurs Auteurs Grecs en Ar-j mcnien. D'autres difcnt que ces Cantiques font d'Ananie de ChiraKa qui vi- voit au milieu du fixiémc ficelé. Poète , Aftronome , Chronologue, à qui l'Arménie doit la fixation de l'Ere Arménienne , & la compofi- tion du Calendrier de l'Eglife du Pays. C'eft ce dernier que M. Ville- froy croit être l'Auteur de ces Can-. tiques. Le Canon ou Recueil des Can- tiques Arméniens pour la Nativité de S. Jcan-Baptifte, contient fept Cantiques. Le premier comprend l'éloge (Si la Vie de S. Jean Baptiftc en trente (îx verfets ou ftrophes , chaque ftrophe commence par une Lettre Arménienne fuivant l'ordre de l'alphabet , dans le goût du pre- mier Chapitre des Lamentations de Jerémie , c'eft à dire, que la pre- mière ftrophe commence par un. (^ 4 ) , la féconde par un ( ^ ) , &c. la 36' ftrophe par un ( x.é) qui dans If 5° fiécle étoit la trente -fixié- me & dernière Lettre de l'alphabet Arménien. Le Tradudlcur a placé au dclTus de chaque ftrophe la Let- tre par laquelle cette ftrophe com- mence dans l'original Arménien, comme l'Auteur de la Vulgate a pl?cc au-dc0us de chaque verfet Bbbbb .':rj2 JOUP.NAL D ùcs Lamentations de Jérémie , la Lettre par laquelle commence ce vcrfet , chacun des verfetsdu pre- mier Cantique pour la Nativité de ;>. Jean Bjptifteiinit par le refrain. Sois notre iniercejjeur auprès de Jefiis- Chriji. Voici trois verfcts de k Tra- ludion. THO, ij Le Maître de l'Univers étoic J5 enveloppé dans le fein d'une -•' Vierge, mais toi , fidel Serviteur, ï^tu l'appercevois par le S. Efpiit, n & ru le bénilTois par la bouche 3) d'Elifabeth. Sois notre inrerccf- » feur aupris de J. C. G E'. » Héritier de la Juflice de la Loi » ancienne avec les Prophètes , tu 5J as précédé avec les Apôtres ceux » qui dévoient entrer après toi dans » la voie étroite de la Loi nouvelle. * Sois notre interceflcur auprès de »J.C. INL M Semblable au Prophète Elle , ES SÇA VANS, » tu as mené dans le dcfcrt la vie » d'un Ange. Là Icsfautcrelks 6c 3> le miel_fauvage ont fliit ra nour- :o riture , 5c tu es devenu un modc- » le dans la Loi nouvelle & dans la » Loi ancienne. Sois notre intcrcef- » feuf auprès de J. C. Le fécond Cantique eftadredé à Dieu en forme de Prière. Le troi- sième de louanges a pour refrain : loi'tsz. le Seigneur , éxalti.z. - lekj.t- muis. Dans le quatrième , l'Eglife Arménienne implore la mifericor- de de Dieu pdr l'intercefiion de S. Jean-Raptifte. Dans le cinquiè- me , dont chaque verfet commen- ce par le mot aujourd'hui , on glo- riuc ciiaquc pciTonnc de laTrinité, Dans le verfet pour le S. Efprir , il y a fimplement : gloire fait cm plus haut des deux à celui qui émane du Père. Le fixiéme , eft un Canriquc d'invocation. Le feptiéme , qui n'a point de refrain , mais dont les trois ftrophcs commencent par ces mots , c'ejl auj.onrd'hui cjue , eft en l'honneur de l'Eglife qui honore particulièrement S. Jean-Bapcillc. TUSCOVRS EV^NGELIQVES SVR DIFFERENTES VERITEZ de la. Relifion , & d'autant plus utiles dans chaque état ^ cjtte les fujets. & les deffcins en font plus particuliers^ & plus rarement traitez.. L(s Textes font pris vràinairemcnt des Evangiles de l'^vent & du Carême. P.rrle P. L. R. D. S. D. Tome I. A Paris , chez Gijpy , rue de la vieille Boude- rie , 3 l'Arbre de JclTé ; de Billj, (^iiai des Auguftins , à S. Jérôme ; le Clerc , Grand'Salledu P.alais , à la Providence ; Cloitjîcr ^ rue S. Jac- ques, à i'Ecu dePrance. 1755- vol. /« li.pag. 265. CE premier Tome , qui fera premier eft fur la fermeté dans le fans doute fuivi de pluheurs fervice de Dieu , & a pour Texte autres, concienc fcpt Sermons : le ^cspai-olesdes Pharifiétti,,en fsiiit D E C- E M B Jean, cli.ip. lo. Si tu es Chriftiis ^ dic nobis patam. Si vous êtes le Chnfl^ dites-le-nous clairement, » A entcn- » dre parler ainlî les Pharificns , » ne diroit-on pas , demande £abord n l'auteur du Difcours , que le Fils » de Dieu leur ait fiit JLifqu'iciun » myftere de ce qu'il étoit en lui- » mccne , quen'ofant fe nianitefter " en public , il n'aie agi que dans = le fecret , & que retenu par une " efpece de crainre , il ne fe foit pas » donné à connoître aux Grands , » comme au commun du peuple. » Mais il s'eft conduit d'une ma- » nicre bien différente. L'a-t on ja- » mais vu craindre les jugemens des » hommes î S'cft-il jamais caché M quand il s'agiffoit de foûtenir la » vérité de fi dodrine , de rciîfter » aux auteurs du menfongc, de pu- is blier la gloire de fon Père , » de fe déclarer pour la vertu , & f> de s'acquiter de toutes les fonc- »' tions qui le regardoient ? N'a c- » il pas paru au contraire , à la tace => de fes ennemis > N'a-t-il pas par- » le toutes les fois qu'il en a été be- » foin? &c ne s'eft - il pas montré »aux yeux d'un chacun , lorfque » fa prefence pouvoir fervir à fon »niinifterer Nerat-on pas vii , rn » efict , tantôt dans le Temple 5) parmi les Dodeurs, tantôt fur la 33 montagne au milieu d'un grand T> peuple , ik tantôt dans les Svna- » gogues, où il cxpliquoit les Ecri- 3> turcs? » Il a par - tout a(Tez donné à » connoître , que ni la crainte du » monde, ni la timidité ne l'eni-' S' pCcboicnt de taire cies œuvres R E , ï 7 î y. ^9j » faintcs. Il n'a pas diflîmulc fou » nom par le filcnce , &c lans qu'il » fût befoin qu'on l'interrogeât » pour fçavoir qui il étoit , il a pu- »blié hautement qu'il étoit le Fils » de Dieu. Il n'en tut pas de lui «comme de la plupart des Chré- » tiens , qui n'ofent prefque pas » déclarer quelle cil leur profef- sj fion , qui rougiflent de dire » qu'ils font engagés dans le Chri- » ftianifme , qui ont honte d'en y> pratiquer les devoirs , & qui fe » cachent lorfqu'il s'agit de Ibûtc- »j nir leur caractère d'eni:ant de » Dieu. C'e(ï donc bien à eux » qu'on pourroit dire avec raifon, » ce que difent aujourd'hui les 3> Juifs au Sauveur du monde : di- » tes-nous ouvertement qui vous l'êtes, faites fçavoir au public li » vous êtes Chrétiens , aie nobis yy-palnm. Il eft facile de voir où ces paro- les conduifent notre Auteur. Il en prend occafion de déclamer contre la lâcheté de la plupart des Chré- tiens qui retenus par le refpccl hu- main , n'ofent pratiquer ouverte- ment les devoirs du Chviftianifmc, & s'en cachent comme d'une chofe qui les rabailTcroit aux yeux du pu- blic Il fait voir combien cette con- duite eft injurienfe au Chriftianif- me , & pernicieufe au Chrétien : deux points capitaux qui partagent fon Difcours , & dont il faut voir l'exécution dans le Difcours mê- me i nous rapporterons feulement ce trait de la fcfonde Partie , où pour faire voir le bonheur dont joliiflcnt ceux qui fans égard ai)>i Bbbbbij tf(j4 JOURNAL DE vains difcoursdu monde , mettent toute leur -onfolation à bien vivre, ont dit ; a Ce font des Jacobs qui *rcpofant avec tranquillité dans M leurs vifions myftcricufes fe » mettent peu en peine que les » Efïiis les pouvfuivenr , & ayent «la penfce de les perdre -, ce font 5> des Noés qui étant en repos au =» dedans de l'Arche , entendent » fans s'émouvoir Jes malédiilions » des habitans de la terre ; ce font j> des Elies qui confolés par des An- as ges dans la folitude , fefoucient «peu des menaces des Jczabcls. 5> Non toutes les infultes des im- wpies font incjpabics de troubler »la paix d\] peuple dans le plaifir 30 que lui caufe cette généreuie It- » berté qui lui fait méprifer les ju- a> gemens des hommes. Le fécond Difcours concerne h manière d'honorer le Nam dejefiis^ &c a pour texte ces paroles de Saint Luc , chap. 1. Foaiuim ejf nome» ejus Je/us. Il fur nommé Jefus. Le dclTein de l'Auteur dans ce Dif- cours, eft de faire voir qu'on ne Içauroir honorer comme il taut, le Nom de Jefus , qu'en honorant celui à qui ce Nom auguftc a été donné. »> Eft-ce-là cependant ce 30 que vous faites, dit-ilem'adref- jifatit aux Chrétiens , vous qui pa- » roiflez fi zélés pour le culte de ce » Saint Nom , qui le prononcez à » tous les momcns , qui en laites sole fujet de vos dévotions , &qui y> embralTez toutes les Societez » érigées en fon honneur. Vous ne » penfcz jamais à celui à qui ce «-■Njoih a été donné y j emplis <3cs S SÇAVANS, » objets terreftrcs , vous ns vouî M occupez point de lui, & c'eft ail- 3 leurs que votre imagination fe 3j fixe. Après ces réflexions, & quel^ ques autres que nous retranchons*, notre Auteur divifc fon Difcours en d'eux Parties , dans la première il fait voir que pour honorer com- me il faut, le Nom de Jefus , il tant mcttretoure notre confiance en J.C. Dans la féconde, qu'il laut taire de la vie qu'il a menée , la règle de là nôtre \ en forte que J. C. foit l'ob- jet de notre confiance , & le modè- le de notre conduite. L'Auteur remplit cette divifiofi avec beaucoTip d'exaftitude. 11 re- marque d'abord dans fon premier point, que pour fe confier comme ondoit en J. C. & honorer vérita- blement en cela fon Saint Nom , trois conditions font requifes , L première de fe confier en lui avec fermeté, la féconde de le faire avec difcernement , & la troifiéme avec foûmillion. La fermeté dont il s'a- git, confifte à ne douter nullement que J. C. toutes les fois que nous implorons finceremcnt fon Saint Nom , ne vienne .