n1 54 ME Fes 5 LES PHDINS DE. VERSAICERS LES ARDINS VERSAILLES PAR PIERRE: DE NOLFAE PARIS GOUPÉE Sue. ÉDITEURS-IMPRIMEURS MANZI, JOYANT & C'E, ÉDITEURS-IMPRIMEURS, SUCCESSEURS ? ? ? 24, BOULEVARD DES CAPUCINES, 24 1906 "x. 2 « } ï È “ FPABITE s RE » Published December 15, LE ROI LOUIS XIV Peinture de Charles Le Brun (1619-1690) Ua nr 3 nn Sr 2 * Charles Le Brun del. LES JARDINS pe VERSAILLES INTRODUCTION VEC Ses souvenirs IMpériISSa- bles, son décor royal encore debout, avec son château, ses terrasses, ses marbres et ses fontaines, Versailles n'est qu'une harmonie. Tout s'y présente dans l'unité ma- jestueuse d'une œuvre d'art accomplie; la con- struction, l'ornementation, le détail le plus modeste et l’ensemble le plus grandiose, tout obéit à la même pensée, la réalise, l’exalte et l’impose. L'enchantement d’un passé, que cette forte conception révèle, saisit l'imagination dès que les grilles des jardins sont franchies. Pour que lim- pression soit complète et ineffaçable, on devrait choisir, pour cette visite, un jour de solitude, au moment du printemps, alors que les parterres de Le Nôtre se rajeunissent par la profusion des fleurs nouvelles, ou plutôt vers la fin de l’au- tomne, quand, dans les allées désertes, les pas soulèvent avec les feuilles mortes une jonchée de souvenirs. Au déclin de la saison, la maison de nos rois, alors abandonnée des foules, prend une force d'évocation plus souveraine, et les coulées d'or et de cuivre qui chamarrent les hauts feuillages s'accordent avec le rappel des splendeurs d'autre- fois. L'âme la moins ornée, la pensée la moins vive est émue par la puissance d’un tel décor de tristesse et de beauté. Car ce n'est point en vain que ce parc de novembre, en sa somptuosité désolée, célèbre chaque année une commémo- ration magnifique de la royauté. L'illusion devient maitresse en ce lieu de fas- tueuse mélancolie ; on y sent revivre ceux qui l'animèrent, personnages de gloire, de noblesse, bb de > Z æ FA un æ a À un > 7-08 n d'intrigue et d'amour; et cest là surtout qu'on arrive à comprendre l'esprit de la monarchie française, dont ils furent l'orgueil, la parure ou le soutien. Versailles donnera des sensations plus pro- fondes et plus rares à qui cherchera à le mieux connaître, à qui consentira à y vivre quelque temps, pour en pénétrer peu à peu le lent secret. L'homme de loisir avisé, qui a pu réaliser ce rêve, nous dira comment le charme opère, comment il le subit tout d'abord, puis le goûte davantage à mesure qu'il le sent plus familier, et enfin com- ment 11 s'y livre avec un enthousiasme reconnais- sant. Ce n'est pas qu'il y ait en cette ville une plus riche accumulation de souvenirs historiques qu'en tel autre lieu illustre; mais l'œuvre qui les con- Photo P. d'Aujec. NYMPHE ET AMOUR, PAR PHILIPPE MAGNIER Groupe de bronse, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Keller, en 1690 centre et les fait revivre dispose d’une force vrai- ment évocatrice, parce qu'elle ne disperse point l'émotion. Bien que l'art de Versailles soit un des plus vastes et des plus variés, toutes ses manifestations s'assemblent et se juxtaposent sui- vant les mêmes règles interprétées par des maîtres divers ; elles obéissent aux lois d'équilibre et de noblesse qui sont les lois même de ce génie fran- çais, dont elles offrent une des parfaites images. La création de Louis XIV, à peine retouchée et ornée par le xvu° siècle, et dont le siècle der- nier n'a altéré que des détails, est sous nos yeux encore presque intacte et presque vivante. Sous l'incantation de la pensée, aisément ressuscitent les scènes d'autrefois. L’escalier de Mansart nous conduit au seuil des appartements du Grand Roï; voici l'antichambre de l'Œil-de- Bœuf, qui semble pleine encore de la rumeur des LOUIS XIV EN PROMENADE DANS LES JARDINS DE VERSAILLES Détail d'un tableau de P.-D. Martin, représentant la fontaine de l'Obélisque LES ul 7 hui détr AIT “d RS ; aujour QUE (sa, & | > È | be | < Fu S 1 FS LES | as a © | Ês | y) Ge Z &È pe L << (OR B LE JET raw { en | toil (quet de LE Bat beutre dr he 4 A mtin d u T + Veuis Fontaries 1 PLAN DU BOS Fi D EAU Tiré d'un album ayant appartenu au Roi Louis XV BOSQUET DU THEATRE DU PLAN ANDRÉ LE NOTRE, ARCHITECTE DU ROI (1613-1500) Peinture de Carlo Maratta 6 LES JARDINS DE courtisans, du mouvement d’une cour impatiente de plaire au maitre. Traversons la Chambre de parade, qui fut comme le centre de la monar- chie et où mourut celui qui, par l'éclat unique de sa fortune, avait ébloui le monde. En suivant la VERSAILLES Grande Galerie et les appartements de marbre et d'or, nous arrivons à la Chapelle où se célébrèrent les unions royales, les mariages princiers, les baptèmes des dauphins et aussi les pompeuses funérailles. De l’autre côté du Château, nous par- NEPTUNE ET AMPHITRITE Groupe de plomb du Bassin de Neptune, exécuté par Sigisbert Adam en 1740 courons les appartements de la Reine et la chambre somptueuse où, pendant trois règnes, naquirent les Enfants de France. Et dans l'intimité des cours intérieures, incon- nues du public d'aujourd'hui comme de celui de jadis, que de cabinets, de pièces secrètes, de passages et de réduits aux boiseries merveilleuses. où les reines devinrent de simples femmes, où Louis XV et Louis XVI se livrèrent à leurs divertis- sements, à leurs plaisirs si différents , où toutes les anecdotes de l’ancien régime prennent leur expli- cation, pour qui sait patiemment identifier les emplacements et préciser les lieux. Et maintenant que nous descendons dans les Jardins, 1l faut peu d'effort pour reprendre les pro- menades royales, se figurer qu'on suit Louis XIV, Monseigneur, Madame la duchesse de Bourgogne, alors que la longue file des « roulettes » se déroule ZINSKA LE C MARIE © Q = AS > ï SE d n°] D = = = d A Re. | REINE LA a LES JARDINS sur les pentes de Latone et sur les allées du Tapis- Vert, pendant que les eaux glorieuses et délivrées jettent, sur les margelles de marbre, leur pluie jaillissante. S'il est tel coin retiré du parc de Versailles où DE VERSAILLES le goût du temps de Louis XVI a fait quelques transformations « à l'anglaise », si l’on y revoit surtout les dames de Marie-Antoinette, avec les chapeaux de bergères et les robes de linon, Versailles garde avant tout la marque de son créa- x ; . D w] , a F, EL « FONTAIN E DE DIANE Groupe d'animaux de bronze, par Van Clève teur dans les lignes intactes du Grand Siècle. Les marbres et les bronzes sont encore à la place que leur désigna Charles Le Brun, où les ont vus Racine et Boïleau ; les eaux ont perdu peu de chose de ces effets singuliers dont s’enchanta Madame de Sévigné: les blanches marches, où grandissent çà et là, d'année en année, les taches roses, Sont encore celles que balayait la traîne de Madame de Montespan, conduisant la promenade de la Cour. Ces degrés, ces pièces liquides, ces parterres, ces larges perspectives ouvertes sur la plaine loin- taine ou sur les bois de la colline, ce décor de fleurs, d’eau et de pierre, cet enchantement du regard et de la pensée, c'est encore l’œuvre ancienne qui rappelle à la postérité, autour du LA REINE MARIE-ANTOINETTE ET LOUIS XVI EN PROMENADE DANS LES JARDINS DE VERSAILLES Détail d'une peinture de Hubert Robert 10 LES JARDINS DE VERSAILLES Versailles de Mansart, le nom de Le Nôtre. Dédaigné comme une grandeur morte, oublié longtemps par ceux-là même qui eussent dû en tenir le respect éveillé, méprisé aussi par tant d'artistes français déracinés de leur tradition, Ver- sailles a repris, depuis peu d'années, la place d'exception et de gloire qu'à d’autres titres les siècles monarchiques lui avaient conférée. Des peintres et des sculpteurs modernes s'in- téressent passionnément à ce qu'il peut donner d'inspiration, de motifs et de modèles; des poètes, émus par la grâce fanée du parc endormi, célèbrent le charme de ses quatre saisons: un public tou- jours renouvelé de visiteurs proclame à voix haute l'admiration de ses découvertes, tandis qu'une petite église de dévots plus discrets sait à quels jours et à quelles heures célébrer le mieux son culte paisible. Nous mesurons aujourd’hui, après l'avoir trop méconnu, ce qui manquerait au patrimoine de la nation et au témoignage de son génie, si Versailles eût été détruit. O Palais, horizon suprème des terrasses! Un peu de vos beautés coule dans notre sang... Ainsi parlent, avec Albert Samain, tous ceux des nôtres qui expriment ou dirigent la sensibilité contemporaine. L'impertinence des vers d'Alfred de Musset sur « l’en- nuyeux parc de Versailles » nous choque moins que son inintelligence ne nous attriste ; car il n’est pas de beauté plus émouvante que celle de ces architectures, où se composent avec tant d'har- monie les jeux de la lumière, de la verdure et des eaux. Nous y associons la sculpture qui les décore et qui représente, en sa maturité, cet art qui fut toujours un art de France. La convention pompeuse de la peinture de l’époque, l'esthétique impérieuse et tout ita- lienne du grand ordonnateur Le Brun, n'ont eu presque nulle prise sur la robuste originalité de nos sculpteurs. Soumis aux nécessités d’un ensemble décoratif, 1ls ont su garder dans l’exé- cution les qualités de leur race et faire passer en leurs nobles figures souplesse et vérité. A ces vieux maitres, prodigues de chefs-d'œuvre et pour lesquels nous avons été si ingrats, ce livre vou- drait avant tout rendre hommage. Telles sont les leçons faciles et fortes que donne Versailles. À quelques pas de Paris, la ville la plus agitée et la plus bruyante, les grands ombrages ouvrent un refuge de silence et de recueillement. C'est un abri pour les amoureux du rêve et aussi un lieu d'élection pour les chercheurs de beauté. Celui qui a une fois pénétré Versailles ne se lasse donc pas d'y revenir. C’est un ensemble incomparable qu'offrent, sans jamais l'épui- ser, à la joie de son esprit, au plaisir de ses yeux, ce château qui, par sa structure même, est l’image éloquente de la monarchie; ces jardins qu'une volonté singulièrement forte a fait surgir du terrain le plus ingrat ; ce parc, aux lointaines percées, où semble sonner encore l’hallali des chasses royales, et ces larges surfaces d'eau vivante qui reflètent, depuis deux siècles et demi, le ciel chan- % geant et léger de l'Ile-de-France. PROJET POUR UNE FONTAINE DE PLOMB (AUJOURD'HUI DÉTRUITE) DU BOSQUET DU THÉATRE D'EAU Dessin de Charles Le Brun Charles Le Brun del. 2 PROMENADE DE VERSAILEES AU XX al n'est pas, à Versailles, de plus noble spectacle que celui qui s'offre des balcons de la Grande Galerie, ouverts sur les bassins du Parterre d'Eau. C’est la vue royale par excellence, celle qui suffirait à donner en quelques minutes une idée claire de la somptueuse création de Louis XIV. Le visiteur est fatigué de son parcours à travers les trois étages de l'immense château. Il a rempli ses yeux des décorations merveilleuses, des bois et des métaux finement travaillés, des mosaïques de marbre et des plafonds dorés. Il s’est ému dans les chambres royales aux souvenirs évoqués ; il s’est attardé dans les salles du Musée, vivantes des scènes et des portraits qui les animent. L'histoire et l'art des derniers siècles se sont révélés à lui dans ce qu'ils ont de plus fran- çais et de plus raffiné. Il est accablé de tant de gran- deur et de magnificence, quand ses pas le ramènent en cette galerie fameuse, au centre de l'habitation, où viennent s’accumuler les plus rares ouvrages. Les paysages qui s'encadrent en ces hautes fenêtres aux glaces étroites, que Venise envoyait au Grand Roi, apportent la surprise souhaitée, et l’artifice grandiose du palais y continue son enchantement. Les fonds lointains, les horizons des collines boi- sées sont presque seuls purement naturels : les immenses SIÈCLE pièces d'eau des Suisses et du Grand Canal peuvent sembler encore des lacs harmonieux, ramenés à la ligne symétrique par un travail à peine sensible ; mais, par degrés, en se rapprochant du Château, l'art se laisse voir, s'affirme et s'étale. Les gazons se découpent, les arbres se taillent, les eaux se concentrent en des margelles de marbre, les statues se multiplient. Autour de la maison royale, la nature est entièrement asservie ; tout y a été construit et manié de façon à ne plus laisser paraître que l'œuvre de l'homme. La volonté d’un roi et le génie d’une époque ont fait d’un sol rebelle le plus riche jardin. Il faut un grand effort pour se rappeler qu'aucune partie des environs de Paris n'était plus sauvage et plus délaissée, quand Louis XIII y construisit un petit château et y établit un parc de chasse. Même après lui, ce n'était qu'un ter- rain boisé et marécageux, qui s’est transformé, sur le seul désir de Louis XIV, en ce brillant ensemble de plantations régulières, de bosquets, de pièces d’eau et de fontaines. Les terrasses sont faites presque totalement de terres rapportées ; l’étroite butte primitive s'est élargie en proportions énormes pour asseoir le Château et ses abords. De chaque côté se découpent les parterres du Midi et du Nord, dessinant leurs arabesques, leurs rinceaux, leurs fleurs de lis. Entre eux, devant la Galerie des Glaces, dorment deux larges nappes liquides, attendant que les gerbes 12 LES JARDINS DE VERSAILLES rapides viennent, au signal voulu, en éveiller les vastes eaux. C’est ce qu'on appelle le Parterre d'Eau, dési- gnation qui s’appliquait mieux à un état plus ancien de cette grande terrasse, où vraiment des courants d’eau, ingénieusement aménagés, formaient des dessins variés, semblables aux décors fleuris tracés par Le Nôtre; ils étaient entourés, d’ailleurs, de buis et de gazon. Tout ce décor, riche en complications hydrauliques, s'est peu à peu simplifié en une conception plus belle. Le Roi n'a voulu, sous les fenêtres de sa maison, pour en refléter l'harmonie, qu'un double et pur miroir qui n’en brisât point l’image. Sur le marbre qui les entoure, bientôt après se dressèrent de magnifiques groupes de bronze, exécutés en de grandes porportions, afin qu’on püt en saisir la ligne des balcons de la Galerie. Les deux nappes frissonnantes semblent répondre Photo P, d'Aujec. LE VASE DE LA PAIX Marbre de J.-B. Tubi, sculpté en 168%, pour la terrasse devant le Château à celle du Canal, qui miroite dans le lointain. Autour d'elles, de tous côtés, à la descente des allées des parterres inférieurs, on aperçoit des vases chargés de fleurs et aussi de blanches statues qui semblent chemi- ner le long des charmilles. Elles se détachent tantôt sur le ciel, tantôt sur les sombres verdures. On désire approcher et contem- pler de plus près ces formes harmonieuses, connaître le symbole qu’elles expriment ét la pensée qu'elles réalisent. Et ne sont-elles pas comme les prêtresses du lieu, les gardiennes permanentes des jardins? Devant elles ont passé les générations disparues : elles ont vu la gloire des monarques, la grâce amoureuse des prin- cesses ; les paniers de brocart et les habits brodés ont frôlé le marbre qui les porte ; elles assistèrent à Photo P; d'Aujee, VASE DÉCORÉ DE SOLEILS Marbre de Drouilly, au Parterre d'Eau 4x Lara Static NP REA " 11 TE TR Pme pu tn ic Ed Te dcr 7 + de 4 (4 PTT TUS A bé 42 qu Se O2 SN Photo P, d'Ajec, LE VASE DE LA GUERRE Marbre de Coyzevox, sculpté en 1684, pour la terrasse devant le Château l'heure du déclin et des tristesses; et c’est pourquoi, tout autour d'elles, l'atmosphère est comme chargée de souvenirs. Elles sont pour nous encore bien autre chose que des témoins du passé. Les artistes de nos jours honorent les meilleures d’entre elles comme des chefs-d'œuvre; ils les contemplent et les étudient volontiers, quand il leur plaît de se rendre attentifs aux rêves et à la tradition de leurs aînés. Pourrions-nous faire mieux que de suivre leur exemple ? Si l'on songeait trop vite cependant que c'est un vaste Musée de la Sculpture française qui reste encore à parcourir en ces jardins, — une collection complète où tous les grands noms de deux siècles d’art incom- parables sont représentés, — plus d’un promeneur sortant du Château hésiterait devant cette fatigue nou- velle. Mais l’enseignement qu'il en doit recueillir peut être pris dans le plaisir le plus reposant, dans la joie d’une belle journée, alors que les parfums montent des parterres fleuris et que l'air très pur vivifie l'attention et soutient la marche. Après plusieurs heures passées dans les apparte- ments, la promenade en ces jardins et ces bosquets, sans nous enlever du même milieu, est d’un charme apaisant et profond. Nous pouvons descendre sur la terrasse et visiter l'une après l’autre les œuvres qui s’harmonisent si bien avec l'architecture du parc et révèlent l’âme ingénue et magnifique de nos pères ; nous goûterons, en même temps, la fraicheur des grands ombrages, que les années ont faits plus beaux. La longue masse du Château se détache de partout, imposante et nette, sans qu'aucune plantation d'arbres en vienne interrompre les lignes. Vers l'aile du nord seulement, de hauts feuillages les rejoignent et semblent les prolonger. Mais l'édifice est entouré d’un espace immense, où toute la décoration reste basse et comme PLAN DES ABORDS DU CHATEAU Tiré d'un album, daté de 1747, ayant appartenu au Roi Louis XV (S2SSINS S2p nt2p 99214 EU] 2 aro8u POI ‘PUOZ 21 Sue(]) (9198 1814) FRQI Ua 251]094 19 OUON 90T Abd oWSSa IQIN AG AYYALAVd 41 16 LES JARDINS DE VERSAILLES écrasée, afin de mieux faire valoir la construction majestueuse qui le domine et permettre de n’en perdre aucun détail. Cette décoration fut difficile à exécuter, et, bien que l’idée principale n'ait guère varié, elle nécessita des tâtonnements et des remaniements multiples, dont les estampes anciennes gardent les traces. Louis XIV en aimait la pensée, et, pour réaliser son rêve, les recherches, les essais, les destructions ne le fatiguaient point. Après avoir changé trois fois l’aspect du Parterre d'Eau, il finit par être satisfait de celui qu’achevèrent ses architectes en l’année 1684. Mais les courtisans, ceux surtout dont l'humeur fut de médire et qui restèrent mécontents par profession, se plaignaient de la nudité de ce grand espace et de l’incommodité du soleil à tous les abords du Château. & AMOUR SUR UN SPHINX Groupe du Parterre du Midi Bronze fondu par Duval en 1670, d'après un modèle de Jacques Sarrazin; marbre de Lerambert Entre toutes les critiques plus ou moins justifiées que provoquait Versailles, celle-ci passait pour la mieux fondée, et nous rappellerons Saint-Simon dénigrant les jardins, « dont la magnificence étonne, mais dont le plus léger usage rebute 5. — « On n'y est conduit, ajoutait-il, dans la fraîcheur de l'ombre que par une vaste Zone torride, au bout de laquelle il n’y a plus, où que ce soit, qu'à monter et à descendre. » Avec une humeur moins amère, nous souffrons aujourd’hui des mêmes inconvénients que les sujets du Grand Roi. Et pourtant, ces chemins de sable, qui semblent trop larges à nos pas de flâneurs, étaient alors néces- saires pour le déploiement d’une cour somptueuse. De nos jours encore, on peut s’en rendre compte lorsqu'une fête officielle ou simplement le dimanche populaire des « Grandes Eaux $ amène à Versailles une foule excep- TRE RENNES RTE EP LES JARDINS DE VERSAILLES 17 bac ter is tionnelle de visiteurs. En dépit du léger ennui de nos premiers pas, n'hésitons point à nous engager dans l’espace aménagé devant le Château, entre les deux bassins, et allons contenter notre impatiente curiosité en face du couchant où fuit à l'horizon la perspective du Grand Canal. A mesure que nous avançons, le Parterre de Latone se développe devant nous. En haut des marches qui y descendent, se dévoile brusquement l’élégante fontaine qui le nomme et que les yeux ne soupçonnaient pas, puisque, des balcons même de la Galerie des Glaces, elle ne se laissait point apercevoir. Au centre du large parterre en fer à cheval, que bordent les ifs aux formes géométriques, est le charmant AMOUR SUR Groupe du Parterre du Midi UN SPHINX Bronze fondu par Duval en 1670, d'après un modèle de Jacques Sarrazin; marbre de Lerambert bassin, peuplé de figures de bronze doré, au milieu duquel s'élève, sur un massif en pyramide, le groupe de Balthazar Marsy, Latone et ses enfants. La mère d’Apol- lon et de Diane, à genoux et serrant son jeune fils, implore la justice de Jupiter, et le dieu change en gre- nouilles d’or, autour d'elles, les paysans de Lycie, coupables de lui avoir refusé assistance. La métamor- phose continue dans les deux autres bassins du Parterre. La place centrale accordée à un tel sujet, dans la décoration de Versailles, s'explique par l’idée mytholo- gique qu'on retrouve aux points principaux du parc. N'oublions pas que Latone est la mère d’Apollon,et que le dieu du Soleil est le symbole, la personnification céleste de Louis XIV. Tout au fond des jardins, au milieu de la perspective qu'on embrasse de ces degrés, c’est le motif du char d’Apollon qui répond à celui de Latone, 18 LES JARDINS DE VERSAILLES et c'est à l'extrémité du Grand Canal qu’en certains jours de la belle saison le soleil se couche dans sa gloire. À la cour du Grand Roi, chacun savait la significa- tion de ces symboles ; les artistes s’en inspiraient pour leurs compositions ; les madrigaux et les odes y muiti- pliaient les allusions adulatrices ; et La Fontaine nous conserve le sentiment des contemporains de Louis XIV, montrant le souverain, au lieu même où nous sommes placés, lorsqu'il vient contempler, à l'heure la plus belle, les admirables horizons de son domaine : Là, dans des chars dorés, le Prince avec sa cour Va goûter la fraicheur sur le déclin du jour; L'un et l'autre soleil, unique en son espèce, Etale aux regardants sa pompe ct sa richesse. Phébus brille à l’envi du monarque françois; On ne sait bien souvent à qui donner sa voix: Tous deux sont pleins d'éclat et rayonnants de gloire! Ces vers ne sont pas des meilleurs du poète, mais ; Floto F, a'Awre. L’ARIANE DU VATICAN Parterre du Midi Marbre copié par Corneille Van Clève ils n’en demeurent pas moins fort instructifs et nous rappellent, dès le début de notre promenade, la pensée ordonnatrice de Versailles. Réjouissons nos yeux quelques instants de l'étendue du spectacle, du dessin harmonieux et double du par- terre, de la blancheur des vases de marbre qui meublent les terrasses et que garnit une profusion de fleurs. A. nos côtés, aux extrémités du large degré, se dressent deux vases de forme colossale, dont la proportion s'accorde avec les grands espaces dominés ici par le regard. Avec leur pied de marbre qui s'élance d’un cube de pierre, avec les hardies têtes de bélier qui forment les anses, et les souples couronnes de feuillage ornant le vaisseau, on les jugerait partout des œuvres admirables ; mais, en ce lieu, leur présence est signifi- cative, car le motif central offre précisément le « Soleil » VUE DU PARTERRE D'EAU APRES 1690 Détail d'une peinture de Jean Cotelle (Au premier plan, les suivantes de Vénus la regardent s'élever au ciel 20 de Louis XIV, le symbole fameux interprété suivant son désir, et qui est une tête triom- phale auréolée de rayons. La grande façade développe ici sa longueur de quatre cent quinze mètres (qui atteint six cent soixante-dix mètres avec les façades en retour). La monotonie de cette immense bâtisse est rompue par les avant-corps, formés de cc- lonnes que surmontent cent deux statues, par les sculptures en relief qui encadrent les fenêtres cintrées du premier étage, par les clefs des arcades du rez-de-chaussée, enfin par les trophées et les vases de pierre couronnant la balustrade de l’attique, qui avaient été détruits lors des restaurations du premier Empire et qui viennent d’être heureusement Photo l'd'Aujec. Groupe de bronsc, Gu Parterre d'Ecu, fondu en 1690 JEUX D'ENFANTS, PAR C. VAN CILÈVE rétablis sur le corps central du Château. Quatre bronzes d’après l'antique, posés contre le mur, sont d’assez belles fontes fran- çaises, un peu noires, qui furent les premiers essais des frères Keller pour Versailles ; ces figures, Bacchus, Apollon, Antinoûs et Silène, annoncent les merveilles de bronze du ?arterre d'Eau, tandis que les deux grands vases de marbre, placés aux angles de la même terrasse, semblent continuer, au seuil des jardins, la sculp- ture décorative répandue Si abondamment sur les façades. Le premier fut sculpté par Coyzevox. Le pied svelte et puissant soutient une coupe ouvragée de feuilles d’acanthe:; les deux anses sont formées de têtes de faunes grimaçants, à la longue barbe tressée. Le NYMPHE ET AMOUR, PAR RAON Groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Keller en 1668 a dt SR SORT - :"< ssadih fie PT ss ES: he, GhA LES JARDINS DE VERSAILLES 21 Photo P. d'Aujec. NYMPHE ET AMOUR, PAR LE GROS Groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Keller en 1688 haut vaisseau porte un bas-relief imité d’une peinture de la Galerie des Glaces. Les scènes qu'il retrace furent d'une actualité glorieuse ; elles représentent la préémi- nence de la France reconnue par l'Espagne, après la défaite des Turcs par nos armes en Hongrie (1664). D'un côté, des guerriers enturbanés sont mis en déroute par Hercule et par la France, sous la fière apparence d’une femme casquée. De l’autre, se dresse la même figure, devant laquelle s'incline une autre femme, l'Espagne, avec le lion à ses pieds. Tel est le vase de la Guerre. er L'hoto P, d'Aujee, LE FLEUVE LA LOIRE, PAR REGNAUDIN Groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par Les frères Keller en 1689 [Se] Le) Photo P, d'Avjec. Celui de la Paix est de même forme et de même élévation; le bas-relief seulement diffère. C’est une allégorie des traités d’Aix-la-Chapelle (1668) et de LES JARDINS DE. VERSAIÏILEES LE FLEUVE LA GARONNE, PAR COYZEVOX (1686) Groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Keller en 1688 Nimègue (1678-79). Le jeune Louis XIV, couronné debout Hercule, le demi-dieu qui fut une de ses images d’olivier, est assis sur un trône; près de lui, se tient LA RIVIÈRE LA DORDOGNE, PAR COYZEVOX Groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Keller en 1688 s pars Di PURE ANTOINE COYZEVOX, SCULPTEUR DU ROI (1640-1720) Peinture de Gilles Allou olympiennes ; une Victoire suspend des trophées à un palmier. Un autre groupe est formé de Renommées portant des branches d’oli- vier. Les femmes aux longs corps gracieux s'enlacent, enroulées dans les plis de leur vêtement à l'antique ; l’une d'elles tient un caducée et indique ces mots inscrits sur une tablette : Pace in leges suas confecta Neo- magi, 1679. Ce vase est de Jean-Baptiste Tubi, sculp- teur romain, devenu de bonne heure sujet du roi de France et l’un des meil- leurs maîtres qu’il ait em- ployés à son service. Les bronzes maintenant déploient devant nous leur magnificence. Le long de LES JARDINS DE"VERSAIRPES Photo -P. d’Aujec. JEUX D'ENFANTS Groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu en 1690 la margelle des deux vastes bassins, la merveilleuse ma- tière, patinée par le temps, . étale ses œuvres de grâce et de majesté. Elles valent qu'on les examine à loisir, car elles forment, par leur réunion ingénieuse, le plus important ensemble de ce genre qui existe dans le monde. Ces deux bassins sont décorés chacun de quatre statues couchées, figures de fleuves et de rivières de France, de quatre groupes de nymphes et de quatre groupes d'enfants debout aux coins de la pièce d’eau. Sauf ces derniers, chacun porte le nom de l'artiste qui l’a modelé et aussi la signature des fondeurs du Roi, les frères Keller, et la NYMPHE ET AMOUR, PAR LE GROS Groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Keller en 1688 LES JARDINS DE VERSAILLES b A Photo P. d'Aujee. LA RIVIÈRE LE LOIRET, PAR REGNAUDIN Groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Keller en 1689 1 0 date de la fonte dans les ateliers de l'Arsenal de Paris. La plus ancienne date de 1687, la plus récente de 1690. Par ces indications, l'étude de ce grand ouvrage est singulièrement simplifiée. Au reste, dès le premier regard, on se rend compte que les sculpteurs qui créèrent les modèles de cire subordonnèrent exacte- ment leur travail à la conception de l'ensemble. Nous savons, en effet, que l'invention et la disposition des Blois Bagues M LA RIVIÈRE LAS Groupe de bronze, au Parterre d'E AÔNE, PAR J.-B. TUBI au, fondu par les frères Keller (sans date) 26 LES JARDINS DE VERSAILLES figures du parc appartenaient de droit à un ordonnateur général, le Premier Peintre du Roi, Charles Le Brun. Les croquis destinés aux sculpteurs étaient de sa main; il les soumettait au Roi, et les remettait, avec son approbation, aux artistes chargés d'exécuter, après une maquette préalable, le modèle définitif. On a conservé _un certain nombre de ces dessins, au crayon et au lavis, illustration de ce livre présente quelques-uns de ces intéressants documents. Nous n'avons retrouvé aucun des croquis originaux qui servirent à composer la décoration du Parterre d'Eau ; mais il est certain que, sur ce point comme sur tous les autres, le Premier Peintre donna ses projets. Non seulement il désigna les sujets et imposa les atti- tudes des figures, mais encore il évita aux artistes toute hésitation dans le choix des accessoires et des symboles. De cette façon fut assu- gnaudin, le sculpteur de Moulins, que nous rencontrons d'abord, au pied du vase de la Paix, avec ses deux figures couchées de la Loire et du Loiret. Le fleuve de la Loire est représenté par un vieillard robuste et souriant, couronné de fleurs de roseaux et tenant une corne d’abondance, qui dit la richesse du pays arrosé. Une écrevisse et de beaux légumes de France, melon, concombre, asperges, sont épars sur le sol. La double source qui jaillit d’un rocher, symbolise apparemment les deux cours égaux de la Loire et de l'Allier. Le corps du Fleuve est nu et majestueux dans sa raideur; sa longue barbe bouclée caresse sa poitrine : l ses jambes sont croisées; le regard semble chercher au loin, alors que, près de lui, un petit génie soufflant . dans un coquillage montre ses ailes impatientes. Sur le même plan, la rivière du Loiret a la même beauté puissante, un peu rée l'unité d'exécution. de la magnifique assem- blée de bronze qu’on rèvait et qui devait être consacrée aux fleuves et rivières du royaume. Ainsi guidé et comme maitrisé, il semblerait que chaque sculpteur ne dût réaliser qu’une œuvre impersonnelle concou- rant simplement à l'har- monie générale; mais il n'en est rien. Tout en obéissant à une loi rigou- reuse, chacun reste lui- : même en ses manifesta- tions d'artiste ; et tout d’abord Coyzevox dans sa puissance et Tubi dans sa souplesse sont hors de pair ; on sait distinguer en leurs œuvres l’élégant Magnier de l’expressif Le Gros, et c’est à peine si l’on est tenté de con- fondre entre elles celles des maïtres secondaires, tels que Le Hongre, Raon et Regnaudin. | C'est Thomas Re- | lourde, mais non sans noblesse. Cette femme, au profil si grave, a des tressés; la draperie qui l'enveloppe laisse à nu sa généreuse poitrine et ses jambes allongées ; elle versée d’où l’eau s'écoule, pendant qu'un Amour lui présente une corne char- gée de fruits. L’urne est énorme, pour rappeler les fameuses « Sources », dont laseconde, le«Bouil- des pommes de pin ont été modelés dans la cire Bernard Palissy. Derrière les grands bronzes, et après la courbe de chaque angle du bassin, se dressent trois bambins enlacés, potelés et vivants, les mains pleines de fleurs, d'oiseaux, de coquillages ou de miroirs. Un coup Photo P. d'Aujee JEUX D'ENFANTS, PAR LESPINGOLA Groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu en 1690 fleurs dans ses cheveux s'appuie suruneurneren- lon s, jaillit en 1672. Un ï serpent, une grenouille, … avec le soin réaliste d'un LES JARDINS DE VERSAILLES Photo P, d'Aujec. a — LA RIVIÈRE LA MARNE, PAR LE HONGRE Groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu pur les frères Keller en 1689 Photo P, d'Aiÿce NYMPHE ET AMOUR, PAR MAGNIER Groupe de bronse, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Keller en 1689 sil RL d'œil suffit à nous assurer que toute cette grâce en- fantine est bien celle du xvir siècle, et n’a rien de la joliesse maniérée qu'offri- ront les mêmes jeux d’a- mours au xvie. Nous pas- sons aussi devant les deux Nymphes couchées, qu'ac- compagne un Amour, pour. rejoindre à l’autre extrémité du bassin les magnifiques figures de Tubi, le Rhône et la Saône. Le fleuve est un dieu des eaux, au visage sévère sous sa couronne de feuillage; son corps, de vigueur ner- veuse, a pris une pose aban- donnée; ses jambes se croi- sent; il s'appuie d’une main sur le rocher, d’où la source jaillit; dans l’autre main est un aviron soulevé par Le Photo P, d'Arÿee. JEUX D'ENFANTS, PAR GRANIER Groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu en 1690 un petit Triton souriant qui semble questionner le vieil- hard. Le bronze verdi a, sous la lumière, unechaleur admi- rable. La Saône, au corps élé- gant, aux formes amples, au mouvement aisé, est cou- chée sur le côté droit. Des grappes de raisins lui font une ceinture ; elle repose sur des épis et des pampres épars; son sein rond se pen- che sur une urne d’où l’eau s'écoule. La déesse, couron- née de fleurs et de pampres, sourit au Rhône, qui la regarde. Le petit Amour qui lui fait compagnie s'amuse à presser des raisins. C’est une claire et charmante per- sonnification de l’heureuse Bourgogne aux vins re- nommés. NYMPHE ET AMOUR, PAR LE HONGRE Groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu-par les frères Keller en 1690 dl pni 20e roi vphbises - ÉAS A at AS MUR 0 PAS 5 ‘ ñ ü} a AE SR JEAN-JACQUES KELLER, DE ZURICH, COMMISSAIRE ORDONNATEUR DES FONTES DE FRANCE (1635-1700) Peinture de Hyacinthe Rigaud à LES JARDINS DE VERSAILLES | È RTE ER FREE ri 4 de fruits mêlés d’épis. Le dieu est couronné de pampres et de roseaux; mais, au lieu de ce visage calme et imposant, on souhaiterait, pour le mieux particulari- ser, une sérénité plus gracieuse; rien dans ce bronze Ë ne rappelle le joli cours d’eau qu'est la Seine, à la à | marche lente, aux bords fleuris, parcourant ses pro- 4 | vinces si doucement accidentées, si paisibles sous leur î | ciel gris de lin. i | Coyzevox a été mieux inspiré en interprétant les . deux « idées » de Le Brun pour les grandes rivières de î Gascogne. Le dieu fluvial, qui symbolise le fleuve de : la Caronne, est assis, appuyé sur son bras gauche, et Ë tient un gouvernail plongé dans les flots. 