* Pig dar the RME îs aasre k nrmuTi ne nn are ai LES BAMBOUS … AT ot LI * é 4 3 PARIS. — IMPRIMERIE DE E MARTINET, RUE MIGNON, 2 4 A D: nu - [ Î IL . mr | c'e PL LEE 2; br 1: à 4 E 4 & F D | 4 P ñ Le, HF A à | ” , % pi 4 > ü LA Fe ; L k . pa ÿ à à e, ; | | Se gp #4 5 Fu % - à x à 6 1 . C , | MMS SS LES AMBOUS VÉGÉTATION, CULTURE, MULTIPLICATION EN EUROPE, EN ALGÉRIE ET GÉNÉRALEMENT DANS TOUT LE BASSIN MÉDITERRANÉEN NORD DE L'AFRIQUE, MAROC, TUNISIE, ÉGYPTE PAR Feu AUGUSTE RIVIÈRE DIRECTEUR GÉNÉRAL DU JARDIN D'ESSAI DU HAMMA JARDINIER EN CHEF DU LUXEMBOURG, PROFESSEUR D'ARBORICULTURE, ETC. ET M. CHARLES RIVIÈRE DIRECTEUR DU JARDIN D'ESSAI DU HAMMA D'ALGER #. 2RAR.- # Le +$ sh NEW YORK SKXBOTANICAL Poe 7 re PARIS AU SIÉGE DE LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION 19, RUE DE LILLE, 19 rears EXTRAIT DU BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION +. < A - , . L . * . + _ , . . * * « : ‘ “ ’ » ts — = = : = ; . . me ANT CRE Ex nt “= tite + =: Le î 2 a 2 e . à 4 ‘ “ F* > MONSIEUR PAULIN TALABOT MEMBRE DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION COMMANDEUR DE LA LÉGION D'HONNEUR HOMMAGE DE RESPECTUEUSE RECONNAISSANCE A LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION TÉMOIGNAGE DE GRATITUDE POUR SES ENCOURAGEMENTS Ar KORNE 1 AIAPI ANSE : N te FLE É ; À LA 07 . : LP” c P + US n . À / ER “< WT » É2172 À TR (as Le <9 LE F % a si r *: AI: LEE CPE STORRC A GRIS EU RATE AREA NI N 74 ‘ ù $ s' « A Cri ’ : L : « ra ai es Pr r * Fe À L L . 2 B ” k: Ce + 4 » …. A ER N ER RU eR A 5€ 0! >. - E LL x ; 1 fe À L . - = de g LL . . L] = : GOT 5- 190! R NEW YORK > BOTANIJCAL CARDEË: … NOTE DE L'ÉDITEUR Nous n’avons pas besoin de faire ressortir l'intérêt que présente l'introduction du Bambou dans le midi de la France et en Algérie, ni d'insister sur tout le parti que l'industrie nationale pourra tirer de ce magnifique vé- gétal. On connaît, en effet, les services sans nombre qu'il rend aux populations de l'extrême Orient, et l’on sait les merveilles d'application que nos artistes et nos praticiens peuvent créer, lorsqu'une matière première nouvelle leur est donnée. La naturalisation du Bambou peut être considérée au- jourd’hui comme un fait accompli et ce ne sera pas une des moindres conquêtes de ces dernières années. Il n’y à plus actuellement qu’à le faire connaître, à le propager, à choisir les espèces les plus recommandables et à vulga- riser les méthodes les plus rationnelles de reproduction. Jusqu'à ce jour, 1l n’a été publié sur cette plante que deux monographies de quelque importance (1), mais ces travaux sont déjà anciens; ils sont écrits au point de vue purement botanique et ils ont été insérés dans des recueils qu’on ne peut se procurer que très-difficilement. Bien des points, d’ailleurs, restaient encore à éclaircir, car peu de végétaux offrent au botaniste autant de sujets d'étude; il nous suffira de rappeler 1ci la question seule de sa floraison. Il faut, au surplus, à ceux qui veulent s'occuper de la naturalisation d’une plante nouvelle, autre chose que des données scientifiques résultant de l’analyse de spécimens apportés de leur lieu d’origine. (1) Monographies de Ruprecht et de Munro. 8 NOTE DE L'ÉDITEUR. Personne n’était mieux en mesure de parler du Bam- bou que le regretté M. Auguste Rivière, Jardinier en chef du Luxembourg et Directeur du Jardin d’essai du Hamma, près d'Alger. Pendant plusieurs années consé- cutives, il a poursuivi sans relâche une suite d’expé- riences sur la culture de cette plante, tant au Jardin du Hamma qu’à Paris même. Presque à chaque séance de la Société d’acchimatation, il rendait compte à ses con- frères de ses recherches, de ses tentatives, de ses succès, et il mettait à ces communications une chaleur entrai- nante, puisée dans la conviction qu'il faisait une œuvre utile à son pays. Malheureusement il a été frappé, jeune encore, au milieu de ses travaux, au moment où il venait d'écrire, en commun avec son fils, son élève et son collaborateur, les dernières pages du traité qu’on va lire. Ce mémoire est le fruit de plusieurs années d’expé- riences ; il résume de longues et consciencieuses études ; il a été écrit avec passion, car M. Rivière apportait à ses recherches sur le Bambou une ardeur en quelque sorte dévorante, comme s’il sentait que la vie allait bientôt lui échapper, que ce serait son dernier travail et l’une de ses œuvres les plus importantes. Aussi la Société d’acclimatation a-t-elle cru devoir faire illustrer l'ouvrage de MM. Auguste et Charles Rivière, de 60 planches dessinées et gravées avec soin par des artistes de mérite, sous la direction des deux auteurs. Cette publication est un dernier hommage rendu au savant modeste et dévoué qu’elle s’honorait de compter parmi les membres de son Conseil d'administration. AGROCULMIS AMBUSA M Fic. 1. — B Développement et floraison d'une vieille souche ne CSS ue a INTRODUCTION « Le Bambou sera un jour à l’industrie européenne ce que la Pomme de terre est à l'alimentation, » nous écrivait, en septembre 1869, un des membres les plus éminents de la Société zoologique d’acclimatation, M. le baron Jules Cloquet. Cette opinion se confirme de plus en plus: la culture du Bambou end à se généraliser, principalement dans les climats tempérés, qui offrent des conditions beaucoup plus favorables au développement de ce très-intéressant végétal; aussi, à diverses reprises, l’atlention a-t-elle été appelée sur lui; diverses notes, disséminées, sont venues, à certains inter- valles, apporter un peu de jour, quelquefois sur le côté pratique, rarement sur le côté théorique de la question. C’est alors que la Société d’acclimatation a pensé qu’il serait bon de faire une élude toute particulière des Bambous; de définir avec plus de certitude les caractères jusqu'alors bien incertains qui pourraient aider à établir une nomen- clature moins douteuse; de constituer, autant du moins qu'il est possible en l’état actuel de nos connaissances sur ces végétaux, les divisions et les groupes au moyen desquels se régulariserait la culture ; de traiter enfin cette dernière dans tous ses détails de multiplication, de croissance et de récolte. C’est la tâche, honorable mais ardue, quenous avons acceptée de la Société d’acclimatation. Aux renseignements édités par quelques voyageurs, nous avons ajouté tousceux qu'une étude de neuf années a pu nous faire recueillir, au milieu mème des plantations dont nous entreprenions l’étude. De ces observa- tions réitérées nous avons déduit des faits de végétation passés jusqu’à présent inaperçus; nous avons surpris des caractères 12 INTRODUCTION. non encore étudiés qui nous ont aidés à établir une clas- sification plus exacte, des groupes plus naturels, et, ce qui est plus important encore, à leur appliquer la culture qui leur était nécessaire. Nous avons cru devoir étudier les Bambous à plusieurs points de vue et diviser ainsi ces études : L Classification botanique. Il — horticole. ITT Caractères généraux. IV Végétation souterraine. " — aérienne. VI Mulüiplication. VIT Culture. VIT Distribution géographique. : IX Propriétés el usages. X Description des espèces. XI Expériences sur lacroissance des tiges ou chaumes. Nous allons traiter successivement tous ces chapitres. Nous y avons apporté tous nos soins, toute notre bonne volonté, tout notre désir d’être utiles ; c'élait notre seul moyen de remercier nos collègues de nous avoir procuré l’occasion de nous livrer avec ardeur à une étude aussi intéressante. Nous devons signaler ici Pattention soutenue apportée par M. Dupart, l’habile Jardinier en chef du Jardin d’essai, à nos expériences de multiplication et de culture, rappeler aussi les artistes distingués qui ont bien voulu se charger de l’exécu- tion dé nos planches : M. Courtin qui les a dessinées d’après nature avec une netteté et une vérité si bien reproduites par le burin de M. Bisson. Paris, 10 avril 1877. CLASSIFICATION BOTANIQUE. Les Bambous, Bambusa de Retz, font partie des Monocoty- lédonées, l’une des trois grandes divisions du règne végétal. Ils appartiennent à la famille des Graminées, celie qui com- prend le blé, le seigle, l'orge, l’avoine, le riz, le maïs, la canne à sucre, etc. ; ce sont des herbes vivaces, des sortes de roseaux à tiges herbacées ou ligneuses, arborescentes, persis- tantes, droites et quelquefois sarmenteuses, mais toujours ra- mifiées. Les espèces en sont très-nombreuses; elles diffèrent entre elles par leurs caractères, leur végétation et surtout par leur taille, qui est très-variable : certaines espèces, en effet, n'ont que quelques centimètres de hauteur et des tiges à peine de la grosseur d’une plume ordinaire, tandis que d’autres acquièrent de très-grandes dimensions et qu’il n’est pas rare d’en rencontrer qui présentent des tiges dont la hauteur dé- passe plus de 40 mètres, et dont la grosseur atteint 0",20 de diamètre. Ce sont des végétaux exotiques; on les rencontre dans presque toutes les parties du globe, excepté en Europe; nous verrons plus loin le rèle qu’ils jouent dans chacune d'elles, en étudiant leur distribution géographique. Les Bambous semblent assez mal connus, ou plutôt mal dé- terminés dans nos cultures; cela s'explique facilement : ces plantes, même dans les contrées qu’elles habitent naturel- lement, fleurissent rarement ; certaines espèces ne le font qu’à des intervalles très-éloignés, c’est ce qui fait que, n'ayant eu, pour beaucoup d’espèces introduites dans nos Jardins, d’autres bases que l'aspect de leur forme et de leurs carac- téres extérieurs pour fixer leur dénomination, on les à rap- portées à un genre commun, le Bambou. Il est évident que cette manière de procéder a donné souvent naissance à des erreurs, à une nomenclature vicieuse et à une synonymie 14 LES BAMBOUS. qui en a rendu l'étude plus difficile, en transportant dans certains genres des espèces qui apparliennent réellement à d’autres. Dans ces derniers temps, un botaniste anglais, le colonel Munro, a fait sur les Bambous un travail très-remarquable et assez étendu : « Monograph of Bambusaceæ ». Il a été publié dans les Transactions de la. Sociélé linnéenne de Londres en 1868 (vol. XXVI). Cette monographie, qui comprend toutes les espèces con- nues jusqu’à celte époque, est écrite en anglais et en latin, ce qui en rend l’étude et la vulgarisation fort difficiles; une per- sonne qui en ferait la traduction française rendrait un véri- table service à ceux qui veulent étudier et cultiver ces plantes intéressantes. C’est un travail bien difficile et bien aride qu'a entrepris là le colonel Munro ; aussi a-t-il dù, pour rendre les recherches plus faciles, former un groupe de ces plantes, qu’il a intitulé : les Bambusacées. Ge groupe a été divisé par sections, puis par senres et par espèces. Nous avons pensé qu'il serait intéres- sant de signaler ici cette classification, ainsi que le nom des espèces et leurssynonymes, leur station naturelle et la hauteur de leurs tiges, et qu'il serait utile d'appeler l’attention sur le nombre considérable des espèces signalées, par rapport à la petite quantité que nous possédons dans nos cultures et dans nos collections. Les sections sont au nombre de trois et comprennent : I. Les Triglossées. If. Les Bambusées vrais. III. Les Bacciférées. Les genres sont au nombre de 21 ; nous allons les retrouver répartis dans les trois sections. Première section. —- Triglosscées. Chaume toujours sans épine, creux, cylindrique (semi- cylindrique dans les Phyllostachys), nombreux le plus sou- CLASSIFICATION BOTANIQUE. 15 vent, à peine arborescent, souvent grimpant, très-rameux à chaque nœud, ne produisant jamais de {abasheer où tabashir, herbacé et sans nœud dans le Platonia seulement. Panicule très-peu garnie dans beaucoup d'espèces, à ra- meaux simples ou à peine garnis d’épis, ou bien encore à peu près ronde et supportant un capitule; en forme de thyrse décomposée dans d’autres espèces, très-grande et large, dé- nudée le plus souvent à la base et comme enveloppée soit par la gaîne de la feuille terminale, comme dans les Meros- tachys, soit par les feuilles elles-mêmes, comme dans les Rettbergia et Chusquea, soit par une spathe ou un petit nombre de bractées, comme dans les Thamnocalamus et les Phyllostachys. Dans la plupart des espèces elle est termi- nale, c’est-à-dire sortant de l'extrémité des rameaux ou des ramules qui portent des feuilles; dans un petit nombre, comme chez quelques Arundinaria et le Thamnocalamus, les tiges florifères sont séparées de celles qui portent des feuilles. Épillets pluriflores, mais rarement composés de deux fleurs, dont l’une est complète et l’autre incomplète. Glumes offrant la plupart du temps peu de nervures, quel- quefois fort petites ou mal conformées, ne produisant Jamais de bourgeons et différant souvent des fleurs parfaites par leur consistance et leur couleur. Glumelle supérieure toujours à deux carènes. Étamines au nombre de trois, à base libre, à connectif jamais allongé. Style se divisant bientôt, et, la plupart du temps, en deux ou trois parties à son sommet. Fruit ovale allongé ou oblong-linéaire, remarquable par un sillon latéral et par un petit écusson en dehors. Les végétaux de la première sous-section (A rundinariées) se trouvent dans les deux hémisphères; tous les autres de cette section, dans l’hémisphère occidental seulement. La section des Triglossées comprend les genres et les espè- ces dont les noms suivent : 16 LES BAMBOUS. Premier genre. — Arundinaria. AR. MACROSPERMA, Michaux, — (Tige de 10-20 à 30 pieds anglais) 3°,05 à 6",10 et 9°,15. Synonymie. — Ar. gigantea, Champ. — Arundo, gigantea, Walt. — Miegia macrosperma, Pers. — M. gigantea, Nutt. — M. maritima, Wild. — M. arundi- nacea, Torrey. — Nastus macrosperma, Raspail. — Ludolfiu macrosperma, Willd. — Festuca grandi- flora, Lam. Habitat. — Amérique septentrionale (Philadelphie, Floride, Kentucky, Nouvelle-Orléans, Texas, Caroline). , AR. RADIATA, Ruprecht. Habitat. — Brésil. AR, RAGEMOSA, Munro. — Tige cylindrique, de 2 à 4 pieds anglais ou 0",60 à 1",20. Habitat. — Himalaya. Ar. KuriLewsis, Ruprecht. — Tige de 6 à 8 pieds anglais ou 1,82 à 2°40. ï Habitat. — Ile Ouroup des Kouriles (?). AR. JaponicA, Sieb. et Zuce. — Tige de 6, 8, 12 pieds anglais ou de 1,80, 2,40, 3",69. Synonymie. — Bambusa Melake, Sieb. et hort. — B. milis, Hort. Par. Habitat. — Japon (ile Kiusiu, île Niphon). AR. WicurianA, Nees. — Tige de 6 à 8 pieds anglais ou de 1,80 à 2°,40. Synonymie. — À. hispida, Steud. — A. molinifor- mis, Hochst. Habitat. — Indes orientales (monts Nilghiri). AR. LONGIRAMEA, Munro, Synonymie. — À. Wightii, Benth. Habitat. — Hong-Kong. AR. FLORIBUNDA, Thw.— Tige de 2 à 5 pieds anglais ou 0",60 à 1",90. Habilat. — Ceylan. CLASSIFICATION BOTANIQUE. 17 ARUNDINARIA GRIFFITHIANA, Munro. — Tige de 4 à 6 pieds an- olais ou 1,20 à 1°,80. . Habitat. — Indes orientales (mont Khasia). Ar. WALKERIANA, Munro. Synonymie. — À. Wightiana, Thw. Habitat. — Ceylan. AR. GLAUCESCENS, P. de B. — Tige de 3 à 5 pieds anglais ou 0",90 à 1",50. | Synonymie.—Ludolfia glaucescens, Willd.—Panicum glaucescens, Lam.— P. arborescens, Linn.— Triglossum arundinaceum, Fisch. — Bambusa glauca, Blume. Habitat. — Indes orientales? Chine? AR. MACROSTACHYA, Nees. Habitat. — Brésil. Ar. pisTANs, Trin. — Tige grimpante, très-élevée. Habitat. — Brésil. AR. VERTICILLATA, Nees. — Tige de 10 à 15 pieds anglais ou 97,05 à 4,55. Synonymie. — Ludolfia verticillata, Dietr. Habitat. — Brésil. Ar. DEBILIS, Thwaites. Habitat. — Ceylan (province centrale). AR. ACUMINATA, Munro. — Tige de 12 à 20 pieds anglais ou 3",69 à 6°,10. Habitat. — Mexique (Vera-Cruz). AR. TRIANE, Munro. Habitat. — Nouvelle-Grenade, Andes de Bogota. Ar. AMPLISSIMA, Nees. — Tige de 6 pieds anglais ou 1",80. Habitat. — Brésil. AR. FALCATA, Nees.—Tige de 6 à10 pieds angl. ou 1",8043°,05. Synonymie. — Ar. interrupta, Trin. — Ar. ulilis, Cleghorn. — Ludolfia falcata, Nees. — Thamnocalu- mus ringala, Fale. Habitat. — Himalaya, Népaul. AR. KnasraNA, Munro. — Tige de 8 à 12 pieds anglais ou Qn 45 à 3" 65. = Habitat. — Khasia. 19 18 LES BAMBOUS. AR. INTERMEDIA, Munro. — Tige de 8 à 10 pieds anglais, ou 2,45 à 3,05, Habitat. — Sikkim? AR. KookERIANA, Munro. — Tige de 12 à 15 pieds anglais ou 9",09 à 4°,55. Habitat. — Sikkim. Dans ce genre Arundinaria, le colonel Munro fait rentrer encore les espèces suivantes, mais en ayant soiu de prévenir qu’elles sont douteuses, attendu qu’on ne les a pas vues fruc- tifier encore et qu'on n’a pu en étudier que le feuillage. ARUNDINARIA CALLOSA, Munro.—Tige de12piedsanel.ou 3",65. Habitat. — Himalaya (monts Khasia). AR. HIRSUTA, Munro.— Tige de 2 à 4 pieds anglais ou 0",60 à 1,20. Habitat. — Himalaya (monts Khasia). AR. TESSELLATA, Munro. — Tige de 5, 10, 15, 20 pieds an- glais ou 1°,50 à 3",05, 4,55 et 6",10. Synonymie. — Nastus tessellatus, Nees. Habitat. — Afrique australe. Ar. Hinpsir, Munro. Habitat. — Hong-Kong. AR. DENSIFOLIA, Munro. — Tige de 3 pieds anglais ou 0",90. Habitat. — Ceylan. AR. MICROPHYLLA, Munro. — Tige de 2 à 4 pieds anglais ou 0”,60 à 1,20. Synonymie. — Bambusa microphylla, Griffith. Habitat. — Bootor, Sannah. AR. SUBERECTA, Munro. — Tige de 10 à 15 pieds ou 8",05 à 4,95. Habitat. — Himalaya (monts Khasia). Deuxième genre. — Thamnocalamus. Tu. Fazcoxert, Hooker fils. Synonymie. — Bambusoides, Wall. — Bambusa {loribunda, Munro. Habitat, — Himalaya. CLASSIFICATION BOTANIQUE. 19 Tu. SPATHIFLORUS, Munro. Synonymie. — Arundinaria spathiflora, Trin. — Ar. procera, Wall. — Bambusa macra, Wall. Habitat. — Himalaya. Troisième genre. — Phyllostachys. Pa. Bampusoines, Sieb. et Zucc. Synonymie. — Bambusa reticulata, Rupr. — B. bifolia, Sieb. — Phyll. megastachya, Stund. — Ph. macrantha, Sieb. et Zucc. Habitat. — Japon, Chine, Himalaya. Pu. STAUNTONI, Munro. Habitat. — Chine. Les deux espèces suivantes sont regardées comme incer- taines par le colonel Munro, qui les indique comme étant probablement des Phyllostachys. Pu. NiIGRA, Munro. — Tige de 4 à 5 pieds anglais ou 1",20 Er ts LE Synonymie. — À rundarbor nigra, Rumph. — Bam- busa nigra, Lodd.— B.puberula, Miq. — Arundinaria stolonifera, Kurz. — Ar. diversifolia, Kurz. — Bam- busa nigricans, Hort. Steud. Habitat. — Chine, Japon, ile Niphon. Pn. Kumasaca, Munro. Synonymie. — Bambusa Kumasaca,Zoll.—B.rusci- folia, Sieb. Habitat. — Japon. Quatrième genre. — Arthrostylidium. A. HÆNKkEï, Rupr. Habitat. — Pérou. A. MACULATUM, Rupr. Synonymie.— Guadua parviflora, Presl. — Bambusu parviflora, Rœm. et Sch. Habitat. — Montagnes du Pérou, 20 LES BAMBOUS. A. LONGIFLORUM, Munro. Habitat. — Venezuela. A. ScnomeurGku, Munro.— Tige de 50 à 60 pieds anglais ou 15:22%18%20 Habitat. — Guyane. A. ExCELSUM, Grisebach. — Tige de 60 à 80 pieds anglais ou 18",95 à 24,39 Hat dé Caraibes, la Trinidad. A. PUBESCENS, Ruprecht. Habitat. — Mes Caraïbes, la Trinidad, Venezuela. A. BurcuezLn, Munro. — Tige de 6, 8, 10 pieds anglais ou 4",80 à 2",45 et à 5",05. Habitat. — Brésil (monts Corcovado). A. Cugexse, Ruprecht. Habitat. — Cuba, La Havane. À. CAPILLIFOLIUM, Grisebach. — Tige grimpante. Habitat. — Cuba. À. FIMBRIATUM, Grisebach. — Tige de 1 à 3 pieds anglais ou 0",30 à 0°,90. Habilat. — Cuba. À. RACEMIFLORUM, Steud. — Tige grèle, cespiteuse, de 20 à 30 pieds anglais ou 6",10 ou 9",15. Habitat. — Mexique, Venezuela. A. Train, Ruprecht. Synonymie. — Arundinaria parviflora, Trin. Habilat. -— Brésil. Cinquième genre. — Aulonemia. A. Quexo, Goudot. Habilat. — Nouvelle-Grenade (Carthagène), Vene- zuela. Sixième genre. — Merostachys. M. rerRnara, Nees. — Tige de 20 pieds anglais ou 6",10. Habitat. — Brésil, province Saint-Paul, Rio de Ja- neiro, Minas-Gefacs. CLASSIFICATION BOTANIQUE. 21 M. spEcI0SA, Sprengel. Synonymie. — M. cirrhosa, Nees. Habitat. — Brésil. M. CLaussenr, Munro. Habitat. — Brésil. M. grRevisricA, Munro. Habitat. — Pérou (près de Tarapoto). M. SPARSIFLORA, Ruprecht. Habitat. — Brésil. M. Neesn, Ruprecht. Synonymie. — M. speciosa, Nees. Habitat. — Brésil. M. Kunrau, Ruprecht. Synonymie. — M. speciosa, Kth. Habitat. — Brésil (Rio de Janeiro). M. capiraTa, Hooker. — Tige grimpante. Synonymie. — Chusquea fimbriata? Steud. — Chusquea (Retthergia) glomerata, Munro. Habilat. — Brésil (Rio de Janeiro). M. SeczLovir, Munro. Habitat. — Paraguay. M. Burcnezzn, Munro. — Tige de 30 à 40 pieds anglais ou 9.49 à 12°,920. Habitat. — Brésil austral (Santos). Septième genre. — Chusquea. Cn. TENELLA, Nees. — Tige grêle. Habitat. — Brésil. CH. SIMPLICIFLORA, Munro. — Tige grimpante, de 59 à 80 pieds anglais ou 15",25 à 24,35. Habitat. — Panama. CH. ABIETIFOLIA, Griseb. — Tige très-grimpante. Synonymie. — Arundo, Browne. Habitat. — Jamaïque. Cn. VENEZUELÆ, Steud. Habitat, — Venezuela, 22 LES BAMBOUS, CH. pintFoLIA, Nees. — Tige de 4 à 6 pieds anglais ou 1",20 2 M: Eee LE Synonymie. — Arundinaria? pinifolia, Nees. — Ludolfia pinifolia, Dietr. — Dendragrostis pinifolia, Nees. Habitat. — Brésil. Ch. PuroiEena, Munro. Habitat. — Nouvelle Grenade. Cu. CuminGnr, Nees. — Tige de 8 à 10 pieds anglais ou 2",45 à 9”,09. Synonymie. — Arundo quillinga, Molina. — Ar. ca- nila, Molina. — Ch. parvifolia, Philippi. Habitat. — Chili (Valparaiso). Cu. uLiGINOSA, Philippi. — Tige à peine de 6 pieds anglais ou 1280: Habitat. — Chili (Valparaiso, Puerto-Monti). Cu. AnniNA, Philippi.—Tige à peine de2 piedsanglais ou 0",60. Habitat. — Chili (les Andes). Cu. Cuzeou, Em. Desv. — Tige de 15 à 20 pieds anglais ou 4725 Abe 10. Synonyrie. —— Ch. breviglumis, Philip. Habitat. — Chili. Cu. unirLorA, Stend. — Tige de 20 pieds anglais ou 6",10. Habitat. — Nouvelle-Grenade, Équateur, Quito, les Andes. CH. GALEOTTIANA, Rupr. Habitat. — Mexico, Oaxaca. CH. MonrANA, Philippi. — Tige de 6 à 9 pieds anglais ou 1°,80 2 LS Habitat. — Chili. CH. OLIGOPHYLLA, Rupr. Habitat. — Brésil. Ch. spreaTA, Munro. Synonymie. — Ch. humilis, Lechler. Habitat. — Pérou. CH. TESSELLATA, Munro. Habitat. — Nouvelle-Grenade (Andes de Bogota). CLASSIFICATION BOTANIQUE. 23 CH. ARISTATA, Munro. — Tiges de 5 à 6 pieds anglais ou 1",50 à 4",80. Habitat. — Équateur, Quito, les Andes. Cu. FENDLERI, Munro. Habitat. — Venezuela, Équateur. Ca. Dompeyana, Kunth. — Tige de 9 à 10 pieds anglais ou 2».15 à 32,05: Habitat. — Pérou, Nouvelle-Grenade, Équateur. CH. LIGULATA, Munro. — Tige grêle. Habitat. — Nouvelle-Grenade. CH. ANELYTHRA, Nees. Synonymie. — Dendragrostis anelythra, Nees. Habitat. — Brésil. Cu. Wiikesit, Munro. Habitat.— Brésil. CH. SCANDENS, Kunth. Synonymie. — Ch. Jamesoni, Steud. — Nastus chusque, H. B. K. — N. chusquea, Rasp. — Bambusa chusque, Poir. — Mustelia arundinacea, Cav. Habitat. — Équateur (Quito), Nouvelle-Grenade. CH. PALLIDA, Munro. Habitat.—Nouv.-Grenade, Sainte-Marthe, Venezuela. Cn. MuzLert, Munro. Habitat. — Mexique (Vera-Cruz, Orizaba). CH. Quica, Kth. Synonymie. — Ch. pubescens, Steud. — Ch. Valdi- viensis, Em. Desv.— Ch. intermedia, Stewd. — À rundo quila, Poir. — Ar. quila? Molina. — Nastus quila, Rœm et Sch. Habitat. — Chili (Valparaiso). CH. TENUIFLORA, Philippi. — Tige de 6 à 12 pieds anglais ou 1,80 à 3,69. Synonymie. — Ch. quila, Em. Desv. — Ch. ciliata, Philip. Habitat. — Chili. CH. SELLOvIT, Ruprecht. Habitat. — Brésil. 24 LES BAMBOUS. Cu. GaupicHAuDI, Kunth. Synonymie. — Relibergia bambusæoides, Raddr. Habitat. — Brésil (Rio de Janeiro, Gorcovado). CH. CAPITULIFLORA, Trin. — Tige grimpante, très-haute. Habitat. — Brésil (Rio de Janeiro). CH. capiraTA, Nees. —- Tige grimpante. Synonymie. — Rettbergia capitata, Nees. Habitat. — Brésil. Les deux espèces suivantes sont douteuses : Cu. LEPTOPHYLLA, Nees. Habitat. — Brésil. CT. HETEROPHYLLA, Nees. — Tige obtuse, à trois côtes. Habitat. — Brésil. Huitième genre. — Planotia. PL. ELATA, Munro. — Tige droite, de 4 à 5 pieds anglais (Kunth.) ou 1",20 à 1°.50; de 12 à 18 pieds (Bompl.) ou JDD à 040: Synonymie. — Platonia elata, Kunth. Habitat. — Quito. PL. virGarTA, Munro. — Tige de 6 pieds anglais ou 1",80. Synonymie. — Platonia virgata, Grisebach. Habitat. — La Trinidad. PL. Nogicis, Munro. Habitat. — Nouvelle-Grenade. PL. AGUMINATISSIMA, Munro.—Tige de 6 pieds anglais ou1",80. Habitat. — Nouvelle-Grenade. PL. APERTA, Munro. Habitat. Nouvelle-Grenade. Deuxième section, — Bambusées vraies. Chaume épineux ou inerme, épais, creux, très-rarement massif, cylindrique, arborescent, élancé ou rarement buis- sonnant, jamais grimpant, produisant assez souvent du Tabasheer. CLASSIFICATION BOTANIQUE. 95 Tnflorescence ou en pédoncule radical (Bambusa Balcooa, d’après Roxburgh) ; ou en vaste panicule terminant une tige souvent très-élevée, souvent couverte d’épines et dénudée de feuilles ; rameuse ou très-rameuse ; rameaux disposés en épis simples ou composés ou laxiuscules : très-rarement on y rencontre çà et là des rameaux portant des feuilles; ou bien, comme dans le Nastus, les Guadua et un petit nombre d’au- tres, la panicule terminale des rameaux est presque simple avec quelques épis pédicellés ou sessiles. Epillets à plusieurs fleurs, ayant souvent beaucoup de bractées, imparfaits en haut et en bas, biformes quelquefois, très-rarement dioïques. Glumes à nombreuses nervures, les inférieures produisant presque toujours des bourgeons, excepté dans les Nastus, toutes fort semblables dans les petites fleurs inférieures, dont plusieurs, unipalacées, sont souvent stériles. Glumelle supérieure à deux carènes où sans carène, et arrondie sur le dos. Étamines : 6 pièces, à filets libres à la base ou mona- delphes ; le connectif des anthères est obtus ou en pointe. Écailles : 3 pièces; deux avortent, elles manquentrarement toutes. Style court ou très-court, bientôt partagé en trois parties, ou bien plus ou moins simple à la base, et seulement en deux ou trois parties au sommet. Fruit ovale ou oblong, ou (surtout dans l'Oxytenanthera) étroitement oblong-linéaire, remarquable par un sillon longi- tuainal; l’écusson visible au dehors. Péricarpe non distinct de la graine. Les végétaux de cette section croissent dans les deux hémisphères. Neuvième genre. — Nastus. N. BorBonicus Gmel. — Tige arborescente, de 50 pieds anglais ou 15,25 Synonymie. — N. paniculalus, Sm. — Slemma- 26 LES BAMBOUS. lospermum verticillatum, P. de B. — Bambusa alpina, Bory. — Chloothamnus chilianthus (), Büse. — Bam- busa arundinacea, H. B. — B. paniculata, Wild. Habitat. — Le Bourbon, Madagascar, Sumatra. L'espèce suivante est douteuse. N. garearus, Trin. — Tige de 20 à 25 pieds anglais ou 6",10 ae Habitat. — Brésil. Dixrième genre. — Guadua. G. Tacoara, Kunth. — Tige de 20 à 30 pieds anglais ou 65,40. à:9r,15: Synonymie. — Bambusa lagoara, Nees. Habitat. — Brésil. G. LATIFOLIA, Kunth. — Tige de 24 pieds anglais ou 7",30. Synonymie. — Bambusa latifolia, H. et B. — Nastus latifolius, Spr. — Bambusa fragilis, Spruce. Habitat. — Brésil (Rio-Negro), Trinidad, Venezuela. 3. GLOMERATA, Munro. Habitat. — Brésil (Rio Negro). G. macrosracuyA, Rupr. — Tige de 20 à 30 pieds anglais ou 610: 29 45: Synonymie. — G. dioica, Steud. Habitat.— Guyane française, Brésil (Para, Santarem). G. (?) carrrara, Munro. — Tige de 15 à 20 pieds anglais ou Ana a D TO, Synonymie. — Bambusa capilata, Trin. — Schizo- stachyum capitatum, Rupr. Habitat. — Brésil. \ G. ANGusTIFOLIA, Kunth.— Tige arborescente de 30 à 36 pieds anglais ou 9",15 à 10",95. Synonymie. — Bambusa quadua, H. et B.— Nastus guadua, Spreng. , Habitat. — Nouvelle-Grenade (Andes), Équateur (Quito), Pérou (Lima). me = À CLASSIFICATION BOTANIQUE. 1 G. Tri, Ruprecht. Synonymie. — Bambusa Trinii, Nees. Habitat. — Brésil. G. pisrorTA, Ruprecht. Synonymie. — Bambusa distorta, N. E. Habitat. — Brésil. 1. ViRGATA, Ruprecht. — Tige de 95 pieds anglais ou 7",60. Synonynie. — Bambusa virgata, Trin. Habitat. — Brésil. G. AMPLEXIFOLIA. Pres, Synonymie. — Bambusa ampleæifolia, Rœm. et Sch. Habitat. — Mexique, Santa-Cruz, Panama, Nouvelle- Grenade (Carthagène), Venezuela. G. REFRACTA, Munro. — Tige de 10 à 30 pieds anglais ou d-300.497.45: Habitat. — Brésil tropical (Goyaz). = G. PANICULATA, Munro. — Tige de 20 à 30 pieds angiais ou GRAO SA TD. Habitat. — Brésil tropical (Govaz, Pernambuco). G. VENEZUEL#, Munro. Habitat. — Venezuela. Onzième genre. — Bambusa. B. NaNA, Roxb.— Tige de 6 à8 pieds anglais ou 1",80 à 2",45. Synonymie. — B. qglauca, Loddig. — B. floribunda, Loll. — B. cœsia, Sieb. et Zuec. — B. glaucescens, Sieb. — B. sterilis, Kurz. — Ischurochloa floribunda, Büse. — Arundinaria glaucescens, P. de B. Habitat. — Chine, Japon. B. Tuzpa, Roxb. — Tige arborescente atteignant de 20 à 70 pieds anglais ou 6",10 à 21,35 en 30 jours Synonymie. — B. trigyna, Roxb. — PB. macaia, Ham. Habitat. Indes orientales (Bengale). B. nuraxs, Wallich. Habitat. — Indes orientales. 28 LES BAMBOUS. B. AFFINIS, Munro. — Tige grimpante. Habitat. — Indes orientales. B. Tuzpoipes, Munro. Synonymie. — B. Blumeana? Hook. et Arn. — B. tulda, Benth. Habitat. — Chine (Canton, Hongkong, Ile KFor- mose). B. ANGULATA, Munro. Habitat. — Chine (Ile Formose). B. TERES. — [b. Ham. Habitat. — Indes orientales (Bengale, Assam). PB. FazcoxERI, Munro. Synonymie. — B. fistulosa? Rovle. Habitat. — Indes orientales (Himalaya). B. BREVIFLORA, Munro. Habitat. — Chine (Formose). B. PALLIDA, Munro. — Tige de 50 pieds anglais ou 15",25. Habitat. — Yndes orientales (Bengale). B. KHASIANA. — Munro. Habitat. — Indes orientales (Khasia, Churra). B. PoLYMOrRPHA, Munro. — Tige de 60 à 80 pieds anglais ow 18",95 à 24,35. Habitat. — Indes orientales (Martaban, Pegu, Ran- S00n). B. GRIFFITHIANA, Munro. — Tige grêle. Habitat. — Indes orientales. B. Bazcoo, Roxb.— Tige de 50 à 70 pieds anglais ou 15",95 ANSE Synonymie. — B. vulgaris, Nees. — B. vasaria, herb. Hamilton. — Arundarbor vasaria, Rumph. — Arundo bambos, herh. Smith. Habitat. — Indes orientales (Bengale). B. FLEXUOSA, Munro.— Tige épineuse de 6 à 12 pieds anglais où 1", 00 à 365: Habitat. — Chine (Canton). . BLUMEANA, Schultes. — Tige épineuse. Synonymie. — B. spinosa, Blume, — B. agrestis? — Le CLASSIFICATION BOTANIQUE 29 Poir. — A rundo agrestis, Lour.—Schizostachyum durie, Rupr. — Ischurochloa spinosa? Büse. Habilat. — Java. B. ARUNDINACEA, Retz. — Tiges épineuses de 20 à 50 pieds ou 0",10 à 15",95. Synonymie. — B. spinosa, Nees. — B. arundo lb. Klein. — B. orientalis, Nees. — B. Neesiana, Arn. — Arundo bambos, Linn. — Bambos arundinacea, Pers. Nastus arundinaceus, Sm. Habitat. — Indes orientales. — Culture en Chine (Hong-Kong). B. spiNosa, Roxb. — Tiges de 30, 50, 100 picds anglais ou 9 ,45.4457,95.à 30550: Synonymie. — n rundo indica arborea, Burmann, — B. arundinacea, Thw. — Arundo bambos, herb. Roxb. Habital. — Indes orientales (Bengale, Calcutta, Assam, etc.). B. OrrENTaLIs, Nees. Synonymie. — B. arundinacea, Nees. Habitat. — Indes orientales. ee vULGARIS, Wendl. — Tige de 20, 30, 59 pieds anglais ou 1", 10 à gn, 15441952 Synonymie. — B. Thouarsii, Kth. — B. Surinu- mensis, Rupr. — B. Sieberi, Griseb. — B. humilis, Reich. — B. arundinacea, Moon. — B. auriculala, Kurz. — Nastus Thouarsii, Rasp. Habitat. — Indes, Java, Iles Maurice, Bourbon, Saint- Hélène, Madagascar, Jamaïque, Trinidad, Don gue, Bermude, Guyane française, Pérou, Mexique, Brésil. B. BeecneyaNa, Munro.— Tige de 20 pieds anglais ou 6",10. Synonymie. — B. verticillala? Hook. Habitat. — Chine. B. OLonamr, Munro.— Tige de 5 à 6 p. angl. ou 1",50 à 1",80. Habitat. — Chine (Ile Formose). B. Brannisir, Munro. — Tige atteignant 120 pieds anglais ou 36",99 ct 27 pouces ou 0",68 de circontérence. Habitat. — Indes orientales. aÙ LES BAMBOUS. La fructification des espèces suivantes de Bambous n'ayant pas été observée, le colonel Munro ne les inscrit qu'avec doute dans ce genre. B. TESSELLATA, Munro. Habitat. — Chine. B. Canrorr, Munro. Habitat. — Chine. B. Forrunet, Van Houtte. — Tige naine. Synonymie, B. picla, Sieb. et Zucc. — B. variegala, Sieb. Habitat. — Japon. B. Wicuru, Munro. Habitat. — Indes orientales, Malabar. B. Brrunc, Rœm et Sch. Synonymie. — Schizostachyum bilung, Steud. Habitat. — Java. B. Apus, Rœæm et Sch. Synonymie. — Schizostachyum apus, Steud. Habitat. — Java. B. cornuTA, Munro. Habitat. — Java. B. Rirenevi, Munro. — Tige de 10 à 15 pieds anglais ou 3",05 ou 4",95. Habitat. — Indes orientales (Bombay). B. Masrersir, Munro. — Tige grimpante. Habitat. — Indes orientales (Assam). B. Mac CLELLANDI, Munro. — Tige grimpante. Habilat. — Indes orientales. B. MARGINATA, Munro. — Tige très-grimpante. Habilat. — Indes orientales (Tenasserim). B. Hezren, Munro. Habitat. — Indes orientales (Tenasserim). B. Horsriezonr, Munro. Habital. — Java. B. LuÇONLE, Munro. Habitat. — Iles Philippines (Luçon). CLASSIFICATION BOTANIQUE. 31 B. AUREA, Sieb. Habitat. — Japon. B. Recra, Thomson. — Tige de 40 pieds anglais ou 12,20. | Habitat. — Indes orientales (Tenasserim). D. PyGMÆA, Miquel. Habitat. — Japon. B. AUREO-STRIATA, Regel. Habitat inconnu. B. ARGENTEO-STRIATA, Regel. Tige de 4 à 5 pieds anglais ou a 0 D at Habitat inconnu. Le colonel Munro cite les espèces suivantes sous la rubrique : Bambusées florifères, moins connues, mal décrites par les au- teurs. (Ordre alphabétique.) B. AGRESsTIS, Poir. — Tige tortueuse de 30 pieds angel. ou 9",15. Synonymie. — Arundo agrestis, Lour. — Arundar- bor spinosa, Rumph. Habitat. — Cochinchine, Chine ? B. prrrusA, Blanco. Habitat. — Yes Philippines. B. LINEATA, Munro. Synonymie. — Leleba lineata, v. virgata, Rumph. Habitat. — Yes Ternate et Célèbes, B. Loxanonis, Miq. Habitat. — Amboine, Manipe, Java. B. LumaAmpao, Blanco. Habitat. — Tes Philippines. B. mrris, Poir. — Tige de 40 pieds anglais ou 12",20. Synonymie. — Arundo mitis, Lour. Habitat. — Cochinchine. B. moxocynA, Blan. Habitat. — Mes Philippmes. B. muzriPcex, Ræuseh, Rœm et Sch. — Tige de 12 pieds anglais ou 3",09. Synonymie. — Arundo mullipleæ, Lour. Habitat. — Cochinchine. 32 LES BAMBOUS. B. PUNGENS, Blan. Habitat. — es Philippines. B. TenuIS, Munro. — Tige de 15 à 16 pieds anglais ou 4",55 ou 4",89. Synonymie. — Arundarbor tenuis, Rœm et Sch. Habilat. — Macassara. Les espèces suivantes sont moins connues; elles n’ont pas été vues portant leurs fruits. B. AmanussanA, Lindl. B. Synonymie. — Leleba amahussana, Rumph. Habitat. — Amboine (Amahussa). B. ARISTATA, Lodd. Habitat. — Indes orientales. B. arrA, Lindi. Synonymie. — Leleba nigra, Rumph. Habitat. — Amboine. B. BLANCOI, Steud. Synonymie. — B. milis, Blanco. Habitat. — Yes Philippines. B. rer, Miq.—Tige s’élevant jusqu'à 50 pieds angel. ou 9",19. Habitat. — Amboine. B. LEVIS, Blanco. Habitat. — Yes Philippines. B. Lima, Blanco. Habilat. — Nes Philippines. B. mAxIMA, Poir. — Tige atteignant 80 à 100 pieds anglais ou 24",35 à 30",50. Synonymie. — Arundarbor maxima(Bulu Sammel), Rumph. — B. excelsa, Miq. — Arundo maxima, Lour. Habitat. — Amboine, Java. B. ricra, Lindi. Synonymie. — Leleba picta, Rumph. Habitat. — es Célèbes, Cerama, Kelanga. B. prAvA, Lindl. Synonymie. — Leleba prava, Rumph. Habilut. — Amboine. ; CLASSIFICATION BOTANIQUE. 33 B. srriaTA, Loddig. — Tige de 20 pieds anglais ou 6",10. Habitat. — Chine. B. TapacaRIA, Poir. Synonymie. — Arundo tabacaria, Lour. Habitat. — Cochinchine. B. TeBa, Miq. Synonymie. — Arundarbor spinosa (Bulu Baduri, Teba Teba), Rumph. Habitat. — Amboine, Manille, Java, Chine australe. B. TEXTORIA, Blanco. Habitat. — Yes Philippines. B. vasariA, Munro.— Tige de 36 à 50 pieds anglais ou 10",95 2457.05; | Synonymie. — Arundarbor vasaria (Bulu Java), Rumph. Habitat. — Amboine, Mollusques, Java. Douzième genre. — Gigantochloa. G. veRTICILLATA, Munro.— Tige de 80 à 100 pieds anglais ou 24*,35 à 30°,50: Synonymie. — G. maxima, Kurz. — Bambusa verti- cillata, Willd. — B. pséudo-arundinacea, Steud. — B. eæcelsa, Miq. Habitat. — Java (Buitenzorg). G. ATER, Kurtz. — Tige de 40 pieds anglais ou 12",90. Synonymie. — B. Thouarst, 8. alter, Hassk. — B. verticillata, Miq. Habitat. — Java (Buitenzorg). G. HETEROSTACHYA, Munro. —Tige de 50 pieds angl ou 9",15. Synonymie. — B. diversistachya, Munro. Habitat. — Malacca. L'espèce suivante est douteuse ; on n’en connait que le feuillage. G. Arus, Kurtz. Habitat. — Java. 34 LES BAMBOUS. Treizième genre. — Oxytenanthera. O. AgyssiniCA, Munro. — Tige de 25 à 50 pieds anglais ou 22,60 à 157,95. Synonymie. — Bambusa abyssinica, Rich. — B. Schimperiana, Steud. Habitat. — Abyssinie, Afrique tropicale. Ô. NIGRO-CILIATA, Munro. — Tige de 30 à 40 pieds anglais ou 04947220. Synonymie. — Bambusa nigro-ciliata, Püse. — B. bitung, Hassk. — B. gracilis, Wall. Habitat. — Indes orientales (Tenasserim, Martaban, Madras, Sumatra, Java). Ô. ALBO-CILIATA, Munro. — Tige grimpante. Habitat. — Indes orientales (Pegu). 0. Tawarresir, Munro. — Tige de 10 à 12 pieds anglais ou 3",05 à 3,09: Synonymie. — Dendrocalamus monadelphus, Thw. — Bambusa stricla, Roxb. Habitat. — Ceylan, Indes orientales (Nilgheri). O. Srocksir, Munro. Habitat. — Indes orientales. Troisième section. — Bacciférées. Chaume inerme (est-ce toujours?), creux, très-rarement compacte, cylindrique, quelquefois élancé, quelquelois un peu sous-frutescent, souvent grimpant, produisant rarement le Tabasheer. Tnflorescence : ou bien en ample panicule décomposée, lâche (Pseudoslachyum et Dinochloa); ou en épillets rassem- blés en verticilles très-épais le long des rameaux et des ra- mules (Dendrocalamus); où en épillets réunis en épis com- posés, allongés, ayant de longues bractées à la base (Welo- canna bambusoides) ; où en capitule terminal épais, soutenu par les feuilles supérieures dilatées à leur base (Cephalosta- CLASSIFICATION BOTANIQUE. 35 chyum capilatum); où en panicule presque simple, Lermi- nale, peu ramifiée et quelquefois presque en forme d’épis (Beesha et Schizostachyum Blumii). Épillets de la base souvent parfaitement composés ou émi- nemment prolifères ; ceux de l'extrémité (les vrais) ont sou- vent peu de fleurs, dont 1 ou 2 parfaites; ils en ont beaucoup dans le Teinostachyum et dans le Dendrocalamus. Glumes à nervures nombreuses ; les inférieures produisent très-souvent des bourgeons. | Glumelle supérieure manquant rarement (Schizostachyum Blumii), presque toujours trés-enveloppée et assez souvent sans carènes, souvent bi-mucronée au sommet. Étamines : 6 ou davantage (Beesha), libres à la base; con- nectif obtus ou en pointe. Écailles : généralement 3, quelquefois davantage; elles manquent parfois. Style toujours long et simple à la base, étroitement ren- fermé dans la forme du périgyne, et se terminant en deux ou trois parties, avec les stigmates souvent retournés. Fruit très-gros la plupart du temps,bacciforme ou pomi- forme, renfermé dans le périgyne, en sorte que l'écusson n’est pas visible au dehors. Les genres de cette section ne se rencontrent que dans l’hé- misphère oriental. Quatorzième genre. — Melocanna. M. pampusoIDes, Trin. — Tige de 50 à 70 pieds anglais ou 15°,95 à 21,35. Synonymie. — Bambusa baccifera, Roxb. — Beesha Rheedei, Kunth.— Beesha baccifera, Rœm. et Sch. — Nastus baccifera, Rasp. Habitat. — Indes orientales (Chittagong), Iles Bour- bon, Maurice, etc. M. viRGATA, Munro. Habitat. — Indes orientales (Birmah). M. cracrLis, Kurz. — Tige de 10 pieds anglais ou 3",09, Habitat. — Singapore, Java. 36 LES BAMBOUS. M. ZoLLINGERI, Kurz. Synonymie. —Schizostachyum Zollingeri, Steud. — S. Blumei, Miq. Habitat. — Java (Buitenzorg). M. Kurzir, Munro. Synoymie. — Bambusa schizostachyoides, Kurz. Habitat. — Ile Andaman. L'espèce suivante est moins connue, ct désignée comme très-douteuse. M. numiuis, Rœpert. — Tige de 15 à 18 pieds anglais ou 4,59 à 5,45. Synonymie — Beesha ? humilis, Kunth. — B. fax, Rœm. et Sch. — Arundarbor cratium, Rumph. — Arundo fax, Lour. Habitat. — D'Amboine à Java. Quinzième genre. — Schizostachyum. S. PARVIFOLIUM, Munro. — Tige de 8 à 10 pieds anglais ou 2" .45 à 3,05. Habitat. — Madagascar, Nossi-bé. S. DUMETORUM, Munro. — Tige de 4 à 6 pieds anglais ou 1,90 à 1°,80. Synonymie. — Bambusa dumetorum, Hance. Habitat. — Chine (Hong Kong). S. BLUMEI, Nees. Habitat. — Java. S. GLAUCIFOLIUM, Munro. — Tige de 9 pieds anglais ou TC Synonymie. — Bambusa glaucifohia, Rupr.— Bam- bos arundo, Solander. Habitat. — Yes de l'Océan pacifique (Taïti, Hawai, Noukahiva). S. AGUTIFLORUM, Munro. Habilat. — Iles Phihppines, Luçon. CLASSIFICATION BOTANIQUE. 37 Seizième genre. — Cephalostachyum. C. caPpITATUM, Munro. — Tige de 12 à 30 pieds anglais ou USE ee Synonymie. — Bambusa capitata, Wall. et Griff. Habitat. — Indes orientales. C. PALLIDUM, Munro. Habitat. — Indes orientales. C. LATIFOLIUM, Munro. Habilat. — Indes orientales (Boatan). C. CHapeLierr, Munro. — Tige grimpante. Habitat. — Madagascar. C. PERGRACILE, Munro. — Tige de 40 pieds anglais ou 12",20. Habitat. — Indes orientales (Tenasserim, Rangoon). Dix-septième genre — Pseudostachyum. Une seule espèce connue. Ps. POLYMORPHUM, Munro. Habitat. — Indes orientales (Assam). Dix-huilième genre. — Teinostachyum. T. GrirritTan, Munro. Habitat. — Indes orientales (Birmah, près de Wullo- boom). T. ATTENUATUM, Munro. — Tige de 19 à 25 pieds anglais ou 3",69 à 7,60. Synonymie. — Bambusa attenuata, Thw. Habitat. — Ceylan. Dix-neuvieme genre. — Beesha. B. Ragepeï, Kunth. — Tige de 16 pieds anglais ou 4",85. Synonymie. — Bambusa scriptoria, Schleus. — Melocanna humailis, Roep. — M. Rheedei, Steud. Habitat. — Indes orientales, Malabar, Cochinchine. 38 LES BAMBOUS. B. sTRIDULA, Munro. Synonymie. —Ochlandra stridula,Thw.— Bambusa stridula, Moon. | Habitat. — Ceylan, Indes orientales (Bombay). B. caprrarTa, Munro. — Tige de 50 pieds anglus ou 15,25. Syncnymie. — Nastus capitatus, Kunth. — Bambusa capilata, Willd. Habitat. — Madagascar, Ile Nossi-bé, Nossi-Camba. L'espèce suivante est douteuse. B. ELEGANTISSIMA, Kurz. Synonymie. — Bambusa elegantissima, Kurz. Habitat. — Java. Vingtième genre. — Dendrocalamus. D. srricrus, Nees. — Tige de 8 à 10 pieds anglais (Hooker) ou 2,45 à 3,05 ; de 40 à 100 pieds (Brandis). Synonymie. — Bambusa stricta, Roxb et autres. — Oxytenanthera Thwaitesii, Munro. — B. verticillata, Rottler. — B'"glomerata, Royle. — "B. heæandra, Arundo hexandra, Roxb. — B. tanœa, Ham.— B. pu- bescens, Lodd. et Lindl. — Nastus strictus, Sm. — Munget, Pluken. Habitat. — Indes orientales, en grand nombre de localités. D. sERICEUS, Munro. Habitat. — Indes orientales (Bengale). D. Parisur, Munro. Habitat. — Indes orientales (Punjab, Himalaya). D. MEMBRANACEUS, Munro. | Habitat. — Indes orientales (Martaban, Tenasserim). D. FLAGELLIFER, Munro. Synonymie. — Bambusa flagellifera, Griffith. — Schizostachyum loriforme, Munro. Habitat. — Malacca. D. GiGANTEUS, Munro. — Tige très-élevée. CLASSIFICATION BOTANIQUE. 39 Synonymie. — Bambusa gigantea, Wallick, Habitat. — Pulo Penang, Tenasserim. D. Hooker, Munro. — Tige de 50 pieds angiais ou 45",95. Habitat. — Indes orientales. D. HamiLronn, Nees et Arnott. — Tige de 40 à 60 pieds an- glais ou 12,20 à 18",95. Synonymie. — Bambusa maxima, Ham. — B. mo- nogyna, Griffth. Var. edulis, Munro. Habitat. — Indes orientales, en un grand nombre de lacalités. D. LATIFLORUS, Munro. — Tige de 6 à 7 pieds anglais ou 47,80 à 2°,15. Synonymie. — Bambusa verticillata, Benth, Habitat. — Chine (Hong-Kong, Formose). Vingt et unième genre. — Dinochloa. Ce genre ne comprend qu’une seule espèce. D. Tsaxkorren, Büse. — Tige grimpante. Synonymie. — Bambusa scandens, Blum. — Nastus Tjankorreh, Rœm. et autres. — Schizostachyum par- viflorum, Munro.— Chusquea amplopaniculata, Steud. Habitat. — Iles Philippines, Java. On voit par cette longue liste, qui comprend 220 espèces de Bambous, combien 1l a fallu de persévérance au Colonel Munro pour arriver à les étudier et à les décrire toutes, et à quelles difficultés 1l a dû se heurter; travail d’autant plus aride que les caractères de ces plantes ne résident pas seule- ment dans les fleurs et les fruits, mais aussi dans les organes appendiculaires de la tige, aux moments où celle-ci croît, où elle se développe, où se termine sa végétation. Il CLASSIFICATION HORTICOLE. Nous avons dit au début de cette étude que les Bambusacées fleurissaient rarement, même dans leurs contrées naturelles; nous ajoutons que, dans nos cultures, quelques-unes seule- ment ont, par hasard, montré leurs inflorescences pendant ces dernières années, alors que nous avions déjà commencé ce travail et arrêté depuis longtemps cette classification horticole, qui ne perd nullement de son intérêt par la présence Imat- tendue de fleurs apparues depuis peu sur de rares espèces. En effet, leur diagnose vient en général confirmer notre projet de classification basée sur les organes appendiculaires de la tige et sur la végétation de la plante. Or, ces organes appendiculaires qui sont, d’une part, les gaines, et, de l’autre, les écailles binervées (ou préfeuilles), sont caducs dans le plus grand nombre des cas, d’où 1l arrive souvent que certaines espèces qu'ils caractérisent échappent aux botanistes voyageurs qui ne se trouvent pas toujours à point nommé sur les lieux, alors que les tiges des Bambous se développent avec tant de rapidité. D'un autre côté, l'attention du collectionneur est naturellement beaucoup plus attirée par l'inflorescence, bien qu'il soit non moins utile d'étudier l’en- semble de la végétation et les caractères qu'offrent alors les Bambous. Il en résulte que beaucoup de ces caractères, qu'il faudrait précis et nettement accusés, nous font défaut, et c’est d'autant plus regrettable que toutes les Bambusacées peuvent se distinguer entre elles par leurs gaînes et par leurs écailles binervées. C’est par ces organes que, dans la pratique horti- cole, nous pouvons souvent les reconnaître. Nous établirons donc avec eux une classification sinon bota- nique, du moins horticole, puisque la rareté des inflorescences nous empêche jusqu’à présent de suivre une méthode plus CLASSIFICATION HORTICOLE. ai naturelle. Il est besoin de signes extérieurs plus saillants et plusrenouvelables, pour reconnaître êt dénommer des espèces chez qui les organes floraux ne se montrent guère dans les cultures ou qui n'apparaissent qu'une fois à la fin de leur existence, alors que pratiquement leur détermination devient inutile. Le mode de végétation et l’époque où elle a lieu chez les quelques espèces que nous cultivons dans nos jardins d'Eu- rope et en Algérie, offrent des caractères qui nous ont paru assez nettement tranchés pour que nous croyions devoir les faire connaître. C'est tout particulièrement sur celte époque et ce mode de végétation des Bambous, sur les caractères de leur jeune tige et de ses organes appendiculaires, que notre attention s’est constamment portée depuis plusieurs années. Nous y avons reconnu des différences bien tranchées au moment de la végé- tation annuelle des tiges, dans des espèces qui, sauf pendant leur courte période de croissance, présentent durant le reste de leur existence un aspect et une similitude de forme et de détails qui les font confondre entre elles. Dans nos cultures du Jardin du Hamma, près d'Alger, nous - avons Suivi ces précieux végétaux dans tous les détails de leur formation, de leur croissance, de leur développement complet, et nous nous sommes entièrement confirmés dans cette opi- nion, qui ne manquera pas d'utilité dans la pratique de la cul- ture, que les Bambous connus de nous forment deux groupes parfaitement distincts par rapport à l'époque et au caractère de leur végétation : l'un comprenant : Les Bambous à végétation aulomnale, végétant en automne, depuis septembre ; L'autre comprenant : Les Bambous à végétation vernale, c'est-à-dire qui végètent au printemps, en avril-mai. 42 LES BAMBOUS PREMIER GROUPE. BAMBOUS A VÉGÉTATION AUTOMNALE. (Touffes cespiteuses. Ramifications rhizomateuses disposées en faisceau.) Toutes les espèces de ce groupe que nous connaissons dans nos cultures ou nos collections sont originaires des pays chauds et ne peuvent vivre que sur le littoral des parties sud de la Méditerranée, ou dans des expositions exceptionnelle- ment favorables, peu élevées au-dessus du niveau de la mer. Ce groupe a donc besoin d’une somme de chaleur considé- rable et par cela même, il se développe pendant l'été, depuis septembre. Toutes ses espèces appartiennent à la section des Bam- busées vraies de Munro; elles ont comme caractères géné- r'AUx : 4° Végétation automnale commençant en août-septembre, pour se terminer en décembre ; 2 Touffe cespiteuse ou peu traçante ; æ Tiges cylindriques sans dépression ni cannelure. 4 Ramifications rhizomateuses, nombreuses, disposées en faisceau à chaque nœud de la tige et pouvant donner nais- sance à des racines. Les premières se développent ordinai- rement après la croissance de la tige. Les espèces de ce groupe cultivées au Hamma et généra- lement répandues dans les cultures ou les collections sont, par ordre de mérite et de grandeur reconnus dans le bassin méditerranéen : Bambusa macroculmis ; — vulgaris ; — — vittata; -- Hookeri ; — SpinoOsa ; — stricla ; — — argentea; — gracilis ; — scriptoria. CLASSIFICATION HORTICOLE. 43 DEUXIÈME GROUPE. BAMBOUS A VÉGÉTATION VERNALE. (Touffes généralement très-traçantes, quelques-unes cespiteuses, Ramifications non rhizomateuses.) Les espèces de ce groupe, dans les parties tempérées du bassin méditerranéen, dans les contrées analogues et en Algérie, végètent au printemps, en avril-mai, mais seule- ment en été dans toutes les régions semblables au climat moyen de la France. Ce groupe peut vivre en pleine terre en France, même dans le Nord, en Angleterre et dans des climats voisins. Il donne des résultats de végétation très-remarquables aux environs de Paris, où cependant certaines espèces sont plus ou moins rus- tiques. Le caractère général de ses espèces, qui appartiennent à n'en pas douter à la tribu des Triglossées, est de présenter deux formes principales de végétation : l’une à rhizomes traçants, l’autre à souches cespiteuses, mais offrant toutes deux des ramifications non rhizomateuses, c’est-à-dire ne pouvant pas produire. de racines ni conséquemment se multiplier artificiellement par des organes aériens. Ces deux formes principales, bien différentes par leurs caractères extérieurs, constituent deux sous-sections : les Phyllostachyées et les Arundinariées, 1° Phyllostachyées. Bambusacées à rhizomes très-traçants, à tiges comprimées, cannelées, à ramifications géminées, bifurquées, se dévelop- pant pendant la croissance de la tige. Chaque nœud présenie généralement deux ramifications ; mais il peut y avoir de rares exceptions dues à des causes diverses. On en rencontre quel- quefois une seule à la base des grosses liges, d’autres fois trois, mais encore la troisième n'est-elle que le résultat du déve- loppement d’une ramification secondaire née à la base d’une 44 LES BAMBOUS. des ramifications principales ; cette troisième et rare ramifi- cation s’observe plutôt dans le nord de la France que dans les pays tempérés. , Les Phyllostachyées remontent plus au nord que les Arun- dinariées. Les espèces qui font partie de cette première sous-division sont, par ordre de grandeur : Phyllostachys mitis. — Quilioi. — nigra. — viridi-glaucescens. — aurea. — flexuosa. — violascens. — sulphurea ? Nous avons rapporté ces Bambusacées à la sous-division des Phyllostachyées et même au genre Phyllostachys, parce que Munro a décrit, dans sa Monographie des Bambusacées, le Bambusa nigra sous le nom de Phyllostachys nigra, Munro. C’est sans doute par ses caractères extérieurs que cette plante a été rapportée à ce genre, puisqu'on n’en connaît pas encore les fleurs. S’il en est ainsi, toutes les espèces de Bambous citées ci-dessus doivent appartenir également au genre Phyllostachys. Ce qui nous autorise à avoir cette opinion, c’est que la Bam- busacée décrite par M. Carrière sous le nom de Bambusa flezuosa, qui a fleuri dernièrement dans nos cultures africaines et françaises, n’ayant que trois étamines, appartient naturelle- ment à la section des Triglossées, et comme cette espèce a les tiges cannelées-comprimées, les ramifications géminées-bi- furquées, que sa végétation est vernale, que la plante est très- traçante, en un mot qu’elle ne peut s'éloigner du Bambusa nigra, il en ressort que toutes les autres espèces ayant le même mode de végétation et d'organisation ne peuvent. non plus s’écarter des Phyllostachys ; c’est pourquoi on doit les y rat- tacher, jusqu’à ce que les fleurs viennent démontrer le con- traire. CLASSIFICATION HORTICOLE. 45 % Arundinariées. Bambusacées à tiges cylindriques non cannelées et à rami- fications multiples, en faisceau. Par le caractère de leurs tiges et par la façon dont se déve- loppent et dont sont disposées leurs ramifications, les Arundi- nariées diffèrent essentiellement des Phyllostachyées. Ces dernières ont les ramifications bifurquées ; dans les Arundi- nariées, au contraire, elles sont quelquefois réunies en fais- ceau, en masse compacte et souvent semi-verticillées, mais non rhizomateuses. Les espèces qui appartiennent à cette sous-division sont ou très-traçantes, avec de puissants rhizomes souterrains ‘parfois très-longs, ou peu traçantes, avec des rhizomes assez courts constituant des souches cespiteuses. Espèces tracantes. Arundinaria Japonica. — Simoni. — Fortunei fol. var. Espèce peu traçante ou cespiteuse. Arundinaria falcata et les différentes formes qui s'y rat- tachent. Il CARACTÈRES GÉNÉRAUX. Avant de préciser les caractères particuliers de chacun de ses deux groupes, il ne sera pas inopportun de faire connaître les caractères généraux du genre Bambou; ce ne sera, du reste, qu’au point de vue de la végétation. Le Bambou, pris en général, est, comme nous l'avons dit, une herbe dont les dimensions varient selon les espèces; tantôt sa souche est cespiteuse, compacte, composée de tiges très- rapprochées les unes des autres ; tantôt elle est très-traçante, et ses tiges sont plus écartées. De ce point de départ, nous pouvons suivre la marche de la végétation de ces tiges, depuis leur apparition sur la souche jusqu’à leur évolution complète. Tige ou chaume. — La tige des Bambous, qui prend aussi le nom de chaume, porte dans toute sa longueur des nœuds plus ou moins apparents et dont l’écartement est variable ; cette portion de tige d’un nœud à l’autre est connue sous le nom de mérithalle où entre-nœuds. | Chaque nœud porte une cicatrice circulaire plus ou moins apparente; elle indique qu’à un certain moment il existait à cet endroit un organe appendiculaire qui a disparu, et dont nous parlerons plus loin. La tige est de forme cylindrique dans la plus grande partie de sa longueur, mais elle va en diminuant de grosseur jusqu’à son extrémité, comme cela a lieu chez la plupart des végétaux dicotylédonés. En outre, elle est fistuleuse, c’est-à-dire qu’elle est creuse à l’intérieur, mais seulement d’un nœud à l’autre, car il existe à chaque nœud une cloison plus ou moins épaisse, formée d’une matière résistante. Quant à la hauteur et à la grosseur de la tige, elles sont subordonnées à la nature des espèces; dans les unes, les tiges sont petites, n'ayant que CARACTÈRES GÉNÉRAUX. 47 quelques centimètres de haut, et à peine de la grosseur d’une plume à écrire ; dans d’autres, au contraire, elles sont arbores- centes, atteignant une hauteur relativement considérable, puisque, au Jardin du Hamma, le Bambusa macroculmis dé- passe plus de 20 mètres et que sa tige y peut atteindre 55 centi- mètres de circonférence. D’après le colonel Munro, il existe dans les Indes orientales, à Mataban, à Pégu, à Tenasserim, une espèce, le Bambusa Brandisii, Munro, dont les tiges sont hautes de 120 pieds anglais, soit environ 37 mètres. Il existe dans les collections d'histoire naturelle du Muséum, à Paris, deux nœuds de Bambou dont l’un a 67 centimètres de circonférence. Il est étiqueté sous le nom de Bambusa arundinaria, mais son origine est inconnue. Généralement les tiges sont droites, raides ou légèrement flexueuses vers leur extrémité ; tel est du moins le caractère habituel que nous présentent les espèces cultivées dans nos jardins. D’un autre côté, dans leur développement, les tiges de certains Bambous offrent, principalement dans les grandes espèces, un caractère qui leur est particulier : les mérithalles (entre-nœuds) sont légèrement arqués d'un nœud à l’autre, mais dans un sens opposé entre chaque nœud : l’un s’arquant, par exemple, sur la gauche de la tige, le suivant s'arquant sur la droite, et ainsi de suite; la tige va comme en zig-zag. Ge caractère se remarque surtout dans le Bambusa vulgaris. Parfois les tiges de certaines espèces se font remarquer par la saillie très-prononcée de leurs nœuds ; d’autres portent sur lun des côtés de leurs mérithalles, et toujours chacun dans un sens opposé au précédent, une cannelure, rainure ou sillon plus ou moins profond; les Phyllostachys mailis, nigra, viridi-glaucescens, aurea, etc., en offrent de fréquents “exemples. Les Liges des Bambous sont généralement lisses, luisantes, glabres, ou glabrescentes, c’est-à-dire couvertes pendant leur premier âge de petits poils roussâtres et caducs. Leur couleur est verdâtre, violacée, brunâtre, et quelquefois couverte d’une matière glauque, durant leur développement; mais ces cou- leurs changent avec le temps, pour devenir plus tard ou 48 s LES BAMBOUS. grisätres, ou jaunes, ou noires. Il y en a une variété jaunâtre, coupée par des stries d’un beau vert. C’est habituellement vers la fin de la première année pour certaines espèces, et vers la troisième année pour les autres, que la couleur est défini- tivement acquise; elle se modifie cependant encore après qu’elles ont été coupées. Les tiges ou chaumes des Bambous affectent bien des formes curieuses dans cerlaines espèces que nous ne connaissons pas encore dans nos cultures. Ainsi, il y a des chaumes qui ne présentent aucun nœud, comme le Plalonia. Quelques espèces sont flexueuses, enroulées, grimpantes, comme À rundinaria distans, Merostachys capitata, Chusquea capituliflora, Ch. capitata, Bambusa affinis, B. Mastersii, Dinochloa Tjankor- reh. Une plante se remarque surtout par ce caractère grimpant des plus accentués, c’est le Bambusa Mac Cellandi. D’autres plantes ont des chaumes carrés, ou à trois côtés obtus, etc. « Les tiges des Bambous sont d’une densité et d’une dureté extrèmes; malgré cela, comme elles sont formées de fibres longitudinales très-longues et très-serrées, on s'explique facilement leur souplesse, leur élasticité, leur flexibilité et leur grande résistance. Quant à leur durée, elle varie d’après la manière d’être de l’espèce, d’après l’âge de la plante, d'après les conditions de culture. Nous ne saurions préciser jusqu’à quel âge peut vivre une tige de Bambou, cependant il est à supposer qu’elle peut atteindre l’âge de vingt ans dans le Bambusa macroculmis et les espèces analogues. Dans les espèces plus petites, comme les Phyllostachys nigra, maitis, aurea, viridi-glaucescens, etc., il n’est pas rare de les voir mourir vers la quatrième, la cinquième ou la sixième année. En outre, les tiges qui se succèdent jusqu’à ce que la plante soit parvenue à l’état adulte, deviennent plus grosses d'année en année, jusqu’à une épaisseur qui n’est pas dépassée. Quelque- fois aussi les tiges &e certains Bambous sont détruites après avoir donné leurs fleurs, circonstance encore peu observée, mais qui s’est rencontrée dans ces derniers temps pour l’Arun- dinaria fulcata et le P hyllostachys flexuosa. Dans tous les cas, lorsqu'on veut employer des tiges de Bambous pour un usage CARACTÈRES GÉNÉRAUX. 49 quelconque, et en leur conservant toute la force de résistance possible, 1l ne faut les séparer de la souche que lorsqu'elles ont acquis tout leur développement ; du reste, leur croissance est extrêmement rapide, puisqu'elles atteignent leur longueur et leur épaisseur dans l’espace de quelques semaines seule- ment; mais 1l leur faut quelques années pour acquérir un caractère pour ainsi dire ligneux, car, comme le fait observer Geoffroy Saint-Hilaire dans sa Morphologie végétale, ce serait donner une fausse idée de la tige légère de certains Bambous en la considérant comme ligneuse «€ et pourtant, dit-il, je ne puis guère appeler cette même tige herbacée, puisqu'elle est assez solide pour qu’on en fasse des échelles ». Les tiges des Bambous portent des ramifications plus ou moins nombreuses, naissant tantôt dès la base, tantôt seule- ment vers le milieu; cela dépend du caractère du groupe ; nous ferons connaître en temps opportun les espèces qui offrent chacune de ces deux dispositions différentes. Dans tous les cas, ces ramifications ont une disposition dislique alterne, c'est-à-dire qu'elles sont placées sur deux rangées, une de chaque côté de la tige ; elles sont plus ou moins abondantes, et c’est sur elles qu’on observe les feuilles et les fleurs. Feuilles. — Les feuilles, dans les Bambous, ne se rencon- trent que sur les ramifications que portent les tiges; leur disposition est distique : elles sont placées sur deux rangs et alternées. Lorsque leur formation est complète et leur déve- loppement entier, elles sont composées : 1° d’une gaine ; 2 d’une ligule ; 3° d’un limbe. 1° La gaine a son point d’adhérence à un nœud; elle est plus ou moins longue ; elle est fendue dans toute sa longueur. A bien la considérer, ce n’est qu’un pétiole élargi, ayant une forme particulière. Comme cela a lieu dans toutes les autres Graminées, elle s’enroule, dans toute sa longueur, autour de la ramification qui la porte, au point que l’un des bords recouvre presque entièrement l’autre. Selon les espèces, elle est presque glabre à sa partie extérieure, ou rude au toucher, ou bien, dans beaucoup de cas, couverte de nombreux poils, rudes ou soyeux, dressés ou couchés, d’une couleur blan- 4 50 LES BAMBOUS. châtre ou brunâtre, mais qui se détachent avec une facilité extrème. La couleur de la gaine est d’un vert plus ou moins intense; la partie intérieure, celle qui est appliquée sur la ramification, est très-luisante; les bords sont souvent garnis de petits poils soyeux. Lorsqu'elle se dessèche sur la plante, elle devient jaunâtre, et alors, sur beaucoup d’espèces, on remarque des stries longitudinales très-rapprochées les unes des autres. Les gaines étant beaucoup plus longues que les mérithalles, elles s'emboîtent toutes les unes dans les autres, dans la moitié de leur longueur, et quelquefois davantage. 2 Au sommet de la gaine et faisant suite à l’épiderme inté- rieur, On remarque une expansion membraneuse, haute de quelques millimètres, mais quelquefois peu apparente. Cette sorte de membrane, mince, parfois transparente, d’une couleur blanchâtre, jaunâtre ou violacée durant la végétation, est ce qu’on appelle la ligule. Cet organe offre des caractères varia- bles dans ses formes; généralement il est entier, mais on le rencontre quelquefois divisé accidentellement en deux lobes. Son sommet est un peu oblus, comme tronqué, ou ayant la forme d’un onglet; dans d’autres cas, il est glabre ou velu, bordé de soies blanchâtres ou brunâtres, pectiné, c’est-à-dire déchiré en lamières filiformes, dans une partie de sa hauteur. La ligule, qui sert souvent, en horticulture, à distinguer cer- taines espèces entre elles, est toujours appliquée sur la rami- fication dans le jeune âge, puisqu'elle est le sommet rétréci de la gaine. 3° Le limbe est la partie élargie de la feuille. Dans les Bambusacées, sa forme, comme aspect général, offre peu de diversité; c'est une sorte d’ellipse plus ou moins allongée, plus ou moins élargie, à côtés droits, s’arrondissant plus ou moins à chaque extrémité, et se terminant, dans le plus grand nombre de cas, en une pointe quelquefois très-prononcée. Dans le Bambusa scriptoria, ou Bambou à écrire, le limbe est long, du moins dans quelques cultures, d'environ 7 à 8 centimètres et large de 10 millimètres environ; dans le Bambusa macroculmis, au contraire, il peut atteiidre 30 à 40 centimètres de long sur 6 à 10 de large. CARACTÈRES GÉNÉRAUX. 51 Le limbe est strié, parcouru plus ou moins par de petites nervures longitudinales, souvent plus apparentes à la surface intérieure. Quant à la nervure médiane, elle est quelquefois, et selon les espèces, plus saillante en dessous ; d’autres fois elle fait saillie sur les deux surfaces. En général, la couleur du limbe est verdâtre ; on la trouve cependant légèrement blan- châtre dans toute sa longueur, et particulièrement à la face inférieure du limbe. Les deux faces sont glabres quelquefois, mais ordinairement la face inférieure est scabre, c’est-à-dire rude au toucher, ou bien pileuse, légèrement velue, et la face supérieure d’un vert plus ou moins intense, mais générale- ment plus blanchâtre en dessous ; quelquefois même elle est très-glauque et comme argentée. Il est quelques espèces qui, durant la période végétative, offrent ce caractère singulier que le limbe est rubané de blanc, mais cette sorte de panachure disparait avec le temps ; c’est particulièrement sur l’Arundi- naria Simoni, le Bambusa stricta, quelquefois sur le Phyl- lostachys maitis, mais constamment sur le Ph. Fortunei, qu’on la remarque. Le Bambusa stricla argentea ou striata argenlea tire son nom de ces stries blanches, remarquables principalement sur toutes les nouvelles feuilles. Les bords du limbe sont finement dentés, au point qu’en les touchant on pourrait, si l’on n'y prenait garde, se blesser la main. Sur quel- ques espèces on remarque que la nervure médiane porte, à la face supérieure, deux rangées de petites dents épineuses ; ces dents, comme celles des bords, sont inclinées vers l'extrémité du limbe. Le limbe est fixé au sommet de la gaine par la nervure médiane, qui s'est quelque peu élargie sur ce point. Il est soudé derrière la ligule et sur une sorte de coussinet formé par une expansion membraneuse de la partie épidermique ex- térieure de la gaîne ; généralement la contexture en est assez mince, molle, quelque peu coriace. Il se tient droit, horizon- tal, ou pendant. Au sommet de la gaine, à la base, et de cha- que côté du point d'insertion du limbe, on remarque, sur cer- taines espèces, comme un faisceau de poils variables dans leur longueur comme dans leur couleur; ils sont formés d’une 02 LES BAMBOUS. expansion des bords de la gaine. Cette expansion est élargie à sa base, à son point d’adhérence à la gaîne, puis elle est divi- sée en lanières filiformes plus ou moins longues ; ces lanières, quelquefois tortueuses ou tourmentées, sont appliquées sur la tigelle, ou sont disposées autour d’elle, en une sorte de col- lerette. Toutes les feuilles d’une même tige ne présentent pas ce caractère ; comme ces expansions laciniées disparaissent au bout de quelque temps, ce n’est en quelque sorte que sur de jeunes rameaux qu’on peut les étudier. Les Bambous peuvent conserver les mêmes feuilles pendant plus d’un an, mais lorsque est arrivé pour elles le temps de disparaître, elles jaunissent, se dessèchent et tombent en se désarticulant à leur point d'insertion sur la gaîne. Celle-ci est plus persistante ; elle ne tombe généralement que beaucoup plus tard, après être restée autour des ramules, sèche, dé- colorée et assez aplatie sur elle-même. Fleurs. — Dans leurs stations naturelles, les Bambous, au dire des voyageurs, se montrent assez avares de leurs fleurs, du moins pour un très-grand nombre d'espèces ; c’est ce qui explique, du reste, le peu d'ouvrages qui existent sur ces inté- ressants végétaux et les difficultés que rencontrent Journelie- ment les horticulteurs pour étiqueter des espèces, anciennes ou nouvelles. Cette mème rareté de floraison s’observe égale- ment dans nos cultures européennes et algériennes; nous avons cependant été assez heureux pour constater en ces der- niers temps, au Jardin du Hamma d'Alger, la floraison acci- dentelle de quelques espèces : l'Arundinaria japonica, le Bambusa macroculmis, le B. spinosa le B. stricla, et, en février 1876, celle d’une espèce japonaise introduite, 1l y a quelques années, par le Jardin zoologique d’acchimatation de Paris, et décrite, d’après les caractères de son port, par M. À. Carrière, sous le nom de Phyllostachys fleæuosa. La floraison de cette espèce, qui appartient à un groupe tout spécial, est d'autant plus remarquable que c’est la première fois qu'elle à lieu dans nos cultures, et pour l'espèce et pour le groupe. A la même époque fleurissait, dans le mème Éta- blissement et aussi dans les serres du Jardin du Luxembourg, CARACTÈRES GÉNÉRAUX. 