à notre fccours. L'Auteur cite là-detrus l'exemple du Centenier, qui cfperoit fi fort la fanté de fon Serviteur , qu'il ne demandoit pas même pour cela la prefence de J. C, mais qu'il dai- gnât feulement prononcer une pa- role. Il cite l'exemple de l'Aveugle de Jéricho qui ne celToit point d'é- lever fa voix, pour engager Jefusà l'écouter , & qui pcrfuadé qu'il feroit enfin exaucé , rciteroit fans D E C E M fin fa demande. Il cite l'exemple de ia Cananéenne, qui quoique rebu- tée comme indigne de recevoir au- cune grâce ,■ ne quitta pointle Mef- fic qu'elle n'en eût obtenu la gué- rifon de fa hlle. Il cite l'exemple de Marthe Se de Magdeleinc qui ne celTer^nr d'infifter auprès de J. C. jufqu'à ce qu'il eût rcffufcitc kur frète. Le difccrnement qui eft la deu- xième condition requife , conhlte à ne nous propofcr dans notre con- fiance , que des chofes vérita- blement dignes d'être demandées à Dieu. Ici s'ouvre à notre Auteur un vaftc champ de morale : il remar- que que l'on ne demande ordinai- rement à Dieu que ce qui regarde les honneurs j les diftindions, les commoditezdufiécle. Oerreurdu cœur humain , s'écrie- t-il, de ne penfer qu'aux douceurs de Babylo- ne , &c d'oublier celles de Jcrufa- 1cm, de loupirer après les eaux de Mara , &: de ne fc foncier point de celles de la pierre du défère , de s'attacher à la fervitude de l'Egypte Se de ne pas prétendre à la liberté delà terre de Canaan Dieu n'c(l-il doncdcfcendudu Ciel,que pour nous procurer des biens ter- i-cftrcs 2 » N'a- 1 -il donné fa vie » que pour nous mériter les avan- » tages les plus frivoles j ne voyez- n vous pas que tout ce qui fait >i l'objet de votre confiance en lui, » eft oppofé à fcs maximes î Vous 3> lui demandez de régner fur la =» terre, lorfqu'il vous apprend que »fon Royaume n'cft pas de ce » monde • vous défiiez de devenir B R E , 1 7 5 y; e^s' » grands , lorfqu'il ne fe plaît Jui- » même qu'avec les petits : vous » voulez avoir des richcflcs , lorf. » qu'il les maudit , loger dans des » maifons fuperbcs , lorfqu'il n'cft »>couché que dans une crèche , cx- » terminer vos ennemis , Iqrfqy'il » prie pouï ccv^^:^.q^y^fcmt^lo^- * tir. Nous laifiTons pluficurs autres traits pour venir .i la troifiéme con- dition qui eft de fc confier en J.C. avec uns foûmiflîon entière. L'Au- teur explique au long , ce que cVft que cette foûmifiîon parfaite. Elle confiftc à ne point murmurer fi l'on n'eft pas d'abord exauce , & à accepter avec refignation , lestra- verfcs mêmes qu'il plaît à Dieu de nous envoyer pour nous éprouver. Tout cela eft accompagné d'exem- ples choifis , tirés de divers en- droits de l'Ecriture. Le fécond point n'eft pas moins inftrudif: il s'y agit de l'obliga- tion où l'on eft d'imiter J.C. Trois conditions font encore nccelTaires pour s'acquitter comme il faut de cette obligation ; c'cft d'imiter J. C. 1°. fans reftriiilion , z°. fans intérêt, 3". fans relâche. L'Auteur entre fur cela dans un détail impor- tant que nous paffons. Le troifiéme Difcours concerne les defirs inefficaces qu'ont les pé- cheurs pour fe fauver. L'Auteuc prend pour Texte ces paroles de S. Thomas en S. Jean , Chap, 10; Refpondit Thomas , &■ '^xit ei , Do- minus meus & Deus meus. Thomas répondit & lui dit ; mon Seigneus- & mon Dieu»' 6^6 JOURNAL DE Bien d;s pécheurs difent com- me S. Thomas , mon Seigneur & mon Dieu , c'eft-à-dire , je ne veux avoir d'autre maîcre que vous, mais il y a cette différence que S. Tho- mas prononçoit ces paroles du fond du cœur , & que dans la plu- part des Chrétiens elles ne font que fur les lèvres. On dit qu'on veut avoir Dieu pour partage, que l'on veut fe lauver, mais on ne le dit que de bouche , ou (î l'on for- me quelques defirs pour le filut , ce font des defirs taux qui ne vont point à la pratique -, or ces defirs inefficaces font d'autant plus dan- gereux , qu'ils trompent celui qui les forme en lui faifant croire qu'il veut effedivement fe fauver , & l'entretiennent là-delTus dans une fauffe fccuiitc qui l'endort jufqu'au dernier moment de la vie , & le conduit à l'impenitence finale. Qj-ie ne puis-je , dit notre Au- teur , en s'adieffant aux Chrétiens qui s'abufent ainfi eux - mêmes , vousdétourner d'un péril fi affreux. Dans ce dcifcin, je m'attacherai à détruire ici deux erreurs \ la pre- mière de croire que cette volonté apparente , que vous avez de faire votre fahit , foit véritable ; & la féconde qu'elle puiife vous fervir de quelque chofe devant Dieu. Premier point , h fauffeté de vos defirs pour le falut ; fécond point, le pernicieux effet de ces