w m IFF rKm. ^\^à.t ■ mmrm 1'\\ Hl '^^^ »Hi^, f fû U IT îr=^^^A ' "^^ ^ \Xi^^^^ ^v'V*t **<-^^^ /ra^..t^ LES CHAMPIGNONS '1 * CÛMIiSTIBLI'S l'T VlîNENRUX DE LA REGION DE MUXTi'ELLIEll ET DES CEVENNES ftUX POINTS DE VUE ÉCONOMIQUE ET MÉDICAL PAR Louis F»LA]srGH:o]sr DOCTEl'll KX MÉDECINE AIDE -BOTANISTE A LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE MONTPELLIER -^^^ MONTPELLIER IMPRIMERIE CENTRALE DU MIDI (Hamemn Frères) 1883 A Mi>N l'ERE J.-E. PLANCHON Correspondant de l"Inslilut Professeur à la Faculté de raédecine, Directeur du Jardin des Fiantes, elc A MA MÈRE A mon frère Jules — A ma sœur Marie L. l'LANCHUN. A MES ONCLES JULES LICHTENSTEIN Membre de la Société entomologique de France Secrétaire et trésorier de l'Académie des sciences et lettres de Montpellier ET GUSTAVE PLANCHON Professeur à l'École supérieure de pharmacie de Paris Membre de l'Académie de médecine L. PLANCHON. A M. LE PROFESSEUR JAUMES A MM. LES PROFESSEURS E. BERim SANS ET J. GRASSET I,. l'I^AXr.HON, A MES AMIS LE D" LOUIS HUGOUNENQ Préparateur de chimie à la Faculté de médecine ALEXANDRE ROUSSY Docteur en Droit HENRI BERTIN-SANS Aide de physique à la Faculté de médecine MEIS ET AMICIS L. PLANCHON. INTRODUCTION ^"r^.v.c^. Étudier les Champignons au point de vue pratique; faire connaître aux médecins les caractères distinctifs des bonnes et des mauvaises espèces; combattre les préjugés sans nombre qui, à cet égard, circulent et se transmettent dans nos cam- pagnes; contribuer ainsi pour une faible part à diminuer le nombre des accidents, aussi fréquents que terribles, dont les Champignons vénéneux sont la cause journalière : tel est le but de ce travail. Aussi tout le côté purement scientifique du sujet y sera-t-il, à dessein, négligé. Exposer longuement la structure anatomique et la physiologie des Champignons en général ; s'attarder à montrer l'état actuel des connaissances surle développement de ces êtres, serait, me semble-t-il, inu- tile et même déplacé dans un travail spécialement adressé à des médecins. Je ne pourrais du reste, sur un pareil sujet, que résumer les admirables travaux de mycologistes éminents, tels que Tulasne, de Bary, van Tieghem et tant d'autres, et cela sans utilité pourmes confrères, auxquels des notions pra- tiques sont bien plus nécessaires, ni pour les naturalistes, qui préféreront toujours remonter aux sources et consulter les mémoires originaux. C'est donc à la partie descriptive et mé- ç^ dicale de ce travail que je me suis spécialement attaché. ^ Mais là ne s'arrêtent pas les restrictions. Les Champignons ■' forment un vaste groupe de plantes, dont les espèces, très- eu VIII nombreuses, sont loin de présenter au praticien un égal inté- rêt. C'est à l'étude des Hyménomycètes, c'est-à-dire des Cham- pignons les plus élevés en organisation, que sera limité ce tra- vail. Bien plus, les Hyménomycètes eux-mêmes comprennent une foule d'espèces qui n'ont ni usage alimentaire ni proprié- tés nuisibles, et qui seront passées absolument sous silence. Enfin j'ai cru faire oeuvre utile en me restreignant à une étude locale, c'est-à-dire en décrivant spécialement les Champi- gnons de notre région. En réalité, le champ est encore vaste; car, d'une part, les Hyménomycètes renferment la grande ma- jorité des Champignons comestibles et vénéneux, et, d'autre part, la flore mycologique ne variant que très-peu d'un point à un autre, les Champignons de l'Hérault sont, pour la plu- part, les Champignons de la France, ou tout au moins ceux des départements méridionaux. Ces restrictions faites, ce travail se divise naturellement en trois parties. La première résume d'abord rapidement les notions anato- miques, physiologiques, chimiques, etc., nécessaires à l'intel- ligence du sujet; les principaux usages des Champignons y sont ensuite indiqués; puis vient la réfutation de tous les pré- jugés populaires, causes habituelles des empoisonnements. Je termine enfin par quelques mots sur la distribution géo- graphique de nos Hyménomycètes. La seconde partie est occupée tout entière par la descrip- tion des espèces comestibles ou dangereuses, qui croissent communément dans notre région. Un petit nombre seulement trouvera place dans cette énumération; mais les caractères en seront développés avec soin, et la connaissance exacte de ces espèces suffira amplement à prévenir toute confusion dangereuse. Autant que possible, les localités où j'ai ren- IX contré chaque espèce ont été exactement indiqu<^es. Pour les laits que je n'ai pu contrôler moi-nicme, j'ai toujours cite les auteurs. Enfin, à la suite de plusieurs espèces, se trouvent notés les résultats de quelques expériences dont le détail, au moins pour les plus intéressantes, trouvera place dans la troi- sième partie. Ce dernier chapitre, exclusivement médical, contient sur- tout des observations d'empoisonnement et quelques expé- riences faites principalement avec les Amanites. J'aurais voulu apporter dans cette partie de mon travail plus de compétence que n'en comporte ma qualito de débutant. Tout au moins les circonstances m'ont servi, en me permettant, dans la plupart des cas, de reconnaître, après les accidents, les Champignons qui les ont causés, et de rapporter ainsi à des espèces déter- minées les symptômes observés. C'est à ce chapitre que devraient se rattacher les côtés thé- rapeutique et médico-légal de mon sujet; mais je craindrais d'étendre outre mesure les bornes de ce travail, si je déve- loppais comme il le faudrait cet ordre de considérations. Je m'en tiendrai donc à cet égard au strict nécessaire, c'est-à- dire à un simple résumé. Qu'il me soit permis, en terminant une Introduction déjà trop longue, d'adresser publiquement mes remerciements à tous ceux qui m'ont aidé de leurs conseils. C'est dans la clien- tèle de M. le docteur Réfrégé, de Lodève, que j'ai pu recueillir la plupart de mes observations, et j'ai fréquemment profité des avis et des renseignements que m'a fournis ce praticien distingué. Je remercie aussi MM. les professeurs Jaumes et Grasset, dont les conseils ont été précieux pour la partie mé- dicale de ce travail, et M. le professeur Soubeiran, qui m'a généreusement prêté sa riche collection de notes sur les 2 Champignons. La complaisance de mes amis a été maintes fois mise à contribution, soit pour des renseignements, soit pour les matériaux. M. Henri Bertin-Sans, dont les nombreux envois m'ont permis de faire bien des expériences, en même temps qu'ils m'ont renseigné sur la flore mycologique des en- virons de Mazamet, et M. Barthès, pharmacien à Saint -Pons, dont les utiles indications sur les noms vulgaires et les espè- ces principales de ce pays m'ont été fort utiles, ont droit à une mention spéciale. Enfin je n'achèverai pas sans remercier mon père, mon pre- mier et mon meilleur maître, de l'appui qu'il m'a prêté dans la partie systématique de ce travail. Nos herborisations com- munes m'ont donné l'idée de l'entreprendre et m'ont permis de le mener à bonne fin. L'affection et la reconnaissance s'unissent donc pour me faire inscrire en tête de cette étude le nom de celui qui l'a inspirée. LES CHAMPIGNONS COMESTIBLES ET VÉNÉNEUX DE LA RÉGION DE MONTPELLIER ET DES CÉVENNES aux points de vuo économique et médical PREMIÈRE PARTIE DES CHAMPIGNONS EN GÉNÉRAL ORGANISATION DES CHAMPIGNONS C'est uniquement dans le but de familiariser le lecteur avec les termes qui seront employés plus loin que je désire faire connaître en quelques mots l'organisation des Champignons. Cette étude, si elle était approfondie, serait un travail fort long, et je n'en pourrais faire qu'une banale compilation. C'est donc à la pure et simple explication des termes que cette partie sera réduite. Les végétaux ont été divisés par Linné eu Phatiérogamcs et Cryptogames. 11 n'y a i as à insister sur les Cuiaclèresde ces — 12 — deux grandes classes, que tout le monde connaît. Les Crypto- games, à leur tour, ont été justement scindées, en raison de leur structure anatomique, en Cryptogames vasculaires, possé- dant des cellules et des vaisseaux, et Cryptogames cellulaires, uniquement composées de cellules. — Les Fougères sont le type des premières, les Champignons sont le type des secondes. Laissant de côté les Cryptogames vasculaires {Fougères, Équi- sétacées, Lycopodiacées, etc.), arrêtons-nous seulement à la seconde division. Ici se présentent trois groupes : 1° les Thal- lophytes {Algues, Lichens, Champignons)', 2" les Charagées {Chara, Nitella, etc. ) ; 3" les Muscinées {Mousses, Hépatiques). Les Champignons sont distingués des Algues par leur sta- tion terrestre ou épiphytique, par l'absence totale et constante de chlorophylle et par leur développement, dont le premier stade est toujours la formation d'une mycélium. Mycélium. — La spore, en germant, donne toujours nais- sance à des filaments qui se développent ensuite et forment la partie végétative du Champignon (1). C'est là la plante véri- table; mais c'est aussi celle que l'on connaît le moins, car, au contraire des parties aériennes des Phanérogames, le mycé- lium fuit la lumière et reste toujours plus ou moins enfoncé dans le substratum qui lui fournit la nourriture. Quelquefois même, lorsque les conditions nécessaires à la fructification ne se produisent pas, le mycélium peut rester indéfiniment ca- ché, à moins qu'il ne se révèle par les ravages qu'il exerce sur les arbres. Le mycélium se présente tantôt en filaments entremêlés, formant comme un tissu cotonneux ou aranéeux, c'est le my- célium byssoïde; tantôt sous forme de cordons plus ou moins parallèles, c'e^We mycélium fibreux; tantôt sous forme de mem- (1) Je fais abstraction des cas dans lesquels les premiers stades de la germination comprennent la formation d'un promycélium et de spo- 7'idies ou spores de second degré. — ir>> — brane étalée, c'est le mt/célium membraneux. Eïi{\n,i^ré([nQm- ment, sur certains points, le mycélium se condense, se serre en une masse homof]:èno et compacte: c'est ce que l'on nomme un sclerotUim, un sclé7-ote. Il est quelquefois annuel; jihis fréquemment il est vivace, et l'on voit chaque année les organes de reproduction se mon- trer aux mêmes places. Enfin ce mycélium, toujours sembla- ble à lui-même, peut cependant donner naissance à des appa- reils reproducteurs de forme etde structure très-diverses. Ce fait extraordinaire est aujourd'hui parfaitement étudié sous le nom de polymorphisme des C hamjji gnons, quesiïon très-vaste qui ne sera même pas abordée ici. Appareil reproducteur. — Après avoir végété plus ou moins longtemps, soit sur le sol, soit sous l'écorce des arbres, soit enfin sur le substratam quelconque qui le nourrit, le mycé- lium arrive à fructifier. Il faut pour cela des conditions d'hu- midité et de chaleur qui se rencontrent d'ordinaire à l'automne et pour quelques-uns au printemps. Chez les Hyménomy- cètes, les seuls qui soient à considérer ici, la portion fructi- fiante se compose de plusieurs parties qu'il est nécessaire d'énumérer. Le Chapeau, réceptacle ou hyménophore, est un organe de soutien et de protection pour les spores. De forme extrême- ment variable, le chapeau est pour l'ordinaire convexe, ar- rondi et régulier. Mais il peut être aplati, infundibuliforrae, en cloche, latéral, irrégulier, dimidié, etc., etc., ou même man- quer absolument Chez les Clavaires, par exemple, l'hyméno- phore est rameux comme une branche de corail. Chez les Tré- melles, c'est une membrane irrégulièrement plissée,etc. Stipe, pied, pédicule. Le chapeau peut être sessile, comme chez certains polypores; mais le plus souvent il est supporté par un pied. Ce pied, de forme très-variable, gros, mince, long, court, renflé, atténué, plein, creux, etc., etc., est ordinaire- — 14 — ment central, mais il peut être excentrique, complètement la- téral, ou même nul. Hyménium. — L'hymênium est la partie de la surface de l'hyménophore sur laquelle se forment les spores et que le réceptacle est chargé de protéger. C'est sur la forme de l'hy- mênium qu'est basée la division desHyménomycètes en Aga- ricinées (hyménium lamelleux), Polyporêes (Hyménium formé de tubes), Hydnées (hyménium sous forme d'aiguillons), Thé- léphorêes (hyménium inférieur, membraneux), Clavariées ( hyménium périphérique autour des rameaux ), Trémelli- wees (hyménium périphérique formant des replis irréguliers). Dans la distinction des espèces, l'hymênium joue aussi un rôle important. La forme, la couleur, le nombre, la grandeur des lamelles ou des tubes, sont des caractères dont on tient grand compte, comme on le verra dans la partie descriptive. Le collier [anneau, collerette, vélum partiale, etc.) est une membrane qui s'étend du stipe au bord du chapeau. L'accrois- sement du Champignon rompt cette membrane, qui peut dis- paraître ensuite complètement, ou rester autour du stipe sous forme de filaments aranéeux [cortine), ou enfin persister comme une collerette annulaire. Cet organe manque chez beaucoup de Champignons. Le wZt?a(w/wmww^t?ersa^e)estrenveloppegénérale du Cham- pignon jeune, tandis que le voile dont les débris forment la collerette ne recouvre que l'hymênium. Ce volva, qui n'existe que chez quelques Champignons, se déchire pour laisser sortir l'hyménophore; mais souvent il laisse sur le chapeau des frag- ments adhérents, que la croissance du Champignon écartera les uns des autres (c'est la volve in complète). Souvent aussi le chapeau ne porte pas trace de volva et passe tout simplement à travers une large déchirure de cet organe: c'est le cas d'une volve complète. La volve manque dans une foule de genres. L'hymênium porte en saillie sur son tissu propre : 1° des - 15 - cellules allongées de formes diverses, désig-nées sous le nom de ci/stides, et dont on ne connaît pas encore bien les fonc- tions: certains naturalistes y ont vu des organes maies etlos ont R\^'[se\ées anthé7ndies owpollinaires; rien n'est moins dé- montré que le rôle sexuel de ces organes; 2" d'autres cel- lules, allongées aussi, les hasides, beaucoup plus nombreuses et généralement plus petites que les cystides. Ces cellules sont pourvues de pointes très-ténues, le plus souvent au nombre de quatre pour chaque baside. Ce sont les sporophores ou sté- rigmatcs ; chacune de ces pointes se termine par une spore. La spore (1) est un petit corps ordinairement sphérique ou ovale, quelquefois réniforme, lisse ou hérissé de saillies; le nombre des spores est prodigieux. Elles forment, quand on pose un Champignon sur une table et qu'on l'y laisse quelque temps, une couche plus ou moins épaisse. La couleur de ces spores est constante pour chaque espèce, et elle est en général la même chez les Champignons que les autres caractères rappro- chent. Aussi est-ce sur cette coloration des spores qu'est basée la division du genre Agaricus de Pries. Les spores ne sont vi- sibles qu'en masse à Tœil non armé du microscope. Certains Champignons ont dans leur tissu, et surtout sous l'hyménium, des canaux qui laissent suinter, quand on les coupe, soit un liquide hyalin, soit, chez les Lactaires, un lait diversement coloré. Sur les fonctions physiologiques des Champignons, ce ré- sumé sera plus bref encore. Le fait principal à noter, c'estque (1) En réalité les prétendues spores des Hvménomycètes ne répon- dent pas aux graines des plantes plianéroq'anies, ni même aux nns/mrfs ou spores fécondées de certains Charapitruons {f'enmospora, Ci/sto- pus) ou de certaines Algues {Vauchena, Œ(li)fjo)iium). Ce sont tout simplement des conidies, c'est-à-dire des cellules susceptibles de repro- duire Tespèce par voie purement végétative (scissiparité ou gemrai- parité). — 16 — ces végétaux n*ont point de matière verte et, par conséquent, ne respirent pas comme les autres plantes. En effet, ils absor- bent de l'oxygène et exhalent de l'acide carbonique. Il paraît aussi établi qu'ils dégagent de Thydrogène. Emettent-ils de la chaleur? Le fait n'est pas bien démon- tré. — Quelques-uns sont phosphorescents. Je dirai un mot de cette propriété à propos de VAgaricus olearius. Le développement des Champignons, la germination des spores, la fécondation, peu connue encore, sont autant de questions qu'il vaut mieux passer sous silence, faute de pou- voir leur donner ici le développement qu'elles méritent. La coloration des Champignons est variable à l'infini. Le vert est une des couleurs les plus rares, et, quand il existe, il n'est pas dû à la chlorophylle. Quelques Champignons sont obscurs, mais la plupart sont brillants, et il suffit de se prome- ner dans les bois humides en automne pour être frappé de cette richesse de coloris. Les changements de couleur sont fré- quents, surtout chez certains Bolets. La cause de ces variations est très-mal connue. Peut-être l'ozone joue-t-il un rôle dans ce phénomène. L'odeur des Champignons est variée, bien qu'il y ait une odeur fungoide commune à beaucoup d'espèces. Tous ces ca- ractères que la vue, l'odorat ou le goût, font percevoir chez chaque Champignon, seront signalés dans la partie descriptive. Je ne fais aussi qu'indiquer la difi'érence de taille que présen- tent les espèces même comestibles, depuis les grandes Ama- nites jusqu'aux petits Marasmius. Chimie des Champignons. — A côté des caractères physiques, il faudraitpasser ici en revue les propriétés chimiques. Mais la chimie des Champignons n'est pas faite. Un très-petit nombre d'espèces ont été étudiées, et les résultats qu'on a obtenus sur elles ne sont pas tous satisfaisants. De nombreuses analyses ont été pourtant données parBraconnot,Vauquelin, Bouillon- 17 — La^rrarif^f^, Lctel lier, Pay(^n,Gob!et,Lerort,Bouclier(l), etc., etc. Quelques-unes ont donné des résultats : des résines ont été isolées, comme celles de VAgar. stypticus, par exemple; lesuc dos Lactaires a été fort étudié par M. Boudier et par d'autres ; Letellier a extrait de VAgar. muscarms une substance qu'il a nommée Vamanitine, etc., etc. On se reportera aux publica- tions de ces auteurs pour Tétude de cette partie de la science mycologique. Le seul fait essentiel pour ce travail est la dé- couverte du principe actif de la fausse Orong-e, la muscarine, par MM. Schmiedeberg et Koppe en 1870 (2) {Vierteljahres- schrift fur Pharmacie., t. XIX, p. 27G), et la synthèse de cet alcaloïde par MM. Schmiedeberg et Harnack(CAc»2isc^e Cen- tralhlatt, t. VII, p. 554), — La muscarine est associée dans la Fausse Oronge à un autre alcaloïde, Vamanitine (Harnack), dont il est facile de la séparer, le chloraurate de muscarine étant beaucoup plus soluble que celui d'amanitine. La mus- carine est très-soluble dans l'eau, ce qui rend son emploi ex- périmental facile. On l'obtient, soit en l'extrayant de VAma- nita muscaria par des procédés que je n'ai pas à décrire ici : elle est alors liquide, noirâtre, avec une odeur spéciale; soit directement par synthèse, et elle est alors en cristaux jau- nâtres, déliquescents. En oxydant l'amanitine, on obtient la muscarine (3). L'amanitine elle-même est identique avec la né- vrine. Quelle que soit la névrine qu'on oxyde (naturelle ou synthétique), on n'obtient jamais qu'une seule muscarine, tou- jours identique à elle-même et toujours toxique. L'oxynéovrine (l)Voy. Boudier, les Champignons, Paris, 18G6. (2) Voy. le résumé de la question, par Jungtleiseh, Jnurn, phami.el chimie, 1877, p. 140. (3) Cette oxydation, impossible à obtenir par la plupart des moyens ordinaires (acide chrominue, permanganate de potasse, etc. ), se fait très-bien par l'acide nitrique concentré. - 18 - ne diflfère de la muscarine que par deux atomes d'hydrogène en moins. Elle est neutre et inactive. Les deux substances don- nent par la chaleur de la triméthylamine. Ces indications sont données ici à cause de l'usage que j'ai fait de la muscarine dans quelques expériences. USAGES DES CHAMPIGNONS Sans vouloir donner les résultats des analyses dont les Champignons ont été souvent l'objet, il est essentiel de noter la richesse de ces végétaux en azote. Aussi peut-on se nourrir presque exclusivement de Champignons, et l'expérience du professeur Schwsegrichen, de Leipzig, qui a vécu plusieurs semaines de cette unique nourriture, arrosée d'eau pure, et qui a senti ses forces s'accroître notablement, est tout à fait concluante. Il mangeait même les Champignons crus. Pour les classes pauvres, les Champignons sont une très-grande ressource. En Russie, en Allemagne, en Italie et même en France, dans les Cévennes par exemple, on en consomme des quantités considérables, et les années de sécheresse sont plus dures que les autres pour les paysans privés d'une nour- riture abondante, fortifiante et gratuite. — Cette richesse en azote pourrait être beaucoup plus utilisée qu'elle ne l'est au point de vue de la fertilisation du sol. Si tous les Champi- gnons trop avancés ou vénéneux étaient recueillis et pour- rissaient en tas dans les fermes, on obtiendrait un engrais dont les effets seraient certainement très-remarquables. Les usages culinaires sont, sans contredit, les plus connus et les plus utiles parmi ceux qu'on fait des Champignons. De nombreux ouvrages spéciaux ou généraux traitent en détail ce côté gastronomique, sur lequel je n'ai rien à dire ici; les quelques faits intéressants au sujet de la culture et des pro- — 10 — priétés nutritives de chaque espèce trouveront place dans la partie descriptive de ce travail. Les usages médicaux sont peu nombreux, et la thérapeu- tique des Champignons est encore à faire. Letellier a proposé, dans certains cas spéciaux, la substitution de l'amanitine à l'opium, d'après l'analogie d'action de cet alcaloïde avec la narcéine. — Reinhardt a employé la teinture à^Amanita miis- caria contre la teigne, la toux opiniâtre; on a essayé ce même médicament contre l'épilepsie convulsive (1). Le D"" Curie et M. Pierre Vigier, pharmacien à Paris, ont étudié VAmanita mappa, dont ils ont fait une alcoolature et des pilules pour les affections catarrhalos (2). En somme, rien de précis en- core, du moins quant aux Hyménomycètes, car d'autres Cham- pignons, comme l'Ergot, sont au contraire fort étudiés. — Le Polyporns offtcinalis n^esi plus employé aujourd'hui. Pour les rares usages des autres Champignons, on se repor- tera à la seconde partie. Ketchup (voy. Agar. campestris). Amadou (voy. Polyporus igniarius), Glu de chêne (voy. Fistu- lina hepatica). Encre, (voy. Coprins) etc., etc. DES MOYENS de reconnaître les Champignons comestibles et les Champignons vénéneux. Les empoisonnements par les Champignons, si fréquents encore aujourd'hui, se sont naturellement produits de tout temps; il est môme probable que le nombre en était plus grand alors que les données scientifiques faisaient défaut et 'D Note (le M. le professeur Soubciran. (2) Sicard,///s^ nat. des C// a /?;/>. Paris, 1883, p. 222. - 20 — que l'empirisme seul présidait au choix des espèces. Aussi a-t-on cherché de toute antiquité les moyens de reconnaître d'emblée si un Champignon est ou non comestible. Trou- ver un caractère sûr, invariable, tel a été le but; mais le suc- cès n'a pas couronné ces efforts, et il faut bien reconnaître aujourd'hui que toutes les recherches dans ce sens sont inu- tiles. Ce caractère absolu n'existe pas ; c'est à la connaissance raisonnée de chaque espèce qu'il faut demander la préser- vation de tout danger. Et, pourtant, que de moyens ont été proposés, que de signes ont été indiqués, dont les meilleurs offrent encore de nombreuses exceptions! Des préjugés sans nombre ont pris peu à peu racine, non-seulement dans le peuple, mais encore chez les gens du monde, et même chez quelques demi-savants. Ces idées se transmettent de père en fils: les déraciner devient une œuvre longue et difficile; aussi chacun doit-il y travailler pour sa part, et répandre autour de lui la connaissance vraiment scientifique des quelques es- pèces dangereuses ou comestibles, au lieu de poursuivre sans chance de succès la recherche d'un signe qui n'existe pas. Parmi les moyens si nombreux qu'on a successivement pro- posés, les uns sont basés sur de simples superstitions, les autres ont une couleur scientifique qui les rend plus dan- gereux encore. On est étonné, en lisant certains ouvrages, de la légèreté avec laquelle les auteurs donnent au public l'assurance que tel signe est infaillible, et cela au risque de voir une foule de malheureux succomber pour les avoir écou- tés avec trop de confiance. Lorsque, en 1861, pour n'en citer qu'un exemple, cinq officiers en garnison à Corte moururent empoisonnés par des Champignons vénéneux, l'opinion pu- blique s'émut beaucoup, et le Conseil de santé, c'est-à-dire un corps dont chacun était disposé à accepter sans contrôle toutes les affirmations, le Conseil de santé rédigea et publia une Instruction, où l'on prétendait donner les caractères — 21 - distinctifs entre les espèces ve'néneuses et le?5 comestibles. En suivant cette instruction pied à pied, on pouvait s'empoi- sonner vingt fois. — M. le D' Bertillon l'attaqua immédiate- ment, et n'eut aucune peine à la renverser de fond en com- ble. En eft'et, il n'y a pas de caractère absolu : quelques-uns sont faux absolument, d'autres ne sont vrais qu'à moitié et souffrent de nombreuses exceptions. Or il suffit d'une seule pour occasionner les plus grands malheurs. Passons donc en revue, le plus rapidement que nous pour- rons, tous les caractères distinctifs qu'on a successivement invoqués. Notons d'abord pour mémoire les vieilles superstitions des anciens, qui se méfiaient de tout Champignon ayant poussé prôsd'un clou rouillé, d'un drap moisi, d'un arbre toxique (1). Le voisinage d'un trou de serpent rendait aussi le Champi- gnon malfaisant ; aujourd'hui encore, j'ai souvent entendu des paysans affirmer que le contact d'une « mauvaise bête » est la cause des propriétés toxiques du Champignon. A côté de ces préjugés grossiers, il faut placer les quelques essais dont on parle partout, ce qui ne leur donne pas une valeur plus grande. Voici les principaux : Le blanc d'œufqui prendrait, par l'ébullition avec des Cham- pignons vénéneux, une couleur plombée; La moelle de jonc qui noircirait dans les mêmes conditions; Les petits oignons blancs qui, eux aussi, deviendraient noirs ; La cuiller d'étain, la bague d'or, la pièce d'argent, qui ré- véleraient par la couleur qu'elles prennent la toxicité des Champignons. M. Cordier a fait ces essais sans résultat. Le moindre défaut de tous ces prétendus indices est d'être absolument inexacts. (1) Voy. Boudiei", des Champ/gnons an point de eue de leurs caract., etc., pag. 9. — 22 — Les autres signes sont tirés des caractères physiques des Champignons. Ils ont à peu près tous un fond de vérité; mais les exceptions sont toujours si nombreuses, que Ton ne peut plus attacher aucune valeur à ces données, et qu'on s'ex- poserait à de graves accidents si l'on s'y fiait sans contrôle. La couleur du chapeau a été souvent invoquée, et bien à tort. D'abord, elle est souvent très-variable dans une même espèce. J'ai souvent pu réunir à côté l'un de l'autre jusqu'à 12 et 15 pieds de Russula alutacea, dont chacun offrait une nuance différente. — Alors même que la couleur est fixe dans une espèce, l'éclat du coloris n'est pas, quoi qu'on en ait dit, une preuve de la nocuité du Champignon. Entre l'Oronge vraie et la Fausse Oronge, on ne sait quelle est la plus brillante, et, dans les Russules, celles qui sont comestibles, comme le R. virescens ou le R. alutacea, ne le cèdent en rien au R. emetica, par exemple, dont les effets sont très-pernicieux. — Quant à la couleur blanche qu'on a dit être l'apanage des bonnes es- pèces, on la trouve dans VAgaricus vertius, une des variétés les plus meurtrières de VAgaricus butbosus. La couleur de l'hymênium est souvent très-variée et fré- quemment commune à des espèces dont les propriétés diffè- rent absolument : les lamelles sont blanches dans la plupart des Amanites; chez VAg. ovoideus, qui est comestible, comme chez VAg.bulbosus; chez VAg. vaginatus, comme chez la fausse Oronge. — On a conseillé aussi de se méfier des espèces dont les feuillets changent de couleur en vieillissant et deviennent noirs ou noirâtres. Il suffira de faire remarquer que le Cham- pignon de couche {Agaricus campestris) rentre dans cette ca- tégorie prohibée, et que les Coprins jeunes sont parfaitement comestibles. Plus tard, ils se fondent en eau noire; mais, certes, personne n'est tenté de les manger dans cet état. La couleur de la chair, suivant qu'elle change ou non à la coupe, est un des caractères dont on parle le plus souvent. — 23 — Il est, en effet, facile à constater et peut donner à bon [droit des soupçons sur quelques espèces. Mais ici encore se mon- trent bien dos exceptions. Beaucou[) de Bolets, et quelquefois même le Cèpe de Bordeaux {Bol. eduHs), changent de couleur. Le Bol. scaber, le Bol. aurantiacus, sont dans le même cas. Une variété du Champig-noii de couche que j'ai trouvée du côté de Murviel devient rouge quand on la coupe. Enfin le Lactarius deliciosus prend, lorsqu'on l'a froissé, un aspect très-désa- gréable. Il devient vert-de-gris sale, et il faut le bien connaî- tre pour ne pas craindre de le manger. La saveur des Champignons nous renseignera-t-elle da- vantage? C'est là un des caractères physiques auxquels on accorde le plus de valeur. Et, pourtant, quelle saveur évitera- t-on? La saveur acide? Mais on laissera de côté les Chante- relles et les Langues-de-Bœuf [Fistullna hepatica) pour n'en citer que deux. La saveur acre? Mais il y a des Lactaires, le Lact . piperatus , par exemple, que la cuisson rend parftiitenient mangeables. La saveur astringente? Mais VAgaricus (Armil- laria) melleus saisit atrocement à la gorge quand on le mange cru, et pourtant il sert au repas de beaucoup de nos paysans. Et VAmanita rubesce/is? et le Lactarius controversus ? et tant d'autres dont le goût n'est bon qu'après une préparation préa- lable. Par contre, se fier à une saveur douce pour accepter un Champignon sans le connaître exposerait à manger bien des espèces pernicieuses, telles que VAmanita pantherina, etc., etc., et bien des Bolets suspects. L'odeur se place à côté de la saveur; mais elle fournira en- core moins de renseignements. Eu général, les odeurs douces sont plus spéciales aux bons Champignons. Mais que de mau- vais qui sont inodores! ou même qui sentent bon! L'odeur de farine fraîche, que l'on donne comme une bonne note, se trouve chez des Champignons que Cordier trouve au moins suspects, tels que VAgaricus lividus. Les Amanita mappa^plial- — 24 — loides, pantherina, miiscaria, etc., sont absolument inodores. Le CLitocybe nehularis sent bon, et il a failli tuer Cordier! — Bulliard a été comme asphyxié par l'odeur du Bolet de Noyer, et dans certains pays on le mange. La consistarice du Champignon ne prouvera pas grand'chose. Celle de l'Agaric bulbeux et celle du Champignon de couche ne diffèrent pas beaucoup, et entre les Oronges vraies et les fausses, je ne vois même pas de nuance sous ce rapport. Il est certain qu'à poids égal, une substance coriace a plus de chances qu'une autre de provoquer une indigestion ; mais VHydnum repandum, le Cantharellus cibarius, la plupart des Collybia, les Pivoulades, sont assez fibreux et sont pourtant des Champignons estimés. La consistance de toutes les Rus- sules est la même, et les propriétés en sont bien diverses. Les Bolets que nous mangeons sont souvent mous et spongieux: en sont-ils moins inofténsifs? hdi présence d'un suc laiteux donne en général une préven- tion défavorable. Pourtant M. Boudier a démontré que la cuis- son enlève aux Lactaires leur principe toxique: l'un de ces Lactaires, le Lad. deliciosus, est comestible sans précaution aucune. A côté de ceux que l'on mange [Lad. volemus, con- troversus, pipe^^atus, subdulds, etc.), on en trouve de vrai- ment pernicieux [Lact. torminosus, rufus, etc.). h'excentricité du pédicule n^ est pas une preuve de nocuité. Les Pleurotus contiennent, en effet, beaucoup d'espèces co- mestibles et même estimées, telles que VAgar. ostreatus et VAgar. Eryngii. Végalité de longueur des feuillets se rencontre chez toutes les Russules, et les propriétés de cette section sont bien diverses suivant les espèces. JjSl minceur du chapeau par rapport àl'hyménium se retrouve dans les espèces les plus diverses. Aucune valeur. La p)'>'ésence de filaments araîiéeux autour du collet est com- - 25 - mune à toutes les Cortinaires, qui n'cnl pas, qu(3 je sache, de propriétés vénéneuses. La dessiccation est souvent tlonnée comme preuve de l'inno- cuité d'un Champignon, et l'on invoque à rap[)ui de celte idée le fait que les Champignons secs que Ton vend en tonneaux ne causent jamais d'accidents. Le lait est très-ex[)licable, si l'on songe que c'est à peu près uniquement le Cèpe de Bordeaux qui est ainsi pré[)aré, et que les gens qui le ramassent et le font sécher le connaissent parfaitement. J'ai fait souvent sécher des Champignons vénéneux, la Fausse Oronge et l'Agaric pan- thère en particulier, et j'ai toujours réussi quand les morceaux n'étaient pas trop épais. Par contre, bien des Champignons comestibles se putréfient vite ; c'est donc là un caractère à re jeter absolument. La viscosité du chapeau est caractéristique de certaines es- pèces, mais n'est pas en rapport avec leur action délétère. Les Agaricus ebur?ieus et virgineus, visqueux comme toute la section des Bi/grophot^us, sont comestibles. VAgar. (volvaria) glojocephalus est au moins suspect. Les peluchures du chapeau n'indiquent rien de précis. Les fragments de volva, très-nets sur les Amanita pan- therina et muscaria, peuvent leur manquer et se trouvent sur d'autres Champignons comestibles, tels que VAma?i. rubescens. ^adhérence de Vépide^^me à la chair du chapeau n'est ab- solument pas en rapport avec les propriétés du Champignon. Parmi les bons ou les mauvais, on en trouve de faciles et de difficiles à peler. Le renflement du pied ne se voit d'abord pas toujours, car bien des gens coupent le Champignon au ras du sol, au lieu de l'arracher. Et puis, si ce bulbe existe chez les Amati. bul- bosa, muscaria, etc., n'existe-t-il pas aussi chezlesAm. rubes- cens^ solitaria, eœcelsa; chezVAga7\ procerus, et même chez une variété de V Agaricus campestris? 