93 à Paris, l'A rundinaria falcata. Enfin, le 24mai 1876, l'A run- dinaria Simoni montrait ses fleurs pour la première fois, et c’est dans les serres du Jardin du Luxembourg qu'a eu lieu ce fait intéressant. Généralement les fleurs des Bambous, de même que les feuilles, naissent et se développent sur les ramifications que portent les tiges, aux articulations où nœuds, à l’aisselle, ou à la place qu’occupaient les feuilles (fig. 32). Elles sont réu- nies plusieurs ensemble, soit à l'extrémité des ramules, soit sur des axes très-courts, et, dans le plus grand nombre des cas, forment, par leur réunion, de petits épis simples, aux- quels on a donné le nom d'épillets (spiculæ ou locustæ) (fig. 16). Quelquefois aussi les fleurs sont réunies sur les épis com- posés, c’est-à-dire formés d’épillets. Les épillets ou les épis forment, par leur ensemble ou par leur groupement, des inflorescences de forme et de caractères divers, selon la nature des espèces de Bambous (fig. 14, 26, 32, 00), tantôt ces inflorescences consistent en un seul épillet porté à l'extrémité d’une ramification, tantôt les épillets naïs- sent par groupes aux articulations des tiges ; en d'autres cir- constances, ils forment par leur réunion d'immenses panicu- les plus ou moins rameuses, plus ou moins denses. Autrement encore, les inflorescences sont formées de longs rameaux por- tant des ramifications, mais à chaque nœud desquels les épil- lets sont réunis en masse agglomérée, compacte, de forme globuleuse. Ces glomérules sont verticillés, c’est-à-dire qu'ils entourent complétement le rameau. Le nombre des épillets qui composent un de ces glomérules peut s'élever jusqu'à 120; nous l'avons observé sur le Bambusa macro- culmis du Jardin du Hamma d’Alger, lors de sa première flo- raison, en octobre 1872 (fig. 5). Parfois aussi, dans certaines espèces, les inflorescences se développent toutes à la fois, à chaque nœud de toutes les ramifications que portent les tiges, et depuis la base jusqu’à l'extrémité de celles-ci. Un autre caractère non moins curieux, c’est que les tiges d’une même touffe, qu’elles soient anciennes ou qu’elles soient nouvellement développées, fleurissent {outes simultanément ; 54 LES BAMBOUS. nous avons pu encore tout dernièrement constater le fait sur deux espèces, l’Arundinaria falcata et le Phyllostachys [leæuosa. L'épillet, ou épi simple, des Bambusacées est donc tantôt porté à l'extrémité d’une ramification, tantôt naissant directe- ment en groupe sur les nœuds, tantôt répété et groupé sur un axe allongé, et constituant alors un épi composé; quoi qu’il en soil de ces diverses positions, 1l est ou uniflore ou multiflore, portant une ou plusieurs fleurs sur un axe commun. Lors- qu'il est multiflore, les fleurs sont distiques, imbriquées, et portées sur un petit axe central nommé rachis, plus ou moins aplati, articulé et en zig-zag. À la base de chaque épillet sont des sortes de petites écailles, le plus souvent au nombre de deux, et qu’on désigne quelquefois sous le nom de bractées stériles, mais plus généralement sous celui de glumes. On les appelle encore lépicines, involucres, valves de la glume, valve supérieure ou inférieure. Elles sont généralement naviculaires ou se rapprochent de cette forme, parce qu’elles embrassent toujours la tige à la base de l’épi, quand il est simple, ou la base des épillets, qu'ils soient uniflores ou multiflores. Elles ont toujours à peu près la même configu- ration : un peu plus longues ou un peu plus courtes, un peu plus larges ou plus étroites; cela dépend des espèces sur les- quelles on les étudie. Leur texture est généralement mince, comme transparente. Occupant toujours la base des épis et des épillets, elles sont opposées l’une à l’autre, mais sur un plan plus élevé, c’est-à-dire l’une placée plus haut que Pautre. Dans le plus grand nombre des cas, on les trouve appli- quées sur la tige, à la base des enveloppes florales; c’est cette disposition qui leur donne une forme un peu navicu- laire. En outre, elles sont glabres ou quelquefois couvertes de villosités, et ordinairement au nombre de deux et d’inégales longueurs ; quelquefois le nombre en est plus grand, quelque- fois il est moindre ; on peut n’en rencontrer qu’une, et même elles font parfois complétement défaut. L’épi composé porte des épillets, et, sur un même épi, ces épillets se présentent uniflores ou multiflores, fertiles ou CARACTÈRES GÉNÉRAUX. 55 stériles ; quelquefois ils sont avortés. De même, l’épi offre les caractères les plus divers. Voici ceux que nous avons observés sur le Phyllostachys flezuosa. À la base de l’épi on remarque, accolée à l’axe qui le porte, une petite écaille à sommet obius, coriace ; c'est du centre de cet organe persistant, qui mesure à peine un millimètre de hauteur, que sort l’épi. Celui-ci porte d’abord à sa base cinq ou six petits organes ayant l’aspect d’écailles ; ce sont les gaïînes scarieuses, en forme de spathes, qu’on pourrait appeler pour cette raison, gaines spathiformes. Les trois premières gaines sont extrêmement petites el courtes, de 4 à 4millimètres ; le sommet en est obtus et le plus souvent échancré, ou plutôt fendu de haut en bas; les trois autres sont plus longues, elles ont de 5 à 7millimètres ; l’une d’elles, la plus courte, a le sommet obtus, mais les deux suivantes ont un caractère différent : elles se terminent par ure membrane ciliée peu apparente ; c’est une ligule. On remarque, en outre, sur le sommet de ces gaines, un petit appendice très-court et pointu ; c’est le rudiment d’un limbe qui apparaît. Ces pre- mières gaines spathiformes, de formes variables, comme nous venons de le voir, sont accompagnées chacune, à la base, d’un petit bourgeon plus ou moins développé, et souvent presque à l’état rudimentaire, qui doit, par suite de sa situation, rester en cet état. On peut donc conclure que ces gaines spathiformes accompagnées de leur bourgeon représentent les épillets dont les fleurs avortent complétement, puisque les bourgeons qui devaient les produire restent à l’état rudimentaire, ou du moins sont trés-peu développés. Après ces premiers épillets en quelque sorte atrophiés, on remarque des épillets fertiles; ceux-ci sont au nombre de cinq ou six; ils sont uniflores ou multiflores, mais chacun d'eux est toujours accompagné d’une gaîne spathiforme. Celle- ci s’est modifiée; sa longueur est d'environ 20 ou 25 milli- mètres, et sa largeur, lorsqu'elle est déroulée, est de 5 à 7 milli- mètres. La ligule est courte et cihée, et l’appendice limbaire plus effilé. On peut voir, d’après ce qui précède, que, dans le Phyllostachys flezuosa, les épis sont composés de cinq à six épillets avortés et de cinq à six épillets fertiles, uniflores ou 56 LES BAMBOUS. multiflores. En moyenne, le nombre des épillets est de douze ; il peut atteindre jusqu’à quatorze, mais il peut être moindre que huit. À bien les considérer, soit sous le rapport de la position qu’elles occupent, soit sous le rapport de leurs caractères propres et du rôle qu’elles remplissent, ces gaines spathi- formes qui accompagnent la base des épillets, ne sont souvent autre chose que de véritables feuilles, mais à petites propor- tions, puisque nous avons remarqué que, dans certains cas, le limbe de la gaine spathiforme n’était représenté que par une petite pointe très-courte, à peine de 2 à 6 millimètres. Dans d’autres circonstances, cette sorte de limbe, qui n’est en réalilé que la nervure médiane se modifiant à chaque gaine, s'était élargie, était devenue cordiforme, en un mot avait un caractère foliacé, avec une longueur de 15 millimètres sur une largeur de 6; c'était donc également une véritable feuille avec son limbe, qui devient quelquefois caduc. | Après la gaine spathiforme, après les deux glumes que nous venons de voir, 1l nous reste à examiner une fleur en parti- culier. Une fleur complète de Bambusacée se compose des carac- tères suivants : | 1° Un organe ayant la forme d'une écaille, et que les bota- nistes désignent sous le nom de glumelle inférieure ou glu- melle extérieure. Selon la nature des espèces de Bambusacées, la glumelle inférieure est variable dans sa forme et dans sa longueur ; quelquefois elle est concave, ou naviculaire, ou peu étalée, ou comprimée sur ses parlies latérales ; dans d’autres cas, elle est enroulée sur elle-même, de manière à former une sorte d’étui ou fourreau, comme cela a lieu dans le Phyllos- tachys fleæuosa. Elle peut être obtuse à son sommet et porter en même temps une pointe plus ou moins développée, carac- tères qu'on remarque dans le Bambusa macroculmis; elle peut être encore de forme plus ou moins allongée, être quel- que peu elliptique ou effilée, se terminant par une pointe très-prononcée. Quant à sa longueur, elle est extrêmement variable selon l'espèce. CARACTÈRES GÉNÉRAUX. 57 La glumelle inférieure peut être glabre sur sa partie dor- sale; elle peut être scabre, rude au toucher, quelquefois légè- rement velue; elle peut aussi ne porter que des cils ou soies, ou être frangée sur les bords. Sa face intérieure est toujours glabre et luisante. Cette glumelle est striée de petites nervures longitudinales très-rapprochées les unes des autres; celle qui est centrale n’est guère plus apparente. Observée sur des échantillons vivants, elle peut être d’une couleur verte, ver- dâtre, brunätre ou légèrement violacée, striée de jaune, ete. Dans certaines Graminées, elle est munie d’une arête dorsale ou terminale; elle est carénée, ce qui l'a fait désigner quel- quefois sous les noms de glumelle carénée ou imparinervée. 2° Une glumelle supérieure, née d’un nœud supérieur, opposée à la glumelle inférieure et emboîtée par cette der- nière, dont elle diffère essentiellement par les caractères qu’elle présente : d’abord, on voit sur sa partie dorsale deux nervures latérales quelquefois assez saillantes ; ensuite, elle est le plus souvent bifide, c’est-à-dire que son sommet est plus ou moins fendu dans une petite partie de sa longueur. A cause de ces caractères, on lui a donné les noms de glumelle bi- carénée et de glumelle parinervée. Elle est accolée au rachis. Sa longueur est variable ; quelquefois elle dépasse la glumelle inférieure; d’autres fois elle est plus courte et plus mince. Généralement elle est transparente ou à peu près ; cependant il est des cas où sa consistance est presque analogue à celle de la glumelle inférieure ; elle est ou entièrement glabre ou légè- rement velue, ou bien elle ne porte des poils que sur les carènes ou nervures dorsales, ou sur ses bords. Ces deux premiers organes de la fleur, les glumelles, ont reçu les noms de bractées fertiles, inférieure et supérieure. En d’autres cas, on les désigne par les noms de balles ou bâles. 3° Comme troisième organe de la fleur, on remarque par- fois, à la base de la partie dorsale de la glumelle supérieure, et inséré sur le même plan, un petit organe filiforme ou peu s’en faut, en un mot une sorte d’arête, et dont la longueur est variable, atteignant tantôt la moitié de la hauteur de la 58 LES BAMBOUS. olumelle, tantôt la hauteur tout entière ou à peu près. Gette sorte d’arête, que nous avons remarquée dans l’Arundinaria falcata et le Phyllostachys fleæuosa, est complétement libre ; par la place qu’elle occupe et par les caractères qu’elle offre souvent, elle semblerait être un axe avorté. % Les glumellules, quatrième organe de la fleur, sont de très-petites écailles, de très-petites bractées, comme pellicu- leuses, membraneuses. Elles sont blanches et transparentes. Leur forme est élargie, ou obovale, ou obtuse, ou plus ou moins allongée, ou plus ou moins étroite. Elles sont glabres, avec les bords ciliés, frangés ou pectinés. Placées à l’in- térieur et à la base de la glumelle supérieure, elles sont en quelque sorte emprisonnées par elle. Leur nombre est faible et variable ; il peut être de 3, comme dans l'A rundi- naria Simoni ; de ?, comme dans l'A. falcata, ou être réduit à 1, comme dans le Bambusa macroculmis; elles peuvent manquer presque complétement, comme cela a lieu dans le Phyllostachys flezuosa, où même faire absolument défaut, comme dans certaines autres espèces. D'autre part, 1l est des espèces de Bambusacées où le même épillet porte des fleurs avec des glumellules, et d’autres fleurs qui en sont dépour- vues, sans doute par suite d’avortement. Lorsque les glumellules sont au nombre de 5, elles sont dis- posées de manière que les deux latérales alternent avec la olumelle inférieure et la glumelle supérieure, tandis que la troisième est adossée à la glumelle supérieure; mais quand les fleurs n’ont que deux de ces glumellules, elles sont disposées latéralement et alternent avec les deux glumelles; d’autres fois, quand la glumellule est seule, elle se trouve tantôt surun des côtés, tantôt en avant ou en arrière; il n’y a donc pas pour ces organes de position déterminée. Certains botanistes les ont considérés, par suite de leur disposition, comme étant le périanthe de la fleur ; ils ont reçu de différents auteurs les noms de paléoles, squamules, lodicules, etc. D° Les étamines, dans les Bambusacées, sont au nombre de 3 ou de 6; dans certaines espèces, elles dépassent ce dernier nombre; cette augmentation coïncide alors avec l'avortement CARACTÈRES GÉNÉRAUX. 59 de l’organe femelle. Elles sontinfères, c’est-à-dire disposées en verticille autour et à la base de l'ovaire. Le filet est blanc, très- grèle, filiforme, capillaire, droit ou flexueux. Leur longueur est fort variable d’après les espèces; ainsi, pour ne citer que deux exemples, nous dirons que, dans le Bambusa macrocul- mis, elles ne dépassent presque pas les glumelles, on dirait qu'elles sont droites; au contraire, dans le Phyllostachys fleæuosa, elles sont une fois plus longues que les glumelles, et, dans ce cas, elles sont pendantes. Toutefois ce dernier carac- tère, étamines pendantes, peut appartenir à des espèces dont le filet est court, ce qui arrive dans celles-ci lorsque, au mo- . ment où l'acte de la fécondation va s’accomplir, les deux glu- melles s’écartent; les étamines, en laissant tomber le pollen sur le stigmate, s'infléchissent toutes du même côté, et, quel- que temps après, les glumelles se rapprochent pour protéger l'ovaire pendant son développement; les étamines restent alors pendantes jusqu'à leur destruction complète (fig. 15 et 16). L’anthère est linéaire, biloculaire et versatile, c’est-à-dire vacillante, parce qu’elle est attachée vers le milieu de sa partie dorsale. Son extrémité inférieure est un peu échancrée ; au contraire, son sommet est ou arrondi ou terminé en pointe. Lorsque le pollen est sur le point de s'échapper, la déhiscence des deux capsules de l’anthère a lieu dans toute la longueur de celle-ci, comme dans le Bambusa macroculmis, ou bien sur une petite partie de son sommet, comme dans le Phyllostachys flexuosa, l'A rundinaria falcata où YA. Simoni. Sa couleur est ordinairement jaune; quelquefois, dans l’Arundinaria falcata par exemple, elle est violacée. Dans les quelques espèces de Bambusacées vivantes que nous avons vues fleurir, nous avons remarqué que le pollen était extrèmement abon- dant. 6° Le pistil. — Cet organe est composé, comme on sait, de l’ovaire, du style et du stigmate. L’ovaire estsitué au centre des étamines, et en quelque sorte inséré sur le même plan qu'elles, ce qui lui a fait donner le nom d’ovaire supère. Sa forme est globuleuse, ovoïde, ou un peu allongée; quel- 60 LES BAMBOUS. quefois il est parcouru sur lune de ses faces par un sillon plus ou moins prononcé. Il est glabre et porte des poils au sommet. Le style est grèle et filiforme; il est variable dans sa longueur; 1l arrive parfois à dépasser les glumelles, comme dans le Phyllostachys flexuosa ; d’autres fois il est tellement court qu’il fait défaut. Sa couleur est généralement blanche, mais, dans certaines espèces, son extrémité supérieure est légè- rement violacée; nous l'avons souvent remarqué dans le P hyl- lostachys flexuosa. Le stigmate est ou simple, ou divisé en deux ou trois parties (fig. 13), ce qui fait dire qu'il est bifère ou trifère. Il est plus ou moins long, silué au sommet d'un style, ou presque sessile ; il est blanc, quelquefois violacé, mais il est Loujours plumeux ou papilleux (fig. 13). Les caractères approximalifs que nous venons de donner sur les organes qui constituent une fleur de Bambou, ont été pris sur des espèces que nous avons vues fleurir depuis trois ans et particulièrement en l’année 1876. Toutes celles que nous avons étudiées étaient à fleurs hermaphrodites, chacune contenant tous les organes sexuels; mais il paraît, au dire de certains botanistes, qu’il ya des Bambusacées dont les sexes sont séparés, soit sur des pieds différents, et dans ce cas les espèces sont droïques; soit sur [a même branche, laquelle porte alors des fleurs mâles et des fleurs femelles ; ces espè- ces-c1 sont dites monoïques. En dehors de tous ces caractères de la fleur, certaines espèces de Bambous se font remarquer par la quantité de leurs étamines, quisont relativement considérables, atteignant le nombre de 20 et même davantage. En outre, il en est qui sont monadelphes, c'est-à-dire que leurs étamines sont toutes soudées entre elles, de manière qu’elles forment une sorte d’étui, au milieu duquel est situé le pistil. Fruits.— Le fruit du Bambou est chose assez rare dans nos cultures ; cependant, depuis trois ans, nous avons pu en voir, au Jardin du Hamma d'Alger, sur cinq espèces : les Bambusa macroculmis, spinosa et stricta, lArundinaria falcata et le Phyllostachys flezuosa. Le fruit, dans ces plantes comme dans toutes les Graminées, a été désigné sous le nom de cariopse, CARACTÈRES GÉNÉRAUX. GI à cause de la soudure des téguments de l’ovule avec les parois ovariennes. Dans le cariopse des Bambusacées, le Colonel Munro considère comme un bon caractère la position de l’'écusson, ou scutellum de Gaertner, et le décrit dans ses trois grandes divisions; cet organe est une expansion ovale, plane ou peu arquée, partant de l'embryon et s'appliquant par sa face dorsale contre l’albumen. Les graines que nous avons vues étaient de différentes formes; celles du B. macrocul- mis ont tout à fait l'aspect d'un grain de blé arrondi, portant une petite pointe épineuse à son sommet; ce n’est autre chose qu’une partie du style dont la base est devenue persis- tante; quant aux autres graines, elles ressemblent à celles d'avoine ou de seigle (fig. 18 et 28). Un caractère fort curieux, cité par le colonel Munro, c’est le développement que prend le fruit d’une Bambusacée appartenant à la tribu des Bacci- férées, ou Bambous à fruits charnus. Dans les espèces de cette division, le pistil semble renfermé dans une enveloppe un peu analogue à un sac, ou utricule, qui contient les graines des carex. A l’état jeune, il est étroitement attaché au style, dont il est presque impossible alors de le séparer ;en avançant en maturation, il s'accroît de différentes manières : dans le Melocanna bambusoides, il devient très-charnu, et le fruit atteint le volume d’une grosse poire, tandis que la graine reste proportionnellement très-petite. Dans d’autres cas, cette sorte d’enveloppe est relativement mince. Les caractères généraux des Bambous étant ainsi connus, nous pouvons maintenant étudier leur mode de végétation. IV VÉGÉTATION SOUTERRAINE C’est au point de vue purement horticole que nous désirons traiter ici cette question; elle se rapporte essentiellement aux espèces de Bambous introduites dans nos cultures et dont les tiges sont ligneuses et souvent de haute taille. Avant toutes choses, dans la culture des végétaux, il est un point qu'il ne faut pas perdre de vue, si l’on veut arriver au succès ; ce point essentiel, c’est l'étude préalable et sérieuse des mœurs, des caractères, de la manière d’être du végétal, étude sans laquelle il ne serait pas possible de le bien diriger, ni de lui donner tous les soins qu'il exigera durant toute la période de son existence. C’est ce but que nous nous sommes efforcés d’atteindre dans nos études. C’est à la suite des observations que nous avons pu faire au Jardin du Hamma d'Alger, durant plusieurs années consécu- tives, sur les différentes espèces et variélés de Bambous que possède cet Établissement, que nous avons été amenés d’après l’époque de végétation de ces plantes et d’après leur manière d’être à en former nos deux groupes. 4° Bambous à végétation automnale et à touffe cespiteuse ; 9% Bambous à végétation vernale et à touffe généralement traçante. D'après l’époque et d’après le mode de leur végétation, les Bambous forment donc : ou bien des’souches à touffes cespi- teuses, compactes, c’est-à-dire dont les tiges sont rapprochées les unes contre les autres ; ou bien des souches à touffes cou- rantes, c’est-à-dire très-traçcantes. Ce sont ces caractères que nous allons maintenant chercher à connaitre le mieux pos- sible. Afin d'établir une comparaison entre ces deux groupes, nous allons prendre comme exemples les Bambusa macro- VÉGÉTATION SOUTERRAINE. 63 culmis et vulgaris pour le groupe à végétation automnale et à touffes cespiteuses, et le Phyllostachys milis pour le groupe à végétation vernale et à souches traçantes. Il est d’une im- portance réelle de connaitre les caractères de ces deux groupes pour appliquer judicieusement le mode de multiplication qui appartient aux espèces de chacun d'eux. Les Bambous forment des touffes qui augmentent de vo- lume chaque année, par suite du nombre de tiges qui sur- oissent de leurs parties souterraines. C’est toujours d’une souche commune que se forment ces couches. Nous allons en suivre les développements. Supposons un moment que la souche soit née d’une graine, point de départ de toute ramification souterraine. Une fois la oraine confiée à la terre, la germination a eu lieu. Deux or- ganes, se dirigeant en señs opposé, se sont développés, l’un conslituant la partie aérienne, la tige, l’autre la partie sou- terraine, la souche. C’est cette dernière, sur laquelle s'établit la plante, que nous allons étudier d’abord; l'étude de la vé- gélation aérienne sera l’objet du chapitre suivant. La souche est donc la partie du Bambou qui s’est dévelop- pée en terre. Des nœuds, assez rapprochés les uns des autres, signalent ses accroissements successifs ; quelques petites ra- cines, disposées en verticille, se remarquent à chacun d’eux ; puis, à chacun également, un bourgeon, organe qui produira plus tard une tige, et dont la série, disposée distiquement et alternativement de chaque côté de la souche, donnera nais- sance à une série de liges. D’année en année, à mesure que la végétation se manifes- tera, le bourgeon d’un nœud — rarement deux — se ‘déve- loppera, une tige partira de la souche; successivement le nombre en deviendra plus considérable, et en même temps la partie basilaire s’enfoncera plus ou moins profondément dans le sol, jusqu'à un point déterminé par la nature de l'espèce. Telle est la végétation souterraine générale; suivons-la maintenant dans chacun des deux groupes de Bambous. Pour le groupe à végélation automnale et à touffe cespi- 64 LES BAMBOUS. teuse, c’est-à-dire non traçante, nous prenons comme type le Bambusa macroculmis. Si l’on arrache une portion de sa touffe, lorsque déjà de jeunes tiges sont en voie de développe- ment, comme le représente la figure 2, on voit que, dès le début de la végétation, le bourgeon né sur la partie souter- raine d’une tige de l’année précédente s’est d’abord développé quelque peu et horizontalement, puis qu’il s’est redressé juste à point pour que la nouvelle tige puisse croître sans rencon- trer d’obstacle, ce qui n’empèche pas qu’elle soit quelquefois tellement rapprochée de ses voisines, qu’une lame de couteau ne trouverait pas place entre elles à leur partie basilaire. Cette partie horizontale, rhizome ou tige souterraine, est donc rampante, mais plus ou moins; elle se tient à la surface du sol, ou bien elle s’y enfonce jusqu’à 50 centimûtres ; celle du Bambusa macroculmis est très-courte. Il en est de même pour le plus grand nombre des espèces à végétation estivale : rhizomes courts et, par conséquent, touffes compactes. Il peut cependant y avoir des exceptions à cette règle générale; la végétation que nous avons remarquée dans le Bambusa vul- garis en est une preuve (fig. 18); il arrive en effet chez celui-ci que, dans la partie souterraine, chaque bourgeon se développe d’abord horizontalement; puis, à une longueur variable de 10 à 30 centimètres, il se redresse pour consti- tuer la partie verticale de la tige. La figure 18, qui représente un fragment de touffe, en fait bien voir la forme et le déve- loppement. Dans ce cas-là, les touffes seront moins com- pactes. Dans les Bambous de ce premier groupe, chaque nœud du rhizome porte une gaine, des racines en verticille, un bourgeon. Les gaines et les bourgeons sont disposés distique- ment et alternativement, et, plus le rhizome est étendu, plus ils sont nombreux. Si la plante est placée dans des conditions favorables, il n’est pas rare de voir chaque rhizome en pro- duire plusieurs autres, et en d'autant plus grand nombre sur un point que le rhizome s’est enfoncé plus profondément dans le sol. La figure 18 fait voir une portion de rhizome du Bambusa vulgaris développant six rhizomes à la fois ; il est œ É \ J EAN Fig. 2. — BAMBUSA MACROCULMIS Développement des bourgeons et modification des languettes sur les écailles, a Ts à 5. Vs .f ve » = N ‘ FL > 20 Ph s RL s : N y Ê X-Fi EU ds A JR Le Le à LE : FT De DER TRS ENT E À uk . h ÉP à DS E. ur _, “a 1 0 À LA . es + 2081 * æ E à PP: - je , NY: : . k s É " = © 1 ‘ 2 Le < m L'T à à 2 7 à ra 1: WU ‘ Sn] y : { « RAR SL ï PEL CE . Perl "3 TT èe ait ; +. , ‘ " —— Lun) . * Hs À À 2 PAS CA TPE 4 LU : e À é * sf yes ‘te r 1248 % à" ACTE ME. RL + Gr 0 SE te GATE on, : ‘ » À. è £ ° Su GTR à . en L'unt a 2) VC 3 FENTE Frein f Ve. SENTIER, CE LATE. SRE Fe NE £ a ” : à à ‘ °% + 2 VÉGÉTATION SOUTERRAINE. 67 facile de comprendre, d’après cette disposition latérale des bourgeons sur les rhizomes souterrains, qu’une partie des tiges puissent s'éloigner de la touffe, tandis qu’au contraire d'autres s’en rapprochent et même viennent rejoindre le centre, en sorte que, souvent, les rhizomes s’entre-croisent et montent les uns par-dessus les autres ; aussi ces plantes for- ment-elles dans le sol une masse presque inextricable (fig. 1). La végétation souterraine de certaines espèces est parfois telle, qu’au bout d’un certain nombre d’années, les rhizomes, retournés sur eux-mêmes et empêchés de s’enfoncer plus avant en terre par l’épaisse couche qu’ils y ont formée tout d’abord, finissent, à force de s’entasser les uns sur les autres, par s’exhausser à plus de 1 mètre au-dessus du sol. Cet exhaussement est dû d’abord à la soudure des rhizomes entre eux, qui ne tardent pas à former une masse compacte, avec l’aide du développement annuel des bourgeons qui avortent et de la base des troncs provenant des tiges coupées. Ces dé- bris d'organes de toutes sortes, sur lesquels naissent de nou- velles tiges, constituent un bloc tellement homogène, qu'il serait inutile d’en tenter la séparation. Tout ce système radi- culaire vit par le concours de nombreuses racines qui vont chercher très-loin et horizontalement les matériaux néces- saires à une si puissante végétation. Au Jardin du Hamma d'Alger, on peut voir plusieurs touffes du Bambusa macro- culmis offrir ce caractère de compacité de rhizomes, qui ne manque pas d'intérêt au point de vue de la force vitale de celte espèce; la figure 1 représente une de ces touffes âgée de plus de vingt ans. Dans les Bambous du deuxième groupe, à végétation ver- nale, le mode de végétation souterraine est différent. Ici les tiges sont très-éloignées les unes des autres et les touffes, na- turellement, moins compactes. D’un autre côté, les plantes sont très-traçantes, très-coureuses ; les tiges souterraines s’é- tendent en rampant sous le sol, au point d’atteindre plusieurs mètres de longueur dans l’espace d’une année, surtout si les plantes sont placées dans des conditions favorables de tempé- rature et de terrain (fig. 3). Ce caractère de vigoureuse végé- 68 LES BAMBOUS. tation souterraine ne se montre que sur les plantes âgées de plusieurs années. Les rhizomes peuvent quelquefois s’enfoncer dans le sol à une profondeur relativement considérable ; il n’est pas rare de voir ceux de l’Arundinaria Simoni pénétrer à 80 cen- timètres, et cela même dans des terres extrêmement durcies, puisqu'ils traversent souvent les chemins macadamisés du Hamma d'Alger. En général, la végétation des rhizomes des Bambous tra- çants se fait horizontalement et en ligne très-droite (fig. 3); elle ne dévie que devant un obstacle trop difficile à écarter, une pierre par exemple; dans ce cas, ils passent par-dessus si cette pierre ne surmonte pas le sol, et se replongent de l’autre côté à la même profondeur, pour reprendre ensuite leur chemin direct. Examinons maintenant quels sont les caractères de ces rhizomes et comment a lieu leur végétation. Pendant leurs deux premières années, les Bambous traçants se bornent à peu près à une végétation aérienne, ne produisant que des tiges, mais une fois que cette période est passée et qu’un assez orand nombre de racines se sont produites, la végéta- tion souterraine commence. Sur la partie basilaire des tiges, sur leur partie souterraine, il existe, dans ces Bambous comme dans ceux du premier groupe, une série de nœuds variables dans leur nombre et plus ou moins rapprochés les uns des autres. À chaque nœud il existe également des ra- cines en verticille et un bourgeon. Chaque bourgeon, lors- qu'il est sur le point de se développer, est entouré d’une écaille binervée, composée de deux membranes assez minces; l’une est appuyée sur la tige et porte deux nervures latérales assez distantes entre elles; l’autre est opposée à la première et fendue dans toute sa longueur au moment où la végéta- ton est active. Ordinairement ce bourgeon est pelit, de forme conique; parfois les deux nervures sont couvertes de poils. Le rhizome prend toujours une direction horizontale. 11 est recouvert, principalement dans son jeune âge, et dans > Rhizome et développement des Lourgeons, F1G. 3. — PHYLLOSTACHYS (BAMBUSA) MITIS VÉGÉTATION SOUTERRAINE. 71 toute sa longueur, de gaines de forme écailleuse, pointues au sommet, assez épaisses, coriaces, distiques et imbriquées, d’une couleur jaune tirant sur le blanc sale; elles sont gla- bres, ternes sur leur partie dorsale, mais très-luisantes à l'intérieur, plus longues que les mérithalles et embrassant par leur base toute la périphérie de l’entre-nœud; elles sont persistantes, puisqu'elles se détruisent sans se désarti- culer. A un certain âge non encore trop avancé, toutes les par- ties enterrées du rhizome ont perdu leurs gaïnes; on n’en retrouve plus que les téguments fibreux, entièrement désa- grégés, de couleur ou terne ou rougeâtre. Dans les parties externes, c’est-à-dire celles qui rampent sur le sol, comme dans le Phyllostachys maites, le rhizome reste enveloppé pen- dant un certain temps par ses gaînes incolores et sèches ; elles finissent néanmoins par disparaître à mesure qu’il de- vient vieux. Il n’y a que la partie extrême, ou mieux le bourgeon d’élongation du rhizome, qui en soit toujours pourvue sur un certain parcours. Cette extrémité, très-co- nique, aiguë, composée de gaines imbriquées, incolores et luisantes, constitue une pointe dure et polie qui perce le sol ou horizontalement ou obliquement, suivant les cas, organisation toute spéciale qui permet au rhizome de courir dans les terrains les plus durcis et les plus com- pactes. Au fur et à mesure que le rhizome s’allonge, des racines se développent; elles naissent autour du nœud en verticille sim- ple, c’est-à-dire disposées sur un rang, au nombre de 6 à 10; elles sont grêles, peu longues, filiformes. garnies d’un chevelu serré, court et fin. Elles percent les écailles et se dé- veloppent au travers, en tous sens, en haut, en bas, et laté- ralement de préférence. Les rhizomes qui rampent à la sur- face du sol n’ont de racines que sur les parties en contact avec lui. Le rhizome est ordinairement cylindrique, quelquefois aplati, à nœuds plus ou moins saillants et d’un écartement entre eux variable suivant les espèces, mais ne dépassant 19 7: LES BAMBOUS. pas un maximum de 6 à 10 centimêtres. Ses entre-nœuds se rétrécissent dans leur milieu pour s’évaser vers les nœuds qui font saillie. Cette saillie circulaire, dans laquelle était em- prisonnée la base de la gaine, est encore accentuée par la couronne de racines ou de mamelons de racines latentes qui se développent au-dessus. À la base de chaque nœud se trouve un bourgeon disposé distiquement et alternativement, un peu aplati, situé dans une cavité, sillon ou cannelure, qui se prolonge, dans le même ordre, d’un nœud à l’autre. Ge sillon, très-large à sa base, contient ce bourgeon plus ou moins formé qui interrompt la ligne circulaire de racines et se rétrécit vers le haut, quel- quefois les bords de ce sillon présentent deux arêtes assez vives. Les nœuds des rhizomes ont, comme ceux des tiges, une cloison, mais elle est très-épaisse ; en outre, les rhizomes de ce groupe sont fistuleux, c’est-à-dire creux à l’inté- rieur. Les parties souterraines du rhizome sont d’un blanc jau- nâtre ou d’un beau jaune, mais elles verdissent à mesure qu’elles se rapprochent de la surface du sol et sont en contact avec l'air. Celles qui rampent sur la terre sont d’un vert très-accen- tué. Les parties extérieures sont sensiblement rétrécies en dia- mètre; elles se renflent sous le sol pour se rétrécir ensuite dès qu’elles en sortent, leurs nœuds sont dépourvus de racines, ou du moins n’ont que des rudiments à l’état de mamelons saillants. Le Phyllostachys nigra présente cette remarquable particularité d’avoir des rhizomes noirs comme ses chaumes. La grosseur des rhizomes est subordonnée à l’âge, à la nature des espèces et à leur force végétative ; dans tous les cas, ils peuvent varier de la grosseur d’un crayon à celle d’une forte canne. Les Phyllostachys mitis offrent les plus fortes dimensions; quelques touffes adultes en présentent de 2 cen- timètres de diamètre. Leur longueur est très-développée chez quelques-uns de ces Bambous traçants; il n’est pas rare de voir des rhizomes de P hyllostachys mitis, viridi-glaucescens, VÉGÉTATION SOUTERRAINE. 73 aurea, dépasser 5 à 6 mètres, et surtout de rencontrer des Arundinaria Simoni avec des tiges souterraines de plus de 10 mètres. Tous les rhizomes des Phyllostachys cités offrent les mêmes caractères et à peu près la même forme ; ceux du Ph. viridi- glaucescens sont cependant plus grêles relativement aux nœuds moins saillants; ceux des Arundinaria, de l’A. Simoni par exemple, en diffèrent par le manque de cannelure, par le peu de saillie de leurs nœuds. Tous rampent à une dizaine de centimètres au-dessus de la surface du sol. Quelquefois le Ph, mitis en émerge pour s’y replonger ensuite; l'A rundi- naria Simoni, au contraire, s’enfonce perpendiculairement pour ramper à 0",80 et 1 mètre de profondeur. Très-souvent les rhizomes se ramifient en se dirigeant en différents sens; très-souvent aussi, dès qu’ils ont atteint une certaine longueur et en même temps qu’ils continuent à croître, des bourgeons latéraux se développent et sortent de terre pour devenir des tiges aériennes, En général, quand cela a lieu, toutes ces tiges sont sur le même plan, comme si on les avait alignées (fig. 3). Ainsi que nous l’avons déjà dit, la végétation des tiges sou- terraines est assez rapide, malgré la dureté du sol qu’elles ont parfois à vaincre; mais comme leurs gaines sont coriaces, comme leurs sommets, réunis à l'extrémité du rhizome, se terminent en une pointe aiguë très-résistante, comme leur disposition est imbriquée, on s’explique la facilité qu’elles ont de percer les sols souvent les plus durs. | Quelquefois, par une étrange anomalie de la végétation, il n’est pas rare de voir, sur une touffe de Bambous traçants, des rhizomes sortir du sol, s’exhausser à 10 ou 20 centimètres, décrire une légère courbe, puis se replonger dansle sol pour en sortir de nouveau un peu plus loin et yrentrer ensuite. Ce caractère se remarque assez souvent dans le Phyllostachys mitis ; aussi, lorsque l’on passe à travers une plantation de cette espèce, faut-il prendre garde que les pieds ne s’engagent sous ces sortes d’arceaux qui provoqueraient une chute. D'un autre côté, 1l arrive aussi, lorsque la végétation des rhizomes 14 LES BAMBOUS. se ralentit, que leur extrémité se redresse pour sortir du sol et se transformer en une tige aérienne (fig. 3). Les Bambous traçants, lorsqu'ils sont placés dans des con- ditions favorables de climat et de sol, se développent souter- rainement avec une telle rapidité, qu’en fort peu de temps ils envahissent des surfaces immenses de terrain, et en cela nous verrons plus loin les services qu’ils peuvent rendre. Sous le climat de Paris, la végétation souterraine est plus lente; elle se prolonge très-avant dans l'automne. Dans ces conditions, l'extrémité des rhizomes n’a pas le temps de se constituer normalement avant l'hiver; il en résulte qu’assez souvent, si les froids sont rigoureux, cette partie périt pen- dant la période hivernale, ce qui entrave toujours un peu la végétation de ces Bambous dans notre région. Un fait assez curieux à relater, c’est l'influence que peut exercer la chaleur sur certaines espèces de Bambusacées ; ainsi le Phyllostachys mitis passe à Paris pour être une espèce peu traçante, si, s’en rapportant à ce dire, on culti- vait la même plante en Algérie, on éprouverait une déception complète, car là c’est une espèce des plus traçantes; du reste la figure 3 en donne bien le caractère, que nous avons pris comme tvpe de ce groupe. Dans le centre de l’Europe, le caractère le plus saillant qui différencie, suivant les horticulteurs, le Bambusa viridi-glau- cescens du B. aurea, c’est que ce dernier forme une touffe bien accusée et n’est pas véritablement traçant comme le premier ; en Algérie, ils le sont également tous les deux. Il y a donc lieu de prendre en considération l’influence exercée par le milieu dans lequel on transporte ces végétaux. En terminant cette étude de la végétation souterraine des Bambous, nous ferons remarquer que les rhizomes du pre- mier groupe ne sont pas fistuleux, tandis qu'ils le sont dans le second. Y VÉGÉTATION AÉRIENNE Il n’est pas inutile de rappeler que l’époque de la crois- sance des tiges des Bambous correspond à la manière d’être de chaque groupe. Ainsi, ceux à touffe cespiteuse commen- cent à entrer en végétation en été, quelquefois vers les pre- miers jours du mois d'août, mais principalement en septem- bre; c’est pour cette raison que nous les avons désignés sous le nom de Bambous à végétation automnale; dans les Bambous traçants, au contraire, la croissance a lieu au printemps, dans le courant du mois d'avril; aussi les avons-nous appelés Bam- bous à végétation vernale. Nous devons suivre la végétation aérienne dans chacun de ces deux groupes. Les Bambous à touffe cespiteuse commencent, nous l’avons vu, à développer leurs bourgeons à partir du mois d'août; à ce moment on pourrait apercevoir déjà, à la partie basi- laire, les turions se former, grossir, s’organiser, qu’ils soient à la surface du sol ou profondément enfoncés; se disposant déjà horizontalement ou obliquement, selon la direction que les tiges auront à prendre. Leur végétation est d’abord très- lente ; il y a un point d'arrêt bien marqué, ce qui fait même que, dans l’extrème nord de l’Afrique, cette végétation est plus hivernale qu’automnale; mais une fois qu’ils sont bien con- stitués et propres à transmettre à la partie aérienne les maté- riaux nécessaires à sa croissance, elle s’accomplit avec une extrême rapidité, dans l’espace de quelques semaines, les tiges ou chaumes peuvent atteindre leur plus haute dimension ; nous aurons occasion de revenir plus loin sur ce sujet, dans un chapitre spécial. Examinons les caractères de la tige pendant sa croissance, prenant toujours pour exemples, dans ce groupe, les Bam- busa macroculmis et vulgaris. Dans le premier, ainsi que le 76 LES BAMBOUS. montre la figure 2, la jeune pousse a pris naissance presque à la surface du sol et sur la partie basilaire de la tige de l’an- née précédente. Il en est de même dans le second, avec cette différence que les bourgeons se sont développés à divers de- grés de profondeur dans le sol (fig. 18). Dans l’un et l’autre cas, on voit que les bourgeons ont d’abord rampé horizon- talement, pour se redresser ensuite et devenir la partie aérienne. Lorsqu'ils ont atteint une longueur de 1",50 à 2 mètres et qu'ils sont en pleine activité, ils sont extrême- ment remarquables par les organes appendiculaires dont ils sont recouverts et qui protègent les jeunes tiges durant la période de leur développement. Ces organes méritent parti- culièrement d’être examinés ; car, au point de vue horticole, ce sont eux qui, par leurs caractères constants, nous fournis- sent les meilleurs moyens de distinguer entre elles les diver- ses espèces de Bambous; c’est en les étudiant avec soin que nous sommes parvenus, au Jardin du Hamma, à rétablir la nomenclature, alors que nous n’avions pas encore constaté d’inflorescences, et à faire disparaître la confusion qui exis- tait dans la collection de Bambous de cet Établissement. Nous ne saurions trop attirer sur eux l'attention des personnes qui s'occupent de la culture de ces plantes. Gaînes spathiformes.— Un moment semblables à des écailles, les organes appendiculaires accompagnent la tige, mais seu- lement durant sa croissance ; ils ont reçu le nom de gaînes. Par la position qu’ils occupent sur la tige, par leur manière de s’enrouler autour d'elle, par le rôle qu’ils jouent, on s’aper- çoit bientôt que ce ne sont que des parties de feuilles, la partie basilaire ; en un mot, chaque gaîne n’est qu’un pétiole dont toute la végétation s’est portée sur ce point au préjudice du limbe, qui généralement s’estatrophié, comme nous le ver- rons plus loin. Quoique fort peu connu, cet organe est quel- quefois décrit sous le nom de spathe; mais cette dénomina- tion ne s’applique rigoureusement qu’à ceux qui sont placés à la base des inflorescences et qui les enveloppent, avant et pendant leur expansion, comme chez les Aroïdées, les Pal- miers et beaucoup d'autres plantes appartenant aux Monoco- VÉGÉTATION AÉRIENNE. 71 tylédonées. Nous n'avons donc pas cru devoir nous servir de ce mot; ces organes occupant la place des feuilles, nous les considérons comme tels, et, en raison de la forme qu’ils présentent, et qui rappelle en effet une spathe, nous leur avons consacré, ainsi que nous l’avons dit plus haut, le nom de gaînes spathiformes ; c’est donc sous cette appellation que nous continuerons de les décrire. Pour bien étudier les caractères des gaines spathiformes, il faut choisir le moment où les tiges croissent, dès qu’elles mesurent 20 centimètres de hauteur, jusqu’à ce qu’elles aient atteint environ 2 mètres. La forme en est bien simple; elle est en tout semblable à un cornet de papier; la partie basi- laire est de même diamètre que la partie centrale; c’est, en un mot, une sorte de fourreau fendu dans toute sa longueur, complétement appliqué sur la tige et l’entourant, et dont le sommet est taillé comme un cornet. Les figures 19 et 20 les re- présentent déroulées ou aplaties, pour celles qui appartiennent aux grandes espèces, et les figures 23, 25, 29 pour celles des espèces moyennes. La grandeur de ces organes est subor- donnée aux caractères des espèces de Bambous, à la grosseur de leurs tiges et à la place qu'ils occupent sur cette der- nière, car sur la même tige leurs dimensions sont toujours diverses. Pendant les premiers moments de son évolution, la tige est complétement enveloppée de ces gaines spathiformes placées sur deux rangées, une de chaque côté, autrement dit présen- tant une disposition alterne et distique (fig. 2 et 22). Celles qu’on aperçoit à la base sont très-rapprochées, comme em- boîtées l’une dans l’autre, imbriquées; elles sont plus ou moins courtes et souvent terminées en pointe, surtout lors- qu'elles se sont développées sous terre. Dans ces conditions. leur couleur est ordinairement blanchâtre ou jaunâtre, mais variable dans beaucoup d'espèces. Leur texture est plus ou moins épaisse ou coriace. Par leur partie basilaire elles em- brassent complétement la tige, au point que cette partie s’en- tre-croise en se repliant sur elle-même. Elles sont insérées sur un coussinet circulaire qui forme comme un bourrelet plus 18 LES BAMBOUS. ou moins apparent, et chacune d'elles indique un nœud, Celles de la base, dont le nombre est variable, sont en outre persistantes. Observées successivement et au fur et à mesure que CroIs- sent les tiges, les gaines spathiformes se modifient, ainsi que nous l’avons dit; elles deviennent, comme les mérithalles, plus longues, particulièrement: vers le centre de la tige. Ce sont alors des sortes de faisceaux très-longs, dont les bords se recouvrent de manière à cacher complétement la tige, et dont le sommet est taillé en forme de cornet plus ou moins allongé, plus ou moins obtus, arrondi, ou quelquefois comme tronqué. L'ordre est régulier, mathématique, dans la disposition des gaines, comme il est symétrique par la manière dont les bords se recouvrent; ainsi, par exemple, si l’on examine un bourgeon en voie de développement, voici ce que l’on con- state. La première gaine, en supposant qu’elle soit à gauche, aura le bord gauche appuyé sur le bord droit de la gaîne su- périeure qui est à droite; d'autre part, le bord du côté droit de l’une s’appuie sur le côté gauche de l’autre. Les autres gaines suivent successivement la même marche; la troisième pe à la première, la deuxième à la quatrième, etc. (fig. 2, 22, 30, 33, etc.). Vas l'extrémité de la tige, les gaines spathiformes sont naturellement moins longues et, par conséquent, moins lar- ges, puisque la tige va toujours en diminuant de grosseur; elles reposent, comme celles de la base, sur un coussinet cir- culaire dont le bourrelet est plus ou moins apparent. La texture des gaines est très-variable ; tantôt elle est très- épaisse, coriace, résistante; tantôt extrèmement mince, comme membraneuse, et, par conséquent, peu résistante. En outre, leur partie interne, c’est-à-dire la face appliquée sur la tige, est, dans beaucoup de cas, très-luisante. Elles sont glabres ou couvertes, sur leur partie dorsale, de poils ordinairement couchés, rudes ou mous, duveteux, et se détachant souvent très-facilement. Dans certaines espèces, les poils sont assez roides (fig. 19) pour pénétrer dans la peau et causer De sen- sations peu agréables. VÉGÉTATION AÉRIENNE. 19 Les gaines spathiformes sont quelquefois striées et de cou- leur variable : violacées, brunâtres, verdätres, jaunâtres, et quelquefois maculées comme une peau de serpent (Phyllosta- chys mitiset Quilioi, fig. 23); elles sont généralement caduques, se détachant ettombant à mesure que latigeprend sa croissance (fig. 22, 30, 38); mais auparavant elles se décolorent, comme tout organe qui va se séparer de son axe; dans certaines espèces cependant, elles sont persistantes, quoique dessé- chées. Ces gaines offrent encore d’autres caractères. À la base des tiges, elles sont plus longues que les mérithalles qu’elles englobent; puis, vers le centre, elles deviennent plus courtes, pour redevenir plus longues vers l’extrémité de la tige. Leurs dimensions sont subordonnées à la nature de l'espèce du Bambou et aussi à la grosseur de la tige ou chaume; cepen- dant, pour donner une idée du développement qu’elles peu- vent acquérir dans certains cas, nous dirons que, dans le Bain- busa macroculmis, elles atteignent jusqu’à 0®,44 de hauteur sur 0",52 de largeur à leur partie basilaire. Avec ces dimen- sions considérables, les gaines de ce Bambou ont la forme d’une grande pelle dont se servent les terrassiers; ce sont certainement les plus grandes que nous ayons observées dans les cultures de l'Algérie. On peut en rencontrer de plus longues, puisque celles du Phyllostachys mitis ont jusqu’à 0",55 de hauteur ; mais leur largeur, qui n’est que de 0",14 sur cette même gaine, est considérablement moins grande que dans le B. macroculmis. Il va sans dire que, dans les Bambous dont les tiges ne sont pas plus grosses que celles du blé, les gaines sont en rapport avec ces dimensions res- treintes. Au sommet des gaines spathiformes, on remarque une mem- brane à peine haute de 5, 10 ou 15 millimètres, de couleur variable, verdâtre, jaunâtre, violacée, brunâtre, quelquefois transparente. Elle est parfois bordée de poils (ciliée), ou déchirée en lanières (pectinée), ou comme tronquée horizon- talement. C’est, en quelque sorte, une expansion de l’épi- derme intérieur de la gaine, qui est désignée sous le nom de 80 LES BAMBOUS. ligule et que certains botanistes considérent comme une sti- pule. Elle est toujours fortement appliquée sur la tige, jus- qu’au moment cependant où la gaine commence à s’entr’ou- vrir, elle est peu apparente sur les gaïnes inférieures; elle peut, du reste, sur une même tige, voir se modifier ses caractères. Un autre organe vient s’ajouter à la gaine spathiforme, c’est le limbe. Comme la ligule, il prend sur une même tige les formes les plus diverses. Le limbe est situé tout à fait à l'extrémité de la gaine spathiforme ; il repose sur un cous- sinet formé par une expansion de l’épiderme extérieur de la gaine. Quant à sa forme, elle est extrêmement variable ; dans bien des cas, il est atrophié sur les gaînes de la base, ou bien il n'offre qu'une petite pointe épineuse, raide (fig. 2); dans d'autres cas, il est étroit, linéaire ou apiculé, quelquefois élargi et ayant la forme d’une équerre dont la partie basilaire est plus longue que les côtés (fig. 19). Observé sur les gaînes supérieures et successivement jusqu’à l'extrémité de la tige, le limbe subit de réelles modifications; il devient beaucoup plus long et plus large, et, selon les espèces, il est raide, ou ondulé (fig. 42), ou coriace ; il est mince, ou flexueux, ou infléchi sur la tige (fig. 36), ou droit (fig. 34), ou horizontal, ou elliptique, lancéolé, linéaire. Sa couleur est également va- riable ; dans certaines espèces, comme les Bambusa macro- culmis et Hookeri, il est bronzé; dans d’autres, il est d’un vert olivätre ou d’un vert tendre, et quelquefois rubané de blanc, comme sur le Phyllostachys milis ou l'Arundinaria Simoni. Le plus généralement, il est caduc, persistant cepen- dant sur quelques espèces, et notamment sur le B. vulgaris. I est glabre, ou légèrement velu, surtout à la face inférieure ; quelquefois il est couvert de poils, ou rude au toucher. On y rencontre des stries, et la nervure centrale est plus ou moins apparente ; on le voit parfois armé de deux rangées de petites dents épineuses. Les bords sont glabres, ou ciliés, ou dentés. Enfin, vers l'extrémité de la tige, les dimensions et la forme qu'il a prises font du limbe une véritable feuille, qui arrive à des proportions considérables relativement à ceux de la base. VÉGÉTATION AÉRIENNE. 81 La gaine spathiforme et son limbe sont bien une étrange anomalie dans la végétation, car rien n’est plus disparate que la réunion de ces deux organes. Par leur position sur la tige, par leur organisation, leur caractère, c’est bien une feuille qu'ils forment, mais une feuille d’une nature toute particu- lière. Si, partant de la base de là tige, on étudie successive- ment, jusqu’à son extrémité, la forme du limbe, on constate qu'à chaque gaine une modification se produit. À la base, nous l’avons vu atrophié, représenté par une pointe plus ou moins épineuse, souvent peu apparente, et qui n’est, en quel- que sorte, que le rudiment de la nervure centrale d’une feuille qui a pris ce caractère; mais peu à peu celui-ci disparaïit, et la transformation a lieu par l’allongement et l'élargissement de cette nervure. Au sommet de la tige, le limbe est complé- tement transformé ; il a pris, dans son développement, l’aspect d’une véritable feuille (fig. 52), mais la végétation s’y montre assez curieuse ; il semble que, dans la première partie de la longueur de la tige, toute la force d'expansion ait passé au profit de la gaine, qui a pris un développement considérable au préjudice du limbe, tandis que vers l’extrémité le con- traire a lieu ; c’est le limbe qui s’accroit, pendant que la gaine diminue de volume. D'un autre côté, cette feuille persistant très-peu de temps, ainsi que nous avons pu le remarquer dans le plus grand nombre des cas, pourrait être considérée comme éphémère, puisqu'elle disparaît quelques jours après sa naissance et son développement. La gaine spathiforme offre encore une autre particularité : à son sommet et de chaque côté du limbe, sur certaines espèces de Bambous, on aperçoit quelquefois une expansion membraneuse qui peut avoir une forme auriculaire bordée de poils, comme dans le Bambusa vulgaris (fig. 19), ou bien être déchirée en lanières filiformes et formant comme une col- lerette pectinée autour de la tige, ou encore, et même assez fréquemment, étalée, comme dans le Baïbusa Hookeri (fig. 20). Ces expansions n'existent pas sur toutes les espèces de Bambous ; très-souvent toutes les gaines d’une même tige n’en portent pas, ou bien elles ont avorté sur un des côtés de ) 6 82 LES BAMBOUS. la gaine; en tout cas, elles ne persistent pas bien longtemps et semblent dues à un prolongement de l’épiderme de la partie dorsale de ladite gaîne ; elles sont surtout remarquables, quoique de petite dimension, dans les gaines des Phyllosta- chys viridi-glaucescens et nigra (fig. 28-33). Tels sont, en général, les caractères approximatifs de la gaine spathiforme de nos deux groupes de Bambous cultivés, bien que nous ayons tiré tous nos exemples du premier groupe, qui offre des caractères plus saillants. Cette gaîne spathiforme, nous le répétons, caractérise chaque espèce de Bambous en particulier; en les étudiant comme nous l’avons fait, 1l sera facile, au moment de la croissance des tiges, de distinguer les espèces entre elles. Mais il nous reste encore à parler des quatre ou einq der- nières gaînes qu’on remarque à l’extrémité de la tige et qui la terminent complétement. Celles-ci sont tout à fait différentes des gaînes spathiformes; elles sont’ plus persistantes ; elles enserrent plus étroitement la tige, en raison du décroisse- ment de volume de celle-ci; leur forme, naturellement, n’est plus la même. D’un autre côté, le limbe est quelquefois mieux caractérisé et plus persistant, surtout dans les espèces du groupe cespiteux; dans d’autres cas, il est moins développé. La ligule suit les proportions de la gaine, ainsi que ses expan- sions membraneuses pectiniformes. Les gaînes ici peuvent être considérées comme des pétioles engaïnants. Nous connaissons maintenant les organes appendiculaires de la tige des Bambous pendant leur croissance; 1l nous reste, pour compléter notre travail, à étudier : 1° la force végéta- tive des tiges, c’est-à-dire la rapidité avec laquelle celte crois- sance a lieu; 2 comment et dans quelles conditions leurs ramifications se produisent. Pousses ou turions. — Une touffe de Bambous étant placée dans un milieu favorable sous tous les rapports, et élant arri- vée à produire des tiges normales en grosseur et en longueur, on peut, dans ces conditions, se faire une juste idée de la puis- sance des Bambous quant au développement de leurs tiges. Nous avons déjà dit que, lorsque est arrivée l’époque de la végétation déterminée pour chaque espèce, on voit des bour- VÉGÉTATION AÉRIENNE, 83 geons se former à la base des tiges, mais avec une remar- quable lenteur dans certaines espèces; puis tout à coup ils s’élancent avec une rapidité extraordinaire, car, au Jardin du Hamma d'Alger, le Bambusa macroculmis développe dans l’espace de quelques jours une tige qui atteint une longueur de plusieurs mètres, et le Ph. mitis croît avec une vitesse en- core plus remarquable. Pour donner une plus juste idée de la manière dont s’est effectuée la végétation, nous avons cru devoir établir des tableaux indiquant jour par jour la croissance de chaque tige, comparant celle du jour et celle de la nuit. On verra par ces tableaux qu’il y a des jours où les tiges se sont allongées dans des proportions réellement re- marquables et dignes d’être connues. Le chapitre qui traite de la croissance des Bambous contient tous ces détails. Un fait curieux et intéressant se remarque chaque année dans la végétation des Bambous : au moment où les bourgeon: se forment, et particulièrement sur les B. macroculmis, Hoo- keri, vulgaris et Ph. mitis, à l’époque où les jeunes pousses vont sortir de la terre, celle-ci est durcie par les sécheresses qui se prolongent quelquefois fort longtemps en Algérie; or, à la place où devaient apparaître ces bourgeons, le sol s’hu- midifie sur une certaine largeur ; il se soulève quelque peu, se fendille, et enfin, ainsi aidé par ce secours inattendu, le bourgeon sort. Si on l’examine pendant les deux ou trois jours qui suivent sa sortie, et particulièrement le matin de très- bonne heure, on peut constater que, durant la nuit, le bour- geon a fourni ou a condensé une quantité d’eau suffisante pour détremper le sol environnant. Le bourgeon lui-même, observé dès le matin avant le lever du soleil, est imprégné d’une humidité très-abondante. Comment cette humidité se produit-elle? Ce fait tout physiologique est dû peut-être à une sécrétion de la plante : sur les jeunes organes à peine développés, on remarque, en effet, des gouttelettes qui se détachent de temps en temps et tombent sur le sol. Pendant quelque temps, nous avions supposé que cette humidité, con- statée tous les matins autour des jeunes bourgeons, pouvait être due aux vapeurs, aux rosées de la nuit ou aux brouil- 84 LES BAMBOUS. lards, qui seraient venus se condenser sur les Jeunes tiges et produire alors ce phénomène; mais ayant abrité ces bour- geons pendant la nuit pour leur éviter tout contact avec les agents extérieurs, nous avons vu le même fait se renouveler; cependant, malgré des expériences diverses et réitérées, nous ne pourrions être affirmatifs sur les causes de cette humidité. Nous ajouterons encore que, dans le courant d’août 1874, nous avons assisté, dans certaines soirées, à de véritables pluies qui s’échappaient en larges gouttes du feuillage de certaines touffes de Bambous; nous en avons même recueilli assez pour prendre la température de cette eau. Ramifications des Bambous cespileux.— Lorsque les tiges des Bambous cespiteux que nous étudions 1ci, en prenant toujours comme exemple le Bambou à gros chaume, B. ma- croculinis, ont terminé leur croissance, elles sont simples dans toute leur longueur et ressemblent alors à de grandes perches. En outre, elles sont à peu près de même grosseur depuis la base jusqu'aux deux tiers de leur hauteur ; mais à partir de ce point, elles deviennent de plus en plus minces, pour se terminer en pointe effilée. Elles restent ainsi jusqu’à l’année suivante; puis, lorsque la végétation se remet en mou- vement, on voit apparaitre des ramifications à chaque nœud et sur toute la partie supérieure de la tige. C’est d’abord un bourgeon simple enveloppé dans une écaille binervée haute de quelques centimètres. Dès que ce bourgeon est long de 3 à 4 centimètres, 1l est en tout semblable aux bourgeons sou- terrains désignés dans beaucoup de cas sous le nom de {u- rions; il est donc composé de gaines spathiformes. Le bour- geon continue à se développer; bientôt on en voit naître deux autres à sa base, un de chaque côté ; donc, trois bourgeons à chaque nœud et sur un même point, ayant les mêmes carac- tères et la même marche végétative. Celui du milieu, étant le plus vigoureux, aura atteint à la fin de l’année une longueur de 1 mètre environ pour le Bambusa macroculmis, longueur variable dans les autres espèces; il sera composé de gaines spathiformes, caduques comme celles de l’axe principal. Cette ramification se terminera par des feuilles plus ou moins lon- VÉGÉTATION AÉRIENNE. 85 gues, selon les caractères de Pespèce. Les deux autres rami- fications suivront la même marche, tout en restant plus faibles. L'année suivante, au commencement de la troisième année, une nouvelle végétation se manifestera; celle-ci se portera d’abord sur le nœud, à la base des ramifications, et il se for- mera sur ce point des bourgeons qui seront tout à fait sem- blables aux premiers et suivront la même marche végétative. De leur côté, les premières ramifications se ramifieront elles- mêmes ; à chacun de leurs nœuds des bourgeons se dévelop- peront, montrant les mêmes dispositions. Dans les tiges non adultes, les branches principales sont à peine nées que d’autres se développent au-dessous. Chaque année, les nœuds de la tige principale continueront à produire des ramifications nouvelles qui partiront directe- ment des nœuds, à la base des précédentes, en sorte qu’au bout d’un certain temps ces ramifications, chaque année plus nombreuses, forment à chaque nœud comme des buissons compactes ; ce seront, en un mot, des touffes aériennes, ainsi que le représenterait la figure 6, si elle n’était préparée pour servir au bouturage. On voit que sur les ramifications se ma- nifeste le même caractère que sur la tige; à chaque nœud se forment également des touffes, mais beaucoup moins épaisses, car leurs branches sont bien moins nombreuses. L'étude des caractères de ces buissons aériens montre que chacune de leurs tiges a la même organisation que les touffes terrestres, qu’elles sont composées à leur base de gaines spa- thiformes pendant leur évolution et de nœuds très-rappro- chés, et que de ces nœuds il peut sortir des racines, comme nous le verrons plus tard au chapitre de la multiplication. Ramifications des Bambous traçants. — Si les Bambous à touffe cespiteuse ne produisent que des tiges simples la première année de leur évolotion, el ne commencent à se ra- mifier que la deuxième année, il n’en est pas de même pour les Bambous traçants. Les tiges de ceux-ci se ramifient, soit pendant leur évolution, comme chez les Phyllostachys milis, viridi-glaucescens, flezuosa, Quilioi, violascens, nigra, au- 86 LES BAMBOUS. rea (fig. 30-38 bis), soit lorsque leur croissance est terminée, comme chez les Arundinaria Simoni, Japonica (fig. 45 et 53), mais toujours dans l’année même. La végétation des Bambous que nous citons ici est remar- quable en ce que, dès que les jeunes tiges ont à peine atteint une longueur de 50 à 60 centimètres, on voit apparaître les ramifications; elles partent soit de leur base, soit de leur extré- mité, un peu plus haut ou un peu plus bas, selon le caractère des espèces et l’âge de leur touffe. Elles sont généralement au nombre de deux. Dès qu’elles commencent à végéter, c’est-à-dire lorsqu'elles sortent de leur état embryonnaire et qu’elles ont une dizaine de centimètres, elles sont d’abord enveloppées par la gaîne spathiforme; repoussée peu à peu par les ramifications, celle-ci s’écarte de la tige, puis, comme elle est caduque, elle s’en détache et tombe. Écaille binervée. — Avant leur développement et sous leur gaîne spathiforme, les jeunes ramifications étaient complète- ment enfermées dans une écaille commune, composée de deux membranes souvent très-minces et comme pelliculeuses, transparentes ; cette écaille est appliquée sur la tige princi- pale. La membrane dorsale porte deux nervures latérales assez éloignées l’une de l’autre, et qui sont quelquefois couvertes de poils; la membrane supérieure, c’est-à-dire celle qui se trouve placée en avant, est fendue dans toute sa longueur, soit vers le centre, soit sur l’une de ses parties latérales. Cette écaille est de forme conique, ou légèrement échancrée à son sommet (fig. 31), ou bifide (fig. 39), ou trifide (fig. 26); quel- quefois de forme ellipsoïde. Sa hauteur est variable, selon les espèces de Bambous ou selon la force des tiges; elle peut être de 40 à 50 millimètres, sur 30 millimètres de largeur en moyenne. Cet organe est connu sous le nom de préfeuille, mais, en raison de ce caractère qu’il présente, d’avoir sur sa partie dorsale les deux nervures latérales que nous avons signalées, nous lui avons donné le nom d’écaille binervée. Il est quelquefois cadue, comme dans le genre Phyllostachys ; son existence est alors de très-courte durée; cependant on le retrouve parfois resserré par sa base entre la tige et les rami- VÉGÉTATION AÉRIENNE. 