11 fait penser, : par sa majesté, au Rhin des vers de Boileau, « tran- H quille et fier du progrès de ses eaux ». La tête, 1 qu'allonge une barbe flottante, est joviale; la bouche "1 ouverte rit spirituellement à quelque vision dans È JEUX D'ENFANTS Groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu en 1690 La ligne du décor se rehausse à nouveau derrière les deux statues, par deux autres groupes d'enfants cou- ronnés et enlacés de fleurs. Nous saluons de loin les deux dernières Nymphes du bassin du midi, pour aborder les grandes figures du bassin du nord, la Marne et la Seine. La Marne, grave et belle, soutient la corne d’abon- dance remplie de fruits; la tension de son bras droit développe sa forme élégante. Un jeune Triton soulève une guirlande de fleurs et s’affermit sur l’aviron; la tête un peu froide de la déesse n’a point l'expression exquise des statues de Tubi, ni la force que nous allons trouver chez celles de Coyzevox; elle fait pourtant honneur à Étienne Le Hongre, ainsi que son pendant, le fleuve de la Seine. Celui-ci est un vieillard taciturne, à qui un petit génie sourit en lui offrant une corne débordante Photo P. d'Arjec. JEUX D'ENFANTS Groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu en 1690 | 2e need SEraRes T'hoto P. d'Aujec. l'holo P, d'Aujec. eat vd à LES JARDINS DE VERSAILLES LE FLEUVE LA SEINE, PAR LE HONGRE Groupe de brense, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Keller en 1690 LE FLEUVE LE RHONE, PAR J.-B. TUBI Groupe de bronz:, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Keller (sans date) J Le] l'espace. La lumière tressaille sur son corps musclé aux nombreux replis. Un bel enfant ailé, blotti à ses pieds, répand les fleurs et les fruits, et joint sa grâce mutine à cette œuvre de tranquille force. En face, la Dordogne, sous les traits d’une femme puissante, est renversée en arrière sur un coude et, elle aussi, regarde avec ravissement vers le ciel. Le petit dieu qu’elle enlace suit son mouvement. La noble LES JARDINS DE VERSAILLES tête féminine, aux traits fins, est chargée de fleurs ; autour d'elle sont épars des fruits, des épis, du feuillage de vigne, et deux urnes jumelles, rappelant la double origine de la Dore et de la Dogne, coulent sous son bras magnifique. Le groupe enfantin, auprès de ces deux grandes figures, se dresse comme une gerbe de fleurs entrela- cées. Nous apercevons la silhouette des Nymphes cou- PROJET D’UNE FONTAINE D’AMOURS Dessin de Charles Le Brun chées qui les suivent; elles ont l'ampleur majestueuse et la souplesse à la fois de leurs autres sœurs qui occupent, deux par deux, des places identiques sur les bas côtés de l’autre bassin. Ces Nymphes du Parterre d'Eau ont jété modelées par Le Hongre et Raon, au bassin du midi; par Le Gros et Magnier, au bassin du nord. Le motif, varié seule- ment dans l'expression, reste le même. De petits dieux crc ses Mir peie NC CRE 6 SE de un + LES JARDINS DE VERSAILLES 33 D LE CHATEAU DES.JARDINS Estampe de J, Rigaud tout fleuris accompagnent ces belles formes féminines. Ce sont les génies de l’eau, de l'air et de la terre. Elles jouent avec eux, rieuses ou pensives, conduisent des dauphins, soulèvent des guirlandes, apprivoisent des oiseaux ou choisissent des fleurs. Leurs jolies têtes, couronnées de feuillage, présentent de fins profils ; leurs corps nus s’enveloppent à peine dans une drape- rie, laissant voir une jeune poitrine, des jambes pures et des bras ronds. Étendues sur la margelle, leur bronze a le reflet de l’eau verte où elles se mirent et les tons dorés de la lumière qui les caresse. La plus délicieuse est certainement cette élégante déesse, à la petite tête couronnée de boucles relevées par un diadème, que Le Hongre a posée sur le bord le plus méridional. Elle est assise sur un sol jonché de beaux coquillages; une jambe s’allonge et continue la ligne dressée du buste; l’autre est repliée sous elle. D'un geste un peu maniéré, harmonieux cependant, elle LE PARTERRE DE LATONE Estampe de J. Rigaud À LES JARDINS DE VERSAILLES LES SAISONS : LE PRINTEMPS, PAR MAGNIER Cabinet du Point-du-Jour Marbre sculpté en 1681 prend des bijoux dans une coquille que lui présente son jeune compagnon ; l'enfant nu se renverse un peu pour être à portée des doigts de la Nymphe rêveuse. Les groupes d'enfants, trois par trois, qui mettent aux angles des bassins du parterre leur joliesse espiègle, sont les frères semblables de tant d’autres petits Amours qui penchent leur sourire aimable sur l’eau des fon- taines. Ils n'ont rien du libertinage des bambins joufflus qui tresseront des couronnes autour des galants portraits du xvirt siècle; ils sont aussi bien différents de l’enfance véritable et de son enjouement naturel ; ils sont les créations de l’art, mais de l’art du xvue siècle, un peu cOMmpassé, retenu, avec une ombre de dignité jusqu’en ses Cupidons replets et ronds, aux chairs creusées de fossettes. La grâce domine cependant, cette grâce que Louis XIV voulait mêler à la pompe de Versailles, aux allégories des plafonds peints comme aux sculptures des jardins, cette grâce qu’il invitait Mansart à ne pas oublier, quand il lui recommandait de mettre « de l'enfance partout ». Combien sont insouciants les jolis gestes de ces groupes de petits êtres qui S’enlacent, qui se couvrent de fleurs, qui jouent sur les margelles de marbre! En voici un porté sur les ailes d’un grand cygne au col penché; un autre, une fillette, se regarde dans un miroir, tandis que ses deux compagnons se dressent sur des jonchées de roses; plus loin, des oiseleurs Photo P, d'Aigee, LES HEURES * LE POINT DU JOUR, PAR GASPARD MARSY Parterre d'Eau Marbre sculpté en 1680 Photo PF, d'Aujee, LES ELEMENTS : L'EAU, par LE GROS Cabinet du Point-du-Jour Marbre sculpté en 1681 36 LES JARDINS DE VERSAÏIELES perchent sur leurs menottes des oiseaux prêts à s’envo- ler; ici des danseurs, là des tritons qui soufflent dans les coquillages marins. Rien de plus délié que tout ce petit monde qui sème dans l'héroïque symphonie du parc sa note de gaieté sans éclat. Une autre évocation de l’enfance est là, toute voi- sine, aux côtés de l'escalier qui descend au Parterre du midi. Ce sont les génies de bronze, portés sur des sphinx de marbre, qu’on vit longtemps au-dessus des degrés de Latone, à l'endroit où nous venons d’admirer les vases « au soleil ». Les enfants « au sphinx » sont parmi les œuvres les plus populaires de nos jardins ; nous en avons heureusement retrouvé l’histoire véritable. Modelés, en 1660, par le vieux maître Jacques Sar- ! LA NUIT, PAR RAON Rampe du Parterre du Nord Marbre sculpté en 1680 razin, le plus ancien sculpteur qui ait contribué à Ja décoration actuelle de Versailles, les enfants furent fondus par Duval après la mort de Sarrazin, et placés, par les soins de Lerambert, son élève, sur les sphinx de marbre que lui-même sculpta pour eux. Les bronzes furent d’abord dorés, puis dédorés, pour s’harmoniser plus tard aux fontes des Keller. Les sphinx sont accroupis sur une tablette de marbre. Leur tête de femme est coiffée à l’égyptienne, un bandeau barre le front, des boucles tombent autour du visage; les épaules sont couvertes d’une étole bro- dée, qui est de bronze et sert de selle aux Amours qui chevauchent. Les groupes se font face; les sphinx sont identiques, mais les deux petits dieux diffèrent par leurs Photo P, d'Aujee. LES ÉLÉMENTS : L'AIR, PAR LE HONGRE Parterre d'Iau Marbre sculpté en 1683 > o æ = Z. £ & es" ce” À S o À éd et BR & © 7 à | 5 à | pee | 3 à ER n) | % [sa] | ES y £ Ÿ — ES — a 2 ba Die < FES Z à mn à [a°4 a Ses tn) £a < LA à > He & (æ ! CES 3 NAS ", © n i ER # Î Z S . ss. A de. > n t 0 cu : z Ÿ 2 3 S ÿ | à 4 à < à ae D = © ss z Ÿ Z à ñm. > S > & zZ à 4 S ñ à n AS es M. { é | a à Î ous | ES { È È l : “ £ CH | S © ES à S = à 8 LES JARDINS mouvements et l'expression rieuse de leur tête frisée. Is ont en bandoulière le carquois garni de flèches, retenu à l'épaule par un ruban. L'un tient à la main une couronne de fleurs tressées, l’autre une guirlande; ils sont vivants, espiègles, et d’un effet imprévu en leur couleur de bronze foncé sur le blanc. marbre des monstres impassibles. D'une invention et d’une technique admirables, ces motifs ont introduit pour la première fois dans la décoration du parc ces enfants, dont la grâce a si promptement peuplé les jardins et qui ont atténué par- tout ce qu'il y aurait eu de trop sévère dans le domaine royal renouvelé. Les groupes de Sarrazin et Lerambert furent aussi les premiers ouvrages de bronze venus, en même temps que les beaux marbres, remplacer les termes et les statues de pierre qui avaient d’abord suffi à Thoto P, d'Aujee, RER PA d 1 JEUX D'ENFANTS, PAR LE GROS Groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu en 1690 DE VERSAILLES décorer le Versailles primitif. Leur place est ici particuliè- rement instructive, à côté de cet illustre Parterre d'Eau, tout en décoration de bronze, où triomphe la maîtrise puissante et définitive des grands fondeurs de l’Arsenal. De l’autre côté du Parterre, deux fontes plus récentes que les enfants « au sphinx 5 leur sont symétriques. A la tête du degré qui conduit au Parterre du nord, ont été reportées, au xix° siècle, des figures accroupies, fondues par les Keller, qui s'y trouvaient autrefois, comme le montre un tableau d’Allegrain. Ces bronzes avaient été longtemps remplacés par les marbres que le Roi avait à la même époque ordonnés de ces deux figures. L'une est exécutée d’après un antique, lArrotino (le Rémouleur) des Offices de Florence, en qui les con- Photo P. d'Aujec, JEUX D'ENFANTS, PAR POULLETIER Groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu en 1690 mt: dis Sa 4 $ L' % \ g: 3 DS MUR LME LL ma Cas EAST SA A à se gti ACL c'es DEN ET des ANNE-LOUISE-BÉNÉ TE DE BOURBON, rcus rar DUCHESSE DU MAINE (1676-1753) Peinture de Pierre Mignard 40 LES JARDINS DE VERSAILLES temporains de Louis XIV voyaient un personnage de Tacite, Milicus, affranchi de Scevinus, aiguisant pour son maître le couteau de sacrifice avec lequel celui-ci veut immoler Néron. L'expression attentive de ce servi- teur s’expliquerait par l'effort qu'il fait pour pénétrer le secret des conjurés, qu'il doit aller livrer à l'empereur. La figure de femme est la Vénus de Coyzevox, qui porte, sur le marbre original, aujourd’hui au Louvre, la date de 1686. On sait aussi que c’est une imitation plutôt qu'une copie d’un antique fameux, dont les répliques existent à Paris, à Rome et à Florence. La tortue, qu'a conservée le sculpteur français à sa « Vénus pudique », indiquerait, paraît-il, « que les femmes ver- tueuses doivent être aussi retirées dans leurs maisons que cet animal l’est dans son écaille ». Ce fut une heu- reuse idée de mettre à Versailles la reproduction de cette œuvre exquise, que sa date rapproche des œuvres voisines. On connaît la ligne harmonieuse du corps de la déesse, le joli geste de ses bras qui cachent sa nudité robuste, et l'expression de son visage doucement effa- rouché. Les tablettes qui bordent les Parterres du nord et sont assis deux Amours nus, tenant leurs joues rondes dans leurs mains, les coudes appuyés sur le bord et penchés vers l’intérieur; leurs regards se défient et leur mine boudeuse est d’un effet charmant. Un autre vase a un étroit collier de pampres, et pour anses deux têtes de bélier sur lesquelles s'appuient deux faunillons au pied fourchu, au visage épais et rieur. Sur celui-ci, qui est une coupe, se dessinent des feuillages d’acanthe:; sur celui-là, des médaillons, un soleil, des têtes de chimères. Ici, deux monstres à poitrine de femme forment les anses; là, ce sont des hures de sanglier ou encore des sphinx posés sur des coquilles au-dessus de têtes de lion. Le corps de cette orfèvrerie de bronze porte parfois de simples guirlandes, parfois aussi des reliefs symbo- liques; sur un de ceux dont la forme est la plus sobre, Ballin a modelé Apollon poursuivant Daphné et, de l’autre côté, Apollon vainqueur du serpent Python. C'est un jeu de déchiffrer ces faciles énigmes. Les ÉCUSSONS royaux qui se trouvaient sur quelques pièces ont été défigurés avec soin, aux temps révolutionnaires, et remplacés par de vagues symboles. du midi supportent quel ques vases de marbre, mais surtout une curieuse série de petits vases de bronze, répétés deux fois, qui se rattache, par la matière plus que par le style, à la décoration du Parterre d'Eau. Toutes ces urnes, qui se remplissent de fleurs au printemps, sont dues à Claude Ballin, sauf une qui est de Fran- çois Anguier, et le carac- tère de leur exécution s'explique par leur ori- gine : Ballin était orfèvre du Roi, et il a traité ses modèles, fondus par Du- val, comme ceux des meubles d’argenterie qu'il ciselait à la même époque pour Sa Majesté. Les formes sont di- verses et plaisantes. Sur les anses d’un de ces vases Dirigeons-nous vers la colossale figureendormie, à l'entrée de la rampe ombragée qui descend à l'Orangerie. Si l'on sui- vait le terre-plein qu’elle décore, on arriverait aux « marches de marbre rose» que les versd’Alfred de Musset ont rendues fameuses. Jetons un ra- pide coup d'œil sur cette Cléopâtre (ou Ariane du Vatican), copiée à Rome par Van Clève. Ce travail de bon praticien ne sau- rait retenir l'attention, que sollicite tout à côté un groupementd'œuvres fort diverses et d’une origina- lité extrême. Nous sommes devant l'un des célèbres « Cabi- nets des Animaux », celui que l’on désignait autre- Photo P. d'Aujec. RAMPE DU PARTERRE DU NORD Au premier plan, la Diane de Desjardins AI RSAILLES E V JE [ JARDINS S LE u | TIGRE TERRASSANT UN OURS, PAR HOUZEAU AR HOUZEAU fondu par les frères Keller en 168 LIMIER ABATTANT UN CERF, d'Aujce, Photo P, Photo P. d'Aujec, 4 le bronze, d Groupe « Î fondu par Les [réres Keller en 168 Groupe de bronze, D | 2 2 | = | AE | Oo & | x = | A à | RE | a à Z. E> | O | Photo P, d'Aujec. 42 LES JARDINS DE VERSAILLES : [UUS YTrryTre ea Q al LTTTTIT 4 AIT US Ù CHE LE PARTERRE DU NOR D SOUS LOUIS XIV Peinture d'Etienne Allegrain fois sous le nom de « Fontaine du Point du Jour ». D'un grand bassin carré surélevé descend dans un bas- sin plus petit, au niveau du sol, une nappe liquide, qui voile dans sa chute des panneaux de marbre coloré. C'est une exquise harmonie que forment, aux heures du jaillissement de la fontaine, les eaux, les marbres et les bronzes. Car nous y retrouvons encore le bronze, et l’art des sculpteurs « animaliers » du grand siècle affirme une surprenante maîtrise dans les groupes de chasse posés aux angles de la margelle. Là, un fort limier abat un cerf pantelant, qui semble bramer en son agonie et dont les yeux disent l’effroi. Le chien, dont le cou est entouré d’un collier, est sur la bête qu’il déchire; sa tête se redresse et son regard appelle les chasseurs. En face, un tigre terrasse un ours. C’est la même disposition des corps, qui donnent une ligne presque semblable. Le tigre s’acharne sur sa proie, l’ours vaincu va mourir; sous l’eau qui ruisselle, la lutte entre les fauves paraît s'animer, ils tressaillent sous l'écume qui les recouvre. Les admirables cires de Houzeau furent fondues par les Keller en 1687. La statue, qui a donné son nom à cette fontaine du Point du Jour, se place en retrait vers la descente de Latone. Elle est longue et fine, avec une étoile sur le front ; un coq est à ses pieds, sous les plis de la robe un peu trainante, qui découvre son épaule et ses beaux bras. Sa main gauche se lève pour indiquer l'aurore. Gaspard Marsy a prêté à cette figure un grand charme de jeunesse, et sa vaillante beauté est de race toute française. Et voici, encadrant la nappe liquide, en avant du groupe d'animaux, deux autres statues féminines qui regardent vers le Parterre d'Eau. Elles font partie, comme le Point du Jour et toutes celles que nous allons rencontrer au voisinage du Château, de cette série de vingt-quatre marbres qui avait été commandée par Colbert, en 1674, pour 2 ET #, D 22I[V.I 12 J ‘puoz 21 S ([P098 1814) 8991 Ua 951D24 19 AUON 97 404 ousso( ŒAON AG AHAAALAVdA HT PROJET POUR LES QUATRE FIGURES DES («HEURES DU JOUR » Dessin de Charles Le Brun figurer dans les méandres du parterre d’alors. Quand on décida d'abandonner cette forme, les statues qui n'avaient plus de place dans la décoration nouvelle furent néanmoins conservées aux abords de la maison royale, comme étant les plus soignées et les plus précieuses. Charles Le Brun en avait concu l'idée, et les avait réparties en six groupes d’allégories conformes aux habitudes du temps. On y trouve, en effet, les Quatre Eléments, les Quatre Saisons, les Quatre Heures du Jour, les Quatre Parties du Monde, les Quatre Poèmes et les Quatre Tempéraments ou « Complexions de l'Homme ». Ces marbres, qui avaient coûté au Roi cent cinquante mille livres, devaient sans doute, à l’ori- gine, être réunis par groupes, comme dans les dessins de Le Brun. Cette conception fût restée assez pédan- tesque et mal d'accord avec la libre exécution des sculpteurs. Leurs œuvres ont été dispersées au mo- ment de leur installation dans les jardins ; et ce sont fort heureusement des raisons d'effet et d'équilibre qui en ont déterminé le placement. Voici, par exemple, un Élément et une Saison qui se répondent et qu'harmonise entre elles leur seule perfection. Sous les traits d’une nymphe dressée sur un dauphin, Pierre Le Gros, de Chartres, a représenté la déesse de l'Eau. La jeune femme, nue jusqu’à la ceinture, déploie son buste juvénile que caressent ses longs cheveux ; elle est couronnée de plantes marines et son bras droit soutient une urne d’où l’eau s’épanche. Le Printemps, qui l'avoisine, est une Flore déli- cieuse qui a des roses dans les cheveux. La robe mon- tante dessine sa gorge menue; d’une main elle soutient les lourds plis de son manteau qui traîne. Elle porte une corbeille de fleurs, et son expression un peu froide est rachetée par l'harmonie de ses lignes. Elle est due au ciseau de Magnier, auteur de cette Aurore du Bosquet des Dômes qu'on a souvent prise pour une autre Flore. La fontaine de Diane, à droite sur la même terrasse, est d'un arrangement semblable à celle du Point du Jour. Les deux groupes de bronze sont attribués à Van Clève seul, quoique Raon y ait aussi travaillé. Les sculpteurs ont donné à leurs fauves une allure passion- née, une énergie de combat extraordinaire. SE RL LES JARDINS DE VERSAILLES 45 Deux lions, à la longue crinière hérissée, luttent l'un avec un loup, l’autre avec un sanglier. Les lions, bien entendu, sont les maîtres, et ils se dressent fière- ment sur leur proie. Le loup est lamentable sous les griffes qui le déchirent, tandis que le sanglier tâche encore de se dégager de son farouche vainqueur. Autour du bassin, trois gracieuses statues se dressent comme de l’autre côté, et la première, qui fait face au Point du Jour, représente l'Air, par Le Hongre. Les ambassadeurs du roi de Siam, qui visitèrent Ver- sailles en 1686, admirèrent particulièrement cette statue, qui venait d’être mise en place, et le narrateur du Mer- cure la loue au-dessus des autres, à cette occasion, « pour la délicatesse du travail et la correction du dessin 5. L'artiste a su tirer le meilleur parti du croquis confié par Le Brun. De- bout sur son piédestal, le bras gauche levé soute- nant sur sa tête les plis | supérieurs de l'étoffe qui | la revêt, la jeune divinité semble s’envelopper de ! nimbes; la robe flottante | éparse autour d'elle est comme l'atmosphère qui va la dérober. Son buste nu présente au soleil qui la baigne sa poitrine ronde et hardie; à ses pieds, le roi des airs, l'aigle, la contemple ; elle-même re- garde le ciel, et tout son mouvement vers le haut la fait prête à s'envoler, tant le marbre paraît léger. Un détail permet ici de juger le goût excessif du siècle pour les sym- boles. La statue de Le Hongre porte dans Îla main un caméléon, et un guide du temps en donne la raison naïve : « Cet animal, selon Pline, ne vit que d’air. Feu Mademoi- selle de Scudéry, qui en avait eu deux chez elle pendant sept mois, était aussi de ce sentiment ; cependant Messieurs de lAca- démie Royale des Sciences, qui paraissent avoir exa- miné de plus près ce qui regarde cet animal, croient qu'il se nourrit de mouches et autres insectes. » Tout au bord du bassin est la Diane chasseresse, qui représente l’Heure du Soir. Son joli mouvement en avant est suivi par son chien qui bondit. Elle a le croissant des nuits dans ses cheveux en couronne. Sa courte tunique laisse voir sa jambe nue. Un bras en arrière marque l'élan, l’autre tendu tient un arc; der- rière son épaule s'aperçoit le carquois. C’est une œuvre de Desjardins, une des plus rares et des plus vivantes parmi celles de Versailles. Pour accompagner la chaste Diane et figurer l'heure ardente de midi, voici, de l’autre côté du bassin, une Vénus tranquille, où Gas- pard Marsy a mis tout son art délicat et souple, toute la facilité de sa main accrue par l'étude de l’an- tique. Et c’est vraiment la déesse de la Beauté, cette adolescente à la tête fine et fière, couronnée de roses; ses longs cheveux reviennent sur un sein qui s'arrondit à peine; d’une main, elle retient sans effort les plis de sa robe trainante ; son bras droit, élégant et pur, retombe, et ses doigts effleurent le jeune Amour tout nu, qui lui présente une flèche d’un geste implorant. Ces statues, qui ont arrêté notre promenade, sont parmi les meilleures du parc. Inspirées par ce goût de l’allégorie hérité de nos pères du Moyen Age, elles sont traduites dans ces formes antiques rajeunies par l'esprit fran- çais. Elles suffiraient à établir ce que nous avons dit de l'indépendance lais- sée à l'artiste, moyennant Photo P. d'Aujecs LES HEURES DU JOUR : DIANE SOIR, PAR MARTIN DESJARDINS Cabinet de Diane Murbre sculpté en 1680 40 sa subordination volontaire à l’idée bolisme imposé par Le Brun n’a Chaque sculpteur a su l'interpréter a fait passer dans le marbre son mant le génie de son temps et Tout le long des palissades du tenant un monde de figures, dont marbre et qu'auront caressées tomnes, des milliers de feuilles théorie se déroulera, descendra nuera sur les deux allées du Tapis- quets détournés et les allées pro- Trois-Fontaines, où se poursuit ensemble par Colbert aux bons la Vénus de Marsy, d’une si fraîche line, droite et fière sous le casque voir en elle une image de Ma- s'oppose à cette légende, qui ne frappante ressemblance. La belle d'Agénor, a un air de guerrière ; un cheval en relief. Elle est vêtue Photo P.d'Aujee. VASE DE BRONZE Parterre du Midi Modèle de Ballin génératrice de l’ensemble. Le sym- géné la création de personne. suivant son sentiment propre et style personnel, tout en expri- de sa race. Parterre du Nord va défiler main- le temps aura poli joliment le doucement, depuis tant d’au- mortes. De tout côté, la blanche les rampes de Latone, se conti- Vert et ira se perdre dans les bos- fondes. Suivons-les dans l'allée des la série des figures commandées sculpteurs de l'an 1674. — Après jeunesse, vient l'Europe de Maze- coiffant sa tête bouclée. On veut dame de Montespan, et rien ne se justifie pas cependant par une Europe mythologique, la fille l'écu sur lequel elle s'appuie porte d'une robe très ample qui se drape en nombreux plis; elle donne une impression de force majestueuse alliée à la juvénile beauté. C’est en vérité, comme on peut s'y attendre, la plus jolie des Parties du Monde. Cette Europe si élégante a comme voisine l'Afrique, sous les traits d’une jeune fille ayant pour coiffure la peau d'une tête d'éléphant; elle tient dans les doigts une défense d'ivoire et, de l’autre main, relève sa tunique; sa chair, que laisse apercevoir sa robe défaite, est vigoureuse et ferme; un lion couché lui lèche le pied gauche; son nez est large, sa bouche épaisse; le type caractérise très nettement la race nègre. Cette œuvre, d’un réalisme inattendu dans un tel ensemble, fut commen- cée par Sibrayque et finie par Jean Cornu, de Dieppe. Et voici à côté d’elle la statue de la Nuit. Raon l’a faite nue jus- qu'à la ceinture ; le buste court et mollement ar- rondi supporte une fine tête qui sourit mysté- rieusement ; ses cheveux sont couronnés de pa- vots.D'ungeste précieux elle relève sa robe semée d'étoiles, ingénieuse- ment enroulée autour de son corps ; une main tient un falot d’où Photo P. d'Aujee, VASE DE .BRONZE Parterre du Midi Modèle de Batllin te Photo P, d'Aujee. VASE DE BRONZE Parterre du Midi Modéle de Ballin it sd Pelé Main dt NE Taies Lis He P, d'Aujee, GASPARD MARSY AR MIDI, DE L'HEURE Cabinet de Diane ; VENUS OI JOUR LES HEURES DU Marbre sculpté en 1680 s'échappent des flammes; l'oiseau des ténèbres est à ses pieds. Auprès d'elle, la Terre de Massou, grave et chaste- ment vêtue, toute enveloppée de sa robe aux lourds plis, soutient de la main une corne d’abondance, sym- bole de sa fécondité, fruits et débordent ; des roses couronnent sa beauté, et sa force est signifiée par le lion couché qui la regarde. A l'angle d’où part l'allée de Cérès et de Flore, se placé le Poème pastoral. La jeune femme qui le repré- sente a la grâce ingénue qui convient au sujet ; elle est couronnée de fleurs; elle se prépare à jouer de la d'où les les fleurs syrinx et tient aussi son bâton de bergère. La robe : L'ASIE, PAR ROGER du Nord Marbre TJ MONDE Parterre LES JARDINS DE VERSAILLES courte laisse voir ses jambes bien modelées ; elle a jeté un manteau sur son épaule, et la panetière pend à sa taille. L'œuvre, d’une douce fraicheur champêtre, est de Pierre Granier. Nous allons quitter ici l'allée des Trois-Fontaines, qui devient mystérieuse comme une percée ouverte sur une grande forêt. Ses arbres élevés la font profonde et haute, et la lumière y passe tamisée, dorée à peine. Cette allée, au bord de laquelle autrefois chantaient les fontaines d’un bosquet maintenant détruit, demeure l'asile ombreux et discret des amoureux du silence. Une étrange assemblée de termes vient inter- LES PARTIES DU MONDE : L'AFRIQUE, PAR SIBRAYQUE ET CORNU Rampe du Parterre du Nord Marbre sculpté en 1682 (1624-1684) ROI DU ep! MARSY, GASPARD v Carrey Peinture de Jacques 50 LES JARDINS DE VERSAILLES Les auteurs de ces termes assez monotones importent peu à notre curiosité. Celui de Lysias, dû au ciseau de Dedieu, est d’une maïtrise Supérieure à ceux qui l’en- tourent. Les guides anciens rappelaient au visiteur, à l'honneur de l’orateur athénien, l'apologie qu'il avait composée pour la défense de Socrate, défense que celui-ci refusa d’ailleurs avec noblesse. Un dernier sage de la Grèce est le subtil Ulysse, à qui est consacré le cinquième terme; il tient à la main la fleur que lui donna Mercure et qui fut un talisman contre les enchantements de Circé. Nous avions oublié ce détail sans doute ; les lecteurs des Aventures de Télémague ne l’ignoraient point. La file nouvelle des figures en pied commence Photo P. d'Aujec. LES ÉLÉMENTS : LE FEU, PAR DOSSIER Rampe du Parterre de Latone Marbre sculpté en 1681 rompre la suite de nos statues. Ce sont des orateurs et des sages de l'antiquité, tous maîtres du langage insi- nuant, tels que Fénelon aurait pu en dresser la liste. Les draperies largement enroulées autour de la taille retombent amples sur le piédestal. Les têtes de ces vénérables personnages sont graves, avec leur cheve- lure et leur barbe bouclées ; trois d’entre eux tiennent des rouleaux. Saluons le grand orateur grec Isocrate, qui forma Démosthène ; Apollonius, venu de Chalcis pour être le précepteur de l’empereur Marc-Aurèle ; Théophraste, le parleur divin, quitient dans sa main des pavots, car il était l'ennemi du sommeil, disant que la plus folle dépense que l'on puisse faire est celle du temps. Photo P. d'Arjee. LES ÉLÉMENTS : LA TERRE, PAR MASSOU Rampe du Parterre du Nord Marbre sculpté en 1681 UN BOSQUET DETRUIT : LES BAINS D'APOLLON LOUIS XIV VISITE LE BOSQUET DISPOSÉ EN 1705 POUR RECEVOIR LES GROUPES DE L'ANCIENNE GROTTE DE TÉTHYS Peinture de J.-B., Martin par l'Automne, sous les traits d’un jeune Bacchus. D'épaisses boucles mêlées de grappes encadrent son visage ; il est presque nu; un manteau retenu par son bras jette des plis derrière lui, et ses hanches sont entourées d’une écharpe. D'un geste convenu, il |pré- sente une coupe ; à ses pieds, une corbeille est remplie 2 LES JARDINS DE VERSAILLES de raisins. On ne trouve point injuste le comte de Caylus quand il dit que cette statue de Regnaudin « n'est pas un bon ouvrage; elle est lourde, courte et médiocrement composée ». Il faut être d'accord ici avec les critiques du xvur siècle, bien qu'ils nous donnent souvent l’occasion de constater qu’ils sont plus LE PARTERRE DU NORD Dessiné par Le Nôtre et réalisé en 1668 (Etat actuel) sévères que n'est notre éclectisme pour l’art du temps de Louis XIV. L'Amérique a plus de charme que le Bacchus, et surtout plus de caractère. Il faut songer qu’au xvue siècle les populations du Nouveau Monde n'éveillaient point l'idée des gracieuses zisses qu’il se plaît aujourd'hui à nous envoyer. C'était, pour tous. les ‘esprits, la terre des Peaux-Rouges, des « Indiens », comme l'on disait. Et, afin de la représenter, voici ce que Guérin a imaginé, d’après les récits de voyageurs : La femme est nue, avec un simple pagne de plumes très court; la poitrine bien prise et bombée; la tête expressive couronnée de hautes plumes; un carquois garni sur le dos et un arc à la main. Un crocodile sans 32 à WP FEU a | + Yi PAS 7 2 tien ” — pt rs * | EH TT par MAZELINE L'EUROPE, MONDE : LES PARTIES DI Nor Rampe du Part Marbre sculpté en 1680 54 LES JARDINS DE VERSAILLES PROJET POUR LES QUATRE FIGURES DES « SAISONS » Dessin de Charles Le Brun férocité accompagne cette « sauvage » ; mais une tête de « visage pâle », qui gît à ses pieds, semble indi- quer que les relations avec la belle guerrière ne sont pas sans danger. Tout le morceau est hardi, le geste vrai, l'impression curieuse. Elle est plus noble et plus sereine, la Cérès que nous trouvons ensuite, dans la fière maturité de l’Æfé qu'elle représente. L'étoffe qui la drape s’ajuste par endroits et laisse deviner les formes vaillantes. Sa tête assez petite est couronnée de blé; sa main retient une gerbe d'épis dressée auprès d’elle. Cette déesse est de Hutinot, et Gérard Edelinck en a gravé l’image, tandis que son frère Jean gravait la statue suivante. L’Hiver est un vieillard mélancolique, sculpté par Girardon. Le maître a mis toute une âme d'artiste en ce chef-d'œuvre, et pour vérifier sa signification esthétique, il faut aller le visiter quand la froide saison a dépouillé le parc. Sur le fond dés arbres dénudés, la grande figure désolée est bien dans son domaine. Le corps s’enveloppe à moitié d’un manteau qui remonte sur la tête et la coiffe en capuchon. L'homme, accablé du poids de la vie, baisse le visage et. sa longue barbe caresse sa poitrine. Le front ridé, la bouche douloureuse, les yeux baissés disent la lassi- tude. Ses bras musculeux sont ramenés d’un- geste frileux ; sa jambe nue apparaît vigoureuse ; d’un mou- vement naturel, il se penche sur un réchaud ciselé soutenu par deux griffes de lion, d'où s'échappent les flammes qui réchauffent ses membres glacés. Le marbre de Girardon nous donne bien la sensa- tion de la saison rude, alors que les oiseaux ont fui les bosquets sans fleurs; et c’est aussi l'image de cet âge qui n'a désormais que les souvenirs sans espoir et s’'achemine vers le tombeau. La puissance du sculp= teur en a fait un rappel tragique et sobre des réalités et de la souffrance, parmi tant d’allégories orgueilleuses ou joyeuses à plaisir multipliées. Dans l’espace carré où se creuse le Bain des nymphes les deux statues qui apparaissent aux angles de l'Allée d'Eau font partie des « Tempéraments de l'Homme 5. Ce sont des œuvres médiocres, mais il faut convenir que le sujet prête peu à l'inspiration. C’est d’abord le Colérique de Houzeau. Un homme nu, aux gestes GIRARDON AR fr) > D LES SAISONS : x ES S Sn ais] e LES JARDINS désordonnés et violents, semble lever le poing contre un adversaire ; près de lui, un lion furieux le regarde, la gueule ouverte, dressé pour la lutte. De l’autre côté, lui faisant face, est le Sanguin de Jouvenet. Couronné de grappes de raisin, il joue de la flûte d’un air jovial. Une large écharpe se noue à sa taille et retombe assez bas; près de lui, un bouc broute un rameau de vigne. Voilà toute une physio- logie interprétée par les artistes du grand siècle. Remontant à l'angle de la palissade, nous rencon- trons ie Poème satirique. Le jeune satyre de Philippe Buyster n’a point les pieds de bouc, mais son visage exprime bien la finesse malicieuse attribuée à ces divi- nités des bois. Sa tête, encadrée d’une barbe courte et frisée, a des cheveux bouclés étroitement, sous une : L'ÉTÉ, PAR du Nord Marbre LES SAISONS HUTINOT DE VERSAILLES couronne de feuillage. Il s'appuie sur un tronc d'arbre. D'une main il lie écharpe qui fait le tour de ses hanches, de l’autre il tient un rameau de vigne. L'expression doit ici suggérer tout le symbole. Le sourire moqueur est, en effet, d’une méchanceté spirituelle, et l’on devine, sur les lèvres entr'ouvertes, le mot prêt à sortir, acéré comme une flèche. C’est une page de Boileau traduite dans le marbre, et, avec cela, le charme d’un corps jeune, à la ligne pure, au geste gracieux. Les figures qui suivent sont d'intérêt moindre. L'Asie, de Roger, porte un vase de parfums dans la main gauche ; ce sont les nards de l'Arabie qui s'en exhalent; un turban, jeté aux