1994. De Laet. — L’Histoire du Nouveau Monde ou Description des Indes Occidentales, par Jean de Laet. Maps and figures. Leyde, Bonav. et Abr. El- seviers , 1640. folio. geàiSuiF .€5 The French translation of De Laet contains many materials not to be found in the original Dutch, chieily vocabularies of Indian tribes. Dr. Asher was not able to procure a «opy of this rare work. See liis Essay p. 2. Llseuiers, Leyde, 1640 Translated from the Latin original pubüshed in 1633. “ fhis work is fuU of excellent researches respecting the establishments of the Europeans in America, &c. &c. The author has had resort to the best authorities.” — Chaïilevoix. V3 L’H IS T O I R E OUVE AU MONDE O U description ES INDES OCCIDENTALES, Contenant dix-huiét Liures, Par le Sieur Iean de Laet, d’Anuers; Enrichi de nouueües Tables Géographiques ^ Figures des Animaux-, Flantes ^ Fruits, V A L E Y D E, Chez Bonauenture & Abraham Elfèuiers , Imprimeurs ordinaires de TVniaerfîté. % In Descriptionem Indiæ O CCIDENTALIS GlARISSIMI VIRI ioHANNIS DE LaET. REBVS EIVSDEM Indiæ PrÆFECTI. Xtrenmm primmque diem, qua furgit ahndà ^aque faûgatk in mare fertiir chût Emenfo Batampoft tergum liqànus orbe. Et quas Sol met as, nauîta nojlerhabet. Subfiquittir, quac urique vlamfecbre carlrue, ' 'Et quantum nauU,. mens jibi fumit ïteh Latius extremi poftum fibi vindicat Indl, Et curam terra-deficientis agit. Bar patria cuiuis, par liber tatis amore, liicquoque,quopatriamdemereatur,habet. Electantum diftmbla lotis mirât ula reddit, ^tetunque in Batauos panda tarina talït t Cedentis reuotat finemque intertipitorbis. Exeipit exhaujlm parmundo glbria munduét ^antiis in immenfa pofleritatepatei.- varies terrarum habitus, traUmque,ftusque, . Et deferipta fuo nomine régna le gis, Cum frutiees, berbasque nouas, ignotaque nobis ' - . Net quondam terris tognita monjirajègis -, Elus mânflrls quatunque le gis, nirare doeenieni, . Ber quem,vt nata domi,tamperegrina le gis. *ÎDaniel jF/einsivs. I ■'i-vl: ORDRE DES T A B L ES Géographiques, '* A Table generale de l’ Amérique ou Indes Oc-, icidentales doit eftre mis deuant la Préfacé ge- nerale. II. Des Mes grandes & petites, deuant le premier Liure pag.i. III. De la N ouuelle France & Prouinces voifines, deuant lefecondliu.pag.jj . IV. De la Nouuelle Angleterre ,Nouueau Pays-bas & Virginie, deuant le troifiemeliu. pag. 6-i. V. De la Floride & Prouinces circonuoiunes, deuantle , quatrième liu. pag. 103. VI. De laISrouuelleEfpagne,Galice& Guatimala,deuant le cinquième liu, pag. 131'. VII. De Terre Ferme,N ouueau Royaume de Grenade & P opaian ,deuant le huiéheme liu. pag. 2 67 . VIII. De Peru,deuant le dixiemeliu. pag. 3 1 y- IX. Du Royaume de Chili, deuant le douzième liu. pag. - 409- X. Les Prouinces du Deftroit de Magallan, & le Maire^ deuant le treizième liu. pag. 43 1 , XI. Le Paraguay ou Prouince de Rio de la Plata, & celles quiraduoifinent,Tucuman & S. Cruz, deuant le quatorzième liu. pag . 45 1 . XII. Le Brafil,deuant le quinzième liu. pag. 473. XIII. LaGuiana auec les grands fleuues des Amazones & rOrenoque,deuant le dix-feptiemeliu. pag. 5 ^3 . XIV. DeVenezueleôc partie Occidentale de la Nouuelle Andaluzie, deuant le dix-huidiemeliu. pag. 60^. PREFACE ■ ' Vif-' • ' -f / PREFACE GENERALE ' S V R Les Liures fuiuans. O s T R E refolütion eû; de defcrire en ce lieu toute l’Inde Occidentale s appellee vulgaire- ment Amérique quatrième & plus grande partie du monde habitable, premièrement def^ couucrte & abordee par Chrtfiofle Columb Gé- nois , fous les aulpices des Roi & Roine Ca- tholiques Verdinand & ElifibethYan cio cccc- xcii. combien quelle porte le nom d Amené VeJ^uce , qui voyagea quelques années apres vers la Continente. Nous ne dirons rien ici des caufes qui efineurent d’entreprendre ce voyage, ni comment ôc d’où les Saunages y habitans, font premièrement venus en ces régions, non plus que des autres chofos,qui appartiennent à ce fuiet, comme eftant dili- gemment traitées par d’autres, notamment par Jofiph Acofta: mais nous par- ierons feulement vn.peu des limites de cette partie en general, de la liaifon de Tes Prouinces particulières,^ de la méthode que nous auons fuiuie en les deferiuant. L’Amcriquedoncs’eftend prefque en latitude d’vn pôle à l’autre; ayant deiiers l’Orient l’Europe & l’Afrique -, defquelles elle eft feparee par le fpa- cieux Océan Germanique & Atlantique ; dont la largeur eft ici de plus de lieuè's ôt là de moins; toutesfois elle eft: plus près del Afrique que de 1 Euro- pe ; ( car on tient qu’il y a vn traiedt fort court des UeYferides ou Ifles du Cap Verdi comme on les nomme, iulques au Continent d icelle ; ) vers 1 Occi- dent elle a l’Afie^: la terre Auftrale pour la plus grande part encore inco- o-nuë ; on n’a point encore bien elprouué quel eft le deftroit,qui la fopare de ' i’Afie, combien que la commune opinion foit,qu iln’eft pas large, lequel on nomme communément Anian ,• toutesfois ie n ai pas remarqué iufques ici, queperfonne ait abordé cette Continente audelàdu Capde dit de Mendoce, qui doit encore eftre fort loin du Continent de i’Afie, ft le conte du chemin a efté bien fait. Sa forme eft fort irreguliere ; car premièrement elle s eftend fort au large du cofté du Nord; principalement entre l’ille de TerreNeuue(où.dlc s auance beaucoup beaucoup vers 1 Europe) & les derniers bouts de \3.Cd, forme, (où elle appro- che de l’Afie: ) qui eftans comme deux cornes, fes coftes, dés icelles s’appro- chent infenfiblement d vn cofté & d’autre.iufques à ce qu’à la fin elles Te fé- loignent pefque derechef comme en vn angle obtus auprès du port de la ■nomeUe quon nommer, lum de Vlluet, ( caria terre n’eft pas en cet endroit fort large, fi onia conféré au refte) & ayant iufques-là defeendu dû Nord vers la ligne; -delà elle tire prefque droit vers l’Orient & s-auance pour e loindre auecl autre partie del'Amerique par vn certain lieu , tantoft plus large & tântoft plus eftroit, n ayant pas plus de huid lieues de trauerfe au , droit de cette coniondion, de maniereque IVueac l’autre deces deux par- îles lemblenteiErepreique vneîfîe. ^ Nous appelions cette autre partie Méridionale , pource que la plus grande part d'icelle tire depuis la ligne vers le Sud, comme toute la pre- miere s eftend vers le Nord, & pour cette caufe eft dite ù bon droit Septen^ trionaic, ^ En outre cette partie Méridionale, eft prefque d’vne forme triangulaire dont la bafe & plus large cofté regarde vers leNord, puis approcLntles deux autres coftes , elle finit en angle obtus vers le Deftrok de Maeallan où elle eft a peine large de lxxx ou xc lieuës;car il eft à prefent aflés eufdent que les terres qui font au delà de ce Deftroii:,ne font que des Mes , bien que nos preciecefîeursayentcreii autrement. ^ Or comme cette partie Septentrionale s approche de l’Europe pârcetté îiîe que nous nommons Terre Neuue, aüffi la Méridionale s auance vers l'A- frique par ce Cap renommé du qu’on appelle de S. Auguftm. Et IVnc & 1 autre partie s approche aufîi fes riuages dés ces deux extrémités-, la Se- ptemrionale courant vers le S ud-rud-oueftj& la Méridionale vers leNord- OLieft, ml/qucs à ce qu enfin elles fe conioignent Vers la Noumüe Efhame x 3c embraüentdans cet efpace d’entre-deux vn grand nombre d’Ifles, qui d’vne fuite iemilunaire,s eftendent d’vne partie iufques à l’autre , & féparent de la mer du Nord comme vn golfe Méditerranée, qui eil appellé aufond le plus lecuic^golfedekNouuelleEffagneouàe Mexique, ^ Ces deux parties eftantdoncdifpofees en cette façon, il ne nous a pas efté beaucoup difficile de trouuer vne commode méthode, pour nous feruir en la delciipdon d icelles. Car nous auons iiigé que le meilleur fèroit , d’ache- uer premieiement Ces Mes dont nous venons de parler, qui ont efté les pre- mières defcouuertes,& ouurent comme la porte pour entrer vers les princi- pales parties de fvne & de l’autre Amerlque:Par apres de pourfuiure les Pro- uinces de i’vne & de l’autre partie félon Pordre de leur fit. Par ainfi ayant pa- ^cheue au premier Liure ladefeription de ces Mes; nous auons’ abordé la Continente de 1 Amérique Septentrionale,& paffians outre ces quartiers qui tirent vers le pôle Ardique ( comme n’eftanspas affiés cognus, &oûil n’y a lien de remarquable, que des glaces & des neiges prefque perpetuelles)nous en auons commence la defcriptioii par l’Me de Terre ^N^euue ü^oumUe t rance, comme onid. nomme, deuant laquelle elle eft; ces deux ont eftéle fuiet de noftre fécond Liure': & ainfi courir lelong dck cofte, notions ordonné ordonné au troilléme Liure la Noutielle Angkterrè^ les 9^omeaux^ Vays-hm, & la Firginie : au quatrième Liure nous auons poürfuiui la Fluide : qui nous a mené vers la Nmuelle B^agne^ comme à la plus noble partie de certé Amérique Septentrionale, laquelle nous nous Tommes efforcés de viliter di- ligemment & à plein au Liure cinquième, auec quelques Prouinces voilines que les Èfpagnols y annexent, comme vers TOueft celle de Methnacan ,• & vers le Nord Fa?mco^ deuers TEft Taha/co ^ Tucatan ,* vers le Sud Gnaxaca de autres : Et par ce moyen il nous afalu vn peu nous reculer de noftre mer, pour aller vers ces Prouinces, qui font derrière la NouaelieEfpagne , & fort auant au dedans delà Continente, f^auoir la üiomeUe Galice ,• IdiNouHelîeBif caye la Californie ,* la D^omelle ^Ibton^de la Nouueüe Mexlcjue , que nous auons paracheuees de delcrire au Liure Tixieme. Cela ellant fait hoiis fommes re- tournés aux dernieres limites àcld. Nouuelle Ed}agne ^ que nous auons ci-def^ fus tracées, Ôc au lèptieme Liure nous auons entrepris de deferire toutes ces Prouinces,qui occupent cette eftroite fuite de terres,laquelle ioinél ces deux parties de PÀmerique enlèmble, que nous auons nomniee Guatemala, àQ la partie la plus noble & du Siégé du Parlement j toutesfois les Prouinces font deferites félon leur ordre, lçauoir{7^/4:piîProuince Méditerranée, Soconujco de Suchitepec fur la mer du Sud ; la Ferapa^ aufîi Mediterranée j GuatejmaU pro- prement dite, T^alcoSy SanSaluadoVy San Mïguély Chuluteca auffi fur la mer du Sud ; la Hondura fur la mer du Nicaragua y Cofla Rica, de Veragua fur les deux. Par ainfi nous fommes pariicnus iufques à Hfthmus j & au Liure huidtieme nous auons premièrement deferit la Prouince de Panama, hqùcU le occupe tant icelui Ifthmus,que quelque partie de Pvne de de l’autre Con- tinente :& auons adioindt à icelle ville des Efpagnols fort mar- chande de célébré, de Prouince fort renommee de EAmerique Méridionale, fituee fur la mer du Nord; & encore deux autres Gouuernements qui font plus outre, fçauoir de S. Marthe de de Rio de la Hacha , aufîi afïis fur la mefme mer. Or en cet endroit nous auons eflé vn peu en fufpens,&: comme en branf le, de fuiure plus outre cette partie vers l’Orient, de paffans par le Deftroit dé Magallan nous rendre au mefme Ifl:hmus,quenou^ aidons défia aclieué; niais enfin nous auons iugé qu’il valoir mieux approcher de la mer du Sud de tirant vers leMidy, retourner par ce moyen à la riuiere de la FJacha^zx le Vejlroit de Magallan, di.ip'ecszMoïï fait vn grand cercle. Voila pourquoi au neufieme Liure nous fommes entré au dedans dek Continente, &: apres auoir parcouru le Nouueau Royaume de Granadcycyai n at- touche de nul cofté aucune des deux mers,nous fommes retourné par Popa- ïan à la mtïPacifique ydc laquelle nous nous eftions retirés apres auoir acheué la Prouince de Panama. Delà nous auous deferit aux deux Liures dixième de onzième, tout le Peru,qui s ’eftend par vne fort longue fuite de terres le long de cette mer. Et par apres Chile au 'LïmtdowziQmQ'Xd.Magallanique^n treiziè- me ; le renommé Deftroit de laquelle nous a ramené dans la mer Atlantic que, de fes codes qui regardent l’Orient , nous ont conduit iufques à la fpa- cieufè emboucheure de la grande nwïciedela Plata.kxx quatorzième entrant '^'^2. dans dahs cette renomnice riuiete , nous auôns vifité toute la Prouince qui eà porte le nom,& celle de Tucamann qui l’aduoifine vers rOucft iufques aux derniers confins du'Per»& deCfo/ei car la Continente de TAmerique na cité trauerfee iufques ici, en aucun autre endroit que là ; depuis vne met iuf- ques à l'autre. Et ayant couru la colle de cette Prouince le lona de la m'er Atlaatique , nous auons entré dans le que les Portugais habitent ( car lesCaftillanss’attribuenttout le relie ) lequelnous auons parcouru aux Li- üres quinzième & lëizienie,& auons ellendu nollre delcriptioii iniques à la fàmeule riuiere des Atthi^oneste^ue nous auons vilitee au Liuro dix-lèptieme, &apresicelui les autres riuieres,&prefque toute la colle (car le dedans dû pais ell pour la plus grande part incognu ) & entre icelles la noble riuiere de loremqne. Au dix-huidieme & dernier rafant Cumana, & entrans dans Ve- nous auons acheué nollre tour. Voila qu'elle ellnollre méthode generale ; car ce que nous auons traité en chacun Liure pattieuher, fe verra ’ mieux par l’Indice que nous mettrons ci-apres. Or nous iaifîonsaiugeraux autres de combien nous auons fùrpalîe ceux qui ont entrepris cette alFairedeuant nous lelquels remarqueront ailement combien de labeur nous y auons employé, & auec qu’elle peine il nous a falu tirer la vérité entre vne fi grande variété & diuerfité d’Autheurs: laquel- le toLîtesfois ie n’oferois encore promettre d’auoir fuiuie de poinél en pointa en chacune cholèjcar comment fèroit-il poIïible,veu que nous auons trou- ueplufieurs quartiers de cette Continente, eftre feulement deferits parvn feul & encore affés négligemment 5 mais en ceux, qui ont efté depuis quel- ques années vifités & deferits plus foigneufement par diuerfes nations no- tamment parles François, Anglois, & des noftres, il nous a efté plus facile den tirer la vérité; les obferuations defquels nous auons diligemment con- fiées auec celles, que les Efpagnols en ont données au fiecle precedent, & vfans deiugement,nous n auons rien caché au Leéteur de ce qui eftoitvrai ouforfivrai-fembiable, en forte toutesfois que nous n’auons obmis le iuge- ment des autres, mais auons faille a chacun d en dire fon opinion. Or combien que depuis plufieurs années il y ait eu vne grande edntro- uerfe entre 1 £fpagnol & les autres Princes de noftre Europe, touchant la Seigneurie & propriété de ces terres;! Efpagnol s’attribuant toute cetteAme- rique par la donation qui lui en a efté faite par le Pape de Rome, les autres au contraire y contredifans s attribtians & occüpans cette partie ou celle-là d i- celle , nous n’auons pas toutesfois eftiméeftre de noftre deuoir,de nous mettre pom arbitie entre Jesparties , mais feulement de rapporter fimple- ment & iidelinent, ce qui a efté fait par chacune nation en chacun quar- tier 5 leurs laiffans la difpute de leur droit : Encore que , pour confefferla ve- nté,nous ayons toufiours fort approuué l’opinion delà Sereniffime Roine d Angleterre Elisabeth : laquelle comme le Roi d’Efpagne Philippe 11, foufte- noitfort & ferme, en la Cour par fon Amhz.(^2iàQmBerriardm de Mendo’^e^xxt toute 1 Amérique félon fon eftenduë lui appartenoit, & que les Ano-lois auoyent mal fair,dauoir fréquenté quelques parties d’icelle contre fon^réj fefpondit( comme nous liions àd.mCamdene en la vie dicelle Roine iufques à l’an cId Îd lxxxi ) qu’elle he pouuoit comprendre, pourquoi fès fubiets êc ceux des autres Princes deuoyent eftre extlus des Indes, lerquelles ellô-îTrC pouuoit le perfuader appartenir aux Efpagnols , ni parla donation du Pape de Rome , qu’elle ne recognoilToit pas auoir aucune prerogatiue en rel- ies caulès , ni mefmc àuthorité pour obliger les Princes, qui ne lui doiuenc point d’obeilTanciJ^ai de donner en fief & inueftir l’Elpagnol de la poflelïioii de ce noLiueau monde. Ni par aucun autre droit, û ce n’eft que les Efpagnols y auoyent abordé ci & là-, planté des logettes , & donné nom à quelques ri- üieres & Caps , lefquelles cliofes ne peuuent acquérir de propriété. Que cette donation de la chofc d’autrui qui eft nulle de droit, & cette imaginai- re propriété ne deuoit empefcber les autres Princes d’exercer le commerce en ces régions, & de mener des Colonies où les Efpagnols n’habitent point, le droit des gens n’en eftant nullement violé, veu que prefèription fans pof^ fèfïïon eft de nulle valeur^non plus que de nauiger ce grand Ocean,p ois que IVfage de la mer& de Pair eft commun à tous. Que le droit fur l’Océan né pouuoit appartenir à aucun peuple ni à nulle perfonne priuee, attendu que la nature ôc la raifon de l’vfàge public n’en permet l’occupation à perfonne. Ce ne fora pourtant pas hors de propos d‘adioindre ici en pafTant, pat quel droit le Roi d’Efpagne s’eft efforcé de s’approprier à lui fout toutes ces terres,& pour cet effedt nous mettrons en auant,folon Antoine de Rerfém Hi- ftoriographe du mefiue Roi , comment les Efpagnols ont parlé au# ^?ais Seigneurs d’icelles, & ont pris occafion de les deftruire,&;de mafTacrer^Wit de milliers de panures miforables Saunages. f : Nous N. N. Officiers, des très-hauts & tres-puiffans Rois de Caftille & de Leon,dompteurs des nations Saunages , leur Ambaffadeur & Capitaine, vous faifons fçauoir, parles moyens qui nous font donnés, que vn foui &: eternel Dieu,noftre Seigneur, a crée le Ciel & la Terre,-de plus vn homme & vnc femme, dcfquels nous & vous auffi , mefones tous les hommes font nés & de qui naiftront ceux qui viendront ci-apres • or il a cfté neceflàire pour ia multitude des hommes, qui font accreus depuis cinq mille & tant d’an- riees, que les vns habitaffent ici , & les autres là , & fuffont diuifés en diuerfos Prouinces & Royaumes, pource qu’il eftoit impoftible qu’ils peuffont eftre tous contenus dans vne foule région. De toutes ces nations & peuples Dieu avouluqu’vnfoul homme, nommé P/^w,euft le foin & la charge, en forte qu’il fuft le Seigneur & Souuerain luge de tous & d vn chacun des hommes decetVniuers, afin de leur commander, ôefuft comme leChefdé tout le genre humain, en quelque contrée qu’ils habitaffent, & de quelque loi, foi & fedle qu’ils fuffont j & mit fous fa puiffance tout ce monde : or combien qu’il lui euft commandé d’eftablir fon throfhe à Rome , comme au lieu le plus commode pour gouuernerl’Vniuers,toutesfois il lui a permis de le- ftablir en toute autre partie du monde, pour iuger ôc gouuerner les peuples, foitChreftiens,Mahumetans,îuifs,Gentils,& enfin de toute autre foi & fu- perftition qu’ils peuffont eftre. Ceftui- ci eftoitditPape,c’eft à dire, admirable Primat, Pere & defenfeur , pource qu’il eft Pere & Pafteurde tous hommes. A ce Sainét Pere ont obeï, ôc Ce font foufmis de plein gré, corume à leur ^^3 Souuerain Souueràin Seigneur, les Rois & Princes de tout le mondé qui ont efte en Ton temps ; & apres lui ^ à tous ceux qui ont efté auancés à cette dignité Panaie, chacun en leuraagedufques ace iourd’hui & feront ci- apres iufques à la fin. Vn de ces SouuerainsPreftreSjCGmme Seigneur du monde, a donné ces Mes &la Terre Ferme ümeesm dedans Sepres de fOcean ,aux Rois Catholiques de Gaftille & de Leon, qui eftoyent pour lors FerdinandàL Eli7^abeth de tres- ioiiablememoire,&àleursheritiersnosSeigneurs,auectoutcequ elles con-* tiennent j comme il eR contenu plus à plein en laBullequî en a efté eftrite, qu’il vous eft permis de voir s’il vous plaift r de forte que S. M. foit Roi & Seigneur de ces Mes ^ Terre Ferme en vertu de cette donation : & quelques- Vnes de ces Mes, êcprelque tous ceux, a qui la renommée de cette donation eft paruenuë , ont recognu S. M. pour leur Roi & Seigneur, lui ont obeï & ferui 5 & lui obeïftent & feruent encore pour le iourd’hui , comme doiuent faire des fiibietSjd vne obeilîance libre & fans contrainte ou fans y auoir con- tredit: & mefine apres cela, aufîi toft qu ils ont efté aduertis des ehofès ci- deftus,ils ont efeouté &obeï aux Religieux, qu’il leur auoit enuoyés , afin quils fuffent enfeignés par iceux en hoftre foi j & tous ceux qui dVnelibré^ volonté ont commencé, & ont embraffé/ans aucundon, ni condition, la foi Chreftienne & y perfeuerent, S. M. iesareceus benignement auec grâces & a voulu quils fuffent tenus & traidés ne plus ne moins que fes autres fubiets : voila pourquoi vous eftes obligés de faire en la mefme façon. A ces caufes nous vous prions,& nous efforçons de tout noftrepouuoir, de vous raire entendre ce que nous vous auons dit, & afin que vous les puiffiés d’au- tant mieux coHipfendre.prenés vn delai fuffifant.Gomme il eft raifonnable pour y aduifer, & afin que Vous recognoiftiés laSaindeEglife pour Dame & Maiftreffe de tout le monde,le Souueràin Preftre, qui fe nomme le Pape,^ en fon nom,& S. M. en fà place pour Souueràin Seigneur &: Roi des Mes & de la Continente, en vertu de ladite donation j &permettiés à ces Peres Re- ligieux devons expliquer plus à plein les chofes ci- deuant dites. Si vous fai- te^ ainfi,vous ferés bien pour vous, & rendrés àS. M. lobeiffanee que vous lui deués : Et nous en fon nom, vous embrafferons auec toute beneuolence, vous laifferons vos femmes & vos enfans, & ne vous mettrons en aucune feruitude,de forte que vous ferés libres d’en difjiofer à voftre volonté, com- me plufieurs Infulaires ont faitiS.M. en outre vous donnera beaucoup d’ex- emptions & derecompenfes.Que fi vous faites au contraire, ou fi par malice vous apportes quelque retardement, nous vous dénonçons, qu’aidant Dieu, nous entrerons dans vos terres auec nos troupes , & vous pourfuiurons par guerre de tous coftés & en toutes façons, &vous réduirons fous le iouo- & 1 obeiffance de 1 Eglife & de S. M. , emmènerons vos femmes & vos enfans, les rendrons efolaues jies vendrons, & ferons d’iceux félon que S. M. com- mandera: Nous vous ofterons vos biens, & vous affligerons d’autant de maux qu il nous fera pofïible , comme vaflaux qui refufent de recot>-noiftre leur Seigneur,& qui au lieu de lui obeïr,lui contredifent & refiftent.lic nous proteftons, que les meurtres & maux qui s’en enfuiuront , feront réputés eftreaduenüs par voftre faute, & non par celle de S. M. ou de ces vaillans hommes Iiommcs qui nous ont (Liini. P.'cquerahs, que le Notaire ici prefent nous en deliurelcttrcsreellées.pour teliiioignerquenoiis vous auons fio-nifié toutes ces choies & prié d icelles. V oila ce que nous auons extraid de Herrera. Au refte pour retourner à noftrc propos, outre vne exaéte defcriptioii Geografîque & Hydrografique de ces régions , que nous auons principale- rnent refolu de faire.; nous auons éll;imé,qirilimportoit àl’vtilité publique dy adioiiidre aulll quelqiies autres choies ; comme font les mœurs & cou- tumes des naturels habitans ; l’origine de quelques Royaumes , & k fuite des Princes ; mais fur tout la defeription & pourtraits des Animaux, Arbres Herbes, Grains & Fruidbs. Nous kuons pris vne partie des figures d'autres^ & notamment du fameux homme Charles de l'Echfei vne partie ( & mefme beaucoup ) nous les auons nous melinds dépeintes au naturel , & les auons fait grauer en plaques par vn excellent ouurier; de forte que nous ne dou- tons pas que le Ledfeur men reçoiue vn fingulier contentement & beau- coup d’vtilité. Or nous auons tiré les deferip dons des Autheurs les plus approuués , entre lelquelies leLedteur y trouuera beaucoup de choies, qui n’ont point efté iniques ici veuës en Latin. ^ ^ Au refte,nous prions vn chacun, fi nous auons failli en quelque endroit^ comme c eft vne choie natuielle a 1 homme d errer,de ne le vouloir repren- dre ou poiiitiller par haine ( ce qui eft vneriialadie & vnemauuaile couftù- me de notre aage) mais de nous admonefterhumainement, & nous enlei- ^ner mieux ; cai nous lommes prefts de luiure ceux qui nous montreront bientôt de corriger tant ce qui nous eft elchappé de dire contre la vérité, que ce ou nous auons efté trompés parles autres. Et afin de delcharger notre credit,& par melme moyen de rendre grâces à ceux de qui nous auons emprunté ce qui eft contenu ci & là dans ce Liure; nous, adioLifterons ici delfous les noms des Autheurs du labeur defquek nous recognoilfons librement nous etre aidés. Trimera Tarte de U chronica del Périt Hecha por Pedro de deçà de Leon, Befcripcion de lâs IndiM Occidentales por Antonio de Herrera. Hijïoria general de los Hechos de los Cajlellanos en las I^as y "Terra Firme del mar Oceanh eferita por A ntonio de Herrera. HiJloria del defiuhriementoy conquijla de la Prouincia del Périt, érc. K^ttgufiîn de Z arate. Diego Fernandez, Hijïoria delFern. HiJloria naîural y moral de las Indias per el Padre lofeph de Acojla. • Felacam Annal dos coufasque fezeram os Fadresda Companhiade lefus nas partes da India Oriental (J noBraJil, dre. Conquejladelas Moluccaspor Leonardo de Argenfola. Argent ina por Martin delBarco. kMraiicana de Don Alonzo de Fr cilla y Cuniga: Frimera Parte de los Comment arios Re aies que tratan del origen delosJncas^Reyesque fue- ron del Peruyé'c. Fferitosporel Tnca Garcillajfo de la Vega,naturaldel Cufco y Capitan de . jît Magejîad. Viage delmundo Hechoy compuejlo por el Licenciado Pedro Ordonnez de ceuaUos^ natural de la injigne cuidad de laen. Delle Nauigationi cf Eiaggi racdlîeda M. Gio Battijla Ràmujio volume terzo^nel quale Ji contiene le Tpanigationi al Mundo Nuouo. larriciThefaurm rerum Indicarum. Dec ades Océanien Pétri Aiartyris, Deferiptionis Xtefcriptîonisrtûkmaicaaugmentum ComelüVFytfliet. Xa,HtJiorîàdelasIndiasparFrâncifcoLopêzdeàomara€krîgù„ fopîHinkre des trois Mondes. < Fheuet France Antartique. HijîoirednBraJïlparlean'de Lery. Les voyages du Sieur Champlain. Hifioire delà Nouuelle France par Marc Lefcarbot. Hifloire delà mijfîondes Peres Capucms.en Vljle de Màragnanért erres air conmîfimspnrk R.P.Clauded’ Ahheuille. Fraite'de laNauigation & des voyages des defcômertures é" conquejîes modernes é* prinH^ paiement des François. par Bergerofî. >.' L'roifame volume des voyages ér nauigatiom de la nation Angloife,par M. Richard Hacklftyk enAngloù. ' •Qeuure lahorieufe de Samuel Pur ch as , contenant plujlèurs voyages des Anglois dr autres tions. enAngleis. Defiription de la Virginie par Tehn Smith, en Angloîs. J)efcription de laNouueüe Angleterre par le mefme Smith. enJngloù. Relation des chofes que les Angloü ont faites dans la Nouueüe Angleterre, en Angloîs. Commentaire de la Ferre ISleuuepar Richard VVhitbourne Angloîs. en Angloîs. Defcription de Guiane par Robert Harcourt, en Angloü. Relations des Angloü touchant les If es de Bermudez. en Angloü. jBriefue defcription de l' Amérique par Hugues de Linfchot. Nauigation de Laurens Bicker vers la riuiere de la Plat a. en Flaman. Routier de l Admirai Mahu par le à'Efroitde Magallan,par Bernard lanfon Chirurgien. en Flaman. ' Routier d’oliuier de Noord. en Flaman. Routier de Spilbergue par le d'Ffroit de Mdgallan. en Flaman. Routier de Lemaire & de VVilhem Schoute par le nouueau d’Ffroit Lemaire, en Flaman. Routier de l’Armee nauale de Najfau fous la conduite de l'Hermite. en Flaman. Roteiros de Portugal par a o Braff Rio de la P lata , Indias de Portugal dr Càfleüa , Compofos por (JHanoêl de Figueredo. Flambeau des nauigationsfe Fheodore Reuter Belge, en Flaman. Caroli Clufi Atrebatü Fxoticorum libri decemscum Garzia abHorto drChrifûphoro a Cofa. ,^mtro libres de la Naturalezay Virtudes de las plantas y animales que efan receuiâos en el vfo de Medicirta en la Neuua Ffanna,por Francifeo Ximenez. en Mexico. Voila prefque tous les Liures imprimés dont nous nous fommes feruisjioinét auflî plu- fieurs routiers, & relations eferites à la main de diuerfes nations , mais principalement de nos Belges, qui ces dernieres années font abordés en diuerfes parties de Tvne & de Fautre Amerique,notamment fous les aufpices de Ja Compagnie des Indes Occidenta- les ; les exades obferuations defquels nous auons conférées cnfemble,& fuiuans ce qui y eftoit auec plus d’approbation > nous auons corrigé vtilement beaucoup dechofès, où les Efpagnols & autres auoyent failli. Nous auons auffi remarqué que les Autheurs qui ont eferit deuant nous, Centre iceux Antoine de Herrera, autrement fort diligent efcriuain, ont eferitpar fois tantoft d’vne forte,tantoft d’vne autre, &bien fouuent diuerfementd’vne mefme Prouincci ce qui fe peut difficilement efuiter és grandes œuures entre vne fi grande quantité d’Autheurs : or combien que nous nous foyons foigneufement donné garde, de heuter contre la mefme pierre , toutesfois nous craignons, qu’il ne nous foit arriué le mefme en quelque endroit, pour n’yauoirpasefté affés attentifs ,& pour auoir quelquesfois efté empefehés en de grandes affaires; voila pourquoi nous prions les Ledeurs de nous exeufer comme nous auons exeufé les autres. TABLE DES CHAPITRES Qiii font contenus en chaque Liure. Liure Fremier , Des Ifîes de TOcean. Randeur crudités du Ciel de la Terre de l’ijlede S. lean, Tilles des EJpagnols dans cette Ijle , dont la Métropolitaine eH Porto Rico. Torts é" Cojie marine de l’ijle de S. lean '.e^dela Mone. Situationygrandeurianimaux,Jrui6ls,é^c. de l’ijle Hifpaniole. Vrouinces ^ principales riuieres de cette Ijle. Villes anciennement habitées des EJpagnols ÿ de la Métropolitai- nes. Domingo. VII. Villes rejl antes de cette Ijle habitées auiour d’hui des EJpagnols. VIII. jyefcriptiondela CoJîemarine,BayeSyCapSyér Ports de lEjle Hifpagniole. IX. Situation de T Ijle de Cuba, qudités de fin dr ér de fa terre > arbres é- animaux d’icelle. X. Trouinces df principales riuieres de cette Ife. XI. Villes (yui font pour le lourd' hui habitées des EJpagnols dans cette ife. xir. Wdd'A.m principale Ville dr P <^rt de cette Ife. ^ XIII. Ports drCofte marine de l' Ife deCxxhzfiucofe' du Sud. X IV. Cofe marine dr Ports de T Ife de Cuba du cofe' du Nord. X V . Situation de hlfe de Iamaique,Fif7/,leur Jîtuation ^ qualités. Situation des Ijles de Bermudcz,^^^/^^ de leur air de leur terre. Colonies des jlng^loü dans les ijles de ^QïnwxdiCTL, Z//Wf JVfoW, Nouuelle France. , VCltuation dd-^e Terre Neuue,y«&« definaïr&defatem.mimmx. . Habttans de i cvïQ^cuxi^, leur habit Mceurs. ^orts ^ rades de cette Ijle j ^ toute la cojle marine d’icelle. Defertpnon duGvznà Banc, comme on lenomme vulgairement, qui eB audeuant Terre Neuue,d“i^’/^^i^ Sable. ^ Sttuamndel Ifledes^xcions,qualitésdefondirérdefaterre habitant d'icelle ■ x^elques petites Ifleseÿarfes dam le Golfe de S.hzndni. . Ifedelfr if /WZref if /fr/'f if Nouuellc Anglcterre,y?/f;^/f^ mis en lumière par la Compagnie d icelle l'an c I o I d c x xii. N O U U e 11 e PI ey m o U t h , Cf /f Wf Mf wf /i ^4/ /f r Zf. ^ouudlcFclgïççuc-,defcriptionduContmentdel’AmeriqueSeptentrionale,pre~ mierementplm au dedans defcouuerte ^habitée par nos Belles. Defeription particulière de la Nouuelle Belgique félon la fuitedefacofte. De la grande ou Septentrionale riuiere de la Nouuelle Belgique,^ desdiuers peu-, pies quiy habitent. ^ La naturedel'air & de la terre ,fruicés, plantes & autres chofes de Z^Nouuelle Belgique. CMœurs &couf urnes des habitant de laNouu. Belgique, langage des Saukïkans. xii.Defri- Chap II. iir. IV. V. VI. VII. VIII. IX. X. XI. XII. XIII. XIV. XV. XVI. XVII. XVIII. XIX. XX. XXI. XXII. XXIII. II. III. IV. V. - VI. VII. V III. IX. X. XI. XII. XIII. XIV. XY. XVI. XVII. XVIII. XIX. XX. XXI. XXII. XXIII. XXIV. XXV. DES CHAPITRE S. Defcripttorp de U cojîe marine iufques à l'autre rimer e é' iuj^ues au degré trenté huiBieme de la hauteur du Foie du Nord. , Èituatibn > qualités de Pair & de la terre de V irginie,^'»^ les Anglais habitent aù- iûur d’hui. \ v. Riuieres deN irginie, é’ peuples qui t habitent, félon le Commentaire de lean Smi'tH. Des fui Pis de la terre qui croijfnt particulièrement de leur nature en cette partie de Virginie. ï)es fiuicls,de f mences é‘ de la maniéré que les Saunages 'Vfint epr dont ils f feruent. Des ditiers animaux de V iïgmïcyterrejiresyairiens é" aquatiques. CMeeurs ér naturelyhabit ef couf urnes des habitans. Chofis fait es par les Anglais en cette partie deN'n^niQ. Baye deCh.ç,P^^Q2k 'vfte€par\Q,2.n Smith. Des clitfs qui ont èjîefaites déplus par les Anglais en cette partie. Virginie premièrement defcouuerte ^iïrWalthcr Ralegh: fiuiéts de la terre ^ animaux. , , Des chofis propres au commerce que cette contrée porte des mœurs des nations. Des premiers 'voyages des Anglais vers cette partie de Continente iufques à l'a^ clnlp Lxxxvi. Refle de ce qui s'y efl pajfé iufques à l'an c I D I D X c . hiure Quatrième Ch AP. XéORemiere defcouuérture des Prouinces de laVlotiàQyOu le voyage delezïiVQnçt ^ de Leoüi. i , , , ' II. Second voyage des EJpagnôls dans la Floride. III. Droifieme voyage des EJpagnôls dans la Floride/* an clolo xxviii yfeus lacon- Pamphile Naruefe. IV. Quatrième ^plus mémorable voyage des Ejpagnols dans la E\oiià.Q yfius la con^ duite deHcmznàeszSotOyCommencé faneÏD Id xxxix. T. Progrès du voyage deHemandeszSotoe^ la ficondeanne^, VI. Progrès m la mort de Hernandes à Soto. IX. Premier voyage des Erançois en la E\ox\d&yfius le Capitaine Ican Ribauld. X. Second voyage des François' en la Floride fous le Capitaine René de Laudonierc. XI. Èroifeme voyage des François en la Floride y fus le Capitaine léan Ribauld. XII. ^atrieme voyage des François en la Floride y fius le Capitaine Dominique dé Courges. 'XIII. Situation ^limites delaF\ot\d.t filon les F fagmls. XIV. Nature de l'air éf de la terre mœurs des habitans de cette partie de la Floridé» que les François ontvifteCy filon les Commentaires de Laudoniere. XV. De quelques arbres ^ herbes familières en la Floi:ide,c^ d autres chofis. A Diouftez à ladefcription dt Saffaffras auons entendu de quelqu vndes no- "^ftres retournant du Nouueau Pays-basyCÇQQ les frui(^s de cet arbre,' comme il dilbit>. ne different pas beaucoup de grains du laurier, mais ils font bien plus petits, ayans la pelure fort tendre &prefque noire, au dehors pleine de rides,& contient vne noix blanche, d’vn petit gouft ametjdiuifee en deux parties. XVI. Régime politique de sFXoxxdàoxs^yfelon lemefine Laudoniere. X V I r. Defiription des villes cjr forterejfis qui font poffidees autour d’hui par les Ffpagnols enlaVlondc. XVIII* Defiription de la cofle marine de la Prouinèèdela Floride, de celle quieîihattuè de la grande meryque de celle qui Reçoit le Golfe de Mexique. ^ ^ ^ Liure TABLE J, NouuclleEfpàgne. 'Ch A P • Î-T Nouuclle Erpagne^^'^^to âe laïr é delà terre dr la defirlptio» ^ generale d' icelle. II. B'efcription des refînes ef loueurs aromatiques , defquelles il fe trouue grande ///(jV^^/^NouuelleErpagne. . III. De quelques arhres fimliiers^dr plantes particulières de la Nouuelle Efpagne. ' IV. De quelques fleurs dr herbes^ animaux de pierires precieufles de la Nouu. Efpagne. V. Limites de la Prouince ou t Archeuefché de Mexique, ou petites Prouinces d'icelle. . _ . vio DeflcriptionduLâcdeyioxxeipiç^dr delà Métropolitaine. - VII. Lieux pim renommés autour du Lac é'de la Quille Mexique, Chulula, Tezcuco,Quitlauaca,YztacpaIapa^^»^m. VIII. Kc^'^xéico ville dr port fur la mer du Sud. i ‘A IX. Digrejflon touchant les couflumes anciennes desM.QX\c\mms. . X. Langage des Mexiquains, leur maniéré de conter drdefirirei les moUi ans,flecle dP. leur mode pour confleruer la mémoire des chojès pajjèes. XI. Origines desyiçrLiç^'xmSidP de leurs P rinces félon Qiom^idL. . ■ XII. Capitaines dr Rois des MexiquainSj/?/[omxé[\cG2[icCiProumceSiqualiîês de P atr dr de là terre ,fiuiéls, 1 1 . Naturel, mœurs , couftumes des naturels habit ans d'icelles Eflpagnols y habitam. J 1 1. Prouince de G uadalaiara,^ que les EJpagnolsy pojjèdent. IV. Prouimes de'K.'sXxlc.o drG\\\2mtÛ2Lyvilles habitées des Ejpagmls eniceües. V. Deflcripîion de la Prouince de Culuacan,c^’ comment elle fut premièrement defeou- «m^’p-^rNonnez Guzman. VI. Expédition de Nonnez Guzman en Cinaloa , la deferiptionde la meflnePro- uince. VII. Defcri- DES CHAPITRES. VII. Befcrîptîûà de la Proumce qu'm nommelVxm^'x- VIII. Proumce dt\os’Zé^c^tGC2LS Jès mineSi^ villes. I X. Defcription de U Proumce dite miour d'hui Noua Vifcaya, é' des mines qui s’y trouuent. X. Cofle marine delà Nouuelle Galice^/?.? CapSyBayes,Riuieres ér Ports. X r. Limites de la CzMïomiCyexpeditions nauales de Cor res en la mer du Sud. X I I. NauigationdeYi2iX\c\{co de Vlloa dans le Golfe de Californie. XIII. Nauigation du me/me Francifeo de VlloaV^ long delà cofle de Californie j qui eU laueedelamerduSud. Xiv. chemin de FrereMdiïc àc'Hiz^Lvers laProuince de Cibola. XV. Expédition de Francifeo Vafquio de Cornado dans la Proumce de Cibola autres voiflnes. XV I. Situation de la Proumce de dhoX^i, qualités de Jhndir ^ de fa terre remarquées par Francifeo Vafquio de Cornado. XVII. situation de la ProuincedeÇfaimxZy naturels hâhitans,animaux ér autres chùfesy félon Qomzxz. « X vi 1 1. Nauigation de Hernandez ào. hXzxcon dans le Californie. X I X. Expédition nauale de Tean Roderico Cabrilio le long de là cofle du Sud de la Ca- lifornie en la mer P3.ciRque. XX. Defeription delà Nouuelle Mhiony félon les Commentaires deVrznqois Drac, & le refle de Californie. XXI. Première defcouuerture des Proainces quon nomme auiourdéhui'Homx. Mexique. X X r 1. Progrès du voyage âéKntonio de Efpeio en la Nouuelle Mexique. XXII I . Defcouuerture desProuinces de ios Tiguas, de los Quires, Cumanes, Ameyes, Acoma, & "ZunHydites par les Eflagnols Cibola. xxiv. Refle du voyage à’ hnioniQ deEfpeio, bourgade de Zaguato, Prouince desYluh^- tes, eir des T amores. X XV, Expédition de D. lean Onnate ; Acoma prifefrrafeyville de S. luan bafliey vifl- tê enpajfant du Lac ConihdiS. XXVI. Nouuelle defeription de la Nouuelle Mexique, Commentaires dé héidonfo de Benauides Cordelier. Liure Septkme , G uatimala . Ch AP. \éY\Efription de cetteProuince ou Parlement en gros , ^ quand ér par quel chacu- ne de fes Prouinces ont eflé premièrement defcouuertes. 1 1. Du fiuiB de Cacao prefque particulier à cette Prouince,éfde la Chocolaté. 1 1 r. Digrejflon touchant le Mays fes facultés clr diuers vfages. I V . Defiription de la Prouince de Chiapa en general. V . Defeription de la Prouince particulière de Chiapa , ville de Cuidad Real j naturel fpmœurs des hahitans,ef‘ autres chofes. V I . Defeription des Prouinces deSoconufeo dr Suchitepec , qualités de leur air dr terreyVille,d" autres chof s. V I I. Defeription de la Prouince de Verapaz é‘ des lieux que les Eflagnols habitent au- tour à’ hui en icelle. VI I I. Refle de la defeription de cette Prouince dr du Golfe qu'on nomme Golfe Dolce. I X. Defeription de la Prouince proprement appellee Guatimala. X. Particulière defeription de la Prouince Yzalcos , comme les Eflagnols la nom- ment auiourd' hui. X I. Spéciale defeription de S. Saluador,San Miguè’l ^ Chuluteca dr des chofes par- ticulières qui y font. X I I. Ville de S . lago de Guatimala principale de ces Prouinces. XIII. Ville de San Saluador,c^ les bourgades de la Trinidad, S. Miguel e^Xerez de la Froncera. XIV. Ports dr rades de ce Gouuernement,dr toute la cofle marine d'iceluifur la mer du Sud. X V . Limites du Gouuernement de las Honduras, de fona'ir dr de fa terre. ^ X Y i. Villes XXIV. Chap t À B L E Vv I . -Filles âu Gôuuèrnement de las Hôduras,VaIIodolid,Gratiasà Diôr^ S.PedrdJ X V I r » Filles reftantes du Gouuernement de las Honduras, Porto de Cauailos, Truxiilô ^ S. George. icv 1 1 î. Cojie marineiPorts ^ Ijles du Gsuuemement de las Honduras. Adiûujîéz, fùL 3 41. /.p. Mais il y^a vis àvis de la eôHe de cette iurifdidion, f laquelle le recourbe vers le Sud & regarde l'OriehtJdeîlx Mes, bien qu’il y a vn afîes grand efpacè entre deux ; S. Catherine efloignée "de la ligne vers le Nord treize degrés &: dix huiét fcrupulesjprefque de tous collés dnuironnee de bayes & de rochers j toutesfois les An- glois ont choifi celle-ci poüx cultiuerleTabac&lecotton. feptou huiét lieues dei’àutre vers’îe Sud-ell , fa longueur en eftdetrois lieues s elloignee delà lign® douze degrés & trente huid fcrupules, comme les nôllres ont obferué. X Vx. Limites de U Proui&ce de Nicaragua, n^tuu de fin ciel ér défi i erre, finies, lacs é" autres chofes. X X, Filles des EJpagnols au Gouuernement de Nicaragua. X X lo ''Suite de la Cofie,Rades ér Ports deNicatagua. il X I î. Limites de Colla Rica, autres chofes :item la Prouince d^Nicoya. XXIII. Limites du Gouuernement de V eragua, qualités de fin air (f défi terre , nauiga’- 'tiens' de Coiumb njers kelk. Filles'é’ bourgades des Bfiagmls dans Y eragua, cofie marine, Ifiesadiacentes. Lime huiBieme T erra Firma. ll^Arlement é" Gouuernement de Panamâ ifis limites , nature de fin air ér de fi terre, particulières Prouimes. ïi; Ville deVauama,fia fituation ér fies qualités. ' / ï 1 1. ExaÛe deficrmion de la ville de Panama par luan Baptille Antonelli enuoyeea» Roi d’Eÿagne , comme nous Vauons extraire des Liures de M. Richard Hackluyr. î V , Fille d^NombredeDios^ lafituation ér qualités des lieux circommfins. V. Deficription df Porto P>é\o félon luan Baptille Antônelli. V I . Ville de S. PhilippeySrPortô Bellb ; bourgadeNata. vil. RiUieres. cjr coftes de ce Gouuernement de Panama, notamment la riuiere de Chagre. V I î ï . Riuiere deDaricn ér la Prouince de mefime mm. X I. Villes que les Efipagnols ont eu autresfioü en la Prouince de Darien. X. Cojîe marine. Caps, Bayes,Riuieres,S‘ Ports du Goumrmment de Panama. X r. \^mlques Ijles qui font ioinôles au Gouuernement de Panama dr notamment celles qui ont receu leur nom dr remmmee des Perles. X I I. Expédition fur toutes mémorable deltàn Oxenham Anglois, en la mer du Sud par la Prouïncé de Panama. XIII. Limites du Gouuernement de Cartagehe , quàliîés de l'air dr de la terre , diuerfis Prouimes. XIV. Qattagc communément dite des Efpagnols Cartagene Métropolitaine de ce Gou- uernement. xVi Plus ample deficription de la ville de Cartagene fionport,pâr luan Baptille Antonelli. xvî. Vidés drbourgqdesrefiantes de ce Gouuernement. X V I î. Riuieres, Ports, Caps,dr toute la cofie de ce Gouuernement de Cartagene. XVIII. Limites de la Prouince de S. yiatth.c,qualités de fion air d" défi terre. XIX. S. Marthe ville principale de ce Gouuernement. XX. Villes refiantes de ce Gouuernement, Teneriffc, Villa dePalmas, Cuidad de los Reyes,Ocanna d" Ramada. XXI. Riuieres, Caps, Port s dr Cofie marine de ce Gouuernement. XXI î. Ville & Gouuernement appeUé des Efiagnols'Bdo de laHacha. Liure DES CHAPITRES. Liure N eujieme , Nouueau Royaume de Granade. QnLvXY^emieredefcouuertureàti Nouueau Royaume He Granade, conduite de GQnfaluo Ximenes de Quefada 4:;^ c 1 0 1 D X X X V I. '% r T /ï^y IVT /^lUiya/^I-l T? y^vr/^11 *-%-» ^ J ^ 1 ' . / 1 II III. IV. V. VI. vir. Limites du Nouueau Royaume de Gxçimàt, qualité s de fon dir. é‘ de fa. terre Ji^ ^ uerfesProuinces d'icelui^naturel ^ mœurs des peuples y habitant. S. Fé Metropolitaine.bourgadedeS. Miguel & la w//,efloignee des autres quarante lieues, le,chemin en eft fort fafeheux & raboteux, Sc la ville eft plus large que toutes les autres. ha.Prouincc de los Cofianesf dit-iUeft efloi- gnee de la vallee Coca vingt lieuës,douzedefquellcs font occupées de montagnes, plei- nes de canelle; les autres font empefehés par des arbres qui portent des froids , ief- quels ils sppeUentLucumûs,grands comme la tefte d’vn hommcjde bon gouft,& bonne nourriture. Les habitans y font dociles, ayans le corps robuftejtellement que les Efpa- gnols ne les pouuoyentdompterqu a grande peine.La Prouince de eft ioinde auec laprecedente, laquelle vers la mer Septentrionaleeftreceue de laProuincede los Pues, plus grande & populeufe que les precedentesjil y a vne ville tres-grande, habitée, comme VIIÏ. IX. X. XI. XII. xiir. XIV. XV. DES CHAPITRES. comme on dit, de lx mille Barbares. LaProuincc àcslSluxares eftfitueeen laProuin- ce des Cofanes par delàvn grand fleuue, &verslaProuincedes Omaguares^on voit ici vne montagne ayant du lablon méfié anec de l’or. Auec celle-ci feioind la Prouince des Barbares, par eux appelle Coromdos,'^omcc(\\xi\s font tondus comme des Moines, contre la couftume de tous ceux qui demeurent en l’Amerique. Ceux-ci ne femenc point, mais gaignent leur vie en volant & defrobant. Toutes ces Prouinces font alen- tour de la Prouince des ^mxos. Il dit aufïi, que les Barbares fe fafehans des Eftrangers , apres auoirobeïauic Efpa- gnols vingt années, ont fait vne confpiration enfemble U tuénonante trois des Efpa- gnols,&: en Anchidona prefque autant : mais qu’ils auoyent efté repouffes de Baeza auec grand dommage, pource que ceux de ^itos leur auoyent donné de l’affiftance auec desc^randesarmees. Apres qu’il euft efté faitPreftre,&: enuoyé pour les efmouuoir à la paix; & qu’il eut voyagé à la'vallee de Coca-, diuifee du territoire de Baeza par vn o-rand fleuue , efloignee de Baez-a d’onze lieues : &:fut le premier , fous quelque con- dition,qui appaifa les Barbares. Leiriefme deferit la cité de Binamfiro , efloignee de la ville dc^ito vingt lieues , en vn pais moderc,prefque fous la lignemefme, tellement qu’il y fait fort chaud, & les ar- bres y portent des fruifts par toute l’anneejtantdomeftiques qu’Efpagnols. Le s’y trouueen grande abondance; & beaucoup d’autres herbes, defquels on fefert à la Mé- decine. En outre il y a quelques petjts ârbres> les fiieilles defquels font fort petites , de faueur douce, &: l’vnc d'elles purge qu’vne fois. Comme les autres, lefquelles ils appel- lent Mofquera,\cs racines defquelles ont vne efeorce qui purge fort: îi y a force froment de l’Europe, & abondance de toutes fortes de viandes. XVII. Prouince des peup-ks qu’on nomme '§iï^comotts,Colûnies des EJpagnols en icelle, çjr quelque mention des mines d’or. X V 1 1 1 . Cojle marine de la Prouince de Quito, Caps, Bayes, Ports, Riuieres & Ifes qui font au deuant de la Continent e,frincipalementV Mm. X I X. Limites du Parlement de nombre des villes, & le chemin Royalpar laplaine depuis la ville de S. Miguel iufques a ceüe de Truxillo. XX. Bourgade deyiK2Aoïcs,vilIedeTtM'^i\\o,V2in\\a.ih.inQdo. XXI. chemin qui mene par laplaine de la ville deTiM'x.Wdo ^Lima,^ autres chojès, X X n . Lima ou Cuidad de los Kty es, auiourd'hùi Métropolitaine du P eru. xxïi I* P ort de la ville de\JiVM2L,dit XXIV. Vallee de^d.c\i2LC2irci2,& les autresïufques àGM2.ïco,& de labûurgade deC^nnetQ. XXV. cheminpar les plaines duVemle langde la cofte de la mer, depuis Guarco iufques a Y €2.^ bourgade deYâlueïdedrl^'nille de C^idvoYirïcynâ. XXVI. Cocolococha<7» Caftro Virreyna cf autres vallees reflantes depuisYc2 iufques a T arapaca ér l^t villes ou bourgades fituees en icelles. _ . A Requipa. Les autres difènt que cette Ville n’eft que fept lieues de la mer Auftrale, quelle Ce fait de iour en iour plus riche par les mines d’argent qu on a trouué l’annee paflee en quelque lieu,appeUé Callioma,CoMS les Andes, covame 1 on nomme Cor- dillera,dL OM on tire beaucoup d’argent, &: ces mines la font a quatorze lieues dAreqni- pa, tout deuant le chemin qui mene à la ville capitale de Cufco, car celle-la première- ment addrefle à ces mines, puis ^2t\e^Vï.oMVMce^ Aymar au,Chanciu,éi‘Canaru a Chicuito. XXVI I. Prouinces Mediterranees, chemin Royalpar les montagnes du^ exM depuis Guanca- bamba : Prouince de Chachapoia ér Moyabamba. XXVIII. chemin Roy al par les montagnes depuis G2X2\vci2C2iuJques a Guanuco. chemin Royal par les montagnes, ér A’s Prouinces qui font depuis Guanuco iufques a GM2VM2X\g2,item depuisl^\ïM2 iufques i Xauxa. Prouinces Mefterranees ref antes depuis la ville de Gm2XM2U^2 iufques æ Cufco; Guancabelica,Ê^Chocolococha Caftro Verreyna. Cufco autresfois Métropolitaine duVcïM, f tuât ion Cy' qualités des régions adiacen^ . tes: Ville (sf^S.Fraiicifcodela Vittoriac^S.luandel Oro Caruaya. chemins au trauers des Andes vers diuerfes Prouinces qui ne font pas encore bien cognues,(f quelques expéditions des Efpagnols. X X X 1 1 î. Caps, Bayes, Vorts,Riuieres,é" toute la cofîe marine du Parlement dehitn^. XXIX. XXX XXX î. XXX II. r iiiv fi TABLE LmreOnz.iemei^Qmo(tChaïcii. { , , ' ' ^ ï- . I Ch A P . Imites Parlement de (Z\ïZïCQ.j(^udlités de Jon dir déjà terre» I I . chemin Rayât depuis U ville de(Z\x[co iufques à U ville de la Paz, froumces cir- conmifines notamment QoWzo. III. ^^fi^tption pim particulière de la Prouince de Collio. J^E chemin deC^^ iufques à la ville c!elai^^^;,&delà àPtf/tf/,m’aefté defigné de quel- qu vn qui en venoic, comme vous verrés. De C^/îiufques au village de .S’. i’É’W/V/? enuiron trois lieues ; par ^nguJiuram(e\nQS mmlhgQd’Orepe/k quatre lieues. De Frcosy vn tres-beau village des Indiens, trois lieucs.De ^iquifana hoftellerie iufques à Cufca dix lieueS: De 7>^^Æ;?,tres-belle bourgade, laquelle a fon Correuidor, iufques à dix hma heues. De .y. Pablo, tres-beau village peu efloignéde Tynta j dcNicafio Tambo,lc chemmd vn demi iomiuCcincs a S,Pablo-,DcChumaraTamboydcmcCmc: DcPuraca vil âge &fon Corregtdorycommcih difentjtout autant: De -^y^»/>f,vn des plus erands villages, vn peuplusloingjDeiV/V^^? bourgade, vneiournee:De Paucarcollahomçrzdc, tout autant ; De Pma,vn petit village, peu elîoigné du lac Titicaca. DelàlaifTant le lac a main gauche iufques a Chiquito ,(pii eft feulement auiourd’huivnc petite ville, quoi qu autrcsfoisvnedes plus fleuriffantesj De peu elîoigné dulac, iufquesà Chila- ncy le premier village de la Prouince d’ Aymerau ,yn iour de chemin. De Xuli, la plus grande bourgÿe de tout le Peruyod les lefuites ont quatre Colleges. & polfedent beau- coup de richefles, trois a quatre heucs; De CopauacanayVn tres-beau village,peuelloi- gne du lacje chemin d’vn iour, De Cepita^gt^nd village,fept lieuës;Du conduit du lac aux deux nuages duquel font deux villages,iufques à la bourgade Guaki,vn iour de che- min.Remarquez ici que ce village fe trouue dans la Table du PeruMots dudit conduit, mais qu il doit eftre plus outre. De Tiagmnaco,hez\x bourg des Indiens,le chemin d’vn lour.Delaviilede laPazmCqncs dHayo Hayo ttes-gmnd village, fituéen vnlieu fort froid, deux de chemin; De village fort renommé pour les veines d argent lept lieues : De 1 hoftellerie le chemin d’vn grandiour: Du bourg Oruro, fort renomme par les mines d’argent,trois ou quatre lieues, delà coulequelques petites ri- ' uieres qui tombent au lac.Delà vient-on ayant fait le chemin d’vn iour à l’hoftellerie appellee Venta diMedio:&c d vn autre iour à la tauerne de las Pinnas ',Scd\x troifîeme à Puna Tamboi^ du quatrième à Totora Tamboyentte lequel &:Pi?/^nereftenr que neuf lieues, ou le chemin de deuxiours. ' ^ IV. Defeription du grand Lac deTiticsLC^.. . ' V. Refie de la Prouince de Collao le long du chemin Royalqui mene de CuÇcoala ville rfelaPaz: f;'(?/^/WÉ’zPcco\ià.e^ Magallanj/?/tf;i^Herrera. IV. Defeription de ce ï) fikxo\tàQM.zgz\\zn filon les EJpagnols qui l'ont premier paffé. V. Nauigation des Anglois par le Deftroit de Magallan fi premièrement deVxzn- çoisDrac. V'i. Nauigation de Thomas Candish par ZfDieftroit de Magallan , item de Richard Hawkins Cheualier. V I I. Nauigation des Belges par le Deftroit de Magallan fi la première fous le Capitaine Simon de Cordes. VIII. Longs tourhoyements dans ce Deftroit par Sebald de W eert, defiription des P en- guins. 1 Seconde fi troifieme nauigation des Belges par A Deftroit de Magallan. X. Expédition de Diego Flores de Valdes fi deux Colonies placées par lesEfiagnols /^Deftroit de Magallan. * 2, XII. XIII. XIV. XV. XVI. XVII. XVIII. XIX. XX. ( XI. Pre^ t XVI. II. - -■ M T À': B L )E: deJcûuueYture dtiY)Q^x.Qit\^tvsi‘3L\iQ. Namgation- des Eÿaguols par ce Nouueau Deftroi't. Lemaire de la terre Auftrde é’ des Saunages y haUtans. ^'^'%7gno]!^ Magallanique , qui eB fur la mer Atlantique , félon les T^fription delà mefmecofe félon les Angloké" les Belges. Liure ^fiatorz,ieme,RioàchV\gitgL: ^^firiptiondeJarirneredhznuzfelonUcitèt^i&Umnà^^^^ ejcription delamefmermterefelon diuers routiers des Efagmls &vndesmllres Saunages ^ qmhaktent le long de cette riuiere ,• kurnaturel é- mœurs. Sennorade Buenos Ayrcs. nefirtpionpu MetrofoUmm de cette Fro»mce,4ttec fin territoire s item de Im- rrfwÆrCuidadReal. ‘ ailles deSfe^S.S^Xnzàoï (pfi autres de cette Promme. BçÆn/&«*/4Prw»«*Tucumana.^*7S^«»«>4/fTOy/fS.IagodelEftero. S. Mjguê‘l,Talauera ^ Corduba. De quelques autres villes de ce Gouuernement & des qualités desProuinces ouettes jontjituees. ■ ^^e”'^ifd’vncertamBelgedeP>txtxiQ%KytQ.%auxmmesiargentde]PQtQÇipar cette Proumee de Tucümana. * Conte de ce mefme chemin félon d'autresi Cofemarme du Gouuernement de la riuiere deX^^l^t^, depuis leCap du Nord de iemboucheure de cette riuiere iufquesauBiü.Çû. V Limre ^lMinz>teme ,Bïgi[i\. C H A P . I. Y_,^mttesdu B rafî 1 , la première defcouuerture d’icelui, qualités de fin aïr & défi ^^J-‘^^eligionynaturelé’fnœursdesPi^2i.Ç\\\tm en general. J I >. Dmerfes nottonsdctBraGliens à kurmtnrel & mœHrs, filon la Commentaires A vn Autheur moderne Portugais. Diuerfis nations des Brafiliens , filon le rapport d'AntoineKniuec Anolois.qui a t^ournoye longtemps dans lelàïzÇil. Beftes a quatre pieds du^tzPû félon vn Autheur PortumisMzri de Leryc^Theuet. Couleuures é Serpents terreftr es félon lesmefmes Autheurs que deffus. s^Hf^ues oifiaux du^ïACûdefiritspar lesmefnes Autheurs. Arbres fiuiBier s ér autres du Bra fil defiritspar diuers Autheurs. Piufeurs arbres familiers au'^iz.ÇA filon les Commentaires de Lery Theuet. Herbes fiâmes & racines bonnes a manger du ’QtzCû filon les mejmes Autheurs. ^^elques autres plantes du Brafil filon de Lery , Theuet, l’EcIufe fiece monjtrueufe de Phalanges. , Poîfons marins des Brafiliens de cet Autheur Portugais autres. Poijfons Cruftaces & Teftaces, item arbres du riuage & marins, comme auftles oi- jeaux marins. ^elquespoijfonsde riuiere , item Serpents & autres animaux qui viuent dans les ' rimeresydesmefmes Autheurs. Animauxyarbres ^ herbes que les Portugais y ont premièrement portés , defquels ils font amour d'hm fort grand profit : item la diuifion du Brafil en fis Gouuerne- menti. 'SAti.Defirk XIÎ. xiir. XIV. IV. XIV. XV, J XVI. XVII. XVIII. XIX. XX. XXI. XXI I. XXIII. XXIV. XXV. XXVI. XXVII. Chap II. DES CHAPITRES. Defcription du premier Gouuernement appelle' deS. Vincent. Defeription pim particulière de ce Gouuernement ér de U ‘ville de S. Paul Ijles adiacentes. Gouuernenement delà riuiere de lanuier, communément dite Rio de lennero. ‘Troifieme Gouuernement duBxià.Cûi Spiritu SznOco y comme les Portugais le nom- ment d’ordinaire. .^mtrieme Gouuernement du ^xsi(û,appellé des PortugaisVoxto Seguro. Cinquième Gouuernement du Brafil que les Portugais nomment Ilheos. Sixième Gouuernement du Brafil ou la Baye de tous les Sainds : defcription exaSie d'icelle Baye -, le mémorable aile de Pierre Ht'^ndê nofre nation. Defcription de la 'ville de S. Saluador lieux d'alentour. Item de Seregippe. Septième Gouuernement Brafil, Pernambuco. Be la 'ville à'OXmAzdtem de Garafu. Comment 0\mAt a efépr if par lesBelgeSiéfeH auiourd hui tenue pariceux. Gouuernement de T amaraca é" la cofe marine iufques à ce lieu. Liure Seiz.,ieme , Brafîl Septentrional. I. V langage commun des B rafiliens . Neufieme Gouuernement duXtïzÇiXdit Paraiba. Tj* Ntre lé port Gc le. Promontoire blanc ,yoit-oïi vne autre corne de 4 terre, -*^appellee Punta de Piedra Furada-.àexneve duquel vers le Midy, & fept degrés & quatorze fcrupules de la ligne vers le Sud j s eficoule vne riuiere afles large, tiiais l’en- treede celle-là eftant bouchee, par le gué qui defeend de la corne Septentrionale, à grande peine les g-rands batteaux peuuent-ils pafler pour le peu" de pafTa^e qu’il y refte,finon les petits. Lefleuue MongiangapeeXc efloigné de la ligne , comme difent les noftres, fix degrés & trente fcrupules, l’entreeeft fore eftroite , mais neantmoins alTés profonde, à pei- ne peut-on y arriuer,finon par le vent de Nord. Les noftres ontobferuéauiliquercntreedela riuiere de Paraiba eft diftante de la ligne fix degrés & cinquante fix fcrupules vers le Midy. . ^ III. IV. V. VI. VII. V III. rx. X. XI. XII. xni. XIV. XV. XVI. XVII. XVIII. XIX. XX. Jfe dite communément deV et Ammà de Norohnà. Cofe de la Continente du Brafil Septentrional,«fé/>»^/^ riuiere de Mongiangape Rio Grande. Dixième Gouuernement du Brafil, Rio Grande. Cofe du Brafil Septentrional depuis Rio Grande iufques à Siara jfelonX'igxxete- Ao ép autres. Gouuernement du Brafil Septentrional quon nomme Siara, é" refedela cofe iufques au Marann on. Defcription generale de cette Prouince ér quelques chofes neceffaires a remarquer. Defcription du Maragnan félon Claude d’Abbeuille. .égalités de Pair dr de la terre de P ife de Maragnan . Arbres fruicliers qui fi trouuent dans cette ife. ^Quelques herbes dr plantes de cette Ife de Maragnan. Diuers oifiaux qui fi trouuent dans cette Ife dr la Continente prochaine. Poiffons marins dr de riuiere qui fi trouuent en ces quartiers. Befes a quatre pieds de cette ife dr de la Continente voifine. Origine,mœurs; dr couf urnes des habitans naturels, dr autres chefs appartenantes a ce fiuiet. Defcription des Prouinces de Tapouytapere dr Qom.m^,fituees dans la Conti- nente. chofes faites par les François dans P Ife de Maragnan dr ce qu’ils ont remarqué de la montagneX\iow2rg2eŸ> Situation de Maranhaon (fi des lieux que les Portugais y tiennent. Refe de la Cofe de la Continente depuis le Maranhaon iufques i Para. Lture LmfeT)ix-Jèptieme,Güa.\ins. ^ Lmtroduaion. l’a'pns beaucoup depeinepourfçauoirqu'eftoventcespeuples defquels Hcr.era fait mention; &ie laittouué maintenant chezpLe Ordonnez de Cjuallos. U Proumce d’Omngnes ( dit-il ) eft edoignee d’AmU & Achtdona, rcefontdesvillesdansiaProuincede^«M;cent& ttente lieues, & il y a plufieurs nattons qu. sappellent communément du mefme nomO»,a««,&chaqueProuta! ce rencntfon propre nom ; Us vont tous nuds, excepté dans quelques Ptouînces , les femmes defquelles couutent leur partie honteufe âuec des fueillà datbres-la Pro mnceconnentenu.roncinquantelieuës.Beaucoupd’Efpagnolsonttafchéd’y entrer mais ils n ont nenaduance. Chap. Amazones «td'Orellan. Francifcode Otellana, qu on eftimemotrfremurementdefcoHuert & vifitécettermkre. Seconde exfeimonde Francifco de Orellana dum cette grunderimere oifirumom 'desAngloü Quittés de k Contmemed'icelle^érdefesljlesjruiàs à-hethium.. Brief dîjcours de ce que les Belges ont fait en ces quartiers, CopdecetteContinente&ksnuieresquifirtentdHceUesJefuùkgrandermiere ^es Am2.ïoxicsmJquesacelledeW\2.^oco ’ ^ ^ ^ ^ dec Prouinces eircon. Plufieurs chofes que ceux de mflre nation mt remarqué touchant cette riuiere ér de quelques autres prochaines, notamment d’Apur waka VtJi^^^^/riuieresde^o&deWiU&desFroumc'esadiacentes. Defcrtpuon^larmteredeC^i^nc &de la Contmentevoifme.&mceurs des haU- tans a tcelles. . moeurs écouftumes Bu langage de ces Sauuagesfur tout des Yaiosi Bes viures des Saunages, animaux, poijfonsplantes Ve quelques autres plantes, ref nés & bois propres au trafic ér qui ontvnfinqulier ‘vjageenMedecine. ^ J- •' dp fi‘‘t>’^,^''imeres qui firtent de la mefinecofleenrueré- notamment deUzcvmt. Befcnptionde quelques autres rmter es qui fort ent de la Continente , Szrn2me,So- rame,Correcme,Berbice,Demararo. Befcription de la riuiere d ’Eflequebe & autres voifmes, Befcription de la rimer e àlOitviocixxt en general, félon ce queks Éfbamols en ont muenlumtere. • Récit des chofes que les Efagnots ont faites en defcouurant cette riuiere &mtam~ ment par On^Mo‘. Bes chpes qftont efté faites du depuis é’ notamment par Gonfaluo Xirtienes de i^eiada é’pur Antonio de Berreo. Première expédition du Cheualier Walther Ralegh vers la riuiere de l’Oreno- /W» c 1 3 1 D X c V. Catalogue desriuieres quife defehargent dans l’Orenoque,A«« k relie de l'expedh tiondeK^lcgh., ^ ^ Seconde expédition des Anglou en Gmzncfomle CapitaineùmQnt Keymis l'an c 1 D 1 D X c VI, é la troifiemefom le Capitaine Thomas Masham la mefme année ^ la fuîuante. ^ Bermere expédition de WaltherRaleghff^Guiane es années cl':^ îoe xvi ép y^^iit&fonfupplice. Befcription de la riuiere de i Orenoquey?/i?» les remarques de nos Belaes. Befcription de Vjfequ^on nomme la Trinidad. Be l Jfe dite communément Tabago , que ceux de nofire nation nomment mainte- nant HQmxûl^N dX'àQh.ic, II. lïi. IV. V. VI. VII. VIII. IX. X. -xr. Xîl, XIII. XIV. XV. XVÎ. XVIT, XVIIÎ. x'ix. XX, xxi. xxir. XXlII. XXIV. XXVs XXVI. XXVïI. Liure - f DES CHAPITRES, Liure Dix-hmBieme ^ Nouuelle Andaluzie* C H A P . ï. Ifcription de k noble Ijle Margiirita. JJ B efcr if tiondel’ljle C\xh2igu2ié‘ de Cocht. Defcriftion dit Caf cation nomme h.t2.yz,é^des fameujès Salines qui font auprès. Defcriptionde la Prouince de Cumana , qualités de fin air ^ défi terre, animaux mœurs des Indiens. Récit des ^cruautés que les Efiagnols ont exercees au fiecle precedent en ces quartiers ^ k defcriftion de k bourgade de Cumana. Récit des chofes qui ont ejlé faites en ces Prouinces par Hieronymo de Ortal An- tonio Sedenno. Refle de l' expédition êé Kntonio Sedenno en cette partie de k Continente. Defiription generale delà Prouince ^^Venezuela ^fipartition en diuerfis parties. Première defcouuerture de V enezucle parles Allemands ^auec les chofes qu’ils y ont faites durant quelques années. Delà Métropolitaine dece Gouuernement nommee Coro. feutres 'villes de ce Gouùernement-, fiauoir^^ Nueftra Sennora de Carua.lleda, S. lago de Leon, Noua Valencia c^Xeres. ville ^^Noua Segoxxi^iyauec les qualités de l air ér de k terre,des régions 'voifînes. Villes rejl antes de ce GouuernementT\xc\xyo , Laguna (ér qualités des Prouinces adiacentes àicelles. Defcriftion du grand Lac de yi2X3iCzyho,item de Maracapana au bout des limites deceGouuernernentversleLeuant. Defcriftion des Ijles quibordeut ce Gouuernement ^ de l Ijle Blanca , Tortiiga , Or- chilla, Rocca, Aues. Defiription des ijles de Bonaire,Caracao é" Aruba. Defcriftion de toute kcofie de j'vn ^ de l’autre Gouuernement de CnmzntiéP de Venezuela. iir. IV. V. VI. vir. VIII. IX. X. XI. XI T. XIII. XIV. XV. XVI. XVII. TABLE V > ^ Des Animaux , Arbres & Plantes que nous auons particiiiierement defcrits & repreientés par figures. V ManatipoilTon.Lia î.Chap.iv. De l’Iguane Lezarr.liu.i.chap.ix. Du Walrusbefte marine. liu.ii.ch.yi. De l’Araignee de mer ou Siguenoc. liu.ii.chap XIX. D’vne herbe particulière à la Nouuelle Belgique, liu.iii.chap.x. Du Macoquerfruid de Virginie.Iiu.iii.ch.xxir. Du Lobe de 'W'ingandecau’w'. iiu.n i.chap.xxii. De l’arbre de SaflTafras.liu.i v.chap.xv. Des vrayes Febues purgatrices.liu.v.chap.iii. Des Pinnons purgatifs du BraIil,M mefme. Rameau du Guaiabe auecfon fruid:,là meline. Du Yecotl ou früiâ; de Palme de montagne, là mefme. Dufrui£tde Tlilxochilc,là mefme, chap.iv. Du fruiét de Mecaxuchitl,là mefme. Du ^oiure long ou Buyobuyo,là mefme. Du petit oifeau Huitzitzil ou T ominee,là mefme, chap.xvii. Des Vaches bofluës de Quiuira. liu.vi.chap.xvii. Du fruid de Cacao auecvn rameau Sc fonfruid. liu vu.chap.ii. De la fueille de l’herbe anil,là mefmejchap.ix. Des Amendes duNouueau Royaume, liu. ix.ch. IV. Ratneaude Molle auec fon fruid. liu. x.chap.iii.^ Del’oilèauPcnguin.liu.xiii.chap.viii. De rArmadille.liu.xv.chap.v. Du Haythi.là mefme. ^ Dufruid Acayous,là melme,chap.vni. De l’arbre Ayri, là mefme, chap.xx, Desfruids Aouay,là mefme. Des fruids de Bachoues,là mefme. De l’arbire de Mamoera,là mefme. Du Fruid Ananas, là mefme, chap.x. Du fruid Pacoba.là mefme. Des Lobes du Brafii,là mefme. DesTrufîes de Manobi,là mefme, chap.xi. Des Febues du Bralîi,là mefme. Des Phalèoles du Brafil,là mefme. D’vne grande & monftrueuIèPhaîange,là mefme. Figure du poilïbn Dorade, là mefme, chap.xu. Du poiffbn Atawawapebbe,là mehne. Du poiflbn Vbirre,Ià mefme. Du poilïbn Awah-kattoe,!à mefme. Dupôillbn Pira-vtoeuah, là mefme. DupoilTonZigæne ou Libelle, là mcfrac.ch.xiii. Du fruid lunipap.IiU.xvi.chap.x r. D’vn certain fruid de Palme, là mefme. Dufruid Karouata,dit desnoftres Slijp-tongh, là mefme, chap. XI i. De l’animal dit Pareflcux.liu.xvi.chap.xv. Dufruidde Totocque.liu.xvir.chap.lv. D’vn remarquable fruid fans nom, là mefme. De l’arbre Papayauec fon fruid. liu. xvii. chap. XXVIII. De l’arbre de Courges auec les fucilles & le fruid, là mefme. D’vn arbre portant rcfinc dansl’Ifle dcTabago, là mellne. Figure dcfueillages &: fruids dcTabago, là raef. me. Rameau & fruid^e Cafle fauuage,là mefme. D’vne certaine forte d’Alocs auec le tuyau & les fruids, là mefme. DESCRIPTION MAIGRES MINORE S QVE INSVLÆ. HISPATsriOLA.CVBA Lucaiæ et Caribes. Lucayoncquc ' "Bnhattui ^rianjfvh Los Jtlartircs Ctyo iiutriA ."VerAe ^bre^o Ao Sol Giiatutio Ctyman yranAe Caymatt Aloah/y ^ozutmL I AM AY C aAj Aorifhn ^ ^jflorortf^ Raruts ‘^lîPontlln Scrr.tnilLt '*w4Ltrt ÿaluibe SAtttss ~^omuu^.i ^étrhtAffi' l^de joLva '.O. m vno^ra: 7aatC(e tattica nu ZVYD T I •! Is 0. s la^T DESCRIPTION DES INDES OCCIDENTALES, LIVRE PREMIER. I Des Ifles de l’Ocean. LS LE DE s. lEAN PORTO RICO. 10 C H A Pi L SltHAÜon^^mdeur ^nature de l'air de la terre de tlfîe de S.Iek n. 1 s L È que fes naturels habitans & leurs voillns ap*- pelloyent ancièhliément Boriquen^ïxxt premièrement defcouuerte par Chriftofle Columb en fa fécondé ^ ^ nauigation fan <:l3cCccxciii,&: d’icelui dediee au nom de S. leanÉaptifté. Elle eft diftante de rifle Efpagnole( qu’elle a à l’Ouefl:)de quinze ou feize milles Efpagnolles ( vulgairement dites lieues légués i dix fept & demie , defquelles conftituent degré ) du Continent de l’Àmerique Méridionale & du Cap qu’elle a au Sud cent trente fix( com« me quelques-vns ont obferué ) vn peu moins de Co- quihocoUiÇ^i eft f autre Cap de la mefme Continente. Sa cofte dü Sud gift fur le dix buiaieme,& celle du Nord vn peu entre le dix neufieme degré de fefleuatioii du Pôle arétique: Elle a trente iieuës de long Eft & Oueft { oii trente cinq comme aucuns veulent) & vingt de large; fa forme eft prefque quarred, ayant toutesfois vncofté plus long que l’autre. L’air y eft d’vne température fort a- greable ( excepté en Décembre & lanuier ) n’eftant ni trop bruflec d’ardeürs,ni abreü- uee de trop de pluyes , fi ce n’eft au mois de feicherefle, depuis la fin de May iuf- ques en Septembre; elle eft pareillement trauaillee au niois dAouftfie Septembre* 2,0 de rudes tempeftes & fubites tourmentes, ( appelldes Huracanes ) & par fois les femen- cesy font bruflees d’vn mauuais vent de Nord-eft. Sa terre eft riche & abondante eii pafturages;mais elle reçoit vn grand dommage des arbres de Gùajàbes: cet arbre ( auflî frequent és autres Ifles, & mefme en la Continente ) porte vn fruiét comme vne pom- me, d’vne efcorce brune,ayant la chair rougeaftre & remplis de petits grains, qui tom- bans en terre, s’efleuent incontinent par l’abondance de la graiffe & fertilité du ter- roir, prenans infenfiblement tel accroifrement,qu’ils rempliflént toute la plaine d’vne foreft eipaiflTe, qui empefehe par fon ombrage que l’herbe n’y prenne accroiifement. Combien que cet arbre ne foit autrement inutile ; comme nous dirons ailleurs. Ce mal eft accompagné d’vn autre plus grand , c’eft que les vaches ôe autres animaux do- 5 0 meftiques de nature,s’y effarouchent de telle forte qu’ils nepeuuentplus cftre appri- uoifés. La plus grand part de la terre y eft releuee par petites collines , mais le milieu du païs eft prefque tout rempli de fort hautes montagnes, f appellees vulgairement des Eipagnols i’/Vrzvï àelLoquillo)c^\ commençans duCapî’Eftde Flfle dix lieues A audefliLS 'S. J I. r » DESCRIPTION DES INDES au dcfTus la principale ville vers le Sud-eft, d vne fuite continue palTans par le dos dé rifle,s’eftendentjufquesauboutOccidentald’icelle, finilTans tout près de la ville de , Elle a quantité de deuuesje principal defquelsf comme veut Ouiedo ) eft Cairabon t le plus prochain de ceftui-ci çdiBayamon, qui defcendahtvers le Nord, femelle en la mer vis à vis de la forterelTe , qui commande au port de la principale ville : apres fui- utntLuifa 8c Toa procedans dVne mefme fontaine, qui fourdant du pied du mont Cayamo,( quinze ou feize lieues à l’Eft de la ville) defcend premièrement par vn canal vers leNord,receuant plufieurs petites riuieres d’vh codé & d’autre jufques au mont Cauuas ; où fe fourchant en deux , vn canal va courir du long la Colonie Luifa < & Tau- i © tre fecourbantverleNord-oueft,prendlenomder0^, (quiluieftoit plus hautincer tain ) & fe va defcharger dans le port de la mefme ville. Suiuent enfin Gujane, Arez,ibo, Gabiabo & autres 5 quelques-vns defquels ouurent des haures commodes pour de grands & petits vailfeaux : outre vn nombre infini de torrens, dont il y en a qui portent de l’or 5 les plus riches & célébrés de tous font Manatuabon & Cebuco. Il y a eu autres fois detres-riches mines d’or & d’argent, qui fontpour le iourd’hui ou efpuifees , ou abandonnées pour la difette des ouuriers. ^ ^ Outre les arbres qu’elle a de commun auec les autres Ifles,on y en a remarque enco- resd autres, entre lefquels excelle le ‘Tabernaculo ou ‘Taborucu, quidiftile vn certain bi- tume blanc, fort propre pour poilfer les nauires, utile aux pintres, & grandement fin- 2.0 gulier pour guérir lesplayes , & les douleurs des membres caufees par le froid. Le Maga obtient le fécond lieu, d’vn bois fort durmullement fuiet à vermoulure, duquel on lè fert en charpenterie : fi ce n’eft qu’on préféré à ces deux l’arbre nommé fàinét bois,fort peu different du Gajac,{ car Ouiedo mt que ce foitle mefme ) doüé des mefmes facultés contre la verolle,fi on le iert de la decoélion comme il appartient Outre ce- la il y a deux arbruiifeauxd’vn s’appelle Higillo fini ado, \c fuc des fueilles, duquel confo- lidepuilTammentlesplayes: &rarbriircaudcS.Marie qui ne cede en rien à l’autre en faculté de medecine. Entre les herbes nuifibles excede le ^ibehom a les fueilles picquantes,fa fleur imite les violettes,mais plus longuette, qui eftant mangé des belles Sauuages, leur apporte vne mortprefente. Auprès du riuage croilfentaufli plufieurs ? o arbnfleaux , qui portent des pommes mortelles aux poilfons , lors quelles tombent en l’eau j & leur ombre mefme nuifl: aux hommes , s’ils s’endorment fous icelle, on les nomme Maçanillo î ce font arbres de moyenne grandeur,qui ellandent leurs branches r du long de terre, leurs fueilles font femblables à celles de nos poiriers j ils porrent a- bondance de fleurs,aufquelles fuccedent de petites pommes rondes & longuettes, ta- chetées d'vn peu de rouge , qui les rendent agréables à la veuë ; & auec œla d’vne lî douce odeur, qu’à peine y a-il chofe qui leur puilfe eftre comparée, au relie trefdange- reules &mortellesj 1 ombre de cet arbre eft tellement mauuaile,que fi quelquVn s’en- dort fous icelle, toutle corps lui_enfle d’vne ellrange maniéré ; & fi d’auanture quelque goutte de rolèe tombe des branches fur la peau, elle l’efcorche comme fi c’eftoireau 40 fortedesSauuagescompofentdecefruidvnpoifonfansremede. Il s’ytrouueauflivn autre aibre,que les Inlulaires appellentG’^4^I,&lesMexiquains à qui il ell familier Thet- il porte des fueilles rouges, velues &: qui ne tombent iamais , efpaiffes auec plu- fieurs petites veines de couleur de feuifon fruit efl verd,& reflèmble en grofleur & for- me a celui de 1 arboifier.Le fuc de cet arbre efl grandement caufliq,- qui fait que les ani- maux qui s y frottent,perdent le poil,le mefme adulent aux hommes aufïî bien qu’aux beflesjs ils s endorment fous icelui, tant cette plante a vne pefliferepuiffance.ontranfi porte en 1 Europe de fon bois pour fa couleur non commune , qui imite la verdeur du Calchante, & on a de couflume d’en faire des quenoüiiles de chaflits, pource qu'on 1 eflime ennemi des punaifes ; mais les ouuriers qui le mettent en œuure, en ont les Jo mains & la face enflee lors qu ilsl attouchent,fàns qu’il fe defènfle de plufieurs iours. Les principales richeffes de cette Ifle font vn grand rapport des cannes de fuccre, du gingembre, caffe folutiue , &:vne tres-grande abondance de beaux bœufs: car ■ les bœufs & vaches y font tellement multipliés , qu’onles tue feulement pour la peau, abandonnant la chair fur le champ aux chiens & aux oifeaux. Les habitans Efpagnols traitent toutes ceschofes auec grand profit en contrechange des marchandifos de pardeçà ^ OCCIDENTALES. LIVRE I* 5 pardeçà ; car des naturels Infulaires qui ont efté autresfois fans nombre, la cruauté des Efpagnols n en a laiiTé que peu ou point j voila pourquoi de difcourir àprefent de leur naturefmœurs ou religion, ce feroit chofe entièrement fuperfluë, C H A P. IL Viües des Efpagnols en cette Jfle^defquelîes la Métropolitaine eB Porto Rico. CE T T E lile commença premièrement d eftre habitée par les Efpagnols l'an cId iDXjfousle commandement àclean Ponce de Leon, qui ayant efté humai- nement receu par les Infulaires & leur principal Roi Jgueybanay & d'iceux en- richi de plufieurs prefens , commença de placer vne Colonie au cofté du Nord , à vne lieue de la mer : & du principal port ( que l’on nomme riche ) & la nomma Cappara : mais pour l’incommodité de fa fituation&defondiftîcile accès, elle fut abandonnée dix ou douze ans apres, & les habitans furent tranfportés à G’^»üV4: , tout près du lieu où la ville de S. Germain Ce voit pour le iourd’hui : lequel lieu ayans derechef quitté, ils baftirent Sotomajor, gueres loin d’Aguada, & enfin s’arrefterent tout à fait à S. Ger^ main. Orl’anclDlD xiv par le commandement du Roi d’Efpagne, apres qu’on eut ioinét la petite Ifle,qui eft à l’emboucheure du principal port auec la grande, par vne chauffée faite au trauers du haute , on donna commencement à la principale ville, 2.0 qu’on appelle auiourd’hui Porto Rico, du port fur lequel elle eft fituee. Cette ville eft au cofté du Nord de Cette Ifle dix huid degrés , & quelques fcrupules au nord de k ligne; elle n’eft ceinde de murailles ni de rempars,eftant au refte fort bien baftie,elle a de larges rués , & fes maifons font à la façon d’Efpagne , ayans peu de feneftres , mais delargesportes,parlefquellesleventy entre,qui dés les huiél heures du matin iufques fur les quatre heures apres midi,tempere & rabat l’ardeur, laquelle depuis ce temps iufques à la minuid y eft extrêmement grande. Elle a vne Eglife cathédrale d’vne ele-^ gante ftrudure , à double rang de colomnes , auec de petites feneftres , qui pour la di- fette de vitres, font munies d’vn fin canenas : deux petites Chapelles ( comme ils ap- pellent ) de tout proche de la ville vers l’Eft-nprd-eft, il y a vn Conuent de lacobins. 5 O Son port eft fpacieux,&afreuré tant à l’encontre de l’incertitude des vents,que contre les incurfions de l’ennemi ; car il reçoit la mer par vne forte eftroite emboücheure,fur laquelle commande vn très-fort chafteau,augmenté & fortifié de nouueauxouurages l’an cId Id xc par le commandement du Roi d’Efpagne, & excellemment bien mu- ni de canon & de tout autre appareil de guerre. Proche de ceftui-ci vn peu plus auanc vers le Sudoueft de la ville, il y a vn autre chafteau ( qu’on appelle Portale^a ) dans le- quel les threfors du Roi & les munitions de guerre font conferués : le refte de cette petite Ifle eft impénétrable , a caufe d’vn bois efpais qui la couure toute , excepté vne place & les fentiers qui vont à la chauffée, auquel lieu il y a deux petits chafteaux, pour empefeher le paffage à l’ennemi s’il vouloitpar là paffervers la ville. 4^ Le valeureux CZCievesXiec François Br ac, attaqua cette ville l’an clolo xcv, mais en vain ; car ayant entré dans le haute auec plufieurs barques & chaloupes, il brufla bien les nauires de l’ennemi qui eftoientàranchre,toutesfois il ne peuft prendre la ville, mais il fe partit delà apres auoir perdu quarante ou cinquante de fes gens. Et l’Illuftie Comte de Cumbrie l’an cId Id x c vu, ayant defeendu fes foldats fur le riuage de îâ grande Ifle, & les ayans conduits parvn très- difficile chemin iufques à la chauffée, il printd’vn premier affaut les chafteaux qui gardent le paffage ; entrant auec peu de danger dans la ville, qu’il trouua prefque vuide ; & apres huid iours de fiege , il print par compofition la fortereffe qui commande l’emboucheure du haute. 11 auoit refb- lu de s’y arrefter,&d’y mener vne colonie d’Anglois, mais comme il eut perdu quatre 5® cents de fesgens, emportés en peu de temps par diuerfes maladies , ayant changé de refolution , il fe partit delà , laiffant la ville prefque entière , emportant vn tres-riche butin, & les plus greffes pièces de canon, iufques à fep tante du moins , comme les An- glois difent. Enfin l’an cId In c xv Baudouin Henri Bourgue-maiftre d’EdamjCreé General fiir l’armee de mer, que la compagnee des Indes Occidentales desProuinces vnies des Païs-basjran d auparauant auoientenuoyeeaufecours de leurs gens affiegés au Brafil, A 1 auec Her.d. l^c.-y 4 DESCRIPTION DES INDES auec dix feptnauires, combien que le nombre des foîdats & matelots y fuftcrrandc- ment diminué par diuerfes maladies, & par vne longue & facheufenauigation , d’vn courage du tout héroïque, ayant paffé leftroite emboucheure du haute, & au trauers des canonades du chafteau qui y commande, ( ce que nul autre iufques-là, n’auoit ofé faire auec de grands vaifleaux) n’ayant eftéfon nauire que bien peu brifé ,les autres fortpeu endommages, il letta les anchres au dedans du port J d’ou defcendant à terre auec deux cents cinquante foldats & quatre cents matelots, il print auffi toft la ville, que les habitans auoyent abandonnée de nui(51:,& s’eftoyent retirés ; ceux qui pou- uoyent porteries armes dans la fortereire,& les autres dans la grande Me; & apres auoir pris les deux petits chafteaux, coupé la chaulTeejpour n’eftre obligé à fe garder de l’en- 1 0 nemi àdos,drellé vnetranchee,mis fes canons en batterie,il attaqua la principale for- tereffe.Maiscomme ceux du dedans fegardoyent vaillamment; voyant le general qu’a- uec vne fi petite troupe de gens, ( car vn de fes principaux nauires lut lequel y auoit c XXX foldats & force munitions de guerre eftoitabfent) il n’eftokpas fuffifant pour, garder la ville & les autres forterelfes, ni puiffant ailes de prendre par force vne telle place, encore moins de la contraindre à fe rendre par le delfaut de viures, ( veu qu’il ne " pouuoit empefeher qu’elle ne fuft rauitaillee de la grande Me ; il commença de pen- fer à fa retraitte,combien qu’à regret & ayant chargé dans les nauires tant les canons qu’il auoit mis a terre,que ceux qu’il auoit trouués dans la ville, prins le meilleur butin, rafé prefque la ville, brullé auec cela fept nauires de l’ennemi qu'il auoit trouué dans zo le haute, il fe retira en ordre de bataille : & fauorifé d’vn bon vent, ayant repaffé le mefme deftroit, fans perdre qu’vn nauire, qui pluftoft par la patelle des matelots, quepour la vaillance ded ennemi, ayant touche le fond , ne peuft fuiure les autres , il s’en alla triomphant. 4. La fécondé d’apres eft la ville de S. Germain, anciennement noua Salamanca,en la- quelle comme nous auonsdit,fetranfporterent les habitans de Guanica, elle eft elloi- gnee quatre lieues delacofte d’Oueft, & delaMetrapolitainexxx vers le Sud-oueft: c’eftvne petite villepeufortifîee,quifaitqu elle aparfoiseftépillee des François , il y a vne rade feulement en mer, encore fortincommode & malafteuree , oiila riuiere GuarahoÎ2i\tf2ifoix.\e. 50 La troilîcme villette s’appelle Arez^iho^ fttuee . enuiron à xxx lieues de la Métropo- litaine vers l’Oueft. ^ Il y a outre cela quelques bourgades dans cette Me,&plufieurs métairies , ( que les ' Efpagnols appellent les habitans félon l’ordinaire de l’Amerique , y font en aftes bon nombre ; car comme le Gouuerncur d’icelle Diego Menefes de Valdes racon- ^ te, l’an c I o I o x c ,ron y en contoit quinze cents capables de porter armes, entre lef- quels y auoit quatre vingts caualiers,fans les foldats que le Roi y entretenoit au nom- ■ bre de deux cents. 11 y en a d’autres qui font le nombre beaucoup plus petit, & efti-' ment qu’à peine pourroit-on trouuer en toute l’Me mille cinq cents perfonnes. 40 C H III. ïl tures 0^ cofte maritime de ïlfle S. I e a n, M o n e. El L E a peu de hautes pour fa grandeur , peu de rades , & encore mal afteurces : ? pource que la mer qui la ceinétducofteduNord , brife grandement , & toute- cette cofte eft expofee aux vents deBize;toutesfois afin qu’il ne lemble que i ayeomis quelque choie legerement, iepourfinurai la cofte, commençant dés Porto Rico,deduilant les hautes &rades,lelonl ordre qu’ils lontdilpoles :Son premier port" donc vers 1 Eft,s’appelle LuiJa,foit qu’il ait pris Ion nom de la rîuiere qui s’y defeharge, ouqu’ill’ait donné àla riuiere: L’autre eft Gamba iXcnoifiemel^i Cabecayeis le Capde 40 1 Eft, qui regarde le Nord,fur lequel fe drelfentles tres-hautes montagnes delLoquillo, ; delà la cofte le courbe vers le Sud, car en cette cofte qui regarde l’Eft , il le trouue leu- . lement deux hautes, .S". lacque dt' Tabucoa , leparésl’vn de l’autre, d’ vne elpace d’enui- roii trois lieues. De ce cofte de l’Eft de rille,il y a plufieurs Mes , appellees d’vn nom QOTiTLïmiïiFirgmes , delquelles nous parlerons cî-apres enfon lieu: il y a en outre au' Cap du Sud de ce cofte la petite Me Boyque, D’ici la cofte retourne vers l’Oueft,. regardant m f •-1%. y J OCCIDENTALES. LIVRE I. y regardant le Sud ; où le port Gayama Ce prefente le premier ; apres iùyuent les riuieres Neabon & Xaiùa ; & à Ex lieues du dernier le haure GadianilU , & vne lieue plus vers rOueftjkriuiere que l’on nomme de Mo/quitesy vn peu plus outre Ganica ; & fix lieues delàleCapderOueftderiiîe, ditCî:^^»i?\xC2.^ iîi?x acaufe I O dVne proche vallee abondante en excellentes Oranges, Limons & autres femblables fruRds : fuit demefme coftcl’emboucheure delariuiere 6'4;^^^tf,que l’on appelle. ^^,poiuTa commodité quiyeftde prendre de l’eau ; apres fuitle haure tout près de l’autre Cap d’ Oueft.qui regarde vers le Nord. De ce cofté de l’Oueft de l’IHe, eft fiti^é Mona , moyenne Ifle fur la hauteur de dix huid degrés ou vn peu moins, &: vn autre vn plus petite appellee Monico. La Mona eft prefque au milieu de l’efpace qui ^ona. eft entre S. lean & Hifpaniola , plus près toutesfois de la première j elle a vn peu plus de trois lieues de tour,c’eft vne terre bafle &p]atte,& f comme ie trouue qu’il a efté re- marqué des noftres ; falee &pierreufe,toutcsfois vnpeuplus haute du cofté duNord: elle eft inhabitée , combien qu’elle foit remplie d’arbres fruidiers , & qu’elle produife zo de fort bons fruids,notamment des Oranges remarquables pour leur bonté & groft feur. 11 y a aufli de ce cofté vne autre Iftette, ou pluftoftvn rocher nommé Zacheo,^m^~ zacheg^ Guahatacay\x cofté del’Oueft de l’Ifte Haîi bonico eft renomme, nourriftant de tres-bon poiflon,arroulànt de tres-fertiles champs & pafturages , & receuant plufieurs petits ruifteaux , le delcharge en la mer du cofté du Nord. Taquioxx laque eft proche de Monte chrijli, riuiere remarquable , qui ayant par- couru vne grande elpaçe de terre,emporte auec loi en l’Océan quantité de torrens 6c ruilfeaux. Voila les principaux fieuues de cette Ifie : car ce lèroit vne choie trop lon- gue de les delcrire tous : I adioufterarleulement ceux qui portent de l’or, entre lelquels lepremier eft Nicayagua,Qyxi coupe la Prouince de Cibao,sccç.vL2.m. trois autres plus pe- 4*^ tits Buenico, Coatenuco, & Cibo : le fécond Xanique venant de la melme Prouince, fur le- quel eftoit baftie laforterelfede S. Thomas, h-dhito-o lors que l’or fetrouuoit en abon- dance,maintenant totalement deferte. C H À P. . VL rDes V illss anciennement habitées des E^agnols s d de la Métropolitains S. Domingo. — D ^ CHris T OFLEColumb en fapremiere nauigation aborda cettellle enlaProuin- lîtrAu ce àe.Marien,\2.qno\\Q.CajJiqueGuacanagary gouuernoit,il y baftit vn petit fort des j^lanches de Ibn nauire, rompu par la faute des matelots dans le melme port nomme. Nauidad} 6c y ayant lailfé trente de fes gens fous le commandement de Dieoo e Arana , s en retourna en Elpagne : mais eftant en Ion fécond voyage retourné au 1^^^ lés gens tues,6c Ion chafteau bruflé par les Inliilaires,il refo- nt ïiilleurs, ôcnauigeant vers 1 0 ueft, quelques lieuè’s au defius de Monte 1 f \ ville ifab elle, 2X2. riued vnfleuue 6c d’vn commode port, combien que ma a eure a 1 encontre de la violence du Nord-oueft , en vn terroir fertile ôc d’vn air B ^ grandement ; ■‘"wirrr: îo DESCRIPTION DES INDES h.er.d.\, l.6.ch.\. JîerJ.r. L}.ch.s. grandement {àin,enuiron xx lieues de cette Prouince riche en or , & tout près de cette région champeftre que nous auons ci-deffus nommee U Vega Real. Mais cet-^ te ville aulli ne fut pas de longue duree, les habitans ayans efté peu de temps apres tranfportésà^. Domingo, non plus que beaucoup dautres,bafties en ce temps-là, tant par Columb qu’autres Gouuerneurs. Q^x Nicolas deObando édifia la ville de Verapa"^ en la Prouince Xaragua^ÇL^vos quhl eut deftruit par horribles tourmens & par vne inouye cruauté le CajftqueàtcoztoVtoninco, Anacoana, &les principaux de la noblefi'e j duquel mefchant aéle , encore qu’il delpleut grandement à Ifabelle Royne d’Efpagne , obando neantmoins demeura impuni. Le mefme baftitvne autreville en la contrée de Haniaguiaga , nommee Salua terra de la Zabana,on\iizon x 1 1 lieues du i o Cap Tuberon. Et derechef vne troifîeme en Maguana , entre les deux riuieres Neybam & Taquin, cpiilnommoL S. lo an de la Maguana. Apres vne quatrième en la Prouince ' Taquinio près du port de Brafifqu’il appella Villa noua de Taquimo, & la munit d Vn cha- fteau. Enfin il en baftit encore vne cinquième nommç,tBonoa,gnor:ç,s loin du lieu ou cft à prefent Cotuj ; lefquelles toutes s’en allèrent en ruine en peu de temps , fi ccn’eft l’Egiife de S. loan de la Maguana qui relie encore, &:les ruines du challeau de Viüa noua de Taquimo qui le voyent pour le prefent. Mais nous auons alfés parlé de ces villes de peu de duree. - S. Domingo ville Métropolitaine de cette Ille,fut premièrement nommee lors qu’on la baftilToit l’an c I D cccc xciv les habitans d’ifabelle la vieille y ayant lo efté tranfportés j elle fut edifiee fur la riue de l’Eft de la riuiere Ozama , qui lui fournift: d’vn fort beau port ; mais apres que plufieurs édifices de cette ville furent ruinés par vne horrible tempefte &: tremblement de terre l’an cia Id ii,Nicolas de obando Gou- uerneur pour lors de cette Ifle , la tranfporta à l’autre collé de la riuiere, d’vn confeil mal digéré, comme il femble à quelques-vns ; car elle eft rendue mal faine, à caufe que le Soleil en fe leuant y chalfe les vapeurs efleuees dufleuuelanuiél, & les habitans font contraints n’y ayant point de fontaine d’aller quérir leur eau pour boire outre la riuie- re,par fois auec grand peril,fur tout quand elle eft enflee oupar les vents ou par la ma- ree. Lavilleeftfîtueeen lieu plat,orneede fort beaux édifices prefque tout de pierre, & ceinte de muraillesjelle eft enuironneede larges campagnes & d’agreables paftura- 5 o ges,on l’eftime vne des meilleures villes de tout le nouueau monde. En icelle outre le Gouuerneur de toute l’Ifle; les Auditeurs de la Chancellerie du Roi.le Threforier autres officiers royaux y font leur refidence.Elle a vne Eglife cathédrale, ( dans laquel- le prefide l’ArcheuefquejayantpourSuffragansl’Euefque de la Conception de la Vega dans là mefineifle ; l’Euefquede S. loan de Porto Rico ; l’Euefque de l’Ifle de Cuba ,• l’E- uefque de Venezuela,i\t\itt vis à vis en la Contipentej & l’Abé de lamaique ) il y a quel- ques Monafteres de Iacobins,deCordeliers,& de la Mercijdeux cloiftres de Nonnains: vne Efcole où on enfeignelaGrammaire,dotee de quatre mille ducats,& vnHofpital qui en a vingt deux milles: elle a aufli monnoye: & pour la fin vn chafteau vers le coin Occidental du port affés fortifié félon la mode de ces pars. Elle fleurilToit grandement 40 au fieclepafré,pour la commodité du trafic, & pour l’abondance des nauires qui yarri- uoyentimais apres que laNouuelleEfpagne& peu de temps apres le Peru commen- cèrent d’eftre cognus des Efpagnols,êlle perdit peu à peu fon luftre, le nombre des ha- bitans & le commerce y eftantdiminué,de forte qu’àpeinefcommeles Efpagnols con- feftent ) contient-elle fix cents familles d’Efpagnols 5 & beaucoup d’auantage de Nè- gres, qui demeurent tant en la ville qu’és fauxbourgs, plufieurs Mulates f qu’ils appel- lent j & auffi des naturels desCanaries prefque en auffi grand nombre que lesEfpagnolsj & on ne croit pas que le nombre de tous les habitans paffe de beaucoup deux mil telles. L’an cia la lxxxvi cette ville fut prife,& la plus grande partie d’icelle ruineepar Trançois Drac , renommé Cheualier Anglois en cette maniéré : il defcendift à terre j o vers l’Oueft de la ville enuiron douze cents fbldats , qui s’eftans auancés en bataille, depuis les huid heures du matin iufques fur le midi , à la veuc de la ville , mirent facilement en route toute la caualerie Efpagnole qui les vint rencontrer; delà s’e- llans diuifés , ils attaquèrent deux portes de la ville , lefquelles ils faifîrent auec telle diligence , nonobftant les coups de canon qu’on leur tira fans grand dommage, que les Efpagnols furent contraints de fe retirer, s’enfuir par la porte qui eftoit de l’autre OCCIDENTALES. LIVRE 1. n l’autre colle de la ville. Le butin y fut fort petit pour la renommée 8^ grandeur de la ville, feulement quelques beaux meubles & quelque vaifelle d’argent y futpillee par les foldats,peu d’argent & d’or monnoyé y fut trouué, mais grande quantité de mon- noyé dccuyure. Les Anglois s’alTemblerent incontinent dans la grande place de la ville, n’ellans pas capables de garder tous les endroits de cette grande ville ; 8r ayans prins le chafteau que les Elpagnols quittèrent au premier alfaut , eflans maillres de toute la ville, ils latindrent vnmois entier} & apres enauoirrafé la plus grande part, &receu argent pour efpargner le relie, ils fe retirèrent. Entre les chofes que les Anglois y ont remarqué,rEmblerne trouué peint contre vne muraille eft la maifon du I O Gouuerneur , eft digne de mémoire, relique excellente de l’ambition & arrogance Elpagnole. C’eftoitvn Globe terrefte peint,du milieu duquel fortoitvncheual ayant vne bonne partie hors de la périphérie , auec cette fentence, Non fufficit Orhis^ c’ell à dire,le monde m’ell trop petit. C H A î?. VIL rejîe des Villes de cette J/le amourd^’hui habitées des 'B/pagnob» Le relie des villes de cette Me n’ell pas de grande conlcquen ce, nous les pourfuL urons ici par ordre. Premièrement Salualeon, petite villette en la prouince <^»^j,cnuironxxviii lieues de S. Domingo vers rEll,elle a quelques mou- lins à luccre dans fon circuit, force beaux pallurages quinourrilTcnt grande quantité de bœufs & de vaches. Apres Zamo/a,pï:e{qu.e. à deux lieues de la mer,au fonds du port,qu’on peut à bon droit dire le premier entre les grands & àfiéurés hautes du nouueau Mon- de; car l’eau de la mer y entrant par vne eftroiteemboucheure, eftreceuë dans vne grande baye, comme vn golfe de mer,parfemee de plufieurs petites Mes; c’eft vn haute fi alTeuré qu’il n’eft pas debefoin d’ymoüiller l’anchre; cette ville a autresfois fleuri en abondance d’habitans, qu’on dit y eftre pour le prefent réduits à fort petit nombre : Elle a vne Eglife cathédrale & vn Euefque , SuflPragant del’AfGheuefque de j O Domingo ; & vn Monaftere de Frétés Mineurs : elle eft gouuernee par le Lieutenant du Gouuerncur del Ifle. Les marchandifos qu’on a de couftume d’amener delà, font des peaux de bœufs & du fuccre. A trois lieues delà ville, il y a de tres-riches mines de cuyure,quife tire auiourd’hui de fort hautes montagnes, que lesEfpagnols nomment pour cet effed Sierras de Cobre. Proche de cette- ci vers l’Eft à enuiron xxx lieués ,efl; la v'ûlzttoBaracoa, bafliepar le mefine FÉ’//^^^,au cofté du NorddeJ'Ifle,à x ou au plus à x 1 1 lieues du boütleplus Oriental de l’Ifle & vers FOueftd’icelui : la xiuicre Mares ne pzffc gueres loin de la vil- le profonde en fon emboucheure de v i ou v 1 1 1 braires,plus auant de v, fur fon riua- gedu code del’Efl: s’eflêueiit deux montagnes, le cofte Occidental efl: fermé par vn 40 certain Cap , ayant le fommet plat , qui s’auançant vne petite eipace en mer , fait vne baye, qui eft le port de cette villejmais feulement capable de petits nauires, expofé aux vents de Nord-nord-oueft & Nord-oueft , & par ce moyen fort incommode : Les forefts proches de cette ville portent de fort bon hebene , & comme les noftres rap- portent, du Brafil aufli. Latroifieme edSan Saluador -, ou Bajamodn nom de laProuince, baftie par lemef- me VeUfque , xxx lieues ( comme Ouiedo aifeure) de la ville S.Iacques vers le Nord- oueft , qui furpaflé en bonté d’air , fertilité de terre , & én plaines fort belles toutes les autres villes de cette Ifle: elle eft au milieu du païs , mais on y tranfporte les marchan- dilesdelamerfurIefleuueC2jÿ/c,quelle a vis à vis d’elle. On met entre les merueilles ,j O de cette Ifle certains cailloux , de diuerfes grofleurs, mais tous d’vne parfaite rondeur, de forte qu’on s’en pourroit feruir deboullets à canon; on dit qu’il s’en trouue telle quantité fur le riuage dufleuue qui porte le nom de la ville, qu’il femble qu’ils y foyent pleus du ciel : Ouiedo eferit qu’il s’en trouue en vne vallee marefeageufe, qui eft pref- que au milieu du chemin entre cette ville & S. lacqnes.^ Porto del Principe s’attribue le qûatrieme lieu, ville auec fon port, ( fort prifé des ma- riniers j fituee au cofte du Nord de rifle, à xl liexiës de S. Jacques vers le Nord-nord- C oueft. i8 DESCRIPTION DES INDES oueR. Gueresbin delà il y des fontaines de bitume jdelquelles Momrdes fait men- tion au cliap. V. En Cuba ( dit-il) fe trouue des fontaines proche du riuage de la mer* quiiettent du bitume noir comme poix, d’vnemauuailè odeur, duquel les Indiens fe feruent contre les maladies froides j il fert auxElpagnols pour empoifler leurs nauires* ( pource qu’il éft femblable à la poix nauale ) mais il la faut mefler auec du fuifpour i’eftendre mieux. le croi que c cil la Naphte des anciens, de laquelle Pofidonim efcrit qu’il y en auoit deux fontaines en Babylone, vne de noir & l’autre de blanche. Nous nous feruons de ce bitume aux maladies de matrice , qu’il jpreferue de fuffocation,. eftanthairé ouappliqué àicelle. Il eft chaudau fécond degre & humide au premier. en fait auffi mention au liu.xvii ch. vJii,& encore qu’il ne nie pas qu’ilnecou- i o le par fois , toucesfois il dit qu’on le tire le plus fouuent hors de terre par morceaux. Au codé du Sud de l’Ille eft S”. Spiritm d’enuiron x l ou l maifons, pluftoft village quevilie,L lieuësouplus delaville de -S. vers l’Oueft, à quelques lieues duriua- gejcn vn terroir fertile & agréable, fiirlariue d’vnfleuue afféseftroit, que i’enten eftre appellé des habitans.S'^^y ou feulement nauigable auec des barques ou chalou- pes : ceux quiviennentde S. lacunes, deBajamon^^de porto delPrmcipe-,2}L\ms\HauanA ont couftume de pafter par là. Dumefmecoftédavilledela a autresfois fleuri, baftie par le meftne Velaf- I X ou X lieues du port vers FEft, tout ce cofté eftoit fort rempli d’habita- tions d’Indiensj mais pour l’incommodité du port, & pour plulîeurs naufrages y adue- 20 nus , la place eft prefque deferte, & eft auiourd’hui feulement cognue par le nom du port. C H A P. XII. Hauana principale Ville O* port de cette Ifle, IL refte que nous parlions d'Hauam,YÛlc fltueedu cofté du Nord del’Ifle, vis à vis delaFioride,à XXIII degrés ou enuiron ( comme les plus expers pilotes afleu- rent ) au Nord de la ligne. Le port eft grandement renommé , & tellement fait &: fortifié par la nature & l’induftrie , qu’il eft eftimé de plufieurs imprenable. Car rece- 3 o uant la mer par vne tres-eftroite emboucheure , mais aflfés profonde , il s’eflargift au dedans en vne grande baye , les riuages s’efloignans infenfiblement l’vn de l’au- tre , & puis apres fe courbans en vn, il eft capable de mille nauires & plus , & tel- lement défendu à l’encontre de l’incertitude des vents &: fubites tempeftes , par les montagnes qui l’enuironnent , que les vaifleaux y font au coi fans qu’ils ayent befoin d’anchre ni de chable , comme dans vn fein aflTeuré . Au deux coftés de l’emboucheur'e il y a deux pointes , & fur icelle deux forts chafteaux , tellement fortifies & munis , qu’ils peuuent empefeher le paflàge à la plus grande flotte, du monde. 11 y a eniceux grande quantité de pièces de fonte, & vnegarnifon afles forte ; du cofté de l’Eft au deifous du chafteau il y a vne haute tour, dans laquel- *;j.o le il y a toufiours des fentinelles qui voyent aifement venir, les nauires de la mer, & par vn fignal cognu , aduertiflent la garnilTon & les habitans du nombre d’i- ceux comme d’vneguarite. La ville eftaufli defenduë d’vn fort chafteau , n’eftant au refte ceinéte d’aucunes murailles. Ce troifieme chafteau eft beaucoup plus grand que les autres , & tellement oppofé au déuant des nauires qui entrent parl’e- ftroite emboucheure du haure, qu’il leur peut brifer la proue comme les deux au- tres les coftés. Toutes les flottes d’Efpagne qui viennent de la terre ferme de r Amérique Méridionale , de la Nouuelle Elpagne , & des Ifles , chargées de diuerlès marchandifes , & d’abondance d’or & d’argent , ont couftume de s’y retirer , ôc d’y demeurer pour y prendre leur eau & leurs viduailles necefl'aires, iufques à ce jo quelles y foyent toutes ou la plus grande partie alfembleees , & delà au mois de Septembre ( au plus tard ) enfcmble , ou diuifees en deux flottes , elles gai- gnent par le deftroit de Bahama , la mer du Nord & s’en vont en Elpagne. La ville a outre lagarnifon ( de laquelle le nombre des foldats eft incertain , encore que le Roi y enuoye la folde de mille ou plus enuiron trois cents familles d’Ef- pagnols, plufieurs Portugais , & yn grand nombre d’efclaues. Le Gouuerneur de toute OCCIDENTAIES. LIVRE I. S, de toute I Ille j & les autics Officiers royaux y font leur ordinaire detneurc Oiioi plus ? elle fiirpaffie non feulement les a^tres villes de cette Ifle , mais prefqûe^ffi toutes les autres de l’Amerique, tant en la grandeur & lèureté de fon port, qu en ri- chclfes & commerce. Les forefts voifmes leur fourniffient vne grande abondance de fort bon bois, duquel ils fe feruent à baftir des nauires, qui leur feroit vrie grande corn modité , s’il neleur falloir point auoir d’ailleuts &mefme de l’Europe, pÆfque tout le refte qui eft requis pour les appareiller. On à auffielfayé à trauailler quelques mines de cuyiire^guéres loin de la ville; niiiis fânS liiccéSj foit pource (|ue la, veine a.defFailli^ ou pour 1 ignorance des ouuriers , ou enfin pource que les delpens fiirpafioyent le l O profit. ^ r ; C H A P. XIIL H mes cojle maritime de l’ijle de Cuba du cofté du Sud. rov s commenceronsàdcfcrirelacoftede lameraucoftéduSud&duport I de s.lacques,^ le cofté quelle court à l’Oueftiufqucs au Cap Santa Cruz.. De ce Gofte il y quelques hautes & ports que nous ne deuons pas obmettre, le premier defquels cft appelle des mariniers Guama SeuilUM pied des montagnes qué nous auons nommées ci-delTus Sierra^ de Cobre-, ouïes noftres auoycntde coùftu- AO ftume de fe retirer, auant qu’il fuft défendu aiixEfpagnols par vn feuere Edit, de trafi- quer auec ceux de noftre nation& autres eftrangersjles pefeheurs de S.Iacques auoyeiït de couftume dy porter les tortues qu’ils aüoyentprifes,pour les vuider & feicheràu boleii ; c elt vne place pour la fin tres-propre aux pirates. Suit en mefme collé porto ^ornllo petite baye, profonde tant en fon emboucheure qu’au dedans enuiron trois brades : & tort près delà fe voit vne haute montagne, vulgairement dite d aran Tar^ ^«/^,de kquelleiufques auCap Cmxily a xxx lieues, & vne autre vn peu plus balle, quifevoittoutesfoisdefortloinpardelTus les autres,rappelieelepetitr^rL;.) de laqudle mfques au mefme Cap on conte Xi i : entre ces deux montagnes ell fitué le port Spmtus^ x x lieues du port .y. lacques vers l’Ouell, félonie conte de Herrera, 50 Ce Lap ell aife a coçioillre, pour ce qu’il s’auance en mer par vn col graille & ef- ga , yerd d vn oas & efpais bocage 1 duquel quelques balfes ou bancs s’auancent en mena quoi es mariniers doiuentfoigneufemcnt euiter: il y a vne doute entre les Au- t eurs quelle eft fa hauteur,lesvns ne lui donnent que xix degrés & xxx, ou au plus X L forupules. Les autres lui en donnent iufques à xx , entre lefquels ell Herrem & quelques routiers de mer quenous auons fuiui en nos chartes. Palfé ce Cap , la colle fe courbant vers le Nord fait vne grande baye, fort commode aux mariniers pour plu- heurs ports & anchrages qui y fontj fouuent fréquentés ci-deuant par les nollres pour ' ^ innombrables rochers , &mul- titudes d nies qui y font,fontfort mal alfeurees : on appelle ces Mes Catos, mcc leur 40 hiinom particulier, quiferoit long à reciterici. En outre ce retour de la colle vers le JMord,oucre quelques ports peu renommés, quelques anchres, recoins & petits Caps, a vn celcbrehaureqi^lonappelleJ/^;?jr4;?/7/^,dans le recoin que fait lacoHefe cour- LTdn d ^ Oueffiou les nauires peuuent anchrer feurement,ellant couuer- tes au vent de bud par le moyen d vne petite Me. nwk Sifin 7 ® feurement, grande perte, apres auoir coutes- ' EfDamok’rJ”^ preuue de la vaillance Belgique ; & la viaoire ne fut-pas mefme aux rrl^noTr ^ •’f ? i y ™ fi filrieux & ôpiniaftré combat en- er. ErnarnoTc Abraham^ Verne commandoit. & le Vifadmiraldes JO pagnols.qu ds furent creiies & emportes tous deux par la violence delà pouldre. Il feullmenrcLaXt les autres /ï««e..pLteriuiere eu ement capable de petits vaiflêaux, riche en commerce de peaux de bœufs ■ & 3ore envoient recoin de mer i fort près delà fort enmerlariu Je Came, & autres pett nombre l’Oueft.du long de laquelle s'eftendentvn grand nombre d llles ( & la mer mefme y eft fort plate ) entrecoupées de plufieurs cànaux C % comme zo DESCRIPTION .DE_S INDES, comme de fibres, les Efpagnols les appellent lardm de là Reymdm xx i degré ; ces Mes rochers s’eftendentiurques au port de la Tr/W/Z. . Dix lieues ou plus à l’Oueftjplus outre on rencontre port admirable commeTonditjcar receuant lamerpar. vne eftroite emboucheure , il fe fait au dedans vne fort fpaeieufe baye, s’eftendant pref. ques X lieues en long , & vn peu plus eftroite , rernparee tout autour de hautes mon^ tagnes, qui la rendent parfaitement bien guarantie à l’encontre de rincertitude des vents , c’eft vne place fort aifeuree pour les nauires , qui n’ont que faire d’y moüiller ranchre,mais de s’y amarrer feulement. Ceferoit vnport qui n’auroit fon pareil fi on n’y alloit point auec fi grand danger. Ce port eftantpaifé on trouue deux petites Mes, qu’on appelle les deux Germanas; iufqués au Cap dit vulgairement CamarcoM deftroit i <3 eft fort d-angereuXjpour les bafles,Mes,& quantité de rochers, il finift dés l’Me de Fines vers le Sud : Et le Cap de l’Oueft de cette Me ouure vne autre baye , la cofte fe cour- bant doucement &: remontant derechef au droit du Cap de Corrientes ; ce Cap de Cor- rientes eft moyennement efleué, remarquable par vn fable blanç & vn bocage verd, fur la hauteur de x x degrés & x l fcrupules. Delà 6n va au Cap renommé S, Anthoi- ^(?,à XII lieuèy ou enuiron delà la cofte s’éncHnant vers le Nord-oueft. C H A P. XIV. CoHe maritime O* Haures de Hlfte de Cuba yers le l7{ord. lÔ Le Cap de S. Jnthoine dernier de cette Me vers l’Oueft, eft grandement remar- qué de ceux qui fréquentent cette mer. Car tant ceux qui vont en la Nouuelle Efpagne,que ceux qui en ireuiennent ont couftume de le recognoiftre & de dref. fer félon icelui leur cours } pareillement ceux qui viennent de la terre ferme de KA- merique Meridionalele cherchent ;& enfin tous ceux qui vorit a Hamna lefaluent de près. Car c’eft vn Cap fort bas, &prefqueefgal à lamer,&quinefepeutvoirquepar vn petit & efpais bocage d’arbrifleaux ; au derrière il y a vn aftes bon anchragejau défi- fus vneftang d’eau douce &c bonne à boire, aftes commode pour s’y fournir d’eau quand la neceftité le requiert. De ce Gap là cofte fe courbe premièrement lentement vers leNord fans aucun haure, laquelle les mariniers doyuent euiter,à caufe de la quan- j o tiré de bancs & rochers, que les matelots pour la reftfemblance nomment los Organosy faifant voile vn peu plus vers le Nord-oueft. Apres cette cofte le riuages’eftend par vne longue fuite vers i’Eft, entrecoupé deplufieurs Caps & bayes, dans quelques-vnes defquelles il y a des alTeurés haures ou anchrages,& entre iceux quelques-vns ont des noms comme celui^qu’on nomme de Cabanas,^ i x lieues de Hamna vers l’Oueft, pro- fond du moins de trois braftes en fon fonds ; & celui de Marien v i lieues de Hauana. aufti vers l’Oueft, lequel on recognoift par vne montagne plate aufommet en mode de table, d’où il a prisfonnom: & autres vers l’Oueft de ffà//4!>?ii,defquels nous auons parlé ci-deflùs. A XXX lieues ou comme il a eflé mieux remarque par les noftresjà xvi ou au plus 40 a X X de Hauana vers rEft,fe prefente vn autre port fort fpacieux, lequel on nomme de Matanzasyce^ à dire des meurtres, ainfi furnommé par le vulgaire, dont la caufe m’eft encore incognuë, qui n’eft nullement à comparer au port de Hauana , mais qui pour- tant ne cede en rien à tous les autres meilleurs de cette Me,d’vne aftTés bonne profon- deur, & qui reçoit la mer par vne large entree,&où il y a vne ou deux riuieres qui y en- trent,qui fait qu’il eft fort fréquenté, tant pour la commodité d’y prendre de l’eau, que^ pour l’abondance des rafraifehiffemens qui y font. Il y a vne montagne fort haute, qui a le fommet en forme de pain,dans vn païs autrement plat, ( d’où il eft appellê des mariniers el fan de Matanzas) s’efleuaiit affés près de ce port proche du tiuage vers rOueft,quimonftre aux mariniers le chemin vers icelui. lufques ici lacofte&: haures ont efté aftes afteurésjmais plus outre vers l’Eftjlamereft pleine de batures,la cofte deftituee de haures, & remplie prcfque d’vn nombre infini d’ifles, rochers de bancs de fable, ( que les Efpagnols nomment Jardin del Rey J la derniere defquelles eft l’Me obo- haua. En mer il y a des baffes & bancs : entre lefquels coule vn canal d’vne moyenne profondeur, & qui n’eft nauigable que de iour, & encore auec vne grande pruden- cejmefme par les plus expers, A enuiron il OCCIDENTALES. LIVRE 1. A enuiron cinquante lieues de Matanza vers l’Eft, Herrera met le port Iucamca,-SL\i- près d’vnepointe du merme nom àxx degrés &xxx fcrupules au Nord de la ligne, comme Oniedo oblerue. Le porr del Principe félon Herrera efl: à v 1 1 1 lieues de ceftui-ci vers le mefme co^ lié, duquel la cofte fe tourne doucement vers Sud-eft &: tantoft faifant quelque baye, tantoft auançant quelque pointe enmer,s’eftend ainli iufques au port de Baracoa. 11 y a plufieurs Ifles en toute cette fuite de cofte , lefquelles ie pafle exprès, pource que les Autheurs n’ont pas allés exaftement déclaré leurs noms, fituations & diftan- ces, & mefmes ceux qui en ont defcrit le cours & la fuite du chemin, ne s’accordent I O pas bien entr’eux. • On conte du port de Baracoa iufques au Cap May zi, qui eft le dernier de cette Ifte vers l’Eft x ou xi i lieues. Ce Cap palfé, la cofte retourne vers l’Oueft , & apres auoir fait quelques bayes & ports, nous ramene au port -5’. Jacques d’où nous eftions fortis. Iufques ici nous auons traité des hautes & cofte, maintenant il nous faut dif- courir de quelques petites 1/1 es qui font auprès & autour de Cuba. Faifant voile du Cap. .S"* Croix yqvs leSqd-ouefton renconte les Mes Caymanes,\t% Saunages appellent ainli les çrocodilles,qui font trois en nombre : la première def- quelles & qui eft la plus petite, eft diftante du fufdit Cap enuiron de xxvii lieues, &: delà ligne, comme il a efté remarqué parles noftres xix degrés . & xlv fcrupu- 20 les ; de cette-ci à celle du milieu il y a v i liéuës , cette-ci s’appelle d Vn’nom propre Braccas, elle eft bafte bc prefque elgale à la mer, ayant v lieues de circuit; il y terrift or- dinairement quantité de tortues de mer, depuis le commencement d’Apuril iufques à la lin de Septembre; elle eft enuiron xxx lieues du Cap àclamaique que l’on nom- me De eette-ci iufques àla grande ( dite vulgairement el Gran Cayman ) il y / a X 1 1 lieues ; elle eft de la ligne ( comme il a efté obferué par les noftres ) à x i x de- grés & xx XV Fcrupules , c’eft vne terre bafte, &: couuerte de rude buiftbns ; il ne s y trouue aucun animal ft ce ne font des Tguanes,&c vne certaine petite belle aftes fembla- ble aurenard.viuant d’œufs de tortue, qui ontcouftume de terrir en cette Me en gran- de quantité, du mois de May iufques en Oélobre, pour y efclore leurs petits dans lé 5 O fable. Elle eft d’vn alfés facile accès , la mer qui l’enuironne eftant aftes profonde , 6c n’a ni rochers ni baftes ; du collé du Sud auprès vne baye de fable,il y a vn bon anchra- ge. En outre ces Mes ne fontcultiuees ni habitées d’aucun, &: prefque dutoutdefti- tuees d’eau douce, ("li ce n’eft que quelques-vns ont efcrit qu’il s’en trouuoit dans la grande en quelque endroit bonne à boire; mais elles font infedees pour laplufpart de marais falés,5c de profonde boue. L’Ille de Pinos eft du collé du Sud de Cuba , & dicelle feparee par vn deftroit fort peu profond, elle a x lieues de long &: v i ou v 1 1 de large, à xlviii lieues de la grande CaymanevQïs Nord-nord-oueft xi i de Cap de Corrientes vers l'Eft. Au mi- lieu de rifle s’elleuent quelques montagnes , plate au relie , bocageufe & fournie 40 d’eau douce : incultiuee & inhabitée, mais abondante en beftail pour la fertilité de fes pafturages , qui fait que les Elpagnols la vilitent en certain temps : elle eft à x x i de-* gré du Nord de la ligne. I A M A I Q^V E. C H A P. XV. Situation de ïlfle lamaique, Viües, CoHeî^ Haum êicelie, VE R s 1 Oueft d Hijpaniole ybt vers le Sud de Cuba eftfltuee cette Me que Chri- ftolle Columb nomma anciennement S. lacqués, 6c maintenant eft cognuë par le nom de lamaique. Son milieu eft entrecoupé par le dix huiélieme degré de la hauteur du pôle du Nord , encore que HerreraPre Ouiedo elcriuent autrement de la hauteur, 6c quils 1 enferment entre les dixlept6c dix huiélieme. Elle eftlcparee de C^^dtparvneelpace de xx lieuës,ôc autant d’iï^^;^/tf/(?,combien que la mette en fon hiftoire diftante de x x v lieuës anciennement les Elpagnols pafte- rent cette elpace auec deux canoas , par vne téméraire hardieflfe , mais d’vn heureux C 5 fucces. < DES C RÎPTION ïDES INDE S fucces, apres que Columb, reuenaht delà terre ferme de T Amérique auftrale, eut rom- pu fonnauire près de cette Me. Oneftime qu’elle a cl lieues de tour , longue Eft de Oued: de L,&de xx ou plus de large. Cette Me excelle par deflus les autres en bonté d’air de de terre^eile eft: en fa plus grande partie plate & pleine de campagnes^dorinanc en abondance toutes les choies qui font necelîaires a la vie de l’homme par vne agréa- ble fertilité .-nourricière graciefoe d’vne infinité decheuaux, bœufs, vaches &pour- ceaux,elle ne porte que peu ou point de froment, mais enfonlieu vn telle abondance de Tuca, diiquèl on faille C«^«É',qu’onlapeueftimer à bon droit le grenier des autres Mes. Le coton y croift par tout en grande quantité, ( d’où vient qu’on y tift plus qu ailleurs plufieurs eftoffes ) elle a aufti bien que les autres les fruids, quel’Autheur r q de la nature y a dés le commencement plante par fa bénignité, ou il a fait apporter d ailleurs par 1 induftrie de diligence des hommes. Elle eftoit au commencement quand les Efpagnoîs y arriuerent cultiuee de plufieurs milliers de Sauuages,qui font y a ia long temps deffaillis , tant par la cruauté de leurs maiftres, que par leur propre lafeheté. , ■ Il y a peu de villes en cette Me pour fa bonté, & encore peu peuplees : On en conte feulement auiourd’hui trois, la principale defquelles efti’e«/7/«?,baftie au cofté du Nord dei’Me vers le bout Occidental d’icelle, affés près delamer.-il y a vne Eglife cathédra- le,qualifiée du tiltre d’Abbaye,oU pluftoft anoblie par fon Abbé Pierre Mârtjr Angleriy diligent eforiuain des affaires des Indes. La plus proche d’elle vers l’Eft à enuironxii 2,0 lieues de chemin,eft la ville de Melilla , remarquée par le naufrage de Columb , quand reuenant de V ?raguâ par vne infortunée nauigation, il aborda là. La troifieme ville eft OriJlan’-jÇiXMZç. du coftedu Sud de 1 Me, tout près du Cap de l’Oueft d icelle, à x i v lieues de la ville àcSeuille. Il ne refte prefque plus pour le iourd’hui aucune mémoire de la ville de U V gu-, de laquelle les Columbs portoyent anciennement le nom de Ducs, ni des autres colonies , le nom defquelles on lift encore pour le iourd’hui en quelques chartes Géographiques. Les Anglois fan cîdId xc vi fous la conduite du Cheualier^;?/^w»f 5 apres auoir pris la principale ville, fubiugucrent la plus grande partie de î’Me, mais ils ne la tindrent pas long temps, ains ils l’abandonnèrent de leur plein gré. jq La cofte de cette Me du cofte quelle s encline plus vers l’Eft avance en mer vn Cap, r\QV[\mk Morantey dés lequel elle fe courbe peu à peu vers Sud-fud-oueft, & fait quel- ques bayes : elle court droit vers 1 Oueft iufques au Cap àcFalcony duquel derechef elle retourne versleNord-oueft iufques au cap del Negrillo,c^i eft au boutOccidental: delà derechef la cofte retourne vers rEft,elle a de ce cofté du Sud plufieurs anchrages &ports, le principal defquels eft celui de «///(?,& le plus proche de ceftui-ci celui de Melille,tû.oignè du premier de x lieues vers l’Eft , le troifieme lanta à x lieues du der- nier,& autant du Cap Morante^tts V Ovicdc, commQ Herrera, a remarqué; Ouiedo ad- ioufte à ceux-ci Anton de defquelles les interualles font incertaines. En outre combien que cette Me ne cede rien aux autres en fertilité de terre, beauté 40 de bocages, & en abondance de toutes chofes, toutesfois à caufe de ladiffette de ha- utes & incertitude defes anchrages,on l’eftime de difficile accès : car elle n’eft auoifi- nee ou ceindc de plufieurs rochers de Mes diffamées de naufrages , à caufe de la quan- tité des baffes qui y font: fort proche & feulement feparés de v lieues vers le Sud font les dangereux rochers nommés les Hormiges'. apres les Vimres, certaines petites Met- tes enuironnees de baffes de de rochers couuerts, à vïi lieues de lamaiq^ue vers le Sud : Serrana en eft plus loin, fur la hauteur de x v degrés,compofec de trois ou quatre Mettes, enuironnee d’vne meirpeu profonde & pleine de rochers ,& qui n’ont iamais efte vifitees qu’auec le dommage de ceux qui l’ont entreprins japres SerranilU , feparee de la Serrana vers le Sud-oue,ft par quelques canaux, & eftenduë de l’Eft à l’Oueft for la 5© hauteur de xv degrés &xxx fcrupules, non moins ceindeque l’autre de multitude de baffes &rochers: le ne fai pas ici mention des dangers plus efloignés &: qui font plus près de ia Continente,encore qu’ils ne foyent pas moins à craindre que ceux que nous venons de dire à ceux qui courent cette mer. Du cofté du Nord,afin quelle n’ayc partie desfournie de pefiî, il y a vn rocher lequel les pilotes par aduertiffement appel- lent Ceci OCCIDENTALES. LIVRE L Ceci foit dit de laquelle feroit la plus commode de toutes pour les mark niers,!! eftoit qu’on l’eftime dVn Ci difficile accès , veu qu elle eft fituee comme au mi^ lieu des grandes I/les & de l’Amerique auftrale. L V C A Y E S. C H A P. XVL Situation ^ qualités des Ijles de Lucayes. I O TT L y a vn grand nombre de petites Mes , mais incertain , d’entre lefquelles celles I qui s’eftendent Hijpuniole & de Cuba, s’appellent ordinairement d’vn -^nom commun les Lucayes ^ de la plus grande & de la plus Septentrionale de tou- tes : quelques-vns les diuifent en trois clafies , en la première ils mettent celles qui s eftendent de Tlfle de Bahama ^ de Ton deftroit vers l’Eft; en la fécondé celles qu’on nomme vulgairement d’vn nom commun Organas, Martyres Caiûs , qui n’eftans que rochers ouIflesdefable,&pourlaplufparte%ales àlamer, deçoiuént aifement, les mariniers, & Ipur apportent fort fouuent de l’infortune : & en la troifieme les Tor- tugues. Quant à nous nous en difeoureronsfuiuant l’ordre des lettres de leurs noms, la charte Géographique demonftreleur difpofition & connexion, lo Ahacoa eft au milieu de ces baffes & bancs , aufquels on a donné le nom de l’Ifle BiminheXlt eft longue de x 1 1 lieues & vn peu moins de demie de large. proche de la precedente vers l’Eft, fa grandeur eft incertaine, &aefté vne feule fois amenee en hiftoire par Anthoine de Herrera. Amaguaio trouuee par lean Fonce de Leon ^x.ocSiQsTaguna. Amana ou Amaguana fituee prefque à l’Oueft des Mes Caicos , les hiftoriens ne di- fent rien de fa grandeur. Bahama longue de xi 1 1 lieues , & large de vin comme Herrera affirme, delaquel- le le deftroit a pris fbn nom , le plus rapide de tous ceux qui fè trouuent au nouueati Monde ; car il roule fes flots d’vne fi vifte courfe vers le Nord entre le Continent de la 3 O Floride , & les bancs & Mes qui font de l’autre cofté, qu’il trompe les vents & les na- uires vogans à pleines voiles. On veut quel’Ifle foitdiftante de la ligne de xxvi 1 1 degrés. Le deftroit de Bahama a de largeur x vi lieues , & en longueur depuis le Cap de la Eloride vers le Nord XL V ou VI lieues. Bimini eft au milieu des baffes & bancs à qui elle a donné le nom , de v lieues de lar- ge, anciennemeiitfort curieufement recherchée par lean Ponce,tyicd\cnt tefmoigna- ge de la crédulité Efpagnole; car il s’eftoit laiffé perfuader par les Indiens , qu’il s’y trouuoit vne fontaine, l’eau de laquelle eftant beuë,faifoitrecouunr aux vieillards la ieuneffe paffee : 1 Me, fi nous en croyons ledit eft couuerte d’vne agréable foreft & arroufee de fontaines d’eau douce. 40 Caicos eft cornme vn rond de certaines Mes entrecoupées de plufieurs canaux, &: ceinftes du cofté de l’Eft au long & au large d’vne mer pleine de baffesd’vne defquelles, qui êft la plus grande de toutes , eft par excellence appellee Caicos-.vios Hollandois qui l’an cId Id cxxiii y moüillerent l’anchre , du cofté qui regarde le Nord, prifenc affés l’anchrage : la mer affés près duriuage y eft profonde de x à xii braffes , & fi creufe quand on en eft vn peu eftoigné,que nulle anchre ni peut atteindre le fond. Les Portugais auoyent rapporté qu’il s’y trouuoitabondancede fel,ce quiadeçeu les An- glois & les noftres quelques années y a, carie recherchant curieufement, tant en la grande qu’aux prochaines petites Mes, ils n’en trouuerent pas le moindre grain qui foit, combien qu’ils y trouuerent plufieurs eftangs & aires fort propres pour y conge- 50 1er du fel : celle qui eft la plus Orientale de toutes,cft fur la hauteur de x x i degré U XXIV fcriipules,la plus Occidentale xlv fcrupules. Ciguateo à l’Eft de Lucanyoneque eft fur la hauteur de xxvii degrés, (comme dit Herrera ) on dit qu’elle a de circuit x x v lieues. Conciua eft vne petite Me affés près du Caicos , &fans doute vne dïcelles , à l'Eft de Amana. Curât eo n’eft pas beaucoup plus grande, fituee au cofté du Sud Ciguateo, ÇwddL hauteur 14 DE^CRIPTÏONÎ DES- ÎNDÈS hauteur dé xîc vi degrés, comme Herrera dit : Sé comme les noftres oüt depuis peu obferuéjelle eft diftante àc G itaninia d’enuiron vin lieues vers l’Ouefl, de la ligne XXVI degrés & x fcrupules, il s’y trouue de l’eau douce en des eftangs. Guanaham la première îfle de routes celles du nouueau Monde trouuee par Chri- ftofie Columb, & appeîlee du nom de S. Saluador, fur la hauteur de xx v degrés & XL fcrupülesj elle eft pleine d’arbres, &-fournie d’eau douce; elle porte comme beau- coup d’autres du coton: elle a auffi vn commode port au coftéduNord,oùelle décliné vers rOuelh Les noftres qui y ont efté n’agueres difent qu’elle eft efloignee de Trian- guio vers le Nord oueft de x v i lieues, de la ligne x x i v degrés & l fcrupules , & quel- le ne porte que des Palmites & des arbrifleaux. ’ î a Guâmma eft proche de la precedente vers l’Oueft , & feparee d’elle d’vnc efpace de vu lieues, elle fut nommee par Columb lorsque premier il y alla, -S". Marie de U Gon~ eepîion'.cWc eft de la ligne (comme il a efté obferué par les noftres) xx v degrés &xl fcrupules, elle a de longueur Sud- eft: & Nord-oueft xi i lieues, de toutes parts enui- ronnee de rochers & baffes : au dedans elle a vn terroir fertile & agréable & n’a fau- te d’eau douce. - GuAtAO eft diftante de Curât eo-ide. x lieues vers îeNord,fon.coft:é Oriental eft diftant de la ligne de XXVI degrés &: xlv fcrupules, fon Occidental eft fur xx vu &quel- ques fcrupules, elle s'eftend en longEft ôtOueft:,cinte de petites Iftes, rochers & baffes. Lucayoneque ou. Yucayoneque, (car elle eft: appeîlee de ces deux nomsjeft la plus gran- lo de de toutes ces Mes & la derniere; elle eft eftenduc en long entre lexxviiôexxviii degré de hauteur, elle n’eft iufques ici cognuë que de nom feulement. Macarey que Herrera met fur la hauteur de x x degrés, (enquoi il n’y a point de dou- te qu’il ne fe trompe) eft enuironnee d’vne mer fort peu profonde, & pleine de plu- fîeurs bancs. Manega eft fur la hauteur de xxi v degrés & xxx fcrupules auprès de AmaguayOt comme, Herrera\2.met. Les noftres ont remarqué qu’elle eft à xviii lieues de la 2V;'- tuge^ qui eft proche d'HiJpantdle vers le Nord, elle eft haute & montueufe. S. Martha fituee proche la Continente de la Floride, longue d’vne lieue feulement, & arroufee, comme fondit, d’eau douce. ■ jo Martyres font pluftoft rochers qu’Mes , fitués du cofté du Sud duCap de la Floride, fur la hauteur de x x v degrés ; difpofés en rang Eft & Oueft ; on leur a donné nom de l’image qu’ils reprefentent, quand on les voit de loin en mer, car on diroit que ce font hommes empallés. Et l’euenement n’a pas mal refpondu au mauuais prefage du nom, car ils font diffamés de diuers naufrages, & de l’infortune de plufieurs : les derniers de ces rochers vers l’Eft font appellés des mariniers Cabeza de las Martyres , ceft à dire Cap des Martyres , & on iuge de fon aduancement par leur difpofition ; car c’eft vne marque certaine qu’on eft entré dans le canal du deftroiét de Bahâma , quand on à ce Cap à la main gauche vers le Sud-oueft : ce font trois monceaux de fable blancs,cou- uerts d’arbrilfeaux, celui du milieu furpaffe les deux autres en grandeur & hauteur. 40 Mayaguana eft diftante de la ligne de xxii degrés x xv fcrupules, & à xii lieues vers le Nord-oueft , de la plus Occidentale Me des Caieûs , eftenduë entre le Sud-ëft &: Nord-oueft,longue d’enuiron vi i i ou ix lieues, comme il a efté n’agueres obferué y par ceux de noftre nation. Mimhres eft vne petite Meé ou pluftoft rocher^ fur la fin des bancs de quelle les mariniers qui paffent le deftroit de Baharnayàioyucm. fur tout euiter. MiraporuoSjGc^ adiré gardés vous, le nom eftan t pris de la mefme chofe , font trois Mes en triangle, difpofees entre des bancs & rochers, affés près de Yumeto. Vola eft fituee à la cofte de f Eft de la Floride, elle eft fur la hauteur de x x v i degrés ôé xxx fcrupules. la defcouurit en fa nauigation,elle eft au refte peu remarquée, yo Samanaiout près de vers l’Eft, eft déformé triangulaire, fur la hauteur de XXIV degrés, comme on a obferué au temps paffé, mais comme les noftres ont depuis . remarqué , elle eft efloignee de Mayaguana vers le Nord-oueft x 1 1 lieuës , de la ligne xx 1 1 1 degrés & XX fcrupules, elle a delong I V lieues & vne de large. Saomoto quatrième Me defcouuerte par Columb , & par icelui nommee Ifahelîa , à prefent elle eft incognuë. 2" ntugues OCCIDENTALES. LIVRE I. l’ort figues Mes Tlu- toutes renommées dans les routiers des pilotes , ce font font Mnd petites Mes, fituees vers l’Oueft du dernier Cap de laFloride,& comme dirn^ feescnrondTurlahauteurde xxv degrés &vn peu plus, à xxxvi lieues dunortl^ vis avis d’icelui. r™»_j»/i>eftaiftancede^4m«vcrsleNord-oueftdex ou xviii lieuëa de k l; gne vn peu plus de xx i v degrés.elle eft haute, mais les hautes y font mal afliurés & oiiy vadimcilement. Veu font quelques petites Mes entre des bancs & rochers, ( les Baixos de Babuec^ par es Elpagnols; fituees fur la hauteur de xx v 1 1 1 degrés vers le Nord, fi Herrera ne fie I O trompe ici aum bien quai fait ailleurs par fois. nhaqm eft alTésptes de Magmnay^^n leNord-oueft, furlahauteut de xx 1 1 doutés &■ XXX lcrupules félon le mefine Autheur. ^ ^ Tmgua grçrnàc de x lieues , fur la hauteur de x x i degré & quelques fcrupules, ( comme il a efte obferue par les noftres ) vers le Nord-oueft de l’Me àQTortme^ui eft au cofte du Nord de W^,remarquable à ceux qui nauigent de Porto m/vers mi uana ,1e long de la cofte du Nord de C/z^^,par le vieux canal qu’on appelle , par leauel on pâlie a cette heure rarement. ^ ^ ^ longue de xx lieues, large de vu, fur la hauteur de xx degrés &xxxfcruDu ics,gueresloinde(7/if^;^z;^4versleSud-oueft. o ‘°"g“«°”“eles Efpa- Il y a plufieurs autres Mes, mais leurs noms font fi incertains , & leurs^ fituations fi variables, qui! me defplaift de les reciter: Ortoutes ces Mesoulaplufpart,onc efté P eines d habitans, lors que les Elpagnols fous le commandement deCoIumbv fu- ient a premier fois , comme tous leshiftoriens des Indes rapportent vnanimement , à prefent elles font entièrement defertes, les habitansayans eftétranfportés ailleurs par lesLfpagiiois,oudeftruits furie heu par vn labeur intoierable,ou par lafaim & fup- phees indicibles : d ou vient qu on va rarement à prefent en ces Mes, fi ce n’eft con- tre fon intention. ; ^ ^ i.uu ISLES C AN I BALE S. C H A P. XVII. Situation ^ propriétés des J fies des Canibales. De p v I s le cofté Oriental de l’Me de i-. Jean Porte rique, iufqucs au Continent de 1 Amérique Meridionale,il y a plufieurs petites Mes , qui difpofees en arc . , ; , a >^i'auers la mer,lefquelles font appellees Cardes & mhales^o eft a dire Anthropophages , de la nature de leurs habitans j en la defeription cedenter mefme briefueté & ordre que nousauons vfé auxpre- eft fîtuee vers l’Eft del’Mede S.lean,^li^ii lieues de vers le Nord- oueft , fin la hauteur de x v 1 1 1 degrés & x x x fcrupules , elle a enuiron v 1 1 lieues U J' ^ nieûne,car elle eft ceinfte d’vne mer plate ôi pleine de baffes, fort dangereufes pour les nauires. ^ CtifefnEftl^rme 7 “ yes-eftroite,d-où elle a prins fon nom . elle eft lituee a I tit de I Me de /«».a xv 1 1 1 degres & xx fcrupules de la ligne vers le Nord- comrdS'.mfisïeû " toutesfois quelques Salines affés JO ^^t/^ua ou rJ. JParia âel AntiguaM la hauteur de x v i degrés, x x ou l frrnnnlpc ’ commeaumiheuderefpaceqm eftentrela^arWe&laii S cénvYn' de l-incertirui des baffes qui yfont! flT lo c ^ y mouillèrent laLhL l’an remnlh de bâ .rf ™ n " f°refts &marais remplis de haut hmon; car elle eft inhabitée & deftituée d eau douce. J e u»Otfemx,h dermere prefque de toutes & la plus Occidentale , eft fttuee fur D la hauteur 30 description DES INDES la hauteur de x v degrés &: x l v fcrupules,elle eft prefque aufli rafee que la mer, & par aiaii fort dangereufe aux mariniers. Barbade eft fur la hauteur de xv ii degrés &: xxx fcrupules vers le Nord-cft de Monferrâte,U à x 1 1 ou x 1 1 1 lieues d'Antigue^Gns leNord, elle eft bafte, & la mer qui reiiuironne pleine de baftes,& dangereufe à nauiger,les noftres y ont pourtant abordé fans peril,y ayans trouué vne baye où il y a vnafles bon anchrage , au refte il n y ont rien veu qui loit digne de récit , car c eft vne terre balle & fterile, longue d euuiron i v BarbâdosQVi la derniere de ces Mes vers l’Orient, eft lur la hauteur de xi ii degrés & xx ou vn peu plus de fcrupules , eftendue du Nord-eft au Sud-oueft., d vne i o forme ouale,& comme lés noftres ont remarqué depuis peu,d’enuiron xv i ou x v 1 1 1 lieues de circuit, beaucoup plus grande quon ne la mife iufques ici dans les chartes geographiquesda terre y eft aucunement haute & aftes femblable à celle d’Angleterre, le cofté du Nord eft toutesfois le plus haut , couuerte de toutes parts d’arbres verds. La cofte de l’Eft eft entrecoupée de plufieurs recoins, & de baffes qui s eftendent en la mer: celle du Sud reçoit la mer dans vne grande baye, qui fourniftdVn fort bon an- chratre aux nauires,où il y a mefme vne petite riuiere qui y defeend. La terre n’y pro- metrien de grand ; li ce n’eft qu’il y croift vn certain arbre qui approche aucunement du gingembre en gouft & dvne grande acrimonie, ( les noftres l’appellent Cûjîe)(ts fueilles fontd’vnverdobfcur, ronds au bout; il a de petites fleurs & affemblees en 2,0 rond comme celles du SuTêâu, qui ont chacune cinq fueilles , pourprines au dehors bc iaune par dedans : fon efcorce eftlegere & fa matière dure, au dedans noiraftre, il aime le riuage& lieux limoneux. Cette Me nourrift plufieurs pourceaux. Les Angloisy ont mené vne colonie l’an cio loc xxvii, & ayant coupe les bois pour y cultiuer duToubac.ils y ont porté des autres Mes des arbres fruidiers , comme orangers &: filtres» .s. Barthelemi eft vne Me fituec fur la hauteur prelquc de x v 1 1 degrés : elle eft à l’Eft de rifle de .Ç. Martin & à l’Oueft de BarhadeMàç, S. chriftofle aufli à l’Eft : elle eft d’vn circuit affés grand & haute, mais d’vn difficile accès, pour les baffes & bancs qui 1 en- uironnent. . . 1 ° Beke ou Bekia.àt laquelle les Efpagnols n ont fait nulle mention en leurs Commen- taires,& comme ie croi premièrement abordee par les noftres , elle eft diftante de 5’. Vincent Aq, iii lieuësoude v,commeles autres veulent, elle a prefque x de circuit, vne feule baye,qui eft vne excellente cachette àl’encontre de l’incertitude des vents; cet- te Me eft couuerte d’arbres, & eft d’vn terroir fertile, affés commode pour eftrehabi- tee,fi elle n’eftoit deftituee d’eau douce : elle eft diftante de la ligne de xi i degrés bc XXIV fcrupules, & eft au Sud-oueft de S. Vincent." S. chriJîojïeç.^2L\}.vs\iXit\xAts\AcsAcNieHesbcAQ S. Vujlachey fur la hauteur de xv 1 1 degrés & xx ou xxx fcrupules ; elle a de long Sud-oueft bz Nord-oueft enuiron v i lieuè's : fa largeur eft inégalé; car le cofté du Nord-oueft eft plus de ii iicuè's de large, 40 bc enuiron i v lieues vers le Sud-eft,lamer fait vne grande baye, ainfilMe finiftèn eftroiciffant. Sa terre eftefleuee en montagnes , mais principalement vers leNord- oueft,vers le Sud-eft elle a plufieurs Salin es. Les années precedentes les François &: les Anglois s y font habitués pour y cultiuer le T oubac , ( qui y eft grandement eftime ) & ont tous deftruits ou cha ffés ailleurs les habitans Anthropophages qui y eftoyent, manifeftes aguetteurs des eftrangers comme on dit : ils furent contraints par la venue de D. Fredericù de Voledo, qui y arriua auec vne grande flotte d’Efpagnols d’abandon- ner l’ifle, mais ils y font derechef retournés comme les noftres difent , bc s exercent comme deuant à labourer les champs & y femer le Toubac. Defeada eft fur la hauteur de x v i degrés bc x fcrupules vers leNord, comnie il a yo efté curieufement obferué des noftres depuis peu : elle eft à x lieues de Guadalupe vers le Nord,& v i ou v 1 1 de Marigalante : Chriftofle Columb la defcouurit premiè- rement en fon fécond voyage : les Efpagnols ont de couftume d y drefler eurs cours quittans les elle eft entre le Nord-eft &: le Sud-oueft; elle eft defcouuerte d’arbr€s,&femble au commencement qu’onlavoit vnegalere;la partie duNordi elt plus baffe que l’autre, bc celle du Sud femble s’efleuer en cône ; fa terre eit noire, * ^ diftinguec OCCIDENTALES. LIVRE T, diftingiiee de veines blanches & rougeaftres \ la mer y eft de ce cofté pleine de baffes, & briiè entre plufîeurs rochers. Dominique loiigMc de xii lieues, vn peu moins large,eft fur la hauteur de xv degrés xxxfcrupules.jàenuiron iii lieues de la vers le Nord-oueft; entre lequel &le Sud-eftelleeftfîtuée,ducofté duNord-oueftelIe eft plus haute que de hautre,&àla voir de loin il femble qu elle foit diuifeedes bayes ont quelques bons anchrages. Pour le iourd’hui il y habitent force Caribes qui vont nuds,ayans tout le corps teinét de certain ne couleur rougedls mangentla chaire humaine, grandement ennemis desEfpagnols, fideles à nuls,ïi ce n eft quand ils n ofent ou ne peuuent nuiredes hommes nourriffenc I O auffi bien quelesfemmes leur cheueleurej& ontleur Cajftque à qui ils obeiffent, aucu- nement different des autres par quelques marques au corps. Il y a deux fontaines chau- des qu’on y a remarquées, l’vne defquelles fort auprès l’emboucheure de la plus grande baye qui regarde le Nord-oueft,affés près de la mer & de la riue dVne riuiere. Ce cofté de rOueft a vn port affés commode, & vne bonne oportunité pour y prendre de l’eau, par le moyen d vn petit fleuue qui y fort large de quelque vingt pas. S. Eujiache eft vne petite Iflef encore que Herrera lui donne x lieues de tour)auNôrd- oueft de.S’.c/?rf/? de Porte nqueEik. & Oueft,elles font hautes & delhuees d’arbres,fur la hauteur de xvii i a O degrés au Nord de la ligne j autrésfois eftimees fort perilleufes à caufe des bancs & baffes, mais fans caufe comme les Anglois affeurent, veu que les canaux qui les entre- coupent font affés profonds , & peuuent fournir d’anchrage à mille nauires : il y a grande abondance de poiffôn & pas moins d’oifeaux. Quelques-vnes dentr’elles, ou qui les fuiuent ont receupar les mariniers dbs noms particuliers, qui les defirera fçauoir pourra vifiter les routiers de merpour cet effeét. Voila ce que nous auions à dire des J{lesCamba/es,l3. plus grande partie defquelles font inhabitées, quelques- vues font pour le'iourd’hui habitées d’ Anthr op ophages, & quelques autres commencent d’eftre cultiuee par les Chreftiens. 11 eft befoin d’aduertir ceux qui fréquentent ces mers, ou qui moüillentranchre au- 3 O tour de ces Illes , qu’ils fe gardent foigneufementdVn certain poiffon qui eft fort fre*. quent,depeur qu’ils ne tombent en tres-grand danger: ce poiffon eft femblable en grandeur & forme au congre, il a la peau coloree dVn verd gay, & excellemment bien variée, vue grande gueule & des dents fort aiguës j la chair quand elle eft efcorchee eft trer-blanche & d Vn affés bon gouft , mais d’vne qualité fi veneneufe, quelle met en grand danger me fine de mort ceux qui l'ontmangee ; comme non feulement les Am glois, mais auflî les noftres auec péril & danger ont elprouué. 4® LES ISLES DE B ER M V D E Z. C H A P. XIX. situation des Ijles Bermudez auec les qualités de leur air ^ terre. AP R E s auoir parcouru tant les grandes que petites Ifles que nous auions pro- pofé de defcrire en ce liure , il nous faudroit paffer au Continent de l’Ameri- que Septentrionale, fi Tlfle de Bermudez. ne nous retenoit,& encore qu’elle foit efloignee de.^ autres d’vne grande elpace,& n’appartienne proprement à cette claffe, neantmoins ie ne voi pas qu’on en puiffe traiter ailleurs plus commodément. Cette Ifte a défia par plufieurs années efté cognue du nom de Bermudez furnom de celui qui la defcouurit, & Garza aufii du nom du nauire dans lequel il eftoit; lequel nom y O toutesfois eft manitenant aboli. Herrera la met fur la hauteur de x x x 1 1 1 degrés du pôle du Nord,mais les Anglois quil’ont plus exadement obferuee fur le trente deux- ieme degré & trente fcrupules. Herrera tient quelle eft efloignee de la cofte d’Efpa- gne vers l’Oueft de prefque mille lieues , & les Anglois qui s’eftiment auoir vn exade cours du chemin, la croyent eftre eüoignee de Londres ville capitale d’Angleterre de trois mille trois cents milles Angloifes vers le Sud-Oueft , & enfin de Baonoac/^IÜe de Virginie ( de laquelle nous traiterons en fon lieu) l vers le Sud-eft , il y a ia long temps D 3 qu’elle 3Ô DESCRIPTION DES INDpS quelle a'eftc remarquée par les dangers & naufrages des Efpagnols autres. Tan cin Id xciii elle commença d'eftre cognuë de ceux de l’Europe , mais plus à plein par le moyen des Anglois, toutesfois par cas fortuit comme nous dirons bien toft. ’ ' ' Le Roi d’Efpagne dés l'an c I o I d x x i ï auoit refolu d’y enuoyer vnc colonie ; car l’opportunité du fit de laplace l’y perfuadoit, pource que les flottes venant du deftroic de Bahamâ & s’en retournans en Efpagne la peuuent diflîcilement euiter ; &pour cet cfFed donna en ce temps là de fort amples priuileges à Ferdinand Camel Portugais, mais la chofe n’eut point de fucces. Apres cela rifle demeura fortpeu renommée vn fort long temps, &: ne fut rcmar- i o quee dans les hiftoires qu’à caufe des te/npeftes & naufrages y aduenus ; iufques à ce quel’an cId Id xciii^^rto/VrÉ’CapitaineFrançoiSjparvnepareilleinfortuneyrom- pit fon nauire,y ayant efté mené par l’imprudence de Ton pilote ; vingt fix hommes ré- chappes dans le bateau du nauire & fur quelques planchesjdefcendirent à terre au co- fté duNord-ouefl:decetteIfle3& entre iceuxiïfOVA ^ ^ .egiones Chct^Jc. I>^>rtS. \\^tCffLLs Grand' Balyy^ C-Fûmttt Hieot de Fra ! ^ : C-JeBona Vijla. ^iS^kf'deBaeataes \deJ30u- J^oveîle Qffidi/ns ■’J'&reee 'r^onanenture ■ JiChaUur iaV ^oriunftlbi J*artJte%ea/ Grand F0rtaJ4.r Iles B-Blancht Milliofia G-errttanùa V DESCRIPTION DES INDES OCCIDENTALES, LIVRE SECOND. NOVVELLE FRANCE. INTRODVCTION. Près 4 Hoir parcouru au Hure precedent tant les grandes que petites Ijles , qui fint dedans ou autour de ce grand golfe de mer , nous paf- \ ferons maintenant d la Continente^ la defcription de laquelle nom commencerons au coHé Septentrional , lequel embraffe plufieurs re^ gions 3^ O* de fort grandes Prouinces ,• iufques ici prefque incognuës [quelques~ynesexceptees)ou legerement feulement proche duriuage cognués : car horfmù la Kouuelk Eëfagne gT les Prouinces qui lui attouchenî iufques au fin de Californie , nom nauons eu quyne fort petite cognoiffance des autres qui fint au mi- lieu du. pais 3 par ainjî nom traiterons legerement de celles qui fint moins cognués ^nom arrefîans yn peu pim diligemment aux autres qui le fint pim , nom ne commencerons pas toutesfoü cette defcription par ces derniers confins ^qui font fim le pôle mefine^ mais pajjans outre ces régions non cultiuees ^ qui fint toufiours roides de glaces de neges continués , qui ri ont efîé ^ifîtees qu"en paffant par ceux, qui par diuers recoins , golfes deflroitSy ont iufques ici cherché en yain pajfageyors la Tartarie le Royaume de la Chine 3 nom commencerons par celles qui ont défia receu quelque culture parles hom- mes i qui at touchent le cinquante quatre ou le cinquième degré de la hauteur du pôle du Nord, s'appellent auiourdhui du nom ^^Nouuelle France : non que ces ré- gions ayent premieremént efté defiouuertes yifiteés par les Pranfoü , car auant au- cune nauigation des Bretons ou Normands yers ces païs,yne grande partie de la cofiê maritime auoit eflé^'non feulement defcouuerte, mais me fine dehgnee par lean Se- baftien Cabots F enitiens,fom les auif ices deVlcmï vu ^i diAngleterre,comme ^^font foi leurs chartes Géographiques, {defquelles il s'en trouue encore plufieurs pour le iourâ hui en Angleterre) qui contiennent ces mots: tan duSeigneur cId cccc xcvii lean Cabot V enïtien c/ Sebaftien fin fils ont monflré le chemin à cette terre ,à la- quelle aupar auant perfinne n' auoit osé aller, le xxiy de luïïiet enuiron cinq heures du matin. Et la nommaTcne premièrement yewïjecroi que de la mer il auoit ietté fis yeux premièrement yers cette part: car il appella tlfie qui etî yù a yà S. lean, pour cette raifin comme ie penfi quelle fut defcouuerte leiour qui eB dédié à S. I. Baptifte. Les habit ans de cette terre fie feruent de peaux d'animaux de detfoüilles de befies ^Qfàuuages pour habits, (st* en font autant d efîime que nom de nos pim précieux yefie- ments. ^uandils yont à la guerre, ils fe firuent d' arc,de flechesfde picqHes,de dards, de majfuës de bois ^ de fondes. La terre y eB flerile,&n apporte aucun fruiB, d'ou yient quelle eB remplie d'ours de couleur blanche , (F de cerfs d’yne extraordinaire 'grandeur : elle abonde en poiffon, és* mefme il y en a de fort grands, tels que fint les loups marins , GA ceux qu'on appelle yulgairementSmmom} il s'y trouue des files E fi longues^ 54 DESCRIPTION DES INDES ” ji longues ^quelles /ùrpajenf me aulne de longueur. Et fur tout d a ynê grande ^ » bondance de ces poïfjons qu'on appelle èm mm yulgaire Bacalaos, tly a en cette l[le „ des ûifiaux de proye fî noir s ^qù ils rejfemhlent naifuement aux corbeaux, les perdrix & les aigles y font noirs. Voila ce qui en eB efcrit en ce lieu là. Teu apres les Cabots, affauGirtan cId \d Gafpar Corterealis yifita les mepnes terres par le commandement du Roi de Portugal^ les àefcouurit pim auant. Mais la caufepour laquelle le nom de Nouueile France a efté donné à ces régions, c'eH pource que les Françoù ont les premiers de tom pénétré pim auant le milieu du païs,g^ îont occupé i o comme leur y ayans mené des colonies par l'authorité du Roi. Or la Nouueile Vïslxï- €e,comme yeulent plufteurs Autheurs François ,y eB contenue entre le' quarante & cinquantième degré de la hauteur du pôle du Nord; les autres [enferment en des limi- tes pim eftroits'. d autres [e(îendentiufques au foixantieme degré : La longueur de ces pats y ers ÏOueB eB incertaine : ci apres nom defcrirons iujques ou les François par leurs nauigations 0* chemins terreBres ont pénétré. Nom commencerons au reBe la defeription de cette Continente, par tlfle deTcuc Neuue, comme elle eB à prefént nommee, pource quelle hauoifne, ^ ouure le chemin à icelle. )) î> 2.0 TERRE NEVVE. C H A P. L Situation de [îfe, qualités de [aïr, de la terre Ct* animaux. ’I s L E de 2" ^,rre Neuue eft diuifee vers le Nord du Continent de FAmerique Septentrionale par vn de- ftroit fort petit, vers l’Eft elle eft au deuant de ce gol- fe ou mer Mediteranee qu’on appelle vulgairement 5 o de S. Laurent, elle eft ceinfte entre le quarante ûx & le cinquante troifieme degré de la hauteur du pô- le du Nord: & ft quelque efcriuain François fans nom dans Ramus a bienobferué, fur le quarantième de- gré de longitude Occidentale, f la mefuredelongi- tude eftant priie des Ides du Cap verd J de forte que fonCap Oriental vulgairement appelle Cap deRaz,, eft diftant de Dieppe ville maritime de France de fept cents foixante lieues prefque en droite ligne. Ducoftéde i’Eft &de celui du Sud, elle eft batuë de cette grande &fpacieufe mer du Nord. 40 Plufieurs ont eforitplufieurs chofes & diuerfes des qualités & conditions de fon aïr & de fa terre. Ejlienne ParmenieBudee, qui a voyagé vers cette Ifte auec le braue Che- ualier Anglois Humfred Gilbert , defcrit d’icelle dans fà lettre qu’il cnuoya à Richard Hackluit en cette forte. La terre eft . en general montueufe & bocageufe ; la plus grand part des arbres font des pins , d’iceux vne partie vieux , vne partie croiflent encore , la plus grande partie font tombés de vieillefle , & empefche tellement la veuë de la terre &: le chemin aux allans , qu’on n’en pourroitiamais vuider.Tes herbes y font toutes hautes, mais rarement diffemblables aux noftres. Il femble que la nature s’y vueille mefme forcer à y produire du blé: car i’y ay trouué des herbes & des eipics femblables àîafeglejqui pourroyent facilement , comme il femble, s’accommoder à l’vlàge de fo l’homme parla culture & en les femant. Les ronces des forëfts font pluftoft des fram- boifes d’vne grande douceur. Les ours apparoiftent quelquesfois auprès des loges d’où on les tuë fouuent, ils font blancs , comme i’ay peu conieélurer par les peaux, &: plus petits que les noftres. Il eft incertain s’il y a du peuple en cette région ou non, ni n’en ay veu aucun qui le peuft affirmer. Auffi qui eft-ce qui le pourroit,veu que l’on ne peut aller gueres loin ? on ne feait pas non plus s’il n’y a point quelque métal dans les montagnes OCCIDENTALES. LIVRE IL montagnes pouiile rridhie fuict , elicores qu on diroit à les voir quelles Ont des mines » cachées. Nous auions donné confeil à l’Admiral de bruller les forefl:s,afin qu’il y eufl del’elpace pour vifiterle païs : lequel confeil ne lui defplaifoitpoint, s’il n euft femblé ” apporter vn grand dommage.Car il fut affirmé par des hommes de foi, que cela eftanr ” aduenu par cas fortuit en ie ne fçai quelle baye , qu’il ne fut veu de poiflbn par fept ans entiers, pource que l’eau de lamereftoit deuenuë amere, par la terebinthine qui v eftoit coulé le long des ruiffieaux lors que les arbres brulloyent.L’aïr en cette faifon ( il » cfcriuoit au mois d’Aouft) y eft lî ardent, qu’on ne pourroit empefcherlespoilfons qu’on feiche au Soleil de bruller, fi on ne les tournoit affiduellcment. Combien eft ” 10 grand rhiuer,lGs grands monceaux de glace au milieu de la mer nous l’ont apprins. Il ” nous a cfté rapporté par nos compagnons , qu’au moisdeMay ilss’eftoyenttrouués , empefehés entre tant de glaces, qu’il y en auoit des Illes hautes de foixante bralfes ; le ” cofté defquelles qui eftoit vers le Soleil eftant fondu,toute la malTe par vn certain con- ” trepoidsfe tournoit deflus delTouSjauec grand danger des affiftans comme il eft àcroi- „ re. L’air eft moyennement clair en terré : vers l’Orient il y a toulîours des nuees en mer ; & en icelle autour du Banc ( ainli appelle-on le lieu où on touche le fonds à qua- ” rante lieues de la terre & où on commence àpefcherlespoiirons)iln’y a prefque pas „ vn iour fins pluye. Voila ce qu’il en eferit. Mais Richard VVhitburne Angiois,dans vn liure qu’il amis en lumière de cette Ifle,affirme : que l’aïr de cette Me eft fort fain non 10 feulement l’efté, mais auffil’hiuer, & que la terre y eft fertile au fonds des vallees &au pié des montagnes,de forte qu’elle produit naturellement i’efté non feulement de fort bel herbage,mais auffiplulicurs fruids,comme des pois & des veffes,quien grofreur,& bonté ne cedenten rien à celles d’Angleterre: elle porte des fraifes rouges & blanches, desgrofteillesverdes & autres femblables fruidsen grande abondance j elle n^eft pas desfournie d’arbres fruidîers, veu qunnytrouue en plufîeurs endroits des poiriers, ce- rifiers & des noifilliers. Elle eft au refte abondante en herbes falubres, comme perfil grand & petit,ozeille& femblables herbes. Elle porte auffi de fort belles fleurs, princi- palement des rofes depiufîeurs coulèurs & d’vnefort foiiefue odeur; & pour la fin il eft tout certain par expérience qu’elle porte des herbes & racines médicinales; toutes lef- 5 O quelles chofes donnent vn afleuré tefmoignage que c’eft vne terre trcs-feconde &fer- tilé. Le blé femé par ceux qui y ont hiuerné, n’y eft pas feulement bien creu,mais auffi a rapporté du fruiden abondance.Entrclesanimauxfauuages,ilya des heures, re- nards,caftors,ours, loups & efcurieux,& autres chofes nées pour l’vfage & commodi- té des hommes. Il y a vne fort grande quantité de toutes fortes d’oifeaux, tant aquatiques que fore- ftiers ; des oyes, canes & des pinguins , du tout incognus aux Europeans , ( delquels nous parlerons ailleurs ) des pigeo ns^ ou ramiers, perdrix, roffignols,& de grands & pe- tits oifeaux de proye & autres. 11 y a vn nombre infini de fontaines d’eau douce : enfin toute rifle eft entrecoupée de plufieurs riuieres,torrens & ruilTeaux.qui nourriflfent de 40 fort bon poiflbn, entre lelquels eft le faumon, les anguilles, fiir tout les truites y excel- lent : la mer auffi qui.l’enuironne eft grandement poilTonneufe :Les bayes^ports & ha- utes fourniflent de fort bons cancres,moufles & autre quoquillage. La variété des ar- bres fauuage y eft grande,il y a de fort hauts fapins,des pins boulleaux & plufieurs au- tres elpars par les grandes forefts & bocages fort efpais ; qui fourniflent de matière fore propre pour le feu,les nauires, édifices & autres chofes neceflàires à l’vfage de l’homme. L’hiuer y eft plus froid que fon climat ne porte,mV>&^«r;2^cftime que cela fe fait principalement pour deux caufes, pour la grande abondance de glace qui eft iettee à cette cofte de deuers le Nord au temps d’hiuer ; & lefpaiflfeur des forefts,qui n’ombra- gent pas feulement la terre en telle forte que les rayons du Soleil ne la peuuent en au- jo cune façon atteindre & le réfléchir, mais auffi engendrent plufieurs vapeurs & nuees, à quoi cette Iflc eft outre mefure fuiette : & lefquelles incommodités il cftime qu’on pourroit preuenir fl on coupoit les forefts, & fl on ouuroitvn libre accès aux rayons du Soleil vers la terre, il femble que fon opinion foit vrai femblable. Or le froid n’y eft pas tous les ans égal , car ceux qui y hiuernerent l’an cIdIoc xi, affirment, qu’à peine fontirent-ilsàuc.un froid en Oétobre. Nouembre & vne bonne partie de Dé- cembre , tout le refte de î’hiuer iufques à la mi-Mars,ils n’y remarquèrent qu’vn peu E 2, de gelee, I DESCRIPTION DES INDES de gelee ,fouu^nt des vents d’Oueft,& peu de vents de Nord-eft. C^tte Ifle comme il appert fut premièrement defcouiuerteparles AngioiSi & commença d’eftrefrequen- tee par les François de Bretagne & de Normandie fan cId lo iv, premièrement de ce cofté qui regarde, le Sud, entre ces deux Caps 4e Jlaz>S)C des Bretons : peuapres celui qui regarde le Nord , outre le Cap de Bona vifta. iufques au deftroit qu’on appelle vulgai- remes Golf he des chajleaux : Les Portugais frequenterent les premiers le cofté de l’Eft, puis apres les autres nations de l’Europe. Les ports & haures de cette îfle ont efté iufques ici' egalement ouuerts pour tou- tes nations , qui en certain temps de l’annee ont couftume de s’y retirer, pour y feicher & endurcir au Soleil les poilTons qu’ils ont prins affés près du riuage : ils s’ac- i o cordent enfemble par certaines ioix & conftitutions, qui font eftablies d’vn commun confentement, iSt qui font volontairement gardées de tous: defquelles la principale . eft, que chacun pourra tenir le lieu qu’il aura prins le premier, & qu’il fe feruira cette année là des loges & autres inftrumèns comme s’ils eftoyent à lui: il y en a d’autres que ie laiffe exprès. Les Anglois ont effay é quelquesfois de s’approprier cette Ifle , y ayant impofé tribut aux autres nations k. donné quelques loix touchant la religion, & l’obeiffance aux Rois d’Angleterre ; principalement l’an cIdId i^xxxiii, auquel temps Humfred Gilbert Cheualier, la mit en fà polTelîîon 5c du Roy d’Angleterre > 5c propofa d y mener des colonies : mais depuis qu'il fe fut perdu en mer repaffant dans vne barque, on n’a rien fait dauantage 6c la priftine liberté eft demeuré aux pefcheurs. 2,0 Derechef l’an cio Idc viii les Anglois fous le commandement de leanGuie àçBrj- jlok certaines habitations en cette Ifle, enlaBayede la Conception, qui y ont duré quelques années. C H A P. IL Habit ans de Terre Neuue, leurs habits mœurs, TO v s ceux qui ont ci-deuant efcrit de cette Ifle , affirment d’vn commun ac- cord, que le cofté de i’Eft ôc celui du Sud ne font habitées de perfbnne, mais que les Saunages vaguent çàSclà fans demeure afleuree du cofté de rOueft ôc j o de celui du Nord. C’eft vn peuple rude 5c fans ciuilité , n’ayant nulle religion ou co- gnoiflTance de Dieu, nul régime Politique entr’cux, 6c fe gouuernent pluftoft à la fa- çon des belles fauuages qu’à celle des hommes 5 du tout femblables en habit 6c viures aux Saunages qui fe tiennent en la Continente vers le Nord,defquels il n’y a point de doute qu’ilsne foyent fortis autresfois 6c venus la. Au rcfte les François 6c E^agnols qui entrent tous les ans par le deftroit de S. Laurens pour y harponner la Balaine, 5c fe placent au cofté Occidental de cette Ifle , affirment que ces Saunages font allés prompts au feruicedes Europeans, eftans loüéspourpeudeviureôcdefalaire,6cs’em- ployent par vn labeur continu à toutes fortes d’ouurages,foit à découper les Balaines ou à les efuentrer ou bien à les cuire. Ils font de moyenne ftature de corps,ont les che- ueux noirs, la face large, le nez camus, les yeux grands; tous les mafles font fans barbe: l’vn 5c l’autre fexe teint d’vne certaine couleur rouge non feulement leur peau, mais auffileurshabitsjlefquelsilsfont àlagroffe mode de peaux de loup marain. Ils habi- tent dans des loges ou cabanes faites de perches difpofees en rond 6c liées enfemble au fommet, qu’ils couurent tout autour de peaux de beftes fàuuages,ou de defpoüilles de poiflbn contre l’iniure de l’aïr 5c les pluyes : ils font le feu au milieu de leur loge, au- près duquel ilsfe couchent à terre nuiftôciour quand il leur plaift. Ils ont des bateaux compofés d’efcorce d’arbre, longs de vingt piés pour le plus fouuent,6c larges de cinq ou enuiron en forme de demi-lune; efleués aux deux bouts 6c courbés , capables au plus de porter cinq hommes ; auec iccux comme eftans fort légers ils coupent les on- yo des d’vne grande viteflè,ôc ils les portent fur les efpaules quand il en eft befoin ; car ils n’ont point de demeures afreüreesjmais vaguans à la façon des ils changent fort fouuent de demeures, félon que la heceffité Içs y contraint ou que la commodité lesinuite.Leurs armes font Tare ôc la fléché munies de certaines pierres fort aiguës ou de petits os. Il y a eu auffi autresfois du cofté du Sud ou l'habitation eft beaucoup plus belle ôc plus commode, vne forte de gens affés femblables a ceux-ci qui y ont ' . demeuré OCCIDENTALES. LIVRE IL demeuré , mais abhorrans ou craignans comme il eft vrai femblable la frequentation de ceux de l’Europeils fe font retirés plus auant dans lepaïs ; Et cet Autheur François Anonyme duquel nous auons fait mention cLdelTus qui a eferit l’an iJ5p , affirme, que la cofte du Sud de cette Me eftoit en ce temps habitée d’vne nation de Sauuages deftituées de toute ciuilité & humanité , & qui mefpriloyent entièrement l’accoin- tance des autres &: de parler à eux , au refte du tout femblables aux autres ci-deflus en habitudede corp & habits, lî ce n eft qu’ils fe faifoyent en la face quelques marques auec le feu &: la tiree en lignes. Le mefme tefmoigne que le cofté Oriental eftoit auffi lors habité par de plus ciuilifés & humains, mais moindres en nombre, lefqu elles deux I O coftés on trouue maintenant abandonnés & vuides d’habitans , qui eft vn affeuréin- dice, que ces gensfuyent tant qu’ils peuuent la fréquentation de ceux de l’Europe, ôs quand on les rencontre qu’ils ne rendent fèruice qu’à contre cœur. C H A P. III. Torts îS Maures de cette l/le , 6^ toute la Cofle maritime icelle. IL n’y a Me en tout le monde de pareille grandeur, qui ait plus de commodes an- chrages & ports que cette-ci : & afin que nous les recitions tous particulièrement^ il nous faut fuiure la cofte qui va premièrement du Cap Raz, vers le Nord, &puis 20 apres nous tournerons vers l’Eft. Le Cap qu’on appelle communément Cah&Ra^ le dernier de cette Me vers le Sud diftant de la ligne vers le Nord , de quarante & fix de- grés & vingt cinq ou trente lcrupules, eft vne terre bafle & fort peu releuee, on le re- cognoift a vn rqcher,qu il a a demi- lieue duriuage en mer,à fix lieues de ceCap vers le Nordfe prefente vn portj, dit vulgairement Remufe oü Roigneufe, dans le fonds duquel il y a vne Me toute pierreufe : à ce port abordent tous les ans plufieurs nauires , &là ils falent &: feichent au Soleil le poiflbn qu’ils ont prins en mer. A vne lieue de ceftui- ci ou trois milles Angloifes eft capable de fort grands vaiffeaux,& qui entre plus de quatre lieues en terre vers rOueft,à quarante fix degrés & quarante cinq fcrupules de la ligne. Près de ceftui-cidu mefme cofté fuit le port d’Aqua forte, qui a 5 O l’entree fort eftroite &le riuage entrerompu de toutes parts. Le routier de mer des P ortugais meta deux lieues de Ceftui-ci, cette pointe de terre vulgairement dite RuntA deFarilhan,^ quarante fept degrés delà ligne,& vn peu plus outre plufieurs recoins &: bayes queles mariniers nomment ordinairement Abras. Apres il y a trois petites Mes le long du riuage, diftinftes de leurs noms, la première defquèlles s’appelle Fer^ ro,\ autre d Columbrina,bc la troifieme /Zié^tf de Galeotas , à deux lieues ou enuiroii du Cap de Fjfhera,ù\k bien comme les François l’appellent Frefaye. De ce Cap on conte deux lieuës iufques au port renommé de .9. à quarante fept degrés & ^ quarante lcrupules delà ligne. A cinq lieuè's duquel plus outre vers le Nord Ib prelente le S. François ^ £\xs. la hauteur de quarante & huiét degrés ,ouurant vers le Nord 40 vne grande baye, appellee des P ortugais Fnfeada grande^ & des Anglois Fhornbaye la hauteur de laquelle ils different quelque p eu, quant à nous nous luiuons lesPortugais en cet endroit. Outre le Cap S. François lacofte s’enfonçant en la mefme maniéré, fait vne grande baye, & en icelle plufieurs recoins; laquelle les Portugais appellent hiadela Concepcion,^\cs Anglois Baye of T7i»/7^’,fur la hauteur prefque de quaran- te neuf degrés. C’eft vne baye fort fpacieufe qui a au plus eftroit cinq lieuës, & laquel- le s’eftendaulong & aularge tant vers le Sud-oueft que.vers l’Oueft au dedans des ter- res,elle a beaucoup de recoins,ayant chacun fon nom, qui fèroitlong à rapporter ici. Il y a trois riuieres qui s’y defehargént, & plufieurs Mes efparces ça & là,lâ terre y eft affez fertile,d’oà vient que cethaure eft à bon droit conté entre les meilleurs de cette Me. J O A deux lieues d efpace du C onfinent de la grande Me,il y en a vne petite qu’on appelle Bacalaos du nom des poiflons qui s’y pefehent. Du cofté du Nord le Cap de Bona ‘vifa ferme le port deffiis dit,ayant Vn haute de mefme nom, fur la hauteur de quarante neuf degres & quinze fcrupules félon le conte des Portugais. De ce Capiufques à vn autre qu’on appelle desllheos deFray Louys,^ ivS(\\ie,s aux Mes mèfineS de Fray Lottys il y a dix lieuçs fiir la hauteur de (Quarante neuf degrés & demi : de ces Meç iüfques à Bife des Oijèaux comme la nomnienc les Portugais , furda hauteur de cinquante degrés E 5 quinze DESCRIPTION DES INDES quinze fcmpules ,il y a auffi dix lieuës; delà la cofte fe courbe vers le Nord-nord- oueft, il y a là beaucoup de baffes & bancs, toujours des neges,vn extreme froid, & point de poiffon. Auprès duCapie^i^^^'z/ÿ^versle Sud,quelques-vns y mettent vnebayejla- - quelle aucuns nomment Frelay^lcs autres Forilland & Farillon. De ce Gap la terre main- tenant receuantla mer ,& maintenant la repouffant, fait plufieurs bayes, recoins &: pointes iiifques au Cap de Grat , qui eft le dernier Cap de cette lile vers le Nord. Les Anglois font mention de quelque petite Me fur la hauteur de quarante & neuf degrés & quarante fcrupules,laquelleilsappellent/’ÿ^iaP/»^»mj,pour labondance de ces oifeaux qui y nichent, lefqùcls les Saunages nommtmAporath , reffembians fort bien aux Pinguiiis,que ie defcrirai ailleurs. François, qui a entre les premiers fre- £ o quenté ces mers,auoit appelle cette Me pour la mefme caufe ifle des Oifeaux, & les Por- tugais. lufques ici nousauons fuiui la cofte du Nord, maintenant nous retournerons au coftè du Sud. Du Cap i^i?/ï2ipourfuiuant vers le coftè du Sud de cette Me, tournant ài’Oueft, il y a deux lieuës iufques auport des Trejpajfésy^zi les|Portuga,is AbraTreJpejfam hauteur de quarante & ftx degrés , félon la computation des Anglois : Ce port eft grandement commode & la mer profonde, nullement empefehee de bancs ou ro- chers: delà iufques à la riuiere, nommee des Portugais Chincheta , on conte deux lieuës J de cette riuiere à la baye S.MarieÇsx^'. cette baye a vne large emboucheu- rc &: qui s eftend iufques à quatre lieuës, enfermant dans fon feinvne Me qu’on to appelle vulgairement Culnetam. Suit de mefme cofté le Cap S. Marie y à dix neuf lieuës du Cap Raz^^zis l’Oueft, comme quelques-vns content. Outre ce Cap vne autre baye s’ouure , laquelle on nomme Flacentia ou Prafencia , fur la hauteur de quarante & ftx degrés & quarante cinq fcrupuîes ; affés près delà fe trouuent au- près de la cofte quelques petites Mes ou pluftoft rochers , qui s’appellent ordinal-^ rement Martyres. Et cinq petites Mes nommées du nom de S. Pierre , qui fournif- feiit d’vn fort commode port aux mariniers , & qui ne eedent en rien à la grande Me en abondance d’arbres fauuages ; elles s’eftendent iufques dans l’emboucheure du deftroif , qui lâue Terre Neuue & les Mes de S. Laurent ou des Bretons, Vis à vis la cofte du Sudde la grandeMe , chamflain fait mention duport des Bifeayens vulgaire- j o ment ditle Port aux Bafyues. Le dernier Cap vers l’Oueft s’appelle Cap de Raye y qui eft diftant des Mes de S.Pierreàc quarante deux lieüx,commeles Anglois affeurent. Dés ce Cap la cofte retourne vers le Nord ou pluftoft Nord-nord-oueft douze lieuës de long, iufques au Cap Anguille s duquel la cofte fe tourne vers le Nord-eft dix huid lieuës iufques à la baye S. Georges y fort cognuë par la frequente nauigation des Bajoues ,• elle eft grande de neuf ou dix lieuës, & eft habitée des Sauuages que nous auonsdeff critei-deffus : Cequireftede plus vers le Nord,eftfortpeu cognu iufques ici, car on y va rarement,^ encore malgré foi. C H A P. IV. ^efiri^tion du ÿ'and Bafic, comme le yulgaire i appelle y qui ü fi end iu/qaes en 4° Terre Neuue, ^ de fïfle Sable. AV deuant de l’Me de Terre Neuue que nous venons de defcrire,s’eftend vn grand banc en la mer,que pluficurs nations de l’Europe appellent d’vn nom commun le Grand Banc-, lequel fe peut mettre entre les merueilles de l’Océan: car veu que cette grande mer du Nord eft fi profonde, qu’eftant vn peu efloigné de terre,à pei- ne trouue-on fonds auecjvne ligne de deux cents brafles,toutesfois comme vne coline ou vn dos, & profond parfois de trente , parfois de quarante braffes, s’eftend enlong iufques à quelques centaines de lieues, fçauoir depuis ie quarante & vnieme degre iuf- ques au cinquante deuxieme de hauteur. Il a de large au plus vingt quatre lieuës , & jo où il s’eftroicift feize & mefine moins : finiffanten pointeaux deux bouts : plus il s’a- uance vers leNord & plus lamer y eftprofonde, aucontraire versleSud; carmeff mes on voit des rochers, que les François appellent les Nucquelets. Il y a d efpace de- puis le Gap Raz. iufques à ce Banc, vingt cinq lieuës, la mer eftant fort profonde entre deuxj aux autres lieux il y a vnpeu plus ou vn peu moins dediftancciufques àlMede Terre Neuue . Au refte il s’y pefche vne abondance incroyable de poiffon tous les ans, par les I OCCIDENTALES. LIVRE II. ,3, par les François, Efpagnols, Portugais, & quelquesfois des autres nations ; les Bafoues les appellent BacaUos François Molués ou Morués yi^oï{£oi\ fort cognu en toute l’Europe. On pefche ces poifldns des le milieu d’Auril iufques à la fin de lulliet, les ayant P tins on les efuentrc & fale, ainfifalés les François les appellent verte. Tout ce temps il y voile vne fi grande abondance d’oifeaux au defius, qui viuent des entrailles de ce poiflbn qu’on iette en mer(que les nauires n’ont befoin d’autre fignal;& fe pren- nent aux bains aulTi bien que les oifeaiix , auec vu grand plaifir : entre ces oileaux les François font particulierernent eftinie des Fau^uets. 1 0 Outre ce grand banc on a remarqué plufieurs autres petits autour de Terre Neuue, de principalement deux, l’vn defquels eft au cofté du Sud de cette I/le, & s’eftend iuf- ques aux Ifies de Pkrres dit des FrznçoisBanç au Fert-, l’autre eft au cofté du Nord de rifie deSah/e , ilfe tourne vers le Nord-eft , ce feroit chofe longue & nullement ne- ceflaire de reciter les autres. En outre il y a 1 Ifie (fÉ* Sable ( que les F rançois appellent ainfî de labiés qui y font ) fur la hauteur de quarante quatre degrés,à enuiron trente lieues de lifte dis Bretons ou i*. Laurent le Sud, elle a de tour prefque quinze lieues , beaucoup plus long que large, pleine de bancs,defgarnie de haures & diffamée de naufrage de plufieurs. L’an clolo XVIII les François fous le commandement du Baron de Lerj incitez par la io commodité du lieu,auoyent refolu d’y placer vne colonie ; mais apres l’auoir confide- ree de plus pres,ils furent contraints de la quitter, fur tout pour la diffette de viduailles & d eau douce, laiffant leur entreprife fans effeét ; ils y laifferent feulement le beftail 61!: pourceaux qu ilsy auoyentamenes,qui n’y ont pas beaucoup profité par le deffautde paft ure ; car pour la plus grande partie l’Ifte eft fterile & du tout fable. Apfes ie trouue queles Portugais Font auflieffayee, mais auec pareil fuccés. Enfin apres auoir long temps efté abandonnée par les P ortugais & autres nations,le Marquis de la RocheV\:2.i\- çois s’effaya de l’occuper, y plaçant quelques colonies l’an cIdId xcviii: & y laifTa quelque petit nombre de gens, qui y vefeurent auec grande difficulté de poiffon & du beftail qu on y auoit auparauant laiffé ; & furent contraints de s’habiller de peaux de 5 O certains renards noirs & de loups marains, enfin ils en furent retirés cinq ans apres. Il y apeud eftangs dans cette Ifte,nulle fontaine; beaucoup d’arbrifreaux& peu d’arbres ; la terre y eft prefque nue oulegerement couuerte d’herbe; on la peut difficilement aboruer a caufe des baffes & bancs qui y fbnt,auflî n’eftime-ie pas qu’elle le mérité. ISLE DE S. LAVRENTouDES BRETONS. C H A P. V. 40 Situation del'ljle des Bretons, qualités de fin aïr défit terre, peuple y habitant. IL y a vne autre Ifte qui eft a l’Oueft de Terre Nemie, au milieu entre icelle & le Con- tinent delaNouuelle France;dite S. Laurent, du golfe qu’elle cloftj&^^j- Bretons de fon Cap Oriental , ( qu’on appelle vulgairement Cap Briton ) fon cofté du Sud eft mng entre 1 Eft & l’Oueft de vingt cinq lieues , diftant de la ligne de quarante cinq degres & quarante cinq fcrupules. Son Cap Occidental eft eftoignéde Campfieau{ qui huid lieues: de fon Cap de 1 Eft ( dit Cap Briton ) iufques au Cap Raz. , ( dernier bout de Terre Neuue versi’Eft; on conte quatre vingtsfept lieues. Elle eft feparee du Continent de la Nouuelle France par vndeftroitde neuf ou dix lieues de long, qui encore qu’il s’eftende iufques en la 50 merMediterranee de 6’. Laurent vn canal affés profond, toutesfois il eft peu foü- uent frequenté,a caufe qu il eft fort eftr oit, & que le courant y eft dangereux , duquel les r rançois lui ont donne le nom de Cette Ifle eft de forme triangulaire,ayant de tour prefque quatre vingts lieues , elle- uee pour la plus grande part en colines & montagnes , extrêmement belle & deleda- e . a mer y entre iufques au milieu par de petits canaux , qui la diuifênt en plufieurs parties comme fi c eftoyent de petites Mes ; il y a au milieu vn lacparfemé de plufieurs , petites 4d DESCRIPTION DËS INDES petites Méttes , dans lefquelles il fc trouue grande quantité de Sauuagine ; les cailâüx lont remplis de coquillage, entre autres d’huiftres , mais qui font d’vn mauuais gouft. Il y a partout de grands bois remplis de fort hauts chefnes, fapins & autres arbres lemblables à ceux de rEurope5& de pluüeurs autres incognus de pardeçà.La terre pat vne agréable fertilité y produit des fraifes & autres fort bons ftuifts ; l'herbe encorô qu'elle y foit haute eft moins prifee pour eftre trop menue. Les bois nourrilTent des Gerfsi,renards noirs, loutres & autres belles fauuages j il y a aulTi force oifeaux, &: entre iceux des Pinguins. Elle ell habitée en plulieurs endroits de Saunages, qui font femblables en habit mœurs à ceux de T erre Neuue , ils ont les cheueux noirs , qu’ils lailTent pendre iufques r g au delTous des elpaules I le commun d'entr'eux couurcnt leurs parties honteules de peaux de belles iauaages,ellans nuds quant au relie ; les principaux portent vn petit manteau aulTi de peau de belle fauuage qui leur couure la poidrine & les efpaules ; ils nourrilTent pour la chalTe certains chiens noirs auec vn fort grand foin. Les Portu- gais y ont mené autresfois vne colonie, mais ennuyés de la rigueur de l’hiuer, delaïr, du froid & des ordinaires tempelles, ils changèrent incontinent de lieu. 11 y a peu de hautes pour la grandeur de Fille : au collé du Sud à deux ou trois lieues du ell la pointe Orientale d’icelle le port des Anglois ell fitué, ('ainlidit des François) pource qu’ils ont coullume d’y aller ordinairement pefcher : &; vn peu plus outre vers i’Ouell celui que les Anglois appellent Nevvfort ■>cQ\mx\ç, qui diroit to Nouueau port , fait par vne petite Ille qui cil au deuant la grande : à huid lieues delà il y en a vn troifieme, que les Sauuages nomment en leur langue Cibo, où il fe trouue vne telle quantité de cancres & efcreuilTeSjque c’ed comme vne choie incroyable : Voila les hautes qui font au collé du Sud. Au collé qui retourne vers le Nord-ell> à dix huid ou vingt lieues vers leNord^ouell du CapBritonïcs Portugais mettent le port iV/^^/ï^^jfur lequel ils s’elloyent autres fois placés, & qu’ils ont depuis abandonné. Le Cap du Nord de cette Ifle ell vulgairement appelié Cap S. Laurent, 2M deuant d’icelui ell lituce Fille de S. Faut-, de ce Cap iufques ^ Terre Neuue &au Cap de S. Marie, les François content quatre vingts trois lieues. Enfin la colle fe tourne vers le Sud- ouell fournie de force hautes & anchrages , peu remarqués & feulement cognus de j o nom, que i’ellime ellre du tout inutile de deferire ici de peur d’ennuyer le Ledeur. C H A P. VL De flufieurs petites Îjîes e^arfès dans le golfe de S.- Laufent. Le s deux nies defquelles nous auons parlé ci-delTus font comme vne barre au deuant de cette mer Méditerranée ou golfe appelié du nom de S. Laurent yàzns lequel la mer entre par trois diuerfes emboucheures, dont celle du milieu ell affés large, entre ces deux Caps de S. Laurent & de Raye-,\G.^ deux autres font plus cllroites, par lefquelles ces deux Ille^ font feparees d’vn collé & d’autre de la Conti- 40 nente. Cette mer ell de forme triangulaire, & fa balfejs’il faut ainli parler, s’ellend d’vn des angles de la Nouuelle France qui ell fur la hauteur de quarante fix degrés , iufques à l’autre angle , ou plus ellroites emboucheures fur cinquante deux degrés , du long des deux Illes ; car le golfe ell plus long de ce collé : les deux autres collés vont en s’ai- guifant iufques aux emboucheures du grand fleuue de CanaJa,oùilCe finilTent en vn cône J le droit prefque en droite ligne, & le gauche fe courbant en croiliknt embraf- fe dans fon fein quelques Illes. L’vrie d’içelles appellee Menego de ceux qui ont les premiers defcouuert ce golfe, ell grandement renommée pour 1 abondance des mer- lus fort gros qu’on y pefche, elle ne fe trouue pourtant plus és iiouuelles chartes Geo- grâphiques,fon nom ellant aboli. A vingt trois lieues de cette-ciily en a trois autres yo petites, qui pour l’abondance des oifeaux qui s’y trouuent font appellees tantoll Ijles aux tantoll Ijles des Mar gaux, U. champlain les nomme en fa charte Ijle aux Tan- geaux.D^vc/i de ces Illes qui font entrerompuës de rochers fort difficiles à aborder font couuertes d’vne telle multitude d’oifeaux, que c’ell comme vne chofe incroyable: elles font fur la hauteur de quarante neuf degrés Anglois ont remarqué . A la troifieme terrill en ^ quarante lcrupules, comme les fort grand nombre vne certaine OCCIDENTALES. LIVRE IL 41 cfpcccdePhoques.animal comme ie croi incognu aux anciens, appelle des noftres VFalru4,&cdts Anglois qui en ont pris le nom des Ruffiens Morsh. C’eft vn animal amphibie & fort monftrueux, qui furpafle parfois quand il eftparuenu à fonordinaire grandeur, les bœufs de ce pais engroifeutjil a la peau comme celle d’vn chien marin, la gueule d’vne vache, f d’où il a efté nommé par aucuns vache marine)fi ce n’eft qu’il a deux dents qui fortent hors, recourbées en bas, longues parfois d’vne coudee, qu’on employé à melme chofe quel’iuoire, & font de mefme valeur : ils ont rarement plus d’vn ou deux petits ; c’efl vn animal robufte & fort fauuage d’abord, par ainh fort diffi- , cilc à prendre,on le prend en terre, rarement en l’eau. Nous en auons faitmettre ici la I O figure, exadement & au vif depeinte. I 5 O Cette belle fut monftree en cepaïs l’an cio loc xii, laquelle le fameux Dodeur OuvlUe. Æüm Btierhardm VorJlmsA^ bonne mémoire ProfelTeur enMedecine a deferit en cette maniéré. l’aiveuf dit-il i cette belle marine, de la grandeur d’vn veau, ou d’vn grand dogue d'Angleterre , allés femblable à vne Phoque j ayant la telle ronde , les yeux de bœuf, les narines plates & ouuertes, lefquelles il fermoit & ouuroit parfois, au lieu d’o- reilles il auoit de chaque collé vn truojl’ouuerture de la gueule eftoit ronde & alTés pe- tite, enlamachoirchaute il auoit vne moullachedVn poil cartilagineux, gros &rude. La mâchoire d’embas elloit en forme de triangle,la langue efpailTe & courte, le dedans de la gueule muni d’vn collé & d’autre de dents plates.Les piés de deuant & de derrière elloyent larges, & le derrière du corps relïembloit entièrement à vne Phoque de ces 40 pa'is. Les piés\de deuant elloyent tournés en deuant & ceux de derrière en arriéré, tous diuifés en cinq doigts, mais ioinéts par vne membrane elpailfe. Les piés de der- rière auoyent des ongles, & ceux de deuant point,il elloit fans queue. Lapartie de der- rière rempoit plulloll quelle ne marc^ioit. Il auoit la peau elpailîe, coriace & couuer- te d’vn poil court & délié, de couleur cendree. Il grondoit comme vn lànglier , on parfois crioitd’vnevoixgroire & forte. Il rempoit par la place hors de l’eau. On le mettoit tous les iours dans vn tonneau plein d’eau l’elpace d’vn heure pour s’y ioüer, C’elloitvnfaon vieux de dixfepmaines, comme difoyenteeux qui l’auoyent apporté àtNouaZemhU. Il n’auoit encore point les dents ou les cornes qui fortent dehors à ceux qui font plus vieux , mais on voyoit en la mafehoire haute les bolTes , d’où on pou- 5 O uoit iuger qu elles lortiroyent bien toll. 11 fembloit quand on le touchoit que ce fuffc vn animal furieux & robufle, & relpiroit très-fort par les narines. Il viuoit de boüillie d auoine ou de mil,il luçoit lentement pluflofl qu’il ne mangeoit ; il approchoit de fon maiftreauéc grand effort & en grondant, lors qu’il lui prefentoit à manger, mefmes il le fuiu oit au flairer d icelui.Sonlardnefemblepas mal agréable à ceux quienontgou- flé. On monftroit aufliles teftes de deux grands qui auoyent chacune deux dents qui fbrtoyent en dehors a la façon de celles des Eléphants, longues, grofres& blanches, F recourbées f 4t Î3ESCÎIIPTION DES ÎNDES recourbées en bas vers la poitrine. Les Anglois quiies auoyent apportées difoycnÉ que leurs cuirs pefoyent quatre ou cinq cents Hures. Ils contoyent aufli qu’ils mon- toyent auec ces dents fur les rochers, & Ce fouftenoyent d’icelles , & qu’ils fortent par troupes à terre pour y dormir. Leur pafture comme ils dilbyent, eftoit de grandes & longues fueilles d’viie certaine herbe qui croilToit au fond de la mer , & ne man- geoyent ni chair ni poilTon. le vei la mefmevn engin dumefine animal prefque dur comme vn os , rond & long d’vne coudee ou plus, gros, pelant & folide ; au bout près du gland il eftoit plus gros & plus rond qu ailleurs. Les Mofeouites s’en feruentpour faire fortir la pierre des reins. On conte de ces Mes iufques àriHc de Bam cinq lieues. Il fe trouue vne grande i o diuerlité entre les Autheurs-touchant fon lit &: fa grandeur : François , qui l’a premier defcouuerte & lui a impofé nom , lui donne deux lieuè's de long & autant de large ; les autres lui donnent vn bien plus petit circuit : mais tous tiennent que la mer qui l’enuironne eft fort poilTonneufe, & loüent auffi fon terroir pour eftre fertiles plein de pafturages & fort propre aux femencesj Ils difeordent aulîi quant aux arbres ; car ^MmÉ’ralfeure qu’on y trouue de fort grands arbres, & les autres feulement de fortpetits & vrais arbrilfeaux;!! ce n’ell queles noms des Mes ayent efté changés; d’où viendroit cette diuerlité entre les Autheurs. Quartier entre les commodités de cette Me met en rang les fraifcs,les rofes,les vignes & plulieurs herbes, mefmes il dit qu’ily vient des poisnatureliement par-ci par-là dans les champs. Proche de cette- lo ci il y en a vne autre plus petite , qu’on appelle l'IJle Blanche de mefmê fertilité que l’autre. Au iourdhui on renomme fur toutes les Mes Rameesy ( ainli nommées par chant- premièrement frequentees par les l’an clolo xc poury prendre les VValruJfes, qui ont de coullüme tous les ans d’y terrir en fort grand nombre pour y faonner : & du depuis par les Anglois. Mais il y a li grande différence entre les rou- tiers de ces deux nations, & ceux qui en ont fait mention auparauant, tant en la def. cription de leur lit, qu’en la définition de leur circuit , qu’il eft fort difficile d’arrefter quelque chofe de certain. Les François mettent fur quarante fept degrés & donnent vingt lieues de tour à celle que les Sauuages appellent Menquith.K l’autre qui eft pro- ^ o che de cette-ci nommeeH«^, vingt lieues de long.Cette-ci eft d’vne terre làblonneufe, & ne produit ni herbe ni arbrineau : pareillement flfle Buoron qui eft feparee des Ramees d’vn canal de trois lieues de large & de fept ou huid bralfes de profond. Quant a nous nous auons pofé en nos chartes les Mes Ramees & de Brim comme nous les auons trouuees dans les plus nouuelles chartes des François, iniques à ce que la diligence des mariniers y ait apporté plus de clarté. Le coft é droit du deftroit de S. Laurent eft fort peu cognu ; car encore que .^artier qui a le premier nauigé par ces eftroites emboucheures , qui paflàns entre le Cap du Nord de L îrre Neuue, &le Continent de l’Amerique Septentrionale entrent dans ce golfe Mediterranee,face mention de plufieurs Mes,bayes,anchrages,ports & riuieres, 40 neantmoins tout cela eft pour le iourdhui incertain, fans nom, ou du tout confus; voila pourquoi ce feroit donner de la peine aux Ledeurs &abulêr de leur patience que de les reciter. Ainfi ie me contenterai de dire,que ces emboucheures s’appellent des François Golfe des chafeauxy & continuent ainfi eftroites quelques lieues , & où elles Commencent à s’ellargir, les deux riuages s’efloignans l’vnde l’aütre, elles font premièrement cette baye dit vulgairement Grand Baye s où elles s’eftargiffent tout à fait,dela fe nomme Golfe de S. LaurentiTious laifferons le refte làns y toucher. C H A P. VIL Jjlt Natifcotec dk mdntenmt Afifumption ou Afeenfion 5 flsuue Chefchedec, ils* autres ^uieres, Avant que commencer la defeription de ce grand fleuue de Canada, il ne nous faut pas oublier vneifte gaffés grande qui eft dans fon emboucheure, &: qui la diuife en deux. Elle eft nommee en langage des Sauuages Natifcotec, par ^mrtier qui la premier defcouuerte Flfte de C^^^umftion-, ôc par lean Alphonce,de l' Afcenfiom OCCIDENTALES. l' Jfcmjîon : cWc a enuiron trente cinq lieuès dcIong,& fept ou huid de large ; s’éten- dant depuis le quarante huidieme degré iufques au cinquantième & entre le Sud-eft bc le Nord-oueft. On conte de la plus grande entree d’icelle dans le détroit qui et vers le Cap S. Laurent, iüfqués au coiii le plus Oriental de cette ïfle cinquante lieues ; de la'Baye de S. Georges fituee au coté Occidental de T rrre Neuue^commo. les Anglois' ont remarqué, quarante trois lieues. C’et vne Ite fort agréable , fans aucunes montagnes, dVn terroir plat & fertile, coiiuerte iufques fur le bord du riuage de diuers arbres , & notamment de fort hauts lapins , qui fut qu’il y a de tous cotés grande abondance de betes fiuuages , comme 10 ours, onces, héritons & autres femblables : Il y a auffivn nombre infini d’oifeaux, tant de ceux qui aiment les bois que de ceux qui fréquentent les riuages & les eaux. La mer qqi l’enuironne et fort poitbnneufe; mefmes il fe trouue des Balaines dans le dé- troit, & celles qui font bletees auprès de la cote Occidentale de Terre Neuue Sont foLiueiit iettees à cette cote. Elle a quelques anchrages ates commodes, mais peu de por ts'.ien’ai iufques ici veu perfbnnequi ait defcrit qu’elle fut habitée d’aucun. Vis à vis leCapOccidental de cette Ite à la cote du Sud de l’Amérique Septentrionale fort vne riuiere , dans laquelle Jacques .^artier entra en fon fécond voyage , nommeé en- core pour le prefent Chefchedec: où il auoit defcouuert fept Ites; la Continente quiles auoifine et vne terre bâte , plate, & couuerte de plufieurs grands arbres ; mais elle et xo enuironnee de bâtes & bancs de fable, qui s’étendent vne lieue &plus en mer, def- couuertsà mares bâte, où on nauige auecgraild danger: cette cote ainfi pleine de bancs contient enuiron dix lieues, & finit à la riue Occidentale de ce tenue. Cette riuiere fort d’vne telle vitete , que forçant les tots de la mer, elle y poute fes ondes long temps dVne mefme furie , & continué fon canal entre les tots falés, de forte qu’à plus d’vne lieue de fon emboucheure on y puife de l’eau douce : elle et profonde dans Ibn entree de dix huid piés; au dedans on dit qu’il s’y nourrit plufieurs cheuaux marins j cet animal amphibie montant de nuid par delTus les bords de la riuiere fort en terre , & de iouf il regaigne la mer. Vers rOuet de la riuiere Chefchedec, il y a vne baye,ôù l’anchrage et fort mal ateu- 5 O re a caufe des bâtes & rochers qui y font : patànt plus outre on rencontre la riuiere S. Aîar guérit e,^ioionàQ. à fon emboucheure de huid piés à bâte mer & de trois braf- fes à haute maree : mais elle et dangereufe à caut d’vnc bâte qui y et : elle vient de fort loin d’au dedans dupais du coté de l’Et, où elle fe précipité du haut des monta- gnes,& puis dés là ellefegrotit fort. Ates près de fon emboucheure ily a vn Cap moy- ^ ennement eteué, &;.au coté droit d’icelle vne petitte Ite. Toute cette cote et di- tante de la ligne de cinquante cinq degrés , & et reuetue de plufieurs arbres & no-^ tamment de fapins , & relcuee en petites montagnes. A trois lieues de la riuiere S, Marguerite fort vne autre riuiere, la grandeur & pro- fondeur de laquelle et encore incognuc,pource que fon emboucheure et comme 4° fermee d’vne infinité de baffes & rochers, dés là la cote et entrecoupée de plufieurs pointes &: bayes , & la plus grande partie d’icelle et baffe & fablonneufe. Seize lieues plus vers l’Ouet s’ouure vne baye dans laquelle vne riuiere defeend , cette baye et ca- pable de tenir plufieurs nâuires, & et le meilleur haute de toute cette cote ; mais la cote à caufe des baffes qui s’étendent vne lieue ou deux en mer, ne peut etre appro- chée déplus près fans grand danger. Apres cela la cote s’auance tantôt en mer &: tantôt fe retirant fait places à quelques bayes & et bordee d’Ifles iufques au port de Lefquemin ,fort cognu & renommé, encore qu’il foit mal affeuré , tout enuironné de rochers, & qu’il ait fon emboucheure fi étroite qu’il n’y peutpàffer qu’vn nauireàla fois , toutesfois les Bafques ont coutume d’y fréquenter pour harponner laBàlaine. jo Toute cette contrée etle longdela cote baffe &plate, & le milieu dupais etreleué en Golines & montagnes, elle et toute remplie de forets & bocages, & nullement ac- comparable à la Nouuelle France qu’elle avis à vis de foi, foit en bonté de terre ou en douceur d’aïr, combien qu’elle foit plus baffe. Ch AP, 44 DESCRIPTION DES INDES C H A P. VIII. *ToTt deTadoufàc de T{iuîef'e de Saguenay, PR O G H E du port de Le^nemiu eft fîtue celui de T'adoujkc ^ renoimné fur toiis par la Frequente nauigation des François & autres nations, auprès de Fembou- cheure du grand duquel nous parlerons bien toft. Ce port eft fort petit, & dans lequel fe peuuent feulement placer vingt nauires au plus, il eft en vn certain recoin près de la bouche de ce grand fleuue, fermé au dehors par vne pe- tite ïfte ou pluftoft rocher, prefque tout fappé par les ondes de la mer , au dedans il eft i o eiiuironné de fort hautes montagnes, couuertes par endroits d Vn peu de terre, ail- leurs de pierres & rochers , & de fort hauts fàpins î ailes près du port il y a vn jnarais enuironné de colines reueftues d’arbres. La mer eft au dedans du port afles profon- de , agitee dVne merueilleufe variété de marees , à caufe de la proximité du fleuue qui eft grandement rapide , fort fuiette aux grands vents & froidures extremes. Ce port eft ouuert principalement au vent de Sud-eft,mais ceftui-ci eft le moins à craindre, tout le danger vient des vents qui defeendent le long de la riuiere, à Fvne & Fautre pointe d’icelui fe defcouure vn banc quand la mer eft baffe j au dedans il a dix & en quelques endroits vingt braffes de profond: ce marais d’ontnous auons parlé,s y def- chaige par vn petit canal , comme auili dedans la riuiere par vne autre ouuerture, ces 2.0 deux canaux feparent vne certaine Ifle de la terre ferme, dans laquelle les Sauuages ont couftume de dreffer leurs loges, lors qu’ils viennent là pour traiter auec les Chre- ftiens de leurs marchandifes , qui ne font pour la plus grande partie que des peaux. Lariuieredite des habitans du lieu, eft fort fpacieufe, & en plu&urs en-\ droits profonde iufques à deux cents braffes, (chofe comme incroyable; elle defeend de deuers le Nord-oueft dVn fi vifte cours qu’elle empefehe longtemps la'maree d'y entrer, & conferue fon flus prefque iufques à fon emboucheure ; elle a feulement vn quàrt de lieue de large à fon emboucheure; mais plus on monte haut & plus on trouue fon canal large, elle emporte auec foi en la mer quantité de riuieres quelle reçoit d Vn cofté & d’autre, quelques-vnes defquelles font nauigables : on y peut monter Nord- ? o oueft cinquante lieues loin , & là elle fe précipité du haut de petites montagnes , quel- ^ quesfois elle s’efpend en des lacs ou emprunte leur eau,lauant plufieurs Mettes ou plu- ftoft rochers couuerts d’arbres. Sur fbn riuage entrecoupé s’efleuent à droite &à gauche de fort hautes montagnes & rochers , couuerts d’arbres efpais & horribles à voir. La contrée qu’elle trauerfe eft fort mal plaifante, tant en infertilité de terroir qu’en incommodité de fon aïr , qui fait qu’elle n’eft nullement propre à eftre habitée pour les froidures continués , enfin c’eft vne vraye folitude; car les foreftsn ynourrif. fent aucuns oifeaux fi ce ne font quelques petits, ni les eftangs auffi fi ce n’eft en certain temps de Fannee,où on y en trouue fort peu de riuieres. Les Sauuages qui des reo-ions les plus efloignees de la Continente defeendent ce fleuue pour trafiquer, content des 40 chofes eftranges d’icelui , qu’ils tafehent de faire croire aux Chreftiens en les affeurant de tout leur pouuoir ; c’eft qu’apres plufieurs iours de chemin, ayans furmonté diuers précipices defquels Feau feiette du haut en bas , trauerfe plufieurs lacs, enfin ils vien- nent en vn lieu, d’où ils voyent la grande mer Septentrionale; mais poureequ’onafou- uent & parfois auec grand danger efprouué la vanité des Sauuages , &leur defir de mentir , en vne chofe fi douteufè & ou la croyance chancelle,il ne s’eft trouué perfon- ne que ie fçache qui ait monté plus haut cette riuiere ; aufli la chofe ne meriteroit pas en vn pais £deferc& fi affreux, de s’efforcer à viurele courant d’vne fi vifte riuiere. Au cofté gauche de ce fleuue commence laProuince des Sauuagcs,appellésvulgai- rement Canadiens î par ainfi il eft temps que nous commencions à traiter du principal yo fleuue de ces pais. Vne chofe voulons nous feulement adioufter, c’eft que du port Gajpe' qui eft à la cofte oppofite,vis à vis de FIfle de Natifiotec, iufques à Tadoufac , ceux quifçauent mieux le chemin content oétante ou nonante lieues. CANADA. 4; OCCIDENTALES. LIVRE II. CANADA. C H A P. IX. La ^'ande ^^uiere de Canada j cÿ* la, defcription des tenons qui ïauoijïnent iufques à Quebec. CE fleuue peut aifementobtenirlapremiereplace entre les plus renommés fîeu- ues de 1 Americjne Septentrionale; il fut nomme par .