87 fications qu’il protégeait. Dans les Arundinaria, il est plus persistant (fig. 46-47). Un fait bien important à constater et sur lequel nous appe- lons lattention, c’est que l’écaille binervée, en outre des gaines spathiformes, nous offre des caractères précis, au moyen desquels nous pouvons distinguer très-nettement les espèces de Bambous entre elles. En effet, d’après les études que nous avons faites en ces derniers temps sur cet organe, nous avons reconnu que chaque espèce est caractérisée par la forme de son écaille binervée, et que, si quelquefois la gaine spathiforme était insuffisante pour déterminer l'espèce, on pouvait y remédier par l’examen de cette écaille. Les Bam- bous ont beaucoup d’analogie entre eux, surtout dans le groupe qui comprend les Phyllostachys mitis, viridi-glau- cescens, Quilioi, violascens, nigra, aurea, fleæuosa, et il faut une bien grande habitude pour les reconnaître à première vue ; aussi hésite-t-on souvent à se prononcer d’une manière bien affirmative; l’étude des écailles binervées esi donc d’un grand secours, mais elles sont si éphémères, qu'il faut les étudier instantanément. Si nous nous sommes attachés, ainsi qu’on le verra dans la description des espèces, à l’examen de l’écaille binervée qui enveloppe sur chaque nœud de la tige les deux rameaux principaux, c’est, nous le répétons, que cette écaille est par- faitement caractéristique. Il éxiste bien, à la base de toutes les subdivisions des rameaux, des écailles binervées de plusieurs ordres; mais comme elles ne peuvent servir pour caractériser une espèce, nous n’en parlons ici que pour indiquer leur existence. D'un autre côté, les deux rameaux en question étant d’inégale longueur, il résulte que le plus petit porte aussi à sa base une écaille binervée, mais d’un ordre secon- daire, et qu’il ne faudra pas confondre avec l’écaille commune qui enveloppait les deux rameaux lorsqu'ils étaient à l’état de bourgeons. Nous revenons aux ramifications de nos Bambous traçants. Ces ramifications commencent à prendre naissance à la partie inférieure de la tige, soit à quelques centimètres au-dessus 88 LES BAMBOUS. du sol, soit à une certaine hauteur. Quelquefois même, lors- que les touffes sont encore jeunes, les tiges qu’elles pro- duisent sont ramifiées dès la base (fig. 30-38 bis); mais, lors- qu'elles deviennent plus âgées, ce caractère disparaît et les ramifications naissent beaucoup plus haut (fig. 22). Dans les Bambous traçants, les ramifications ont une dispo- sition toute spéciale qui caractérise parfaitement les plantes de ce groupe : elles sont géminées, bifurquées, c’est-à-dire au nombre de deux à chaque nœud, et insérées sur le même point; en sorte qu’elles forment, dès leur point d’adhérence sur la tige, une sorte de V, comme le représente la figure 4. Leur position est ou presque horizontale, ou presque rap- prochée de la tige principale. Leur longueur varie selon le caractère des espèces; dans certains cas, elle peut dépasser 80 centimètres et peut-être davantage. Elles sont raides ou légèrement flexueuses. L'une est toujours plus grande que l’autre (fig. 27, 35 et 38 bis). Pendant leur croissance, ces ramifications, qui sont de longueurs et de grosseurs inégales (fig. 28-38 bis), portent à chacun de leurs nœuds une gaine spathiforme caduque et, naturellement, de petite dimension, puisque ces rameaux sont d’un petit diamètre (fig. 38 bis). Elles se terminent par quatre ou cinq feuilles qui persistent durant une année; mais, pendant qu’elles croïssent, il se développe à chaque nœud une seconde série de rameaux beaucoup moins longs que les pre- miers et couverts également de gaines spathiformes terminées aussi par un bouquet de quatre à cinq feuilles. Enfin, sur ces ramifications de second ordre il se développe une troisième série avec les mêmes caractères ; mais ces dernières sont gé- néralement simples sur chaque nœud. Toutes ces subdivi- sions sont ordinairement très-grèles. En résumé, pour bien faire comprendre la marche végéta- tive des Bambous traçants, nous dirons qu’elle a lieu simul- tanément, sauf pour les Arundinariées, c’est-à-dire que la tige principale commence à se ramifier dès qu'elle a atteint une longueur de 50 à 60 centimètres, et qu’au fur et à mesure de son élongation, ses ramifications latérales se développent VÉGÉTATION AÉRIENNE. 89 (fig. 30 et 38 bis), tandis qu'en même temps des subdivisions se produisent sur elles ; tout, en un mot, se produit à la fois. On peut conclure de cela que c’est seulement pendant la crois- sance de leurs tiges qu’on peut étudier les organes qui carac- térisent les Bambous, puisque, ces organes étant très-fugaces, il ne serait plus temps ensuite. W Fic. 4. — PHYLLOSTACHYS MITIS. Tiges avec ramificalions géminées. Tiges cannelées. — Il est un caractère remarquable utile à signaler dans les Bambous de ce groupe : c’est une sorte de dépression des tiges, formant des cannelures consécu- tives qui les font quelquefois paraître comme triangulaires. 90 LES BAMBOUS. Chaque cannelure se prolonge d’un nœud à l’autre (fig. 4-55), mais alternativement et distiquement, chacune s'étendant sur toute la longueur de son mérithalle, mais du côté opposé à la précédente. Elles prennent toutes naissance à la base de cha- que groupe de ramifications, ne commençant à paraître sur la tige qu'à partir du nœud qui porte les premières. Il n’est donc pas rare de rencontrer des Bambous chez lesquels les cannelures ne commencent qu'au-dessus du huitième ou même du douzième nœud; les Phyllostachys mitis et nigra offrent fréquemment.ce caractère. Dans le plus grand nombre des cas elles sont à doubles rainures, plus ou moins pro- fondes, séparées au milieu par une côte plus ou moins déve- loppée. Les principales charpentes latérales présentent égale- ment ces cannelures, disposées de même et alternativement d’un nœud à l’autre. Nous avons cherché bien longtemps quelle pouvait être la cause de ces dépressions sur la tige; nous avions pensé tout d'abord qu’elles étaient dues à la pression des deux bran- ches, lorsqu'elles étaient encore à l’état de bourgeons et comprimées sur l’axe par les gaînes spathiformes; mais un examen plus approfondi nous a laissé supposer qu’au con- traire celte dépression à doubles rainures était due à l’écaille binervée, incrustée en quelque sorte dans la tige, pendant la formation de celle-ci. Si, en effet, on enlève en ce moment, vers son extrémité, une des gaines spathiformes qui la compo: sent, on aperçoit à sa base un bourgeon complétement en- chässé dans la tige; et comme sur ce point les mérithalles sont extrêmement courts, il en résulte que le bourgeon tou- che les deux nœuds par ses extrémités. En soulevant ce bour- geon, on remarque que ce sont les deux nervures de l’écaille binervée qui ont formé les deux rainures, et que l’intervalle est occupé par une petite côte qui les sépare. La dépression à ce moment n’est donc que de la longueur de l’écaille biner- vée, et il ne peut en être autrement, par suite de l’état de la jeune tige ; mais au fur et à mesure que sa croissance a lieu, le mérithalle s’allonge et le nœud supérieur, s’éloignant du nœud inférieur, entraine la dépression dans toute la lon- VÉGÉTATION AÉRIENNE. 91 oueur du mérithalle, c’est-à-dire d’un nœud à l’autre; il est vrai de dire aussi que ces deux rainures correspondent exac- tement aux deux ramifications qui vont s’accroitre en même temps que l’entre-nœud. Le caractère spécial de ces Bambous à tige cannelée est de n'avoir que deux branches principales à chaque nœud, se bifur- quant dès leur insertion sur la tige et accusant la forme en V plus ouverte ; il arrive cependant quelquefois, et surtout lors- que les plantes sont jeunes ou cultivées dans la région du Nord, à Paris par exemple, qu’il se développe un troisième et même un quatrième rameau ; mais ceux-ci sont toujours très-grêles et ne prennent jamais d’extension; ils restent à l’état de ra- muscules. Quant à leur position, elle se trouve toujours à la bifurcation des deux branches et ils apparaissent en même temps que ces dernières. Une fois établies les ramifications de ces Bambous, jamais le nombre n’en augmente, à l'inverse de ce qui a lieu dans ceux à végétation automnale et à touffe cespiteuse, qui en pro- duisent de nouvelles chaque année, à la manière des touffes terrestres. Tels sont donc, pour les Bambous bifurqués, les caractères d’une tige pendant la première année de sa croissance; mais, si l’on étudie cette même tige l’année suivante, durant sa deuxième période de végétation, on voit que tout est diffé- rent. Les gaines spathiformes, ainsi que les écailles biner- vées, ont disparu; toute la nouvelle végétation se porte sur les ramules et les ramuscules, ce qui en augmente le nombre. Ces nouvelles ramifications, généralement courtes et très- grèles, ne développent que cinq ou six feuilles chacune, situées à leur extrémité. Les années suivantes, ces ramifica- tions en produiront d'autres, et successivement il en sera ainsi pendant toute la durée de l'existence de la tige. Dans la seconde subdivision des Bambous traçants, les Arundinariées, le développement des ramifications de la tige principale se fait d’une manière différente; elles n’apparais- sent que quand celle-ci a complétement terminé sa croissance en longueur; et, en outre, ce n’est plus à la base de la tige, 92 LES BAMBOUS. mais à son extrémité que s'opère ce développement. Aussitôt l’élongation terminée, les gaines spathiformes situées sur le sommet de la tige s’écartent peu à peu par le haut, en res- tant adhérentes à leur base, puisqu'elles sont persistantes, c'est alors qu'apparaissent les ramifications. Jusque-là, la gaine spathiforme, très-épaisse et coriace, les tenait prison- nières ; mais celles-ci, en se développant, l’ont forcée à s’écar- ter de la tige pour les laisser s'échapper; il en résulte que les gaines, au fur et à mesure qu’elles quittent la tige, s’enrou- lent autour des ramifications et y restent pendant très-long- temps. Ces ramifications, lorsqu'elles commencent à se former, sont simples ou multiples, selon les espèces de Bimbusacées. Celles qui appartiennent à cette subdivision sont les Arundi- naria Japonica et Simoni. Dans l'Arundinaria Japonica, les ramules et les ramuscules qui se développent successive- ment, selon leur ordre, au commencement de la végétation, sont unitaires, comme le rameau principal l’est sur l’axe cen- tral ou la tige, mais pour se ramifier ensuite. Au contraire, dans l’Arundinaria Simoni, les ramifications naissent en faisceaux, mais chaque nœud n’en portant qu’un seul. Elles sont quelquefois très-nombreuses sur un même point, et, d’après leur disposition, on les dirait montées sur une sorte de pivot ayant un empâtement assez considérable sur le nœud. Les ramules et les ramuscules suivent, selon leur ordre, la même marche végétative. Les tiges de ces Bambusacées offrent aussi une différence : les cannelures que nous avons remarquées sur l’autre série de Bambous n'existent pas sur ceux-ci; cependant, sur l’A run- dinaria Japonica, on en aperçoit quelquefois les marques à la base des ramifications. Les tiges des Bambous traçants sont très-résistantes, et leur grosseur varie selon les conditions dans lesquelles les plantes se trouvent placées. Leur couleur est ou d’un beau jaune, ou noire, ou d’un gris cendré; elles sont cannelées ou non; leur bois est plus ou moins épais et généralement luisant. Racines proprement dites et adventives de la base des Bam- VÉGÉTATION AÉRIENNE. 93 bous. — Dans les Bambous à végétation au- NU tomnale et à touffe cespiteuse, les racines se | développent à la base des tiges, où elles sont () disposées en verticille et quelquefois sur trois h: rangées (fig. 2). Elles sont insérées à chaque j { nœud, un peu au-dessus du point d'insertion 4 de la gaine spathiforme; elles sont grèles, A A cylindriques et garnies de petites radicelles. À À Leur longueur est subordonnée à la stature de la plante; cependant, dans le Bambusa macroculmis, 1 n’est pas rare, au Jardin du [amma, de leur voir envahir le terrain à plus de 10 mètres de la touffe et le dessécher d'une manière extraordinaire. Elles sont très-dures, coriaces et par cela mème très- résistantes. Leur apparition a lieu lorsque les jeunes pousses ont atteint une certaine longueur; elles les aident alors dans leur naissance (fig. 2). Dans bien des espèces, et en prenant comme exemple le Bambusa macroculmis, il n’est pas rare de voir à chaque tige des racines ad- ventives se former au-dessus du sol et quel- quefois au delà du sixième nœud (fig. 2). Ces racines, qui dans les climats secs comme celui de l'Algérie ne dépassent pas une lon- gueur de 3 à 4 centimètres, peuvent se dé- velopper et atteindre le sol dans les endroits humides et marécageux de leurs stations naturelles. Il n’y a guère que celles de la base qui ont la faculté de s’accroître davantage et de s’enfoncer dans le sol. Les Bambous traçants ont, à les bien considérer, deux sortes de ra- cines : les unes sont disposées en ; RESTE à sa é F1G, 5. — PHYLLOSTACHYS (BAMBUSA) MITIS verlcille simple sur les rhizomes, Bourgeon naissant sur le rhizome, 94 LES BAMBOUS. où elles sont fixées à chaque nœud (fig. 3 et 5), un peu au- dessus de l'insertion de la gaine; elles sontau nombre de six à douze, généralement peu longues, grêles, tortueuses et cou- vertes de petites ramifications courtes qui constituent le che- velu. Elles servent, d’un côté, à faciliter le développement du rhizome ; de l’autre, à fournir à la nouvelle tige aérienne une partie des matériaux nécessaires à sa croissance. Mais, comme la nourriture provenant de ces racines et du rhizome sera insuffisante pour fournir à l’évolution complète, dès que cette tige aérienne a atteint une longueur de 30 à 60 centimètres, elle développe à sa base (fig. 5) et sur toute sa partie basilaire, qui est plus ou moins enfoncée dans le sol, une série d’autres racines, toujours disposées en verticille autour de la tige et à chacun de ses nœuds (Multiplication, fig. 11). Celles-ci sont bien plus grosses et plus longues que celles qu’on remarque sur les rhizomes, et, par suite de la faculté qu’elles ont d’aller puiser au loin lessues nutritifs dans la terre, elles contribuent beaucoup à apporter à la jeune tige le complément des matières qui lui sont indispensables pour parcourir les phases de sa nutrilion. Enfin, pour compléter cette série d'observations qui se rat- tachent à la végétation des Bambous en général et résumer leur mode de croissance aérienne, nous rappellerons que les turions qui doivent produire les tiges s'organisent longtemps à l'avance, afin de pouvoir subvenir rapidement à l'établissement définitif de leurs dimensions en grosseur et en largeur. Il conviendrait ici de faire remarquer combien ces turions, même dans les premiers moments de leur végétation, sont plus gros que les rhizomes qui les produisent, et que plus ils se développent, plus leur base se renfle. A cette époque, des racines naissent déjà de cette base (fig. 3 et 5), et le turion n’a plus que quelque adhérence au rhizome. Dans le B. ma- croculmis (fig. 2), le turion en développement émet dès sa base de fortes racines et ne communique à la souche mère que par un pelit faisceau organique qui suffit cependant pour lui fournir cette force d’allongement citée plus loin, au cha- pitre Croissance. Si l’on enlève ce turion pendant son évolu- VÉGÉTATION AÉRIENNE. 95 tion pour le placer dans les meilleures conditions possibles, il croît quelque temps; mais malgré ses racines il finit par se désorganiser. La tige ou chaume, nous le répétons, prend dès le début de sa croissance une grosseur déterminée, en rapport avec l’âge plus où moins grand de la souche, avec les conditions dans lesquelles elle se trouve, et aussi avec les caractères de l'espèce; 1l en est de même pour sa longueur. Ces deux dimensions sont acquises en l’espace de quelques semaines, après quoi Ja tige, dût-elle vivre encore bien des années, ne grossira plus ni ne grandira. Les années suivantes, la végé- tation se portera sur deux points seulement : d’un côté, sur les ramifications que la tige a déjà produites ou qu’elle pro- duira plus tard; de l’autre, sur la souche qui développera de nouvelles tiges. C’est donc une erreur de croire, comme on l’entend dire très-souvent, que les tiges des Bambous grandiront ou grossiront encore en vieillissant. Floraison. — Les Graminées sont des herbes, annuelles ou vivaces, qu'on rencontre en abondance sur tous les points du globe, dans les champs, dans les bois, dans les montagnes, aans les parties sèches comme dans les parties humides, sur les rochers, sur les murailles; partout enfin où il y aun peu de terre, il est rare de ne point rencontrer une Grami- née. Leur floraison, ainsi que leur fructification, est très- régulièrement abondante, et c’est ce qui explique leur diffu- sion; Mais, par une étrange anomalie, le plus grand nombre des espèces de Bambous sembleraient s'éloigner de cette règle générale, à en juger par les récits des voyageurs distin- gués et dignes de foi, à en juger aussi par ce que nous avons pu observer dans nos cultures européennes. C’est donc un fait accrédité que bon nombre d’espèces de Bambous sont avares de leurs fleurs, qu’elles ne montrent qu'à des époques très-éloignées, quelquefois à plus de trente ans, et qu’en outre ces floraisons ont lieu simultanément pour cer- taines d’entre elles. Nous emprunterons, à ce sujet, au Golo- nel Munro quelques passages qu’il a puisés dans différents ouvrages, et dans lesquels ont été consignés des faits très- 96 LES BAMBOUS. intéressants sur la rareté et la simultanéité de la floraison de certains Bambous. « Humboldt dit que Mutis, qui a herborisé pendant vingt ans dans des forêts marécageuses de Bambusa gadua s’éten- dant sur plusieurs lieues de largeur, n’a jamais rencontré une seule floraison de cette espèce. Il en est de même du Bambusa Balcoa que Roxburgh, excellent observateur, dit n'avoir jamais vu qu'une seule fois en fleur. » Le Colonel Munro ajoute que, dans les herbiers, les échantillons de ces deux espèces sont très-rares. En opposition à ces espèces à floraisons très-éloignées, 1l en est d’autres qui, au contraire, fleurissent tous les ans, comme le Bambou mâle (Dendrocalamus strictus), ainsi que certaines Arundinacées à tiges annuelles. En outre, Hooker dit que le Pao (Dendrocalamus edulis) fleurit chaque année, ainsi que le Prang (Arundinaria Hookeriana) qui produit abondamment des graines. Mais le fait le plus remarquable est certainement la si- multanéité qui existe dans la floraison de certains Bambous. On peut lire sur ce sujet, ainsi que le conseille le Colonel Munro, de nombreux comptes rendus provenant de soigneux observateurs, et réunis dans les XIII et XIV° volumes du Journal de la Société d'agriculture et d’horticulture de l'Inde. Sir W. Sleeman y établit, comme un fait observé par lui, qu’en 1836 tous les grands Bambous du Deyrah-Dhoon, qui, depuis vingt-cinq ans, donnaient le plus bel aspect à la vallée, se mirent à fleurir et à produire des graines, aussi bien ceux qui avaient été transplantés pendant la saison précé- dente que ceux qui lavaient été vingt ans auparavant, et qu’ensuite tous moururent ensemble. Il ajoute que la croyance générale dans la vallée est qu’un homme qui a vu deux florai- sons de Bambous doit avoir environ soixante ans. Le docteur Wallich mentionne qu’un bosquet renommé de Bambous, qui environnait la ville de Rampore, dans le Rohil- cund, fleurit tout entier en 1824, puis que chaque tige périt. Il apprit que la même chose était arrivée quarante ans aupa- ravant. M. Spilsbury établit que tous les Bambous entre VÉGÉTATION AÉRIENNE. 97 Jubbulpore et Mundlah, qui avaient fleuri et fructifié en 1839, moururent bientôt après. Des faits semblables d'anéantisse- ment de forêts entières de Bambous à la suite de leur florai- son et de leur fructilication sont signalés pour le Welocanna bambusoides (Bambusa baccifera, Roxb.), qui, ayant généra- lement fleuri dans le Tipperah, à Runypore, Arraca et Chit- tagong, de 1863 à 1866, moururent immédiatement après et causèrent un dommage considérable dans le Tipperah, les années suivantes, par suile de l’absence de tout Bambou pour les constructions. A l’encontre de ces assertions, le docteur Anderson, l'habile surintendant des jardins botaniques de Calcutta, ‘rapporte qu’en 1857 et 1858 beaucoup de Bambous fleurirent et fruc- tilièrent près de Calcutta et au Paramath; mais dans aucun cas il n’en résulta, ainsi qu'on s’y attendait, la mort géné- rale des Bambous. Autant qu'il a pu l’observer, les seules tiges qui avaient fleuri périrent, et elles furent remplacées par de jeunes bourgeons qui repartirent de leurbase; mais, avant la floraison et la fructification, le feuillage des tiges avait presque entièrement disparu. Il ajoute qu’en 1861, à Calcutta, lorsque les Bambusa gigantea fleurirent pour la première fois depuis trente ans, les plantes, bien qu’affaiblies, continuèrent à vivre. Le journal dont il est parlé plus haut mentionne encore quelques points où il v a eu des floraisons générales de Bambous, particulièrement à Oressa en 1812 et, en 1864, à Camara, dans les jungles de Soopa, sur la côte occidentale de l'Inde. Tous les botanistes célèbres, Humboldt, Bonpland, Rox- burgh, Muts, Spence, Wallich, Spilsbury, Gray, Hooker, Brandis, Bory de Saint-Vincent, Auguste Saint-Hilaire, et beaucoup d’autres qui ont parcouru comme eux des forêts de Bambous, s'accordent à confirmer les faits cités plus haut de la simultanéité de la floraison des espèces, de la mort des tiges ou des plantes après leur floraison ou leur fructifi- cation, et enfin de la rareté de cette floraison chez la plu- part des espèces de Bambous, ce qui explique la défectuosité ll 98 LES BAMBOUS. de la nomenclature pour beaucoup de ceux que nous culli- vons. En examinant un moment ces derniers comme nous allons le faire, nous verrons jusqu'où va, sous ce rapport, la concordance entre eux et ceux qui croissent à l’état spon- tané. Dans nos cultures européennes, nous n'avons pu encore apprécier d’une manière certaine les longs intervalles qui existent d’une floraison à l’autre d’une même espèce; cepen- dant nous avons déjà constaté le fait d’une Bambusacée très-rustique sous le climat de Paris, l’Arundinaria J'apo- nica, qui, ayant fleuri pour la première fois il y a quelques années, n’a plus, depuis lors, donné de fleurs dans nos cul- tures. La plante que nous citons est bien humble, à la vérité, auprès de ces grandes espèces qui forment d'immenses forêts, mais, au point de vue botanique, le cas n’en a pas moins un certain intérêt. À côté de ce fait nous avons, au contraire, à citer celui de trois espèces qui, depuis quelque temps, paraissent devoir fleurir de temps à autre au Hamma d'Alger ; ce sont les Bambusa spinosa, B. macroculmis et B. stricta, plus particulièrement ce dernier. Quant à la floraison éparse et simultanée d’une même espèce, les faits rapportés ci-dessus se sont vus déjà corrobo- rés dans nos cultures européennes. Il y a quelques années, en effet, en 1867 ou 1868, l’Arundinaria Japonica com- mença à montrer ses fleurs au bois de Boulogne sur deux magnifiques touffes; au même moment, on signalait la même apparition chez MM. Thibaut et Kételeer, horticulteurs à Sceaux; puis à Marseille, au château du Roucas-Blanc, dans la magnifique propriété de M. Paulin Talabot, amateur distin- oué de botanique et d’horticulture, et enfin dans d’autres établissements européens. Bien plus, la floraison de cette plante n’eut pas seulement lieu sur le continent, on la con- stata également de l’autre côté de la Méditerranée, car tous les Arundinaria Japonica du jardin du Hamma y fleurirent environ à la même époque, et le fait le plus curieux qui se produisit, c’est que toutes les tiges, les plus anciennes comme les plus nouvellement développées, portèrent des VÉGÉTATION AÉRIENNE. 99 fleurs à la fois, au point mème que les bourgeons, à leur sor- tie de terre, se convertissaient immédiatement en tiges flo- rales. Cette floraison surabondante avait tellement altéré ces plantes qu’elles ne produisaient plus que de faibles tiges de 9 à 6 centimètres de long, et encore ces dernières étaient- elles couvertes de fleurs. Pendant longtemps ces Bambous res- tèrent comme frappés d’une stérilité complète; cependant, à l’aide de soins et grâce à quelques fragments de rhizomes qui s'étaient refusés à la floraison générale, on put sauver l’es- pèce; elle nous donne aujourd’hui des tiges qui atteignent 3 mètres de hauteur. Un autre exemple de simultanéité de floraison s’est montré l'an dernier, dans les mêmes conditions, sur une autre espèce, l’Arundinaria falcata. Cette plante, d’un port extrè- mement élégant, ne résiste pas à nos hivers parisiens, mais, sur les côtes de Bretagne et de Normandie, ainsi que dans les régions tempérées, elle se développe avec toute la beauté qui la caractérise. C’est en 1875, vers l'automne, que s’y montrè- rent les premières fleurs, circonstance que signala M. Car- rière dans la Revue horticole. Depuis cette époque, l’Arun- dinaria falcata a fleuri à peu près partout et simultanément à Angers, à Nantes, au Hamma d'Alger, et, postérieure- ment, en mars et avril 1876, au jardin du Luxembourg, à Paris; chose fort curieuse, tous les pieds fleurirent indistinc- tement, même les individus cultivés en pots en ce dernier endroit. Enfin un troisième cas s’est produit, cette fois sur le Phyl- lostachys flexuosa. C’est au jardin du Hamma, en février 1876, que les fleurs de cette espèce se sont montrées pour la première fois; au mois de mai suivant, elles parurent chez M. Turrel, à Toulon, et enfin, en juillet, dans l’établis- sement d’horticulture de MM. Thibaut et Kételeer, à Sceaux, en même temps qu’au Jardin zoologique d’acclimatation de Paris. L'Arundinaria Japonica, d’origine japonaise, a été in- roduit en Europe par Siebold, il y a longtemps déjà, et les individus qui se sont répandus dans nos jardins proviennent 100 LES BAMBOUS. tous d’un seul et même pied. Ce n’est donc qu'après une vingtaine d'années de culture que leur première et unique floraison a eulieu. Ilen estde même de l'A. falcata, originaire des monts Himalaya, et dont l'introduction est due à M. Van Houtte, il y a environ trente ans. C’est encore d’un seul et même sujet, multiplié par division de sa touffe, que provien- nent tous les individus qui se sont répandus dans nos jar- dins et dont la floraison simultanée est très-récente. Quant à la troisième espèce, le P hyllostachys fleæuosa, c’est le Jardin zoologique d’acclimatation de Paris qui l’a reçue de Chine en 1864 et qui l’a fait multiplier; c’est de cet établissement qu'elle est sortie pour figurer dans nos cultures où elle vient de fleurir après sa douzième année d'introduction. Ces trois cas de floraison simultanée sur trois espèces dif- férentes peuvent déjà confirmer une partie des observations qu'ont faites à ce sujet les voyageurs. On pourrait nous faire remarquer, il est vrai, que celte simullanéilé n’a pas été ici très-rigoureuse, puisque le Bambusa fleæuosa à commencé à fleurir en Algérie au mois de février, puis à Toulon en avril-mai, et enfin à Paris en juillet. A cela 1l est facile de ré- pondre par la différence climatérique ; Alger étant la partie la plus chaude des trois localités où nous avons constaté la floraison de cette plante, il est tout naturel qu’elle y ait eu lieu d’abord. Si tous les B. fleæuosa eussent été réunis en un même endroit, il n’est pas douteux que leur floraison eût eu lieu à la même époque; tous les individus dispersés à Paris ont fleuri en même temps. On a pu constater que, au moment où chacune de ces trois espèces de Bambusacées se préparait à fleurir, les feuilles ont jauni, se sont desséchées et sont tombées, pour être rempla- cées par les inflorescences. À Alger, nous l’avons vu, le P hyllostachys fleæuosa a montré ses fleurs sur toutes les tiges, même sur les plus jeunes et sur celles qui étaient en voie de croissance. Chez MM. Thi- baut et Kételeer, à Sceaux, les fleurs de cette espèce ne se sont développées sur la touffe que sur une seule tige, et celle-ci, avant de fleurir, s’est complétement dépouillée de VÉGÉTATION AÉRIENNE. 101 ses feuilles; les autres tiges les ont conservées. C’est donc un signe certain que, du moins pour certaines espèces, les tiges perdent leurs feuilles au moment où les fleurs vont paraître ; mais ce caractère n’est pas général, car les Bambusa spinosa, macroculmis, stricta, et lArundinaria Simoni, les ont con- servées pendant leur floraison. Il en est de même du Bam- busa Hookeri, qui a fleuri en 1872 dans la grande serre à Pal- miers du Jardin des Plantes de Paris. Maintenant il reste à résoudre une question assez délicate, celle de savoir ce que deviennent réellement les tiges ou les plantes après leur floraison ou leur fructification. Certains auteurs, nous l’avons vu, ont écrit que des forêts entières avaient complétement disparu ensuite; d’autres ont constaté le contraire, ct particulièrement le docteur Anderson, qui n’a vu les Bambous que très-fatigués après cette fructification, mais n’en continuant pas moins à produire de nouveaux bour- -geons à la base des tiges florales. La disparition totale de forêts de Bambous a été également consignée par Auguste Saint-Hilaire, le célèbre botaniste qui a exploré le Brésil. Dans sa Flore partielle de ce pays il dit céët: « Je puis citer, entre autres, ces Bambous qui font, dans les forêts primitives, l'admiration du voyageur. Il faut à ces herbes immenses plusieurs années pour qu’elles puissent éle- ver jusqu’à 90 ou 60 pieds leurs tiges souvent presque aussi dures que du bois, et parvenir à l’époque de leur floraison. Mais quand elles ont porté des fruits, elles se dessèchent et meurent comme la Graminée la plus humble de nos climats si froids... La première fois que j’entrai dans une forêt entiè- rement formée de l’espèce de Graminée appelée vulgaire- ment Toboca, j'éprouvai un véritable ravissement en voyant ces tiges d’un aspect presque aérien, qui, hautes de 40 à 50 pieds, se courbaient en arcades élégantes, se croisaient en tous sens, entremêlaient leurs immenses panicules et lais- saient entrevoir l’azur foncé du ciel à travers un feuillage étalé comme un tapis à jour. Alors la plante était en fleur. Je repassai quelques mois plus tard, la forêt avait disparu. 102 LES BAMBOUS. Dans l'intervalle, les fruits avaient succédé aux fleurs; ils avaient mis un terme à la végétation de la plante; les tiges s'étaient desséchées ; elles s'étaient brisées, et il n’en restait plus que des débris gisant sur le sol. » (Aug. Saint-Hilaire, Leçons de botanique comprenant principalement la Mor- phologie végétale, p. 47.) Il est donc assez difficile ici, d’après nos seules cultures, de se prononcer affirmativement sur ce fait de la mortalité des Bambous; leur introduction étant trop récente, nos ob- servations sont encore incomplètes; mais, en raison de leur nature essentiellement vivace et de leur faculté de produire, dans le plus grand nombre des cas, des tiges qui peuvent vivre quelquefois au delà de vingt ans, il est à supposer que, pour tous les Bambous qui ont donné lieu aux observations signalées plus haut, la mortalité n’a dû porter réellement que sur les tiges qui ont fleuri ou fructifié; quant à la sou- che elle-même, elle a dû se conserver vivante. Du reste, les observations du docteur Anderson et d’Aug. Saint-Hilaire semblent ne devoir laisser aucun doute à cet égard. Si l’on se rappelle, en effet, comment est organisée une souche de Bam- bou, il est difficile de croire que ces plantes, d’une rusticité et d’une vigueur extrêmes, ayant des moyens si puissants de reproduction, périssent après avoir fleuri et fructifié; cela nous parait invraisemblable. Que les tiges, comme celles de toutes les plantes vivaces, meurent après avoir produit leurs fleurs et leurs fruits, rien ne semble plus naturel, et c’est ce qui doit arriver pour les Bambous, si nous en Jugeons par quelques-unes des espèces qui viennent de fleurir; ainsi l’'Arundinaria Japonica, VA. falcala ont perdu leurs tige après leur floraison récente, mais de nouveaux bourgeons se sont produits à leur base. Quant au Phyllostachys fleæuosa, si les tiges ont péri après leur floraison, il en est repoussé de nouvelles sur ses rhizomes. Nous ferons cependant remar- quer, ainsi que le constate le docteur Anderson, que les plantes ont été fatiguées. Pour ce qui est du Bambusa macro- culmis, comme les inflorescences ne se sont développées qu’à la base des tiges et presque sur la souche, nous n’avons pu VÉGÉTATION AÉRIENNE. 103 constater si cette floraison avait entraîné la mortalité de la tige ; dans tous les cas la touffe a continué à végéter. Les Bambous qui fleurissent annuellement se trouvent na- turellement en dehors de ces observations; bien évidemment leur floraison n’entraine pas la mort de la plante. De toutes les citations que nous avons rapportées ici, il naît un doute dans notre pensée : que deviennent ces vastes forêts de Bambous après leur mort? Ces plantes sont-elles rempla- cées par des espèces d’un autre ordre, comme cela a lieu naturellement, ou bien ces Bambous sont-ils remplacés par d'autres dont les graines, répandues sur le sol, ont recon- stitué la forêt? Les voyageurs ne nous en disent rien. En s’ar- rêtant à cette dernière hypothèse, comment expliquer alors que les jeunes Bambous puissent trouver dans le sol les élé- ments nécessaires à leur développement, puisque celui-ci est encore emblavé des souches des plantes qui viennent de dispa- raître”? Il est peu probable, à notre avis, qu’une forêt de Bam- bous disparue soit immédiatement et naturellement rempla- cée par une autre composée de la même espèce; ce serait contraire aux règles ordinaires de la végétation successive. Il faut, en outre, ne pas perdre de vue la forte organisation des souches des grandes espèces de Bambous, qui s'élèvent quel- quefois à 1 mètre au-dessus du sol, comme nous le voyons au jardin du Hamma, et ne pas oublier non plus le mode de végétation de ces grandes herbes qui doivent produire chaque année, en leur qualité de plantes vivaces, de nouvelles tiges destinées à remplacer celles qui se détruisent soit par le fait de l’âge, soit par toute autre cause. Pour nous résumer, nous dirons que cette question de la disparition de forêts entières de Bambous, après leur fructi- fication, n’a pas dû être suffisamment étudiée; les voyageurs qui les parcourent s’attachent généralement trop peu au mode de végétation, et souvent aussi la durée de leur séjour dans une localité est insuffisante pour leur permettre de constater bien des faits intéressants qui restent ignorés, ce qui est arrivé sans doute pour les grandes forêts de Bambous. Il est fort probable que, si l’on eût pu attendre l’époque ordinaire 104 LES BAMPBOUS. de la végétation, on eût constaté que la mortalité ne s'était portée que sur les tiges florifères, et que l’on eût aperçu de nouveaux bourgeons destinés à les remplacer, comme l'ont fort bien constaté Anderson à Calcutta, et Aug. Saint-Hilaire au Brésil. 3 Bien des personnes ont cherché à expliquer quelles pou- vaient être les causes de ces floraisons singulières et toutes plus ou moins hypothétiques. Sont-elles le résultat de grandes sécheresses, de faits accidentels? Bory de Saint-Vincent con- state que, pendant son séjour à l'Ile de France, il cherecha vai- nement des fleurs de Bambous, et ne put en découvrir qu’à la suite d’un incendie qui s'était manifesté dans un bosquet composé de ces plantes, près d’une maison d'habitation; elles s'étaient développées sur les vieilles tiges qui avaient résisté aux flammes. Ces fleurs disparurent lorsque de nouvelles tiges eurent remplacé les anciennes. 6 MULTIPLICATION. Dès 1868, en étudiant les principaux végétaux du jardin du Hamma, au point de vue des services qu’ils sont appe- lés à rendre, nous avions été frappés du rôle que pouvaient jouer les Bambous dans tout le bassin méditerranéen, et sur- tout en Algérie où toute essence ligneuse est rare, où le bois manque souvent tout à fait. En y remarquant la luxuriante vé- gélation de quelques espèces de l'Inde, du Japon et de la Chine, il n’y avait pas à douter de leur emploi industriel, com- mercial, économique et artistique; il devenait dès lors de notre devoir, on ne peut plus conforme à nos goûts naturels, de prendre les mesures propres à les multiplier pour en acti- ver la propagation, pour en répandre la culture. C’est à par- tir de cette époque que tous nos efforts se sont portés vers l’étude des espèces que nous avions réunies, nous attachant spécialement à connaître la manière d’être de chacune d'elles; une fois leur genre de végétation bien déterminé, nous avons pu en déduire les modes les plus faciles de multiplication et de traitement. Nous apportons aujourd’hui à la Société d’Acclimatation le fruit de notre travail; c’est le résultat d'expériences que nous avons poursuivies pendant neuf ans, et qui sont d’un caractère essentiellement pratique, puisqu'elles ont servi, depuis lors, à la large propagation des différentes espèces de Bambous dont la culture est possible soit en Europe, soit en Afrique. Pour rendre plus facile la multiplication mieux comprise de ces plantes, il fallait tâtonner beaucoup, comparer, modi- fier souvent, étudier Loujours. Ce sont ces nombreuses obser- vations qui nous ont amenés à en former les deux groupes très-distincts que nous avons signalés : Groupe à végétation automnale et à touffe cespiteuse, pro- pre aux régions tempérées ; 106 LES BAMBOUS. Groupe à végétation vernale et à rhizome traçanc, propre aux régions froides. Les caractères de ces deux groupes, qu’on n'avait pas encore observés jusqu’à présent, et dont la connaissance nous a telle- ment guidés dans le dédale de cette étude, nous paraissent si nécessaires à connaître, que nous ne craignons pas, comme on a dû le remarquer, de les rappeler de temps à autre. Pour nous, c’est sur eux que la pratique doit se baser, si elle veut sérieusement réussir, et l’on verra clairement, par la suite, comment de ces deux divisions ressortent naturellement jes différents modes de multiplication à employer ‘pour chacune d'elles. Dans les Bambous à végétation automnale, les faisceaux de ramificalions portés par des tiges, et que nous avons qualifiés de touffes rhizomateuses aériennes, peuvent, d’après leur or- ganisation, servir à la reproduction de la plante; au con- traire, dans les Bambous à végétation vernale, les tiges ne portant que des ramifications non rhizomateuses, celles-ci ne peuvent s’employer pour la multiplication, mais on les rem- place par les tiges souterraines ou rhizomes, qui présentent parfois une végétation des plus vigoureuses, La nature, heureusement, a fourni ce moyen de multipli- cation à ces végétaux, dont la plupart des espèces fractifient à des époques indéterminées et seulement à de longs mtervalles. En outre, les espèces des deux groupes peuvent se repro- duire par la division de leur touffe. Nous allons étudier successivement ces divers modes de multiplication et les opérations qu’ils comportent. PREMIER GROUPE. BAMBOUS A VÉGÉTATION AUTOMNALE, A TOUFFE CESPITEUSE, À RAMIFICATIONS RHIZOMATEUSES DISPOSÉES EN FAISCEAU. (Bambusa macroculmis, vulgaris, vulgaris vittata, Hookeri, spinosa, stricta, stricta (seu striata) argentea, gracilis, scriptoria.) Ainsi que nous l’avons déjà dit, ces Bambous ne croissant que dans des contrées chaudes, ne peuvent être cultivés, en MULTIPLICATION. 107 Europe et en Algérie, que dans les parties où la chaleur est la plus élevée, La multiplication de ces espèces peut se faire : 4° Par semis ; ? Par division des touffes; 3 Par éclats de souche; % Par bouturage de tronçons de tige; D° Par couchage de tiges. 1° Multiplication par semis. (Bambous du premier groupe.) Le semis est certainement le mode de reproduction le plus naturel, mais c’est aussi le plus lent, et, du reste, comme nous l’avons remarqué, il ne peut être employé qu’accidentel- lement, surtout dans nos cultures, où la frucüification a lieu si rarement qu'on pourrait presque n’en pas tenir compte. En France, il n’y a guère que l’Arundinaria falcata qui ait fruc- tifié, sur les côtes de Bretagne. En Algérie, nous avons eu des graines sur cette dernière espèce et sur les Bambusa macro- culmis, spinosa, stricta et Ph. flezuosa, mais on ne saurait prévoir quand ces faits anormaux se représenteront. Il n’est cependant pas tout à fait inutile de dire quelques mois sur ce sujet; on peut, en certaines circonstances, avoir des graines à sa disposition, soit qu’elles arrivent de leur sta- tion naturelle, soit qu’on ait pu en récolter dans nos cultures. La première question se pose naturellement : à quelle épo- que doit être fait le semis? Certainement, s’il fallait s’en rap- porter à la marche naturelle de la végétation des Bambous, ce seraitaux mois de mars et d'avril que cette opération aurait le plus de chances de succès, puisqu'elle correspondrait à l’épo- que où cette végétation commence, et peut-être sera-ce le mo- ment qui devra être choisi plus tard par les semeurs; mais comme nous n'avons jusqu'à présent reçu que très-rarement des graines et que nous ne savons pas encore positivement combien de temps elles conservent leur durée germinative, 108 | LES BAMBOUS. il sera préférable, jusqu’à nouvel ordre, de les confier à la terre dès leur réception ou dès leur récolte. Lorsqu'il nous sera donné d’en posséder un assez grand nombre pour que quelques-unes puissent être sacrifiées, nous pourrons, se- mant à différentes époques, arriver à préciser la meilleure. En pays tempéré, le moyen que nous avons toujours em- ployé au Hamma d'Alger a été de pratiquer le semis dans des pots de 10 à 12 centimètres de diamètre ou dans des terrines de 20 à 40 centimètres; cela dépend de la quantité de graines que l’on a à sa disposition. Terrines ou pots doivent être drai- nés d'avance avec des tessons de pots cassés ou avec du gros gravier, 1ls sont ensuite remplis d’une terre légère, préféra- blement siliceuse, dont la couche supérieure sera de 3 centi- mètres environ en contre-bas de leur bord. On appuie légè- rement dessus pour lunir. On répand alors les graines do manière qu’elles ne soient pas trop rapprochées les unes des autres, que le semis ne soit pas trop dru, comme on dit en horticulture, afin que, après la germination, les jeunes plantes puissent se développer avec plus de force et, par conséquent, se micux constituer. Les graines sont recouvertes ensuite d’une épaisseur de 1 centimètre de la même terre, puis on bassine légèrement, mais de manière à humidifier la terre dans toute son épaisseur, avec un arrosoir à pomme percée de nombreux trous très-fins. | Au jardin du Hamma, lorsque les semis sont terminés, les terrines ou les pots sont placés soit dans une serre, sur des tablettes et près des vitres, soit dans les bâches à semis ou châssis, préférablement dans les bâches; ce n’est pas pour les préserver du froid, mais pour éviter le desséchement de la surface de la terre. Les soins à donner ensuite consistent à entretenir les arro- sages, qui seront plus ou moins fréquents selon l'intensité de la chaleur et de la sécheresse atmosphérique; dans certaines circonstances, on sera obligé de les répéter plusieurs fois par jour; ils deviendront plus copieux au fur et à mesure que les plantes prendront de la force. Sous les bâches à semis, on donnera d’abord peu d'air; MULTIPLICATION 10 puis, si le semis a été fait au printemps, on augmentera le vo- lume, dès que les plantes auront quelques centimètres de hau- teur, en soulevant davantage les châssis. Plus tard on pourra les sortir des bâches, les exposer à l'air libre, dans un endroit abrité du soleil, sous des claies, par exemple. Il en sera de même pour les vases qui auraient été placés dans la serre. Une année après le semis, et au moment où une nouvelle végétation va se produire, on devra procéder au séparage des jeunes plants. Cette opération consistera à les mettre isolé- ment dans des pots de 7 à 9 centimètres, ou bien à les repi- quer en pleine terre. Dans le premier cas, immédiatement après le séparage, les pots sont placés sous châssis; on om- brage pendant quelque temps pour faciliter la reprise; après quoi, on expose les plantes à l’air, pour pouvoir les livrer à la pleine terre l’année suivante. Dans le second cas, repiquage en pleine terre, on dispose le terrain préalablement, selon les usages locaux. En Algérie et dans le midi de la France, comme les arrosages se font à l’eau courante, les planches sont dispo- sées en billons et en rigoles, et le repiquage a lieu sur la pente, de chaque côté des billons et vers leur base, de manière que l’eau courante ne vienne pas détruire les jeunes plants. Ceux-ci sont repiqués à une distance de 30 à 40 centimètres. Durant toute la période estivale, un arrosage sera néces- saire une fois par semaine; puis, de temps à autre, on donnera un binage, afin de détruire les herbes inutiles et de maintenir la terre meuble à sa surface. En pays froid, dans la région du Nord, en prenant Paris comme exemple, la meilleure époque pour faire des semis de Bambous est, comme partout ailleurs, le printemps; mais, pour hâter la germination des graines, on devra placer les pots sur une couche tiède recouverte de bâches et de châssis, comme les couches à melons. Les soins à prendre sont sim- ples : donner un peu d'air dans la journée ; ombrager quelque peu les châssis en temps opportun; entretenir une humidité modérée dans les pots ; augmenter la dose d’air à mesure que les jeunes plantes prennent de la force; les exposer à l'air libre et en plein soleil à partir du mois de juin. L'année suivante, 110 LES BAMBOUS. au printemps, on pourra procéder au séparage du plant, comme il sera petit, on le repiquera dans de petits pots de 6 à 8 centimètres ; on arrosera immédiatement et on les placera sous châssis, sur couche tiède, pour faciliter la reprise. Pendant quelques jours, on ne donnera que peu d’air. On abritera con- tre les rayons du soleilet tous les jours on visitera les plantes, pour qu’elles ne pâtissent pas faute d'arrosage. On aug- mentera la dose d’air au fur et à mesure des besoins, et, lorsqu'on le jugera convenable, on exposera les plantes en plein air et au soleil. On pourrait alors les réunir dans une planche et enterrer les pots à 2 centimètres au-dessous de la surface du sol, puis couvrir la terre d’un léger paillis de feuilles, ou, à défaut de celui-ci, d’un fumier court. Pendant l'été, des arrosages seront donnés en temps opportun. Au mois d'octobre, si les jeunes Bambous appartiennent aux régions chaudes, ils seront placés dans une serre chaude; si, au contraire, ce sont des espèces croissant dans des régions froides ou tempérées, on les placera, soit dans une serre froide, soit sous des châssis froids, qu’on couvrira pendant les grandes gelées; nos jeunes Bambous, encore trop faibles, ne sauraient supporter celles-ci impunément; ce n’est que l’année suivante qu'ils seront mis en pleine terre. Quant aux Bambous des régions chaudes et qui ne suppor- teraient pas nos hivers, leur place sera, tout ce temps-là, dans la serre chaude; mais, à partir du mois de juin jusqu’à la fin de septembre, on pourra les exposer à lair libre et au soleil. Il pourrait arriver qu’on fût obligé de faire les semis à une autre époque que celle que nous avons indiquée comme étant la meillèure, le printemps. Si c'était en été, on sèmerait sous châssis, en suivant les instructions que nous avons don- nées ; si c'était en automne, les terrines ou les pots seraient placés sur les tablettes d’une serre chaude, et l’on devrait les mouiller de temps à autre pour entretenir constamment l’hu- midité nécessaire. Dans ces cas de semis tardifs, la germina- tion pourrait fort bien ne pas se produire immédiatement; 1l % ne faudrait pas, pour cela, croire à un insuccès, et, déses- MULTIPLICATION. | Lil péré, rejeter la terre des pots, comme nous l'avons vu faire assez souvent ; il faudrait, au contraire, attendre patiemment jusqu’au printemps suivant, en entretenant toujours la terre humide. Si, au printemps, la germination n'avait pas lieu, on pourrait commencer à douter de la réussite ; il serait bon ce- pendant d’essayer encore de placer les pots sur une couche chaude sous châssis, en leur donnant les soins indiqués plus haut. Les indications générales contenues dans ce chapitre s’ap- pliquent également à la multiplication par semis du groupe à végétation vernale. > Multiplication par division des touffes. (Bambous du premier groupe.) Pour bien comprendre cette opération, il est nécessaire de séparer ce groupe en deux parties, dont l’une comprendra les espèces à grosses et grandes tiges, comme les Bambusa ma- croculmis, Hookeri, vulgaris, etc., et l’autre les espèces à tiges de moyenne ou de petite dimension, comme les Bambusa stricta, scriptoria, etc.; toutes appartiennent, du reste, au groupe à végétation automnale, qui nous occupe en ce mo- ment. Selon la nature et les caractères de ces Bambusacées, leur touffe est composée d’un nombre plus ou moins grand de tiges ; leur division est facile ; toutefois, dans les espèces à grosses et grandes tiges, il faut opérer sur des sujets de deux à quatre ans ; sur les autres, à tiges moyennes ou petites, la division peut se faire sur des touffes de cinq à dix ans. Chaque touffe peut, suivant son volume, fournir un nombre plus ou moins grand de pieds, mais il est important d'enlever chaque morceau de touffe avec deux tiges au moins, et ces tiges doivent être munies de leur partie basilaire ou rhizome, accompagnée de racines. Pour bien arriver à cela, on fait, avant d'opérer, un trou assez profond au pied de la touffe et d’un seul côté, puis, avec une bèche bien tranchante, on coupe la 112 LES BAMBOUS. toufle en deux parties; on enlève celle du côté de laquelle a élé fait le trou; elle doit avoir un certain nombre de racines, ce qui aide à retenir de la terre autour d'elle, de manière à former une motte. Cette première motte peut elle-même se diviser en plusieurs autres, mais il faut avoir soin de laisser à chacune d’elles au moins deux tiges pour les grosses et orandes espèces, et cinq ou six, et même davantage, pour les petites. Ces tiges, ainsi divisées, doivent être rigoureusement coupées à une hauteur de 30 à 50 centimètres à partir de leur base, dans le but de faciliter leur reprise. | Au fur et à mesure qu'a lieu la division des mottes, on doit les abriter contre les rayons du soleil, qui ne tarderaient pas à les altérer; puis, aussitôt que possible, on les met en pépi- nière dansle terrain qu’on a dû préalablement préparer à cet effet. La distance dans les lignes sera de 60 centimètres pour les grosses espèces, et les lignes seront à 1 mètre les unes des autres; pour les petites espèces, la distance pourra être moin- dre, soit entre les pieds, soit entre les lignes. Chaque trou de plantation est comblé immédiatement, puis on arrose. Plus tard, les soins consisteront en binages et arrosages donnés selon les besoins. Quant aux plantes mères restées en place, il faut combler les trous, puis, afin que la terre se raffermisse autour d’elles, et afin aussi de réparer leurs forces à la suite de l'opération qu’elles ont subie, on les soumet à l'irrigation; on les laisse ensuite en repos jusqu’à l’année suivante. Au bout d’un an, les suites de ces mulilations sont depuis longtemps effacées, les plantes ont repris leur vigueur ; la moitié de la touffe qui à été laissée intacte peut fournir les éléments d’une multiplica- tion nouvelle; on lui fera donc subir à son tour les mêmes opérations. Depuis l’année précédente, de nouveaux bour- geons ont pris naissance et quelques tiges sont venues rem- placer celles qui avaient été enlevées; elles auront deux ans l'année suivante; 1l sera possible de les diviser encore ; un an après, il en sera de même pour l’autre moitié, et l’on conti- nuera jusqu'à ce que les touffes mères soient épuisées ou qu’elles ne donnent que de trop grosses tiges. MULTIPLICATION. 113 3 Mulliplicalion par éclats de souche. (Bambou du premier groupe.) Ce mode de multiplication ne peut s'appliquer qu'à de grosses espèces et sur des touffes anciennes, dont les tiges ont été coupées à quelques centimètres du sol. Par éclats de sou- che on entend la séparation de tout le système souterrain, dont la compacité, l’enchevêtrement des rhizomes et des tiges et leur grosseur ne permeltent d'enlever que des fragments; ce sont donc, dans le plus grand nombre des cas, des portions de tige adhérentes au rhizome et qui en font partie. Pour opérer convenablement celte séparation, il faut fendre en deux ces parties de souche dans toute leur longueur, avec la précaution de conserver intacts les bourgeons que portent de chaque côté les parties souterraines garnies de racines; or, elles sont extrêmement dures, et ce n’est qu’à l’aide d’une hache ou d’une serpe qu’on peut venir à bout du tra- vail; il faut donc prendre quelques soins pour le mener à bien. Chaque éclat peut avoir de 20 à 30 centimètres de longueur. Aussitôt préparés, tous sont mis en pépinière, convenable- ment espacés; ils sont posés dans le sol, soit verticalement, soit obliquant légèrement du côté fendu; on ne laisse que très-peu sortir de terre leur extrémité, ou mème on la re- couvre entièrement. On irrigue ensuite, puis on entretient le sol par des binages pendant la période végétative; on arrose selon les besoins. Chaque éclat, ainsi traité, peul produire, dans le courant d’une année, plusieurs bourgeons qui forment autant de tiges. Les espèces que nous multiplions ainsi au Jardin du Hamma sont les Bambusa macroculmis, vulgaris, Hookeri et spinosa. Pour le B. vulgaris, on ne doit opérer que sur des rhizomes âgés de deux ans ou davantage, parce que alors ils sont très-garnis de racines; les parties plus jeunes n’en ayant généralement pas qui soient suffisamment développées, on mutilerait la plante sans aucun résultat. 114 LES BAMBOUS. % Multiplication par bouturage. (Bambous du premier groupe.) Le bouturage se fait au moyen de tronçons de tiges portant des ramifications disposées en faisceau. Cest le mode de mul- tiplication le plus rapide, une touffe, composée ordinairement de plusieurs tiges, pouvant fournir un nombre considérable de boutures, surtout si l’on opère sur les grandes espèces, et particulièrement sur le grand Bambusa macroculmis. Ce moyen a élé longtemps considéré comme très-incerlain : de là cette lente diffusion de ces Bambous, notamment du macrocul- mis, sur le sol algérien et dans les contrées analogues. Ce n’est que par des expériences réitérées que nous sommes arri- vés, depuis quelques années, à bouturer tout ce groupe avec une très-grande facilité. Autrefois, parmi les nombreux procédés en usage, on con- seillait : de couper de longues portions de la tige et de les en- terrer, de couper à trois nœuds, de couper à un seul nœud, ou bien de coucher les tiges dans toute leur longueur, de les inciser pour faciliter l'émission des racines et de les enterrer complétement. Quand ces diverses opérations étaient faites à l'automne, les tiges pourrissaient; au printemps, elles se con- servaient plus longtemps, mais toujours sans végétation. Le bouturage à deux nœuds, comprenant un mérithalle entier terminé par un nœud à chaque extrémité, ou bien celui à un seul nœud central accompagné de chaque côté d’une partie évale de tige, était préconisé comme donnant quelquefois des résultats. Les boutures étaient alors enfoncées verticalement dans le sol. Celles dont on n’avait pu conserver les cloisons des nœuds et qui offraient, par conséquent, une ouverture béante à chaque extrémité, étaient remplies de terre, afin d’en empê- cher la dessiccation. C’est en opérant d’après ces différents moyens, et surtout en étudiant attentivement la végétation des Bambous, que nous avons trouvé le véritable mode et l’époque du bouturage. En dehors des pratiques défectueuses d'opération, le choix de la Fic, 6. — BAMBUSA MACROCULMIS Bouture oblique. — Mise en place. a £, 1e"5, is NE HE MULTIPLICATION. 117 partie destinée à l’enracinement était déjà par lui-même une cause d’insuccès, car on opérait avec des tiges de l’année, non encore formées, à bourgeons peu ou point développés. Étant démontré que les tiges des Bambous de ce groupe ne sont ra- mifiées, particulièrement chez les grosses espèces, qu’à partir de leur deuxième année, moment où elles ont acquis leur ca- raclière ligneux, il était logique de tenter le bouturage avec des tiges adultes, et c’est ce que nous avons fait avec pleine réus- site. D'où nous concluons que ce bouturage doit se pratiquer comme nous l’allons dire, pour la plupart des espèces de Bam- bous du groupe cespileux, à végétation automnale ; mais au- paravant, nous nous appesentirons tout particulièrement, quoi- que d’une façon sommaire, sur le caractère de leurs ramifica- tions, déjà décrit par nous; en culture, il ne faut pas craindre de se répéter de temps à autre. La tige des Bambous cespiteux, à végétation automnale, porte, comme nous le savons déjà, des ramifications nom- breuses, disposées en faisceau à chaque nœud. Lorsque ces ramifications sont sur le point de se former sur la tige, elles apparaissent sous forme de bourgeons ayant la même organi- sation que ceux que l’on remarque sur la souche, avec cette différence qu’ils sont beaucoup plus petits. Il en naît plusieurs ensemble sur le même point et sur le même nœud; celui du centre est généralement plus gros que les autres, Is ont, comme mode de développement, la même organisation que les bourgeons souterrains ; c’est dire qu’ils sont d’abord, comme eux, enveloppés de gaines spathiformes et qu'ils crois- sent avec une très-grande rapidité, puisque, à la fin de l’année, leur longueur dépasse souvent plus de 1 mètre. L’année suivante, à la base de ces ramifications, il s’en dé- veloppe d’autres, en suivant la même marche végétative qu’une touffe terrestre, et il en est ainsi chaque année, de manière que ces faisceaux de ramifications forment sur les tiges, et à chaque nœud, autant de souches, tant aériennes que rhizoma- teuses, car si l’on écarte les gaines de la base, on remarque les racines toutes formées et qui ne demandent qu’à être sou- mises au contact de la terre pour se développer. Ces touffes 118 LES BAMBOUS. aériennes deviennent quelquefois énormes; il n’est pas rare d’en voir qui sont composées de plus de vingt tiges. Les rami- fications elles-mêmes se ramifient de la même manière et elles présentent les mêmes caractères, mais les faisceaux sont moins nombreux en rameaux. Partant de ces caractères comme base d'opération pour les espèces à grosses et à grandes tiges, telles que les Bam- busa macroculmis, Hookeri, vulgaris, ete., il faut choisir, pour le bouturage, des chaumes d’une grosseur moyenne et bien ramifiés. Des ramifications, ramiliées elles-mêmes et de la grosseur du doigt, pourront également servir. On les tron- conne par nœuds, c’est à-dire que l’on coupe le mérithalle par le milieu, en sorte qu’il en reste une partie au-dessus de chaque nœud et une partie au-dessous (fig. 6); on laisse à ce nœud toutes ses ramifications, que l’on rabat seulement à la moitié de leur longueur. Dès que les boutures sont préparées ainsi, on doit immé- diatement les planter en pépinière. Cette opération a lieu sur une planche large de 1 mètre environ, qu’on dispose en ri- soles; mais il faut avant tout que le terrain soit bien défoncé. La terre doit être meuble et pas trop légère. Les boutures, espacées entre elles et en tous sens de 25 centimètres envi- ron, sont posées horizontalement ou obliquement dans le sol; cette dernière position est préférable, parce que les ramifi- cations se trouvent alors situées perpendiculairement. On les recouvre de quelques centimètres de terre; les rami- fications seules émergent de toute la partie conservée (fig. 6). Arrosage immédiat après la plantation, surveillance dans les premiers bimages après chaque irrigation, afin d’en- tretenir la terre perméable et d’empècher la croissance des plantes inutiles. Ce n’est pas sans raison qu'on a laissé une partie du méri- (halle de chaque côté du nœud ramifié : on avait pour but d'entretenir la vie dans ces ramificalions, en attendant qu’il en naquit des racines. Celles-ci existent déjà à l’état rudimen- taire à la base des ramifications, dès que ces dernières sont en contact avec le sol, elles entrent elles-mêmes en végétation et Fic. 7. — BAMBUSA MACROCULMIS Bouture couchée obliquement, après sa deuxième année de végétation. MULTIPLICATION. 121 ne tardent pas à se développer. En même temps qu’elles, ap- paraissent de jeunes bourgeons, puis, dans la partie tout à fait souterraine, il se forme de nouveaux turions, qui donnent dans l’année même des tiges de 1 mètre à 1",50. La touffe est ainsi constituée. La figure 7 en représente une de B. macro- culnis après une année de végétation; son tronçon de tige s’y trouve encore attaché; nous avons démontré à la Société d’Ac- climatation, par une série d'échantillons de diverses espèces, ce fait habituel de persistance. C’est ainsi que cette touffe, composée d’un faisceau de tiges, toutes enracinées à leur base, pourra se séparer en un plus ou moins grand nombre de pieds. Ce que nous venons de dire pour le bouturage des grosses espèces de Bambous peut parfaitement s'appliquer aux moyen- nes et aux petites espèces du même groupe, en prenant toutes les tiges, à l’exception toutefois de celles qui seraient trop faibles. Les faisceaux de ramificalions qu’on remarque sur les tiges trop grosses pour être tronçonnées peuvent encore servir au bouturage; c’est le bouturage simple des ramifications. Voici comment on procède : Chaque faisceau est enlevé au-dessous de son point d'adhérence de manière à être accompagné d’une plaque, comme le serait une bouture à talon; ensuite, chaque ramificalion est enlevée séparément dès sa base et coupée à une longueur de 25 centimètres environ, comme le repré- sente la figure. Les boutures ainsi préparées sont généralement garnies à leur base de gaines spathiformes (fig. 8), et sous ces gaines il existe des bourgeons à l’état presque rudimentaire el des racines dans les mêmes conditions. On les met alors en pépinière d’après les procédés indiqués pour le bouturage par tronçon ramifié, mais avec cette différence que ces boutures simples sont placées verticalement dans le sol, enfoncées de 10 à 15 centimètres et un peu plus rapprochées entre elles; quant aux soins à donner successivement au sol, ce sont les mêmes. Îlest bien entendu que, pour faire ce genre de bou- tures avec toute chance de réussite, il faut opérer avec des ramifications traitées exactement comme nous venons de l’in- 122; LES BAMBOUS. diquer; en employant de simples ramules, comme on le fait assez souvent, on ne peut constater que des insuccès. Dans le courant de la saison, des bourgeons naissent à la base de cette bouture simple, des racines émergent de tous points, et la touffe commence à se constituer (fig. 9). Le développement des racines dans les boutures de Bam- bous ne se fait pas comme dans les autres végétaux. Dans les végétaux dicotylédonés, il a lieu le plus souvent à la suite d’un bourrelet qui se forme à la base de la bouture, entre l’aubier et l'écorce; dans certaines Monocotylédonées, les Dracæna. par exemple, les racines sortent du centre de petits mamelons disséminés autour de la partie enterrée de la tige. Chez les Bambous, ce sont des racines adventives à l’état rudimentaire qui se développent lorsque les rameaux qui les portent sont mis en contact avec le sol; ce n’est pas le chaume qui s’enra- cine, mais bien ses ramifications rhizomateuses. D° Mulliplication par couchage des tiges. (Bambous du premier groupe.) Le couchage est encore un mode de reproduction facile, mais il ne peut se faire qu'avec des tiges de jeunes touffes, parce que, plus flexibles, elles se prêtent à l’inclinaison. L’o- pération a lieu du 1° au 15 avril. On prend les üges les plus nouvelles, pas avant cependant qu’elles soient ramifiées, mais elles le sont de bonne heure sur les jeunes touffes; on les in- cise au-dessous des nœuds, puis on les incline, sans les sépa- rer du pied mère ni même les fendiller, jusque dans le sol, dans une petite rigole profonde d’environ 10 centimètres; on les y maintient à l’aide de crochets, puis on les recouvre de terre, en laissant les ramifications seules à l’air libre. Une fois l’enracinement obtenu, chaque sujet ou touffe est divisé et transplanté. Sous le climat de la France, et particulièrement dans le Nord, les Bambous à végétation automnale sont peu cultivés; on ne les rencontre guère que comme sujets scientifiques ou de curiosité, dans les jardins botaniques ou chez quelques H1G. 8. — BAMBUSA MACROCULMIS Fi6. 9.— BAMBUSA MACROCULMIS Bouturce verticale (mise en place), Bouture verticale (développement). de ones RU #4 kr PAR LL | Mai A ER [fa # ü MULTIPLICATION. 125 amateurs, mais toujours sous l’abri d’une serre chaude, qu’ils ornent de leur gracieux feuillage. Le mode de multiplication se borne alors à la division des touffes, mais encore faut-il avoir la précaution de placer les plantes dans une serre très- chaude et d’en enlever avec toute leur motte les parties sépa- rées; quant au bouturage, nous ne l’avons jamais encore pra- tiqué pour ces plantes de serre, bien que nous en possédions des pieds assez forts; dans tous les cas, si l’on voulait en ten- ter l’essai, il faudrait préparer les boutures comme nous l’a- vons indiqué plus haut et les placer sous cloche dans une serre à multiplication, où la température soit maintenue assez élevée. C’est à l'ignorance de leurs caractères constitutifs qu’on doit attribuer toutes les difficultés et tous les échecs qui ont retardé, en Algérie, la large diffusion, par le bouturage, des orosses espèces de Bambous. En effet, on voulait forcer un tronçon de tige-mère, jeune ou vieille, mais ordinairement jeune, privé de ramifications, à s’enraciner par n'importe quel moyen. C’était bien peu connaitre la végétation des Mo- nocotylédonées, et surtout celle des Graminées, que d’attendre l'apparition de racines. Où pouvaient-elles se développer? Ce ne pouvait être sur la section des parties tronçonnées d’un chaume fistuleux, jamais pareil fait ne se produit; ni encore moins à la base d’un œil ou rudimentaire, ou invisible, ou souvent absent. Mais dès que, par l'étude des ramifications sur les Bambous adultes, nous leur avons reconnu un caractère rhizomateux, le doute n'existait. plus sur la partie du végétal à employer comme bouture. Dès lors ces ramifications, ou isolées ou ac- compagnées d’une partie du mérithalle, mises en terre à une époque déterminée, nous ont assuré une multiplication logi- que, prompte et facile. On avait été sans doute induit en erreur au sujet de ce bou- turage par les procédés employés pour une plante de la même famille, la Canne à sucre, Graminée dont la rapide propagation s'obtient par la fragmentation de la tige en tronçons de plu- sieurs nœuds. Cependant aucune analogie ne peut exister entre les méthodes de multiplication usitées pour ces deux pré- 126 LES BAMBOUS. cieuses plantes, si l'on songe que, pour la Canne à sucre, l’on est en présence d’une exception peut-être unique par rapport à la constitution organique des autres Graminées, car elle est à tiges pleines, tandis que les Bambous sont à liges fistuleuses. La tige de la canne à sucre est ordinairement annuelle, ou pour mieux dire elle est coupée annuellement, bien qu’elle puisse vivre assez longtemps; ses yeux sont toujours bien for- més et saillants, même pendant sa croissance. Bouturée, ses yeux se développent rapidement, et à la base de ces nouveaux bourgeons apparaissent en même temps des racines; mais celte végétation rapide est due à la présence des matériaux vitaux contenus en abondance dans les riches cellules de la tige pleine de la plante, surabondance de vie qu’on ne trouve pas concentrée dans un fragment de Bambou, qui n'offre qu’une tige creuse, et qui, sans ramificalions, n'a aucun ot- gane à l’état latent capable de développer des racines. DEUXIÈME GROUPE. BAMBOUS A VÉGÉTATION VERNALE, À RHIZOME TRAÇANT, RAREMENT CESPITEUX, A RAMIFICATIONS GÉMINÉES ET QUELQUEFOIS EN FAISCEAU. (Bambusa où Phyllostachys mitis. Quilioi, nigra, viridi-glaucescens, aurea, flexuosa, violascens, Arundinaria Simoni, Japonica, falcata, Fortunei.) En Algérie, la multiplication des Bambous à végétation ver- nale peut se faire avec une très-grande facilité et de plusieurs manières : 4° Par semis; 2 Par division des touffes ; 9° Par tronçons de la partie basilaire du chaume, avec ou sans rhizome ; 4° Par sectionnement des rhizomes. 