taux de- firs. ^, Le quatfléme Difcours eft fur les moyens d'avoir la tranquillité du cœur , & a pour texte ces paro- les de S. Luc, chap. 24. Stetit Jefns S SÇAVANS. ;n meUio Dtfcipiiloriitn fuoritrn , Ô" dhcit eis : pax vobis. Jcfus fe pre- fcnta au milieu de fes Difciples , & leur dit : la paix foit avec vous. Le deffein de l'Auteur dans ce Difcours , eft de montrer combiea prccieufe eft la paix du cœur , S<. par quels moyens on peut fe la pro- curer. Sans la paix du cœur , tous les biens que le monde procure ne font rien. Je n'ouvrirai pas ici , dit notre Auteur , les Livres Saints pour vous en convaincre , je ne » vous parlerai point d'un Saiil à 30 qui la polTefTion d'un Royaume » ne donne aucun contentement , »j parce qu'il eft agité dj mille n troubles au fond d; fon ame ; je " ne vous parlerai pas d'un Elaii , » qiU ne manquant ni de terre ni ■«de troupeaux, ne goûte aucune » joye àcaufe des inquiétudes donc " fon efprit eft rempli : Je ne vous » parlerai pas taftion dans les biens que vous » poffedez , fi ces jeax , ces con- » certs , ces divcrtiffemens font >s pour vous des fujetsde délices.... L'Auteur , après un grand nom- bre d'autres traits fcmblablcs, vient à fon fécond point , qui eft de montrer par quels moyens on peut D E C E M fe procuver la paix du cœur. Ces movcns (ont l'innocence de vie, la haine de loi-même , &c la religna- tion aux ordres de Dieu. Une ex- pofition vive ^' touchante de ces trois moyens, fait le fujet de ce fé- cond point. Le cinquième Difcours eft fur les remèdes contre l'hypocrifie , &■ a pour texte ces paroles de J. C. rapportées en S. Mathieu, chapitre 23. Oinnui opéra fua fac'uim ut vi- dcinniHr ab hominihtts. Ils tout toutes leurs œuvres pour être vus des hommes. L'Auteur attaque dans ce Dif- cours , deux fortes de perfonnes , premièrement les hypocrites , fe- eondement ceux qui pat un juge- gement précipité traitent d'hypo- crifie ce qui ne l'eft pas. Il expofe aux premiers les raifons les plus capables de leur faire renoncer à la vaine gloire qu'ils cherchent, & aux féconds l'jnjuftice de leurs ;u- gemcns. Il dit aux premiers , qu'ils s'attirent avec le n^épris des hom- mes , la colère de Dieu , & aux fé- conds , que la croyance où ils font que les autres à qui ils voyent pra- tiquer le bien , font des hypocrites, leur fait mcprifer h vertu , & les engage à fe faire un point d'hon- neur de ne la point pratiquer. Ce qui eft pour eux le dernier des malheurs. Le fixiéme Difcours eft fur la charité envers nos treres, 6c a pour texte ces paroles de S. Jean , ch. S. Stahat juxta Crucem ]efu mater ejus. La Mtre de Jefus étoit debout au- près de la Croix. B R E , I 7 3 ;. çr)-j L'Auteur propofe ici pour mo- dèle de la tcndreffe que l'on doit avoir pour le prochain , celle que la Sainte Vicige témoigne pour fon Fils en fe tenant au pied de la Croix. Nous paffons toutes les re- flexions qu'il fait là-deflusdans fon Exorde , & nous venons à la divi- lîon du Difcours , laquelle confîftc en deux points : la véritable charité doit produire en nous deux effets dificrens , l'un dans le cœur , & l'autre dans l'cfprit ; celui du cœur fait la matievc du premier point , & celui de l'cfprit, la matière du Iccond. L'impreffîon que la véritable charité pour le prochain, doit faire fur le cœur , confifte en une ten- drefle fincere &; confiante , deux conditions dont notre Auteur fait voir au long la neceffité. Quant à l'impreflion que cette même chari- té doit faire fur l'cfprit, il remarque qu'elle doit nous engager à cher- cher les moyens de fecourir nos frarcs dans leurs befoins, & que ces moyens doivent être effedlifs, con- venables , & prompts; Premièrement ils doivent être cffedlifs , & ne pas Ib réduire .à de fimples paroles de confolation : Qu'importe aux affligés , dit notre Auteur , qu'on leur témoigne être touchés de leur état , iî l'on ne tra- vaille à y remédier ? Si Jofcph , continue-t il , fe fût contenté de fc faire connoîtrc à fcs frères , & de leur marquer delà joyc àleur arri- vée , fans faire en même tcms rem- plir leurs lacs de fromcnr , & leur donner la Terre de Geiien pour s'y ^p8 JOURNAL DE établir , auroient ils été moins dé- vorés par la tamine î Si Abraham n'eût -fait autre chofe pour les étrangers ^ S< les pallans , que de les faluer & d'accourir à eux avec des paroles de tendrefTe , fans leur ouvrir fa maifon , & leur donner à manger , en auioient-ils été moins dans le befoin L'Auteur étend ces reflexions , après quoi il vient à la féconde condition qu'il 1 jut obfcrvcr dans les fecours que l'on donne