^^nTtiey Oj^x premier le defcroLiurit d’autres du depuis maintenant il cft ap- pelle par ces vulgaires habitans Il prend fa fource des plus profondes Vro- uinces de cette Continente, s’eipardant parfois en des lacs ,puis raprochanties riua- ges ilfe roidift entre des palfages fort eftroirs,tantoft il fe précipite , &rauift & emme- ne auec foi plufieurs grandes riuieres, aucunefois fort large, aucunefois plus eftroit, il defeend par plufieurs tours & deftours, iufques à ce qu’il (e mefle au droit du Cap Oc- cidental de 1 de Natijcotec ou de t’ Ajjuwption dans le Goljè de S, X4^r^^/,par vne em- boucheure large de trente ou quarante lieues , & profonde de cent cinquante bralTes, principalement auprès defonriuageduSud. C’eftvnechofe incroyable comme ileft poiiibnneuxjcar à certains temps del’annee , félon la nature de chaque forte de poif- xo fo n, depuis fon emboucheure iufques à fa fource, il s’en prend vn très-grand nombre, non feulement de celui de riuiere,mais auiîi de mer , fçauoir de ceux qui ne fuyent pas l’eau douce. fait mention entre iceuxd’vn,dVneafles eftrange forme, lequel eft de la grandeur d’vn ^/«^«/>?;d’vne couleur fort blanche, ayant la telle comme celle d vn Heure ; les Sauuages lappelloyent en leur langue Adhothuys :i\ s’en trouue grande quantité vn peu au dedus 1 emboucheure de SaguettAy , où l’eau commence à deuenir douce. L vn & l’autre riuage de ce fleuue efl: fort plaifant,mais principalement celui de la main gauche quand on monte , la terre va doucement pn penchant vers^le riuage ; & puis infenfiblement fe releue en colines & montagnes ; & par tout elle eft reueftue 3 O d'arbres & vignes fauuages, qui eft vne chofe fort belle à voir; plufieurs ruifteaux,tor- rens & petites riuieres defeendant des montagnes s’y viennent perdre. Son canafem- brafle plufieurs Ifles,& fait plufieurs bayes & recoins, defquels pour parler auec la mef- me ordre que leur dilpofition requiert, nous retournerons à car au prece- dent Chap. nous auons couru la riue de la main droite. A fix lieues donc de Ion emboucheure vers 1 Oueft,ily a vne petite Ille au deuant de la Continente , laquelle on nomme l'ijle aux Lieures , de ces poilfons dont nous auons parlé n agucres ; elle eft diftante de la riue de main droite deux lieues, & quatre de cel- le de main gauche; au delTous d’icelle on peut fans danger mouiller l’anchre. Il y a vne petite riuiere qui fort delà Continente, fort plate à baffe marree, que Chamflain nom- 40 Rimer e aux Saulmom,^. caufo qu’on y prend de cette forte de poiflbn. A trois lieues delà eft le Cap du Daulphm,çyyxx conftituë vne baye fort ample d’enuiron huiél lieues de large,dans laquelle fort vne petite riuiere fort plate quand la mer fe retire : cf tte baye eft fermee de 1 autre cofte par le Cap de l'Aigle. A vne lieue delà fo trouue l’ijlè auxCou- dres,ainfi dite de l’abondance de ces arbres,dont elle eft comme remplie, panier lui donne trois lieues de long & deux de large, mais chafnplaml^ fàit la moitié plus petite: elle fe finift en pointe aux deux bouts; il y a des prairies vers le coft é d’Oueft: & au tour du riuage qui regarde le Sud-oueft,ils’y trouue des rochers qui font que la mer y brifo grandement : au refte c’eft vne Ifle fort agréable , couuerte de beaux bocages &fepa- ree du riuage d enuiron demie lieue ; vis à vis d’icelle il y a vne petite riuiere qui fort de jo la Continente dite par ChamplainiRiuiere de Goufie, non pas de fa profondeur; car elle eft fort plate & difficile à nauiger,à caufo des rochers qui font dans fon emboucheure ; mais a caufo de la profondeur du canal qui coule entre flffe & la Continente, grande- ment agitee quand mefme il ne vente point.pour laquelle caufo les François ont nom- me e Cap qui eft a cinq lieues delà vers 1 Oueft, Cap de Lourmente .T)Qvcùxd.\xzxit l’eau de cette grande riuiere deuient déplus en plus douce. Suit a deux lieues delà vne Ifle nommee autresfois par .^jtartierj'ljle de Bachmy^oxxt F 3 l’abondance description DES- INDES iabondaiice des vignes fauüages qui y Cont,m2imtQn^ntl’lpd^OrïeanSy feparee du riua- «■e de la main droite d Vne demie lieue d’erpace,& du gauche dVne lieue & demie j elle adelonglix lieues, & de large vn peu plus dVne,fon coftéduSud abonde enbois& pafturages par vne deledable variété. Vers le Sud elle eft auoifmee de quelques peti- tes Ides plates & rafes^rendues fort agréables par vne diuerfité de prairies & bocages, qui font fournies de Sauüagine ; mais entre icelles & la Continente, il y a plufieurs ro- chers, qui rendent le paifage difficile aux nauires de ce codé là. ^ Delariuiere de Saguemyva(<\\xts à cette Ifle, les riuages du fleuuede Canada grand deftour fe courbent vers le Sud-oueft ; la terre des deux Continentes eft releuee de hautes montagnes & du tout infertile, partout elle eft couuefte de fort grands fa- r o pins &: femblables arbres : les riuages y font de difficiles accès à caufe des rochers ci & là efpars,& onnepeutmefmenauiger dans le fleuue qu’auec vne grande peine. * En outre de l’Ifle i Orléans iufques à ^ebec ( duquel nous parlerons ci-apres ) il n’y ^qu vne lieue : Toute cette efpaee de la Continente, qui eft cnttQradoufac & j^uebec, eft appellee des François Nouuelle Bifeayes elle eft terminée par yn torrent fort rapide, qui prenant fon origine dVn lac, qui eft au haut des montagnes à enuiron dix lieues du riua^e , fe précipité du haut d’icelle quelques vingt coudees o Aplus , & fe roule dans vne grande baye vis à vis de cette Ifte. Les François nomment ce précipice, Legrand Sault de Mommorancy. Iufques ici nous auons fuiui le riuagede la main droite, auant que pourfuiure plus to outre , il nous faut auffi viftter enpaftant celui de l’autre cofté. Vis à vis du Cap de V rOueft de Hile de NaPifiotec,NÇ,is le Sud leCap appelle de Boutonnières s’auance en mer, vn peu plus outrevers leNord-oueftle Cap de l EueJ^uetèc dans le deftour du riuage vers l’Oueft eft celui du chat, fur lequel femonftrent de fort hautes montagnes , vul- gairement AitcsAîonts de nojlre l)an^e,6s slIIgs près delà la riuiere.Æfi!ï^^^^^ entre dans le grand fleuue ; c’eft vne petite fiuiere qu’on peut monter dix huid lieues haut auec des chaloupes : les Sauuages qui habitent du long d icelle , quand ils ont monte iufques a fafource portent leurs fur leurs efpaules enuiron vne lieue , iufques à vne fon- taine d’où fourd vne grand riuiere qui fe defeharge dans le grand fleuue, &par ce moyen ils fontleur trafique auec plus de facilité. A vingt lieues de Mantane on ren- j o contre le PA, montagne qui plus elle s’efleue & plus elle fe fait pointue ; delà iufques au noitderadoufacoyxi eft fur le riuage oppofire,il y a quinze lieues depaflage. Au milieu de l’efpace qui eft entre Mantane & cette montagne, fe trouue l’Ifle de S. Barnabe , vn peu toutesfois plus près de ce riuage ; le refte de cette riue eft fort peu cognu. • C H A P. X. ^es Terres du fleuue de Canada, //«m flm auant de U yiÜe Hoclielaga, anciennement yeu'e de fente ^ar îacc^ues Quartier. Avant que de pourfuiure la defeription du fleuue de Canada & fes riuages, 40 félon la defeription des plus Modernes cfcriuains,il ne fera point hors de pro- j;^s de renouueller la mémoire des plus vieux, & de reprefenter ce que Iàc(yues ^uartïir y a remarqué. Iceîui donc comme il fut monte auec fes nauires iufi^ues a tljle de Bachus, nommee pour le iourd’hui d’Orléans , eftant vnpeu plus aduance vers rOueft, il rencontra yn port fort commode,ou ilmoüillal anchre,&luidonnale nom de .S. Croix, [champlain s’efforce par plufieurs raifons de prouuerque ce lieu eft main- tenant appelle ^uehec , d’autres font d’autre opinion ) ou pour lors les Sauuages auoyent vne habitation & vn village nommé Stadaca on St adacona: & ayant a caufe de l’approche de l’Automne donné ordre pour y baftirvne maifon afin d y hiuerner, cependant que les ouuriers auançoyent la befbgne,il entreprint le xix de Septembre l’an I J35 devifiter auecquelques-vns de fes gens la riuiere plus auant: Or les riuages eftoyent d’vn cofté & d’autre fort beaux à voir, eftans reueftus de forefts & bocages remplis de hauts arbres,&d’vne grande quantité de vignes 5 mais qui napportoyent que de petits raifins aigres, comme n’eftans pas cultiuees : le fleuue mefmecouloit doucement par vn agréable canal, bordé à droit & a gauche de plufieurs villages & ha- bitations de Sauuages, qui viuoyent principalement de poiflon. A vingt cinq lieues OCCIDENTALES. LIVRE IL ÜU délias du port de S. Croix le fleuue s efl:roicinbit,& contraint par vn deftroit,roidif. foit fon cours par deflus des pierres & rochers cachés fous l’eau , ce qui le rendoit dif- ficile à nauiger : les Saunages appelloyent ccliQU-Achelaci OMÂchelay. Ayant par apres monté neuf iournees de chemin, il entra dans vn grand lac, dans lequel le fleune fe relpandoit, lequel aiioit douze lieues de long & cinq ou fix de large, profond en plitfieurs endroits de deux brades & au commencement d’yne & demie^ receuant l’eau de quatre ou cinq riuieres, qui entrecoupoyent quelques petite^ Ides : delà le deuue court par vn propre & certain canal, & puis ferelpend derechef en vn autre lac, duquel iufques à Hochelaga il y auoit quarante & cinq lieues ; toute cette efpa- 1 0 ce le deuue ed fort plat,&: feulement nauigable auec de petits bateaux. La ville de Hochelaga eftoit edoignee de fix ou fept lieues du riuage , fîtuee en vn fort beau terroir & biencultiué; oùil y auoit vne grande abondance dechefnes &fapins, & des champs fort fpacieux, femés de duquel les naturels fe feruoyent au lieu de blé. La ville eftoit munie en rond d’vn rempart de bois fait de trauerfes de fommiers entraués l’vn dans l’autre par vne finguliere induftrie, auec vne pointure de pieux pointus, couuerts dedans &: dehors de planches, l’entree edoitau haut remparee d’ais à laquelle on montoit auec vne efchelle , où il y auoit vn grand monceau de pierres & de cailloux,d’où les habitans, fi l’ennemi fe fud efforcé d’entrer , pouuoyent en feureté le chadér auec ces pierres du rempart.il y auoit dans la ville quelque peu moins de ein- io qualité maifons, badies de mefme matière & couuertes d’efcorce d’arbres , de quinze pas de large, longues au plus de cinquante, élégamment diuifees en chambrettes, auec vn fouïer prefque au milieu. Ils auoient leur prouifion & autres chofes en commun ; leur pain edoit dGMayz. qu’ils nommoyent Caracomy^U auoyent vne grande abondan- ce de febues, pois , melons & concombres ; ils gardoy ent auffi pour leur hiuer du poif- fonfeichéau Soleil Sauvent; ils s’habilloyent de peaux de bedes fauuages,& d’icelles ils faifoy ent leurs lids fur vn plancher vn peu reloué de terre. C edoit vne , nation qui mefprilibit les richelfes , defquelles ils n’auoyent ni cognoidance ni defir, leur foin edoit feulement de la vie &: du vedemenr. Ils ne voyageoyent point pour -trafiquer comme plufieurs autres Sauuages,mais edant contents de leurs limites, ils appliquoy- 3 O ent tout leur labeur &:indudrie à cultiuerles champs, à cha]fer& à pefeher. Ils fa^- foyent feulement edime de hEfargny,çyyx\ edoit blanc comme nege, lequel fe trouuoic dans la riuiere comme eferit dans des Cornibots {ïq n’ai peu fçauoir ce que figmfiêce mot, fi cen’edd’auanture quelque forte de coquille, ou bien au lieu de Or- nibot on eud eferite Caramot, qui fignifieen François coquille j en cette maniéré : Ils plongeoyent dans la riuiere les corps morts de leurs ennemis , où des leurs mefitie mis à mort pour quelque forfait, apres les auoir découpés aux parties les plus inufcu- leufes en longues taillades , & les y ayans lailfés l’efpace de douze heures ou plus, il les enretiroyent, ôede ces incifures ilsamadbyent leur précieux duquel ils for- moyent des carquans ou paternodres. Ils honnoroyent grandement leur Cafîque 40 qu’ils nommoyent/^^i7/^^Æ;24,&leportoyentpar tout fur leurs efpaules, aflis fin des peaux de bedes fauuages. C’edoit fans doute vne heureufe nation, fi elle n’eudedé dedituee du tout de la cognoidance de Dieu &: de fon feruice. Nous n’auons pas voulu pader fous filence toutes ces chofes amplement dbfcrites lacques ^artier^^nco'ce.s que Champlain àc^LMtr^s François,qui y ont voyagé beau- coup plus loin, n’ayent rien ouy de cette ville ni de cette nation,non plus que plufieurs autres chofes que ^artier a lailfees à lamemoire, comme veuësparlufoureceuè’s par le rapport des Sauuages , lefquelles edant incertaines & douteufes nous n’auons pas edimé deuoir edre ramentuës en ce lieu. 50 C H A P. XI. Defcripîion du> grand fleuue de Canada es enuirons de Québec îfl au defflis, fllon [obferuation des Modernes^ « NO V s auons pourfuiui au Chap. ix 1 vn & l’autre riuage du grand deuue à £^^r^£’r,ainfi nomment les derniers François & cham^lain mefme, vn certain coin de la Continence; qui ed fur la hauteur de quarante fix degrés & vingt fcrupules; 48 DESCRIPTION DES INDES fcrupules, renommé à caufe d’vne colonie de François dont nous parlerons bien toft, & qui eftoit, lors que les François y arriuerent premièrement, agréablement couuerc dVn bois efpais de noyers. La contrée voifine eft dVn terroir fort fertile, &grande- ment prodigue à rendre la femence ; mais elle eft prefque toute couuerte de grandes forefts de diuers arbres femblables à ceux de par-decà & mefme de ff uidiefs , comme noyers, pruniers, cerijfîersjqui pour le deffaut de culture produiftent des fruifts moin- dres que les noftres. Il y a des vignes fans nombre, des meures de buiftbn, fraifes femblables fruifts , ci & là il s’y trouue des herbes & racines dont l’homme fe fert oi:- dinairement: lefleuue voiftnfquin’eft en cet endroit qu’vn quart de lieue de large) eft abondant en poiffon , & les bois fourniftent force Sauuagine. Laïr y eft fort fain i o dés la fin d’Auril iufques au milieude Décembre, les mois d’hiuer y font maladifs, & engendrent le Scorbut & autres maladies : L’hiuer y eft fort long, de forte que bien foiiuent les neges couureiit encore la terre au commencement de May , ce qui eft efmcrucillable veu le climat. Le vent de Nord-oueft y eft le plus froid de tous , & il y amene l’hiuer les neges ,& l’efté le beau temps. Tant plus on monte le fleuue au defllis de ce lieu, & tant plus les riuages fe font voir beaux ; mais le canal de la riuiere qui eft tantoft d’vne lieue , taiitoft de deux de large s’eftroicift infenfiblement , &; à caufe des baftes &: rochers ne fepeut nauiger qu’auec grande difficulté & danger. , A quinze lieues de ^ebec vers l’Oueft fur l’autre cofté de la riuiere il y a vn autre ao coin , lequel on appelle encore pour le iourd’hui S. Croix , qui eft le lieu ( comme l'on croit ; où ^artkr hiuerna, encore que ce foit vn lieu du tout fablonneux , & expofé à la rigueur du Nord-oueft, & où les prairies voifines font couuertes d’eau à haute maree ; & qu’on peut mefme difficilement aborder, à caufe des bancs, rochers & de la rapidité du fleuue. A neuf lieues delà au riuage de main droite fort vne petite ri- uiere appellee vulgairement S. Marie ; ôz vn peu plus outre eft fituee l’ifle nommee des François i*. Eloy, à quatre lieues de laquelle eft celle que les mefmes appellent Les trois Riuieres-, ilyaàfbn emboucheure quelques''petites Ifles fort belles avoir, & toft apres on trouue le lac Pierre, fur la hauteur de quarante fix degrés ; ayant huift lieues dé long & quatre de large, profond de trois ou quatre brafles : a lariue de main droite fort 5 o la petite riuiere de S. Sufane,^cd\c de la gauche deux petites riuieres ; mais qui cou- lent par de belles campagnes, on les nomme du Pont & de Germes , elles Ce vont perdre dans vn lac qui coule fi lentement qu’il femble ne bouger point du tout. Au haut dé ce lac il y a quelques petites Mes reueftuès de plufieurs arbres, remarqués pour y auoir vn grand rapport de vignes, & grande quantité de Sauuagine. A la main gauche fort vn fort grand fleuue , appellé par les François du nom des habitans Fleuue des Iro^uois^ à quarante cinq degrés de la ligne , ffin emboucheure eft de quatre on cinq cents pas de large, & court du Sud-oueft au Nord-oueft 5 les riuages qu’il laue font de part & d’autre fort beaux, & couuerts de plufieurs arbrès ; il encerneneuf ou dix Mes , en plu- fleurs lieués il eft plus de demie lieue de large ,& n a pas moins aux lieux ou il eft le 40 moins creus de quatre piés de profond ; il defeend d’yne catara(fte,puis il court par vn plat pais quinze lieues de long, il s’el])end comme en vn lac au commencement du précipice, où il eft fort plat,& y court d’vne vitefle n grande qu on ne le peut monter auec des chaloupes ; mais feulement les Saunages auec leurs canoas lepeuuent forcer auec vn grandlabeur éc danger : ayant pafle ce precipiceô^ derechef vn autre, il entre dans vn grand lac qui a de circuit quatre vingt ou cent lieues , ou il y a plufieurs Mes> aucunes defquelles ont dix lieues ou plus de long, riches en caftors : le lac eft enuiron- né de forefts, qui contre l’ordinaire de celles des autres contrées de la Nouuelle Ff an- ce,produifent force chaftaignes : il nourrift diuerfe forte de poilfon, & entre iceux vn, incognu ailleurs, que les Sauuages noïx\sxiex\tchaoujourou,(:y\jii croiftbienfouuent iul- Jo ques à dix piés de long; il eft long & délié comme vn brochet, muni a la façon d vn efturgeon d’cfc^lles cendrees,fi dures quelles efinoucept la pointe des dards, auec vn long bec & la gueulegrande,ayant chaque mâchoire garnie d’vn double rang de dents fort pointues ; il n’çft pas feulement ennemi des poiftTons , mais il chafle par vne fingu- liere induftrie aux oiféaux mefmes ; car Ce tenant auprès du riuage entre les ioncs &: rofeaux; il dreflfehors de l’eau fon long mufeau, auec la gueule à fleur d’eau, & demeure en cec ; zo OCCIDENTALES. LIVRE ÏI. 43) en éct eftat faiisfe bouger, iufques à ce que les oifcauxjquine fe doutent de fa trom- perie,fe perchent fur Ton bec comme fur vn pieu, qu’il tire par apres fous l’eau & les deuore. Les Sauuages font grand eftime de fa telle, & lors qu’ils font trauaillcs du mal de telle, ils s’iricifent la veine auec les dents d’icelui, &: difent qu’ils en recoiuentvne guerifon alleuree. D’vn collé & d’autre de ce lac fevoyent de fort hautes montao-nes, dont celles du collé derOrientontlefommettoulîours couuertde nege: auprès d’i- celles Izslroquoü font leur demeure, & y cultiuent de fort belles vallees fertiles en Mayz. J comme aulTi vers le Sud auprès d’vn petit lac , qui tourne vers la Prouince de Norttmbegite ; où s’efleuent aiilïi de fort hautes montagnes, mais qui ne font pas fi cou- I O uertes de neges que les autres, champlain qui premier defcrouurit ce lac lui donna fonnom. Mais il ell temps de retourner maintenant au grand Heuue. A quelques lieues au delTus l’emboucheure dufleuuedes /rtf^« eft fort petit, & comme bouché par vne petite Ifle qu’il a à l’entree ; il y avn bois qui couure fes riues,quiempefcheparfon elpaifleur le paffagede ce port à h baye de S. MArk.Le troifleme eft du mefme cofté,qu on appelle Rmjfeau delà Rc>che,\ caufequ’on n’y peut entrer auec des nauires, pour les baffes & rochers qui font en fon emboucheu- Les François s’y eftoyentplacésl’an cio loc v,commenous dirons ci-^pres. Du F&rt Royal la cofte tourne encore plus vers le Nord-eft , iufques au Cap dePou^ trincourt & iufques fur la hauteur de quarante & cinq degrés & quarante fcrupules, où la mer s’efpend dans vne baye qui a vingt cinq l’ieuès de circuit, beaucoup plus lon- gue que large, dans le fonds de laquelle entre vne petite riuiere & quelques torrens t vis à vis du Cap,& à la main gauche de cette baye dont nous venons de parler, il y ale Fort aux minesyaiwd nommé des mines de cuyurej-qui font tous les iours couuertes deux fois de la maree. Ici la terre ferme s auance en mer par vn long & eftroic Cap qui s’e- ftend entre deux bayes, nommé vulgairement le Cap de deux Bayes cet eftèét.Tà baye la plus loin s’appelle la Bayes de Gennes, laquelle receuant la mer par vne entree de J o cinq lieues de large yluiouure au dedans vn fort circuit , &: reçoit deux riuieres, l’vne qui y vient de l’Eft , l’autre qui y defeend du Nord, & fe ioind: prefque auprès du de- ftroft .S”. Lunaire , auec le cofté droit de laPeninfule , ioignant en vn angle les limites de Cadie. C H A P. XVI. tir Si couUumeSi langage des Souriqiiois, qui habitent ces pats. Le s naturels habitans de la Cîouy^fÆc de chafre,ils difent qu’il y a ia long temps qu’ils ont ceffé de femer comme les autres qu font plus au Sud,font,a caufe des incuiTions de leurs ennemis qui gaftoyent leur m oif- fon : ce fleuue defcend du milieu du pais de deuers le Nord-eft, premièrement fort pe- tit,puis apres croiffant par la rencontre d’autres ruiffeaux & riuieres,ilcoulepar diuers deftours, tantoft doucement entre des Mes , & tantoft roidement. Les Anglois l’ap- pellent d’vn autre nom Sagadahoc, cotrime. nous dirons au liuf e fuiuant ; car nous nous fomnies propofé de donner en ce lieu la defeription de la Nomelle France , principale- ment félon les obferuations^des François. C H A P. XIX. Fleuue de Chouacouët, mœurs des Almouchiquois. CO V R A N T la cofte du fleuue .^innibequi vers le $ud*ouefl: ('car elle fe tour- ne de cette partj on rencontre vne baye , laquelle embrafle dans fon fein plu- lleurs Ifles, & on voit à la terre ferme de fort hautes montagnes : huift lieues plus outre, la riuiere ChouacouétïsSx. fon entree en mer, à quarante trois degrés & quarante cinqfcrupules de la ligne 5 ayant plufieurs Ifles dans fon emboucheure, Tvne defquel- les pour l’abondance des vignes'qui y eftappellce des François tljlede Bachm , & des noftres, VFijngaerdenEykndt.YWo. eft feparee de la Continente par vne efpace de deux io lieues , rendue fort agréable par vne grande quantité de chefnes*& noyers qui y font, & fournie de champs propres à enfemencer. La riuiere efl: fort plate, profonde feule- ment en fon entree de deux brafles à maree haute, mais au dedans elle en a trois & qua- tre ; fort poiflbnneufe : Le terroir le long de fes riuages y efl: gras, muni de prairies, veftu agréablement de hauts fapins, fouteaux &c ormeaux. Les Sauuages qui y habitent different grandement, tant en langage qu en mœurs des autres naturels de ia Notmelle France. Ils fe nomment, comme eferit chamflain, Al- mouchiquois. Ils rafent leurs cheueux depuis le front iufques au fommetde latefte, & laiffent croiftre ceux de derrière, qu’ils noüent & bigarrent de diuers plumages ; iis fe peignent la ^ace de rouge ou de noir, & font bien compofés de membres fans aucune 5 o -deformité : leurs armes font des lances, mafîuè's, l’arc & les fléchés, lefquelles à deffaut de fer, ils muniffent de la queue d’vncertainpoiflbn monftrueuxteftané,nommé 5’/- gnoc. Ils cultiuent la terre autrement que ceux qui demeurent à l’Orient d’eux, & fe- ment du Mayz, & des febues de T urquie, bigarees de belles & diuerfes couleurs , qu’ils plantent de rang auprès du Mayz^^odœo. qu’il leur ferue de rames pour monter : ils palli- fadent leurs champs d’efpines viues &les ferclent& nettoyeur curièufement : ils fe- ment en May & moiflbnnent en Septembre. 11 y a grande quantité de noix,mais plus petites que les noftres ; vne infinité de vignes,des raifins defquelles les François difent auoirfait au mois de lullietdefort bon verius. Ils plantent aufli des citroüilles & fem- blables fruiéts, comme aufli du T abac. Ils ont leurs demeures arreftees, & ne changent ^ q pas facilement de lieu comme les autres Sauuages, ils couurent leurs cabanes d efcorce dechefne, &ies enuironnent en rond de grofles poultres,pour s’y pouuoir défendre de leurs ennemis. Pource que nous auons fait mention de ce poiflbn monftrueux, qui eft fort ordi- OCCIDENTALES. LIVRÉ IL Ce poifTon nommé des Saunages Signoc ou Siguenoc, des noftres Aragnec de Mey,c(k vne efpece d’efcreuicesjcouuerts deflus de deux fort dures efcailles,defquelles celle de deuant eft bofl'ee à la façon dVn plat, aucunement efpaifle , ü ce n’eft quelle foit dou- ble ronde autour du front & brauement formée, tàillee en demie lune ou elle fe ioind a l’autre ; le dehors eft releué par bodettes ou pointes obtufes difpofees par rang , celle de derrière plusdeliee que l’autre eft en forme derozange,dentelee des deux codes, ed picotee de petits trous par va bel ordre : la queue ( comme audî l’efcaillej ed fort long-ue , furpadant en longueur tout le rede du corps , trigone ou tetrahedre, & depuis le milieu iufques au bout dentelee de pointes rudes. En la partie connexe du premier 10 ted,prcfque au milieu font adis les deux yeux, ades apparents quand ils viuent.mais . quand ils font morts plus retirés & couuerts d’vne membrane comme de corne; il a pludeurs iambes à la taçon des cancres, les huid premières font plus courtes que les autres, les deux qui fuiuentfont plus longues, & les autres deux d’apres derechef plus courtes , il n a point de nageoires, mais il ed fourni de codé & d autre d’vn petit os ob- tus comme d’vne rame aueclefquels on croit qu’il nage, ilaauredeaupresdela gueu- le deux petites pâtes défquelles il fe fert pour mafcher: fous le ted de dedbus il y a quel- ques petites velies do codé & d’autre, qui s endent à la façon des gorges des raines. Ils fe plaident aux riuages & lieux fort peu profonds, &fe prennent principalement à remboucheuredes rmieres,ily en.a de diuerfes grodeurs; car il s en trouue pludeurs io la queue defquels ed longue de plus dVn pié: celui que nous reprefentons ici edoit des plus petits, d'où vient que toutes les marques que nous auons deferites n’y pa- rodfent pas d bien. A lemboucheure de la riuiere il y a vne petite Ide fort commode pour y badir vne forccrede , qui pourroit empefeher l’entree à tontes fortes de naüires. Deux ou trois heuës outre cette riuiere vers le Sud-edily a vn Cap ,& derrière îcelui en vn recul vn port entre quelques Ides,défquelles il apris le nom;il ed didant de la ligne de quarante trois degrés & vingt cinq fcrupules. Delà la code s’auançant fait vn autre Cap nommé des François Cajf aux J//es, qui eft âuôifmé de quelques Ides coüuertes d’arbres, fepa- rees de la terre ferme par vn petit dedroit. La terre de la Continente ed fertile en fro- 5 O ment & en padurages ; ou il y a pludeurs champs cultiués des Sauuages , & pariemés d’arbres par vne ap'eable variété. Les Sauuages qui habitent celieuvfentde canoas faits d’vne feule piece de bois ; peu differents au rede en habits & mœurs des Almou- leur langage ed fort diuers. ^ Au delà de ce Cap s’ouure vne fort belle baye, port fort commode pour les nauires, d ou vient qu ilaede nomme des François Beau Bort\ il ed ed oigne de la ligne de qua- rante & trois degrés. Pludeurs Sauuages demeurent auprès & y cuitiuent de fort fer- tiles champs : quelques torrens en outre qui arroufènt les champs defcendeiit en cette baye. A huiét lieues du Cap aux Ifîes vers le Sud le Cap de S. Louys s’auance en mer, lequel va en penchant, il edfur la hauteur de quarante deux degrés & quarante cinq 40 fcrupules au Nord de la ligne , vers le Nord d’icelui il y a vne baye, enuironnee de plu- %urs cabanes & champs de Sauuages , dans laquelle coule vne petite riuiere , venant du milieu du pais , que les François appellent Riuiere du Gaz^, & les nodres, pour les fables qui y fbnt,d^ SandRieuiere:Champlam edime qu’elle Va iufques au lac des Iroquoist & que peut edre elle en prend fà fburce.De ceCap,la code retourne vn peu & fe cour- be en forme de croidant (apres auoir fait pludeurs bayes &: recoins; vers le Cap ap- pelle des François Cap Blanc , des Anglois Cap Cod^^ des nodres Staeten-hoeck, c’ed à dire le Cap de Medîeurs les Edats : duquehnous parlerons d’auantage en fon lieu. Dans le retour de la code il y a vne baye fans anchrage,qui pour cet effeét ed nommee des François Maleharre\envn^T2indï:ecu\qui2itïois ou quatre lieues de large, detou- j O tes parts enuironne d habitations de Sauuages, & de tres-beaux champs, & ou il y a vne petite riuiere ; mais d vne fort bonne eau : ce recul pour la quantité des baffes qui y font, ci &labrifed vne ëdrange forte: iledau redeenuironné de foreds & bocages de fort hauts chedies & cedres odoriferans : les habitans y cuitiuent le Tabac foigneufe- ment: leurs cabanes font rondes,couuertes & enuironnees de mattes,au milieu ed le fouler & au fommet vn trou pour paffer la fumee. Iufques ici la code à appartenu à la 2\(tf/// ■ Ayant dere chef entreprins vn fécond voyage au mois de May Fan gIdIoxxxv, il monta- le grand fleuue de Canada, Ôc alla auec de petites barques iufques à Hochelaga, & plaçant vne colonie de François au port de i*. Croix,i\ y hiuerna. Là cette maladie dite Scorbutdncognuë pour lors^maintenantfi commune, affligea tellement ceux de cette colonie que plufieurs en moururent miferablement,les autres receurent leur fanté par la decodion de quelques fueilies que les Sauuages appelloyent Annedda:ct~ pendant la haine s accrut de telle forte entre lui & les Sauuages , qu’ayanrprins par fi- nelTe leur Cajftque l’ayant mis dans fon nauire, il trouua bon de l’emmener z o en France auec quelques autres. Parquoi apres auoir drelTé vne croix de bois , où les armes de France eftoÿent attachées auec cetteinfeription, Francis cvs Primvs Dei Gratîa FkANcoRVM Rex REGNATjilsenretournaenFranceaucom- mencemenrdeïullietl’an cl D lo XXXVI. Par apres cette nauigation ayant efté in- terrompue,enfin Fan cIdId XL le Roy derechef la commença auec plus grand appa- reil,& la plus grand part de ces Sauuages eftans moits,ï\cmxo'^2,IeânFrançoisSQignc\ix: de Roberualcn tiltre de Viceroi, & ^^m^rcomme premier maiftre de nauire en Ca- nada^Hochelaga. panier partitde France au mois de May auec cinq nauires, arrriuaen Aouftau port de S. Croix, mais Fayant elprouué aux precedentes années eftreafles incommode, il monta auec trois de ces nauires quatre lieues plus haut, apres 5 o auoir renuoyé en Francfe les deux autres, & y ayant trouué vne place commode , il y baftit le chafteau de Charles bourg Royal, où il hiuerna auec fes gens. Mais comme le Sieur Roberual, qui ne partit que Fan c I D I d x l 1 1 arriuoit auec trois nauires,r en- courra panier s en retournant auec les fiens , auprès de la Baye de la Conception cofte Oriental de Ferre lequel ne pouuant deftourner de fon retour en France, ( car ^artiernioit qu onpeufl: auec fi peu de gens brider Finfolence des Sauuages ; ilpafla outre & entra dans le fleuue de Canada, «m>2ff^/zr/,&broüilla tellement les affaires qu’on nepeuft à temps en- uoyer fecours à la colonie, qui fut caufe que les habitans d’icelle pafferent cet hiuer mi- ' ferablement à faute de viduailles. Mais les lefuites apres auoir obtenu de la Royne quatre tentes Royales , auec vn grand appareil de guerre, & pluficurs prefens de quel- ques particuliers, ils entreprindrent au mois de Mars l’an cio loc XIII vn nouuean^ voyage en la NouuelleFrânce, Et comme eftans arriués au Port Royal, ils n’eurent troù- uc perfonne que leurs compagnons & deux autres,les ayans prins, ils tournèrent leurs cour? vers la riuiere Pemtagoüet , où. ils auoyent refolu de fe placerais defeendirent commodément, bien qu’ils y eurent grande difpute auec les naturels, qui leur tourna lo à leur totale ruine. • Les Anglois y arriuerent lors auec vn nauire commandé par le Capitainey^r^Æ/A,qui venoyent de Virginie pour vifiter cette cofte; les Sauuages fe fer- iiaiis de cette occafion, aduertirent parMeffagerle Capitaine de la venue des lefuites en leurs terres ; qui fans perdre temps y alla auec toute diligence ; Gilbert dtt Thet ef- pouuantédefon arriueefi foudaine,niit fes gens en armes, & s’effaya de chaffer à coups de canon les Anglois ; mais ils abordèrent le nauire François d’vne telle furie, qu’ils s’en rendirent maiftres aifement, Gilbert & trois autres demeurans morts fur la place, & quelques autres griefuement bleffés ; les autres deux lefuites & plufieurs autres fu- rent prins prifonniers.quelqucs-vns fe fauuerent auec vne chalouppe. Argalle emme- na premièrement le nauire &les prifonniers en Virginie -, &: retournant derechef à J o cette riuiere, il rafa entièrement lafortereffe desFrançois,&plantavnecolomneau lieu de la croix qu’ils auoyent dreffee , & y attacha les armoiries d’Angleterre : il ruina auffi les ouurages des François en lifte de S. Croix, àc eftant allé au Port Royal,tm\i\xznt la place vuide, le ieune Poutrincourt eftant lors abfent, il démolit tous les édifices qui y eftoyent,&laiffa la place deferte. PoutrimourtYzncloloo xivarriuant à ce port &■ trouuant les chofes en cet eftat, voyant fon deffein rompu , & imputant le dommage receu parles Anglois à la témérité des lefuites, il s’en retourna en France, où peu apres il fut tué combatant pour fon Roi. V oila ce qui a efté fait par les François en la pzï- tic kudrâlcdch NouuelleFrânce, ^ C H A P. XXII. Difeours 'de ce que les Vrançoù ont fait es régions Se^tentfïondes de U Nouiielie France. Le Marquis de Monts duquel nous auons fait mention au Chap. precedent, ayant laiffé la partie Auftrale de la Noimelle Frame,to\ix^ fon deffein lancloloc vni fur la Septentrionale ; &: ayant obtenu priuile^ du Roi , il enuoya champlain en tiltr e de fon Lieutenant au grand fleuue de Canada s\c(y\ic\ eftant premièrement ar- riué au P or t deT adoufac,zpi:cs auoir interdit la traite à quelques nauires de 5. qu’il y trouLia auec les Sauuages,il monta de l’autre cofté du fleuue iufques ^.^uebec, ayant jo trouué vn lieu propre pour s’y placer,il y fortifia vn chafteau de foffés &: de remparts ; , fur la hauteur de quarante fix degrés & quarante fcrupules. Il y fema du froment au commencement d’Odobre , du feglc au milieu , & planta des vignes a la fin. Le Scor- but attaqua au mois deFeburier dix huid defes gens , dix defquels en moururent , cinq autres de difenterie; la terre futxouuerte denege fort hautes iufques au com- mencement d’Auril, auquel temps elles commencèrent à fe fondre. Et comme défia de vingt OCCIDENTALES. LIVRE IL de vingt huia qui y auoyenc hiiierné..il n’en reftoit plus que huid, encore prefquc tous malades, au mois deïuinran cio loc ix illeurarriua du fecours de Francefort à pro- pos. Champjam l’ayant receu , cntreprint vn voyage auec les Ochateguins & les Ahon- niequins à l’encontre àcsiroquoü, 5c ayant monté le fault , il entra dans le lac, & apres que pluficlirs de ces Sauuages eurent efté tués , & quelque peu prins prifonniers , il re- roLirna iims dommage auec ces gens à -où ayant laiffé chauuin pour comman- der en fon abfence à la colonie, il s’en retourna en France. L’an clolocxiiiy retour- na derechef,& y ayant trouué Tes gens en bonne fanté , il attaqua derechef auec les Sauuages fes alliés les en ayant fait grande boucherie, plufieurs dentr’eux 1 0 prins prifonniers & emmenés en dure feruitudeparces cruels Sauuagesjils’enretour- na premièrement à facolonie, & delà en France apres auoir laiffé dixfept hommes feulement. L’an cio loc x i retournant défia pour la troifîeme fois en cette partie de \d.Nouuelle France, apres auoir remarqué vn lieu fort propre pour placer vne colonie auprès du grand fault de .S. Lotiys, n’y ayant pourtant pas encore placé aucunes gens,il haflafon retour en France. Car comme de diuers ports de France il arriuoit confufe- ment des nauires au grand fîeuue,pour traiter la pelleterie, il ne receuoitpas deprohe de ces commerces, 6^ mefmes vn chacun de ceux qui y alloyent, fouffroyent de grands dommages. C>^4^//^/»pourpreuenir à cela,perfuadaauRoidefaire Proteéleurde de ces expéditions, le Comte de Soiffons premièrement, puis apres le Prince de Con- de, & lui pour Lieutenant. Fîonorede cette dignité, il entreprintvn quatrième voya- ge ver sla au mois d’Aurill’an cloloc xiii, &auecvnejieureufe na- uigation il arriua a le vu deA/Iay,ouiltrouuafesgensenbonnedifpofition; Oi apres auoir vn peu rafraichi les foldats , il entreprint vn voyage au dedans du pais, adioLiftant trop de foi aux menteries d vn CQ,vt2Liïi Nicolas Vignau, qui affirmoit con- ftamment que les Sauuages l’auoyent merîé fan precedent à la veuc de la mer du Nord, iufques à ce que les Sauuages & la chofe mefmelui fift cognoiftre lemenfonge, ainfüî retourna fans rien faire premièrement à fa colonie & puis delà en France. Mais par apres il entreprint vn cinquième voyagel’an cId Idc xv,menant auec foi quatre Re- ligieux de l’ordre des RecoIés,pour conuertirles Sauuages à la Religion Chreftienne ; 5 O & arriua le xxv -de May iTadoufac, puis delà à & enfin au grand fault de L Louys,on plufieurs Sauuages de diuers Prouinces eftoyent affemblees. La mefme an- née il fit vne entrepiife contre les Ir oquois laquelle 1 ifïué’ fut telle j c eft qu’ayant at- taqué & batu en vain quelque temps vn village des ennemis , champlain fut bleffé de deux coups, & la chofe demeurant fans effed, il s’en retourna auec grand danger à fes gens l’an c I d I d c x vi fur la finde îuin,& delà il s’en alla en France au mois de Septem- bre. Apres cela il partit défia pourlafixieme fois de France au mois de May, arriua à Tadoufacd^n mois de Iuin,&s’en retourna fur la fin d’Aouft en France. Voila ce que les François ont fait es pais Septentrionaux de la Nouuelle France ,cyy\.ç. i’ai rapporte comme il efi: contenu es Commentaires de Champlain :\e. n’2.i peufçauoir ce qu’on a 40 fait depuis, ni ce qui eft aduenu a cette colonie ; fi ce n eft qu’il efi affés notoire que ces lieux font pour leiourdhuifort fréquentés des François pour y trafiquer. C H A P. XXIIÎ. Ide L Nouuelle Efeoffe concedee par Lettres patentes du Roi de U Grande Bretagne Cheualier Guillaume Alexandre. AV A N T que paracheuer ce Iiure,ie ne puis oublier de dire qu’vne bonne partie de la Noimelle France auons ci-defîus nommee cW/>, fut concedee 1 an c Id Idc xxi parlacques Roi delà Grande Bretagne, fous le tiltre de Nou~ y O auec particulières lettres d’odroi au Sieur Guillaume Alexandre Cheualier, lefquelles lettres apres la préfacé contenoyent ces chofes. Nous auons concédé & difpofé, donnons, concédons & difpofons par la teneur de „ ces prefentes Lettres, au fufdit Sieur Guillaume Alexandre, Rs, heritiers, ou à tous ceux à qui il l’affignera,en héritage toutes & chacunes les terres de la Continente , enfemble ’* les Ifles fituees & aaiacentes a 1 Amérique entre le Cap ou Promontoire appellé com- ,, munement C/2/>^/fi’^^/^,efl:antenuiron la hauteur de quarante trois degrés de la ligne ’ I Æquinodiale ” T' description DES INDES >) Æquino(5î:iaie vers le Nord ; & de ce Cap {uiuantlacoftedela mer vers 1 Oueftdulqucs auhaure de S. Mane ,ivü\ga.ircmcnt S. Maries Baye) &dela vers le Nord trauerfanc ” par vne droite ligne, l’entree ou l’emboucheure de ce grand haure, qui court dans les >5 terres vers l’Eft entre les régions des Souriyuois ^ Ejlecheni'WS iufques aufleuue nomme vulgairement de iS". Croix : &ciu.fc^ucs a la fource ou fontaine plus elloignee de deuers ’’ l’Oueftd’icelui, qui première entre'dans ledit fleuuei d’où par vne ligne droite imagi- ^ » needaquelle on findra continuer & courir par les terres vers le Nord, iufques au pro- chain haure, fleuue ou fource fe defchargeant dans le grand fleuue de Canada : Et delà continuant vers l’Eft du long la cofte dudit fleuue de Canada iniques a la riuiere, haure, >> port ou riuage communément cognu & appelle du nom de Gachej;e ou Gaÿé,^ dere- 1 o chefvers le Sud-fud-efl: iufques aux nies appellees Baculaos ou Cap Breton, laiflantlef- ’’ dites Mes à la droite, & le golfe du grand fleuue de Canada ou grand haur e , & les terres » de Nemv-found-land,2.\xtc les Mes appartenant aufdites terres à gauche; & derechef iufques au Cap ou Promontoire fufditdu CapBreton,tÇi2.m.^\xn la hauteur de quarante ” cinq degrés ou enuiron :& dudit tournant vers le Sud-ouefl; aufufdit Cap nous auons commencé noftre délinéation enclouant Renfermant entre lefditss colles R riuages,R leurs circonférences depuis la mer iufques à toutes les ter- ” res de la Continente,auec les fleuues torrents,bayes,riuages. Mes R mers y adiacentes ” au deflfous fix lieues vers quelque collé que ce foit,foit de rOuefl:,Nord-efl:, R de l’Ell des colles R riuages R leurs enceintes : Et du Sud-fud-ell ( comme gill le Cap Briton ) zo ’’ R du collé du Sudd’iceluioù ellle toutes les mers R Mes vers le midi de leurs dites colles marines, enfermant cette grande Me communément appellee „ de Saille ou de Sablon,t{k2iïit vers Carban vulgairement dit Bout SoutheaB 2. Qnmton tren- te lieues dudit Cap Briton en mer , R ellant lur la latitude de quarante quatre degrés ” ouenuiron. Lefquelles dites terres feront toufiours par ci-apres appellees Nouuelk „ Bfcojfe en l’Amerique. Et lefquelles le Sieur Guillaume diuifera en telles parts R por- tions qu’il trouuera bon, Rieur impolera nom a la volonté. Enlembleaucc toutes fortes de mines, tant de nobles métaux d’or R d’argent, qu’autres de fer,cuyure,efl:ain, „ airain,Rc. Nous auons iufques ici exprimé les mots dudit priuilcge,fidelement comme ils y 3 o font contenus , par lefquels les limites de la Nouuelle Efcojfe en T Amérique font fpeci- fiés. Le Sieur Guillaume Alexandre enuoya auflîtolli an cloloc xxii vn nauire auec quelques gens pour chercher vne place commode pour habiter; qui ellans partis vn peu tard , hiuernerent en Eerre Neuue au port nommé vulgairement S. leans port, R puis apres l’an cio loc xxiii ellans pafles outre le colle du Sud de cette Me, ils abor- dèrent premièrement au port dit desFrançoisP^?r/4» quilsnommerent S. R puis delà ils allèrent à vn autre deux lieues plus outre,qu’ils appellercnt j DESCRIPTION DES INDES d’y germet hcureurement & d’y croiftre promptement. Il s y fait vne riche pefchc de poinon-jce qui feroit le premier reuenu qu’on entireroit : Aumois deMars, AurihMay ^ vne partie de luin, il y a vne fort, grande quantité de gros merlus, & en May, luini lulliet & Aouft des efturgeons,& mefme il s’ypefchévne incroyable multitude de ha^ rans auprès du riuage : quoi plus ? la mer y eft remplie de poilTon tout le long de l’an-. nee. Il n’y a point de doute qu on ii’ypourroit faire aifement&auec grand profit des Salines j Et les Marchands feroyent vn profit alîéuré de certaine graine, qu’on nom- me Alkermes ; car la liure d’icelle a efté autresfois vendue en Angleterre trente & mef- me quarante fols fterlings, combien quelle foit maintenant à plus vil prix : Il y a en outre vn grand nombre de peaux de cafî;ors,loutres,martes ou bellettes Scytiques, re- i gt nards noirs & d’autres femblables beftes,qu’onpeuttraiéter des Sauuages aueepeu de chofes; ( 11 eft certain queles François emporterentl’an cio Idc xvi àé\2. Nouuelle Irdnce en l’Europe plus de vingt cinq milliers de ces peaux ) Et afin que nous mettions fin aux commodités de ces païs, l’eau des riuieres y eft fort claire & tres-bonne à boire, comme defeendant des montagnes & rochers. La terre y porte de la nature plufîeurs arbres & mefmes plufieurs fruiéts/ur tout des meures, noix, noilettes, prunes, vignes, framboifes, groflelles & des fraifes : & des femences produites des melons, febues de Turquiesjpois & du Mayz, : commG aufli vne forte de lin , duquel les habitans font leurs rets. Il n’y a enfin contrée au monde qui nourrifte plus d’oifeaux & plus grande quantité de diuerfes belles que cette-ci. ' C H A P. III. Définition plus particulière de la mefme Continente par le mefme Autheur. A Baye de Penmbfcot, dans laquelle fe defeharge vne riuiere du niefme nom, eft grande de dix lieues del’Eft à l’Oueft ,& autant du Nord au Sud: elle eftdiuf urent lèe en plufieurs îfles , quelques-vnes defquelles ont dix milles de long , qui ou- plufieurs bayes & ports. Du collé de l’Eft demeurent les Tarantms,Æ.ks àts François, lefquels ont guerre continuelle auec les qui habitent de l’autre co- llé. Au collé gauche eft fitué Meccadacut au pié de certaines montagnes , que la mer ^ o laue,& qui font tellement hautes qu’on les peut voir en mer de feize ou dix huid lieues loin. Au deuant de la baye eft fituee l’Ifle de Sorifeo^ fort efteuee, qui pour cette caufe a cftéappellee des François ife Haute. Proche delà eft le lieu nommé Segochet Nufconcus, Pemmakidy & enfin du mefme collé la Sagadahoc^ fur lequel ily a eu autres- fois vne colonie d’ Anglois , auprès d’icelui les Aumukiawgeni, Kmnebekiy & autres Sau- uages ont leurs cabanes & leurs champs. Cette riuiere defeend quarante ou cinquan- te lieux au dedans du païs , fes riuages font d’vn collé & d autre bordés de mottes de fable, & de rochers couuerts d’arbres, excepté ouïes Sauuagesdemeurent,carlàla terre y eft afles fertile & gralfe. Delà vers l’Oueft la contrée Aacocifio s’eftend autour de cette grande baye,où il y a 40 plufieurs nies auec leurs hautes femees ci & là. Proche delà cd: Sô^ocotuck Cut vne pointe de la Continente,qui ouure vne large baye, où le riuage eft de fable, mais qui eft fortdangeureux à caufe de la quantité des Mes & rochers qui le bordent, & n’y peu- uent ranger que de petits nauires. Quoi plus ? toute cette colle depuis Pennobfcot iuf- ques ici & encore plus loin de Pennobfcot dQutïs PEU, eft toute remplie de tels rochers & Mes enuironnees de roches , de maniéré que c’eft vne chofe efmerueillable corn-. ment elle peut porter de fi grands arbres, & il n’y a rien qui ne foit pluftoft propre à eftonner qu’à recreentoutesfois la mer y eft poilfonneulfe autant qu’en lieu qui foit,&: ces Mes font fi plaifantes en bocages, arroufees de tant de fontaines, ornees de tant de diuers fruids, & nourrilTent telle abondance d’oifeaux, que c’eft comme vne chofe in- jo croyable, & encoresqueles riuages Ibyent ainfiafpres & rudes, neantmoins les vallees & le dedans de la Continente font d’vn terroir fort fertile. Suiuant lacofteversl’Oueft onreneontre^fr^;»m//V^ petits haures & commodes pour des petits nauires, auprès de la colle la terre eft fertile. Proched'f ceux eft fituee^;^^^i~ me troubla leur befogne, rafa les colonies, & emmena prifonniers tous ceux qui peufl: prendre,commenousauonsditauliure precedent. Les Anglois du depuis enuoye- rent auec plus grand appareil le Capitaine autres, & auec eux deux Sauna- ges, qui auoyent demeuré quelque temps en Angleterre, pour attirer par eux leur na- tion & feruir de truchements : mais pource qu’vn peu auparauant leur arriuee,vn cer- tain Anglois nommé auoit emmené de ce lieu vingt quatre Sauuages,qu’il auoit par trahifon & fous efpece d’amitié attiré en fon nauire, apres auoir traité auec eux, iefquels ( comme on a fceu depuis ) il auoit vendu aux Efpagnols dans le deftroit de GihdtârXes Saunages eftoyent li animés contre les Anglois, que fut contrains de s’en retourner fans rien faire. Parapres l’an cio Idg xiv i’;»«/>/?/futenuoyé,('pourpefclierlabalaine,&pour chercher des mines d’or &: d’argent^ lequel aborda à fille Mo7iAhiggm ,a quarante trois degrés & demi de la ligne i jl y trouua bien des balaines,mais non pas de celles de qui on tire auec profit de l’huile de leurlard J mais quant aux mines il n’en defcouurit nulles; parainfi ilfuten vain. L’an cIdIdc xv le mefmey futenuoyé pour la fécon- dé fois , lequel tomba entre les mains des pirates François , qui le tindrent quelque temps prifonnier. Cependant comme d’auanturevn des Sauuages que Huntaouoit vendu? comme nous auons dit; fuft tombé entre les mains des Anglois , vn nouuel 5 o efpoir commença à fe monftrer,^: ayant obtenu , bien qu’auec difficulté , vn nouueau priuilege du Roi, on y mena peu apres vne autre colonie, de laquelle nous parlerons bien toll. C H A P. V. ^ialiîés de l’air de la terre de U Nouuelie An^ctcYïCyextraiSi des Commentaires mü en lumière ^ar la compagnie mefene^t an cId loc xxii. Avant que nous pourfuiuions ce qui a efté fait par les Anglois en ces païs apres le nouueau priuilege obtenu du Roi,il ne fera point hors de propos d’em- 40 ployer ici,ce qu’eux mefme ont publié touchant les commodités àe a Nouuelie Angleterre-,^ ce qu’ils ont remarqué en general pour y placer des colonies virilement. Pour ellire vn lieu propre pour mener des colonies outre mer, il faut f difent-ils ) prendre garde à trois chofes: premièrement à l’aïr, afin que les habitans s’y portent bien:apres à la terre,afin qu’on y puiffie auoir aifement & abondamment les chofes qui font neceffaires à la vie : &pourladerniereàlamer, afinquefacces foit facile aux na- uires pour y exercer le trafic. Les qualités de l’aïr varient ou en general félon le climat, ou en particulieràraifondeleur fituation & habitude. Or ces chofes fe trouuenten la Nouuelie Angleterre en cette façon. Elle, comme eftant fituee prefque au milieu de la zone temperee,&: au milieu de f efpace qui eft entre le cercle ar6tiquc,& le tropique du cancre', deuroit iouïr de la mefme température d’aïr, qu’eft celle de la France &: d’vne bonne partie de f Italie : toutesfois le contraire s’y trouue, car ce qui attouche la mer,eft d’vn air plus froid , & cela ( comme il femble ) en partie pour le voifinage de la mer , de laquelle les ondes & le mouuement montrant , rompent la réflexion des rayons du Soleil: en partie pour l’abondance des vapeurs qui montent d’icelle , lef. quelles rabattent l’ardeur : mais les régions Mcditerranees y font médiocrement chaudes : 0«CCIDENTA L E s. LIVRE IIÎ. chaudes J 6e on y;a trouué par expérience certaine j que les païs qui v rccfardcnt Je icuer du Soleil, font plus froids que ceux qui y regardent le coucher; &queles \chzs du foi r y font plus tiedes que ceux du matin. Ce qui eftant ainfi , il fem- bic que, la température de l’aïr en ces régions là, eft grandement propre au corps des hommes de noftre nation , qui eflans accouftumés à vn climat aucunement tempéré , ne peuuent fupporter ni vn trop grand froid ni vn chaud immodéré. La terré y eft en outre fort fertile, & n’y apporte pas feulement de ce blé , que les Saunages ont accouftumé d’y femer , mais aufti de celui que les noftres y ont porte. Le riuage y eft fourni dé ports & bordé de toutes parts de plufieurs Mes, I O fort propres à eftre habitées , pleines de bocages, &veftués par vue agréable va- riété de chefnes, cedres, arbres à poix, pins, noyers, chaftagniers , faflàfras , pru- niers, rofeaux aromatiques , & autres femblables. Les hàbitans y font de mœurs aucunement traitables à qui fe comporte bien auec eux, humains & hofpitaliers. La mer auprès du riuage y eft poiftbnneufe, &fort commode poirr les Salines. Il y a au dedans du païs grande abondance de diuers oifeaux ; comme coqs d’indes, perdrix , cygnes , grues , oyes , canes > pigeons , principalement quand les fraifes commencent à meurir. De cerfs ôc autres femblables beftes , il y en a vn o-rand, nombre qui produifent quelquésfois trois ou quatre faons , qui eft vn remarqua- ble indice de la bonté de laïr & de la terre. 20 II y a vne certaine forte de befte frequente en ces païs j que les Saunages nom- ment Mû/fe, de la grandeur d’vn taureau , ayant la tefte dVn dain auec les cornes larges , qui muent tous les ans , le col comme vn cerf, le crin fort court , & qui defeend du col le long du dos , le poil long comme les eftans, auec vne paue qui lui pend fouS la gorge, les iambes longues, de grands pies à la façon des vaches, la queue vn peu plus longue que celle des dains ; fa chair eft d’vn affés bon gouft, laquelle les Sauuages gardent long-temps feichee au vent: fa peau eft aufti efpaif. fe que celle d’vn bœuf, & autant vtile à plufieurs chofes. Il fe trouue vne grande quantité de ces animaux en vne Me fort près dé jà terre ferme , appellee desÂn- glois Mount Mmfel , où les Sauuages les prennent en cette maniéré ; apres auoir 5 O allumé plufieurs feux , ils enuironnent le bois , & chafTent en mer ces beftes qui s’y iettent volontiers de leur nature ; ainfi ils les pourfuiuent auec leurs Lanoas , & les y tuent : il n’y a point de doute qu’on accouftumaft bien cette befte à feruir l’hom- me , fi on y apportoit de la peine & de l’induftrie. En outre voici les chofes donc on pourroit tirer de l’vtilité & du profit par le trafic : plufieurs fortes de poifTons : les fiéhes peaux de caftors,de loutres, de renards noirs, martes & autres fembla- bles : la chanure , le lin , des mines de fer ; planches , trauerfes , & route forte de matière, aufquelles oh peut adioufter la culture des vignes, qui y font là diuerfes & communes, & vne grande commodité d’y faire de la poix tant dure que liquide: enfin on ne nous apporte rien foie de France, foit d’Allemagne par ledcftroitde 40 Danemarck , qu’on ne puifiTe auoir là auec induftrie & vn petit labeur, loind vne efperance non petite d’y trouuer des perles ; & de l’ambre gris qu’on y a mefme trouué parfois furie riuage. Enfin la nauigation y eft facile & courte, & fort com- mode à l’Angleterre. Voila ce qu’ils en difent en leur Commentaire imprimé l’an clolocxxii. - C H A P. VL Nouueaa Pleymouth de U colonie qui y fut menee fdr les^Angloù, JO TT An cIo Idc xx quelques gens ayans efté enrollés en Angleterre, partirent aïTes tard & au commencement de Septembre de Flejmouth^^ocx. renommé d’i- celle,& ayans outrepaïTe le Cap Ctfflfleneufieme de Nouémbre, pource qu ils ne pouuoyent , a cauïe du vent contraire , gaigner leport où ils precendoyent aller , qui eftoit a dix lieues du Cap, ils moüillerent 1 anchre en vne grande baye que la coufjbu- ' re du Cap ferme. Ladefeendans a terre ôc cherchans de tous cpftésvnlieucommo- depours y loger, ils trouuerent quelques cabanes abandonnées ; puis eftans auancés , K plus ) 74 DESCRIPTION DES INDES plus outre, ils furent inopinément attaqués des Saunages, qu’ils chafferent auee peu de' peine. Mais comme ce lieu ne leur plaifoit pas a(Fés,ils entrèrent le feizieme Decemb/ dans vn autre haure vis à vis du Cap. vers l’Ouefl:. Or c’eftoit vne baye beaucoup plus grande que la precedente , enuironnee.de toutes parts d Vn terroir fort fertile, com- prenant deux Ides pleines de bois, & d’autres defertes & noncultiuablesjil y auoiC beaucoup de poiiron,& grande quantité d’oifeaux aquatiques félon la faifon,& melme dediuerfes fortes. Ils n’y trouuerent nuis habitans,encôr6 qu’ily euft des champs qui auoyent félon l’apparence efté cultiués &enfemencés, & n’y virent nulles riuieres na- uigables j mais bien pludeurs ruiffeaux & torrents d’eau fort claire &: bonne à boire. La terre y eftoit enplufieurs lieux merueilleufement fertile, en d’autres areneufe , il y i a auoit audi de l’argile fort propre pour faire des pots : ci & là il y auoicdes bocages grandement délectables & des champs & pafquis couuerts d’herbe. Par aind auprès de cette baye en la Continente mefme ils marquèrent l^iNouuellè Pleymouth,2i\x penchant d’vne coline qui auoit edé autresfois eukiüecparles Sauua- ges: dans lavallee couroitvn torrent, qui pouuoit feulement porter des chaloupes &: petits bateaux : beaucoup de fources & de fontaines arrôufoyent la terre de tous co- dés. Il y fut premièrement place dix neuf familles en tout ; qui badirent leurs maifons à doublerang vis à vis l’vne de l’autre, afin d’edre plus adeurés,&: de fepouuoir aider les vns les autres plus commodément.- Au mois de Mars comme l’hiueredoit pref- que padéjVn certain Sauuage vint à eux nommé SâmofitiC^và par la fréquentation auec iô les Angioisjlefquels venoyeiit d ordinaireà ride Monâhiggan^o\xt y peicher, feauoit quelque peu d Anglois, par lequel ils apprirent premièrement que la Prouince où ils s’edoyent placés edoit appellèe des Saunages Pâtuxet-, & qu’il y auoit défia quatre ans pades que tous les habitans d’icelle edoyent morts par vne maladie non accoudumee, làns qu’il en fut réchappé aucun : que proche de cette contrée demeuroyent les qui n’edoyent à peine pas foixantc propres à la guerre : 6c que vers le Sud- ed habitoyent les Nmfites , qui pouuoyent edre enuiron cent hommes , grandement ennemis des Anglois à l’occafion du fait de Hunt , duquel nous auons parlé ci-deffus. Peu apres vint audi à eux Mafjafoit, Cajjît^ue des Prouinces voifines, ( habitées dès Sau- nages nommés Sagâmos ) auec fon frere .^adequina , 6c plufieurs autres Saunages, qui j 6 contractèrent alliance auec eux. Voila quels furent les premiers fondements de la Nouuelle , laquelle fut par apres augmentée par la venue de nouueaux habitans : nous auons briefuement recité ce qui a edé rapporté par les Autlleurs Anglois en quelques particuliers Com- mentaires,laidant leredéà ceuxquiy ontintered. Nous adiouderons toutesfois cela en padant que ces premiers habitans , comme audi ceux qui y font allés du depuis, edoyent tous ou la plus grande partie de cette forte, qu’on nomme vulgairement en Angleterre Broumjles ôc P^r/>^/Vj,plufieurs defquels fe retirèrent en ces païs il y a quel- ques années, 6c d’ici ont edé menés vers leurs compagnons. ~ NOVYELLE BELGI Q_V E. C H A P. VIL T^efcription de U Continente de l’ Amérique Septentrionale , premièrement defeouuerte plus à plein e>* habitée par nos Belges. NOv s auons iufques ici parcouru cette partie de l’Amerique Septentrionale, laquelle les François ont les premiers defeouuerte 6c mefine podedee quel- que temps y ayantmené des colonies ; 6c que les Anglois ont edayé, apres l’a- uoirnommee depuis peu Nouue//e Efcojfe ^ Angleterre ^àe Ce l’attribuer: Or nous l’a- fo uons fuiuie au Hure precedent le long de la code iufques auGapappellé des François Malebarre, 5c auChap. ci-delTu? àcaufe des nouuelîes remarques des Anglois, nous l’auons derechef vifitee iufques au Cap Cod. Du Cap Maleharre donc,f afin que nous commencions par là jla Continente fe courbeparvn grand circuit vers l’Oued, 6c fait comme vne baye, au fonds de laquelle il y a vne grande riuiere qui fe defeharge en mer, de l’embourcheure de laquelle la code fe courbe derechef en forme d’vn coude vers le Sud-oued: à OCCIDENTALES. LIVRE IIÎ. 75 le Sud-ouell : & c’efl cette partie de la Continente aucc pluficurs îfles qui rauoifinent, depuis le trente huidieme degré & trentefcrupules("oùilyavneautreriuierequifort en mer ) iniques au quarante quatrième & plus, auant dans le païs , que nous ap- pelions auiourd’hui Noimeaux Païs-bo'S , pource que premièrement fous nos aufpi- ces , &: à nos deipens cette terre commença deftre plus à plein defcouuerte, puis apres par continuelles nauigations frequentee , & fous l’authorité des tres- illuftrcs & puilfans Seigneurs Meilleurs les Eftats Generaux des Prouinces vnies des Païs-bas , commença d’eilrê habitée des noilres , par vne colonie qui fut me- née. &:vn chafteau bailidu confentementdes Sauuages fur leur héritage. Aupara- 10 uant le cours de la code auoit bien efté remarqué par les autres nations, & mef- mc la coite veuë de la mer, & abordee du Cap Maiebane imzis nul qu’on fçache n’a point entré au fonds de cette grande baye ni de cette grande riuierc capable de porter de fort grands vaiifeaux , & n’y ont point remarqué quelle eitoit habi- tée de tant de nations diuerfes; _auant que les noilres fan cId Idc ix l’euifentob- ferué . Car la compagnie des Indes Orientales , ayant enuoyé Henri Hudjon An- glais auec vne barque vers les contrées du Nord de l’Amerique , pour y chercher vn paiîage vers la Tartarie & la Sinci cortime il l’euil cherché en vain, changeant fon cours, il alla premièrement vers la Nouuelle France, (un la hauteur de quarante &:quatre degrés &quinze fcrupules. Delà il tourna vers le Sud-oueil iufques fur la io hauteur de quarante vn -degré & quarante trois fcrupules, où li vit terre , laquelle il cilimoit que ce fuit vne Iile,qui viomn\2.Nounelle Hollande, mais vn peu apres il cogna que c’eiloit vne partie de la Continente & mefme le Cap Blanc ou Cod, 6c apres auoir fupputé reilime de leurs cours, ils iugerent que ce Cap eftoit feptante 6c cinq lieues plus eiloigné vers l’Oueil des régions del’Europe, qu’on neie mettoit ordinairement dans les chartes marines. Etapres qu’ils eurent veu la. terre en diuers endroits, ils rangèrent la coite du trente feptieme degré ( car ils auoyent iufques là exprès ou par- hafard décliné vers le Sud ) iufques au quarantième, où entrans dans vne grande baye , ils moüillerent l’anchre derrière vne baife, pointé de fable: là deux Sauua- ges veitus de peaux d’eilans les furent voir 6c les receurent ailés humainement : $0 6c eilans defeendus à terre, ils y cueillerent des prunes bleues défia meures j 6c y virent de fort beaux chefnes , peupliers 6c autres tels arbres ci 6c là. Puis apres auoir leué l’anchre , ils entrèrent dans la riuiere qu’ils montèrent iufques à quarante 6c trois degrés de la hauteur du pôle du Nord , où le canal pour eitre trop eilroit 6c trop plat, ne peut plus porter de grands nauires , ils virent bien par figues certains 6c indubitables , qu’auparauant il n’eitoit entré aucun Chreitien dans la riuiere, du moins qui euifent monté iufques là. Voila pourquoi comme Hudjon fut de retour à Amjlelodam fur la fin de l’automne, & qu’il eut raconté ce qu’il auoit defcouuert de cette riuiere, laquelle il auoit nom meeyî//?;?^.!î//a, du nom des Sauuages qui habi- tent à fon emboucheurej aufii toit l’an cIc Idc x quelques Marchands â'Amfielo- 40 dam y deftinerent vn nauire auec plufieurs marchandifes : & apres auoir obtenu priuilege de Meilleurs les Eftats des Prouinces vnies, par lequel il n’eftoit permis qu’à eux feuls de fréquenter pour la traite cette riuiere , 6c d’autres régions voifi- nes d’icelle, les années d’apres on commença le commerce auec les Sauuages , 6c nos gens y hiuernerent: enfin l’an cId Idc xv on y baftit vne fortereife fous les auipices de mefdits Seigneurs les Eftats, laquelle on tint quelque temps auec vne garnifon, comme nous dirons ci-apres. Par ces commencemens on donna le nom de Nouueaux Païs-bas à cette partie de la Continente Septentrionale, lequel lui conti- nue encore pour le iourd’hui. K C H A P. r 7tf DESCRIPTION .DES INDES h' C h a p. VÎII. '■'2 n^ejcrt^tion particulière des Nouueaux Païs-bas,y^/0» cofîe. La cofte de la terre ferme, comme nous auons dit,fe courbe dés le Cap Malleba^ re vers i’Oueft , bordee ci & là de pluiîeurs Ides, entrecoupées de tant de reculs & bayes , qu’il eft comme douteux fi on lui doit donner le nom de Continente ou fi on les doit appeller Ifles, enquoi les Autheurs font fort differents. Paffé ce Cap dans le retour mefme que fait la cofte, il y a vne petite Ifle , à deux lieues de la Conti- nente, longue d’enuiron vne lieue, laquelle on appelle Petockemck. Vers l’Oueft de i o laquelle , il y en a vne autre longue & ample qui fauoifine , que les noftres pout quel- que reffemblance ont nommee Texel: proche de cette ci deuers le Sud-oueft, à enuî^ ron vne lieue ou deux d’interualle,il s’en trouue vne autre plus petite , laquelle les no- ftres nomment du nom de celui qui la premier defcouuerte,rifle de Henri chrijiian; & des Anglois, comme il femble, elle eft appellee la Vigne de Marthe, fur la hauteur de quarante vn degré & quinze fcrupuies. On dit quelle a cinq lieues de circuit, veftuë ci & là d’arbres, abondante en oifeaux & fort commode pbur la pefche. Suit vers la- Continente tout proche delà V'ne autre petite Ifle, laquelle on nomme de la chofe mef- me le rocher de Boure, & à vne lieue d’e^ace rifle EltfabethSm la hauteur de quarante vn degré & dix fcrupuies , au milièu de laquelle il y a vn eftang d’eau douce , & dans zo icelui vn rocher que les Anglois ont autresfois effayé de fortifier, puis l’abandonnc- rent. La derniere de ces Mes eft celle que le Capitaine t^drian Block appella de fon nom. ' / Mais retournons à la Continentedà premièrement s’ouure vne baye (que quelques- vns veulent eftre vne riuiere^ honorée du nom deNaJfkd, ayant deux de nos lieues de large en fon entree , entrecoupée de plufieurs Mes , & entrant dans les terres enuiron huid lieues , par apres elle vient plus eftroite & fe finift en cône ,. profonde dans fon canal de quatre , cinq & par fois de neuf braffes, excepté en fon fonds où elle eft plus plate. Elle eft enuironnee d Vn agréable & fertile terroir,habité de Saunages fort vail- lans , difficiles à accofter, pource qu’ils rie font pas accouftumés de trafiquer auec 5 o les Chreftiens. Courant la cofte vers l’Oueft, on rencontre vne autre baye , àfept lieues de l’emboucheure Occidentale de la precedente , laquelle feft feparee en deux par vne Me qui eft dans fon entree , d’ou elle reçoit deux noms i car l’emboucheure qui regarde vers l’Eft eft appellee baye Anchres, & celle de l’Oueft baye des chalou- pés : les Saunages qui habitent autour d’icelle font appellés VVapenokes -, encore que quelques-vns ont eferit , que le cofté Occidental de la baye eft habité des Nalucanes. Eftant pafle huid lieues ou enuiron plus outre on trouue vne fort grande baye, la- quelle eft barree d’vnelongue fuite de terre, ou pluftoft d’Mes entrecoupées de plu- fieurs canaux, & s’eftendans iufques à l’emboucheure de la grande riuierej il y a auffi plufieurs petites Mes efparfes par la baye, qui ne font encore cognués de noms 40 particuliers , que les mariniers nomment & renomment à leur volonté. Entrant dans cette baye on rencontre à la main droite vne pointe à la terre ferme, courbee à la fa- çon dVne faulx, derrière laquelle il y a vne petite baye où entre vnè petite riuiere qui y defeent de deuers l’Eft, d’où elle à receu nom des noftres. Suit du mefme cofté vne autre petite riuiere, laquelle on nomme Siccanamos,à\i nom du Cajfique des Sauua- ges qui y habitent :Ily a là yn fort bon anchrage; derrière ce petit Cap ou pointe court vne autre petite riuiere, dans laquelle on fie peut monter que cinq ou fix lieues j on y prend des Saulmons ; les Sauuages Pequatoës y habitent , qui ont toufiours guerre auec les VVapenokes. Delà la cofte retourne vn peu vers le Sud-oueft, courant du long, la- quelle on rencontre le fleuue de Prïfe,2m£\ nommé des noftres, où ils ont couftume de 5 o traiterauecles Sauuages Proche de ceftui-ci & du mefme cofté eft la ri- uiere,que les noftres nommeüt douce ou de Verfehe Rieuiere, plate à fon entree & d’vn fort petit canal, de forte que les petits nauires ont de la peine d’y monter ; elle eft habi- tée de peu de Sauuages auprès de la mer, au dedans du pais habitent premièrement les Sequins, à quelque quinze lieues de la cofte : apres les Nawaji^cpxi cultiuent la terre & fcmcat dü Majs , & appellent le pain qu’ils en font Leganick , ils fe fortifièrent d’vne palliffade OCCIDENTALES. LIVRE - / / palliflaae en forme dé chafteau ,à l’encontre de l’incurfion de leurs ennemis, l’an cio Idc xiv,ils fontfurlahauteur dequarante vn degré & quarante huiél lcrupules comme ie trouue qu’il a efté remarqué parles noftres : plus outre demeurent les HorL /'Æ»r,qui ont couftumede defeendre cette riuiere auec des canoas faits d efcorces d’ar bre,coufués enfemble àleur mode. A huidlieués de cette riuiere quand on pourfuit vers l’OLieft,s en trouue vne autre à laquelle on a donné le nom de Mont rot Je où de meurent les ^erepees; on y prendgrande quantité de caftors , depuis que les Sauua- ges defireux deleur nature , ont efté excités par la conuoitife de nos marchandifes. Pourfuiuant la colle vers l’Ouell, on rencontre à quatre lieues delà vne Ille, & puis t O apres plulieurs autres, d’où les noftres ont nommé cette place VArchipelaQne des Ifles cette baye a quatre lieues de large : Les habitent, la Continente, femblables aux autres Sauuages en habitude & mœurs. Ln outre, les Ifles que nous auons dit ci-delTus fermer cette grande baye,& eftre diui- leeslvnede lautre par de petits canaux, font habitées d’vne nation fort fa uuage,ad- donneelur tout alapefche,dontelIevit,C Qpxis’ssp^eWeMatomvax) d’oùleCapderEft de ces Ifles a efté nommé des noftres Cap des Pefeheurs, & par d’autres Cap de U Baye Au fonds de cette baye defeend vne branche de la grande riuiere, ou comme d’autres veulent, vne autre riuiere, laquelle les noftres appellent le trou d’enfer ou de Helle.- contrée en l’ Amérique plus propre pour y mener des habitans de noftre pais : fur tout ^ pource que rien n y manque de neceflaire à la vie de l’homme, qu’on n y puifle auoit abondamment auec labeur & induftrie. Le beftail & beftes de charge feulement v manquent, qui y pourroyent eftre paflees auec peu de peine , & nourries prefque pai l;out commodément pour l’abondance du pafturage qui y eft. Et les vignes femblent y promettre vn grand rapport fi elles eftoy ent cultiuees. > C H A P. XL lo ^ éMœtîrs des naturels hahitans de U Nouiielle Belgique, leurs coutumes | 6^ le langage des Sankikans. Le s Sauuages font diuifés en plufieurs nations, beaucoup differentes en langa- \ ges,mais peu diflemblables en mœurs, de mefme conftitution de corps que ceux qui habitent vne bonne partie de la Nouuelle France. Leurs habits font de peaux de beftes fauuages , principalement de caftors, renards & femblables,coufus à leur mode.defquels ils fe couurent tout le corps rhiuer,& l’efté îegerement. Leur prin- cipale nourriture eft de duquel ils font des gafteaux qu’ils cuifent à la façon du 5 o ’’ pain, de poiffonjd’oifeaux & de venaifon. Leurs armes font l’arc & la fléché munie au bout de cailloux aigus ou d’os de poiflbn. Leurs bateaux font dVne feule piece de bois de gros troncs d’arbres , caués auec le feu. Quelques-vns vaguent ça & là fans de- ' meure affeuree, prenans leur fomne& leur manger dehors fur l’herbe ou fur du ionc, >; fur tout l’efté quand ils s’approchent de la mer pour pefeher. Les autres ont leurs de- < meures arreftees , & leurs maifons faites de pièces de bois à la façon d’vn four, ' f couuertes d’efcorces d’arbres, fi grandes quelles fuflifent pour beaucoup de familles. ' Leurs meubles font de peu de valleur & en petit nombre, comniemattes, fiegesde | bois, haches qu’ils font de leur induftrie de durs cailloux , pareillement des pipes auec 'v quoi ils fuccent lafumeedu Tabac, des mefmes cailloux fi proprement cauees , que 40 V c’eft merueille comment ayant fi grand difette de ferrements ils les peuuent ainfi gra;-. uer en de fi dure matière ; ils ne défirent ni ne cognoiffent les richefles. Au refte ils n’ont aucun fentiment de religion,nul honneur diuin , vrai eft qu’ils fèr- uent le Diable , mais non pas fi folennellement & auec des ceremonies fi precifes que font les Ameriquains iih l’appellent en leur langue Menutto on Menetto tout cç qu’ils ont en admiration , & qui femble furpafler la raifon humaine , ils le nomment aufli Menetto -, en la mefme façon que nous auons dit ci-deffus que les Canadiens fe fer- uoyentdeleur mot Oqui. . * ' Ilsn’ont nulleformePolitique,excepréqu’ilsontleursCommandeurs,qu’ilsnom- ment.S'Æf-f;»(?j ou xS’^^.!?»w,qui ne font que Chefs de familles, car peu fouuent leur pou- uoir s’eftend outre les bornes d’vne affinité. Ils font comme la plusgrandpart des Sau- uages, foubçonneux & craintifs; fur tout fort defireux de vengeance; muables&chan- geans: mais quand on les traite doucement,hofpitaliers& prompts à faire fèruice, & donnent leur peine pour petit loyer,mefme ils font de longs voyages en peu de temps, auec plus grande fidelité qu’on ne deuroit attendre d’hommes fi barbares : &'n’y a point de doute qu’on ne les pourroit façonner aux mœurs ciuiles& à la Religion Chreftienne, r J OCCIDENTALES. LIVRE III. 8i Chrcftienne, principalement fi on y menoit des colonies de gens bien morigénés, qui fe feruiroycnt d’eux fans violence ou fâcherie , & qui les accouftumeroyent peu à peu au feruiceduvrai Dieu&: à laconuerfation ciuile. le ne puis oublier de donner comme ci-defTus quelque effai de la Dialeâe de ces Saunages ; & principalement des Sankikans, qui habitent au haut de la riuiere du Sud, comme nous dirons bien toft. t: Cotte: i.Nife: ^.Nacha: 4. FPJwe: ^.Parenagh: 6. Cottetsh: j.NyJfas: %.Gechas: _ ^.Pefcon: lo.Terren: 10 20. Myjfynach: 50. Naùhynagh: 40. VVeywnagh: ^o.Parathgymh: 6o,Cottegynagh: 7 O • ^ • Gahashynagh: «> o. Pefcongynach: X 0 o. Cottapach. Ils nomment ainfi les parties du corps humain. La telle VVyer. ch&Mzwx Mytrach. Le front L’œil Schinqtioy. Le nez Akywan. L'oreille La bouche Toonne. Laleure chettoen. Vnedent La langue VVyer anou. Le menton Hochcjuoy. Le col La poitrine Toorjay. Les doigts Rinskan. Vnnerf ;■ cheet. Le ventre Nathey. L’efpaule Duchke. 2.0 Les bras Nachk. Les ongles Hyckaes, Le ventricule Vheje, Les pies. Syt. Nomsdefexes, Nachkaroncki Hyttrwaek. VVypyt. Neo^mykangm» Les mammelles Nqemckm, Le poulce Le ûng Lacuifle Riàeren, Mohocht^ Promine. Malle Remet. Eléments & ce qui eft compofé d’iceux. Femelle Or(yuoywe. 50 Le feu Pluye G refie Vinteywe. Eau Soukeree. Gele'e TaJJyckii. Empye. Arbre Kepatten. Negc Hitteocke. VVynoytveet Noms des animaux. ' Cerf Ours Caftor Atto. Loup Machquoyuo. Lion Temaquoy. Loutre Metumntt. Chien Synquoy Mackyrggh. Renard Coumamoch. Aram. Woucous. Noms d’oifèaux. 40 Cygne VVynkyckJb. Coqd’inde Sickenum. Grue Varecka. Oye Ciahack^ Cane Comconcke. Perdris Ourikimk. 'ToiVXï.t Mymy. PoifTons làcognus. ' Brochet Caopyte. Anguille Syackameck. Perche CiC^yckmeJfe. Truitte Cackykane. Ils diflinguentainfl les qualités, ^oïi Ouret. ^Az\Xvi7^is Matet. C tt A P. Xll. 50 ^efiri^tion de U cofle maritime iufques à l'autre riuïère , au trente hui&ieme degré de la hauteur du pôle du Nord. ON conte depuis le Cap de Sah/e, qui ferme comme nous auons dit n aguere, la baye où entre la riuiere du Nord, iufques au dernier riuage des Mes qucLMat- touïVAkesh^hittwu vingt cinq lieues, félonies plus exades obferuations des no- ftres, entre le Nord-eft&le Sud-oueft, &la mer y garde prefque au milieu del’efpacc vn canal affés profond. Ayant forti cette baye & courant vers le Sud, la terre fe monflre premièrement haute L & double *v U DES.CRLPTÎON DES ÎNDES ôc double, retournant v-ers le Sud-fud-oueft, puis apres elle fe courbe vn peu plus vers le Sud, fans aucun banc ou baffe ; auprès du riuage-on voit en la Continente des tertres de fable, mais eftantpafféplus outre la terre décliné peu à peu &re fait plus baffe, leri- uage qui eft feparé de la Continentepar-vn lac quieft dans icelle, eft prefque auffi bas que la mer,{i ce n eft qu’il -y a ici & là des petites cnlines de fable,& la cofte entrecou- pée donne entree aux flots de la mer en diuers endroits : principalement fur la hau- teur de trente neuf degrés & quinze fcrupulcs, les noftres l’appellent leport4«x Oeufs ou dux Bayes. Car là la cofte entrecoupée des ondes de la mer,donîîe entree à la ma- ree dans vne baye ouuerte,,où il y a quelques petites Ifles parfemees. Ce port eftant pafféonvoitfur leriuagede la mervneforeft, & peu apres quelques coîines de fable, ro vn bas riuage & des petits bocages , parfois vn monceau de. fable ou deux , la cofte fe courbant vers le Sud-oueft,iufquesàremboucheure d’vne autre baye affés grand e,qui reçoit la mer dans vne grande enceinte, entre deux Caps fort auancés en mer d’vn co- fté & d’autre , & feparés d’vn efpace de quelque lieues ; celui du Nord eft appelle May & celui du Sud de Corneille, du nom de celui qui les a premier defcouuerts. Or cette baye eft grandement dangereufe à caufe de la quantité des bancs & baffes quelle a, de forte qu’on ni peut entrer qü’auec vn extreme péril, fl ce n’eft par vn pilote fort expert 5 toutesfois il y a vn canal affés profond entre les baffes. Au fonds de cette baye fort vne grande riuiere , qui y defeend du milieu de la Conti- nente,laquelle pour mettre différence entre icelle & i’autte dont nous auons parlé ci- 2,0 deffus,eft appelleeduSud,qui aiaefté frequenteepar quelques voyages qu’y ont fait les noftres 5 & en quelques petites riuieres qui fe roulent dans cette baye. Mais pour- ce que nous n’en n’auons pas encore vne parfaite cognoiffance, nous n’en parlerons pas beaucoup. Nous contentans de dire, que diuerfes nations de Sauuages habitent du longdefes riuages,& poffedent le dedans du païs. Du long de la petite riuiere qui entre dans la baye vn peu audeffous l’emboucheure de la grande, habitent les S^wafos, tout proche & au deftusl’emboucheure de la grande riuiere à la main droite habitent les Sicones,^^\2.gznch.Q\ts CMinquas,vaom2.nz plus outre on rencontre les Naraticom, Armcomeehx-,(\mh2Lhit(^nx.to\xs à la riùe droite, auprès de petites riuieres qui courent dans la grande, félon le mefme ordre que nous les auons nommés, plus loin de la riue j o demeurentles CMœroahkom, Amakaraongki, Remkokes, CMinquofy ou Macheoretms,iMt~ fayongky, & les plus efloignés de tous font les Mattikongy & Sankikans, qui atteignent le quarantième degré de la hauteur du pôle du Nord, & font efloignés de l’emboucheu- re enuiron de dix huid lieué’s : quelques-vns y adiouftent les Sawanoos , Capitanajjès, Cacheos & autres, qui ne different que peu ou point en façon de viure & en mœurs de ceux que nous auons eferit n’agueres 5 ils cultiuent des champs &viuent de May s ôc de légumes. En outre le Cap de Corneille , comme on l’appelle, cftdiftant de la ligne de'trente huiét degrés & cinquante cinq fcrupules, eftant forti delà, &fuiuant la cofte qui tour- ne vers le Sud-oueft , on rencontre à quatre lieues de diftance vn autre Cap que les 40 noftres appellent Hinloopen, duquel la cofte court premièrement Sud, & derechef re- tourne vers le Sud-oueft iufques au trente huidieme degré, ou nous finiffons à prefent. VIRGINIE. Chap. XIII. .^alités dti ciel & de la terre de Virginie, que les aAnglois ^ojjedent amourdhm. LÀ virginie 2Llx.o\xcdrie\es, No nue aux laquelle efthabiteepour le iourd’hui 50 par des colonies Angloifes , que lean Smith deferit en cette maniéré. Virginie ( dit-il ) en laquelle nos Anglois l’an cIdIdcvi menèrent des colonies, s’eftend depuis le trente fept iufques au trente neufîeme degré de l’eleuation du poleduNord le-long du riuage de la mer. L’cfté y eft chaud comme en Efpagne, l’hiuer y eft froid comme en France ou en Angleterre : au mois de luin, luillet & Aouft eft la principale chaleur I laquelle eft corrigée & temperee grandement par vnvent d’Orient,queles Efpagnols OCCIDENTALES. LIVRE IIÎ. 8^ Efpagnols nomment Brifes & parles vents q-uiy fouflent delà mer : depuis Décembre iufques en Mars il y fait froid j&mefme fort alprement,mais qui n’y dure pas tant qu’en nos pais. L’an cio loc vu lors que les régions de l’Europe furent aflaillies d’vn fort rude froidure, la Virginie auifi fentit vn long hiuer & des glaces de longue du- ree,mais l’annee d’apres excepté huidou neuf iours de nege ôcdegelee, l’hiuer il y fit plufieurs iournees temperees &prefque d’vn printemps. Les vents y varient beau- coup : ily a forces efclairs &: tonnerres plus grands qu’en l’Europe. Le vent de Sud- oued y eft plein de pluyes, &:les y produit aulTi bien que la chaleur: LeNord-oueft corrige l’ardeur & le plus fouuent y amene le temps clair & ferain ; le froid & la gelee J Q y viennent du Nord, les brumes & pluyes de l’Eftéc Sud-eft. Encores quel’aïr y foie fort fec parfois, il y eft neantmoins aucunesfois fort humide , l’vn & l’autre pourtant fans dommage, &nempefchent pas que lesfruidsde toutes fortes n’y puifléntaufti croiftre,auecle labeur & induftrie des hommes,qu’en l’Europe. Il n’y a qu’vn accès à cette contrée par vn large golfe, conftitué entre deux Caps ou Promontoires à droit & à gauche,defquels celui duSud,quiaprinsfonnom^’i7(f;?r/ Prince de Galles, eft releué par petites montagnettes & coftaux de fable, verdoyant d’arbres à poix & de pins auprès du riuage: celui duNord areceufon nom de Charles pour lors Duc d’yorck,& maintenant Roi de la Grande Bretagne. Le milieu du pais n’a point de région qui le fecônde en l’Europe , Afîe ou Afrique, 2 0 foit qu’on y confidere la quantité des riuieres fort belles &nauigables, foit la bonté de l’air & delà terre.Icis’efleuent des hautes montagnes,là des moyennes colines, ailleurs la terre s’enfonce en vallees , là derechef elle s’eftend en de larges plaines : plufieurs eftangs , diuers lacs , quantité de riuieres l’arrofent de tous coftés, qui fe defehargent toutes dans cet ample & fort beau golfe : dans lequel,comme aufli dans les riuieres, di- uerfes Ifles fontparfemees , quelques-vnes defquelles fontveftues d’arbres, les autres font defcouuer tes, mais toutes bafles, & qui femblent n auoir efté cultiuees iufques à maintenant. Cegolfe s’eftend Nord &Sud,& la maree y monte prefque deux cents milles an- gloifes , fon canal eftnauigable cent ôr cinquante milles , profond de fept S^fort fou- 3 O uent de quatorze bralîés,large pour la plus grande partie de dix & quinze milles. La terre au fonds d’icelui fo drelTe en de fort hautes montagnes , qui s’eftendent par vne fuite continué & comme en droite ligne vers le Sud,& plus elles s’auancent vers le mi- di, autant plus s’eftoignent elles du riuage du golfe : plufieurs ruifteaux & torrens def- cendentd’icelles,qui tombansl’vn dans l’autre amènent enfin cinq notables &naui- gables riuieres dansle golfejEHes courent principalement du Nord-oueft vers leSud- eft,& coupent la cofte Occidentale d’icelui , leurs emboucheures eftant feparees tan- toft de vingt,tantoft de vingt cinq.nulles d’interualle les vnes des autres. Les montagnes y font en outre de diuerfes natures & terroir, car celles qui s’eften- dent au fonds du golfe, font rudes de cailloux & de pierres , qui ne different pas beau- 40 coup de celles dont on fait les meulles de moulin; en quelques-vnes il y a mefme du marbre : & parfois on trouue du cryftal au pié d’icelles , qui fe roule du haut , lors que les neges qui couurent tout l’hiuer le fommet des montagnes , eftans fondues par la chaleur du Soleiffe précipitent dans les torrens & baffes vallees :Ces mefmes eaux ar- rachent de la terre des petites paillettes quelles emportent quant & foi, qui font fi lui- fantes,qu’on iugeroitbien delà qu’il y a des veines de métaux dans les entrailles des montagnes. La nature du terroir y varie aufli fort,il yen a qui reffemble le bel Arme- niac en couleur,d’autre qui reprefente la terre Lemnie ou figillee : fort fouuent ii s’y trouue de la terre de foulIon& de la marne fort propre pour engraiffer les champs, ôc femblables efpeces de terre.Le plus fouuent le terroir eft noir ou fablonneux ou de ter- jo rcgraffe,rarementd’argille inféconde: Les grands arbres qui y croiffent prefque par tout,& l’herbe & beaux pafturages preuuentaffés qu’elle eft la fertilité de la terre. Au refte la terre n’y eft trop droite ni penchante, mais elle y eft tellement diuerfîfiee en co- lines & petites vallees, arroufee de tant & fi claires fontaines,trauerfee& entrecoupes de tantderuifreaux,quilfembleque la nature n’euftfceu rien faire déplus deleda- ble : fi ce n’eft que les forefts empefehent le chemin par tout, excepté ou par l’induft rie des naturels, elles ont défia dés quelques années efté éoupees & arrachées pour y femer, L 2, Ch AP. C H A P. XIV. Kiaieres de Virginie] ^ peuples qui les habitent^ extraiSî du Commentaire de lean Smith. NO V s auons dit ci-deflus qu il y auoit cinq riuieres ou fleuues nauigables, qui defcendoyent au cofté gauche de ce grand golfe, ( lequel eft vulgairement ap- pelié Chefapeack ) & ferouloyent dans icelui.Le premier d’iceux eft fituépref- que vis à vis de l’emboucheure qui donne entree à la mer dans le golfe, & qui defcend de deuers l’Occident, fourdant des montagnes des Momkans nommé Pawhatan) du nom du Cajjîque, par la Prouince duquel il pafle j qui apres auoir couru cent milles i © & plus portant des nauires tout cet efpace , il entre dans le golfe par vne emboucheu- re large de trois milles, fon canal eft toutesfois eftroit à caufedes baffes qui font d’vn cofté & d’autre du long de fes riuages:&la quantité des catarades & bancs de ro- chers empefchent qu'mon ne le monte plus haut fil reçoit plufieurs ruiffeaux qui pro- cèdent des fontaines , & fegroffift par la rencontre d autres riuieres ; premièrement du cofté du Sud par le fleuue Apamatuch , puis apres vn peu plus bas par deux autres nommés d’vn nom commun ^myoughcoha.nock-,2.\x delfous defquels il y a vne baye f où fe defehargent trois ou quatre moyens torrensj la moitié de laquelle eft habitée des VFarask'oyakis:ci\ troifieme lieu delariuiere Nandfammâ i bi en dernier lieu du cou- rant de l’eftang nommé des Saunages duquel le grand golfe a pris fon nom: i© Du cofté du Nord il reçoit au deflus/4ff^^/^<7/w colonie des Anglois, premièrement la riuiere Chikahamania , puis d’vn autre qui’laue l’Ifledes Cedres , enfin il reçoit l’eau de la baye & port de Kecoughtan-, qui entrecoupé en diuers canaux & peninfules par plu- fieurs deftours , comme fibres fournifîent de haures pour des barques. Les riuages de cette riuiere & fleuue qu’elle emporte quant & foi, font habités par diuers peuples ou pluftoft parentages , fous leurs Cajjiques qu’ils appellent VFeroances. Auriuagedcla main droite, auprès de l’emboucheure de la riuiere demeure les Kecoughtans, qui outre les femmes & enfans peuuent à grand peine conter vingt hommes propres à la guer- re : proche d’eux font les Pafpaheges , quarante miftes au deffus 1 emboucheure de la ri- uiere,qui à peine font quarante, ( en leur territoir eft fituee vne colonie d’Anglois ; en 5 o apres les Chuahimanes , prefque deux cents en nombre : Les FFeanocks qui font cent ; les Arronatocksxxenie : les quarante. Et fur la nue gauche il y a les Apama- tuks,(\m ont quelque foixante hommes portans armes: les ^tyougcohamks quelques vino-t cinq: les FFaraskoyacks quarante ; les Nanfamunds deux cents; les Chefapeacks en- uironcent. Tous ces Sauuages ont leurs particuliers FFeroances^2.\x(qyxe\s ils obeiffent, excepté les Chicahimanians , qui font gouuernés par leurs Preftres , qu’ils ehfent des plus vieux & les appellent Ca^Caw^^aJfoughes. Enfin en cette riuiere il s’y prend l’efté ■ vne grande quantité d’efturgeons, ( au mois de luiii de petits,mais au mois de Septem- de fort gros ; l’hiuer abondance d’oifea,ux : toutes les riuieres & torrens qui s’y def- ehargent font grandement poifl'onneux. 40 A quatorze milles de cette riuiere deuers le Nord, fort vne autre riuiere dite vuîgai- • rement laquelle naift de deuers 1 Oueft des montagnes Mediterranees, pre- mièrement fort petite, ou elle eft nommee Foughtdnound du nom des habitans,qui font foixante hommes propres à la guerre: puis apres courant par vne longue efpace de terre, faifant diuers tours, elle reçoit vne autre riuiere du cofté du Nord nommee tapamintsybe. delà defeendant par vn plus large canal, elle eft appelleeP4/'^^4«;2é^, & au- près du confluant elle eft habitée prefque de trois cents Sauuages : au deftbus delà à quelquevingt cinq milles fur lariuedemaindroiteouduNordeft FFei^divocomoco, de- meure autresfois de leur grand C4^^/^f,laqueîle toutesfois il a abandonnée, & s eft re- tiré dans les deferts des OrapnkeSy furie riuage de Touchtamimd: dix ou douze lieues au j© deffous de FFerdxvocofnocoSnx. lariue de main gauche ou du Sud eft fitue le village de chijehiakes yC[m'Ÿ^n\xent eftre quelques quarante ou cinquante hommes propres aux armes : à vn petit efpace de cette riuiere, il en coule de la Continente vne autre petite appellee des habitans Payan katuikyxyyd y font enuiron quarante. La troifieme riuiere fe nomme Toppahanock , qui defcend des montagnes des Mmmhoacks , & peut porter bateaux cent & trente milles : tout proche de fon emboucheure OCCIDENTALES. LIVRE IIL cmbouciicnre demeurent les Cuttawornens^o^i n’ontgiiereplus de trente hommes de guerre ; au delliis d’iceux à la riue du 'Nord font les Moraugtacundsy qui font enuiron quatre vingts :•& proche d’eux les Toppahanocks ( defquelslariuiere à prins Ton nom ) enuiron cent: & puis encore les Cutta^'O'/nens Qnip\\is ^cziznomhïQ. de beaucoup. Sur la riue du Sud fort loin de Eemboucheure demeurent les Nautaucht.acmds enuiron cent & cinquante hommes ; &plus près de l’emboucheure les Opifcopmks. La quatrième riuiereeft appelleeP4:^Æ;î’^«/ï»?/^^^defqLielles ils gardent, &: quand ils en ont befoin,iis les froiflent entre deux pierres, puis eftanrmouluès,ilsles reichentaufeurur vneclaye,&ain(î feiches, ils les reduifenten pafteauec vn pilon de bois, & apres l’auoir lailfé tremper dansl’eau, ils fc feruent de ce fuc blanc comme laid, qu ils nomment FatPcûh/cûra. Ils gardent aufli leurs Putchamins. De ces glands nommés Chechinquamins boüillis quatreheures 10 dans l’eau, ils en font vn bruuage , comme auifi du pain duquel les principaux den- tr’eux fe feruent comme d’vne chofe délicate en leurs banquets. Outre ces arbres fruidiers,ils ont aulfi des peupliers blancs, & d’autres qui rendent delà gomme odori- férante comme le baume ; aiifli des cedres &fafrafras. Dedanslesvallees humides croilTent desgroffelles commodes cappres, qu’ils fei- chent l’efté au Soleils s’en feruent en leur manger apres les auoir fait boüillir quel- ques heures dans l’eau, car auantqu’eftre cuites, elles font fort veneneufes. Le Mat- /(?)îW(fcroift dans les pafturages,fcmblableàrherbe panique, fafemencc reffemble la fegle,mais plus petite, ils eftiment le pain qui en eft fait fort délicat, qu’ils meflent auec de la graille de belles fauuages. L’elléily croill des fraifes, qui y font meures au ^o mois d’Auril,& des mœures en Iuillet,& enfin de ces fruids fort i&ins qui relTemblenc aux limons, lefquels ils appellent Moracok,q\ie nous auons trouué ellrs des citroüillés. Il y a au relie plufieurs herbes bonnes à manger,comme violettes, pourpier,ozeille &: autres qui croilTent abondamment dans les prairies & foreds. Entre les racines bonnes à manger excelle le T ockawoùge , qui vient en fort grande abondance és lieux humides & fangeux, femblable engrolleur &faueur aux patates : ils enfoüilTent fes racines en vne fofle,&les couurent de füeilles de chefnes & de fou- giere, puis y ayant mis du feu tout autour, il les grillent vingt quatre heures de long, car ils les eftimentveneneufesellant crues :&mcfme ellant cuites fi elles ne font de long temps refroidies, atténuées & fort feiches, elles picquent par leur aigreur la bou- 5 o che ; toutesfois l’ellé ils s’en feruent au lieu de pain mellees auec de l’ozeille. VP^ichfa- can ell vne racine vn peu plus petite , qui confolide les playes appliquée , fort broyee dellus. Les Poconesiettentàelongnes & deliees racines, elles croilTent és montagnes, ellant feichees & pilees, elles rendent vne certaine couleur rouge, qui amollillles tu- meurs, ils s’en frottent les membres, la face & leurs vellements. Mafquajpenne ell vne' ' petite racine, qui excede rarement la grolTeur d’vn doigt, rouge comme fang; du fuc de laquelle ils peignent leurs mattes, boucliers & autres vtenfiles. On y trouue aulTi Pyrethre, Saxifrage & plufieurs autres fimples : Les oignons croilTent de leur natu- re és lieux marefcageux,mais ils fontplus petits que les nollres. 40 C H A P. XVI. Des fruiUs prouenans de Jèmence , de la façon que les Saunages les cuit ment îfr comme ils s en feruent. Le s Saunages diuifent leur annee en cinq parties ; ils nomment Thi- uer Popanati ou CattafeuckSeÇce Cohattayough , quand leur blé produill fes elpics Nepinough , l’automne & lors que les fueilles des arbres tombent Taquitock. Du commencement de Septembre iufques à la mi-Nouembre ils banquettent & fe don- nent du bon temps, car lors principalement ils ont abondance de toute forte de fruiéls, poilTons, oileaux, & fur tout de la venaifon. Ils s’employent principalement àla cul- 50 turedeleurblé, & premièrement ils ollent Tefcorce aux arbres proche de la racine, defquels la terre ell par tout couuerte & leur brullent les racines pour les faire mou- rir : Tannee d’apres les arbres ellant morts, ils les defracinent entièrement , & enfin ils fement dans les places vuides en cette façon: Les hommes font premièrement des folTes auec vn pieu de bois , à quatre piés Tvn de l’autre , dans lefquelles, iis iettent qua- tre grains de May s & deux febues : puis les femmes & les enfans quand il ell deuenu vn peu grand le lardent &:amoncelent la terre au pié. Ils commencent à femer en Auril, ôc continuent / 88 DESCRIPTION DES ÎNDE S & continuent iufques à la moitié de luin : ils moÜTonnent ce qu’ils ont femé en Auril, au mois d’Aoufl:,&ainfi fucccflmement iufques à la fin d’Oftobre. Chaque tuyau ap- porte le plus fouuent deux ou trois eipics, rarement dauantage ( parfois iis n’en ont nuis) qui contiennent chacun deux ou cinq cents grains , quand ils font fort grands : le fuc des tuyaux auaiit qu’ils foyent fecs ell; doux , prefque autant que celui des cannes de fuccre , qui efl: caufe que les Sauuages cueillent leur blé verd & auant qu’eftre bien mcur, afin d’en pouuoir fiiccer les tuyaux, &c l’eftimentplus ainfi cueilli verd, que s’il eftoit parfaitement meur. - ' Ils fement auiîi des poids qu’ils nomment AjJèntamenSi & aiment fur tout les febues de T urquie. Ils roftinent les efpics de leur blé verd, puis le pilent dans des mortiers, & l o l’ayant enueloppé dans les fueilies de la mefme plante, ils les cuifent dans l’eau, efti- mans cela pour vn délicat manger. Le blé femé fi tard qu’il n’a peu meurir, apres l’a- uoir rofti fous les cendres , ils le gardent pour l’hiuer , & lors ils le cuifent auec des febues j ils appellent ce potage Pawfiro'^ena. Ils font tremper ceux qui font meurs dans l’eau quelque peu,puis ils les pilent àlagroffe mode, & ainfi pilé ils le paffent au trauers d’vne corbeille au lieu de tamis j & de la paffe font ou du pain qu’ils cuifent fous les cendres, ou la meflans auec de reaudelaboüillie qu’ils nomment P<»;^Æ^.Le fon & ce qui refte de cette farine apres l’auoir vn peu vanné & boüilli quelque temps, leur fert d’ordinaire de viande , qu’ils nomment Vftatahamen. Quelques-vns dentr’eux brufient les efpics vuides & méfient la poudre, qu’ils nomment F ungmuck,z\icc delà io farine, mais cela n eft qu’vn gafte potage. • Au mois de.May ils lément entre autres fruids des Pepons , & vn fruiét feffiblable aux melons, mais qui eft plus petit , & beaucoup moins bon , qu’ils appellent Macock , ce fruideroift promptement, commence à meurir au commencement delulliet&dure iufques en Septembre. En outre ils fement cette plante fauuage qu’ils nomment - racock de forme comme vn milon,ainfi que nous auons dit ci defirus,lequel croift fubi- tement & eft meur au mois de Septembre. Ils en cultiuent peu d’autres outre ceux-là, & encore en petite quantité, par vue parefle commune à cette nation; car la plus grande partie de l’annee ilsviuentde ce que la terre produit de foi-mefme, ou de ce que les riuieres & forefts leur fournilfent ; contents du prefent, negligeans pour l’ad- 5 o uenir. Afin que nous ornions vn peu cequenoftrc Autheura efcritdu Maracockmom zà^ ioufterons vn mot ; on nous enuoya l’an pafté des Nouueaux Pats-bas vne certaine forte ' de femence,prefquefemblable à celle de citroüille,pourde la femence de limon d’eau, laquelle apres l’auoir femee , nous auons trouué par la forme des fueilies & autre con- ftitution de la plante, f car elle ne porta point de fruid J que c’eftoitvn Angurieouvn concombre citroüille. Nous auons eu des Pepons de femences venues delà, plus petits que les noftres,mais de fort belle façon & variété de couleurs. C H A P. XVII. , diuers animaux deYnc^mic yterreftres i^uolatiles cÿ aquatiques. Le s cerfs font entre les premiers animaux delà, peu difterents de ceux de l’Eu- rope, il y en a plufieurs qui courent par les forefts & folitudes, & auprès des fontaines des riuieres ; mais rarement s’en voit il entre les riuieres 5c aux campagnes. Il y a vn animal nommé des Sauuages qui eftfèmblabIeaucaftor,ficc n’éft qu’il ce nourrift entre les arbres à la façon de l’efcurieu. Les efeurieux de ce païs là approchent fort en grandeur de nos connils , ils font noirs, ou méfiés de noir & de bianc,toutesfois la plus grande partie font cendrés. Il y a vn autre petit animal qu’ils jo appellenty^j^/4»zVé,&les Anglois efcurieuvolant, lequel en efiargiflàntlcs iambcs & eftendant lapeau,commefic’eftoitdes ailes, vole parfois trente ou quarante verges dç dix pies loin. On y trouue auffi vn autre animal nommé Opajfum, qui a la tefte d’vn cochon, la queue comme vn loir , de la grandeur d’vn moyen chat, ayant vn fac fous le ventre, dans lequel il porte & nourrift fes petits. Le Mnjptfcus OCCIDENTALES. LIVRE III. 8<, Le Alujfafci^s fcmblable en forme & naturel à noftre rat aquatique , qui fent le mule. Les licures y font en petit nombre, gucre plus grands que les connils. Les ours y font aufli petits fi on les compare à ceux du Nord. Les caftors y font de la grandeur dVn chien d’eau, ils ont les iambes coürtes , les pies de deuant femblables à ceux d’vn cliicn, ceux de derrière à ceux dVn ligne, la queue large & femblable à vne raquette, nuë&: fans poil, les Sauuageseftimentfortleurchair. Il y a beaucoup de loutres, que les Saunages prennent auec des lacs & s’ornent de leur peau. Ils ont auffi vnebefte fort femblable à vnchatfauuage, qu’ils nomment Lesre^nards y fontpe- I O tits,& n’y fentent pas fi fort que ceux d’Angleterre, de couleur cendré brun. Les chiens font du tout femblables aux loups, ils n’abbayent pas comme les noftres,mais ils hur- lent. Les loups y font rarement plus grands que les renards. Les peaux qu’on y voit bellettes & martes tefmoignent qu’il y a de ces belles là, encores que les Anglois y en ayent veu peu iufqucs ici. C’eft vne chofe ellrange que ces animaux n’y ont point porte de dommage auxpoule&: poulets qu’on aye^remarqué iufques à cetteheure; comme auffi de ce qu’on croit que les ferpens y font fans venin, veu qu’on a efprouué leur morfure eftre li mauuaife & prefque mortelle és régions de l’Amerique Aullrale. Quant aux oifeaux il y a des aigles & diuers oifeaux deproye,des perdrix guere plus groffes que nos cailles , des coqs d’indes fauuages, femblables aux noftres priués .* xo des merles & des tourds,qui ont les plumes des ailes d’vn fort beau rouge, bleu & verd. L’hiuer il s’y trouuc grande quantité de cygnes,de grues cendrees &: blanches,auec les ailes noires, des ayrons,oyes, canes, pigeons,& autres oifeaux incognus de forme & de noms à ceux de nos pais : mais il s’en voit peu l’ellé. Entre les poilTons il s y trouue des ellurgeons, marlbüiiis, veaux-marins, pallina- ques, l’aiguillon defquelles ell fort veneneux ; des petits merlus, des làulmons qui ont la chair blanche,des truites,foles,plai2es,harans,anguilles,lamproyes, des perches de trois fortes, cancres, efcreuices,huiftres & moufles. Il y a vn petit poiffon lequel méri- té bien d’eflre mis entre les poifTons monflrueux, qui reffiemble naifuement au dra- gon peint au deffous de S. Georges, excepté qu’il n’a ni ailes ni iambes. Et vn autre 5 O ailes femblable au crapault, d’où il a efté nommé, lequel eflant hors de l’eau s’enfle de de telle forte qu’il en creue. ^ Les Saunages boüillentleur chair &poiflon,oulcsrofl:iflent furdes clayes, ou bien a la façon des Efpagnols ils les embrochent, & les plantent deuanp le feu fi long temps qu elles fbyent entièrement feiches, comme on a couflume defeicher la chair au So- leil auxifles & en la Continente de 1 Amérique, pour les garder quelque temps. G H A P. xviir. 40 l: ^æurs naturel i habits ^ cotijî urnes des naturels. E s Naturels font en fort petit nombre pour la grandeur du païs,& mefme il y a peu d’hommes,beaucoup plus de femmes & d’enfans. A foixante lieues de cir- cuit au io\xr.àiQ.UcohiŸolùÀ n’y a pas plus de cinq milles hommes , & encore en- tre iceux à peine fçauroit on trouuer mille cinq cents hommes propres à porter ar- mes. Leur parefle en efl la caufe,qui fait que bien que la terre y foit fort fertile,toutes- fois elle nepeut pas nourrir beaucoup d’habitans.IlsdifFerentgrandemententr’eux,en Ilature de corps & en langage ; car il y en a qui font de grande corpulence, comme les Sajqueshamekifîs^d. autres de fort petite, comme les Wi^cocowos font grands & graif]es,bien compofés de membres,de couleur brune quand ils font vn peu grands, car ils naiffent blancs, les cheueux noirs & prefque tous fans barbe. Les mafles fe font 50 rafer la moitié de leur cheueleure par les femmes auec certaine forte de coquilles , & laiffent pendre le refie. Les femmes font tondues diuerfement félon leuraage,toutes- fois elles laiffent vne grande mouflache d’vn coflé ou d’autre. Les Sauuages font ro- bufles de corps & agiles, accouflumes a flipporterlefroidjl hiiier ils couchent dans les bois furla terre auprès du feu,l elle dedans 1 herbe. Ils font d’vn naturel changeant, cruels , timides , & affes ingénieux & induftrieux félon la capacité des Sauuages prompts à fe courroucer & fort addonnés à fe vanger ^ ’ ’ 1 > M ils fe gardent de defrober. 350 description des INDES pource qu’ils eflimcnt que leurs forcicrs peuuent deicouurir le larcin. Les femmes y: font rarement impudiques, ü ce n’eft que les maris y confentent. V ne chacune famille & parentage à fes champs, iàrdins & héritages cognus> Ils s’abiilent de peaux de belles fauuagesjfhiuerauec le poil êcTefté fans poil: les plus riches portent des manteaux faits.de mefmes peaux coufuës enfcmble : mais les plus pauures fe couurent de fueilles d’arbre , d’herbe & de mouce d’arbre : plu- fleurs portent des manteaux faits de plumes de coq d’indes , fi bien coufuës en- femble , qu’ils fcmblent eftre tout de plumes , excellent remede contre la rigueur du froid. Les femmes, s’y couurent toulîours le ventre & les parties honteufes , & mefmes ont honte d eftre veues autrement ; ils fe peignent les cuifles, les mains, ro les mammelles & la face de marques noires, & de diuerfes ligures dé belles & defer- pens,ilsontles oreilles le plus fouuent percees en trois endroits, où ils pendent des coquilles de diuerfes fortes pour parure ; quelques-vns portent yne petite couieure verde-iaune, dVn pié & demi de long qui s’entortille au tour de leur col, & fouuent leur leche les leures ; d’autres vn rat &: d’autres vn loir mort, pendu par la queue: d’autres portent à la telle des ailes d’oifeaux, & d’autres vn faifceau déplumés auec vn gros bouton , femblable au pommeau d’vne efpee , qu’ils prennent de la queue d’vn certain ferpent; d’autres des peaux d’oilèaux de proye ou d’autres; les plus ri- ' ches portent quelque placque de cuyure , mais d’autres portent pour plus glorieu- fe parure vne main feiche de quelqu’vn de leurs ennemis. Ils fe rougiflent la telle 2.0 & les efpaules d’vn fuc prefle des racines de l’ûcMef , meûé auec de l’huile, & efti-, ment que cela les garantift l’hiuer contre le froid & l’efté contre le chaud. Enfom- me celui qui eft le plus dilForme femble eftre le mieux orné & peint. Ils ont le plus fouuent leurs cabanes auprès des fontaines ouriuieres , qui font ba- ftics de perches de bois courbées & liees enfemble vers la cime , couuertes de toutes parts de mattes ou efcorces d’arbres, pour eftre commodément garantis du froid , des pluyes & des ventSjil y fume toutesfois beaucoup, combien qu’il y aitvn trouaufom- met. Ils cpuchent dans ces loges autour du feu fur des clayes , efleuees de terre dVne palme ou plus,couuertes de mattes, fix, dix,ôt quelquesfois vingt enfemble en chacu- ne : qu’ils placent le plus fouuent au milieu de leurs iardins,qui font affés petits : quel- 5 o quesfbison y en voit vingt ôc mefme cent enfemble, feparees de pallilTades d’arbres : auprès des maifons on y voit de petits bois taillis ou de vieux troncs d’arbres tombés, pour faire du feu. Les peres&meres donnent à leur fantaficdiuers noms à leurs énfaiis; On dit que les femmes y accouchent fort facilement ; ils aiment grandement leurs enfans : lef- quels ils lauent aufti toft qu’ils font nés dans la riuiere,couftume obferuee par les vieux Allemands, puis apres ils les oignent & peignent , afin de leur endurcir la peau tant à l’encontre du froid que du chaud. Les hommes s’employent à' la chafte, à la pefchcjà la guerre & à autres femblables cxercices,& ont honte de faire autre chofe,de forte que le plus fouuent ils font oififs & 40 fans rien faire : Les femmes & les enfans font le refte , car ils tiftent les mattes , cliftent dés corbeilles de vifme, font les pots & mortiers, pilent leurs fruids, cuifentlepain,& , mefme elles fement ôc recueillent leurs ôc legumes , enquoi elles font legere- ment aidees par les hommes,enfin elles portent les fardeaux. Ils font du feu en frot- tant & roulant deux pièces de bois l’vnedans rautre,Iequelils allument auec des fueil- les ôc autres chofes feiches : ils poliflent leurs arcs auec des pièces de coquilles , ôc mo- nilfent leurs fléchés , qui font de iettons d’arbre ou de cannes, auec des os depoilTon. ou de cailloux aigus,quelquesfois auec des efperons de coqs d’indes, ou becs d’oifeaux, qu’ils lient auec des nerfs de beftes fauuages. De l’extremité des cornes de cerf iis font vne certaine cole , qui tient fi fort, quelle ne fe diflbut iamais à l’eau froide : ils fe fer- y o uent aufti en guerre de rondaches faites d’efcorce d’arbre, ôcdefpees de bois. Les ba- teaux auec quoi ils pefchent,font d’vne piecedebois, cauésd’vn tronc d’arbre à la fa- çon d’vne tuyie, longs parfois de trente , quarante ôc cinquante palmes de long , pro- fonds de deux ou plus , de forte que aucunesfois ils portent quarante hommes, mais d’ordinaire ils font plus petits ; ils les font aller auec leurs palettes ôc perches aufti vifte que nous faifons nos chaloupes auec les rames.^ OCCIDENTALES. LIVRE IIL Les femmes ont couflume d’y filer de refcorce d’arbre fort delice.des nerfs de be- n;cs,& d’vue certaine efpe^de ionc qu’ils nomment Pemmenmv, fi fin qu’on s’en fert à plufieurschofesjdece filetilsenlacentleursrets. Ils ont tous vne feule religion,!^ fi on peut donner le nom de religion à vnechofefi impie; qui eft d’adorer tout ce qu’ils craignent leurpouuoirapportervn dommage ineuitabîe^comme le feu,l eauj le tonnere, le foudre, les canons, les clieuaux, &c. mais fur tout le Diable qu’ils appellent Oh,q\ïils feruent pluftolî: par crainte que par amour: Ils ont dans leurs temples des images horribles d’icelui , & des Preftres fort conuena- bles à leur diuinité : les autels qu’ils nomment Pawcorap^ces , font placés dans leurs J O champs , où ils immolent du fang & de lagraiffe des belles fauuages , & y offrent du Tabac quand ils retournent de la guerre ou de la chaffe. Mais nousauons affésparlé de ces chofes. ^ C H A P. XIN. chofis qUe tes ^Anglot^ ont fait en cette partie de Virginie. BArthelemi Gofnold fut le premier qui entreprit d’habiter cette partie dé Virginie que nous venons de deferire, apres qu’il \ eut vne compagnie formée de plufieurs Nobles & Marchands , & vn priuilege Vort ample impetré de lacques io Roi de la grande Bretagne : par lequel il elloit permis d’eflablir vn confeil non feule- ment en Angleterre, mais auiïi en Virginie ,^ont dilpofer & ordonner de tout. Au pre- mier voyage il y fut enuoyé trois nauiresfous la conduite de chriflofede Ne'^fortiXe- quel partit de Londres le XV Decembre l’an clDlDc xix,& s’efforça prefquefixfep- maines de long a 1 encontre durent contraire fous Angleterre mefme,& ayant o-aio-né la haute mer,il s en alla premièrement aux Ifles de Canaries pour y prendre de l’eau, 5>c delà ayant traite auec les Saunages de \zDprnini(^uey ou il demeura quelque temps, il tourna voile vers , laquelle il rencontra contre tout efpoir, & comme fur le poina de s’en retourner : ils nommèrent le premier Cap qui fe prefenta à eux du nom de Henri Prince de XSf^alles : delaapres auoir cherche vnepjace commodepour y pla- 3 O cer la colonie, efieu les Officiers du confeil &lé Prcfident : chacun s’employa de tout fon pouuoir à la befogne, les vns à faire ^es maifons,les autres à diflribuer les champs, & d autres aux fortifications : On enuoya quelques- vns pour vifiter le pais, qui eflans venus de 1 autre colle de la riuiere^ que nous auons ci-deflus deferit la première ) apres fix iours,trouuerent vn petit village fitué fur vne coline forl agréable, & trois Ifles auec quelques champs qui auoyent eflé autres fois cultiués par les Sauuagesj cette région efloit fuiette au Pai^hatan , duquel les habitaris , félon la couflume de ces nations, ^comme nous auons remarque ailleurs, s appelloyent Pawhatans ; la riuiefe efloit naui- gable iufques la,mais plus outre on ne la pouuoit monter mefine auec des chaloupes, a caufe des bancs,efcucils & cataraéles. Ils furent par tout receus des Sauuages humai- 40 nementjmais ceux qui bafliffoyent Henri‘Ville,2.uoyent attiré vne telle haine des natu- rels fur eux,qu ils auoyent graneffuiet de craindre ; par ainü ils fortifierentleur ville,&; y placèrent les canons. Mais ils ne s’accordoyent pas bien enfemble,toutesfoisles Mi- niflres del Eglifey mirent bien tofl la paix ; On y auoit mené pour ce coup centhabi- tans: & les nauires s’en retournèrent en Angleterre le XV deluin cio Idc vu. Apres q^uc les nauires furent partis, cette nouuelle colonie fut attaquée d’vne grande calami- te a caufe de la difette de viures, de forte qu’a peine en demeura il dix qui fe peufîenc tenir debout tant ils efloyent dcbiles, & mefmes il en mourut la moitié auantlafin de Septembre jlerefle fe fubflantoit mifèrablement depoifîon& de cancres; auec tout cela la difeorde ciuile les trauailloit,&: enfin vne cruelle faim { car les Sauuages ne leur y O apportoyentque paifois de leurs fruiéls efcharcement ) à laquelle toutesfoispourueut vn ipeulean Smithy^^res quil eutlegouuernemQnt de la colonie, renouuellant la traite auec les Sauuages, ôi s en eflant aile premièrement vers \es Kecougtans,S>c puis vers les VVeraskoyks,i\ rapporta vne chaloupe pleine de blé. Cependant ceux qui auoyent de- meure dans la colonie, auoyent tellement rempli les Sauuages de leurs marchandifes, quils nen faifoyent plus de conte : & comme il fe preparoit pour faire vh autre voyage vers les Chichahamins , quelques garnemens fe penferent faifîr de fa barque M Z , & l’emmener : DESCRIPTION DES ÏN D ES & Pcmmenér: puis apres ü fut pris lui mermedes'Sauuages fa barque perdue par la négligence de fes gens : mais il fut bien toft relafché,& eî^orta des prouifions'pour la colonie. Apres cela il leur vient vnnouueaii renfort d’Angleterre de cent hom^ mes que Neoport mefme amenoit : lequel à la perfuafioù de Smith alla vifîter le Pa^ha- tan dans fon village vriconioco , & fut receu d’icel'ui humainement , felonla couftume des Saunages. 11 eftoit affis fur fon lift couuert d’vnematte, appuyé fur vn oreiller de cuir, orné d’vne fort gentille façon de perles & petites coquille de mer, veftu de peaux, à fa telle & à fes pieds il y auoittleuxieuneslilles. aflilès,&: aux deux collés de la cabane vingt de fes cQncubines,pmétesiaface & les efpaules de rouge. Neoport àon- na à ce Roi vnieune garçon Anglois, & lui en recompence donna à Neoport vn de fes i o amis familiers, nommé Namontack chofes palTees ils s enretournerent à la colo- nie, emportant delà vne grande quantité de blé qu’ils auoyent trafiqué auecpeude chofes. Par apres vne nouuelle mifere affligea ceux de la colonie ; car là plus grande partie des maifons brullerent par vn fortuit embrafement auec la meilleure part de leur prouifion: mais les édifices furent auec vne grande diligence refaits. Cependant Paivhatan cpjiicommcriçoit à s’ennuyer d’eux, faifoit tout fon effort pour attirer à lui par.fineffe leurs armes", afin qffil les peull plus aifement deffaire par furprife : mais Smith quis ’apperceut de leur tromperie l’empefcha detoutfonpouuoir. C H A P. XX. Du Golfe dé Chefàpeack defcoumrt par lean Smith. S Ml s T cependant impatient du repos,entreprit au commencement de luin Pan cIdIdc VIII, de vifiter le golfe de chefapeack:, qui court entre les terres droit Nord & Sud, & montalariuieredans vne petite barque defcouuerte, auec qua- torze de fes gens iufques au Cap Henri : & delà faifant voile vers l’Eft, il vogua vers les Ifles qui font au deuant du Cap Charles , qui eftoyent défia nommées de fon nom : ayant paffé ce Cap courapt la colle droite du golfe, il vifite Acowmacke,Qpxiç.^o\^NTi homme allés humain: en toute eewe fuite de coftelarerrey ellfertile,& leshabitans 50 fontdemefme langage quelcs Pmvhatdns. El^ntforti delàapres auoir vifité quelques nies fituees au milieu du golfe, il arriua à la riuiere VFigcomocO)Çoït trouble & boüeufe; & Payant paffee il rencontra vn Cap, où ily auoit vn ellang d’eau douce,mais qui elloit fi chaude qu’vn bain: delà changeant fon cours il alla aux Ifles defertes, aufquelles il donnalenom àcLimbei & derechef dellournantàla colle de main droite il vifi ta karanock, fort belle riuiere, du long de-laquelle habitent diuerfes nations , les Sorapha- nighsi les Naufesy Arjècs-, & Naut^K^uacks -, qui lui contèrent tant de merueilles de la na- tion MdJJa'Womeks, qu’ii lui prit enuie de la vifiter ; & pour ce que cette colle elloit trop plate, il trouua bon daller à l’autre; en cet endroit le golfe ell fi large qu’on ne peut voir de la colle de main droite de fort hauts roche'rs qui font à l’autre. Delà ilcourut 40 la cofte de main gauche vers le N ord trente milles, où il ne trouua nuis habitans : toute cette colle ell remplie de fontaines d’eau douce,les montagnes y font rudes & Il eriles : mais les vallees fort agréables & fécondés, les bois y font efpais, remplis de loups, ours & autres belles fauuages. Il nomme la prochaine baye qu’ils tïomicBûlus,à caufe delà couleur de l’argille du terroir femblable à celle du bol d’Armenie ; Le golfe a encore en cet endroit dix milles de large & profond de neuf ou dix braflés. Ellant repouffé par le vent contraire de ce lieu , il entre le x v i de luiii dans la riuiere de Patmomecky large en fon emboucheure de dix milles ; laquelle ayant monté enuiron trente lieues, fans y trouuer aucun habitant, il fut enfin mené par àony^amxzg^t^aOnawmamentyon il y auoit quelques centaines de Saunages , qui d’vne embufeade firent vne fortie fur lui, j o contrefaits en Diables, mais pour la crainte des armes à feu, ils n’oferent rien faire, ils Gonfefferent qu’ils auoyent efté incités par le PawhatanJcaÇç^o contre ceux de la colo- nie,pour les tuer. Ils vifiterent aufli cette riuiere , afin d’y defcouurir quelque métal ; caries Sauuages auoyent perfuadé Neoport opxû. y auoit force argent ; mais comme ils furent venus fur le lieu, fevoyans trompés, ils s’en retournèrent. Or quand ils furent venus à l’emboucheure de la riuiere de Toppahanockyiis Ce trouuerent attaqués par deux malheurs. OCCIDENTALES. LIVRE III. malbeiirsj car leur barque toucha fur les balles quifont à l’entree d’icelle riuiere fur picque d’vn aiguillon veneneux dVnepaftinaque, auec grand danger de fa vie, en eftant à grand peine garanti parvne certaine huile , qu’il aiioit par hafard porté auec foi. Enfin ayant palîé outre les riuieres àzPayankatak^àcPamaunkeyil retourna à Kecouchtany&CŸCVL apres à /<«£• & peut eftre de mefme efpece, qui croilTent pliffieurs en- fcmble,leurtuyaureirembleàleglantier("maislesfueilles different grandement/'eftanc proches des arbres , elles les embraftent eftroitemefft, & montent iufques au fommet d’iceux ; les Anglois les ont nommées TfincC^ à caufe de la femblance quelles ont auec J 0 cés racines, là ; eftant fraîches on les coupe par morceaux, puis les ayant pilees & pref- fé le fuc hors auec l’eau, on en fait du pain j eftant boüillies le ius en eft fortbon fur tout quand on y met de l’huile. La racine que les naturels nomment Cofimha,'^ , & les Anglois Tuca^ à caufe de /à femblance fe plaift és lieux humides & boüeux: les Saunages en font du pain à leur mode & delà boüillie d’vn aftes bon gouft,dc laquelle ils vfentfort. Le fuc, quand elle.s font fraîches ,en eft veneneux, voila pourquoi il le faut preftfer incontinent auant qu’on s’en ferue ; qui fait qu’on les feiche au Soleil ou au feu apres qu’on les a pelees, puis on les met en farine, de laquelle on fait du pain : ou bien eftant fraîches & ver- des,on les nettoye,& apres les auoir coupees par morceaux, on les pile & on en fait des ,^0 ballottes, qu’on tient ff long temps auprès du feu quelles font feiches,& puis on les ré- duit en pafte pour en faire du pain & de la boüillie. Hahafeon eft vne racine chaude , de la forme &: grandeur d’vne paftinaque,on ne la peut manger feule, mais elle n’eft pas reiettable cuite auec autres viandes. Il y en a plufteurs autres qui y croiftTent d’ellès meffnes en plufieurs lieux , aifés fem- blables à celles de l’Europe , mais les naturels ne s’en feruentpas, les Anglois difent qu ils en vfent fouuent. V oila ce que nous auions à dire touchant les racines,maintc- • liant nous parlerons des arbres & des fruiéls. On y tronue en diuers lieux grande quantité de chaftagners, &des forefts toutes en- tières de noyers, quelques-vns defquels portent desfruiâs femblables aux noftres en JO groffeur&: en gouft, mais qui ont r’efcaille plus dure & plus efpaiife: d’autres qui en portent beaucoup de plus groifes , qui ont l’efcaille prefque comme du bois & rabo- teufe, ce defqu elles lenoyau eftgros,fortdoux Seoleagnieux. Il y, a auffi d’autres arbres qui portent certains fruifts que les Anglois nomment pour la reftemblance nefles on meftes ;car ils ont vn grand & large ombeIique,on en peut manger auant qu’elles foyent choppes, leur couleur approche toutesfois plus de la cerife, comme auffi le gouft , qui eft neantmoins ft doux qu’il en eft prefque inftpide. Les figues des Indes N qu’on c 558 DESCRIPTION DES INDES qu’orxnommeenla Nouuelle EJpagne Tuna,^Qï\ Virginie Muttaquejùnnaucky cto{Ç[cn.t aufli. Des mœuriers, pommiers fàuuages,& pluEeurs autres arbres fèmblabies à ceux de l’Europe. Les Angloisyont remarqué en outre cinq fortes de glands ; la première defquels les fauuages nomment en leur langue Sagatamener : La fécondé Ojàmener: La tr:o\(icïr\c Pimninckoner:h^ quatrième Sapummener : èild. derniere Mangummenauck : ils feichent les trois premières fortes fur des clayes de rdfeauà feu lent,afin qu’ils s’en gardent mieuxjpuis quand ils s en veulent feruir^ils les trempent dans l’eau &: les boüil- lent : ils tirent aufli d’iceuxvne huilealfés douce. Ceux delà troifieme forte quand ils font cuits en l’eau, & puis prelfés , approchent fort en goufl: des chaftagnes, d’oùyient qu’ils en font alfésfouuent du pain j II tiennentla quatrième elpece entre les plus viles i o viandes, & ne nonrriflent leurs efclaues prefque d’autre chofe. Il y a vne grande abondance debeftes-à quatre pies, fur tout des cerfs; defquels ceux qui régnent autour du riuage font plus petits que ceux de l’Europe faute de pafturage ; ceux qui font au dedans du pais font beaucoup plus grands ; aurefte ils font du tout femblabîes aux nofl:res,fi ce n’efl: qu’ils ont la queue plus longue, & le bois plus courbé. Ils ont aulfi des connils , qui font pour la plulpartgris comme les heures, en fi grande « quantité qu’en plufieurs endroits les Indiens s’en font des camifolles. Le Saquenuckot Maquo^oc font fort femblabîes aux connils, mais plus grands &c d’vne meilleure to nourriture. Les efeurieux font prefque gris ; les ours noirs, que les Sauuages mangent quand ils les ont pris,comme aufli les lions & autres femblabîes belles. Heriot afleure y auoir remarqué, outre les oifeaux fort cognus,comme coqs d’indes, palumbes,perdrix,gruës,ayrons,cygnes & oyes, plus de quatre vingts diuerfes efpeces d’oifeaux foreftiers & feptante qui fréquentent les riuages, les eflangs & marais : & n’y a pas moins de poiffôiii, comme efl:urgeons,en Feburier, Mars & Audi Des harans qui furpaffent en grandeur les no Ares, & qui font parfois deux palmes de long: des truittes, marfoüins, rayes, congres, playes,& plufieurs autres bons à manger : des cancres & des huiftres de diuerfes fortes,des moufles, efcreuices & autres coquillages de mer.Et pour la fin cette forte de poiffon crufl:acee,que les naturels nomment Seeckanauck, & qui efl j o fort frequent en toute cette cofteiufques aux confins de \2i Nouuelle France lement dans les baffes & les bancs ; nous en auons ci-deffus donné la figure. C H A P. XXIII. Des marchandtjès qùon peut tirer de cette partie de Virginie des mœurs des naturels d icelle. OVt R E les chofes neceffaires à la vie,Ia terre produit de foi mefme,ou contient en foi plufieurs chofes dcfquelles on peuttirer grand profit pour le commerce. Entre icelle les Anglois renomment vne certaine forte d’herbe, qui a les fueil- les longues & eflroites , couuertes d’vne petite membrane deliee & luifànte , laquelle 40 eflant oftee ils fe fèruent du refte au lieu de foy e, ainfi qu’ils affeurent , d’où ils lui ont donné le nom d’herbe de foye.Il n’efl: pas befoin de parler de ce qu’on y peut femer ou cultiuer ; car veu que la terre y eft aflfés fertile, il n’y a point de doute quelle ne donne auec grande vfure ce qu’on y femera,fi on la cultiue comme il faut. Il y-a vne veine de terre, qui n’eflpa'S fort loin du riuage, & laquelle s’eftend quarante ou cinquante lieues en long, de laquelle on peu faire de bon alun , comme ceux qui font experts en chofes, affirment: la mefme veine fournit aufli du calchante,du nitre,de l’alun de plumef'com- me le nomme l’Autheur ) qui eflpeut eftre de fcifrile,mais non pas en fi grande abon- dance comme de l’alun , ni auec tant de profit. Il fe trouue en plufieurs endroits vne efpece de terre , du tout fembîable à cette terre qu’on nomme vulgairement figillee, jo ayant les mefmes marques de bonté, de laquelle fe feruent tant les Sauuages ( qui la nommtnt Wap er gh play es & vlceres,queles Anglois qui ont commencé àl’efprouuer.ll n’y a point de doute que veu la grande quantité qu’il y a d’arbres,qui rendent la poix , refine , terebinthine & femblabîes, on ne fifl vne grande quantité de ces marchandifes,auec le labeur & induftrie des habitans. On trouue ci & là du fâfla- fras nommé des Sauuages Winauck. Ily a aufli de grandes forefls de cedres, fort pro- pres en charpenterie : les vignes & mefmes les n.oyers y font fans nombre : enfin il n’y deffaut que la main de l’homme pour en tirer vn grand reuenu. On peut OCCIDENTALES. LIVRE IIL Oh peut àiifîi e/pcrcr vn profit content de peaux de loutres , qui fetroiiuent en. grand nombre auprès du riuage; peumefine fie trouue des onces Vautres animaux de plus riche pelleterie. On peut aulli tous les ans traiter des Sauuages auec peu de cho- ie des peaux de cerf, tant crues que pafiees en forme de chamois , en fort grand nom- bre. On y a veu aufii de cette forte d’animal que les Anciens nommoyent Hy£7ie, & des Modernes Ciuette , félon que les Anglois aifeurent, aufquels ie m’en rapporte. Onyatrouué des indices de métaux: de fer en deux lieux j à quatre vingts ou cent lieues de la place que les Anglois auoyent choifie pour leur colonie; &proche du ri- uage de la mer il y a plufieurs rochers qui donnentgrande apparence de fer; defquel- 1 0 les on peut efperervn grand profit tant pour l’abondance du bois qui y eft,que du bon marché des oLiuriers qu’on y employeroit. On dit qu’au dedans dupais il y a desmi- nes d’airain &d’argcnt,&mefme il y en a afles d’apparence, combien que iufques ici , on n’en ait rien feeu de certain. Il s’eft trouué des perles parmi les Sauuages, mais on ne fçait point fiches y onteftépefchees.Ily a diuerfes teintures ; outre l’anchre des coii- royeurs fort cognu de par deçà ; car les Sauuages font diuerfes couleurs rouges de la decoétion de l’herbe qu’ils nomment & de petites racines dites Chappacor, comme aulfi de l’efcorce de l’arbre appelle Tangomocque^ingé. Les Sauuages naturels de ces pais font d ’aifés belle forme, les hommes nourriffent leur cheueleure aufli bien que les femmes:les malles & notamment les princioaux ton- zo dent leur cheueux en forme de crefte, commençant depuis le front iufques auchinon du col, palfant par le fommet de la telle : ils couurent leurs parties honteufes d’vne peau de cerf ou d’autre belle fauuage qui leur pend dés le nombril iufques aux ge- noux ; le relie du corps ell nud,ou couuert d’vne legere chemifette de oeaux iettee fur les efpaules,ils imitent nos manteaux, & fe figurent en plufieurs parties de leurs corps de certaines figures & marques pour apparoillre plus beaux. Leurs armes font l’arc fait de couldre,Ies lleches de rofeaux & vn pieu de bois plat , long de deux coudees : ils s’arment de boucliers d’efcorceou de pièces de bois appropriées enlèmble à leurmo- de,ils n’ont nulle cognoilTance du fer. . Leurs villages qui font petits & en petit nombre,ront fitués le long du riuage : con- j O tenant chacun dix, douze, parfois vingt, & ceux qui font les plus grands trente caba- nes,enuironnés feulement de paux plantés en rond, à l’encontre derincurfion de leurs ennemis. Leurs loges Ibnt faites à la façon des berceaux & treilles,de perches & bran- ches ployees en voulres &Iiees auhaut,couuertes d’elcorces d’arbres, ou de certaines martes fort ingenieulèmenttiiruès,depuis le haut iufques au bas : dont la longueur, qui le plus fouuent efl le double deialargeur,eildedou2e,quelquesfois de feize, mefme bien fouuent de vingt perches de dix piés. Ils nomment leurs Gouuerneurs ou Roitelets FKeroanSy qui gouuernent vn & par- fois plufieurs villages; le plus puifiant de tous lors que-les Anglois y arriuerent, com- mandoic fur dix huiél villages. Chaque gouuernement à fon particulier langage, bc 40 plus il font cfioignés les vns des autres, d’autant plus different ils d’idiome. Ils font la guerre entr’eux pluflofl par furprife que par la guerre ouuerte, & s’efFor- centleplus fouuent d’attaquer àl’impourucuë leurs ennemis àlapointedu iour ou au clair de la lune. Ils ont plus de befoin d’mflrudion & d’inflruments , que d’efprit & d’induflrie. Ils feruent plufieurs Dieux fuperflitieufement,diflingués en plufieurs degrés & or- dres, qu ils appellent Jldentoacy encores quil femble que quelque cognoifiance bien que legere leur refie encore en la mémoire d’vn grand Dieu eternel ; lequel ils efli- ment auoircree & gouuerne iufques ici le monde , parle moyen des autres Dieux êe. demi-Dieux qu il a aufii créés. Ils croyent que l’eau a eflé la première créé des Eie- yo ments ; & la femme premier que l’homme, & que tout le genre humain efl venu de fç- mence diuine. Ils n ont non plus de cognoifiance combien il y a de fiecles depuis la création du monde, que des lettres qui en conferuent la mémoire: toute la mémoire qu ils ont du paffé , paffe par tradition du pere au fils. Ils croyent que leurs Dieux font corporels comme les hommes,parainfi ils les honorent par certaines firaulacres qu’ils nomment KewafowakXï\ç,wx.^ côfacrent deschapelles en forme de temples qu’ilsappeL \tViX.MAchicomuckiX^i[i^ lefquels ils prient, chantent& y offrent plufieurs prefens:iis ont N £ leurs ICO DESCRIPTION DES INDES leurs Preftres , qui font magiciens , lefquels demandent confeil aux Diables en chofes douteufesj&par desgeftes fort hideux & tordement de membres contre nature font peur à ce pauure peuple , & fe font honorer par force. Ils cognoiiTent. rimmortalité des ames,Ôc eftimentqu elles font portées aux demeures desDieux,ou au puits ardant, qui e-ft au bout de la terre vers rOccident, en vn lieu nommé Pofogujfo, Il puiiÜTent le larcind’aldiiltere & femblabies crimes par le fouet, & parfois auflî de mort. C H A P. XXIV. T)es premières expéditions des Angloù en cette partie de la Continente itijques à tan cId Id lxxxvi. ’ La première nauigation ( qu onfçache ) vers cette partie de l’Amérique, fut eii- treprife l’an cId Idlxxxiv, fous les aufpices de la Royne d’Angleterre, aux dépens de VVAlther Ralegh-, auec deux barques commandées par Philippe AmA~ J^:Qui partant le vingt feptierhe d’ Audi de lacofte Occidentale d’Angleterre, il arriua premièrement aux Mes de CAnAriesXc dixième de May,& le dixième de luin aux Mes del’Amerique,d’oùilprit fon cours vers le Nord-oueft& vit terre le quatrième de lulliet, laquelle il coftoya enuiron fixvingt milles auant que trouuer aucun port: mais apres en auoir trouué vn à la pàrfinj ayant moüillé l’anchre proche de terre , il y defeendirent & ranexerent parla pofleffion qu’ils en prirent auec les ceremonies ac- 20 couftumees àla Couronne d’Angleterre. Or la terre eftoit auprès du riuage baffe & fa- blonneufe,couuerte ci & là de vignes, qui montoyent iufques à la cime des arbres:plus auant elle s’efleuoit en petites colines,du fommet derqueiles on voyoit de toutes parts la mer qui renuironnoit,d’où ils cogneurent que c’eftoit vneMe , appellee des Sauua- ges VVùkokon : elle a de long vingt milles angloifes, & à peine fept de large ; veftue d’vn agréable bois de cedres , dans laquelle on voyoit vne grande quantité de grues blanches &: autres oifeaux, & non moins des belles fauuages. Le troilieme iour trois Sauuages qui y habitoy ent vindrent à eux qui leur prefenterent du poiffon: & le lende- main plufieurs autres auec GrAngimin frere du Roi VVinginA ;lls difoyent que toute la VïoxxïnctsoiŸ^tWoitVFingandocôs , &les Anglôis à l’honneur de leur Royne Vierge la ^ o nommèrent Virginie. Ils traitèrent là auec les Sauuages de peaux de chamois, d’eilans & de cerfs. Peu apres le frere du Roi retourna à eux & entra dans leurs nauires auec la femme & fes enfans: elle eftoit accouftreed’ vne belle façon félon Iji mode des Sauua- ges , fes cheueux eftoyent attiffés auec vne chaîne de blanc corail ; depuis les oreilles iufques au nombril pendoit vne corde de petitesperles, mais lui eftoit plus mal en couche,caril ne portoit feulement qu’vne lame de cuyurefur le fommet de la telle. Ces Sauuages eftoyent de couleur brune, auec les cheueux noirs, qui pendoyent aux femmes des deux collés, & aux hommes d’vn feulement. Leurs bateaux eftoyent d’vne feule piece de bois cauee à la façon des autres Ameriquains. A lept milles de cet haure il y auoit vne autre Me au deuant de la Continente, ap- ipç^e,ç,RAonAck desSauuages,qui eftoit habitée àcGrAngimimyis à vis de laquelle entroit en mer là riuiere OccAy qui venoit de fort auant au dedans du pais, comme ils difoyent, auprès du riuage duquel eftoit litué le Yi\\2igcPomeiock:Sz à lix iournees au haut d’icelle, il y auoit vne grande ville nommee SkicoAck,commc les Sauuages difoyent auoir appris de leurs deuanciers,toutesfois il n’y auoit pour lors perfonne en vie qui l’euft veuë. Le lleuue Cipo defeent en cette riuiere, abondant en perles félon leur dire : & la riuiere NompAno à la riue duquel eft le village chAïpanock,(\x\cx. à Poneno ; proche de ceftui-ci eft “le ^oï MenatononttVi ce temps il y auoit ces trois Rois VVinginA) MenAtonon & Poneno qui eftoyent alliés enfemble. A quatre iours de chemin vers le Sud-oueft eftoit litué le village dernier confin vers le Sud delà Prouince VVingandocoa. Proche d’i- jo celui eftoit Pomonick o\x Pananuioc (nict PiArnoco, du collé dcl’ Ouefi Nenjiocl' litué le long du riuage du beau lleuue Neiis. Au delà RAonoack, il y a au deuant de la ter- re ferme plufieurs Mes auec leurs villages. Car toute cetcecofte eftbordee d’vneinfi- nité d’ifles, iufques à deux cénts milles angloifes & plus , qui Ibntfeparee de la Conti- nente par vn deftroit Méditerranée , large parfois de quarante milles. Enfin les An- gîois recoutnerent en leurs pais en Septembre.amenant auec eux deux Sauuages. L’am l OCCIDENTALES. LIVRE III. ,o, L iin cio lo Lxxxv «lu mois d Aüril ou entreprit vu fcconclvoynge, *iiuec/eptna,- uires Tous la conduite de qui partant de le neufîeme du meli-nc mois,arnua le quatorzième aux Canaries feptieme de May àla Dominique, le dixième à Cotefi,}pcmc Ille lîtueéfoüs Porto Rico: & le douzième il entra dans la^ baye des Mofqiiites Tl/lede S.Iean:^nRr\ apres auoirvilîté en palTant & veu enfin de loin la le vingtième dcIuin,ilsmoiiillerent lanchre le trentième der- rière vn Cap, qu’ils , nommèrent Cap de Frayeur, pour le danger auquel ils fe trouue- rent : delà eftans portes le vingt fixieme à VVokokon, ils y perdirent le nauire Admirai par lalautedes matelots: delà il eriuoya quérir FFin^inqc demi de l’Æquateur : & enfin à l’Ifle Hatorask Cm trente üx degrés & vingt Fcrupules de la hauteur du pôle du Nord. Mais apres qu’ils eurent auecgrand peiil, & apres auoir perdu vne chaloupe, mis a terre VVithe ; du Sajfafia^ François Ximenes deferit en cette maniéré. Sajjajras cOiNSi 49 grand arbre , dont k fucille eft diuifee en trois parties, le tronc eft poli 6c rou- geaftre , 6c qui fent l’anis. Il eft prefque chaud 6c fec au troifierae degré 6c a de fubti- les parties , voila pourquoi ilguerift la colique 6c les douleurs nephritiques; c eft vn excellent remede à l’encontre la difficulté dVrine 6c aflPedions de reins procédantes de froid : il diffipeles vents, delbouche les obftruaions,corrobore les parties intérieu- res,guerift la difficulté d ’aleine 6c autres maladies de poitrine venantes de froid; il aide la digeftion,lafche le ventre, guerift la fterilité de la matrice , prouoque les menftruës, 6c eftvn puiflant remede contre kvcrole: il appaife la douleur des dents & reprime le rume. On donne la decoétionde fbn bois des branches 6c racines, & fur tout de fonefcorce au matin à ieun la quantité de huiét onces. Qu on fait en cette maniéré: 50 on prend vne demie once de racines auec leurefcorce coupees par petits morceaux, 6c les laifleontrempervnenuiftdans douze liures d’eau; puis on les cuift a feulent iufques à ce que la tierce partie fbit çonfumee : mais il faut noter tant en la decoétion qu’en l’vkge qu’il faut auoirelgard au malade, c’eft à dire à fon tempérament, àfes forces , à fon aage & à fa façon de viure, comme auffi à la faifon de l’annee, car il faut que fon manger fi)it petit 6c de viandes feiches , comme on a de couftume de faire es ^ ' autres OCCIDENTALES. LIVRE IV* autres alexipharmaques contre laverole. On doit aiiffi prendre foigneufe crarde à purger tout le corps. Quelques-vns vfent derafimpledecodion pour ordinaire breu unge,yadiouftantieulementvnpeudevin/ansfepurgerpremierementnifaireaucu nediëre^Onferaauffiaduertiqueradecoaioneftfortdangereufe à ceux qui font dé- biles & grandement malades : le bois fertauffi à rendre l’eau de mer douce, comme le mefmeX/V^^^’/^^raobferué envneextremenecelîité: carcommel’an cId Idc v ilvova- geoit de la Tlovide vers la Vevii Cïuzj , auprès de la baye de Carlos ils commencèrent auoir diTette d’eau douce, & eftalis portés à vne petite Ifle,ils y trouuerent de l’eau fort peu diderente de l’eau de la mer, mais y ayans trouué de cette forte d’arbre qui y croif- r 0 loit en grande abondance,ils en coupèrent par petits morceaux & les trempèrent dans cette eau, laquelle ils beurent douce au bout dehuiél iours non fans grand eftonne- menr. Voila ce qu en dit François Ximenes : voyes vn Chap. entier touchant cet arbre ! dans Momrd. Nous en auons mis ici la figure tiree de Dalechamp. Il s y trouue auflî ci & là dans'les forefts vn arbre que Trançois Ximenes •dkXoccz.Çiovï.diM Ca~ hos, arbre fort familier dans le Peru, deferit, qui a les tueilles rondes & deliees,d’vn verd obfcur, duquel nous parlerons en fon lieu. Il ne fera point ( dit-il ) hors de propos, de faire mention ^ O d’vn autre arbre fort femblable à ceftui-ci , fi ce n’eft qu’il ne porte point defruid, des fueilles duquel les Sauuages de la Floride font vn breu- ' uage, qu’ils nomment lequel a vnefin- gulierepuilTance deprouoquerl’vrine, &eft en telle eftime entre les Efpagnols & Sauuages, qu à peine y a-il aucun qui n’en boiue au matin éc au foir, & mefine auec plus d’exces qu’on ne fait en la Nouuelle EJpagne lç. Chocolaté-, ils le font en cette façon,ils prenent vne certaine quanti- 0 té de fes fueilles qu’ils mettent dans vn vailfeau de terre du tout fec & fans liqueur, & auec vn tifon préparé pour cet elFed, ils les rotilTent & les remuent de l’autre main fi long temps, que fa couleur verde fe change en rouge,puis apres ils y verfent de l’eau peu à peu , iufques à ce que le vaifleau foit prefque plein , & lors ils en vui- dent la feule liqueur , qui reffemble en couleur au vin clairet, & rend vne efeume tout ainfi que le chocolaté quand on y mefle l'Athole. Ils boi- o uent dé cette liqueur autant qu’ils en peuuént porter toute chaude dans de grandes coquilles de mer , à l’enuie auflî bien les Sauua- ges que les Efpagnols, & penferoyent mourir s’ils auoyent paffé vn iour fans en boirej vne heure & demie apres qu’ils ont beu , ils lafehent vne incroyable quantité d’vrine, prefque par l’efpace d’vne heure continuellement; par ainfi ils s’en trouue peu qui foyentfuietsauxaffedions de reins & de vefie: les Sauuages fe fubflantent auffide cette potion ; & quand ils fe veulent purger ils y meflent de l’eau de mer ; car par ce moyen il purge puifl'amment les mauuaifes humeurstantparfelles ,que parvomiffe- ments ; mais s’ils en meflent outre mefure, ils en meurent aucunesfois. On a défia trou- ué plufieurs fois par expérience, que ce breuuage deC^r/Weft vn puiflant remede con- 0 tre le mal nephritiq; & la grauelle. V oila ce que nous auions à dire touchant les arbres. Entre les herbes eft prifee l’Apoyomatli ou Phatzijiranda , laquelle le mefine Ximenes deferit en cette forte. Les fueilles de cette herbe ( dit-il ) font femblables à celles des porreaux,mais elles font plus longues & plus deliees, prefque à la façon du Cjpri, à vne des efpeces duquel il femble qu on le doit rapporter : elle a le tuyau à la façon du ionc, pleins de poulpe, noüeux & hauts d’vne coudee & demie; fa fleur eft petite & eftroite: la racine eft deliee, fort longue , pleine par interualle de nœuds, ou boffettes rondes ôi velues. description des INDES veluës'oLéà Efpagnols les appellent PaîernoflresdeS. Hekne, pource qu’on les porte diî port qui eftainfi nommé en Efpagne. Ces boulettes efl:anscoupees& mifes au Soleil s’endurciffeiit d’vne eftrange forte, & deuiennent noirs par dehors, & blanche par de- dans; les foldats de cette place les percent & en font des chapelets, qui font en grande eftime non feulement là, mais aulTi en Efpagne.Cette racine a vne faueur aromatique, prefque comme le Galanga ,• & eft chaude & %che au troifieme degré , &: prefque au quart, aucunement aftringente & refmeufe. Elle vient és lieux humides & à la riue des riuieres. Les Sauuages broyent l’herbe entre deux pierres, & fe frottent tout le corps de fon fuc, quand ils fe veulent lauer, & font cela prefque tous les iours,pource qu’ils croyent quelle corrobore la chair & lui communique fa douce odeunNon feulement i o les Sauuages,maisauffiles Efpagnols prenentauecvtilité la poudre d’icelle fort fubtile auec du vin à l’encontre la pierre des reins; car elle efraeut püilTamment rvrinc,& vui- de tous les excrements qui ont de couftume de boucher les conduits. Eftant broyee & prife en boiiillon ; elleappaife les douleurs de poitrine; & appliquée en emplaftre ar- refte les deiedions de fang ; elle fortifie 1 eftomach , & guérit les affedions de matrice. MoMrdhit mention de cette plânte;mais il eft differeiit zXimenes en la defeription des fueilles & du tuyau , car il lui donne des fueilles larges , & les branches penchant vers terre. Ils fe trouue auffi en cette Prouincede P Ambre gm , comme dit Momrd» iette à la cofte,dcpuis Canmueraly iufques au Cap S, Helene. C H A P. XVI. * ' 2,0 Gouuernemenî ToUüque des hahitans naturels de la Floride, îkè du mejme Laudoniere. LË s Floridiens font füiets à plufieürs Cajftques , qu’ils appellent Paracôujfsi qui pour eftre fort difeordans ont continuellement guerre enfemble, laquelle ils ne font pas ouuertement,mais prefque toufiours par embufehe , & fe furpre- nent à l’improuifte ; quand ils ont furpris leurs ennemis , ils les traitent cruellement; tuant tous les mafles , aufquels ils coupent la tefte , à caufe de la cheueleure qu’ils por- tent ci & là auec ioye& triomphe; ils pardonnent toutesfois aufexequine peut leur faire guerre, & nourriftentcurieufement les femmes & les enfans qu’ils ont emmenés 5 0 en feruitude. Eftant de retour à leur logis apres la vidoire obtenue, ils inuitenttous leurs amis,& banquetent trois iours de long nuid & ioür,paJrans le temps à chanter &: à dancer ; les vieilles mènent la dance,ornees de la cheueleure de leurs ennemis morts; ils attribuent principalement leur vidoire receuëau Soleil, & lui en rendent grâces. Allans à laguerre,ils portent auec eux du pain, du miel & de la farine de May s , parfois du pfoiflon fec à lafumee , quand celaleur manque, ils viuent de chofes fort fales , & méfient auec leur boüillie des charbons & du fable. Quand leur troupe marche, le Roi va le premier,tenant en vne main la mafiTuë, en l’autre Tare , & la troufie reiettee der- rière le dos, le refte fuit auec l’arc & les fléchés, ils donnent leur aflTaut auec grands cris & beuglements. . - ' 40 Ils n’entreprenent rien temcrairement,fi ce n’eft apres auoir plüficurs fois aflemblé leur confeil ; où le Roi fe fied fur vn fiege plus releué que les autres , par apres chacun entre félon fon rang & fon aagc,& efleuant les mains au defifus la tefte,ils chantent de- uant Ha Heya y &L les autres fuiuent refpondans ha ha : apres cela chacun fe fied fur là felle.Si les chofes font de fi grande confequence defquelles il faut délibérer, ils y appel- lent leursPreftres,& ceux qui font plus vieux,aufquels on demande aduis deuant tous. Alors on apportelaC4//?;?f,le Roi boit le premier,& commande qu’on verfe à chacun par ordre* ^ Ils n’ont nulle certaine Religion , & ne feruent prefque aucune certaine dminité. toutesfois ils font quelque feruice au Soleil & à la Lune, comme aufli ils feruent fuper- yo ftitieu foment tout ce qui fo prefènte à leurs y cux,fiirpaflant la commune raifon.ïls ont leurs Preftres, qu’ils appellent aufquels ils font afl'es obeïffans , eftans abeftis par leurs augures & preftiges ; car outre qu’ils font Magiciens, ils excercent auffi la Méde- cine, & penfent les playes, portans toufiours auec eux quelques herbes ou médica- ments ; Ils n’ont maladie quileur foit plus commune que la verole , pource qu ils abu- fentintemperament des femmes, & ne s’abftiennent des hommes par vne deteftabic . couftume. OCCIDENTALES. LIVRE IV. Le vulgaire & ceux du commun denrr’eux n’ont qu’vne femme . mais les Rois & let plus grands en ont plufieurs , toutesfois ils en tiennent vne pour Royne, les enfans de ..quelle ils efleuent comme heritiers du Royaume : ils s’abftiennent Icplus fouuent de leurstemmes lorsque lesfontgroires.ouqu'ellesontleursmenftruës.carils eftiment quelorselles poluent les viandesdeleur toucher. Ils enterrent folennellement leur Ro. ellant mort, & mettent fur le tombeau la coupe dans laquelle il auoit couftumeX boire, 6C plantent autour d icelui vne infinité de fleches,le plaignant par pleurs & ieuf nés de trois .ours 1 le vulgaire fe coupe auffi les cheueux en figned’vn diîeil fingulier ■ enfin ils brufient les armes du Roi & le refte de fes meubles auec fa maifon- 8? de£' . 0 lient quelques vieilles qui le plaignent par des hurlements cftrangestous le^iours aj matin 1 m.d. & au foir, l’efpace de fixmois. Et les Rois voifins & les amis lui rendent magnifiquement les honneurs qui lui font deus. Les Preftres font auffi enterrés dans leurs maifonsjefquelles on brufle en la mefme façon. C H A P. XVIL Defiripon des ViUes Forterejfes ejue les Espagnols fojfedeat auto UY à" h ni dans la Floride. Le s Efpagnols tiennent pour le iourdliui en la Floride peu de places pour la grandeur du pais : car en toute cette grande eftenduë du golfe de ils n en ont lufques a prefent aucune ; & du cofté qui eft batu de la mer du Nord ils en ont, feulement deuxilaprincipaledefquelles eft la villette àcS.Ju.uflm, auec fes fortereiTes fituees a 1 emboucheure delà riuiere de MayAitt auiourd’hui ry. plus auant ftir les bords d’icelle ^ diftante du Cap du Sud de la PW. cinquante lieues comme on ait. L autre dediee a i”. auprès du Cap de S. Helme,A.Çi2,m.Q de là precedente de douze lieues ou plus, & du port dlHauana d’enuiron cent. a première villette appelleedu nom à^S.Auguflm, eft la principale, le fondement de laquelle fut lette par les François, comme nous auons ci-deuant dit : laquelle ayant entièrement efte ra^e par fut apres fon départ rebaftie par Fierre Meleldez. E e fut prife parle Ch.^'aAi^'eFrmçoùBrackï^vi cio Lxxxven cette, maniéré. Les Anglois eftans portes du golfe de Mexique par ledeftroit de Bahama Aolus la mer du Nord, comme ils coftoyoyent la cofte de {^.Floridedc près, & la vifitoyent curieufe- ment enuiron le trentième degré au Nord delaligne,ils apperceurent auprès delem- boucheure d vne riuiere vne guarite releuee,faire ala façon d’vne chaire j par ainfi les loldats ayans defeendu dans les barques, vont de cette part , afin dé voir de près ce que cepouuoit eftre.Ayantentré dans la riuiere,il defeendent à terre, & ayant fuiui le ri- uage enuiron vnelieue,ils virent vne fortereffe de l’autre cofté delà riuiere, quiauoit efte depuis-peu baftie des Efpagnols, &au deflhs d’icelle a prefque vne lieue d’efpace vnpetit vidage contenant quelques maifons de bois fans aucun rempart.AinfîlesAn-. 0 g OIS poinderent a l’encontre deux pièces de canon qu ils auoyent amenés auec eux, auant leloir,&enuoyerentquelqu’vnde leurs gens auec vne petite chaloupe, afin de confiderer de plus près la place. Les Efpagnols eftimansque les Anglois venoyent auec toutes leurs forces , apres auoir lafehé quelques coups de canon, prirent la fLte, lailTans quelque peu de gens dans leur place. Les. Anglois furent vnteinps fans fçauoir nen de leur fuite,iufques a qu vn certain François, qui y eftoit prifonnier vint vers eux, &. les aduertit de ce que les Efpagnols faifoy en t , lors ayant fait palfer toutes leurs for- elT; n Vd """''T'' P'Tm' beaucoup de peine : car ^ w foire & le rempart qui eftoit fait de pièces de bois croifees emble, n eftoit encore pas acheue , pource qu’il y auoit peu de temps que les Efpa- ) pois auoyent commence cetteforterelTe.Ilne fetrouua rien là dedans qui fuft deL eui, excepte quatorp pièces de fonte, & enuiron vingt mille francs en vn coffre, qui . toyentpourpperlagarnifomlaquellepouuoiteftrëd’enüiron c l. Cette forteràe eltoitnonpeede .y. lean.kyms pris cette place, auffi toftils montèrent la riuiere auec iems chaloupes & entrèrent fans grande difficulté dans la villette de S.Auaudm,lo prit la fuite des premiers. Ils entendirent là que pagno s auoyent a douze lieues delà vers le Nord vne autre fortereffe auprès K du Cap î3cr DESCRIPTION DES INDES ^ du Cap de laquelle eftoit aulTi gardee par cl foldats. Brack moktdôlM d’enleuer aufli cette place des Efpagnols.mais comme il vit en y allant que la mer . eftoit plate, &: la cofte fort baffe & dangereufepour fes nauires, ayant changé d’aduis,il s’en alla droit en Virginie. C H A t. XVIII. ^efcrl^tion de la cofte marine de la Floride , tant celle qui regarde le ^and Océan , que celle qui reçoit le golfe de Mexique. Le s Iflesfi cognuës,ou piuftoft rochers, dites des mariniers Martyres, couurent ie> le dernier Cap de la Floride, regarde Cuba vers le Sud. Derrière les Martyres eft ledit Cap de la P/mWe fur vingt quatre degrés & trente fcrupules au Nord de la li^ne ; delà courant vers le Nord , on rencontre premièrement la riuiere Ays^ ; puis apres cette pointe de terre qu’on nomme vulgairement Cap de à vingt iiuiét degrés & trente fcrupules de la ligne. A deux ou trois lieues delà eft la riuiere ou (comme on la nom- me ) à dix lieues de laquelle ou plus , fort U Barra deMatan&a, ainfi nommee pour le meurdre y commis de & autres François. Vn peu plus outre eft la riuiere de S. Auguftin, l’emboucheurc de laquelle s ouure âu Sud-eft> à enuiron trente degrés de la ligne vers le Nord, comme les Efpagnols ont io remarqué. De cette riuiere iulques afemboucheurede S. A/4/^i^/^,ilyadixlieuè’s,au milieu de cet efpace fortent en merles riuieres ào. Sarauay ^àç, Sana, maisquifont plus près de S.Auguftinc^t àc S. Mathieu. Suit apres à huid: lieues d’efpace la riuiere de S. Pierre a trente & vn degre de la ligne vers le Nord: à cinq lieues delà la riuiere ou Barra deBdlenas: apres CxiitAlacany ou Gua- laquiny nmcr:Q..T)c laquelleon conte cinq lieues iufques à la riuiere Saon ou chaon. De SaonlBeJpogen on conte vne lieue 5 iufques \ Cafala trois. De Capala iufques àCofo- nufo deux 5 fur trente & vn degré & vingt fcrupules au Nord de la ligne. De Cofonufo iufques à Barra de AjopOjW y a trois lieues. B Aftopo iufques a la Baye de S. Croix deux & I ® demie. De la Baye de S. Croix iufques à la Baye des Bajfes, ( vulgairement ftites Bos Ba- xos jil y en a trois. De la Baye des Bajfes iu(c\pLQS au Cap dei". Helene cinq,a trente deux degrés & trente fcrupules au Nord de la ligne. Du Cap de S. Helene à Oriftan,i\ y afix lieues. B'Oriftan iufques à Oftano quatre. Z>’0- Jlano à Cayagua huid. Dé Cayagiia iufques à lariuiere lordan,, on ne trouue {)oint la di- ftance, mais les Efpagnols ont remarqué, quelle eftoit fur trente trois degrés au Nord de la ligne. Voila la difpofition de la cofte qui regarde la grande mer du Nord. ^ ^ La partie de la qui reçoit par vn grand circuit le goXîei àc Mexique eft moins cognuë , toutesfois voici ce que nous en auons peu apprendre touchant la fuite de la cofte. Apres les Martyres fuiuent les Ifles des Torîuges ïoitcogxixscs , defquellcs nous 4® auons parlé ailleurs. A la Continente aucofté Occidentalde laP/^r/W^, on remarque premièrement la Mujpa,?£ delà à treize lieues plus vers le Nord eft laBaye de Carlos ou £74/;?/, qu’on nomme aufft du nom de lean Ponce de Leon. .De la Baye Ponce, on conte -aufli treize lieues iufques à TampàxJDo Tamjaiulc^nzs alaBayedui'..^r//,il y a trente trois lieues , les Sauuages la nomment Tocobaga , on dit qu elle eft de la ligne a vingt neuf degrés & trente fcrupules vers le Nord. Delà la cofte qui a couru vers le Nord, par vn grand circuit, prefque de trois cents iieuè'Sjfe courbe vers l’Oueft iufques à la riuiere des Palmes , en tout lequel efpace nous y trouuons fort peu de places remarquées. Car de Tocobaga qui femble eftre appellee Ancon Baxo,oiîi conte cent lieues iufques à lariuiere des vulgairement diteAw Jo deNieues. De la riuiere iufques à la riuiere des Fleur s f\. y avingtiieuè'souplus. De lariuiere des Fleurs inlcgacs à la Baye du S. EJprit f qui doit eftre vne autre ^uela. precedente ) ou Culataycovnmc on la nomme vulgairement, on conte feptante lieues. De Culata iufques à la riuiere vulgairement Rio de Peftadores ,i\ y a aufli feptante lieues. D e la riuiere iufques àlariüiere des P aimes, iïy en -àcent. . DESCRIPTION S>\wp^\ST i: K . iîA S^ritii Sanh TsTveva Bis caya ma S.Iu/tn ^ S^f^eirharA. il V. 'pur.mjo ^jiinas hAvînno ^ S. Aartùi ^■/fe 'By.de Jlcntanhoj J l^AUVCO ^ ^.Lpuis /le Tantfice j^a ^{ertneso Tropicus Caiicri ^'IL.^anuco ' Ae AÏAeatu\ ^ Z/u/ttecas ’ Pr.ile Singùi^uipa^^j'^^^^ _ ^XaLI5CO ^ Cort^astelht -™A Wi^S^^ile , L.Chnpalo- ^ U TtUvptc Yv t A-'^T^V Ih S- Stev/iii âel S.lejo Ae hs vnlles ^uerto Tula Papap ^uel Xilotepe^ue , , , Meftitlan ■ton de Saltÿ'/i R. de S. : ^ •» Tiichuea y.s.îeti dehsZajps I/ateotlalpa ♦ Achachic/i ,^4- Mexico jAAi^ico.Aco.._, - à^S.7iUj;o ^ Giiaxnnitto jLiuaiuv Z.deLohos jfejrütos C.S.Antvti Los Ahcranes Sümi de Xatiscùi Las très Jl Arias if.de arettas a La Descffncscid/u-^ Trùin^uh C. de Cotoche C.àe Carrient 'Lhanos de Ahtt Siuhê^, ^d/'i^de Alucheres 'ÿeùtgo vAOtftJan, à Aiment Gil/iyatijAree Yzael Cocomes '^VaÙadAid jà,Colittut \ ^Catt^echc '■.^oziimel r^havdiL. O ^ Zum^anjo \Zaeatidi2. Misteca Jluitaz^/4-,c’eftà C ) ftui eft vn arbre moyen, ayant les fueilles comme la Menthe farafine, bien qu elles ne foyent pas coupees fi auant, qui font con- lointcs aux branches trois a trois :1e tronc eft extrêmement odorant; il rend vne li- IXw/ " bien le limon. Lehuidieme fe nomme xochicopalh ou Xochuopalquahmtho^m eft vn grand arbre, ayantles fueilles comme l’o- ranger ; le tronc eft bigarre de certaines marques blanches,les fleurs rougeaftres, mais D F’^ites : il rend vne refme de couleur de feu, laquelle on nomme Animer Copal auiTu U refte la refine quoi! nomme par excellence Copaleli chaude prefque au troifieme degre,deireichantaucunement&aftringent d’vne douce odeur felle appaife la dou- fuffocation de ma- temede contre toutes les maladies qui Voyé, de ‘ !>nok ^ ^ 'f Saunages nomment Hdlli, & les Efpa- fe rrnrT*' 1 ^ppelje Holq^huttl: duquel on trouue deux efpeces, Ivne quia , Gran des riûf ^ blanches. & de ^ f “eibes . il porte de grolle boules rondes de couleur rougeaftre , attachées au cule btunTv ^ P-*?®" des noifettes.qui font couuerts d’vne pelli- makvnn! P-“^'^®‘>'®'P“®illesfemblablesà celledel’oranger, inc fel ilnd *’ del'autreeftd’vn gouft amer.Qui eftant enf n nnfr f fn'" de couleur de laièt , & puisbrune & Slês î c ’ desquelles les Sauuages fe feruent au lieu de enoignentauliilapeau: &1 ayant cuite auec certains vers qu'ils nomment K J Axin^ j54 DESCRIPTIOH des INDES formée en pilules, ils les aualenr, pourfe rendre plus agiles, 6^ s acquérir vne admirable dextérité de ployer &c tourner leurs membres vers toutes les parties ; elle eft auffi puiflante eiiMedecine, car elle efmeutrvrinejnettoye la matrice, & on penfe qu’elle corrige la fterilité des femmes. Les fueilles de cet arbre eftant feiches & broyees, tuent f comme l’on dit; les lions,tigres&femblables belles Sauuages. Le Tecomahaca tient le quatrième lieUjComme il eft nommé du vulgaire par vn nom. vn peu corrompu, car les Sauuages l’appellent Tecômahiayc,ècWThxQ Cofdyhyu,^ Me^ meyd (juahuilt. C’eftvn arbre fort grand, qui aies fueilles rondes & dentelees 5 il por- te au bout des branches vnfruiét petit,rond, roux, plein de femences femblables à cel- les des pommes de coin i la plante eft acre & mordace, odiferante auec vne vertu 10 aftrino-ente : icelle parfois d’elle mefme , parfois eftant incifee, rend vne relîne à prefeiit cognué de tous, qui a mefme vertu que les precedentes : quelques-vns s’en fer- ueiitaulieu de la myrrhe : elleappaife les douleurs qui procèdent d vne matière flatu- lante;diflbudies tumeurs lentes &: vifqueufes elle eft fi amie à la matrice qu eftant mi- fe fur les charbons êc approchée des n'arines,elle aide auffi toft ceux qui font trauailiés de fon mal 1 appliquée au nombril , elle arrefte les mois qui coulent outre mefure , elle fortifie la matrice , & la contient en fa place : eftant mife dans les trous des dents , elle en appaife la douleur & les preferue de pourriture ; enfin c eft vn excellent remede à l’encontre toutes les aftedions procedentes de caufe froide. Nous donnerons le cinquième lieu au C^rr^w^.-cette-ci fort d’vn grand arbre que 10 les Sauuao-es MexiquainsnommcntTlahmlillocan ,-il a vn tronc poli, rouge Stluifant, fort odorant; les fueilles font femblables à celles deroliuier,difpofees en forme de croix ; fa refine a les mefmes qualités que le Tecomahaca , & mefmes de plus grandes & fortes comme quelques-vns eftiment , combien qu’on ne s’en ferue pas tant , pource qu’il eft moins cognu. Pour la fixieme eft vne certaine gomme odoriférante comme l’ AnethyC[mco\i\c d’vn arbre que les Sauuages appellent xochilt & Anetl~mani4/£’2:/>4:^//,grandarbriireau,qui croift fouuentesfois auffi grand qu’vn arbre,fon tronc efl gros, fans nœuds comme le poirierj fes fueilles font femblables à celles des ciches , mais plus petites i &:non dilTemblables àlaruë,ou vn peu plus grandes, fes fleurs font petites, longues, iaunes & difpofeesea forme d’efpicjc’efl vne plante froide & humide, combien quelle approche vn peu d’vn moyen tempérament. Son bois teint l’eau en bleu, laquelle eflant beuë réfrigéré & nettoye les reins & la vefie,& tempere l’acrimonie de rvrinefil y a long temps qu’on en porte en Efpagne,où il efl appelle Bok Nephritique.O'jom vn peu Momrdl^ deifus. La „ NomielleEfpagne nous enuoye auffii d’vne forte de Eois folide & fans nœuds,dontla ma- tière efl femblable à celle du poirier,l’vfage duquel efl défia receu de long temps en ce ” lO pais, contre les maux de reins & difficultés d’vrine.Depuis on a trouué par expérience, „ quefon eauefloit bonne contre les obflruétions de foye Sédela rare. On la préparé en cette façon : On coupe le bois par petits morceaux, & le fait-on tremper dans de bône ” & claire eau de fontaine,& l’on l’y laifle fi longtemps,qu’onenaitbeu toute l’eau.De- „ mie heure apres queie bois y a eflé mis-l’eau fe teint de couleur d’vn bleu clair,qui s’au- gmente peu à peu félon la demeure que le bois y fait,combien que le bois foit blanc (ce ” que ie dis, afin que perfonne ne foit trompé, car on vend vn autre en fon lieu, qui teint „ S l’eau ' ï) 13S DES CRÎPTION DES INDES l’eau en iaune. Onvfe de cette eau affiduellement, onlametdansle vinâuflî, &elic produit des effets admirables fans cfmouuoir aucunement les humeurs ,& on na point befoin d’vfer de façon de viure autre que temperee t car l’eau ne change non plus fon gouft par ce bois, que û rien n’auoit efté trempé dedans; il eft chaud & fec au premier degré. Voila ce qu’il en dit. François Ximenes a remarqué que ce bois perd la force entièrement quand il eft trempé quinze iours continus dans reau, 6e ne lui don- ne plus cette couleur bleue. Le dixième eft le HigmrOyCommz les Efpagnols le nomment, qui eft vn grand arbre auec des fueilles femblabies à celles de nos mœuriers,6^; qui lui approche fort en gran- deur & formedl porte fes fruids comme vne citroüille, longs, ronds ou d’autres lîgu- lo resjdefquels les Sauuages font des coupes & autres vaifteaux , qu’il nomment Tecoma- tojdans lefquels ils boiuent ordinairement leur Cacao.Ws mangent aucunefois la moü- elle du fruid quand ils n’ont rien autre chofe,qui relfemble à la chair de citroüilles. Pour Fonzieme le Xalxocotls ( par les Elpagnols Guyaho) c’eft vn grand ar- bre, duquel on trouue plufieurs cfpe- ces;deux defquelles Ximenes deferit en cette manierefnous auons faitap*pofer lahgure d’vn rameau auec le fruid c6- me vn Efpagnol l’a defpeinte ) la pre- 20 miere a les fueilles comme vn oranger, mais plus petites bc velues , les fleurs blanches , le fruid rond plein de grains ainfi qu’vne figue , d’où vient que les Mexiquains l’appellent fruid a- reneuxdes fueilles font aigres ô^: aftrin- gentes bc fort odorantes, qui guerilTent la gale defquelles on vfe dans les bains; l’efcorce eft froide 6^: feichc 6£ grande- ment aftringente : fa decodion diflîpc 5 0 les inflammations des cuifles ^ àc gue. rift les playes fiftuleufes ; on dit aufli qu’elle guerift la furdité bl qu’elle ap- paife les douleurs du ventre,à caufe de certaines facultés occultes qu’on ne peut cognoiftre. Le fruid eft chaud bc fec, principalement la partie extérieu- re & plus folide,car le dedans eft d’vne chaleur moderee qui fent aucune- ment les punaiflTeSjtoutefois on ne laif 40 fe pas d’en manger,& mefme plufieurs auec volupté , encores qu’il rie foit pas propre à tous egalement. Il y en a qui difent qu’il efmeut & efehange le Ventricule qui eft al- îangouri par vne caufe froide. La fécondé efpece porte fon fruid beaucoup plus gros, & qui ne fent pas fi mal, voila pourquoi on les tient pour plus délicats. V oila ce qu’il en dit. Ouiedo deferit le mefme arbre b>L Ibn fruid : L’arbre ( dit-il) eft grand, ayant les fueilles d’oranger, mais il a moins de branches bi qui font plus efparfes, & les fueilles ne font pas aufli fi verdes, approchant plus en forme a celles du laurier, fi ce n’eft qu’elles font plus larges , plus elpaifles, & que les veines en font plus groffes. Il y enadeuxefpeces, mais toutes les deux portent vn fruid femblable a vne pomme, dont les vns font ronds,les autres longs,lesvns ont la chair rouge, les autres blanche, yo tous ont l’efcorce verde ou iaune quand ils font fort meurs ; mais pource qu eftans meurs, ils ne font pas de fi bon gouft , & font gaftés des vers, on les cueille le plus fou- uent verds: au dedans ils Ibntfolides , 6^: comme diuifés en quatre parties ; dans lef- quelles font contenus certains petits grains fott durs : au fommet le fruid a vne cou- ronne de petites fueilles qui tombent aifement. Gomaretxii'àix.xvLtTiXxoxiibc Monard aufli comme on pourra voir és Exotiques de Charles de l’EcluJè. En OCCIDENTALES. LIVRE V. l'yP En douzième lieu eftle Meiguey^ dit des Mexiqtiains, Métis qui efl: vn arbre que les Sauuages elliment fort & le cultiuent foigneufement ; il a les fueilles larges & efpailTes (''prefquc de la grandeur des tuiles & caués en la meime façon, comme affirme Gomare) auec de longues & fortes efpines & au bout dVne. pointe, qui ferucnt d’aiguilles, def- pingles &: de poinçons, & les fibres du dedans de la fueille de filetjil a le tronc affés gros & aio'u en haut en forme de pyramide , lequel on incife & caue , d’où fort vne liqueur comme de l’eau, fort claire, & fort belle à boire &: falubre, en fi grande quantité que d'vne plante f ce qui eft cfmerueillable j on en recueille parfois l arrobes, chacune defquelles contiennent xvi fetiers ; cette eau legerement boüillie fe conuertit en 0 yl//>/;& efl;antdepuree enfucreieftant meflee auec de l’eau en vinaigre, & y adiouftant àzl' Ocfa6ili( Qyx\ efi; vne racine qui pour fa bonté efl: appellee la <3?^ -i/Mlaquel- le toutesfois ie ne trouue pas eftre defcrit par noftre Autheur jen y'm-.Frânçois Ximenes cfcrit qu’on fait du vin de fon fucre en y méfiant de l’eau, des femences d’oranges, me^ Ions &: autres, afin qu’il enyure pluftofi: : les Sauuages le boiuent auec grande volupté, combien qu’il foit fort mal fain, &: qu’il offence puifiamment la tefte& enyure fort: il n’y a charogne ni retrait qui fente plus mal que l'haleine de ceux qui fe remplifient de ce vin. Ceferoitvne chofe longue dedefcriretousles vfages de cette plante. François Hernandes & fon Interprète Fraytçois Ximenes les mettent au rang des herbes, & lui don^ -nent vne fueille de loubarbe ou d'Alo 'éss &en remarquent plufieurs efpeces aucune- 0 ment differentes en grandeur & forme.- Voyés de cela Acofia &le fameux Charles de /’£c//^auliure V des Plantes rares. En treizième lieu efi: le MimuitU lequel f comme efcrit François Ximenes J efl; vn ar- , bre affés commun en la Noutulle Fjpagne^nziï^znt de foi mefme par tout,mais principa- lement és montagnes ; il efi: fauuage & efpineux,auec des fueilles deliees commç celle de l’ail j ayans des cfcoces pendantes comme le T amarinde & prefque de mefme for- me, qui font bonnes à manger, longues, douces, & d’vn bon goufi, pleines de grains, defquelsles Sauuages chichimeqnes lont certaines pillules defquelles ils viuent au lieu de pain : ie iuge ( dit-il ) que c’efi la vrayc CaJfeàQS Anciens, qui produit la vraye gom- me Arabique.de laquelle on trouue grande quantité en X'uNouuelle Efiagne, iufques ici O incognuë non fans grande négligence : la liqueur tiree des furgeons de cet arbre , ou l’eau dans laquelle ils auront trempé,appliquee aux yeux en faconde collyre, guerift merueilleufement bien toutes les affedions des yeux. En quatorzième lieu efi le Ycolt, que les Efpagnols appellent , & a lesIndiensj^Æ^to/É'/tf///5qui produit d’vnç racine deux ou trois troncs, lefquels portent des fleurs blanches & odoriférantes , pen- dues par grappes, difiinguees en fix fueilles, ^ , d’oùnaiffentdesfruidsfemblablesauxpom-' \ .0 mes de pin, lefquels nous auons fait reprefen- ’ ' ■ ter ici,qui font fort beaux , de diuerfes gran- l deurs & figures , de couleur pour la plufpart dechafiagne. lenefçai fi c’eficefruid que Charles de l’EeluJe a deCpcint au Chap. ni du fécond liu. de fes Exotiques. Nous auons veu plufieurs qui ont efié apportés de Xz Nouuelle EJpagne ,xn^is toutes vuides, qui fait que nous nepouuons rien dire de fa femence : Ximenes quelle efi froide &:glu- tineüfe, lequel a aufii remarqué qu’on file des fueilles de cet arbre vn certain filet ( du- quel on fait de la toile)plus fort combien que plus délié, que celuiqu’on file àuMaguey. Pour le quinzième & dernier lieu, il refie que nous efcriuions ( car de les pourfuiure fotous,cen’efi pas chofequiappartienneàcet œuure) cet arbre admirable, que les^^’- xiquains âppcXXent NochtliyXes In/ùlaires,Tunay & Xes Européens , Figuier. indique, fi on le doit appeller arbre, veu qu’il croifi fans tuyau fans branches, & n âye prefque rien de ■bois J fa forme efi défia fort cognuë & vulgaire. On en trouue deux efpeces il’vne faü- uage qui ne porte aucun fruid,ou bien il efi fi efpineux, qu’il n’efi vtile a chofe aucune: & le domefiique ou franc qui porte vn fruid long & rond & afies femblable aux fi- gues,prefque de mefine grofiéur & poli, duquel quand on a ofié i’eipaifie peau, on voit S Z la poulpe i4a ÜESCRII^TÎON DÉS INDES la poulpe du dedans pleine de quantité de grains , fort douce & dVn gouft fort agréa- ble, laquelle eft ou blanche qu on eftime la meilleure, ou rouge & purpurine, de forte quelle teint les mains de couleur de fang comme les mœures, & eftant mangé teintlV- rinedemefme,cequi a trompé aucunesfois les Médecins qui ne lefçauoyentpas. Il y ena vneautre efpece, dite des Ameriquaim, Nochezcli Nopalli ou Nopal nocheztlii qui encore qu’elle ne porte pas de tels fruids,toutesfois elle eft plus eftimee & eft cultiueé plus foigneufementjpource qu elle porte ce précieux grain, que le vulgaire nomme Co- thmilley du Cocco des Anciens, tant requis des teinturiers pour la beauté de là couleur ; oe grain eft feichc par les naturels & eft porté par toute l'Europe , dont il fe fait vn ri- che trafic . Acofta rapporte qu on en apporta en Elpagne en vne feule flotte l’an lo cIdId Lxxxviijcinq mille fix cents feptante arrobes. Cette plante aime les lieux tempérés ,5 Herrera en defcritainfi la culture : Le grain de Cochmille vient en plufieurs Prouinces de la Nouuelle Bjpagne, fur l’arbre qu’on appelle T una^ qui a des fueilles fort efpaiflesjaufquelles il croift és lieux expofés au Soleil & couuert du vent de Nord-cft * c’eftvn petit animal viuant ou pluftoft vn infede , prefque femblable àvnepunaifcj lors qu’il s’attache premièrement à la plante , il eft vn peu plus petit qu vne puce, & vient d vne femence delà grolTeurd’vne mitre ,& remplit tout l’arbre & mefmetout le iardin, on l’amafle vne fois ou, deux l’an j ils dilpofent les arbres en certains rangs comme on plante les vignes , les cultiuent foigneufement &: les nettoyent des her- bes, plus font les plantes ieunes, &:plus elles portent abondamment & donnent de 10 meilleure graine : mais il faut fur tout prendre garde de les preferuer de l’iniure de plufieurs infedes , & non moins des poules qui mangent le grain : ils fe feruent de queues de renards pour nettoyer les plantes , de peur que la femence, nouuelle de fes infedes ne foitgaftee : quand ils font venus affés gros, on les ofte auec vn grand foin, &: on les tué en les arroufant d’eau fraifche,onles feiche àrombre»&: on les conforuedans des vaifleaux de terre : on les tué aufli auec de la cendre qu’on iette deflus , puis on les lauc'jOn les tué aufli en d’autres fortes,toutesfois ceux qui font tués auec de l’eau froide font les meilleurs. Cette graine eft au refte adultérée par les marchands en plufieurs fortes, car il s’en trouue de quatre elpeces; vne qui donne vne couleur qui ne vaut rien, pource quelle eft lauuage & non cuîtiuee : l’autre qui eft plus noire, qui vient aufli làns 5 0 eftre cuîtiuee & de foi mefme : la troifieme de montagne qu’on appelle chkhimeque, qui eft aufli de petite valeur j toutes lelquelles ils meflent auec îa^quatrieme elpece, qui eft cuîtiuee & eftimee la meilleure. ‘Tlaxcaia donne la meilleure de beaucoup , de laquelle les naturels font vne fort belle teinture ('dont les Peintres fo feruent hc les femmes à fe farder la face J en cette façon, ils la pilent & trempent dans de la déco- dion de l’arbre T ezbuafly y adiouftant vnpeu d’alun, & quand le tout eft raflis, ils le raflèmblent en tablettes que lesEfpagnols nomment Gram en Pan. Ffançoû Ximenes eferit que cette plante fuë aufli vne gomme , qui tempere la chaleur des reins & l’ar- deur de l’vrine : Et que le fuc d’icelle ou l’eau qu’on en extraid eft vn admirable reme- decontrefesfieburespeftilentesSe biiieufes. 40 C H A P. IV- De quelques fleurs O* herbes y animaux pierres precieujès de la Nouuelle Efpagne. Le s Naturels habitans de la Nouuelle EJpagnet fo deledent fiir toutes autres na-' tions aux fleurs ,& d’icelles compofontdés couronnes & bouquets fort genti- ment, qu’ils nomment Suchiles s’y trouue-il vne diuerfitéprefque infinie de fort belles fleurs, quelques-vnesdefquellesfurpaflènt les autres en douceur d’o- deur,notamment celles que porte vn arbre, lequelon nomme Ploripondio ylç.opxel ne Jo porte au refte nuis fruids 5 elles font yn peu plus grandes que les lis , pendues en la fa^ çon des cloches, fort blanches,du milieu defquelles fortent des filets à la façon des lis t elles rendent vne fort bonne odeur, principalement à lafraifeheur du matin yfarbre fleurir toute l’annee fans intermiflion. Et celles que porte Vzxkn^XuchmacazÆlioxi Huemacdzîli:,àitQS des Eipagnols Flor de la oreia , dp leur figure , car elles font compo- fees de fueilles pourprées au dedans , au dehors verdes & dilpofoes en forte qu’elles reprefontent OCCIDENTALES. LIVRE V «prcfcntenc vne oreille; elles font dVnc fort douee & agréable odeur. Comme auffi celles y,e porte arbre r./Wte/.le nombril defquelles?eprefente vncœur eTcdn aepluûeiirsfueilles blanches &au dedans entrerouo-es, Grandes olnrincrt^c « fent fort bon:.efquelles ils edimentfurto„tes,tant^^^^^^^^^^^ pour leurs remarquables quahtés contre les affeaions de matrice Et pouthTn ceT les que porte larbre CaratoÆr/, ^car ce feroit trop longde les reciter toutes j oui font grandes, belles &: dvne fort douce odeur; quelques-vnes defquelles font pour près cramo.fi, d autres blanches & de plufieurs autres couleurs; il vient d’icellervn to d^cSfporetS^^^^^^ poulpedefquelles ferten Me- parleroispasence lieu,neftoit que noftre Autheùr Ximenesy a remarqué ^elque chofe qui mente d'eftre cognu. Or il efcritque cette fleur eLppellee de! ^cw^«i»r,Cc®pMA:«te/pourlamultitudedesfueilles.&desEfpagnols de las Indtas, &qu on l’eftime faucement eftre l'Orhone ou Fleur de^lupiter des An ciensi la forme en eft maintenant allés cognuc de tous ; plufieurs luiamibuent des qualités & vertus veneneufes : lui au contraire de falubres ; lefquelles il efcrit ainfi. Le fuc des fueilles delafleur, ouïes fueillesmefmespilees & beues auec vin ou eau euerif zo fentl eftomach réfrigéré; elles prouoquent IVrine.les mois & fueurs appliquées au dehors auantl accès appaiftnt les rigueurs des fiebures intermittentes fSflipcnt les vents ; exitent Venus, guerilfent la corruption d'humeurs venue de caufe froicfe.ou de 'riîr!m |îh "if r ■ delbouchent les obftruaions ; relafchent les nerfs retirés ; gue- riffentl hydropifie;prifesaueceaufroide, prouoquent levomir; enfin e'eftvn admi- rableremede contre toutes affeaions froides, vuidant la caufe du mal parl'vrine ic ueu s. U y en a plufieurs efpeccs, mais la plus grande eft proprement appellee Cem- pdxochtltli de cette-cionfait dubaulme pour guérir les playes, la froiffant auec de ^ ^ àcs mefmes fleurs, iufqL qu’il foit confommé Î O P ^ relie, y méfiant apres vn peu de cire pour l’efpaiflîr en onguent; c’eft vil ^ hemorrhoides. Il ne ditticn df cette qualité veneneufe; & toutesfois il appert clairement qwDedmatss,Sc les autres auffi bien que ^«r«rparlentdvnemefme plante par toutes les citconftances d icelle. Quec^u! meT!!i,vl, 5 differente de cette-ci, qui porte des fueilles corn- ela cichoree erpmeufes,cientelees & rudes, noiraftre auprès du lieu d'où elles fortenc hnnrTn dVnepauIme, iaunes &qui finirent en fleurs, à la façon des f ^ P“ ^ bouillon eft amer,acpris enclyftere, lafehe le ventre, prouoquelVrine & appaife les douleurs du efternuenients , & fon fuc appliqué aux narines , fait fortir fle quelques herbes à caufe de leur nature & qualités non commu- ai Fr a vf celleqüe les Saunages nomment Tcumpatli & ^imihpatlh le laquelle il fe trouue quelques efpeces , mais la prindpa- eflde n ^ eftroites, rayees en long de certaines lignes fie tuyau eft de trois palmes de long,d oufortent par efpics certains grains femblables à l’orge^ aïs plus petits , qui ont vne puilfance fi bruflanté &cauftique, qu’ils font le mefme nA ^ gangrenés & malins vlceres, ou autant que le fubhme &le fer chaud. ' ° h] '''''' eft vn herbe volubile , ayant les fueilles fembla- emhr / P^'^^W'^es & efpailfes , elle monte le long des arbres - & les ^ft"''ftes,&quafi rondes, qui fcntcittk Bau/^ tiree au naturel ci-deflbus: t)eti><=>c r breuuage de Cacao / leur poulpe eft noire, pleine de l’eaiT n celles du pauotj on dit que deux dicelles trempees dans 1 eau, prouoquent piuliammentlVrine. S I Tiercement Tiercementdu chichimecaf^tli , qui a les fueilles longues & déliée , lé tuyau menu d'vne coudee de haut , faracine eft de forme & gtoiTeur dVnenoix, noire par dehors, blanche dedans, delaquelle fortvn fuc vifqueux : elle eft chaude&fe.cheauquatne- me degré. & d'vne grande efficace, d’où vient qu’on ne la prend qu auec grand danger; car eftlrt prife le poids d’vn fcrupule auec quelque liqueur . tant fraifche que feiche, i o - mais plus feurcment feiche.elle purge par haut & par bas toutes humeurs nuiiiues des Sauuages toutesfois compofentd’icelle & du CmzJk certains trochifques. vne dra- emedefquels on croit purger fort bien & fans danger. > , ■ ^ OuartemcntduAf««/* autres? En TR? toutes les places les plus reniar(|uables cjui le voyoyent anciennement tant es enuirons que dedans le lac mefme , chulula, pouuoit facilement obtenir le premier lieu, qui a efté autresfois vne grande ville, & prefque égalé à la Métropolitaine mefme j principale Seigneurie, apres la Republique de Tlaxcala^ào. O toute la Nouuelle Efp^gne , & où le principal temple de leur lùperftition Payenne & le plus ancien de tous eftoit érigé, elle eftoit au temps palTé grandement peuplee,baftie en vne plaine, contenant prefque vingt mille maifons, ( fans vn nombre infini dans les villages voifins, & qui eftoyent ci & là efparfes ; decoree de plufieurs temples auec leurs clochers, qu’on dit y auoir efté en aufli grand nombre que les iours de l’an, de for- te que comme l’on en a efcritjon y a tuèfurles autels & immolé aux Diables fix mille enfans de rvn& l’autre fexe chacun an. Il y atioitvn Gouuerneur efleu parles fuffra- ges du peuple, qui adminiftroitauec lîx des principaux & les Preftres tout ce qui eftoit neceflàire tant à la paix qu’à la guerre , tant dedans que dehors la ville, & n ’entrepre- noit rien qu’on n en euft premièrement délibéré & confulté religieufement leurs O idoles : qui eftoit caufe que cette ville eftoit appcllee par le refte du peuple de cette Prouince , Le domicile de tous les Dieux. C eftoit aulH vne ville fort marchande, où il s’ytrouuoit de diuerfes marchandifes que leshabitansaccommodoyent par vne fin- guliereinduftrie. Car fon terroir eft fort fertile en ,& la terre y produit les femences libéralement, & eft fournie abondamment de pafturages pour le beftail.Les naturels habitans eftoyent autant' les hommes que les femmes bien compofés de membres,de mœurs honneftcs &bien ciuihfés,& marchands fort entendus. Le com- mun peuple eftoit veftude Nequen,{ c’eft vne efpece de toile faite défibrés & filaments des fueilles de Henequen ) les plus riches de robeS de toille de coton,lefquelles ils pafle- mentoyent de diuerfes plumes ou de peaux de connin fort gentiment. 3 Tez.cuco meritoit le fécond lieu , qui eftoit vne fort grande bourgade, & autresfois deux fois aufii grande que Seuilk en Efpagne,fomptueufe en édifices, & magnifique en la commodité de Tes rues, elle eftoit aufli baftie en vn lieu plat fur le bord du lac falé ; toutesfois elle eftoit fournie en abondance d’eau douce & bonne à boire, laquelle ils faifoyent venir par des conduits d’eau des prochaines montagnes. Elle eft diftante de la ville fix lieues de chemin le long des riuages dulac,commedit Cortès. ^uitlauacA toute baftie dansl eaujalafaçonde^^’i?^^, qui eft caufe que lès Ef- pagnols l’âuoyentnomraeeF^»f^»^A,*elle eftenvnheu fort fain & riche en pefchede poiflbn:on y va par vn chemin paué de cailloux, qui a vingt piés de large, & longue de prefque d’vne lieue , elle eftoit anciennemetit habitée de prefque deux mille familles. 3 bourgade d enuiron dix mille maifons, eft la moitié dans le lac falé, le refte eft bafti fur le riuage d’icelui; ayant plufieurs eftangs d’eau douce, dans lefquels fè nourrift diuerfes fortes de poiffons: & vne fontaine fiir le chemin quimeneàlaMe- tropolitaine,enuironnee de beauxarbres,elle eft àcinqlieués de là ville, éc à fix de Tez- cuco ;oxi va d icelle a la ville parvn chemin aflés large, paué de cailloux , tellement droit,qu on voit le long d icehti la porte de Mexique, aufli’ toft qu’on a pafle vn petit deftour qui eft au commencement. A cofté de cette-ci il y auoit UMexicaltzingo , bourgade de dix mille maifons , baftie dans le lac mefme 5 & Cuyocm de fix mille maifons fur la riue du mefme lac, en vn lieu tort falubre,& en terroir fur tous autres fertile ^ plaifant: contenant 5 cinq cents maifons; Ces trois places eftoyent ornees de tours fort hautes, & de plu- fieurs temples,qui refplendiffoyentde telle forte, qu’on eut dit de loin qu’ils eftoyent d argent, maintenant les Efpagnols les ont réduits prefque tous en monafteres. Il fe trouue là grande abondance de fel , quin’eft toutesfois pas blanc , ni d’vn bon gouft auecles viandes, mais feulement propre à faler,Qnle cuift de la terre mefme, qui en tout ce voifinage eft aucunement fàlee & nitreufè : c’eft vn riche commerce, poiirce qu on le tranfporte en diuers quartiers. T 5 Guatitlm Ï50 DES CRÎPTION-DES INDES Guâütkn eft diftante de Mexique quatre lieues : T miaucâ de deux : Ezcapuzdco dVne du long le riuage du lac : T uuba en eft la plus proche de toutes. Suchimilco eft vn lieu remarquable, bafti dans le lac doux j à quatre lieues de la ville vers le Sud,& à deux de Cuyocan. ^eretavû eft vne bourgade de la Prouince de Xilotefec^ ( de laquelle nous auons parlé ci-deftus j il y a vne fontaine fort chaude, de laquelle l’eau quand elle fort de fa fource efchaude tout aulTi toft tout ce qu’elle'^ttouche,mais quand elle eft tiede elle cngraiffe d’vne cfmcrueillable façon lebeftail. On renomme vne autre fontaine dans la mefme Prouince, qui fourd quatre ans continus, & les quatre autres d’apres elle eft tarie,& derechef court comme auparauant : &: ce qui eft efmerueillablc, c’eft , qu elle i o iette fon eau chichement au temps de pluyes ,& quand le temps eft beau &;fec elle fourd abondamment. Il y a plufieurs mines d’argent en cette Prouince; & produit plufieursherbesfmgulieresenMedecine. Et pour la fin c’eft vne chofe remarquable qu’entre les bourgades de ^eretaro & de S. luan dans vne campagne,qui n’apas plus de neuf lieues delong & deux de large, il y paift plus de cent mille bœufs & vaches, deuxcents mille brebis, & dix mille cheuaux & autres beftes déchargé , tant elle eft abondante en pafture excellente. C H A P. VUE Acapulcô njïüé poTt Jùr la mer du Zud. • L’Archeves cHE^de Mexique a fes ports fur l’vne & l’autre mer, mais le plus célébré eft fur la mer du lequel eft appelle du nom delaProuince.<^f4- y^«/r,onpaftefurvn ponton : l’autre que les Efpagnols nomment de las BdfaSiOydX cotirtfort vifte & non moins que le rago,ç[VLon pafle fur des radeaux de grofles cannes lieesenfemble&mifes furdescourges,queles Sauuagesfirent à la nage: Latroifieme nommee de 5*. fr4w^^?,combien qu’elle foitlarge,neantmoins onia pafle àgué. Les voyageurs en tout ce chemin font mer ueilleuft ment tourmentés des moucherons que les Efpagnols nomment la morfure defquels eft fl veneneufe, queles hommes en meurent parfois. Auant que d arriuer a la ville, il faut pafler par le Mar- quifât del r^/A,qui donna le tiltre de Marquis ^Femando Cortès premier conquefteur J 0 de ces païs. lufques ici nous auons fuiui Texeira. Vn certain Anglois quifit le chemin l’an cio lo ni,ditque partant il trauerfavn païs non habité de trente lieues, & puis qu’il vint à ZumpangOiCqni eft vne bourgade des Indiens^ de laquelle nous auons parlé ci-deflus,; & delà à Cuermuaca.cpài eft vne bourgade fort renommee du Marquis del Falle, diftante de Mexique de treize lieues. En outre les Marchands de tiennent dans ce port quatre grands natures de charge, OCCIDENTALES. LIVRE V. vie charge, auec lefquels ils trafiquent aux IflesP/7/%»/m&auRoyaumedela5’/^^ viuifontdiftans d’icelui plus de deux mille lieues comme on dit: deux defquels par’ tcntlepliis rouuentaumoisde Mars chargées de marchandifes de LE urope,&: retour' lient au mois deluin de l’an fuiuant: leur trafic eft d’vn fi grand gain, qu’on eftimj communément qu’ils font profiter au décuplé en deux ans de temps le capital qu’ils y ont employé: car cesnauires quand ils retournent font chargés de fort riche mar- Spilberge de noftre nation entra dans ce port auec fon armee de mer l’an clolocxv, & encore que les Efpagnols en fuflentaduertis,neantmoins n’eftans pas bien difpofés : O pour fe defendre,il eut peu predre & piller la ville,de forte que plufieurs eftiment,qu’il fe contenta fimplement , fans efiayer les forces & le courage des ennemis, d’accorder auec le Gouuerneur, & ayant obtenu d’icelui des viduailles pour fes nauires de n’en- treprédie riend hoftile.ll efcritdans ionlournahqu’il y auoitlors dans le chafteau qui commande au port, dix fept pièces de fonte, quatre cents foldats en garnilon,ians plu- fieurs gentilhommes qui y auoyent accouru de toutes parts.&force appareil de guerre Et lors que l’armee Naual de Nafau moüilla i’anchre dans ce port l’an c I o I o c x x i v,’ les noftres remarquèrent, que la fortereife qui eft baftie proche de la ville, fur vue pointe de terre, auoit efté depuis peu fortifiée de nouueaux ouurages , & qu’on y auoic faitquatrebaftions,auecvnemurailIedepierre tout autour. ^ ,0 Au refte on dit que la ville a le plus fouuent faute de viures, car il les y faut apporter de loin, & quand il y eiva qu ils font conibmmés par ceux qui voyagent tous les ans en 1 Occidentjde forte que ce lieu n a rien de remarquable outre le port. C H A P. IX. ^igvejJîoK touchant les coujîumes anciennes Mexic^uains. IE s T I M E que ce ne fera point hors de propos , de faire mention en ce lieu des anciennes mœurs des de la forme de leur République, de l’origine & fuccefïion de leurs Rois,& enfin des chofes qui s yfontpaflees : puis que cette na- 0 tion fe prefente la première en noftre defeription de 1 Amérique, qui ait eu quelque forme de police. Les Efpagnols efcriuent,que les Mexiqmim auoyent vn fingulier foin à faire in- ftruireleur ieunefîe, ( ce qui eft le fondement de toute Republique ) ce qui fe voitaufïi par vnliure contenant des peintures mal faites & à leurmode,lequelle Dode perfon- nage Samuel Pur chas Kn^ois a depuis peu mis en lumière en fon œuure laborieufe. Quatre iours apres que 1 enfant eftoic ne, la fàge femme le portoit tout nud dans la court du logis qui eftoit ionchee de ionc, fi c’eftoit vn mafie auec les inftruments dont le pere auoit accouftume de gaigner fa vie, fi vne fille auec le fufeau, balai & autres vtenfiles ; au milieu il y auoit vn vaifîeau plein d’eau,dans lequel elle le lauoit, vis à vis O trois enfans quiregardoyent raftaire,aufquels on feruoit de la boüillie de cJKays & lé- gumes, ( qu’ils nommoyent ; lefquels apres eftre rafîafiés impofbyent nom à 1 enfant défia laue. Apres vingt iours les parents prefentoyent l’enfant au Preftre dans le temple qu ils appelloyent Calmacac, pour eftre employé aux ordres facrés ayant at- teint l’aage de quatorze ou quinze ans : ou aux Chefs de guerre & Magiftrats , qu’ils' nommoyent Teachauch ou ‘Telpuchtlato,2.\xÇc^ç\s ils le dedioyent,pour eftre inftruit en 1 Art militaire : Cependant comme il croifloit , ils lui donnoyent au logis les viandes félon 1 aage, a 1 aage de trois ans ils lui donnoyent demi pain,à quatre ans vn pain en- tier,depuis fix ans iufques a treize vn pain & demi, puis apres deux : ils lui apprenoyent a faire quelque chofe félon fa portee,comme a cinq ans à faire de légers ouurages, à fix a balayer la place publique & glaner : les filles à manier le fufeau & ainfi confequem- ment : enfin s ils eftoyent pareffeux ou opiniaftres , ils les eftonnoyent premièrement par menaces, leur mettant deuant les yeux des efpines de Maguey d’puis ils les cha- ftioyent, les picquans des mefines efpines , ou les batans de houffines, ou bien en les tourmentant mifèrablement auec de la fumee ^’^x/,qu’ils leurs mettoyent fous le nés. Ils celebroyent leurs mariages légitimés auec ces ceremonies : La guide de la mariee qu ils appelloyent portant i’efpoufè fur fon dos , accompagnée de quatre femmes ïji DESCRIPTION. DES INDES femmès qui lui efclairoyent deuant auec des torches de pin, elle la mettoit auant So- - ieil leué fur le fueil de la porte des parents de Telpoux, qui l’ayant receuë la menoyenc dans la maifon, &lafIioyent delTusvnematte jqui eftoit eftenduë à terre vis à vis de refpoux, &: les lioyeiit enfemble tous deux par le pan de leur robe en prefence de deux vieillards & autant de matrones qui y affiftoyent alTis d’vn çofté & d’autre comme tef- moins:apres ils faifoyent bruller du Copal à leursDieux,& les mariés foupoyent enfcm- ble,puis apres le refte des conuiés,le fouper acheué, ils les deflioyent & prononçoyent les loix de mariage. Gomara adioufte qu’ils ne couchoyent point enfemble les quatre premiers ioiirs, mais qu’ils auoyent couftume de fe rafer &: fe faire tirer du làng qu’ils olFroyeiit aux Dieux du mariage, enfin la quatrième nuiétlesPreftrespreparoyent le lo îid nuptial, & le confacroyent auec quelques ceremonies, & apres que les mariés l’a-- uoy ent parfumé, ils couchoyent enfemble : le lendemain ils ofFroypnt à leurs Dieux au temple le Iid , leurs veftements & principalement le fang qu’ils auoyent tiré, là ils eftoyent bénits par les Preftres & eftoyent arroufés d’eau nette , quatre fois à l’hon- neur de TlUlloc-^ que les Efpagnols difent refpondre à Neptune^ & quatre fois à l’hon- neur de qui eftoit y Or ceux qui eftoyentvoüésaux ordres facrés, eftoyent dédiés aux eftoyent premièrement contraints de balier le temple, porter du boisj ou feruir aux plus vieux à faire les chofes neceftaires pour le feruice de leurs Idoles, que s’ils eftoyent parefteux ou obftinés , ils eftoyent punis de griefs tourments : & ainfi ils eftoyent lo peu à peu auancés aux autres feruices plus honneftes . Ceux qui eftoyent dédiés pour eftre inftruits en la milice , ils portoyent les armes des "Tequinas , c’eft à dire fpeculateurs ou hommes renomnés parla guerre, & les feruoyent en autres chofes, iufques à ce qu’eux mefmes apres auoir pris ou tué vn de leurs ennemis fulfent entoilés pourfoldats, Autempspafte legouuernement politique des Mexiquains Arijlocratic yipnïs apres il fut transféré àvn feul, lequel n’y venoit pas par fucceffion ou hérédité, mais par vne libre eledion, premièrement de tout le peuple,puis apres par celle des princi- paux : car au temps de Iz>coatl, on dit que quatre Eledeurs de la Noblefte de Mexique ôt deux Rois alliés, fçauoir<5/^ Tezeuco &Lde Tacuba eftifoyent le Roy de Mexique. Ils jo l’eflifoyeiit le plus fouuent ieune, comme eftant plus propre à porter la fatigue de la guerre. Ilyauoit toufiours vne finguli-ereobeïflaiice des fuietsenuers leurs Rois^ Au commencement la famille des Rois eftoitmediocre,mais auec l’Empire & lesrichef- ûs s’augmentèrent aiiifi la fumptuofité& magnificence, principalement fous ma premier. Apres les Rois les Eledeurs eftoyent les principaux en dignité & autorité, lefquels ils appelloyent T kcohecalcath c’eft à dire Princes des dards. Proche de ceux- ci en dignité eftoyent les Tlacatecatl,cc^ à dire tueurs d'hommes. Ceux de la troifie- me dignité eftoyent nommés BzuahuacatliyCoSk. à dire relpandeurs de fang : enfin ceux du quatrième rang s’a ppelloyent c’eft à direSeigneurs delà Maifon noi- re,àcaufed’vn certain onguent noir,dont auoyent couftume de s’oindre ces Preftres. 40 LeConfeilduRoi eftoitcompoféde ces quatre ordres, & difficilement appelloit-on quelqu’vn àla Royauté s’il n’eftoit del’vne d’icelles. Il y auoit plufieurs autres moindres Officiers, d’entre lefquels il y en auoijt qu’ils nommoyentTfé?