1° Multiplication par semis. (Bambous du deuxième groupe.) Tout ce que nous avons dit de la multiplication par le semis des Bambous à végétation automnale s'applique par- MULTIPLICATION 127 faitement au groupe à végétation vernale : même manière d'opérer, même préparation du terrain, mêmes soins à don- ner aux toutes jeunes plantes; repiquages, arrosements, etc. Nous ne voyons guère à recommander que moins de chaleur pour l'éducation en France et, pour les parties méridionales, le semis en pleine terre dans des terrains légers et propres. 2 Mulliplication par division des touffes. (Bambous du deuxième groupe.) Toutes les espèces de Bambusacées qui composent le genre Phyilostachys ont, comme nous l’avons déjà dit, des rhizomes souterrains qui peuvent quelquefois dépasser, en une année, plusieurs mêtres de longueur; il en est de même de quelques espèces d'Arundinaria.Toutes ces plantes, en raison de leurs caractères et de l’altitude où elles croissent naturellement, peuvent se multiplier par la division de leurs touffes, dues à une réunion de rhizomes, pendant tout l'hiver et même jusque dans la fin du mois de mars; mais, en raison de leur végéta- tion précoce, la meilleure époque est la fin de décembre et le courant de janvier. En mars, les rhizomes ont déjà émis des racines et des bourgeons qui souffriraient d’une déplantation; c’est presque se créer une année de retard que d'opérer dans ce mois-là. Ce que nous venons de dire se rattache au Jardin du Hamma d'Alger, mais il est évident que, dans des régions plus tempérées, on procédera plus tardivement; c’est ainsi que, à Paris, on devra attendre la deuxième quinzaine d'avril. La multiplication par division des touffes des Bambous à végétation vernale est facile à exécuter; 1l suffit, comme nous l'avons déjà indiqué pour ceux à végétation automnale, de pratiquer un trou sur un côté et de morceler les petites touffes composées de trois à quatre tiges réunies entre elles par leurs rhizomes. Chaque tige est ensuite rabattue à 25 ou 30 centi- mètres au-dessus du sol; c’est une opération indispensable que de ies rabattre ainsi, sans cela elles se rident dans toute leur longueur et compromeitent la reprise. 128 LES BAMBOUS. On remarque quelquefois, sur certains rhizomes, qu'il s’est développé des tiges, souvent assez rapprochées et qui forment touffe ; on peut facilement les enlever pour la multiplication, mais avec le soin de les rabattre comme nous venons de l’in- diquer. Toutes ces touffes divisées, et dont quelques-unes forment une petite motte, sont ensuite plantées en pépinière, à 40 cen- timètres l’une de l’autre en tous sens, dans une planche par- tagée en rigoles. Irrigations immédiatement après la planta- tion ; soins successifs d'arrosage et de binage. 9 Multiplication par tronçons de la partie basilaire du chaume avec ou sans rhizome. (Bambons du deuxième groupe.) Cette méthode de multiplication est la plus usitée pour la pleine terre : elle co nsiste à extraire du sol le chaume avec le rhizome auquel il est attaché. On laisse à ce rhizome envi- ron 30 centimètres de longueur, puis le chaume est coupé à la même hauteur environ, ainsi que l'explique la figure 10. Si ce chaume n’était pas coupé au point C, il ne tarderait pas à se flétrir et à compromettre l'existence du pied entier, à moins qu'il ne reçût des soins excéptionnels, qu’on ne peul donner en grande culture et à l'air libre. Ce procédé ménage tous les yeux, jeunes bourgeons, jeunes rhizomes et les racines qui se trouveraient à la base du chaume. Soit en pleine terre, soit en pot, on enterre jJusqu’au- dessus des verticilles de racines de la base. La figure 10 en indique la position dans le sol. Dans des espèces rares ou dont on possède peu de sujets, s’il convient de les propager plus rapidement en utilisant toutes leurs parties, on peut multiplier séparément la partie basilaire du chaume sans que le rhizome y soit adhérent. On sait que chaque chaume de Bambou est composé à sa base, dans sa partie souterraine, de nœuds quelquefois très- rapprochés; chaque nœud porte un ou plusieurs verticilles de racinés et un bourgeon. Cette partie de la tige peut donc — S — À * INR NN SJXK NS \ L Z Te: PES Le eu, ESF SKS NAS, dt) LT QU; CT LE es TA | ) f / | CRT - ALES ER = , 7 : 7 0 AN Z fn 2 7) «| 4 / (4 F4 Cu A), NN NN \ | ESCENS x À Multiplication par la base du chaume ( Fic. 10-11. — PHYLLOSTACHYS_VIRIDI-GLAU 10. Multiplication par chaume avec rhizome. — 11. sans rhizome. al MULTIPLICATION. 131 servir à multiplier l'espèce. On procède de cette manière : Le chaume est déchaussé aussi profondément que possible; puis, à l’aide d’une forte serpette, ou mieux, d’un fort séca- teur, on le coupe à son point d'attache sur le rhizome. Le chaume est ensuite rabattu à 10-12 centimètres de sa base. Ces tronçons sont ensuite réunis dans une planche partagée en rigoles; on les met en terre, de façon que leur extrémité émerge seulement de toute la partie non pourvue de racines, avec une distance entre eux de 20 à 25 centimètres en tous sens. rrigation et soins ordinaires. A la fin de l’année le tron- çon sera enraciné et aura le caractère que représente la figure 11. Cette méthode doit être employée principalement dans la culture en pots. % Multiplication par sectionnement des rhizomes (Bambous du deuxième groupe.) En avril pour les pays froids; en hiver pour les pays chauds. Les rhizomes ou tiges souterraines rayonnent, nous le sa- vons, tout autour des touffes, se dirigeant en tous sens, et quelquefois à une assez grande profondeur dans le sol, comme le démontre très-bien l'Arundinaria Simoni. Le moment étant arrivé de procéder à la multiplication au moyen de ces organes souterrains, on les extrait du sol et on les coupe par fragments de 15 à 20 centimètres de longueur, formant ordi- nairement trois à quatre nœuds (fig. 12. PA. viridi-glauces- cens). On les met ensuite en pépinière dans des planches dis- posées en rigoles profondes de 10 à 15 centimètres, en les v plaçant horizontalement à 25 centimètres environ les uns des autres; on les recouvre de 8 à 10 centimètres de terre. Irriga- tions et binages en temps opportun. À la fin de l'année ces troncons présentent l'aspect de la figure 13, c'est-à-dire qu'un ou plusieurs chaumes $e sont développés, du pied desquels se produiront des rhizomes et une nouvelle végétation aérienne. Une observation importante qu'il est bon de signaler, c’est que le rhizome ne peut pas être employé dans toute sa lon- 132 LES BAMBOUS. gueur pour la multiplication, parce que les parties infé- rieures, anciennement développées, n’ont plus de bourgeons ou yeux, ceux qui n’ont pas poussé s'étant détruits. Ce ne sont donc que les parties jeunes, celles dont la croissance a pu s’opérer pendant la dernière année, qui peuvent être utili- sées. Dans tous les cas, en sectionnant les rhizomes, il est très-facile de se rendre compte de leur état; toutes les parties non pourvues de bons yeux doivent être rejetées. Si la multiplication des espèces de ce groupe à végétation vernale, soit par petites touffes, soit par tronçons de la partie basilaire de la tige, soit par section de rhizomes, a été faite tardivement, c’est-à-dire après mars, l’arrosement sera con- Fi5. 12. — PHYLLOSTACHYS VIRIDI-GLAUCESCENS. Multiplication par rhizomes (préparation). stant pendant les chaleurs; si, au contraire, elle a lieu en au- tomne ou en hiver, 1l peut être négligé à été suivant, car les pieds seront suffisamment enracinés pour supporter la séche- resse. Cette sorte de multiplication du rhizome est tellement simple et surtout tellement rapide en Algérie et dans les’ pays tempérés, que la multiplication par bouturage de la tige n’y a pas de raison d’être. Il est heureux, du reste, qu’il en soit ainsi, car les boutures faites par tronçons de toute la partie MULTIPLICATION. 133 aérienne de la tige, même en conservant les ramifications, ne nous ont jamais, jusqu'à ce jour, montré un seul cas d’enra- cinement, bien qu’essayées à différentes époques. Il ne peut en être autrement, car, sur toutes les Bambusacées qui forment le groupe des Triglossées, on sait que les deux ramifications FiG. 13. — PHYLLOSTACHYS VIRIDI-GLAUCESCENS. Multiplication par rhizomes des espèces traçantes (résultat). que l’on remarque à chaque nœud sont dépourvues à leur base de tout bourgeon reproducteur; qu’une fois les ramifica- üons établies, ce qui a lieu pendant la croissance de la tige, il ne s’en produit plus d’autres, tandis que, au contraire, dans les autres Bambusacées, les ramifications augmentent chaque 134 LES BAMBOUS. année, parce qu’elles portent à leur base des bourgeons à la manière d’une touffe. Cela explique comment on peut multi- plier ces espèces par le bouturage avec une très-grande faci- lité, résultat impossible à obtenir avec les Triglossées. Nous poursuivons encore ces essais au Jardin du Hamma, mais c’est seulement comme curiosité physiologique. Mulliplicalion sous le climat de Paris pris comme lype. Si nous considérons la multiplication des Bambous à végé- tation vernale relativement au climat de Paris, nous devons remarquer que, ce groupe n'étant cultivé qu'au seul point de vue ornemental, leur multiplication ne se fait que sur une pe- tite échelle. L'époque la plus favorable pour cette région est le mois d'avril. Les deux modes les plus généralement employés sont : 1° la division par tronçons de la partie basilaire ou souterraine de chaque tige; 2° la division des rhizomes. Il est quelques modifications bonnes à effectuer dans les pro- cédés ; ainsi, au lieu de livrer immédiatement à la pleine terre les parties mutilées, comme nous l'avons indiqué pour les régions méridionales, on place, au contraire, chacun de ces fragments, et séparément, dans des pots-godets de 8 à 10 cen- timètres de diamètre; puis les pots sont réunis sur une plate- bande, dans laquelle ils sont enterrés, de manière que le bord se trouve à 2 ou 3 centimètres au-dessous de la surface du sol. On donne un léger arrosement et l’on attend que la végétation se manifeste, en prenant garde, toutefois, de ne pas négliger les soins que réclament ces multiplications, particulièrement au point de vue de l’humidité de la terre, qui doit être modé- rée, mais constante. Dans de telles conditions, l'émission des racines et des bourgeons se fait lentement, ce qui est favorable à l2 reprise des tronçons. I n’y a pas encore longtemps, lorsque la culture de ces sortes de Bambous a commencé à se répandre chez nous et qu'on a commencé également à les multiplier, dès que les MULTIPLICATION. 135 plantes étaient tronçonnées d’après les procédés que nous venons de décrire, les pots étaient placés sous châssis et sur une couche de fumier dont la chaleur, obtenue par la fermenta- lion, était ou douce ou tempérée. Cette chaleur provoquait immédiatement la végétation des bourgeons ; mais ceux-ci, lors- qu'ils avaientatteint une longueur de 8 à 10 centimètres, pour- rissaient souvent à leur base et étaient détruits; aussi perdait- on presque toujours la plus grande partie des jeunes plantes. La cause de ces insuccès, que nous avons cherché souvent à nous expliquer, nous parait être la suivante : la chaleur des châssis et des couches amenait la végétation des bourgeons avant l’émission des racines, et lorsque les jeunes pousses avaient épuisé tous les matériaux accumulés dans les cellules des rhizomes et des tronçons de tige, les aliments leur man- quaient; les racines, non encore organisées, ne pouvaient leur en amener ; elles mouraient. C’est donc une erreur très-grave que d'employer la chaleur arüficielle pour la multiplication de ces sortes de Bambous. À Paris, les horticulteurs font leurs multiplications en pots, et ils ont raison, puisque leur but est de pouvoir livrer des sujets en meilleur état et d'assurer ainsi leur reprise lorsqu'ils sont livrés ensuite à la pleine terre. Dans les régions tempé- rées, cette précaution est inutile. Dans la tribu des Triglossées, 1l existe, en dehors des es- pêces traçantes, quelques espèces, les Arundinaria falcata par exemple, dont les rhizomes sont courts et peu traçants. Celles qui offrent ce caractère peuvent se multiplier par la division des touffes, en les sectionnant de manière qu'il y ait plusieurs tiges ensemble, ou bien en tronçonnant la partie souterraine de chaque tige. Quant aux précautions à prendre pour leur mise en pépinière, soit dans les régions tempérées, soit à Paris, et quant aux soins à leur donner, on suivra les indications précédentes. VIT CULTURE La culture des Bambous n’est ordinairement pas difficile ; on peut dire, au contraire, qu’on arrive très-facilement à la bien réussir; seulement, avant toute chose, il est indispen- sable, pour les obtenir dans tout leur développement, de pla- cer chacun d'eux dans les conditions qui lui conviennent. Nous les avons déterminées d’une manière générale par la for- mation de deux groupes: l’un, tout spécial aux régions méri- dionales de l’Europe et à l'Algérie; l’autre, prospérant dans les mêmes régions, mais pouvant, en outre, supporter le cli- mat des parties tempérées et même froides de l'Europe, cer- taines espèces possédant un degré de rusticité qui leur per- mettrait de s’avancer plus au Nord. Nous allons étudier cette culture; nous l’étudierons dans deux conditions : d’abord en pleine terre, pour la grande uti- lité générale; ensuite en pots, pour l’ornementation des jar- dins, des serres ou des appartements. Culture en pleine terre. 1° Bambous à végétation automnale. Les espèces de notre premier groupe ne croissant que dans les régions chaudes, c’est dans des conditions analogues que la culture en sera possible. Ainsi, toutes les parties chaudes du littoral algérien et les plaines au niveau de la mer, les par- ties chaudes du midi de l’Europe, les parties les plus abritées, celles où la température est le plus élevée et ne s’abaisse jamais en hiver au-dessous de zéro, sont très-favorables à la bonne et complète végétation des Bambous de ce groupe, qui com- CULTURE. 137 prend les grosses espèces utiles : Bambusa macroculmis, B. Hookeri, B. vulgaris. Au point de vue industriel, songer à les cultiver dans d’au- tres conditions serait imprudent, car, en raison de l’époque de leur végétation, qui ne commence généralement que vers le mois d'août, elles ont besoin, durant deux mois environ, d’une forte somme de chaleur, pour que s’accomplisse rapide- ment la croissance de leurs tiges. Il faat à ces grands Bambous un terrain profond, substan- tiel, perméable, meuble et frais ou susceptible d'arrosement. Une fois choisi l'emplacement, le terrain sera défoncé le plus profondément possible, car toute bonne culture dépend du défoncement préalable du sol. En Algérie et dans les pays analogues, la plantation pour ces espèces aura lieu du 15 février au 15 avril, et même plus tard au besoin. Le moment arrivé, les plantes sont enlevées de pépinière avec leur motte et mises en place immédiatement. Si elles sont destinées à voyager, il est nécessaire de les empa- queter avec de la paille au fur et à mesure de leur extraction du sol, afin que leurs racines soient protégées du contact de l'air. Au moment où les plantes vont être enlevées de terre, on rabat leurs liges à 30 ou 40 centimètres au-dessus. Ce rabat- tage est très-important et s'explique facilement, car, laissées telles quelles, les tiges se trouveraient surchargées de feuilles, et celles-ci, absorbant, puis dégageant une très-grande quan- tité de liquide, se dessécheraient très-promptement, sans compter qu'elles enlèveraient à la souche une partie des sucs qui peuvent être uliles à sa reprise. La distance à conserver entre chaque touffe, pour les grandes espèces, est de 3 mètres en tous sens. Afin que le travail de la plantation soit plus vivement et plus réguliérement exécuté, on tend sur le sol un cordeau garni dans toute sa longueur de nœuds espacés de la distance que l’on veut maintenir entre les plantes, puis, vis-à-vis de chacun de ces nœuds, on fait un trou assez profond pour que la touffe se trouve en contre-bas du sol, car, dans ces grosses espèces, elle a toujours une ten- dance à s'élever. 138 LES BAMBOUS. Après la plantation, 1l faut donner un arrosage copieux et répété tous les quinze jours pendant l’été de la première année. Quelques binages aussi sont indispensables, tant pour détruire les herbes inutiles que pour tenir la terre meuble à sa surface. Plus tard, chaque année, et pendant la période hivernale, on fera bien de donner un bon piochage entre les lignes, pour entretenir également la terre perméable et poreuse ; puis, de temps à autre, afin de favoriser le développe- ment des touffes, on irriguera de manière que l’eau pénètre profondément. Sans irrigation, on n’obtiendrait pas cette vé- gétation luxuriante, telle qu’on peut la remarquer au Jardin du Hamma. Les Bambous aiment à avoir les pieds humides ; si cepen- dant l’humidité doit être grande, la stagnation de l’eau leur serait très-préjudiciable en hiver. Dans un sol légèrement frais, ces grands Bambous résistent sans arrosements, mais leur végétation est restreinte. Parmi les trois grandes espèces que nous cultivons au Jar- din du Hamma, il en est une que nous devons recommander d'une manière toute spéciale, à cause de la vigueur de sa croissance et de la grosseur de sa tige, qui atteint parfois 18 centimètres de diamètre sur une longueur de 20 mètres. Cest ce Bambou qui compose au Hamma cette magnifique allée ombreuse, épaisse voûte de verdure que le soleil ne sau- rait pénétrer, et qui cause l’étonnement de tous les visiteurs; on le connait en Algérie sous le nom de Bambusa arundina- cea ; c’est celui que nous avons décrit récemment en le nom- mant Bambusa macroculmis, à cause de la grosseur de son chaume (tige). Il serait à désirer que, dans les parties les plus chaudes de l'Algérie, on fit des plantations de cette espèce, dans les vastes plaines de l’'Habra (province d'Oran) par exemple, sur le littoral et dans les terrains non salins. À La Calle, dans la province de Constantine, non loin de la frontière de Tuni- sie, aux bords des lacs Tonga, Mela et Obeira, localités extrè- mement chaudes, ce Bambou pourrait se développer très- vigoureusement. Quelques tentatives de plantation en ont été faites à plusieurs reprises à Biskra et sur plusieurs plateaux de CULTURE. 139 la région saharienne, mais les résullats ont été négatifs. A Biskra, c’est l'humidité du sol qui fait défaut, ce qui a lieu également en d’autres endroits; d’un autre côté, dans certaines de ces localités, la température, extrèmement élevée pendant l'été, descend quelquefois au-dessous de zéro en hiver; le B. macroculmis ne peut vivre dans ces conditions. Où le Bambou qui nous occupe serait cultivé avec succès, c’est en Espagne, à Malaga, à Gibraltar, sur le littoral, dans les localités où l’on cultive la Canne à sucre, sur une bande pro- fonde d’un kilomètre et demi; il y rendrait des services, car le bois y est rare. Les parties chaudes de l'Égypte, celles où la température ne s’abaisse pas au-dessous de zéro, la Crète, Malte, les endroits abrités de la Sicile et autres analogues, devraient en posséder de nombreux groupes. Sa place se trouve aussi marquée sur le littoral tunisien et marocain, dans les petites vallées ou dans les ravins abrités. La plantation en massif ne convient pas à ces grosses espèces : on obtient de meilleurs résultats en plantant en lignes ou en petits groupes isolés, en avenue par exemple, en bordure de propriétés, en lignes parallèles à des canaux d'irrigation, mais surtout en allée conduisant à une ferme, à une habitation quelconque. Dans ces derniers cas, aérées de chaque côté, les touffes prennent un développement remarquable qu’elles n'auraient certainement pas atteint si elles étaient réunies en plantation compacte; en outre, cette disposition offre plus de facilité pour l'exploitation des chaumes, qu’on ne saurait extraire d’un massif serré sans des difficultés sérieuses. En allées, les Bambous ont encore ce précieux avantage de former une véri- table voûte de verdure sous laquelle, dans les pays chauds, l'on trouve, n'importe à quelle heure du jour, une fraicheur bienfaisante ; les animaux y rencontrent aussi un abri contre les ardeurs du soleil de midi. La magnifique allée des Bambous du Hamma, déjà citée, peut servir comme exemple de la plantation que nous préco- nisons : elle en a les avantages et les défauts signalés, dans la disposition comme dans les détails. Ainsi, un des côtés de cette allée, contigu à un carré de grands arbres en collection, pré- 140 LES BAMBOUS. sente une végétation beaucoup plus chétive que celle de la partie exposée à l'air libre. Le sol qui l’avoisine est entiè- rement envahi, à une grande distance, par les racines des Bambous qui le dessèchent en absorbant constamment le peu d'humidité qu'a fournie l'époque des pluies. Aussi, depuis quelques années, ces vieilles touffes, vivant dans un même em- placement, présentaient-elles, pendant la saison des chaleurs, des signes non équivoques de dépérissement : les pousses étaient moins nombreuses et plus chétives, les feuilles jaunis- saient prématurément, et, par l’action d’une caducité précoce, donnaient au chaume un aspect dégarni et délabré qui nous a souvent fait croire à une mortalité complète, inévitable sans doute, si nous avions tardé plus longtemps à prendre des me- sures efficaces, d’ailleurs tout aussi nécessaires aux autres vé- gétaux de nos collections. En effet, dès l’année 1873, quand, à force de persévérants travaux, nous avons pu doter le Hamma des eaux d'irrigation qui lui avaient fait défaut jusqu'alors, les principaux canaux ont été élablis à même la terre. au pied de la plus grande partie des touffes de lallée. L'influence de cette humidité leur fut on ne peut plus favorable; aussi, depuis lors, obtenons-nous des chaumes d’une dimension réellement remarquable. Malgré la sécheresse absolue et la chaleur in- tense de ces dernières années, nos Bambous avaient un feuil- lage si vert, si touffu, si abondant qu’on pouvait véritable- ment leur appliquer, comme au datticr, ce dicton arabe : «Tête dans le feu, pied dans l’eau. » Dans l’eau, pendant l'été. Il a déjà été dit, d’ailleurs, que la stagnation des eaux, pen- dant l'hiver, leur était nuisible. Une partie de cette allée, en contre-bas de celle dite des Ficus, nous offrait cet inconvé- nient de submersion partielle ; à ces endroits, les Bambous poussaient peu; les tiges, petites et peu vigoureuses, étaient recouvertes de lichens; les nouvelles surtout devenaient rares. En procédant tout dernièrement au nivellenient entier de cette grande allée de 343 mètres de long, nous avons, en supprimant ces causes nuisibles, constitué une surface unie et macadamisée, appréciée en tout temps par les promeneurs. Ce nivellement à eu encore cet autre effet de permettre le CULTURE. 141 rechaussement de certaines touffes trop élevées au-dessus du sol, qui souffraient de ces conditions défavorables, et qui ont recouvré une nouvelle vigueur. Nous l’avions déjà pratiqué en 1868, en remaniant une jeune allée de Bambous, la partie gauche en descendant l’avenue des Platanes, jeune allée qui est le prolongement de celle dont nous venons de parler, alors à peine tracée à travers un sol mouvant. En modifiant les distances, on exhaussa les plates-bandes latérales, afin de pou- voir rechausser les touffes dès leur croissance au-dessus du sol. Le nivellement et l’empierrement de ce prolongement, exécutés en automne 1876, et le système d'irrigation établi, font de cette partie l’exacte continuation de la première, sous le rapport de la vigueur et de la beauté. En résumé, à l'heure présente, le promeneur peut circuler sous une haute et large voûte composée de plus de trois mille grosses tiges de Bam- bous, qui s’entre-croisent en tous sens à 19 et 20 mètres de hauteur. Les gros Bambous sont d’un grand effet ornemental, mais ils ont le grave inconvénient, dans les jardins, d'exiger des neltoyages fréquents : leurs feuilles sèches, dures et coriaces, tombent constamment et en grande abondance; le vent les emporte dans les buissons, dans les autres cultures, dans tous les recoins; la quantité qu'on en enlève mensuellement est considérable, et leur lente décomposition ne permet pas leur emploi comme engrais. | Toutes les espèces de Bambous à végétation automnale ne peuvent être cultivées, sous le climat normal de l'Europe, qu’au point de vue scientifique; aussi ne les rencontre-t-on que dans les jardins botaniques, quelquefois, mais plus rarement, chez quelques amateurs, dans les serres tempérées, et dans les serres chaudes chez ceux qui habitent le Nord. 2° Bambous à végétation vernale. Les Bambous du deuxième groupe, tout en se comportant très-bien dans les régions tempérées et chaudes, notamment en Algérie, peuvent cependant s'éloigner de ces climats et 142 LES BAMBOUS. croître à certaines altitudes où, en raison de leur origine, ils supportent des abaissements marqués de température, ce qui les rend éminemment convenables à tout le bassin méditerra- néen. Toutes ces espèces sont généralement très-traçantes; elles paraissent, en Algérie, se plaire plus volontiers dans les endroits élevés et aérés que dans ceux qui sont trop abrités ; entre 200 et 300 mètres d’altitude ils donnent de très-beaux développements. En raison de leur rusticité et de leur extrême vigueur, on devrait en voir des massifs presque partout, ainsi que nous l'avons conseillé autrefois, les bords du lac Fetzara, dans les plaines de Bonc, province de Constan- tine, devraient être entourés de Bambous traçants. Au point de vue économique et industriel, les espèces suivantes con- viendraient parfaitement : tout d’abord, le Phyllostachys milis, la plus grande espèce du groupe; ses chaumes attei- gnent 12 mètres de haut et 6 à 8 centimètres de diamètre; elles pourraient être facilement employées à la construc- tion de hangars légers, etc. Le Phyllostachys nigra viendrait ensuite, avec ses tiges noires et recherchées par la fantaisie; puis les Ph. Quilioi et aurea, aux tiges jaunes et d’un aspect agréable. Ces vastes terrains marécageux, incultes et mal- sains, qu'on remarque autour de Bone, ne pourrait-on les utiliser et les assainir en les couvrant de Bambous traçants? Pour ces sortes de terrains, on emploierait deux autres espèces très-rustiques et très-envahissantes : le Phyllosta- chys viridi-glaucescens et l’Arundinaria Simoni. Dans la province d'Alger, on pourrait former çà et là des ilots de Bambous, surtout sur des terrains où d’autres cul- tures seraient difficiles, particulièrement dans les endroits humides et sur les bordsdes torrents, dans la plaine de la Mi- tidja et dans d’autres situations analogues; on utiliserait ainsi de vastes étendues improduclives. Dans la province d'Oran, aux vastes plaines de Saint-Denis du Sig, à Relizane, à Perrégaux, où s'étendent ces immenses terrains de lHabra où la culture estivale commence à faire défaut, ne pourrait-on pas couvrir toutes les parties CULTURE. 113 de qualité inférieure avec des Bambous traçants, qu’on pro- pose toujours d'employer à la fabrication du papier ? Nous parlons ic; de fabrication de papier avec les Bambous, parce qu'il était question, dernièrement, de faire des tentatives de culture dans ce but, en desséchant le lac d'Oran et en cou- vrant en partie de Bambous la superficie de ce lac, qui com- prend plus de 32000 hectares. Les espèces que nous avions indiquées pour cet usage étaient les Phyllostachys milis, Ph. Quilioi, Ph. viridi-glaucescens, Arundinaria Simoni. Les autres pourraient également servir; mais nous avons pré- férablement indiqué ces quatre espèces, parce qu’elles sont les plus coureuses. Comme cela a lieu en Chine et au Japon, chaque village d'Algérie devrait avoir sa forêt de Bambous ; on la composerait de quatre espèces : Phyllostachys mitis, Quilioi, nigra et viridi-glaucescens. Ce serait également une ressource pour les Arabes, qui y trouveraient tous les éléments pour la construc- tion de leurs gourbis, qu’ils pourraient dès lors établir plus solidement, et pour la fabrication de clôtures pour leurs parcs à animaux. Les colons surtout uliliseraient avec profit ces tiges légères et solides à une foule d’usages trop longs à énumérer, car 1l faut se rappeler que dans le plus grand nombre des cas, en Algérie, le moindre brin de bois est une rareté, et qu’on ne rencontre que bien accidentellement des pelites plantations de roseaux ordinaires. Non-seulement dans les grandes plaines d'Oran, mais aussi dans les vallées de la Kabylie, nous avons souvent vu, dans les nouveaux villages surtout, les colons dé- sirer ardemment quelques tiges ligneuses pour satisfaire à des premiers besoins, pour protéger leur maison d’un soleil brûlant au moyen d’une tonnelle, pour éviter de demander à des herbes fistuleuses et sèches les matériaux de construction de divers objets d'utilité journalière qu'ils sont obligés, à l'exemple des Arabes, de confectionner avec les tiges d’une grande ombellifère, le Ferula communs. Dans tout le midi de la France, dans presque toute l'Italie et l'Espagne et les contrées semblables, les Bambusacées de 145 LES BAMBOUS. ce groupe se comportent fort bien et se développent dans toute leur force; c’est là, dans tout le bassin méditerranéen, qu'ils sont appelés à rendre les services qu'on est en droit d’en attendre. Dans le nord de la France et dans le centre, ils ne serviront qu'à des usages horticoles, mais ils y seront de plus en plus appréciés dans la décoration des jardins. Comme la végétation des espèces de ce groupe est essen- tiellement vernale, c’est dans le courant de l'hiver, c’est-à-dire de décembre à février, que les plantations devront s’exécuter dans les pays méditerranéens. De même que pour celles du pre- mier groupe, le terrain devra être, autant que possible, meuble et de bonne qualité; s’il est légèrement frais, cela n’en vaudra que mieux, quoique le caractère traçant de ces Bambous les rende beaucoup moins délicats sur le choix du sol. D’ail- leurs, l'irrigation ne leur est pas une condition indispensable, puisque leur végétation commence à la suite des pluies du printemps et qu’elle est terminée, en Algérie, dans le courant des mois de juin et juillet. Afin que le travail de défoncement du terrain, qui doit être fait profondément, soit plus économique, on pourrait exécuter à la charrue, en se servant d’abord de la charrue ordinaire, puis en faisant passer derrière celle-ci la charrue défonceuse. Le terrain ainsi préparé serait hersé plusieurs fois, pour que la surface en füt plus unie. Vient ensuile la plantation. Les plantes seront également levées en motte dans la pépinière et mises en place immé- diatement, ou bien empaquetées de paille, si elles ont à voya- ger. On n’oublierait pas de rabattre les tiges à 30 ou 40 centi- mètres du sol. La distance entre chaque pied devra être de 3 mètres en tous sens, pour une plantation importante, car les rhizomes traçants auront bientôt envahi le sol. On arrosera copieuse- ment au fur età mesure que se fera la plantation. Les soins consisteront ensuite en quelques binages et quelques irriga- lions, et quoique la végétation de ces Bambous se termine quelque peu après les pluies dans la région africaine, et qu’ils puissent supporter les plus longues sécheresses, on fera bien CULTURE. 185 d'irriguer copieusement de temps à autre, si la chose est pos- sible, surtout dans le nord de l'Afrique, où les pluies sont rares; dans tous les cas, les produits qu’on obtiendrait par les arrosages seraient bien plus beaux sous tous les rapports. Ce que nous venons de dire pour la région africaine s'applique à toutes les régions analogues, la Tunisie, le Maroc, ete. Dans le nord de la France, où la végétation de ecs Bam- bous est encore possible, la plantation sera faite plus tardi- vement, c’est-à-dire de la fin d'avril à la fin de mai. On se laissera guider, du reste, pour cette opéralion, par le mouvement de la végétation. Sous le climat de Paris, la dé- plantation des Bambous pendant l'hiver leur est très-souvent funeste. Au point de vue ornemenlal, les Bambusacées traçantes commencent à entrer dans le domaine de nos jardins paysa- gers; lorsqu'on sait les disposer et les grouper avec art, elles ne marquent pas d’une certaine élégance, principalement si l’on a su les accompagner habilement de plantes exotiques, comme cela a eu lieu à Montsauve, près d’Anduze (Gard), dans la pro- priété de M. Mazel. C’est dans ce magnifique établissement qu'il est facile de se figurer ce que peuvent devenir, dans la région méditerranéenne, les Bambusacées traçantes, et particulière- ment le Pyllostachys mitis. Un peu plus loin, à Hyères, dans le jardin de la ville, dont la direction est confiée au Jardin d’acclimatation de Paris, on voit déjà un commencement d’allée formée de sujets de cette dernière espèce ; puis, à côté, une collection d'espèces patiemment réunies dans l'établissement, dans le but d’y être étudiées, tant au point vue de leur nomen- clature qu’à celui de leur rusticité. Enfin, en se rendant en Italie, si l’on a le loisir de s’arrèler un instant à Nice et que l'on puisse y visiter la villa du vicomte Vigier, c’est encore là qu'on aura une idée de l'effet que produisent les Bambous formant des massifs, accompagnés comme ils le sont d'une nombreuse collection de végétaux exotiques, Palmiers, Dra- cæna, Cycadéeset autres, remarquables par leur port ct leur feuillage ; aussi ce jardin, l’un des plus beaux de la contrée, a-t-1l un cachet tout à fait asiatique. 10 146 LES BAMBOUS. Dans les grandes plantations faites au point de vue industriel, nous avons conseillé de rabattre les chaumes à 30 ou 40 cen- timètres au-dessus du sol, dans le but de faciliter la reprise des touffes; mais c'était, qu'on ne l’oublie pas, avec un but commercial; au point de vue ornemental, on peut éviter celte mulilation; pour cela, il sera prudent de lever les touffes avec de grosses mottes, les empaquetant toujours avec le foin ou la paille, si elles ont à voyager; de raccourcir quelques-unes des ramificalions latérales qui seraient trop longues; de les planter aussitôt que possible et en contre-bas du sol, de ma- aière à former au pied de chaque touffe une cuvette en forme d’entonnoir. Il faudra que les eaux d'arrosage pénètrent à tra- vers les mottes; on devra les y contraindre au besoin, en apla- nissant les parois de la cuvette. Ce procédé très-simple nous a toujours donné d'excellents résultats. Si l’on agit autrement, voici ce qui arrive : l’eau donnée à la plante glisse par-dessus la motte; seule, la terre environnante l’absorbe, et la motte, restant sèche ou à peu près, risque de se trouver entourée d’un sol fangeux; la plante alors se dessèche et meurt. Cest du reste le sort du ÿlus grand nombre des végétaux trans- plantés en motte; l’incurie, l’inexpérience, quelquefois l’inca- pacité de gens qu’on a à son service et qui, sans en avoir les connaissances, se décorent du titre de jardinier, qu'ils ne de- vraient jamais porter, conduisent souvent à ces insuccès. Le jardinage est un art qui demande de longues études pratiques, qui réclame beaucoup de jugement, beaucoup de réflexion et beaucoup de patience; celui qui s’en occupe avec passion y met sa vie tout entière; celui qui, sans l’approfondir, n’en a Jamais connu que la surface, se trahit à la première difficulté qui surgit en dehors de la routine ordinaire; 1l n'hésite pas, 1l déplante, il replante, 1l arrose, et... les Bambous meurent. Quelles que soient l'importance et l'étendue de la planta- tion des Bambous, il faudra, pendant les deux ou trois pre- mières années, donner au terrain quelques binages à diverses époques de la saison, afin de tenir la terre meuble à sa sur- face ; il faudra également, si l’on veut activer le développement des plantes, leur donner des irrigations en temps opportun. CULTURE. - 147 Il est toutefois une recommandation que nous faisons de la manière la plus formelle, c’est de ne jamais pénétrer dans aucun des carrés de Bambous, sous quelque prétexte que ce soit, pendant la période de croissance de leurs tiges ; celles-ci, comme nous l’avons vu précédemment pour les espèces tra- çantes, surgissent de tous côtés, par suite de l’extension des rhizomes; elles vont dans toutes les directions ; en sorte que, avec l’excessive fragilité des jeunes pousses, il serait à peu près impossible qu’on n’en détruisit pas une grande quantité ; bien plus, lorsqu'elles ont une longueur de plus d’un mètre, il suffit souvent qu'elles soient froissées au passage pour qu'elles se désarticulent ou que leur croissance s’arrête. Il est même des espèces, le Bambusa macroculmis par exemple, chez lesquelles la végétation des bourgeons cesse immédiate- ment, suivie même de pourriture, pour peu qu'ils aient été heurtés ou légèrement blessés. Aussi, en raison de ces faits, au Hamma d'Alger, est-il interdit à toute personne de péné- trer dans les carrés de Bambous durant une période de quatre à six semaines, et cela à partir du Jour où les bourgeons commencent à sortir de terre. En Chine et au Japon, d’après un ouvrage que nous avons sous les yeux, on taillerait les Bambous dans le but de les faire grossir et grandir. Aucun développement n’est donné à cette assertion, et nous doutons fort, à dire vrai, que la personne qui à rapporté ce fait ait jamais vu pratiquer cette opération ; dans tous les cas, elle ne saurait avoir aucune action sur le développement des tiges, ni en grosseur ni en longueur. Notre avis est, au contraire, que la taille des Bambous ne pourrait qu'altérer les chaumes, puisqu'elle n'aurait lieu que pendant leur croissance et que, à ce moment-là, elles ne peuvent subir aucune blessure sans en souffrir. Nous l’avons constaté dans bien des cas et nous le répétons, les blessures faites aux jeunes tiges, pendant leur période de croissance, entraînent leur avortement et toujours leur mort. 148 LES BAMBOUS. Culture en pots. Depuis quelques années, au Jardin du Hamma, on culiive avec grand succès tous les Bambous en pots, et tout spécialement pour les expéditions au dehors; 1ls sont généralement préférés à ceux qui sont expédiés en motte et qui, malgré toutes les pré- cautions, souffrent toujours plus ou moins d’une déplantation. En Algérie, la mise en pots a lieu à deux époques diffé- rentes : au printemps, dans le courant de mars, un peu avant la reprise de la végétation, ou bien à l’automne, dans le cou- rant du mois d'octobre. Si : on pouvait, dans ce dernier cas, opérer dès le mois de septembre, cela vaudrait assurément beaucoup mieux; malheureusement, les chaleurs qu’amène en ce mois le vent du désert, le brûlant siroco, seraient un obstacle à la reprise des plantes, dont au moins l'extrémité des tiges serait assurément brûlée; durant plusieurs jours le thermomètre, sans interruption, peut marquer environ 53° centigrades à l'ombre; le degré hygrométrique de l'air est peu élevé; une poussière brûlante dessèche tout; les jeunes Bam- bous, déjà affaiblis par la transplantation, mourraient de séche- resse. [Il faut donc attendre que le siroco ait effectué son passage. A l’époque choisie, printemps ou automne, pour les deux groupes, on lève les touffes destinées à cette culture; elles doivent avoir accompli déjà leur deuxième végétation, ou mieux, être âgées de quatre à cinq ans. La touffe est extraite entièrement avec une grosse motte, que l’on désagrége peu à peu, de manière à pouvoir en enlever à la fois deux ou trois tiges rapprochées, lesquelles forment une petite touffe ayant conservé un peu de terre autour des racines. Quelquefois les chaumes, assez serrés les uns contreles autres, appartiennent à des rhizomes différents, qui se sont entrecroisés ; quoi qu'il en soit de leur point de départ, la question importante est qu’en les séparant de la touffe mère on les laisse réunis et qu’on leur conserve une motte proportionnée à la grandeur du pot, en retranchant, en avant ou en arrière, toutes les par- ties des rhizomes qui pourraient en gêner l'introduction. CULTURE. | 149 Pour que le sectionnement de la touffe se fasse dans de bonnes conditions, il faut se servir d’un sécateur; l’on peut, avec cet instrument, retrancher toutes les parties de la plante sans lui faire subir de secousses qni feraient détacher la terre et ne permettraient pas de conserver la motte autour des plantes, surlout si l’on opérait avec une bêche ou une pioche. La grandeur des pots est subordonnée au volume des touffes, cependant, comme celles-ci sont généralement de moyenne force, ce sont des pots de 18 à 22 centimètres de dia- mètre qu’il est préférable d'employer; plus grands, d’ailleurs, ils rendraient les expéditions plus onéreuses. Au fur et à mesure que les Bambous sont mis en pots, ils sont placés dans un endroit ombragé, soit sous des claies, soit sous de grands arbres. L’arrosage a lieu successivement et il est continué chaque jour, comme cela se pratique pour les autres plantes cultivées ainsi. Quelques jours aprés la mise en pots, les Bambous perdent une partie de leurs feuilles, mais celles-ci se trouvent bientôt remplacées. Au bout de trois se- maines environ, un mois peut-être, de nouvelles racines com- mencent à se former; il faut alors exposer les plantes au soleil pour aider à leur reconstitution. Les Bambous végètent peu ou mal dans des pots, parce que les racines n’ont pas assez d'espace à parcourir pour puiser les liquides nécessaires à une végétation normale; si nous avons indiqué ce genre de culture, c’est parce que nous sommes convaincus des services qu'il pourra rendre à l’horticulteur en même temps qu'à l’acheteur, par suite de la facilité qu’auront ces plantes, d’une part, de voyager sans souffrir, d'autre part, d’être facilement transplantées. C’est en effet le meilleur moyen à employer dans ces circonstances, car on est toujours assuré de leur reprise. En outre de cela, les tiges restent entières, tandis qu’autrefois — et cela encore aujourd'hui lorsqu'on fait des transplantations en motte — on était obligé, dans le plus grand nombre des cas, de retrancher la moitié des chaumes, lorsque les mottes ne tenaient pas autour des racines. C’est donc une méthode indispensable pour les horti- 150 LES BAMBOUS. culteurs dans leurs expéditions, et sans laquelle les plantes ne reprennent que difficilement. On comprend également le désappointement de l'amateur, qui s'attendait à recevoir des végétaux intacts et, conséquemment, des tiges entières, et qui ne voit sortir des caisses que des tiges tronquées ; désappoin- tement augmenté encore en ce que, n'étant pas, la plupart du temps, au courant de la végétation des Bambous, il ignore que si ces plantes ne peuvent pas, pour le moment, servir à une ornementation sans reproche, elles se remettront avec le temps et redeviendront telles qu'il les avait désirées. Il est inutile d’ajouter que, dans le bassin méditerranéen, les Bambous élevés en pot peuvent se mettre en pleine terre en toute saison. Récolte des tiges. — La récolte des tiges des Bambous est une des opérations importantes de la culture de ces plantes; elle dépend tout entière de l’usage auquel elles sont desti- nées; mais, dans tous les cas, elle est subordonnée à la nature des groupes. Ainsi, pour les grosses espèces, Bambusa ma- croculmis, B. vulgaris, etc., toutes celles enfin à végéta- tion automnale et destinées à la construction des habitations légères de toute nature, il faut que les chaumes aient acquis toute leur solidité, ce qui n’a lieu qu’à la fin de la troisième année; plus tard serait encore préférable. Le moment le plus convenable est ou bien avant le commencement de la végéta- tion, ou bien dès que celle-ei est terminée. Aussitôt les tiges abattues, on les débarrasse de toutes leurs ramifications latérales, à l’aide d’une serpe ou d’une hache bien tranchante; ensuite on les fait sécher en les plaçant à des endroits ombragés ou sous des hangars où l’air circule libre- ment, afin que la dessiccation se fasse lentement. Une dessic- cation trop rapide, au soleil par exemple, les ferait se gercer, se fendre, et leur retirerait, par conséquent, leur valeur. Récoltées trop tôt, avant leur époque de maturité, les tiges perdent de leur résistance mais, d’aulre part, récoltées trop âgées, lorsqu'elles ont plus de dix ans, si elles sont plus so- lides, moins élastiques, elles sont aussi plus dures et se tra- vaillent plus difficilement pour les objets d’art. CULTURE. 451 Pour ce qui est des Bambous à végétation vernale ét à touffe très-traçante, ceux surtout appartenant aux espèces qui com- posent le genre Phyllostachys, la récolte des tiges peut se faire beaucoup plus tôt; généralement on peut la commencer dès que la végétation est complétement terminée, c’est-à-dire à la fin de la première année; à ce moment-là, leurs tiges sont suffisamment ligneuses et résistantes pour être employées, et, d'autre part, elles se travaillent beaucoup plus facilement. Pour certaines espèces à chaumes colorés, comme le Phyl- lostachys nigra, c’est à la fin de la première année, dans cer- tains cas, que celte couleur estle plus intense ; c’est donc à ce moment qu’il convient de les récolter, si l’on veut profiter du meilleur état de cette coloration; car plus tard elle perd de son intensité, en laissant voir de place en place des taches rubi- gineuses, comme marbrées. En outre, après la première année, les ramifications se dessèchent quelquefois; elles deviennent moins flexibles et blanchissent. Cependant il faut remarquer que, récoltées avant leur complet développement, les tiges se rideraient et ne seraient plus propres à aucun usage. Si les tiges de ces Bambous doivent être employées, comme nous le dirons tout à l'heure, à la confection de cannes, de manches de parapluies ou d’ombrelles, on les coupe à quelques centimètres au-dessous du sol, afin qu'une partie de la souche y reste adhérente, et l’on conçoit le parti qu’en peut tirer celui qui sculpte l'extrémité de ces manches; mais ce qui est préférable encore, c’est de pouvoir l’éclater du rhizome. Pour celles-ci comme pour les précédentes, mèmes recom- mandations pour le séchage à l'ombre. ILrestera ici une question à étudier : à quel âge les tiges de Bambous pourraient-elles être récoltées, en supposant ces plantes cultivées ici où en Algérie, pour la fabrication du pa- pier ? Il y aura là une suite d'expériences à entreprendre. Quoi qu’il en soit de la destination des tiges et de leur utili- sation, 1] est une observation précieuse à faire : c’est que, en procédant à la récolte, on doit en laisser quelques-unes sur cha- que louffe, afin de ne pas altérer la végétation successive et, par conséquent, nuire à la production; si, en effet, l’on coupait cha- 152 LES BAMBOUS. que année toutes les tiges d’une touffe de Bambou, celle-ci né tarderait pas à périr d’épuisement. Les instruments employés pour la coupe des Bambous sont nombreux; nous conseillerons l’usage de la serpelte et du sécateur pour les petites espèces telles que les Bambusa scrip- loria,gracilis, Arundinaria falcata,Japonica ou Wetake, etc. Pour les espèces atteignant déjà la grosseur du doigt, nous nous servons, au Hamma, d’un long ciseau de menuisier, en acier, bien tranchant, avec gros manche en bois, La lame, appliquée à la base du Bambou et pouvant même pénétrer dans le sol, poussée par un vigoureux coup de maillet sur le manche fait une coupe nette et régulière, sans éclat ni fendil- lement; ce procédé est généralement en usage dans la récolte des Phyllostachys nigra, des jeunes mitis, aurea, viridi- glaucescens, etc. Les grosses espèces : Bambusa macroculmis, vulgaris, Hookeri, etc., dont la base des tiges est pleine ou presque pleine, ne peuvent être coupées que par de forts instruments, haches et serpes bien affilées ; mais comme leurs touffes ces- piteuses présentent souvent des tiges serrées les unes contre les autres, dans le B.macroculinis par exemple, on a recours à la scie à main, longue et à doubles dents, qui se glisse par- tout. La coupe d’un Bambusa macroculmis d’une vingtaine de mètres environ, chargé à son sommet flexueux de nombreuses ramifications et de feuilles qui constituent, à cette hauteur, un poids considérable, exige quelques précautions. On attache d’abord le Bambou à ses voisins au point le plus haut que l’on puisse atteindre, pour éviter sa chute; l’entaille à la hache ou à la serpe doit être faite sur plusieurs points de sa périphérie, afin qu’il se coupe brusquement et ne reste pas attaché à sa base par quelques parties, dans lequel cas il s’inclinerait sous le poids de sa lourde tête et, si l’attache cédait, il se fendrait sur une certaine longueur par la partie inférieure. Il faudrait bien se garder de chercher à en arrêter la chute, il n'y aurait d'autre chose à faire qu’à se garer. On procède de même avec la scie en agissant toujours circulairement. L VITE DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE La distribution géographique des Bambous est des plus inté- ressantes et des plus utiles à connaître pour les personnes qui ont l'intention de s'occuper de leur culture. Tout nous fait espérer que le nombre de ces personnes s’accroîtra facilement, car ces végétaux, vu les nombreux genres de produits qu'ils peuvent nous fournir, méritent certainement à plus d’un titre d’être plus connus et plus répandus parmi nous. La géographie végétale ou botanique, c’est-à-dire la distri- bution naturelle des plantes sur le globe, nous fait connaître dans quelles conditions vivent ces plantes à l’état spontané. C’est une science encore assez nouvelle et qui commence à être appréciée, par suite des services qu’elle nous rend, ser- vices qui seront de plus en plus signalés à mesure que s’éten- dront nos connaissances. On conçoit, en effet, qu’il n’est guère possible de cultiver convenablement une plante sans savoir quels sont les éléments et les milieux qui lui conviennent, soit sous le rapport du climat, soit sous le rapport géologique. Depuis une vingtaine d'années, la culture en Europe des végétaux exotiques a fait un immense progrès; cela vient de ce que maintenant, lorsque, de pays éloignés, on reçoit des espèces nouvelles, on s'inquiète tout d’abord des conditions dans lesquelles vivait la plante avant son introduction; on la traite alors d’après les renseignements recueillis. Les Bambusacées, très-nombreuses en espèces, sont assez répandues dans les régions chaudes ou tempérées de notre globe, en Afrique, en Amérique, en Océanie, en Asie, L’Eu- rope fait exception, elle ne possède pas de Bambous à l’état spontané. Le tempérament variable de ces végétaux les a répandus un peu partout : on les rencontre en effet dans les parties les plus chaudes, vivant dans des terrains secs ou marécageux, 154 LES BAMBOUS. formant parfois des forêts immenses, des jungles, qui s’éten- dent à plusieurs lieues, tandis que d’autres habitent des ré- oions plus tempérées et plus douces, qui rappellent celles du midi de la France ou celles de nos côtes de Bretagne et de Normandie. D’autres espèces envahissent les montagnes, qu’ils couvrent de leur végétation unique, s’élevant à une altitude considérable, et arrivant, dans les monts Himalaya et autres environnants, sur le Singa-Selah, montagne de l’Islumbo, entre le Népaul oriental et Sikkim, à une hauteur de 11000 pieds au-dessus du niveau de la mer. Jameson rapporte avoir rencontré des Bambous, le Chus- quea aristata, Munro, à une hauteur de 15000 pieds, sur la chaîne occidentale des Andes, et dit qu’à 15 000 pieds il couvre complétement le sol, formant ce que les gens du pays appel- lent un carizal, impénétrable aux hommes et aux animaux, et continuant ainsi jusqu'aux limites des neiges perpétuelles. Au contraire de ces stations extrêmes, M. Hooker dit que le Dendrocalamus edulis a une limite très-tranchée en éléva- ion, montant à 4000 pieds, où il abonde et fleurit chaque année; après lui viennent le Cephalostachyum capilatum et l’'Arundinaria Hookeriana, ce dernier arrivant jusqu’à 6000 pieds et plus, et, dans ces conditions, produisant abon- damment des graines. Ce qu’il y a de particulier, c’est que ces espèces ne franchissent jamais les limites qui leur sont assi- gnées par la nature. On comprend, d’après toutes ces conditions variables, com- bien il est indispensable, pour mener à bien la culture des végétaux exotiques, de connaître non-seulement ie pays d’où vient la plante, mais aussi sa station au point de vue de son altitude, afin de ne pas faire d'école, comme on dit en horti- culture, ce qui, malheureusement, a encore lieu trop souvent, faute de connaissances sur ce sujet. Si nous avons touché cette question, c’est que nous y atla- chons un très-grand intérêt, et que l’un de nous a élé à même, dans sa longue carrière horticole, d'enregistrer bien souvent des mécomptes dans la culture qu’il a entreprise de nombreux végétaux, après les avoir reçus sans renseignements suffisants DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. 45 sur leur localité respective. Et cela s’explique. On n’a eu aucune donnée sur l'altitude des stations où les plantes ont été recueillies; on apprend seulement qu'elles viennent de l'Inde, du Brésil, du Mexique ou de pays à peu près ana- logues. L'Inde, le Brésil, le Mexique, ce sont des pays géné- ralement fort chauds, alors on expose indistinctement ses végétaux à la température très-élevée d’une serre chaude; on redoute pour eux le moindre refroidissement; on leur refuse l'air, qui pourrait les froisser; on leur ménage l’eau, qui pourrait les refroidir, et, dans le plus grand nombre des cas, les plantes étouffent, elles s’étiolent, elles périssent d’épuise- ment. Si l'on avait su que ces pauvres plantes habitaient, dans l'Inde, dans le Brésil, dans le Mexique, des parties élevées, parfois très-élevées, où le climat se modifie, où la chaleur est modérée, où mème les neiges apparaissent, on se füt bien gardé de les dorloter si imprudemment, on les eût placées dans la serre tempérée, quelques-unes peut-être dans la serre froide; ou bien on leur eût procuré le plus possible cette humide chaleur dont l'atmosphère du pays natal les baïgnait sans cesse; on les eût sauvées. Ces insuccès tendent à se moins renouveler maintenant. La géographie botanique a été plus étudiée ; on en a apprécié les avantages ; les botanistes voyageurs ont eu soin de joindre, aux échantillons récoltés, des notes aussi exactes que possible sur les conditions où se trouvaient les végélaux; les collection- neurs de plantes vivantes ou de graines ont fait de même, en sorte qu'aujourd'hui on rencontre dans les cultures un bien plus grand nombre de végétaux exotiques, qui non-seulement ornent nos serres, mais qui peuvent en sortir sans danger, pour aller, durant la saison estivale, décorer nos jardins pri- vés ou publics, pour lesquels jusqu'alors ils étaient inconnus. Les premiers Bambous, venant des régions tempérées de la Chine et du Japon ou des parties montagneuses de l’Inde, n’ont pas échappé aux mauvais traitements qui étaient alors en usage; nous nous rappelons parfaitement avoir cultivé en serre chaude le P hyllostachys nigra lors de son introduction à Paris, et nous devons avouer qu’il y faisait triste figure. Ce n’est que 156 LES BAMBOUS. plus tard, lorsque nous avons appris qu’il habitait, dans son pays, les régions froides ou tempérées analogues aux nôtres, que nous l’avons cultivé à une température moins élevée. C’était déjà un progrès. Plus tard, pour connaitre son degré de rusticité on le livra à la pleine terre, où 1l végéta avec plus de vigueur; c’est ainsi maintenant qu’on le cultive. Il est donc important, on le voit, lorsqu'on reçoit des végé- taux exotiques, de savoir à peu près à quelle altitude ils ont été recueillis; plus cette altitude sera élevée, moins la plante exigera de chaleur, et plus facile en sera la culture dans nos régions. La végétation suit par échelons les zones d'altitude, et elle se modifie selon les circonstances. Les espèces aussi changent, elles sont remplacées par d’autres qui deviennent plus rusti- ques au fur et à mesure qu'on arrive vers le sommet. La plante qui doit habiter la plaine ne se rencontre donc pas sur la mon- tagne, et celle qui doit vivre sur cette dernière n’est pas orga- nisée pour vivre dans la plaine; les conditions climatologiques n’y sont pas les mêmes; il peut faire très-chaud dans la plaine et n’y avoir qu'une chaleur très-tempérée sur la montagne. Les espèces de Bambous sont disséminées, nous l’avons vu; il en est qui ne croissent que dans les contrées chaudes et d’autres que dans les zones tempérées ou froides. Certaines espèces habitent les deux hémisphères, particulièrement le Bambusa vulgaris, mais on croit que c’est par la culture qu'il s’est naturalisé dans l’un des deux. On le trouve abondamment dans l’île Maurice. Il a été recueilli par Wallich au Silhet et par Hooker à Chittagong. Il est encore dans les Indes occiden- tales et sur divers points de l'Amérique du Sud, mais toujours cultivé, et à Ceylan, où 1l est probablement sauvage. C’est, du reste, la seule espèce cosmopolite. Le genre Arundinaria, assez nombreux en espèces, se ren- contre aussi dans les deux hémisphères, mais celles d’un hémisphère ne se trouvent pas dans l’autre. Les espèces se localisent souvent; elles se confinent dans des régions qu’elles ne franchissent pius : c’est ainsi que cer- tains Bambous particuliers à diverses parties de la Chine et du DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. 157 Japon ne se retrouvent pas dans d’autres pays; 1l en est de même pour beaucoup de localités où ils croissent tout spé- cialement, et ce serait en vain qu'on les chercherait ail- leurs. A côté de cela, d’autres se rencontrent un peu partout, mais dans une même région : ainsi le Dendrocalamus strictus se trouve distribué dans une grande partie de l’Inde, au nord et au sud, à l’est et à l’ouest, à Birmah, à Tenasserim et au Ja- pon. Il en est de même du Bambusa arundinacea, qui habite la péninsule des Indes orientales, Tautham, Quilon, Nemde- broog, Madras, Poonamala, Bombay, le Bengale, la Chine. Ce Bambou, quoique l’un des plus communs parmi les grandes espèces, n’a pas encore été introduit chez nous, et 1l serait à désirer qu’il le fût. « En Chine, dit le docteur Ed. Mène, on trouve le Bambor au midi comme au nord, sous 90 degrés de chaleur comme sur le bord des rivières glacées; aux environs de Canton et de Sang-haï, où la chaleur est tropicale, comme à Pékin, où la température estsirigoureuse, et à Nuy-pô, où, malgré de fortes gelées d'hiver, il pousse à de grandes hauteurs et forme des massifs qui ombragent les cours d’eau et les habitations des pêcheurs. » Tous les grands Bambous semblent appartenir plutôt aux régions chaudes et habiter les plaines et les plateaux inférieurs. Ils sont communs dans l'Amérique du Sud, le Brésil, les Indes, orientales ou occidentales, Chittagong, Ceylan, Calcutta, Te- nasserim, Birmah, Pegu, et dans les îles de l’Archipel oriental. Les îles Philippines, Java, le Khasva et beaucoup d’autres régions de ces contrées possèdent de grandes espèces de Bam- bous; la Cochinchine, les parties chaudes de la Chine et du Japon en ont également, mais elles y sont cultivées. On en trouve aussi aux iles Bourbon, Maurice, à Haïti, à Saint-Pierre de la Martinique, etc. Quelquefois on les rencontre à une alti- tude de 4000 pieds. Un botaniste, Oldham, dit avoir trouvé six espèces de Bam- bous à l’ile Formose. Griffith mentionne le fait curieux d'une espèce, le Pseudostachyum polymorphum « Purphok », qui 158 LES BAMBOUS. ne vit dans l’Assam supérieur que toujours accompagné de l'Arbre à thé. Klacourt rapporte que toute une province de Madagascar est nommée Galumbulu, du nom d’un Bambou nommé Bulu, qui y domine, et le R. P. Ellis, dans son livre sur Madagascar, dit que quatre très-belles espèces de Bambous contribuent beaucoup, par l'extrême élégance de leur port, à la beauté de l’aspect que présente cette île. Quant aux moyennes espèces, on les trouve à peu près dans les mêmes localités, mais beaucoup d’entre elles aiment à vivre dans des zones plus élevées, où la température est plus douce : c’est ainsi que la Chine et le Japon nous en ont envoyé quel- ques-unes qui peuvent vivre sans trop souffrir sous le climat de Paris, mais qui prospèrent à merveille dans notre région méditerranéenne. Poux terminer ce résumé déjà trop long des quelques sta- tions où croissent les Bambous, nous dirons que dans toute l'étendue de l'Amérique du Nord et au nord du Mexique il n’y en a qu’une espèce qui vive à l’état sauvage : c’est l’Arundi- naria macrosperma, espèce cultivée autrefois dans quelques jardins de Paris, mais qui a disparu depuis longtemps. Un envoi malheureux nous à empêché tout dernièrement de pos- séder à nouveau cette espèce, que nous croyons utile en rai- son de sa vigueur et de £a rusticité. Il y a certainement encore beaucoup à dire sur la géogra- phie botanique en ce qui a rapport aux Bambous, mais nous étendre davantage, ce serait sortir du cadre que nous nous sommes imposé; nous n'avons dû qu'effleurer cette question importante. En se reportant à la nomenclature des nombreuses espèces de Bambusacées décrites par le colonel Munro, on voit qu'il en est beaucoup habitant des altitudes très-élevées, dont la température correspond, à peu de chose près, à celle de notre région de la Méditerrannée, et qui pourraient dès lors y être cultivées avantageusement. Peut-être même que parmi celles qui sont dispersées dans les deux hémisphères, et particuliè- rement dans le Brésil, on en trouverait de plus rustiques que celles que nous cultivons déjà. D'autre part, la culture pra- DISTRILUTION GÉOGRAPHIQUE. 