au pro- chain , fcavoir que ces lecours doi- vent être proportionnes aux be- foins de ceux que l'on afllfte. l! ne prétend pas fcukrricat taire enten- dre par là , comme il le dcclare , que l'on doive f' conformer à la grandeur des befornsdu prochain , en forte que la lil tralité croillè à ncfure que la neceflTué du prochain augmente i on voit aflcz , dit -il, que ce ne feioit pas fecourir une perfonne affligée jufqu'à l'accable- ment , que de le contenter d'une afliftance inédiocre , mais il veut faire entendre que ces fecours , pour être jiroportionnés , doivent répondre aux occalions , aux tcms & aux perfûnnes;il defcend ici dans ie détail : il remarque que tous les affligés n'ont pas befoin de la mê- me affiftance i ceux-ci , par exem- ple , dit-il , auront befoin de vos mains libérales , ceux-là pouvant s'en palfer, auront befoin les uns de vos avis , les autres de votre pro- tection , les uns de votre compa- gnie , les autres de votre vigilance, îl faut donc pour cela , continue-t- il , que votre charité prenne plu^^ S SÇAVANS, fieurs formes, qu'elle fe fafTe toute à tous comme celle de l'Apôtre , qu'elle examine tout, qu'elle s'in- forme de tout , qu'elle foit pat (.jnféQUcnt ingénieufe , étendue . atcrnnve , çuneule même , pour ainfi parler , de fcavoir tout ce qui fe paJT.. L'Auteur qui n'avance au- cune piopofition fans l'accompa- gner de quelque trait -o deal' /nfermi , dcdicata alCEmP"^ è Rev.'^° Pr-i?/cipe il S ignor Cardinale Francefco Borghefc. Opéra che Ser- ve d'introdiizjone a qu aluncfue Ifto- ria , la cjualo t/atti dell'an ica Roma. y^ppr.jfo Gianimcria Lazzaroni. 2754. '«•4". Staniflai SantinelU , Cong-regatlo- nis a Sommafcha Clerici Regidaris Dijfertationes , Orationes , EpiftoU , & Camiina. Apud Chrifiophorum Zam. 17} 4- ««-4°. De Mil an. Caroli Sigoiiii A'fnti:-2rnjîs Hifl:o- riar Ecclefiafticx Libii XIV. mtnc primhn è Mf. Cad. Bibliothede F'aii- canx in lucem emijfi ^ à Philippo- Argelato Bononienfi. /« Regiâ Cm- rià. 1734. in-i^. i- vol. Corpus omnium Vaerum Poëra- mm L(it!7Jorum cum eo>-nmdem Itali- ca verjiom. Tomus fcprimus, Con- linet P. Virgiiii M-ironis Georgicon Ltbros qiiatuor , Biicotic^m iri X. Eqjoqas diflrihiit^im , nec non Cnli- cem & Cirim , qMbus adjungiinr mo- retum. In Regiâ Curià. 1734. in-^, HOLLANDE. Le gy.-ind D'.^ionnaire Géogrciphi- cjue & Critique. Par M. Britz^en de la Aidninicre , Géoeraphc de Sa Ma- jcftcCatholiquePhilippcV.Roi des Efpagncs & des Indes. Tome V. Première Partie K. L. féconde Pat- rie M. à la Haye , chez P. Gnjp^ &; P. de H«ndt -, à Amflerdam ^ chez r^y^lverfSc Chi!ngmon\ à Rotterdam^ chez Jean - Daniel Beman. 175 j. in -folio. Ce Volutne fe trouve auffi à Pa- ris , chez Mariette fils , rue Saint- Jacques. F R A N C-'Sf^ ■'• De Paris. Hifioire de l'Hôtel Royiil'des Inva- lides 3 où Ton verra les fecours que nos Rois ont procurés dans ton: les tems aux Officiers & Soldats hors d'état de fervir. Enrichie d'E- ftaa-.pes reprefentant les Plans , Coupes & ElevationjGcornétraJes de ce grand Edifice , avec les ex- cellentes peintures & Sculptures de l'Eglife , deflinées ?c gravées avec tous les foins 6c l'éxaftirudc polTï- ble par le Sieur Cochin ^ Graveur du D E C E M B Roi &: de l'Académie de Peinture Se Sculpture. Cliez Gtiillaurne Déf- erez. , rue S. Jacques , à S. Prolj-ier & aux trois Vertus. 173 j. » Cet Ouvrage qui fait un Vo- » ïume in folio , contient cent qua- » tre Planches , fans y compren- » dre les Vignettes , les Lettres » grifes &c les Culde-latnpes necef- » fi ires , dont foixante-dix-fept » font limples , c'eft-à-dirc en une »>demi-feuille , 6c vingt- fept en » une feuille entière , delîînées & » gravées par Monfieur Cochin , » Graveur du Roi , outre vingt à »> vingt-cinq feuilles d'impreflîon , »qui contiennent l'Hilloire de cet » Horel Royal , les Edus , Arrêts , » & les Ordonnances du Roi , "dont la plupart refont que par »» extrait , qui feront c.onnoître » l'ordte qui s'obferve dans ce » magnifique Hôtel. » Ce Livre fera imprimé fur du » grand Raifin fin , pareil à ce pre- 30 fent Projet , & les Figures fur le » même papier double. M Ledit Sieur Cochin a affocié à I) cet Ouvrage le Sieur Dcfprez. , »> chez qui dès à prefcn: on peut » avoir le plaifir de voir les Eftam- » pes imprimées. » Ils donneront cette Hiftoire »au Public au premier Mars mil » fept cens trentefix , & le vcn- » diont foixante livres en feuilles. » Ceux qui voudront s'en aflurer 35 un ou plufieurs Exemplaires juf- D qu'audit mois de Mars , on leur » fera une diminution raifonnable: » lequel tems palTc , ils n'en don- »» neront pas un à moins defoixants R E , I 7 ? 