pieds de la statue, complète un symbolisme facile. Le Flegmatique, de Lespagnandel, a près de lui une tortue, et ses bras LES QUATRE PARTIES DU MONDE : L'AMÉRIQU E, PAR GILLES GUÉRIN Parterre du Nord Marbre | | | LES JARDINS DE VERSAILLES 57 croisés suffisent à caractériser ce « tempérament s. Enfin, vers l'allée dite de l'Arc de Triomphe, auprès du Château, est le Poème héroïque. Drouilly a donné à la figure l’air noble et fier qu'il fallait attendre. On veut voir, en ce majestueux personnage couronné de lauriers, Louis XIV lui-même. L’allure est belle, l'expression franche ; la tête modelée avec soin se pare de longues boucles. L’habit est à la romaine avec la s FES à æ PROJET DE FONTAINE : LIS ÉPANOUI SOUTENU PAR DES TRITONS Dessin de Chartes Le Brun Jupe au-dessus des genoux, brodée au bord. Le corselet damasquiné porte un soleil, emblème du Roi ; un long manteau jeté avec négligence sur l'épaule retombe par derrière en draperie lourde ; la main droite le soulève en S'appuyant sur la hanche ; la main gauche tenait la le trompette de la Renommée. Les pieds sont dans des sandales à lanières, les jambes et les bras nus, le cou puissant. Si le sculpteur courtisan a voulu flatter l'amour- propre du monarque, il n’a pu saisir meilleure occasion. Le Poème héroïque chante le vain- queur, comme le chantait Qui- nault dans l'Æglogue de Versailles : Le maître de ces lieux n'aime que la [victoire ; Il en fait ses plus chers désirs ; [1 néglige ici les plaisirs Et tous ses soins sont pour la gloire! Louis a trouvé naturel d’être choisi pour personnifier la gloire dans ce domaine qu'il venait de créer et où tout disait au monde qu'il était aussi le maître de l'art. Le Parterre du Nord, que nous venons de longer, a conservé très exactement le dessin de Le Nôtre, tel que le montrent les anciens tableaux et les plans primitifs. Il est permis de faire remonter à cette époque maint détail de jardi- TERMI D’'ULYSSE, PAR Rond-point des Philosophes Marbre sculpté en 1688 MAGNIER LES JARDINS.DE VERSAIÏILEES Photo P. u'Aujec. YASE ORNÉ DE TÊTES de BÉLIER Parterre du Nord Marbre, par Rousseau nage qui S'y remar que, tel que l’encais- sage en des bordures de buis de la terre rapportée pour la plantation des fleurs. Comme autrefois, d’ailleurs, le Parterre est surtout fait de gazon, dont les sur- faces se juxtaposerit en triangles. Au milieu de cette verdure, égayée de vases demarbre blanc et souvent d’arbustes fleuris, tremble la nappe transparente de deux bassins cir- culaires. Ce sont les anciens Bassins des Couronnes. Les pre- inietsS Mots. dé plomb qui les ornè- rent furent confiés à Le Hongre et à Tubi. Des sirènes et des tritons soutenaient, dans chaque fontaine, une grande couronne fleurdelisée; mais, depuis lors, des restaurations renouvelées ont en- levé les couronnes, ne laissant au centre que quelques feuillages ; des parties entières des figures ont été refaites ; une seule chose demeure encore du premier ouvrage, c’est l’onduleux groupement des dieux marins. Ils nagent, le corps renversé ou couché sur le côté, avec une expres- sion hardie et rieuse; leurs hanches sont entourées de fleurs ; leur double queue entortillée semble prête à battre l’eau tranquille. La pose des sirènes est nonchalante : celle-ci, couchée sur le dos, se pré- serve du soleil en élevant le bras ; celle-là présente à la lumière son Re Phutv l'a" Aujec, TERME PAR GRANIER Rond-point des Philosophes Marbre sculpté en 1688 D'ISOCRATE, MARTIN VAN DEN BOGAERT, ntr DESJARDINS, SCULPTEUR DU ROI (1640-1694) Dans le fond, le monument érigé a Louis XIV sur la place des Victoires, à Pa Peinture de Hyacinthe Rigaud 60 LES JARDINS dos cambré et montre le plus joli visage couronné de fleurs. Ce n’est, au reste, qu'une ingénieuse com- position de Le Brun traduite en sculpture. Cette autre, de proportions plus vastes et d’une conservation plus complète, est la Pyramide, exécutée par François Girardon ; il y affirmait déjà cette maïi- trise, qui devait faire de lui le premier des sculpteurs DE VERSAILLES de Versailles. Il dut porter un soin particulier à ce grand ouvrage, qui fut mis en place en 1669 et appar- tient, par conséquent, à la plus ancienne décoration du parc de Louis XIV. La minutie du détail exigea un assez long temps pour l'exécution. Mais rien n’est plus parfait que cette fon- taine, où tout est délicat travail de patience et de goût. Il n’en est pas de plus exquise dans les jardins d'Italie où l’eau chantante, comme à Versailles, berce la pensée du promeneur. Si pourtant sa forme générale fut empruntée à l’art de nos voisins, comme ils sont français les moindres motifs qui la décorent! La mesure, l'élégance, l'invention des morceaux qui tous répondent à l’idée princi- pale, font un chef-d'œuvre de ce petit monument. Il est composé de la flore, de la faune et des dieux de la mer, que les eaux caressent en cascades. Le plomb, jadis entière- ment doré, fut travaillé comme une orfèvrerie, et, parmi les multiples ornementations, les poissons, les dauphins, les tritons. semblent vi- vre sous l’écume frissonnante. Tout en haut, dans l’étroite cu- vette ouvragée, est un vase portant des têtes de satyres; c’est du vase que s'élance le grand jet qui re- tombe avec force sur les quatre bassins de la pyramide. Quatre écrevisses dressées le soutiennent de leurs queues; elles-mêmes re- posent sur une deuxième cuvette, plus large, et de reliefs différents. Celle-ci est portée par quatre dau- phins, dont la gueule s’entr'ouvre pour boire l’eau de la troisième cuvette, ornée de coquillages, au- tour de laquelle ils sont placés. Des guirlandes de fleurs sont jetées d’un monstre à l’autre. Au-dessous jouent quatre jeunes tritons, aux queues doubles, qui s'écartent et se courbent pour se : à rejoindre sous des fleurs. Les bras PROJET POUR LA FONTAINE DE LA PYRAMIDE Dessin de Charles L2 Brun Photo P, d'Aujee. de chacun d’eux se sou- lèvent et s’arrondissent ; la tête douce et bouclée se penche sous le poids. Ils plongent dans la quatrième cuvette, la plus grande. Entre les pieds de lion qui la supportent, se pour- suivent quatre grands tri- tons dont les mouvements ont la souplesse de la na- ture ; leurs visages égayés disent le plaisir qu'ils ont à nager dans le bassin cir- culaire d’où s'érige la Pyra- mide. Ainsi s'enracine au milieu des eaux ce petit temple élevé à la gloire des EAUX. C'est encore le travail de Girardon que nous re- trouvons, quelques pas plus loin, parmi les bas-reliefs qui décorent le bassin carré appelé les Cascades ou le Bain des Nyrmpbes Photo P. d'Avjec. LA VÉNUS PI DIQUE Degré du Parterre du Nord Bronze fondu par les frères Keller, d'après Le marbre de Coyzevox (1686) 61 de Diane. Le plus impor- tant, celui qui s’adosse à la Pyramide et que le soleil ne visite jamais, est du sculpteur troyen. Le sujet est digne d’un bas-relief antique. Onze nymphes, chastement nues, s’ébattent dans l’eau, au bord d’une rivière. Le paysage de rêve est tout près de la réalité, tant la patine des ans a glissé sur le plomb des tons qui l'a- vivent. Le soleil dore l’ho- rizon ; on croit deviner un bleu de ciel et d’eau, un rose jeté sur les chairs, le vert profond des plantes marines ; et lorsque la nappe transparente vient se répandre devant la scène, les corps semblent tressail- lir sous le ruissellement ar- genté. Le morceau est coloré comme une peinture et TRITONS ET SIRENES Bassin du Parterre du Nord Groupe de plomb, d'après Tubi et Le Hongre 62 LES JARDINS DE VERSAILLES dégagé comme un relief de marbre; c'est aussi tout un petit poème de vivante jeunesse abandonnée au gré de l'eau, au milieu des roseaux en fleurs. Ce long morceau rectangulaire a ses figures moins grandes que nature. Il est comme arrondi aux extré- mités par deux nymphes assises au premier plan, tenant l'une et l’autre la draperie qui doit les vêtir après le bain. La première est allongée, à droite, sur un rocher; elle sourit, cachant sa poitrine de son bras; et près d'elle une naïade, vue de dos, s'enfuit vers les arbres, les jambes encore dans le flot, montrant une onduleuse ligne. Il s'ajoute au groupe une troisième compagne, renversée sur la berge, qui s'appuie sur ses deux mains et bat l’eau de ses petits pieds: son visage amusé rit aux gouttelettes qui l’éclaboussent. A l'arrière-plan, deux baigneuses semblent se tenir à l'écart. Elles gardent les pieds dans l’eau ; mais l’une se dirige vers le bord; la deuxième assise, un peu pen- chée en avant, la main sur son genou, dans une paisible lassitude, regarde une compagnie, qui, non loin d'elle, crie et s’agite. Ce sont quatre belles filles, animées par une lutte joyeuse. Celle qui est prisonnière dans les bras d’une amie, a l'air courroucé ; les yeux baissés, le front plissé, toute tendue pour la défense, sa ronde poitrine en avant, elle repousse de la main : les deux espiègles qui lui jettent sans pitié l'eau dans les yeux. Echappée de la bataille, une cinquième naïade rit de tout son visage. pleur de ses formes contraste avec celles d'elle, arrête la composition. Celle-ci est calme comme une figure de Poussin, pure comme une de ses vierges d'Arcadie. La scène, si joliment mouvementée, se forme ainsi de groupes distincts, qui se réunissent en guirlande ; la science des lignes courbes y crée des harmonies ex- quises; le corps des jeunes filles a la sou- plesse des lianes; on les sent vivre, on les voit jouer, on les entend rire, dans l'air à peine doré, dans l’eau teintée d’un rose doucement rompu d'azur. + Plusieurs bas-reliefs secondaires accom- pagnent l'œuvre de Girardon, tant au fond que sur les deux faces latérales du bassin. La partie droite est de Le Gros, celle de gauche de Le Hongre. Elles sont en parfaite symétrie et répètent en les diversifiant leurs génies marins, leurs naïades, leurs enfants et leurs dauphins. Les motifs, de plus en plus petits, suivent la pente, chacun dans son cadre séparé. A gauche, le dieu des eaux par Le Hongre les roseaux et couronné de plantes marines. marchant dans les fleurs et portant sur sa tête une corbeille de fruits, l’autre avec une PROJET POUR LA FONTAINE DE LA PYRAMIDE Dessin de Charles Le Brun coquille remplie de petits coquillages; ils Elle est tournée de telle sorte que l'am- d'une autre nymphe qui, étendue à côté est assis, taciturne, les jambes repliées dans Deux enfants nus et potelés suivent, l'un KE pbehnnnt UE. dé diane se Fe à Sanders sis _—. PR D es due e nd son mariage * Photo L, Lévy, FONTAINE DE LA PYRAMIDE Sculpture de plomb, par Girardon Achevée en 1672 Photos P. d'Avjec. vont, légers et souriants, laissant au zéphyr flotter leur écharpe. C’est en- suite une nymphe pen- sive, appuyée sur une urne, frèle et penchée comme les roseaux qui l'environnent ; mais l’en- fant qui vient après est dodu et plein de vie, couché sur un dauphin, son écharpe en auréole. Dans le dernier et le plus petit cadre s’enchässe un dauphin aux prises avec une écrevisse. A droite, le génie des eaux s'appuie sur une urne et songe en regar- dant la mer ; deux amours, porteurs de fruits et de coquilles, rient de leur butin et courent dans le vent, tandis que la naïade qui suit est sagement as- sise au bord du fleuve qu'elle garde; elle sourit, consciente de sa jeunesse et de sa beauté. Le con- + LES POÈMES VASES DE BRONZE Parterre du Nord Modèles de Claude Ballin * LE POÈME HÉROIQUE, PAR DROUILLY Parterre du Nord Marbre traste se répète : un petit enfant, dans l’autre cadre, chevauche avec fougue un monstre récalcitrant; puis deux dauphins achè- vent l'extrémité amincie de la muraille sculptée, toute voisine du specta- teur. L'œuvre fut dorée au- trefois, comme tous les plombs de Versailles ; mais le temps, qui a effacé l'or, l’a rendue plus belle et lui a laissé des teintes dont il faudra à tout prix respecter l'heureuse har- monie. L'Allée d'Eau va nous permettre maintenant de comparer l'effort des ar- tistes du Versailles com- mençant avec le goût sou- verain, que nous avons vu triompher, en sa ma- turité, dans les bronzes du Parterre d'Eau. Toute cette partie du parc, en LOUISE-FRANCOISE DE LA BAUME LE BLANC, DUCHESSE DE LA VALLIÈRE (1644-1710) Peinture de Jean Nocret 66 LES JARDINS DE VERSAILLES effet, où nous trouvons la Pyramide, les Couronnes, le Bain des Nymphes, l’Allée d'Eau, a été ornée à la première époque de la décoration des jardins; et les oroupes de l’Allée, les plus anciens tout au moins, étaient déjà posés au printemps de 1670. L'Allée d'Eau fut imaginée par Claude Perrault, le médecin-architecte, et comporta d’abord sept petites fontaines deux fois répétées et formées de groupes d'enfants en plomb doré. Ils soutenaient des bassins de métal, dans lesquels Massou et Le Hongre avaient SAR , ne ‘#54 modelé des ornements de fleurs et de fruits. 272 Le nombre des groupes de plomb fut porté de quatorze à vingt-deux, lors d’un remaniement de la partie basse de l'allée, en 1678; et l’ensemble de ces Photo P. d'Auÿee. LES SAISONS : L'AUTOMNE, PAR REGNAUDIN Parterre du Nord Marbre sculptures fut refait en bronze dix ans plus tard, en 1688. Il faut remarquer cette transformation, cet enno- blissement de la matière, dont la date est instructive. Peu de temps auparavant, les vasques de métal avaient été remplacées par des vasques de marbre, et l'on avait sacrifié les ornements de fleurs et de fruits qu'il était difficile de préserver du vol. Telle nous avons l’Allée d'Eau de nos jours. C’est l'allée joyeuse, l'allée des « Marmousets », selon la dénomination populaire, celle où chantent, dansent et s’enlacent vingt-deux groupes d'enfants réunis trois par trois. Dans la grande avenue majes- tueuse, ces petits tritons, ces amours, ces termes MPERAMENTS DE L'HOMME : LE COLERIQUE, PAR HOUZEAU Allée d'Eau Marbre LES JARDINS DE VERSAILLES 67 multiplient les jeux de l'insouciance et réjouissent les yeux sous les hautes branches. Le jour des Grandes Eaux surtout, quand jaillit au-dessus d’eux la pluie qui les inonde, ils ont l'air tellement surpris et amusés qu'ils semblent vraiment vivre. De chaque côté de l’allée se répètent les onze groupes semblables, qui, par une illusion ingénieu- sement conçue, paraissent différents parce qu'ils sont autrement placés. Ils sont posés au centre de bas- sins circulaires de marbre blanc et les vasques qu'ils soutiennent sont en marbre rouge du Languedoc. Les premiers que nous rencontrons sont trois petits tritons, aux corps terminés en spirale, revêtus d'algues et de fleurs ; les visages, très expressifs, sont épais et rieurs. Ensuite viennent trois garçons étroitement enla- cés; les membres gras et creusés de fossettes s’arc- Photo P, d'Aujec. LES POEMES ;: LE POÈME PASTORAL, PAR GRANIER Rampe du Parterre du Nord Marbre sculpté en 1681 ë < ÿ. 7] Es l'hoto P. d'Auÿre. LES POEMES : LE POEME SATIRIQUE, PAR PHILIPPE BUYSTER Parterre du Nord Marbre boutent sans raideur ; lun d'eux simule un jeune Bacchus couronné et ceinturé de pampre, la main pleine de raisins. Voici deux amours ailés, vêtus seulement d'écharpes flottantes, et, parmi eux, une petite fille dont la robe fendue laisse voir les jambes croisées ; une ceinture d'orfèvrerie s'agrafe à sa taille et un bijou retient l'étoffe sur ses épaules. Trois bambins dansent autour d’une colonne fleurie, les mains levées, les bras arrondis. Un surtout est délicieux, montrant la jolie ligne de son dos; il s’ap- puie sur la pointe d'un pied, tandis que l’autre, en l'air, semble marquer la cadence. 68 LES JARDINS Le DE VERSAILLES Photo Giraudon LA FONTAINE DU BAIN DES NYMPHES (partie gauche) Allée d'Eau Bas-relief de plomb, par Girardon, sculpté en 1670 Suivent des musiciens appuyés sur une lyre. Autour de leur corps des rubans retiennent des fleurs. L’un joue du flageolet, l'autre de la syrinx, et le troisième, de ses deux mains, bat la mesure. Leurs voisins sont trois petits satyres, aux visages grimaçants ; ils dansent de leurs pieds fourchus autour d’un arbuste. Les jeunes termes qui leur succèdent, bien qu'engainés dans un fût de bronze, n'ont pas la mine moins épanouie. Quels artistes ont exécuté ces groupes d'une vie parfaite, d’un équilibre harmonieux, dignes d'être com- parés aux œuvres les plus célèbres de l’art florentin de la grande époque ? Les deux premiers sont de Le Gros, le troisième de Le Hongre, les deux suivants de Leram- bert ; Le Gros a fait encore les trois satyres du sixième groupe, Lerambert les trois termes du septième, et, bien que tous les croquis fussent de Le Brun, on peut dire qu'ici plus qu'ailleurs lidée première, tout ingénieuse qu'elle ait été, s'est trouvée dépassée par sa réalisation sculpturale. Ils continuent à se grouper trois par trois dans le bas de l'allée qui s'ouvre en éventail, les petits dieux, les petits oiseleurs, les petits musiciens. Nous les trou- vons peut-être plus pittoresques, mais moins jolis que les premiers et d’une exécution moins parfaite. Sans doute sont-ils nés trop hâtivement : lorsque furent remaniés les deux bosquets qui prirent les noms des Trois-Fontaines et de l'Arc de Triomphe, l’Allée d'Eau dut se continuer en demi-lune; l'addition de nouveaux groupes S'imposa, et d’autres artistes furent conviés à fournir les modèles aux fondeurs. Ce furent, immédiatement après les motifs anciens, trois petits pêcheurs de Mazeline, une fillette et deux garçons qui jouent avec des poissons, et trois chas- seurs, du même sculpteur, dont l’un sonne de Ja trompe, l'autre tient un lièvre et le troisième caresse un chien. Les trois espiègles qui regardent l’eau tomber du bassin, ainsi que les trois petites filles qui suivent, dont l’une porte un perdreau, sont de ce Buirette, qui, vers le même temps, travaillait aux Amours du Parterre d'Eau. Cette jolie enfance, disséminée un peu dans tous les coins des jardins, est ici réunie en bande rieuse; elle est l'animation et la gaieté de cette avenue, aimée et fréquentée de nos jours par les jeux d’une enfance à peine plus vivante que celle des sculptures. L’allée nous a amenés devant le Bassin du Dragon. Les groupes de plomb épars sur ses eaux sont une imitation moderne un peu menue des modèles primi- tifs depuis longtemps détruits. L'ensemble ne manque pas d’un certain caractère. Au milieu de l’eau est le ve en ee tnt nul Rotu > LES JARDINS DE VERSAILLES 69 Photo Giraudon. LA FONTAINE DU BAIN DES NYMPHES (partie droite) Allée d'Eau Bas-relief de plomb, par Girardon, sculpté en 1670 dragon aux ailes énormes éployées, que montrent les estampes et les tableaux, et dont le milieu du corps, avec ses traces de dorure, est encore l’ancien plomb de Gaspard Marsy. Il représente, dans les jardins de Louis XIV, le serpent Python, dont Apollon fut vain- queur. Le monstre, serré de près par les dauphins, se dispose au combat, la tête renversée, la gueule ouverte, les griffes en dehors. Des enfants montés sur des cygnes dirigent vers la bête mythologique leurs arcs bandés. Cette restitution d'un ensemble disparu, due à M. Tony Noël, est contemporaine de la grande réfec- tion du Bassin de Neptune, dont l'achèvement coïncida avec les fêtes du centenaire des États Généraux réunis à Versailles en 1789. Le 5 mai 1889, les eaux du Dragon et de Neptune jouèrent devant le président Carnot, comme elles avaient joué jadis pour le Grand Roi; les puissantes canalisations retrouvées, réparées, rétablies par les ingé- nieurs modernes, qui se gardèrent d'y rien ajouter, avaient permis ce miracle. Et depuis, les eaux de l'immense bassin, avec leurs cent neuf jets de forme et de hauteur diverses, sont redevenues ce qu'elles étaient autrefois, c’est-à-dire la plus importante partie des jeux d’eaux de Versailles, le principal attrait pour les foules et aussi pour quelques raffinés amateurs de ce noble spectacle. Le Bassin de Neptune garde toute sa valeur déco- rative, même quand les eaux n’en viennent point animer les vastes lignes. Le Nôtre a donné le modèle de ce bassin et Mansart a surveillé la plus grande partie de sa construction. Tout d’abord, la seule beauté de l'immense vasque résida dans la ligne heu- reuse qui la dessinait. Sa forme de théâtre antique est à peu près la même de nos jours; la rectification du mur de soutènement, exécutée par Gabriel sous Louis XV, n’a presque rien changé à la conception première. Elle se présente à nous, après sa restaura- tion définitive, dans une unité merveilleuse. Le décor Louis XV, plus mol et plus gracieux que celui de Louis XIV, s’harmonise cependant à l’ensemble majes- tueux. Les effets d’eau sont admirables et les plus élevés atteignent vingt et un mètres. Dès l'origine, l'ornementation en fut arrêtée ; le Roi désirait consacrer cette pièce d’eau à Neptune, dieu des eaux marines. L'état médiocre des finances royales, au moment de la guerre de la Ligue d’Augsbourg, empêcha la réalisation des projets. Ils devaient être repris sous Louis XV, et si hardiment menés, qu'ils ont fini par nous donner la plus colossale et la plus heureuse décoration de plomb qui existe. Sans nul doute, on avait ici, comme partout dans le parc, cou- vert le métal de la mixture dorée qui en augmentait l'effet ; cet éclat lui manque de nos jours, et le plomb restauré, que le temps n’a point encore honoré de sa patine, reste un peu sourd et ne produit point toute l'impression que les artistes rêvaient pour lui. Mais sa valeur décorative est telle qu’elle résiste aux condi- tions mauvaises où nous la goûtons aujourd’hui. Pour en bien juger, il faut contourner la vaste nappe et se placer au renflement du bassin, le regard be l'hoto P. d'Aujce. TRITONS Bassin tourné vers le Château. Le décor se déroule par-dessus le Bassin du Dragon, à travers l’Allée d'Eau, bordée de ses grands arbres, pour arriver à la Pyramide qui dresse, tout au fond, son élégant bouquet. La tablette du bassin est bordée d’un chéneau d'où s'élancent vingt-trois jets d’eau; la tablette supporte onze vases de plomb répétés en double, à droite et PORTA E EE La rt ET SIRÈNES du Parterre du Nord Groupe de plomb d'après Tubi et Le Hongre à gauche de la décoration du milieu, où sont repré- sentés Neptune et Amphitrite. Le dieu et la déesse des Mers sont assis dans une grande conque de style rocaille. Ils sont accompagnés de néréides, de tritons, d'animaux marins. Le groupe est d’un beau mouvement de vigueur et de mollesse mêlées. La peau d’un monstre marin d’où sort par la gueule une belle nappe d’eau, sert de fond aux figures. Neptune, presque nu et d’une fière allure, brandit son trident et semble commander aux flots. A sa droite, Amphitrite, gracieusement étendue, reçoit des mains d’une naïade une branche de corail, qui repré- sente « les richesses de la mer ». Un enfant est près d'elle. À la droite du dieu se cabre un cheval que dompte un triton ; une vache marine est à l’autre bord du rocher. Le plateau est soulevé par trois monstrueux FRANCOIS GIRARDON, SCULPTEUR DU ROÏI (1627-1715) a | { Peinture de l'École de Le Brun ; LES JARDINS DE VERSAILLES dauphins. Et voici un triton encore qui sonne de la conque, pour annoncer à travers les eaux le passage du roi des Mers. Adam, l'aîné, a donné ce morceau de sculpture d'une heureuse ordonnance, d’une vivante compo- sition, qui s’anime surtout sous les grands jets qui l'inondent. Il est signé dans le plomb : Sigishert Adam natu maior invenit et fecit, 1740. Telle est la date de l'installation des groupes du bassin. Sur le plateau de droite est une œuvre de Jean- Baptiste Lemoine, signée et datée également de 1740. L'artiste a créé une fort noble image de l'Océan dans le jeune dieu nu, de beauté virile et gracieuse, assis et étendu sur un monstre marin. Le grand coquillage sur lequel ils reposent laisse passer sous ses rebords des monstres à la gueule ouverte, troupeau de Neptune dont Protée a la garde. Des roseaux ornent la conque posée sur un rocher. Sur le plateau de gauche est Protée, modelé par Bouchardon en 1739 (Edmundus Bouchardon faciebat anno 1739). La figure est couchée sur une mons- trueuse licorne. Tout autour du beau vieillard se voient des plantes marines, des FRReers et un serpent qui dévore une écrevisse. Aux deux extrémités du bassin sont deux dragons géants chevauchés par deux Amours. Ces groupes sont aussi de Bouchardon; et déjà les petits enfants ailés diffèrent de leurs frères du Parterre et de l’Allée d'Eau. Pour colossaux qu'ils soient, ils ont plus de grâce maniérée, plus de coquetterie dans le geste, et cette expression fine et entendue que le xvin° siècle prête même à l'enfance. Les monstres grimaçants domptés par la simple écharpe qu'ont mise autour de leur col les mains potelées, se redressent, battent de la queue et semblent vouloir se débarrasser de leur mon- ture ; mais les petits dieux se rient de leurs efforts et. da sur la bête en furie. La tablette elle-même, toute en glaçons de marbre à l'intérieur, porte sous chaque vase des têtes de satyres et de faunes; l’eau qui coule de leur bouche ouverte ruisselle dans la large coquille posée sur un rebord. Toute la décoration supé- rieure du bassin est de l’époque Louis XIV. Les vingt-deux vases de plomb qui la constituent ont été placés presque dès l’origine. Ils sont naturellement répétés deux par deux. Ce sont de ma- gnifiques morceaux fort bien res- taurés, qui donnent l'impression d'une grande variété, surtout à cause des anses d’une ligne en- tièrement différente pour chaque paire. Les unes sont formées de rinceaux, les autres de serpents enlacés ; ici se tordent des vo- lutes portant des lézards ; là, des écrevisses géantes s’arc-boutent sur leur queue d'écailles. Sur le corps des vases se dessinent des têtes de monstres, de faunes, de tritons, le tout entouré de fleurs, de roseaux, de conques, de poissons. Quelques- uns ont des bas-reliefs représen- tant des scènes marines. Celui-ci porte, d’un côté, une nymphe D’UNE PROJET FONTAINE Dessin de Charles Le Brun ‘ AMOURS SUR DES DAUPHINS ads . — ee = _ _ | n 3 = | — = | 3 ; RE — È É | = ô à < È > (#2 & & [a 2 # 2 Y ol = % & [éa] Z = a 8 | 4 s Z, " | > FA & < = ZE PIE ss ALES Zn À a PE ES am m 2 à n 2-8 (92) Box Hem à O x = & 7 4 TRE — 9 ee LS æ | A È du = | (a 2 se S Ko | < à 4 En | ë S | | 2 = | A ù 2 | [sa | ë Ë =3 E — a : = à È à | | | | ES & & $ “ : e = È = - à ns —. D M LL PP A ee D RE 9 PT APE RP 74 LES JARDINS DE VERSAILLES qui joue avec des serpents et s'appuie sur un dauphin ; de l’autre, une naïade qui caresse un cheval marin, tandis qu'autour d’elle des enfants chevauchent des dauphins. Sur un autre vase se voient des femmes montées sur des monstres de la mer; et encore, sur une urne élancée, des cygnes qui cherchent à boire l’eau tombant du macaron. Ainsi se complète la décoration de la grande pièce d’eau, quand elle reste au repos, encadrée de ses feuillages séculaires, magnifique et noble à tout moment et toujours évocatrice de la majesté du grand siècle. Mais il convient de la voir vivre de la vie que ses créateurs ont rêvée pour elle. Quand elle s’anime pour une heure, le jour des Grandes Eaux et quand tous les jets s’élancent à la fois, le bassin de Neptune a tout l'éclat d’une féerie. Entourant la partie circulaire du bassin, une rangée régulière d'arbres limite le parc. A leur ombre se dressent trois grands marbres lumineux. L'une des statues colossales, mises à l’échelle des grandes lignes de cette partie du parc, est celle de Faustine, fille d’Antonin et femme de Marc-Aurèle. On ne voit pas l'intérêt qu'offre ici cette impératrice, dont le seul mérite, aux yeux de la postérité, est d’avoir exercé, par son libertinage, la philosophie stoïcienne de son époux. L'œuvre, copiée à Rome par Frémery, n’a dû être acceptée ici que pour sa valeur décorative. L'autre PROJET D'UNE FONTAINE : AMOURS SUR DES CYGNES Dessin de Charles Le Brun RE AE TETE APS PEN NET AT PÉDNPES FS PPROITE 2 PER ET FETE SAN EEE mm one bus a dE nn enr Éd cd de dc de ee dd à PR EE D I À RS RE SE es hr “tte x LS LES JARDINS DE VERSAILLES 75 Photos P. d'Aujee. GROUPE D'ENFANTS Allée d'Eau Bronze (1688) d'après Mazeline (1678) DR PE ax 2 GROUPE D'ENFANTS Allée d'Eau Bronze (1688) d'après Buirette (1678) GROUPE D'ENFANTS Allée d'Eau Bronze (1688) d'après Buirette (1678) Statue, également copiée de l’antique par Lespingola, représenterait, sous une forme pleine de noblesse, cette Thotos P, d'Aujec. GROUPE D'ENFANTS Allée d'Eau Bronze (1688) d'après Le Hongre (1670) Bérénice, fille du roi de Judée, qui aima son frère Agrippa et dont la beauté troubla Titus lui-même. Les anciens visiteurs se plai- saient à saluer en cette image une des héroïnes du théâtre de Racine. Au centre, un groupe célèbre, placé en cet en- droit en 1702 seulement, figure la « Renommée du Roi $, sous la forme d’une femme qui écrit la vie de Louis XIV dans le livre de l'Histoire, soutenu par le Temps. Le Temps est un vieil- lard agenouillé, à longue barbe, écrasé sous le poids des tablettes. La Renom- mée a les ailes déployées, les yeux au ciel, l'air inspiré. GROUPE D'ENFANTS Allée d'Eau Bronze (1688) d'après Maseline (1678) 10 76 LES JARDINS DE VERSAILLES PROJET DE FONTAINE ARCHITECTURALE ENCADRANT UNE STATUE DU ROI LOUIS XIV Dessin de l'atelier de Mansart Sur sa tête petite, les cheveux se relèvent, noués au- dessus des bandeaux. Sa main gauche retient le por- trait de Louis XIV ; ce sont bien les traits du monarque avec son long nez accentuant le profil et la lourde perruque bouclée qui encadre son visage. Mais tout a été refait sous la Restauration, le médaillon original, dû à Girardon, ayant été gratté en 1792, à l'époque où l'autorité révolutionnaire poursuivait et cherchait à proscrire de l’art les effigies royales. La jeune Renommée foule aux pieds l’'Envie, dont le masque expressif est d’une vivante réalité ; celle-ci, d’une main décharnée, tire l’historienne par la robe pour l'empêcher d'écrire et déchire de ses dents un cœur qu'elle tient dans l’autre main. Parmi les trophées du socle, on remarque les médailles d'Alexandre, de César, de Trajan, les émules et les modèles du jeune monarque français, à l'époque où il commandait en Italie, par les soins de Colbert, le marbre monumental destiné à représenter sa gloire. Ce groupe, dont le dessin était de Le Brun, fut exécuté à Rome et achevé en 1686 par Dome- nico Guidi, un des meilleurs sculpteurs de l'Italie du seicento. L'ouvrage est, à coup sûr, important ; mais la composition reste lourde et massive; elle « tourne 5» médiocrement; elle est même un peu confuse et manque de cette simplicité harmonieuse que les sculpteurs français de la même époque savaient mettre dans leurs œuvres allégoriques. Un tel marbre et aussi la fameuse statue équestre du Bernin, reléguée par le goût choqué de Louis XIV à l'extrémité de la pièce d’eau des Suisses, fournissent la meilleure com- paraison et la plus instructive, et laissent juger dans quelles conditions « le sceptre des arts », comme on disait alors, fut arraché à l'Italie par la France de ce temps. Au midi du Bassin de Neptune, de chaque côté de l'Allée d'Eau, se trouvaient le bosquet des Trois Fontaines et celui de l'Arc de Triomphe. Le premier, qu'animaient des chutes d’eau obtenues par la pente du terrain, est aujourd’hui entièrement détruit; le second a gardé bien peu de chose des magnificences qui le rendaient fameux au temps de Louis XIV. Il tirait son nom d’un arc tout en ferronnerie dorée, élevé à la renommée de Louis XIV, qui rappelait, dans les jardins de Versailles, l’arc de triomphe de la porte Saint-Antoine à Paris. Cette œuvre d'architecture était formée de trois portiques, qui faisaient aux eaux jail- d } È | | k LOUIS LERAMBERT, SCULPTEUR DU ROI (1638-1670) Peinture de N.-A.