159 tique des Bambous, bien qu’encore dans son enfance, nous a déjà révélé bien des services qu’ils sont à même de nous ren- dre; peut-être en est-il d’autres espèces qui nous sont incon- nues en ce moment, et qui sont appelées à nous en rendre encore davantage; aussi ne saurions-nous trop appeler sur cette question l'attention spéciale de la Société d’Acclimata- lion de Paris, qui, par suite de ses nombreuses relations avec le monde entier, pourrait arriver à l'introduction de ces végé- taux. Les Bambusacées appelées à être cultivées dans les parties tempérées de l’Europe doivent appartenir à la série de celles qui vivent sur les montagnes et à des altitudes élevées, ou dans des contrées où la température est moyenne. C’est dans notre bassin méditerranéen que la culture pourra s’en répandre; les zones du Palmier, de l’Oranger et de l’Olivier, et celles qui présentent des conditions analogues, devront être choisies de préférence. Si, du reste, on s’en rapporte aux observations faites chez nous dans ces dernières années, tous les Bambous à végétation vernale peuvent supporter sans périr des gelées de — 10° à — 14°; par un froid plus intense, leurs tiges sont détruites, mais leurs rhizomes souterrains résistent et repous- sent ensuite au retour du printemps. Jusqu'à ce jour celles qui ont été introduites chez nous et qui offrent assez de rus- ticité pour qu’on les puisse cultiver dans les régions que nous citons, sont encore relativement peu nombreuses. Elles nous sont venues des régions tempérées de la Chine et du Japon, et elles ont un caractère commun, celui d'être très-traçantes et à végétation vernale. Ce sont, en les classant par ordre de mérite, les Phyllostachys mitis, nig'a, Quilioi, aurea, viridi-glaucescens, violascens, flexuosa et l'Arundenaria Simont. Ces Bambous sont rustiques; ils croissent admirablement dans la vallée du Rhône, où commence la zone de l’Olivier. On peut déjà en voir de très-belles collections chez un amateur très-distingué, plein du feu sacré pour la culture des belles plantes, M. Mazel, à Montsauve, près d’Anduze (Gard). Leur ruslicité permet même de les cultiver un peu en deçà de cette 160 LES BAMBOUS. zone ; ils ont pu supporter chez M. Mazel un abaissement de température assez considérable, puisque le thermomètre, en 1875-1876, y est descendu à 14 degrés au-dessous de zéro. Les tiges, quoique couvertes parfois de neige, n’ont pas souf- fert. Il est vrai de dire que, dans ces régions, les froids sont plus secs, mais aussi il faut ajouter que, pendant l'été, les cha- leurs étant plus fortes et plus prolongées, les Bambous y ac- quièrent une végélation plus active; leurs üges alors peuvent se constituer plus fortement, se bien aoûler, comme disent les horticulteurs, et par cela même supporter plus facilement ces abaissements de la température méridionale, sans que leurs tiges en éprouvent du dommage. Sous le climat de Paris, ces Bambous sont assez résistants, mais leurs tiges souffrent quelquefois; elles périssent même lorsque le froid descend au-dessous de 14 degrés centigrades. Les rhizomes ne s’en trouvent pas altérés; néamoins, pendant environ trois ans, les plantes sont mo’ns vigoureuses. Quoique originaires des zûnes tempérées, les Bambous sup- portent facilement des chaleurs assez élevées; à Alger, ils acquièrent en très-peu de temps des dimensions relativement considérables. En raison de ces faits, les espèces de ce groupe pourront se cultiver non-seulement sur le Jittoral algérien et dans des conditions analogues, mais aussi sur les plateaux où règne une lempérature douce. Quant aux espèces des régions chaudes, appartenant à notre groupe des touffes cespiteuses et à végétation automnale, il ne faut pas songer à les cultiver dans nos zones tempérées, il n’y a guère que dans quelques parties de l’Algérie et de l’Europe méridionale qu’elles pourront réussir; ce seront générale- ment les plus grandes. Les espèces de ce groupe cultivées au Jardin du Hamma, et qui acquièrent de très-grandes dimen- sions, sont les Bambusa macroculinis, Hookeri et vulgaris. Ce sont véritablement les seules du groupe que nous ayons jusqu’à présent à recommander pour les régions chaudes de l'Europe méridionale, de l'Algérie, et pour certaines plus favorables encore du nord de Afrique. IX PROPRIÉTÉS ET USAGES Parmi les végétaux qui rendent le plus de services à l’homme par les usages économiques très-multipliés auxquels ils se prêtent, on peut, sans contredit, citer un certain nombre d'espèces de Bambous. C’est principalement dans l’extrème Orient qu’on peut voir quel cas les habitants de ces vastes contrées savent faire de ces végétaux qui leur sont tellement utiles; quelle vénération presque idolätrique leur suggère leur reconnaissance, et jus- qu'à quel point est poussée la culture passionnée des Chinois pour ces plantes, qu’ils considèrent à juste titre comme le pre- mier de leurs trésors. L’idolâtrie des habitants de la Malaisie va plus loin encore, et Rumphius rapporte qu’au moment où il parcourait cette contrée, les indigènes croyaient que l’homme était sorti d’une tige creuse de Bambou. Cette extrême vénération des populations asiatiques s’ex- plique, nous le répétons, par les nombreux produits que leur fournissent ces végétaux, et dont ils trouvent continuellement l'usage dans leurs moindres besoins domestiques. Les Indiens et les Chinois mangent les jeunes pousses de Bambous comme nous mangeons ici les asperges, ou encore en salade, en purée; ils en font, dit-on, d'excellentes fritures. On dit aussi que lorsqu'on les coupe au printemps, elles sont vertes et tendres, avec un goût analogue à celui de l’asperge; c’est surtout à celte saison que cette consommation est consi- dérable; elle est l’objet d’un commerce très-actif dans la ma- jeure partie des provinces de la Chine, celles principalement de l’intérieur, où la hauteur considérable des montagnes et les grands froids ne permeltent pas la culture du Bam- bou. Ces pousses sont encore employées comme condiments après avoir été marinées dans la saumure ou le vinasgre. Les pointes extrèmes servent à faire d’excellentes confitures, il 162 LES BAMBOUS. dont le goût a quelque rapport avec celui des pâtes d’angé- lique. On sait également, en Chine, préparer les pousses en con- serves au moyen de la dessiccation, comme nous le faisons en France pour les légumes. Quand elles sont parfaitement sèches, on en fait des ballots qu’on expédie dans la Mantchourie et dans les plaines immenses de la Mongolie, où elles rendent un grand service à la population, condamnée en hiver à une di- sette continuelle. Avant de s’en servir, on les trempe dans l’eau tiède pour les faire revenir, et, en effet, elles redevien- nent tendres. Nous avons puisé ces quelques renseignements dans un petit ouvrage de M. Verdier-Latour, Chancelier de la Légation de France en Chine, imprimé à Alger en 1854, par l'imprimerie du Gouvernement, sous le titre : Études sur les Bambous. De notre côté, nous avons essayé, en diverses occa- sions, de manger des Jeunes pousses de Bambous, préparées de différentes manières, mais nous devons avouer que; jusqu'à présent, nous ne leur avons trouvé qu'un goût fort médiocre; peut-être les avions-nous mal préparées; peut-être aussi, pour les bien apprécier, nous aurait-il fallu le palais des Indiens ou des Chinois. Nous ne serions pas étonnés, du reste, qu'avant de faire cuire ces jeunes pousses, il y eût une préparation à leur faire subir, car, en croissant, elles sont enveloppées de gaines spathiformes emboîtées les unes dans les autres, et celles-ci deviennent, par la cuisson, aussi coriaces que du parchemin; 1} y aurait donc nécessité de s’en débarrasser, soit avant soil après la cuisson, ce qui devient un travail assez difficile. En outre, certaines espèces de Bambous ont leurs gaines spathiformes recouvertes de poils assez rudes, autxe inconvénient qui pourrait avoir de fächeuses consé- quences. Dans les contrées où croissent les Bambous, les populations sont souvent très-nombreuses et très-denses, et 1l n’est pas rare que les premiers éléments de nourriture leur fassent . défaut; bien des fois elles ont eu à subir de terribles disettes qui, sans le secours inespéré de ces végétaux, y eussent amené une mortalité effroyable. En certaines années, les Bam- PROPRIÉTÉS ET USAGES. 163 bous ont sauvé la vie à des populations entières, en leur four- nissant la seule nourriture qui fût à leur portée. C’est ainsi que, dans les deux volumes que nous avons déjà cités du Journal de lu Société d'Agriculture et d'Horticulture de l'Inde, on lit qu’à Oressa, en 1812, à la suite d’une floraison sénérale de Bambous, la fructification fut tellement abon- dante qu'elle prévint une famine. Les graines fournirent une nourriture à des milliers de personnes, el un grand nombre n’eurent pas d’autres ressources. Des centaines d'individus veillaient jour et nuit à mettre en sûreté celles qui tombaient des branches. M. Shaw Stewart, collecteur à Canara, sur la côte occiden- tale de l'Inde, dit qu’en 1864, à la suite d’une floraison géné- rale des Bambous dans les jungles de Soopa, un très-grand nombre de personnes, estimé à 90000, venaient des districts de Dharwar et de Belgaum pour recueillir les graines. Chacun restait de dix à quatorze jours, récoltant suffisamment pour sa consommation durant les mois de la mousson, et mème de quoi en revendre. Il ajoute, on le comprend, que cette fructi- fication fut un grand bienfait pendant cette grande disette. M. Gray, écrivant de Malda, en 1866, dit ceci : « Dans le district du Sud et sur toute l'étendue de la région, le Bambou a fleuri, et les graines se sont vendues au bazar à raison de 43 seers (26 livres) pour 3 roupies (7 fr. 50), prix de 10 seers de riz, et les paysans en emmagasinèérent encore pour leurs propres besoins. Des centaines de paniers (le panier est de 100 livres) furent vendus au bazar anglais, à Malda, et de orandes quantités envoyées à Sultangunge et autres endroits distants de 25 à 30 milles. On voit quelles énormes provisions ont pu être faites. » M. Gray ajoute : « La récolte du Bambou a été tout à fait providentielle, car les paysans étaient sur le point de mourir de faim. » M. Hooker dit que, dans le Sikkim, le Prung (Arundinaria Hookeriana) donne abondamment des graines chaque année ; que ces graines, longues e£ noires, sont bouillies comme le riz; qu'on en fait des gâteaux ou qu’on les utilise pour la bière. 164 LES BAMBOUS. En dehors de ces produits alimentaires tirés des pousses et des graines des Bambous, on peut extraire de leurs tiges une liqueur sucrée qui se coagule à Pair et qui sert à préparer dif- férentes boissons fermentées assez agréables, paraît-il, mais ce n'est que pendant la croissance de la tige et en la tronquant qu’on peut obtenir cette sorte de liqueur. Plusieurs espèces de Bambous d'Amérique renferment dans l'intérieur de la tige une eau potable et très-fraiche, fort re- cherchée des voyageurs et des tribus indiennes. Au Jardin du Hamma, nous avons cherché à recueillir de cette eau sur les orandes espèces de l'Inde, les seules que nous possédions Jus- qu’à présent, mais nous n'avons pu constater ce fait. Aux nœuds de certains Bambous, et plus particulièrement, d’après Roxburgh, sur le Melocanna bambusoides, il se forme des dépôts d’une matière appelée Tabasheer, composée de silice, d’un peu de chaux et d’une faible quantité de matières organiques. Ce produit, qui tient de la nature de l’opale, était autrefois employé comme médicament à propriétés merveil- leuses; les indigènes le nomment Chuna Lime. Nous n'avons pas le Melocanna bambusoides au Hamma ; mais sur les quatre orandes espèces de Bambous qu’on y cultive, nous avons vai- nement cherché cette matière, qui est considérée comme un bon caractère dans la détermination des espèces. On rapporte que, dans bien des localités, les feuilles de cer- taines Bambusacées sont employées comme fourrage pour les chevaux. C’est sous le rapport industriel qu’il faut voir tout ce que l'on peut faire avec les tiges des Bambous. Déjà en 1865, etau point de vue horticole, il se faisait en Angleterre une grande consommation de tiges d’une espèce de Bambusacée apparte- nant sans doute au genre Phyllostachys. Ces tiges, qui ve- naient de l'Inde, étaient destinées à servir de tuteurs aux plantes, et elles remplaçaient avantageusement les bâtons peints en vert qu’on employait depuis longtemps. Il n’est pas douteux que si dans le midi de la France, en Algérie et dans les pays analogues, où le bois manque, on culüivait le Phyl- lostachys mitis etle Ph. Quilioi, ces deux espèces pourraient PROPRIÉTÉS ET USAGES. 165 y rendre de très-grands services en fournissant des tuteurs pour l’échalassement de la Vigne. Depuis 1868, nous confectionnons constamment, au Hamma, avec des tiges de Bambous, des charpentes légères, pour supporter les elaies sous lesquelles sont abritées du so- leil toutes nos cultures de multiplication de Palmiers. Ces charpentes sont fendues en deux dans leur longueur; les tiges ayant 12 mètres en moyenne, elles nous produisent donc cha- cune 2% mètres. Si cette charpente devait être en sapin, elle nous coûterait 6 francs les 24 mètres et sa résistance serait de bien plus courte durée. Rien n’est curieux comme de constater les usages que l’on fait des tiges de Bambous, en Chine et au Japon, au point de vue de l’économie domestique; on peut dire que les habitants les approprient à tous leurs besoins. D'abord, avec les grosses espèces, ils font des charpentes, des poutres, des solives pour la construction deleurs habitations, des échelles, des ponts pour passer les petites rivières, des hangars, des magnaneries, des séchoirs, des kiosques. Ils trouvent ainsi le moyen de réunir la légèreté, la solidité et la durée, car les Bambous sont peu attaqués par les insectes el ne sont jamais envahis par la pour- riture sèche. En 1869, nous avons mis sous les yeux des mem- bres de la Société d’Acclimatation un morceau de Bambou d’un mètre de long qui, depuis un temps considérable, avait servi, dans le Jardin du Hamma, à toutes sortes d’usages, notamment comme pièce de palissade, sans avoir éprouvé aucune détérioration. Les tiges, comme chacun le sait, sont divisées de distance en distance par des nœuds qui offrent une grande résistance, mais qui peuvent être percés d’outre en outre à l’intérieur; aussi sait-on les utiliser pour les conduites d’eau. A cet effet, les tiges une fois percées, on les enduit extérieurement et intérieurement d'huile, puis on les fait noircir au feu. Ainsi préparées, elles sont plus solides, moins poreuses, tout à fait à l'abri des insectes, et peuvent être mises en terre sans qu'il y ait danger de les voir pourrir. Sciées à une longueur voulue et au-dessous d’un nœud qui 166 LES BAMBOUS. en forme le fond, les tiges procurent encore des vases, des pots, des godets à engrenage pour puiser l’eau, des pots à tabac, des tasses à boire, le tout d’une seule pièce et d’un excellent usage pour la population ouvrière de la Chine et du Japon. Dans ces deux pays principalement, les habitants, très-indus- trieux, savent, avec la patience qui les caractérise, travailler le Bambou d’une façon merveilleuse, l’adaptant à tous leurs besoins domestiques et journaliers; ils en font des chariots à bras, des lits, des palanquins, des chaises, des fauteuils, des tables, toutes sortes de meubles d’une extrême élégance et réunissant toujours la légèreté et la solidité. Avec les lamelles ils font de jolies boîtes et de jolis petits paniers. Avec les tiges de petite ou de moyenne grosseur, on fait des manches pour les instruments aratoires, des manches de fouets, des cannes, des sarbacanes, des cannes à pêcher et d’autres engins pour le même usage ; sous ce rapport on les recherche beaucoup. Elles sont, selon les espèces, ou d’un beau jaune, comme les Phyllostachys mitis, aurea, Quilioi, violascens, ou d’un jaune grisâtre, comme les Bambusa macroculmis, vul- garis, Hookeri, ou d’un très-beau noir, comme le Bambusa nigra. Dans tous les cas, elles sont luisantes, comme polies et vernissées, et l’industrie sait les rendre encore plus brillantes au besoin. Le bois, en admettant ce mot pour un instant, est très-dense, très-dur, très-résistant; il entre un peu de silice dans sa composition , c’est ce qui explique la difficulté qu’on éprouve lorsque l’on coupe les tiges, car souvent les outils s’émoussent. Aussi, lorsque les Indiens, les Chinois et les Ja- ponais veulent le travailler, ils commencent par le rendre plus souple et plus tendre en exposant dans l’eau bouillante ou plutôt à la vapeur d’eau; pour certains usages, ils s’en servent lorsqu'il est encore vert; les outils et les ustensiles de toutes sortes qu'ils en confectionnent sont excellents. Les Chinois, pour préparer certains médicaments ou toute autre matière qui pourrait être altérée par le contact d’un instrument de métal, emploient des couteaux de Bambous; ainsi, C’est d’un outil de ce genre qu'ils se servent pour ratis- ser leur racine de Gin-seng (Panax quinquefolium). PROPRIÉTÉS ET USAGES. 167 Les Bambous servent aussi à la fabrication d’un très-bon papier, doux et solide, appelé papier de Chine. Toutes les parties de la tige s’emploient pour la fabrication de sa pâte, qu’on obtient par la macération et la trituration, après toute- fois que les tiges ont été divisées par lanières. Pour se garantir des ardeurs du soleil, les Indiens et Îles Chinois portent de très-grands chapeaux qui les protégent également contre la pluie; ces chapeaux sont faits avec des lanières de Bambous. La coiffure des soldats chinois est éga- lement confectionnée avec des Bambous très-secs, entremêlés de petites lames de cuivre; à la fois légère et solide, elle ré- siste très-bien aux coups de sabre et protége convenablement la tête sans la surcharger d’un poids fatigant. Les éventails se confectionnent avec le Bambou: comme il peut se couper en lanières extrêmement minces, il est très-propre à ce genre d'industrie, et l’usage en est tellement considérable et uni- versel aujourd’hui, qu’en Chine, il s’en fabrique annuellement plus d’un milliard, qui sont dispersés sur toutes les parties du globe. Ceux de Soutchao sont renommés pour leur solidité et leur élégance. Il y en a qui sont de véritables chefs-d’œuvre de patience, tant à cause des sculptures microscopiques qu’on y remarque qu'en raison de la finesse des lames; 1ls sont d’un prix très-élevé. Mais où le Bambou est appelé à un service journalier dans ces contrées où le soleil est très-ardent et la chaleur très-intense, c’est dans la confection des parapluies ou des parasols. Il s’en fabrique des quantités considérables et le commerce en est immense en Chine; toutes les populations de l’Inde en font usage ; on les expédie de Canton pour Bombay, Calcutta, etc.., en quantités assez grandes pour composer chaque année le chargement de plusieurs navires d’un tonnage assez élevé. Les plus estimés sont ceux qui viennent du Japon; ils ont les tiges en Bambou; le dessus est recouvert de papier de Bambou, huilé et gommé à l’intérieur comme à l'extérieur, imperméa- ble et résistant aussi longtemps que les étoffes de soie ou de coton employées en Europe. Le prix de revient de ces para- pluies est très-modique, puisqu'on peut s’en procurer à rai- 168 LES BAMBOUS. son de 50 centimes la pièce. En Chine, les parapluies ne sont pas uniquement destinés, comme chez nous, à protéger con- tre la pluie ; leur principale utilité est même de mettre à l'abri du soleil; vu la modicité de leur prix, il n’est pas un Chinois qui n’en possède un, non plus qu’un chapeau et un éventail, le tout en Bambou; on conçoit alors quelle consommation en est faite rien que pour cette spécialité. Avec les toutes petites tiges, les Chinois et les Japonais font leurs plumes à écrire, les manches de leurs pinceaux et de leurs petits outils, des étuis, etc. Divisées en fibres très-ténues, les tiges permettent de fabri- quer d'excellents cordages, des toiles grossières, des cor- beilles, des nattes, fréquemment employées dans ces pays. Pour établir à peu de frais d'immenses barrages dans les rivières, à l'effet d’y arrêter le poisson, c’est encore aux tiges de Bambous qu’on a recours, au moyen de grandes perches réunies; la rareté du bois et son prix élevé ne permettraient pas de l’employer à cet usage. Par suite de sa résistance et de sa durée, le Bambou est aussi mis à contribution pour former des haies, des palis- sades très-résistantes. Ses feuilles servent de toiture aux habi- tations et de bourre pour des lits confortables. Dans ces contrées où l’usage de fumer le tabac et l’opium est presque général, le Bambou devient encore indispensable ; avec ses petites tiges on fait les tuyaux, avec la base des tiges ou la partie souterraine on fait les fourneaux des pipes. La quantité qui s’en fabrique annuellement est très-considérable. La population chinoise étant de plus de trois cent millions d’âmes, on ne doit pas s'étonner de l'importance du com- merce qui se fait avec les pipes; il n’est pas rare de voir dans les ports de mer des jonques uniquement chargées de ces produits. Comme partout ailleurs, il y a en Chine des ama- teurs d'objets fantaisistes et qui les collectionnent; on y re- cherche beaucoup les tuyaux de pipe faits de liges de Bam- bous très-anciennement coupées; une tige de cinquante ans se vend de 100 à 150 piastres. Un riche marchand de Canton montrait comme l’objet le plus précieux qu’il pos- PROPRIÉTÉS ET USAGES. 169 sédât, un tuyau de Bambou très-simplement incrusté d’or, qu'il estimait 500 piastres; il avait plus de deux siècles. Pendant leur croissance, les tiges sont remplies d’une moelle très-abondante, mais qui se résorbe au fur et à mesure que ces tiges se constituent. En Chine, on récolte cette moelle, on l’utilise pour l'éclairage des habitations. On la fait sécher, puis on la coupe par tranches fines; préparée de la sorte et plongée dans une solution de salpètre, elle brûle très- longtemps dans l'huile, sans charbonner et sans qu’on ait besoin de la renouveler avant plusieurs jours. La force des tiges, leur résistance, leur légèreté et leur élasticité les font employer à la mâture des petites et des moyennes embarcations de toute sorte. On en fabrique ce que l’on ne craint pas d'appeler, en ces pays, des instruments de musique, c’est-à-dire les instru- ments les plus criards et les plus discordants que l’on puisse imaginer, mais dont les oreilles indiennes et chinoises pa- raissent pleinement satisfaites. Des fragments de chaumes per- cés de trous nombreux deviennent des épouvantails pour les oiseaux carnassiers. Atlachés à l'extrémité d’une perche ousur les arbres du voisinage des poulaillers, ils sont le jouet des vents, qui, passant à travers les trous qu'on y a pratiqués, déterminent un bruit qui effraye les oiseaux rapineurs. On sait qu'en Chine on se sert souvent de pigeons voyageurs ; il pa- rait qu’on y emploie un moyen assez ingénieux de les proté- cer dans leur course : des sortes de petits sifflets, confection- nés toujours avec des Bambous, sont attachés à leurs plumes de façon que l'air, s’y introduisant énergiquement, grâce à la rapidité de leur vol, détermine un son prolongé dont l’étran- geté écarte les gros oiseaux qui pourraient poursuivre les pigeons voyageurs. Du reste, sir Emerson Tennent, dans le premier volume de son ouvrage sur Ceylan, rapporte un fait assez curieux « Dans la presqu'île de Malacca, dit-il, on a converti le Bam- bou vivant en un instrument de musique naturelle : on le perce de trous au travers desquels le vent soupire de la plus charmante manière. En 1847, M. Logan, en approchant des 170 LES BAMBOUS. villages de Kandingee, contigus à la frontière de la colonie européenne de Malacca, entendit des sons, les uns doux et lim- pides comme ceux d’une flûte, les autres graves et majestueux comme ceux d’un orgue. En s’approchant d’un groupe d’ar- bres, il remarqua un Bambou grêle, haut de 40 pieds, et s’as- sura que ces sons musicaux en provenaient, causés par le passage de la brise au travers des trous de sa tige. Les instru- ments confectionnés de cette manière sont appelés par les in- digènes Bulu perindu, c’est-à-dire Bambou plaintif. Ceux que vit M. Logan avaient un trou à chaque nœud, en sorte que chaque tige possédait de quatorze à vingt notes. » Le Bambou, qui rend tant de services aux populations asia- tiques, se transforme quelquefois en instrument de guerre : on en fait des flèches et des lances; on remplit les grosses tiges de poudre, de goudron et de salpêtre, et elles deviennent des brülots qui portent l'incendie et la mort sur les jonques ennemies. En Chine, le Bambou vient volontiers en aide à la loi; il en impose le juste respect, et les épaules des malheureux coolies sont là pour attester le fréquent emploi qu’en font faire leurs mandarins, sous forme de baguettes ou de lanières. N'oublions pas que nous avons lu dans une note du D’ Ed. Mène que, dans leurs grands jardins, les Chinois mêlent sou- vent à leurs rochers artificiels des bouquets de Bambous noirs dont l'effet est magnifique. Les produits et les modes d'utilisation du Bambou étaient largement représentés à l'Exposition internationale de cette année 1878. La section des Indes néerlandaises contenait un grand assortiment d'engins marins de toutes sortes, fabriqués avec cette précieuse plante, notamment des radeaux, des mâtures, des instruments de pêche; les chaumes étaient de dimension moyenne. Le Pavillon de l'Exposition du Nicaragua, entièrement construit en Bambous, avait la plus haute origi- nalité. Les chaumes, fort semblables à ceux de notre Bambusa macroculmis, sans dimensions supérieures à celles obtenues à Alger, en différaient par une teinte plus sombre, due sans doute à une certaine préparation, à un vernis préservatif, qui PROPRIÉTÉS ET USAGES. 171 semblent donner à ce Bambou une texture plus dense et plus serrée. Dans cette construction rustique et du goût artistique le meilleur, on remarquait l’habile enchevêtrement et l’ajus- tement précis des chaumes, avec lesquels on obtient une grande force jointe à une extrême légèreté, avantages très-appréciables pour l'habitant de ces contrées, exposées aux fréquents caprices des volcans et aux ravages des cyclones. Des chaumes appartenant au B. vulgaris, d’un diamètre très-moyen, étaient exposés par la République d'Haïti. Une collection de Bambusacées des plus utiles à étudier, si elle eût été placée dans des conditions faciles d'examen, était celle des Possessions anglaises de l’Inde. On y voyait un Bam- busa gigantea, d’un diamètre d'environ 0",20, ne différant de de notre B. macroculmis que par une teinte foncée presque vineuse; puis des espèces plus petites, ayant de grands méri- thalles longs de 0",60, atteignant quelquefois 1 mètre, etc. L'exposition annamite montrait, au milieu d'objets très- divers, deux paquets d'un curieux Bambou dont le rèle serait bien apprécié dans l’industrie. Ses chaumes ronds, de 1 à 5 cen- timètres de diamètre, offrent cette particularité que chaque nœud constitue une saillie bien prononcée, en forme de colle- rette ou de bourrelet circulaire ; au-dessus de ce bourrelet on en remarque un autre, ordinairement plus foncé, de dimen- sions moindres, portant des traces de l’attache périphérique de la gaine. Aucune trace de cannelure sur les mérithalles, longs de 0",40 à 0",50. La couleur est jaunâtre; des taches de couleur marron, paraissant naturelles, sont parsemées sur ces mérithalles. C’est surtout dans les sections chinoise et japonaise que l'utilisation pratique et artistique des Bambous s’étalait dans toute son originalité, et que l’on constatait de nombreuses espèces encore inconnues dans nos cultures. Ceux à tiges diversement colorées, mouchetées; ceux à couleur d’acajou, ceux marqués de larges taches marron, sont pour nous autant de nouveautés naturelles, ou le résultat d’un art de prépara- tion qu'il nous faudrait introduire ou imiter. Les artisans de ces pays reconnaissent au Bambou un tel cachet d'originalité 172 LES BAMBOUS. qu'ils limitent en bronze dans leurs œuvres en métal; leurs sculptures de pots à tabac, faits avec un seul mérithalle, étaient au-dessus de toute imitation ; la vannerie, obtenue avec toute la finesse que donnent les lanières fibreuses du chaume, sur- passait tous les ouvrages de ce genre confectionnés avec les pailles les plus renommées ou avec les produits Les plus est1- més des Palmiers. Notre plus grand intérèt était de connaitre les dimensions moyennes de tous les chaumes exposés. Jamais nous n’avons constaté que ceux récoltés en Algérie fussent inférieurs en dia- mètre, et, si quelques spécimens très-rares figuraient à cause de leur diamètre de (",23, disons que le Jardin d'essai du Hamma avait exposé une touffe entière du B. macroculmis, extraite avec toute sa souche, dont les chaumes de 0",19 de diamètre avaient plus de 20 mètres de haut. Les habitants des contrées où croissent les Bambous nous ont montré aussi quelles applications ils savaient leur réserver dans leur industrie agricole ; les magnaneries exécutées dans leur moindre détail avec toutes les parties de cette plante; les clayonnages en Bambous noirs garnis de toutes leurs ramifi- cations ; les palissades ou les treillages ; les planches ou lames de Bambous servant aux toitures, aux panneaux pleins, etc., et qui paraissent être obtenues par la section longitudinale du chaume en deux parties égales, qui sont ramollies dans Peau chaude ou sous l’effet de la vapeur d’eau, puis soumises à une forte pression qui écrase ces demi-cylindres, les aplatit entiè- rement, en leur laissant cette surface plane, toujours fen- dillée de lignes parallèles, mais très-homogène et très-résis- tante, si elle est enduite de cette matière grasse dont les Bambous paraissent être recouverts en Chine et au Japon. L'étude de ces divers emplois nous a encore démontré que les Bambous nés en Algérie avaient aussi, quand ils étaient coupés, séchés et travaillés dans de bonnes conditions, cette même densité, ce même vernissé semblable à du vieil ivoire, qualités reconnues à ceux qui sont originaires des contrées asiatiques. Des propriétés médicinales du Bambou, nous n’avons rien PROPRIÉTÉS ET USAGES. 173 à citer; la concrélion siliceuse formée dans les nœuds et connue sous le nom de Tabasheer ou Tabaschir, est seule employée par les Indiens, plutôt comme talisman que comme remède efficace. Sont aussi exagérés les principes toxiques qu'on prétend retirer de certains organes de la plante, et dont les effets seraient des plus dangereux et des plus incompréhensibles ; il faut laisser tous ces racontars au domaine du merveilleux, dont sont avides toutes ces populations indiennes ou chi- noises ; cependant il convient de rechercher sur quelle base 1ls reposent. Parmi les divers renseignements que nous nous sommes procurés sur ce sujet, une personne qui a habité long- temps la Chine nous a rapporté le fait suivant, confirmé par M le docteur Savatier, médecin de la marine, qui a parcouru longtemps la Chine et aussi le Japon où il est fixé : «J'avais pour employé un Chinois qui, en voyant culliver chez moi le Bam- busa vulgaris, m'a affirmé que ses compatriotes se servaient des poils cadues d’un organe spécial de celte espèce, pour se défaire de leurs ennemis sans être inquiétés par la police. IIS ramassent ces aiguilles minuscules et les placent subreptice- ment sur les mouchoirs, lits ou étoffes diverses que pourraient toucher leur ennemi; ces poils s’introduisent ainsi dans les fosses nasales où ils irritent la muqueuse et déterminent un fort coryza ou rhume de cerveau. Ce coryza s'aggrave; une inflammation qu’on ne saurait arrêter, puis une suppuralion active s’ensuivent, avec d’affreuses douleurs, et le malade périt misérablement dans des tortures atroces, sans qu’on puisse lui porter secours et souvent sans savoir de quelle manière lui vient la mort. » Ces petits poils agissent comme les raphides de certaines Aroïdées, qui s’implantent dans la gorge et y causent des acci- dents inflammatoires des plus funestes. On comprend qu'il soit inutile d’insister sur cette question, traitée incidemment dans le seul but de bien préciser la nature d’effets dus à une action non pas toxique, mais {out à fait mécanique. On voit, par ces quelques détails sur les usages du Bambou, de combien de manières il est employé et quelles ressources 174 LES BAMBOUS. de travail il procure à une partie considérable des popula- tions indienne, chinoise et japonaise. Aussi serait-il grande- ment désirable, en raison des services qu'il pourrait nous rendre également, de voir la culture s’en répandre dans nos contrées méridionales et surtout dans notre colonie algé- rienne, dont la population en tirerait des produits certaine- ment rémunérateurs. € Ce serait pour notre pays, a dit M. Verdier-Latour, et sans aucun doute, une nouvelle source de richesse nationale. » Lorsqu'on examine, au Jardin du Hamma, ces énormes touffes de Bambous, qui s’y forment si facilement, et surtout cette allée de 346 mètres de long que nous avons citée déjà comme la plus belle voûte de verdure qu'il soit possible de voir; lorsqu'on se trouve en face de massifs composés d’une touffe unique, occupant une superficie de 2 mètres carrés et portant de vingt à vingt-cinq tiges de 12 à 17 centimètres de diamètre, on se prend à s’attrister sur la pénurie de bois à laquelle se trouve réduite l'Algérie, faute de forêts; on songe avec peine qu’au lieu de rencontrer partout, comme cela de- vrait être et comme il serait si facile d’y arriver, de grands massifs de ce précieux végétal, c’est à peine si quelques rares plantations existent, et l’on est réduit à faire venir du Nord, avec des frais excessifs de transhbordement, les bois qui font défaut. Les grandes espèces, les Bambusa macro- culmis, maxzima, vulgaris, le Phyllostachys milis égale- ment, prospéreraient on ne peut mieux dans toute la région du littoral, dans les parties basses de la Mitidja, dans les plaines du Cheliff, de la Macta et de l’Habra, de Bône, sur les bords des lacs Fetzara, de La Calle, sur les rives des ruis- seaux, où ils réussiraient tout particulièrement, partout enfin où ils formeraient si bien des haies vives ou des brise- vents. Comme moyen de dessèchement, il n’est pas un végétal doué d’un pouvoir plus absorbant, dû à sa végétation rapide, la plus rapide sans doute que l’on ail constatée Jusqu'à ce jour, car il ressort de nos expériences que le Bambusa ma- croculmis, au moment de son développement, pousse à raison PROPRIÉTÉS ET USAGES. 170 de 0",27 par 2% heures, et que le Phyllostachys miltis, toujours dans le même espace de temps, arrive jusqu’à don- ner des pousses de 0",56. C’est ce pouvoir absorbant et cette prompte végétation que nous avions voulu utiliser quand il s’est agi du dessèchement du lac Fetzara, qui recouvre une surface de 13 000 hectares, et dont les émanations miasmatiques contribuent à entretenir dans toute la contrée de Bône cet état insalubre si contraire au développement de la colonisation. Nous avions proposé de clrconscrire cette immense surface aqueuse, au moyen de plan- lations de Bambous sur les bords mêmes des eaux, afin d’em- pêcher d’abord leur déplacement, en constituant des berges artificielles. Dans le cours de celte étude, nous avons assez démontré quelle était la nature du Bambou pour faire com- prendre combien ces robustes végétaux auraient rapidement lancé leur vigoureux système de rhizomes très-avant dans les parties marécageuses, dont l'élément liquide aurait été bientôt absorbé par ce réseau de nombreuses racines, produisant d’in- nombrables tiges sur leur parcours. A la suite de cette première ligne de végétaux en contact immédiat avec l’eau, nous aurions placé des massifs d'arbres, d'Eucalyptus par exemple, et nous sommes persuadés que, grâce au concours d’absorbants si puissants, nous aurions diminué par ce seul moyen, sinon complétement, du moins dans une notable proportion, l’éten- due recouverte par les eaux. Par la coupe des Bambous et des arbres forestiers, nous aurions assuré des revenus annuels, tout en protégeant la contrée des effluves paludéennes, consé- quence inévitable d’un dessèchement par canaux, qui aura pour effet d'exposer, pendant des années, à l’action du soleil, les matières organiques accumulées depuis des siècles au fond du lac. Nous avons constaté bon nombre de fois, et nous voudrions l'appliquer dans la pratique, ce pouvoir asséchant des Bam- bous, dans différentes plantations qui, peu de temps après des irrigations, ne présentaient, au milieu d’un véritable tissu de racines, qu'une terre sèche et poudreuse. Ce projet de dessèchement et d’assainissement que nous 176 LES BAMBOUS. voulions exécuter au lac Fetzara avec cette sorte de végétaux, s’'appliquerait aussi, on le conçoit, à toutes les régions ana- logues de l’Algérie et de l’Europe méridionale; les espèces seules varieraient suivant le degré thermique de la contrée. Ainsi, dans le sud de l’Europe, tous les Phyllostachys, princi- palement les plus grands, seraient employés de préférence à cause de leurs racines traçantes; les parties marécageuses des rivages de l'Espagne, de l’Italie notamment, ces terres humides des bords de l’Adriatique où la culture du riz est difficile, les marais de la campagne de Rome s’assainiraient, s’utiliseraient, donneraient des revenus avec des plantations régulières de Bambous, peut-être les seuls végétaux de nature à produire un résultat pratique et efficace dans de telies stations. L'emploi des Bambous serait encore utile pour protéger les berges contre les ravages des eaux impétueuses, en certaines saisons. Des plantations de Bambous, dans lesquelles la vase et les détritus de toutes sortes formeraient des berges artifi- cielles, contiendraient les rivières dans leur litet atténueraient ces ravages annuels préjudiciables à tous. Il faut bien le recon- naître, les ingénieurs et les différents agents des travaux pu- blics n’utilisent pas assez dans ces sortes de questions, ces essences végétales appelées à leur rendre bien souvent de réels services, qu'ils réclament ordinairement à des moyens d’action plus dispendieux, moins logiques et moins naturels. Depuis peu de temps quelques essais de culture commen- cent à êlre tentés; le Bambou a déjà conquis une petite place dans nos habitations au point de vue de la décoration; mais, comme toujours, on rencontre chez nous cette hésitation el celte apathie pour les choses les plus utiles, dont on a tant de peine à nous faire sorlir. C’est là le continuel obstacle à la vul- garisation de produits qui souvent pourraient accroître notre bien-être et notre fortune; nous ne savons pas encore entre- prendre par nous-mêmes; 1l faut qu’on entreprenne pour nous avant que nous nous mettions à l’œuvre à notre tour, et nous n’arriverons qu'à grand'peine à nous persuader que nous pouvons marcher sans brassières. Il n’est pas douteux que si PROPRIÉTÉS ET USAGES. 177 le midi de la France et notre Colonie algérienne avaient des cultures de Bambous, les produits en seraient écoulés on ne peut plus facilement; nous en avons la preuve dans les de- mandes continuelles qui nous sont faites au Jardin du Hamma. Bien que ces végétaux ne soient pas aussi indispensables à l’Europe qu’à l'Asie, nous sommes certains qu’ils sont appelés à un succès considérable; le commerce horticole, tout d’abord, en retirerait grand profit, puis les régions où le bois manque absolument et celles où 1l est lent à se produire. Le champ des suppositions est accessible à tous : supposons donc 1 hectare, 10000 mètres carrés entièrement plantés de Bambous ; supposons encore que chaque mètre donne seule- ment deux tiges, et qu’au lieu de valoir 5 francs, prix actuel, leur valeur soit réduite à 2 francs pour en rendre l’écoule- ment plus facile et plus sûr; voici donc un hectare de ter- rain qui rapportera...…..? On n'ose citer les chiffres! Qu’on suppose maintenant quatre tiges au lieu de deux! Et remar- quons qu'il n’est pas rare de rencontrer des touffes qui en portent douze ! En 1869, en publiant le premier Catalogue du Jardin du Hamma, nous avons émis l'opinion qu'il serait bon de tenter la culture des Bambous traçants sur les berges ou les talus qui bordent les chemins de fer; non-seulement ils y donneraient des produits rémunérateurs, mais encore, au moyen de leurs rhizomes souterrains très-coureurs, ils fxeraient le sol et em- pècheraient souvent, surtout dans les terrains légers, les ébou- lements de se produire. Dans les parties de ces talus ou de ces berges où la terre serait de bonne qualité, on pourrait uti- lement employer les Phyllostachys mitis, nigra, Quilioi et aureæ. Dans les parties, au contraire, où la qualité des terres serait inférieure, la plantation serait faite en Phyllostachys viridi-glaucescens et en Arundinaria Simoni, ces deux espèces élant plus traçantes que les précédentes, surtout l’'Arundinaria Simoni, qui souvent enfonce ses rhizomes jusqu'à 80 centimètres de profondeur. En outre, toutes les deux sont très-robusles. Une objection sérieuse pourrait être faite à la culture de ces 12 178 LES BAMBOUS. Graminées sur les lignes de chemins de fer, c’est celle des incendies qui pourraient se produire: en effet, la nature d’ap- parence sèche des tiges, la chute de leurs feuilles, quelquefois très-abondante, pourraient faire craindre des accidents de cette sorte, mais nous ferons observer que les feuilles des Bambous s’enflamment assez difficilement. On pourrait, du reste, séparer de loin en loin les îlots par des espaces laissés vides sur une distance de quelques mètres. Une autre observation pourrait nous être adressée : que fera la Compagnie des tiges de ces Bambous”? en trouvera-t-elle le placement assuré dans l’industrie? Oui, certes, l’écoule- ment en serait assuré si, comme en Chine et au Japon, en dehors des autres services qu’elles peuvent rendre, on utili- sait ces plantes à la fabrication du papier. Les matières dont se fabrique le papier, on l'entend dire journellement, commen- cent à devenir rares; on recherche activement les plantes qui pourraient en produire; ne serait-ce pas le cas de songer aux Bambous? Mais c’est une question économique et non de cul- ture à résoudre. En Algérie, les vastes étendues de terrain ne manquent pas pour y établir cette culture, qui non-seulement est lucrative, mais encore très-facile; presque toutes les par- ties chaudes ou tempérées se prêtent merveilleusement à celle des espèces traçantes; déjà quelques plantations de Bambou noir se forment aux environs de Bouffarik et de Cherchell; on ne saurait trop les encourager, afin que la France s’affran- chisse peu à peu du tribut qu’elle paye aux Indes. La grande difficulté qui se présentait était celle d’une propagation nom- breuse et rapide; elle est résolue et, nous l’espérons, la partie pratique du travail que nous terminons aujourd’hui en est la preuve. On voit que nous n’avons pas exagéré en disant innombrables les usages des Bambous, usages dont beaucoup pourraient convenir à nos pays, et quelles ressources ils sont à même de fournir à l’industrie et au commerce; on comprendra facile- ment dès lors le grand intérêt que porte à leur culture la Société d’Acclimatation qui nous a demandé ce travail. Puisse-t-il, indulgemment accueilli par nos collègues, pro- PROPRIÉTÉS ET USAGES. 179 voquer chez quelques-uns d’entre eux le désir de doter notre pays d’une branche lucrative de commerce et pousser en avant ceux qui, déjà entrés dans la voie, en apprécieraient plus distinctement le but! C’est là notre plus grand désir. X DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES DANS LES CULTURES D'EUROPE ET DU NORD DE L’AFRIQUE Il y a quelques années, nous n'avions pas encore introduit au Hamma toutes les espèces qui forment maintenant cette belle collection admirée de tous. L'Établissement possédait un certain nombre de plantes qui, bien que portant des noms dif- férents, n'étaient souvent que la même espèce; aussi nous sembla-t-il urgent et de la plus grande nécessité de réunir sous une seule dénomination, la plus exacte possible, tous ces termes spécifiques appliqués à une même plante. La vérification de cette nomenclature était d'autant plus réclamée que nos procédés rapides de multiplication sous ce climat favorable commençaient à répandre, dans une très- large proportion, ces précieux végétaux, non-seulement en Afrique, mais dans tout le bassin méditerranéen et en Europe. Il convenait alors de les bien différencier, de les bien préci- ser, afin que leur culture et leur multiplication, établies d’après deux groupes bien distincts, fussent rendues plus faciles. En présence des difficultés que nous avons démontrées de dénommer exactement les Bambous, on comprend que cer- taines de ces plantes peuvent avoir reçu par des botanistes des noms bien différents des nôtres, mais, sans aucun moyen de contrôle, nous nous sommes bornés à maintenir la nomencla- ture connue et en usage dans les cultures, en supprimant toute synonymie, ou plutôt en ramenant au type le plus exact toutes ces mêmes plantes portant les termes spécifiques les plus variés. Il'importe surtout de réformer cette propension à mettre au catalogue le plus grand nombre de noms d'espèces, les- quelles souvent ne représentent qu’une seule et même plante avec des origines diverses ou un développement différent, sui- vant lesterrains ou les milieux. C’est en réunissant tout ce que DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 181 les cultures européennes en possédaient c’est en mettant dans les mêmes conditions de végétation toutes celles existantes en Algérie, que nous avons pu, à l’aide de caractères extérieurs décrits dans celte étude, rapporter au mème type toutes ces mêmes plantes d'une spécification si variable. Certainement il reste encore beaucoup à faire pour élucider la question, que nous ne pouvons résoudre, mais, au point de vue pratique, il en résultera cet effet, qu'ayant vu, sous le ciel du Hamma, tous ces végétaux se développer dans toute leur force et leur vitalité, les Bambous qui sortiront de ce grand centre de mul- tiplicalion auront pour nous, sinon une nomenclature bota- nique indiscutable, du moins une individualité propre, c’est- à-dire que la diffusion d'une même plante ne se fera pas sous des noms différents. Alors on pourra leur appliquer, sans crainte d'erreur, le climat, la culture et la multiplication qui conviennent aux deux groupes que nous avons formés avec les Bambous connus dans nos cultures et dans nos col- lections. En dehors des vingt-trois Bambous décrits dans cette étude et qui constituent les plus importantes des espèces réunies dan: nos collections d'Europe ou du nord de l’Afrique, nous en avons encore quelques-uns en expérimentation, et un grand nombre d’autres sur lesquels les essais n’ont pas toujours été heureux, sans cependant être concluants. Parmi ces diverses tentatives, on a à regretter la perte d’es pèces réellement remarquables, notamment d’une plante américaine, l'A run- dinaria macrosperma, Michaux, qui n’a pu supporter les lenteurs du voyage, Bambou qui rendrait des services dans toutes nos parties tempérées de l’Europe et s’avancerait même vers le Nord. Un envoi important de Java, adressé au Hamma en 1870, sur notre demande, eut à subir quelques retards préjudi- ciables, en même temps que l'emballage laissait à désirer pour un si long voyage; néanmoins, nous püûmes voir végéter pen- dant un certain temps les espèces suivantes, qui, encore fai- bles, furent détruites par les froids exceptionnels de l'hiver de 1871. Elles étaient accompagnées des noms suivants, dont 182 LES BAMBOUS. quelques-uns sont consignés dans la Monographie du Colonel Munro : Gigantochloa maxima. — — var. minor (?). a atler. — apus. — aspera. Melocanna brachyclada. — — lutea. Bambusa vulgaris. — — lutea. Plus quelques autres Bambous, dont un épineux, sous le nom de B. species, et certains de nomenclatures diverses, dont on ne trouve pastrace dans les Monographies de Ruprechtetde Munro. Quoi qu’il en soit, les échantillons que nous avons eus à notre disposition nous ont offert des facies que nous ne con- naissions pas encore ; beaucoup même avaient des panachures ou lignes jaunes assez larges, nullement semblables à celles du Bambusa vulgaris vittata de nos cultures. Si, d’après les indications fournies, ces espèces n'avaient pas de grandes dimensions en hauteur, du moins le chaume de quelques- unes était-il remarquable par l’épaisseur de ses parois. Ces plantes, originaires de climats très-chauds, ont paru sen- sibles au premier hiver qu’elles ont eu à supporter, et elles ont fini par disparaitre sans avoir manifesté grande végéta- tion. Seul, le Melocanna brachyclada lutea a résisté quel- ques années, puis il a disparu, tué insensiblement par les mau- vaises saisons, après nous avoir montré, avec des chaumes panachés, des feuilles également lignées de jaune. Les espèces décrites dans ce chapitre sont classées dans les deux groupes formés par les caractères déjà indiqués. Le premier groupe à végétation automnale et à touffe ces- piteuse comprendra les espèces suivantes, rangées par ordre de tailles constatées dans nos essais. Leur végétation est limi- tée aux régions chaudes et tempérées du bassin méditerranéen. DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 183 1° Bambusa macroculm.,A.Riv.Répandusouslesfaux noms Do s 7° 8° Qe 10° de B .arundinacea et media(?). vulgaris, Wendl. Même espèce dans les culturesqueles B.Thouarsii, Madagascariensis, distorta. vulgaris vittata, A. Riv. Même plante dans les cultures que le B. variegata. Hookeri. Au Hamma, même espèce que celles cultivées sous les noms de B.mazimaetaltissima(?). spinosa, Roxburgh. siricta, Roxburgh. Même plante que le B. verticillata des cultures. stricta argentea ou striata argentea, Hort. gracilis, Hort. et variétés ou formes. gigantea, Wallich. scriptoria, Dennst. Le deuxième groupe comprendra les Bambous à végétation vernale et à rhizomes traçants, également rangés par ordre de tailles constatées dans nos essais. Leur végétation, vernale dans le bassin méditerranéen, est estivale dans le centre et vers le nord de l’Europe, où le tempérament robuste de ces espèces leur permet de s’avancer. 11: Bambusa ou Phyllostachys mitis, Poiret, ou edulis. 1 Je 1 3° 4 4° Î 5° 1 6° 1 7e 18 1 9e 20° 2 29e 23° _- .Quilioi, Hort. — viridi-glaucescens, Carr. — nigra, Lodd. — aurea, Hort. — fleæuosa, Hort. — violescens, Hort. — sulphurea, Hort. Arundinaria Simoni, Carr. — Japonica ou metake, Sieb. _ falcata, Nees. et formes. — Fortunei, fol. var., Van Bambou à chaume carré. [Houtte (?). 184 LES BAMBOUS. Comme taille, l’Arundinaria Simoni se place entre le Ph. Quilioi et viridi-glaucescens, et l'Arundinaria falcata entre les Ph. nigra et aurea, mais les chaumes de ce dernier sont beaucoup moins forts que ceux de ces deux espèces. PREMIER GROUPE. Bambusa macroculmis, À. Riv. Bambusa arundinacea, Retz. 45 à 25 mètres de hauteur, — 15 à 19 centimètres de diamètre. (Végétation automnale, touffe cespiteuse.) C’est l'espèce qui produit, en Algérie, les plus grosses touffes, les plus longues et les plus fortes tiges; au Jardin du Hamma, celles-ci atteignent rapidement la hauteur prodigieuse de 15 à 25 mètres, sur un diamètre de 15 à 19 centimètres. Elle frappe l'imagination par l'effet qu’elle produit, par sa rapide croissance, par les services qu’elle pourra rendre. Bien qu’elle soit généralement connue et répandue sous le nom de B. arundinacea, nous croyons cependant ne pas devoir lui conserver ce nom, qui paraît mieux s'appliquer à une autre espèce originaire de la Chine, dont la description n’a aucun rapport avec celle-ci. Au véritable Bambusa arundi nacea de Chine on n’assigne aucunement les dimensions véri- tablement remarquables de notre espèce, et de plus, caractère bien saillant, on le signale comme épineux. En attendant qu’on rapporte notre Bambou à une plante déjà nommée, s’il y a lieu, nous le décrirons sous le nom de Bambusa macroculmis, à cause des grandes dimensions acquises par ses chaumes. La touffe est très-cespiteuse ; son rhizome, très-ramassé sur lui-même, présente, au bout de quelques années, une masse compacte formée de racines, de débris de tiges et de bour- geons avortés, qui élèvent la souche au-dessus du sol (fig. 1). Le turion ou jeune bourgeon, quand il a atteint environ DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 185 50 centimètres, reste un instant stationnaire et présente un caractère qui sert à le différencier des espèces voisines. Il est cylindro-conique, assez élargi à sa base, composé de gaines d’un brun plus ou moins rougeâtre, terminé par des limbes avortés en forme de languettes longues de 10 à 20 centimètres, un peu en gouttière (fig. 2). Ces gaines accompagnent le chaume dans son développement jusqu’à une très-grande hau- teur, puis elles s’en détachent en commençant par la base. D'abord d’une consistance molle, la gaine devient coriace et acquiert en peu de temps une constitution solide et presque ligneuse. En son jeune âge elle a une teinte rosée, recouverte sur toute sa surface de poils courts, également disposés, violacés et blonds; elle présente par place de larges taches lie de vin, cependant elle est excessivement variable dans ses tons généraux. Les bords extérieurs sont garnis de poils blancs d'autant plus apparents que, bien souvent, ils font opposition sur la base foncée de la gaine supérieure sur laquelle ils sont appliqués. La ligule, située au sommet de la gaine, est membraneuse, pectinée, fimbriée, composée de poils ayant souvent 1 centi- mètre de longueur; elle est à l’état rudimentaire dans les gaînes de la base et du sommet. Ces gaines spathiformes sont terminées par un limbe avorté, à l’état d’aiguillon dans les premières gaines du chaume, mais qui, à son sommet, cons- titue de véritables feuilles : avant de prendre son caractère foliacé, ce limbe est rougeâtre, plus foncé que la gaine elle- mème, et est parsemé de petits poils. A la chute des gaines, dans les touffes adultes, les chaumes présentent d’abord un aspect brun avec des reflets dorés ou rouge cuivré, de nuances variables, dues au jeu de la lumière sur le duvet très-épais et court qui tapisse ces chaumes. Si l’on enlève prématurément ce duvet, la véritable couleur du chaume apparaît, mais le temps se charge de cette opération : peu à peu cette matière tomenteuse devient moins épaisse au contact de l'air, perd sa fraicheur, prend une teinte plus claire, puis sa couleur feuille morte, qui n’est pas encore la couleur définitive. C’est pendant les premières intempéries 186 LES BAMBOUS. de novembre que, lavés par les pluies, frottés les uns contre les autres par l'effet du vent, les chaumes ne tardent pas à prendre leur teinte véritable, d’un vert mat lisse, qu’ils con- servent pendant leur période de végétation. En vieillissant, leur dernière métamorphose se traduit par la décoloration ; ils deviennent de couleur bois mort, jaune pâle, et s’ils ne sont pas coupés à leur cinquième ou sixième année d'existence, quelques moisissures, quelques plaques de lichens indiquent qu'ils sont à la limite de leur vie. Dans les jeunes chaumes développés par des touffes non adultes, la couleur est moins variable, et ordinairement, à la chute dés gaînes, ils sont d’un vert terne; ils sont parsemés de petits poils blonds et caducs. Les nœuds sont peu saillants. Les chaumes portent dès la deuxième année des ramifications en faisceau. Sur les vieux, ces ramifications sont droites et longues, renflées à leur base; elles se trouvent décrites au chapitre Végétalion aérienne. Les feuilles naissent à l'extrémité des ramules, disposées par huit à dix de chaque côté, distiques, alternes et sur un même plan. Variables de dimensions, elles ont ordinaire- ment de 20 à 25 centimètres de long sur 4 à 5 centimètres de large; limbe aminci, arrondi à la base et s’attachant à la gaine par un court pétiole contourné sur lui-même. La face supérieure est verte, à stries apparentes; la face inférieure est plus pâle, avec une nervure fine, claire, assez marquée. Sous le climat de l'Algérie, l'extrémité des feuilles est tou- jours sèche. Les chaumes, droits, s’infléchissent légèrement au sommet. Fleurs. — Les fleurs de ce magnifique Bambou se sont montrées pour la première fois, dans nos cultures du Jardin du Hamma, en octobre 1879, sur une des touffes les plus an- ciennes. Contrairement à ce qui a lieu habituellement dans les autres espèces de Bambusacées, les inflorescences de celle-ci se développèrent presque directement sur la souche même, à la base de vieilles tiges entières et sur quelques-unes qui avaient été tronquées ou coupées à quelques centimètres au-dessus de la souche. Ces inflorescences sont simples ou peu DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 187 ramifiées; leur longueur peut varier de 0",50 à 1 mètre. De- puis leur base jusqu'à leur extrémité, qui est légèrement flexueuse, on remarque à chaque nœud une quantité assez considérable de petits or- yanesréunisenune masse compacte et qui présente une forme globuleuse, plus ou moins développée (fig. 14). Elle est due à la réunion des fleurs por- tées par de petits épillets courts (fig. 15), dont le nombre peut s'élever jus- qu’à cent vingt par grou- pe, par conséquent à cha- que nœud. Le point d’in- sertion desépillets occupe la moitié de la circonfé- rence de la tige; mais, d’après leur mode de sroupement, ils entou- rent complétement celle- ci, au point qu'on dirait qu'ils sont disposés en verticille, et cependant ils ne sont que subverti- ER ; À F , 6. 15-16-17. cillés, puisqu'ils n’occu- M4 Fig, 15-16-17 pent, par leur point d’a- BAMBUSA MACROCULHMIS ip ? fs 14. Inflorescence agglomérée. dhéi ence, qu une partie Évrbon d'nloreseenen. : : APP 16. Graine de grosseur naturelle. de la circonférence de la NT Brninn Eros tige. Les ramifications de l’inflorescence sont simples et peu nombreuses; 1l en naît une alors, une seule, du centre d’un glomérule, qui s’allonge en une tige simple, généralement grêle, flexible, d’une longueur qui varie entre 0",10 et 0,50, La distance d’un glomérule à l’autre varie également : à la base de l’inflorescence, elle est de 0",10 à 0",14, mais elle 188 LES BAMBOUS. n'est plus que de 0",02 à l'extrémité. Mêmes variations pour la grosseur de ces verticilles : ceux d': la partie inférieure sont beaucoup plus développés que ceux de l'extrémité, lesquels se traduisent parfois par la réunion de trois ou quatre épillets seulement. Chaque glomérule est accompagné à sa base d’une feuille bractéale dont la longueur et la largeur varient selon sa posi- tion à la base ou à l'extrémité de l’inflorescence; souvent la longueur dépasse 5 centimètres et la largeur peut, vers la base, atteindre 7 millimètres. Sa forme est acuminée, allongée. Les ramifications de l’inflorescence naissent, comme nous le savons, du centre des glomérules. Elles sont accompagnées, à leur base, d'organes scarieux, ayant une disposition dis- tique, et dont la forme rappelle celle d’une glumelle à base élargie. Ces organes portent à leur aisselle des épillets réunis en groupe et qui sont le commencement de la formation des ulomérules. Observés un peu plus haut sur la même ramifica- tion, les organes scarieux se modifient pour prendre le carac- tère de feuille bractéale, parce que les glomérules aussi se sont constitués, c’est-à-dire caractérisés. Ceux-ci, considérés en eux-mêmes, ne sont que des rameaux raccourcis, compri- més, et dont l'expansion végétative s’est faite latéralement et circulairement autour d’un très-petit axe, au lieu de s’allon- ger. Telle est, du moins, notre opinion d’après les observa- tions que nous avons pu faire sur les échantillons assez nom- breux que nous avons étudiés. Nous avons dit que les inflorescences du Bambusa macro- culimis, que nous observions en 1872, étaient nées à la base de vieilles tiges entières ou coupées depuis déjà longtemps; c’est donc sur la souche même, et parfois entre les premiers verticilles de racines aériennes, que cette végétation a eu lieu pendant deux années consécutives, car le fait s’est renouvelé en 1873. Lorsque ces inflorescences étaient sur le point de se développer, elles apparurent sous la forme de bourgeons dont la grosseur pouvait égaler celle du pouce, chacun composé de plusieurs gaines scarieuses, assez épaisses, coriaces, apicu- lées, distiques et imbriquées. C’est du centre de ces organes DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 189 que sont sorties les inflorescences, plusieurs ensemble et sur un même point, montrant déjà dès leur base les glomérules accompagnés de leur feuille bractéale. Mais, en 1876, un jeune chaume tronqué par le vent a produit à chaque nœud, au lieu de simples ramificalions, des tiges florales, ainsi que le représent: la figure 14. C’est la seule fois que nous ayons constaté cette floraison aérienne quelque peu avortée. Les fleurs du Bambusa macroculmis sont hermaphrodites ; elles sont portées sur de petits épillets courts, multiflores et disposés en glomérules compactes et semi-verticillés à chaque nœud, composés chacun d’un nombre d’épillets tout à fait variable de quatre à cent vingt. Ces épillets sont petits, courts; leur hauteur est de 8 à 10 millimètres; leur forme un peu déprimée se ressent de la compression qu'ils subissent dans leur disposition en glomé- rules compactes. Ils sont muliflores, portant quatre, cinq ou six fleurs distiques ou imbriquées, fertiles quelquefois en Lota- lité, tandis que, dans d’autres cas, les deux ou trois premiéres de la base avortent, ainsi que la dernière, celle de l'extrémité. Chaque fleur d’un épillet est composée : 1° D'une glumelle inférieure, mince, transparente, haute de 4à 7 millimètres, large de 4 à 5 à sa base, lorsqu'elle est étalée. Le sommet est plus ou moins obtus et terminé par une petite pointe aiguë, comme un mucron. Les bords sont légère- ment ciliés. Les deux surfaces sont glabres et parcourues par de très-petites nervures longitudinales, au nombre de douze à seize. 2 D’une glumelle supérieure beaucoup plus petite et com- plétement enveloppée dans la glumelle inférieure. Elle est de forme naviculaire, un peu allongée, bicarénée, à deux ner- vures dorsales assez saillantes; elle est extrèmement mince, transparente; son extrémité se termine en deux pointes à peine visibles. Les bords, ainsi que les nervures dorsales, sort garnis de nombreux poils blanchâtres, assez longs relative- ment à la petitesse de cette glumelle. 9° D'une glumellule (paléole, squamule ou lodicule), extrê- mement petite, à peine visible à l'œil nu, de forme allongée, 190 LES BAMBOUS. de couleur transparente. Ses bords, ainsi que son extrémité, sont comme ciliés, fimbriés, pectinés. La glumellule manque dans le plus grand nombre des fleurs; ce n’est que très-rare- ment que nous avons pu l’observer, et celles que nous avons rencontrées faisaient généralement face à la glumelle supé- rieure. Il nous est arrivé cependant de coüstater, dans deux ou trois fleurs, que la glumellule occupait parfois l’un des côtés. Ce caractère, Joint à l’absence des deux autres glumel- lules, indique suffisamment qu’elles ont avorté, comme dans les fleurs, où elles font complétement défaut. Les étamines, au nombre de six, sont insérées à la base et autour de l'ovaire. Leur longueur dépasse de quelque peu les enveloppes florales. Le filet est grêle, filiforme, de couleur blanche, long de 7 à 8 millimètres. Les anthères, de couleur jaunâtre, sont suspendues par leur partie dorsale; elles sont biloculaires, longues de 3 millimètres et pointues au sommet. Au moment où le pollen va s'échapper, elles s'ouvrent dans toute leur longueur. Le pistil est composé d’un ovaire très-petit, un peu globu- leux, comme légèrement déprimé sur ses deux faces longitu- dinales, et velu. Le style est long de 4 millimètres environ et de couleur brunâtre. Le stigmate est simple, long de 3 mil- limètres, également brunâtre et légèrement papilleux. Le fruit a la forme d’un grain de blé, un peu renflé à l’une de ses extrémités et quelquefois pointu à autre (fig. 16 et 17). | La multiplication du Bambusa macroculmis a lieu : Par section des tiges, avec des mérithalles de deux ans; Par division de jeunes touffes; Par éclats de souche. C’est l'espèce la plus vigoureuse et dont la reprise est la plus facile. La multiplication et la culture de ce Bambou ont été don- nées comme exemple dans les chapitres spéciaux. DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 191 Bambusa vulgaris, Wendi. Bambusa Thouarsii, Kent. PB. Madagascariensis, Hort. B. distorta. Nees. 12 à 15 mètres de hauteur. — 8 à 10 centimètres de diamètre. (Végétation automnale, touffe cespiteuse.) Le Bambusa vulgaris est originaire des îles de Madagascar ét Bourbon; on le confond très-souvent avec le B. macrocul- mis (arundinacea) ; ce sont cependant deux espèces bien diffé- rentes. Parmi celles qui sont cultivées au jardin du Hamma, c’est, après cette dernière, l'espèce arborescente qui atteint les plus fortes dimensions : de 12 à 15 mètres de haut, de 8 à 10 centimètres de diamètre. Comme dans tous les Bambous, la tige n’est que la conti- nuation du rhizome qui sort de terre pour se développer à l'extérieur avec les caractères qui lui sont propres. A la base de la tige et sur toute la partie souterraine émergent de nom- breuses racines réunies en verticilles très-rapprochés. Le rhi- zome, avant de se redresser, se traine horizontalement dans le sol sur une longueur de 10 à 30 centimètres; parfois, s’il se trouve trop rapproché de la surface, il s’y replonge de nou- veau, sans doute afin d'y puiser une nourriture plus abon- dante. À leur sortie de terre, les tiges du B. vulgaris ne sont pas serrées les unes contre les autres comme dans les B. macro- culmis, Hookeri et autres analogues; elles ne forment pas, par conséquent, des touffes aussi compactes que ces der- nières, mais ces touffes ont un immense développement, pro- duit par les nombreuses tiges qui partent d’un rhizome cen- tral; le dessin ci-joint peut en donner une idée exacte (fig. 18). Ce rhizome, on le voit, porte un très-grand nombre de ra- cines quise sont développées en verticilles très-rapprochés, el d'autant plus nombreuses et fortes qu’elles sont voisines de la surface du sol. Elles naissent toujours au-dessus de la cica- trice circulaire laissée par la chute des écailles et sur quatre 192 LES BAMBOUS. rangées alternant entre elles. Elles sont cylindriques, très- longues, grèles, sans ramifications, portant cependant sur les côtés quelques petites radicelles courtes, chargées elles-mêmes de petits corps radicellaires. Lorsque Ja plante est placée dans des conditions favorables à son développement, il n’est pas rare de voir naître plusieurs bourgeons sur le rhizome; 1ls sont rangés symétriquement, en suivant l’ordre distique alterne particulier aux Bambous, ainsi que le représente la figure 18; il en peut naître aïnsi jusqu’à dix, cinq de chaque côté, et superposés régulière- ment. Assez souvent quelques-uns avortent, le rhizome qui les porte ne pouvant fournir suffisamment à la subsistance de tous. Lorsque les tiges sont sur le point de se développer, elles apparaissent au milieu de ces faisceaux de racines, un peu au-dessus de la cicatrice laissée par la chute des écailles, et sous la forme de bourgeons écailleux. Quand ceux-ci ont alleint 10 ou 15 centimètres de long, ils sont composés d’écailles imbriquées, distiques, alternes et très-rapprochées ; d’abord très-courtes, elles grandissent au fur et à mesure de la croissance du bourgeon. Les deux ou trois premières écailles observées à la base de la tige sont distantes entre elles de 15 à 25 centimètres; cette distance devient plus grande tant que la tige grandit, puis elle diminue lorsque la végéta- tion se ralentit. À l’état de turion, le jeune bourgeon ou la tige en dévelop- pement est presque aussi gros au sommet qu’à la base : il est d'aspect verdâtre, couvert de poils bruns. Ses limbes, avor- tés, au lieu d’être en forme de languette, sont cucullés. Ces caractères du jeune âge sont très-différents de ceux du B.ma- croculmis. Lestiges, pendant leur croissance, sont couvertes de grandes et larges gaines spathiformes, à dispositions distiques, les- quelles, observées sur des sujets arrivés au maximum de leur grosseur, sont hautes de 0",12 à 0",15. A la base des tiges, c’est-à-dire au niveau du sol, elles les embrassent compléte- ment, au point que les deux bords se recouvrent l’un l’autre FiG. 18. — BAMBUSA VULGARIS Développement et formation d’une souche. f CET Ur. | NS ot L 72 ÿ i + [A pi A 4 4 v "7 br : CU CR "= Lei k 11 Le de MT 2e SR : + . L ds a 1 . 4 ” . 