//,qui eftoyent comme Preuofts de la ville : d’autres qu’on appelloit Mixcoatlayotlac iEzguagacatlyAcatlyacapanecatl &cTequixquinahuacatl y qui eftoyent comme luges ordinaires, vidoyent les procès du peuple & adminiftroyent la iuftice. Ils appelloyent leurs Meflagers &Sergens T eputchli,\cC<\nch ils eftifoyent prefque tou- fiours ieunes & non mariés, afin qu’ils fuftent plus propres àlarcourfe 5 car ils rappor- toyent au Roi des Prouinces les plus eftoignees, peint fur de la toille, ce qu’ils ne pou- uoyent exprimer par leurs caraéleres. Or en chacune Prouince il y auoit des Gou- Jo uerneurs du Roi, nommés vuIgairementPé’//4f i endans giaces a leurs Dieux 3 de ce qu’ils auoyent prolongé encore ce nouneaufiecle au monde: ils fe fournilîbyent de nouueaux vaif- léaux & de nouueaux meublesj&alloyent quérir du feunouueau aux Preftres. Enfin ils diftinguoyent pour l’aduenir ce fiecle de cinquante deux ans en cette fa- 0 çon ; apres auoir fait vn cercle, ils pcignoyent vn Soleil au centre d’iceiui, duqiiei il ti- royent quatre lignes à la circonférence, qui diuifoyent le monde en quatre parties diftinguees de leurs couleurs, de verd, de bleu, de rouge & de brun, qui eftoyeht cha- cunes diuifees à la circonférence en treize interualles diftindes comme delfus de leurs marques . a chacune annee au dehors du cercle ils repreientoyentpar vne pein- ture à la groife mode, ce qui y eftoit aduenu de mémorable , de en cette maniéré ils fai- foyent paifer à leurs fucceffeurs la mémoire des chofes paffees. C H A P. XL Origme des Mexiquains d de leuh Princes félon Gomarâ. ' Le s Hiftoires Mexicanes racontent f dit Gontara ) c^xxc les Chichitnicas viûdttht les prerriiers en ces pais là , l’an de Chrife félon nollre conte loc xxi. Le pre- mier dont ils font mention s ’appelloitr^?/?y>!?^^C OCCIDENTALES. LIVRE V. îcs principaux de Tez,cuco & de CidhuAcm, ils leur racontent auec fàn^lots le cruel afte des Tepaneciuâins.toxxi^sîoïs qu’ils ne leur demandoyentpas fecoiirs dépens à Icncôtre d’eux mais rculement qu’ils les prioycnt de permettre que le commei ce leur demeu rail libre auecleurs luiets & qu’ils prendroyent le foin du refte, ce qu’ayans obtenu^ ils les requiientd aflilleral eleftiond vnnouueauRoi./^;f<74//jfîlsd’viie efolaueôc^’^ au refte dVne vaillance & prudence finguliere, fut efleu au grand applaudit fcmentde tous, principalement des Tezcuqmms^lc Roi defquels auoitefpoufé la fœur. Le premier confeil tenu, fut touchant la guerre aux Tepanequaim ,mais le commun peuple redoutant le nombre & les armes des ennemis, ( enquoi ils fçauoyent qu’ils ocftoyentleurfuperieurs, commencèrent de prier le Roi, de préférer la paix à la guerre, &: qu ils aimoyentmieux ternir anxTepanc(^mmscommt deuât,&d’eftre au nombre de leurs colonies, que de tomber en vne ruine du tout alTeuree. Le Roi qui fembloit auoir cite dmeu par les prières du commun, commanda que les Preftres s’en allaient àuec Icurldole vere le Koi d Azcapucalco s’humilier à lui: mais TlacaellelconÇm du Roi, vaillant leune homme, arrefta la troupe, & par vne magnifique harangue deftourna le Roi & les grands de çornmettre vne chofe fi deshonnefte, &les efmeut de telle forte que le Roi fe repentant ÿfon entreprifoyprit vne refolution plus falutaire pour la Re- publique;il entreprit aufli lui mefmel’ambaflàde vers les T epaneqtmm,non fans grand danger, par laquelle il leur dénonça que les Mexiquains aimoyentmieux la paix, pour- 0 lieu qu elîç fuft lufte, que la guerre, & qu’ils declaralTent ce qu’ils en auoyent efleu • & pourcequillembloyent aimer mieux la guerre, il le la leur déclara, brayant tué quel- ques-vns des ennemis,il s’en retourna fauue. Or toutes chofes eftant deuëment prepa- reespOLirla guerre, il fut accordé entre la populace qui refufoit la guerre & la noblef- fe,que fi les nobles remportoyentlaviéî;oire,lepeuple leur feroit à touflours tributai- re,que s il aduenoit du contraire, que les nobles fe donneroyentau peuple pour eftre tues & immoles. "TUcaellel fut commandé de conduire l’armee, laquelle ildiuifàen deux parties, & fe porta fi vaillamment,qu’ayaht fait vne grande boucherie des Tepane- ' quamSiilpntleur ville d'Acapuza/co au premier alTautjCouurantla place de toutes parts de corps morts : la ville fut pillee & fes riches defpoüilles partagées entre les vain- ) queurs : & pour la fin, les chariips de l’ennemi furent diftribués par tefte à la noblelTe, a laquelle le peuple de Mexique fut rendu fuiet comme il auoit efté accordé. Par apres on attaqua les Cuyoquams, qui fans s’eftonnerdu malheur^’^^;f^*;ÿ^4/c^>, auoyent ofé auec melpris commettre hoftilite a 1 encontre des Mexiquaim, qui furent Vaincus par la vaillance du mefine Tldcaedelfla ville de Cuyocan prife & pillee,ceux qui refterent delà tuerie furent pris à merci & rendus tributaires. La mefme infortune enueloppa izs Sucmmilques,mais on procéda plusdoucementauec eux, caron laiflTaleur ville en- tière, feulement on les condamna de pauer de cailloux le chemin qui va à la ville de Mextqu^ afin que le commerce fe peut plus facilement exercer entre ces deux villes. es habitans de Cuitlauaca ville baftie dans le lacmefme,fe fians fur lanauigation en » laquelle ils eftoyent puiflTans , croyans eftre pareils ou mefmes plus forts que les Mexi- ^«^mpenfoyentafairela guerre, ce que le Roi/^sf<7^^/ayantfentit,ilfepreparoitpour enuoyer vne groflé armee contre eux, mais TlacaelleJ fans fe feruir d Vn fi grand appa- reil,partant auec la feule ieuneffe de Mexique, il les fatigua de telle forte , qu’ils fe dL- nerent eux & leurs biens en fa puiffance. Cette vidoire & la renommee de tant de chofes fl heureufementexecutees,eftonnatous leurs voifins & notamment ceux de Tezcuco ,la^rn^nce defquels eftoit grandement renommee.-par âinfiilsfefoubfmi- rentpar Ambaffadeurs enuoyés pour cet effeft à l’Empire àé Mexique. Izcodtlmonrnt ^Y^^'^^^egne douze ans^ auquel fut fuhrogéopfutezuma, efleu en vne grande afTembleè couronne auec plus grande pompe qu’on n auoit fait auparauant. Il s’eftoit défia c a 1 vne couftume que le Roi efleu enleuoit des ennemis vn certain nombre de pri- ionniers,pour eftr^e cruellement immolés à leur Démon àlafeftédefon couronne- ment. ut pris de la Prouince de c/pa/eû,toutesfois elle ne fut pas domtee poür lors, m fort belliqueux. Or il arriuapeu apres vne chofe, fort emorabie,c eft que les Chdcenfes ayant pris en vn combat le frere du Roi de Mexique, ^^hoyent de 1 eftabhr pour leur Roi ,'lui feignant d’en eftre contant, il commanda rij^ervn.poteau&dy dreffer vn theatre, comme s’il eut voiilu d’iceiui' leur faire vne , harangue .ï^o DES CRÎPTION DES INDES haj:aiic^ue,mais comme il fut monté, apres auoir par vn bref difcours affeuré' les fiens de la ferme fidelité qu’ilportoità fon pars &àft)n freredlfe précipita du haut en bas, & ■ mourut cruellement : Les Chdcenfes abhorrans vn fi cruel afte, mirent cruellement en pièces le refte des prifonniers. Le Roi de Mexique apres ces chofes s’en alla à l’en- contre des Châlcenfes auec vne grofle armee,' & les ayant vaincus , il domta auffi les autres nations voifines iufques àl’vne & àl’autre mer , & les adioignit à l’Empire de j^fxi^^^jptincipalement par la vaillance de T lAcâellel, Ils trouuerent bon de n atten- ter rien a l’encontre des Tlafcâltequdns ^ de peur qu’il ne reftaft aucune occafion de guerre pour excercerla ieuneffe.ou aucun lieu d’où ils peuffent enleuer desho- fties pour immoler à leurs Dieux. De maniéré que la grandeur de l’Empire de r “■ j\d.exîque eft finis doute deuè" principalement a ce Roi & a fon Generaldarmee7^/<ï- caellel. Durant fon régné ce renommé temple de Vitz.iliputz.li & autres édifices pu- blics furent baftis d’vne magnificence barbare. Enfin Motezuma mourut le vingt hui- aieme an de fon régné j & comme les Eledcurs euffent elleu tout d Vri accord TUcacU Mil refufa conftamment cette dignité , & voulut qu’on fubrogeaft au lieu de fon pere i:\zocic, combien que fort ieune & nullement capable d’vne telle charge: Mais les Me- xiquains eftans.ennuyés de la lafcheté de ceftui-ci , ils l’empoifonnerent le quatrième an de fon reo-ne. Son frere^x^y^r^ lui fucceda plus digne de la Royauté: mourut fort%ieil, auquel lé Roi, les grands & tout le peuple firent des funérailles ma- gnifiques comme il mcritoit. Or le Roi auant qu eftre couronné s’en alla én la Pro* i uince de ^ tua grand nornbred en- nemis, prit leur ville, &gafta tout le pais iniques a CuAtulcoV port pour leiourd hui fort cognu fur la mer Pacifique) de'forte qu’il s’en retourna auec vn grand nombre de pri- fonniers pour triompher & prendre la couronne du Royaume auec grande folennité. ’ . • ][iJomtaauffileshabitansder/4?^^»M,combienquiisfufientdelamefmenation,- niais ils auoyentefté depuis la première feparationtoufioursdifcordans,ayantvaincu leur Roi en combat, & apres auoir efté annobli de plufieurs autres vidoires , il mourut l’onzieme an de fon régné. Ils efleurent en fon lieu du confentement de tous Autzoh lequel s’en alla en ^auxutitUn Ptouince fort riche, & qui eft encore pour le iourd’hui entre les plus renommées de \%Nouuelle Efpagne, & fit vn carnage fort grand de fes en- 3 nemis ,& il s’en retourna auecvn grand nombre de prifonniers dans la ville pour y prendre les aufpices du Royaume. On renomme principalement la libéralité &: ma- gnificence de ce Roi; à qui plufieurs édifices plublics, & les aqueduqs grandement neceftaires, conduits à^Guyocan à la ville, font attribués dans les Annales de Mexique, marquées de rudes peintures , &: qui font conferuees en la Bibliothèque du Vatica, comme efcrit Acofia. • r er , tt Ce Roi mourut l’an onzième de fon règne , & eut pour fucceileur Mutezuma il, en Tan quinzième duquel, & de la naififance de Chrift cIdIdxviii Hernanâo Cortès tra premièrement en ces pais. Nous auons traité ces chofes briefuement , ielquelles le Ledeur curieux pourra voir amplement deferites dans Acofia au liure v ii de fon Hi- 1 ftoire Naturelle Morale. C H A P. XIII. SucceJJlon des Koù de filon leurs Annales feintes, SAmvËl Pvrchas Anglois tres-diîigent rechercheur des affaires des Indes, donna és ans precedents, dans fon riche threfor des chofos eftranges I Hiftoire de depuis le Roi T^/^Mou depuis noftreannee cio ccc xxiiiufques a \ la mort du dernier Mutezuma itixee il a ia long temps par les Efpagnols des Annales peintes des & annotées, & par lui traduite en Anglois ; duquel nous auons ' trouué bonde tirer briefuement la fuite des Rois dccMexique, les ans de leur régné, & les chofes paffees ; encores qu’il différé grandement des relations precedentes corn.- me nous ferons voir bien toft. Or en ces Annales les années font peintes par leurs claffes de treize ans en marge, félon les marques que nous auons fait voir, dans 1 efpacc du dedans le pourtrait premièrement du Roi auec les enfeignes qui refpondent a fon ^ nom,& puis deuanclui fes armes, la rondaefie & les fléchés ; enfin les villes qu il a prifes y - OCCIDENTiALES. LIVRE V. autc leurs enfeigncs.quirerponclentauffiauecIeurnom.Aupres des marques delcurs treize anson voit vue fois du deux leuraiide iîecle.qui efc de cinquante & deux ans, rcprcfcnté par cette note particulière, comme en l’an vingt huitième du réglée dcTeuch, & au feptieme de celui de HuiTllihuit , &Z au cinquième Ê' ^ ^ àcL^Iutel^uma le dernier, ie croi qu’on la oublié es autres, combien que rAutlieurEfpagnolqui a expliqué ces Annales femblen’auoirpas igno- ré ce que fignifioit cette marque , fçauoir cette annee qui leur eftoitfi formidable, pource qu’ils auoyent appris de leurs maieurs, que cet an feculicr reco*m- jneiiçant, le plusfoulient eftoit remarqué de quelque grand defaftre, comme d’inon- 0 dation ou de tempeftes,ou bien d incurdons de leurs ennemis ; ou enfin comme nous auons dit ci-deflus,quela fin du monde deuoit en cet an aduenir. L ande Chrift cio ccc 'k.'kii\cs Mexii^uaifîs commencèrent à fèplacerau lieuoù ils deuoyent baftir leur ville J qui cftappellee maintenant pjource qu’elle eftoit regie par fix Gouuerneurs,ils efteurent r£>«f/;poureftre par deftlis lés au- tres ; Ceftui-ci gouuerna cinquante & vnan,&adioignit àfon Royaume Culhua- can & Tenyatican, cl 3 ccc L XXII I fuccedao^f4z^4r/>?V^, qui régna vingt &vn an; il adioignit à l’Em- pire de Q cio ccc '^ciY Hiii'^lihuitl ^\s d Acawnpich {ÀicçQfAAïit à fon pere, régna vingt&vn. an; ilfubiugua ToltitlAn^ ,^yyAu7pitlAtP,châ.lc0iX XAltocâU'i Otumpiin-jAcol-' ma,m & T ezcuco. cio CCCQXV ChmalpupucaÇwhio^c^fon pereauRoyaume,regnadixans,&adioi- gnit à l’Empire & retint les cWiT^zzy^rqui fe rebelloyent. cio ccccxxv fils z/^^riZz^^y^zV/^fuccedant a ftm frere, régna treize ans, & ad- ioignit au Royaume de Mexiiptiei K^z.capit'^lco^ CoyndcdniTeocAlhuyacan', Guagua- caniTlacopanjAtlahuyacmtÂfixcoacy i^uauximalpan, ,^uüuhtitUn, T upauy Acolhua-- camy Mizquic, CmtUhuacy Xuocinuitcopuy ^AutUtoare, HukiUpan, ^aumhmcy CuecaUîîy Cagualpany I&tepec, Xuchtepecy Toalan & Tepeo^uamlco ; rendit tributaire le 0 Seigneur de reprima qui fe, vouloir rebdler.-,, / cio cccc XXXVIII fucceda Guegue^ Adote’i^^mA , fils de Huiz^ilihuitl {typXxoj^iiz. vin^c neuf ans . ilfubiugua CoyAxtlAhuACAny2\dâtnAlhuâxtepcc,’T€fj'â,ucff.y ‘Tcteuch'tppüss^çjéi* conquiAuhco,X€utepeCyTotolApAnyChAlcOy,^piAunAhuACyAtlatlAncfiAyHttA;xîepeÇyTAu};-rt tepecyTepuz>tUny TtpAtz^cincOy TACApichtlA:$, ToaltepecyTlAchcû^J:lAlcûcAuhtitlan,ÿ'^e~ pecpiiacmlcOy <^uyanteopAnyChonîAlcoAtlAn’yHuichipi.chtlAn, At.otomlco, AxoeppA^^'^fu- lAn,Xilotepecy Tz^q^uincuitlapilco yTlApAcoyany ÇhApolixit.lAn > 'Xlaiauchquïîep/ci"CHh<' Uxtlan^ .^Aiihtocheo. ' , , cio cccc Lxvii AxAyACAci, fils de Tecozomoeliqueto nepueu-de Tz>coait fùcceda, Ô5 régna douze ans, &adioignoitplufîeurs villes à & prefta tellement 0 qmhmx Seigneur de T ktelulco qui s’èftoit rebellé, qu’il fe précipita dm'iiaut 4u temple. . ^ 'f' . ‘ T • ^ ---v cio cccc Lxxix TzrfZrzrÆtez fucceda à ion pere au Royaumè, & régna cînqans,ii adioignit à l’Empire à-cMexique <\\^^lOl^QyiV^Q^yTonAhymog^i&fiyAnpToxifo,Bg$Ur, peCyZilAnyTecaxicyTulucAnyJAncmtUn, XlApAn, At.ez,cAhuAçany MapAtUny Xockiyjçf- lanyTemapAchcOyEcAtlyquapocheOyMiq^UAtlAn. , ' cio cccc LXXXIV Ahuczozîn. fut fubrogé à fon frere& régna feize ans, &:açqEit à 1 Empire Mexique quarante & cinq villes que nous obmettons ici , de peur dennuyerleLeaeurparlamultitudedecesnoms Sauuages.' cl 0 1 0 I I MotezumA fils d’AxAyACAci fu cceda au Royaume, &; mourut l’an dix huitième O de fon régné, auantlavenuedesEfpagnols, ilauoitadioint à ion. Royaume qua- rante &quatre villes: Or l’an dix feptieme de fon régné OzZÉ’jf dit f Interprété J SL\:n\jL2Le,ïi\2.1Slpuuelle EJpAgne. , Ces chofes font félon 1 interprétation dés Annales peintes , nous auons vn peu corrige le conte de leurs ans , qui eftoit aucunement confus , &: ne quadroit pas aux années des régnés qui font attribuées & piines à chaque Roi,; combien quai ' ne s accorde pas encore bien auec les narrations precedentes des autres. 11 appert X par description DES INDES par les Hiftoircs des Elpagnols &c par Ije r9,pport d Hernando Cortès mefme j cju il en- tra preniiereiTient en la lo xviiijqueficefucl an quinzième du régné de MutezumA II, comme efcric Acofta y le commencement de Ton règne tomba en l’an cio lo iii , comme GomûrA dit, ce qui ne différé pas beaucoup) de i noffre conte , car il mourut Lan cio lo xx, & en cette forte il régna dix ]iui<5tans î tous s’accordent affés bien de ces chofes. Mais il y a vne grande variété entre l’Hi- ftoire des Rois de Mexique deferite par Acofia., celle quHerrera a fuiuie en Tes Dé- cades & celle qu on a tiree des Annales peintes , tant en la Genealogie des Rois, au nombre des ans de leur régné , qu’enfîn en la narration des chofes paffeesrnous au-ons trouué bon de faire voir en la table ci-deffous la différence du nombre des i ans , que chacun d’eux a régné. XLVI. Selon Gomara: Acamapch. VicilittiîL , Chimalpopoca, Izcoua. J MotezumA. La fille de MotezumA. AxAjacâ, T icozicA. Anhico. Selon Acofta : AcAmAfiBli. VitziloMtlu chimalpopocâ, TzcoaîL ' Cuegue MotezumA 'ïieozic. Axayaca. Autzol. Mutezuma. XL. XlII. XII. XXVIII. IV. XI. XI. Selon les Annales peintes. AcamApich. Hmzilihmtl. Chimalpupuca. Tzeoatei. G, MotezumA. AxayACAci. ‘Ticocicatzi. Ahuizozm. MutezimA. XXI. XXI. x.^ xiir. XXIX. XII. Y. XVI. -MotezumA. ^ C'eft affés parlé des affaires de Mexique, ittomnons maintenant à noffre fuiet. C H A P. XIV. t Dejcriftîon de la Trouince de Panuco elT des ^villes que les - , Uj^agnols y habitent ^our le iourd^huL A Prouince de PAnuco fitnee au Nord de la ville de Mexique s eff oit ancienne- 5 ” nient vn Gouuernementa part foi, mais maintenant elle eff coniointe au Dio- — *^cefe Archiepifcopal ; elle adclongcinquante lieues, &• prefqueautant delargc: fon terroir du coft^uelle attouche l’Archeuefché eff fort fertile , & muni de veines d"or ; mais du cofté' quelle tire vers la Floride,cMç. eff trifte & fterile , prefque par 1 efpa- ce de cinq cents' lieues comme on dit. Partant de la ville de on rencontre premièrement la Prouince Ayotuxtethn , autresfois habitée par vne grande nation & îbrt belliqueufe, laquelle Cortès fubiugua l’an cl d I xxn,& y mit à mort prefque tous les habitans: ChiU eff proche de celle-ci à cinq lieues de la mer, laquelle il domta auec grande difficulté, pour lavaillance des habitas U quantité de marais. Dans ces 1 roiun- Cès il taubit au temps paffé vn grand nombre de bourgades de Sauuages.dequelques- 4 vues defquelies les Efpagnols font mention, comme las Caxas , TxicuyAn, NAchAfAtAn, râquimti,ruzetecoMsh2bit^ns defquelies tucrentplufieurs Efpagnols qui y eftoyent venus aiiec FrâneifeoGArAyo : car il auoit obtenu du Roi pouuoir de fubiuguer la 1 ro- üiriéè'de pAmco, mais il defiff a fe voyant preuenu par Cortès. On trouue la aufli bien qifés autres Prouinces de L Amérique, vn certain bitume, duquel on fe fert au^ieu de poix pour empoifTcr les nauires. , . , d l/s EfpaRnols ont feulement pour le lourd hui trois colonies dans cette Prouince de Pmuco .• la principale defquelies s’appelle de ceux de la nanon Pkotoi. &des tlpa- mols iiSm Stemn âcl merto. auprès de Chila , & au delTus 1 emboucheure de a Huiefe àtrmmo .-baftie fous les abfpices A'Hermndc Cowci . apres qud eut deltruit a î plus grande partie des habitans, & eut btufléleurs.bourgadcs. Elieeft i ante e ligne vers le Nord vn peu plus de vingt trois degrés: a foixantc cinq lieims c avi de Mexiquevess leNord-eft.àhuia lieues de la mer fur la riue du fleuuefufdit.quilui ouurej’entreeàfon port: vis à vis de cette ville fur la riue Septentrionale de ariuiw { qui en cet endroit n’eft pas beaucoup large j les Efpagnols ont leurs Sa mes, corn aulTi à vne lieuë au deifus la villc.ee qui cil le principal reuenu des habitans d A OCCIDENTALES. LIVRE V. ' La Iccondc colonie eft nommée des Efpagnols i". lago de tes Vallès, baftie au dedans du pais, à vingt cinq lieues de Panuco vers TOueft. La troiiieme eft la ville de Lodouiede Tampice , fituee à liuift lieues de Panuco vers le Ndrd-eftjfur le riuage de la mer vulgairement nommee Golfo de Mexico. Or combien qu en toute cette fuite de cofte,il y ait plufieurs riuieres qui fbrtent en. incr,pluricurs bayes, où il y a quantité d’anchrages pour les nauircs,iurques àlariuiere deUsPalmas,towzcsi6\s elle eft fort peu cognuc,excepté la riuiere'de Panuco, à caufe de Ton port tort commode,mais mal afleuré à l’encontre de l’incertitude des vents. Mais afin que le fit, les lieux & lés chemins de ces régions foyent mieux cognusj 10 iaieftiméneftre point mal àproposd’inferer ici les obferuationsdedéux Ant^Iois. Le" premier eftoit Adillos Philippe, lequel ayant efte laifte a terre auec cent autres parle ÇX\zv\2}i\zïIeanHaukin\^2.Ti clolo lxyiii, apres auoirfubi plufieurs dangers,&'deL poüillédes Sauuages,arriua tVikn\PAnuco,i>L delà fut emmené prifonnier parles Efpa- gnols à la ville Métropolitaine de Mexique .Tl définit ce chemin de nouante lieuësj fçauoir à deux iours de chemin on vient au viWi^gQNoheten, dit de .S*. UMarie^u les Efpagnols,delà à Mejîitlan,ç}^i eft à quatorze lieues de la ville,habitee par trois cents Eipagnols,de laquelle il dit que le bourg de Puchuca eft à vne iournee de chemin, & les mines d argent de Puchuca zïiyi lieues du bourg vers leNord-oueft. L autre eft lean chilton,\Qc[ud deferit fon chemin en cette façon à Richard Hack- to luyt. Lan cio Id lxxii ( dit-il; eftant parti auec vn mien camarade Efpagnol, pour aller de la ville ào. {Mexique en la Prouince de Panuco : ayans cheminé trois iouis, nous arriuafmes a la ville de Mejlitlan , habitée feulement par douze Efpa- gnols, & par enuiron trente mille Sauuages , tant en la ville qu’és champs voifins; cette ville eft baftie fur vne montagnç releuee ; laquelle eft ceinte de toutes parts bocage , il y a plufieurs bourgades qui ioüiftenc dvn aïr fort fain , & les habitans d’icelles cultiuent vn terroir fertile , arroufé de plufieurs fontaines & torrens . Le chemin royal eft par tout bordé d’arbres frui- tiers ; fort beaux a voir j les habitans du païs nous aidoyent libéralement deviures partout ou nous allions. A enuiron vingt lieues delà on rencontre vne autre ville JO nommee Clanchinoitepec , appartenant à vn certain Gentilhomme Efpagnol , de la- quelle font fùiets enuiron quarante mille Saunages j il y a quelques Moines de l’or- dre de Sain^l{Muguftin , qui y demeurent en vn petit Conuent. Partant delà nous allafmes a Guaxutla , où habitent douze Efpagnols auec quelques Moines du mef- me ordre. Apres fiiit la Prouince de Guajleca fans’ montagnes ; où nous arriuafhies premiere- ment dans la bourgade de Tanculabo, habitée de certains Sâuuages qui fe teignent la peau de bleu; &ont les cheueux pendans iufques aux geiipux , qu’ils retroufîcnt o-en- timent en nœuds à la façon des femmes , eftans iiuds au refte , ils ne marchent iamais ans auoir leur arc & leurs fléchés, defquels ils fefçauent fortdextrementferuir: iîsne 40 trafiquent auec aücun or ni argent , mais auec du fel , lequel ils ont en grande eftime, comme eftantvn excellent remede a 1 encontre dés vers qui s’engendrent fous leurs léures. Delà ayant cheminé neuf iournees, nous arriuafimes à la ville de Tampice , la- quelle a vn port fur la mer & pour lors habitée comme ie peus remarquer ) de qua- rante Efpagnols, quatorze defquels furent enuirdnnés &:tués par des cruels Sauuages comme ils eftoyent occupés à amafler du fel.Or cette ville eft fituee fur lemboucheure mefme delariuiere de laquelle eft fort grande, & dans laquelle pourroyent monter iufques afoixante lieues haut des nauires de cinq cents tonneaux, files baffes qui font au deuant de fon cmboucheure ne les empefehoyent. Delà ayant marché quatorze lieué’s,nous arriuafmes à anciennement ville renommee & la demeu- jo m du G ouuerneur,mais pour le ioùrd’hui prefque deferte & où à peine demeurent dix Chreftiens & vn Preftre, pour les frequentes incurfions des Sauuages qui y font fort inhumains. Là ie tombai eh vne maladie à caufe de l’aïr mal fain , qui ihe tour- menta par quatorze iours , de forte que i’eftois contraint de me fubftenter d’eau &: de truiéts, qu’on alloit quérir à plus de fix lieues de la ville ; par ainfi eftant refolu de partir tiela,iè montai a cheual ayant vn Sauuage à coftépourmefouftenir, & me mis en che- min auec quelques autres de compagnee : le lendemain nous paflafines vne riuiere ; là X 2, eftant 1^4 DESCRIPTION DES INDES cftaht demeuré feui, comme mes coiupagnôns cftoyentvnpcu plus auahcé, icm’eC- carrai du chemin, & ayant erré prefque deux lieues par vn bois fans chemin,ic tombai entre les mains des Saunages, qui habitoyent dans certaines petites cabanes de paille-, qui accoururent à moi vingt en nombre armés d’arcs St de fléchés , qui m ayant ènlé- ué de chenal me menèrent à leur Roi: fans doute il m’euflent mangé s’ils n’euflentfau- fement eftimé qu’à caufe de la maigreur & crafle de mon corps , i’eftois malade de la verole; comme ils m’eurent donné de l’eau à boire, dans vn verre deVenifedoréau bord,ie m’efmerueillois d’où ils le pouuoyent auoitj i’appris d’vne fille de Mexique ef. claue,quiisauoyentenuoyee auprès de moi, que le Capitaine de ces Sauuages auoit furpris de nuid/il n’y auoit pas long temps,ia bourgade de Ska/lapa',rituee à trente lieue i o delà dans les montagnes , habitée par quelque peu de Chreftiens , St des Moines de S. Augupny&c raüoyentpillee S£ bruflee, & qu’ils enauoyent apporté entre autres def- poüilles ce verre.Comme i’eu efté quelques heures entre ces Sauuages, non fans grand frayeur, leur Roi me demanda fi ievoulois pourfuiure mon chemin , auquel iefis figne qu’ouï, il medonna trois guides qui marchoyentnudsdeuant moi auec leurs arcs & leurs fieches,5t me conduirent enuiron trois lieues, me remettant au droit chemin , ôt me donnant à entendre parfignesque ien’eftois plus gueres loin d’vnc ville de Chre- ftiens: C’eftoit S. lago de los vallesM\^^ dans vne plaine, ceinte d’vn rempart de terre, ha- bitée pour lors de vingt cinq Efpagnols , aufquels le Roi d’Efpagne a: concédé de tres- grandes pofleifionsjafin qu’ils tiennent en leur deuoir les Sauuages de ces lieux,ôt gar- io dent les limites du pais. Cette Prouince nourrift des mulets fort robuftes, que les Marchands mènent en diuerfes parties de l’Amérique. Là ie trouuai mes compa- gnons J les habitans de cette ville s’eftonnoyent grandement, de ce que i’auois peu efi chapper des mains de ces Sauuages, qui n’auoy ent iufques là pardonné à aucun Efpa- gnol,mais qu’ils tenoyent à grande gloire d’auoir arraché la moindre petite partie de peau auec des cheueux de leur ennemi, pour la porter en forme de médaillé ; apres quei eupaflelà dix huictiours pour recouurer ma fanté.fr^w^i? de Page y arriua,lequelcftoit enuoyé par ie Viceroi Henrico Manrique^ pour djcfcouurir vn nou- ueau chemin delà depuis la mer iüfques aux mines d’argent de Sacatecanas, { elles font diftantes de ce lieu enuiron çent &foixante lieues; afin qu’on y peut tranfporter auec j o moins de peine les marchandifes, ôt lailTer le chemin ordinaire de la ville de Mexique» qu’on ne peut faire rarement en moins de fix fepmaines. Ce Capitaine auec mes compagnons, moi ôt enuiron quatre cents foldats, ôt quelques cinq cents archers Sau- uages,qu’il auoit pris des bourgades de T anehipa ôt Tameclipa , prit fon chemin vers la grande riuiere, qu’on appelle de las PalmasAc^nd conftituë les limites cmtQ\z.Nouuelle Bfpagne Ôt les grandes Prouinces de la ,*delà fuiuant la riueduSud, montant trois iournees de chemin, apres auoir en vain cherché vn gué,il fit couper des arbres ôt les ioindre enfcmblepar radeaux, que nos Sauuages menèrent en nageant à l’autre cofté de la riuiere auec les foldats ôt bagage. Par apres ayant cheminé auec difficulté au trauers des bois fort efpais ôt par des montagnes hautes ôt rudes trois iours,nGus ar- 40 riuafraes auxmines d’argent de la Prouince de qui font eftimees les plus riches de toute l’Amerique Septentrionale , elles eftoyent pour lors habitées de trois cents Elpagnols. Mais nous en parlerons en fon lieu dauantage au liurc fuiuant. Ces ehofes fuffifont afles pour entendre la conftitution ôt le fit de la Prouince de Panuco i nous paflerons aux autres parties de h^Nouueüe Bfpagne. T L A S C A L A. C H A P. XV. ^efcrïpion ^mrde de hVromnee J® Avant que nous commencions la defoription de l’Euefohe de Tlajcala» com- me elle eftpour le iourd’hui, lieft neceflaire de reprendre vnpeu plus loin l’ancien eftat de cette Prouince. ... Par ainfi la Prouince de Blafeala eftoit anciennement grande de cinquante lieues, ôt la ville principale d’icelle eftoit baftie envn li^u extrêmement fort de nature, a * * ; enuiroii OCCIDENTALES. LIVRE V. cnuiron vingt degrés au Nord de la ligne, en vne montagne entrerompué dehaurs & rudes rochers, d ou elle futnommee Tlaxcala, qui fut du depuis changé en TUrcaU qui fignifie heu de pain, pour l’abondance de Mays & quantité de viures , que les coH* nés expofecs au Soleil & les humides vallees fournilToyent plantureufement • Or les naturels habitansdemeuroyent pour laplufpartés hautes montagnes & lieux froids pour plus grande feurete. Delà région de la ville qu’on nommoit Xicotencalt .il v a des montagnes qui s’eftendent de l Eft à l'Oueft , par le milieu defqueiies court la riuiereZ^W,qui palTant quelquesfois par delTus fes bords, emporte les femail- les & les maifons : II; y auoit dans les vallees vne bourgade hommee Ocoteuilco , où 0 les Efpagnols s eftoyent places au commencement, afin de pouuoir eftre plus commo- dément derendus de , qui commandoit à cette région &quieftoit leur grand ami : mais apres quils furent en repos , pour plus commodément inftruire les naturels es principes de la Religion Chteftienne.ils defeenditent au riuage de la riuie- rede2.W.(lequelnom fignifie eaugalleufe.pource que les enfans qui eftoyent laues en icelle, eftoyent le plus fouuentgalleux) où ils commencèrent à baftir des mai- fons a la taçon d’Efpagne. Les naturels du païsviuoyentanciennementerparts,ou bien dans quelques mai. fons coniomtes,entrecoupees de fentiers eftroits & tortus,la plufpart de leurs maifons eftoyent de gafons,quelques.vnes de bois,& peu de pierre, lefquelles eftoyent baftes, omaisouily auoit de fort grandes chambres &dVne façon eftrange.-auiourd’hui ils imitent la forme de baftir des Efpagnols. ’’ ° Le Gouuernemept de la ville & de la Prouinceeftoit Démocratie ou Ariftocratic: ils vfoyent du langage de Mexique & de celui des Otomü; pource qu’ils auoyent pris ce peuple fous leurs fauuegarde apres qu’il fe fut reuolté des Mexiquaim. Ces Otomles ou 0^,eft vne nation fort laborieufe, & addonnee plus que nulle autre au feruice des Idoles,inciuile, & du tout ignorante des Arts politiques, & qui oeut difficilement eftre imbue de la Religion Chreftienne,toutau contraire des qu on eftime fore dociles. Et combien que le tempérament de ces régions foit prefque toufiours tel, queplufieurs des habitans y aillent nuds, & ceux qui y fontveftus ne changent preL 3 que point pour 1 efte ou 1 hiuer j il y a neantmoins vn endroit qui y eft vn peu plus froid J qui décliné quelque peu plus vers le Nord,&encore qu’il n’ayepas plus de qua- tre lieues de large & dix de long, toutesfois il abonde en vne telle quantité de femen- ces & de fruiéts pour la finguliere fertilité de la terre, qu’il fuffit non feulement auxha- bitans,mais auffi a leurs voifms. Cet efpace de pais s’eftend de l’Eft à l’Oueft, & eft four- niedeplufieurs bourgades: vers le Nord elle eftcouuertedefort hautes montagnes, continues & comme difpofees exprès de rang ( les Efpagnols les nomment vulgaire- ment ) qui rafent les limites de cette Prouince prefque par tout, &fontles plus hautes montagnes de toute la NouueUe EJ^agne, & pource qu’on n’en fçait pas le bout, ils ont vne opinion ferme, qu’elles trauerfent d’vne fuite continue prefque tout ) ce nouueau mode; elles ont de large en plufieurs à peu près huid lieues, fl droites & ru- des qu on neles peut en façon quelconque habiter cnpIufieursendroits,iIs n’ontquc trois mois fampluyes,& le refte ils font noyés de nuees & pluyes continués, & font rarement efehauffes des rayons du Soleil. Ces montagnes diuifent le pais en régions temperees & fort chaudes , caries ayant paffés on defeend infenfiblement dans vne plaine fort haflee,laquelle s’eftend iufques à la mer ou au golfe de tj^exique. En outre ces montagnes font de toutes parts couuertes de diuers arbres, ô^nourriflent plu fieurs beltes auuages, comme hons,tigres , loups, adiues, ( ainfi nomment-ils les chiens fau- uages J grandement dommageables au beftaii & autres beftes fauuages incognués de pardeça, ferpens, viperes grands & petits 5 entre lefquels eft le plus remarquable celle que les Saunages nomment Teuchtlacozauhqum : François Ximenes le defpeint en cette lorte; C eft vne befte( dit-il) fort cruelle, laquelle les Efpagnols nomment vipere, pource que fa morfure eft mortelle ; longue de quatre palmes & quelquesfois de plus, moyennement grofte , la tefte de vipere,le ventre blanc tirant fur le àuue ; fes coftés lont couuerts de certaines efcailles blanches, qui font par interualle diftindes de li- fn A ^ ^ prefque noir, auec quelques rayes brunes qui finiftent os . 1 y en a plufieurs efpeces qui different feulement en couleur : elle fe remué X 3 fort i6ë description des INDES - fortVifte parles rochers & précipices, (pius ientémeiit en vn lieu vni ) d’ou vient que les Mexiquains lui ont donné vn nom du vent, l’appellans autant quelle a d’annees,autantiuitrouue-on dc fonnettes au bout de la queue:, qui fe fiiiücntrvne 1 autre à la façon des os de refpine du dosjfes yeux font petits &c noirs>elle a deux dents courbées enlamachoire haute, defqueiles elle communique fon venin,elle en a enco- re cinq autres à chaque mâchoire^ qui fe voyent aifement lors qu elle ouure la gueule ; ceux qui font blefles de ce ferpent meurent auec de grands tourmens en vingt quatre heures , car tout leur corps fe fend en petites creuafles. C^andàl eft fafchér, il ‘remue violemment fes fonnettes & les fait fonner fort haut; Il s’en trouvé' beaucoup déplus -o-rands que ceux que nous auons deferit dans la Prouince de Pamco. Les Sauuagcs i mano-ent fa chair, & leurs Médecins fe feruent de fes dents &: de fa graiffe en Médeci- ne ou pluftofl; en Chirurgie. On voit aulTi dans ces montagnes vn nombre infini d’oi- feaux,qui tirent vers le Nord par bandes en certaines faifons de fannee. lin y a point de doute que la terre ify couure des mines dargentj Ven qu’on y trouue coftimune- ment des autres metaux.Et il y avne grande abondance d’aiun-’& dechalcante.Les ar- bres defqucis ces monts font veftus,font des pins, des chefnes de diuerfes fortes»& d’au- tres qui rendent le Copal Liquidambar: on y recueille aufli en plufieurs endroits de la mais d’vn mauuais gouft &: qui n’eft pas propre à purger. C’eft vnechofe efmerueiliable qu’on trouue en ces montagnes plufiprs bourgades fort plaifantes, & fournies abondamment de tout ce qui eft neceflàire à ’ -1 àla viederhomme. Les monta- z gnes àzrlafcdâ, que les Efpagnols nomment pour leur eftenduë& admirable tempe- rature las P aides azulezdont ceintes de toutes parts de fort beaux Goftaux,qüi font cou- uertsiufqucs au fommet,où ily a de la terre, d’vne efpaiffeforeft de fort hauts ôtgros arbres , &: femblent quand on les contemple de loin , eftre teints d’vne belle couleur bleue : de laquelle, comme nous auons dit ci-deflus, ils ont receu leur nom des Efpa- gnols ; lefquels appellent les autres montagnes la Sierra de rldfcala,fo\iïCC qu’ils enfer- ment pour la plufpart les limites de cette Prouince.lls ont de circuit dix huid lieues, & iiourrilîent plufieurs belles fauuages,&: mefmes des taureaux & des vaches , lefquelles belles y ayanseftéraenees par les Efpagnols, fe font àfucceftion de temps rendues fau- uao-es. De ces montagnes procèdent tous les torrens & marais de cette Prouince, 1 comme aufli des fontaines d’eaux fort faines :& au temps des pluyes , qui durent du commencemet d’Auril iniques a la fin d Oftobre, toutes les nuees & vents delcendcnt de ces montages. Or la riuiere Zahuatl ne produit point de poiiron,rans doute pour la -vitefiTe de fon cours & frequentes catarades. Etlelacproche de la bourgade de Topoy- anco , large d’vne lieue & demie, n’engendre aucun poilTon , mais vne forte de lézards noirs,les plus grands defquels n excédent pas vne palme de long, qui font bons à man- ger & d Vn fl bon gouft, que les Sauuages les ont en grande eftime. Ce lac remarqua- ble eft habité des Sauuages , qui y poflTedent des champs fort fertiles, & plufieurs ar- bres fruidiers & grande quantité de CochinilleA^ laquelle on apporte en la ville de 'TlafcalatovLS les ans pour plus de deux cents mille ducats : car comme nous auons dit ' chdeflTus, on recueille en cette Prouince la plus excellente qui foit. Il n’eft pas befoin de difeourir beaucoup en ce lieu des mœurs des naturels de cette Prouince du temps qu’ils eftoyent encores Payens; fi ce n’eft qu’ils auoyent accouftumé premièrement 1 .«««pmt’c.nn’ilc immolnvpntà Icuts Idoles.& Duis aorcs cel- de manger la chair de leurs ennemis, qu’ils immoloyentaleurs Idoles,&puis apres cel- le de leurs gens mefines,de forte qu ils tenoyent boucherie ouuerte de chaii lair humaine; laquelle inhumanité a efté de long temps abolie. Enfin Hermndo Cortès fe confiant fur l’aide de cette Republique, ola attaquer le Royaume de ^Mexique & le fubiugua ; & en mémoire d’vn tel bénéfice , il impetra de i’Ernpereur Charles-le-Quint liberté pour ceux de Tlafcala , de forte que les habitans d’icelle ne peuuent eftre contrains de feruir aux Efpagnols: mais ils payent tous les ans ( comme chiltoa dit ) tribut au Roi d’Efpagne dVne poigneede blé par tefte, ce qui reuient chacun an au nombre de treize mille Hettegas ou plus , qui eft vne mc- fure d’Efpagne qui refpond à vn boiffeau. C H A f . O CCIDENTALE s. LIVRE V. C H A P. XVI. i(>7 îjtîTiitss de FEueJche de Tla,lca,la, , MetTopolitaïue Puebla, de los.Axio-elgs - Tlcifcidii ^ille des ‘~ijieux hAhitdïis ^ nHtves lieux *~uoiJi?2s m LEvesche de T'Ufcâla. fituee entre 1 Archeuefché de Mexique & TEuefcIié de C/z^ïAr^^r^jadelong, comme on dit, plus de cent lieues d’vne mer iufques à l’au- tre , & quatre vingts de large du cofté qu’elle attouche la mer du Nord & dix huiftou elle auoifme celle du Sud .-entre lefquelles limites elle enferme outre la Pro- uincedcr^/4/^, proprement dite, de laquelle nous auons principalement parlé au 10 Chap.precedent,plufieurs autres; comme feulement diftan te de huid lieues de l^ieille ville de TUfcala, de laquelle nous parlerons bien toft ; Y.iZempoaU^ Prouin- ce affes grande & grandement fertile, plate pour la plus grande partie & abondante en pafturages,couuerte d vn cofte des montagnes, & qui n’eft pas plus qu a deux lieues de la m^er : Les habitans lors que les Elpagnols y arriuerent premièrement, n alloyenc pas nuds comme les Infulaires ; ils eftoyent beaucoup plus ciuilifés, & auoyent appris de rendre a leurs Rois vue finguliere obeïifance : leur principale bourgade auoit mef- me noni que la Prouince,elle eftoit baftie entre deux ri uieres,les édifices eftoyent aftes fplendides félon la capacité de gens Saunages : leurs voifins notamment ceux qui ha- bitoyent les montagnes s appelloyént anciennement T-'otonuques-i différents enlano-a- ro ges &mœurs aux autres nations de cette Continente. Nous traiterons des autres Pro- uinces ci-apres. ^ La principale ville de ce Diocefe eîjt nommee des Efpagnols FueUu de los Ameles, ceftadirevilledes Anges, elle eft diftantede la ville vers l’Orient, eticli- nantvn peu vers le Sud de vingt deux lieues : contenant, comme on dit, mille cinq cents mailbnsjdiftribueës en quatre quartiers que les Efpagnols nomment Barrios : le Prefident Sebafiian Ramirez, la baftit l’an cId Id xxxi, fur le chemin qui va delà mer par la ville de Ver a Crtiz a la Métropolitaine Mexiqueîk cinq lieuè’s dé la vieille ville de TIhJcaIu ,ftir les limités de Cholula, dans la plaine de CuetlAxcoApàt & auprès du com- mencement de cette noble vallee Atlifca^ fur le riuage d’vne petite riuiere qui vient du to Vulcan :à.2Xi^ vn terroir fertile enfroment,vignes,cannesdefticreiiin, &en toutes for- tes de fruits d’Efpagne.-elle iouït d’vn aïr plus chaud que froid, combien que parfois es lieux voifins la gelee brufte les femences. Robert Thornfon Anglois qui eftoit en ces pais lalancIolD lv &fuiuàns, l’a fait diftantede la ville de Veru Cruz^o, xliii lieues, Si affeure qu elle eftoit pour lors habitée feulement de fix cents familles d’Efpagnols. ’ A cinq lieues delà ville de lo s Angeles vqxs le Nord, eft fîtuee rlafcala^^niicmt deïneii- redcs Sauuages Si ville libre,conimenous auons dit: EEglife Cathédrale y aeftéiuf- ques a l’an c I D I o l , laquelle fu t par apres transférée dans la ville de los Angeles. Gueres loin de VlafcalA Îo. voyentles fôürces d’vne riuiere qui premiereméhtéft fort pctite,laquelle fe faifant plus grofte , court entre la ville de los Angeles Si Cholula , Si par \ohVzo\xmctdtMechoacanpp\iïs entre en la met Pacifique auprès àt Zacatula\i\ n’y a pointde poiflonjmâis vne fi grande quantité de gros crocodilles qu’ils dépeuplent lès lieux prochains du riuage. A ces villes appartientla vallee d Atlijca, large feulement d’vne lieue Si demie, mais ^ a r /^^^^perature fi agréable que les femences n’y font iamais gaftees du froid, elle eft fi fertile qu’on y recueille tous les ans plus de cent mille Hanegas de froment. Si: 1 y a plus de mille Efpagnols,fànsles efclaues qui s employentàla culture de la terre. ept lieues aufli de la ville vers 1 Orient,il y a la vallee dlOcumba ou Oizumba, la- quelle s eftend depuis l’hoftelerie qu’ils nomment iufques à vne autre dite delPerote^p'àx l’efpace de vingt lieues de long, Si large de dix ou vn peu moins : il y a vne 0 bourgade célébré appellee Napuluca , laquelle fut premièrement commencée pàrvn egre Chreftien au temps pafïe , lequel nourriftoit des pourceaux dans cette vallee, qui attira a foiinfenfiblementvne telle quantité de Montagnards vmÇxns, qu’il remplit cette ourgade de mille habitans: Orles vaches Si troupeaux de menu beftiaiiont pris en cette vallee vn tel accroiftement en peu de temps, qu’il a efté neceftaîre d eftablir vn confeil des Bergers ( que les Efpagnols nomment Confeio de Meïîa ) qui fe tient tous les ans dans le bourg de A huid Îtf8 description des INDES A huidlieuê's de la ville de T'iafeala vers l’Oueft, s’efleue la grande montagne de Po- pcâtefecM fommet de laquelle fume continuellement; lors que les Efpagnols de- meuroyent dans la ville, &merme du depuis elle iettades flammes plus grandes qu’à raccouftumee,auec grande admiration des naturels habitans. Les Ëfpagnols la nom- ment pour la flmilitude du mont Æthttu , Vulcun * elle eft fi haute qu on la voit de plu- fieurs lieues loin, & eft toufiours blanche de ncge : toutésfois les champs voifms font cftimés les plus fertiles de toute U T^nuelle Efpagne,^\cs mieux peuplés. Au pic de cet montagne eft fituee la bourgade de Guaxocmgo, fort deleétable, fertile & grandement peuplee. Ce F-ulcan auoit celle de ietter de la fumee dix ans durant, mais l’an cl d I o x l, il vomit derechef de la fumee & de la flamme auecvn tel bruit, qu’il fit prefque mou- 1 c rir de peur tous les habitans d’alentour , & ietta fi grande abondance de cendres qu’il en remplit les champs de Guaxocmgo ^ .^etlaxopan^T’epeacay Cholula & de ElafcaU^U. ne brufla pas feulement l’herbage &: potages , mais aulfi les arbres fruidiers , de forte que les habitans furent tellement efpouuantés.qu’ils penfoyent quitter & changer de païs. Ttiego dê Ordas Capitaine fous Cortès, fut le premier des Efpagnols, quid’vn har- di courage monta cette montagne iufques au trou, lequel il remarqua eftre rond& d’vne grande ouuerture. Apres l’anclD lo Montano & Mefa l’entreprirent aufli auec quelques Efpagnols & Sauuages,& montèrent iufques au fommet auec grand danger, où ils furent prefques gçlés de froid : Uontano le premier ayant defcenduvnc corde dans le trou mefme,en tira à fix fois enuiron huid arrobes de foulfre, & apres lui i vn autre Efpagnol en autant de fois en tira quatre : lequel foulfre ils portèrent à Cortès, qui eftant cuit & rafiné,ii en demeura dix de tres-fin , ce qui lui feruit fort à faire de la poudre, de laquelle il auoit lors grande difette, qui fut de grande confequencepour prendre la' ville de Mexique. Auant que nous quittions la ville de E lafcda,\\ ne nousfaut pas oublier de dire, que le Prefident Sebafikn Ramirez, en ces temps , apporta toute induftrie & diligence pour faire cultiuer plus abondamment la Cochinille en ces païs, qui a efté caufe que cette Republique libre a fleuri d’vne admirable façon ; & il s’y rendoit toutes les fepmaines au iour de marché vne telle quantité de peuple , tant des lieux voifms que des Prouin- ces frontieres,non feulement des naturels, mais aufli des Efpagnols, que c’eft comme 3 vne chofe incroyable. Car fans parler des fruids & de l’aboadance de toutes fortes de viures,rqu’vn chacun pourra eftimer de ceci, qu’on y vend tous les ans en la bouche- rie publique quatorze ou quinze mille tant moutons que brebis, quatre rnille bœufs & deux mille pourceaux ; on porte à ce marché vne incroyable quantité de médica- ments Amples , Liquidambar & refînes, de Cochinille , de laine & autres marchandifes : il demeure en la ville plufieurs ouuriers en argent, plufieurs orfeures & autres : & n’y a difette de vin d’Efpagne & autres marchandifes eftrangeres , combien qu’il foit défen- du aux Sauuages de boire communément du vin, cars il leur eftoit tout a fait permis, tout les preflbirs d’Efpagne ne fçauroyentfuffire à ces païs. On fait conte dans cetEuefehé ( dit Herrera ) de deux cents bourgades d’indiens - principales, & plus de millepetits villages, & plus de cent cinquante rnille Sauuages qui payent tribut : Or ces bourgades font diuifees en trente fix clafles, à chacune def- quelles il y a quelques Preftres & Clercs qui les gouuernent : en outre trente Con- uents de lacobins, Cordeliers & de l’ordre de S. Âuguftin. C H A P. XVII. Trouince de Tepeaca, Segura rutile des B^dgnols, AP R E s quHernando Cortès l*an cio lo xix, eut efté chalfcde la ville de dMe- xiquesiuec grande perte de fes gens & de les allies; fut retourne auec gran- de difficulté en la ville de Tlafcala , s’eftant vn peu rafraîchi auec les fiens , ü fut confeillé & mefme prié par la République d’icelle , qu’il s’employait à fubiuguerla Prouincede Eepeaca qui eftoit elloignee de huict lieues de leur ville, & ayant auec peu de difficulté exécuté fon deflein, l’an d’apres il y mena vne colonie d Efpagnols & y baftit la ville de Segura de la Fronteraj( comme ils l’appellent j fur la hauteur de dix hui(ft degrés & quarante fcrupules au Nord de la ligne : en vnîieu fort commode , ou OCCIDENTALES. LIVRE V. lesiucsToilt larges & bordées de fore beaux édifices, les naturels habitarisauoyentau- parauant leurs domiciles en vn lieu releué,ou quelques-vns demeurent encore au iourd’hui. La température de cette Prouince , combien que les Sauuages appellent la région froide, eft de cette forte que tour a tour le ciel y eft clair l’efté, & l'hiuer pluuieux ou né- buleux. Mais les champs de la contrée y font fort fecs , car la ville eft baftie fur des ro- chers ôdieu pierreux: &neftpointarroufeederiuiereoii d’aucunefontaine,dc ftirte que les Bourgeois font contrains dVferprefque toufioursd eau de pluye, r car la fon- taine qui fourd ademi-Jftudde la ville eft aigre, comme eft l’eau qifon puife proche 0 / ville de Caftille; fi ce n eft que depuis peuik ontfaic venir pat certains ca- naux Teau d vne petite rmiere quidefeend des montagnes de TÙÆ^/J. Le temps des pluyes y commence comme en toute la au mois d'Autil & fiLt en Septembre, tout ce temps le ventde Sudy fouffle fi violemment, qu’il en incommode la lante : les autres mois il y fait fort doux, & quand les vents de Bife y fouillent , il v ta- bâtent tellcmcntl ardeur du Soleil qu’il y gele parfois vn peu. Au refort de cette Prouince ^^p'à.^^i^ViTiemrema,chdco,recdco,chachutlac ^ Ara- 2;»^^,bourgades fort renommées. Defquelles Temachdco eft fituee au pié d’vnemon tagne, laquelle eft dmifee par vne petite fente de ces hautes montagnes, que nous auons dit ci-deflus,pafrer au trauers de ce nouueau Monde dVne continuelle fuite. Or 0 combien que cette région n ait ni fontaines ni riüieres,neantmoins elle abonde en fort beaux pafturages,a caufe d vneplaine qiii s’eftend au long & au large, & eft boftec de quelques petites colines. • ° . Le naturel &les mœurs des naturels font prefque tout femblabicsj excepté que les nobles ont vn langage plus poli & s’habillent plus proprement: la langueMexicane leur eft commune , celle du commun eft vn peu differente , qu’ils, nomment vulgaire- ment Foplucan ; & plufieurs den tr’eux fçauent auffi rotomitique, & fe vantent q ue c’eft leur naturelle. En outre on voit vn lac fur les limites de Temachalco & de chachutUc auprès delà homg'ààeâ Alyoxucan, qui eft au haut d’ vne montagne, qui eft enfoncé de cinquante bra fies, depuis le haut de fes bords iufques àlafuperficie de l’eau, auquel les 0 habitans defeendent pour y puifer & les beftes pour y boire par vn fentier eftroit, ilne nourrit aucun poifion ni aucun autre animal , ni ne croift au temps de pluyes & de l’hi- ue^& ne diminue 1 efte , fa profondeur eft incognuë , de maniéré qu’on penfe que par deffouspafre vne riuiere, laquelle fort à dix lieues delà dans, vne plaine,on le nomme Aloaz,apan,czi 1 eau de ce lac eft bleue & fort froide , demefme que les eaux de cette ri- uiere,ce qui fortifie la vérité de cette coniedure. Dans les mefmes limites à trois lieues du precedent, il y en a vn autre qui eft dans vneplaine,lequel on nomme vulgairement rUchac^oM les hommes & le beftailpeuuent approcher de tous coftés ?ayant enuiron vne heuë de circuit, & profond comme vn abifme, ceftuha engendre certains petits poif]hnsblancs,quinefontpaspluslongsqueledoigt,dVn gouft fortagrêable.Avne D lieue de ceftui-ci il y en a vn troifieme, qui eft de deuxlieiiès de circuit , nommé Alchi- chican, qui figmfie eaux ameres, toutesfois le beftail en boit, & en deuient merueilleu- fement gras,ce lac eft fort profond & grandement clair, neantmoins il ne nourrit au- cun poiflon ni autre animai : quand il eft violemment agité du vent, il efteue fes flats auffi l^uts que la mer, & ne croit ni decroit comme lepremier :;il y a vne plaine qui iauoifine,qin s eftend douze lieues, parfemee dediuerfes colines & pafturages par vne belle variété, dans laquelle paiffentgrand nombre de troupeaux. Cette région abonde en vne quantité mombrable d’arbres fauuagespopr la multitudedes forefts & colmes ; entre les fruidiers il y a des cerifiers fort femblables à ceuxd’Efpagneifi ce n eft que les fruids ont de fi courtes queues, qu’ils font comme attachés aux branches. Françou Xtmenes femble appeller cet arbre Capolin y lequ.elil deferit en cette maniéré 5 c eft vn arbre moyen, qui a les fueiiies d’amendier oucerifiêr , entrecqiipees de petites dents, les fleurs pendent par grappes, dêfqueiles naiffent.des fruids du toutfembla^ blés a nos cerifes , en forme , groffeur & noyaux , fi ce n:eft que le gouft approche plus es mœui^ ; il fleurit au printemps , & porte/on fruid tout l’efté:: .qui eft fort agrea- e au gouft & grandement eftime de plufieurs, toutesfe.is i'l n’eftpa sprifé desMede- ms, pource qu il caufe yne puante haleine à ceux qui en mangent fopuent. Si ce n’eft T qu’on description des INDES quotidoiucpluftoft entendre cela d’vn autre arbre» qu’ils nomment Copalxùcotl, porte des fruits femblables à de petites pommes, lefquels diftillentvnc certaine fa- iiue fort glutineufe ; veu que cet arbre eft en toute autre chofe grandement fem- blable aux cerifiers , d’où vient que les Efpagnols appellent ce fruid cerife gom- meüfe. , ' j , Le froment y croift abondamment , principalement en la vallee de S. Paul , la- quelle eft habitée de pluùeurs Efpagnols > qui pour quatre cents Hanegas qu’ils fe- ment tous les ans , aflemblent dans leurs greniers le plus fouuent au temps de la moiflbn quatre vingts milles Hanega^ , qui eft vne monftreufe fertilité, ( fi on doit affeurement croire Herrera)dlQ porte auffi de Forge, febues & autres légumes, du lin & de la Cochinïlle. Il y a auffi plufieurs troupeaux de brebis & de pourceaux j dans les montagnes principalement dans celles de nege , il fe trouue grande quan- tité de beftes fauuages , comme tigres , léopards , loups , adiues , cerfs & autres animaux . Entre les oifeaux on prife vn fort petit oifeau, gros comme vn papil- lon, qui a le bec long &: les plunies dVne fubtilité & beauté incroyable: ( defquels ils compofent par vne finguliere induftrie des pourtraits , tout de mefme que s’ils eftoyent peints de couleurs ) il vit de feule rofee qui eft dedans les fleurs , à la façon des abeil- les ; nous en auons fait mettre i ici le pourtrait,que nous auons pris du renommé Charles del'E- clujè, où nous auons corrigé le bec , félon les defpoiiilles du mefme oifeau que nous auions receués fort entières. Françùis Ximenes eferit qu’on l’appelle que les fleurs fe feichent, il picque fon bec dans le tronc des arbres , demeure ainfî attache , immobile comme s’ileftoit mort flx mois de long, iufques à ce queles pluyesretournansf/or^, reuefte derechef les champs. ^ ^ Gomara l’appelle Vuieilm ,• Omeio . Pajferem Mofqmte. On en trouue par tout pref- que en toute les régions de l’Amerique entre les deux Tropiques. Cette Prouînee a faute de fel & de coton ; au refte eft fltuee en vn lieu fort op- portun, principalement la ville pour garantir l’vn & 1 autre chemm , qui vont de U Ver a Cruz, à la ville àcLMexiq^ne .T’vn defquels s’appelle Smhtlchtme iy2x lequel les Efpaenols entrèrent premièrement dans les marches àc Mexique î 1 autre Gw- chuU , lequel on frequente principalement auiourd hui , qui décliné vn peu plus d vne Hqmc dt Tefeac/i. . ^ Chat. XVIII. Villi de Vera Crùz & le principal port S. lean de Vllua. La ville de Fera Crttr, eft diftante de la ligne enuiron dix neuf degrés vers le Nord : de la Métropolitaine Mexiepe, félon que le chemin va : foixante ou loi- Xante cinq lieues ; de la mer àpeine vn quart de lieue. On dit quelle eft habitée prefque de deux cents familles d’Efpagnols, la plufpatt defquels font ou mariniers, ou ïâaeurs,qui réçoiuent les marchandifes venant d’Efpagne , & chargent derechef cel- lës du pais dani les nauircs.La viUe de Fera Croaieft eftimee fort mal faine, car au temps de pluves ou en hiuer , le vent de Sud-eft ou Sud-fud-eft y fouffle le plus fouuent, qui abreuue de grolTe pluye, depuis le foit iufques à minuift, & depuis le grand matin luU j qûes au loir le Soleil y eft fort ardent i ioint que le làble fort menu,lùr leque a vi c e bafties’embreuue dVne abondante humeur , lequel fe conftipe en là . ^ froid de la nui0 lieues. De cette ville au vieil Tlafeala cinq lieues. D ’icclle à la Métropolitaine C^'^e~ quatorze lieues. ^ Voila ce qui fe trouue félon la relation de ceux qui ont eferit des affaires de la Nouuelle Efpagne deuant plufieurs amiees , mais du depuis cette ville a efté tranfpor- tee ailleurs , & lors elle eftoit à cinq lieues du port; maintenant elle eft placée vis a VIS d icelui, comme nous dirons bien toft, quand nous aurons premièrement traité du port. Le principal port de la Nouuelle Ejpagne & prefque le feul fur la mer du Nord, eft vulgairement appelle S.IuandeVllua -, d’vne petite Ifte prefque auffi rafe que l’eau de lamer, de forte que qüelquésfois quand la maree eftfortgroffe, elle en eft toute cou- fo uerte : elle eft ceinte pour la plus grande partie de rochers & baftésdu cofté de la mer; placée au deuant de la Continente; feparee du riuage d’vn deftroit large iéulement de deux cents perches de dix piés,( que les Efpagnols nomment Varras Jcllc ferme le port e la partie intérieure, c eft à dire du cofté quelle regarde la terre ; où elle a vn mur de pierre xileue des les fondements , contenant de longueur auec les forts cent nouan- te cinq des mefmes perches ; & la mer eft profonde de quatre braffes au pié du mur, de lorte que les nauires de charge en approchent de fi près ; qu’on peut faulter de l’efpe- rond icelles fur le mur: Or les nauires ne fe contentent pas d’eftre fur vne anchre mouillee en la mer, mais ils s’amarrent auec des chables & chaînes, & des boucles, car ieyentdeNord y fouffle parfois fi impetueufement , qu’il arrache les nauires & les oportefurlacofteoppofiteouilsyfontbrifés. îlyadefia longtemps qu’on a bafti vne ortereiTe a chaque bouc ffii mur, & que le Roi y entretient vne garnifon de cent cinquante foldats , il y a auffi plufieurs Negres pour refaire ce qui tombe tous les iours. a terre ferme qui eft a oppofi te , eft fans arbres proche du riuage , mais quand on a chemine vne lieue pr les champs, on trouue des bois fort efpais, dans lefquelsil y a grande quantité de beftes Saunages. Sur cette plaine que nous venons de dire, la nou- e VI e e Fera Cruz eft a prefent baftie , contenant en longueur mille deux cents ^ V Z perches» 171 , DESCRIPTION DES INDES perches. Car auparauantpource que la ville, comme nous auons dit ci-deffus, eftoit à plus de cinq lieues du port ,on auoit befoin le plus Touuent de quatre mois pour def- charger & recharger derechef les nauires , ce qui fe fait auiourd’hui en beaucoup moins de temps. Le lieu fur lequel la ville eft baftie 3 s appelloit auparauant Bttytront d’vne montagne qui y eft vers rOueft. ledn Hdwkin fort renommé entre les Anglois, Admirai dvne flotte, entra dans ce port au mois de Septembre l’an clolo Lxviii.oùiltrouuadouzenauiresd’Efpagne chargées de riches marchandifes,qui fe preparoyent pour retourner , aufquels il ne fit nul tort, feulement il demandoit des viduailles en payant pour fa flotte , & comme le lendemain ily arriua vne flotte d’Efpagnede treize nauires chargées de riches mar- t c chandifes de pardeçà auec le nouueau Viceroi, laquelle il pouuoit aifement chafler du port auec le dommage afleuré desEfpagnols, toutesfois ayant conuenu auec eux à certaines conditions, il les laifla entrer auffi toft : Mais il apprit à fon grand dommage qu’il ne fe faut pas trop fier aux promefles desEfpagnols, car eftant attaqué à l’impro- uifte & ayant perdu au combat le meilleur de fes gens , il fortit à grand peine du port auec deux nauires feulement, & apres qu’il eut efté fort agité quatorze iours de long dans le golfe de Mexique,k^ viduailles n’eftans fuffifantes pour tant de gens, il fut con- traint de defeendre cent des fiens àla Continente ; quelques-vns defquels furent tués des Saunages, tous les autres ayans efté defpoüillés, tombèrent apres pluficurs aduan- tures entre les mains des Efpagnols, qui les menèrent premièrement à fanuco, & delà à la ville de Mexique, où vne partie mourut de maladie, vne partie par diuers fupplices à caufe de la Religion, quelque peu toütesfois efehapperent par vn extraordinaire bé- néfice de Dieu , qui apres plufieurs années retournèrent fauues en leur païs , & entre iceux Milos duquel nous auons fait mention ci-delTus. C H A P. XIX. Le rejîe de U cofie marine de l'Euefché de Tlafcala. L’Eve s CH e' àtTUfiaU, eftdiuifeedeuerslamerappellee vulgairement Golfe deLMexiqueyàc l’Euefché de Guaxaca ( de laquelle nous parlerons bien toft j par 1 ( la riuiere , qui eft à prefent appellee du nom du premier defcouureur Rio de AL uarado,màis les habitans la nommoyent anciennement en leur langue Papaloaua. Pro- che de cette-ci fuiuant liacofte vers l’Oueft eft la riuiere qu’on appelle de Banderas, pource que les naturels, comme les Efpagnols voguoy ent outre , fembloyent les inui- ter à defeendre, auec certains drapeaux blancs à la façon des enfeignes des gens de piéjlors de la première nauigation que fit lean Gryalua en cette partie de 1 Amérique. Outre d’icelle il v a vneifle audeuant delà Continente, laquelle on nomme Blanca,2. caufe du iable qui y eft blanc, ôeaftes proche delà vne autre, qui eft a enuiron quatre lieues de la terre ferme, appellee pour la quantité des arbres verds qui y font, ?>C encore vne troifiemefeparee de la Continente d’vne lieue & demie, laquelle Gryalua 4( nomma lAfedes Sacrifices , pource que defeendant en icelle , ils y trouuerent vn Autel & des hommes qui y auoyent efté depuis peu immoles au Diable , ayans les poitrines ouuertes , les bras & cuifles coupées, & mefmes les parois du temple arroufees de fang tout frais, il y en a qui cotent que les Efpagnols auoyent couftume aux premiers temps d’y defeendre ôc defeharger leurs marchandifes , mais qu ils auoyent laifle cette Ifle, cfpouuantés par vne fuperftition & certains eipouuantementsnoélurnes: mais il eft plus vrai femblabe que pour la crainte d’y faire naufrage, pource que le vent de Nord- eft y eft fort dangereux,ilsont cherche vn autre haute ailleurs. Ayant pafte cet ifte courant vers l Oucfton rencontre lifle de S. louan laquelle nous auons parle, au Chap. precedent. Or à la Continente on n’y remarque rien de mémorable en toute cette fuite de cofte.Et iufques ici le riuage de la terre ferme a couru vers l Oueft,dici enauant toute la coftefe courbe au Nord; ou on trouue premièrement la riuiere de Vera Cruz\Qi.viçï[\c. De laquelle courant lacofte vers le Nord, on rencontre a quatre îieué's Sempoala, riuiere & qui ne peut porter de grands vaifteaux: a huiét lieues de laquelle fuit la riuiere Alméria , que les naturels du pais appelloyjpnt Naothlan -, qui lourd des montagnes des ’Totonaquins & de LMicantle, ôc laquelle fe forçant entre des colines, I OCCIDENTALES. LIVRE V. , colines/e defchai^e en mer par vn canal Æs petit. Sur le botd d’icelle elloit ancien- nement ailile la ville de McdcUin-, baftie fous les aulpicesdcOrtet, en memoitc delà «lie de fa pattiedaquelle ttois ans apres auoir efté baftie fut teduite en folitude nar les Officiep duRoi.qui lan cln Id xxv en tirercntleshabitans.poutlahaine qu'ils nor toyenta C'ur/f^pourlorsabient. r '■ Or les mai iniers remarquent les champs i Alméria, auprès de cette riuiere , que les vns mettent lur la hauteur de vingt degrés, & les autres fur vingt degrés & trente fcru- pules. En outre luit apres a la mefme cofte la riuiere de .Ç. Fetro & de S. Faulo , laquelle defcend aufli des montagnes des T otonaqtims (oit en mer fur la hauteur de vingt & 10 vndegre : proche d’icelle eft la riuiere de les Cazones, comme lesEfpagnols lanom- mcnt,ou a terre ferme fait vne grande baye , mal alTeuree pour les nauires ; en cet en- droit finillent les montagnes de T/^^eftendus duNord-eft au Sud-oueft Enfin Ta^ mugua cloft ce cofte qui n eft pas loin de la riuiere de Fanuco. Par ainfi il appert clai- mer^Nord^ ^ ^eul port que la K[ouuelle Ffiagne aye fur la G V A X A G A. C H A P. XX. 10 Limites de ÏEuefché de Guaxaca : defiripion de U ^aUee d'icelle. CE T T E Euefché eft vulgairement appellee de la principale Prouince de Ion Diocefe, & Antequera de la ville où eft eftabli l’Eglife Cathédrale d’icei- i>L- r U' ^ Euefché de Tla/êala, kquelle nous venons de defcrire & lEueichequon attribue au gouuernement de elle a de long félon la fuite de la cofte dçla mer, cent lieuësfuiuant la mer du Sud, & félon celle du Nord cinquan- te ; de large entre 1 vne & l’autre mer le long les limites du Diocefe de Tla/cala cent ôc vinp,vers 1 Eft du long de la Prouince de ch'ap feulement cinquante. Elle embrafte pluheurs belles Prouinces.defquelles fans contredit la valleede Guaxaea eft la princi- opale.eftenduefeizeheues en long, laquelle donna le nom de Marquis delvalle à Her- premier Conquefteur de ce'spaïs. Elle commence au piè de la montagne ÿ furies marches de fur la hauteur de dix huid degrés vers le Nord ( comme affirme à quatre vingt lieues d’efpace de la ville de Mexique vers le Sud : Or combien qu’elle aye peu de fontaines & de ruiffeaux, elle n eft pour- tantpas dutoutdeffburnie d’eaux, & elle eft extraordinairement fertile; Les naturels d icel ejfent de la langue'de Zapocata. Il sy trouue plufieurs mines d’or, d’argent,de cryftal & de chalcante ; & des pierres, combien que de petits prix, fort propre contre lesaffeéfionsnephritiques & le flux de fang. Elle porte en outre du froment & du ^ydortabondamment:grande quantité de Cacaod^ laC^rW/^auffi &dela caffefi- 0 Itule J l’arbre qui la porte eft appellé des Mexiquaim.^auhayohuachtli ,• d’vn tronc de couleur de cendre , les fueilles de laurier, les fleurs iaunes , en forme d’eftoilles & pen- dues pargrappes,defquelles vient ce fruid qui eft fi cognu j voila ce qu’en dit Français Xmenes. Etla terre y fouffrir oit fort bien les oliuiers Se la vigne, veu qu elle y endure benignement toutes femences ôefruids & herbes eftrangeres. ^1^ cette Euefché a peine y a-il aucun ruifleau qui ne porte de l’or, de forte que es habitans ( aufquels pourtant rien ne manque pour le prefent quant à la vie Se veltement; auroyent abondance de toutes chofes,, fi leurpareffe naturelleôel’incole- rance du labeur neles en empefehoit. L'airy eftaffés ferain Se fainXes Efpagnols yfaçonnerentpremierementdela foye, 0 attires a cela pour l’abondance des mœuriers,quela Prouince y nourriffoitjdu capiton ûe laquelle les Saùuages auoy ent couftume de faire du papierjmaintenant on y a plan- tyn 11 grand nombre de mœuriers de l’Europe , que les naturels Se les Efpagnols auffi a em ent vne grande quantité de foye , Se fi les Saunages payoyent la difmed’icel- ^ pagnols font obliges , le reuenu fuffiroit pour eriger cinq autres Et afin que nous acheuions ce qui appartient à cette Euefché en commun j On y y 5 conte 174 description des INDES conte trois cents cinquante principales bourgades des naturels du païs, ( outre trois cents villages oucenfes) plus de cent cinquante mille Saunages tributaires jcent & vingt Monafteres de lacobinsj&plufieurs Colleges de Clercs ; treize langage fort dif- ferents entr’euXjtoutesfois l’idiome des 'Aiexit^Uitins commun a tous. Or combien que le terroir de ces Prouinces„( excepté feulement la vallee de Gmxa^ CA ) foit montueux & rude,toutesfois il eft fertile en fa plus grande partie, & produit de fon naturel arbres fruiâ:iers & fauuages , herbes iàlutaires & nuifibles j & entre les ve- neneules on dit qu’il s’en trouue vne dans la vallee de Guaxacaj d vne vertu admirable ; car û quelqu’vn a entrepris de faire mourir quelque autre en vnan,iifaut qu il lui don- ne de cet herbe cueillie d’vn an, fi promptement de celle qui eft fraifehement cueillie. i ( Il y a auftivn arbrifteau fort familier en cette Prouinçe, que les Sauuages nomment HuitzPAcoth qui traine par terre , les fueilles duquel finftfent en trois pointes : il porte des flairs rouges & menues, iointes enfemble au bout des branches, defquelles naiflent des fruids femblables en grandeur & forme auxnoifettes, âuec trois noyaux blancs au dedans 5 il fleurit & porte fruid prefque tous les mois de l’an. On dit que cinq d’iceux, oufix à ceux qui font plus forts, apres en auoirofté vne certaine peau qui les couure, purgent puiffammentle flegme & labile, tant pàrvomifTetnents que par felles , fi feu- renient a ue orenant tant foit peu de viande , la force du médicament fe débilité aufli ^ ^ toft. le ne fçai fi ce ne feroit point ce fruid duquel le renommé Charles de l'Eclufe en a 2.' donné cette figure fous le nom de Mehenbete- ne, car il quadre aucunement auec la deferi- ption de François Ximenes , veu qu’il contient ^ trois noyaux dans vne coque. Monard fem- ble defcrirevne autre cfpecede noifettepur- gatrice d’vne efcorce deiiee, ( veu que celles des premières tire fur le bois ) d’vn rouge d’ef- carlate,triangulaire, d’vne mouëlle blanche & douce dedans, de laquelle les Indiens (e pur- gent ordinairement. Le meftne^^ l'Eclufe en 5 a donné la figure, que nous auons adiointe ici, qui en defirera fçauoir dauantage voye I>4- lemchamp. Cette Prouinçe eftoit fort fuiette aux terre-trembles , lors que les habitans eftoyent encore Pavens,mais maintenant comme ils content,ils y font moins frequents depuis qu’ils ont embrafle la Religion Ghreftienne, ce que les Efpagnols attribuent à Mar- tial,qvl'ïIs ont efleupour patron du temple dlAnteq^uera. C H A P. XXL ‘Tromnee de Mifl:eca,^/(? Tutepeque,^/^Zapoteca, de Guazacoalco. 4 La Prouinçe vulgairement dite Mifeca eft diuilee en deux parties,! vne delquel- les eft appellee haute de la nature & fit de la terre, & l’autre bafle. Or les habi- tans naturels d’icelle vfent d’vn langage grandement different. La haute Mifie- CA qui eft fltuee entre le Diocefc de Mexique &: la vallee de Guaxaca, eft prefque à qua- rante lieues de la mWed'Antequera déclinant vers l’Occident : la baffe tire plus vers la mer du Zud. La plus grande partie des ruiffeaux & torrens de ces Prouinces portent del’or,parainfi les Sauuages s’envontauec femmes & enfans aux prochains fleuries ou ruiffeaux, portant auec eux pour dix ou douze iours de prouifion, & tant que durent leurs viures , ils cherchent fdigneufement les paillettes d’or qu’ils mettent dans les j tuyaux de poules: puis apres ils s’en vont aux prochains marchés, & changent leur poudre d’or pour de ,1a prouifion bc autres chofes neceffaires, & eftant retournés a la maifoiijils font iour & nuid bonne chere,&ne cultiuent les champs ni ne font aucune autre befogne, nineretourneà chercher de l’or, iufques aeequ ayans confumeleurs viures, la rude neceflité les y pouffe par force,ou quand ils ne peuuent plus long temps fupporter vne vie oififue & pauure -, ils difent qu’ils ont receu de leurs deuanciers cette OCCIDENTALES. LIVRE V. force de vie, qu’ils veulent lailTer à leurs fuccelTcuts , & ne peuuent pas aifement dite induits a au tre labeur ou façon de foire. Les racines qu’on appelle chés les Appoti caires cAtoWa», y croiflent abondamment , notamment auprès delà bourgade de Cuattitlaff. La mefme Prouince porte en grande quantité ces arbres qui diftülent le Car4;;sa,duquel nous auons parlé ci-delTus. Dans icelle r comme en HMimola & ail leurs ; naiflent certains arbres.airés vulgaires, les fueilles defquels font femblables àla petite fougiere; les fruiéts font comme les noifettes, mais vn peu plus petits, & qui ne font pas bons a manger; mais ayant rompu le noyau, ( qu’ils ont ronds ou noirs de la. grolleurd’vn poids ou d’vne balle d’arquebufe; ils mettent fa moüelledans de l’eau D chaude, &d icelle ils lauent les veftements, car elle efeume comme le fauon,& ne net- toyé pas moins. Les oflélets mis au Soleil deuicnnent fort noirs, comme vne ao-ate, cftant tournes & percés, ils feruent à faire des chapelets, pource qu’ils font fort Ico^rs & qu ils nefe fendent ïamais , ils contiennent vne certaine poulpe grandement ame- re, d vn melme gouft que les noyaux des perfets , que ceux qui s’en feruent lui oftent ailement. Momrd hit mention de cette plante fous le nom de boules à fauonner , & prefque en la mefme forte, comme aulTi Ouiedû au liure ix de IHiltoire des Indes. Sur les limites des bourgades de Cuertlauaca & de TequiàJîepequejily z vne chofe ad- mirable Ibusvne fort haute montagne,dans laquelle eft entré au tresfoisvn Moine la ) cobin auec quelques Sauuages ; la defeente en icelui eft fi eftroite-, qu’on n’y peut en- trer qu vn homme a la fois , au dedans il y a vne place quarree de cinquante piés où il y a que ques puits auec leurs degrés; d’iceuxonva par vne voyc pleine de plufieurs deftours,& tortue a façon d’vne labyrinthe à vne large place, au milieu de laquelle lourd vne fontaine, &a cofte fe monftre yn ruüTeau : ayans cheminé dans icellel’efpa- ce d vne heure , comme ils n’y trouuoyent nul bout, ils retournèrent par le moyen dvne ficelle qu ils auoyent attache à labouchede lacauerne. Dans les mefm es limi- tes il y a des montagnes, nommées de j". ^nthoine, qui font habitées par certains Sau- nages, lefquels demeurent dans des puits & fentes de rochers au lieu de maifons, où iis couchent a terre auec leurs femmes & enfans , & ne peuuent en façon quelconque eftre induits a quitter cette vie accouftumee, combien que fort miferable. On racon- te vn^e chofe admirable de deux montagnes qui font là , lefquelles ont leurs fommets fort hauts & fl proches 1 vn de l’autre, qu’on peut en e/largilfant les iàmbes fe tenir de bout lur les deux, combien qu’elles ayent le pié fort efloigné Ivne de l’autre. Enfin on pcutiuger que ces Prouinces abondent en Cochinille, la plus excellente de excepter celle de rlafcaUyQG. ce que les fadeurs preferent la Ces hauts rochers autresfois munis des chafteaux des Mexiqmins, font prefque loints a cette Prouince de Mijieca ; les Efpagnols les nomment auiourd’hui Penmles, il y en a fix fepares par certaines interualles les vns des autres entre le Sud & le Nord • eft nommé vulgaircment/te^«/>^;»^f , à fix lieues feulement d'Antequera] les Kois de auoyent couftume d’y entretenir de fortes garnifons. Les rochers voifins outre qu ils monftrent des indices apparans d’or, defcouurent auffides veines de pionm. La terre y apporte de foi des racines qu’on dit âuoirie mefme vfage que le auon. Dans les confins de la bourgade de Totomachiapa fe voit vne grande cauerne, auccvnegrandegueuleouuerteauSud,oùquelques-vnsfontdefcenduvnedemilieue auant,& furent empefehes de paffer plus outre par les ruiftèaux qui y font. > n. ^ J Tutepeque eft iointe au cofté du Sud de la vallee de Guaxaca , qui s eltend prefque foixante lieues en long : &àcelui du Nord eft la Prouince que lari- uierenoimnee deÆ^^^Atrauerfe & vnpeu plus au Nord laquelle eft toute montueufe & pierreufe,qui ne cede rien en grandeur à celle de à aucune au- tre qui 1 aiio’ifine en fertilité de terroir. Les habitans d’icelle eftoyent autresfois de mœurs fort cruelles, & auoyent guerres côtinueilcs auec les Montagnards leurs voifins, qui s appelloyentM/.v^’^da principale bourgade de cetteProuince eftoit anciennement ^ozapotlan.oiidQvntutoitlcnv Cajfique, ils eftoyent veftus au temps pafté de peaux, maincenantils font appris a fe veftir,à tondre leurs cheueux & à porter des chapeaux. es (Ly ùxes iu^rs en langage & en mœurs, eftoyent fous la Prouince de T ecoantepeci (lequel description des INDES {lequel nom fignifie mont des Tigres ) laquelle V'couisic^ AtS'thoine de Herrera met fur la hauteur de feize degrés auNord,&:à foixante lieues à^Socomfio, elle abonde fur toutes en ùquidamhr. D’iceux font differents les Migues, defqueis nous parlerons Les naturels habitans de la Prouince de Guaxacualco Tint a Sc de Cueztxatlat auoyent plufieurs ceremonies des luifs, car ils fe circoncifoyent, ayant receu comme ils difoyent, cette couftume de leurs predeceiïeursj ce qui n a efte remarque ennui au- tre lieu iufques ici par les Efpagnols. XXII. C H A P. 10 Ftiiss des au Diocejè de G\i2X3iC2i ^ comme Anteqiiera autres : item la colle maritime à'icelui. La capitale ville ^ fiege Epifcopal de cette Prouince eft Ante({uerA,tÇio\gnte, de celle de Mexique de quatre vingts lieues vers le Sud-eft ; fur le chemin qui me- né par ChiapA à GuatemaU , dans ladeledable vallee de Guaxaca. La riuiere qui iaue la ville, fourd de la terre dans la Prouince de CimitU.U court rapidement vers les montagnes de CoAtUnà- deux lieues de fon origine & à autant de Gmxaca. Cette ville eft ornee dVn magnifique temple Cathédral, dans lequel il y a des colomnes de mar- bre folide , d Vne hauteur & groffeur admirable : Herrera eferit qu elle eft habitée de lo quatrecentsfamiilesd’Efpagnols,maisC/;itoAngloisquiypaflaran cio lo lxx, alTeurequ’àpeineyena-ii cinquante; & que plufieurs des naturels y demeurent; Or tous les Sauuages de cette Prouince payent leur tribut enrobes de coton & Cochinille, qui y croiffent abondamment. Lafeconde ville de ce Diocefe eft vulgairement nommee S. lllifonfi delos Zapotecas, diftante d'Jnîequeravcvs le Nord-eft de vingt lieues ; dans vne Prouince riche en tra- fic d’or, de coton & de Mays^en laquelle il y a plus de trente mille Sauuages tributaires: Elle eft baftie fur vne montagne, au païs des Sauuages qu’on nomme Migas : qui font fort hauts & barbus, ce qui eft rare en l’Amerique : leur langage eft rude & groffierjqui a quelque refonnance auec l’Alemand; cruels & belliqueux , &c fort friands de chair j o humaine ; ils alloyent au temps paffé nuds ou ceints fur les reins d’vne peau de cerf; &nepeurent eftredomtésque parlemoyendes chiens de chafle &des dogues, eftans garantis des bocages Si hautes montagnes , où lescheuaux ne pouuoyent aller; par ainfi on dit qu’anciennement cette ville n’eftoit pas habitée de trente Efpagnols, iuf- ques à ce que la crainte des chiens eut contraint ce peuple fauuage à receuoir les con- ditions de paix. Auprès de cette ville croift en abondance Vâïhce EzquahuitliCcAo. dire arbre découlant du fang,pource qu’il iette le fang de Dragon, gomme aprefent fort cognuë du vulgaire ; c’eft vn arbre ( dit François Ximenes) fort large, ayant les fueilles comme le boüillonblanc,large& remplies de coins. j t n La troifieme eftla villede 5. /rf^(?,appellee communément aufii du nom de la vallée 4c dans laquelle elle eft, l^exapay elle eft auffi diftante d^Antequera de vingt lieues vers le leuantjle long du chemin qui va à Chiapa & à Guatemala. Chilton dont nous auons par- lé ci-deffus efcrit,qu’elle eft baftie fur vne çoline fort droite dans la Prouince de : ceca. Si qu’à peine eft elle habitée de vingt Efpagnols, qui y font entretenus du Roi en | garnifon. , à l’encontre des nations Sauuages & non encore domtees , qui remf ent de , porter le ioug,aufquels on a diftribué pour paye les bourgades & villages d icelles. i La quatrième ville eft appellee Villa del Ffpiritu SantOy fituee en la Prouince e ua- zacoalco furies marches de TabafeoÀnonzntt\icucU^Antequera,hÆcV^n cloloxxii par Gonfaluo de SandoualSnt\o.n\xc d’vnc riuiere, à trois lieues de la mer. Ancienne- ment les Sauuages qui habitoyent cette Prouince eftoyentfort belliqueux & cruels, y qui futcaufeque donna aux premiers habitans de cette ville, plufieurs vil âges des naturels du païs, notamment Guecollany Cuiatlat Si Guezaltepec,p^iL lefque s ces peu pies furent infenfiblement domtés de forte, qu’ils portent maintenant le loug vo- Sur la mer du Nord & vers l’Orient, la cofte de ce Diocefe commence des U riuiere de Aluarado , laquelle prenant fa fource des montagnes de Zapoteea , court * ^ nrpmieremeiit OCCIDENTALES. LIVRE V. î,, premièrement par plufieurs Prouinces, principalement par cdlede chinmtU &de ftournant vn peufon cours parles mefmesmôtagnes,defquelles elleeftoitdefccnduc elle entre en la mer duNord entre la tiuiere de GtuzAcodco & l'Ifle de Smt Imn de rlhù Or Guizicodçe eft vne fort grand riuiereiCor/n enuoya l’an c Id In x x le Capitaine Dugo de Ord^ pour la vRiter ; qui ayant fondé fon emboucheure.trouua qu'elle eftoit profonde de trois bralTes.&plusauantdebeaucoupplus.defortequeceuxquis'en tendoyent en lamarme.iugerent lors.qu’elle palToitiufquesà lamer du qu’elle cftoit fort commode pour exercer le trafic de l’vne & de l'autre mer.chofe q u’on cher choit fi foigneufement :& encore que tout cela nefutrien,neantmoinsfen port eft I O grandement propte pour le trafic des Mes : Le terroir qui l'auoifine eft eftimé fort commode pour y nourrir du beftail.Z/>ÿc,i«denoftrenationmetvn intervalle de l lieues entre ces deux riuieres. En la mefme cofte defeend en mer la n’uiere QxxHerrem nomme parfois Aqmltilco & ailleurs auffi Aqaiauilco , large à demi-lieuë de la mer de centnonantcpas.defortequ-ellepeutfetuirdepottcommodepourlesnauires Ala mefme cofte eft aufli fitue Recapanlda.C^ç de la Continente, lequel defeend des mon «gnes fort cognuës de 5. remarqué du naufrage de plufieurs nauires.qui fê foncperdues fur des ^chersaueugles,lelquels bordent dVne fuite fort drue le riuao-e- Les mariniers qui paftent le long de cette cofte.remarquent foigneufement ces mo'n' tagnes pour delà drelfer droit leurs cours : elles s'eftpndent entre le Nord-oueft & lê to Sad.eft,& font diftantes de la ligne de dix fept degrés & quarante huiafcrupules. Du plie de lamer du Z^^i,ce diocefe ale iponGuatulcoiqxxtlcs ^nncsnommQntAzüatulcû\ a quinze degres & trente fcrupules de la ligne vers le Nordic eft vn fortgrand haute & qui eft beaucoup frequentejcartouslesnauiresquiportentdesmarchandifesderEu rope & de \2.NouuelleEfiagne au Pm/, partent le plus fouuent delà. Le valeureux Che- ualierPr4;?p2^Z>r4t,au voyage qu’il fit autour dumonde,y arriual’an cId Id lxxviii pntla ville &la pilla : Elle fut derechef prife & pillee l’an cio Id lxxx vu par X* «;r^cW/.^quibruflaIetempleaueclebureauduRoi.EnlamefmecofteilvavnDeti^ port qui eft atribue a recoantepeque,zxxcc^^n^ttit bourg auprès aftes peuplé à quarante cinq heuesdJnfequerai a laquelle il y a de ce port vn chemin fort freefuenté paftant [ 0 par Chômâtes, Tiexapm & Mexdtepeque: il y a plufieurs autres bourgades Iclon^de la mer du Z/.^,qui fonttoutes des appartenances del’Euefché de Gu^xaca. U y a làauftî vn autre port, mais fort petit, que les Saunages appellent Teou.^^apas par lequel def cend en mer par vn canal nauigable la riuiere d’Omaepeo , laquelle prend fa fource fous les montagnes de Jrso.ja;. de plufieurs marais, dans lefquels pluficL torrens c^u le^t des montagnes de Or O^aepeo reçoit cinq lieues au deflhs fon emboucheu- re d vn cofte Tüoo/uù.Ôc de lâutrc rkeomama sdde derniere defquelles prend fon orim ne des montagnes d Atoyaque ècâ^Amuganlc^nmzelïenës de Iamer,.elleeft tout auffi toft capable de porter de petits vaiftéaux , & defeend doucement par plufieurs hoZ gades de Sauuages : & 1 autre fourd auprès de Chiljtmkuaca , qui ne por?e point de na Tr TZ fl f confluant, Ceftui-ci eft auoifiné delà Prouincê de T kp A, ^ EkcâfBAtnâ de celle de Eututepec, M E C H O A C A N. O A C C H A P. XXIII. Limites de U Proumee de Mechoacan ,• de hïr 0* de Utem d icelle ^ diuevs arbves ^ plantes qui y Jont» E c H O A c A N, fignifie en langue Mexicane,Z/V« poijfonneux, au ant la venue des Efpagnols encespais la, c’eftoit vne principauté, fuiette à nulle autre- maintenant elle porte le nom d’Euefehé , fituee entre l’Archeuefché de & les Prouinces de laiV«»Æ G.&e.-ayantde large fuiuant lafu.tedu riuagede a mer lxxx lieuës,& au dedans le païs L x:fa longueur eft incertaineicar elle eftend depuis la merdu ^«^lufquesaux limites des Chichimemes.Oîv vnlongefpace mais mal cognue.Elle embralTe plufieursProuinces defquelles Lus patlerôs lenLft: vnLSTfroTiL LT’"’' L Prouinces, en eu plus froide, en I autre plus temperee, parfois auffi fort chaude; toutesfois elle ^ eft pat 4H 'i,> V 178 DESCRIPTION DES INDES cft par tout fort délectable & fi faine, quonditquil y en a plufieurs qui y accoutent des autres Proüinces pour y recouurerleurfanté. Il y a plufieurs lacs &eftangs , for- ce riuiereSjVn inombrabîe nombre de fontaines d’eau douce & falubre , qui engraif- fent merueilleufementle beftail : aufïi des fources chaudes & des bains fort boüillans, & d’autres qui font mpvennementtiedes. n , n , A cette clemence du Ciel eft iointe vne grande fertilité de terre , laquelle s eltend maintenant en campagnes & agréables pafturages , tantoft fe releue de moyennes co- lines: fouuent auffi fe releue en de fort hautes montagnes veftues de grands arbres. Il y a vne fort grande abondance de viures ; car la terre y rapporte le froment, 1 orge , & autres efpeces de blés,auec vne fi grande vfurejque ie trouue qu’on a laifîe a la memoi- 1 « re,que quatre Hanegâs de froment femés , en ont produit à lamoiüon fix cents, 8e JFrançois Ximenes afTeurc que les êfpics du froment de 1 Europe en produifent com- me deux mefmes trois ou quatre autres. Mais il eft requis que nous difeourions vn peu plus à plein de quelques arbres &plantes que cette noble Prouince porte ordi- nairement. Entre tous les arbres on peut librement donner le premier lieu à celui qu’ils nomment Xfichkofdl'ho^xki eft vn arbre moyen, ayant les fueilles comme celles de la menthe farafine, encores qu’elles né foyentfi profondément decoupees, lefquelles fontattachees aux branches trois a trois ; letronc&lefcorceen eftgrandement odo- rante, qui fuë vne liqueur de couleur leonine, fentent parfaitement le limon , de mef- m es facultés que les autres efpeces de Ctf^4/,defortequon leftimeen eftre ’sme efpece. u Le fécond heu a vne efpece de duquel nous auons parlé ci-deüus ; qu’on nomme en ces lieux Tzintzequa , mais il na pas d efpines, bc a les fueilles plus fubtiles que le vulgaire produit au refte de la cafte & delà gomme Arabique. Le troifieme \ïm,^duhtepaîli^inÇi nommé des Mexiquatm & des Meeboaquams, Chmreyceiï à dire , plante de feu : qui eft vn arbre femblable au laurier , d’vn beau &: agréable afpea:,fes fueilles font vn peu plus grandes & larges que celles de lamendier ; fes fueiJles font compofees comme les rofes^-de forte qu ilfcmble que ce foit cet arbrif- feau que Diofeonde appelle Rhùdodendronyckés les Apoticaires Oleandery & des CapllanSy Adelpha, fa finguliere acrimonie, on a de couftume de dire en prouerbe, touchant les femmes qui n’aiment pas reciproquemétique leur eau eft infedee d Adelphe. bon lue 5 ■ eft rouge de fa nature , neantmoins les Saunages afteurent , qu eftant donne en potion laquantité de deux fcrupules,il euacué commodementles humeurs pituiteufes a ceux qui font trauaillés de cachexie , principalement fi le mal vient de caufe froide : mais r ditXlme^^esJ cela ne m’eft pas vrai femblable de prendre par la bouche vn me- dicament fi vehement fans danger : par ainfi,i’eftime,oe queles Saunages aufli conlef- fentiqu’il'vaudroit mieux l’appliquer au nombril en petite quantite,car il purgera aufli le corps en cette façon. Ceft auffi vn prefent remede à l’encontre les maladies ex- ternes du corps, la rogne, lagalle & autres fetnhhhles.B.Fra^a/co Hema^dezayantpcis à l’improuiftedu fuc de çec arbre, fut en grand danger de fa vie, il y en a qui ettiment cette plante veneneufe& mortelle a Ihommejellefe plaiftes lieux humides. 4 Le quatrième lieu, ou comme eux mefmes l’appellent Pompoqua , arbre qui a les fueilles femblables à nos cerifiers, portant vnfruid femblable a des petites pommes , qui font douces , mais aftringentes , U qui fuent vne certaine fa ïue grande- ment vifqueufe ( d’où il eft nommé des Efpagnois Cerife gommeufe J laquelle eftant ap- pliquée guérit les fiebures & les deiedions fanguinolantes.Le bois de cet arbre e orc propre pour en tailler des images,car outre qu’il fe coupe aifement,iamais il ne le ten , &n’eft pas aifement vermoulu: il approche a la fenteur&faueur du Entre les arbrifteàux on renomme le MafipendayÇpxi a vn tronc enuiron haut de x x palmes, les branches font noires , fes fueilles font femblables au fer d vn dard, larges bc efpaiftes,enla partie fuperieùre elles font d’vn verd pourpriflant, auec vne queue rou- p ;ge': il porte fes fruids par grappes ( longs de fix palmes j à la façon des raifins,mais p us clairs, qui fontpremierement verds,apres rouges, enfin dVn pourpre obfcur. Les uagesprennent les lettons traîneaux de cet arbrifteati ( quelquesfois la femence; les ayant coupés menus, ils les boüillent tant en l’eau , quelle s’efpaiflifte & vienne en confiftence de fyrôp. Cela guérit merueilleufement les playes, mefmes celles qui font dediftîcilecure,&arrefteie&ngésplayesrecéntes. OCCIDENTALES. LIVRE V. En outre le Chupm ou Chmpctt arbriflcau qui iecte vne racine grbflc & lono-ue” im dehors d vne couleur entre iaune & blanc, au dedans aueunement roulTe , de houdle na.flentquelques troncs&plufieurs rameaux deliés.longsdVnverdobfcur.S^quien chne fut le bleu, ronds & longs, polis . plems de fueilles .à la façon de celles d« oran- gers, mats plus grandes: les fleurs iaunes & eftoillees, rl n’a nulle odeurou faueu^rx m.rrquable. Les naturels dupaïseftiment fort cette plante, &difent qu’elle fmnairê de beaucoup toutes au tres pour appaifer les douleurs venues de verole: & qu’elïeC! r.t les debrhtes de nerfi.Ia plie & ptres vices opiniaftres du corps.qui ne veulenfce der a aucun remede : Ils fe feruent de cette racine en cette façon f ^Is Yon t boüillh vne , O once en fetze pots d eau tant que le tprs en foit confommé &prennent de cet e de! pftion dem.e hure tous es .ours , obferuans le mefme ordre qu’on garde en la not.on deC«^.r.-.lguentauir. les tumeurs, playes & autres vices venus de verole -Sud les tumeurs de la tefte tpt beu qu’apphqué au dehors, arreltela difenterie, exâ elïp petit, & nourrit les debiles. <^ACicei ap- Il yaauiîi vne elpece de Bmfd, qui eft vn arbrilTeau que les Tara/quim appellent C«h:iraqm,^\es Mexiqmms, ^mmochttkHmtzxjmhuitUkm^Jx, qui iette^les ra cines blanches & pleines de lettons , defquelles fottent des troncs tirans au dehm fur le toux , au dedam fort rouges , contors &:pleins de fueilles qui ont prefque la figure tôle. > *“\“°«“deuxautresefpeces,l’vnedefquelless’appelleh»g««,r,&l’autret ; le bois de toutes ces efpeces teint en rouge. 2 >w.i aucrei^ï Nous ne prierons que de peu d’herbes des plus excellentes . Curutzeù ou Matd i^»«p»«rt/,laquelle(d.tX/tKe«pnpspouuonsbienappeller,^ya™t*ie.J/«I,f««^^ ellealesfue.llesmoyennenaentfubtiles,&aucunementfemblabiesàlavi.rnes.pierei d enefures crenelees , yerdes en la patties de deffus , & delTous rudes : les^tuyaux f^nt hauts d vne cpdee, polis, ployables, teretes & déliés ( les fleurs font fubtiles, blonde comnie des cheueux,defquelles naiffentdes femences noires fort menues, elloa b!a! coup de racines, longues & deliees comme to&W blanc. On ne fe fert qu^defr!: cines en Medecine, elles font d v_n gouft acre & mordace, qui fenrent doucement le 0 mufe i chaudes & feiches au troifiemc degré & de parties fubtiles : la poudre d’icelles pifeauec du vin, ou de l’eau de buglolTcou de citron, la quantité d’vnc dragme !ppai fe, es douleurs nephntiques.pttoye les reins de tous exwements fuperfluf ■ cmrobo: Kh la concodion , ofte les crudités ouure les obftrua,ons^,prouoque les mois, aide la matrice. & diflipe les vents , enfin c’elï ^e? cellent antidote contre les venins. > c cic vn ex- rAmitzehuarira que lesaurres nomment & Efna pois pour fa finguhere vertu. l’Ememi des Fenim : C’eft vne noble nlsn.e ^ des fueilles femblables àla PareUe , lefquelles procèdent l ia raciné iéfine lesXu! fonttetetes.hauts d vne palme & demie,&: fort, tendres , au fommet défié s „a!S :o de pentes fleurs d vn blanc tougiirannairemblees en rond, la racine eft ronde fela b le a vne pente pomme de coing.dedans blanche, dehors d’vn iaune d’or dont on fe feu pripipalementen Medecine , car elles fonr d’vne faculté tempetee, eéclilnt vn peu au froid&humide, fvn gouft agréable & doux, fonfuc ou l’fau extoireTer beuc en qplqupupnre qu on voudra.amortifles ardeurs des fiebures , corrobore le œut,& eft vn afleure anndore contre les venins & contre la morfure des animaux ve neneux,commefcorplons&aurres,& fait l’officed’vn fort excellent dcZh^ml' que,fut tout fl on m^etfu^tlapartie offenfee la racine d’icelle broyee en foïmfeX !l * douleur des rems , tempere l’acrimoniel l’vrine , excite Lap ptit.dilloud les tumeurs dugofier, appaifeès douleurs de poitrine, & par vne certa^ eyertuocculte&admirable, elle guérit toutes fortes de maladies ^ Il r , > dartres C/W«j laoiielle nm dns 1 Hl tondes.difpofees troisà trois, feniblableà l’herbelue les lÎ ^ ^ fibreufe. ,8o description des INDES fibceufe. Elleeftfroide&feichc&aftringente.EllegHeritlesrfayesrecentes&vieil- les , eomme auffi on dit qu’elle fait meurir les tumeues & abfces ; arrefte le vomir î Etant .piiee & beuë la quantité de deux dragmes , elle modéré les douleurs venues de la verole,& vuide toutes hi^meurs nuifiues : appliquée aux yeux, elle en corrige les iii- fiammations : Et pour la En elle tue les poulx. Voila ee qu en dit .• Momrd fait mention de cette plante dans les Exotiques de l^EcluJ^. Les appellent cette planter X«; laquelle mofionde nomme Ariftohie cUmatide , laquelle ie n’ai iamais peu voir en Efpagne, non pas mef- me peinte ; que fi elle y eftoit cognuë.on n y feroit {jas tant de conte de la racine de la Chie ou del Zar^aparille,^ms qu elle a des facultés beaucoup plus excellentes qu el- 1 c les.C’eft vne herbe volubiie, les foeiiies de laquelle reprefentent la figure d vn cœur, mais elles font petites ; les fleurs en font pourprines,qui ne font au refte diflemblables de celles des autres efpeces d' Anfiolochie: fa racine eft longue , groffe & couuerte d vne efcorce rougeaftre ; de laquelle on fe fert principalement en Medecine : elle eft acre, odorante, chaude & feiche autroificme degré & de fubtilesparties : fa decodion pré- parée en la mefme façon que la racine de la Chtne onZarzafanlle , & obferuant la mef- me forme de viure, guérit merueilleufement toutes affedions prôuenues de caufe froi- de,& mefme la verole^elle guérit la toux inueteree;diffipe les vents, diminue les petites pierres dans les reins & dans lavefie : prouoque les mois, haftel enfantement, deftou- pe les obftrudions.ôrc. Les Saunages mettent cette plante entre les plus excellentes, u ^ Il eft neceflaire d’ouïr vn peu François Ximenes, touchant la racine purgatiue de Me- laquelle eft à prefent fort cognuë. La racine purgatrice (dit-ii) eftappellee des Mechmquaim.rachuâcheAcs LMexiquaim , rdantUqmcmtkmlle; & des autres Puf quam : il s’en trouuc trois efpeces, deux dcfquelles font mafle & femelle, qui conuien- Lnt en forme & en qualités , & ont la racine longue & groffe , de laquelle fort vne li- queur de laid ; d’icelle racine procèdent des tuyaux déliés & ployables , auec des peti- tes fueilles de la forme d’vn cœur ; les fleurs font longues & rougeafttes j qui prod^ai- fentvnfruidfemblableau peponri’aiainfi tournéce mot Efpagn^olPr//w,ie nefçai pas fi c’eft bien ; en figure & en groffeur, couuert d’vne peau blanche , pleine d vne fe- înence blanche, menue & plate , auec de certains filaments comme de coton, qui fc 5 rompent difficilement. La racine eft chaude & feiche au quatrienie degre, & bruflan- te quand on la goufte,d’où vient que fi ie voulois imiter les mœurs des autres, lerepen- drffis beaucoup ceux qui onteferit d’icelle plufieurs chofes imprudemment & igno- ramment. Elle purge toutes humeurs par le bas , principalement les pituiteufes , en prenant vne dragme & demie, ou deux au plus dans de 1 eau,du vin ou du bouillon, ou Ln auec vn ceuf frais, car on la prend en cette façon vns fc feruent de fon fuc efpreint au lieu de feammonee . a vne des efpeces de laquel- le ils ctoyent qu’on la doit attribuct,&: en font des tablettes auec du fucre,qu ils dife t operer pliffamment ; d’autres ont couftume de mettre cette racine en poudre le poids de fix dfaemes, & l'ayant fait ttemper vne nuia en fixonces d’eau apres eftre efprein- 4 te & coulfe,ils donnent cette eau; pour moi 1 ai accoiiftume de meller en cette eau v once de fyrop de MaUtc.tic ou ZtrzefarilU ou de futiles de Sene,U par ce moyen die purge faL incommodité. Latroifieme cfpece naiftcnvnete_rre noire&lieuxpict- reaf,la racine de cette-ei eft plus grefle. de laquelle 011 compofevn eieduaire pu g - tifrdeux dragmes auec vingt dragmes de fucre de rz.Mtb ou rragaemthe, purge la cholere & le flegme doucement, & ne penfe point qu on trouue aux Sicamentquifurpafficeftui-ci. Les autresfontdefadécoaionvnfyropqu^^^^^ pris le poids de trois onces, purge pmflàmment les mefmes humeurs. cetieracine & lagarder toute l’annee; mais enla cueillant il faut prendre g^rdea vne amreracinefort?emblable,quieftvnprefentvenin.Lorsq«eZ>.E™r/rv^^^^^^^ efcriuoic, lequel nous aeGnsfuiuiiufques ici, cette racine neftoit pas i f -J car on a trouué du depuis plufieurs erpeees,plus douces en opérant, combien que ce trois efpeces qu’il a remarquées foyent fort célébrés. La première e c q ^ Efpagnols appellent MecLcanAn lieu oùclle a efte premièrement : qudle on trouue en cette Prouincc & enCuaddayara deux efpeces i vne quelle noftre Autheur nous aduertit d euiter, l’autre qui purge modérément 5 la raa OCCIDENTALES. LIVRE V. i8i tic l’vne & de l’autre cCc grande &:grofle, mais la bonne eft la plus grande. Vne autre cfpece qu’ils nomment Maf/a/izUc, beaucoup plus petite que la precedente, que quel- ques-vns font fioidejn entcndans pas les facultés des médicaments purgatifs qui n’ad- inettent ianiais aucune frigidite;cette-ci purge moins que lesprecedétes;& on ia don- ne à ceux de tout aage& toutefortede fexe, mefmes aux femmes grofîes fans dancrer. L’efpece appellee Xa/apa,eO: plus puifTante que les autres, encore quelle foir plus p^cti- te.car elle euacuë en general toutes les humeurs pecantes,mais on à befoin de veiller le iour qu’on la prend & le fuiuant. On fait d’icelle vn fyrop allés vtile pour ceux qui font trauaillés de diuerfes maladies : fa compofition en efttelle.Prenés de là racine de Xa- to lapa cm({onccs^,àcPol^podeàcul^y àcsHermoàa6iyles vne j des fleurs cordiales & de iu- iubes des deux enfemble vne poignee j de canelle, de noix de mufeade enfemble deux dragmes & demie, le tout pile foit mis tremper dans flx pots d’eau toute vne nuia : par apres qu’on les boüille, comme il fe doit, iufques à ce que la moitié foit con- fommee ; & qu’on adioufte vn boüillon apres qu’il aura efté coulé,deux liures de fucre, & que le tout foit cuit iufques a ce qu ilaye 1 efpaifleur de fyrop ; puis quand il fera jprefque froid, qu on y adioufte huia grains de fort bon mufe. Il faut aduertir ceux qui fe purgent auec ces racines, qu ils ne prennent pas le iour d’apres du fucre rofàt, ou de l’eau, mais pluftoft quelque poitrine d’oifeau , ou de la chairde mouton roftie , car au- trement les malades viennentà purger derechef,ce qui ne fe fait pas fans danger; On to trouue de toutes ces efpeces abondamment en la ISlouuelle Pjpagne ; le Matlalitztic a la plus grande racine,apres le MechoacanM plus petite de toutes eft celle de XdapayCom- bien qu elle foit plus longue & pftis ronde. Elles font toutes chaudes & fèiches au quai- trieme degre, excepte le feul cMatlalitztic qui eft modérément chaud, & purge beni- gnemenr,p3r ainfi on s’en fert plus feurement. Par lefquelles chofes on voit combien peu de foi on doit adioufter a Monavd & a Aljitîjo Inoiojo en ce qu’ils efcriuentde ces racines. Or ces plantes ne difterent en fueiiles , fleurs ou fruids , fi ce n eft à raifon du terroir,quifaitqu’elles font en des endroits plus grandes quen d’autres; feulement les fleurs varient en couleur,qui eft prefquebleuë, mais ou plus obfcur ou plus clair. Au refte il n’y a prefque aucun arbre fruidier que porte l- Europe, qui ne fe trouue là: 0 mefines on dit que les raifins y viennent a maturité. Les Efpagnols y ont planté plu- fieurs mœuriers,& commencèrent à y nourrir des versàfbye,d’oùvientqu’ily a vn grand reuenu de fort bonne foye. Cette Prôuince donne en outre d’affés bon paftel, dit vulgairement vn fruid femblable a ces efeofles cornuès, qu’on nomme vulgairement Caroha,qui peut feruir de Sumach ou d’ancre aux Côuroyeurs, & fes fueiiles feruent a faire du verre. Et pour la fin, les Prouinces qui font ioignantes aux Chichime^ues, portent de la Chochmille,m2.is qui n’cft pas de la meilleure. C H A p.-^XXIV. ^ T) es amyn AUX de cette "Ptouince^^ des iîioeuvs des natuvels hahitdns (dicelle. IL y a vn grand nombre de gros & menu beftaii en ces Prouinces, comme auffi de. belles decharge,defquels les naturels habitas fe feruent à prefent à porter leurs far- deaux,efpargnans leurs efpauies;outrc ce^a vne fi grande abondance de cheures & pourceaux d Efpagne,qu’ils fe pourmenent à grandes troupes par les forefts fans mai- lires : Il y a plufieurs fàngliers dans les montagnes , & autres belles fàuuâges, comme Heures & connils, &mefmes celles dans lefquelles fe trouuent le Bezôar ,* qui font vne certaine forte decheureaux,qu ils nomment là Theotlalmazamesy de la grandeur d’ vne moyenne cheure,ou vn peu plus grands , d’vn poil de couleup leonine qu’on leur ofté aifement,mais ils font blancs aux coftés,ils ont les cornes larges auprès de la tefte,diui- 0 fees en quelques branches,petites, rondes & fort pointuès. Il s’en trouue auffi en d’au- tres qu il nomment cXliazatlchichiltic ou ThemàmazameyCpii ont de grandes cornes. Il eft befoin de remarquer qu il fe trouüe auffi dans la Nouueüe Bjpagne ( comme eferit François Ximenes) des pierres foffiles, f que les Arabes norpment pareillement Bezo-a^ r«,pource qu’elles ont mefme vertu contre le venin ) principalement dans la riuiere T>etzhuatlan y de diuerfes efpecès & formes, qui font emportées des eaux dü haut des montagnes, lefquelles abondent eh bol d’armeaié. Z 5 II n’y i§2, DESCRIPTION DES INDES Il iiy a pas auffi faute en cette région d’animaux furieux & nuifibles ; car elle nour- rit des lions, des loups ôc des Jdîi?es grandement dommageables au beftail : des tigres il acharnés fur les hommes, apres qu’ils en ontgouftévne fois, qu’ils les vont rauir dans les maifons , les defchirent & deuorent : mais les Efpagnols en onttuè auec leurs ar- mes à feu vn grand nombre.Des efcurieux fouïifent fous les maifons & y font vn dom- mage irreperable : Des renards qui gaftcnt auecleurvrined’vne fi puante odeur, tout ce qu’ils attouchent , de forte qu’à peine cette puanteur fe perd en quarante iours , UC les habits en font entièrement gaftès. Les poules, les pigeons ,& les palumbes font multipliées à i’infinij&: n’y a pas faute de perdrix, faifans & tourtres.Ily a auiTi plufieurs Jures , oifeaux dont on ne fçait l’origine, qui font de la groffeur d’vne poule, noirs, 1 1 ayans la telle & le col couuert d vn certain poil.fort laids à voir, qui volent fort haut, & viuent de charogne qu’ils fentenc de loin: ( defquelles nous auons parlé ci-delfus plus amplement j en outre des efpeces inombrables d’autres oifeaux qui s’en vont à cer- taines faifons vers le Nord,& puis retournent ; enfin plufieurs qui viuent de rapine : il nya pas figrandnombrede ferpens,viperes,&: d’autres infedes èL reptiles ven en eux, qu’és autres Prouinces. Les naturels habitans auoyentautresfois quatre principaux langages,grandement differents entr’eux, le Chkhimeque, t Otomite, f car cette nation y a aufii demeuré; le Mexiqudn que nous auons défia dit auoir elle commun par toute liNotiuelle E/pagne, & le Tarâfque,(\\ii cftoit l’ordinaire & propre à cette nation, lequel ell fort concis, & ii beau ; cenom fut donné à cet Idiome par les Efpagnols de Earafeue, par lequel nom les Sauuagesdefignent leurs gendres j car les habitans offroyent aux Efpagnols leurs filles volontairement pour femmes, lors qu’ils entrèrent premièrement en cesPro- uinces,auec ce mot Earafeue. Nous ne dirons r-ien de leur habit, vieilles mœurs & cou- ftumes ; car ils fe veftent à prefent tous de robes d’efloffes de coton & de laine, faites à i’Efpagnole,&: portent des chapeaux : les femmes auffi bien queles hommes parlent communément l’Efpagnol ; & ceux qui font induftrieux,ont appris parfaitement plu- lîeurs meftiers ; car pource qu’il y a da bois de Brafil, & d’autre forte en abondance, ils font des cofFres,buffets 6ç autres ouuragesde menuiferiefort gentiment ; ils prépa- rent aufii la foye,&:cultiuentfoigneufement des fruidseftrangersjils nourrmentdu5' gros & menu beftail, &des beftesde charge : ils feplaifent grandement aux chiens, defquels plufieurs s’enfuyent aux montagnes , &: y deuiennent tellement fauuages qu’ils fontvn grand dommage aux beftès ^ ils les nomment Ils peignent alfés bien 5 font experts tailleurs & cordonniers j enfin ils fçauent fabriquer de l’airain qu’ils ont en abondance,defort bons chauderons, hoyaux & autres inftruments rufti- ques. Lors qu’ils eftoyent encore addonnés auxfuperftitions payennes,ils iouïflbyenc d’vne fanté beaucoup plus ferme qu’auiourd’hui, pource qu’ils eftoyent contans de peu de viure , & leurs Rois les exerçoyent'par vn continuel labeur. Ils ont cette an- cienne couftume de le lauer en 1 eau froi^e,de laquelle ils ne peuuent eftre deftournes, car fi Toft qu’ils ont la fiebure, ils fe ietteht en l’eau tout nuds , par ainfi ils augmentent 4 leur maladie,& bien fouuent auanceiit leur mort. Les Efpagnols ont changé la Pro- uince de ilf^f^<7^in,(im fignifie vieil foulier: le fiege du Royaume eftoic O Zmtz.ontz.AyOM les Efpagnols placèrent leurpremiere colonie. Herrera raconte ouen cette Prouince 1 an cId Id xXv.ony trouuavnefort riche mine d’argent, mais corn, me les Officiers du Roi, qui pour lors en labfence de Cortès , faifoycnt tout à leur vo- lonté, talchoyent de l’approprier au fifque , elle fe difparut auffi toft , & on ne la pas veuedepuis. Enoutrei\r//;2(?iÉ-G^4;?,PrefidentauParlementde Mexique^ brufler vil par vne cruauté inouïe.ce miferable Roi délia Chreftien, aceufé fauffiment.com- me les Eipagnols melmes croyent, du crime de Leze-maieRé. La principale ville de ce Diocefe, en la Prouince de MechoacAn , eft appellee des Ef- pagnols VAllodoltdy des Saunages GtiAyAngAreOy^h,c^o\\o enfin le fiege Epifcopal fut transféré : car ilauoit efté premièrement placé tnZmtzontzAy^lt premier Eù^efque 0 d icelle VaJco de ^irogA lauoit tranfportee tnPafeuAro ou diftante àzMexi- que de quarante &fept lieues, où le chemin eft plat & facile à dix neuf degrés de la ligne vers le Nord, ( comme HerrerA la met ) s’il n y a de l’erreur au conte , car lui mef- me ailleurs &prefques toutes les chartes Géographiques mettent cette ville fur les vingt degrés & quelques fcrupules ; Par apres le fiege Cathédral fut tranfporté ^VaIH- Joletol an c I D Id X L I v,qui eft diftante de PafeuAro de fept licuès vers l’EftfPres de cet- te ville il y a vn lac beaucoup plus grand que celui de Mexique^ comme ôn dit, & qui auec la moindre tempefte efleue fes flots fort hauts ; il y a plufieurs canoas & bateaux qui e fréquentent, pource quil s’y prend plufieurs fortes de poifldn, principalement d vne forte fort petite,qu ils feichent au Soleil, & le portent vendre en plufieurs Pro- D umees auecvn grand profit. ^ La ville de^. j^/ri^^/meritele fécond lieu,fituec en la mefme Prouince, à trente & cinq lieues de PAfeuAro vers le Nord-eft; & a quarante de la ville de Mexique vers l’Ou- e , en vn terroir P at.mais qui eft vn peurude,lelongdu chemin qui meneaux mines ^sgcmdcZACAtecas: &ce chemin eft au commencement allés feur, mais quand on yelt vn peu auance , il eft eftimé fort dangereux, à caufe deplufieurs tours & deftours qui y font, & des Cruels Sauuages qui y habitent aux montagnes,iefquelleslesEfpa- gnols appdlcntde/ Vtzochoyczx ils fortentdes montagnes, & des cachettes & lieux ob- curs des rorefts , & attaquent à la defpourueue les paflans, qu’ils pilent & tuent bien ouuent. Au refte cette ville eft fort peuplee, & dans fon territoire il y a plufieurs cen- ies,oij des paiturages beaux fur tous autres. La ville de i". Philippe requiert le troifieme, qui eft diftante de celle de VAllodolid de fffOACAn de cinquante lieues vers le Nord,& de la Métropolitaine Mexique foixan- e & deux vc^le Nord-oueft, en vn terroir froid & maigre. Elle a vn Monaftere 7 deux villes S. Philippe^ S. Michel furent bafties par le Viceroi Loup Velajque, pouis^l^pMiox a l’encontre des pArAfques & Otomttes c en partie rouges , les i fleurs pendent par flocquets & font de couleur verdaftre >le firuiét en eft noir, plein de grains , defquels on tire vne huile iaune , grandement bon pour refoudre les hu- meurs & à rencontre des play es. n. ^ La Prouince de Tanfitaro eft aufli des appartenances d’icelle, laquelle eft d’vn aïr fort froid: comme aufli Xacambafo montueufe ôi afpre. Y V C A T A N. . C H A P. XXVI. Limites de U Proumce de Y \xc2Lt2Lïi, qualités de fin aïr d défit terre. ^ La Prouince &gouuernement de Xucatani^c^Lt elle receut ce nom 1 an cIdIdx vu àcHernando Cortès ç-sx fa première expédition) fut au commencement tenue pour vne Ifle , comme auflTi les naturels du pais l’eftimoyent telle qui la nom- moyent pour cet efteft Peîen,cék. à dire ïflej mais par apres on cognut que c’eftoitvne Peninfule,qui eft prefque toute enuironnee de mer: elle a de circuit plus de c c l lieues dVne forme prefque triangulaire, ou d’ vne figue verde:elle a de large en fa baffe.où elle eft la plus large,entre l’Eft & l’Oueft, prefque cent lieues comme on veut,& autant en- tre leNord ScleSud^depuis la cofte qui regarde leNord iufques auxlimites du gouuer- nement de Guatemala,d\ç. à peine x x v lieues de large entre l’Eft & l’Oueft. Ses limites 5 font fermés vers le Sud de la riùiere Tai&a & des montagnes de Lecando j vers le Sud- oueftde la Prouince de ,• & vers l’Oueft de cdlQàcXilacango^T'abafcoj où la mer entre dans les terres par deux bayes ; la plus grande defqtielles a vne lieue & plus d’emboucheure, & elle reçoit les flots de la mer en fi grande abondance, qu’ils emplif- fent au dedans vn grand lac, dans lequel font parfemees plufieurs Mes, au grand dan- ger des mariniers, qui font contrains de marquer les arbres,pour fe defengager d’icelui comme d’vn labyrinthe. Or ces Mes corne auffi toute la cofte voifme de la terre ferme, font remplies d vn nombre infini d’oifeaux de diuerfes efpeces , principalement de ri- uage &de lacs, que c’eft comme vnmiraclc,de forte que les Sauuages tant des Prouin- ces voifines, que des plus eftoignees, ont couftume d’y accourir pour y prendre ces oi- 4 féaux. Etn y a pas moindre abondance de beftes Saùuages, comme connils, fangliers & finges ; &encores plusde yguanes. ^ La température de l’air y eft fort chaude , principalement du cofte qui regar e le Nord, lequel eft le plus long de beaucoup ; & combien qu’il n y ait nulle riuiem ou torrens en toute cette Peninfule , toutesfois iamais il n y a faute d eau , po^^ ^ commodité & quantité des puits qui y font. Or on y defcouure ci & la au milieu du pais en bêchant fous les rochers & pierres infinité de coquilles de mer, laquel- le chofe, comme aufli la bafleffe du riuage,lepeu de profondeur quy a la mer tout autour, ne donne pas vn foubçon trop vain , quelle a autresfois efte couuertepour la plus grande partie de la mer. L’hiuer y commence en Oélobre ou a la fefte de S. j François , lors que le yent de Bize commence a foufller , qui eft froid dé fà nature & grandement contraire à la fànté des naturels habitans -, car eftans accouftumes au chaud &nefeveftans que légèrement, plufieurs font lors attaques de catharies & c fiebures : & ce temps dure iufques au mois de Mars , fi ce n’eft qu ils fentent que - que efté en lanu^er Feburier j & il ne pleut point en ces mois qu’aux nouuelles Lunes. ( OCCIDENTALES. LIVRE V. Or I-cfté qui dure du commencement d’Auril iufques à la fin de Septembre il y pleut prefque continuellement; toutesfois ilr fement & moilTonnent en ce temn le plus ibuuent abondamment a caufe de la fertilité de la terte. On n'y fent ntef que point le froid de 1 hiuer,fi ce n’eft quand les vents de Nord-cft y fouflïent fort & feulementceux quifontnatutels du pais lefentent pour les caufes que nous auons defu dites. Cette région abonde en belles fauuages j comme cerfs, fangliers & au- tres, d ou vient qu elle a elle anciennementappellee des fauuages Vlumluea, retil- Sf^.cell dire, terre des Paons & des Cerfs, comme rinterprete Later- re n y apporte ni froment ni autres fruids de l'Europe : & on n'y a ttouué iufeues , O ICI aucunes veines d or ou d'autre métal ; d'où il appert clairement en quelle etreut ont elle qnelques Autheurs qui ont efcrit, que les Efpagnols, lors qu'ils y arriue- rent premièrement , y trouuerent des croix faites d'atchd (qi'on nomme vnlgai- te leton, veu qu il ne s ell lamais trouue aucun veftige de ce métal ni en cette Peia- inlulc.ni en aucune autre région de rAmerique. Plufieurs Saunages content auoir recen de leurs predecclTcurs , que cette Pro- uince auoit elle premièrement cultiuee par vn peuple qui y elloit venu , apres auoit longuement vague de deuers l'Orient, lequel auoit ellé conferuéde l'iniure des au- tres nations par la diuinite qu’ils feruoyent , & qu'ils auoyent palfé au trauers de la merles ondes en ayant elle feparees d'vn collé & d'autre., C’eft vnc chofe digne de :o remarque ce que les Efpagnols racontent , qu'ils ont trouué eh cette feule Prfuince quelque ombre duBaDtefme.nno PC -«loi, t , . ^ ^ uciui cux ncgiigcoïc commc mutiIe,pource Qu’lls efti- moyentquepar ce lauemenc.îlseftoyentimbusduprincipe'de toute vertui& eftoyenc munis a l encontre les tromperies &iniures des Diables. Ils felauoyentle plus fouLne b douzième , & ne fe marioyent pas auant que lauoir ^e. I^schori%entpourceIaviMourheureux,&iamaisvnmalheurcux;&lesperes &meies leufnoyent trois lours deuant,&les maris s abftenoyent de leurs femmes. Les Efpagnôls racontent en outre plufieurs chofes touchant les façons de faire & les couftumes Payennes de ces nations , que nous ne ramenteurons pas ici , pour, r cfn" changées. Le langage de ces peuples eftoit vn, . fl ce n eft que ceux qui habitoyent fur les limites & au bord de la mer , parloyent plus proprement & promptement. ^ ^ Penmiule , on y voit de grands édifices baftis de pierre , ce qui cft etoerueillable , veu qu ils n’ont eu ci-deuant aucun ferrement ni autre métal ; qui fans doute eftoyent des temples & oratoires ; car les maifons priuees eftoyent pref- ^ k^^ couuertes de paille. Auiourd’hui on y trouue vn grand nombre 1, rnrnn ^ cheuaux de l’Europe ; grande quantité de poules, du coton pareillement & de 1 herbe de laquelle on fait L«/7s’y cultiuépar tout. 0 Chat. XXVIL De quelques Vrouinces partimBeres de cette Penlnfde , comment elle fut pTemïeTement deJcouueYtç^ IL y a des petites monta^ies qui diuifent cette Peninfule à trauers,qui courent de champotonMn^ au cofteOccidental d ’icelle.iufques à la ville de iS'^/.«.,qui eft .npf ^ ï deux, dont cette partie qui tire de cls monta- înZTA f Lecmdo^ & Tay/a^cà demeuree Jeferte & fans eftre cultiuee P a 1 ette d eau; mais celle qui defeend des mefmes montagnes vers le Nord eft 0 oh s r • "r f Soleil y foit affés chaud dcpu4n leuer lufque; au mer iTt nomment;. qui fontvents lefquels fe leuent furlefoir de là ™e;h montagnes ellla plus faine,de forte que les habitans y font de filon. Srd'vInA 1 f ™y=‘g“h par ces montagnes, TO hom^e trVn T Chrellienncilauoif veu 1 ^00 ,ûlecontedefes voiûns&deluimelîrieneletroropoit,deuoitauoic Aa 2 pour I§g description DES INDES pour le moins trois cents ans;&ilefl:oit G. courbe que là bouche touchoit a fes genoux:, & auoit la peau fi dure , pource qu’il auàit efté toujours nud, & fi rude , qu’il fembloic eftre couuert d efcailles. Her rer a xsicontc d’vn autre veu de plufieurs, qui auoit atteint l’aage de cent & quarante ans , comme on pouuoit recueillir des chofes dont il fe fou- uenoitexadementbien. . „ t j ' Francifco Hernandez, de Corduba defconurit cette Me d.es premiers ; & aborda a cette pointe de terre, laquelle eftiourd’huiappellee Couche :\\s donnentcette raifondece nom • Le Roi de ce quartier inuitant les Efpagnols de defcendre en terre, vfoitfouuent de ce mot Conez Couche, qui fignifieen leur langage, entrés deffous mon toid; voila pourquoi les Efpagnols donnèrent le nom à ce Cap de Cotoche. Mais comme ils furent i < delcendus à terre, non feulement la, mais auffi en vne autre part que les Sauuages ap- pelloyent , maintenant dite des Efpagnols , ils furent deffaitsSt contrains de retourner à Wfle de Cuba. Apres ceftui-ci Imn de Grydua aborda en la mefme région, en cette partie de laquelle eft rifle de Cozumel. ( de laquelle nous parlerons bien toft ) & là il trouua ( comme ils content) quelques temples ou oratoires & des croix de pierre &: de bois, qu’ils n’a- uoyent veu en aucune partie de l’ Amérique iufques la. Les Efpagnolsracontent qu ils auoyent appris des Sauuages, qu il y auoit eu entr eux vn certain Deuin nomme chila chambel. qui leur auoit prédit long temps auparauant , qu il y deuoit venir vne nation eftrangere de deuers le Soleil leuant, qui y venoitdreffervne Croix, telle qu’il depei-A ernoit, que leurs Dieux ne pourroyent furmonter ; & que cette nation fîibiugueroit toutes ces terres, &deftruiroit entièrement le feruice des Idoles , & conuertiroit les Sauuacresau feruicedu vrai Dieu, Vautres chofesde la mefme forte: & delà eftoit ve- nu qu’ils y auoyent trouué tant de croix, & que le peuple demandoit fans cefïe aux Ef. pagnols, s’ils ne venoyent point de deuers le Soleil leuant. Gryalua par apres s en alla a Potonchan & y ayant fouftert beaucoup d hoftilité des h^bitans, il tourna verslaPro* uince de T^abafio fans defcouutir toute la P eninfiile. ^ Bemando Cortès fuiuit ceftui-ci , & aborda l’Me Cozumel, ou il trouua Geronimo de ActuilaryC^ï auoitappris lelangagedes Sauuages •& lui profita grandenient a fubiugucr la Nometle EJpagne : mais tirant delàautre part, il n’effayapas lors a defcouutir la Pen- 5 infule plus auanr. ^ . ,, Par ainfî elle ne commença pas d’eftre defcouuerte a plein ni tout exprès que 1 an cId In XXVII} auquel temps Prancifeo deMonteyo. ayant obtenu du Roi vnamplepri- uilege,fe mit en deuoir de fubiuguer l’ Me de Cozumel & la Peninfule Yucatan : & ayant premièrement attaqué rMe,peu apres il pafîa àla Continente} arriuantàla bourgade Xamanzal. où il eut vn rude combat auec les habitansqui y eftoyent fort vaillans, neantmoins ilauança le long de la cofte iufques a auquel lieu le vindrenttrou- uer de leur bon gré les Gouuerneurs delà Prouince Chacua. defquels il appert que la principale bourgade de ce quartier s’appelloit Turoh,^\e. Seigneur d icelle Delà il alla en la Prouince qui eft auffi nommee Yzamal, fans que les habi- 4 tans s y oppofafrent.& delà en celle de rutulxm^t principal lieu de laquelle tGcoitMim ( à quatorze lieues de la place ou eft maintenant Merida ) les habitans de laquel e ui demandoyent aide à l’encontre des . En la mefme Peninfule eft la Prouince de chetemal .Aüxis laquelle anciennement fut baftie Villareal.^ maintenant Salamama y eft fituee. Campeche & champoton ou les Efpagnols ont maintenant vne ville. A icelle eft iointc la Prouince Cochmque , afpre &montueufè,auec vne bourgade nommee Tulma & celle de chahle.oM les Efpagno s efpererent long temps en vain d’y pouuoir trouuer des mines d or. Proche de a e a, Prouince i â à \ Enfin les habitoyent la Prouince la principale bourgade de a-j quelle eftoit appellee Mayapan-^ où Merida eft a prefent baftie : les Cocomes tenoyent Zutf^td} & Canuli eftoit habitée par des eftrangers de qui eftoyent Mexiquams d’origine. C H A P. occidentales. LIVRE V. i-g^ C H A P. XXVIII. Villes des Bj^agnols en Yncùm, Merida,Vâlloclôlid,Campeche. La principale ville de cette Etouince eft .Æfd’^'/^jdiftârite de là ligne de Vingt de- grés vers le NordjComme afTeure Hèyrera,ûtute preitiue au rniîieu de cette Peh- inlule , plus près totitesFois du riuage Septentrional, & à enuirori douze lieuès de la mer : ôn dit qü il y aut)it autresfois vne grande bourgade dés Sauuages, orneé de plulieurs grands édifices de pierre, dans les rnuraillés déiqüels il y aiioit des hom- 0 mes nuds qui y eftoyent tailles, qtie les EipagnoJs eftirtietent auec apparence que c e- ftoyent leurs temples : auioutd'hni la ville s'appelle pour lafimilitude qu elle a auec celle d E/pagne. Le Goüùérneur de toute la Prouince auec les autres Officiers du Roi y font leur ordinaire dettieüre : il y à auffi l’Eglife Cathédrale; combien que comme ie trouue qu il a elle effirit par ceux qui l’ont veu , il n’y demeure pas plus de cent familles Eipagnols. ^ - La fécondé eft Faf/odûlid,diîia.ntt de Merida de. trente & vne lieue vers le Sud-eftj il y a vn Monaftere de Cordeliers aftes fomptueux : on conte dans le territoire de cet- te ville plus de cinquante mille Sauuages qui payent tribut àüx Eipagnols. La troifieme ville eft Campeche, dediee au nom de à". François , elle eft diftànte de la 0 ligne,comme il a elle remarqué par les plus curieux pilotes, de dix neuf degrés, à cin- quante lieues prefque de Meridavùïs l’Oueft ou pluftoft Sud-oueft : elle eft affifefurle riuage qui regarde la NouuelleEJpagne-, ayant vn moyen port dans vne baye large , mais peu profonde.Elle a receu ce nom d’vne certaine forte de bois, duquel les Teinturiers le leruent, qu on tranlporte en grande abondance en l’Europe , qui eft vne eipece de Brajili & peut eftre l’arbrifteau dihuragua , que nous auons èlcrit ci-deftiis. Au refte cette ville fut prilè lan clnlo xcvi par Wilhelm Farker en cette maniéré. Ayant palTe lé Cap de Cûtoche , & coftoyant là coftéde TucatahiwicçuQs à l’autre Cap nomme vulgairement Z> il lailïa Ibn nauire à l'anchre àfix lieues delà ville, 6c ayant mis cinquante & fix de lès gens dans vn grand canoa de Sauuages , qu’ils appel- 0 lent Firague, il tira vers le port; où ayant defeendu à terre auprès du Monaftere de S. François à trois heures du matin , il furprit fi inopinément les habitans , qu’il prit le G ouuerneur de la ville & l’Alcade, & làns aucunepeine la ville, que les Bourgeois qui eftoyent plus de cinq cents, auoyent abandonnée s’en eftans fuis de nuiéf. Mais com- me ceux qui s’en eftoyentfuis elpouuantés lanuideurent repris courage, ilss’alTem- blerent en grande troupe, & ayant allailli les Anglois amufés au pillage, ils en tuerent de prime abord fix , & blelTerent leur Capitaine griefuement d’vn coup d’arquebulc lous le tetin gauche; lequel toutesfois ne s oublia pas en vn fi grand danger, mais voyant que les gens n eftoyent pas capables derefifter à l’effort d’vne fi grande trou- pe,il effaya par vn nouueau ftratageme de fouftenir l’affaut de fé^ ennemis & de le rom- 0 pre : car ayant lie tous les prilonniers enlemble bras à bras , les mettant au deuant de fes gens en forme de barricade, il le retira en ordre dé bataille vers le port. Il y auoit là vne fregatte a l’anchre, chargée du tribundu Roi, d’or, d’argent &id’autres precieulès, marchandifes,laqueile il prit à la veuë de l’ennemi, & l’emmena auec le Pirague à Ibn nauire. Ils prirent auffi fans peine vne bourgade nommeeJ’^^^?, qui eftoit vis à vis du lieu où ils eftoyent anchrés, habitée de trois à quatre cents Sauuages , & emmenerenc tant de bois de Campeche^ de miel & de cire , que leur nauires peut porter, & s’en alle- reut chargés d’vn gros butin. La quatrième ville fe nomme Salamanca-, fituee en la Prouince de Bacalar ou chete- mdi feptante lieues de la ville de Merida vers le Sud, 6c prefque d’autant de VallodoM 0 le long du riuage qui eft laué du golfe de Mexi^m. Aa J Ch A P. DESCRIPTION DES INDES C H A P. XXIX. Cefle marine de Yucatan , Ijles adiacentes, La Mer en tout le circuit de cette Peninfule efl: fort plate,de forte que les grands nauires ne peuuent feurenient approcher la cofte de plus près que de quatre ou cinq lieues, & n’a aucun haure que pour de petits nauires, & le flux & reflux y eft beaucoup plus violent,qu en aucune autre part de la 7{ouueüe EJpagne : en outre le ri- uage eft: fi bas & fi plat, fans qu il y ait aucunes colines ou mottes de làble ( fi ce n’efl: entre Campeche & champôtün,où il y a quelques coftaux qui fe monftrent de loin,& vnc i o montagne afles haute qu^ils nommQntyu\^zir:cment Mono de los Diabolos i ) ne peut eftre veu de la mer par les mariniers, qu ils^n en foyent fi proches,qu ils font en danger. Outre tout cclafil faut bien prendre garde que les grands nauires fe tiennent loin de la colle, à caufe des bancs & baffes j & non moins pourles rochers, qui bordent îe riuage de toutes parts,d y perdre les anchres & les chables fi onn’eft: fort foigneux} toutcsfois encore que les nauires y touchent le fonds, il n y a pas vn danger fi eminent, à caufe que le fonds y eft: mol & plein de vafes. En outre cette Peninfule regarde vers leNord lifte de Cuba^àt laquelle elle eft eftoignee de feptante lieues comme on a remarqué ; vers l’Eft elle a les Prouinces que l’on nomme des Hondures-^ entre les deux il y a vne grande baye (\2LC\yitllQ luanGryalua lo auoitnommee Baya, de l' Afeemton appellee à&sHondareSj remplie de plu- fieurs Ifles, ( defquélles nous parlerons en Ibn lieu ) tachees de plufieurs naufrages, de ceux qui trafiquent dans les deux Prouinces. Or du collé quelle attouche la Prouin- ce de T" abajeo, on y conte ces ports ; Cicla & Telichaq^ue , item Ckal & la riuiere Cauq^uil, qui fort en mer par deux emboucheures : puis le môyenportde Campechct du collé quelle regarde la BJpagne. Enfin le Cap qu’on appelle fur le propre retour que fait la colle vers l’Ell; au deuant duquel ell l’Ifle qu’on appelle Befeonofeiday feparec d’icelui de quelques lieues, laquelle eft: toute enuîronneede baffes &rochers, d’où elle a receu fon nom. Et enuiron dix huid lieues de cette-ci vers fOuell les Ifles de Lazarz,a &T A?, trois petites Iftes quifont comme iointes à vne autre ou vn peu 5 0 plus grande, fort dangereufes pour les nauires à caufe de plufieurs bancs. En outre à feize lieues du Cap fufdit , font fituees les Ifles qu’on nomme de Aréhas : & U Bermeja a trente lieues vers le Nord; A trente lieues de laquelle vers l’Efl: font Los Negrillosy trois nies ceintes de toutes parts de bancs & rochers. Enfin les Ifles renommées , qu’ils appellent Los Alacranes, font dillantcs de la colle de Tucatan de vingt lieues vers le Nord ; que les mariniers doiuent euiter foigneufe- ment , pour les balïès & rochers voifins ; voila pourquoi ceux qui quittans le dernier Cap de rifle de voyagent vers la NouueÙe EJpagneyont coullume félon la diuerfîté+ du temps , de drelfer leurs cours ou au dedans ou au dehors de ces Ifles : ce font trois petites Ifles dillantes de la ligne d’enuiron vingt deux degrês,commé eferit OusedoyCn- 4(3 uironnees au long & au large de rochers aueugles, & diffamées de naufrages de plu- | fieurs , notamment.du Licentié Suajis qui toutesfois en efehappa auec fes gens mira- | culeufemenr, comme Ouiedo le raconte. C eft: à fçauoir qu’ellant parti du port de Xa-^ \ guayi\m ell en fîHe de C»A^,auec vn nauire de quarante cinq tonneaux, & ayant dou- blé le Cap de S. Anthoine , comme ils tiroyent vers IçiNouuelle EJpagsteyils furent agités d’vne horrible tempefle par quelque iours dans le golfe de Mexique,^ enfin ils rompi- rent leiirnauire fur des rochers , d’où ils fe fauuerent a la nage , &auec vn petit canoa, quarante fept 611 huid tant hommes, femmes, quenfans, fur vne petite Ifle ou pluftoft banc de làble efleué par delfus l’eau de la mer, où ils vefeurent miferablement quelques iours de tortues qu’ils y trouuerent ; âpres ils trauerferent à vn autre vn peu plus gran- de, où ils trouuerent quantité d ’oilèaux ; & enfin dans vne troifieme aufli petite , dans laquelle ils fouirent vne folfe & y trouuerent de l’eau douce, non fzns miracle, plu- fieurs cependant eftans morts delbiflàils ballirent vne chaloupe des planches de leur nauire rompu, qu’ils enuoyerenten \2.Nouuelle Ejpagne , d’où vint vn nauire qui emme- na auec grand danger le Licentié auec feize autres qui eftoyent reliés de tout ce nom- bre en la Nouuelk Efpagne. Mais ' \ I i OCCIDENTALES. LIVRE V. Mais il eft temps que nous retournions à la cofte de la Continente. AyantpafTéle Cap Delgado vers l'Eft,on rencontre Sifal, port de la ville de Merida, au deuant duq uel il y a vers le Nord certaines baffes , que les mariniers nomment Baixos de Sifal^ lef- quelles font disantes de la ligne de vingt & vn degré & quarante fcrupules, & s ’eften- dent en mer Sud-eft & Nord-oueft trois lieues. Or le Cap Oriental de cette Penin- fule ell: appelle Cotoche,(m la hauteur de vingt & vn degré Ôr quelques fcrupulcsjoù on voit vn bourg d’indiens auec vn petit temple, qu’ils nomment IgreU de Icao. Dés ce Cap la cofte fe courbe auffi toft vers le Sud & Sud-oueft , & prefque datis cette courbure de la cofte,iI y a quelques petites Ifles qu on appelle ^^/^^«^^m,qua- 3 ficoniointesauecla terre ferme. Avn petitefpacedelàfeprefente vne Ifle,nommee CoztmelA^ bldole renommeedes Sauuages,à laquelle au temps paffé les habitans de rucatan accouroyent fort fouuent de toutes les Prouinces voifmes par reli^rion • elle eft eüoignee de la terre férme de quatre lieues ; a de long quinze lieues & cinq de lar- ge eft diftante de la ligne vers le Nord de vingt degrés ouenuiron. Les naturels habitans d icelle vloyent de meftne langage, mœurs & couftumes que ceux de Tucatm. Brancifco Hernandez aborda le premier dans cette Me , & apres lui luan de Gryalua l'an cloloxvm &luiimpofaIenom de 5.Crtf/x,quifemblepourtanreftreaboli.Suiuanc la cofte qui eft a la main droite, il y a au fonds du golfe des Honduresy(c2x cç.itc baye que nous auons parle ci-deuant,s appelle auiourd’hui ainfi ^ il y a trois petites I/les enuiron- ) nees de baffes,qu’on appelle T^rtangulo de leur forme : vis a vis du lac Bacalaly qui eft en la terre ferme,à trente lieues d’vn autre lac nommé chetemal. Le refte de la cofte iuf- ques àla ville de Salamanque eft ainfi bordee de plufieur s Mes,l’vne defquelles fc nom- me Pantoiay'Çïoch.t des baffes, que les mariniers nomment par vn aduertiffement ne- ceffaire ^itafuenno , c eft à dire veillés ; l’autre Zaratam la troifieme Lamanay ÿ & la dernière tout au fonds du golfe ; defquelles perfonne n a parié que du nom. Et iufques là la cofte de ICucatan court vers le Sud ou Sud-oueft. T A B A S C O. C H A P. XXX. \ Limites de la Prouince de T , qualités de taïr ^ de la terre, ^ habitans , n/illes ^ autres chofis d'icelle, La Prouince de Tabajcoio'mtks limites vers leleuant auec 7«fÆ/^^,dugouuerne- ment de laquelle elle eft contee, vers l’Occident auec Gualzacoalco yvcrsle Sud elle eft feparee par des montagnes de Chiapa &c de Fera paz ; vers le Nord elle a là mer Septentrionale ou le golfe de ^Mexique. Elle a de long fiiiuantla cofte delà mer enuiron quarante lieues entre l’Eft&rOueft: & prefque autant de large, depuis la cofte iufques aux, montagnes de la Prouince de chiapa. I Le territoir y eft pour la plus grande partie plat & humide , entrecoupé par tout de plufieurs marais & eftangs, ( dans lefquels fe nourriffent diuerfes fortes de poiffons & mefmes de fort grands, principalement des CManatü & des tortues de mer) néant- moins il eft couuert de force forefts & bocages efpais. L’aïr y eft grandement humide, pource qu’il y pleut prefque neuf mois continus, & auffi fort chaud,d’où vient qu’il s’y engendre vne grande quatité de moucherons fort ennuyeux. Au refte la terre y eft fort fertile, & ne fournit pas feulement abondamment de pafture aux beftes,mais auffi elle donne auec vne grande largeffe du CUays & des Cacaosy qui font la richefle de ces païs. Car les naturels ayans efté enfeignè des Efp£ignols,ont commencé il y a ia long temps, de labourer la terre,renfcmencer,depaiftre du gros &:du menu beftail,& d’y culduer les arbres & fruiéts eftrangersjd ou vient qu’on y trouue pour le iourd’hui force vignes, figues, oranges,citrons & autres femblables frui£ts:fàns que les forefts y en produifènt de leur nature de fort bons : entre lefquels on prife grandement les Mameyes cpiOuiedo deferit entre lesfruiéls del’Me Hijpaniole exi cette façon, c’eft vn très-bon fruict,le plus fouuent rond,de la grofîeur du poing, d’vne efcorce rude, de couleur leonine, ayant parfois deux, parfois trois noyaux, couuerts au milieu d’vne petite peau deliee, de cou- leur de chaftagne , d’vn gouft amer comme fiel jccs noyaux font enuironnés d’vne chair i<)2. DESCRIPTION DES INDES chair de couleur faulue , & de la mefrae faueur qü’eft vn perfet : l'arbre qui porte Ces fruids eft fort grand, & beau ayant les fueilles comme celle du noyer, mais beaucoup plus grandes. Itcm,lesZi*^<7/(Ê’^,- L’arbre qui porte ces fruidseft nommé en hiNounelU Ejpagne , Cochiz. T zafotl^ lequel Fr. Ximenes defcrit en cette maniéré ; c’eft vn grand arbre & difforme, duquel les fueilles font femblables à celles de l’oranger, rares & ioin- tcs trois à trois par interualles ; le tronc eft martelé de petites marques blanches -, les fleurs en font petites &iaunes;fon fruid efl: de la forme d’vne pomme de coing, & parfois de la mefmegrofreur,lesEfpagnols l’appellent il eft bon à man- ger & d’ vn bon gouft ; mais il n eft pas fort fain,fon noyau eft vn venin mortel. Et les Aguacâtes & GuajaboSi defquels nous auons défia parlé, & d’autres excellents en odeur i -& en gouft.Maisils eftiment fur tous vn arbre donieftique,qu’ils nommcniXocoxochitlj qui eft fort grand, ayant les fueilles d’oranger , fort odorantes ; fes fleurs font rouges comme grenats , de la mefine odeur que celles des orangers , agréables & douces : les fruids en font ronds & pendans par grappes , qui font au commencement verds , & puis apres roux,& à la fin noirs ; d’vn gouft acre & mordace,& de bonne odeurjchauds & fecs au troifieme degré, de forte qu’il peut eftre mis au lieu de poiure, & on s’en peut feruir chés les Appoticaires pour du fruid de Baulme. Les Efpagnols l’appellent poi- nte de Tabafeo. il corrobore le cœur & le ventricule ; eft ami de la matrice j diflipe les vents ; defbouche les obftrudions, prquoque rvrine & les mois j appaife les douleurs de coliques & des reins : confume les humeurs efpaifires & vifqueufes & chafle les ri- ^ gueurs desfiebures. On y recueille IcMays deux fois l’an &: parfois trois : la terre y produit afles bien le ris & le mil, comme aufli toutes fortes d’herbes potagères. Cette Prouince abonde en tigres j lions, cerfs, dains, fàngliers , connils, armadilles & autres femblables. Ily â aufli vne grande quantité d’oifeaux d’vne infinie variété. Combien que le coton y vienne par tour, tôutesfois les Saunages ne s’en foucient pas,mais ils ti- rent leurs veftements & autres chofes neceffaires de Tmatan pour la plus grande par- tie ; & ils s’occupent à nourrir des vaches & des pourceaux, & fur tout à garder les fruids de C4C4e?,lefquels ils peuuentà grande difficulté defendre du larcin des finges & efcurieiix quand il commence à meurir. Les moucherons y font en fi grand nombre & fi fafcheux,qu’à peine peuuent-ils dormir fi cen’eft fous des tentes. 3 Cette Prouince a efté autresfois plus habitée quelle n’eft, pource que la plus gran- de partie des naturels y font morts de peftes & autres maladies, & principalement par cette mauuaifecoultumc qu’ils ont de feîauer d’eau froide, quand ils font atteints de quelque maladie que ce foit; & pource que les loixChreftiennes leurs défendent d’a- uoirplufîeurs femmes, ils nepeuuentpasmultiplier auiourd’hui commeau tempspaf fé. Lors qu’ils eftoyentPayens ils mangeoyent peu,mais ils fe rcmpliflbyentde beau- coup de boflTon, principalement de celle qu’ils faifbyent àcCacao où ils mefloyent de la boüilliej comme aufli d’vne autre faite de A/^jyjcuit,vn peu aigret & fort agréable à boire aux grandes chaleurs: mais depuis qu’ils ont commencé à fe façonner aux mœurs des Efpagnols, ils viuent en plus grand nombre enfemble dans des bourgades, & pren- a nent leurs repas à certaines heures, viuans de chair de bœuf & de pourceau ; & vfent de breuuage fait de Mays cuit & de accommodé de plufieurs chofes aromatiques, qu’ils nomment Cocolate. Finalement ils vfent de trois langages ; le premier defquels eft appelle chontal, enri- chi de plufieurs mots,bref& leplus commun ; l’autre eft celui dont fe feruent IqsZo- ques , qui habitent les montagnes, lefquelles diuifent cette Prouince de Chiapa : ôt le troifieme celui de Afagne , mais principalement pource que les Religieux ont donné au peuple plu- ; fleurs chanfons en ce langage,aufquelles ils fe plaifent grandement. Les Eipagnols n’ont qu’vne ville en cette Prouince, qu’ils appellent du nom dupais ‘Tabafcojioxxtcsiois ils la nomment fouuent la Villa de mejlra Senmra de la V ittoria,ç.n mémoire de l’heureux fucces d’vn combat que Cortès zwt proche de ce lieu contre les naturels du pais, lors qu’il entreprit fon premier voyage en la NouueUe Eÿagxe ; & fou- iient aufli Vittorïa, Elle eft diftante de la.Cuidad Eeal,\iilc fituee en la Prouince de - Chiapa OCCIDENTALES. LIVRE V. chiapa de Icptaiite lieues, a laquelle Prouince on va premièrement en montant la ri uierc de Gryahu quarante lieues, puis par terre à trauers de rudes & fort froides mon- tagnes trente .-plufieurs riuieres defcendentde ces montagnes dans laProuince de Taha/cû. La meihie ville eft diftante de la Métropolitaine Mexlcj^ue par le chemin qui y va par terre de cent &: ibixante lieues, par mer iufques à la Vera Cruz, & delà par terre cent cinquante : de Campeche par mer cinquante. ^ La riuiere de Gryalua cft fort grande, & qui a au deRus defon emboucheure plus de huiabrafles de profond, mais au dedans d’icelle elley eft fort plate &difficileàentrer, acaufe qu ily brifefort par le moyen du chocqù y faitlamaree contre le courant d’a- o mont qui elHort rude. Il y defeend cinq autres riuieres, fans vn nombre infini de tor- rens & emilTaires deplufieurs lacs. Or elle fe defeharge en la mer par deux bouches, ? vn quart de lieue de large,& coupe la colle(quis-eftcnd en cet endroit Eft&OtieftJ a trauers, defeendant droit du Sud vers le Nord :l’autre court du Sud- oueftaiiNord-elr. A trois lieues de la mefme ville, il y a vne autre riuiere qui fort en mer par deux bran- ches î l vne defquellesap^s auoir falüédepres Grydua^fe courbe comme vn coulde,&: rafe la bourgade de rdafctllo .reliayxe de la vieille ville de Fontonchan, lequel donna à cette renommee interprété Vis à vis de ce village, le torrent Tcicanis, paflant par vn certain lac,pourfuit fon cours vers la riuiere de S. Petro&cFaulo, qui eft vne 0 autre riuiere de cette Prouince affés grofle 5 mais qui a vne eftroite emboucheure , ou- uerte au Nord, profonde & fort claire,nourriirant de fort bon poiflbn en grande abon- dance : fes nuages font couuerts de forefts verdoyantes, dans lefquelles il fe prend qnanntc de Sauuagine. Or par le torrent fiifdit, les Mextauaim lors qu’ils tenoyent cette Prouince au^ leurs garnifons,auoyent couftume anciennement d’aller auec des canoas ala ff^tereiTe Xkditnÿ) ; d'où vient que les Eipagnols ont nommé le lac £/ ùga dvX/«/«gv.Dc celacfort lariuiere rjlafa vers le Sud-eft, d'vn canal nauigable, lequel ceuxquivontar»«f«defcendentauecdescanoasiufques Enfin depuis le mois de Septembre iufques à la fin de Mars.la coftede cette Prouin- ce eft fort tormentee des vents de Nord. Nord-oueft & Nord-eftide maniéré qu’on 0 n’ynauigepas en ces mois la fans danger; les autres mois reftans le vent Sud-eft', &: Sud-fild-eft y régnent J rarement celui du Sud,lequely eH fort mal làin & pefant au cerueau. . ^ Bb DESCRIPTION DES INDES OCCIDENTALES, L I V R E s I X 1 E M E. NOVVELLE GALICE. C H A P. I. Vefiripîion /^Nouuelle Gûicc, Froumces ^ qualités de taïr ^ de la terre fruïUs ficelle, AN ovvelleGalic e, laquelle lesEIpagnols appellent auflî Guâdalatara de fa capitale ville , & quelquesfois Xalifco de fa principale Prouince,con- ftitue auiourd’huivn reflbrt iuridique à part foi fé- lon la partition nouuelle des Efpagnols : elle eft li-zc mitee versl’Eft &Nord-eftduportde XzNamdad & du marais de Chiapala , qui la diuife de la Nouuelle Ejpagne ; vers POueft du golfe de Californie, ('bien qu’elle enferme les terres qui font fituees plus outre vers l’Oueft ) & vers le Nord-oueft & le Nord , elle s’eftend parmi degrands païspeu cognus,vcrs lef- quels fes limites font indéterminés. Ce qui eft en quelque façon cultiué des Efpagnols, a de large , comme on dit , plus de cent lieues , & du port de la Nauidad félon la fuite de la cofte de la mer enuiron trois cents. Ce gouuernement embrafteplufieursProuincesparticulieres,les principales def- 3( quelles fcfnt, Guadalaiara, Xalifco, los Z acatecas, chiametla, Culuacan, Cinaloa, NeuuaBi- Jcaya ;&les frontières California ,Cibold, .^muira, Neuuo Mexico : nous trai- terons en fon lieu & félon l’ordre requis. , En toutes ces Prouinces l’aïry eft plus temperé que fjroid : en luin, lulliet &: Aouft il y a force pluyes & tonneres : & fortfouuent des tremblements de terre, grandement à craindre pour les grands & folidcs édifices. Autrement elle iouït d’vn ciel ferain &: rarement couuert de nuees hors les mois de pluyes ; La terre apres les pluyes y eft fort feiche& nullement boüeufe: les vents yfoufflent le plus fôuuentauec violence prin- cipalement du Sudjles pluyes y tombent ordinairement fort dru & par ondees.La ro- fee du matin y eft grande ; autour la fefte de la Natiuité , il y fait des frimats & legeres 4 gelees : aurefte toutes ces Prouinces font fort faines, & conferuatrices delafantéde leurs habitans iufqucs envne longue vieillefle, & nullement fuiettes à la pefte. Elles onttoutesfois leur pefte.vne grande abondance de moucherons & punaifes, qu’on dit y eftfe aufti groffes que des febues,& eflcuent par leurs piqueure veneneufe des puftu- les aulTi groftes que des noix ; elles ne font pas aufti fans fcorpions, mais leur piqueu- re n’eft pas mortelle, combien qu elle excite de griefues douleurs vingt quatre heures de long, que l’on guérit auee du fuc de pommes de coing. La terre y eft plus montueufe que plate , fablonneufe en fa plus grande partie , quel- quesfois argiileufe : il y a force pierres, toutesfois nous nations leu qu’on y ait iufqucs ici trouué du marbre, ou des pierres de quelques prix : les murailles des maifons y font j le plus fouuent de mortier ou d'argile. A quatre lieues de la ville Guadalaiara,\c long du chemin qui va ^ Z acatecas, il y a vnc montagne fort haute,de laquelle la montée & defeenteeft d’vnelieuë,inacceftibleaux cheuaux & autres beftes de charge;les autres montagnes en tout ce quartier y Ibnt fort afpres & bocageufes, où il y a de grands pins & de forthautschefnes,&grande abon- dance de loups. , ^ Ils y OCCIDENTALES. LIVRE VI. îï s y ti'ouiie force mines , principalement d’argent & de cuyure; & nulles d’or iufqiics à prefent , de fer & d’acier fort peu. En toutes les mines ou en la plus gran- de partie, il y a du plomb meiîé, & des pierres en grand nombre, quon nomme CMArgafite ôc Chalciuites i comme auffi des pierres qu’on dit guérir le mal de la grauelle. Le terroir en plufieurs endroits y eftfalpeftreux, d’ou vient qu’ils cuifentdu fel de l’eau de pluye. • La plus grande riuierede toutes ces régions eft celle de , (^ui fbrtant du lac de UHechmean , court rapidement vers le Nord-oueftj & fe précipitant à quatre 1 0 lieues de la ville de Gnadaîaiara , du haut d’vn làult de dix bralfes , fe roule en la mer du Zud / on ne le palfe en lieu qui foit à gué , mais fur des radeaux faits de cannes &: de courges , fur lefquels fe feent les hommes auec leurs hardes, on tient les cheuaux auprès dans l’eau, que les Sauuages pouffent à lanage à l’autre riue non fans grand danger. Dans la Prouince de Tcâtlân il y a vn grand lac de vingt lienes de circuit; vn autre dans Ziimalco de douze ; 1 vn & l’autre enuironnés de beaux pafturages,où il y a o-rari- de quantité de belles de charge. ^ ^ Prefque en toutes les vallees croifl en abondance 1 arbre LZÎiJ^uitl , que nbüs âuons deferit au liure precedent, portant de longues efeoffes pendantes , fort femblables 10 aux carrobes : & vne plante de mefme genre laquelle ils appellent Guamoche ,* les Saunages mangent des deux. Entre les arbres qui font là en grande abondance, lé Zeybo excelle en grandeur, Ouiedo lenomme , qui conte mérueilles delà «Gran- deur de cet arbre; toutesfois fon bois ell fpongieux & prefque inutile, & on ne s’en fert point à aucun ouurage: il porte vn fruid comme des efeoffes, rond, plein d’vne certaine laine fîibtile, qui vole en laïr lors que les efcofles eflant meures s’ouurent: on dit que l’ombre de cet arbre efl fort faine. Il s’y trouue auffi force Tunas, qui por- tent de fort bons frui£ls,mais la CochiniUe n’en efl pas fortprifèc. Au lefle les pommes de coing, les poires, les figues, abricots, melocotons j & autres fruids de l’Europe y viennent là fi abondamment & y.meuriffent fî bien, qu’ils [0 furpaffent de beaucoup les fruids d’Efpagne : mais les cerifiers y iettent tant de fueil- les &de branches, pour la fertilité & humidité de la terre, qu’ils ne portent que fort peu de fiuids : & les oliuiers n’y donnent point de fruids pour la multitude de four- mis , qui fouïffent fous leurs racines . Les campagnes fourniffent abondamment de toute forte de paflure pour les belles : & produifent de leur nature vne efpece de truphles fous terre ( que les Efpagnols nomment Cajlanuela, ) qui n’efl moins bon- ne pour erigraiffer les pourceaux que le gland ou les chaflagnes. , terre y porte aufîi le froment volontiers , & le plus fouuent en rend foixante boiüeaux pourvu; le auffi deux cents & parfois dauaütagé: les naturels ni pri- ent pas beaucoup le fegle ni forge, auffi ils n’en ont pas de befoin,mais ils cultiuent |.o foigneufement ôc auec grand profit les legumes & les herbes bonnes à manger de Europe. Ils ont fur tout grande quantité duquel nous auons parlé ailleurs: 1 s ont auffi de la Cedauilla, auec laquelle ils guetifïent la galle & les vlceres à leurs cheuaux. Les fourmis font en ces païs vne pefle aux femcnces; comme auffi les pics, qui y font fort petites & gueres plus greffes que les p aller eaux, mais en fi grand nom- 1 e, qu elles abatent & foulent tout vn champ, quand elles s’appuyeiit vhe fois fur les cfpics, & ne s’enfuyent pas par aucun cri ou autre efpouuentaü. Les riuieres y abondent en poiffon & les forefls en venaifbn , tout de mefine qu’en IzNotmelle Efpagne. Ilyaauffi vne grande quantité de mouches à miel, qui n’ont point :o a aiguillon,& font leur miel dans les creux des arbres^ Bb 1 Ch a p. Üiatml des habitans Ü^aturels, leurs mœurs coujimesi * habitans E^agmls qui y fent. Le s Naturels habitans de ces Prouinces font d’vn naturel fort changeans,& pouf vne legere caule ils changent leurs demeures; &fort Ibuuentpour la liberté & afin de s’exempter des tributs , ils fe retirent dans les forefts & folitudes , où ils retombent derechef en leurs vieilles mœurs & cruelles couftumes : Ils font indu- ftrieux &: fubtiles,&: aucunement dociles mefmes és chofesqui concernent la religion, i « mais ils font parefiTeux & fur tout impatients au labeur, auquel ils ne felailTent pas em- ployer qu’à peine, fi ce n’eft auec grand loyer. Ils font vn peu plus grands de corps que les Mexiquains: Ils fe veftent de chemifes de coton , & de manteaux quarrés tifiiës de qu’ils attachentfurleursefpaules auec deux boucles. Ils fe feruentde mar- tes de ionc au lieu de lid , qu’ils couurent de petits matelats de coton : ils portent au- tour de leurs bras & iambes des pierres verdes & des coquilles de mer fort belles pour parure: Il n’y a rien à quoi ils s’employent plus volontiers ni àquoiilsfedeleëtentle plus qu’aux dances, aulquels ils paffent le temps des iours entiers au rude Ion bc enroüé d’vn tabourin de bois,en chantant & fe peignant le corps & fe bigarrant de diuers plu- mages, & s’occupent à boire iufques às’enyurer; ils n’ont nul defir de richeffes ; con- ic tans de cultiuer quelque peu de terre ; Ils cultiuent feulement auec grand foin le guey^bect pour l’amour de leur boilTon, ils fe feruent pour vaififeaux des fruids d’vtï arbre , qu’ils nomment Tecomates j parfois fi gros qu’ils contiennent de liqueur vne Azumbre i quieft vne mefure d Eipagne contenant ( comme remarque l'BcluJe ) trois liures bc quatre onces des choies liquides ; reipondant à deux ièptiers des anciens, fix deiquels faifoyent vn conge,ou dix liures. L’arbre qui les porte efl: grand, ayant les fueilies femblables au mœuricr,lequel porte ces frui£ts,faits comme courges,de diuer- fes formes & groifeur. Ils viuent le plus iouuent de chair,d’où vient qu’ils nourrÜTent des poulailes en grand nombre, Ils fe feruent de Maysso^i ou mefinepiléau lieu de pain,& du Çacao broyé , méfié auec du Ma,ys rofti pour leur ordinaire viande ^ & de la 5 c \i(incnx àwMagtiey ou d’vnbreuuagecompoféde & de pour leur vin.Le plus fouuent aufli ils méfient auec de l’eau du Cacao, àvL MaysÂQ l’Axi & autres eipiceries pi- iees enpafte , laquelle ils boiuent , & ontcouftume de porter cette pafie dans des facs de cuir lors qu’ils voyagent. Ils ont abondance de coton , & içauent la maniéré de le tiftre , mais par leur naturelle parefle ils ne tiennent conte de le cultiuer ni de le rc- cneiller. Au temps paifé il labouroyent la tçrre auec des pieux de bois , mais main- tenant ils ont appris à la fouir auec des hoyaux faits à la façon d’Efpagne. Ils habitent aufii à prefent enfembles das des bourgades, & ont leurs Seigneurs, luges» Preuofts bc Sergens,felon la couftumedes Efpagnols. Et les Roisfuccedent par droit héréditaire , leuts autres Officiers font eftablis par les Gouuérneurs du Roi. En fom- 4^ me ce leur eft vn grand deshonneur d’eftre tondus ils n’affedent rien tant que la gloire d’eflre vaillans. lufques à l’an cîd Id lxxxii ( comme il a efte rernarque par des Autheurs fidelles jil s’efl: peu trouuê en ces Prouinces de Mejliz,c efl; a dire, qui foyçnt venus d’vn Efpagnol & d’vne Indienne, ou au contraire,que les Anciens ap- pelloyent Hybrides : mais il y a plufieurs Negres qui y font nés,qu’on dit qui furpaflent en induftrie bç tolerence de trauaii de beaucoup ceux d’Afrique. Voila ce quenous auions à dire de ces nations en commun. En particulier on fait mention des Cazeanes , qui habitent fur les limites des Zacate- f^fjdi&rents des autres enlangage & mœurs; Les Guachachïles aufli diffemblables en Idiome ; bc enfin les Guamares le langage defquels efl fort concis,& difficile à appren- jo dre aufli bien que celui des autres : & ces nations fe font peu à peu appnuoiflees,Iors qu’ils ont commencé à viure enfemble dans des bourgades ; mais ils font fi addonnes a defrober, qu’ils aiment mieux vaguer , & s’abftenir de la fréquentation des Chreftiens. Les Efpagnols qui demeurent dans ces Prouinces , s’exercent pour la plufpart au trafic &aux mines : quelques- vns semployent à paifi:re& nourrir des vaches & brebis ou à cultiuer la terre. Et encore que les cannes de fucrey croifTent abondammenr, toutesfois [0 OCCIDENTALES. LIVRE VL ,„ toutcsfois ils neles cultiuent pas, non plus que les Tunas, defquels on trouuelà des fl relis toutes entières, & entre autres vne fi grande , comme on dic,qu elle a plus de cin- quMte lieues d eftenduc,defquelles on pourroit tirer vne quantité infinie de Cochinil /r,fion ptenoitla peine deles cultiuer. Ils feferuentpar tout de charrettes & chariots qu lis font tirer auec des bœufs, chenaux & mulets. Ils vfent des poids & mefurel dEfpagne. «senmronnentleursbourgadesdepaulxdebois à l’enconttedes barba- resSauuages, quifeuls y font a craindre; & s arment le corps de cafaques cotonnees ( qu ils nomm&n^ftauptles ) a 1 encontre des coups de fléchés. Maintenant nous vifi- terons chacune Prouince en particulier. gvadalaiara. C H A P. Iir. niromnce de Guadalaiara , r^lUes que les E^agmls habitent en keüe. En T R E les Prouinces de la Nouuelle Gdice excelle ceUe qu’on nomme vulgaire. ment Guadalatara, quin ’apointaucune qui la fécondé en température d’aïr & tertilite terroir j car elle porte benignement le froment & le Mays-,&c rend auec vne largelTe remarquable les autres fruids de l’Europe, & pour la fin elle eft ex- ,0 traordmairement riche en argent. Elle eft limitée du cofté de l’Eften partie parla Pro- mnee de Me^oacany & en partie par celle àeMexic^ue^ vers l’Oueft de Xalifco, du cofté du Sud des Prouinces de Mechoacm qui fontlauees de la met Pacifique ,• au Nord de Zacatecas. Les Efpagnols y ont trois villes. La principale eft la ville de Guadalaiara:^ qui a domîé nom à la Prouince, baftie par Nmno de Guzman lan cId Id xxxi, fur vingt degrés &: autant de fcrupules vers le XSordde lahgne, ( comme la mer,combien que les chartes Géographiques la placent fur les vingt & vn degré & demi,ce que la différence de fon fit de la ville de xtqueiemhle requerir)&fur le cent & fixieme degré & demi delongitude duMeridieii de Toledo ; c.ar les plus curieux ont remarqué qu elle eft en droite ligne de Toledo mille 0 ept cents quatre vingts licites. Or elle eft diftante de la Métropolitaine ^Mexique de quatre vingts & fept lieues entre le Nord&l’Oueft, & à quarante des derniers limites de la Nomelle Eÿagne : de Culuacan deux cents cinquante , fi Herrera ne fe trompe en cetendToitrdes inines d’argent de quarante, bien qn Herrera oublieux de loi-melme met ailleurs beaucoup moins: de feulement de douze. Or leDiocefe de cette ville s’eftendiufques aux derniers limites delaProuince.de Prancifeo deTbar- ra, comme on la nomme vulgairement.La Banlieue de cette ville eftoit anciennement y pellee des Saunages Molino ,• qui eft vne plaine large,proche d’vne riuiere, arroufee ep U leurs c fontaines & torrens ; par ainfi deleélable en pafturages, & riche en champs de femailles ; les montagnes voifînes lui fourniflent abondamment de matie- 0 refort propre pour baftir des maifons. La température de l’aïr.y eft fort agréable, car e eneltpas brullee de trop d’ardeurs,ni incommode de froid ni degelee,mais elle eft aine,& ne produid que fort peu d’infedes ennuyeux. Les luges royaux y ont leur au- itoire,& les autres Officiers du Roi & les Receueurs y demeurent, comme auffi l’E- uefqi^ lequel eft conte entre les Suffragans de TArcheuefehé de Mexique iC2xYE^ ^ eftoit auparauant en la ville à.eCompoJlelleyyÇ\it transférée l’an ciDloLxx. Il y a en outre des Conuents de Cordeliers &d’Auguftins. L autre ville eft appellee des Efpagnols Villa delEÿiritu fan£lo , baftie par le mefme Aw^G^^,«^^;,,danslaProuincequifenommoit d’vnnomdu païs àeTepique, de laquelle nous n auons rien remarqué dauantage. ' La troffieme eft nommee Sanpfa M aria de los LagûSyhsLdic auffi par le mefine Guzman^ emtante delà Métropolitaine Guadalaiara de trente lieues vers le Sud-eft,c eft vne o-ar- nilon al encontre des Saunages Chichimeques , qui vaguent entre l’Eft & le Nord, d'ins ^ campagnes à la façon des belles fauuages , deftitués de toute humanité ; ns le cachent le plus fouuent dans les cauernes & lieux obfcurs des forefts , où ils cou- chent lur la terre a l ’aïr, fouftenant leur vie miferablement de venaifon & fruids fau- uages,en partie nuds,enpartie legerement couuerts de peaux de beftes, ils font armés B b 3 d’ares ïi,8 DESCRIPTION DES INDES d’arcs &de fléchés ; d’vne grande corpulence & toutesfois nullement laids , au reftc gourmands ôrvaillans Veneurs ; ils s’enyurenr d’vn certain breuuage compofe de ra- cines fàuuages : mais nous auons parle d’eux ailleurs j &c nous ne trouuons rien dauan- uanta diflbud toutes tumeurs,diflipe les vents, principalement ceux du ventre , &: pour cette caufe elle n’eft pas feulement vtile en ranafarque,mais auflfi en toutes les efpeces d’hy- dropifie,fi apres en auoiroind le ventre, on en prend par la bouche quelques gout- tes dans du vin ou autre liqueur commode: car elle euacuè les eaux ; ce qu elle fait aufli auec moindre incommodité prife par clyfteres. Elle deliure le ventricule des 30 humeurs froides & des vents , 6t;eft fort bonne contre les douleurs de colique, fl on en oinftles parties affeélees,& qu’on en prenne quelques gouttes. Elle aide efficacieii- fement ces douleurs , comme nous l’auons appris par expérience. Elle aide aufli les gouttes prouenantes de caufe qui nefoit pas trop chaude, euacuant 1 humeur, fi on en prend quelques gouttes difloutes auecduboüillon gras de chapon. Elle guérit les membres retirés fl on les en oinâ:,en eftendant mollement les nerfs. Elle deliure d ob- ftrudions l’cftomach,la matrice & la rate fl on les en oind. Elle amollit le ventre aux enfans,fi on le frote d’icelle entièrement: &en chafle les vers, principalement fl on leur en donne à boire vne ou deux gouttes auec du laid ou du boüillongras. Elle eft bonne contre les rongnes & vlceres coulantes de la telle : fert contre les douleurs d’o- 4 c reilles & la fourdité : elle nettoye en outre la peau de tous vices, notamment celle de la face ; ^ efface les lentilles du vifage des femmes en l’en oignant. Elle eft chaude au commencement du troiflerne degré, humide au fécond. X adioufte, qu i a donné auffi la figure du fruid, qu’il eft appellé des Indiens Curcas : mais ces fruids fem- blent eftre les mefmes que ceux lefquels nous auons deferit ci-deffus fous le riom de Finnones de Brafd, toutesfois ie ne fuis pas certain : mais quant au nom de Car* cm ie n’en ai veu faire nulle part aucune mention dans Fr. Xmenes tres-diligent re- chercheur des plantes de l’Amerique ; qui ne parle non plus de 1 huile des figues eii- fer,dequoi ie m’eftonne,car il a efcrit long temps depuis Monard. La principa e yi .e & peut eftre la feule de cette Prouince eft appeîlee C^mpojlelle , fitüee^fort près du iiua 5 c ge fur la hauteur de x xi degré,f comme ie trouue que les Anglois ont obferué.'car plu- fieurs chartes Géographiques qui font en lumière iufques a ce iourd hui, la mettent ur la mefnie que Guadalaiara,(\uc\(\\iQS-yne:s mefmes prefque fur les vingt deux dégres au Nord de la ligne : Or elle eft diftante de GuadalaUra de trente trois lieues vers 1 Ouelt. Nunno de Guzman l’abaftit l’an cId I o xxxi dans vne plaine auprès delà riued’vnc riuiere,oùil n’y aés enuirons nulle pafture pour les belles, 6ile terroir n y eft pas erti^^ OCCIDENTALES. LIVRE VL 1 herbe y manque aiilîî pour les cheuaux j comme auffi la matière pour y baftir des mai fons. Au reftc.pource que la ville eft proche *de la mer, raïr y eft grandement chaud &: y engendre plufieurs infedes & petits animaux dommageables j il y eft auffi fort humide & fuiet à beaucoup de tempeftes j de forte qu il n’y a point de doute, qu’elle n’ait efte placée en vn lieu fort incommode,par l’imprudence de celui qui labaftie En outre, il y a vne bourgade fur la cofte Pacifique, à vn petit efpace du port de la 7^mdad,c\\x ils nomment de la Ptmficacion^dzw^ les limites de cette Prouince en vn lieu tort chaud & grandement mal fain. rouince, en LaProuincedeC/^/4«?e//4 confine à celle de X4/^<7,fituee le long de la cofte de la 5 mer Auftrale-, longue de vingt lieues & autant de large , fort célébré & ancienne- ment grandement munie dhabitans , qui alloyent à la guerre armés d’arcs & de fléchés, de rondaches & de maftuès enfemble : leurs rondaches eftovent compofees de certains petits baftonnets, qu’ils lioyent enfemble fort fermement; lefquelles ils portoyent liees a des cordes fous le bras'; &lors qu’ils s’en vouloyent feruir,iis les defta- choyent,&s en couuroyentprefquc tout le corps,parfois eftans couchés à terre pouf cuiterle choc des çheuaux, car il falloir que ce fut vne bonne lance , fi elle les perçoit a trauers a caulc de la dureté du bois. Les femmes de cette Prouince eftoyent belles, & eftovent entièrement habillées ; les hommes auovent des courtes cafaques& des louhers de peau de cerf: Ils portoyent tous leurs fardeaux aueedes baftons furies ef- ) paules , eftimant fur tout que c’eftoit honte de les porter fous le bras ; quand ils n’al- loyentpointalaguerre,ilsemployoyenttourleurtempsdlachaire. Ilsferuoyentan- ciennementlesldoles,&:nauoyentpointd’horreur de manger la chair humaine • ils leveautroyent en beaucoup de vices ; maintenantdepuisquelalumierederEuanaile y a relui , ils commencent à quitter fes mœurs inhumaines. ^ Le terroir de cette Prouince eft fertile ; & il s’y trouue plufteurs mines d’argent ; il y a auiii bonne quantité de mi el & de cire. Le Capitaine IrancifcodeTharra y mena le premier vne colonie d’Efpagnols l’an c D 1d L iv,a laquelle il donna le nom de S. Sehaftian, à vingt deux degrés de la ligne vers le Nord. Par apres on trouua en cetteProuince quelques riches mines d’argent, : ou on ht quelques places pour les mineurs auec leurs machines & moulins ; de forte que cette Prouince (qui fe nomme auiourd’hui ^£’rW^)eftconteeàbondroit en- tre les riches en argent. CVLVACAN. C H A P. V. Dejeription de U Prouince de Culuacan comment elle fut premièrement defcouuerte par N unno de G uzman. A La Prouince de chiametla le long de la meftne cofte marine eft contiguë cel- lequ on nomme auiourd’hui Culuacan,hLO^tViQ lS(unno de Guzman defcouurit & ubiugua le premier 1 an cIdIdxxxi. Du chemin & voyage duquel nous auons tire ceci félon / o ^ Guzman apres qu’il eu t bafti la ville delEfiiritu eft pour le iourd’hui nom- mée partant auec fa troupe de Chiametla,i\cmï2i premièrement dans la rouince de P/^/^^/^,laquclle il deftruifit entièrement, bruflant toutes les bourgades ; e a I pa a dans la Prouince d^Zapuatan, ou il trouua beaucoup plus de femmes que cl hommes,qui donna le commencement à cette fable, qu’elle eftoit habitée m :d icelle ayant enuoyé fes troupes en plufieurs parties, pourfuiuant fon chemin, il ’ enfin a vne grande riuiere , fort peuplee d’habitans le long de fes riuages , à la- quelle il donna le nom de Rio de la. Sal. La terre y eftoit plate , & enuironnee de toutes parts de montagnes comme d’vn rempart. Ayant pôle fon camp en Piailla, vne riuiere de mefme nom, à vne lieue de la mer apres auoir fupputé fon chemin , il trouua qu il auoit marché cent cinquante lieues le long du riuage de la mer. Les mai- lons desSauuages qui habitoyent cette Prouince eftoyent beaucoup differentes en a rique de celles de leurs voilîns & mefme de tous les autres Ameriquains, dans lefquelle^ DESCRIPTION DES INDES lerquellés ils trouuerent és coins & recoins plufieurs ferpens , amoncelées cnfembles d’vne eftrange façon, qui mettoyent la telle hors du monceau deirus & defldus, ou- urant vne effroyable gueule fi quelqu’vn en approchoit de près , toutesfois fans faire aucun malj lefquelles les Saunages veneroyent grandement, pource que le Diable auoitcouflumedes apparoiftre à eux en cette forme : toutesfois ils les manioycnt& viuoyent parfois d’icelles. Les femmes y eftoyent fort belles; & les hommes auffi bien que les femmes s’y veftoy eut pour l’abondance de coton qui y eftoit. Les foldats ga- flerent auffi miferablement cette Prouince fort belle & biencultiuee. Eftans partis delà, non fansauoir fouuent des combats auec des vaillans Saunages, ils arriuerent à Ba,yla-, Payant marché huidiours de long par plufieurs bourgades qui i c auoyent eflé abandonnées par leurs habitans , ils rencontrèrent vne grand riuiere, qu ils nomment de Af#^(?m,pourlagrandeabondancedes femmes qu’ils y vi- rent. Toute cette région qui attouche la nue de la riuiere,eft prefque impénétrable à caufe des forefts efpaiffes, où ils eurent quelques combats auec les Saunages ; car elle eftoit fort peuplee & bien cultiuee. Iis prirent refolutiô de retourner vers la cofte de la mer,mais comme ils ne trouuoyent pas de chemin commode, ils montèrent lelongde la riuiere delos Mugeres^^ paruindrent à vne montagne où iis entrerent,non fans com- bat,dans la bourgade fies habitans de laquelle s eftoyent de bonne heure retirés auec leurs meubles dans les efpaiflés forcftsjlaquelle ils bruflerent entièrement, ’ Delà ayant à grande difficulté pénétré au trauers les lieux difficiles des montagnes, rc ils defeendirent dans vne autre bourgade; (laquelle eftoit trauerfee d’vne fort belle riuiere) diuifee en quatre quartiers, qu’ils nommerentpour cet effed ^atrobanios: bc peu apres dans vne autre, qu’ils appelèrent f/X^i»», d’vn lion qui y fut trouué. Cette région eftoit grandement fertile & peuplee de beaucoup de bourgades, que les Efpa- gnois deftruifirent miferablement, en ayant pillé les champs & tué ou chaffé les habi- tans. Eftans auancés plus outre, ils tombèrent dans vne foreft fombre, peuplee au de- dans de grande nombre de bourgades de Sauuages , qu’ils trauerferent auec grande perte de leurs gens ; & comme ils commençoyent à auoir grande difette de viures, 6c qu’ils ne trouuoyent nulle fin , ils furent contrains , apres auoir beaucoup tracaffé , de retourner vers la Prouince de 5® Au refte cette Prouince, laquelle a maintenant vn GouucrneUr particulier,eft fituee lelongde la coftedelamerAuftrale,ou pluftoft entre le golfe de C4/^rw>,vers l’Oueft de chiameîla j elle n’a point qui la fécondé en fertilité de terroir , & en abondance de viures, & n’a pas faute de mines d’argent. Car toute la terre qui eft entre les deux riuic- res de 'PiafllanbL Cùlmcan, 'àhonàc enfruids 6cen diuers fruidiers: les loges des Indiens eftoyent artificieufement couuertes de paille & les filiers des portes eftoyent ornees dediuerfes peintures, entrelefquels y auoit de vilains accouplements d’hommes ôc de femmes>mefmes ( comme difentles Epagnols J des manifeftes marques de Sodomites ( abominables, Les habitans auoyent des marchés publics j ils n’auoyent nulle cognoif- fance d’or ; mais on y trouua quelques carquans d’argent, parfemés de turquoifes. Les 4^ Efpagnols y ont defcouuert au temps paffé des mines d’argent. letrouue çyücNunnode Guzman n’a baftiqu’vne ville dans cetre Prouince, nommée S. Miguel fur la riuiere de los Mugeres ( de laquelle nous auons fait mention ci-deffius ) à vingt cinq degrés de la ligne vers le Nord : mais cette ville fut puis apres abandon- nee,&les habitans furent tranfportés à quelques lieues delà, dans vne autre ville nou- uelie de mefine nom, baftie dans la vallee de Horaba, à deux lieuës de la mer , pour la commodité des champs &des pafturages,& abondance de fruiéls qui y eftoyent. Elle eft efloignee de Comfojlelle de quatre vings lieuës, de Guadalaiara de ce cent ôc trois. ^ C I N A L O A. P C H A P. VL - Voyage de Nunno de Guzman en la Province Cinaloa,^ deferi^tïon ddceüe, La derniere Prouince de la Nouueüe Galice ^ & la plus efloignee d icelle vers le Nord le long la cofte de la mer, eft appelée C/»4/tf4,diftante de Cuiuacan, laque - le elle fuit, de quarante & deux lieuës ; de Guadalaiara cent & cinquante '[ OCCIDENTALES. LIVRE VL 2,01 Nord; de ChUmetU cent, comme ditH^rrera. Or il me femble neceifaire dadioindre icijComment elle fut premièrement defcouuerte par Nunno de Guz>wa,n ^ & Quel che- min il fit par icelle. ^ (7»Æ;wrf;2partantauecron armeede Culuacan l’an cIdId xxxii, ayantmarché cin- quante lieues arriuaà la riuiere de Petatlmi ce nom ayant efté donné à la riuiere com- me àlaProuince de qui fignifie en langage de ces Saunages mattcs ,derquelles lesmaifons des Indiens eftoyentcouuertes; il y auoiten icelle peu d’habitans & les plus panures du monde; les femmes y auoyent leur partie honteufe couüerte, eftant nues quant au telle ; les hommes s enuelopoyentde peaux de cerf coufuës enlem- ble & leiettees fous le bras .* ils honoroyent le Soleil, toutesfois ils ne lui facrifioyent pas ; ils elloyent mangeurs d’hommes , eftant au relie bien compofés de membres , de couleur brune , ils corn batoyent premièrement à coups de fléchés, & quand elles elloyent faillies, ils fe feruoyent de leurs mairuès,qui eftoyent faites de dur bois de Gm- UC, en forme d’efpees. S eftans auan ces vingt lieues delà i ils rencoiitrerent la riuiere de TarndchaU, & il y a entre deux vne foreft fort efpaifl'e d’arbres ( le bout defquels a la couleur & dureté du Brajil ) qui eft vne vraye folitude; il y auoit au bord de la riuiere quelque peu de vil- lages des naturels a la façon de ceux de Petlat. Des derniers limites de la Prouince de Tamochala iufques a la colle de la mer il y a fix lièues de chemin ^ defquelles cinq lont habitées. ^ ^ Ayant marche trente lieues de Tamochak -, ils entrèrent dans la Prouince de O;.^,ouilsrencontrerentplusdevingtcinqbourgades,fortpeupleesd’habitans,où Ils turent contrains de feiourner quarante & deuxiôurs à câufd despluyes continues, prelque tout ce temps ils furent nourris par lesSauuages de force venaifon & d’oifeaux, lulques a ce que les Indiens eftans ennuyés de leurs hoftes, s’enfuirent dans les monta- gnes ore s voifines; Les Elpagnols ayans trâuèrfé lariuieredls cheminèrent trente lieues vers le Sud, par des terres defertes & fort feiches , dans lefquelles il ne fe trouue ni fontaines mruiireaux,pource quelles fontplates &expofees à l’ardeur du Soleil, de (oiTe qu’ils furent contrains deftancher leur foif d’eau depluye qui eftoit en certaines toiles; iniques aoe qu ils rencôtrerent vne autre riuiere,quin eftoit pas fi fournie d’ha- bitans que Cmaloa, toutesfois ils ne differoyent en rien d’iceux en habits &: couftumes. Apres qu lis eurent pafle cette riuiere fur des radeaux, on les alfeura qu’à huid lournees de chemin dela,il y auoit des nations fort populeufes ^vaillantes, aufquelles üs ne leroyent pas égaux en force : toutesfois cela ne les arrefta point, mais ayant pris es guides, & ayant cheminé feptiours par des lieux non habités, ils arriucrent à lafin ilariuierede Ya^mmiiords eurent fi grande dilfette d’eau en ces lieux deferts.que plulieurs Saunages & efclaues y moururent de foifi & y fuffent fans doute tous demeu- , n euft elle qu ils trouuerent vne certaine efpece de chardons, fort femblables aux /«»^,Ies troncs defquels apres les auoir coupés auec leurs efpees , iettoyent vne cer- taine liÿjeur, qui leur futvn grand foulagement en vnpaïsfi altéré. Apres qu’ils eu- rent pa e la riuiere fans empefehement d’aucun, ils trouuerent vne bourgade aban- Jonnee de fes habitans , & vn chemin qui menoit en bas ; lequel ayant fuiui ils ren- ontrerent quantité deSauuages armés, lefquels apres vn leger combat ( caria plaine auorifoit a leur caualerie ; ils les mirent en fuite. Le long des bords de cette riuiere yaplufieurs bourgades, les habitans defquelles font forts, & de mefme langage & ^œurs que les precedents. Au deflhs du riuage s’eftendent de rang des moiitagnes .ontinues,qui prenans leur origine de cette longue fuite de montagnes, de laquelle ous auons délia parle plulieurs fois, s auancent en ce lieu quelques milles dans la mer mtorme de Cap ; Et entre ce Cap & la pointe de la Prouince de Xalifco, la colle de a mer e courbe en forme de coulde, par l’elpace de deux cents lieuès. Or comme ils encontroyent de toute parts vne fi grande dilfette deviures.&qucces montagnes es enipefchoyent de palfer plus outre , &que mefme la colle de la mer eftoit cou- lei te de bocages fort efpais,ils trouuerent pour le mieux de retourner vers la Prouin- :e de Culuacan. En outre les Sauuages qui habitent entre les riuieres dcPetatlan^dc raquimi font que tous vne mefine forte , ils ont peu de fruiéls , nulles Patates ou autres racines Ce ■ femblables: DESCRIPTION DES INDES femblabies : feulement vue forte de melons , àn Ma^Sydcs febues de Turquie & vne efpece de grain menu duquel ils font leur pain : ils n’ont nulle cognoilîànce duMa-^ guej J mais ils compofent leur breuuage de certaines petites carrobes, ( lefquelles nous auons dit que apporte ) pilees ôc meflces auec de feau. Ils font fort vaillans,& ne iettent point de eris,comme les autres Saunages ont couftume de faire, lors qu’ils combatent; ils font auiïi fort patients au labeur & s’exercent continuelle- ment à la ebalfe : quelques- vues des femmes fe font des marques à la face auec le fer chaud àla façon des Negrês ; & les hommes s’y en incifent & piquent. La terre y efl: pour lapins grande partie plate ôc feichejl’aïr y eftfain : les montagnes fonteiloignees de la mer enuiron trente & quatre lieuësdes riuieres y font fort poilTonneufesj & pour i o la fin le long des bords de la riuiere Ttfqmmi il y paifl: des bœufs, vaches & de fort grands cerfs. Les Efpagnols auoyent anciennement mené vne colonie en cette Prouince,&v baftirênt la ville de S. Imn de Cimba ; mais ils eurent de la peine à la conferuer , com- bien que Francifco de Tbarra. y euft mené de nouueaux habitans & abondance de prouifions dé la Prouince de CulmcarPy & ait effayé de la reftaurer & reftablir l’an cId la Liv. Ce ne fera point hors de propos d’adioufler en ce lieu le iugement que fait de cette Prouince iu/ques l’an cla laxci Martin PerezlcÇmiQ : La Prouince de Cmal0a( dit- il) trois cents lieues de la ville de Mexique vcis le Nord; du coftè droit elle efl: ro couuerte de ces fort hautes & rudes montagnes nommeès Tepecjùan àgauche elle efl: lauee du golfe de Californie:, vers l’Ouefî: elle efl: fermee des Prouinces de Cihola & Ca- lifornien vers le Nord de la de laquelle on dit que laderniere riuiere de cette Prouince efl: efloignee feulement deux iours de chemin : elle efl: arroufec & trauerfee de riuiereSjfiir les bords defquelles demeurent par bourgades les naturels du païs pour la commodité de la pefche ; l’aïr y efl: clair & fain ; la terre graffe &: fer- tile, & qui porte volontiers toutes fortes de fruids ;il y a vne grande abondance de May s J febues de Turquie, & d’autres femblabies froids & legumes ; force coton, du- quel les hommes & les femmes fe veftent, prefque à la façon des Mexiquains : ceux de i’vn & l’autre fexe y nourriffent leurs cheueux.les hommes les nôüent:ils font de grand 3 0 corfage &furpafrentles Efpagnols prefque d’ vne palme en hauteur ,robufl:es & belli- queux : leurs armes font l’arc & les fléchés enuenimees,dcs maffues de bois fort dru, & des boucliers de bois rouge ; iis ont receu le ioug des Efpagnols auec beaucoup de . difficulté. Le mefme fait mention des villettes de S. Filippo & S. lago fur les bords d’vnc riuiere à quarante & quatre lieues de la ville de Culuacan-, defquelles ie n’ai pas mémoire d’a- uoir rien remarqué ailleurs. Voila quelles font les Prouinces maritimes de la T^uuel-, le Galice, V X I T I P À. 4^ ^ C H A P. VII. Vefcrlption de la Trouime quon appelle Vxitipa. NO V s auons deferit iufqucs ici les Prouinces de la Nouuelle Galice, qui fontfi- tuces le long de la mer Méridionale & du golfe de C/ï/^w/Vjparticulierement & félon leur ordre, maintenant nous vifiterons celles qui font plus auant &: au dedans du païs ; commençant par la Prouince qui attouche immédiatement leGou- uernement de laderniere vers le Nord-efl: de toutes celles qui font compri- £zs^omle.iomd']xmÇo\xs\2. Nouuelle Galice. y® l^oxscyyxQNunnode Guz.-manV2Ln cla la xxix fepreparoit pour faire le voyage vers les Prouinces que nous auons peu auparauanteferites ) il laiÛkZope de Mendof a pour fon Lièutenant au Gouuernement de Fanuco, lequel il auoit obtenu par fpeciale com- miffion de l’Empereur Charles-le-Quint, & lui donna charge de vifiter la Prouince voifîne à la première commodité, & de mener vne colonie d’EfpagnoIs dans la Pro- uince dVxitipa,de laquelle il auoit défia ouy quelque renom, fi les conditions de l’aïr & delà OCCIDENTALES. LIVRE VL zos de la terre y elloyent agréables. Mendoze elFedua foigneufement le màndement de ton Gouucrneur,& apres auoir diligemment efprouué les qualités de l'aïr&du ter- roir 6e les mœurs des naturels d’icelledlmena vne colonie, comme il auoitreccu man- dement dans la vallee 6e y baftit vne ville du nomàc Sant Luis t diftantedela ville de Panuco de vingt lieues, comme eferit Herrera. Par ainli cette Prouince eft au dedans du païs déclinant vers la Prouince de XaUJio, de laquelle on dit qu elle eft eflôignee de cent 6e vingt lieuësjelle eftoit anciennement des appartenances duGouuernement àc. Panuco ft long temps qu’il a eu vn propre Gouuerneur,mais maintenant qu’il eft adioint à la Prouince de Mexique:, la Prouince I O d'Vxitipa a efté amenee au Gouuernement de la Nouuelk Galice. Les naturels habitans de cette Prouince ne different en rien en habits, mœurs Le couftumes des Mexiquains,Qncor:tsc\}xi\s ayent vn langage grandement diuers : leurs temples eftoyent efleués auec leurs degrés faits degafons : ils fe feruent de manteaux à la mode des CMexiquains : ils vfoyent de plufieurs fortes de breuuages, compofeès en diuerfes façons ; dequoi ils auoyent couftume anciennement de s’enyurer à leurs iours de feftes comme belles, 6c commettoyent des chofes énormes : mais maintenant inftruifts par la couftume des Efpagnols i & par l’admonition des Moines , ils com- mencent à quitter ces vilains vices^ Cette Prouince abonde extraordinairement en toutes fortes de fruids : les bocages 20 y font tous remplis de cerfs 6c autre Sauuagine; ôc les campagnes de cailles, perdrix, tourtres 6c autres oifeauxj il s’y trouueaufTi auiourd’huivn grand nombre de poulailesj de forte quelle n'^eft pas feulement pourueue pour la neceflite , mais aufli pour la vo- lupté des hommes : la terre toutesfois y eft en plufieurs lieux inégalé 6c afpre , 6c l’air y eft vn peu trop chaud. Au refte la riuiere qui pafte le long de la ville de Panuco 6c qui defeend vn peu au deftbus d’icelle dans legolfe àz\2iNouuelle EJpagne , doit fon origine à cette Prouince, laquelle ellearroufe. le n’ai peu rien fçauoir de la grandeur de cette Prouince, 6c n’y a autre chofe de remarqué que ce que nous en auons dit iufques ici* ' LOSZACATECAS. 3 0 C H A P. VIII. Prouince de los Zacatecas fhinès njiÛeSi. La Prouince de los Zacatecas eft feparee d’vn petit cfpace de celle dont nous venons de parler, elle eft entre le Nord 6c rOueft,6c eft fort riche en mines d ar- gent,mais prefquedutoutdeffburnie d’eau, de froment, Mays 6c de toute autre prouifion. 11 y a pour le iourd’hui trois villes habitées par les Efpagnols , outre quatre ou cinq bourgades auec leurs mines d’argent; la principale desquelles eft particulie- ment appellee de los Zacatecas, dunom delaProüince,à quarante lieues delà ville de 40 vers le Nord, 6cà quatre vingts de la Métropolitaine il y a dans icelle enuiron cinq cents Efpagnols auec autant d’efclaues , 6c cent tant chenaux que mulets ; il y a vn Monaftere de Cordeliers , 6c vn Officier du Roi dil Gouuernement de Guadalaiara. Les mines qu’onmomme de Auinno tiennent le fecondlieu,qui furent defcouuertes fbusles aufpicesdu ViceroiZ«^‘^Ê’F Lequel adioufte en outre , qu a feptante lieues de ces mines vers le NoM, eft lltuee cette fort grande ville que les Efpagnals appellent la^qudtro Ciemgas. Nous nauons rien trouué [daiiantage iufques ici des Prouinces de la NotmelïeBîfcaye ni de fes villes. C H A P. X. Cofte màrine à IMonviéïc Bifcayc,y?s Caps,BayeSiKmeres ^Pom, Avant que de paffer aux Prouinces frontières de ce reflbrt lüridique, il nous i o faut courir leriuage & viliter-la cofte marine àchNoaueUe Galice. Au liure pre- cedent lors que nous traitions de la Prouince de > laquelle eft efti- raeela dernicredela l’Oueft, nous auonsfuiui la cofte iufquesau port de Mâlaccai^ioQht duquel eft du mefme cofte le port que Fuller pilote de Candifch appelle Chacala. De ceftui-ci courant la cofte vers l’Oueft on rencontre à dix hui(ft lieues d’irtreriialle, ce noble Cap qu’on nomme vulgairement Caho de Corientes,{m la hauteur de vingt degrés & trente fcrupulesauNord delalignerduqüeliufquesavne autre pointu de terre ditePis^»^^* de Tintec^ue j on conte dix lieues , la cofte le tournant vers leNord & courbant en coulde, fait cette baye, quelavallee nommee de Banderas auoifme, laquelle efteoupee dVne petite riuiere.fur les deux bords de laquelle les Ci- 20 toyens de CoM^ôJîelle pofledent pluftcurs iardins, & des vergers de Cacao. Ayant pafte trois lieues outre Tinîoi^ue wctslc Nord-eft , onrencontre le petit porc C^Æw/ifjdiftantde Compofielle é! cïi\\iiorihmù.\ÏQ.\xQS. Ce port eft auoifinedelavallee de Chila que les montagnes de Cruz couurent deuers le Nord, qui aüançans vne pe- tite pointe dans la mer fontvn petit Cap de mefme nom ; derrière lequel on entre dans vn port nommé auiourd’hui des mariniers Mant ach al il femblequeiV«;?»<7 de Guzman l’appelle en fes Commentaires Mutochclà trois lieues duquel vers le Nord- eft eft fitué au dedans des terres la bourgade CMeîatlan. Audi toft fuiuentdu mefme cofte les hautes montagnes de cette Prouincc, quon nomme vulgairement la Sierra deXaliJco. Ayant pafte ces montagnes on trouue vne 5 ® riuiere, qui eft nommee des mariniers laquelle fèmble eftre celle meftnc que nous auons appellee ci-àtiPns^n\d.àcknipi{oviàcGuadalaiara,Barrauia. Avne lieue feulement d'icelle eft le fleuue de S. André , a huiéi lieues duquel vers 1 Oueft eft fituee rifle de S. André, fur la hauteur de vingt degrés au Nord j elle eft fort petite &: couuerte d’vn bois fort efpais, mais au refte pleine dbifeaux & d’yguanes : au deftbus de fon cofté duNord-oueft, il y a vn bon anchrage, & la mer y eft profonde de dix fept Dés cette riuiere de 5. Andrelzco^cc eft bafle,&: couuerte iufques furie bord de plu- fleurs arbres , qu’on appelle Mangles,( Adorés nous parlerons ailleurs; le dedans du pais eft peuplé de plufieurs bourgades, on le nomme vulgairement la Prouince Stngm- 4 o quipaquen : le croi que c’eft la mefme que Tiunno de Guzman appelloit anciennernent d’vn nom du païs Centliquipac, & la grande Efpagne , comme tefmoigne Herrera. . . En outre eftant auancé feize lieues du port cîto»?/*fMvers îeNord, on rencontre vn autre Cap nommé des mariniers lequel defeendde certains larges fommets de montagnes qu’on nomme vulgairement Guainamota. Dés ce Cap lenua- ge fedrefle derechef & s’efleue en montagnes j & la Prouince qui eft au dedans dupais eft appellee Acaponeta & chiametla. 1 t -a Suiuent apres deux fort petites Ifles , que les matelots nomment deMazaUan , der- rière lefquels il y a vn port de mefme nom,iuftcment fous le Tropique du Chancre, corn- j o me il a efté remarqué par les plus foigneux pilotes : la baye eft petite & tort poiflon- neufe , dans laquelle defeend vne riuiere , mais où ne peuuent entre? des nauires , a cauledes bafles qui (ont dans fon emboucheute ; on dit que la ville sde S. Se aj tan en eft diftante de huiét lieues de chemin entre les terres. De ces I/les de Mazathn la cofte fe tourne vers le Nord-oueft vingt ôi quatre lieuësj dans lequel interualie fe rencontre premièrement vne riuiere que les O CCIDENTALE s. LIVRE VI. I07 appellent Rio de Nauito, & nous ci-defTus, comme ie penfe, nous auons dit quelle fe nommoit Piajila ; apres a huid: lieues delà Barra, de Data, petite riuiere &:où ne peu- uent entrer que depetites nauires & barques ; ie ne içai fi ce ne feroit point celle de Mugeres, dont nous auons ci-deuant fait mention. Eftans portes neuf lieues plus outre fuiuant lafiiitedeja mefinecoftej ontrouue vne plus grande riuiere que les mariniers appellent de ^ameto, ( Herrera Tappelle ailleurs ) Or ces trois riuieres trauerfènt, comme on dit, la Prouince de Cutua- ca^,d ou vient que quelquesfois elles font appellees parles mariniers d’vn nom com- mun riuieres de Culitacan, Ci-defius en la deicription de cette Prouince nous en auons I O fait mention de tïois,PiaJlla,Rio dcMugeres & Culuacan-. Du deinier fleuue de Culuacan iufques au Cap dzCinaloa , il y a vingt lieuès de che- min,lequel Cap on eftablit vulgairement pour borne des Prouinces poifedees paifi- blemenc parles Efpagnols en ce quartier. Enfin il y a trois Ifies dites les trois AParies^yC^i font au deuant de cette code delaiVi?^- uelle GaliceSsix. la hauteur de vingt & vn degré au cofté du Nord,à enuiron vingt lieues du Cap de Corientesy&ts le Nord-oueft, &:prefque tout autant de la Continente delà Nouaelle vers l’Ouefi:, defquelles nous ferons mention ailleurs : com.meauffi de ce qui refte a parler de cette cofte j maintenant nous pafïerons aux Prouinces qui limi- tent ce reflort Juridique & Gouuernementde \z.