-S. Belle 8 LES JARDINS DE VERSAILLES lissantes un encadrement de marbre et d’or. Dans le bosquet, à droite et à gauche, des fontaines, dites de la Gloire et de la Victoire, étaient surmontées d’un génie tenant une couronne d'or. On admirait enfin ce groupe de la France triomphante, placé en face de l'arc de métal. Ce dernier morceau existe encore; il est le seul de l'ancien bosquet qui ait survécu à la destruction de l'ensemble, survenue en 1775, au mo- ment du remaniement des jardins par les ordres de Louis XVI. La fontaine de la France triomphante, restaurée de nos jours, occupe la même place qui lui fut donnée autrefois ; mais elle n’est plus dorée comme elle l'était, LE BOSQUET DES alors qu'elle contribuait, avec les motifs variés de l’an- cienne décoration, à la splendeur surprenante du bosquet. La France est assise dans un char posé sur des degrés de marbre blanc. Le long manteau royal jeté sur une épaule traine à ses côtés ; elle porte sur son bouclier la devise de Louis XIV, un soleil. Elle s'appuie sur une lance terminée en fleur de lis; autour d'elle sont épars des trophées et des attributs guerriers ; enfin son casque est relevé d’un coq pour cimier ; c’est le vieil emblème national, qu’on a déjà pu voir placé de même au bas-relief du vase de Coyzevox et qu'on retrouve dans maint détail de la décoration intérieure du Château. TROIS FONTAINES Estampe de J. Rigaud Quoique cette figure soit sévère et majestueuse, Tubi cependant lui a donné la grâce qui caractérise toutes celles qu’il a modelées. Aïnsi at-il fait pour l'Espagne, représentée par un jeune homme assis sur un lion et qui se trouve à droite du char victorieux. On remarque en lui la tête ronde et bouclée des statues de Tubi; le corps aux membres souples et arrondis n’est couvert que d’une simple écharpe. Sa pose est abandonnée sur la croupe du lion couché ; sa main est crispée sur l’étoffe ; sa tête est renversée et ses yeux tristement interrogent. l'horizon; près de lui gisent des casques, des haches, des boucliers. Un grand vieillard accablé, représentant l'Empire vaincu comme l'Espagne, est assis sur les ailes d’un aigle. Malgré l'excès de la restauration, l'œuvre reste de Coyzevox par son expression vigoureuse. L'homme laisse tomber la tête sur sa poitrine ; sa jambe est repliée sous lui, ses mains sont inertes ; çà et là sont jetés des armures et des trophées. Au bas des degrés, une hydre à trois têtes semble expirante; elle complète l'œuvre et symbolise la désunion de la Triple Alliance. N'oublions pas, en effet, que le bosquet de l’Arc de Triomphe a été aménagé à partir de 1678, année glorieuse de la paix de Nimègue. L'ensemble de cette composition, un peu massif peut-être, et que la dorure allégeait sans doute, garde cependant une allure très noble. Le modèle général avait été payé à Tubi en 1681 et, bien qu'il y ait fait nd M EEE vs ce, OSQI > 5 N { >einture de Jean Cotelle 80 LES JARDINS DE VERSAILLES travailler Coyzevox et aussi le sculpteur Prou, dont la part de travail reste incertaine, c’est lui qui doit en garder le principal mérite. Le bosquet ayant perdu sa décoration première, on lui en a donné une nouvelle, en y réunissant des objets d'art de diverse provenance qu'il était intéressant de conserver et de présenter en plein air. Deux jolies statues y ont été transportées ; elles furent, à l’origine, en ce fameux Labyrinthe de Versailles, détruit, au temps de Louis XVI, parce qu'il tombait en ruine, et où se trouvaient représentées en groupes de plomb les principales fables d'Ésope. Ces deux figures, / Amour et Ésope, dont le plomb conserve encore quelques traces des couleurs qui le revêtaient jadis, accueillaient autrefois les visiteurs à l'entrée du Labyrinthe. L'Amour qui tient le fil d'Ariane est de Tubi; sa grâce d’adolescent est toute féminine; ses longues ailes déployées ont la douceur des plumes ; il porte en bandoulière le carquois meurtrier. Ses doigts dévident le peloton qui roule dans sa main gauche; une simple écharpe entoure son corps charmant. La tête ronde et frisée a gardé sa finesse, malgré l’usure du métal, et le sourire a déjà quelque chose de cette mièvrerie séduisante qui caractérisera l'enfant malin dans l'art du xviur siècle. En face du dieu enchanteur est la figure d'Ésope, d'une laideur expressive, par Le Gros. Ce marbre est LE BOSQUET DE L’ARC DE TRIOMPHE Estampe de J. Rigaud d'un plein réalisme, d’une originalité et d’un accent inattendus, au milieu de la beauté apprêtée de toutes les.statues du parc. Le Phrygien est coiffé d’un bon- net, les chausses sont défaites ; un manteau tombe des épaules; le masque est franchement laid, la lèvre lippue ; mais il y a sur le front de cet être dif- forme la marque du génie. Dans une de ses mains, un papier se déplie ; de l’autre, il semble souligner ses paroles, car il parle et sa bouche est entr'ouverte : quelle est la fable qu’il récite avec cet air étrange et décevant ? Le long du bosquet sont quelques bustes nouvel- lement placés, copies de l'antique vraiment peu inté- ressantes : Alexandre, Rome, Diane, Minerve. Au milieu se trouve une statue de Méléagre avec le san- glier de Calydon. On a même utilisé ici les gaines de deux termes du monument funéraire du grand-prieur de Souvré ! Le bosquet de l'Arc de Triomphe conserve donc peu de chose de sa richesse d’autrefois ; mais il a mieux encore peut-être en cette parure que la nature, année par année, s’est chargée de lui offrir. Les grands arbres touffus penchent leur ombrage sur les bancs de pierre ; c'est un coin des jardins discret et silencieux. A quelque distance de la pièce d’eau de Neptune, UN BOSQUET DÉTRUIT : LE BOSQUET DE L’ARC DE TRIOMPHE Au premier plan, allégorie de la France triomphante Peinture de Jean Cotelle 82 LES JARDINS DE VERSAILLES Le Nôtre avait dessiné avec un soin particulier le bosquet du Théâtre d'Eau; c'était sans conteste le plus important par ses effets hydrauliques, et il tirait son nom de sa configuration. Il formait un grand LE BASSIN espace rond divisé en deux parties : l’une, entourée de marches de gazon, servait d’amphithéitre ; l’autre, élevée de trois ou quatre pieds, était la scène même. Trois allées s'en détachaient, d'une merveilleuse per- DRAGON Sculpture de plomb reconstituée ex 1889 par M, Tony Noël d'après les représentations anciennes (Le corps du Dragon est par Gaspard Marsy) spective, quand les jeux d’eau les plus variés s'y déployaient en allées, en gerbes ou en berceaux. On y voyait aussi des groupes de plomb doré, représen- tant sous des formes enfantines Jupiter, Mars, Plutus, et des Amours jouant avec un cygne, un griffon, un dauphin et une écrevisse de mer. De.tant de fontaines et d'objets d'art qui ornaient ce lieu privilégié, tout a disparu aujourd’hui. Nous n’en possédons plus que des vues gravées ou peintes. Le Théâtre d'Eau, détruit au milieu du xvin° siècle, est remplacé par une simple LES JARDINS cuvette gazonnée, le Rond-Vert, qui a son charme encore, tout environnée de grands arbres. Au détour d'une allée, pour égayer le silence et l'abandon, l'Ile des Enfants est demeurée. Dans un bassin circulaire, un rocher s'élève où s'ébat une compagnie de bambins nus et potelés, riant parmi des roses. A droite et à gauche du prin- 7 = CT LAS ns DE VERSAILLES 83 cipal groupe, deux petits Amours se sont jetés dans l’eau et nagent, délicieusement vivants. L'un, renversé, le buste et la jambe seuls émergeant du bain, répond au camarade qui l’interpelle ; l’autre, ses bras soulevés, tout étendu sur la nappe, semble regarder son image dans le reflet. Et, dans l’île, six enfants sont disposés en corbeille. TT Mat ’ pts ELU # A. DE sa Photo P. d'Aujec. FONTAINE DE LA FRANCE TRIOMPHANTE [LA FRANCE, L'ESPAGNE ET L'EMPIRE) Bosquet de l’Arc de Triomphe Sculpture de plomb achevée en 1683 sous la direction de Tubi, restaurée en 1883 (La figure de l'Empire est par Coyzevox) Au milieu, dominant la scène, le plus beau du groupe est à genoux, tenant un nœud de ruban de sa main gauche et de la droite effeuillant une guirlande; il sourit, amusé sous sa couronne, alors qu’à ses côtés un petit compagnon se penche, soulevant ses bras comme des ailes, pour le plaisir sans doute de battre l'air. Aux extrémités de la rocaille, se faisant équilibre deux par deux, les autres enfants s’épanouissent comme des corolles. Leurs corps sont joints par le bas, tandis que s’écartent les têtes bouclées et rieuses. Les petits pieds frémissent sur le sol, les bras se courbent, les bustes se creusent de fossettes. C'est l'enfance heu- reuse et jolie, le sourire de ce bosquet désert et que l'on visite à peine, car beaucoup ignorent l'île fleurie des enfants joyeux. On a ignoré aussi jusqu’à ce jour l'auteur de ce 84 LES JARDINS DE VERSAILLES chef-d'œuvre, éclos au seuil du xvi° siècle. Je puis le nommer avec certitude d’après les comptes du temps : c’est le bon maître Hardy, un des sculpteurs de l’admirable frise de jeux d’enfants, au Salon de l'Œil-de-Bœuf, qui a ajouté ce fleuron charmant au décor juvénile de Versailles. Sur l'emplacement de l’ancien Théâtre d'Eau, ont été transportées quelques médiocres copies ou imita- tions de l'antique : Cérès, Pomone, un Faune dansant et une statue de la Santé. Du côté de l’Allée de Trianon, est un buste d’Adrien sur un admirable socle. A la sortie, par l'allée de Cérès, se voit le groupe de Ganymède et de l'aigle de Jupiter, copié par Joly pour le Roi, d’après l'antique de Florence. L’adolescent s'appuie sur l'oiseau royal, qui a ouvert ses grandes ailes pour FONTAINE DE LA FRANCE TRIOMPHANTE (LA FRANCE, L'ESPAGNE ET L'EMPIRE) Bosquet de l'Arc de Triomphe Sculpture de plomb achevée en 1683 sous la direction de Tubi envelopper le corps frêle à la ligne si pure. La tête de Ganymède est féminine ; les cheveux bouclés se couronnent de feuillage ; l'Olympe n'aura pas de dieu plus beau, et le nouvel échanson est digne de Jupiter. Le même antique se retrouve en une autre partie des jardins ; il était donc dans le goût de l’époque. Des générations toutes saturées de lectures grecques et d’é- ducation mythologique ne voyaient aucun inconvé- nient à multiplier ces images qu’un autre temps eût déclarées choquantes. À ! t . FRANÇOISE-ATHÉNAÏS DE ROCHECHOUART, MARQUISE DE MONTESPAN (1641-17 Peinture de l'Ecole de Mionard 86 LES JARDINS DE VERSAILLES Le bosquet actuel des Bains d' Apollon ne date que de 1778; il a remplacé les deux bosquets du Dauphin et des Bains d’Apollon qui existaient sous Louis XV. Le second avait lui-même succédé, à la fin du règne de Louis XIV, au curieux bosquet primitif du Marais. C’est à ce moment que furent transportés, dans cette partie du jardin, le groupe d’Apollon servi par les Nymphes, qui avait été jadis, aux premiers temps de Versailles, l'ornement principal de la fameuse grotte | de Téthys. Après la destruction de cette grotte, le groupe d’Apollon et les chevaux du Soleil qui laccompagnaient furent d’abord installés au bosquet des Dômes, que nous visiterons dans le bas des jardins. Ils y restèrent jusqu'en 1704, année où fut créé le premier bosquet des Bains d'Apollon. On les plaça sous des baldaquins dorés d’une cer taine richesse décorative, que montrent les anciennes représentations, mais qui cependant ne furent jamais regardés que comme un abri provisoire. Le goût ayant changé au cours du siècle et le remanie- ment du parc ayant commencé avec le règne de Louis XVI, Hubert Robert dessina ici un fort beau jardin « anglais 5, au milieu de Ja création de Le Nôtre, et il imagina, pour y conserver Il | les marbres anciens, une | nouvelle etingénieusegrotte de Téthys. Elle est loin du goût louisquatorzien, cette grotte d’un pittoresque inattendu. Le bosquet de verdure, à . l'ombre des grands arbres ce er 1 . qui leficercient, ofre Photo P. d'Aujrc. ÉSOPE LE PHRYGIEN Jadis à l'entrée de l’ancien Labyrinthe, aujourd’hui au Bosquet lieu de fraîcheur et de sutr- de l'Arc de Triomphe Figure de plomb par Le Gros (1673) prise, qui repose agréable- ment des aspects ordonnés et majestueux du reste des jardins. La grotte, tout au fond, se dresse, creusée en haute arcade que soutiennent des colonnes qui semblent taillées dans le roc. De tous côtés, des arbres l'entourent. Au bas est une nappe d’eau envahie par des plantes aquatiques qui montent jusque sur les bords du rocher. A l'entrée de la mystérieuse retraite, dont la sombre profondeur fait ressortir le blancheur des marbres, Hubert Robert a disposé le groupe harmonieux d’Apollon et des Néréides. Le dieu du Soleil, fatigué de la course du jour sur son char de lumière, vient se reposer chez la déesse des Mers. Les filles de Téthys s'empressent autour du glorieux fils de Latone, le baignent et le parfument. re ù æ- sn RESF < 2 ME L' : SEE I est assis au milieu d'elles, abandonnant son jeune corps aux soins des mains diligentes. Sa tête fine et altière a de longs cheveux, que des fleurs couronnent. Son profil rappelle celui du Grand roi. I appuie son bras sur la lyre et, avec grâce et nonchalance, tend Sa main vers une nymphe pour qu'elle répande sur ses doigts le pur. dau. - L'AMOUR TENANT LE FIL D ARIANE Jadis à l'entrée de l’ancien Labyrinthe, aujourd'hui au Bosquet de l'Arc de Triomphe Figure de plomb par Tubi (1678)] LE BASSIN DE NEPTUNE AU TEMPS DE LOUIS XIV Au premier plan, scène mythologique représentant le Jugement de Päris F 1 Peinture de Jean Cotelle 88 LES JARDINS DE VERSAILLES parfum du flacon qu'elle incline. Elle est debout, à peine vêtue, montrant l’adorable rondeur d’un sein découvert, d’une épaule tombante et d’un bras élé- gant. Le petit visage est plein de noblesse; ses lourds cheveux la coiffent en boucles ; de la main gauche, elle soutient un bassin où s'égoutte l'huile parfumée. C'est la plus jolie peut-être parmi ses gracieuses compagnes. Elles sont six filles de la Mer entourant Apollon : trois sur le premier plan, devant le jeune dieu, et trois plus en arrière encadrant la scène. Girardon est lauteur principal du groupe, et la maîtrise du célèbre sculpteur n’a jamais surpassé tant de souplesse et de naturel. On lui doit, avec l'Apol- LE BASSIN DE lon et la parfumeuse, les deux Néréides à genoux qui baignent et essuient les pieds divins. L'une, d’un lent geste soumis, se penche avec un linge dans les mains. Son corps a cette ligne infléchie, si doucement caressante, des femmes inclinées qui prient. De sa taille à ses pieds, sa robe s’enroule en nombreux plis. Le buste se dégage nu et charmant, et montre la gorge délicate, le bras arrondi et le dos qu'effleure une longue boucle échappée. Sa petite tête, à l'expres- sion candide, est coiffée de nattes qui se nouent sur les bandeaux ; elle est toute à son travail de servante amoureuse. En face d'elle et sur la même courbe est celle qui NEPTUNE Estampe de J. Rigaud verse l’eau dans le bassin ciselé. Elle repose sur un genou; l’autre jambe est redressée et la robe retroussée retombe en draperie. La main gauche soutient l’anse dè J’aiguière, sur laquelle est représenté un épisode glorieux pour Louis-Apollon, le passage du Rhin. La jeune fille détourne la tête; sa nuque étroite est sur- chargée de lourdes boucles ; on aperçoit, exquise, la ligne qui va de l'épaule à la hanche ; en un si vivant. morceau, le marbre palpite. Et voici les trois autres nymphes, plus reculées, qu'a sculptées Regnaudin. Elles achèvent heureuse- ment le cadre où s’alanguit la grâce du dieu lassé. Deux d’entre elles redressent le groupe, dont la composi- tion s'étend encore, par la dernière Néréide, qui s’at- tarde au fond de la grotte. L'action est ainsi mouve- mentée et d’une vérité plus grande. Regnaudin a vêtu ses figures, mais l’étoffe semble humide, tant elle s'adapte aux formes minces et longues. Il en est une qui va coiffer Apollon, et sur ses doigts légers glisse l’opulente chevelure. Elle est d’une coquetterie timide, joliment maniérée, en ce geste qui lui fait toucher les boucles emmêlées. Sa robe descend jusqu'aux pieds, prend sa taille et découvre l'épaule. Une écharpe vient encore l’enve- lopper ; cependant le joli corps se devine, si chastement voluptueux. La tête ronde, au profil à peine arrêté, est couronnée de nattes étroitement tressées qui s’enroulent à la grecque, puis retombent. ot SH Sr à hate Te a LES JARDINS DE VERSAILLES 89 Après elle, et à gauche du maître, est la cinquième sœur, modeste et souriante. Son bras nu s’arrondit autour d’une amphore ciselée qu'elle appuie sur sa hanche. Le haut de sa poitrine se dévoile; sa fine beauté paraît menue auprès des membres plus amples du jeune dieu ; la tête est d’un pur ovale ; les cheveux frisés, en bandeaux, se divisent d’un ruban. De l'obscurité de l’antre S’avance, blanche, la der- nière des nymphes. La perspective rapetisse sa taille et prête à l'illusion de la réalité. Elle est auprès d’une colonne taillée dans le rocher. Sa robe la revêt tout entière ; les plis dessinent ses formes ; sa tête frisée porte un bijou sur le front ; elle marche, sereine, sou- tenant un bassin des deux mains, vers la compagne ÉCRIT Em EEE 4 > IQ TRS. Etes FE ae as ea2res So) | PLAN DU BASSIN DE NEPTUNE Tiré d'un album, daté de 1747, ayant appartenu au Roi Louis XV agenouillée qui l’appelle. La scène intime, d’une élégante interprétation, est d’un groupement cadencé, d'une parfaite vérité d'ensemble ; chaque figure est par soi- même une œuvre d'art, où l'esthétique de Regnaudin et celle de Girardon ont donné toute leur mesure. Il faudrait lire à présent les vers de La Fontaine pour savoir l'admiration que ce grand ouvrage a excitée au temps où il a été conçu. La moindre intention de l'artiste est comprise et développée par le poète; cha- cune des nymphes a son nom particulier et son geste se trouve caractérisé : Ce dieu, se reposant sous ces voûtes humides, Est assis au milieu d’un chœur de Néréides.…. Doris verse de l’eau sur la main qu'il lui tend, Chloé dans un bassin reçoit l'eau qu’il répand ; A lui laver les pieds Mélicerte s'applique; Delphine entre ses bras tient un vase à l'antique ; Climène auprès du dieu pousse en vain des soupirs…. Rougit autant que peut rougir une statue. Ce sont des mouvements qu’au défaut du sculpteur Je veux faire passer dans l'esprit du lecteur. 90 LES JARDINS DE VERSAILLES La Fontaine ne manque point d'indiquer brièvement le sens symbolique de tout l'ouvrage ; la course royale d'Apollon à travers le ciel est comparée par lui à l’acti- vité bienfaisante du monarque, non moins digne que le dieu d’un noble repos : C’est ainsi que Louis s’en va se délasser D'un soin que tous les jours il fautrecommencer…. Cette grande composition est complétée, comme elle l'était déjà dans la disposition primitive, par des groupes accessoires. Dans les excavations de la grotte, ont été placés les chevaux du Soleil. Ils sont d’une ardeur, d’une vie extraordinaire, et, suivant le mot de La Fontaine, qui décrit encore ces marbres en vers chaleureux, Ils semblent pantelants du chemin qu'ils ont fait. A droite est l’œuvre de Gilles Guérin. Ce sont deux chevaux dételés du char d’Apollon. Les bêtes sont hardiment modelées, nerveuses et fringantes ; les narines paraissent frémissantes, « flambantes », dit PROJET POUR LA FIGURE DE NEPTUNE Dessin de Charles Le Brun notre poète ; les crinières sont fournies et ondulées, les queues longues et touffues. L'un, penché sur une nappe d'eau, boit avidement ; l’autre, la tête redressée, plonge ses naseaux dans une large coquille que soutient un triton; celui-ci en emplit une autre en même temps et semble, de la voix, inviter l'animal à se désaltérer. Il est placé entre les chevaux. Un deuxième triton, appuyé sur le flanc du cheval de droite, est, comme son compagnon, couronné de plantes marines. Leurs longues queues entortillées se terminent par des palmes écaillées ; leurs muscles saillants disent leur force. A gauche sont les chevaux des frères Marsy. L'œuvre nerveuse, sans convenu académique, est d’un merveilleux mouvement. Le cheval qui se cabre, sous les dents de celui qui le mord à la croupe, est d’une souple réalité. Il semble hennir de douleur ; ses pieds de devant battent de leurs sabots le triton accroupi qui puise de l’eau pour le panser. Un autre serviteur calme de la voix et apaise de la main l'animal furieux; ERCETEMREE En AX SINO'1 OSZI U9 j1PJ404 AD 44 SaNAL AV d ojui ANA od oyjo4pnby LdN I NISSV le Le 92 LES JARDINS DE VERSAILLES les doigts se marquent dans la chair de la bête. La face bestiale des tritons montre leur rudesse, et leur torse est d'une vigueur admirable. Toute cette œuvre sculpturale, dont on jouissait mieux autrefois, parce qu'on l'approchait de plus près, remonte à une époque assez éloignée. Les plâtres avaient été posés à l'ancienne grotte en 1672; les marbres furent définitivement payés en 1677. Mais La Fontaine lavait déjà vu les modèles en 1668, puis- qu'il les décrivait à cette date dans son livre des Amours de Psrché. Au sortir du bosquet préféré de Marie-Antoinette, au carrefour de longues allées ombreuses, le bassin octogone de Cérès assemble autour de la déesse des enfants qui s'ébattent dans les blés. Cette œuvre de Regnaudin, composée avec un art savant, n'est com- plète cependant que sous le jet qui retombe en gerbe Fe e PROJET POUR LA FIGURE D’AMPHITRITE Dessin de Charles Le Brun sur le groupe joyeux et la récolte fleurie. Il faut aussi se rappeler qu'en ces quatre Bassins des Saisons, des- sinés par Le Brun en 1672, toutes les figures et orne- ments de plomb étaient dorés, ce qui enrichissait sin- gulièrement l'effet décoratif. La Cérès, d'un modelé un peu lourd peut-être, est à demi renversée parmi ses présents, regardant avec béatitude la colonne liquide qui s'élève vers le feuil- lage. Sa robe la laisse découverte presque entière ; elle tient une faucille et sa tête est couronnée d'épis. Sur la moisson éparse où se mêlent les fleurs des champs, trois Amours nus sont couchés. Sous l'eau qui ruisselle, ils ont l'éclat des coquelicots jetés dans les prairies. Celui-ci abrite sa tête en soulevant son. bras; cet autre, les ailes et les bras étendus, présente son dos et ses jambes rebondis à l'écume qui tombe ; et celui-là, gentiment émerveillé, ouvre dans sa joie ses menottes rondes. Plus loin, au rond-point de l’Allée du Printemps, est le bassin circulaire de Flore. Bien que restaurée, la LES JARDINS DE VERSATELES 93 figure de plomb garde encore le joli mouve- ment de son corps, la ligne exquise des épaules, la tête à l’ex- pression ravie cOUron- née de trois bouquets d'églantines. Toute la saison parfumée est dans cette île enguir- landée, où l'épouse de Zéphire semble la plus belle des fleurs. Tubi l’a rêvée pres- que nue et comme frémissante sous la pluie qui l'inonde. Sa main s'appuie sur la corbeille d'où s'élance le jet et qui déborde de bleuets, d'anémo- nes, de tournesols, de toutes les fleurs des vieux jardins de France. Des guir- Photo Po d'Awgee. LE DIEU -P ROTÉE Groupe de gauche du Bassin de Neptune Sculpture de plomb exécutée par Bouchardon en 1739 Photo l, d'Aujre. E DIEU PROTÉE Groupe de gauche du Bassin de Neptune F Sculpture de plomb exécutée par Bouchardon en 1739 landes de tous côtés s’enchevêtrent, retom- bent jusque dans l’eau du bassin, et l’on sait que cette richesse orne- mentale se trouvait plus abondante encore quand le bassin était dans tout son éclat. Les Amours jouent avec les fleurs tressées et s’en enlacent les uns les autres. C’est leur plai- sir des heures dusilence ; mais comme le jeu est plus divin à l'instant de la pluie scintillante ! Les bustes ronds se redres- sent, les ailes palpitent sous l’averse ; le plus charmant, d’un geste dé- licieusement enfantin, pleure, la tête sous le 94 LES JARDINS DE VERSAILLES bras, car le jet rapide l’a sans doute aveuglé. Parmi les œuvres d'un grand artiste né et élevé en Italie, mais devenu tout français d'inspiration, celle-ci a la fraîcheur et l'éclat d’un bouquet de printemps. A l'entre-croisement des allées qui rayonnent du Bassin de Flore, s'ouvre une des entrées du Bosquet de l'Étoile. Ce bosquet, dont le dessin n’est nullement compliqué, reçoit à tort, de quelques-uns, le nom de l'ancien Labyrinthe détruit sous Louis XVI, et qui se trouvait, d’ailleurs, de l’autre côté des jardins. Dans leur forme primitive, les allées de l'Étoile étaient bordées d’un treillage orné de pilastres, où montaient des pieds de chèvrefeuille ; la corniche supportait des vases de porcelaine remplis de fleurs; des niches, sous lesquelles chantait un jet d’eau, rompaient la monotonie de ce treillage, dont l'usage fut à la mode assez longtemps dans les jardins à la française et qu’on assurait venir de Hollande. * Au centre de l'Étoile se trouvait, à l'origine, une fontaine de rocaille assez importante, dite la Montagne LE CHAR DE NEPTUNE ET L'AMPHITRITE Dessin à la sanguine, par Bouchardon d'Eau, qui a disparu en 1704 et dont rien, à la surface du sol, ne rappelle le souvenir. Quelques antiques, comme les fouilles d'Italie en ont tant donné, médiocres débris rongés de mousse, achèvent de périr aux angles des charmilles; ce ne sont point, par bonheur, des œuvres de prix. Une aimable petite Minerve enfant, due au sculpteur Bertin, et qu’on apercevait des bords du Bassin de Flore, méritait naguère de retenir l’atten- tion, avant qu'il fût devenu nécessaire de la mettre à l'abri des mutilations. On rencontre encore, placé de nos jours dans l’allée circulaire, un Apollon du dernier des Coustou, Guil- laume le fils. L’élégance réelle du jeune dieu, repré- senté en inspirateur des arts, n'est pas exempte de mièvrerie. Que nous sommes loin du type composé par Girardon et qui atteignait à la noblesse de l’Apollon du Belvédère ! Ce marbre, signé simplement Coustou 1753, n'a d’ailleurs rien à voir avec la décoration ancienne de Versailles. Il était, en dernier lieu, à Saint- Cloud, et c’est, apparemment, l'Apollon que Madame de nD'P 22]|F.1 2P 2241U2,7 D UOSrA(T np 10[ 2] 19 241U99 np nDIP siofo s2T ANNLdAN 44 NISSVA 471 ES ete om m0 mn ins ” ‘e we 00 Pompadour avait commandé à l'artiste pour ses bos- quets de Bellevue. La fontaine voisine, nommée l'Obélisque, occupe un vaste espace géométriquement découpé et entouré d'arbres magnifiques. On y vit jusqu’en 1704 le bos- quet de la Salle des Festins ou Salle du Conseil, com- position assez bizarre faite de gazon et de ces étroits canaux nommés « goulettes », dont l'entretien était LE DIET LES JARDINS DE VERSAILLES fort difficile. Ce bosquet fut détruit en même temps que la Montagne d'Eau, à l'époque où les minuties décoratives de Versailles furent sacrifiées et simplifiées sur beaucoup de points. On installa alors ce grand bassin surélevé, aux pentes gazonnées, ayant au centre, comme unique motif de plomb, un massif de roseaux. De puissants jets d’eau s'élèvent en forme de pyramide ou d’obé- # É _ E Er OCÉAN Groupe de droite du Bassin de Neptune Sculpture de plomb exécutée par J.-B. Lemoyne en 1740 lisque, ce qui a fait donner au bassin le nom sous lequel il fut anciennement connu et qu'ont souvent remplacé dans l'usage populaire les expressives déno- minations de la & Gerbe 5 ou des « Cent-Tuyaux 5. La très heureuse réfection de l’Obélisque date de peu d'années. Elle se rattache à ces importants travaux de restauration générale des bassins qui, commencée par celui de Neptune, s’est achevée par celui d’Apollon. Il faut revenir à l'allée où sont les Bassins des Saisons, pour chercher, dans le massif où elle se cache, la grande fontaine de l'Encelade. Elle date de 1676. Les anciens guides décrivaient avec admiration le plomb de Marsy, enchevêtré dans les roches, le Géant, « acca- blé sous le mont Ossa et le mont Olympe, que lui et LES JARDINS DE VERSAILLES 97 ses compagnons avaient entassés sur le mont Pélion Appelé d’abord « Fontaine de la Renommée 5, à pour escalader le ciel. II sort de sa bouche un jet d’eau cause d’une figure de Marsy qui y resta jusqu’en 1684, qui a 78 pieds de haut et qui est d’une grosseur extraor- puis « Bosquet des Bains d’Apollon », quand on y dinaire. Ce qu’on voit de cette statue est quatre fois plus installa, pendant une vingtaine d'années, les marbres grand que le naturel et d’un parfaitement beau travail. fameux de la Grotte de Téthys, il tira son nom défi- La tête surtout est très belle, et si fort dans le goût nitif des deux pavillons de marbre de couleur, revêtus de Jules Romain, que ce grand homme n'en désavoue- de plombs dorés, qui en faisaient un des plus riches rait pas le dessin, s’il vivait. » morceaux de Versailles. Il semblerait, en effet, que la grande fresque de C’est Jules Hardouin-Mansart, alors occupé à bâtir la Chute des Titans, au palais du Té de Mantoue, eût le château de Clagny, qui fut, en 1677, l'architecte de inspiré ici Le Brun et Marsy. C'est, du reste, le seul ces pavillons fameux, et ce fut apparemment son pre- point de la décoration de nos jardins où l’art français mier travail pour ce Versailles qu'il allait remplir de ait sacrifié, d'ailleurs de façon. ingénieuse, au plus ses ouvrages. Le sculpteur Buirette avait fait le petit médiocre goût italien. modèle d’un des « cabinets », car Louis XIV demandait toujours à voir en relief les constructions qu'il ordon- Le Bosquet des Dômes, qui est le plus voisin de nait ; les marbriers du service des Bâtiments du Roi l'Encelade et a été créé en même temps, a l'histoire avaient réservé, pour les compartiments du pavé, les la plus compliquée du monde. marbres les plus fins; et, afin d'accompagner le décor, © ——————— —— ————— Photo P, d'Aujec. DRAGON MARIN CONDUIT PAR UN AMOUR 3assin de Neptune Sculpture de plomb, exécutée par Bouchardon 08 dont le Roi voulait jouir promptement, les modèles en plâtre de grandes statues prirent place sur huit piédes- taux. A ce moment, dans la vasque du bassin, la Renom- mée de plomb doré, le pied posé sur une sphère, soufflait verticalement dans une trompette d’où sortait un énorme jet d’eau. Ce détail, qu'on peut trouver d'un goût contestable, ne tarda point à être sacrifié au moment de l'installation du groupe d’Apollon servi LES JARDINS DE VERSAILLES par les Nymphes, parce que le jet le cachait aux visi- teurs entrant dans le bosquet. Le travail des « Cabinets des Dômes dura plusieurs années et de très bons artistes y travaillèrent. Au comble du premier, Le Hongre et Mazeline modelèrent les ornements de plomb et d’étain ; Buirette et Lespin- gola firent le même travail pour le second. Sur les cires de ces derniers artistes, Ladoireau, « orfèvre et fondeur de la garde-robe du Roi », fondit et cisela les trophées à » an, L er be X D FLY Eye. Le Photo Raffaele. LES EFFETS D'EAU Côté droit du Bassin de Neptune de bronze doré qui représentaient, en double exem- plaire, les armes et emblèmes des quatre Parties du Monde. On peut se faire une idée de ce travail par les œuvres analogues du même Ladoireau, qui sont à l'intérieur du Château; c’est lui qui a pris la plus grande part aux grands trophées et « chutes d'armes » de la Galerie des Glaces et des Salons de la Guerre et de la Paix, et c’est par ces spécimens admirables d’un art arrivé à sa perfection qu'on doit se rendre compte de la beauté des ouvrages placés jadis en cette partie des jardins. Louis XIV aimait s'y rendre en compagnie des dames, et y faisait servir la collation, tandis qu'on entendait un air de musique. La chronique de la Cour mentionne souvent les divertissements du Bosquet des Dômes ou des Bains d’Apollon. Dangeau nous parle par exemple, le 15 mai 1685, de celui qui suivit un grand souper de dames chez Monseigneur : « Le Roi EL " Re — d RS OT Te Fr ea si AT DS >s "0 ITS : : LL. sn GP GRR PERS LA Re "2 Se Patie “ } En et Lei À Photo P. d'Aujee, LOUIS XIV n de Neptune DE LA RENOMMÉE Pourtour du Bassi Groupe en marbre exécuté à Rome par Domenico Guidi, d'Urbino, et terminé en 1686 100 LES JARDINS DE VERSAILLES alla avec les dames dans les jardins, et nous trouvâmes les Bains d’Apollon allumés et, dans les pavillons, il y avait les hautbois; on y dansa même, et Mademoi- selle de Nantes finit le bal par y danser une dame- gigonne le plus joliment du monde. » Tout ici enchantait les yeux. Les deux cabinets sont décrits par un nouvelliste du Mercure, comme « aussi riches que galants. Ils sont de marbre blanc et ornés chacun de huit colonnes de marbre de couleur et de pilastres taillés dans le marbre blanc. Les montants des petits pans dans les encoignures sont remplis de tro- phées de bronze qui représentent les armes dont se servent plusieurs nations. Il y a aussi de semblables trophées en dehors, entre les pilastres. Les dômes sont enrichis de plusieurs ornements de métal et ter- minés par un vase. 5 Les fondations carrées de ces édicules sont encore visibles, et d'importants frag- ments de leur décoration sont conservés dans les maga- sins du Château. Ils n'ont disparu qu'au xix° siècle, faute d'entretien, et la perte en est à jamais regrettable. L'effet en reste évoqué, en quelque mesure, par le double exèdre récem- ment restauré qui entoure le bassin. L'une des balus- trades a été refaite en marbre rouge, avec les balustres de plomb doré; l'autre est de marbre blanc, avec les balustres de marbre rouge. On peut critiquer, au point de vue de l’histoire, ces choix qui ne correspon- dent pas exactement aux états anciens ; mais l’as- pect général est vraiment heureux et dans l'esprit du décor de Le Nôtre. Voici, pour les cu- rieux, des renseignements précissurleschangements subis par cette architec- ture. Lors de la visite faite à Versailles par les am- bassadeurs de Siam, en 1686, la relation du Mer- cure galant indiquait la balustrade la plus élevée comme étant de marbre blanc avec les balustres de bronze doré, et la seconde tout entière de métal : « Le bassin est entouré d’une balustrade de bronze doré d’un autre dessin que celui de la terrasse. Sur chacun des piédestaux, que l’on y voit d'espace en espace, s'élève un jet en bouillon d’eau qui fait une rigole autour de la balustrade, dont l’eau, en se répan- dant, forme tout autour une nappe. 