1 - = LE Lg po é Ja DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 195 de plusieurs centimètres. À mesure que croit la tige, les gaines deviennent plus longues; elles peuvent avoir de 0",20 à 0",98, et leur largeur, à leur partie basilaire, peut en mesurer jusqu'à 38. Étalées, elles sont, dans le plus grand nombre des cas, plus larges que hautes (fig. 19). Quant à leur forme, elle est très-variable ; cependant, considérant principalement celles qui sont situées vers le centre de la tige, elles offrent l'aspect d’un triangle, d’une équerre à sommet tronqué, dont la base est plus longue que les deux côtés. Vers les trois quarts de la hauteur de la tige, cette forme se mo- difie ; elles deviennent alors beaucoup plus longues que lar- ses, et cela s'explique, puisque la tige va en diminuant de grosseur. Quoi qu’il en soit, elles sont très-épaisses, coriaces, de couleur verdâtre durant le cours de la végétation, mais prenant par la suite une teinte d’un jaune pâle, principale- ment lorsqu'elles sont sur le point de tomber, car elles se détachent de la tige au fur et à mesure que celle-ci s’accroit. En outre, ces gaines spathiformes sont recouvertes, sur la plus grande surface de leur partie dorsale, surtout en haut, de nombreux poils d’un brun noirâtre, couchés, roides (fig. 19), et pénétrant très-facilement dans la peau, à laquelle ils causent une sensation désagréable, mais de peu de durée. La partie inférieure, au contraire, c’est-à-dire la face qui est appliquée sur la tige, est complétement glabre, luisante et comme vernissée. Pour une si grande gaine, la ligule est relativement petite ; c’est une sorte de petite membrane simple, de 2 millimètres à peine, de couleur brune, plus ou moins ciliée sur son bord, même sur les gaînes de la base. Sur le Bambusa vulgaris le limbe a une forme toute parti- culière. Sur les gaînes de la base, il se présente en triangle, haut de 0",04 environ, large de 0",045; mais sur celles du milieu de la tige il atteint jusqu’à 0",08 et 0",10, avec la même largeur, tout en conservant la même forme. Puis, à mesure qu’on approche de l'extrémité, le limbe se modifie : sa base se rétrécit, ses côtés s’allongent, il prend la forme d’une feuille. Au milieu de ces variations de forme et de gran- 196 LES BAMBOUS. deur, toujours il se termine en une pointe aiguë; 1l est épais, coriace, de couleur verdâtre d’abord, puis jaunissant comme la gaine, strié et plus ou moins couvert, sur les deux faces, de poils couchés, roides, d’un brun noirâtre. Il est persistant, et l’on remarque sur ses deux bords, depuis la base Jusque vers le milieu de sa hauteur, des expansions filiformes, filamen- teuses, tortueuses et assez longues, jaunâtres, et portant à leur base des sortes de poils de même couleur. Au sommet de la gaine spathiforme et de chaque côté du limbe est une expansion membraneuse de forme auriculaire, de couleur brunâtre ou noirâtre, et bordée de lanières fili- formes comme le limbe (fig. 19). Quelquefois elles sont peu apparentes, quelquefois très-développées, d’autres fois elles w’existent que d’un côté. Selon la forme et le caractère du limbe, il se produit, entre celui-ci et les expansions, un sinus plus ou moins ouvert et plus ou moins arrondi. La figure 19 représente une de ces gaines moyennes avec la disposition ordinaire des poils et les appendices auriculaires qui sont situés de chaque côté du limbe avorté. A la base de la tige, les gaines sont plus longues que les mérithalles; un peu plus haut, au contraire, elles sont plus courtes, puis redeviennent plus longues vers son extrémité. D'un autre côté, le limbe qui s’observe sur les dernières gaines est devenu une véritable feuille dont voici les caractères : Gaîne de la grosseur d'une plume à écrire, longue de 10 à 12 centimètres, enroulée autour de la tige, légèrement cou- verte de poils couchés, noirâtres. Ligule peu dévelop- pée, noirâtre, non ciliée. Limbe long de 0",15 à 0",20, large de 0",09, elliptique, allongé en pointe, glabre sur les deux surfaces, de couleur vert tendre, et bordé de petites dents épineuses. Expansions membraneuses auriculaires, noi- râtres, peu développées et non ciliées. Coussinet sur lequel repose le limbe, légèrement cilié. Le développement des tiges du Bambusa vulgaris com- mence à se manifester vers la fin d'août, pour se terminer vers la fin de l’année. Elles restent simples durant toute cette pé- riode de croissance et n’ont, comme organes appendiculaires, “DIIOAB OQUT NP 9100 onbuyo op sous Sumo s001puodde so] 2018 otmroyrpieds oups) SIUVOTNA VSOANVI — ‘67 OM | ie + “ . dre l we & Ré LAEe te tous + 3 € LA : De Ft CURE | tr ve 2: € ll DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 199 que les gaînes spathiformes qui, du reste, tombent peu à peu. Ce n’est que l’année suivante qu’elles se ramifient, commen- çant par constituer, au sortir de l’écaille qui les renfermait, un bourgeon de forme aplatie; l’année suivante, l’écaille, composée alors de deux membranes, se divise et laisse échap- per les jeunes pousses. Les ramifications portent à leur extrémité les véritables feuilles, qui se présentent horizontales ou sur un même plan, disposées distiquement et parallèlement, alternes, très-rappro- chées les unes des autres, ordinairement au nombre de quatre de chaque côté de la tige. Le limbe est plan; quelquefois ses bords sont un peu relevés; il est vert, avec une teinte jau- nâtre par moment, long de 20 centimètres, large de 25 milli- mètres, lisse, acuminé au sommet, élargi à la base, mais se rétrécissant brusquement à son point de contact avec la gaine, qui est jaunâtre et luisante. La face inférieure est un peu glauque, à nervure filiforme peu apparente. Le Bambusa vulgaris, habitant les régions chaudes, comme les îles Bourbon, Madagascar et certaines parties de l’Inde, ne pourra prospérer dans nos cultures que dans des conditions analogues. Au Jardin du Hamma, d'Alger, owÎT végète avec une extrême rapidité, ses tiges acquièrent des proportions relativement considérables; déjà, dès leur deuxième ou troisième année de végétation, elles présentent une certaine résistance, elles se caractérisent, portant des ramifications assez nombreuses qui commencent à naître vers le prin- temps. C’est une fois ces proportions acquises qu’elles présentent cette couleur verte et vernissée dont nous avons parlé, cou- leur qu’elles conservent plusieurs années, pour devenir d'un blanc sale ou jaunâtre, tout en restant luisantes. Les nœuds sont peu saillants, mais on y remarque une sorte de petit bourrelet grisâtre, ayant la conformation d’un anneau mince et faisant une fois et demie le tour de la tige; 1l sert de point d'appui à la gaine. Le premier nœud qui appa- rait au-dessus du sol porte un cercle de racines adventives, longues de 0",01 à 0",02, disposées en verticilles sur trois 200 LES BAMBOUS. rangs et alternant entre elles. Mêmes caractères sur les trois nœuds suivants, ces racines, toutefois, étant moins apparentes et seulement à l’état rudimentaire. Elles naissent ordinaire- ment à 0,01 au-dessus de l’anneau. Les mérithalles sont légèrement arqués, mais alternative- ment d’un nœud à l’autre, c’est-à-dire que chacun est arqué dans le sens opposé au précédent : par exemple, le premier l’étant sur le côté droit, le suivant l’est sur le côté gauche, et ainsi de suite, de sorte que la tige, tout en conservant une direction verticale, est légèrement mouvementée, sinueuse, et l’un de ses noms spécifiques, distorta, désigne bien ce carac- tère. La longueur des mérithalles est variable; cela dépend, dans bien des cas, de l’activité plus ou moins grande de la végétation; cela dépend aussi de la partie du chaume sur la- quelle on les observe. Au Jardin du Hamma, lorsqu'une louffe de ce Bambou a atteint son maximum de force, il n’est pas rare de voir les mérithalles mesurer de 0",15 à 0",30. Le chaume s'incline, chargé de ramifications peu agglomé- rées, très-vertes, flexueuses, grêles, peu longues, et serrées à tel point qu’il disparaît au milieu du feuillage. L'examen de la végétalion souterraine du Bambusa vul- garis n’est pas sans intérêt; le développement de ses tiges a lieu d’une facon toute spéciale. Si l’on arrache une tige aérienne avec sa partie souterraine, et cela une année après son développement et lorsqu'une nouvelle végétation vient de se produire, comme le représente la figure 18, on remarque d’abord que la tige, avant de sortir de terre, s’est traînée hori- zontalement, puis, qu'arrivée au maximum de son trajet souterrain, elle s’est redressée et est sortie du sol pour constituer une autre tige aérienne semblable à la précédente, portant à sa base six bourgeons, trois de chaque côté. Relative- ment gros, ceux-c1 se développent à angle droit, rampent hori- zontalement, soit à la surface du sol, soit à une profondeur qui peut aller jusqu’à 0",50, et lorsqu'ils ont atteint de 0",20 à 0°,2, ils se redressent pour sortir de terre et constituer le chaume ou tige. Durant leur végétation souterraine, ils sont composés de gaines nombreuses, de forme écailleuse, d’abord DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 201 très-rapprochées les unes des autres et comme emboitées, mais devenant plus distantes à mesure que le chaume s’al- longe et qu'il arrive au terme de sa longueur. Suivant la place qu’elles occupent, ces gaines offrent des caractères dif- férents : celles de la base sont à peine hautes de 5 centi- mètres, et le sommet en est obtus ; au-dessus elles sont plus hautes et leur sommet, légèrement cilié sur les bords, se ter- mine par une pointe aiguë. Si l'on détache d’un des bour- seons souterrains une des gaines qui occupent la partie mé- diane et si on l’étale, sa forme est celle d’un triangle à base plus longue que les côtés. Ces bourgeons, sur la plus grande partie de leur longueur, ne portent que des gaines simples, c’est-à-dire dépourvues de tout appendice, mais il en est autrement sur celles qui se rap- prochent de la surface du sol: celles-ci sont déjà plus grandes ; la pointe du sommet s’est modifiée et élargie en se transfor- mant en une sorte de limbe haut de 2 centimètres environ et large de 15 millimètres à sa base. Au sommet de la gaine on voit déjà apparaitre la ligule, qui est peu développée et qui n'offre rien de particulier. A la base et de chaque côté du limbe se forment des expansions membraneuses auriculaires, portant déjà des sortes de poils filamenteux. Les gaines souterraines sont coriaces, résistantes, glabres, d'apparence sèche, d’une couleur jaune paille très-pâle ; leur face inférieure appliquée sur la tige est très-brillante, et leur partie dorsale est terne; elles sont persistantes, mais il est bon d’ajouler que, par suite de leur situation, leur décompo- sillon à lieu pendant l’année qui suit leur formation. D'après ce mode souterrain de végétation, il est facile de comprendre que les tiges du Bambusa vulgaris sont plus éloignées les unes des autres que dans certaines autres espèces du même groupe; au bout de quelques années cependant, elles forment, par leur enchevètrement dans le sol, des sou- ches presque inextricables qui cependant ne s'élèvent pas au- dessus du sol comme celles du B. macroculmis. Les tiges offrent encore un autre caractère : toute la partie 202 LES BAMBOUS. aérienne est fistuleuse d’un nœud à l’autre, tandis que la partie rampante, souterraine, est complétement pleine. Ce Bambou n’a jamais fleuri en Algérie ni dans les cultures européennes. La multiplication du Bambusa vulgaris est très-simple par le bouturage de tronçons ramifiés de la tige. Il se fait aussi par division de jeunes touffes. On emploie également la divi- sion des rhizomes, mais avec cette réserve que le rhizome coupé seul ne végéterait pas; il a besoin d’être enlevé avec le pied ou la base de la tige qui lui a donné naissance : c’est une division par éclat. Le B. vulgaris exige un sol moins frais que celui dans le- quel se plaît le B. macroculmis, maïs il a la même rusticité sans avoir une végétation aussi vigoureuse. Bambusa vulgaris vittata, À. Riv. Bambusa variegata. Hort. 8 mètres de hauteur, — 7 à 8 centimètres de diamètre, (Végétation aulomnale, touffe cespiteuse.) Ce Bambou, que nous avons cullivé d’abord au Jardin du Hamma sous le rom de Bambusa variegala, ne nous a plus paru, à la suite de nos observations, pouvoir être considéré que comme une variélé du Bambusa vulgaris : même genre de développement que celui-ci, même sinuosité de la tige, avec l’arcure légère des mérithalles. C’est bien la plus saillante et la plus remarquable du genre. Les chaumes sont d’un beau jaune d’or, rayés de lignes et de bandes vertes dans toute la longueur de chaque mérithalle, mais diversement disposées sur chacun d'eux. Sauf dans quelques cas exceptionnellement remarqués, c’est toujours la couleur jaune d’or qui domine. Par contre, les gaines sont vertes et lignées de jaune. Malheureusement, ce caractère ornemental, qui serait recherché par l'industrie, ne se con- serve pas; les couleurs de la tige coupée disparaissent à me- DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 203 sure qu'a lieu son dessèchement, el elle n'offre plus qu'une surface très-vernie, mais entièrement décolorée, d’un blanc sale, comme celui du B. vulgaris dans un état avancé de vieillesse. Les tiges de cette variété du B. vulgaris se couvrent de ra- mifications, courtes mais peu touffues, qui leur forment une colonne de verdure tellement serrée qu’elles disparaissent au milieu. Toutes ces ramifications, même les plus petites, et quelquefois aussi les feuilles, présentent également les lignes de couleur dont il est question plus haut, vertes pour les unes, jaunes pour les autres. Le Bembusa vulgaris vittata se multiplie par les mêmes procédés que le simple B. vulgaris. Tous les caractères de panachures se reproduisent parfaitement, et, dans les nom- breuses multiplications que nous en avons faites, nous ne les lui avons jamais vu perdre. Il est peut-être un peu plus délicat que son type. Plusieurs autres espèces ou variétés non connues dans les cultures ont également des panachures constantes, tels sont les Melocanna brachyclada lutea etle Bambusa vulgaris lutea, plantes qui semblent différer entièrement de celle que nous analvsons ici. Il serait extrêmement important d’avoir à nou- veau, pour l’étudier, ce Bambusa vulgaris lulea que nous avions reçu de Java, afin de bien déterminer si le Bambusa vulgaris a deux variétés bien distinctes, l'une, que nous appe- lons PB. vulgaris vittata, l'autre, cultivée à Java sous le nom de B. vulgaris lutea. Cette plante est encore appelée Bambusa striata, Munro. Bambusa dumetorum, Hance. Sous ce nom se trouve, dans les cultures en serre d'Europe, une espèce à chaumes verts, qui, mise en pleine terre au Hamma depuis quelques années, n'est autre que le Bambusa vulgaris. 204 LES BAMBOUS. M. Munro fait de ce Bambou le Schizostachyum dumeto- rum, espèce naine à petits chaumes lisses et grêles, originaire de la Chine : elle n’a donc rien de commun avec notre grande plante, le Bambusa vulgaris. Bambusa Hookeri, au Hamma. Bambusa maxima, Poiret. Dendrocalamus Hookeri, Munro. 12 mètres de hauteur, — 8 c?ntimètres de diamètre. (Végétation aulomnale, touffe cespiteuse.) Ce Bambou, originaire d’Amboine et de la Chine, à une assez grande ressemblance avec notre Bambusa macroculmis ; mais il est, en Algérie, d’une végétation moindre et plus déli- cate, car 1l supporte mal nos hivers et ne végète que très-tar- divement, alors que la saison n’est plus favorable à son déve- loppement. Ces dernières considérations établissent donc une différence bien marquée entre ces deux espèces. Ce Bambou porte aussi, au Hamma, le nom de Grand Martaban. Nous l’avons également reçu sous la dénomination de B. Hookeri. Les turions ou bourgeons cylindro-coniques sortent de terre à la fin de l'automne, très-tardivement, et, dans certaines années, se développent avec peine au milieu de l'hiver, ils sont de couleur jaune verdâtre, recouverts de poils blonds, roux ou marrons, d'un aspect un peu hérissé à cause de leurs ligules fimbriées composées de filaments blonds, longs de 1-2 centimètres; ils sont accompagnés de limbes avortés, un peu cucullés, roides, pointus, bordés de rouge. Les gaînes spathiformes qui enveloppent le chaume ont une grande ressemblance avec celles du Bambusa macrocul- mis, mais elles sont plus pâles et couvertes de poils marrons, dressés et raides; leur partie supérieure se termine par des sinus arrondis en forme d’oreillettes un peu inclinées; leurs dimensions varient avec celles du chaume, et leur intérieur DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 205 est très-lisse. Leur caractère le plus saillant réside dans la ligule rougeâtre, peclinée (fig. 20), composée de grands fila- ments blonds. Jusqu'à une hauteur de 1°,50 sur le chaume, le limbe est réduit à l’état de pointe ou d’organe peu déve- F6. 20, — BAMBUSA HOOKERI Gaine, loppé ; mais à cette hauteur il commence à se transformer en une véritable feuille, caduque avant la gaine. Quand les gaines ont disparu, le chaume apparait d’abord d’un vert Lerne, couvert de poils blancs argentés, puis il brunit ou prend des teintes violacées. Les mérithalles sont droits, quelquefois longs de 40 à 50 centimètres, non renflés aux 206 LES BAMBOUS. extrémités, à nœuds non saillants, à gouttières sèches el peu apparentes. Le chaume est ordinairement très-droit ; Pextré- mité seule se recourbe. Les premières ramifications naissent vers l'extrémité du chaume et se produisent de haut en bas, sur tout son parcours jusque vers les premiers nœuds, près de la souche. Cest d’abord un bourgeon central qui apparaît recouvert de gaines poilues à ligules pectinées; quand il s’est allongé, d’autres poussent à sa base, munis de gaînes offrant les mêmes carac- tères, mais de dimensions moindres, et ainsi se trouve formé un faisceau de six ou sept ramifications assez longues, droites, légèrement violacées dans leur ensemble et terminées par des feuilles. Dans certains cas, les feuilles sont très-larges; elles sont remarquables par leur gaine violacée garnie, pendant un cer- tain temps, par des poils blancs et rudes, et par leur ligule légèrement pectinée. Le limbe, à stries apparentes, est d’un vert pâle, jaunâtre, dernière teinte due sans doute à l’action du froid, acuminé au sommet, mais arrondi à la base et s’at- tachant à la gaîne par un court et large pétiole contourné sur lui-même. A la face inférieure, la nervure médiane est accen- tuée; cette face est douce au toucher, veloutée, composée qu’elle est de petits poils mous, couchés, à peine visibles, qui lui donnent une teinte d’un vert d’eau. La base de cette face inférieure est garnie de poils blonds et soyeux réunis princi- palement de chaque côté de la nervure et s’étendant jusque sur le court pétiole. Certains rameaux abrités des intempéries développent des feuilles bien vertes, qui ont 25-50 centimètres de long sur 6 de large vers leur milieu, où elles sont un peu renflées. Le rhizome cespiteux est entièrement semblable à celui du Bambusa macroculmis ; mais, comme toute la plante, il est moins développé. Ce Bambou n’a jamais fleuri au Hamma. Cette plante sup- porte mal les intempéries de l'hiver en Algérie; les chaumes s’atrophient, ne se développent pas annuellement, ou attei- onent rarement des dimensions assez élevées. Les feuilles DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 207 sont jaunätres et évidemment souffrantes; l'extrémité des grands chaumes est souvent dégarnie ou desséchée. En Algérie, au Maroc, en Tunisie, cette espèce demande donc des expositions exceptionnelles pour bien végéter : abris des vents du nord, terrains arrosés l'été, non humides l'hiver. Nos essais dans un sol entouré d’eau pendant l’hiver donnent de mauvais résultats, également ceux exposés aux ardeurs du soleil dans une terre sèche; on peut d’ailleurs voir ces expériences comparatives dans l’île de la Mare du Hamma. Le littoral de la Tripolitaine, le bord des canaux de l'Égypte, sont des conditions favorables au développement de cette espèce, dont les chaumes très-droits sont également très- résistants et capables de rendre de véritables services. La multiplication est exactement semblable à celle du Bambusa macroculmis. En Algérie, les touffes étant peu garnies de chaume, la multiplication par éclat donnerait peu de sujets et fatiguerait la souche. Le bouturage est préférable, et des chaumes de deux ans, avant de bonnes ramificalions, offrent les meilleures conditions d’enracinement. La fin d'avril est une époque convenable pour multiplier cette plante, dont les boutures doivent être surveillées pour les arrosements et pour les binages, parce qu’elles ont moins de vitalité que celles des autres espèces. Bambusa spinosa, Roxburg. 8 à 10 mètres de hauteur. — 5 à 6 centimètres de diamètre. (Végétation automnale, touffe cespileuse.) Ce Bambou habite les Indes orientales, le Bengale, Calcutta, Tenasserim, etc., d’après Munro, et Java d’après Steudel. En Algérie, le jeune bourgeon ou turion sort de terre dans le courant de septembre ou d'octobre ; il est cylindro-conique, pointu, recouvert de gaînes d’un vert jaunâtre, qui se des- sèchent bientôt et deviennent grisâtres. A la base du chaume, 208 LES BAMBOUS. elles sont de dimensions réduiles comme hauteur, et termi- nées par une sorte de pointe ou limbe plus ou moins accusé, sans ligule apparente; plus le chaume allonge, plus leur développement s’accentue, et elles peuvent acquérir ainsi de 15 à 20 centimètres de hauteur avec une largeur égale à leur base; leur modification est très-sensiblement accentuée sui- vant leur place sur le chaume, bien qu’elles présentent des caractères variables avec les stations et la culture. Dans tous les cas, élalées, elles ont une forme triangulaire, terminées par un appendice ou limbe avorté, aigu, droit et perpendicu- lire, strié et poilu ; les deux côtés de ce triangle s’évasent à la base, et l’ensemble d’une gaine aplatie peut être com- paré à un grand ïer de flèche. Ces gaines sont fortement striées, garnies sur tout leur parcours de nombreux petits poils raides et foncés, agglomérés par place, principalement à la base; l’intérieur est lisse et strié. Leur ligule, très-apparente sur certaines gaines, est com- posée d’expansions en forme de poils longs et aplatis. Leur limbe, droit, presque cucullé, s’allonge de plus en plus et devient, vers l'extrémité du chaume, une véritable feuille verte, presque pétiolée, comme articulée, longue, ayant 3 ou 4 centimètres de large, renflée au milieu, acu- minée au sommet. Quelquefois le sommet de la gaine est légèrement auriculé ou forme un sinus. Gelte gaine n'occupe que la moitié de la longueur d’un mérithalle et ne l’enroule complétement qu'à la base. A sa chute, ou mieux, lorsqu'elle se déroule du chaume, car elle reste souvent suspendue ou retenue par une ramifi- cation, ce chaume apparaît recouvert d’une matière glauque assez adhérente qui, effacée avec le temps, le laisse d’un vert intense et lisse, mais il est décoloré et jaunâtre en vieillissant ; il est un peu en zigzag à cause de ses mérithalles arqués dans un sens, alternativement d’un nœud à l’autre, c’est-à-dire que chaque mérithalle est arqué dans le sens opposé au précédent. Les mérithalles sont hauts de 30 à 40 centimètres dans leur plus grand développement, présentant un aplatissement, ane DESCRIPTION DES ESPÈCES -CONNUES. 209 dépression, une large gouitière même, du côté de l'œil, dépression large à la base, mais qui s’atténue vers le haut. Le nœud est renflé, accompagné d’un bourrelet circulaire très- saillant et recouvert de poils nombreux, serrés, roses et dorés, bourrelet formant la gouttière où était enchâssée la gaine. A chaque nœud, un bourgeon d’abord unique, écailleux, détache ou fend la gaine et embrasse, par son empâtement, au moins le Uers du chaume. Ce bourgeon, qui constitue un rameau plus ou moins long, est vert, roide, un peu sinueux, ordinairement développé, à angle presque droit par rapport au chaume; il est enveloppé à sa base par des écailles sèches, persistantes, au nombre de huit à douze, disposées distiquement, c’est-à-dire sur deux rangs, et superposées les unes au-dessus des autres, en sorte qu’une ligne droite passe- rait par le milieu de chacune d’elles: elles sont très-aiguës ; étant élalées elles forment un triangle, un fer de flèche. Elles sont de consistance sèche, un peu violacées, striées, ayant sur le dos une arèête accentuée due à la dépression de la base durameau, couvertes de quelques petits poils rudes et rouges ; leur intérieur est strié et lisse; leur hauteur ne dépasse guère 7 à 8 centimètres, sur une largeur un peu moindre ; en résumé, elles sont un diminutif des caractères généraux dé la gaine spathiforme. Ces écailles, ou gaines réduites, presque persistantes (fig.21) ne disparaissent qu'après la formation de trois ou quatre rami- lications à la base de ce premier rameau; car d’abord, sous ces écailles, à la base et de chaque côté du rameau central, sont disposés deux yeux, élargis à leur base, pointus, aplatis, _renflés en leur milieu, enveloppés d’une membrane jaunâtre, lisse ; quelquefois 1l existe d’un seul côté, à la base d’un de ces deux gros yeux, un autre plus petit. Tous ces yeux doivent produire trois, quatre où cinq ramificalions qui émergent d'un même point (fig. 47). Ces ramifications sont d’inégales dimensions, souvent la centrale est plus forte que les latérales, souvent aussi c’est l'inverse. Une ramufication primaire présente les caractères généraux du chaume : même couleur verte moins la glaucescence, même 14 210 LES BAMBOUS. dépression du côté de l’œil, même goullière accentuée conte- nant les gaînes, etc... Elle est raide, tortueuse, longue de 1 mètre à 1”,50, portant des ramifications secondaires grêèles, de même couleur, avec les mêmes caractères moins accusés. L'étude de ces ramifications secondaires mérite d'être enre- gistrée spécialement, parce que c’est sur elles que se ren- contre plus marqué le caractère saillant de lespèce, la pré- sence des épines. La base des ramifications primaires et secondaires est, comme nous l'avons vu, accompagnée d’écailles sèches et persistantes, sous lesquelles sont deux ou trois gros yeux bien développés; au-dessus de ceux-ci se trouvent également d’autres yeux de dimension moindre, donnant naissance à des bourgeons, mais bourgeons qui avortent et se métamorphosent en véritables épines (fig. 21), dures, pointues, acérées, renflées à la base, un peu recour- bées, vertes, atteignant quelquefois de 3 à 4 centimètres de longueur. Ces épines se font jour à travers les écailles. Elles ne sont pourtant pas régulièrement distribuées et se dévelop- pent dans diverses circonstances et sur certaines parties de Ja plante. Dans les chaumes un peu vieux ou souffrants, sur des rameaux de la base d’une touffe qui se trouve alors dans de mauvaises conditions de végétation, sur des rameaux issus de chaumes tronqués, on constate plus régulièrement et plus oénéralement la présence de nombreuses épines. Il existe d’abord, à la base des ramifications primaires, deux épines très-développées (fig. 21) ; puis, toutes les ramifications secon- daires sont réduites à l’état de petites épines ordinairement ainsi disposées : une épine centrale plus ou moins longue et droite, ayant à sa base deux plus courtes et recourbées. Quand l'avortement en épine de ce rameau central n’a pas eu lieu, ilest long et grêle, et ses ramifications tertiaires sont plus ou moins développées, quoique souvent réduites aussi à l’état de petites épines sans régularité dans leur position. Ces épines sont des rameaux avortés : c’est un fait morpho- logique facile à constater et que nous avons cité bien souvent comme exemple dans nos cours depuis une dizaine d'années. Dans le jeune âge, ces épines sont accompagnées de gaines 16. 21. — LDAMBUSA SPINOSA. Chaumes et ramifications épineuses. DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 213 qui laissent sur elles des cicatrices circulaires; souvent ces gaines persistent quelque temps, d’autres fois ces épines portent des bourgeons qui avortent et produisent ainsi des épines ramifiées. Dans certains cas, à la base des ramifications pri- maires, près de leur insertion sur le chaume, une des deux épines s’est allongée en un véritable rameau; dans d’autres cas, si, au moment de l'apparition de ces rameaux, qui ont une tendance à l’avortement, on supprime la végétation supé- rieure de manière à faire refluer la force végétative en eux, ils constituent alors de fortes et vigoureuses ramifications. Tous ces faits ne laissent aucun doute sur l’origine de ces organes. Au sommet des ramifications secondaires grèles et genouil- lées sont les feuilles, distiques sur le rameau ou disposées sur deux rangs, alternes, au nombre de cinq ou six de chaque côté, rapprochées les unes des autres, terminant une gaine verte à ligule apparente bordée de rares et longs poils; le limbe est acuminé, long de 8 à 10 centimètres environ, large de 1 centimètre, se rétrécissant à la base en forme de pétiole aplati; sa couleur est d’un vert terne à sa face supérieure, à stries apparentes ; la face inférieure est un peu glauque, à nervure peu marquée. Les feuilles de cette espèce sont, au Hamma, toujours en partie desséchées, surtout à l'extrémité ou sur leurs bords, résultat sans doute des abaissements de température ou d’une humidité de l'air trop constante et trop froide pendant l'hiver. Les rhizomes sont peu profondément enfoncés, quelquefois ils sont à la surface du sol. Ils forment, par leur développe- ment en tous sens, un enchevêtrement inextricable dans lequel, pour l’arrachage ou la multiplication, la pioche a de la peine à se faire jour. Leur dimension moyenne ne dépasse pas la grosseur du poignet; ils sont courts, renflés, naissant à la base d’un chaume, rampant pendant 20 ou 30 centimètres pour se redresser ensuite et en produire un autre. Ils sont couverts d’écailles jaune pâle, lisses, striées, terminées par une pointe très-courte, plus ou moins aiguë; des racines les percent et s’allongent dans le sol. Dès que ce rhizome 214 LES BAMBOUS. sort de terre, ses écailles se modifient, elles deviennent dorées, plus larges; c’est-à-dire qu’elles sont alors de véri- tables gaines. - En 1874, nous avons vu fleurir le Bambusa spinosa sur des touffes peu vigoureuses, mais malheureusement les inflores- cences se sont égarées dans leur expédition à Paris, où elles devaient être dessinées; nous nous rappelons cependant qu’elles naquirent sur des hampes florales de 1 mètre environ, développées au pied mème des touffes. L'apparition des hampes florales basilaires, courtes, n’est pas un fait isolé, el toutes les inflorescences constatées sur les véritables Bambous du Hamma n’ont pas présenté d’autres caractères, car Îles Bambusa macroculmis et stricta n'ont jamais montré leurs fleurs sur les ramifications des chaumes, ainsi qu’on le remar- que sur les Phyllostachiyées et les A rundinariées. Cependant, d’après des souvenirs, le Bambusa spinosa aurait fleuri autrefois au Hamma sur de forts chaumes, dont les ramifications délicates et grèles portaient des fleurs éparses à olumes argentées, aspect d’ailleurs commun à la plupart des Bambusées. L’herbier du Hamma n’existant pas encore, on ne put retrouver trace des caractères floraux ni des épo- ques de floraison et de fructification. De la floraison de 1874 est résultée une fructification abon- dante dont les graines, semblables à du blé de qualité infé- rieure, ont produit un grand nombre de jeunes plants. A la suite de cette fructification, les touffes, quoique peu vigoureuses, n'ont présenté aucun signe de décadence plus marquée, et si quelques vieux chaumes séchèrent, des jeunes, rares il est vrai, les remplacèrent; si bien que ces touffes âgées et florifères sont encore dans un état assez salis- faisant en ce moment, bien que d’une médiocrité indéniable, due, avant tout, à leur mauvaise situation. Cette persistance de la végétation dans ce Bambou, qu’on regarde comme mono- carpique, n’est d’ailleurs pas un exemple isolé, puisque nos Bambusa macroculmis et stricla, qui ont fleuri dans les mèmes conditions, n’ont présenté aucun signe de ce dépérisse- ment presque complet chez les Phyllostachys flexuosa et DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 215 total chez les Arundinaria faleata. Nous citons ces faits qui peuvent être variables, comme pris d’après nature, et non comme résultant d’hypothèses ou de théories non confirmées par l'observation et la réalité. La description que donne Roxburg de linflorescence du Bambusa spinosa, rappelle celle que nous avons pu constater et se résume ainsi : Tige florifère aphylle ; panicule grande, très-fournie, épineuse, à épis presque toujours sessiles, sou- vent recourbés, aigus, portant de quatre à six fleurs longues de cinq à six lignes, coriaces, queiquefois monoïques, à rachis rarement visible sur les rameaux supérieurs, qui sont minces et grèles ; fleurs presque toujours réunies en verticilles très- denses, disposés à des distances presque égales. La glume inférieure est souvent dentée plus ou moins sur les bords. Le style est conique, bulbeux à la base; il se divise en trois par- ties, rarement en deux. M Hamima, le Bambusa spinosa, examiné sur des sujets bien adultes et isolés, forme de fortes touffes sphériques, à chaumes assez rapprochés les uns des autres, hauts de 8-10 mètres, tourmentés en zigzag, s’entre-croisant en tous sens, s’inclinant, garnis de rameaux | Loris et épineux. Les chaumés ne restent pas longtemps verts; ils Jaunissent ou brunissent sous l’action des abaissements de température. Quoique d’une végétation assez robuste dans son développe- ment, cette plante ne paraît pas être, au Hamma, dans son véritable milieu; il lui faudrait peut-être plus d'aération, moins de chaleur l'été, moins de froid l'hiver, car elle parait toujours souffreteuse et est constamment envahie par de nom- breux insectes, Coccus ou Kermès, recouvrant les chaumes et les faces inférieures des feuilles d'une couche de coques, qui donne à ce Bambou une teinte sale et grisâtre. Mais, bien que n’étant pas d’un aspect agréable, il a un rôle utile à jouer, si on l'emploie comme haie et en mème temps comme abri dans les parties les plus chaudes de l'Afrique septen- trionale. On en fait des haies impénétrables de 8 à 10 mètres de hauteur, à chaumes serrés les uns contre les autres, gar- aix - nis de ramifications épineuses depuis la base jusqu’au som- 216 k LES BAMBOUS. met, haies qui ne demandent d’autres soins que d’être sou- mises de temps à autre à une simple taille, pour éviter son élargissement. Il existe au Hamma un assez bel exemple de cette haie, qui constitue une véritable muraille impénétrable, peut-être pas à des rats, mais au moins aux chats sauvages, ratons, elc. Le chaume rarement droit de ce Bambou ne peut euëre s’uliliser dans l’industrie, sauf une partie de sa base, qu’on peut seule employer avec profit, sur une longueur de quelques mètres. [l est lourd, de consistance dure, fort, parce qu’il est peu fistuleux, c’est-à-aire que ses parois sont plus épaisses que sa cavilé centrale. Ce Bambou n’exige pas une culture spéciale ni des soins particuliers ; il s’agit seulement, en Algérie et dans les climats semblables, de le placer dans une situation favorable à son développement, que contrarieraient les abaissements de tem- pérature et la sécheresse prolongée du sol; il réclame donc, sur le littoral de l'Afrique septentrionale, de petites altitudes au-dessus du niveau de la mer et une exposition tout excep- tionnelle. La culture en France, en serre tempérée ou chaude, n'offre pas de difficultés ; mais elle y est peu répandue, parce que ce Bambou n’a rien d’ornemental à l’état adulte (1) ; la constitu- tion de son rhizome réclame de grands vases pour qu'il puisse se développer. Les procédés les plus en usage pour multiplier le Bambusa spinosa sont : le semis et la division des souches. Le semis, provenant de graines obtenues au Hamma ou dans les pays d’origine, n’a d'autre inconvénient que d’être d'un accroissement très-long ct de demander des soins minu- (1) Cependant, dans son jeune âge, pendant ses premières années de dévelop- pement, il est, toujours dans les serres, des plus élégants et des plus décoratifs. Il est peu coanu à ce point de vue, mais en réalité les caractères de sa jeunesse en font une plante véritablement ornementale par ses tiges vertes, vernissées, flexueuses et même presque grimpantes, par ses feuilles longues, étroites, très- vertes et luisantes. Ses tiges peuvent s’enrouler autour du tronc de gros végé- taux ou retomber en guirlandes. Sous ce facics, résultat de létiolement, la plante est peu facile à reconnaitre, si l’on n’a recours à l’examen des petites épines crochues situées à la base des ramifications. DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 217 tieux. Le mode le plus prompt, le plussür, estencore la division des touffes, surtout des jeunes, car, si on les laisse vieillir sans les éclater annuellement, on opérera forcément sur de gros rhizomes d’une résistance difficile à vaincre et beaucoup moins susceptibles de reprise. Le mois de mai est la saison la plus favorable à cette multiplication. Le bouturage, qui devrait se faire à cette même époque, semble être, pour cette espèce, un procédé bien incertain. Nous n'avons jamais pu obtenir de boutures enracinées dans nos essais réitérés, quoiqu'elles aient été l’objet d’attentions particulières. Il a été constaté seulement que ces boutures ont végété, ont émis des ramifications avec des feuilles, qui se sont conservées d’une année à l'autre, mais que pas une racine ne s'était développée. Le Bambusa spinosa serait donc une exception à notre groupe de Bambous à touffe cespiteuse et à végétation au- tomnale, qui ont tous des ramifications rhizomateuses servant à leur reproduction, ou alors, malgré de nombreuses expé- riences, nous n'aurions pu saisir le véritable moyen. La présence d’épines, si remarquablement accentuées dans un Bambou, pourrait faire croire à un caractère assez saillant, assez distinclüif, pour ne pas laisser de doute sur la dénomi- nation exacte de cette espèce; mais 1l n’en est pas ainsi, et le Bambusa spinosa a des synonymes dus à des rapprochements avec d’autres espèces, notamment avec le véritable Bambusa arundinacea ; c’est ce qui nous a engagé à retirer ce der- nier nom à celte grande et belle plante, que nous cultivions au Hamma sous ce faux terme spécifique. Le Bambusa spinosa, d'après le colonel Munro, se distingue du vrai Bambusa arundinacea par sa panicule plus pâle, ses épis plus petits et plus coriaces, par un moins grand nombre de fleurs. 218 LES BAMBOUS. Bambusa stricta, Roxburg. Bambusa verticillata, Wild. G à 7 mètres de hauteur. —92 à 3 centimètres de diamètre, (Végétation automnale, touffe cespiteuse.) Une espèce de Bambou est entrée au Hamma sous le nom de Bambusa verticillata ; nous la trouvons exactement sem- blable au B. stricla des cultures lequel, du reste, porte aussi quelquefois le premier nom. Au Hamma, on cultivait sous ces deux noms la même plante, à laquelle nous laissons le terme spécifique de stricla. D'autre part, Steudel désigne le Bambusa verticillata, de Wild, comme synonyme du Bam- busa stricta de Roxburg; nous sommes donc porté à les réunir tous deux sous le même nom, slricla. Nous devons dire toutefois qu'un autre Bambsu, provenant de granes venues de l'Himalaya et remises à nous par la So- ciété d’Acclimatation de Paris sous le nom de stricla, a ëté élevé d’abord par nos soins au Jardin du Luxembourg, puis planté au Hamma. Là, il nous a présenté des formes toutes différentes de celles des stricla que nous y avons toujours eul- tivés, quoique en ayant les caractères généraux. I est à l'étude. Dans les pays soumis à l’action d'un froid léger, on ren- contre souvent celte espèce ou quelques-unes de ses formes, confondues sous les noms, ou d’Arundinaria falcala ou de Bambusa gracilis. Comme aspect général, ces trois espèces ont en effet certains rapprochements : même touffe cespiteuse, même disposition de chaumes réunis en gerbe évasée où flexueuse, ou plus ou moins rigide, mêmes ramifications en faisceau appliquées contre le chaume, feuilles également étroites, ete.; mais cependant, si l’on examine l’une à côté de l’autre ces trois espèces bien distinctes, on reconnaitra les différences bien tranchées que nous tâchons d'établir dans les descriptions que nous en donnons ci-après. Cultivées dans les serres, car elles ne résistent pas au climat de Paris ni à celui du Nord, elles peuvent présenter un même DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 219 aspect à cause de leur végétation restreinte, qui peut encore les faire confondre avec une quatrième espèce de petite taille, le Bambusa scriptoria. Cependant on ne peut nier que, suivant les contrées, ce Bambusa stricta n'affecte des formes, surtout si l’on n’a pas de point de comparaison qui le rapproche plus ou moins de l’'Arundinaria falcata où lui constitue un type partieu- her, dû sans doute à des semis nombreux, qui auraient amené une certaine variabilité du facies. Dans tous les cas, ces trois espèces sont rustiques à des degrés différents : l’Arundinaria falcata se rencont*e dans la région d'Angers et, de là, suit les côtes de Bretagne, en compagnie du Bambusa gracilis, plus délicat, mais tous deux restent ordinairement limités au cli- mat moyen de la région méditerranéenne. Le Bambusa stricla est encore plus délicat, il réclame des parties plus abritées où même son développement est restreint, sa couleur altérée par les abaissements de Ia température. Dans les parties chaudes du bassin méditerranéen, en Algé- rie, principalement, la distinction de ces trois espèces est plus facile à établir qu'en Europe. Au Hamma, bien que la climature soit un peu élevée pour lArundinaria falcata et le Bainbusa gracilis, ils s'v développent bien dans les terrains frais, mais le Bambusa stricla Y croit en forte touffe. En Algérie, les jeunes bourgeons ou lurions sortent de terre en seplembre. Ils sont cylindro-coniques, très-aigus, formés par des gaines d’un vert intense et striées, prenant au bout de quelques jours une teinte Jaune. Ces gaines sont terminées par des limbes avortés en forme de languettes pointues, garnis de poils rougeätres, perpendiculaires et appliqués sur l'axe. Ces gaînes spathiformes, qui accompagnent le chaume dans sa croissance, sont, à sa base, longues de 5 à 6 centimètres, elles l'enserrent complétement; elles sont surmontées d’un limbe droit élargi à la base, long de # centimètres environ, large de 2 centimètres, très-pointu au sommet et se dessé- chant dès son apparition. Ligule entière et peu apparente, réduite souvent à une simple ligne ou trait sinueux rougeâtre 220 LES BAMBOUS. ou noirâtre, seule démarcation entre la gaine et le limbe. Vers les parties supérieures du chaume, la gaine atteint son maximum de développement, elle a 15 centimètres de lon- oueur, elle est glauque, recouverte même d’une matière prui- neuse assez accentuée avant sa dessication, glabre; les limbes plus longs sont droits et accolés au chaume, se changeant, au sommet de ce chaume, en véritables feuilles d’un vert intense, acuminées, striées sur leur face supérieure, glauques en des- sous; limbe sessile sur la gaine, légèrement articulé, attei- onant une longueur de 10 à 15 centimètres, sur 1 centimètre ou 2 de largeur. Dans les gaines entièrement formées, la ligule est légèrement auriculée et garnie de poils blanchâtres d'un centimètre de long, très-espacés. Les gaines sont lisses extérieurement, et très-lisses, comme vernissées, à l’intérieur, dures et épaisses. Extérieurement elles paraissent terminées en pointe à cause du limbe aigu qui semble en être le prolon- gement : il n’en diffère que par sa couleur plus claire et sou manque de vernis. À l’intérieur laligule établit une démarcation. L’élongation du chaume terminée, il apparaît couvert d’une matière glauque, blanche, argentée, avec ses gaines sèches, pointues à cause du limbe droit, persistantes, gaînes qui sou- vent arrivent à peine à la moitié du mérithalle. La glauces- cence disparait au contact de l'air, mais elle persiste sous les gaines. Le chaume est cylindrique, droit, d’un beau vert; les mérithailes sont presque droits, leur plus grand écartement est de 40 à 55 centimètres ; ile ont, dans les forts chaumes, des poils rudes et rouges dressés verticalement; ils portent à leur base une auréole blanche. | Sous la gaine persistante, l'œil commence à s’accentuer et à manifester sa présence par un renflement qui bientôt fait détacher la gaine, souvent l’éclate, et les ramifications appa- raissent par cette fissure qu’elles élargissent. Cet œil est très-aplati contre le chaume, en forme de cœur, recouvert d’une membrane pelliculeuse, à bordsjaunâtres, gar- nis de rares poils. Sous cette écaille sont rangées des ramifi- cations à l’état rudimentaire, également enveloppées de membranes. DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 29 Ces ramifications naissent d’abord à la partie supérieure du chaume; elles émergent en faisceau d’un même point et sem- blent semi-verticillées, portant à leur base des écailles sèches, petites et pointues. Elles sont agglomérées, grèles, Jaune verdâtre, dressées, nombreuses, quelquelois de vingt à vingt- cinq, au milieu desquelles se développent une ou deux tiges plus fortes, longues de 0",60 à 0,80, tandis que les autres ont 0",30 environ. A chaque nœud de ces rameaux apparaissent une ou plu- sieurs ramules portant également des ramuscules, au sommet desquelles sont les feuilles. Les feuilles sont composées d’une gaine sèche, persistante après la chute du limbe. Elles sont disposées par trois ou quatre sur un même plan, presque parallèles et distiques. Limbe lancéolé, acuminé, à base ronde insérée sur la gaine par un court pétiole, long de 7 centimètres ët large de 1 cen- timètre; la face supérieure verte, lisse, avec des stries; la face inférieure glauque, avec une nervure filiforme. Le Bambusa stricta a un système souterrain très-agglo- méré en rhizomes et racines; ces rhizomes sont courts, garnis d’écailles imbriquées que les racines traversent. Les inflorescences se forment à l’extrémité de rameaux plus ou moins grêles; ce sont des sortes de panicules composées d'épis simples, droits ou légèrement arqués; 1ls portent de trois à six fleurs fertiles. On remarque à la base de ceux-ci : 1° Une gaine appartenant à une feuille; cette gaine est longue de 3 à 5 centimètres, elle emprisonne souvent lépi. À son sommet se trouve un limbe très-développé, mesurant quel- quefois jusqu’à 9 centimètres de longueur sur 2 de large; il se termine en pointe effilée et sa base est un peu arrondie. De chaque côté du limbe, à son point d'insertion sur la gaine, on remarque souvent une expansion membraneuse légèrement pectinée; ® Une, deux et quelquefois trois glumes, longues de 2 à 3 millimètres, de forme naviculaire, lancéolées, pres- que transparentes. Les glumelles inférieures sont de forme navicukure, lon- gues de 15 à 20 millimètres, larges de 7 lorsqu'elles sont dé- 299 LES BAMBOUS. ployées, au nombre de seize à vingt, à sommet un peu pointu, presque coriaces, striées longitudinalement, glabres sur les deux faces ainsi que sur les bords. Les glumelles supérieures sont plus courtes, naviculaires, bicarénées, à sommet pointu, légèrement fendues, de couleur presque transparente, glabres sur toutes leurs parties. Les glumellules, au nombre de trois, sont petites, allongées, quelque peu fimbriées, transparentes; deux alternent avec les deux glumelles et la troisième est adossée à la glumelle supé- ricure. Les étamines, au nombre de six, ont le filet blanc, capil- laire, très-ténu, pendant, long de 8 à 10 millimètres. Leur forme est aplatie, s'ouvrant un peu par le sommet pour lais- ser échapper le pollen. Elles sont marquées de deux couleurs sur chacune de leurs faces; deux bandes brunâtres sont pla- cées sur les côtés avec une bande jaune au centre. Le pistil a l'ovaire très-court, presque globuleux; il porte de petits poils à son sommet. Le style, extrêmement court, un peu violacé, se divise quelquelois dès son origine et se termine par trois stigmates blancs et plumeux. La longueur du style avec le stigmate est de 5 à 6 millimètres. Le scutel- lum est très-développé et fait face à la glumelle supé- rieure. Les graines sont souvent fertiles au Hamma. | Le Bambusa stricla est le type de la végétation cespiteuse ; il forme une toulfe large el compacte. Les tiges droites, de 6 à 7 mètres de longueur, s'épanouissent en gerbes, et sont sem- blables dans leur jeune âge à des lances argentées. Les ramifi- cations, longues ct touffues, dressées contre l'axe, forment par leur ensemble une pyramide de verdure; la tige alors penche sous ce poids; elle a l'aspect d’un jeune cyprès incliné. Ge Bambusa est tout à fait ornemental dans toutes les contrées méridionales, mais ce n’est que sur le littoral africain qu'il acquiert son parfait développement. Le Bambusa stricla est de dimension moyenne ; souvent, au Hamma, il fleurit sur des tiges qui partent de la base. Il est très-rechcrché à cause de sa dureté, due à ce que son chaume DESCRIPTION DES ESPÈCES CONXNUES. 293 est presque plein; on l'emploie comme canne à pèche ct comme manches de toutes sortes. La végétation essentiellement cespiteuse du B. stricla se prête à la division très-multipliée de ses souches, que l'on peut facilement séparer en nombreux éclats. Ses ramifica- tions, très-serrées sur la tige, facilitent l’enracinement, cer, en dessous d'elles et sur le nœud, il se développe rapidement un grand nombre de racines et d’autres rhizomes. Souvent on voit s’enraciner les tuteurs faits avec ses chaumes. Au Hamma, les graines sont, il est vrai, fertiles, mais le semis est un trop long mode de propagation; il faut cinq ou six ans pour obtenir une toufle moyenne. Dans tous les cas, il faut semer à l'abri et dans une terre légère, mais constamment humide (1). Sous le nom de PB. vertlicillata, nous avons au Hamma une espèce semblable au stricta, mais qui n’en diffère que par sts chaumes plus inelinés au sommet, ses ramifications plus éta- lées; tous les autres caractères étant ceux du BP. stricta, nous lui conservons ce nom et ne le considérons que comme simple forme. Le B. verlicillala de Munro est une espèce de haute taille, qui atteint à Java 50 mètres environ. Bambusa stricta, var. argentea, A. Riv. Svn, — Bambusa stricta argentea, Hort. (Développement moindre que le type.) Sous ce dernier nom, nous avons acquis, du Jardin d’Accli- matation de Paris, une espèce qui, en se développant sous le climat algérien, nous a offert tous les caractères du B. stricta, avec celle variation que les feuilles sont striées de lignes blanches argentées. Cependant le B. stricla présente quelque- (li On trouve quelquefois cette espèce cultivée en serre; ce ne sont plus alors des caractères remarqués à l’air libre. En pot, elle végète mal, mais en pleine terre, dans un jardin d’hiver, elle donne des chaumes minces et flexibles, très- lisses, d’un beau vert, avec des ramifications longues et effiiées portant de longues et étroites feuilles. L'ensemble est d'un vert très-gai qui diférencie ce Bambou du B. gracilis observé dans les mêmes conditions de culture artificielle. 224 LES BAMBOUS. fois cette panachure sur de jeunes tiges. Il est bon d'ajouter qu'en vieillissant ce B. striclä argentea perd sa panachure, ct 1l nest pas impossible que, par la suite, cette plante re- tourne au type primitif. Il y a donc lieu de considérer ce Bambou comme une simple variété et de l’adopter sous le nom de PBambusa stricla ar- genteu ou striala. Elle a en effet tous les caractères du strictæ. ses gaines seules n’en diffèrent que par des stries foncées et jaunâtres. Ses chaumes sont un peu plus tortueux dans le jeune âge. Sa mullüiplication est la même, toutefois le bouturage seul peut faire espérer d’en conserver la panachure. Bambusa gracilis, Hort. » mètres de hauteur, — 2 centimètres de diametre. (Végétation automnale, louffe cespileuse.) Celle espèce, sans contredit une des plus gracieuses du senre, est ordinairement confondue avec l'Arundinaria fal- cala, qui s'en rapproche par certains caractères de factes ; cependant ces deux espèces, observées dans tout leur déve- loppement, présentent des différences bien marquées. Le Bambusa gracilis a une souche essentiellement cespi- teuse, c’est-à-dire que les chaumes naissent très serrés les uns contre les autres. Touffe ronde pouvant atteindre un grand diamètre. Les chaumes agglomérés s'inclinent sous le poids de leurs ramifications touffues et forment une gerbe retom- bante de tous côtés. En Algérie, la végétation se manifeste dans le courant d'août et de septembre par la sortie de terre de bourgeons aigus recouverts de gaines légèrement colorées. Ces bour- gcons ou turions s’allongent et forment des chaumes dénudés, flexibles, recouverts d’une poussière glauque très-mntense, très-adhérente, qui lui donne veritablement une teinte argentée. Les gaines spathiformes, d’abord vertes, parfois légèrement teintées de rose glauque, sèchent rapidement. Elles sont peu DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 225 larges, longues de 18 à 25 centimètres, très-étroites vers leur sommet terminé en pointe, et ne portant ni ligule ni limbe dans la partie inférieure du chaume. Dès qu'elles s’en détachent elles restent plates. Elles sont d’une consistance presque molle, striées, couvertes de petits poils à peine vi- sibles. Vers le milieu de la hauteur du chaume, les gaines sont accompagnées d'un limbe caduc avorté, en forme de pointe, et d’une ligule très-apparente, haute de quelques mil- limètres, sinueuse et déchiquetée. Vers le sommet du chaume les limbes sont plus développés et constituent de véritables feuilles vertes, longues de 12 à 15 centimètres, étroites, s’at- ténuant insensiblement à leur point d'attache sur la gaine. A la chute de ces gaines très-caduques, le chaume apparait cylindrique, recouvert de celte matière glauque très-intense qui s’efflace avec le temps; il est alors très-vert, puis brun en vieillissant. Les nœuds sont un peu saillants, à renfle- ment quelquelois légèrement vivlacé du côté du soleil. Au- dessous du renflement existe la gouttière circulaire qui contenait la gaine, elle est bien apparente et sèche. L'œil situé entre cette goultière et le renflement du nœud est large, peu haut, aplati, composé de petits bourgeons écailleux serrés les uns contre les autres sur deux rangs. Les bourgeons du milieu du chaume donnent d’abord nais- sance aux ramifications, et leur développement se continue simultanément vers l'extrémité et vers la base. Ces ramifications grêles, nombreuses, de vingt à trente, émergent d'un même point, et leur agglomération est telle qu’elles sont semi-verti- cillées sur le chaume ; elles sont terminées par de petites feuilles d’un beau vert. Feuilles munies d’une gaine verte, à ligule membraneuse, sèche, très-apparente; à limbe long de 9 à 10 centimètres, large de 8 à 10 millimètres, acuminé, rétréci à sa base en sorte de pétiole, à nervure fine, apparente à la face infé- rieure. Ces ramifications grèles, peu longues, dressées, entourant presque le chaume, garnies de feuilles d’un vert très-gai, for- ment une sorte de panache et iuclinent gracieusement ce 15 220 LES BAMBOUS. chaume sous leur poids, de là le terme spécifique si bien mérité de B. grucilis. Les chaumes secs sont durs et résistants. Malgré de nombreux essais, nous n’avons Jamais réussi la multiplication de cette espèce, soit en serre, soit à l'air libre, sous le climat de l'Algérie, par des boutures auxquelles on conservait même le faisceau de ramification. La division des touffes est le seul moyen pratique, encore doit-il être pru- demment exécuté. En Algérie et dans les pays analogues, 1l faut opérer en mai ou juin, sectionner la souche par partie assez forte, mettre en pot et à l'ombre, donner beaucoup d’eau. On peut transplanter directement en pleine terre ces divisions de souche ; dans ce cas on opérera fin avril. Dans les deux modes, les chaumes doivent être coupés au moins par la moitié. Les inflorescences n’ont jamais été constatées en Algérie. On rapporte qu’en France, et notamment dans les serres de Paris, cette espèce aurait fructifié et que de nombreux sujets obtenus ainsi seraient la cause du polymorphisme qui fait hésiter dans l'application du véritable nom. Cette observation pourrait avoir de la valeur, si la plante fructifère était bien déterminée. Sous des climats chauds, la végétation de ce Bambou laisse à désirer dans la culture en pot. Dans une zone tempérée, dans le midi de la France, mais notamment dans les îles du lac Majeur, il prend un magnifique développement. Nous avons vu ses chaumes y atteindre 6 mètres de hauteur et 2 centimètres de diamètre à la base; les touffes mesuraient plus d’un mètre de diamètre. En Algérie, dans le sud de l'Espagne et de l'Italie, il ne craint pas la chaleur ni le soleil direct, s’il esten bonne terre et soumis à l'irrigation ; dans le cas contraire, quoique résis- tant, l'extrémité de ses chaumes se dégarnit et les touffes sont chétives et grêles; alors sa couleur moins glauque se rap- proche du B. stricta. En France, il résiste quelquefois vers le centre pendant quelques années, mais ne supporte pas un abaissement de température accentué; sa véritable culture y est la serre froide, de l’eau et de l’espace. Bien cultivée, cette DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 227 espèce pourrait être considérée comme une des plus gra- cieuses plantes destinées à la décoration des jardins d'hiver, des serres et des appartements (1). Bambusa gigantea. Wallich. Dendrocalamus giganteus, Munro. 3 iuèlres de hauteur. — 3 centimètres de diamètre. (Végétation autonnale, touffe cespiteuse.) Originaire de Tenasserim et cultivée à Calcutta, où elle atteint de grands développements, cette espèce, que nous avons rapportée en 1871 du Muséum d'histoire naturelle de Paris, est des moins rustiques au Hamma. Elle a beaucoup de rapports avec le Bambusa Hookeri, mais elle est bien plus délicate. Ses chaumes n’ont jamais pu atteindre plus de 3 mètres et se dessèchent à leur extrémité dans le courant de l'hiver, pendant que les feuilles sont très-souffrantes. Les mé- rithalles sont droits, à nœuds peu saillants ; les feuilles sont courtes, mais on ne peut rien préciser des caractères d’une espèce qui végète à peine sous le climat le plus chaud de PAI- gérie. On peut donc conclure qu'elle y est demi-rustique, c’est- à-dire réclamant un abri dans la mauvaise saison ; dans ce cas, sa culture n'offre aucun intérêt dans le bassin méditerranéen. Sa multiplication ne diffère en rien de celle du Bambusa Hookeri, elle doit seulement être faite plus tard et ètre abritée pendant l’hiver par un châssis. La culture en Europe ne peut avoir lieu qu’en serre chaude ou tempérée, (l) On peut d'ailleurs voir le bel effet qu’elle produit dans un des grands pa- villons du Muséum de Paris, dont un des murs est presque entièrement tapissé de ses chaumes flexibles, à ramificalions étalées laissant pendre des feuilles longues et étroites, le tout d’un ensemble glaucescent des plus agréables à voir 228 LES BAMBOUS. Bambusa scriptoria, Dennst. 1,50 à 2 mètres de hauteur. — 1 centimètre de diamètre. (Végétation automnale, touffe cespileuse.) Originaire des Indes orientales, cette espèce peut être con- sidérée, dans bon nombre de cas, comme la plus petite du groupe des Bambous que nous connaissons, en exceptant ce- pendant le Bambusa Forlunei, si l’on regarde ce dernier comme un Bambou et non comme un P halaris ou un Panicum. En Alvérie et sur tout le littoral chaud et sec de la Méditer- ranée, ce Bambou se présente sous une forme cespiteuse très- prononcée, formant une touffe de chaumes compacts, hauts d'environ 4°,90 à 2 mètres. Les bourgeons ou turions, grêles et pointus, sortent de terre à la fin de l’automne, accompagnés de gaines spathiformes vertes, qui se dessèchent aussitôt. Le chaume, en s’allongeant, est vert, lisse, portant à chaque mérithalle une petite gaine spathiforme haute de 5 à 6 centimètres et surmontée d’un limbe droit et avorté, qui semble en être la continuation. Cette gaine n’atteint pas le tiers de la hauteur du mérithalle et ne l’entoure dans sa périphérie qu’à la base seulement; sa largeur varie avec le diamètre du chaume; elle est de consis- tance sèche, de couleur blanc jaunâtre, légèrement striée et très-vernissée à l'extérieur, et encore plus lisse et plus polie à l'intérieur. Une ligule peu apparente sépare la gaine du limbe, lequel est droit, appliqué contre le chaume, et pa- rail être le prolongement de la gaine, dont l’ensemble pré- sente une forme très-pointue ; seulement ce limbe avorté n’est nullement vernissé, il a des stries marquées et est très-caduc. Ces gaines sont facilement détachées de leur gouttière par le renflement des yeux, et le chaume apparait nu avec une trace de glaucescence à l'emplacement recouvert par la gaine, glaucescence s’effaçant rapidement pour laisser au chaume une couleur très-verte dans toutes ses parties ; en vieillissant, 1l prend une teinte Jaune d'or quelquefois très-brillante. Les mérithalles sont un peu en zigzag, c’est-à-dire arqués dans DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 229 des sens opposés, mais presque droits au sommet du chaume, sphériques et lisses, à nœuds peu saillants, portant la gout- tière circulaire et sèche dans laquelle était emboîitée la base de la gaine. Certains mérithalles atteignent jusqu’à 20 centi- mètres de long. Le chaume est grêle à son extrémité, et à sa base 1l attemt environ 8 millimètres de diamètre; dans la parlie souterraine, il est renflé et émet sur ce renflement de longues et nombreuses racines. Ce chaume, caractère saillant, n’est pas fistuleux, il est entièrement plein. A la chute des gaïînes, l'œil qui doit produire les ramifica- tions est déjà très-accentué ; il est de couleur jaunâtre, lui- sant, formé d’une membrane transparente, garnie de poils sur ses bords et figurant un cœur renversé; il est exactement semblable à celui du Bambusa stricta. Les ramifications naissent en faisceau; elles sont nom- breuses, grêles, presque filiformes, ayant à leur point d’at- tache sur le chaume de petites gaines sèches et persistantes. Ramifications également ramifiées, portant, à leur extrémité, des feuilles disposées distiquement sur un même plan, au nombre de quatre ou cinq de chaque côté d’une ramille, alternes, mais quelquefois tellement serrées qu’elles parais- sent opposées et former des paires. Le limbe est petit, acuminé, long de 3 à 5 centimètres, large de 5 à 10 millimètres, presque arrondi à la base, s’atta- chant à la gaine par un court et large pétiole à face inférieure glauque, sans nervure bien marquée. Gaine verte, terminée par une ligule peu visible, bordée de quelques poils blonds et soyeux, de couleur vert pâle. L'hiver altère beaucoup ces feuilles, qui sont ordinairement jaunâtres. Ce Bambou n’a jamais fleuri au Hamma. Le froid et la sécheresse fatiguent quelques organes de cette plante, aussi les chaumes sont-ils souvent dégarnis à leur extrémité et les feuilles sèches dans une partie de leur limbe, ou jaunâtres, ou décolorées ; néanmoins, elle supporte nos étés les plus chauds. Si ce Bambou croit à l'ombre légère d’une plus grande 230 LES BAMBOUS. espèce, qui le protège aussi bien des abaissements de tempé- ture que des ardeurs trop directes du soleil, il présente aus- sitôt un facies nouveau. Dans ces conditions favorables, aidé par des arrosements, le Bambusa scriptoria lance des chaumes de #à 5 mètres de hauteur sur 1 centimètre de diamètre, qui émettent des ramifications plus vigoureuses, chargées de feuilles serrées les unes contre les autres, plus vertes, à ner- vure médiane plus accentuée, feuilles surtout remarquables par la couleur bleuâtre de leur face inférieure. Ce Bambou peut être confondu avec l’Arundinaria falcata, mais il en est bien distinct. Si l’on hésite à se prononcer d’après le facies ou les caractères extérieurs, la simple inspec- tion de l'intérieur du chaume résout la difficulté : le chaume du Bambusa scriptoria est plein, celui de l’Arundinaria falcata, quoique épais, présente un canal bien marqué. Sile milieu favorable cité plus haut agit sur son dévelop- ment, il existe les plus grands rapports entre lui et le Bam- busa stricla jeune, même dans la gaine, seulement les feuilles du Bambusa scriploria sont plus petites et plus nombreuses, au sommet de ramifications plus agglomérées. Cette plante exige, pour bien prospérer dans les contrées chaudes, une terre fraiche et l'abri léger d’autres Bambous, mais, comme nous l’avons dit, elle est très-rustique. En France, dans les régions du Centre et du Nord, cultivée en pot, elle rendrait des services comme ornementation ; les soins culturaux lui feraient perdre cette teinte jaunâtre et non naturelle aux feuilles développées dans de bonnes conditions. Ainsi que son nom spécifique l'indique, les Orientaux em- ploient ses chaumes pour écrire, mais sa flexibilité, quoique avec des mérithalles pleins, lui assigne une place dans les travaux de vannerie. À ce point de vue, sa culture doit avoir lieu dans des terrains frais et irrigables. On obtient sa multiplication par boutures ; mais sa touffe, essentiellement cespiteuse, fournit un grand nombre de sujets d’une végétation plus rapide que les boutures; chaque chaume éclaté constitue un pied formant touffe l’année même, par le développement de bourgeons situés sur son renflement sou- DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 231 terrain. On opère en avril, à mi-ombre autant que possible, avec quelques arrosements, si l’on veut avoir des plants bien verts. - DEUXIÈME GROUPE Phylilostachys mitis, Bambusa mitis, Poiret. — edulis 8 à 12 mètres de hauteur. — 5 à 7 centimetres de diamètre. (Originaire de la Chine.) Ce Bambou est le type de toutes les espèces du groupe des Phyllostachyées que nous connaissons, dont la végétation est vernale, les racines traçantes, les tiges canaliculées et les ramifications géminées ou dichotomes ; les autres espèces n’en diffèrent que par la taille et des caractères apparents seule- ment à certains moments, car, avant que sa touffe soit adulte, ce Phyllostachys mitis a la plus grande ressemblance avec les suivants, qui, d’ailleurs, sont aisément confondus entre eux ; tels sont, par ordre de taille : Phyllostachys Qui- lioi, viridi-glaucescens, aurea, fleruosa, violascens. Le Ph. nigra en diffère seulement par sa couleur ; comme dimension, il vient immédiatement après les Ph. mitis et Quilioi. En Algérie, les bourgeons ou turions sortent de terre dans le courant d'avril ; ils sont coniques, droits et raides. Leur couleur est verdâtre, légèrement maculée dans les jeunes sujets, mais violacée, fortement maculée dans les sujets adultes. TIs sont accompagnés de limbes avortés en forme de languettes longues et pendantes dans les jeunes tiges (fig. 22). Le turion, en s’allongeant, forme un chaume garni de gaines spathiformes, caduques, à l'exception des trois ou quatre pre- mières de la base qui persistent pendant quelque temps (fig. 22). Celles-ci, analysées sur des pieds dont les tiges moyennes ont atteint tout leur développement en grosseur, _ sont longues de 0°,05 à 0° ,15: elles embrassent la tige à leur 232 LES BAMBOUS. base seulement, c’est-à-dire à leur point d’adhérence. Elles sont de couleur jaunâtre; leur sommet est un peu en pointe ou un peu arrondi. Elles sont relativement peu épaisses, coriaces cépendant, striées, glabres même sur les bords. La ligule est peu apparente, peu développée; 1l en est de même du limbe. Celui-ci est très-court, comme apiculé; mais il atteint parfois, sur la quatrième gaine, une longueur de 12 à 15 millimètres. Les gaînes spathiformes qui succèdent aux premières changent de caractères et de forme; leur longueur varie depuis 0",20; elles peuvent arriver successivement jusqu’à 0",99 vers le milieu de la tige. Nous avons récolté, au Jardin du Hamma, des échantillons qui avaient cette longueur, laquelle peut être encore dépassée. La largeur atteint 0",16; nous l'avons constaté plusieurs fois. Dans ces conditions extrêmes, les gaines spathiformes du P hyllostachys mitis res- semblent à de grands cornets dont les bords se rejoignent à peine, caractère qu'on observe sur toutes, à mesure que le chaume acquiert sa grosseur définitive. Elles sont distiques, caduques ; elles se détachent et tombent selon laccroissement du chaume. Leur couleur est violacée, puis devient jaunâtre ; elles sont, en outre, tachetées sur leur partie dorsale de nom: breuses macules brunes, rondes, irrégulières de grandeur et dispersées sans ordre, Cette maculature leur donne la cou- leur d’une peau de serpent ou de la tige de certaines espèces d’Aroïdées (fig. 23). Elles sont coriaces. Le sommet est plus ou moins arrondi, plus ou moins ovaliforme, plus ou moins allongé; mais, dans tous les cas, il se termine comme s’il était brusquement tronqué horizontalement. Elles sont glabres sur toutes leurs parties et sur leurs bords, et portent des stries nombreuses. Comme dans toutes les espèces de Bambu- sacées, elles vont en diminuant de longueur et de largeur, à mesure qu’elles s'approchent de l'extrémité de la tige. La ligule est petite, large de 15 millimètres environ, haute de 5. Elle est brunâtre, plus ou moins pectinée. Le limbe est variable ; sur les gaines inférieures, il est long de 0",03, étroit, effilé (fig. 23) ; sur celles du centre, sa lon- Fic. 22. — PHYLLOSTACHYS MITIS. Tige en pleine croissance, coupée par le milieu. … TA 2 4 Æ Met . RSR ; DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES, 2939 gueur augmente, ainsi que sa largeur. Il en est de mème sur les parties intermédiaires, jusqu'aux trois quarts de la hau- teur du chaume; le limbe y est long de 0",10 à 0",20 sur 5 à 8 millimètres de large; il est étroit, lancéolé, légèrement flexueux, et rugueux sur ses deux faces, de couleur verdätre, quelquefois légèrement rubanée; les bords sont armés de petites dents très-fines et nombreuses. Les dernières gaînes sont plus épaisses, moins larges; la ligule est d’une couleur plus brune; elle est plus haute et plus fortement pectinée et ses lanières filiformes sont blan- ches; d’un autre côté, le limbe devient plus petit et plus étroit. Sur celles de l'extrémité de la tige, à leur sommet et de chaque côté du limbe, on remarque quelques petits bou- quets de poils. A la chute des gaines, le chaume apparait d’une couleur verte, recouverte d'une matière glaucescente et pruineuse, quelquefois très-développée, mais toujours plus intense et disposée en auréole au-dessus du nœud. Ces nœuds, peu ou à peine prononcés relativement à la grosseur de la tige, se distinguent par un petit bourrelet circulaire et blanchâtre assez saillant, cicatrice laissée par la chute de la gaine spa- thiforme. La tige est cannelée, portant, d’un nœud à l’autre, les rai- nures alternes et distiques que nous avons déjà étudiées (fig. #). Les ramifications géminées et latérales naissent au fur et à mesure que la tige poursuit son élongation. A l’état de bourgeons presque rudimentaires, avant leur développe- ment, elles sont emprisonnées dans une gaine bicarénée ou binerviée. Cette gaine est adossée à la tige; elle est haute de 15 à 20 millimètres et large à sa base de 8 à 10; sa forme est presque acuminée. Elle se compose de deux membranes pel- liculeuses, blanches, transparentes ; la supérieure est fendue sur le côté gauche et dans toute sa longueur; c’est pourquoi l’une de ces membranes est plus longue que l’autre. Sur la partie dorsale de la gaine, on aperçoit deux nervures latérales assez distantes l’une de l’autre et bordées de cils blanchâtres. C’est du centre des gaines bicarénées que sortent les rami- 236 LES BAMBOUS. fications ; lorsque celles-ci, généralement au nombre de deux, ont atteint quelques centimètres de longueur, la gaine, qui a grandi également, peut mesurer jusqu’à 0",04. Le caractère de ces gaines a été pris sur les tiges principales, et c’est ce qui explique cette fente régulière et latérale; les gaines caré- nées et qui se subdivisent, se fendent sur le côté droit pour laisser passer les ramuscules, tandis que les autres se fendent à gauche. Les feuilles sont portées par ces ramuscules. Elles sont étroites, acuminées, ordinairement longues de 8 à 9 cen- timètres et larges de 2, lisses, glauques en dessous, sans ner- vures bien saillantes. Ce Bambou, que nous avons étudié pendant une période d'environ dix années, ne nous a Jamais montré ses inflores- cences, quels que soient les soins et les tentatives que nous ayons employés pour connaître les fleurs de cette espèce, que nous considérons comme le type d’un grand nombre de Bambous déjà bien répandus dans les cultures. À ce point de vue, il y avait grand intérêt pour nous à connaître son organisation florale. On prétend pourtant que le Phyllostachys mitis a fleuri au Hamma ; mais le fait n’a pu être confirmé, ou, sans nul doute, il y a eu confusion d’espèces. Les rhizomes du P hyllostachys mitis atteignent quelquefois une très-grande longueur. Leur développement se fait hori- zontalement et à quelques centimètres au-dessous de la sur- face du sol. Leur grosseur est variable; elle dépend de La force de végétation des sujets, de leur âge et des conditions locales dans lesquelles la plante se trouve cultivée; elle peut atteindre et même dépasser 0",02. Leur couleur est jaune. Elles sont composées de nœuds très-rapprochés, 0",02 à 0,06 environ. Chaque mérithalle porte, d’un seul côté, une cannelure profonde qui prend naissance à la base de chacun des bourgeons latéraux que porte le rhi- zome dans toute sa longueur. Des racines filiformes, petites, garnies de radicelles, courtement ramifiées, se développent sur les rhizomes, mais seulement aux nœuds; elles sont dis- posées en verticille sur une ou deux rangées; dans ce cas, elles sont très-rapprochées. | | || | | | Il NN! \fN D! {LA HAE A | (Il {ll | | | | | | (l | | IL Un EL AL LL ] Ill | ( ATRT TANNN | | AL | | | ANT ONU A \ D UN JANET ALL KE Al 0 AI EN Fic. 23. — PHYLLOSTACHYS MITIS Gaîne maculée avec son limbe avorté en forme de languette. B on Ep, >: Mir AFS à 1 , PPS dE LRNEN re 2 NS l IN be k# d'ré kr » re - 1 L ' aie p AL COTE, écr NS sol | : Ne PT CARTE - 7: . 