‘2louuelle quelques- vnes def- 2,0 quelles fontfepaiees d icelle par le golfe,comme la Californie s & les autres eftans eiila mefmc Continente en font feulement diftinguees de montagnes, forefts ouriuieres,&: les vnes & les autres font mal cognuës & ndnt pas efté pleinement defcouuertes. ' CALIFORNIE. C H A P. XL Limites de Californie , expéditions de Cortès en la mer Aufir ale. ON appelle communément Californie tout ce qu’il y a de terre au deuant de la Nouuelle EJpagne ^GaliceY&ï.s l’Oueftj quieft certes de fort grande eftenduë, & attouche les dernieres fins de l’Amerique Septentrionale & le Deftroit dit vulgairement mais c’eft vne chofe incertaine iufques à prefent fi cela eft con- tinu au Continent de l’Amerique Septentrionale, ou s’il en eft feparè par quelque de- ftroit ; car on voitencoresde vieilles chartes Géographiques & Hydrographiques qui font Californie vne Me, & la diuifent de T Amérique par vn deftroit affés large au com- mencement,mais qui s’eftroicift en continuant : Dans les chartes d’auiourd hui elle eft leplusfouuentconiointe à la Continente: quoi qu’il en foit , ce font des régions fort amples, & cognuës legerement en leur plus petite partie & feulement auprès du riua- ge. Or on appelle proprement Californie , cet angle de terre lequel s’eftend entre le 40 Nord-oueft & le Sud-eft du fonds golfe Californiain, s'il faut ainfiparler, iufques au Cap de .S. Cr»z.,ou au vingt deuxieme degré de latitude Septentrionale, & eft fitué au deuant & de l’autre cofté des Prouince de la Nouuelle Galice,Xalifco,ChiameîlayCul(iacan ôc de Cinaloa. On fait mention tant au dedans qu’au dehors de ce golfe deplufieurs ports, haures, bayes &riüieres,cognus legerement & de nom feulement. Or vis à vis du Deftroit & au cofté droit en entrant en icelui , les Anciens y marquoyent vne Me fort longue,feparee par vn petit deftroit du Continent de la Nouuelle B fagne, laquelle ils nommoyent Guayaual , & de la riuiere dcNuefra Sennora ,les autres de Sebajlian de Bora,Sc efcriuent quelles ’eftend iufques à la riuiere do-Pafeua dans la Prouince de Cu~ ; laquelle Me ne fe trouueplus dans les chartes d ’auiourd’hui^ & les Routiers JO des pilotes ne la cognoiflent plus. Orafinqu on entende plus commodément le vrai fit de ces régions , la fuite de la cofte marine, & autre chofe neceftaire en cet endroit, nous auons trouué fort à propos d’inferer ici les nauigations de quelques Efpagnols, la defeription defquelles nous auons defcouuerte. K^x:ç,sç}^ç.Hernando Cortès tntdomth plufieurs Prouinces de Iz Nouuelle Eÿagne,>i\ mit toute fon intention à defcouurir plus auantla mer dnZud, pour ceteffed il efqui- pa deux nauires l’an cIdId xxxiv,qui firent voile du port de S. lagocw laProuince de Colyma: 2,o8 DESCRIPTION DES INDES de Cûiyma ;lâ'plus grande qui eftoit l’ Admirai, comme on parle ordinairement, eftatit feparee de l’autre par vne forte tempefte ne peut tenir Ton cours , mais elle fut empor- tée dans la baye de S. Cruz,: où ayans defeendu à terre , la plus grande partie des mate- lots furent tués des Sauuages , le refte ne fe voyant pas capable pour gouuerner le na- uiredls le rompirent de plein gré à la cofte de la Nouuelle Ejpagne : Et l’autre ( qui eftoit nommcQ S. Lazare) quelle eut premièrement couru vers le Sud-Oueft iüfques • fur la hauteur de treize degrés & trente fcrupules deuers le Nord; elle changea foii' cours delà vers le Nord-oueft iufques fur le degré feizieme de la mefme hauteur ; ^ puis apres vers le Nord-nord~oueft iufques fur le feizieme degré & demi; &: derechef changea de cours vers Sud-fud-eft iufques au mefme degré feizieme : enfin elle tour- 1 oV nale Cap vers ieNord-nord-oueft& Nord-oueft, & continua en ce cours iufques fur la hauteur de vingt trois degrés & trente fcrupules de la hauteur du pôle du Nord; pat ainfî tournant tantoft deçà tantoft delà , ils atteignirent vne Iflc fur la hauteur ( com- me ils remarquèrent ) de vingt degrés & autant de fcrupules , à laquelle ils donnèrent le nom de i". Thomas. Il leur fembla qu’elle auoit vingt cinq lieues de circuit, agréable- ment couuerte d’arbres verds ; le cofté du Sud s’efleuoit en vne haute'montagne, fous laquelle il y audit vn bon anchrage,en pleine mer fur vingt cinq braftes de profond ; au refte le riuage de l’Ifte eftoit de toutes parts entrerompu,& il n’y auoit point d’eau que de pluye,& encore demi-falee pour le voifinage de la mer. De cette Me voulans retourner en ils prirent leur coursvers l’Eft- zo- nord-eft & Nord-eft , declinans vn peu de la hauteur de vingt degrés , & par ainfi ils moüillerent premièrement l’anchre près de la Continente de \2i Nouuelle Ejpagne y fur la hauteur de vingt degrés & autant de fcrupules, auprès de Ciguatla yîons le cofté Oriental d’vne certaine Me, laquelle eftoit feparee par vn petit deftroit de la terre fer- me; & peu apres ils entrèrent dans le port at Xuclutan y fix lieues au defîus de Ciguat- lan, comme ils remarquèrent. Delà coftoyant la cofte, qui eft en cet endroit fort droi- te, & releuee au long & au large en montagnes bocageufes , vers le Sud-eft, ils paruin- drent premièrement au port AeZacatula,^ peu apres celm d'Acapulco. Cortès eftant aduerti du fucces de ces nauires , il efquipa derechef trois autres naui- res auecplus grand appareil,& refolu.de tenterla fortune & de fe mettre lui mefme en 5 mer, il fit voile du port où le premier nauire s’eftoit brifé , & apres auoir vogué quel- ques iourSjil aborda à la cofte de Californie , laquelle fe drefl'e en de fort hautes monta- - gnes,à laquelle il donna le nom de S. EhilippCyLc peu apres à vne Mc feparee de la terre ferme de trois lieues, à laquelle il impofa le nom de S. lago. . Par apres au mois de May, le iour de la fefte de S. CroiXyü entra dans le port du mefme nom, auquel l’an precedent fes foldats & matelots auoyentefté tués par les Sauuages y habitans, auquel il donna premièrement le nom de .y. C'mAr,quiîui a demeuré iufques à ce iourd’hui. Orc’eftvn fort commode port,& extrêmement bien garenti à l’encontre l’inconftance des vents, qui a l’emboucheure fort eftroite,mais la baye y eft au dedans fpacieufe ; diftant de la ligne feomme iis remarquèrent lors j de vingt & trois degrés &trentefcrupules vers 40 le Nord. Delà s’efforçant de trauerfer legolfe deCaltyornieyilfütreiettê parvne tempefte con- traire,le petit nauire fur lequel il eftoit,arriuaàremboucheure de lariuieredeiy. PeJro & Fai>lo. Là s’arreftant quelque temps,il tomba en vne grande diffette de viures,car il ne pouüoit receuoir aucune aide des Sauuages , qui n’eftoyent accouftumes en tout ce quartier de demeurer dans des maifbns, ni de cultiuer la terre , mais ils viuoyent de fruiffs Sauuages & de venaifbn, & le plus fouuent de poiffon , qu’ils pefehoyent dans la riuierc & en la mer mefme fur des radeaux,qu’ils faifoyent de cinq poultres de bois, dont celle du milieu eftoit la plus large. Et comme partant delà, il couroit le long de la cofte de la Nouuelle Efpagne, il coftoya la cofte de fi près , qu’il fe vit prefque du tout y q enfermé entre les baffes & rochers , il voyoit de ce lieu fon autre nauire, qui eftoit fur les anchres à deux lieues delà, le pilote de laquelle venant fort à propos pour lui aider, retira vn peu fon nauire, toutesfois il ne le peut mettre tellement hors de danger, qu’il ne touchant furies baffes, pource qu’il eftoit défia trop près de la terre, de forte qu’il s’ouurit & fut rompu, & les hommes & le bagage en firent fàuués à grande diftîculté ; il nomma’ ce lieu Guayahal, qui eft diftant de la ville de S. Michel de dix huiét lieues , en laProuince OCCIDENTALES. LIVRE VL la Prouince de CuluAcan. Ayant en ce lieu vn peu racommodé fes autres naüirés , il fit derechef voile, &: apres qu’il eut prefque circui l’Ifle de S. lagOy il encra derechef dans la baye de S. Cruz^on ayant lailfé quelques-vns de fes gens fous le .commandement de Francifco de VUoa^ auecviduailles pour vn an,!! s’en retourna en la Nouuelle EJpagne. Cette nauigation fut par apres quelques années intcrmife , & ne fut point reptile auant que Cortès retournaft d’Efpagne en l’Amerique, car lors il enuoya Francifco de VlloA ,pourdefcouurir plus outre la mer du & les terres adiacentes , de la nauiga- tion duquel nous allons traiter maintenant. C H A P. XII. Ndmgatiotî de Francifco de Vlloa dans le Çolfe de Californie. Francisco de Vlloa fit voile auec vn nauire & vne fregate d'AcafulcOi port renommé de la mer du.Z'Wran cio Id xxxixle huictieme de luin, Payant palTé la cofte de ZAcatuU &: de Motin^ agréable à voir pour la beauté des bocages verds & quantité de riuieres qui y font, il entra dans le porc de S. lacq^ues en la Prouince de Colyma , le vingt troifieme du mefmemois. Duquel lieu , y ayant demeuré vingt ' fepe ioursjil fit voile derechef le troifieme d’Aouft, & ayant efté quelque temps agité cà & là d’vne forte tempefte, il entra enfin dans la riuiere Guayaualy en la Prouince de Or pource que la fregate, nommeesS”. Thomas, s efcarteedelui,il eftima 2.0 qu’il deuoic trauerfer au port de S. Cr«2;,dans lequel ils s’eftoyent donné auparauant le rendeuous.il feiourna en icelui cinq iours,& ayant pris fon eau, comme il vit que la fre- gate ne s y trounoic point, il partit derechef delà le xii de Septembre,& rafantla co- fte voifine, il vit trois Mes , defquelles il palTa outre , ne trouuant pas bon de les vifiter. Ayant delà vogué deux iours,il entra dans la riuiere de <5’. Fedro & Pahlo:il y a au deuant de l’emboucheure d’icelle vne petite Me, feparee delà terre ferme d’enuiron v lieues j la riuiere eft bordee des deux coftés de plaines fort Ipacieufes parfemees de bocages d’arbres fort beaux : au dedans du pais s’efieuoyent de fort hautes & larges montagnes couuertesdebois d’vn agréable afped. Delàs’eftant auancé iv lieues, voyant la terre par tout plate, & proche de la cofte plufieurs lacs au dedans du pais qui fe defehar- 3 O geoyenc dans le golfe de Californie par des emiftaires , il trouua bon de mettre fa cha- loupe à l’eau pour vifiter la cofte de plus près & fonder les ports j mais il trouua le riua- ge plat & l’emboucheure de ces canaux fort peu profondej Or la terre y eftoic fort fer- tile &: agréable à voir; ils y virent aufli quelques Sauuages,&par tout force feux. Proche delà il y auoitdeux riuieres ( fepareesl’vne de l’autre de deux lieues d’inter- ualle ) qui couroyenc d’vne telle impetuoficé,qu’elles conferuoyent leurs canaux iuf- ques à trois lieues de la cofte au dedans du golfe; lefqu elles procedoyent iàns doute de ces lacs. Le lendemain ils nauigerent xvi lieues le long|de la cofte, au milieu duquel efpace,il y atioic vne baye de quatre ou cinq lieues de large. Ils anchrerentlà cette nuiét,5£; dés le grand matin pourfuiuans leur chemin vers le Nord , ils pafterent outre 40 trois autres emilTaires delacsoueftangs;& ayant peu apres moüilléi’anchre(carlamer n’y auoit que deux brades de profond à demi-lieuë'de la terre ) ils mirent la chaloupe hors pour fonder l’emboucheuredeces canaux.Là ils virent quelques Saduages,& dès herbes verdes, differentes de celles que la Nouuelle EJpagne ^oïtQ-,\2. terre eftoit baffe au- près du riuage,mais au dedans du pars elle s’efleuoit en colines & montagnes, Partans delà, ils prirent leur cours vers leNord-oucft,le long de cette cofte baffeifix lieues plus outre,ily auoit vne baye d’enuiron cinq lieues de circuit , de laquelle la cofte fe tourne de plus en plus vers le Nord-oueft,plate comme la precedente, mais non pas fi deleda- ble : fuiuant le mefme cours ils arriuerent à vn certain Cap de fable , qu’ils nommèrent Cabo Roxo Sml-x hauteur de xxix degrés &: xlv fcrupules vers le Nord :1e riuage yo eft en cet endroit bas &fablonneux: au dedans du païson y voyoit qüelques petits arbres de moyens coftaux ; à trois ou quatre lieues outre ce Cap , il y auoit vne riuie- re qui couloir d’vn lac, laquelle ne pouuoit porter des nauires à caufedes baffes qui eftovent dans fon emboucheure: delà tirans droit vers le Nord, vne forte tempefte - s’efleua, qui les fit entrer dans vn port allés commode, où la terre eftoit és enuirbns baflé ou releuee en petites mottes. A trois lieues de ce portais rencontrèrent yne Me d’enuiron vne lieue de circuit , Si D d vis 2Ï0 DES CRIPTION DE S INDES vis à vis d’icelle vn autre port, qui receuoit la mer par deux emboucheuresjdatis lequel ils entrèrent par celle qui eftoit la plus au N ordjoù ils trouuerent a 1 entree dix ou dou- ze braffes de fonds, .au dedans cinq , il y auoitplufieurs bayes & ports enicelui, & on y pouuoit prendre grande quantité depoüTon.Làle Capitaine apres auoir moüillé 1 an- chre defcendit à terre , & y ayant drefle vne croix, il prit poffeffion du pars pour le Roi d’Efpagne, aiiecles ceremonies accouftumees. Ils y trouuerent là des rets à pefcher & certains tefts de vailTeaux de terre induftrieufement façonnés à la façon d’Efpagne: la terre eftoit és enuirons couuerte de belle herbe verde , mais beaucoup differente de celle de la Nouuelle Efpgne ,• on voyoit fort près delà des colines & montagnes veftuè’s d’arbres.Eftans fortis de ce port Scfuinant leur cours vers leNord-oueft,ils virent la co- lo fte qui s’efleuoit infenfiblement en hautes montagnes ; &: vne grande multitude d’oi- feauxqui nichoyent dans les trous des rochers : le iour d’apres ils commencèrent à voir la terre à droite & àgauche,du coftégauche ou au Cofté Occidental, il y auoit plu- lieurs Mes & des rochers fort droits ; & de part & d’autre de fort hautes montagnes,la ■Continente fe monftrant au cofté gauche de plus en plus.Il y eut là vn grand débat en- tr’eux,les vns vouloyent que toute la terre qu’ils auoyent coftoyee au cofté gauche de- puis le port de S. Cruz. fuft vne Me, & les autres que ce fuft la Continente & vne partie de la Nouvelle Ejpagne. Ainft ayans la terre en veuë des deux coftés , ils arriuerent à vn certain Cap, qu’ils nommèrent Cabd de las Plaïas, pource que le riuage eftoit releué par monceaux,&neftoyentcouuerts d’aucuns arbrifleauxnimefmed’herbe.Eftanspafles zo plus outre, ils rencôtrerentvndeftroitenclinant vers le Nord-oueft, large dans fon em- boucheurede xii lieues, qui eftoit comme fermé par deux Mes, feparees l’vnede l’au- tre dVn efpace de i v lieues ; la cofte vers l’Eft eftoit bafte & releuee par certaines mot- tes ; & des lacs & eftangs qui diuifoyent la plaine : mais vers l’Oueft elle eftoit plus rele- uee & couuerte de montagnes chauues; ôc ledeftroit eftoit fort creux & fans fonds qu’on peut toucher. Le iour d’apres ils firent xv lieues versleNord, & ils trouuerent vne grande baye qui entroit dans les terres par diuerfes pointes & recoins plus de fix lieués:le lendemain ils auancerent x lieues le long d’vn riuage entrerompu & releué en hautes montagnesrdelàilsraferentla cofte xv lieues vers le Nord-oueft,laquelle eftoit plate & fablonneufe, mais le dedans dupais eftoit montueux & moyennement releué 5 o de colines & monceaux de fable , veftu de quelques arbres : à midi ils virent quelques rochers,à quatre lieues delà Continente,oùla terre en s auançant fait vne pointe, der- rière laquelle ils moüilierentl’anchre ; il plut fort toute cette nuid : le iour enfuiuant ayant fait dix lieues, ils virent au cofté droit quelques colines fans arbres, mais au gau- che il y en auoit beaucoup & qui eftoyent fort droits félon qu’ils pouuoyent difeerner de la veuë.En cet endroit l’eau commença à changer de couleur, & blanchiftbit com- nie de la chaux,ce qu’il les eftonna,toutesfois ils ne laiflerent pas pour cela de pourfui- ure leur route vers le Nord-oueft,& ayant fait voile huid lieues, ils virent vne autre par- tie de laContinente courant Nord-oueft, releuee en de tres-hauteS'montagnes,laquel- le coftoyant, comme ils fondoy ent auec doute le paftage entre l’vn & l’autre riuage, ils 40 trouuerent la mer de plus en plus moins profonde, trouble & boüeufe, iufques à ce qu’ils viiidrent à la profondeur de cinq braffes : Or ils remarquèrent que la ma- rée couroit là d’vne grande impetuofité vers la terre , & retournoit d’vne mefme furie toutes les fix heures. Le Pilote auec le Capitaine regardans du haut du maft,ils virent la terre de tous côftés fablonneufe, de toutes parts formée & continué', & le riuage fi bas, qu’à peine pouuoit-on le difeerner de près. Or quand ils virent qu’ils ne pouuoyent pas pafler plus outre, & qu’ils n’y voyoyent ïiülshommes quiy habitafrent,ilsiugerent qu’il vaIloitmieuxtournervoile,&comme la maree retournoit, ils pafferent de Taupe nue, où ils virent d’vn cofté laContinente, &: de l’autre plufieurs Mes. Delà ils coAimencerent à prendreleur cours vers le Sud- fo oueft,mâis ils n’auancerent güeres à caùfè du calme ; ils virent à la main droite de fort hautes montagnes nuës , àla gauchd des plaines, & de nuid plufieurs feux. Le lende*- main tenans le mefme Coursdl^defcouurirentvn grand port & vne petite Me feparec de la Continente par vn petit deftrôit, de laquelle montoit vne nuee de fumee, qui s’exalloit de quelques puits , ôe la terre toute bruftee es enuirons : ily frequentoit beau- coup de loups marins. Iis artefterent là vn Sauuage fuyant , lequel y pefehoit auec ' plufieurs )■ Tl. .i'. . » y l /v O CCIDENT ALE s. LIVRE VL iii piufieui’s autres, entièrement nud fort femblable à ceux de la nation Chîchîm'equei. Delà coftoyant la cofte, & ayant pafle vne haute Ifle, ils entrèrent dans vn port , & defeendirent à terre, où ils trouuerenc quelques calTes baffes couuertes de foin, & la terrey eftoitfterile, s’ablonneufe deffournie d’eau ; ils donnerentnom a ce port de S. K^ndréi & prirent en poffefîion du pais le Marquis del Vàlk fous les aufpices du Roi d’Efpagne. Ils virent auflî deux Saunages deftature vn peu plus grande. La ver- fion Angloifc met ce port fur la hauteur de trente & deux degrés vers le Nord. Ils prirent leur cours de ce port entre la Continente & vne grande Ifle, qu’ils iugeoyent auoir de long enuiron quatre vingtslieuëSi Et le Dimanche douzième du mois d’O- I O clobre , ils coururent du cofté de la Continente , beaucoup plus belle & d vn gracieux afped que la precedente j où ils virent quelques loges de Sauuages , qui approchè- rent des nauires dés legrand matin auecvn canoa élégamment fait de cannes, mais comme ils ne pouuoyenteftre entendus des Efpagnols, ils fe retirèrent auflî toftrpeu apres il en vint cinq autres auec cinqcanoas à vnieét de pierre des nauires, maison ne peut les perfuader d’approcher plus près , par ainfi les Efpagnols ayans prompte- mentmis la chaloupe a l’eau > les fuiuirent commeilss’enfuyoyent, Rattrapèrent vn canoa, toutesfois le Saunage faulta dans feau en nageant & plongeant s’efehappa^ S’eftans auancés quelques iours delà, ils approchèrent derechef de la terre encore de beaucoup plus belle à voir, de laquelle plufieurs riuieres, fbrtoyenten mer, où ilsvi- io rent des pas d’hommes & des arbres fruidier^, mais ils ne cherchèrent pas plus outre. Le dix feptieme d’Odobre ils doublèrent vn Cap fort haut, Rie lendemain ils retour- nèrent au port 5’. Cr/K t.,où ils demeurèrent huid iours pour prendre du bois & de l’eain Ils virent là auflî quelques Saunages , qui s’enfuyrent aüffi tod dans le bois prochain, commelcsEfpagnols defeendoyent à terre. C H A P. XIÎL Nauigatiûn du mefme Francifeo de Vlloa^« long de U eofle de Californie', qui eïi hatue de la mer. 5 O "T O V s auons fuiui au Chap. precedent Francijco deVlloa , comme il vifitoit le j golfe de Californie i & l’auons ramené au port de^iS*. Croix i maintenant nous ^ pourfuiuronsfanauigationleilongde la cofte quieft, au dehors dumefmegol- fe,quieftlaueedelamerdu^»i4 ' , • . Par ainfile vingt neufîcme d’Odobre ils partirent-du port de .S.Cm’Ar,mais à caufe du vent contraire , ils furent en grand danger, car.l’vn des deux nauires qui portoit le nom de la S. Trinité touché fur des baffes.en fut retirée aueé beaucoup de difficulté j Delà eftans affaillis d’vne obfcure tempefte auec des fortes pluyes R des efclairs,à pei- ne peurent-ils en huid iours^de temps doubler le Cap, non fans grand péril, à caufe qu’ils eftoyent proche de la cofte : enfin la tempefte s’apxpaifa le feptieme de Nouem- brc,Rcourant la cofte de la Continente, ils defcouurirent de fort belles terres j qui eftoyent des plaines verdes auec peu de bocages; ils y virent auflî plufieurs feux de nuid,par lefquelsil apparoiffoit clairement quelle eftoit habitée; Etle dixième du mefme mois , continuant toufioursla terre en mefme beauté ,ils trouuerent apres auoir fait conte de leur chemin, qu’ils eftoyent défia auancés outre de Cap de Cali- fornie de cinquante lieues , R n’y auoit point de doute que cette terre ne fuft auflî habitée ; mais ils ne peurent defeendre à terre à caufe que la cofte éftoit droite, la mer furieufe,R le courant dulufan fort vehement, encore que la mer tout proche du riua- ge fuft profonde de cinquante braffes. Depuis l’onziemede Nouembre iufques au quinzième, ayans le, vent contraire JO à peine firent-ils dix lieues, le nauire de la T rinité qui auoit efté efearté trois iours en- tiers, feretrouua auec l’autre. Le feizieme du mefine mois levent.de Nord qui leur eftoit du tout contraire empefeha d’auancer ; Or la terre qu’ils yoyoyent de loin, eftoit plate R pleine de campagnés,que les feux allumés de nuidtcfmoigrioyenteftre fortpeuplee,RvnSauuagc qui eftoit dans fon canoa leseonfiderant de loin, refufoit d’approcher plus près: ils eftoyent défia à lxx lieues du Cap de Califoymelm2à.%'ceim- ilsnepouuoyent faire voile à caufe du fort vent de Nord, ils enduroyent grand froid,’ D d a ^ . Delà t)ESCRIPtiON DÈS INDES Delà ayaiât veu vne pointe de terre, comme ils fe preparoyent d’y moüiller l’aiichre derrière icelle & d’y defcendre pour prendre de l’eau , ils furent ehalTés en mer par vn grand vent de Nord, mais enfiii le vingtième du mefmemois retournans vers terre, ils iettereilt l’anchre au deffous de fort hautes montagnes , où ils eftoyent garantis de la furie du vent. CAfiellon premier pilote defeendit là à terre auec fix autres, où il trouua quatre Sauuages fort grands,qui a la première veuë des Efpagnols s’enfuirent de gran- de vitelTe. Par apres ils prirent de i’eau le fécond de Décembre , &vifiterent la terre, qui cftoit montueufe,afpre &: empefehee de plufieurs rochers & cauernes. Apres mi- di vne troupe de Sauuages les chargea fi inopinément , qu’ils furprirent les fentinelles, ils combatirent furieufement, & les Sauuages defehargerent vne fi groife pluye de fie- 1 o . ches & de pierres fur les Efpagnols, que le Capitaine & deux foldats en furent bleifés, & le principal fecours fut en deux grands chiens, qui eftonnerent tellement les Sauua- gesjque comme les Efpagnols lespourfuiuoyentde furie, ils tournèrent enfin le dos & fe retirèrent vers leurs gens; apres cela les Sauuages ayans fait de grands feux,fetin- drent vn peu coi , & la nuift ayans pris des tifons ardens hors de ces feux , ils fe retirè- rent en diuers quartiers , les Efpagnols fe retirèrent pareillement dans leurs nauires. Le lendemain ils acheuerent de prendre leur eau; &: le pilote Admirai ayant vifitévn grand lac qui eftoit au dedans du païs , qui fembloit auoir du moins trente lieues de circuitjayant vn canal large de plus d’vne lieuë,& profond de trois quelquesfois de dix brades : voyans auprès d’icelui vne loge de Sauuages , comme ils fe preparoyent d’ap-26 procher plus près, vne fi grande multitude de Sauuages fortit fur eux, qu’ils furent contrains de reculer &: de fe retirer promptement dans leurs chaloupes. Delà le vent eftànt vn peu plus fauorable, ayans auancé dix lieues, ils entrèrent dans le port de 5. grandement commode St ceint d’vnplaifant païfage 5 St delà co- ftoyant la cofte plus outre iufques au neufieme de Décembre, ils rencontrèrent vne terre verdefort plaifante à voir, parfois des montagnes, St derechef des campagnes, 6t force riuieres qui defeendoyent en la mer: apres cela ils furent attaqués première- ment de gelee St puis à l’improuifte d’vne fi forte tempefte que leurs voiles ayant efté rompues St perdu deux anchres , ils furent contrains de fe retirer derechef dans le port de i!. ' 5® Ils defcendirentlà pour prendre del’eaUjStpource que les Sauuages fi oppofoyent, on ne fit rien tout ce foir : lelendemain ils appaî^iferent les Sauuages auec quelques pe- tit prefents,mais comme ayans acheué de prendre leur eau , ils fe retiroyent aux naui- resjles Indiens commencèrent premièrement auec grand cri 6t tumulte d’en deman- der dauantage,&: comme on ne leurdonnoit rien , ils tirèrent des fléchés apres ceux qui' ramoyent, mais les Efpagnols lafchèrent deux coups de canon des nauires fur eux, qui les efpouuentà tellement, que tournantle dos, ils s’enfuirent dans la foreftprochai- ne. Or il fautnoter que ces Sauuages ne pouuoyent en façon quelconque entendre le langage de l’autre Indien , que les Efpagnols auoyent amené auec eux de Californie pour s’en fèruir de truchement, o ^ 40 ' Eftans partis delà , ils doublèrent le Cap de S. ‘Trinité') & eftans retenus par le vent contraire ,1e vent venant derechef fauorable, ils mirent la voile auvent, couransiuf- ques au premier iour de l’an g Id I d x l le long d’vn riuage bas & fort plaifànt, la tqrre au dedans du païs s’efleuoit doucernent en colines & montagnes couuertes d arbfes, qui eftoit vne agréable perfpeéliue: &voguansainfi iufques au cinquième de ïanuier, ils atteignirent 'la hauteur de trente degrés du Nord, où ils fentirentvn rude froid, & trouuerent que l’hiuer y eftoit auffi long qu’en Efpagne. Le treizième du niefme mois ils defeendirent à terre pour prendre de l’eau, laquelle eftoit fi rude & raboteufe, qu’ils s’eftonnoyent comment elle pouuoit eftre habitée, comme il apparoifloit qu elle eftoit par des pas d’hommes ; tiràns plus outre, ils rencontrèrent le dix huiélieme du mefme y o mois’ vné plus belle terre, & plufieurs Sauuages dans des canoas qui confideroyent auêc grand adffliraf ioniieurs nâuires ; mais vn grand vent de Nord-oueft fe leuant les reietta à llfle des Cedres'Ls. verfion Angloifela met fur la hauteur de vingt huiét degrés èc quinze fcrupules. Or eftans prefTés pour la diflette d’eau, ils firent voile vers la terre ferme,où iIsdefcendirent,les Sauuages tafehans de les empefeher de prendre de l’eau, lefquéisils mitent aifèment en fuite auec leurs cliiens,& emplirent tous les tonneaux. A peine occidentales, livre Vî. iîj A peine auoyent leué les anchres , que le vent Te leua du Nord, qui ne leur eftoit pas Seulement contraire, mais au/Ti fort molefte pour le froid,de maniéré qu’il les força de rerournerà rifle des Cedres; où ils feiournerentiufques au huidiemcde Feburier. Cet- te Ifle abonde en eau & en bois, comme aufli enpoiflon,meflTieil y a vn haute afles dé- fendu contre l’incertitude des vents. Par apres eflrans agites de continuelles tempeftes & ayant palTé beaucoup de dan- gers,qu’ils fouftindrentiufquesau vingt quatrième de Mars, mais comme leurs naui- res eftoyent prefqueouuertes,les matelots commenceront à murmurer, & à deman- der importunément a leur Capitaine Francifeo de Vlloa de retourner en la Nounelle EJpa^ I O qui demeurant opiniaftre en fàrefolution, ayant aucunement racommodélon na- uire , le mit derechef en mer, & ne fçait oniulquesici ce qui luiaduint par apres, on croit alTeurement qu il s efl: perdu en mer ou mort par quelque autre delaftrej l’autré iiauire apres beaucoup de perils,arriua enfin a bon port en la Nouuelle c H A P. xiy. Voyage de Frere Marc de Niza e?} la Frouince de Cibola. Maintenant nous retournerons de la mer en la Continente, & récite- rons le renommé voyage de Marc de Cordelier ,1e récit duquel nous euflîons peu obmettre, comme coUuaincu manifeftement de faulfetés eii plufleurs choies, n eftoit qu il adonne l'occalion aux expéditions 6cnauigations lui- Anthoine Herrera & autres ont daigné l’inlerer dans leurs Commentaires; Par ainli Marc de Niza auec' Ibn compagnon & le Negre Bjiauanico ( lequel eltoit efehappé auec quelques Elpagnols de ce troilîeme voyage fait en la Floride, fous la conàmtzàc Pamphile Narueze, que nous auons ci-deflus rapporté ) èc quelques Sau- nages qui Içauoyent délia 1 Efpagnoheftant parti de la ville de S. Michel en la Prouince àc Culuacan 1 an de Chrill cl o I d xxix,il prit fon chemin premièrement vers Petatlan» lieu litue,comme il conte, a loixante lieues delà precedente ville, & fut receu par tout humainement des Saunages. Là laiflTant fon compagnon malade, il pourfuiuit fon 5 O chemin auec les autres,& combien que les naturels du païs par lequel il paflafnlTent en grande difette de viures,pource qu ils auoyent elcharcement lemé tous les trois ans d’auparauant,il n eut pourtant faute de rien. Durant trente lieues de chemin, par apres il neremarqua rien de mémorable, Il ce n’efl: que certains Infulaires Saunages vindrent a lui,d’vne Iflequiauoit efté délia delcouuerte & viliteepar le Marquis det comme aufli d’vne autre plus efloignee,quiportoyent autour de la telle certains fragments de coquilles à perles, & alTeuroyent qu’il fc troüuoit quantité de perles dans leurs Iflés, ( combien qu’ils ne lui en monftrerent aucune j il y auoit plulieurs au- tres petites Ifle's aupres,qui eftoyent habitées d’vn panure & miferable peuple. Delà ayant marché parvn defert de quatre iours de chemin auec plulieurs Sau- 40 uages , qui 1 accompagnoyent dé leur gré , il rencontra d’autres Saunages, qui ne s’e- ftonnoyent pas feulement des habits des Chreftiens , qu’ils n’auoyent iamais veu auparauant, mais aufli ils admiroyent les autres Saunages qüi leurs eftoyent entière- ment incognus a caule de cette grande diftance du defert qui eftoit entr’eux. Il fut re- ceu la auec grande reuerence, & les Saunages du lieu ne lui apportoyent pas feulement abondances deviures, mais ils touchoyent fuperftitieufement fes habits, l’appellant Hayota,c eft a dire, homme diuin. Il leurprefcha partruchernents lacognoilTancedu vrai Dieu & de 1 Empereur : ils lui contoyenten recompenle,q|u’à quatre iours de che- min de leurs limites vers le milieu du païs, il y auoit vné large plaine habitée par des gens qui eftoyent habilles ,& portoyent aux nés & aux oreilles certaines pierres de 50 couleur verde; &quils auoyent li grande quantité de cette forte de métal, qu’ils lui monftroyentï c’eftoit de l’or^ que leurs vaifleaux en eftoyent & les murailles de leurs temples eftoyent couuertes de lames d’orjmais pource qu’il lui eftoit commandé de ne s efloigner gueres delamer au dedans du païs, il différa d’y aller. Delà ayant cheminé quatre iours parles contrées du melme peuple>ilvintàF4(r d’vn animal çouuert d’vn long poil, de la couleur d’vn dain ; lequel animal, comme ils contoyent, auoit vne corne au front recour bee,de laquelle il en naiflbit vne autre droi- te,qui eftoit la principale force de cette befte. Par ainfi ayant pris cette vallee en la pofléflion du Roi d’Efpagne,apres qu’il y eut feioürné trois iours à la priere des habi- tansjil entra le dixième de May, accompagné d vn grand nombre de Sauuages , ^uec abondance de viures,cedefèrtlequel il auoit appris feparer cette vallee d auec la 1 ro- jo uince de CiboU de quinze iours de chemin , trouuant vn fentier large 5c batu, 5c plu- fieurs marques de feux,que les voyageurs ont couftume d y faire : Or le douzième vn des compagnons du Negre arriua à lui, tout trifte 5C eipouuanté, lequel apres eftre vn peu rafteuré, raconta, que commet Efiauanico eftoit défia paruenu a vneiournee de chemin de CiboUSi auoit enuoyé fa calebafle ( ornee de quelques fonnettes & de plumes,!’ vne blanche 5c l’autre rouge) par des Meflagers au Gouuerneur de la ville OCCIDENTALES. LIVRE VL poui lui déclarer fà venue ; mais que le Gouuerneur ayant veu la calebalTe, s’eftoit mis en fi grande cholere qu’il l’auoic iettee contre terre qu’il auoit baillé charge aux Meflagers de dire a leur Maiftre qu’il lui commandoit de vuider promptement hors de Tes limites,autrement qu’il les tailleroittous en pièces; queleNegrefans s’eftonner de ce melTage auoit pafle outre, Sc qu’on ne lui auoit pas feulement empefehé l’entree delà ville, mais qu apres lui auoir oltéfes Turquoires,&defpoüillédetoutfon bao-aae, on 1 auoit contraint de s enfuir ; quant à lui qu’eftant prefque mort de foif, il s’eftoit deftourne a vne riuiere qui eftoit près delà, d’où il auoit veu fuir le Negre,& tuerfes camarades milerablement par les habitans. Ce difeours eftonna grandement les Sau- t O liages qui accompagnoyent le Moine, par ainfi il s’efforça de les r’afleurer , & d’aro-uer defauxCeMelfager, &ayantauparauantfait fes prier es, il tira hors toute fàmarchan- dife,qu il diftribua aux principaux, les priant & coniurant de le fuiure plus outre. Com- me donc ils eurent marche iufques a vne iournee près de Cihola,ils rencontrèrent deux autres compagnons du Negre, prefque morts de peur, & couuerts de beaucoup de play es, qui rapportèrent le mefme que le precedent, & de plus qu’il y auoit plus de trois cents de leurs gens tués ; & que fans doute le Negre mefme l’auoit efté , ce qui efpou- uanra derechef les Sauuages,de forte que le Moine eftant en peine, & ne /cachant ce qu’il deuoit faire, fe retira vn peu de la troupe, & ayant fait fes prières, il retourna à la com^pagnee,s’eft'ayant par careffes & quelques petits prefents de les appaifer, mais né 20 profitant rien , & eftant aduerti par vn Mexiquain , que les Sauuages eftans o-rande- ment courroucés contre lui, pour le meurtre de leurs gens , la caufe duquel ils^lui im- putoyent & au Negre,ils le menaçoyent fort, il commença de prier les Sauuages de ne commettre rien à l’encontre de lui, & qu’ils auroyent peu de profit en fa mort , de la-' quelle ils ne demeureroyent pas impunis,car fans doute lesChreftiens la vengeroyent. Et comme par de telles &€ femblables parolles il eut adouci les Sauuages , il pourfuiuit a les admonefter d’enuoyer quelques-vns de leurs gens pour efpier,afin qu’ils fuffent plus certains de la mort des leurs & du Negre , mais voyant qu’il ne les y pouuoit in- duire,il s’en alla lui mefme auec quelques autres à la veuë de cMa , laquelle il dit eftrç fituee dans vne plaine au pié d’vne montagne, & quelle cft vn peu plus grande que ? ° -4/^’Ar/^«^’,baftie élégamment de beaux édifices de pierre & bien couuerts : il netrouua pas bon d’en approcher plus près ni d’entrer en la ville, de peur que fi quelque infor- tune luiaduenoit,la cognoiffance d’vne fi noble ville ne fuftdu tout cachee aux Efpa- pagnols; par ainfi apres auoir fait vn monceau de pierres,y ayant planté vne croix, ^ pris poffellîon de laProuince au nom du Roi d'Efpagne , il s’en retourna par le mefmé chemin qu’il eftoit venu , & ayant trauerfé derechef le defert , & falüé en paffant la plaine ou il auoit efté premierement,il arriua en premier lieu à la ville de OHùhe/ & peu ^>resâC0mpûp/ie,d'oàilcniioYz au Viceroi de \d,Nouttelle E/pa^ne la defeription de fon chemin. ■ t r Nous auons iufques ici briefuement fuiui la relation de Frere Marc de Nî&a , par lé- 40 quel on pourra voir clairement, combien eftlegere la foi de telsfreres, qui rapportent bien fouuent ce qui leur a efté conté des Sauuages, & maintefois nullement entendu* comme s’ils l’auoyent veu eux-mefmes, & trompènt par ce moyen ceux,qui adiouftans foi a leurs parolles, entreprennent de longs voyages, comme il eft aduenu à Francifio Cornado&c2M Viceroi mefme,ainfi que nous raconterons prefentement. C H A P. XV. Voyage de Francifeo Valqiiio de Cornado njers la Froumee de Xüibola 0* autres ^oijînes. Nthoine de Mendoza Viceroi de la T^ttuelle Ejpâgne ^ eftant rempli d vne grande efperance par le rapport precedent de ce Moîne,donna charge à ^ FranciJcoVaf^uio de Cornado QiO\x\xç,sx\ç.wï.dQ.\2iNoutielle Galice ^ d entreprendre, a la première commodité vn voyage vers ces régions : Icelui ayant affemblé çent & cinquante hommes decheual,plufieurs defquelsmenoyent deuxcheuauxjdeux cents, hommes, de pié bien armés, auec quelques pièces de campagne, grand appareil de , guerre, des troupeaux de brebis & pourceaux, & enfin abondante prouifions de viuresr.- eftant' / description des INDES eftant parti au mois d’Auril de l’an cl o I o xl de Cultucm, il arriua ayant marché qua- tre iours à la riuiere de Petaîlan , & trois iours apres à Cmaloa , comme Herrera a laille par efcrit : D’où il ordonna fon chemin , comme lui mefme raconte en cette mode. A X X X lieuësrdit-iljdu lieu que le Per e Prouincial auoit tant recommande par ia rc- ' . lationdecommandai àyî/fAùi^rDM/7?demarcherdeuantauec xy Caualiers,&des a- uancer à grand iournees vers cette prouince,& delà defcouunr plus auant:iceliu ayant cheminé par des montagnes fort raboteufes, fans trouuer ni viures ni villes aucunes que II ou III pauures villages contenans xx ouxxx baffes loges les habitans de la- quelle contoyent qu’il n’y auoit au delà rien que desmotagnes rudes ^defertes &vne vrave folicude, comme eftant de retour à la troupe il eut rapporte ces chofes, ns ture j ^ grandement troublés fe voyans fi vilainement fruftrés de leur efperancejtoutesfois leur avant remonftré que ce voyage n’eftoitpas entrepris pour defcouunr leulement ces pais, mais quon s'elloit propofé vn autre but pour tant de abeurs.fçauoir de £ub- iuo-é^er ces riches Prouinces,àlafin ils furent perfuades d aller plus auant. La derechef avant rencontré vn chemin fortempefché, parfois entrerompu de plufieurs monta- ^ ânes, iis commenceront à detefter la foi qu’on auoit adiouftee a ce Moine, qui promet- ?oit quelechemin y eftoit par tout plat &aifé, excepte quelques, coftaux qui apeinc occupovcntdemie4ieuëd’efpace:carilstrouuoyenttoutlecontraire,delortequeles beftes non pas mefme les brebis n’y pouuoyentfurmonter lafprete des montagnes, mais y mouroyent le plus fouuent de laffitude. Enfin on arriua le vingt feptieme de 2,0 May alavalleede Corazones, {HerreralanommQJrroya de beaucoup plus oeuplee que toutes les autres Prouinces qu’ils auoyent paffees lufques la. Nous trouuafmes là beaucoup de champs enfemencés , mais vne fort petite proui- fion de Mays meur : par ainfi i’enuoyai le mefme Dm/eyevs la prochame vallee de Sefî- ZZmLlcsnoLs lanomment à prefent,afin qu’il traitaft des Indiens du pour quelques marchandifes 5 & par ce moycnonfecourut a propos nos Sauuages,ë£ aux moindres foldats,quicommençoyent défia d’auoir diiÇtte de viures. ^ Cette vallee ;sftoit, comme i’appris, à cinq lournees de chemin de la mer, &: 1 enten- di de quelques Sauuages qui habitoyent auprès de la cofte , qu’on auoit fait venir la, qu’il y auoit proche du riuage fept ou huift Ifles habitées d vne gent brutale, & pauure ^ ^ de viduailles , & qu’on y auoit veu n’agueres yn grand nauire. ^ ^ Ayant demeuré quatre iours en cette vallee, ie parti dela,& comme le penfois m ap- procher de plus en plus de la mer, d’autant plus m’en reculois-ie , de forte qu eftant paruenu à Chichilticalen, ie trouuai que i’en eftois à quinze iours de chemin , combien que le Moine eût mis en auant qu’il n’y auoit qu’vne diftance de cinq lieues feulement, L qu’il eut fauffement controuué qu’il l’auok veuë de loin : ce ^i nous fit grand tort, le demeurai feulement deux iours à chkhilticala à caufe de la diffette de pafture, enco- res que la laffitude des cheuaux euft bien requis vn plus long feiour , & l’entrai dans le defert la veille de S. lean, dans lequel il n’y auoit nul pafturage pour les cheuaux .mais vn long & difficile cheihin , auquel plufieurs cheuaux deffaillirent, comme auffi (piel- 40 ques Ameriquains & Negres & mefme vn Efpagnol. Apres lenuoy ai le Colonel de la froupe auec quinze cheuaux pour defcoiiurir deuant , qui faifant bien fon deuoir ren- dit le chemin plus, aifé à l’armee. Ayant par apres fait trente lieues par des bois fans chemin & des montagnes fort rudes , nous entrafines en vne région arroufee de pk- fieurs riuiercs & abondante en pafturages,qui n eftoyent pas beaucoup diffcmblables àceuxderEurope,pleinedemœuners,noyersrmaisdefueillageaucunemetdifterents à ceux de nos pais; nous y auions défia marche l’efp, ace dvn lour, quand quatre Sau- nages fans armes vindrentnous rencontrer,quidifoyent eftre enuoyes pour don- ner la bien venue, & nous dire que le lendemain il en viendrait d autres ^ ures : lefquels les avant ouys , ie priai de direauxhabitans de la ville qu ils courage, & qu’ils n’abandonnaffent pas leur ville , car 1 eftois la venu par le cornman- dementdemonRoi pour les defendre à l’encontre de tos ennemis : enfembk^ uoyaile Commandeur de l’armee pour vifiter tous les paffap,&^s il en trouuoitquel- qu>n de difficile, qu’il i’occupaft de peur qu’il ne fuft premier faifi des Sanuages : Or il en trouua vn grandement difficile, que fi les Sauuages fi ^^ent p . peu nous apporter grand empefehement 5 & il auoit efte faifi ort OCCIDENTALES. LIVRE VI. 217 Commandeur) pource que fur la nuid les Saunages nous approchèrent, qui eftans tombes entre nos fentinelles.ils fe retirèrent aufli toft.Le lendemain ie mis l’armee aux champs, & eftant prede par la difl'ette de viures.i’approchai à grand pas la ville , & afin d’efiaver toutes chofes,i’enuoyai quelques Religieux deuant pour peiTuader les habi- tans,quc ie n cftois pas venu pour leur faire aucun dommage, mais pour les defendre à l’encontre tous ennemis, pourueu qu’ils voulufl'entembrafl'ernoftre Religion,^ qu’ils fe recognulfent valTaux du Roi d’Efpagnc ; mais m'efprifans noftre petit nombre , ils prirent les armes d’autant plus courageufement, & nous attaquèrent librement, tou- tesfois ie retins encores mes gens, me fouuenant de voftre commandement & de celui 10 du Marquis, iufques à ce que l’audace des Saunages s’accreut de telle forte , qu’ils fe mefloyentprefque parmi nos troupes , & que les pierres & dards tomboyent auxpiés de nos chenaux ; alors ie n eftimois pas que ie deuois patienter dauantage, ce que les Religieux mefmes eftimoyent, ainfi ie marche à l’encontre des Sauuagesqueie mis en fuite de prime abord : vne partie futreceuë dans la ville, & les autres furent efparts par les campagnes , quelques-vns furent tués , car la faim meperfifàdoit d’approcher les troupes de la ville au pluftoft,par ainfi ie commandai que lesarbaleftriers & arque- bufiers approchalTent premièrement du rempart, afin d’en chalTer ceux qui le vou- droyent defendre; mais cet effort ne profita gueres, car les cordes des arcs fe laf- choyent, &:les arquebufiers efianstous las cefl'erent incontinent ; cependant les Sau- 20 uages tiroyent les no lires du rempart à coups de pierres & de fléchés, où ie fus en grand danger.eftantietté par terre de deux coups depierre,defquels ie fus tellement bleffé, que ie fus contraint de quitter le combat ; neantmoins les Saunages quittans peu à peu ie pris la ville par la vaillarice des Capitaines & des foldats,où ie trbuuai tant de UHays, qu’il fuffifoit abondamment pour noftre neceffité. Iufques ici nous auons rapporté fuccinflement cette expédition félonies Commentaires de Francijco de Cor^ nado mefme,maintenanti’adiouftcrai le refte des Décades d'Herrera. Ils allèrent ( dit-il ) dans la Prouince de Tucayan à cinq iournees de chemin de CiboU vers le Nord-eft,dans laquelle il y a fept bourgades affés peuplees, quifemblent eftrç ces fept cités dontFrere Marede ^N^za, fait mention. Iufques à Cibolaioxxlcs les riuie- 5 O res & torrens courent vers l’Oueft & fans doute dans la mer du ZW, celles qui font plus outre defeendent dans celle du Nord. De T ucayan ils vindrent à la riuicre HtteXiXc long du riuage de laquelle il y a quinze bourgades en vingt lieues d’efpace,les maifons eftoyeiit iointes enfemble & fort bien bafties,dans lefquelles ily auoit des eftuues , faites fous terre contre la rigueur de l'hi- uer. Cetteriuiere courtduNord-oueftauSud-Eft ,de fortequ’iln’y a point dedou- te qu’elle ne forte en la mer du Nord. A fept iournees delà vers rEft-nord-eft,ilsarri- . lièrent à lariuiere de Cicuic , &cinq autres lieues, ils entrèrent dans des campagnes où il paifl'oit des taureaux & vaches boffués : Les habitans baftiffent leurs maifons de perches pliees au haut en pointe, & couuertes de peaux de bœufs à l’encontre de l’in- . 40 iure du temps; & ne cognoiffent autre richeffes outre ce beftaif ils viuent d’iceux,ils fe veftent de leurs peaux , d’iceux enfin ils tirent tout ce qui eft neceffaire à la vie de l’homme; ils ont en outre de grands chiens , defquels ils feferuent pour porter leurs hardes lors qu’ils changent de place. Cependant l’Ameriquain qui leur monftroit le chemin, foit par fa malice ou par la perfuafion des autres , deftourna les Efpagnols du vrai chemin,& les mena dans des marais & lieux pleins d’eaux,efperant qu’ayant con- fumé toutes leurs prouifions,ils mouroyent de faim dans ces deferts : ils auoyent défia marché huidioLirs quand ils furent aduertis par vn autre Saunage de la tromperie du premier & du danger où ils eftoyent , toutesfois ils cefl'erent de marcher iufques à ce qu’au vingtième iour ils vindrent à vne autre bourgade, le Roi.de laquelle fort vieil & 5 O défia aueugle, fe fouuenoit d’auoir veu quelques années auparauant quatre Chreftiens. Vajquio trouua bon en ce lieu de defcouurir plus auant auec vingt neuf Caualiers,6i d’enuoyer le refte de fes gens en la première place où ils auoyent feiourné. Par ainfi il s’auanca trente iqurs droit vers le Nord, mais à petites iournees, par des lieux pleins d’eaux,remplis de ces beftes boffucs , iufques à ce qu’il arriua à vne riuiere , à laquel- le il donna le nom de S. Pedro & l’ayant paffee & défeendant le long d’icelle vers le Nord- eft, enfin le troifiemeiour ils rencontrèrent des Sauuages attentifs à la E e chaffe, ii8 DESCRIPTION DES INDES chafTcjparlefquels ils apprirent tantl’eftat de cette Pronince,que de l’autre qui eftoit plus efloighee nommee Hara'é, ils marchèrent iniques à finira ■> ou ils trouuerent vne riuiere plus grande que la precedente , mais les bourgades des Saunages eftoyent prefqued’vne mefme façon. Enfin ayant iàlüé le Roi qui eftoit vn grand homme ôc biencompoféde corps, comme ils virent qu’ils né trouuoyent rien qui meritaft tant de peine, & que le mois d’Aouft s’approchoit de ia fin, craignans d’eftre furpris des ne- gcs & deririondation des riuieres , ils eftimerent qu il valloit mieux penfer de bonne heure à leur retraite. Enfin Va/qmo eftant retourné au refte de fes troupes, fut fort trifte de cet aduanture,par ainfi il remmena la plus grande partie de fes gens premièrement enC’«//^4(;^^,&:deiàenfonGouuernement. i C H A P. XVI. . ; Situation de la Prouince de Cibola , qualités de fin aïr de fit terre, comme Francilco Vafquio de Cornado l'a remarqué. NOy s auons defcrit au Chap. precedent le chemin de Francifio tenant nous adioindrons fes lettres mefmes efcrites au Viceroi, par lefquelles on pourra voir plus clairement la fituation & qualités de ces régions. 11 refte à prefent f dit-il ) queie prefente àvoftre Seigneuriedefit&i’eftatde ces fept villes & de ces Royaumes, defquels le Prouincial a conté des chofes fi magnifiques. Premièrement iepeus bien afleurer,que tout ce que ceMoine a rapporté eft outre la vérité de la chofe, & qu’il n’a rien raconté de vrai que les noms des villes & la ftrudure des maifons , car encores qu’elles nefoyent pas ornees de pierreries bleues ni bafties de briques & de ciment, toutesfois elles font fort belles &efleuees de trois & quatre eftages de haut , diuifees en plufieurs falcs & chambres, & munies de caues (bus terre à l’encontre delà rigueur de i’hiuer. Or ces fept villes font autant de petites bourga- des , diftantes les vues des autres de quatre iieüê's d’interualle au plus , qui toutes en- lêmble conftituent le Royaume de Cibola, mais chacune a fon nom propre. La bour- gade dans laquelle nous feiournons à prefent,laquellepourlareflemblance& envo- ftre mémoire i’ai nommee Granade , contient enuiron deux cents maifons, outre d’au- j très ci & là efparfes par les champs au nombre d’enuiron trois cents. Proche d’icelle il y en a vne autre vn peu plus grande d’enuiron cinq cents domiciles : lajtroifieme e ft égalé à la première : les autres quatre font vn peu plus petites j le vous les enuoye peintes toutes dans ce parchemin que i’ai trouué ici. Les habitans de ces régions font d’vne iufte ftature , & allés ingénieux félon la capacité que peuuent auoir des Sauna- ges,toutesfois il ne femble pas qu’ils foyentdç telle induftrie, que d’auoir peu baftirde tels édifices : car ils vont prefque nuds ou leur partie honteufe legerement couuerte, & portent des manteaux bigarrés & peints,tels que ie vous en enuoye.La terre ne peut porter le coton à caufe de la vehemence du froid , toutesfois i’y en ai trouué quantité. Ils portent leur cheueleurc à la façon des Mexiquaim : il femble qu’ils ont grande ^ quantité de pierreries bleuës,mais ils les auoyenttranlportees ailleurs auec le refte de leurs meubles, leurs viures exceptés, auant noftre venue : ni n’auons trouué en la ville nulles femmes ni enfans , ni mefmes aucuns vieillards excepté quelques-vns , qui fem- bloyenty auoir eftélaiiîés pour gouuerner les autres. Entre le pillage on trouua quel- ques pièces d'emeraudes , de cryftal & d’autres pierreries de peu de valeur,qui fe font perdues par la négligence de mes feruiteurs. Il y a vne grande quantité de coqs d’in- de,queles habitans difent ne point manger, mais feulement les nourrir pour les plu- mes : ce qui ne me femble pas vrai femblable,car ils font beaucoup plus grands & meil- leurs que ceux de Mexique. La température de l’aïr n’y eft pas en l’efté beaucoup differente de celle de Mexique, j car parfois il y fait fort chaud, & parfois iiy pleut, bien que ie n’y aye veu qu’vne fois pleuuoir , mais fort violemment & comme par guillee. Les habitans difent que les ne- ges y font fort hautes , & qu’ils y endurent vne gelee fort rude l’hiuer , ce que le climat prouue,&laftruaure des maifons certifiejcomme auffi les peaux & autres préparatifs que les habitansy font à l’encontre du froid. Il n’y a nuis arbres portans fruiéts 3 la terre y eft plate & prefque égalé , elle eft pourtant « OCCIDENTALES. LIVRE VI. zi<> pourtant parfois incommodé de quelques montagnes fort droites.il fi trouue peu d’oi- feaux,& lesforefts y font rares ; il y en a toutesfois vne qui eft à enuiron quatre lieues de la ville de cedres fort bas , qui fournit de fufîifiinte matière pour fairedu feu. Les pafturages n’en font pas loin, qui nous ont fourni fort à propos de l’herbage & du foin pour nos cheuaux,lefquels eftoyent grandement maigres & atténués de laffitude. Le blé dont les habitans fe feruent eft du Map qui y abonde ; comme aulli des pois fort petits & blancs ; il y a auflî de la venaifon , de laquelle pourtant ils ne mangent point, comme ils difent, combien que nous y auons trouué plufieurs cuirs de cerf, comme aulTi des peaux de heures & de connils. Ils font de fort beaux gafteaux de I O Mays ; qu’ils fçauent moudre & piler auec vne telle induftrie , qu’vne femme d’ici fait plus de befogne,que quatre dans la ville de Mexique. Ils fe feruent de fort bon fel, le- quel ils amalTent au riuage d’vn certain lac qui en eft à vne iournee de chemin. Au refte ils n’ont nulle cognoiftance ni de la mer du Nord ni de celle dei’Oueft,iene fçaurois aifement dire de laquelle ils fontplus proche , combien que plufieurs raifons femblentperfuader qu’ils font plus près de celle de l’Oueft, de laquelle toutesfois ils nefontefloignés moins de cent cinquante liejuës, mais de celle du Nord il n’y a point de doute qu’ils n’en font à dauantage : dequoi on peut conieéturer combien eft gran- de cette Continente. Il fe trouue ici plufieurs beftes fàuuages, des ours, tigres, lions, porcs-efpics, & cer- 2,0 raines brebis de la grandeur d’vn chcual, qui ont la queue courte, les cornes grandes, quelques-vnes defquelles i’ai veu fi grandes que c eftoit merueilles : en outre des che- ures fauuages, des fangliers,& pour la fin de très-grands cerfs. Les habitans vont à des plaines à huid iours de chemin vers le Nord , d’ou ils rapportent des cuirs de bceufe bien préparés & élégamment peints. Le Royaume de Tonteac ou Totonteac , que le Prouincial célébré fi fort, n’eft qu’vn lac chaud ainfi que conte les habitans, au riuage duquel il y auoit anciennement plu- fieursloges,maismaintenanteiles y font enpetitnombre &mal peuplées à caufede l’iniure des guerres. Le Royaume âic Marata n’eft nullement cognu ici. Acm eft vne petite villette, ou J O croift vn bien, peu de coton, que les Sauuages delà appellent Acucu. Plus outre on rencontre quelques bourgades fituees furies bords d’vne riuieré, quelques-vnes dei^ quelles i’ai veu,les autres que i’ai apprifes par le rapport des Sauuages. Voila ce que Francifeo Vafquio a deferit, comme tefmoing oculaire, de la vraye face, fans mftie doute de ces régions. Chai». NVÏL Situation^ hahitans, animaux fS autres cho^s de la Prôuincâ de Q^iiiira félon GoxnsLïSL. 40 O M A R A deferit la région de ,§uiuira en cette façon : toute la région qui 1 s’eftend depuis C^V«/Viufques à ,^imrai eft plate, deftouuerte d’arbres,&: nul- lement raboteufe depierresrpeu de villages, fort petits & malpeuplés,les honi- mes ne femunifiTent pas feulement les piés de cuir debœuf, mais aufîi tout le refte du corps : & les femmes, auiquelles c’eft grand honneur de nourrir de fort longs cheücux, fe couurent d’iceux non feulement latefte,mais auflî la partie honteuft:Ils n’ont pour tout aucune forte de blé, & viuent de chair, le plus fouuent eruë,foit qu’ils y fbyent accouftumés ou qu’ils le facent pour la diifette du bois ; ils deuorent gloute- ment lagrailTe fraîchement tiree des entrailles des beftes : ils en boiuentlefangmef- me tout chaud fans danger ( bien que les Anciens ay eut nié que cela fe peuft faire )' & le J 0 froid méfié auec de l’eau : quand ils n’ont point de pots,iis rotiffent parfois la chair ou labrufient pluftoftà la flamme d’vn feu fait de fumier fecdaquelle ils deuorent pluftoft qu’ils ne la mafehent ouamolliflTent des dents : car l’ayant prife aueclesdents, ils la fe- parent auec des cailloux trenchans,& la defehirent à la façon des beftes. Ils viuent par/ troupes, mais ils n ont nulle demeure afreuree , ains ils changent fouuent de place à la façon des Scytes , félon que la faifon dei’annee les contraint , ou l’abondance du paftu- rages les inuite. ■ ‘ Ee Z Leurs ^lo description des INDES V Leurs vaches font fort femblables en grandeur & couleur aux taureaux de l’Europe, mais les noftrcs les furpaflent en grandeur de cornes, car elles les ont petites, prefque droites & fort aigues, elles difFerei;it principalement en cela qu elles ont vne boffe en- - tre les efpaules & le poil commedela laine,au deuant du corps plus longs qu’au der- rière , & fur le col & l’efpine du dos crefpes comme crin : elles muent tous les ans de poiI,qui eft ptefqu© noir & par endroits bigarré de certaines macules blanches ; elles ont les iambes courtes, couuertes depuis les genoux dVn long poil, le front en eft auffi ^ couuert entre les cornes, & fous la gorge il pend ft bas qu’il femble vne barbe de bouc : les mafles ont la queue longue & velue au bout j de forte qu ils ont quelque chofe de commun auec le lion ôc quelque chofe auec le chameau. Ils frappent des Cornes, & i o •quandla rage les prend, ou quand ils font courroucés ils tuent mef. ^ mes les cheuaux.C’eft enfin vn ani- m mal difforme , d’vn regard affreux 5 & cruel, de maniéré que les che- ^ uaux ont peur de leur rencontre, fi c’eft pour la laideur ou pour la nouucauté il eft incertain. Les Sau- I uages ne cognoiflent autres richef- fes outre ces animaux j car ils leurs zo | fourniffent le manger & le boire, # ( car leur chair eft de fort bon 'W gouft ) de leurs cuirs ils s’en couurent le corps & leurs cabanes auffi ; des tranches d’i- f ceux ils en fontieurs cordes,de leurs os des poinçons ; des nerfs & du poil du filet î des » cornes des cornets ; des vefîes des oüaires ; ôt enfin du fumier fec du feu. Gomara don- » ne la figure de cet animal que nous auons ici mife. A Il y a auffi d’autres animaux de la grandeur d’vn cheual, qui pource qu’ils portent » laine èc cornes, les noftres les appellent Brebis ; on dit que leurs cornes pefent parfois » cinquante liures. Comme auffi de fort grands dogues qu’ils lafehent apres les tau- î reaux,&: les chargent de fardeaux de cinquante liures pefant , lors que pour chaffer ou 5 o || changer de demeure ils vont par païs. 1 J£n outre, tant Gemara c^Anthome HerreraiVatlttnt ^muira fur la hauteur de qua- a tante degrés vers le Nord ; & loüçnt affés la température de Faïr, la bonté des eaux &: ^ la beauté des champs 5 ils difent qu’il y a des cerifiers, meeuriers, noyers, des vignes & | enfin des melons. # Mais il eft befoin d’ouïr là deffus Gomara, qui met la Prouince de Cihola fur la hau- S teur de trente fept degrés & trente fcrupules, (ainfi parle la verfion Françoife, car | l’exemplaire Efpagnol la met fur trente degrés & demi ; & pourfuit le chemin de Bran- f cifio Fajquio de Cormdoi^lm outre en cette maniere.Les foldats de ( dit-il )com- J me ils virent que ces régions eftoyent fi deffournies d’habitans, &fi pauures, ils furent 40 grandement courroucés contre ce Moine , qui auoit conté tant de merueilles de ces païs là : par ainfi afin de retourner en la Nouuelle EJpagne à vuide & fans auoir rien fait } qui Yaille,ils fe refolurentde defcouurirle païs plus auant,fur toutpource que les Sau- nages affeuroyent quüy auoit affés près delà des terres beaucoup meilleures : Ayans approché leur camp iAcuco , lieu grandement fort & fitué en vn lieu haut ; Carjïas Lopes de Cardenas ayant efté enuoyé auec vne compagnie de Caualiers pour chercher la mer ; Fafqmo rneime marchaauec le refte des troupes vers Tiguez, fitué fur vne gran- die riuiere. Là ils ouïrent quelque renommee de Axa & ^muira , & les Sauuages con- toyent que le ^oï^Xatarax dominoit fur ^muira,Qpx\ eftoit vn homme barbu, blanc de couleur & grandement opulent , lequel adoroit dans vne chapelle vne croix & la Roi- j 0 ne du Ciel. Le bruit de ces richeffes pouffa aifement les foldats à marcher , combien que |)lüfieurs dentr’eux foubçonnaffent non fans caufe que ces chofes eftoyent fauffes &: inuentees parle Moine. Cependant les Sauuages qui auoyent fuiui les Efpagnols iufques làjs’enfukent vne nuid en diuers quartiers, ce qui ne troubla pas peu l’armee. Toutesfois ayant leué leur camp , ils prindrent en paffant vne bourgade , laquelle ils ' pillèrent & bruflerent ; par apres ils en affaillirent vne autre, où ils perdirent quelques foldats, I OCCIDENTALES. LIVRE VL foldats^anec cinquante de leurs cheuauxblefles,&'niefmesE^/«w^tf fut pris & emmené dedans la place, on ne fçait pas fi c’eftoit pour le facrifier aux Idoles , & pour apprendre de lui plus à plein l’eftat de ces nouueaux venus 5 toutesfois il eftoit plus croyable que c’eftoit pour le dernier fuiet,car on n’auoitpas remarqué iufques làjqu’en ces païs ils enflent appaifé leurs dieux par l’immolation d’aucun homme. Par ainfi la forterefl'e fut ceinte, mais elle peut à peine eftrc prife auant le quarante & cinquième iour. Comme les habitans de cette place virent que c’eftoit fait d’eux, ils ietterenc premièrement dans vn grand feu leurs manteaux, leurs turquoifes, & tout ce qu’ils auoyent de précieux ; par apres ayans mis au milieu de leur troupe les femmes & les I O enfans , ils fortirent d’vne grande furie ; mais il y en eut fort peu qui efchapperent,lc refte fut tué à coups d’efpee , ou furent foulés aux piés des cheuaux, ou bien furent noyés dans la prochaine riuiere : Les Efpagnols n’eurent pas auflî la viétoire fans refpandre de leur fang; car il y en eut fept de tués, quatre vingts de bleffés & plufieurs cheuaux y demeurèrent : enfin quelques Sauuages eftans repouffés dans la place , re- refifterent vaillamment iufques à ce que les Efpagnols mirent le feu dans les maifbns, ^ & que la flamme eut confumé tout ce quelle rencontra. C’eftoit rhiuer,& la riuiere eftoit fi fort gelee, que la glace portoit les cheuaux. Les neges y font fort hautes, & y durentprefquelixmois : toutesfois les Autheurs difent qu’il y croift de fort bons me- lons,& mefmes du çoton,duquel les habitans tiffentleurs manteaux. xo Ayans cheminé quatre iours de Tiguez,,ils arriuerent à Cûmc, petite. bourgade,de la- quelle s’eftans efloignés enuiron douze lieuës,ils rencontrèrent vne nouuelle forte de vaches, defquelles ils en tuerent quatre vingts,qui fut vn grand foulagement pour leur troupe. De OV^/Viufquesà j^/»/>4;,ils content nonante lieues, par vne grande & fte- rile plaine,dans laquelle on ne trouue ni pierres ni arbres, non pasmcfme de l’herbe, par ainfi ils furent contrains de marquer leur chemin & leurs logements auec de la iîente de vache,dequoi ils faifoyent des monceaux, de peur de s’efearter du droit cfic- min en retournant: Ils leur eut fallu néceflairement mourir de faim dans ce defert,car ils n’auoy ent défia plus de blé, fi ces vaches ne leurs euflent fourni de viures,qui vaguent par ces campagnes en grandes troupes. Enfin ils arriuerent à & trouuerent 5 O Tatarax, qui eftoit vn homme blanc défait, mais nud du tout, & qui n’auoit nulles au- tres richeffes qu vne lame d’airain,qui lui pendoit du col fur la poitrine. Les Efpagiioîs eftans fruftrés d’vne fi grande efperance,retournent au pluftoft à T iguez, n ayans trou- ué aucune marque de la Religion Chreftienne parmi ce peuple de ^muira^ Et enfin l’an clnlDXLiiils arriuerent en la Noiiuelle EJpagne, Plufieurs chartes Géographiques d’auiourd’hui mettent cette Prouince de ra prefque au dernier coin àe Califomie vêts l’Oueft:& toutesfois HerreraoiSeute auec raifon, quelle décliné de Cibola deux cents lieué's vers l’Eft ; ce que le conte du chemin que nous venons de deferire requiert, comme aufîi celui d’vn certain Portugais, re- tourné de ^muirâ par le païs des Chichimeques en la Prouince de Panuco. Par ainfr i’ai 40 eftimé qu’il y auoit vnegrande faute commifedans ces chartes,toutesfois iene fuis pas encore defgagé du tout de ces aftaires.fur tout depuis que i’ai veu vne vieille charte élé- gamment bien tracee en parchemin, laquelle feparoit Californie à\x Continent de l’A- merique Septentrionale à la façon d’vne grande Ifle: Or i'ai penfé que peut eftre ce que G omar a raconte,auoit donné occafion à cette faute, fçauoir que les Efpagnols en ce temps là auoyent veu quelques nauires le long du riuage chargées de diuerfes mar- chandifes , le Galion defquelles eftoit orné d’oifeaux dorés , qu’ils fôubçonnoyent ve- nir de Catay ou du Royaume de la Sine. Mais i’ai veu aufîi n’agueres la relation certai- ne du Cordelier Francifio de Benauides, de laquelle nous parlerons dauantage bien tofh en laquelle il fait mention de deux Prouinces de .^iuira , l’vne defquelles eft fituee|à J O rOueft de la Pilome/leAIexique, l’autre à l’Eft : quoi qu’il en fbit de cette première qui eft vers l’Occident, carien’adioufte pas grande foi à ce Cordelier )ie me perfuade que cette derniere qui eft vers l’Orient eft fans doute la vraye ^umira. Car Gomara racon- te,comme defrus,qu’apres ce voyage inutile de Francifio Vafiquio, que Frere loandePa- dilU auec vn autre Cordelier, douze Sauuages de Mechuacan^^ André de Ocamfo Por- tugais, auoyent feiourné quelque temps dans la Prouince de ‘Tiguezi & puis delà auoyent efté en la Prouince de ^muira ,• &: les Moines ayans eft é tués par les Sauuages E e 5 du lieu. DES CRIPTION DE s INDES . du lieu, le Portugais s’efchappa auec quelque peu de Mechoaqmim , qui après dix mois de captiuité & ayant longuement tracaffé par le pais, retourna enfin par les terres des Chichimeques dans la Prouince de Panueo. Au refte Bemuides met ^iuira fur la hau- teur de trente fept degrés ver? le Nord de la ligne ;& efcrit que cette Prouince (les habitan's de laquelle il nomme Aixaoros ) abonde en mines d’argent & d’or , & qu’elle n’eft pas loin des limites de ces Prouinces , que les Anglois & Hollandois occupent à prefent auec leurs colonies; lefquels il ditreceuoir des Sauuages d’icelle beaucoup d’or & d’argent, ce que les Anglois & ceux de noftrepaïspeuuent tefmoigncr eftre faux . C H A P. XVIII. Jdauigation de Hernando de Alarcon dans le Çolfe Californie. AV mefme temps c^Anthoine de MendozaYiee^noi de la Nouuelle EJ^agne^ en- uoya Francifeo Vajquio de Cornado par terre pour defcouurir les Prouinces de Cibola , il fit partir uuiTi Hernando de Alarcon auec deux nauires , afin qu’il vifîtaft la cofte marine de Californie : lequel eftant venu iufques aux bafles d’où Framifto de vUoa auoit retourné , il pafla non fans grand péril iufques au fond du golfe : où il trouua vue riuiere qui couroit fi vifte, que le courant arreftoit les naui- res flotfans à pleines voiles : par ainfi laiffans là les nauires à l’anchre , il entreprit de lo monter la riuiere auec deux chaloupes fournies de vingt tant matelots que foldats; le premier iour,qui eftoit le vingt fixieme-d’ Aouft, il fît à peine fix lieues , le lendemain il vit quelques cabanes de Sauuages, qui apres auoir caché toutes leurs hardes dans les montagnes voifines,retpurnans auriuage,ilssclForçoyent en menaçant d’empefeher les Efpagnols de defeendre à terre ; mais Alarcon adoucit tellement les Sauuages par promefles & petits prefens, qu’ils leurs permirent de leur bon gré de defeendre à terre, & leur apportèrent libéralement des viures. Ce peuple alloit nud,& eftoyent peints la peau de diuerfes couleurs , ils auoyent la telle couuerte d’vn morion , qu’ils faifoyent de cuir de cerf orné de fort belles plumes : leurs armes eftoyent l’arc & les fléchés auec des efpees de bois; ils eftoyent de grande corpulence & de membres robuftes : ils fej o percent les narines &: fe fîgurent les bras de certaines petites marques : leurs cheueux font rafes au delTus du front, derrière pendants iufques aux reins: les femmes couurent leurs parties honteufes deuant& derrière de plumes; ayant le refte nud & cheueluës en la mefme partie que les hommes. Or tous les iours il accouroit vne grande multi- tude deperfonnes,lelquels cetEfpagnolfceutfibienappriuoifer, pource qu’il feven- toit eftre là enuoyé du Soleil, que ces Sauuages adorent vniquement , qu’auec des pe- tits prefents de peu de valeur, comme des croix de bois & de papier, ( qu’il difoit eftre chofes celeftes ; il les appriuoifa en forte,qu’ayans pris les cordes des chaloupes, ils s’ef- fayoyent de toute leur force à les monter à l’encontre du courant de la riuiere. Ils en trouuerent quelqu Vn dentr’eux , qui fembloit entendre vn peu leur truchement : le- 40 quel ayans interrogé de diuerfes chofes , comme ils l’enquirent de la fituation & eftat des Prouinces de Cibola 3c Tonteacyil refpondit qu’il n’en fçauoit rien. Enfin Nagua^ chatm le Roi de ces Sauuages vint à eux, qui falüa humainement le Capitaine, & lui donna quelques gafteaux faits de Mays & des courges ;^par ainfi les Efpagnols y plan- tèrent vne croix, & les Moines enfeignerentles Sauuages comment ilia falloitadorer. De l’autre cofté de la riuiere il n’y auoir pas moindre multitude d’hommes , qui leurs prefentoy ent aufli des viures , voila pourquoi on y dreifa auflî vne croix. Par apres in- terrogeans ierieufement le Roi, ils apprirent qu’il y auoit plus de vingt trois diuers peuples qui habitoyent le long des bords de cette riuiere , tous differents entr’eux de langage , routesfois qu’il y en auroir roufiours quelques-vns lefquels pourroyent en jo quelque façon entendre le truchement des Efpagnols. Et quau defl'us d icelles il y auoit vne certaine nation qui demeuroit dans des maifons de pierre, & alloyent veftus depeaux de belles Sauuages, lefquels defeendoyent tous les ans vers eux pour achc- pter des viures. Eftant parti delà il rencontra vne autre nation , laquelle auoit quelque obfcure co- ernoiflance de CiboU , & difoyent qu elle en eftoit efloignee d’vn mois de chemin : &: ^ . peu OCCIDENTALES. LIVRE VL 223 peu apres ils tombèrent entre vn autre peuple,le Roi duquel alTeuroit que le Seigneur de Cthok auoit tué quelques années auparauant vn Negre, auquel ilauoit ofté des plats verds & vn chien. Proche delà il y auoit des Sauuagesqui auoyent grande abondance de coton , mais ils en ignoroyent entièrement l’vfage, la renommee de CihoU s’au- gmentoit de plus en plus , car ilsdifoyent qu adix iournees de chemin delàparvn de- fèrt on n enferoitpasloin : enfin il s’en trouua vnqui difoity auoir efté, & y auoirveu des Chreftiens auec leurs grandes belles. Or le Capitaine coniefturoit alTés qu’il vou- loit parler d.QFranciJco V dji^tiio de CoTnado & de les cheuaux, defiroit fort de lui enuoyer des Melïagers,mais il ne peut perluader perlonne d’entreprendre ce chemin. En deux 10 iours apres il delcendit vers les nauires, le chemin qu’il auoit prelque monté enquin- - ze iournees : Etayanstrouué tour en bon ellat, il donna nom à lariuieredeü’ztf de hona laProuince Campannade hona, Guia ; & apres qu’il eut donné chargea les gens d y ballir vne chapelle a Nuejira Sennora de hona Guia , il entreprit derechef de monter la riuiere auec plufieurs chaloupes: ôc en peu de iours il arriua dans la Prouince de Coauo ou Cumana ou bien ^uama,( C2X ie trouue ces trois noms dans les Autheurs, foitquc ce foit vne m.efme& feule Prouince ou plufieurs &diuerfes ; où il fut humai- nement receu des habitans ; enfin ayant monte la riuiere enuiron quatre vingts lieues, ne trouiiant pas cequ il cherchoit, il retourna vers lès nauires làns faire ce qu’il s’elloit propofe. Apres leuant les anchres, vilîtant en palïant les colles de Californie, il rame- 2.0 na fes nauires fans infortune en \^2{puuelleEJ}agne. C H A P. XIX. . Expédition nauale de luan Rodriguez Cabrillo le long de U cofle Aufirale de Californie en la mer Pacifique. Le Viceroi Mendoza ellimant qu’il falloir pourfuiure iullement ce qu’il auoit commencé , efquipa derechef deux nauires, fur lefquels il mit pour Capitaine luan Rodriguez Cabrillo Portugais ; lequel partant du port de la Nauidad le vingt feptieme deluinl’an cId Id xlii, palla le lendemain le Cap de Corrientes,èL\t tren- 5 o tieme du melm e mois apres qu’il eut colloy é la colle , il monta iulques à la hauteur de vingt deux degrés &: vingt fcrupules. Or le fécond de lullict ayant palTé outre le port du Marquis del VallefitxxQ au Continent de Californie (qu’on nomme de la Cruz ) le huiélieme du melmemois il doubla le Cap de laTrinitad lut la hauteur de vingt cinq degrés : & le dixneufiemedu mefme il de la Madalena fur la hauteur de vingt feptdegres, fort bien garenti à l’encontre de l’incertitude des vents j où il prit del’cau. Partant delà il arriua le vingtième d’Aoull au Cap dél Enganno (w\:\2l hauteur de trente & vn degré : & le quatorzième de Septembre il anchra fur la hauteur de trente trois degrés delà ligne vers leNord, au delTous d’vn Cap fort droit, qu’ilnom- ma delà ayant derechef mis les voiles au vent, le dixième d’Oélobre il arriua au ^ O droit d’vn village de Saunages 3 fur la hauteur de trente degrés & vingt fcrupules, le- quel il nomma pour la multitude des. canoas qu’il y vit, Eftant dé- tenu la a caufe du calme, ilfètrouuale dix huiélieme du mefme mois fur lahauteuf de trente fix degrés & trente fcrupules, où la Continente nuançant vn grefle col en mer, fait vn Cap, qu’ils nommèrent de fa figure ^ Parapres pour efuiterla froidurede Nord-ouefl ,laifîànt le riuageilgaigna la mer, & à dix lieuëes du Cap precedent, il defcouurit deux Mes , l’vne defquelles auoit huiél lieues entre l’Efl & rOuefl,& l’autre quatre, auiourd’hui appellees du nom de S. Lucasi Il entra dans vn port qui efloit en la premiere,fort petit, mais affeurè, lequel ilnomma de la Pojfejfon. L’vne & l’autre de ces Mes font habitées de Sauùages , qui vont nuds JO aufli bien que ceux de la Continente, ayans lesiouès figurées de certaines marques quarrees,& viuans depefehe. Le vingt cinquième du mefme mois ayant vn petit vent Sud-ouefl,il partit de ce port, le lendemain il fut en grand danger eflant prefque iet- té d’vn vent du Sud violent fur vne coflc fans haute, & qui brifoit fort; & ayant efté quatre iours de long trauaiilé d’vn vent variable, auec des fortes pluyes & vn ciel cou- uert,le premier de Nouembre il fut reietté par vn vent impétueux duNord-oueft, & vne tempefte contraire au Cap de la Galera^àcintiQ lequel il mena fès nauires. Le iour d’apres description des INDES d’apres il entra dans le port de llfemble quen cet endroit la cofte foit fort peuplee d’habitans , plufieurs defquels vindrent des lieux voifins voir les Efpagnols ; ils dançoyent au fon du tabour& couchèrent dans les nauires: cependant lesEfpa- gnols fournirent paifiblement leurs nauires de bois & d’eau. Ces Sauuages auoyent des maifons fort fpacieufes fur le bordd’vne riuiere; eftoyent prefque tous nuds,&: viuoyent de glands, noix & poiffon: leurs fepulchres eftoyent enuironnés de planches. Les Efpagnols nommèrent cette Prouince Sejo. L onzième de Nouembre ils partirent delà, lèvent eftant Sud- eft, qui leur eftoit fort bon, prenant leur cours le long de la cofte comme ils eurent quelque temps cherché en vain la tmxç.izèicNueflrêiSennoray comme ils la nomment, ils rencontre- 1 rent vne fuite continue de fort hautes montagnes, qui font nommées auiourd’huii’. , lefquelles auancent en mervn grand Cap demcfme nom, fur la hauteur de trente huid degrés.En cet endroit ilfe leua de nuid vne forte tempefte du Sud-oueft, auec des fortes pluyes & vn temps couuert de nuées , de forte qu’ils ne peurent tenir leur route,mefmes ils furent feparés les vns des autres par la violence des flots, qui les contraignit deietter tout le bagage qu’ils auoyent fur letillac ; ainfl le treizième du mefme mois,ils tournèrent le Cap vers tcrrc,pour chercher leur autre nauire. En outre fur les quarante degrés & quelques fcrupulesdelaligne versleNord,il y { âvn Cap couuert de hauts pins,defquels il receut le nom ; d’icelui la cofte de la terre ferme court quelques lieues vers le Nord-oueft,&: le riuage eft fort haut & droit. lo J Le quinzième comme le vent de Nord-oueft fouflloit violemment , & voguant le long du riuage à peine pouuoy ent-ils fupporter la rigueur'du froid, ils eurent la veuë de certaines montagnes couuertes de nege,& ayant trouué leur autre nauire qui eftoit en grand danger pour la quantité d’eau qu’il auoitpuifé,ils entrèrent lefeizieme en la baye de ?mo%. Le dix huidieme ils partirent delà pour chercher vn port plus commo- dedls virent derechef des montagnes couuertes de nege,defquelles defeendoit vn cap en mcr,nommé vulgairement Ccibo de Nieues-, à trente huid degrés & quarante feru^ pules au Nord de la ligne. Toute la Continente eft prefque là de mefme températu- re,car quand le vent de Nord-oueft règne , le ciel y eft clair, &: nullement couuert de nues. Or la cofte court du Nord-oueft au Sud-eft , depuis le trente feptieme degré 3 iufques au quarantième. Ne trouuans nul haure en toute cette fuite , ils fe refblurent de retourner au port de U Tojfejfton au deflbus de l’Ifle de S. Lucas ,• là le vent de Sud-oueft foufflant opiniaftre- ment,ils furent miferablement trauaillés par vn grand froid, des negjes & des flots fort impétueux, mefmes au dedans duport,iufques àlafindeDccembrejils fe mirent dere- chef en mer,& enfin le dixneufiemedelanuierde l’an cio lo XLiii,ils entrèrent auec grand danger dans le port de Sardinas la féconde fois. D'où faifans voile dere- chef le quatorzième de Feburier, ils virent le vingt fixiemedu mefme Cap AcFortuney fur la hauteur de quarante & vn degré : iufques au commencement de Mars ils furent fort fatigués de fortes tempeftes,obfcures nuees,& d’vn froid intolérable , iufques à ce qu’ils furent paruenus fur la hauteur de quarante quatre degrés de la hauteur du pôle du Nord. Mais comme ils ne pouuoyent plus fupporter la vehemence du froid,ils re- tournèrent premièrement au Cap deP/wj, & peu apres pour latroifieme fois au port delà Pûjfejjîon ,• dans lequel ils ne peurent entrer pour la violence des ondes , le petit nauire fe retira enfin fous l’Ifle de S. Sebaftian^zygint fait,comme ils difent,prefque deux cents lieues en cinq iours. Ils commençoyent défia à auoir grande diflette de viures, par ainfi ils iugerent que le meilleur feroit pour eux de retourner en la Nom/elle EJpa~ gnei & ayans trouué leur compagnon fous l’Iflede Cedros le vingt fîxicme du mefme mois , ils retournèrent le quatrième d’Aurilau port de XzNmidad, lum Rodriguez. Ca- eftant mort peu auparauant en chemin. NOVVELLE I • ^ OCCIDENTALES. LIVRE VL NOVVELLE ALBION. ÎZ5 C H A P. XX. Nouuelle xAlbion dejcrïte félon les Commentaires de François Drac, le refîe de la Californie. Avant que nous retournions de ces régions maritimes aux Prouinces qui font au dedans de la Continente de l’Amérique Septentrionalejil ne fera point hors de propos de faire mention de cette Prouince , que le valeureux Cheua- I O lier defcoùurit premièrement en fon mémorable voyage, qu’il fit tout au- tour dugolfe de la terre.Iceluiayantpaflele Deftroit de (JMagellan,bcçL^2iYiX.co\xs\x tou- te la coftede 1 Amérique Méridionale, & de \z. Nouuelle EJpagne^ defirans de retourner en Angleterre par les Ifies des Indes Orientales, il prit Ion cours vers le Nord-oueft , &: ayant traiierfe cette grande mer du Zud iufques au quarantième degré dé la hauteur du pôle du Nord, le cinquième de luin , comme lès gens ne pouuoyent plus lupporter Iefroid,il tourna vers la Continente del’Amerique Septentrionale, & eftant retourné iuiques au tiente huiétiemedegre de la hauteur dumefinepole, il entra dans vne large Sz fort commode bayc,ou ilmoüillal anchreledix/eptiemedu mefinemois. Les Sau- uages qui habitoyent proche de la cofte marine accoururent auffi toft à grandes trou- 2.0 pes,ôt firent prefent au General de quelques ouurages faits déplumés &delaeis ;qui les receut courtoiiement,& leur donna en recompenfès quelques petites merceries de pardeçà j Ils admiroyent de telle forte les Ànglois &leurs prefents, qu’ils les croyoyénc eftre Dieux,& ne vouloyent pas eftre perfiiades autrement. Le lendemain comme ils furent venus fur le lommet de la montagne , au pie de laquelle les Anglois auoyenc drelTe leurs tentes, ôe s eftoy ent fortifies,ils s’arrefterent vn peu de temps, & apres qu’vn dentr eux fe fuft longuement peine a haranguer , & que les autres eurent laiffé leurs arcs&lerefte de leurs armes, ils defeendirent auec leurs prelènts au lieu où les An- glois eftoyent placés : cependant les femmes quiauoyent demeuré au haut delà mon- tagne , fe tourmentoyent miferablement, fe defehirant les ioucs auec les ongles , & I O cftoy ent attentifucs,comme il fembloit,a quelque fàcrifice:& comme les hommes eu- rent confideré auec grande attention & elbahiffement les couftumesdes Chreftiens, (car les Anglois vacquoyent lors à leurs prières fort à propos) ils rendirent tout ce qu’ils auoyent receu le iour d’auparauant des Anglois pour prefent. Ccpendantla re- nommée de la venue de ces Eftrangers s’efpendant de plus en plus, le Roi de ces Sau- uages en eftant efineu,il enuoya deuant deux ÎVIelïagers,, qui ayant harangué pref* que demie heure pour néant, ils firent fignequils demandoyent quelque preleiic pour leur Roi , par lequel il cognuftquil pourroit en fèureté delcendre où eftoyenc les Anglois logés , ce qu ayans obtenu , ils retournèrent à leur Seigneur. Icelui mar- cha auec pompe Royale,enuironné d vne grande troupe de gardes. Tvn defquels por- 40 toit deuant le Sceptre , auec deux Couronnes, qui efloyent élégamment faites de di- uers plumages, & trois longues chaînes de certains olîclets , peut eftre de mefine ma- tière & forme que tBjttrgny , dont nous auons dit ci-deftus que les Canadiens Ce fer- uoyent.OrleRoi eftoitgrand de ftaturc,°eftcsnullemenrinciuils,veftu de peaux de conqils & autres beftes fàuuages: derrière lui fuiuoit vne troupe confulè d’hom- mes auec des piefentSi qui eftoy ent entièrement nuds & peints de diuerfes couleurs. Or les Anglois eftansfortis au deuant en bataille, s’eftans fàlüés de loin les vnsles au- tres,il y eut long temps vn grand filence fait : Par apres celui qui portoit le Sceptre au deuant du Roi,eftant lecrettementaduerti par vn autre, fit vne longue harangue, qui ayant efte approLiuee par cris deioyedelamultitude, LeRoi commença àdeicendre jQ auec les femmes, f Car il auoit commande que lesénfans demeurailènt au haut de là montagne j il eftoit preique défia venu au rempart du camp, quand le Port-lceptre commença de chanter vne chanfon & à faulter à la cadance d’icelle, le Roi &:fes gar- des lui relpondant ôc menant la dance : le refte de la troupe les imitdir , excepté les femmes qui laultoyent lans mot dire : Et eftant en cet eftat receus au dedans des rem- parts , ils fe fatiguèrent longtemps à chanter &dancer: Enfin ils fuppliérentleGene- ral Anglois qu il vouluft prendre fous là proteélion leur Prouince, & gouüerner le F f Rovaume, DESCRIPTION DES ÎNDËS Royaütiie,cie qile leur ayantaccordé par ligne, ils mirent furlàtefte la Couronne en chantant &:dançant,&: lui pendirent les chaines au coUe nommant : T oute cette Prouince abonde en vn nôbre infini de connils,qui ne different en rien ^ de la telle de ceux de l’Europe, mais leurs pies relTemblent mieux à ceux des taulpes, ,'V & la queuç à celle des loirs j ils ont comme vn fac de chacun collé , dans lequel apres qu’ils font làouls , ils gardent le relie : les habitans en viuent, ils en elliment fort les peauXjCar l’habillement du Roi en elloit fait. Les cabanes de ces Saunages elloyent ballies de gafonsjcouuertes iulques au haut d oliers élégamment entrelacés enlemb c en rond, & fort bien accommodées contre le froid , dans lelquelles ils couchent au- près du feu fur du ioncellenduàterre.Leshommesy font nuds,&: les femmes y ont les i o parties honteufes couuertes de certaines martes deionc fort indullrieufement faites, Dfàc en partantdelà donna le nom à la Prouince de Nouuelle Albion, tant a caufe des rochers blancs qui y font,qu’auiri pour la mémoire de fon pais, qui s appelloit ancien- nement Alhion.'Ei y ayant planté vne colomne,il y attacha les armes d’ Angleterre,& y efcriuit le nom de la Royne & le fien ; & partit delà au grand regret de ces Saunages. Or afin que les amateurs de la Géographie n ayent rien a defirer en ce lieu, nous vi- fiterons en palfant lacolleÂullrale àc Californie ^ (on dernier riuage: fon Cap Ori- entai ell appelle par quelques-vns du nom de 5’. CUire,ms à vis de IzNouueUe Galice: D’icelui l’autre Cap qu’on nomme de .S. Lucas en ell feparé d vn long efpace, fitue fur les vingt deux degrés de la ligne vers le Nord, comme Lrancois GualleY.('^^.%no\ a re- 20 marqué : vers lequel drelTent leurs cours les nauires qui retournent des Mes Philipfmes & du Royaume deia Sine en la Nouuelle Efagne : de ce Cap iufques à celui de Mendo- zefiinh fur la hauteur de quarante & vn degré , les Pilotes content cinq cents lieues. Auprès de ce Cap de 5. Lucas, Candifeh olla auxElpagnols lan cId îd lxxxvii cette nauire fi richement chargée : Or derrière icelui il y a vne large baye ( laquelle les Ef- pagnols zy^^zWtntAguadaSegura, pour la grande commodité qui y ell de prendre de l’eau) dans laquelle delcend vne riuiere , aux bords de laquelle plulieurs Sauuages ha- bitent. Les Caps, bayes, ports, &riuieresqui fuiuent plus outre à la Continente,ont ellé en partie ci-delTus recitees par nous ; le relie a tant de fois change de nom félon la Volonté des mariniers, & les chartes Hydrographiques font fi dilTemblables en cet en- 5 o droit, que fi ie voulois les remémorer ici,il fembleroit que ie voudrois exprès ennuyer le Leéleur. Enfin entre l’vn & l’autre Cap de S. Lucas & de Mendoze,i\ y a plulieurs Mes efparfes en la mer du Zud audeuantde la terre ferme,deux defquelles font particuliè- rement remarquées des mariniers , l’vne ell appellce du nom de S. Auguftin , fur la hauteur de trente degrés & quarante fcrupules , l’autre de Cedros fur la hauteur de vingt huid degrés & quinze fcrupules, comme il a ellé remarque par le mefme Gualle. NOVVELLE MEXI QJ/" E. C H A P. XXL Première defiouuertme des Promnees q&Pon appelle auiourdhm Nouuelle Mexique. Avant que de fortir de ces Prouinces, il ne fera point hors de propos d’adioin- dre ici, comment ces grandes Prouinces,à prefent nommées Nouuelle Mexique , ont ellé premièrement defcouuertes par les Efpagnols, comme il ell recite par Fr ere luan Gonfalez deMendoze en fa rclatiô du Royaume de la .ÜiW l’an c I p I o l x x x i x imprimée à tu KMuguftin Ruiz ( dit-il ) Religieux de l’ordre de S. François, demeurant en la vallee àcS. Rartholome, ayant entendu l’an cId Id lxxx des Sauuages nommes Conchos,o^n trafiquent auec leurs voifins les Paffuagates,(:^(L y auoit vers le Nord plulieurs 1 roum- jo ces ôi villes habitées par diuerfes nations,vers lelquelles les Elpagnols n auoyent ellé iufques alors, poulTé d’vn zele pie^ d’amener à Chrill les âmes de ces peuples, i e- mandapermilfion au Comte deia Couronne, qui elloit pour lors Viceroi tnl^Nouue - le Efbaqne,^ au Prouincial de fon ordre, d’aller vers ces nations, & d’apprendre eur langage afin de les induire plus aifement à la Religion Chreflienne : laquelle ayant 00 - facilement OCCIDENTALES. LIVRE VL Z27 facilement obtenue, il fe mit en chemin auec des autres Moines de Ibn ordre, &hui(2: fbldats qui le voulurent accompagner de leur plein gré: & apres auoir marché quel- ques iourneesjil entra dans la Prouince de qu’on croyoit eftre efloignee des mi- nes d’argent de S.Barbe àe.âiQ\xx cents cinquante lieues vers le Nord. Là, pour les cau- fes qu’on ne dit point, vn des Moines fut tué par les Sauuages;lcs foldats qui crai- gnoyent auecraifon de ces commencements d’encourir de plus grands dangers, & voyans qu’ils n’eftoyent pas capables en fi petit nombre de contraindre vne fi grande multitude de Sauuages , & que ce feroit en vain d’attendre aucun fecours des Prouin- cesdes Erpagnols,derquelles ilseftoyent fi loin, ils iugerent que le plus feureftoit de X O retourner au pluftoft vers les mines d’argent de S. Barbe.VlTaïs les Moines qui reftoyent reiettans le confeil des foldats , s’arrefterent là auectrois ieunes hommes Ameriquains bi vn Mejîiz,i(c fians par trop, comme il femble,en l’humanité des Sauuages. Les foldats eftans retournés vers leurs gens , efcriuirent au Viceroi l’affaire comme elle s eftoit paffee ; Or les Cordeliers eftans en peine de leurs gens, & craignans quel- que chofe de pis, commencèrent à encourager quelques foldats, afin qu’ils fehaftafi- fent d’aller auec Bernardino Beltrany[om& de leur ordre, vers la Prouince des Tiguas^^ tirer leurs Freres hors du péril prefent.il aduint fort à propos qu’en ce temps Anthonio de EJpeio natif de Cordube en Efpagnc,& Citoyen de Mexique,QLvn\x2i là pour trafiquerj qui eftoit vn homme riche , d’vn grand courage & fort induftrieux , & fur tous autres 2.0 preft à feruir fon Roi ; qui ayant pefé ferieufement le deftein des Moines & la dignité deiachofe,ferefolut d’hafarder auec fes biens & fàvie, pourueu qu’il peuft obtenir permiflion de quelque Officier du Rois laquelle par' l’interceffion & prières des Moi- nes fut librement concedee,tant à lui qu’à tous ceux qui le voudroy ent accompagner, par luan de Ontiuerosy Baillif de la ville nommee des quatre Cienagas en la Prouince de la Nouuelle Bijcayey\ feptante lieuè's des mines d’argent de S. Barbe. Par ainfi Anthonio de .^«abondante prouifion de viures & beaucoup d’efclaues;& ayant 5 O cheminé deux iours vers le Nordjii rencontra beaucoup de Sauuages nommés Conchûs qui habitent par villages dans des cafés baffes, & ne fçachâs quel chemin il prenoitiVin- drent au deuant de lui pour lui donner la bien venue. Les Conchos iCommo ^MÏ^i tous les autres Sauuages qui habitent ces grandes régions, viuentleplus fbuuent devcnaifbn, ( car il y a grande abondance de connils, heures & cerfs ) de Mayz^ auffi de citroüilles & de melons qu’ils ont en abondance: les riuieres font fournies de toutes fortes de poiftbn. Les habitans font prefque tout nuds ; leurs armes font l’arc &les fléchés ; ils obeïffent à plufieurs Rois, qu’ils nomment comvaQlos Me xi quaim :ï\s n’ont nulles Idoles,ni chofe aucune qu’ils adorent, voila pourquoi ils foufrroyent librement que les Chreftiens y drefTaffenc des croix, apres qu’ils eurent legerement appris par 40 des truchements ce qu’elles fignifioyent. Delà eftans conduits par les Conchos:, ils fu- rent vingt quatre lieues par leur Prouince fans danger ni aucun mal, les Rois venans partout au deuant d’eux pour les aider j ils arriuerent chés XcsPaJfuaguates^ qui viuent en la mefme façon , & ayans receubenignement les Efpagnols, ils les conduiront par leur Prouince ; ils trouuerent là auprès du chemin plufieurs veines d’argent, félon les indices de ceux qui s’y cognoiffent. Les Tobojès fuiuent les Pajfuaguates, nation diffe- rente des autres, qui eftimans qu’il n’eftoit pas bon d’attendre la venue des Efpagnols, fe retireront auec ce qu’ils auoyent dans les prochaines montagnes , pource que quel- ques foldats Efpagnols { comme il feeut par apres ) és années precedentes eftans entré dans cette Prouince pour y chercher des mines, auoyent enleué par force plufieurs 5 O habitans pour en faire des efclaues. Par ainfi le Capitaine enuoya quelques-vns de fes gens,pour les prierpar douces parolles& grandes promeffes, afin qu’ils retournaffenc à leurs maifons,& qu’ils y feroyent affeurés en toutes chofes,& qu’ils n’eftoyent pas ve- nus là pour faire du mal ; plufieurs dentr’euxperfuadés par ces chofes,retournerent,& laifferent dreffer des croix , ayans appris leurvfage,& conduirent les Efpagnols en cette forte douze lieues de chemin par leurs terres: ces Sauuages vont prefque tous nuds,& font armés dates & de fléchés. Ff* Z C HA P. DESCRIPTION DES INDES * C H A P. XXII. l?ourfmte du voyage de Anthonio de Efpeio enU Nouuelle Mexique. Le s Efpagnols furent conduits du païs des Tobofes aux lumanes ou Patarahuyesy qui habitent vneProuince fort peuplee par bourgades , ils ont des maifons de pierres auec leurs toi£ts élégamment conftruites ; les hommes & les femmes fe rayent la face & les bras & iambes de certaines lignes ; ils font robuftes de corps &: beaucoup plus ciuils que les precedents. Ils ont là abondance de viures pour lacom. moditê de la chalTe aux belles & oifeaux ; Les riuieres qui y font en grand nombre, i o font fortpoilfonneufosjlelquelles defoendentduNordj&on croit quefomellans rou- tes en vn grand canal, elles defcendent dans la mer du N ord : Il y a aulTi beaucoup de lacs falés, l’eau defquels fe congele en tres-bon fel l’efté : Les Saunages y fontgrande- ment belliqueux , car la première nuid que les Efpagnols fortifièrent leur camp, ils leur enuoy erent vne telle nuee de fléchés, que cinq cheuaux en furent tués , & autant de bleirés,& n’en eulTent laifle aucun fans l’endommager s’ils n’eulTent efté empefehés par la garde. Ayans fait ces chofesjabandonnans leur bourgade , ils fe retirèrent dans la montagne ; mais le Capitaine auec cinqfoldats,fon truchement & quelques-vns du païs, les ayant fuiui,les efmeut tellement par douces parolles qu’ils retournèrent à leurs maifons, & firent fçauoir à leurs voifins parMeffagers que les Efpagnols paflbyent zo parle païs fans faire aucun dommage, & ne faifoyent aucune violence aux perfonnes ni pilloyent les biens des habitans des lieux où ils paflbyent:ainfi ayans premièrement appaifé le Roi par quelques petits prefents , ils perfuaderent aifement le refte, de ma- niéré qu vne grande troupe dentr’eux accompagnèrent les Efpagnols quelques four- nées de chemin. Ils cheminèrent le long d’vne grande riuiere douze fours de long, paflans au trauers de diuers bourgs du mefme peuple : Or les Sauuages aduertis par leurs voifins, venoyent fans armes au deuant des Efpagnols, & leurs fourniflbyent pour rien les viures & autres chofos dont ils auoyent befoin j ou entre autres eftoyent à ad- mirer les peaux des cheureaux fi brauement préparées qu’elles ne cedoyent à celles de Flandre. Cette nation vfoyent d’habits , & fembloyent auoir quelque legere co- 5 o gnoiflance de la Religion , car regardans le Ciel , qu’ils nommoyent en leur langage , ^palito, ils defignoyent vne Diuinité.& vn Seigneur de tout IVniuers , qu’ils difoyent eftre liberal donateur de la vie & de tous biens : Les femmes & les enfans appro- choyentdu Religieux qui eftoit dans la compagnie, afin d’obtenir la benedidion de lui ; & lors qu’on leur demanda de qui ils auoyent receu cette cognoiflance de Dieu,ils refpondirent de trois Chreftiens & d’vnNegre qui auoyent pafle parla, & y auoyent demeuré quelque temps : Ils cognurentpar plufieurs indices qu’ils vouloyent dénoter CabecA de Vacca, DoTAnteo, CaJIUIo leur Negre, delquels nous auons parle ci-deflus. Les Efpagnols partans delà, furent accompagnés & feruis plufieurs fours par vn grand nombre d’habitans, fi long temps qu’ils fuiuirent les riuages de la riuiere. Delà à peu 4p deiournees de chemin, ils arriuerent a vne autre bourgade d Indiens; qui excites par la renommee de leurs voifins, vindrent de leur bon gre au deuant des Efpagnols, auec plufieurs ornements de plumaceries, qui eftoyent compofes dyne grande variété de couleurs, & des cafaques de coton, bigarrées de bleu & de blanc a la façon des Chinois. Or les homes & les femmes eftoyent veftus de peaux de belles fauuages bien prepa- , reesde nom de ces Sauuages ne peut eftre cognu a defaut de truchement,on leur mon- ftra apres quelques pierres où il y auoit de riches veines de métaux meflees, 6^ on leur demanda fi leur terre couuroit en quelque endroit de telles chofes , ils refpondirent par fignes.qu’ilfetrouuoit de telles pierres en grande quantité dans vneProuince qui eftoit à cinq iournees de chemin delà vers 1 Oueft. Ayans en outre accompagne es jp Efpagnols vingt deux lieues parleur Prouince, ils les conduirent iufques dans la pro- chaine,qui eftoit encore plus peuplee, & fituee le long des riuages de la rnefme riuiere. En celieujles Efpagnols ayans efté receus fort humainement, & fauorifos de que ques petits prefents, comme auffi de prouifion, & fur tout de fort bon poiffon qu yn lac voi- fin nourrit, ils feiournerent trois ioürs; cependant les Sauuages drefferent Mmi eut couftume des dances : ils ne peurent apprendre le nom de laProuince , au ^ e e e ^ . fembloit O CCIDENTALES. LIVRE VL fembloiteftre fort grande, &n’auoit point de féconde en fertilité de terroir, en bonté d’aïr & abondance demetaux. llfe trouua là vn de la nation des Conchos,(im demon- ftroit par figues, qu’à quinze iours de chemin vers TOueftdlyauoit vn grand lac,enui- ronné de plufieurs bourgades de Sauuages,qui vfoyent d’habits, abondoyent en viures &: demeuroyent dans de grandes maifons,&s’olfroit de les y guider ; mais pource que cechemin entrepris pour deliurer les Moines s ’addreffoit vers leNord,ils leur fem- bla qu’ils deuoyentlaifi'er celui du couchant. Delà ils cheminèrent quinze iourspar des lieux fanshabitans & des grandes forefts,qui abondoyent en pins, dutoutfembla- bles à ceux de l’Europe, & s’eftans auancé quatre vingts lieues , comme ils penfoyent, 10 ilsarriuerentà vn petit village mal peuplé,dans les loges duquel qui eftoyent faites de paille à la legere,ils trouuerent beaucoup de peaux de cerfs, & abondance de fel blanc fort bon. Les Saunages delànereceurent pas feulement les Elpagnols humainement, mais aulTi les conduirent douze lieues le long de la riuiere del Norte dans la Prouince qu’on nomme pour le iourd’hui Notmelle Mexique. L ’vne & l’autre riue de lariuicre eftoit couuerte d’vne foreft de peupliers , qui elfoit parfois large dequatre lieuës,ils y virent auffi force noyers & vignes jayans marche par ces forefts deux iours, ils rencontrèrent dix bourgades fituees fur IVn & l’autre riuage, dans lefquels il fem- bloit bien y habiter dix mille hommes. Ils y furent receus humainement, & menés dans les bourgades,ils trouuerent leurs maifons grandes ôcreleuees de qüatre eftages ^o de haut,auec beaucoup de fales , chambres & eftuues contre le froid : les hommes & les femmes eftoyent veftus dérobés de coton & de peaux de belles à la façon des Me^^ xiquaim , &ce qui eftoit non accouftumé aux Saunages & par confequent nouueau aux Efpagnols,c’eft qu’ils vfoyent de fouliers & de botes , qui eftoyent faites de peaux ,de belles fâuuages &:de cukdebœuf. Les femmes auoyentles cheueux bien peignés & élégamment ageancés,fans fe couurir la telle d’autre coëfure. Chacune bourgade auoit fon Roi, qui denonçoit au peuple fes ordonnances par les crieurs publics. On y voyoit par tout plufieurs Idoles , lefquelles ils adoroyent, &: prefque en toutes les mai- fons il y auoit des chapelles dediees au feruice du Diable, & tout ainlî que les Chre- ftiens plantent des croix le long des chemins , ainfi auffi eux drelTent des petites cha- 5 O pelles peintes & ornees , dans lefquelles ils croyent que le Diable palTe la nuid & s’y donne du bon temps, quand il va dVne bourgade à l’autre. Ilscultiuent foigneufe- ment leurs champs & en chacun d’iceuxils y plantent quatre paulx, fur lefquels ils mettent vn toid, afin que le Laboureur prenne fon repas delfous & s’yrepofe à midi. Le terroir y eft prefque tout montueux & couuert de bois de pins. Leurs armes font de forts arcs & des fléchés munies au bout de cailloux aigus , de longues efpees de bois garnies des deux collés de plufieurs cailloux trenchans,de forte quelles peuuent d’vn grand coup couper vn homme en deux, & enfin des boucliers couuerts de peaux de bœufs crues. 40 C H A P. XXIII. DefioHuerture des Promues delos Tiguas, de los Quires, Cumanes, Ameyes, Acoma,Zunyj/é';' Promnees dejquels est dite des Ejpagnols Cibola. APr E s auoir leiourne quatre iours dans la Prouince precedente, ils pàlferent dans la Prouince des Tiguas,çq\xi eft peuplee de leize bourgades, dans l’vne def- quelles dite PoaU auoyent efté tués , comme ils cognurent Framifeo Lopez, & Augujlin Ruiz auec leurs gens. Or les habitans voifins fe lentans coupables de ce meur- tre, & craignans queles Elpagnols s en voululTent venger, laiflans leurs maifons fe re- tirèrent a la halle dans les montagnes, &ne peurent eftre retirés delà par aucun beau JO femblant qu’on leur fit. Il fut trouué dans leurs maifons grande abondance de viures, force poules & autres chofesj ils ne peurent au vrai cognoiftre le nombre des habi- tans. Par ainfi ayans trouué les Moines tués, ils deliberent entr eux, quel feroit le plus expédient ou de retourner en la No 'uuelle Bijeaye ou de pourfuiure plus outre, ils furent en doute quelque temps, iufques àcequ’vn bruit courant de certaines grandes&ri- ches Prouinces vers lEft,il fut trouué bon de vifiterplus auât, à quoi Bernaydwo BeltrAïi ne contrediloit pas , afin qu ils enpeull'ent porter de plus certaines nouuelles au Roi, Ff 3 toutesfois ^30 DESCRIPTION DES INDES toutesFois quil ne falloit pas hafarder toute la troupe; mais que le Capitaine entre- prendroit ce chemin auec deux foldats. Icelui eftant efloigné de deux iournees du j. heu où eftoit logé la troupe, il entra dans vne autre Prouince, peuplee d onze bonrga- ” des & fl fournie de gens,qu ils iugeoyent qu’on y pouuoit trouuer quarante mille ames; le terroir y eftoit fertile &: bien cuitiué , attouchant de fort près les limites de Cihola ; tellement abondante en taureaux & en vaches, que les habitans s’en veftoyent des peaux ; qui n eftoyent en rien differents en mœurs & cbuftumes de leurs voifms ; il y - auoit apparence d’y auoir force métaux dont ils virent beaucoup dans les maifons : Les habitans y feruent diuerfes Idoles , au refte ils receurent humainement les Efpa- gnols. Ayant remarqué ces chofesdl retourna au logement J où on auoit cependant id y ouy le bruit d’vne autre Prouince , qu on nommoit de los ^ires , laquelle eftoit à fix ' lieues le longdelariuierc dell^rte,vtis laquelle s acheminans, comme ils en eftoyent y. à vne lieue feulement, ils furent inuités amiablement par les habitans, qui viridrent au , deuant d’eux en grand nombre: Iis y virent feulement cinq bourgades, qui eftoyent habitées de quinze mille hommes idolâtres comme les precedents. Ils virent aufli vne pië enfermee dans vne cage à la façon d’Efpape, & des Tirazoles, defquels vfent les élégamment peintes de figures du Soleil, de la Lune & des Eftoilles. Ayans en cet endroit pris la hauteur du pôle, iis trouucrent qu’ils en eftoyent venus iufques à ^ , la hauteur de trente fept degrés & demi. Ayans marché quatorze lieues vers lemefme vent, ils entrèrent dans vne autre Pro- lo uince, dite de los Cummes , dans laquelle ils trouuerent cinq bourgades , la plus grande 4,' s’appelloit Cia , tellement grande qu’il y auoit huid marchés publics ; les maifons eftoyent enduides de chaux,& peintes de diuerfes couleurs ; les habitans eftoyent plus de vingt mille, félon qu’on pouuoit coniedurer : il leur fut fait la prefent de fort beaux manteaux3& on les feruoit de viures nettement préparés &: bien cuits ; de forte qu’il apparoilfoit clairement que ces Sauuages furpaflbyent de beaucoup les autres en ciui- . lité & mœurs bien cultiuees : &: n’auoycnt faute de riches métaux, car ils monftroyent y: de leur gré les montagnes où ils eftoyent. , , A quinze lieues delà vers l’Oueft, on trouucla grande bourgade d^Acoma, place furvn^rocherefleué& droit, à laquelle on ne peut monter qu’vn àvnparvn efcalierjo J fort eftroit, taillé dans le roc : Les Principaux defeendirent volontairement vers les Efpagnols,& leurs donnèrent des viures & plufieurs prefents : Les champs qu’ils enfe- . ? mençoyent eftoyent à deux licuè's delà,qu ils arroufoyent auec des fofles qui eftoyent '»■ conduits de la riuiere prochaine , aux riuages de laquelle ils virent des bois de rofiers '.s à la façon de ceux de l’Europe : il femble que cette Prouince abonde en métaux, mais les Efpagnols n’oferent les chercher plus auant,à caufe de la multitude & férocité des ^ Ayans marché vingt quatre lieues delà vers 1 Oueft, ils atteignirent vne Prouince dite des naturels Zuny, & des Efpagnols Cibolas dans laquelle auoit autresfois entre v Framifeo rafqmo,S>cy auoit drefîe plufieurs croix; quelques-vnes defquelles ils y virent 40 | encores ; & y trouuerent trois Chreftiensquiy auoyent demeure depuis ce temps la, r' lefq uels auoyent prefque oublié le langage de leur païs , par lefquels tou tesfois ils ap- prirent qu’à foixante iours de chemin , il y auoit vn grand lac ou peut eftre la mer , a la riue duquel il y auoit plufieurs grandes bourgades , &que les habitans auoyent beau- coup d’or,& que Francifeo Fa/quiolc fçachant,s’eftoitmis en chemin pour y aller; mais qu’il fut contraint, faute d’eau , de retourner apres douze iours de chemin, & qu il ne lauoit plus eftaye ayant cfté preuenu pat la mort, C H A P. XXIV. 'R.cjîc du chcfniu dê Anthonio de Efpeio, Prouince ^^Hubato f^ejTamoros. A N T Hto Nio deEsPEio eftant par le precedent rapport releued vne nou- uelleefperance, defiroitfurtoutde s’acheminer auec toute la troupe vers ce^ te riche Prouince, mais Frere Bernardino & la plus grande partie des foldats fi onpofoitfortidifant qu’il eftoit temps de retourner au logis & de déclarer au Viceroi comme OCCIDENTALES. LIVRE VI. z^i comme les affaires s’eftoyentpafTees: parainfî ayant laifTé le Capitaine auec neuf au- tres,ils prindrent le chemin vers la Prouince d’où ils eftoyent venus: mais le Capitai- ne fans s’arrefter print fon chemin auec ce refte vers l’Oueft, & apres auoir marché vingt lieues, il paruint à vnc Prouince qui fembloit eftre habitée de cinquante mille Sauuages,qui eftans aduertis de la venue des Efpagnols , enuoyerent de leurs gens au deuant d’eux , afin de leur defendre le pais , les menaçans de mort s’ils s’efforçoyent à l’encontre : Mais af^j^/i^appaifa tellement tant par douces parollesqueparprefents, premièrement les Mefïagersj&puis le refte de la troupe , qu’ils le receurentauec cent cinquante de Cibola de leur bon gré. Et corume ils approchoyent la principale bour- I O gade nommée Zaguato, enuiron deux mille Sauuages vindrentau deuant d’eux auec force viures , qui eftimoyent grandement les prefents des Efpagnols , combien qu’ils fufl'ent de peu de valeur ;lefquels eftans fuiuis de leur Roi, receurent enfin les Efpa- gnols auec fi grade ioye, qu’ils iettoyent la farine aux pies de leurs cheuaux,& les ayans logés dans leur bourgade, ils les traitèrent afles bien félon la couftume des Sauuages. Plufieurs hommes accoururent auffi des lieux voifins, & les Rois mefmes diuul- guoyentla bontés: humanité des Efpagnols. Le Capitaine feferuantdela fimplicité de ces Sauuages , les aduertit que fes cheuaux eftans offenfés du premier meftage, par lequel ils leur auoyent defen du le païs,les menaçoyent dVn grand maLpour lequel pre- uenir,il leur falloir baftir vne maifbn de pierre, pour les y enfermer : ce que croyans ils 10 firent auffi toft cette maifon: Or eftant preft à partir on lui fit prefent de x l mille man- teaux de coton 6: plufieurs autres chofes ; entre lefquelles il y auoitdes métaux. S: des riches pièces de mines d’argent comme il fembloit. Les Sauuages confirmans ce que les precedents auoyent dit, parloyent de ce grand lac. Orle Capitaine fe confiant en l’humanité 6: libéralité de cette nation,renuoya à Cibola tous ceux qu’il en auoit ame- né auec cinq foldats S: le bagage : S: printle chemin auec quatre foldats feulements: quelques guides vers dé certaines mines d’argent,defquelles il auoit ouy quelque bruit, lefquelles il trouua apres quarante cinq lieues de chemin. Or c’eftoit.vne fort riche S: large veine d’argent, fituee fur le fonimet d’vne montagne, laquelle on montoit fans peine : autour d’icelle demeuroyent plufieurs Sauuages par bourgades, qui receurent 3 O les Efpagnols humainement. S: vindrent au deuant d’eux auec des croix en figne d’a- mitié. 11 y auoit la deux moyennes riuieres, les bords defquelles eftoyent couuerts de force vignes, qui portoyent de fort bons raifins; S: de bois de noyers, auec grande abondance delin,fèmblableà celui del’Europe. Or les Sauuages donnoyent à enten- dre par certains lignes, qu’il y auoit proche delà vne grande riuiere, large d’enuiron quatre lieués,qui fortoit dans la mer du Nord .-Mais les Efpagnols croyant qu elle eftoit trop loindelà,ils ne prindrent pas la peine d’y aller; S: eftans retournés par vn plus court chemin en la Prouince de Zuny^ih y trouuerent le Moine auec le refte delà troupe,ô: ceux qu’ils auoyent enuoyé deuant. Bemardim s'âchcmina. peu apres auec la troupe vers la Nouuelle Bifcaye : mais Antho^ 4° nîû monta auec huiét foldats le long des riuages de la riuiere del Norta & apres auoir marché foixantelieuës,il paruint à la Prouince ayant fait par apres douze lieues vers le leuant,il palfa dans les limites delos Hubates, où ayant efté fort humaine- ment receu 6: aidé deviures,ily trouua dctres-riches mines. Cette Prouince fembloit eftre habitée de vingt cinq mille Sauuages , qui eftoyent veftus de manteaux de coton, élégamment peints,comme auffi de peaux de cheureaux fort bien préparées. Au refte cette région eftmontueufe,couuerte de force pins & de cedresjles maifons des habi- tans y font fpacieufes ô: efleuees de quatre eftages. La Prouince do los Tamos en eftoit feulement à vne iournee de chemin,’qui refufàns de receuoir volontairement les Efpagnols , ils trouuerent pour le mieux de retourner 50 enleurpaïs. Parainfî au commencement de lulliet del’an clo lxxxiii eftans con- duits par vn certain Saunage, ils defeendirent le long de la riuiere par vn autre che- min qu’ils n’eftoyent venus,Iaquelle pour l’abondance du beftail qui y eftoit, iis nom- TsxQicntiRio de las Vacas,S)C2.yzntmzx:c)ie cent & vingt lieuës,ils arriuerentàla riuiere de los ConchûSi&i peu apres en la vallee de S. Bartholome, d’où ils eftoyent premièrement partis. D’où le Capitaine efcriuit toute la fuite de l'affaire paffee au Viceroi & au Roi d’Efpagnc. Voila ce que nous auons exraiél de Imn Gonfalez- C H A P, C H A P. XXV. Voyage de D. luan de Onnate, Acotna. prifi ^ pUee^ cùnflruBïon de S. luan, defcoMuerture faite en fajfant du Lac Conihas. Avant que nous retournions de ces régions Mcditerranees & peu cognucs aux autres qui le font pius, nous adioufterons encore ici vn voyage des Efpa- gnols briefuement, la defcription Ludoukus Tribaldm Toletm enuoya' Vanclol:^ cy à. Richard Hackluydt. Lan cio Id xcix Z). /«æ» partit delà ville de Mexique auecvne armée de cinq mille perfonnes de tout fexe & aage, bonne i o prouifîon de viures , quantité de brebis , cheures , vaches, belles de charges bc autres chofes necelTaires pour vn tel voyage ; bc ayant marché par diuerfes Prouinces l’clpace prefqtie de cinq cents lieues, il defcouuritplufieurs nations , qui habitoyent des villes bien munies bc élégamment bafties, aueclerquelles il contrada alliance bc amitié, & les rendit fuiettes au Roi d’Efpagne.Iufques à ce qu’il arriua à Vne ville extrê- mement forte de nature & fortifiée par art,fituee fur vne haute roche > les habitans de laquelle le receurent benignement & lui aidèrent pour l’heure de viures , promettant de lui en fournir dauantage par apres; mais comme il eut enuoyéfori nepueuauee quelques foldats dans la ville pour demander ce qu’ils auoyent promis , ils rencontrè- rent dans la place du marché public, prefque toute la ville aifemblee , qui feiettans à lo rimprouiftefureux,commeils eftoyént défia empefehés àaeheptereequ’ils auoyent befom,tuerentîe nepueu du General auecfixfoidats,& les autres feiauuerentàgrandc difficulté apres auoir efté fortbleffés. Ce qu’ayant entendu le General, il fit appro* cher la ville auec fes meilleurs fôldats,& apres quelques iours de fiege&pluficursafi faultSjil prit enfin la ville par force bc tua beaucoup de pcrfonnes,il en print peu de pri- fonniers bc rafa la ville rés pié rés terre. Cette ville s’appelloit Acomadm la hauteur de trente deux degrés bc quarante fcrupules. Delà ayant trauerfé la Prouince fans y faire mal,il arriua à vne autre ville beaucoup plus grande, les habitans de laquelle il contraignit de fe foufmettre au Roi d'Efpagne. pource qu’ils craignoyent vn mefme malheur que celui qru eftoit aduenu à ceux d’A- j o coma. Par apres il mit en fa puiffance vne autre grande ville fans fiege,&: enuoyaquei- ques-vnsde fes gens pour quérir des taureaux de Cibola, qui eftoyent cognus par le voyage de Rrancifio Vafquio :Oi ils en virent plufieurs , mais ilsn’eh peurent gucres prendre, pource ce que c’efl vn animal furieux bc vifte , qui furent regardés par grande admiration de toute l’armee. Par apres s’eftant refolu de garder ce qu’il auoit conquis , il baftit vne ville •, laquelle il appella du nom de 5. ayant fait alliance auec les peuples voifins,ildefcouurit de riches mines d’argent , bc fit tout fon deuoir pour conuertir les Sauuages à la Reli- gion Chrcftienne. L’an cIdîd cii il entreprintvn autre voyage vers la renommée riuiere del Norte, 40; oùilfutbienrcceu des habitans : & il paffa delà au grand lac Conibasy au bords duquel ily a vne fort grande ville.longuede fept lieues, & large dedeux,ornee de magnifiques edifices,qui eftoyent feparés les vns des autres par des bois, vergers bc parfois de foffés; Ils n’y virent nuis Sauuages, voila pourquoi le General ayant cette folitudcftifpeâ:e,ne fe fentant pas auec fes troupes affés fort pour vne fi grande entreprife , il enuoya quel- ques Caualiers pour efpier; qui eftans entré dans là ville,ils cheuaucherent par de fort larges ruës'fans rencontrer perfonnedufques à ce qu eftans venu en la place du marché où il y auoit vne grande multitude qui s’y eftoit fortifiee.Ce qu’ayans rapporté au Ge- neral,on trouua pour le plus feur de retourner au logis , bc de refe'rucr pourvue autres- fois le fiege de cette ville. Voila ce que dit - 50 Apres cela on entreprint plufieurs voyages, en la 2{ouuelle Mexique , qui furent eau- ^ fes que ces régions furent enfin redigees en Prouince ; comme il appert affés par ce qu’en raconte de la relation duquel i’ai fait mention ci-defîhs ; Or afin que nous concluions la defcription de ce quartier , nous adioindrons vne recente deferi* ptionde laNouuelle Mexique y mife en lumière par lui mefme , afin qu’on puiffe mieux voiries limites & qualités d’icelle, &mamteaât quelles villes les Efpagnolsy habitent. , C H A P. XXVI. K 0(4 ne lie dejcr letton de U Nouuelle Mexique ^ félon les Commentaires de Alfonfo de Benauides , Cordelier. La Nouuelle Mexique à tout le moins fa Métropolitaine .y. jF/,eft lltuee fur le vingt feptieme degré de la ligne vers le Nord ; on y va des mines d’argent de S. Barba- ra par la Prouince de los Conchosy laquelle eft feparee de la Nouuelle Efagne, par vne riuiere de mefme nom que la nation. Or entre S. Barbara & la riuiére delNorUy il I o y a cent lieues , lefquelleson faitauec beaucoup de danger, au trauers des terres de los T'abofoSyTarrahumareSyTepoaneSyTomitesySumasyHanoSytLOiUZvtsnoLiionscmcWts & Sau- nages ; ils vont nuds , font entr’eux toujours difcordans, fe tuans les vns les autres, leurs armes font l’arc & les fléchés, aueclelquelles ils ontporté de grands dommages aux Efpagnols, principalement par cmbufohes. De la riuiere delNorte, il y a aulficent lieues iufques ^l^. Nouuelle Mexique iàzns lequel efpace on rencontre premièrement les Saunages nommés dA^anJos&cGorretas s les hommes vont entierementnuds , &les femmes couurent leurs parties honteufes depuis le nombril en bas auec des peaux de cerfs; ils demeurent dans des loges qu’ils font de branches d’arbres ; ils ne fement point, mais viuent de chair cruë,& mefmes n’ont point d’horreur de mâger les entrail- ^o les des belles immondes ; mais maintenant ils commencent à s’accommoder à la foi Chrellienne: Par apres les Apaches, nsLtion fortpopuleufo, de laquelle nous parlerons bien toft dauantage. De ceux-ci on vient pour la fécondé fois à la riuiere del Norte, dés laquelle la prend fon commencement, qui a cent lieuë's de long vers le Nord , depuis Sant Anthonio de SenecUy^ZQmÎQXc bourgade de los Birorosy iufques à celle de S. Hieronimo en la Prouince de los Taoros; Or elle contient plulieurs nations de Saunages qui font fituees félon cet ordre. De la riuiere del Norte commencent les P/m,quifont vefl:us& bien ciuilifés,ils ontdes maifons faites de gafons& de mortier, &: obeilfent à leurs Capitaines, & fe gouuernent politiquement : ils ont grande abon- dance de Mayzj & de legumes, comme aufli du coton ; car leur terroir eft fertile, l’aïr y 5 O eft fain ; les riuieres poiflronneufes,& les forefts nourriflTent plufieurs arbres fruiéliers, comme noyers,chefhes,&: fur tout defort beaux pins. La principale bourgade ( com- me aufli de toute la Prouince ) eft appellee auiourd’hui Socorro, pource qu’en ce lieu premièrement apres vn long & ennuyeux chemin, ils alfouuirent leur faim par vne a- bondanteprouifionqu’ilsytrouuerent.L’ancIolDC x xvi on y ietta les premières fe- mences de la foi Chreftienne.on y baftit trois temples dans les bourgades Senecuyfila- bo Sc Seuilletta. Il y agrande abondance d’or & d’argent,dont on dit que les mines cou- rent iufques à cinquante lieues , & que proche du lieu il y a tout ce qui eft neceffaire tant pour lauer que pour fondre les metaux,les fouis ouuriers y manquent & l’induftrie desmineurs.LesTf^/^^fuiuentlesPim,quiont quinze bourgades & deux temples fort 40 bien baftis,car ils cmbrafTentdefialeChriftianifoie. Apres \zsEeba6X\xmQ.Xiz\zs,^ere'Sy qui ont fept bourgades &: trois temples à dix lieues de ceux-là & de la riuierevers l’Eft, demeurent les Tompires , ayans quinze bourgades,Ia principale defquelles eft Chililiy &C fîx temples ; cette Prouince eft infertile & l’aïr y eft fort froid , toutesfois elle a de grandes Salines, à dix lieué's des mines de Socorr0.Tix2.nt derechef vers le Nord on ren- contre à dix lieues delà les Tamsyaùec cinq bourgades, aufquelles il n’y a qu’vn temple, Suiueiit apres du mefme cofté les Peicis auec vn foui bourg, mais grandementpeuplé auec vn temple fomptueux ; la terre y eft froide & fterile. A fept lieues de ceux-ci vers l’Oueft eft fîtueelavillede i". JF*/, Métropolitaine de ce pais, où le Gouuerneur de la Prouince habite & enuiron deux cents &: cinquante Efpagnols: Or combien qu’ils 50 foyent en fî petit nombre, & encore à peine y en a-il cinquante de ce nombre duids auxarmes,neantmoins à caufe de leurs armes non accouftumees aux Sauuages, & des cruels fupplices qu’ils ont fouuent exercés contre les rebelles, ils font tellement redou- tés des Indiens, qu’ils en tiennent fuiets beaucoup de milliers. Du mefme cofté & vers la riuiere del NortCy de laquelle nous nouseftions vnpeu efloignés,fhabitentles TeoaSy dans huiôh bourgades, ils embrafforent les premiers la foi, par ainfiils font grandement fauteurs des Efpagnols; ils ont trois temples; & leur terroir eft fertile. Vers l’Occident G g de ceux- 154 DESCRIPTION DES INDES de ceux-ci au delà de la riuiere, demeurent les Hemes , qui ont deux temples 5 & vers le Nord du long delà riue de la riuiere font les Pkuries lieues plus oùtre les Derechef vers l’Oueft de la Prouince des ,^eres & de leur derniere bourgade S. Anna, eft iîtuee Acoma , lieu extrêmement fort , fur vn rocher efleué & droit de toutes parts d vn fort difficile accès; les habitans duquel tuerent es années precedentes plufieurs Eipagnols & Saunages; enfin l’an c I d I o c x x i x ils commencèrent à embraffer la paix: à trente lieues plus vers l’Oueft habitent les Zumü en douie bourgades, le terroir def- quels eft fertile, & les viures y abondent ; & à autant de lieues les Moojüù , lefquels ont défia tous embrafle le Chriftianifme,ou l’embraftent tous les iours : lors qu’ils eftoyent encores Payens , ils fe veftoyent conuenablement tant hommes que femmes deio robes de coton & de peaux de beftes fauuages ; feparoyentde certains quarquans & pendans d’oreilles, car il eft tout certain qu’il s’y trouue des turquoifes. Leterroir y eft pour la plus grande partie fertile , & rend auec grand vfure le froment & légu- mes ,mefmes le fafran y vientbien:ily aplufieurs &diuersfruidiers,comme cerifiers, abricotiers, tunas,pommiers de coingjnoyers,chefnes porte glands,meuriers& autres, des pins auffi quelque peu differents de ceux de l’Europe, qui portent grande quantité de pommes de pin. Beaucoup de riuieres & lacs poiffonneux,entre les riuieres excelle celle del Norte^c^ni nourrit de fort bonnes truites, anguilles & autres poiffons. If y a grande quantité de beftes fauuages, comme de fort grands cerfs, qu’ils fçauent fi bien appriuoifer,qu’ils mènent les charriots ; des heures^ connils, renards, loups, lions, leo- 2.0 pards, chats fauuages éedes cheureaux d’vne grande agilité ôc vélocité. Les vaches auffi amenées d’Efpagne y multiplient fort,comme auffi les brebis. Il y fait extrême- ment chaud l’efté, &lhiuer il y fait fi grand froid que les plus grandès riuieres s’y gla- cent en forte quelles portent les charriots & cheuaux. Toute cette région qu’on appelle Nouuelle ^éAri^/^f,eft prefque ceinte de tous coftés des ApacheSiW^Liion fort numereufe belliqueufe fur toutes autresjils different des au- tresSauuages en langage & prononciatiÔ.car ils pefent lentement leurs mots, les autres au contraire les profèrent legerement;ils demeurent fous des tentes,lans maifons cer- taines,changeans fouuent de place ; ils font veftus tant les hommes que les femmes de peaux de cerfs ; ils ont plufieurs femmes félon leur plaifir, les adultérés y font cruelle- 5 o ment punis, car eftans furprins on leur coupe le nés & les oreilles ; ils obeiffent à leurs fuperieurs,&inftrui{ent curieufementlaieuneffe & la chaftient,CequeIes autres Sau- nages n’ontpas accouftumé ; plufieurs dentr’eux honorent le Soleil & la Lune pour Dieux. Leur langage varie quelque peu de dialeâ;es,felon la diuerfité des ProuinceSii Les Efpagnols les diftinguent par certains furnoms ; ceux qui font voifins des Pires font nommés i^pachesdelPerillo qui les attouchent, de Xi/4; plus outre vers le Nord,deiV4«4itf (ceux-ci occupent vn grand efpace de terres vers l’Oueft, & croit-on qu’ils s’eftendentiufques au àc^ToizdAnianjvtss l’Eft de \2i Nouuelle Mexique (ont les ^paches Vaqueros,àc ces vaches boffués ( que nous auons deferites ailleurs )dcfquelles ils ont grande quantité. On paffe par le païs de ces derniers cent-& douze lieues 40 vers l’Eft iufques aux XumanasAapies & Xabotoas ; proche lefquels font vers l’Eft les Ai- xais &: la Prouince de ^iuira ,• de laquelle iufques à la Baye de Spiritu fanSfo ( qui eft entre le Cap Apalache & bout Septentrional de Iz Nouuelle EJ^agne^Cuzles vingt neufieme degrés de la ligne ) les Efpagnols content cent lieues feulement. V oila ce que nous auons briefuement extraidde la relation de Alfonfo de BemuideSi Corde- lier,imprimee à MadriU’an cId Idc xxx. DESCRIPTION DESCRIPTION DES INDES OCCIDENTALES, LIVRE SEPTIEME. GVATIMALA. C H A P. I. ^ejcription de cette Vrouince ou KeJJort luridiejue en general^ (s* quand par qui chacunes ? rouinces ont efié premièrement defiouuértes i La Nouuelle EJpagne, comme elle eft auiourci’hui pri- fc par les Elpagnols pour vn RelTorc luridique parti* culier , attouche la PTouince ou RelTort luridique de Guatimala,2.inCi nommee de la ville & Prouince prin- cipale d’icellê, depuis que les luges royaux eurent aL fis leur fiege en la ville de S. lago de Guatimala^ car au» parauantelle s’appelioit de los Confines ybc eftoit contenue entre des limites beaucoup plus e- ftroitesjpource quelle ne comprenoit que lesProuin- ces de Nicaragua &C Guatimala. Or auiourd'hui tou- tes les terres qui font entre les dernières fins des T e~. coantepeces & les dernieres limites de Cofia Rica vers l’EftTont fuiettes au fiege de ce Reflbrt luridique. Demaniere quefelonla fuite de la cofte de la mer Pacifique ou du Zud, elle s’eftend entrele Sud-eft & Nord-oueft plus de trois cents lieues de long, mais félon la droite ligne entre l'Eft & l’Ouefi:,elle n en a pas 3 O plus de deux cents quarante : c’efl: à fçauoir depuis les quatre vingts & quatrième de- ^ gré de longitude, iufques au nonante & huidieme du Méridien de T oledCiCommo. Her~ rera le conte prefque toufiours. Sa largeur eft fort inégalé , or où cette Prouince eft la plus large, elle a cent & quatre vingts lieues, fi le conte deHifrr^r^ ne letrompe. Par ainfi cette Prouince eftantainfiprife,& entre ces limites, elle embralTe treize Prouin- ces particulières ; chiapaiSoconufcOySuchitepecOiGuatimalaŸio^tcmtntàitc, Ver a Paz, Tza/cos,\es Prouinces de S. Saluador & de^S’. MigueUHonduras^chuluteca-tNicaragua^Ta- guzgalpa & Cofia Ricajy-ms lefquelles Prouinces tous les habitans Sauuages ont eu de tous temps diuers langages, ce que les Moines Efpagnols mettent entre les ftratage- mes du Diable,comme s’il eut voulu nourrir entre ces nations voifines,desdiflent4ons 40 continuelles & des guerres cruelles, par cette infinie diuerfite de langues. En outre cesProuinces ont efté defcouuertes en diuers temps & par diuerfes perfon- nagesj Car Gil Gonzalez DauilaAQ(co\xu.nt\e.^ctmi^r:\’2.Ti cÎdIdxxii les ha- bitans de laquelle embraflèrent incontinent la foi Chreftienne, & donnèrent volon- tairement les Idoles d’or qu’ils poffedoyentau Gouuerneur. Par apres il entra enM- Lvnc poignee de auquel ils n adiou- ftent aucuns fruias chauds ni efpiceries , ceftui-ci nourrit & réfrigéré aufîi fort. Le troifieme eft celui qu’ils nomment Chocolaté , défia affes cognu de tous, lequel fe com- pofe en diuers maniérés félon le gouft d’vn chacun,duquel nous dirons feulement cela qu’il nourrit fort bien : mais quand on en prend par trop & immodérément, il débilité lo & produit en outre les autres incommoditez que nous auons dit. Nous ne dirons rien de fà compofitionjpourcc qu elle varie trop, feulement nous deferirons comment on s’en fert : on met de l’eau claire dansvnvaifleauflirlefeuiufques a ce quelle boüille, apres on prend la Chocolaté autant qu on veut , & on la met dans vn vaifteaude terre , y verfant deffus cette eauboüillante,qu on braffe tant,auecvninftrumentdebois qu ils appellent iufques à ce qu elle foit entièrement defmeflee, ôe que les parties firaftes & huileufes flottent deffus , lefqueiles on efeume & met à part ; puis apres on mefle auec le refte de la liqueur l'Atole, (h compofition duquel nous deferirons auffi toft ;& quand il eft refroidi,y mettant d^erechef cette graiffe, ils le boiuent auec vn Te- cûP^ate, qui eft vn vafe ^it d’vne noix de Cocost ou de ce fruid que nous auons deferit ail- 5 o leurs. Il y a auffi vne autre forpe de potion qu’on nomme Tze^e , laquelle on compofe d’egales portions de Mays & de Cacao^ premièrement roftis, & on le cuift auec quel- que peu de jMays boüiili,tant qu’il foit propre a boire. 1» Au refte on a accouftumé de planter auprès des arbres qui portent le Cacao vn autre arbre , lequel ils nomment Atlymm, afin qu’il l’ombrage, & le défende des ardants rayons du Soleil, car il n eft vtile à aucune autre chofe que iefçache. Voila ce qu’en àitXimenet.% C H A P. III. Vi^t'epon touchant le Mays ,Jès facultés & diuers qui a les plumes blanches auec quelques marques brunes; le bec d’oifeau de proye, mais plus aigibilvaàlaproyeautanîenlamerqucfut Iaterre;ilalepiégauchefembla- biei celui d’vne oyCiauec lequel il nage dans les eauxdedextre comme celui d’vn faul- Con , duquel il ferre ce qu’il apris , foit enl’aïr ou en l’eaii : en outre ils ont aufli des ai- gles noires ou grifes, les plus grandes font couronnées, aufli des cailles, des palumbes vn peu plus petites que celles d’Elpagne j des tourtres, des oyes, canes 6c plufieurs autres OCCIDENTALES. LIVRE VIL 243 autres fortes. Et l’oifcau T otoquejlaly que les naturels auoyent au temps pafle en tres- grande vénération,!^ car c’cftoit vn crime capital que de le tuer,vn peu plus petit qu’vnepalumbe, ayant les plumes vcrdes comme le foucy , la queue longue : ils s’or- noyent de fes plumes aux ioursde leurs principales feftes : nous ne dirons rien des perroquets & Guacamayes-,c[m ont les plumes d’vn rouge fort beau & bleues , defquels il y en a grande quantité par tout : des beftes à quatre pies , nous n’en dirons que peu & premièrement des eftrangeres : il y a vn grand nombre de taureaux, vaches, brebis, cheures pourceaux ;& cette Prouinceeftfurtoutesautresprifes pour nourrir vne race de cheuaux fort généreux, voila pourquoi on a couftumed’y aller quérir des 10 poulains delà ville àc Mexique, combien qu’elle en foit prefqu’à deux cents lieues. Il y a auflî des tigres, lions, léopards, chats fauuages merueilleufement bigarrés j des chiens aufli furieux que des loups ; des renards bigarrés de blanc , de noir & cendré dVne belle façon, mais qui puent fort: defquels François Ximenes ^(ent ainfi; l’animal Tz,qniepatli eftfortfemblable au renard quand à l’aftuce; il eft deux palmes de long, a vne petite gueule , de pentes oreilles , la peau noire & fort velue ; & la queue ( qu ’il a aufli fort longue ) eft couuerte de poil méfié de noir & de blanc ; les ongles courbés ; il vit és cauernes entre les rochers,& Ce nourrift d’efearbots & vers de terre ; & de pou- les & d’autres oifeaux auffi, quand il en trouue le moyen , defquels il mange la tefte : fon vrine fa fiente put d’vne eftrange façon, de maniéré quelles galtcnt entièrement 2,0 tout ce quelles touchent ; mefme le vent qu’il lâche en fuyant, rend vne puanteur in- tolérable; de forte que ce font les armes dont il fe defend, principalement à l’encontre des chafl'eurs. 11 s’y trouue en outre des fangliers de mefme forte que les autres de l’Amerique ; des armadilles, efeurieux des Tlaquatzin, defquels nous auons parlé ci-delfus. Il y a aufli des beftes de la grandeur d’vn connil, mais de la forme d’vn loir, lefquelles portent fur leur dos leurs petits f qu’elles ont trois ou quatre enfemble^ quand ils font encores petits, lors qu’elles vont à la quefte de leur vie. Cette Prouince nourrit aufli plufieurs ferpents,& autres animaux veneneux,queî- qiïes-vns defquels iettent vn venin fi violent, qu elles mettent en danger de mort ceux qui les touchent auec vne bafton, fi cé n’eft qu’en les tuant aufli toft , ils fe frottent de J O leur fang ; toutesfois encore qu’on euitela mort fubite,on ne laiffe pas de languir. Il y a des ferpents qui y croftfent merueilleufement grandes, quelquesfois il s’en eft vende vingt piés de long: d’aucunesfont d’vn parfaitrouge,diftinâ:es de rayes noi- res & de marques blanches ; les Saunages les appellent meres des formis , & les por- tent autour de leur col fans danger. Enfin auprès bourgade des ^ttelenes^ il y a deux coftaux , tellement remplis^de toutes fortes de ferpents , que les Sauuages craignent grandement d’en approcher. . , C H A P. V. ■„ . ■'J . U i i Defeription partimliere de U Yromnee de Ghiapa -, Guidad Real *, , mttsrel mœurs des SamageSyiCS'* autres particularités, \ CE T T E Prouince a de tous temps efté habitée dè quatre diùerfesjna.tions ou peuples,comme nous auons dit ci-deffus, entre lefquels ceux de C/^wy>^,n’excelT lent feulement pas en fubtilité d’efprit & mœurs ciuiles ,les autres de cette Prouince , mais aulTi tous les autres de la NouueUe EJpagne ;ç2œ ils noürriflTent le^:plus hardis cheuaux &; les meilleurs de tous, qu’ils fçauent dotopter;ils excellent enlamu- fique,peintures & autres Arts mechaniques:ils font fort humains & ciuils,&obeiflenc àleurs fuperieurs de toutleurpouuoir.llsfontvenus,commeilsdifentjdelaPrQuînce de Nicaragua, d’où il y a ia long temps qu’ils fe font venushabituer eti cette-ci,'OÙ ils 50 fe placèrent aupres d’vîi coftau pierreux, aftés près du lieu qu’ils tiennent atiiourd’hui. Les Efpagnols, apres qu’ils fe furent rendus maiftres de ces regios, ils s’y choifirentvn lieu-fort commode, dans vne vallee ronde;enuironnee de toutes parts de montagnes, &:diuifee de quatre fentiers;au milieu de laquelle il y a vne haute monfagne,aupié d’icelle du cofté qu’elle regarde le Soleil leuant,ils baftirent vne ville, qu’ils nomment Cuiâaà Real ■,\,Cepx.2axte\\e\xé^ de celle de S.Iago de Guatimala versleNord-oueft 5 ôr à prefque autant delà ville de Sennora de U Vittoria enlçi V tomnee àeTabafeo ; H h 2, de 244 description DES INDES de laquelle on va à la ville de chïâpa , premièrement en montant la riuiere de GryduA quarante lieues, puis delà par des hautes & afpres montagnes , & vallees arroufees de plulieurs riuieres,qui feparent l’vne Prouince de l’autre. Cette ville de CuidadRealtik. gouuernee par vn (îngulier priuilege du Roi d’Efpagne, des Magiftrats de la ville , les- quels ils nomment Alcades, Elle a vneEglife Cathédrale, & vn Monaftere ; pluiieurs bourgades d’indiens l’enuironnent, la principale defquelles eft c/?/4^^,de laquelle non feulement le relie de la vallee a pris Son nom, mais auiîi toute la Prouince. Or on efti- me que cettevaileecfl: comme au milieu des deux mers, efloigneed’enuiron Soixante lieues de l’vne & de l’autre , à dix huid degrés & trente fcrupules de la ligne vers le Nord félon lequel il eft tout certain qu’il s eft abufé en ce lieu, carlalîtua- lo tion du lieu & les autres circonftanccs y répugnent ) elle eft froide & Seiche , d’vn aïr Sain, mais fort Subtil, qui fait qu’elle ne porte ni limons ni oranges 5 mais bien des pom- mes, poires, coings, per fets,& autres fruids qui croilSentés régions froides, comme auiSi du froment &: du Mays en grande abondance,à caufe de la quantité du fient qu’ils ont pour fumeries champs. Le Second peuple font les ou Prouince defquels eft pour le iour- d’hui peuplee de vingt cinq bourgades , la première defquelles eft Tecpatlan , où les la- cobins ont bafti vn Conuent : cette Prouince eft chaude & humide à caufe de l’abon- dance des pluyes,&;pour la quantité des riuieres & torrens les chemins y Ibnt fort dif- ficiles,par ainfi elle eft riche en fort bon poifTon. to Le troifieme font les Zeltales qui habitent treize bourgades, ayans vn gouuernement populaire 5 le terroir y eft fort fertile & abondant en d’où vient qu’ils nourriffent force pourceaux : ils ont aufSi grande abondance de miel quantité de poules î beau- coup de cochinilie dequoi ils peignent leurs maiSons & leur coton. Sans en faire autre profit ; & enfin des Cacaos. 11 y a auffi plufieurs riuieres , mais qui font petites ; & les montagnes y font fort hautes qui Séparent cette Prouince de celle de Lecandon^Zocyues ôc Tucataft.Ccs Lecadones vont nuds,& demeurent auprès des marais,&: entre des mon- tagnes droites &raboteülès Sur les marches de Tucatan , iis Sont de mœurs rudes & in- domptés,&grandcment ennemis des ESpagnols , comme Chilton Anglois afteurequi a fait ce chemin. 50 Le quatrième Sont les qui habitentvingt cinq bourgades, la principale defquelles eft Copamuaztla où les lacobins ontvn Conuent, l’aïr y eft d’vne temperie chaude & Seiche, & la terre y porte en abondance du froment & autres fruids de l’Eu- rope : ils ont beaucoup de vaches , d’où vient qu’ils font de fort bons formages : ^e- hrada Rica appartient à cette Prouince, ainfi nommee des Espagnols, pourcc qu’an- ciennement ils en ont tiré quantité d’or: cette Prouince de ^uelenes eft bornee d’vn cofté de Soconufio^^ de l’autre du deSert de Lecandon. La principale riuiere de Chiapa deScehdde deüers le Nord, & coupe la Prouince de ^mlenes auprès de Copanam&tk^ipms ayant receu plufieurs autres riuieres, Se defehar- ge par Taba/co dans la mer ; quelques-vns veulent qu elle entre dans la terre auprès de 40 la bourgade Oz^tutan. Cette riuiere nourrit certains animaux,qiîi ne Se trouuent nulle part ailleurs,ils font Semblables à des,finges,ayans vne longue queue & la peau tachet- tee comme vn tigre ; ils Sont le plus fbuuent cachés dans l’eau, & rarement viennent- ils delTuSj&lors que les Sauuagespaffent la riuiere à la nage, ils ont couftume d’entor- tiller leur queue autour de leurs iambes & de les tirer au fonds , ce qu’ils font meSmes aux cheuaüX,toutesfois on n’a pas remarqué qu’ils ayant iamais mangé aucune chofe qu’ils ayent fait noyer : les Sauuages aduertis de ce danger, porte auec eux de petites haches defquelles ils coupent les queues de ces animaux pour s’en defengager. L’autre riuiere de cette Prouince , qui eft appellee des Efpagnols Rio blanco , couure aufîi toft d’vne croufte de pierre le bois qu’on ictte dedans, -l’eau en eft aureftefort 50 claire & peut eftre beuc Sans danger. Entre les chofes belles decette Prouince, font diuerfos fontaines merueilîeufos& remarquables ; dans le village de Cazacualpa à vne lieue & demie de la principale ville, fo voit vne fontaine fort claire, qui croift & deforoift ainfi que la mer de fix en fix heu- res, ce qu’on ne peut eftimer procéder de la mer , de laquelle elle eft extrêmement ' loin. Au territoire de Tafixa , il y a vne autre fontaine qui fourt trois ans de long abondamment. OCCIDENTALES. LIVRE VIL ^4^ abondamment , encore qu’il pleuue peu , & fe feiche les trois autres années d’apres, combien qu il y pleuue fort. Eta cinq lieues de la ville, s’en voit vne autrelaquelle fur- monte fes bords l’hiuer tarit du tout. Prés de la bourgade Cinacatanjil y a vne petite fontaine, l’eau de laquelle guérit les maux où il faut appliquer le cauterej & tue les oifeaux 6c autres animaux qui en boiuent. Auprès de la bourgade S. Bartholomecw la Prouincede ,^jielenes yi\y 2lVï\ trou en ter- re comme vn puits , dans lequel fi on iette vne pierre ou autre petite chofe, il fe fait vn. grand bruit, &: aulïi toft s’efleue vne tempefte, comme vn tonnerre , fi grande , encore que le Ciel foit ferain 6c tranquille , qu on l’entend fort loin, 6c eft prefque infupporta- I O ble. Ce que Pline eferit dVne certaine cauerne en Dalmatie. Enfin pour ne parler des autres.il y a vne cauerne en la bourgade de qui a 1 entree fort efl:roite,mais au dedans eft fort Ipacieufe, auec vne plaine fort belle, 6c vn lac a vn des coftes fi clair, que l’eau trompe la veuë de ceux qui la regardent, eftanc au refte immobile 6c profonde auprès du riuage de deux brafles. Au refte cette Prouince de a grandement fleuri au temps pafle, pour l’abon-. dance d or qu on y tiroit : 6c pour le iourd’hui les veines d’or n’y manquent pas , mais les efclaues pour les miner. Il y a aulïï beaucoup de mines d’argenr,d’eftain,dc blomb, dargent vif 6cde cuyure,quinefontpas defcouuertes, 6cn’ont pasefté trauaillés iuf- ques a ce iourd hui. chilton Anglois, duquel nous auons ci-deuant parlé , eferit enfes io Commentaires,que la principale ville de cette Prouince s’appelle en langage du païs SacatU/i-,^ que lEuefque 6c enuiron cent Efpagnols y demeurent; qu’ilyagrand re- uenu de coton , duquel les Sauuages font des eftoffes, defquelles ils payent leur tribut aux Efpagnols, qui en font vn grand trafic en la NouuelleEJpagneyoh 'ûs les tranfportent. A quatorze lieues delà, il y a vne autre ville nommee chiapay qui eft fort renommée pour auoir vne race de cheuaux genereux. Delà on va en la 2(ouuelle EJpagne par de fort hautes montagnes, iüfques fur la fin des limites de cette Prouince,ou la ïx\ont2.^ncdQEcatep€c ('lequel nom fignifie en lan- gage du païs montagne du vent js’efleue en vne telle hauteur, qu’on aflèureque du fommetd’icelleon peut voir l’vne 6c l’autre mer relie a prefque neuflieuës de chemin 5 O de haut, lequel il faut faire la plus grande partie de nuiét, pource que quand le Soleil fe leue,il s y fait le plus fbuuent de fi fortes tempeftes, qu’il eft commeimpoflible de fe te- nir 6c de cheminer au haut; enfin du pié de cette montagne eft la première bourgade de la Nouuelle EJpagnCi on conte quinze lieuës. Voila ce que nous auions à dire de la Prouince de chiapa. S0C0NVSC06CSVCHITEPEC. C H A P. VI. 40 ^sfeription des Vrouinces de Soconufeo afs* Suchitepec, qualités de leur air & terre ^ des bourgades d! icelles autres chofes. PR O c H E de la Prouince de chiapa vers le Sud-eft ôc Sud, eft cette Prouince que les Sauuages appellent .S’tfr<7;2^i7,eftendu'ë le longdelacofte de la merduZ’»^, enuiron trente cinq lieuës de long, 6c vn peu moins de large. Elle a pour limites vers leLeuant GuatimaU proprement dite, vers le Nord Ferapaziàvi cofte du Cou- chant Tecoantepec, dernier quartier de la Nouuelle EJpagne. Le terroir y eft entièrement abondant en ces arbres qui apportent le Cacao, ce qui eft la principale richeflede cette Prouince , auec lequel ils trafiquent fort aifemenr, pour la proximité de la mer,ésProuincesles plus riches de la 6c la î O terre y apporte afles bien ce qu’on y feme,fi ce n’eft du froment. Il y.a vne feule place habitée des Efpagnols,qui fe nomme d’vn nom du païs tant par les Sauuages qu Efpagnols G'//^//^//4»,baftie anciennement par Pedro deAluarado , lors qu’il eftoit Gouuerneurde ces Prouinces. Au refte cette Proumce,cômme nous auons receu de chilton qui y voyagea l’an c I o I d l xx, eft beaucoup deftituec d’habitans, 6c y a peu d’Efpagnols qui y demeurent, qui ne paffent pas le nombre de vingt; car les na- turels du païs y font fort arrogans 6c cruels>par la confiance qu’ils ont en leurs richefles, Hh 5 lefquelles 24^ description DES INDES lefquelles ils aquerent par le trafic du Cncao. Toutesfois ils payent tribut au Roi d’E- fpagne,à fçauoir quatre cents cargas de Ciica.0 chacun an du moins. Car vn carga con- tient vingt mille amendes de Cacao,ôc c A pn fcc dans la ville de le plus fouuent trente realles. Cette Proùince depuis le mois d’Aurii iiifques en Septembre eft fuietteàde quentes tempeftes & pluyes, &il y defcend des montagnes dans les vallees vne telle quantité de tortens &ruiflbaux,queles chemins en fontcouuerts,où on ne peut aller à caiife des eaux qui y font efpanduës /d’où vient que ceux qui veulent voyager de Ni- caragua & autres Prouinces Orientales vers UNouuelle EJpagne , font contrains durant ces mois de fe deftourner ailleurs, combien que le chemin foit plus court és autres mois de beaucoup par cette Proùince. Suchitefec & deux petites Prouinces auoifinent vers fOncni SoconufcOi lefquelles font grandement desfoiirnies d’habitans ; car la plus grande bourgade d’i- celles necontient pas plus de deux cents Bourgeois jleur principale richefle & mar- chandife font les fruicts de Cacao defquels leur terroir eft eftimé eftre fort abondant. La cofte marine de ces Vmvfmcc^ Soconufcoy Suchitepec & Guafacapan, le long de la mer Méridionale ou Pacifique , prend fon commencement à fept lieues de la riuiere Amitla vers l’Oueft,& s eftend iufques à T ecoantepec & autres derniers bouts de la Nou- uelleEjjagneiàzns lequel efpace il y a plufieurs riuieres,qui fe defchargent en cette mer : lefquelles font fituees félon cet ordre, premièrement Coatlan, apres Capanarcalte, puis Colatl, Hazaîlan bL Amatituc.co^nvi 'cs feulement de nom , le refte de cette cofte nous eft incognu. Ÿ E R A P A Z. C H A Pi VIL De/criptiofî de la ^romnce de Verapaz des f laces qui fint auiourdfhm habitées en icelle. La Proùince à laquelle eft demeuré le nom de VerapaT^c'cft à direjdc la vraye paiXj 5 ® - pource qu’elle n’eft pas venue fous la puiflance du Roid’Efpagne par armes, comme prefque toutes les autres de ces régions , mais par la prédication de TE- uano-ile , prefchee par les Moines de l’ordre de S. Dominique , eft du tout Méditerra- née j elle eft bornee du coftédcl’Oueftdela VnoMinccàcChiapa iNCïslcSnààc Soco- nufco,2i\x Nord de lucatan, & vers l’Eft des Honduras & Guatimala proprement dite ; elle a de long trente lieues ou enuiron , & prefque autant de large. Elle eft feparee de Guatimala par la riuiere Xtcalapa ; des Honduras p2.t les riuieres, marais, & golfe, qui eft vulgairement appellé Golfo Dolce^^cfc tenu pour vn port de cette Proùince. Les habitans qu’on dit auoir pour la plufpart embrafle la Religion Chreftienne , & . qui pour eftre d’autant plus commodément inftruiéts par les Religieux/ont aftemblés 40 dans peu debourgades,nbccupent pas de pais plus de vingt fix lieues de large; le refte •eft non habité, &pofledé par des Sauuages infidèles & qui ne font pas encore dom- ptés,à fçauoir par les Lecadonesi defquels nous auons parlé ci-deuant,&: de Eochuteques^ & de ceux qui habitent la Proùince d' Acala:,pc\ip\c^ aufti cruels & indomptés. La ré- gion eft montueufe , afFreufe pour la plufpart en montagnes fort hautes , profondes vallees où il y a peu de plaines , fombres bocages & forefts efpaiffes : le milieu d’icelle ioüift d’vne temperic.d’aïrafles commode, mais fes extrémités font fort haflees &: bruflees ; & grandement fuiettes aux mofqiiites, / ainfi appellent-ils vne certaine forte de moucherons fort commune en ces pais ) pefte familière aux régions chaudes & hu- mides. Au refte fort abondante en de fort bons fruits,poiflbns &: autres chofes neceftai- J o res à la vie. Or l’air y eftgrandement pluuieux, defortequ’il y pleut prefque neufmois continus, & mefme aftes fouuent les autres reftansjenfin l’air y eft fi plein de nuees,que le Soleil y luift fort rarement.Mais depuis qu’on y coupe les bois, la terre eftant de iour à autre de plus en plus defcouuerte,il y monte moins de vapeurs, qui font plus aifèment diffipees , d’où vient que la température de Pair y change tous les iours comme on dit. Il y a au refte de fort hautes montagnes & de prôfondes vallees & plufieurs précipices, ^ &:lc Y OCCIDENTALES. LIVRE VII. 247 & le païs eftempefehé de beaucoup de riuieres, de fontaines fans nombre, &: desfour- ces d'eaux fort faines, combien qu’il y en ait, d’aigrettes, & d’autres d’vn mauuais gouflr, à caufe des veines & métaux par où elles paflent. Proche de la bourgade de S. Augujlin fe voit entre deux montagnes vue cauerne dans la roche, qui peut contenir plufieurs hommes , ayant vne grande bouche, au de- dans obfcure &: applanie,auec beaucoup d’autres aupres,lefquels diflillent continuel- lement vne certaine liqueur , laquelle fe conuertiten pierre blanche comme albaftre, foriîiant plufieurs colomnes & ftatuës,par vn rare artifice de nature: au dpdans il y fait vn froid fi pinçant &:fubtil, qu’on dit qu’il pénétré les os : on y oit aufli vn murmure I O confus d eaux courantes,lefquelles fortant de diuers torf ens , fe précipitent première- ment dans vn profond abyfme comme vn lac, d’où eftant conioindtes en vn canal for- ment vne riuiere, laquelle aulîi toft apres fa fortie porte des bateaux. Le terroir de cette Prouince peur là trop grande humidité n’endure pas bien le fro- ment de l’Europe, toutesfois il porte le Mays deux fois l’an, bien qu’il fe galle fort fou- uent& fe pourrillpar trop d’eau: elle ell trauaillee de grande tourmente de vents,de terre-tremblés , tonnerres &: foudres. Les forells y lont toutes remplies de cedres blancs & rouges,& plufieurs arbres quiportent choies aromatiques , qui rendent vne bonne odeur de foi, plufieurs qui ài9ci\\Qnt\cLic[mdambar,t Anime, le Xuchicopalje Ma- Jîich & fang de D ragots, comme, on le nomme és boutiques. La terre y produit en outre 20 de fort grandes cannes, par fois de cent palmes de haut, & fi gro fies qu’elles tiennent entre deux nœuds vnearobe d’eau, ( qui ell vnemefuredes Efpagnolsj defquelles les naturels fe feruent parfois à faire des trauerfesàleurs mailbns. Ils ont aulTides arbres qui ont le bois aulTi dur.que du fer, qui n’efi: point fuiet à vermoülure,& lequel ell mar- queté de aiuers couleurs,duquel on. le lert a diuers vlàges. Il y a aulîi vne admirable variété de fleurs odorantes,defquelles les abeilles viuent, qu’y n’y font pas d’vne mef. me efpece : les vnes n’ont point d’aiguillon & font leur miel fort clair; les autres ont des aiguillons comme celles de l’Europe, d’autres fort femblables aux moufehes qui ne font pas malignes,d’autres enfin qui font du miel fauuage bc qui trouble le cerueau aux hommes ; toutesfois milles d’icelles ne font des rayons, mais font leur miel fous 5 O l’efcorce des arbres & au pié d’iceux dans des trous en terre, & le miel en eft fort clair, mais vn peu aigret : les Eipagnols ont coullume de le cuire,car par ce moyenil eft plus làin bc plus agréable au gouft,approchant du fyrop compofé d’oranges ou citrons. Entre les animaux à quatre pies qui font là,le plus grand eft celui que les Saunages nomment Beeirhbc les Efpagnols Danta jfort ftmblableà vu veau,mais il a lesiambes plus courtes & les piés articulés comme l’elephant; ceux de deuant ont cinq orteils, & ceux de derrière feulement quatre j iîa la tefte longue,le front eftroit,les yeux petits pour fagrândeur,lemufeau long d’vne palme qui lui pend comme la trompe de l’ele- phant -, quand il eft faiché il fe dreffe , & ouurant fà gueule monftre les dents , qu’il a comme celle des pourceaux; les oreilles font aiguës,le col retiré,la queue courte, cou- uerte d’vn peu de poil, la peau fort efpaiffe de forte qu’on la peu difficilement empoi- gner de la main ou percer d’vn ferrement ; il vit d’herbes fauuages ; les Sauuages man- gent fà chair ; &: difent qu’ils ont appris à s’incifèr la veine de cet animal, car quand ii fe fent eftre trop rempli de fang,en fe frottant contrôles pierres il s’ouure les veines & en tire le fang. Cette Prouince nourrit auffi des lions,mais qui font coiiards,car ils dorment tout le iour dans des cauernes,ouau fommet dcsarbres,defquels ils defeendent denuiélpour aller à la quelle ; ils font legers,mais fort timides, & les Sauuages les tuent fouuent, ils font d’vne chair blache bc affés bonne,fi nous en croyons les Sauuages qui la tiennent pour délicate ; ils fèfèruentdela graifïeen medecine,&des os à faire fluftes pour ioüer ;o en leurs feftes. Les tigres y font beaucoup plus grands & plus dangereux ; ancienne- ment ils rauifToyent les miferables Sauuages de leurs maifons &:lesdeuoroyent, voila pourquoi ils les craignoyent d’vne telle forte qu’ils fe profternoyent deuant eux & les adoroy ent comme Dieux : car le bruit eft non feulement en cette Prouince, mais aufli en tonzeh Nouue/leE^agne^ que le Diable és fiecles palTés auoit coufturne de s’appa- roiftre aux Sauuages fous la forme de cet animal, d’où eftoit venu cette adoration:mais depuis que les Efpagnols s y font habitues, & ont fait paroiftre aux Sauuages la lumière • description DES INDES de rEuangile,ayans defpoüillé cette crainte, les Indiens auec leurs fléchés , mais prîn^ cipalementles Efpagnols auec leurs armes afeu en ont fait vn fi grand carnage, qu on n’y en voit à prefent que fort peU3& ne font pas fi redoutés. Il s’y trouue encore vn autre animal, qui n eft gueres plus petit qu vne ourle, au refte d’vn poil noir, la queue large, ayans les pies & les mains prefque à la façon dVn hom- me,la face plate, fans poil & ridée, & les narines plates comme vn ntgXQ.rheuet dit qu’il fe trouue vn lemblable animal au mais il ne lui donne pas des pies & des mains femblables à ceux de l’homme, mais nous en parlerons ailleurs. Enfin il s y trouue vne orande multitude de finges & guenons, comme aufli des cheures làuuages, pourceaux, porcs-efoics,armadilles & autres femblables belles lauuages. Il n eft point beloin de l< parler des oileaux,que cette Prouincenourrift en aufli grande quantité & aufli beaux que cQWcàcChiapa, ^ , i-r Nous ne trouuons pas iufques à ce iour,au moins par efcrit que les Elpagnols y ayent trouue aucune mine d’or ou d’argent , combien qu ayans efte louuent trompes par de iegers indices que les Indiens leurs donnoyent,ils ayent employé leur temps en vain à les chercher, fi ce n’eft proche du Golfe D bien que le froment, félon qu’on efcrit,s’y garde difficilementplus d’vn an. Les pluyes y font rares, mais quandellesy tombent, c’eftauec grande vehemence, principalement: depuis le mois d’Auril iufques en Oâiobre. Les vents y fbufflent principalement du Sud ou du Nord,le dernier moins fouuent que l’autre, & n'y dure que quinze ou vingt iours continus, mais fort froid & impétueux. Le païs eft fort raboteux de montagnes» 5 O & empefehé de beaucoup de riuieres, d’où vient qu’il y a grande commodité pour chafl'er &pefcher. Elle eft fécondé en bons fruifts tant en ceux quelle porte defoij qu’en ceux que les Efpagnols y ont apporté de l’Europe, riche fur tout en vn grand re- iienu de Cacao. Ils y ont grande difette de fel , qu’ils font auec grande defpence du fa- ble que-la mer a couuert,cuitdans des fournaifes àforce de flamme. Les riuieres outre toute forte de poiflon nourriflent auffi de très-grands Crocodilles. Elle abonde fur toutes autres en pafturages,d’où vient qu’il y a plufieurs cenfes champeftres,& des in^ nombrablcs troupeaux & vaches ; mais elle eft eftimee mal faine j tant pour le trop grand chaud qui y fait que pour la trop grande humidité : il y a vne incroyable multi- tude de moufcherons,qui font fort fafeheux aux hommes iour & nuid : infinies mouf- 40 ches auffi & desguefpes: beaucoup de fcorpions,&: autres vers gros & velus, qu’on efti- me dangereux & fouuent mortels par leur feul toucher; & ceux qu’ils nomment Cent- rés, qui ne font moins à craindre ( encores que François XimèneSi lequel eferit que les MexiquainsVz^^eWent Coyayahual,diecçne de ceverfec broyé Setrempé enl’eau on en oinétles mâchoires pourappaiferla douleur des dents ;& qu’il eftfortdur&fauueau dehors, ayans les piés d’vn blanc pourprifrant,lefquels il a engrandnombre,d’où vient qu’on le rapporte à vne des efpeces des Centpie's. jÀu refte des ferpents, viperes ôr au- tres reptiles veneneux.il y a force moufehes à miel qui font leur miel & leur cire blancs» & qui ne piquent pas fi fort que les noftres. Cette Prouince porte du baufme , & vne autre liqueur aromatique femblable à de 50 l’huile ( que Gomara dit couler d’vne montagne j & du foulfre parfait. Enfin d’excel- lent annil oupaftel, qui eft fort eftimépar le nom de cette Prouince: duquel il nous faut vn peu difeourir en ce lieu,pource que nous y auons inféré vn rameau d’icelui auec les fueiiles tiré au naturel auffi grand qu’il eftoit. François Ximenes eferit la plante ainfi : Xihuicçttilitl pitz.ahuac,ced. à düe, Annir à fubtiles fueiiles, eft vn arbrifleau produifanc d’vne racineplufieurs troncs, fix palmes de haut, &gros comme le petit doigt, ronds &: polis,de couleur cendree, ayans les fueiiles femblabics aux pois chiches 1 de petites li fleurs DE C RIPTION DES INDES fleurs d’vn blanc roux , defquelles naiflent des gouffeS pendantes par flocquets enfemble du tronc, qui font lemblables aux vers qu’on nomme afcorides , aucune- ment grofles &: pleines defemencenoirerd’autres adiou- ftent que la femence approche de celle du fœnugre, pla- te des deux cofliés cômefi elle eftoit coupee.Des fueilles fe fait la teinture que les Sauuages appellent Tlacchoyli- mihuithm^c quoi ils teignent leurs cheueux de couleur noire. Or la maniéré de faire cette couleur bleup, que les Mexiquaim nomment Mohuiîü, & T lecohidlli , & les Ca- fl:illans^^;»/( vulgairement anniDeft telle : Ils mettent les fueilles triees dans vn vaifleau d’airain, & y mettent de l’eau chaude ou piuftoft tiede f combien que quel- ques-vns approuuent piuftoft la froide ) & la verfent fort deflusdufques à ce qu’elle foit teinte, laquelle ils verfent doucement dans vn autre vaifleau ou pot,qui a vn trou au haut, par lequel coule l’eau la plus claire , & celle qui eft la plus trouble & elpaifle, & laquelle a pris la fubftan- ce des fueilles demeure au fond; qu’on paflepar apres au trauersd’vn fac de toille de chanure, mettant lafub- lo 2,0 ftance la plus efpaifle au Soleil,dcquoi on forme des tourteaux , lefquels on feiche fur des charbons vifs tant quelle foit dure. Voila ce qu’il en dit. Mais parmi les vrais Indiens quihabitent entre les xï\x\ttç,sâ‘ Inâe & de la ma- niéré de tirer cette teinture eft beaucoup plus laborieufe , que i’ai cftimé deuoir adiou- fter ici. Ayant découpé la plante, ils la iettent dans vne longue cifterne préparée pour cet effet, & y ayant mis beaucoup de pierres deflüs,ils l’enfoncent,& la deftrempent &: Couurent de force eau claire, la laiflant ainfipreflee & couuerte quelques iours,iufques à ce que l’eau ait tiré & beu toute la fubftance de l’herbe: lors ils mettent cette eau dans vne autre cifterne ronde , au fond de laquelle il y en a vne autre petite auffi ronde; & la braflent fort auec des baftons, efeumant infenfiblemeut le plus clair; continuant tant j o que toute l’eau foit efcumee,& que la lie & la plus efpaifle fubftance repofè au fond.-Ia- quelle ayant tiree,ils l’eftendent fur des draps & la feichent au Soleil ; & quand elle eft vn peu dure,ils la forment par poules, en lames ou tourteaux; & la mettent derechef fur du fable pour s’endurcir dauantage,car toute autre matière en boiroi t la couleur ou la gafteroit. Or on tranfporte de cette teinture fort cognuë de GuatimaU & autres Pro* uinces voifmes par le port de i/tfW^r^enl’Europe,dontfèfaitvn riche trafic. En outre cette Prouince eft feparee de Suchitepeque & Guajacapani'p2.x la riuiere 2l4i~ €hatoya,\2.<\\iç\\t fortant du lac AmitatantZ quatre lieues de la ville de i". lago, fe précipi- té du haut de fort hauts rochers dans vne profonde &:creufecauerne, au haut de la- quelle vn nombre infini de perroquets nichent, & de groffes & fortdangereufes chau-40 ues fouris,qui tuent les veaux en fuçant leur fang,& n’efpargnent pas mefinesles hom- mes fi elles les trouuent endormis : & il y en a fi grande quantité,qu’à caufe du domma- ge quelles font iournellement au beftail, les Sauuages ont efté contrains de quitter les cenfes voifines de ce lieu. Les naturels de cette Prouince font de fort pent courage & vils; la langue Me- xicane leur eft commune à tous, combien qu’ils en ayent vne propre. Ils ont plus profité qu’aucuns autres Sauuages en la Religion Chreftienne & conuerfation ciuile» mais quand ils n’ont nulle peur,ils retombent aifement à leurs couftumes Payennes & façons de faire de barbares. Les hommes font plus greffiers, mais fort bons archers ; mais les femmes y font vn peu plus ciuiles,& fçauent fort bien filer. J o Au quartier de cette Prouince nommé T^fticfaca, , il y a des lacs, que la mauuaife o- deur des eaux manifefte procéder des veines de fbulfre ; comme auflî les morceaux d’i- celui qu’on trouue coagulés auprès de leurs riuagesj Or les pafturages qui enuiron- nent ces lacs & reçoiuentles ruiffeaux d’iceux, nourriffent extrêmement bien les che-* uaux,& de maigres & debiles les rendent fort gras. L’an cIdId xxiv cette région fut premièrement domptée par Pedro de Alunrado - ' , & réduit® OCCIDENTALES. LIVRE VIL ^ 2^1 & réduite eiiProuince ,& fleurit beaucoup tant qu’il velcutjmais apres la mort elle - perdit beaucoup de fa première fplendeur, laquelle toutesfois elle recouüra apres par ^ labondancé du commerc^, deforte qu’auiourd hui on la conte entre les plus riches Prouinces. Henera ne lui donne qu’vn port & encore mal alTeuré , lequel il nomme rztàpa ; en qüoi il eft manifefte qu’il fe trompe, fi ce n’eft qu’il entende parler de quel- que port lur la mer du Nord, a laquelle toutesfois cette Prouince n’attouche pas ; Or ailleurs il fait mention de la riuiere & du port Tz,tApa, proche de la riüiere de Gryaluay par laquelle il eft vrai fèmblable qu’autresfois onauôit couftume de tranfporter les marchandifes de l’Europe en cette Prouince , auant que les Efpagnols euftent trouüé I O le Golfe Bolce & autres paftages : nous parlerons bien toft des ports qui font fur la merdu^W. Y Z A L C O S. C H A P. X. ^aHiculieve deJcTftion dé la Frouince Ÿzalcos , comme Us E^agnols là nomment aulourd'hui, > La Prouince Tzalcosipc^nà Ton commencement de la riuiere Guacapa & f nift à & a la cofte manne qui eft vulgairement àxi^Tonda. Elle a'delont^ .. fuiuant la cofte de la mer dix hui poiirce que la matière en eft confommee, comme il eftvraifemblable,l’emboucheure en eft fort grande , ayant de circuit demie-lieuë , &eft extrêmement profonde : en la dcfcente d’icelui fe voyent comme deux fournaifes.du fond defquelles fort encore vne efpailTe fumee, d’vne fi mauuaife odeur, que ceux qui s’en approchent de trop près tombent efuanouïs. Cette montagne eflcouuerte du pié iufques aufommet de grands cedres & pins,& on y voit ci &: là de la matière bruflee, indice de fon ancienne incêdie. A trois lieues outre ce Vulcan eft la bourgade où il fe voit vne piece d’vne feiche montagne ( les Efpagnols la nomment elmal pays ) de pierres &: morceaux de zo terre bruflee amoncelés enfemble , de matière fans doute que le Vulcan dont nous a- uons parlé a autresfois vomi, pource qu’on ne voit aucune apparence d’autre Vulcan en tout ce quartier ; ce qui toutesfois fembleroit eftre vne chofe du tout incroyable en vn fi grand efpace, fi ce n’eftoit qu’il n’y a pas trop long temps,qu’vn autre qui eft en la vallee de la ville àc S^.Iago de Gmtimala,7iie.ttc fort loin des montagnes entières de pier- res ardentes ; & en la Prouince de Nicaragua , au fiecle paffé , vne flamme Portant im- petueufcmentd’vn nouueau/^^/(!r^;?,renuerfavne montagne toute entière dans la val- lée prochaine auec tant de ruinesjqu’elle en fut toute comblée, & enterra les habitans fubitement tous vifs. Or de ce Vulcan fourdent des fontaines de fort bonnes eaux, quis’aftcmblenten vn 5 O canal auprès de Nÿxapa: du mefmé defeend vn torrent admirable , qui courant de nuiét,eft de iour comme englouti auprès de lamontagne de .S”. il y en a vn autre prefque femblable dans la Prouince de chuletecUiOpA coule iufques à midi & apres miditarift. Enfin au pié de cette montagne iette-flamme,fe voit auiourd’hui vne cauerne ron- de, ( qui a efté autresfois vne gueule, & laquelle a autresfois long temps bruflé, comme tefmoignent les pierres bruflees & la terre feiche & fterile autour ) de laquelle fort vne fontaine fort claire , où vontpuifer leur eau les habitans de la bourgade de Cuz^catlan fituee auprès J & proche delà eft la ville de SanSalmdor,à.^\2.QpyxzVic. nous traitons. Le long de la coftemarine,iufques à lariuieredeXf»?^^ ('quifepare cette Prouince 40 de celle de S. CMiguel ) le pais eft tout plat & champeftre, fort propre pour les trou- peaux : Or au deflbus du mefme VulcanyàwoyxtX nous parlions à cette heure, il y a qua- tre bourgades de Sauuages, qui ne cedentrien en reuenu de Cacao à la Prouince Xzal- coss^ au coftéduNord du mefme eft fl tué le village Tjlepeque y renomme pour quel- ques fontaines qui engendrent du foulfre & de l’alun, comme aufli en campagnes qui produifent plufieurs herbes medecinales. Dés ce lieu commence le pais des Chontalesy gent rude ôr de moeurs beftiales , le na- turel de laquelle eft encore rendu plus rude par les montagnes & deferts où ils demeu- rent. Proche delà la riuiere de Lempa fort d’vn certain lac , & par vn canal nauigable fe roule vers la. mer au trauers d’vn pais fort agréable, riche en venaifon &enpefchc5 5 O fl ce n’eft que pour eftre vn peu trop chaud,il eft mal fain. Auprès des riuages de cette riuiere croiffent certains arbriffeaux, qui portent des fleurs fort fouéfues & vne gom- me grandement odorante , laquelle n’eft en rien inferieure ni beaucoup diffemblable au Beniuin. Or à trois lieues de ce lac fe trouue le village •cMimilla , où les Fipiles & les autres na- tions alloyent anciennement facrifier ; en ce lieu fe voyent deux fontaines feparees Pvnedel’autred’vnfortpetitinterualle, dontl’vne iette fon eau prefque boüillante, I i 5 U l’autre DESCRIPTION DES INDES & l’autre froidejii y croift en outre plufîeurs fimplesjdontleshabitans fe feruent eri leurs viandes & breuuages au lieu d efpiceries : on y tire auffi vne certaine terre com- me du ChdcmteA^ laquelle on fait de l’encre en tous ces lieux là. Enfin proche de Ce- edriiàu. cofté que cette Prouince s’encline vers le Nord-eft , il y a vne montagne qui s’efleue par deffus toutes'les autres d’alentour, le fommet de laquelle eft tout couuert d’vn lac grand & profond, qui s’amalfe d’vne fontaine qui eft auprès. Enfin il y a en ces régions vne certaine elpece de dains affés frequente, à qui FAu- theur de nature a donné deux ventricules, Fvn pour digerer les viandes, & l’autre pour ^ y mettre du bois pourri comme on a remarqué, fans qu’on puifle fçauoir à quel viàge, bien qu’il foit croyable que la nature ne fait rien en vain. Les Sauuages mangent de la i o chair de ces animaux, encofes qu’elle foit vifqueufe,& fans doute fort mal faine. / C H A P. XIL Ville de S. lago de Guadmala principale de ces Frouincès. NO Y s auoiis iufques ici conioinét quelques Prouinces pour leur proximitéj maintenantnouspourfuiurpnsles villes que les Efpagnols y habirent:La prin- cipale defquélies eft fans contredit S. lago de Guâtimala ,• comme eftant la Mé- tropolitaine de ce Gouuernement & le fiege du Parlement. Elle eft diftante de la ligne de quatorze degrés & trente fcrupules vers le Nord: du Méridien de T olede vers FOu- lo eft nonante& trois degrés, comme Herrera a remarqué; à douze lieues ou comme d’autres veulent à quatorze de la mer du ZW. Elle eft fituee au milieu d’vne vallee, qui eft coupee d’vne riiiiere ; entre deux montagnes flamiuomes ; Fvne delquelles eft proche de la ville, l’autre en eft à deux lieues, dont le fommet eft fort haut & rond; qui le plus fouuent a couftume d’exhaler vne elpaifle fumee,parfois de vomir des flammes &: des cendres , & de ietter des pierres bruflees ; & quand le feu commence à fortir , la terre tremble fort & dru tout autour. Il y a fouuent des foudres & tonnerres,toutesfois Faïr n’en eft pas moins fàin : le ter^ roir y eftaullifertile, fort bon pour les vaches &brebis,defquels il y a grande quanti- té : la terre y eft fi fécondé en Majs, que dans les campagnes arroufees, elle rend cinq 5 o cents pour vn, ailleurs iamais moins de centJly agrande quantité d’arbres frudiers, de forte qu’on peut mettre le paiïàge de cette ville entre les plus agrea.bles.iïemrÆ conte fix cents Bourgeois Efpagnols en icelle, outre les Sauuages & cüchucs.chilton Anglois qui pafta par icelle Fan cIdId lxx, faitle nombre beaucoup plus petit, & dit que la ville pour lors n’eftpit pas habitée de foixanteEipagnols. Les Oflîciers du Roi pour la plus grande partie y font leur demeure; de plus FEueique, qui eft Suffragânt de FArcheuefque de .-ilyaaufti vnMonaftere deIacobins,&vn autre des Frè- res qu’on norfime delà Mercede ,• vn Hofpital : enfin on y fond tous les métaux. Or on dit qu’en ce Diocefe il y a vingt cinq mille Sauuages habitans. Cette ville eft diftante de la Métropolitaine Mexique de deux cents ftptante lieues 4 o par vn chemin fort fafeheux, qui pafl'e par deux deferts , dont Fvn s’eftend de Guaxaca iufques à Tecoantepeque quarante & cinq lieues; & l’autre àç,Tecoanîefeque iufques à Soconufeo foixante lieues d’eftenduë. Or depuis le milieu de May iufques à la mi-.No- uembre ce chemin eft prefque impoftible pour les pluyes afliduelles, marais & eftangs. Et de Guaz.acoalco lieu fitué fur la mer du Nord, elle en eft efloignee de deux cents lieues, où on va par vn chemin fafeheux & tortu ; toutesfois ils alloyent anciennement quérir les marchandifes de l’Europe à ce port, aucegrand frais & encore plus grande peine; maintenant ils lestranlportent parvn chemin beaucoup plus court par la val- lee de ^laquelle eft feulement diftante de la ville de S. de cinquante lieues J du golfe de Honduras. * jo Cette ville fut prefque toute ruinee l’an cId Idxli par vne horrible tempefte, la- quelle s’efleua vnenuid à Fimprouiftedu Fulcam( que nous auonsdic eftreaudeflus de la ville ) car roulant auec foivn grand déluge d’eaux, de fort groflés pierres & des arbres arrachés tous entiers, elle heurta la ville d’vne telle impetuofité , qu’elle boul- uerfa les édifices, & couurit & fuffoquamilèrabîementplufieursperfonnes;&entre autres la veufue du Gouuerneur &: premier Dompteur de ces Prouinces ( de laquelle miferable OCCIDENTALES. LIVRE VII. miferable infortune , diuers Autheursen ont efcrit diuerfes chofes, & qui s’accor- dent mal enfemblej; Toutesfois Ja ville fut par aptes reftauree & augmentée de nouueaux habitans. On dit que pour le iourd’hui'elle eft opulente en or & autres ri^ cbefTes^à caufe du trafic qu’ils font auec ceux de Vera.gua ^Ms.u.zs nations. C n A P. XIII. V iUe San Saiuador , Bourgades la Trinidad , San Kdiguel Xeres de la Frontera. lo jfil A Ville qui cR auioui.d bui appelleedesEipagnolsnciennementCi^2; los enEfpagne que de Timbre Bios-, enfin que laBaye de Fonfeca eftoit vn port beau- coup meilleur &c plus affeuré que celui de Panama ,* par ainfi ils fupplioyent le Roi de commander d’exercer le trafic de l’vne à l’autre mer par ce chemin : mais iufques ici ils n’ont peu perfuader cela. le croi qu’il s’eft rencontré d’autres difficultés,que ceux , qui fuggerent quelque chofe pour leur commodité aux Princes,ont couftume de paf- fer fous filencc. Fuller Pilote de Canâifch a remarqué , qu’au golfe de Fonfeca { ainfi nomme-il cette baye) il y auoit dix Ifles efparfes , quatre defquelles font habitées des Sauuages,& abondent en eau, bois & fel : & qu’au cofté Occidental de cette baye, il y a vue bourgade d’indiens nommee où il y a quantité de beftail. Le port à' AcaxutU eft proche de la Baye de Fonfeca & affés près de Sonfnate ou bour- gade de S. douze degrés de laligne vers le Nord,commei*rr^r^ remarque, combien qu es Chartes marines il foit mis fur treize. C’eft: le principal port de tout ce Gouuernêment , &: où abordent communément les nauires du Peru & de Is^Nouuelle Ffagne. - . zo De ce port à la Baye on conte douze lieues vers i’Oueftj de la Baye Gua~ timala iufques à la riuiere Xicafala fept. Ce Gouuernement n’a nul port fur la mer du Nord, pource que les dernieres limi- tes d’icelui n’en approchent pas plus près que de quarante lieues : toutesfois les mar- chandifes de l’Eutope fe tranfportent par le Golfe Bolce^commç, ils l’appellent, du fond de la Baye de iufques a vne place qui eft au dedans du pars, qu ils nomment Fl fuerto de Golfo Dolce, delà par terre à la ville de .S. lago de Guaùmala & autres villes de ce Gouuernement. Enfin à douze lieues de la ville de S. lago auprès du chemin qui va à la Nouuelle Efa- , ^«^fe voit le lac ayant dix lieues de circuit, & quatre de large,duquel on ne 5 a peut trouuer le fond. Voila ce que nous auions à dire du Gouuernement de Guatimala, ; \ H O N D V R E. C H A P. XV. Limites du Gouuetnement de Honàmc, qualités de fin aïr 0*defk terre. L A Prouince& Gouuernement de comme elle eft appellce communé- ment des Efpagnolsja pour limites vers l’Orient la Prouirice TaguzcalpaiC^xxo. .. les Efpagnols nomment auiourd’hui laNeuua Efremadurai vers le Sud-eft A/’- caragua & fa ville Segouia ,• du cofté du Sud & Sud-oueft les Prouinces du Gouuernc- ■ ment de Guatimala àl’Occident la Veragaz. & le Golfe Dolce} & vers leNordlamer du . Nord. Elle a de long fuiuant la cofte de la mefme mer cent & cinquante lieues entre l’Eft & l’Oueft î de large vn peu plus ou moins de quatre vingts, depuis ladite mer iuf- - ques aux Prouinces qui font lauees de la mer du Le terroir de cette Prouince ou fe drefle en hautes montagnes, ou s’enfonce en val- lées deledables & fertiles, lefquellcs eftoyent au temps pafTé fort peuplees de Sauua- ges, maintenant à caufedes guerres inteftines & tueries mutuelles, elles en font fort desfournies : il s’y voit peu de plaines. La terre nyeft pas feulement fertile en ( qu’on y feme & recueille , comme on dit , trois fois 1 an , comme aufti les pois ) mais yo aufîi en froment , & eft fort propre pour y paiftre du beftail. Il y a des mines d or & d’argent non encores defcouuertes , que les naturels ignoroyent anciennement ou les negligeoyent. Enfin elle abonde en toute fortede viures, fur tout en miel & cire. Or cette région porte grande quantité de groftes & fort belles courges, lefquelles ceux qui defcouurirent les premiers la cofte de ce tte Prouince, voyans floter fur l’eau, ■ nommèrent cette mer Golfo de Hibueras & le païs mefme Prouince de Hibuerai ( car les Infulaires OCCIDENTALES. LIVRE VIL Infulaires de 1‘ Hijpanio le nomment les courges Hibueras: ( mais du depuis pour la pro- fondeur de la mer auprès du principal Cap de cetceProuince,on donna le nom à la Prouince de Hondure-^o^m lui dure encore auiourd’hui le premier eftant abol% La principale riuiere de cette Prouince fe nomme Haguarod^2,o^eV^e paffe aâfes près de la ville de T ruxillo ygtTmàe & deledlable : furl’vn & l’autre bord d’icelle il y a plu- iicurs bourgades j les champs defquels font fort bien cultiucs ; pource qu’on les peut commodément arroufer de la riuiere. Les autres riuieres font plus petites, l’vnedef- quelles les Saunages appellent chamaluconiConle auprès Commyagua, & trauerfe le le territoire de S. Pedro : l’autre nommce laquelle ayant couru vingt lieues le long I O de fort agréables riuages & par vn terroir bien cultiué & peuplé, defcend en la mer du Nord. Or toutes les riuieres de cette Prouince furmontent leurs bords à certaines fai- fons de rannee,& s’efpandent fur les champs voifins,& par ce moyen arroufeht & en- graillent non feulement les prairies, mais aulîiles verger, s & iardins : ce quiacouftume d’arriuer le plus louuent enuiron la fefte de S. François ou de S. Michel. Les anciens habitansde ces régions fouïlToyent la terre auecdes pieux de bois, re- courbés defl'us & delTous , afin qu’ils peulTent plus aifemcnt trauailler des piés &des mains: toutesfois ils femoyent efcharcemêt,f carcette nation eftoit merueilieufement parell'eufe ) voila pourquoi ils auoyentfouuent faim , ou fe remplilToyent de diuerfes racines, &: de toutes fortes d’animaux, mefmes des plus immondes : En leurs banquets 10 ils beuuoyent iufques à s’enyurer d’vne certaine forte de Melicrat , ô£ fe poluoyent eftans yures de pluficurs mefchancetés & abominables vices : iln’eftoit permis pour lors qu’aux principaux d’vfer de boilTon de Cacao , maintenant ils en boiuent tous in- différemment: Etontappris parlacouftumedesElpagnols à viure plus ciuilement 5c plus proprement, mefme à s’abftenirde ces énormes péchés. Iis vfoyent de diuers langages, toutesfois celles des Chontales eftoit commune entr’eux,qui eftoit vne nation beftiale ôc de mœurs fort inciuiles: ils diuifoyent leur an en dix huid mois, qu’ils ap- pelloyent en leur langue loalar y::omme qui diroit vne chofe mobile & qui paffejôc don- noyent à chaque mois vingt iours,combien qu’ils les diftinguoyent par nuids , ce qui eft auiourd’hui fort familier aux Anglois 6c à quelques autres nations de l’Europe : ils 5 O commençoyent leur an quarante iours deuant lenoftre, de forte que le premier iour de leur troifieme mois tomboit au premier de noftre lanuier. Barthelemi de las C^/^Euefque de en facomplainte qu’il faità l’Empereur Charles-le-Quint, déploré amerement,déux millions de perfonnes que les Efpagnols ontdeftruites en ces Prouinces en peu d’anneès,de maniéré qu’on trouuepourleiour- d’hui fort peu de naturels en ces grandes 6c agréables Prouinces ; ceux qui font de ré- fte,fontprefque tous tributaires aux Efpagnols, aufquels ils payent leur taille en man- teaux de coton, miel qu’ils tirent des troncs des arbres 6c de la terre, en Chili ou Axi 6c en Bâtâtes. Cette Prouince a auiourd’hui fon Euefque; quatre villes des Efpagnols, deux bourgades, defquelles nous traiterons par ordre. C H A P. XVÎ. Villes du Gouuernement de Hondure, V alledolid, Gracias à Dios,S. Pedro. La principale ville de ce Gouuernement eft Valledolid)( que les Sauuages nom- ment en leur langage Commyagua ) diftante de S.Iago deGuatimala de quarante lieues vers leLeuant, 6c enuiron quarante delà coftede la mer du Nord, voila pourquoi ie ne puis aflesm’eftonner, que la met fur le xvii degré de hau- teur vers le Nordjveu qu’il ne place le port de ville maritimc,que fur le x v de la mefme hauteur. Or elle eft fituee dans vne belle 6c agréable vallee; fous vn tempera- 5 0 ment d’vn aïr temperé 6c fort fain:les campagnes font couuertes de troupeaux de bre- bis 6c de vaches, qui y prennent vnmerueilleux accroiffement :on a trouué dans fon. territoire de fort riches mines d’argent.Dans icelle font ordinairement leur refidence le Gonuerneur de la Prouince,le Receueur du Roi,6c les autres Officiers royaux : on y tranfporte aufli les métaux qui fe tirent es Prouinces voifines pour y eftre fondus. L’Eglife Cathédrale 6c le Domicile de l’Euefque y a efté transféré de Truxillo l’an . cId Î3 Lviii:EtpourlafinilyvnConuent deMoynes^(? K k Frami/ce ijS DESCRIPTION DES ÎNDÉS Francifcû de Monteio Gouuerneur de cette Prouince lanelD Id xxxix fit meiief par fon Lieutenant C^mmvne Colonie dans la bourgade S. Marie dé Commyagm,m.citè par l’opportunité du lieu ; car de cette bourgade on contoit douze lieues dèicbenïin fort aifé &: propre pour les charriots iufques à vn certain village de Sauuages’,aupres duquel pafToit vne riuierequi portoitdes canoas iufques au port de Cauallos i de maniéré que cette bourgade n eftoit qu’à vingt fix lieues de chacune des mers d’vn cofté &: d’autre. Le fît d’icelle fut trouué fi commode que les habitans don- nèrent à entendre au Roi d'Efpagne,que ce lieu eftoit fort propre pour exercer le commerce de l’vne à l’autre mer , auec vne grande facilité & vtiiité ; car la nauigation feroit plus aifee de quelque port de la mer du Zudy & le paflage plus court à Lima Me- 1 o tropolitaine du Peru , que de Panama ; qu’au refte ce deftroit de terre entre le Nombre de Bios Panama eftoit tenu pour mal iàin aux voyageurs & mefine funefte à plufîeurs, ceftui- ci au contraire eftoit d’vn aïr fort fain , le terroir y eftoit, fertile & abondant en toutes fortes de viures & fort propre aux voyageurs 5 veu qu’il eftoit fertile en froment , & ne portoit pas mal les vignes; tres-bon pour les troupeaux à caufe des pafquis veftus de belles herbes & arroufees de plufîeurs torrens; & enfin ce qui eftoit le principal qu’il y auoit grande apparence d’y auoir de tres-riches mines d’or; que cette bourgade fituee en vne deleélable vallee de quatre lieues de large, eftoit abondante en toute for- te de fruiéts de terre ; & exceiloit en venaifon de cerfs , connils & autres tels animaux. Voila deqvioi ils fo vêtoyent- Affés proche de ce lieu la ville àcValledolidïnt apres baftie, 2,0 comme il eft vrai fomblable;entre les deux mers, qu’on dicn’eftrefeparees l’vne dcl’au- tre que de î,iîi lieues en cet endroit làjàfçauoir du port deC^^^/Ztfjàlabaye àé.Ponfecai Cette perfuafion des precedents & fans doute de ces nouueaux incita le Roi Phi- lippe de donner charge ^leanBaptiJîe ,.^»^«»»^/i,tres-expertGeometrien &Fortifica- teur.devifîterla fîtuation des ,lieux,&ia commodité des chemins,qui ayant foigneufe- ment vifîté &meurement pefé le tout, rapportai qu’il y auoit plus d’empefehement à cet affaire , qu’on ne s’eftoit venté , par ainfi ondefifta de délibérer dauantage fur ce liouueau chemin. La fécondé ville de ce Go.uueiT^^^c^f appellee Gracias à i>/W,eft diftante de VaUedo- lid de trente lieues prefque vers rOueft;eUe fut baftie l’an cloloxxx parleCapitaine 5 o Gabriel de Roy as, defendre les mineurs,qui trauailloyent les mines d’or de ce quar- tier ; mais comme ne fe voyant pas alTés fort pour fouftenir les continuelles & inopi- nées excurfîons des Saunages voifîns ,& n’eftant pas fecouru comme il deuoit des Gouuerneurs de la Hondure & de NicaraguaÿX l’abandonna derechef; OrcIolDxxxvi elle commença d’eftre derechef reftauree par Gonfalo de AluaradolEWe. eft baftie fur vn coftau fort rude: Les habitans s’employent àcultiuer les champs & à femerdu fro- ment; auec grand trauail pourla dureté du terroir. Ils y efleuent force mulets , auec lefquels ils tranfportént leur blé à la ville de S. Saluador & autres lieux voifîns 5 ils n’ont • auffi faute de fort bons cheuaux. Latroifîeme ville eft appellee du nom de S. Pedro, auffi à trente lieues delà ville de 40 Valledolid vers le Nord ou pluftoft Nord-oueft ; & à onze du port de Cauallos ; & pour- ce que le port de Cauallos eft fort mal fain, les Officiers qui reçoiuent les tributs & im- pofts du Roi, ont couftume pour le plus fouuent d’y demeurer, & quand il faut congé- dier les nauires ils vont au portrMais Herr. dit ailleurs(ie ne fçai s’il fe fouuient bien de foi)que ce lieu eft auffi valétudinaire, comme eftant fort chaud & mal fain:neantmoins il eft affés euident que cette ville a efté fort marchande; iufques à ce qu’on ait cognu l’opportunité de Golfo Bolce,cyyxï lui ofte maintenant beaucoup defonluftre. C H A P. XVIL des Villes de ce Gomernement de Hondure, Fort de Cauallos, Truxillo 6^ S. lorge. Le Ponde Cauallos eft fîtué fur la hauteur de quinze degrés vers le Nord , com- me le met onze lieues de -S. quarante de Valledolid'. 'd y a eu au- tresfois vne ville, laquelle pour l’opportunité & grandeur du port, qu’y fait vne baye,eftoithabiteedeMarchands & deNegres;cÔbien que le lieu fuft fort mal fain aux habitans>comme ie trouue que plufîeurs ont efcrits.Leport auoit efté ainfî nommé des . cheuaux. OCCIDENTALES. LIVRE VIL chenaux, qui en vue grande tenipefte furent iettés en la mer par les mariniers. La vallee de iVÆr^;(de laquelle nous auons fait défia quelque mention) efi: efloignec de ce port au dedans du pais de dix huid lieues ; Prouince riche en métaux, & grandement peu- plée : car comme dit , c’eft vn quartier le meilleur de tout ce Gouuernement, d’vn terroir plat & fertile , ceint de toutes parts de montagnes , où les chemins font larges, les champs verdoyans , bigarrés dyne belle variété de fleurs ; & fort femblable à la Valence d’Eipagne en beauté abondance de fruids. En outre pource que cette ville de Caudlos^Moix. efté plufieurs fois prife &:pillee pardiuerfes nations, notamment parles Anglois, premièrement l’an cIdIdIoxci fous la conduite de chriftofle New- io^ort,<\m la pilla entièrement, emportant delà de fort riches defpoüilles, combien qu’vn peu auparauant quatre nauires en eftoyent parties chargées de riches marchan- difes; Or elle contenoit pour lors deux cents maifons, comme lui mefme a laifTé par eferit: Secondement l’an cId Id xevifous le commandement du Cheualiery^;?//??^- ne Sherlei^qni fe plaint d’auoir trouué ce lieu le plus panure & miferable de toute l’A- merique. Les calamités fi frequentes à cette ville firent, ('fiirtoutpourcequele port n’eftoit pas afléuré contre les inuafions de l’ennemi, mefme eftoit de telle nature qu’on le pouuoit difficilement fortifier j qu’elle fut à la fin abandonnée, & que les ha- bitans furent tranfportés par Alfonfe Criado de CaJiilla,Vïe.ü.à&ntm Parlement de Gua- timaUi à Amatique dix huid lieues du port de Cauallos : où auiourd’hui eft la ville 2 0 de i". Thomas de Cafiille , extrêmement bien fortifiée, à l’encontre des incurfions de l’ennemi. Truxilloç.Qc vue ville afles renommée, elle efi; diflante de celle de Valledolid de foi- xante lieues vers le Nord, à quarante du port de Câuallosy^xs l’Eft, & à vne delà mer du Nord; elleavn port au fond d’vne baye fortaflfeuré à l’encontre de l’incertitude des vents,nommé Sant Gil. Elle efl: baftie fur vne tertre , entre deux riuieres claires &: poifTonneufes ; & dans vne contrée temperee efté & hiuer. Le terroir d’alentour eft fertile en froment & abondant en brebis & tout autres choies: il f a quantité de miel & de cire : le beftail y profite fort, de forte qu’on dit que les vaches furpaffent en gran- ♦ deur & bonté celles d’Efpagne. Les vignes y portent deux fois l’an , car apres qu’on a 5 0 vendangé on les retaille auffi toft,& reiettent , & les féconds fruids font meurs autour deNoël : enfinles arbres eftrangers,comme orangers, limonniers & femblablesypor- tent des fruids excellents. Cette ville fut furprife par les Anglois l’an c I d I d l x x vi. Et fut derechef attaquée par eux-mefmes l’an cIdIdxcvi fous la conduite d'Anthoine Sherlei & William é^r,'maiscefutenvain,pourceque les fentinelles donnèrent l’alarme à la ville: Or cette place,comme ils tefmoignent, eft tellement forte de nature, qu’elle ne peut pas aifement eftreprifepar force,car elle eftaffife fur vn tertre, droit & coupé de tous co- ftés,femblablement enuironné d’efpais bocages,où il n’y a nul paffage pour approcher la ville , excepté vn fentier fort droit & eftroit, au deuant duquel il y a vne porte affés 40 forte &: bien munie : de maniéré que fi on ne furprend les fentinelles, il n’y a point de moyen de prendre la ville autrement. À douze lieues de cette ville eft fituee la vallee Xuticalpa , pleine de torrens , où il fe trouuoit de l’or anciennement, par ainfi elle fut munie d’vn chafteaupar les Elpagnols l’an cl D 1d xxx à l’en contre les courfes des Sauuages. La bourgade de S. lorge d'olancho, eft à quarante lieues de Valledolid vers l’Eft ; elle eft hàbitee d’enuiron quarante Efpagnols;ilya enfon territoire feize mille Sauuages tributaires : on y a trouué autres fois force or principalement dans lariuiere à^Guaya-^ /»^,qui paflTe à douze lieues de ce bourg. Or la vallee 0/4»r^à feizelieues de à vingt & quatre de Zeja/e/û. LaProuince dans laquelle elle eft afiifès appelloitautresfois des Sauuages Ne^uecheri. Francijco Hernandez, d^ Coydua y a fait baftirvn magnifique temple &:vne forterelTe à l’encontre des Saunages. Or cette ville eft fituee dans vn agieable & fertile terroirj& feconden cannes de lucre j qui fait I O Elpagnols y ont quelques moulinsjqu’ils nomment Ingenios.Ki^Qs 'çïoçbe. delà villeily a vnpetit lac,nommédes Lindiri^ lequel le defcharge dans le grand. Eta deux lieuè's d icelui & a lept de là ville s’efleue fort haut yn grand /^^/f4^npi,Tirnê c;i/««2^4f/^tf,dontlefommec eft couuert d arbres , notamment de fruidiers, defquels toute cette Prouinéeeftmerueilleulcment abondante, entre lelquels font renomn;iés les ZapotesyPlantanos èë Znonesi^ kï tous ces fruids de méfiés d’vn fort agréable gouft, des cerifes defquels les Indiens font du vin, & les Efpagnols du vinaigre. Il y a grande quantité de Sauuagine & vne grande commodité pour chaffer. La troifieme ville cd Segouia a. ztç.ii\ze. lieues dePvne & de l’aurre des precedentes vers le Nord,en vne contrée fort riche en veines d’or, lo La quatrième eft a trente lieues de la mer duNord,fur l’emboucheuredu lac de iV/V4r^^»<^,par laquelle le longd vn long & eftroit canal à la façon d’vneriuiere , il deL charge fes eaux dans la mer ; elle eft nommeeÆ/ dejaguadero des Efpagnols , qui tran f- porterit les marchandifes de l’Europe , qu’ils ont efté quérir à Porto helloy le long de ce canal a cette ville & lieux voifins. Enfin la bourgade de Rejaleio , à vne lieuè du port qu on appelle deld Pojjèjponibi a vingt & quatre de Granadaî elle eft colloquee par les Efpagnols fiir la hauteur d onze degrés & demi , mais par les Anglois qui îiauigerent ■a\xQcCa?tdiJchauto\xz delà terre, fur cellede douze degrés ^quarante fçrupules,pour- ùeu que Rio comme ils efcriuent, foitle mefme lieu que Rejaleio. Il n'y derneure prefque quedes mariniers , des charpentiers & autres ouuriersde nauires; car outré JO que le port eft fort afreure,on peut aifement couper du bois fort propre pour faire des nauires,& fl le peut-on amener fur le riuage prefque fans nulle peine. C H A P. XXL Cours de U cojîe ^Haufes Ports La cofte marine dé ce Gouuernement fur la mer du N ord , prend fbn commeri-> cernent des la riuiere Tare^c^zii lafepare de laProuince de Hondure)Coziiïnç.vio\is auons dit ci-deffus. Suit apres verslemefinetraiétde vent la riuiere Tar€pa,'^\xis le port S, luan ( ainfi nomment-ils 1 emifïaire du grand lac de ispicaraguai par lequel il }.o fedefchaigeenlamer ja 1 emboucheure duquel il y a vne petite Ifle : &par apres plu- fleurs riuieres qu elles a de communes auec la Prouince de Cofta i?/V^.Lors queles Rois deCaftille eftoyent en fî grande folicitudepourtrouuer, auant la defcouuerture dii d Pdzoïz^at Magellan , vne place commode pour tranfporterles marchandifes dVne mer a 1 autre , on eut fur tout efgarda cet emifïaire , aidans à cela les Efpagnols qui auoyentefte places dans laProuincedeiV^V^;'^^/!?^ l’an clolo xxxiv, àcaufèdefon canal fort large, aufîî grand qu eft la riuiere de Setülle, & pour l’abondance du peuplé de diuerfes nations habitant le long de fes riuages, enfin pour le terroir fertile&abon- dant en toutes chofès necefîaires ; mais 1 expérience monftra que leur confèil n’eftoit pas bon. O Sur la mer du Zud, outre le port de Rejaleio , duquel nous auôtis fait mention ci-def- fus,il y a celui de S. lago & peu apres celui de 2Sljcoya, ( qui eft vne particulière Prouin- de Ntcara^ùay d vn terroir fort agréable & fertile) lequel les Sauuages appelloyent en leur langue chira & les Efpagnols au temps paffé de S, Lucas : c cdwic baye fort fpacieufe ayant de circuit vingt lieues j qui contient en fbn fein plufieurs Ifles. Delà on rencontre vne autre baye nommee des Salines, dans laquelle eft le port Paro , vis à vis dcNicoya. Par apres la cofte s auançant en mer, fait premièrement la pointe de S. Lazare description des INDES 5 peu âpres le Cap de ^wV^: De ceftui-ci vers l’Eft s’eftendentle long de là Continente les Ifles de de Marthe, Coboya &c Zebaco iufques aux limites Mes àcZebaco , car il femble qu elles font ainfi appellees des Efpagnols d’vn nom commun, qui font au nombre de trente comme on dit, tant grandes que pe- tites, font à enuiron foixante lieues de vers 1 Oueftj elles eftoyentautresfois pS A^giois fait mention du Cap Bhnc , fur la hauteur de dix degrés & autant de Icrnpuîes vers le Nord, &: difpofe le cours de cette cofte en cette maniéré. Du Cap Bknc^n port de F^/fihuia milles entre leNord-eft & le Sud-ouefl: : ^ Du Port de Veles auPort de lean dix fept milles entre le Süd-eft & le Nord-oueft. > Du Port de S. iufques à Rio Lexo quarante milles. ^ , r , f Le vaillant Cheualier François Drac fait mention de l’Me Cano ( ou ayant deicharge fon nauire,il le tira fur le fec & le racommoda ) fur la hauteur de huiddegresversle Nord de laiigne,à deux lieues de la Continente de 'Nycdragua, il y a vn port tort com- mode qui a cinq braffes de profond pretque au bord du riuage. COSTA RICA. C H A Pà XX IL £0 timm de Co^2LKic2.,Viüesp autres chofes'. Item laPromhcedeUico^^. La Prouince & Gouuernement de Cop Rica a fes limites vers l’Oucft, comme auffi vers le Nord Nicaragua, à.M cofte de 1 Eft Veragua,^A vn cofte & d autre vers le Nord & le Sud, elle eft barree de la mer : Elle a de long ( h le conte iHerrera ne le trompe en cet endroit ) nonante lieues depuis les dernieres limites de Nicaragua vers l’Eft, iufques à Veragua : & de large iamais plus de quarante ou cinquante.: Le ter- roir y eft fertile, & n eft deftitué de mines d’or & d’argent , comme les Efpagnols fe le perfuadent par diuersindices. Il y a feulement trois tant villes que bourgades habitées par les Efpagnols en cette Prouince : la première defquelies eft Araniuez, qui eft repu- j o t^ee cftre du territoire dcNicoya, furies limites des Sauuages appelles & leparc feulement de cinq lieues de leurs principales bourgades , & vn peu moins delà mer L’autre eft la ville de Cartagoà quarante lieues de Nicoya, à vingt de la mer du Zuâ, & çomme au milieu entre byme & l’autre mer , de forte quelle a vn port fur chacune ^ ^La troifieme eft appelîee Caflro la quelle Herrerâ a marquée fur fes Chartes Géographiques , fans qu’il en fafte aucune mention en fa defeription ou fort légère ailleurs. ^ ^ ^ o.t, Entre les limites àe Nicaragua & de Cofta Rica eft fituee Nicoya, 2. quarante & huiét 40 lieues de la ville de Granada,\e long de la mer du Zud,e\\e eft regie par le Lieutenant du Gouuerneur de Nicaragua. Au refte dans le territoire de cette ville & dans le reflorc de la Prouince àeNicoya>comme aüffi dans l’Ifle C^w,qui eft à hmd heuës de la terre ferme de Nicoya,l\2i iurididion de laquelle elle eft fuiette , il y a pour le iourd’hui plu- lieurs Sauuages de refte qui font tributaires au Roi d’Efpagne. Anciennement ce quar- tier eftoit fous le Parlement de Pamma,vs\2.is il fut adioint lanclolo Lxxvia CojtaRi- combien qu’il y air vn Lieutenant de Nicaragua pour le temporel, & vnVicaire ÿ 1 E- uefque de Nicaragua çomEcdeüzAiqne. Elle avn petitport fur la mer ânZud. Mrui- ; ron ces lieux il y a eu anciennement vue Colonie d’Efpagnoîs nommee Bruxe/k,cim doit auoirefté par apres abandonnée, car il n’en refte maintenant aucunes marques. Il y en a & entre iceuxZtf^^^sF^^ Portugais, qui afteurent quelaPiouincede Rica eft vn pais montueux,vafte & defert : que fi cela eft, elle a efte mal nommee. u refte elle a vne baye fur la mer du Zud nommee de 5. Hierofme ,• & encore vne autre ap- pellee vulgairement de C^r4^4r^,fur les limites de Feragua.