3 — 26 — Le pédoncule fîstuleux n'est pas spécial aux espèces per- nicieuses. La plupart des pédoncules se creusent avec l'âge, et toujours il y a une différence entre la texture de la circon- férence et celle du centre de ce pédicule. Aucun renseignement à tirer de ce caractère. La présence de la volve est commune aux Champignons vénéneux et bienfaisants. Ex. Ag. vaginatus, cœsareus,... bul- bosus, muscarius. La présence du collier, dont on parle peu dans les livres, est un des caractères auxquels les habitants de nos pays se fient le plus. Aussi, après s'être empoisonnés, tant avec l'Aga- ric bulbeux qu'avec la Fausse Oronge ou quelques autres Cham- pignons analogues, affirment-ils souvent n'en avoir mangé que de bons: « Tous, disent-ils, avaient la collerette.)> On comprend facilement quels accidents cause cette déplorable croyance. — J'y reviendrai à propos des empoisonnements. Vacidité au tournesol est un des signes de malignité qu'on a indiqués; il est absolument faux. Les limaces et les vers mangent fréquemment les Cham- pignons. On a prétendu que ces animaux ne touchent qu'aux bonnes espèces (1). Il faut n'avoir que bien peu observé pour soutenir une idée pareille. J'ai vu, et bien d'autres avant moi, VAgar. bulbosus, par exemple, être attaqué par les limaces, alors que ni la Chanterelle ni l'Hydne sinué ne le sont. Et, d'ailleurs, quelle indication pourrait-on tirer de ce que font les gastéropodes? La distance entre l'organisation de ces ani- maux et celle de l'homme est telle, qu'on ne pourrait jamais conclure de l'un à l'autre. — Ce qui aurait plus de valeur assurément, ce serait d'observer avec soin les espèces que mangent les herbivores, qui en sont très-avides. Et encore on (1) On trouve même cette idée exprimée dans une thèse inaugurale, (Chauvin, Paris, 1819). — 27 — sait que les chèvres, par exemple, ingèrent impunément des substances toxiques; du reste, les porcs et les rennes mangent la Fausse Oronge. Vhaldtat est souvent invoqué. Les bonnes espèces vien- draient plutôt dans les endroits découverts, les clairières, les friches, etc.; les mauvaises rechercheraient de préférence les endroits sombres et humides. Le fait est vrai d'une façon très-générale ; mais j'ai trouvé VAgaricus campestris sous bois (Lavérune) et VAgaricus bulbosus dans une clairière fort sèche (Doscare). — VAmanita rubescens venait à Grammont, côte à côte avec le bulbeux. VAgaricus olearius, qui vient au pied des oliviers, n'est par conséquent pas un hôte des lieux sombres et humides, et il est toxique. VAmanita verna vient dans les champs. VAgaricus glojocephaluSj, qui est suspect, y vient aussi, tandis que la Chanterelle, les Clavaires, crois- sent sous bois et sous bois humide. Je pourrais multiplier les exemples. Le climat, l'exposition, la nature du sol, que l'on a cru longtemps avoir une influence, n'en ont absolument pas. Les Champignons toxiques en France, le sont aussi en Russie, quoi qu'en ait dit Zuckert, et les différences que l'on a signalées quelquefois tiennent au mode de préparation qu'on a fait subir aux Champignons avant de les manger (1). — Telle espèce préférera un sol à l'autre, c'est souvent vrai ; mais, où qu'elle ait poussé, elle y conservera ses propriétés perni- cieuses ou bienfaisantes. Vâge du Champignon a une importance. Non pas qu'il se développe par la maturation un principe toxique dans un Champignon primitivement non vénéneux; mais il se passe probablement un commencement de décomposition, qui rend alors le Champignon nuisible et difficile à digérer. C'est ainsi (1) Voy. Vadrot, thèse de Paris, 1814, n" 97. — 28 — que l'on a quelquefois constaté des accidents causés par Morille ou le Champignon de couche, accidents sur lesquels j'aurai plus tard à revenir. En tout cas, on évitera d'em- ployer des Champignons trop vieux. En résumé, pas un seul de ces caractères si divers et si nombreux n'est vraiment satisfaisant. La plupart des auteurs, après avoir réfuté quelques-uns de ces signes diagnostiques, font une sorte de tableau oii ils engagent, d'une façon géné- rale, à se méfier des Champignons présentant tel et tel carac- tère. En agissant ainsi, ils éliminent plusieurs bonnes espèces et ne défendent pas assez contre les mauvaises. Il faut être un peu plus radical, et dire qu'il est nécessaire absolument de connaître les Champignons comme on connaît les plantes qui entrent quotidiennement dans les préparations culinaires, comme on connaît le persil, la salade ou les carottes. C'est là le seul et unique moyen; tous les autres exposent à l'erreur. Il serait facile de répandre le peu de connaissances néces- saires pour que tout le monde arrivât à ce résultat. Il suffit de montrer, de faire toucher du doigt les choses, pour les faire immédiatement saisir. Il est des gens qui ramasseront des Grisettes toute leur vie et ne sauront pas, à la fin, si cette espèce est ou non munie d'un volva. Qu'on le leur montre, ils le sauront désormais. Encore une fois, c'est là le seul moyen: il faut rejeter tous les autres comme dangereux, et ne jamais manger de Champignons sur la foi d'un ou même de plusieurs caractères indiqués par les auteurs, et à plus forte raison par la tradition. — La connaissance d'une dizaine d'espèces, tant bonnes que mauvaises, suffit amplement pour éviter les accidents graves et pour fournir abondamment la table. _Aussi sera-t-il facile un jour, avec des tableaux coloriés, avec surtout des promenades qu'on fera faire aux enfants des écoles, par exemple, avec quelques indications — ?0 — qu'on donnera aux paysans, d'éviter un ^rand nombre de ces empoisonnements terribles qui déciment une famille, et sont souvent dus à la confiance trop grande dans le témoignage des sens. Puisqu'il n'existe aucun moyen empirique de reconnaître les Champignons vénéneux, ne peut-on pas rendre comestibles tous les Champignons, même les plus toxiques, et se mettre ainsi à l'abri de tout accident ? Le fait, reconnu depuis long- temps, que certains peuples se nourrissent indistinctement de tous les Champignons qu'ils rencontrent, les observations nombreuses d'innocuité constatée de la Fausse Oronge ou de certains Lactaires vénéneux, ne peuvent être expliqués, en effet, que par l'action des procédés de préparation. VAgar. mnscarius est mangé dans les Cévennes, après une simple ébullition dans l'eau, suivie de quelques jours de macération dans le même liquide. Il est certain que le sel ou le vinaigre ont pour effet de débarrasser la plupart des Champignons de leur principe toxique. Les anciens, et Ambroise Paré lui-même, attribuaient le même effet aux queues de poire et à l'écorce de poirier. Inutile de dire que l'action de ces agents est nulle absolument. Mais, en Russie, le sel est employé constamment; les Champignons y sont conservés, et cela suffit, en effet, pour rendre la Fausse Oronge inoffensive (1). Gérard eut le courage de faire sur lui-même et sur les siens de nombreuses expé- riences, qui furent répétées devant une Commission du Con- seil de salubrité, composée de MM. Cadet-Gassicourt, Beaude, Cordier, etc. Le procédé n'était pas nouveau. 11 se trouve déjà dans la Ire édition de la Toxicologie d'Orfila, en 1815 ; mais jamais les (1) Les Russes préparent diversement la Fausse Oronge. L'eau bouil- lante, le vinaigre et le rauriate de soude, sont les agents qu'ils em- ploient le plus fréquemment. (Voj.Vadrot, thèse de Paris, 1814, n^OT, pag. 5.) — 30 - résultats n'avaient été mis en lumière avec autant d'éclat. Un litre d'eau avec trois cuillerées de vinaigre ou deux cuillerées de sel suffisent pour 500 grammes de Champignons. On laisse macérer deux heures, puis on retire les Champignons ; on les essuie et on les fait bouillir un quart d'heure dans de l'eau, qu'on rejette ensuite. Il n'y a plus qu'à apprêter et à servir. Je suis loin de contester la véracité et l'authenticité de ces expériences remarquables. Mais il faut faire observer trois points : d'abord, comme le dit fort bien M. Cadet-Gassicourt dans les conclusions de son rapport (1), c'est là un procédé qu'il ne faut pas répandre ; car il suffirait d'une imprudence pour occasionner de grands malheurs. Secondement, le mets ainsi préparé a le double défaut d'être peu nourrissant (car, en même temps que le principe toxique, on a enlevé beaucoup des principes nutritifs) et d'être fort mauvais, coriace, filan- dreux, sans parfum ; bref, un manger détestable. Enfin, dans nos campagnes, on emploie fréquemment le sel ; mais il est rare qu'on fasse bouillir les Champignons avant de les apprê- ter; or cette méthode, suffisante pour la Fausse Oronge, ne suffit pas pour l'Agaric bulbeux ; on en verra la preuve dans les observations relatées dans la troisième partie de ce travail. — Ces restrictions faites, le procédé de Gérard mérite qu'on s'en serve dans les années de disette, lorsque les Champignons deviennent une ressource véritable pour nos paysans. Pour l'usage ordinaire, il faut n'employer que les Champignons que l'on connaît bien et les apprêter directement, pour ne leur rien faire perdre de leur agrément et de leur parfum (2). La chaleur suffit, dans bien des cas, à rendre comestibles des Champignons au moins suspects. C'est ce que M. Boudier (3) (1) Voir Journ. des connaiss. médic, 5 décembre 1851, pag. 109. (2) Les expériences de Gérard ont porté sur : Ag. muscarius, bul- bosus, emeticus, Boletus chrysenteron et quelques autres. (3) Boudier, des Champignons aux points de vue de leurs cai^actètes, usuels, chimiques et toxiques. Paris, 1866, pag. 99. _ 31 — a démontré pour certaines Russules et quelques Lactaires. On pourra donc employer ce moyen en ayant soin de ne s'y fier que pour les espèces dûment expérimentées, c'est-à-dire \(isAgar. piperatus, controversus et quelques autres. D'après M, Bou- dier, le principe acre n'est pas détruit par la chaleur, mais seulement modifié dans son état physique. En somme, les espèces comestibles sont nombreuses; elles poussent souvent en quantité, et je conseille de ne recourir aux moyens qui viennent d'être indiqués que si l'usage des Cham- pignons devient une nécessité. La règle, en toute autre occa- sion, est de rejeter toute espèce suspecte. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE des Champignons L'importance de la géographie botanique des Champignons n'est pas seulement théorique. Le côté pratique de la question présente aussi un grand intérêt. La connaissance de la distri- bution des espèces peut et doit venir en aide au médecin, so't pour reconnaître les Champignons, soit, en cas d'empoison- nement, pour établir des probabilités et diriger le traitement dans tel ou tel sens. Il est certain, pour n'en prendre qu'un exemple, que l'on n'aura pas à songer à la Fausse Oronge, si l'on sait que les Champignons toxiques ont été ramassés dans les environs de Montpellier, c'est-à-dire en un point où VAgaricus muscmHus ne se montre jamais. Le trai+'^ment des accidents, qui est évidemment le point capital, c 'ra tenir compte de ces faits, et c'est pour cela justement que j'ai donné tous mes soins à indiquer, dans la partie descriptive, les loca- lités, les terrains et les saisons oïl l'on trouve les différentes espèces qui intéressent le praticien. Malheureusement, il faut le reconnaître, les connaissances à cet égard sont encore bien — 32 — limitées et le travail est loin d'être achevé. Ce n'est qu'après des années qu'on peut conclure, et mes courses ont été trop peu nombreuses pour me permettre de donner des indications définitives. L'étude que M. de Seynes a faite de la région de l'Hérault et du Gard est le travail le plus intéressant et le plus com- plet que nous ayons sur cette importante question. J'ai pensé comme lui qu'il fallait étudier la distribution géographique des Champignons au point de vue local. C'est le seul moyen d'être vraiment utile, les données générales étant souvent su- jettes à exceptions et n'offrant jamais qu'un intérêt théorique. Du reste, ce travail général est moins fait encore que les flo- res particulières, à cause de l'ignorance absolue où l'on est de la végétation cryptogamique d'une foule de pays. Le meil- leur ouvrage qu'on ait publié sur la matière est un article de Elie-Pierre Fries(l), le flls, mort trop jeune, du célèbre my- cologiste d'Upsal. Une autre esquisse en a été donnée par Lé- veillé, dans l'article Mycologie du Dictionnaire de d'Orbi- gny (2). Régions. — La division de notre région en zones, telle que l'a comprise et exposée de Seynes, me paraît tout à fait ration- nelle. Mes excursions se sont étendues moins au nord que celles de cet auteur, et, si elles ont compris une partie du dé- partement du Gard, c'est surtout sur l'Hérault qu'elles ont porté, et plus particulièrement encore sur cette région de Montpellier, si intéressante et si bien étudiée déjà au point de vue phanérogamique. Tout autour de Montpellier se trou- vent des parcs magnifiques, dont les ombrages épais abritent, (1) In Ann. se. nat. (bot.), 4 série, vol. XV, 1861, p. 10. (2) Voyez aussijCooke et Berkeley, les Champignons. Paris, 1875, p. 243, — .?n — lorsque le temps en favorise la croissance, toute une flore de Chnmpinfnons, dont, en 1882, j'ai pu faire d'abondantes r<^- coltes. — Si l'on s'écarte des environs immédiats de la ville, on se trouve au milieu de la zone des Chênes verts, dans la crrande plaine qui nous sépare des premiers contreforts des Ce'vennes. On peut donc admettre deux grandes zones, la plaine et la monta^j-ne : la première se scindant en zone du Chêne vert et, sur le littoral, zone du Pin d'Alep et du Pin pisrnon; et la deuxième comprenant à son tour le Châtaignier d'abord et plus haut le Hêtre. Le Pin sylvestre s'y trouve aussi, mais trop peu abondant pour constituer une zone véritable. Les Champignons sont répartis dans ces diverses zones : les uns sont communs à toutes; d'autres obéissent surtout aux con- ditions de terrain; d'autres enfin, peu influencés par la na- ture du sol, le sont au contraire beaucoup par l'altitude ou par les conditions climatériques qu'ils rencontrent sur tel ou tel point. Le terrain, souvent sans action sur le développement des Champignons, puisqu'on voit les Aparicus vaginatus, mel- leus, terrerts, alutaceus, piperatus et tant d'autres, traverser toutes les régions et se montrer partout sans distinction de sol, doit dans certains cas entrer en ligne de compte. Cer- tains Champignons sont, en effet, silicicoles. La plupart des Amanites, l'Oronge vraie, la Fausse Oronge, l'Agaricbulbeux, ne viennent jamais dans le calcaire. Il en est de même de VAgaricus pantheriniis, et probablement aussi du riibescens. Aussi ces Champignons sont-ils rares dans nos environs im- médiats: on ne les rencontre qu'exceptionnellement {VAgar. muscarius pas du tout), et toujours dans la région siliceuse formée à l'est et au sud-est de Montpellier par les cailloux roulés de l'ancien lit de la Durance (notre diluvium alpin).. Te ne connais pas d'espèce absolument attachée aux terrains calcaires. Aussi les bois sur la silice sont-ils toujours les plus riches en espèces. — 34 - Le rôle joué par Valtitude est aussi fort important. Pries avait établi que le nombre des Champignons va en augmen- tant à mesure qu'on se rapproche des tropiques, en partant, soit du pôle, soit de l'équateur. La diminution qu'on observe lorsqu'on monte vers le Nord se retrouve naturellement quand on s'élève verticalement, et l'on voit, vers une certaine alti- tude, disparaître des Champignons fréquents dans la zone inférieure, tandis qu'en apparaissent d'autres inconnus plus bas. UAgaricus muscarius, par exemple, ne se trouvera jamais dans les plaines. Il apparaît déjà à Lodève sur la hauteur; encore n'est-ce pas l'espèce type que l'on y trouve, mais seu- lement une variété. Mais, si l'on arrive au Hêtre ou même à la lisière du Châtaignier, ce Champignon abonde et remonte jus- qu'à 12 on 1,300 mètres d'altitude. Dans le nord de la France, où la température est plus basse, cet Agaric redescend jusque dans la plaine. L'Oronge vraie finit à peu près oii la fausse commence. Il y a, il est vrai, une zone mitoyenne entre 400 et 600 mètres, où se trouvent les deux espèces; mais l'une tend à remonter, l'autre à redescendre. — Dans la région du Châ- taignier, qui finit vers 1,000 mètres, se développent bien plus abondamment que chez nous la plupart des Amanites, VAgar. proc^rzfs, les Mousserons (Ag.oreades,Ag.prunuhis, Ag. albel- lus, etc.); c'est là que l'on trouve la plupart des Russules, et en particulier les Russules toxiques. Ainsi VAgar. emeticus n'existe pas près de Montpellier; il est, au contraire, mêlé à Valutaceus sous les Châtaigniers des Cévennes. — Les Bolets comestibles (5. edulis et œreus) n'existent dans nos plaines que par très-rare exception. A la limite des Chênes, on commence à les récolter, mais c'est dans les Châtaigniers, et plus encore dans les Hêtres, qu'ils deviennent une véritable ressource. Ils remontent jusqu'à 12 et 1,300 met.., comme la Fausse Oronge. Ces conditions d'altitude sont intimement liées aux con- ditions météorologiques. Nul doute, par exemple, que nous — 35 - n'eussions ici rOronp-.-' vraie on abondance, si ce Champi- prnon n'exigeait pas une dose d'humidité plus grande que notre région no la lui fournit. La région du Châtaignier est humide. Les sources abondent dans les terrains siliceux, bien plus que dans nos calcaires arides. Aussi la flore crypto- gamique est-elle bien plus riche dans les sous-bois arroses desCévennes que dans nos garrigues. D'autre part, quelques espèces qui ne craignent pas une certaine sécheresse se mon- trent pins fréquemment dans nos environs. De ce nombre sont VAgaricus ovoideus, qui caractérise presque à lui seul la zone méridionale du département; VAr/ar. deliciosus, dont la pré- sence (due aussi à des conditions d'habitat qui vont être exa- minées) est assez caractéristique de nos bois environnants (1). — L'influence de cette humidité est si grande, qu'il suffit d'une année pluvieuse pour faire apparaître dans nos bois des Champignons qui ne se montrent d'ordinaire que dans les régions arrosées, l'Oronge par exemple, ou le Cèpe, pour ne prendre que les plus connus. — La chaleur est aussi pour certains une condition sine quâ non de développement. Mais insister sur cette idée serait revenir à la question de l'alti- tude, que j'ai examinée déjà. Vhabitat ordinaire de certaines espèces peut avoir une influence sur leur distribution: la plupart des Polypores des tropiques sont caractéristiques des arbres qui les portent. Le Polypore officinal n'existera chez nous que lorsque les reboisements entrepris dans les Cévennes y auront développé le Mélèze. Le Boletus granulatus, VAgaricus deliciosus, se mon- treront partout où se trouvent les bois de Pins. Mais, que les Pins disparaissent, et ces Champignons disparaîtront auGsi, en même temps que VAgar. lamellirugus qui vient sur le Pin (1) Mon père vient pourtant de l'observer dans les bois de Pins sa'I- vestres de Saint-Sauveur-des-Pourcils, dans les hautes Cévennes du Gard, vers 1,000 mètres d'altitude. — 36 ■- lui-même. Du reste, comme le fait remarquer Pries, dans l'article déjà cité, les arbres résiiiifères oat une flore moins riche que les autres, mais plus spéciale. — Enfin certains Champignons recherchent les bois humides, et l'on courra peu de risques de les rencontrer dans les champs; d'autres, au contraire, ne se plaisent que dans les friches et les endroits découverts. Dans les premiers se trouvent, par exemple, VAga- ricusbulhoius, les Chanterelles, etc.; parmi les seconds, VA- gar. glojocephalus et le Champignon de couche. — Mais ce caractère est fort incertain et n'est vrai que d'une façon générale. Quelles sont, enfin, les principales espèces que n'arrêtent ni la diversité des terrains, ni les différences d'altitude ; qui, en un mot, traversent toutes les zones sans montrer de préfé- rence marquée pour aucune? De ce nombre sont VAga7\ mel- leus, dont les ravages se font sentir sur les Châtaigniers des Cévennes comme sur les Marronniers du Jardin des plantes de Montpellier; l'Agar. terreus;VAgar. cylindraceus, qui suit les rivières; VAgar. vaginatus^ que l'on récolte partout; VAgar.ri- mosus; VAgar. alutaceuSj, qui couvre quelquefois le sol; VAgar. piperatus, moins abondant, mais également répandu; VAgar. amarus, dont les touffes sortent abondamment sur les vieux troncs de tous les arbres, depuis les Cévennes jusqu'à la mer ; certains Polyporesqui s'attachent à toutes les essences, et tant d'autres encore dont la liste dét?iillée me ferait sortir du cadre que je me suis tracé. Il faut ajouter seulement que l'aspect de certaines de ces espèces ubiquistes varie un peu avec la ré- gion, c'est-à-dire avec Faltitude et l'humidité. Les exemplaires d'A^ar. bulbosus que j'ai trouvés à Grammont n'avaient ja- mais la taille qu'atteint la même espèce dans les ombrages hu- mides des Cévennes ; VAgar. rubescens, quand on le rencontre dans nos contrées, a une teinte plus claire que les exemplaires venus dans une région plus élevée. Sans vouloir multiplier les — 37 — exemples, j'ajoute seulement qu'on devra tenir compte de ces variations et ne pas se laisser tromper par ces léj,''ères difl'é- renccs. Tout ceci, on le voit, est bien incomplet; mais la géographie botanique, celle des Cryptogames comme celle des Phanéro- games, n'est, je le répète, qu'une sorte de moyenne, dont les chiffres seront d'autant plus exacts que le nombre des obser- vations aura été plus considérable. Il en est de cela comme des données météorologiques, dont les résumés n'ont de valeur qu'autant qu'ils sont dus à de longues années d'observations consciencieuses et suivies. Aussi mon intention n'est que de montrer la voie et d'engager les chercheurs à accumuler les notes et à indiquer toujours, à côté des es[)èces trouvées, les localités exactes. Nul doute qu'en quelques années les ré- sultats ne deviennent moins vagues et que la géographie botanique ne rende à la connaissance des espèces, et par suite à la médecine, les plus signalés services. DEUXIÈME PARTIE DESCRIPTION DES ESPÈCES CLASSIFICATIONS La mycologie est une science moderne; aussi, pendant longtemps, le besoin d'une classification des Champignons ne s'est-il pas fait sentir. On réunissait sous le nom général de Fungi les quelques rares espèces connues, et ce n'est qu'à la fin du siècle dernier, avec Persoon, qu'on a commencé à distin- guer un peu les genres. Mon intention n'est pas de passer ici en revue les diverses classifications qu'ont successivement pro- posées Nées d'Esenbeek, 1817; Ad. Brongniart, 1825; Léveillé, Berkeley, Pries, etc. Mais il est nécessaire d'adopter un ordre général de description et de grouper ensemble les espèces que les caractères rapprochent évidemment. — L'arrangement proposé par le savant professeur Pries, et qu'on accepte géné- ralement aujourd'hui avec les quelques modifications que chaque auteur croit devoir lui faire subir, sera celui que je sui- vrai, pour la classification générale. Je laisse tout d'abord vo- lontairement de côté tous les Champignons qui ne rentrent pas dans la grande division des Hymênomycètes, et comme, au milieu des groupes fort nombreux que Pries indique dans cette — 39 — division, il en est beaucoup dont les espèces n'intéressent à au- cun degré le présent travail, je me bornerai à signaler en pas- sant ces genres inutiles, pour insister au contraire sur ceux que le médecin doit connaître, en raison de leur importance économique ou des accidents qu'ils peuvent occasionner. Lqs Hyménomycètes sont des Champignons dont les organes de fructification, les spores, portés sur des basides, s'insèrent sur une membrane (hyménium) libre, nue, ou du moins bientôt extérieure. Ce grand groupe est divisé en six autres, d'après la forme et la position de l'hyméuium. ' I. Lamellato Agaricini I A . Hymcnio I II. Poroso Pohjporei effigurato(l) \ III. Aculeato 1. varie pro- TT . ., I f tuberante JTydne'i Hymenoraycetes / / nr tt • / IV. Horizontali infero. . Thdephoi'ei B. Ilynieniu \ V. Verticali-umphi- l8evigato(2) \ geneo Clavariei [ VI. Supero. Gelatinosi. TremeUinei Mais les Agaricinées, les Champignons à lamelles, consti- tuent à elles seules un groupe si nombreux, qu'on doit y in- troduire forcément des subdivisions. Ici j'abandonne Pries, dont la classification, excellente au point de vue botanique, se- rait pour le médecin une surcharge inutile, et j'adopte l'ancien genre Agarlcas, en mettant entre parenthèses le nom de la subdivision deFries. Ainsil'Araanile bulbeuse s'appellera. \^a- ricus (Amanita) bulbosus ; le Champignon de couche, Agaricus (Pratellus) campestris, etc., etc. La couleur des spores sert de base à la division du genre Agaricus de Fries. Ce caractère semble au premier abord tout (1) Hyménium figuré, c'est-à-dire formant des saillies de formes di- verses. (2j Hjmcnium lisse. — 40 - artificiel; mais on remarque vite que les espèces voisines ont en général les spores de même couleur, et qu'à défaut d'une classification vraiment naturelle, il est avantageux d'adopter cette base commode de division. Il est néanmoins plus prati- que de suivre ici le travail que M. de Seynes a consacré aux Agaricinées de l'Hérault et du Gard, et de distribuer comme lui les Agarics en deux grands groupes : les Leucospores et les Chromospores, ces groupes étant à leur tour subdivisés en tribus, en suivant, bien que d'un peu loin, la classification de Fries. On trouvera dans l'ouvrage de M. de Seynes (page 61) les raisons qui l'ont engagé à ne pas suivre Fries pied à pied. Je n'ai pas à les énumérerici. Entrant donc franchement dans mon sujet, je commencerai la description des espèces princi- pales de notre pays par la section des Amanites, c'est-à-dire par celle qui mérite au plus haut degré l'attention des méde- cins. Dans cette section, en effet, à côté des ('hampignons les plus estimés, comme l'Oronge ou la Grisette, viennent se pla- cer les plus terribles poisons : la Fausse Oronge, par exemple, et surtout l'Agaric bulbeux. Pour abréger les citations^ voici la liste des principaux ou- vrages que j'ai consultés pour en citer les figures ou le texte, en tête de l'histoire de chaque espèce : Barl. -T- Barla, Champignons de la province de Nice, et principalement les es- pèces comestibles, suspectes ou vénéneuses. Nice, 1859. Bull. — Bulliard, Histoire des Champignons de la France. Edit. deVentenat. Paris, 1809. DC. — De Candolle, Flore française, 3* édition. Paris, 1815. Cord. — Cordier, les Champignons, 4® édition. Paris, 1876. Dun. — Dunal, Dessins inédits de Champignons. — Collections de la Faculté des sciences . Fr. — Fries (Elias), Hymenomycetes Europei, sive Epicriseos systematis my- cologici editio altéra. Upsal, 1874. Gill. — Gillet, les Hymenomycetes. Alençon, 1874 à 1877. Ki'ombh.-Krombholtz Sch-wsemme. . . . Paul— Paulet, Iconographie des Champignons; édit. Léveillé. Paris, 1855. — 41 — Pers. — Persoon, Traité sur les Chanipignons comestiblcB. Paris, 181S. Roq. — Ro(|Ucs, Mist. (les Clianij). comestibles et vénéneux. Paris, 1832, in-4'*. Rouni. — Roumeguère, Flore mycologii|uc du département duTarn-et-Garonnc (Agaricinées). Montauban, 1880. Seyn. — De Soyues, Essai d'une flore mycologique de la région de Montpellier et du Gard. Paris, I8G3. Sic. — Sicard, Histoire naturelle des Champignons comestibles et vénéneux. Paris, 1883. Le nom des auteurs, cité en abrégé, suffira pour indiquer l'ouvrage. Les mots Roub., Del., indiquent les Icônes inedltœ de Roubieu et de Delile que je n'ai pas eues entre les mains, mais que je cite d'après de Seynes. Les autres indications bi- bliographiques seront données en note au bas des pages. AGARICINÉES Les Agaricinées sont caractérisées par l'hyménium, qui est infère et formé de lamelles rayonnant autour du stipe. Ces lamelles peuvent être sim[)les ou rameuses, égales ou inéga- les. Les basides portent quatre stérigmates, terminés chacun par une spore. LEUCOSPORES AMANITA On donne le nom à' Amanites à des Agarics terrestres, ca- ractérisés par la présence d'une enveloppe générale [volva) se rompant de bonne heure pour laisser sortir le Clia mpignon, et par des lamelles inégales et séparées du pédicule. Le pied est souvent renflé en un bulbe auquel se soude la volve. Il y a un anneau persistant ou fugace. Les spores sont blanches et ovoïdes. Cette section n'est pas très-riche en espèces, mais les pro- - 42 — priétés des Champignons qui la composent en font une des plus importantes à connaître. Agaricus {Amanùa) csesareus. Scop. (L'Oronge vraie) Fries(l). Hym. Eur. (Ed. II), p. 17.— Barla, Ch. prov. Nice, p. 5, pi. I, fig. 1-9 (optimè). — Gordier, les Champ., p. 200 pi. I. — Dunal,'n'' 299. — De Seynes, p. 108. — Ag.aurantiacus^BwW., p. 666, pi. 120. — Roques, p. 132, pi. 22. — Roub., Icon. myc. inéd. — Amanita aurantiaca. Fers., Traité des Champ., p. 174. — Amanita cœsarea. — Gillet, Hym. fr., p. 33. — Krombholtz, tab. 8 (optimè) — Ag. speciosus Gouan, FI. Monsp., p. 461, — Fungus luteus, magnus speciosus. Magn., Bot. Monsp., p. 103. Noms vulgaires: Oronge vraie. — Jaoune d'iôu irandja, Irand- jat (Montpellier). Dorade, Jaseran, Cadran, Chojeran, Mujolo, Mufolo, Campagnol, Ounégal, Doumergal; Roumanel ; Oriol, Vouers(Agen);Iranget, Rouget (St-Pons); Boutchols (Sorèze) ; Ourangeada (la Caune); Doumeal (Mazamet). Description. — (7/m/;eaw jaune orangé, trés-brillant ; d'abord hémi- sphérique, puis, plan, charnu, sec, strié sur les bords. Chair ferme, épaisse, blanche, 'jaune sous l'épiderme, que l'on soulève facilement Feuillets jaune clair, libres, larges, frangés au bord. Pied d'abord plein, puis spongieux au centre, concolore aux lamelles, légèrement (1) J'ai cru devoir restreindre la synonymie de chaque espèce : 1° au- tant que possible aux auteurs ayant publié des ouvrages spéciaux à la région ; 2° aux figures et aux ouvrages que j'ai pu consulter moi- même. Je citerai entre parenthèses le nom des auteurs chaque fois que je n'aurai pas eu les ouvrages entre les mains. Les Icônes mycolog. inédites de Roubieu et de Delile ne se trouvant malheureusement pas à Montpellier, je citerai ces figures d'après de Seynes. J'ai conservé autant que possible l'ordre chronologique des auteurs pour un même nom. Cependant, Fries faisant autorité en la matière, je l'ai toujours cité après l'auteur prineeps. — 43 — renfle, ^wh^gu large, persistant, jaune, menibraneux. lolve complète, d'un blanc pur, donnant au tlianipif^non naitsani l'apparence d'un œuf. Ot/eur et savein- agréables. Variétés. — ie n'ai jamais trouvé que le type. Mais Gillet (1) en cite quatre variëiés, qu'il appelle : auranlia, riibra, luica et alba, d'après la couleur du chapeau. D'après Fries, le cha- peau varierait du jaune au rouge et au cuivré. Enlin Bul- liarddit qu'on trouve des individus dont le volva a une teinte vineuse, et quelques-uns dont les feuillets sont blancs (?).— Quelquefois _ des débris de volva adhèrent au chapeau, mais c'est rare, et, dans ce cas, ces débris sont larges, irreguliers, et ne ressemblent guère à ceux de la Fausse Oronge. Habitat.— L'Oronge croît en général solitaire. Elle vient dans les clairières des bois, surtout des bois de Châtaigniers. Elle aime les endroits pierreux, bien qu'on en trouve aussi dans la mousse. Essentiellement silicicole, les terrains grani- tiques et schisteux lui conviennent surtout : aussi abonde-t-eiie dans les Gévennes, dans des limites d'altitude qui varient entre 300 et 500 mètres. Elle ne remonte pas aussi haut que la Fausse Oronge, à beaucoup près. Je ne l'ai trouvée dans les environs de Montpellier que comme rareté: quelques pieds au bois de la Moure, au bois de Flaugergues, à Mézouls et à Doscare, c'est-à-dire dans toute la plaine siliceuse recouverte par le diluvium alpin. Usages. — C'était, comme on le sait, un des mets favoris des Romains, qui l'appelaient Boletus(2). On connaît la mort de l'empereur Claude, qu'Agrippine empoisonna avec des Oronges {Boleti medicati). — C'est, aujourd'hui comme autre- [\) C.-C. Gillet, les Hyménomychtes. Alennon, 1871-1877, pag. 34. (2) Horace, Sénèque, Juvénal, Pline, Martial, Suétone. — 44 — fois, un mets des plus recherchés et des plus vantés à juste titre. Sauf le D' Gurtis (1), qui le traite de détestable, tous les auteurs s'accordent à lui donner un des premiers rangs. Les mots de «fungorum princeps etdominus », de « cibus deorum », et son nom même d^Agaricus cœsareus, prouvent l'estime où ce Champignon a été tenu de tout temps. Confusions possibles. — Il n'y a guère que la Fausse Oronge que l'on puisse confondre avec l'Oronge vraie. Et même c'est un sujet d'étonnement que cette confusion soit possible. Qu'il y ait des variétés de Fausse Oronge dont la couleur se rap- proche un peu de l'orangé, et qui n'ont que peu ou pas de peluchures au chapeau, cela est vrai; mais les feuillets en sont toujours blancs, tandis qu'ils sont jaunes dans l'Oronge. Cela seul doit suffire à faire reconnaître les deux. Voici, du reste, les différences : OEONGE FAUSSE ORONGE Chapeau Orangé, sans peluchures. . Rouge, peluchures blanches . Lamelles Jaune soufre Blanches. Collier Jaune soufre Blanc. Pied Légèrement renflé Bulbeux . Volva Ample, déchiré Adhérent au chapeau, écailleux, à peine visible sur le stipe. Odeur et saveur Agréables Vireuses. Habitat Clairières au soleil Lieux humides, sous bois. La réunion des ces caractères ne permettra aucune hési- tation. Agaricus {Amam'ta) vaginatus Bull. La Grisette Agaricus vaginatus Bull., p. 664, pi. 512, 98. — Fries, p. 27, Krombh., 1. 