4 Sur AE | | PR LOU : _ je w A HN y £i Hp | détées a pa ne pr L] PE Lo 5 FEV D DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 259 Pendant leur croissance, les rhizomes sont enveloppés de longues gaines de forme et d'apparence écailleuse, à dispo- sition distique alterne, imbriquées, d'un blanc jaunâtre ou grisâtre ; elles durent peu de temps et se décomposent à me- sure que le rhizome s’allonge. C’est au-dessus de la cicatrice qu'elles laissent après leur chute, que se développent les racines. À leur aisselle on remarque un bourgeon; les rhi- zomes en portent donc, dans toute leur longueur, un nombre plus ou moins considérable ; ils ont, comme les gaines à l’ais- selle desquelles ils sont nés, une disposition distique alterne. Quand la croissance du rhizome est sur le point de s’arrêter, son extrémité se redresse pour sortir de terre (fig. 23) et con- sutuer une tige aérienne; des bourgeons latéraux peuvent se développer en mème temps. Pendant que les tiges grandissent, 1l se développe à leur base une cerlaine quantité de racines qui viennent leur appor- ter de la vigueur; elles sont plus grosses et plus longues que celles des rhizomes. Par une cause qui nous est inconnue, tous les bourgeons d’un même rhizome ne se développent pas : les uns avortent sans végéter davantage; d’autres pourrissent dès qu'ils sont sortis de terre et qu'ils ont atteint quelques centimètres de longueur; d’autres enfin restent longtemps stationnaires et semblent attendre une occasion favorable pour se dévelop- per. IL est inutile d'ajouter que les rhizomes ne sont pas fistu- leux comme les tiges. Les chaumes du P hyllostachys mitis sont assez rapprochés les uns des autres sur leur rhizome, quoique conservant entre eux une certaine distance. Comme aspect, ce Bambou a une teinte générale vert glauque; ses chaumes sont droits, effilés au sommet, et leur couleur est bleuâtre, surtout dans les sujets adultes; dans d’autres cas, elle est vert jaunâtre. Chaque nœud porte à sa base une auréole glaucescente, persistante et très-accentuée. Les deux ramifications inégales, droites, lon- dues et peu garnies de feuilles, forment entre elles et l'axe qui les süpporte un angle trèssouvert. 240 LES BAMBOUS. En vieillissant, les tiges deviennent jaunes, vernissées et très-dures. Dans le sud de l'Europe, à certaines altitudes, et en Algérie, dans les contrées tempérées, les chaumes atteignent de 8 à 42 mètres de haut sur 0",05 à 0",07 de diamètre. Nous en avons vu des exemplaires de 16 mètres de haut chez M. Mazel, à Anduze (Gard). Dans le Nord, aux environs de Paris, les dimensions sont plus restreintes, mais elles ont encore une hauteur de 4 à 6 mètres. Parmi les Bambusacées du groupe à souches traçantes et à végétation vernale, le Phyllostachys mitis est l'espèce qui croit avec la plus grande rapidité; des observations faites au Jardin d'essai du Hamma pendant plusieurs années consé- cutives nous ont donné comme résultats des chiffres intéres- sants à constater, qui sont indiqués dans des tableaux au cha- pitre Croissance. En raison de cette excessive rapidité de croissance et de sa rusticité relative, le Phyllostachys mitis est une des bonnes espèces à propager dans les cultures. Ses tiges longues et volu- mineuses pourront servir à la confection de cabanes, de kiosques, de chaumières, de hangars légers, à la fabrication d’échalas pour la culture des vignes, et à une infinité d’autres usages. Il est très-propre à fixer les terres, ainsi que l’a fait M. Mazel à Montsauve, pour des terrains d’alluvion. Comparati- vement aux autres espèces, son bois est moins épais, plus léger, mais d’une très-grande résistance. Pour cultiver ce Bambou avec tous les avantages possibles, la condition d’un climat favorable sera la première à recher- cher. La région méditerranéenne lui conviendra parfaitement, ainsi que les parties tempérées de notre pays. Il trouvera les mêmes bonnes conditions en Algérie, en Espagne, en Portugal, en Italie, ete. Ce qu’il lui faut en second lieu, c’est un terrain de nature siliceuse autant que possible, profond et frais. Du reste, sa végétation normale, se manifestant à la suite de la saison des pluies, lui permet de supporter ensuite de longues et fortes sécheresses. Cette espèce est assez rustique pour braver les hivers de DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 241 Paris et du nord de la France; ce n’est guère qu'une gelée au- dessus de 14 degrés qui peut en détruire les chaumes. La multiplication du Ph. mitis est, comme celle de tousles Bambous essentiellement traçants, des plus simples et des plus faciles, au moyen du tronçonnement des rhizomes. Les tronçons doivent, autant que possible, avoir trois yeux, par conséquent une longueur de 0",15 à 0",25. On les plante à demeure, en rigole. L'opération doit se faire en hiver, avant le départ de la végétation. Ce Bambou est originaire de la Chine, où il est très-répandu et très-apprécié. Ses tiges droites et lisses, surlout sans épines, lui ont fait donner le nom de mitis. L'usage culinaire qu’en font les Chinois, qui en mangent les jeunes pousses comme des asperges, lui a valu le synonyme de edulis. Phyllostachys Quilioi Bambusa Quilioi, Hort. 8 mètres de hauteur, — 5 centimètres de diametre. Végétation vernale el rhisomes tracants. Cette espèce est originaire du nord du Japon, d'ou elle à été rapportée en 1866 par l'amiral Du Quilio. Elle a une très- grande ressemblance avec le Phyllostachys mitis, mais c’est certainement la même plante connue dans quelques endroits sous le nom de Ph. Mazeli. En Algérie, les jeunes bourgeons ou turions sortent de terre à la fin d'avril ou aux premiers jours de mai. Ils sont coniques, terminés par un faisceau de limbes avortés en forme de languettes vertes ou rougeâtres (fig. 24). Les chaumes ou tiges de ce Bambou sont accompagnés, pendant leur croissance, de gaines spathiformes, caduques, distiques. Les premières de la base sont longues de 0®,05 à 0",15, à sommet elliptique; elles sont assez épaisses, co- riaces, striées, glabres. Les bords sont également glabres et lisses, dépourvus de toute aspérité. La partie dorsale est tachetée de brun, comme dans le Phyllostachys mitis, avec 16 249 LES BAMBOUS. lequel, dans sa jeunesse, il a beaucoup de rapports; il en a également, du reste, avec les Ph. aurea et viridi-glau- cescens. La ligule est peu apparente, jaunâtre et légèrement ciliée. Le limbe est long de 0",08 à 0",20, large de 5 à 6 mil- limètres à sa base, acuminé, pointu, glabre, strié, rude sur les bords, de couleur violacée bronzée (fig. 25). Les gaines supérieures deviennent plus longues et plus larges et atteignent des dimensions subordonnées à la grosseur des chaumes ; elles sont giabres, striées, jaunàtres, marquées de taches brunes; le sommet est elliptique, allongé ; les bords ne sont pas ciliés, ni rudes au toucher. La ligule ne s’est pas développée; elle est restée petite et ciliée. Le limbe est de- venu plus long; il est lancéolé, terminé en pote; sa lon- oueur est de 0",03 à 0",06 ; sa largeur, de 5 millimètres ; 1l est scabre sur la partie dorsale. Les bords sont garnis de très- petites dents blanches très-serrées. La couleur est violacée, mais elle passe vite et devient d’abord verdâtre, puis jaunâtre. A la chute des gaines, le chaume apparait très-vert, à peine glauque au-dessus du nœud. Ce n’est pas un caractère bien sail- lant à signaler, mais le Ph. mitis est beaucoup plus glaucescent. Les tiges du Ph. Quilioi se ramifient pendant qu’elles croissent et s’allongent. Dès le principe, les ramifications sont enveloppées dans une écaille binervée, haute de 55 à 90 mil- limètres, et large à la base de 20 à 25. Composée de deux membranes relativement assez épaisses, elle est un peu coriace, assez mince cependant quelquefois pour être trans- parente, surtout lorsqu'elle est située vers l'extrémité de la tige. Elle porte sur sa partie dorsale deux nervures latérales très-éloignées l’une de l’autre, assez saillantes et garnies de poils épineux. Au moment où nous l’avons observée, la cou- leur de l’écaille était jaunâtre, la végétation de la tige était achevée. La membrane située en avant est fendue dans toute sa longueur et sur le côté, tantôt à droite, tantôt à gauche. Le sommet, presque toujours aussi large que la base, est divisé en trois lobes plus ou moins aigus et d’inégale hau- teur (fig. 26). En outre, l’écaille est striée, glabre et non ciliée sur les bords ; elle est très-caduque. lic. 25. Fc. 24. fic. 26-27, PHYLLOSTACHYS QUILIOI. l'i6. 24, Bourgeon eu développement. —F16. 25. Gaine, — F16.26. Écaille bincryce et Lriloéc. - Fi, 27 ‘annelé. &, 27. Chaume cannelé DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 24 L’écaille binervée existe à la base de chaque ramification, mais alors elle devient moins grande sous tous les rapports, tout en conservant généralement les caractères que nous avons décrits ci-dessus. Le chaume à la plus grande ressemblance avec celui du Ph. milis : mème couleur, même dépression cannelée com- posée de deux sillons, mêmes ramifications geminées, l’une forte, l'autre faible (fig. 27). Le rhizome, très-traçant, a tous les caractères du Ph. milis. Inflorescence inconnue. Ce Bambou atteint chez M. Mazel, près d’Anduze (Gard), de très-fortes proportions; c’est d’ailleurs le plus grand du groupe avec le Ph. mitis. Les terres riches, humides pen- dant l’été, lui sont favorables. Très-rustique aux environs de Paris et en Angleterre, où l'amiral Du Quilio en a adressé de nombreux exemplaires que nous avions mis à sa disposition, alors qu'il commandait la marine en Algérie. Nous souhai- tons que ce Bambou reste une espèce bien distincte pour rap- peler le souvenir de son introducteur, marin dislingué, ama- teur passionné des végétaux et notamment des Bambusées, dont il suivait au Hamma la culture avec le plus grand intérêt. La multiplication du Phyllostachys Quilioi est celle du Ph. milis, décrite à l’article précédent. Phyilostachys viridi-glaucescens. Bambusa viridi-glaucescens, Carrière. G metres de hauteur. — 2 à 3 centimètres de diamètre Végétation vernaie et rhiromes traçants. Cette espèce, dénommée par M. Carrière, l’habile chef des pépinières du Muséum de Paris, est sans doute originaire du nord de la Chine; elle en fut rapportée, vers 1846, par le vice-amiral comte Cécile. Elle à certains rapports avec les Ph. mitis el aurea comme aspect général. 246 | F1G.98.— PHYLLOSTACHYS VIRIDI-GLAUCESCENS. Bourgeon et gaines accompa- gnées des appendices ciliés, LES BAMBOUS. En Algérie, les bourgeons ou turions sortent de terre vers la fin de mars ou dans la première quinzaine d'avril. Ils sont coniques, pointus même, terminés par une réunion de limbes avortés en forme de languettes droites, au bas des- quels se remarquent des expansions pi- leuses ou appendices ciliés (fig. 28). Leur couleur est fond chamois ou ver- dâtre, teintée souvent de brun rouge, parsemée de macules petites plus fon- cées. Ils sont couverts de poils rudes (fig. 28). Leur aspect, moins la couleur, est fort semblable à celui du Phyllosta- chys nigra. A la base du chaume, les gaines spa- thiformes sont d’abord réduites à l’état d’écailles de dimensions variables, sui- vant la force des chaumes. Elles sont élargies à leur base et se terminent en ovale ou en pointe; elles paraissent même acuminées par la présence d’un limbe avorté souvent peu visible ou . ayant à peine 1 ou 2 millimètres de long (fig. 29). Plus le chaume s’allonge, plus les gaines se caractérisent, et leurs dimen- sions varient avec l’écartement des mé- rithalles; elles peuvent atteindre 25 à 90 centimètres. Elles sont striées dans toute leur longueur, âpres au toucher par la présence de petits poils blancs et raides, qui disparaissent quand la gaine va se dessécher. Leur couleur est en général celle du bourgeon, que d’ail- leurs elles formaient : fond verdâtre clair, teinté de brun par places, avec DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 217 quelques macules plus foncées; couleur très-variable dàns les tons indiqués. Elles se décolorent rapidement et ne conser- vent à leur base que quelques taches brunes ou violacées, ou des points de même couleur (fig. 29). L'insertion de leur base dans la gouttière du nœud ne présente rien de saillant : elles s’en délachent facilement. La ligule est simple et légèrement échancrée, haute de 5 à 4 millimètres, verte et beaucoup plus claire que la gaîne, de consistance plus fine, se décolorant ou se desséchant avec celte dernière. Dans certains cas, elle est obtuse, irrégulière, bordée de vil- losités blanchâtres. Elle est quelquefois à peine marquée et semble disparaître dans les parties supérieures du chaume, où le limbe est développé, et aussi dans le: parties inférieures, où le limbe est rudimentaire. Le limbe, avorté, en forme de languette, est à peine appa- rent dans les premières gaînes de la base (fig. 28); ce n’est en quelque sorte qu’un petit appendice très-étroit et pointu, ayant quelques millimètres seulement de longueur ; puis, cet orsane se modifie progressivement avec l’élongation du chaume. Le limbe s’élargit et devient foliacé. Ces sortes de feuilles sont, pendant leur développement, vertes ou d’une couleur légèrement bronzée ; mais, comme elles ont le même caractère de caducité que la gaine dont elles dépendent, elles jaunissent avant de tomber. Sur les gaines inférieures, les limbes sont un peu ondulés et presque horizontaux ; sur les gaines supérieures, où ils sont plus longs et plus minces, de consistance plus molle et herbacée, ils s’infléchissent, s’in- clinant sous leur propre poids. Vers les parties supérieures du chaume, ce limbe a tout son développement; il atteint de 5 à 10 centimètres de lon- œueur, mais resle très-étroit, puisqu'il n’a qie 3 à 9 millimé- tres dans sa partie la plus large. Le limbe est caduc dans cer- (ains chaumes, surtout à leur base. Le caractère le plus distinctif des gaïnes de cette espèce, commun d’ailleurs avec celui du Phyllostachys nigra, c’est la présence, au sommet de cette gaîne, à la base de chaque côté 245 LES BAMBOUS, du limbe, d’un appendice membraneux longuement pectiné (fig. 28). Par la disposition qu’a cet organe, il semble que ce soient des faisceaux de poils qui accompagnent la base du limbe; mais lorsqu'on l’examine attentivement, on voit que la base de l’appendice est élargie et formée par une expansion du bord supérieur de la gaine et de la base du limbe. Cette expansion, en forme d'oreille ou lame horizontale, ordinaire- ment plus longue que large, se divise en lanières filiformes, irrégulières, tourmentées, tortueuses et d’une couleur brun violacé, mais qui sont blanches dès leur apparition. Ces lanières sont disposées sur un seul rang, comme les dents d'un peigne, longues de 10 à 15 millimètres. Ces corps arti- culés, qui forment une sorte de collerette à la base du limbe, sont verts et brunissent en vieillissant. Cet appendice pectiné n'existe pas toujours sur les gaines de la base comme sur celles de l'extrémité de la tige ; quelquefois aussi il n’existe que sur un des côtés du limbe, et, dans d’autres cas, il est peu développé ou n’est représenté que par deux ou trois lanières. Dans le Phyllostachys viridi-gluucescens, les gaïînes de la base sont persistantes. Les gaines spathiformes tombées, le chaume apparait d’une couleur vert tendre, recouverte d’une matière glauque ; iloffre d’abord les caractères suivants : 1° La saillie du nœud est violacée. Au-dessous de ce nœud existe une auréole de ma- ère glaucescente, blanchâtre même, qui disparaît au bout de quelque temps, soit enlevée par le vent, soit aucontact des ramifications. 2° À la base d’un grand nombre de méri- thalles existe une tache violacée foncée, occupant une partie de sa périphérie, mais toujours du côté le plus exposé au soleil, et manquant même au côté opposé ou au plein nord; cette tache s’efface insensiblement au bout de quelque temps. Les tiges de cette espèce se ramifient dès leur base, au fur et à mesure de leur croissance (fig. 30). Les ramifications, généralement au nombre de deux, mais quelquefois de trois, à chaque nœud, surtout en France, sont d’abord enveloppées dans une sorte d’écaille bicarénée dont la longueur peut varier de 20 à 25 millimètres, et la largeur de 5 à 10 à leur partie Fra. 29. Fc. 30. AE MENT PHYLLOSTACHYS VIRIDI-GLAUCESCENS. F1G, 29. Gaîne spathiforme, — Fic. 30. Tiges à différentes époques de développement. Fra. 31; Ecaille binervée, — Fire. 32, Tiges avec ramificalions géminées. » LL ET Re n's L Cr TS, $ es 1 re DESCRIPTION DES ESPÈCES GONNÜES. 251 basilaire. Gette écaille, de forme acuminée, est composée de deux nervures latérales (fig. 31), peu éloignées l’une de l’autre, et de deux membranes extrèmement minces et trans- parentes : l’une adossée à la tige, l’autre recouvrant les jeunes bourgeons avant leur développement. L’écaille binervée est fendue dans toute sa longueur, sur le côté droit, de manière que le bord de cette membrane vient s'appuyer sur la ner- vure de droite. Il résulte de cette conformation qu’en l’éta- lant, il semble que la nervure de gauche soit placée vers le centre des deux membranes. Le sommet est terminé par deux pointes inégales et séparées par une légère échancrure, ce qui lui donne le caractère bifide (fig. 31); elles sont la prolongation des deux nervures qui ont outrepassé les mem- branes. Les bords et la partie dorsale des nervures portent des petits poils rudes au toucher. Pendant la végétation, les bourgeons, pour se frayer un passage, écartent la membrane supérieure en la rejetant en arrière. Quelquefois, par la rapidité de la croissance de la tige, l’écaille binervée se déchire de bas en haut, et, comme elle est extrèmement caduque, elle disparait assez vite. L’écaille binervée se retrouve à la base de tous les bour- geons ou jeunes pousses, quelle que soit leur origine ; mais alors elle subit des modifications dans sa largeur et sa hau- teur, restant constante dans ses deux nervures, et bifide dans le plus grand nombre des cas ; mais ce dernier caractère dis- parait sur les écailles observées à la base des ramifications de troisième et de quatrième ordre. En outre, toutes les écailles qu'on remarque à la base des rameaux de second ordre portent leur fente longitudinale sur la partie gauche. Sous le climat de Paris, lorque les chaumes du Phyllosta- chys viridi-glaucescens ont terminé leur croissance, ils pré- sentent les caractères suivants : presque droits, se déjetant un peu de droite à gauche et d’un nœud à l’autre ; presque cylindriques, quelquefois cependant un peu méplats, compri- més; de couleur verte, luisants; nœuds un peu saillants, d'un violet foncé; mérithalles plus ou moins longs, de 0",08 à 0°,25, ct portant, alternativement d’un nœud à l’autre, Q 19 so LES BAMBOUS. une double canrelure plus ou moins profonde et séparée par une sorte de petite côte longitudinale arrondie. Nous avons dit que les chaumes du Ph. viridi-glaucescens portent des ramifications dès leur base, au nombre de deux, quelquefois de trois (fig. 32), à chaque nœud; les deux laté- rales, ordinairement d’inégale longueur, sont plus vigoureuses que celles du centre; elles forment, dès leur point d’inser- tion, une bifurcation dont l’angle est assez ouvert. Au centre de cette bifurcation naît la troisième ramification, très-petite et quelquefois avortée. Les ramifications latérales ou de pre- mier ordre sont plus ou moins longues; elles sont grêles, d’un vert luisant, portent des nœuds plus ou moins rappro- chés, d’une couleur violacée ; les mérithalles sont cannelés et les cannelures sont ou doubles ou simples. Pendant la végétation de ces ramifications de premier ordre, on remarquait à chaque nœud une gaine spathiforme longue de quelques centimètres, portant une ligule peu appa- rente et un limbe plus ou moins développé; puis, tout à fait à l'extrémité, et au terme de la végétation, trois ou quatre feuilles parfaitement constituées. Celles-ci sont composées : 1° d’une gaine de 0*,07 à 0",08, glabre et enroulée autour de la tigelle; 2% d’une ligule à sommet denté, de couleur vio- lacée ; 3° d’un limbe elliptique lancéolé, long de 0",10 à 0",15, large de 10 à 15 millimètres, aux bords garnis de très-petites dents épineuses, glabre et d’un vert glauque sur ses deux faces, particulièrement en-dessous, caractère qui à fait don- ner à ce Bambou le nom qu’il porte; 4 d’expansions mem- braneuses divisées en lanières filiformes, relativement assez longues, de couleur purpurine, et disposées en collerette autour de la tigelle, mais au sommet de la gaine et de chaque côté du limbe. Ces expansions sont caduques, car on ne les retrouve plus sur les feuilles anciennes. Les ramifications de premier ordre, examinées vers la partie centrale d’unetige, peuvent présenter de dix à quinze nœuds, à chacun desquels naissent les ramifications de second ordre. Celles-ci portent vers leur base deux ou trois gaînes spathi- formes de dimensions étroites, puis elles se terminent par DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 253 trois ou quatre feuilles dont nous avons donné ci-dessus les caractères. C’est sur les nœuds que portent les gaines spathi- formes que se développent successivement des ramifications de troisième ordre, et toujours d’après les mêmes principes. Quant à la ramification centrale, elle reste toujours grêle, tout en se subdivisant quelque peu. Quelquefois, mais rare- ment, 1l s’y en ajoute une autre parlant du même point et croissant dans les mêmes conditions. Pendant toute la durée de l'existence du chaume, ses rami- fications se subdivisent à l'infini; mais toutes ces ramifica- lions nouvelles ne sont plus accompagnées à leur base de l’écaille binervée que nous avons signalée sur le développement de première année. Cet organe est remplacé par un autre à peine apparent ; les gaines spathiformes sont également rem- placées par de très-petites et courtes écailles caduques, au nombre de trois ou quatre. Tels sont les caractères d’un chaume de Phyllostachys viridi-glaucescens durant sa période de croissance, laquelle a lieu en quelques semaines seulement. Ces caractères, saillants sur cette espèce, peuvent d’ailleurs servir à la description gé- nérale des ramifications du groupe des Phyllostachyées. Déve- loppé en France sur une touffe de cinq à six ans placée dans de bonnes conditions de climat et de terrain, le chaume peul alteindre une hauteur de 5 et 6 mètres, avec 2 à 3 centimè- tres de diamètre. Au bout de deux ans de végétation, il est d’un vert jaunâtre, luisant, à nœuds assez saillants, formant comme un bourrelet de couleur olivâtre, avec un petit cercle pruineux en dessous, à mérithalles longs de 0",10 à 0",20 et à cannelures simples ou doubles, comme nous l’avons pré- cédemment indiqué. Si c’est dans le midi de la France, en Algérie, ou dans des conditions analogues de climat, qu'est cultivé le Phyllostachys viridi-glaucescens, ses tiges prennentun tout autre caractère que dans le nord. Elles sont plus vigoureuses, deviennent plus droites, plus cylindriques ; leurs mérithalles sont plus allongés, leurs nœuds plus saillants et leurs ramifications au nombre de deux seulement, sans doute parce qu'il y à eu doi. LES BAMBOUS. avortement de la centrale, par suite de la rapidité de la crois- sance. En Algérie particulièrement, ce Bambou devient un vévétal dont on n’a aucune idée dans les régions septentrio- nales. Les chaumes, sous ce soleil ardent, deviennent d’un beau jaune doré ; le bourrelet supérieur de chaque nœud est d'un jaune foncé, tandis que Pinférieur, moins apparent, est orisâtre, et le cercle pruineux qui existe en dessous est alors plus visible. Le rhizome, ordinairement enterré, rampant à 0",25 ou 0",30 de profondeur, est de dimension beaucoup moindre que le chaume, de couleur jaune clair, lisse, presque sphérique par parties. Nœud peu saillant. C’est en généralle caractère de tous les rhizomes de ce groupe; seulement celui-ci est un peu orèle. Inflorescence inconnue dans nos cultures. Sou le climat de Paris, cette espèce est souvent confondue avec le Phyllostachys aurea, avec lequel elle à en effet beau- coup de rapports; cependant elle y est moins traçante. En Algérie et dans le midi de la France elle l’est essentiellement. Elle est très-employée dans la décoration des jardins du Nord, à cause de sa robusticité. Son aspect est fort semblable à ses congénères du même sroupe ; cependant ses tiges sont plus flexueuses que le Ph. nilis, plus hautes que celles du Ph. aurea. Ses chaumes, de moyenne grosseur, s'élèvent à # mètres environ (climat de Paris) et sont d'un vert jaunâtre; ses ramifications sont rigides, orèles, longues, peu touffues; ses feuilles, moyennes, vertes en dessus, glauques en dessous. Par sa rusticité et la facilité avec laquelle on peut le cultiver dans toute sorte de terrain, le Ph. viridi-glaucescens pourra rendre de grands services à l’industrie, qu’on l’emploie soit à la fabrication du papier, soit aux nombreux usages dont il est question précédemment dans un chapitre spécial. Le mode de multiplication est le même que pour tout ce eroupe : les rhizomes, peu enfoncés, émettent beaucoup de radicelles à chaque nœud. La reprise est facile DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 200 Phyllostachys nigra, Bambusa nigra, Lodd. 5-7 mètres de hauteur. — 2 à 3 centimètres de diamètre, (Végélalion vernale et rhixomes traçants.) Ce Bambou est originaire des Indes orientales. Il est remiar- quable par la couleur noire de ses tiges. Comme dimension, dans les pays tempérés, il vient en troisième ou quatrième ordre, dans le groupe des {raçants connus, c’est-à-dire après les Phyllostachys milis, Quilioi, et viridi-glaucescens ; ce- pendant, dans certains cas, il dépasse ce dernier en hauteur et surtout en diamètre. En Algérie, le jeune bourgeon ou turion sort de terre du 15 avril au 1% mai. Il est cylindro-conique, légèrement aplali cependant, quelquefois d’un brun rougeätre, ordinairement teinté de rouge pâle, recouvert danstoutes ses parties de poils blancs, raides et courts (fig. 33), et d’une matiëre glauces- cente. Il se termine par un faisceau de limbesavortés en forme de languettes vertes, rigides, sinueuses, au bas desquels sont de petits corps auriculés garnis de longs poils (fig. 35). La tige s’allonge et les caractères des gaines spathiformes s’accentuent. Les quatre ou cinq premières de la base, hautes de 0",03 à 0",07, embrassent la tige par leur partie basilaire ; elles ont une forme presque acuminée, et, comme sur beau- coup d’autres espèces, elles persistent plus longtemps que les gaines supérieures. Leur texture est assez épaisse, coriace, de couleur jaunâtre. Elles sont glabres; cependant, dans leur Jeunesse, quelques petits poils couchés et caducs recouvrent leur partie dorsale. En outre, elles sont striées et portent sur leurs bords des cils nombreux et jaunâtres. La ligule s'y trouve quelquefois assez développée, de couleur brunûtre, et quelque peu ciliée. Le limbe est assez court, épais, coriace, légèrement acuminé, et glabre. Les gaines spathiformes supérieures à celles que nous venons d'étudier deviennent beaucoup plus grandes et plus 250 LES BAMBOUS. longues; elles peuvent avoir de 0",10 à 0",20, et peut-être da- vantage sur des sujets à végétation plus puissante; leur largeur est subordonnée à la grosseur de la tige qu’elles embrassent, de manière que leurs bords se rejoignent dans une grande partie de leur longueur. Assez épaisses, coriaces, striées, de couleur violacée pendant leur développement, puis jaunâtres en vieillissant, elles sont très-caduques. Leur sommet est plus ou moins brusquement obtus; les bords sont ciliés dans la moitié de leur partie supérieure. La plupart d’entre elles sont légèrement recouvertes de poils couchés sur leur partie dor- sale; celles de l’extrémité sont glabres ou à peu près. La ligule est plus développée sur les gaines supérieures; elle a quelquefois de 4 à 6 millimètres de hauteur, avec une largeur subordonnée à celle du sommet de la gaine qu’elle couronne. Elle est brune, rouge, plus foncée que la gaine, plus ou moins obtuse, fimbriée, pectinée, quelquefois déchi- rée. Dans le haut de la tige, cette ligule a une couleur carmin foncé. Le limbe ou languette est assez épais, coriace, légèrement ondulé pendant qu’il se développe; sur les gaines inférieures, sa largeur est de 8 à 12 millimètres et sa longueur de 0",02 à 0",06 ; mais sur les gaines supérieures 1l devient plus long, atteignant 0",10, quelquefois davantage. Dans ce cas-là, il reste étroit; 1l est alors lancéolé et terminé en pointe. La face supérieure est glabre, l’autre est légèrement scabre et les bords sont garnis de très-petites dents épineuses. Sur les gaines qui vont terminer la tige, le limbe devient foliacé, comme dans toutes les autres espèces; dans cette condition de droit qu’il était sur les gaînes inférieures, il se coude à sa base pour s’infléchir sur la tige. Au sommet de la gaine et de chaque côté du point d’inser- tion du limbe, on remarque une expansion membraneuse plus ou moins élargie à la base (fig. 33), et se divisant, sur les côtés et à son sommet, en lanières filiformes, tortueuses et de couleur brunâtre. Dans bien des cas, ce caractère n’existe pas sur les gaines basilaires et disparaît sur celles de l’extré- mité de la tige; quelquefois aussi il n'existe que d’un seul DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 2957 côté, ou bien cette membrane est atrophiée. Ordinairement ces ex- pansions se dessèchent rapidement. La tige s’accroit, conservant sur la plus grande partie de sa lon- gueur les gaines spathiformes en- roulées autour d'elle. Cependant ces gaines ne tardent pas à se déta- cher par leur base, sous l’effort des ramifications. Elle apparaît alors couleur vert tendre, et glaucescente seulement au-dessous du nœud. Quelquefois, et surtout sur les touf- fes non adultes, les jeunes tiges sont entièrement glauques. Avant leur développement, les ramifications des tiges, sous les gai- nes spathiformes, sont enfermées dans une gaine bicarénée, offrant un caractère particulier : elle est bifide, c’est-à-dire divisée en deux lobes comme acuminés, aigus el formant un V très-ouvert (fig. 54). La longueur de chaque lobe peut ètre de 10 à 20 millimètres avant le développement des ramifications; mais lorsque celles-ci ont quelques centimètres, il devient plus long el peut atteindre 0",03. Cette gaine bicarénée est composée de deux membranes très-minces, pellicu- leuses, diaphanes, et de deux ner- vures jaunes latérales, formant la bifurcation que nous avons indi- quée. Elle est due aux deux mem- si | ri branes qui se résorbent dans leur ,, 33 _pHyLLosrAcHYS NIGRA partie supérieure, mais qui restent Bourgeon. 17 258 LES BAMBOUS. unies par leur base; celle du devant est fendue jusqu’en bas (fig. 84). Sur leur partie dorsale, les nervures sont couvertes de villosités blanchâtres, et les bords sont ciliés (fig. 3%). Lorsque les ramifications de la tige ont alteint une longueur de 0",20 à 0",30, cha- cune d’elles porte à sa base des gaines d’un autre ordre, proportionnées en dimensions à la place qu’elles occupent. Leur texture est extrêmement mince; presque membra- neuses, elles sont en partie couvertes de vil- losités blanchätres sur la face extérieure; les bords sont ciliés. La ligule est assez déve- loppée, à sommet arrondi; le limbe géné- ralement très-petit. Ces gaines de second ordre étant très-caduques, leur existence est de courte durée. Il en est de même des ramifications de troisième ordre; leurs gaines vont en diminuant de développement. Pendant leur première année de végétation, les tiges du Phyllostachys. nigra sont d’un vert olivâtre et d’un brun foncé à l'approche des nœuds; ce n’est qu’en vieillissant qu’elles deviennent noires. Lorsque la touffe a été cultivée à la même place depuis quelques années, dans de bonnes con- ditions de climat et de terrain, elles peuvent avoir une lon- gueur de 5 à 7 mètres et une circonférence de 0",10 à 0",12. Cylindriques dans une partie de leur longueur, elles vont tou- jours en s’amincissant. Dès cet âge, la couleur des tiges est déjà d’un beau noir brillant, surtout à la partie opposée au soleil; cette coloration noire commence à se mamifester par la partie supérieure du mérithalle. Les nœuds sont générale- ment peu saillants (fig. 35); ils sont assez remarquables en ce qu’ils sont, en quelque sorte, composés d’un bourrelet dont le supérieur est noir et l’autre blanchätre. Entre eux deux est une cicatrice circulaire, linéaire et blanche, indiquant la place qu'occupait chaque gaine spathiforme. D’un nœud à l’autre on compte de 0”,06 à 0",15, les mérithalles du bas de la tige étant toujours plus courts que ceux du centre; ils portent Fic. 34. PHYLLOST. NIGRA. Écaille binervée, DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 299 presque tous un double sillon assez accusé (fig. 35). Dans le Bambou noir, les ramifica- tions ne commencent à apparaitre que vers le huitième ou le douzième nœud à partir du sol. Alors les tiges se mo- difient; elles portent d’un nœud à l’autre, et alternativement jusqu’à leur extrémité, deux cannelures générale- ment peu profondes, l’une plus large que l’autre, séparées par une côte lon- gitudinale. Deux ou rarement trois ramifications, partant d’un même poini d'insertion, sortent de chaque nœud. Lorsqu’elles sont deux, elles forment une sorte de V (fig. 35) dont les bran- ches sont un peu fermées; l’une est un peu plus grosse et un peu plus longue que l’autre, suivant en cela la diflé- rence de largeur des cannelures. Leur disposition est oblique; elles sont rai- des, de forme à peu près triangu- laire, comme aplaties d’un côté, lon- gues de 0",80 à 1°,30. Ces deux sortes de branches se subdivisent _elles- mêmes; chacun de leurs nœuds porte des rami- fications : une sur les nœuds du bas, deux sur les nœuds du centre, trois sur ceux de l’ex- trémité ; mais sur ces derniers, celle du cen- tre est extrêmement petite et comme atro- phiée. Ces ramifica- Fic. 35.— PHILLOSTACHYS NIGRA. lions secondaires se Tige avec ramifications. Naissance des ramifications 260 LES BAMBOUS. subdivisent encore à leur tour en une multitude de petites ramuscules, ténues, presque filiformes, à l'extrémité des- quelles sont les feuilles. La gaine est grèle, longue de 20 à 25 millimètres, glabre. Le limbe est relativement petit, elliptique, acuminé, long de 0",07 à 0",10, large de 10 à 12 millimètres, glabre sur les deux faces, mais portant de petites dents épineuses sur les bords ; il est plus vert en dessus qu’en dessous. La nervure médiane est peu apparente; sur chacun de ses côtés on en remarque quatre ou cinq autres plus petites, ce qui en porte le nombre à huit ou dix; le sommet a les bords quelque peu ciliés. La ligule est brunâtre, petite, comme légèrement déchirée, tronquée. Au sommet de la gaine, et de chaque côté du limbe, se trouvent des expansions membraneuses divisées en quelques lanières filiformes relativement assez longues. Comme caractère général, les ramifications du Bambou noir ne présentent jamais à leur extrémité que quatre ou cinq feuilles, qui tombent au bout d’un an. Les rhizomes s’enfoncent peu dans le sol, à quelques cen- timètres seulement; ils sont, comme la tige, de couleur noire et portent alternativement d’un nœud à l’autre une cannelure plus ou moins prononcée; leur grosseur moyenne est de 0",01 à 0",02. Les mérithalles sont cylindriques, courts, de 0",02 à 0",03 de diamètre. Ils sont fistuleux d’un nœud à l’autre; mais, par suite de l’épaisseur du rhizome, le canal est très-étroit. Par contre, la cloison qui forme les nœuds est très-épaisse, relativement à l’exiguité du canal. Les nœuds sont peu saillants; à chacun d’eux apparaît un verticille de racines, généralement au nombre de six, peu longues, coriaces, résistantes, et portant un nombreux chevelu capillare. À chaque nœud est un bourgeon qui peut, selon les circon- stances et le caprice de la nature, produire ou une tige aérienne ou un rhizome. Avant son développement, ce bour- seon est enveloppé dans une sorte d’écaille bicarénée, com- posée de deux membranes pelliculeuses dont l’une est adossée au rhizome et dont l’autre lui est opposée. Sur la partie dorsale de l’écaille s’aperçoivent deux nervures latérales assez DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 261 éloignées l’une de l’autre et formant presque les bords. La membrane inférieure s’est déchirée dans presque toute sa longueur, en sorte que l’écaille semble être divisée en deux lobes; la membrane supérieure est fendue dans toute sa hau- teur. Cette écaille bicarénée, haute de 0”,01 environ, est noi- râtre, etses nervures sont couvertes de poils grisätres. Durant sa végétation, le rhizome porte à chaque nœud une gaine écailleuse, qui recouvre chaque entre-nœud. Le Phyllostachys nigra n'a jamais montré ses inflores- cences dans nos cultures. En Algérie, tous les essais tentés pour en obtenir la floraison sont restés infructueux. Cette espèce est assez rustique pour supporter les hivers moyens du climat de Paris, mais alors ses dimensions sont limitées et son caractère traçant très-amoindri; il préfère les régions tempérées et chaudes de l’Europe et celles de l’AI- gérie, où 1l peut parfaitement quitter les plaines du littoral et s'élever dans le Sahel et dans les régions montagneuses. C’est, parmi les espèces cultivées, celle qui offre les tiges les plus jolies et les plus justement recherchées. Noires, naturel- lement luisantes à partir d’un certain âge, elles s'élèvent de D à 7 mètres avec un diamètre de 0",02 à @°,04. L'industrie les recherche beaucoup, et nous avons dû en étendre large- ment la culture au Jardin du Hamma. On les exploite au moyen de coupes annuelles faites avec soin au-dessus du rhizome. La multiplication du Ph. nigra est très-facile au moyen de tronçons de rhizomes. Quelquefois plusieurs tiges naissent très-rapprochées sur le même rhizome et forment des touffes avec les rhizomes voisins; on peut, dans ce cas, les séparer et enlever des mottes assez fortes, qui constituent alors immédiatement de grosses touffes. 262 LES BAMBOUS. Phyllostachys aurea, Bambusa aurea, Hort. 9-4 mètres de hauteur, — 0,020 à 0,095 de diametre. \Végétation vernale el rhixomes tracants.) Est-ce bien une véritable espèce que le Phyllostachys aurea? Son nom lui a été donné par M. Carrière, parce que ses liges deviennent d’un beau jaune en vieillissant, caractère très-commun à bien des espèces voisines. Par son mode de végétation et par ses organes extérieurs, il a beaucoup d’ana- logie avec le Ph. mitis, dont il ne diffère guère que par les nodosités très-rapprochées, plus ou moins nombreuses et plus ou moins accentuées, que l’on remarque toujours vers la base de ses tigos (fig. 37). Ces nodosités sont très-con- stantes ; elles se maintiennent du moins très-rigoureusement dans les cultures de notre Jardin du Hamma, depuis que nous avons observé ce caractère pour la première fois, 1l y a quel- ques années déjà. ielativement à ce caractère, M. Martins, le savant bota- niste et Directeur du Jardin des Plantes de Montpellier, pense que ces nodosités ne sont dues qu’à une influence locale, influence que subissent souvent les végétaux, des modifica- tions très-profondes pouvant se produire souvent sur l’en- semble d’un même végétal, au point que celui-ci s’écarte assez sensiblement de son point d’origine pour constituer une race ayant des formes extérieures particulières; c’est probablement le cas qui se présenterait pour le Phyllostachys aurea, qui aurait pour point de départ le Ph. mitis, modifié, suivant lui, par des circonstances locales. C’est néanmoins un fait fort intéressant à étudier dans des localités différentes, en y culti- vant simultanément les deux plantes; par ce moyen l’on verra au bout de quelque temps si des modifications se produisent, et si l’on remarque quelque retour de forme vers la plante originelle. Nous ne sommes pas très-éloignés de partager, mais non FiG. 36. — PHYLLOSTACHYS AUREA. Bourgeon ou turion, avec ses limbes avortés en forme de languettes flexueuses. Le ». F a eZ ESA pa À Le no mr se "2 rt ie th ER ETS DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 265 complétement, l'opinion de M. Martins, pour plusieurs rai- sons : d’abord parce que, au Jardin du Hamma, lorsqu'on veut distinguer le Ph. aurea du Ph. mitis, on ne peut le faire qu'au moyen de ces caractères extérieurs, les nodosités; c’est déjà une remarque digne d’attention. Les organes appendicu- laires, les gaines spathiformes, qu'on voit sur le chaume au moment où celui-ci croit, sont assez semblables à ceux du Ph. milis; nous ajoutons que semblable est également le mode de végétation. Cependant nous devons dire que dans nos cultures, où les Bambous sont nombreux, les Ph. mitis n’ont jamais dégénéré en Ph. aurea, ni l'inverse ne s’est produit. Ces deux espèces restent constamment avec leur même type, et le Ph. aurea conserve, en dehors de caractères différents, une taille plus petite. Ces espèces, transportées dans d’autres localités, sont restées exemptes de modifications, du moins pendant ces quelques années que nous les étudions. Nous dirons encore, en faveur de la fixité de cette espèce ou de cette forme, que des Bambous venus sans noms de la Chine et du Japon nous ont représenté la même plante avec les mêmes caractères de superposition de nœuds. A l'Exposition univer- selle de 1878, convient-il d'ajouter aussi, ce Bambou à nœuds superposés figurait comme un des types les plus usités dans l'industrie. | Quoi qu'il en soit, dans la description que nous allons donner, on verra la presque identité des deux Bambous, ou du moins la grande ressemblance du Ph. aurea avec le Ph. mitis jeune. En Algérie, le bourgeon ou turion sort de terre du 15 avril au 1* mai. Il est très-vigoureux, très-conique, sensiblement aplati, teinté d’une légère couleur vineuse parsemée de quel- ques taches et macules plus foncées, striées. Il est accompagné de limbes en forme de languettes très-longues, de 0",08 à 0,10, étroites de 4 millimètres, flexueuses (fig. 36), bordées d’un liséré très-clair. Il est lisse au toucher. Les gaines qui le forment se dessèchent immédiatement sur leurs bords en larges plaques. Le chaume, garni de ses gaines spathiformes, est de moyenne 266 LES BAMBOUS. grosseur. Les trois ou quatre premières gaînes de la base sont quelque peu persistantes, hautes de 5, 6, 8, 10 centimètres, de couleur jaunâtre; elles embrassent le chaume par leur partie basilaire seulement; leur sommet est un peu en pointe ou un peu arrondi. Elles sont peu épaisses, légèrement co- riaces, striées, glabres sur toutes les parties. La ligule y est peu développée et glabre. Le limbe est court, presque droit, apiculé ; 1l atteint parfois, sur la quatrième gaine, de 8 à 15 millimètres. Les gaines spathiformes qui succèdent à celles de la base sont caduques; leur longueur peut atteindre 0",30 et quel- quefois davantage ; leur largeur est subordonnée à la gros- seur du chaume. Elles sont minces, quelque peu coriaces cependant, et striées. Leur couleur est violacée, mais elles jaunissent en vieillissant, ou plutôt en se desséchant. Elles ont, sur leur partie dorsale, quelques taches irrégulières, généralement petites. Le sommet est plus ou moins arrondi, mais 1l est brusquement tronqué horizontalement. La ligule est relativement petite, courte, glabre, entière sur la moitié de la longueur de la tige, mais fimbriée ou pectinée sur les gaines qui succèdent et la terminent. Le limbe est linéaire, lancéolé, effilé, variable dans ses dimensions ; il est long de 0",03 à 0",15, et large à peine de 2 à 4 millimètres; court, il est presque droit; long, il est lége- rement flexueux. En outre, il est bordé de petites dents épi- neuses; ses faces inférieure et supérieure sont légèrement scabres. Sur les dernières gaines de l’extrémité de la tige, le limbe devient plus long et plus large; en se développant, il est rubané de blanc. Cette panachure disparaît assez prompte- ment; le limbe alors devient vert et jaunâtre, comme sur les saines inférieures. On voit, d’après ces caractères des gaines spathiformes, que le Ph. aurea a bien de l’analogie avec le Ph. mailis. Les gaines de la base sont terminées par un appendice foliacé linéaire, long de 0,03 à 0",04; ce n’est autre chose que la feuille à l’état rudimentaire ; il se modifie peu à peu sur les gaines supérieures ; il prend alors tout à fait les carac- DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES,. 267 tères de la feuille. Les bords de la gaine sont peu ou point ciliés, ce qui la distingue de celle du Ph. viridi-glaucescens, avec le- quel ce Bambou a également des caractères de ressemblance. La ligule est courte, verdâtre, peu ciliée, et ne porte pas de cils bar- bigères sur les côtés, comme le- dit Phyllostachys. Après la chute des gaines, le chaume apparait d’un vert pres- que glauque avec une auréole olaucescente au-dessous de cha- que nœud. Le chaume du Ph: aurea est très-droit ; il s'élève à 35 ou 4 mè- tres; son diamètre est de 20 à 25 millimètres. Les mérithalles sont courts, canaliculés; les nœuds assez saillants, comme nous l’avons fait remarquer; les feuilles moyennes, vertes en des- sus et glauques en dessous. Les caractères qui distinguent encore ce Bambou du Ph. viridi- glaucescens sont : une ramifica- tion beaucoup plus dense, plus feuillée, due d’abord au peu d’écartement des mérithalles de OLA sa base (fig. 37), et ensuite à ce que ces ramifications descen- dent, ou à peu près, jusqu'à la base de la tige. Beaucoup moins traçant que le viridi-glauces- cens, il forme une touffe plus compacte et d’un plus grand effet. vero title | ju N° (Us F1G. 37. — PHYLLOST. AUREA. Nœuds de la base des liges. 268 LES BAMBOUS. On le considère comme traçant peu, ou même pas du tout, sous le climat de Paris; peut-être ne l’y a-t-on pas étudié sur des sujets qui avaient atteint un développement suffisant. En tout cas, 1l y est très-résistant. Son inflorescence est inconnue dans nos cultures. Le rhizome est semblable à ceux du groupe. Les touffes compactes du Ph. aurea permettent de le mul- üiplier par division, et d'obtenir tout de suite des pieds déjà forts. Lesrhizomes, peu profonds, souvent rampants à la sur- face, donnent toute facilité pour le bouturage par tronçonne- ment. Cette multiplication est des plus faciles et des plus assurées. Le Ph. aurea est destiné à avoir du succès. Il est très- apprécié en Algérie à cause de la dureté de son bois, de la belle couleur jaune de ses tiges, et à cause surtout de cette superposition de nœuds (fig. 37) qui se trouvent à sa base. Il sert à faire des manches d’ombrelles, des cannes, etc., d’une grande originalité. Phyllostachys flexuosa. Bambusa fleæuosa. Hort. 3 mètres de hauteur, — 1-2 centimèlres de diamètre, (Végétation vernale et rhixomes traçants.) Sous ce terme spécifique, le colonel Munro décrit une petite espèce épineuse qui n’est certainement pas celle que l’horticulture désigne sous le même nom, et dont nous nous occupons ICI. En Algérie, le jeune bourgeon ou turion sort de terre à la fin de mars ou au commencement d'avril. En 1875, il appa- raissait dans les premiers jours d'avril, et en 1876 vers le 15 mars, sur la même touffe. Il est droit, conique, pointu, légèrement aplati, terminé par de petits limbes avortés, raides et droits. Sa couleur est verdâtre ou vineuse, souvent très- foncée ; en résumé, de teinte variable et fondué avec des ma- cules plus brunes. Fic. 38. Fic. 38 bis. Fic. 39. PHYLLOSTACHYS FLEXUOSA. Fi, 38. Tige en développement. — F16. 38 bis. Développement des ramifications Fi6, 39, Ecaille binervée, DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 271 Une couleur foncée, en forme de liséré, accompagne les bords de chaque gaine et s’étale quelquefois ; mais, au bout de quelques jours, cette couleur devient aussi terne qu’elle a été accusée, se ternissant même bien avant le desséchement com- plet de la gaine, qui a lieu au moment où elle quitte le chaume. Quoique à l’état de turion, sur une certaine hauteur, ce chaume en élongation a un aspect légèrement violacé, plus accentué encore que celui du Phyllostachys violascens au même degré de développement. La uge du Pyllostachys flexæuosa, enveloppée de gaines spathiformes, distiques, caduques pendant sa croissance, ne tarde pas à les rejeter (fig. 38). Les quatre ou cinq premières gaines de la base sont longues de » à 10 centimètres, larges de #, longuement acuminées, de couleur légèrement vio- lacée, mais jaunissant promptement, striées, glabres, même sur les bords. Ligule très-petite, tronquée, déchirée, de cou- leur brune. Limbe très-petit, acuminé, long de » à 6 milli- mètres, glabre, aux bords rudes au toucher, tantôt droit, tantôt oblique. Les gaines spathiformes deviennent successivement plus longues ; elles peuvent atteindre 0",20 et mème davantage ; leur largeur est proportionnée à la grosseur de la tige ; elles sont très-longuement acuminées, de couleur violacée, striées, glabres, polies et lisses au toucher, portant quelques villosités sur leurs bords supérieurs; elles jaunissent et tombent promptement. La ligule est petite, comme tronquée, déchirée, portant quelquefois des cils et des poils blanchâtres assez développés ; sa couleur est brünâtre sur la plante vivante. Le limbe est devenu plus long ; il peut avoir de 0",01 à 0",03; il est très-étroit, linéaire, glabre ; les bords sont rudes au toucher. Nous n'avons pas remarqué sur les gaines spathiformes de ce Bambou ces expansions membraneuses pectinées que nous avions rencontrées sur beaucoup d’autres espèces du mème groupe, notamment sur le Phyllostachys viridi-glaucescens, qui à beaucoup de ressemblance comme aspect avec le Ph. [leæuosa. 212 LES BAMBOUS. À la chute des gaines, qui se détachent de bonne heure sous l'effort des ramifications, bien avant même que l’élongation entière du chaume soit accomplie, ce chaume apparaît d’une couleur vert d’eau, non glauque, si ce n’est une légère auréole au-dessous de chaque nœud. Les ramifications géminées (fig. 38 bis) naissent, comme nous l’avons dit, à chaque nœud, dès la base de la tige et dans toute sa longueur. Elles sont alternes distiques, géné- ralement bifurquées à leur point d'insertion, de manière à former comme un V ouvert; très-rarement, on en observe trois sur ce même point. Elles se ramifient elles-mêmes en ramules et ramuscules (fig. 38 bis). Les feuilles de ces rameaux sont longues d’une quinzaine de centimètres environ sur 15 millimètres de large, vertes, un peu glauques à la face inférieure. La ligule est quelquefois accompagnée de grands cils rouges. Au moment de la floraison, les feuilles tombent, et les fleurs apparaissent à leur place. Avant le développement des ramifications, les organes qui les produisent sont enveloppés dans une écaille binervée, bifide (fig. 39), accolée à la tige; elle est composée de deux membranes pelliculeuses, transparentes, striées, et de deux nervures latérales assez éloignées l’une de l’autre, très- saillantes sur la partie dorsale et comme ailées. Sa hauteur est de 0",02 à 0",03; sa largeur, à la base, de 0",015 à 0",018. La membrane de devant est fendue dans toute sa longueur sur un de ses côtés, tantôt à droite, tantôt à gauche, mais plus généralement dans ce dernier sens. La membrane adossée à la tige est beaucoup plus transparente que l’autre; elle est fendue dans le tiers ou la moitié de sa partie supérieure, quand les bourgeons s’en échappent. C’est ce qui lui donne ce caractère bifide que nous avons observé et qui forme deux lobes arqués d’inégale longueur, dont l’extrémité est ter- minée par chacune des deux nervures (fig. 39); celles-ci sont couvertes, sur les faces des parties ciliées, de petits poils cou- chés, tandis que les bords portent de longs cils blanchâtres. Le sinus formé par les deux lobes est un V peu ouvert (fig. 39). DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 273 Des deux ramifications qui naissent de chaque nœud, l’une est beaucoup plus vigoureuse que l’autre (fig. 38 bis); la plus petite est également enveloppée d’une écaille binervée, mais de proportions beaucoup moindres. Les ramifications du Phyllostachys fleæuosa deviennent assez longues, flexueuses (fig. 38 bis), d’où son nom; durant leur croissance, elles sont garnies à chaque nœud d’une gaine spathiforme de second ordre, mince, violacée, striée, glabre, longue de 0",07 à 0",08 et très-caduque. Ligule très-petite, quelquefois acuminée, ciliée, pectinée. Limbe très-petit, api- culé, acuminé ; vers l’extrémité des ramifications, il devient un peu plus long et plus large. Quant aux subdivisions des ramifications, leurs organes sont les mêmes, avec des dimen- sions plus restreintes, chacune d'elles se terminant par trois ou quatre feuilles fort semblables à toutes celles des plantes de ce groupe. Ce n’est que très-rarement que le Phyllostachys flezuosa a montré sa floraison ; le Jardin du Hamma d'Alger en à eu- la primeur; ce fait est d'autant plus remarquable que c’est la première fois également que nous pouvons constater la floraison d’une espèce du groupe auquel appartient ce Bam- bou; aussi nous sommes-nous empressés de faire repré- senter cette inflorescence, et c’est sur ces dessins (fig. 40-41) que nous en verrons l’ensemble. Les fleurs du Phyllostachys flexuosa naissent sur toutes les ramifications que portent les tiges et à la place qu’occu- paient les feuilles. Elles forment par leur ensemble et par leur groupement des sortes de panicules dont les divisions, prises séparément, représentent des épis de 0",03 à 0",04 de long, composés le plus ordinairement de 8 ou 10 épillets, bien qu'on en compte parfois moins de 8 et jusqu’à 14; chacun porte une, deux, ou très-rarement trois fleurs. Sur chaque épi, l'on remarque des fleurs avortées, des fleurs fertiles et des fleurs stériles, ces deux dernières réu- nies le plus souvent dans un même épillet. Si on l’étudie en procédant de la base au sommet, voici ce que l’on constate. À la base de la partie dorsale, accolé à l’axe qui le supporte, 18 274 LES BAMBOUS. on remarque un organe extrêmement petit, c’est une sorte d’écaille caxénée, à sommet obtus, et légèrement velue exté- rieurement. C’est du centre de cet organe persistant, d’un millimètre à peine de hauteur, que sort l’épi. Celui-ci porte à sa base six gaines écailleuses; les trois premières sont extrêmement petites et courtes, de À à 4 millimètres; le sommet en est obtus et le plus souvent échancré, ou plutôt fendu de haut en bas; les trois autres gaines sont plus longues, elles ont de 5 à 7 millimètres ; l'une d’elles, la plus. courte, a le sommet obtus, mais les deux suivantes offrent des caractères différents : elles se terminent par une pelite membrane ciliée qui est très-peu développée, c’est une ligule, et par un appendice très-court, c’est la languette qui com- mence à apparaître. Sur l’un des côtés et sur une partie de l’autre, les gaines sont bordées de petits cils blanchâtres. Elles sont donc, comme on le voit, de forme variable ; cha- cune delles est accompagnée à sa base d’un très-pelit bour- geon plus ou moins développé, souvent presque à l’état rudi- mentaire, et qui, par suite de sa situation, doit rester tel quel; d’où l’on peut conclure que les gaines écailleuses accompagnées de leur bourgeon représentent des épillets dont les fleurs avortent complétement. Après ces premiers épilets, en quelque sorte atrophiés, on remarque les épillets fertiles, composés comme suit : 1° Une gaine écailleuse, longue de 20 à 25 millimètres, large, quand elle est dérouléé, de 5 à 7 millimètres, terminée par une petite languette pointue. Entre ce dernier organe et l'extrémité de la gaîne, on aperçoit une tigule très-courte et légèrement ciliée. La surface supérieure de la gaine est un peu scabre au toucher. De petits cils blanchâtres existent sur l’un des côtés et sur la moitié de l’autre. 2 À la base de cette gaine, une petite bractée carénée, longue de 5 à 8 millimètres, mince, molle, blanchâtre, pres- que obtuse, avec la partie dorsale légèrement velue. Un bour- geon très-petit, peu ou point développé, l'accompagne à sa base. Ce bourgeon est sans doute encore une des fleurs, qui avorte. 3° Au-dessus de cette bractée carénée, une écaille membra- PHYLLOSTACHYS FLEXUOSA. Fi. 41. Fleur. FIG. 40. Inflorescence enpanicule. -- DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 2 to 77 neuse, molle, longue de 15 millimètres environ et se termi- nant brièvement par une pointe courte. Quelques petits poils soyeux se font remarquer sur les bords, vers l’extrémité. La partie dorsale de cette sorte d'écaille est très-légèrement pu- bescente. % Une écaille d’une autre nature, longue de 20 à 25 milli- mètres, à pointe très-effilée, suit l’écaille membraneuse; elle est un peu plus épaisse, plus résistante et plus longue, et gla- brescente. o Enfin une dernière écaille, semblable par la forme à celle qui précède, mais différente par un caractère constant, celui d’avoir la pointe fendue dans une partie de sa longueur. Ces cinq organes composant l’épillet sont distiques, imbri- qués et enroulés, plus particulièrement les deux derniers, les uns par-dessus les autres. Ils sont de couleur verte à leur base, et légèrement violacés vers leur extrémité, surtout sur les parties exposées à la lumière. 6° A la base de la partie dorsale de la dernière écaille qui termine l’épillet, et insérée sur le même plan, est une petite arêle fillforme, quelquefois de la longueur de l’écaille, mais le plus ordinairement n’ayant que la moitié de cette longueur. 