^ Et fur hmer du Zud outm le port de Nicoya, elle à diuerfes Bayes , Caps & Mes depuis le Cap Bianc iniques a a pointe de Borica & plus outre , defquels nous auons fait mention au ^ y?' OCCIDENTALES. V E R A G V A. C H A P. XXIII. Limites du Gouuernement de V eragua, qualités de fin aïr de fa terre , namgations de ColumB 'vers tcelui. La Prouince AcVeragaa qui eftladerniere vers l’Eft du Gouuernement & Parle- ment de GmtimaUiZ pour limites vers l’Oueft Cojla Rica, vers l’Eft le Parlement àc Panama. Elle eft lauee d’vncofté & d’autre de la mer ,& fa cofte Septentrio- nale attouche enuiron le dixième degré de la hauteur duPole du Nord.Elle a cinquan- te lieues de long entre rEft& l’Oueft, &: de large entre le Nord & le Sud vingt cinq, où elle eft plus eftroite. Son terroir eftpourla plus grande partiçmontucux,& prefque impénétrable à cau- fe des bois elpais & de la quantité de hauiers & buiftons , desfournie de pafturage , 6^ par ce moyen fort mal propre pour y nourrir du beftaii: & ne porte ni froment ni orge, mais il eft aucunement fertile en comme auffien falades & herbes potagères: il eft riche en mines , principalement en celles d’Or, qu’on y tire ci & là , & qu’on amafle és torrens & riuieres. Les Saunages y font belliqueux &: hardis, ennemis pour la pluft 2,0 part des Efpagnols, le iougdefquels ils portent impatiemment. chrifiofle Columh defcouurit le premier cette région l’an cId lo ii , retournant du Cap Gracias à Bios de la Prouince de Hondure vers l’Eft; &defcendit premièrement dans rifle de j-^/^/>/,couuerte d’herbe & d’arbres; delà il trauerfa parvne lieue de paflageàla Continente où il trouua les Saunages aflfés courtois' de mœurs ciuiles ; la terre fe dreifoit en de fort belles montagnes & colines agréables , couuerte de toutes parts de beaux bois efpaisj&arroufee de claires riuieres. Ce village Cariari eftoit fitué fur le-bord d’vne riuiere ; & fort peuplé de Sauuages ; qui accourans à leur rencontre auec arcs, fléchés & des efpees de bois, s’efforcèrent quelque temps de chafferles Efpagnols de leur contrée, mais eftans enfin appaiféspar quelques petits 3 O prefentSjils les receürent & traitèrent auec eux.Delà C^?A^;»^s’auançantplus vers fÈft, il arriua à baye fort ample &:poiflbnneufejquiauoit trois lieues de large Sc fix de long : à fon emboucheure il y auoit des Ifles, & les nauires entrent dedans la baye par quatre canaux eftroits, mais affés profonds, ayans defeendu dans Tvne de ces Ifles, ilsy trouuerent plufieurs canoas :les Sauuages alloyentnuds excepté les femrties,qui couuroyentleurs parties honteufesrils y trouuerent quelques carcans d or, que les Sau- uages changèrent librement pour des fonnettes ; leurs monftrans qu’il s’en trouuoit grande abondance à la prochaine terre ferme. Eftaht parti delà &; ayant legerement vifité en paflant la contrée Aburena , qui ne differoit en rien de la precedente , apres douze lieues de chemin iis entrèrent dans vne riuiere, fort garnie de bourgades de 40 Sauuages fur fes riuages,defquels ils traitèrent quelque peu d’or : delà ils vindreiît a Catîba,ovi vne riuiere fort en mer: & peu apres à Hurira , les habitans de laquelle fai- foyent fi peu de conte d’or,queles Efpagnols en traitèrent nûnante marcs pour trente fix fonnettes, comme iis racontent. Eftant parti il entra dans Cubiga, oixiXnc trouua nui or à changer : Oï Cô- lumh s’auançant vers l’Eft , comme il fut pafle Porto Belo , le vent fe roidit du cofté de l’Eftjquilui fit prendre fon cours vers l’Oueft : par apres ayant efté a la defpour- ucué furpris d’vne horrible tempefte de l’Oueft , & agité d’icelle neuf iours con- tinus , il fe trouua en grand péril, pour laquelle caufe il nomma toute cette cofte Cojiadelos Contrajles. Enfin au commencement de lanuier de l’an cId Id iii, ilren- 50 contra vne riuiere , appellee des Sauuages Tebra,c\\x’i\ nomma Belen: a vne lieue de cette-ci,il y en auoit vne autre, que les Indiens nommoyent Feragua nom de laquel- le demeura puis apres à la Prouince. Les Sauuages qui demeuroyent fur l’Xebra,‘Æo\x~ royent qu’il y auoit grande quantité d’or dans Veraguai mais ayans fonde 1 embou- cheure de l’vne &: de l’autre riuiere, ils trouuerent pour le mieux d’entrer dans Bekn,\o canal de laquelle eftoit plus profond. T oucesfois Colimh enuoya fon freré pour vifiter Verama ; qui ayant monté la riuiere auec fa chaloupe,vint au village du Roi ^ibia, &: L 1 traita DESCRIPTION DES INDES traita beaucoup d’or pour des marchandifes de l’Europe de peu de valeur. Or le x xi v delanuierla nuieredeF^f/e» s’enfla de telle forte E promptement, que les nauiresfe trouuerent en grand danger, & peu s’en falut qu elles ne periflent. Ce déluge d’eaux fembloit defeendre des montagnes,qui paroiffentau deflus de Feragua fl hautes qu’on lesvoitdevingtiieuës de long, ils leurs donnèrent le nom de i’. Ce danger eftant palTé, Columh enuoya derechef fon frere vers lequel le mena aux mines de Fr/>^,qui eftoyent fl riches qu’ils amafferent par tout des paillettes d’or entre les ra- cines des arbres, defqueîs le pais eft tout couuertnufques à icelles va vne riuiere de mef- me nom, laquelle fort en la mer du Nord à flx oulept lieues de celle de BelenvQTsYO\x- eft ; Or les mines de Feragua eftoyent plus proches, comme ils trouuerent puis apres. * ® Columh alléché par cette abondance d’or , choiflt vne place pour vne Colonie fur les bords de la riuiere proche defonemboucheure,&auoitdefla commencé de la fortifier, quand les pîuyes finiflans, le canal de la riuiere fut tout à coup fait fi petit,que lesnauiresn’enpouuoyent fortir 5 &fut contraint de demeurer là iufques à ce que la riuiere fuft derechef remplie par le retour des pluyes ; par ainfi voyant que fes gens s’y pouuoyent difficilement nourrir,il les remmena tous, combien qu’à regret. C H A P. XXIV. Villes & Bourgades des E^fagnols en la Brouince de Veragua, cofie marine Ijles adiacentes. Le s Efpagnoîs ont mené quelques Colonies y a ia long temps dans la Prouince de F ♦ DESCRIPTION DES INDES OCCIDENTALESi LIVRE H V I C T I E M E. TERRE FERME. INTRODVGTION. Om auom ci-dejfm dmisétoMe la Continente de t Amérique en deux parties, Cyne defqueÜes nous auons appelle Septefitrionak, ^ l autre Méridionale ; Or elles font conïoinCîes par yn efiroit efface de terres en laquelle font fituees deux des plus célébrés yilles des Espagnols , d [çauoir Panamajei^ au temps pafé^omhïç, de Dios, maintenant Porto Belo. Ear ainfi auant que nous commencions la defiription de t Amérique Méridionale, il nous faudra douant toutes chofès acheuer la defiription de cet îfihme ^ de la Prouince qui le contient, laquelle eB auiourdhm yulgairement dite Panama , 0* d'yn nom commun par les E^pagnols Terre Fel:me:Or anciennement elle efioit appela ^ ° /^’^Caftilla del OiofieH adiré, Cafliüe don maïs pourcequela Caftilla dei Ofo a filment changé de limites, il eü yenu delà quelque ôbfiurké és Commentaires des theurs du fiecle precedent, laquelle nous efilaircirons ici en paffant. ' Van cl D lo viii ' ce Gouuernement fut concédé à Diego de Niqueza, pour le conquefterO* lo tenir ^ fous le nom de Caftilla del Oro ; lequel efioit enfermé entre ces limites, a/ers l'Orient ilefloit borné de la nue Occidentale de la D arien au dedans du golfe de Vrabaj du cofté de l’Occident du Cap Gracias à Dios dernier y ers l'Orient de la Prouince de Hondure -, au Nordil efioit barré par la mer du Nord ( car ï autre n’ efioit point enco-- re cognuéi ) plus outre dés l'autre riue de la riukre Darien yers ÏEB iufques au Cap de la Vêla, cette partie de Continente efioit àppellee du nom de Nouuelle Andalu- zie. Maü les limites de la Caftilla del Oro ayant aufji toÜ efié changées, furent re- tranchées yers t Occident, & yers l'Orient auancees au delà des bornes de la Nouuelle Andaluzie: Enfin le nom de Caftilla del Qro fit du tout aboli, changé de celui de P anama., apres que la mer duTLwàeutefiédeficoùuerte :ce quHl nous a faludirë hriefuement,pource qu’auiourd'hui le nom de Caftilla delOro s'efiend fort loin en plu- fieurs Chartes Géographiques, me fines iufipues aux Prouinces qui nont iamaù efiécom- prifis fius icelle : de peur que fi nous nous en fit filons teus du tout, il ne femblaïi que nous l'eujfions ohmifi par ignorance. Au refie en defiriuant l'Amérique Méridio- nale, nous nous fommes proposé de fiuiure cet ordre : ayant premièrement aèheué cet Ifihme deVa.na.ma., nous lut adtumdrons les Prouinces yotfines îfi contigueesyers le Leuant^qui font Cartagene,S, Marcha,^ làRiuiere de la Waçàia, laquelle partie Lis, de 268 description des INDES de Continents yfource quafres les Ifles, elle fat la première defeomerte^fat appeÜee des E^fagnols comme elle hH encore aMoard'hui^TcïmVivma^c’eft à Terre Fer- me j cela fera le faiet de ce Liare: par apres mm pourjàmrom à defirire quelques Promnces qui font plus au dedans dupais yoifines des precedentes ^comme Nouueau Royaume de Granade 0* Popaian , 0 quand elles nous auront ramené â la mer du Zud , nous fuiurons toutes ces Promnces qui se fendent le long de cette mer, f Ion l'ordre de leur ptuationfufques auDeflroit de Magallan j 0 t ayant faiui 0 yifté en pajfant les terres qui fini au Sud diceluî, nous courrons de mejme la mer Atlanti- j q que,cy defirirons fumant lamefineordrey les Prouinces quiîattouchenî,fauoir Rio de la PÎata,le Brafil, toute la Sauuage, Paria, Cumana, Venezuela, re^ tournerons par yn grand circuit â la nmere de la Hacha , ou nous mettrons fin. à cet œuure^ PANAMA. C H A P. I. P ‘Parlement ou Keffort Juridique de Panama: fs Imites, nature de zo fn aïr 0 de fà terre , particulières Prouinces. E Parlement ou Confeilluridiq; de Panama ncik pas contenu entre de fort amples limites, poürcequç les luges d’icelui font feulement eftablis pour deipefeher les flotes5& faire droit aux Marchands : il y a donc dé longueur entre l’Eft & l’Oueft enuiron nouante lieues, & a pour borne vers le Leuant les Gouuerne- ments de Cartagene & de Popaian , au Couchant le Chafteau de Yeragua : Et de large où il eft le plus fpa- 5 o cieux entre les deux mers foixantelieuè's, mais où il eft le plus eftroit entre la ville de Panama Porto JBelo feulement dix huid: & ce encore félon la fuite du chemin,quiy eft fort difficile & tortu ; car fi lamefti- re eftoit prife félon le Ciel, à peine y auroit-il fept ou huid lieues dVne mer à l’autre, comme il a efté obferué par AcoJldySc comme le prouue la hauteur des lieux. Son terroir eft pour la plus grande partie montueux& rude; où il eft yn peu bas, il eft empefehé de beaucoup de marais & de profonde fange; le Ciel y eft le plus fou- uent couuert, humide & fort ardant : & mal fain outre mefure, principalement depuis May iufques enNouembre : toutesfois l’air y eft aucunement efuenté & corrigé des qo Vents de la mer, & au contraire eft rendu plus pefant & mal fain par ceux de terre. De- puis le mois de lulliet iufques en Nouembre,il y pleut continuellement,tonne & efclai- re,& ce temps eft leur hiuer. La terre y eft infertile &: defpourueuë depluheurscho- fes ; car elle ne produit que du May s y encore efcharcement ; elle eft meilleure pour les beftes , notamment pour les vaches à caufe de la quantité & bonté de pafturage. IL y auoit anciennement de fort grands troupeaux de pourceaux, que les Sauuages chaf- foyent dans leurs rets, apres auoir mis le feu dans les herbes , qui y croiflent d’vneex- . treme hauteur; auiourd hui il y en a peu,de forte que les Efpagnols fe plaignent de leur petit nombre & de la cherté du lard. Les Sauuages compoibyenr leurs rets deVhethe Nequen ou Henechen, comme Voip- ja pelle Omedoycpai l’a deferit en cette façon : Cahuia ( dit-il ) eft vne herbe qui porte des fueilles femblables au chardon ou à l’iris , mais elles fonf plus larges , plus e^aiftes &: plus verdes : Et le Henechen eft vne autre herbe ayant auffi les fueilles femblables au chardon, mais plus eftroites & plus longues que celles du Cahuia : deWne & de l’autre de ces herbes, ils en font des cordes & du filet aftés beau &: fort ; mais le fil du Henecheip eft plus fin. Or les Sauuages font rouïf ces herbes fous l’eau des ruiffeaux , comme on , a d^ OCCIDENTALES. LIVRE VIIL 2,^9 û Je coüftuine en l’Europe de faire au lin, par quelques iours; puisles ayant tiré hors, ils les font feiclier au Soleil, les froiflént d’vn ballon tant qu’il n’y demeure que le fml brin, comme au lin ; & enfin les filent ou en tordent des cordes. C’ell vue chofe admi- rable ce que le mefiiie Autlieur raconte, que les Sauuages coupent de ces filets le fer comme d'vne lime, y elpandant du fable fort fin, & tirant & retirant ce fil comme vne fcic; & parce moyen ils en ont coupé non feulementdes chaifnes de fer.mais aùlïi fore fou Lient des anchres. Il y a vne alTés grande quantité d’oifeaux,des faifans,tourtres & femblables. La mer y ell poilî'onneufe,comme aulîi les riuieres,dans lefquelles fe trouue grand nombre de lo CrocodilIes,que les Sauuages nomment C^j)'«2^??(?i',&lesEfpagnolsZ4^4!r^;^ (mais-elles iouïlTent d’vn air plus fain & plus ferainj& n’a efté autres- fois delpourueu d’or. ^ io C<7;»^^reeft proche vers rOueft, de laquelle les plaines & campagnes com- cencent ; L es régions voifines ont cllé anciennement fort peuplées ; & diuifees en pe- tites Seigneuriesdes Elpagnols appelloyentau temps paffé toute cette région iufques à Feruqueten, Cueha : 8>c les Prouinces voifines defquelles les habitans n’obeiiïbyent à nuis Rois,ains viuoyent en communes, Behetrias. Apres Cûmagre Cuiuoit chiame, Coy- ba ài Focorofa,où les Efpagnols ont eu autresfois là bourgade de S. Croix. Vers l’Occident du la ville de Panama , c^ïoit fituee la Prouince chame,^. à fept lieues d’icelle Chtru,\ huidlieuè's de laquelle chEfeoria, riche en Salines j car lamaree croilTanr, elle remplit certains ellangs,dans lefquels l’eau de la mer ell congelee en fel par la chaleur du Soleil. 5 O Nat a fuit Efeoria à fept ouhuid lieuè's de chemiiiipaf upiesTohre & Prouinces montueufes &: bocageufes , où il y a de fort beaux chefiies qui produifent de gros glands : plus outre font Huyjia & Burica,i^ïe(c[ue furies limites de T^caragm.yidùs elles ne font pas toutes fous le Gouuernement de Panama. Enfin à douze lieuè's âLcNata, vers le Nord-ouell,eft la Prouince que le RoiP^râpoiredoit,qui eftoit grand ennemi des Elpagnols, & leur donna en Ibn temps beaucoup d’affaires. Or combien que plu- ' fieurs des noms de ces Prouinces foyent maintenant abolis, & n’elloyent cognus lors que pour noms de Rois, toutesfois ie ne les ai pas voulu palTer fans en faire mention, poiirce que peut-eRre on s’en feruira quelquesfois en quelque lieu. Enoutre la cruauté des E Ipagnols a,il y a ia long temps,deflruit,Ies habitans de ces 40 Prouinces,qui ont ellé en grand nombre,& en a lailTé vn fi petit nombre, qu’il y a au- iourd’hui plus de Negres que d’Ameriquains. Les Efpagnols polTedent en ce Parlement feulement trois villes , fçauoir Panamâ^ Porto Belo & iYàr4!,clefquelles nous parlerons maintenant. C H A P. IL ha Ville de Panama, yâ ptmtion ^ Jes qualités. La Ville de laquelle la Prouince porte le nom , ell alîîle fur leriuagc de la mer du fur neuf degrés de la hauteur du Pôle du Nord, & à quatre vingts & deux de longitude, à conter du Méridien de T oledeNCis l’Ouell, com- me Herrera obferue en fes Commentaires. Son enceinte ell fort petite pour la proxi- mité d’vn eflang, lequel enuiron vne grande partie d’icelle, & qui la rend fort mal laine à caufe des vapeurs qui s’elleuent d’icelui : ioinél que la conllruélion de la ville ell fort mal difpofee,pource que toutes les rues font ellendués del’Ellàl'Ouelljquifait qu’au matin les ardants rayons du Soleil frapent furies allans & venans , fans qu’il y ait au- cune ombrage j ce qui engendre plufieurs maladies & caufe la mort à beaucoup. L1 5 Or ^ 270 t)ES C RIPtlÔN üts INDES . Or encores que Ton ait plufieurs fois efté d’aduis de changer de lieu , neantfmoms elle demeure iufques à maintenant, foit que la commodité du lieu les retienne , ou foit que ceux qui y demeurent auiourd’hui efperent d’y faire peu de feiourj^" par ainfi ne fe fou- cientpas beaucoup de changerrcar plufieurs de fes habitas fontMarchandsjquiayans àcheué leur commerce vont demeurer ailleurs fou bien font foldats qui maintenant font ici, peu apres enuoyés ailleurs en garnifon ; ou pour la fin que la difficulté de ba- ftir en ces lieux-îà leseftonne,&: quelaftruéluredesmaifonsqui yfonteft de grand prix : quoi qu’il en foit , encores que le lieu foit fort mal fain pour fes habitans , néant- moins le grand trafic & la commodité d’y faire fes affaires a rendu cette place fort peu- plée. Car tous les ans les flores du Pem, chile & autres Prouinces voifmes de la mer y i © abordent, chargées d’or & d’argent & autres riches marchandifes ; & s’en retournent delà rechargées de marchandifes de l’Europe , qui y font amenées de la mer du Nord, premièrement parla riuiere puis apres’ par terre, qui fait quelle eft fort mar- chande d vn cofté & d’autre : & mefme comme les Efpagnols difentjon nauige delà en la NomeUe BJpagne.mx Ifles Philippines , &au Royaume de la China & les nauires par- tent de ce port enuiron la fefte de Noël Cette ville contient pour le plus, félon le dire de Herrera , fix cents familles d’Efpagnols, dont la plus grande part s’employe au tra- fic : Les luges royaux & les autres Officiers publics y font leurs demeures ; 11 y a auffi vneEglife Cathédrale, ( l’Euefque de laquelle eft Suffragant de i’Archeuefque de Li- ma ) tr^ois Monafteres, dé Jacobins, de Cordeliers & de Reh’gieux qu’ils appellent de lo la Mercede. Le port de cette ville eft médiocre, combien que lés nauires demeurent à fec à baffe maree,¶infi ilsontdeconftume es mois d’efté d’anchrer eh merj i’hiuer de fe retirer au port de PmV/9,qui eft à deux lieues delà. Proche de là Ville pafle vne riuiere, defeendant des montagnes,qui reçoit plufieurs ruiffeaux & torrens ; fur les bords de laquelle il y a plufieurs cenfes,que les Eipagnols nomment Bjlancias yà2Xis, lefquelles ils nourriffent du beftail, notamment des vaches pour la grande abondance de pafture. Au territoire de la ville il y a plufieurs arbres fruidiers, non feulement de ceux qui font ordinaires en ces régions , comme des Pinnss d’vne fort bonne ktiicnryPlantanoSi Guayaitas, Caymitos .Aguacates & femblables,( defquels nous dirons dauantage ailleurs ) jo mais aulïi de ceux de l’Europe qui y ont efté apportés d’Efpagne, fçauoir oranges, li- mons,citrons & plufieurs autres de telles fortes. Or combien que la terre n’y produife que du Mays , encoje chichement , toutesfois cette ville abonde en toute forte de vi- urcs,qui y font apportés par la mer du Zuâ^ du Peru en grande quantité ; comme auffi d’Efpagneparl’accesaffés facile d’vne mer àl’autre. Les riuieres y font poiffonneu- fes, comme auffi la mer, laquelle eft remplie de poiflbns ( beaucoup differents de ceux de l’Europe) en fi grand nombre que c’eft comme vn miracle: Et auriuageiufques tout proche des murailles de la ville,il fe trouue vne forte de limaçons,en quantité in- finie ( les Sauuages les appellent en toutes les faifons de l’annee,& qu’on peut aifement ramaffer i de forte qu’on leur attribue la caufe de la conftruétion de cette vil- 40 le en ce lieu;car les Efpagnols faifoy ent auffi leur conte anciennement,qu’ils ne crain- droyentpasâifementlafaim,tantqu’ilsauroyent cette forte de viande. Tous les na- turels du lieu font morts y a ia long temps,foit par la cruauté des Efpagnols , ce qui eft grandement croyable, foit par maladies , comme les Efpagnols veulent qu’on croye, combien que cela n’ait pas grande apparence, que laïr foit mai fain aux Sauuagesqui y font accouftumés, comme leur eftant naturel. C H A P. IIÎ. 'ExaBe defeription de Panama par luan Baptifte Aîitonelli , enmyee m Koi dlB^fagne^felon que nous ïauons tiree des Liures de M. Richard Hackiuyt. PAnama ( dit-il ) eft la principale ville de ce Diocefe , diftante de la ville de Nomy hre de Bios àc dix huid lieues ; fituee fur IenuagedelamerduZ’W,àneufdegrés de la ligne vers le Nord. 11 y a trois Monafteres de Moines & vne maifon des Peres de la compagnie de I e s v s : & les luges royaux y ont leur fiege. La ville eft ba- ftie auprès de la mer fur vne baye de fable, de forte qffyn de fes coftés eft batu de la mer mefme. V OCCIDENTALES. LIVRE VIII. 271 mefmc,& l’autre d'vn certain bras de mer qui entre dans la terre ferme mille perches de dix pies de long. Elle a trois cents cinquante maifons bafties de bois; enuiron fix cents Bourgeois ; huift cents foldats en garnifon le plus fouuent,& quatre cents Nè- gres de Guinee,defquelsily en aplufieurs libres.Proche delà il yavne bourgade nom- mée S. Cruzla Real,c]\\i eft toute habitée de Negres libresmommés Simaronesy au nom- bre prcfque de cent, qui font prefque tous e mploy es au feruice de Voftre Maiefté: elle efl: diftante de PÆ»4;»?4d’vne lieue fur les bords d’vneriuiere, à enuiron vne lieue de la mer, vis à vis du port P erico. Or on ne fe doit pas trop fier à ces Negres , pource qu’ils- font infidelles & ennemis , mais il faut foigneufement prendre.garde à ce qu’ils ne I O lacent quelque dommage à la defpourueuë. Il y a en outre trois chemins par terre ( car ie ne dis rien de celui de la mer ) par lef- quels 1 accès efl; ouuert à cette ville, mefme à l’ennemi. Le premier par le Pont de bois qui eft fait au trauers la riuiere: &: de cofté il y a vn marais, qui rêd la ville prefque innac- ceftible de ce cofte la, car la bouc & fange y eft fi profonde qu’on n’y peut marcher: vis à vis court vne riuiere, qui enuironne la ville comme vn fofte : de l’autre cofté s’eftend vn lac ou eftang,rempli d’eau tout l’hiuer & vne bonne partie de refté,de maniéré que la ville peut eftre defendué de ce cofté là auec peu de garde. Le principal danger eft du chemin qui vient de à cette ville, lequel eft plat & defcouucrt d’ar- bres ; Or à deux cents perches de dix piés de la ville court vne petite riuiere.nommee xo Lauandera,^omcc quelesfemmes ontcouftumedVlauer les linges; cette petite riuie- re remplit cet eftang,en la façon que ie l’ai tracé à Voftre Maiefté, au delà d’icelle il y a vn chemin paué de cailloux. L’autre chemin qui mene à là ville eft vn peu au deftbus , auprès du Pont qui eft fur le chemin,lequel va au port de Perico. Ces deux chemins peuuent eftre difficilement defendus,pource que ce font plaines & campagnes. Au cofté de l’Orient de la ville, lamaifon Royale eft baftie fur vne roche, proche de la mer &quipanche vers icelle, coAime auffi la terre. Le Parlement fe tient en cette maifon : la prifon y eft auffi & le trefor Royal : Le Treforier de Voftre Maiefté, le Prefident, & les trois Confeülers ou luges, auec 1 Aduocat Fifoal &: autres Officiers royaux, y demeurent dans des maifons J 0 ioindes & bafties de bois fur la mefme roche : Or le lieii où eft bafti le Palais , & la pri- fon peut aifoment eftre fortifie, a caufode i’aduantage du lieu & du voifinage delà mer, qui eft en cet endroit femee de beaucoup de rochers , lefquels paroiflent à bafte mer,&quelques-vns d iceuxamareehaute. Visa vis de cette maifon- vers leLeuant,à cinq cents perches de dix pies d’interualle, il y a au deuant delà Continente vne Ifle demi-circulaire ; enfin a l’oppofite de cefte maifon eft l’anchrage des nauires, apres qu ils fe font defcharges : car ils n en peuuent approcher eftans chargés , fi ce ne font des barques ; quela mer s en retournant laifte à fec,enuiron trente perches de dix piés de cette maifon ; car la ville eft baftie vis à vis delà. E^s années precedentes, comme le bruit couroit,queles Pyrates eftoyententrés enlamer du Zud,\Q. Prefident & les luges 40 y firent baftir vne forterefle,auecvn rempart de bois ; afin de garder cette ville & les treforsde Voftre Maiefte : ils fortifièrent en outre Venta, de Cruz,es Chagre ôc <^gel?radey & groffirent la garnifon de Ballano ,• car pn eftimeque l’ennemi peut faire defeente en tous ces lieux-là & gafter le pais au long & au large. Or cette ville peut eftre aifoment prinfode l’ennemi par trois moyens rl’vn par la mer du Nord & parvn certain pairage,qui eft à quatorze lieués Nombre deDioSi^L^- pelle AcU-, par lequel il n’y a pas long temps qu’vn Pyrate a pafte en la mer du Zud: 1 autre Nombre de X>fo5,-car encore que le chemin foit rude & difficile, plein d’eau. & fangeux, toutesfois les habitans s’en foruent neuf mois , paflànt au trauers des eaux & boues , ou par les hauts & innacceffibles rochers du mont l’ennemi 5 0 pourroit lors eftre empefehé auec peu de gens : mais on afteure que ce chemin eft foc & facile l’efte. Et le dernier par lariuiere C^^^r£’,quientreènlameràdixhuid: lieues Nombre de Bios vers l’Oueft : Ce pafl'age met en grande peine les habi- tans de PÆ;?4?«i«,*,car on peut monter cette riuiere iniques ^ Venta deCruzeSy &L delà on peut venir par vn chemin de cinq lieues à cette ville. On peut monter cette riuiere auec des chaloupes de trois cents quintaux ou plus ( c’eft vn poids d’Efpagne reuenant à cent & vingt de nos liures ) auec lefquelles on mene lés marchandifos de l’Europe à Venta V 2.72, - DES CRIPTIQN DE S INDES Venta de Cruzes A'on on les tranfporte trois lieues de chemin à Limaretei lequel chc» min eft fort vni,ü nous en croyons les habitans : par ou il feroit aife à 1 ennemi de s ou- urirvn chemin à cette ville & à la mer du Z«zi:&merme porter auec foi des barques préparées à cet effet, &les porter en mer, & parce moyen nous attaqùer par mer & par terrejComme on fçait quei^/'. Dvâc a eu autresfois en la penlee de faire. Et pourcequc les Bourgeois de cette ville font prefque tous Marchands, ils craignent à febatre, fe contentant quand ils peuuent mettre leurs moyens en feureté: Voila pourquoi, s’il plaifoit à Voftre Maiefté,de faire fortifier la maifon fufdite,ce feroit non feulement vn refof^e pour les Bourgeois, quand quelque fubite crainte de l’ennemi furuiendrofo mais aufii vne retraite affeuree pour vos trefors» Car les Pyrates & les rebelles de^Vo- j ^ ftre Maiefté,qui gaftent ces colles , ont eu toufiours cela pour vnique deffein de s’em- parer de cette place, afin que par vnmefme moyen ils peüffentempefcher le commer- ce entre rEfpagne& le piller les trefors de Voftre Maiefté. A cette caufe on doit prendre fur tout garde à bien conferuer celieu; car eftant bien muni, Voftre Ma- iefté n a que faire de craindre Ces trefors,ni les Marchands leurs commerces : Et fi d’a- uanture quelques-vns tafchoyent és Prouinces v’oifmes à fereuolterde robeïffance deuë à Voftre Maiefté & feioindre àlennemErcequeDieu ne vueillejvous n’auez que faire de craindre fi long temps que cette ville & Fertû Belo feront munies de forte garnifon. Caries foldats placés à Porto Belo(({m n’eft eflôignee d’ici que de dix huiét heués ) peuuent facilement eftre amenés ici , & y ayant le plus fouuent dix ou douze barques,qui appartiennent à cette ville, peuuent eftre tranlportes prefque fans peine vers toutes les autres parties. Et il n’y a aucun autre port dans le Peru{ Lima excepté ) qui aye tant denaüires que Panama. Mais fi cette ville n eft bien fortifieefil fe pourroit faire que les Py rates paffans dans la mer du Zud par le Deûroit de Magadan, arrmeront: ici au temps que les trefors y font amenés , ( qui excédent parfois cinq ou fix millions ) kfquels ils pourroyent piller auec peu de perte de leurs gens: mais la ville eftant forti- fieej on y pourra amener en (cureté tous les trefors. ParainfifiSaMaiefte letrouuc bon, on pou rra faire du cofte que cette ville regarde la terre, vne forterefle de briques depuis les fondements j en lieu propre & prépare pour cet effet, auec Ces baftionsôc foffés : car du cofté de la mer,il n’y a point de danger j pource que la maree vient & fe j retire deux fois le iour ; & mefme a maree haute 1 accès n eft pas afîeure pour les naui- res, & quand elle s’en retourne , & que les rochers fe defcouurent,ils n’y peuueïit eftre fermesd caufe du fond trop mol 5 cette cofte du cofte que nous parlons , s eftend iuf- ques au Poijt qu’on nomme Paita. Or à deux lieues de la ville vers l’Oueft,!! fe rencontre vn aütre port,lequel on nom^ me PmV^,extreniement bien garènti à l’encontre de l’incertitude des vents , par trois liles prefque continués, eftenduës au deuant de la terre ferme en Croiffant , au dedans il eftlpacieux dedemielieuë: Ot la Continente efthaute,& lèsllîes baffes: ily abon- ne commodité d’y prendre de l’eau ; & le port n’eft tache d’aucun naufrage iufqUes a maintenant : car il a de profond a haute maree feptbrafïes , & trois ou quatre a bafle mer: les anchres y tiennent fort bien, & quand le befoin le requiert, on peut a peu de peine tirer les nauires fur le fec pour les racouftreri Les nauires retournans du. Peru chargés d or & d’argent entrent dans ce port j dans lequel , n eftant point fortifie ^ les Pyrates pourroyent aifement y entrer & piller tous les nauires : car toutes les barques qui nauigent en la Mer du Zud, font pour laplufpart fans armes, de forte que ceux qui les mènent n’ont pas à peine vne efpee pour Ce defèndre : & il n y a pas en tout ce quar- tier aucune fortereffe pour empefeher l’ennemi. Or ce port eft a cinq lieues de Venta de Cruzes, Par ainfi il feroit nèceffaire fur tout d y faire vne fortereffe, dans l lfle qui eft au milieu des autres , & y mettre quelques groffes pièces i ce qui ce feroit a peu de frais , pource que l’Ifle meftne fourniroit ce qui feroit neceffaire pour cet ouurage : &c jb par ce moyen on pouruoyeroitfort à propos non foulemet a la^ille, mais auftiauport: Outre ces paffages,il y en a encore vn autre pour aller vers la mer du Zud, Cçauoir par la riuiere qu’on nOmme^c/tf Francijca, auprès de Cabeca de Cattma,\elong delà cofte delà mer du Nord : car ayant entré dans cette riuiere,iiy a vn court chemin iufques a celle de Caracol,lacpiel\e deicend en la mer du Zud a cinq lieues de cette ville. Voila ce qu il en dit.Or ie ne fçai pas bien ce qui a elle fait du depuis de ces ehofès'qü il eftime fi ne- ceffaires. . Chap. ^75 OCCIDENTALES. LIVRE VIIL C H A P. IV. Ville de Nombre de T){os: qualités fituatiom des lieux circonuoijins. La fécondé ville de ce Gouuenlement ell Nombre de Bios, mais i^u’ai-ie dit, eftji ains a efté, car elle eft maintenant abandonnée, & leshabitans en ont efté tranf- portcs à Porto Belo :&c il n’euft pas elbé befoin d’en faire mention ici, s’il n’im-» ï ° portoit de cognoiftre la lituation du lieu, la commodité du port, & les qualités des lieux voilins.Tous les Autheurs Efpagnols, fans en excepter aucun, fe plaignent gran- dement de ce que celieueft mal (zin -, Herrera affeusQ en fon Hirtoire, qu’iiyeft mort prefque vn nombre infini d’Efpagnoîs de diiierfes maladies. Car là ville eftoic enuironnee de marais & lieux aquatiques , defquels s’exhalent des vapeurs peftilentes & erandement contraires à la fanté des hommes. Mais il eft neceffaire d’ouïr là delTiis O luan Baptijle Antonelli, Nombre de Bios ( ) tù: bafti fur vne baye de fable proche de la mer du Nord, contenant enuiron trente familles ; & les maifons y font de bois : Or laplufpart des habitans font eftrangers,qui n’y ont pas de demeure arreftee ; le terroir voifin eft cou- ^ ° uert de forefts efpailTeSjOU de quantité de marais- & de profondes bouê's,où On ne peut prefque paflèr, pour l’abondance des eauX qui y defcendent des montagnes fombres : le port n’y eft ni commode ni propre pour y prendre de l’eau, car il eft expofé aux vents de bife,qui continuellement fouillent en ce quartier Ià,nin’eft pasaiféspro- , fond, de forte que les grands nauires font contrains auant que d’y entrer , de defchar- ger vne grande partie de leurs marchandifes. Que ii le vent de Nord ou de Nord-^ oueft y vente de furie, les nauires font contrains d’y moüiller parfois fix anchres , &c n’ofent pas filer leurs chables , à caufe des rochers & des baftes qui font d’vn cofté d’autre ; car la mer y brife fort lors , & roule vers la terre de fort groifes ondes , de maniéré que les nauires font fort agités & auec grand danger romjient tantoft vn 5 O chable, tantoft le gouuernail eftenleué de fa place, ou reçoiuent d’autres incommo- dités-. La ville eft bien baftie&commodementfituee au cofté de l’Eft du port fur vne roche,où onpourroit baftirprefquc fans nulle peine vne fortereftepour ladefenfe du port ; mais pource que le port e^ft fi incommode, ie ne puis confeiller à Sa Maiefté d y faire d’autre frais,quc de l’enuironner d’vn rempart, par le moyen duquel les habitans pourront fe defendre à l’encontre d’vne flotede trois ou quatre nauires. Panama en eft à dix huid lieues , où on va par vn chemin fort rnaüuais : neantmoins tout le tre- for d’or & d’argent, tant de Sa Maiefté que des particuliers, eft amené par icelui; & les marchandifes de l’Europe , font premièrement menees auec de petits nauires iuf- ques à l’emboucheurede la riuiere chagrei&c àolà font menees à mont de la riuiereiuf- 40 à Venta de Cruzesi enfin de cette hoftelerie on les tranfporte aüec des mulets cinq lieues par terre iufques à la ville de Panama. Cette ville eft fituee furneuf degresSe:, vingt fcrupules de la ligne vers le Nord. Si Sa Maiefté trouue bon de démolir cette ville ôetranfporter les habitans d’icelle à il faudroit faire vn autre chemin par la montagne de Capira,czr: l’autre eft fort difficile & peut aifement eftre eftoupé : &remboucheuredefon port peut auec peu de frais eftre bouchee , parle moyen des Vieux nauires qu’on y enfbndreroit& des pierres qu’on y ietteroit : Or il y a grande di-' fette de pierres, de maniéré que les nauires quand elles ont befoin de balaft , font con- trains de l’aller quérir dans vne Ifle prochaine nommee de ios Bajîimentos. Voila ce qu’il en efcriuit au Roi d’Efpagne l’an cId Io lxxxvii. Mais les Anglois,qiiii’an fa gId Id xcv fous la conduite du valeureux Cheualier François Brae , pillèrent & rui- herenteette ville, en parlent bien autrement comme auffi de fôn port; & affeurent que la ville eftoit ample, auec des larges rues , desmaifonsde bois, mais qui eftoyent fort hautes, & qu’il y auoit vn temple aifés beau, encore qu’il ne fuft que de bois : quelle eftoit fituee en vn terroir humide, & fous vn air fort fuiet à de grofles pluyes , par ainfi autant mal renommé pour eftre mal fain aux habitans qu’autre en tout le nouueau Monde. Que vers le Leiiant de la ville defeendoie vne petite riuiere dans le cofte Mm ' gauche I. 274 DESCRIPTION DES INDES gauche de la baye, Teau de laquelle eft fort claire & tres-bonne à boire : le long de lès riuages il y auoit quelques villages baftis & des eenfes : que l’anchrage eftoit deuant la ville afles commode, encores qu’à l’entree il y eut à droite &àgauchevne fuite de ro- chers , mais qui n’apportoyent point de danger , pource qu’on les pouuoit aifemenc euiter, à caulequ’ils aduertilToyent allés du péril j &qu’on pouuoit moüillerl’anchre autant au dehors qu’au dedans d’iceux. le ne fçaurois m’imaginer autre caufe pour làqqelle Ai^gloîs ^ ont difeouru de ce lieu fi diuçrfement , que cette-ei ayiGitainli dilppfé cet alfaire , afin d’inciter le Roi à démolir la ville & la tranlporter ailleurs , çotnme il fut fait par apres, ainh que nous dhons biçn toft. C H A P. V. 'D.efmphn de Porto Belo félon ïuan Baptiftç Antotielli. Porte Belo (àit-i\)àxïkznt de 2{ombre de Bios de cinqlieuè's vers l’Occident, eft vnport fort commode & capable de beaucoup de nauires, le fond y eft fort pro- pre pour retenir les anchres.car la mer eft haute prefque contre le riqage de cinq ou fix braflès,& au milieu du port de douze, le fond eft mol ou fablonneuxjoù il n’y a ni rochers ni balTes : douze tant ruilfeaux que petites riuieres delcendent en- femble dans icelui , de forte qu’on y peut aifement prendre de leau en tout temps. 2-0 En outre le terroir voifin abonde en arbres de haute futaye, propres pour en faire des nauires ; comme aufîî en pierres pour les lafter : il n’y a nul danger pour y entrer, excepté quand il vente de rOueft, ce qui aduient rarement; Caries vents qui y fouf- flentlepîus fouuentfont du Nord, plus dangereux que ceux de l’Eft & parfois fort in- commodes aux mariniers. Au dedans du port il y a vneftang, ayant cinq cents ver- ges de dix pies de long, & autant de large, large auprès 4e fonembouçheure prefque de trois cents verges &: plus de quatre bralTes de profond , mais au dedans il en a fix, d’vn fond mol & boueux, de forte que les, nauires ne reçoiuent aucun dommage, encores qu’elles y touchent, où foyent fur le fond,leriuage mefmcn’a ni baffes ni • rochers , & fort feur pour les mariniers, qui fait qu’ils peuuent moüilley l’anehre ians 5 o danger par toutoù il leur plaift. Le port eft enuironné d’vn bois 3$ d’vn marais, qui peut à peu de ffais eftre affeiché per le moyen d’vne chauffée qu’on feroit au deuant, & peut feruir de pafturage pour le beftail : ce qui feroit vne des grandes commodités pour la ville. Or il y agrande difettedepafturagesautourdeiVbw^rÊ'iS^^D/Vjjderortequ’ils n’y peuuent paiftre de beftail, & faut qu’ils aillent quérir leur chair à Il y a en outre vne plaine vers le cofté du Sud du port, fort commode pour y placer la ville, au pié des montagnes , qui s’efleuent en moyens coftaux, & ou trois petites riuieres de fort belles eaux fe roulent : le terroir eft propre à y femer du Mays &c autres fruids 3ç mefme eft fertile. Il s’y trouue auffi de fort grandes pierres propres , 40 comme on eftime,à faire de la chaux (car nous ne l’auons pas encore eiprouué) enfin pour n’eftre trop ennuyeux, & eipluchant toutes chofes,il s’y trouue abon- damment tout ce qui eft requis pour y baftir vne ville. La place fur laquelle on baftiroit la ville eft pierreufe , & l’aïr y eft fur tout temperé & lain. Or de peur que l’eau des pluyes , laquelle les montagnes pluuieufes qui font au deffus de la ville enuoyent l’hiuer , ne nuife à la ville, il faudroit creufer vn eftang au pié d’icelles montagnes qui receuroit les torrens & les deftourneroit en la mer par vn canal. Or il feroit fort vtile de tranlporter les habitans de Nombre de Bios ici j ce qui ne leur feroit ni pelant ni couftable , pource que les rnaifons n’y font que de bois , qui ne feroit pas malaifé à emmener ici, comme auffi les tuiles des toids. Si Sa Maiefté 5'o approuue ce confeil , il faudra premièrement faire vn chemin , par apres démolir le temple &: autres édifices publics , notamment la maifon des contradions & les rebaftir ici : enfin faire commandement aux Ilotes qui partent tous les ans d’Ef- pagne de venir à ce port : car par ce moyen il aduiendroitque les Marchands tranf- fereroyent là leurs magazins , & qu’vne grande quantité d’hommes accourroit à cette nouuelle ville. Or OCCIDENTALES. LIVRE VIÎI. 17^ Or polir la garde du portdcla ville, il fcroit necc/îaire de baflirvn petit chafteau quarré/ur le Ibmmet delà montagne qui commande au port du codé du Nord, où on placeroit quatre ou cinq pièces de canon, &dx hommes pour y faire toufiours la gar- de ; fans qu’il foit bcfoin de plus grand appareil, car tout le port efl: ceint de bois & de rochers fort drus. De l’autre codé il faudroitbadirvn autre chadeau en forme de tour, dans lequel on logeroithuid pièces de canon & vingt foldats en garnifon.càr cela feroit d’vn grand poids pour ladefenfe de la ville, comme edant fort proche &: prefqueconioina à icelle. En outre vers le Nord , il y a vn haute de huid brades de profond, ou il y a fort bon anchrage, parainfi ce chadeau pourroitdefendre la ville de I O apporter grand dommage à l’ennemi,& mefme garder toute la code, laquelle s’auance vn peu en mer en cet endroit & retourne vers 1 ifle de Bonâuc?ituv6. Or combien que le premier chadeau vint afe ruiner ou aedre prins derennemi, neantmoins l’autre fe- roit badant pour defendre la ville, pourueu qu’on plaçad vingt foldats feulement fur la coline oppofîte, car par ce moyen ils pourroyent facilement empefehervn grand nombre d’ennemis. Ce port ed didant de la ligne de neuf degrés & vingt fcrupules vers le Nord. Le chemin qu’il faudroit faire de ce lieu à ne feroit pas beaucoup difficile, comme i’ai apprins des Simarones : car bien qu’il foit le plus fouuent rempli d’eau l’hi- uer,toutesfois iled foc redé:&aux endroits où on ne peut pader à caufode la boue trop profonde , on pourroit le combler de bois & pauer de pierres, defquelles il v a grande quantité ici : Et l’Impod que Sa Maiedé leue à Panama , lequel reuient tous les ans àquatorzemilie ducats, fuffiroità cette befogne. Voila ce qu’il en dit. C H A P. VL Ville de S. Philippe fm Porto Belo,e^ de laBourgade Nata PH I L I P P E II. Roi d’Efpagne ayant entendu le Confoil de luan Baptifie Anto_^ nelli,\c(\\xd nous auons inféré ci-dedus, & l’ayant meurement pefé auec le Prefî- dent & les Confeillers du grand Confeildes Indes edabli en Efpagne,fe laifla en- 50 fin perfuader qu’on ^h2Lnàonnç^ïo\tà\xto\xt Nombre de Bios, de qu'on badirodvne au- tre ville defonnomfur Porto Belo. Parainfi^;2/iiW//ayantreceule decret du Roi,tra- ça l’enceinte de la ville , & fortifia vn chadeau ; & auoit défia choifi place pour l’autre de l’autre codé du ^oïUÇ{\\2Lnà François Dr ac , apres auoir prins & pillé la ville de hre de Diûs,ç.nt\:2L2.viQcù. dote dans ce port où il mourut auprès. Celui qui a rédigé en Commentaires les cho'fes par lui faites en cette derniere expédition , tefmoigne que ce port ed grandement commode tantpourles grands que petits nauires, & qu’il fur- pade de beaucoup tous les autres potts & hâures de cette Continente: à peine,y auoit- il lors huia ou dix maifons de badies, outre vne grande qu’où faifoit pour le Gouuer- neur, & les fondements d’vne forte forterede edoyent défia pofés & d’vn rempart de 40 fommiers entraues, remplis auec des pierres & de la terre : l’ouurage auoit l’apparence de quelque chofe de manifiqüe, de edant paracheué,deuoit edrevn valide fort à l’en- contre les incurfions de l’ennemi. Cette première calamité auenuë de la part des An- glois à cette nouuelle ville, fit prelque abandonner l’ouurage. Mais apres le partir des Anglois la ville & le chadeau furent parfaits ; & le malheur de Nombre de Dw pro- fita, car les habitans en dedogerentplus volontairement: qui fut caufe que la ville de S. Philippeint audî tod accreuc de quantité de maifons & de multitude de Bourgeois. Or 1 an cIdIo ci cette villefut derechefprinfo parles Anglois en cette maniéré. William edant parti d’Angleterre auec deux nauires & vne barque dans lefo quels il y auoit cc tant foldats que mariniers,demeura à l’anchre quelque temps fous jo lifle de los Bajlimentos^de apres qu’il eut mis cent cinquante foldats dans deux fréga- tes & autant de chaloupes, il entra de nuiél dans le port comme la Lune luifoit & com- me il fut venu au droit du grand chadeau nommé .S". Philippe , lafontinelie lui deman- da doùil venoit,il relpondit de par apres on lui commanda de moüiller l’anchre pour attendre le iour,ce qu’il fit , j mais vn peu apres il s’en alla auec deux cha- loupes vers la ville,fans que les fentinelles du chadeau qui edoit de l’autre codé, dit S. lago , lui difent rien, & auec trente foldats choifis, il print le faulxbourg Friana à la Mm 2, delpourueuc. ^7^ description des INDES defpourueue, lequel il brufla; delà tirant promptement vers la ville & s’acheminant vers le lieu où eftoyentles trefors du Roi, il rencontra quelques foldats & deux pièces de fonte, qu’il repouffa vaillamment & fe faifit du can-ondl receut fes gens qui eftoyent commodément abordés auecles frégates : cependant le Gouuemeur delavilleP^’<;/r^j Melendes, 2c^2nt affemblé foixante des fiens, comme il s ’efforçoit d’empefeher aux An- glois le paffage d’vn pont qu’il leur faloit neceffairement paffer , ayant efté bleffé de deux coups, fut contraint de le retirer dans vne maifon prochaine, ou.il fut par apres vncombat douteuxprisprifonnienparapresles Angloisayantgaigné laTrefbrie,ils y^ trouuerent neuf ou dix mille ducats;car vn peu auparauanton en auoit enuoyé cent & vingt mille à Cartagene auec deux pinaffes. Or ayant pillé tout ce iour la ville, ils lo retournèrent de nuift vers leurs nauires, fans faire aucun dommage à la ville, ni fans en receuoir beaucoup des chafteaux en fe retirant. Ils dirent,qu’ily auoit défia pour lors deux temples baftis en la ville, fix ou fept rues garnies de maifons des deux coftés , & plufieurs boutiques d’artifans & de faéteurs. Le chafteau S. Philippe eft htué au cofté Oriental du port, dans lequel il y auoit trente cinq pièces de canon & cinquante fol- dats en garnifon,& vne compagnie de Bourgeois. Voila quel eftoit lors Teftat de la ville & de la fortereffe. Apres cela on y baftît vn chafteau plus grand & mieux fortifié, entre la fortereffe de S. lago &la ville, fur le cofté Occidental du haute, qu’on dit eftre muni de quarante pièces de canon,difpofés en trois rangs. Enfin audeuantdelabaye qui eft fort large,ilyaenmerdeuxpetites Illes, la plus petite defquelles eft proche du za coin Occidental bc du chafteau S. /4:^wffautre maritime, premièrement iufques à l’emboucheure de la riuiere chagre,<^m en eft à trei- ze lieuë5,par apres à mont de la riuiere, en la façon que nous auons dit ci-deffus ; il y a vne autre petite riuiere qui fort en mer à deux lieues du fort S. lago vers rOueft,au co- fté Oriental de laquelle ilsontbaftivne petite fortereffe j comme auflifur la riue Ori- entale de la riuiere auprès de i emboucheute. La troifieme ville de ce Gouuernement eft appclleei’. IagodeNatabcÇim^\Q.mcnt N(âta } elle eft fituee fur la mer du Zud,â trente lieues de Panama vers l’Oueft. Son ter- ^ roir eft fertile,plat & fort plaifant ; il eft fermé vers le Nord des montagnes d'Vrraca ou de Veragua. Vers l’Eft-fud-eft de cette ville eft fituee la Prouince Paris , le Roi de laquelle Cutaüra , comme nous auons dit ci-deffus , a autresfois fait beaucoup de mal aux Elpagnols. C H A P. VII. ^uieres cofie de ce Gouuernement Panama, notamment de U Rimer e Chaire. 40 La principale riuiere de ce Gouuernement fur la mer du Nord , eft appellee des Sauuages chagre, mo-is desEfçsLgnols Rio de LagartoSiCcG: à dire, riuiere des Cro- codilles : qui deifeend en mer fur les neuf degrés & vingt fcrupules de la ligne vers le Nord,à quinze lieues de la ville de Nombre de Bios ^ & à treize de celle de Porto 3elo. De l’emboucheure d’icelle iufques \VentadeCruz,eSiOncontQài\h.Midi\iQucSi iufques où toutes les marchandifes de l’Europe font menees,& delà auec des mulets &: autres beftes de charge, àP4;2^«^^parvn chemin de cinqlieuës. Cette riuieres’au- gmente & fe groffit grandement l’hiuer. Les barques dontils fè feruent en icelle, font pour la plufpart de feize tonneaux, comme parlent les mariniers ,& d’enuiron trois cents quintaux, comme les Elpagnols content. Mais 1 efté fbn canal eft fort petit, de 50 forte qu’en ce temps-là le tranfport eft beaucoup plus difficile, & font contrains en beaucoup d’endroits de fe defeharger & tirer les barques auec grand effort & à force d’hommes auec des cordes. Voila pourquoi duquel nous auons défia fait mention plufieurs fois , confeilla au Rpi d’Efpagne , de faire baftir vn chafteau auprès de l’emboucheure de la riuiere, &: de faire faire des chaloupes, auec lefquelies on tranfporteroit les marchandifes i’efté,& dans les plus grandes l’hiuer : & OCCIDENTALES. LIVRE VIII. 277 Vn chemin de l’vn des coftés de la riuiere, afin qu’on peut plus aifiemét tirer les barques auec des cordes : ce qu’il n’eftimoit pas eftre beaucoup difficile, pource que les riua- gçs font prefques plats & vnis , ou il faloit feulement couper les arbres qui panchent d'vn cofté & d'autre, & parfois tombent de traiiers,retardans ôc empefchans la naui- gation. L’emboucheure de la riuiere eft large dvn ied de pierre, afles profonde & garentie à l’encontre des nommentdls les vents d’Orient, qui y fouffient prefque toufiours. Enfin la riuiere eft poiflbnneufe, &il y a vne belle commodité de chaflc à plufieurs beftes auprès du riuage,à caufe de refpalfteur des forefts. Sur la mer du.Z^//4r/V;?,riuiere fort claire & tres-bonne à boire : de laquelle la Prouince de Darien Z prins fon nom.Elle eft grandement prifee en bonne temperie d’air & princi- palement en fertilité de terroir j car les melons & fruits femblables,vingt iours apres qu’on en a mis la femence en terre , germent & amènent leurs fruids à maturité : pa- reillement les vignes & autres arbres fruidiers y portent leurs fruids promptement, 40 auffi bons & meurs qu’en Efpagne &: aux Mes. Entre les arbres porte-fruids , Gomara célébré ceux-ci : Le Mameya arbre fort beau,verdifrant gay ement, bran chu, ayant les fueilles plus longues que larges d'vn bois poreux , portant vn fruid gros & rond , d’vn gouft de percet,maisd vne chair comme le coing j ayant trois ou quatre noyaux ioints cnfemble qui font grandement amers. \-,&Guanabo\iilreeeutvnin%ne domma- ge des Saunages vaillants & cruels qui habitoyentlàiayant perdu feptante de fés gens; ce que touteslois Nifuefa,c^m arriua làfortàprppos aiieplesiiens, vengea tuant beau- coup dauantage de Saunages. Mais ne tronuant pas- bon dp s’artefter eii co lieu, if print fon cours vers le golfe d’Vraba , cherchant lariuiere deParkn, ( des richeires .de laquelle il y auoit vn bruit incertain qui' erpidoit fort) pouf laquelle trpuuer il aupit inutilement employé quelque temps, il mena fa flote au cp^e Orientai du golfe d’V- r^^4:,oùayant defeendu à terre il baftit la bourgade de Sehafiun^cnnn terroirgran-* dement fertile & abondant en toutes chofesnecefîaires à la vie, comme Herrer a tef- 5 O >;îioigne. Or les Saunages eftans auffi toft ennuyés de ces eftrangers, comme les Eipa- gnolscommençoyent à auoir difette de viures,&eftoyent fatigués des Saunages par embufehes & guerre ouuerte, Oieda laiiTa cette place à peine commencée, & aban- donna fes gens deftitués de toutes chofes : voila pourquoi ceux qui y auoyent eljté lailfésjs ’embarquans dans les chaloupes qui eftoyent de relie, s’en .allèrent en diuers quartiers: mais comme ils eftoy ent défia bien loin, ruruint^;^^-^ auec prouifions ôc renfort de foldats,qui les emmena prefque contre leur gré auec foi, &.fc plaça au codé Occidental du golfe Ce dernier ayant d’adu.anture trouué la riuiere de Tarien, laquelle Oieda auoit cher- ché en vain, il baftità la riue d’icelle vne petite viilette, qu’il dédia au nom de S. Marie ^ Q Antique, l’an c I d I d x. Cette villes accreut tellement en peu d’annees, tant en nom- bre d’habitans qu’en richelfes, que l’an cio In xiy elle futann.oblie d’vn Euefehé. Mais apres que FafquoNimnes B allô a. eut ounertauec non moins d’indudrie que de la- beur, vn padage vers la mer du Zud) ( de laquelle aupArau.ant les Efpagnols auoyent entendu par lignes des Saunages quelque bruit ohfcur)& que i’elperance des grandes richedés,que tant & de lî grâdesProuinces lîtuees fur cette mer promettoyent(Sr non en vain)defquelles ils auoyent délia de grandes indices,croiiroit deiout en iourj cettG ville fut abandonnée par Fetreio Tauila , que le Roi d’Elpagne auoit fait Gouuerneur de cette Prouince, & leshabitans furent tranfportés à Panama l’an cîo Id xix, cou- urant la caule de fon affaire de rincommodité,qui auoit caufé la mort .à pludeurs Ef- JO pagnols en cette ville en peu de tçm^s. Or cornme Pierre Martyr tefmoigne,elIe edoic badie fur la riue du deuue, dans vne bade plaine, ceinte de toutes parts de fort hautes montagnes, qui y rendoyentl’aïr outre mefure humide &: ardant : ioind- pludeurs marais & des edangs pleins de bouè'jquiexhaloyent vne odeur pelante & puante. Gomaraadiou^ke que tantlàqu’és autres Prouinees de cette Continente, cela arriue d’ordinaire aux Efpagnols , d’y acquérir vne couleur brune & fafranee , a la façon de ceux qui font malades de la iaunide : ilfe peut faire ( dit-il J que le grand appétit d’or, qu’ils ^go DES CRIPTION DE $ INDES qu’ils portent clos dans leur poitrine, fe mohftre par cet indice , & teigne leur peau de cette couleur doree: femocquant de l’aiiarice de ceux de fa nation & s’en riant fa- ceticufement. ' , . Mais les habitans de cette ville receuoyent bien vne autre incommodité beaucoup plus grande , par le difficile tranfport & la chereté de toutes chofes , pource qu’elle èftoit trop efloignee de la mer.Pour ces caufes donc elle en fut eftimee moins commo- de , combien que la Prouince eftoit fans doute agréable & nullement ennemie de la fànté de fes habitans. -11 y eut en outre vne autre bourgade qui fut baftie par les foldats d' Amlayàd.m la Pro- uince de Vocorofâ, fur les bords de la riuiere de î”. Cruz,^ comme les Efpagnols l’appel- i o loyent ; laquelle fut puis apres furprinfe & entièrement ruinee des Saüuages. Auffil’un cîdId XV vne Colonie fut mertee par le meCme au-port d’Jc/a, à vingt lieues de S. Marie Antique vtïs leNord-oueft: f comme Pierre Martyr Z remar- quéy auprès du riuagedelamer 5 lequel port eftoit affésprofondjmais de fort difficile accès, à caiife du rapide flux de lamer qui bat cette cofte. Le terroir de cette ville eftoit montueux , mais beaucoup plus fain que celui de B arien , & eftimé n’eftre des- fourni de veines d’or. Il y a vne certaine llle en cet endroit qui eft au deuant de la Continente, nomniee de Pi»tfj.Toutesfois la ville de laquelle nous parlions à Cette heure, ne fut pas aufti de lon- o-ueduree,&lamemoired’icelle feroit entièrement efteinte, fl ellen’eftoittacheedu fupplice de Vafquo Numes Balboa, homme qui certes auoitfait grand feruice auRoyau- me d’Efpagne , pour la defcouuerture qu’il auoit premier faite de la mer du Zudy^ qui ^«/^ràdroitou àtort,oHnelcfç'aitpasbien)fittrencherlatefte en ce lieu. Apres cela la Prouince de Barien 62 mefme tout le cofté Occidental d’Vrabay de mmbre de Bios iiifques au profond du golfe, a demeuré vafte & defert, & n’y a encore pour le iourd’hui aucune ville ni village des Efpagnols : quant au cofté Oriental du mefme golfe nous en parlerons ci-apres,pource qu’il appartient maintenant au Gou- \iememenià.e Car tagene, G H A i*. X. < J Û Q}lîemaŸÎneyCapSyBayeSyFleuues ^ Ports du Gouuernement Panama. POv R c E que ce Gouuernement eft fitué entre deux mers , nous defcrirons les coftesd’iceluid'vn cofté 62 d’autre. Sur la mer du Nord la cofte eftainfi difpcr- fee: De Nombre de Bios (nm^Lmle riuagevers l’Oueft, ©n conte cinq lieues iuE (yue%2.Porîo Belo:Nis avis d’iceluifont fitaees,en mer les Mes qu’on nomme las Miras, 621’lfle de à laquelle Columb àonn-Si. ce nom, pource qu’y eftant arriué par cas fortuit, il y trouua quelques champs enfemencés de ayant par ce moyen trouué de la prouifon, lequel mot fonne enEfpagnol Bafiimentos. Proche de Porto Belo à vne lieue d’interualle eft le port duquel iufques au port de las G allinas on 40 conte trois lieues 5 62 du dernier iufques au port de Lagojîas autant ; apres lequel fuit vn petit port dit vulgairement elPortete,enhn la riuiere chagre de laquelle nous auons parlé ci-deuant: Voila la cofte de ce Gouuernement qui comtêin Nombre de Biosyeï^ FOueft. Delà mefme villeVersTEft; iufques à la riuiere il y a deux lieues ;62 iufques à Sardrna quatre, peu apres s’ouurent les riuieres de Mays 62 de Culebras : de la derniere defquelles iufques àla riuiere Framifca ( de laquelle Antoneüi a fait mention en l’exade defcription de la ville de Panama ) Ô2 iufques au commencement du golfe d’Vraba on conte huid lieues. , Sur le deftour que fait la cofte vers le Sud/e dreflent les m onragnes de .S. Blas,^n deuant defquelles eft l’Me qu’on nomme Cattiuâ:^^\.e% celle- ci fuit vne autre dite vulgairement Comagre; Or a la Continente ftiit le port Acla, vis a j 0 vis duquel refpond rifle de 62 enfin le port de proche de l’emboucheure de la riuiere de Barien, eynï fepare ce Gouuernement de celui àeCartagene : 62 là finit le golfe d'Vraba, à' ou ce lieu là eft appellé des Efpagnols la Culata, ( comme qui diroit le fond du golfe ) car le golfe qui eft proprement appellé dVraha par les Efpagnols, comme ie trouue oyxHerrera a eferit, prend fon commencement fur les huiôf degrés de la ligne vers le Nord, 62 entre quatorze lieues au dedans de la Continentej il a à fon entree OCCIDENTALES. LIVRE VIIÎ. entrée fix lieues de large, peu apres cinq èc enfin quatrerOràcinqlicuèsdefonem- boucheureversleSudeftoicautresfois bafticlavilledei’. Marie Antique ow dtDarien, de laquelle nous auons parlé ci-defTus : Voila quant à la colle de la mer du Nordi Au relie la colle de ce Gouuernement de Panama fur la mer du Zud,c{\: delignee pat IcsEfpagnols en cette façon. De la ville de Panama versTOueRon rencontre premiè- rement la baye ou golfe de Parita ou de Parü^ur laquelle ell fituee la villette Nata .-par apres la pointe ou Cap chama.où auoitfes polTelîions le Roi chiapes.loïs que Balboa defcouurit premièrement cette mer. VersleLeuant de cette ville fe rencontre pre- mièrement la riuiere Coquira ou cbepo , puis la riuiere de las Balfas: & delà, la çolle fe I o courbant vers le Sud , on trouue le golfe de Miguel, au fond duquel fe defeharge la riuiere de Congés. Or ce golfe cllgrandementagité,& incommodé de plulîeurs files, quantité de balTes, rochers & bancs, de forte que parfois il elleue de fort grolfes ondes, U notamment és mois de Septembre, Oélobre, Nouembre & Décembre il efl gran- dement efmeu, & on n’y entre pas lors fans grand danger, comme IcsEfpagnols ont quelquesfois efprouué à leur dam : le Cap de Ptnnas termine fon collé du Sudjderrie- re lequel on entre dans vn port de mefme norri , lequel Herrera efcric ellre elloigné de cinquante lieues delà ville de Panama, & vingt du golfe d’Frabazttmcïs du pais, car on dit que la Continente n’ell pas en cet endroit plus large. Or toute cette région cil rude en montagnes & rochers, & la plus grande partie de i’annee elle ellincommo- 10 dee de grolfes pluyes & guilees,non feulement fur la terre, mais aulîi en lamervoilîne, iufqucs à dix,mefmes à vingt lieues de la Continente. Et pour la fin, le pais ell rempli de forclls tellement elpailleSjqu’on ellime qu’il ell innaccelTible pour les hommes. Proche delà entre en mer vne riuiere,que les Sauuages nomment Beru,à’o\x on elli- me qu’ell venu le nom de Peru : Or le port de Pinnas ell elloigné de la ligne de lîx de^ grés & quinze fcrupules,comme eferit Herrera. De ce port iniques à vn autre qu’ils appellent ^emado, on conte vingt dnq lieues, à cinq degrés de la ligne vers le Nord: duquel enfin iufques au Cap nommé âfeCmV;?- tes,ï\y a peu de lieues. Cette colle ell fort mefprifee & ell couuerte iufques fur le ri- uage de bocages nommés Manglares iCniette à de perpétuelles guilees & foudres,&: ta- 30 cheede la mort de plulîeurs Efpagnols 5 car P/Ww en là première expédition dans le Pm/, perdit plufieurs de fes gens, partie par maladies, partie par difette & autres in- commodités , & eull fans doute perdu courage j fi le grand appétit des riehelfes ne l’cullpoulfé àfaire & endurer tout. C H A P. XL De quelques Ifles qui font adiacentes au Gouuernement (â^^Panailia, O* notamment ' de celles qui ont eu le nom O* la renommee des Perles. Le Gouuernement de Panama a quelques Mes dans l’vne & l’autre mer,defquel- les nous auons fait mention ci-delTus enpallant , mais ici nous les deferirons plusaplein. Orvoici celles qui Ibnt en la nier du Nord, premièrement celles qu’on nomme Capiues, o^i font bâlfes 6c prefqüe égalés à lamer,auecvnriuagedc fable, au dedans couuertcs de bocages efpais , au dehors enuironnees de rochers 6^ de balles, par ainfi on les doit efiiiter ou en approcher auec grande prudence. Par apres proche d icelles les Mes Comagre lont ellenduès au deuantde la terre ferme, non moins dangereufes que les-autres aux mariniers pour leur balfelfe* L’Me de Pinos ell feparee de celles-ci dVn petit efpace vers le Sud-ell, qui ell haute de terre & pref- que ronde, & feparee de la terre ferme d’vn fi petit efpace , qu’il femblc à la voir de loin en mer que ce foit vne partie d’icelle, & n’ell pas cognuë auant que d’en ellre 5 0 fort près. 11 y a plulîeurs autres petites Mes efparfes , defquelles il n’ell point befoin de parler , non plus que des precedentes , n’eftoit que ceux qui vont de Cartagenez Porto Belo ont coullume de dreller leurs cours vers quelqu’vne d’elles, & félon la veuë d’icelles de fuiure ou changer leur route. Dans la mer du Z/^^appartiennent à ce Gouuernementrl’Me d.e Tabogalz cinq lieues de la ville de Panama , & à douze d’icelle les Mes des Perles , vulgairement dites de las P^r/^jquiont ellé ainfi nommées de la quantité desPerles qu’on a autresfois pefehees N n dans 2,8t DESCRIPTION DES INDES dans la mer prochaine : Or il y en a deux vn peu plus grandes , 1 vue defquelles eft or- dinairement appellee de/ Rioy l’autre Tararequi, & vingt ou dauantage autres plus pe- tites, qui fontpluftoft rochers qu Mes : Quant à leur hauteur les Autheurs Efpagnols n’en font pas d’accord, & Herreraios\t(mc en efcrit différemment: Pedro de deçà en la Chronique du PeruMs met à huid degrés de la ligne vers le Nord^ Gomara efloigne de l’Æquateur de cinq degrés. Il y a eu autresfçis grande quan tité de belles fauuages dans ces Mes, notamment des cerfs, connils & femblables ; & n’y a point de terre qui fourniffe fes habitans de OlPays & Tuca, pour manger &: pour boire plus be- nignement que celle-là faifoit: fur tout la plus grande abondoit en toutes fortes de fruids : & la mer voifîne fourniffoit largement toute forte de fort bon poiffon , enfin i o rien n y manquoitde eequi efloit neceflàireàlaviejor entre les arbres que la terre y nourriffoit de fa nature, il y en auoit d’odoriférants ; ce qui trompa auxpremiers temps quelques-vns,qui foupçonnoyent que les Mes qui portent les efpiceries & autres cho- fes aromatiques, n’eftoyent pas loin delà, pource que ces Mes efpandoyent d’elles mef- mesvne fi agréable odeur. Au relie rien n’a tant fait recommander cesMes, que la grolfeur & perfedion des Perles que la mer voifinc portoit ; car encore que la Marga- rite & Cuhagua donnalfent bienfouuent des Perles, les plus grolfes defquelles pefoyent huid carats , elles elloyent rarement rondes & fans tare , mais ici il s’en cil trouué qui pefoyent vingt fept&mefme trente &vn carats, tant rondes qu’ouales & pyriformes, &ce qui elloit efmerueiliable, de fi belle forme, perfedion & lullre , quelles rauif- 20 foyent en admiration vn chacun. En outre ces Mes ont ellé au temps palfé fort peu- plées : & les naturels d’icelles elloyent fort experts à nager & pionger,& quand la mer elloit calme,ils faultoyenthors de leurs canoas pour pelcher les perles, & enarrachoy- ent les huiftf es des rochers auec grand labeur & danger ; car elles ont de couftume de s’attacher fermement enfemble,comme aulfi aux pierres: & les plus grolfes fe trouuent là où il fait plus profond au moins de dix bralfes : car ils fe plaifoyent fort aux Perles, encores qu’ils ne fceulfent pas la vraye maniéré pour les tirer hors des huillres ni pour les percer, qui faifoit qu’ils les galloyent le plus fouuent , &: corrompoyent leur blan- cheur & fpiendeur naturelle qui les fait tant'ellimer. Or auiourd’hui les naturels font tous morts iufques à vn , & ceux qui y demeurent àprefent fe feruent de Negres ou 5 o d’efclaues de Nicaragua , tant pour cultiuer les champs que pour paillre le bellail, qui ell pour le prefent leur feul reuenu,depuis que l’auarice des Efpagpols n’y a lailfé aucu- nes huillres à Perles. Richard Hawkin Anglois appelle vne de ces Mes PachetaMi{nd\c ell feparee de la terre ferme par vn petit dellroit,à huid ou dix lieues de Panama vers le Sud J elle ell ronde &:haute,& n’a pas plus d’vne lieue de tour,toutesfois elle ell fort fertile, de forte qu’elle recôpenfe benignement le labeur & l’indullrie de fon Seigneur,- qui fait vn grand reuenu de l’abondance de fes fruids qu’il enuoye vendre à Panama. C H A P. XII. Expédition fort mémorable de luan Oxenliam Angloù en la 40 mer Zud par la Vrouince de Panama. AV A N T que de mettrefinàladelcription du Gouuernement de Panama , ie n’ellime pas deuoir palfer lous filence l’expedition mémorable dvn certain Anglois, laquelle deferipten luan Oxenham Anglois (dit-il) incité par la renommee de l’expedition de François Drac fan cId Id lxxii ôi par la riche prife qu’il auoit faite, fe refolut d entreprendre lemefme:Par ainlî ayant elquipé vn nauire d’enuiron lix vingts tonneaux , & mis ieptante hommes dedans, auec vne heureulè nauigation , il aborda au code du Nord du Gouuernernent de Pa- nama ; où après auoir conféré auec les Negres qui habitent en ce quartier la, & eut en- jo tendu d’eux que tout l’or & l’argent elloit conduit par des loldats de Panama la mer du Nord, il entreprint ce qu’autre auparauant lui n’auoitofe faire; car ayant défi cendu à terre auec fes gens , où Drac auoit defeendu es années preccderites , il amena premièrement fon nauire fur les balfeSjpuis ayant defeharge fon canon a terre & cou- uert de galons verds, il tira toutes les viâuailles & munitions de guerre de fon nauire, lequel il cacha le mieux qu’il lui fut polïible entre les arbres apres faupir vuidé. ^ Alors OCCIDENTALES. LIVRE VIIL iS-^ Alors il print Ton chemin au trauers du païs, auec deux pièces de campagne , quantité de viures & autres chofes iieceflaires, eftant guidç parles Simaro^es: ayant cheminé douze lieuésjilarriua àvneriuierequi fedefchargedansla mer du zW;où ayant cou- pé du bois propre, il baftit vne fregate, longue dè quarante cinq pies ; auec laquelle eftant porté le longde lariuiere dans lamer du Zud, il fut mené par les mefmes Negres a vne des Ifles de /as Perlas j ou ayant demeuré dix iours en embufehes caché, il print fans peine vne barque qui venoitdu Peru^ dans laquelle il trouua foixante mille efeus, outré vne grande quantité de vin & de farine -, & peu apres vne autre qui venoit du port de laquelle portoit de l’argent enmalTe pour la valeur de cent mille pezos } lo enfin ayant mis tout l’or & 1 argent dans la fregate, apres auoir employé quelque temps a tirer des Infulaires quelques Perles, il s’en retourna à la riuiere par laquelle il efloit defeendu , & renuoya eftant auprès de l’emboucheure d’icelle , les barques qu’il auôit prinfes , ce qui fur vne grande faute , comme il apparut apres. Car les Negres qui habitent rifle.aulTi toifl apres le partir des Anglois s’en allèrent auec leurs canoas à VanamAy & aduertirent le Gouuerneur de tout ce qui s’eftoit paffé. Or icelui efquipa promptement quatre barques, qui furent preftes en deux iours , dans lefquelles il mit cent foldats & vn bon nombre de Negres pour ramer : auec lefquelles lukn de Ortega Capitaine alla anxips des perles, afin d’apprendre d’autant mieux le chemin des An- glois, où il fut long temps en vain, iufques à ce qu’il rencontra les barques que les An- ^o gloisaùoyent renuoyeesj par ainfi ayant apprins dés mariniers que les Anglois eftov- ent entré dans lariuiere auec leur fregate j il tira auffitoft celle part; mais comme il'y fut arriuéjils ne furent pas en moindre doute, car pource que la riuiere defeend en la mer par trois emboucheures , iis dehberent quelque temps dans laquelle ils deuoyent entrer,iufques à ce que l’imprudence des Anglois les tira de ce doute, par le moyen des plumes qu’ils auoyent plumé de quelques poules qui fîotoyent dans le -plus petit ca- nal de la riuiere : de forte qu entrans dans icelui , ils trouuerent enfin au quatrième iour la fregate des Anglois lailTee à fec,vuide de tout excepté deviures, &gardee par lix hommes, Ivn delquels fut aufifi toft tue des Elpagnols, les autres prindrenc la fuite. Apres Ortega ayant defeendu à terre quatre vingt foldats, print fon chemin à trairers 5 0 du païs,refolu de ne fe repofer tant qu’il euft recouuert vne fi riche prife:à peine eftbit- il à demi-lieuë du riuage, quand il trouua vne loge faite de branches d’arbres , dans la- quelle les Anglois auoyentcaché tous leurs trefors.ioyeux donc d Vn fi inopiné fucces, il retourna au plus ville vers fes barques, lans le Ibucier de pourfuiureles Anglois' plus outre. Mais le Capitaine Anglois ellant aduerti par les loldats qui s’en elloyent fuis de la venue desEfpagnols.les pourfuiuit en diligence auec roues fes gens & deux centsNe- grès, ôr les alîaillit furieulement: mais iceuxellans couuerts & défendus d’vn bois pro- chain, mirent en delroute les AngloiSj defquels ils en tuerent onze & cinq qu’ils prin- drent prifonniers. Enfin ils apprindrent de ces prilonniers, pourquoi l’Ànglois auoit tant demeure la auec vne telle prinle ; fçauoir le mauuais accord qui eftoic entre lui & 40 lès gens, lelquels vouloyent que le butin fut aulîi toll partagé, & demandoyent impor- tunément que chacun eull la part, & refulbyent opiniallrement de porter ces richef' les au nauire lous autres conditions, par ainlî qu’il s’en elloit allé au dedans du pais pour loè'r des Negres afin de les porter. Il fut aulîi defcouuert par les mefmes, où il auoit cache fon nauire. Les Elpagnols ellans retournés à Panama, rapportèrent l’af- faire comme elle s elloitpalTee.Or le Gouuerneur enuoya lettres à fon Lieutenant en la ville de deDios, &laduertit de toutes ces choies, qui ellant allé auec quatre nauires dans le golfe <3?^ raba, lâns aucune peine le nauire des Anglois & leur ca- non.Le relie des Anglois ayant longtemps erré parles bois & montagnes , comme ils en elloyent venus la,qu ils failoyent quelques chaloupes, auec lelquelles ils penlerent yo prendre quelque nauireen la mer du Nord, pour s’en retourner en leur païs, ils furent furprins & emmenes prilonniers a par cent cinquante foldats que le Viceroi du Peruanoit enuoyespour les chercher, où ils furenttous faits mourir, quelques ieu- nes garçons exceptes, aufquels on pardonna a caule de l’aage. Voila la fin qu’eut cette entreprinfe hardie & lur toutes autres mémorable, en partie par rimprudencè-ou aua- rice duCapitaine,en partie par la delobeïllance des loldats, &: l’importune dilcorde en vn lieu fi efloigné & vn temps fi mal propre. Nn Z, CARTAGENE. • -M ^ V -'■fe-:' z8 4- DESCRIPTION DES INDES C A R.T A G E N E. C H A P. XIII. Limites du Çouuernement de Cartagene, qualités de fin atr de Ja terre , diuerfes Proumces. Proche du Gouuernement & de kProuincedeP^;?/??^?^ vers rEft,efl; celui de Carta^eneM(\\xd 2iïcccu Ton nom de fa Métropolitaine : Or il eft ficué fur la mer du Nord^ayant de long entre l’Eft & l’Oueft, depuis la grande riuierc de la Mag- 1 o ^f/ mais elle eft vn peu plus grande, elle s’appelloit anciennement Codega,m2.m^ tenant Carex,2Cf^riZ deux lieues de long & à peine demie de large, desfournie d’eaux,&: J O feulement habitée depefeheurs au temps paffé. Lorsque Fr. Drac ^nnt cette ville, comme nous dirons maintenant,!! trouua dans cette Ifle vn puits fort commode pour y prendre de l’eau; Oril la prife.poureftrefurtoutefort agréable, comme èftant toute parfemee d’arbres fruiétiers , fçauoir d’orangers Vautres femblables , difpofés d’vne fi belle ordre & plantés par allees,qu’elle reprefente vn fort beau verger. Cette ville fut baftie l’an cio Id xxxii par Pedro HeredtA , qui fubiugiia les Sauuages voifins auec grand labeur & induftne , car les naturels de cette Prouince eftoyeiit fort belliqueux N 11 3 éc fans 1Î6 DÈS C RIPTION DES INDES & fans crainte, & fe precipitoyenc au combat autant les hommes que les femmes . d vtie telle furie, qu vne ieunc fille ( félon que ie trouue que les Efpagnols ont laifi'é à la mémoire ) qui à peine auoit dix huid ans, tua de fes fléchés enuenimees huid Elpa- gnols auant que mourir. Au refte cette ville s’eft accreuë merueilleufement, &fes ' Bourgeois y font deuenus fort riches , pour la commodité dn trafic qui y efi;,ear tous les ans il y arriue vne grande abondance de toutes fortes de marchandifes d’EfpagnCi & la flore Royale qui va à i^^Z)/0j-,afouuentcoufl:umed*yhiuerner;mais prih- ■ cipalement toutes lesrichefles & autres marchandifes, qui defcendentdu nouueau Royaume de Granade parle grandfleuuedela font d’ordinaire amences. Enfin elle fut prinfe l’an cio lo lxxxv parlés Anglois^fous la conduire de François io Braci car encore qu’ils fuflent informés defon deflein, vn mois entier deuant fonar- riuee , & qu’ils euffent préparé tout ce qui eftoit requis pour leur defenfe , dreffé des remparts aux endroits les plus foibles , planté le canon fur le paflage le plus eflroit, & . accreu de nombre leur garnifon,neantmoins par la grandeur de fon courage il la print fans grand peine & la pilla: & en ayant bruflévne partie, il rendit lerefteauxBour- geois, moyennant cent & vingt mille ducats qu’ils lui payèrent. Le burin ne fut pas fort grand pour la renommee de la ville, pource que les Bourgeois auoyent retiré long temps auparauant tout ce qu’ils auoyent de précieux dans les montagnes,& principa- lement-dans la ville de T !?/»,qui eft’plus au dedans du pais. C H A P. XV. , ample dejcription de la ViUe de Cartagene ^ de fin Port^ luan Bapdfte Antonelli. AV Chapitre precedent nous auonsbriéfuement defcrit la ville de Cartagene^ fon port,&auons principalement fuiuiiïfrré’r^, maintenant nous auons iugé à propos d’inferer ici mot à mot, ce que nous auons trouué eftre plus claire- ment efcrit touchant icelle par Antonelli ^ comme il defpeint au Roi d’Efpagne l’an cio lo Lxxxvii. Cartagene ( dit-il) eïd vne ville & mefme Métropolitaine de fon Euefchéjà quarante lieues de la ville de S. MjtrtheNets l’Oueft:, & à dix degrés delà 5 ligne vers le Nordj elle eft fituee dans vne Peninfule fablonneufe j elle a enuiron qua- tre cents cinquante familles, & des maifons fort belles & la plus grande partie de pier- res 5 il y a trois Monafteres , deux defquels font en la ville , & le troifîeme hors d’icelle, auquel on va par vne chauffée pauee de cailloux, lauee des flots d’vn cofté & d’autre : le trafic y eft fort grand, d’Efpagne, du nouueau Royaume de Granade,d\x Peru,des Mes, &de tourelacoftedc cette Continente qu’on nomme vulgairement Terra Firma; enfin le lieu y eft fain. Elle a vn fort bon port capable de plufieursnauires, dans lequel on entre par deux paflages j l’vn a enuiron demf lieue de la ville , large de neuf cents pas & fort profond, par lequel communément les nauires entrent j l’autre eft à vne lieue du precedent vers l’Oueft, qu’on nomme la Boca chica,Ce^ à dire, petite embou- ^ o cheure, qui a aufli neuf cents pas de large, mais le canal qui y eft nauigable n’a pas plus de deux cents pas delarge Sequinzeou vingtbras de profond, & parfois moins, lequel ' il faut toutesfois que ceux qui veulent entrer dans ce port fuiuent 5 pource que la cofte d’vn cofté & d’autre eft entrecoupée & a plufieurs recoins : ayant palfé ce canal pour entrer dedans le port, il faut approcher le riuage de l’Me Orrx, prenant foigneufe garde à efuiter plufieurs baffes & rochers , qui font à peine couuerts de deux où trois pics d’eau ; de maniéré qu’il n’eft pas feulement befoin d’aiioir vn bon Pilote, mais aufli ; d’enuoyer deuantlachaioupe,pour fonder la profondeur du canal. • Il y a en outre trois endroits,par où cette ville peut eftre approchée par terre & at- taquée de i’ennemi.Le premier eft par où l’attaqua & la print,quieft vne jo baye ou vn dos de fable, lequel a d’vn cofté la mer, & de l’autre le grand lac qui s’eftend vers le port : & ce dos eft large d’vn ccdlé de cinq cer^s pas , d’vn terroir fablonneux & defcouuert d’arbres ; de forte que l’ennemi l’attaquant par ce cofté, eft contraint de marcher ces cinq cents pas à defcouuert iufques au retrenchement, &: delà défaire encore autre cinq cents pas du toutenlamefme-façon iufques à la ville :ce dos eft large de cent & trente pas , où les Bourgeois auoyent lors dreflé vne trenchee ; de ce cofté la ville O.C CI DE NT AL ES. LIVRE VIIL 287 la ville a défia par deux fois efi:é prinfe de l’ennemi ; voila pourquoi nous y auons plan- té au fond vne grande quantité de paulx, par lelpace de cinquante pas ; pource que ce riuagc ell: fort périlleux & empefché deplufieurs bancs; & dans la valleenousyauons drellé vne petite redoute , où on peut placer trois ou quatre pièces de canon ; & y auons creufcvn large toile, qui refpondd Vn collé & d’autre à la mer, de maniéré que la ville ell pour le prclcnt allés fortifiée de ce collé là. L’autre palTage ellvn peu audellbus du premier & le long du mefme dos de fable , lequel ell ordinairement appcilé U Ciejiega^ où l’ellang delRoreado : or en cet endroit ce dos ell large de trois cents pas iufques au riuage delà mer; de l’autre collé èll le marais, dit/4 lequel I O ell plein d’eau tout le long de l’annee,par ainlî fi l’ennemi vouloit attaquer la ville par cet endroit, il feroit contraint de marcher le long d’vn dos de fable, qui ad’vncollé la mer & de l’autre vn bocage, & enfin par vn champ humide, mais qui n’eft pas du tout couuert d’eau: voila pourquoi nousy auons défia balli vne fortereire,auecfes ballions fie vnfolTé large de foixantepiés,de forte que l’eau delà mer vient maintenant iufques à ce champ humide,& auons par ce moyen bouché cepalîage,quifaitque la ville ell à prefent fituee comme en vne Ille ; il y a deux mille & foixante pas entre ce lieu & celui où Drac auoit defeendu. Or l’emboucheure du port ell proche de la chaulTee pauee de cailloux & du Pont qui va au Monaftere de S. François ,• & cette chaulTee ell longue de . trois cents pas & large de douze,lauee d’eau d’vn collé & d’autre,de forte que ce trois- 20 ieme endroit ell le plus fort de tous;là nous auons fait faire vn pont-leuis & vne plate- forme au dellùs, fur laquelle on peut placer quelques pièces ,& d’vn collé & d’autrè vne trenchee derrière, laquelle des moufquetaires peuuent ellre couuerts& d’icelle empefcherl’eniiemi fans dâger. Sur la pointe de terre, qui atteint Tentree ou l’embou- cheure du port vers le Monaftere de *S’..4;^;2^appellee2r4ri?j', nous y auons fait faire vil fort quarré de bois, duquel chacun collé a trois cents pas de long ; derrière le bois il y a vn rem part de terre , large de quatre piés , & rempli au derrière de fable, où on peut loger feize pièces de canon & cinquante foldats en garde. Cette forterefte ell fur rou- tes necelîà'ires pour la feureté du port, car tous les nauires qufentrent dans icelui, paf fent fi près de cette pointe, qu’on pourroit d’icelle y ietter aifement vne pierre auec la J O main : toutesfois fi Tennemi s’efforce d’entrer dans le port, onferavenirlesdeux ga- leres,quife plaçant au deffous du fort auec lelpron vers la mer, batront les nauires en- nemies au deuant cependant que le fort les batra en flanc ; car par ce moyen il aduien- dra que les nauires de Tennemi eftans ainlî batuës de tous coftésjferontcontrains de fuiure leursr:ours,ou toucher fur les rochers appellés vulgairement.5/^^,ou mefme fur les bancs,qui defeendent de Tille Carex auec grand péril. Que 11 Tennemi ayant paffé cette entree , s’efforçoit d’entrer auec fés barques & longues Tulles parTeftroite em- boucheure,il faudroit pour cet effet tenir preftes quatre fregates,qui tireroyent à for- ce de rames lesgaleres dans le plus eftroit du canafear pource que cette entree ell fort dangereufe à caufe des baffes & rochers, on pourroit aifement par ce moyen couler à 40 fondsles chaloupes de Tennemi & mefme les nauires. Etafind’affeurerencore.dauan- tage le port, il feroit neceffaire de baftir fur cette pointe Tcacosvn fort chafteauauec quatre ballions ; & fur Tille Carex qui ell vis à vis,il faudroit faire du collé Oriental d’i- celle vne tour quarree,&: y mettre quatre ou cinq pièces, afin de chaffe^aulîîparce moyen les barques du port, qui peuuent s’y couler de nuiden cachette, & piller ou bruller noftre Ilote fur les anchres , mais fi les lentinelles de ces deux chafteaux font bon guet,il n y pourra entrer nauire ni chaloupe làns ellre veus. Or fur la plus eftroite entree du port,il y faudroit auffi baftir vn petit chafteau, furie collé d’Oueft delà mef me Ille,& y loger trois ou quatre pièces, & fixouhuiét hommes pour y faire la garde. Toutes ces choies eftant ainlî faites , cette ville lèroit extrêmement bien fortifiée ; Il 5 o importe grandement à SaMaiefté,que cela foit effeélué,car le lieu ell fans doute la plus ferme defenfe de tout ce pais & comme le bouleuert. Voila ce qu’il en dit. Ceux qui ont veu depuis peu cette ville , nous la delpeignent en cette façon : que c’eft la place la plus marchande & la plus frequentee de toute TAmerique ; car elle ell habitée de quatre mille Elpagnols,& d’enuiron quatorze mille Negres de tous fexes 82: anges : que la ville eft ceinte tout autour d’vne muraille de dix huiél piés de haut dés la terre, auec fes ballions, &vn rempart de terre derrière le mur: elle a deux ballions auprès 2, DESCRIPTION DES INDES auprès de la porte, par laquelle on fort pour aller vers vue pointe de terre nommet de Cama } deux autres plus petits auprès la porte qui mene aux faulxbourgs j deux plus ' grands au delTus la porte i & deux fur le riuage & fur le chemin qui va à la forterefl'e, la- quelle cqmmande Temboucheure du port.defquels baftions celui qui regarde leNord, êc où le rempart eft batu des flots de la mer efl: le plus grand. Il y a tant dans les bafliions que furies remparts enuiron feptante pièces de canon placées, donc la plus grand part font de fonte. Le faulxbourgefl: fitué fur vn banc de fable, qu’on nomme Xex^aniy auquel on va de la ville par vn éftroit fentier, & pat vne porte où il y a vn pont-leuis, de cefaulxbourgon pafle vers la terre ferme aufli par vn fentier eftroit, de forte qu’icelui faulxbourgefl: dans vne Peninfule;commeaufli la ville, de laquelle on va à laConti- lo nente parvn chemin eftroit, ayant d’vncofté la mer, & de l’autre le marais nommé Cienega&cÏQ. deftroit Méditerranée par ce fentier les Anglois prindrentla ville, pour cette caufe on y a fait vn folfé, & la ville ceinte de murailles aueerdeux ba- ftions : ce chemin tire vers leNord-eft: delamefme ville il y a vn autre fentier qui va vers le Sud-oueft, lequel au commencement eft fi bas qu’il eft parfois eouuert de la- maree, eft fort eftroit ayant d’vn cofté la met , & de l’autre le fonds du port y enfin le dedans d’icelui eft eouuert d’arbres de manglas.il y a deux emboucheures pour en- trer de la mer dans le portja première defquelles,& qui eft la plus prochaine de la ville eft appellee Boca grandeS^^l'à pointe Occidentale de laquelle il y auoit vne fort gran- de fortereflre,mais pource qu’elle eftoit fondée fur le fable,elle eftoit fouuent menacee lo de ruine, enfinl’an cio loc xxviii elle fut ruinee. Vis avis fur la pointe Orientale de rifle dont nous auons fait mention ci-defiTus , il y a, vn petit fort bafti fur la roche, enuironné de la mer à maree haute, où il y a douze pièces de canon & quinze ou feize foldats en garde. Cette Ifle qui diuife les deux emboucheures , eft appellee de Naucy elle eft haute,& longue d’enuiron vne lieue & demie. La poin te Occidentale d'icelle eft nommeeP^^t^ delcacos, de laquelle s’eftenden mer vn banc fort périlleux aux ma- riniers,prefque deux lieues loin, qu’on nomme Salmedma. Auïeiïccmnïon deux lieues au dedans delà première emboucheure eft l’anchrage des grands nauires , au droit du- quel vers le Nord il y a vne forterelfe quarree, ayant de courtine cent & cinquante pies, ceinte d’vn haut mur,& d’vn rempart de terre par derrière, dans laquelle il y a dix ^ © huid petites pièces de canon, & vingt cinq foldats ou quelque peu plus en garde. Dés icelle tirant vers la ville & leNord-eftpar vn petit efpace,le port s’eftroicift; auquel endroit il y a à la Continente vne petite forterelfe ronde fur vne petite montagnette de fable, laquelle on nomme Buerte Silla de fa forme ; De cette forterelfe vers la ville & le fauIxbourg,Ie port n’a pas plus de trois pies de fonds en plufieurs endroits. La ville eftfortdifetteufe d’eau douce; voila pourquoi il la leur faut aller quérir à vne monta- gne qui eft au Nord, & proche du lieu où anchrentles grands nauires, laquelle f dite. Monte de PopaoM deGalera^où il y a vnMonaftere de Moines, nommé Madré de Bios de la Pop a. C H A XVL 40 ^fle des Villes ^ 'bourgades de ce Gouuernement» En outre il y a dans le Gouuernement de CartageneciudQiuQS petites villes habi- tées parles Elpagnolsjfvnedefquelles eft appellee T^rtf/?4afteure, qu’on remarque le courant de cette riuiere à dixiieuës en mer de fon emboucheure, & deux lieues delarge,& que les nauires n’en approchentpas plus près fans danger,à caufe des remuements &decoulements du courant de la riuiere à l’en- contre celui delà mer. Elle a vne Ifle au milieu de fon emboucheure longue (comme les Efpagnols difent) de cinq lieues, & large de demie, le plus large canal d’icelle eft 3 0 du cofté de ,!>. Marthe,içzx. où les nauires ont d’ordinaire couftumed’entrer, d’où vient que fort fouuent, comme nous auons dit cLdeiTus, les Efpagnols donnentàcetteri- mQtclcTîiomàt S. Marthe. Ceux de noftre nation qui ont approché afles près de cette riuiere, tefraoignent tous d’vne voix que cette riuiere fort en mer par trois emboucheures, IVne defquelles qui eft la plus prochainedei’.Jtf;^ia!,combien qu’ils ayent plufieurs fois elTayé de les fubiugüer auec grand perte de leurs gens. 40 La mer qui laue cette Prouince , comme auffi les riuieres qui la trauerfont font fort poiflbnneufeSjSc nourrilfent d’excellent poiflrôn de toutes fortes* En outre cette Prouince comprend ces Prouinces particulières, f ozdgttàca , Betoma» TaîronaiChimilajBurîtaca. La vallee de Tairona eft fort ample & fiche } elle eft diftan- te de fix ou fept lieues de la ville de S. Marthe^ ou à dix huid, comme Herrera eferit ailleurs ; & à fix de la mer du Nord : la vallee àcMongay en eft proche, qui iouït auffi des mefines richefles que l’autre. ' Buritica eft à treize lieues delà ville de S. Marthevets loiRamadai & îaProuince de Bonda en eft à trois lieues de demie } enfin la vallee de Cote eft au milieu entre la mefine ville & Rûz,igueica. y o Nous traiterons ci-apres de la vallee quand nous pillerons de la ville c/e los Reyes. Les Sauuages de la Prouince Chimlà font renommés en force de corps & vàîlîaftce, & les femmes en beauté. Dans cette Prouince les hautes montagnes de neiges , que les Elpagnois nomment Sierras Nkuadas , prennent leur commencement, & apres aùoir couru aU trauers infinies 1 O OCCIDENTALES. LIVRE ^ infinies Prouinces, & mefnie an trauers du Pcru & de Chili , finirent enfin au deftroit de Magalian.Ces montagnes le voyencprerque de trente lieues en mer,toufiours cou- ueites de neige, & a caufedela vallee de r^/Wquieft au delTous, elles fontYouuenc appelJcesdesmanniers montagnes dcTairona. D’icelles defcendent à l’improuifte de toits vcn ts , qui font fort redoutés des matelots j de forte qu’il faut nauige? le long de ces coftesauec grande prudence. u^^cneiong En^i il y a ^uiourd’hui cinq tant villes que bourgades que les Efpagnols habitent en ce Gouuernement,defqiieIlesnous traiterons felonleurordre. C H A P. XIX. S. Marcha principale de ce Gouuernetnent. L^S Gouuernement,&delaquelIeilportelen()meR appellee .y. Marthe ; a dix degres de la ligne , comme Herrera aireure,ou à onze comme veut Martyr; ou bien à dix degrés & trente fcrupules , comme nlufm^rs ontiemarque : & afeptantequatredegrés du Méridien de rHedevets rOuelLcomrne 1 entlesEfpagnols. Elleeft baftieen vnlieu fortfainfurla colle de la mer du Nord- ayant vn port fort ample &aiîbufé, où il y a vn commode anchrage. & bonnëoVpot tunitepourtirerlesnauiresafec,afinde les racommodet; il a demi-Iieuëde large &: zo VIS a VIS de là ville vne haute montagne,par laquelle il eft défendu à l’encontre de^Pin certitude des vents ; la mer y ell moyennementpro fonde , fans aucun.rocher ou banc dangereux aux nauires ; enfin il y a bonne commodité pour fe fournir d’eau & de bois Cette V.IIC a efté autresfo^ fort peuplee , mais maintenant elle eft hnd Jo.rn^ ab.tans,depuis quelesflotes dEfpagneontcefféd’yaborder. La ville eft diftante de qa on nomme de U Rmada de xxiv lieues vers l'Oueft- de TmeHffe fituee fut la nue de lagtaÿe tiuiere de la quatantelieuS vers k Npf Le Gouuerneut de cette Prouince,& lesauttes Officiers royauxy font leutdemeure yavneEghfeCathedrale.l’EuefquedelaquelleeftSufftagantLMettopSdu 30 L°cëtTe“vübru7oidTr f 5oüecettevilleauKoidEfpagnelanclDlDLxxxviiencettemaniere .y. Marthe principale ville &Euefché delaProuince,eftfituee à dix degrés & trente fcrupules de la ligne vers le Nordj fur vne baye de fable allés près delamer j cllecon- ti en t enuiron trente familles,les maifons font faites de rofeaux & counertes de fueilles de palmiers, quelques- vnes auffi de tuiles , ils trafiquent auec les Sauuages de cette re ^ autresvaiffeauxdeteriicomraëS ' ^ & des veftements de coton: Or les Bourgeois portent leurs marchandifi;<î d Elpagnols Elle a vn fort bon port , enuironné iufques fur le riuage de hLteëmL ao rc?sTëNo7d lefquelles comme auffi par deux Ifles qui font au deuant d’icelui ^ nn’L ^ ^ ^ extrêmement bien garentides vents & desflots de la mer, qui fait q encoie que cette région loit expofeeâux vents d’Orient & fort fuiette auxtempe. fh?t"riurdam d™ f ce port fans danger, &defchatger à terre fa charge. Au dedans du port il y a vn lieu que bon nomme Cdldéra, c’eft à dire, cha.ide- Au lelîe il n-eft anciennement de tiret les nauires à fec &les racommodet. U refte n ell nullement necelfaire de fortifier ce port,, pource qu’il y aborde rare mentdesnauires,&il va fi Peudep-en^danç le ^ aoorac rare- 1p, r - Pf, ^^^^^°^”^^^ville,quisenvonr deiour enio'urail- Roi d or/ ^ frequentes pilleries de l’ennemi.Sice n’eft que d-anantare il pleuftau narP U a en la print fonchemin pt la.y abordaft,& pnnt de beau & s’y foutnift des chofes ne/itaims : ce qui Sft ' rftmdelTeîî'’ / WoKsaffeutent tous dVne voix, & toufioutsauec vent ar- Jîî nh P®""™': dfcflet fon cours droit vers le Cap de S.jMtheme,de PWe de C«- termtCùmTrs néril ce moyen cette flore eui- rul/fement 2 ’ ces grands tourbillons de vents, qu'on nomme .v irréf ‘le la cofte du Sud d'HMa- fes Étlesdeuxf'// grand perte d'hommes & de matchanffi- deux flores nauigeans énfemble, celle qui va en la Nouu. Bfpagne s’arrelleroit Oo 5 \v *1 description des INDES ici &l’autreiroitdroità Cm.gene. Que fi cela fe faifoit . alors il faudroic fortifier lé po« en cette façon : ilfaudroit faire vn petit fort fur la montagne qui commande fur fembodïheure du potc,& y placer quelques pièces de ^ roit ncceflaire de baftirvne tour ik vne forteretTe vn peu plus grande que 1 autre & la fournir de plus de canon : car celaeftant fait les nauires ne feroyent pas leulcmcne Lurement à l'anchre ici, mais aufli les Bourgeois fe pourroyent détendre des pilleries del’ennemi. Enfin tout ce qui feroit neceffaire pour cette affaire, comme pierre , fable, ciment & bois fe trouuetoit commodément proche de la ville. Voila ce qu il en dit. Adiouftons y vn recent pourtrait de la ville , comme le Gouuerneur mefme di- celleledefpeintauRoid'Efpagnel'anclDlocxxv,. eftbatuêdelamerdu ' La cofte ( dit-il ) de la Continente gift entre 1 EU & 1 Ouell , elt batue de la mer au Nord, Celle entre ici entre deux pointes en forme de demi-lune i la pointe Or.en- tTeft appellee l'Occidentale Lifan au milieu de cet efpace .1 y; a vne Me de rochets qu'on nomme e/ ,• laquelle defendle port de hmpetuofite des flots de kmer Lacorne Otientalea vn petitchafteau quarté dans lequelil y a trois ouqua- r “lommes en garde iour 6e nuift , afin d'aduertir les Bourgeois du nombre des nau^ res qui viennenf de la mer. La ville eft fituee au fonds de la baye fur vne place rare & nrcfqùe aulfi balTe que la mendu collé de l'Ouell il y a vne fortereffe quarrecqui n eft ras beaucoup -n-ande, car chaque collé n'a quecentpies Géométriques! Icmur di- «lie eft d’enmran trente palmes de haut ; dans laquelle il y a quatre pièces de fonte, „ &eftgatdee par fept ou buift hommes : qui eft certes vne pente garde contre * dans entr'eux^ Voila quelle eftoit lors la face de cette ville & de fo dans entt’eux Voila qu’elle eftoit lors la face de cette viiie ce ne fon port fort com- , iode. Cette ville a fouuenr efté prinfe &r pillee par les François & Anglois,&l an “iD ID xcv elle fut mifetablement deffiguree- du feu par Dr.,,- & non moins pillee l'an d'apres par Cheualier Anglois Elle a elle auffi affli- eee parios Belges l'L cId Idc xxx. 6<:prifepar le General de la compagnie desIn- ; de! Occidentales Paur. mais elle fut rachetée par vne pente rançon. , C H A r, XX. %ej}e às Villes de ce gomernement, Tenerilfe , Villa de Palmas, Cuidad de los Reyes , Ocanna eÿ Ramada. ON conte entre les villes de ce Gouuernement , premi«ement reneriffe. Cm , lesbords de la riuierejde hMagMend tfoversleSud-oueft,à laquclleonva parvn fort difficile chemin pat terie, mais allés commodementparmer 66 partagranderuiiercdclat.^a^*/r«. La fécondé eft Tam.lameqtte, dite des Efpagnols Fi/l. de lus PdmM , a feptante cinq lieu"X‘FrversI=sUàvingtde àdeuxdelagrandenu.ere d la MaMene • à huift degrés de laligne vers le Nord s en vne région fort chaude, pource 40 S i^s gride parde de l'anSee les vents du Sud y foufHent.86 par fort de pefans &defaneaMesventsd'Oueftiaccombienquelateir6 y foit picrreufe 6thautc,elle ,.1> nca^tmoins plate pour la plus grande partie, 86 belle en pafturages. par ainfi for piprràvnourrftdubeftail!elleeftcouuertedeforeftsefpaiflés,principalemen^ Fonn du riuage de la riuiere, les inondations de laquelle font dans le plat pais plufieur eftanes 86 raarais.au bord defqqels les Sauuages ont leurs habitants, qui vont fu iceuxLec leurs canoas 86 prennent grande quantité de fort bon po.ffon . fe nou^Firent lé plus fouuenti car il y a force Mamù 86 beaucoup de Crocodilles. Au eft!k"erroi eft infertile , combien qu’il y croilTe des oranges douces & aigres en abondance,commeauir!desG»««.«,fiuiadomeftiquedecesregions. LesS.uuage î kc ci Pramnees font d’vn naturel llupide.tardifs 86 grandement addonnes a do mm à quoi ils palfent prefque tout le temps.fi ce n’eft quand ils s employent a banqueter de la ville de 5. Cü-îarthe vers le Sud-eft.à trente de la ville .* a cent ^quatre vingts de la Métropolitaine du noilueau Royaume de Granadc ; lur la nue de a grarn^ OCCIDENTALES. LIVRE VIIL timztcàcGuataporiilQ. terroir de cette ville comme au/îi toute la région voifine,neft pas beaucoup chaud , pource que l’efté , qui aduient là és mois de Décembre, lanuier, Feburier,Mars Auril , les vents d’Orient y foufflent continuellement qui modèrent l’ardeur ; & les mois d’hiuer, aufquels il pleut fort, pour la proximité des montagnes, qui font prefque touliours froides , ils font trauaillcs de beaucoup de catharres & de fiebures,notamment de quartes: les montagnes diuifcnt toute cette région du Nord au Sud,defquelles fe précipitent dVn cofté & d’autre des riuieres &torrents:Le terroir n’eft pas feulement rempli de paft tirages, mais il eft auffi fertile en fruits : toute cette région eft fort peuplee de Sauuages,quine peuuent en façon qui foit eftre contrains à I O obéir aux Elpagnols: car ils font belliqueux &cruels,oppiniaftres de nature, &addon- nés à toutes fortes de vices î & les habitans de cette ville font en trop petit nombre pour contraindre vne fi grande multitude.il y a plufieurs arbres fauuages, comme aufti qui portent des fruiéts , des J, & fomblablesjmais beaucoup plus de XaguasMs fruids defquels font femblables à des febues,dans la gouITe defquels il y a vn autre fruid cache de forme rondejd vn gouft comme les raifins de paftes : ils gardent les efcofles fi long temps quelles feichent, puis apres ils les pilent, & de la farine ils en cuifent du pain,quieftde bonne nourriture, comme ils difent. Il n’y a pas aufti faute de fruids dEfpagne, comme aufti decoton,dequoi les Sauuages fe feruent à faire des ha- bits. Quand il ont cfté mordus des ferpents ou autres animaux vêncneux, ils mangent zo la racine de Scorzonera crue ( laquelle herbe & fes facultés Nicolas Monard cCcïit pro- lixement en fon Spécial Commentaire de la pierre Bezaar bc de l’herbe Scorzonera) & mettent les fueilles d'icelle fur la playe, pour vn prefent remede , ce que les Efpa- gnols commencent à imiter ; les Sauuages aufti s’ils peuuent prendre le ferpent qui les a mordu, ils en mangent la tefte &; la queue crue, pourvu afteuré antidote. Contre les catharres & les douleurs de tefte ils vfent le plus fouuint de Tabac , qu’ils tirent par les narines , puluerifé fort menu-, &mefmeilsenboiuent ie fucverdpour lafcherle ventre . Il y a dans les montagnes plufieurs mines de cuyure & de plomb bù fans doute aufti d’argent, fi on doit croire aux indices, toutesfois les Efpagnols n’en trauaillent aucu- 5 0 ne , pour leur petit nombre & leur pauureté : mais les Bourgeois pour la plus grande partie s’employentà paiftre des vaches ou à nourrir des cheuaux,qui y font bons. En- fin la terrey nourriroit fort bien les cannes defucre,files habitans y employoyent leur peine & leur induftrie. La quatrième eft Oca^^a,qui eftappellee dVn autre nom S.^p^m,viUettQ fitueefur vn haure au dedans du pais, fur les limites delaProuince de Tamalameque. La cinquième la Ramadayqni fut premièrement nommee nouuelle SaUmancafk qua- rante lieues de la ville de Martha vers l’Orient, & à huid de la ville & de la riuiere de U Hacha, au pié des montagnes de neige, & fur les limites delà vallee Eupari, laquelle n’eft pas moins remplie de veines de cuyure que de pierres, comme Herrera parle. C H A P. XXL ' ' ^uieres, Caps, Ports O* Cofle de tout ce Gouuernement. La Cofte marine de ce Gouuernement eft entrecoupée premièrement de la ri- uiere Buhia,c^i fe defcharge en mer proche de Ramada puis apres de la riuiere Piras }bc^ms de celle de laquelle fo précipité des montagnes de neige & gaigne la mer d’vn vifte cours ; elle a prins fon nom d’vn Capitaine , qui la voulant pafter à cheual,fut noyé dans icelle. Apres fuit la riuiere de Don Diego, & à vn petit elpace delà plufîeurs..^^»^•^’^, qu’on 50 nomme Amones de Buricata ,*les Pilotes remarquent en leurs routiers, que venant de la mer vers ce lieu, on voit de loin vn riuage de fable blanc, ce qui ne fe remarque en tou- te cette fuite de cofte lequel eft au cofté del’Oueftde ces AncesbcànMenonlesnaui- res anchrent : eftant paffé cet endroit on rencontre le Cap de Aguia , à dou ze degr és de la ligne vers leNord,commeles plus experts Pilotes ontremarqué. Cette cofte eft fuiette à beaucoup de tempeftes & tourbillons de vent, pour la hau- teur delà terre ferme, car le Cap mefine fe dreffe en hautes colines entrecoupees,Sc au deftus DESCRIPTION DES INDES deffus d’icelui les montagnes de Bonda s’efleuent fort haut. Au cofté du Cap qui regar- de le Nord-oueft, il y a vne petite Ifle de rochers blancs fort remarquable. Ayant paf- fé ce Cap, la cofte Ce tourne vers le Sud-oueft, &: à enuiron vne lieue d icelui fe voit vne garitealTife fur le rocher, & au delà vne petite Ifle, entre laquelle & la Continentail y a vn canal qui mene au port de S. Marthe. Or courant le long de la cofte du port de S. Marthe vers l’Oueft, on ren contre pre- mièrement lariuiere Gajra.o^e Pierre Martyr eCcnt,eCt grande & capable de porter de grandsinauires ; elle defeend d’vne haute montagne, qu’on voit toufiours blanchette de neige î les Saunages difent que l’eau n’en eft pas bonne à boire -, mais afles près delà il en fort vne autre, de laquelle on ne dit point le nom, l’eau de laquelle eft fort bonne, i o Au dedans du pais on conte ces riuieres ; Guatapori ( au bords de laquelle nous auons dit ci deffus que la ville de los Reyes eftoit baftie ) defeendant des montagnes de neige, d’où vient que les eaux en font fi froides , qu’eftant beuës, elles prouoquent des catharres &: des flux de ventre : or on remedie au flux de ventre auec certaine canelle réduite en poudre &beuë auec de l’eau , laquelle arrefte Ci puiffamment le cours de ventre, quelle guérit mefme les deiedions fanguinolentes. Les Sauuages appellent cet arbre Carrapa , lequel mot fignifie en leur langage amer, car tel eft le gouft de fon bois. Or la riuiere Guatapori defeend dans celle de Cefar, à enuiron vne lieue au def- ' fous la ville de los Reyes. La riuiere Cefar court vers le Sud , & eft appellee des Sauuages qui demeurent au- 2,0 près PompataOiComme qui diroit Princes de tous les fleuues, ( car ce mot fonne cela ) auffi elle reçoit plufieurs autres riuieres de tous coftés qu’elle emporte auec foi en- tre autres vne afles grande qu’on nomme vulgairement Baâillo , qu’on dit procéder de trois lacs ; l’eau de cette riuiere eft dVn verd pafle,& les Sauuages la nomment en leur langue Socuignia.^èeCt à dire, abondante, à caufe de là multitude du poiffon qui fe prend en icelle,par le moyen d’vne certaine racine qu’on iette dedans , par laquelle les poiff fons font comme endormis : apres il y en a vne autrejqu’on nomme de las Jyumas,âinCi groflie par toutes ces riuieres, elle court par des campagnes feptante lieues vers l’Ou- eft,& enfin defeend dans le grand fleuue de la Magdekne : Or le païs qui auoifme cet- ^te riuiere d’vn cofté &d’autre,eft fertile & beau. ? Q A vingt lieues de la ville il y â trois grands puits, entre certains rochers, fitués entriangle,danslefquelsles Sauuages difent qu’il y a vnferpent d’vne horrible grandeur, qui a tué plufieurs hommes: Les Efpagnols l’ont fouuent foigneufernent cherché, & combien qu’ils enayent trouué quelques traces , neantmoins ils ne l’ont iamais peu voir : toutesfois les Sauuages croyent fi fermement qu’il eft là caché, qu’ils n’ofent en approcher pres,&mefmes craignent de demeurer és enuirons. 11 y a aufll d’autres puits en ces lieux là,qui iettent vne forte de bitume fi tenant & glueux,que les grands oifeaux en font prins &arreftés des Sauuages ont couftume d’oindre leurs rets,auec quoi ils pefchent,de ce bitume. RIO DE LA HACHA. C H A P. XXIL / 40 V'iUe (T Gouuernemenî que les ECpagmls nomment Rio de la Hacha. La Ville quieftauiourdhuinommeeüîitf H/if^^,anciennement appellee des Efpagnols Nojlra Sennora de la Nieues peu apres de los Remedios ; eft fituee fur la mer du Nord.à xxx lieues de la ville AeS.Martheyeïs leLeuantjôt a lx de celle de Corowets le Couchant^prefque au milieu entre les Gouuernements deS.Martha de i & enfin au midi du Cap elle eft baftie fur vne coline, à enuiron mille pas de la mer 5 fon port eft du tout couuert & expofé au vent de Bize. Du Cap dela^o iufquesàcette ville,il y a xviii lieuè's, le terroir plat ô£ bas, empefeoe de nulles pierres, ni arroufé d’aucun torrent: fon territoire nés eftend pas plus de huiét îieuës au dedans de laContinenteffort fertile & grandement abondant en tontes fortes de fruits d’Efpagne 5 plein de veines d’or &: de pierres de diuers prix & diuers vertus ; il eft auffi rempli de fort bonnes Salines. Il y a plufieurs belles fauuages,notamment des tigres des ours dans les riuieres grande quantité de Crocodilles. Il y a dans la ville enuiron cent OCCIDENTALES. LIVRE VIIL ^^7 ccntmaifons : elle eftoitpleine derichefles au temps pafle , lors qu’on n’y trouuoit,& CS lieux voilîns,abondance de Perles. Celui qui a rédigé par Commentaires la derniere expédition de François Z)rac,efcric d’icelle en cette façon:F/o de la Hacha àxx lieues du Cap de la Fe/a vers l’Oueft, eft vne petite yiHe^mais Ion terroir eft fertile &fort beau. Les noftreslaprindrentlurlami- nuid ; à vne lieue ou enuiron de la ville vers le Leuant, il y a vn banc & des baffes en la mer,de/quellcs les mariniers fe doiuent efloigner de demi-lieue deuant que d entrer au portrproche de la ville vers 1 Orient il y a vne petite riuiere qui defcendd’emboucheu- rede laquelle eftprefque bouche par vn banc de fiblej de forte qu’il efl: fort difficile 1 0 aux barques d y entrer, mais eftant au dedans peuuent monter fixou huift lieues entre la Continente. A Ex lieues delà ville vers le Soleil Leuant.il y a vne bourgadejnommee la Fancheria, demeure de ceux qui s employent à pefcherles huiftres àPerles;à v lieues niiuantlacofte vers 1 Oueft,& aiv duriuage mehne fituee la bourgade de Tapia,^ quelques cenfos dElpagnols , &plus outre vntroifieme bourg nommé vulgairement Salamca ( peuteftre Salamanca ) que nous auons appelle ci-deffus Ramada. Le Gouuer- neur de cette ville auoit promis vingt quatre mille ducatSjpour racheter la ville du feu & empefoher qu elle nefuftruinee, mais pource qu’il vouloir payer cette fomme en Perles, qu il eftimoft outre mefore5& qu’il necontentoitpaspar cemoyen les Anglois; ils bruflerent en cholere non feulementla ville, mais auffi les villages fufdits, & s’en al- io lerent autre part. Or la peche des P erles eftant maintenant du tout ou à toutle moins pour la plus grande partie faillie( car nous auons apprins que les Sauuages en pefohent encore quelques- vues aucunesfois )il n’y a point de doute que le norn bre des habitans n’y foit beaucoup diminué cçmme auffi les richeffes j au moins auiourd’hui la place eft fort peu renommee. ^ Auantque finir la defeription de cette partie deContinente, que les Efpagnols nom- ment Terra il fomble que nous ne ferons pas mal d’aioufter en peu de mots, comment les Efpagn ois font leur voyage tous les ans vers ces quartiers. Ilspartentdu portde.ÿ.Z»r4roudelabayede C(i/;^aumoisd’Auril,auecvne grande Ilote, dans la- quelle il y a le plusfouuent de ces grands nauires du Roi fort bien armés qu’on nom- j O me Galions, maintenant fix, parfois huiéî:,fouuent dauantage, rarement moins,& plu- fieurs nauires marchandsjaucc quelques caruelles.Cettefloteordoniiefon chemin en cette façon, elle va premièrement aux Ifles Canaries , auquelles ils prennent fouuent di- uerfos marchandifos fur tout du vin , & rempiifïent leurs vailleaux d’eau douce : Par apr^s eftans paffes le Cap de Nagayils tiennent la colle d’Afrique en veue, notamment le Cap Cantin } du(\ue\ ils prennent leurs cours vers les Ifles des Indes Occidentales qu on nomme Caribes ou Canibales }&c abordent tantoft à la Dominit^ue, tantofl: la Jl^atinine, parfois Gaada/npejôc aucunesfois à toutes ;où ils demeurent quelques iours pour y prendre del eau & du boisdequel paffage de la colle d’Afrique iufques à ces Ifles ils font maintenant en quinze iours, quelqueslôis en plus,rarement en moins: les Sau- 40 liages de la Afatinine haïffent moins les Elpagnols, mais les autres leurs font ennemis mortels . Ilfotrouue en ces lieux grand nombre de pourceaux & de fruiéls, qu’ils trafi- quent des Sauuages pour peu de chofo,comme parfois quatre pourceaux & fix poules pour vne hache , & ainli du relle.Ils ont coullume de vifiter là les nauires , & les Offi- ciers qu on nomme Cantanores de la Contratation prennent le nombre des paflagers fé- lon les rooles du luge des Indes qui demeure à Seuille. Partans delà ils tirent tout droit vers la Continente, & ont couflumele plus fouuent de la prendre en veuë auprès des montagnes de neige, proche de S. JHarthei^defuiurt la colle delà iulquesauCap ou pointe delà Canoa,6e ainü entrer dans le port de Cartagene:îîs demeurent dans ce port ordinairement huiél iours, ou ils defehargent diuerfes marchandifos & en rechargent 5 o d autres ; apres ils vont a Porto Belo ^ou ils foiournent fi longtemps qu’ils ayent chargé dans les nauires les trefors du Roi & des Marchands ;& delà ils retournent à Cartage- ne-y ou ils demeurent derechef a l’anchre quinze iours ou enuiron,& ayant acheué leur commerce, & receu leurs charges , ils tirent droit vers Hauana^ d’où ils retournent en Efpagne,au commencement de Septembre, ou plus tard parfois, ce qui n’efl pourtant fans danger,poùrce qu’apres le cÔmencement de Septembre il y fouffle de rudes vents deNord;& on rencontré autour des Bermudezdefurieufes tempefles, qu’on efuite fort foigneufement. Pp DES- -S 4- description DES INDES -cr -:; ■ ■ LIVRE NEVFIEME.;, ' îSîouueau Royaurne de Granadc; à Char. I. première dejcouuerture laf^^Nouiicau Royaume deGranade.j/^/? lan cIdIdxxx vi far le Captame Gonfaluo Ximenez de Quefada Licentié. V Liure precedent nous anons fuiui le Continent de l’ Amérique Auftrale iufques aux limites du Gouuer- nement de Vene^^ueU, maintenant nous retourne- rons vers les Prouinces qui font au dedans du païs, afin qu’eftans par icelle reuenus à la mer du Zud, nous lacions par apres le tour de lamefme Ameri-, que Auftrale félon l'ordre que nous nous fommes propofé. Or le Notmeau Royaume de Granade, comme. on l’appelle , fe prefente ici le premier ; mais ayant , que nous traitions de fos limites , & des qualités de i o fonaïr & de fa terre, il eft neceflaire de difeourir vn V vJ peu de fa première defcouuerture , ce qui donnera ^ quelqueclarté au difeoufs fuiuant. Parainfil’an cIdId xxxvi Ad^ miraldes lflesdeC4»^r/>^, enuoyadelavillede S.Marthe fon \Âcmcn2Xit Gonfaluo Xt~ menez, de ^uefada Licentié en l’vn & l’autre droit,afin de defcouunr fos régions fituees le long dib grande riuiere de la Magâelene ; Lequel eftant parti par mer & par terre, auec vue raifonnable troupe de gens , il monta par terre du long du nuage de mam gauche de la riuiere : où marchant , il efprouua de fort grandes difficultés au chemin, tant pour l’efpeffeur des bois, quantité des riuieres & torrents , & des marais & lieux bourbeux, où il faloit qu’ilpaflùft , que principalement pour les frequentes mcurfions ao des Saunages, hardis&cruels: enfinilparuintàvncertainlieu, que lesSauuagesnom- ment Tora, Pueblo de losBrachos^pomccqn^cn cet endroit il >; auoit quatre bras de riuieres qui feioignoyentenfemble. Ayans fiipputé leur chemin ils eftimerent qu’ils auovent fait iufques là depuis la mer , cent & cinquante lieues au dedans de a Continente : & pource que les chaloupes qui auoyent monte le long de la riuieie le rencontrèrent en cet endroit, & que les riuieres eftoyent fort grofles & refpandues dans le païs voifin,iltrouua bon d’hiuernerlà. 11 remarqua cependant que les Sauna- ges tranfportovent du fol de la mer iufques à foptante lieues loin en grande quantité j &quelesmefmes Saunages en amenoyent en ce lieu des régions fort eftoignees, d ou il conieftiira que de necelfité le dedans du païs eftoit fort peuple. Ayans paifo l hiuer, 5 o ils monterént le long d’vne autre riuiere, iufques au pié de fort hautes montagnes, que les Saunages appelloyent Opony lefquelles eftoyent larges, félon leur opinion de cm- quante îieuës,fort rudes & defertes, toutesfois les ayant paflees, ils defoenoirent dans y n païs plat & bien cultiué,où on aifombloit beaucoup de fol ÿ certaines fontaines fa- lees • & par ainfi ils pafterentdansla Prouince du pmifant Caffniue Bogota:\c(\i\d^^^nt efté auparauant aduerti de leur arriuee. s’y oppofa de tout fon pouuoir auec ies gens, mais il fut deffait prefque fans peinèi qui fut caufe qu’aucun Sauuage nola plus pat apres s’oppofec à eux, ils pillèrent les villages des Sauuages, & crouuerent qLntité d or & d'emeraudes i Delà ils pafl'erent en la région des Fancha , laquelle elt feparee delà prouince de Bogota par des petites montagnes , & auoyent guerre conti- 4 0 nue auec les fuiets d’icelui i Et comme les Efpagnols cherchoVent curieulemenc a O C CI DENT AL E s. -LIVRE IX. veine des emer.iiidesj ils arriuerent premièrement à la vallee à laquelle on donna puis apres le nom de à quinze lieues de laquelle il y a vne montagne fort haute, deinuee du tout d’arbres, de laquelle on tiroir ces pierres precieufes. Cependant qu’ils feiournentdans cette vallee, quelques Saunages vinckent à eux, qui s’offrirent de leur montrer le chemin pour aller dans vne autre Prouince , le CaJJtque de laquelle fc nommoit quelques Efpagnols fuiuans ces guides,rurprindrent T/mù à ladef- pourucue & l’amenerent prifonnier à leur Gouuerneur auec vn riche butin. A trois iours au delà de cette vallee , deux autres Cajftques nommés Sagamofa & Dmtama, fiifoyent leur demeure; vers lefquels s’eftans acheminés auec toute la troupe, l’vn 10 d’iceux s’enfuit aufli tofl; , mais l’autre ofa bien effayer le combat, qui ayant efté fans nulle peine deffait.fe retira en lieu fort de nature : ils eurent auffilà vn riche butin & fe retirèrent au camp: ayant fait conte de leur butin, ils trouuerent qu’ils auoyent défia affemblé 15112.^4 pezos d’or fort fin, & plus de 57000 de moins fin, enfin du plus vil qu’ils nomment vulgairement Falonia 18000 pezos : & d’emeraudes tant de grandes que de petites i8c o. Au relie ayans laiffé dans cette vallee tout leur bagage &: butin auec bonnegarde, ils allèrent par vn chemin plus aifé dans la Prouince de Bo- gota, peu s en falut qu’ils ne furprindrentle Cajjique dum fa cachette, qui efehapapour lors de leurs mains, mais il fut par apres trouué mort fur vne montagne d’vne playe qu’il auoit receuë. Sagipa fucceda en fa place , lequel fit paix auec les Efpagnols, & fit 20 alliance auec eux afin de fubiuguer enfemble les defquels par apres ils firent vne grande boucherie & bruHerent leurs deux bourgades :Toutesfois cette paix fut bien toll changée en la ruine àeSagipa caries Efpagnols affamés outre mefure des ri- ■ cheffes de ces miferables Indiens,comme ils eurent demandé ^Sagipa qu’il euft à leur defcouurirletreforde & qu’il l’eut refufé,ne le voulant ou pouuant pas mon- ' ftrer,fe mettans en cholere contre lui, ils le firent mourir, Payant bourrelé par cruels tourments. , Apres cela ils entrèrent dans cette région plate, laquelle on voyoit du haut des mon- tagnes, (les Saunages lanommoyentiVif^^^) dont lesjndiehs voifins auoyent exprès controuué des merueilles,afin d’enuoyer ailleurs ces e'ftrangers qui leur eftoyent def- 5 O ia en charge; mais comme l’euenement ne refpondoit pointa leur deffein, & qu’ils euffent en vain effaye de. paffer au trauers d’vne fombre folitude, ils retournèrent dans la Prouince de Bogota , & paflant par le territoire des Panches , ils contraignirent tant par menaces, que pargrandespromeffes,vnepartiedentr’eux à faire lapaix. Or Xiftienez, impola nom dxi N ouue au Royaume de Granade à CjCtte Prouince , qui lui femblaeftreaffés defcouuerte & domptee('pource qu’il eftoit natif de Granade znY.Ç- pagne ) & y baftit la ville de S. Fe' de Bogota. Et s’eftaiit refolu de retourner en Elpagne pourobtenir du Roi vnerecompenfe de fes labeurs ; fçachantque Rio grande(omdoit a vingt cinq lieues du lieu ou il eftoit ,il trouuapourle mieux, ’de defeendre le long d’i- celle,& de laiffer ce chemin fi fafeheux quipaffe à trauers les montagnes d’Opon. Or 4.0'Commeil fepreparoit,& vifitoit cependant les montagnes de neige qui trauerlent ce quartier,on l’aduertitfort apropos,que de l’autre collé de la riuiereilyauoit vn Capi- taine Efpagnol, lequel marchoit auec fes ttou^esyc’c^oiiSebaJîian de Belalca&ar , çyyii eftant parti de la Prouince de P opaian, ïziÇoit par là vn paffage pour aller vers la mer du Nord, & peu apres il entendit qu il venoit encore vne autre trqupe de deuers l’Orient, laquelle Nicolas Vredeman conduiloit, qui eftoit là venu du Gouuernement de Vene- zuela. Or il n y eut pas petite dilpute en celieu entre ces trois Chefs pour lapoffeffion de ces régions, la decifion de laquelle eftanstous prefts dedefererau Roi d’Elpagne, chacun d eux auec petite compagnie defeendit en diligence le long delariuiere, & eftansarriues a la mer, s en allèrent en Elpagne. Voila comment ce nouueau Roy’'au- yo me fut premièrement defcouuert,nous pourfuiurons maintenant le relie des chofes qui feruent le plus à noftre intention. Pp a ' Chap. ' C H A P. II. Limites Nouueau Royaume de Granade , qualités de fin air ù* de fit terre^ diuerfis Proumces ^ naturel mœurs des peuples d icelui. Le Nosmeau Royaume de Granade il eft limité par les Efpagnols, a de long c X X X lieues , de large au plus fpacieux de trente, au moins de vingt ou vn peu moins, lia pour bornes vers le Louant leGouuernementde Venezuela-, vers le Septentrion celui de S. ^^r^Mduquelileftfeparé parles larges montagnes d’Opon, à rOueft il y a Topaian , & vers le midi de grandes & encores peu cognues régions : il eft diftant de la ligne de trois, quatre ou plus de degrés vers le Nord. Il pleut fort en tou- * o te cette région ; & dans icelle fe trouue plufieurs forefts efpaiffes : il y habite partout grand nombre de Saunages, plufieurs defquels s’accordent encore mal auecles Efpa- gnols. Il s’y trouue quantité de vaches &: chenaux on mene de ce Royaume plu- fieurs cheuaux & mulets au Peru.Lcs principales Prouinces d’icelui font de tout temps Bogota^ TunUyC^m font pour la plus grand part enuironnees des Sauuages F anches. Or le pais des P anches eft grandement chaud, celui de Bogota au contraire elLifoid ou au moins temperé ; & comme ceux-ci fc nomment Panches ainfi les Bogotes & Tuniens font appellés d’vn nom commun iMoxes. Il eftoyent regis par diuers CaJJiques quand les Efpagnols defcouurirent premièrement ces Prouinces. La Prouince de Tunia(m- ctWo-àQ Bogota en veines d’or & d’emeraudes , combien que l’autre ne foit aufli desfournie de richeffes :L’aïry eft temperé entre le froid & le chaud, & balancé entre Tvn & l’autre , de forte qu on n’y fent aucune différence entre l’efté &rhiuer‘, & fort peu entre le iour & lanuid:,àcaufede la proximité de l’Æquateur. Larcgioneftdu tout faine. Les maifons y ont les parois de planches , & le toid d’herbe ou de foarre. Les naturels vfent à^Mays ou àù'CaJfaui au lieu de froment , ou de certaines racines de Tumas,o\i bien de raues qu’ils nomment Cubias : ils ont quantité de fel, qu’ils tranf- portent auec grand profit dans les autres Prouinces, principalement aux montagnçs, & dans celles qui font proche dp Rio grandes leur viande ordinaire eft de la venaifon, de laquelle ils ont grande abondance, comme aufli d Vne efpece de connils, qu’ils ap- pellent les Sauuages du Gouuernement de S. Marthe, Curies Ms n’ont pas tant I o d’oifeaux -, il s’y trouue peu de tourtres , beaucoup d’oyes , que les marais nourriffent ; enfin il fe prend dans les riuieres & lacs force bon poiffon. Or tout ainfi que la température des Prouinces y eft fort diuerfe,aufli les mœurs des Indiens y font fort diffemblables : car les Bogotes & Tuniens, font de grande ftature & habiles de corps, & leurs femmes font belles & blanches, & nullement fi brunes que les autres des Prouinces voifînes : ils fe couurent de manteaux noirs, blancs & bigarrés dediuerfes couleurs, ceints de bandes autour des reins, d’autres les ontiufqnes à la poitrine, & d’autres pendàns iufques aux iambes j ils ornent leurs cheueux de certains chapelets & de fleurs faites de coton , teintes & faites fort gentiment ; quelques- vns fe couurent la tefte d’vn bonnet ou fêla bandent d’vn ret. Ils font addonnés outreme-4o fure aux dances & aux chanfons , menteurs comme lé refte des Ameriquains , mais moyennement induftrieux pour apprendre les Arts mechaniques. Et les Panches eftoyent anciennement de mœurs deprauees & fort fauuages , car ils ‘eftoyent man- geurs de chair humaine^ j mais les Bogotes &c les Tuniens abhorroyent du tout ces ban- quets inhumains. ■ Or combien que ces régions abondent prefque toutes en viures , & autres chofes neceffaires à la vie humaine, il y en auoit pourtant entre icelles qui auoyent difette de ces choies ; car en la Prouince qui eftoit proche de celle de Twm, les Indiens au com- mencement que les Efpagnols y arriuerentjviuoyent de fourmis & les nourriffoyent foigneufement pour les manger. Il fe trouue par tout ce Royaume force mines, d’or ( mefme de fort fin ) de cuyure & d’acier. Le païs abonde aü refté en paftûrages , en froment & autres frui£ts,& ne nourrit pas moins les herbes & fruids d’Elpagne que les naturels mefines. Il y a plufieurs autres Prouinces diftindes de leurs noms, qui ap- partiennent à ce Gouuernement, defquelles nous parlerons ci-apres. Au refte les Efpagnols habitent pour le iourd’hui en ce Gouuernemént ces villes & bourgades , S. Fé de Bogotaifi bourgade de S. Michel, les villes de Tocayma , Trinidad, T unia, i OCCIDENTALES. LIVRE IX. 501 'TunUi Pamplom,Merida, Pelez, Marequitay Ybague ,Vittoria, S. luan de los Llanos , &les bourgades de Palma & de S. chrijiofle, defquelies nous traiterons par ordre. c H A P. ni. Métropolitaine S. Y i '.'Bourgade de S. Michel, /a Ville â^^Tocayma. La principale ville de ce Gouuernement&rmerme la Métropolitaine du Nou- ueau Royaume, eft vulgairement Sangla Fe' de Bogota iOï die. eftfituee fur les quatre degrés de la ligne vers le Nord: & à feptante & deux degrés & trente Tcrupules du Méridien de Toledevcis l’OueU:; comme Herrera : Gonfal- I O ueXimenez de^efada labaftitau pié des montagnes de Bogota ; elle eft habitée de fix cents familles d’Elpagnols : dans icelle eft le fiege ludiciai de ce Parlement , le Gou- uerneur,leTreforier du Roi ôcles autres Officiers y font leur reftdence; il y a auffi inonnoye que les Efpagnols nomment Cafa de Fundicion : Elle a vne Eglife Cathédra- le,fous le Métropolitain de laquelle font les Euefques,de Cartagene, dcS-Marthe ècdc P^7y>ÆW»;deuxConuents,rvn de Jacobins & l’autre de Cordeliers : il y a fous ceDio- cefe plus de cinq mille Saunages tributaires : Proche de la ville eft le lac Guatauita , au bords duquel les Saunages auoyent couftume de iàcrifier au temps pafle à leurs Ido- les,& de leurs offrir beaucoup d’or &: d’autres chofes de grand prix. L ’aïr y eft gran- dement fain , comme les Bourgeois affeurentj mais on y chercheroit maintenant en io vain beaucoup d’or j toutesfois elle eft auiourd’hui loüee pour l’abondance de toutes chofes neceffaires à la vie, comme du pain, formage, chair de pourceau &de bœuf, poules & toutes fortes de delicateffes. La bourgade qu’on nomme VilU S. Miguek eft diftante de la Motropolitaine SanBa, P/de douze lieues vers le Nord,baftie en faueur des F anches, de trafiquer plus com- modément auec eux, car pource que leur contrée eft fort chaude, il leur eftoit fort faf. cheuxde monter iufques à qui eft plus froide. La ville àeFocaymd eft efloignee de la Motropolitaine de quinze lieues entre l’Ou- cft & le Nord-oueft,elle eftbaftiefur leriuagede la grande riuiere Patiy qui defcend dans le large canal de \2iMagdelene:d\e. iouït d’vi^ïr fain & fec,ferain & le plus fouuenc 5 O clair, toutesfois fur le iour vn peu trop chaud , mais il eft temperé au matin & vn peu frais, & ptefque tout le long de l’annee ainfi. Les naturels de la contrée font de la na- tion des PanchesMdbiXcs de corps & bien compofés de membres , fi ce n’eft qu’ils ont vn petit frond, vaillants & redoutés de leurs voifîns j ils mangeoyent au temps paffé la chair humaine, mais ils font changés par la fréquentation des Efpagnols ; ils font libe- raux , & nullement defireux d’or ; légers & fort addonnés à la chaffc ; defireux de ven- geance ; ils fe teignent les dents de couleur noire auec le fuc de certame herbe , qu’ils ont toufiours à la bouche: ils vont prefque tous nuds,fi ce n’eft que les femmes fe cou- urent les parties honteufes d’vn petit drapeau : ils fe rempliffcnt iufques à s’enyurer d’vne certaine boiffon qu’ils font de CMays: 40 Proche de la ville fevoyent des fontaines qui rendent vne fubftance fulphuree; & l’argille par laquelle elle pàffe fert, contre la gratelle & autres femblables affedions, d’vn affeuré rcmede,on en oind lap9,rtie entachee, & puis on la laue auec de l’eau des mefmes fontaines. Dans la vallee prochaine il s’y trouue auffi des fontaines falees, l’eau defquelies laiffent fur les plantes quelles arroufent, vne certaine efpece de bitu- me,duquel les Sauuages auoyent couftume de poiffer leurs canoas.-il y a auffi des bains chauds,entre deux torrents fort froids, qui gueriffentplufieurs maladies & affedions, comme on a trouué par expérience. Les fommets des montagnes,qui font fort hauts, font couuerts de neige fort eipaiffe,qui ne fond iamais:Il s’y voit auffi ytxVulcanyçydi vo- mit fouuent des flammes, & toufiours de la fumee, &grande abondance de cendre, 1° qu’il efpart parfois huid ou dix lieues loin. Le terroir de cette ville eft fertile, produifant abondamment des vignes, figues, oranges,mefmes des dades , & toutes fortes d’herbes & plantes de l’Europe , & autres fruids ; en outre des cannes de fucrc, defquelies on a défia commencé d’en tirer du fuerc : On y moiffonne deux fois ran,du froment és endroits plus hauts &: plus froids, & du Mays prefque par tout : Les vaches & les iuments y profitent fort bien ; les bre- bis pas i mais les tigres, lions & les ours tout grand dommage à ce beftail. On célébré entre >> 10 DESCRIPTION DES INDES entre les arbres fauuages le y croiffent abondamment; quoi plus Mes cè- dres,les noyers , les noix lefquels n’ont rien dedans , & autres arbres y fournilTehf d’a- bondante matière pour baftir des maifons ; quelques-vns defquels font d’vn bois (i dur , qu’il n’eft iamais vermoulurEt les fueilles de l’arbre Zeyba qui tombent & recroif- fent toutes douze les heures. Enfin l’herbe de laquelle on tire l’Aml,y croift de foi- mefine,mais on ne s’en fert point. 11 neferuiroit deriendeparlerdesoifeauxnides autres animaux, qu’elle a de commun auec les autres. C H A P. IV. l?romnces des Mulos des Colymas , qualités de leur aïrirde leur terroir y mœurs ^ naturel de ces peuples. E s limites des Prouinces de Bogota & de T" unia font fermées vers le Nord-ouefi: des Prouinces des peuples que les Sauuages voifins nomment Mufos & Colymas: 'la contrée defquels eft pour la plus grande partie chaude & humide, & a cha- cun an deux eftés & autant d’hiuers : le premier efté commence au commencement de Décembre & dure iufques à la fin de Feburier: & le premier hiuer dés i’entree de Mars & dure iufques à la fin de May,auquel temps le fécond elle commence & conti- nue iufques à la fin de Septembre, où le fécond efté fait fon entree occupant le refte del’annee: non que ces faifons foyentdiftinguees par le froid ou le chaud, mais pour- ce qu'és mois d’hiuer il y pleut fort, & en ceux d’efté il y fait toufiours beau temps: or il 2,0 y pleut le plus fouuent toute la nuid,le iour fort rarement; les vents y (ont fort tempe- ftueux & les Huracanes dommageables , qui fouftlent du Sud au Nord & au contraire auec tonnerres & horribles efclairs. Le pars eft montueux & arroufé dans les vallees de plufieurs riuieres & torrents, empefehé de quantité de marais, riche en viures, mais desfourni de pafturages. Les Indiens y multiplient fort de iour en iour, depuis qu’ils ont et fte de manger la chair humaine : ils font habiles de corps & bien compo- fés de membres, mais impatients au labeur , parefleux & de moyenne induftriejils auoyent couftume d’aller nuds , maintenant ils commencent à fe veftir ; ils eftoyent addonnés à ryurongnerie,eftoyent cruels & auares. Ils ont vne feule & commune lan- gue,belliqueuxau pafté & accouftumés a furprendre leurs ennemis: anciennement j q ils parloyent familièrement auec les Diables, mais depuis qu’ils ont efté baptizés, ils ont entièrement reietté le feruice des Démons Scieur familiarité. Entre leurs arbres O 'W fruidiers excelle vn qui porte vne efpeee d’amendes , & qui a le tronc rond comme le pin , les noix reprefentent vn roignon de mouron, dans lefquellcs font contenus certaines OCCIDENTALES. LÏVRE IX. 505 certaines amendes.longues,douces &approchantesde celles d’Efpagne: nousauons fait mettre ci- deflus la figure tant de la noix entière que de l’amende. De plus vn autre qu’ils nomment qui porte vn fruid bon à manger, de la grofl'eurd’vn ceufd’oye. Entre lesfauuages il y a des cedrés, & ceux qu’ils nomment Canuros,à''^n bois dur &.cÔpad,qui font arbres fort branchus & larges : Le Guayac du- quel le bois guérit la verole: enfin leXagua lc fuc duquel teint en noir, encore qu’il foit blanc de foi. Les figuyers y portent des fruids fort doux & fort gros, car ils, font aufE gros que des pommes d’orange. Ils ont vn arbre l’efcorce duquel fert à faite des cot- des comme fi c’eftoit chanure ; & l’arbre qu’ils nomment Hol^o, grand & rond, les iet- 1 0 tons & l’efcorce duquel guérit les playes & tumeurs des iambes j fes fueilles beuës auec de l’eau lafehent le ventre,& plufienrs tels arbres domeftiques ;.mais ils en ont vn grandement nuifible qu’ils nomment Jgmfa, l’ombre duquel eft fi dangereufe, que fi quelque Efpagnol s’endort fous icelui, il enfle d’vne eftrange maniéré, que fi c’eftvn Sauuage nud,il creue. Or les arbres eftrangers qui y ont efté apportés d Efpagne, com- me orangers , limonniers & femblables , y croilTent abondamment'‘& portent de très- bons fruids ; mefme la terre y efleuedoucementles'vignes. Les Saunages fe feruent enleur mets d’ordinaire de pois, & Bâtâtes. Les belles de cetteProuince font certains pourceaux noiraftres,qui ont le nombril fur le dos : & d’autres plus petits qui different peu des fangliersi des cerfs, dains, Guntinaias femblables à peu près à nos ic heures j des chenaux, brebis & des cheures , lefquels animaux font fuiets dés leurs naif- fance à certains vers,parainfi il s’y en trouuepeu. Enfin en ces Prouinces il y a plufieurs veines de métaux, d’or qui ell moyennement fin , mais elles font fort loin des habitations à cauie quelarerre y ell balTe & mal faine, quelques d’argent aufli,commeauffi de cuyure& de fer effgrande quantité: il y a vtie certaine terre noire, de laquelle les Saunages ceignent leurs' habits. On y trouue par tout beaucoup de fontaines falees,quelques-vnesdcfquels fe congèlent en fel,& d au- tres non pas fi bien. Or à fix lieues de la ville de la Trtmdad le voit vue grande fonrai- ' ne qu’ils nomment de laquelle on r’afl'embie vne-grande quantité de fort bon fel: c’ellvne chofeefmerueillableque ces fontaines falees fe trouuent entredesfour- 5 0 ces douces &c mefmes comme au milieu d’icelles. Au relie les Prouinces dés tMufis ^àesColymas(\e(c[xxe\\es peuples s’appellent aulfi d’vn nom commun Camfeyes) ont de long vingt cinq lieues, & de large treizes.il n’y a que deux Colonies d’Efpagnols en icelles, l’vne en la ville de la Trmidad & l’autre en la bourgade de la Pahna-. C H A P. V. De U Ville de la Trinidad , de la Bourgade la Palma, de Herrera au Im. iv. Cha^. v. Decade vîîi- Le s Efpagnols habitèrent premièrement dans les Prouinces des Mttfis & des Colymash bourgade nommeeTude/a.fm lariuede lariuiete Zarl)i,mms pour la proximité des montagnes & la trop grande férocité des Saunages, & principa- lement pour la difficulté des viures, ils l’abandonnèrent peu apres, & la plufpart fuiuit le Capitaine Pedro de Orjùa en fon voyage qu’il fit vers les Prouinces qu on nomme vulgairement el Dorado, pour la renommee de l’or. Peu apres ils baftirent proche de fcelieu la ville dela7>/V??W4j,mais elle ne dura pas longtemps pour l’incommodité du lieu , ains fut tranlportee au lieu où elle eft maintenant ; or le fit de cette ville eft au- iourd’hui fort commode, toutesfois les Bourgeois ont efté long temps rrauaillés de guerre, à caufe des ordinaires remuements des Saunages. Elle ell diftante de la Métro- politaine S. Fé de vingt quatre lieues vers le Nord-oueft,& à lix vers l'Oueft des mon- jo tagnes de neige du nouueau Royaume , lefquels pour leur grande hauteur & froideur font nommés vulgairement Paramo^ & feparent le; pais chaud du froid ; or ces mon- tagnes font vne partie de celles qui s’eftendent entre leNord-ell & Sûd-oueft vn long efpace; & qu’on croit trauerfer depuis la Prouince de S. OPlarthe iufques au Royaume de chilt & au Deflroit àe Magàllatt d’vne fuite prelque continué. Herrera, eferit que cette ville eft à fept degrés de la ligne vers le Nord, & que du fommetdes hautes montagnes voilines on voit les indices de l’vn & de l’autre Pôle. Mais fi on prend 'l'- 504 DESCRIPTION DES INDES prend garde à la diftance qui eft entre cette ville & la Métropolitaine, on iugera qu’ei-^ le doit pluftoft eftre fur le cinquième degré de la hauteur du Pôle du Nord. Lariuiere Zarbi(\m paffe à enuiron vnelieuëde la ville , eft afl'és grande , & reçoit plufteurs autres riuieresjaueclefquelles elle court vers le Nord, & eftantprefte s’eftbr- ce entre deux fort hautes montagnes : que les Saunages appellent comme qui diroit mari & femme, car lignifie en leur langue vn homme, & Fura femme. 11 fe trouua dans le territoire de cette ville des veines d’emeraudés, comme aulfi dVn cryftal fort dur, & formé en diuers angles à la façon des diamants : Or la veine d’eme- raude fe trouue meflee auec de la pierre de Chalcedoine ou du marbre blanc. En ou- tre la montagne Ftocm fournit la plus grande partie de ces pierres precieufes, & plu- 1 o fieurs autres eftoignees de la ville d’vne ou de deux lieues." De Ttocu^ iufques au mont Abihi on conte trois lieues, lequel eft fort abondant en emeraudes , qu’on a cefte de tirer pour la difette d’eau ; dans le territoire de la mefme ville fe trouue auffi du beril & du cryftal fort reluifant. L’autre bourgade de cette Prouince eft appellee des Efpagnois la Palma , baftie l’an cIdId Lxxii,à quinze lieues de la Métropolitaine S. Fé vers le Nord-oueft î l’air v eft plus chaud que temperé. C H A P. VI. Définition des autres Villes de cette Pr<)«/^^f^,Tuna,Pamplona, 10 S. Chriftofle, Merida, Belez , Merequira, La Ville de T unia eft auflî nommee de la Prouince où elle eft fituee, à vingt lieues de la Métropolitaine 5'. jF/ vers le Nord-eft:elle eft baftie fur le coupet d’vne montagne, pour eftre vne garnifo.n & retraite à l’encontre des incurfions des Saunages voifins : îbn terroir eft fort peu different de la Prouince de Bogota itznt en qualité d’air que de terre :c’eft la principale ville marchande de cette région, abon- dante fur toutes en toutes fortes de viures; les Bourgeois peuuent fournir plus de deux cents cheuaux propres à la guerre j les lacobins y ont vn Cloiftre & les Cordeliers vn autre. 50 ’LzYiW&àcPafnplone eft à foixante lieues de la Métropolitaine S. Fe' vers le Nord- eft,elle eft riche en mines d’or & en abondance de brebis; Les laqobins y ontaufli vn Monaftere. La bourgade de S. chrifiofle eft à trente lieues de Pamplone tirant vers le Nord , elle eft fîtuee fur les confins de la Prouince qu’on nomme vulgairement Grita , prefque du tout desfournie d’or ; mais riche en pafturages , par ainfî fort commode pour y paiftre & efleuer du beftail, ce qui eft tout le reuenu de fes Bourgeois. (JMerïda eft fituee prefque fur les limites qui feparent Venezuela du Nouueau Royau^ me de à quarante lieues de PomploneYzis l’Eft-nord-eft, &àdixhuid lieues de ce grand lac de Maracaybo ( àwcyaû nous traiterons auec Venezuela )\e,ïs X Oncü-, en vn terroir fertile & abondant en toute forte de fruids , & qui n’eft pas du tout des- fourni d’or ; elle a vne bourgade fur les bords du lac fufdit , où les Bourgeois mènent vne fois ou deux l’annee leurs fruids & autres marchandifes, pour les tranfporter delà auec des barques dans les autres Prouinces voifines. Lavillette de 5^A:^eft à trente lieues vers le Nord de la Métropolitaine 5, & à quinze de i elle a vn Monaftere de Cordeliers; le terroir de cette ville, comme auffi de toute la Prouince, eft fuiet à beaucoup d’efclairs ; proche d’icelle Ce voit vn qui iecte fouuenc vne guilee de pierres. LzYillc de Marequita ( dite auffi 5. Sebaftïan delOro) eft attente ou quarante lieues ( car ie trouue l’vn & l’autre ) de la Métropolitaine vers le Nord-oueft: elle eft fituee jo dans vne plate câpagne,au pié d’vne montagne,d’où vient que l’aïr eft y extrêmement chaud, combien qu’il fafle froid dans la ville de j’.f/,merucilleufe variété en vn fi, petit interualle. On dit que l’an clolo xc if y fut premièrement trouué de riches veines d’argent. Enfin cette ville eft diftante de Cartagene , célébré ville marchande de toute cette Continente,de deux cents lieues. Ybague ville fituee fur les dernieres limites du nouueau Royaume, du cofté qu’il attouche / OCCIDENTALES. LIVRE IX. actouche la Proiiince de Popaian^cik. à trente lieues de la Métropolitaine S. Fe vers rOucft; ilya aulîi vnMonalleredelacobins. La ville de hVittorU de los Remedios diftante de cinquante lieues de la Métro- politaine vers leNord-oueft, on ditquefon territoire abonde en mines de métaux. Etpourlafinja ville de S.Itunde les Llanos,^^xcÇ<^uecmc[\x2imcl\c\i&s delà Métro- politaine vers leSud/itueedans vn terroir riche en veines d’or, elle fermera le catalo- gue des villes quiappartiennentau Gomicmcmcwt du Nouueau Royaume de Granade, 1 ai entendu d vn Portugais qui a long temps demeuré dans le qu’il y auoit dans IcNouueau Royaume vne ville des Efpagnols nommee SaragoJ]e,m2iis ie nefçai fi c cft I û vne de celles dont nous auons deha fait mention, ou quelque autre. Le mefine faifoit mention d vne mine d or, qui fe nomme iS’^^'^^^^jmais il ne difoit rien de fafîtuation , ce que ie n’ai pourtant pas voulu obmettre. P O P A I A N. C H A P. VII. Generale defcription de la Vrouince de Popaian, comme aujjî des particulières Vrouinces qui font contenues fous icelle. T^Ovrce quenousnousfommespropoféci-deuantde nous acheminer vers la j-^merdu^»^ &: vers les Prouinces qui iattouchent par vn certain ordre, il nous faut de neceffité paffer par la Prouince de Fopaian , laquelle ferme les Prouinces du Nouueau Royaume de Granade du cofté de l’Oueft. Anthoine deHerrera defcrit les li- mites de ce Gouuerhement en cette maniéré: Elle a de long entre le Nord & le Sud deux cents & vingt lieues ( combien qu’en fa defcription des Indes Occidentales il ne lui en donne feulement que cent & vingt) depuis les derniers confins de la Prouince dej^/V• yiüe de Caranlanta. NO V s auoiis ci-deffus commencé la defcription de cette Pr.ouince de par la Métropolitaine d’icelle , afin que la diftance des places , qui fe rappor- tent le plus fouuentà celle-ci,*. apparuft plus clairement: maintenant nous pourfùiurons à delcrireles autres par la ville d Antioche qui eft toute la derniere vers le Nord, & fur les limites duGouuernement de CartageneA^ laquelle il y a eu long ternps i o vne difpute entre les deux Gouuerneursde Ivne & de l’autre Prouince,iufques à ce qu’il en a efté décidé par le Roi , & que cette ville auec Ton territoire a efté adiugee au Gouuerneur de Popaian.Cette ville donc de i”. Fe' d' Antiochk{c2iÇ elle eft ainfi appellee le plus fouuent par iïfm & autres Efpagnols ) eft baftie dans vne vallee appellee d’vn nom du ^2iisNore,mttc les deux grandes & célébrés riuieres àtDdrkn bc dcS.Magdelene ou -S". Marthe; entre les hautes bc continues montagnes qui s’eftendent le long des ri- uages de l’vne & de l’autre riuiere par vne fuite continue. La ville eft fituee dans vne ‘laro-e & belle plaine, fur lesbords d’vne petite riuiere : or fon terroir eft arroufédeplu- fieurs riuieres i qui defcendfent d’vn cofté SI d’autre de -ces montagnes , & qui empor- tent auec fotpourla plufpartdes paillêttesd’or, couuertes de toutes parts d’agreables lo vergers d’arbres fruidiers. ; . ^ Pedro de deçà la met fur la hauteur de fèpt degrés au Nord delà ligne,à douze lieues delà riuiere de à plus de cent de la Métropolitaine PopaianYC^vs l’Eft-nord-eft, comme remarque. Les Sauuagesde ces régions font d’vn naturel paifible, d’vne belle habitude de corps & blancs de cpuleur : l’aïr y eft temperé &r fain,de forte que les naturels dorment de nuid dehors,fans fentir aucune incommodité de la rofee ou du ferain. Le pais abonde^en brebis & en toutes fortes de fruidss ôi les riuieres nourriflent quantité de fort bon poiifon. ^ ^ ^ En outre il y a deux chemins qui vont de cette ville, l’vn à Anzerma, l’âuùrê à Carta- qene & à Arma : nous parlerons maintenant du premier félon les Chroniques de deçà, j o afin que le fit des régions apparoifle d’autant mieux. Il y a d'Antiâche à Anzérma fep- tante lieues, par vn chemin fort diflScilc & grandement fafcheüx, autrauers de hautes Prudes montagnes, defcouuertes d'arbres } &les Saunages ont tranlporté leurs habi- tations loin du chemin. ■ • Eftant parti d^ Antioche on rencontre aufti toft vne petite montagne qui eft appellee Corome ou ( comme Herrera efcrit ) C»r«wi?,éfteuee au deflus de certaines eftroitesval- iees,autresfois fort peupleesd’habitans, mais qui y ont efté réduits à fort petit nom- bre,depuis la venue des Efpagnols, il y a vne bourgade riche en beaucoup d’or , qui fe trouue dans les torrents voifins. 11 y a peu d’arbres fruidiers & il s’y recueille peu dctMays. Delà on palTevers vn autre village fitué fur vne fort haute montagne appellee tica,où demeuroyent au temps pafté des Mineurs, pour l’abondance d’or que ce quar- tier fourniftoit : car on dit pour certain , que le grand nombre d’or c][ue les Efpagnols ont anciennement arraché des lepulchres de Zenu ou Cenu , auoit efte tire de ces ré- gions. De ce village fourt la riuiere qui coupe cette plaine ou pluftoft vallee , dans la- quelle fevoit auiourd’hui .S. P/, bourgade qui eft des appartenances de la iurididioh d’Antioche, habitée par des Mineurs, lefquels trauailient de riches mines d’or , proche de la grande riuiere Cama.Prochs de cette bourgade il y a vn village deSauuages nom- mé Xundahe, qui font de mefme naturel & mœurs que les precedents, ils pofledent plu- fieurs vallees feparees les vues des autres par de fort hautes montagnes. Delà on paftedans la Prouince & vallee de Caramanta,\t de laquelle fenom- moiz Canroma lors que les Efpagnols y furent premièrement. Les naturels habitans de cette Prouince eftoyentaftes bien faits, & belliqueux fur tous autres, ils auoyent vn autre langage que les precedents. Or cette vallee eft ceinte de toutes parts de fort hautes & rudes montagnes , & eft coupee parle milieu d’vnc riuiere , & plufieurs tor- rents rarroufenr,defquels,ce qui eft efmerueillabledes Sauuages font du fel fort blanc ^ ôrfort OCCIDENTALES. LIVRE IX. ' &: fort bon, principalement d Vn petit lac qui y eft. Le terroir efl: fertile en Mays & en racines , dequoi les Sauuages fe feruent ordinairement au lieu de blé, mais il ne porte pas fl bien les arbres à fruiéls. La Prouince de Cartuma, eft fituee au delà des montagnes vers l’Orient : les habi- tans de laquelle ne different en rien de ceux de C ht nwimt d’Soïx. en mceurs ou en langa- ge : elle abcÿnde en or ; ils demeuroyent iadis dans de petites loges & alloyent prefque nuds ou leurs parties honteufes légèrement couuertes d’vn petit drapeau. Mais allant que de poiirfuiure le refte de ce chemin , il nous faut vn peu parler de la ville de CdramantA : elle eft diftante de la-Metropoliraine Ÿopaian de L X ou il X X lieiiës 1 0 vers leNord-eft, fituee furies riuages de lariuiereC///zf^,-&eftfoüs leParlementdu Nou^ ueau Royaume de Gramde,m2iis eft de l’Euefché &Gouuernement de Popaiarndlt abon- de en Mays & autres fruids, excepté en froment, a peu de vaches & de brebis, mais beaucoup de pourceauxron dit qu’on defcend d’icelle à W^r/^^^^en fix heures de temps fur lariuiere Cauca , qui eft en cet endroit fort rapide, combien que par terre il y ait prefquê cinquante lieues de chemin. C H A P. XL chemin qui conduit d’Antioche d Anzerma, U defcription de la Ville de S. Anne àt Anztïinz.. lo A Y A N T pafféila Prouince de de laquelle nous auons maintenant parle J on rencontre auffî toft de fort hautes montagnes, qui ont prefque fept lieues de large, appellees des Saunages CimaiCOûntïtes de toutes parts de bois fortefpais : où le chemin eft fort difficile & empefehé, taché delà mortdeplufieurs Efpagnols,quiyfontmorts de faim & d’autres incommodités, lors qu’ils le faifoyenc au commencement, comme on a crauerfe ces montagnes,on defcend premièrement dans vne petite vallee, ou il y a peu d’habitans j mais vn peu plus outre on entre dans vne autre fort grade &deleétable,autresfois fortpeuplee quandles Efpagnols y furent au commencement & orneede plufîeurs belles maifons, abondante en viures, & fort J O fertile en eMays èz en racines dont les Sauuages viuent,maintenant elle eft prefque de- ferte , depuis que l’infolence & cruauté des Efpagnols a deftruit la plus grande partie des naturels habitans, & a contraint le refte d’abandonner leurs maifons &fè retirer dans les montagnes raboteufes des enuirons & dans les bois deferts : à deux lieues delà on rencontre vne vallee plus petite, qui s’eftend iufques aux montagnes où la ville d’Anz^erma eft baftie. Cette ville premièrement nommee des Efpagnols .y. Anne de los Caualleros, eft baftie entre deuxriuieres furvn tertre efleuéjceintdVn bois fort beau & planté détourés fortes d’arbres fruiaiers,tant d’eftrangers quedomeftiqueS: extrêmement bien munie par la nature du lieu & affés afleuree à l’encontre des fubitesincurfîonsdel’ennemi, ^ 0 pource qu’elle defcouüre de tous coftés dans de larges campagnes : le territoire voifîn eft peuplé de plufieurs villages de Sauuages. La contrée où la ville eft edifîee , eftoit anciennement appellee des Indiens^ mbr'a)tx\zis Sebajlian de Belaledzar,\6TLS c^^ilé.QC' couurit premièrement ces Prouinces n ayant nul truchement, oyant nommer par les naturels diipa.ïsle{hlAnzer,il3,ppèlla,cctteProuinceAnzerma,lcquclnomxdu depuis toufiours demeure tanta la Prouince qu’a la ville. A iv lieues de cette ville vers l’Oueft il y a vn certain petit village, contenant peu de maifons , mais fort grandes, & grande- ment peuple, auprès d vne petite riuicre, qui apres auoir couru enuiron vne lieue, fe perd dans celle de Cauca. Les Sauuages ont mefine langage que les Carama?itains, de eftoyent anciennement grandement cruels & abominables mangeurs d hommes. De jQ lamontagnequi eft au deffus defeendent quelques torrents fort remplis de fable d'or, que non feulement les Indiens, maisauffiles Negres que les Efpagnols y ontamenés, affemblcnt en grande abondance. La Prouince Copia eft proche de celle- ci, laquelle eft trauerfèe d’vneriuiere qui por- te de l’or , bordee pour le iourd’hui de quantité de cenfes d’Efpagnols ; d’vn cofté elle feioinél a la Prouince de (7/ d’Antioche a la Ville d’Arma ,• condition 0* fit des Troénees qui font entre d'eux*, defeription de la Ville d Arma. CE V X qui Vont d'Antioche à la ville d' Arma , s’acheminent premieremefit à la grande riuiere nommee de^ Sauuages Cauca^U des ^{^2.gno\sS.Marthey oùily io adouze lieues : par apres ils paffent la riuiere auec des canons , qui fe tfouuent là en grand nombre , combien qu’il y ait peu de Sauuages qui demeurent proche du ri- iiage dans de petits villages , pource que la plus grande partie ont trànfporté leurs cabanes loin du chemin. Delà en peu de iours ils arriuent à vne bourgade ( que les Efpagnols nomment Pueblo Llano ) anciennement fort peuplee : les habitans d’icelle font de petite ftature &alloyentprefquenuds, exceptéles femmes qui fecei- gnoyent d’vn drapeau ; Ils prifent lefel pour toutes richeffes, ôd nontautre marchan- dife que cela,encore qu’on die que les torrents &ruifteaux abondent en or. Levilla- ge riche en fel eft vn peu efloigné du chemin. Delà tirant vers l’Orient fe rencontrela vallee Aburra^ fitueeau àeWàts Andes , qui 5 □ font en cet endroit aifees &: fe palfent en vne iournee de chemin : cette vallee s ’ellargit en vne belle plaine, fon terroir eft fort fertile & arroufé de beaucoup de petites ri- uieres: on dit que les habitans d’icelle ont eu en telle horreur la cruauté des Efpa- gnols,que tant hommes que femmes fe pendoyent volontairement. En outre le che- min va dé Pueblo Llano à Cenufara^ grande bourgade , & fi le bruit eft vrai,pleinc de ri- ches fepulchres : d’icelle on va à vne autre qu’on nomme Pueblo Blanco : de laquelle ti- rant vers Arma , il faut laifter la riuiere de S. Marthe à la main droite. T oute cette re- gioniufques àla grande riuiere appartenoit au temps palTé àlavilledeC^m^^/^f-jiiif ques à ce que l’autre ville y futbaftie,qui fut premièrement placée fur vne montagne a l’entree de la Prouince d’Arma i puis apres, à caufe que les Efpagnols eftoyent conti- ^ j, nuellement fatigués des Sauuages, & auoyent difette de viures , pource que leur terri- toire eftoittrop petit, elle fut tranfportee dans vne plaine, entre deux petites riuieres, auprès d’vn bois de palmiers fortabondaiis enfruids ; de forte qu’elle eft auiourd’hui à deux lieues de la grande riuiere, à vingt trois de la ville de Cartagene^ à douze de celle d’ Anzerma, ^^cincimnteàeX'à Métropolitaine vers leNord-eft, cornmeiP^r- reradcüt. Le terroir de cette région eft grandement fertile,raais il eft eftimé fort mal fain,tous les ans on y moiffonne deux fois le Mays abondamment, Et il y a de riches mines d’or, notamment au riuage de la grande riuiere. La Prouince d’ Armait laquelle cette ville porte le nom,eft fort fpacieufe , grande- ment peuplee, aefurpaffe en richeffes toutes les autres voifines. Les naturels d'icelle jo auoyent leurs maifons rondes & couuertes au fbmmet de paille. Elle a de long dix lieues , fix ou fept de large , & eft pour la plus grande partie montueufe & couuerte de bois efpais d’arbres fruiétiers , qui portent des fruiéts fort délicats, entre les principaux defqueiseftceiuiqii’ils nomment Pytahaiani\ee\\\e\teint l’vrineen coqleur de fang, fans dommage toutesfois. Il y a plufieurs riuieres*qui defeendent de ces montagnes, & entre icelles celle que les Efpagnols appellent Rio de Arma.c^m eft l’hiuer fort rapide & dangereufe m OCCIDENTALES. LIVRE IX. tîaiigcrcufe ii pafîer, les autres font plus petites. Vers l’Orient les hautes montagnes des ylndes s' cù.cndcni au deuant de cette Prouince. La ville de S. lago de Arma ( dit Herrera ) riche en mines d’or, eft fous le Parlement du Kouueau Royaume de Granade^ mais du Gouuernement & Euefché de Tofaian ,* elle eft panure en froment & autres fruids eftrangers,mais abondante en blé des Indes.Les naturels des régions voifines fonc fort gourmands de chair humaine, de forte que comme le mefme Herrera afléure,ils ont mangé plus dehuid mille tant Sauuages qu’Efpagnols depuis que cette ville a commencé d’eftre habitée. Ayant palTé les limites delà Prouince^’^m4!,on entre dans Prouince gran- I O dement fertile, & qui n a point de fécondé en bonté de terroir & en rapport de Mays Sc autres fruidsrles Sauuages ontvnlangage beaucoup different de celui n’a pas tant de mines d’or 5 il y a vue petite riuiere qui la trauerfe & plufîeurs torrents. La Prouince de Pozo eft prochede la precedente,les naturels de laquelle font fem- blables en mœurs & en langage à c&\xxd'Arma : elle eft lauee d’vn cofté de la grande ri- uicre C auca, & de l’autre bornée des Prouinces de Carraba & de Vicara : elle abonde en mines d’or, notamment proche du riuage de la grande riuiere & dans le territoire mefme de la bourgade de Pozo. Le long de la Prouince de Pozo vers le Leuant s’eftend celle de PkaraSotl grande grandement fournie d habitans,qui vfent du langage de ceux de Paucura : elle eft fer- io mee du cofté de l’Orient des grandes montagnes des /^Wfy,audelàdefquelles les Sau- uages difentque la Prouince eft fttuee, caries Efpagnols n’auoyentpas encore defcouuertplus auant,quandP^’^^tf Cie^a efcriuoit, lequel nous auons fuiui. C H A P. XIII. De la Frouince de Carrapa, Qinmbaia, ^de la VïUe de Cartage. La Prouince de Carrapa^^ à douze lieues de la ville de fon terroir eft haut &rude, fans montagnes toiitesfois,fi ce n’eft du cofté qu’elle eft couuerte des hautes montagnes des /^W^r,au deftbus defquelles il y a de petites vallees àc J O des plaines, arroufees de plufîeurs torrents &petites riuieres , l’eau defquelles n’eft pas pourtant fi claire ni fi bonne à boire qu’és precedentes Prouinces : les Sauuages y font gras & ont la face longue, & eftoyent au temps pafte riches en or. Apres Carrapa fuit laProuince dt^imhaia^ dans laquelle Cartage^^ baftie à vingt deux lieues de la ville CctteProuince a de long quinze lieues & dix de large, depuis la riuiere CaucaduCques aux montagnes desAKdesielle eft prefque toute couûer- te degrands rofeaux ou cannes,defquelles les Sauuages font leurs maifbns. Les mon- tagnes de neige ou les plus hauts monts des ^^ndes font à fept lieues des villages de cette Prouince , au fommet defquels fe voitvn Vulcan, qui exhale vne efpaiflefumeej d’iceux auffi fourdent plufîeurs petites riuieres , defquelles les plus célébrés font Tacu- ^0 rumbi & le fîeuuc de UCegue, qui pafte auprès de la ville, & plufîeurs autres, dans leT quelles fe trouue beaucoup d’or, & entre icelles riuieres & fources il y en a de falees^ Il y a plufîeurs arbres a fruiéts, tant de ceux que laxontreeproduit de fon naturel , que de ceux que les Efpagnols y ontapporté. L’aïr y eft fort fain,& n’eft ni trop froid ni trop chaud , de forte que les Efpagnols qui y habitent font rarement malades & y vi- uentlong temps. Elle nourrit force abeilles , qui font leur miel dans les troncs des ar- bres & parmi les rofeaux. Il y a beaucoup d’arbres qui portent vn fruiét nommé G?y- mitOido lagrofleur d vn percet,noir au dedans , rempli de petits grains &d’vn fuc fîef- pais,vifqueux & tenant,qu on ne le peut lauer qu’à grande difficulté: comme auffi des K^guacates &c Guayaues , quelques-vns defquels portent des fruiéls aigres comme les li- I o mons , d’vn gouft & odeur fort agréable. Il y a quantité de beftes fauuages qui font leur repaire parmi ces rofeaux, comme des lions fort grands, &vn petit animal qui porte fes petits dans vn fac, que les Sauuages nomment là Chuca ,* plufîeurs cerfs, con- nils &des Guadaquinaies vnpeu plus grands que des Heures , dont la chair eft d’vn bon gouft & nourriture, & plufîeurs autres femblables. La ville de Cartage^Q: fituee fur vne plaine, entre deux torrents, à fept lieues delà grande riuiere Cai{ca,f\xi les bords d vne petite riuiere, de laquelle les Efpagnols puifènt leur JI2, des CRIPTION DES INDE S ' leur eau pour boire : il y a dans icelle vn Monaftere de Freres mineurs : les chemins font de toutes parts fort mauuais , à caufe des marais & de la boue, car il y pleut la plus grandepartie del’anneCj&y efclaire fort:à vne lieue ouplus delà ville coule vnepe- tite riuiere, qu ils appellent Con/ota, auprès de laquelle il y a vn petit lac & vne fontaine falee de laquelle les Sauuages font de fort bon fel. Or Cartage elî: diftante ( félon Fe- Çtiïtiod’Herrera ) de la Métropolitaine Fopaün de vingt cinq lieues vers leNord-eft,& appartientau Parlement du Nouuçâu Roy duwê de Gy âKdd&y mais elle eft de 1 Eueiche & Gouuernement de Popaian :fon terroir ne produit aucun froment ni autre blé d’Efpa- gne ; toutèsfois elle eft fort propre pour y paiftre d,es vaches & iuments : il eft prefque du tout deftitué déminés d’or j eftantau refte d’vnaïr &: tempérament grandement i o falubre. . Ceux qui vont de cette ville acelle de C4/i,paüent premièrement aux trauers des ro- feaux iufques à la riuiere de U Veia f qui eft fort difficile â ti^uerfer Fhiuer ; où il y a quatre lieues :delà à celle de Caucâ on conte vne lieue, laquelle on pafte fur des radeaux ou dans des canoasjen ce lieu deux chemins fe ioignent enfemble/çauoir celui qui defeend de Cartage & l’autre qui vient d'Anzerma. Au refte il y a entre Cartage & Cali quarante cinq lieues & entre & C/«/i cinquante. 10 C H A P. XIV. Vefcriptîon de la ViUe de Cali des Proumees rvoipnes $ du Portptué fur la mer du Zud nommé Bonauentura. La Ville de Cali eft baftie dans vne plaine vallee au pié de fort hautes montagnes, à quatredegrés de la ligne vers le Nord, à vingt deux lieues de la Métropolitaine Popaianlk vingt huift de la mer du Zuà & à vne de la grande riuiere Caitca.ÎMXi les bords d’vne autre fleuue,qui defeend des montagnes,lefquelles font au deffius de la vil- le : que fl l’aïr n’y eftoit point fi chaud, on la pourroit à bon droit mettre entre les lieux les plus fains de toute F Amérique , elle ne laifle pas pourtant d’eftre affés peuplee , car le Gouuerneur de toute la Prouince&les autres Officiers du Roi y font le plus fou- nentleurrefidence, & il sy fait vn grand trafic. Il y a deux Monafteres,! vn d’Augu- j o ftins,& l’autre de Freres çyyxor^t\ovciV(\ç.dela Mercede. SebafiiandePelalcazar^Moii'pik- mierement placé cette ville en la contrée des peuples que les Efpagnols appelloyent GorronesiXoùgme, duquel nom on dit eftre venue de ce que les Efpagnols qui n’en- tendoyent pas le langage de ces Sauuages, leur oyant nommer le poiffon Gorron^ , leurs donnèrent ce nom là , comme nous auons défia dit que le mefme auoit efté fait à t^nzerma^ / , r • j i -n • En outre afin de cognoiftre d’autant mieux les qualités & la ütuation de la Prouin- ce dans laquelle Cali eft auiourd’hui baftie, & des autres qui l’auoifinent, nous repren- drons vn peu de plus haut la delcription d icelle que en a faite. Au del- fous de la ville de PopaianA^xan. fuites de fort hautes montagnes commencent à fe fe- parer l’vne de l’autre &: à eftendre entre deux vne certaine vallée , qui eftant au com- mencement eftroite s ouure peu à peu de telle for te, que lie a enfin douze lieues de large, &derechefs’eftroicitfifort par interualle,qu’ellepreflé la riuiere qui la trauer- £c entre deux montagnes efteuees d vn cofte & d’autre, laquelle eftant ainfi contrainte dans fon canal , s’efforce entre ces obftacles & rochers d’vn cours fi violant, qu’on ne lapent palier ni aueccanoas ni radeaux, mais fait de grands remuements & tournoye- ments, qui attirent au fonds & trauerfent tout ce qui nage par deffus. De ce deftroit la vallee de Cali commence à s’eflargir , anciennement fort remplie de villages gran- dement peuplés ; mais depuis que les Efpagnols 1 ont poffedee , la plus grande partie de ces peuples ont efté deftruits & rnis à mort; & quelque peu qui font refté fe font re- tirés aux montagnes qui ferment cette vallee vers l’Occident, defquels nous parle- rons ci-apres. Cette vallee eft auoifinee deuers le Nord d’vne autre Prouineequila fepare de celle d’Anzerma, les Sunusigts de laquelle s’appelloyent au temps paffé cIom- cü , qui eftoyent de fort grande ftature , de forte qu’on les euft iugé a bon droit eftre defeendus de iaracedes Geans,ils auoyent la face longue &vn grand front. Dans ces monts qui déclinent peu à peu de ces longues montagnes, (qu’on nomme vulgairement OCCIDENTALES. LIVRE IX. 313 vulo-airement Cordillera & font fituecs au couchant de cette vallee ) & dans les vallees qui s’ouurent entre iceuXjCesGi^rrtfWjdefquels nous auons parlé, auoyent leurs habita- tions à trois ou quatre lieues de la vallee de Cali & de là grande riuiere, nation populeu- fe,qui polledoit vn peu de bas or,&: viuoit le plus fouuent de poiflon, qu’elle prenoit en certaines faifons de l’annee dans les riuieres voifines. Leur Prouince eft pour le iour- d’hui annexée au territoire de la ville de C^//; elle eft alTés fécondé en Mays^OiWiïts crains en fruiéts diuers. Il y a beaucoup de cerfs, de Guadaquinayas & d’autres belles làuuages ; comme aulïi quantité d’oifeaux.Or combien que la vallee de Cali foit gran- dement fertile, toutesfois elle efl; pour la plus grand part deferte & non cultiuee, ne I O feruant que de repaire aux belles fauuages,à caufe du petit nombre des Bourgeois . qui ne font pas fuffifans pour cultiuer des champs de lî grande ellendué. En outre pour al- ler à la ville àcCali-, il faut premièrement palTervne vallee de trois lieues de large , puis apres trauerfer vne petite riuiere, couuerte de cofté & d’autre d’vn bois efpais, laquelle court fort ville & eft grandement froide à caufe de la condition des monragnes d’où elle procédé , qui eft caufe que les Elpagnols l’ont nommee Rio Trio ; qui ayant couru vne grande partie de cette vallee de Cali) fe perd enfin dans la grande riuiere. Ayant palfé outre cette petite riuiere, on entre dans de larges campagnes , dans lefquelles les Efpagnols ont leurs cenfes & villages, où ils employeur foigneufement leurs efclaues à nourrir du beftail : or le territoire eftagreablementparfemé d’arbres fruidiers de plu- 2,0 fieurs fortes. Delaville de Caliv&ïs l’Occident &r du collé des montagnes, îlyaplufieurs villages habités par les Sauuages,qui font fuiets & tributaires aux Efpagnols ; d’vn naturel pai- lible,mais d’vne moyenne induftrie. Or à cinq lieues de la ville, il y a vne autre vallee ( qu’ils nomment fort fertile en Mays & en pleine d’arbres fruidiers; elle eft coupee par le milieu dVne petite riuiere, au bords de laquelle croilTent diuers fruids, notamment des fauourees & odorantes Granadilles. Plus outre de cette vallee tirant vers la mer du Zud^X^. nation des 'Timhas polfede certaines profondes vallees, en- tre de fort hautes, rudes & defertes montagnes,lefquelles vallees font remplies d’arbres fruidiers,& abondantes en Mays & autres fruids de la terre: les Sauuages d’icelles ont 3 0 tué au temps pafte beaucoup d’Efpagnols. Outre ces Prouinces defquels nous traitons maintenant, il y en a beaucoup d’autres qui font comprinfes fous le reflbrt de la ville de C4//,principalement celles des monta- gnes,où il y a diuers peuples qui habitent entre de rudes hautes montagnes, dans de certaines vallees & pantes, fuffifamment fournies de tout cequieftneceflaire à la vie de l’homme: Or dans les bois & précipices des montagnes repairent plufieurs ani- maux dommageables tant aux hommes qu’aux beftes : notamment des tigres. qui ont deuoré plufieurs Sauuages & Efpagnols non en petit nombre, qui allans àlamerouen reuenans paflbyent par là. Or à trois iours de chemin,au trauers des rudes & defertes montagnes,couuertes de 40 force bois de palmes & où les vallees font fales & boüeufes,on arriue ^u port de Rouen- tura^k trente lieues de la ville de Cali,2M Diocefe de laquelle il appartient : fur trois de- grés & trente fcrupules de la ligne vers le Nord ; félon Herrera . Il y a quelque peu de familles d’Efpagnols quiyhabitent,pourreceuoirles marchandifesqui y viennent de d’ailleurs, &lesenuoyer àP/9y><2w;2 & aux autres villes. La place eft grandement humide & eftimee mal faine, car elle eftfituee au fonds d’vne profonde baye, qu’on nomme Rahia deRonauenturasbi tout le païs circonuoifin eft herifé en hau- tes &defertes montagnes,où ilpleutprefquetoufiours,de forte qu’il en fourt plufieurs riuieres quifedefehargent toutes dans la mer du Zud dans le port mefme. En- fin ce port eft caché & fon emboucheure eft difficile à trouuer & il eft malaifé d’y en- j O trer,fi ce n’eft par le moyen d’vn expert Pilote.P/Wr^» de deçà eferit, qu’il n’y a qu’vn feul moyen pour tranfporter les marchandifes delà à la ville de Cali , fçauoir par le moyen des Sauuages,car à caufe que les lieux font fort raboteux & les chemins grandement difficiles, on ne fe peut feruir de beftes de charge : combien qu’on les tranfporte aucu- nesfois du long des riuages de la riuiere Bagua auec des cheuaux ; mais ils font fi mife- rablement fatigués,qu’ils ne vallentplus rien par apres : Or les Sauuages ont couftu- me d’y porter des fardeaux de trois où quatre arobes, ( ^roha c’eft vn poids d’Efpagne Rr qui 514 DESCRIPTION DES INDES qui renient à trente cinq de nos liures ou plus ) & auec cela yn homme ou vne femnié affis dans vne chaire^qu’ils portent fur leur dos, par les montagnes & au trauers des ri- uieresjlàns en r eceuoir aucun profit, car le falaire en reuient à leurs Maiftres,ceft à dire aux Elpagnols. C H A P. XV. Chemin qui ya de U Viüe de Cali â la MetropolitaineV çy* les qualités des répons qui font entre deux. ON contedelavillede C^/zjCommenous auonsditci-deiruSjiufquesàlâMetro- lo politaine de cette Prouince XXII ii eues, par vn chemin affés aifé,Ieplus fbu- uentpardes campagnes fans montagnes,& par des colines moyennement ef- Icuees & nullement rudes ou difficiles à paffienPartant donc de la ville de Cali,ovi paffie premièrement par des campagnes & plaines, qui font entrecoupées de quelques peti- tes riuieresjiufquesàcequ’onvienne à vne moyenne nommee vulgairement <^/,les riuagcs de laquelle font co'nioints parvn Pont fait degroffies cannes , fur lequel les hommes paffent & les chenaux à gué. Auprès des fontaines de cette riuiere,demeu-^ royent des Saunages, le CajJique defquels s appelloitXÆ^/5?^^/,le nom duquel on donna aux premiers temps à la nation & à la riuiere,qui a demeuré iufques à ce iourd’hui. Ils trafiquoyent au temps palTé auec les TimbeSy defquels nous auons fait mention ci-def- 1 o fus,& auoyent beaucoup d’or,que les Efpagnols, aufquels iis eftoyent recommandés, c’eft à dire baillés en feruitude,leur ofterenr. Il y a de cette riuiere à la grande, qu’on nomme au deffous , de la Mdgàelene, cinq lieues : Er on la paffie aifement auec des ra- deaux ou des canoas, par le moyen des Sauuages qui habitent au bords defes riuages. Or 1 vne & l’autre riue de cette riuiere a efté autresfois grandement peuplee de Sau- uages,qui font maintenant réduits à fort petit nombre , en partie par leur propre cru- auté,qui les faifoit tuer & manger les vns les autres, partie par celle des Efpagnols &: par les pertes de la guerre : & ceux qui reffient , demeurent fur les mefmes riuages , font nommés Aguales ( que ie ne peux dire fi c’eft leur propre nom ou vn inuenté par les Efpagnols ) & fontauiourd’hui tributaires aux Bourgeois de Cali aufquels ils 3 o feruent. Or du traied de la grande riuiere iufques à la Métropolitaine F defquels peuples nous auons fait mention lors que nous auons traité de la Métropolitaine: au delàdaceluilavallce de Patia-, laquelle la grande riuiere coupe, s’eftroiciftpeuàpeu , où on rencontre vne bourgade de Sauua- j Q ges anciennement fort grande & peuplee, combien qu’elle le foit encore afles,nonob- ftant qu’vne bonne partie deshabitans foyent allés demeurer dans les montagnes voilines vers l’Occident: les Efpagnols nomment cette bourgade Puehlode la Sal; les habirans d’icelle ontefté fort riches £c ont fourni à leurs Maiftres 5c Seigneurs beau- coup de bon ôc fin or. Vn peu au delà cette bourgade, commence laProuince des Saunages qu’on nom- me5c auprès d’icelle celle d’Abado, les villages de laquelle font Tfancal-, PangamPx. Zacampus i \tiem\eLConuc&à.csChorroros,&L enfin Pichtlumhuy'.çi. l’Occident de cette bourgade demeurent plufieurspeujples 8c nations, iufques à ra,merduZ^;^^/, ôc on croit que toute cette région n’efi: point desfournie deminesd'or. II y à plufieurs •20 villages efparts.comme K^fgual-,Mallama,TucuryeSyCapiiyes,lies-,Gualmatal-, Funcs, Cha- paly Malos-, T y aies, Pupiales-, ,T urca ôc Cnmba. Tous ces villages ôc leurs CaJJiques loyent anciennement d’vn nom commwnPaJlos, defquels la ville.quieii pour leiour- d’hui baftie a emprunté fonnom : Or il y a d’autres Sauuages qui auoifinenc ces villa.- ges ôc peuples vers l Orient.qui s'9.Ÿ^d\e.ni.^illacingas, defquels les principaux villa- ges font Mocondino, Bexendino, Bmzaco, OiMjanz,angua, Moxoconduque, Guaquanquez, ôc Macaxamata : ôc encore plus vers l’Orient vne ample ôc moyennement fertile Prouin- ce,nommee Cihundoy : proche de laquelle eft le village' item vu autre allés près du riuage d’vn lac, lequel occupe la fommité d’vne fort haute montagne iufques à huiéb lieues de long , ôc prefque quatre deiarge,tellement froid qu’il ne nourrit aucun jQ poifibmnin’eftgueres fréquenté des oifeaux de riuiere: Le terroi'r mefmequi l’enui- ronne eft du tout fterile, de forte qu’il ne produit aucun Mays,xâ ne peut nourrir d’ar- bres fruiétiers. . ■ En outre toutle territoire des eft infertile en^<ïjyi'i^ autres blés, excepté l’auoi- ne, laquelle il produit bien ; mais il eft allés fourni dé pafturages.d’où vient qu’il y paift quantité de vaches ôc fur tout degrands troupeauxde pourceaux.Les racines de Papa, de Xiquima ôc les fauourees Granadillesy croifléntabondamment. Mais la contrée des ^uillacingas eft grandement fertile en Mays ôc autres grains ôc fruiéts. Aneuf lieues de la ville de Paflo palTe vne riuiere que les Efpagnols nomment Rio Calientedl^tsdidiQ. laquelle eft fort eftimee ; mais l’hiuer elle s’enfle de telle foi te,qu’on la 40 peut difficilement traue'rfer. Ayant palfé cette riuiere, on monte defort hautes mon- tagnes par l’efpacede trois lieues, ôc derechef on defeenddans vne plaine ôc marche- t’on par vn defert,où il fait vn afpre froid:lequel eftant palfé on arriue à vn haut mont, le fommet duquel exhale le plusfouueiitvneefpailfefumeej ceux cpaiv ont àiz. Popaian à la ville de Pajlo, lailfent ce Fulcan à main droite. Enfin il y a encore vne autre riuiere qui trauerfe la contrée de los Pajlos, nommee vul- gairement fur tout célébré, pource qu’elle bornoit anciennementvers le le Nord le Royaume àc Périt, comme le fleuueiî/^^A qui eft en laProuince de Chili, \c confinoit vers le Midi, tant que l'Empire des Ingas à duré. La ville de .S*. luan de Paflo,zlk. diftante de la Métropolitaine Popaian de l lieues vers J O le Sud-oueft,comme affirme rierrera,o\x de x l, comme veut Piedro de deçà , ce qui ap- proche mieux de la vérité ôc du conteduchemin:ôcdelaMetropolitaine.^f/(9 L vers leNord-eft, ou comme veut Z)f^^(?Pc’r;?/3!;^^/^^XL:delamerduZ’WxL,felon Herrerax à vn degré de la ligne vers le Nord. Elle eft baftie dans vne belle ôc deledable valiee, qu’vne claire riuiere ôc de bonnes eaux fillonne,outre plufieurs ruiffeaux ôc torrents, la valiee s’appelloit anciennement ; ôc eftoitaffés peuplee de Sauuages auant la ve- nue des Efpagnols, qui fe font maintenant retirés dans les montagnes:eïle eft ceinte de Rr. a toutes 4 ^16 description des INDES toutes parts dVn haut terroir, qui s’efleue partie encolines,& en partie s’enfonce en vne plaine. LcsEfpagnols y ohtplufieurs cenfesruftiques ,où ils nourriffent du beftail : & le long des riuagesdelariuiereilsy fementdufrorrient& âuMays.Ortomc la région des Pajlos eft vn peu froide ou à tout le moins temperec,& mefme plus froide l’efté que rhiuerjCÔme ils diftinguent là les {àifons,cê qui a lieu auffi en la villejau reftc elle eft faine & lapins grande partie fertile & bonne pour les troupeaux :& on eftime qu’elle n’eft pas desfournie de mines d’or. Nous pourfuiurons les régions qui auoifî- nent la ville vers le Midi au Liure fuiuant,où nous traiterons du Peru. Au refte Herrer* eferit qu’il y a plus de vingt & quatre mille Saunages fuiets au Diocefe de cette ville, qui doiuent tribut & feruice aux Efpagnbîs : ils ne mangeoyent point de chair humai- 1 o ne du temps mefme qu’ils eftoyent gentils , n’eftans au refte habiles de corps ni ciuils de nature, mais fales,d’vn lourd entendement, & prefque fans aucune induftrie. C H A P. XVII. des Villes O* Bourgades de ce Gouuernement. Le s Villes reftantes de ce Gouuernement font celle-ci. La ville de Timana, qui eft à quarante lieues de la Métropolitaine Popaian vers le Sud-eft , à foixantede la ville de J?. Fé de Bogota, au commencement de la vallee qu’on appelle à l’Orient des hautes montagnes des ( qui fe nomment ordinairement Cordilierd comme nous auons défia dit toute cette Amérique) en vne région fort chaude.. Au refte la Prouince de T imana de laquelle la ville porte le nom, eft fort faine & arroufee de riuieres & bonnes eaux , deleftable çn pafturages' & fort propre pour les vaches. Le plus grand pro^tdes Bourgeois & habitans d’icelle pour leiourd hui , reuientde confire toutes fortes de fruids , qui y croiflent fort bons par cout,auec du fucreoudumiel,qui fe trouué là en grande abondancedans les troncs des arbres creux;mais principalement de former des marfepains & maccarons de cer- taines noix qui imitent le gouft des amendes , qu’ils portent vendre à la ville d'Alma- guer. Il y a aufli plufieurs vergers & iardins dans lefquels ils cultiuent fbigneufement la Coca,fànt aimee de tous les peuples de cette Amérique. Ils ont auffi grande quanti- ^ q té de Pite qu’ils ont apprins à filer fort fin par vne fingulicre induftrie, laquelle eft fort eftimee par tour. La ville eftgrandement faine & les Bourgeois y viuent long temps.^ Le Lieutenant du Gouuernement de la Prouince y demeure,auquella ville de S.Seba- fiian- de la Plat a eft fuiette. Proche de la ville ily a vne montagne où on dit qu’on a trou- ué de l’aymant. ‘ ■ Les Talcones touchent les limites de cette Prouince, nation furieulè & vaillante, qui poflede la vallee d'A^uirga : laquelle eft fermee de la Prouince des peuples nom- més Paezes. Ces peuples ne different en rien tant en mœurs qu’en naturel des precedents , & ont fait au temps paffé beaucoup de mal aux Efpagnolsde la ville de Timana i&LÏQS contraignirent d’abandonner la ville de Neyua, qui auoit efté baftie dans la mefme Prouince àvingt lieues de la ville de Timana :\ts mefmes P4^^«p^auec leurs voifinsles Pixaü Manipis deftruifirent la ville de riwr»/, que les Efpagnols baftiffoyent dans la Prouince des à foixante lieues delâvillede-S./»4» que l’on nomme de los Llano s, (utiles limites du Gouuernement de Popaian ; & le village de los Angeles à neuf lieues de la ville de Neytta & à vingt deux de Tocayama, chafferent les Efpagnols qui y habitoyént hors de leurs païs, La ville de Guadalaiara de Buga , eft fituee dans la vallee de Buga, de laquelle elle a prins fon furnom,à quinze lieues de la Métropolitaine Popaian vers l’Eft-nord-eft , en- tre les hauts fommets des Andes ( comme Piedro de deçà affeure ) qui feparent la Pro- j q uince de Popaian des vallees de Neyua : les Bourgeois de cette ville font iufticiables au Parlement de ^ito , mais ils font fous le Gouuernement de Popaian &c en recognoif- fent l’Euefque en caufes Ecclefiaftiques. La ville de5. Sebapàn de la Plata ycikfituce entreles limites du Gouuernement de Popaian, zitcnte cinq lieues de la Métropolitaine a trente de S. Fe' de Bogota vers le Sud-oueft : dans le territoire d’icelle il y a plufieurs mines d’argent, defquelles la ville OCCIDENTALES. LIVRE IX. 517 la ville a cfté rurnommecîles Sauuagesde la Prouinceont efté diftribiics en vingt quatre tribus que IcsEC^^gnoisnommcniRepartiementos^ chacune derquelles payent tribut à leurs Seigneurs Efpagnols,& leur fontferuice gratuit. Cette ville eft en outre cfloignce de trois lieues du port Méditerranée qui eft ftirles bords delà grande riuie- rc de la C^agdelene ^hovswnk Onda ; où les canoas qui portent à mont de la riuiere les marchandifes, qui viennent de la ville de Cartagene & du Gouuernement de Marthe, ont couftume de Te defeharger. Elle eft baftie dans vne large campagne fur le riuage delà riuiere Galli-,îotx. ftiiette aux tremblements deterre, &: Thiuer il y fait plus froid que chaud : Les naturels habitans d’icelle ont efté prefque tous tués I O parles Sauuagesvoifins,qu’onappclle^(?/ü/»ftf»jquiles cnleuentàla defpourueuc, les tuent &: en vendent la chair en leurs boucheries publiques ; fans que les Efpagnols ayentpeu iufques ici l’empefcher. La ville d’Almaguer eft fituee à vingt lieues de la Métropolitaine Popatan vers le Sud- cftjfur vne plate &: deferte montagne ; l’aïr y eft vn peu froid , mais agréable : les Sau- uages s’y veftent d’habits faits de coton :1e terroir voifin eft fort fertile en froment, autres grains &frui61:s:il y a grande abondance de brebis &de vaches: enfin onyatrouuéde riches mines d’or, qui ont rendu ce lieu fortpeuplé parle concours de plufieurs. La ville de S. luan de TruxiUo,QpxQ. les Sauuages nomment en leur langue' eft to diftantede trente lieues de la Métropolitaine vers le Sud-eft ; ie n’ai pas trou- ué en aucun AutheurEfpagnol le nombre ni les ricliefles des habitans. La ville de Madrigal, appellee en la langue des Indiens Chapanchica , eft diftante de celle àc.Popaian de xxx v lieues prefque vers le Midi : la contrée eft rude & pierreufe, où on ne feme point de froment, ni on n’y paift aucuns troupeauxjtoutesfoisle y vient affés bien deux fois l’an. Le naturel des Indiens,eft rendu d’autantpius rude par la nature des lieux, de forte qu’on les peut difficilement dompter & amener à rhu- manité : Or dans fon territoire on y atrouué des mines d’or allés bonnes. Agreda qui.eft aulfi appellee Malaga par les Efpagnols, eft à quarante cinq lieues de la Métropolitaine vers le Sud-oueft : il s’y eft aulfi trouué des mines d’or ailes riches, 5 O comme difent les Elpagnols. C H A P. XVIII. tÂnehrages^ Kiuteres, Caps^ toute U cofie de ce (jouuernment^ auec les Ifles quifint au deuant- SV I V A N T la cofte marine de ce Gouuernement auprès la mer du Zud, on trou- ue premièrement, du Cap de Corrientes qui eft fur la hauteur de y degrés vers le Nord de la ligne , vne riuiere nommee vulgairement R. de Satinas , entre le fufdic Cap & rille de Palmes. L’Ifle de Palmes qui eft ainli nommee de la multitude de ces ^0 arbres dont elle eft couuerte , a enuiron vne lieuë & demie de circuit, il y a quelques ruifleaux & torrents d’eau claire & bonne à boire, & a efté autresfois habitée des Sau- uages î elle eft diftante du Cap de Corrientes de vingt cinq lieues , de la ligne de quatre degrés & vingt fcrupules vers le Nord. On conte d’icelle iufques à labayedeP^?;?^- trois lieues, de laquelle baye & de fbn port nous auons défia parlé. Delà la cofte court prefque Sud : or de la Bonauenture le riuage fe courbe vers l’Eft-fud-eft iufques à vingt cinq lieues, où l’I/le Gorgone eft au deuant de la terre ferme. Toute cette cofte eft fort plate & peu profonde, couuerte iufques au bord de lamer d Vn bois efpais d’arbres qu’on nomme CMangles. Or entré les riuieres qui for- tent là en mer.la rapide riuiere àcS.Iuan eft la principale, fes deux riuages font peu- jQ plés d’vne nation vrayement barbare, qui ontleurs loges au fommet des arbres, pour- eeque cette riuiere à couftume fort fouuentde furmonter ces riuages & d’inonder le pa'is voifin: Or ils defeendent à terre à certaines faifons de l’ann ee & fement des pois & des febues tant communes que de Turquie, & ayant acheué de femer, ils prennent du poiftbn autant qu’ils iugent en auoirbefoin pour viurei puis derechef ils remontent dans leurs cabanes: ils font riches en or,duquel la riuiere en porte des paillettesjle ter- roir voifin eft afles fertile, mais il eft mal égal & fortfàle de marais & de boue. Rr I Vis 3i8 description DES INDES Visa vis de remboucheulreciecette nuieveïlüe à& Gorgone eftfituee,à trois degréi de la ligne vers le Nord. Cette Ifle eft accomparee , par ceux qui y ont eftè, à l’enfer; caràcaufe de la hauteur des montagnes & de l’efpelîeur dés boisjils’yengendre vhè incroyable multitude de mofqilitesjraïry eft mal fàin & .têpeftueux,car il y pleutpreft que toufiours & fans cefte,de forte qu’on y voit rarement le Soleil. II s'y trouue gran- de quantité de Guadaquinaias i cet animal n’eft pas fort difterent d’vn lieurev II y a aufîi des arbres qui portent vn certain fruiéf, comme vnechaftagne, lequel lafchefort bien le ventrej& euacuéles mauuaifes humeurs : il y croiftauflî de petits raifins qüine font pas d vn maiiuaisgouft. On y prend beaucoup de.poiflbns,enrreles rochers qui borderit la cofte de toutes parts : il y a vn nombre infini d’oifeaux dans les bois : enfin i quelques ruifteaux & torrents qui defcendent des tnontagnes. L’Iftè a enuiron trois lieues de tour, au refte peu remarquée, & feulement cognuë pour auoir ferui de ca- chette ^Framtfco Pîzarre loTSc^VL ’û. alla premièrement dans le Fm/, lequel y demeura quelque temps auec treize de fes gens. / De rifte Gorgone fe tourne vers l’Oueft-fud-oueft jiufques à Tlfle qu'on nommo, del Gallo:or: toute cette cofte eft bafte & plate ; & il y a plufieurs riuieresqui y defcendent de la terre ferme, notamment celles de S. Lucas ^ deNkardojéc àes Zedros, L’Jfle del Gallo eft petitejayantàpeine vne lieue de tour , elle eft diftante de lalicrne vers le Nord d’enüiron deux degrés. De cette Ifle la cofte fe courbe vefs.le Süd-oueft iufquesau Cap des Mangles ycdoigncdo, la ligne dedeux.degtés vers leNord,&àhuiâ: t lieues de Tlfle; en l’elpace entre moyenne,il y a vn port nommé de S. Cruz: la cofte d’i- celui eft demefme condition que la precedente, & eft entrecoupée de quelques riuie- res, habitées de Sauuages,qui ne different en rien en façon de viure de ceux de la ruie- rede S.Iuan. Iniques ici la cofte a appartenuau GouuernementdcF<7^4/4Z2, mais dés le Cap des UHangles la cofte du Peru commence, laquelle nous pourfuiurons au Liure fuiuant. * , y DESCRIPTION ‘é li DESCRIPTION DES INDES OCCIDENTALES, LIVRE DIXIEME. P E R V. C H A P. I. (j CKSTûilc dcjcî du ^oyuumc du P cm j c^^uAlitcs de Jou aït de Ju îctyc ; naturel if;* mœurs des naturels habttans die élut. VLiure precedent nous auoiis acheué de deferire TopaiartiC^i nous a conduit à la mtxàwZud & a,u Royaume du Féru ; duquel il nous faut maintenant tiaiter ; Acojla parle dicelui en commun en cette maniéré: Sous le nom du Féru ( dit-il J nous ne com- prenons pas cette grande partie du nouueau Mon- de,laquelle on nomme vuIgairementAmerique, fous laquelle font comprinfes ces amples régions du Bra- 'Jîl,àe. Chili & de Gramde , aufquelles le nom du Féru neconuientnullement J mais cette partie de TAme- rique Auftrale qui tire vers le Sud , depuis le Royau- - nie de^:^/Vi?,conftitue prefquelbus laligne, iufques au Royaume de cM/,horsduTropique duCapricorne,parPefpacede fix cents lieues delong,&cinquantc de large iufques aux hautes montagnes des excepté en quelques endroits principalement vers les régions des chachapoyaSyOViilQÏÏYnpcn p^s large. Cette partie du nouueau Monde, qui eft vulgairement nommee Feruy doit eftre diligemment confideree entre toutes lesProuincesde ce monde, à caufe des eltranges & admirables qualités de fon aïr: car premièrement fa cofte marine n eft eluenteeque d’vn feul vent, non pasde celui qui a couftumede fouiller le plus fou- 10 uent fous la torride és autres quartiers,mais dVn qui lui eft du tout contraire, fça- uoir celui du Sud ou de Sud-oueft. Secondement, combien que ce vent Ibit de la na- ture tempeftueux,pefant & maifain ailleurs,ici au contraire il eft doux , làin &fort agréable, de forte qu’on lui doit la caufe pour laquelle la cofte marine peut eftre habi- tce,quiferoitautremcntdefoitres-chaude &nuifible àla fantédes hommes. Tier- cement,il ne pleut iamais a cette cofte marine, & ne s’y trouue,grelîe ou neige. Quar- tement,avn petit interualle d’icelle, il n’y pleutpas feulement, mais aulliily neige & tonne horriblement. En cinquième lieu,ily a deux fuites de montagnes qui Coupent tout le Te/'», le pare es l’vne de lautre d’vn efnarp nrpfnnf. I O froide que chaude , &1 efté &1 hiuer ,les pluyes & le beau temps y régnent par luui . Mais afin qu’on puilTe d’autant mieux entendre ces chofes, il faut fçauoir, que tout le Féru eft diuife comme en trois fentes fort longues, mais tres-eftroites j fçauoir en plai- nes,montagnes & ,_^ndes:lçs plaines font auprès de la cofte de la mer du 2ud ou Pa- cifique ; les montagnes font des colines , montagnes & vallces ; & les tendes font de aiges & grandement hautes montagnes. Les plaines ont communément de large dix iieux,ici plus & la parfois moins , les montagnes vingt, & les tendes autant^ leur lon- gueur fe prend du Nordau Sud, 6^ la largeur de l’Eft à l’ Oueft. Or c’eft comme vue 40 choie monftrueufe, qu’en vn fi petit éfpace qui n’eft pour le plus que de cinquante vnemefme diftance de la ligne & du pôle, il le trouuevne fi grande diuerlî- te,qui P euueici toufîours,& la iamais j & enlatroifiemeregionil y pleut & fait beau alternatiuement. Jio description des INDES akernatinement. Dans les plaines il ne pleut iamais, combien qu’il y tombe parfois vnerofee ( que les Sauuages appellent G'/2r«4,& les Efpagnols Mollin/i ) qui eft parfois refoulte en gouttes, mais en li petite quantité-qu’on n’y abefoin de toid ni de gouttiè- res; car lesmaifons y font feulement couuertes de mattes,furlefquelies on met vn peu de terre. Dans les Andes il y pleut prefque toufiours , bien qu’il y faffe plus beau vne annee que l’autre. Dans les montagnes qui font comme au milieu de ces deux extrémités, il y pleut preique aux melînes mois qu en Efpagne,lçauoir depuis Septem- bre iufques en Auril ; lerefte du temps le Ciel y eft clair & ferain,quand le Soleil eft plus edoignê de leur Zenith. En outretant les que les montagnes, font des monts fort hauts qui s’eftendent continuellement &d’vne fuite mille lieues du moins lo de lono-,feparés d vne diftance prefque égalé entr’eux. Dans les montagnes errent ci &là d« troupeaux fans nombre de qui font animaux femblables en viftefte- aux cheures des montagnes , comme aufti des Guanacos & P acos , defquels nous parle- rons bien toft. Dans les Andes il s’y engendre plufieurs finges &guenons^fortplai- ^ans,des perroquets fans nombre, & la precieufe Coca y croift aufti. Or ou ces monta- gnes fe feparent, elles ouurent force vallees , qui fourniftent la plus faine & plus com- mode habitation de tout le Peru , & font eftimees fort fertiles en froment & en Mays^ comme celle de Xauxa,Andagmila,rucay & plufieurs autres: voila pourquoi elles eftoyent anciennement fort peuplees. Cela foit diten general quanta laïr &ala ter- re,nous pourfuiurons les chofes particulières en leur lieu. Maintenant voyons ce qu’il io y a à remarquer touchant le naturel des habitans de ces païs.Ceux qui cultiuoyent la plainejdemeuroyent le plus fouuent al air, ou fous de laiges arbres, les hommes fo ve- ftoyent de certaines chemifes qui leurs venoyent iufques aux genoux,auec des petits manteaux fur leurs efpaules:&les femmes portoyent'de longs veftemens de coton qui leurs pendoy ent iufques aux piés: les vns & les autres auoyent leurs cheueux gallon- nés de certains liens de laine , ou de bandes d’vne ou de diuerfes couleurs, par lefquel- les ils fe diftinguoyent les vns des autres : ceux des montagnes qui eftoyent plus robu- ftes de corps & furpaftbyent de beaucoup les autres en fubtilité d’efprit & en indu- ftrie , auoyent des maifons couuertes de gafons de terre , les hommes s’habilloyent de chemVes & de manteaux faits de laine des brebis àxxPem, & les femmes portoyentjo des camifoles bandees par tout le corps de certaines bandes & vn manteau autour du col, attaché auec des efpingles d’or oud’argent,qu’iîs nommoyentenleur langue To- Mr; elles font ordinairement blanches & bien morigenees: & aident leurs maris de tout leur pouuoir à çultiuerles champs & à faire les autres ouurages, elles feplaifenc fort à auoir les cheueux noirs & longs: & afin de les auoir noirs, elles les trempent dans l’eau bouillante, auec grand danger & peine ( parfois l’efpacedVne heure ou deux, comme eforit IPuca GaYcillajJus)à,z.Vi% laquelle elles ont cuit diuerfes herbes, notamment de la racine de APaguey ou de chuchdUiCovciVs\Q ils la nomment. Cette nation s exerce le plus fouuent à la chafle , & parfois ils font des chaffes folennelles en cette façon ; ils s’aftemblent quatre ou cinq mille hommes,felon que les Prouinces font peuplees , & 4® ayant fait vn cerne ( laiftans vn petit efpace entre chacun ) qui a parfois deux ou trois lieuës de rond,ils s’approchent peu à peu à la cadance de certaines chanfons , iufques à ce qu’ils fe ioignent main à main & bras à bras , & par ainfi ils enferment vn grand nombre de fauuagine , de laquelle ils tuent ce qu’ils veulent, car ils font vn fi grand bruit, & eftonnent que les beftes par leurs cris , fo laiftent prendre a la main ou fo laifo fent enfermer dans les rets. -rj-ar Auant que ces peuples fufïent vnies fous vn Empire,ils auoyent diuerfos & differen- tes mœurs & couftiimes,mais qui eftoyent du tout barbares & inhumaines; & ils ado- rovent fuperftitieufoment diuerfes chofes chacun félon fon plaifii; côme les plantes, des animaux , des riuieres,des montagnes ; fur tout les animaux cruels, & tout ce enfin jo qu’ils aimoy ent paftionnement ou dequoi ils auoy ent horreur. Xoutesfois il y en auoit qui n’adoroyent rien du tout. Mais apres qu’ils curent fubi le ioug des & furent amenés comme à vne Republique , ils commencèrent aviure plus courtoifement,a embraffer les mœurs &couftumesplus ciuiles,& a réduire en vne certaine forme ce feruice fuperftitieux qui eftoit auparauant incertain. Cardes ce temps la ils adorè- rent le Soleil, perfuadés que le Créateur auoit affigné à cet aftre le principal lieu entre OCCIDENTALES. LIVRE jf. les aucrcs.& par ainfi qu’il auoit grandement foingdes affaires humaines; & encore qu i! honoroyent la Lune comme fa femme , toutesfois ils ne donnoyenc aucun cul- te dium ; comme .auffi au foudre, aux efclairs.au tonnerre { ce qui eft faufement eferit par les Autheurs Efpagnols. Car_r«a Peruuiam de nation, raconte, qii encore que les gensaÿirafFent Iculement vifiblement le Soleil, toutesfois qu'ils auoyent quelque cognoiflance du vrai Dieu ; lequel ils appelloyent Pacha Carnage cO: a dire, animateur du monÿ ( de Pacha, monde & C.;^.r,pLticipe ou deriuatifdu ver- beoudunom C4W4, qui fignifioit ameou animer )& l’honoroyent d’vne telle affe- aion,quils neprononçoyent laniaisce nomfans honneur ou fbrupule; comme au 10 contraire cebi de C«/4ji,par lequel ils denotoyent le Diable fans abomination & ex- fecration. Neantmoins ils n auoyent quVn feulTempIe dédié à Pacha Camac, dans lavallee de laquelle nous parierons ci-apresi combien qu’ils en auoyent vn nombre !J.