1, fig. 1 à5.— Barla, p. 9, t. 5 (optimè).— Gord., (l)Voy. Cooke et Berkeley, /es C/famy^î^nons. Paris, Germer-Bail - lière, 1875, page 82. - 45 — p. 200, pî. V. — Seyn., p. 105. — Roiib., Icon.myc. inéd. — Dol. Icoii. myc. inédit. — Diin., n° 303. — Amanit a vaginat a (Lamk .), Gill., p. 50. Amanita liv Ida (Fers.). — A. spadicea (Pevs.), Krombh., t. X, fig. 6-10. — Affa7Ùcns piumbeus {Schsefï.). Noms vulgaires. — Grisette, Coucouraèlo grise, Coucoiimèle grisette; Coucoumèle jaune, Goucoumèle orangée, Irandja, Irandjada. Ces noms, cités par Cordier, sont ceux de Mont- pellier. — Hyrandjat (d'après Dunal) ; Boutaïré (St-Chinian); Gougoumo, Trauco-Turro (Tarn, Haute-Garonne). Description. — Chapeau peu charnu, campanule, puis étalé, de cou- leur gris plombé ou cendré (var. grise) ou jaune fauve (var. jaune), sec, luisant, à marge membraneuse rnmfaniment striée. Rarement il va des débris de volva. Lamelles blanches, libres, rarement cendrées. Pied mince, long, fistuleux, atténué au sommet, fragile, sans anneau. Fo/ya caractéristique, très-long, engainant, membraneux, étroit, blanc ou blanc jaunâtre. Ji faut arracher le Champignon avec précaution, sans quoi le volva reste en terre. C haïr hl&nche, sans odeur ni saveur spéciales. Variétés. — M. Gillet (1) en compte sept, sous les noms de alba, pallescens, cinerea, major, fuscescens, livida, fulva. M. de Seynes(2)admet l'existence d'une espèce type, « sordide albus plumbeo lividus », correspondant à VAgar. plumbeus de Sch;efF(l. 85 et 86) et à VAgar. griseus de DC., et deux ordres de variétés : 1° "Var. propinquae : k) albus; B)fuscus, hadius, etc. (Del., Icon. myc. inéd.); 2° Var. alienœ: c) fulvus {.\g. fui- vus Schaeff., fig. 95; Del., Icon. raye, inéd.; spadlceus Pers., p. 248); D)cinereus (de Seynes). Pries (3) donne deux variétés : a) fu/ra. et b) tota alba. .Te n'ai jamais trouvé cette variété toute blanche, admise par les (1)C. C. Gillet, Flyménomycêtes, page 51. (2) De Seynes, Essai d'une ff. m.yco/. Paris, Baillière, 1865, p. 105. (3) Pries, Ui/men.Europ. Upsal,1871, p. 27. — 46 — auteurs, et je pense du reste que, pour notre région du moins, les deux variétés indiquées par Cordier (1), l'une, var. fulm, correspondant à VAm. spadicea. de Persoon, et l'autre, var. pîumbea, correspondante VAman. livida, Pers., sonttrès- sufflsantes. Les variétés que j'ai recueillies sont parfaitement représentées dans l'ouvrage de Barla (2). Habitat. — Dans les bois de Chênes verts des environs de Montpellier. DeSeynes citeLassalle,leVigan,le Caroux. Dunal l'a ramassée au bois de Boussairolles. Je l'ai trouvée dans des terrains très-divers, au bois de la Moure (silice) comme à La- valette (calcaire). C'est surtout dans ce dernier bois que je l'ai cueillie; mais elle n'y est pas très-abondante, comme Ta dit de Seynes, qui l'a trouvée surtout près de Saint-Gilles, dans la région marécageuse. — Solitaire et terrestre, elle croît par- fois dans les endroits les plus arides. La variété jaune, moins fréquente à Lavalette, domine au contraire dans les terres siliceuses de la Moure et de Doscare. — Été, automne. Usages. — Clusius le considérait comme dangereux. Tons les auteurs en font aujourd'hui un Champignon comestible. Il est vraiment très-délicat, un des meilleurs de notre région, bien supérieur à l'Oronge blanche {Agar. [Amanita) ovoideus), et je partage entièrementl'opinion du D"" Badham, affirmant (3) que peu d'Agarics le surpassent en parfum; — Biilliard lui attribue un petit goût salé que je ne lui ai jamais trouvé. Confusions possibles. — La variété grise peut, à la rigueur, être confondue avec VAgaricus (Amanita) pantherinus, lorsque celui-ci a perdu les débris de volva qui adhèrent ordinaire- ment au chapeau (le fait se produit quelquefois). L'absence de (1) Cordier, les Champ., p. 206. (2) Barla, Champ, de la province de Nice, pi. 5. (3) Voy. Cooke et Berkeley, les Champignons, pag. 78, — 47 - collier, choz la Grisette, et le volva allonj?*^ caractéristique, permettront de les distinn^uer. — La variété jaune peut être confondue avec certaines formes de VAf/aticus (Amanita) bul- bosus, confusion terrible, mais heureusement assez difficile. La couleur, et surtout la présence du collier, chez la dernière es- pèce, devront préserver de tout danger. Malheureusement les paysans ont dans la. collerette une confiance qui les induit souvent en erreur. Agaricus (Amanita) ovoïdeus Bull. L'Oronge blanche Af/aricus ovo'ideus Bull., p. G68, pi. 364. — Pries, p. 18. — Seyn., p. 106. - Del., Icon. myc. inéd.— Dun., n"' 300, 301, 302.— Barl., p. 11, pi. 6, f. 1-6 (optimè). — Cord., p. 202.— Amanita alba Pers., p. 177. — Am. ovaidea Gillet, p. 37. — Fungus albus,vulgb Coucoumèle . Magn., Bot. Montp., p. 103. Noms vulgaires. — Le peuple l'appelle, dans toute cette ré- gion, « lou Boulé » ; souvent aussi on lui donne le nom de Cou- coumèle blanche. Oronge blanche, Coquemelle, Coucoumelle fine, Mujolo blanco (Toulouse). — En Toscane, on lui donne le nom caractéristique de Farinaccio. Description. — C'est un Champignon de grande taille, qui sort de terre, soit isolément, soit par groupes, entouré d'un volva blanc de neige, qui le fait prendre pour un œuf. Chapeau arrondi, convexe, rarement étalé, blanc, légèrement jaune au centre quand il est un peu vieux, à bords unis, saillants, infléchis, lisses, quelquefois un peu striés, surtout dans un état avancé de développement. Lamol/fs libres, larges, à bord finement dentelé. Chair blanche, épaisse; rpidcrme (a.- cile à détacher de la chair. Pied épais, fort, gros, plein, recouvert de petuchurcs semblables à de la neige ou à de la farine, le plus sou- vent renflé. ro//i«?7' fugace, souvent nul, emporté parle développement du chapeau, sur les bords duquel on en trouve les traces. Volva lâche, grand, mince, résistant, blanc do lait, jaun;itre à la base. Odeur et saveur à peu près nulles. — 48 — Variétés. — VAgaricus (Amanita) Cocco/a (Scop.) (Fr. Epier. 2, — Batt., tab. 4, f. D) ne serait, d'après Cordier et d'autres auteurs, qu'une variété abords striés del'A^. ovoïdeus. Il en serait de même de YAgar. (Amanita) leiocephalus, D.C., FI. fr., VI p. 53. — Del., Icon. myc. inéd. — Herb. hort. bot. Monsp. — Icon. cer. (Fac. se, n<* 22), que Pries range dans les Volvaria. Il ne diffère de l'oyoïc?ews que par l'absence complète de collier et l'aspect satiné du chapeau, qui est, lui aussi, complètement blanc. — Cordier le cite comme étant vendu au marché de Montpellier. Je ne Tai jamais trouvé ni vu chez les marchands. Il est comestible. Habitat. — D'après Cordier, Roumeguère, de Seynes, il se- rait très-abondant dans les bois de Chênes, à la fin de l'été et en automne. Je l'ai surtout récolté dans les bois de Pins. C'est un des Champignons les plus beaux de notre région. On en remarque de loin la vigueur, la forte taille et la couleur d'un blanc pur. Il est souvent solitaire, mais souvent aussi il sort par groupes plus ou moins nombreux. J'en ai trouvé jusqu'à 15 en touffe (clos Martial, 1882), figurant, à s'y méprendre, une nichée d'œufs. Cette espèce aime les endroits arides et rocailleux; mais, je le répète, elle caractérise surtout les plan tations de Pins plutôt que celles de Chênes. — Partout aux environs de Montpellier: Fontfroide, Viviers, Méric, clos Mar- tial, Laval ette (en quantité sur un point non loin du Lez\ Cau - nelles, mas d'Estor, Grammont, etc., etc. — Elle pousse aussi en assez grande abondance dans les pinèdes d'Aiguesmortes. Les exemplaires que j'y ai trouvés étaient même remarquables par leur taille élancée et par l'étalement du chapeau. Cet Agarie demande moins d'humidité que la plupart des Champignons; aussi le trouve-t-on souvent alors que bien peu d'autres ont fait leur apparition. Usages. — Il est comestible, et je l'ai vu apporter sur le mar- — 40 — ché de Montpellier par graîidps corbeilles. — Barla lui attribue un g"oût et une odeur fortes et désagréables que je n'ai jamais trouvées chez lui. Il paraît qu'à Nice on ne le récolte pas, et, ici même, bien des gens n'en connaissent pas la valeur. — Il est très-bon; mais ce n'est pas, comme le dit Cordier, «un man- ger desplus déUcats."^ En réalité, il manque un peu de parfum. Confusions possibles. — On insiste beaucoup sur le fait qu'on peut confondre cette espèce avec VAgmncus (Amanita) vernus, c'est-à-dire aveclVl^. (Aman.) bulbosus,v2iv\éié blanche. Cette confusion me paraît difficile, et je suis loin de partager l'opi- nion de Sicard, qui conseille de ne pas la cueillir de peur d'ac- cidents. Certes la confusion serait grave; mais, pour peu qu'on examine l'Oronge blanche, la taille, l'épaisseur de la chair, la fugacité ou même l'absence du collier, et surtout les flocons farineux qui entourent le pied, devront mettre à l'abri de tout danger. Le bulbosus est beaucoup plus élancé, beaucoup plus grêle, et il a souvent une odeur virulente et désagréable qui le feront repousser (1). Ici comme partout, il faut une certaine attention ; mais, pour peu qu'on regarde, la confusion paraît impossible. Agaricus (Amanita) rubescens Batsch L'Omoge vineuse Agaricus rubescens (Batsch). — Fr., p. 23. — Roq., p. 130. — Seyn., p. 111.— Dun., n° 201 (malè).— Cord., p. 204.— Sic, p. 73, t. III (pessimè). — Aynanito rubescens (Pers). — Gill., p. 45. — Krombh.. t. X. — Roum., p. 52. — Agaricus ver- omcosus Bull., p. 672, pi. 316. Noms vulgaires. — Le Rougeàtre (Paulet), Golmelle, Gol- motte vraie. Golmotte franche Lorraine), Amanite rougeàtre, (1) Ce dernier caractère est insuliisant. L'odeur est souvent nulle. - 50 — Amanite vineuse, Oronge vineuse, Missie, le Verruqueux. — Dans la région de Montpellier, il est trop rare pour avoir reçu un nom vulgaire. Description. — Chapeau charnu, sec, convexe, puis plan, de 10 à 12 centimèt. de large, d'un rouge lie de vin un peu foncé, portant des squames de même couleur, faciles à détacher. Feuillets blancs, iné- gaux; les plus courts coupés assez brusquement, serrés, larges, nom- breux, décurrents à leur insertion par une strie. Chair blanche (rouge sous l'épiderme), devenant vineuse à la coupe ou par l'âge, cassante. /*2(?c? bulbeux, turbiné, long, fistuleux, floconneux, de couleur rouge, rosée ou lie de vin, avec des écailles rougeâtres plus foncées. Anneau large, concolore au pied. Volva presque nul, représenté seulement par quelques débris. Odeur Xi\A\e. Saveur d'abord douce et fade, puis salée et amère. Variétés. — M. Gillet (1) en admet cinq, qu'il nomme ge- nuina, incarnata, alutacea, verrucosa, annulo-sulfurea. Mais ces variétés, fondées sur des nuances du chapeau, me parais- sent subtiles. — De Seynes (2) cite une variété trouvée par Delile (Icon. inéd.)au grau dePérols, et remarquable par sa taille et les grandes dimensions de l'anneau. Il y rapporte les figures 292 et 293 des dessins inédits de Champignons de Dunal, qui pourtant ne semblent pas s'en rapprocher beaucoup (3). — J'ai recueilli dans le parc de Grammont un pied de ce Champi- gnon, dont la couleur était très-claire, le fond presque blanc et les écailles rouge clair ; mais ce sont là des nuances. Habitat. — Il est très-rare aux environs de Montpellier. Je n'en ai trouvé qu'un seul pied dans le parc de Grammont, en octobre 1882. Il existe, au contraire, assez abondant dans les Cévennes. Je l'ai recueilli à Lasalle, à Lodève, et l'ai reçu (1) C.-C. Gillet, Hxjm. fr., pag. 45. (2) De Seynes, Essai d'une fl. myc, pag. ■111. (3) Ces dessins sont sous le nom à'Agaricus macrocephalus. — Bi- en abondance des environs de Mazamet. Il vient de prdlérence sous bois, mais plutôt dans les parties découvertes. Sur cer- tains points, il est très-commun. Fries l'indique: < Uhiquè in sijlvis.» C'est surtout dans l'Est qu'on le trouverait beaucoup. Usages. — C'est un des Champignons sur lesquels les opi- nions ont le plus varié. Le changement de couleur de la chair, quand on la coupe, est probablement cause de la suspicion où on le tient d'ordinaire. On ne le mange guère (à Montpellier il est trop rare) même dans les pays où il pousse en abondance (Mazamet). Il est pourtant excellent. Letellier et Spéneux l'ont expérimente. 1 gramme de son extrait aqueux, injecté dans le dos d'une grenouille, n'a rien produit. Une chatte en a mangé I.SO grammes en douze heures et n'a pas eu d'accidents (1). J'ai aussi essayé une fois ce Champignon sur un chien qui en a mangé 300 grammes sans en paraître le moins du monde incommodé. — Aujourd'hui, du reste, tout le monde est d'ac- cord pour donner toute confiance à ce Champignon, et même pour le considérer comme un manger délicat. Il est très-usité en Lorraine. Confusions possibles. — Gaterau (2) l'a confondu, dans sa description, avec VAgaricus (Amanita) muscarius, confusion bien difficile quand une fois on a vu les deux Champignons. La tendance de la chair à rougir quand on la coupe ou qu'on l'écrase, est caractéristique. On pourrait aussi le confondre avec VAgayncus panthcri- nus, et l'erreur serait plus grave encore. Mais celui-ci ne rou- git pas à la coupe. Il est brun, fauve, marron, mais jamais (1) Letellier et Spéneux, les Champ, vénén.— Unionpharm., janvier 1867, p. 22. (2) Voy, Roumo?uèro, Flore mycologique du département de Tarn-et- Garonne. Montaubau, 1880, p. 53. — 52 — rouge. Ce ne sont pas des squames, mais des débris de volva qui se trouvent sur îe chapeau. Il a le pied très-blanc, ce que n'a pas le rubescens,ei le collier est blanc comme le pied. En- fin, si on enlève l'épiderme du chapeau, on trou ve une chair blanche chez le pantherinus, rouge chez le rubescens. Agaricus (Amanita) muscarius L. (La Fausse Oronge) Agaricus muscarius L.: Scop, Schaeff. — Fries, p. 20. — Roq., p. 123, pi. 18, 19, 20, fig. 1 ( optimè ). — Barl., p. 6, pi. 2-3 (optimè).— Seyn., p. 111.— Cord., p. 201, pi. 2.— Roum., p. 50. — Amanita 7nuscaria (P ers). — Krombh., pi. 9. — GilL, p. 39. — Sic, p. 72, tab. 2 (pessimè). — Amanita formosa et Am. jjuella (Pers). — Agaricus peudo-au7'antiacusB\i\\.,T^. 673, pi. 122. Noms vulgaires. — Fausse Oronge, Faux Jaseran, Agaric aux mouches, Tue-mouches, Mujolo-folo, Agaric moucheté. — Royal rouge (Nice). — Rouge. — Do urguino (Alais). — Rouge de la Lozère (Genolhac), etc. Description . — Chapeau charnu, globuleux, puis convexe, puis plan, quelquefois même concave à la fin, rouge écarlate ou rouge orangé, quelquefois jaune par décoloration; à marge légèrement striée; garni à la surface de débris de volva épais, irréguliers, manquant quel- quefois, blancs, ou plus rarement jaunes ; sub visqueux par les temps humides. Epiderme facile à enlever. La chair, blanche à l'intérieur, est jaune sous l'épiderme. Lamelles blanches, inégales, nombreuses; les plus courtes coupées brusquement en arrière, plus larges au bord du chapeau que vers le stipe qu'elles touchent, décurrentes, par une petite dent. Pied cylindrique, à centre d'abord cotonneux, puis fistu- leux, renflé en bulbe à la base, et portant sur ce bulbe des écailles provenant du volva. Ce stipe est blanc, long de 10 à 18 centimètres, entouré d'un collier blanc, rabattu, large, flasque, persistant, placé assez haut. Volva blanc. Chair épaisse, ferme, blanche (jaune sous - 53 - répiderme). continue du pied au chapeau. Odeur nuWe, saveur un peu vireuse. Variétés. — Varietates permultœ d'ii de Seynes (1), qui en distingue cinq. Pries (2), Gillet (3), etc., subdivisent aussi cette espèce en variétés basées sur la couleur du chapeau, la pré- sence et la couleur des verrues. L'espèce type, rouge de sang, à verrues blanches, nombreuses et régulières, se trouve dans toutes les hautes Cévennes, particulièrement du côté de la Lozère. A Lodève au contraire, où la Fausse Oronge est assez abondante; je n'ai jamais trouvé que la variété rouge jaunâ- tre, presque sans verrues, répondant bien à l'une des figures de Barla (4), et une autre presque jaune, à centre un peu plus rouge, élancée et assez petite, bien représentée aussi dans la même planche. Ce sont les variétés formosa et puella de Gillet et de Fries. — Celle de Génolhac répond au sangui- nea de Gillet et au regalis de Fries. — Il faut dire pourtant que la distribution géographique de ces variétés n'est pas faite et qu'on en trouve d'ordinaire plusieurs dans les mêmes en- droits. D'ailleurs il y a des passages nombreux, tant au point de vue de la couleur du chapeau qu'à celui du nombre et de la couleur des verrues. Habitat. — La Fausse Oronge, très-abondante dans le centre et le nord de la France, où elle vient dans les plaines, ne des- (1) De Seynes, Essai d'une FI. mycol., page J il. — Aurantiacus, — sanguineus, — verrucis albis, — verrucis sulfurescentibus, farinosis — sine ver ruas . (2) Fries, Hymen. Europ.., page 20. (3) Voici les variétés de Gillet : {Hymen, franc., pag. 39, : a) Plante ordinairement plus petite, chapeau nu. Var. Puclln. — b) Chapeau rouge sanguin, verrues blanches assez régulières. Var. Samjuinea. — c) Col- lier, pied et verrues jaunes ou jaunâtres. Var. Formosa. — d) Pied plus ou moins tomenteux ou peluché au-dessous du collier. Var. Tomentusa. (4) Barla, Champ, de la prov. de Aice, pi. 3. - 54 ~ cend pas dans notre région au-dessous d'une certaine alti- tude. Son domaine est la région du Hêtre; mais elle empiète souvent sur le territoire du Châtaignier (Genolhac, Lodève, etc.), sans l'occuper complètement. Elle est inconnue dans nos environs immédiats; mais on la trouve dès qu'on s'élève, et c'est réellement un spectacle remarquable que celui de ces magnifiques Champignons dont les couleurs brillantes émail- lent le sous-bois des Hêtres. C'est en effet dans les lieux om- bragés et humides que se plait la Fausse Oronge : de Seynes l'a trouvée encore à une altitude de 1,260 m. Elle vient en quan- tité dans la forêt de Hêtres qui couvre le Terme Noir (montagne Noire), à une hauteur de plus de 1,000 m. Dans les environs de Lodève, elle se trouve surtout, eu même temps que VAga- ricus (Amanita) bulbosus, dans un espace situé entreGramont, Soumont et Fozières, sur le granité et les grès bigarrés. Elle vient sur le sol, isolée. Usages et propriétés — UAgaricus muscarius doit son nom à l'action mortelle qu'il exerce sur les mouches. Il les attire et les tue : cette propriété est utilisée en Russie, mais je ne sache pas qu'on la mette à profit dans nos Cévennes. Le fait est certain, et je l'ai constaté moi-même en faisant sécher au soleil des fragments àWg. muscarius. Les mouches qui s'y posaient n'avaient souvent pas le temps de s'envoler et mou- raient sur le Champignon même. Mais ce n'est pas seule- ment comme poison des mouches que la Fausse Oronge est employée. Dans bien des pays, elle sert d'aliment : en Russie d'abord, et même en France. Les habitants de Genolhac et de Concoules, les forestiers de la Lozère, en utilisent des quan- tités (1). On fait bouillir le Champignon pendant un quart d'heure; on jette l'eau et on laisse macérer pendant plusieurs (1) Le fait, signalé par de Seynes, m'a été confirmé par un garde forestier, M. Constant Lambert, de Genolhac. jours dans de l'eau qu'on chanj^e quotidiennfraeiil. — 250 grammes de Fausse Oronge soumis à ce traitement ont été mangés par un chien, chez lequel je n'ai constaté aucun symptôme d'indis position. Il est vrai de dire que ce ne doit pas être un manger délicat. UAga7'icus muscariiis est un poison, et à ce titre il intéresse particulièrement le médecin. On trouvera, à la fin de ce tra- vail, des expériences et dos observations, qui ne peuvent avoir leur place ici. On verra que ces propriétés toxiques, très-réelles sans contredit, ont cependant été un peu exagérées. Balliard déjà avait pu manger deux onces de ce Champignon cru sans en être incommodé, et il en faudrait, je crois, [)Our ame- ner la mort, une dose très-considérable. L'action du poison se portes pécialement sur le système nerveux central, comme on le verra au chapitre des Empoisonnements. La Fausse Oronge, en raison de cette action sur le système nerveux, qui se traduit quelquefois par une sorte d'ébriété, est utilisée par les Kamtschadales; ils en font une boisson fer- inentée avec laquelle ils se grisent. Pendant cette ivresse fu- rieuse, qui dure vingt-quatre heures, leur force musculaire est, paraît-il, augmentée (1). Puis ils tombent comme les fumeurs d'opium et finissent comme eux, c'est-à-dire par la folie. — Ces propriétés de VxVgaricus muscarius se transmettent à la chair des rennes qui en ont mangé, et aussi à l'urine des ivrognes de Fausse Oronge. Aussi cette liqueur est-elle fort recherchée dans le pays et peut servir même plusieurs fois. Ces faits ont été rapportés par Krascheninnikow (2) et confirmés par Mur- ray, Langsdorlf, etc. — La liqueur enivrante est faite, soit avec (1) Le fait me paraît singulier, car j'ai toujours observé chez les animaux la diminution des forces et la résolution musculaire, quand on les empoisonne avec cet Agaric. Voir plus loin les expériences. (2) Krascheninnikow, flist. nat. du Kamlschatka, p. 209. — 56 — l'Agar. muscarius seul, soit en mêlant à'celui-ci des feuilles d'un Epilobium^ ou encore du suc de Vaccinium uliginosum. Les Tongouses, les Koriaques, etc., mangent la Fausse Oronge crue, ou la font infuser dans le koumys(Langsdorfif). Confusions possibles. — Avec l'Oronge. La couleur blanche des lamelles de VAgar. muscarius est le meilleur signe diffé- rentiel. (Voir l'Oronge pour les autres différences.) — Avec VAgar. pantherinus: la var, umbrina de Fries y ressemble en effet un peu; mais la confusion (qu'on évitera du reste en regardant avec soin) ne saurait avoir grande importance, le patitherinus étant plus toxique encore que la Fausse Oronge. — Avec VAgar. rubescens, la couleur du chapeau, celle de la chair sous l'épiderme (elle est jaune dans la Fausse Oronge, lie de vin dansl'Ap', rubescens), et surtout la couleur rougeâtre que prend la chair de l'Amanite vineuse, quand on la coupe, suffiront à la distinction. Agaricus {Amanita) pantherinus DC. (L'Agaric panthère) Agaricus pantherinus D. C.,F1. fr.,t. VI, p. 52. — Fr., p. 21. — Barla, p. 12, pi. 7, f. 1-3.— Seyn., p. 110.— Cord.,p.203, pi. 3, f. 2(malè). — Roum.,p.51. — AmanitapanfherinaKromhh, t. 29, f. 10-13. — Gill., p. 41. — Aman, cinerea Krombh., t. 29, flg. 1-5. — Agaricus fuliginosus Roq., p. 129, pi. 20, fig. 2. — Agaricus herpeticus Roq., ibid., flg. 3. — Agaricus cinereus Roq., p. 131, pi. 21, fig. 2-3. Noms vulgaires. — Agaric panthère, Grapaudin gris, Gra- paoudin gris (St-Pons), Fausse Golmelle, Faux Missie (Lor- raine), Agaric dartreux. Fausse Golmotte, Lera negra (Nice). Description. — Chapeau charnu, d'abord convexe, puis plan et même ombiliqué à la fin ; de couleur bistre, gris fauve ou brun (nuances un peu variables); couvert de petites verrues blanches qui ne sont autre Ol chose que des débris de volva. Epiderme facile à détacher et laissant voir au-dessous une chair blanche, un peu visqueuse par les temps liuiuides ; strié sur les bords. Feuillets tros-blancs comme la chair, larges, minces, inégaux, assez distants, libres ou subadhérents, les plus courts coupés brusijuement en arrière. A'erf cylindrique, renllé en bulbe à la base, jilein, puis fistuleux à la fin, par résorption de la moelle blanche, qui le remplit d'abord. Collier blanc, descendant sou- vent très-bas, disparaissant quelquefois (mais rarement}, rabattu. ] olua adhérent au bulbe, libre seulement à la partie supérieure et peu mar- qué, la majeure partie étant restée sur le chapeau. Odeui- nulle ; saveur peu marquée, légèrement vireuse. Vmnétés. — Les auteurs n'en indiquent pas. De simples nuances dans la couleur du chapeau ont conduit Roques à donner comme non décrites trois formes qui répondent toutes trois à ce Cliampignon : ce sont ses Agancus fuliginosus, her- peticîis (1) et cinei^eus (2), — Cet Agaric est en général facile à reconnaître ; mais il faut se souvenir que les verrues blanches manquent quelquefois, surtout quand le Champignon est déjà âgé et qu'il a été lavé par de grandes pluies. Habitat.— De Seynes (3) remarque qu'il augmente de fré- quence à mesure qu'on s'élève dans les Cévennes. Il est, en effet, très-abondant à Lasalle, à Mazamet et dans toute la haute région cébennique. Mais on le trouve aussi aux envi- rons de Montpellier, et, comme il est très-dangereux, on ne saurait trop se méfier de lui. Je l'ai trouvé surtout dans les bois de Chênes verts de Doscare, de Mézouls, de Flaugergues, dans les bois du St-Esprit (près Mézouls), de St-Antoine(près St-Aunès), etc. Delile l'indique à Grammont, ainsi que de Can- dolle {FI. fr., t. VI, p. 52.) Il recherche de préférence les bois un peu humides etmon- (1) Roques, Hist. des Champ, p. 129. Planche 20 fig. 2-3 (in 4"). (2) — — p. 131.— 21 fig. 2-3 (in 4"). (3) De Sejnes, Essai d'une FI. i/iyc, p. 110. - 58 — tueux. — Les châtaigneraies des Gévennes, surtout quand il y a au-dessous de l'herbe humide, sont les terrains qu'il pré- fère.— A Goncoules, il abonde dans les prairies plantées çà et là de Châtaigniers. — Été et automne. Propriétés. — C'est un des plus dangereux de notre région. Il faut le placer, dans la liste des Champignons toxiques, après VAg. bulbosusei avant VAg. muscarius, dont les eifets sont bien moindres. Letellier et Spéneux le donnent comme toxique, et Cordier l'a essayé sur des chiens qui en sont morts. Des expé- riences (voir plus loin) m'ont permis de vérifier ces proprié- tés délétères: il faut donc éviter toute confusion avec lui. J'ai vu pourtant au bois de Flaugergues un chercheur de Cham- pignons qui le prétendait comestible. C'est là une très-grave erreur, comme les expériences le démontreront plus loin. Confusions possibles. — Les pieds qui n'ont pas de verrues sur le chapeau peuvent, à cause des stries plus ou moins mar- quées du bord, être confondus avec des variétés foncées de VAgaricus vaginatus. Celui-ci n'est pas gluant par les temps humides ; l'odeur est en franche et bonne. // a un volva dé- veloppé, et n'a pas de collier; ces caractères doivent suffire. On pourrait encore le prendre pour le rubescens (voir Aga- ricus rubesce?is, p. 49) ou pour le Champignon découche, dont il diffère parla couleur blanche des lamelles, la couleur et les verrues du chapeau, et dont il n'a ni le parfum, ni l'odeur dé- licate.— VAgaricus rubescens en diffère par les mêmes carac- tères, auxquels il faut ajouter la couleur du collier, du pied, et celle que prend la chair quand on la coupe. Agaricus [Amanita) bulbosus Sch^ff. L'OroDge-Ciguë Agaricus bulbosus [Sch^ïï.), Bull., p. 670, pi. 2, 108 et 577.-=- Roq., p. 137, pi. 23, f. 1,2. — Seyn., p. 108. — Roub., Icon. — 59 — ined. — Agariciis phallo'ides Vv. ■ — Fr., Hym., p. 18. — Barl., p. 8, pi. 4 ^optimè). — Del., Icon. niyc. incd, — Diin., n" 301 (mîilè). — Corel., p. 203, pi. IV. — Roiim., p. 47. — Amanita bidbosn (Pers.). — Am. virescens Krombh., tab. 28, f. 1-3. — Arn. viridis, Am. citt^ina, Am. bidbosa nihn Pers. — Krombh., tab. 28, f. 4-10, — Am. citrina Laink. — Agiir. verniis Fr. (sub A. phiiUo'ide). — Agn7\ citrinus SchsofF. — Roq., p. 137, pi. 23, fig. 3-4. — .1. venenahis Roq., [>. 138, pi. 25, fig-. 5. — Fîingus aibiis venenatus Magnol, Botan. Monspel., 1086, p. 104. Noms vulgaires. — Oronge-Ciguë, Amanite bulbeuse, Agaric bulbeux, Agaric citrin. — Grapaoudin jaouné (Saint-Pons). — Descourtilz (l) donne le nom d'Agar. bulbeux à FOrongeblan che, et place naturellement ce Champignon dans le groupe descomestibles.il est bonde signaler cette confusion. Description. — Le chapeau est diversement coloré, ce qui a permis d'établir plusieurs variétés de cette espèce. Il est charnu, convexe, puis plan, glabre, non strié sur les bords, visqueux par les temps hu- mides, mais ordinairement sec, un peu luisant. Quelquefois il porte des restes de volva, mais ce n'est pas le cas ordinaire. Diamètre : 6 à 10 centimètres. Feuillets blancs, arrondis, ventrus, inégaux, libres, nombreux, les plus courts coupés brusquement. Pied plein, puis fis- tuleux au sommet, renflé en bulbe à la base, blanc, floconneux, élancé, garni d'un collier etd'un volva. 6'o///e/- persistant, membraneux, abords déchiquetés ; blanc, assez large, rabattu. Volva libre en haut, dépassant le bulbe, large, blanc, mou, lâche. Odeur nulle. Saveur un peu acre à l'arrière-goùt. L'enseml)ledu Champignon est séduisant et tente beau- coup les chercheurs novices. La forme en est gracieuse et élancée. Variétés. — Elles sont nombreuses et bas^^es sur la couleur du chapeau, qui est en effet assez variable. Il faut en admettre (1) Descoutilz, Champ, comest., suspects et vénéneux. Paris, 1827, pag. 9. — 60 — au moins quatre. L'une, très-importante à connaître, a le chapeau blanc, incolore. C'est la var. Alba de Fries (1). [Agar. bulbosus vernus Bail., t. 108, p. 670. — Amanita verna Pers., Champ. comest.,pl.II,fig. 2. — Agarici^venencitus'Roq.,^\.23, flg. 5; etc.). — La deuxième a le chapeau jaune citron. C'est la var . citrina, de Fries (Bull., pi. 2 et pi . 577, flg . G, H. — Amanita, citrina, (Pers). — Roques, pi. 23, flg. 3 et 4. etc. — Une troisième est vert olive, var. ^)^rescer^s Fries (Krombh., t. 69, fig, 10-17). — Enfin la quatrième est verte, var. viridis Fries [Aman, viridis Pers. — Roques, tab. 23, flg. 1 et 2. — Barla, pi. 4, flg. 5 à 8. (optimè). — Fries en a trouvé une cinquième variété qui a le chapeau blanc, avec un disque noir au centre. C'est la variété dont parle Roumeguère (2), sous le nom de bicolor. Le Champignon Croix-de-Malte de Paulet (3) ne serait, d'a- près Letellier et Spéneux (4), qu'une monstruosité de l'Agaric bulbeux. Habitat. — L'Oronge-Ciguë est assez rare dans la région de Montpellier; on l'y trouve pourtant ; et, comme il suffît d'un pied pour causer la mort de plusieurs personnes, il est essen- tiel de savoir bien la distinguer des autres Champignons. — Je Pai recueillie assez abondamment dans le parc de Grara- mont, sous les arbres ; une fois, dans les chênes de Doscare. Dunal l'a trouvée à Fontfroide; Delile, au bois de la Moure; De Seynes, au bois de Malerargues et à Calviac (5). Elle est abondante à Lodève, où elle a causé des accidents graves (6) : (1) Fries, Hym. Fur., pag. 18. Agcu\ phalloïdes. (2) Roum., FI. mycol. du départ, de Tarn-et- Garonne, 1880, p, 48. (3) Paulet, Traité des Champ., tabl. 152, fig. 1. (4) Letell. et Spén., Union pharmac, janvier 1867, p. 19. (5) De Seynes, Essai d'une fl. mycol., pag. 109. (6) Voir plus loin : Observations. - 61 — on la trouve dans cette localité aux mêmes endroits que la Fausse Oronge, c'est-à-dire entre Fozières, Soumont et Gra- mont. Toutes celles que j'ai recueillies appartiennent à la va- riété citrina. G'est sur elle aussi qu'on porté les expérien- ces de Boudier. L'Oronge-Gigiië recherche en général les bois sombres et touffus ; elle aime l'humidité, les terrains fertiles, riches en humus, et se montre soit au printemps (var. rerna), soit à la fin de l'été et en automne. Elle est solitaire et terrestre. — Cette espèce est mangée par les petites limaces. De Seynes fait la remarque qu'on n'y trouve jamais de vers, et, en effet, je ne l'ai jamais vue attaquée par eux. Propriétés. — C'est, au dire unanime de tous ceux qui l'ont étudié au point de vue des propriétés, le Champignon le plus redoutable de tous. Toutes les variétés sont toxiques au plus haut degré, et le danger est d'autant plus grand que le poison peut n'agir que longtemps après l'ingestion, lorsque Pabsorp- tion est faite et que les vomissements ne peuvent plus débar- rasser l'organisme de la substance délétère. — Qu'on se reporte aux auteurs qui en ont fait une étude spéciale (Bou- dier (1) par exemple, Letellier et Spéneux(2), etc.) et aux ex- périences et observations qui terminent ce travail, et l'on verra que, le plus souvent, quand les accidents sont très-graves et se terminent par la mort, c'est l'Agaric bulbeux qu'il faut en accuser. Confusions possibles. — Tout d'abord, on ramasse souvent le 6w//^os^288 (malè).— Cordier, p. 213, pi. VIL— Roum., p. 54.— Sic, p. 76, pi. VIL — Agaricus colubrinus. Bull., p. 484, pi. 78 et 583. — Lepiota 'procera GilL, p. 56. Noms vulgaires. — Agaric élevé, Saint-Michel, Petit Saint- Michel (en patois, San-Miquel, San-Miquelet) (Saint-Pons). Brugassou (le Fraysse). Brugaizello, Couleuvrée, Couleu- vrelle, Coulemelle, Columelle , Cormelle, Cleuvrée, Coul- motte, Goilmelle, Penchinade, Capelan, Capellou, Clorosse, Houpale, Saint -Martino, Cocherelle, Escumelle (Lozère). Parasol, Boutarot, Poturon, Coulsé, Vertet, Bruguet, Colom- bette, Grisotte, Grisette, Brugairol (Agen), Cournet (Agen), Quioul-d'Ase (Toulouse), Coche, Nez-de-Chat, Champignon franc. Potiron à bague. Chic à la bague (Loire), Cul-d'Ours, Commère, Cloroson. — Padre, Madalena, Ombrelle (Nice), Co- gomelos (Pyr.