7° Au sommet de l’épillet, à la base de la dernière écaille et enveloppés par celle-ci, sont les organes sexuels, composés des étamines et du pistil. Nous avons dit plus haut que les cinq pièces bractéales ou écaiileuses qui composent l’épillet étaient toutes enroulées les unes par-dessus les autres; c’est donc dans ces conditions que se forment et se développent les organes sexuels. Lorsque ceux-ci sont arrivés à leur parfait développement, ils s’al- longent (fig. #1 FL), pour s’échäpper par l'ouverture de l’ex- trémité de cette sorte d’enveloppe, qui représente une espèce d’étui ou de fourreau. Les étamines, au nombre de trois (fig. 41), sont insérées à la base et autour de l'ovaire. Elles sont très-longues, de 95 à 39 millimètres, et la moitié de leur longueur inférieure est emprisonnée par les écailles constitutives et caractéristiques de la fleur. Le filet de chaque étamine est blanc et d’une 278 LES BAMBOUS. ténuité extrème. Les anthères sont très-développées, longues de 10 à 12 millimètres, d’un jaune pâle et suspendues par la partie échancrée de l’une des extrémités; elles ont deux loges. Lorsque leur développement est compiet et que le pollen est sur le point de s'échapper, elles s’ouvrent par leur som- met, mais seulement sur une petite partie de leur lon- gueur. L’ovaire est relativement très-petit, globuleux, ovoïde. Le style est situé au sommet de l'ovaire; il est de la même longueur que les écailles; le stigmate qui le termine, trifide, plumeux et de couleur violacée, s’épanouit à sa sortie des enveloppes. Gette teinte violacée du stigmate se remarque aussi sur une partie de la longueur du style. Les caractères que nous venons de décrire indiquent un épillet fertile, uniflore, et les organes sexuels réunis à la base de l’écaille supérieure démontrent que le Phyllostachys * fleæuosa est une espèce à fleurs hermaphrodites; mais en voici un autre différent, celui-ci est biflore et comprend une fleur stérile et une fleur fertile. Il se compose d’une gaine lisulée et à languette, embrassant les deux fleurs à leur base et les enveloppant, puis d’une écaille carénée, à la base de laquelle s’est développée la fleur stérile. Celle-ci est formée : 1° d’une écaille membraneuse; ® d’une écaille plus longue et pointue; 3° d’une écaille semblable à la deuxième, mais ayant la pointe fendue dans une partie de sa longueur; 4° enfin des organes sexuels, mais mal conformés. La fleur fertile est placée un peu au-dessus de la fleur sté- rile. Elle est composée : 1° d’une écaille membraneuse; ®% d’une écaille pointue; 3° d’une écalle à pointe fendue ; 4° des organes sexuels parfaitement formés et développés. Un épillet uniflore et fertile se présente encore : mais à celui-ci il manque un organe, c’est l’écaille carénée, qui fait complétement défaut. Enfin, un dernier épillet nous reste à étudier. Celui-ci est terminal ; il est situé à l'extrémité de l’épi. Cette fleur diffère des autres; elle se compose seulement de trois pièces : gaine ligulée et à languette, écaille pointue, écaille à pointe fendue, DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 219 puis des organes sexuels bien constitués. Il manque à cet épillet l’écaille carénée et l’écaille membraneuse. L'épi que nous venons d’analyser est donc composé, en moyenne, de onze gaines de formes variables et représentant les épillets; les six premiers étaient, dans l’inflorescence que nous avons étudiée, complétement avortés et représentés seu- lement par des gaînes en forme d’écailles et par des bour- geons atrophiés; les cinq autres, au contraire, accompagnaient des épillets fertiles, uniflores ou biflores. En dehors cependant des caractères que nous venons de signa- ler, nous avons rencontré sur d’autres épis des épillets fertiles uniflores, qui avaient six enveloppes florales au lieu des cinq décrites ci-dessus, et deux écailles membraneuses au lieu d’une. On peut rencontrer encore, mais très-rarement, des épillets triflores, lesquels se caractérisent par : 1° une gaine ligulée et à languette; 2° une écaille carénée; 3° une écaille membra- neuse; # deux fleurs stériles portant chacune quatre écailles de différentes longueurs, plus ou moins développées et sem- blables, comme forme, à celles que nous avons déjà décrites ; 9° d’une fleur fertile, n’ayant que trois écailles bractéales de même nature que celle des autres fleurs fertiles, et renfer- mant les organes sexuels bien conformés et développés. Quel- quefois la fleur fertile est sur l’un des côtés de l’épillet; dans d’autres cas, elle se trouve entre les deux fleurs stériles. Dans certaines circonstances et lorsque les épillets étaient plus vigoureux, mieux développés, nous avons rencontré des épillets biflores qui étaient fertiles, à fleurs parfaitement dé- veloppées et bien constituées toutes deux. Pendant que l’épi se forme et lorsqu'il a atteint la moitié de sa longueur, les organes qui le composent ont une couleur verte légèrement violacée ; mais lorsque la végétation est Ler- minée et que les étamines commencent à s’échapper de leur prison, la couleur violacée disparaît presque entièrement ; les petites feuilles de forme écailleuse que nous avons remar- quées à la base de l’épi deviennent jaunâtres, et quelques- unes d’entre elles se détachent et tombent. L’épi, qui est de forme elliptique, a un autre caractère que 280 LES BAMBOUS. nous ne pouvons passer sous silence : 1l est légèrement arqué. D'un autre côté, nous avons dit que les gaines ligulées, à lan- guette, sont disposées sur deux rangs; elles ont en effet cette disposition à leur point d'insertion sur le petit axe qui les porte ; mais pendant leur végétation, et par suite d’une légère déviation, ces gaines, qui s’étalent un peu, rapprochent leur extrémité sur la partie dorsale de lépi et forment de celte manière une sorte de toiture imbriquée. D’après celte dispo- sition de ces organes, on dirait que l’épi est unilatéral. Les gaines ligulées, à languette, offrent des variations dans leur longueur; tantôt elles dépassent les écailles florales, tantôt elles sont plus courtes. La languette qu'on aperçoit à leur extrémité offre aussi des caractères variables dans leur forme ; généralement elle n’est représentée que par une petite pointe apiculée, affilée, à peine élargie à sa base, ayant de 3 à 6 millimètres de lonÿueur ; mais quelquefois elle a le carac- tère d’une feuille, Nous en avons remarqué qui étaient cordi- formes, longues de 15 millimètres et larges de 6. Quand ces sortes de languettes prennent le caractère foliacé, elles sont caduques. Celles que nous avons observées sur ces gaines ne sont done, à en juger par leurs différentes formes et la place qu’elies occupent, que des feuilles rudimentaires. Au moment où la floraison du Phyllostachys fleæuosa est pour s'effectuer, les feuilles perdent leur couleur verte pour jau- nir, se dessécher ettomber ensuite; ce n’est qu'après leur chute complète que les inflorescences apparaissent, et que les fleurs se développent. Quelque temps avant leur complet développe- ment, c’est-à-dire avant leur sortie des enveloppes, deux des trois étamines ont leurs anthères logées côte à côte dans l’écaille supérieure, tandis que l’autre occupe seule l’écaille inférieure, c’est-à-dire celle qui précède immédiatement la supérieure. Les glumellules sont extrêmement rares dans les fleurs du Phyllostachys fleæuosa. Dans les nombreux échantillons que nous avons analysés, nous n'avons pu les observer qu'une seule fois, et dans une fleur terminale, sur la plante qui a fleuri chez MM. Thibaut et Kételeer, horticulteurs, à Sceaux, en juin 4876. Pendant la floraison, les chaumes sont totalement dégarnis DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 281 de feuilles, et leur végétation est terminée avec la maturité des graines. Les ramifications continuent, il est vrai, à émettre à leur sommet quelques organes floraux avortés, mais le dessé- chement complet du chaume est le terme de toute végétation extérieure. En même temps que les chaumes disparaissent, de petites tigelles sortent de terre, donnant naissance à des fleurs quelquefois bien conformées, quelquefois avortées. Dans d’autres cas, ce sont de petits chaumes chargés de feuilles et de fleurs qui végètent quelque lemps et auxquels succèdent d’autres plus forts. Les rhizomes de la vieille touffe ne seraient donc pas entièrement altérés, car des pousses de plus en plus accusées paraissent surgir. Les rhizomes sont exactement semblables au type de ceux de ce groupe. Comme aspect, le P hyllostachys fleæuosa diffère des espèces voisines par ses chaumes un peu inclinés au sommet, par les coudes que présentent alternativement ses mérithalles et par ses ramifications plus flexueuses. Quant au chaume, il n'offre aucune particularité : même couleur dorée en vieillissant, même dépression cannelée. Pour la taille et la dimension, on peut le classer avec les Phyllostachys aurea, viridi-glauces- cens, violascens, c’est-à-dire entre 3 et 4 mètres de hauteur. Ce Bambou, originaire des parties froides de la Chine, a été adressé en 1864 à la Société d’acclimatation, qui, après l'avoir multiplié, a pu songer à le répandre. Nous l’avons in- troduit au Hamma dès l’année 1869, el avons contribué à sa large diffusion par de nombreuses multiplications. Son lieu d’origine et l’expérience démontrent que le climat de Paris est supporté par cette espèce, qui se plaît aussi dans les parties méridionales de l’Europe et en Algérie, surtout dans les parties élevées ; elle résiste néanmoins aux sécheresses du littoral de l’Afrique du Nord. Sa multiplication est la même que celle qui est usitée pour tout le groupe : sectionnement des rhizomes. Cependant, les tiges étant plus rapprochées elles constituent ainsi des touffes qui peuvent être transplantées en motte avec chance de réussite. 282 LES BAMBOUS. Phryllostachys violascens. Bambusa violascens. Hort. 3 mètres de haut, — 2 centimètres de diamètre. (Végétation vernale et rhixomes traçants.) En Algérie, les bourgeons ou turions sortent de terre dans les premiers jours d'avril; en 1876, par suite d’une tempé- rature exceplionnellement chaude, ils se sont montrés dans la première quinzaine de mars. Le bourgeon est droit, conique, pointu, légèrement aplati ; terminé par de petits limbes avortés, droits et un peu sinueux, dont les bords sont lisérés de clair (fig. 42). Il est dans son ensemble d’une couleur verdâtre, marbré de teintes violacées et de petites macules. Les 3 ou 4 premières gaines spathiformes de la base sont longues de 0",08 à 0",14, avec une largeur proportionnée à l'épaisseur de la tige, puisqu'elles l'embrassent complétement par leur base. Leur sommet est plus ou moins acuminé; elles sont striées, de couleur brune, violacée, verdâtre, mais jaunis- sant très-promptement. La partie dorsale est presque glabre ou légèrement scabre, c’est-à-dire peu rude au toucher ; les bords ne sont pas ciliés. La liguie est peu développée, ainsi que le limbe, qui est presque à l’état rudimentaire ou bien n’a que 4 ou à millimètres de long. Les gaines supérieures deviennent successivement beau- coup plus longués ; elles peuvent atteindre 0",20 de long sur 0",08 de large à la base. Leur sommet est obtus; la partie dorsale est scabre dans les premiers temps et lisse par la suite ; les bords sont légèrement ciliés. La couleur reste la même; cependant, à leur extrémité, on remarque, de chaque côté, une large bande blanchâtre, ce qui indique un commencement de décoloration; en effet, avant de tomber, elles deviennent jaunâtres extérieurement, tandis qu’à l’inté- térieur elles ont pris une teinte violette assez intense, qu'elles DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. conservent longtemps encore après leur chute. En outre, elles sont striées. La ligule est par- faitement développée, elle est haute de 3 à 4 millimètres, ob- tuse à son sommet et fortement fimbriée sur cette partie ; sa cou- leur est brunâtre et violacée. Le limbe s’est également modifié ; il est devenu plus long, de 15 à 95 millimètres, étroit, ondulé, d’une couleur bronzée olivâtre; la partie dorsale est légèrement scabre, et les bords rudes au toucher. Le limbe devient plus foncé que la gaîne en vieillissant. Les ramifications repoussent bientôt les gaines et quelquefois elles lestraversent : elles sont, en certains cas, serrées entre la saine et la tige, et laissent passer à l’extrémité de cette gaine une masse de petites languettes ver- tes qui tranchent sur la couleur foncée du chaume. Au fur et à mesure que les saines spathiformes se détachent, la tige, mise à nu, est vert ten- dre, légèrement pruineuse : elle se recouvre d’une matière blan- che, semblable à celle qu’on re- marque sur les prunes de Reine- Claude lors de leur maturité. Cette matière pruineuse est plus intense au-dessous du nœud et dans la gouttière où étaient lo- oées les ramifications, to [w2] RUES n ("à “ - C4 ‘ . Coma À # ir. T4 * L ri ” ï DAT RE mt Mu nai Treuil 1e PA ec AL en LE TES to DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 301 gaines (fig. 92) a subi une transformation brusque : de très- étroit qu'il était, il est devenu très-long et très-large ; il a pris, en un mot, le caractère d’une véritable feuille. Long de 0",3 à 0,59, et large de 0",04 à 0°,06 dans sa partie centrale, il est longuement acuminé, et sa base est ovaliforme. La nervure médiane est plus saillante en dessous qu’en dessus. De chaque côté de cette nervure, on en remarque ou 10, ce qui les porte, sur le même limbe, au nombre de 16 à 20, mais elles sont beau- coup plus petites ; on aperçoit entre elles des stries très-rap- prochées. La face supérieure est verte et glabre; la face infé- rieure est glaucescente et un peu rude au toucher ; les bords portent de petites dents épineuses inclinées vers l'extrémité du limbe, qui est légèrement flexueux et pubescent sur la partie qui le sépare de sa gaine. La gaine qui porte ce limbe élargi s’est un peu modifiée aussi ; elle est longue de 0",10 à 0®,15, complétement et fortement enroulée autour de la tige ; en outre, elle est scabre, de couleur verte et violacée ; son sommet est auriculé. La ligule, de couleur violacée, pileuse, est haute de 5 milli- mètres environ ; elle embrasse la moitié de la tige sur laquelle elle est appliquée ; sa forme est légèrement auriculaire comme le sommet de la gaine. À la fin de son élongation, le chaume est simple, sans aucune ramification, cylindrique dans presque toute sa hau- teur, diminuant de grosseur vers l'extrémité (fig. 52). Sa couleur est d’un vert plus ou moins intense dans toute la longueur des mérithalles, mais les nœuds sont d’une couleur olivâtre et recouverts d’une matière pruimeuse blanche. C'est lorsque la jeune tige de l’'Arundinaria Japonica à complétement terminé son élongation qu'elle se ramifie. Les ramifications commencent à naître, vers son extrémité, à l’aisselle des cinq ou six dernières gaines spathiformes, pla- cées au-dessous des gaines foliacées qui la terminent (fig. 95). Elles sont simples à leur point d'attache sur la tige, et se forment sous les gaines. Chacune d’elles nait d’un bourgeon composé d’abord d’une sorte d’écuille, celle que nous appe- lons gaîne bicarénée ou binervée. Adossée à la tige, celle-ci 302 LES BAMBOUS. porte, sur sa partie dorsale, deux nervures latérales assez saillantes; elle est haute de 15 à 18 millimètres et large de 9 à 8 ; sa forme est presque plate; le sommet est obtus, presque mucroné (fig. 4). Les deux nervures, assez éloignées l’une de l’autre, sont couvertes de villosités blanchâtres (fig. 54). La texture de la gaine bicarénée, entre les deux nervures et les deux ailes qui bordent ces dernières, est extrèmement mince; c’est une membrane pelliculeuse el transparente. Au fur et à mesure que le bourgeon s’allonge, on remarque d’abord qu’il est composé à sa base de gaines de forme écail- leuse, au nombre de #4 ou 5, longues de 1 à 6 centimètres, de couleur jaunâtre, fortement appliquées sur le bour- veon et l’embrassant complétement; elles sont glabres el plus ou moins terminées par un limbe en quelque sorte apiculé. Plus haut, ces gaines se modifient : leur longueur est beaucoup plus grande; leur couleur est devenue verte, et leur partie dorsale s’est couverte de poils; le limbe est plus développé, il prend le caractère d’une vraie feuille; la ligule s’est formée, elle est plus apparente. Après une année de végétation, une tige d’Arundinaria Japonica présente les caractères suivants : Elle est garnie, dans toute sa longueur, de gaines spathiformes, de couleur orisätre marbré de blanc, fortement persistantes et enroulées autour de la tige (fig. 53). La ligule est de même couleur ; les limbes ont presque complétement disparu. Les ramifications, au nombre de 8 ou 10, se sont développées, comme nous l’avons dit plus haut, vers la partie supérieure de la tige (fig. 53), et en dessous des quatre ou cinq gaines foliaires qui la terminent. Ces ramifications, en se développant et s’éloi- gnant de la tige, ont, au fur et à mesure qu’elles croissaient, entrainé, chacune, leur gaine spathiforme, en lui faisant abandonner peu à peu la tige qu’elle enveloppait; mais, comme celle gaine est épaisse, résistante et coriace, elle s’en- roule, en se séparant ainsi de sa tige, autour des ramifications, où nous la retrouvons occupant leur partie supérieure, qui semble dès lors sortir comme d’un fourreau. Les gaines restent néanmoins adhérentes à leur point d'insertion. Les ere l'IG. 56. (TEE DOTE TEEN INFLORESCENCE DE L’'ARUNDINARIA JAPONICA. F16, 55, Iuforescence. — F16, 56, Fleur hermaphrodite. —— F16. 57. Le style trilide. - F1G. 58, Enserrement des étamines après fécondation, — K16. 59. Epis avortés sur jeunc: tiges de 1 à 20 centimètres de haut. DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 309 ramilications, malgré cet emprisonnement, portent à leur base les gaines de forme écailleuse que nous avons déjà décrites et qui ont conservé leur même caractère, avec cette différence que la couleur est devenue jaunâtre; un peu plus haut, elles se sont modifiées; elles sont devenues plus longues, puisque parfois elles atteignent de 0,10 à 0°,15. Leur couleur est légèrement violacée, et la partie exposée à la lumière est un peu velue. La ligule est petite, entière, comme tronquée, d’un blanc grisätre. Le limbe représente la véritable feuille ; il est long de 20 à 50 centimètres ; sa lar- seur est de 3 ou 4, prise vers le centre ; la base est ovaliforme, et le sommet longuement acuminé. La face supérieure est glabre, verte, un peu luisante; l’inférieure est glaucescente, un peu rugueuse. La nervure médiane est plus apparente en dessous qu’en dessus; on y remarque de chaque côté, ainsi que dans le limbe de la gaine spathiforme, de 8 à 10 petites nervures, ce qui en porte le nombre à 16 ou 20 sur chaque limbe. Entre celles-ci existent également des stries assez nombreuses. Les bords sont très-légèrement accompagnés de petites dents épineuses ; la base qui s’unit à la gaine, au lieu d’être velue comme dans le limbe de la gaine spathiforme, est couvert de pellicules qui se lèvent par plaques. Nous avons dit que les ramifications que porte la tige prin- cipale sont simples ; par conséquent, il nait un seul rameau à chaque nœud ; chaque ramification principale peut en porter deux ou trois autres, qui se développent, comme sur la tige, au-dessous des trois ou quatre dernières gaines foliaires qui terminent lesdites ramifications (fig. 53). La tige, on l’a vu. est très-droite; sur des sujets vigou- reux, les mérithalles sont plus ou moins longs; à la base, leur longueur est de 0,02 à 0",06, mais, vers le milieu de la tige, elle atteint jusqu’à 0",22; ils se raccourcissent ensuite en se dirigeant vers l'extrémité. La tige devient jaune en vieillissant. Les nœuds sont peu saillants et conservent en dessous une sorte de bague blanchâtre. Sur les ramifications, les nœuds ont les mêmes caractères, mais ils sont plus rap- prochés. 20 306 LES BAMBOUS. La moitié inférieure de la tige de l’Arundinaria Japonica étant tout à fait simple et dénudée, la partie supérieure seule porte les ramifications; on aperçoit, à la base de chacune d'elles, une cannelure avec sillon, occupant une petite partie de la longueur de chaque mérithalle ; cette dépression est peu profonde, peu longue et quelquefois peu apparente. L’inflorescence a les caractères généraux de celle de l'A run- dinaria Simoni. C’est une panicule ramifiée (fig. 55), com- posée d’épis plus ou moins nombreux, serrés, assez souvent courts et anguleux, velus ou pubescents, quelquefois glabres et rugueux. Épillets d’une dizaine de fleurs, cylindriques, longs de 2 centimètres environ. Glumes inégales, lancéolées : les inférieures à quatre ou cinq nervures, marginées, quelquefois ciliées ; les supérieures portant jusqu’à neuf nervures, margi- nées, glabres. Paléole inférieure portant jusqu’à quinze ner- vures, lancéolée, à dos convexe, mucronée, aiguë, verte ou colorée, de couleur fauve après la floraison, un peu scabre, velue et marginée ; la supérieure, presque égale ou rarement plus courte, portant deux mucrons à son sommet, bicarénée. Fleur hermaphrodite, composée de trois étamines pen- dantes (fig. 96), planes et presque persistantes, d’un style peu ou point long, mais profondément trifide, à trois stig- males allongés (fig. 57). L’ovaire est oblong. Après la fécon- dation, glumes et glumelles se rapprochent (fig. 58), enser- rant style et étamines qui émergent au sommet, pendantes et décolorées. L'Arundinaria Japonica présente des chaumes de 2 à 3 mètres de hauteur, sur une circonférence de 4 à 5 centi- mètres, très-droits, mais dégarnis jusqu’à la moitié de leur hauteur ; l'extrémité seule est chargée de feuilles, très-vertes, larges et assez longues. Ses gaines sèches, mais persistantes, lui donnent un aspect peu agréable. Le chaume a des parois très-épaisses, comme le montre la coupe transversale de la figure 20, représentant un mérithalle entouré de sa gaine. L’Arundinaria Japonica se multiplie par section des rhi- zomes, qui s’éclatent facilement. Ses usages sont restreints; très-rustique et très-répandu DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 307 dans le nord de la France, il peut figurer en touffe isolée sur les pelouses. Il a fleuri sous le climat de Paris, mais, en somme, il n'offre qu’un intérêt fort médiocre, et nous ne serions pas étonné qu'il fût relégué tôt ou tard dans les jar- dins botaniques. En Algérie, il semble, sous le rapport de l'utilité, n'avoir aucun avenir, malgré sa résistance à la séche- resse. Une remarque assez curieuse faite à Alger, à plusieurs reprises, c’est que ce Bambou, dans certains cas, tend à s’amoin- drir au lieu de prendre du développement. Si on l’abandonne dans un lieu non cultivé, il finit par arriver à l’état de plante herbacée, ses épillets, accompagnés de deux feuilles, se trou- vant portés sur de petites tiges qui ont à peine 0",10 de hau- teur. L’inflorescence, dans ce cas de dégénérescence, consti- tue un épi, long, grêle, serré, portant des étamines longues et pendantes (fig. 29). Arundinaria falcata. Nees. Bambusa falcata. Hort, 2=,50 de hauteur. — 8 millim. de diamètre. (Végélation vernale, touffe cespiteuse.) Cette espèce se rapproche beaucoup du Bambusa gracilis, avec lequel on la confond souvent, bien qu’elle en soit dis- tincte; mais elle est tellement polymorphe qu'on la rapporte encore, dans le plus grand nombre de cas, aux Bambusa stricta et scriploria, parce que parfois ces derniers, altérés par l’influence de milieux favorables ou ééfavorables, ont une certaine ressemblance avec elle. Sans nul doute, cet À rundi- naria a une grande quantité de variétés issues de nombreux semis qui en augmentent la confusion; mais il est certain aussi qu'à l’état naturel il présente différentes formes, et a, dans l'Himalaya, son pays d’origine, d’autres proportions et d’autres facies que ceux constatés dans nos cultures. En Algérie, cette plante forme une forte touffe, compacte, 908 LES BAMBOUS. à chaumes réunis en gerbe, mais moins réclinés que ceux du B. gracilis, grèles, effilés au sommet, d'un vert peu intense, atteignant 2",50 de hauteur, très-cylindriques, à mérithalles courts et très-droits, à nœuds peu saillants ; ces chaumes blanchissent en veillissant et ont un aspect vernissé. Les ramifications naissent en faisceau à chaque nœud ; elles sont grêles et quelquefois rougeâtres, terminées par des feuilles variables suivant les types. Feuilles plus ou moins larges, à bords parallèles ou renflés, ordinairement longues de 8 centimètres ; de couleur vert foncé, plus pâle à la face inférieure, où se remarque une nervure fine mais saillante,. L’Arundinaria falcata est l’un des Bambous que nous avons pu étudier à l’état de floraison, car, ayant montré ses fleurs, pour la première fois, dans les cultures parisiennes, c’est au Jardin du Luxembourg que ce fait intéressant s’est produit. Trois pieds de cette plante y sont cultivés en pots et hivernés, durant la mauvaise saison, dans une serre tempérée froide ; un quatrième, en pleine terre, sur une pelouse de gazon. Tous les quatre ont montré simultanément leurs fleurs en mars 1870; elles se sont développées sur toutes les rami- fications que porte la plante (fig. 60). Voici donc comment notre Bambou se comporte. Les fleurs forment de petits épis, dont la longueur peut varier de 2 à 9 centimètres, et composés de trois ou quatre épillets, uni- flores et fertiles (fig. 61). Si on l’étudie depuis sa base jus- qu'à son extrémité, on remarque, à la base de la partie dorsale appuyée sur la tige qui porte l’épi, une sorte de petite écaille très-courte, bicarénée, glabre et de forme conique; c’est du centre de cet organe, persistant et à peine haut de 2 millimètres, que naît l’épi. Gelui-ei porte d’abord à sa base quatre ou cinq gaines de forme écailleuse, distiques et imbri- quées : la première, haute de 2 millimètres au plus; la seconde, un peu plus longue; la troisième, pouvant avoir de 6 à 7 millimètres ; la quatrième, plus longue que la troisième ; enfin la cinquième atteignant quelquefois 19 millimètres et large de 2 à 5. Les gaines de la base sont glabres, très-légère- ment acuminées à leur sommet; Les autres sont terminées en FiG. 62. Fic, 61. INFLORESCENCE DE L’ARUNDINARIA FALCATA. F1G. 60. Inflorescence. — Fc. 61. Épillet. — Fire. 62, Fleur ouverte (grossie) Fi. 60. DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 311 pointe ou par une languette extrêmement petite. Entre le sommet et le point d'insertion de la languette est une ligule développée à peine. Les gaînes, écailleuses, sont d’une couleur légèrement violacée, qui disparaît peu à peu pour devenir d’un jaune pàle. Immédiatement après ces organes écailleux apparaissent les épillets, au nombre de trois à sept, uniflores et fertiles. Chacun d'eux se compose : 1° d’un pédoncule variable dans sa longueur, de 1 à 5 millimètres ; 2° de deux petites écailles membraneuses très-minces, larges de 1 millimètre et longues de 3 à 6, acuminées, bordées quelquefois de petits cils blan- châtres, d’une couleur légèrement violacée au début, mais devenant Jaunâtre en vieillissant; elles portent de deux à quatre nervures longitudinales ; 3° de deux autres écailles plus longues, 8-10 millimètres, plus larges, en forme de nacelle un peu fermée, d’une plus grande consistance, de même cou- leur, légèrement striées de lignes verdâtres, et portant assez souvent à leur extrémité un petit faisceau de soies blan- châtres ; 4 d’un sillon assez profond partant de la base de ces deux pièces bractéales, occupant toute la longueur de la partie dorsale, et d’une arête linéaire, insérée à sa base et sur le même plan, logée dans lesillon et le dépassant en longueur ; ces deux organes sont entourés de petites soies blanchâtres à leur point d’adhérence ; 5° de deux petits organes membra- neux, de couleur transparente violacée, légèrement ciliés sur les bords et à l’extrémité, qui se termine un peu en pointe, placés à la base des deux dernières écailles et enve- loppant l'ovaire (fig. 62). Ces deux organes, qu’il faut consi- dérer comme les glumellules, ne se trouvent pas sur le même plan; ils alternent avec les deux grandes écailles. C’est au milieu d'eux que se trouvent placés les étamines et le pis- til (fig. 62). Les étamines sont insérées à la base de l’ovaire et sont au nombre de 3 (fig. 62). Chacune est composée d’un filet et d’une anthère. Le filet, qui est extrêmement ténu, pendant, blanchâtre, est long de 5 à 10 millimètres. L’anthère, de 5 à 6 millimètres, est d’un brun violacé et de forme biloculaire, 312 LES BAMPBOUS. Les deux loges s'ouvrent dans toute leur longueur en deve- nant ondulées, et souvent, après cette phase, elles prennent une couleur brun olivätre. L'ovaire est très-petit, presque globuleux, ovoide quand il est observé au moment de la floraison ; le style, extrèmement court, de couleur blanche, est terminé par un stigmate trifide, blanc et plumeux (fig. 62). Quand tous les organes qui constituent la fleur sont complétement formés, les quatre premières pièces bractéales s’entr'ouvrent; c’est alors que l’on remarque que la troisième bractée sert d’abri à l’une des trois étamines qui est venue y adosser son anthère, les deux autres occupant la même posi- tion dans la bractée supérieure; l’ovaire apparaît au centre de la fleur, surmonté du style et du stigmate. La fleur reste ainsi ouverte pendant quelque temps; après quoi, les anthères, prêtes à laisser échapper le pollen, sortent de leur abri. Aus- sitôt après, les bractées se rapprochent pour enfermer complé- tement l'ovaire, pendant que le filet de chaque étamine, qui est très-ténu, s’allonge ; c’est ce qui rend celles-ci pendantes, et elles restent ainsi jusqu’à ce qu’elles soient détruites. Dans ce Bambou, l'ovaire nous à paru être entièrement soudé à la base de la quatrième bractée ; ce qui nous confirme dans cette opinion, c’est que, dans les nombreux échantillons que nous avons étudiés, nous avons toujours eu beaucoup de peine à séparer ces deux organes, tant ils étaient adhérents l’un à l’autre; mais, après la fécondation, l'ovaire, qui s’est développé el qui est devenu la graine, se rend libre. Les épis sont donc composés d’épillets fertiles, uniflores, disposés en deux rangs sur la petite tige qui les porte, et pen- chés très-légèrement vers un même côté, en sorte que l’on dirait qu'ils sont unilatéraux. Quand la floraison de nos Arundinaria falcata a été sur le point de s’accomplir, toutes les feuilles que portent leurs nombreuses ramifications ont commencé à jaunir pour se dessécher peu à peu, puis tomber. Quelque temps après leur chute complète, de petits bourgeons écailleux se sont con- centrés à leur place et bientôt après sont devenus des épis à fleurs. DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. 213 Un fait des plus curieux à constater, c’est que les fleurs apparurent simullanément sur toutes les tiges à la fois, anciennes ou nouvelles, et, en même temps, sur toutes les ramifications, quelque chétives qu'elles fussent. Les trois pieds d’inégale force, cultivés dans les serres tempérées du Luxembourg, fleurirent en même temps et présentèrent les mêmes phénomènes. Pendant ce temps-là, le Jardin du Hamma d'Alger nous fournissait des échantillons de cette même espèce, fleurissant pour la première fois et dans les mêmes conditions. Ce qui est encore fort remarquable dans les floraisons que nous venons de signaler, c’est que, sur des tiges développées depuis deux mois environ, les ramifications, qui sortent habi- tuellement en grand nombre de chaque nœud, furent rempla- cées par des inflorescences, des épis portant des fleurs. Au Hamma, les graines mürirent dans le courant de l'été; puis la plante ne donna plus aucun signe de végétation; les chaumes devinrent secs et cassants, et l'examen attentif de la souche établit que la plante était bien morte. C’est ainsi que viennent de disparaître nos deux échantillons remarquables par la pureté de leur type; mais ils nous ont laissé des graines fertiles, dont la germination produit déjà de jeunes et vigoureux sujets, cultivés dans une terre légère et à l’abri du grand soleil. La mulüplication de l'Arundinaria falcata se fait par la division des touffes ; 1l est délicat à la reprise, et à ce moment, en Europe principalement, il doit être traité en serre. En France, cette espèce supporte, pendant quelque temps, le climat du centre, mais elle ne prospère guère que dans les pays méridionaux. C'est une plante rustique en Algérie, mais qui s’efface devant l'effet décoratif du Bambusa gracilis. Nous avons remarqué sa robusticité dans des expositions chaudes et sèches, et nous lui avons vu traverser des étés entiers sans le secours de lirrigation. Au point de vue ornemental, elle rendra des services dans toutes les contrées où le B. gracilis, plus délicat, ne pourra résister. 14 LES BAMBOUS. Arundinaria Fortunei. Fol. var. Bambusa Fortunei. Fol. var. Van Houtte. 50 à 60 centimètres de haut. — 2 à 4 millimètres de diamètre, (Végétation vernale et rhisoines traçants.) Cette petite graminée, originaire du Japon, dédiée par Van Houtte au voyageur Robert Fortune, parait être, par son facies et quelques-uns de ses caractères, ou un Phalaris ou un Panicum. Au Hamma elle ne s’élève pas à plus de 50 à 60 centimètres de hauteur. Son rhizome, très-grêle, esttraçant, portant beau- coup de chaumes, qui constituent une masse compacte garnie de feuilles panachées d’un très-bel effet. Le chaume, de 2 à 4 millimètres de diamètre, est recouvert, pendant sôn déve- loppement, de gaines vertes striées, plus ou moins poilues, bordées de poils sur les bords, gaines terminées par de petits limbes qui, au sommet du chaume, se transforment en véri- tables feuilles. La ligule est courte, accompagnée, sur ses deux bords latéraux, de longs cils blancs. Les feuilles sont lancéolées, terminées en pointe, arrondies à la base, s’attachant à la gaine par un court pétiole. Le limbe est divisé en grandes lignes parallèles, blanches, plus ou moins larges. Les chaumes se ramifient peu ; ces ramifications très-simples portent trois ou quatre feuilles à leur sommet. Celte plante ne peut rendre que des services purement décoratifs dans les jardins ou dans les serres. En Algérie, elle demande un peu d'humidité et l'ombre légère de plus grandes espèces. En France, on la cultive par potées, en bordure ou en touffe gazonnante. Sa multiplication est très-facile par le sectionnement de ses rhizomes accompagnés des chaumes, qui peuvent supporter la déplantation sans trop en souffrir, si l’on opère rapi- dement. DESCRIPTION DES ESPÈCES CONNUES. —— pet ot Bambou carré. Ce Bambou à chaume carré, d'introduction récente dans les cultures européennes, est dû à M. Renard, membre de la Société d’acclimatation, qui, en 1875, a appelé l'attention sur cette espèce qu'il avait essayé de rapporter du Japon dès 1871. Encore jeunes, ces plantes peuvent être difficilement clas- sées. On a lieu de croire qu’elles résisteront au climat moyen de la France. Les pieds microscopiques qu’on en possède au Hamma ne peuvent encore servir à la moindre description. À l’état naturel, suivant M. Renard, ce Bambou pousse, dans les belles plaines environnant la grande ville d'Osaca au Japon, en bosquets serrés d’une hauteur de 10 à 12 mètres, ce qui constituerait une grande espèce pour nos pays tempérés d'Europe. L'aspect du chaume est vert foncé, pälissant en séchant. Les nœuds sont rapprochés, dit-on ; cependant, sur les échan- tillons secs que nous en possédons, les mérithalles sont écar- tés d’une vingtaine de centimètres. Le chaume est droit et carré, à angles arrondis, mais présentant bien quatre faces planes. é On à paru émettre quelque doute sur l’origine naturelle de cette configuration carrée, qui aurait été le résultat d’une pression pendant la croissance; mais l’assertion de lau- teur et l’arrivée de Jeunes plants, bien qu'ils ne présentent pas encore ce caractère, suffisent pour établir la véracité du fait. On ne peut nier cependant que les échantillons de chaumes secs que nous avons reçus n'aient été l’objet d'une première préparation : d’abord les nœuds sont à peine sail- lants et semblent être effacés par l’effet d’un polissage ou d’un grattage, parce que ces nœuds sont plus ou moins accusés sur un même chaume, et aussi parce que la fine gouttière cir- culaire qui emprisonnait la base de chaque gaine a disparu, bien qu'on en retrouve quelques traces. Les emplacements des ramifications alternes et distiques sont encore marqués pour un æil exercé, et le sillon laissé par les ramifications 316 LES BAMBOUS. sur une des faces du chaume est encore assez apparent, bien que réduit par un râpage réitéré. Nous pensons que cette nouvelle espèce sera une bonne acquisition pour toute la zone tempérée du bassin méditer- ranéen, au point de vue industriel, parce que ses tiges sont légères et en même temps assez résistantes, quoique d’une solidité moindre que celle de nos autres Bambous. CHAPITRE XI EXPÉRIENCES SUR LA CROISSANCE DES TIGES OU CHAUMES Au milieu de tous les végétaux empruntés aux flores diverses, subtropicales ou intertropicales, et qui croissent au Hamma, c’est-à-dire dans une des parties chaudes de l'Algé- rie, les Bambous ont attiré tout d’abord notre attention par la rapidité, ou pour mieux dire, par la spontanéité de leur végétation. Les dimensions acquises en peu de temps par cer- tains Ficus, la croissance réputée de l'Eucalyptus globulus, le prompt développement des inflorescences ou des hampes florales des grands Agave introduits dernièrement, l’allon- sement des feuilles des Musacées, ne sont pas à comparer à l’élongation rapide des chaumes des Bambusées, dont nous avons suivi pas à pas la marche ascensionnelle pendant déjà plusieurs années. Quelques auteurs ont cité des faits surprenants de cette pousse des Bambous, mais les chiffres de croissance sont donnés par eux d’une manière générale, ou bien ils ne con- cernent qu'une seule observation. Encore, ces expériences ont-elles été faites, le plus souvent, dans des serres, c'est-à- dire dans des conditions anormales de végétation. Le journal de Petermann (1860, p.196) en signale quelques-unes. Ainsi, au Jardin botanique d'Édimbourg, un Bambou, dont l'espèce n’est pas précisée, a grandi de 16 centimètres en un seul jour, et cet accroissement a été obtenu au moyen d’une tempéra- ture de 65-70 degrés Farenh., soit 18 à 21 degrés centigrades. Le Bambusa gigantea des Birmans atteint une hauteur de 30 mètres, et grandirait de 50 centimètres par jour. Mais ces chiffres sont dépassés par l’exemple donné du Bambusa Tulda, du Bengale, qui, en trente jours, atteindrait 22 mètres de haut, soit un accroissement de 3 centimètres par heure. Le docteur Karl Koch, professeur de botanique à Berlin, 218 LES BAMBOUS. mentionne la force végétative du Bambusa verticillata obser- vée par l'inspecteur Bouché au Jardin botanique de cette ville, Ce Bambou, qui avait 1 mètre de hauteur le 22 août, atteignait 12 mètres au 24 novembre de la même année. Cette croissance n'avait rien de régulier, dit l'observateur, car elle variait, d’un jour à l’autre, de 2 à 4 centimètres ; son plus grand accroissement a été de 22 centimètres en vingt- quatre heures. Le voyageur Fortune, dans son exploration en Chine, fut frappé de la rapidité de croissance des Bambous, et il mesura un chaume vigoureux qui augmentait de 6 à 9 centimètres en vingt-quatre heures ; 1l constatait en même temps que cet allongement en hauteur était plus acüf pendant la nuit. Plusieurs faits de ce genre sont également rapportés par divers auteurs, mais plus ou moins préeis et semblant être ou exagérés, où la constatation de phénomènes exception- nels. Aussi, nous-mêmes, dès 1868, frappés du changement visible qui s’opérait de jour en jour dans les toulfes de Bam bous, de la prompte élongation de certains chaumes dont naguère encore on constatait la sortie de terre, nous crûmes devoir établir plus mathématiquement la rapidité de leur développement et suivre plusieurs fois par jour, et pendant des années, toutes les phases de leur allongement, afin d'en bien connaître et d’en définir la marche normale. Pour mesurer avec précision ces grands végétaux, ou tout au moins ceux d’une puissance d’élongation aussi accentuée, point n’est besoin d’avoir recours à des instruments spéciaux. Une simple règle divisée, ou, mieux encore, sans divisions, mais munie d’une équerre glissante, peut enregistrer avec précision les allongements obtenus durant certains inter- valles déterminés, pourvu que cette-règle soit solidement fixée au sol, bien perpendiculaire et parallèle à l’axe d’allon- gement. Il y a lieu de se préoccuper de ce dernier détail, quand on doit suivre la plante dans des développements de plusieurs mètres de hauteur, ainsi que nous l'avons fait pour de grands Bambusa macroculmis, dépassant plus de 20 mètres. Il faut ajouter que, au-dessus de 10 mètres, 11 v a de réelles EXPÉRIENCES SUR LA CROISSANCE DES TIGES OU CHAUMES. 319 difficultés matérielles pour suivre l’expérience à de telles hauteurs. La partie du végétal qui marque la limite de croissance d’une observation à l’autre doit être prise en considération. Dans le plus grand nombre des cas, nous avons choisi l’extré- mité des limbes en forme de languettes, réunies en faisceau au sommet du chaume, parce que ces limbes avortés sont ordinairement droits et rigides; mais, vers la fin de la crois- sance du chaume, ces languettes se transforment en véritables limbes qui s’'inclinent quelquefois sous leur propre poids. Dans une espèce notamment, le Phyllostachys aurea, les limbes en lanières sont toujours flexueux. Dans ces cas-là, 1l convient d'enregistrer la croissance, en prenant, comme point d’arrêt, la dernière ligule ou la base du dernier limbe à son point d'insertion sur la gaine. De l'examen des différentes expériences failes par nous, au Hamma, pendant plusieurs années, sur les mêmes espèces de Bambous, par rapport à leur croissance, il résulte que la vitesse d’allongement de quelques-uns est telle qu’elle dépasse 90 centimètres en vingt-quatre heures, suivant d’abord une marche progressive, pour diminuer ensuite par degrés sen- sibles ; de sorte que la plus grande vitesse d’allongement se remarque au milieu du chaume ou tige, point où, dans le plus orand nombre des cas, les mérithalles sont le plus distants. Si donc, dès sa sortie de terre, on suit, dans sa complète évolution, ce turion conique et pointu qui doit former le chaume, on remarque d’abord une croissance d’une extrème lenteur, quelquefois même un arrêt momentané ; puis, sensi- blement, un accroissement atteignant son maximum vers le milieu du chaume ; ensuite une décroissance graduelle jusqu’à l'arrêt complet de toute végétation. Cette marche est d’ailleurs générale pour tout organe de la vie végétale. Nos deux groupes de Bambous à végétation automnale et à végétation vernale offrent ces mèmes caractères généraux; mais ils présentent l’un et l’autre, dans leur manière de croître, des particularités diverses et propres à certaines de leurs espèces. d20 LES BAMBOUS. Dans le groupe automnal, en ce qui concerne du moins les trois plantes expérimentées, les Bambusa macroculinis, vul- garis et vulgaris viltata, la croissance est régulièrement plus accentuée la nuit que le jour, et les maxima atteints en vingt-quatre heures sont moins accusés que dans le deuxième groupe à végétation vernale. La marche ascensionnelle est plus lente au commencement et à la fin de la pousse. Dans le groupe vernal, on constate les plus grands allonge- ments en vingt-quatre heures que nous ayons jamais enregis- trés, non-seulement chez les Bambous, mais encore sur d’autres végétaux; ainsi le Phyllostachys mitis atteint norma- lement, à un point déterminé, dans les vingt-quatre heures, des croissances de 40-50 centimètres et plus. Les autres P hyl- lostachys, viridi-glaucescens, nigra, produisent des crois- sances aussi remarquables, par rapport à leurs dimensions. Aussi, les Bambous de ce groupe acquièrent-ils rapidement leur hauteur avec moins d’hésitation que ceux du groupe précédent, surtout au début et à la fin de la pousse. Pour le Phyllostachys mitis, la végétation est plus active, ou plutot l'allongement est régulièrement plus grand la nuit que le jour; mais c’est l'inverse pour les autres espèces étudiées : Ph. viridi-glaucescens, nigra, aurea, etc., dans lesquelles l’élongation est constamment plus active le jour que la nuit. Nos expériences, relatées dans les tableaux qui suivent, démontrent que des Bambous de nos deux genres ont une croissance différente, relativementau maximum d’allongement diurne et nocturne. Les trois Bambous du premier groupe, à végélation aulomnale, ne laissent aucun doute à ce sujet; et comme leur accroissement a lieu à peu près à la même époque, on pourrait croire que les mêmes influences atmo- sphériques produisent sur eux les mêmes effets, bien qu'ils soient d'espèces et d'origines différentes; mais on ne pourrait affirmer cette thèse générale. L'observation la plus impor- tante résulte donc des expériences du deuxième groupe, à végétation vernale, dans lequel une espèce, le P hyllostachys milis, atteint son maximum de croissance pendant la nuit, tandis que d’autres espèces voisines, se comportant inverse- LA EXPÉRIENCES SUR LA CROISSANCE DES TIGES OU CHAUMES. 321 ment, acquièrent ce maximum pendant le jour, comme les Phyllostachys viridi-glaucescens, nigra, aurea. Dans le plus grand nombre des cas, ces caractères particuliers et différents de chacune de ces espèces ont été constatés le même jour, dans un même sol, où, conséquemment, elles étaient soumises aux mêmes effets météorologiques. Ces particularités de croissance diurne et nocturne étant établies, il convient de préciser également le point maximum de l'allongement diurne. Or, cette élongation, si elle est cal- culée dans le total métrique fourni par les matinées compa- rées aux après-midi, se trouve presque toujours en faveur des après-midi, ainsi que l’établissent les totaux des colonnes afférentes aux développements des six premières et des six dernières heures du jour (voir les Tableaux). Cependant, dans la majorité des cas, le nombre des matinées où la croissance est supérieure à celle des après-midi du même jour est beaucoup plus élevé que pour le résultat inverse; mais l’al- longement obtenu dans quelques-unes de ces après-midi est tellement prononcé, que le total métrique se trouve en leur faveur. Les remarques explicatives ajoutées à la base de chaque tableau feront ressortir ces divers calculs. Nous avons, mais en vain, cherché à connaitre la vitesse d’élongation proportionnelle de chacun des mérithalles qui se développent plusieurs à la fois au sommet du chaume, où ils s’allongent simultanément ; nous avons tenté sans succès plusieurs expériences pour déterminer l'accroissement d’un mérithalle pris séparément ; nous avons voulu savoir aussi, mails exactement, si la période de grande croissance du chaume était en rapport avec l’écartement des nœuds ; mais dans ces essais on se heurte à cette difficulté presque insur- montable, à savoir que, les chaumes étant à cette époque recouverts d’une série de gaines dures et scarieuses, emboi- tées les unes dans les autres, s’allongeant comme les tubes d’une lorgnette, les nœuds ne sont visibles que quand les mérithalles ont complétement terminé leur élongation. Si l’on enlève prématurément une de ces gaines, on trouve le chaume mou, sans consistance ; l'allongement s'arrête immédiatement, 21 322 LES BAMBOUS. et le dépérissement du turion en voie de développement est le résultat de cette opération. Ce fait démontre le rôle de ces gaines coriaces, chargées de silice, dont l'imbriquement con- stitue toute la force, et qui contiennent à l’état mou, comme dans un long moule, le chaume en formation. Elles ne quittent le chaume qu'après leur déroulement graduel, qui en permet la solidification au contact des influences atmosphériques. il ressort cependant de très-apparent, dans ces expériences, que les plus grandes croissances observées en vingt-quatre heures correspondent aux plus longs mérithalles ; l'exemple en est saillant dans les Phyllostachys, quelles que soient d’ailleurs la saison et la moyenne de la température. Des essais réitérés démontrent que sur un chaume encore en élongation, dès que la partie inférieure devient nue, c’est-à- dire dès que le déroulement des gaines laisse entrevoir les mérithalles, ces derniers ne s’allongent déjà plus. Une règle appliquée contre le chaume, avec une marque à chaque nœud, nœud très-peu visible et à peine deviné sous la gaine qui se déroule, permet de constater l'immobilité des points mar- qués; en d’autres termes, les mérithalles ne s’accroissent plus quand l’organe protecteur, la gaine spathiforme, com- mence à se dérouler. Peut-on assigner, dans ces végétations variables, un rôle quelconque aux effets atmosphériques”? Les croissances plus accusées ou le jour ou la nuit, suivant les espèces, semblent démontrer que les influences extérieures n’ont pas une action commune sur des plantes de même famille et de même genre, et que les théories des influences retardatrices de la lumière et accélératrices de la chaleur sont des données générales, n’aidant pas, dans le cas présent, à déterminer les causes complexes qui président aux phénomènes d’accroissement des Bambous. De la généralité des expériences faites sur un grand nombre de végétaux, il parait résulter que lallongement diurne est supérieur à l'allongement nocturne ; autrement dit, que l’action de la température agit favorablement sur la vitesse d’allonge- ment, laquelle suivrait les oscillations de cette température. EXPÉRIENCES SUR LA CROISSANCE DES TIGES OU CHAUMES. 323 A “ Cette théorie pourrait s'appliquer à nos observations sur les Phyllostachys viridi-glauscescens, nigra, aurea, dont la croissance du Jour est constamment supérieure à celle de la nuit; mais elle se trouve en défaut dans le même genre, dans le Phyllostachys mitis et dans les gros Bambous, Bambusa macroculmis et vulgaris, où, la nuit, l’élongation est sensi- blement supérieure à celle du jour. Malgré une série complète d'observations météorologiques qui ont accompagné ces expériences de croissance, il est impossible de saisir la moindre corrélation évidente entre les phénomènes thermiques et psychrométriques et l'allongement de Bambous, qui, à la mème époque, dans le même sol, sou- mis aux mêmes influences, poussent plus activement le jour ou la nuit, suivant les espèces. Ces observations simultanées démontrent donc que les mêmes causes ont produit des effets inverses, suivant les plantes. Ainsi, les Bambusa macrocul- mis et vulgaris qui se développent en septembre et octobre, c'est-à-dire dans les mois chauds, et qui souvent finissent leur végétation en novembre et décembre, dans une période pluvieuse et froide, conservent, au milieu de cette climature extrème et variable, la même proportion d’allongement quo- tidien, plus accentuée la nuit que le jour, quoique réduite dans l’ensemble à de plus restreints accroissements. Les P hyllostachys mitis, de croissance nocturne, et les Ph. viridi-glaucescens, nigra, aurea, de croissance diurne, végètent en même temps, au printemps, et nous voyons, dans les tableaux suivants, combien les influences météorologiques agissent indifféremment, relativement à la plus ou moins grande élongation. Mais cette constatation serait plus patente si nous pouvions exposer ici les séries d'observations faites sur cette végétation dans certaines années, au milieu de con- ditions atmosphériques sensiblement différentes, qui semblent n'avoir altéré en rien la marche ascensionnellement et compa- rativement régulière des Bambous soumis à l'étude. Un seul fait aidera à reconnaître que l’action de la crois- sance semble indépendante des influences météorologiques, ou tout au moins que ces dernières sont des causes subsidiaires ou 324 LES BAMBOUS. indirectes. Nous avons démontré qu’une période de maxima dans l'allongement journalier se produisait vers la moitié de la hauteur atteinte ordinairement par le Bambou, et que ces maxima coïncidaient avec les plus grands mérithalles. Or, dans huit années d'observations, nous avons vu ces maxima se manifester par tous les temps et dans des mois différents, suivant les espèces, sans pouvoir invoquer, en faveur de l'allongement le plus rapide, aucune cause thermique, hygro- métrique, actinométrique, etc. Cependant, on doit admettre qu'il peut se rencontrer, au moment de ce maximum d’ac- croissement inné chez la plante, une atmosphère ambiante favorable et aidant à ce grand développement ; et c’est peut- être dans ces cas rarement observés que l’on constate, ainsi que nous en avons été témoins en 1872, des allongements extraordinaires de 57 centimètres en vingt-quatre heures sur des Phyllostachys mitis. De ces phénomènes si divers dans la croissance des Bam- bous, on pourrait conclure qu’il existe dans la plante elle- même des causes internes particulières à chaque espèce, qui provoquent la croissance, indépendamment des influences extérieures ; autrement dit, que chaque végétal a une propriété héréditaire, un tempérament qui lui est propre. Si l’on vou- lait toutefois pousser plus loin cette analyse sommaire de la croissance et rechercher encore dans les phénomènes du temps la cause d’une telle variabilité d’accroissement sui- vant les espèces, il importe de faire connaitre que nos études ont été accompagnées d'observations météorologiques des plus complètes, puisque six fois par jour, à heures fixes, les observations suivantes ont été enregistrées à notre station météorologique du Hamma, située au milieu de notre champ d'expériences : Baromètre. Vents, état descriptif du temps. Thermomètres maxima et minima secs. Hygromètres, thermomètres maxima et minima mouillés. Évaporomètre de Piche. Actinomètres. — Boule blanche et boule noire. Thermo- mètre soleil, EXPÉRIENCES SUR LA CROISSANCE DES TIGES OU CHAUMES. 225 Géothermie.—Thermomètres sol nu : 1° à la surface ; — 2 à 0,19, à 0",20, à 0",30 de profon- deur ; — 3° à 1 mètre dans le sol. — Thermomètres sol gazonné : 1° sur l'herbe ; — 2° à 0°,15, à 0",20, à 0,30 de profondeur. Température des sources et eaux d'irrigation. Température interne de différents végétaux, etc., etc. Nous donnons ci-dessous une série de tableaux détaillés, où est enregistrée la marche ascensionnelle de tous les phé- nomènes d’accroissement remarqués sur un grand nombre d'espèces de Bambous. Depuis l’année 1868, ces expériences ont été répétées annuellement au moment de la végétation, afin de les bien contrôler et de ne pas présenter des caractères anormaux. De temps à autre, nous avons appelé l'attention des Sociétés scientifiques sur ces développements extraordi- naires, espérant provoquer des expériences comparatives. Le Journal de la Société d'horticulture de France, du mois de septembre 1871, signale une de nos communications, au pro- cès-verbal de la séance du 14, sur les croissances du Bambusa macroculmis (arundinacea), et la notice de M. Chalon sur le Jardin d’essai du Hamma contient quelques-uns de ces faits d’allongement que nous avons révélés. De la série d'observations faites sur ce sujet, nous extrayons seulement quelques tableaux, ceux qui représentent le mieux la marche normale de l'ascension; la place manquerait pour les publier tous. Nous exposerons de préférence les tableaux recueillis pendant ces dernières années, parce qu'ils coïn- cident avec nos observations météorologiques les plus com- plètes. 526 LES BAMPOUS, CROISSANCE DU BAMBUSA MACROCULMIS Sujet adulte de 0,15 de diamètre, OBSERVATION COMMENCÉE A 780 MILLIMÈTRES AU-DESSUS DU SOL 7 septembre 1871, Se à RS Z = 2% HAE no DATES. LES ARS CR OBSERVATIONS. — 264 al == © Gi Re = & æ = = millim, millim. | millim. | millim. Septembre. 7 008 008 022 038 8 008 007 025 040 9 007 007 020 034 10 009 011 029 049 11 008 010 027 045 19 005 009 025 039 43 011 010 033 054 14 014 612 042 068 15 014 016 053 083 16 021 020 066 107 17 020 018 065 103 18 015 015 055 085 19 015 017 055 087 20 016 022 080 118 21 015 013 081 109 29 019 030 087 136 93 025 033 086 144 2% 040 026 108 174 95 024% 028 084 136 26 027 030 089 446 97 029 031 106 166 98 034% 027 115 176 29 040 057 417 21% 30 034 047 151 232 Octobre... 4 028 038 124 190 2 032 028 088 148 ’ 3 021 026 093 140 4 030 023 087 140 5 028 03% 138 200 6 054 060 195 309 Grande croissance. 7 045 068 170 286 8 057 055 180 292 9 060 066 170 296 10 061 062 150 973 11 020 046 133 199 19 048 060 113 291 15 027 023 084 134 1% 016 03% 084 134 15 021 036 111 168 16 030 063 089 182 217 026 068 192 216 18 04% 058 167 269 19 038 070 170 978 20 035 042 143 290 91 051 073 190 314 La plus grande croissance, 92 042 047 185 974 93 053 056 067 176 24 029 023 040 092 L’observatio : es 95 095 017 012 054 à A mots 0 1382 1680 4726 7188 EXPÉRIENCES SUR LA CROISSANCE DES TIGES OU CHAUMES, 327 Remarques. — La croissance de la nuit est, dans cette espèce, bien supérieure à celle du jour; c’est un fait constant, remarqué pendant huit années d'observations sur plusieurs sujets à la fois en développement. Dans ce tableau, la plus grande croissance en vingt-quatre heures est de 314 millimètres, qui se décomposent en 124 mil- limètres pour le jour, et en 190 pour la nuit. La croissance diurne, comparative entre les six premières heures et les six dernières, est entièrement en faveur des après-midi. Ainsi, les 49 après-midi donnent un total de 1680 millimètres, et les matinées 1382 millimètres seule- ment; ou encore, sur 49 jours observés, 2 matinées sont égales aux après-midi, et 32 après-midi supérieures aux matinées. — Une observation faite en 1876 démontre que, sur 71 jours d'observations, l'allongement des après-midi a été 53 fois supérieur à celui des matinées. La croissance plus marquée la nuit, dans cette espèce, s’accuse encore dans les cas d’avortement du turion, qui à seulement un allongement nocturne; elle s’accuse aussi dés le début de la végétation du chaume et à son déclin, où les croissances peu sensibles de ces époques sont presque nulles le jour, ce que démontrent les premiers chiffres de ce tableau, enregistrés pourtant à une certaine hauteur déjà acquise, Nous avons suivi ces expériences, au déclin de la végétation jusqu'à 17 à 20 mètres, au milieu des plus grandes diff- cultés. | | 328 LES BAMBOUS. CROISSANCE DU BAMBUSA VULGARIS Sujet adulte. PAR ABRÉVIATION, L'OBSERVATION N’EST DONNÉE QU'A PARTIR DE à MÈTRES AU-DESSUS DU SOL DATES. millim. Octobre... 012 006 010 016 019 032 041 023 016 02% 027 023 021 020 026 023 033 029 033 022 050 021 Novembre. 031 024 050 034 024 027 051 025 193 9 octobre 1876. à 6 heures du soir De 12 heures OBSERVATIONS. De 6 heures du soir à 6 heures du matin. CROISSANCE en 24 heures millim. 013 033 021 031 038 041 039 040 033 041 036 034 037 036 039 022 038 044 059 046 023 04% 060 03% 050 046 056 064 049 1143 millim. Une des plus grandes crois- sances. Id. L'observation se continue dans les mêmes propor- tions, mais en diminuant. Remarques. — Croissance accentuée la nuit. Le maximum de la croissance a lieu presque constamment pendant les douze heures de nuit; ainsi, dans cette expérience, sur 29 obser- vations, 4 fois seulement l'allongement du jour a été supérieur à celui de la nuit. Les plus grandes croissances en vingt-quatre heures sont celles queconstatent le 1" etle 7 novembre; toutes les deux se EXPÉRIENCES SUR LA CROISSANCE DES TIGES OU CHAUMES. 229 sont élevées à 211 millimètres, et, dans ces deux derniers * cas, la croissance de la nuit a toujours été supérieure à celle du jour. Dans la journée, le plus grand allongement comparatif des six premières heures et des six dernières est presque entière- ment en faveur des après-midi, qui sont 24 fois supérieures aux matinées, sur 28 cas de cette observation. Aussi les totaux des matinées ne donnent-ils que 793 millimètres, tandis que ceux des après-midi atteignent 1143 millimètres. La croissance du chaume à son extrémité, vers la fin de son élongation, est des plus lentes et souvent peu accusée. Les ob- servations indiquées ci-dessous, et faites à 10 mètres de hau- teur, le démontrent. OBSERVATIONS. à 6 heures du soir du soir. : 6 heures CROISSANCE du matin. en 24 heures, à 42 heures. De 12 heures millim. | millim. | millim. | millim. Déc. 1874... : Vents. Vents. 5 4 Hi] 4 3 4 2 (y l 0 0 19 Qt be QU = 330 LES BAMROUS, CROISSANCE DU RAMBUSA VULGARIS VITTATA Sujet adulte. TURION HAUT DE 0,72 AU-DESSUS DU SOL AU DÉBUT DE L'OBSERVATION. 25 octobre 1870. heures DATES. OBSERVATIONS. du soir du matin en 24 heures. De 6 heures De G heures du matin De 12 heures millim. millim. millim. millim. Octobre... DE 006 006 015 027 006 006 01% 026 007 006 01% 027 007 005 017 029 006 006 019 031 007 007 020 03% 005 004 02% 033 Novembre. 005 00% 025 034 006 005 02% 035 010 009 013 032 00% 003 020 027 009 009 ‘ 031 003 009 9 032 007 01% 9 041 00% 010 Î 030 007 011 2: 043 006 016 2 050 00% 01% 12 060 009 031 È 07% 031 02% È 108 045 097 08$ 020 092 D5 096 019 026 091 0922 016 È 081 005 022 d 062 016 026 97 069 007 01% PA 050 009 02% É 078 015 028 É 086 008 019 2 056 020 014 D37 071 015 029 p 072 045 025 2 067 021 025 € 080 020 028 Ë 098 016 023 Û 083 026 027 074 Décembre. ! 023 031 401 017 028 ; 091 028 033 D3: 096 021 031 099 034 028 DG: 197 Grande croissance. 031 028 ) 128 La plus grande croissance, 020 020 080 019 020 35 07% 016 010 E 060 006 008 2 038 00% 2 016 005 021 L'observation continue jus- 005 © 015 qu'à 8 mètres de hauteur, 845 1565 3052 EXPÉRIENCES SUR LA CROISSANCE DES TIGES OU CHAUMES. 331 Remarques. — Le maximum de croissance, pendant le jour ou pendant la nuit, est variable dans cette plante ; ainsi, sur 90 jours d'observations, 15 fois la croissance diurne est supérieure, mais 34 fois c’est la croissance nocturne. Le plus grand allongement en vingt-quatre heures, remar- qué dans cette espèce, est de 198 millimètres ; il a été observé le 6 décembre et est dû à la grande croissance des 12 heures de nuit, qui ont fourni 69 millimètres. — Un autre allonge- ment assez saillant, dans ce mème tableau, est celui de 127 millimètres, constaté le 5 décembre. La croissance du Jour, divisée en deux parties, démontre que l'allongement des après-midi est plus accentué que celui des matinées; les totaux des 50 jours d'observations consignés dans ce tableau donnent 845 millimètres aux après-midi, et 642 seulement aux matinées; on peut établir aussi que 29 après-midi ont eu une croissance supérieure aux matinées, et que dans 7 cas il y a eu égalité. A la dernière période de croissance de ce Bambou, lextré- mité, qui continue à végéter lentement pendant l'hiver, pré- sente des accroissements à peine sensibles. DATES. OBSERVATIONS. du soir, CROISSANCE en 2% heures. De 12 heures à 6 heures millim. | millim.! | millim. Janvier 1875. Vents. Froid, > G9 © me ne Re Q5 LO KO 00 = 0 0 I 0 0 1 1 0 0 l û l 2 1 0 0 0 0 2 0 û 1 ot 9 re 332 LES BAMBOUS. CROISSANCE DU PHYLLOSTACHYS MITIS Sujet adulte. TURION HAUT DE 0,80 AU-DESSUS DE TERRE AU DÉBUT DE L'OBSERVATION 25 mai 1876, 2. 22 DATES. = ms OBSERVATIONS. A [=] = millim. | millim. VERRE 5 9 £ 079 144 5 Û 097 167 082 143 085 161 086 180 15% 293 180 309 Juin... I 081 069 193 343 2 080 085 187 352 à 066 072 183 321 4 097 103 197 397 5 059 092 491 349 6 05% 097 210 361 7 084 089 293 396 j g 102 126 968 506 La plus grande croissance. 9 192 076 261 459 Grande croissance. 10 055 078 9275 408 11 071 074 205 350 12 057 074 239 370 43 091 042 191 324 14 081 112 945 408 15 070 090 9243 103 16 047 044 243 334 17 073 052 190 315 18 067 057 947 971 19 041 051 159 251 20 071 050 495 316 91 051 045 197 293 29 057 047 140 244 93 052 039 149 233 24 033 017 139 189 95 028 012 059 099 26 » » 041 (21 97 012 009 069 090 28 055 041 145 241 29 023 021 111 455 30 036 033 016 085 Juillet..... 1 030 023 073 126 2 027 022 055 10% 3 027 024 048 099 4 028 014 039 081 5 010 008 025 043 6 009 008 009 026 7 003 003 005 o11 8 001 » 002 003 2187 2307 6393 10887 EXPÉRIENCES SUR LA CROISSANCE DES TIGES OU CHAUMES. 333 Remarques. — La croissance du Phyllostachys mitis adulte est constamment plus accentuée la nuit que le jour. Les deux plus grandes croissances enregistrées dans Îles vingt-quatre heures sont de 506 et de 459 millimètres. Elles se suivent, d’ailleurs; la première a eu lieu le 8 juin et se décompose en 238 millimètres pour les 12 heures de Jour et 268 millimètres pour les 12 heures de nuit, soit 30 mulli- mètres en faveur de la nuit. — La seconde a eu lieu le 9 juin et donne 198 millimètres pour le jour et 261 pour la nuit, soit 63 millimètres en faveur de la nuit. L'examen de la croissance des après-midi, par rapport à celle des matinées, offre des comparaisons différentes. Mais si, dans le détail des observations, l’on constate une irrégu- larité dans la marche ascensionnelle des six premières heures et des six dernières du jour, le total des après-midi réunies démontre qu'il atteint 2307 millimètres, tandis que celui des matinées n’est que de 2187. II semble que la croissance est plus développée dans les après-midi. Cependant, on peut établir aussi que, dans ces 45 jours d'observations, 24 mati- nées ont eu une croissance supérieure à celle des après-midi, et par conséquent ces dernières ont été inférieures dans 21 cas; mais le total de ces 21 cas a donné un chiffre plus élevé que celui des 24 matinées. 334 LES BAMBOUS. CROISSANCE DU PHYLLOSTACHYS MITIS Jeune sujet, PAR ABRÉVIATION, L'OBSERVATION N’EST DONNÉE QU'A PARTIR DE ® MÈTRES AU-DESSUS DU SOL 17 mai 1876. DATES. OBSERVATIONS. dn matin à 19 heures. À 94 heures. du soir à 6 heures du matin. CROISSANCE De G heures De 12 heures à 6 heures du soir | en | millim. | maillim. | millim. | millim. 059 078 190 035 071 147 053 051 154 095 082 9235 087 062 206 101 121 303 074 075 236 110 109 322 157 130 399 La plus grande croissance. 100 125 287 1147 105 349 Grande croissance. 097 052 228 089 090 081 260 102 081 087 970 088 119 093 293 053 087 12% 26% 037 056 10% 197 063 051 018 162 066 066 014 176 029 08% 06% 177 049 051 061 161 043 045 050 138 046 042 030 118 030 02% 050 10% 026 016 033 075 017 010 020 047 008 007 0923 002 003 Ë 010 009 008 020 005 003 [ 01% 001 » 9 003 1622 1921 7} 5517 Remarques. — Ge deuxième tableau détaille les croissances d’un Phyllostachys mitlis de petites dimensions, non encore adulte, et démontre que, dans ce cas, la végétation est plus active le jour que la nuit; à l’inverse du tableau précédent, qui a trait à une vieille souche produisant des chaumes arri- vés au maximum de leur diamètre. Les deux plus grandes croissances de ce jeune Bambou sont EXPÉRIENCES SUR LA CROISSANCE DES TIGES OU CHAUMES. 355 de 359 millimètres et de 342 en 24 heures : l’une eut lieu le 25 mai, l’autre le 27. La croissance du 25 mai donne 225 millimètres en. 12 heures de jour et seulement 130 millimètres dans 12 heures de nuit. Celle du 27 mai est plus caractérisé 237 millimètres dans les 12 heures de jour, et seulement 105 dans les 12 heures de nuit. Dans les 31 jours d'observations, la croissance des après- midi est supérieure à celle des matinées; aussi l’ensemble des après-midi donne 1921 millimètres, pendant que les matinées en totalisent seulement 1622, soit une infériorité de 299 millimètres. — Sur ces 31 jours, 17 fois les après- midi son! supérieures en croissance aux matinées. Dans la dernière période de croissance des Bambous figu- rant dans les deux tableaux précités, on remarque l’infériorité d’allongement des après-midi par rapport aux matinées, tandis que : contraire a lieu au début de la croissance et Jusque passé le maximum d’allongement en 24 heures. [e) ua 336 - LES BAMBOUS. CROISSANCE DU PHYLLOSTACHYS NIGRA Sujet adulte. 22 avril 1872. on hi 5 SA DATES. Zi RUE B = OBSERVATIONS. EC = Sa À x = S £ millim. | millim. | millim. | millim. Avril: 99 034 049 057 140 93 022 059 071 172 94 05% 05% 057 165 95 06% 068 067 199 26 088 126 186 400 La plus grande croissance. 97 085 068 090 243 28 067 075 106 218 29 053 049 093 195 30 069 059 068 196 Mai:t- 1 100 089 081 970 2 4112 09% 09% 300 3 107 098 113 318 4 131 ait 079 321 Grande croissance. 5 051 072 098 991 6 079 092 080 251 ie 051 074 099 294 8 079 09% 066 239 9 127 108 087 322 Grande croissance. 10 08% 075 08% 243 11 06% 051 035 150 12 057 061 073 191 13 063 061 089 913 1% 046 033 039 118 15 023 037 040 100 16 013 012 005 030 1743 1769 1957 5469 Remarques. — Croissance supérieure le jour. Dans ce tableau, la plus grande croissance enregistrée dans les vingt- quatre heures est de 400 millimètres; elle eut lieu le 26 avril. Elle se détaille ainsi : 214 millimètres de croissance diurne, et 186 de croissance nocturne, soit une différence de 28 mil- limètres en faveur du jour. Les autres croissances les plus saillantes sont de 321 et 922 millimètres par 24 heures. Dans les vingt-cinq jours de cette expérience, l'observation diurne démontre que la croissance est plus accentuée dans l’ensemble des après-midi que dans celui des matinées; ainsi, le total des après-midi donne 1769 millimètres, tandis que celui des matinées n’atteint que 1743. EXPÉRIENCES SUR LA CROISSANCE DES TIGES OU CHAUMES. 337 Mais, dans le détail de l'observation de chacun des 25 jours, on trouve qu'il y en a À où il y a égalité de croissance, 13 où le total des matinées l'emporte sur celui des après-midi, etconsé- quemment 11 pour l'inverse; quoi qu'il en soit, l'allongement total est plus grand dans ces T1 après-midi. Des observalions autres, faites simultanément sur deux chaumes d’une même souche, en avril 1875, font constater que, dans un cas, la croissance est également supérieure dans les après-midi, et que, dans l’autre, Ia dernière période d’al- longement des matinées offre une supériorité d’élongation bien marquée sur les après-midi des mêmes Journées, bien que le total reste, dans l’ensemble, en faveur des après-midi. Un grand nombre d'observations relatent une série de croissances très-accentuées en cerlaines années, et Loujours vers le milieu de la période d’accroissement. Ainsi, en 1873, on a enregistré sur certains chaumes les allongements sui- vants, remarquables pour cette espèce dont les dimensions sont grandes : 2 DA a n [S] 2 ME o a 1O en SES ZE = FISIERE Z 3 = £ 2