5 Un tableau de Cotelle est le plus précieux document pour l'état de cette époque. Le métal doré, qui s’y trouve indiqué pour les balustres de la première clôture et pour l’en- semble de la seconde, disparut en 1705. A la fin du règne de Louis XIV, les descriptions, par exemple celle de Demortain accompagnant les- tampe, nous assurent que la balustrade circulaire et celle qui est octogone sont de marbre du Languedoc et de marbre blanc ». La première a les appuis de marbre blanc et les balustres de marbre rouge, et Ia disposition est inverse dans la seconde : « L’allée cireu- laire, dit expressément La Martinière, est bordée d’une balustrade dont les pilastres, les appuis et les socles __ 11 14017 #Sontde marbre Dates c.] balustres sont de marbre du Languedoc. Au-des- sous est le bassin octo- gone de la fontaine, en- touré d’une balustrade ; le socle et l'appui sont de marbre du Languedoc ; les pilastres et les ba- lustres sont de marbre blanc. » Il eût été pos- cond état de l'époque Louis XIV. cumulent encore en ce lieu choisi, malgré les destructions qui S'Y ac- complirent. C'est d’abord la blanche vasque, œuvre de Girardon, qui a rem- placé celle d'où s'élevait, à l’origine, la fameuse Renommée de plomb doré ; elle rappelle, en motif de marbre, la déli- cieuse « Pyramide » de Photo P, d'Aiÿ v. LE DIEU PROTÉE Groupe de gauche du Bassin de Neptune Sculpture de plomb, par Bouchardon en 1739 sible de restaurer ce se- Les œuvres d’art s'ac- ES ee D Ad es me eV PS nn am à amer da at LE ouai dre more ere ru D $ | UN BOSQUET DETI > Ÿ Mr EE BOSOUET DI Au premier plan : La T'oilette de Vénus Peinture de Jean Cotelle THEATRE D’ AU 102 LES JARDINS DE VERSAILLES plomb du même maître. Elle est portée par quatre dauphins à la gueule entr'ouverte, enchâssés en de souples consoles et dont l'énorme tête soutient l'en- semble. Sous l’'écume blanche qui ruisselle de son jet, l'élégante coupe déborde sans cesse, tandis que des bouillons légers jaillissent, comme autrefois, d’un canal creusé sur l'appui même de la balustrade de marbre rouge. Un large banc de marbre, coupé par les quatre ouvertures des degrés, s'adosse à la balustrade de marbre blanc. Des compositions en très bas relief, trite, d’après les Anguier, emprisonnée aujourd’hui dans une salle du Louvre et qui n’a pu encore rejoindre ses SŒUrS. | La plus ancienne et la plus délicate est peut-être la Galatée, façonnée par Tubi pour orner la Grotte de Téthys. La blanche nymphe paraît sortir des flots et demeure comme en extase dans la lumière. Plus spi- rituelle qu'une Vénus antique, aussi vivante qu’une de nos contemporaines, elle se laisse deviner tout entière en s’enveloppant dans ses voiles. Penchée Sur. que le temps et les nettoyages n'ont pas altéré, apparaissent ici sur toutes les surfaces; ce sont quarante-quatre morceaux de G:i- rardon et de ses élèves, exécutés en 1678 et tous empruntés à des motifs de décoration militaire. [Is furent payés 10.600 livres, et re- présentent, comme les bronzes détruits de Ladoireau, « les armes dont toutes les nations se servent dans les combats ». La variété en est extraordi- naire : on voit S'y associer, de la façon la plus imprévue, épées, lances, hallebardes, carquois, étendards, casques, boucliers, faisceaux, tridents, trompettes, massues, haches, insignes sur- montés de l'aigle ou du croissant, yatagans et cimeterres de toutes formes, avirons et proues. Quel- son échathe et les boucles de cheveux ; son front est couron de fleurs et ses yeux semblent chercher Acis, dont la chanson vient jusqu'à elle. Il est là, en effet, le rival heu- reux de Polyphème, appuyé su un tronc d’arbre et jouant de flûte pour la nymphe aimée. vraiment on prendrait le berger : pour le frère de son amoureuse, tant sa tête ronde a la grâce pareille, avec les mêmes fleurs dans les cheveux. Aucun marbre de l'époque de Louis XIV n'a mieux exprimé la souplesse d'un corps d’adolescent. ; Magnier a sculpté l’Awrore, qui sépare les deux figures de. ques boucliers antiques portent dans leur ciselure des travaux d'Hercule où des Renommées ; celles-ci rappellent la primitive désignation du bosquet, justifiant les imagi- nations guerrières qui le remplissent et qu'on est étonné d'y rencontrer. Lorsque le bosquet a été restauré de nos jours, on y a rétabli, sur leur même piédestal, les statues qui l’ornaient à la fin du règne de Louis XIV. Le roi Louis-Philippe les avait fait retirér, en 1844, pour les mettre à Saint-Cloud, autour du bassin en fer à cheval. Cet acte déplorable a été réparé, et les statues remises en place forment une réunion de morceaux d’un choix exquis. Il y manque seulement une Æmphi- MINERVE ENFANT Marbre de Bertin glisse sur les nuages, légère comme le premier rayon Tubi. La jeune déesse, qui ouvre les portes de l'Orient en semant des roses, est d’une délicatesse presque enfantine. Elle. sourit sous sa couronne et, dans sa ceinture, tient encore des fleurs. Son vêtement flotte au vent qui la. caresse. Ses bras, son sein, sa jambe sont nus; elle du jour. Comme pendant à cette idéale image, Le Gros nous donne le Point du Jour en ce jeune homme qui porte un flambeau. Il marche sur des nuées et sa tête est levée vers le soleil. Une large écharpe flotte autour de lui; son corps est presque nu; ses cheveux sont jetés en boucles ; sa main gauche est étendue; il semble appeler l’Aurore. O1L1 ua Apavpj Avd 091n90X2 quojd op a4nidinoS SINVANA SA4Q ur Né fs 11 L. k 11 * 4 cp «Etape [04 Cette longue jeune femme, appuyée sur un aviron et coiffée de perles, est Ino, reine de Thèbes, devenue déesse marine sous le nom de Leucothéa. On lappe- lait, au xvu: siècle, Leucothoë. Rayol la faite nue jus- qu'au-dessous de la ceinture. La poitrine menue, la ligne des hanches effacée allongent son buste; Ja robe tombe jusqu'à ses pieds. Près d'elle est un vaisseau, symbole de sa puissance, car les marins des mers antiques l’invoquent dans le péril des flots. Voici maintenant une MNywmphe de Diane, fière comme la déesse elle-même, par Flamen. Elle s’avance d’un gracieux élan, que suit la levrette qu'elle caresse; malgré la mutilation du marbre, le mouvement est à peine altéré. La tête petite, le buste court, les jambes longues lui donnent une élégance toute française en son motif d’antique. Sa robe, que la marche applique Mars, 22 SERA 7 Plutc P, d'Aujec. LA FONTAINE DE CÉRÈS OU DE L'ÉTÉ Sculpture de plomb par Thomas Regnaudin, mise en place en 167% à Son corps, s'arrête aux genoux; une ceinture étroite enserre Sa taille; le bras est nu; les pieds sont chaussés de sandales. Les cheveux se coiffent en nœud près du front et sur l'épaule sont jetés les filets de la chasseresse. Le dernier piédestal porte Arion, qui joue de la lyre, l'air douloureux, les pieds sur un dauphin. Le beau musicien a supplié en vain les matelots de Sicile. qui vont le jeter à la mer; son harmonieuse lyre n’a pu toucher ces forcenés ; mais, flottant sur les vagues avec son instrument chéri, de ses doigts enchanteurs il en tire des sons si doux, que les dauphins attentifs se laissent charmer et le portent jusqu'au rivage. Raon a compris à sa façon le héros émou- vant de la légende grecque; sa robe brodée cache à moitié son corps, qui est celui d'un éphèbe; sa LES JARDINS DE VERSAILLES 105 bouche entr'ouverte, ses yeux de prière donnent un caractère expressif à sa jeune tête encadrée de boucles tombantes. Quatre de ces marbres étaient commencés dès 1686 : « Le premier, annonçait le Mercure, est le Point du Jour, représenté par un jeune homme, qui tient un flambeau et qui a des nuages à ses pieds et un hibou qui paraît fuir; il est aussi accompagné Photo P, d'Arjec. LA FONTAINE DE FLORE Sculpture de plomb par J.-B. marbre de son Point du Jour de l'année 1696, et Magnier n’acheva son Aurore qu'en 1704, date placée également à côté de sa signature. Il peut être intéressant de noter, en passant, le prix payé à ces excellents artistes pour des œuvres aussi précieuses aujourd'hui pour lart français. Magnier recut 2.190 livres et Le Gros 3.700 livres. Il faut remarquer, à ce propos, que d’autres statues, d'im- d'un Zzéphire qui souffle. Dans le second de ces groupes paraîtra l’Aurore, répandant des fleurs et descendant de son char. Le troisième représentera Arion invoquant les cieux et monté sur un dauphin. On verra, dans le quatrième, Leucothoé recevant les offrandes des nautoniers. 5 Ces figures restèrent longtemps dans l'atelier des sculpteurs et ne furent installées que beaucoup plus tard. Le Gros a daté le OÙ DU PRINTEMPS Tubi, mise en place en 1675 portance en tout semblable, celles qui font partie des grandes séries du Parterre d'Eau et du Parterre du Nord, avaient été payées en moyenne 4.500 livres. Telle était la somme que Magnier et Le Gros eux-mêmes touchaient alors pour leurs figures. Le Hongre, pour la statue de l'Air, Gaspard Marsy, Guérin, Buyster, recevaient jusqu'à 5,000 livres. A la fin du règne, les conditions avaient chan ; dé : te) 100 DL: lé, + % L ss l'hoto P. d'Aujec. BOSQUET DES BAINS D'APOLLON Disposition faite en 1775 des groupes de marbre de l'ancienne Grotte de Téthys l'état des finances de Sa Majesté ne lui permettait plus les libéralités qu'elle aimait faire aux artistes, au temps de la création de Versailles et de la florissante admi- nistration de Colbert. Quittons le bosquet par la même grille (l’autre nous conduirait au Tapis-Vert) et cheminons dans la direc- tion du Parterre de Latone, que nous aborderons par le bas. Les trois bassins, celui de Latone et ceux des Lézards, où s'achève la métamorphose des méchants paysans de Lycie, sont étincelants de leur dorure neuve. D'éclatants massifs encadrent les tapis de gazon. Aux degrés qui forment le fond de l’amphi- théâtre s'étagent des vases de marbre. que les jardi- niers continuent de remplir de fleurs; c’est ici le triomphe de leur art, leur domaine préféré depuis les origines du jardin, et les sculpteurs eux-mêmes leur cèdent le pas. Il y a pourtant ici une erreur assez grave quil importe de signaler, dût-on n’y point porter remède: Les ifs taillés qui longent les rampes, de chaque côté du Parterre, semblent une partie nécessaire de son décor, et le public est si bien habitué à les voir tels qu’ils sont qu’il admettrait avec peine l’idée de les modifier et de les réduire. Il faudrait pourtant Sy résoudre, si l’on voulait rester dans le sentiment de Le Nôtre et des jardiniers de Louis XIV. Jamais ne s’est présentée à l'esprit de ces grands artistes l’idée de ces masses lourdes et sombres, d’une ligne aussi malheu- reuse, qui dissimulent par endroits les marbres du Par- terre, alors qu'il est visiblement conçu pour que toutes ses beautés soient embrassées du même coup d'œil. my Taure tee Un ECS tee RL ee cmge de MT ee “OS | | ÉES JARDINS DE VERSAILEES 107 LÉTCGROTTEL DE TÉTHVS Décoration de rocaille achevée en 1667, détruite en 1686. Les modèles en plêtre y furent placés en 1672 1 F ) F 7 Estampe de Le Pautre, montrant la disposition primitive des groupes pt TELE LES LE BOSQUET DES BAINS D'APOLLON VERS 1730 Estampe de J, Rigaud, montrant la disposition des groupes sous des baldaquins dorés, telle qu'elle fut de 1705 à 1775 AT EPRNE 108 LES JARDINS DE VERSAILLES Les tableaux anciens, les estampes, les dessins de jardinage de l'époque nous apprennent clairement que les dimensions actuelles des ifs de Versailles, qu'on respecte comme traditionnelles, n'ont pu être tolérées qu'à l'état d'exception. Pour ce qui est du Païterre de Latone, les vues du recueil de Demortain, aussi bien que celles de Rigaud, montrent toujours des arbustes élégants, développés plutôt en hauteur et surtout de proportions restreintes, n’écrasant point, comme le font ceux d'aujourd'hui, le décor sculptural. S'il faut une preuve matérielle pour justifier cette critique, n'est-elle pas fournie par les ifs qui terminent chaque rangée à la hauteur du Parterre d'Eau ? A côté d'eux sont les grands vases de Dugoulon et de Drouilly. Ces beaux marbres sont entourés et comme étreints par le feuillage démesurément développé; au lieu de A een rends ne 1. PROJET POUR LA NOUVELLE GROTTE DES BAINS D’APOLLON (17:73: Dessin de Hubert Robert (Le dessin original coupé en deux parties, l’une au Musée de Versailles, l'autre à M. H. Lemonnier, S’enrichir d’un heureux contraste, leur effet se trouve fâcheusement diminué par un voisinage aussi indiscret, qui n'avait été prévu en aucun moment par ceux qui ont planté les arbustes. Il conviendra donc, quelque jour, de ramener à des proportions plus raisonnables des arbres encombrants et parmi lesquels, d’ailleurs, la vieillesse commence à faire des ravages. On se rapprochera ainsi de l’idée pri- mitive, à laquelle il faut toujours se reporter, que se trouve rétabli intégralement ici) l'oubli des générations, les changements du goût, le travail même de la nature ont contribué de tant de façons à obscurcir. Nous ne saurions espérer, il est vrai, qu’on recon- Stitue jamais en son intégrité et avec tous ses caractères propres la création de Le Nôtre. Un de ses éléments essentiels, par exemple, qui furent les hautes palissades de charmille, a depuis longtemps disparu, et c’est seu- lement par les anciennes peintures, dont plusieurs sont ï | ÉES FARDINS reproduites en ce livre, qu’on en peut admirer l’ordon- nance puissante et singulière. Quelques jardins, en France et hors de France, ont été plus heureux que ceux de Versailles, ayant con- servé ces charmilles, qui sont tout à fait dans l'esprit du temps. Ces grands murs rectilignes convenaient admirablement aux marbres auxquels ils servaient de DE VERSAILLES 109 fond ; ils ajoutaient, en même temps, de la majesté aux promenades d’une cour, qui semblait cheminer en des palais de verdure. On aperçoit, du bas du Parterre de Latone, met- tant régulièrement leur blanche silhouette derrière le rideau entr'ouvert des ifs en pyramide, la suite un Photo P, d'Aujee. APOLLON SERVI PAR LES NYMPHES Bosquet des Bains d'Apollon Groupe de marbre par Girardon et Regnaudin, achevé en 1675 pour l'ancienne Grotte de Téthys peu froide des figures antiques copiées, presque toutes en Italie, par les élèves de l'Académie royale. Les œuvres les plus fameuses, les plus admirées à l'époque de Louis XIV, se retrouvent en cette noble assemblée réunie ici pendant les années 1687 et 1688. Ce sont Ganymède, Uranie, Hercule Commode, l'impé- ratrice Faustine en Cérès, le Bacchus de Florence, le Faune à la flûte, du Louvre, les deux Prisonniers Daces, du musée de Naples, l'Antinoüs du Belvédère, la Vénus Callipyge, le Silène portant Bacchus, un Mercure, de Rome, et enfin l’Apollon du Belvédère. L'Uranie et l’Antinoüs se trouvent répétés, mais sans inconvénient, car la plupart de ces figures sont peu regardées. Elles ne laissèrent pas de choquer, dès leur instal- LES JARDINS DE VERSAILLES Dans le haut, parmi les antiques, ont été placées trois compositions modernes : Ze Poème lyrique, de Tubi, qui voisine avec Ze Point du Jour; le Feu, de Nicolas Dossier; Ze Mélancolique, de Michel La Per- drix; ces marbres font partie des séries des Poèmes, des Éléments et des Tempéraments de l'Homme, dont les meilleurs morceaux se rencontrent ailleurs. lation, les prudes de la Cour. Les mentions qu’on peut relever dans les Comptes des Bâtiments nous apprennent que le sculpteur Bertin fut chargé, en 1689, de leur poser « des draperies et feuilles de vigne », et l'on trouve également le sieur Fontelle occupé à faire « des feuilles de sculpture pour mettre devant les nudités des figures du jardin ». APOLLON SERVI PAR LES NYMPHES Bosquet des Bains d’Apollon Groupe de marbre par Girardon et Regnaudin, achevé en 1675 pour l’ancienne Grotte de Téthys A mais le projet n'a jamais été mis à exécution. J'ai l'y a eu autrefois des projets plus considérables pour la décoration du Parterre de Latone. Le mur de soutènement, tapissé de charmille, qui fait un fond de verdure derrière le bassin, devait recevoir des niches. des sculptures et des fontaines, dont les dimensions auraient été en diminuant avec la pente du terrain. On aperçoit cette disposition, représentée comme réalisée. 1 dans l’estampe d'Israël Silvestre reproduite en ce livre: pu reconnaître en quelques dessins aquarellés de Le Brun, les motifs de cette ornementation, qui aurait été fort belle et que son étendue même a empêché d’en- treprendre. Nos jardiniers ont repris depuis peu une habitude heureuse de leurs prédécesseurs et garnissent de " we ns DS "s . SR “o Photo P. d'Aujec. TRITONS DES PAR CHEVAUX D’APOLLON PANSES LES juet des Bains d’Apollon Bosc 1YS 5 pour l’ancienne Grotte de Tét} / roupe de marbre par les frères Marsy, achevé en 16 G RE pc pr 0 x Ve cm) Por ete PARMI Ce LPO: CONSEIL DU OI FESTINS DES SALLE Martin n " PR Peinture de J.- Construite LA FONTAINE en 1700 sut l'emplacement DE L'OBELISQUE la Salle des Festins, restaur Peinture de P,-D. Martin SE Pi # “ # 1 À “À 114 LES JARDINS fleurs, dans la belle saison, les vases de dimensions moyennes placés entre les deux perrons et sur divers points du Parterre. On y trouve des œuvres d’art véri- tables, qui pourraient même se passer, pour retenir l'attention, de toute parure florale. Deux sont des créations originales de l'art du xvu® siècle, et les bas-reliefs qui les décorent, et qui représentent l'enfance du dieu Mars, offrent d'ingé- nieuses allégories à la gloire de Louis XIV. Com- mandés par Louvois en 1684, ils ont été exécutés d'après un dessin de Mansart, et des branches de lis largement épanouis entourent le bas de la coupe. Prou est l’auteur du vase où Mars, nu et casqué, DE VERSAILLES est assis sur des trophées et entouré des génies de la guerre; ils sont douze, tous enfants comme leur maître, qui jouent avec des armes, des casques, des drapeaux ; l’un d’eux tient un bouclier sur lequel est ciselé le lion d’Espagne. Le bas-relief du vase de Hardy montre Mars enfant assis sur un char traîné par des loups. Un génie le couronne de lauriers, et derrière marchent de petits captifs enchaïînés de guirlandes, tandis que plus loin est représenté un sacrifice à l'antique, toujours par un groupe enfantin. Des génies vont devant le char; il en est qui s'amusent avec le casque du dieu décoiffé ; l'un folâtre avec un loup vautré sur un amas de cuirasses LA FONTAINE D’ENCELADE Estampe de J, Rigaud et de carquois, où l'on voit aussi un bouclier avec le lion espagnol; un autre porte un drapeau où se recon- nait, dans les plis, l'aigle de l'Empire. Nous retrouvons ici des symboles bien des fois répétés sur les marbres des jardins, comme dans les plafonds du Château. Six autres vases avoisinent ceux de Prou et de Hardy, dans la partie centrale du Parterre; ce sont des copies faites par Cornu pour Colbert, d'après deux vases célèbres de l'antiquité, le Vase Médicis et le Vase Borghèse. Le premier représente le sacrifice d’Iphi- génie, le second une bacchanale ; chacun est ici à trois exemplaires. Au palier qui domine le bassin sont quatre autres vases d'après l'antique, « faits à l'Académie de Rome, par Grimaud et plusieurs autres étudiants 5. Deux sont ornés de masques sur les flancs et sous les anses, avec une branche de vigne autour du colles deux autres portent quatre masques de faune réunis par des guirlandes de lierre. Ce n’est là qu'un choix décoratif fait pour rappeler, au milieu des jardins de Louis XIV, les motifs qu'on trouvait en ceux des empereurs romains ; il vient logi- quement compléter la série des statues antiques repro- duites par les pensionnaires du Roi le long des rampes de ce parterre. Mais c’est au bas du Parterre que les principales sculptures sont groupées, et d’abord les admirables termes tournés vers le Château. Les grands termes de Versailles sont, sans doute, 0 D LES JARDINS DE VERSAILLES 115 les plus beaux qu’on ait conçus depuis l'antiquité. Ils n’ont point cette rigidité de la gaine surmontée d’un visage inattendu; la moitié du corps y apparaît; le vêtement entoure les hanches et retombe en nombreux plis très bas sur le piédestal. Les expressions sont d’une vie étonnante, et ces marbres, bien qu'’inspirés de l’art romain, sont animés en leur originalité d’un sentiment tout moderne. Tout au long des Allées de l'Été et de l’Automne, les termes se succèdent, et c'est d’abord Diogène, par Lespagnandel. Le philosophe de Sinope n’est point ici le « cynique » de la tradition. La tête est allongée, là Photo P, d'Aujee LA FONTAINE D'ENCELADE La figure de plomb du Titan «a été exécutée par Gaspard Marsy en 1670 barbe courte et frisée comme la chevelure; les yeux songent, la main tient un rouleau ; un manteau brodé, jeté sur l'épaule, l'enveloppe élégamment. On pourrait s'étonner d’une mise aussi soignée chez celui qu’on définissait « un Socrate qui serait fou ». Mais nous sommes dans les jardins de Louis XIV, et Diogène lui-même ne saurait l'oublier. En face de ce marbre est une Cérès de Poulletier. Elle a l'air d’une matrone romaine, dans sa robe serrée à la taille et qui retombe en draperie. Sa tête sereine est enguirlandée d’épis; elle tient une gerbe et une couronne de fleurs. En des notes que je citerai plus loin, le sculpteur, qui se piquait de littérature, a raconté lui-même l’ins- tallation de son œuvre. L’anecdote est assez piquante, car elle montre en scène Louis XIV en personne, cau- sant avec ses artistes : « Sa Majesté, raconte Poulletier à propos de sa Cérès, eut la bonté d’en paraître satis- ES era ne SE Le dont Sun DD dent. 2 pipe " LE BERGER ACIS Bosquet des Dômes l'hoto P, d'Aujec Marbre exécuté par J.-B. Tubi pour l’ancienne Grotte de Téthys faite, lorsque je la posai, et elle se récria par plusieurs « Voilà une belle femme ! Il est rare d’en « trouver de semblables. 5 Il est vrai encore que le reprises : Roi me témoigna sa satisfaction par une gratification proportionnée au mérite qu'il trouvait dans mon ouvrage. » Le voisin de Diogène est un Faune, par Houzeau. Le visage du dieu champêtre. est rieur et grimaçant. I a la barbe longue, la bouche fendue, de grandes oreilles, et, parmi le pampre de la couronne, deux | petites cornes pointent sur le front. Le buste semble ajouter de l'ampleur à sa taille. D'une main, il presse vin coule dans le vase qu'il soutient. nt entourées d’une peau de bélier et, à la tête de la bête. LES JARDINS DE VERSAILLES Près du Faune se dresse la plus délicieuse des Bac- chantes, par Jean Dedieu. Le buste svelte, aux harmo- nieuses proportions, se cambre en une fierté de jeu- nesse; il supporte une petite tête rieuse, aux cheveux épars. Les bras se recourbent pour jouer du tambour de basque. Une peau de lion sert de vêtement ; les pattes retombent sur la gaine. Un Hercule suit, d'une forte stature, les traits accentués, l'expression énergique. Il appuie la massue sur son épaule; les pommes d’or du jardin des Hes- Photo P. d'Aujec. LE POINT DU JOUR Bosquet des Dômes Marbre exécuté par P. Le Gros en 1696 mé LES JARDINS pérides sont dans sa main ; il a jeté sur son dos la dépouille du lion de Némée, qui se noue autour de sa taille et dont la tête revient sur son front. Louis Le Conte a su rajeunir ici, de façon intéressante, le type d'Hercule. Autour de la demi-lune qui précède le Tapis-Vert, quatre groupes se présentent. Ce sont des morceaux antiques, de valeur fort inégale, et auxquels on attachait autrefois une importance qu'ils ne sauraient tous mériter. La tradition érudite leur attribuait aussi des désignations, dont l'explication remplit les vieux guides et qui figurent encore dans les ouvrages récents. Le lecteur doit apprendre à la fois l'état de l'information ces compositions trop archéologique au sujet de Photo P, d'Aujec, ARION Bosquet des Dômes Marbre exécuté par Jean Raon en 1695 DE -VERSAILLES Photo P. d'Aujec. INO, DÉESSE MARINE 3osquet des Dômes Marbre de Rayot fameuses, et ce que les générations anciennes en ont si longtemps pensé. Le premier groupe était connu comme celui de Papirius et sa mère, copié par Martin Carlier d’un anti- que de la Villa Ludovisi. Les visiteurs ont toujours eu besoin d’une explication pour s'intéresser à cette œuvre sans grande expression et, de plus, fâcheuse- ment transportée, au xIx° siècle, sur un piédestal trop large pour elle. Elle représente une femme penchée sur un enfant, et l’on voyait en elle l'épouse du sénateur Papirius, questionnant son fils, suivant un récit d’Aulu-Gelle. L’adolescent hésite : il revient du Sénat, où il assistait à la séance avec son père, et le sujet qu’on a traité doit être tenu secret. La mère insiste et l'enfant s’en tire par un mensonge : « On a délibéré, dit-il, sur ce point : Serait-il plus important à la République de donner deux femmes à un mari que de donner deux maris à une femme? 5 Ce fut un amusant tumulte parmi les matrones romaines; les sénateurs en rirent et, pour récompenser la discrétion du jeune Papirius, déclarèrent qu'il serait le seul enfant ayant ses entrées au Sénat. L'’anecdote, que se répétait le xvi® siècle, n’a rien à voir avec le marbre Ludovisi, aujourd’hui au Musée des Thermes à Rome. Ce morceau, qu'on attribue à l'époque d’Auguste, et qui est signé de Ménélaos, représente tout simplement la scène funéraire tradition- nelle, analogue à celle qu’on retrouve sur un si grand nombre de stèles attiques. Le deuxième groupe est le Laocoon. Bien que toutes les copies du célèbre morceau rhodien restent loin de l'original du Vatican, celle de Tubi, placée d'abord à Trianon, peut compter parmi les meil- leures. Dans les replis des deux serpents marins, le prêtre Laocoon et ses deux fils, sur l’autel même où ils sacrifiaient, luttent contre les deux monstres envoyés LE BOSQUET DES DÔMES VERS 1730 Estampe de J. Rigaud par Apollon. Ce marbre n'offre ici d’autre intérêt que d’être d’un ciseau du xvie siècle. François Lespingola est l'auteur du suivant, que l’on croyait un groupe romain, et que l’on désignait comme celui de Pœtus et Arria. On admirait le mouvement du Romain enfonçant l'épée dans sa poitrine, tandis que de l'autre main il soutient Arria, sa femme, affaissée et morte d’avoir essayé l'arme sur elle-même. « Poœtus ! » a-t-elle dit en expirant, pour encourager le condamné, « cela ne fait pas de mal. » Nous savons aujourd'hui que l'antique copié pour le Roi « dans la vigne Ludovisio », et qui est mainte- nant au Musée des Thermes, est un marbre exécuté en Asie Mineure et appartenant à l’école de Pergame. Il représente un Gaulois et une Gauloise, pendant une déroute infligée par les Grecs aux envahisseurs bar- bares ; plutôt que d'abandonner à l'ennemi sa femme vivante, le Gaulois lui a donné le coup mortel et se frappe à son tour en jetant au vainqueur un regard de défi. Le prétendu Gladiateur mourant, du Capitole, est aussi, comme on sait, un Gaulois, et provient de la même origine que le groupe Ludovisi ; on veut même voir en ces marbres des reproductions de bronzes perdus de l’ex-voto monumental d’Attale, roi de Per- game. Louis XIV eût été fort surpris d'apprendre qu'il introduisait en ses jardins des images commémoratives de très anciennes défaites nationales. Le quatrième groupe est celui que l’on nomme Castor et Pollux. Coyzevox a signé sa copie et l'a datée de 1712. Les guides font remarquer la beauté des ÊE BOSQUET DES DOMES, DIT ALORS LE BOSQUET Disposition des groupes de l'ancienne Grotte de ‘Féthys Peinture de Jean Cotelle DES 1686 1 BAINS D'APOLLON \ li TRES À NYMPHE GALATÉE ÉCOUTA Bosquet des Dômes Marbre exécuté par J.-B. Tubi pour l’ancienne Grotte de Téthys L’AURORE JETANT DES FLEURS Bosquet des Dômes Marbre exécuté par Magnier en 1704 P 5 7 122 LES JARDINS DE VERSAILLES adolescents nus et couronnés de fleurs qui sacrifient à la Terre. Sur l'autel enguirlandé, Pollux a posé une torche allumée et en tient une autre sur son épaule; Castor a l’encens dans la main gauche, et, de son bras droit, enlace tendrement son frère. La Terre serait repré- sentée sous la forme d’une femme présentant un œuf, signe de sa | fécondité ou symbole de la génération des enfants de Léda. Winckel- mann rejetait déjà ces diverses suppositions et pensait voir ici Oreste et Pylade. L'archéologie moderne a diminué l'intérêt de ce groupe du Musée du Prado, en constatant que les attributs sont des restaurations arbi- traires et que les jeunes gens ne peuvent être désignés. C’est un pas- tiche de basse époque, composé de modèles connus dans Part antique : le jeune homme de droite est une réplique affadie d’un type d'athlète de Polyclète; celui de gauche rappelle certaines statues praxitéliennes. Quant à la figure archaïsante de Coré, qu'on a prise pour la Terre, elle semble indiquer un sacrifice offert aux divinités souterraines. On ne connaît plus le morceau désormais que sous le nom de « groupe de San lidefonso 5, du château royal d'Espagne où il fut autrefois CONServé. Le marbre de Coyzevox est le seul de ceux de la demi-lune qui soit demeuré en place depuis l'époque de Louis XIV. Celui de Lespingola à été changé de côté; il occupait le piédestal qui porte aujourd'hui le groupe du : pseudo-Papirius. A la place 5 du Laocoon et des deux in Photo l d'A. LE TERME D'HERCULE Gaulois se trouvaient, à l’o- Parterre de Latone FRA En. P M MP rigine, les chefs-d'œuvre de Puget, qui ont été transpor- tés au Louvre au siècle dernier : le Persée délivrant Andromède et le Milon de Crotone. jé SU ro Ces morceaux étaient réputés parmi les plus beaux de Versailles. Louis XIV les montrait aux visiteurs avec une prédilection particulière. Le Milon est daté de 1682 sur le marbre: le Persée, de 1684. Ce dernier groupe, payé 15,009 livres, était arrivé par mer de Marseille au Havre en 1683, et avait été installé aussitôt sur le piédestal de droite. Le Milon, placé à gauche, figure sur le tableau d'Hubert Robert, où l'on voit la Reine Marie-Antoinette en promenade à l'entrée de l’Al'ée Royale. On n'aurait pas une idée complète des richesses sculpturales des jardins de Versailles, si l’on n'y rétablissait par la pensée les admirables groupes du maître marseillais. Le siècle qui les y posa savait qu'il y | amenait des chefs-d'œuvre. Les connaisseurs discutaient seulement leurs préférences ; « le feu Roi s, raconte un d'eux sous la Régence, & paraissait pencher pour Milon s. On s’accordait à rendre hommage à la noblesse du caractère de Puget, qui lui avait fait repousser les offres de Louis XIV, ainsi que celles de la République de Gênes : « Le Roi ayant su qu'il avait fait deux merveilleux groupes de marbre, les ! -ÆÆ TERME DE PANDORE Photo P. d'Aijre. j Parterre de Latone Marbre de Le Gros SAVOI DE MARIE-ADÉLAIDE So G A A al s S De pen à _ fit acheter. M. Puget vint à Paris pour la première fois et les fit placer à l'endroit où vous les voyez. La Cour fit tous ses efforts pour l'arrêter ; rien ne put ébranler sa philosophie. Aussi désintéressé à Versailles qu’à Gênes, il ne fut sensible qu’à sa liberté ; il courut se recacher dans sa province et mourut paisiblement dans le sein de sa famille. Heureux celui à qui Dieu donne 1 Parterre deu 1 Combat.des Animaux | 5 la Salle du Bal | É4 laSalle des Bains de Diane. #2 À LES JARDINS DE VERSAILLES une si grande sagesse et qui peut la conserver jusqu’à sa mort ! » Le long de l’Allée de l’Automne, une nouvelle série de termes commence par l’Achéloïüs, de Simon Mazière. Le fleuve de la mer lonienne, d’une tranquille puissance, au torse vigoureux, est couronné de fleurs. Sa tête épaisse a une longue barbe. Une écharpe flotte PLAN DU PARTERRE DE LATONE Tiré d'un album exécuté en 1747 pour le Roi Louis XV sur son dos; il tient dans ses mains la corne d’abon- dance, qui lui fut arrachée du front par Hercule, alors que celui-ci, convoitant Déjanire, sut vaincre ainsi le fils de l'Océan. On voit encore, par ce nouvel exemple, comment nos sculpteurs tiraient parti des moindres détails mythologiques. C'est Pandore qui suit, aussi belle que Vénus, aussi sage que Pallas, et éloquente comme Mercure. Sa nudité fière se dégage du piédestal ; sa tête, aux longs cheveux, a ce charme de belle jeunesse si fréquent dans les figures de Le Gros. De ses doigts, elle soulève ses lourdes boucles; la main gauche, qui revient sur la poi- trine délicate, porte la boîte fatale aux humains. Insou- cieuse des maux qu’elle va répandre, l'égale des divinités, la première Femme, garde l’espérance au fond du coffret. Van Clève semble moins heureux que Le Gros dans le Mercure, qui vient après Pandore. Le dieu aux multiples fonctions est coiffé du pétase; le caducée et la bourse sont dans ses mains ; ses yeux levés vers le ciel semblent y chercher l'inspiration. _ Een TE à 1405 2 © © nd LA nc A em mn RS nus RE EE SU SET ET Re NS LT | LES JARDINS DE VERSAILLES I Le quatrième terme, Platon, est une sculpture de Rayol. La tête du philosophe grec se profile grave et sévère sous les boucles courtes des cheveux ; la barbe est aussi frisée. Il tient à la hauteur de son cœur un médaillon représentant Socrate, son maître; sur son front est une flamme, « marquant l'élévation de son génie ». En face de lui est Circé, faisant pendant à la Cérès située à l’autre extrémité de l'allée. La fille du Soleil [e NT se dresse altière sur son fût de marbre, un sourire astu- cieux aux lèvres. Sa tête fine se couronne de longs cheveux et sa robe la revêt de plis souples et tom- bants. L’évocation de la magicienne homérique est due au ciseau de Magnier, de qui est encore la robuste copie voisine, ce Gaulois mourant, du Musée du Capi- tole, qu’on appelait alors le G/adiateur, placée à l'entrée du Parterre. En symétrie avec cette figure couchée, s’en aperçoit LE PARTERRE DE LATONE ET LE CHATEAU EN 1674 Estampe d'Israël Silvestre (Cette vue montre le projet d'une décoration de niches et de statues autour du Bassin) une autre, la Nymphe à la Coqguille, de Coyzevox, vers laquelle nous revenons et qui est une des plus sédui- santes de Versailles. Ce n’est, à vrai dire, qu’une copie un peu amollie de l'interprétation originale, qui se trouve maintenant au Louvre, à l'abri des intempéries dont elle avait eu à souffrir trop longtemps en nos jardins. On admire encore la courbe adoucie du corps penché, la gorge tendue et ronde, la tête pure. Entre ses jolis doigts, l’adolescente tient la coquille avec laquelle elle puise l’eau de l’urne coulant à ses côtés. C’est là tout le sujet, mais l'expression en est exquise. Cette figure est la plus aimée du Parc, la plus connue, la plus populaire. Coyzevox l’a empruntée à l’art grec. Il s’est, en effet, inspiré d’un motif célèbre plusieurs fois repro- duit par l'antiquité. L’esthétique des Anciens s'affirme dans la perfection des lignes; l’élégance et l'esprit du sourire font cependant bien française la nymphe juvénile, qui semble le gracieux génie de la « cité des eaux ». Il faut s'arrêter à l’entrée du Tapis-Vert, dans l'axe de la célèbre Allée Royale et des Allées de l'Été et de l’'Automne. Là se trouve ce que les anciens guides de Versailles appellent le « Point de vue s, et c’est de cet endroit, lorsque les eaux jaillissent, qu'on aperçoit le mieux, de tous les côtés, l'effet de leurs jeux. Louis XIV lui-même a indiqué l'intérêt de ce coup d'œil circulaire, dans un des itinéraires écrits de sa main, où il marquait les curiosités de ses jardins et l’ordre dans lequel il les fallait visiter : « On ira droit au point de vue du bas de Latone… On y fera une pause pour considérer les rampes, les vases, les statues, les Lézards, Latone et le Château ; de l'autre côté, l’Allée Royale, l’Apollon, le Canal, les gerbes des Bosquets, Flore, Saturne ; à droite, Cérès ; à gauche, Bacchus. » Les « Bosquets » dont parlait le Roi n’ont plus de « gerbes » et ont été remplacés par deux quinconces, de chaque côté du Tapis-Vert, dont le seul ornement est une série de termes de petites dimensions et d’un carac- tère fort différent des autres marbres de Versailles. Un cer- tain nombre proviennent du châ- teau de Vaux-le-Vicomte, où le Roi les acheta, en 1683, au prix de 1,800 livres l’un. Ce sont ceux qu'avait composés à Rome Nicolas Poussin, pour le surintendant Foucquet. Le grand peintre français avait lui-même exécuté en terre les modèles que les praticiens italiens firent passer dans le marbre. Il y a, dans la série dont Versailles a hérité, quelques figures admirables de sobriété décorative, le Morphée, par exemple, la Minerve ou le Pan; mais elles ne sont pas en accord avec les proportions et le style de nos jardins. L'Allée Royale déroule à présent son large tapis de gazon et, parmi