-Or.). — 65 — Le nombre même de ces noms vulgaires indique assez que ce Champignon est connu et estimé à peu près partout. Description. — VAgar. procerua est un très-beau Cliarapignon, attei- gnant une taille moyenne de 20 centimètres, mais dépassant souvent cette hauteur (1). Chapeau d'abord ovoïde, en forme de massue, rappe- lant un peu VAgar. [coprinus) li/phoïdes jeune, puis campanule, enfin plan, mais le centre toujours saillant; charnu, à fond blanchâtre, re- couvert d'écaillés largos, imbriquées, formées par l'épiderme qui, se soulève régulièrement, presque circulairement. Ces écailles varient du noir au bistre clair : elles sont peu nombreuses sur les bords, plus serrées à mesure qu'on approche du centre, qui n'est ordinairement pas écailleux. Le diamètre du chapeau est de 10 à 20 centimètres. Il en atteint souvent 30. Les bords sont légèrement filamenteux. Feuillets ordinairement blancs, mais de couleur variable (voir Variétés], nom- breux, inégaux, finissant en pointe à une certaine distance du stipe, sur un bourrelet formé par la chair du chapeau. Chair blanche, ne changeant pas de couleur, à odeur trcs-agréable, rappelant la farine fraîche; peu épaisse, formant un bourrelet circulaire autour du stipe. /'/erf très-haut, renflé en un gros bulbe à la base, cylindrique, fistu- leux, contenant à l'intérieur un tissu soyeux blanc ; s'enfonçant pro- fondément dans le chapeau, marqué d'écaillés concolores à celles du chapeau et disposées sous forme de zones (2). Collier remarquable, persistant, mobile autour du stipe; évasé, jamais rabattu, à bord irré- gulier. Orfcwr agréable; goût nul; texture un peu filamenteuse (surtout celle du pied). Il se dessèche sans se putréfier. Va}iétés. — De Seynes fait remarquer que ceux de la région de Montpellier sont plus pâles que ceux des Cévennes. — C'est surtout la couleur des lamelles qui est variable et qui a per- mis d'en distinguer plusieurs variétos. Rouraeguère eu donne (1) M. Roumeguère en a trouvé qui avaient 45 cent, de haut. Bul- liard en a vu de 30 pouces. (Voir Bull., pi. 78, pag. 485.) (2) Delile observe que les peluchures zonées du pied sont, non pas de vraies écailles, mais de petits tubercules, sommets de fibres réunies, rompues et détachées par la croissance du pédicule. (De Seynes, Essai d'une fl. mycoL, p. 114.) - 66 — quatre (1). Enfin Gillet parle d'une variété plus petite, à pied moins écailleux, qui paraît n'être qu'une nuance. UAga7\prO' cerus sera toujours facilement reconnu. Habitat. — Il n'est pas très-fréquent dans la région de Mont- pellier. Cependant je l'ai rapporté plusieurs fois de Doscare, où de Seynes le signale aussi. — Delile l'a récolté à Lavérune. — Dans les Cévennes, il est quelquefois très-abondant ; dans les friches de bois de St-Sauveur (Gard) et sur bien d'autres points, on peut le ramasser par paniers ; on l'y mange beau- coup. Il affectionne les endroits découverts des bois, les lisières, les bords de chemins, les pelouses, et paraît préférer les ter- rains sablonneux ou en tout cas siliceux. Il vient en quantité sur le plateau du Sommail, près St-Pons, au pied des genêts et fougères, et surtout dans les sillons des champs de seigle après la récolte (M. Barthès). Usages. — C'est un Champignon très-estimé et utilisé par- tout; il a peu de chair, mais il est savoureux et l'odeur en est fine et douce. Le pédicule est trop fibreux pour être mangé. Le Champignon dans son ensemble est peut-être un peu co- riace. D'après Barla, on l'estimerait peu àNice. — On le mange dans tous les pays. Confusions possibles. — VAgaricus (Lepiota) rachodes es celui qui s'en rapproche le plus sous tous les rapports; peut- être n'est-ce même qu'une variété. En tout cas l'erreur n'aura pas d'importauce, puisqu'ils sont tous deux comestibles et qu'on les vend quelquefois ensemble indifféremment. — La confusion avec VAgar. (Coprinus) typhoïdes n'est possible que (1) a) alhida (feuillets blancs) ; b) /7ay2c?a (feuillets jaunâtres); c) in- carnata (feuillets rosés); dj nigrescens (feuillets noirâtres). (Voj. Roum., FI. mycol. du département du Tarn-et-Gar., p. 55.) — 07 - lorsque les Champifjnons sont très-jeunes, car le Coprin ne tarde pas à tomber en deliquium. A l'â^e où la confusion est possible (la couleur beaucoup plus claire du Coprin, l'absence de renflement de la tige et de peluchures noires sur le pied, pourraient l'empecher facilement), elle serait aussi sans im- portance, car les Coprins jeunes sont comestibles. — l/Agar. cli/peolariics, dont parle Persoon (4) (Bull., pi. 40.") — \aCoule- melle d'eau àe Paulet, 1. 136) est plus petit, n'a pas le pédicule tubéreux ni l'anneau mobile et persistant. Il est mou et fugace et a une odeur désagréable. — Pourra-t-on confondre ce Cham- pignon avec VAgaricîis (Amaiiita) vaginatus (2)? Ce n'est guère probable, et je renvoie si l'on éprouve le moindre doute aux descriptions des deux espèces. D'autres Lepiota seraient intéressants à étudier; mais le cadre de cet ouvrage ne me permet pas de décrire toutes les espèces, et je laisse volontairement de côté celles sur les- quelles je n'ai pas d'expériences positives à citer. M. de Seynes parle de quelques espèces qu'il a trouvées, soit à Montpellier, soit dans lesCévennes: VAgar. clypeolarius (Bull.), qu'il réu- nit comme espèce à VAgar. cristatus (Pries); VAgar. excoriatns (Schseff.), qu'il n'a trouvé qu'une fois; VAgar. ermineus, dont il décrit deux variétés et que j'ai aussi trouvé plusieurs fois à Grammont et à Doscare. (Voy. pour les fig., Krombh., tabl. 24 et 25.)Voici, d'après Letellier (3), les Champignons véné- neux de ce groupe: A. clypeolarius (4) suspect; pas d'expériences. Il ressemble au procerus, mais est plus petit. A. Vittadini (mauvaise répu- (1) Persoon. Traité des Champ., p. 188. (2) Voy. Descourtil, des Champ., p. 16. (3) Letellier, Un. pharm., juillet 1867, p. 201. (4) Les opinions sont très-diverses sur cet Agaric. Les uns le don- nent comme très-bon, les autres comme très-vcnéneux. Je n'ai pu faire d'expériences, faute d'un nombre suffisant de cei Champignons. — 68 — iaiion). A. echinocephalus (c'est une Amanite et non un Le- piota ; il serait dangereux et trompeur à cause de son odeur agréable). A. Pauleti, suspect pour Paulet. Les Agat\ €xcoriatus,cristatus, ermineus, sont comestibles. ARMILLARIA. Champignons charnus, à spores blanches, à lamelles ad- nées au stipe, à chapeau continu avec le pied, à anneau adhé- rent, persistant, rigide. Agaricus {Armillana) melleus Vahl. Agaricus melleus (Vahl.). — - Fries, p. 44. — Krombh., pi. 1, fig. 13, et pi. 43, f. 2-6.— Seyn., p. 115. — Cordier, p. 215, pi. VIII. — Roum.,p. 61. — Sic, p. 78, pi. IX, f. 28. — A^a- ricus annularius Bull., p. 626, pi. 377, 543, et 540, fig. 3. — DG. Fl. fr., t. II, p. 203.— Roub.— Dun., n" 277 (optimè).— Roques, p. 122. — Ag. ohscurus (Schseff.). — Ag. stipitis (Sow.). — Ag. polymy ces {Fers.). — Armillaria mellea Gill., p. 83. Noms vulgaires. — Pivoulado, Piboulada (Montpellier, Ni- mes, Saint-Pons, etc.). Ce nom est commun à plusieurs au- tres, comme on le verra plus loin. — Soucarel (Alais, basses Cévennes,Tarn). — Sauzenado, Cassenado, Perpignan (Lozère). — Bolet d'amourié (Provence). — Boulet d'oulivié (Nice). Description. — Chapeau d'abord sphérique, se développant ensuite et devenant même ombiliqué à la maturité complète (mais alors il est fendillé ou même fendu dans le sens des lamelles), d'une couleur de miel ou brun-jaune plus ou moins foncé, couvert de petites peluchures, surtout au centre (ces peluchures manquent quelquefois). Diamètre : 5 à 15 centimètres. Chair blanche, quelquefois légèrement rosée, un peu spongieuse. Lamelles inégales, nombreuses, adnées au pédicule, légèrement décurrentes, blanches, devenant quelquefois jaunâtres ou rosées en vieillissant, et présentant alors çà et là des taches rousses. Pied long proportionnellement au chapeau, cylindrique ou atténué à — ftO — la base, plein, puis fistuleux, fuuvo ou jannMre. Collier fixe, haut placé, membraneux, ascendant, ne retonil»aiit que très-tard, rigide. Odeur nulle. Saveur d'abord fade, puis Iiorriblement acre et prenant à la gorge. Variétés. — La couleur du chapeau varie du brun presque noir au jaune de miel et presque au café au lait. De Seynes (1) et Gillet (2^ admettent chacun trois variétés qui se correspon- dent: Tune (var. obscura Gill.) est VAgar. obscurusàe Schœff. ; elle a le chapeau couvert d'écaillés nombreuses et noires. — La seconde var. /lava Gill.) est caractérisée par un chapeau jaune ou jaunâtre carné, toujours muni d'écaillés. — Enfin la troisième (var. glabra. Gill.) aie chapeau glabre. Ce ne sont que des nuances, comme aussi la var. striata de Roum. (3), caractérisée par des stries au bord du chapeau. — De Seynes observe que les Agar. melleus que Ton trouve dans les Cé- vennes sont plus foncés de couleur que ceux de la région de Montpellier ; à mesure qu'on descend, la couleur s'éclaircit et les écailles diminuent. J'ai trouvé, pour ma part, toutes les nuances, même les plus foncées et les plus écaiJleuses, dans nos environs. VAga7\ griseo-fusci{s{'DC.,'F\. fr., t. VI, p. 52. Dun., n" 279) devrait, d'après de Seynes, être réuni comme espèce au mel- leus. Je le pense aussi, d'après la figure de Dunal, car je n'ai jamais trouvé ce Champignon bien caratérisé. Habitat. — VAgaricus melleus vient quelquefois solitaire; mais il apparaît d'ordinaire en groupes énormes sur les vieux troncs d'arbres au ras du sol, ou plutôtsur les vieilles souches. Le mycélium de ce Champignon est un des plus terribles en- (1) De Seynes, Ess. d'une flor.myc, pag. 116. (2) Gillet, Hym. fr., p. 84. (3) Roumeguère, FI. myc. Tarn-et-Gar., p. 61. - 70 — nemis de nos arbres. Les Châtaigniers, dans les Cévennes (à "Vialas, àLasalle, etc., etc.), les Marronniers du Jardin des plantes même, et une foule d'autres arbres, sont victimes de ce mycélium. Les touffes à^Agar. melleus ne se montrent guère que lorsque les arbres sont morts ou très-malades et lorsque la pluie en favorise le développement. Quelquefois le Champignon reste indéfiniment à l'état de mycélium, et c'est ce qui a fait longtemps méconnaître l'origine du mal, aujour- d'hui très-bien reconnue (1) et prouvée journellement par mille faits. C'est ordinairement par touffes nombreuses que sort le melleus. Je l'ai vu à la Valette, le long du sentier qui conduit de la ferme au bord du Lez, vers Substancion, cou- vrir des espaces considérables. Au Jardin desplantes de Mont- pellier, en octobre 1883, il s'en est montré une touffe d'au moins 150 à 200 pieds, les uns sur les autres, recouvrant plus d'un mètre carré de surface. — Il vient partout, au pied de tous les arbres. De Seynes l'indique sur le Chêne, le Hêtre, le Mû- rier, le Peuplier, le Prunier, la Vigne, le Laurier, le Cyprès, le Pin. — Il faut y ajouter le Micocoulier, la Glycine, le Châtai- gnier, le Marronnier, le Sureau, etc., etc. Il est partout dans le département, et même en France. Usages. — Peu de Champignons ont été aussi diversement jugés. Les uns le déclarent très-vé?iénenx (Roques, Persoon, Descourtilz, etc.), et Paulet le donne comme ayant tué des chiens sur lesquels on l'expérimentait. Les autres le disent très-bon, enquoi ils se trompent aussi. Ce Champignon est co- mestible; on le mange partout, dans le Midi, dans les Cévennes, et, quoi qu'en dise de Seynes, à Montpellier même. Il a, lors- qu'on le mâche cru, un arrière-goût extrêmement désagréa- ble, qui saisit à la gorge atrocement, mais que la coction fait (i) J.-E. Planchon, la Maladie du châtaignier dans les Cévennes. — Bull. soc. bot. Fr., 13 janvier 1882. — 71 — complètement disparaître. Néanmoins le Champig'non reste coriace et peu parfumé. Il faut, pour pouvoir le manger, re- jeter le pédicule, et, après avoir fait bouillir les cliapeau.x, jeter l'eau, presser légèrement entre deux linges et apprêter. — C'est le Champignon qu'on vend le plus sur le marché de Vienne, où on VsLppeUe Ilalllmasche. Il jouit, en Angleterre, d'une très-mauvaise réputation. Le docteur Badhara l'appelle nauséabond et désagréable (1). Il rend, par son abondance, de grands services à la classe pauvre. Confusio7is possibles. — D'après de Seynes, il a le port de VAgar. miUabilis (Schseff.), qui s'en distingue par des spores ferrugineuses. Agaricus {Armillaria) caligatus Vit. La Caussetta Agaricus neomartes Del., Icon. myc. inéd. — Agar. caligatus. Vivian. I fungh. d'Ital., 1834, p. 35. — Agor. caussetta, var. guttatus Barla Ch. Nice, pi. 10,1 à 7, pag. 17. — Voyez aussi Vélins, Fac. se, t. III, p. 228. — Herb. hort. bot. Montp. — Agar. Schœ/feri D\in., n°298(?) Noms vulgaires. — Caussetta, Bolet de pin de la Caussetta, Roussoun, Caussetta bigarrada. (Nie. — Barla). Description. — Chapeau hémisphérique, puis plan, à bords roulés en dessous et velus, couleur brique ou marron, ou roug-c brun, un peu variable. Za/nc'//es inégales, arquées, écliancréesprèsdu pédicule; blan- ches, puis jaunâtres ou carnées. Pied ferme, solide, épais, charnu, plein, fibreux, atténué à la base, rougeâtre comme le chapeau, avec des écailles brunes qui se soulèvent; entouré d'un anneau. Anneau persistant jusqu'à un âge avancé, mou, cotonneux, blanc en dedans, (1) Voy. Cookc et Berkeley, les Champignons. Paris, 1875; Germ. Baillière, pag. 78. — 72 — rougeâtre en dehoi's. Entre l'anneau et le chapeau, le pied est blanc. Chair blanche, tournant vite au rose, au jaune ou à la couleur chair. Odeur de raifort. Saveur assez piquante, plutôt qu'amère, comme on l'avait dit. Variétés. — Ce Champignon a reçu trois noms sans que les auteurs connussent les travaux les uns les autres. L'œuvre de Delile était inédite, et Barla n'a appris le nom que Viviani avait donné à cette espèce qu'au moment où sa planche était déjà tirée. — On est tenté de rapprocher de VAgar. caliga- tus, VAgar. SchseffeiH, représenté dans les dessins inédits de Champignons de Dunal, n° 298, mais il y a quelques diffé- rences. — Barla décrit deux espèces qui n'en sont qu'une, sous les noms de Ag. caussetta et de Ag. caligatus. Habitat. — Il vient solitaire ou pér petits groupes sous les Pins. Je l'ai recueilli à Fontfroide, où mon père l'avait pré- cédemment trouvé, et sous les grands Pins de Jacou, où De- lile l'avait signalé sous le nom de neomartes. Les exemplai- res trouvés répondent très-bien à la description de Delile (1) et à la figure de Barla (2). Usages. — Malgré l'opinion de Viviani, qui s'en défiait à cause de l'odeur et de la saveur très-fortes qu'il lui trouvait, Barla assure qu'on le mange partout dans la province de Nice, et qu'il y est très-apprécié. Je n'ai pas fait d'expérien- ces sur ce Champignon. Les autres Armillaria de notre région n'ont qu'une impor- tance toute botanique. TRICHOLOMA Champignons à spores blanches, charnus, souvent cartila- (1) Voy. de Seynes, Essai d'une fl. myc, pag. 119. (2) Voy. Barla, Champignons prov. de Nice, pi. 10. ginenx. Voile apparent, consistant en flocons ou fibrilles non séparés de l'épiderme du chapeau. — Hyniéniuni conti;jrn au stipe et même subdecnrrent. — Lamelles sinueuses en arrière. — Tous terrestres, Agaricus {Tn'r/iolomn) Hussula, Sch.uff. L'Agaric Russule. Afjaricus Rnssiila Schseir. ; — Fr,. p. 52. — Roq., f). 111. — Krombh., tah. 03, fig. 1-9 (optimè).— Barla, p. 22, p!. 13. fig. 11 et 12. — Seyn., p. 421, — Cord., p. 227. — Af/. hœma- todes. Del. icon. ined. — Tricholoina Russula Gill., [i. ÎU. Noms vulfiau'es. — Roussouii, Loia rougi a (Nice), Fayssé (Lorraine). Rouget (Bagnols). Description. — Chapeau variable de forme, arrondi, à bords roulés en dedans, portant des pelucluires cotonneuses qui disparaissent en- suite. Couleur rouge vineux, plus foncée au centre, bords rosés; épi- démie facile à détacher, visqueux, lisse ou squameux; écailles inéga- lement répandues et visqueuses. Lamelles blanches ou blanc jaunâtre, présentant des taches bistrées, surtout quand on les froisse ; étroites, arquées, adhérentes ou légèrement décurrentes sur le pédicule, iné- gales, épaisses, écartées, quehjuefois bifurquées. Pied court, épais, carné, vineux, portant au sommet des écailles blanches; cylindrique, plein, à chair filandreuse. Taches violacées ou fauves. C'/w/r blanche ou rosée, douce, ferme, tendre, cassante, épaisse. Odeur forte, mais agréable. Saveur douce. Habitat. — Gillcl le donne comme assez rare. Cependant, là où il vient, il vient en masse (Bagnols-sur-Cèze, d'où me l'a rapporté M. Barrandon). Ddilo Ta trouvé à Grammont. Il est abondant dans les friches el les châtaigneraies des Cé- vennes. Usages. — On le mange dans les Cévennes, en le confondant avec VAgar. ( Russula) al lU ace us , (\m abonde i)artout. Les o|u- nions personnelles varient sur lui. Les uns rcstiiucntméUio- 6 — 74 — crement et ne le donnent que comme Champignon de con- serve; les autres (Persoon) lui attribuent le parfum du Cham- pignon de couche, parfum que je ne lui ai jamais trouvé. Confusions possibles. — La confusion la plus grave serait celle qu'on en pourrait faire avec les Russules toxiques, en particulier avec les Agar. ( Russula) roseus et emeticus. Un peu d'attention le fera distinguer. L'Agat\ roseus est d'un rose presque blanc, à chapeau plus concave. VAgar. emeticus est d'un beau rouge foncé. Le pédicule est court et la saveur piquante. Enfin, surtout, les lamelles, sont égales ches ces deux Champignons, inégales dans VAga7^icus Russula, et elles restent blanches au lieu de se tacher de bistre. On a vu que, dans les Cévennes, on le confondait avec VAgar. alutaceus. L'erreur n'a pas d'importance, tous deux étant comestibles. VAgar. alutaceus a les lames égales et jaunâtres. Fries admet enfin qu'on peut le confondre avec VHygro- phorus purpurescens et avec VAg. erubesens. Agaricus {Tricholoma) terrens. Sch^ff. (Lous Carbouoels) Agaricus terreus Schaeff. — Fries, p. 57. — Seyn., p. 122. — Roum., p. 68. — Sic, p. 85, pi. 32, fig. 171, — Tricholoma ter- reum Gill., p. 100. — Agaricus argyraceus Bull., p. 584, pi. 423, fig. I.— Del. Icon ined. — Dun., n°« 269, 270.— A^«;'. myomyces (Pers.). Noms vulgaires. — Lous Carbounels (Montpellier), Description. — Chapeau peu charnu, conique, puis campanule, puis plan, sec, couvert d'écaillés squameuses noires ou grises, plus foncées au centre que sur les bords. — Feuillets blancs ou blanc grisâtre, lég. dé- currents. peu nombreux, crénelés. — P/erf plein, quelquefois fistuleux, cylindrique, blanc ou gris, couvert en bas de fibrilles grisâtres. — Chair cendrée. — Saveur faible. — Odeur de plume brûlée, d'après les auteurs. Je lui trouve plutôt celle de farine fraîche. — 7 o Variétés. — Ce Chanipifiiion \arie beaucoup dans la nuance du chapeau. Le gris fonc6 et le blanc sale sont les deux ex- trêmes. Gillet en cite deux variétés, dont l'une (que je n'ai pas trouvée) porte au bord des feuillets des points noirs très -re- marquables. z Habitat. — On le trouve partout dans les environs, et c'est seulement en raison de sa tVéquence que j'en parle ici, car il n'a aucun usage. Je ne le crois pas vénéneux ; mais la minceur de la chair le fait laisser de côté. 11 vient surtout sous les Pins et aussi sous les Chênes. Je l'ai trouvé dans presque toutes mes courses aux environs: à Doscare, au bois du St-Esprit, au bois de Flaugergues, au parc de Grammont, à Frontfroide, au château Levât, à Méric, etc., etc. Mon père l'a recueilli à Hratnabioou, à Sl-Sauveur Hautes-Cévennes). Terrestre et gé néralement solitaire. — Automne. Agaricus {Tricholoma) Silhellus DC, (non Sch.eff.) (Le vrai Mousseron) Agaricus albellus D. C, FI. fr., t. II, p. 176, n" 470(exclus. syn. Schœff). — Fr., p. 67.— Seyn., p. 123 ;?j— Cord., p. 221, pi. 9, fig. 1. — Roum., p. 74. — Agaricus aromaticu'< Roq., p. 109, pi. 16, fig. 4-5. VAgaricus albellus D. C. est un Tuicholoma qu'il ne faut pas confondre, comme le fait de Candolle lui-même, avec VAgar. albellus de Schœff., qui est VAgaricus prunulus de Scopoli. Ce dernier, du groupe des Chromospores, est décrit plus loin dans la tribu des Hyporhodius. — Autour du véri- table albellus se groupent des formes admises par Fries comme espèces, telles que les Agar. gambosus, Georgii, borealis et graveoleyis, dont je n'ai pas à faire ici la synonymie très-com- pliquée. Noms vuUjaires. — Champignon muscat, Mousseron vrai, — 70 -^ Misseron, Braguet, Moussairon, Moussaïrou (St-Pons), Mous- saïrigo (Toulouse), Gourioulettes (Pyr.-Or.), Blanquet (Alais). Description. — Chapeau très-charnu, convexe, glabre, sec, de 8 à 10 centimètres de diamètre, compacte, blanc, puis légèrement gris fauve. Bords minces, ondulés, repliés. — Feuillets blancs, inégaux, un peu décurrents, nombreux. — Pzcrf plein, blanc, nu, un peu velu à la base, fibreux, légèrement renflé en bas.— Chair blanche et ferme, se séparant difficilement de l'épiderme. — Odeur et saveitr très-agréables et musquées (d'où le nom de Champignon muscat), se conservant après la dessiccation. Variétés.— Pries en admet deux formes, l'une plus grande et solitaire, l'autre plus petite et venant par groupes. Gillet on connaît une à chapeau blanc et une autre à chapeau gris rous- sâlre, tacheté de noir, surtout au sommet. Habitat.— Cei Agaric est le Mousseron de printemps poul- ies habitants du nord de la France, qui, d'après M. Roume- guère, appellent Mousseron d'automne VAgar. albellus de ^d\^f^.{Ag. 2:)runulus Scop.). Dans le Midi, le Mousseron d'au- tomne estl'A^rar. tortilisDC. (Ag. (Marasmins) oreades Boit). C'est au premier printemps, dès le mois d'avril, même en Suède (Pries), qu'on voit apparaître le Mousseron. 11 se montre quelquefois en cercle (1) dans les pelouses, dans les friches, au bord des bois. D'après Bulliard,on le retrouverait souvent en automne sur les points oii il a poussé déjà au printemps. (1) Cette disposition en cercle, assez fréquente chez certaines es- pèces de Champignons, est explicable de la façon suivante : le mycé- lium, qui est ici vivace, part d'un point et se développe circulairement autour de ce point. Le développement se fait également dans toutes les directions, et, comme c'erst sur le mjcélium de l'année que se mon- trent les organes reproducteurs, on voit les Champignons pousser en cercle. Ce qui appuie cette hypothèse (car ce n'est là qu'une hypo- thèse), c'est que les cercles se montrent chaque année à la même place et semblent annuellement s'agrandir. — 77 — Je ne l'ai jamais trouvé à Montpellier, bien que de Seynes l'y signale. 11 existe dans les Cévennes, mais toujours assez rare. A Alais, où il est connu sous le nom de Blanquet, on ne le ra- masse pas. Usngos. — On le considère en géne'ral comme le plus délicat des Cliampi<^nons.La chair en est blanche, cassante, ferme, et le trahit à distance par le parfum qu'elle exhaie. — On l'em- ploie surtout comme condiment, et quelques personnes le pré- fèrent à hi truffe. Il est assez rare, et on l'a f)ayé jusqu'à 30 fr. la livre (1). — On peut cultiver le Mousseron (2). Confusions possibles. « Confunditur saepe cura formis minori- bus A()/^ (Fr.), var. alba, qui sont tous comestibles. Je dois citer encore VAg. caprinus (Fr.), que j'ai trouvé à Doscare, et VAg. olivaceo-albus (?), qu'on m'a apporté de Fontfroide. CLITOCYBE Champignons à spores blanches; charnus, résistants, à marge d'abord enroulée. Pied élastique, spongieux, souvent fistuleux. Lamelles atténuées en arrière, adnées ou décur- rentes, jamais sinuées.— Terrestres. — La plupart plans ou in- fundibuliformes. Agaricus [Clitocybe) nebularis Bastch Agaricus nebularis (Bastch). — Fr., p. 79. — Roq., p. 107, I.I. 15, f. 5.— Cord., p. 229.— Roum., p. l^.— Ag.pileolarias. Bull., p. 521, tab. 400.— Clitocybe nebularis. Gill., p. 157.— Agar. turgidus (Grev.). — Ag. canaliculatus (Schum.). Description.— Chapeau charnu, d'abord convexe, puis plan, puis cja- thiforrae, mais le centre restant saillant, à bords toujours enroulés'en dedans; ferme, résistant. Couleur jaune ou grisâtre ; couvert d'abord d'une poussière grise qui disparait. — Feuillets nombreux, minces, inégaux, blanchâtres, décurrents, arqués, aigus aux deux extrémités. — Pied cjlindrique assez haut, renflé à la base, qui adhère au sol par une sortedebjssus; spongieux, é]astique,plein ou floconneux, substrié, tomenteux à la base. — Chair blanche, ferme, un peu élastique. - _ 81 - Orfcî(t nu/. Tels étaient les exemplaires que j'ai recueillis au pied des Chênes verts des bois environnants. Les peluchures du chapeau seraient, d'après Delile, la plus grande diffé- rence entre cet Agaric et le fnsipcs. Or le fusipes, pour la plupart des auteurs, n'est autre que ï flic/nus. Je n'insiste pas du reste sur ces questions toutes botaniques. — L'habitat et les usages sont les mêmes pour tous. Uahitnt. — On les trouve sur les troncs des vieux Chênes et aussi sur d'autres arbres, mais plus rarement. Ilsnaissent sous terre par groupes de douze, quinze et davantage, rarement deux ou trois. Je les ai trouvés dans tous les bois de Chênes des environs. Usages. — Tous sont comestibles, mais coriaces. Il faut re- jeter le pied et faire bien cuire le chapeau. Ils manquent de saveur et sont a=sez indigestes. — Manger peu délicat. Confusions possibles. — On ne peut guère les confondre qu'entre eux, ce qui n'estd'aucune importance, puisque ce ne sont là que des variétés. Agaricus (Colhjbia) dryophilus Bull. Agaricus drijopliibis Bull., p. 470. pi. 434. — Fries, p. 122. — Seyn., p. 144. — Del. — Dun., n° 227 (malè).— Cord., p. 231. — Roum., p. OG, — CollybicL drijophila Gill., p. 330. Description. — Chapeau assez mince, peu charnu, de couleur assez variable ; convexe, puis plan; la couleur, quelle qu'elle soit, est géné- ralement plus foncée au centre du chapeau. — /vame/Zw sinueuses, ser- rées, étroites, blanches, libres on décurrcntes par une dent. — Pied as- — 94 — sez long, fistuleux, concolore au chapeau, cylindrique, lisse. — Chair blanche, ksaveur fongique, mais non nauséeuse, comme le dit Cordier. La couleur est très-variable. J'ai surtout trouvé les nuances gris de souris et blanchâtre. — Dans le parc du clos Martial, j'en ai vu deux grosses touffes répondant bien à la description de Fries(l)etdeDe Sej- nes (2), et répondant mieux encore à la figure de Bulliard (3). Le des- sin de Dunal est moins bon (4). Chaque touffe était formée d'au moins une vingtaine de Champignons sortant du sol, et d'autres étaient prêts de sortir. Il n'y avait pas de connexion nette avec des racines d'arbre. — Oc?ewrfade- — Goût de Champignon, mais rien d'acre ni de nauséeux. Variétés. — Lesvarialions de couleur sont très-nombreuses. De Seynes admet deux formes principales, dont l'une, qu'il définit : « pileo griseo, nigricante, stipite concolori lamellis albis, a Delileo quoque sine nomine notata in horto botanico raonsp. », est celle que j'ai trouve'e. Habitat. — Cette espèce s'implante sur des feuilles, des dé- bris de bois, dans les parcs, les bois, les haies. La base ag- glomère, comme le fait remarquer de Seynes, tous les débris qui l'entourent, — Automne. Propriétés et usages. — On le considère en général comme malfaisant. D'après Cordier, qui cite mistress Hussey, il au- rait*î)ccasionné un accident en Angleterre. J'en ai fait manger 250 grammes à un chien dans une soupe, qu'il a avalée sans difficulté et qui n'avait, en effet, aucune mauvaise odeur. Au- cun accident ne s'est produit. Si l'on considère que le groupe auquel appartient VAgar. dryophilus ne se compose que de Champignons inoflfensifs, ne pourrait-on pas croire à une con- fusion? En tout cas, denouvelles expériences jugeront lachose. (1) Fries, Hpn. Enr. Edit. altéra, p. 122. (2) De Seynes, Essai d'une fl. mycol. p. 144. (3) Bulliard, pi. 434, p. 470, fig. E. F. (4) Dunal, Dess. inéd. de Champ., n" 227. — 95 - LACTARIUS Charapif^nons à spores blanches, plus rarement jaunâtres; charnus, fermes, irënéralement ombiliqués ou infiindibulifor- mes, contenant un suc laiteux diversement coloré. Lamelles dëcurrentes, nombreuses, inégales, souvent bifurquées. Pied généralementassez court, forme, continu avec la chair du cha- peau. La présence d'un suc laiteux caractérise surtout ce groupe. Mais il ne faut pas oublier que, par les grandes chaleurs, ce lait diminue beaucoup et peut même disparaître, ainsi que l'a fait remarquer Bulliard. Tous les Lactaires perdent dans leur vieillesse la faculté d'excréter du lait. — Ils sont en général indigestes, et quelques-uns sont très-suspects, bien que leur âcreté disparaisse par la cuisson.— Voici les principaux re- présentants de ce groupe dans notre région : Agaricus {Lactarius) deliciosus L. L'Agaric délicieux Agtiricus deliciosus (L).— Roq., p. 93.— Krombh., tab. 11 (optimè). — Barl., p. 34, pi. 19 (eximiè). — Seynes, p. 146.— Y)e\.— Dnn., n" 249 (optimè).— Cord., p. 294.— Lactarius de- liciosus Fr., p. 431. — Gill., p. 204. — Roum., p. 220. .Vo)77.- blan- che, forme, compacte, sèche. —Suc laiteux, blanc, ne changeant pas de couleur, très-âcre, prenant à la gorge. Ce suc disparaît quelquefois complètement quand le Champignon est vieux. — OdeiimnWQ ou faible. Variétés. — VAcjar. ncris de Bull. (t. 538, p. 500) est une variété à lamelles jaunes. Il paraît même que c'est surtout lui qui est mangé dans le pays où se trouvent les deux formes. Habitat. — Je l'ai trouvé partout aux environs. C'est une espèce très-répandue dans les terrains de garrigue, soit cal- caires, soit siliceux. Elle est presque aussi comm une que le Russula alatacca, ce qui n'est pas peu dire. La Colombière, La- valette, Jacou, Viviers, Doscare, Grammont, la Moure, le Gros de Miège, Murviel, la Lauze, etc. Usages. — On considérait autrefois cet Agaric comme vé- néneux, quoique Pries dise « Antiqultus celebratiis et edn~ lis.'* — Aujourd'hui tout le monde s'accorde à le reconnaître comme comestible. Paulet l'a mangé, Roques a suivi son exem- ple. On le vend ici sur le marché, et j'ai vu bien souvent les marchands de Ghampignons le ramasser. La cuisson fait, en effet, disparaître l'âcreté du suc des Lactaires et rend inoffensifs bien des Ghampignons de ce groupe qui, mangés crus, seraient pernicieux. En tout cas, ce n'est jamais un ali- - 100 — ment bien agréable ni bien parfumé que VAga,r. piperatus, et, s'il peut rendre par son abondance des services aux clas- ses pauvres, les gourmets s'en abstiendront toujours. — Les va- ches en sont friandes: mais, d'après Gordier, il rendrait leur lait nauséeux. Agaricus {Lactarius) thejogalus Bull. Agaricus thejogalus Bull., p. 495, pi. 567, f. 2. — Roq., p. 91. — Krombh.,t. 1, flg. 23-24 (?) — Barl., p. 39, pi. 20, fig. 14-18. — Gord., p. 297, pi. 27, fig. 2. — Lactarius thejoga- lus Fr., p. 432.— Gillet, p. 208. — Roum., p. 222. Description. — Chapeau charnu, convexe, puis déprimé, légèrement visqueux, glabre, orangé ou fauve rougeâtre, zone, rarement uni et sec. — Lamelles blanches ou fauve clair, décurrentes, nombreuses, serrées, inégales, laissant découler un laù d'abord blanc, puis couleur de soufre. — /*?'ef/ plein, puis creux, ferme. — Chair du chapeau d'abord blanche, puis jaune par l'exposition à l'air. — Goût acre, amer. ^Odeor nulle. Hauteur, de 5 à 7 centimètres. Diamètre, 4 à 6. Variétés. — Je n'ai jamais trouvé celle qu'indique Fries, à chapeau sans zones, sec et à lamelles très-jaunes. Mais il admet lui-même que c'est peut-être une espèce. Habitat. — De Seynes l'indique surtout dans la partie méri- dionale de la région. C'est à Doscare, Mézoul (le long du bois de pins, mais non sous les pins oii se trouve le deliciosus) et à Grammont, que je l'ai le plus souvent recueilli. Terrestre et so- litaire. — Automne. Propriétés. — G'est une espèce au moins suspecte, l^a plu- part des auteurs la donnent comme vénéneuse, sans citer d'expériences positives. Paulet a donné ce Ghampignon à des animaux sans résultat. Leveillé assure qu'on le mange sur certains points. Un chien auquel j'en ai donné n'a pas paru en — 101 - souffrir; mais la quanlittî était ti-oj) faible (20 grammes) pour qwc j'en puisse tirer une conclusion. On le reconnaîtra au lait blanc, qui devient jaune à l'air. Agaricus [Lactarius) zonarius P>ULr-. L'Agaric zone Agarlcufi znnarlm Bull., p. 491, pi. 101. — Roq., p. 90.— Seyn., p. 115. — Dun., n° 250 (?)— Del. — Afjnricufi flexuosus ^Pers.). — Barl., p. 41, pi. 21. fi^. 8-12. — Lactarius zonarius, Pries, p. 425.— Gill., 214.— Roum., p. 213. Noms vulgaires. — Bonrrup-o (Monta,£,'-no noire), Bolet lo- tresse, Roussillon, Rouzillon (on le confond sous ce nom avec le deliciosus). Description. — Chapeau arrondi, puis convexe, puis infundibuliforme, jaune ou roussâtre, marqué de zones concentriques plus foncées, bords roulés en dedans. — Feuillets nombreux, inégaux, blanc, sale. — Pied plein, ferme, court, nu, atténué vers le bas, blanc jaunâtre. — Lait acre et caustique, blanc, inaltérable à Tair. — Chair blanche, com- pacte, non changeante. — Saveur acre.— Odeur nulle. Ihibitat. — Il vient dans les bois, sur le bord des chemins. De Seynes l'a trouvé dans les prés arrosés, au mois de sep- tembre.— Je l'ai recueilli en abondance à Lavérune, en octo- bre.— Eté, automne. Usages et propriétés. — Il i)asse pour vénéneux. On se sert du lait pour cautériser les verrues. Confusions possibles. — Avec le deliciosus. La couleur du lait est un signe différentiel suffisant. Agaricus {Lactarius) torrainosus Scileff. L'Agaric au.\ tranciiées Agaricus torminosus {SchiGliï.). — Krombh.,tab. l.'î, f. 15-23. - 102 — — Baii., p. 33, pi. 18, fîg. 7-10 (optirnè).— Seyn., p. 146.— Cord., p. 297, pi. 27, fig". 1.