^n»,de toutromptueux bafti^ par toutau Soleil,où il y auoitdes Sacnficateurs &des Vieigesdediees,&oLulsfairoyentbeaucoupdeSacrifices. LemefmeditquelesEfpa- gnols attribuent fiulementpluheurs Dieux & Deeffes aux car combien quib eulTent en grand honneur diuerleschofes, fous lefquelles le Diable auoit couftu- me de s apparoiftre,ou de parler par icelles, comme eftans facrees, toutesfois ils ne les ^oroyent pas:& cette erreur eft néede ce quelesPeruumm nommoyent telles chofes Huaca ou Guacaj or le mot Huaca auoit parmi euxvne fort ample %nification car ils io nommoyent dicelui tout ce qui eftoit facré,toutcequi eftoit excellent en fonefoece tout ce qui eftoit monftrueux, & enfin tout ce qui eftoit remarquable en la fiature des chofes,foit en beaute ou en laideur : d’oü vient que nommans de ce nom les Idoles,les Efpagnds crurent que les Saunages feruoyent autant de Dieux qu’ils appelloyent de chofes Huacas LemefmeT^ca remarque aüfii lamefme erreur au mot Æach/aa s car pource quecela eftoit ordinaire aux Sauuages, toutesfois &quantes qu'ils portoyenc quelque coline ou montagne droite &difficile,defe de/charger au fommet,& efteuant trois fois les veux au Ciel & les baif- fant autant de fois,de dire ^pache6fa,c'eÇi à dire, comme lui mefme 1 interprète , ^ Imqmfaît <^ue mm nous leuom ; comme s ils eulTent dit , nous rendons grâces à celui, 3 O qui nous a donne tantde force que d’apporter ce fardeau fur vn lieu fi Lut: r car cela eftoit familier a cette nation d exprimer toute vnefentence par vn ou deuxmots.) Les Efpagnols qui apoyent fouuent ouï cela, foupçonnerent, que les Sauuages adoroyenc eft vrai femblable,que les Efpagnols ont attribué, tant à ces Sauuages,qu’4 d’Ltres, P ufieurs diumites par 1 ignorance de la langue. Ces Sauuages croyoyent en outrej ouatoutlemoms leurs Sages, qui s’appelloyent^;»4®/4^,.que l’homnL eftoit com- pofe de corps & dame,&que cette-çieftoitincorruptile, & l’autre mortel -par ainfi ils le nommoyent Allfacamacfa,ce^a dire,terre animee j & pour la différence des bru- tes,P«^,c eft a dire,iouiirant de raifon; appellans les autres animaux d’vn nom com- 40 mun Llama Ils croyoyent aulTi qu’il y auoit vne autre vie apres cette-d 5 voila pour- Pf ties,fçauoir en celefte, qu’ils nommoy eift Ha^ nan Pacha, c eft adiré, monde haut ou les bons eftoyentreceuspoury eftre falairiés ^ ferieui . & en Veu Pacha,c eft a dire,bas ou foufterreftre,auquel les mefehans deuoyenc fa Huacw c eft a dire, le domicile des Démons. Et on n eftime pas qu’ils reiettaZnc la géniale reftauration des corps , comme plufieurs Autheurs Efoagnols tefmoi gnent.Oi ils eftoyent fort efloignes de ces cruelles mœurs desMexlquams,qui éftoyenc de fiicnfier les hommes en hofties à leurs Dieux, que mefmesils ne mangLyent pas JO de chair humaine. Ce quirefte de leurgouuernement ciuil&politiquef& de lafL- cefïion des Tncas,nous 1 adioufterons aillcursi ^ SC C H A?. ■ > description des INDES C H A P. II. Des "plantes, grains 0* fruits pecuiiers auVcm, notamment dt* Coca. Le blé le plus commun 2.nPem eftle qu’ils appelloyent en leur langue Z AV a 5 ou comme ebcrit TncA GâTcildJJhs , duquel ils ont deux elpecesj l’vne duquel le grain eft plus dur, nommé Muruchu -, l’autre qui eft plus mol &: plus délicat appelle Capta ^ de ces deux eipeces ils faifoyent deux fortes depain, fça- noir l’vn duquel ils fe feruoyent feulement en leurs facrifices , qu’ils nommoyent Zamui l’autre duquel ils fe feruoyent à leurs repas ordinaires, qu’ils appelloyent i o Huminta. Or iis appelloyent le pain d’vn nom commun TantatèL le Mays boüil- li auec de l’eau Mute ou Adote , qu’ils humoyent tout chaud: le mefme réduit en boüillie , formé en boules & rofti , eftoit en quelques Prouinces nommé Arefas: & le mefme encore rofti tout entier eftoit nommé Camcha. Ils fe feruoyent à fah re de la boiftbn en diuerfes maniérés ;car( prefque à la mefme façon qu’on fait la biere en l’Europe ; ils moüilloyent le grain tant qu’il commençoit à germer, &puis eftant lèiché ils le mouloyent & boüilloyent ; & nommoyent cette efpece de boiftbn Vinnapu & en quelques Prouinces Sera , qui auoit vne fmguliere puiftànce d’en- yurer^oila pourquoi il eftoit défendu par Ordonnance des Jneaston bien ils ma- fehoyent le grain &: en faifoyent du leuain, ( comme eferit Acojîa) lequel ils cui- zo foyent puis apres auec de l'eau ; Or les K^meriquams croyent que le meilleur fe fait par les vieilles : ou enfin ils roftiftbyent premièrement le grain, le piloyent, puis le cuifoyent, laquelle forte de breuuage ils prifoyent fort, comme fort fain & fort vtile à ceux qui font trauaillés de la pierre ou de la grauelle. Enfin le breu- uaçe fait de Mays, ils l’appellent communément Azua , & ailleurs aufti Chica. Or outre le cMays , ils ont aufti diuers legumes j quelques-vm defquels font comme des febues , mais plus petits qu’ils nomment Purutu , & s’en feruent en leur ordi- naire viande ; d’autres qui ne font pas bons à manger , qui font ronds , &c de di- uerfes couleurs, nommés vulgairement chuy , & leurs donnent diuers noms félon la diuerfité de leurs couleurs. Il s’y trouue plufieurs racines , defquelies ils fe Ier- 3 0 lieu de Mays ou icelui n y vient pas : entre icelles les principales font cel- les qu’ils nomment Papas , lefquelles eftant feichees au Soleil ils pilent , & les nomment chunno , dont ils portent en grande abondance aux mines d’argent de Potûfi, & en font vn riche trafic. De plus celles d'Oca , qui eft longue & gref- fe comme le pbulce , laquelle ils mangent crue , pource quelle eft fort douce & cuite aufti: ils la féichent au Soleil, & lors ils la nomment Caui. La troifieme eft I celle i Annm , femblable en forme & en groftfeur à la precedente, mais d’vn gouft beaucoup differènt , car elle eft amere , d’où vient qu’ils ne la mangent que cuite ; les Indiens eftiment quelle eft ennemie à la puiffance d’engendrer. Celles que les Efpagnols nomment Batatas , font nommées des Peruuiams, ApichuÀh en ont qua- 40 tre efpeces,mais feulement differentes en couleurs. Ils ont aufti vn autre fruid qui vient fous terre , qu’ils nomment Tnchic & les Efpagnols Mani, (nom fort vfité parmi les Infulaires ) qui a la moüelle & le gouft d’vne amende; que fi on le mange cru, iloffenfele cerueau,mais eftant rofti, il n’eft pas feulement agréable au palais, mais aufti fort fain : on tire du mefme de l’huile fort bonne contre plufieurs infirmités. l’ai apprios d’vn certain Portugais qui a long temps demeuré au Pem , qu’il y vient vne certaine femence ( qu’ils nomment chawico ) femblable a celle des, oi- gnons, mais d’vne admirable vertu; car fi on boit l’eau dans laquelle elle aura efté boüillie feule ou auec du vin , elle prouoque vn dormir de vingt quatre heures; & fl quelqu’vn la beuë riant ou pleurant, il demeure en cet eftat long temps, de ma- jo niere qu’il fe laiffera de plein gré defrober comme s’il eftoit fol, & permettra qu’on le trompe en toute forte. Linjehot t^LCOUic le mefine du des Indes. Entre les fruids on prife fur tout , premièrement ceux que les Efpagnols appel- lent Pepims, ( Garcilajfm fait doute, s’il n’eft point nommé des Indiens Cacha ) pour- ce que ( comme eferit Acofta & Garcilajfm ) ils approchent en longueur & rondeur à la forme des pepons , combien qu’ils en different grandement en autres chofes; ^ &ne i OCCIDENTALES. LIVRE X. 52.5 ô:ne font pas verds, mais bruns ou blancs, &r n’ont pas làpeauefpineufeotiraboteurej mais fort polie: enfin ils les furpalTentde beaucoup en gouft, car ils font dVnelàueur aigre, mcflee de doux, &: agréable au palais ; pleins defucfi^ de facile digeftion j & ré- frigèrent grandement en ces régions chaudes. Enfin des citrouilles ou melons, qu’ils nomment en leur langue CapdluyC^i y croilTent ( comme dit Acojla ) d’vne mon- ftrueufegrofl'eur& variété notable. Entre les plantes peculieres au Peru,le Coca ou Cuca eft des plus remarquables, qifils cultiuent fuperftitieufement, &en foht fi grande eftime, que c’eft comme vne choie mciov ahlc x Monard ladeferit en cette forte: c’eft vne plante de la hauteur d’vne aul- I O ne,ayantles fueilles vnpeu plus grandes que celles du myrte, f qui ont comme vne au- tre fueille tracee au milieu defemblable forme; molles & d’vn verd pafie : fon fruidt eft aflemblé par grappes, comme le fruid du myrte , rougeaftre quand il meurit , & de mefme grofleur,mais quand il eft parfaitement meur, il eft noiraftre: lors il eft temps de cueillir l’herbe, & l’ayant cueillie, on la met dans des corbeilles & autres vaiffeaux pour la faire feicher,afin qu’elle s'en conferue mieux, & qu’on la puiftetranfporter en d’autres places ; car d’vne montagne à l’autre, on en fait trafic, &Ia change-on pour d’autres marchandifes,comme pour des habits,du bcftaihdu fel & autres chofes,pouri ce qu’ils s’en feruent aii lieu de monnoye. En outre, on en vfe communément entre les Indiens, tant entre les chofes qui font neceftaires pour voyager , comme entre cel- io les dont ils lè feruent à la maifon pour volupté j on la préparé en cette maniéré: ils font de la chaux de coquilles de mer ou d’efcailles d’huiftres, qu’ils pilent bien menu, puis ayant froilTé auec les dents le ils y meflent cette poudre, comme vn.aftai- fonnementjdelbrte que la quantité delà chaux eft moindre que celle des fueilles: de cette mafte, ils en forment des boulettes, &les mettent feicher. Ils fe feruent de cette mixtion tant au logi^ qu’en chemin , & la tournent en la bouche la fuçant, affeurans que cela empefehe la faim, la foif, & fouftient les forces. K^cojîa en fait auftî vn long recit,& dit entre autres chofes,qu’au temps paffé fous l’Empire des qu’il n’eftoic point permis au commun d’vfer de cette herbe fans la permiftion du Roi ou de fes Of- ficiers. Mais auiourd’hui il fe confomme dans Potoji feulement fi grande quantité de 3 O cette herbe,que le prix en monte iufques à cinq cents mille ducats ; car il s’y en porte fionante & parfois cent mille corbeilles, chacune defquelles fevent dans la ville de Cufcü deux ou trois reales,& en Potofi cinq. Plaife Vallera fur GarciUJfus eferit, que c’eft vnarbrifteau de la hauteur ôr grofléur de la vigne, qui a peu de branches,mais beau- coup de fueilles, & fent bon ; ad roufte qu’il eft de la hauteur d’vn homme; & qu’il fe prouigne comme le fep; fa fueille eft femblable tanten fa fuperficie, qu’en fâ queue à i’arboifier, ( que les Efpagnols nomment Madronno ) mais plus tendre & déli- cat : qu il faut cueillir doucement de peur de gafter le nouueau bouton, & la feicher moyennernerit, afin quelle ne vienne en poudre pour eftre trop feiche , ou fe moififle par humidité; enfin on les cueille trois ou quatre fois par, an. ; 40 II y a encore vne autre herbe familière au P€ruc\\xt\ts Indiens nommentP^jr^? ,Ies fueilles de laquelle font fembkbles ( félon que dit Momrd)ï celles du Plantain en for- me & en couleur; eftant feichees elles font fort deliees,grandement acres & chaudes. On dit qu’eftans beuè's en poudre auec du vin , qu’elles gueriftent les douleurs nephrï- tiques,procedantcs de vents ou de caufe froide : & la plante mefme produit le fem- blable effed fi on l’applique,eftant cuite en forme d’emplaftre fur la partie affedee î ce qu’on a trouué eftre tres-vrai par expérience. Il s’y trouue en outre vne certaine herbe, ( comme dit Auguftin de Carate ; les Vieil- les de laquelle reftemblent à l’Ache, eftant appliquée fur les'playes, combien qu elles foyent pourries, les nettoye aufli toft ; & confomme la chair entièrement iufques 50 aux os fi on la met delTus, elle porte vne fleur bleue. Il croift aufli de fa nature dans les montagnes du Pemvn certain fruid que les Efpa- gnols appellent GranadilU.^om la fimilitude qu’il a auec les pommes de Grana- de, car il eft prefquede mefme couleur & grofléur quand il eft meur, fi ce n’cft qu’il n’a pas de couronne : quand on-le branle eftant fec , la femence fait vn bruit au de- dans,elle eft femblable à celle d’vne poire, mais vn peu plus grofle, élégamment ornee de certaines bQfléttes,& fort belle à voirjla poulpe du fruid eft blanche, mais infipide. S( % ta ^.z4 s description DES INDES ' La plante eft; femblable au lierre , montant &: rempant en la mefme forte en quelque lieu qu’on la plante. Fort chargée de fruid pour fa grandeur: elle porte vne fleur fem- blable à la rofe blanche , dans les fueilles de laquelle { Monard dit ) qu’on y voit com- me des marques de la paflîon deChrift, qu’on diroit y auoir efté peintes auec vn grand foing ; & pour cette caufe la fleur eft fort belle : fes fruids font les Granatilles, que nous auons dit , qui eftans meurs , font pleins d’vne liqueur aigrette , & ont beaucoup de fe- . mence ; on les ouure comme on fait les œufs,&: les Efpagnols, comme aufli les Sauna- ges,hument cetteliqueur auec grande volupté encore qu on en hume beaucoup, on ne s’en fent point le ventre chargé, mais pluftoft lafché. Cette herbe eft fort rare & ne fe trouue qu’en vn lieu. Le fruid eft temperc & aucunement humide. Fiedrode^'^ Cûca efcrit toutesfois, qu’elle croift en abondance dans la vallee de Lile, dans laquelle la ville de Ca/i eft baftie : Elle eft défia cognuë en l’Europe, où onia nomme vulgaire- ment /æ Nous auons aulfi premièrement receu du Pem vne plante d’vne extreme grandeur, à prefent cognuë par tout,laquelle on appelle Dodonaus la defcrit fous le nom de chrifantheme du Peru : Monard l’appelle l'Herbe du Soleil '.François Ximene$ dit,qu’elle eft nommee des Peruuiam , Chimalacatl. Du mefme lieu nous eft aufli premièrement venu la femence d’vne herbe,qu’on nomme communément Greffon du PerUià\i<\\xéi Monard ^2x\o(ous\q nom àc Pleur de y2w;la plante (dit-il ) croift de la hauteur de deuxpalmes,ayant les branches droites, lo enuironnees de petites fueilles rondes & deliees , & fort verdes : les fleurs naiflent au bout des branches°d’vne couleur doree fort refplendiflante rayant cinq fueilles, dans lefquelles il y a des taches de fang fort rouges imprimées,^: au bout d’icelles vn long coqueluchon quis’auanceenlong. Ot François Ximenes en parle ainfi,il croift ('dit-il) auiourd’hui dans les iardins des Mexiquams , vne herbe qu’on nomme Greffon du Peru, la fleur de laquelle les Sauuageseftiment fort,& l’appellent Mexixquilitl & Félon GhiU le-, fes fueilles font quafi rondes, deliees , auec quelques angles , elles pendent à vne queue, qui ne naift pas droit au milieu de la fueille,mais à cofté d’icelle & comme obli- quement,elles font verdes defliis & deflbus pâlies ; le tuyau eft rond , tendre & ploya- ble.quiembraflecequi l’approche: fes fleurs font d’vn iaune rougflfantjcompofees 5 o comme celles de l’aquilegie , elles finiflent en vne petite cannullerecourbee, qui s’ef- flargiflant peu a peü,ouure fept fueilles , deux defquelles furpaflent les autres en gran- deur, les deux fuiuantes font plus petites que les trois autres, or ces quatre font mar- quées de certaines lignes rouires,qui font fort femblables aux playes de noftre Sei- gneur crucifié, comme on les peint, les autres trois qui font au milieu des fufdites, ont trois marques femblables à des teftes de doux. Cette plante eft chaude & feichépref- que au quatrième degré, & fi femblable à noftre creflTon en gouft & facultés,qu’à peine y peut-on cognoiftre aucune différence : voila pourquoi encore qu’ils different en forme, toutesfois on les peut bien rapporter à vn mefme genre, &peut eftre appliquée ' aux mefmes chofes que l’autre j elle eft verde & fleurit tous les mois de l’an, fi ne n’eft 4° quelle eft parfois gaftee du froid. Ils fe feruent des fleurs d’icelle és falades , car elles aio’uifent r.appetit,& aident l’eftomach refroidi ou débilité par l’abondance de ven- tosités : les fueilles pilees & appliquées gueriflent la toux; enueloppees d’alun elles - appaifent la douleur des dents ; les fleurs & les fueilles pilees enfembles^ & diftilees dans de l’alembic auec quelques grains d’alun, eft vn fouuerain lauement à l’encontre des vlceres de la bouche & desautres membres ; & encore qu’elle foit vn peu chaude, toutesfois elle guérit lestumeufs nées de chaleur, refouldant les humeurs vifeides, quand les médicaments froids ne profitent de rien ; elle guérit les playes enflammées : enfin ces fleurs comme aufli celles de noftre creflTon , feruent contre les douleurs pro- cédantes de caufes froides. P Il y croift aufli vne herbe ( dit Garcilaffus ) d’vne meruëilleufe efficace contre les af- fedions des yeux ; ils la nomment Matecllu ; elle croift dans les ruifleaux, & n’a qu’vn tuyau & vne feule fueille ronde : à la façon de celle qu’on nomme enEfpagne Oreia de ahad, { c’eft à dire Gymbalaire ) cette herbe eftant mafchec,& le fuc d’icelle mis dans les yeux au foir,auec la fueille aufli broyee,appliquee fur iceux, ofte merueilleufement ' bien les fcotomies,& guérit tout mal des yeux. Il afléure qu’iU’a lui-mefme efprouué. îiya OCCIDENTALES. LIVRE X. 11 y aauil'i diiTabac dans le rera, lequel Garcilajfmàït qu’ils appelloyent Sayri; & 5 en lèruoyenc fort fouuenc en medecine , & en prenoyent la poudre par les narines, pour defcharger le cerueau des mauuaifes humeurs. CAionard remarque plufieurs autres herbes qu’il auoit receilës du Peru iXcÇcyitWcs nous lailîbns pour caufe de briefuetértoutesfois il y en a vne laquelle nous ne pou- uons oublier, pour quelque chofe demerueilleux qu’il y obferue. L’an cio lo lxh ( dit-il ) lors que le Conte de Nieua demeuroit dans le Peru, il y auoit vne femme de les domeftiques, laquelle auoit fon mari malade au lid d’vne griefue maladie ; pour la- quelle caufe, comme vn notable Indien l’eut veuê forttrifte,illui demanda fi elledefi- 10 roit defçauoirlifonmari deuoit mourir de cette maladie ou non, & qu’il lui enuoye- roit vne branche de quelque herbe, laquelle elle mettroiten la main gauche de fon mari & lui feroitprelTer long temps: que s’il deuoit relouer, il feroit toufiours alaigre &: ioyeux fi long temps qu’il la tiendroit en la main ; que s’il deuoit mourir, il feroit trifte & eftonné. Cet Indien lui enuoya vne branche de cette herbe , qu elle mit en la main de fon mari, & la lui fit prefferimais ildeuint aulîi toft fi trifte & en fi grande peine,que craignant qu’il ne mouruft à rinftant,elle la lui oftadelamain &la ietta: quelques iours apres il mourut. Eftant defireuxdefçauoir fi cela eftoit vrai, il me fut alfeuré par vn certain Gentilhomme qui auoit long temps demeuré dans le Peru, que la chofe eftoit véritable, & que les Indiens pratiquoyent ordinairement cela quand ils 2,0 eftoyent malades J ce qui m’apporta vne grande admiration. C H A P. III. Des Arbres fruiÜierSi ^ notamment dtù Caclios du Molle. PLvsievrs arbres &^?^. Il s’y trouue auffi vne efpece de cerifes, que les Sauuages nomm.ent de couleur rouge, & douce de faueur: qui eftant mangees auiourd’hui, teignent le lendemain l’vrine en couleur de fang. Dans ces grandes montagnes, que les Efpagnols appellent Andes, & GarcilajJus,Antis, il y croift plufieurs plantes qui portent de fort bons fruids i entrelefquelles eft fort eftimé le P/4/^;?«^,ainfi nommé des Efpagnols pour caufesin- certaines,car il ri’a rien de commun auec les Planes de l’Europe : mais reflemble pluf- toftàla palme tant en forme qu’en grandeur de fueilles, qu’il a figrandes,qu elles cou- urentvn homme depuis latefte iufques aux pies. Or c’eft vne plante ( comme eferit Acoftci)Gyi\ a fon tronc en terre, duquel fortent plufieurs furgeons,qui croiflenten JO grandeur &grofteur d’arbre, &iettent hors les fueilles, que nous auons dit,quifont d’vnverd gay & legeres : du milieu defquelles fort vne grappe, qui contient parfois plus, parfois moins de fruid , au nombre aucunesfois de trois cents,longs d’vne pa Ime &gros de deux doigts ou enuiron : l’efcorce s’ofte aifement, & loirs ilenreftela chair tendre,bonne à manger, faine & d’vne bonne nourriture. On a couftume de cueillir ce fruid verd & de le mettre dans quelques vaifleaux fous de certaines fueilles ? mais ceux qui meuriftent fur l’arbre , font dVn meilleur gouft & de meilleur odeur. S f 5 Ils I ^2,6 DESCRIPTION DES INDES Ils portent leurs fruits tous les mois de l’an , car du tronc naiffent contihuellément - de nouueaux lettons, qui fuccedentà ceux quiontporté du, fruid, ( qu’on coupe aufli toftjcar ils ne portent chacun qu’vne feule fois ) ils demandent vne terre humide & vn aïr chaud. Cette plante fe trouue en grande abondance aux vrayes Indes, comme auifi en Afrique, où elle eft appellee de diuers noms , touchant lefquels on peut voir Garzias ah Horto ; & par tout dans les régions plus chaudes de l’ Amérique : qui en dé- lirera fçauoir dauantage voy e Ouïedo. Nous auons donné la figure du fruid en la défi cription du Brafil,ou il eft appelle Pacûuere ou Bacoua. Suit apres le fruid que les Efpagnols ( comme efcrit Gardlajfus ) appel- lent Manür blancod qui eft vne efpece de creme fort vfitee entr’eux )pource qu’eftant t o diuifé,il ne reprefente pas mal deux cueilliers remplies de cette creme, tant en couleur qu’en gouft tdanslamoüelle font contenus quelques petits noyaux noirs delà forme des amendes, qui ne font pas bons à manger : il ne reffembîe pas mal en grùffeur & for- me à vn moyen melon: mais il a l’efcorceplus dure & femblableà celledes courges feiches : fa moüelle eft blanche, douce & vn peu aigrette, fort agréable au palais. Ilfe trouue feulement dans le l’arbre de chacoSi\c(\\xûMûmrdc[cnt ainfî : On m’enuoyaen outredelafemence de la plante appellee Caches , qu’on dit naiftre com- me vn arbrifleau,d’vn fort beau verd, ayant les fueilles rondes & deliees : & qui porte vn fruid femblable à vne pomme fole,d’vn coftéplat,de l’autre rond & long , de cou- leur cendree, d’vn gouft agréable & fans aigreur, contenant vne femence fort menue. j,o Les habitans en font grande eftime,pour fes facultés remarquables:car elle prouoque l’vrine, fait fortir hors des reins la grauelîe & la pierre : & ce qui eft de plus excellent, c’eft qu’on dit que par l’vfage d’icelle la pierre fe diminue dans la vefie, fi elle eft enco- re mollé,& peut eftre diniinuee par aucun médicament ; & ils apportent tant d’exem- ples de cette Ghofe,que i’en fuis tout efmerueillé : car mon opinion eft telle , qu’on ne peut faire fortir la pierre hors de la vefie,mais que le feul remede eft de la tirer; & qu’on nefçauroittrouuervnremedealféspuiftant pour la rompre: toutesfois ils difent que cette femence broyee & prinfe auec quelque eau propre à cela,diflbut en boue la pier- re,laquelle eftant hors fe congele derechef & reprend fà dureté de pierre. l’aiveuvn ieune homme à qui cela eft aduenu. Comme il eftoittourmentéde lapierre,ceque^ q i’entendi par les Operateurs qui auoyent fenti la pierre,& que ie cognu par les fÿm- ptomes qu’il fouffrbitji’enuoyai le ieune homme au commencement du printemps à vn fontaine nomhiee de la Pierre,: où ayant demeuré deux mois , il en retourna deliuré de fa pierre, & apporta auec foi toute la boue qu’il auoit peu àpeu iettee, qui cftoit de- rechef endurcie en morceaux de pierre. Enfin l’excellent arbre Molle o\xMulli,covamQ efcrit Garcilajfas,e^ du tout peculier au Perui nousletrouuons deferitparplufieurs, mais fort diligemment par Franfoü Xi- menes. Cetarbre f dit-il) eft grand,beau & fort branchu, les branches font d’vn verd tirant fur le pourpre; fes fueilles font femblables à celles de l’oliuier, mais elles font plus eftroites & plus deiica tes, dentelees & difpofees comme par rang d’vn cofté èc d’autre de la branche ; fes fleurs font d’vn fort beau blanc & pendues par grappes, qui font aufli toft conuerties en fruids fçmblables aux grains du vinatier,mais vn peu plus gros ,& quand ils font meurs d’vn rouge clair, leur chair eft douce, meflee d’vne certaine aigreur , le nôyau eft fort dur & pierreux. Les fueilles & le fruid fentent le lentifque & fa gomme, & ont vn gouft qui approche du fenoüil : peut eftre que c’eft la . ’ caufe pourquoi il femble à quelques-vns que c’eft vne efpece de lentifque , mais c’eft vn arbre de fon genre : les fueilles &4cs fruids durent tout lelong de l’annee, fefucce- dans les vus aux autres. C’eft vn arbre fauuage , combien qu^il y ait ia long temps que plufieurs le cultiucnt dans leurs iardins ; car ilfe multiplient aifemenr,foit de femence ou de.iettons,en toute forte de terre. Il fuë vne larme, qui ne fent pas moins ie lentifi y o que que le tronc & les fueilles: elle eft d’vn gouft aigre ,& doux auec vne certaine amertume & faculté aftringente : chaude & feiche prefqueau troifîeme degré:le noy- au corrobore ie cerucau & l’eftomach, & referre le ventre ; & comme quelques-vns veulenr,ilalemefme vfage que la terebinthineî& les fruids, s’il eft befoin, celui du carcamome ou graine de paradis ; il prouoque l’vrine , diflîpc les vents, deffeiche les huîheurs fuperfluHs. Les fueilles raafehees affermiflent les genciues & lcs dents; gueriffent OCCIDENTALES. LIVRE X. 52;^ ^uerillent les playes ; ce que font aufli les fruids. Voila ce qu’il en dit. Pedro de deçà en fiit aufli mention : En tout ce quartier ( dit-il ) on voit de grands arbres & aufli de petits, que les habitans nomment Molles :ih ont les fueilles petites , d’vnc odeur de fe- noüil, l’efcorce en eft fortprifee, car on fomente de fa decodion lesiambes doulou- reufes & enflamees auec vn grand fruift ; on fait des branches des curedents fort vti- les. Du fruid d ’icelui cuit auec de l’eau , félon là decodion , on en fait ou du vin, du moins vn breuuage fort bon, ou du vinaigre,ou bien du miel ; ces arbres font en h gran- de eftime parmi les Indiens , qu’en quelques lieux ils les confacrent à leurs Idoles. Quelques-vns adiouftent ( dit Clufim ) que la decodion des fueilles de cet arbre aide 10 fort contre les douleurs nées de caufe froide: & quefagomme,quieftblanchecom- medelamanne,diflbutedansdu laid,nettoye latenebrofité des yeux. Le Fameux Charles de l'Efelufe nous a donné la figure d’vnébranche auec le fruid de cet arbre, ne de femenceenEfpagne,&mefme au Pays-bas , laquelle nous auons fait mettre ici. Voyons ce qu’en dit CarcilaJJm bre CMulli croifl: de foi mefme dans les champs , il donne fon fruid par grappes longues & ellroites, qui font certains pe- tits grains ronds comme la coryandrej fes fueilles font menues & toufiours ver- 1 0 des : le grain eftant meur, a en la fuperfi- cie vn peu de chair douce & agréable au gouft.le refte eft fort amer. On en fait du breuuage, le frottant doucement entre les mains dans de l’eau chaude, iufques à ce que toute la douceur en foit hors ; car il fe faut bien garder de l’amer , qui gafte le breuuage. On pafte cette eau, & la gar- de-on trois ou quatre iours iufques à ce qu’elle foit claire & l’efpais au fonds , le 3 O breuuage eft clair, agréable & fort fain, principalement à ceux qui font trauaillés de mal de reins ou de vefiej fur tout quand on mefle auec ce breuuage du May s. La mefme eau eftant boüillie fe conuertit en de fort bon miel ; & eftant mife au So- leil y adiouftantie ne fçài qu’elles chofes, il s’en fait d’excellent vinaigre. La deco- dion des fueilles eft fort veile pour enla- uer les iambes & autres membres infe- 40 dés de gratelle; comme auffi à guérir les En outre ; lai receu , dit Monard , du Peru le fruid d’vn arbre appelle dés habitans Leucoma , femblable à noftre chaftagne , en forme & grofteur , plat & blanc du mefme cofté qu’icelle: il fembloit qu’il y auoitvn noyaudedans,mais acaufèqueien eh auois receu que deux, ie ne les voulu pas rompre , pource que i’en femaivn, qui ne vint point, & que ie garde l’autre pour le femer en vn autre temps. L’arbre dans lequel il croift eft fpacieux , d’vn bois fort & ferme, comme on dit : les fueilles font comme celles de l’arboifier, & le fruid eft bon à manger, d’vn bon gouft & temperé, quia caufede fareftridion, arrefte lefiux de ventre. / ^ JO II y croift plufieurs arbres d'eftime , mais pource qu’ils font peculiers a certaines Prouinces, nous en parlerons quand nous ferons paruenus a icelles. C HA P. DESCRIPTION DES INDES C H A P. IV. Certains animaux peculiers au Peru. Le s animaux domeftiques àQsFtrumatm font ( dit Garcilajfm ) de deux fortes, grands & petits 5 qu iis appellent dVn nom commun Llama^ c’eft à dire, brebis ; & les Pafteurs Llama michec :i\s noramentlcs plus grandes Huamcu-llama^ pour la reffemblànce quelles ont auec vn animal fouuage qui eft appelle Huanacu, duquel elles different en couleur feulement; caries brebis domeftiques font de diuerfes cou- leurs, commeles cheuaux, les fauuages feulement d’viie couleur de chaftagne. Lesio grandes brebis ont vne grande reflemblance au chameau , fi ce c’eft qu’elles n’ont pas de boffe, &:nefont pas’fi grandes. Ils nomment les petites Paco-llàma,qiii ne font pas propres à porter des fardeaux, mais on les nourrit feulement pour la chair & pour la laine qui eft fort bonne & fort longue. Mais voyons ce qu’en dit -^cojia. Le dit-il, n’a rien de plus excelent, ni déplus vtile, que les brebis queles no- ftres appellent oüailles duPm/, &eux en leur langue Llama-, car elles apportent vn grand profit & font nourries à peu de frais. Ces brebis leur fournifle delaine pour fe veftir, de mefmes que les noftres : ils s’en feruentaufli au lieu de beftes de charge à porter routes forces de fardeaux : & n’eft point de befoin de les ferrer , brider , ni nourrird’aiioine, elles feruent leurs maiftres pour rien, contentes de l’herbe qui fe to trouue fur les champs ou le long des chemins. Or il y a deux fortes de ces animaux ; vne qui porte laine, nommee des Indiers Facû : l’autre qui eft feulement couuerte de quelque poil leger & prefque nue , par ainfi plus propre à porter des fardeaux,qui eft appellee Guamco. Elles font vn peu plus grandes que les brebis , & plus petites que les genices, ayant le col long comme les chameaux, les iambes longues, & d’vn corps bien proportionné , elles font de diuerfes couleurs ; car il y en a de blanches , de noi- res, de minimes, d’autres bigarrées de diuerfes couleurs, qu’il appellent Moromm, leur chair eft bonne, combien qu’elle foit grofliere, & beaucoup meilleure & plus dé- licate que celle d’agneau : on les tué rarement, pource quelles font plus de profit à porter les fardeaux, que leur laine fort à faire des eftoffes des Saunages ont cou- 50 ftume de l’apprefter, filer & d’en tiftre du drap ; or cette laine eft de deux fortes ; Tyne plus rude & moins prifee, qu’ils nomment Hamfia^ l’autre plus fine & meilleure, qu’ils appellent Cumhi (Garcilajjiis la nomme Comfii) de cette derniere,on en fait des tapis & des capifteries d vn fort bel ouurage, qui durent long temps, & fon luftre imite celui de lafoye; & ce qui eft à admirer aux Saunages , c’eft qu’ils en fçauent tiftre des eftof- fes, qui font des deux coftés egalement belles, & la tiftlire ni la trame ne fo voyent en aucun endroit. Lesanciens’Rois duP^’r«,entrecenoyentplufieurs Tifferants en Cmm- les principaux ouuriersdefquels demeuroyent à Capachka fur les bords du lac Tk îkaca. Or ils teignoyent ces laines auec diuers focs d herbes, folonquel’ouurage re- queroit. Au refte plufieurs Saimages du Per/ü fçauent cetArtdetiftre,&ontenleurs 40 maifons des outils propres à cela; & de ces brebis on tire plufieurs chofos neceflaires à la vie. Mais l’vfage principal d’icelles eft pour*'porter des fardeaux; car auec , on tranfporte en troupes parfois de trois cents, quelquesfois de mille diuerfes marchan- difos, comme du vin en oüaires,de la Coca, du Mays, du chunno, de l’argent vif, aux mi- nes de Pûîofi, & autres mines & villes, & de l’argent de Poîofi à Arka,^«^’m,c’eftà dire,(9m/j-. Il s’y trouue plufieurs abeilles fauuages, qui font îeurmiel dans les trous des pierres & dans des foffes au pié des arbres: dans les Prouinccs froides elles font peu de miel &:quieft prefque amer, & la cire noire & inutile : mais dans celles qui font temperees pour l’abondance des bonnes herbes, il efl beaueoup'meilleur, blanc & clair, & qu’ils eftim eut fort. En outre au mefme Rpyaume,il s’y trouue [''dit Momrà ) Certains infiecles, qu’ils ap^ pellentaraignees,pource qu’en quelques lieux qu’elles foyenr, elles tiflént leurs rets, à la façon des araignées d'Efpagne, ces infedesfont aufligrofîés que pommes d’oran- ges,fi veneneux que leur piqueure tué,fi on n’y apporte quelque bon remedeicar fi on 5^ différé long temps & que le venin ait gaigné le cœur, la mort s’enfuit afieuree, fans qu’aucun remede puifl'e feruir: or on a efprouué vne grande vtilité en la figue, fi ceux qui font piqués y courent promptement, & font diftiller deux oucrois fois dans la pi- queure du laid qui coule des fueilles d’ice^i : car le venin laifie dans la playe par l’ai- guillon s’efteind du tout,&: toutes les douleurs & les fÿmptomes fiuccedents en font ofl;és,la feule playe demeurant ; qui eft facilement guerie , comme eftant fort petite : toutesfois ils ont conflumede la laiffer long temps ouuerte : Etafinque ce remede fuft toufiours prefent, Dieu a voulu que les figuyers nelaiffalTent iamais leurs fueilles là, maisy fufl'ent continuellement verds. Encore que le Veru ait plufieurs riuieres, &: mefme fe vente d’auoir la fource des 40 plus grandes, toutesfois il fe nourrit peu de poiffon dans icelles, & prefque d’vne feule ibrtef comme eferit GarcillaJfu'S) fans efcaiiies,qui a la tefte longue & plate comme celle d’vn Grapault, la gueule fort grande; d’vn bongoufi: & bonne nourriture :Les Indiens le nomment C(^4///^4,d’vn nom commun à tous poiffons. Nous expliquerons en fon lieu les autres chofes de cette rorte,maintenant nous nous préparerons à traiter des parties particulières du Royaume du Pm/. V I T a C H A P. Vî. 5° 'Dmfïôn dur Perii en Prouinccs principales ; limites de laProuince de Qiiito , qualités de Jon aïr iS de Jd terre. Le Pm/ fi grand qu’il efi:,efi:gouuerné par vnViceroi; duquel les Prouinccs de Chili fituees vers le Sud,les Ifles qu’on nomm:e de Salomon vers l’Oueft; & pour lafin,la Prouince de la Plata vers l’Orient, reçoiuent leurs Gouuerneurs. Il eft diuifé par les Efpagnols félon les trois Parlements qui y font , en trois parties ; la Tt a première 55i ■ description *1) ES INDES première derquelles eft dite ,-la féconde los Reyes ou &latroiïîeme Us char cas, & bien fouuent la P lata de fa Métropolitaine. Le Parlement de -^uito comprend fous foi , Popaiaa , proprement dit, los ^liixoSi Canela, luan de Salmas, Pacomoros , Tgualfongo , & plulieurs particulières Pro- uinces : nous auons ci-defl'us traité de Popaian, nous parlerons maintenant des autres félon leur ordre. La Prouince qui éft proprement appelle prend fon commencement de la ' ligne mefmei&s’eftend dés icelle vers le Sud, félon Herrera, quatre vingts lieues, ou feulement de feptante, félon Pedro de deçà: de large vingt cinq ou trente. Or les li- mites du Parlement s’eftendent le long de la cofte de la mer du Sud, du Nord au Sud, i o fçauoir de la pointe de (J^IanglareSy iufques au Cap del Aguia au delà de la ligne vers ie Sud: & dans les Mediterranees depuis Carlùfama iufqiies aux confins du Parle- ment de Lima s en largeur, de la rrier du Sud iufques aux Prouinces qui font barrées par les Andes-, & où elle eft plus large, entre Baeza, ville de la Prouince de los ^ixos vers rOriçnt,& Pertv Veto , ou la Montanna, fur la mer du Sud. La température de cette Prouince eft plus froide que chaude: de forte qu’on dit qu'ils ont befoin de feu aucunesfois l’hiuer , ie Ciel y eft clair & forain , rarement nu- bileux , fi ce n eft quand il pleut ou veut pleuuoir. L’hiuer y dure du mois d’Odobre iufques en Mars , aufquels mois entremoyens il y pleut fort, mais il ny neige iamais, fi ce n’eft dans les montagnes que les Efpagnols nomment vulgairement les Andes, & 20 Cordillera. Au réfte c’eft vne région fort faine , de maniéré que les habitans y viucnt plus long temps qu’en Efpagne. Lan cId Id Lvni,la petite vcrole, qui courut p'rcfo que toutes les Prouinces de l’Amerique, emporta aufli en cette Prouince pluficurs perfonnes : autrement les maladies qui y font les plus communes & les plus mortelles tant aux Sauuages qu’aux Efpagnols , font les catharres, qui au commencement & à la fin de l’efté affligent les hommes : mais la plus ordinaire maladie de toutes, eft la vc* rôle, que les Efpagnols prennent par l’accointance des femmes Indiennes ; car toutes les femmes, mefmcs les filles vierges font fi fuiettes à ce mahqu il n’y a point de doute qu’elle ne tirent ce mal de leur race : or le plus puiffant remede eft en la Zarzaparille bc au bois de Guayacion a trouué plufieurs autres,apres que ce mal par vne contagion ^ ^ a couru prefque tout le monde. Cette Prouince porte plufieurs herbes veneneufes, auec lefqtielles les Indiens fo font mourir les vns les autres, bien fouuent pour vn Icger füiet. On a amàfTé autresfois force fragments d’or de la riuiere de .î. main- tenant il s’en aflemble peu , depuis qu’ila efté défendu par Edid du Roi de contrain- dre les Sauuages à cette befogne. H fo tire en plufieurs endroits de cette Prouince, ou la terre eft marefeageufo, beaucoup de falpeftrc, duquel ils font force bonne poudre à canon. Dans les Prouinces les plus chaudes de ce Gouuernement , il y croift vn certain fruid, qu’ils nomment Cuaba, long de deux palmes, d’vne efoorce cendree, ayant la poulpe blanche , meftee de certains noyaux fort durs , douce & refrigerente : comme ^0 auffi des arbres de Guayabes, qui portent vn fruid comme vne pomme, plein de grains blancs & rouges, foin & d’ vn bon gouft : Et pour la fin, des Plantains : ils ont auffi des fruids de l’Europe j comme percets , oranges, granades, coings & plufieurs a.utrcs, qui y meuriflent en abondance , mais iis y pourrifîent auffi toft. Il y croift auffi des vi- gnes en plufieurs endroits: la terre y porte fort bien le froment, l’orge, & y rend la fomence dVnemerueiileufo fécondité : En^n elle ne nourrift pas moins les herbes potagères &autres de toutes fortes qui y ont efté apportées d’Efpagnc,quelcs fiennes propres. Il y a vne grande abondance de vaches, iuments & brebis, qui y multiplient raer- ueilleufomentjiln’y a pas grand nombre de brebis du P<7,ce qui eft plus vrai femblable.; ^^.v^en eft à lxxx lieues vers le Sud: I O S. Miguel beaucoup dauantage vers le Sud-oueft :1a ville marchande de Cartagene à prefqueiDC vers le Nord; & Lima à enuiron ccc vers le Sud. Son territoire eft • fermé vers l’Orient de montagnes fort ipacieufes , vers le Nord du Gouuernemenc àePopaian. La terre encore qu'elle femblefort fterile, neantmoins elle eft fertile en fruids & bonne auxbrebis; la région eft fort plaifante, & on dit qu’elle ne différé pas beaucoup d’Efpagne tant à la forme de l’herbe, qu’ésfaifonsde l’annee, carl’efté y commence des ^Mars de Auril, & finift en Nouembre, doüe d’vn remarqubale tem- pérament. Les Indiens qui demeurent proche de cette ville, font beaucoup plus ciuils &plus induftrieux que le refte des ils font de moyenne ftature& patients au la- , Q heur. 11 s’y trouuegrande abondance de coton, duquel ils tilfent des eftolfes,auec quoi ils payent le tribut à leurs MaiftresEfpagnols. Le terroir de la ville eft fablonneux de fort fec, ouurant au trauers de laville vnegrandecreuafte,furlaquelleily aplufieurs ponts. Les rues y font larges & dr9ites;& il y a i vplaces,rvne deuant l’EglifeCathedra- îe,& les autres deuant les Monafteres des Jacobins & Cordeliers : or outre cette, Eo-ft- fe Cathédrale, il y en a encore deuxautres,l’vne dediee à .9. SebaJliandeV^àwuz à S. Blai- 7?, on dit qu’il y demeure cinq cents familles d’EfpagnoIs,quelques Portugais & autres Eftrangers. LeTreforier du Roi de les autres Officiers Royaux y habitent; comme auffi le Prefident de les luges du Parlement Royal; de plus l’Euefque auec vn noble College de Chanoines : Or il y a au Diocefe d’icelle iufques à cinquante mille Indiens O tributaires,quifontdiftribués en lxxxvii répartitions. Et pour la fin, c'eftvne ville fort bien fortifiée de munie de tout ce qui eft neceffiairepour la guerre ; car il s’y fait de tres-bonne poudre à canon. A vne lieue au deflus de la ville , dans la région des montagnes, paroift vn mont , le- quel ils nomment Vulcan, qui exale vne elpaifte fumee, de fait vn bruit comme vn ton- nerre; parfois il vomit grande quantité de cendres,defquelles il remplit,au mois d’O- élobredel’an cId Id Lx,les champs voifins de telle forte, qu’il fitgrand dommage aux femences de aux troupeaux, iufques à ce que la pluye l’euft deftrempee. Dans le territoire de Mira ( qui eft vn village appartenant au Seigneur d'Otohali ) il s’y trouue des puits falés, duquel on cuift du fel brun &aucunementamer, que toutes- 0 fois les Saunages ont en grande eftime. A demi-lieuë de la ville, il y a vn lac, d’enuiron vne lieue de circuit,qui nourrit plufieurs oyes & autres oifeaux de riuieres. On y amene le vin, l’huile , les efpiceries de autres marchandifes de l’Europe , de la mer du Zud, premièrement amont de lariuiere Guayaquil,^^\x\s par charriots. Les Indiens y tiennent auffi leurs foires &marchés,& y vendent leurs denrees fans poids ni mefures certaines,mais par efehange faite à l’œil, qui font fort fréquentés des Efpa- gnols. Or la plus grande partie de leurs marchandifes font ( outre les fruids de ani- maux ; des fromages de brebis,de vache de de cheure ; des habits de coton,& du drap de toute forte ( qui fe tilfent pour la plus grand part au bourg de Tacunga ; ) des bon- nets,des cordes de nauire,du cuir,du lin , delà laine : On a commencé y a défia long ) temps d’y cultiucr le fucre,& les Indiens mefmes à exercer plufieurs meftiersparvnc finguliere induftrie. Outre le MaysÀ^ y croift par tout deux chofes pour rvfagedel’homme,fçauoirIes P4/>^,qui font des racines croilfantfous terre, dont la bulbe relfemble aux chaftagnes, de eftant cuites,approchent du gouft des chaftagnes boüillies, elles iettent des fueilles femblables à celles du pauot fauuage, comme dit deçà, ce. qui eft faux : cette plante eft maintenant cognuë par toute l’Europe, laquelle îe Char les de l’Bfclufe a diligemment 53<î description DES INDES diligemment defcrit dans fonHiftoire des Plantes Rares. L autre eft la plante .Qmm- hâ ou ^^mnuA { comme parle Cieca) de la hauteur d vn hommC) les fueilles comme la Blette de Barbarie, la femence menue, blanche ou rouge, de laquelle ils font vn breu- uage,oii la mangent boüillie comme nous faifons le ris: il y a ia long temps que la plan- te eft comiuè' en l’Europe, ( dit tEfcliife ) combien que non pas fous ce nom. Car le ^mnua n’eft autre chofe, que cette forte de grande Blette ,croiirant parfois plus haut ^vn homme , ayant le tuyau gros, ferme, diuifé en plufieurs branches inégalés, les fueilles comme la blette vulgaire, mais qui font plus larges & plus longues, portant pliîheurs efpics au hàut des branches, longs d vne palme & plus, qui font parfois plus laro-es au bout & aucunement crefles à la façon de lacrefte du paffe velours crefté, deio couleur d’vn rouge pafle , qui contiennent eftans meurs, plufieurs petits grains blancs & ronds. Mais il ed temps de retourner maintenant àlafupputation de noftre che- min,qui nous mènera aux autres Villes & bourgades de cette Prouince. C H A P. ÎX. Chefi'iiU’ (^ui yâ de Lt Ville de Q^ito a Rhiobarnba., des megionSy mœurs naturel des Indiens. N conte de la^ville de S. François iufques au Palais Royal de Thorne- ^ ^ bamba cinquante trois lieues ou cinquante cinq, comme Herrera dit ailleurs, 2,0 lequel nous auons iuiui en nos Chartes Géographiques, Or le chemin eft pa.r- ticulierement defigné par en cette maniéré. ' De la ville de ,-^®/Vtf,luiuant le chemin Royal vers le Sud & vers la A^etropolitainc CnfcOi on xencontïc^ïo^vaïQïtvacnt Panz,aleo ;les habitans de laquelle different aucu^ nement de leurs voifins,tant en langage qu en la façon de lier leurs cheueux 5 laquelle maniéré diftingue le plus fouuent les Saunages de diuerfes Prouinces. Au milieu de l’efpace il y a quelques bourgades dans les montagnes d’vn codé & d’autre ; au codé droit ou vers le Couchant font les vallees de T^cr^f^^? & de Z4^^«4^:f,celebres en tem- pérature d’aïr & fertilité de terroir ; defquelles il y a vn chemin qui va aux montagnes de Tumbiydzns lefquelles habite vne forte de gens rudes & inciuils , qui ed rendu plus 3 ^ farouche par l’alpreté ôc difficulté des lieux : a code gauche il y a vn autre fentier qui mene vers les peuples de los ,^iüxoS)àc(cçüt\s nous parlerons bien tod. De Panzaleo on va à CMulahalo trois lieues de chemin, où il y a eu autresfois vne ho- dellerie ou vn "Tambo) & vn magazin de viures pour les foldats que les Rois y entrete- noyentjîors qu’ils palïbyent par la,maintenant la bourgade ed fort peu peupleeiacode droit fo voit vnF^/f^^,qui iettoitau temps paffe force pierres de ponces & des cendres. Vn peu plus outre on rencontre T acunga,{^2. quinze lieues de la M^etropolitainé comme affeure Palais anciennement fomptueux,ôc nulle- ment inferieur à celui de comme on peut voir encore pour leiourd hui par les ruines cl’icelui , car on y voit des niches dans les. murailles , ou on dit qu il y auoit des images de brebis d’or,du temps des y auoit vnXemple au Soleil auec fos veda- les qu’ils ViOx:ciVCiO'çç,riX.Jidamâconasi & plufieurs greniers dans lefquels on forroit toutes fortes de viures , force effcables pour des bedes, &des cages pour toutes fortes d pi- feaux:tous les édifices edoyent de pierres & couuerts de paille. Les Indiens y font bruns de couleur,combien que les femmes n y foyent pas laides,mais belles de face. Il y a auiourd’hui vne bourgade fort peuplee, où nous auons dit ci-defTus qu’on tidbic force draps, defquels les habitans font vn grand profit. De Tacunga fuiuantle chemin Royal, on M^^rJPduUmbato, où il y auoit de pareilles hodelleries,& le peuple ne différé prefque en rien de ceux de Tacunga. Delà on va àJa i\\x\ç,xç. â' Ambato-i^ à trois lieuc’s d’icelle au Palais de la anciennement édifice 3 ^ magnifique , maintenant il ed prefque tout tombe, comme les autres édifices des Tîi>~ caS". il y a peu de Sauuages qui y demeurent de mefmes mœurs & coudumesque les precedents. Vers le Couchanthabitent les Sichos diuifés en quelques bourgades, vers 1 Orient les P/7éi;2tf5dansvn pais fertile,deforte que rien deneceffaire à la vie humaine ne leur deffaut j plufieurs Efpagnols y nourriffent des brebis , attirés là par la bonté des ^ padurages: OCCIDENTALES. LIVRE X. jj7 pafturages : ils y nourriflenc principalemenc force pourceaux , qui font ellimés les meilleurs de tout le Pern. T)c.C^îocha on vient à Rhiobamba , anciiennement decoree d’vn magnifique Palais, fituce dans la Prouince des Puruas, qui eft tout champeftre,& femblable en tempéra- ture d’aïr,abondance diierbage,& en beauté de fleurs à l’EfpagneiLes Indiens y font dVn naturel doux & fe veftent à la façô de ceux de ^ito,i\s nourriflent leur cheUéleu- re,qu ils treflenr d vne belle maniéré. On ditquelavilledej^^/Vtf eftoitanciennement baftie en ce lieujiufques au temps qu’elle ait efté tranfportee où on la voit maintenant. Or RhiobâinbA eft diftante de la ville de ,^mto de vingt cinq lieues, comme Herrera dit, 10 011 vingt deux lieuès,felon vers le Sud-oueft ': ce n’eft quVne place â troupeauxide forte qu’on dit qu’il y a plus de quarante mille brebis. Vers l’Orient il y a plufieurs Saunages qui habitent entre les montagnes, des limites defquels la com- mune opinion elt, comme efcritH^er^^-rr?, que les fontaines de lariuieredu Marannon. ne font pas loin : du mefine cofte font fituees les montagnes de ou 'Twcuya^ f//jpeuples de beaucoup de bourgades de Sauuages. Et vers l'Occident fèvovent les fommets couuerts de neige des montagnes de yrcolUJfo ou Vrcollafu.îott peuplés d’in- diens,au trauers la contrée defquels paffe le chemin qui va à la ville de Guaya^uil. De Rhiobamba on vaà Cayamben où Caya-^py, où il y a des hoftelleries pour les paf- fans,qui font dans vne large campagne,fous vn aïr vn peu froid. Delà on va aux ho- ftelleries des Teocaxas{ ou Tucajfa y comme, efcric GarcilLiJpis)'Çiz]jiccs au milieu d’vn certain defert ou Pum,où il fait fort froid. Apres à trois lieues de chemin , on va au Palais de Tiquicambi, à la main droite du- quel eft la ville de Guayaqml, à la gauche Palaîa , ou comme GarcilUjJm l’appelle Puma- lequel mot fignifie. Terre des lions, pource qu’il s y engendre plufieurs de ces beftes : &les Prouinces de ^ijhaon ^ejna -, comme aulTi les peuples nommés Ma- casybc autres tres-grandes Prouinces. Delà on defeeud vers Chancham & les contrées plus chaudes , lefquelles font appellees par les Indiens, comme les autres de meffne condition, d’vn nom com- mun Tungas. JO Enfin de cette bourgade iufques au Palais de fPhomebambayonconîev'm^tlieu'ésy dans lequel cfpace a chaque trois ou quatre lieues, il y a des hoftelleries ou bafties d’ancienneté,entre lefquelles il y en a deux excellentes, fçauoir & HatuncannariyZmÇi nommées fans doute des Indiens, qui font ordinairement nom- mes CannareSyàz^ mœurs & du naturel defquels nous parlerons bien toft. ^ C H A P. X. D« magnifique Valais Thomebamba, la Vrouïnce ^ des mœurs des peuples qu’on appelle Cannares. 40 ^ N T R E tous Içs Palais qui ont efte baftis en grand nombre par îeS Rois du 1 ^ tout leur Royaume,auec les édifices y adioints, dans quelques-vnS ^ defquels il y auoit magazin de toutes fortes d’armes , en d’autres des veftements Ou aes viures en grande abondance :1e magnifique & fomptueux Palais Ae’Thome- bamba fou comme GarcillaJJhi le nomme Rumtpampa ) fituédans la Prouince des Càn- nareSymevite a bon droit le premier lieu ; duquel combien que les Saunages en con- tent plufieurs merueilles, toutesfois on dit que les reliques ou pluftoft les mafores quand on les voit,caufent vne extraordinaire admiration : le terroir d’icclui eft borné du cofte del Oueft delà Prouince des Guancabilcas çr le Leuantdeforthautes mon- tagnes : il eft baftidans vne large plaine,laquellea enuiron douze lieues de circuit, fut le confiant de deux riuieres : La contrée eft vn peu froide,eftarlt au refte fort commo- de pour la chafle des cerfs & des connils, comme aufli pour celle des perdrix, tourtres & autres oifoaux. Il y auoit vn Temple dedie au Soleil, bafti degroffes pierres, quel- qncs-vnes defquelles eftoyent noires comme pierre de touche, d’autres de couleur de îafpe verd ; les portiques eftoyent élégamment peintes & diftinéfes de diuerfos pier- res precieufos & autres ornements : & les paroisnon feulement du Ternple, maisaufîî du PalaisRoyal eftoyent au dedans couuertes d or, dans lequel il y auoit diuerfès figures V U grauees : 338 description DES INDES frrauees ; les toiéls combien qu’ils ne fulTent que de paille, toutesfois ils eftoyent agen- cés âuec vne telle induftrie , qu’ils pouuoyent durer vn aage ; enfin il y auoit vn trefor incroyable d’or & d’argent qui y eftoit ferré. Or c’eft vn indice remarquable de l’o- beïfiance des fubiets enuers leurs Rois , ce que rapporte Ciecâ & que GârcilUjfm con- firme,que ces grandes pierres, defquelies ce magnifique Palais & le Tempk du Soleil eftoyent baftis , ont efté amenées là de Cufco,^^tvx\ fort long & grandement difficile chemin. Au refie ce fomptueux édifice eft maintenant prefque tout tombé, & n’y refte rien qu’vne grande mafure. - ^ Les naturels de cette Prouince font appelles beaux de face & agiles de corps; ils portent les cheueux longs, mais fi bien trefles , & liés en nœuds, &accom- jq modés fur la tefteen forme de couronne, qu’ils font principalement diftingués de leurs Yoifins par cette marque ; ils fe vefient de draps de laine & de coton ; & fe chauf- fent de bottes qui font ingenieufement faites de Cabma.hcs femmes y font belles.mais impudiques,& fe plaifent outre mefure à auoir l’accointance des Efpagnols & autres Eftrano-ers : combien quelles s’employent le plus fouuent auxouuragesruftiques& autres exercices d’hommes;cependant que les hommes feent à la maifon,fiIent,tiflenc & n’ont pas de honte de faire tous les autres offices des femmes: & mefmes ils preftenc de leur plein gré leurs femmes & leurs filles aux Efpagnols qui voyagent parlepaïs, pour porter leurs hardes, comme beftes de charge : plufieurs eftiment que la caufe de cela efi, qu’il y a beaucoup plus de femelles que de mafles en cette Prouince. Quant à leurs autres mœurs durant qu’ils efioyent Payens, iln’eft pas befoin d’en dire mainte- nant dauantage,pource qu’il y a ia long temps qu’ils ont commencé d’embrafler la Re- ligion Chrefiienne. En outre la Prouince de ces peuples efi longue &: large , arroufee de plufieurs ri- uieres , defquelies on a autresfois tiré de grandes richefles ; car on conte que l’an cIoIoxLivonya trouué de fi riches mines , que les Bourgeois de ^ito en ont tiré en peu de temps plus dehuid cents mille ducats ; mefmes eftoyent fi riches en cerne- rai, qu’on droit prefque autant d’or que de terre, f le luyles Autheurs Efpagnols no- tamment Pedro de Cteça. ) Le terroir porte allés bieri le froment & l’orge : & n’endure pas mal les vignes, voi- - ^ la quel efi le tempérament de cette Prouince.D’icelle il n’y a nul chemin qui aille à la^ mer du Sud ; fi ce n’eft d’auanture par les vallees de Piura &c par la ville de S. Migueh de laquelle nous parierons bien toft. Mais auant que de pourfuiurele chemin Royal qui conduit parles montagnes,& de deferire les Prouinces qui font au dedans du pais, qui l’attouchent à droite & à gauche, il nous faut vn peu nous deftourner vers celles qui aduoifinent de plus prés la mer du Sud, & parler de Puerto Veyo, & des autres lieux qui font à l’Occident de celles dont nous auons traité iufques ici. C H A P. XL Chemin qui conduit de U Prouince de Quito d U mer du Sud, 4° O* qualités des 'Pigions qui [aduoifinent. ACofté de la Prouince de proche de Rhiohâ,mha(àt laquelle nous auons traité ci-defîus ; eft fituee la Prouince de chumho or en l’efpace d’entre-deux, il y a plufieurs villages fort peuplés, les habitans defquels font tous diftingués entr’eux par certaines marques, comme c’eft la couftume en tout le Peru. On dit qu’il y a défia en ces régions plufîeursTempîes baftis,danslefquels la Religion Romaine cft exercee, & la ieunefife inftruite par les Religieuxaux prières & chants facrés. De cette Prouince chumbo, on va par vn fort difficile chemin de quatorze lieues à vne ri- uiere, proche la riue de laquelle les Indiens ont toufiours des radeaux prefts ,furlef- jo quels ils mènent les voyageurs iufques au lieu le plus célébré & cognu de tout ce Royaume , que les Efpagnols nomment el Pajfo de Guayamcapa , duquel nous parle- rons ci-apres plus amplement. Or le premier port du Peru fur la mer du Sud eft nommé PaJJaOyàncinû comme auffi delariuiere de-S'./4^iJ,ieslimitesdu Gouuernement que auoit obtenu de rEmpercur,prenoyent anciennement leur commencemetj car les terres qui eftoyent OCCIDENTALES. LIVRE X. 35^ plus au Sud.effcoyent attribuées à la riuierc de S. Iua?i-, dont nous auonsparlé ci-defTus. Les naturels de la Prouince de qu’on nomme vulgairement de Puerto Veyo, font de llature médiocre, &r polTedent vne terre grandement fertile , qui porte abon- damment du MayS) du Tucd) des Bâtâtes &Cü.utvcs, racines bonnes à manger, faines & propres pour l’vfige de l’homme: Il s'y trouue de fort bonnes Cuayaues , de deux ou. trois fortes : des Guaues & des /guacatess des Tunas , de deux fortes ; des Caymes S>cde's Bcrez,il!eSi$^ vs\e(mes les melons &: autres fruifts de l’Europe y meuriffent excellem- ment bien. Il y vague ci & là plufieurs pourceaux de/’v^;^m^»e,qui ontle nombril furie dos,&meImes de ceux de l’Europe. Les cerfs y fontaiilTi d’vnechairfortagrea- 10 bie. Il y a vne infinité d’oifeaux,& entre iceux des fort femblables auxoyesj que les Saunages appriuoifent &: nourriflent dans leurs logis , & les feruent à table pourdelices. Puis aufîi d’autres oifeaux qu’ils nomment iV/ïf^,vn peu plus petits que les coqs de noftre pais, qui ont le bec longjde couleur iaune & rouge , & de plumage fi varice de couleurs,qu’ils apportent vnegrande admiration à ceux qui les regardent. Les montagnes & les vallées font couuertes de bois efpais de diuers arbres, la matiè- re defquels eft eftimee fort propre pour en baftir des maifons. Les Indiens prennentdiuerfes fortes de poiflbns,dÈfqueIs ceux qu’on appelle Bom- font les moins eftimés, pource qu’on croit qu’ils engendrent les fiebures Vautres maladies. Or les Saunages qui habitent le long de la cofte de la mer du Sud, font affii- zo gés d’vne certaine forte de verrues ou pullules rouges,qui fortent parfois aulfi grofles que desnoix au front, auxnarrines ôr autres parties du corpsjque quelqucs-vns efti- ment procéder par l’vlàge de certain poilFon, d’autres l’attribuent à d’autres caufes, c’eft vn mal fort malin & bien foüuent mortel. On remarque qu’il y a deux fortes de gens qui habitent cette colle : car du Cap Jào de de la riuiere .S". Tago iufques à là bourgade Zdango, tant les hommes que les fem- mes fe marquent la face de certaines lignes, tracées des oreilles iufques au menton , &: s’ornent de diuers carquans d’or & fur tout de certâines paftenollres, qu’ils nomment vulgairement chaquira Colorado, , qu’ils ellimeht fort en ces quartiers. Or il faut re- marquer que Chaquira ell vnmot propre des BefuuuinSi par lequel ils defignent vne jQ chaine d’or artificiellement trauaillee,qu’ils fçauoycnt auant la venue desEfpagnoIs façonner fi gentiment & fubtilement, qu’elles eftoyent admirées des Europeans mefi mes,comme eferit GdrcillaJJus. Les principales bourgades de ces peuples font PaffaOiXaramixOtVompaguacei Peclau- fèmeque & la vallee Xagua,,Pechonfi ou Monte Chrijlo, \Mfechtgue,iSilos,^Camllega, Monta, Zafil, tZMonoui, Xaraguaco & autres. Leurs maifons font de bois, couuertes de paille. La bourgade de ell fituee fur la colle de la mer du Sud : il y auoit au temps palî'é vne grolTe Emeraude que les voilîns venoyent adorer à grandes troupes : & n’y a point de doute que les riches veines de ces pierres prccieufcs,ne fulTent proches de- là,comme tefmoigneylir<^.«; auprès de Monta ( dit-ilj & Puerto Veyo , ilfe trouue plu- fieurs Emeraudes, & au dedans du pais on renomme vnlieu, nommé vulgairement dé las Efme r a Idas i^ouï. l’abondance de ces pierres , combien que cette région n'ait pas ellé encore defcouuerte ni domptee des Efpagnols. OïManta ell auiourd’hui le pre- mier port du Perth auquel la plus grand part de ceux qui viennent de Panama, ont cou- llume d’aborder , & ennuyés de la mer, vont par terre delà à Lima : Le haure ell afles commode pour les nauires: il y a quelque peud’Efpagnolsqui y demeurent, tous les habitans font naturels du païs,qui s’occupent à faire des chables & autres ouurages pour les nauires j car ils y ont quelques barques. Les Sauuages qui demeurent au dedans du païs, ontvn langage du tout different, côbien que leurs mœurs ne foyent pas beaucoup dilTemblables de celles desautres qui habitent proche du riuage, il court vn bruit qu’il fe trouue quantité d’or dans leurs riuieres . L’autre forte de Sauuages font appelles Caraques,qui font differents en mœurs &: coullumes aulfi bien que leurs voilîns des precedents ; car ils ne fe font aucunes mar- ques en la face, ni ne font pas fi habiles ni fi indullrieux, mais hébétés & ruflics. Vne partie dentr’eux notamment ceux qui demeurent vers le NorddeCcxx lieues, & que le chemin tourne àbs ^uiîo vers le Sud-ouefté . Mais OCCIDENTALES. LI?RE X. Mais auant que de pourfuiure plus outre , nous expliquerons vn peü plus à plein fuiuant de comment fe doit entendre ce que nous auons dit ci-deffus» qu’il ne pleut iamais dans la plaine ni dans les vallees : Au païs des montagnes, que les Efpagnols nomment Us S/e^raj-J'edé y commence au mois d’Auril & finit en Septem- bre: ôc riiiuer y dure d’06tobre iufques en Mars : Mais dans la plaine qui efi: proche de la mer du Sud,tout le contraire y arriue : car des d’Oitobre il n’y pleut pas la moindre goutte qui Toit, feulement il y tombe vne certaine rofee fi menue, qu’à peine humette- elle le defllis de la terre ; de forte que les habitans font contraints d’airofer auec grand labeur leurs champs ; car la plus grande partie de la terre efi: de fterile fable, & des ari- : O des rochers,couuerts de quelques bas arbres & arbriffeauxjqni portent peu de fueilles Sc nuis fruids ;& il y a par tout force chardons & chaffetrapes. Orrhiuer,comme ils rappellent,le Ciel efi; prcfque toufiours couuert de nuees, qui empefehent la veuê' du Soleil, &femblent menacer de groifesguillees, combien qu’à peine elles arroufent la poulliere de quelques menues gouttes. On eftime que cela fe fait parle voifinage des hautes montagnes,qui attirent à foi les nuees, & les empefehent de tomber fur la plai- ne. Car quand il pleut fort dans les montagnes, la plaine iouït d’vn Ciel grandement ferain & clair ; & au contraire quand la plaine efi: humettee d’vne rofee fort menuë, il fait beau dansles montagnes. Les 7^^ Anciens Monarches du Per/^ auoyent aufli drelfé vn chemin Royal par les plaines de quinze ou feize piés delarge,paué de cail- 1,0 loux,muni de muraille de deux coftés,& couuert d’arbres à l’encontre de l’ardeur du Soleil,felon que la nature de la terre pouuoit permettre ; accommodé d’hoftelleries &: de Palais par interualles,comme nous auons dit de celui qui eft au païs des montagnes. Au territoire de S. ^/^«^/appartient Faïfa, renommé port du Féru, fur la hauteur de cinq degrés au Sud de la ligne, comme Herrera remarque ( aufquels qüelques-vns ad- iouftent quelques fcrupules ) à vingt cinq, ou félon d’autres feulement à xîi lieues de la villeroù le chemin eft fort ennuyeux à trauers des lieux fablonneux &: deftitués d’eau & de toutes autres chofes neceffaires. Or c’eft Vne tres-grande baye, & extrêmement bien munie de nature à l’encontre dé l’incertitudé desvcnts;les nauiresqui vont de Guatemala au Feru^ont couftume d’y aborder & de s’y defcharger,laquelle opportuni- 0 té à excité plufieurs Efpagnols d’y baftir vne bourgade, qui es années paflees a efté prefque toute ruinee par deux infortunesrl’vnel’an cId Id ilx:s.'kvu ^ar Th ornas Can- difeh Anglois, qui la prit fans que les habitans fe miflenten defenfej elle contenoit pour lors deux cents maifons auec leur Auditoire, & vnFort qui n’eftoit pas encore acheuéril attaqua à la defpourueuë les Bourgeois, qui s’en eftoyentfuis dans la mon- tagne voifine,qu’ilmit en route & leur ofta vingt cinq liures d’argent, puis en defeen- dantil brufla toute la bourgade.Derechef l’an cId loc xvpar George Spilbergucy Hol- landois,lequel y ayant entré & trouué la place vuide d’habitans , qui s’en eftoyent fuis auec tous leurs moyens dans la montagne , brufla derechef les maifons : ceux qui ont veu cette place depuis peujaffeurent qu’il y habite peu d’Efpagnols , qui y vendent des j-o viures,& beaucoup d’indiens. G H A P. XVL Trouirnt de los Quixos,^j limites ^ qualités y Villes y comme au^l celle que l'on nomme de la Canclla. IV s Q^E s ici nous auons vifité les Prôuinces qüi font les plus proches de la mer , qui font enfermees entre les limites du Parlement de ^ito, fituees tant en la plaine , qu’és montagnes ; maintenant il nous faut parler de celles qui font plus efloignees , &: lefquelles appartiennent aufli à ce Parlement. L’vne defquelles eft ap- p pellee des Efpagnols feulement defcouuer te l’an cIdId lvii, apres qu’on eut mene vne Colonie d Efpagnols dans Cuença (de laquelle nous auons parlé ci-def- fusj elle a pour limites a l’Occident la Prouince de ^mto proprement dite j vers le Nord celle de Fopaiani du cofté de l’Orient les Prouinces,qui fontnommees BlDora.^ do, de l’abondance de l’or qui y eft , fi le Bruit en eft vrai , &: pouf la fin vers le Sud lâ Prouince de TguarJongo,àe laquelle nous parlerons ei-apres. Ces limites du cofté dti Nord atteignent à peine le premier degré de l’eleuation du Pôle du Sud} elle a prefque ' Xx de long I t^6 DESCRIPTION DE.S INDES de long XL lieues, & de large à peine vingt. Tout le contenu de cette Prouince eft fort ardent, & eft arroufé de beaucoup de pluyes : elle porte peu de de froment point : à peine y a-il aucun fruid du Fem qui ne fe trouue là,& elle produit ceux qu’on nomme Granadillas.Çi excellents, qu’ils furpaftent tous ceux des autres Prouinces. Les fruitts de l’Europe y font défia familiers , comme auffi les herbes potagères & autres. Elle a fon Gouuerneur,qui y eft eftabli par le Viceroi du Fertt. Il n’y a que quatre villes en tout qui y font habitées des Efpagnols, la première &: principale defquelles Bae- ^s^jbaftie l’an cId lo lix par Gil Ramires Daualos,^ dixhuid lieues de la Métropolitai- ne ^ito vers le Sud-eft,le Gouuerneur de la Prouince y fait farefidence. La fécondé eft K^rchidom, diftante d’enuiron vingt lieues de Baeza vers le Sud- ic fud-eft. La troifieme o^W/4,la diftance de laquelle ie ne trouue point, elle eft au Nord d'Archidona. La quatrième Seuilla delOrotencote que Herrera n’en face mention en la defeription des Indes,ni ne la fait mettre dans fa Charte Géographique. Cette Prouince appartient à l’Euefchc de ^mto^ & fes habitans naturels ont com- mencé à embrafter à bonne efeient la Religion Chreftienne , ils ont vn langage parti- culier,combien qu’ils vfent aufli du commun du Beru , lequel ils fçauent : au refte ils ne dilferoyent anciennement, foit enmœursou en habits desautres Sauuagesdeces régions : mais la rage de la guerre &: les maladies ont emporté vne grande partie d’i- u ceux. Car lors que les Efpagnols entrèrent premièrement dans cetteProiünce,ils leurs refifterent puifiTamment par armes , & leurs monftrerent en vain la furie, dont font fournis tous ces tranfmontans ,puis apres auoirefté domptés, comme ilsportoyent impatiemment le ioug,ils fe rebellèrent vne fois, voire deux : mais maintenant eftans domptés toutàfait,ilsembrafrentla paix,&s’employentà laculturedes champs. Vers f O rient la Prouince de J eft aduoifinee de celle qu’on nomme de la CÆ»^//^,pourrabondance des arbres ('defquels il y amefme des forefts entières, qui s’eftendent plufieurs lieues ) qui pour vne certaine fimilitude qu’ils ont auec cette clpicerie ficognuë,font appellés Canelles. Or cet arbre eft de la grandeur d’vn oliuier, produifant certaines bourfettes auec leurs fleurs, qui eftant broyees approchent en 3 ( quelque façon tant en odeur, qu’en gouft de cette efpicerie. i^onard deferit cet ar- bre en cette façon. Les arbres qui porte la canelle,font d’vne moyenne grandeur, & toufiours verds, comme les autres arbres des Indes, ils ont les fueilles femblables à cel- les du laurierjlefruidreftemble à vn petit chappeau, de la largeur qu’eft vne piecede huid reales d’Efpagne , parfois plus grand , dedans & dehors d’vn pourpre brun , poli au dedans, & rude au dehors, les marges duquel font de l’efpeflTeur de la monnoye que nous auons dite, mais le haut eft beaucoup plus efpais, & la queue y eft attachée , à la- quelle il pend à l’arbre .-quand on le goufte il ale mcfme gouft de douceur Codeur agreable,qu’à la vraye canelle qu’on apporte des Indes Orienrales,auec quelque aftri- dion: l’efcorce de l’arbre qui eft efpaifre,n’a nul odeur ni gouft de canelle. le ne fçai fi la deliee membrane de deflbus en a quelque chofe. Voila ce qu’il en dit. Anciennement ily auoités régions voifines du Féru vn grand renom de la richeffe de cette Prouince ; iufques à ce que Gonfdue Fizarre l’euft trouué autrement, quand il fit cet infortuné voyage vers les Prouinces delDorado ; car outre de grandes forefts de ces arbres & des bois fans paflage,il n’y trouua rien de prix.Et lesSauuages eftoyent de- ftitués de routes chofes & d’vn efprit fort lourd ; ils demeuroyentdans des baflés calés & des logettes qui s’en alloyent tomber: du tout ignoras desProuinccs voifines,& mef- me ilsnefçauoyentpas bien la leur propre :toutesfois par vne inouïe cruauté, lesfitdefchireràceschiens,& bourrelamiferablement par d’autres tourments, pource qu’ils ne lui pouuoyentnine fçauoyent monftrer le chemin vers ces riches Prouin- yo ces, que ce Tyran auoit défia englouti en efperance. Cette Prouince eft fitueefous la ligne & eft appellee des peuples voifins d’vn nom du pais Zumaca. r C H A ?. OCCIDENTALES. LIVRE C H A P. XVII. 'Trottince des peuples nommés Bracomoros , Colonies des E^agnols dans icelle. DV mcfme Parlement de ,^ito font contés d’autres Proûinces Mediterranecs, qu’on appelle Bracomoros ou Pacomoros , àl quelquesfois Tguarfingo-, & le plus fouuent luande SalinasSoitc^e. cefoitvne Prouincc ou plulieurs &diuerfes: or elles ont pour limites vers l’Occident ces grandes & continués montagnes àe.% AnâeSi lo qu’on nomme Cordillçra,m delà defquelles nous auonsditqu’eftoitauffi celle de Za~ mora, du territoire de laquelle il y aiulques à ces Proûinces vingt lieues vers l’Orient. Or elles ont de long entre, le Léuant& le Couchant prefque cent lieues, & autant de large entre le Septentrion &: le. Midy. Les régions font d’vn aïr agréable, d vn terroir fertile, & fécondés en toutes fortes defruids,notamment en froment, mais beaucoup meilleures pour le beftail , pour l’abondance de 1 herbage. Elles abondent outre en minesd’or,danslefquelles on trouue des grains d’vnegroiîéurnonaccouftumee,donc les Efpagnols qui y ont eftéenuoyés pour Colonies, tirent vn grand profit. Or il y a quatre villes ou bourgades qui y font habitées par iceiix, bafties par luan de Salinas de qua nd il efi'oit Gouuerneur de cette Prouince. lo La première defquelles efi: Fallodolidy placée par k^Anthoine Herre.ra fur fept degrés auSuddelaligne,à vingt lieuès de la ville de au delàdes fpacieufes & prefque continués montagnes des yfWei-i-maisveu que Zoxaed fur la hauteur de cinq degrés, &: que Zamora ed pixCque fur la mefme hauteur & à vingt lieuès de Loxa, outrelcs An- des vers rOrient,ceIameferoitcroireque Herreraaefcriten ce lieuZoxa poui^Zamora, ÔL que la ville de Fallodoltd eft à vingt lieues de Zamora vers le Leuantjor il s’eft pu tromper en la hauteur. La fécondé efi: Zoyo la yUom.mee d’vn nom de la nation Cumbinamai^Vingt lieuès vers l’Orient de Vallodolid, , La troifieme eft S. lago de las Montannas^ prefque cinquante lieuès de Zoyola vers le i 0 Leuant,en vne région fort riche d’or fi fin, comme on dit , qu’il furpafte de beaucoup celui des Proûinces voifines : & n’y en a point qui foit meilleur, fi ce n’efi: celui de Ca- rauaia dans le Peru & de Valdiuia en Chili. Herrera n’eferit point le nom de la quatrième, ni en la defeription des Indes, ni en l’Hiftoire. Acojla fait mention en fes Commentaires des chofes naturelles & morales, des mines d’or de Cartamay dans le Gouuernement de Salinas y où il dit auoirveu de grofl'es & fort dures pierres , au trauers de l’efpefleur defquelles couroyent des veines ci’or,quelques-vnes defquelles eftoyent demid'or} auprès defquelles mines ie me dou- te que cette quatrième ville efi; baflie. Orpource que nous fommes fouuent tombés furie propos des mines d’or, fine fc- 4o ra point hors de propos de dire encelieu,que l’or fe trouue en trois fortes en l’Ameri- que ; premièrement en grains pu fragments de pur & fin or, fans eftre méfié d’aucun grauier de marbre ou autre matiere,de forte qu’on n’a qu’à le fondrcjor ces grains font le plus fouuent de la groffeur de la femence de concombre & mefme de celle de cour- ges , quelquesfois plus petits, rarement plus gros : & cette forte d’or fe trouue moins fouuent que les autres. Secondement méfié ou incorporé auec des rochers, pierres où du marbre , au dedans defquels il y a des veines luifantes qui courent par iceux : & de cette forte il s’en trouue principalement dans la Prouince de laquelle nous traitons à prefent , comme affeure Acojla , & lequel fe tire auec grand labeur des puits & fofies profondes ; pour la dureté des pierres auec lefquelles il efimefié. Et pour le troifieme JO lieu, en poudre & menu fable, f que les Efpagnols nomment Oro enpoluo ) de laquelle forte ontrouuecn beaucoup plusgrandeabondance dansles riuieres & torrents, où es lieux qui ont efté autresfois coùuerts & inondés des riuieres ; defquelles riuieres & lieux inondés, les Ifles & plufieurs Proûinces en la Continente ont autresfois abon- dé & abondent encore pour le iourd’hui. Acojla au Liure i v traite plus à plein de ces choies. Mais les Ancierîs l’ont aufli remarqué, comme il fepeut voir dans Pline, Xx a Ch Aï», . r 34^ D ES CRIPTION D ES INDES C H A P. XYIII. Cofle maritime de la Promuce de CapSy Bayes J Forts, Fleam Ifies qui font âu deuant de la Continente ■, principalement Puna. Le long de la cofte maritime de ce Parlement àc ^ito, on y renaarque ces caps, bayes & rinieres. Du cap de Mangiares, duquel nous auons parlé au Liuise pre- cedent,iufques à la baye de S. lago^QL cofte court Süd'-oueftj& feG^it une grande bayeidans laquelle s’ouurepremierement vne Anee , appellee tùlgâ4reraent>^;^^^'^?» de ' Sârdinas’à ^^ ài\ cap ftifdit,qui eft eftimé le dernier de k^Pt^mnee àQ Fûpaim. i o En Geste place dercénd en mer la grande nuicre de S. Iagp,^m a fes riuages ü droits que les naukes touchant le fonds de leur proue, ont bien fouuent fous leut derrière Lxxx bradés d’eau : cette riuiefe fe roule fi viftepar fbn emboucheute dans la mer, qu emportant le fable auec foi, elle fait vne incrbyabîe-profondeur j toutesfois les na- uires y entrent fans danger. Vn peu plus outre,!! y a^ vne autre baye appellee de S.Mat- ?/?/>»,fur la hauteur d’vn degré de la ligne vers le Nord', -à îaquêMe rèfpond prefque au dedans du pais la ville de .^ito^ comme remarque. Or le Cheualier Anglois Richard HâipkinfiCcnt quec’eft vn port fort commode & qué la riuiere eft afles pro- fonde , & où la maree croift de quinze à feize piés : le territoire qui enuironne cette baye, eft fertile & fortpeuplee de Saunages, qu’on dit cftre riches en Gr& en efmerau- 2,0 des des Efpagftols qui habiten t la ville de Guayaqmli y auoyentmené vue Colonie, du sré des Sauuagesjqui peu apres eftans ennuyés de rinfblence de cesnouueaux venus, 'èc ayàns faitfecrettement vne coniuration contre eux,aüee vn certain Mulate,ils atta- quèrent à l’improuifte les Chréftiens, & les tuerent tous, exceptés deux, qui s’enfui- rent auec grand péril à la ville de ^mto. Le mefme Hawkin fait mention d’vne autre baye & d’vne autre riuiere, entre la baye de S'. Matthieu &le cap de S. François ^ à fept lieues de ce cap : au coin de cette baye il y a vne coline, qui femble vne Ifte quand on la voit de loin î la riuiere eft grande, mais l’eau en eft vn peu falee àTembouchéure^quand la maree eft haute. De la baye de 5’. iufques au cap dé S.Franfois,h coùes*cQ:eiiiddroïtempnt 30 versPOueft.par douze lieues d’efpaee: Orle Êapdefcend en merd’vrte haute coline, couuerte de plufieurs arbres,à vn degré de la ligne vers le Nord. Dueapde S. François iufques à vn autre nommé vulgairement dtlaffaOy fîtué pref- quefbüs k îigne,la cofte court vers le Sud-oüéft. Or dansfefpacequieft entre-deux, il y a quatre riuieres qui fortent en mer, qui font appellees d’vn nom commun ,^ixi- mies: Diego Fernandez, les nomme Aehenaux, dit qu’elles s’eftendent iufques à dix lieues loin dans le païs, qu’elles rempliffent parfois fi fort qu’on n’y peut paffer. Au defîbus du cap il y a vn petit port nommé vulgairement desEfpagnols El Portete, où on peut prendre commodément de l’eau & du bois, quand la neceftité le requiert. Le cap eft moyennement efleué, derrière lequel fe voyent les montagnes de i^aque, qui 4° s’eftendent de la Prouince de chumbo: En ce lieu comme aufli dans les montagnes de ^uaque-)FrançoüFizarre ofta anciennement beaucoup d’or &d’efineraudes aux Sau- uages, qu’il furprint à la defpourueuë quand il fit fon premier voyage vers le Peru. A XX X X lieues ou enuiron de ce cap vers l’Oueft,il y a quelques Mes parfemees en mer, que les Efpagnolsnommentde/(?i’(?4//i9p4^^.f, quifontdefertes & infertiles, comme Richard Harvkin eforit. Du cap de Fajfaos la cofte s’ençline vn peu plus vers le Sud, au milieu de l’efpace il y a vne baye appellee d’ordinaire de los Caraques , des peuples dont que nous auons parlé ci-deffüs; oùily avnfort’bon anchrage,& mefme on peut mettre à fec les plus grands naüires pour les y raccommoder ; l’entree & la fortie y eft aifee, & combien qu’il y ait y® au deuant vne Me ou rocher, toutesfois il n’y a nul danger, qui ne puiffe cftre veu &euité. A v. lieues de Puerto F^yé?fuiuantîa mefme cofte,forten mtr le cap de S.Zaurens, à. iii lieues duquel vers le Sud-oueft, eft fitueela petite Me de la Plata , d’enuiron vne lieue &: demie de circuit: où il y auoit anciennement vn Temple, que les Saunages nom- moyent en leur langage Guaca, dans lequel les habitans mefmes de la Continente fàcrifioyent OCCIDENTALES. Lî\^RE X. facrifioyent îl leur démon, & n’yimmoloyent pas feulement des brebis, mais aufîi leurs propres cnfans : Fiz,arre quLy aborda fortuitement, en fa, première expédition vers le Perihy trouua beaucoup d’or & d’argent, force carquans , vn grand nombre de vellements de laine & de coton, qui y auoyentefté oferts par les nations voif nés : qui fut caulè que les Efpagnols nommèrent ainf cette Ifle,car PlMa fignifie en leur langue ai gent;aurefte comme il a efté remarqué par ceux de noftre nation l’an cId Id xcix, cette Ifle eft fterile &où il n’y a prefque rien du tout que quelque peu d’arbrifleaux fecs. Du cap de S. Laurens iufques à celui dei". Helene,>ox\ conte quinze lieues : or il y a en l’efpace d’entre-deux, deux ports, fçauoir Cdlo &.^^//^;»2^«?,fort commodes pour les ma- ^ Q riniersjcar ils y peuuent commodément prendre de l’eau & du bois,& demeurer afTeu- rés fur leurs anchres. Le cap de 5'. Helene Q,fcfm la hauteur de deux degrés au Sud de la ligne;& au derrière d’icelui il y a vn port vers le Nord, auprès duquel fe voit vn puits, duquel coule du bitume femblable à de la poix : Acojta en fait mention en cette façon; Auprès de la pointe de S. Helene( dit-ilj il y a vne fontaine de bitume, que les Pern- «Mm nomment Copey^Xts mariniers en gouldronnent leurs cordages fleurs autres hardes, car il eft fort femblable à la poix quant a l’vfage. Les Sauuages content merueilles des Geans qui ont anciennement habité proche de cette pointe, & qui furent deffaits & entièrement ruinés dans vne certaine vallee par vn ieune homme defcendu du Ciel; Or Juguftm de Zdrate alaïffè^ax elçrit dans fon Hiftoire du Périt i que le Gouuerneur de Puerto Veyo fit faire, l’an cin In xliii, certaines foftes dans cette vallee,& qu’on y trouua en les faifant des coftes & autres of- fements d’hommes d’vne grandeur defmefuree, entre autres des dents qui eftoyent larges de trois trauers doigts , & longues de quatre. Pedro de deçà & lofeph 4cofia en font aufli mention &:autres,mais fort amplement. De la pointe de S.Heleine 'mfoçaç.^ à lariuie’re de qui eft fur la hauteur de trois degrés & trente fcrupules de la ligne vers le Sud ) on conte x x v lieues , au mi- lieu de cet efpace il y a vne grande baye,dans laquelle defcendla riuiere de Guayaquil. En outre à douze lieu'ès de cette riuiere de T umhez, YQïS l’Eft-nord-eft, f comme gttjîin de Zarate a remarqué ) entre la baye fufdite, eft fituee l’Ifle de Pum , fur deux de> 50 grés & cinquante fcrupules au Sud de la ligne, comme les Angloisont exaétementob- férué. Ellea, félon la commune opinion , dixou douze lieues de circuitf car Herrera qui lui en donne vingt,fe trompe fans doute ) & eftok fort renommee anciennement entre les Sauuages de la Continente, car elle abondoit entoures cLoifesneceftàires à la vie de l’homme, & fes habitans eftoyent eftimés marchands, fort mduftrieux Sc vail- lans guerriers ; ils aueyent au temps paffé vne forte guerre auec leurs voifîns ,.de la rL uiere de T umbezy iufques à ce qu’ils furent enfin accordés par les Rois du PÊr^iils eftoyencdemoyenneftature, de couleur brune: les hommes ks fenuines eftoyent veftus d’eftoftes de coton , & s’ornoyent de chaquires & autres ioyaux. Au refte i’Ifle - eft couuerte d’vn bois efpais d’arbres fàuuages & d’arbnfte.aux:abondanteneantmoins . en MaySyYuca ^auz'ecs racines bonnes â manger: les bois font pkins-de toutes fortes d’oifeaux,principa]ement de perroquets & de Gfta,cit?mtyas ^ comme auffi deguenonsy renards autres beftes fauuagcs. La terre y produit fort libéralement la Au refteelle eft difetteufe d’eau douce,ainfi qu’eferit Berrera^àl leshahitans dbnteon- traints de l’aller quérir &de faire leus femailles dans la Continente: de laquelle elle n’eftfepareeen plufieurs endroits que d’vn canal fort eftroit: le port toutesfois en eft à deux lieues ou enuiron. Les Indiens embraftent maintenant la Religion Chreftien« ne : on V fait force nauires , auec lefquels ils voyagent dans lamerduSudj car il y def- cend le long de la riuiere de grande abondancede bois, qui fetranfporte à Lima & autres ports du Peru. Thomas Candifeh entra à l’improuifte dan 550 DESCRIPTION DES INDES * En pleine mer fe voit vne autre If]e,que les Efpagnols nomment de *5. qui eft du tout defertCjdefFournie d’eau douces de boiSjOii ceux de Funa auoyent couftume anciennement d’enterrer leurs morts. Deia riuiere de T umhez,( afin de retourner à la Continente /iufques au Cap 13/4»f,la cofte fe tourne prefque vers le Sudjl’efpace de quinze lieues: Or ce cap eft fur la hau- teur de quatre degrés au Sud de la ligne, comme Herrera a remarqué , ou fur trois & trente fcrupulesTelonC/ép. De ce Cap on prend fon cours versleSudjdroitàriflede dans laquelle il y a vne fontaine de mcfme bitume, que celui dont nous auôns fait mention à la pointe àcS.Helene. Entre les deux il y a vne autre pointe à la Conti- • nente , dite des mariniers Fimta de Parinn , de laquelle la cofte fe courbe vers le Sud- 1 of Gueft iufques a P4//4, félon que & deçà difent ; mais fclon les Anglois& autres vers leSud-eft: or tous mettentee port fur la hauteur de cinq degrés ; & eftdiftantdu Capfufdit de vu 1 lieues ou vn peu plus: C’cftvnfort excellent port & le plus ircquen- té de tout le Per». D’iceliii iufqués au Cû.p del J.guia,la. cofte fe tourne droit au Sud, & ouure au milieu vne baye dans laquelle il y a deux ports ou hautes, fçauoir Si/U ëc T angora. , , Enfin de ce Cap on voit deux îfles, nommées de l’vne dcfquelles eft feulement feparee delà terre ferme d’vn efpacede quatre lieuésft’autre eft à dix lieues de la première :rvne ô^Fautre , comme il a cfté remarqué par fur la ^ hauteur de fix degrés & trente fc.rupules. Or elles font fort fteriles , & ne produifent ta ni arbrifteaux ni herbage ; & font du toutdeftituees d’eau douce, fréquentées feule- ment des loups marins , des pinguins &: autres oifeaux demer. Voila quelle eft la oofte du Parlement de , L I M A ou L O S R E Ÿ E S. , C H A P. XIX. Définition des limites dis Parlem’enf de Lima , nombre des Villes ikelui , chemin ^jal par la plaine, depuà la Ville de S. Miguel iufques à celle de Truxilio. ^ O Le fécond Parlement du Royaume du Peru , prend fon nom de la Métropoli- taine Lima ou los Reyes; & s’eftend entre le Nord & le Sud, depuis le fixicme de- gré de la hauteur du Pôle du Sud,iufques au feize ou dixfèptieme : il y a de lon- gueurdulongdela cofte de la mer ccxx lieues {combien qu’il y en air qui lui en don- nent trois cents } depuis le Cap de Aguia où le Parlement de finit, iufques à Are- quipA & vn peu plus outre, où celui àç.las Char cas commence-, ëL de large de l’Oueft a 1 Eft en quelques endroits de cent oirenuiron, en d’autres plus, outre les régions fpa- cieufes & qui ne font pas encore aftes defcouuertes ni cognuës, vers les Gouuerne- ments du Brafd & delà Platâ,vtis, lefquels fes limites s’eftendent fans eftre definis. Les villes & bourgades de ce Parlement font ou cité de los Reyes , Arneào, Santa oyxi 40 eft aufli nommee ‘Truxilio, Miraflores, S.JuAnâelâFronîera,S.Iago de losValles, Leon de Guanmo,Guamanga, Cufico, S. Francifeo de la Vittoria, S. luan delOro, Arequipa,S. CMiguël de la Ribera,Faluerde, Cannete ou Guafeo, Cafirouirreina & Oconna. Or afin que la fituation de ces régions foit mieux comprife, nous commencerons la defeription de ce Parlement par la plaine , & premièrement nous pourfuiurons le chemin Royal par les valiees maritimes dés la ville de S. Miguel. 'cMugujlm de Zarate dans fon Hiftoire du Peru, diftingue les habitans naturels en trois nations,fçauoir enTungas,Taffanes ë>cMochichas,c^i different entr’eux de langage, combien qu’ils entendent '&parlent tous indiffereromêt la langue commune àeCufco. Garcillajfus dit que les Perumains appellent en leur langage tous les terres qui font pro- 5 ® chedclamer, &■ en general toutes les contrées chaudes 2»;^r4,quiefi:lemefmemot que Tunga ■: d’où eft venu que les habitans des plaines & des terres chaudes ont efte nommés Tumas ou Tungas: Or tous les qui demeurent prés de lamer,auant qu’ils fuffentfubiugués parles depuis iufques à Tarapaca adoroyent fur toutes chofes la mer, qu’ils appelloy ent Mamachocha, comme auffi la balene & les autres poifîbns : & ce à cette occafion qu’ils n'en eftoyent pas feulement nourris , mais aufïi , que OCCIDENTALES. LIVRE X. . que Icuis champs en eftoyent rendus fertiles; car il auoyent coufturae d’enmiîîèr leurs terres de poilîon. ^ De la ville de .S*. Miguël, iufques à la vallee Motupe rdans laquelle eft fitué la bour- gade 0/r^os, dchqucUc nous auons parlé ci-delTus; il y.a xxii Iieuës d’vn chemin fa- blonneux & fort difhcile, principalement par où on va maintenant : car il y a entre des mottes & coftaux certaines vallees, dans lefquelles defeendent bien plufieurs tor- rents du haut des montagnes, mais ils fontauffi toft engloutis parle terroir fablon- neux , de forte qu ils n apportent nulle ou fort petite commodité aux voyageurs : & afin qu on pu.fle plus facilement furmonter la difficulté de ces chemins.on part le plus I O louuent fur le fonde la ville de 5’. Miguel, & on marche toute la nuid, afin d’arriiier de grand matin a certains puits ou lources d’eaux, OVy^les appelle los Xaaiiyes : delà auec des ouaires pleines d’eau & des bouteilles de vin, on pourfuit fon chemin euitant mnt qu il eft poffible la chaleur : or dans la vallee de Motupe on rencontre le chemin Royal , duquel nous auons parle ci-deffiis. Cette vallee eft large & profonde , & par icelle paflevne petite riuiere qui y defeend des montagnes voffines, mais elleeftL gloutie des fables auant que de venir dans la mer: neantmoins les arbres y croiffient tort bien,pour 1 abondance de l’humidité qu’ils rencontrent au dedans de la terre: or >? ^ puifentleur eau des puits, & ont plufieurs arbres à coton , duquel ils s habillent, & trafiquent. . io A quatre lieues de Motupe on entre dans vne belle & fertile yallee nommee Xuy. auca , large de quatre liei^’s : qui eft coupee par vne petite riuiere , de laquelle les ha- bitans conduifent des foffes pour arroufer leurs champs : la Nobleffe duPeru y auoic efckuer^^^^*^ plufieurs métairies & des champs qu’ils faifoyent cultiuer par leurs De cette-ci on pafle à là yallee Tu^ueme, fort deledablc & couuerte d’arbres , dans aquelleil y a eu au temps pafte plufieurs villages, comme tefmoignenr encore pour le lourd hui les mafures d iceux. A vne lournee de chemin delà eft la belle vallee de Cinto , le Ledeur fera aduerti vne fois pour toutes, qu’entre ces vallees iîn’y a quedes mottes de fables & des pierres feiches, dans lefquelles on ne trouue nuis animaux, 3 O nuis arbres ni aucun herbage, mais vn pur defert , de forte que ceux qui voyagent en ces lieux la , ont befbin d auoir des guides experts au chemin. De l^allee do Cinto on pafte à celle de CoUiquen , qu vn fleuue coupe , qui ne fe peut paffer a gue,fi ce n’eft quand l’efté eft dans les montagnes, & l’hiuer dans la plai- ne; c eft vne vallee large & bocageufe, mais elle eftprefque du tout deffournie d’ha- bitans, que les Efpagnols ont quafi tous deftruids aux guerres ciuiles du pafte. Aum- quaran- Apres Côlltquen fuit Sma ou Zana aftes femblable à l’autre, de laquelle il y a deux ^chemins , 1 vn qui va a rruxillo , l’autre vers les montagnes & à CaxAmalca , fur lequel 40 on rencontre la bourgade nommee Pueblo Noua, où il y a vn Monaftere d’Auffuftins appelle Guadalupe. ^ ^ Suit apres Pafeamayo la plus fertile & mieux peuplee de toutes les vallees • les habitans d icelle, auant qu’ils euffent efté fubiugués des Ingas, eftoyent fort puiftànts & redoutes de leurs voifins : ils auoyent bafti plufieurs Temples, dans lefquels ils lacrifioyent a leurs Idoles , qui font maintenant du tout tombés : auiourd’hui il y a plufieurs Preftres & Religieux qui y demeurent, & enfeignent les fondements de la e igion Chreftienne aux Indiens. Il y a vne belle riuiere qui court par cette vallee, de aqueüe es habitans ont deriué plufi eurs canaux pour en arrofer leurs champs ; par icelle paffe le chemin Royal. On y tift force draps de coton , & les vaches y profitât ) O tort, comme auffi les pourceaux, & encore plus les cheures. ^ De Pafamayo on paffe à celle de chacma , qui n’ell en riin inferieure à l’autre en bonté, ou on cultiue des cannes de fucre, les autres fruias y naiffent auffi abon- damment. ■' A quatre lieues de Chacama on entre dans Chimo.oxi félon CiirciUffks,chimtt,^z\\et ort amp e, & ort cherie anciennement des Rois du Peru, comme, tefmoignent les ruines des Palais & les marques des iardins ; dans icelle fe voit auiourd’hui la ville de Truxillv, jjt description des INDES rruxiilù. JngA Vachaucutec, fubiuga le premier cette vallee, fur laquelle commandoit lors J comme aulTi furies voifines , vn certain Seigneur appellé chimttiàxi norn duquel cette principale vallee fut nommée. G H A P. XX. bourgade de Miraflores, Ville Truxiiio, Parilla, Àrnedo. Avant que nous pourfuiuions plus outre la defeription des vallees , il eft ^ neceffaire de faire mention des villes qui font en icelles , de peur que nous ne pallions quelque chofe legerement. lo La première villette donc, qui appartient au Parlement de Lima dans cette plaine, teft appellee des Efpagnols Miraflores ; baftie dans la vallee de Zana ou Sâna(à\i nom de laquelle elle eft Ibuuent appelleej allés prés de la mer, & à x c v (où félon d’autres à ex; lieues de la Métropolitaine versle Nord : à xx de Lruxtllo'. &a lxx de T dit a vers le Midy. C’eft vne bourgade fort peuplee & fort riche (comme i’ai apprins de ceux qui l’ont veuë depuis peuj entre toutes celles qui font fituees dans la plaine : il croift dans fon territoire beaucoup de froment, comme aulfi des cannes de fucre: on y fait aulli de l’Anifmais qui n’eft pas du meilleur ; La ville eft à cinq îieuës de la mer, fur laquelle elle a le port de Chencepen: Or en l’efpace d’entre-deux il y a des bois fort agréables , & plufieurs villages ou métairies : le port n eft pas fort commode ni io bien garenti à l’encontre de l’incertitude des vents , ains eft fort agité , qui fait que les nauires ont beaucoup de peine & employent beaucoup de temps à s’y defeharger ou charger. ' La plus prochaine ville delà eft Trugillo ou Truxillo, dans la vallee C^/w, fur les bords d’vne petite riuiere, de laquelle les Efpagnols deriuent l’eau par diuers canaux & foftés pour arrofer leurs vergers & iardins ; & la conduifent par des aque- ducs iufques dedans la ville. Le territoire de cette ville eft eftimé fain fur tout autre : & eft orné de tous coftés de plufieurs métairies , dans lefquclles les Efpagnols nour- riflént des brebis & y fement leurs grains : Les vignes y font fort communes , & il y a grande abondance de figues, de pommes de grenades, d’oranges, & de tous autres 5° fruiéls d’Efpagne: & il s y fait vne grande récolté de froment: de forte que les Bour- geois & les Indiens abondent en toutes fortes de viures, & n’ont iamais faute de poiifonà caufequelemereneftprés : la ville eft fituee fur la hauteur de vu degrés ôd XXX fcrupules au delà de la ligne vers le Sudj à lxxx lieues delà Métropolitaine Lima, comme dit Herrera ,• baftie fur vn plat terrain de la vallee , auprès de certains coftaux pierreux & fecs, les ruës font larges & les édifices contiguës : les Sauuages viennent par bandes à cette ville , pour y feruir les Bourgeois, & leurs fournir ce dont - ils ont befoin. Elle eft à bon droit mife entre les premières villes du Peru,S>c comme quelques-vns efcriuent , il y a plus de cinq cents maifons ; quatre Monafteres , de la-, cobins , de Cordeliers & de l’Ordre de S. Auguftin : les Officiers Royaux y demeu- 40 rent : il y a dans fon refort cinquante mille Sauuages tributaires , comme raconte Herrera. Tout le fucre qui fe fait en ces quartiers, croift principalement dans la vallee de Chacama ou Chicama, félon Acofla : enfin le port qu’on nomme eL Arrecifle de Tru- gillo , eft à deux licuës de la ville , dans vne baye ouuerte, & qui n’eft point garentic à rencontre des vents, mefmc l’anchrage n’y eft pas bon. Ceux qui ont veu depuis peu cette ville , difent quelle eft fort marchande , & riche , pour la remarquable fertilité de fon territoire, & fur tout de la vallee de chicama : & que fon port s’appelle Guan^ , chaco , & eft diftant de quatre Iieuës de la ville : enfin que la ville eft habitée de mille cinq cents Efpagnols, & de plufieurs Indiens & Negres. La bourgade la Parilla, nommee auffi Santa, de la vallee dans laquelle elle eft fituee, jo eft diftante de xx Iieuës de Truxillo , ou comme d’autres veulent de xxv vers le Sud, ■ &à Lv, ou félon d’autres àtx de la Métropolitaine vers le Nord: fur la hauteur de IX degrés au Sud de la ligne, félon Herrera: elle eft baftie auprès de la mer, fur le riuage d’vne belle riuiere,& la plus grande de toutes, celles qui trauerfent cette plaine, laquelle fournit d’vn port fort com.mode, de forte que ceux qui coftoyent ces coftes ont couftume, d’y prendre de l’eau, du bois & autres chofes dont iis ont befoin, Olpiier - OCCIDENTALES. LIVRE X. 5^5 0^«;Vr»^,beaucoup plus que celui des autres vallées. Et que la ville efl: habitée de feptante familles d’Efpagnols ou enuiron,& plulîeurs Indiens &Negres. La bourgade d’Arnedo efl: fituee dans la vallee de Chancay^\ neuf ou dix lieues de la Métropolitaine Z-iwÆ vers le Nord, & à demie de la mer du Sud ; elle efl: riche en vi- gnes : les lacobins y ont vn Monaflere. Ceux qui l’ont veuë depuis peu adiouflent, qu’il y a enuiron cent familles d’Efpagnols &plufieurs des naturels du pais : il y a vne riuiere qui paffe aupres,au bords de laquelle il y a force métairies ; il s’y fait beaucoup de fucre ;& s’y cueille alTés de vin. C H A P. XXL io Chemin qui mène par la Plaine de la Ville de Truxillo à Lima , ^ autres chofis. De lavilledé7y«x:/74» iufqiiés à plu fleurs content lxxx lieues. Sçauoir de la vallee de iufques à Gmnape Garcillaffm nomme. Huampu) feptlieuës : cette vallee a eflé anciennement fort renommee &: grandement peuplee, & qui pour la bonté d’vnc boilTon f qu’ils nomment en leur langage Chka ) n’efloit pas moins célébré que Madrigal l’efl en Efpagne pour le vin , qui croifl en fa contrée. Maintenant les Indiens font réduits à fort petit nombre^ Le port efl fpa* cieux & grandement commode, ouïes nauires quivicnnent de Panama ont couflume 5 O d’aborder pour s’y rauitailler. Apres Guanape (nit vne autre petite vallee , de laquelle le nom nefo trouue points où il y a feulement vn puits fait pour la commodité des voyageurs, duquel on croit que l’eau vient d’vne riuiere qui paflhpar delTous. fuit cette-ci,qui efl vne vallee fort longue & large, &anciennementfort peu- plee d’habitans.qui y font maintenant en fort petit nombre, de forte qu’il y a beaucoup de champs abandonnés pourladifette des Laboureurs. Ils ont vfé de tout temps d’ha- bits,& felioyentles cheueux de bandes differentes des autres, &auoyent d’autres or- nements de tefle,par lefquels ils efloyent difernés de leurs voifins: il y a grande abon- dance de fruids, tanteflrangers que de ceux qui font ordinaires au pais ,• elle efl cou^ 40 pee d’vne riuiere rapide & affés large, qui s’enfle fort lors qu’il pleut beaucoup dans les montagnes, & laquelle on paffe fouuentauec péril, nous en auons pârlé ci-deffus» Ceux qui nauigent dans la mer du Sud , ont couflume d’y aborder le plus fouuent pour y prendre de l’eau. Au refle à caufe de l’elpeffeur des bois & halliers qui font en cette vallee , il y a fi grande quantité de moufquites ( qui efl vne efpece de moufehe- ronsj que tant ceux qui y voyagent que les habitans en font grandemêt incommodés. A deux iours de chemin de Santa f ou à fixlieuës félon d’autres) on paffe dans la vallee de Guambdcho,qm efl arroufoe d’vne petite riuiere : à vn iour & demi de chemin de cette-ci on rencontre celle de G uarmey {qn il femble que Garcillajfm Oi^'^eWe HualL nii) cette vallee a eflé aufli anciennement grandemént peuplee,maintenant ce n’eft 5 O feulement qu’vne habitation de pafleur^, qui y nourriffent force pourceaux & peu de vaches : ils habitent vne bourgade de mefme nom,auprcs d’vn haute fort commode 8c capable de plufieurs nauires, dans lequel anchra noflre Spilhergue l’an cIdIdc xv, apres qu’il eut deffait l’armee Nauale du Viceroi du Peru : il remarqua qu’il efl diflanc de la ligne de dix degrés vers le Sud, 8c le prife affés, combien que nos gens furent con - traints de prendre leur eau dans vn eflang: tous les habitans s’en efloyent fuis auec tous leurs meubles j on y voit les mafures d’vn certain Chafleau. Yy Suit 554 DESCRIÏ>TrON DES ÏNDES Suit pair apres la vallee de Farmonga, ou de Parmunca , félon GarcHlaJpHi qui enco- re qu’elle foit du tout femblable aux precedentes , toutesfois il femble qu’elle n’ait efté jamais habitée par ci-deuant, fi on confidere l’efpefTeur des bois & les champs deferts qui y font : il n’y a rien de remarquable outre les ruines d’vn magnifique Pa- lais 3 ou pluftoft d’vn Chafteau fort bien fortifié ( félon i’induftrie des Sauuages ) & élégamment peint par dedans: il y auoit beaucoup de fales & de fieges, comme il appert par les veftiges des mafures j qui font maintenant du tout tombées, & ont efté minces deffous par les Efpagnols 3 qui croyenr que dans les monuments & dans de telles mafures, il y a beaucoup de threfors cachés. Gârciliajfm raeohte que cette vallee St lesvoifines furent adiointes au Royaume de par Inga Pachacutec tZ^zes queio Curaca Chimu eut efté dompté. Of lès Tngas auo.yent fait grande eftime aii temps pafte de ceitev2\\ee P armuma y &y firent baftir ce Chafteau , d’vne admirable ftru- 6î:ure,en mémoire delà vidoire qu’ils auoyent obtenue furies principaux CaJJt^ues qui habitoyent le long de la mer : qui toutesfois eft de long temps du tout bas. - A deux lieues de Parmonga , fuit la riuiere Guama , ou félon Garcillajfusy Huama ( qui lignifie entre les Indiens, Oifeau de proyc) laquelle defcend en la mer du Sud par vne vallee de mefme nom, les Efpagnols h nomment /a Bara^ca j cette riuiere s’en- fie fi fort quand il pleut dans les montagnes ,ôt court fi vifte, qu’on ne la pafte qu’à grande peine ôt auec grand péril, qui à caufé la mort à plufieurs. De Guama on pafte dans G aura y icelle^ Lima, comme Pedro de Cieça efcrir, zo lequel nous auons principalement fuiui en cet endroit : toutesfois il oublie la vallee de Chancay, dans laquelle eft fituee la ville d'Arnedo,e\m doit eftre au milieu de Gau- ra bL de LimatC'Xt c^ugufiin de Zaraîe dit en fon Hiftoire, que Gaura eft à dixhuid lieues de Lima. Ceux qui depuis n’agueres ont voyagé par làjdifentjqu’apres.S’^»/^ fuit Guamhachi, & peu apres la haute & baffe Cafma , lieux qui ne font habités que d’indiens 5 où il croift du vin, des fruids, & où on nourrit des brebis. Delà on vient à Guarmey , où il y a douze- lieues de chemin, par des tertres de fables fort arides , & où à peine y a-il aucune herbe: de Guarmey iufques à la Baranca , on conte quatre lieues 5 à la riuiere de Parmongilla , auprès de l’emboucheure de la- quelle fe voit vne haute montagne, & fur le fommet d’icelle les ruines d’vn vieil 50 édifice ,• & delà à la riuiere de Barama , qui eft diftante de Limd de vingt quatre lieues 5 proche d’icelle eft Gaura, où il y a de fort bonnes falines : dans la bourga- de il y demeure enuiron cent familles d’Efpagnols & beaucoup plus d’indiens : Il y a quelques moulins à fucre . Elle eft diftante de Lma de vingt lieues . Suh uent apres des lieux fablonneux &: plats, & enfin cha?Hay ou Arnedo à neuf lieues de Lima . La vallee de Lima eft la plus grande & large de toutes celles qui font en la plaine depuis Tumbez, 5 Garcillajfm fait mention qu’elle s’appelloit auftî ancienne- ment Rimac. Ceux qui y ont long temps demeuré, content merueilles , de la bonté de l’aïr, 4® & de la fertilité & beauté du terroir ; car la température de l’aïr y eft telle, qu’on n’y eft point offenfé de la chaleur , & on n’y fent point de froid, & on n’y a point bcfoin de feu , non pas mefines pour les enfans nouuellement nez. La plus gran- de chaleur eft au mois de Décembre ,Ianuier, Feburier & Mars, & lors c’eft leur vrai efté , or les iours y font les plus longs en lanuier , qui ont quatorze heures , les plus courts n’y ont pas guerres moins de douze. Ils moiffonnent leur froment en Décembre & lanuier ; les raifîns commencent à fe former autour la fefte de la Natiuité , & font meurs au mois d’Auril , car on vendange en ce mois. Du mois de May iufques en Septembre c’èft leur hiuer ; qui fait que le Ciel y eft le plus fou- uent nébuleux, & le Soleil ne fe voit parfois quatre iours de long, il y tombe vne 50 rofee comme vne bruine ( que nous auons dit eftre nommee Garua ) qui encore qu’elle humede à peine la pouffiere ,neantmoins elle fait que les colines qui font parfemees parlaplaine,produifentbeaucoup d’herbage, qui engraiffe merueilleufe- mentles vaches & les brebis: Et cette fàifoneft de beaucoup là plus agréable 5 en la- quelle les oliuiers & autres arbres fruidiers amènent leurs fruids à maturité; les Plan- tains, les Paîtas, les Lueumas & autres plantes tant domeftiques, qu’eftrangeres. Il s’y^ r OCCIDENTALES, LIVRE X. II s y trouue dcgrands If arfar es (commz parle mon Authcur ;e’efl: à dire, des châmps, dans lefquels croift vne certaine herbe groffe &haute, de laquelle fe nourriflent les cheuaux & autres belles de charge ^car on ne s’y lert point de paille ) defquels les prin- cipaux font vn grand profit. Tous les champs de cette valIee fontarroufés de trois ri- uieres en l’efpace de fix lieues, & font entrecoupés de plufieürs beaux fofies; de forte qu’il s’y voit pluficurs métairies & agréables villages, iardins & vergers. Enfin eh tout le territoire de cette ville, il ne s y trouue aucuns lerpents , ou autres animaux vene- neux: feulement il y a force moufcherons. Dans cette vallee il y croift force cannes de fucre; de forte quelefucre s’y donne à bon marché, fçauoir vne arobe d’Efpagne 10 pour vingt quatre ou vingt huiélreales. Il y a auifigrandeabondancedefigues & de raifins de paflc ,-enfin toutes fortes de viures y fontà fort grand marché : car vne arobe de chair de bœuf,graire& bonne, fi vend fix reales ;& dans les montagnes on y a vn grand bœuf pour quatre pezos ou ducats: vne brebis de Lima pour dix, & dans les montagnes pour quatre, & les autres chofes àl’aduenant. Le poiftbn y eft à vil prix &: y enadediuerfesfortes,&fortbons;les plus ordinaires font ceux que les Efpagnols appellent Coruinas^chitas qui fontlangues ou foles,des rayes,des anchoix, des bonites &L diuerfes fortes d’efcreuices. Le froment eft en la ville à fort bon marché , car on y vendl’Hanega,c’eftàdire,vn boifleau dix ou douze reales ; le eft prefque à mef- meprix. Mais il eft maintenant temps de parler de la ville mefmc, 2,0 C H À P. XXII. Lima ou Cité des éMetroplitame auiourdhm duŸcm. La Métropolitaine de ce Parlement, &mefme d&toniÏQPeru, eft appellce des Efpagnols Cuidad de los Reyes.c’tù. à dire, Cité des Rois, & bien fouuent Lima.àn nom de la vallee dans laquelle elle eft fituee-. Elle eft diftante de la lio-ne vers le Sud de douze degrés & trente ( ou comme d’autres veulent quarante) fcrupules • du Méridien de T olede l x x x ii degrés vers l’Oueft. Cette ville n’a point de fécondé tant 5 O en grandeur qu’en magnificence en tout le Pem.ü ce n’eft qued’auanture on en exce- pte C«>. Or il me femble fort à propos de la defcrire vn peu plus diligemment, feloii que ie l’ai appris d’vn certain qui y a demeuré plufieurs années. La ville eft toute.diuifee en quartiers quarrés, chacun de c i pas, par îefquels paflént des rues egalement larges , toutes droites,fans aucune courbure ou deftourj vingt ôr deux de ces quartiers font eftendus de l’Eft à l’Oueft ; & quatorze du Nord au Sud : vers le Nord paffe vne grande riuiere, fur laquelle il y a vn pont de pierre aifés fort^ qu’on y fit lors que le Marquis de Montes Claros cftoit Viceroi de ces Prouinces ■ Aiî mefme collé il y a le fauxbourg novamhdQS.LazareAMKi diuifépar quartiers - Vers l’Orient il y a vn autre fauxbourg, dans lequel demeurent en uiron huid cents familles 40 d’indiens,qmfçauent la langue Erpagnole& font fort riches jcellui- ci eftceindd’vii rempart de terrc,auec fes portes,ilyavn College de lefuites allés riche; il a fon Lieu- tenant Particulier,^ qui font aufti fubieds quelques bourgades de la banliefue. Dans la ville eft le Palais Royal, où il y a du moins huid luges , quatre Officiers qu’ils nomr ment Alcaldes deCorteAe.\x^ Aduocats Fifcaux , & autres Officiers : le Viceroi mefmc yprefide leplusfouucnt,lcquel a diuers Secrétaires: 11 a depenfion tous les ans qua- rante rnille pezos ou ducats; & quand il va au port de Ca//ao, trois mille pour fa defpen- ceen chemin,- que s’il va en d’autres Prouincçs,dix mille. Le Capitaine des Gardes . du Viceroi a de gage trois mille ducats ; le Gouuerneur du port ; les Confeillers du 1 arlement; les Capitaines des Soldats qu’ils nomment Majîres de Campa, autant. Lé y O Viceroi donne tous ces Offices, excepté ceux de Confeillers , à qui bon lui femble êc beaucoup d’autres; entre lefquels on conte plus de cent Lieutenances, ou comme ils les appellent Corregiementos ; ce qui eft vne grande commodité pour fes amis & tamihers : car il y a telle Lieutenance , defquelles on peut tirer en trois ans ; qui eft le temps qu’elles durent d’ordinaire , cents mille ducats ; ce qui n’eft pas de merueilles , puis que r comme afleurc fainement celui que ie fuy ; vn Confefteur du Viceroi qu’il a cognu, auoit emporté auec foi trois cents mille ducats. Quoi Y y A ' plus? description DES INDES plus ? le Viceroi a infinis moyens , par lefquels il fe peut faire riche & les fiens. La ville a fonArcheuefque, le reuenu annuel duquel riuient à trente mille ducats ;plü- fieurs Prebendiers & Chanoines , le reuenu annuel defquels eft cinq pu fix mille ducats • en fomme tous les Ecclefiaftiques y font grandement riches, de maniéré qu’il y a des Chanoines qui font riches de plus de trois cents mille ducats : le rapporte ces chofes fous la foi de mon Autheur. Mais retournons a la ville. Au milieu d icelle il V a vne grande place, au cofté de laquelle qui décliné vers le Nord , eft bafti le Palais extrêmement grand, dans lequel le Viceroi fait fa refidence auec fa famille, on y tient auffi le Parlement, & les Threfors du Roi y font conferues. Au cofte Oriental de cette place eft rArcheuefehé & la grande Eglife faite a la façon de celle de Stmlle: i o au cofté Meridionnalily a plufieurs boutiques de Marchands j vers l’Occident ily a auffi quelques boutiques de Marchands , le Greffe public & le logis du Preuoft de la ville, auec la Prifon : vis à vis eft l’ Arfenac public, dans lequel il y a diuerfes fortes d’ar- mes &: beaucoup de munitions de gperre. Au milieu de la place fe voit vne tres-belle fontaine, qui iette fon eau dans vn vafe de pierre. En outre de cette place, il y a huiff rués, qui mènent toutes aux champs , de chacun cofte d eux, en cette manieie . pre- mièrement celle qui paffe le long de la maifon du Preuoft de la ville & du cofte du Pa- ' lais , comme auffi du long de l’ Arfenac public, mene à la riuiere & au porit ; car entre le pont & la grande place , il n’y a outre le Palais , qu’vn quartier fepare du Palais par vne rué qui le trauerfe : au delà dii pont on paffe par le fauxbourg de .S. Laz^Are vers le io chemin Royal, déclinant à la main droite, qui conduitle long de plufieurs iardins& métairies à vne autre riuiere , fur les bords de laquelle eft fituee la bourgade de Cara- millo à'quatre lieu'és de la ville. A la main droite on va vers vn bocage nommé Ah- meda^i la montagnette ou coline de S. 'chriPfle^coMMtnc de plufieurs arbres a fruifts q ui eft au milieu de ce fauxbourg, ou il y a quatre fontaines , & plufieurs canaux deriués delà riuiere, pour arroufer lesiardins & les champs; d’icelle il y a huid rangs d’arbres qui vont iufques au Monaftere des Freres Piéfnuds , au pié de la montagnet- te fufdite ; entre lequel & la riuiere paffe vn chemiri qui mène à Lurigamho , bourgade d’indiens, à vne lieue de la ville,& s’eftend iufques aux montagnes à trauers de piu- fieurs métairies. La féconde rue commence dés la place vers le cofté Oriental & du 5 o Palais mefme, & tire vers le marché public, le long du Monaftere de .S. Françoü q\xi eft fort grand , car il occupe auec Ion iardin deux quartiers ; & le long des murailles d icelui la rué mene au Monaftere deNonnains de S, Clairei & tire droit au fauxbourg des Indiens vers le Nord,- & conduit'vers vn eftang, ou vne tres-belle fontaine : de laquelle on mene l’eau par des tuyaux foubfterrains ou aqueducs, dans les autres fon- tahies de !a ville , car l’eau en eft beaucoup plus claire & faine que celle de la riuiere ; cette rué continue en outre par plufieurs métairies iufques à la belle vallee de Tnes^ qui eft diftante de la ville de cinq lieues. La troifieme rué commence à cofté du Palais & de l’hoftel de l’Archeuefque, & tire droit vers la place de l’Inquifition,fur laquelle fe voit la Cafa delà charitad, où font receuës les pauures filles & les femmes maladi- 40 fues : &delààlaplacede S. ^^^^,fiir laquelle eftle ConuentdesNonnainsDelchauI- fees,'& l’Hofpital & l’Eglife Parochiale de Anna dans cet Hofpital font traidés les Indiens malades , & a de reuenu annuel trente mille ducats ; & ainfi paffant par d’au- tres lieux mene au chemin Royal qui va aux montagnes : duquel nous parlerons ail- leurs. La quatrième rué commence dés la place quieftdeuant lagrandeEglile, &tire vers le Monaftere de la Concepeiony fort grande &c riche maifon de Nonnains : & plus outre à l’Eglife de S. tendre & au riche Hofpital des EfpagnolsjSt: tournant à la main gauche ellefeioindalaplacede .î. & au chemin Royal qui va aux montagnes,- gc à la droite par vne autre rué on va aux fours a briques; & laquelle defeend par apres vers le chemin Royal, lequel va parla plaine: mais fuiuantla principale rué vers l’O- yo rient , on arriue au lieu où on fait de la poudre a canon fort bonne , diftant de la vi le d’vn quart de lieuë, & enfin le long de plufieurs métairies à Seneguillo. La cinquième luë coupe le cofté Meridionnal de la grande place, &paffant par la place des Mar- chands de draps & d’habits , elle tire vers le Midy le long du Monaftere des Freres de \àUMercede y & le Conuent de Nonnains de l Incarnation occupe deux quar- tiers • & delà au Monaftere des nouueaux Cordeliers qu on nomme Recolés ; & OCCIDENTALES. LIVRE X. 5^7 finit au chemin Royal qui va par la plaine ; par icelle on peut aufli defcendre vers la mer. La feptieme rue commence du mefine co{lé,ôc apres auoirpafle le quartier des Marchands , dans lequel on fait nombre de quarante boutiques de precieufes mar- chandifes, elle rafe le Monaftere des Freres de la Mercede Parochiale de S. Didier, & l’Hofpital des ConualefcentSjdans lequel fontmenés dugrandHolpital les Efpagnols, pour y demeurer iufques à ce qu’ils puiflent trauaillerj &va iufques à la Magddene, bourgade d’indiens , à demie lieue de la ville, & iulques aux bords de la mer , qui n eft clloignee de la ville de ce codé que de trois quarts de lieues. La fep- tieme rue commente au codé Occidental de la grande place, & embrade premie- 1 0 rement plufieurs boutiques de Marchands, puis apres continue vers l’Eglife de Mon- ferate ( de laquelle il y en a vue autre qui tourne vers le Midy , & qui finit au chemin qui va à Callao) delà le long des iardins à la riuiere. La huidieme & derniere rue, commence de la grande place , le long du codé de la Preuodé de la ville, & ayant palTé vn quartier entremoyen , va au Monadere des lacobins , le plus riche de tous ; les murailles duquel vers le Nord fontlauees de la riuiere; vers laquelle on defeend par cette rué. Voila les huid principales rués , que nous auons dit Ibrtir de la grande place, il y en a d’autres,que nous toucherons en padant. Du Monadere de S. François, duquel nous auons parlé, commence vne rué qui va iufques au College des lefuites, qui font là nommés T^^’a!//»r,grandement richerderriere lequel il y a vne autre rue qui io va à S. Martin, autre College des mefmes,dans lequel il y a enuiron cinq cents Efeo- liers,îaplus grade partie enfans des plus grands du pais, qui font enfeignés des lefuites Par apres àlaTrinité,Conuentdes Nonnains ; à lamaifon des Orphelins ; & au troL fieme College de ceux de la Société de Iefus,audi fort riche: & plus outre à Nojlra Sen- nora deGuadalufeM^ox\2.Çttx.ç, de Cordeliers ; & delà elle entre dans le chemin Royal, qui conduit par la plaine droite vers le Sud, ayant la mer à la main droite ; là font fitués Sur CO & Sur(iuillo,dc\i^ bourgades d’indiens, à vne lieue & à lieue & demie de la ville, le long de la mer, & ce chemin continué iufques à Fachacama, vifitant en paffant vne métairie des lefuites, où ils ont planté des cannes de fucre &: vn verger d ’oliuiers. Il y a vne autre rué le long du College àesTheatins, qui paffantpar quelques quartiers de 5 O Marchands, tire vers le riche Conuent des Auguftins,& vers la riche ParoilTe de S. Se~ haftianW y a aulïi deux autres rues qui paffent le long de l’EglifeParochiale de S. Didier, & defeendent droit vers Callao,2Ly^nt au milieu la principale Paroiffe de S. Marcel,U. le Monaftere des Auguftins Defehaufles. En fomme cette ville a fix Eglifes Parochiales & plufieurs autres;quinzeConuents de Moines, de la Société de Iefus,& de Nonnains; quatre Hofpitaux pour les malades &pauures. Par la partie la plus haute de la ville, au coftéd’Orientd’icelle,courent deux larges canaux, quifonc tourner des moulins au dedans de la ville ; defquels on deriuc des canaux par tous les quartiers de la ville, de forte qu’il n’y a pas vne maifon qui n’ait fon aqueduc. Toutes lesmaifonsont leurs fales,porchers,& plufieurs des iardins, qui font atroufésdeces aqueducs. Toutesfois la 4° plus grand part des maifons n’ont qu’vn eftage,à caufe que le bois ni vaut rien , qui n’y dure que peu d’annees,& eft aufli toft gafte de vernioulurejles murailles n’y font pref- que que de fommiers ou poultres & de planches, remplies entre-deux de mortier ; les toiéts font faits de cheurons mal polis, couuerts par deftus de toilies peintes , ce qui eft vn remede afles fort contre l’air, puis qu’il n y pleut iamais. C’eft fans doute vne ville fort opulente , pource que la Chancellerie du Roi y eft eftablie,laCourdu Viceroi,&la demeure de l’Archeuefque & des autres Officiers Royaux : Elle eft auffi la ville la plus marchande de toute l’Amerique Meridionnale, &mefme comme la feule fur la mer du Sud: car on y amènerons les Threfors d’or ôr d’argent des Prouinces voifines du Féru & du Chili-, & prefque toutes les marchan- yo difes de l’Europe y font tranfportees de la ville de Panama & d’autres, comme auffi celles de la Nouuelle EJpagne -, de forte que tous lés iours il y arriue grande quantité de Marchands, & eft fournie merueilleufèment de boutiques de Fadeurs, pleines de toutes fortes de marchandifes. Delà on tranfporte vne fois l’an au plus , toutes les richeftes d’or & d’argent au port de Panama, cçvii excédent fouuent plufieurs mil- lions. Or la ville eft toute ouuerte, & n’eft ceindc d’aucune muraille ni de rempart, & n’y a aucune garde de iour ni de nuid,ni garnifon qui foit , feulement és enuirons Yy 5 il y a 358 . description DES INDES il y a pluïleurs iardins qui font fermés de terraces. On dit que les Bourgeois Efpa- gnols de nation j tant hommes que femmes, & de tous aages, n’y excédent point cinq mille : combien qu’on die qu’il y a tant dans la ville que dans la, banliefue qua- rante mille Negres,detous fexes & aages ; que lesEfpagnols tiennent pour la plus grandepartlansarmes, de peur qu’ils n’attentent quelque chofe à l’encontre d’eux. 11 y a peu de Soldats dans la ville ; car outre deux Cornettes de Cauallerie 5 Fvne def. quelles eft de Lanciers , & Fautre de Carabins , qui font entretenues du Roi ; & ac- compagnent le Viceroi lors qu’il fort hors de la ville : il n’y a au plus que huid Enfei- gnes de gens de pié, qui font compofees des principaux Bourgeois , & qui ne rcçoi- , uent nuis gages ; chacune compagnie de cent & cinquante hommes : & lix cents 1 0 hommes de cheualjes vns & les autres peu exercés aux armes. La Magiftrature de la ville efl: compofee de vingt quatre hommes , du rang de ceux qui tirent rente & fer- uice des Indiens , & font fort riches. C H A P. XXIÎI. Vonde U Ville de Lima nommé Callad. Le Port de la Cité des Rois efl: appelle C*/ï//4«»,iieft diftaht de la ville d’enuiron deux lieues ; il y demeure quelque fix cents familles d’Efpagnols & quelques Negres & Indiens ; pour la plus grande partie mariniers , ou qui gaignent leur 2-0 vie fur la mer: la bourgade efl eflenduë en long, le long du riuage de la mer, ayant plufieurs rues , celles defquelles qui tirent vers la ville font les plus courtes : Il y a vn. Ou deux Monafleres de Moines & vne maifon des Peres de la Société de lefus. Le^ édifices qui fontters la mer ne font que celiers & magafins , pour ferrer du vin , du Tabac, delà poix, des cordages & autres chofesj il y a aufii des chais dans lefquels on ferre toutes les marchandifes qui viennent de l’Europe , de la Nouuelle Ejpagne , & des autres quartiers du monde , qu’on tranfporte prefque continuellement à la ville auec des charrettes , charriots & befles de charges : defquels on voit tous les iours le chemin rempli : & difficilement fe pourroit il trouuer en tout le monde aucun che- min, où on hazarde en allant & venant, tant de richefles. Or ce chemin pafle tout du 5 0 long des iardins & métairies Fqu’on nomme là Chacnras) de forte qu’on n’y a iamais faute d’eau , & va iufques à l’entree de la ville, à l’endroit où efl la Prifon des Negres, nommee Peraluillo, d’où derechef oh peut aller, pat les ruës qu’il femble bon. La conflitution du port efl telle ; de Pachacamà [^dequoi nous parlerons dauantage ei- apres) la cofle s’eflend iufques à la bourgade de Surco, habitée d’indiens ; où la falaife de la mer efl auffi droite qu Vne muraille , de forte qu’on n’y peut aborder ou defcendre, entre les rochers toutesfois il y fburd quelques fontaines d’eau douce_ : fuit fur la mefme cofle Surt^uillo ; apres k^Magdelene vn peu efloignee du riuage, & puis CMarangdy qui efl entre la CMagdelene & Callao fcela font toutes bourgades d’indiens; & delà la terre ferme s’auance comme vn col iufques à rifle de entre laquelle 4® & la Continente il y a vn eflroit paflage , par lequel entrent les barques & petits na- uires qui viennent de deuersle Sudj dans le port de Limai lequel s’eflargit delà par vne courbure qui fe fait au dedans de la terre ferme. Or ce port efl fort afleuré & fort grand, net de tous bancs & rochers : mais les grands nauires qui arriuent de deuers îe Sud , doublent l’ifle de Lobos , & entrent ainfi dedans le port : en outre la cofle con- tinue dés le port iufques à l’emboucheure de la riuiere qui paffe près de Lima , & au- près d’icelle s’auance en mer, faifant vne baye, à cinq lieues de la ville , ou demeurent feulement des pefeheurs. Le port à quelques quarante nauires tant grands que pe- tits 5 deux defquels feulement, fçauoirl’Admiral & Vice-Admiralf que les Efpagnols nomment Cafitana & portent des pièces de fonte, les autres font pref- 50 que fans armes : & vne galere, qui n efl feulement que pour tenir en prifon les mal- faideuts & les Negres. Or la bourgade qui efl fur le port, &: qui efl proprement dite Callao , a eflé long temps fans eflre ceintle d’aucunes murailles 5 mais depuis que les Anglois & ceux de noflre nation ont commencé de la tafler , on y a fait quelques ter- races , & deux chafleaux qu’on a bafti auprès , il y a enuiron trente pièces de fonte de- üant la maifon ou chais du Rohfur vn droit coflaiT,qui efl fort battu des flots de la mer* Car I f ■ l OCCIDENTALES. LIVRE X. Car François Drac 1 ati cId Id lxxix eftantentré dans ce port, y ayant troiiucdouzc nauires a 1 anchre, & dans vne d'icelles force argent, fans beaucoup de marchandifes de diuerles fortes ; il en pilla la plus grande partie , & ayant coupé les chables il laiflà driuer en mer les nauires, &delà s’en alla au port de F ait a. En outre 1 Ifle qui eftau deuant delà terre ferme eflenduè'en long entre le Nord ôi le Sud, eft communément appelleel Ifle de Callao & mefme de Linta ; elle eft longue & eftroite. Ceux de noftre nation l’aborderent auec l’armee Nauale de Naffau, fur laquelle eftoitle General lacçues l'Ermite 1 an cIo Idc xxiv , au mois d’Auril & s’y tortiffierent. Or elle eft fort raboteufe de rochers & du tout deftituee d’eau douce; ï O il s y trouue feulement au haut des montagnes , quantité d’vne certaine herbe , que nos gens prenoyent contre le fcorbut, qui eftoitvn remede prefent: cependant que les noftres feiournercnt la n eftans pas aftes forts pour attaquer la ville , ils effayerenc quelquesfois de prendie la bourgade, mais ce fut en vain: toutesfois de cinquante nauires ou enuiron, qu’ils trouuerent à l’anchre dans le port, ils en bruflerent plus de trente : & le lendemain les Efpagnols mefmes en enuoyerent quelques-vns à feu vers la flotte de nos gens , fans faire aucun dommage. Enfin il faut noter que de ce port il part tous les ans au mois de Feburier vne flotte, qu’ils nomment U K^rmaàilU , qui s en va a t^^rica ; & retourne le plus fouuent delà fur la fin du mois de Aîars , chargée d or & d aigent ; qui ont efte ammenes des mines de Potoji^ & autres Prouinces voi- ..0 fines . & tout ce Trefor fê defcharge au port de Lima, & delà Ce tranfporte par char- lettes Si belles de charge a la ville: prefque en ce temps y accourent les Marchands de tous les quartiers du Royaume du Fern, & on y âmene l’or & l’argent de Cu/co &c Prouinces entrcmoyennes, de forte que tout le mois d’AuriLils’yaffemblevn grand Threfor: qui eft mené au commencement de May auec vne autre flotte à Famma. V oila ce que nous auions à dire de cette ville & de fon port. l’adiouftcrai feulement vne chofe, c’eft, que toute cette cotte eft grandement fub- iette aux terres trembles, mon Autheur raconte, que l’an cId Idc ix,le xix iour du mois d Oélobre furie fbir, il en arriua vn fi rude dans la ville de Lima, que plus de cinq cents maifons en tombèrent, & prefque toutes en furent endommagées : Or l’an ; 0 c I D I D c V, le X X VI de Noucmbre le mefme arriua à Tca .• Et en Arica la mer fut telle- ment efineuë , qu elle emplit fubitement de fes flots toute la ville, abatit plufieurs mai- ions, & emplit les chais de ^ble & de boue. Nos gens content qu’ils fentirent vn trem- blement de terre dans 1 Ifle de iJallao au mois de luin. ^ C H A P. XXIV. Vallee de PachacaiTia, ^ autres iufques à Guarco de la Bourgade de CoLtinete. N ô N s maintenant a la dcfcription des Plaines : apres la vallee de Lima fuit la vallee célébré de Fachacama , diftante delà Métropolitaine , com- c 1 • ^ veulent, de quatre lieues : qui n’a point de fécondé en beauté erti ite ; dans laquelle a efté autresfois ce Temple, tant riche en or & en argent, du- eçoel Ferdinand Fizarre a tiré, comme on dit, plus de neuf cents mille ducats, outre vn grand 1 hrefor que les Soldats y auoyent auparauant pillé, ou que les Preftres Indiens auoyent ofte auant la venue des Efpagnols ; car la commune opinion eft, que les Sau- nages en auoyent caché foigneufement vn grand poids d’argent, & autant que qua- tre cents orts hommes pouuoyent porter fur leurs efpaules; encore qu’on n’en ait lu cpes ICI rien peu trouuer, bien que les Efpagnols ayant miferablement bourrellé plufieurs lois ces pauures Indiens , pour leur faire defcouurir ces Threfors : les ruines O e œ magni que baftiment relient encore pourle iourd’hui,qui eftoit anciennemeuc vn 1 emple dedie au Créateur de l’Vniuers, comme eferit Garcilafm, &non au Soleil, comme d’autres ont eftimé. La vallee de chilea fuit celle de Fachacama, qui encore qu’elle ne foitabbreuuec d aucune p^luye, ou d’aucune riuierc ou torrent, eft neantmoins fort fertile en racines bonnes a manger, & abondante en arbres fruiftiers: &T:elaparvn fingulier labeur & grande induftrie des Sauuages ; qui font de profondes foffes, dans lefquelles ils 3^0 description des INDES " ils {cillent ; & afin que le Aiâys y vienne mieux j ils y mettent au lieu de fumier des te- Ites de Sardines fquieft vne forte de poifTon que la mer prochaine fournit en abon- dance prefque infinie; appris par l’vfage &, par lexperience que cela rend la terre beaucoup fertile. Or les habitans puifent leur eau pour boire hors de profonds puits. Les Inças Rois du Peru y auoyent auffi vn Palais , des greniers & des lardins , & vn grand magazin de viures. Elle eft diftante de dix lieues de la ville de Lima , & de fix de Pachacama ; il y a vn village d’indiens , qui s’exercent foigneufement à cultiuer les ^^pTo^che de Chilca & à trois lieues d’înterualle d’iceîle eft la vallee de Mala ou Malla, qu’vne petite riuiere diuife,&qui eft prefque toute couuerte de forefts d^ziScs.AcoJla i o raconte en fes Commentaires quelque chofe d admirable de cette vallee. Dans MaU r dit il; à treize lieues de la ville des Rois , fe voit vn figuier , qui pouffe & produit fon fruid, du cofté qu’il regarde le Sud & les montagnes, aux mois que l’efté eft aux mon- tagnes j & de l’autre cofté au contraire? quand il eft eftê dans la plaine . admirable in- dice du changement de la nature en vn fi petit interualle , & mefme en vn arbre, com- bien qu’il y en ait qui affeurent auffi qu’il y en a plufieurs de mefme. A cinq lieues plus outre de la vallee on entre dans celle de Guano yon félon Garcillaffm de Huarcit , qui n eft pas moins renommee en ces quartiers que les prece- dentes- car elle eft fort large , & remplie d’arbres de bonne odeur fur tous , & déli- cates Guayaues, & encore plus de Guaues. La terre eft grandement fertile en froment 20 & Mays i & porte benignement toutes autres femenccs. Les Ingo/s Anciens Rois du Peruyy auoyent vne fomptueufe fortcreffe fort bien fortifiée, baftie de groffes pierres quarrees fur vnhaut coftau , qui commande fur la vallee, auec fes fales & porches . on, defcend du haut de la fortereffe iu fqucs à la mer par vn efcalier de pierre, cotre lequel fe brifent les flots de la mer, de forte que c’eft comme vne merueille comment on a peu premièrement faire vne telle maflé. Ce Palais eftoit orne, félon la capacité d’vne o-ent Saunage , d’elegantes fculptures, vn grand Threfor de ces Rois y eftoit gardé; or Se qui accroift l’admiration , c’eft, que de fi groffes pierres , y eftoyent de telle forte conioindes, fans chaux ni autre mortier, qu a peine en pouuoit-on voir les lomdu- res • & combien que cette maffe foit tombée parle temps, toutesfois les maflires, jo monftrent encore affés auiourd’hui qu elle eftoit la magnificence de fouurage. Plu- fieurs Autheurs en font mention, & entre autres GamllaJfu^yCyxi raconte, qu’au temps de l’Inq^a Pachacutec, cette vallee auec celle de Chiica & de , furent conquifes fur vn Prince puiflant en ces quartiers , nommé chuquimancu , & adioÿites au Royaume de Cufco : Or la vallee de Guano eftoit lors peuplee fur toutes autres , de forte qu’on y contoit enuiron trente mille habitans : & les vallees voifines prefque de la mefme for- te ^maintenant dans la plus peuplee d’icelles (il parle de fon temps; à peine y en peut- on nombrer deux mille. OrcetJ/^^^auoitbafti cet édifice, admirable pour fon fit, en mémoire de fa vRfoire &: comme vn trophée. Dans cette vallee il y a auiourd’hui vne bourgade baftie par les Efpagnols , nom- 4c mee Cannete ou auffi Guano du nom ancien ; à x x v lieues de la Métropolitaine Lima vers le Sud ; & à vne lieue & demie de la mer du Sud ; le terroir de cette bourgade eft fi fertile en blé , &: mefme en fort bon froment, que le pain qu’on y fait eft fort eftimé; & on tranfporte delà par nauires és autres quartiers de P Amérique Meridionnale, <^rande quantité de tres-bonne farine.Ceux qui ont veu ce lieu depuis peu, difent que ?ette bourgade eft habitée de trois cents Efpagnols , de plufieurs naturels du pais & de Negres %n va d’icelle le long de la mer à l’hoftellerie àtJfa&c delà à Mak , où il y a plufieurs métairies, qui appartiennent à ceux de Lima. C H A P. XXV. chemin far la Plaine da Perii,/&f«f4onvaàla vallee rr4,pareille aux precedentes, tant en fertilité de terroir, qu’en nombre de peuple ; il y a vne belle riuiere qui la coupe d’vn agréable canal ( Her- rera la nomme P^^ijmaisauxmoisdel’efté&iorsqu’ilnepleutpointdanslesmon- tagnes,elle eft fort petite, de forte que les habitans ont lors difette d’eau :& afin d’ob- j 0 uier à cette incommodité , ils auoyent au temps pafle deriué , auec grarid labeur , vn fofle ou canal, du pié des montagnes iufques dans leurs champs, qui eft maintenant ■ comblé par l’iniure du temps' ; au refte cette vallee eft tres-feconde en arbres frui- éliers , &: eft prifee fur toutes par Acofla^om y auoir abondance de vin. Il y a vne riuiere qui la coupe par le milieu , de laquelle on a deriué plufieurs grands Ibflcs, qui arroufent les vignes ; cette riuiere commence à fe groffir & s’enfler au mois de Décembre ; toutesfois elle n’eft pas fuffifànte d’arroufer toute la vallee , mais Z Z il y a ' description des INDES il y a plufieurs champs qui demeurent fans eftre cultiues pour la difette de leau. Il V a dans icelle quelques bourgades d’indiens , comme S. lunn & S. Martin ; & plufieurs Saunages demeurent aufli près de la ville , dont nous allons parler main- *^^”onVmené vne Colonie d’Efpagnols dans cette vallee , la ville fe nomme Valuerâe, d’vnevalleequiy eft jointe extrêmement agréable, qu on dit eftre plantée de vÿnes fix lieues de long, qui portent du vin en grande abondance; il y en a qui afleurent qu’il fe prefte tous les ans dans cette vallee cinq cents mille bottes de vin ( c’eft vne mefure fefpagne reueuant à vne arobe des chofes liquides. ) La ville eft fort belle & richesoù il y a enuiron cinq cents Efpagnols,il y a vne grande Eglife, trois Monafteres i o de Religieux, &vnHofpital. L’aïry eftferain &'fortfain le terroir eft fans aucuns animaux venimeux. Les femmes font eftimees les plus belles de tout \zPeru. Elle a vn port fur la mer du Sud à fix lieues de la ville, qu’ils appellen ^emado.'m^weL on mene le vimpour eftre delà tranfporté aux autres Prouinces ,& notamment à Li- ma. La vendange s’y fait au mois de Septembre & Odobre : on entonne première- ment le vin dans de grands vaifleaux , qu’ils nomment rinaias , puis apres on le met dans des oüaires ; Or les vns &: autres tant les vailfeaux, que les oüaires, fe font dans cette vallee par les Negres qui font adroits en cet art. Cette ville a vn Lieutenant, auquel font fuiettes Lanafca & Pifeo : lequel y eftoit eftabli par le Roi d Efpagne mef- me ; car cette Lieutenance eft de grand reuenu,& riche fur toutes autres. La ville eft 2,0 diftante de la Métropolitaine Z/;^Æ,comme dit Herrera.àt x x xv lieues, félon d’autres de cinquante: de Pifio douze. Or au milieu de ces douze lieues , comme i’ai ap- prins par vn Autheur certain, il y a plufieurs Mahamares prairies auec de l’eau pour les beftes de charge , & c’eft vne chofe admirable, que lors que la ri- uiere, qui coupe la vallee s’cnfie.alors l’eau de ces prairies fe diminuë& afteiche; & au contraire quand la riuiere eft fort petite, alors l’eau abonde en ces prairies. Villa- curi eft fituee entre des lieux fablonncux & deftitués d’eau , c’eft vne autre vallee , qui encore quelle ait difette d’eau,neantmoins elle abonde en vignes, & porte de fort bon vin. Elle porte auffi des fîguyers ,• or telle eft là propriété de ces arbres , qu’ils portent leurs fruits la moitié de l’anneedu cofté de l’Orient, & le refte d’icelle vers l’Occi- 5 o dent,ce que nous auons dit ci-deffus. rappoftè d’vn arbre félon Acofia. On conte de Vilàcuri iufques à Vifeo ou ?ifck<\\x2.txt lieues : c’éft vn port fur la mer du Sud aftes re- nommée quia du cofté de duquel nous auons fait mention ci-defliis, l’ifle àc Sangalla,^ vne autre liommee de Paxaros-, ) & fort affeuré; les nauires demeu- rent en l’anchre à demi- lieue du riuage,car tous les iours fur le foir , il s’y leue des vents aftes impétueux de la terre, qu ils nomment la P aracds : il y a vne ville proche du port de mefrne nom, où on dit qu’il y a enuiron quatre cents Efpagnols ; il y a vn Monafterc de Cordeliers dehors la ville : k plufieurs chais fur ie bord de la mer, dans lefquels on ferre le vin & autres marchandifes.La ville a efté autres fois fans murailles,mais depuis que les Anglois &ceux de noftre nation ont commencé de pafter dans lamer du Sud, 40 les Bourgeois l’ont ceinde de murailles, pour leur feureté,qui ont quinze piés de haut, comme les noftres ont trouuué l’an cId I oc xxiv. Le Corregidor de Valuerde ou de rr^yeftablitvnLieutenant:ily a vne vallee proche qui eft arroufee d’vne petite ri- uîere , laquelle porte de fort bon vin, & beaucoup plus fort que n’eft celui de Tca. Cette vallee s’eftend iufques à (quatre lieues de diftance ) bourgade d’in- diens, par laquelle pafte le chemin qui va a de laquelle nous parlerons bien toft, fort raboteux comme prefque toutes les montagnes, à vingt & fix Jieuës. Mais retournons à Valuerdc:2L quatre lieues de la ville veisl orient, le long du chemin quimeneauxmontagnesjori va à la vallee deTw^f^, qui encore qu elle n’ait niriuie- 50 ires nfruifteauît,& mefrne ne foit jamais arroufee de pluye, elle porte neantmoins des ciches les meilleures de tout , beâuco^p^dè vin & aunes fruiéts : force coton ; defdïtequ’elle cft fort peuplee de naturels du pais, qui y ont leurs maifons champe- ftres : le chemin qui va aux montagnes ’pàfte par cette vallee, & premièrement a la bdüfgàde dé >• de laquelle on 2. Lucanes , Prouince habitée d Indiens: par, laquelle paftent ceux qui vont auec beaueùup de marchandifes de Lima a Cufco. j î!)c O C CÏ'DENTAL E s. LIVRE X. De cette ville de Faluerde il y a vn chemin qui conduit à Gucimanga-, à Chocolococha, & à Guancabelica, & retourne vers la vallee de Xanxa & autres, carie vin de Tc^ fe tranf- porte prelque dans toutes les Prouinces des montagnes. C H A P. XXVL Chocolococlia oU Caftro Virreyna autres yallees clepuù Yca iufques â Tarapacà lesVdks cuBourgades Jîtuees en icelles. NO V s allons dit ci-delTus que Chocolococha , appelJee des Efpagnols Cdjiro Virreyna, ville depuis peu baftie , elloit diftante de Pidco vers le Leuant de xxvi lieues par vn chemin fort raboteux : plulîeurs tiennent quelle eft efloignee de la Métropolitaine Lima de lx lieues & de Guancabelica de xi v vêts le Midy.C’efl: vne ville fort renommee en ces quartiers pour l’abondance d’argent tres-fn, qu’on tire des mines elloignees de la ville d’enuiron deux lieues 5 or ces mines font lituees au haut d vne (eiche montagne ou Puna, toufiours couuerte de neige, & froide outré mefure, de force qu on dit qu elle furpalfe en froideur toutes les autres Punas du Peru : la région eft neantmoins faine , & deiiuree de tous animaux veneneux, & les Indiens y lont lur tous grands &robuftes : Les Elpagnoles craignent d’y accoucher, pour le trop grand froid, par ainlî quand elles font grolîés & proches de leur cerme:elles def- io cendentdans la plaine : pour la mefme caulc la terre nourrit fort peu d’arbres : au- près delà ville pafte vne petite riuiere,qui toutesfois fait tourner les moulins, lefquels pilent & brifent les mines : or c’eft vne veine de pierre, laquelle eft grandement efti- mee de couleur d’vn bleu obfcur , ou d’vn blanc brunaftre : ils icttent ces pierres dans des fourneaux , & les calcinent auec de LYcho fqui eft vne certaine forte d'herbe lon- gue &ployable, de laquelle on a conftumcen ces quartiers de couurir les maifons,) eftanc calcinées ils les pilent en poudre 5 qu’ils mettent dàns des vaifteaux , & la dd"- ftrempent d’eau & d’argent viR lequel attire l’argent & l’amafté, lalffant les ordures fdefquelles toutesfois guelques-vns fçauent faire du profit; & font d’icelles vne cer- taine forte de métal qu’ils nomment par apres ils feparent au feu l’argent vif y ^ de l’argent ; lequel ils fondent en lames , qu’ils nomment Barras : qu’ils portent enfin aux efprouueurs Royaux, qui apres en auoir prins le droit du Roi, y appofent les marques par lefquelleson cognoiftJe qualité de largent, l’annee & le nombre des lames . Orpoureeque ces mines ne font pas beaucoup riches j le Roi d’Efpagne n’en prend que le dixième: touteslois l’argent en eft fort fin; de forte que chaque maredehuid: onces eft eftiméàdeux mille trois cents odante marauedis : & tous les an^ on en tire enuiron neuf cents Barras d’argent dixième, outre celui qui eft emporté en cachette & que lesÔrfeures employentà faire toute forte de vaiftelle. Cette ville a fon Gouuer- neur,qui peut alTembler de grandes richefles. Dans la ville il y a plufieurs boutiques 40 de Fadeurs ; & des celiers à vin qu’on y apporte de la Plaine, & ^ce qui eft a admirer ) qui de petit y deuient fort & fort bon: car l’aïr y eft fort fain & fort agréable, de forte que les bœufs qu’on y tue fe conferuenc long temps fans fe gafter, combien qu’ils ne foyent point lalés. De cette ville il y a des chemins paués qui vont iufques à Pifeo, Chinca & Yca: comme auftia Guamanga par le chemin Royal des montagnes : princi- palement à Guancabelica-, or ces chemins pafl'ent entre trois lacs, fort profonds &: terribles; chacun defquels a prefque vne lieué de long; & delà tirent vers le moulin datant: & derechef le long d’vn grand lac, & par des montagnes couuertes de neige & imoides,qu’à peine y en a-ilentoutlc monde de femb!àbles;ces montagnes fe ioignent auec Pariacaca (de laquelle nous parlerons ailleurs^ & peu apres par vn ma- 50 rais boueux ) où le droit chemin eft difficile à trouucr ; 5c par des montagnes fans chemin, & par vne vallee dans laquelle paiflent force Guacos,&z delà on arriue à Guàn- cauelica. le trouue que d’autres ont remarqué qu’entre Sangalla & la ville de Cufco, font CCS fpacieufes montagnes appellees vulgairement des Efpagnols la Sierra de Güaytara, qui de necelîité doiuent occuper vn grand élpace de terre, 8c fi Herrera a bien dit,ellcs ne font elloignees de Lima que de quatre lieues. Mais retournons aux vallees qui font le long du riuage. Z Z Z Apres 5«4 DESCRÎPTIOH DES INDES Apres la Vallee d’Tca fuiuent de belles & agréables vallees,& de fort claires riuiere's; on les nomme LanaJcét,o\x Nanafia félon Garcillajfm (qui conte que cette vallee a efté adioinde au Royaume de Cufeo par l'inca Capac lupanqui) anciennement renommées pour vn nombre prefque ii?fini d’habitàns, que les feditions des Efpagnols & les guer- . res ciüiles ont prefque tous deftruifls. Dans vne de ces vallees , qui fe nomme d’vn nom particulier Caxamalca^lcs Ingas y ont eu au temps palTé vn édifice admirable, & des munitions en grande abondance pour tous vfages : auiourd'hui les Efpagnols y cukiuent force cannes de fucre , de forte que par fois le reuenu annuel en monte iul- ques à trente mille ducats , comme tefmoigne Acofta. , ce qui eft efmerueillable en vn lieu où le fucre eft à fi vil prix , ainfî que nous auons dit cndeifus. Auguflin de ZArate i o. efcrit, que ces vallees font diftantes de la ville de Lima de cinquante lieues. Elles ont vn port fur la mer du Sud , qu’on nomme S, Nicolas 3 duquel iufques à la principale val- lée de Villacurh on conte xv ni lieues. Farces vallees & autres, pafte le chemin Royal que nous auons défia fi fôuuent nommé j 'on voit encore dans des lieux fablonneux & difficiles les veftiges des colomnes, qui monftroyent le droit chemin. Et afin de faire vne petite digreffion, nous dirons, que outre cette vallee, le lohg du chemin quimenepar les montagnes à habitent les peuples nommes Lucanes, delquels on pafte vers la Prouince de Farina cocha, ou comme G ar ci lîajus la nomme, Tarihuana cocha (ce nom fignifie cette forte d’oifeaux de marais , que les Efpagnols nomment Flamencos) grande , fertile & riche en or. 2,0 Or de cctte-ci on va par de grands deferts & des montagnes couuertesde neiges dans la Vtonxnce d’ Aymaras : à.eW)sT'otora-3<\eT'otoŸa2.\x^Hs des Cumhihilcas , ôdiainfî à Acha fur la riuiere i Apurima, comme remarque Herrera. le trouue dans Garcillajfm-, que l'Jnca ayant fait vn pont à trauers Afurima-, auoit pafte dans la Prouince, comme il parle, des Cumpiuilicac vers l’Occident de la ville de Cufeo, longue de vingt lieues & dt dix de large. Delàpar vn defert & marais, & lieux boüeux, de feize lieues de che- min, il eftoit allé à Allca ,• & plus outre aux grandes Prouinces de T iurifma, de Cotahua- ci , Fumât ampu , Tarihuana cocha : & que d’icelle il auoit pafte par le defert de Coropuna vers la Prouince à’ Arunns, & plus outre à celle de Collahua, qui va iufques aux limites de la vallee Arequipa , de laquelle nous parlerons bien toft. ^ ^ Suit apres Nafca la vallee de Hacari, à L x x lieues de la ville de Lima , félon le conte de Biego Fernande?:, : Garcillajfm efcrit, que le Inga auoit defeendu de Guallaripa (mon- tagne renommee pour l’abondance d’or qu’oq en a tiré) par vn defof t large de plus de 3c X X V lieues , dans cette vallee , qui eft grande , fertile & pour lors fort peuplée. Apres Hacari fuit Oconna , ou félon Garcillajfm V'vinna -, delà à Camana & ^uilca, Vallees qui ont leurs riuicres &:ont autresfois efté fort populeufes, maintenant prefo que defertes, pour les caufes plufieurs fois dites. Or on mena vne Colonie dans la vallee de Camana, nommée S. Migu'élde Rihera, à cent & treize lieues de Lima vers le Sud: & à xxii d'Arequipa vers le Nord, elle ap- partient à l’Euefehè de Cufeo. Son terroir eft fertile en figues, vin &grainsi qo La ville d'Arequipa eft baftie dans la vallee de ,^mlcA : elle eft diftante de la ville de Lima, félon Pedro de Cieça de exx lieues ; félon Augufinde Zarate & Herrera enlade- feription des Indes exxx : de Cufeo lxx ou lxxx: fpar lequel chemin durant le ré- gné des Ingas, on portoitlepoiftbn de la mer, en fort bref temps poureeque par toute cet efpace il y auoit des Indiens difpofés, qui fe le bailloyent comme de main en mainjcomrne racontent les Efpagnols j enfin delà mer du Sud douze ou quatorze: elle necede à nulle autre ville du Peru en bonté de terroir, température & bonté car la terre eft tres-fertileen froment & en vin : elle a vn port à l’emboucheure cte la riuiere chila, qui defoend le long de la ville, deforte qu’elle abonde en marchandifes de l’Europe & en celles qui fe tirent hors des Prouinces voifincs. Or elle eft diftante y o des mines d’argent de Potofi cent & cinquante lieues par vn chemin fort difficile &: empefehé ; neantmoins au temps pafte tous les Threfors eftoyent ammenés à la mer par cette ville, comme auiourd’hui on les mene à Arica par vn plus court chemin. Afféspres delà ville fe voit vn F^/r4»,duquel on conte merueilles: &lc territoire de cette ville (^comme toute la plaine ainfi que nous auons dit) eft fort fuiette aux trem- blements de terre, de forte que l'an gId Id lxxxii elle fut prefque abatuc par vne horrible J vomit tant de OCCIDENTALES. LIVRE X. horrible fecoufTe : & l’an cloloc cette montagne cracha flamme, pierres de ponce & de cendres, qu’elle en gafta" prcfque tous les fruîds par tout le ïeru, tant on dit quelle efpardit au loin ces cendres : & dans le territoire de la ville les vignes furent tellement gaftees qu’elles defnierent leurs fruitts cinq ans de long : on dit que le murmure & beuglement horrible en fut ouï de Lima. Quoi plus ? vne grande calamité opprelTa lors plufieurs mois cette ville, laquelle Tnca CarcilUJfus eferit prolixemeiit. Elle a fon Euefque, & vn Corregidor : enfin fon Diocefe avers le Nordlavallee Hacari,yG^s\eSnà Tarapacai du cofté de l’Orient dans les Proùinces de Conde/ftyOi comme elles font appellees d’vn nom commun par les Indiens ; plufieuris I O bourgades , les principales defquelles font Htibina, chic/ui-Guanita .^imijlaca vne partie des peuples nommés Coliagna^: Or ces Proùinces ont efté anciennement fort populeufes, maintenant par les difeordes & expéditions de guerres des Efpa- ■ gnols, elles font merueilleufement efpuifees de gens : combien que Herrera eferit qu’en ce Diocefe il fe nombre cinquante mille Indiens tributaires. Afles près de la \ ille auprès du chemin qui mene à chtiquito, efl: la vallee CMoquegua fertile & dele- dable. Enfin auprès du chemin qui va de la ville à C• & laquelle on ap- pelle vulgairement dans le Pertt, Marannon ; car ils croyent qu’ayant couru vn long efpace à trauers des Prouinces Mediterranees & s’eftant grofîîe de plufteurs autres riuieres i elle fort dans la mer du Nord. Cette vallee a quatorze lieues de long,&: quatre ou cinq de large; elle eftoit anciennement fi peuplee, qu’on eftime qu’il y habitoit trente mille Sauuages.au commencement que les Efpagnols y pafterent: mais pour le iourd’hui ( àitPiedro de deçà , cfcriuantde fon temps ) à peine y en a-il 30 dix mille de refte. Les naturels eftoyent appelles d’vn nom commun Guancas.ovL félon Garcillajfus-, HuancaSy encore cyneHerrera appelle aufti les meftnes 7aos\m2iis i\ femble que Garcillaffm vueille que ce foit toute vne autre Prouince, dans laquelle les Tauyuy comme il eferit, ayent habité : car apres que Xauxa & mefme Caxamalca eurent efté domptés, comme PTnga s’en retournoit triomphant à Cufcoyil fe de- ftourna du chemin vers cette Prouince , laquelle il dit eftre fttuec en vne région raboteufe , & auoir efté remplie de Sauuages belliqueux. Que le mefme apres auoir fubiugue Xauxa y auoit diuilé la Prouince en trois, la première defquelles fut nom- mée Saufa ou Xauxa ; l’autre Maricabika ou Marcauilca , & la troifîeme Laxapalan- ga ou Lacftpallanga : & y baftit dans chacune vn Palais Royal, mais vn plus fbm- ptueux de beaucoup que les autres , dans la première à i’entrec mcftnc de la val- lee : cette vallee eft ceinéle de toute parts de montagnes de neiges ; & eft diftante de la Métropolitaine Lima , félon le calcul d’Herrera de trente fix lieues, ou félon dautres quarante. Etafin que nous donnions cet aduertiffementpar digreflîon.lc chemin de Lima à Xauxa fe fait en cette maniéré. De Lima on pafte par la vallee de Se^eguilla ( qui eft diftante de quatre lieuè’s de la ville j vers chontaio del .Mar y 2.\xtie vallee fertile à neuf lieues de Lima;&càc- là ayant pafTe vne riuiere on vient à Sificayo , village d’indiens , à dix lieues de la ville : peu apres on monte le long de l’autre cofté de la riuiere à chorillo , qui eft aufti vn autre village d’indiens , fttué fur vn lieu haut , à treize lieues de la ville : " jQ il commence défia là à beaucoup pleuuoir & tonner. Delà à Guadacheri opulente bourgade d’indiens , qui habitent dans plufteurs bourgades fituees fur les penchans des montagnes & dans les vallees , & s’appellent d’vn nom commun Capiyungas. Delà a trauers des vallees & des montagnes , on monte fur ces hauts fbmmets des montagnes, qu’on appelle Pariacaca,^ vingt & deux lieues delà ville ; par vn chemin fort difficile &|perilleux ; & mefme double , par vn, nommé la Efcarilla , pource qu’on monte par certains degrés taillés dans la roche , auec vn grand danger de Aaa tombe? 57® DÈ$CklPTÎON£)ËSÏNDÈS tomber dans vn précipice , & mefme dans vn marais fort profond qui eft au deffous ! ce chemin fort vers Aîunxauxa^ou on paffe la riuiere de Maranmn , comme ils l’appel- lent,fur vn pont de pierre. Par l’autre ( qu’on nomme El Atâiù ) qui mene par vne ri- uiere f laquelle ayant couru par la plaine fort en la mer du Sud auprès de Cannete ) qui fe cachant fous terre vne lieue d’efpace, &fourdant derechef, fo paffe fur vn pont fait par la nature: & le chemin paué tire plus outre vers le rocher la riuiere fe précipité du hautd’vne certaine roche dans vne ahyfme auec vn horrible murmure ; de Pacacacha on defeend enfin dans la NsWeeXauxa^^ trauers des montagnes & deferts. Enfin il y a auiourd’hui dans cette vaîiee,comme i’ai apprins d’vn certain qui la veuë depuis peu, quatorze bourgades d’îndiensjc’eft vn gïai\àCorregiemento,àzns lequel ily i q SL quelques Conuents de Cordelliers & de Iacobms,-qui inftruifent les Indicns:La val- lée abonde en Maysôc en froment,*en fort bon lardf&: en fruids déroutes fortes. Entre ces bourgades eft renommee celle de Guamaiû, où il y a vne hofteilerie ou vn Tambo fort commode pour les voyageurs. Or combien que les naturels habitans de cette val- lée foyent pour la plus grande partie maintenant baptizésmeantmoins il y en a encore entr’eux beaucoup qui retiennent leurs fuperftitions payennes 5 qui adorent le Diable qu’ils appellent non qu’ils ne fçaehent bien qu il foitmauuais,màis de peur qu’il neleur faffemal. IDcXauxa iufques à la ville delà VittorU ouG’»4;i^?4;2^4,il y a trente lieues. Car ceux qui fuiuent le chemin rencontrent premièrement des montagnes, qui ferment cette va h îecjdans lefquelîcs on voit des mafures de vieux édifices : & puis apres le village Acos, fitué auprès d Vn marais plein de rofeaux : Or les Indiens habitent vn peu à l’cfcart du chemin, dans des rudes montagnes non cultiuees, qui font àlamain droite. If Acos on va au Palais de Picotée puis on defeend par vne haute plàine vers la riuiere Xauxa,SL\x trauers de laquelle il y a vnponti que les Sauuages nomment au- près duquel il y a eu anciennement vn Palais Royal & des bains chauds , qui boüillent près de leur fource:dece pôton vaà vnautre.qui eft bafti fur vne autre riuiere, laquel- le es mois d’efté eft fort petite, mais qui s’enfle fort rhiucr : fur la due oppofîte eft fi- tuee la bourgade Pic0y:àQ laquelle on monte au Palais de qui efè bafti furie fommet d’vne montagne,& qui eft ceind de tous coftés de colines rudes &non culti- 5-0 uees,où les Indiens ont habité. Proche delà fe voyent dans vndefort les mafures d’vn certain PucaraÇ car ce nom eft commun à tous les lieux qui font fortspar nature ou par art) ouChafteau Royal au temps paffé, auquel les Sauuages voifins eftoyenc commandés de porter leur tribut. Orleplusfouuentlcsnaturels 'des pais ont leurs demeures dans les montagnes de neiges , & enfemencent dans les vallees, qui font dc- fenduës du froid par les hautes montagnes j on dit qu’il s’y trouue beaucoup de mines d’argent. De Parcos on defeend à vne autre riuiere de mefme nom par des montagnes & co- ftaux, laquelle on paffe fur vn pont dreffé fur des colomncs de pierre. Ayant paffé cette riuiere,le chemin Royal conduit premièrement à Ajfangaroÿ puis apres à Gunmunga: 40 or Herrera conte de Parcos z Gmmanga x i Augujlin de Zarate iufques à la ville de .0^0 cinquante. l’aiprins la fuite de ce chemin comme elle auoitefté defcriteparvn certain qui y auoit efté depuis peu, en cette manière ; fçauoir que de Xauxa on va à Acos, qui eft vne hofteilerie ou Tambo certains coftauxqui font le long delà riuiere de Mar an - comme il f appelle,on va à Ca^a où il y a de beaux iardins,& fuiuant le cours de la riuiere par des fentiers difficiles , on paffe fur vn pont depierre,laiffantà la main gau- chelechemin qui mene à GmmaVelka , de laquelle nous parlerons bien toft,delà on monte vne haute montagne fortafpre & rude , puis on vient à fhoftellerie de Picoû, d’oùfedefcouure tant de montagnes fi hautes, qu’il ne femble pas que perfonne en jo foit iamais forti , dans lefquelles il y a quelques villages d’indiens & la riuiere y eft fi eftroite pourfa profondeur , qu’il femble que ce ne foit qu’vn ruiffeau : delà on paffe à rhoft ellerie de P^wr,de laquelle defcédvnepente de deux lieues & demie, d’où fe voit vne Iflc au milieu de la riuiere de MaranmK,âsLns laquelle il y a vne mine de pjomb & vn ' village fort peuplé d’indiens 5 & en ce lieu la riuiere qui auoit couru iufques à cette Me vers l’Orient, retourne tout court vers l’Occident & reçoit vne autre riuiere, ' laquelle OCCIDENTALES. LIVRE X. laquelle on pafle fur la fin de Cette pente, par defius vn pont fait d Vne fingulietein- dulh-ie : car ils tendent de grofles cordes d’vn bord à l’autre, & lient à trauers des fafei- nes ; qui font laites aulfi bien que les cordes de pire ou de maguey , & mettent par def- fus vne matte tifilic de poil ; qu’ils munifient de chacun cofté d’autres cordes & fafei- nes : ce pont eft louftenu aux deux bouts par des colomnes de pierre j mais il pend an milieu tout tremblant, de forte que le plus foüuent ils font contraints de le foiiftenir auec vne grue ; or quand la riuiere eft diminuée, on la pafte à gué. Pafle cette riuiere, on vient a 1 hoftellerie â' A fAngâ.roX‘^\^2Li\t à la main gauche Guanta , & autres bouro-a- des d Indiens , qui ont leur Corregidor. Delàenfin,filariuierefepafleâgué,paftant 1 0 par la vallee de Vinax^ue , on vient a Guamanga , de laquelle nous parierons main- tenant . La ville de GuamangA ou de S.Iuan de Ia VittoriA , eft fituee fur la hauteur de treize oegrés de la ligne vers le Sud j a feptante lieues ou comme d’autres veulent à feptante iiuiétde la ville de Li^Avtts le Sud-eft , auprès du chemin Royal qui conduit par les montagnes ,dans vne plaine ouuerte au pie de petites montagnes , qui s’eftendenc d’vne fuite continue vers le Sud de la ville: fur les bords d’vn torrent d’eau fort claire & bonne à boire : les maifons y font prefque toutes de pierre & couuertes de tuiles ; il y a trois Eglifes dans laville,& diuersConuents de Moines,plufieursConfrairicscom- me ils les appellent, tant d’indiens que d’Efpagnols,& vne de Negresj&vn Hofpi- 2 0 tal qui peut à bon droit difputera^uec les plus beaux de ces régions: Il y a vn Euefque, &vn Corregidor, comme ils l’appellent. L’aïr y eft fort fain & n’eft incommodé de l’ar- deur du Soleil ni delà rofee du foir, mais il eft temperé du froid & du chaud qui y ré- gnent par tour, dans fon territoire il y a beaucoup de métairies d EfpagnoIs, danslef- quelles ils nourriflent de grands troupeaux de brebis,pour la bonté des pafturages , & la commodité des ruifteaux qui les trauerfent. Or la plus grande de toutes ces petites riuieres eft nommee VinAq^ue ,2.\x bords de laquelle fevoyent lesmafures de certains édifices anciens, que les Sauuages difent auoir efté baftis aux fiecles pafles par vne au- tre nation ,• ce qui eft aftes croyable ; car l’Architedure en eft beaucoup differente de celle que les Rois du Veru ont fuiui depuis. Dans les champs proche de cette riuiere, 50 fe recueille vne grande abondance de froment, qui ne cede en rien à celui de l’Euro- pe,& duquel on fait d’excellent pain. Aux mois d’efté les beftes de charge y ont par lois dilette dcpafture,pource que fiir tout on n’a pas couftume en 1 Amérique d’amaf- fer aucun foin. Les montagnes des (^^^des^que les Elpagnoîs nomment Cordillera^Çont à dix huid lieues de cette ville. Les naturels de cetteProuincelontde moyenne ftature, de couleur brune, d’vn efprit pefant,pareffeux & menteursiinais affésfubtils au mal. On dit que le nombre de ceux qui payent tribut , monte à trente mille. Il fe recueille grande quantité de Coca dans cette Prouince, comme auftî du miel : elle abonde auffi en herbes médicinales, & il y en a vne nuifible & venimeulè,qu ils nomment c^îio, laquelle tue les animaux qui 40 l’attouchent. Entre les animaux propres à feruir de viande à I homme, excellent les dains, la chair defquels on compare à celle de veau : entre les nuifibles vn , l’vrine du- quel donne vne odeur fi mauuaire& fl peftilentieufe, qu’on lafentdcfort loin, & ne peutiamais eftre oftee des habits. Il y a enfin en cette Prouince des mines d’or, d’ar- gent,d’argentvif,de cuyure,defer,deplomb,defoulfre,&d’aymanr. C H A P. XXX. des Frouinces Æediterranees qui font depuù la Ville de Guamanga tufues d Cufco : mines de Guancabelica 50 ^ Cho.colocoha<7« Caftro Virreyna. ON conte ordinairement de laProuinte & de la ville de GuAmanga iulques a la Métropolitaine ,foixante lieues ,mais Alugujîm de Z ArAte en nom- bre Lxxx : par vn chemin rude & fort fafeheux, à caufe de la grande eften- duë des montagnes & alpreté des rochers. La plaine de chupA eft a deux lieues de GuAmangA ; & à xi lieuës du grand Palais de Bile AS, que les Indiens ont de tout temps eftimé eftre fitué au milieu du Royaume Z ' du 37^ description DES INDES' du PerUi^lQS Efpagnols ont trouué par leurs voyages qu’il y a autant de la ville àtCufco à Bilcas, que de Bilcas au Royaume de chtle. Or ce Palais a efté anciennement le plus grand & le plus fomptueux de tout ce Royaume , auiourd’hui il ne fe voit feulement que les mafures &L le corps ruiné d’vn fi noble édifice. Ily amaintcnant vne bourgade d’indiens, enuironnee de toutes parts de plufieurs villages, qui ont leur Corregidor^ comme ils l’appellent ,• on iuge que la terre y eft la plus haute de tôutle Peru. 'Dq Bilcas ily a vu lieues iufquesà Vramarca^èi'^.n milieu des deux Ce trouue vne ri- uiereappeileeMf.^du nom du Palais, laquelle on paffe fur vri pont de clx pas long. Cette riuiere prend Ton origine dans la Prouincc de Seras, fertile & abondante en toutes chofes necelTaircs à la vie ; les habitans d’icelle font belliqueux, font de mefme i o langage que les Lticanes, & fe veftent d'habits de laine en la mefme façon , ils poflTe- dent de riches mines d or &: d’argent. Les naturels d' Fr.^marca s'appelloyent ancien- - nement Chancas,^ leurProuince Andabdyla ou AndagHayla,àans laquelle il yauoit beaucoup dedifices Royaux & des magazins de viures. La Proiiince eft fort large, abondante en vaches, fertile en froment & en grande quantité de fruids dans les plus chaudes vallccs. Maintenant la plus grande partie des Indiens y a efté prefque de- ' ftruide par la cruauté & guerres ciuiles des Efpagnols. Herrera conte de Gmman- ga iuCques i Aadaguayla xx lieues. GarcAlaJpss appelle cetteVromnee Atahuay la , eferit qu’anciennement la nation des Chancas comprenoit plufieurs peuples, comme les Hamohualb, Vtunfulla, Vramarca,Ftllca,&i autres. Or il faut remarquer que Marca to fignific au langage de ces nations, vnChafteau ou lieu forrifié.Par cette Prouince pàfte vne riuiere, qui eft comme la plus grande de toutes celles qui entrent dans le Mar an- non,a\nC\ qu’ils le nomment; au bords de laquelle croiftent plufieurs cannes de fucre, elle eft nommee Vramarca,àe rhoftellerie voifine. On conte de Andaguaylas iufques à Abancay ix licuê’s;le chemin va en cette manié- ré; premièrement on vient à rhoftellerie de Vingos , &: puis on monte par vn haut coftau à Guancauama , où on fait de fort bonnes bottines ou brodequins , qui font fort eftimés en plufieurs endroits du Peru. Delà on pafte , en montant , & defeendant plufieurs hautes & rudes colines , à l’ho- ftelierie de Cochacaxas ou Cocachaca (Garcillajjks l’appelle Cochacajfa) diftante de la ri- 5 0 uiére d’Abamay de trois lieues vers le Nord , ou comme d’autres veulent de deux , par vn chemin fort difficile, pour les rudes & droits coftaux qui s y rencontrent, à cofté defquels toutesfois il y a des terres aftes fertiles en froment & tMays. On palTe la riuiere d' Abancay fur vn pont de pierre , drefte fur des colomnes de pierre à la grofle mode ; tout proche du riuage fe voyent les ruines de quelques édifi- ces Royaux. La vallee qui aduoifine la riuiere dl Abancay nourrit force cannes de fucre,- elle eft diftante de Cufco àe -sAii lituës félon Herrera, ou de xxiv félon d’autres .-elle a fon hoftellerie , qui eft appellee du nom de la riuiere Abancaio , auprès de laqutdle fe voit vne fort haute montagne, qu’on eftime eftre pleipe de veines d’argent, qui n’ont pourtant pas efté trauaillees iufques ici. On defeend le long de la riuiere dans la vallee 40 de Cotabamba, iufques où ilya xii lieues de chemin. On conte xii lieu'ês d' Abancay iufques à la riuiere d’Apurima. La fuite du chemin va en cette façon comme ie l’ai apprins d’vn certain qui l’auoit fait depuis n’a gueres. B’ Abancaio on pafte entre de hautes montagnes & profondes vallees iufques à vne au- tre hoftellerie & à vne bourgade d’indiens : de laquelle on defeend derechef à lari- uicre d'Apurima,\a plus rapide de toutes celles du où il faut paflér des lieux fort dangereux; fçauoir/^L^x/, comme ils l’appellent le rpont d; Apurima :ce Laxa eft vn fentier de quatre cents pas long , taillé dans des roches fort dures , qu’on defeend comme vn efcalier, les degrés eftans faits en forte que chacune befte de charge fe peut arrefter fur iceux ,• ayant d’vn cofté des rochers de fort hautes montagnes qui s’eften- jo dent quatre lieues ,• de l’autre vne riuiere , le bord de laquelle eft auffi vn rocher j pen- chant à droit, qui eft muni à cofté comme d’vn mur ou rempart taillé, de peur que les voyageurs ne tombent du haut en bas : de l’autre cofté de la riuiere il y a des monta- gnes, ôt des forefts & bois impenetrablcs.Toutesfois les Anciens Rois du Peru auoy- ent fi bien applani vn chemin par ces lieux raboteux, qu’ils alloyent fouuent par ice- iui à quatre lieues de Laxa ,\e\ong de la riuiere, dans vn certain lieu retiré, fitué au fonds OCCIDENTALES. LIVRE X. 575 fonels d’vnc vallee, auprès duquel on dit qu’il s’y trouiieauiourd’hui beaucoup d’or. Le ponccft firit d’vn admirable oimrage, car d’vn codé il eft fouflenu d’vne roche, &c de l'autre d’vn monceau de pierres ; or il eftde bois , long de cent de quatre vingts pas, accommode & lié d’vn tel artifice auec des anneaux , doux & chaifnes de fer, qu’en- core qu’il ne foie fouftenuen tout cet efpacc d’aucunes coiomnes,toutesfois ilfou- flient de fort grands fardeauxrcar lariuiere efl en cet endroit fi profonde, que les fom- miers n’y peuuent toucher le fonds : Il y a vn Efpagnol commis pour entretenir ce pont, qui a mille ducats de gages ; & toutes les marchandifes payent vn demi ducat pourcent, 10 Au defîus de ce pont, proche du liuage de cette riuiere, il y a plufieurs bourgades des Sauuages nommes Âlimarranes ou Ajmaraos \ & vers le Nord des riuages de la mefme cft fîtuee Filcabamba^ où il y a vne mine d’argent, mais qui n’eft pas beaucoup fin, de laquelle on tire tous les ans l’vn portant l’autre cinq cents lames ou barres d'argent, comme ils les nomment: Il demeure en ces quartiers peu d’Efpagnols, mais il y a beaucoup de Marchands qui y viennent auec des marchandifes, & s’en retour- nent auec grand profit. ^ Diego Fernandez, dcAuguJîm de Zarate content douze lieues àcApurima iufques à la Métropolitaine Cufco. Car ayant pafl'élepont on vaà vnehoftellerie ou Tambo : Or eft fituéauhautdes montagnes &plufieurs bourgades d’indiens. Delàon io pafi'e à Umatamboon on voit plufieurs mafures d’çdifîces Royaux, qui eft diftante de Cufce de ix lieuës,&: puis on defeend delà par les fpacieufes montagnes de Bilcaconga dans la vallee de Xaq^uixaguana ^ ( que GarcilUJJm appelle Saefahuana) enfermee entre de fort hautes montagnes en vn petit efpace. Dans icelle les Anciens Rois du Peru auoyentanciennementIeursiardins& vergers, dansicfquels ils fe retiroyentfouuent pour ferecreer J elle eft diftante de la ville de cinq lieues. L’eau d’vne petite riuiere qui lourd des montagnes voifines, y fait vn marais boüéux, qui feroit fort difficile à pafTer, fi les Rois n’y auoyent fait à trauers, auec grand labeur, vn chemin bordé d’vn cofté & d’autre dvnemuraille,& paué de cailloux, au delà duquel on monte certaines co- lines iufques à la ville. Cette vallee aux fiecles paffés eftoit fort peuplee , & les champs 5 O y eftoyent diuifés d’vne admirable façon : les Efpagnols y fement auiourd’hui pour la grande fertilité de la terre , & y nourriffent des brebis. Or auant que nous commen- cions la defeription de la ville de C/^tf,il eftneceffaireque nous difeourions vn peu des mines de Guancabelica. A VIII ou X lieues de Guamanga vers le Nord-oueft , font fituees les célébrés mines de Guancabelica:, que les Efpagnols appellent QLUiomdihm El Ajfîento de Oropefa^ défi quelles on tire vne grande quantité d’argent vif Cette forte de métal eftoit certes du tüutincognuë des naturels du Fm/,feulementils tiroyenc le minium, cixx'ihnommoy- eut duquel ils fe peignoyenr, ou s’embixauoyeiit (pour parler comme eux) le corps j comme ils s’en feruent encore auiourd'hui pour vn fingulicr ornement. A 40 cet eftedils ont miné plufieurs cauernes fquèles Efpagnols nomment Socabonesjzn dedans des montagnes par longs efpaces, qui fevoyent encore auiourd’hui, fi tortues &embroüillees, que quand quelqu’vn y entre à peine s’en peut-il retirer. Or l’argent vif qui eft contenu dans les veines de ce minium, leur eftoit paS cognu, non pas mefmes des Efpagnols, iufques à Fan clolo lxvi & lxvii, auquel temps cette chofe fut premièrement defcouuerte dans le Peru, par cette occafion , comme tefmoigne Acojîa : Henriques Garfioi Portugais , ayant reeeu d’vn certain Indien vne pierre de laquelle examinant, par la fcience qu’il auoitdes chofes metaliques, iliugea que c’eftoit vne mefme mine que celle de laquelle on tire en Efpagne & le minium (qu’on nomme d’vn mot barbare ’V ermillon) & l’argent vif rvoilapourquoi il s’en alla 50 aux mines mefmes, & ayant efrayé,iltrouua que la chofe eftoit comme il l’auoitfoup- çonnee. Les mines des F^A^^jdans le territoire de la ville de Guamanga,2iy^nttÇLLà&Ç- couuertes en cette façon, les Efpagnols y accoururent en grand nombre,pour en tirer de l'argent vif, afin de le tranfporter en \2lNouu. EJpagne, où on purge la mine d’argent auec ce métal: ce qui accreut les richeffes à plufieurs,& renditle lieu fort bien bafti & peuplé. Or entre ces mines,excellent celles qui s’appellent d’Amador Cabrera & aufii desSainéts,c’eft vn fort dur rocher, & rempli d’infinies veines d’argent vifiqui courent Aaa 5 par ^74 DESCRIPTION DÈS INDES par toute la mafie, ayant lxxx aulnes d’EfpagnedelongjXL delarge^detousco- ftéscrcufee de Lxxx coudees de profond,de forte que trois cents Mineurs y peuuené trauailleràlafois. Jmador Cabrer a obtint àxxNiccioi, èncoïzsciwQ l’Aduocat Fifcal s’yoppofaft aucunement, cette mine ici, qui auoit efté defcouuerte par fon efclaué Mamncopa, tenir & poffeder : & apres l’auoir vendue deux cents cinquante mille ducats, s’en repentant ( car ceux qui fe cognoilToyent aux mines, iugeoyent tous qu’elle valoir le double J il demanda quelle lui fuft renduë,ce qu’il obtint : Or apres le temps que D. Framifco de Toledo eftoit Viceroi au Ferti , Framifco Fernandez, de Velafco, qui auoit apprins lyfage de l’argent vif pour repurger l’argent, eut elTayé le mefme heureufement à Fotofi, on commença à mener enfin l’an c 1 ol o l x x i grande quantité 1 6 d’argent vif aux mines de Votofi-, parle moyen duquel on fond plus aifement, non feu- lement la mine qu’on tire nouuellement, mais auffi on purge les vieux excrements, f que les Efpagnols appellent Defmontes)c2iti\(cmt plus grande quantité d’argent à l’aide de ce métal, que quand on le tire à force de feu. Enfin on tire tous les ans des mi- nes de Guamauelka vn million de liures d’argent vif, qu’on mené par terre à Lima^ & puis à i^rka,èi delà. derechefàP(?/fablc) pource que la montagne eftoit dececofte fablonneufe : la féconde %McAhuânA Puncu du nom de 1 Architeéte : la troifieme Vir acocIoa P^^r/^,du nomdeleurldole ou de leur Prince: derrière chacune muraille il y auoit vn rempart de,xx v ou xxx pies efteué de terre ou de fable iufques au haut , & chacune auoit vn parapelle ou auant mur d’vne aulne de haut. Entre ces murailles il y auoit vne place, & dans icelle trois Tours ou Chafteaux, ^0 difpofes en triangle ; defquels celui du milieu qui eftoit le principal s’appclloitMoyoe MATCA'i c eft a dire, Chafteau rond de fa forme; dans lequel y auoit vne fontaine fort claire, qui y eftoit conduite de fortloin par deffous terre : en ce Chafteau eftoit le do- • miciie du Roi , & les murailles eftoyent couuertes d’or & d’argent, varices de diuerfes figures d’animaux à, la façon des tapis : la fécondé fe nommoit PaucArMarcAy&c\z troi- fieme quarres toutes deux: dans lefquellesyauoitplufieurs chambres pour les foldats de la garnifon. Or on alloitd’vn chafteau à l’autre par des cauernes fouftcrraincs. description des INDES fouftcrraihes , dafts lefquelles il y auoit diuerfes portes -& plufîeurs tours & deftoufS àla façon d’vnlabirynthe. Quoi plus ? c’eftoitvneœuure fi admirable, qu’on croiroit pluftoft qu elle auroit efté faite par des démons que par des hommes. Les Elpagnols ont grandement déformé ce merueilleux baftiment , cat ils en ont emmené plufieurs pierres dans la ville pour baftir, de Ibrte qu’il n y refte auiourd’hui (|ue les murailles qui l’enùironnoyent, les pierres defquelles font fi grofies qu’ils ne les ont peu en fa- çon quelconque remuer. Mais c’eft affés parlé infques ici des Antiquités du Peru. * Les rués de cette ville font longues, mais eftroites5& les maifons font de pierres ba- fties de viues roches fort maffifues & induftrieufement ageancecs: il y auoit beau- coup d’edifices Royaux,* & entre tous vn Temple fort fomptueux, dédié au Soleil, i o qu’ils nommoyent Curiacanche i riche en or & en argent, fur les fondements duquel eft pour le iourd hui bafti le renommé Monaftere de È. Domimqut: & on n’a trouué en toute cette partie de l’Amerique place aucune, qui euft quelque forme de ville que cettc-ci I Au refte on nefe doit point efmeruciller fi elle a efté la plus opulente de tout le Peru , veu qu’on amenoit à cette Cour Royale tout l’or & l’argent de diuerfos Pro- uincesjmefmes des plus efloignees: il s’y voit encore plufieurs caues & celliers fouftcr- rains, dans lefquels les Efpagnols ont trouué vne incroyable quantité d’or & d’argentj qui y auoit efté ferré de long temps. Il y a auiourd’hui quatre Temples dans lavillci quatre Monafteres de l’ordre des MendiaUs , &: vn College de lefuites.: Et quelques Hofpiraux , entre lefquels il y en a vn d’indiens opulent fiir tous , duquel Garcillajfm ze conte merueilles. L’aïr combien qu’il y foit vn peu froid , y eft neantmoins fort fain : & y a grande abondance de toutes chofes neceflaires à la vie de l’homme : Or les Elpa- gnois qui habitent dans cette ville y ont plus d’indiens tributaires ('qu’ils appellent Encomiendas) qu’en aucun autre lieu de tour le Peru. Le territoire de la ville & les val- lées voifines ne font feulement pas ornees dVne agréable variété d’herbes & de fleurs> mais aufli deleélables d’vne abondance d’arbres tant domeftiques qu’eftrangers. H y a fur le ruifteau qui trauerfe la ville quelques moulins baftis pour l’vfages des Bourgeois: enfin au milieu de la ville il y a vne fontaine , l’eau de laquelle fe congelle en fort bon & blanc fcl, de laquelle on pourroit faire ailleurs grand profit, mais là l’abondance la rend vile. A quatre lieues de la ville il y a des Pierrieres , defquelles les habitans tirent 5 o leur pierre pour baftir. l’ai apprins de quelqu’vn qui l’auoit veuë n’agueres, qu’il habite dans cette ville enuiron trois mille Efpagnols , & dix mille Indiens : Et qu’elle eft ‘Gouuernee par vn Corregidor, comme ils l’appellent, qui eft de grande authorité fur tous: Qudly aaulfi vnEuefque,qui eftoic anciennement beaucoup plus puiftant qu’il n’eft à prefent, mais qui du depuis que les Euefchés de Guamanga & â’ ^requifA ont efté érigés , ne poflede tous les ans de rcuenu que vingt mille ducats. Il y en a en outre dans fon Euefché huiétou dix Corregiementos-, comme ils les nomment, qui font desGoùuernements de grand lucre, de forte qu’il y en a entre iceux qui valent en trois ans cent mille ducats ; qui font tous conférés par le V iceroi. Au Refort de cette ville appartient la vallee de Toyma^ & plufieurs autres dans îef- 4® quelles on cueille vne infinie quantité de tant aimé des Indiensjon y trouué plu- fieurs indices de veines d’or, d’argent & d’argent vif: 11 y a cent mille Indiens , qui payent tribut & rendent feruice aux Efpagnols , comme Herrera eferit. La vallee de Yucay eft à quatre lieuè’s de la ville, ainfi qu’eferit GarciilaJfuSi vers le Nord-eftj qui eft comme clofe entre de fort hautes montagnes & fi bien garentie d’icelles à l'encontre toutes les iniures de l’aïr, qu elle eft à bon droit eftimee fort temperee & fort faine: & les principaux de Cujeo ont fouuent efté d’auis d y tranfpor- ter les Bourgeois : il y a dans icelle beaucoup de vergers & iardins \ les Tngas s y rcti- royent anciennement pour y prendre leur plaifir, & y auoyent plufieurs édifices ma- gnifiques fur tous , defquels les veftiges fc voyent encore pour le iourd’hui , notam- j o ment vnTamboy^ trois îieucs au deflous de cette vallee, entre deux hautes montagnes, fur les bords d'vn torrent qui defeend des montagnes. Or combien que cette vallee foit fi bien temperee, toutesfois les fommets des montagnes qui 1 enuironnent , font couuerts de neiges , prcfque tous les mois de fan. Les Tngas auoyent dans la mefms vallee vne fortereffe fi forte de nature quelle pouuoit eftrc defenduë de peu al en- contre de plufieurs : car elle eftoit baftie fur vn haut rocher , ceinte autour comme d’vn OCCIDENTALES. LIVRE X. ^77 d’vn rempart de fort dures roches, &:enuironnee du rommetiufqües au pié deplu- fîeurs femblables rochers diftinûs en couronnes par interualles , dans lefqueHes il y auoit des reliefs de lions & autres belles Sauuages taillés , qui tenoyent de leurs pattes diuerfes armes: or chacun rang de cés rochers enfermoyent des places ac- commodées pour y femer,- &L les parois du .Palais elloyent enduites d’vn codé de certain bitume , dans lequel reluilbit vnc poudre d’or. Cette vallee a du codé du Leuant de fort hautes montagnes , qu’on edime eftre vne partie ou tranche des Jndes , dcfquelles defcendenc plufieurs torrents ; vers le Couchant d’autres mon- tagnes audi fort hautes, mais qui vont doucement en penchant, au pié defquelles t O coule par vn coi canal la riuiere Tucay. Les Efpagnols ediment fort auiourd’hui cette vallee &: en cultiuent auec grande indudrie les champs , dans lefquels ils y ont planté défia force cannes de fucre: Et ceux de C»/co ediment les Bourgeois mal partagés, qui ne podedent rien dans cette vallee : Enfin ils ont coudume d’y mener leurs malades, afin d’y recouurer plus aifement & promptement leur fanté. Vers l'Oued ôc du codé de la mer du Sud cette ville a les Cumhibilcas , qui ed vnc Prouince, comme eferit Garcillajfui yàe. vingt lieues de long & de plus de dix de large : \Q,sVbinas ^ & autres peuples , quelques- vns defquels ont edé au temps padTé grands guerriers , & riches en troupeaux , qui y profitoyent fort pour la bonté des padurages : dans les riuieres mefmes qui coupent la Prouince ao des Aymertes ^ on y a trouué autresfois force fable d’or. Or dans Pomatambo & és bourgades voifines, on y tid de fort belles tapifferies, pource que la laine y ed fort fine & qu’il s’y trpuue vne grande diuerfité de fort bonnes teintures. Vers le Leuant & du codé des Andes ydlQ a la Vallee de Vilcàhambâs où les Efpa- gnols ont badi la ville de S. Prançois deda Vittûrid,dzns vne contrée montueufe 6s rude, entre les Andes mefmes , à prefque vingt lieues de la ville de Cufco ,• le Gouuer- neur de laquelle ed edabli par le Viceroi du Peru^ mais ellerecognoid l’Euefque de Cufco. Or à treize lieuë’s de la ville droit vers l’Orient pafTe la riuiere de Paucar tam^ comme la nomme Garcillajpts. |o Vers le Sud-ed de la ville de Cufco à quarante lieues d’icelIe, ed CamudyA , ou félon Garcillajfus , CalUuaya , vallee fituee entre de fort rudes montagnes , dans la- quelle fe trouuent de renommées mines d’or fort fin (de vingt quatre ou vingt trois quarats & demi , comme parlent ceux qui font experts aux métaux ) qui fè tire par fois par gros fragments : Garcillajfus raconte que l’an cIoIoLvionen tira vne pierre, de mefme forte que celles qui fe trouuent attachées aux mines de mé- taux , de la groflfeur de la tede d’vn homme, de la couleur des poulmons , & qui ne leur reflembloit pas mal en forme , trauerfec de plufieurs trous. & porcs , dans lefquels il y auoit des grains d’or aigus , quelqucs-vns defquels fbrtoyent dehors, & les autres edoyent enfermés dedans : ceux qui cognoifTent les métaux iugeoyent que toute la pierre eud edé conuertie en or , fi on ne l’eud auant le temps tirée des veines de la terre. Les Efpagnols ont badi auprès de ces mines la villette ou bourgade de S. luan del OrO , que Herrera eferit edre à quatre vingts lieues de la ville de Cufco , ce qui ed fans doute faux , car GarcilUjfm & ceux qui font veuc' depuis peu,mettcnt tout d’vn accord cette vallee de à quarante lieues feule- ment de la ville de Cufco. C H A P. XXXII. Chemins qm y ont au delà des Andes, yers dmerjês Prouinces qui ne font pat encor es bien cognues ^ les expéditions de quelques Edpagnols. PO V R c E qu'vn certain bruit couroit, qu’il y auoit au delà des fpacieufes mon- tagnes des plufieurs Prouinces ( quelques- vneis defquelles font mainte- nant habitées des Efpagnols ) riches en argent & grandement belles 5 les Efpa- gnols ont cherché & ouuert diuers chemins pour y paffer : Or Herrera en conte qua- tre,qui font tous comprins entre Opotari & Cochabamba , en l’efpace de feptante lieues, entre le Nord & le Sud. Le preinier d’iceux s appelle Opotari, furies treize degrés de Bbb ‘ la 578 DES CRI PT ION DE S INDES la liçne vers le Sud, par les montagnes des Andes, appellees d’vn nom particulier Tonot à trente lieues, ou comme dit Garctllajfm^yïugi fix de la ville de Cufco : Or on conte ce chemin en cette maniéré: de la ville de C^i>iulques à favallee de il y adix lieues :àQPaqual2iU pié des tendes , cinq;& delà iufques au haut du Ibmmet deTom & delà iufques à la riuiere/o^iy>4'r/,trois,. auquel lieu il y a eu autresfois vne bourgade d’indiens fort peuplee : par apres on va à trauers des forefts fort efpaiifes , des monta- gnes grandement hautes & des rochers fort droits, par vn chemin fort difficile & em- ■ pefché dans la Prouince/v4%/?^,en laquelle il y a plufîeurs chaudes vallees & abon- dantes en viures,qui font prefque clofes d’vn defert impénétrable. GarcilUffus efcrit, que l'Tnca lufanqui effaya le premier à trauerfer par les fondes dans les Prouinces i qui eftoyent àu delà des monts, delà richeffe defquelles ilauoit ouy beaucoup de re- nom ; principalement d’vne que les Sauuages appelioyent Mufk , & les Efpagnols au- iourd’hui Moxos ; & qu’il s eftoit perfuadé qu’on pouuoit aifement y paruenir le long de \2.n\iiete d* Amaruma.yw , qui feramaffie de pluheurs fleuues en vn , vers le Leuant de Cufco,bc qu’on eftime fortir dans la mer du Nord ; cette riuiere a prins fon nom du mot deferpent, qu’ils nomment car Mayu lignifie en leur langue riuiere. Que pour cet effed il auoit fait faire piufieurs radeaux du b^sisde cet arbre, que les Efpa- gnols nomment Higuera{ non quecefoit vn figuyerjmais pource que fon bois eft fort loger j fur lefquels il enuoya le long de la riuiere Amarumayu pluûeûrs Capitaines delà lignee Royale ; qui arriuerent, apres piufieurs combats & apres auoir fubiugués les na- Z( turels du païs,nommés Chunchu ( du nom defquels s’appelle fouuentla riuiere ) dans la Prouincedec^/^,à deux cents lieues, comme ilseftiment,de Cufco, ou. ils s’arrefte- rent,&y habitent encore auiourd’hui méfiés auecles naturels. Le fécond chemin pafiTe par la contrée de Caramya , le long de Sandia & de la ville de S. tuandel OrOyi trente lieues ou enuirond.u premiervers le Sudrpar lequel les Espa- gnols dés l’an cId Id xxxviiiont fouuentefiTayé depafifervers ces riches Prouinces, dont ils auoyent ouy quelque bruit obfcur. Car cemefmean, Pedro Anzurez. ayant pafleauec beaucoup de peine parla Prouince de Carauayad2.ns celle de il ren- contra de rudes montagnes , des bocages pleins de neiges & de purs deferts î ce qu’ayant toutesfoisTurmonté , il entra dans la Prouince de T acana , &paruint auec3 ' grand labeur & danger àla riuiere des Ow(7^4/f/^,laquelle on croit fourdre dans la Pro- uince de Moxos , au piê des jAndes , du cofté qu’elles regardent l’Orient ; & defcéndre dans la mer du Nord. Delà ayant marché par la contrée des cheriobonas,ï\tmuet{k de l’autre cofté de la riuiere fur des radeaux , combien que les habitans d’icelle s’y oppo- falFent de tout leur pouuoir en vain : mais comme il n’y trouuoit rien que des folitudes & des lieux affreux de forefts impénétrables, il trouua bon de marcher à mont de la ri- ‘ uiere,afin qu’il peuft par les Prouinces de & de Cochabamba p2L&t dans celle de Chuquïabox mais apres auoir long temps tracafle ci & là, piufieurs dentr’eux eftans morts, partie de maladies & partie de difette, ils arriuerent dans la Prouince de Taca^ may&L enfin au village d’ Ayamre,qm eft de la Prouince de Collao. 4( Le troifieme chemin paffe par Camata,â dix huidou vingt lieues de Sandia plus vers le.Sud. Le quatrième paffe par Cochabamba (de laquelle nous parlerons ci-apres ) à dix ffipt degrés de la ligne vers le Sud, & à vingt & trois lieues de Camata. Les E:^a- gnols le nomment ordinairement laEntrada de los Moxos, pource que le pafiàge vers ces nations fut premièrement ouuert par ce chemin. Garcillajfm raconte que l’an cId Id lxiv Diego Aleman , Citoyen de la ville de las PaT^^uoit entreprins auec vn certain & douze Efpagnols depafifervers les Moxos , pource que ce Curaca lui auoit perfuadé qu’ils auoyent abondance d’or: & qu’ayant paffé par la Prouince de Cochabamba , & apres qu’il fe fut efforcé auecJQ grande difficulté vingt &huid: iours par des montagnes & bocagcs,il parumt à fa veuë du premier village de la Prouince qu’il cherchoit 5 & qu’ayant follement aftàiHi de nuid les Sauuages auec fî peu de gens, il fut prins par eux, & prefque tous fes gcH^s tuésjde forte qu’il n’en retourna au logis rien qu’vn meftis, nommé Francifc& Morem. Par ceftui-ci piufieurs furent jpfmeus d’entreprendre le mefme voyage , & eîïtEe les premiers Gomefo déTordoya,cpinmpett^ptcmietementpetmiidiionduNicetoi\eQonte de I OCCIDENTALES. LIVRE X. 57^ dei\^/«rf,qui lui fut par apres fufpenduè^pource qu’il craignoic Ynefedition de fol- dats,quiseftoyentioinâ:sauccluiengrandiiombre. Enfin l’an cIdIdlxvi le mef- mc congé fut aulficoncedéparle Viceroi,leLicentiédeC^7?^(7,à • qui aflenibla plufieurs ioldats d elite > & fit alïociation ^^ccIncATupAc httiatu-) quis’efloit retiré dans Vilcabamba : leur deffein eftoit de defcendre la riuiere de Filcabamba auec des radeaux ; mais ce congé fut abrogé, & derechef concédé à luan Aluarez Maldonato. Lequel ayant alïemble deux cents cinquante hommes de pie,& plus de cent chenaux* & les ayant mis fur de grands radeaux, les mena a va! delà riuiere d’ AmATHmAyo-ToYdoj a qui s’eftoitgrandementincommodé pour faire fon appareil, s’eftant plaint de l’iniure I O qu on lui auoit faite, entreprint le voyage maigre le V icîeroi , auec foixante autres qu’il auoit a grand peine afïembles,& ayant marche par CAmâtâ^ ôc trauerfé auec beaucoup de peine de rudes montagnes & des marais, il arriua furies bords d' Amaïumayo ayant cognu que fon compétiteur n’eftoit pas encore venu iufques là, il fe refolutde 1 attendre. ^JAîAldonAto défoendant cependant le long de la riuiere, arriua où eftoic rordoyA-.^Çzxis. aucun retardement il y eut vn rude combat entr eux; où il fut com- batu vaillamment des deux coftés trois iours de long ; de forte que la plus grande par- tie de l'vn & de l’autre parti y fut tuee,& le refte demeura inutile au combat. Les Chuncos dans la Prouincc defquels arriuerênt ces chofes, refolus de fe feruir de cette occafion , fe ruent fur ceux qui eftoyentde refte, & les tuerent tous, entre autres Tor- }.o doyA: exceptés trois qu’ils prindrent prifonniers, fçauoir MAldonAto, Frere Diego May- tin, VoTm^a.is&cSimonLopez, d’vne fîngufiere induftrie pour dreffer les canons : qui toutesfois retournèrent deux ans apres dans CaYAUAyA. C H A P. XXXIÎL Qt^s , Bayes y Ports , Rtmeres y toute la Cofte marine dis Parlement de Lima. La Cofte marine de ce Parlement, prend fon commencement de la pointe ou. Cap delAguiAyOxt celle de ^/>^;finift : Et là premièrement fe prefentent au de- , ■' uantde la Continente les Ifîes de loups marins, vulgairement dite de Lohos iJ/4r/»^,afept degrés delà ligne vers le Sudj l’vne defquelles eft à quatre lieues de la terre ferme,& l’autre à vn peu dauantage les Anglois mettent l’vne & l’autre fur la hauteur de fix degrés vers le Sud. ; Vers le Sud-eft d’icelles eft l’Ifte de Roch , vis à VIS de la riuiere de PAfcAmAyo. Nos Hollandois qui l’an cId Id xcix ont couru cette cofte,ont remarqué que cette Ifle eft fur la hauteur de fix degrés U trente fcrupules • ils trouuerent dans icelle vne infinie quantité d’oifeaux, qu’on nomme vulgairement deveaux marins ,-neproduifantaurefteniarbmsniherbesquifoit,aude- hors elle eft enuironnee de durs rochers, au dedans elle eft pleine de fable j au deuant du Cap qui regarde le Sud-eft,il y a deux Mes ou pluftoft rochers, & autant au deuant }.o la pointe qui eft vers le Nord-oueft. A la Continente fe rencontre premièrement le port MAUhrigo, mal garenti contre incertitude des vents,ce que fon nom décidé: Richard HAwkin a remarqué, qu’il eft afept degrés au Sud de la ligne. ^ Adix lieues de Mdahngo,i\ yavnautre haure.qu’ils nomment dArrAe de Trmil- tort mal couucrt contre les tempeftes , il eft diftant de la ville de TmxiUo, qui eft au dedans oe la Continente de deux lieues ; que nous auons dit ci-delTus auoit vn autre port,nomme GuancAcho. Enfin eftant auances fept lieues plus outre le long de la cofte, on rencontre le port de diftant delà ligne vers le Sud de huid degrés & vingt fcrupules, comme ^o?edYodeCteçAtevci2.tQyxe-. en quoi il fe trompe vn peu, ou il faut que la diftance foit plus grande, ^ Delà courant vers le Sud, on trouue le port de Santa , fur la hauteur de neuf degrés vers le Sad , auprès duquel fort en mer vne riuiere j la cofte eft baffe, fans montagnes, lablonneufe,&: n’a ni rochers ni bancs. ^ De Santa à Rerrol il y a cinq lieues , c’eft vn port commode & affeuré , mais il n’eft pas propre pour y prendre de l’eau ni du bois. Bbb Z Delà \ 380 description des INDES / Delà iufqiies au port de Câz,mA on conte fix lieuës j auprès de ceftui-ci fort vne ri- uiere, de laquelle on peut prendre de l’eau fort claire , & on y peut couper du bois en . quantité , ce qui eft vne grande commodité pour les mariniers, deçà, le met fur la hau- teur de dix degrés. Depuis ici la cofte court vers le Sud- fud-eft, comme ie trouue que; les plus curieux ont remarqué. De Cazma, iufques à Guarmey on conte huid lieuës, il y auffi vne riuiere qui fort en mer, au rcfte le lieu eft peu remarqué, & feulernent cognu par l’abondance de char- bon qui y eft , comme il a efté obferué par Olyuier de noftre nation , lors qu’ils cburoit. îamerduSud. De Guarmey iufques à la il y a xx lieuës, que O/y/ÿ/Vr a recognu eftre fur 10 la hauteur de xi degrés, &: eftre abondante en froment. Augupn de J^arate qu’el- le eft à xxiv lieuës de De la Barranca iufques au port de Guara il y a fix lieué's , auprès duquel il y a des Sa- lines, que le mefme olyuier met à deux lieues du port & à x vii ï de Ltma : Or il eferit félon le rapport des Efpagnols , qu’il s’y trouue du fel dans vne certaine vallee , où les flots de la mer ne pénétrent iamais, en grofles pierres fort dures,amoncelees enfemble. De Gaura ils content quatre lieuës iufques aux T ar alloues i ces rochers bordent la terre ferme par vne longue fuite : carie dernier eft efloigné de huid lieuës vers le Sud- , oueft du premier. Suit apres le port de Callao, duquel nous auons parlé ci- deuant ; or en l’efpace d’en- 10 tre deux , plus proche toutesfois de Câllao^ eft fitué Salmerinadoznc qui mouline fort, à IX ou X lieuës de la Continente du Féru. . De l’Ifle de Callao iufques au Cap de Guarco ils mettent xx lieuës, au deuant duquel il y a auffi vne petite Me es loups marins : Or de ce Cap iufques au port de Sangalla il va XV lieuës. Ce port eft fort affeuré & grandement commode, diftant delà ligne vers le Suddexiv degrés ou enifiron: il y a auprès vne moyenne Me dite de Lobas, ôc fept ou huid autres plus petites , partie baffes , partie hautes , mais toutes deffournies d’Lu douce , & n’ont ni arbres ni herbes , ce n’eft feulement qu’vne retraite de loups marins & vn repaire d’oifeaux de mer. On trouue par apres vne moyenne Me, qui porte le nom auffi de loups marins-, à j 0 XIV degrés & xx fcrupules de la ligne : de laquelle iufques au Cap de la Najeafà xiv det^rés &XLvfcrupulesde l’Eqüateur; on conte xii lieuës:,llyalà vnbonanchrage pour les nauires, mais on y peut difficilement aborder le riuage, pource que la. mer roule contre la terre de fort grandes ondes , qui renuerfent parfois les chaloupes.. Suit apres le Cap de S. Nicolas , à. xy degrés & xx fcrupules de la ligne vers le Sudj duquel iufques au port d’Hacari, on conte xii lieuës, à xvi degrés de la ligne. Ceux qui nauigent cette mer ont couftume d’y aborder, pour y prendre des viâuailles, qu’vne proche vallee fournit libéralement. Eftant forti delà on rencontre la riuiere d'Ocon-na & à vn petit efpace d’icelle celle ^ de C^mana, & enfin ^ilca -, félon que Pedro de deçà deferit cette cofte. Mais olyuier 4® de Non, Belge , adioint à Nafca le port fort affeuré de S. Ngcolas, où on charge fur les nauires le plus excellent vin de tout le Peru. Or la vallee de ^ilca auanceenmerleCapde.S. X4/ÿr^;?xderrierelequelily a vne riuiere, d’vne emboucheure eftroite & comme enfermee entre de hautes montagnes, qui fait le port d’Arequifa (duquel nous parlerons bien toft; à xvii degrés de la ligne, vers le Sud. De ,§mlca iufques à TMe de cW, diuifee de la Continente d’vn petit deftroit, mais , affés p^ond , on conte xii lieuës; & d’icellc iufques à la riuiere de eft aujourd’hui appeilec des Efpagnols Nombre de Bios) il y ena deux: Là finit la cofte du Parlement de celle de celui de commence. yo Il a efté remarqué quelquesfois , tant par les Anglois que ceux de noftre nation, que cette cofte du depuis le xin degré & demi de la ligne vers ie Sud , iufques au xviir, fe tourne infenfiblement vers le Sud-eft, combien que deçà & autres Elpa- gnols l’ay ent mife tout autrement, ce qui a iufques ici caufé de grandes fautes dans les Chartes marines. DESCRIPTION r DESCRIPTION DES INDES OCCIDENTALES, LIVRE ONZIEME. DV PERV ou CHARCAS. C H A P. ï. Limites du Parlement de los Charcas, qualités de fin aïr O^defi terre, E troifieme Parlement du Royaume du Teru , eft vulgairement dit de los Charcas ^ comme auffi de là Plat a-) du nom de la principale ville de ces Prouinces; or il eft feparé de celui de Lima , le long de la mer du Sud, par la riuiere de Tambofalla, (de laquelle nous auons parlé ci-delTus) & au dedans du païs par les dernieres fins & plus feptentrionnaux limites de la Prouince de Collao, Il a de long depuis lefdites bornes iufques àla vallee de Cofiafo-, pùle Royaume de chik commence , (à xx degrés de la ligne) en droite ligne trois cents lieues ,• (car fi on luiuoit le cours de la cofte ou les deftours des chemins, on en trouueroit plus de quatre cents) & de large entre l’Eft & l’Oueft , depuis la mer du Sud, iufques aux Pro^ uincesde Rio de la rlataiily indéfini. Car ce Parlement embraf- feplufieurs grandes Prouinces qui font hors du proprement dit, comme S. Cruz de U Sierras , T ucuman , & les peuples nommés lurias & Liagutas , defquelles nous par^ lerons peu ici, & ailleurs plus amplenent : Ôr la Prouince de los Charcas-, de laquelle noftre deffein eft de traiter en ce lieu , eft contenue en des limites beaucoup plus eftroits, & n’a pas plus de cent cinquante lieues delong, fçauoir depuis les derniers 2,0 confins du Parlement de Limay iufques aux limites Meridionnaux des mines d’argent de Votofi. Or la plus grande partie des Prouinces de ce Parlement font plus froides que chaudes: & les faifons de l’efté & del’hiuery fontprefque du tout differentes de celles de l’Europe. La terre y eft pour la plus grande partie peu fertile, & qui ne porte pas bien le fro- ment & autres grains ; mais elle eft belle de pafturages , principalement dans les am- ples Prouinces de ColUoy & aux bords du lac de Titicacay qui occupe vne grande partie de Collao : & fur tout borine pour les brebis , qui y font en fort grand nombre &: y por- tent de la laine fort fine. Or combien que le pars y foit pour la plufpart froid j toutes- fois il y a des vallees qui y font chaudes &: fertiIes,enuironnees de hajjtes montagnes : f O la plus grande partie de ce Parlement eft remplie comme par miracle de mines d’ar- gent & d’autres métaux, comme nous dirons plus à propos traitant de chacune Prouince. Il fe trouue dans ces Prouinces prefque partout vne forte de petites abeilles, qui font leur miel dans les trous de la terre, le miel defquelles eft aigret & brun de cou- leur, comme aulîi les rayons (que les Sauuages nomment en leur langue Leciguanas) lefquels font fi fecs qu’ils reffemblent pluftoft à du chaume qu’aux rayons de l’Europe. Bbb 3 De 3^2. DESCRIPTION DES INDES De Chana^fdit Monard) on apporte des racines, fort femblables à celles de l'irisy mais elles font plus petites & Tentent comme les fueilles de figuyer. Les Efpagnols qui habitent aux Indes, les nomment Contrayerun , comme qui diroit contre-venin , pour- ce que la poudre d icelles beuë auec du vin blanc, eft vn prefent remede cqntre tout venin, de quelque forte qu’il puiffe eftre f excepté le Sublimé qui eftextinôt auec la feule potion de laid) le faifant ietter par vomiffcments, ou levuidantpar Tueurs. Il chaffe aulTi les vers du ventre. Ces-Prouinces font fuiettes au Viceroi du Peruy comme les autres : il y a toutesfois dans icelles deux Gouucrnements qui font tenus par des Lieutenants, fçauoir celui de .los Charcas ^Tmumân:Y.t dç.