les grands arbres qui lombragent, le long des palis- sades de verdure, continue le défilé des blanches statues. Mêlées à quelques copies de l'antique, ce sont des œuvres originales, de noblesse et d’é- légance toutes françaises. Nous traversons la demi- lune et, passant devant Laocoon, nous nous arrêtons devant la figure svelte et longue, dont le sourire faux inquiète et retient. C'est la Fourberie, par Le Conte. Son corps de jeune chasseresse est vêtu d’une robe grecque qui PROJET D'UN DES MOTIFS DU Dessin de Charles Le Brun POURTOUR DU BASSIN DE LATONE, NON EXÉCUTÉ LES JARDINS DE VERSAILLES 127 CNRS Te le dessine ; la jupe relevée montre jusqu’au-dessus du genou la ligne flexible de la jambe. Le profil délicat et rusé S'accentue des cheveux roulés bas en torsade : sur le sommet de la tête, un nœud en serpent. La femme s'appuie sur un tronc d'arbre et tient en ses mains un masque ; un renard symbolique est à ses pieds. Cette statue, ainsi que la Fidélité, qui lui fait face et qu'on jugeait fort inférieure, avaient été composées sur un dessin de Pierre Mignard. C'est en effet Mignard, devenu Premier Peintre du Roï, qui avait l'ange [== . Photo P, d'Aujce, LE BASSIN assumé la « conduite $ des figures de marbre, dirigée avant lui par Le Brun; mais les artistes semblent lui avoir reconnu une autorité beaucoup moins grande qu'au créateur du décor de Versailles. On a fait une /unon d’une figure antique de femme, trouvée à Smyrne et tout entière vêtue, dont la tête et les bras sont refaits par Mazière. Deux grands vases la séparent d'une copie, par Jouvenet, du marbre du Vatican appelé Hercule et Télèphe. Hercule serait sous les traits de l’empereur Commode; l'artiste romain LATONE Sculpture de marbre et de plomb doré, exécutée par Les frères Marsy de 1668 à 1671 lui a mis dans les bras un enfant, celui qu'aimait le fils d’Alcmène et que les nymphes lui ravirent. La figure symbolise la force unie à la bonté. Nous traversons l’Allée du Printemps pour trouver, en la Jénus de Médicis, un antique plus fameux encore. Il était facile à Frémery de traduire pour le goût français une statue athénienne. On connaît la Vénus qui sort de l'onde, timide d’être au grand jour dans toute sa splendeur. Son buste doucement s'infléchit, sa jambe droite se replie, sa tête fine se penche un peu et, de ses mains, elle tâche de cacher sa beauté dévoilée. La crainte paraît sur les jolis traits ; des yeux, elle inter- roge la solitude. La statue de la Tribuna de Florence passait, d'après une inscription regardée aujourd’hui comme douteuse, pour l'œuvre du sculpteur Cléomène. Elle a été reproduite en bronze par les Keller, en 1687, d’après un moulage qui a peut-être servi à Frémery pour sa copie de 1686. L'art des sculpteurs du temps de Louis XIV reste en harmonie avec les œuvres où nous venons de goûter, sous le ciel de Ver- sailles, le rêve des maîtres antiques. Comme tous ses contemporains, An- selme Flamen était trop nourri de Part des Anciens pour n'avoir pas créé sa statue de Crparisse dans le sentiment où ils l’eussent conçue. Le jeune favori d’Apollon tua un jour par inadvertance le faon apprivoisé qu'il aimait tendre- ment; son chagrin fut si grand qu’il voulut mourir, et Apollon le changea en cyprès. On nous le montre comme un jeune homme souriant, à la tête frisée, habillé d’un long manteau jeté sur son épaule, le carquois au dos. II est penché sur la jolie bête, qui dresse la tête et le regarde, pendant qu’il Le groupe d'angle, daté sur le marbre de 1723, a été exécuté par S. Slodtz, d’après une composition de Girardon. Ce morceau, un peu mas- sif, représente Aristée liant sur un rocher Protée, pour l’obliger à prédire l'avenir; car le fils de l'Océan n'an- nonce le temps futur que si on lui arrache ses secrets par la force. Aristée est un berger vigoureux dont le jeune corps n’est recouvert que d’une écharpe qui flotte au vent de mer ; ses cheveux abondants et bou- clés sont retenus par une couronne de ruban. Vaincu, mais non consentant, le gardien des troupeaux de Neptune se débat et tâche de rompre ses liens. Deux veaux marins soutiennent par l'enguirlande de roses. Desjardins a terminé, après la mort de Le Fèvre, une statue d’Arfémise. La robe traînante de la reine de Carie découvre la poi- trine et les bras; elle tient une coupe et s'apprête à boire le breuvage où sont dissoutes les cendres de son époux Mausole, à qui elle fera élever le magnifique et fameux tombeau, septième merveille du monde. Certes, un sculpteur d'Athènes eût donné à l’œuvre un autre caractère, mais c'est beaucoup qu’auprès d’authentiques évocations de l’art grec, elle ne détonne point. Un dernier vase de marbre sépare Artémise du groupe d’4- ristée et Protée, qui se trouve au bas du Tapis- Vert, dont nous avons suivi un des côtés. L’AI- lée Royale s’a- chèveicicomme elle a commen- cé, en une demi- lune qu’ornent symétrique- ment termes et statues. ADP PA VASE DE MARBRE Parterre de Latone Copie sculptée par Cornu du Vase Médicis (Le bas-relicf représente le sacrifice d'Iphigénie) Photo P. At. VASE DE MARBRE Parterre de Latone Sculpté à Rome par les pensionnaires du Roi le bas l’ensemble, qui est fait d’un seul bloc de marbre. Les termes qui sont autour du Bassin d’Apollon ont moins d'originalité que ceux du Parterre de Latone. Dans le quart de lune de droite, le premier est Syrinx, par Simon Mazière, daté de 1689. La nymphe d’Arcadie, compagne de Diane, a la sveltesse de la Chasseresse. Ses veux levés au ciel semblent implorer Jupiter, alors qu’elle se jette dans le Ladon pour échapper à Pan qui la poursuit. Elle sera aussitôt métamorphosée en roseaux et, de ces roseaux, le dieu des bergers et des prairies fera la flûte appelée du nom de la chaste nymphe. Elle ap- paraît ici nue sous l'écharpe qui ef- fleure son dos et tenant en ses mains la plante de . la légende. Le Jupiter et la Junon qui la- voisinent sont de Clérion; ces figu- res ne sont que desinterprétations de l'antique. Yer- Photo P. d'Aviec. VASE DE MARBRE Parterre de Latone Sculpté par Prou d'après un dessin de Mansart (Le bas-relief représente Mars enfant) | Photo P, d'Aujer LES POÈMES : LE POÈME LYRIQUE Rampe du Parterre de Latone Marbre sculpté par J.-B. Tubi en 1680 tumne, qui vient ensuite, par Le Hongre, porte une corbeille de fruits. Le buste est nu, l'expression amoureuse, la tête couronnée. Il fut le dieu des vergers et l'époux de Pomone, qui longtemps se laissa désirer. Les marbres se terminent de ce côté par la statue de Silène portant Bacchus. Le charmant antique est trois fois répété dans les jardins de Versailles. Silène nu tient délicatement dans ses bras le petit dieu qui se débat et joue avec la barbe du père nourricier ; celui-ci, tendrement penché sur l'enfant, lui sourit ; il LES JARDINS DE VERSAILLES est couronné de raisins et s'appuie sur un tronc d'arbre enroulé de pampres. Nous laissons de côté les marbres, en très mauvais état, qui s'alignent dans la direction du Canal et occupent, sur les anciens piédestaux, la place d'œuvres meilleures qui s’y dressaient jadis; et, passant derrière le quadrige d'Apollon charriant le Soleil, qui s'élance des eaux du grand bassin, nous allons chercher, à l'autre extrémité de la courbe gracieuse, le Bacchus antique qui fait pendant au Silène. Cette statue a été refaite au xvut siècle dans la partie supérieure, mais de la façon la plus heureuse. Le corps de l'adolescent est frêle comme celui d'une femme; il sourit Sous Sa couronne de rai- sins retenue par une ferronnière. Penché à gauche, d’un joli mou- vement, il soulève son: bras et, de la main, presse une grappe dont le vin s'égoutte dans une coupe. Le terme qui fait pendant à Vertumne, placé de l’autre côté de la demi-lune, est Pomone couronnée de fleurs, portant de ses deux mains une longue guir- lande de pommes. Cette œuvre charmante estausside Le Hongre. Le Bacchus, de Raon, est bien froid, si on le compare à la sta- tue du jeune dieu que nous ve- nons d'admirer. Le buste nu sort de la gaine enveloppée d’une peau de bête; sa tête est cou- ronnée de raisins ; il tient un thyrse à la main. Le Printemps, commencé par le sculpteur Arcis et signé de Mazière en 1699, est représenté par une jeune femme couronnée de roses, avec un bracelet de fleurs et une lourde guirlande qu'elle tient des deux mains. Elle est vraiment un délicat sym- bole de la saison fleurie sous cette jonchée printanière : son jeune buste se détache sur le fût de marbre, la tête est fière, PROJET D'UN MOTIF DU POURTOUR DU BASSIN DE LATONE, NON EXÉCUTÉ Dessin de Charles Le Brun 1/01 D $991 op ‘AFADY Sououif say Avd a0n22x0 ‘o10p quojd 2p 19 o4quviu 9p 94n1dn9S LUAHA-SIdVL ANG FAILOHdSHHd VI LH ANOLVTI 4Q NISSV4 AT l'hoto P. d'Aujes. Groupe copié de l'antique par Coysevoæ en diviniséesous lenomde Leu- cothoé, dans un marbre du Bosquet des Dômes. Ici, encore simple mortelle, elle se jette à 1a mer avec son fils, pour échapper à la fureur d’Atha- mas, roi de Lhébes Hs ont tous Îles deux un beau v'esteenavant: les bras d'Ino Il ? Sr PeVerrIT €CASTOR ET POLLUX » LES JARDINS DE une boucle de cheveux descend sur l'épaule. Près d’elle est le dieu Pan, de Mazière encore, d’après Girardon. Couronné de ro- seaux, il joue de la syrinx ; le buste est nu et nerveux, latte expressive ; autour des han- ches se noue une peau de panthère quiretombe sur la gaine de marbre. Nous retrou- vons un groupe important à l’en- trée du Tapis- Vert, le marbre d’/n0 et Mélicerte, de Pierre Granier, d’après une cire de Girardon. On a vu la même Ino LA NYMPHE A LA Rampe du Parterre VERSAILLES comme pour bat- tre l'air et, pen- chée vers l’enfant qui répond à son courage, elle va se plonger avec lui dans les flots, où Jupiter les mé- tamorphosera en dieux marins. La composi- tion de ce grand morceauestexcel- lente, et les dé- tails s'y regardent sans ennui. La reine Ino est vêtue de longues drape- ries qui flottent au vent ; Son man- teau brodé traîne par derrière ; les manches sont re- levées par des bi- joux ; un diadème de perles la cou- ronne ; ses pieds sont chaussés COQUILLE de Latone Copie, par Suchetet, du marbre imité de l'antique par Coyzevox en 168 : € PŒTUS ET ARRIA » Groupe copié de l'antique par Lespingola d'étoffe ou- vragée. Le jeune Méli- certe a une écharpe jetée sur une sorte de cotte de mailles ; ses jambièrestrès hautes sont retenues par un cercled’or- fèvrerie : il re- garde sa mère et pose lÎa main sur son cœur en Signe d'obéissance. Sur le roc d'où le couple ee — ——— LOUIS XIV, LE DAUPHIN ET LES PRINCES EN PROMENADE DANS LES JARDINS DE VERSAILLES Détail d'un tableau de P.-D. Martin représentant le Bassin d'Apollon 1 34 | | prend on élan, se dessinent des fleurs marines et un dauphin. Au milieu de tous ces marbres qui l'entourent, le large bassin d’eau tranquille, qui semble amener au milieu des jardins les flots du Grand Canal, porte le groupe de plomb le plus important de Versailles, le Char d'Apollon. L'art souple et délicat de Jean-Baptiste Tubi, s'est élevé ici à une singulière puissance de compo- sition. Le plomb fut autrefois doré et, des fenêtres du Château, le groupe LA FIDÉLITÉ Tapis-Vert LES JARDINS DE ARTÉMISE Tapis-Vert Marbre sculpté par Le Fèvre et Desjardins en 1695 Photo P. d'Aujee. Le matin est venu; Apol- lon, reposé, quitte la grotte marine de son épouse Téthys. Le voici qui sort des eaux sur son char lumineux, jetant de- vant lui des rayons. Il est bien le dieu du jour dans sa splen- dide jeunesse et tient d’une seule main les rênes de ses quatre chevaux. La Fontaine, qui a connu le modèle de Tubi, s'ingénie à les décrire : Les coursiers de ce dieu com- [mençant leur carrière A peine ont hors de l’eau la croupe [tout entière ; Cependant on les voit impatients [du frein: Ils forment la rosée en secouant [leur crin.…. VERSAILLES apparaissait étincelant; l'or revêtait tout naturellement le semeur de lu- mière. Faut-il rappeler une fois de plus qu'Apollon, si souvent répété dans ces jardins, où ses divers mythes se rencontrent sans cesse, avait une place exceptionnelle dans l'imagina- tion des contemporains? N'était-il pas le Roi-Soleil, ce Louis XIV qui portait comme emblème la tête rayonnante du jeune dieu ? Les artistes prêtèrent souvent à celui-ci les traits et le port majestueux du souverain, jamais ce- pendant en une œuvre plus forte et plus complète que celle qui nous arrête ici. ? d'Aujec. LA FOURBERIE Tapis-Vert Marbre sculpté par Le Conte Vu de face, le mouvement des groupes est en éventail ; les chevaux se partagent deux par deux ; en avant, un triton les sépare ;.des tritons nagent encore à droite et à gauche et en arrière ; ils sonnent éperdument de la conque, annonçant par le monde la venue du jour; des baleines suivent, la tête seule au-dessus de l’eau. Le char ciselé est traîné par deux roues plus qu’à moitié hors de l’onde. Apollon est assis, le bras droit étendu pour conduire, les doigts de la main gauche légèrement appuyés sur le bord du char. Son corps nu, penché en avant, offre la ligne pure et vigoureuse de son buste, de ses jambes et de ses bras déliés. Une écharpe flottante l’enveloppe ; à ses côtés, un Amour, souriant et cou- ché, tient une coupe. L'énergique tête, penchée sous les longs cheveux couronnés de lau- riers, suit des yeux attentivement la Photo P. d'Aujec. UNE AMAZONE Tapis-Vert Marbre copié de l'antique par Buirette en 169% marche des coursiers. Ceux de'gauche redressent le col, ivres d'espace et de clarté, hennissant sous la main ferme qui les maitrise. Ceux de droite, aussi indomptés, baissent la tête et, de leurs jambes recourbées, battent le flot. Un colossal triton est en avant, la queue sous l’eau, le torse raidi, nageant d’un bras, les joues gonflées sur la conque. Les deux autres, qui forment la garde du dieu, se soutiennent de leur queue et, formidables, claironnent le passage de la divinité. Tout à l'arrière, un autre géant des eaux annonce ‘aux humains la venue désirée du jour nouveau, alors que, d'un mouvement fougueux, s'élance le char éblouissant qui s'en va éclairer la Terre. Tel le groupe puissant se reflète dans le changeant miroir, Photo P. d'Aujee. VÉNUS SORTANT DU BAIN Tapis-Vert Marbre imité de l'antique par Le Gros en 1692 l'hoto P. d'Anjee. YÉNUS CALLIPYGE Rampe du Parterre de Latone Marbre copié de l'antique par Clérion en 1686 Flu P. dAue. VASE COLOSSAL DU TAPIS-VERT Marbre sculpté par Legeret vertissements du Grand Ca- nal, renouvelés de ceux de l'ancienne Cour, ne se dou- tent guère qu’ils passent de- vant un des plus nobles spectacles de Versailles. Les grilles séparent ici les jardins de l’ancien «Petit Parc », qui a conservé pres- que intact son mur de clô- ture et qui couvre une su- perficie de 1738 hectares, alors que le « Grand Parcs, le parc de chasse, dépassait 6600 hectares. Le Petit Parc est traversé par le Canal, qui pénètre dans les jardins par une pièce d’eau octo- gone. Un large degré de plusieurs marches marque la place abandonnée où Ja Cour, pendant trois règnes. S'embarquait pour se pro- mener sur l’eau. Tracé dans l’axe du Chà- teau et des jardins, dont il prolonge la perspective, le LES JARDINS dont la nappe se co- lore de toutes les lueurs du ciel, tan- dis qu’alentour la masse des arbres dresse son tranquille mystère. Il faut voir aussi, en hiver, ce même Char d’Apollon, lorsque les glaçons enserrent l’attelage et le font plus fré- missant encore en cette prison blanche qui semble immobi- liser l’impétuosité des coursiers divins. Les patineurs qui se hâtent vers les di- DE VERSAILLES Grand Canal est une des plus heu- reuses créations de Louis XIV. L'idée première remonte à 1667, année où les jardins prirent leur forme définitive. A ce moment, on élar- gissaitl’AlléeRoyale que les jardins pri- mitifs avaient eue bien moins majes- tueuse, et l’on inau- gurait les effets du Bassin d’Apollon, alors dit simple- ment « Bassin des Cygness, où les eaux jaillissantes ve- LE BERGER CYPARISSE Tapis-Vert Marbre sculpté par Anselme Flamen en 1696 Photo P. d'Aujec. VASE COLOSSAL DU TAPIS-VERT Marbre sculpté par Herpin naient d’être amenées. Le Roi songea naturellement à étendre la vue déjà fort belle dont on jouissait des fenêtres de son petit château, et le creusement du canal fut sug- géré par la présence des eaux, toujoursgênante et malsaine, dans les bas terrains. L'opération, sur laquelle Messieurs de l’Académie des Sciences furent consul- tés, fut aussi bien une œuvre d'assainissement de la plaine que d’embellissement pour le Parc: Ee:Canal db creusé en des proportions modestes, fut agrandi à par- tir de 1671 et prit en peu d'années la forme grandiose que nous lui voyons aujour- d’hui. Il a 1520 mètres de lon- gueur sur 120 mètres de largeur. La pièce d’eau qui en élargit l'extrémité, et où l’on projeta longtemps d’é- difier une construction à ve D D fret " 8 | ! | LE BASSIN D'APOLLON ET LE GRAND CANAL Peinture de P.-D., Martin = L'hoto P. d'Aujee, LE CHAR D'APOLLON Groupe de plomb par J.-B,. Tubi, mis en place en 1670-1671 (Dans le fond, les bâtiments de la Petite Venise où logeaient les matelots du Grand Canal) colonnades, à 195 mètres de largeur. La « traverse du Canal s, qui le coupe vers le milieu et donne à l'ensemble la forme d’une croix, est longue de 1013 mètres et va de Trianon à l’emplacement de l’ancienne Ménagerie. Tout le pourtour était jadis bordé d’une tablette à fleur de terre, supportée par le mur de soutènement. La pièce d’eau voisine du Bassin d’Apollon formait le port des bateaux réunis sur le Canal. Cette flottille, qui a été entretenue jusqu’à la Révo- lution, se composait, au temps de Louis XIV, de navires de toute espèce, élégantes réductions de cha- loupes, de galiotes et même de frégates, construites par les ingénieurs de la marine royale. Plus d’une fois, des essais de formes nouvelles furent tentés sur le canal de Versailles, où travaillèrent les meilleurs charpentiers du port de Dunkerque. Tourville, Duquesne, le marquis de Langeron furent appelés à donner des dessins et à surveiller les constructions: Si la flottille de Versailles tient une petite place dans l’histoire de notre marine, elle en a une aussi dans l'histoire de l’art français. Les charmantes embarcations furent toujours sculptées et décorées par les meilleurs artistes, tels que Tubi, Mazeline, les Marsy et surtout Philippe Caffiéri, le chef de la lignée célèbre des sculp- teurs de ce nom. Les frères Keller avaient fondu, à l'Arsenal, toute la petite artillerie d’un vaisseau de guerre en miniature, dont un des canons tirait à poudre. Le plus beau navire était la K grande galère », avec ses écussons et ses sculptures, ses tentures de soie frangées d'or, ses flammes, ses banderoles, ses cordages de soie aurore et cramoisie. Elle rappelait la Réale, sculptée par Puget pour la Méditerranée, dont elle reproduisait les dispo- sitions essentielles. La République de Venise avait offert au Roï, pour son « Grand Canal s, de magnifiques gondoles dorées, dont les premières étaient arrivées à Versailles en -1674. Elles étaient conduites par des gondoliers véni- tiens envoyés en même temps que leurs bateaux. Ils avaient attiré peu à peu un certain nombre de leurs concitoyens, qui formaient, avec les Provençaux sujets {pub puvin np oduoodsiod »} 39 xnrs NOTTOdV.{. NISSVA : 1 L S 2pur 7 | S !] TL 18 du Roi, les équipages réguliers du Canal, commandés par le sieur Consolin, de Marseille. Bientôt se déve- loppa, en ce coin du parc, une sorte de corporation nautique, groupée, avec ses règlements et ses usages, en « une es- pèce de petite ville » enclose de murs, où les familles aux noms italiens se multipliè- rent et vécurent en paix jusqu’à la fin du xviie siècle. Leurs maisons basses sont en partie conservées ; on les appelle encore du nom ancien la Petite Venise. Les jours des grandes fêtes de la Cour, de vastes illu- minations étaient pré- parées le long des LES JARDINS DE VERSAILLES Photo P. d'Auec., INO ET MELICERTE Demi-lune du Bassin d’Apollon Marbre exécuté par Granier d'après un modèle de Girardon berges du Canal, qu'ellesornaient d’une architecture de feu. Le premier essai de ce genre remonte à 1673. La Gazette raconte que, le jour de la naissance du Roi, « Monseigneur le Dauphin fit une grande fête à Ver- sailles, par des feux d'artifice sur le Grand Canal,éclairédetoutes parts d’une infinité de lumières, et par d’autres réjouissances qui durèrent une grande partie de la nuit. » C'était l’an- nonce de la merveil- leuse soirée du mois d'août 1674, qui cou- ronna les fêtes don- nées par le Roi en l'honneur de la se- conde conquête de la Franche-Comté. Vigarani avait di- -E BASSIN D'APOLLON Estampe de J, Rigaud 1 49A -S1 dv no 9/DAOY 22] l NO'TIOdV.A 9p 24119 ods l od »] 12 NISSVA AT Y nDA S 2PUDAL) S0T 142 LES JARDINS DE VERSAILLES ne agde ti mouvement de ceux de Montecavallo à Rome ». Leurs Majestés et la Cour montèrent en gondoles et parcou- rurent tout le Canal. A la Croix paraissaient quatre grands pavillons ornés de termes ; au bout qui atteint Trianon, était un char de Neptune entouré de tritons; du côté de la El Ménagerie, celui d'Apollon, avec les Heures volant à la tête de ses chevaux; et toutes ces figures en transpa- rent n'avaient pas moins de vingt-deux pieds de haut. Dans la pièce d’eau du bas du Canal se trouvait le mor- l'hoto P. d'Aujec. DIDON SUR LE BUCHER Tapis-Vert Marbre sculpté par Poulletier en 1695 rigé l'illumination générale des jardins. La Cour s'y répandit, dès que la nuit fut venue. Les lignes gran- dioses des parterres et de l’Allée Royale étaient dessi- nées par des lumières, ainsi que toute la longueur des bords du Grand Canal, que décoraient des figures, des termes, des poissons et, de distance en distance, des monuments. A la tête du Canal étaient des pyra- mides de lumière et d’eau, et, un peu en avant, deux chevaux de feu domptés par des héros, « dans le l'holo P. d'Aujec. ACHILLE A SCYROS (VÊTU EN FEMME) Tapis-Vert Marbre sculpté par Ph. Vigier en 1695 —= k aies | | LES JARDINS DE VERSAILLES 143 | | | | | ceau principal de l'illumination, un gigantesque palais rable, et le bon historiographe Félibien devient presque de lumière, dressé sur des rochers, où des effets d’eau éloquent à les décrire : « Dans le profond silence de la | étaient ménagés et qu'ornaient une foule de figures. nuit, l’on entendait les violons qui suivaient le vaisseau | De tels spectacles étaient d’une grandeur incompa- de Sa Majesté. Le son de ces instruments semblait | pr — — LE BASSIN D'APOLLON ET L'ALLÉE ROYALE Ot TAPIS-VERT Groupe en sculpture de plomb par J.-B, Tubi Se cote sm VASE DE MARBRE, PAR RAYOL Allée Royale LES JARDINS donner la vie à toutes les figures, dont la lumière donnait aussi à la sympho- nie un certain agrément qu'elle n'aurait point eue dans une entière obscurité. Pendant que les vaisseaux voguaient avec lenteur, l’on entre- voyait l’eau qui blanchissait tout autour,-et les rames, qui la bat- taient mollement et par coups me- surés, marquaient comme des sillons d'argent sur la modérée surface obscure de ces canaux... Et les grandes pièces d’eau, éclairées seulement par tant de figures lumi- neuses, ressemblaient à de longues galeries et à de grands salons enrichis et parés d’une architecture et de statues d’un artifice et d’une beauté jusqu'alors incon- nus et au-dessus de ce que l'esprit humain peut con- EE : cevoir. » Bien des fois, depuis lors, des feux d'artifice à l'un où à l’autre bout du Canal illu- miné vinrent ter- miner les grandes réjouissances noc- turnes de la Cour de France. On en donna plus d’une fois sous le règne de Louis XV. Les dernières et peut- être les plus belles illuminations du Grand Canal et du pourtour duBassin d’Apollon eurent DE VERSAILLES lieu pour le ma- riage du Dau- phin, petit-fils de Louis XV, avec l'archiduchesse Marie - Antoinette d'Autriche. Mo- reau le jeune en a fixé l’image dans un de ses dessins les plus célèbres. Aucune partie des jardins n'of- frait plus d’anima- tion que la tête du Grand Canal: Le coup d'œil y était extraordinaire, à cause de cette réunion denavires de toutes formes Photo P. d'Aujec. VASE DE MARBRE, PAR HERPIN ‘ Allée Royale aux riches pavesades et aux dorures éclatantes. Le costume des matelots avait toujours un air de fête : les hommes d'équipage portaient le justaucorps, l'habit à boutons d’or bleu et rouge, des bas et des jarretières de soie cramoisie, des cravates de mousseline et les cheveux noués d’un ruban ; les gondoliers avaient la veste de damas de Gènes cramoisi brodé d’or ou d’ar- gent, le bonnet de velours noir, avec les bas de soie et les escarpins. A toute heure, on pouvait venir choisir une barque pour aller à Tria- non ou à la Ména- gerie, ou pour se faire accompagner par des violons. Le Roi, Monsei- gneur, les prin- cesses goûtaient fort ces divertisse- ments. Un récit Photo P, d’Aujec. VASE DE MARBRE, PAR SLODTZ Allée Royale MARIE-LOUISE-ELISABETH D'ORLEANS, DUCHESSE DE BERRY (1695-1719) Peinture de l'Ecole de Mignard LES I {0 de Dangeau, choisi entre vingt autres, montrera en même temps le rôle que jouait Trianon au temps de Louis XIV, et l'intérêt de tout cet ensemble de beaux jardins pour la vie ordinaire de la Cour. Nous sommes au 10 juillet 1699, et la Cour habite Trianon : « Sur les six heures du soir, le Roi entra dans ses jardins, et, après s'y être promené quelque temps, il se tint sur la terrasse qui regarde le Canal et y vit embarquer Monseigneur, Madame la duchesse de Bour- gogne et toutes les princesses. Monseigneur était dans une gondole avec Mgr le duc de Bourgogne et Ma- dame la princesse de Conti. Madame la duchesse de Bourgogne était dans une autre, avec des dames qu’elle JARDINS DE VERSAILLES avait nommées ; Madame la duchesse de Chartres et Madame la Duchesse séparément dans d’autres gon- doles. Tous les musiciens du Roï étaient sur un yacht. Le Roi fit apporter des sièges au haut de la balustrade, où il demeura jusqu'à huit heures à entendre la mu- sique qu’on faisait approcher le plus près que l’on pouvait. Quand le Roi fut rentré au Château, on alla jusqu'au bout du Canal, et on ne rentra au Château que pour le souper. Le Roi avait résolu de s’embar- quer ; mais comme il a quelque disposition à un rhu- matisme, M. Fagon ne lui conseilla pas, quoique le temps fût fort beau. « Après le souper, Monseigneur et Madame la LE BOSQUET DE LA COLONNADE Estampe de J. Rigaud duchesse de Bourgogne se promenèrent jusqu’à deux heures après minuit dans les jardins et sur la terrasse qui est au haut de la maison ; après quoi Monseigneur S'alla coucher. Madame la duchesse de Bourgogne monta en gondole avec quelques-unes de ses dames, et Madame la Duchesse dans une autre gondole et demeurèrent sur le Canal jusqu’au lever du soleil. Puis Madame la Duchesse s’alla coucher ; mais Madame la duchesse de Bourgogne attendit que Madame de Main- tenon partit pour Saint-Cyr ; elle la vit monter en car- rosse, à sept heures et demie, et puis elle s’alla mettre au lit sans paraitre fatiguée d’avoir tant veillé. Mon- seigneur le duc de Bourgogne, qui était retourné à Versailles, veilla de son côté, se promena dans les jar- dins jusqu’au jour et puis alla jouer au mail jusqu'à six heures. s Ces promenades nocturnes de la duchesse de Bour- gogne sont restées fameuses. Ses dames n'étaient pas moins passionnées qu'elle pour ces amusements. A! n'était point rare qu'on les prolongeit jusqu’à l'aurore; on emportait une collation qu’on prenait sur l’eau; les musiciens suivaient dans une barque, à quelque dis- tance, donnant aux soirées de Versailles harmonieux enchantement des nuits de Venise. L’Allée Royale nous fait remonter vers le Château, en examinant, sur son côté méridional, ses vases et ses statues. La première est l’Achille, de Philibert Vigier. BOSQUET DE LA COLONNADE Peinture de Jean Cotelle présente Apollon servi par les Nymphes mythologique r 148 LES JARDINS DE On connaît la légende interprétée par le sculpteur : le fils de Thétis est dans l’île de Scyros ; sa mère, ayant appris qu'il mourrait au siège de Troie, l'a envoyé tout jeune, pour y vivre en habits de fille, auprès du roi Lycomède, parmi les femmes de la cour. Mais Calchas ayant révélé aux Grecs sa retraite, ils députent le rusé Ulysse afin de le découvrir. Celui-ci se rend à Scyros VERSAILLES avec des bijoux et des armes qu’il offre aux femmes ; celles-ci se parent des bijoux; Achille se précipite sur les armes et Ulysse ainsi le reconnaît aussitôt. Tel est le moment qu'a pris l'artiste pour représenter le jeune héros. Joli comme une femme sous ses longs cheveux qu'il vient de coiffer d’un casque, Achille a saisi une épée qu'il tire de son fourreau. SE meer pe & XX PROJET POUR UN GROUPE Dessin de Charles Le Brun Le mouvement est naturel ; l’ex- pression martiale du visage an- nonce le bouillant guerrier. Il est vêtu d’une robe et d’un manteau à bordure brodée, ses pieds sont chaussés de cuir ouvragé. Autour de lui, sont épars les bijoux dédai- gnés. L'œuvre est signée et datée de 1695 ; c'est une des dernières en date des statues du Tapis-Vert. Après elle vient une Amazone, ingénieuse interprétation de l’an- tique du Musée du Capitole, par Buirette. On sait que le goût des Anciens n’a jamais consenti À représenter une amazone le sein brûlé ; ici, le sein gauche est découvert et joliment arrondi. Le geste du bras relevé au-dessus de la tête s'explique, dans l'original antique, par une blessure reçue au combat; la restauration sup- pose que la jeune femme soutient un arc de ses deux mains. La tunique dorienne laisse voir ses jambes longues et fines; ses bras sont nus et, dans cette pose re- cherchée, elle à un air grave, le regard interrogeant au loin, les traits réguliers sous les cheveux frisés. La statue suivante n’a d’an- tique que le sujet; c’est la Didon de Poulletier. La reine de Car- thage vient d’être abandonnée par Énée et va mourir. Elle est sur le bûcher, une épée à la main. Sa robe brodée tombe de son épaule, révélant la splendeur de sa beauté: les boucles de ses cheveux sont : L'ENLÈVEMENT DE CORONIS PAR NEPTUNE + M | Î | ! ( | 1 | Î [ L'ENLÈVEMENT DE PROSERPINE PAR PLUTON 3osquet de la Colonnade Groupe de marbre par Girardon, achevé et mis en place en 1099 150 LES JARDINS en désordre; les yeux désolés regardent la mer par où a su fuir celui qu’elle aimait. Le morceau est d’une ardente vérité et d’un tragique presque cornélien. Poulletier le considérait comme son chef-d'œuvre, et même comme un chef-d'œuvre. Il a composé lui- même, pour le Mercure de France de 1718, un essai de critique assez curieux à propos de quelques-unes du os” dent ; € ne arm rm rmomn ee 0 L'OMEITE 777 7ENN LR na Pape ee Es LT des sculptures de Versailles. Il y exalte Marsy, Puget et Girardon, et y attaque assez vivement d’autres con- frères. Il laisse surtout exprimer abondamment la com- plaisance des visiteurs pour sa Cérès et pour sa Didon. Voici les propos qu'il prétend avoir entendus sur celle- ci : & On louait le beau désordre qui règne en toute sa personne, et, si j'ose vous en dire davantage, je vous SE — a nr EE SES Re LE-BOSQUET DE LA COLONNADE Édifié par Mansart en 1685 avouerai que je trouve le tout merveilleux... Cette main qui déchire ses vêtements et qui découvre la plus belle gorge du monde, cette attitude du bras dont elle tient l'épée d'Enée, de laquelle elle est prête à se frapper … Cette figure est admirable! » Bien que Particle du Mercure ne fût pas signé, l’auteur ne cherchait pas à se dissimuler, la critique d'art de cette époque étant exer- cée avec Une heureuse simplicité. Un Faune, copie de l'antique par Flamen, met ici le contraste d’un réalisme souriant ; le demi-dieu des bois tient un chevreuil sur l’épaule et un bâton à la main. C'est le Faune au Chevreau du Musée de Madrid. Deux vases le séparent de cette évocation de jeu- nesse et de fraîcheur qu'est la Vénus de Richelieu. Elle fut composée par Le Gros, d’après le torse antique qui appartint au cardinal de Richelieu. La déesse sort eee A du bain : son manteau mouillé ne couvre que ses jambes et les dessine en s’ajustant. Le buste est d’une jolie ligne se courbant à peine, le geste maniéré et gracieux. Le bras arrondi retient comme un voile au- LES JARDINS DE VERSAILLES 151 dessus de la tête, une natte défaite de la longue cheve- lure. La draperie qui tombe est arrêtée par une main molle et douce ; le profil délicat, au fin sourire, révèle une grâce toute française, et l'ensemble peut paraître | d'une harmonie comparable à celle d’une œuvre de Racine. La Fidélité, par Le Fèvre, offre un caractère moins complexe. La jeune femme est svelte, les cheveux coiffés en diadème, le visage serein. Sa robe la couvre MARIE-ANNE-VICTOIRE, INFANTE D'ESPAGNE (1718-1781) Fiancée au Roi Louis XV, plus tard Reine de Portugal Peinture de N.-A.