— Agaricus necator Bull., p. 489, pi. 529, fig. 2, non pi. 14. — Roq., p. 88, pi. 13, fig. 3-4. — Lactarius toruninosus Fr., p. 422. — Gill., p. 211. — Roum., p. 212. Noms vulgaires. — Rougeole à lait acre, Morton, Raffoult. Calalos, Mouton zone, Raffouet, Lalyron de Chêne, Agaric aux tranchées. Description. — Voici la description des exemplaires que j'ai récoltés au bois de la Moure en novembre 1882 (en petite quantité). — Chapeau charnu, convexe, se déprimant rapidement au centre, de couleur jaune ocracé pâle, subzoné, à bords très-tomenteux primitivement enroulés. — Lamelles nombreuses, inégales, minces, adnées, subdécurrentes, jau- nâtres.— /*i'erf plein, puis creux, cylindrique, central, de couleur jaune un peu rosé, comme les lamelles. — Chair blanche, légèrement rosée sous Tépiderme, qui s'enlève facilement. — Lait blanc, inaltérable à l'air, extrêmement acre. — Odeur légèrement vireuse, — Le chapeau est presque constamment souillé de terre. 11 est garni de poils cotonneux blanchâtres, très-serrés et très-longs sur les bords. Va,riétés. — « Variât carneus, ochraceo pallens, albidus, » zonis obscurioribus atque etiam azonus et tolus albo-tomen- » tosus. » (Fries.) Ce Champignon est représenté de façons bien diverses. Que l'on compare entre elles les fig. de Paulet (70) , Krombholtz (13), Barla (18) et Balliard (529), et l'on croira dif- ficilement avoir affaire à la même espèce. Ainsi BuUiard dit qu'on le confond avec le deliciosus; la fig. de cet auteur ne prête toujours pas à la confusion. Les exemplaires que j'ai trouvés répondent bien à la fig. de Barla (Champ, prov. de Nice, pi. 18). Habitat. — On le rencontre, en été et en automne, par petits groupes, dans les bois, surtout dans les bois couverts. — Cor- dier fait observer que les limaces ne l'attaquent presque jamais. C'est un fait que je n'ai pu vérifier. Propriétés. — Malgré son nom, qui est fait pour inspirer de — 103 — la tprreur aux plus braves, les avis sont partagés, et beaucoup d'auteurs le considèronL comme innocent, Paulet et Letnlii^'r l'ont mang-é im[)unément. Gillet et Rouinon-uère le donnent comme un puri^atif drastique; Cordier pense qu'on l'aura con- fondu, soit avec le scrobiculatan, qui est très-suspect, soit avec le riifus, qui est malfaisant. En tout cas, s'en méfier. Confusions possibles. — Avec les deux dont parle Cordier, mais on les évitera tous trois. Dans celte grande et importante section des Lactaires, j'ai trouve encore : Agarlcus {Lnctarius) fulirjinosus Fr. — Petit Champignon à chapeau légèrement concave, gris de fer, sans zones, très-sec, charnu; lamelles légèrement ferrugineuses, inégales, adnées. — Pied court, atténué à la base, concôlore au chapeau, plein, solidement fixé au sol. — Lait peu abondant, blanc. — Chair blanche, grise sous l'épiderme. Odeur peu marquée de Cham- pignon.— Goût nul, plutôt douceâtre. — Vénéneux. — Bois de la Moure, novembre 1883. Agarlcus (Lactarius) insulsus Fr.,Hym. Eur., éd. 1, p. 336, fide ipsius; éd. II, p. 424 ; Krombh., t. 12, f. 1-6, optimè, dit Pries avec raison). Chapeau infundibuliforme ; diamètre, 10 centimètres; bords sinués ; épiderme visqueux, surtout par les temps humides ; zones concentriques. Fond du cha- peau, jaunâtre pâle. Même couleur pour les lamelles, qui sont adnées. i^ait blanc et restant blanc. Très-âcre. Entre deux la- melles entières, trois incomplètes, dont une moyenne et deux petites. Pied creux, marqué de dépressions lenticulaires plus foncées. Je l'ai trouvé à Murviel, à Fontvalès, au bois de Flau- gergues, et surtout en quantité au fond du parc de Lavérune, dans les herbes, sous les arbres. — De Seynes n'en fait pas — 104 ~ mention. — Agaricus (Lactarius) serifiuus DC : un exem- plaire unique à Doscare et un autre au bois de Fontvalès, près Murviel; un autre trouvé par mon père à Concoules (Gard). D'autres Lactaires existent encore dans les environs de Montpellier, mais je ne les ai jamais rencontrés. RUSSULA Champignons à spores blanches ou jaunâtres (1), charnus, à chapeau plan ou déprimé, ordinairement régulier ; feuillets secs, égaux ou quelquefois inégaux, fréquemment anastomo- sés ou bifurques. Trame vésiculeuse. Spores rondes, verru- queuses. Terrestres, putrescibles. Les Russules forment un groupe très-naturel et três-rap- proché des Lactaires (2), dont elles ne diffèrent que par PaL- sence de lait. Encore les Russules sont-elles souvent larmoyan- tes, c'est-à-dire laissent-elles découler un suc hyalin. La struc- ture anatomique, étudiée par Corda et de Rary, rend compte de l'aspect grenu de la cassure de la chair. Ce groupe inté- resse le médecin, car il comprend des espèces vénéneuses à côté de Champignons fort estimés. Malheureusement, la variété des couleurs chez une même espèce en rend l'étude difficile, et il reste encore beaucoup à faire pour bien les délimiter. Je décrirai ici deux espèces très -communes dans notre région, en y ajoutant la Russule émétique, que je n'ai pour ma part jamais trouvée, mais qui pousse fréquemment dans nos Cévennes et qui peut causer de graves accidents. (1) Cette couleur jaune ne vient pas de la membrane de la spore, mais de l'huile du protoplasme. (2) Voy. de Seynes, article Russule, et Bertillon, article Lactaire, in Dict. mcycl. des sciences méd. - 105 Agaricus {/(ussuln) alutaceus Pkrs. Aqnrirufi aliUacnn.^ (Pers.). - Roq.,p. 81, pi. 10, fig. 3. — Krombh., tab. CA, lig. 1-4. — Barl.,p. 23, pi. 11, fig. 1-3. — Seyn., p. 150.— Roiib.— Del.— Dun., n' 260.— Cord., p. 302, \)\. 29. —Rufifiiila lûulacca Fr.,p.453. — Gill., p. 24'.).— Roum., j). 236. — Aijnv. !^apidu>i (Poir.).— Roq., p. 82, pi. 10, f. A.— Fungus superne sature ruber Magn., Bot. Monsp., p. 103. Noms vulgaires. — Fayssé (Meuse), Berdanel, Berdeto,Ber- det, Rouget (en commun avec VAg. lîassala), Rougetto (bas Languedoc), Rousson, Roiigion, Bise rouge, Crusolo. Description. — Comme tous les Cliarapigiions de ce groupe, c'est une espèce très-remarquable par ses variations de couleur. — Chapeau cliarnu, convexe, puis plan, quelquefois déprimé, abords minces, non roulés, de couleur très-variable (tous les mélanges possibles entre le rouge, le]vert, le blanc et le violet) et souvent très-brillante. — La- melles égales, jaune pâle, devenant ocracées, presque libres, épaisses, assez écartées, non décurrentés, réunies entre elles par des veines. — Pied cylindrique, lisse, blanc, ou lavé de jaune et souvent de rose ; spongieux, rapidement creusé par les larves. — C/tai?' blanche, quel- quefois rouge sous l'épiderme, cassante. — Goîit agréable, quelquefois légèrement poivré à la fin. — Odeur agréable ou nulle. — Spores ocra- crées. Hauteur, 5 à 8 centimètres. Diamètre, 5 à 10. Variété.s. — On peut eu distinguer beaucoup. M. Gillet en admet quatre. Mais la coloration du pied et du chapeau, sur laquelle il base ses différences, passe par tant de nuances intermédiaires, qu'il est impossible parfois de décider si le Champignon que l'on regarde appartient à telle ou telle va- riété. « Pileo, dit de Seynes, carminato, fusco, flavo, viridi, gri- seo, etc.; indè varietates et nomina pormulta. » IIa})itnt. — C'est le Champignon le plus commun chez nous. 8 — lOP) — A certains moments, il couvre littéralement le sol, et l'on ne peut faire un pas sans en écraser quelque exemplaire. C^est à Doscare, surtout du côté qui [regarde Grammont, et dans le bois de Saint-Esprit, près de Mézouls, que j'en ai surtout trouvé par milliers. Les bois de Flaugergues, delà Moure, de Mézouls, de Lavalette, de Cannelles, de Bione, etc., etc., en un mot, tous les bois des environs, en sont garnis. De Sey- nes fait remarquer, avec juste raison, que c'est surtout une plante des zones sèches, tandis que les Russules toxiques ha- bitent les régions plus hautes et plus humides des Cévennes. L'Agaricus alutaceus vient solitaire, entre les pierres, sous les bois de Chênes et, moins souvent, sous les bois de Pins. — Été, automne. Usages. — Je ne l'ai jamais aperçu sur le marché, mais les chercheurs de Champignons le ramassent très-souvent; pro- bablement ils le mangent eux-mêmes, le peu de parfum de ce Champignon le faisant mépriser du chaland, et les cou- leurs éclatantes du chapeau inspirant peu de confiance. — Mais, dans bien des pays, il est très-recherché. Dans l'Est, en Lorraine, on le consomme beaucoup, et dans nos Cévennes il devient, par son abondance, une ressource très-importante. Il est lâcheux que, dans les environs de Montpellier, on en connaisse peu les qualités comestibles; car on peut, sur cer- tains points, le ramasser à pleins paniers. — C'est un manger parfaitement sain, mais peu parfumé. Confusions possibles. — Il ne diffère guère de VAgaricus (Russula) emeticus Fr. , que par la couleur ocracée des lamel- les, et les confusions seraient plus fréquentes si les deux espè- ces vivaient d'ordinaire côte à côte. Cette couleur des lamelles écartera aussi YAgaricus (Russula.) roseus Fr., qui est véné- neux et a, comme Vemeticus, des feuillets blancs. — UAgar. (RussulaJ ochraceus Swartz. est plus petit, et la chair elle- — 107 — même est de couleur ocre. Quautù IWr/.iràja.s (lîuxf^ula) nnu- .s'(?os(i.s Pers. , dont les lamelles sont jaunes aussi, l'odeur putrido qu'il répand le fora rejeter immédiatement. Agaricus {/{iissuln) fetens Pers. Arjnrifii.^ fetens (Pers). — Roq., p. 85. — Krombh., tab. 70, f. 1-6.— Seyu., p. 1 10.- Del.— Gord., p. 301.— Aryar. pl- pcratus Bull., p. GOl, pi. '20-2. — Ra>. M] — D'autres méthodes sont encore employées. — Les Champignons cultivés sont souvent beaucoup plus gros que leurs congénères des friches, mais ils ont perdu en parfum ce qu'ils ont gagné en volume. (2) Voy. Roques, Ilisi. des Champ, eom. etvén., p. 98, éd. in-4''. (3) C'est ici le lieu de dire un mot de cette préparation, fréquemment employée en Angleterre. C'est une sorte d'extrait de^Champignons qui devrait toujours être fait avec VAgar. cnmpestris ou la variétéV//'i'e«.sî'.'>', mais dans lequel entrent toujours quelques autres espèces (.4'/. rnhes- cens, ureades, comatus, alramcntarins, Fistulina hepafica, Morrhel/a es- culenta, etc.) et même, chez certains fabricants peu scrupuleux, toute — 120 — coup moins estimé en Hongrie et en Italie que partout ail- leurs. — Quelques personnes préfèrent la variété blanche à toutes les autres. Confusions possibles. — Les plus graves seraient avec les Amanites {Agar. pa.ntherinus, Agaricus hidbosus). On trou- vera à Tarticie respectif de ces Champignons les différences qui les séparent du campestris. — VAgaricus CVolvaria) glo- jocephalus lui ressemble assez; mais il a le chapeau très- visqueux, n'a pas d'anneau ; le pied est plus élancé, plus grêle, et le chapeau plus étalé. En outre, il n'a ni l'odeur, ni le goût du Champignon de couche, mais plutôt un goût de navet. — BuUiard signale encore une confusion possible avec VAgar. phonospevinus, dont les feuillets sont décurrents. UAgar. campestris est, en somme, facile à reconnaître. J'ai trouvé aussi, dans le parc du Clos-Martial et ailleurs. VAgar. (Pratellus) appendiculatus Bull. La chair du cha- peau est mince, la couleur brun jaune clair. La couleur des lamelles marron. — Odeur et saveur fungiques. Je ne puis non plus passer complètement sous silence VAga- ricus (Pratellus?) amarus (1) Bull., que nous trouvons en touffes énormes sur les vieux troncs de bois, les vieilles sou- ches d'arbres, etc. — Cette espèce a, comme le fait remarquer de Seynes, une synonymie très-compliquée, à cause des es- espèce de Champignons. Il n'y aurait, paraît-il, jamais d'accidents, ce qui est probablement dû au mode de préparation. Il j a en Angle- terre de très-grandes manufactures de Ketchup. Voy. Cooke et Berke- ley, les Champignons, page 83. (1) A. fascîcularis Huds.— Pries, p. 291.— Krombh., lab. 44, f. 4-5. Ag. amarus Bull., p. 478, pi. 30 (non pi. 562). — Roques, p. 102, pi. 1, f. 15. — Roub. — Delile. — Ag. pulverulentus Bull., pi. 478. — Dunal, Icon., w" 124? - 121 — [)èces nombreuses qu'on a foiideos avec de simples variétés. L'onsemblo du Ghampii]:non est jaune. Le chapeau est roi- geàtre, surtout au centre, où il se fonce davantage; les lamel- les sont verdâtres, vert olive, quelquefois franchement ver- tes. Le pied est cylindrique, assez souvent dévié en bas, pour s'appliquer sur le tronc, d'où il sort, jaune, muni d'un collier aranéeux. — Il est décrit parla plupart des auteurs comme VAgar. fa-'icicularis Huds. Ou le trouve partout, sur les troncs de toute essence : Montpellier, environs, bois de Chênes verts; Romiguières (en quantité sur un tronc de Châtaignier coupé), St-Sauveur-des- Pourcils (Gard), etc. La saveur en est très-amère, et l'usage n'en serait proba- blement pas sans danger. Du reste, il ne tente personne. DERMINUS Champignons à spores colorées, de forme et de couleur va- riées, ferrugineuses, ou olivâtres ou jaunes, etc. Ce groupe est assez mal délimité, et, pour de Seynes, une partie au moins devrait être rangée parmi les Pratellus. Agaricus {Derminus) cylindraceus DC. La Pivoulade AgariciLS ci/lindraceas DC, FI. fr., t. VI, p. 51. — Fr., p. 218.— Seyn., p. 86.— Del. — Dun., n°' 155, 156.— Cord., p. 217. — Roum.,p. 131. — PhoUota cylindracea Gill.,p. 439. — Agaricus attenuatus DC, loc. cit., p. 51. — Dun., n" 157. Noms vulgaires. — Pivoulado, Piboulada, Sa uzenada. Cham- pignon de Saule. Description. — Chapeau charnu, sec, glabre, convexe, à marge re- pliée ; bleuâtre, puis roux, à centre plus foncé. 10 à 12 centimètres de diamètre. — Lamelles adnées, serrées, blanches, puis ferrugineuses. — 9 122 P/çc? plein, cylindrique, rigide, souvent tordu, farineux au sommet, un peu squamuleux en bas. — Anneau rabattu, persistant, 6 à 10 centimèt. — Chair blanche et délicate. — Saveu?' douce et agréable. Variétés. — Il n'y a à signaler que VAgar.attenuatus DC, qu'on s'accorde aujourd'hui à réunir au cylindraceus. Delile pense, et de Seynes n'est pas éloigné de partager cet avis, que les brusques variations de température, fréquentes en automne, ne sont pas sans influence sur la production de la forme atténuée de VAg. cylindraceus (?). — Ce qui distingue ces deux Champignons, c'est que VAg. cylindraceus a le pé- dicule égal dans toute sa longueur, tandis que le pied de VAg. attenuatiis est aminci vers le bas et claviforme. — Delile ajoute que le chapeau de ce dernier est fauve, et celui de l'espèce type, blanc. Mais il a trouvé Vattenuatiis ieune avec le chapeau blanc. De Candolle donnait la variété comme soli- taire; de Seynes l'a trouvée en touffes plus fréquemment que l'espèce type. Habitat. — Sur les vieux troncs de Saule, de Platane, de Peuplier, au bord des rivières. J'ai trouvé l'espèce type dans le parc de la Plauchude, en septembre 1883, et la variété au bord de la Mosson, à Bione. C'est, du reste, un Champignon que les botanistes ont très-peu souvent l'occasion de récolter, car il est connu de tous les paysans, qui l'enlèvent à mesure qu'il paraît. — Printemps, automne. Usages. — Il est comestible, et même assez estimé. Tous les paysans de notre région le connaissent et le mangent. — De plus, c'est un des Champignons que l'on peut cultiver: on scie des rondelles de Peuplier de quelques centimètres d'épaisseur, on les frotte à plusieurs reprises avec des chapeaux d'Aga- ricus attenuatus, et on les enterre à l'ombre dans un endroit frais. On peut aussi ne les enterrer qu'après l'hiver. Quelques arrosages aident à la production. On récolte dans le courant — 123 — de rannéfi de belles touffes de Pivoulado, d'autant plus souvent que les pluies sont plus fréquentes. Agaricus [Dcrminus) rimosus Wmi. Af),iricuii ri))i()sn. légèrement violacée. — Odeur Qi saveur à. peu près nulles. [J'ai trouvé en octobre 1883, au bois de Flaugergues, un Champignon que je rapportais à VAguricus violaceus. Mais, d'après M. Max. Cornu, ce ne serait pas exactement le vio- laceus, dont la couleur violette serait constante. Le Champi- gnon que j'ai trouvé avait le chapeau fauve clair sur le bord, — 126 — blanc sale vers le centre, qui était légèrement ombiliqué. Bords enroulés en dessous ; feuillets nombreux, roussâtres, nuancés légèrement de violet. Stipe court, fortement renflé à la base^ en un faux bulbe ou bourrelet discoïdal. L'épiderme du chapeau s'enlève facilement; il est satiné plutôt que pe- luché, comme flammé de nuances rousses rayonnantes. La chair est blanchâtre, avec une légère nuance fauve; l'odeur et le goût sont à peu près ceux du Champignon de couche, sans trace d'âcreté ni d'amertume.] Habitat. — On trouve VAgar. violaceus sous les Chênes, dans les environs. Assez rare. Je l'ai recueilli à Doscare, bien caractérisé (octobre). Usages. — ^"ll est comestible. Du reste, toutes les Gortinaires pourraient l'être. Aucune n'est signalée encore comme vrai- ment vénéneuse; mais la plupart sont amôres, et, s'il en est quelques-unes qu'on peut manger, ce n'est jamais un plat bien appétissant. Roques l'a souvent consommé. On en fait usage en Toscane. Agaricus {Cortinarius) turbinatus Bull. Agaricus turbinatus Bull., p. 645, pi. 110. — Roq., p. 118. — Seyn., p. 92. — Del. — Gord., p. 283. — Cortinarius tur- binatus Fr., p. 346.— Gill., p. 461. Description. — Chapeau charnu, visqueux, glabre, arrondi, puis con- vexe, puis plan, enfin déprimé, unicolore, jaune pâle. Épiderme facile à enlever, luisant, hjgrophane. — Lamelles entières, atténuées aux deux extrémités, adhérentes, couleur cannelle ou ferrugineuses. — Pied épais, plein, puis creux, cjlindrique, turbiné à la base, blanchâ- tre en haut, roux en bas. — Cortine nette, rougeâtre, fugace, entou- rant presque tout le pédicule. — Chair blanche, ferme. Habitat. — On le trouve dans les bois ombragés, un peu partout dans la région. Il est plus fréquent que le précédent. — rJT — Le bulbe turbiné, le chapeau jaunâtre, sec et glabre, le feront reconnaître. Bois de Flaugergues, de la Moure. — Automne. Usagefi. — Quelques auteurs le disent comestible. Il est sus- pect pour d'autres. Il n'a en réalité pas d'action nocive, mais rien n'engage à le manger. On peut citer encore dans nos environs VAg. (Corlinariu.^J inucosu!^, assez fréquent; VAg. (Cortinarius) cafftanpuf^, qui est comestible, et bien d'autres encore. — La détermination des espèces est souvent difficile dans ce groupe, dont l'ensem- ble est au contraire bien délimité. PAXILLUS Champignons à spores colorées, ocracées; à feuillets dé- currents, faciles à détacher du chapeau. Marge fortement enroulée. Lamelles membraneuses, anastomosées en arrière, rameuses. — Charnus, putrescibles, bien que séchant facile- ment. Agaricus {Paxillus) involutus B.vtsch Agaricus involutus (Batscli.). — Seyn., p. 93. — Dun., n" 141.— Cord., p. 261, pi. 17 (benè). — Sic, p. 128, pi. 30. — Agaricus contiguus Bull., p. 518, pi. 570, fig. 2 et pi, 240. — Paxillus involutus Fr., p. 403. — Gill., p. 520. — Roum., p. 201. — Agar. lateralis (SchœfF.). Deficription.— Chapeau fauve sale, convexe, puis plan, puis déprimé; 10 à 15 centimètres de diamètre, à bords irrcguliers, roulés en des- sous, tomenteux, striés, comme cannelés. — Lamelles inégales, nom- breuses, quelquefois anastomosées, atténuées aux deux bouts, plissées, sinueuses à la base, où elles simulent parfois des pores : un peu plus pâles que le chapeau, dont elles se séparent facilement. — Pied centra ou plus souvent excentrique, cylindrique, continu avec la chair du cha- peau et concolore, solide, charnu, quelquefois tordu. — C/iair de la cou- — 128 — leur du chapeau, changeant un peu (|uand on la meurtrit, ainsi que les lamelles. — Odeui' {angiqne. — Saveur peu. accentuée. Habitat. — Il est quelquefois très-abondant dans les bois. De Seynes l'a trouvé à la campagne René. — Récolté à La- salle à Concoules, à Saint-Sauveur, près Camprieu. Je ne l'ai jamais rencontré aux environs de Montpellier. Usages. — Il est comestible. Agaricus {Paxillus) lamellirugus DC. La synonymie la plus complète est donnée par de Seynes. — Agaricus lamellirugus DC, Fi. fr., t. VI, p. 44. — Seyn., p. 94. — Del. — Dun., n" 191 (optimè). — Agaricus panuoides Fr., obs. II, p. 227 (auctore ipsius). — Paxillus panuoides Fr., p. 404. — Agar. croceo-lamellatus (Letell.). — Cantharellus Dutrochetii (Mont. Ann. se. nat.). — Merulius crispus (Turp.). — Merulius lamellosus (Sow.). Nom vulgaire. — Oreille-de-Pin. Description. — Chapea i charnu, dimidié, jaunâtre, pruineux, ve- louté, comme recouvert d'une fine poussière blanchâtre, sessile, sou- vent résupiné, quelquefois en conque. — Lamelles décurrentes, anasto- mosées en arrière, rameuses, d'un jaune plus foncé, presque orangé, marge enroulée en dessous. — Pied ordinairement nul ou latéral. — 6'Aa2r blanche, ferme, cassante. — Odeur désagréable, rappelant celle de l'amadouvier, un peu résineuse. — Saveur douceâtre, légèrement amère à l'arrièregoût. Habitat. — Il abonde dans nos environs. G^est sur les vieux troncs de Pin qu'on le voit apparaître, quelquefois en touffes si serrées que l'ensemble est dur comme une pierre, bien que chaque Champignon soit souple quand on le sépare du groupe. — Il vient en quantité à Lavalette, sur un point au bord du Lez, à moitié chemin entre le maisonnage et la petite porte du côté de Subtancion. De Seynes le signale en masse dans les les pinèdes d'Aigiiesmortes. — Meric, Fontfroide. — Planches de Pin, vieilles portes. Propriétés. — Est-il toxique? Je n'ai pu le savoir; car, mal- gré la coction sinuiltande de ce ChampiiTnon et de diverses substances propres à allécher l'animal, les chiens auxquels je l'ai offert n'ont jamais pu se décider à l'avaler complè- tement. Cependant, plus d'une fois ils en ont pris de petites quantités, et je n'ai observé chez eux aucun symptôme par- ticulier. Cette répugnance des chiens doit se retrouver chez l'homme, et, en effet, ce Chami)ignon n'est jamais recueilli. Un chien de forte taille en a mangé plus de 200 grammes sans en être le moins du monde incommodé autrement que par l'odeur. CREPIDOTUS Les Champignons de cette section correspondent aux Pleu- rotes, dans les Leucospores. — Les caractères tiennent à la fois des deux sections voisines, les Paxillus et les Hyporhodlus. Agaricus (Ct^epidotiis) olearius (1) DC. Agaricus olearui^ DC, FI. fr., t. VI, p. 44. — Fr., p. 170. — Roq., p. 81. — Bar!.,, p. 47, pi. 24, fîg. 1-6 (oplimè). — Seyn., p. 96.— Roub.— Del.— Dun., n° 140. — Cord., p. 256.— Po- lijrnyces phosphorus (Batt.). — Dendrosarcofi phof< Bull., p. 568, pi. 534, 590, 547, fig. 1 (?). — Pluteus cervinus Gill., p. 393. Description. — Ce Champignon n'a que peu d'intérêt pratique. Aussi n'en donnerai-je pas la description complète. Les exemplaires que j'ai trouvés répondent bien à la figure de Bulliard (pi. 382, sous le nom (le lividus) età la fig.n" LS8 des dessins inédits de Champ.de Dunal. Le chapeau est d'un gris clair, à éclat un peu soyeux; épiderme lisse et strié en rayonnant, comme Pries le décritîà la fois chez VAgar. ccrvinua {plut QHS Pers.) et chez VAgar. lividus Bull. (Agar. phonospcrmm, datîs le texte de l'édition de Bulliard par Ventenat.) L'odeur de la chair rap- pelle un peu la saucisse fraîche. Le goût est celui de la farine de fro- ment, avec une légère âcreté, qui ne se développe qu'à la longue. — Les lamelles sont rosées. Les spores sont polyédriques. Fries signale comme anguleuses celles de VAgar bridas Bull., dont de Seynes fait un synonyme du pluteus, mais que Fries place dans une section spéciale {Enloloma). llabilul. — Printemps, automne. — Un peu partout sur le sol ouïes arbres. De Seynes en a trouvé de très-grande taille. — 134 — VOLVARIA « Carnosi, volvacei, exannulati ; laraellis liberis, sporis lu- teo-rubris. » (De Seynes.) Les lamelles sont distantes du stipe, et les spores sont ovales, ce qui les distingue des Hyporho- dius. Cette section, la dernière des Agaricinées, se rapproche de la première. Les Volvaria sont desAraanites à spores colorées, et plusieurs auteurs n'en font qu'une section des Amanites (Gordier, etc.). Agaricus ( Fo/yam) glojocephalus DC. Aga-vicus glojocephalus DC, FL fr., tom. VI, p. 52. — Fr., p. 183. — Barla, p. 52, pi. 26 (eximiè). — Seyn., p. 102. —Del. — Dun., n° 134. — Roum., p. 119. — Agar. speciosus (Klotsch). — Fries, p. 183.— Krombh., tab.26, fîg. 1-8.— Cord.,p. 208, pi. 6, fig. 1 (malè). — Volvaria glojocephaU Gill., p- 387, — Volvaria speciosa Gill . , p. 388. Description. — Chapeau charnu, gluant par les temps humides, lisse et brillant par les temps secs; convexe, puis plan; souvent souillé de terre; le centre toujours proéminent, mamelonné; bords striés, quel- quefois lisses. — Épiderme blanc sale ou fuligineux. — Lamelles iné- gales, libres, séparées du pédicule, frangées ou crénelées finement; blanches d'abord, puis roses, puis rouges. — Pied glabre, plein, cylin- drique, strié, sojeux, sans collier; blanc. — Volva blanc sale, petit, membraneux, lâche, déchiré en deux ou trois lanières (1). — C/?a?V blan- che, mince, tendre, aqueuse. — Odeur faible. — Saveur vireuse pronon- cée. C'est le goût de raifort, de navet un peu poivré, comme l'a dit de Sejnes. — Tous les exemplaires ne l'ont pas également marqué. Variétés. — Comme le font observer de Candolle et de Seynes, il n'y a pas lieu de distinguer de cette espèce VAgar. (I) D'après Barla [Ch. Nie.), des débris de volva resteraient souvent sur le chapeau Je n'ai jamais constaté ce fait. — l.^"^ — apecAofiUf^ de Pries ni le mcdiufi de Schura. — La couleur du chapeau est souvent plus foncée quand la saison est avancée. Ilabitnt. — Dans les prés, les champs, surtout les luzer- nes, en octobre et novembre. Assez fréquent dans notre ré- gion. Prop)'iété!<. — UAijnririis fjlojoccphalu!^ jouit d'une très- mauvaise réputation. Letellier a fait des expériences tendant à prouver que ce Champiornon contient un principe toxique, et que ce principe n'est autre que l'amanitine, c'est-à-dire le principe extrait [lar lui-même de VAmanita muscaria. Le fait est rationnel, étant donné que les deux sections sont très- voisines. Letellier ajoute qu'il ne faut pas le confondre avec le Lejocephalus (Amanites), qu'on mang-e à Montpellier. D'après son expérience. Pries, Cordier, Gillet, le donnent comme véné- neux; Barla, comme suspect. Cooke et Berkeley, au contraire, et avant eux Persoon, le donnent (sous le nom de f^peciosns) comme comestible. Je connais plusieurs personnes, notam- ment M. Turlin, membre de la Société d'horticulture et d'his- toire naturelle de THérault, qui l'ont mangé très-souvent sans aucun inconvénient. Des expériences faites sur les ani- maux confirment l'idée qu'il n'occasionne pas d'accidents. Trois expériences, l'une avec 150, l'autre avec 200, la troi- sième avec 250 gr. de ce Champignon, n'ont eu aucune action sur les chiens de moyenne taille auxquels je l'avais donné. Le temps m'a manqué pour élucider tout à fait la question; LesChampignons m'ont aussi fait défaut. L'étude n'en est donc pas encore finie, et de nouvelles expériences sont nécessaires pour conclure définitivement. Confusions possibles. — Avec VAgaricus (Amanita) vagi- natns. La couleur des lamelles, toujours blanches chez l'A- manite, et le volva long qui en engaîne la base, en même temps - 136 - que l'absence de viscosité du chapeau, la feront distinguer facilement de VAg. glocephalus. — Avec le Champignon de couche, la confusion est difficile. (Voir page 120.) Agaricus [Volvaria) bombycinus. Sch^fp. Aga,ricus bombycinus (Schseff.). — Fr., p. 182. — Krombh., p. 23, fig. 15-24.— Barl., p. 50, pi. 25, fig. 1-5.— Seyn., p. 102. — Del. — Dun., n° 135. — Cord., p. 207. — Amanita bomby- cina (Pers.). — Volva^risi bombycina GilL, p. 387. Cette espèce est assez rare. Elle a le chapeau couvert de fibrilles soyeuses, légèrement visqueux; un volva très-large, déchiré en deux ou trois points en entoure la base. La chair en est blanche, un peu molle, à odeur de farine fraîche. Ce Champignon est comestible.— 11 vient en été et en automne, sur les troncs pourris ou dans les champs. — Je l'ai trouvé entre le Rochet et les Pins de Grammont, non loin de Ver- chant, dans un champ en friche. L'exemplaire répondait bien aux figures citées plus haut, mais le volva était plus petit. L'Agaricus (Volvaria) volvaceus Bull, est cité comme vé- néneux,sans observations précises. — Nonvidi. — Bonne figure dans Barla, pi. 25, fig. 6-13. POLYPORÉES On groupe sous le nom de Polyporées les Champignons basidiosporiés, dont l'hyméniura forme des tubes libres ou soudés entre eux, séparables ou non de la chair du chapeau; l'orifice de ces tubes, dirigé vers le sol, est arrondi, anguleux ou sinueux. La consistance de ces Champignons est molle, coriace ou ligneuse. Ils tiennent le milieu entre les Agarics et les Hydnum. — 1.37 — Trois genres seulement intéressent ce travail: Bolctas, Po- lyporus et Flstalimi. BOLETUS Champignons charnus, ordinairement terrestres, à pied généralement central ; hyménium tubuleux, séparable [de la chair du chapeau. Beaucoup de Bolets sont comestibles, et quelques-uns jouent un grand rôle dans l'alimentation. Le nombre des vénéneux est moindre; mais il en est beaucoup de suspects, et il est bon , quoiqu'on en ait dit, de s'en tenir à ceux dontles qualités ali- mentaires ont été bien établies. Boletus edulis Bull. Le Cèpe de Bordeaux Boletus edulis Bull., p. 322, pi. 60 et 494.— Fr., p. 508.— Roq., p. 61, pi. 4, f. 2, et pi. 5. — Kromb., tab. 31. — Barl., p. 60, pi. 34 (optimè).— Gill., p. 640.— Cord., p. 317, pi. 34. Noms vulrjaires. — Bolet comestible, Cèpe de Bordeaux, Ceps, Cèpet, Gyroule, Porchin, Potiron, Prourse, Gros-Pied, Grosse-Queue, Michotte, Brucq, Bruquet, Essalon, Moussar, Champignon polonais, Nissoulou, Missol (Lodève), Cep mol (Saint-Pons). On appelle dans le Tarn, et surtout dans la Montagne Noire, nndouillos les Cèpes encore mangeables, mais que l'âge a rendus moins fermes, en même temps qu'ils ont pris un dé- veloppement considérable. Les andonillcs sont moins parfu- mées et plus aqueuses que les Cèpes plus jeunes; mais il n'y a pas encore décomposition et on les mange partout. On appelle, par analogie, faussc^^ andouilles tous les autres Bolets par- venus au même stade de leur évolution. Le Bolctu'i edulis est le seul qui soit mangé dans ce pays. (IL Bertin-Sans.) 10 — 138 - Description. — Chapeau trôs-ciianui, sortant de terre sous forme de cône, au-dessus du pied très-renflé; d'abord légèrement velouté, puis glabre, à bord arrondi ou sinué; marron clair, brun, fuligineux ou fauve. Quand les Cèpes poussent àlaflndu printemps, ils sont en général plus clairs. — Tubes réguliers, à demi libres, d'abord courts et blancs, puis plus longs et jaunes, enfin verdâtres, à pores petits et fins. — Pied gros, épais, plein, renflé en un gros bulbe, réticulé de blanc au som- met (trace des tubes serrés contre le pied avant l'épanouissement du chapeau), blanchâtre en haut, roux en bas. — Chair blanche, légère- ment vineuse sous l'épiderme, qui se détache facilement ; ferme, puis molle, tendre, succulente. — Spores ocracées ou verdâtres. — Odeur agréable, faible. — Saveur de noisette. — Les dimensions de ce Cham- pignon peuvent être très-considérables. Il atteint quelquefois 20 cen- timètres de diamètre. ^- Variétés. — Le pied n'est quelquefois pas renflé; il est, dans ce cas, plus long qu'à Tordinaire. — La teinte du chapeau varie du brun foncé [Bol. faligineus, FI. dan., 1296) (1) au fauve blanchâtre (TjoL a!5us Pers., Champignons comest., p. 233). — Barla (2) admet une variété pinicola à chapeau humide. Habitat. — Le Cèpe est rare dans la région de Montpel- lier. Je l'ai trouvé en exemplaires isolés au bois de la Moure, de Doscare, du Saint-Esprit. Il est au contraire très-fréquent dans lesCévennes. Il recherche les coteaux boisés, la mousse. On le trouve en général isolé, dans les endroits oh le gazon est rare et maigre. C'est surtout en automne qu'on le voit ap- paraître ; mais les pluies de l'été et même de la fin du prin- temps en font souvent sortir. Si l'hiver est doux, on en ren- contre jusqu'en décembre; mais c'est en automne qu'il a le plus de parfum et de fermeté. Il remonte assez haut en alti- tude (1,200 mètres à peu près); l'apparition en est alors plus tardive. (Ij Auctore Cordier, les Champignons, pag. 317. (2) Barla, Champignons prov. de Nice, pag. 69. — 139 - f/.siir/r'.s. — Il est universellement estimé. Chez nous, il est trop rare pour être d'une grande ressource; mais il abonde dans les Cévennes, et les paysans en font une très-grande consommation. De plus, on le conserve pour l'hiver, à l'huile, au vinaigre ou à la saumure, et surtout on en fait sécher des quantités considérables. C'est ce Champignon que les épi- ciers vendent sec toute l'année. Confusions possibles. — La couleur du chapeau, celle des tubes, le pied renflé, la chair immuable à l'air, le goût et l'aspect du Champignon, rendent ces confusions très-difficiles. Aussi ne voit-on jamais d'empoisonnements par les Champi- gnons secs. Boletus sereus Bull. Le Bolel bronzé Boletus tereus Bull., p. 321, pi. 385.— Fr., p. 508.— Roq., p. 60, pi. Set pi. 4, fig. 1 (optimè).— Krombh.,tab.3G, fîg. 1-7. — Gill., p. r,17. — Cord., p. 315. Noms vulgaires. — Ceps noir, Cèpe bronzé, Bolet bronze, Tête-de-Nègre, Cèpe nègre, Gendarme noir. Cep sec (St-Pons). Description. — Chapeau arrondi, convexe, épais, velouté, fuligineux ou de couleur très-sombre, souvent noir. — Tubes blancs ou jaune soufre, pores très-fins. — Pied assez long, en général cylindrique, blanc jaunùtre, plus ou moins réticulé. — C/iair blanche, ferme, lé- gèrement vineuse sous l'èpiderme. — Odeur très-agréable. — Saveur: celle du Cèpe de Bordeaux. Variétés. — Bulliard parle d'une variété à chair jaunâtre, verdissant légèrement à la coupe. — On a cité aussi une var. leucospora, qui, d'après Pries, n'est qu'un état plus jeune du Champignon. Habitai. — Je ne l'ai jamais rencontré près de Montpellier. — 140 — — Il est rare, du reste, même dans les Cêvennes, où on le trouve à terre, en été, en automne, dans les mêmes endroits que le Boletus edulis. Usages. — Les mêmes que ceux du précédent. — Les ama- teurs de Champignons le considèrent même comme plus dé- licat que le véritable Cèpe. Confusions possibles.