\xyiY.nç£i^ks. Au refte dans le Gouuernement de los C^^re^proprcment dit, (car nous parlerons de celui de Tucuman ailleurs; il y a ces villes habitées des Efpagnolsjla Métropolitaine de U P lata ; Nuejlra Sennora de La Paz. j Oropefa & Potofi: &r quelques bourgades à fça- uoir Chacpui, Porco, Arica^ Arequipay LMifque, Tarifa, Tûmma.Lagumlia.Skafua, &c. Or afin que nous en traitions plus commodément, nous reprendrons le chemin Royal , lequel nous fuiurons comme il eft monftré par Cieça, & parlerons de chacune Prouince &: ville en Ton lieu, comme nous auons fait ci-deuant. C H A P . 1 1. Chemin Rayai qui va de U Fille de Cufco iufques à celle de la Paz : T^romnees adiacenîes ç/ notamment de Collao. 2,0 De la Métropolitaine Cufco iufques à la ville de la Paz,on conte vn peu plus ou moins de l xx x lieues: & le chemin conduit de l’vne à l’autre en cette maniéré. De Cufco le chemin Royal fqui eft nommé des Indiens CoUafuyo) vncnc pre- ^ mierement aux deft toits de Mohinay laiflantle Palais Royal de ^ijpichance à la main gauche. Ce chemin eft paué de fort groftes pierres , à trauers des Ipacieux marais de CMohina & mefme muré des deux coftés : à CUohina il y a eu au temps pafte de ma- gnifiques baftiments, defqucls on ne voit auiourd’hui que les mafuresi d’où Pizarre enleua grande quantité d’or &: d’argent, lors qu’il fubiuguoit ces Pf ouinces. G^m/- , ^ laffm l’appelle Muynay & fait mention de quelques Salines qui font auparauant, vne lieue de la ville, remarquées par le combat qui y a efté donné entre Almagro de Pizarre. A fix lieues de Cuf o on rencontre Freosy village ancien &: autresfois annobli d vn Palais Royal, qui eftoit bafti fur le fommet d’vne montagne. De Freos iufques à ^iquixana (ou comme Gareillajfm le nomme .^equefana) il y a trois lieues de chemin afpre & montueux : la riuierc de Tucay fur lequel il y a vn pont qui coupe prefque le milieu de cet efpace,- elleeftdiftantedeC/^<3i de ix lieues, com- me ils difent. Les peuples nommés Cauina habitent cette région , ce font des monta- gnards qui baftiftent leurs maifons de pierre. Apres les Cauinas fuiuent les Canches-, nation induftrieufe, d’vn doux naturel & nul- lement trompeur, fupportant le trauail, qu’elle a fupporté anciennement à miner les métaux j riche au refte en brebis du Pêru. Leur terroir eft fertile en froment & en Mayt, abondant en perdrix & autres oifeaux : & leurs riuieres font poiflbnneufes outre mefure. Les CanM fuiuent les Canchesy autre iiatiob de differente de la première, les bourga- des defquels font Hatuncana,chiquana , Horuro y Cacha de plufieurs autres; Or dans Cacha les Rois y ont eu vn magnifique Palais. Dans l’vne de l’autre Prouince tant des Canches que des Canasy il y fait vn peu froid , combien qu’elles abondent en toutes for- tes de grains de en hcchis.Hatuncana eft, félon Herrera,\n peu à cofté du chemin Royal, y© & eft ef]oigné/>4fy4«/>^de feulement dedeux lieues. De Chiqtiana iufques ^Ay autre il y a x vlieué's de chemin au trauers de plufieurs bour- gades des Canas. La bourgade d'Ayauire eftoit ornee anciennement, comme elle eft encore pour le iourd’hui,de plufîeursmagnifiquesbaftiments,notamment detom- beaux, qui furpaffentde beaucoup en nombre les autres édifices: mais les naturels habitans d’icelle, ont efté prefque tous deftruits, par les guerres ciuilcs des Efpagnols: ilya OCCIDENTALES. LIVRE XL ,8^ il y a vne riuiere qui pafTc le long de la bourgade , de laquelle on ne dit point le nom. le croique c’eft le mcdne lieu que mon Âutheur qui a trauerjfe toutes ces contrées és années precedenteSjditeftre nomme des las Sepulturits on voit lesplus antiques monuments de tout XtPerii,^ des pierres fort grolTeSjfi bien polies , que c’eft ync choie comme monftrueule que des Sauunges les ontpeuainfî polir (ans inïtru- ments de fer ou d acier , ce qu’ils ont fait cn-les frotant l’vne à l’autre , comme il ap- pert afl'és. ^ - Yi^^K^yauire commencent les Collas , qui poffedent la plus grandes mieux peu- plée contrée de tout le Peruy depuis ce lieu iuiques à Caracallao :û.s ont pour limites I 0 vers le Leuant les (pacieufes montagnes des Andes , & vers le Couchant les monts de neiges: lefquelles deux fuites de montagnes fe feparerit l’vne de l’autre de la ville de laiflent entre-deux vne large plaine, qu’on nomme vulgairement En outre entre & la mer Pacifique ou la plaine du il y a vngrandde- rcrt,qn’on appelle occupant trente deux lieues depaïSjCommeditPT^/r^- ra : Garcillajftts eCetit Coel/a ûgniâc en Peruuiain, mer, marais ou lac, &que Por/~ huanA (ont ces oifeaux que les Efpaghols nomment Flamencos : & que les Indiens auoyènt donné ce nom à vne grande Prouince fertile, agréable & riche en or: d’autres au contraire efcriuent,que c’eft vne région froide, parfemee de montagnes de neio-e, & ou on ne peut prefquepafler pour les valleés, marais &bouè's ennuyeufes : parla- 40 quelle toutesfois, comme auffi par la contrée des Lucanes on a ouucrt vn chemin iuf- ques à la vallee de Nafia & à la mer Auftrale. Des derniers confins de cette Prouince iufques aux mines de Gîtallaripa.on comme Garctllajfmlés appelle HuallaripaSS. y a feize lieues : de Guallaripaixxdoyics à Chucj^uinga , quatre : or Chuc^uinga eft vn lieu fort de na- ture & prefque inaccefîible , pource qu’on n y peut aller que par vn chemin fort eftfoit^où vn feul homme peut marcher à lafois, l’cfpace de trois lieues; fermé d’vu cofté'defort hautes montagnes, dé l’autre par la riuiere iAhancay,\t% fiuages de la- quelle font fl droits que ce font des précipices. GarcilUjJks deferiuant l’expedition de l'rnca Mayta Capacy^om fubiuguer les Prouinces de Contefuyo , raconte qu’eftant parti de chumpiuilca , comme il 1 appelle, il rencôiitta premietertient vn marais plein de 50 boue,autrauers duquel il fut contraint d’y paUer vn chemin de pierres r qui dure en- core pour le iourd hui, & eft en grande vénération entre les Indiens, pource que le bruit eft que / Tnca meftne y a tràuaille ) & qu il eut pat ée moyen entree dans la Pro- uince par des deftroits grandement difficiles ;& delà dans les autres Prouinces Taunfma.Cotahuacin.Pumatampu & Parihuna cocha : de laquelle il alla au rrauers du de- fert de CoropunaA^ns la Prouince d'Arunij&L plus outre à Collahud) qui iôind fes limi- tes âUec la Areq^uipa. Le mefmé deferiuant vne autre expédition vérs les mef- mes quartiers ; conte opp AuquiFifu auoit pâffé auec vne drmèc ftir le pont de Huaca chacdiSz delà da ns les Prouinces de Cotàpampà.Cotanera & Hudmanpalfa ,• les deux pre- mières defquelles font habitées des ^^uechuis. Que delà il âuoit trauerfé larriuiere 40 d' Abancdy,ô\x comme il l’appelle Amncay ( vn bras de laquelle defeend auprès de Chu- 3'«/>»c4,remarquépardeux combats d’Efpagnols) & eftant entré dans les defértsde Huallaylpa,qmcà vne miheà:ov(ott renommeeaupafré,& apres auôir marché trente cinq heüës,il auok paffé dans la vallee d^Haéari. Ceci foit dit par digrèffion, ( car ces Prouinces appartienrïént aii Parlement de Lima ) retournons maintenant au chemin Royal que nous nous fonames propofé de fuiure. C H A P. III Defeription farticuliere de U Vrouince de Collao. fo h ■ O v i* Ë la contrée de Collao eft plate y entrecoupée de plufîeurs riuieres, ^ri- ^ ches fur toutes en pafturages , qui fait qu’il y a plus de brebis, que dans les au- très Prouinces du Périt ,• l’efté l’herbe y feiche comme en Efpagne. Leurh'iuer dure depuis Octobre iufques en Auril; & il y fait plus froid qu’en aucune région du Pe- ruy fi on en excepte les montagnes de neige.Ils s’imaginent quela caufe de cela eft, que cette plaine eft auffihaute que les montagnes ; quand le vent eft vn peu grand, il fait ortfafeheux d y voyager, mais quand le Ciel y eft clair & ferain, c’eft vnplaifir, pour la -• «ss; ; 384 \ DESCRIPTION DES INDES ladeleélabîe face des champs. Or le froid edcaufe que la terre n’eft pas fort fer- ' tile en Mays ni en autres grains, ni mefme en arbres. Leur principal prouiiion eft des racines de Papas gardent dans leurs greniers apres les auoir feichees au Soleil, &: les nomment chunm. Les Efpagnols font vn grand profit par le trafic de ces racines , car ils en mènent vne grande quantité aux mines de Votofi: ils en ont vne autre qui fuccede à celles-ci, qu’ils nomment Ocai & n’ont pas diferte àe^ui- nua^Ae laquelle nous parlerons ailleurs. Or ils fe feruent du froment & du Mays j apportés d’ailleurs 1 combien qu’il y en a qui affeurent que Tvn & l’autre y n’aift I en plufîeurs endroits. Dans cette mefme contrée fe trouuent certains animaux, i qu’ils nomment Bifcachos ildidno-k defquels eft femblable à celle des connils de nos 10 pais ; ils ont la queue longue comme les efeurieux. Ils ont auffi certains oifeaux, de la grofleur des eftourneaux,qui ont les plumes comme les ailoüettes, màis qui font verdes fous le ventre, le bec & la queue longue, ils les nomment cet oi- feau a couftume de cauer les rochers auec fon bec pour nicher dedans : Il y en a I qui content que par vne induftrie naturelle ils fe feruent pour cet effed d’vne cer- taine herbe , que pour cette caufe les Efpagnols nomment lerua àel Pito ; à laquelle ils attribuent de merueilleufes vertus pour percer le fer & toutes autres chofes" fort dures. - . Les CôÜM ( c’eft le nom de la nation de ces Saunages ) font d’vn naturel afles prompt & de moyenne induftrie : car auant la venue des Efpagnols, iis fçauoyent 2,0 diftinguer le cours du Soleil & de la Lune , & tenir conte du nombre des ans &: des mois-. ilsÿL^^eWo'^entÏQLn Mari, \eio\xtAuroA2.k\xneAleJj>aquexe. On conte de Ay autre fuiuant le chemin Royal iufques à quatre lieues, Vuea- r^jcomme nous auons défia remarqué ailleursjfignifie vne place forte; auiourd’hui il n’y afeulemcnt que les ruines de grands baftiments,& on y voit des images d’hommes taillées de pierre : il y a peu d’habitans aux prix du paffé qu’il a efté fort peuplé. En ce lieu fut vaincu en vne mémorable bataille Franctjco Hernandez, de Giron , duquel il eft parlé dans les Hiftoires des Efpagnols. - , De Pucara iufques à HatuncoUa on conte quinze lieues . Il y a entre deux quel- ques petits villages , comme Nicajto , Sullaca & autres : HatuncoUa eft la principale pla- j © ce de la nation , car Hatun fignifie en Peruuiain Grand ; maintenant ce n’eft plus que l’ombre de ce qu’elle a efté autresfois. Or il faut noter que des ou des / caraiQOTnmeelcxSx. Garcillajfm i\e chemin Royal CoUaJuyo fe diuife en deux fentiers» fçâuoir Ftn^yoô^ Orco/uyo, qui enferment entre deux le lac de T/V/Væ; le premier def- quels pafte à l’Orient d'icelui , & l’autre à l’Occident. Ceftui-là tire vers les bourga- des Horuro , AjftUo , Ajfangaro & plufieurs autres riches en brebis & abondants en } viures. Proche d’iceux fourd des montagnes du pais la riuiere de Carauaya^ de la- ; quelle on dit qu’on a tiré anciennement grande quantité d’or fort fin, & s’en tire encore tous les ioursjniais la Prouince eft eftimee mal faine. Ceux qui viennent de Potofi , apres qu’ils ont attaind Ayauire , tourne à la main droite pour gaigner 40 j Carauaya. |! „ Au refte dans la Prouince de CoUao^(Aiz Monard) il y a vn lieu du tout nud , au- ;! quel il n’y croift ni arbre ni aucune plante, pourcc que la terre eft bitumineufè , de ’’ laquelle les Indiens tirent vne liqueur, propre à guérir plufieurs maladies, en cette ! ' „ maniéré : ils coupent la terre pargafons , qu'ils mettent en vn lieu expofé au Soleil, fur des perches ou grofles cannes, & au deffous des vaififeaux propres à receuoirla ” liqueur: car le bitume ou fuc enfermé dans cette terre , fê fond par l’ardeur du Soleil, „ de forte que les gafons demeurent fccs fans aucune humeur , & fort propres pour en faire du feu,pource qu’en ce lieu il n’y a point de bois ni d’autre chofe commode pour cela,- ce feu eft toutesfo4 nuifible, pour fon efpaiffe & noire fumee ,& puante odeur y© I „ qu’il rend : neantmoins à deffaut d’autre matière , ils fe feruent de ces mott^. - Chaf. io OCCIDENTALES. LIVRE XL C H A P. IV. Defcriptioîi du grmd Lac de Ticicaca, AV milieu de ColUo eft fitiié vn Lac, leplusgrand.&le plus large de tous ceuîc de rAmerique,au moins de ceux defquelsvne certain ecognoiffan ce eft venue iufquesa nous, furies riuages duquel plufieurs bourgades de cette Prouincc font fituees ; & dans les plus grandes Ifles , qui y font parfemees en grand nombre, les Indiens cnfemenccnt leurs grains, &y cachent ce qu’ils ont de plus precieux.Dans les O ioncs & roleaux nichent plulieurs oiieaux de toutes fortes , principalement de riuiere, entre lefquels il y a de fort grofîes oyes. Il a de tour quatre vingts lieues ou plus, fi pro- fond en quelques endroits qu’il a feptante ou quatre vingts brades ; & eftant agité , il efleue de grofîes ondes pareilles a celles de la mer ,-de forte qu’on diroitquec’eft vn golfe, combien qu il foit a enuiron lx lieues delajmer du Sudjil y defeend des montât gnes, qui font d \n cofte & d autre,plufîeurs riuieres & vn nombre infini de ruiffeaux.Il fe nomme vulgairement Titicucn , mais l’appelle 'Ticj^utcaca , lequel fignifie Ifle de plomb, comme Tiqui, plomb, qui fe trouue , comme ils veulent dans les Ifles de ce Lac. Le commencement diceluiefî; a quarante lieues de la Métropolitaine Cufco, Acofla en tait vne diligente defeription, lequel il fera fort à propos d’ouïr la deffus. . En ce Lac r dit-il; defeend plus de dix riuieres de iuffe grandeur, & n’a quVn emif- faire,qui n’eff pasforclarge,maisfortprofond,parlequell’eau court d’vne telle Viteffe, qu il efl: du tout impoflible d y baftir aucun pont , foit de pierre ou de bois, non pas nik-lme de le pafîer auec des radeaux ou canoas, comme ils afîirment c toutesfois les In- diens ont drefîe à trauers auec vne grande induftrieyn pont de çhaiim.e, lié fermement aux deux riuages auec des cordes, lequel eft aifement fouftenu par fa legereté & par la fermete defès liens, de forte que les hommes & les belles de charge y paffent fans dan- ger. Ce Lac a de long trente cinq lieuès,& de large ou il efl le plus fpacieux, quinze j on voit dans icelui plufieurs Ifîes,anciennementcultiuecs & habitees,maintcnant vüi- dees & defèrtes : 11 y naill vne forte de ionc,que les habitans d’alentour appellent T o-^ J Q /yr^.defquels ils fe feruent a plufieurs chofès,carIes Sauuages les mangent; en eno-raif- fent les pourceaux & en nourriffent les cheuaux &autres belles de charge; ils en coii- urent leurs cabanes,en forment des bateaux,en font du feu, enfin les Vros l’employent prefque à toutes chofes que la neceffité de la vie humaine requiert. le dis les Vros, na- tion brutale, &qui a peine ont quelque chofe d’homme outre la forme , lefquels au temps pafle habitoyentdans les rofeauxde ce Lac,& flottoyent par icelui fur des ioncs lies en forme de radeaux , agités par les flots , tantofl d’vn collé & tantofl de l’autre. L eau de ce L^ fdit le mefmejn’efl pas dutoutfîfalee que celle de la mer, mais elle efl trouble.efpaifTe&nullement bonne à boire. Il nourrit deux fortes depoiffonjlepre- mierdelquels efl appellee des Indiens qui font les plus grands & d’vn bon goufl, mais ils font flegmatiques & mal fains : ceux de l’autre efpecefont nommés des Efpa- gnols ^^,beaucoup plus fams, encores qu’ils foyent plus petits & plus remplis def- ‘ chardes. (?4m/^^efcrjttoutautrement,que les font fi gras, qu’on n’a befoin autre graifle pour les frire ; que les Bogas font fort petits , d’vne laide forme & d’vn mauuais goufl. Il nourrit en outre des oifeaux de marais prefque vn nombre infini, comme oyes, canes & autres femblables. Lors que les habitans d’autour d’icelui veu- lent fefloyer leurs hoftes, qui voyagent le long de l’vnou de l’autreriuage,ilsafrem- blent plufieurs radeaux, qu’ils appellent enuironnentd’iceux comme de pan- neaux es oyes &les canes,tant qu ils les prennent a la main. Or apres que cet emiffai- le a couru prefque cinquante lieues, il fait vn autre Lac, mais plus petit, qu’ils nom- 50 Pana ou de Aulag^, où il y a auflî beaucoup d’Ifles,mais nul cmifl'aire,de forte que plufieurs fe perfuadent, qu’il fedefeharge par des conduits fouflerrains dans la merAuflraIe,&ceprmcipalementparcctteraifon,qu’il v a vne certaine riuiere qui fort en mer afies près delà,de laquelle on ne fçait point la fource. Le terroir qui enui- lonne e gland Lac, abonde en troupeaux, notamment en pourceaux, pour l’abon- dance de ce rotora,G^\xQ ces belles aiment fort & s’en engraifl'entmerueilleufement. Cc( C H A P, 38 Heritage d’or, mais GarcillaJJht y contredit & rinterprete,principale lance.L’aïr y eft fort froid & la terre afles feiche: Il y pleut deDecembre iufques enMars,& depuis Auril iufques en Aouft,il y fait froid & y gele par fois ; de forte que les herbes y feichent & les fiieilles des arbres : Septembre, OAobre & Nouembre y font fort ferains & tempérés 5 en ces mois les arbres y bour- geonnent comme en Efpagne en Mars. Les vents n’y font iamais pefans & le Ciel y eftpreique toufiours clair , l'aïr temperé &fàin; excepté és mois les plus froids, car lors on y eft trauailléde catharres & de douleurs d’hypochondres. La ville eft baftie aupié mefmed’vne montagne, afin d’eftre d’autant mieux garentie de l’iniure des 10 vents; regardant dans vne profonde vallee>qui a à peine demi-lieuë de circuit. Il y a plufieurs fontaines, & de fort bons pafturages : elle nourrit des vignes, des ftguyers èc autres arbres fruiôtiers : au mois de lanuier tous les fruids commencent à meurir j ôc les raifins du milieu d' Auril iufques à la fin de May. Les naturels de cette Prouince (ont de moyenne induftrie.lafches, & comme ils ap- prennent aifemenr, aufti oublient-ils promptement : ils vfent maintenant d’habits àC font profeftion de Chriftianifme. Les Andes (ont diftantes de leurs limites de dix lieues. On dit qu’il y a d’excellentes mines d’or, &: des Salines aufti, quifournilTentles Prouinces voifines d’abondance de ièl,auec grand profit. La vallee de CaracdtOy<\m appartient à cette Prouince, porte de fort bons raifins, & 10 les premiers de toutes ces contrées. L’anclolo AcoJia)i\ arriua quelque chofe de merueilîeux dans cette Prouince; c'eft qu’vne bonne partie de la bourgade d'Angoangû,\es habitans de là- quelle eftoyent eftimés notables Enchanteurs, fut foudainement accablée du mont voifin , de forte que plufieurs peribnnes furent fuftoquees ; &: la terre qui eftoit tom- bée, courut, comme fi c’euft efté de l’eau refpanduë , de telle force ^’efpace d’vne lieue & demie, qu’elle combla du tout vn petit lac,& fut femee partout le chemin où elle auoitpaftTé. C H A P. VI. J O ^ourfilte du chemin Royal Côllafuyo iujques à U Vitte de la Platâ. AV Chapitre precedent nous auons fuiui le chemin Royal iufques à nous nous en fommes vn peu deftourné pour faluè’r en paftant la ville de U Pa^A maintenant nous le reprendrons. De Viacha on va a Hayo-Hayo , ou les Ingas ont eu au temps paifé vn Palais fort ma- gnifique . De Hayo-Hayo a Siquijicay qui n’eftoit anciennement qu’vn village, maintenant vne bourgadeaifes peuplee,depuis qu’on y a crouué des mines d’argent alTés riches , com- ' me i’ai apprins de ceux qui y ont efté és années precedentes , elle eft diftante de Potoji de foixante fixlieuës. 40 De Sii^ui^ca iufques a Caracollo on conte onze lieues , c’eft viie bourgade fituce dans vne campagne buuerte près de la fpacieufe Prouince de Paria. Gardllajfus deicriuant comment / Jnca Loque Tpanqui adioignic à fon Empire ces Prouinces de CûUao, raconte qu eftant parti de Pucara , il alla premièrement à Pauearcoüa hc a Hatuncolla i & delà a Chicuyto s à.ç, laquelle les principales bourgades eftoyent pouf lors Hillaui tChulli ,PHmata y Cipita^ &c. Defquelles iè deftournant vers l’Occident, il entra dans la Prouince de Hurin capac qu’il fubiugua ; Il adioufte par apres que / Tnca APayta Capac , eftoit venu a 1 emiflaire de Titicaca , & Payant paftTé , qu’il auoit prernierement adioint a 1 Empire des Tncas , L iahuanacu , & que delà il auoit ache- mine ion armee vers Hatun pacajjk, laquelle ayant iubiuguee,il eftoit venu à Cacya^ jo uire , & que la il y eut trois grandes Prouinces qui s’eftoyent ibuimiies à lui , ri- ches en brebis ,& peuplées dvne nation beIliqueuiè,fçauoir Cauquicura ^ Mallama & Huarina. Que par apres il enuoya les Condudeurs de fon armee de Hatuncol- la vers l’Occident; qui apres auoir pafle auec grande difficulté les deferts de Ha- tunpuna , lequel a de large en ce lieu enuiron trente lieuës ; iis paiTerent iufques dans la Prouince de Chucuna , où ils menèrent deux Colonies , feauGir Cuchuna & Moquehua , qui font diftantes l’vnc de l’autre , pour dire vray , de cinq lieuës. C c c 2. Apres 588 DESCRIPTION DES INDES ' Apres cela que îe Roi deflogeaiit de Pucara Omajuyo, {c^\tik. vue autre que celui dont' nous auons parlé ci-deuant) marcha vers TOrient , & iubiuguala Prouince de Llari-' cajfn, & peu apres celle de Samatu , qui eftoyent des Prouinces de fort grande eften- duë : car elles auoyent de long cinquante lieues, & de large en partie trente & en’ partie vingt. Que delà il trauerfa dans PacaJJa.vnt partie de laquelle auoit efté aupâ-' rauant domptee, & retourna au chemin Royal , nommé Omafuyo, auprès la bourgade; appelleeauiourd’hui Hunychu ou Vidchn. Et apres auoir eu vn rude combat aùec les ha bitans fur les bords de la riuiere Hmychu , il adioignit à fon Empire toutes les bout-' gades depuis Hmychu iufques à Callamarca,c\\xï occupent trente lieues de païs vers le Midy. Delà il s auança vingt quatre lieues vcïs Caracello , & fubiugua toutes les i o- bourgades qui eftoyent à droite & à gauche du chemin Royal iufques au lac de' Paria. ' ■ P aria ^ comme nous auons dit, eftvne fort fpacieufe Prouince, où’il y a vne petite ville d.e mefmenom, diftante defoixante licuêsouenuiron de Pûîoji,oi\ les Bourgeois mènent force fromages vendre. Au refteJcs bourgades de cette Prouince, font fitüees fur la riue de i’emiflaire du grand lac de Titicaca , ou vn peu à l’efcart, comme Coponata & autres. Au delà de Paria il y a aufli diuêrfes bourgades , comme Pocoarat xJMachâ , Caracara & Moromoro. Et fous les Andes habitent plufîeurs peuples en di- uerfes Prouinces , defquels nous n’auons rien apprins de particulier. 2a C H A P. VII. Définition de la Vtlle de la P lata ou Chuquifaca,- comme atfjfi de quelques petites Villes. La Piata Métropolitaine de ce Parlement , eft diftante de la ligne vers le Sud de dix neuf degrés , félon Herrera fen quoi toutesfois ie me doute qu’il fe trom^ pe & qu’il ne fe fouuient pas bien de foi-mefme , car il l’a met ailleurs auec ^r^/^ffur la mefme hauteur que Potofii) & à lxxii degrés du Méridien de vers l’Occident. Les Autheurs font differents touchant fa diftance de Cufico^ Diego Per- nandez, contQ fZiyiX'S. Mtxxcs , Herrera Augufiin de Zarate cl. La Pfouinccjo s’appelloit en langage du païs Chuquifiaca ^lequel nom les Autheurs Efpagnols attri- buent aufti fort fouueiK à la ville) le terroir eft fertile en grains , & porte fort bien le froment & forge, comme aufli les vignes & autres fruiéts. Herrera eferit diuerfement des qualités de fon air, car il loué en vn endroit la temperie de f air, fuiuant fans doute pour Autheur C/>p, ailleurs au contraire (peut eftre croyant Augufiin de Zarate) il dit quelle eft froide outre mefure,&: cela contre la nature du clymat: en quoi il fe trompe fans doute, car Acofla Autheur diligent & idoine , rapporte entre les merueil- îes de cette région , que combien que la Piata & Potofi foyent fur vne mefme hauteur du Pole,&feparé feulement l’vn de l’autre d’vn efpace de xviii lieues ; neantmoins le terroir de Potofii eft froid outre mefure, fec & infertile ,* celui de la Piata au contraire 40 chaud, temperé, fécond & fort beau , & qui porte benignement les fruids d’Efpagne. En outre en cette ville eft eftabli le Parlement de toute la Prouince de los charcas, qui fait quelle eft fort peuplee : lly aaulTi vne Eglife Cathédrale & quelques Mo- nafteres de Jacobins, Cordeliers & d’autres ordres. Le reuenu annuel de l’Euefquc eft, comme on dit, de quatre vingts mille ducats. Les limites de ceDiocefe s’eftendent fort longs & fort larges , & il eft arrofé de plufîeurs riuieres : les anciens habitans s ’ap- pelloyent Ch areas & Carangues, peuples belliqueux & furieux. Les Rois du Peruy ont au temps pafle occupé plufîeurs efdaues pour en tirer les métaux & les fondre, no- tamment de lamontagnede Parco ou Porco ; de laquelle il appert afles que cette gran- de abondance d’argent, que les Efpagnols onttrouué dans les threforsdu PerujZ^o cfté tiree : Pizarre a du depuis effaye les mines de cette montagne, & en fit vuider & nettoyer les anciens trous & cauernes j & n’y a point de doute qu’il n en euft peu tirer tous les ans deux cents mille ducats , s’il euft pourfuiui ce qu’il auoit commence. Il y a en outre plufîeurs mines , & mefine le bruit eft que toute la contrée eft pleine de riches veines d’argent, d’où on a donné le nom à la ville. Enfin dans le territoire de eette ville , habitent en diuerfes métairies S>t villages, qu’ils nomment Chacar as , plus de OCCIDENTALES. LIVRE XL de Iiuid cents Efpagnols,fî nous en croyons Herrera : bL àxm le Diocefc plusdefoi- xante mille Indiens tributairesjdiuiles en vingt neuf Tribus ou RcpATtioncntostÇ.oxxwci^ les Efpagnols les nomment: de forte que les Citoyens & ceux qui demeurent aux champs, furpaffent enrichefles & en abondance de toutes chofes tous les autres habi- tans du Veru. A ce Diocefc appartiennent, outre les bourgades fuûnentionneeSjTonora^&ch Prouincc de Tapacriyioxz fertile, comme eferit GarcilLijJiis , grandement peuplce, & ri- che en brebis, ayant de long vingt lieues & plus de douze de large. Or il faut noter qu entre cette Prouince & celle de Collito )i\ y a vn delêrt Ipacieux enuiron trente [ 0 lieuès de large, dans lequel fe trouuent force fources fort chaudes ; Tapacri eft diftant de huid lieuès de Cochabamba. Sipjïpe de laquelle ie n’ai rien apprins. La valleedc de Cochabamba eft fur toutes autres fertile & abondante en froment & Mays , comme aulTi en pafturages : dans laquelle le Viceroi D. Frantifeo de roledo a bafti vne ville, nommee Oropefa, à vingt lieues de la ville de la Plata, les habitans de laquelle font vu grand profit à cultiuer foigneufement les champs & à nourrir des brebis : Fai apprins de ceux qui ont pafle par là, qu^elle eft efloignee de vingt deux lieuès de Potofi, le long du chemin quimene à Cufco .-bccyyi ih mènent principalement leurs grains & leur beftail à Potofi. GarcilUjftis eferit , que dans la vallee de Chocapampa , comme il la nomme, les Efpa- to gnolsyauoyentbafti,pourfaremarquablcfertilité,lan cIdId lxv la ville de'.S. de Cardenna i ie doute fi, ce ne leroit point Oropefa mefine. Outre los Carangues ; il y a chayanta , touchant laquelle Garcillajfm eferit , que de O- chabamba on pafle dans cette Prouince par vndefert fort fterile, de prefque trente lieuès de large, dans lequel il ne fe voit rien que des rochers & précipices , & des char- dons ou chaufles-trapes,quiont, ainfi qu’on dit, les aiguillons longs comme les doigts de la main,& fi forts &: aigus,qu on s’eii peut feruir d’aiguilles & efpingles : ils font fore communs en toute l’Amerique: Et que la Prouince de Chayanta a de long vingt lieuès, & prefque autant de large. La Prouince de chaqui, proprement los dans laquelle les Efpagnols habi- o tent auiourd’hui vne petite ville de mefme nom, à quatre lieuès de Pûtoji^ Faïry eft froid, mais le terroir eft couuert de beaux pafturagesîd’où vient que les , Bourgeois s’employentprincipalementà nourrir du beftail. Les peuples nommés los chkas,qui pofledentplufîeurs bourgades. Atiguftin de Zarate adioufte à icelles Poconkr à quarante lieuès de la Plata & à quatre vingts de Paria. Et d’auttes y mettent aullî proche de la contrée des Chicas la vallée dei^/tfATi^rtf/'i^.danslaquelleilyaplufieurs iardins, toutes fortes de fruids, & abondance devin&defucre. Entre la ville de la Plata &: celle de Potofi coulent deux riuieres 5 Fvnc defquelîcs eft diftante de la ville enuiron deux lieuès , les Indiens la nomment Chacomayo , fur laquel- oleily a vnpont de bois,& qui fait tourner plufieurs moulins. L’autre PikomayoèxÇt^n^ zc^ePotof^Q douze licuës , de fix, ou il y avn pontdepierrc jpourcc quedu- rant les pluyes elle s’enfle fi fort,qu’on ne la peut pafler à gué Il n y a en cette contrée nuis loups,mais bien d’autres animaux furieux, que les Elpa- gnols appellent Tigres, les Indiens OttorongosScmbhhles auxleopards, &:dclagran- deur d’vnveau,quideuorent les brebis, mefmes les vaches &iuments, & les hommes aulfi s’ils les rencontrent. Il y a pareillement des lions , mais qui ne font pas fi furieux que ceux de FAfrique.de forte que les chiens les maiftrifent aifement. A trente lieues ou enuiron de Chuquifaca vers le Leuant,il y a trois viîlettes , qui lêr- nent de Citadelles a 1 encontre des cheriguanas,Cç3,\ioit Tomina,la Lagumlla Sz Tartxa } 3 où il y croift beaucoup de froment, de CMays, diuers fruifts, du fucre & chofes fembla- bles J lefquelles chofes ils portent toutes à cette ville ou à En outre à enuiron vingt cinq lieuès de la Plata, il y a la villette Mifque, de laquelle on porte force vin à Potofi: au milieu de cet efpace paflTc vne riuierc que les Efpagnols nomment de Condorillo , à huid lieuès de la Plata , & à dix fept de Mifque ; le terroir de cette villette eft fertile en froment & porte fort bien les vignes. Ccc I G H A P. 5^0 DESCRIPTION DES INDES C H A P. VI IL ' VtUe de Potofî fes riches mines d'argent. La Cité Impériale de Votoji (comme les Efpagnols parlent) cft iitucc fur la hau- teur de XXI degré & XL fcrupulesau Sud de ia ligne, comme tefmoigne lequel nous fuiuons en cet endroit volontiers , comme exad Eferiuain , com- bien que d’autres l’approchent plus près de l’Equateur. A xviii lieues de la ville de lâ f/4/4: à VIII du lac àc Paria ou de i^ulagas^z clx de Cufco-, où le chemin eftafles aifé & les Prouinces par où on paffe font bien peuplees: à lxxx ou enuiron de Arica 1 q fur la mer du Sudj & enfin de Buenos Ayres ville fituee fur la riuiere de U Plaîai de c c c L ou plus félon que plufieurs efcriuent, comme il fera dit en fon lieu. Les Citoyens Efpa- gnols d’icelle font au nombre d’enufron quatre ou fix mille; & beaucoup plus d’e- ftrangers : car il y accourt de toutes parts force Marchands , & mefmes beaucoup de gens oififs qui ne s’employent à autre chofe qu’à faire bonne chcre & à ioüer. 11 y a dans les fauxbourgs & dans le territoire voifin d’ordinaire trente mille Indiens ou plus , qui trauaillent aux mines, & mefmes il y en a qui y viennent des Prouinces fort cfloignecs , pour feruir aux Efpagnols. Elle eftgouuernee par fesMagiftrats,* le Chef defquels eft le Gouuerneur, que les Efpagnols nomment Corregidorycinc le Roi d’Ef- pagne y enuoye pour trois ans , la penfion annuelle duquel eft de trois mille ducats, *,0 comme quelques-vns efcriuent, & félon d’autres de dix mille, caries émoluments font fort grands. Il y a plufieurs riches Conuents de Moynes, vn College de ceux de la Société , & vn Cloiftre de Nonnains. Or combien que le terroir y foit fort froid & grandement fterile , & qu’il ne produife nuis grains , excepté de l’auoine , encore qui n’y meuric que rarement, & qu’on fauche comme du foin pour feruir aux cheuaux de pafture : neantmoins il y a vne grande abondance de toutes chofes , & rien n’y manque non feulement pour la necelTitéjmais auffi pour la volupté. Or Acofta deferit en cette maniéré cette renommée montagne : La célébré mon- tagne de eft fituee fur la hauteur de xxi degré & xl fcrupulcs, entre le Tropic du Capricorne , & prefque en l’extremité de la Zone torride ; neantmoins , cette rc- 5 o gion eft plus froide qu’aux Pays-bas, de peur de dire qu’en Efpagne; combien que par la raifon de fon clymat elle deuroit eftre chaude ou à tout le moins temperee ; la caufe en eft la hauteur du terroir &: prefque l’ordinaire fouffle des vents froids & tem- peftueux; notamment de celui qu^ils nomment grandement froid,quiy régné és mois de May,Iuin,Iuillet& Aouft.La terre y eft à l’enuironfeiche, froide, laide à voir, fale , & qui ne produit feulement pas des grains , mais non pas mefmes des herbes ou verdurequi foit , de forte quelle eft de foi inhabitable : mais la foif d’argent a rendu ce lieu non feulement le plus peuplé de tout le Peruy mais auffi le plus abon- dant en toutes chofes : car encore que la contrée voifine foit auffi deffournie des chofes neceftaires , &: qu’il foit befoin d’y apporter toutes chofes des Prouinces fort 4c efloignees, neantmoins les marchés publics y font toufiours remplis à merueilles de toutes fortes de fruids, de confitures, d’excellents vins, de draps defoye, & d’autres chofes iieceffair es tant pour l’ornement que pour la volupté. La montagne de Potojt paroift par deflus les autres voifines,àlafaçond’vnpauillonoud’vnpaindefucre, d’vne couleur d’vn rouge brun , fort plaifante à voir ; elle cft de foi difficile à monter, combien que maintenant les cheuaux y montent: fon pié occupe vne lieuë; fon fom- met finit en pointe, duquel iufques au bas du pié on conte mille fix cents & vingt quatre aulnes communes , qui font à la mefure d’Efpagne vn quart de lieuë. Au pié d’icelle il y a vne partie de la montagne , qui procédé de la grande, où on a trouué an- ciennement des maffies d’argent, comme en des cachettes & fondues hors des veines, yc qui eftoyentfort riches, mais en petit nombre: On nomme cette partie de montagne au langage des Indiens Potoji guaym , cefi à dire, petitPotofe du penchant, duquel commencent les édifices des Efpagnols & des Indiens , qui ont prefque deux lieues de circuit, de forte que cette ville eft la plus grande de tout le Peru. Ces mines n’ont pas efté cognuës aux Rois du mais furent trouuees, feulement le xii an apres l’entree des Efpagnols dans le PerUi par vn Sauuage fortuitement : Or l’an c I o 1 3 xl v furent OCCIDENTALES. LIVRE* XL jc,r furent premièrement commencées deux mines par VtlUroele Gtianca, Indien , Tviie defqucis fut appellee Rica^ l’autre veine àicBiego Centaio \ & peu apres la troifieme qui pour fa dureté de cailloux futnommee àcl Ejîanno ; enfin au mois d’Aoufl: de lamefme année la quatrième qu’on appelle Mendteta. Voila les quatres principales mines de cettemontagne. Onditquela première que nous auonsdit'eftre nommee riche , eftoit efleuee par deffus la terre comme la crefte d’vn coq, de la hau- teur d’vne lance, de la longueur detrois cents pies & large de treize, on penfe qu’elle a efté ainfi laifîée nue du temps du deluge, ôcque l’eau ne la peu fapper à caufe de fa dureté. Or cette mine eftoit fi riche, que prefque la moitié efloit d’argent pur & fin, lo & ce iniques a cinquante ou foixantebrafïes de profond, ou elle commença vn peu a changer. Les richeflesdes plus leiiommees mines de tout le monde, defquelles les Anciens Autheurs ont fait mention,' ne font point a! comparer a la richefîe de cette- ci: caries liures royaux difent&4es vieillards dignes de foi affeurent, que lors que le Li- centié y eftoit Prefident, apres plufieurs années paftees depuis quelle auoit efté delcouuerte , tous les iours de famedy, on auoit couftume de lui apporter , afin d’en prendre le Quint pour le Roi, cent cinquante & par fois deux cents mille pezos ("chacun defquels vaut huiét realles dEfpagne) de forte que ces mines rehdoyent chacun iour trente mille du moins : & toutesfois tout 1 argent n’eftoit point apporté au Gouuerneur,peut eftre pas la moitié ; car c’eft vne chofe ordinaire au Peru que de :.o l’argent marqué (qu’ils nomment Corrknté) duquel on fe fort pour négocier , on ne paye point dâ quint. & il éft aftes euident qu en ces premiers temps on monnoyoit vne grande partie de l’argent. Et ce qui monftre encore d’autant plus l’excellence de ces mines, c’eft qu’il y a des puits qui font défia creufés iufques à deux cents brafles de profond, fans qu’ils foyent incontbodés d’aucunes eaux : & toutesfois le riche puits de Rehelo en Efpagne, qui rendoit cous les iours à Hannibal c c c liures pefant, eftoit creufé mille cinq cents pas,& en toute cet efpace ils eftoyent contraints d’y tenir des gens pourpuifor l’eau nuid & iour, à la lueur dès lampes , & de faire vne ri- uiere,' comme Pline dcùv. & les puits de Pom fort riches en mines, ont efté défia abandonnés de long temps â caufe de l’abondance des eaux. Quoi plus î J5) Le Roi d’Efpagne reçoit tous les ans dès mines de Potofiwn million de ducats , cela foulemenc du quint de 1 argent, afin que ie ne die rien des autres émoluments qui pTouiennent de 1 argent vif & des impofts, De maniéré que folon le compte exad de . ceux qui eftoyent inftruids en ces affaires, au temps du Viceroi Z). Tvdncijco de 'Toledot ilfetrcuue affourement que depuis la première defoouuerture iufques à l’an cId Id Lxxiv on y aupit quinté foptante & fix millions ,• & veulent que du depuis il s’en foie encore tire dauantage. Et comme y^fi^^tefinoigne ailleurs l’an plolo Lxxxvn dans 1 vne & l'autre flotte , tant du Peyu que de la Nouuelle EJpâgne, il fut apporté en Efpagne onze millions, defquels prefque la moitié appartenoit au Roi, & prefque les deux , tiers eftoyent venues du Peru. 10 C H A P. IX. Autres chofes itgnes de/emarques des mines d^ argent de Potofi. Iofèph de Acojla efcrit,que ces quatre: principales veines que nous auons remar- quées ci-deffus, font fituees au cofté de l’Orient de la montagne,& qu’elles s’eften- dentdu Nord au Sudj larges ou elles le font le plus de fix piés,au plus eftroit d’vn î & qu’elles Te dilpercent en plufieurs petits rameaux, qui ont diuers foigneurs. Que lajplus grande veine contient lxxx aulnes ; & la plus petite quatre. On conte dans la veine Rica lxxviii puits, qui defoendent en fonds de la hauteur de clxxx, & par fois JO ce hauteurs d'hommes. Dans la veine C^/^-zm^/ily a xxiv puits qui defoendent iufques a Lx & LXXX de telles hautéurs , & afin d euiter vne telle profondeur,ont trouué l’in- uention défaire des mines ou cauernes, que lès Efpagnols nommQm Socabones, par lefquelles on pénétré du cofté de la montagne iufques aux veines. Car ils croyentque ces veines defoendent iufques au pié de la montagne, & qu’elles feront cfe beaucoup plus riches au fonds, combien que l’experience tefmoigne du contraire. Ces cauernes ou mines font prefque de la hauteur d’vn homme & larges de huiâ pies : elles fo ferment 5^1 DESCRIPTION DES INDES ferment de portes, & les proprietaires d’icelles prennent le quint du métal qui s’en tire. Il y en auoit lors que Acojîa efcriuoitjfçauoir l’an cio lo xc défia neufd’ouuerts, &on en ouuroit pliifieurs autres. L’vne d’icelles nommée delVemnOjÇ[\x\ va à la veine Rica-, auoit efté parfaite en xxix ans , par vn difficile labeur : combien que fon em- boucheure ne foit du lieu où elle fe ioindt au puits ('qu’on nomme El Cruzero) que de deux cents cinquante aulnes d’Efpagne. En outre la veine d’argent fe trouue le plus fouuent enfermee entre deux hanches ou roches (qu’ils nomment la Caxa) l’vnedef- quelles eft dure comme vn cailloux, & l’autre eft plus molle ; Or la mine d'entre deux eft de diuerfe valeur : car il y en a de riche, (qu’ils appellent Çacilla ou Tucana)\ç, plus fouuent d’argent accompli ; d’autre pauure , qui en donne peu. La riche mine elt de i o mefme couleur que l’ambre iaune. Enfin le chemin qui va de Potofî à Cufco (comme ie l’ai apprins d’vn des Pays-bas) ' fe fait en cette façon ; par les Prouinces de Collao à Chaquiaho ; or il faut palier par Skafica , mais il n’eft pas necelfaire d’entrer dans Chuquiabo , ains on ie peut lailTer à la main droite; on rencontre là toutes les v, vi,ou vu lieues des Tamhos & des Sauna- ges qui feruent pour rien les palfans. De chuquiaho iufques à Tiahuanaco on conte ix lieues ; ce lac eft défia là grand, & le chemin va le long de fes riuages , iufques à ce qu’on vienne au pont qui eft fait à trauers de fon emilfaire ; duquel iufques à Chucuito on conte trois lieues : delà on va à Ayauire-, de laquelle le chemin tourne à la main droite qui mene à Carauaya-, de t^yauire le chemin continue à Chongara, & delà à Lunacachen, c[\i\ (ont deux bourgades d’indiens feparees de fix lieues IVne de l’autre: Gette région eft eftimeelaplus haute de tout le Peru: de laquelle iufques à la Métro- politaine Cufco il y a xxxm lieues. Lui apprins d’vn homme des Pays-bas qui ^ demeuré l’an cîd loc & du depuis, que la veine diminue de iour à autre , & que pour deux voire trois cents pezos de fin argent, qu’elle auoit couftume de rendre decentliures,on n’en tire maintenant que ‘ dix à grand peine & mefme moins : & que la maniéré de le fondre eft maintenant beaucoup differente de celle du paffé, car lors apres auoir mis la mine en poudre, ils la fondoyeiit à force de feu dans de petits fourneaux, que les Efpagnols nomment Gmyros, qui auoyent la gueule eftroite & expofee au vent : mais maintenant ils met- j o tentauec beaucoup de labeur cette poudre dans des cifternes faites pour cet effed, & la deftrempent d’eau, la méfient auec des raclures de fer ou de cuyure, & principifc lementauec de l’argent vif, la tournant & lauant plufieurs iours,& enfin ils la bru- _ fient dans des fourneaux , afin d’en faire confommer & exhaler l’argent vif. En outre pour brifer la mine, ils ont befoin de plufieurs machines que l’eau fait tourner com- me des moulins ; or^ette contrée eft difetteufe d’eau , excepté de celle de pluye; de forte qu’il la leur faut amaffer dans vn grand eftang au temps des pltiyes,& auec des efclufes la lafeher par ordre ôrmefure.pour faire tourner les roués, qui y font au nom- bre de foixanre. 11 y a auffi dans la vallee de Tarapaya^ qui eft à deux ou trois lieues de la ville , quelques-vns de ces moulins , qu’vne petite riuiere fait tourner. Enfin au 40 commencement de cette vallee il y a vn lac du tout rond , les fources driquel combien que le terroir d’alentour foit fort ftoid, font moyenement chaudes aux bords, mais au milieu elles font fi chaudes , que les hommes ne4es peuuent endurer : l’eau d’icel- les boult au milieu vingt pies à l’enuiron : ôç^cc qui eft efmerueillable, c’eft qu’on ne voit iamais croiftre ni diminuer celacmonpasmefmesàprefentqu’on en a tiré vn. canal pour faire tourner les moulins. Les mines de Porco font à fix, lieues de celles de Potof le long du chemin qui mene ^K_AricaM à deux du lac de , qu’on nomme de Aulagas autresfois les plus célébrés de tout le Peru, & donnent encore auiourd’hui de l’argent fort fili ; mais elles font grandement incommodeesi des eaux. 50 Il y a auffi dans ces quartiers des mines d’argent, qu’on nomme Oruro ou Horuroi & BerengeUymTiïs leur fituation ne m’eft pas. encore affés cognuë.Nous parlerons en- core vn peu des limites àtlos Charcas ,c\\i2.nà nous ferons paruenus à la Prouincede Tucumana, laquelle il nous faudra neceflairement voir afin qu’on puiffe mieux com- prendre la fituation des régions voifines. « -rv>. 39} OCCIDENTALES. LIVRE XL C H A P. X. (ojiej Caps y Bayes , Ports Haures de la Promnce de los Charcas. N O VS auofis dit ci-defTus que la cofte du Parlement de ^m{{o\t^Tambô- /»æ//-«,oii le Parlement de /(7^C'^4!rf^commence.A dix lieues de Tajnbopallav&ïs le Sud, la cofte s auançant plus d vne lieue en mer fait vn Capjcouuert de trois rochers qui fortent hors de 1 eau ; 1 ayant palïe s’ouure iTlo ou l' Hilo , fort commode port , auprès duquel (brt en mèr vne riuiere , à dix huift degrés ou enuiron de la ligne 1 0 vers le Sud. Delà iufques a vne haute montagne qui le dreH’e hir le riuage, nommée des Efpagnols losBUblos[àeQyxQ\ ie ne fçai pas la caufe)il y a vu lieues. D’icelui iuf- ques a vne petite riuiere, de laquelle on ne dit point le nom , mais de laquelle on prilè fort l’eau, ily a v lieues. Delà iufques à vne autre haute montagne, au deuant de laquel- le il y a vne Ifle vers le Sud-lud-eft,on conte dix lieUjf s. Proche de cette montagne eft le renomme ^oix. d Arica:çpie Tedro de deçà ècHerrera mettent fur le xix degré & xx fcrupules : mais les Anglois qui ont fait le tour de la terre auecZ)r4c&C4W/^, & cou- rurent le longde cette cofte , fur le x viii &: xxx fcrupules : Et Olyuier de Nûort fur le XVIII &.XL lcrup. ;par ainfî nous eftimÔs qu 6n le doit placer, félon les exactes dimeti- fions des Anglois &:de ceux de noftre nation, fur les x vin degrés & demi ou enuiron. Î.0 Ceux de ces païsqui entrèrent dans ce lieu l’an cIdIdxcix afteurent qüe c’eft vne baye, & qu’on le doit pluftoft nommer rade que portror il eft fort bien garenti des vents de Sud,d Eft & Nord-eft,mais non pas fi bien de ceux d’Oueft on y peut entrer ai- fement.&n’y a dangerque celui qu’on peut facilement voir; eferit qu’il eft diftant des mines àePotoJi de lxx lieues : d’autres y en mettent lxxx, ce qui eft plus approuué. Ce port eft gmndementneceflaire ; car tout l’argent qui fetire à Potoftèc autres mines prochaines, à couftume d’eftre amené là, fur des brebis du Peruyconàmtes par quelquesEfpagnols&Indiens,qui partent au milieu deMars,de forte que fur la fin du mefmemoisjou au commencement du fuiuant ilarriue à .^w4,*d'où on le porte fur vne flotte de peu de nauires 2,Li}na, ou ils arriuent ordinairement au commencement O de May ou enuiron. V oila pourquoi les Efpagnols ont diligemment fortifié cette place 1 és années paflees,quiauoitefté iufques là toufiours ouuerte,& y ont logé force canons fur les endroits du riuage les plus conuenables, afin de chaflTer du port les nauires de l’ennemi, & empefeherja defcente.Elle eft gouuernee par vn Corregidorycmi y eft efta- bli par le Roi mefine pour fîx ans, & lequel eft en grand honneur. François Drac en fon mémorable voyage lur la mer Pacifique, eftant entré dans ce port fans que les Efpagnols s en doutaflént,y print trois barques, dans l’vne defquàles il trouua cinquante feptmaflcs d’argent, chacune dé vingt liures pefant : il afleure que la bourgade qui eft fur le port, n’eft feulement que de vingt maifons: mais d’autres lui en donnent cent ; ce qui eft plus vrai Ièmblable,^caufedu trafic qui s’y excerce &pour [O 1 opp^tunité du port , enquoi il eft pareil à tous les autres ports de cette mer , ou les furpaflemefme.xar tous les trefbrs d’argent de Us C^4rf<«fs’y tranfportcnt tous les ans, & dela te tnenent auec de petits nauires ou barques à X/^4,-&derecheftouçes les mar- c andjfes de 1 Euiope & celles de 1 Amerique,que la cofte du Fera apporte, y font def- chargées & font menees par terre aux mines de autres places. Du port^ ^^/V4,la cofte court vers le Sud-oueftixlieués:où la riuiere de fort en merrqui de noftre nation metfurxx degrésversle Sud, ienefçaific eftexa- ' élément bien. En outre ceux de ces pa’is qui coururent cette cofte l’an c I o I d x c i x, remarquèrent qu’ilyauoit vne baye fur la hauteur de x i x degrés & quelques ferupu- Ies,qui eftoit comme vn croiflant,derriere vne haute & droite pointe de terre ; & que O la bourgade Hul’ahU eft fur la hauteur de x x degrés en vn terroir afpre,fterile & où à ' peine y a-il de 1 herbe; que la cofte eft toute ainfi iufques au xx degré &c demi, droite courant vers le Sud-oueft,& que l’Ifle qui eft au deuant d’icelle eft fablôneufe & fterile. Ees Efpagnols content de ^^^«4 iufques au portdeTarapacaxxvlieuëslen ceten- roitil y a vne Ifle au deuant de la Continente d’enuiron vne lieue de circuit,& enfer- Pole d^ laquelle eft ceport,contenufurlahauteurde xx i degré du Ddd De 35)4 DESCRIPTION DES INDES De Tarapaca iufques au Cap de l'acama /û y a cinq lieues. D’icelui iufques au port nommé vulgairement de los Moxillones , fur la hauteur de vingt deux degrés &. trente fcrupules , on conte fcize lieues. Toute cette cofte eft haute & droite. Entre deux il y a vneriuiere qui dcfcend en merriommee comme auffi celle de U Haja ( que noftrc oiyiâer appelle de Loa, & la met furies vingt deux degrés, & dit que les Saunages de ce quartier font pauures de tout, &:viuent miferablement de poifTon ) enfin la riuiere de Montelo. Ceux de noftre pais , comme deflus, mettent le Cap d’Agama, fur la hauteur de vingt deux degrés & quarante fcrupules , & derrière icelui vne belle baye : & à cinq lieues d’icelle vers le Sud-oueft,la grande baye & port de Morromorem, qui lo eft comme fermé par vne Ifle qui eft au deuant , fort bien garenti à rencontre de l’incertitude des vents : l’entree en eft aifee & a dans fon emboucheure du cofté du Sud vingt cinq brafles de profonds, & eft capable de contenir plufieurs naui- res: mais on n’y peut prendre d’e^u ni de bois, pour l’infertilité & ficcité de la ter- re ; neantmoins elle eft habitée de Saunages , qui viuent de poifTon crud , def- pourueus de toutes autres chofes, & dVn naturel ftupide, qui craignent extrême- ment les Efpagnols,aufquels ils payent leur tribut de poifTon , ils font fort experts à*na^er & à plonger, & boiuentdc l’éau de mer fans danger: Enfin Richard km dit , qu’ils n’ont rien d’humain que la forme & la parolle,au refte plus approchans des beftes que des hommes. lo Delà plus outre vers le Sud , Herrera fait mention de ^ebrada , Punta blanca ^ebrada honda , de la riuiere de S. Claire à trente lieues de la vallée de CopiapOy qui eft en la Prouince de chile\\ts interualles font au refte incertaines. Mais ceux de noftre nation content de Morromoremo iufques à l’autre pointe de terre, deux Heuës , auprès de laquelle vers le Sud-fud-eft il y a vn petit port à peine capable de trois ou quatre naùires-, derrière vne Ifle qu’ils nomment de Gua~ dans la Continente , mais fort loin du riuagè , il y a' beaucoup de fel (fembla- ble à celui de Pologne; fur vne terreinfcrtile,nuë,&: où il n’y a nulle herbe. Plus outre vers le Sud ils ont remarqué Tlfle de Zûbûs, qui eft eftendué le long dVne falaife fans riuage & où la Continente eft fort droite, la mer eft fi profonde pro-jo che de la terre, qu’on n’y peut trouuer de fonds auec la fonde. Delà ils font men- tion du Cap de Michel Bios & de celui de Lopez.:&c pour acheucr en peu de mots, iis difent que toute cette région iufques à chile ç.Çt fterile, pierreufe , rude, & qui ne produit ni grain ni herbe , & vn pur defert ; que les riuages de la mer y font hauts & difficiles à aborder, & nullement propres pour y monter. S. CRVX DE LA SIERRA. C H A P. XL Sanda Crux de la Sierra, quelques autres Troumees njoifnes. IL refte que nous traitions de quelques Prouinces d’au dedans du païs, qui font contenues fous ce Parlement , & notamment d’vne, que les Efpagnolslappel- lent du nom de la Colonie qu’ils y ont vatntQySanSlaCruxde laSierra. Cette fille (comme tefifioigne Herrera )eft prefque diftante de cent lieues de la Prouince de los Charcas proprement dite, vers l’Orient j fur le chemin qui va à la ville de P Aj[umpciony(m\z riuiere de la Plata. Or cette Prouince à fon Lieutenant gouuerneur, qui y eft eftabli par le Viceroi du Peru. Le terroir de cette ville eft bien difetteux d’eau , mais il n’eft toutesfois pas infécond , & porte lè froment, iA/lays & vin 5 la ville eft fituee au pié d’vné montagne dans vne campagne ouuer- D te , de laquelle s’eftendent d’autres plaines , & des vallees deffournies d’eaux : les maifons des Bourgeois font couuertes de fueilles de palmiers; auprès d’icelle paf- fe vn torrent qui fburd d’vne roche , lequel fait vn lac a quatre lieues de la ville, fort poifTonneux , de forte qu’on en apporte tous les ionrs à la ville abondance de fort bon poifTon . Le terroir abonde en diuers fruiéts domeftiques & familiers à l’Amerique , comme Plantains t Guayauesy Pinnas, Granadilles y Ambabayes y Lniurnesy & Tucumaies, OCCIDENTALES. LIVRE XL Sc Tucunhiics , qui font tous fort eftimés pour leur bon gouft & falubrité. Il v a vnc forte de palmes qui ell fort commune : du tronc defquelles ils font de la fari- ne en grande abondance, de bonne & agrcabie nourriture. loind à cela les fruids de l’Europe , comme raifms , figues & melons : mais les arbres y font de peu de duree: la terre n’y porte pas fort bien les grenades & les coings , non plus que le froment : combien qu’on penfe afleurement que dans les terres des chiqmtos ( c^ni appartiennent à cette Prouincejon y enpourroit femerauee profit. Les naturels du pars demeuroyent anciennement dans des maifons de terre, & afiembloyent l’eau de pluye dans des puits, & mouroyent par fois de foifou Ce tuoyent lolesvns les autres pour de l’eau :& elloyent tourmentés miferablement par leursVoi- linsles C^^r/gua^âs .-comme aufii par les qui polTedent vne contrée fort ferti- le,& où il y acomme on croit du plomb,du Guyure,&mefme de l’argentjqui e fi: à tren- te cinq lieues de la ville de S. Crux. Or on dit que les chiquiïos (ont induftrieux, belliqueux, & laborieux : ils abondent en MayS:>Cehues de Turquie, & fembables fruids , comme aufii en cotton : les femmes vfentd habits les hommes fe feruent en guerre de fléchés enuenimees. Plufieurs de ces Saunages comme aufli des campagnes des Cherigmnes>Com6.e leur gré allés de- meurer dans le territoire & fauxbourgs de cette ville ; pour euîter la cruauté des mon- tagnards cher iguanes, qui font fi gourmands de chair humaine , qu’ils n’cfpargnent xo pas mefmcs les nations alliées. En outrelesSauuagesdccetteProuince abondent en diuerfes teintures, qu’ils fçauent tirer de certaines racines &fueilles d’arbrifléaux, defquelles ils teignent leur cotton. D’où fient qu Âcojla afifeure, que le cotton filé, comme aulTi le tilTu ferc de monnoye dans cette Prouince. Dans la Prouince des Paicanos, quicftdiftante de vingt lieues de la, ville de S. Croix, croi fient certaines courges ou bouteilles, fort belles avoir & fi grandes, qu’elles tien- nent vn baril de vin , dans lefquelles les Sauuages ferrent leurs veftements & autres meubles. La contrée eftfuiette à vn extrême chaud & froid: carie froid y dure de- puis le mois de Mayiufques au commencement d’Aoufl:, fi penetrable par fois, qu’il fait mourii’tous lescottonniers,& geleiufques aux plus profondes racines les y^mbay- lobas ibe ce quand le vent de Sud y fouffle opiniafi:rement,qui y domine comme feul du milieu de îuin iufques à la fin de luillet. Or la chaleur y eft principalement grande autour de lafefle de Noé'l , & autour delà S. François il y pleut fortj ils fementau com- mencement de Nouembre, & moiflbnnent fur la fin de Mars. 11 y a vn chemin fort fafeheux pour aller dans la Prouince de S. Croix , aux temps des pluyes & aux mois d’hiuer , pour l’inondation des riuieres, & de plufieurs marais, fur tout à caufe d’vn bois de palmires, qu’on trauerfe à grand peine en quatre iours, où on ne peut prcfque marcher pour la boue qui y eft, lequel eft diftant delà ville de vingt cinq lieues vers le Couchant. Et au mois d’efté fur tout dés la fin de îuin iufques au commencement d’Oélobre, le cheniin eft fort difficile pour la feicherelTe & difette 40 d’eau, qui fait qu’il faut porter des courges plaines d’eau, auec grand peine, ou bien mourir de foif en chemin. Il croift auiourd’hui dans le territoire de cette ville force cannes de fucre, defquelles les habitans font du fucre & d’excellent fyrop. La foreft qui n’eftpas fort loin de la ville abonde en diuerfes beftes fauuages ; &lesbois en oifeaux: entre lefquels on fait mention d’vn femblable à vne Pie, mais qui ale bec fi grand & gros, que de la partie d’en haut on en fait de fort belles bouteilles. Les Sauuages de cette Prouince font d’vn naturel lourd &abiet, & n’ont prefque nulle induftrie; ils feruoyent anciennement aux Diables, maintenant ils ont com- mencé d’embrafi'er le Chriftianifme. Ils ont la langue des Diaguitas commune en- tr’eux,mais ils en ont outre icelle quatre autres particulières, dont ils fe feruent fe- 5 O Ion la diuerfité des nations. Les hommes eftoyent couuerts de larges chemifes , qu’ils faifoyent de plumes-d’auftrichesi&les femmes en portoyent de plus cftroites faites de pailles ou de laine de brebis du Peru -, maintenant qu’ils ont apprins l’vfage de cotton, ilsvfentle plus fouuentd’eftoft'es de cotton. Nufio de chaues fut le premier qui entra par cette Prouince, dans celles qui font pro- ches de lariuierede la Plata l’an cId Id xlviii. Car la Prouince riche en mi- nes,n’eft qu’à trente lieues de cette- ci vers l’Orient. Il y a Ddd 1 ^^6. DESCRIPTION DES INDES 11 y a enfin plufieurs Prouinces de Saunages qui attouehent immédiatement cette* ci, comme celles des Chmkicûcostdes Mûxos ydes cherigmnesjèc des Tipiones. Garcik lajfm raconte, que l'Xnca, Tupanqui auoit anciennement eRayé de fubiuguer les cheri- guanes montagnards, & leur apprendre des mœurs plus ciuiles; que pour cetefFed: il auoit enuoyé fies gens vers les K^ndes^ proche defquelles ils habitoyent , dans des montagnes auffifortrudes, deftituees de toutes fortes de grains, & outre cela fi cruels & fi gourmands de chair humaine,qu’il ne deuoroyent pas feulement tous cruds leurs ennemis qu’ils prenoyent , mais mefmes ils enfeuelilfoyent en la mefme façon dans leur ventres leurs parents morts : mais qu’eftant eftonné par la difficulté du chemin &rafpreté des lieux, il s’en eftoit déporté. Que le Viceroi du Pem D. Frandfco de lo Tûledo auoit eifayé le mefme l’an cId 1d Lxxii,,mais auec vn fi malheureux fucccs, qu’apres que plufieurs de fes gens furent morts de difette & de trauail, il fut contraint d’abandonner fon bagage & de s’enfuir , d’où il efehappa auec grande peine bc difficulté. Les Efpagnols auoyeiit bafti auffi vne autre ville dans cette Prouince, nommee Noua Rioïa, comme auffi la bourgade de la lefquelles places furent peu apres mifes bas parles Sauuages voifins, notamment par les cheriguanesdovs que le Conte dcNeyuatù-oit Viceroi dans le Peru; Nufio de Chaues eftoit Gouuerneur, ayant efté auparauant tué par vn Saunage en cachette. le voi que ceux qui ont efté depuis peu en ces quartiers , ne font mention que de lo deux villes dans la Prouince de S. Crux de la Sierra-, fçauoirla ville de S. Croix, & celle de Barrama-.'Ez qu’elle eft diftante de Potofi d’enuiron lx lieues. Mais qu’il y a quel- ques villetres à enqiron xxx lieues de Potofi, qui font des garnifons contre les farou- ches Cheriguanes, fçauoir T omina, Lagunilla, & Tarixa -, dzm le territoire defquelles croift force froment, CMays , & autres grains, mefme du fucrc. Et que la terre de S.Crux, ne porte nuis fruiéts , & la Barranca efcharcement. Enfin que S. Cruxe^ vn Gouuernement, ëc T arixa vn Corregiement , comme ils parient. C H A P. XII. Origine des du Peru leur fiçceffion iufques au 5 © dixième Ynca Yupanqui. Avant que nous pourfuiuions la defeription des Prouinces reftantes de l’Amerique Meridionnale, il femblc qu’il ne fera point hors de propos, fi nous difcoLirons vn peu des Rois du P^r»,dcieur fucceffion, & de leurs couftumes & gouuernement , comme nous auons fait ci-deuant de ceux de CMexique, puis que ceux-ci ont eu auffi vn Gouuernement bien reiglé. Les P er uuians , comme ont prefque couftume toutes nations , racontent plufieurs fabl es de la première origine de leurs Rois&Roines,Iefquels ils font defeendre du Soleil , comme il fe peut voir dans Tnca Garcillajjm de U Vega , au Liure i. Chap. xv. 40 ôt fuiuans , qu’il n’eft pas necefifaire de rapporter icij d’autres ont auffi eferit de la‘ fuite & fucceffion de ces Rois ; qui s’accordent tous en ce qui s’enfuit. I. Le premier Roi des Peruuiains, qui toutesfois eut vn Royaume affes petit, fut Jnca Manco-Capac , & fa femme Coya Marna Oello Huaco fa. fœur : defquels fut baftiej commeon dit, la Métropolitaine enuiron quatre cents ans auant que les Efpa- gnols entraffeiit dans le Peru, & le fubiugaffent. Or il faut remarquer que les Peruuiaim appelloyent leurs Rois Tma^ , c’eft à di- re, Rois ou Empereurs & par excellence Capac-Tneas , c’eft adiré. Seuls Rois: &les defeendans des Rois ligne mafeuline fimplement Tncas : ils appelloyent auffi le mefme Roi Huaccha-Cuyac ,ccfc à dire, charitable enuers les pauures ; comme auffi ^ Capac, c’eft à dire, magnifique,- enfin Tntip-Chutim , c’eft à dire fils du Soleil,- car ils aftééioyent l’opinion d vne origine diuine; Or les enfans malles des Rois & ceux qui defeendoyent d'iceuxen ligne mafeuline, eftoyent appellés {^uqui, c’eft à dire, en- fans, iufques à ce qu’ils fufl'cnt mariés, lors ils les appelloyent, comme deflùs : Ils appelloyent la Roine les concubines du Roi, fi elles eftoyent de leur race, P allas i les autres Mamacunas,c’efl à dire, matrones : les üllcs légitimés ou qui eftoyent nées OCCIDENTALES. LIVRE Xï. hécs d’icelIesiY/^./j, c eft à dire , filles du fang Royal ; les illégitimes auec vii furnom de la Prouincejd’où eftoyent leurs meres,comme Colla JSlHfta^^ituNuJlay &c. Enfin ils appelloyent les Grands du Royaume Curaco/s. A cefiui-ci fucceda Sincbi-Rocha fils ailhéjqui erpoufia fa fœur germaine Marna OeL I L /(?, ou félon d’autres Cora: cç.{d\n-ci eftendit les limites defon Royaume dans Collaoy iufques à Chuncara & ailleurs : les ans de fon régné font incertains, quelques-yns tou- tesfois veulent qu’il ait régné trente ans. Lloqr(e~Tupan(^in fucceda a fon Sinchi- Rocha: cc9im-c\ fubiugualés Canas:doirt- Uî, pta les Ayauiros & baftit dans leur contrée Pucara : il foufmit à foi les Collas ; Chïcmto & : 0 les peuples qui habitent le longdu lac de Titicaca: fa femme ïxxX. Mama-Cauaidz laquel- le il n'eut qu'vn feul heritier & deux ou trois filles. Mayta-Capac^\xccç.d^ a /on pere:quiadioignitafonEmpire//4/^^‘-^4ffÆ^,à Cofté I Y. gauche de l’emi/faire de titicaca : comme au/fi Cauquicura, Mallama & Huarma-, Llari- caJJa^Sancatta ^ Charcas,i\.\^(\\XQS au lac de Pa^ia. ‘auffi chiquiapa & d’autres Prouinces : il eut a femme Marna- Cucayqui lui enfanta plnfieurs en fans mafles. Capac-Tupanqui Cüccedâà. fon pere,&eftenditles limites de fon Empire vers POcci- Y. dent, fubiuguant les Prouinces de tanahuaray Aymaya, Cotapampa^ / comme auffi tou- tes celles qui font le long de l’vn&de l’autre riuagede la riuiere qu’ils nomment c^/- mancay(ow félon d’autres ) Par apres pa/rantparlesdefertsdei/»4//4r//4,ii 3 entra dans la plaine, qui eft près de lamer du Sud, & notamment dans la vallee d’Haca- fl ; de laquelle il pa/ïà dans Vuinna^ Camana^ Cafatiillifiy Piflany^^ucllcan & autres vallees qu’il lubiugua. Sa femme fut /a fœurgermain,de laquelle il eut plufieurs fils. fils aifné fucceda à fon pere,plufieurs entreprifes ayant eftéauparauant VL heureufement executees : ceftui-ci eftendit les bornes de fon Empire vers le Septen- trion ; fiibiuguant tacmaf a,y,^yiinualla,CochacaJJa,Curampay&c\2,^X2.x\d&Vxo\iiv\cç. d An- t ah ay a lia y c^wQ les chanas poflédoyent: & plufieurs autres. Sa femme fut fa fœur ger- main Mama-micay i de laquelle lui nafquirent plufieurs fils. lahuac-Hitacac fucceda a /on pere, qui fit peu de choies, ayant efté e/pouuanté par VIL D quelque finiftre augure ioril fit Chef defonarmee fon ixQï^Maytay qui fut par apres nomme Apic-Mayta,c eft à dire, Capitaine general: & fut adioint à l’Empire tout ce qui relloitvers le Sud, depuis Arequipa iuÇçyyxQs ztacapia. Par apres plufieurs nations qui habitoyent au Nord de Cufco le rebellèrent , de Ibrte que le Roi fut contraint d’aban- donner Cujeo , mais il fut /ecouru par Ion fils ai/ne Vira-Cocha ,• qui fit vne grande bou- cherie des rebelles ,• & cftant retourne a CuJeo , il contraignit /on pere de quitter l’Empire. duquel les Efpagnols content merueilles, & eftimentfaucement eftre VI IL le principal Dieu des Peruuiains) apres que fon pere eut quitté l’Empire, & que les re- belles furentreduitsjadioignitplu/ieurs Prouinces au Royaume; baftit de merueilleux 0 ouurages ; entre autres d’admirables aqueducs. Or durant fon régné Hancohuallu Roi dès CoancaSyS ç,'(\î\x\z auec plufieurs milliers de /es gens, dans les Prouinces les plus^^ eftoignees ; les Peruuiains content de lui plufieurs cho/ès merueilleu/es , mais incer- taines. Il eut à femme qui lui enfanta plufieurs enfans. Pachacutec-TncaCncctd^zion pere au Royaume; & dompta les Huancas yhahit^ns de t ^ la renommée vallee de Xauxa fou Sauja, comme la nomme GarcilhJJiis ) par fon frere Capac-Yupanqui: comme aufti tarma & P ampu ( ou tarama & Romhon ) Prouinces tres- fertiles ; & plufieurs autres vers les Andes / de plus Huamacucuchu & Caxamalca ( que Garcillafm appelle Cajfarmarca ) vers le Nord. Et vers l’Occident Nanafcay TmayPifioy & les autres vallees vers lamer du Sud. Ceftui-ci eut àfemmefa/œ^rgermai- 0 ne Coya-Anahuarque. Ddd 5 Ch AP. 5^8 DESCRIPTION DES INDES C H A P. XI IL des Koù des Peruuiains iufques â Atahuaîpaj (ÿ* les autres defeendans des Incas. X. TT Nca-Yupmt^ui fucceda à Ton pere , & fubiugua les Conchos & les Moxos ; & entre- I priiit fur Chile^àc laquelle il fubiugua mefme vne partie, iufquesà lariuicre de Maulen. Il eut à femme fa fœur germaine Coya, chimpu Oello. X î. TupAc IncA Tupanqui fuccedant à fon pere, alla par Caxamalca, vers les Chacapuyas & Huâcracuchos, comme les nomme Garcillajfm, qu’il fubiugua. Il adioignit aufli à fon i q Empire Muyupampa ou LMoyobamba, HmncapampA, Cajjki Ayahuaca & Callua ; & enfin la Prou ince des Cannares & des Paltas-y & plufieurs autres Prouinces iufques à ^uito. 11 eut à femme Mama Oello. XII. fuccedantà fon pere, ayant auparauant çxecuté plufieurs bellesafFai- res & ayant dompté le Royaume de ^uito & autres Prouinces voifines , il eftendit grandement les limites de fon Empire. 11 eut pour la première femme fa fœur aifnec Tillcu Huaco, de laquelle il n’eut nuis enfans : puis* apres la puifnee Raua Oello i & vnc troifieme Mama Runtu fille de fon oncle. De Raua il ç.vlI HuAfcAr IngA \ YUcCMAmAt Manco IncAi & enfin de la fille & heritiere du Royaume de ^yùto , AtAhuAlpA. On attribué à ce Roi les deux chemins Royaux, defquels nous auohs parlé ailleurs. Or comme il eftoit proche de fa mort, il fubfiitua au Royaume de ^uito fon fils AtA» huAlpA qu’il aimoit fort, & donna le refte de l’Empire à HuAfcAr. XÎII. HuaynA-CApAc eftant mort, fes deux fils HuAfcAr S)C AtahualpA , regnerent chacun dans fon Royaume quatre ou cinq ans, fans aucun notable difcordc : mais comme toute puifiance ne peut endurer de compagne: HuAfear à qui il defplaifoit d’auoit cédé fi aifement à fon frère vne bonne partie du Royaume, lui enuoya vn Ambafla- deur , demandant qu’il euft à fe recognoiftre fon valïal, & qu’il n eftendit dauantage . les limites de fon Royaume. AtahuAlpA feignit d’accepter volontiers les Conditions qui lui auoyent efté enuoyees, & d’eftre preft d’obeïr à fon frere, comme à fon fou- uerain Seigneundemanda au refte qu’il lui fuft permis d’aller à Cufco auec vne grande jo fuite , pour faire les obfeques de fon pere , auec grande pompe & folennité j ce que HuAfcAT, qui ne fe doutoit de la tromperie, lui permit auec remerciement : Voila pourquoi le plus promptement qu’il peut, il aflembla de toutes ces Prouinces , tout ce qu’il y auoit de braues foldats, fur tout les vieux qui auoyent ferui fon pere , Icfquels il enuoya deuant à refoîu d’attendre dans fon Royaume l’euenementde cette affaire. On dit qu’il y en auoit plus de trente mille : Et HuafcAr ne print garde à cette trahifon , auant que l’armee de fon frere fuft à prefque cent lieues de Çufco : car lors les plus fideles Gouuerneurs de fes Prouinces lui firent entendre, que fon frere venoit auec de plus grandes troupes que la folennité des funérailles ne requeroit , & mef mes auec des gens armés, defquels il n’auoit que faire, s’il venoit pour faire hommage à fon frere, comme il faifoitfemblant: Voila pourquoi, fefentant trompé, il aflembla promptement fon Confeil , & fit venir des gens d’armes dé toutes fes Prouinces voifi- nés : mais l’armee à' AtAhualpA qui fe haftoit cependant l’accabla à la defpourucuc & le print, apres que plufieurs de fes gens eurent efté tués en la bataille qui fut donnée près de Cufco. AtâhualpA vfa de cette vidoire fort cruellement ; car il fit mourir par diuers fupplices , tous les Princes de la lignée Royale qu’il peut trouuer , mefmes deuant les yeux de fon frere , pour l’affliger dauantage : & ne pardonna ni à femmes ni à enfans , non pas mefme à HuafcAr , comme! les Efpagnols eftoyent défia entrés dans fon Royaume, & eftoyent preft à fondre fur lui. Ce cqyi&Tnca GarcillaJfu4ïa.contQ au long. Toutesfois il ne demeura pas impuni de cette cruauté, car il fut priué de ^ Rovaume & de vie par les Efpagnols dans Caxamalca. Les autres Tncas apres lui, re- gnerent quelques années pluftoft par forme qu’en effed,- touchant lefqucls on peut voir les Hiftoires des Efpagnols. Voila ce que nousauons tiré des Commentaires de rncA Garcillajfue de la Fega , qui fc dit cftre defcendii de leur race, & rapporté briefuemenr. Ch A P. OCCIDENTALES. LIVRE XI. S99 C H A P. XIV. Suite clés Koü du Péril leurs familles yfèlonloÇc^h. A colla. rt IOfepb Acojla dans Ton Liure de l’Hiftoire naturelle & morale des Indes , defcric vn peu autieinent la fuite des Rois du PerUi laquelle nous rapporterons ici briefuement. 11 nomme le premier Roi aufîî Aïangocapa : ceflui-ci Autheur des deux familles I, Royales Hanancuzco & Vrincuzco, de la première defquelles font defeendus les Rois O qui ont grandement agrandi cet Empire. n nomme le fécond Ingaroca, Autheur de la famille fils le nomment Ayllei) Viço- j j e[mrao ,• ceftui-ci fe feruit le premier de vaiffelle d’or, & confacra vne Idole d’or. ^ A ceftui-ci fucceda Paguar/^ua^ueiC^ on dit auoir pleuré du fàng ayant efté vaincu III, prins de fes ennemis , dequoi il receuc fbn nom: de ceftui-ci defeend la famille Aocailli panaca. * . A icelui fucceda Vimcocha, Inga , duquel defeend la famille Coccopanaea •, Gonjaluo j y Pizarre chercha foigneufement fon corps mort, pource qu’on croyoit qu’il y auoit vn grand threfor. enterre auec lui, & l’ayant enfin trouué dans Xa^uixaguana y & bruflé; les Indiens eurent long temps fes cendres en grande vénération, iufques à 20 ce qu’il leur fut défendu par les Efpagnols, qui brufîerent aufli les autres corps des qu’ils trouuerent. ‘ ^ Pachd'cuti In-ga Tupan^ui fucceda au Royaume, qu’on dit auoir régné foixante ans, y & eflargit grandement les bornes de fon Empire: ils racontent de lui beaucoup de fables, qu ’il n ’eft pas befoin de rapporter ici. Ceftui-ci fut Autheur de la famille Tnaca, panaca: & fit l’Idole d’or Indüllapa, qu’on portoit par tout dans vne felle d’or. Succéda apres Topa Inga Tupanqui^ icelui fon fils de mefme nom, qui fut Chef y J de la famille, que les Indiens nommoyent CapacAyllo. y j’j A ce dernier fucceda Guaynapaca , le plus riche de tous les Rois ; de forte qu’on lui y I n. attribue principalement les fomptueux édifices de ce Royaume : Il fut Autheur de la ^0 izvciiWQ T emebamba. A Guaynacapa fucceda dans la ville de Cufco, Tito Cujci Gualpa, c^xxi fut apres nommé I X. Guafc/tri ceftui-ci fut prins & bruflé par les Chefs de l’armee de fon frere, ^ixquiz & Chiliçucima , comme les Efpagnols eftoyent défia dans le Peru. Atahualpa prins & eftranglé par les Efpagnols dans Caxamalca ; comme défia Pi- x. iouïlToit du Royaume j (ÀiïxyïviX, JHangocapa fils aufîide Guaynacapa , qui afliegea eftroiétement les, Efpagnols quelques temps dans j mais eftant contraint de s’enfuir , il fe retira dans Vilcabamha entre de fort rudes montagnes, où lui & fes fuc- cefléurs fe font gardés plufieurs années, iufques à ce qu’il fut prins d’Amaro, & fait mourir pupliquement a Cujeo. Guaynacapa eut plufieurs enrans malles, l’vndefquels 40 fut baptizé & nommé Paul, qui eut vn fils nommé Charles, lequel aufti bien que fon pere aida les Efpagnols à l’encontre de ceux de fon fang. Or du temps que le Alarquis de Cannete eftoit V iceroi du Peru, Sayritopa Inga vint de fon gré de VtLcabamba à Lima , auquel le Roi d’Efpagne donna la vallee Tucay. Enfin la famille , laquelle comme il appert ci-deffus, recognoift Mago-' - capa pour Autheur. lofeph Acojla conte ces Princes Chinchiroca , Capac Tupanqui, Lluqui Tupangui , Mayta capa, Tarco guama , vn fans nom, & enfin Tambo Maytapa- naca, qui ayant efté baptize fut nommé lehan. Voila-ce qu’il en dit; qui différé beau- coup de ce que Garcillajfus en a eferit; ce qui n eft point de merueilles veu que les Peruuiains' ont efté fans lettres & fans liures, fans lefquels il eft difficile de conferuer JO la mémoire des chofès paffees. " ■ Or nous adioufterons en pafrant,que Atahualpa fut prins des Efpagnols au mois . de May de l’an cIoId xxxiii, &: vn peu aûparauant fon frere Guafear parles Capi- taines d K^tahualpa-, dans la ville de Cufco : lequel du depuis par le cruel commande- ment de Atahualpa fut noyé dans la riuiere d Andamarca , comme difent les Efpa- gnols : pour laquelle cruauté inouïe les Efpagnols firent mourir vn peu apres At'a- hualpa mefme, par apres Pizarre voulut que fon fils Toparpa fuft par mocquerie couronné 400 DESCRIPTION DES INDES couronné parles principaux du Royaume auec les ceremonies accouftumees : mais il lui fubrogea l'an cio Id xxxiv Mmgo fils de Gtiaynacauay comme heritier légitimé du Royaume.Mais la difcorde eftant peu apres née entre Pizarre & Almagro^ivcz aufli les courages des Indiens à ces partis , de forte que Mango s’adonna principalement à Kjîlmagro i efperant de pouuoir recouurer l’Empire de fon grand pere, fi les Elpa- gnols en eftoyent chafies ; qui fut caufe que l’an cId lo xxxv, il s’enfuit de Cufco fecrettement, & alfiegeaauec vnegrolfearmee les Efpagnols dans cette ville, & les fatigua en plufieurs façons : Apres cela Almagro retourna de fon voyage de chiiez que Mmge efperoit , comme eftant ennemi dé Piz^arre^ obliger en forte, qu’il forceroit auec lui ceux de Cufco : mais comme il vit que cela ne fuccedoit pas , il fe ietta aufli fur £ les troupes d't^lmagro , tôutesfois auec peu de profit : Almagro eftimant eftre retour- né en grâce auec les efpouuanta tellement Mango par vn fien Capitaine, nommé Roderigo Orgonnezy qu’il s’enfuit dans vneafpre Prouinceà xx lieues de Cufc^^ qu’on appelle de Viticos, proche de la Prouince, dans laquelle la ville de Guanuco à cfté baftie du depuis. Par apres les Efpagnols combatirent entr’eux par mutuelles tueries quelques années. Almagro fut fait mourir publiquement , & François Pizarre futtué par ceux du parti dans la ville de L’an cIdI6 xlii viritd’Ef. pagne Faca de Cajîro enuoyé du Roi, qui eftant entré dans le Peru^ & s’eftans ioinds auec lui plufieurs Capitaines auec leurs troupes , print le Gouuernement l’an cIdId- X n I, & fit marcher fon armee vers la vallee de Xauxa & delà vers les Chupas,on il y eut vne bataille , en laquelle ceux du parti d' Almagro furent batus, & peu apres le ieune Almagro prins, & fait mourir par fupplice l’an cId lo xliii. Par apres leRoiy enuoya Blafco F(unnezFela, pour eftre Viceroi au à qui il eftoit commandé de remettre Mango en fon office, & de lui pardonner les chofes paflees : Ceftui-ci y arriua l’an cIolDXLivrOr Gonzalo Pizarre fe rebella dans la ville de Cufco & fe fit Chef contre Mango-, mais comme il eut tiré hors de la ville fes troupes & fe haftoit contre le Vi- ceroi; Mango eftimant que l’opportunité fe prefentoit de fe faifir de la ville prefquc vuide, comme il penfoit ; cependant qu’il y eft,il fut tué par quelques Efpagnols , qui s’eftoyent cachés chés lui quelque temps , & fon armee fe retira dans les Andes. Ce- pendant leViceroi ayant efté prins par les luges du Roi, & derechef mis en liberté par ^ vn dentr’eux; fut proclamé par les autres Gouuc'rneurs du de Ibrte que le Viceroi s’enfuit à ,^ito , & eftant preflTé par les troupes de Pizarre vers Popaian -, d’où eftant retourné dans la Prouince de , il fut deffaitpar l’armee de Pizarre dans tué d’vnNegre par le commandement de l’an cIdIdxlvi. Par apres arriua le Licencié Pedro delà Gafca, qui fit tant par armes & par confeil, qu’il vainquit le print & le fit mourir par fnpplice, dans Guaynarima: parainfi les PiT^rres perdirent tous les pais qu’ils auoycnt acquis au Roi d’Elpagne, l’an cIdIoxlviii. C H A P. XIV. Du Goimernement politique desV cnmifins, félon les Commentaires à'Ync^. 40 Le s Rois du Beru auoyent anciennement diuifé leur Royaume en quatre par- ties, félon les quatre parties du monde: ils appelloyent la partie Orientale Antifuyo ,Ae\2. Prouince d'Auti, laquelle on veut auoir communiqué fon nom à ces fpaçieufes montagnes,appellees des Efpagnols là Cordillera- l’Occidentale Cun~ difuyoA'vnezMXse Prouince Cunti: La Septentrionnale d’ vne grande Pro- uince qui eft vers le Nord de la ville; La Meridionnale Côllafuy,oàe Collao. Or ils auoy- ent diftribué le peuple par decuries, de forte qu’il y en auoitvn qui commandoità chacune dizaine; & derechef quelque Qfficier fur cinquante, ainfi fur cent, cinq cents, & fur mille on eftabliflbit quelque General ou Gouuerneur, & ils n’excedoyent pas fouuent ce nombre. L’Office du Dizenier eftoit d’auoir foing vn chacun de fà dizaine, & de prendre garde que rien ne lui deffaillift, de ce qui lui eftoit neceflaire: comme auffi s’il commettoit quelque faute, de le rapporter au Gouuerneur fupe- rieur: & de deefarer tous les mois les noms & le nombre de ceux qui naiflbyent ou quimouroyent.Ils nommoyent ces Dize niers Chunca Camayuy de Chunca, qui fignifie OCCIDENTALES. LIVRE XL 401 dix & Camnyuy c’cft à dire, Procureur ; & ainfi des autres à raifon du nombre. Dans chacun village il y auoit des luges qui decidoyent des procès fans^appelle ; que fi toutesfois quelque controuerfe fourdoit entre les Prouinces ^l'inca, mefme en cognoiflbit. Ils portoyent grande reuerence aux loix; & ne fouffroyent parmi eux aucun fai- néant ou vagabond ; ils reueroyent leur Roi comme vn Dieu j car iis fçauovent exadlement par leurs Dizcnicrs le nombre de leurs fubiets , combien de chaque fexe ôc leurs aages:&afîn de contenir d’autant mieux ces petits Officiers en leur deuoir,ils commettoyent des Vifiteurs fecrets,qui s’enqueroyent de leurs adlions & puniffioyent les delinquents: ils nommoycnt ceux-ci Tucuy ricoc , comme qui di-i roit preuoyans' toutes choies : & les Officiers qui failloyent , eftoyent plus griefue- ment punis que le commun peuple. Or la puiffiance des Rois eftoit du tout abfolue , car ils n’cftoyent pas feulement Seigneurs de tous les biens, mais auffi des perlbnnes ; de forte qu’ils n’en prenoyent pas pour eux autant qu’il leur plaifoir, mais auffi ils demandoyent quelles filles ils defiroyent & les obtenoyent du gré des parents , foit qu’ils les voululTent pour con- cubiner ou pour feruantes. Cette couftume s eftoit cftablic depuis le premier Roi , quel’heritier du Royau- me efpoufoit l’aifnee de fes fœurs de pere & de mere , que fi elle mouroit ou fé trou- 10 uoit fterile, la puifnee, & la troifiemejque s’il n auoit point de fœurs, fa coufine ou mefme fa tante de pere , ou quelque autre qui lui eftoit proche de fang : mais les autres Princes fe marioyent auec leurs confanguines , les fœurs toutesfois ex- ceptées , afin que cela fuft propre feulement aux Rois & à leurs fils aifnés. Or le fils aifné fuccedoit toufiours au Royaume, & ne s’eftoit point fait autrement en ces douze Rois , dit GurcilUjftis : conïhiQncyyx Acojîa ait efcrit autrement. Mais la fuccef- fion des Curacas ou Princes varioit félon la diuerfité des Prouinces ; car en d’au- cunes les fils aifnés fuccedoyent à leurs pcres : en d’autres vn des ma'fles qui le plus plaifoit au peuple, de forte qu’il fembloit y venir pluftoft par eledion, que par droit de fang: en d’autres tous les freres fuccedoyent par ordre, & apres eux le plus vieil fo ncueu & ainfi confecutiuement : ce que les Eipagnols ont creu faulfemenr auffi du Roi. Ils feuroyent auec grande iblennite leurs a^ifiiés , apres qu’ils auoyent deux ans: & lors ils les tondoyent & leurs impoloyent nom : le parain alloit deuant , qui eftoit prins d entre ceux du lâng, mais du iils aifiie du Roi eftoicie Souuerain Pre- ftre du Soleil. ^ Les Ingas apportoyent toute forte de foing afin qu’en toutes les Prouinces fuiettes a leur Royaume , les champs y fuftent diligemment biencuîtiués & enfemencés de Jles edifim aux qui fè ^oyoyènt dans ïoùt h Pcrû, de U ^ligion desŸcmmiïns.. Le s edifices Royauxont eftéfortmagnifiques & grandement fomptueux : éarjo premiereihentils eftoyent baftisde grofles pierres élégamment polies,- ce qui eft admirable en vne nation qui ne fçàuoit que c’eftoit que du fer ; & fi projpre- ment coniôindes &:ageancees, qua peine enpouuoit-on voir les ioindures : d’oueft venu que les Efpagnols ont eftimé qu’ellèsai’auoyentefté liées d’aucun mortier; Mais encore que les Veruuuim ignoraftent l’vfagc de chaux ou du ciment ; toutesfois au lieu d’iceux ilsmettoyent tantoft d’vne certaine forte d’argillcfortdeliee & glutineufe, qu’ils nommoyent Llancac-Allpa,iCt^k. à dirè, mortier glutineux, qui à la fin n’apparoif- foit plus à caufe qu’elle eftoit fort claire: tantoftmefleeauec du pIomb,de l’argent ou de l’or : qui a efté caufe que les Efpagnols auaricieux ont entièrement gaftés & de*- ftruidsplufieurs grands édifices , comme raconte Pedr& de Ck^a aux Çhap.xLii.LX^o &XCIV. Les murailles de la chambre du Roi, comme auffi du Temple du Soleil couuertes de plaques d'or, dans lefquelles il y auoit des figures diuerfes d’hommes & d’animaux. Le Throfne Royal, qu’ils appelloyent Tia^a, eftoit tout d’or & placé fur vn paué d’or. Tous les vaiflVaux de la maifondu Roi tant grands que petits , eftoyent d’argent ou d’or ; & il y en auoit fi grand nombre en chacun des Palais, que quand le Roi voya- geoit, il n’auoit befoin de porter auec foi ni vaiffelle ni autres meubles. Ils auoyent en outre Elit d’or &: d’argent toutes fortes d’animaux, de plantes, & de fort grands arbres auec leurs branches , fleurs &: fruids ; & ce qui eft prefque incroyable , de grands monceaux de bois. Touchant lefquelles chofes on peur voir outre Garcil-^o laJJksçLW Liu. VI. ii,Pedro de 0^p,Chap.xxi.xxxvii. xli. Mgujîm de Zarate, Liu. I. Chap.x I v,& Chap. c XXV. Or tous les Hiftoriens font dVn accord, que tous ces grands trefors , au moins la plus grande partie, furent cachés par les Indiens, apres que le Roi Atahualpa eut eftéprins, &onneles à peutrouuer iufquesici,fi ce n’eft qu’il en foit tombé par cas fortuit quelque partie entre les mains de quelqu’vn. Il V OCCIDENTALES. LIVRE XL 405 II y aiioit de plus les magnifiques Temples , qu’ils auoyent baftis ci & là au Soleil, comme à leur grand Dieu: & fur tous vn fort fomptueux dans la ville de Cufio, les parois duquel eftoyent couuertes,du pané iufques au haut, de plaques d’or. Et la figure du Soleil , comme on le peint ordinairement , eftoit toute d’or auec fes rayons : qu’vn Efpagnol ayant trouuee ioüa aux dez en vne feule nuid. Ce Temple refte en- core auiourd hui, & clt vne partie du IVIonaftere de S.Doyninic^ue. Auprès du princi- pal Temple il y en auoit quatre autres, le premier desquels eftoit dédié à la Lune, com- me femme & lœur du Soleil , les portes duquel & les parois eftoyent couuertes de la- mes d argent. L autre a lEftoille de Venus quils nommoyent Chajca ,\cs murailles I O duquel eftoyent aulîi couuertes d argent. Le troifieme au foudre, au tonnerre & aux efclaii s, qu ils nommoyent d’vn nom commun Jllafa. Le quatrième à l lris qu’ils nom- moyent Cuychti, qui eftoit tout couuert d’or par dedans. Outre iceux il y auoit vne mailon conioinde qui eftoit aufti couuerte d or poli du paué iufques au haut, dans la- quelle les fouuerains Preftres s afiembloyent, quand ils deuoyent vaquer aux chofes faindes , lefquels deuoyent tous eftre delà lignee Royale. Il y auoit en diuerfes Pro- umees d'autres T emples baftis en la mefmc façon , qui eftoyent aufti dédiés au Soleil, combien qu ils ne fulTent pas fi magnifiques que celui de Cufco', fi ce n’eft qu’on en excepte vn beaucoup plus antique bafti dans vne Ifte du Lac de Titicaca.cyiQ les In- diens veneroyentfur tous, comme aufti nfte,pource qu’ils tenoyenc que leurs Rois io en eftoyent ilfus . car ce Temple eftoit aufti orne d or d’argent, & y auoit en outre fi grande quantité d’or & d’argent amalTee, que le conte qu’en font les Indiens eft piefque du tout incroyable. Or puis que nous auons parlé de leurs Temples , il ne fera point hors de propos d adioufter aufti quelque choie de leurs fuperftitions : nous auons dit au Liure pre- cedent que les ne tenoyent feulement que le Soleil pour Dieu: A icelui ils immoloyent prefque toutes fortes d’animaux, principalement de leurs brebis j com- me aulfi toutes fortes de grains, de breuuages & d’habits. Car les Incas abhorroyent de facrifierdes hommes; de mefme que le manger de la chair humaine, qu’ils defen- doyent fur tout ; combien que les Efpagnols ayent eferit au contraire. Ils auoyent plu- 5 O fieurs Preftres,defquels le Souuerain s’appelloit Fillac Vmu, c’eft à dire.Deuin ou Pro- phete; & leurs habits ne difteroyent en rien de ceux du commun. Ils confacroyent aufti des vierges au Soleil des 1 aage de huiét ans , qu’ils renfermoyent dans de.certai- _ nés maifons deftinees a cela, ou iln’eftoit point permis aux malles d’entrer, non plus qu aux femmes dans le Temple du Soleil, d’où fè peut voir combien ont efté trom- pés les Efpagnols qui ont eferit, que ces vierges lèruoyent aux chofes facrees auec les Prefties dans le Temple du Soleil : elles eftoyent le plus fouuent plus de mille dans la ville de Cufio , & prefque toutes du fang Royal , or celles dentr’elles qui eftoyent plus vieilles, eftoyent appellees CMâmacunas -, c’ à dire , matrones ou meres des plus leunes : elles conferuoyent vne perpétuelle virginité, & ne fortoyent iamais en 40 public, nin’eftoyent veués des autres femmes, encore moins des hommes, excepté delà Roine ou des filles du Roi, Leur principale occupation eftoit de filer pour les habits du Roi &: de la Roine. Or les veftements du Roi eftoyent premièrement vne chemife qui defeendoit iufques aux genoux, qu’ils appelloyent Vncu-, & vn petit manteau quarré, nomme YacolU ils portoyent en outre vne bourfe quarree, qui leur pendoit de l’efpaule gauche vers le cofté droit, dans laquelle ils portoyent leur Ctf£-^,qu il n eftoit permis de mafeher, durant le régné des /;^^^, qu’à eux feuls &à ceux de leur fang, quelques- vns des principaux exceptés à qui le Roi le permettoit par priuilege fpecial. Ils bandoyent leur tefte d’vn certain galon qu’ils nommoyent LUutu: lequel eftoit d’vn trauers doigt de large & aftes gros, qui enuironnoit la tefte io trois ou quatre tours j de plus vne bande rouge, laquelle conioignoit le diademe entre les deux temples. Les mefmes vierges cuifoyent le pain , duquel ils fe feruoyent aux facrifices fo- lenn^els , qu’ils appelloyent Cancu , & lequel ils oftroyent au Soleil aux iours des gran- des feftes Raymibecittua: commeauftî le breuuage que l' Inca bc ctux defon fang euuoyent a ces iours de feftes. Or toute la vaiflelle dont ces vierges Ce feruoyent, eftoit d argent ou d’or , de mefme qu’au Temple du Soleil. Eee 2, Il y 404 DESCRIPTION DES INDES Il y auoit de femblables Monafteres dans les autres quartiers du Royaume , dans lefquels eftoyent reclufes les filles des Curacas & d’autres aulïi,qui furpaflbyent en beauté ou elegance les autres ; toutesfois elles n eftoyent pas confacrecs au Soleil, ni ne gardoyent pas leur virginité, mais elles eftoyent concubines du Roi, & for- toyent hors des Cloiftres quand le Roi les appelloit : elles eftoyent neantmoins gar- dées par leurs MamacomSi^sQ^cQr(^oycnt à diuers ouurages, tiftbyent du drap,& faifoyent des veftements & autres choies pour le Roi ; qu’il partiftbit comme riches prefents à ceux de Ton fang, a les courtifans, & aux foldats qui ’auoyent fait quelque chofe de remarque. Or celles que le Roi auoit vne fois fait fortir ou qu’il auoit cognuës, n’eftoyent lo iamais renuoyees au Cloiftrc, mais elles feruoyent la Roine en Cour, ou eftoyent renuoyees auec vn fingulier honneur à leurs parents. Que fi quelqu’vne de ces vier- ges fe laiflbit corrompre fce que toutesfois ils ne veulent pas eftre iamais aduenuj la loi commandoit de les enterrer vifues ; & d’eftrangler celui qui les auoit corrom- pues, auec toute fa famille, & mefme fi nous en croyons GarcillaJfîiS:, tous ceux delà bourgade dans laquelle il habitoit. Enfin ces reclufes foit qu’elles fuflent encores vier- ges , ou quelles euflent couché auec l'Inca , n’eftoyent iamais données à d’autres pour femmes ni pour concubines: tant ils portoyent d’honneur à leur Roi & à fes femmes : bien que d’autres ayent eferit autrement, deçeus de ce que l'Inca mefme, marioit par fois pour certaines & fpeciales caufes , les filles de fes fubiets , notamment io des principaux , mais qui n’auoyent iamais entré dans le Cloiftre des Vierges. C H A P. XVIL Ve h F ejîe principale des Peruuiains,^« //f nommoyentYnti^ Raymi. Entre les quatre principales Feftes , qui eftoyent celebrees par les Incas dans la ville de Cufco, il y en auoit vne qui excelloit, qu’ils nommoyent Tntip Raymh c’eft à dire, fefte folennelle du Soleil, & fimplement Raymi: laquelle ils cele- broyent au mois de luin apres le folftice auec grande folennité : car lors s'aflem- bloyentde tous les quartiers du Royaume dans la ville, tous les Capitaines & Con-50 duàeurs de 1 armee,tous les Curacas & principaux du Royaume, qui y venoyentou en perfonnes , ou y enuoyoyent leurs enfans & parents , fi ils eftoyent empefehés de s’y trouuer ou par vieilleflé ou par autres occupations. Le Roi mefme commençoit les ceremonies , comme fils du Soleil & fouuerain Preftre , combien qu’ils auoyent toufiours vn autre fouuerain Preftre de la lignee Royale. Les Grands difputoyent entr’eux à qui viendroit à cette fefte le mieux orné & le plus rarement veftu. Il fe preparoyent tous à cette fefte par vn ieufne de trois iours , durant lequel ils s’abftenoyent du tout de la compagnie des femmes , & ne gouftoyent rien , excepté vn peu de Mays blanc, de l’herbe de Coca &c de l'eau pure: & il n’eftoit point permis durant ces trois iours d’alumer aucun feu dans la ville. Le ieufne eftantacheué, la 40 nuiéf dé deuant la fefte, les Preftres preparoyent les agneaux, les brebis & autres chofes neceflaires pour les facrifices , félon le nombre de ceux qui eftoyent venus à la fefte; & les Vierges dediees au Soleil cuifoyent le pain , nommé Cancu & faifoyent la boiftbn que l'Inca ^ ceux de fa lignee vfoyent; car pour préparer le pain des autres , il y auoit des autres femmes deputees. Par apres de grand matin , l'Inca fiiiui de ceux de fbn iang , chacun tenant le rang que fon aage & fa dignité lui donnoit, fortoit dans la grande place de la ville, nom- mée Haucaypato , & la eftans attentiuement tournés vers l’Orient , & nuds piés ,ils attendoyent que le Soleil feleuaft fur i’Horifon;& fi toft qu’ils le voyoyent,ils fe feoy- ent à terre, & ouurant les bras,efleuant les mains, & la bouche auancee, comme jo s’ils euflent baifé l’aïr, ils adoroyent le Soleil, comme leur fouuerain Dieu &Pere. Les autres grands' Seigneurs, faifoyent les mefines folennites dans vne autre place voi- fine, nomme Cujftpata. Le Roi puis apres fe leuoit , les autres demeurans aflis , & pre- nbit dans fes deux mains deux grands vafes d’or, quils nommoyent Aquilla, pleines de ce breuuage , duquel ils vfoyent; & de celui qu’il tenoit dans la main droite il beu- uoit au Soleil & â ceux de fa lignee, apres il verfoitle breuuage qui eftoit dedans dans , OCCIDENTALES. LIVRE XL . 40^ vn vafc d’or, duquel il y auoic vn tuyau de pierre élégamment poli qui alloit iufques au Temple du Soleil, de forte qu’il fembloit qu’il beuuoit cebreuuage. Etduvaifeau qu’il tenoic dans la main gauche, il beuuoit premièrement, puis il verfoit vn peu à tous ceux de fon fang, à chacun dans vne coupe préparée à cela , de cette fainôle liqueur. Mais les Curacas & ceux qui n’eftoyent pas de la lignée Royale , beuuoyent d’vne autre liqueur préparée par les Vierges. Cette ceremonie eftant acheuee, ils s’acheminoyent tous vers le Temple: où le Seul Inga ôc ceux de fon fangentroyent, fie le Roi feul offroit lui mefme au Soleil les vaifeaux dans lefquels ilauoit offert & beu , de adoroit le Soleil deuant iceux : les autres Mcas , comme aufïî tous les grands ï ^ Seigneurs qui eftoyent en la place deuant la porte du Temple, donnoyent leurs cou- pes aux Preftres , pour les offrir au Soleil par leurs mains, auec plufieurs animaux d’or & d’argent fort bien façonnés. Les oblations eflans finies , ils retournoyent chacun en fa place : & lors venoyent les Preftres auec vn grand nombre d’agneaux & de brebis du pais , qui eftoyent con- facrees au Soleil: defquels ils prenoyent vn agneau noir ('car ils prifoyentfort cette couleur) de d’iceluiils prenoyent les aufpices: & l’ayant couché à terre latefte vers l’Orient, ils lui ouuroyent le cofté gauche, duquel ils tiroyent promptement auec les mains le cœur,& les poulmons auec la tranche artere ; or ils eftimoyent cela pour vn bon prefage quand les poulmons fortoyent encore palpitans de pleins d’efprit vital; lo & pour vn mauuais fi l’agneau, cependant qu’on lui ouuroit le cofté , s’efehapant des mains de ceux qui le tenoyent, feleuoit fur fes pies, outre d’autres chofes qu’ils re- marquoyent de mauuais prefage. Que fî l’agneau leur fembloit de mauuais prefage,ils prenoyent vne brebis de ainfi confecutiuemenn Par apres ils immoloyent plufieurs agneaux de brebis, mais non pas auec la mefme folennité , car ils les efgorgoyent feu- lement, &en confommoyentle cœur & le fangau feu, qu’ils tiroyent du Soleil par vn certain artifice naturel. Or ils rotiftbyent la chair en public, de l’y mangeoyent eftant roftie auec vn fingulier ordre de ioye : de apres auoir mangé , ils s ’empliflbyent tous de beaucoup de breuuage, par vn ordinaire vice de comme naturel à ces Indiens. Cette fefte duroit neuf iours , laquelle s’acheuoit principalement en banquets de iO- hoiries ; de eftans acheués chacun retournoit chés foi. C H A P. XVIII. Dii langage des Peruuiains leur Poefie. YNca GarciUaJfm(<\\jii l’a bien pu fçauoir)dft en plufieurs endroits, que le langage des P^ü,fonc communément à trois ou quatre lieues du riuage, par fois defeendent iufques au riuagc mefme & font batuës des flots de la mer, comme il fera remarqué en fon lieu. Au refte c’eftvne région fort belle & ferti- le, & non moins fécondé entoures fortes de grains que l’EIpagne, abondante aufli bien en froment qu’en vin,& remplie à merueilles de pafturages .-elle eftaufli faine 10 extremementbien temperee entre lechaud &lefroid,iouïflantegalement del’efté &: de l’hiuer félon le changement des faifons : le printemps y commence dés Septembre, l’efté dés Décembre, l’automne dés Mars,& l’hiuer dés luin : le plus long iour y eft à la S. le plus court à la S. Bermbe: toutesfois ils fentent plus de chaleur l'efté que de froid l’hiuer, il y a peu de tonnerres & d’efclairs. 11 tombe en certains temps dans quelques valleesvne rofee fi efpaiffe, qu’elle fe congele & s’attache aux fueilles des plantes comme du fucre , laquelle eft fort douce & a prefque lemefme vfage quela manne. L’herbage y eft prefque toufiours verd à caufe de la bonne humidité de la ter- re,&: les arbres ne laiflent iamais leurs fueilles dans les montagnes : les pafturages par l’ordonnance du Roi d’Elpagne,y font communs a tous & à vn chacun des habitans: io&i le droit de chafler & pefeher eft commun , tant en la merqu’és riuieres , lacs &: eftangs : Ceux qui y voyagent fontpar vne couftume receus,traidés & logés pour rien dans les villes & villages. C H A P. IL aAnim aux ^fruiUs^i^ fiant es de ce Goumrnenient ^ mœurs des naturels, En toute la contrée du Peru il s’y trouue viie forte de brebis, tant domeftiques que fauüagcs,qui approchent plus en forme dés chameaux , fi ce n’eft quelles n’onc point de boffe, elles font au refte plus grandes que celles de l’Europe & hautes le ^ plus fouuent d’vne aulne d’Efpagne,ayans le col long & rond, la leure d’enhaut fendue, ^ ° par laquelle fente elles iettent, quand elles font fachees,derefcume cotre ceux qu’elles penfentles auoir offenceesjleur chair eft plus feicheque celles des brebis de l’Europe j lespriuees fontde couleurle plus fouuent blanche ou noire, &:quelquesfois cendree; mais lés fâuüages & des montagnes font rougeaftres ou fauües} & font veftuës de laine longue , legere & fort luilante, qui eft Ipeaucoup plus chere que celle d’Eipagne : car quand la toifon d’vne brebis eft vendue en Efpagne vne realle( ce font les propres mots d’vn Autheur Efpagnolj celle d'vne de ces pais eft eftimee vn efeu. De cette lai- ne ils tontvn certain drap,qu’on dit approcher fort en luftre du camelot. Au refte ils percent les oreilles à ces brebis, & paflent des cordes dans les trous, auec lefquelles il$ 40 gouuernent & conduifent comme il leur plaift ; car eftant libres elles courent fort ville, principalement les fauuages, qu’on dit eftre aulTi legeres que les cheuaux. Mais nous en auons parlé plus amplement en la defeription du Féru. Michard ^aitmenüon d'vn certain petit animafquife trouue là, qu’ils nom- ment Chincilla.de lagrolTeurd’vn efcurieu,de couleur brune, mais dVn poil fort leger & poli,de forte que fa peau furpalTe celle de tous autres animaux, & eft en grande efti- me de tous dans ces régions & dans les voifines dxxPeru. Outre le froment,rorge,le^Æj)/^,que la terre y produit en abondance, il y croift en- core vne autre forte de blé,qui eft nommé des naturels Teca, -, fes fueilles different fort peu de celles de l’orge ; le tuyau croift comme l’auoine de lahauteur d’vne demi-aulne d’Efpagne, le grain eft vn peu plus menu que celui du fegledes Sauuages ont cou- ftiimedelemoiflonnerauantqu'ilfoitdu toutmeur & deiefeicher en efpics au Soleil, puis l’ayant efeous lors qu’ils en ont befoin,de le griller fous les cendres,& enfin eftanr rqfti de le réduire en pafte fur vne pierre quarree auec vne autre ronde ,* laquelle pafte ' ils portent auec eux quand ils voyagent,car elle nourrit fort,de forte qu’vne petite meé furefiiffit à vn homme pour huiétiours; cela leur fert de viande & de boiflbnjcary meftant vn peu d’eau, c’eft leur manger, & eftant fort deftrempee ils s’en feruent pour breuua^e. O En Fff a 4IZ DESCRIPTION DES INDES En autre iis’y trouue par tout vne certaine forte d’arbres fauuages depuis le xxxvi degré de la ligne vers le Sud , iufques au Deftroit de MâgâEân , qui porte des fruids affemblés par grapes & pendans comme les raifins, de la grofleur des pois, de la forme des grains de grenades, & de la mefme couleur : les naturels appellent cet arbre Vnni^ & les Efpagnols MurtilU; les fruids font d Vn gouft moyen entre le doux & l'aigre; qui efchauffent & delfeichent: la liqueur qui s’en tire, approche fort du vin , & n’eft pas feulement agréable au palais , mais eft aufli fort conuenable à l’eftomach : car elle digéré les humeurs fuperfiuës du corps & notamment celles du cerueau;aide Tappetit du ventricule ; & eft fort claire , fe defehargeant naturellement de fa lie fans l’aide du feu ; il fe fait aufti de ces fruids de fort bon verius , qui eft beaucoup plus excellent en i o odeur & faueur, que celui qu’on fait d’aigret. Or il n’y a rien qui rende ces Prpuinces plus recommandables que l’abondance ' d’or, qui y eft ft accompli, qu’il iurpafle de beaucoup celui de toutes les autres Prouinces. On dit que depuis que les Efpagnols y font entrés, qu’ils s’y trouue vn fi grand nom- bre de cheures , qu’on en tue tous les ans plus de cinquante milliers feulement pour en auoirla peau & le fuif Le froment y eft auflî grandement eftimé : cari’ai vn Autheur qui dit que les grains de froment approchent de la grofleur des pinnons de pommes de pin ; d’où vient que bien fouuent ils aident le ?eru de viures ; ce qui eft fort facile aux Chilûis , pource que le vent eft toufiours fauorable de Chile vers le ?eru. lo Les naturels y font de couleur blanche , mais ils ont le front petit & cheuelu , qu’on veut procéder de la trop grande humidité de l’aïr: anciennement ils alloyent prefque nuds, mais maintenant ils fe plaifent à eftre veftus : ils s’employent auflî fort à nourrir des brebis, fçauent carder la laine & tiftre des draps. Au refte à caufe des guerres con- tinues , que les K^rauedns & leurs confédérés ont défia eu depuis plufieurs années alTiduellement auec les Efpagnols , le pais eft pour la plus grande partie mal cultiué & mal peuplé ; car il n’y a nulle partie de l’ Amérique qui coufte plus cher aux Efpa- gnols que chile, & il n’y a nul endroit où ils ayent des demeures plus incertaines,- &: où ils fouflfent plus & de plus griefues pertes d’hommes, que là, &: fouflrent encore tous les iours, comme nous dirons bien toft plus à plein. 5° C H A P. III. Defirt d’Atacama, des chemins qui ^ont de Peru d Chile, de U Ÿremtere expédition d’Almagro dans ces Prouinces. IL y a vn grand defert, appelle vulgairement Jtaca^a , qui feparele Parlement de los char cas ou la partie Meridionnale du Peru, des Prouinces de Chile: Or de Peru au Chile, il y a deux chemins terreftres qui conduifent de l’vn à l’autre (deC- quels toutesfois les Efpagnols fe feruent fort rarement) l’vn par ce defert , & l’autre par les montagnes. Ce defert d’Jtacama a de long entre le Nord & le Sud , le long de 40 la mer Pacifique nonante ou cent lieues , eftant coupé quafi par le milieu du Tropi- que du Capricorne: c’eft vne'region fort trifte& laide à voir, grandement feiche ôc fterile pour la difette d’eau, & defnuee du tout d’arbres, non feulement de fruiûiers, mais aufli de fauuages , la terre nuë & fans herbage, excepté en deux ou trois endroits où il croift quelque peu d’herbe & où vaquent quelques brebis de ces pais fque nous auons dit eftre appellees Guamcos) en l’hiuer le Ciel y eft fi mal plaifant, & la terre fi affreufe de neiges & de gelees, qu’on n’y peut voyager fans grand danger & par fois fans vne afl'euree mort. Prefque au milieu pafle vn torrent ou vne riuiere que les Efpagnols nomment Rio de à X XIII degrés & x l v fcrupules de la ligne vers le Sud , qui defeendant des jo "montagnes lefquelles ferment ce defert vers l’Orient, coule par cette terre alteree & par vne fort profonde vallee vers l’Occident, & entre enfin dans la mer du Sud à XXII lieues des Xaguyes ( ainfi font nommés certains puits, defquels ceux qui voya- gent par ce quartier puifent leur eau, fans qu’il s’en rencontre aucun autre en route cetefpacede xxii lieues.) Or on l'appelle pource que les eauxd’icclle font fl falees, qu’elles fe conuertiflent auffi toft en kl dans les vaiflTeaux & mefmes dans OCCIDENTALES. LIVRE XII. 4,^ les mains de ceux qui les puifent, & fes riuages blanchilTenc coufiours de for- cc Tel. Le fécond chcniin qui vadu Pem dans le CfoVe, palTe par les montagnes . beaucou n plus long, plus dillicile &de beaucoup plus dangereux que l’autre j car ilfaut trauer^ lerauec grand péril les hautes cimes des qui font couuertes de neiges perpe tuellcs &ii froides, que nul homme ne peut entreprendre d’y paffer fans vne mort preiente , h ce n’eft quelque peu de mois de l’annee. Car il y fouffle ( comme Acofia alîeure)vncertamventfubtil&debile,quipenetre les corps de telle forte, que les hommes tombent à 1 improuifte, & meurent fubitement auant qu’ils fefententmou- I O rir J toutela chaleur vitale,comme il eft à croire , eftant tout à coup efteinte par ce vent : comme nous auons entendu qu’il aduint en la première expédition doDiePo ^Imagro vers lesProuinces decto, en laquelle plufieurs perfonnes furent efteinâ parce vent, les corps defquelles furent trouués plufieurs années apres tous entiers & qui ne rendoyent nulle mauuaife odeur, comme les Efpagnols ont remarqué : ^co/îl cette chofe, que nous payons en ce lieu à Or le chemin qu’entreprint Diego Almagro fut tel : l’an de Chrift cîo Id xxxvi eftant parti auec fes troupes de la P tonincc de los charcas ^ il vint premièrement à Topija , qui eft vne bourgade dans la Prouince des Chicasi de laquelle il paffa vers la ao 1 rouince des Sauuages appelles Xuxuyes (defquels nous traiderons ailleurs) nation belhqueufe &: accouftumee à viure de chair humaine : de cette^ci il enrra dans la Prouince àcChaqmna-, & delà marchant plus outré à trauers des régions vafles & defertes , ( car toute la terre y eftoit raboteufe, nitreufe & du tout fterile) il arriua par vn fort difficile chemin & ennuyeux au piè des montagnes, les fommets defquelles blanchifloyent de force neiges : & n’eftant encore point lafTé par les incommodités qu ils auoyent endurees, iii eftonné de plus grandes qui fans doute le menaffoyent, il marcha auec vne difficulté prefque indicible par des droits coftaux pleins de pre- cipices ,• ou il perdit beaucoup d’hommes & de cheuaux , qui fubitement tom- boyent roides morts par ce froid extreme & par ce vent mortel que nous auons dit; ! 0 neantmoms il monta lufques au hauts fommets des Andes ^ & delà defeendit dans la vallee de Copiapo.on les Prouinces de Chile commencent, par vne deuallee d ’enuiron douze heues. Enfin retournant dans le PemÀl paffa par le defert d’Atacama, non fans perte d hommes & de cheuaux. Par icelui paffa auffi l’inca Tmanqui anciennement vers les Proumees àeChtle & entra lufqucs à la riuicre de Maule, comme il fera dit en fon heu. Or les Efpagnols pour les difficultés & dangers de ces deux chemins, y vont prefque toufiours par mer j & rarement par terre le long de la cofte marine, par le defert d Atacama , renonçans tout à fait à ce dangereux des montagnes ,• excepté du cofte, que nous monftrerons ci-apres. ^ Les Efpagnok ont remarqué en outre, que depuis les xxiii degrés ou enuiron O de la ligne vers le Sud, lufques prefque au Deftroit de AfW/» , il ny vente com- munement quede trois coftésdumonde : fçauoirdu Sud-oueftau moisdupHntemps & de 1 elle & quelque peu d autres iours aufquels le Ciel eft clairs du Nord au mois d hmer & au temps des pluyes , enfin de l’Oueft . qui eft fort dangereux & contraire à La Prouince àe chile a fon Gouuerneur , qui obéît au Viceroi du Pen , & eft rfawé's & habitans Efpagnols ont efté autresfois iutti- U arlement d^ Ltma, auant qu il y en euft vn d’eftabli ; mais maintenant ils ont vn propre fiege ludicial dans la ville de 5. lago : & ont en outre deux Euefehés, a onze vdles ou bourgades habitées de leur nation , defquelles nous parlerons félon leur ordre, félon quelles font placées fur la mer du Sud. " Fff Ch A Pt 4H DESCRIPTION DES INDES C H A P. IV. Dejcription des premières yallees du Gomernement de Chiie, Copiapo, Guafco Chili. La vallee de CopiapOy qui commence les Prouinces du Royaume de Chile (com- me on l’appelle vulgairement^ fuit les dernieres limites & defert d' Atacama,<\ViÇ. nous auons acheué de defcrire ci-deffus. On dit que ce mot fonne en la langue des Saunages, Champ aux pierres bleues (que nous appelions communément Tur- qmifes) car il fe tire vn grand nombre de ces pierres d’vne certaine montagne qui eft i o efleuee fur cette vallee, qui font bien excellentes, mais qui pour la trop grande abon- dance font auiourd’hui peu eftimees ; &ne font pas prifees comme anciennement. Cette vallee eft loüee pour eftre laplus fécondé de toutes celles qui font attribuées au gouuernement de chile, car elle porte du Mays qui a les tuyaux aufti hauts que des lances, & des efpics longs de demi-aulne j de forte que la moÜTon furpalTe lafemen- ce de trois cents fois par vn grand rapport, comme efcriuent les Efpagnols : ce qui toutesfois ne fera pas tenu pour incroyable ni efrnerueiilable par ceux qui fçauentla fertilité de ce grain. Cette vallee n’eftpas moins fertile en d’autres fruids tant do- meftiques , qu’en ceux que les Efpagnols y ont apportés. Il y a vne petite riuiere qui la coupe , laquelle defcendant du haut des monts de neige, arrôufe cette vallee io par i’efpacc de vingt lieues , & enfin defcend dans vne large baye fur la mer Meri- dionnale, & là fait vn fort commode & large port; elle eft diftante de la ligne vers le Sud de XXVI degrés, comme dit Herrera. Lofez. Vdzio afleure qu’il y a en cette vallee vn petit port & auprès d’icelui vn villa- ge de Saunages, qui font tributaires aux Efpagnolsj & qu’il y a aufti vn moulin à fucre. Du port de la vallee de CoftAfo-, iufques au port de la vallee de GuaJcOt on conte XXXV lieues. Ce port ou rade eft diftant de la ligne vers le Sud de xxix degres, comme efcrit Herrera : il eft dans vne baye ouuerte fur la mer du Sud, par laquelle Ce defeharge en mer vne petite riuiere, laquelle lourd des montagnes de neige, quijo couurent cette vallee du cofté de l’Orient, & arroule les champs de cette vallee de forte, qu’elle approche fort en fertilité & bonté de grains delà vallee de Cofufd que nous venons de defcrire. Dans cette vallee, comme prefque en toutes les autres , il y a vn nombre infini de perdrix ,• & ce qui eft le principal, c’eft qu’il s’y nourrit vne j grande quantité de brebis dont nous auons parlé: en outre force efeurieux, de cou- leur cendree brune , les peaux defquels font en grand viage. Valdima quand il arriua premièrement pour fubiuguer les Prouinces de Chile aucc fonarmee, plaça vne Colonie d’Efpagnols dans cette vallee de Guafeo , & y baftit 1^ ville de S. Tagode U TfguuA Ejîremadura , comme il la nomme lui mefme, munie d’vn bon Chafteau à l’encontre l'effort des Saunages , au territoire que les naturels ap-40 ipeWoyevit Adafocho enuiron xiv lieues de la mer du Sud, & dvn petit port fort commode : ‘mais cette ville fut de peu de duree, & fut tranfportee ailleurs , comme nous dirons au Chapitte fuiuant. Olyuier de noftre nation remarque en fes Commentaires , que le port de Guafeo eft fur les XX VI II degrés & xxx fcrupules au Sud de la ligne, & que lanchrage y eft fort commode & afleuree à l’encontre de l’iniure des vents, derrière certains rochers qui font au deuant de l’emboucheure de la baye : dans cette baye defcend vne belle petite riuiere , qui eft communément appelleedu nom de la vallee, mais il eft diflmile d’y prendre de l’eau : il y a peu d’arbres fur cette cofte ; & les cafés des Sauuages font fort loin de la mer du Sud. Apres la vallee de Guafeo fuit celle de Chile, la principale de toutes les autres voili- nes, d’où il eft à croire qu’elle a donne nom à toute cette cofté & Prouince . il y ^uoit anciennement dans cette vallee des mines d or fort célébrés, qu on nomme de lota , defquelles Valdmia a tiré autresfois de grands trefors,- voila pourquoi il y auoit bafti vn Chafteau , pour garder les Mineurs de l’iniure des Sauuages. \ C H A P. OCCIDENTALES. LIVRE XII. C H A P. V. Définition des Villes de la Serena de S. lao-o. t> La prcmicie ville du Gouuernemcnt de Chik, & qui eft la plus proche du rem, eft appellee des Efpagnols U SmM-.cllc fut baftie par le Gouuerneur Valdiuia lan cIdId xliv , dans la vallee de Coquimbo (d'où vient qu’elle eft louuent appellee des Efpagnols & des noftres Coquimbo du nom de la vallee) afles près de la mer du Sud; & à xxx degrés au Sud de la ligne félon Herrera-, par lequel I 0 je trouue qu’il a efte remarqué . que la Solftice d’efté tombe là l’onzieme de Decem- bre (& que le plus long lour eft de xi v heures) & l’hyuernal l’onzieme de luin. Elle eft diftante de la ville de .y. lago de l x lieues vers le Nord. Elle a vn port fort grand & fort commode dans vnc large & fpacieufe baye, qui eft à enuiron deux lieues delà ville ; la ou le defchargent les nauires. Il y a vne moyenne riuiere qui trauerfe le ter- ritoire de la ville, par laquelle plufieurs champs font arroufés, de maniéré que toutes iortes de grains & de plantes y croilTent fort bien : par ainfiil y a abondance de viures & vihce de homent , de vin , de chair, de poiffon , & vne grande affluence de toutes cho es que 1 vfage de la vie requiert. Il y pleut fort rarement, à peine trois ou quatre tois l’an , neantmoins il p de tres-beaux champs , qui rendent richement la femence. 10 11 y a dans le territoire de cette ville, beaucoup de mines d’or, & fur toutes vne haute montagne a v ii lieues de la ville, de laquelle les Efpagnols ont. défia de long temps tire beaucoup dot. loin* qu’il y a . comme le l’ai apprins d'vn cettain de ces pais, qui l’auoit veu, proche de la ville, vne montagne remplie de veines de cuyure. Lapez nicknt que la ville de U Serem contient plus de deux cents maifons : & cet- tes il faut qu elle foit affes peuplée, veu qu’il eft narré en i’Hiftoire de cette mémo- rable expédition Nauale de François Drac, par laquelle il nauigea autour du globe terreftre,que les Anglois eftans entrés dans le ipondQCoquimbo,^ s’y eftoydnt anchrés pour y prendre de 1 eau, il fortit de la ville trois cents Caualiers & deux cents hom- mes de pie , qui contraignirent les Anglois de fe retirer dans leurs nauires. Toute O cette région a efte autresfois fort peuplee des naturels du païs, mais maintenant la plus grande partie d iceux ( fi non tous, comme quelques-vns eferiuent) a efté de- Itruiae des Efpagnols ou par labeurs intolérables aux mines, ou par vne grande cruauté , de forte qu a prefent les Citoyens ne font pas capables de chercher & tra- uailler.es mines parla difette d’ouuriers & font contraints d’en laifler plufieurs d’or ix de cuyure lans y toucher. En outre la principale ville de ce Gouuernement de Chile eft vulgairement appel- lee lago : fituee a x xx i v degrés de la ligne vers le Sud ; & a L xx v 1 1 du Méridien & J. o e e vers Oueft: a xv lieues de la mer du Sud. Le Gouuerneur de toute la ^ ^ . 1 V . «jouuciiicur UC coure la rouince y a tait quelquesfois fa demeure ; mais maintenant à caufe des guerres des O 21 0^ raucains,! re ide le plus louuent dans la ville de la Concepeion î II y a à prelènt depuis quelques années vn fiege ludicial: Ily aauffi vne Eglife Cathédrale & quel- inaifonsTBourlLft ^ Cordeliers i ôr fi nous croyons Lopez, VazMiOi cents Le territoire de la ville eft fertile, & abondant en froment, vin & autres fruids : riche en veines d’or & fort peuplé auiourd’hui des naturels du païs, puis qu’il y a dans ce Diocefe prefque quatre vingts mille Sauuages, repartis en xxvi tributs, qui payent tribut & font feruice gratuit aux Efpagnols. Il y a fi grande quantité de che- naux, que plufieurs vaguent fans maiftres dans les champs & forefts , & font fi fauua- ges , qu on ne les peut pas aifement dompter. O BtegoTernmâez dans fon Hiftoire du Ten dit, que la riuiere !),<*& s'eftant efforcée par des faufts de montagnes & ayant paffé par là , entre enfin dans la mer du Sud : ils nomment ropccalmaynee autre riuiere qui coupe la ville ou paffe le long d’icelle : delcend puis apres dans le port de cette ville,nommee vulgairemét rulparaili, le meil- leur & plus renomme de toute cette cofté.il eft diftant de la ligne vers le Sud de degres & XI. fcrupules, comme ila efté curieufement & exaftement ob- crue ng ois. Dans ce port fe defchargent toutes les marchandifes qui viennent par 41^ DESCRIPTION DES INDES par, mer de Lima, & des autres ports du Vem , & on y charge aufïi tous les trefors qui s'amalTent dans les Prouinces voifines & s’amenent là. Le valeureux Cheualier Dr^f,eftant entré dans ce.port au deceu des Efpa- gnols,il print vn nauire.dans lequel il trouua vingt cinq mille pezos, comme ils les ap- pellent 5 d’or de Valdiuia fort parfait, & grande abondance devin de chile\ & eftaiit defcendu à terre, il trouua là mefme neuf ou dix maifons auec vne petite chapelle, que fes foldats pillèrent & bruilerent. ■ , L’armee de mer des Prouinces Vnies des Pays-bas, fous la conduite de Georges SpL- y arriuant, trouua auffivn nauire à l’anchre.que lesEfpagnols bruflerentauflî toftjde peur que les noftres ne s’en feruiifent : il accourut en outre au port plufieurs 1 0 Cauaiiers & gens de pié,qui bruderent quelques loges , de forte que nos gens n’ypeu- rent rien faire de remarque. Enfin à quatorze lieues de la ville paffe vne riuiere,que les Saunages nomment ChacapbL Or la vallee dans laquelle la ville de S. lago eft baftie , eft voifinc de la Pro- uince des peuples qu’on appelle d’vn nom de la nation Parmacanes, on comme GarciU les appelle Purumaucas-, par laquelle on va àlariuiere dcMaule^éc aux bourgades de Gueler & de Tata ,• & plus outre à ^ilacura. C H A P. VI. Defcriptïon de U Ville de la Concepcion de l'ifle de S. Marie. La troifieme ville de ce Gouuernement dire de la Concepcion, eft fituee fur la co- fte de la mer Meridionnale.fur vne baye ouuerte & auprès d’vn fort commode port : le territoire d’icelle a vers le Nord la riuiere de Maule,vQts le Sud le fleuue Biobm f car il n’y a point de doute cpiHerrera ne fe foit trompé, qui lui donne pour bornes vers le Sud la riuiere Ttaten on Itatayan, veu qu’il eft tout certain que cette ri- uiere fort en mer à quelques lieues de la ville vers le Nord, fi ce n’eft que d’auanture cette ville ait anciennement efté fituee ailleurs. ) Elle eft diftante de la ligne vers le Sud de trente fix degrés & quarante fcrupules: lacofte s’encline en cet endroit l’cipa-p ce de vingt trois lieues vers le Sud-fud-oueft. ^ De la riuiere d' Ttaten iufques au port que les Efpagnols nomment de la Herraâuray ( pource qu’il reprefente la forme d’vn fer à cheual ) on conte trois lieues : ce port eft fort commode & excellemment bien muni à l’encontre de l’incertitude des vents; il eft diftant de la ligne vers le Sud de trente fix degrés & trente fcrupules : d’icelui iufques à , auprès duquel la ville de la eft baftie, il y a quatre lieues. Dans cette baye fortent deux fort petites riuieres oupluftoft ruifteaux, le plus petit defquels trauerfe la ville, & l’autre pafle vn peu loin de la ville vers le Sud,& fe nomme Rio de Landalienyàc la vallee voifine qui eft appellee Anddien. Or le riuage,qui eft en cet endroit fort eftroit,eft bordé de colines & montagnettes, defquelles le port eft garenti, excepté contre les vents de Nord-eft & de Nori du co- fté defquels il eft expofé aux tempeftes. Et combien que ces colines,& meftne le terroir de la ville ne foit de foi ni fertile ni d’vn bel afped,neantmoins par rinduftrie & culture des hommes il eft à prefent fort deledable ; car on y voit plufieurs vergers & iardins cultiués par les Efpagnols , beaux avoir & remplis de toutes fortes de fruids. La mer qui eft proche de la ville eft extre- ment poiflbnneufejaupres du riuagc fe voitauflî vne perriere, de laquelle on tire cer- taines pierres noires & bitumineufes,qui feruent aux Bourgeois de charbon. Or pour- ce que ce port eft expofé aux vents de Nord,& mal afteuré quand ils foufllenr,les bons Pilotes ont couftume d’anchrer derrière vne certaine petite Me, qui s’eftend au de- _ uant de la baye, afin d’eftre défendus à l’encontre des vents de Nord-eft. ' ' Il y a deux lieues de la ville iufques à la riuiere de Piohio ; cette riuiere eft fort large & profonde,de forte qu’on ne la peut pafter à gué, toutesfois elle n’eft pas capable de porter des nauires: d’icelle iufques à la ïinÏQtQ Labapi il y a quinze lieues ; ô^enTef , pace d’entre-deux il y a vne baye fort large , fur laquelle eft fituee la Prouincc d’Araucana. i En OCCIDENTALES. LIVRE XIL 4,7 EnoutrclaviIIedelaCi;»^^/«V;?efl;dirt:anccdecelIede.S’./4^ & le troifieme dans x^ratico : afin de lier par iceux comme par des ceps , & contenir malgré eux en leur deuoir,ou contraindre à obeïr ces furieufes nations qui n’auoyentiamais efté aupara- uant domptées par les Rois du Peru : & pource qu’il remarqua peu apres de fort riches veines d’ordansvne plaine, que les Sauuages nomment Ongol, ily mena auffi vne Co- lonie dans la villette de los Confines ycomme, ils l’appellent; afin quelle fuft comme au lo milieu des deux villes fufdites , qui fut toutesfois abandonnée & tranfportee ail- leurs. Cependant les naturels ennuyés de ces nouueaux venus & mal accouftumés à la feruitude,eftimans qu’il fe falloir efforcer de tout leur pouuoir,pour fecouer le ioug deceseftrangersdedeffusleurcol&deleursvoifins;ayans fait entr’eux plufieurs fe- crettes affemblees , attaquèrent les Efpagnols à la defpourueuë, & priqdrent de gran- de furie premièrement le Chafteau qui eftoit dans la Prouince de Puren; car les Ef- . pagnols n’eftans pas forts affés, pour fouftenirvne fi grande multitude de Sauuages, auoyent défia abandonné de leur gré l’autre qui eftoit dans Tucapel , & s’eftoyent ioinds auec la garnifon de celui de Puren i ôclàayansfait venir du fecours du Cha- fteau s’en allèrent refolus au deuantde leurs ennemis,par lequel ayans efté j o deffaits & mis en route, ils n’eurent qu’vne feule retraite vers le Chafteau dl Arauco. Leur Gouuerneur eftant aduerti de ces chofes, marche en toute diligence vers le Cha- fteau, lesfiens ly encourageans , 6c à grandes iournees,tire auec lui foldats feule- ment vers fes ennemis , qui eftoyent autour du Chafteau de Tucapel: 6c comme il fut arriué à campagne fort renommee en ce quartier, il enuoya deuantvn de fes Capitaines auec dix hommes, pour cfpier de près le camp & le deffein des ennemis, qui fe précipitant dans vne embufeade auec fes gens, fut taillé en piece par iceux: Le Gouuerneur fans s’eftonner de ce defàftre,s’auança, mais il fut batu des Sauuages, print la fuite auec quatorze de fes gens reftés de la deffaite, &fe retira aux bords de la riuiere de Ledi, où il fut tué auec iceux, & ne refta de cette tuerie qu’ vn ieu ne Chreftien , lequel porta les nouuelles de ce malheur à ceux qui auoyent demeuré dans \2L gnni^on d’ Arauco. * C’eft vne chofe mémorable ce que Lopez.Faz> 6c autres racontent, que Valdiuia eftant tombé vif entre les mains de fes ennemis,ilslefirentmourir en lui verfant de l’or fondu dans la gorge, ces Sauuages lui reprochans qu’en fin ils l’auoyent faoulé d’or dont il auoit eu fi grande foif. Ce que toutesfois n’eft pas eferit par d autres. Les Efpagnols qui auoyent efté laiflés dans le Chafteau d'Arauco pour le garder, ne voyans autre remede cofitre le danger qui les menaçoit, abandonnans la place fc retirèrent dans la ville de la Concepeion : 6c ceux de la garnifon de Puren dans celle de ITmperial. J o Apres cela François de la Villagra Lieutenant de Valdiuia, (efforçant de vanger la mort de fbn Capitaine 6l de tant de foldats , partit auec cent 6c foixanre hommes de pié delà ville delà mais ayant trauerfé la riuiere de 6c eftant défia venu à la veue du Chafteau d’Arauco, auprès d’vnc pointe de terre batuë des flots de la mer, nommee des Efpagnols la Raquette, il rencontra vne grande multitude de fes ennemis, quil’attaquerent fi furieufernent, qu’ayant perdu en ce combat non an te 5^ fix OCCIDENTALES. LIVRE XIL 41P fix de Tes gens, il fut contraint de s’enfuir hadiiiement & de gaigner la ville de la Con- cepeion. Les Efpagnols apres tantde pertes receuës en fi peu de temps, commencèrent à perdre courage, & craignant encore de plus grands maux des Saunages qui les menaçoyentjayansabondonné la ville de la Comepeion, fc retirèrent dans celle de 5. Iago:\cs autres villes fçauoir F///^ Rica, & los furent auffi quittées par eux, pource qu’ils fe cognoiffoyent à peine fuffifans de garder lago & l Impérial. ^ Or ces Saunages fçauent bien autrement mener la guerre que les autres, car ils fçauent tenir leurs rangs & manier dextrement les armes: leurs armes font l’arc & les fléchés , de longues piques , & des fourches ,* mefines ils fçauent faire fort genri- I O ment des bourguignottes, des rondaches & des cuiraffes de peaux de loups marins, ils ferroyent anciennement leurs piques de cuyure , & maintenant de fer, duquel ils ont eu vne grande quantité des Efpagnols: mefmes ils ont apprins à fè feruir fort dextrement des armes qu’ils ont oftees aux Efpagnols en combatant. Au refte ils difpofent en leurs combats leurs gens en bataille a la façon prefque des Europeans, 6. gardent les rangs & la difeipline Militaire; ont apprin.s auffi à faire des trenchees &a fortifier leur camp ou il en efl befbin: à attaquer leurs ennemis par embufehes, a fiirprendre leurs villes aladefpourueuë, & prendre & brufler leurs villages & mé- tairies. Ils font vaillans au combat & fans peur,& ont fouuent fait de grandes deflàites ÿs Efpagnols, & en ont fouffert aufîî quelquesfois: de toutes lefquelles chofes les 20 Hiftoriens Efpagnols font mention & en ont eferit prefque autant qu’il eft poflible, qui feroit long de reciter ici & peut eflrre hors de nofire deuoir. Seulement nous di- rons ceci en pafTant, que ces Sauuages ont tant fait parleurs armes & vaillance, que les Efpagnols tiennent vne fort petite partie de leurs païs , & ont efté contraints d’a- bandonner plufieurs Villes, & de quitter diuerfes Prouinces & qu’ils fe peuuent à peine défendre de leurs armes. Car encores que les Efpagnols , apres la miferable in- fortune de Valdiuia , tant de pertes receuës des Araucams & leurs confédérés, euffent quelque peu refpiré,du temps que G arfias de Mendoza, fi\s du Viceroi du Peru, y efloit Gouuerneur (qui auoit amené vne bonne partie de ces Sauuages à obeïffan- ce) neantmoins les Sauuages recommencèrent laguerreauec plus deffortque iamais, JO & fe portèrent fi vaillamment & refoluëment, qu’ils ont laiffé peu de villes auiour- d hui aux Efpagnols, & fi mal affeurees, qu’ils attendent tous les iours l’ennemi à leurs portes, & font contraints de faire foigneufe garde iour&nuiét Au refte cette ^ïiowixicQ d Aratteo célles de Tucapel & de Puren, qui font prefque tenues pour vne, & appellees des Efpagnols vulgairement El Ejlado de Arau- co , coxïxvciç, Alfonje de Erziüa les nomme en fon renommé Poème, eft contenue en- tre des limites fort eftroites, car elle n a de long que vingt lieues ou enuiron , & à peine fept de large. On croit qu’elle foit riche en mines d’or, mais l’accès n’en a pas efté ouuert aux Efpagnols iufques a prefent, voila pourquoi elles font encore auiourd’hui fans 40 eftre trauaillees.Laplus grande partie d’icelle eft releuee en montagnes ou hautes co- lines ; du cofte qu elle attouche la mer du Sud ce font pluftoftde droits rochers que des riuages; elle reçoit la mer dans vne grande & fpacieufe baye, dans laquelle on eftime qu il y a anchrage fort fèur , mais la defeente y eft grandement difficile. En- fin cette Prouince seftend vers le Sud depuis le xxxvn degré par vn & petit En outre dans les montagnes voifines,qui couurent Arauco vers le Leuant, ha- bitent les Sauuages vulgairement nommés Pulches , nation legere, defîreufe de combatte & non moins furieufè, mais ils ne font pas d’vn tel efprit ni induftrie que les Araucains,defquehils font furmontés en toutes fortes, neantmoins ils ne font pas moins ennemis iurés des Efpagnols ,• qui fait qu’ils fe conioignent aife- ment auec le refte de leurs ennemis. ^ Ggg 2, C H A R, 4to DESCRIPTION DES INDES C H A ip. VIIL Dejcri^tion de Hfle de la Mocha , naturel mœurs de fis naturels habitant , les nauigations de j^lufieurs yers icelle. A La Prouince d'Arauco que nous venons de defcrire, appartient l'îde, nom- mée vulgairement la Mochay habitée des gens de la merme nation , qui s-’-y font retirés de la Terre ferme & ont cfuité iufques ici le ioug des Efpagnols. Elle cftdiftante de la ligne vers le Sud de xxxviii degrés & quelques fcrupules, fé- lon qu’il a efté remarqué à diuerfes fois, tant par les Efpagnols, que Anglois & de ceux i o des Prouinccs Vnies, qui font tous quelque peu differents au nombre des fcrupules, félon la diuerfité des lieux où ils en ont prins la hauteur: De la Continente cinq lieues; de la riuiere de Leho^ qui fort prefque vis à vis d’icelle en mer, fix lieues vers l’Oueft- fud-oueft; & de 1 Me de S. Mark (de laquelle nous auons parlé ci-deffus j x v iii vers le Sud-oueft ou Sud-fud-oueft. Le canal qui coule entre deux eft communément pro- fond de X 1 1 braffes , & queîquesfois de moins , & eft en quelques endroits fale de cer- tains bancs & baffes. Cette Me eft ailes Ipacieulc ,• prelque au milieu d’icelle, le drelïe vne montagne d vne extreme hauteur, diuilee & fourchue au lommet; dou delccnd vne petite riuie- re fort claire & fort bonne a boire : Or des le pie de la montagne iniques aux bords dé io la mer qui Tenuironne, la terre va doucement en penchant & eft eftenduë en vne plai- ne j la terre y eft fertile & qui ne porte pas feulement toutes fortes de fruids , mais eft embellie de pâfturages. Au deffous de Hile il y a vne bonne rade, & vn aifé anchrage, afurfeptou huid braffes en mer; toutesfois eftantfurles anchres il faut craindre les vents de Nord-eft, qui pourtant ni foufflent pas fouuent. Irançoù Drac, lors qu’il y eftoit auec fes nauires, y trouua les habitans allés courtois, & trafiqua d eux quelques prouiCons en contrelchangc de quelques marchandiles, mais le lendemain il enuoya deux de fes hommes à terre, que les Infulaires tuerent, eftimans feomme il eft vrai lemblable^ que ce fullent des Efpagnols ou de leurs amis ou alliés,& empefcherent apres cela la defeenteaux Anglois. Candish Anglois, 5° y arriuant du depuis , fut receu prefque en la mefme façon des Sauuages , qui lui dé- fendirent de defeendre à terre. Ceux de nos Pais y eurent beaucoup meilleure fortune; car premièrement olyuier deNoort, lors qu’il y aborda, traita amiablcment auec les Infulaires & pour des haches & desjrouteanx receutdes brebis &des viuresde toute forte: pour vne hache il auoit vne brebis, pour vn couteau vnepoule & queîquesfois deux; & du UMays, des patates, des courges & d autres fruiéfs que l’Ille porte a l’aduenant. Les Sauuages auoyent au- près de la rade vn village, qui contenoit enuiron cinquante maifons, qui eftoyent faites élégamment de paille, longues & ornees au milieu dVn certain porche. Or com- bien qu ils euftent receu les noftres fort courtoilement, toutesfois ils ne permirent 40 point qu’ils entraffent dans leurs maifons , ni de parler auec leurs femmes ; mais ayant fait fortir par vn certain beuglement toutes les femmes des maifons dans vne place voifine, ils les faifoyent agenoüiller par diuers rangs à la veuë des noftres. Ils ont couftume de prendre autant de femmes qu’ils veulent, & celui qui a plus de filles eft eftimé le plus riche, car ceux qui les veulent auoiren mariage, ont couftume de les achepter des peres & des meres, & payer pour leur filles vn bœuf, des brebis ou quel- que autre chofe dont ils feront auparauant conuenus enfemble. Ils fe^veftentde lon- gues robes depuis les efpaules iufques aux talons, autant hommes que femmes,- qu’ils fontdedrapjtiffude la laine des brebis îdelquelles nous auons parlé ci-deuant. Les hommes laiffent pendre leurs cheueux iufques furies elpaulcs, &Ies femmes lesre- fo trouffent & les noüent derrière la telle. Georges Spilhergue des Pays-bas les trouua auffi fort courtois en fon endroit , & re- ceut d’eux toutes fortes de viures; Celui quiàdcfcrit fa nauigation , affeure,que cette Me , du cofté qu elle regarde le Nord, eft baffe & pleine de champs , mais que du collé du Sud, elle eftenuironnee de plufieurs rochers, & où la mer brifefort. le n’ai veu aucun qui dife rien de fa grandeur ni de fon circiiïr. C H A P. 1 OCCIDENTALES. LIVRE XIL 4^1 C H A P. IX. De/cripîion des IJÎes de Jean Fernandez. PO V R c E que nous fommes maintenant tombés fur les Mes, il fera fort à pro- pos,auant que de retourner à la Continente, de parler de celles qui portent le nom de lean Fernandez. , qui les a premièrement defcouuertes : Elles font deux entout,lîtueesfür le xxxiii degrés & xlviii fcrupuIesauSuddelaligne, comme il a efté obferué laques le Maire, HoWznàois, toutes deux fort hautes , & celle qui eft I O la plus Occidentale eft la plus petite, infertile & à peine couuerte d’aucun herbage, où il n’y a que des rochers & des coftaux arides : mais la plus Orientale eft la plus grande: auftireleuee en montagnes, mais elle eftcouuerte de beaucoup d’arbres & agréable- ment verdoyante, & on ne l’eftime pas eftre infeconde:il s’y trouue vne grande quanti- té de cheures &: de pourceaux ; la mer qui l’enuironne eft fi remplie de toute forte de poiflbn, quelesEfpagnolsy vontfouuentpefcher,& y en prennent en peu de temps grand nombre,qu’ils portent vendre à la Continente & au Il y a vne fort commode rade derrière fa pointe Orientale, par ainfî ceux qui y veu- lentanchrer,doiuentcoftoyerla cofteOrientale; car quand onrafe celle de l’Oueftjon eftaifementdriuéaularge par le courant, à caufe du calme, & emporté loin de l’ifle, LO de forte qu’il n’eft iamais polTible de l’aborder. Sous la cofte qui regarde l’Oueft, pro- che du riuage la mer a quarante , puis apres trente & feichant infenfiblement vient à trois braftes de profond , en cet endroit la rade eft afleuree & le fonds y tient bien les anchres ; vis à vis d’vne belle & verde vallee, veftuë dVn bois d’arbres verds d’vne belle perfpediue. L’an cIoIdc x xiy ceux de aoftre nation furent à ces Iftes,auec la Ilote qu’ils appelloyent vulgairement de defquels nous auons apprins ce qui s’en- fuit. Les Mes de lean Fernandeziont deux, la plus Orientale defquciies eft diftante de la ligne versle Sud xxxiii degrés & x l fcropules, de la Terre ferme de l’Amérique Meridionnalea enuironx XX iieuës d’Alemagnc:Eti’autré Me eft de certe-ci,felon les Efpagnols a enuiron vingt lieues vers le Nord-oueft : ils ont couftumed’appeller cette O derniere ifola de Fuera,&cVümr:e ifola detierraM caufe en eftmanifefte, car laplus Orientale eft près de la Continente : voila pourquoi ceux-là errent grandement, qui prennent pour la féconde Me de lean Fernandez , vn rocher pluftoft qu’vn Me, proche de la plus Orientale Me,veu qu’elles font feparees l’vne de l’autre d’vn efpace qui eft de vingt lieues, & la plus Occidentale n’eft pas moins enuironnee de tels rochers . Laplus Orientale (ditl Autheurqui a rédigé cette nauigation pareferit jfbus la- quelle nous moüillafmes 1 anchre , a de circuit enuiron fîx lieués,& de long deux ou trois entre 1 Eft & 1 Oueft : Elle a vne rade au cofte du Nord-eft,où on voit certaines vallees,gratieufement couuertes d’herbes menues & de trefîes : or le fond de la baye O eft fort penchant, & en partie fàlederochers & bafîés, & en partie couuert de fable noir; mais il eft fort difficile d’approcher près de terre & de trouuer vne bonne place pour anchrer. Cette Me abonde enfontaines d’eaux douces : la mer voifine eft rem- plie de fort bon poiftbn, qu’on y pefche en grande abondance prefque fans peine. Il y a auifi desloups & des lions marins en nombre infini. Dans les bois grande multitu- de de cheures, mais leur chair n eft pas fi agréable a mangerque de celles que nourrit 1 Me de i". 1 vne de celles du CapVerd : ou. les y prend difficilement à caufe de l’efpeffeur des arbrifreaux,qui empefchentlepaffage de tous coftés,& font qu’on n’y peut prefque marcher. Nous n’y auons veu nulle autre forte d’animaux. Dans les montagnes ily croift force palmes, & on voit près de la rade trois arbresde coing. Il s’y D trouue en outre vne grande abondance de bois deSandal, mais qui n’eft pas fi bonde beaucoup que celui qui croift en l’Me àcrimor:i\ y a d’autres arbres le bois defqueîs eft extrêmement dur & tillace , & fort propre a tous ouurages : toutesfois nous n’y en trouuafmes point d’affés propres pour feruir de mafts de naiiires. Il appert affés qu’il y acemeuie autresfois dix ou douze Sauuages, qui s’employoyent à cuire de l’huile de loups marins & femblables animaux, maintenant TMe eft du tout abandonnée, fi ce n cic que fix uc nos gens tant foldats que matelots , ennuyés du long voyage ou pour Ggg 5 quelque \ 412, DESCRIPTION DES INDES quelque autre caufe à nous incognuë',fe defroberent des nauires & y demeurèrent de leur bon gré,au grand regret de r Admirai. Voila ce qu'il en dit. ^ Bartholomeo Leonardo de \^rgenfola , au Liure troifieme des Ifles Moluques , fait mention des deux Ifles de lean Fernandez,, qu’il trouua fortuitement lors que l’an cId Id LXjav il alloitau chile, qui font nommées auiourd’hui S. Félix & S. Ambor-, mais celles-ci ne peuuent eftre les premières defquelles nous traitons ici, carildic qu elles ne font qu a xxv degrés & xx fcrupules vers le Sud de la ligne ; fi ce n’èft que d auanture il fe foit trompé à fon conte. Or il efcrit que l’vne & l’autre font nom- mées des Efpagnols c’eft à dire, maiheureufes. lo C H A t. X. Définition des Villes ^^los QQnü.ncs ^dite aujfi de\o^ Infantes, llmperiale. La Ville, que de la VilUgra Gouuerneur de ces Prouinces apres Valdmia , appel- la quand premier il la baftit, AqIos Confines, & Garfias de Mendoza nomma par apres Villa Noua delos Infantes, efl: fituce au milieu du paisj à xxxvii degrés & XXX fcrupules de la ligne, félon à xviii de la mer du Sud:&àxxdela ville de la Concepeion vers le Sud-fud-eft: elle eft baftie dans vne plaine qui efl: appel- leedes Sauuages Ongol, d’où vient que les Hiftoriens Elpagnols donnent ce nom 20 fouuent à cette ville. Il y a vne riuiere qui delcendant des montagnes de neiges où des Andes diuife cette plaine, & paflTe le long de la ville au coûé du Sud; & vn autre torrent qui fait moudre quelques moulins pour les Bourgeois , qui y coule du cofté du Nord: de forte que la ville efl: fituee entre les deux. Le territoire de cette ville eft: fertile en grains, riche en pafturages, & toutes for- tes de fruids y croilTent fort bien &: y meuriflTent bien toft. D’où vient qu’on n'y pref- fe pas feulement de bon vin, mais ony feiche aulîi des figues &des raifins de paflfe. 11 eft clos des deux coftés de hautes montagnes , de forte que la, ville eft à huid lieues des montagnes de neige ou des Andes, &à deux ou à plus à trois des autres monta- gnes qui font plus près de la mer du Sud, nommées vulgairement la Serrania: & ce 50 territoire a de large entre l’Eft & l’Oueft dix lieues ; & de long entre le Nord & le Sud XVIII : fçauoir vers le Nord de la ville v 1 1 1 depuis icelle iufques à la riuiere qu’ils nomment de la Laxa ('pource qu’elle fe précipite en vn certain endroit d’vn fault haut prefque de xx brades) & vers le Sud dix lieues , depuis la mefme ville iuf ques aux limites de la ville de l' Impérial, le long du chemin qui mene vers icelle. Il y a grande quantité de cyprès , qui ont vn bois lequel fent fort bon, & font fort prifés pource qu’ils donnent delà Lacca,commt ils l’appellent. Plufieiirs riuiercs coupent cette Prouince, notamment celle de Biobio, qui en emmene auec foi plufieurs autres petites, & celle que les Sauuages appellent Niue- queten. Etn y a pas aufli faute de mines d’or, combien qu’on n’y ait pas prefque tou- ché pour la difette d’ouuriers & d’efclaucs. Il y a enfin deux Monafteres dans la ville, de lacobins & de Cordeliers : & pource que les Sauuages du païs, qui ontguerre con- tinuelle auec les Efpagnols , habitent fort près de la ville , on dit qu’il y a vne garni- fon qui eft le plus fouuent de deux cents foldats. . hoLmWcAz l* Impérial qUA xxxviii degrés &xl fcrupules de la ligne vers le Sud: de la ville de los Confines à dix lieues vers le Sud-oueft ou Sud-fud-oueft : & de la mer du Sud I V. Elle eft baftie fur les bords de la riuiere. de Cauten qui fe précipitant du haut des fommets des montagnes de neiges , & courant vifte vers l’Oueft, paflTe le long de cette ville , ôç qui fe ioignant auec vne autre qui rafe le cofté Occidental d’i- celle, fait vn certain coin de terre, rond & droit, & difficile à monter , fur lequel cette jo ville eft conftruite. Le terroir de cette ville a de long x vi 1 1 lieues, fçauoir delà ville vers le Sud dix lieuès; & vers le Sud iufques aux bords delà riuiere ^wule (qu’on dit eftre diftante de la ligne de xxxix degrés & demij v 1 1 1 Iieuës:delargeentrel’Eft& l’Oucft vingt, fçauoir depuis la mer du| Sud iufques au pié des Andes. Or il eft par tout fort fertile en froment,- & porteaflrés bien les vignes, combien que les raifins n’y meuriffent pas bien, excepté / J CCIDENTALES. LIVRE XIL 42^ excepté dVne forte qu'ils nomment vulgairement mufeats. Il fournit auffi de bons palhirages pour les vaches ; on n’y fait pourtant nuis fromages, pource que les vaches ne donnent pas de laid afl'és propre pour cela -, comme ils difent. Les moyens nauires peuuent monter iufques àla ville de riuage eft au reftefans rade & eft fale de beaucoup de bancs de fable , & na pas plus de demi-brafle de pro- fond aiipres de la cofte de la mer. La fécondé Euefehé du Gouuernement de Chile prend fon nom de cette ville. Or il y a comme on dit plus de quatre vingts mille Sauuages dans le Diocefe d’icelle, qui ne font pas moins ennemis des Elpagnols que les autres , de forte qu’on dit qu’es I O années precedentes cette ville fut par eux ruinee. Il y a enfin de fort riches mines d’or, defquelles on pourroit tirer grande quan- tité d’or fi les Sauuages le vouloyent permettre , ou s’il y auoit des Mineurs en abondance. C H A P. XL Villes de V illa Rica,e3^ de Valciiuia,<ï^#^c les ^Regloy/s yoifnes d! icelles. A Ville que les Efjjagnols nomment Villa Ric^ eft efloignee de la ligne vers L- le Sud de xxxiX degrés , de la ville de l Impérial:, enuiron xvi lieuè's vers *■■■■- - - - - - 20 Sud-fud-eft: d’elamer Auftrale xxv vers le Leuant, & à trois des fondes ou. montagnes de neiges vers l’Occident. Elle eft fituee au cofté Occidental du lac que les Sauuages nomment CMallabauquen 'àiàoihn emifîaire nommé vulgairement Rio Tûlten \ or ce laça de long entre l’Eft & l’Oueft trois lieues, & entre le Nord le Sud deux, au bout d’icelui qui regarde le Sud-fud-eft, il y a vne montagne ou Vulcan-, au pié duquel fe voit vne fontaine, qui fortant de deux grandes fources fait vn torrent, lequel peu apres fe mefle dans le lac. Le territoire de la ville eft affés fécond , la terre eft argilleufe , de laquelle on fait de fort bonnes briques : le refte fe drefte en colines & la terre y eft prefque du tout fterile ; combien qu’il y croifte beaucoup de pins , que les Efpagnols nomment ^o.Tinnones de Libano: leur fruiét ehgraifte tellement les pourceaux , qu’à peine fe trou- ue-il ailleurs de meilleure chair de pourceau, & d’vn gouft plus agréable. Au pié des montagnes habitent les Sauuages appellés Rulches } nation farouche &difetteufe de toutes chofes, viuantleplus fouuentde chafte, & ils font fort adroits à tuer à coups de fléchés la fauuagine. Or au delà des fommets neigeux des Andes vers le Leuant , il y a vne plaine fablonneufe , du tout deferte , deftituee d’eau & vne vraye folitude. En outre le territoire ou Diocefe de cetté^villea pour limites vers le Nord la ri- uiere de Tolten, qui en eft efloignee de huid lieues : vers le Sud fuiuant le chemin qui mene à Valdiuia , iufques à la vallee de Marequina autant. La région eft pour la plus 40 grande partie froide, & n’eft pas fertile en froment ni en vin : les Bourgeois traînail- lent prefque tous en laine , tiffent de fort bons draps, & des chemifettes de lin, dequoi ils trafiquent tant en ce Gouuernement qu’àilieurs. La ville de Valdiuia la plus renommee de tout ce quartier ,eft fituee prefque au milieu entre les limites du Nord du Gouuernement de chile & le Deftroitde Ma- gallan, dans la Prouince que les Sauuages appelloyent d’vn nom particulier Gua- dallanquen ,• à deux lieues ou enuiron de la mer Auftrale , & fur les x l degrés non du tout pleins de la ligne vers le Sud, félon Herrera ,• qui eferit que quelques curieux ont remarqué, que lors qu’en la ville de Seuille il eft midy,le Soleil eft en cette ville à cinq heures & vn tiers du midy ; c’eft à dire , fi on conte iuftement, qu’elle eft diftante 50 du Méridien de la ville de de L XXX degrés vers l’Occident. Elle a vn port fort commode, qui eft ouuert au Sud, capable de grands nauires; il y a vne riuiere coye , claire & fort belle , diuifee au deflus de la ville en deux bran- ches , qui y entre par deux emboucheures : or les nauires montent dans le plus grand canal d’icelle deux lieuè's haut; toutesfois la ville eft aflife fur le plus petit, fur vne ronde plaine coupee à plomb tout autour, & efleuee par deflus la fuperficie du refte de la terre d’enuiron cinq brafles , la maree entre dans i’vn& l’autre canal iufques à cette 4H . DESCRIPTION DES INDES cette plaine çeinfte de toutes parts de colines,que nous auons dit ci-deffu s eftre nom- mée Gmdallanquen. • ^ LeTerritoire de cette ville ("quieft toutesfois fort eiloigné d’icelle, & comme quel- ques-vns efcriuent à dix lieuè's) eft pour la plus grande part bas & plat , fort fertile & qui porte abondamment le froment &: l’orge, comme aulTi toutes fortes de fruifts, excepté les raifins , qui n’y meuriifent pas bien. Il eft borné vers le Nord de la vallee à^Marequinay de laquelle on conte vin lieuè's iufquesàla ville: vers le Sudiufques à dix delà ville; de forte qu’il a de long entre le Nord&le Sud xviii lieues : Scpref- que autant de large, fçauoir depuis la mer du Sud iufques à la ville deux lieues, & de la villeiufques au pié des y^w^É’ifeize. . i® Il n’y a nulle partie du Gouuernement de chile qui abonde plus en or fin & par- fait que cette-ci: car on tient pour certain, que quand le Gouuerneur Vddiuia,\z nom duquel à demeuré à la ville, s’y arrefta premièrement, il y auoit des mines d’or fi riches, que chaque efclauc Sauuage en tirpittous les iours xxv,& parfois xxx pezos; comme ils les nomment. Or l’an cId Id xcix f'comme vn Pilotte Efpagnol rapporta à Olyuier de Noort) les Sauua^es voifîns attaquèrent les Efpagnols à l’im- v prouiftc, prindrentla ville & en tuerent tous les habitans : du depuis pourtant on dit que les Efpagnols y font retournés & ont rebp.fti la ville dans laquelle ils entretien- nènt deux cents foldats en garnifon. 2.0 C H A P. XIL Vilhs ci Oforno de Cliiiue ou Caftro, ‘TdTouiuces fuoijînes notamment Chucuito. La ville d'ofirno eft fituee à lx lieues ou vn peu plus de celle de la Concefcion vers le Sud & vers le Deftroit de LMagallan (comme Herrera efcrit) à enuiron VII lieues de la mer Meridionnale; à xlii degrés au Sud de la ligne; en vne région vn peu froide & deffournie de viures & de toutes autres chofes neceftairçs à la vie humaine ; mais fort riche en mines d’or ; qui fait que cette ville l'felon le tefi l o moignage du Pilotte Efpagnol, olyuier de Noort auoit prins en ces quartiers^ ' eft beaucoup plusgrande & mieux peupleeque ValdiuiamQÎmQ: les Bourgeois tiflent en outre grande quantité de drap & de toille: dans le territoire & entre les limites de cette ville, habitent, comme on dit, plus de deux cents mille Sauuages, qui payent tribut aux Efpagnols & leurs rendent fcruice gratuit. ' Enfin la derniere ville que les Efpagnols habitent en cette région, vulgairement appellee Cajlro, & des Sauuages Chilue: eft fituee dans vne des Iftes, qui font efparfes en grand nombre dans le lac ou golfe d'Ancud ou chiltte^ comme il eft nommé des naturels, à xl deux lieuè's de la ville d’ofirno vers le Sud. Or l’Archipelague de ces Mes commence dés les xliii degrés de la ligne vers le Pôle Antardic. il y a aux 40 enuirons de cette ville Cafiro plus de douze mille Sauuages habitans, qui font tri- buj:aires aux Efpagnols >• carl’Ifle dans laquelle la ville eft baftie s’eftend en long cin- quante lieuè's, félon qu’efcriuent les Efpagnols (ce qui n’eft pourtant pas vraifem- blable) & en large, où elle eft plus large ix ; où elle eft plus eftroite feulement deux. Or toute cette cofte eft diuifee de deftroits & de canaux qui l’extrecoupent, & ily a'plufieurs Mes qui bordent la terre ferme, iufques au piédes hautes montagnes des Andes , qui fe dreffent en cet endroit au deffus de ce lac ou golfe. La terre de ces < Mes eft ceinde de toutes parts de montagnes, fertile en Mays , & ne porte pas mal le froment : mais elle eft riche outre mefure en or, de forte qu’on en trouue des yo paillettes iufques fur le riuage mefme , ce qui à couftume de fe voir rarement ailleurs. Ce Pilotte, duquel nous auons parlé ci- deffus, affeuroit que cette ville eftoit à XL IV degrés delà ligne vers le Sud, qu’elle eft fituee dans vne Ifte cultiuee de toutes parts des Efpagnols, &: qu’elle abonde en laines de brebis de chile, de laquelle ils y font de fort bons draps & des robes. Cette OCCIDENTALES. LIVRE XII. 42^ Cetre ville ( comme nous auons apprins des Commentaires de Georges Spilher- gtte) fut prinfe de nos Belges auec peu de peine, fous la conduite de Bllthafar de Cordes & d' Antoine Antoine furnommé le Noir(Q^ï auoyent paffé le Deftroit de C^Ugallm auec vn nauire nommé la Foi; & la perdirent derechef. Mais ie n’ai pas bien peu fçauoir comme l’affaire c’eftoit pafîée : fi ce n’eft que i’ai apprins de quelques-vns, que comme les noftres eftoyent mal fur leurs gardes, ils furent à la defpourueuë deffaits par les Efpagnols , qui eftoyent venus d'Oforno au fccours de leurs gens. l’ai veu toutesfois la délinéation de cette place faite affés exaéte- ment bien par cet Antoine le Noir ^ par laquelle i’ai remarqué, que cette villette I O eft diftante de la ligne vers le Sud de quarante trois degrés ; & que l’Ifle dans la- quelle elle eft fituee, eftoit eftenduë prefque du Nord au Sud, le long de la cofte de la mer Meridionnale. Et que la ville n’eft efloignee de la mefme cofte que d’vne lieue ou deux , combien qu’on y aille par vn long & tortu chemin : car vers la pointe Septentrionnale de l’Ifle , entre vn~canal .qui tire de l’Oueft vers l’Eft ( qui a l’emboucheure large d’enuiron deux* lieues & demie ) & autour du fond rond & courbé, où il s’eftroicit en vn eftroit canal, & derechef s’eflargit en yn golfe fpacieux; parfemé de plufîeurs petites Mes : ceux qui veulent aller à la ville de , doiuent coftoyer premièrement la cofte qui regarde l’Orient cou- rant Sud-eft, iufques au Cap eftroit de l’Ifle, & l’ayant paffé tourner a la main 20 droite vers le Sud-oueft, & vn peu plus outre faire voile vers le Nord-oueft iuf- ques à la rade de la ville mefme, qui eft baftie entre deux torrents, auec vn^ pe- tit Chafteau , qui commande à la rade ou port ; les autres maifons de la ville font efparfès ci & là & reprefentent pluftoft quelque bourgade , qu’vne ville, car elle ne font ceindes de murailles ni de remparts. Outre ces villes du Gouuernement de chile que nous auons récitées, il y en a encore deux autres qui appartiennent au rhefme Gouuernement, fttuees au delà des montagnes des Andes au cofté Oriental d’icelles, dans la Prouince qu’on nom- me vulgairement Chuciato [Herrera la nomme auflî ailleurs Cuyo ) région froide ôc inféconde ; fçauoir iJM.endoz>A & S. Iuau de Ia FronterA ,• GavJîas de L^endozA j com- 5 O me on dit,baftit l’vne & l’autre, lors qu’il eftoit Gouuerneur de Chile. . La ville de MendozA eft fîtuee prefque vis à vis de celle de S. Ugo de la Pro- uince de laquelle nous auons ci-deflus deferite, & feparee d’icelle d enui- ron quarante lieues vers le Leuant ; à laquelle on va de la Prouince du çhile par vn fort difficile chemin & par les hautes montagnes des Andes toufiours couuer- tes de neiges ,• car il y a auffi vn chemin qui, y va de la Prouince de la riuiere de U VUtA, comme nous dirons bien toft. L autre ville S. luAn de Ia FronterA décliné vn peu de la precedente vers le Sudo Selon que i ai peu conceuoir d vn certain Hollandois , qui auoit paffé par là de la Prouince de la riuiere de Ia FUtA & auoit trauerfé iufques en chile ; cette ville de 40 S. luzn n’eft pas plus de cent & dix lieues diftante de celle de Buenos K^yres (de laquelle nous parlerons en fon lieqjpar vn chemin droit, mais fort folitairej voila pourquoi ceux qui vont à cette ville paffent le plus fbuuent de Buenos Ayrés par Cordube, qui eft bien vn plus long chemin, toutesfois il eft plus frequent d’ha- birans & partant plus affeuré. Le mefme affeure, que la Prouince de chtle eft au plus large à l’endroit de la ville de S. lagOy & que d’icelle ville iufques à vn pont couuert d’ofier, qui eft en- tre des vallées des montagnes , au trauers d’vne riuiere qui y paffé, on conte foi- xante lieues ; de forte qu’il faut de neceffité que cette ville de S. IuAn foit plus loin de la mer Meridionnale, qu’on ne la met ordinairement dans les Chartes 50 Géographiques. Q^îint aux degres de leur efteuation du Pôle Antarftic, & à la face & condition de leur terroir, ie ne 1 ai trouue eferit de perfonne iufques ici , voila pourquoi nous n’en dirons pas dauantage. Hhh C JS A P, 425 DESCRIPTION DES INDES C H A P. XIII. Dejcripiion de toute U Cojîe manne de Chile , de fis Ports , "P^ades , Bayes Caps J iufques au trente troifieme degré de la latitude oAuJîrale. La colle marine du Gouuernement de chilej comme nous auons dit ci delTus; commence dés la baye & vaîlee de CofufoSvitlts vingt fix degrés de la hauteur du Pôle du Sud : courant le long de la colle vers le Sud de cette baye (félon Ve- drode deçà) on rencontre premièrement vne certaine pointe de la Continente qui s’auance vn peu, 6c derrière icelle vne baye, au delTus de laquelle paroilTent deuxio hauts rochers, & ayant palTé outre cette baye vne riuiere , qu’on nomme Guafeoi à XXVIII degrés 6c x v fcrupules de la ligne vers le Sud. L’interualle entre la vallee de Cofiapo ôc Gmfco ell de xxx lieues , comme eferit Herrera , qui place Guafeo fur xxix degrés de la ligne vers le Sud: olyukr de Noort obferue Guafeo fur xxviii degrés ôc demi ; ôc eferit qu’il y a vne allés bonne rade , derrière des rochers qui font en cet en- droit au deuant de la Terre ferme , ôc qu’il y a vne riuiere de mefme nom qui coule dans la baye , l’eau de laquelle ell fort bonne , mais qui n’ell pas co mmode à caufe qu’on y entre difficilement ; au relie le païs efl: couucrt vers la colle de peu d’arbres, ôc n’y a nulle habitation d’hommes , fi ce n ell fort loin du riuagé. Iufques ici la colle aprefque toulîours couru vers le Sud-ouell: mais dés Gmfco lo elle fe courbe vn peu plus vers le Sud, iufques au port de Coquimho-, fur xxx degrés de la ligne vers le Sud, comme Herrera eferit, ôc comme a ïtm2.ï<\né. Richard Harvkinsy Cheualier Angloisrmais Pedro de Ciefaqui pourfuit cette colle parle menu,dit que ce, port n’ell feulement dillant de l’Equateur que de xxix degrés ôc xxx fcrupules ; auec . lequel s’accorde Puller, qui a vilité cette colle auec Candish. On Richard Hawkins célébré ce port entre les principaux de cette Amérique Meridionnale, tant à caufe de fa capacité , que principalement à caufe de la grande feureté; car il efl couuerc de routes parts à l’encontre de l’incertitude des vents, ôc fournit vne bonne rade entre la colle de la Continente ôc vn rocher qui ell au deuant d’icelle. A dix lieué's de ce port ( comme Pedro de deçà remarque ) il y a derechef vne 5 o pointe de terre auancee , qui donne ouuerture à vne baye au derrière de foi , laquelle on appelle vulgairement K:^tongayo ,âi on on conte iniques à la riuiere àt Limar a cinq lieues ; à neuf lieues d’icelle plus outre il y a vne autre baye, qui s’appelle choapa» fur XXXI degré de la ligne vers le Sud j où il n’y a nulle commodité pour prendre de l’eau î enfin de cette baye iufques au port de ^uintero qui eft fur xxxii degrés de la ligne,on conte XXI lieuë. Les Anglois remarquent le mefme port fur les xxxiii degrés ôc quelques fcrupu- îes: Georges Spilbergue de nollrc nation lors qu’il couroit le long de cette colle, sar- rella dans ce port auec fa flotte ,• ôc alTeure que c’ell vne belle ôc fort deledable baye, ôc fi biengarentie de tous collés à l’encontre de l’incertitude des vents ôc, des tem- 40 pelles, qu’elle fournit d’vne commode Ôc alTeuree rade aux nauires. Il y a en outre bonne opportunité pour y prendre de l’eau : car au collé du Sud d’icclle , vne petite riuiere y entre,reau de laquelle ell fort claire, ôc proche delà il y en a vne autre qui nourrit abondance de fort bon poilTon; on y peut auffi commodément prendre du bois; de forte qu’on la peut à bon dro^t mettre entre les meilleurs ports de cette colle. Cependant que nos gens y prenoyent de l’eau , ils virent au dedans du païs plufieurs cheuaux fauuages, qui venoyent par troupes à vnruilfeau ^lequel defeend dans cette riuiere du haut dés montagnes proches delà) pour y boire, mais apres qu’ils eurent veus nos gens, ils fe retirèrent à la fuite dans les bois,& n’apparurent plus jil y demeure fortpeud’Efpagnols fort loin du riuage. 5® Herrera conte fept lieues de .Qmntero Falparayfi , ÔC Pedro de deçà, ^.nec lequel s’accorde Hawkin-, dix : quant à la hauteur les Autheurs Ibnt diflérents en- tr’eux; car deçà le met fur les xxxii degrés ôc xl fcrupules; Pulier, Anglois , fur les xxxiii degrés & xl fcrupules; ôc Olyuier d.e Noort fur xxxiii feulement: de forte qu’il ell difficile de fçâuoir lequel on doit fuiure en vne fi grande variété, mais nous auons défia parlé de ce port plus amplement ci-delTus. C H A P. 42-7 OCCIDENTALES. LIVRE XIL C H A P. XIŸ. Kcjîe de U Cofle de Ç}\i\Q,depuù Valparayfo iujques an quarante deuxieme de^é de lefleuation du Pôle du Sud ^ ^n peu pim outre, DV Port de r<«^Ær4j(y^,pouiTuiuaiït vers le Sud,la code eft entrecoupée de quel- ques bayes & caps iuiques à la riuiere de Mayta , l’interualle eft d’enuiron de cinq lieues : d’icelle iufques a celle de Chacapol ^ i\ y aenuironfeize lieues îde cJoAcapol iufques à vne pointe de terre appellee communément dans les Chartes ma- I O rines Pitnta de BairreSiOncontt quatre lieues ;de cette pointe iniques à la riuiere ^4»- / il y a vne pe- tite Ille qui n’a pas plus d’vne lieue de long & à peine demie de large, eftenduë preft que entre le Nord-eft & le Sud-oueft,& feparee de la Terre ferme par vndeftroit lar- ge enuiron d’vnc lieue' ;dans laquelle il y a fort bonne commodité pour y prendre 3 O de 1 eau:elle porte en outre diuers grains, légumes & de fort bonnes racines qu’ils nom- ment Potatos : il s’y trouue aufti quantité de poules & des brebis en grand nombre , ils ont remarqué lors qu’ils en prindrent exadement la hauteur, qu’elle eftoit fur les tren- te fix degrés & cinquante deux fcrupuîes de la ligne vers le Pôle Antardique. Or la terre de la Continente n’eft pas en cet endroit fort haute , mais quand ori eft vn peu auancé vers le Sud,on voit qu’ellefe drelTe en trois rangs de fort hautes mon- tagnes,qui font toufiours couuertes de neiges & heriftees ci & là de hauts rochers : les colines qui apparoiftentau deflbus de ces montagnes,iie fontpasfi hautes, ni couuer- tes de neiges , mais de bois efpais, qui font vne belle perfpediue. La terre fe voit aufti moyennement efleuee iufques furie bordmefme de lamer,mais elle eft defnueed’ar- 40 bres,& infertile félon qu’on peut iuger deloin. Nous auons ci-deifus aftTés parlé des Ifles de 5. delà qui font au do- uant de la Continente, voila pourquoi nous auons refolu ici de n’abandonner point la cofte. De la baye de PencoiuCquts à la riuiere de il n’y a que deux lieues parterre, mais par mer il y en a dauantage , à caufe d’vn Cap fourchu , qui s’auance fort auant en mer. ’ De iufques à la riuiere de Labapii Herrera conte quinze lieuè's, flefquelles ri- uieres font feparees Ivne de l’autre par vne large & /pacieufe baye, fur laquelle eft la Vïouinced’Arauco ) or la riuiere de Labapi eft diftante de la ligne vers le Sud de trente 50 ftptdegrés&trentefcrupules,feloni7é’rr£’rÆ:-& elle court depuis la forterefle que les Efpagnols tiennent en ce lieu contre les Araucaim le Sud-oueft ;de forte qu’il femble qu’elle forte dans la baye mqfme: au refte elle ne porte que de petits vaifleaux, & eft remplie de beaucoup de poifton. De l’emboucheure àç.LabapiyOU du Cap de mefme nom iufques à la riuiere de Lebe, on conte fix lieues ; aux bords de laquelle Garjîas de Mendoza auoit anciennement baftilavillettede Cannete ^ prefque fur trente huid degrés de la ligne ;toutesfois les Hhh Z habitans f 418 . DES C RIP TI ON DES INDE s habitans furent contraints d’abandonner puis apres, à caufe des guerres dont les Sau- nages voifîns les menaçoyent, de forte qu’à peine refte-ii à prefent aucune mémoire d’icelle. Suit apres à la mefme cofte le port de C^r»f;'& l’ont entièrement ruinee, ayant mis le feu aux quatre endroits de la ville, ont tué plufieurs Bourgeois, emmené les femmes & les enfansén miferable feruitude î & ont ainfi ruiné vne ville qui eftoit entre les plus riches & fleurifiantes. Enfin ces Saunages cZ'to font deuenus fi courageux par tous ces heureux fucces, & fe font fi bien faits aux ârmes,qu’ils fçauent maintenant fi bien manier vn cheual &: fe feruir de lances & autres armes que ceux de l’Europe, qu’il n’y a point d’Efpagnol à qui iis n’ofent bien faire tefte : or on enuoyc tous les ans du fecours du Veru au Chiky duquel il y en a fort peu qui en retournent faufs.D’où on peut voir,ce que nous auons dit ci-deflus,que chile a coufté beaucoup de fang aux Efpagnols anciennement, & en lo coufte encore auiourd'hui; & qui n’y a partie de cette Continente qui puifle eftre ‘ oftee plus aifement au Roi d’Efpagne , ni qui fut plus neceflaire que cctte-ci , n’eftoit que le voyage eft fort long, quitoutesfoisefi: rendu beaucoup plus court, depuis que nos Belges ont trouuc ce nouueau Deftroit, duquel nous parlerons au Liure fuiuant. , description 2 WD T S . Antûniû 45^ DESCRIPTION DES INDES fedro Sarmient 0 CmMoix. ceftui-cijcnuoyé ^QxD.Trancifcode Toledo, Viceroi du Feruç apres que le valeureux Cheualier François Drac eut trauerfé par le Deftroit de Magal- lan dans la mer Meridionnale,& eut emmené de cette mer vn riche butin de plufieurs nauires,qu’ilyauoitprinfes&pillees. Lequel -S^rw/V^^^eftant parti auec deux naui- res du Peruj^xnnz auccvne, ayant palTéparle Deftroit de MagalUn en Elpagne j mais l’autre fut emportée auant qu’elley peuft entrer, par des tempelles de la maree versle Pôle Antarâricj&paruintiufquesau cinquante fixieme degré de la latitude Auftrale,. fans que toutesfois il rencontraft aucunes terres , comme ils eferiuent ; & la rempefte eftant appaifeedl fit voile vers le Nord , & encore qu’il euft trouué vn large canal , qui finififoit fans doute dans le Deftroitde MagalUn^ toutesfois il n’y enti'a point, pource i ^ que ces gens s’y oppoflerent, mais s’en retourna fans rien faire auGouuernement de Chile.Ot pource que cette nauigation de Pedro de Sarmiento donna premieremêt quel- que lumière à cettepartieJ^4!^^//^»/f/i^e, nous le reciterons ici enbrief, comme nous la trouuons deferite Leoriardo de Argenfolay2iXx\À\xtç. iii. Chap. xi. de fon Oeuure in- titulé Conquijîa de las Ijlas Malncas en Espagnol à Madril l’an cIoIdc ix. Chap. II. üi^mgation de Pedro Sarmiento if âS?/4Caf^fMagalIamquey«r/^ ? Leonardo de Aro:enfola. mer du Sud , des Comment mes de Leonardo de ^ A 2C APr E S qucE^^^p^Dr^f eutpaflepar le Deftroit de dans la mer du Sud I ce qui n’auoit efté eflayé iufques là par autres nations, excepté les Efpa- gnols ;D. Francifio de To le do yNicemi àxiPertty fit efquiper deux nauires, fiirlef- quelles il mit pour Commandeur Pedro Sarmienîo , afin de pourfuiure Drac auec fes gens , qui eftoit , félon le bruit commun , retourné vers le Deftroit de Magallan, Sar-^ miento fit voile auec fes deux nauires du port de Coüao de Lima au mois d’Odobre l’an cIdIdlxxxix :& au commencement de Nouerribreil eut lavenè des Iftesqueles Efpagnols nomment vulgaircmentZ)i^f^/«r4<3?^, fur les vingt cinq degrés de la ligne versle Sud, comme il les remarque, premièrement defcouuertes fortuitement l’an cl dIo lxxiv par luan F ernande%j comme il alloit du Pens-smChiky qui font auiour-jc d’hui nommées S, Félix ^ S.AmborX>e\z àe&.o\imzntveïs la Continente, il en eut pre- mièrement la veuë fur quarante neuf degrés & trente fcrupules au Sud de la ligne : où il aborda & defeendit auec grande difficulté au riuage, auquel il trouua bien des pas d’hommes, des fleches,des rames & des rets , mais il ne vit iamais les Sauuages : apres eftant monté auec grande peine au haut des montagnes,il vit que la cofte eftoit entre- coupée de plufieurs canaux & bayes, & que la terre ferme eftoit bordee de quantité fort d’Iftes , de forte qu’il cognut bien que c’eftoit vn Archipelague d’Ifles ( defquelles il pouuoit conter de ce fommet de montagnes plus de quatre vingtsj&eftima qu’il y auoit par là auffi vn paflage vers le Deftroit de Magallan. Il donna le nom au port de Mueflra Semtora del Rofario , & à l’I/le qui en eftoit proche de S. Frinidady & print pof- 4c feffionde ces terres pour le Roi d’Efpagne auec les ceremonies accouftumees : Par apres il entra auec fa chaloupe dans le canal qui pafte entre les Iftes & la Terre ferme, defcouurit tous les ports & rades qui y eftoyent, & donna nom à plufieurs lieux , prin- fal cipalementà vn lequel il nomma Porto Bermeio, c’eft à dire, Port rouge, des fables d’vne riuiere prochaine : il trouua auffi là des pas d’hommes : or tous les canaux qui pafTcnt entre ces Iftes font fort poiftbnneux, & font remplis fur tout de grandes hui- ftres, dans lefquelles ils trouuerent des perles , mais qui eftoyent pour la plus grande part obfcures. ^ Eftans partis du port 5rm«V,ils entrèrent dans vne certaine baye, à laquelle ilsim- poferentlenomde^. -Fr47?|r(?0jqui eftoit couuertevers leSudd’vne montagne aftes haute, laquelle ils nommèrent Ptmta de la Gente, pource qu’ils y virent premièrement des Sauuages , teinds tout le corps de certaine couleur rouge, i’vn defquels qu’ils auoyent emmenés par force dans îachaloupe, s’efehappa peu apres à la nage: Apjes ils paftTerent derechef vn nombre prefque infini d’Iftes, toutes non cultiuees ; enfin comme, ils furent venus à la baye de Nueftra Sennora de Gmdalupe, comme ils l’appel- lent, & au Cap qui cloft cette baye, & qu’ils n’y eurent trouué qu’vne baffe loge, eniiironnee OCCIDENTALES. LIVRE XIII. 455 cnuironncc de toutes patts de gafons , & couuerte defTiis d’efcorce d’arbre & de peaux de loups marins, fans y voir a^cllns Sauuages,ils s enretournerent dans leurs nauires. Par apres eftant feulement parti auec Ton nauire ( car l’autre eftoit defa efeartee ) il entra dans le port de la Mifericorde & à trois lieues delà dans celui de Nucjlra Senno- ra de CandeÜariaybc enfin dans l’I/le de S. Tnes : ( lefquels noms. ils donnèrent lors à ces lieux) où iltrouua cinq Saunages, qui lui firent entendre par fignes, que proche delà il y auoit deux nauires à ranchre,que des hommes barbus menoyent, veftus à la mode des Efpagnols : 11 leur fembla qu’ils parloyentdes Angloislefquellesils cherchoyent. ! ü Delà faifant voile vers le Sud-eft,ilarriua à vne Ifle queles Saunages nommoyent Ttdchachailgua,^ puis à vne autre qu’ils appelloyent Cayrayxa xylgua & enfin ils entrè- rent dans vn canal , lemboucheure duquel ils nommoyent Xauttec[ua , & derechef il rencontra vn nombre infini d’IfleSjl’vne defquellesles Saunages appelloyent Tinqui^ chijguay mais Sarmiento la nomma de S. Cruxÿ & ainfî ayant pafie vne ou deux Mes, il entra dans vn infigne port, d’où il lui fembla qu’il voyoit au haut d’vnc montagne vne belle ville baftie à la façon de celles de l’Europe, & dans icelle plufieurs hommes en armes. Delà il prin t fa route vers vne certaine pointe fur cinquante quatre degrés de la ligne vers le Sud,qu’il nomma 5. delà on voyoit vne certaine montagne flammiuo- 10 me,couuerte de neige; delà entrant dans le canal, il arriua au Cap de S. Jme , Cm cin- quante trois degrés & trente fcrupules au Sud de la ligne, où il planta vne Croix & mit des lettres aupié d’icelle, par lelquelles il declaroit à toutes nations, que ces régions appartenoyent au Roi d’Efpagne & qu’il en auoit prins poflefiion auec les ceremo- nies accouftumees, félon la Bulle de donation d’Alexandre VI, Pape de Rome. 11 donna nom de S. luan à la riuiere qui eft derrière ce Cap,& laquelle defeend dans leDeftroitde Magallan&n au, Deftroit de Magallanqui paffe entre les Ifies Madré de. Bios. Etauxeftroitspafifages du Deftroit qui font fur la hauteur de cinquante trois de- grés & trente fcrupules de la ligne vers le Sud, il leurimpofà nom deNueJira Sennora, delVaüe. Il eut en cet endroit vn fanglant combat auec les Saunages, & en remporta I O vne remarquable vidoire. Et defeendant à terre il nomma cette contrée auflî2\^^^Æ Sennora delVaUey&L eftant monté au haut d’vne montagne , il lui fembloit qu’il voyoit au bas vne belle plaine auec plufieurs bourgades , de magnifiques édifices &: de hautes tours, enfin de fort beaux Temples,de forte qu’à peine croyoit-il à fes yeux propres, & il fembloit qu’il voyoit vne certaine ville qui eftoit pluftoft en l’aïr que fur terre. le ne fai pas de doute que ceux qui liront ceci, &: qui en feront comparaifbnauec ce que les autres en ont rapporté véritablement , ne iugent que ce Sarmiento eftoit vn homme fort vain &: qui s’alfeuroit trop de laiegere croyance des autres. Enfin ayant pafle le Deftroit de Magallan y ilaWa au Brajtl & finalement ajrriua en Efpagne,or ce qu’il y perfuada à fon Roi & ce qui s’en enfuiuit, nous le dirons ci- 40 apres. C H A P. III. De/criptioa félon Herrera de toute cette Cofleydefuù les limites du Gouuernement de Chile iujques au Deftroit de Magallan. NO V s auons pourfuiui au Liure precedent la cofte de cette Continente, fi- tuee fur la mer Auftrale,iufques au Cap de .S". Félix, dés lequel elle court en cette façon félon Herrera : dudit Cap iufques àla pointe de S. Cyprianyon con- te quatorze lieues Nord & Sud. y O De cette pointe iufques à celle de C/^/Vé-jil y a quatre lieues. Delà iufques au Cap des Mes vulgairement dit Cabo de las IftasydiyiMeu'és. Dés lequel iufques à l’Ifle de Naeftra Sennora del Soeorroyil y a dix huid lieues : cette Me eft feparee par vn petit ipterualle de la Continente : d’icelle déclinant vn peu vers le Leuant iufques au port de S. Dominique , on conte fix lieues ,* duquel iufques au Cap de Diego GallegOy il y a dix neuf lieues , qu’on dit eftre à quarante fix degrés au Sud de la ligne. 454 DESCRIPTION DES INDES De ce Cap iufques au port àc S . Efiienne,i\ y a douzelieuës , ô^'deceport au Cap de S. Jndre,üx,Cm quarante fept degrés de la ligne. Delà iufques au Cap d’OchiuuariyOn conte huiét lieues, & d’iceîui iufques à la val- lée de Nuejîra Sennora^ dix, ainft norame-on vne baye qui eft enfermec entre deux colines,fur prefque quarante huid degrés delà ligne vers le Sud. De cette baye iufques au port de Ferdimnd Gallego , on conte dix huiét lieues , fur quarante neuf degrés de la ligne : de ce port iufques à Abra S, Guillen ( comme ils l’ap- pellent ) il y a quinze lieues, fur quarante neuf degrés & quarante fcrupules au Sud de la ligne. De Ahra S. Guillen iufqües à Funta Delgaddiil y a Éx liêuës,fur cinquante degrés de la i o ligne. Suit par apres Porto de losReyes fur cinquante degrés & vingt fcrupules de hauteur; & à fix lieuès d’icelui le Port des Innocents ; & peu après la pointe de S. Augujlim le Cap delà Roia & de S. Catherine-, cinquante & vn degré. & cinquante fcrupules de la ligne: & près delà le port de S.Amaro &: Abra S. FiBorian,Ç\xt cinquante deux degrés & vingt fcrupules de l’Equateur, qui eft vn canal lequel s’infinuë entre de hautes Ifles, tou- fîou.rs couuertes de neige. Or au deuant de fon Cap du Sud, il y a trois petites Mes, difpofees en triangle, marques certaines de l’emboucheuredu Deftroit de CMagallan du cofté de la mer du Sud : Voila ce qu’il en dit en la Decade vin. Liure v 1 1. Chapitre i‘x. , 20 Le mefme trace vn peu autrement cette cofte en la defcription des Indes. La co- fte ( dit-il ) qui s’eftend depuis le Gouuernement de chile iufques âu Deftroit de Ma- gallan, & dés Valdiuia court prefque cent lieues Oueft-fud-oueft , a premièrement le Cap de .S”. André fur quarante fept degrés au Sud de la ligne ; dés lequel la cofte fe cour- be vers le Sud & droit vers le Deftroit de Màgallan. En fécond lieu le Cap de S, Romany^m quarante huid degrés de la ligne ; & auprès d’icelui rifle de 5.;'C4/^mw,furremboucheurcd’vne grande baye , qu’il nomme o//- earchofada. Et dàns la mefme baye le reculde 7s[uejlra Sennora bc l’Ifle de S. Barbe & vil peu plus outre le port de Ferdinand Gallego , fur quarante huiôl degrés & quarante fcrupules de la ligne; puis à dix huid lieues de ce port la baye dés Rois ècetWo. dei". leany 5° fur cinquante degrés & vingt fcrupules do la ligne. LeCapde S. François à cinquante & vn degré de hauteur, derrière lequel il y a quelques canaux qui entrent dans la Ter- re ferme ; & rifle de Campanalk onze lieues du Cap de S. François {hiOpiedXQ. Acofla àxz eftre ainfi nommee de fa forme , & monftrcr i’entree du Deftroit de Magallan ) & la baye de 5’. à cinquante deux degrés delà ligne,dans lequel entrent du moins fix canauXjqui n’ont iamais efté vifités par perfonne, enfin l’Archipelague des Mes. V oila ce GÇà en dit Herrera. D’autres donnent d’autres noms à cette cofte, car nous auons veu vne Charte Géo- graphique imprimée en Efpagne l’an cio loc xix,&traceepar leCofmographe du Roi Pedro T exerra Ealbornas, apres le retour des deux nauires du Deftroit nouueau le 40 Maire^doins laquelle nous auÔs trouué ces noms appofésfur les xlv degrés de la ligne vers le Sud, eft fituee la riuiere de losBarbudosyceld à dire, des barbus,laquelle fe defehar- ge dans la baye de los Coronados ;fur la hauteur de x lvi degrés &xxx fcrupulcs,i?/4 fin fondo-.enttele xlvii & huidieme degré certains reculs ou bayes aufquels il eft eferit, A(^ui fe perdiû Diego Gallego, ici ce perdit Diego Gallego : fur les x L^degrés & trente fcru- pules ouenuironle Cap Corca s duquel la terre fe retire prefque vers l’Eft par vn long efpace , & donne ouuerture à vne grande baye , qui par vn circuit femicirculaire fe courbe iufques fur les cinquante deux degrés , & femble receuoir plufieurs riuieres, enfin elle eft fermee de plufieurs Mes vers la mer du Sud ; il n’y a nul nom donné à cet- te baye , mais il y a au fonds d’icelle vn recoin afl'és large d’emboucheure, à qui on a 50 donné le nom de Ancon fin Salida,c dire,Ancelans fortie. Dans cette mefme Charte la face de ces terres eft peinte prefque du tout montueu- fe,& veftuë ci &làde bocages. Maintenant nous parlerons du Deftroit mefme. C H A P. OCCIDENTALES. LIVRE XIII. 455- C H A P. IV. Defcription du Deftroit de Magallan félon les E^fagnols qui [ont premiers pq/Je. NOv s nous feruirons en la defcription ce Deflroit de MagalUn , des obfer^ uations de trois nations , qui ont donné chacune diuers noms fouuent aux mefmes lieux: car combien qu’il ait efté enfin par ceux de nohrc nation exa- élément remarqué & deferit , toutesfois il ne fera point inutile de fçauoir cequi de- I O puis la première defcouuerture de ce Deftroit a efté eferit de chacune. Nous commencerons donc par lesEfpagnols, aufquels la première defcouuerture d’icelui eftdeué: car Ferdinand Magallan renommé Cheualier Portugais, le defeou- uritle premier, l’an cloloxx, fouslesaufpicesduRoideCaftille, en cette maniéré; apres qu’il eut hiuerné dans la baye de S. Iulien( cdec iepaftece qui leur eftoit arriué auparauant ) il fit voile d’icelle le xxiv d’Aouftdel’an cio 1d xx ylaiftant/^^» <5^^ Cartagena Sc vn certain Clerc François, condamnés pour quelque grand forfait delà il alla dans lariuiere dei”. Cm.v,où.ilfeiournales mois de Septembre &d’Oétobre &y print grande quantité de poifl'on. Eftant parti delà, fur la fin d’Oétobre,il courut le long de la coftê vers le Sud, & ayant io combatu contre plufieurs difticultés& de rudes tempeftes, il arriua enfin au Cap des Vierges, qu’il appelle ainfi de S. Vrflme,\2. fefte de laquelle il le defcouurit; là il vit premièrement vn grand canal qui entroit dans laContinente,par ainfi y ayant enuoyé deux nauires pour le defcouurir ; l’vn d’iceux ne rapporta rien de certain , l’autre don- na grande efperance,que ce Deftroit eftoit ouuert aux grands nauires. Ayant mis pié à ^ terre à enuiron vne lieue de l’emboucheure du Deftroit,il y trouua vne petite loge èc plufieurs fepulchres des Sauuages 5 car les naturels de cette région ontcouftumede venirlàrefté& d’y enterrer leurs morts, &rhiuer de fe retirer au dedans du pais: ils y trouuerentaufli vne grande balaine,& plufieurs os iettés au riuage, d’bùil eftoit aifé à ■ iuger,que ces lieux eftoy ent fuiets à de grandes tempeftes. 3 O Sur la fin d’Odobre ils paflerent le Cap de S. Seuerin ('comme ils l’appellent^ fur cinquante deux degrés & cinquante cinq fcrupules au Sud de la ligne: & pource qu’ils virent plufieurs feux de nüiél en la Continente,ils donnèrent le nom de V ?rra del Fuego à cette partie de la Continente, commeils l’eftimoyent. Et àyantpafte par leseftroits paffages du Deftroit, ils arriuerent enfin fur la fin de Nouembre dans lamer Auftrale. Magallan mourut peu apres en ce voyage,mais non pas fa renommee , car il mérita par cet aéle remarquable, que non feulement ce Deftroit , mais auffi cette partie Auftrale de l’ Amérique Meridionnaîe fuft appellee iufques à ce iourd’hui de fon nom. K^xcslmGarfoé de Loyala,Vzn cIoIdxxv entra dans le mefrae Deftroit au mois d’Auril, St lepaftaaftes heureufementfurlafindeMay : St: pource qu’ils y virent des 40 Saunages de fort grandeftature,ilslesnommerent Geans hcFatagones. Lalongueur, les eftroits paflages.les diuers reculs, les rades St ports de ce Deftroit , furent lors plus exaétement remarqués. Car ayant pafté les féconds paffages d’icelui, il trouua vn port, à qui il donna le nom de .S”. ils trouuerentde ces arbres,defquels il fera parlé ci-apres, de l’efcorce defquels ils fe feruirenr,ôt eftimerent que c’eftoit canelle verde. Et puis apres ils trouuerent encore vn autre port à qui ils donnèrent le nom de Puerto Frio , pour le grand froid qu’ils y endurerent,de forte que plufieurs y moururent. Suiuit puis apres vn troifieme, Simon de Alcazoua, qui partant de l’Ifle de Gomeraooi commencement d’Oâobre de l’an cId l3xxxiv,prenantfon cours droit &prefque fans voir aucune rerre,arriuale feptieme delanuier de l’an cl a Id x xxv à la riuiere de 5 O Gallegos,\ vingt cinq lieues du Deftroit vers le Nord, & ayant peu apres entré dans le Deftroit , il fut contraint de retourner au port des Lions, àcaufe de la mutination du fes gens,où il périt miferablement. Enfin l’an cIdId XXXIX l’Encfquede Plaifance enuoya trois nauires, qui eftans parti d’Efpagne au mois d’Aouft, virent enfin le Deftroit le xx de îanuier de l’an cio lo XL, où le nauire Amiral ('comme ils l’appellentj fut miferablement brifé , & la plus grande partie des gens fauués: l’autre nauire ayant heureufement_ p;:^é le lii Z Deftroit, 43^ DESCRIPTION DES INDES Dcftroit, arriua à Arequipa ; & le troifieme s’eft retourna fans tien faire en Efpagnci apres qu’il eut hiuerné dans le Deftroit mefme au port de las Zorras (comme ils le nommèrent de la quantité de renards qu’ils y virent.) Voila prefque toutes les naui- gations des Efpagnois par ce Deftroit, auantqueles Anglois entreprinffent le mef- me: de la relation defquels Acojla deferit le Deftroit en cette façon au liure ni Chap. XIII. Le Deftroit de tJMagâlUn ('dit il) eft fur les lu degrés, non du tout pleins, de la ligne vers le Sud , il a de long d’vne mer à l’autre x c , ou au plus cent lieues , de large où il eft le plus cftroit vne lieuë feulementî & le Roi d’Efpagneauoit efté perfuadé, d’y baftir vne fortereffe, afin de fermer le paflàge de la mer du Sud aux autres nations,- 1 o la mer y eft en quelques endroits fi profonde, qu’on n’en peut trouuerîe fond auec la fonde, & en d’autres lieux elle n’a feulement que xv ou x v ni braftfes : Or de ces cent lieues qu’il a de long, la mer du Sud en poftTede xxx , & la mer Atlantique ou du Nord Lxx,- par vne manifefte difpute ou fcpararion entre les eaux des deux, & par vne certaine reciprocation des marees: en outre durant cet efpaçe de xxx lieues, le Deftroit eft plus eftroit & tellement fermé dVn cofté & d’autre, de hautes mon- tagnes toufiours couuertes de neiges , qu’il femble de loin que le fommet des mon- tagnes fe touchent quafi, bc l’emboucheure du Deftroit peut eftre difficilement di- cernee par ceux qui y viennent de i’Oueftj en cette mefme efpace il eft fort profond & la cofte d’vn cofté & d’autre y eft fort droite , de forte que les anchres y veulent dif- zo ficilement tenir: mais en l’efpace des autres lxx lieues , le Deftroit eft moins pro- fond , plus large &,les riuagcs y vont d’vn cofté & d’autre doucement en penchant. Les Espagnols donnèrent lors diuers noms aux lieux qui font entre le Deftroit , la plus grande partie defquels font maintenant abolis; excepté des deux Caps qui font fur l’vne & l’autre mer , celui defquels qui eft fur la mer du Nord à la droite quand on y entre, eft dit Cabù de las Virgines ^ & celui quisauance dans la mer Auftralc, eft norrimé encore auiourd’hui Cabo Dejfeado. C H A P. V. ^uigAîions des Angloù par le Définit de Magaiîan premièrement I ® de François Drac. De s P VI s lan cId Id XL iniques à l’an cîd Id lxxviii, ienctrouuepaspar eferit, que perfonne, foit Efpagnol ou d’autre nation, ait cflayé à paifer ce Deftroit, car ce notable different des Mes des Moluques, entre les Rois de Ca- ftille & de Portugal eftant afibupi, il fembloit qu’on n’en auoit pas grand befbin , & la grande difficulté qui eftoit a le pafler, ioinél les dangers qu’auoyent encouru ceux qui 1 auoyent eflaye, apportoit a bon droit de la frayeur ; ôt perlbnne n’auoit encore eflaye a retourner de la mer du Sud dans celle du Nord. Enfin l’an cIdId lxx vu le valeureux Cheualiet Fran-çois Drac , fort expert en la marine , par vne hardiefle 4® du tout héroïque, extreprint vn voyage en la mer du Sud auec peu de nauires , & qui n eftoyent pas beaucoup grands. Icclui faiiànt voile d’Angleterre, au commence- ment d’Auril de l’an cIdIo lxxvii arriuaau Frafil, fur les xxxiii degrés au Sud de la ligne : & entra prefque fiir la fin de luin dans le port de S. Julien i duquel il partit le xvîi du mois d Aouft , & attaignit le Deftroit de Magallan le xx du mefme mois ; Or y eftant entre , il rencontra trois Mes , a l’vne defquelles il donna le nom d* Elifabethi a 1 autre de S, Barthelemi, & a la troifîeme de S. Georges j & tua dans icelle en peu de temps trois mille de ces oifeaux qu’on nommé Tenguins. Au commencement de Septembre ilpaffa affés heureufement le Deftroit, &'moüiU lalanchre fous vne certaine Me, qui cloft prefque l’emboucheure du Deftroit vers jo la mer du Sud, afin qu il vifiraft plus à plein lepaflage dans cette mer: par ainfi ayant enuoye fa. chaloupe, il vifita foigneufement le canal qui s’ouure vers le Nord ; là ils rencontrèrent vn canoa de Sauuages fait par vne mcrueiileufê induftrie d’efoorces d arbres, & tellement coufu auec des courroyes de peaux de loups marins , qu’il y entroit peu ou point d’eau par les ioindures il auoit les deux bouts recourbés en forme de croiffant. Ces OCCIDENTALES. LIVRE XIII. 4^7 Ces Sauuages eftoyent de médiocre flature, bien membrus, & la face peinte de cer- taine couleur rouge: or ils trouuerent dedans l’Iflcvne petite cabane, faite de gafons &: couucrte de peaux d’animaux; dans laquelle ils trouuerent du feu & de l’eau , dans des vailfeaux coufus de mefmes efcorces, de la chair de loups marins , des moufles & & fcmblables pronifions : Or ils aiguifent de telle forte les coquilles des moufles (qui y font extrêmement grandes) auec de petites pierres, que d’icelles ils ne coupoyent pas feulement du bois fort dur, mais aufli ils en fendoyent des os. Enfin le fixieme de Septembre ils entrèrent dans la mer du Sud. Et la ils furent aufli tort: aflaillis dVne tempefte , fi horrible & opiniaftre , qu’elle ne diminua prefque 10 en rien cinquante iours de long; voila pourquoi elle les agita auec fi grand danger, que contre leurintention ils furent emportés iufques fur la hauteur de cinquante fept degrés de l’cfleuation du PoleAntarétic; ôùayans moüillé l’anchre dans vn certain port,ils furent contraints derechefpar la violence des vents & par la mer fi agitee, de regaigner la grande mer,& vnc de leurs nauires,& peu apres vnc autre ferfeparerent de l’Admirale, fur laquelle eftoitDr^f: voila pourquoi ils donnèrent nom à cette rade, Of ^elîÉïllig of 5fïicnîli8y c* eft à dire,feparation des amis. Delà la mcfme tempefle les porta derechef iufques fur la hauteur de cinquante cinq degrés vers le Sudde laligne,entreplufieurs Ifles, auprès defquelles ils s’arrefte- rent derechef, iufques à cç que la tempefte s’appaifâfl:; ils nommèrent ces Ifles Eli/à-- 10 betkides ,• Or elles font cette partie de la terre Auftrale , qu’on croyoit anciennement cftre vne Continente, diuifees de fi larges & fi profonds canaux, qu’il femble que ce foyentautantdegolfes : ils y rencontrèrent des Sauuages qui voguoyent ci & la auec leurs canoas, hommes & femmes qui portoyent leqrs enfans couuerts de peaux fur leurs dos. Ils remarquèrent lors,que les dernieres de ces Ifles eftoyent à cinquante fix degrés de la ligne vers le Sud, & que derrière icelles il y a vnc mer fpacieufè , autre- ment qu’on n’auoit creuau fiecle paflfé. Enfin fiir la fin d’Oélrobrc le vent eftant ap- paifé , ils prindrent leurs cours vers le Nord. Nous laiflèrons en ce lieu le refte de ce voyage,pour ce qu’il ne fait rien à noftre propos. Mais il ne nous faut pas obmettre ce que Jean Winter a remarqué, qui eftoit Capi- 5 o taine fur vn des nauires de cette flotte ; Car eftant entré dans la mer du Sud auec il pourfuiuit fon chemin vers le Nord-oueft, iufques à feptantc lieues, comme il leur fembloit; où le quinzième de Septembre à fix heures du matin , ils remarquèrent vnc Eclipfe,laqueile fut veué en Angleterre, auant vne heure apres minuid. Cemefme jour fe leua vne rude tempefte , de forte qu’ils ne pouuoyent porter voiles , quf dura huid iours,& les porta vers le Sud iufques fur la hauteur de cinquante fept degrés ; là où le vents’eftantvn peu a ppaifé,ils mirent derechef les voiles, & mirent leurs cours à l’Eft ; le feptieme d Odobre ils virent derechef terre,&: entrèrent dans vne baye fàle de beaucoup de rochers,de laquelle ils fbrtirent non fans danger,retournerent dans le Deftroit de MagaUan-,^ delà en leurs païs,pour obmettre le refte de leur voyage. C H A P. VI, Ü^auigation de Thomas Candish par le DeÜroit de Magallan *, item celle du Richard Hawkins. T Montas Candish fuiuit François Drac en la mcfme entreprinfe ,qui faifànt voile d’Angleterre au mois de luillet de l’an cl n la lxxxvi auec trois^ nauires, eftant porté fur la fin de Décembre au Continent del’Amerique, fur quarante degrés de la ligne vers le Sud, entra dans vn port qu’il nomma pour fon opportunité Fort dejïre'i duquel derechef faifànt voile le fixieme de lanuier de l’an c I d I o l x x x v ii, 50 il entra dans le Deftroit de Magallan^on eftant quelque peu auancè,il print vn certain Efpagnol,qui reftoit auec vingt trois autres de quatre cents, que le Roi d'Efpagne auoit enuoyé là, afin d’y baftir quelques villes, defquelles nous parlerons ci-apres : & le lendemain il paffa les premiers eftroits palTageSjqui fontfelonfbn conte à xiv milles Angloifcsdel’emboucheure du Deftroit, delà s’eftant auancé dix milles iufques aux Ifles des Pe;2^«m,il tourna vers leSud-oueft & viütz Philippe 0/1110 ( vulgairement dire Cuidad delRey Phelippé)cç(x\ auoit efté abandonnée, & déterra quelques canons enfouis lii ^ par 438 DESCRIPTION DES INDES parles habitans : & pource que la plus grande partie des Efpagnols y eftoit mortède diuerfes incommodités & fur tout de faim, il nomma le lieu Port famine : or cette ville eftoic fituee furies cinquante trois degrés de la ligne vers le Sud. Le routier de mer des Efpagnols place ce Cap , qu’ils nomment Punta de Santa Anna^ixxx la hauteur de lui degrés 6c xxx fcrupules, & remarque que Philifpe-villè eftoit fituee au delTus vers leNord-oueft furvne certaine pointe de terre. 