5". ^ot » livres en tcuiUas , qui fera le prix » fixe. « On pourra encore s'adreffer »j aux Perfonnes marquées cidef- » fous. » A Paris , chez Monfieur C»- iithin. Graveur du Roi , & de » l'Académie de Peinture & Scul- wpture , qui demeure rue Saint » Jacques , vis-à vis les Mathurins. :o yi la Haye , chez Monfieur x> Néaitlme , Libraire. » ^ Londres , chez Monfieur ^ Baron, Graveur, rucdel'Oran- » ge j près le Carré de Lcicefter. « A Bruxelles , chez Monfieur » Léonard^ Libraire. = A Amflerdam , chez M on fit uï }> Lhonnoré ^ Libraire. Inftitutions Ecclejî.iflicjues & Bê- fièficiales , fuivant les principes du Droit Commun , & les ulages de France. Seconde Edition , corrigée &C augmentée • confiderablcment , dans laquelle on trouvera les ufages particuliers aux divers Parlcmcns du Royaume, & desObfervutions importantes ptifes des Mémoires du Clergé. Par Jean-'Pierre Cibert^ Dofteur en Théologie & Jurifcon- fulte. Chez Pierre J. Aiariette , ruii S.Jacques, aux Colonnes d'Her- cules. 1736^. '«-4°. 2. vol. De morbis F'enereis Libri fcx. In tjnibus diJferitHrtum de origine , pro- pagatione & cot.iAgione horumce affelhiitm , in génère : tum dejingido- rum naturâ , ey£tiologia & Thera- peià , citr/i brevi Antdyjî & Epicrif ovemm plerontm^ne cj'i£ de eadem ar- gumentofçriptafnnt. Aucîore Joanne Àftruc, RegiaCo)ifdiis Medicis,&:c. C c c c c ij 702 JOURNAL D j^piii G itillehniim Cavelier. 1731S. in - 4°. VAnâtomiedHùfter ^ avec des EfTais de Phyfique fur l'ufage des parties du corps humain , &: fur le /jnéchanifcne de leurs mouvcnicns. Enrichie de nouvelles figures en taille-douce. Seconde Edition ^ re- vue , corrigée & augmentée confi- derablcmenr. Chez J.ic 0 U CATALOGUE DES LIVRES DONT IL EST PARLE' Journaux de l'Année 1737. DANS LES BIBLIA SACRA, INTERPRETES, CONCILIA. NOvum Tcjlanmmim Gmcum , Kc. inferviente Jo. yllhsno Bengelio, pag. 241 Commentaire de M. le Clerc fur le Pentareuque , 304 Abrégé de l'Hiftoire de l'Ancien Teftamenc , où l'on a confervé autant qu'il a été poflîble içs propres paroles de l'Ecriture Sainte avec des éclaircincmcns & des réflexions, 459 Edition Grcque du Nouveau Te- ftament. à Amftcrdam , ^45 PATRES, THEOLOGT, ASC ET'I CI, LÎTURGI CI, SCRIPTORES ECCLESIASTICI , S<.C. HetERODOXI. Pènfces fur la véritable méthode d'étudier la Théologie , pat M. '^.IVotton, 59 Commentaire Littcal , Hiftorique & Moral fur la Régie de Saint Benoît , &c. par le R. P. Dom Augurtin C4.V«f«, Ibid; Année Ecclcfiaftique, Tom. III. 60 — -Tom. IV. 106 ,- — Tom. V. 650 Inftrudions fur les Dimanches & les Fêtes en général , & fur tou- tes les Fêtes qui fe célèbrent dans le cours de l'année , 60 Coîiverfations fur plufieurs Sujets de Morale propres à former les jeunes Demoifelies à la pieté , Lettres fur divers Sujets de Morale & de Pieté , 1 ly Grande Bibliothèque Ecclcfiafti- que , OH Notice des Ecrivains anciens & modernes , d"(r. i-j%. Prières an S. Sacrement de l'Autel pour chaque Semaine de l'année, par feu M. Pélijfon , i-j^ Traité de la dévotion au S. Efprit , tiré des Livres Saints , par un Solitaire de Sept Pons , tJ,/^ Pidertation Hiiîonque far la nu- 734 B I B L I O G niere dont l'Idolâtrie a corrom- pu la Religioa depuis le cotn- menccmen: du monde , 241 Sermons fur divers Sujets , par François yitterbuyy , Ibid. Theologia Amoral i s univerfa , &c. yiidlore R. P. Faulo - Gabnele Antoine , 143. 702 Tradudion en Efpagnol des Mœurs des Ifraëlites , par M. Fletiry ^ 243 Traduftion en Efpagnol du Caté- chifme Hiftorique de M. fleury^ Ibid. Méditations fur l'EpîtredeS. Paul aux Romains ^ 732 L'Incrédule fans excufe , ou l'Im- pie forcé jufques dans fes der- niers retranchemcns , compofé par le Perc Segntri Jcfuite , & traduit en Anglois par M. Befom- be , 3^9 Le Tome onzième des Oeuvres de S. Chryfoftome , publiées par le Père Dom Bernard de Adont- faiicon , Ibid. Les devoirs d'un Chrétien envers Dieu , & les moyens de s'en pouvoir bien acquitter , par M. de la Salle ^ 458 ïnftrudions Chrétiennes fur les Myfteres de N. S. J. C & fur R A P H I E. les Fêtes 6c les Dimanches de l'année , 458 Idée de la Religion Chrétienne , Ibid. Les Oeuvres de Salvien Prêtre de Marfeillc , 502 Penfées du Père 'Boitrdaloùe fur di- vers fujets de Religion & de Morale , 508 Lettre de M. l'Abbé de Hllefroy au R. P. *** , en lui envoyant une Tradudion Françoife des Canti- ques Arméniens , compofés dans le cinquième & fixiéme fié- cles , pour la Fête de la Nati- vité de S. Jean-Baptifte , & du Myftere de la Préfcntation de J. C. au Temple , 513.689 Méditations fur les Véritez Chré- tiennes & Ecclefiaftiques , 58^ Sentimens de Saint Thomas fur la Crainte , 587 Difcours fur la Spiritualité & l'im- niaterialité de l'Ame , par M. du Gard ^ 606 Le Tome fécond des Ades des Saints pour le mois d'Aouft, parles Continuateurs de "Sollatt' dus j ^4j Difcours Evangéliques fur diffé- rentes Véritcz de la Religion , HISTORICI SACRI ETPROPHANL Hiftoire Ecclefiafliique pour fervir de continuation à celle de M. l'Abbé Fleityy, Tom. XXXIII. 