- La variété dont parle Bulliard pour- rait seule prêter à la confusion. L'existence en est-elle bien confirmée? La couleur noir de fumée du chapeau, contras- tant avec la blancheur laiteuse des tubes, fera reconnaître ce Champignon, dont la chair ne change pas de couleur au con- tact de l'air. Boletus aurantiacus Bull. Le Bolet orangé Boletus aurantiacus Bull., p. 320, pi. 236 et 489, flg. 2. — Roq.,p.72, pi. 9,fig. 2-3.— Krombh.,tab. 32.— Cord.,p. 315. — Bol. scaber Fr., var. A, p. 515. — Bull., p. 319, pi. 132. — Barl., p. 71, pi. 35, fig. 6-12. Noms vulgaires. — Bolet orangé, Roussille, Roussin, Gy- role rouge. Description. — Le c/m/j^ai/ est orangé ou rougeâtre, très-convexe, très-épais, régulier, légèrement visqueux par les temps humides, à chair blanche, devenant quelquefois un peu vineuse. — Les tubes sont grêles, allongés, blancs ou jaunâtres. — Le pied, plus long que le dia- mètre du chapeau, est cylindrique, s'amincit de bas en haut; il est re- couvert de petites aspérités rousses. — Odeur et saveur agréables. Ce n'est peut-être qu'une variété du Bol. scaber Fr., p. 515. Habitat. — Dans les bruyères, sur la lisière des bois. Cêven- nes. — Automne. — Je ne l'ai pas rencontré à Montpellier. Usages. — Comestible assez médiocre. On le mange surtout jeune. — Peu de saveur. — 111 — Boletus granulatus L. Le Bolet des Pins Bolctas granulatus L. — Fr.,p. 498. — Dun., 11° 01. — Barl., p. 63, p). 31, f. 4-12 (eximiè).— Gill., p. 630.— Cord., p. 311), pl.35(malè). — Bol. circinans [Pers.]. — Roq.,p.73. — Krombli., tab. 34, flg. 11-14. Noms 73iilr}nlres. — Bolet de Pin, Pinade, Bolet groupé, Bo- let circinal, Bolet granulé, Roussoun, Salero (Nie). Description. — Chapeau d'abord hémisphérique, puis convexe, puis souvent plan. Il est de couleur marron clair, chocolat, jaune roussâtre, ou souvent jaune clair (parfaitement rendu dans les figures de Barla). Epiderme facile à dctaclier, couvert, parles temps humides d'une vis- cosité tenace. Le chapeau est, dans le très-jeune âge, réuni au pédicule par une membrane très-fugace. — Tubes plus courts au centre et au bord, soudés, petits, jaune pâle, puis jaune verdâtre, se détachant facilement du chapeau. — Pied cylindrique, jamais renflé, souvent courbé à la base, adhérent au sol par un mycélium blanc très-appa- rent; plein, ferme, granulé à sa partie supérieure par de petites taches rousses qui ressortcnt sur le fond jaune clair du pédicule. — Chair jaune sous Tépiderme, blanc jaunâtre à Tintérieur, aqueuse, d'abord ferme, puis molle. — Odeur nulle. — Saveur très-légèrement acide. Variétés. — La couleur du chapeau est quelquefois jaune citron. — J'ai trouvé au bois de Flaiigergues une variété à pied très-long (un seul exemplaire) et une autre que la taille, la hauteur du pied, l'épaisseur et la couleur blanc jaunâtre non changeante de la chair, la facilité à détacher l'iiyménium, rap- prochaient du granulatus ; mais elle en différait par des tubes plus serrés, plus pâles, plutôt chamois que jaune franc;, une coloration plus foncée du chapeau, surtout au centre, les bords étant marqués de taches blanchâtres ou violacées; un hymé- nium moins épais, en proportion de l'épaisseur de la chair. Le pied était granulé comme à l'ordinaire. — Ce Champignon était — 142 — assez abondaut, mais sur un point limité, près des jeunes Pins, non loin de la grand'route. Ce n'est là évidemment qu'une variété, mais je ne l'ai vue figurée nulle part. Habitat. — Sous les Pins ou à côté des Pins. Ce Champi- gnon indique toujours qu'il y a des Pins non loin de là; je ne Tai jamais rencontré que dans ces conditions. Du reste, il est partout dans notre région : il abonde à Méric, au Rochet, à Fontfroide, à Lavalette, à Viviers, à Jacou, à Cannelles, à Doscare, en un mot partout où se trouvent des bois de Pins, et l'on sait qu'ils sont nombreux dans nos environs. — Sep- tembre à novembre. — Il pousse en longues traînées. La dis- position en cercles réguliers, qu'on signale chez lui et qui lui a valu le nom de circinans (Pers.), ne m'a jamais frappé nette- ment. — Quelquefois par groupe de 2 ou 3. Usages. — C'est un Champignon qu'on doit réhabiliter dans l'esprit de nos concitoyens. Suspect et même dangereux pour la plupart des auteurs (Réveil, Gillet, etc.), il est au moins désagréable pour d'autres (Barla, etc.). Fries le donne pour- tant comme in cibariis prsestans. En réalité, il est très-bon; on peut le manger sans crainte aucune. J'en ai fait un très- fréquent usage, et cela depuis longtemps. 11 n'est même pas indigeste comme beaucoup d'autres Champignons comestibles, et constitue un manger très-agréable. Il serait fâcheux qu'on se privât volontairement d'une véritable ressource, car il est très-abondant. — Du reste, je l'ai vu vendre sur le marché de notre ville. Confusions possibles. — La position sous les Pins, et les granulations roussâtres du sommet du pédicule, la taille assez courte de ce dernier, la viscosité du chapeau et la couleur blanc jaunâtre non changeante de la chair, le feront facile- ment reconnaître. Il est vite attaqué par les vers. — 113 — Boletus castaneûs Bull. Le Bolet marron. Boletus cnstancus Bull., p. 324, pi. 328. — Fr., p. 517. — Dun., n» 70-71. — Roq., p. 68.— Krombh., tab. 4, fig. 28-30. — Barl., p. ce, pi. 32, flg. 11-15. — Gill., p. 633. — Cord., p. 325. Nom vulgaire. — Bolet marron. /Jescription. — Chapeau marron, ou rougo brun, velouté; convexe d'abord, 'puis plan, 'et quelquefois déprimé dans l'âge avancé; les bords obtus, arrondis, un peu plus pâles que le centre. — Tubes libres, courts, blanc de lait; pores arrondis, d'abord d'un blanc pur, puis jau- nâtres. Les tubes n'adhèrent pas au pédicule, autour duquel se trouve un petit espace libre. — P^'ef/ plein, puis creux, renflé et souvent courbé à la base; concolore au chapeau, lisse, pruineux et même légèrement velouté. — Chair blanche, un peu rousse sous l'épiderme ; elle bleuit quelquefois légèrement à l'air.— ^'/jores jaunes. — Odeur Qi saveur Xi\x\- les, ou assez agréables. Habitat. — Solitaire dans les bois. Je ne l'ai trouvé assez abondant qu'à Lavalette, dans les rochers du côté de Subs- tancion, à 200 mètres de la porte, sur la hauteur. .J'en ai re- cueilli des exemplaires épars aux bois de Doscare, du Saint- Esprit, etc. — Automne. Usages. — Il est alimentaire: mais la chair est cotonneuse, sèche. Bien que Descourtilz le dise assez recherché, c'est un manger très-peu délicat. Confusions jxjxsildcs. — Le chapeau brun chocolat, velouté, et les tubes blancs, le font reconnaître facilement. Boletus subtomentosus L. Boletus subtomentosus L. — Fr., p. 503. — Gill., p. 648. — Cord., p. 324, pi. 38, fig. 2.— Boletus communis Bull., pi. 393. — 114 - — Boletus chrysenteron Bull., p. 328, pi. 490, flg. 3. — Roq., p. 70.— Fr., p. 502.— Gill., p. 648.— Cord., p. 317, pi. 38, fig. 1. — Boletus crassipes Krombh., tab. 37, fig. 8-11 (flde Fries). — Bol. stephanopus Dun. , n°62. — Bol. elatus^ autpo- tius subtomentosus Dun., n° 63. Description. — Chapeau convexe, puis plan, sec, subtomenteux, villeux, souvent aréole par des gerçures au fond desquelles on aper- çoit la chair jaune. Couleur brun clair, olive ou cannelle. — lubes d'un jaune verdàtre, assez longs; ceux du tour du pédicule plus courts, laissant un vide. Pores irréguliers, larges, anguleux, jaunes. — Pied grêle, souvent aminci et tordu à la base, strié et comme cannelé en long, dur, plein, résistant, fibreux. — Chair cassante, blanc jaunâtre, changeant légèrement après un peu de temps. — Saveur et odeur non désagréables. Variétés. — Le Boletus chrysenteron n'en est qu'une va- riété : il a le chapeau squamuleux; les interstices des gerçures sont rouges ; l'hyménium est déprimé autour du stipe. Habitat. — A terre, dans les bois de Chênes verts, un peu partout, en exemplaires épars. Lavalette, la Moure, Flauger- gues, etc. Bois de Longuefeuilles (Lozère). — Automne. Usages. — On le donne ordinairement comme comestible. Je n'en ai jamais fait usage. La chair devient verdàtre, et l'ensemble du Champignon est souvent coriace. L'odeur n'est pas désagréable; mais ce ne doit pas être un mets très-recher- ché. Personne ne le mange dans notre région. Boletus cyaneseens Bull. Boletus cyaneseens Bull., p. 329, pi. 369. — Fr., p. 517. — Roq., p. 69, pi. 8, fig. 1. — Dun., n° 75 (?) — Krombh., tab. 35, fig. 7-9. — Barl., p. 74, pi. 37. — Gill., p. 632. — Cord., p. 325. — 1 l.J - Dt'scr/plion. — Je la donno succincte, car je n'ai jamais trouvé ce Cliarapignon ni autour de Montpellier, ni dans les Cévennes, où il existe cependant. — C/ia/joau blanchâtre, subtomenteux, bleuissant par le con- tact.— Tubes blancs, bleuissant aussi au moindre contact. — Pied ren- flé au milieu; plein, puis creux, blanc, resserré au sommet. — Chair forme, blanche, bleuissant immédiatement et fortement. — Odeur et saveur nulles. Ilnbitnt. — On le trouve dans les bois ste'riles, à terre, à la fin de Véié et en automne. Solitaire. — Non vidi. Usngcx. — Opinions diverses. Les uns (Bosc) assurent qu'il peut se manger; le plus grand nombre !e considèrent au moins comme suspect. Le fait est que le changement de cou- leur de la chair n'est pas fait pour engager à le récolter, et que l'on fera bien de s'en abstenir, jusqu'à ce que des ex- périences positives autorisent à en faire usage. Boletus luridus. Sch^eff. Bolctus luridus (Schaefr). — Fr., p. 511. — Krombh., tab.38, fig. 11-17. — Dun., n-- 08. — Barl., pag. 67, pi. 33, fig. 1-5. — Gill., p. 642. — Cord., p. 320, pi. 30. — Bol. rubeolarius Bull., p. 326, pi. 190, fig. 1. — Bol. luberosus Bull., pi. 100. — Bol. pernicio^us Roq., p. 65, pi. 7, fig. 1-3. — Bol. enj- thropus (Pers.) — Barl,,p.08, pi. 33, fig. 6-7.— liol.purpu- rcux {?) Bail., [). 68, pi. 33, fig. 8-10. — Bol. saïujuincus Krouibh., tab. 37, fig. 12-15, et tab. 38, fig. 1-6 (?). Noms vulgaires. — Bolet tubôreux, Faux Cèpe, Bruguet fol, Oignon-de-Loup, Cul-de-Saoumo, Massapareu (Langue- doc). (1) Description. — tV/rz/jeau épais, charnu; d'abord sec et velouté, puis (i) Le nom de Massapm'en ( littér.: tue -parent) est donné, dans les Cévennes, à tous les Bolets vénéneux, et le cyancscens passe pour tel. - 146 — légèrementvisqueux, olivâtre, fuligineux, jaune sale ou brunâtre; con- vexe; 7 à 10 centimètres de diamètre. — Tubes longs, libres, jaunes, puis verdâtres sur leur longueur; facilement séiDarables du chapeau; à pores colorés en rouge vermillon ou brique, très-petits. — Pied assez gros, jaune rougeâtre, renflé en bulbe à la base, qui est d'ordinaire plus fon- cée. En haut se trouve un réticulum rouge fin, ou des ponctuations rou- ges, quelquefois des stries longitudinales rougeâtres. Ce pied est plein, allongé, filandreux, spongieux au centre, haut de 7 à 8 centimètres. — La Chair est ferme d'abord, puis molle; jaunâtre; elle devient rapi- dement bleue, puis brune. — Spores ocracés. — Saveur nxxWe ou désa- gréable.— Odeur sulfureuse. Vdiriétés. — Bien des botanistes considèrent leBoletus Sa- larias, dont il sera bientôt parlé, les Boletus erytlirojms, lu- pinus, et d'autres encore, comme des variétés du luridus. La vérité, c'est qu'on pouvait faire un groupe général des luridi, caractérisé par le changement de couleur de la chair, la petitesse et la couleur rouge des pores de l'hyménium, et par les propriétés nocives qui sont les signes communs à tous ces Champignons si voisins. La délimitation exacte des espèces est mal faite, et, si tant est qu'on veuille divi- ser ce groupe, il faudrait donner des caractères distinctifs plus nets que ceux que l'on connaît jusqu'à présent. Ainsi le réticulum rouge du sommet du stipe manque souvent dans le Bol. luridus, et on trouve bien des passages entre les sim- ples stries, les ponctuations, le réticulum lâche et, enfin, le ré- seau serré et fin du Boletus Satanas. Cette distinction exacte des expèces est donc encore un travail à faire. — M. Gillet admet deux variétés , l'une à pied réticulé (var. rubeolarius), l'autre à pied pointillé (var. erythropus). Le pied est souvent rouge à la coupe, surtout en bas. Il garde la couleur bleue plus longtemps que la chair du chapeau, qui la perd au bout d'une demi-heure et reste alors grisâtre. Habitat. — Il est assez commun, à terre, dans les bois; il vient ordinairement isolé. — Je l'ai trouvé assez bien caracté- — 117 — risé au bois de Saint-Antoine, en septembre 188.*}. — La Mourc. Propriétés. — La confusion qui existe entre les espèces voi- sines se retrouve naturellement quand on vient à parler des propriétés. Aussi les uns donnent-ils comme comestible, et comme mangé dans divers pays (Palisotde Beauvois, Aschor- son, Lcnz, Persoon, etc.), ce Champignon, que d'autres dé- clarent très-pernicieux (Paulet, Roques, Viviani, etc.). — On trouvera plus loin une expérience qui, si peu probante qu'elle soit (on en verra Ja raison), ne laisse pas que d'engager à se méfier beaucoup du Bolctas laridus. Boletus Satanas Lenz. Boletiis Satanas (Lenz.). — Fr., p. 510. — Gill., p. 642. — Cord., p. 323. — Bol. )nannoreus Roq., p. 65, pi. 6 (?) — Bol. sanguineus Krombh., tab. 38, fig. 1-6 (?). — Bol. purpureus Barl., p. 68, pi. 33, fig. 8-10 (?). Description. — Chapeau charnu, épais, fauve clair ou alutacé, sou- vent brunâtre ou olivâtre au centre, blanchâtre sur les bords, glabre, visi^ueux, régulier, arrondi. — Tubes étroits, libres, verdàtres ou jau- nâtres sur leur longueur, rouge carmin à roriUce. — Pied gros, ven- tru, réticulé de rouge au sommet, égal eu longueur au diamètre du chapeau. — Chair épaisse, spongieuse, blanche, mais devenant rapi- dement rouge ou violacée. — 6"/>o/'es jaunâtres. — Goût nul ou douceâ- tre.— Odeur désagréable. Cette description ne ressemb!o-t-elle pas singulièrement à la précé- dente ? Si Ton cherche à distinguer les deux espèces, je pense qu'il faudra se baser surtout sur le réticulum rouge du haut du pied, qui est beaucoup plus fin chez le Satanas que chez le /jw/'^ms, et sur le change- ment de couleur de la chair, qui devient bleuâtre ou noirâtre chez le Bol. luridus, et au contraire rougeâtre ou violacée chez l'espèce dont il est ici question. Peut-être aussi lo Satanas a-t-il le pied plus rentlé en son milieu, le chapeau un peu plus clair(?) Ce ne sont guère là que des nuances. UabituI . — Trcs-rare chez nou?, où il est épars dans quel- — 148 — ques bois de Chênes verts, — On me l'a souvent envoyé du côté de Mazamet, où il pousse assez abondamment. — Céven- nes. Bois de Saint-Sauveur (J.-E. Planchon), Lasalle. — Été, automne. Propriétés. — Vénéneux. — Lenz en a fait l'essai. Confusions possibles. — On peut le confondre très-facile- ment avec le Bol. luvidus, et tous deux, non moins facile- ment, avec deux ou trois espèces voisines, admises par les auteurs. Les confusions n'auront pas grande importance, puis- que tous ces Champignons sont à rejeter. Quant à ne pas les distinguer des bons, la chose me paraît difficile, le groupe tout entier des luridi étant, dans son ensemble, assez bien séparé des autres. Les pores rouges, qu'ils ont tous, suffi- raient à la rigueur à les faire laisser de côté; et, d'une façon générale, on fera bien de ne jamais employer de Bolets dont la chair change de couleur. On pourra bien ainsi perdre quel- ques Champignons mangeables, mais on n'en laissera aucun qui soit vraiment bon. Je signalerai encore le Boletus regiiis (Krombholtz, tab. 7. — Fries, Hym. Eur., éd. II, p. 508. — Gill., 646), qu'on m'a expédié de Mazamet, où il est abondant, et que j'ai aussi ren- contré aux environs de Montpellier. Il se rapproche assez de la fig. de Dunal (n° 73, Bol. ventricosus), sauf la couleur, qui est rouge sur le chapeau et sur la base du pied, tandis qu'elle est marron sur la figure. Le Boletus regius a le pied très- renflé, rouge en bas. Il ne change pas de couleur à la coupe; il passe pour mauvais dans les pays où il pousse; mais, en général, les paysans ne mangent guère que les Boletus edulis et xreus.Le granulatus lui-même n'est pas connu comme comestible ; c'est ce qui m'a — MO — bien des fois permis d'en faire ample provision, même après les ramasseurs de profession. Ce n'est point ici le lieu d'accumuler les descriptions. J'in- dique seulement que j'ai recueilli, soit au mas d'Estor, soit à Jacou, soit à Doscare, plusieurs Bolets dont je n'ai nulle part trouvé d'exacte description, et qui tous peuvent se ranger sous l'e'tiquette commune de luridi. Ne pouvant les décrire tous, j'en renvoie l'étude à un travail ultérieur. POLYPORUS Les Polypores sont des Champignons caractérisés par un hyménium formé de tubes comme celui des Bolets, mais insé- parables ou difficilement séparables de la chair du chapeau, qui^descend entre les tubes. Les pores sont extrêmement pe- tits. Ces Champignons sont le plus souvent subéreux ou li- gneux, et croissent indéfiniment. Les Polypores sont surtout des Champignons des pays chauds. La variété des essences de ces pays amène aussi une grande diversité de ces Champignons, qui sont le plus souvent arboricoles et qui ne viennent d'ordinaire que sur une même espèce d'arbre. — Au point de vue botanique, l'étude des Po- lypores est d'autant plus intéressante qu'elle est encore très- peu avancée. Les Champignons des pays chauds sont mal connus, comme la plupart des contrées qu'ils habitent, et la connaissance en serait nécessaire pour donner aux Polypores de nos pays un classement méthodique. Mais, aux points de vue qui font le sujet de ce travail, ce groiiiie immense ne présente que peu d'intérêt. La plupart des Champignons qui le composent sont ligneux et ne peuvent tenter personne, ni par conséquent causer d'accidents. Quelques-uns sont comes- tibles dans leur jeune âge; mais ce n^est jamais là qu'un plat fort dédaigné des classes aisées. Je n'ai donc à traiter ici que - 150 — le Polypore officinal, recommaadé à l'attention par ses usages médicinaux, à dire quelques mots des espèces qui fournis- sent l'amadou, et à énumérer enfin les rares espèces dont les paysans tirent quelque parti. Polyporus officinalis Fr. L'Agaric blanc Polyporus offlcinsilis Fr,, p. 555. — Gill., p. 677. — Cord., p. 335. — Boletus laricis (Jacq.). — Bull., p. 353, pi. 296. — Po- lyporus laricis Roq., p. 53. — Boletus purg ans (Pers.). Noms vulgaires. — Agaric blanc. Agaric purgatif. Agaric officinal, Agaric des pharmaciens. Bolet purgatif, Polypore du Mélèze. Description. — Ce Champignon est charnu-subéreux, sessile, attaché par le côté aux troncs des Mélèzes ; la face supérieure est marquée de sillons concentriques, indiquant en années l'âge du Champignon. L'écorce est blanchâtre, marquée de zones brunes ou fauves, dure, épaisse. Les pores sont courts, petits, jaunâtres. La chair est spon- gieuse, coriace, très-blanche, friable quand elle est sèche. C'est elle qu'on trouve dans le commerce., — ha, saveur est d'abord douceâtre, puis tout à la fois amère, sucrée ettrès-âcre (Guibourt). — L'odeur est celle de la farine fraîche. Habitat. — Vient sur le Mélèze en Gircassie, en Carinthie et dans les Alpes (Dauphiné). — Il est, par conséquent, absolu- ment inconnu dans notre région. Cependant, si j'en ai parlé, c'est que les reboisements, poursuivis avec tant d'ardeur dans les Gévennes par l'administration forestière, se font en par- tie avec des Mélèzes, et que, dans quelques années, ce Cham- pignon pourra devenir assez fréquent. Usages. — Abandonné à peu près complètement aujour- d'hui, le Polypore du Mélèze a joui pendant très-longtemps d'une grande réputation, surtout dans la médecine des Arabes. — mi — C'est un purpratif drastiqno très-violent. On l'a employé contre les vers et contre les sueurs nocturnes dosphthislqncs. — Au- jourd'hui on s'en sert encore dans la médecine vétérinaire. — On lui reproche avec juste raison d'être iné^ral dans son ac- tion, et d'af^ir tantôt comme purp^atif, tantôt comme vomitif, tantôt comme éméto-cath.artique. Le tannin qu'il contient fait qu'il peut remplacer la noix de galle dans la fabrication de l'encre. C'est celui de Carinthie qu'on estime le plus. Polyporus fomentarius Fr. L'Araadouvier PaJi/porns fomentarius Fr., 558. — Roq.,p. 54. — Cord., p. 334, pi. 40. — Uoleius fomentarius (L.). — lioletus uncjula- tus (SchîBff.).— Bull . , p . 357, pi . 491 , fig. 2, et pi . 401 .— Fomci fomentarius Gill., p. 686. Noms vulgaires. — Boula, Amadouvier, Agaric de Chêne, Agaric femelle. Description. — Ce Champignon est sessile, appliqué par le côté sur le tronc des arbres ; il a la forme générale d'un sabot de cheval. — Uccorre en est brune, noirâtre, glabre, luisante, très-dure. A l'inté- rieur est une chair épaisse, plus ou moins rougeâtre, ferrugineuse, fibro-ligneuse. — Les pores sont souvent stratifiés, nombreux, petits, d'abord glauques et pruineux, ensuite de couleur ferrugineuse. Des zones concentriques, indiquajit l'âge du Champignon, se trouvent sur le chapeau, marquées par des sillons profonds. Ilahifnt. — Sur les vieux troncs des Frênes, des Saules, des Pommiers, des Hêtres et des Bouleaux. Usarjcfi. — On s'en sert comme hémostatique. Après l'avoir débarrassé de son écorce et de ses tubes, on le coupe en tranches, que l'on fait macérer dans de l'eau chargée de les- sive ; quelquefois on le fait fermenter en le plaçant au centre d'une masse de plantes vertes récemment coupées (Soubei- — 152 - ran). Pais on frappe ces lamelles avec des maillets, pour en rompre les fibres ligneuses. On les rend ainsi moelleuses, souples et propres à l'usage médical. Si l'on fait tremper ces lamelles dans de l'eau contenant du nitrate de potasse en dis- solution ou de la poudre à canon en suspension, on obtient de l'amadou. Le Polypore est un excellent moyen d'hémo- stase, très-fréquemment employé. Polyporus igniarius Pr. Polyporus igniariusFr., p. 559. — Gord., p. 335. — Dole- tus igniarius{L.). — Bull., p. 361, pi. 82 et 454, fig. A, B, D, F.—Boletus obtusus (Fers.) DC. FI. fr., t. 2, p. 117, n° 309.— Fontes igniarius Gill., p. 687. Noms vulgaires. — Boula, Agaric de Chêne, Esca, Esco, Campairol. Description. — Très-voisin du précédent, ce Polypore est sessile, d'abord globuleux, puis étalé ; mou quand il est jeune, très-dur par la suite; à bords arrondis. Il est marron, de nuances diverses, allant jusqu'au noir. Des sillons concentriques en indiquent l'âge. — Les tu- bes sont courts, étroits, réguliers. On les voit à peine. D'abord blancs, ils ne tardent pas à prendre une teinte marron clair. — La chair est de couleur ferrugineuse ; d'abord molle, puis subéreuse, elle de- vient enfin très-dure; elle est formée de couches superposées. Habitat. — Sur les troncs des arbres, surtout des Chênes, un peu partout. Usages. — Les mêmes que pour le précédent. Il sert aussi à la teinture en brun foncé. J'ai dit plus haut que quelques Polypores pourraient servir d'aliment. Les Polyporus ovinus Fr. , tuberaster Fr., sgita- inosus Schseff., frondosus Fr. , Pes-Caprae Pers., le sulfii- reus même et bien d'autres encore, sont en effet mangés dans beaucoup de pays. Quelques autres sont suspects. Leur volume les recommande aux paysans, qui voient avec un seul Cham- pignon un repas assuré pour toute la famille. Mais il faut que les pieds soient bien jeunes pour pouvoir être manges, et, en outre, ce sont des plats au-dessous du médiocre. Je n'en recom- mande l'usage à personne. Quelques-uns sont employés par les teinturiers. — Le Polyporus liicidas est remarquable par son aspect vernissé: on le dirait en cire. Il est dur et ligneux, et ie le signale seulement à cause de sa fréquence sur les vieux Chênes. — Grammont, la Moure, Doscare, etc. FISTULINA Cette tribu ne se compose que d'une seule espèce, la Fista- lina hcpaticn,qm fait le passage des Polyporéesaux ITydnéos. — Ilyménium infère, d'abord verruqueux, puis formé do tubes très-serrés, mais libres entre eux. Champignon charnu. Fistulina hepatica Fr. La Langue-de-Bœuf. Fistulina hepatica Fr,, p. 522. — Krombh., tab., 5, fig. 9- 10. — Dun., n" 57. — Rarl., p. 75, pi. 30, fig. 4-7(oplimè). — Gill., p. 653. — Gn'd., p. 314, pi. .33. — Fistulina buglos- so/de-s Bull., p. 314, pi. 464-497. — Uoletus hepaticus{Schseiï.). — l)u!l.. pi. 74. — Krombh., tab. 47. — llijpodrys hopaticus Roq., p. 49, pi. 2, fig. 4. Noms vulgaires. — Langue-de-Bœuf, Foie-de-Bœuf, Lan- gue-de-Chêne, Langue-de-(ihàtaignier, Glu de Chêne, Fislu- line hépatique, Bolet-foie. Description. — Champignon charnu, sessile, ou supporté par un pédoncule gros, court et latéral. La face supérieure est d'abord gre- nue, puis lisse, gluante, irréguliore, mais ordinairement allongée sous forme de langue, rouge ou rouge-brun. La face inférieure est formée de tubes trés-scrrés, inégaux, libres entre eux, à pores crénelés, 11 — 154 — frangés, blancs, puis jaunâtres ou même rougeâtres. — La chair est épaisse, gélatineuse, un peu fibreuse ; elle a un aspect marbré, dû à des veines colorées nombreuses qui en parcourent la coupe et qui la font ressembler au tissu hépatique, ou plutôt à de la chair musculaire ou à l'intérieur d'une betterave. Si on presse ce Champignon, il en dé- coule un suc rougeâtre. — U odeur est nulle, le goût un peu acide. — Spo7'€s roussâtres. La taille de ce Champignon est quelquefois considérable. — Un seul pied bien développé peut fournir un repas à plusieurs personnes. Habitat. — On le trouve sur les troncs de Chêne, ou plus fréquemment de Châtaignier, soit à fleur de terre, soit à une faible hauteur. Un chercheur de Champignons mel'a rapporté de Doscare en octobre 1882. — Je l'ai surtout trouvé abondant sur les Châtaigniers de Fleury, près Saint-Hippolyte-du-Fort. — Automne. — Cévennes. Usages. — On le mange partout; mais les avis sont partagés sur la valeur culinaire de ce Champignon. Ce n'est pas un manger désagréable, et il vaut la peine qu'on le récolte. — On en retire quelquefois de la glu, d'où son nom vulgaire de Glu de Chêne. HYDNÉES Les Hydnées sont des Champignons dont l'hyménium, au lieu de former des lamelles ou des tubes^ est en aiguillons cylindriques ou coniques, distincts les uns des autres ( ou encore sous forme de dents, de crêtes ou de papilles, dans d'autres genres que le genre Hijdnum). Je n'ai à parler ici que du genre Hyd?îum. D'autres, tels que les Hericium par exemple, contiennent quelques Champi- gnons comestibles, mais peu estimés, et d'ailleurs je n'en ai jamais rencontré dans notre région. — D'une façon générale^ les Hydnum sont comestibles; mais quelques-uns sont trop — 15..> — coriaces pour être man.q-és, et tous oril besoin d'ètro bien cuits pour être facilement dij^érés. Je passerai rapidement sur ce groupe, et plus rapidement encore sur les Clavaires et sur les Trëmelles, qui terminent la Série des Ilyménomycètes. En effet, ces Champignons sont quelquefois indigestes, mais on n'en connaît pas de vénéneux. Je n'aurai donc à citer que ceux dont on fuit le plus fréquem- ment usage, et dont plusieurs, du reste^ sont assez estimés des mycophages. Hydnum repandum L. L"llyde sinué Ilydnum repandum (L,). — Fr., p. 601. — Bal!., p. 311, pl.lT2.— Roq., p. 42, pi. 2, fig. 2.— Krombh., tab. 50,flg. 1- 0.— Dun., n" 51-52. — Barl., p. 80, pi. 30.— Gill., p. 716. — Cord., p. 345, pi. 43. — Ihjdnmn vidcjaro Pers. (auctore Barla). Noms i:id(jnire>i. — Eurchou, Urcliin, Ursin, Eurchon, Erinace, Chamois, Chevrotine chamois, ClievrcUe, Rignoche, Arresteron (Landes), Penchenilla (Toulouse), Pied-de-Mouton blanc, Barbe-de-Vache. Descrfption. — Le chapeau est couleur jaune chamois ou blanclui- tre, charnu, compacte, glabre, à surface lisse, molle, rarement pelu- chée, abords slnués, irréguliers; répidermc est adhérent. — Aiguillons coniques, subulés, décurrents sur le pédicule, concolores au chapeau ou plus pâles, mais d'abord blanchâtres ou carnés ; inégaux, plus courts auprès du pied ou sur les bords; fragiles. — Pied chiwnu, plein, ordinairement excentrique, déformé, quelquefois rentlé à la base. — Chair blanche ou blanchâtre, plus rarement jaunâtre, compacte, fi- breuse, ferme, cassante. — Odeur nulle. — Saveur légèrement amère ou acerbe. Elle disparait par la cuisson. Variâtes. — « Pilous variât albidus, lutcus,subincarnatus. » (Fries.) — L'ilijdnam squamosam Sohœff., qui n'en diffère — 156 — guère que par les peluchures du chapeau, est regardé par Barla comme une variété du repandum.{i) (var. rufesceyis). Habitat. — On trouve ïHydnum repandum à terre, dans les bois, soit en traînées, soit en cercles, soit plus souvent en bancs considérables, qui jaunissent le sol, comme le font les Chanterelles. On le retrouve d'ordinaire chaque année aux mêmes endroits. Ainsi, dans une châtaigneraie au-dessus des Vignals, propriété de M. le professeur Berlin, près de Ma- zamet, on le récolte tous les ans exactement à la même place. Il aime l'ombre et vient en automne. — Bagnols-sur-Gèze. (M. Barrandon.) Usages. — C'est un Champignon très-estimé. Descourtilz, l'ayant évidemment confondu avec un autre, décrit avec dé- tails des accidents graves qui lui sont arrivés à la suite de l'ingestion de ce Champignon (2). En réalité, il est très-bon et ne peut faire courir aucun danger. Confusions possibles. — Les pointes le classent tout de suite dans les Hydnura, et il est le seul à avoir cette couleur cha- mois ou dorée, qui se rapproche de celle de la Chanterelle. Hydnum imbricatnm L. Hijdnum iinbricatiun L. (Schœff.) . — Pries, p. 598. — Krombh., tab. 49, fig. 1-6.— Barl., p. 78, pi. 38, flg. 1-4 (op- timè).— Gill., p. 718.— Cord., p. 344. —Hydnum cervinum •pers. — Hydnum subsquamosum Dun., n" 50 (?). Noms vulgaires. — Bouquin-Barbo,Bouchin-Barbo, Barbe- de-Bouc, Barbe-de-Vache , Grande Chevrette, Chevrotine, (1) Barla, Champ, prov. Nice, p. 81. (2) Descourtilz, Champ, comest., p. 183. Plydneécailleux, Poucherille, Moissin. Barbe (nom commun à tous les Ilijdnum). Description. — Chapeau charnu, dpais, brunûtrc, irrégulier, d'abord convexe, puis déprinatS couvert de larges sciuames dressées, surtout au contre, plus foncées que le reste du chapeau, floconneuses, disposées concentriquement. Les bords sont ondulés ou même lobés. — Aiginllans lisses, cylindro-coniques, nombreux, aigus, fragiles, inégaux, décur- rents, blanc grisâtre, cendrés. — Pied court, lisse, inégal, continu avec la chair du chapeau, ferme, épais, soc, glabre, grisâtre ou fauve. — Chair blanche, pâle, devenant quelquefois roussâtre à l'air, ferme. — Odeur nulle ou agréable. — Saveur un peu acide. Habitat. — Sous les Pins et les Sapins, à l'ombre. Il est as- sez commun. Je l'ai reçu de Mazamet, où il est abondant. — Montpellier, bois de la Moure, un exemplaire. Usage.'^. — Il est comestible, bien qu'un peu indigeste. Tous ces Hydnum ont besoin d'être bien cuits. — La saveur acide disparaît complètement par la cuisson. On fait encore usage, dans plusieurs pays, des Hydnum le- vigatum Swartz, riifescens Schseiï., violascens A\h. et Schw., coralloïdcs Scop., Cajnit-Medusx Bull., et de quelques au- tres encore. Avant d'arriver aux Clavaires, je dois dire un mot du genre Craferellas (Théléphorées), qui fait le passage des Hydnécs aux Clavariécs. —Ce genre se rapproche aussi beaucoup des Chanterelles, c'est-à-dire des Agaricinées. Ce sont des Cham- pignons membraneux, peu charnus, dont l'hyménium est in- fère, lisse, ou peu rugueux. Le seul Champignon que j'aie à nommer dans ce groupe est le Crnterellus cornucopioides Fers. (1), auquel la forme en entonnoir et la couleur noir de (1) Peziza coriwcopwnks L., Cantharellus cornucopioides Fr. — Krombh., Helvellus cornucopioides Scop. Merulius cantharellus Pers. Craterellus cornucopioides Schceff. — 158 ~ fumée donnent un aspect étrange. La face inférieure porte quelques rides peu marquées, qui rapprochent ce Champi- gnon des Chanterelles. Je l'ai trouvé à Lodève (bois de PEvê- que) et au bois de Doscare. — On l'appelle vulgairement la Trompette des morts. Il est comestible, mais peu estimé. CLAVARIÉES Le genre Clavaria nous intéresse seul. Ce sont des Champi- gnons rameux ou non, dont l'hyménium est placé extérieu- rement tout'autour d'un hyménophore allongé, charnu ou co- riace, L'hyménium est sec et homogène; pas de chapeaudis- tinct. Les Clavaires sont nombreuses, mais beaucoup d'espèces admises pourraient bien, 'comme le fait remarquer Cordier, n'être que de simples variétés. En tout cas, les unes sont coriaces et ne peuvent être consommées, les autres sont co- mestibles. Une trop grande quantité ferait certainement mal, car ces Champignons sont indigestes, mais on n'en, connaît pas un qui soit toxique. Comme, d'autre part, ce genre est très- facile à reconnaître au seul aspect extérieur, je n'ai pas à insister longuement sur les espèces qui le composent. Clavaria flava Sch^eff. ClamrisL ftava (Schseff.) — Fr., p. 666.— Dun., n° 44, IL— Krombholtz, tab.53, fig. 8, — Barl., p. 85, pi. 40, fig. 5. — Gill., 764. — Cord., p. 354, pi. 46, flg. 1. — Clavaria coral- loides (L.) — Bull., p. 201, pi. 496, fig. 3, et pi. 222.