-S. Belle (Dans le fond, le groupe de l'Enlèvement de Proserpine, par Girardon) à peine et laisse voir ses jambes et ses bras. Elle tient un cœur dans ses doigts minces ; une main relève sa traîne ; à ses pieds, un chien couché la regarde. C'est le pendant de la Fourberie, qui lui fait face, comme elle du dessin de Mignard. A propos de cette Fidélité, fort ordinaire, Poulletier remarquait méchamment, révé- lant sans doute une rancune de sculpteur contre le Premier Peintre, que celui-ci « avait prétendu faire la huitième merveille du monde ». La décoration de l’Allée Royale s'achève par un dernier grand vase. Il complète la série des douze morceaux que nous avons regardés en passant et qui se répètent deux à deux, à droite et à gauche du large tapis de gazon. Ils sont d'artistes honorables et capables d'œuvres de statuaire; ce sont Hardy, Joly, Slodtz, LES JARDINS DE VERSAILLES Legeret, Melo, Drouilly, Rayol, Barrois, Poulletier, Herpin, Arcis et Le Gros. Plusieurs de ces vases de marbre sont chargés d’or- nements, mais leur forme colossale suffirait à leur importance. En voici un décoré d’une corne d’abon- dance; celui-là s’agrémente de lierre et de pampre; celui-ci a le chiffre du Roi entouré de laurier et de chène, et cet autre des fleurs de soleil vigoureusement prises sur le marbre. Il en est deux où les fleurs de lis héraldiques ont été grattées. Ces grandes urnes alternent avec les douze statues du Tapis-Vert et font LA SALLE AUX Estampe de J. avec elles un majestueux ensemble, le plus récent et aussi l’un des plus heureux qui aient été créés à Ver- sailles. Visible de l’Allée Royale, au milieu des arbres touffus qui l'entourent, la Colonnade apparaît comme un débris de monument antique, merveilleusement conservé. Sa construction est circulaire, formée de trente-deux colonnes de marbre coloré, renforcées de pilastres; elles soutiennent des arcades qui supportent une légère frise, et sur l’attique sont posés trente-deux vases ; la variété des marbres est du plus heureux effet. On y a entremêlé la brèche violette, le bleu turquin et le rouge de Languedoc. L'admiration des contemporains ne manqua point à MARRONNIERS Rigaud la Colonnade de Versailles. Dans le cahier de novembre 1686, un rédacteur du Mercure galant la décrivait à peine achevée et ajoutait : « Le bois qui l’enferme, avec le treillage qui garnit les tiges des arbres, fait un fond avantageux pour faire détacher l'architecture, et cette pièce, qui est de pure magnificence, se fait autant admirer par la propreté de son travail que par la richesse de sa matière. Cet ouvrage marque que le Roi est le plus magnifique Prince de la terre, et fait voir que le marbre est présentement plus commun en France qu’en Italie... » Au siècle suivant, Blondel louait encore sans réserve ce bosquet : « La richesse des matières, la beauté de son exécution, l'architecture, la sculpture, l'hydraulique y sont mariées avec tant d’art et d'intel- ligence, que son aspect seul serait capable de donner UN BOSQUET DÉTRUIT : LA GALERIE D'EAU OU SALLE DES ANTIQUES Peinture de J.-B. Martin (1688) >osquet a été remplacé en 1704 par la Salle des Marronnies) LES JARDINS DE VERSAILLES une idée de la splendeur et de la prospérité des arts sous le règne de Louis le Grand. » La Colonnade a été bâtie par le marbrier Des- champs, sur les dessins et sous la direction de Mansart, qu'on vit, en cette circonstance comme en tant d’autres, travailler d'accord avec Le Nôtre. Le parfait concert des deux architectes, dans les ouvrages de Versailles, était reconnu par les contemporains compétents, et c'est bien gratuitement qu'on a voulu le mettre en doute. On répète souvent l'anecdote de Saint-Simon, PROJET D’UNE FONTAINE D’AMOURS Dessin de Charles Le Brun inexacte selon son habitude, à propos du voyage de Le Nôtre en Italie :.« Le Roi le mena dans ses jardins de Versailles, où il lui montra ce qu'il avait fait depuis son absence. À la Colonnade, il ne disait mot ; le Roi le pressa d'en dire son avis : « Eh bien! Sire, que voulez-vous que je vous dise? d’un maçon vous avez fait un jardinier (c'était Mansart), il vous a donné un plat de son métier. » Si le mot a été prononcé, ce n'est point à coup sûr comme le raconte Saint- Simon, car Le Nôtre a fait son voyage d'Italie en 1679, et la Colonnade n'a été construite qu’en 1685. La sculpture est ici fort abondante. Sous chaque arcade est une vasque de marbre blanc, d’où monte un jet droit et dont l’eau déborde et retombe au pied des vasques, dans une grande nappe d’où semble sortir toute cette architecture ; et comme voûte, l'harmonieux | LI 2! -N D dd mu nc ge en eme Le note mi tab Le à 57 DETTE LES JARDINS DE VERSAILLES 155 petit temple a toute la profondeur du ciel. Au claveau Coyzevox encore, Tubi, Le Conte et Le Hongre de chaque cintre sourit une tête de nymphe, de naïade sont les principaux auteurs du bas-relief délicieux qui ou de sylvain; ces têtes sont de Coyzevox, Regnaudin, court entre les arcades et représente des jeux d’en- Van Clève et quelques autres. fants. Ceux-ci rassemblent des fleurs en guirlandes et LOUIS DE FRANCE, DAUPHIN (1661-1711), ET SA FAMILLE D'après P. Mignard en couronnes ; ceux-là, les plus nombreux, font de la basque. Ces petits musiciens rappellent la destination musique avec les instruments les plus variés : luth, du bosquet, où tant de brillants concerts de jour et de lyre, flûte, violon, cymbales, tympanon, tambour de nuit furent donnés à la Cour. 90 Le groupe central qui en achève l'harmonie a été placé très tardivement. C’est le morceau célèbre de Girardon, son chef-d'œuvre, l'Enlèvement de Proserpine par Pluton, daté, sur le marbre, de 1699. II ne l’a cer- tainement point achevé seul, à l’âge avancé qu'il avait alors, et je crois que Robert Le Lorrain, son admirable élève, y a travaillé. On connaît le mythe de Perséphonè, dont les Romains ont fait Proserpine. Le dieu des Enfers aime LES JARDINS DE VERSAILLES la fille de Cérès, et pour la faire reine du sombre royaume, il enlève la jeune vierge, alors qu’elle cueillait des fleurs dans les champs de Sicile. Il plaît de voir ce que le génie d’un grand maître français, en dehors de toute imitation d'œuvre antique et à peine guidé par un croquis de Le Brun, a su tirer de l'inspiration que lui fournissaient les poètes. Le groupe, en une ligne hardie et savante, se com- pose de trois personnages enlacés, sortis du même LA PIÈCE D'EAU DU MIROIR, APPELÉE AUSSI & LE VERTUGADIN » bloc de marbre. C'est le fils de Saturne, vigoureux et ardent, soulevant de ses bras passionnés l'enfant effrayée qui se débat. L’effort de celle-ci accentue seulement l'idéale beauté de ses formes. Le corps ondule, renversé sur l’épaule puissante du ravisseur. Les bras, levés en détresse, découvrent la gorge naissante et le buste juvénile que meurtrit une main obstinée. La petite tête, + rejetée en arrière, dit l’épouvante ; la jambe longue > fine cars rida ir ke 4 1 ï et line Sarc-boute pour échapper à l'étreinte. Mais Pluton, sûr de sa force, superbe d’audace et d'amour, emporte cette proie vivante dans le séjour des morts. Sa tête royale, à la longue barbe, aux longs cheveux, est couronnée du diadème d’ébène; dans son élan, il passe par-dessus une femme couchée à ses pieds, qui essaie en vain d’arrêter sa course. La compagne de Proserpine a toute l’élégante souplesse de la déesse et, sur les traits, le même désespoir. L'œuvre expressive, faite de délicatesse et de force, est une des meilleures SA» LES « ROULETTES» DES DAMES DE LA COUR Détail d’une peinture de J.-B. Martin représentant une promenade dans la Galerie d'Eau 158 LES JARDINS DE VERSAILLES de notre art national. Elle est posée sur un haut pié- destal de marbre, autour duquel Girardon lui-même a sculpté un minutieux bas-relief. Il rappelle le groupe- ment si vivant du Bain des Nymphes de Diane; il a aussi toute la clarté d’un paysage, ses perspectives graduées et le sentiment d’une scène tragique où l'amour brutal serait vainqueur. L'idée du groupe reçoit ici son plein développement poétique. Proserpine et quatre de ses compagnes cueillaient des narcisses au bord de l’eau; des roseaux s'inclinaient sur la berge, une corbeille était à demi remplie des fleurs du rivage, lorsque apparut Pluton. II est à maintenant, soulevant son amoureux fardeau, si léger à sa forte stature. L’adolescente s’abandonne, éperdue; une des femmes retient son écharpe; les autres, interrompues en leurs jeux, immobilisées de surprise, ont l’effroi sur le visage et regardent le dieu puissant et beau emporter la fragile enfant. L’une est debout, l’autre couchée, et la troisième semble figée d'étonnement en la grâce de sa ligne. Proserpine laisse aller son corps flexible, comme une liane arrachée, au mouvement précipité du ravisseur. Chaste dans ses voiles, elle serait belle seulement de souffrance ; et lui, dans l’orgueil satisfait de son désir, L'ILE ROYALE Estampe de J. Rigaud se hâte vers le char que traînent les chevaux des ténèbres. En avant, volant dans les airs, deux Amours portent sa fourche ; l’attelage est conduit par l'Enfant divin, souriant et malin comme d’autres Amours, ses frères, qui lancent vers la jeune fille leur flèche sour- noise. Le motif de l'Amour, planant au-dessus des chevaux de Pluton, a été fourni sans doute à Girardon par un bas-relief de l’ancien fonds du Louvre, représentant la même scène, et dans lequel figure aussi la mère de la déesse. Cet emprunt unique de l'artiste ne fait que mieux établir l'originalité de sa composition. L'autre partie du bas-relief est d’un art aussi habile, mais d’une conception plus exclusivement mytholo- gique. Ce sont des divinités infernales, échevelées comme sont les Furies ; trois d’entre elles portent des torches allumées ; une quatrième est assise dans un char attelé de dragons. Il faut les mérites de l'exécution pour donner de l'intérêt à ce second morceau, d'où l'émotion humaine est absente. Dans le massif voisin de la Colonnade est un long” bosquet, aujourd’hui bièn modeste et dont la décoration se réduit à quelques marbres de peu de valeur. Il a connu des jours plus brillants, alors que, sous le nom de Galerie d'Eau où Salle des Antiques, il présentait aux contemporains de Louis XIV une collection de. vingt-quatre belles figures de marbre, originaux ou copies de l’art ancien, alignées parmi les caisses d’oran- gers, les jets d’eau et les « goulettes » de marbre rem- hr LS phosarctt NS SL LILI dis a. Li LE JARDIN DU ROI Créé en 1817 sur l'emplacement de la pièce d'eau de l'Ile Royale 100 plies d'eau courante. On s'y promenait dans une véri- table galerie de sculpture antique, composée à la façon italienne du xvue siècle ; mais aucun prince romain du temps du Grand Roi n'avait en sa villa de salle plus agréable à visiter, et nulle part les marbres n'étaient mieux mis en valeur au milieu des eaux qui en reflé- taient l’image. La Galerie d'Eau, supprimée en 1704, est devenue PREMIÈRE PENSÉE POUR LA FIGURE DE FLORE DESTINÉE AU BASSIN DU PRINTEMPS Dessin de Charles Le Brun au xvin® siècle la Salle des Marronniers. Elle est encore telle que la représente l’estampe de Rigaud, avec ses huit bustes de marbre blanc posés sur des gaines de Rance, et ses deux antiques, Méléagre et Antinoüs. Au milieu des bassins qui sont à chaque bout, étaient autrefois deux autres antiques, une Muse et une Dame romaine. On retrouve, en. cette région des jardins, divers marbres, qui proviennent peut-être de la Galerie d'Eau ; tous offrent ces hardies restaurations par lesquelles on n’hésitait point autrefois à compléter les fragments antiques. Telles sont, autour du Bassin du Miroir, les figures d’Apollon, de Vénus et de deux Vestales. Un archéologue s’arrête parfois pour les contempler; nous ne leur demandons que de se mirer, du milieu des hautes verdures, dans le demi-cercle d’eau paisible où elles jettent d’heureuses taches de lumière. Le Miroir s'appelait aussi le « Vertugadin », à cause de la forme de son dessin; ce terme désignait, dans le jardinage de l'époque, «un glacis de gazon en amphi- théâtre, dont les lignes circulaires At Je terminent ne sont pas parallèles ». La pièce d'eau avait été creusée JARDINS DE VERSAILLES en 1683, en même temps qu’une pièce plus grande, aujourd’hui entièrement comblée, l'Ile Royale ou Ile d'Amour. Les deux bassins, de niveau inégal, étaient séparés par la chaussée qui existe encore ; l’eau de la première pouvait s'écouler dans la seconde par une rangée de vasques de pierre, où elle tombait en cas- cades mêlées de jets d’eau, disposition ingénieuse que rappellent seulement les images anciennes. L'Ile Royale est devenue un bosquet charmant, clos de treillage, où une large pelouse, des massifs toujours très soignés, et une colonne isolée surmontée d’une statue de Diane, font penser, dès l'entrée, à un jardin. anglais du commencement du xix° siècle. Il date préci ; sément de 1817. Louis XVII le fit tracer pour assainir cet emplacement; la pièce d’eau, n'étant pas entretenue, 1e avait produit un marais fangeux, où l’on venait jeter les décombres de la ville. ml Aux angles de ce bosquet, qui porte le nom de Jar- ne din du Roi, deux jolies salles de verdure sont ména- gées; un vase imité de l'antique s'y trouve le centre d'un parterre de rosiers. Hors du treillage, deux statues colossales apparaissent entre les grands arbres, la Flore Farnèse et V'Hercule Farnèse, copiés PA Raon et pee “#4 PRE MIÈRE PENSÉE POUR LA FIGURE DE BACCHUS DESTINÉE AU BASSIN DE F AUTOMNE Dessin de Charles Le Brun Cornu; ces marbres décoraient, à l'époque de Louis XIV, les borde de l'Ile Royale. La grande allée qui ramène vers le Château est exactement symétrique, dans le dessin des jardins, à celle où nous avons rencontré les bassins de Cérès et de Flore. Les deux autres Saisons sont ici non moins BOSQUET DETRUIT : LE LABYRINTHE (Les trois fontaines de plomb représentent des fables d lsope) Peinture de Jean Cotelle (La scène mythologique représente Diane après la chasse LES JARDINS 162 noblement personnifiées par les groupes de Saturne et de Bacchus. Sur un écueil couvert de glaçons, le grand vieillard Saturne est couché, douloureux et lassé, parmi des fleurs sans nombre et des coquillages, venus de toute la mer. Il a, du Temps, les grandes ailes déployées, et DE VERSAILLES sur son front chenu les rides profondes des années; sur ses lèvres, l’amère expression des dieux qui tou- jours doivent vivre et qui voudraient mourir. De l’urne où il s'appuie s'échappe le grand jet, et ses yeux fati- gués le suivent vers le ciel, vers l'Olympe où, un jour, on put le détrôner. Le long corps amaigri, sous l’écharpe Photo P. d'Aujec. LA FONTAINE DE L'HIVER OU DE SATURNE Sculpture de plomb par Girardon, mise en place en 1677 qui à peine le couvre, reste vigoureux et possède cette vie, ce réalisme adouci dont Tubi anima ses œuvres. La barbe bouclée qui tombe sur la poitrine ajoute encore de la majesté à l'époux de Cybèle, au roi loin- tain chassé par Jupiter. Autour de la taciturne figure, inquiétante de tout ce qui fut, des Amours ailés et rebondis mettent un appel joyeux du printemps sur cette froide neige de l’Hiver. L'un active d’un soufflet un feu imaginaire ; un autre tient un masque comique, et deux encore jouent, sous londée, avec la blanche écume. Plus loin, c'est l’île de l’'Automne avec toute la richesse des lourdes grappes égrenées. Le dieu du vin est couché parmi l'or des vendanges. Quel secret lui a donc révélé l'ivresse pour que son sourire soit ainsi mystérieux ? Il trouble comme le Bacchus androgyne de Vinci. L'insistance moqueuse de son regard gêne un peu, alors qu’on admire la tête fine et bouclée, cou- LES JARDINS DE VERSAILLES 163 ronnée de pampres, que lui donna Marsy. Ses formes ont la robustesse du corps des jeunes fauves et la grâce de la beauté féminine. Il jette dans l’urne les raisins de ses mains pleines, tandis qu'autour de lui des enfants aux pieds de chèvre boivent aux coupes ou pressent sous leurs lèvres le fruit vermeil. Ici un petit satyre repu s'est endormi; là, un autre s'efforce de faire avaler à un bouc le contenu d’une aiguière. Derrière le groupe, un large vase délicatement ouvragé garde le liquide parfumé. Dissimulé dans un massif voisin, le Bosquet des Rocaïlles présente ses gradins de verdure et ses cas- cades étagées, où viennent se mêler des jets d’eau. 4 Photo l, d'Aijer. LA FONTAINE DE L'AUTOMNE OÙ DE BACCHUS Sculpture de plomb par Marsy, mise en place en 1675 On l’appelait autrefois la Salle de Bal, nom que les contemporains justifient en disant qu'il y a, au milieu, « une espèce d’arène sur laquelle on danse, quand il plait à Sa Majesté d'y donner quelque fête s. Cetté arène hexagone, que limitait un fossé décoré de coquillages, a disparu depuis fort longtemps. Il reste les rocailles d'où tombent encore les nappes d’eau, qui faisaient tant d'effet aux lumières et au-dessus desquelles se tenait l’orchestre. Il reste aussi les cinq gradins où s'asseyaient les spectateurs, et toute une vaste décoration de plomb qui fut installée en 1683. Les quatre vases, posés dans le haut des cascades, sont de Le Conte; les quatre torchères du bas, de Le Gros et Massou. Elles sont en forme de trépied et portent des têtes de folie, des trophées d'instruments de musique, des coquilles; elles avaient aussi des fleurs de lis, maintenant presque toutes effacées. Les quatre torchères voisines des entrées sont de Mazeline et Jou- 104 venet ; elles sont chargées de trophées de musique et de beaux bas-reliefs représentant des danses de nymphes et de bacchantes. Le Hongre a aussi travaillé à la décoration du bos- quet; les quatre vases au-dessus de l’amphithéâtre de gazon sont de lui; les bas-reliefs, d’une grande finesse, représentent une danse de nymphes, une bacchanale d'enfants, Neptune et Amphitrite, et des enfants montés sur des dauphins. La conservation du métal est presque partout excel- lente, et il garde même des traces de l’ancienne dorure. On ne peut, sans avoir étudié les sculptures si variées LES JARDINS DE VERSAILLES de la Salle de Bal, se faire une idée complète des res- sources de l’art du plomb au siècle de Versailles. De l’autre côté de l’Allée de Bacchus était le Labyw- rinthe, célèbre jadis par les méandres de ses étroites allées et les trente-neuf fontaines, en des niches de treillage, où se trouvaient représentés en plomb les animaux des fables d'Ésope. D'admirables fragments de ces plombs coloriés ont échappé à la destruction, ainsi que les figures d'ÆÉsope et de l'Amour, transpor- tées au Bosquet de l'Arc de Triomphe. Rien ne rappelle plus aujourd’hui la disposition pri= FL DROITS RÉMAROU Re enr rip QUABLR ; LA TERRASSE DE L'ORANGERIE Estampe de J, Rigaud mitive ; le Labyrinthe, détruit en 1775, lors de la replantation du parc, est devenu le Bosquet de la Reine. On y a introduit alors quelques arbres exotiques, aussi rares à Versailles qu’ils sont nombreux à Trianon. Tels sont les beaux tulipiers de Virginie encadrant la salle du centre, des noyers et des chênes d'Amérique, et deux cèdres du Liban, contemporains de celui que Jussieu rapporta d'Angleterre. On ne peut s'empêcher de penser, en parcourant ce lieu écarté et charmant, à cette nuit d’été de 1784, où l'une des aventurières inculpées plus: tard dans l'affaire du Collier, Mademoiselle d’Oliva, parut mysté- rieusement devant le cardinal de Rohan. Le prélat, qui reçut d'elle une rose, prit, dans les ténèbres, cette femme pour Marie-Antoinette; et ce rendez-vous Je confirma dans l'illusion qui devait compromettre si cruellement la réputation de la malheureuse Reine. La grande allée qui longe le Bosquet de la Reine, et qui était jadis l’Allée du Mail, familière aux divertisse- ments de l’ancienne Cour, débouche devant la grille du « Parterre des Orangers ». Ce vaste parterre, formé de six pièces de gazon, avec un bassin rond, s'étend devant la majestueuse Orangerie bâtie par Mansart. Au-dessus des galeries latérales, s'étage en trois paliers l'énorme construction des « Cent Marches s. Ces degrés gigantesques, qui n'ont pas moins de trente mètres de large, semblent appuyer les soubas- | | | L'ORANGERIE T LA PIÈCE D'EAU Peinture de Jean. Cotelle DES SUISSES 166 LES JARDINS DE sements du Château et lui donnent, de ce côté, un aspect plus grandiose encore. Les orangers étaient les arbres favoris de Louis XIV, qui aimait les voir orner ses jardins et en faisait remplir les appartements du Château. Le Nôtre en avait réuni une collection alors incomparable, qui comptait environ VERSAILLES six cents pièces. Dans l'été de 1687, on apporta ceux de Fontainebleau, « au nombre desquels était l'oranger nommé /e Bourbon, qu'on dit avoir environ cinq cents ans », et qui a vécu jusqu'à nos jours. Un certain nombre de plants de cette époque se retrouve dans les séries actuelles, riches de quatorze cents orangers. Sauf ] LE BOSQUET DES ROCAILLES OÙ LA SALLE DE BAL Au premier plan, une des torchères de plomb sculptées par Mazcline et Jouvenet une centaine, qui se dispersent dans les jardins à Ja belle saison, on les réserve tous à la décoration du Parterre de l’Orangerie. Le vaste édifice qui les loge pendant l'hiver com- prend une galerie centrale et deux galeries latérales: la première a cent cinquante-six mètres de long sur douze mètres cinquante de large. Cette imposante masse de maçonnerie fut élevée de 1684 à 1686, et coûta envi- ron 475,000 livres. Mansart, pour la construction, et Le Nôtre, pour le parterre, avaient fourni des projets longuement müris ; ils venaient, d’ailleurs, de pré= luder à leur œuvre commune par l’orangerie de Chantilly, pour laquelle le Roi les avait prêtés au Grand Condé. Au mois de novembre 1683, le bâtiment des oran- gers était assez avancé pour que Louis XIV, en arrivant de Fontainebleau, vint en admirer la beauté. Dangeau raconte ce qu'il advint de cette visite. Il rap- CEE shonsinenes in DO RES ES Se CES EE TE de "ES ES ST ar led ROUE LE BOSQUET Al DES ROCAILLES:-OUÙ LA-SAEL Peinture de Jean Cotelle remier plan : Renaud et Armide F LES JARDINS porte qu'on avait installé, sur un piédestal construit dans le parterre des orangers, la statue équestre de Sa Majesté faite à Rome par le cavalier Bernin et que le Roi était impatient de voir. « En descendant de car- rosse, il monta à cheval pour aller voir l’eau qui entre dans le réservoir de la butte de Montbauron par le nouvel aqueduc. Ensuite, il se promena dans lOran- cher à l'extrémité de la pièce d’eau des Suisses, où il a été relégué. Une légère transformation du marbre en fit le héros romain se jetant, au Forum, dans le gouffre de feu. Il est dans le même axe des jardins que le groupe de Domenico Guidi, la Renommée du Roi, aujourd’hui voisin du Bassin de Neptune. Ce groupe remplaça précisément celui de Bernin à l’'Orangerie, avant de trouver son emplacement définitif. La statue colossale de Louis XIV en empereur DE VERSAILLES RER So gerie, qu'il trouva d’une magnificence admirable. Il vit la statue équestre du cavalier Bernin qu’on y a placée, et trouva que l’homme et le cheval étaient si mal faits qu'il résolut non seulement de l’ôter de 1à, mais même de la faire briser. » On sait comment fut sauvé le groupe fameux, devenu le Marcus Curtius que bien peu de curieux vont cher- LES CYGNES DES PIECES D'EAU DE Détail d'un tableau peint par Étienne Allegrain, représentant l'Ile Royale VERSAILLES romain, par Desjardins, fut aussi posée à titre provi- soire, dans le parterre emplacement privilégié de l'Orangerie, comme si cet ne pouvait se passer de rece- voir une image royale. On ne tarda pas à la placer dans l’intérieur de la construction, où elle se trouve encore aujourd’hui. Le Mercure galant, au moment de la visite des ambassadeurs de Siam, à la fin de l’année 1686, donna la première description de la grande construction à I RE D GE Po —cne ge 0 D a TN opte TETE cime S di nb 5 ÉMS M ÉdSESE 7 S SeS T S achh otticiart it 9891 D FSOI 9p 11PSUDJY 9p SUDJA So] ANS 211NAISUOT) AIXHONVAO.T LES JARDINS peine terminée ; c’est l'écho du jugement public sur les grands embellissements de Versailles : « Cette Orangerie, qui vient d’être achevée et qui est du dessin de M. Mansart, est un morceau si grand et si hardi, et a déjà tant fait de bruit dans le monde, que vous auriez sujet de vous plaindre de moi, si je ne DE VERSAILLES vous en envoyais pas une description fort exacte... La galerie du fond est éclairée par treize fenêtres cintrées et prises par enfoncement dans les arcades. Le dedans n'est orné d'aucune sculpture ni architecture, ainsi que ce genre de bâtiments le demande, et l’artifice des voûtes en fait la plus grande beauté... On y peut LE PARTERRE DU MIDI Dessiné par Le Nôtre, et réalisé en 1684 jouir d'une agréable fraîcheur et y prendre toutes les sortes de divertissement que peut fournir le théâtre, sans être incommodé de la chaleur, On pourrait même y jouer des opéras et à plus d’un endroit en même temps, Sans que ceux qui les représenteraient s’incom- modassent les uns les autres. C’est ce qui fit dire au premier ambassadeur [de Siam] que la magnificence du Roi était grande d’avoir fait un si superbe bâtiment pour servir de maison à des orangers. Il ajouta qu'il y avait bien des rois qui n’en avaient pas de si belles. » Les sculptures décoratives ne tardent pas à em- bellir les abords et le Parterre de l'Orangerie. Lespin- gola pose les quatorze grandes corbeilles de fruits et de fleurs sur les piliers qui soutiennent la grille. Le Gros et Le Conte sont chargés des groupes colos- saux de pierre, que supportent les quatre forts piliers Î À pes ee RE PRET CR. " S ci L: S Il OSLI uo pij10, 40d NS S4A NAVA:A 49414 oquiod ayjoipnby VIT 44 ANA HINHONVYAO.1 CT tes nn et ee er De D LT ae À Ce TR + a — a 22 1 de la double entrée des jardins. Le premier exécute l'Aurore et Céphale, Vertumne et Pomone, groupes les plus voisins de la ville; le second, Zéphire et Flore, Vénus et Adonis. Dans l'intérieur même du parterre, prend place toute une décoration sculpturale de marbre et de bronze. Il en reste quatre vases de marbre. deux entourés de pampres, par Le Gros et par Buirette, et deux ornés d’un feston de fleurs « du dessin de M. Mansart », par Le Gros et par LD) > nel 0 Z n © tn ee m1 7 n > on me m1 un Robert. Deux groupes provenant des commandes faites jadis pour le premier Parterre d'Eau, Saturne enlevant Cybèle, par Regnaudin, et Borée enlevant Orithye, par Gaspard Marsy, sont aujourd’hui à l'entrée du jardin réservé des Tuileries. Des œuvres d’art qui ornaient l'Orangerie, on ne trouve plus, à l’intérieur de la construction, que la statue colossale de Louis XIV, « revêtu d’une cotte d'armes à la romaine et d’un manteau royal, et tenant LA REPLANTATION DES JARDINS DE VERSAILLES SOUS LOUIS XVI. — VUE DU BOSQUET D'APOLLON EN 1772 Peinture de Hubert Robert (Salon de 1771) le bâton de général d'armée s. Pendant la Révolution, on avait transformé le Roi en dieu Mars, et sa tête fut refaite en 1816 par le ciseau de Lorta. Malgré sa mutilation, l'œuvre de Desjardins ajoute de l'in- térêt à ce lieu, où l'on vient surtout chercher les lignes puissantes de l'architecture et la beauté majestueuse des voûtes. L'Orangerie, sa terrasse et ses parterres, dernier grand travail dans le exécuté parc, donnèrent sa forme définitive à l'œuvre commune de Mansart et de Le Nôtre. On peut y voir le complément somptueux de la création de Versailles; on peut aussi étudier cet ensemble isolément, comme un résumé de ce que l'architecture des jardins a créé de plus parfait en France. Tout harmonisé qu'il soit au goût de la société polie de l’époque, le jardin français, qui discipline la nature et l’ordonne suivant les lois méthodiques de l'esprit, n’est pas, comme on le croit généralement, rdc prit A rene) ETS LL CRT TA LE MONTRES AE res es de CL Se 2. 2 à ——- 2 RS LES JARDINS DE VERSAILLES 173 une innovation du xvu° siècle. Ce cadre coloré, qui achève les bâtiments d’apparat en continuant leurs lignes, se retrouve déjà dans nos miniatures du Moyen Age et de la Renaissance. Les principes de cet art ont donc été posés par nos ancêtres, et, s'ils n'atteignent leur plein développement qu'avec Le Nôtre, né et élevé parmi les jardiniers royaux, cela tient moins au génie de ce maître, qu'à la carrière exceptionnelle qu'il lui fut donné de parcourir. Ainsi s'explique comment un artiste a pu concevoir une telle œuvre de clarté, de logique et de magnificence. Pour sentir cette perfection dans sa plénitude, il faut se tenir sur la terrasse qui domine l'Orangerie. On y saisit l'heureuse pensée qui fit aménager les abords du Château. Au nord, les grands arbres plantés le long du parterre arrêtent le passage des vents froids ; Photo P, d’Aujee. LA .REPLANTATION DES JARDINS DE VERSAILLES SOUS LOUIS XVI. — VUE DE L'ENTRÉE DE L'ALLÉE ROYALE EN F7 Peinture de Hubert Robert (Salon de 1777) le midi demandait une disposition différente, non seu- lement parce que l'ombre prolongée des arbres eût été triste sur les fleurs, mais encore pour varier x l'effet d'ensemble. La symétrie, qui partout règne à Versailles et qui semble essentielle au parc à la fran- çaise, a été rompue ici de façon hardie et admirable. Il n’est pas de plus grandiose idée que celle de cette terrasse tombant à pic comme une falaise devant le plus noble horizon. Au delà de lOrangerie et des grilles qui ferment les Jardins, s'étend la vaste nappe de la pièce d’eau des Suisses, dont la longueur fut à dessein exa- gérée pour les besoins de la perspective. Tout au fond s'élèvent les coteaux touffus de Satory, rappelant l’époque ancienne où le pays de Versailles n’était que forêts. Les bois montent dans le lointain, égayés sou- vent par la blanche fumée des trains de Bretagne. Sauf ce détail de vie moderne, rien ne vient contrarier CR ÿ Abe 2 re ; a LÉ D de GE PE D CP OT PT SR CUS VS OC RE ES POU ES LE CHATEAU VU DU PARTERRE DU MIDI Au premier plan, un des sphinx de Sarrazin et Lerambert ; plus loin le Vase de la Paix LES JARDINS DE VERSAILLES I le Souvenir du passé, et le spectacle qui se présente à nous est tout semblable à celui qu'admiraient les promeneurs de l’ancienne Cour. De tout temps, on y venait chercher la fraîcheur du soir et l'air pur arrivant des hauteurs. Lorsque Louis XVI prolongeait à Versailles son séjour d'été, c'est là que la musique des Gardes Françaises et des Gardes Suisses se faisait entendre, une partie de la US | UT nuit ; le parc était ouvert à tous; Marie-Antoinette, avec les princesses, en simple robe de percale, se mêlait à la foule, ce qui donna matière à la médisance et bientôt à la calomnie. De nos jours encore, sur ces terrasses évocatrices, il n’est pas d'heure plus douce et plus émouvante que celle où le soleil, disparu vers la percée du Grand | LES MARCHES DE … Vous souvient-il, mon ami, MARBRE ROSE De ces marches de marbre rose... ? Parterre du Midi (A. De Musser.) Canal, laisse ses clartés dernières sur l'horizon de feuillage. Dans les pièces d’eau étagées viennent mourir les couleurs du ciel; le silence grandit avec l'ombre; les vitres de la Galerie des Glaces ne flam- boient plus que de lueurs errantes, tandis que le Château lentement s'illumine d’une froide auréole. Derrière la haute façade, la lune prépare sa féerie ; bientôt elle s'élève au-dessus de la noire architecture ; les bassins du Parterre d’Eau la reflètent en leur profondeur, avec la silhouette du palais penché sur les miroirs tremblants. Les bronzes palpitent sous la caresse lumineuse ; les blanches statues se meuvent sur le fond des futaies ; au bord des fontaines et dans les bosquets, s'animent d’une vie étrange toutes les figures de l'Art. Qui n’a point goûté les Jardins de Versailles aux heures de la nuit, n’a pas épuisé l'émotion qu'ils peuvent contenir. 2A145D]0( 24 A4Pd osso1Œ ATOAIS °ITHTAX NG NATTIIN HAT SHHA SHTIIVSYHA AQ SNIQUVI SAG NVTId gel ue oalSep(] 2997 W 7 - | se ot 222 MENT Fp 200 Davnb FT 'uoun’ ” RPRÉAT LUOAU VL2pdg | E | 1 2ARTPY À 90) nE2 p 29P 2 L y vof mnt AOL ? 772 A 24pinD gel NPLALE ORRRT Re pr el | pu 200 2 - par À 00e Mer one ra CP Pyduo ds #7 puodp) aoppodyp suvg + APAFNE) SUBÂR 205 CUT pe "2 uopodpr 207 euÿoT “0 RAT 99 SPADE D LA MSN UC 2 APT A 2400 0 SIT Sense Ÿ v à JS . “(PUUOANCT ap na aq! eme ge 29° 1 >U&0J pl OH AV] % 11 3 ‘El ne» a. F Il ssmdjnor né IA, | 6] sauuquoz çsp pnbjog >» | x APTE] nn) Ge PAP À up ALT - ; APTZ LR RETENIR TRE SPUE EE TITI T = pe l PET 2p SuaprEg |amer( 2 D 20 Z LATIITALISITEIIL JeuE> nf NI RD D 7 TT Fi 4 SLHIÔSON Photo Raffaële. LES GRANDES EAUX PAR TEMPS DE PEUIE Vue du Parterre d'Eau P DLE DES ILLUSTRATIONS Louis XIV, peinture de CHarLes LE BRUN (1619-1690). PAGES FRONTISPICE Nymphe et Amour, par Puaicippe MaGNier, groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Keller. Louis XIV en pr nade dans léjarirns de Versailles, détail d’un tableau de P.-D. MarTin, ee r. la fontaine de l’Obélisque. è : Bosquet du Théâtre d'Eau, aujourd’ Lui détruit, cstaipe de J. Riçaun . Plan du bosquet du Théâtre D Eun, ie da un ibèn ayant appartenu au roi Louis XV... ee Le Nôtre (André), architecte du Roi (1613-1700), pein- ture de CarLo MARATTA . Neptune et Amphitrite, groupe de pla dé Béssin de Neptune, exécuté par SIGISBERT ADAM en 1740 Marie Leczinska (La Reine), peinture de J.-B. Vanroo. Fontaine de Diane, groupe d'animaux de bronze, par Van CLÈvE Marie-Antoinette et Fo XVI à en pr nude ns les jardins de Versailles, détail d’une peinture de HusErT ROBERT . . .. : Projet pour une riaine de. lonb dont hui détruite) du bosquet du Théâtre d'Eau, dessin de CHARLES LE BRON: . È Vase décoré de soleils, marbre vu Donne : au De lerred'Paus. . . .. nu Vase de la Paix, marbre par J.-B. Cusi, scope en 1684, pour la terrasse devant le Château. [e)} "| KO Vase de la Guerre, marbre par Coyzevox, sculpté en 1684, pour la terrasse devant le Château . Plan des abords du Château, tiré d’un album daté de 1747, ayant appartenu au roi Louis XV. Le Parterre du Midi, dessiné par Le Nôrre et réalisé en 1684 (état actuel), (dans le fond, Rae et la Pièce d’eau des Suisses). : Amour sur un Sphinx, groupe du Parterre da Midi, bronze fondu par Duvaz en 1670, d’après un modèle de Jacques SarraziN, marbre de LERAMBERT. 16 et Ariane du Vatican, Parterre du Midi, marbre hs par CoRNEILLE VAN CLÈVvE. ; Vue du Parterre d'Eau après 1090, détail d' une pein- ture de Jean Corezre (au premier plan, les sui- vantes de Vénus la regardent s'élever au ciel). Jeux d'Enfants, par C. Van CLÈvE, groupe de . au Parterre d'Eau, fondu en 1690. Nymphe et Amour, par Raow, groupe de brome au Parterre _. fondu par les frères Keller en 1668 . Sd LUE ee id RU Nymphe et Aiour: par Le Gros, groupe de bronze, au Parterre d’ Eau, fondu par les frères Keller en LORS A Ne Tee de La Loire ‘(le fleuve), par er 0 dibupé de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Keller en 1689.. ons La Garonne (le Heuse), Bar Ébrsbros (1686), “biouse de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Keller en r088.. die be lie . . PAGES 15 14 a +2 La] 180 LES JARDINS DE VERSAILLES La Dordogne (la rivière), par Covyzevox, groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Keller:en 168842 mr ER SERRE Coyxzevox (Antoine), sculpteur du Roi (1640-1720), peinture de GILLES ALLOU. . . . . NE RE eee Jeux d'Enfants, groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu ën.1090 21 0e + Ne et Ar Nymphe et Amour, par Le Gros, groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Keller en PS A 0 A CR PAS TE RE (EEE Le Loiret (la rivière), par REGNauDIN, groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Keller en DOG EN id eeune nf neie lance re Lee eo La Saône (la rivière), par J.