3 Tom. XXXIV. éi Eflai fur les Honneurs Se fur les Monumens accordés aux Illu- ftres Sçavans pendant la fuite des (îédes , par M. Tit'te de Thon , depuis 1 543- jufqu'en lé'cy. traduites en Fran .çois fur l'Edition Latine de Lon- dres , _i90 Diflertation fur l'origine de l'Im- primerie en AngLtcrre , par le Dodeur Miàâleton , 303 Hiftoire de l'Empire Ottoman de- puis fon origine jufqu'à prefenr, écrite en Latin par Démetrius- Cantemir, & traduite en Anglois par N. T/ff-iî/ , lb,d. Mémoires de M^'^'-rrAjiKile de Montfmfier. TT-uvcUc Edition , 304 Les trois derniers Volumes des Mémoires de l'Académie Roya- le des Sciences avant 169 v 30J Second Abrégé de la Carte généra- le du Militaire de France, par M. li M.M de la^aijfe , 306' Les Annales de Prémontré , pat M. Hugo , 349 Traité Hiftorique fur la Foire de Beaucaire, ^So Voyage par terre depuis le Golphe d'Honduras jufqu'à la grande Mer du Sud, tait par Jean Cock; biirn j 3 6^ La Vie de l'Empereur Oclavien- Ca'far - Augufte , par les Pères Catro/i & Rouillé , Ibid. Vie de l'Empereur Julien , 340' Hiftsire du Vicomte deTurenne, par M. Ramfay , 3 lî 8. 5 27 A P H I E. Joannis Bc vcri Chronicon ,' 3 9 j Rccherclies fur les Théâtres de France , par M. de BiAitchamp , Hiftoire Critique des Journaux , ^it yi.Ciimitfat ^ 4c S Abrégé de l'Hillonç Sainte , avec les preuves de la Religion j par demandes & .-ar réponfes , 4^ j Defcription des anciens Edifices de la Ville de Bologne , par le Perc Grill 10! i j 4^-7 Recueil de diverfes Pièces Manuf- crucs rares &C curieufcs qui re- gardent principalement l'Hiftoi- re d'Angleterre, Ibid. Nouvelle Edition de Tite-Livc, par les foins de M. Drakemborch , 458 La Vie de M. de la Salle , Ibid. Le fécond & le troifiéme Tome de l'Hiftoire Littéraire de laFrance, par des Religieux Benediftins de la Congrégation de S. Maur, 459 Reflexions Critiques fur les Hi- ftoires des anciens Peuples , &c. par M. FoHrmom l'aîné , 4(^5. 559-^54 Hiftoire des Séqiwnois & de la Pro- vince Séquanoife , &c. par M. Dunod . 490. 5J4 Hiftoire Générale des Auteurs Sa- crés &: Ecclefiaftiques , par le R. P. Dom KtmyCeilUer^ To- me cinquième, ^04 Hiftoire de la Ville de Paris , 51Z Defcription de l'Egypte , compo- fée fur les Mémoires de M. de Maillet , par M. l'Abbé le Aîafi crier ^ 512 Méthode pour étudier l'Hiftoire , pai B I B L I O G R A P H' I E. par M. Langlet du Frcnoy , 523 Hiftoire de l'Eglife Gallicane , par le Père Jacques de Longueval ^ Jefuite , Tom. VII. 539 Tom. VIII. 601 La Vie & les aftions d'Henri II. &: de Richard I. par l'Abbé Benoit^ publiée par M. H:arn ^ J48 Dcfcription Géographique , Hifto- rique , Chronologique , Politi- <]ue , ÔC Phyfique de l'Empire de la Chine , & de laTartarie Chi- noife , &c. pat le Peie du HaUc Jefuite , Tom. 1. 6\6 — Tom, II. 66^ Xenophontis de Cyri expeditione Ltbri feptem , ^48 Eiiition Latine de Tire - Live , à Paris, par les foins de lA.Crevier^ Calendrier perpétuel , par M. Sau- veur^ Ibid. Diflertation fur l'état des anciens Habitans du SoilTonnois, avant la conquête des Gaules pat les Francs , par M. le Beuj , Ibid. Hiftoire de ce qui s'eft paffé de plus mémorable en Angleterre pen- dant la vie de Giibcit Burner, Les vies des Grands Capitaines , par Cornélius Népos , &c. 6S4 Diflcrtation Hiftoriquc fur l'Anti- quité & l'Origine de la Ville de Rome , -700 Carolt Sigonii Mut'menfts Hifto'-its Ecclefiafltca Libn XIV. Ibid. Le grand Dictionnaire Géographi- que &: Ciirique, par M. Bru~ T^n de la Aiartinien , Tome V. première & féconde Partie , Ibid. Hiftoire de l'Hôtel Royal des In- valides , Ibid. Lettres Critiques de Hadgi - Me- hemmed-Effendi à Madame la Marquife de G *** , au fu"ct des Mémoires de M. le Chevalier d'Arvieux , avec des écl.iircifle- mens curieux fur les mœurs , les ufages , les Religions , Se les différentes formes de Gou- vernement des Orientaux, 701 ORATORES: POET^: FACETIARUM ET JOCORUM , NaRRATIONUM ET NoVELLARUM , NECNON HlSTO- RIARUM ErOTICAHUM SCRIPTORES : GrAMMATICI. Nouvelle Edition des Oeuvres d'Horace , par les foins de M. lortes , 5 9 Oeuvres de Théâtre de M. de Bmeyi , 60 Tom. XII. XIII. XIV. du Recueil général des Opéra , Ibid. Amufemcns Hiftoriques , 1 17 Les Avantures de Zelim & de Da- mafine , Ibid. Decemb. Le Temple de la Tragédie , Poè- me recité à la rentrée des ClalTcs, par le Pcre Marie Adarfy Jefuite , I70- Diiflionnaire Anglois étymologi- que , 177 Didionnaire Univerfei des Arrs en Anglois, Ibid. Oraifon Funèbre du Maréchal de ViiJars, par M. l'Abbé S<:g^'y, 17^ Ddddd 7o8 B I B L I O G Hiftoite de Gilblas de Santillane , par M. le Sage , Tom. IV. Ibid. Anecdotes Galantes & Tragiques de la Cour de Néron , par M. du Caflre ei'Awoigny^ ibid. Nouvelle Edition des Oeuvres de M. RouJfeaH , 242 Tradudion en Efpar^nol des Avan- tures de Télémaquc de M. de Fenelon \ 245 Mémoires du Corute de Commin- . ville j par M. du Caflre d'Anvi- gni , • Ibid. Avantures de Flores Si de Blanche- fleur , Ibid. Le Ciievalier DefelïartS & la Com- teffe de Bercy , 750 Les Odes & les Fragmens à'Ana- crèofi^ en Grec& en Latin, avec les notes de Jean-Corneille de Paiiiu , Juillet 36^0 . Voyage merveilleux du Prince Fanférédin dans la Romancie , Juillet 578 Nouvelles Tradudions Françoifes dei'Amintedu TalTe , 391 Poëfies de Mademoifelle de Mat- erais de L-i Peigne , 399 La Lufiade du Camoens , Poëmc Héroïque , traduit du Portugais par M. dii Peran de Caftera , 457 Soêrërri- SiephaMiThefaurus L'mguit Ldùna , 4J7, ^49 Les Tragédies' de Sophocle , 458 Le Do^'éh de KiUerinè ,, Hiftoire J U RsîoDl.lEé?j E .si ïtJOUjn3fny]].iJt'3Vj^ Ebee Hirtôrfqué"dêl;i Chatfê^ par M. Bennetoft de Perrin , •- 23 Oiilonnanccs des Rois de France R A P H I E: Morale , par M. Prévôt d Exile fl Les Adieux de Mars , Comédie Héroïque , par M. le Franc ^h\à. Le Roman Efpagnol , ou nouvelle Tradudlon de la Diane de Mon^ temayor ^ 52» Le Roman de la Rofe , par Guil- laume de Lorris &c Jeaade Mttm ait Clopinel^ ■•' ' - -57? Didionnaire Italien, Latàn , & François , par M. l'Abbé Ânto-, nim , 582 Recueil de plufieurs Pièces de Poë- fie & d'Eloquence, 58^ Mémoires & Avantures de M.*** traduit de l'Italien , 587 Tradudion en vers Grecs du Para-j dis perdu àt. Milton , par M; Da'wes ^ 6t,<) Difcours fur i'efprit de Société ; par M. Marquet , tf 5 o Les Oeuvres de Virgile , Traduc- tion nouvelle , par M. l'Abbé de la Landelle de S. Remj\ Ibid. Corpus omnium veterum Poëtarhm Latinorum , 700 Jérufalem délivrée , Poëme Héroï- que du Tarte , traduit en Fran^ cois , 702' Obfervations fur la Comédie & fut le génie de Molière ; par Louis Ricohoni , Ibid, La Tradudrion Françoife de l'Etna Cornelius-Sévérus & des Senten- ces de Publius-Syrus , IbidL t ;'P<0L>'|iF4Ol!* .noj3«swJri(j. r^j :Vfci ^nop.ald'I znt,h "sliso fia ' ■ de la f roifiénie Race , recueillies par ordre Chronologique , qua- trième Volume , &c, pat M. Secoujfs , > 27 B I B L 1 O G Code Militaire, &g. par M. de Briijtiet , éo Confulcations 5c Obfervarions fur la Coutume de Bretagne , par M. Pierre Hevin , 9 j Recueil de Diplômes de l'Empe- reur Charles IV. par Adam- Frédéric Cj/rf/yy , 1 1 j ^m Publicum itmverfale & pragma- ticum Afethodo Sy/itmatica nova ratione elaboratum , &c. AnElore Godofreti» - Ernefto Fritfchio , Ibid. JotmniS'Gottlieb Heinecciî Hiftoria ^uris Civilis Ramant ac Germa- nici , 11^ Corpus Juris Camnici , &c. Antore Joanne-Petro Gibert , Ibid. jHrifprudemia Publico-Pditico Ter- ruorialis , 178 Ouvrages Politiques de M, l'Abbé de S. Pierre , 241 ElTay du Chevalier Bacon , Chan- celier d'Angleterre , fur divers fujets de Politique &: de Mora- le , 2^ prefcrits par la loi n.irurcUe , traduits du Latin du Baron de Pupndorf, par Jean Barbeyrac , . / . 304 Inftituts au DroLc Cou-tumier de Bourgogne, 39 j Traitez des Minoritez , des Tutel- les & Curatelles , Cr<;. 49 j Reflexions Militaires & Politi- ques , traduites de l'Italien de Marquis de Sama-Cruz. de Mar- zenad» , par M..Fergy ^ 498 Diifertation fur les Tentes ou Pa- villons de guerre , parM. i5^«- neton du Perrin , j ^j j Recueil de Confultations fur di- verfes Matières , par M. de Cor- Codede la Voyerie , 587 Arrclts Notables du Parlement de Dijon , recueillis par François Perrier ^ avec des Obfervarions fur chaque qutftion, par Guil- laume Raviot ^ les . Sic. pag. 6 Si Vefcription Ciographi/jue , Hijloricjue CronologiijHe , &c. de l'Empire de U Chine , & de Tartarte Chinoife , Sic. 66$ H'ftoire de ce qui s'eftpajfè en An^eterre pendantlavie de GMl!ert£itmet,6-ji Traité du bon Chyle ^ S^c. <77 Les Vies des Grands Capitaines , S,^^ V»'B: Jîj ^>^^"^^;v< ^1.  >'0S.. ?#^. r r^*^ iV