— Roq., p. 33, pi. 1, flg. 1. Noms vulgaires. — Menotte, Mainotte, Espignette, Clavaire coralloïde, Barbe-de-Chèvre, Balai, Buisson, Tripette, Gai- — 150 - molo, Gaiiteline, Gallinctto, Galinola(Alais), Poule, Tied-de- Goq. Ilnhitat. — Comme toutes les Clavaires, elle aime l'ombre. Dans les bois, dans les mousses, quelquefois en grand nom- bre. — Bagnols-sur-Côze (Gard), Mais, toutes les Ccvennes. Usurier. — C'est une des Clavaires les plus estimées : par une exception à noter, elleserait facile à digérer. Nourriture très-saine. — On en fait à Alais une grande consommation. Clavaria botrytis Sch.eff. Clavaria botrytis {SchcQÏÏ). — Fr. p. 007. — Roq.^ p. 35. — Krombh., tab. 53, fig. 1-3. — P.arl., p. 83, pi. 40, fig. 1-3 (optimè). — Gill., p. 701. — Cord.., p. 353, pi. 47. — Clavaria acroporphyrea {Schtxifï.) . — Clavaria plcbeja (Jacq.) Noms vulriaircs. — Clavaire botrytoïdo, Ganteline, Tripette, Barbe-de-Bouc, Barbe-de-Chèvre, Richetta, Manetos, etc. Description. — Cette plante a l'aspect extérieur d'un chou-fleur : d'un tronc unique, grros, blanchâtre, très-épais, se détachent de gros rameaux, qui se subdivisent à leur tour en une foule d'autres très- petits et courts, subrugueux, inégaux, fragiles. Les extrémités sont rouges, ce qui rend cette Clavaire facile à distinguer des autres. — C/iair blanche. — Odeur faible. — Saveur agréable. Habitat. — Bruyères, bois, feuilles; souvent elle pousse exactement aux endroits où on l'a déjà trouvée. — Céven- nes, Montagne Noire, le Fourchât, près Mazamot. Usages. — Excellente à manger. C'est une des plus recher- chées par toutes les classes de la société. Clavaria grisea Pers Clavaria qrisra (Pers). — Fr., p. 672. — Krombh., t. 53, fig.9-10.— Barl.,p.8G pi. 41, fig. 1-2.— Gill., p. 707. -Cord., — 160 — p. 355. — CL cinerea Dun., n° 45. — Je ne la distingue pas bien de la Cl. cinerea des auteurs. Cette espèce est tout entière d'un gris cendré ; le tronc est épais, couleur blanc sale; les rameaux sont inégaux, atténués. Je la trouve quelquefois dans nos bois (Ghâteaubon, Bione, etc.). — Comestible. — Il faut citer encore les Clavaria cine- rea Bull., amethysteaB\i\\.,aurea Schseff., /brmosa Pers. fas- tigiatah., et bien d'autres qui sont aussi comestibles. TRÉMELLINÉES C'est la dernière section des Hyménomycètes. Je n'en dirai qu'un mot. Ce sont des végétaux gélatineux, de forme essen- tiellement variable; homogènes, pouvant être desséchés, et reprendre ensuite leur forme, quand on les imbibe d'eau. L'hyraénium recouvre toute la superficie de ces Champignons, qui sont diversement lobés ou plissés. Aucun de ces Champignons n'est vénéneux, Il n'y a donc pas à insister sur ce groupe. Une seule espèce mérite qu'on en parle. Tremella mesenterica Retz. Tremella mesenterica (Retz.). — Fries, p. 691. — Gill., p. 779. — Cord.,p.360, pi. 48. — TremellachrysocomaB\i\\., p. 230, pi. 174. Description. — C'est une belle plante, d'un jaune orangé vif; or- dinairement coriace, gélatineuse, lobée, plissée irrégulièrement. Elle n'a pas l'odeur de Champignon. — Après dessication^ on peut avec de l'eau lui rendre sa forme primitive. Habitat. — Elle est commune sur les vieux bois, les vieux troncs, les planches pourries. — Automne. Usages. — Comestible. — Peu estimée, comme du reste toutes les Trémelles. TflOISIÈME PARTIE DE L'EMPOISONNEMENT PAR LES CHAMPIGNONS L'empoisonnement par les Champignons est ordinairement accidentel, cela va sans dire. L'empoisonnement criminel a pu être observé quelquefois: Tardieu et Roussin en citent deux exemples, et, s'il faut en croire les classiques romains, Ag-rip- pine se serait servie de ce moyen pour se débarrasser de l'empereur Claude. Mais ici les Champignons n'étaient que le véhicule de la substance toxique. En cas de crime, on de- vrait, comme en cas d'accident, baser surtout le diagnostic sur les symptômes observés, l'analyse chimique et les lésions anatoraiques ne pouvant mettre sur la voie. Les empoisonnements en question se produisent de pré- férence à deux époques de Tannée: au printemps, au mo- ment où sortent les Amanites printaniôres, et surtout à l'au- tomne, après les grandes pluies de septembre. Les années humides, en favorisant la sortie-des cryptogames, augmen- teront le nombre des accidents. On en voit un exemple frap- pant dans la rareté des empoisonnements en 1883, quand l'année précédente avait fourni, dans la seule ville deLodève, une quinzaine de cas plus ou moins sérieux. — Les popula- tions rurales, habituées dès l'enfance à connaître les Champi- gnons, fournissent peu devictimes. Ce n'est pasquelesdonnées scientifiques ou du moins rationnelles, nécessaires pour bien ~ 162 — distinguer les espèces, soient familières aux paysans ; mais l'expérience se transmet chez eux de père en fils, et, tout en appuyant leur choix de superstitions plus ou moins grossiè- res, ils ne cueillent que les bonnes espèces. Les membres des classes riches ne mangent guère, en fait de Champignons, que ceux qui sont pris sur les marchés des villes, où s'exerce toujours la surveillance municipale (1). Mais les victimes or- dinaires du poison sont les ouvriers et les petits bourgeois, qui vont le dimanche se promener à la campagne, et sont tout heureux de rapporter chez eux un plat qu'ils ont cueilli eux- mêmes et dont ils comptent se régaler à peu de frais. Ils ont dans les préjugés que j'ai énumérés plus haut une confiance absolue. Qu'un voisin ou qu'une voisine leur affirme l'inno- cence de leur cueillette, et leur conviction se change en cer- titude. Ce qu'il y a de plus grave (et c'est là encore une des particularités de cet empoisonnement), c'est que l'ignorance d'un seul met la vie de plusieurs en danger. Tin plat de Cham- pignons ! mais c'est une bonne aubaine. Tout le monde en veut; on invite les parents, on remercie le généreux dona- teur qui s'est donné la peine d'aller cueillir ce plat appétissant, et l'idée de faire contrôler la récolte par une personne com- pétente ne vient à l'esprit d'aucun des convives. L'espèce du Champignon vénéneux a une influence capitale. Le poison n'est pas le même chez toutes, et l'action est toute dif- férente, suivant que l'on a affaire, par exemple, à des Russules ou à des Amanites. D'une façon toute générale, on peut dire que les accidents mortels ne sont guère dus qu'aux Amanites. Sans doute, d'autres Champignons ont pu occasionner des era- (1) Cette surveillance n'est pourtant pas toujours assez rigoureuse, comme on pourra s'en convaincre en lisant les observations qui sui- vent. Plusieurs fois les Champignons toxiques ont été achetés au mar- ché. - 103 — poisonnements, et même quelquefois amener la mort; mais, dans l'immense majorité des cas, c'est du côté des Amanites, et tout particulièrement du côlé de VArjaricus balbosui^, qu'il faut diriger les recherches pour trouver le coupable dans un cas de mort. L'influence de la préparation qu'ont subie les Champignons est incontestable. Les expériences de Gérard, contrôlées par une Commission du Conseil de salubrité dont faisaient partie }>[},[. Cadet-Gassicourt, Cordicr et Beaude,le démontrent par- faitement. Celles de M. Boudier, sur les Russules toxiques, ne sont pas moins concluantes, et le fait, constaté depuis bien longtemps, qu'on mange dans certains pays, et en Franco même, beaucoup de Champignons vénéneux après une ébul- lition dans l'eau salée, montre que le principe toxique peut être assez facilementenlevcaux Champignons, en même temps, bien entendu, que toutes les qualités de saveur et d'arôme qui les font rechercher des gourmets. — La préparation devra donc être mise en ligne de compte, dans le diagnostic de cet em- poisonnement. Puisque j'en arrive à ce diagnostic, il faut faire ressortir toute l'importance que prennent ici les commémoratifs. La coïncidence entre l'ingestion des Champignons et les accidents peut, il est vrai, être fortuite; mais c'est là une circonstance qui ne passera jamais inaperçue. Le malade lui-même posera souvent, dans ce cas, son propre diagnostic, et le médecin n'aura qu'à vérifier, d'après les symptômes qu'il observe, si c'est bien aux Champignons qu'il doit les attribuer. Si, quelques heures après avoir mangé des Champignons, l'on se sent tant soit peu indisposé, on pense immédiatement à une intoxication, et lorsque, spontanément ou par l'inter- vention médicale, on s'est débarrassé de l'aliment réputé toxi- que, on estime avoir échappé à un grand danger. En est-il - 164 — toujours ainsi ? Je ne le crois pas, et je pense que, dans bien des cas, ces prétendus empoisonnements ne sont que des in- digestions. Les Champignons, même les plus estimés, sont un mets peu assimilable ; les cellules dont ils se composent résistent beaucoup à l'action du suc gastrique, et, sans parler même des idiosyncrasies qui rendent certains estomacs abso- lument réfractaires à la digestion de ce plat, ils ne sont réelle- ment innocents que pris en petite quantité. Le diagnostic pourra s'établir d'après les Champignons ingérés; mais bien plus souvent on devra recourir aux symptômes, qui seront toujours purement gastriques et en général moins graves que ceux qu'on observe dans une véritable intoxication. Cepen- dant on ne devra jamais perdre de vue ce fait, que les sym- ptômes nerveux graves sont souvent précédés d'une période plus ou moins longue, et souvent très-longue, pendant la- quelle les symptômes gastro-intestinaux se montrent seuls. On réservera donc le pronostic, à moins qu'on ne soit abso- lument certain que les Champignons ingérés n'étaient pas toxiques. Un autre point est à examiner, avant d'arriver à l'empoi- sonnement proprement dit. On a souvent rapporté des cas d'intoxication par des Champignons réputés comestibles et même par les plus connus, les Champignons de couche ou les Morilles par exemple. Le plus souvent, les accidents sont réels ; mais dans ce cas les Champignons étaient trop avancés. Il est certain qu'en vieillissant, et avant même que la putré- faction ne commence à se montrerchez eux, les Champignons acquièrent des propriétés nocives. Ce n'est pas le résultat de phénomènes de décomposition, ou du moins la décomposi- tion est si peu avancée qu'on ne peut la reconnaître. Et pour- tant les faits sont là, qu'il faut chercher à expliquer. Le temps m'a manqué pour faire les expériences que je comptais ten- ter à ce sujet; mais, en songeant à la proportion considérable — ir.5 - d'azote que renferment les Champignons, on se demande s'il n'y aurait pas, chez ces êtres, formation d'un de ces produits toxiques qui se montrent dans lesmatiùres animales : je veux dire des ptomaïnes, ou du moins quelque substance analogue. Ceci n'est, bien entendu, qu'une simple hypothèse, et c'est à l'expérience de la contredire ou de la confirmer. Dans les accidents de ce genre, on ne constate comme, dans le cas pré- cédent, que des phénomènes d'ordre gastrique. Les renseignements botaniques seront-ils bien utiles dans le diagnostic do l'empoisonnement par les Champignons? M. Boudier, le seul qui ait jusqu'à présent étudié sérieuse- ment ce point intéressant de la médecine légale, conclut à l'importance considérable de l'examen microscopique, soit des matières vomies, soit du contenu de l'intestin ou de l'estomac en cas d'autopsie (1). Il montre que les spores et même le tissu du Champignon résistent très-bien à l'action du suc gastri- que et qu'il est facile de les retrouver, même après plusieurs heures. Tout ce que dit M. Boudier sur les différences entre les tissus et les spores des divers Champignons vénéneux qu'il a examinés est parfaitement exact, et cette distinction est des plus faciles lorsqu'on la fait dans le cabinet de travail. Mais que l'on ne compte pas trop sur ce moyen de diagnostic et de pronostic. J'ai examiné très-souvent, soit les déjections, soit le contenu du tube digestif des animaux auxquels j'administrais des Champignons. Il est très-rare quej'aie bien distinctement retrouvé les spores, et encore moins les fragments de tissu des Champignons. Si l'on ajoute que j'étais averti de la probabi- lité de leur présence, on verra combien la difficulté sera plus grande pour l'expert chargé de rechercher un poison quel- conque, sans autre indication. Enfin, après un temps variable, mais généralement assez court, les Champignons ont été éli- (I) Boudier, les Champ., p. 82. - lOG — minés par les voies naturelles, et il est inutile d'en chercher trace. Ce moyen n'a donc aucune utilité dans le cas où la mort n'a suivi l'empoisonnement qu'à trois ou quatre jours d'inter- valle. Cependant on ne repoussera pas à priori cette source d'informations. Il se peut qu'à l'autopsie on trouve des frag- ments de Champignons assez gros pour être facilement ca- ractérisés au microscope. Dans ce cas, c'est un tissu vérita- ble qu'on a sous les yeux, et l'erreur n'est plus permise. Mais tant que le microscope ne montre que des cellules fungiques dissociées, il est bien difficile et bien hasardeux de se montrer afflrmatif. ; Les lésions anatomiques sont banales, il faut bien l'avouer: sauf le cas où l'on trouve le corps du délit (et on devra le rechercher avec grand soin), l'autopsie est rarement probante. Souvent il n'y a rien du tout. Les taches violettes étendues sur les téguments ne m'ont jamais apparu nettement. L'état des pu- pilles, comme je le montrerai à propos des symptômes, ne prouve absolument rien. L'inflammation intestinale, quand elle existe, est difficile à distinguer de celle que produisent les autres empoisonnements. La congestion viscérale manque très-souvent, ainsi que j'ai pu le constater. En un mot, ce n'est pas là une source de renseignements. Le fait que j'ai le plus souvent observé, dans mes expériences avec les Champignons ou la muscarine, c'est la contraction très-considérable de l'in- testin, et particulièrement du côlon. La chimie aidera-t-elle davantage le diagnostic ? Evidem- ment, non. Il faudrait d'abord savoir bien isoler le poison, qui est inconnu dans la plupart des cas, et puis le caractéri- ser. Je n'ai rien à ajouter sur ce point : tout absolument est à faire, et l'on éprouve plus encore que pour les autres poisons végétaux la difficulté qui s'attache à la recherche de tous ces produits toxiques. Or, en médecine légale, le diagnostic peut se baser sur % — ]CÛ — trois ordres de considérations: la sympton-atologiOjles lésions cadavériques et les recherches chimi(iiies. Les deux derniers ira[)portant à la question aucune lumière, il faut voir si la symptomatologic peut fournir qiielques points de repère dans celte recherche diflicile. Mais ici je laisse la parole aux faits, le nombre des observations que j'ai pu recueillir me permet- tant de ne pas résumer les tableaux symptomatologiques donnés par divers auteurs. Je noterai seulement, à la suite de ces observations, les symptômes que je n'ai jamais constatés et dont on parle d'ordinaire partout. OBSERVATIONS Les pluies de septembre 1S82 ont singulièrement favorisé la croissance des Champignons. Mais, par un hasard jusqu'à présent inexpliqué, l'Oronge, qui abonde d'ordinaire sur le marché de Lodève, y fît à peu près complètement défaut. Aussi les habitants de cette ville remplacèrent-ils leur plat ordinaire de Champignons par ceux qu'ils trouvaient çà et là dans la montagne. Les résultats de ces imprudences ne tar- dèrent pas à se montrer, et des accidents nombreux se pro- duisirent. M. le docteur Réfrégé, de Lodève, eut l'obligeance de me prévenir que plusieurs cas d'empoisonnement s'étaient présentés dans sa clientèle, et de m'engager à venir prendre moi-même les observations. Je remercie ici publiquement cet habile et savant praticien de la complaisance dont il a fait preuve, en m'accompagnant auprès de tous ses malades, et des services qu'il m'a rendus, en complétant, par ses précieux renseignements, les lacunes que mon inexpérience eût certai- nement laissées dans ces observations. La plupart des accidents sont dus, comme on va le voir, à VAfjaricas (Amanita) bidbosus, var. citrina (voir descrip- tion, pag. 59). J'ai dit déjà comment cet Agaric occasionne de — IGS - nombreux malheurs par son aspect engageant. Les symptô- mes, dans les cas qui vont suivre, sont remarquables à plus d'un titre. Mais il convient d'exposer d'abord les faits, et de les comparer ensuite aux résultats des expériences. Observation I" Empoisonnement par les Champignons. — Espèce mal déterminée. — Vertiges, ivresse, vomissements. — Guérison [Ce cas est ancien. Il remonte à cinq ans déjà; mais j'ai pu inter- roger les malades elles-mêmes, et elles m'ont donné des détails très- précis.] A la fin de septembre 1878, M°"= A. Benoît et sa fille, demeurant près de Lodève, à 1 kilom. du hameau de Campestre, vont ramasser des Champignons sur le plateau de l'Escandorgue, non loin de la bara- que de Branle (1). Dans toute leur récolte, un seul leur sembla suspect; mais la présence de la «collerette» leur parut une garantie suffisante, et elles le mirent avec les autres. Le soir même, elles mangent la plus grande partie de ces Champignons et s'en trouvent très-bien. Le lende- main, ellesfont cuire le reste, y compris le Champignon douteux, et man- gent leur plat au dîner, vers 6 h. Ii2 du soir. A table même, elles se sen- tent l'une et l'autre prises de somnolence, se couchent de bonne heure et s'endorment. — Vers dix heures du soir, la fille s'éveille avec un ma- laise assez prononcé, la tête lourde. Elle]appelle sa mère, qui éprouve au même moment des symptômes identiques. L'une et l'autre pensent alors aux Champignons de leur dîner; elles se lèvent en tâtonnant, la tête très-lourde, les jambes vacillantes, et passent avec peine dans la pièce à côté, où elles se mettent en devoir d'allumer du feu pour faire de la tisane. Leurs idées étaient déjà troublées, au point qu'au lieu d'allumer le bois dans le foyer ordinaire, elles le placent au milieu de la pièce ety mettent le feu. Alors leur ivresse devient complète: elles se mettent à danser et à sauter autour du feu, toutes deux, pieds nus (1) Le terrain de ce point est formé de tuff'a basaltique, et la silice qui s'y trouve est très-favorable au développement des Amanita bidbosa et muscaria. - ICO - et en chemise, La vue de la llamme qui s't'levait assez haut éveille pourtant chez la mère l'idée d'un incendie: elle cherche à l'éteindre avec une carafe; mais les forces lui manquent, et elle tombe sans con- naissance à côté du feu. Le danger que court sa mère dégrise un peu la jeune fille, qui veut aller chercher du secours. Elle met, dit-elle, plus d'un quart d'heure pour trouver la porte, l'ouvre enfin et sort en che- mise, sous la pluie fine qui tombait. Il est à peu près onze heures du soir. Elle descend un escalier extérieur d'une vingtaine de marches, arrive sur la route détrempée et se dirige vers Campestre, ajant assez de tête pour se rappeler qu'elle était dans de mauvais termes avec son plus proche voisin et qu'il lui répugnait de s'adresser à lui. Néanmoins, sentant ses forces la trahir, elle se décide à frapper à cette porte, qui se trouve à plus de 200 met. de la sienne. L'idée du costume où elle se trouvait ne lui vint môme pas. Le voisin ouvre, surpris de la voir en cet état. A peine a-t-clle la force de lui dire : « Ma mère!., le feu!., au secours! » On la couche dans un lit et on s'empresse de courir à la mère, qu'on trouve toujours sans connaissance auprès du feu qui brûlait. AL le docteur Réfrégé, appelé en toute hàle, accourt et trouve les deux ma- lades guéries. Elles avaient l'une et l'autre vomi :1a fille d'abord, la mère une heure après, et tout s'était complètement dissipé. Il était deux heu- res du matin. Les malades se sentaient bien, brisées seulement et la tête un 'peu lourde. La fille se remit très-vite. La mère passa environ trois mois sans reprendre sa vigueur ordinaire ni son intelligence nor- male. Ces détails m'ont été donnés par les deux malades, dont l'une, la mère, ne se rappelle rien à partir du moment où elle entra dans la cuisine, et dont l'autre, bien qu'ayant au moment même perdu la notion de tout, a retrouvé, le lendemain, le souvenir de tous les détails de cette nuit. L'empoisonnement s'est ici manifesté uniquement par des phénomènes d'ivresse; c'est une ébriété passagère, une sorte d'attaque d'alcoolisme aigu. Les symptômes gastro-intesti- naux n'occupent qu'une place tout à fait secondaire, comme du reste dans l'alcoolisme aigu lui-même. Il n'y a pas eu de trou- bles de la vision. J'ai cherché à déterminer le Champignon coupable. La fille n'y connaît rien et se récuse; mais la mère me donna le 12 - 170 — Champignon dont elle s'était méfiée comme étant blanc et peluché. En voyant des spécimens d'Agaric bulbeux : « Ce n'est pas celui-là, dit-elle; mais il se pourrait bien qu'il y en eût dans mon plat, car, si je l'avais trouvé, je l'aurais consi- déré comme bon. » La Fausse Oronge est écartée d'emblée; elle la connaît. — Il est certain que l'empoisonnement dont il s'agit a été causé par une Amanite. La prédominance des symptômes cérébraux et la marche générale des accidents suffisent à le prouver. Je n'oserais pas affirmer que l'Agaric bulbeux soit en cause; mais, si l'on compare ce cas à ceux qui vont suivre et où le coupable a été sûrement déterminé, on conviendra qu'il y a contre ce Champignon de fortes pré- somptions. Peut-être est-ce aussi VAgar. pantherinus_, qui donne des symptômes analogues, comme on le verra dans les expériences. Observation II Empoisonnement par les Champignons. — Vertiges, délire, guérison. A la fin d'octobre 1882, le nommé Crouzet, serrurier à Lodève, et sa femme, mangent une livre de Champignons « rouges et blancs », qu'on leur avait apportés en les leur donnant comme très-bons. Ils les font cuire en sauce blanche et les trouvent en effet délicieux (sept heures du soir). En les mangeant, ils éprouvent (comme les deux femmes de l'observation I) une envie assez forte de dormir. Ils j résistent, car ils doivent aller à la gare attendre un parent. Vers neuf heures, ils partent. En route, la tête leur tourne, leurs yeux s'obscurcissent, ils titubent, et arrivent à la gare en se rendant très-bien compte que, sans leur appui mutuel, ils tomberaient l'un et l'autre. Leur vue et leurs idées sont trou, blées au point de les empêcher de voir leur parent, qui passe pourtant devant eux. Ils rentrent alors au logis, titubant de plus en plus ; le mari souffre beaucoup. Mais, vomissant d'ordi-naire très-facilement, il se débarrasse en rentrant (dix heures) de tous les Champignons qu'il avait pris. La femme trouve la force d'aller chercher une voisine pour — 171 — demander un médecin. M. le Dr. Réfrégé, occupe ailleurs (1), ne vint (lu'un peu plus tard. Quand il arrive, le mari est au lit, indiiFérent à tout ce qui l'entoure, se plaignant d'une grande lourdeur de tête et d'un poids au creux épigastrirjue. Comme il est débarrassé du poison par ses vomissements, on s'en occupe peu. Pas do coma. La lourdeur de tète se dissipe dès le lendemain, et il no Ini reste qu'un peu de fatigue. Bien autrement grave était l'état de la femme. D'abord celle-ci était enceinte de sept mois; do plus, par une idiosyncrasie assez commune, elle vomissait très-difficilement. Quand le docteur arriva, elle ne le re- connut pas (2). Délire, excitation extrême, sensation de brûlure dans le thorax et l'abdomen, cris violents : « J'ai le corps en feu !.. Je brûle!.. Je suis en enfer 1 » Elle s'est, du reste, rappelé vaguement toutes ces paroles le lendemain. 11 y a chez elle des troubles visuels; elle n'j voit pas. Convulsions cloniques violentes : plusieurs personnes suffisent à peine à la maintenir. Un éméto-cathartique est administré à minuit, mais il n'agit pas immédiatement. Un lavement fait aussi attendre son action. Ce n'est qu'à 2 h. du matin que la débâcle se produit des deux parts. La malade reprend aussitôt ses sens, et la guérison n'est plus qu'une question de temps. Faiblesse pendant trois ou quatre jours. Tout se dissipe peu à peu. Ici encore la détermination du poison n'est pas faite. La cou- leur d'un Champignon n'est pas suffisante pour se prononcer; mais je pourrai plus tard comparer l'état de cette malade à celui d'une autre, la femme Aubenque (obs. VI). On peut, tou- tefois, remarquer une analogie assez grande des symptômes entre les deux premières observations. Notons en passant, sans chercher à l'expliquer, ce sommeil qui s'empare des malades au moment de l'ingestion du poison et (jui s'est produit dans les deux cas. — Dans les deux cas aussi, les vomissements ont fait brusquement cesser les acci- dents cérébraux, pour ne laisser subsister qu'une fatigue phy- (1) C'est ce même soir qu'avait lieu l'empoisonnementrelaté dans l'ob- servation VI. (2) Elle avait pourtant passé trois ans à son service. I — 172 — sique plus ou moins grande, suivant la force de réaction des sujets. Observation III Empoisonnement par l'A^rartcws (Amanita) buliosus.- Vertiges. - Ivresse. —Vomissements. — Guérison. ' Le vendredi 13 octobre 1882, la femme Auge mange des Champi- gnons ramassés da côté de Fozières et de Soumont (1). Elle les soumet à l'action du sel, les égoutte, les fait cuire et les emporte à la fabri- que, où elle les mange à midi. -Il y en avait une douzaine à peu près. Elle ne leur trouve aucun goût spécial. Dès une heure et demie, la tête commence à lui tourner ; elle s'assied, espérant voir passer rapide- ment ce vertige, et boit une tasse de tisane. Les tournements de tête augmentent. A cinq heures, elle veut rentrer chez elle ; mais on est obli-é de l'y accompagner: elle est, en effet, absolument ivre. - Pas de sommeil, pas de soif vive ; quelques nausées sans résultat. Tituba- tion constante. Elle disait elle-même à tout instant :« Je suis ivre. » — Du reste, aucune souffrance. Pas de bourdonnements d'oreille; la vue est seulement un peu obscurcie.-Dès son arrivée chez elle, ele vomit avec l'aide des doigts, à peu près tous les Champignons qu elle avait pris - Deuxième, puis troisième accès de vomissements aqueux, bom- meil d'une demi-heure à peu près ; puis, les symptômes ne s'amendant pas on fait chercher le docteur, qui ordonne des lavements (sept heu- res et demie du soir). -Deux ou trois selles abondantes. La malade s'endort vers dix heures, et s'éveille le lendemain à peu près guérie. _ L'adynamie consécutive a été ici peu sensible. L'appétit est revenu dès le lendemain. La femme Auge a reconnu VAgar. bulbosus dont je lui présentais des échantillons, comme faisant partie de son plat. Voilà un point de comparaison, puisque le Champignon a été ici bien et dûment reconnu. - Tirons d'abord une pre- (1^ J'ai dit que c'est surtout dans cette région qu'abondent la Fausse Oronge et l'Oronge ciguë. Fozières est bâti sur les grès bigarrés (trias.) Soumont, sur les calcaires. Entre les deux est un ilôt de basalte. Deux de ces terrains sont siliceux. Le Châtaignier y pousse partout, et le. Amanites aussi. — 173 - mière conclusion: c'est quo le procédé de préparation par le sel n'est pas d'une efficacité absolue, ou du moins que VAgar. bulbosus fait exception à la rèj?le ordinaire, car ici (et dans un autre cas relaté plus loin) les Champignons ont séjourné dans reau salée et n'en ont pas moins causé des accidents graves.— Les accidents se sont produits une heure et demie après le repas; la lenteur ordinaire d'action du bnlbosus n'est donc pas toujours marquée. On en verra d'autres exemples. —Les rapports de cette observation avec les précédentes sau- tent aux yeux, et je n'ai pas besoin de les montrer en détail. Quelques points ne coïncident pas absolument; mais l'ensem- ble, la marche générale et aussi bien des points particuliers, semblent devoir faire accuser le même Champignon des trois empoisonnements déjà rapportés. Observation IV Empoisonnement par VAgaricus (Amanifa) btdbosus.-YGVtiges.- Crampes. — Adynamie. — Troubles intellectuels. — Phénomènes uniquement céré- braux. — Guérison. La femme X âgée d'environ quarante-cinq ans, demeurant rue des Côtes, àLodève,raange au commencement d'octobre 1882 un quart de livre de Champignons, parmi lesquels deux Agarics bulbeux qu'elle a reconnus quand o^n lui en a montré des exemplaires. Le repas fut pris à quatre heures du soir; elle mange le plat tout entier et seule. Ces Champignons avaient macéré trois heures dans de l'eau salée ; l'eau avait été ensuite jetée, et les Champignons égouttés et pressés entre deux linges. Elle les trouve très-bons, et jusqu'à sept heures rien ne se manifeste. A sept heures moins le quart, tout d'un coup, des vertiges se déclarent, des éblouissements se produisent, des crampes doulou- reuses se font sentir dans les jambes, la faiblesse musculaire est géné- rale. Elle avait l'idée qu'elle devenait folle. L'advnamie et l'incoordi- nation des mouvements lui font faire des maladresses : elle laisse tout tomber. Deux fois la bougie qu'elle veut prendre roule sur le plancher; elle casse successivement trois tasses dont elle veut se servir, et ren- — 174 — verse dans le feu Teau qu'elle veut faire bouillir (1). Le mari, attri- buant avec raison ces accidents aux Champignons, entreprend de trai- ter sa femme à sa manière. Il lui fait prendre au moins 200 gr. d'eau de noix, liqueur fort alcoolique, mais qu'elle avale sans même s'en douter et comme si c'eût été de l'eau ; puis il lui frictionne vigoureu- sement le ventre et le thorax avec de l'ammoniaque. — Les troubles cérébraux s'aggravent de plus en plus, et l'on appelle enfin le docteur. Celui-ci trouve la malade dans une agitation extrême (huit heures soir), ne tenant pas en place, voulant marcher toujours, parlant con- stamment, poussant des cris et répétant sans cesse : « Je deviens folle; il faut qu'on m'enferme [«Parfois des lipothymies. — Elle veut marcher, et ses jambes se dérobent ; si on la relève, elle retombe sitôt qu'on ne la soutient plus. — Elle n'a vu personne dans la chambre, qui a pour- tant été pleine de monde toute la soirée ; elle ne se rappelle que va- guement la visite du docteur, qu'elle' réclamait pourtant à grands cris et qui a passé plus de deux heures auprès d'elle. — La faiblesse des jambes est absolue, et elle veut pourtant toujours essaj-er de marcher. — D'ailleurs, tolérance parfaite et même extraordinaire de l'estomac. Il n'y a chez elle ni nausées, ni malaise. Chaleur normale, pouls nor- mal.— Pas de dilatation pupillaire. — Entre huit heures et dix heures du soir, elle avale 1 décigr. de tartre stibié et 60 grammes de sirop d'ipéca : pas de résultat. — Des titillations sur la luette, dans l'arrière- gorge et jusque sur l'œsophage n'aboutissent pas davantage. Pas même un effort pour vomir. Comptant que l'ipéca finirait par agir, le docteur fait donner un lavement purgatif avec 20 gram. follicules de Séné et 30 gr. sulfate de soude, et se retire, prêt à revenir bientôt si la débâ- cle ne se produit pas, et songeant même, dans ce cas, à faire le lavage de l'estomac. Mais, vers dix heures trois quarts, les vomissements se produisent, précédés par une débâcle intestinale. — A partir de ce mo- ment, les troubles cérébraux s'effacent peu à peu : à minuit, la malade est revenue complètement à elle, mais se souvient très-mal de ce qui s'est passé. Dès lors, elle entre eu convalescence; pendant trois semai- nes encore, elle est vraiment très-fatiguée par cette secousse. Au mo ment où cette observation a été prise (25 octobre), elle se plaint en- core d'adynamie, de mauvaises digestions^ accompagnées de pyrosis (1) Voir, aux expériences, Fadynamie et l'incoordination obtenues par l'action des Amanites {Ag, pantherinus et muscarius). — 175 — et de crampes douloureuses de l'estomac. En un mot, la convalescence est ici très-lcntc. — La malade n'a uriné qu'après la crise. Voilà une observation très-intéressante, en ce qu'elle est le type des empoisonnements par les Amanites. Je n'ai pas eu à ma disposition assez dWijnr. liidbo!^ufi pour fairo|des ex- périences nombreuses, et, d'ailleurs, elles ont déjà souvent été faites, et par de plus babiles; mais j'ai souvent expérimenté, soit la Fausse Oronge, soit l'Agarie panthère ; et, si l'on veut bien se reporter au compte rendu de ces expériences, on sera frappé du rapport symptomatolo^ique avec les observations précédentes, et surtout avec la dernière. Les accidents nerveux ne prédominent pas seulement, ils couvrent toute la scène, et, si quelque trouble g-astro-inlestinal se produit, il est relégué au second plan. Ce n'est pas à dire qu'il n'y ait jamais d'ac- tion sur le tube digestif; mais cette action, qui peut man- quer du reste absolument, n'est jamais que secondaire, tandis qu'elle devient capitale et même unique dans l'empoisonne- ment par certaines autres espèces de Champignons apparte- nant à des genres différents, VAgar. (Crepidotus) olearius, par exemple, oul'.A^.Tr. (Russiila) emeticus, etc. — L'obser- vation doit être rapprochée, non-seulement des expériences, mais aussi des observations précédentes et des suivantes. Les symptômes ne sont pas allés ici jusqu'au coma, probablement grâce à la précaution qu'on avait eue de traiter au préalable les Champignons par le sel; sans cela, je ne doute pas que la femme X... n'eût succombé. Observation V Emi)o\sonncment pa.r VA fjaricm (A manita) hulhosm. — Vertiges. — Troubles visuels. — Ré.solution musculaire. — Délire erotique. — Guérison rapide. Le jeudilO septembre 1883, le jeune Marins J..., ùgc de quinze ans, — 170 — ramasse six Champignons entre Gramont et les Saulières (i), les fait cuire, les mange à 3 heures de l'après-midi : ces Champignons étaient des Agarics bulbeux ; le père les a reconnus quand je lui en ai montré des échantillons. Le plat paraît exquis au gamin, qui se porte à mer- veille pendant trois heures. — Tout d'un coup, à 6 heures, la tête lui tourne, sa vue s'obscurcit, il ne peut plus se tenir debout. 