-B. Tcsr, groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Keller {sans PP RS RS ONE CO OR EP PNA D RE CU Jeux d'Enfants, par LesriNGoLa, groupe de bronze, au Parterre d'Eau, f6ndueh:1690 uni aan La Marne (la rivière), par Le HoxGrEe, groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Kelléren 16809 initie Mai as Nymphe et Amour, par MaGnier, groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Keller en LORD: ur eme aie es on TE CA Nes Jeux d'Enfants, par GraNier, groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondue 16002570 Nymphe et Amour, par Le HonGre, groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Keller en TOO ee dois oi aie Lane lo tie tete iU) cale Keller (Jean-Jacques), de Zurich, commissaire ordon- nateur des fontes de France (1635-1700), peinture des HYAGINTHE; RIGAUD: 0 4 Te PAR Jeux d'Enfants, groupes de bronze, au Parterre d'Eau, fondusS en TODO NT LU Pre nee enr La Seine (le fleuve), par Le HonGre, groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Keller en Le Rhône (le fleuve), par J.-B. Tri, groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Keller . Projet d’une fontaine d'Amours, dessin de CHARLES LE DREN RE PR TE Une en pe 1e eat e ee joue Le Château vu des Jardins, estampe de J. RiGaup. . Le Parterre de Latone, estampe de J. Ricaup . . . . . Les Saisons : Le Printemps, par MaGnier, cabinet du Point du Jour, marbre sculpté en 1681. . . . . .. Les Heures : Le Point du Jour, par Gasparp Marsy, . Parterre d'Eau, marbre sculpté en 1680. . . .... Les Éléments : L'Eau, par Le Gros, cabinet du Point duJour, matbresculpté en 1681:125.2%7.07 008 Les Heures : La Nuit, par RaoN, rampe du Parterre duNord'marbresculpté en:1680. . 1. 72410642 Les Éléments L’Air, par Le Hon&Gre, Parterre d’ Fa marbre sculpté en TES ARE ET Cabinet de Diane, fontaine édifiée en 1684... .... Lion terrassant un sanglier, par C. Van CLÈvE, groupe de bronze, fondu par les frères Keller en 1687. Lion terrassant un loup, par C. Van CLÈve, groupe de bronze, fondu par les frères Keller en 1687. Jeux d'Enfants, par Lr Gros, groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu en 1690 PAGES 22 23 24 24 25 25 26 7 Jeux d'Enfants, par Poucerier, groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu en 1690. . . . . .. RES Anne-Louise-Bénédicte de Bourbon, plus tard duchesse du Maine (1676-1753), peinture de Pierre MicNarp. Rampe du Parterre du Nord, au premier plan, la Diane dé DESIARDISS IN. ESPN ee Tigre terrassant un ours, par Houzeau, groupe de bronze, fondu par les frères Keller en 1687. . . . . Limier abattant un cerf, par Houzeau, groupe de bronze, fondu par les frères Keller en 1687. . . .. Le Cabinet du Point du Jour, fontaine édifiée en 1684. Le Parterre du Nord sous Louis XIV, peinture d'ÉTIENNE ALLEGRAIN: 6e ste nn Le Parterre du Nord, dessiné par Le NôTre et réalisé en 1668 (dans le fond, la Fontaine de la Pyramide ; et PAtlée d'Eau)" ee ee è Projet pour les quatre figures des « Heures du Jour », dessin de CHAR£ES LE BRON: SRE Les Heures du Jour : Diane ou le Soir, par Marrin DessarpiNs, Cabinet de Diane, marbre sculpté en Vases de bronze, Parterre du Midi, modèles de BaLLin. Les Heures du Jour : Vénus ou l'Heure de Midi, par Gasparp Marsy, Cabinet de Diane, marbre sculpté en 1680.47. nant UN SO re EU Les Parties du Monde : L'Asie, par RoGer, Parterre du Nord, marbre ue res See me Les Parties du Monde : L'Afrique, par SiBRAYQUE et Cornu, rampe du Parterre du Nord, marbre sculpté en 1682.45 20e MT RES Marsy (Gaspard), sculpteur du Roi (1624-1684), pein- ture de-JACQUES CARRE 202000 SR È Les Éléments : Le Feu, par Dossier, rampe du Par terre de Latone, marbre sculpté en 1681 FETE Les Éléments : La Terre, par Massou, rampe du Par- terre du Nord, marbre sculpté en 1681. . . . . .. L Un Bosquet débat à Les Bains d'Apollon, Louis XIV visite le bosquet disposé en 1705 pour recevoir les : groupes de l’ancienne grotte de Téthys, peinture de J.:B. MARTIN. 504 UM EN RE SCOR Le Parterre du Nord, dessiné par Le NÔTRE et réa- lisé en 1668.14 25 RER SR Les Parties du Monde : L'Europe, par MazeuE, rampe du Parterre du Nord, marbre sculpté en 1680. Projet pour les quatre figures des « Saisons », dessin de CHarLes LE BRUN NE ee Les Saisons : L'Hiver, par GirarpoN, Parterre du Nord, marbre. + Mens RS Less Les Saisons : L'Été, par Hurinor, Parterre du Nord, marbre..s"ht a ANR Les Parties du Monde : L'Amérique, par Gizces GuéRiIN, Parterre du Nord, matbré em Re Projet de fontaine : Lis épanoui soutenu par des Tri- tons, dessin de CHarLes LE BRUN. . . . . . . . . .. Vase orné de têtes de bélier, Parterre du Nord, marbre par ROUSSEAU... LR Re Terme d'Ulysse, par MaGnier, rond-point des Philo- sophes, marbre sculpté en 1688 ........... Terme d’Isocrate, par GraNier, rond-point des Philo- sophes, marbre sculpté en 1688 ........... TL Pere CNE EL i TABLE DES ILLUSTRATIONS 181 PAGES PAGES Bogaert (Martin Van den), dit Desjardins, sculpteur Bosquet de l'Arc de Triomphe, estampe de J. Ricau . 80 du Roï (1640-1694), (dans le fond, le monument Un Bosquet détruit : Le Bosquet de l'Arc de Triomphe, érigé à Louis XIV sur la place des Victoires, à Paris), au premier plan, allégorie de la France triom- peinture de HyacinTHE Riçaup. . . . . . . . . . .. 59 phante, peinture de JEAN CoTELLE. . . . . . . . . 81 Projet pour la fontaine de la Pyramide, dessin de Bassin du Dragon, sculpture de plomb reconstituée, LUE RON DU SG SERRE ne 60 en 1889 par M. Tony Noër, d’après les représen- La Vénus pudique, degré du Parterre du Nord, bronze tations anciennes {le corps du dragon est par fondu par les frères Keller, d’après le marbre de GASPARD. MARSY) RAR AE ns ne 82 A TOO ete de ie eue dat 61 Fontaine de la France triomphante (la France, l'Es- Tritons et Sirènes, bassin du Parterre du Nord, pagne et l'Empire), Bosquet de l’Arc de Triomphe, groupe de plomb, d’après Tusr et Le HonGre. . . 61 sculpture de plomb achevée en 1683 sous la direc- Projet. pour la fontaine de la Pyramide, dessin de tion de Tuer, restaurée en 1883 (la figure de l’Em- RON 2 era. ae rralene q à 62 pire CStipar COYZEVOR NN: M ALU RUE er 83 Fontaine de la Pyramide, sculpture de plomb, par Fontaine de la France triomphante (la France, l’'Es- RAR DONEACRCVÉS en: 1672.: 2 ue , Le... 63 pagne et l'Empire), Bosquet de l'Arc de Triomphe, Vases de bronze, Parterre du Nord, modèles de sculpture de plomb achevée en 1683 sous la direc- RP CN Ge yet ne ee ee 64 ton -de PRE LS RE ee 84 Les Poèmes : Le Poème héroïque, par DrouiLzy, Par- Françoise - Athénaïs de Rochechouart, marquise de PR MONOEE marbre... nn. 0. 64 Montespan (1641-1707), peinture de l’École de Mi- Louise-Françoise de La Baume Le Blanc, duchesse ce GNARDS FT ST Ten a de en LES 85 de La Vallière (1644-1710), peinture de JEAN Esope le Phrygien, jadis à l'entrée de l’ancien Laby- aan cd one eh rot 65 rinthe, aujourd’hui au Bosquet de l'Arc de Triom- Les Tempéraments de l'Homme : Le Colérique, par phe, figure de plomb par Le Gros (1673) . . .... 86 onrrau-Arlée Eau; marbre... ..., 1. 66 L'Amour tenant le fil d'Ariane, jadis à l’entrée de Les Saisons : L'Automne, par REGNAuUDIN, Parterre du lPancien Labyrinthe, aujourd’hui au Bosquet de RO dead so ee 4 is 66 PArc de Triomphe, figure de plomb par Tusr(1673). 86 Les Poèmes : Le Poème pastoral, par GrANiEr, rampe Bassin de Neptune au temps de Louis XIV (au premier du Parterre du Nord, marbre sculpté en 1681. . .. 67 plan, scène mythologique représentant le Jugement Les Poèmes : Le Poème satirique, par Pnicirpe Buys- de Paris};peinture de‘JEAN COTERLe. 2 0 87 Der cParierre du.Nord.- marbre. :::.: 4 su 67 Bassin de Neptune, estampe de J. RiGaun. . . . . . . . 88 Fontaine du Bain des Nymphes (partie gauche), Allée Plan du Bassin de Neptune, tiré d’un album daté de d'Eau, bas-relief de plomb, par Girarpow, sculpté 1747, ayant appartenu au roi Louis XV...... 89 SO imac e 0e Vi dirt eue en taue 68 Projet pour la figure de Neptune, dessin de CHarLes Fontaine du Bain des Nymphes (partie droite) . .... 69 BE BRON RTE er re ie er eu 90 Tritons et Sirènes, bassin du Parterre du Nord, groupe Bassin de Neptune au temps de Louis XV, aquarelle de plomb d’après Tuer et Le HONGRE . . . . . . . . 70 peinte Dar PORTAIE M R7SON RU se nes 91 Girardon (Francois), sculpteur du Roï (1627-1715), Projet pour la figure d'Amphitrite, dessin de CHarLes peinture de Phoole de En BRUNES Ton 71 LE BRON EE ET RER me SR TON Ne er 02 Projet d'une fontaine : Amours sur des dauphins, des- Le dieu Protée, groupe de gauche du Bassin de Nep- PT OP RARLES AE BRUN -4.0 04 dora els à 72 tune, sculpture de plomb exécutée par BoucHarpon Groupes d'Enfants, Allée d'Eau, bronzes fondus en CD 17920 (ANNÉES) MEL NE ESF 93 1688 d’après les modèles de Le Gros (1670). . .. 73 Char de Neptune et d'Amphitrite, dessin à la san- Groupes d'Enfants, Allée d'Eau, bronzes fondus en guine, PATIBOUCHARDON: 16 Lan Le die sh 94 1688 d’après les modèles de LERAMBERT (1670). . . . 73 Bassin de Neptune, les effets d'eau du centre et le jet Projet d'une fontaine : Amours sur des cygnes, dessin du Dragon, à l'entrée l’Allée Ce A TA ER DR 95 de CHARS LEBRUN: ue SN EE SE 74 Le dieu Océan, groupe de droite du Bassin de Nep- Groupes d'Enfants, Allée d'Eau, bronzes (1688) d’après tune, sculpture de plomb exécutée par J.-B. Le- A A ha a iies.e 75 MONET CD T7 AO Re EME eue De 96 Groupes d'Enfants, Allée d'Eau, bronzes (1688) d’après Dragon marin conduit par un Amour, Bassin de Nep- BUIREETE (678) ae 4) rec Te 75 tune, sculpture de plomb exécutée par BoucHarpon. 97 Groupe d'Enfants, Allée d'Eau, bronze (1688) d’après Côté droit du Bassin de Neptune, effets d’eau. . Re 98 LEMONGRE 670 ee Lie... 75 La Renommée de Louis XIV, pourtour du Bassin de Projet de fontaine architecturale encadrant une Neptune, groupe en marbre exécuté à Rome par statue du roi Louis XIV, dessin de l'atelier de Domenico Gui, d'Urbino, et terminé en 1686 . . 09 nn ee tag re eue is a 76 Le dieu Protée, groupe de gauche du Bassin de Nep- Lerambert (Louis), sculpteur du Roi (1638-1670), pein- tune, sculpture de plomb par BoucHarpon en 1739. 100 CDN ASS BELLE Se. 4 ere lee » 2 0 à 77 Un Bosquet détruit : Le Bosquet du Théâtre d'Eau Bosquet des Trois Fontaines, estampe de J. RiGaup . . 78 {au premier plan, la Toilette de Vénus), peinture de Un Bosquet détruit : Le Bosquet des Trois Fontaines, Jran. COTELLE, 0.7, 4 es ns 101 peinture de JEAN COTELLE. . . . , . . . . . . . . .. 79 Minerve enfant, marbre de BERTIN . .......... 102 182 LES JARDINS DE VERSAILLES L'Ile des Enfants, sculpture de plomb exécutée par Harpy:en1710,,4% 44. Mesh se Lontaine de Cérès ou de l'Été, sculpture de plomb par Taowas ReGNAUDIN, mise en place en 1674 . Fontaine de Flore ou du Printemps, sculptate de plomb par J.-B. Ten, mise en place en 1675. . Bosquet des Bains d'Apollon, disposition faite en des groupes de marbre de l’ancienne Grotte de Téthys see io st Se NS AN Grotte de Téthys, décoration de rocaille achevée en 1667, détruite en 1686. Les modèles en plâtre y furent placés en 1672. Estampe de LE PAUTRE, montrant la disposition primitive des groupes . . . Bosquet des Bains d'Apollon vers 1730, estampe de J. Ricaup, montrant la disposition des groupes sous des baldaquins dorés, telle qu’elle fut de 1705 DT TS nt eme states eus dir tt ein ar tn Th sq Projet pour la nouvelle Grotte des Bains d’Apollon (1773), dessin de Huserr Roserr (le dessin origi- nal coupé en deux parties : l’une au Musée de Versailles, l’autre à M. H. Lemonnier, se trouve rétabli intégralement ici}. . . . . . . . .. .... > Apollon servi par les Nymphes, Bosquet des Bains d’Apollon, groupe de marbre par Girarpox et RE- GNaubIN, achevé en 1675 pour l’ancienne Grotte de PÉtRYS Peer en Pire ner ee 109 et Les Chevaux d’'Apollon pansés par des Tritons, Bos- quet des Bains d’Apollon, groupe de marbre par les frères Marsy, achevé en 1675 pour l’ancienne Grotte dé TéthyS ie eine RSR Let Un Bosquet détruit : La Salle des Festins ou du Con- seil, construite en 1672, détruite en 1706, peinture dé de-B. MARTIN SR en A rate Fontaine de l’'Obélisque, construite en 1706 sur l’em- placement de la Salle des Festins, restaurée en 1890, peinture deP.-D: MARTIN ..: . . . . . . . : . Fontaine d'Encelade, estampe de J. RiGauD . . . . .. Fontaine d'Encelade. La figure de plomb du Titan a été exécutée par Gasrarp Marsy en 1676. . . . . ... Le Berger Acis, Bosquet des Dômes, marbre exécuté par J.-B. Tuer pour l'ancienne Grotte de Téthys. Le Point du Jour, Bosquet des Dômes, marbre exé- cute par PSE GROS 16096 CT TS Arion, Bosquet des Dômes, marbre exécuté par JEAN RAON ACT OO EN RS M ee eee Etes Ino, déesse marine, Bosquet des Dômes, marbre de Le Bosquet des Dômes, dit alors Le Bosquet des Bains d'Apollon, disposition des groupes de l’ancienne Grotte de Téthys de 1686 à 1705, peinture de JEAN COTELEE SE TE RER ARE en La Nymphe Galatée écoutant Acis, Bosquetdes Dômes, marbre exécuté par J.-B. Tusr pour l’ancienne Grotte dé TÉTRYS + re ENT L'Aurore jetant des fleurs, Bosquet des Dômes, marbre exécuté par MaGxier en 1704 Terme d’'Hercule, Le Core Parterre de Latone, marbre de PAGES 103 104 105 106 107 107 108 SE 112 113 114 115 116 116 117 117 118 119 Terme de Pandore, Parterre de Latone, marbre de Le GROS: ee AE a os Marie-Adélaïde de Savoie: ‘duchesse de Bourgogne (1685-1712), peinture de J.-B. SANTERRE. . . . . . Plan du Parterre de Latone, tiré d'un album exécutéen 1747 pour le roi Louis XV. ...... Le Parterre de Latone et Château en 1674, estampe d’Israez Sizvestre. Cette vue montre le projet d'une décoration de niches et de statues autour du-Bassin mie Hot nene Projet d'un des motifs Ju pourtour du Bassin de La- tone, non exécuté, dessin de CHarLes LE BRUN. . . Bassin de Latone, sculpture de marbre et de plomb doré, exécutée par les frères Mrs de 1668 à 24:60 ES CD ER PS MUC RUE LE Non 274 ne aid" VOTE CE AN El TOP RS RD ee nn rie ee Vase de marbre, Parterre dé Latone, ARE à Rome par les pensionnaires du Roi. + ME de Vase de marbre, Parterre de Tone, copie sculptée par Cornu du Vase Médicis {le bas-relief représente le sacrifice-d'Iphigénieh esse ae Vase de marbre, Parterre de Latone, sculpté par Prou d'après un dessin de Maxsarr {le bas-relief repré- senté Mars enfant) Aer ire Les Poèmes : Le Poème lyrique, rampe du Parterre de Latone, marbre sculpté par J.-B. Tusi en 1680. 1: Projet d'un motif du pourtour du Bassin de Latone, non exécuté, dessin de CHarLes LE BRuN.. Bassin de Latone et perspective du Tapis- Vert, sculp- ture de marbre et de plomb doré, exécutée par les frères: Marsv dé r668 A7. D « Castor et Pollux », groupe copié de l'antique par. CoyzEvoxen 17120: de A ter, FR « Pœtus et Arria », groupe copié de l'antique par Les- PINGOLA HR EP CRE te nt LES La Nymphe à la coquille, rampe du Parterre de Latone, copie, par SUCHETET, du marbre imité de l'antique par CoyzEvVox en TOBF-S NPNSRS Ee eS EE Louis XIV, le Dauphin et les Princes en promenade dans les Jardins de Versailles, détail d'un tableau de P.-D. Marrin représentant le Bassin d’Apollon. La Fidélité, Tapis-Vert, marbre sculpté par Le FÈvre ER TOSS, HE CUS RON EE de Ce : Artémise, Tapis-Vert, marbre sculpté par Le FÈvre et Dessarpins en 1695. . Be a TS La Fourberie, Tapis-Vere, marbre sculpié par Le CONTE ; L 5 de RPRerà ‘ 9e Une Amazone, Tapis-Vert, marbre copié de l'antique -sculpté par BuiRETTE en 1694. . . . .. a ue Vénus sortant du bain, Tapis-Vert, marbre imité de l'antique par Le Gros en 1692. . . .. À rue Vénus Callipy ge, rampe du Parterre de Lune mar- bre copié de l'antique par CLérioN en 1686 . . . .. Vase colossal du Tapis-Vert, marbre sculpté ie Lr- GÉRÉE 4e ta ae CT Le Berger Cyparisse, Tapis-Vert, marbre sculpté par ANSELME FLAMEN en 1696 . .. . . . . . . ... Bassin d'Apollon et Grand Canal, peinture de P. D. MARTIN. einen NO RER TABLE DES ILLUSTRATIONS Le Char d’Apollon, groupe de plomb par J.-B. Tumi, mis en place en 1670-1671 (dans le fond, les bâti- ments de la Petite-Venise où logeaient les matelots A 2. à , .t:, Bassin d’Apollon, les Grandes Eaux et la perspective D us... li. Ino et Mélicerte, demi-lune du Bassin d’Apollon, marbre exécuté par GRaniER d’après un modèle de in nue, Jui. Bassin d’Apollon, estampe de J. Ricaup. . . . . . . .. Bassin d'Apollon, les Grandes Eaux et la perspective de PAMES-Royale ou Fapis-Vert, ....,... .. Didon sur le bûcher, Tapis-Vert, marbre sculpté par DRE RDA D LS à heu ct. 0 die _ Achille à Scyros (vêtu en femme), Tapis-Vert, marbre SDS DAT PH VIGIER En 1005. . 4... nn. Bassin d’Apollon et Allée Royale ou Tapis - Vert, (groupe de plomb par J.-B. Tumi) . ......... Vase de marbre, par Rayoz, Allée Royale. . ...... Vase de marbre, par MeLo, Allée Royale. . ...... Vase de marbre, par Herrix, Allée Royale Vase de marbre, par Sronrz, Allée Royale . . ..... Marie-Louise-Élisabeth d'Orléans, duchesse de Berry (1695-1719), peinture de l'École de Micnarp. . . . Bosquet de la Colonnade, estampe de J. Riçaun . . .. Bosquet de la Colonnade, peinture de Jean Corerre (la scène mythologique représente Apollon servi TER ET TA re PE ON Projet pour un groupe : l'Enlèvement de Coronis par Neptune, dessin de CHarLes LE BRUN. . . . . . .. L'Enlèvement de Proserpine par Pluton, Bosquet de la Colonnade, groupe de marbre par GirarDoN, AORÉVÉ CDS CA-pIACé: En LOQ0. 1 ne «dre Bosquet de la Colonnade, édifié par Maxsarr en Marie-Anne- Victoire, Infante d'Espagne(1718-157#1), fiancée au roi Louis XV, plus tard reine de Por- tugal, peinture de N.-A.-S. Bee (dans le fond, le groupe de l’Enlèvement de Proserpine, par Girar- D Ra Te a brie du diee) née nnp lee La Salle des Marronniers, estampe de J. Ricaun. . . . Un Bosquet détruit : La Galerie d'Eau ou Salle des Antiques, peinture de J.-B. Martin (1688) (ce bosquet a été remplacé en 1704 par la Salle des DIPONAneES 0 MED are nu he nee Projet d'une Fontaine d'Amours, dessin de CHaRLEs Le BruN Louis de France, dauphin (1061-1711), et sa famille, d’après P. MiGxarD Pièce d'eau du Miroir, appelée aussi «le Vertugadin ». Les « Roulettes » des Dames de la Cour, détail d’une peinture de J.-B. MarriN, représentant une prome- Da daniaGaleriéd Eau. siens, PAGES 152 155 L'Ile Royale;estampe de JaRiclupe #70 0e Le Jardin du Roi, créé en 1817 sur l'emplacement de la pièce d'eau de l'Ile Royale . . . . . ... .. .. Première pensée pour la figure de Flore desti- née au Bassin du Printemps, dessin de CHarLes LR BRUN me LAN AA Ne ER Première pensée pour la figure de Bacchus. destinée au Bassin de l’Automne, dessin de Cunarres LE BRUNE ea ir nat de en et Ten ie DU Un Bosquet détruit : Le Labyrinthe (les trois fon- taines de plomb représentent des fables d'Ésope), peinture de Jan CorTeLce (la scène mythologique représente Diane après la chasse). . . . . . . . . .. Fontaine de Saturne ou de l’Hiver, sculpture de plomb par Girarbow, mise en place en 1677. . . . .. . .. Fontaine de Bacchus ou de l’Automne, sculpture de plomb par Marsy, mise en place en 1675... .... Terrasse de l'Orangerie, estampe de J. RiGaup. . . . . Orangerie et pièce d'eau des Suisses, peinture de Jean COTEDLR SRE AS M AE Le Bosquet des Rocailles ou Salle de Bal, au premier plan, une des torchères de plomb sculptées par MazELINE Gt JOUYENE TT SAN MONT. em Le Bosquet des Rocailles ou Salle de Bal, peinture de Jrax Corerce (au premier plan : Renaud et APde) UE Mrs RE MU rites à Les cygnes des pièces d'eau de Versailles, détail d'un tableau peint par ÉTIENNE ALLEGRAIN, représentant FTIÉRONaTES RS CM RNA ne Ness L'Orangerie, construite sur les plans de Maxsarr de L'Orangerie vue de la Pièce d'Eau des Suisses, aqua- relle peinte par PORTAIL EN 78000 er Replantation des Jardins de Versailles sous Louis XVI. Vue du Bosquet des Bains d’Apollon en 1775, peinture de Huserr Rogerr (Salon de 1777). . . .. Replantation des Jardins de Versailles sous Louis X VI. Vue de l'entrée de l’Allée Royale en 1775, pein- ture de Huserr Rogerr (Salon de 1777). . . . . . . Le Château vu du Parterre du Midi (au premier plan, un des sphinx de SarraziN et LERAMBERT, plus loin le Vase de Ba) D RER Fee Les Marches de marbre rose, Parterre du Midi . . .. Plan des Jardins de Versailles vers le milieu du xvuie siècle (1753), dressé par l'abbé DELaGRivE . . Les Grandes Eaux par un temps de pluie, vue du Par- LE 9 OMS BA DA ER PE RE PEER IT ne RU tr Les Grandes Eaux au Bassin de Neptune. . . . .... Vase de marbre aux attributs champétres, Allée de l’'Hiver, sculpté par Roserr d’après un dessin de MaNSART. . . . . Les indications inédites, attributions et dates des œuvres d'art, sont tirées des Comptes des Bâtiments du Roi et de l'Inventaire des sculptures appartenant au Roi (Archives Nationales). 160 160 LES GRANDES EAUX BASSIN DE NEPTUNE HISTORIQUES, FABULEUX, ALLÉGORIQUES Achille à Scyros, par Px. Vicier, Tapis-Vert, marbre SoulptGien TOO... RES mr ee Acis (Le Berger), par J. -B. Tusr, Bosquet des Dômes, marbre pour l’ancienne Grotte ets a raser Afrique (L'), par SisravQue et Cornu, rampe du Par- terre du Nord, marbre sculpté en 1682 . ch Air(L’), par Le HoxGrE, Parterre d'Eau, marbre sculpté (A BAS SP TE dE ARR SRE PER ES OS Amazone (Une), par Buirerre, Tapis-Vert, marbre copié a FOSSES 3 a La LU CEST Eh À V0, ARNO ARE CE Amérique (L'), par Girres Guérin, Parterre du Nord, LEADER Me et Amour tenant le fil d'Ariane (L’), par Tu UBI, aujourd’ hui au Bosquet de l’Arc de nt figure de plomb DOS Are TON Duran ee eee de Ame Apollonservipar les Nymphes, par Granbou et Lt REGNAU - pin, Bosquet des Bains d’Apollon, marbre. . ro9 et Apollon (Le Char d’), par Tumi, groupe de plomb, mis en place-6n"1670-1077. 00" 2 138,139 ct Ariane du Vaticin (L’), copie par CoRNrILEE Van CLÈvE, Parterre du Midi, marbre. . . .. : Arion, par Jean Raon, Bosquet des Dômes, marbre ExXÉCUtÉ EN TODPE IE ALERT Artémise, par LE FÈèvre et Destannns, marbre sculpté en:1695 "2 meer tte : Asie (L’), par Rocer, Parterre du Nord, marbre. .. Aurore jetant des fleurs (L’), par MaGnier, Bosquet des Dômes, marbre exécuté en 1704. . . .. Automne (L’}, par ReGnaupi, Parterre du marbre 2. É apis- “Vert, Nord, PAGES 142 116 48 Automne (Fontaine de l’) ou de Bacchus, par Marsy, sculpture de plomb achevée en 1675. Bacchus (Première pensée pour la fgure de), dessin de CHares Le BRUN, destiné au Bassin del’Automne. Berry (Marie-Louise-Elisabeth d'Orléans, duchesse de) (1695-1719), peinture de MIGN4RD. . . . . . . . . . Bogaert (Martin Van den), dit Desjardins, sculpteur du Roi (1640-1694), peinture de HyacinrHe Ricaup. Bourgogne (Marie-Adélaïde de Savoie, duchesse de) (1685-1712), peinture de J.-B. SANTERRE. . . . : . . Castor et Pollux, par Covyzevox, fausse désignation du groupe copié de l’antique en 1712 . . . . . . . . Cérès (Fontaine de), par Taowas REGNAUDIN, Sepi de plomb mise en place en 1674. . . : . . . . Colérique (Le), par Houzrau, Allée d’ Eau, marbre. Coronis (Enlèvement de Coronis par Neptune), dessin de CHarLes LE BRUN . .: . .. a Coyzevox (Antoine), sculpteur du Roi (1640- 1720), peinture de GILLES ADLOU.- 50 RER ONE Cyparisse (Le Berger), par ANSELME FLAMEN, Tapis- Vert, marbre sculpté en 1696. RTE EE Desjardins (Martin Van den Bogaert, teur du Roi (1640-1604), dit), sculp- peinture de HYACINTHE RIGAUD SNS RE ste D Diane ou le Soir, par MaRTIN DEszarDins, Cabinet de Diane, marbre ‘sculpté en 1080: +: #00 . 40 et Didon sur le bûcher, par . Tapis-Vert, marbre sculpté en 1695. STE RE : Dordogne (La rivière la), par CoYzEvox, groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par Keller . . DES PERSONNAGES REPRÉSENTES PAGES 163 160 145 59 123 132 104 66 148 23. 136 59 45 142 22 rAanÉih -crmerent = ne | € { à # if re INDEX DES PERSONNAGES REPRÉSENTÉS + Lt me Eau (L'), par Le Gros, Cabinet du Point du Jour, HP EDN ROSE Ed en, à 0, . Ésope le Phrygien, par Le Gros (1673), aujourd’hui , au Bosquet de l'Arc de Triomphe, figure de plomb. Été (L'), par Huninor, Parterre du Nord, marbre . .. Eté (Fontaine de l’) ou de Cérès, par Trou REGNAUDIN, MUR Plomb inc en es Europe (L’), par MazeLiNE, rampe du Parterre du Non marbre-sculpté en 1680... . Feu (Le), par Dossier, rampe du Parterre de Latone, D PP RCUIRIG GN TO8T 2... 0. 0, Fidélité (La), par Le Fèvre, Tapis-Vert, marbre sculpté D nn coca ee. Flore (Fontaine de), par J.-B. Tusr, sculpture de plomb mise en place en 1675 Flore (Première pensée pour la Jigure de), destinée au Bassin du Printemps, dessin de CHarzes LE BRu . na el eue re elle er es eee. me 8 _ Fourberie (La), par LE Core, Tapis-Vert, marbre. . France (La), l'Espagne et l'Empire, sculpture de plomb achevée en 1683 sous la direction de Tugr. . . 83 et Galatée écoùtant Acis (La Nymphe), par J.-B. Tu, Bosquet des Dômes, marbre exécuté pour l’ancienne NS eau an mecs o + de Garonne (Le fleuve la), par Coyzevox, groupe de bronze au Parterre d'Eau fondu par les frères Kelleren1688. Girardon (Francois), sculpteur du Roi (1627-1715), - peinture de l’ École de Le Brun. ........... Hercule (Terme d’), par Le Core, Parterre de Latone, D St ee nee decide en dire Heures du Jour (Les), dessin de CnarLes Le Brun, projet DORE GUUITFÉ FIBRES ne le sie + ane Hiver (L’), par Girarpon, Parterre du Nord, marbre . Hiver (Fontaine de l’) ou de Saturne, par GirarDoN, sculpture de plomb achevée en 1675... ...... Ino, déesse marine, par Ravor, Bosquet des Dômes, D An a io cr ce loue aie Ino et Mélicerte, par Granier, demi-lune du Bassin d’Apollon, marbre exécuté d'après GirarpoN . . . Isocrate (Terme d’), par GraniEr, rond-point des Phi- losophes, marbre sculpté en 1688. . . ........ Keller (Jean-Jacques), commissaire ordonnateur des fontes de France (1635-1700), peinture de HYAGINTHE EP M nee 2 drone dem ann ant Latone et ses enfants, par Bazrnazar Marsy, groupe de AR TA on ele nee nat 127 et La Vallière (Louise- Francoise de La Baume Le Blanc, duchesse de), peinture dé JEAN NOCRET . . . . ... Le Nôtre (André), architecte du Roi (1613-1700), pein- HN de CA RDO MARATTA or, eue Lerambert (Louis), sculpteur du Roï (1638-1670), pein- DHL EE NAS A PELLES: 200 ei heue one ve Loire (Le fleuve la), par ReGnaunin, groupe de bronze, au Parterre d'Eau fondu par les frères Keller en 1689. Loiret (La rivière le), par REGNAuDIN, groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par les frères OR ED rennes soie ere de Louis de France, dauphin, et sa famille, d’après P. ON RE Nr die Le se + net ave ce eueis Louis XIV, peinture de CHarLes LE BRUN. . . Louis XIV en promenade dans les jardins de Ver- sailles, détail d’un tableau de P.-D. MarTIN, repré- sentant la fontaine de l'Obélisque . . . . . . . . .. Louis XIV, le Dauphin et les Princes en promenade dans les Jardins de Versailles, détail d'un tableau de P.-D. Marrix représentant le Bassin d’Apollon. Maine (Anne-Louise-Bénédicte de Bourbon, duchesse du), peinture de Pierre MiGNaRD . . ... . . . . .. 155 FRONTISPICE 193 Marie-Anne Victoire, Infante d'Espagne (1718-1781), pernture de NAS PÉREEs ce Re EU RS Marie-Antoinette et Louis XVI en promenade dans les Jardins de Versailles, détail d'une peinture de ÉTUBERT-ROBERT A MES AR ie MarieLeczinska,reine de France,peinturedel.-B.Vaxroo. Marne (La rivière la), par Le HoxGre, groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par les Keller. Mars enfant, par Prou, bas-relief de marbre. . . . .. Marsy (Gaspard), sculpteur du Roi (1624-1684), pein- TUTE JE FACOUES CARRE TR AR CR ee Minerve enfant, marbre de BERTIN . . Montespan (Françoise-Athénaïs de Rochechouart, mar- guise de)(1041-1707),peinturedel'Écolede MiGnarp. Neptune et Amphitrite, par SicisBERT ADam, groupe de plomb du bassin de Neptune, exécuté en 1740. Nuit (La), par RaoN, rampe du Parterre du Nord, maärbre-sCuIpté en ArBSor ss MN STRESS UE Océan (Le dieu), par J.-B. Lemoyxe, sculpture de plomb EXÉCUTÉES CID 740 M I An RM oi aan NA Pandore {Terme de), par Le Gros, Parterre de Latone, MMAPDEEr ES EE RM NA Nes ee ete Poème héroïque (Le), par Drouiczy, Parterre du Nord, MACDPE APR SNS DR CPR ET NA Poème lyrique (Le), par J.-B. Tuer, rampe du Parterre de-Latonémarbte SChIpt ch r080 2e RS, Poème pastoral (Le), par Granter, rampe du Parterre duNordiMmarbresCUIpIé EnTOS Te re ONP Ee Poème satirique, par Paire Buysrer, Parterre du NOR MAC DTÉ A ee TE A Le NE TRS vire rate Pœtus et Arria, par LesriNGoLa, fausse désignation du SrOUPe COPIE de Pate, MAS ONE EUR Point du Jour (Le), par Gasparp Marsy, Parterre d'Eau, Marbre SCuIDié ER TOBO NET ee Deere ee Point du Jour (Le), par P. Lx Gros, Bosquet des Dômes marbre erécutC en 600 eu REC Printemps (Le), par MaGnier, marbre sculpté en 1681. Printemps (Fontaine du) ou de Flore, par J.-B. Turi, SCUIptüreide Dion Des ee MEURT LU nee Proserpine( Enlèvement de Proserpine par Pluton), par GirarDowN, Bosquet de la Colonnade, marbre. 149 et Protée (Le dieu), par Boucnarpow, sculpture de plomb ÉRÉCUTÉC CNRS OS Me NS RU aT daet Renommée de Louis XIV (Lai, par Domenico Guini, d'Urbino, pourtour du Bassin de Neptune, marbre. Rhône (Le fleuve le), par J.-B. Tnt, groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Keller . : . Saisons (Les), projet pour les quatre figures, dessiné Da CHARLES PIB RUN SN SE RER ST En ESS Saône (La rivière la), par J.-B. Tumr, groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu par les frères Keller. . . . Saturne(Fontaine de),par Girarpo,sculpture deplomb. Seine (Le fleuve la), par Le HoxGre, groupe de bronze, au Parterre d'Eau, fondu parles frères Kelleren 1690. Terre (La), par Massov, rampe du Parterre du Nord, MATE SCUIDIÉ CN TORTUE RENNES Ulysse (Terme d'},par MaGnier, rond-point des Philo- sôphes)-marbre sculpté en-1688 m0 re Vénus ou l'heure de midi, par Gasparo Marsy, Cabinet dé THARE MATRA RSR EIRE Vénus Callipyge, par CLéRION, rampe du Parterre de Latone, marbre copié de l'antique en 1686 . .. .. Vénus pudique (La), degré du Parterre du Nord, bronze fondu par les frères Keller, d'après le marbre de Coyzevox (1686) rm, Vénus sortant du bain, par Le Gros, Tapis-Vert, marbre imité dé Fantique en TOUR dE RER te 116 150 100 INDEX DES NOMS D'ARPSRES ABRÉVIATIONS ADAM SIGISBERT), SC. ALLOU (GILLES), p. BaLLIN (CLAUDE), sc. BecLe (N.-A.-S.), p. BERTIN, sc. BUIRETTE, SC. Carey (JACQUES), p. CHÉRIONSCS.. true CLève (C. Van), sc. . CoRNU, sC.. CoTELLE (JEAN), 29 22: DELAGRIvE (ABBÉ), dess. Dossier, SC. . DrouILLY, sc. Duvai, f. FLAMEN (ANSELME), SC. 63,68,69, 109,110, GRANIER (PIERRE), sc. Guérin {GiLLes), sc. . Guipt (Domenico), sc. . Harpy (JEAN), sc. HERPIN, sc. . Hurinor, sc.. . JOUVENET, SC. . 21, 22, 24; 207273 — : BRUN (CHARLES), p. DISPICES AIO TE: 232 5#.200:-:02: Le Core (Louis), sc. LE FÈVRE, sc... LEGERET, sc. : LE GROSASC:. 4 42 21 Coyzevox (ANTOINE), SC. . . 13, DEssaRDINS (MARTIN), SC. . . Houzeau (JAcQUESs), sc. . KeLzzer (Les FRÈRES), f.. DONT LES sc. sculpleur. — p. peintre. ALLEGRAIN (ÉTIENNE), p. BoucHarDoN (EDE), sc. Buysrer (PHILIPPE), sc. . P:- 10; 7041010 07 TOI, ŒUVRES SONT REPROD UITES PAGES 6 Le HonGrr, sc.. . . 27, 28,:915:90, OT. 7018 42et 168 LEmoyne (J.-B.), sc. He SUTRUE a 23 Le NÔTRE (ANDRÉ), arch. . 15,43, 52 et .. 46 et 64 LE PAUTRE, gr. PET VE. Le APT U AIO LERAMBERT, sc. ,:16,:17; 73161 Mae UM OS LESPINGOLA, sc. ; DOTE .93, 94, 97 et ‘100 MaAGniEr (PHILIPPE), SC. . . . . . 2, 27, 34, 59:81 HD Et F0 Maxsarr (Juzes Harpouix-),arch. . 76, 128, 150, 160et 67 MaraTTA (CarLo), p. 49 Marsy (Les FRÈRES), sc. : If; 127,61 FE Ra nr Vel Marsy (Gasparb), sc. . 34, 47, 82, 115 et 8:78 20 et 27 MarTin (J.-B,), p... Ji FI2, 192761 FAO ete Marin (P.-D.), p.. . 3 443; 19978 119, 147, Massou (BENoir), sc. 165 et 167 Gt, GirarDoN (FRANGoIs), sc. . . 355, 140,149; Ep rret 203 00; 67 et 136 ct + At et FRON- 44704; 90, 92, Le Brux (ECOLE DE), p.. 1 24 00 Phuto P. d'Aujec. 61 VASE DE MARBRE AUX ATTRIBUTS CHAMPÊTRES Allée de l'Hiver Sculpté par Robert d'après un dessin de Mansart 126, 130, 148, 154 et 160 71 Tusi (J.-B.), sc. 12210134 134 VaxLoo (J.-B.), p. . . 136 ViGier (PH.), sc. 2 205 7 O0 TON EZ2r CL T0 MaAzeLinE (PIERRE), sc. . . . 53, 75 êt MELo, sc. a = MiGnarD (PIERRE), p.. . . 30 et MicnarD (Écote DE). . . . 85 et NocreT (JEAN), p. .. PORTAIL, p. . . gr et PouLLETIER (JEAN), sc. 38 et Prov (Jacques), sc. . . ... . R40N (JEAN), sc. . 20,36 et RAYOL, SCAN LS ARS REGnauDIN (THOMAs), sc. . . 21, 25, 66, 104, 109 et RiGauD (HYACGINTHE), p. . . 20 et Riçaup (J.), gr. . 4, 33, 78, 80, 88, 107, 114, 118, 140, 146, 152, 158 et ROBERT, sc. Re RoBErT (HUBERT), p. . .9, 108, 172 et ROGER, sc. Rousseau, sc. PR SANTERRE (J.-B.), p. SARRAZIN (JACQUES), sc. 16, p7'et SIBRAYQUE, SC.. SILVESTRE (ISRAEL), gr. SEODTZ (SÉBASTIEN); SC... 2 ER 12, 25, 31, 61, 70, 83,84, 86, 105, 116, 120, 129, 138 ct — dess. dessinateur. — arch. architecte. —f. fondeur. — gr. graveur PAGES [ | Îl 1h ACHEVÉ D'IMPRIMER PAR MANZI, JOYANT Éditeurs-Imprimeurs SUCCESSEURS DE GOUPEL & ©. Éditeurs-Imprimeurs ASNIÈRES-SUR-SEINE EN NOVEMBRE 1905 & ei æ; 2088 4 a Le ne ARE IRE ER ; EMRRT Te Has EN Lee ae Loos Er A ET AT SR AR NE A A RÉ oh en QUE Riad HER Eraps D TR ET Sr 4 PIRE STEE Eee F: tas DER EE ce an ANR Rte met + SR RE Te ee tr ELLE RPEUE > DAESEE pete tt pote RS NÉ rannre Fsp lire Crete 0 f {re si L CON TAN it fene Alert pr ap FREE Ce DT A2 Legé las, PAT ALE TARN MALTE errors £ Sn j. RATE Ë ne ee vents Are ste Fun RE Le COTE HART RASE" nes € œ DATANT tre « RTS eus RITES Les à LORIE DOTE RATS Route 4 V Cet <. Hate COUR AN RE RHIN CREER EERN nan pus Lire at ÉHEN S ANAL RCE QU + RAR A NE HAUNERNNC ET ne Se & + à sa KES es AV © té ins Lx pre. St LOIRE Lun ALL À n SENTE a ne DONNER NE ea * VU CON ERE LOU 4e LYON ‘ tan MULTI Lath ALICE VE Ass (HONTE