11 appelle sa mère et se plaint uniquement de la tête. Résolution musculaire consi- dérable. — Une selle liquide se produit; puis il parvient à provoquer plusieur fois des vomissements à l'aide de ses doigts, mais il ne vomit que du liquide. Ses idées s'égarent complètement, il ne sait où il est. Miction involontaire sur le sol de la chambre. — Ce n'est qu'à 8 heu- res qu'on trouve enfin un médecin. Le D' Rouquette, amené, ordonne : café, potion à l'huile et au tartre stibié, lavements au chlorure de sodium, sinapismes aux mollets.— Les extrémités sont froides. — Un fait curieux et inobservé encore, c'est l'apparition, dans le délire, d'idées erotiques : le malade adressait à une de ses voisines, dont il ' entendait la voix, des paroles que, au dire de tous ceux qui le connais- sent, il n'aurait jamais prononcées sciemment. — La vue est abolie : il ne voit pas les assistants, mais il les reconnaît à la voix. — La potion vomitive agit. Le lavement reste sans action. La soif est modérée : il boit quand on lui offre à boire, mais ne le demande pas. — Jusqu'à 3 heures du matin, les extrémités restent froides, le délire continue, l'état adjnamique est complet, la vue est toujours abolie. — Tout d'un coup, brusquement, à 3 heures du matin il s'écrie : « Je suis guéri»; et, en effet, à partir de ce moment il revient très-rapidement à la santé. A 3 heures il se lève, un peu faible encore; mais dès midi il sort avec ses camarades, et le soir la fatigue elle-même a disparu à peu près complètement. N'y a-t-il pas dans cette nouvelle observation une con- firmation des précédentes? Sans doute quelques symptômes manquent, et quelques-unss'y trouvent qui manquaient aux autres. Mais, ici encore, la prédominance des symptômes cé- rébraux est nettement accusée. L'adynamie, les troubles delà (1) Probablement sur le tuffa basaltique qui se trouve à moitié che- min entre les deux localités. — 177 — viio, les vertigos, etc., sont communs à la plupart de ces cas, et, en un mot, il y a une physionomie générale qui me semble caractéristique. OnsEnvATiON VI Empoisonnement jiar VAgaricvs (Amanita) buîhosus. — Phénomènes oôré- braux. — Excitation. — Coma. — Guérison. Vers la fin d'octobre 1882, Aubenquc, menuisier, sa femme et ses deux filles, âgées, Tune de 18, l'autre de 15 ans, mangent un plat de Champignons qui, frais, devaient peser d'une livre à une livre et demie; c'était le fond du panier de la marchande (1). On soumet ces Champi- gnons à l'action du sel, et on les apprête avec du sel, du poivre et du persil. Le repas a lieu à 7 heures du soir: le père en mange plus que les autres, lapins jeune fille en mange peu et, seule de son avis, trouve les Champignons mauvais, en exprimantla crainte d'un empoisonnement. Une heure après le repas, dès 8 heures et demie, cette jeune fille se sent déjà malade et se dit empoisonnée. Frissons, céphalalgie, ventre douloureux: elle vomit dès le début, et, quoique souffrante encore, est immédiatement hors de danger. A 9 heures, tous se couchent. La fille aînée avait, elle aussi, la tête lourde. A peine aulit, lepère etlafilleaî- néo entrent brusquement dans le coma le plus profond: ils étaient u comme morts » , me dit-on. L'alarme est heureusement donnée parla mère et lafille cadette. La mère elle-même, en se levant pour appeler et pour soigner les deux malades se sent prise ù son tour. La tête est pesante; mais chez elle les phénomènes sont tout différents. Peu à peu elle s'excite, elle parle, elle s'agite, se préoccupe bruyamment de son mari et de ses enfants ; elle passe la nuit toute entière à dé- raisonner et à parler à haute voix, constamment en proie à une exal- tation très-vive, dont elle n'a le lendemain conservé aucun souvenir. Elle avait vomi d'assez bonne heure, vers 9 heures 3/4. (l)Un fait à noter, au point de vue de la surveillance que les adminis- trations municipales devraient exercer sur la vente des Champignons, c'est que la marchande dont il est ici question est la même quijdansl'ob- servation suivante, affirma à Daumas, la bonne qualité des Champi- gnons que celui-ci avait ramassés, et qui n'étaient autre que des Fausses Oronges et des Agarics bulbeux. — 178 — Bien différent était l'état des deux autres malades: le père et la fille étaient étendus sur leur lit, dans la prostration la plus complète, in- capables de faire le moindre mouvement, de prononcer la moindre parole. Seulement le père était dans la résolution musculaire la plus complète, avec anesthésie généralisée, tandis que la jeune fille était agitée par des soubresauts et des frissons, et présentait du trismus : unepetite cuiller introduite de force entre les dents fut même coupée. Tel était l'état des trois malades à l'arrivée du docteur Rcfrégé. Laissant de côté la plus jeune fille, qui n'inspirait plus aucune inquié- tude, il fait prendre aux autres un éméto-cathartique, des lavements et du café. Le père revient à lui le premier, vers deux heures du ma- tin. Une selle fétide se produit sans vomissements. Dès 5 heures il va beaucoup mieux, et ne met que trois jours à se remettre complète" ment. Le surlendemain l'appétit lui revient. Ni lourdeur de tête, ni douleur épigastrique. Rien du côté du tube digestif. — Urines après la crise. — Pas de vomissements. La fille aînée ne revient à elle qu'un peu plus tard (5 heures du ma- tin). 30 gram. d'huile de ricin lui procurent des selles nombreuses et abondantes. Elle se remet peu à peu, reste brisée encore pendant sept ou huit jours, et conserve assez longtemps de la lourdeur de tête et une certaine susceptibilité à la fatigue. — Pas de vomissements. Urines après la crise. La mère ne cessa pas de parler à haute voix toute la nuit. Elle ne commença à se calmer un peu qu'au moment où sa fille sortait du coma (5 heures du matin). Dès lors son état va en s'améliorant. Elle ne se rappelle rien absolument. Sa guérison marche parallèlement à celle de sa fille aînée. La cadette se rétablit en quelques heures. Le père et la mère, à qui j'ai montré des spécimens d'Agar. bulbosus, ont reconnu qu'il y en avait dans leur plat. Ils ont mis hors de cause immédiatement VAgai\ muscarius. Il y aurait ici plusieurs rapprochements à faire, mais il vaut mieux jeter plus loin un coup d'œil d'ensemble sur ces diver- ses observations. Qu'on remarque pourtant déjà les rapports entre le cas de la femme Aubenque et ceux des observations précédentes. Le coma du père et de la fille est peut-être un pas de plus dans l'empoisonnement. - 179 — Observation VII Empoisonncriiont par los Amanites (Ar/. bulbnsus ciArf, musciirius). — «.Vo- niisscmcnts, vertiges, adynamio, giicrison. — /^.Vonii.sscnients, adjnamio, ac- cidents gastriques, Invasion brusque des phénomènes cérébraux. Mort. Le jeudi 2 oclobre 1882, au repas du soir, le sieur Daumas(Cé]cstin) et sa lillc Isabelle, <àgée de seize ans, mangent un plat de Champignons ramassés dans la journée par le père : ce plat se compose de trois Faus- ses Oronges {Ag. muscarius) et le reste d'Oronges ciguës {Arj. bidhn- susv^v., citrmus) (1), en tout une douzaine à peu près, formant un très- petit volume, car la cuisson les avait fait beaucoup diminuer. Le père et la fille trouvent leur plat délicieux, un vrai régal, me dit le père, et ne lui reprochent que d'être un peu salé. Du reste, confiance absolue de leur part, après l'assertion d'une marchande qui prétendait s'y con- naître, que ces Champignons étaient bons et qu'elle en avait elle-même mangé et vendu plusieurs fois. Après le repas, le père sort, la fille passe la soirée chez une amie, et tous deux se couchent vers 10 heures en parfaite sauté. La nuit se passe; l'un et l'autre dorment comme à l'ordinaire. A 5 heures et demie, heure habituelle de son réveil, Dau- mas se lève, descend selon son habitude vers la rivière, qui coule tout près, et se sent pris en route de douleurs abdominales. — Une selle demi-liquide. — Il attribue ce dérangement, qu'il croit léger, aux Champignons qu'il a mangés. Il rentre, trouve sa fille encore au lit, et s'aperçoit qu'elle a vomi sur le sol tout son repas de la veille. Elle aurait, d'après son appréciation, rendu du premier coup tous les Cham- pignons qu'elle avait pris. Il fait du thé de montagne, de la citron- nelle, d'autres tisanes encore, essayant d'en faire boire à sa fille et d'en prendre lui-môme. Mais, 10 minutes après chaque ingestion, les vomissements se reproduisent, précédés de nausées, et d'autant plus violents que les liquides ingérés étaient plus sucrés. Tous leur parais- sait trop doux. Ces vomissements étaient liquides. Lafille se lève pendant deux heures dans cette journée de vendredi ; puis, se sentant brisée, soufi"rant de l'estomac, elle se remet au lit. Pas d'étourdissoments, pas de troubles de la vision, soif vive. — La nuit du vendredi au samedi est bonne: ils peuvent dormir un peu l'un et l'autre. Le samedi, les sym- (1) Le père m'a lui-même apporté des exemplaires de ces deux es- pèces comme étant celles dont son plat se composait. ^ 180 -» ptômes s'aggravent: la fille surtout, dévorée par une soif intense, ayant constamment des selles copieuses, liquides, verdâtres, fétides, est très- abattue. Daumas, très-souffrant aussi, essaye pourtant à plusieurs re- prises de se lever. Douleurs vives à l'épigastre. Peu de sommeil du samedi au dimanche, pour l'un comme pour l'autre. Les symptômes s'aggravent encore, tout en restant localisés aux troubles intestinaux; rien du côté du cerveau. Vomissements et selles comme la veille. Epi- gastre toujours endolori. Intelligence parfaite. La fille recevait, quoi- que couchée, tous ceux qui venaient la voir. Enfin le père se décide, le dimanche après midi (70 heures après l'ingestion!) à faire appeler un médecin. M. le docteur Réfrégé arrive, et voici, à quatre heures après midi, l'état dans lequel il trouve les malades, en particulier la fille, dont le cas plus grave nécessitait une attention spéciale : A l'entrée du docteur, elle se plaint de l'estomac, wiiquement de l'estomac. Les vomissements n'ont pas cessé depuis la nuit du jeudi. On constate de la fièvre (110 pulsations), de la chaleur sèche ; langue saburrale au milieu, rouge à la pointe et sur les bords. Céphalalgie légère ; pas de dilatation pupillaire, pas de bourdonnements d'oreille. C'est l'estomac qui la tourmente surtout. Pas de météorisme abdo- minal, épigastre douloureux à la pression. Pas le moindre symptôme cérébral. — Lavement de graine de lin, frictions sur l'épigastre avec du baume tranquille, cataplasmes, potion éthérée. Sous l'influence de cette médication, les vomissements s'arrêtent, un calme relatif se produit. Dans la nuit, nouvelles selles fétides : la malade dort un peu. Le lendemain (lundi), eUe semble aller mieux. Le père et la fille dor- ment encore à l'arrivée du docteur. La fille se plaint encore de l'es- tomac, mais reconnaît que son état est meilleur que la veille. Pas de vomissements ni de nausées. — Même traitement. Comme régime, un peu de bouillon. La journée est bonne ; rien ne fait supposerl'invasion prochaine des troubles cérébraux. La nuit se passe sans beaucoup de sommeil. Mais alors, brusquement, la scène change. Le docteur Ré- frégé, appelé en hâte à quatre heures du matin, entend déjà de l'es- calier la malade pousser des cris, appeler sa mère, morte pourtant depuis quelque temps déjà; eUe est très-agitée, très-inquiète sur son état. En entendant prononcer le nom du docteur, elle l'appelle et lui tend la main: « Je ne vous vois pas, lui dit-elle, mais serrez-moi la main. Je vais mourir. Je suis aveuqle. » Elle ne distingue rien absolu- ment dans la pièce. Pas de dilatation pupillaire marquée. Mais l'iris — 181 — ne se contracte pas par l'action de la lumière. Peau chaude ; pouls fréquent, petit, faisant défaut par intervalles. Il n'est plus question de l'estomac ni du ventre ; c'est la tête, c'est la vue qui préoccupent la malade. Le docteur la juge perdue. Il ordonne: café, dérivatifs sur les jambes. La malade crie plus fort que jamais. Ces symptômes conti- nuent jusqu'à dix heures du matin. A dix heures, le coma succède à l'agitation : elle ne parle plus, ne bouge plus, ne reconnaît personne. Elle meurt à onze heures, sans dire un mot. Revenons maintenant au père, que nous avons laissé le dimanche soir, à la première visite de M. Réfrégé. Son état, bien que très-grave, présentait un danger moins immédiat que celui de sa fille. Aussi s'en occupa-t-on moins. Les douleurs d'estomac marchent chez lui paral- lèlement aux vertiges, et progressivement depuis le début jusqu'au dimanche soir. Il se lève de temps à autre pour se recoucher ensuite ; mais le samedi et le dimanche il garde le lit. Pendant ces trois jours, il n'a cessé comme sa fille de vomir et d'aller à la selle. Le lundi il se sent seulement brisé, et, les vertiges ayant un peu diminué ainsi que la douleur épigastriquo, il croit pouvoir se lever et prendre un peu de bouillon (lundi après midi). Le bouillon lui cause une indigestion et les symptômes réapparaissent avec une intensité nouvelle. Il ne com- mence à aller vraiment mieux que le mercredi après midi, au moment de l'enterrement de sa fille. Dès lors il marche vers la guérison, mais lentement. Je l'ai vu huit jours après, et c'est de lui que je tiens tous ces détails, en même temps que de M. le docteur Réfrégé. Il avait encore une grande adynamie, une inappétence presque absolue, l'es- tomac fatigué, comme u chargé d'un plomb » , la-, digestions laborieuses Ces symptômes menaçaient de se prolongerlongtemps. Pendant toute la crise, les urines ont été rouges, mais non supprimées. On peut étudier ici parallèlement les deux actions des Cham- pignons. Les symptômes éprouvés par le père sont pure- ment gastriques, si l'on excepte les vertiges, qui se retrouvent partout. La fille, au contraire, après avoir éprouvé les mêmes effets sur le tubedigestif, voit tous ces symptômes s'effacer de- vant l'invasion des phénomènes cérébraux. Ce qu'il importe de faire ici ressortir, c'est d'abord le retard dans la manifesta- tion de l'action cérébrale (lOG heures après l'ingestion ! ) et — 1S2 - la brusquerie daus l'apparition des phénomèiiesnerveux graves. On remarquera du reste, ici, qu^il y avait deux poisons et que, si VAg. bulbosus n'agit ordinairement que très-tard, l'action de la Fausse Oronge se fait d'ordinaire moins attendre. Gomment le père n'a-t-il pas eu les mêmes accidents que sa fille ? Peut-être le hasard des portions a-t-il joué un rôle. Ce n'est pas là une pure hypothèse. Le poison des Amanites estsolu- ble dans l'eau, et, dans un plat servi, celui des convives qui mange la sauce court peut-être plus de chance de périr que celui qui mange les Champignons eux-mêmes (voir la fin de l'obs. VIII). — La brusquerie remarquable dans l'apparition des symptômes a été déjà trouvée chez la plupart des malades (voir les obs. précédentes), et on la constatera encore dans les expériences sur les animaux. (Voir expér. avec Agar. musca- rius et Agar. iMutherinus.) Observation VIII Empoisonnement de cinq personnes. — Absence de phénomènes cérébraux.— Prédominance des symptômes gastriques. — Guérison. Il s'agit d'une famille tout entière empoisonnée par des Champi- gnons vénéneux. Ici encore VAgaricus [Amanita) bulbosus a été accusé par les malades ; le père et la mère ont reconnu surtout les petits exemplaires. Parmi les Champignons recueillis se trouvait aussi VAg. muscarius, mais on ne le fit pas cuire. Rey père, sa femme, son fils, sa bru et sa fille (20 ans), se mettent à table ensemble autour d'un plat de Champignons récoltés parle fils. Ces Champignons avaient été salés, puis égouttés et apprêtés en sauce blanche avec du jambon. — Le plat fut mangé le mardi 17 octobre 1882, à 5 heures et demie du soir, et trouvé excellent par tout le monde. Le fils se retira chez lui avec sa femme, et chacun s'endormit. — Suivons maintenant chacun des membres de la famille, d'après Tordre dans lequel les premiers symptômes ont apparu. Le fils s'éveille à 2 heures et demie du matin, la tète lourde, l'es- - 183 — toraac embarrassé. Il vont se lever et éprouve des vertiges. Peu après, il vomit tou.s les Champignons qu'il avait raiingés. Au matin, il se rend chez SCS parents, y trouve sa sœur déjà malade, et, sentant ses verti- ges augmenter, il veut rentrer chez lui. l'\aiblcssc trôs-grande. On est obligé do le ramener chez lui (10 heures et demie), où il se couche: bourdonnements d'oreille, crampes douloureuses aux jambes. Le soir, il fait appeler le docteur Phalippou pour lui et sa femme, dont Tin- disposition commcnrait. Un éméto-cathartique est administré avec succès. Même état le jeudi et le vendredi. Il entre décidément en con- valescence le vendredi soir. Le pire, dès son réveil ù llieurc habituelle, se sent un pou de ma- laise. Néanmoins il mange encore deux ou trois Champignons froids, reste de la veille, attelle son âne et part pour sa vigne, située à trois quarts d'heure de chemin doLodève. En route, il se sent pris de coli- ques violentes, a une selle contenant des Champignons mal digéras. Il n'arrive ù son champ qu'àgrand'poinc, en se traînant ; en arrivant, il tombe presque épuisé. Un coup de vin, qu'il essaye de boire, déter- mine aussitôt des vomissements, et la journée entière se passe ù vo- mir et à aller à la selle. Il est en proie à des vertiges, à des bourdon- nements d'oreille, à des douleurs abdominales ; il titube à chaque pas. Il rentre chez lui comme il peut, à 5 heures et demie, et se met au lit en arrivant. — Adynamie absolue, crampes douloureuses dans les mem- bres. M. le docteur Rouquctto vient le voir à G heures et demie. Il vomit encore. Potion stimulante avec 5 gr. acét. d'ammon. et 40 gr. de sirop d'éther. Diurétiques. — Convalescence rapide. La fille (20 ans) est aussi très-gravement atteinte. Les accidents commencent chez elle à 7 heures du matin: l'estomac est embarrassé, lourd. Elle va pourtant à son travail, mais est obligée d'en revenir à 10 heures. Elle prend de l'eau tiède pour vomir, et ne peut rendre qu'un seul Champignon. Pendant trois jours et trois nuits, elle ne fait que vomir. Les selles sont ici moins fréquentes que les vomisse- ments, mais nombreuses et fétides. Aucun trouble de la vue. Fatigue et faiblesse considérables, mais ne l'empêchant pas de faire de loin en loin quelques pas pour aller chercher de la tisane. Crampes doulou- reuses, douleurs abdominales très-vives, borborygmes, bourdonne- ments d'oreille à chaque tentative pour se lever. Le jeudi et le ven- dredi, elle ne bouge pas de son lit. Le samedi, elle se lève et reprend son travail le lundi. .Jusqu'au moment du mieux manifeste, elle a - 184 — très-souvent vomi, mais aucun autre Champignon que le premier n'est sorti par cette voie. Elle a eu une amygdalite à la suite et une érup- tion d'acné, sur lesquelles je reviendrai à propos des symptômes communs. La mère ne commence à se sentir malade que le mercredi soir. Elle ne vomit que deux fois, le mercredi soir et le jeudi matin, mais rend tout ce qu'elle avait pris. Vertiges, maux de ventre, mal au go- sier, mauvaise haleine (ce dont elle se plaint beaucoup). Tremblement des mains: comme la femme X... (voj. obs. IV), elle laisse tomber tout ce qu'elle touche. Elle est sérieusement malade un jour et demi, et se remet ensuite peu à peu. Elle a encore, au moment où j'ai pris l'observation (huit jours après), mauvaise bouche, inappétence, lour- deur d'estomac, etc., etc. La belle-fille, comme la précédente, ne ressent de malaise que vingt- quatre heures après l'ingestion du poison. Elle avait à peine goûté aux Champignons et n'avait guère mangé qu'un peu de jambon. Pour- tant, elle est assez souffrante pendant trois jours, et vomit tout ce qu'elle essaye de prendre: bouillon, lait, vin, tisane, etc. — Vertiges, adynamie. Enfin, après avoir mangé leur plat et laissé à regret la plus grande partie de lasauce^blanche, ilsavaientrégaléleur chien avec cette sauce. Le pauvre animal eut moins de bonheur que ses maîtres : dès le mer- credi matin, il tourne sur lui-même (vertiges); il crie, s'allonge à terre (douleurs abdominales), se laisse tomber fréquemment (adynamie et ataxie ), sort la langue très-longue et succombe dans l'après-midi, au grand effroi de la famille Rey, dont plusieurs membres étaient déjà malades. Si le début des accidents n'a pas eu lieu pour tous à la même heure, le retour à la santé a commencé pour tous le vendredi soir. Le père et la fille ont été les plus atteints ; le fils a été un peu moins malade que les autres. — Aucun d'eux n'était encore bien rétabli le 25 octo- bre. La mère m'a montré ce qu'ils avaient mangé de pain depuis huit jours, à eux cinq : à peine une livre ! Inappétence très-grande, ady- namie très-marquée, digestions pénibles, lourdeur d'estomac: voilà ce qui leur restait encore à tous, en même temps qu'une horreur pro- fonde et durable pour les Champignons. Enfin je signale, en terminant cette observation, quelques symptômes - 185 — communs à tous : tous ont eu dos crampes douloureuses dans les jam- bes, surtout le père et la fille, qui en ont beaucoup soulTert. Cliez aucun, il n'y a eu des troubles de la vue ; cliez aucun, il n'y a eu d'ivresse. L't'a'uption d'acnû a été générale à tous les intoxiriués, avec plus ou moins d'intensité. Knlin le mal de la gor{,'e (amygdalite) s'est aussi retrouvé chez tous ( mais surtout chez la mère), en même temps que la fétidité de l'haleine et des selles. Jetons maintenant un coup d'œil d'ensemble sur ces di- verses observations, et voyons, chez les 18 malades dont on vient de voir se dérouler les accidents, ^qiicls sont les sym- ptômes qui, par leur fréquence, peuvent devenir une source de diagnostic. Tout d'abord, une question capitale, au point de vue mé- dical et surtout médico-légal, est d'examiner le temps qui s'écoule entre l'ingestion du poison et l'apparition des sym- I)t(jmes d'intoxication. Les auteurs s'accordent en général pour attribuer à VAgarlcus bulbosu>i une action lente, et c'est en effet la règle, au moins pour ce qui concerne les symptômes nerveux. Ceux-ci n'arrivent ordinairement, quand ils arrivent, qu'après avoir été précédés d'accidents gastro-intestinaux, dont la violence et la rapidité varient beaucoup. Il est pro- bable que la dose du poison, la préparation qu'a subie le plat que l'on mange, et aussi les causes générales qui agissent d'ordinaire sur la célérité de l'absorption (état de vacuité ou de plénitude de l'estomac, de santé ou de maladie du sujet, etc.), exercent une influence prépondérante sur le plus ou moins de rapidité de ces deux actions successives. — Dans les divers cas que je viens d'exposer, les symptômes gastriques se sont fait attendre quelquefois 24 heures (chez la mère et la belle-fille, dans l'observation VIII), mais bien plus fréquem- ment ils ont éclaté de deux à trois heures après le repas, ac- compagnés le plus souvent de vertiges, de faiblesse muscu- laire et de tilubation. indiquant déjà que le système cérébro- 13 — 186 — spinal est atteint. — Quant aux symptômes nerveux proprement dits, tels que le délire, le coma ou les convulsions tétaniques, ces observations prouvent qu'il ne faut pas assigner une heure fixe à leur apparition. Chez Aubenque, par exemple, et chez sa fille aînée (obs. VI), c'est deux heures après qu'ils se mon- trent ; chez la fille Daumas, c'est le matin du cinquième jour; chez Marins J., c'est 5 heures après. Et pourtant le même cou- pable a fait le mal : c'est le même Champignon qui est en cause. Qu'on me permette d'insister sur ce fait, que les manifestations nerveuses graves, se terminant souvent par la mort, peuvent ne survenir que très-tard, alors que déjà les symptômes gas- triques durent depuis longtemps et semblent devoir occuper seuls toute la scène. "Voici un fait qui s'est passé l'année der- nière, à peu près à pareille époque : Un jeudi, jour de vacances, au Bousquet-d'Orb, près Bédarieux, deux jeunes enfants, deux frères, mangent ensemble des Champignons qu'ils ont eux-mêmes cueillis et que leur mère leur a préparés. Ils sont indisposés et éprouvent des troubles gastriques pendant les trois jours suivants. Le médecin, appelé le dimanche, ne parle pas de gravité et administre aux deux enfants un vomitif, le sirop d'ipéca. — Le len- demain lundi, dans la nuit, on l'appelle à la hâte auprès de ces deux petits malades, qui, sous l'influence d'un état cérébral des plus graves, sont sur le point de mourir. Quelques heures après, en effet, ils étaient morts. — Pour le médecin, homme d'une grande expérience et qui jouit dans le pays d'une autorité méritée, comme pour son confrère qui l'assiste dans l'autopsie, les deux enfants meurent victimes d'un poi- son végétal ; mais l'idée d'un empoisonnement par les Champignons n'est venue à aucun des deux, et les Champignons ne sont même pas mentionnés dans leur rapport. Il est impossible de n'être pas frappé du rapport entre le cas de ces deux enfants et celui d'Isabelle Daumas (obs. VII), Les deux observations semblent calquées l'une sur l'autre. Dans les deux cas, les troubles gastriques seuls se produisent, et cela pendant quatre jours de suite : rien absolument ne — 1S7 — fait prévoir la prochaine invasion dos sympt/)mr>s cérébraux; puis ceux-ci se montrent brusquement et enlôvent les malades avec une elTrayante rapidité. N'est ce pas là un fait important à noter, et le médecin ne devra-l-il pas toujours, dans un cas de ce genre, se g-arder d'émettre un pronostic favorable, auquel ces terribles accidents viendraient peut-être donner un cruel démenti? — Donc, dans l'empoisonnement par les Ama- nites, et l'Agaric bulbeux en particulier, les troubles nerveux peuvent se produire peu de temps après l'ingeslion, mais peu- vent aussi se faire attendre très-longtemps et n'apparaître qu'a[)rès un intervalle de plusieurs jours. Ajoutons que, dans ce cas, ces symptômes sont toujours très-graves et se terminent ordinairement i)ar la mort. Ils consistent en délire, excitation extrême, convulsions cloniques, cris; puis enfin le coma ar- rive, et le malade meurt au moment où Ton comptait sur une prochaine convalescence. Les manifestations gastro-intestinales se produisent de meilleure heure. C'est le plus souvent de deux à quatre heures après le repas qu'elles commencent à se montrer. Mais ce n'est pas là une limite fixe. Daumas père et sa fille (obs. VII) n'ont éprouvé les premiers symptômes que douze heures après leur repas; la fille Roy (obs. VIII), quatorze heures, et la femme Rey ainsi que sa belle-fille, seulement vingt-quatre heures après. — Les vomissements manquent rarement; mais on est quelque- fois obligé de les provoquer. En tout cas, l'heurede leur appari- tion est essentielle à bien connaître, car ils peuvent, lorsqu'ils arrivent assez promptement, soustraire le malade à l'action d'une pi rtie du poison. — On a souvent dit que ces vomisse- ments sont tardifs dans l'empoisonnement par l'Amanite bul- beuse. On a vu, en effet, que la femme et la belle-fille de Rey (obs. VIII) n'ont vomi que 21 heures après l'ingestion. On verra aussi, dans une expérience laite avec ce même Champi- gnon, que le chien qui en mangea ne fut malade que 30 heures — ISS — après. Mais est-ce bien là la règle? Tout en tenant compte deces faits indiscutables, il faut bien avouer que, d'ordinaire, les éva- cuations se produisent beaucoup plus tôt: c'est, en moyenne, entre 3 et 7 heures qu'apparaît ce genre d'accidents. Quelque fois les vomissements manquent absolument (Aubenque père et fille aînée), et c'est là ce que j'ai observé d'ordinaire, dans mes expériences sur les Amanites (voir Expér.) — A côté des vomissements, il faut placer les évacuations alvines, dont la fréquence est aussi très-grande. En outre de leur nombre, on remarquera que ces selles offrent un caractère spécial, la fétidité, toujours signalée par le malade lui-même. La diarrhée s'accompagne, d'ordinaire mais non toujours, de douleurs abdominales assez vives, quelque fois très-violentes. Mais la douleur est surtout très-aiguë lorsqu'elle siège à la région épi- gastrique (Daumas père et tille, obs. VII; Rey père, obs. YIII, etc.). Ce symptôme manque souvent. Ces accidents, purement gastriques, peuventsurvenir pres- que seuls. C'est très- rare, et peut-être n'est-ce là qu'un degré peu avancé de l'empoisonnement. C'est ce qui s'est produit pour la famille Rey (observ. VIII), chez laquelle ces troubles gastriques ont dominé la scène. Mais, si l'on n'arrive pas toujours aux accidents cérébraux graves, sur lesquels je reviendrai dans un instant, du moins y a-t-il toujours cer- tains symptômes indiquant que l'on n'a pas affaire à une sim- ple indigestion. Ces symptômes sont, du reste, assez variés; et, si quelques-uns sont plus fréquents que d'autres, du moins ne manquent-ils jamais absolument. Si l'on excepte la fille cadette d'Aubenque (obs. VI), qui n'avait fait que goûter à peine aux Champignons, et qui n'a éprouvé du côté du système ner- veux que de la lourdeur de tête et quelques frissons, que les vo- missements seuls pouvaient suffire àprovoquer, tous les mala- des ont été atteints, les uns de délire, d'autres de somnolence d'autres de troubles visuels et auditifs, mais chez aucun les symptômes nerveux n'ont manqué complètement. — 180 — Du côté de la têto, le symptôme lo plus onlinaire est un sentiment de pesanteur, qui n'est que le premier degré de troubles plus sérieux. Il est bien rare que l'action du poison n'aille pas plus loin. A cette lourdeur de tête succôdentrapi- deraent les vertiges et la titubation,qui en est la conséquence. Ces deux symptômes s'imposent à l'attention par leur fré- quence, comme aussi l'adynamie quelquefois complote et tou- jours plus ou moins marquée qu'éprouvent les malades dès le début. Les troubles gastriques ne suffisent pas à expliquer cette faiblesse, qui va quelquefois jusqu'à la résolution mus- culaire absolue. Sans doute l'un des caractères désaffections gastriques est de produire l'adynamie et quelquefois des vertiges. Mais on les voit ici se présenter même lor. ue les accidents du côté du tube digestif font défaut, et l'on constate même souvent nne ivresse complète, en tout semblable à une attaque d'alcoolisme aigu, comme dans l'observation I" et dans l'observ. III. Cette ébriété des Champignons est connue depuis longtemps, et l'exemple des Ostiakes, qui s'enivrent avec la Fausse Oronge, ne laisse aucun doute à cet égard. , Maisc'estun point essentiel à faire ressortir, d'autant plus que c'est le symptôme le plus frappant et le plus net que j'aie ob- servé dans mes expériences sur les Amanites. — Le délire, l'ex- citation extrême, et enfin le coma, sont les termes ultimes de ce processus morbide, dont le début n'estmarqué que par une céphalée légère., Ces symptômes graves arrivent, il est vrai, plus rarement; mais quelquefois, il faut bien le reconnaître, ilsse montrent d'emblée, brusquement, comme dans le cas, très- curieux à cet égard, du menuisier Aubenque et de sa fille. — Au reste, un des caractères de ces troubles cérébraux pris en général (et mes expériences ont entièrement confirmé ce fait), c'est la rapidité avec laquelle ils arrivent à leur summum d'intensité. Que l'absorption soit rapide ou lente, que les sym- ptômes se montrent dès le début ou seulement plusieurs — 190 — jours après, leur invasion est brusque, leur développement est très-prompt. En un quart d'heure, une demi-heure ( voir Expér. ) à partir du moment où l'on constate les premiers troubles, l'ivresse est complète, l'excitation est extrême, si toutefois l'ivresse ou l'excitation doivent se produire. Il faut rapprocher des symptômes précédents un fait qui se produit très-fréquemment, et dont on n'a peut-être pas assez fait ressortir l'importance quand on en a fait mention: c'est l'inhabileté dans les mouvements. Ce n'est pas seulement de la faiblesse musculaire : c'est une véritable ataxie, qui se tra- duit parfois par des tremblements des doigts, mais plus souvent par l'impossibilité de tenir à la main un objet sans le laisser tomber (femme X, obs. IV; femme Rey, obs. VI ; femme Benoit, obs. I,etc.). Les animaux soumis à l'action des Amanites présentent cette inhabileté de mouvements au plus haut degré. Les crampes douloureuses ne sont pas un symptôme con- stant, mais elles sont fréquentes et peuvent, par leur réunion aux autres accidents, aider au diagnostic différentiel. — lien est de même des troubles visuels, qui sont loin, lorsqu'on les considère seuls, d'être, comme on l'a dit, un caractère depre- mier ordre. Beaucoup de ynalades ne les présentent pas, et, chez ceux qui les offrent, ils varient souvent de forme et d'in- tensité.On a signalé le fait que les malades voyaient les ob- jets colorés en bleu. Aucune de mes observations n'est venue corroborer cette assertion, qui peut, du reste, être parfaite- ment exacte. C'est plutôt l'abolition de la vue que j'ai constatée (Marins J., observ. V. — Isabelle Daumas, obs. VI, etc.). — Les troubles auditifs sont beaucoup plus rares, et je ne les ai observés que deux fois. Ils consistent, d'ordinaire, en bour- donnements d'oreille. — Des troubles de l'intelligence se produisent assez souvent, mais souvent aussi les malades con- servent la conscience de tout ce qui se passe. — La mémoire — l'Jl — des impressions qu'ils ont sy\\ ï\ ^ ^^^^ ^K t QK617 P55 gen Planchon. Louis/Les champignons comestib vX''