11 fit voile de ce lieu le x i v de lanuier 6c ayant pafle le Cap le plus Auftral de tous (qu’il nomma Cape Frauward) fur liv degrés de la ligne, il moüilla l’anchre le xxi du mefme mois dans vne baye de fable, queeft â cofté droit du Deftroit, & lui donna le nom d' Elizabeth, à deux lieues delà il y a vne riuiere qui defcend de la Continente, i o laquelle ayant montée auec leur chaloupe trois milles haut, ils trouuerent vne fort belle plaine, 6c vne contrée champeftre ôc verde d’vn codé 6c d’autre duriuage; ce qui eft rare en ces régions , car le rëfte du païs eft prefque toutafpre, defert 6c herifié de montagnes: il y habitoit beaucoup deSauuages, qui viuoyent de chair humaine 6c d’autres fales viures; 6c mefme il y auoit apparence qu’ils auoyent tué 6c mangé _ quelques Efpagnols, car on trouua dans leurs cabanes des couteaux , 6c plufieurs au- tres hardes d’icenx. Delà ils entreront dans le canal de S. Hierome fcomme les Efpa.- gnols l’auoyent nommé) qui eft à deux lieues delà riuiere; 6c ayans efté contraints , à caufe du vent contraire, de feiourner prefque vn mois entier, dans vn certain port, enfin le xxi v de Feburier ils entreront dans la mer du Sud. Le mefine Candüh auoit i© entreprins pour la fécondé fois de pafler par ce Deftroit dans la mer du Sud l’an. cIoId xci: mais n’ayant peu executerfondeffein, 6c ayant efté miferablement agité par diuerfes calamités, il mourut en ce voyage. . Le Cheualier Richard Hawkins fuiuit ceftui-ci,Iequel eftant parti d’Angleterre l’an cio Id xciii au mois dAuril, apres qu’il eut vifité lacofte du Brafd 6c la ïmiGtedeU enfin au mois de Feburier de l’an cio lo xciv , il fut porté par le vent contraire à vne terre iufques alors incognuë, 6c comme il y a de l’apparence, qui eftoit vne partie de la Continente Auftrale ('s’il y a là quelque terre continuèV prefque fur cin- quante degrés de la ligne vers le Sud ; 6c courut le long de cette cofte au Nord-eft prefque lx lieues : Or ils affeurent qu’ils virent vne fort belle contrée, 6c qui eftoit 50 iàns doute habitée, comme ils peurent remarquer par beaucoup de feux qu’ils y vi- rent par tout de nuid; ils virent en outre quelques riuieres quifortoyentdela Con- tinente en mer, d’vne fi grande viftefTe , qu’on en pouuoit difeerner la couleur de l’eau enri é’ies flots de la mer : en outre le premier Cap qu’ils virent de la mer , il le nommè- rent Point Tremontaine ràxiiouxiv milles duquel vers l’Eft , il y auoit vne Ifle au deuantdelaTerre ferme, laquelle ils nommèrent pour fon bel & verd afped Faire Iland, c’eft à dire, belle Ifle; 6c appellerent toute cette terre Hawkins Maide Land. Mais le vent fe leuant derechef, partant dfelà il arriua heureufement an Deftroit de Magallan, 6clepafra,non fans péril, eftant repouffé quelquesfois de l’emboucheurc d’icelui, qui eft du cofté delà mer du Sud. Enfin il fut prms dans lameç Auftrale mef- 40 me par les Efpagnols , apres vn long 6c cruel combat , comme il auoit défia couru non feulement toute la cofte de chile, mais auffi auoit pafle prefque tout le Peru, 6c leur apprint beaucoup touchant la partie Auftrale du Deftroit qu’il auoyent iufques alors ignoré, fçauoir que toutes les terres qui attouchent le Deftroit vers le Sud, ne font que des Mes, entrecoupées par diuers canaux ; comme il a efté du depuis remarqué parues Belges, 6c enfin du tout mis hors de doute par ce nouiieau Deftroit defeou- uertpar le Maire de noftre nation, comme nous dirons ci-apres. C H A P. VII. 'Nauigatïons des Belges par le Defroit de Magallan ^ premièrement yo fèm la conduite de Simon de Cordes. ENf I N Fan cio Id xcviii nos Belges commencèrent la nauigation par le Deftroit de Magallan,^nQ.c deux flottes efquipees par diuers Marchands, fur la première defquelles eftoit l’Admiral laques Mahu 6c le Vice- Admirai Simon de Cordes d’Anuers, qui fucceda en la place de Mahu, lequel mourut en la mer du Nord : elle OCCIDENTALES. LIVRE XIII. 459 elle cftoit de cinq nauires : Or elle fit voile de Hollande au mois de luin : & apres auoir fiirmonté plufieurs difficultés arriua enfin au mois d’Auril de l’an cId Id xcix au Deftroit mefme : cette faifon de i’annee eftoit affiés incommode , car l’hiuer com- mcnçoitdefiaàfie faire fentir en ces quartiers là: ils allèrent premièrement aux Mes des renguim, &puis apres ils moüillerent Tanchre le xiii de ce mefme mois dans vne large baye , à laquelle les Anglois anoyent défia auparauant impofé nom de Baye aux Moujles lieues au dedans du Deftroit, au cofté droit quand on y entre; il y a vne riuicre qui fort dans cette baye , & toute la cofte mefme & l’Ifte qui eft au deuant delà baye , eft toute couuerte d’arbres , de forte qu’il y a grande commodité pour s’y 1 0 fournir d’eau &c de bois , & la mer fournit d’vne grande abondance de moufles. Apres le vent eftant Eft, ils coururent Sud-oueft & peu apres Nord-oueft , mais le vent fe changeant vn peu , ils furent contraints de tourner voile & de ietter l’anchre dans, vile baye qui eft au cofté Septentrionnal du Deftroit : ils nommèrent cette rade Baye Verde, elle eft à Lfv degrés de la ligne vers le Sud : il y a dans icelle trois petites Mes efparfes ; on y peut , quand le befoin le requiert, mettre les nauires à fcc & les y raccommoder : la cofte de la Continente & les Mes font couuertes de beaucoup d’ar- bres , defquels Sebald de Weert, qui eftoit Capitaine fur vn de ces nauires , & qui fut contraint, apres auoir beaucoup tournoyé dans le Deftroit, de retourner au pais fans rien faire, enefcriuitàmonPere, en faueur du renommé Charles de l’Eclufey<\\xi a in- 20 feré fa lettre dans fes Exotiques: de laquelle on peut remarquer: que cet arbre n’a nulle reifemblance auec le laurier, comme quelques-vns ont faulfement rapporté, que les fueilles feulement approchent de la fentcur de celles du laurier, mais elles font plus larges & plus verdes ; {Richard Hawkins les accoinpare au peuplier noir, mais eferit qu’elles font d’vn verd plus clair) or cet arbre eft toufiours verd (comme la plus grande partie des autres arbres qui croififent aux riuages de ce Deftroit) & croift fort haut , par fois fi gros , que ie me fouuien ('dit-il) qu’on en a foyé d’vn des planches larges de deux pies & demi j or le bois eft fort caftant. Il ne porte nul fruiét, félon que nous peufmes remarquer, iaçoit que nous feiournaffions dans le Deftroit neuf mois & plus , dans lequel temps neceftairement nous enflions veu des fleurs ou 50 des fruids meurs ou non. Quant aux facultés & à la nature de fon bois, fueilles &: efcorce , nous n’en pouuons rien dire , fi ce n’eft qu’ayant remarqué que fon efcorce & fes fueilles font fort aromatiques , nous nous en fommes ferui en nos viandes , efti- mans qu’elles ne pouuoyent pas nuire envn pais fi froid, n’ayans principalement nul poiure, pour faire de la faulce aux moufles , defquelles nous eftions contraints de viure,faute d’autres viduailles. Voila ce qu’il en dit. Mais Hawkins duquel nous auons défia fait mention , donne à cet arbre des fruids verds (fi ce n’eft que parauanture il parle de quelque autre) & fort femblables au graines du vinatier, qui contiennent quelques petits noyaux blancs au dedans, & qui ont la mefme force que le poiure. Dans la mefme baye on y trouue abondance de moufles, qui furpaffent en grandeur 40 celles qu’on ait veuës en aucune autre place,car les coquilles en font lougucsprefque d’vne palme , & les moufles eftant efcaillees & cuites , pefent bien forment vn tiers de liure de noftre païs:il s’y prend en outre beaucoup d’oyes & de canes.Ils demeurè- rent là à caufe de la tempefte contraire iufques prefques à la fin du mois d’Aouft , au- quel temps ils endurèrent de rudes tourbillons, qui fouuent les enleuerent des an- chres malgré eux , & les emportèrent en de grands dangers : & plus de cent de leurs gens y moururent de diuerfes maladies. Or cependant qu’ils fçiournerent là,ilsen- uoyerent leur chaloupe à vne Me qui eftoit de l’autre cofté, qui rencontrèrent en y allant fept canoas de Sauuages,lefquels gaignerent auffi toft la terre,& couurirent les noftres d’vne telle grefle de pierres, qu’ils les contraignirent de retourner, & eux de- 50 uenans plus hardis rentrèrent derechef dans leurs canoas, & commencèrent à les fuiure iufques à ce qu’ils en euffent tué à coups de moufquets cinq dentr’eux, car lors defeendans derechef à terre, & ayans arraché prefque fans peine de gros troncs d’arbres, ils tafehoyent de les ietter apres les noftres , qui fe retirèrent de bonne heu- re : Ils eftoyent (comme ils rapportent) de ftature de Geans , hauts de dix ou onze piés J de couleur rouge , les cheueux efpars, tous nuds vn excepté, qui auoit ceind au deuant de fes parties honteufes vne peau de loup marin: leurs armes eftoyent des dards 440 DESCRIPTION DES INDES dards dVn bôîs fort dur, aufquels ils auoyentlié auec des nerfs d’animaux des poin- tes de bois crochues , & les dardoycnt de telle forte , qu’ils trauerfoyent le corps d'vn homme» Ils donnèrent le nom à la baye de Cordes Baye. Le xxiii d’Aouft ils firent voiledelà,& le lendemain à caufe du calme, iismoüillerentranchre au coftédu Sud du Deftroit vers le cofté Oriental d’vne certaine baye , qu’ils nommèrent Ridders Baye, c’eft à dire. Baye des Cheualiers , à caufe de l’ordre de Cheualerie qu’ils eftabli- rent en ce lieu , laquelle ils celebrerent auec certaines ceremonies Çc par l’obligation d’vne foi mutue!le,foas le tiltre du Lion Libre. Par apres s’eftans maintesfois aUancés, & autant de fois efté repoufies auec de grands dangers, enfin ils fbrtirent le m de Septembre du Deftroit entrèrent dans la mer Auftrale ; ou eftans accueillis d’vne i o rude tempeftede nauire fur lequel eftoit deVFert futrepoulfé dans le Deftroit, èc apres de grandes miferes qu’ils endurèrent plufieurs mois dans le Deftroit , il fut contraint de retourner au pais , auquel nous deuons la plus exade délinéation dii Deftroit qui foit, laquelle nous auons fait mettre dans les Chartes Geografiques de ceLiure. C H A P. VIII. Les longs traçai fommyemenu /i^Sebald de Weeft dans le Dejîroit de Magallan, dcj Crï^tion des Pchguins. 2,0 I’E S T I M E que ce ne fera point hors de propos, fi en mémoire d’vn de mes meil- leurs amis, ie fai mention de Tes longs tracas dans le Deftroit. Apres que la Flotte, comme nous auons dit, fut entree le III de Septembre de l’an cId Id xcix dans la mer du Sud , elle eut vn vent afles propice prefque trois iours ; enfin le quatrième vn fort vent commença premièrement à efleuer de grofles ondes , de forte que les nauircs eftoyent fort agités, &vne bruine efpaifte leur oftoit la veuë les vns des au- tres, de forte que le nauire Admirai s’efearta des autres : Or le dixième de Septem- bre vne horrible tempefte s’efleua, qui fepara aufli.les autres, excepté deux, fur l’vnc defquelles eftoit noftre Sehald. Mais comme la tempefte fut vn peu appaifee & le vent eftant vn peu fauorable , ces deux nauires tindrent leur cours iufques au xix du mef ^ ^ me mois, qu’vne fi grande furie de vents les tourmenta de forte, qu’ils furent en^ ' grand danger; de maniéré qu’eftans xxiv iours de long agités dans la mer du Sud, enfin ils furent repoufles dans le Deftroit, où ils anchrerent dans vne certaine baye : En ce lieu ils furent prefques tous les iours tellement accueillis de tourbillons, qu’ils furent maintesfois enlcués de leurs anchres , & en perdirent quelques-vns. Delà eftans allés dans \ ne autre baye qu’ils croyoyent eftre plus afleuree, ils encoururent non moins de péril, car le nauire de Sebald fut prefque brifé contre les rochers par vne fubite trauade , & fut preferuê comme par miracle : ioind à cette incommodité la mutination des matelots , qui defiroyent de retourner au logis & eftoyent à grande , peine retenus par les perfuafions du Capitaine. Cependant l’abondance des moufles qui eftoit dans cette baye , leur fourniffoit à fuffifance de viures ordinaires.. Or apres qu’ils eurent demeuré en ce lieu iufques au fécond iour de Décembre, fans elprouuer que des miferes, le vent commença à fouffler du Nord-eft, voila pour- quoi ayant mis à voiles, ils tafeherent de fortir, & enfin eftans fortis auec grand dan- ' ger & crainte de naufrage, ils moüiîlerent l’anchre vn peu loin de l’autre nauire , de forte qu’à la fin ils furent du tout fèparés d’elle. Cependant qu’ils feiournentlà, ayans paffé auec la chaloupe vers la prochaine terre qui eftoit à rOueft, ils rencontrèrent quelques Saupages, qui aufli toft qu’ils curent veu nos gens, tafehoyent de le fàuueràlafuite dans les montagnes prochai- nes, de forte qu’on ne les pouuoit fuiure en façon qui foit, ilsprindrent feulement vne femme auec deux enfans , qui fut amenee au nauire j Elle eftoit de moyenne fta- ture, de couleur rouge ,1e ventre gros,les mamelles pendantes, le vifage fort affreux, les cheueux rafés,excepté autour du front & des oreilles, dü tout nue, fi ce n’eft qu’el- le auoit les efpaules&ledoscouuertdepeau de loup marin : ilfembloit qu’elle nefc foucioit pas beaucoup d’eftreprinfè, elle abhorroit entièrement toute viande cuite, mais apres qu’elle eut plumé legerementvn certain oifeau, & quelle i’euc incifèvn peu O CCIDENTALES. LIVRE XIII. 44r peu auec vnc coquille de moufle, elle le dcfchira iettantvne partie des tripailles,& mangea clleôi: Tes enfansle foye & legifier fort gloutement, & peuapres lereftedela chair vn peu roflie ôc demi cuite.L’ayans gardee deux iours dans le nauire,ils la mirent derechef à terre,& retindrent vue petite fille de quatre ou cinq ans, fans que la mere s’en fouciaft, laquelle mourutà Amfterlodam comme Sebald commençoit à l’efleuer. Le X I V de Décembre s’efleua derechef vue forte tempefi:e,qui les emporta hors de la bay e,ayans perdu leur diables & leurs anchres,de forte qu’ils furent contrains de re- culer nialgré eux dans la baye de Cordes } cependant qu’ils y font vne calamité les atta- que,car leur chaloupe fut enfondree par la furie des ondes:mais le lendemain comme 10 ils eftoyent encore à l’anchre dans cette bay e, il leur arriuavn fecours,non efperé, par olyukr deNoort->Q^\ auoit moüillé l’anchre dans ce Defl:roit:5’f^/ï/<^fe ioignant auec, fit tout ce qu’il peut pour entrer auec lui dans la mer du Sud, mais ce fût en vain, à caule du vent côtraire qui les repouflfajpar ainfi l’ayant quitté, il print fa route vers les Ijles des P^-i^^^^/Wfautede viduailleSjOÙilarriuale xii delanu. de l’an cio Idc rayansaufli toit defcenduàtcrre dans la petite Ifle, cependant qu’ils font occupés à tuer des oifeaux,il fe leua vne fubite tempefte , qui heurta fi rudement leur chaloupe, qu’ils auoyent faite apres l’autre perduë,contre les rochers & le riuage,qu’ils l’eftimoycnt eftre du tout bri- fee: il fembloit qu’il n’y auoit plus de remede à ce maiheur,car ils n’auoy ent laifîe dans le nauire que cinq hommes,encore pour la plus grande part malades ou debiles & eux 10 deftitués de toutes chofes,ncfçauoyent où fetourner: toutesfois ils firent tant, qu’ils raccommodèrent en quelque façon leur chaloupe, ôr retournèrent au nauire le xx i v. Ils trouuerent dans cette Ifle vne femme qui s’eftoit cachee dans vne cauerne de ces oifeaux: elle auoit la face peinte,efl:oitcouuerte depuis les efpaules iufques aux genoux d’vn manteau fait de peaux de Penguins & autres animaux fort bien coufuës enfemble, & auoit les parties honteufes couuertejs d’vne femblable peaujde maniéré qu’il eft aifé à iugerpar là,quelesSauuagesquihabitentIaContinétefontplusciuilifés&moinsbar- bares, que les autres qui demeurent dans les Ifles qui en font vis à vis j ils y trouuerent auflile corps d’vn homme mort, qui auoit les cheueux elpairs, enuironnés d’vne cou- ronne faite de diuerfes plumes, ceint en outre depuis les reins iufques aux genoux de 5 O femblables plumes, fuflelquclles il y auoit vn petit ret parfemé de diuerfes petites pier- res &: oflrclets:ilsprindrent lors ccccl de ces oifeaux: le lendemain ils allèrent à la grande Ifle remplie d’vn nombre prefque infini d’oifeaux, de forte qu’en peu de temps ils en tuerent neufcents.Eftanspuis apres emportés parles vents outre ces Ifles, & de- rechef ramenés , ils perdirent non fans grand danger vne anchre, de maniéré qu’il ne leur en reflioitplus qu’vnc, petit réconfort en vn Deftroit fi tempeftueux & agité: voila pourquoi ayans relblu de retourner au païs,ils quittèrent le Ejeftroit de MâgdlanXç, xxi de Feburier;&: le XXIV du mefme ayant fait voile prefque lx lieues delà Continente, ils rencontrent trois Ifles, iufques alors incognuès,furL degrés &xl fcrupulesauSud de la ligne,qu’ils nommèrent les Ifles de Sehddsç.nkïi ils arriuerent en Hollande le xiir 40 de luillet. Or pource que nous auons défia fait plufieurs fois mention des Penguins, nous auons adiointemee lieu la forme & la defeription de ces oifeauxfelon Charles de tEclufe. C’eftfdit-iUvn oifeau marin du genre des oyes,com- bien qu’ils n’ayent pas vn bec femblable, viuanten.mer,fort gras, de la grolTeur d’vne grande oyejcar on a remarqué des plus vieux, qui pefoyentxiii, xrv &mefmes parfois xvi li- ures: furie dos ils fontcouucrts de plumes noires,deflrous le ventre de blanches :1e col qu’ils ont court & gros efl: ceint comme d’vn carquant de quelques plumes blanches; leur peau efl; aufli efpailfe que celle de pourceau : ils n’ont point 50 d’ailes, mais en leur place ils ontdeux petits ailerons comme de cuir , qui pendent aux deux coftés à la façon de deux pe- tits bras,couuerts fort dru en haut de courtes,efl:roites & ru- ûgreiôclcs couuertures faites de leurs peaux OripoggresOsils fçauentaulfi bien préparer & coudre ces peaux, que les pelle- tiers de nollre pais. En outre, ils racontoyent qu’au milieu du pais habitoyent les riremenes dans la contrée nommee Coin, d’vnellaturedutoutde Géant, qui elloyent 40 ennemis des autres nations , qu ils attaquoyént louuent & tuoyent milerablement ; il y a de l’apparence qu’ils viuent de chair humaine, combien qu’il femble qu’ils ayent abondance de venaifon & autres viures. Ils racontent qu’ils auoycnt apprins ces cho- fes de quelques garçons qu’ils auoyent amené auec eux, & qui auoyent apprins en partie nollre langage. < La troifîeme & derniere nauigation par ce Dellroit fut eutreprinlè par Georges Spîlhergue, fous les aufpices de la Compagnie des Indes : qui ayant fait voile de Hol- lande lan cIoiDc XIV au mois dAoull, apres auoir lurmonté beaucoup de périls, arriua enfin le Iccond de Mars delan cIdIdc xv , & ayant ellé louuentes fois re- poulTé des vents contraires & des tempelles, il palfa les premiers ellroits palfages le y 0 troifieme d’Auril , & le xvii du mefme il entra dans la baye de Cordes, où il print de l’eau , du bois & autres chofes necelfaires , & enfin il entra le vi de May dans la mer ' du Sud. C’ell celui prelqiie de tous quia palfé ce Dellroit auec moins de temps. le croi bien qu il y a encore d autres Angîois & Belges qui ont elîayé cette na- uîgation , & rnelme que quclques-vns 1 ont acheuee, mais pource que nous n’auons pas veu leurs routiers,' nous n’auons peu en faire mention en ce lieu. C H A P . OCCIDENTALES. LIVRE XÎIL 445 C H A P. X. Expédition de Diego de Valdes, ^ deux Colonies d'Espagnols placées au Defîroit de Magallan. PEdro Sarmiento (de la nauigadon duquel de la mer du Sud par le Deftroit de Magallan en Efpagne nous auons fait mention ci-delTusj induifit par certaines raifons feintes Philippe II. Roi d’Efpagne , Prince pourtant aiî'cS fin , à fortifier les efiroits paflTages du Deftroit de Magallan (le Duc d’Albe, comme efcrit Herrera, I O y contredifl'ant fort j & à les alfeurer auec des Colonies qu’on y meneroit , afin d’em- pefcher à l’aduenir le pafiage par ce Deftroit vers la mer du Sud aux autres nations. Pour efteftuer ces chofes Diego Flores de Valdes fut enuoyé auec vingt cinq nauires, & trois mille cinq cents hommes, outre cinq cents vieux foldats qui ayans efté rappelles des Pays-bas, accompagnoyent le nouueau Gouuerneur de chide dans ià Prouince. Cette expédition fut commencée par de fort malheureux aufpices, car auant qu’ils tuflent quitté la cofte d’Efpagne , il y eut cinq nauires auec huid cents hommes , tant matelots , que enuoyés pour habiter ces Colonies , qui furent enfoncés , &; le refte de la flotte fut repouffee dans la baye deC«iïd.Bahie de tous les Sainds : enfin ayant recouuert vn autre nauire dans la Bahie auec du fecours, il fit voile derechef vers le Deftroit, & derechef cftant accueilli par vne rude tempefte fur lesxLiv de- grés de la ligne vers le Sud, il en fut tellement agité, qu’il fut contraint de ietter en mer vne bonne partie de fes viduailles, & de retourner au port de Riodelenero} d’où par- tant derechef, iltomba entreles mains des Anglois, quiTemmenerent prifonnier. Or il eftoit entierementdecheudelagracedefon Roi, qui feplaignoitd’auoir efté trompé par les vaines perfiiafions de cet homme, fur tout quand il eut entendu de 2.0 pbero , que Iqs paffages du Deftroit eftoyent fort larges, que Sarmiento auoit fait fi eftroits , & qu’ils auoyent plus d’vne lieue , de forte que tous les canons du monde, ne pourroyent empefeher ou arrefter les nauires qui y voudroyent pafler auec vent & maree. Enfin les habitans qui auoyent efté laiffés par Sarmiento en ces deux villes, quelques peu d’exceptés , moururent de diuerfes maladies & notamment de faim ; & beaucoup d’iceux, comme ils penfoyent gaigner les Prouinces voifmes , furent tués & fans doute deuorés des cruels Sauuages, comme nous auons dit cfdeflus en paf. ' fànt. Ces chofes aduindrent és années cIoId lxxxiv,lxxxv & lxxxvï. NOVVEAV DESTROIT LE MAIRE 30 C H A P. XL Première defeounerture du D^uueau Dejlroiî le Maire. NO V s auons iufques ici difeouru briefuement des diuerfes natiigations de plufieurs nations par le Deftroit de ^PMagallan t maintenant auant que de pourfuiure la Continente d’icelui, que eft le long de la mer Atlantique, il nous faut parler de l’autre nouueau Deftroit, qui finit en la mer Auftrale : la gloire de la première defcouuerture duquel eft deuë à nos Belges. Nous auons entendu ci-def- fus par le rapport tant des Anglois, de ceux de noftre nation , que des Efpagnols , que 40 la commune opinion prefque de tous ceux qui auoyent effayé à paffer, & auoyent paf- fe le Deftroit de cMagallan^ eftoit, que toutes les terres qui fontàla main gauche d’i- celui quand on y entre de la mer du Nord, ne font que des Mes, & que derrière icelles il y a vne fpacieufe & large mer, quifè ioind auec la mer Auftrale, & nous auons ci-deuant donne de grandes raifbns de cette opinion. Enfin ceux de noftre nation n ont pas feulement rendu cela clair & manifefte, mais ont mefme trouué vn nou- ueau Deftroit, par lequel on peut paffer dans la mer du Sud auec moins de difficulté & de danger^ Or nous dirons maintenant comment il a efté trouué par ceux de no- ftre nation. Ifaâcle Maire d’Anuers , Marchand fort induftrieux, & Guillaume Corneille Schoufe 50 de Horne-^ ayans refolu de defcouurir & vifiter de nouuelles terres vers le Pôle An- tardic, efquiperent vn nauire auec vne barque, & les rauitaillercnt & fournirent de toutes chofes neceffaires pour vne longue nauigation, fur lefquels fut mis pour Com- mandeur mefme, & laques le Maire ûh d’ifiac pour commis. Ils partirent du Texeloott fort cognu en Hollande., au milieu de luin de l’an cloloc xv: Or ie ne toucherai point a ce qui leur aduint en ces premiers mois , pource que cela ne fait OCCIDENTALES. LIVRE XIII. 44^ Tien à noftrc propos , qu auflî ceux qui en feront defireux le pourront voir dans le routier de ce voyage, qui eft défia de long temps en lumière : ie commencerai par leur partir du Port Dejiré (où y eftans entrés le vu de Décembre, ils y perdirent leur barque,qui fut brufiec inopinément, deqtioi ils receurent vnc grande incommodité) qui fut le xiii delanuier de l’an cId Idc xvi. Eftans partis delà, ils eurent premièrement en veue les Ifles quon nomme de Sebald fpour les caufes ci-deftùs) fur li degré au Sud de la ligne î lefquelles ayans pafiées &: courant droit vers le Sud , ils prindrent la hauteur le x x du mefme mois , & fe trouuerent qu’ils eftoyent défia au Sud de la ligne lui degrés, &àenuiron xx I O lieues outre le Deftroit de Magallan , comme ils pouuoyent conieélurer : delà fuiuant le mefme cours le xxiii du mefine mois,reau commença à changer de couleur & à deuenir d’vn verd pafte, indice afifeuré qu’ils n eftoyent pas loin de terre : laquelle auflî ils virent fur les trois heures apres midy du coftè de l’Oueft & Sud*oueft, & peu apres au Sud: le vent eftant Nord, ils mirent leur cours vers le Sud- eft le long de la coftej le XXIV au matin ils virent derechef terre à ftirbord, de laquelle ils n’eftoyent à peine qu’à vne lieue : la mer eftoit là profonde de xl l^afles , & le vent Oueft : Or toute la cofte couroit vers le Sud-fud-eft, & eftoit de tous coftés enuironnee de fort hautes montagnes qui fembloyent eftre fort couuertes de neige. Courant le long de cette cofte vers le Sud-eft , ils arriuerent enfin fur le midy au 10 bout d’icelle, & virent d’autres terres fort loin vers l’Eft, qui n’eftoyent pas moins releuees en hautes & afpres montagnes : Or entre ces deux terres couroit vn Deftroit enuiron huid lieues de large, félon qu’ils pouuoyent conieduret; ils iugerent auec apparence qu’on pouuoit par iceluipaflerdanslamer Auftrale, car le courant le per- fuadoit.qui couroit lors rudement vers le Sud: ils eftoyent défia à liv degrés & xlvi fcrupules de la ligne vers le Sud, & ayant vn bon vent du Nord, ils entreront heureufe- ment ce Deftroit, mais le vent s’accalmant fur le foir, ils furent piuftoft driués par le courant que poufles parle vent. Ils virent en cet endroit vn nombre innombrable de Penguiris à la cofte, & fi grande quantité de Balaines en mer, qu’ils auoyent de la peine à les efuiter. JO Le XXV du mefme mois ils approchèrent de la terre du cofte de l’Eft, qui eftoit haute & rude de montagnes droites & feparees, & qui couroit droit vers le Sud-eft du cofté qu’elle regarde le Nord, félon qu’ils le pouuoyent iuger de loin ; toutesfois ils ne croyoyent pas que ce fuft Terre ferme, voila pourquoi ils la nommèrent l’ijîe des Ejlats ; & la terre qui eftoit de l’autre cofté, ils lui donnèrent le nom du Prince Mau- rice. La cofte-des deux eftoit fablonneufe , & le fond eftoit moyennement droit, pro-. mettant, comme il fembloit, vn bon anchragej ily auoit quantité d’oifeaux &: de poiflbn, ôd:y pouuoit auoir commodité pour y prendre de l’eau, mais ils n’y virent nuis arbres. En outre le vent foufflant du Nord, il coururent vers le Sud-oueft, &: ayans prins la hauteur à midy,ils fe trouuerent eftre auancés vers le Sud de lv degrés 40 & XXX fcrupules de la ligne. Or toute la terre qui eftoit à ftirbord , couroit depuis le Cap qui s auance dans le Deftroit, vers le Sud-oueft , & eftoit releuee de grandes &: rudes montagnes: au foir le vent fe tournant au Sud-oueft, ils prindrent leur cours vers le Sud, & les ondes de la mer venoyent fort grolTes du Sud-oueft , d’où il eftoit aifé à iuger qu’il y auoit vne fpacieufe & profonde mer de ce cofté. Ils virent en ce lieu des Goilans {c’ cik vne efpece d’oifeaux marins ) prefque auflî gros que des cygnes de ces pais, qui n’auoyent pas peur des hommes, comme n’eftans pas accouftumés d’en voir, mais venoyent librement dans les nauires , & fe laiflbyent prendre & tuer des matelots. Le XXVI du mefme mois eftans fur les lvii degrés au Sudde la ligne, ils furent alTail- J 0 lis d’vne horrible tempefte de l’Oueft &: Sud-oueft, de forte qu’ils furent contraints de gaigner la mer , toutesfois ils auoyent toufiours la veuë de la terre à ftirbord , qui cou- roit Nord-oueft,vers laquelle ils tournèrent le cap la nuiét: le xxvii ils eurent la hau- teur de Lvi degrés & l fcrupules,où ils endurèrent grand froid, & eurent beaucoup degrefle, le vent fe tournant qontraire vers le Sud, peu apres ils mirent le cap au Nord-oueft : le xxviii , le vent leur vint bon de l’Eft, qui les fit courir Oueft , ils eu- rentà midy la hauteur de L vi degrés & XLviii fcrupules : Le xxix courant Sud-oueft Kkk 5 par 44^ DESCRIPTION DES INDES par vn bon vent Sud-eft, ils virent à midy deux Ifles, & comme ils en coftoyoyent la cofte vers le Nord, ils trouiierent que c eftoyent pluftoft des rochers que des I/les ; ils leurs donnèrent le nom AtBârneuelâsàtW courant Nord-oueft, ils virent derechef terre furie foir, qui ferme le Deftroit àc MagallanvQïs leSud& eftendfacôfte vers le Sud , heriflee de montagnes de neiges , iufques au Cap qu’ils nommèrent de Home, fiir L VII degrés &XLVIII fcrupules delà ligne vers le Sud. Là ayans trou ué vn vent de Nord, ils mirent le cap à l’Oueft, le courant les portant roidementdececofté. Le xxx, ils eurent la hauteur de lvii degrés & xxxi vferu- pulesî lexxxijLvin degrés: ils auoyent defiaà dos le Cap de Home &iievoyoyent plus de terre, le vent fe fit Oueft, dé forte qu’il leur fallut voguer ayans défia lix de- j o grés de la hauteur du Pôle du Sud , enfin le xii de Feburier ils eftimerent,non (ans caufe,qu’ils eftoyent pafles dans la mer du Sud, & prindrent leurs cours vers les Ifles de luan^ Fernandez. Ils appellerent ce nouucau Deftroit, premièrement par eux eflTayc & pafle fi heureufement, le Deftroit le Maire, C H A P. XIL tHauigation des Bj^agnoh par ce nomeau Dejîroit. Le bruit de la decouuerture de ce nouueau Deftroit faite par ceux de noftre nation s’efpandit tout aufli toft , & vint aux oreilles du Roi d’Efpagne, qui y lo enuoya deux caruelles de Portugal l'an cl o Idc xviii fous la conduite de Farîholomeo Garjias de Nodal, afin de le vifirer plus à plein : qui partirent de Lifbonne le XXVII de Septembre, & prindrent leur route droit vers le Deftroit de Magallan, & eftans paruenus iufques au Cap du Nord d’icelui.ils mirent le cap au Sud-eft & fur les LUI degrés & xx fcrupules de la ligne vers le Sud, ils rencontrèrent vneouuer- ture, qui auoit en fon emboucheure enuiron trois lieues de large, qu’ils eftimerent entrer dans le Deftroit mefme de Magallan. Ils donnèrent le nom de Cabo âel EJpmtu San£îo au Cap du Sud du Deftroit de Magallan .* & à cette emboucheure de Eniradx de S. Sebajlian^^ au Cap d’icelle celui de Punta de Jrenas: delà courant le long de la cofte vers le Sud-eft, ils rencontrèrent premièrement yne baye, fàle de beaucoup de 5^ rochers & de bancs de fables , la pointe de laquelle ils nommèrent Cabo dePennas. Tonte cette cofte eft haute & remplie de montagnes couuertes de neiges , furies Liv degrés & iv fcrupules de la ligne vers le Sud; mais vn peu plus outre elle eft ve- ftuë de beaucoup d’arbres; &furles Livdegrés&xv fcrupules de la ligne la terre eft entrecoupée de plufieurs bayes & Caps: or à lv degrés ils trouuerent vne baye dans laquelle il y a deux petites Ifles ; toute cette cofte eft blanche, de forte qu’on diroit de loin que c’eft du fable, combien que ce nefoyentquc des pierres rouges des on- des de la mer. Au foir ils arriuerent au nouueau Deftroit, duquel le courant fortoit d’vne telle furie, qu’à peine auec le bon vent & fort qu’ils auoyent, y peurent-ils entrer javans 40 enfin pafle l’entree, & eftans entrés au dedans enuiron vne licuë, ils moüillerent ianchre dans vne baye fablonneufe , où ayans defeendu à terre , ils y trouuerent vne grande commodité pour y prendre de l’eau & du bois; car il y a vne petite riuiere fort bonne à boire qui y defeend, & la terre eft toute couuerte d’arbres : cependant qu’ils feiournerent là, quinze Sauuages vindrentà eux ducoftédu Sud, qui auoyent tout le corps peint de rouge, excepté la face (car ils auoyent le front & les iouè's blan- chies d’vne certaine croyej en partie nuds, en partie ceints d’vne peau de brebis teinte de mefme couleur rouge : il y en auoit entr’eux deux plus vieux , qui eftoyent couuerts d’autres peaux brunaftres,d’vn poil fort doux, & auoyent la tefte couuerte de peaux de Goilans aufquelles ils auoyent tiré les grandes plumes & n’y reftoit que f 0 le duuet feulement : leurs armes eftoyent l’arc & les fléchés , munies au bout de cer- taines pierres aigues , dont ils auoyent aufli des couteaux : ils auoyent autour du col des parures variées de fort belles coquilles de mer blanches, & eftoyent ceints d’vne ceinéure de cuir fur les reins : Les Efpagnols ne p(^uuoyent en façon quelconque entendre leur langage, s’ils difoyent ou demandoyent quelque chofe,ils reïreroyenr, Hoo Hûo Hoo: ih abhorroyent les viandes & la boiflbn des Efpagnols , & vjuoyent feulement . OCCIDENTALES. LIVRE XIII. 447 l'eulemcnt de certaines fleurs iaunes fqui fembloyent n’eftre pas trop differentes de la Soulfle de noftre pais) de l’herbe aucunement amere , qui croift là par tout en grande abondance : ils ne fe plaifoyent pas feulement en la compa gnie des eftran- gers , mais auflî ils leurs aidoyent à prendre leur eau & leur bois , & iertoyent leur:, ar- mes à terre auant que d’approcher prés : de l’autre cofté de la baye on voyoit plus de cinquante femblables Saunages, qui demeuroyent dans de baffes cabanes faites de gafons & couuertes de rofeaux , dans lefquellcs il n’y auoit nuis meubles , feulement ilsy trouuerentdes coquilles de moufles vuides : au refte ces Saunages fembloyent n’eftre pas mal dociles, car prefquc fans peine ils leurs apprindrent à reciter l’oraifon 0 Dominicale , auant que les Eijjagnols en partiffent. Eftans partis de cette baye, le courant refluant derechef les emporta hors du De- ftroit , & les chafla vers la terre qui eft deuers 1 Eft , ou la mer eftoit fi profonde , que proche de terre ils n’y pouuoyent trouuer fonds auec la fonde: Delà eftans derechef portés par les ondes & le vent dedans le Deftroit,ils mirent le cap au Sud-oueft: &: eftans agités deçà & delà quelques iours par le vent &: la maree , enfin ils pafferent le Cap de Home, & entrèrent dans vne baye qui eft derrière icelui, ils y trouuerent quel- ques Mes , où il n’y auoit que des rochers & nul herbage , or la cofte de cette baye fe drefle en hautes montagnes couuertes de neige, & eft fiir les lvi degrés & xxii fcrupules au Sud de la ligne (comme ils remarquèrent : ; proche delà il y a vn port qui 3 femble n’eftre pointmal commode; ils endurèrent en ce lieu vn afpre froid & de ru- des grefles & neiges: ils furent derechef chaffés par le vent & la maree vers le De- ftroit:maisle xix de Feburieriis arriuerent enfin fur la hauteur de Lvr degrés &xxx fcrupules, & déclinant infenfiblementle xxiii du mefme mois,ils eurent la hauteur de Lin degrés & iv fcrupules courant tpufiours vers le Nord-oueft; & tournant le cap à l’Eft ils arriuerent à l’emboucEeure Auftrale du Deftroit de M^gallm, dans le- quel eftans entré le xxv du mefme mois, ils le pafferent hcureufemenc, &: eftans en- trés dans la mer Atlantique, fàlüe en paffarit Pemamhuque , ils retournèrent laufs à Seuille \c. ix iour de luillet de lan cio loc xix.Ayantacheuece mémorable voyage en neuf mois & quelques iours. C H A P. XIII. Expédition de la Flotte de Naflau par le Defîroit le Maire en la mer Meridionnale. En outre le xxiii d’Auril de l’an cio loc xxiii partit de Goeree, port fort co- gnu en Hollande, vne Flotte de onze grands nauires fort bien efquipés,lef- quels ceux de noftre pais nommoyent vulgairement la Flotte de Najfm, fous les aufpices des tres-Illuftres Eftats, Meflîeurs les Eftats Generaux, & de llnuincible Prince Maurice, d’eternelle mémoire, fous la conduite du General Ia(iues tHermitCi auec ce deffein de paffer par le Deftroit le Maire dans la mer du Sud j ie ne parlerai pas de ce qui leur aduint és premiers mois de leur nauigation , pource qu’il ne fert de rien à noftre propos en ce lieu, il fuffira feulement d’entendre, qu’eftans parti de la cofte d’Afrique pluftoft qu’il n’eftoit befoin , ayans efté portés par le courant & le calme vers Guinee & les Mes voifines d’icelle,ils y endurèrent plufieurs miferes & maîaaies , & arriuerent au Deftroit le Maire par vn plus long cours que les pre- Car fans auoir en façon quelconque vêu la terre de l’Amerique Meridionnale, ils fe trouuerent le xxx de lanuier de l’an cIdIocxxiv iufques fur la hauteur de lu degrés de la ligne vers le Sud; & le premier de Feburier iis virent de loin la terre Auftrale; le fécond du mefme mois, ayans recpgnu le Deftroit par fignes indubita- bles, il y entrèrent; à midy eftans prefque défia paffés le Cap Auftral de la terre qui eft à bas bord quand on entre , que ceux de noftre nation auoyent nommee terre ou Jjle de Mejfîeurs les Ejlats , ils nouvLQtentld. hauteur de lv degrés du Pôle du Sud; & le lendemain lvi: enfin le vi du mefme mois ils virent de loin le Cap de Home; mais à caufe du vent contraire ils ne le peurent paffer, par ainfi mettant le cap au Sud, ils voguèrent quelques iours , finalement le vent venant meilleur, ils pafferent le quinzième 448 DESCRIPTION DES INDES quinzième du mefme mois le Cap de Home, mais comme ils faifoyent voile plus ou- tre , le vent de N ord-ouefl: foufflant de furie , ils furent contraints de retourner , & de peur que le courant ne les emportaft outre le Capjils trouuerentbon d’entrer le xvii du mefme mois dans vn canal qui eft le plus proche de ce Cap vers l’Oueft, &qui court rapidement entre les terres > lequel ils nommèrent de Najfau. Or cependant qu’ils s’efforçoyent contre le vent contraire, ils rencontrèrent deux Mes iufques alors incognuës , lefquelles font à enuiron xiv ou xv lieues dudit Cap vers l’Oueft. Eteftans defcendusàterre pour y prendre de l’eau, quelques Sauuages vin- drent à eux , ne demonftrans nul femblant de mal , mais ayans iaiffés x i x de nos gens à terre la nuid, comme ils negligeoyentàfegardetjilsfurenttous tués, deux ex-i q ceptés , par ces Sauuages , partie à coups de fléchés , partie de mafliiês de bois , & ne virent plus du depuis aucuns Sauuages: cependant qu’ils feiournerentlàils enuoye- rentleur barque, afin d’apprendre plus à plein la fituation des lieux, laquelle faifant voile premièrement droit au Nord, trouua vne certaine baye, autour de laquelle ha- bitoyent beaucoup de Sauuages , defquels ils ne rcceurent nul defplaifir : par apres ils tournèrent vers i’Eft , & furent portés par le courant derrière vne Ifle, qu’ilsmomme- rent T nhdthen : & le vent venant de l’Eft, ils retournèrent à la Flotte. Ils endurèrent en ce lieu de rudes tempeftes & des trauades de l’Ouefl: qui les fit de- meurer en ce lieu iufques au xxvn du mefme mois : auquel temps ils firent voile , mais le vent d’Ouefl: foufliant d’impetuofité , ils ne peurent porter que leurs baffes v-oiles ; 20 iufques à ce que le premier de Mars le vent fe faifant Nord, ils mirent le cap au Nord- ouefi; &le fécond d’icelui ils eurent la hauteur de L IX degrés,-le troifieme lix & xly fcrupulesfle cinquième lviii & xl fcrupulesjle feptieme lx degrés & xv feru- pules : enfin le vu i ils trouuerept la hauteur de lx degrés ; par apres ils déclinèrent de cette hauteur infenfiblement & le xiv ils fe trouuerent derechef fur la hauteur de LVIII degrés 5 lexxivfur lvîi &finalementle xxv fur xlv degrés &xxx fcrupules: Là ayans trouué vn vent de Sud continu, ils arriuerent heureufement aux Mes de luan Fernandez., . Ch a p. XIV. Defiriptkn de la Terre Leurs canoas font fort gentimentfaitsd’efcôrce d’vn certain gros arbre, fi bien cou- fuës enfemble, qu’ils femblent prefque en forme aux naffelles" deVeni^e, affermies auec des cercles difpofés à trauers la quiile,quifont derechef couuerts d’efcorces &:ferme- mentliès:ils font ordinairementlongs de x,xii &feizepiés, & larges de deux, & por- tent communément fept ou huid hommes, qui les font aller fort vifte auec leurs rames. Cette nation efl: fort Sauuage,car outre qu’ils viuent de chair crue , mefme de celle d’homme, ils n’ont nulle, eftincelle de religiqn ni de gouuernement politique, & font J O tellementdeftitués de toute honte,qu’ils pifferont librement contre ceux qui font pre- fents,s’ils tie s’en doniient gardejils font d’vn naturel fort changeant & mefehant , car encore qu’ils faflTent au commencement bonne mine auxefl:rangers,neantmoinsils s’efforcent de tout leur pouuoir de les furprendre & maffacrer. Il efl; certain par indices affeurés.qu’il y a quelques animaux dans ces Ifles; car ceux que nous auons dit qui auoyent efté à fa nchre derrière rifleder^;'/^/ï//f^;/,afreurenr, qu’ils auoyent veu de loin des animaux paffans par troupes dans yne verde vallee. C H A P. XV, Defeription de U Cofle Magallanique qui efl fir la mer Atlantique^ fllon les E^fagnols, CE T T E partie de la Magallanique qui efl le long de la mer du Nord, laquelle s’eftcndderembducheuredu Deftroitou depuis le lu degré & xxx fcrupules de la ligne vers le Sud,iufques au xxx vi ou enuiron de la mefme hauteur & iuf- ques à l’emboucheure delà riuiere de la P/4t/?,comprenant des Prouinces fort fpacieu- fes , efl: feulement cognuë legercment,& comme elle a efté vifitee par diuerfes nations, aufïieftellenommee enplufieurslieuxde diuersnoms: Q^ntà nous, nous traiterons premièrement des obferuations des Efpagnols, félon lefquelles Herrera dit ce qui s’en- fuit en la defeription des Indes. Dans l’efpacefdit-iLd’enuiron de c c c c lieuës,le long de la cofte,depuis le Deftroic de ^Æ^^faiufques àlemboucheure delà de la P/<«/^,quigift prefque Nord-eft &: Sud-oueft,feprefente premièrement la riuiere nommée vulgairement S.lle- j^;^,ilyaxiilieuës duCap àc las Virgines,i^ms, apres iî/i? Gallego S>e\d.hzyQ/,fur xl vu degrés de l'Equateur, la riuiere de Cananor LU a XLV 4^0 DESCRIPTION DES INDES à XLV degrés deîaligne. S.Uûmmgo de très Punta^ySih terre de los Humos^ furxxxviiidegrésdelaligne; la pointe deS.Helena & de S. Apoll0nia^xi^Y.yii de- grés de la ligne. Enfin de Cabo Blanco\ qui cloft le cofté Auftral de lariuiere D’autres deferiuent plus exadenient cette mefine colle ; & du Cap Auftral de la riiîiere de la Plaîa(Ci\x ih nomment de S. Antoine) ils content quarante, huid lieué’s iuf- ques à celui de Arenas Gdrdas & mettent au milieu de cet elpacela riüiere de S. Anna^ àremboucheuredelaquelleilyadesbancs de fable. En outre du Cap de ils content trente &:vne lieue iufques à celui de S. André i^metzem entre deuxbeaucoup de bayes &diuerfes riùieresj mais qui fonc toutes fans ports & bouchées de bancs de fable. ; “ r DuCapdeJ‘.y^»ecufi5 "P^dAla candellarût gçi.amacK:ÿ^ Ytat^ni ^'S^S.Cnts ^aiSfq^ — •iiciiJ Baicliei*epo5 Faicnit»o5 TR0PICV5 CAPRICORIJI G’ua^ftt , CrndatCReal, Qntiveros . h» -■ ^■^^S.Seh^a^ Guaictirue5 •Assumcton ymitas ^ IS'îrancjJco .Vtixhuea S. Je 'P .TAi-Anj*^^' ^^S.uitana cffiTfentes L ■ Je los^tM. Aygaiï- Aïepenes j^equai'etA '<2f lêale j£Shoy£etinhi ^.'iamamnJalnt Tejibue. ^ S.SinnJi i •J.OJ’tl"* tarreiij Oixbet^^ ni- JeS'Peâra L e>lriuh(a rontem ■.tivtitiiA iag*uita^ ,/c,lLtrhn Q: H'ana: Cÿb'lht ‘R.Jes S.iiielcs^ C. deS. Antonio DESCllIPT. DES INDES OCCIDENT. LIV. XÎV. 4^5 Il s’y trouuevn nombre infini de guenons, qui ont vne grande barbe & vne longue queue & qui font prefque auffi grands que des hommes, ils iettentdeffroyablcscris îk: fe pleignent quand ils font attaints de quelque fléché , ils arrachent la fléché de la playe & la iettent à l'encontre de ceux qu’ils rencontrent: comme aufli d’autres plus ■petits & fans barbes. II n’y a aufll pas faute de renards, & d’autres petits animaux qui ont la gueule fi petite, qu’à peine yne fourmis y peut elle entrer, au refte fans faire mal n’y fans apporter dommage aux hommes. Il y a aufll vn grand nombre de belles fauuages , comme tigres , lions & autres ani- maux furieux & dangcreux.-iointl qu’il y a plufîeurs & diuerfes couleuures & ferpents, I O quclques-vnes defquelles font longues de quatre braflres& fi grofles, qu’elles deuorent des cerfs entiers auec les cornes, & qui ne font pas fort dangereufes aux hommes, & diuerfes fortes de lezarts: il s’y prend en outre dans les riuieres & marais des cro- codilles , de huid & neuf pies de long, mais qui ne font nul mal, la chair defquels cllantrollie efl: gralTe & d’vn bon gouft. On dit qu’il s’y trouue des chameleons de la grofleur d’vn moyen lezart, lefquels portent leurs petits auec eux & tiennent toufiours la gueule ouuerte pour humer i’air, c’efl: vn animal qui ne fait mal qui foit. Or combien qu’on ait tenu pour certain au temps pafle que ces régions elloyenc du tout delfournies de mines, toutesfois depuis peu on y en a trouué non feulement de 20 cuyure & de fer, mais aulfi d’or & d’argent î & de fort belles pierres precieufes qu’on nomme Amethylles."' C^ant à la température de l’aïr on n’en peut rien dire en general , pource qu’elle varie fort félon la diuerfe fituation des lieux, comme nous monftrerons en fon lieu. Non plus que des naturels habitans , defquels nous traiterons cfapres particuliè- rement. Au relie toutes ces régions ont vn Gouuerneur, qui éll fous le Yiceroi du Peruj comme aulli vn Euefque fous le Diocefe duquel les Elpagnols qui habitent en ces ré- gions par villes n’y font pas feulement contés, mais auflî plulïeurs Saunages. Nous parlerons ci-apres des villes que les Efpagnols y pofledent, maintenant nous traite- 5 O rons deuant toutes chofes de la rïuiere qui a donné le nom à ce Gouuernement. . Enfin ceux qui voyagent vers ces Prouinces doiuent prendre garde de partir d’El^ pagne auant la mi-Aouft, afin d’y pouuoir arriuer fur la fin de Nouembfe, car lors l’ellé y cil & le vent y fouille doucement du Nord & Nord-ell , que les Elpagnols nomment Brifis , car s’ils partent plus tard d’Efpagne,ils feront comme contraints d’y arriuer au commencement de Mars , auquel temps l’hiuery commence & le vent y vente rudement du Sud & Sud-ell (qu’ils nomment Vendauales ) qui rendent la mer tort grofle,agitee & dangereufe,delortc que fouuent on ell contraint d’hiuerner à rille de S» Catherine. C H A P. II. 4® 'JPremiere dejeomerture de la ^mere de la Plaça, O* dmerfès expéditions des Sj^agnols-au dedans d'icelle, IVanDiasde Sûlis defcouurit le premier cette grande riuiere, à prefent nommée Rio de la Plat a l’an cIdId xv, lequel ayant efté porté dans la grande emboucheu- re d’icelle, monta iufques à vne certaine Ille, qui efl: fur les xxxiv degrés & xl fcrupules de la ligne vers le Sud, comme ie le trouue dans les Autheurs ; dans laquelle, ayant veu plufieurs cabanes de Saunages qui l’inuitoyent volontairement, il defcendit à la legere à terre , ou il fut tué & mangé auec plufieurs de fes gens par ces cruels & in- yo humains Saunages ,* & le nom de Solis qui fut lors donné à cette riuiere demeura quel- que temps. Apres cela l’an cId Ib xxvi Sebaflian Cabot, c^m auoitlailTéles Anglois pour aller aux Efpagnols , fut enuoyé afin de palTer par le Dcllroit de Magaüan dans la mer Au- llrale, & delà aux tMoluc^uesi mais à caufe que fes gens fe mutinoyent pour la difette de viures, il entra dans cette riuiere, & y monta enuiron xxx lieues haut iufques à rille,qui fe nomme encore pour le iourd'hui du nom de S. Gahrieho^iX lui donna lors, LU I ou 4)4 DES.CRIPTION DES INDES où il anchra Tes grands nauires , mais il monta aucc fcs frégates &r chaloupes enuiron fept lieues plus haut, où il trouua vne riuiere à qui il donna le nom de S. Saluadori la-, quelle fort du cofté qui eft vers le Brafily Sc qui à caufe de fon canal fort profond pro-^ ; mettoit vne commode rade pour les nauires.voila pourquoi il y mena toute fa Flotte, & s’y fortifia dans la terre ferme, afin d’y pouuoirplus afleiirement raccommoder fes -, vaifleaux. Par apres il entreprit de monter plus haut la riuiere & de defcouurir plus auant auec vne fregate & plufieurs chaloupes. Or ayant monté xxx lieues , il rencon- tra vne autre riuiere que les Sauuages appeiloyent ZArcarmna. En ce lieu habitoyent des Sauuages d’vne induftrie non commune à ces nations j voila pourquoi il y baftit vn Chafteau, à qui il donna le nom de i". EJprit ou de Gabot , & y lai fia des foldats pour i o le garder r delà ayant entré dans la riuiere de Pavana, il y trouua plufieurs Ifles parfe- mees & pafla beaucoup de riuieres qui entrent dans ce grand canal , & apres qu’il eut monté deux cents lieues , il arriua à vne autre riuiere que les Sauuages appeiloyent Paraguay:^2Xi% en cet endroit îaifie à la main droite la grande riuiere de Pavana, ^omïcq qu’il iugeoit quelle defclinoit trop vers ItBvafdiil entradansP^r^^/^^y où eftanr mon- té enuiron xxxi v lieues, il rencontra des Sauuages qui eftoyent occupés à cultiuer des champs, ce qu’il n’auoit point trouué iufques alors. Il eut vn fànglant combat auec eux, auquel il perdit xxv de fes gens, & vne grande multitude de Sauuages y furent tués. Il baftit en ce lieu vn Chafteau nommé de S. Anne. Voila ce qu’il fit là en quelques mois. io Mais l’an cId Id xxvïi Diego Gavji^, Portugais, arriua heureufemcnt à la riuiere de la Plat a, qui ayant doublé le Cap du Nord d’icelle ('nommé vulgairement Cabode S. Mâvia, au deuant duquel il y a vne petite Ifle, laquelle ils nomment de los Pavgos,^out la grande commodité de la pefchequiy eft;ilarriuaàrifie«?f/^P4/;^/^if, où il y a vne bonne rade & fort commode pour ceux qui vont au Deftroit de Magallan-, il femblc qu’il n’habite nuis Sauuages és enuirons du Cap ou à la cofte voifine d’iceluj ; mais vn peu au dedans delà riuiere le long delà cofte de main droite en y entrant, habitent les Sauuages qu’ils nomment Chavvuas, qui viuent de chafie & de pefche : il monta de rifie delasPalmaslariuùoro iufques aux Ifles delasPiedvas, à enuiron lx lieues du Cap de S.Mavie vers le Couchant: en ce lieu il monta vne fregate, qu’il auoit apportée 5® dans fon nauire , auec laquelle il monta la riuiere plus outre, où il trouua auffi toft des veftiges de Chreftiens, & peu apres il rencontra les deux naiiirés de Cabot, & bien toft il arriua au Chafteau du .S", .* delà fuiuant le grand canal de-P^;'^^^, il fit autant de chemin en xxiv iours , que Cabot en auoit fait en quelques mois, puis il entra du confluant de Pavana dans Paraguay enfin il trouua Gabot dans le Chafteau de S. Anne: d’oû ils reuindrent enfemble iufques aux nauires de Gabot. Orpource qu’ils re- couurerent quelque argent des Sauuages en ce lieu (car on n’en auoit point encore apporté iufques alors de l’Amerique enEfpagne) ils donnèrent à cette riuiere le nom de Rimeve d* Argent , qui fonne vulgairement Rio delà P lata. Gabot eftant retourné en Efpagne, la defcouuerture de cette riuiere fut fùfpenduë 40 iufques à l’an cIdIdxxxv, auquel temps Pedro de Mendoza y fut enuoyéauec onze nauires & huid cents hommes: qui ayant entré dans la riuiere & eftant monté iuf- ques à l’Ifie de S. Gabriel,commzn<^a dc baftir vne ville fur la nue dé main gauche, à qui il donnna le nom de Nuejlra Sennora de Buenos Ayves-, où il perdit la plus grande part de fes gens par famine & par la difette de toutes chofcs : voila pourquoi il enupya fon l^iculcnant luan de~K^yo la ,^out recouurerdcs vïures des Sauuages, qui en apporta quelque peu, enfin apres qu’il eut defcouuert beaucoup de lieux auec grand labeur & peu de profit, Ayola demeura là j & Mendoza s’en retournant en Efpagne,mourut en chemin : mais pource que noftre intention n’eft pas de defcrire vne hiftoire enticre des chofes paffees î i’adioufterai feulement, qu’il n’y a efté fait rien de grand ou de re- jo marquable parles Efpagnols auant l’an c loi d xl, auquel temps Aluaro Tonnez Ca- heca de Vaca y arriua, & lors ces Prouinces commencèrent premièrement d’eftre tout à fait defcouuertes &peuplees de diuerfes Colonies d Efpagnols. Ç H A P./IIL Deferiptio» de U rimere de la Plata filon Herrera Martin del Barco. GE, T T E grande riuiere qui eft entre les plus rpadeufes de TAmerique Mcri- dionnale, & qui peut mefnieà bon droit eftre dite la Eeconde apres celle' des \_Jmaz.ones, ( fi ce n’eft que d’auanture elle ne foit plus grande) eft appcllee de Tes naturels habitarts Parana , c eft à dire , mer, & Parandgùa’^- , grande iner 5 elle a fur la mer Atlantique vnc grande & fpacieureemboucheür'e; car elle a xxxii lieues de large, ôcfe roule entre deux Caps, defqüéls celui de la fnkin droite en y entrant eft I o' appelle de S. Marie, & celui de la gauche ou l’Auftrai Cap Blanc ou de S. Antoine. Or elle a au dedans prefque dix lieues de large, & embrafle plulîeurs Mes, receuarit à droite & à gauche des riuietés prefque fans nombre ; dn croit qu’elte proèede dVn lac, qui eft appelle du nom des Sàuuages d’âîentour , de lot Xarajet , a enuiron ccc lieues & peut eftre plus de l’emboucheure d’icelte: on veut que dans ce lac defeen- dent plulieurs riuieres & notamment celles qui fourdent du cofté Oriental des Andes & celles qui naiflent dans le Féru mefnie; Dlcelui fort vne autre riuiere qui courant vers le Nord defeend dans la grande riuiere des Amazones, de laquelle nous parierons en fon lieu. i: Martin del Barco dans fon Poème intitulé Argentina , dilcourt vn peu plus am- to plement de cette riuiere, commençant dés les Caps qui font fur la mer Atlantique, qu’il eferit eftre diftans l’vn de l’autre de xxxvJieuës; &que celui quicloftlc cofté Auftral eft bas, que.la cofte qui s’eftend d’icelui iufques à Buenos Ayres pareille- ment vn peu en penchant ; Or il dit que fvne & l’autre cofte eft fort dangereufe, la gauche à caufe quelle eft rafe &: bordee de beaucôup defoaftes , la droite à caufe de beaucoup de vents de Sud,qui frappent furieufement contre icelle;& fur tout à caufe de la cruauté des Sauuages, qui habitent dVn cofté & d'autre & qui ont tué beaucoup d’hommes. ' , : En outre auprès du Cap de S. Mark, Ûy idcnx Mes riommees de Lohos, des loups marins; &vn peu plus au dedans derechef deux autres, qu’ils nomment de Florès,^ 5 O à XXX lieues d’icelles les fept Mes de S. Gahriel, vis à vis de la ville de Buenos Ayres. La riuiere a en cet endroit enuiron ix liéuè's !de large & eft encore iufques là afles pro- fonde , excepté deux ou trois baffes autour des Mes de Maldonato & de Juan Ortizi maisaudeffus des Mes de S. Gahriel elle commence à eftre peu profonde & on n’y nauige pas fans danger. Deces Mes Martin G arzias, on conte xii lieues, cettc-ci eftfon- gue d’vne lieue & demie & large de demie, veftuë de beaucoup d’arbres , & n’a faute de champs propres a fomer. Pedro de Mendoza y auoitplacéquelques-vns defos gens, comme aufti & depuis Juan Ortiz de Zarate. Iufques là auoit monté vn des nauires de la flotte de Fenton,kn^ioh,ci\xQ Jean Brac conduifoit fan cio Id lxxxii^ 40 mais s’y eftant brifee , Drac auec quelques peu d’autres s’eftans fauué , mena quelque temps vne miferable vie entre les Sauuages & efehappa enfin. De rifle de Martin Garzias, iufques à celle de S. Lazare, i! y a quatre lieuè's , elle eft à demi-lieuë du riuage;& à prefque autant delàjfortde la Continente la riuiere Vraygh, large en fon emboucheure de demi-lieuë; & vn peu plus outre la riuiere à qui Gabot auoit donné le nom de 5’. De cette riuiere iufques à celle de Hum ('vulgairement dite Rio Negro) il y a deux lieues ; cette-ci coulant doucement hors de, certains marais bouëux,afoneaunoira- ftre /d’où lui eft venu fon nom) & eft remplie de force poiffon. Delà la grande riuiere s’ouure en onze grands & larges canaux, qui font feparés JO par de fort grandes Mes, fort belles & herbues, & qui font toutes habitées d’vne na- tion Sauuage, nommee vulgairement Guaraynes. Au deffus de ces Mes, quelques- vnes defquelles ont xii lieues & plus de long,la riuiere reprend fa première largeur, & fes riuages font habités de diuers Sauuages. Or à la main droite de ceux qui montent la riuiere, à enuiron xx lieues au deffus defdites Mes, eft fituee la ville de S.Fe', & a prefque cent lieues au deflus d’icelle, il y a ^ d’autres Mes dans la riuiere habitées de la nation des cherandois. A LXXX 45^ des ÇFlLlPTiaN: DES INDES A Lxxx lie,ut:s au deffus de ces Ifles la riuiere de Paraguay fe ioind auec celle de Varana. Or Pavana s’encline de ce lieu vers le Leuant, le long de laquelle efl: fitueei la Prauincede S. Anna, m partie champeftre, en parne marefeageure , habitée des Sz\x\!i2ige.s Guaranyes. , ? , . • . comme ils l’appellent eft fitueevn peu plus outre, qui eftvn haut ro- cher,au deflbus duquel il y à des gouffres qui ont caufé le naufrage à plufieurs chalou- pes, & plus outre vne Cataraffe ou la riuiere fe précipité auec vn grand murmure ; au- près de laquelle eft iîtuee, la ville de Guayrai & a quarante lieues au deffus vne bour- gade ff’Efpagnols., duquel on ne dit , point le. nom. lufques ici nous auons fuiui ^Qx ja riuieje de Paraguay reçoit premièrement du coffé gauche la noble riuiere d^Ypitfi.y qui coule doucerhqpt par des campagnes; & pqu apres Earannamiro,\ç.çyyiç\. feparaht yneifle trîangulairedqui a énuiron x ii lieués) du refte delà terre ferme , s a- uanec vers Parma.kviŸ'^GS. d'Tpito,ï\ y a vn lac qu’ils appellent du nom de la nation qui habite autour delos Mahoiffaa,, laquelle s’eftend iufques à vne autre riuiere, nommee vulgaiterncnt F^mm, dans laquelle on dit qu’il s’y trouue des perles. Dés ce lieu, le canal de deuient yn peu plus eftrpit, à quarte lieues au deffous de la ville de l'Ajfumpcion il reçoit la riuiere de Pilcemâio ^ Qp\\ défeend des Prouinces de los Charcas &.eil: nommé en ce lieu par les Sauuages d’auprès Araguaygh, Voila ce que nous auons l' Argentine de Martin delBaf CO. ^ G ‘H .iî AP. IV, Dejcripîion de la me^e rmiere, félon les diuers Koutiers des Uj^agnohi f^k^n dej eea^t de noflre nation, E s Routiers dé nier (vulgairement dits Roteiros) mis en lumière par les Efpa- gnols , léfquels theïitdht fur tous d’cftfe creus en ces chofes , varient quelque 'peu en la defeription de cette riuiere, depuis ion emboucheure iufques aux Ifles à&S^.Gabriel. , x ^ ,• ..... ’Càr quelques- y ns d’iceu^ content dix lieuês.depuis le Cap de S. Marie ^ ç^m eftle^Q dérhier de la cofte Septéntrionnale vers le Leuant iufques à la riuiere de Solis, d’icelle iufques aux çolines, qq’on pomme vulgairement los très MogoteSyXxois ; d’icelles enfin iufqùes aux I’fle.s de 5.'(7Æ'iên>/,hui. Mais nous retournons à l'IHe de Martm G-arda^s: d’icelle iufques à S. Saluador fqui efl: vne lHe d’enuiron deux lieues , entre la première emboucheure de la riuiere de Pa~ rana; defcouuerte anciennement par il y a neuf ou dix lieues 5 or la terre qui eft àla main droite eft habitée de Saunages, nommés Carhosy qui font fur tous autres ennemis des Efpagnols, comme eux-mefmes confelTent. En outre la riuiere de, las P aimas y covamQ aulîi les autres bras, enquoi la grande ri- 1 0 uiere eft diuifee par les Iftes, montent feize lieues , auant qu'ils fe reioignent derechef j excepté vn d’iceux ( nommé communément Rio de los qu’on dit monter qua- rante lieues auant qu’il rencontre derechef Par ana ; il y a vn paflage pour aller vers icelui par la riuiere de las Palmas ( c[m eft aufli vne branche delà grande riuiere j or ceux qui vont à S. entrent & montent par ce bras. Montant plus haut du cofté gauche, on pafteplufieurs Mes, lacs &: petites riuieres, où habitent des Saunages ennemis des Eftrangers. On conte de la première entree de la riuiere de las Palmas iufques â S. EJprity L lieues, de S. EJ^rit iufques à la contrée des TembuyoSy's.y : des Tembuyos iufques aux ^mloacas , xx ;des .^tùloacas iufques à ^ne Colonie di'Efpagnols , xv 5 d’icelle iuf- io ques aux Mac^ueretas ,y'v[\gx.\ d’iceux aux iî/^/'f’»lus petits que ceux de l’Eu- rope ; vne infinité d’auftriches,de perdrix,d’oyes & de canes. 40 Les Saunages quihabitent cette Prouince & celle qui l’auoifinc, vontprefquetous nuds ou legerementcouuerts de peaux de loutres f qui s y trouuenten grand nombre J ilsfontgrands &robuftes de corps, &ne font difformes,- de mœurs & de couftumes femblables aux autres Saunages ; ils ne viuent prefque que de chaffe, voila pourquoi ils aiment fort les chiens de chafte & les cheriffent fur toutes chofes : leurs maifons font faites de rofeaux,& couuertes de certaines mattes à l’encontre de la pluye & des! iniures defair. C H A P. VIL Dep.ription de la Métropolitaine de cette Prouince ^ de fin territoire ; Item i'vne autre Ville Ciiidad Real. La Métropolitaine & la principale ville de cette Prouince, appellee des Efpa- gnols 2iueftra Sennoradel Aj[umpckn( & de quelques- vns,mais faulfement com- me iepenfe AJJencion ) eik fituee fur la hauteur de vingt cinq degrés de la ligne vers le Sud , comme les Efpagnols efcriuent communément : prefque egalement' diftante OCCIDENTALES. LIVRE XIV. 4^, difltin te iVf^rz?,ceftui-ci monte vers le Nord, les OCCIDENT A L E s. LIVRE XIV. les autres deux s’afîcmblent vn peu au defTous. Au deflTus de ce confluant fc rencontre encore vne autre riuiere, defcendent de l’Ouefl:, &: le nom de Paraguay eft défia aboli, à caufe deplufieurs riuieres & lacs, qui ouurent tant d’ernbou dieu res, quelles trom- pent ceux qui y nauigent: entre lefiquels efl: renommee la riuiere de Tguatu ^ c’efl: à dire, bonne eau, laquelle Cabeça de Vaca monta. Et delà enfin on vient au port de losReyesiA^ terroir y efl fertile & abondant en viures j les naturels du pais font de moyenne ftature, vont nuds &: feruent vne Idole de bois. A vn petite efpace delà efl: vne Prouince fort eftimee, les habitans de laquelle s ap- pellent defquels nous auons parlé ci-delTus. I O Mais auant que nous difcourions des autres chofes qui relient de ce Gouuerne- ment ; il fera fort à propos de parler de Tucumana , laquelle nous auons lailTee exprès lors que nous traitions de la Prouince de los Charcas, qui l’auoifine. ^ T V C V M A N A. . , , C H A P. IX. Vejcri^tion de U 'Trouince de T uçumana y ^ de fi princiùale Ville S. lago del Eflero. 10 T A Prouince de efltoute Méditerranée, &l:éfl:fortefloigneedervne I ^ de l’autre mer ; mais elle ioind fes limites d’vn collé, fçauoir Vers l’Occident auec le Gouuernement de chite^ de lorte que par icelui elle a palîagc vers la mer Meridionnale; de l’autre collé ou vers l’Orient auec les Prouinçes de la riuiere delà Piata, par lefquelles on va d’icelle vers la mer Atlantique oii du Nord. Au relie elle efl: clofe vers le Leuant, premièrement de la riuiere Verrneiovcomm^ ils rappellent, laquelle lourdant de la vallee Tuiuy , ou elle efl nommee des Sauüages y habitans Xi~ bixibey court tant qu elle le rend enfin dans la grande riuiere delà Plata : puis apres de la riuiere laquelle efl: maintenant plus cognuè pat le nom de Cianc^M fpource que Itian de Cianeas fut tué par les Sauuages fur fes riuàgesj & par fois eH appellee Rio 5 O grande } qui delcendant des Andes , court fort long temps le long du pié d’icelles , tant qu’à la fin elle prend fon cours vers l’Orient & fe mefle auec la mefme riuiere de la Pla- la-, ie ne trouue pas que les limites du collé du NordlbyentalTés bien definies, & ne font pas moins incertains du collé du Sud. Le condition de Ion terroir efl: telle: elle a force terres bien cultiuees vers le Gou- uernement de chile-j'^cvs la APagallani^ue plufieurs Prouinçes delertes, & qui n’ont pas ellé alTés defcouuertes iufques ici, defquelles toutesfoisles habitans de la ville de S. lago del Ejlero lemblentauoirgrande eognoiflance: orils nomment communément cette Région Trapalanda , mais les habitans du Gouuernement de Chile l’appellent VioxxwxQç. de la Sal. 40 La Prouince de Eucumana iouït d’vn air fort temperé, & d’vn terroir moyenne- ment fécond: mais (comme Herrera alîeure^ on ny a trouué nulles mines d’or ou d’argent. L’ellé y commence le xxiii de Septembre & finit le xx de Mars. Elle eft habitée principalement de trois nations de Sauuages; fçauoir des Tucu- mânes, des luries & des Biaguites-, entre lefquelles les Tummanes font les principaux, defquels les Efpagnols ont donné le nom à toute la Prouince. Orils commencent dés les confins de la Prouince des chkas, laquelle nation appartient au reffort de la ville dePotofi ils ont plufieurs bourgades, les plus renommées defquelles font Morata^ ChocmocaySûcocha & Cafabindo] ayant palfé ces bourgades (ie parlede ceux qui vont JO du Peru dans cette Prouince) on rencontre vn defert de xv ou xx lieues d’eftendue, qui eft vne contrée fort froide à caufe des hautes montagnes & mefme des Ipacieux & continués fommets des K^ndes qui l’occupent: mais ayant paffé ces montagnes, on defeend aufli toft dans vne région plus chaude & temperee, par laquelle il y a vn che- min qui conduit dans la Prouince de Tucumana , paffant vn peu au large des habita- tions des Sauuages, pour la plus grande feureté de ceux qui font ce chemin. Mais nous., parlerons bien toft dauantage de ce chemin. Dans 4^4 DESCRIPTION DES INDES Dans cette Prôuince les villes fuiuantes font habitées des Efpagnols , S. Tdgo âel fiflerOi S. Miguëli TaUuera t Cordkbdi Salta, & quelques bourgades, derquelles nous traiterons félon leur ordre. . . La, principale ville de cette Prôuince s’appcîloit premièrement Varco, mainte- nant on la nomme communément S. lago del Eftero. Elle eft fiçuee ffelon Herrera) Tur^^xviii degrés de la ligne vers le Sud, a clxxx lieues des mines d’argent de Totofi vers le Sud , déclinant vn peu vers TEft : de Buenos Ayres affife fur la riuiere de U Plata, félon plulîeurs , çx^xx lieues. Mais nous parlerons de cette diftance vn peu plus à plein. Le Gouuerneur de cette Prôuince demeure le plus fouucnt en icelle , com- me auffi les autres Officiers du Roi d’Efpagne ; & rEucfque, car l’Eglife Cathédrale i q de la Prôuince eft en cette ville. La température de faïr eft en icelle chaude, faine toutesfois; .lc.terroiry eftià- blonneux & falé, deftburni de pierres, qui fait qu’on n’y peut pas commodément ba- ftir ; les champs font arroufés de plulîeurs ruifleaux , fur lefquels il y a plulîeurs ver- gers, iardins & vignobles. On commence à y excercer la draperie, à caufe de l’abon- dance de laine qui y eft, de laquelle on y fait des draps de toutes fortes & de diuerfes couleurs. Les naturels s’y veftentàprefent, &font bien morigerés & ciuiles. Ils habitent le long de deux grandes & puiflantes riuieres , IVne defquelles pafle auprès de cette ville & eft vulgairement appellec J^fr^,pource que quand elle fedelborde, elîefe zo diuilè en plulîeurs canaux & inonde au long & au large tout le pays-bas & champeftre, l’emplilTant de boue & de limon ; & quand elle retourne dans fon ordinaire canal, ils enfemenent vne grande quantité de champs, de froment, Mays , orge &autres fem- blables grains: d’où vient que ce terroir abonde en toutes fortes de viures. L'au- tre riuiere s’appelle vulgairement e/ Salado , pource que fon eau eft vn peu falee: ces deux riuieres courent de l’Occident vers l’Orient, à trauers vne région plate SC champeftre, feparecs Fvnc de l’autre dVn elpace de x ou xii licuës: elles font rem- plies l’vne & l’autre de poiftbn grand & petit, qui apporte vne grande commodité tant aux Sauuages qu’aux Elpagnols : le pais qui eft entre d’eux eft abondant en miel & cire : comme aulft en cotton & en Carrobes j lefquels fruids nourriftent fort bien, & font meurs & durent tout le long de l’annee : il y a auffi de la coccinilîe & du pa- fte!,defqueîs les habitans fçauent teindre leurs laines. Il y a grande abondance de va- ches & de brebis : comme auffi de cerfs & d’autres beftes Sauuages , des oifeaux de toutes fortes, principalement des perdrix, & des palumbes en grand nombre. Et pour la fin, il s’y trouue de fort bonnes falines. Les Bourgeois trafiquent auec leurs draps & eftoffes de cotton, de forte qu’ils fe feruent de ces marchandifes au lieu de mon- noye,& l’aulne d’iceux eft eftimee le flîus fouuent vn demi-pezo ou quatre realles. Ils meneur vne grande quantité de ces draps à la ville de Potojt & dans le Gouuernement de los Charcas. C H A P. X. 40 Des Viües de S. Miguel, Talauera Corduba. La fécondé ville des Elîjagnols en ce Gouuernement eft appellec communé- ment S. Miguel de Tucumm: elle eft fituee à xxvi ou xxvii degrés (car les Au- theurs font differents) de la ligne vers le Sud : à xxviii lieues de la ville de S. lago del Eftero, auprès du chemin qui mene dans la Prôuince àclos Charcas, OLW^icàç fpa- cieufes & rudes montagnes,fur vn plan commode & arroufé : car d’vn cofté il y pafle vne riuiere defeendant des montagnes (nommée ordinairement .^ebrada de chal- chaquï) laquelle auec d’autres riuieres & ruifleaux, qui fe précipitent en la mefme fa- çon des montagnes à v ou vi lieues de la ville, fem elle enfin dans celle qui pafle au- près de la ville de S. lago del Eftero. Le terroir de cette ville eft fort fertile en May s , Sc mefme en froment & en orge, & ne porte pas mal les vignes; mais il abonde outre mefure en pafturages , d’où vient qu’il y a vn grand nombre de vaches & de brebis : il s’y recueille grande quantité de cotton & de lin , defquels les Bourgeois font d’ex- cellentes eftoflès. Elle iouït d’vn air beaucoup meilleur & plus fàin que toutes les autres JO DESCRÎPT. DES INDES OCCIDENT. LIV. XÎV. autres villes de ce Gouuernement. Ils ont bonne commodité de bois. Et la terre n’cft pas defFournie de mines , (î les indices ne mentent. La troüieme* ville des Eipagnols eft vulgairement appellee NchJIta ScnnoTci de Talauera , & au langage des Saunages ÈJlero , elle eft baftie fur les bords de la^ri- uicre, que nous auons dit ci-deflus eftre appellee Ei SaUdo, à quarante cinq Leues de la ville de i". lago del Ejlero vers le Nord ; à cent quarante des mines d’arcrent de Votôfi. Son territoire eft arroufé de plufteurs tolrrents, &: eft riche en cotton, duquel les Bourgeois font diuerfes eftoftes- Il abonde en outre en miel &: en circj comme aufli en I O diuerfes teinétures, defquelles ils fçauent fort bien teindre leurs eftoffes. On dit qu’il y a fur tout vne grande commodité pour pefeher & chaifer. II ne s’y eft trouné iufques ici nulles veines de métaux : elle eft diftaiite delà ligne de x x v i degrés , comme eferit HerreratMzxs ellefut abandonnée l’an cio Idc x par le commandement du Roi, & les habitans traniportes à vn lieu appelle las luntas o\x Mad^rit enuiron xxviii lieues delà, & on appelle cette si\\t7<(uejlra Senmra de Talaitera de JEadr//,dle eft diftante de la ville de la Plata de c l lieues. La quatrième ville des Eipagnols en cette Prouince eft ordinairement nommee fur XXXII degrés & xxx fcrupules de la hauteur du Pôle Antardic. La température de laïr y eft fort agréable & grandement temperee, & il y a vne eo-alc io viciflitude de 1 efte & de 1 hiuer : le terroir eft plein de palqüis & de campagnes, fort propre pour les vaches & les brebis, qui s’y multiplient extrêmement bien: auprès d’icelle pafle vne riuiere fort poiftbnneufe : or a vne lieue &: demie de la ville il y a des montagnes & force vallees fort belles &’bien cultiuces ; dans lefquelles fe voyenc rcomme quelques-vns afleurent) des mines d’argent. La terre n eft feulement pas fertile en froment & autres grains , mais elle endure auffi les vignes : &: pour la fin il y a des falines fort renommées. Cette ville eft fituee en vn lieu fort commode pour le trafique, 'car elle a au Leuant la ville de S.Fe\ qui eft du Gouuernement de Paraguay ou de la'riuiere delà Plata^^M Couchant celle de S, luan de la Frontera , de laquelle nous auons parlé au Gouuerne- 5 O ment de Chile', diftante de 1 vne & de l’autre dVn efpace prefque égalé de cinquante lieues. Ceux auflipaflent par la, qui defoendent du Peru vers la riuiere de la Plata ôeà la ville de pour delà aller en Efpagneouau BraJUCmlurntM àu. Nord; pource que ce chemin n eft pas plus long, & eft afleuré facile & de peu de frais à eau fè de 1 abondance deviures&dela briefuetedu chemin. Elle eft habitée (comme ie l’ai appris d’vn des Pays-bas qui y a paffé és années precedentes^ d’enuiron trois cents familles dEfpagnols, qui s’employent principalement à culduerles champs, & a faire des toilles de cotton, & portent le plus fbuuent vendre leurs marchandifes aux mines de dans le En outre lors que le Marquis de Cannete eftoit Yiceïôi du Peru , & que fon fils 40 Bon Garfias de Mendoza gouuernoit cette Prouince , on y baftit vne ville , qu’ils nommèrent Neuua Londres^ & derechef vne autre dans la Prouince de Chalcha^uti quils appelleront Neuua Cordura, qui ne durèrent que quelques années. Les peuples lurias & Diagutas qui y habitent , fe veftent de draps de laine & quelquesfois de cuirs de vaches bien préparées-; ce font pafteurs de brebis, de la laine defquelles ils font leur profit : leurs villages font près les vns des autres, mais ils font prefque tous petits ; car le plus fouuent il n’y demeure qu’vn ligna- ge; ils d'ifpofent leurs maifons en rond & les enuironnent de hayes d’efpines, pour les guerres cruelles qu’ils fefont continuellement les vns les autres. C’eft vne na- tion fort laborieufo ; & n eft pas fi addonnee à l’yurognerie, comme font prefque J 0 tous les autres Sauuages de ces régions. Nnn C H A P, DESCRIPTION DES INDES 4^^ I C H A P. XI. De quelques autres Villes de ce G ouuernement y des qualités des Frouinces dans lefquelles elles fini fituees, En outreiïfrw^auLiurecinquieme, Chap.ix.de fâviiî Décade eferit de tt Gouucrnement en cette façon. Il habite dans ce Gouuernement àcTucuma- moins d’Efpagnols qu’il n’eft requis; car s’ils y eftoyent en plus grand nom- bre,ils pourroyent aifement fubiuguer beaucoup de Sauuages,qui font maintenant en i o guerre, & cette Prouincedeuiendroitvne des plus riches,* principalement h ces Sau- nages eftans fubiugués,eftoyentafluiettis aux Efpagnoîs certain temps, & leurs payaf. fent tribut, comme ils ont couftume de faire és autres Prouinces de l’Amerique : car lors plufieurs Eipagnols viendroyent fans doute s y habituer du Peru & des Pro- uinces Yoiiînes , & on y pourroit baftir, encore deux villes : l’vne dans la vallee de Salta,<^m excelle en grandeur & fertilité, &iouït fur toutes autres d’vn aïr fain & temperé,fituee fur les vingt cinq degrés de la ligne vers le Sud: & où il y a de fort beaux champs & pafturages3& qui eft fort propre aux femences pour la multitude & oppor- tunité des ruiffeaux. Cette ville feroit fituce au milieu delà Prouince , lieu fort com- mode pour trafiquer, tant auec les naturels delà mcfme' vallée nommés Chalchaquesy 2,0 Imujes & Omagmees , qu’auec les autres Sauuages , qui habitent au long & au large iuf- ques au paflage de la riuiere d'Ejîero: & qui habitent les bourgades de Cafahindo , Soco^ €ha,Cûchmca auecles peuples quife.nommentvulgairement^/>4t^4»?^. Quoi plus ? cette ville rendroit toute cette région qui eft entre le Peru & Tucumam fi affeuree, qu’vn homme feul pourroit aller & venir aifement entre ces Prouinces du Peru^Tucumdm & la riuiere delà PlataiVoïtc iufques à lamer du Nord. Cette vallee eft fituee enuiron cent lieues des mines de quarante de la ville de S. Bernard àzm la vallee de Tarixa^SiC enfin à cinquante delà ville d^Talauera. On remarquera, c^'Herrera ne fait mention nulle part qu’en ce lieu de cette ville de S. Bernard, ni n’eri parle pas en fa briefue defeription des Indes 5 or nous auons ci- jo deftus monftré félon le rapport d’vn certain Belge que la villette de Tarixa appartient, au Gouuernement de les Char cas. Herrera continue. L’autre ville pourroit eftrebaftie en ce lieu où fut autresfois pla- cée le lS(ouueau Londres ( qui fut aufiî toft abandonnée pour le peu de peuple ) auprès du chemin qui va de Tucumana au Gouuernement de Chile. Or cette ville auoit efté baftie dans la vallee de vn terroir ^rt fertile en froment &: autres grains, & qui portoit fort bien les vignes & les autres fruidiers. Les habitans d’icelui qui font vne partie de la nation des Diaguitas, fè veftent, & abondent en brebis de i’Amerique, comme auffi,felon que l’on dit,en mines d’or & d’argent. l’ai appris de ce Belge ( lequel fai défia fouucntesfois fuiui comme guide ) qu’on, a 40 bafti és années precedentes vne ville dans la vallee de Salta, qui eft appellee des Efpa- gnols Villa delLerma & bien fouucntdu nom de la vallee Salta .-comme aufli vne autre dans la vallee de luiuy qu’ils nomment la yillc de S, Salmdor. Herr^ continue au mefine lieurll feroit auifi neceftàire de baftir vne ville d’EipagnoIs au delà des montagnes, qui ferment la vallee de T trya ou de Tarixa & celle de dlOma- gitazaià^àm des campagnes qui s’appîaniftentinfenfiblcment depuis le piédes monta- gnes iulques à la riuiere àQ Paraguay s (\xr\cs bords de la riuiere que les EÎpagnols nom- ment Rio Vermeioiczv ils pourroyent iouïr & de la campagne &: du païs des montagnes; d’vn aïr tempéré & d Vn terroir fertile fur tout autre : ioinft que cette, région eft fort peuplee,& a grande multitude de brebis: & eft prcfque egalement diftante des der- jo nieres fins du Peru&càn Gouuernement de la riuiere ^e//iP/^^^;de forte que cette ville feroit placée à lx lieues de la ville dei*. Bernard à^Xisiz^zWecdcTarya', &a autant de celle àcNueJlra Sennora de Valauera,^ point plus de celle de P AjfumpcionSnxxQC fur le ri- uage de la riuiere deP^r^g^^^j»; enfin à l lieues de la vallee de à enuiron cent des mines de PotoJi.Ftlcs naturels de ces régions eftans ainfi ceinds detoutes parts, comme d’vn pan, des villes des Eipagnols, feroyentfort contraints d’embrafier la Religion Chreftienne' OCCIDENTALES. LIVRE XIV. 4^7 Chreftiennc plus facilement, & viuroyent entr’eux &: auec les Efpagnols paifblement: De plus on pourroit defcendre le long de la riuiere P^ermeto dans le Paraguay , & delà dans la riuiere de la Plata , & enfin le long d’icelle dans la mer du Nord : par lequel chemin qui fcroic court, fain & abondant en toutes chofes,on pourroit tranf- porter l’argent &: autres marchandifes du Teru en Efpagne : Cette ville pourroit eftre baftie à peu de frais & fans grand labeur par les Efpagnols qui habitent le lono- du Paraguay & de la riuiere de la Plata , pource qu’ils font en plus grand nombre , & mieux fournis de toutes chofes neceflàires à cette affaire, comme de cheuaux, d’ar- mes & de viures , & ce qui eft le principal, c’eft qu’ils ont plus d’intereft que ceux I O de Tucumana que ce chemin foit ouuert du Peru vers la mer par leur Prouince, car il feroit plus court de beaucoup que par Tucumana ou par la Prouince de S. Croix de la Sierra. Or i’ai appris de ce Belge : que les Efpagnols auoyent y a ia longtemps vue cer- taine ville fur la riuiere Vermeio ,• neantmoins ceux qui vont à Potofi paffent à prefque quatre vingts lieues d’icelle , par vn defert vers la ville de S. lago : le ne fçai pas bien . fi cette ville eft placée au mefme lieu oy^Herrera a remarqué ci-defrus,& il ne le pouuoic pas bien dire. C H A P. XîL Chemin dvn certain Belge <3^? Buenos Ayres aux mines de Potofi, ^ar cette Prouince de Tucumana. A F I N qu’on puiffe encore mieux comprendre la connexion de ces Prouinces & la diftance & la fituation des villes , i’ai eftimé ne faire point de mal d’adiou- fter ici le chemin d’vn certain Belge, qui a tombé entre mes mains. Ceux ( dit- il ; qui vont de au Peru ou dans la Prouince de Cte,doiuenc paffer par Tucumana premièrement par la ville de laquelle efi: diftante de Buenos Ayres d’enuiron exx lieues, par vn chemin plat & trauers des campagnes , couuert de quelque peu d’arbres, excepté furies bords des riuieres, qu’il fautpaflèr durant 5 O cet efpace, la pl)as grande defquelles efi: appellee Carcaranna , diflante d’vne diftan- ce prefque égalé de foixante lieues, de l’vne & de l’autre ville, remplie d’excellent poiffon. Orcombien que ceux qui vont dans la Prouince de chile ytirtnt dmït à la ville de S.Iuan delaPronterajlâifTâns a.la. main droitelavillcde Cordué>a, toutesfois on va rare- ment par ce chemin , car encore qu’il foit plus court que l’autre , comme n’ayant pas plus de cent & dix lieues , toutesfois il eft plus folitaire &c moins affeuré à l’encontre des Saunages fort farouches,que l’autre qui pafife parla ville de Cordubatot on va par l’vn & par l’autre à cheual, & par charrettes àbüeufs,fur lefquelles ontranfporte les marchandifes & le bagage. 4® A enuiron cent lieuè's de Corduha , hors du chemin qui va au Peru, vers leNord-eft & la riuiere de Paraguay tikÇxmQQlaviWQ de Rioxa , on il y a des vignes & où on feme force lin. De Corduha ( ie fuiurai maintenant le chemin ia commencé ) le chemin va à .S. lago Métropolitaine de cette Prouince, l’efpace eft de lxxx lieues ; le territoire de cette ville eft bocageux & n’eft pas fort fertile , depuis que la riuiere voifine à ceffé de ce delhorder fi fouucnt qu’elleauoitde couftume, & d’engraiffer la terre de fon li- mon ; qui fait que la ville a commencé à defpeupler, pource qu’ils ont fouuent difette de viures,& que les Sauuages n’y ont prefque rien autre chofe à manger que. des Alga- robas, lequel fruid ils nomment là Taco, Sz s’en feruent pour manger & boire. Or les I ° Sauuages de quartier font fort diminués, & deftaillent tous les iours,pource qu’ils font fort cruellement traidés des Efpagnols, car ils les exercent tous les iouts à de grands labeurs, à quoi ils ne font pasaccouftumés de leur nature, à recueillir le cotton, à le carder & filer; &z s’ils font tant foit peu pareffeux à paracheuer leur tafehe ordinaire, ils les bâtent fi inhumainement ôc les fouettent de verges d’vne telle forte, qu’ils def- faillent fort fouuent & meurent miferablement fous les coups. Il s’y trouueaufiides melons & des T»;^^^,defquels nous auons parlé afies ailleurs. Nnn 1 De la 468 DESCRIPTION DES INDES De la ville de on peut prendre Ton chemin en deux façons ; fçauoir parla vil- le de ^JMiguëli l’efpàce eft de vingt cinq lieues : le terroir de cette ville eft fertile, bo- cà^eux & plein de pafturages j d’où vient qu’il y a vn grand nombre de vaches, de bre- bis & de iuments : & les viures y font à vil prix. L’autre par la ville de T dauera ou Bfie- rù\ l’efpace d’entre-deux eft de cinquante lieues ; or ayant trauerfé la riuiere qui paflc auprès de -S. on marche quatorze lieues de chemin par vue Prouince fort defti- tuee d’eau, iufques à ce qu’on vienne à la riuiere Vermeio ( laquelle a eftè ainft nommée de la couleur de fon eau, mais qui eft au refte grandement poiffonneufe; ) delà on fuit les bords de la riuiere iufques a vn autre fleuue, lequel il fautpafter, quieftprefque à deux iournees de chemin de Ejlero. Dans le territoire de cette ville croift du cotton lo en grande abondance : mais il n’y a des viures que chichement. De l’vne & de l’autre ville tant de S. Miguel que de T'AUuera, , on va aux luntas ou à lequel lieu eft diftant de la première de cinquante lieues & de l’autre de vingt cinqlieuës feulement ; or ils ontnommé ce lieu las poureeque ces deux che- mins s’y ioignent derechef en vn & eftàprefent plus frequente pour le changement dont nous auons parlé ci-deftfus. Des luntas on auoit de couftume de prendre fon chemin vers Sait a , mais mainte- nant on va le plus fouuent par Sufuuy ou Xuxuy ; qui eft diftant des luntas de vingt cinq lieues, & l’autre de vingthuidouvn peu plus. Oràl’vne & l’autre de ces places palTe vne riuiere ; qui defeendent toutes deux des montagnes du Veru , & vont tomber dans 2,0 lagrande riuiere de U Plata. Or ces deux villes font à douze lieues l’vne de l’autre. En outre Saltai^Gin. que i’acheue de parler de cette ville, à laquelle on va maintenant rarement félon ce qu’on dit, a en fon voiftnage , mais afles loin comme de quarante lieues de fort bonnes falines , defquelles on tire du fel auffi luifant que glace ; qui ap- porte vne grande commodité à ces trois villes des luntas Sait a & de Sufuuy, ^oxxx. Ùl- 1er les bœufs & vaches qu’ils y tuent en grand nombre & feichent au Soleil apres eftre falees,dont ils font vn riche trafic auec les Femuiains & ceux de Pûtûjt. Au refte partant de Sufuuy ou Iumuy,i\ faut porter auec foi des viures fur des cheuaux & des mulets ; car il faut delà pafler vn defert où il ne s’en trouue nuls,iufques à ce que l’on entre dans la Prouince des Sauuages nommés Omaguacasi ceux-ci font tous riches 5 0};, & ciuils ; ilsfe veftent de draps de laine,car il s’y trouue vn nombre infini de brebis du Peru,\2i laine defquelles ils fçauent d’ancienneté carder , filer & tiftre fort proprement. Leur Prouince eft plus temperee que chaude, fi elle n’eft froide : leur ordinaire viande eft le May s ou les racines de papas. On pourfuit fon chemin en cette maniéré. De Xuxuy (car ils' eCcritauiT} ainfi ) on fuit la riuiere iufques à rhoft:elierie^/7'4;s>2^on Diego de Sfiloca i or c’cftvne valleemarefcageufe & pleine de fange f comme le nom le monftrej appartenant à ce Diego , homme fort riche &: allés induftrieux ^combien qu'il foit Indien) & qui polTede, comme on dit,vn troupeau de plus de qua- rante mille vaches. De Cenega, iufques à l’EjîancU del T reforerOi il y a fix lieues : dans cette métairie on y nourrit aufli beaucoup de vaches. De l'Efiancia iufques à l’hoftellerie fituee fur la riue de la riuiere de Talina , il y a hx lieues } ce chemin eft raboteux & alTés difficile, car il faut defeendre vne montagne fort droite : or cette riuiere s’enfle au temps des pluyes, & on la pafle en ce temps auec I O danger; elle a pris fon nom d’vne bourgade d’indiens qui eft furfes bords, appellee 'Talina : le terroir d’icelle eft eftimé fort fertile en CMays & froment, mais i’aïry eft chaud. La Prouince des Chicas commence en cet endroit & s’eftend iufques aux confins de la ville de PotoJi:ccs Saunages font afles ciuils, & fur tout fort experts Mineurs, d’où vient qu il y en a vne grande partie dentr’eux quitrauaillentlcplus Ibuuentaux mines d’argent: on tient que leur Prouince eft remplie de veines d'argent, quelques-vnes defquelles on trauaille maintenant : on dit auffi qu’ils ont vn grand nombre de bre- bis du Pem. De Talina on conte auffi fix lieues iufques à Cenagilla: cette contrée eft vn peu plus 2 O froide que la precedente, &: ne nourrit pas tant de vaches & de brebis, il femble qu’el- le ait auffi efté nommee par les Efpagnols delà boue qui y eft. De Cenagilla iufques au Tamhillo de Anton genoues, il y a autant de lieues ; or il faut pafler par vne bourgade d’Indiens,appellee S. Pagode Cotagayta, il y a vne riuiere qui pafle auprès, qu’on paflfe à gué: & la contrée eft derechef plus chaude & plus bo- cageufe. Du Tamhillo iufques a la riuiere nommee vulgairement IPio de Toropalca, on conte VII lieues, cette riuiere a auffi pris fon nom d’vne bourgade de Saunages où elle pafle, appellee Toropalca,\cs voyageurs couchent auffi à l’aïr au bord de cette riuiere : & la région eft auffi chaude & couuerte de beaux arbres. 30 De cette riuiere iufques à vne bourgade de Sauuages, qu’ils nomment Cayfa^ il y a auffi VII lieues ; on loge en ce lieu dans vne hoftellerie , où il y a plufieurs Sauuages qui feruent les paflàns , & leurs fournilTent ce qui eft neceflaire. De Cayfi. à l’autre Cenagilla ^ comme les Efpagnols la nomment, il y a ix lieues de chemin; les voyageurs couchent auffi en ce lieu dehors,; & la contrée eft froide & deffournie prefque du tout de bois. De cette Cenagiüa (qui aefte nommee delà chofe mefme, car c’eft vn pais marefea- geux ; iufques à la ville de Potofi, il ne refte que cinq lieues. Par ainfi il y a de la ville de Buenos Ayres iufques aux mines d’argent de Potoji c c c x c v.lieuês en tout félon le con- te de ce Belge : & la finit la Prouince des Chicas , qui s’eftend encore fort loin des au- 40 très coftés. C H A P. XIII. / Conte dtt mejme chemin félon d'autres, COMBIEN que ie ne doute pas que le conte de ce chemin depuis la ville de Buenos Ayres iufques aux mines d’argent de Potof n’ait efté afles exadement fait par noftre Belge, comme celui qui la fait & ifbigneufement eferit: néant- moins ie n’ai pas creu deuoir paflTer fous fllence, que d’autres qui fe ventent d’auoir auffi fait ce chemin, remarquent autrement la diftance des lieux. Ceux-ci mettent y O entre les villes de Buenos Ayres & Corduba vn efpace de c l lieues, qui furpafle de xxx lieues la fupputation de celui de noftre pais. Et affeurent que le chemin eft plat & aifé ; &: qu’on y trouue toutes les cinq, fix ou fept lieues au plus des métairies ou des hoftelleries fort commodes , & abondance de toutes fortes de viures ; & que les Sau- uages font par tout nullement mauuais & le plus fouuent fans armes. Il vague en tou- te cette région plufieurs chenaux & iuments ; qui font bien fauuages , mais qui fe lai- fent prendre ailement des Sauuages, qui les vendent huid ou dix realles, & que les Nnn 5 Elpagnols 470 DES C RIPTÎON DES INDES Efpagnols domptent aifement: enfin dans îa ville de Corduba on trouue force excel- lents mulets ) & des charrettes à bœufs; elle eft habitée d’enuiron cinq ou fix cents Efpagnols , quelque peu de N egres & de plufieurs naturels de ces Prouinces. De Corduba iufques à SJagodelEjîero il y a auffi c l lieues quiexcedele conte de no- ftre homme de lxx lieues , de forte que ie croirois pluftoft que ceux-ci fe trompent que lui. De S.Iago iufques à Eftero on Talauera^ ils content cinquante lieues, enquoi ils s’ac- cordent du tout auec noftre Belge. De Eftero à Xuxuy-, ils content autres cinquante lieues, en ceci ils ne conuiennent pas mai auec noftre homme , ou en font bien peu defterents. : De Xuxuy iufques à la ville de Potojly ils mettent cent lieues ; enquoi ils defferent feulement de cinq lieues du conte de noftre homme ; laquelle différence eft de peu de confequence. Or ceux-ci content en tout de Buenos Ayres iufques à Eotofi, cinq cents lieuës , le- quel conte excede par trop celui de noftre Belge; & ne puis eftimer que la diftance foit fi grande , ni que noftre Belge ait peu fe tromper fi fort en fa fupputation ; de forte que i’aimerois mieux le fuiure qu’eux ; ioinft aufli que la fituation des coftes de l’vne & de l’autre mer, ne femble pas pouuoir fbuffrir vne fi grande largeur à la Continen- te. Mais que chacun en iuge à fa volonté iufques à ce que cette controuerfe foit plus clairement decidee. Par ainfi nous auons acheué la defcription de la Prouince Méditerranée de T ucu~ mâna, , que nous auons exprès differee iufques en ce lieu, afin qu’elle apportait quel- que clarté à la Prouince que nous traitons maintenant, &: par mcfme moyen, demon- ftraft plus clairement la connedion des Prouinces , & qu’elle expliquaft plus à plein les chemins par lefquels on va delà mer du Nord dans les Prouinces dii Peru. Main- tenant nons retournerons à la Prouince de U P/ata qui eft le fuiet de ce Liure. C H A P. XIV. Co^e marine du Gouuernement de U Riuiere de la Plata , depuù le Cap Sepîentrionnal de fa grande emboucheure iufques au Brafil. ^ PR E s 03 E toute la coftedece Gouuernement delà Phta, iufques au BrafiU n’a encore efté cognuë qu en paffant, de forte que plufieurs Autheurs de diuer- fes nations en ont eferit des choies du tout diuerfes; voila pourquoi puis que nous auons à choifîr, nous auons eftimé pour le mieux de ne rapporter ici que ce que Emânuel de Eigueredo ^ Portugais, eferit en fon routier, & Théodore Reuter de noftre nation, comme eftans eftimés auoirleplus exactement trauaillé en cet affaire. Figueredo donc conte du Cap de S. tMarie iufques au port de S. Pedro lxx lieuè's, & ne fait mention d’aucuns lieux entre deux : mais Reuter conte de ce Cap iufques à vne autre pointe de terre,au deuant de laquelle il y a deux lfles,dix lieuës ; il appelle l’vne de ces Ifles llhades Caftilhosy de la forme d’vne fortereffe qu’elle reprefente de loin: & eft diftanre de la ligne vers le Sud de xxxiv degrés & xl fcrupules, del’Ifle de Caftilhos ïnfoyxes à Mar-mimfoyxxx \ lieuës; de Mar-manfo iufques à la grande ri- uiere, qui eft lamefmeque le port S. Pedro, mues xxvi lieuës; toute cette cofte court prefque Nord-eft & Sud-oueft, & eft bordee ci & là de mottes de fable : de forte que le conte des deux différé fçulemen^ de huiCt lieuës. Cette riuiere Grande on de S.Pedro,2.vne cftroite emboucheure, mais elle s’eflar- git au dedans, & monte vers le Nord-oueft, iufques dans la Prouince de ces Sauua-. ges qu’on nomme vulgairement Patosyàe maniéré que cette riuiere eft à bon droit contee entre les meilleures, plus profondes & plus commodes pour les nauires. Apres le port de S. Pedro ou Rio GrandeyFigueredo met la riuiere deTamarandahu -, & laiffe l’interualle incertain , mais noftre Ruter y met dix lieuës. Figueredo conte de la riuiere de Tamarandahu iufques à Rio iboifetïnhiy'kiv lieuës & demie; d’icelle iufques à AraranguaydxXyi>Lc\Tio^deW à la riuiere de Eagoa : mais noUre Reuter met xiv lieuës de Tarnarandahu iufques à Ararangua^ d’icelle à Lagoayix-, qui eft vne grande différence. Lagoa eft nommee par d’autres , port de Biaza, où ne peuuent occidentales, livre XIV. 471 peuuent entrer que de petits nauires , du cofté qu’il s encline vers le Sud , il a vne pe- tite I/le, communément nommee Reparo, au defTous de laquelle il y a vne bonne ra% dans vn certain recoin delà baye. De Lagon iufques à Vpaha^Rigueredo conte huid lieues, mais Reuter n’en met que lixj elleeftaulli appellee des Efpagnols Barra de ibuafup ^ & Rio de Vpaba ; l’embou- cheuren’en eftgueres large, &: n’a pas plus de fix pies de profond, toutesfois au de- dans elle eft fort belle & alfés eftimee i les Efpagnols veulent que les terres des Sauua- ges Ratos y finiflent. De Vpaba iufques à l’Ifle de S. CatherineyTigueredo conte dix lieues , vis à vis de la- j ^ quelle elRio de Patos fort de la Continente , fur xxix degrés de la ligne vers le Sud : mais Reuter ne met que vu lieues entre Vpaba & Rio de Patos , à l’oppofite du Cap du Sud de rifle de S. Catherine. Toute cette cofte que nous auons courue iufques ici, efthâbitee de Sauuages An- thropophages,la plus grande partie defquels font bien ennemis mortels des Portu- gais ; mais neantmoins les autres nations de l’Europe s’en doiuent donner garde j tou- tesfois ceux qui font maintenant fuiets aux Portugais font fur tous autres à craindre. Au refte on doit efuiter cette cofte du mois de Mars iufques en Aouft, car c’eft lors l’hiuerde ces pais ; &ily fait fort froid en ce temps,ily arriue de grandes tempeftes, force groffes pluyes , & la mer eft eftrangement agitee. En outre l'Ifle de S. Catherine a de longueur du Sud au Nord enuiron huiét lieues j au cofté de l’Eft d’icelle il n y a point de rade commode , fi ce n’eft fous vne petite Ifle, qui eft au Cap du Sud , dite Ijla de K^rboredo, ipoutcc quelle eft couuerte de beau- coup d’arbres , fort commode pdur les mariniers, pour l’abondance de bois & d’eau qui y eft , car ces commodités fe trouuent rarement le long de cette cofte. De plus cette Ifle de S. Catherine à vne autre Ifle nommee Galenyil y a trois lieues j or à la Continente depuis le Cap de Mandiui vers le Sud j il y a vne certaine baye remplie de plufieurs Ifles , laquelle eft appellee d’vn nom de Sauuages Toyugua: & ce Cap eft diftant de la ligne xxviii degrés & xv ferupuies vers le Sud. Du Cap de Mandiui (ÇqXoyi Pigueredo) quand on nauige le long de la cofte vers le J Q Nord-oueft on rencontre vne baye , que les Portugais nomment Eufeada de Garoupas, & plus outre la cofte eft haute iufques à la riuiere appellee des Sauuages Taiahugh j l’efpace de fix lieues. De la riuiere de Taiahugh iufques à celle de S. François, ùn conte xxyii lieues : ÔC au milieu de cet efpace la riuiere de Tapuca fort de la Continente. Mais noftre Reuter conte du Cap de Mandiui iufques à la riuiere de Taiahugh feu- lement cinq lieues, & la cofte eft eftenduë en cet efpace entre le Sud-oueft & le Nord- eft. Et il eferit qu’au milieu de cet efpace il y a dans la Terre ferme vne certaine gran- de baye dite Goroupasx & que la riuiere de Taiahugh eft fur les xxviii degrés de la ligne vers le Sud. ^^0 Apresla riuiere de fuit le long de la mefme cofte celle de que ie ne trouue pas auoir iufques ici efté affés defcouuerte par aucun. De Tapuca iufques à la riuiere de S. François noftre Reuter conte xii lieues, entre Nord-oueft & le Sud-eft: Or cette riuiere de S. François a deux emboucheures qui font larges de deux lieues , & il y a trois. Ifles entre deux au Sud au Nord defquelles les nauires entrent dans la riuiere : le canal du cofté du Sud eft nommé Aracari,à’vvi nom particulier des Sauuages, &: celui du Nord Bopitanga s les nauires entrent fort rarement dans cette riuiere. De la riuiere de S. François iufques au lac nommé de Parnagua , il y a x ii lieues fé- lon Reuter ; ou félon Figueredo xv : il eft fur la hauteur de xxv degrés & dix ferupuies, jo ou comme Figueredo remarque xl ferupuies. Ce lac de Parnagua eft fitué dans les montagnes de Pernapiacabay & a de longueur le long la cofte de la mer cinq ou fix lieues ; il y a trois canaux en tout qui fortent d’icelui dans la mer; defquels celui qui eft le plus au Sud eft appellé des Sauuages ibopupetuba & eft profond de fix brafles en fon emboucheure , à enuiron vne lieue au dedans de fon emboucheure il y a vn an- chrage fort commode: celui du milieu diftant de ceftui-ci d’vne ou de deux lieues vers le Nord, eft appellé Bayfaguafuy profond en fon emboucheure d’enuiron cinq braffes ; y*'/’*' 47^ DESCRIPTION DES INDES brafles j le troiTieme qui eft diftant de celui du milieu d'enuiron vne lieue & demie ou di^uxlieuës communes, eft nommé Suparabfty&c eft profond en Ton emboucheure d’en- uiron fix braffes. Du lac de Parnagua ils content cinq bu fîx lieues iufques à la riuiere d* Ararapirai ainfi nommee des Sauu.ages,qui a enuiron quatre brades de profond dans fpn embou-i- cheure. Cette région abonde en toute forte de viures & en excellents fruits i & il y a bonne commodité pour y prendre de l’eau. Les Sauuages font grandement enne- mis des Portugais, de forte que tous s’en doiuent garder , excepté ceux qui fe difent eftre ennemis des Efpagnols,car ils fauorifent de tout leur pouuoir à ceux-là. En cec endroit fort vne riuiere auprès de la pointe du Sud de l’IHe de Cananea^ laquelle em- jq plit vne certaine baye : or les nauires entrent le long de la pointe de la mefme lfle,qui regarde le Nord,dans cette riuiere nommee des Sauuages Itacuatkra , où eft le princi- pal anchrage de Cauanea ,• on tient qu’il y a cinq braffes d’eau en fon emboucheure. Fîgueredô contedeux lieues & demie d’efpace entre i^rarapira & Itacuatiara, dont nous venons de parler, où les Portugais habitent maintenant. D'IîAcmtiara iufques à la riuiere appellee des Sauuages Vguaa, il content dix lieues î on dit que cette riuiere eft profonde de cinq braffes dans fon emboucheure, de forte qu’on l’eftime fort commode pour de grands nauires. De la riuiere de Vguaa iufques à celle de Capiuariopd y a dix lieues félon Reuter , ou douze félon la cofte court Nord-eft &Sud-oueft. Cette riuiere n’eft di-io ftante du Gouuernement de S. Vincent où le Brajil commence que de deux lieues, & eft ouuerte à i’Eft,n’ayapt pas plus de trois braffes en fon emboucheure._ Figueredo nous apprend que les Portugais habitent maintenant fur la riue de cette riuiere , dans vne bourgade qu'ils appellent Nuejîra Senmra de U Cmcepcion ,* & que la rade eft appellee des Sauuages Par ainli nous auonsacheuê la cofte marine du Gouuernement Plata,<^\ s’e- ftend par vn long efpace depuis l'emboucheure de cette grande riuiere ou depuis le Cap de S. Marie iufques auxProuinces àxxBrafils en laquelle il ne fe prefente rien de mémorable; maintenant nous nous tournerons vers les plus cognviès,&: commence- rons la defeription de cette noble Prouince du Brafd. ^ DESCRIPTION ESCRIPTION DES INDES OCCIDENTALES, LIVRE QVI NZIE ME. B R A S I L. C H A P. I. Limites du Bralil , première defiomerture d'icelui^ qualités de fin a'ir de fa terre. O V s ' le norti dxx Brafd font comprifes de fort amples Prouinces dans la Continente de l’Amerique Au- fl:rale,du cofté qu’elle regarde le Soleil leuant, eften- duës le long de la cofte de la mer Atlantique : Or Tes limites font defignés diuerfement par diuers Au- theurs ; car les Efpagnolsf Centre rera Cofmographe du Roi d’Efpagne ,1 enferment fa longitude entre le vingt neufieme & le trente neufie- me de^ré ; à conter les degrés de longitude du Méri- dien de Tûlede vers TOueft; & ce félon l’accord fait anciennement entre les Rois de Caftille & de P'ortu-s gai; de forte que la ligne de feparation eftant con- duite du Cap qu’ils nomment de Humas ( fîtué fur la mer du Nord a deux degres de la hauteur du Eole Arftic ) par l’Ifle de Buenabrigo ( fur vingt cinq degres au Sud de la ligne, au deuant de la Continente ) coupe deux cents lieues où elle eil le plus large , du Continent de! Amérique Meridionnale, & laifTe les Prouinces du Brafil pour la por- tion du Roi de Portugal. Mais les Portugais eftendent les limites d’icelui vn peu plus au dedans du païSjdeL criuant cette ligne de feparation par l’emboucheure de lariuiere de Mur annan du cofté du Nord ; & de celui du Sud par la grande emboucheure de la riuiere de U P lata. 10 Recherchant les caufes de ce different vn peu de. plus haut,ie trouue qu Alexan- dre Pap>e de Rome , auôitaiîigné certaines limites au Rois de Caftille, la Bulle de la- quelle donation, comme ils l’appellent, eftoit telle : Toutes les Ifles terres fermes, trouuees& àtrouuer,defcouuertes & à defcouurirvers l’Occident bc leMidy , fabri- quant & conftruifant vne ligne du Pôle Ardic , ou Septentrion , iufques à l’Antardic, ou Midy,foit que ces terres fermes ou liles trouuees ou à trouuer foyent vers l’Inde ou vers quelconque autre part; laquelle ligne eftdiftante de chacune des Ifles qui font vulgairement appellees de &: VerdeA^ cent lieues vers l’Occident & le Midy. Par ainfl toutes lefdites Ifles & terres fermes trouuees & à trouuer, defcouuer- tes & à defcouurir vers l’Occident & Midy de la fufdite ligne, qui n’ont point efté 5oaduellementpo{redeesparautre Roi ou Prince Chreftien,iufques au iour de la Nati- uité de noftre Seigneur lefus-Chrift dernier pafle, duquel a commencé l’an prefent mille quatre cents nonante trois, quand furent trouuees par vos Lieutenans Capi- taines quelques-vnes defdites Ifles,par l’audoritè de Dieu tout puilfant à nous concé- dée en S. Pierre & du Vicairiat de lef Chrift,que nous exerçons en terremous donnons, concédons, & aflfignons, auec tous leurs domaines, villes, chafteaux, lieux & villages, O O o droits >> V -5 -, ■ 474 description DES INDES droits & iurirdiaions & toutes autres appartenances d'iceux,à vous (Rois deCaftille & de Lconj & à vos heritiers & fucceffeurs à perpétuité par la teneur de ces prefen tes, &c. Mais comme le Roi de Portugal Ce plaignoit.que cette donation eftoit faite à fon pré- judice,il fut accordé entre les deux Rois par le moyen de leurs AmbafTadeursmue cet- te ligne de feparation feroit reculée deux cents & leptante lieuè's plus. vers l’Occident des limites eftablies dans la Bulle du Pape, au delà de laquelle vers l'Occident toutes les Mes la Continente appartiendroyent au Roi de Caftille,& vers l’Orient au Roi de Portugal ; tout le rond delà terre eftantpar ce moyen egalement partagé entr’eux; il reftoit feulement que des Géographes experts, conftituaiTent dans dix rnois de cer- taines limites aux deux, félon ces accords & conuentions ; mais tout fut coi iufques à i o ce qu’vnc grande controuerfe delà pofleffion des Mes des Moluquesnke entre ces Rois,fuadoii: de refaire cette dimenfion exadement : cela,comme affirme HerreraSwx, bien eiîaye 1 an cio I o xxiv,maisne fut point paracheué,pourceque les principes & les dimenfions des Géographes Caftillans & Portugais differoyent fort entr’eux ; car les Portugais commençoyent leurs trois cents feptante lieuès vers l’Occident , de l’Me de Sd { qui eft la plus Orientale des Mes du Cap Verd) eftimans peu de chofe de perdre autant de lieuès dans la Continente de l’Anierique , pour les regaignerdere- chef vers l’Orient & enfermer les Moluques dans leurs limites : mais les Caftillans au contraire les commençoyent del’Me de S.AntomeyC]ni eft enuiron nonante lieuès vers l’Occident. Ils ne s’accordoyent auffi pas mieux de la largeurdu Continent del’A- zo merique Auftrale, entre Portoueyo fitué fur la mer du Sud,&: Je Cap de -y. Augufim fur la meÿu Nord, où elle eft vulgairement eftimee eftre plus large î car les Efpagnols deR fini%ent cet efpaçe de l i degré,& les Portugais de i. v,- obeïflTans les vns & les autres a afteéfion de leurs Rois , les derniers afin d’enfermer les Mûlue^usi entre les limites de leur Roi, & les autres pour les mettre hors des limites des Portugais, Quoi plus > comme ils ne fe pouuoyent accorder enfemble ni tomber d’vn mcfnie aduisTils fe fel parurent, & les Portugais eftendirent la ligne de feparation par Pemboucheiire de la riuiere de Maranmn d’vn cofté , ôf par celle de la riuiere la Plat a de l’autre : les Ca- ftillansipar la mefme embouçheure d vn cofté>mais par celle de la riuiere deS. Antoine ^Qrgmos,comineiU î’appelient,derautre:de forte quenonfeulcmentilsoftoyentaux 5 o Portugais remboucheuredelariuiere^^/^P/^rrf.maisauffi vne grande partie de la con- tinente iniques a la baye de S. Vincent, Or ce different ayant efté différé par vn autre accord fait encre ces Rois,fut enfin du tout efteind par la deuolution des deux Royau- rnes a vn mefme Roi. Ce que nous auons briefuemenr rapporté ici, pource que cela n eft pas cognu au commun, a efté èferit du tout autrementpar quelques Autheurs. Au refte cette région, fi nous en croyons , a efté premièrement defeou- iierte fous les aufpiccs des Rois Catholiques Vincent lannez. Pinçon &peu apres par Diego de Lepe 1 an cln Id. Cyt Cabrai prefque au mefme temps eftant porté for- tuitement vers icelle fous les aufpices du Roi de Portugal ( car tirant auec vue flotte vers les Mes Orientales & ayant pris fort au large en merpour efuiterla coftede 40 Guinee, il fut chaffé par la violence des vents & des ondes à la Continente oppofee de l’Amerique Auftfale ) donna le nom à cette Prouince de S. Crux\ qui a efté du- depuis changé en ce lui du Brafil, à caufe de l’abondance & bonté de ce bois rouge, ' maintenant cognu par toute l’Europe, qui eft prefque fingulier à cette région. Or combien que cette région foit prefque autant diftance du Pôle Antardlquc • que le Perti, & foitlauee pour la plus grande partie de la mer Atlantique ou du Nord, toutesfois elle eft plus chaude & eft outre mefure humide & fuiette à beaucoup de pluyes & de neiges , le Ciel y eft lepîus fouuent nuageux & la terre eftant couuerte de bois & forefts efpaifres,ne reçoit que difficilement les rayons du Soleil, d’où vient qu’elle eft eftimee par plufieurs mal faine & nourrit vnc grande multitude d’animaux y o & infedes venimeux : D autres au contraire, la renomment pour eftre vne contrée belle for toutes, & d vne température fort agréable & faine , à caufe des vents doux qui viennent de la mer (queles Anciens nommoyent Tropaos) Icfquels diffipentde bonne heure les vapeurs du matin, rendent les iours forains, & temperent la chaleur. La terre eft en partie eftendue en plaines, en partie doucement releuee encoli- iies, & bien fouuent heriflee en hautes & droites montagnes 5 grafîe au refte & fort fertile. OCCIDENTALES. LIVRE XV. 475- fertile, &: qui porte tant les fruids eftrangers queprincipalement les cannes de fucre ; du le Lien U dcfquelles les Portugais font vn grand profit : nous parlerons ci-apres des autres dons ou vices de cette terre , comme aufli de la bonté ou inclémence de Ton aïr, en la defeription des Prouinces particulières : mais ie ne puis obmet- tre en ce lieu le iugement d’vn nouueau Autheur Portugais, le Commentaire duquel a efténouuellement imprimé en Angleterre en Anglois. Leclymat du^/'^/i'' dit-il) eft prefquetemperéjl’aïry eftfain, de forte que les hom- mes y viuent nonante & par fois cent ans ; il n’y a pas communément de rudes cha- leurs ni n’y fait pas froid, le ciel y eft clair, principalement de nuid; mais les raids de lolaLune y font dangereux, il n’y a prefque point de crepufcule, carie Soleilsyleue aufli toft que l’aurore } la mefmeraiion eflau foir. L’hiuer y commence en Mats & y finift en Aouft; les iours8<: les nuids y font prefque égaux. Or la terre y eft marefea- gebfeàcaufe de la trop grande humidité,caufee parles pluyes & par les rinieres qui fc defbordentparfoisj carily pleutfouuentés mois d’hiuerjily a de grandes forefts per- pétuellement verdes ; la région eftmontagneufe,principalement ce qui eft lauéde la mer : depuis Permmbuco iufques au Gouuernement de Spiritu JànBo , il s y trouue fort peu de pierres, mais au dedans dupais il y a des montagnes entières comme pauees de grandes pierres & cailloux. Elle eft du tout deifournie de matière pour faire des habits,fi ce n’eft de cotton que la terre porte, riche au refte en tout ce qui eft requis à la zo vie de l’homme. Voila ce qu’il en dit. Au iugement de ceftui-ci s’accordent aftes ceux de noftre pais, qui ont défia com- mencé à s’eftablir au Gouuernement de Permmbuco, ils prifent la température de raïr,& ne fê plaignent pas d’vne chaleur ijîimoderee, fi ce n’eft quelques peu d’heures duiour; oraux mois de l’hiuer il y pleutfortfouuent,mefmeparondees, & il s y fait de fortes tempeftes,principalemcnt à la cofte, mais nous parlerons de ces chofes plus opportunément en fon lieu. - ' C H A P. II. ^ ^ De U Religion , naturel O* wœim des Brafiliens en commun, Le s Sauuages Brajiliens n’ont prefque nul fentimentde Religion, ni n’ont nulle cognoiftance de l’origine ou création du monde, ils racontent ie nefçaiquoi d’obfcur & fabuleux duDelugej fçauoirque tous les hommes ayans efté con- fommés parles eaux , il n’en eftoitrefté quVn auec fa fœur, enaagede porter enfanSi & de ces deux leur race auoit pris fon origine & acoroiftement. Et n’ont nulle co- gnoiftance d’aucun Dieu,ni n’en adorentnul,d’où vient qu’il ne fe trouue aucun nom pour l’exprimer : fi ce n’eft Tuf a , par lequel mot ils dénotent quelque fouueraine ex- cellence, d’où vient qu’ils appellent le tonnerre CanungA, c’eft à dire, vn fon fait par la fupreme excellence,& l’efclair T upA Berab^, du mot Jberab , qui fignifie relplen- 40 dit; auquel ils difent deuoir les inftruments & la fcience de l’agriculture, & par ce moyen le recognoiftfent pour quelque Dieu: ils ignorent aufti leParadys & l’Enfer apres cette vie, combien qu’ils croyent que les âmes demeurent apres leur feparation d’auec le corps,& qu’elles font par fois conuerties en démons, & quelles font tranf- portées dans des champs arrofés & agréablement veftus de diuers arbres, où elles dan- cent continuellement. Ils craignent fort les Eiprits malins,qu’ils nomment Curupira, T aguai, MachacherAy Anhanga,InrupariyMarangigoana-, mais ces noms ont diuerfes fignifications ; c^vÇuru- fignifie le Démon des montagnes, Machachera, le Démon des chemins, Inrupart & JnhAnga,\c Diable {imip\emcnz,Marangigoam,nQ dénoté pas vn Démon, mais lame 50 feparee du corps, ou quelque autre chofe prenotant la mort, caries Brajiliens ne le fça- uentpas eux-mefmes exprimer, &neantmoins ils les craignent fur tout; de forte que par fois ils meurent fubitement par vne imaginée & vaine peur d’iceux , toutesfois ils ne les feruent par aucunes ceremonies ou idoles : quelques-vns dentr’eux tafehent quelquesfois de les appaifer en plantant vn pieu en terre & y mettant auprès quelques prefents: ces Efprits apparoiifent rarement vifiblement entr’eux , combien que plu- fieurs ayent autrement eferit. O 00 Z lisent 47^ description DES INDES ' IIsontdesEnchanteursjdefquels toutesfoisilsnefeferuentgueres que deMedecinsi & leurs lontfortfuietspour en recouurir leur fanré : il Ce trouue auffi parfois entr’eux des garnements, qui combien qu’ils ne fçaehent rien de la Magie, font toutesfois fort habitues a tromper ces pauures miferabies,&pardes tours &geftes non accouftumés du corps, le font admirer & par certains faux miracles fe mettent en crédit : ceux-ci perluadent a leur nation , quelqiiesfois à des Prouinces entières qu’il ne faut plus rien • lemer du tour, & que le temps ett venu, auquel la terre leur produira de foi mefme tou- tes choies, & que les belles fauuages viendront de leur gré fe rendre à eux pourleuE ferui^r de viande ; auec telles & femblables fottifes ils abeftilfent tellement ces mi ferables,qui font communément alfés lafehes de nature , que ne^ligeans la culture de i d Iaterre,ils fe trouuent mfenfiblementdeftitués de viures, & meurent de faim, tant que ’ v cet impofteur demeure feul, ou ell tué de fes gens qui cognoiffent fa tromperie. Au ’ relie i s nomment vn Magmien Fa^e & Caraiba ( que quelques-vns ont pris pour vn - Enchanteu^lignifiela puilTance par laquelle fe font les miracles, voila pourquoi iis ont nomme les Portugais, & les nomment encore auiourd’hui Caraiba y pource qu’ils fai- loyent beaucoup de chofes qui furpalfoyent leur entendement. Esprennentplufieursfemmes&lesdelailTentderechefpour legerescaufes:maisles leunps hommes nefemarientpaslegerement,auantqued’auoir pris & tué quelqu’vn • de eurs ennemis : &ies filles ne fe communiquent pas aifementâux hommes auant 1 aage de pouuoir engendrer: les vns & les autres s’ablliennent en ce temps de leur vin, zd quils font déracinés de Mamot^àQMays , qu’ils nomment en leur langue C/fe^y,Tes ’ mariages font confirmes par vn lid pendant , fait de cotton en mode de ret bien net* Je pere ou beaupere, apres que le mariage cft acheué, coupe d’vn caillou trenchant vn p^ieu de bois,&s’imaginequ il coupe par ce moyen les queues à fes neueux qui nai- ilront apres , & qu ils naillront à caufe de cela fans queues, le rapporte ces chofes fur la roi d vn certain Religieux Portugais, qui les a depuis peu elcrites. 4^ Ils mangentnuid&iour,&n’obferuent point d’heure en leursrcpas,nide modeen leur viure, quand ils ont abondance de viures , ils font bonne chere & fe donnent du s bon temps fans fefoucierclera^uenir,&enfontdesprefents à leurs voifins &amis:ils f fe plaifent fort a eftre eftimé liberaux, &: ne hàîlfentnul vice tant, ni n’en eflimet aucun ? ok plus Ignominieux qüe i’auadceîlorsque les viures leurs manquent,il n’eft point à croire l cornme lis endurent la faim & la foif Ils vient indifféremment de chair & de poiïfon, r & n ont point d'horreur de mangexdcs animaux fales,commc ferpents,crapàulx, rats, 1 vers & autres tels inledes ,* ils mangent akllî de toutes fortes de fruids, excepté de 1 ceux que l’experience leur a appris eftre dangereux & mortels j ils ne boiucnt point ' er leur repas, mais apres icelui ils s’emplilfent d’eau ou de boilfon faite de diuers grains . ; & rruid:s,auec vne telle auidite, qu’ils tombent Ibuuentyu-res. Au iours de leurs feftes ils continuent leurs boiflbns fans manger deux ou trois iaurs de long, & allans de por- f te en po«e en chantant,ils inuitent leurs voifins à leurs yurogneries,où ils deuiennent aucunesfois tellement farouches auec leurs dances & boiffons miftionnees, que des 4oi paroles ils en viennentaüx coups & aux corn bats, & fe veautrent en adultérés & autres i laies vices. Ils fe feent a table fans fe lauer les mains, & iettent,piuftoft qu’ils ne met- W tentdeur viande dans la bouche auec les premiers doigts. Ils fe feruent de rets de cot- I ton tort bien faits au lieu de liéls, lefquels ils pendent à l’aïr ou fous leurs toiéls entre .î deux pieux, allumant vn feu auprès, remede contrôles vapeurs mauuaifesqui s’efle- uentdelaterre. lis vont tout nuds autant les hommes que les femmes , fans aucune honte , excepté ceux qui fréquentent auec lesPortugais:& ils fe frotent le corps de diuerfes couleurs & temdures, principalement d’vn fucd’vne certaine herbe, auec quoi ils fefont noirs , y traçantpardeffusdiuerslineamentsdeblanc,&imitentmefmelaformedeshabits. co Ils font des diaaemes,des couronnes,descolliers,desbrafrclets&autresornements de corps, de plumes d’oifeaux fort gentiment, enquoi ils fe plaifent fort.Ils nourriffent feulement les cheueux & arrachent du tout le poil qui vient ailleurs: les hommes fè tondent diuerfement,par fois en couronne, & parfois en autre mode ;& auec tant de vaiiete,que les nations fe diftinguent par la forme de leur tonfures; mais les femmes p ortent les cheueux lôgs,fi ce n’eft quand elles font en dueifouquand leurs maris font , en voyage. OCCIDENTALES. LIVRE XV. 477 en voyage, car alors par leurs cheueux coupés elles refinoignent le regret qu elles ont de leur abfence : les hommes ne nourriflenc pas volontiers leur cheueleure, fi ce n'eft quand ils font fort courroucés contre quelqii’vn ou lui font ennemis. Ils ont commu- nément la cheueleure noire, polie & peignee. Maintenant quelques-vns de ces Sau- nages ont commencé à fe veftir.pluftoft par couftumeque parl’honnefl:eté,ou pource que les Portugais les y contraignent J car ils les portent fort négligemment, & les laif- fentderechefpourpeu defuiet. Ils fe font des maifons de poultres & pièces de bois qu’ils couurent de fueilles de palmites, longues bien forment de deux ou trois cents pies, &difl:indespluftofl: que I O diuifees en plufieurs particulières demeures : dans lefquelles demeurent fouuent cin- quante familles, par lois dauantage,qui font chacune auprès de ion feu dans leurs liéls pendans. Orenchacunedeces maifons,ily en a vn des plus vieux quigouuerne les autres &qui leur harangue au niatin de fonlid,comme d ’vne chaire, à haute voix, leur dénonçant à chacun ce qu’ils doiuent faire cette iournee là. Et apres qu’il eft leué , il court haranguer en la mefme façon par tout le voifinage î ils ont pris cette couftume, comme ils difent.d’vn certain oifeau fqui ne ièmblepasmalà vn oifeaudeproye) qui excite à leur dire les autres par fon chant, quand le matin eft venu , & pour cette caufe ils le nomment Roi des oi/èaux. Les femmes accouchent eftenduës à terre; & le pere, ou vn ami qu’ils s’dlifenc 10 comme compere (car ils obferuent cette couftume; leue l’enfant de terre ,• par apres le pere coupe auec les dents ou auec quelque caillou trenchant le boyau du nombril, (tout cela fe fait parmi ceux qui font plus ciuilifés maintenant par les femmes) puis ils ieufnent iufques à ce que la playe foit guerie, & bien fouuent iufques au hui-* diemeiour: les femmes auflitoft quelles fohtdeliurees s en vont à vne riuiere ou à vn torrent, où elles fe laùent d’eau froide; & allaident leurs enfans vn an entier, & bien fouuent plus long temps, fans lui donner durant ce temps à manger: voila jpourquoi elles les aiment efperduè'ment, & les portent deflùs leur dos pendus dans vn petit rct (qu’ils appellent Tupùïa) partout où elles vont: elles prennentfur tout garde qu’ils ne crient , & pour cette caufe elles ne les chaftient iamais, 5 O Ces nations s’employent grandement aux fortileges , fe voilans la tefte d’vne toille de cotton &couurant & frétant de leurs mains vn certain pieu. Ils eftiment plus le bien qu’on fait à leurs enfans, que s’il eftoit fait à eux-mefmes, voila pourquoi ils hon- norentvniquement les Peres de la Société, pource qu’ils inftruifent leurs enfans es Arts liberaux & aux difciplines. Ils reçoiuent leurs hoftes auec l’armes & cris, en cette maniéré : apres que le nou- ueau venu eft entré dans la cabane & s’eft aifis dans vn lid pendant , la mere de famille, les filles & les autres femmes domeftiç|^uesrenuironnent ayant les cheueux efpars,6i maniant les mains de l’hofte, elles commencent leur plainte par cris & abondantes larmes ; elles lui racontent d’vne voix trifte & en rime de Sauuage , tout ce qui lui eft 40 aduenu auparauant, les périls qu’il a encouru & tout ce qu’il a rencontré en chemin foit vrai ou non : cependant il demeure fans mot dire : enfin leur plainte eftantache- uee & ayans eflùyé leurs larmes, elles rèprennent leur vifage de ioye , faluënt amiable- ment le nouueau venu , lui prefentent à boire & à manger, & lors elles l’efcoutent ra- conter amplement les eaufes de fa venue. Enfin ces nations n’aftedent rien tant que d’eftre loüees comme hofpitalieres, voila pourquoi ils s’efforcent de receuoir humai- nement tous les Eftrangers , les nourrir & les obliger par quelques prefents. Or pour- ce qu’ils n’ont point de monnoye, ils trafiquent entr’eux parle change de chofe à au- tre. Ils recompenfent le plus fouuent de boiflon ceux qui leurs ont fait quelque plaifir; car quand il leur faut cultiuer leurs champs ou faire quelqueautre ouurage,à quoile J O pere de famille ne peut fuffire fans aide , il préparé premièrement à boire, puis apres il appelle tous fes voifins pour lui aider, aufquels c’eft vn deshonneur de refufer , & apres qu’ils ont trauaillé iufques à dix heures du matin , ils retournent à la maifon , & ache- uentle refteduiour àboire, continuans ainfi les iours fuiuans tant que la befogne foit acheuee. Ces Sauuages aiment affes leurs femmes , & ne les bâtent ou font autre mal légère- ment, fi ce n’eft qu’ils foyent dauanture yures;mais ils en portent grand foin : ils O 00 ^ vont 478 DESCRIPTION DES INDES vont prefque toujours enfcmble dehors , & s’il faut aller aux champs , l’homme va deuant & la femme le fuit, afin que fi quelque befte fauuage ou quelque ennemi fe recontroit, cependant que l’homme fc défend, la femme aye le temps pour fe retirer au logis;que s’ils viennent du champ à la maifon , la femme va deuant , afin que fi quel- que mal furuenoit elle peuft plus aifement s’enfuir à la maifon: voila quant à ceux qui demeurent aux champs : mais dans les villes & bourgades , ils font toufiours marcher leurs femmes deuant, car eftans fort ialoux ils eftiment que par ce moyen ils pour- ront plus aifement prendre garde à leurs aétions. Ils font immodérés à mener dueil de leurs morts ; car ils fe tourmentent fort & fe , iettent contre terre , & crient toutes les nuids,& le iour ils pleurent & fe lamentent, i o êc ce vn mois de long,- alors les hommes fe rafent les cheueux, & les femmes fe mar- quent de lignes noires , & enfin ils finiifent leur dueil par vne boilTon publique. Au refte combien qu’ils foyent melancholiques de nature, ils ont toutesfois diuers ieux,à quoi ils fe déledent ordinairement, eftans ainfi inftruids dés leur enfance: ils fe ' ' pîaifent outre mefure aux chanfons & aux dances : & ont leur façon de chanter, ôc ' leurs inftruments, qui rendent vn fon rance & mal ordonné.- Leurs armes font des maflues de bois, l’arc & les fléchés : ils font fort proprement leurs maffuës & leurs arcs d’vn bois fort dur; leurs fléchés de rofeaux ; qu’ils muniflent au bout de dents de beftesfauuages,d’osoudemorceaux dedur bois, de forte qu’il n’eft prefque point à croire, comme ils en trauerfent des cuiraftes &des rondaches zo de cuir , & en fendent des pieux aftes gros : car ils font rudes archers & fort experts, comme y eftant accouftumés dés leur ieuneffe. Et pour dire en vn mot (car nous ne dirons rien en ce lieu de leurs mœurs cruelles, à tuer & manger leurs prifonniers , pourcc que d’autres & notamment de Lery en , ont traité prolixement) ces Sauuages voyent & oyent fort clair: voyagent volontiers; ils fe conduifent en leurs voyages félon le cours du Soleil , à quoi iis fe trompent fort rarement: ils font bons pefeheurs, habiles nageurs aufti bien dans la mer comme és ^ riuieres: ils vfentfort fouüentde Tabac, ie dirois qu’ils enabufent, n’eftoit que plu- t fleurs Europeans ne les imitent pas feulement en ce vice, mais meflnes plufleurs les U furpafl'ent. Voila ce qui eft commun prefque à toutes les nations, qui habitent cette partie de Continente : maintenant nous pourfliiurons de parler des diuers peuples, ^ & de ce qui leur eft particulier. C H A P. III. Dmer/ès nations du Brafil , ^ leur naturel o* mœurs ^ félon les Commentaires des nouueaux tAutheurs ‘Tortugaü. Le s nations qui habitent la Continente du Brafdi font pour la plufpart diffe- - rents de langage : toutesfois ils en ont vn commun entr’eux, duquel îe feruent . ; ordinairementdix nations d’iceux , qui demeurent proche du riuage de la mer 4o| & mefme au dedans du pais: prefque tous les Portugais l’entendent, car il eft aifé, 'îj . copieux & ailés agréable : Or les enfans des Portugais nés ou efleués de ieuneffe dans i ces Prouinccs , le fçauent comme le leur propre, principalement dans le Gouueriie- ment de S. Vincent : par le moyen de cette langue les Peres de la Société ont auflî r, couftume de traider aiiec ces nations, car ces Sauuages font les plus humains & fa- miliers de tous, & ont de longtemps paix & amitié auec les Portugais: de forte que parleur moyen & armes, ils ont en partie fubiuguees les autres nations du Brafil,bC les ont rendùës tributaires, ou lesonedu tout deftruides, ou contraindde quiter. leurs maifons & de s’enfuir aiu dedans du païs.Mais nous pourfliiurons à traider de ces peu- ples par le menu. Les premiers entr’eux font fans contredit les Petiguares ,<\m habitent auprès de P araiba, Z Cïivàïon xxx lieues de Pernambuco ^ &onticmeiIleur bois à^Brafd en leur quartier,- ceux-ci ('ditcet Autheur) ont efté long temps amis des François, &:eftoyent alliés auec eux-mefmes par mariages, iufques à l’an cId Id lxxxiv , auquel temps P Pardiba fut pris par Diego Fîorest fous les aufpices du Roi d’Efpagne, & les François en furent chaffés,ies Efpagnoîs mirent cent hommes en garnifon dans la fortereffe, fans OCCIDENTALES. LIVRE XV. 47^ lans les Portugais qui y arriucrcnt, lefquels ayans entr eux formé vne compagnie fous la conduite de FruBuofo Barbofa Atcincl y eftoic venu en grande diligence par terre auec ceux de Pernambucoy & auoit efté la principale caufe de la viéloire. La plus gran- de partie dentr’eux à encore pour le iourd’hui en horreurles Portu<^ais , & auec peu de peine pourroit eftre incitée àleur courir fus, comme ceux de noftre nation és an- nées precedentes ont expérimenté. Proche de ceux-ci demeuroyent ceux qu’on nommoit vulgairement Vidtany qui eftoit anciennement vne nation populeule 5^ mais elle eft maintenant entièrement de- ftruide, car pource qu’ils eftoyent amis & alliés des les Portugais ayans O refolu de les auoir par tromperie ; les deftinerentpour eftre mangés des autres Sau- uages, & pour cet effed ayans excité des inimitiés entr’eux fecettement, ils efmeu- rent les voifms les vns contre les autres, & comme ils eftoyent prefles de faim & de difette , ils les reduiftrent en feruitude, & les ayans embarqués dans des nauires, les vendirent pour efclaues en d’autres terres loin delà,- enfin vn certain Preftre Por- tugais, qui eftoit Magicien,commc on croit, ayant par diuers enchantements abefti le refte, les mena a Pernambuco en miferable feruitude, où ils font morts peu à peu. , ^ Depuis la riuiere vulgairement nommee (Rio Real) iufqucs aux confins du Gouucr- nement de los llheos habitent les Tuf inambaSyàxicoxA^Xis entr’eux-mefmes : car ceux O qui habitent autour de la baye à^lodoilos San!amyorxtg\xç,nç. continuelle auec ceux qui lont d auprès de L^ Caetas autre nation de Saunages, habitoyent fiir les riuages du fleuue de S. Iran- cois ^ font ennemis mortels de ceux c ont vn langage particulier : & prefque au quartier les TaicaiuiostC^ni demeurent fous des toids 6c dans des cabanes : '6c les Corium i ces trois nations font amies des Portugais. Les Pigruuos ont auffi des demeures affeurees; & les Ohacatiarod tiennent lesifles da'ns la riuiere de S. François ; ils vfent de dards 6c d’arcs ; font robuftes de corps j man- . gent la chair humaine 6c ont vn langage particulier ; quandils fontfurpris de leurs en- nemis,ils gaignent l’eau, & s’efehappent en plongeant, à quoi ils font fort experts. Apres fùiuent les AnhelimoStAracuitos ; & les Caimarosy qui demeurent dans des ca- 5 0 uetnes (dûs tene,commeâuGîles Guianaguacos. En outre les Canuruiaras aufquels les mamelles pendent iufques aux cuiffes.de forte qu’ils font contraints de s’en ceindre quand ils veulent courir. Les lohioras Apuayaras y qui co’mbatent auec des perches bruflees auboüt , d’où ils ont efté nommés. Les C»m^e^.^,prefquefèulsen cetord troupeau d’ Anthropopages, qui ne mangent point de chair humaine, mais ils fe contentent de couper la telle à leurs ennemis , & de les promener en rrophee,ils vaguent à la façon des Nomades. * Les ont des cabanes & vfent de fléchés enuenimees. Les Cicuos,PahaiuoSyIaicmfîOs,TupyoySiMacaragmcoSyIacaruuy, Tapecuuyy^^nacuy, Pi- 40; racuy , T araguaigosy Pahacuuiy Parapotos yCaraembas y Caracuiuy , Maimimy alTociés des Guaymuros 6c pour la plus grande part confédérés enfemble, combien qu’ils difl^erent de langage : les AturaroSyCmgtaios & les Guipas, cçai ont habité autresfois proche de Po/- , to Seguro : les Guigrauihas , & les Augararosy qui habitent proche de la cofte de la mer, entre Porto Seguro 6c le Gouuernement de Spiritu fanFio. Les Amixocoros 6c les Caraias fe tiennent au dedans du païs, auprès du Gouuerne- ment de S. Vincent y^enns là des quatiers du Nord-eft : les A 'petupas auprès des Aquitig- pen:\es Caraguatayras, K^quigiras,Fapiguyrosy font bas de corps, mais bien ramafles &: robuftes ( les Portugais lesnornment Pygmeos)\es ^uinciguigos-, les ^uirigosy qui font bons Caualiers ; les Guaieras 6c Anaguigos. y o Les Guaitacas Ce tiennent auprès delà mer entre le Gouuernement de Spiritufancîo 6c ; , Æid? iÉ'/^»»<’r^?,ilsfeplaifent fort aux campagnes &fuyent les bois,au matin ils s’en vont dans leurs grains comme les belles aux pafturages , 6c ne fe’retirent au logis que pour y dormïr,&font li viftes& légers qu’ils attrapent les belles fauuages âlacourlè, hes Igbigranupanos alliés aufli des Guaymuros & qui leurs aident le plus fouuent en leurs entreprifesjils font vn grand bruit auec des paux qu’ils frotent l’vn contre l’autre. Les OCCIDENTALES. LIVRE XV. 481 Les ^triguias autresfois Seigneurs de la baye de toâos SanÛos ("d’où vient qu’il eftioc appelle c^irimure) furent chafles de leurs païs par les Tupinabes^ & fe retirè- rent plus vers le Sud. Les HdâTibucos font auprès de Rio Gy^ndo : les C/itdgUt^ts auprès les Ict^ucyi^udyofîf entre les Gouuernements de Porto Seguro & de Spiritn fkn^o. Les Tapuxenquot,P>c Amac/txos au dedans du païs vers S. Vincent, \h font ennemis des Tupinaoiuins,\ç,s Noneasi Jpuy, Panaguiros , Bigrorgy, Piriuios, Annaciugos, Sc les Guaracatiuos. Voila prefque toutes les nations des r4t/»/W,feptantefixen toutj pluficurs defquel- les ont vn langage different ; ce font peuples Sauuages & indomptés , qui ont guerre 10 continuelle auec ceux delà cofte de la mer, quelques- vns exceptés, qui fe tiennent auprès des riuages de la riuierede ou qui font proches des Colonies des Portugais, car ceux-là recherchent l’amitié des Portugais & les reçoiuent en leurs maifons , quand ils Voyagent par leurs contrées 5 & mefmes plufieurs dentr’cux ayans appris la langue de la cofte , ont commencé d’embraffer la foi Chreftienne : car fans la cognoiffance de cette langue, il feroit prefque impoflible d’inftruirc les rapuias, tant il y a entr’eux vne grande diuerfité de langage & de barbarie. Voila ce qu’en dit cetAutheurPortugais imprimé en Anglois, qu’on eftime eftre quelqu’vn de la Société. C H A P. IV. Diuerjès nations du 'Qïa.ül , félon la relation de ^Antoine Yinïntt Anglois y qui a long temps couru ci gy* là dans le Brafil. Le s Petiuares ne font pas fi cruels & inhumains que les autres Sauuages de ces Prouinces , car ils conuerfent affés humainement auec lesEftrangers : mais ils font bons guerriers. Ils font de moyenne ftature, & fe marquent tout le corps de certaines marques, fe percent les leures auec des cornes de cheures , dans lefquels . trous ils mettent quand ils font grands de petites pierres verdes, ce qui leur femble beau fur toutes chofes , car ils eftiment les autres pour ruftiqucs. Ils n’ont nulle Reli- gion ; prennent autant de femmes qu’ils en veulent ou peuuent nourrir : & il n’eft pas permis aux femmes d auoir plus d’vn mari , fi ce n’eft que le mari le leur permette pu- 3 O phquement, car lors elles peuuent eflire celui qu’elles défirent. Quand ils vont à la guerre les femmes portent leurs viurcs fur le dos dans des corbeilles : ils ignorent du tout 1 vfàge des habits : & viuent de racines ou d’oifeaux ou de venaifbn.Le mari quand il eft reuenu de la chaffedl faitprefènta vnede fes femmes defàprifê, qui eft vn indice qu’il veut auoir fbn accointance ce iour là: elle apres s’eftre lauee tout le corps, occu- pe le liétpendant, & les autres la feruent. Apres que les femmes font groffes, les maris ne tuent aucune befte femelle, de peur que lefruiét de leurs femmes ne meure parce moyen. Or quand les femmes font accouchées, les maris fe couchent au liét, & font fàlüés courtoifement de tous leurs voifins , & font traiélés des femmes foigneufemcnc & largement. Q^and ils voyagent par les lieux deferts,ils portent auec eux vne grande quantité de Tabac & tiennent les fueilles d’icelui entre les leures & les genciues, de , forte que la faliue fort abondamment par ce trou qu’ils ont dans la leure. Ils font An- thropophages,& tuent cruellement leurs prifbnniers & les mangentinhumainement: ils ont leurs villages fort peuplés, & ont chacun leurs champs feparés, qu’ils cultiuent foigneufement. Ces Sauuages poffedent vne fpacieufè contrée au cofté du Nord du Brafil: mais il en faudra parler encore ailleurs. Sur le bord de la mer du Nord entre Pernambuco & la baye de tous les Sainêls, habi- tent premieiement les tJMariquites , de la race des T âpui as, w^ûon vagabonde: les hommes & les femmes ('qui n y font pas troplaidesj fçauent egalement combatrej ils vaguent a la façon des beftes fauuages parles forefts & folitudes, ennemis de tous, fi ce jQ n eft qu on dit qu ils ont du depuis fait la paix auec les Portugais , ils attaquent rare- ment leurs ennemis en guerre ouuerte, mais ils les furprennent&les accablent à la defpourueucjils font fort viftes & légers a fuir & pourfuiure:de mefme corpulence que les Petiguares,(\ ce n’eft qu’ils ne fe marquent pas le corps , & font aufli inhumains à tuer & manger leurs prironmers:ils s’eftendent iufques à la riuiere de .S. François. Depuis cette riuiere iufques a la baye de tous les Saincls yh.'àhii&nt les Topinambazes, du tout femblables en mœurs & habitude de corps OLM.xPetiuares(i\ ce n’eft qu'on eftime Ppp leurs 482. DESCRIPTION DES INDES leurs femmes plus belles ) ôe ont le mefme langage , ils font toutesfois differents des autres Sauuages en ce qu’ils portent barbe. De cette baye iufques aux Ifles, comme iis les appellent, habitent les VVaymores oü les GuaymuresÂc(<\\xc\s nous auons parlé au Chap. precedent. Dans le Gouuernement de Spiritu fmBoi fe tiennent les Tomomymes , nation fa- rouche & cruelle: ie fuis fouuent allé ( dit Kniuet) en guerre contre eux auec les Por- tugais , pour prendre leur bourgade nommee Morogegen. Car ils ont plufieurs bour- gades dans les Mes delà riuieredeP^r^^^^, enuironnees de grandes pierres, plantées en façon de paux , & munies par derrière d’vn rempart de terre ou de pierres. Les maifons font couuertes d efcorces d’arbres , & les parois font de pieux ou de cannes i o treliffees & fort proprement faites , de forte qu’ils peuuent tirer leurs fléchés entre deux. Il y auoit en noftre armee cinq cents Portugais, & trois mille Sauuages alliés, quand nous aflîegeafmes Morogegen,^ toutesfois ces Sauuages faifoyent des forties fl furieufes fur nous, que nous fufmes contraints deno.us retrencher,& d’enuoyer querirdu fecours àla ville de Spiritu finHo. Iceux fe tenans fur leur rempart, ornés de plumes & teinds le corps de rouge, nous affailloyent tous les iours &allumans vne certaine petite roue ornee de plumes, la roüant autour, de leurs telles , iis crioyent Co- bae yabe o po monbabme\cQik à dire, nous vous confommerons en cette façon. Mais quand noftre fecours fut venu , ils commencèrent à s’efcouler peu a peu de la bour- gade, ce qu’aperceuant les noftres, fe couurans de clayes faites de longues cannes lo ( que les Portugais appellent ils approchèrent du rempart, & y firent brefehe non fans grand danger , & apres auoir perdu beaucoup de nos gens, ils entreront de furie dans la ville; où il y eut prefque leize mille des ennemis tant tués que prifon- niers,qui furent partagés entreles Portugais:par apres on pritquelques autres petites bourgades, où ayant tué les vieillards & les foibles,les autres furent pris pour cfclaues en la mefme façon.Enfin (dit-il) apres auoir gafté leur contrée fept iours durant, nous defcendifmes le long de la riuierede iufques àla ville nommee Morouy^ delà ayant pafle la montagne ( que les Sauuages appellent ParapiaquemjàQ la mer qu’on voit d’icelle )nous arriu^fines à Tupau Boyer a (que les Portugais nomment Orgam» qui font des montagnes efleuees fur la riuiere de lennero) & delà nous defeendifrnes 5 0 du long de la riuiere iufques à la ville de S. SebaJiieniOU. l’armee fu^ congédiée. Les VFAytaquAfes habitent au deçà & delà du Cap nommé des Portugais Capo Jrio ôedes Sauuages locoex,àzns deslieuxhumidcs & marefcagcux,ils font beaucoup plus grands que les Guaymuros , & portent de longs cheueuxj les femmes combatent auflî bien que les hommes ; leurs maifons font petites & baflés : ils n’ont paix auec nulle au- tre nation, & font egalement ennemis de tous,& mefmes cruels à leurs voifins. Les VVaymJfes tiennent l’Ifle Grande , comme on la nomme, fituee à enuiron dix huiét lieues de i’emboucheure de la riuiere de lennero vers le Sud ; ils font petits , ont vn gros ventre , les piés plats , & font peureux & coüards : leurs femmes font belles de face , fort difformes quant au relie , ils fe peignent tout le corps d’vne certaine couleur 40 rQuge,qui fe fait d’vn fruid nommé P>-sî-«, des tourtresaufli (qui font nommées des Touoapmamhas»Fai- cacu, (don de Leryjdes colombes & tourds,qui ne different gueres à celles de l'Europe. ' Q^q q Z Dans 4^1 DESCRIPTION DES INDES Dans les Prouinces Mediterranees il s y trouue quantité d’auftriches, que les Sau- nages nomment en leur langage Imducocu. On les conte entre les oifeaux de rapine, elles font fort grandes & crient fi haut, qu’on les oit de demie lieue loin, elles font tou- tes noires, ont de fort beaux yeux,le bec comme vn coq,auquel il y a vne corne adioin- te prefque de la longueur d’vne palme, qu’on dit guérir ceux qui ont quelque def- faut à la langue, par vne certaine vertu naturelle,la leur pendant au col, ce qu’ils difent eftreapprouué par expérience. Il s y trouue auffi des aigles, faucons, vaultours & autres femblables oifeaux viuans de rapine, mais ils font tous fi fauuages, qu’on ne les peut en façon quelconque appri- uoifer ni drefier. j ^ C H A P. VIII. Arbres fruiSiiers du Brafiî, ^ autres chofes défaites par diuers Aut heurs. En T R E les arbres fruiftiers de ces païs , excellent les Acaiom , que chrijiofe Acofa defcrit en cette maniéré : Cet arbre eft auffi grand que le grenadiers ; là fueille eft d’vn verd clair, & eft efpaifle : fa fleur eft blanche , prefque femblable à celle de l’oranger , mais elle a plus de fueilles,& ne fentpas fi bon. Cet arbre donne le fruièl vulgairement appelle Caioui qui eft forçeftimé de tous à caufe qu’il eft d’vn bon gouft,& vtile à l’eftomach. Or ce fruid eft comme vne grofle pomme, fort iaune 20 & odorant, fpongieux au dedans & plein de fuc , fans aucuns grains d vn gouft douça- ftre,toutesfois ilpreflelagorge. Or il a vne double naiflance en vne mefme annee,en cette forte : lafleureftantfleftriefuccede vne grofle febue, entre laquelle & la fleur fe groflit quelque chofe femblable à vne pomme , qui attire peu à peu le fuc de la febue ; & d’autant plus qu’elle croift,d’autantplus diminue la febue ounoix,iufques à ce que le fruid Caiou qui eft cette pomme Coit venu à fa parfaite maturité,ce qui fe cognoift à là couleur iaune ou rouflef car ces deux couleurs fetrouuenc dans ces Prouinces ) & à Ion odeur ; encore quele fruid (bit meur,neantmoins la febue y demeure attachée & s’y cueille auec. Voila ce qu’il en dit. Nous auons pris peine de faire tailler &adioin- dre ici ce fruid, que nous auons recouiiert parfaidemerit bien peint. ^ q ■' En outre cette noix qui eft au bout du fruid, eft de la for- ^ me d’vn roignon delieure f dit^/^/’£c/f^ ) d’vn couleur cen- dree , & .par fois d’vn gris de cendre rougiffant. Or elle a deux efc orces , entre le/quelles il y a vne certaine matière fpongieufe,pleine d'vne huile fort afpre & chaude,& au de- dans il y a vn noyauiblancbon àmanger,&: quinecederien en gouft aux pinons de Syrie, couuert d’vne pellicule cen- dree qu il faut ofter. Les habitans du païs en vfent apres l’auoir legerement rofti , il eft d’vn agréable gouft & on croit qu’il excite Venus. On dit qu’il n’y a rien meilleur 40 pour guérir les dattes que cette huile acre. C’eft vne chofe certainè que les Sauuages s*en feruent contre la gratelle. Le fameux char . de l Eclujè a fait dépeindre cette noix comme elle eft ici reprefentee entière & coupee par le milieu. En outre cet Autheur Portugais quei’ai iuf ques ici fuiui en la plus grande partie de ce que i ai eicrit, donne à cet arbre vne fleur rouge : & dit quele bois d’iceluin’eft pas mefme propre à bruller; mais qu’il rend vnegomme, dequoi les Peintres fé feruêt}& qu’on fefèrt de fon efcorcc îo à teindre le fil de cotton,& à faire des vaiffeaux deterre: &qu’eftant boüillie dans de l’eau auec de la limaille de cuyure, &confomméiufques à J, ^ la tierce partie , guérit les vlceres malins. ^ e trouue vne grande abondance d’arbres de ou Afa r eu ba autour de la baye de les Samlls , & rarement ailleurs : Ils ont l’efcorce de fouteau , & la fueille fort OCCIDENTALES. LIVRE XV. .45)^ fort femblablc à celle du frefne, toufioiirs verds & fort beaux. Ils portent leurs fruids deux fois ran,premierementenbofl'e,&lors il ne fleuritpoint,mais cette bôffeeft Ton h uiè'tjapresil produit premièrement vnefleurfemblable à celle du iafmin.maisquiefl: beaucoup plus odorante; à laquelle fuccedevn fruidde la grolTeurd’vn percer, iaune par dehors, & marquetee de certains petits points noirs; au dedans il y a quelques noyaux que l’on mange auec l’efcorce. Il eft fort agréable au palais ,eH: mefmé fort fim&: h léger, qu’on en peut manger vne grande quantité fins qu’ils faflent mal: il tombe auantqu eftre du tout raeur , voila pourquoi les Saüuages le ferrent iufques à ce qu’il foit plus mol,& alors ils en font vn certain vin: les fueilles & le fruidauant I O qu eftre meur rendent vn certain laid vilqueux & amer. L arbre qui porte le fruid, nommé des Sauuages enleur hngâgc Mtfrucuge ou Mu^ cuJ?,e(i£on femblable au poirier fauuage ; fon fruid a vn bouton ; on le cueille verd, & quand il efl; vn peu attendri,il eft de fort bonne fàueur & de facile digeftion. Les Sau- uages ont cou ft lime d abatte 1 arbre pour en cueillir plus àilement le fruid, voila poür- quoiils entrouue peu: Du tronc incife découlé vne certaineliqueur commelaid,qui eftant elpaiflîe,peutferuirau lieu de cire pour cachetter les lettres. Il y a vne grande quantité & variété de ces arbres, qui portent les c’eft à dire, petites poires ; carily ena qui portent des fruids iaunes,d’autres rouges, & quelqu’vns verds ; & cela tous les mois de l’an ; ils font fort agréables au palais à caufe de leur 2,0 aigreur. ■ Vomhu eft vn arbre fpacieux , mais bas : il porte vn fruid femblable à vne prune blanche, mais vn peu plus ronde &iaunaftre: ileft fort dangereux aux dents, de forte que lesSauuages qui en mangent d’ordinaire,font le plus fouuent édentés. Us mangent aufli ordinairement des racines de cet arbre, qui font douces comme fucre, froides & fort faines, de maniéré que les Médecins les ordonnent entre les chdfes ,réfrigerentes, a ceuxquiontlafîebure ou autre maladie chaude. i Le lacapucaya eft conté entre les grands arbres de ces régions, il porte vn fruid fem- blableà vn calice auec couuercle,au dedans il contient quelques chaftagnes,fortfem- blables aux mirobalans ; le couuercle s’ouure de foi-mefme quand il eft bien meur, |o de forte que les fruids tombeni; fi quelqu’vn en mangentbeaucoup decrusjtout le poil du corps lui tombe ; mais eftant cuits ils ne font nul mal : ils fe feruent delà coque au lieu de coupe : le bois de l’arbre eft fort dur,& h-’eft point fuiet à fe pourrir , qui fait que les Portugais s’en feruent ordinairement à faire des eftîeux pour leurs moulins à fucre. r Araticupam eft vn arbre de la grandeur d’vn oranger, fés fueilles font comme ceL les du citronnier : il porte vn fruid gros comme vne pomme de pin, odorant & d’ vn gouftfort agreable,&:quine prouoquepasaifemêtle vomirjllÿen ade plüfieurs efpe- ces, & entre icelles vne qu ils nomment Araticupanania} le fruid duquel on eftime fort froid, & fi on en mange fouuent, il n’eft pas moins nuifible que du poifon: le bois de cet 40 arbre eft aufli leger que du liege,de maniéré qu’il eft employé à mefmevfage entre les Sauuages. Il y a deux efpeces du Pequea: vne qui porte vn fruid femblabe à l’orangé, auec vne efcorce efpaifle, dans laquelle eft contenue vne certaine liqueur mielleufe , qui en douceur ne cede rien au fucre, où il y a quelques noyaux méfiés. Le bois dé l’autre eft eftimé le plus dur & pelant de tous ceux qui croifient en ces régions , les Portugais le nomment nullement fuiet à pourriture. labutîcaba eft v'n arbre droit & grand , ayant des branches fort larges , il porte des fruids depuis le bas du pié iufques au fommet, en fi grande, abondance, & fi fort fer- rés enfemble, qu’on peut malaifement voir le tronc de l’arbre, c’eft vn fruid rond, jo noir, delà grolfeurdVn petit limon, d’vn fuc doux comme celui des raifîns mœurs, d’vn tempérament tempcré & fain, & fort bon pour ceux qui ont la fiebure, il fe trou- ue en grand nombre au Gouuernement de S. Vincent:, principalement dans les forefts de Piratininga , & au dedans du païs de la riuiere de lennero. Il s’y trouue quantité d’arbres qui portent les noix de Cocos , non pas dans les lieux non culdués, mais auprès des habitations des Sauuages & dans les vergers^ ^ - Il y a (dit cet Autheur Portugais^ plus de vingt fortes de palmes qui-ont efté Qqq 5 remarquées 494- DESCRIPTION DES INDES remarquées par plufieurs , mais leurs fruids ne font nullement a comparer auec les Cûcûs. De Zerjy efcrit qu'il s’y trouue quatre ou cinq efpeces de palmes, la plus com- mune defquelles eft appeilee des Sauuages de ces quartiers Gerau^ l’autre d’apres Tri. Au dedans du païs , au delà du Gouuernement de S. Vincent vers Paraguay, on voit des forefts entières d*e pins, qui portent leur fruiôl du tout femblable à ceux de l’Eu- rope, mais ils font plus gros & plus ronds j & les pinons font d vne qualité plus tem- peree que ceux qui fe trouuent d’ordinaire de par deçà. Le Gahueriha ou Cahurciba eft vn arbre Ipacieux, & fort eftimé pour le baulme qu’il rend, l’efcorce eftantlegerement entamee, on y met du cotton, dans lequel découlé infenfiblement la liqueur, que les Portugais nomment Baulme, pource qu’il approche i o fort du vrai , & guérit les playes nouuelles , & mefme fent fort bon : car les forefts où ces arbres croiftent, rendent vne bonne odeur.Son bois eft conté entre les plus excel- lents, a caufe de fà durete & pelànteur, & pour lefingulier vfàge qu’il a en charpente- rie. Les beftes fauuages à force de fe froter à cet arbre en efcorchent l’efcorce , pour en receuoirguerifon, comme il eft vrai femblable. Cet arbre fe trouue principalement dans le Gouuernement de S. EJprit, ailleurs rarement. Le Cupayba eft vn arbre reflemblant au figuyer, haut, gros & droit, &: qui contient beaucoup d’huile: car incifant feulement l’efcorce,il rend vnegrande quantité d’huile fort claire,telie que celle qu on tire des oliues : elle eft fur tout eftimee pour guérir les playes & ofter les cicatrices: mais il s en trouue fi grande quantité en ces quartiers, zo qu’on s’en fert mefme aux lampes : le bois de l’arbre eft inutile. Cet huile s’appelle communément Copal-yua^ mais pluftoft C#^4jy^Æ,touchant laquelle on peut voir char, de PEdufetn fes Commentaires fur Chrifiofle Acojia. L’arbre ^mbayba eft aufli femblable au figuyer,mais il eft plus bas; il fe trouue pref- que toufioursparmileshaliers,&dans les champs qui ont efté autresfois cultiués , ra- rement ou iamais dans les forefts : la fuperficie intérieure eftant raclee & mife fur les playes frai(ches,auec lelcorce lieepar defîus,elle les guérit fort promptement: les Fueilles font fi rudes, qu ons onfortapolirlebois,fàmatierceftinutilcàtousouurages* é L'Ambaitinga eft comme vne efpece du mefme arbre , lequel fe trouue dans les fo- refts de pins, il rend vne certaine liqueur huileufo,delaquelle.Æ/tf»4r^parle en cette fa- 5 0 çon : La mefine ( dit-il ) on raflemble vne liqueur ou refinc,qu’iîs nomment Abiegna» ^ de certains arbres fauuages, qu on ne fçauroit nommer pins ni cyprès ; ils font plus . hauts que des pins & droits comme cyprès. Au fommetd’iceuxcroififent certaines / vefies , groffes & menues, qui eftant rompues il en diftille goutte à goutte vne liqueur admirable,queleslndiens recueillent diligemment dans des coquilles , auec fi grand labeur & foing, queplufieurs en plufieurs iours n’en raflemblent que fort peu. Elle ferta tout ce qu’on employé le baulme; car elle confolide tres-bien les playes, appaifo les douleurs engendrees de madere froide & venteufo : Elle eft aufli bonne contre les vices dei eftomach caufos d humeurfroide,ou de vents,fi on la prend auec vn peu de vinblanc. En outre cetAutheur Portugais lequel nous fiiiuons prefqucen tout,re-4o commande fort les fueilles de cet arbre contrôles vomiirements;& dit quelhuilegue- rit la débilite d eftomach , fi on l’en frote par dehors : mais il deforit la maniéré de la raflembler du tout autrement; comme celle de recueillir le baulme dontnous auons parlé ci-defliîs : car ayant mis premièrement l’efcorce & les fueilles au Soleil on les broyé, puis on les boult auec de l’eau, tant que toute la fiibftance huileiifo nage deflus, que l’on efeume par ce moyen. L'arbre Igbucamici eft fort commun dans le Gouuernement de S. Vincent, i\ porte vn fruiét fomblable a vné pomme de coin, rempli par dedans de petits grains, qui font vn remede fort aifeurejCômme 1 on dit, contre la difonterie : le fais doute fi ce ne foroit point le mefme que le duquel nous parlerons ci-apres. jo L Igciega produit vne efpece de maftych, d’vne agréable odeur: fon efoorce eftant pilee rend vne liqueur, qui eftant congelee fert au lieu d’encens,& s’applique en for- me d empîaftre heureufoment contre les affeélions froides. Il y en a vne autre efpece du mefme, qu ils nomment Igtaigcica,c't^k à dire, maftych dur comme vne pierre, car fà refine eft fi dure & tranfparente, qu’elle femble prefque eftre de verre: les Saunages s’en feruent communément à blanchir leurs vaifleaux de terre. L’arbre ) OCCIDENTALES. LIVRE XV. 4Sj L arbie Curnpicatha:i\z fueille femblablea nos percets.lefquels rendent vne certai- ne liqueur de laid: feniblable a celui des figues,qui eft vn fingulier remede à l’encontre des playcs & puftules : ion eicoiceeftant inciièe diftilleduglu , duquel les Sauuages ie l'eruent à prendre les oifeaux. ° L arbre Caaroba eft fort frequent en ces régions, iès fueilles eftant quelque peu maf- chees & appliquées furies puftules de verole,les gueriiTent fi heureufement, qu’elle ne reuicnnentpas aiièment par apres : on croit que le bois à la meime vertu contre cette maladie qu’a la racine de la Chine & le bois fainftque les I/îes produifent: on cqmpoieauili de ies fleurs vne conierue pourlemefmeviage ;ily aencore vne autre I O eipece qu ils nomment CaoTobmacor andiba^Xç. bois duquel eft de couleur cendree, & le cœur extrêmement dur. hG, laburandiba qui eft aufli nommé des Sauuages Betele, aime fur tout les riuages des fleuues; fes fueilles fourniiTcnt d’vn iîngulier remede contre toutes les aifcétions du foye,commeila efté trouué par expérience. Il y aencore vn autre arbre cognu par le nom de Betele , vn peu plus petit que le pre- mier auec des fueilles rondes, la racine duquel a vne certaine vertu cauftique , comme le gingembre selle appaife la douleur des dents, la mettant dans la concauité des genciues. UAnda ek vn grand bel arbre, le bois duquel fert à plufieurs chofes : les Sauuages 2.0 tirent du rruii5t vne certaine huiloj de Iac|uelle ilsont couftuniedes^oindre lecorpSjils fe feruent de l’efcorce pour prendre du poiflbn s car l’eau, dans laquelle elle a trempé, endort SrTeftourdit tous animaux. ^ L'Aiteratibira n’eft qu’vn arbrÜTeau , portant vn fruid rouge, duquel les Sauuages font vne huile de meime couleur,dequoi ils ont couftume de s’oindre le corps. L Aiabutipita eft vn arbrifleau haut de cinq ou iîx palipes,il porte vn fruidiem- blable aux amendes, mais il eft noir, duquel fe tire vne huile de meime couleur, dont les Sauuages oignent d ordinaire les membres de ceux quiibntdebiles. ^e lanipaba eft vn fort bel arbre &gayement verd,il change tous les mois de fueilles qui ne font pas beaucoup differentes de celles du noyer,il porte vn fruid ièmblable en 3 O formea 1 orange,qui a le gouft de pomme de coin, auquel on a remarqué vne iîngulie- re faculté contre la diiènterie, le foc de ce fruid eft premièrement blanc, mais quand on s eu eft frote le corps,il noircit en peu de temps d’vne telle fortc,que c’eft vne chofo merueilleufo; d ou vient que les Sauuages s’en iexuent au lieu d’encre, & s’en mar- quentlapeau de certaines /ignes,imitans les habitsde ceux de l’Europej cette couleur dure d oi dinaire neuf iours, puis apres elle s efface : on dit qu’elle conftipe & endurcit fort la peau : ce fruid a cette faculté auant qu’eftre meut, car eftant meut il ne fait riendefemblable. L’arbre lequitinguacu ^one vn fruid femblable à vne fraife,dans lequel au lieu de fe- mence eft contenu vne dure febue, ronde, noire & reîuifante comme du iayet, ayant 4ol efoorce fortamere : elléièrtau lieu de iauon,&nettoye mieux que ne fait le meilleur fauon de Portugal. Au dedans dupais, auprès delà baye de totts les Saints , comme ils l’appellent, dans les lieux fecs & arides, croiftvn arbre grand &fpacieux, aux branches duquel il y a des creux fort profonds, lefquels tant aux mois d’eftè qu’en ceux d’hiuer, font remplis d’vne certaine humeur aqueufe,qui ne regorge iamais,fans qu’on fçached’où elle pW cede;& ce qui eft merueilleux,c eft qu elle ne diminué iamais, combien qu’on la puifo, de forte qu’elle ne feruiroitpas feulement de fontaine, mais mefme d’vn moyen ruif- feau: car il fe peut loger fous l’arbre bien cinq cents hommes, y boire & s’y lauer à leur plaifîr ; cette eau eftclaire,dvnbon gouft,& eft vn remede diuinement ordonné pour y O ceux qui voyagent en lieux arides. | Il fe trouLie en outre ci & là dans lesforefts & bocages beaucoup de grands arbres, defquels les Sauuages font leurs canoas tout d’vne piece; plufieurs auffi dont le bois eft fort dur,& qui n’eft point fuiet à pourrir : entre autres le bois, qu’on nomme de Bra- /4duquel les Portugais font vn grand profit: & pour Iaiîn,du bois odorant, comme le larara?^da,Câiidzl,èc d’autres de mefme forte. DESCRIPTION DES INDES 45><^ C H A P. IX. Flttjieurs arbres communs au Brafil , tirés des (omment aires de de Lery Theiier. L’A R B R E le plus célébré de tout le Brafil & duquel on eftime que la contrée a prisfon nom, eft appelle des Sauuages Araboutano\x{ comme eferit Theuet)OrA~ boutm^ mais mieux ibirafitanga j il eft femblable en grandeur & abondance de branches au cheftie de noftre pâïs,par fois fi gros, qu’à peine trois hommes le peuucnt- 1 o ils émbrafler.-fesfueilles font fort fembîables à celle du buisalneportenulfruift: le dehors de fon efcorce eft de couleur grife ; fon bois au dedans eft fort dur & rouge, nullement humide, mais d’vne nature feiche,de forte qu’eftantallumé il rend fort peu defumee:ilteintfi fort, que mefme les cendres dicelui ayant efté roifes fanslefça- uoir parmi la lexiue, teignirent.felon que raconte de LeryMms chemifes dVn rouge fi ferme.que combien qu elles fuflent par apres laueçs plufieurs fois, elles ne perdirent point cette couleur. L’arbre Ayri^ eft fort femblable à la palme quant aux fueilles , mais le tronc eft armé tout autour d’ef- pines fort aiguës , en formes d’elguiiles : il porte vn 20 fruiâidVne moyenne grofleur, au milieu duquel fe trouue vn noyau blanc comme neige, qui n’eft pour- tant pas bon à manger : de Lery croit que c’eft vne elpece d’hebene , car fon bois eft fort'noir, dur &fi pelant, qu’il va auffi toft au fond de l’eau ; Les Sauua- ges en accommodent leurs mafluës ;iîs en muniflent aufli le bout de leurs fléchés. Lheuet appelle cet ar- bre Hairii^cn donne la figure que nousauons fait mettre ici. Il eferit prefque le mefine de Ibn bois,fi ce n’eft 50 qu’il ne penfe pas que ce foitvne elpece d’hebene, pource qu’il n’a pas tant de luftre combien qu’on lepolilTe: il accompare fon fruid à vn cfteuf , & dit qu’il eft muni d’vn aiguillon en la partie d’en bas ; & qu’il a porté vne grande quantité de ces fruids en France: il ne dit point s’ils font bons à manger ou non. ihtraobi eft vn des plus hauts arbres du Brafil, la matière duquel eft fort dure & rouge, il ne porte nul fruid 3 les Portugais le nomment Bao ferro , tant pour fon grand poix, que pour fa dureté. Il fe trouue aufli (dit ào Lery ) fortes de bois en î’Amerique,de diuerfes couleurs, lefquels ie ne fçaurois nommer par le menu: i’en ai veu d’aucun de couleur de buis, d’autre violer, d’autre blanc comme papier, d’autre enfin rouge, d’autre forte 40 que \c Brafil : 2L\ie:c lefquels les Sauuages marquettent leurs mafluës ;vn aufli qu’ils nomment Copau,<\\iï eft vn arbre fort femblable au noyer, toutesfois il ne porte point de noix , mais le bois quand il eft raboté monftre les mefmes taches. Déplus il croift en ces régions vn arbre d’vne beauté fans pareille, le bois duquel rend vne fi bonne odeur, qu’on diroit que c’eft celle de la rofc,Ies Brafiilkm le nom- mentAu contraire il y en vient vn autre, que les Sauuages nomment Aouai. ou comme Theuetofcni Ahouai, qui fent fi mauuaisquand on le coupe, qu’à peine la peut-on fupporter,voila pourquoi les Sauuages n’en font iamais du feu:au refte l’arbre eft de la grandeur d’vn poirier, ayant les fueilles toufioursverdes, fembîables à celles de nos pommiers, il porte vn fruid delà groffeur d’vne chaftagne,qui en figure appro- jo che fort près du A des Grecs, le noyau d’iceluieft extrêmement venimeux, mais la coque en eft fprt dure & fonnante 3 voila pourquoi les Sauuages s’en feriient au lieu de fonnettes, &s’en enuironnent les bras & les iambes pour ornement: ils lient aufli ces mefmes fruids à leurs mafluës,haches & autres inftriiments. Nous auons fait mettre & adiouftci* icideflbus la figure de ces fruids, brauementSe excellemment ageancés à la mode des Sauuages. Il s’y 497 OCCIDENTALES. LIVRE XV. Il s’y trouue aulli beaucoup d arbri/Teaux, notammcnc auprès du riuage de la mer, les- quels portent des fruids Semblables à nos nedîesjinais fort dangereux, voila pourquoi les Sauuages , quand ils voyent que les E- ftrangers s’en approchent pour les cueillir, en répétant Souuent leur Tpochi,ils les ad- uertilîentdes’enabftenir. Le Hiuûurâe f dit deZ^’rj'jeftvneeScorce I O d Vn demi doigt d’eSpais , d’vn gouft agréa- ble, principalement quand elle eft nouuel- lement eScorcee de l’arbre j c’eft vne eSpece de Selon que i’ai appris de deux Ap- poticaires qui pafferent la mer auec nous ; & les Sauuages s’en Seruent contre la vero- le,qu’ils nomment Pians. Theuet deS:ric la maniéré de l’ordonner, & adioufte que le fruiél eft preSqueièmblable à vne moyenne prune, de couleur doree,mais qu’il ne porte zo que tous les cinq ans vne fois ; qu’au dedans ' il contient vn petit noyau , doux & délicat, & fur tout agreale aux malades. L’efcorce au dehors eft argentine, au dedans rougeaftre, elle rend quand on l’eScorcenouuelle ment, vne humeur de laia,d’vn gouft falé,mais approchant de la reglife. c/^ûinâ, 3.rbre ainlî nomme des Sauuages, eft d vne moyenne hautcur,fès fueilles iêm- blent en forme & verdure au laurier, il porte des pommes grofles comme la tefte d’vn enfant, approchant de la forme des œufs d auftriche , elles ne font pas pourtant bon- nes a manger, lefcorce en eft ligneufè& dure, d’où vient que les Sauuages en font leurs maracas & leurs autres vaifleaux auflî. J o Le Pocoaire{ dit de Lery) eft vn arbrifleau de dix ou douze piésdehaut, ayant le tronc par foisaulTi grosquelacuifle,quiefttoutesfois fi tendre, qu’on le peut couper d’vn coup auec vne efpee,les Sauuages en appellent les fruids Pacoba ( & les Portugais Bachoues)c[\ii font de la longueur d’vne palme , fort femblables en forme aux concombres , & de meftne couleur quand ils font meurs ; ces fruids croiflent le plus fouuent vingt ou vingt cinq enfcmble & (}.o par grappes en des branches particulières; nous enauonsfait mettre ici la figure dépein- te au naturel : quand ce fruid eft meur , eftant hors de fa peau, il eft grumilleux comme les fi- gues fraifchesjqui fait qu’en le mangeant il ale gouft d’icelles,&mefme furpafle en bonté les plus délicates figues de Marfeille. La forme des fu eilles n’eft pas fort diftemblable de celles de 1 ozeille aquatique;toutefois elles font fi grandes que leur longueur s’eftend iuiques à fix piés,& leur largeur à deux,mais elles font fi deliees.que quand il vente vn peu fort i; o elles fo découpent par lambeaux & n’y demeure d’entier que la cofte du milieu , de ma- niéré qu a les voir de loin, on diroitque ces arbrilTeaux font ornés déplumés d’auftri- ches. nomme ce fruiâ Pa^uûuere, & eferit que fon tronc croiftrarernent plus haut qu’vne coudee,& qu’il ne porte iamais qu’vne fois.Le fameux de l'Eclufeen fes re- marques furl'Hift.desPlâtes rares,penfeque ce fruid foitle meCmeeiuelePUtano def- ^ cfit par auliu.viii.ch.il. car toutes les marques conuiennent fort bien. DÆ/RiodeIennerù,^è,2XiS la mer prochaine , ne different pas feulement des noftres en grandeur , mais aufti en ce principalement, qu’elles portent deux cornes fort longues, &:ont en outre cinq ou fixfiffuresfoubs le ventre, qu’ondiroityauoireftèfaites exprès, tant elles font bien taillées : leur queue eft longue, deliee & fort venimeufe. theuet efcrit qu’elles font ap- pellees des Sauuages IneuoueA. i l’ai receu en outre d’vn certain ieune homme denoftrepaïs, afTés expert en l’art de peindre, trois pourtraids d’autres poifTons qui fe prennent par tout en cette mer,def. quels, combien qu’il ne m’en ait donné que le nom & les figures, fans qu’il m’en peuft déclarer autrement la nature & les qualités, i’aitoutesfois eftimê ne ao deuoir obmettre les pourtraids en ce lieu , attendant que les autres chofes nous foyent plus plainement cognuës. Il difoit que ceftui-ci duquel nous mettons ici la figure s’appelloit Vhirrey mais vn Portugais m’a dit depuis qu’il s’appelloit OVimu. Vhirte. L 2.MZïQAwah-kAttoe ou labwe^cypii femble fe deuoir mettre au rang des orbes, d’vne belle forme. Voyés-enlafigure. 510 DESCRIPTION DES INDES Le troifiemeP/V^ Vtoewahyà’vnQ forme mon- ftrueufe , qui femble auffi eftrc du genre des or- bes , duquel nous n auons rien receu outre la figure. C H A P. XIII. ’TôiJfom Crupaces Teflaces^ item arbres du^ rimge ou marins y , eomme aufjt les oijèaux de mer, Y *^puk du genre des efcreuices, femblabîe au neud d Vne cane , il fe trouuc g ^rarement» il n’efl: pas feulement bon à manger, mais il fert aufli de médecin e, -■-^car on dit qu’il guérit les affedions de rate fi oii boit de fa pouldre à ieun. LYzas ou Vcaa eftdu genre des cancres, ils font dans la boue auprès du riuageen nombre prefque infini , c eft l’ordinaire & le plus commun viure,non feulement des JBrafdiens , mais aufli des Ncgres , ils font de bonne faueur & fains , fi on boitde l’eau 20 fraifche defliis. Le Guainumu ©d vne forte de gros cancres , ayant la gueule fi large que le pié d vn homme entre dedans, il ed bon àmâger & ed pludod animal terrcdre qu’aquatique, car il fe tient dans des trous auprès du riuage : quand il tonne ils fortent hors de leurs cauernes,& font entr eux vn fi grand bruit, qu’ils efpouuantentles Sauuages, qui crai- gnent que leurs ennemis foyent venus , car ils font fort craintifs. UAratu ed de mefme efpece, ils fe cachent dans les troncs des arbres du riuage, &efpientfoigneufementles huidres & moufles, dans lefquclles ils iettcnt, par vne finguliere indudrie, des pierrettes lors quelles s’ouurent, &par ce moyen les man- gent fans peine. II s’y trouueplufieurs autre forte de cancres, lefquels tous les Sauua- 5 q ges mangent d’vn bon appétit. Ilyagrande quantité d’huidres,danslefquellesfc trouuentquelquesfois des per- les. Les Sauuages enaflembloyent anciennement grande quantité, & en ayant ode la chair, ils ammonceloyent les coquilles auprès du riuage , d’ou vient qu’on voit fou- uent en diuers-lieuxdes monceaux aflfés hauts de telles efoailles, couuerts d’herbes d arbriflTeaux, & par fois aufli de fort grands a*rbres,defquelles les Portugais font de la chaux fort bonne & fortblanche,de laquelle ils fe foruent ci & là de ciment en leurs badiments,& quand elle ed arrofee d’eau de pluye, elle fo noircid aifoment. Il y a de plus des moufles, defquelles la partie creufe des coquilles ed de couleur d’argent, dont les Sauuages fe feruent au lieu de cueilliers & de couteaux. 40 Ils y prifent fort les grands cornets de metjqu’ils nomment Guatapigmfu , car ilsdif- piitent auec liuoire,& les Sauuages s’en feruent pour indruments de mufique. Il y en a vne autre efpece qu’ils nomment Piraguaigi defquels par fois les flots de la mer enafl femblent de gros monceaux fur le riuage, chofe merueilleufe à voir. Il s’y trouüe enfin en grand nombre des trompes, des coquilles de S. laques , & d’autres conches de mer de toutes fortes, fort gentilles. Il s y trouue fous l’eau vne grande quantité'de coral blanc , qui ne différé du vrai qu’en couleur, toutesfois on l’arrache difficilement des pierres , aufli n’en vaut-il pas la peine. Entre les arbres marins font contés les Mangas [ poiirce qu’ils fo trouuenten grand 50 nombre auprès du riuage & des recoins de la mer, ils ont les fueilles comme nos faulx, toufiours verds , d’vn bois pelant & prefque aufli dur que du fer 5 au deffous d’iceuxfo trouue vne forte de moufeherons, qu’ils nomment CMaragues ou Mariguy, fort petits, mais qui peignent fi viuement, qu’on les edime à bon droit la pede de ces régions, & ne font point empefohés par les habits : le foui remede ed de les chaffer par la fumee , ou de fo froter le corps de fiente, ce que les Sauuages ont coudume défaire. Cet arbre edaufli (- I ^ 1 I , OCCIDENTALES. LIVRE XV. jrr efl: aufli nommé par d’autres Mang/e, que nous auons defcric ailleurs félon Ouiedo. Entre les oifeaux qui viuent en mer, le Guira,tinga,mç.x\c\z bande, qui eft de la gran- deur d’vne grue, ayant les plumes blanches, le bec long &: pointu de couleur iaune, les iambes longues, dVn rouge iaunaftre , le col eft couuert de plumes Ci fines & belles, qu’elles difputent auec celles d’autriche. Le Caripira a la queue fourchue, d’où vient qu’il eft nommé des Efpagnols Raho forcado )\cs Saunages feplaifent fort à auoir de fes plumes, pour en empenner leurs fléchés, carils ont remarqué qu’elles durent long temps. Or il nefetrouue feulement pas là, mais par tout ailleurs en l’vne & l’autre Inde , de forte qu’il eft maintenant fort I O, cognu au vulgaire. François Xirnenes, deferit, que la graifle de cet oifeau eft vn fingulier remede pour effacer les cicatrices du vifage, & qu’il eft principalement bon contre la goutte ; mais qu’il eft fort difHcile à prendre , fi ce n’eft en quelque îfle deferte, où il efcloft; fes poufîiris j il raconte qu’on lui en auoit vne fois donné vn, les ailes duquel, fans les plumes , eftant eftenduës en la mode qu’il vole, occupoyent plus d’efpace, qu’aucun homme eftendant les deux bras n’euft fçeu attaindre. Les Saunages nomment les goilans Guacas, or il y en a vne telle multitude & de tant de fortes , qui couurcntle riuage & les arbres qui l’auoifinent, que c’eft comme vne chofe incroyable. Le Guirateonteon eft vn oifeau fort fuiet au mal caduc , d’où il a eu fon nom des zo Saunages, comme qui diroit oifeau fouuent mourant, &derechefrefufcitant, il eft au refte couuert de plumes blanches & fort belles. Le Calcamar eft de la groffeur d’vn pigeon , majs il ne fçait point voler , il hache auec fes mongnons d’ailes & fes pies fort vifte les ondes delà mer, où les Saunages croyent qu’il pond & couue: ils font pronôneiateurs du calme & de la pluye, &cn ce temps ils enuironnent les nauires.en fi grand nombre , que les mariniers en font ennuyés. ÜAyaya eft de la groflfeur d’vne pie, auec vn long bec fait en cueillier , fes plumer font blanches fort bien parfemees de taches rouges , d’vne finguliere induftrie à pren- dre le menu poiffon. 30 Le Caracura eft petit de corps , de couleur cendree , ayant les yeux fort beaux , dont l’iris eft d’vn fin rouge , il a vne voix fi haute qu’on iugeroit qu’il feroit beaucoup plus gros, on l'entend chanter deuantleleuer du Soleil,ô^aufoir,qui eft vn certain indice de beau temps, comme ils difent. ' Le Gttara eft de la groffeur d’vne pië, auec vn long bec recourbé deuant , de longs piés, quand il eft nouuellementefclos,il eft noir , puis apres il deuient cendré, mais quand il commence à voler, il eft veftu d’vn beau blanc , & peu à peu il rougit , iufques à ce qu’auec l’aage il deuient de couleur pourpre , laquelle il retient toufiours par apres. Il niche aufti dans les maifons ; & vit de poiffon, de chair & autres viandes touf- iours trémpees dans l’eau: les Sauuages compofent de fes plumes leurs couronnes & 40 autres ornements, voila pourquoi ils l’ont en grande eftime: ils volent par bandes &: eftant expofés au Soleil,ils font voir quelque chofe de beau. Il y a plufieurs autres oi- feaux qui viuent en mer, cognus à ceux de l’Europe, & entre iceux de ces aigles que nous nommons marines. C H A P. XIV. De quelques ^oijjàns de riuiere , item des fervents autres animaux qui ^lAuenû en icelles ^ félon les mefines Autheurs. Le s riuieres du Brafil ( dit de Lery ) abondent en moyens & petits poiftbns , que les Sauuages nomment en leur langue Faramiri & Acaramirii car miri fignifie en leur idiome petit j de Lery & Fheuet efcriuent de deux de cette forte vn peu moftrueux. V n que les Sauuages nomment Famouata ou Tamoutiata^Gyai eft de la longueur d’vne palme, vn peu plus petit que nos harans , auec vne groffe refte plus que ne porteroit la groffeur de fon corps ; il a deux nageoires deffous les oreilles,ies dents plus aiguës que celle de noftre brochet} armé, comme Armadille, depuis la tefte iufques auboutde la queue ÎI2. DESCRIPTION DES INDES queue de fi dures efcailles, qu’à peine le peut-on percer d vn glaiue. La Chair cft efti- mee , & eft d’vn fort bon gouft. lis nomment Vikuttc P amp ma, d’vne moyenne longueur, dVne peau rude & iné- galé , comme eft celle dVn chien de mer, au re- fte du tout femblable au poiflbn que ceux de Marfeilie nomment Cagnole^ il a la tefte plate, difforme &c diuifèe comme en deux cornes , au bout defquelles apparoiflent ic^ yeux, de forte qu’ils font feparés l’vn de l’autre d’vn long efpa- ce. Theuet en a donné cette figure, laquelle dif- 1 o fere feulement de la queue de celle que Bellomus a exprimé dans fon Hiftoire des Aquatiques. Rondelit efcrit , qu’il a la queue diuifee en deux pinnes inégales , ce qui conuient mieux auec noftre figure. Aldrouanâus en donné deux pourtraids ,, mais ni l’vn ni l’autre ne s’accorde auec le noftre. Le Cururyuba fditcet Autheur Portugais) eft le plus long & beau ferpent de riuierc que cette région nourriffe , car il s’en trouue affés fouuent de vingt cinq & trente piés de long: H a vne chaine fur le dos qui court depuis le derrière de la tefte iufques au bout de la queue , tracee gentiment de diuerfes couleurs : il a des dents de chien que s’il peut attraper foit homme foit befte,il les deuore tous entiers. Ce que les Sauuages 2.0 en racontent eft du tout incroyable; qui eft que quand il s eft bien rempli le ventre, il pourrit le ventre en haut fur te.rre , de forte que les corbeaux & autres oifeaux en mangent entièrement la chair , laiffans le fcelete feul, & que puis apres la chair lui reuient de nouucau dé foi-mefme reprenant derechef fa forme, fa longueur & grof- feur, pource que la tefte dans laquelle eft l’efprit vital eft fi long temps cachee dans la boue, voila pourquoi les Sauuages qui fçauent cela, quand ils en trouuent le fcelete ou le corps pourriffanr, ils cherchent foigneufement la tefte , & l’ayant tirce hors de la boue la tuent : quand il eft faoul, ils dort fi profondément, que les Sauuages lui cou- pent fouuent vne partie de la queuë fans qu’il fe reueille. Le ferpent Manima , ne forriamais de l’eau , il eft par fois plus grand que le precc- j 0 dent , & eft fi élégamment bien peint , que les Sauuages fe ventent d’auoir tiré d’icelui la mode & la forme de fe peindre le corps : d’où vient qu’ils en font ordinairement tant d’eftime,que celuiàquiils’eft monftré conclud de là qu’il viura long temps. Il y a plufieurs Crocodilles , que les Sauuages nomment lacarcj quMbnt fi grands, qu’il s’en prend par fois de quinze piés de long. Ulguarucu eft vn animal amphibie , de la grandeur d’vn bœuf, ayant les dents lon- gues d’vn quart de pié, ennemi de l’homme il fe trouue ordinairement dans la riuiere de S. Francifeo & de Paragua^zWieuts fort rarement. VAtacafe eft aufti vn animal amphibie, plus petit qu’vn loup, mais plus furieux, il a couftume de fortir fur terre pour y attraper les hommes, & pource qu’il eft fort leger, 40 il les furmonte fort fouuent & les deuore. Les laguapopebas , font viperes du tout femblables à celles de Portugal. Le Zaz,iguemem,efiyn moyen animal, duquel la peau eft en grande eftime. Le Baepapim femble eftre vne efpece de Tritons, de la forme & grandeur d’vn en- fant , frequent dans les riuieres de ces régions, c’eft vn animal qui ne fait nul mal. Il s’y trouue aufti quantité de pourceaux de riuieres , nommés des Sauuages Capy- qpara, qui font bien de la grandeur des pourceaux, mais ils font vn peu differents de forme , ils ont vne aftTés grofle pierre fous le palais, qui leur fort au lieu de grolTe dent ; les Sauuages la pendent au lieu de carquant au col de leurs enfans ; ils n’ont point de queue : ils fortent fouuent hors del’eau & nourriflTent leurs cochons fur terre , car ils yo viuent d’herbe & de fruits qu’ils trouuent auprès du riuage. Il fe trouue en outre dans les riuieres des conches , que nous nommons palourdes, & les Sauuages 7^/4, quelques-vnes defquelles font aufti grandes que des cribles, feruent aux Sauuages à mefme vfage, elles font de couleur d’argent par dedans, & con- tiennent quelquesfois des perles. Or on y trouue aufti de ces oileaux que les Portugais nomment Cagadûsen grande quantité OCCIDENTALES. LIVRE XV. 515 quantité dans les riuieres , des œufs delquels les T npuies font extrêmement friands , & en viuent en certaines faifons de i’annee. Et n’y a faute de raines en fort grand nombre dans les riuieres, marais & eftangs; en- tre lelquelles il y en a qu’ils nomment Guararicos , dont les Sauuages ont fi grand hor- reur, que c’eft comme vne chofe incroyable, car à les ouïr feulement ils en font fief- pouuantés,quebien fouuentils en mcurent,fans vouloir receuoir aucune confolationj ils difent qu’elles donnent,en croiflànt, vne certaine fplendeur pareille à vne efclair. ' Et pour la fin il y a grande quantité de canes, que lesSauuages nomment FpeCiCommo. de Lery remarque , mais ils en mangentrarement& contre leur cœur, à caufe que ces I O oifeaux marchent lentement, qu’ils craignent fort d’acquérir par le manger d’iceux. C H A P* XV. ^AnitnauXy arbres herbes quelesPortugaü y ont les premiers portétdejquels ils font auiourd'hui'vngranâ profit: item ladiuifiondu Bràfil en fis Gouuernemenîs. IL y a maintenant vne grande abondance de cheuaux,&mefmes de fi bons, qu’oii en vend d’aucuns deux,voirc trois cents ducats, defquels ils en enuoyent vn grand nombre en Angola. Etcombien que les palhiragesn’y foyent pas beaucoup beaux, & que mefme dans le Gouuernement de Forto Seguro il y croifiTe vne certaine herbe, mortelle au beftail, toutesfois il s’en trouue partout en ces Prouinces de fort grands io troupeaux , de forte qu’il y a plufieurs Portugais qui pofledenteinq cents , voire mille pièces de taureaux & de vaches, notamment dans les campagnes de Firatininga ^ qui abondent le plus en pafturages,ils s’y font accreus d’vne eftrange forte : Les pourceaux & les truyes y font multipliés outre mufure , la chair defquels eft fi délicate & faine, qu’on l’ordonne mefme en la dicte des malades. Auprès de la baye de la riuiere de lennero paiffent force brebis & rnoutons, qui y de- uiennent parfois fi gras, que leurs entrailles fe creuent detropdegraiffe, mais la chair n’en eft pas fi bonne ni faine que de ceux de l’Europe. Il y a encore peu de cheures , toutesfois elles s’y augmentent de iour en iour. Les poules y font en nombre prefque infini , car le tempérament del aïr leur eft afles com- 3 O mode, &: les Sauuages aufîi bien que les Portugais leilftourriflent foigneufement, elles font plus grolTes que celles de rEurope,mais la chair n’en eft pas fi bonne. Les oyes y font beaucoup accrcuës , combien que cette contrée ait auflî les fiennes, plus groftes &: meilleures de beaucoup que celles de l’Europe. Or de tous les animaux eftrangers,il n’y en a point que les Sauuages eftiment plus que les chiens, qu’ils nour- riffent curieufemêt,les hommes pour la chafle & les femmes pour le plaifir,car elles les portent entre les bras comme leurs enfans , & fouuent mefmes leurs donnent à tefter leurs propres mamelles.il y a maintenant vne fi grande abondance de limons, citrons, & femblables frui(fts,qu’onenvoitdes bois enders,& lefruid n’en eft plus tant eftimé pourla trop grande quantité: toutesfois les fourmis,dontil y en a vn nombre infini, ap- 40 portent grand dommage à ces arbres.IIyaauffi plufieurs figuyers de diuerfes fortes. Dans le Gouuernement de S. Vincent 3 principalement dans les campagnes à^Fira- tiningaycomme aufti dans le Gouuernement de Rio lennerotcroiffent des arbres de coin en grande quantité, qui donnent quatre fois l’an des fruids meurs , par vne incroyable fertilité. Et n’y a pas fauté de vignes , notamment auprès de la baye de lennero & dans . Firitininga 3 c^ui portent en grande abondance prefque tous les ans ; dcfquelles ils ont eflayé d’en preffer du vin , mais auec peu de fuccés. Quoi plus ? prefque toutes fortes d’herbes deiardindel’Europe, fleurs, & racines, qui y ontefté tranfporteesy croiffenc fi bien qu’on diroit qu elles ÿ font naturelles. Enfin le fromét qu’on feme dans les cam- pagnes de Firatininga y croift d’vne telle forte, qu’on a par fois remarqué qu’vne feule jo racine iettefoixante& fouuent quatre vingts tuyaux, par vnefertilité dommageable; car pource que continuellement remontent de nouueaux tuyaux, ils ne peuuent faire la moilfon en fon temps,& d’autant qu’ils n’ont point de moulins , les Sauuages reiet- tent prefque du tout l’vfage du fromcnt.Ie crains d’auoir efté trop longen la deferiptiô des animaux, & des plantes de cette region,mais pource que c’eft vne fort belleProuin- ce, & que les deferiptions en font exaétes,nous efperons que les Ledeurs curieux nous exeuferont. Maintenant nous parlerons de la delcription particulière des Prouinces. ^ Ttt Les 514 DESCRIl^TION D.ES INDES Les guerres que les Portugais ontprefque toufiours eues, continues depuis plufieurs années auec les Sauuages de ces régions, ne leur ont pas permis de s’inftaier au dedans dupâïs , mais la plus grande partie de leurs Colonies, villes & fortereffes font placées auprès du riuage de la mer, affés loin l’vne de l’autre. Les Autheurs font differents au nombre des Goüuernements,que les Portugais nomment là Cafitâmas,c2.x K^mhoine Herrera Elpagnol,&f/(?François , n’en content feulement que neuf, combien quel’vn &l'autre,n’en fafleparnculierementmention,&n’endefcriuequehuid:mais Nicolas de Olmeyra Portugais, efcrit que le Roi d Efpagne, en qualité de Roi de Portu- gal,polfede dans l’ Amérique le qui commence dés duquel nous traite- rons au Liure fuiuant ) ou prefque dés la lignemefme5& finit fur les trente cinq degrés i o au Sud d’icelle : & qu’il contient lelong de la colle de la mer par vn grand circuit mille quarante &vne lieue. En outre que cette région foitqu on l’appelle Brafl ou de quel- que autre nom j eft diuifee en quatorze Capitamas, fçauoir Para , LPdaranhaon ^ Ciara, Rio Grande i Parayba, T imaraca, PernambucOy Seregipe , la Bahiajlheos, Spiritu fancto^ Porto Seguro,Rîo de Iennero,S£ S. Fimente:Sixé&(<\\ie\\cs appartiennent à des Seigneurs parti- culieKS.quilesqntacquifes pararmesjles autres huid fontauRoi. Enoutrcque l’in- terualle entre icelles eft diuers,car de la prerniere dite P-«r-« iufques à Maranhaon, qui eJftia feconde,il ditqu’ony conte c lx lieues : dcMaranhaon à Ciara c xxv : de Ciara à Rio Grande c : àcRio Grande à Parayba x l.v : de Parayba â T amaraca x x v : de Tamara- ta à Pernambuco vi : de Permmbmo à Seregipe J.'S.'X. : àcSeregipe à laBahia xxv : de/^ ao Bahia^Luyillheos'^'K'K : des//^m à Porto Seguro autant: àcPorto Seguro à Spiritu fanUo L X V : de Spiritu fancio à Rio de lennero l x x v : de Rio de lennero à S. Vincent e l x v . Def- quelles diftances il fera parlé dauantage en fon lieu. Enfin entre celles qui font fuiet- tes à des Seigneurs particuliers font ^ Tamaraca. Maintenant nous pour-, fiiiurons la defcription des Prouihces particulières commençant à S. Vincent. C H A P. XVI. Défiription du premier Goumrmment appeUé S. Yinccni, Le Gouuernement de S, Vincent eft le plus au Sud de tous & aboutiftant auec les j o Pfouinces de lariuiere de la Plata. Ileft fituéfurla hauteur de xxiv degrés, & a vers la mer & vers le dedans de la terre ferme des limites incertaines & qui ne font pas alfés expliquées. larricm en fon Trefor efcrit de ce Gouuernement en cette ' forte:Le Gouuernement de S. Vincent dans vne petite baye, fur xxiv degrés de la hauteur du Pôle du Sndfurla coftedelamer: efloigné de xl lieues vers le Sudde la ville dePi0 Iennero\\^^(iyi. oufeptieluitesquiy demeurent,lefquels veillent foigneufe- ment pour le falut,tant des Portugais que Brafiliens : ils fontdilpercés en diuers villa- ges autour de la ville , & tous les iours accourent vers eux de nouueaux Sauuages pour faire leur belbgne. Car ils vont fouuent dans la région qui eft au dedans du païs & prin- cipalement celle des Carios, lelquels font fur la colle de la mer, diftans de la ville de S. 40. Vincent YGïsÏQSxsà dehuiron lxxx lieues, &s’eftendent à peu près deux cents lieues au longde ladite colle, car ils attouchentla riuierec des plaines fpacieufes , qui font coupees par vne autre riuiere affés groffe , laquelle on nomme Pio de Sorobü,c{m ayant couru vn grand efpace de terre, &: s eftant précipité de plufieurs faults, enfin on croit qu’elle defeent en l’Océan entre Cabofiio &c Spiritu fanôfo. Or vers l’Occident de cette riuiere, il y a des fpacieufes Prouinces champe- ftres, mais qui ne font habitées de nuis ou de peu de Sauuages, au trauers defquelles 20 paffent plufieurs riuieres courans vers le Sud^bueft comme il eft à croire dans la grande riuiere delà Plata î elles font barrees du cofté du Nord-oueft de fpacieufes &: rudes montagnes, dans lefquelles le bruit eft qu’il y a des veines d’or & d’argent ca- chées ; & d’icelles fourdent quelques riuieres , principalement celle qui defeend en mer entre la Bahie & Pernambuco , qui fe nomme Rio S. Francifeo. Au deuantde l’emboucheure de la riuiere & du port à prefque vingt milles Angloi'fès d’interualle, eft fituee l’Ifle de S. Sabafikn-i longue Sç fpacieufe; ôL vn peu plus vers le Sud d’icelle il y en a vne plus petite, haute, nommee Alcatrajfe. Or entre rifle de S. Sebafiien & la terre ferme,il y a vne rade afTésaffeureejpour quelques grands que foyent les nauires,& fort bien garentie à l’encontre de l’incertitude des ventsjl’Ifle 3 O mefme ouure plufieurs bayes; où lat pefche eft fort bonne, & y a grande commodité pour y prendre de l’eau; aurefteelle eft prefque inaccefïible à caufe des bocages & halliers,qui empefehent ceux qui y abordent de cognoiftre ce qu’il y a au dedans; fbn principal port eft appellé Porto dos Cafiellams. Il fuffit feulement de nommer les peti- tes Ifles de , Au refte vis à vis de l’Ifle de S. Sebafiien habitent dans la terre ferme quelques Por- tugais dans vn petit village depeu de confequence. Antoine Kniuet Anglois, le nomme laq^uerequere : & proche delà il y a encore vn autre village nommé Pianita habité de Sauuages , qu’il nomme Pories. V oila ce que nous auions à dire du Gouuernement de de S. Vincent que noftre Autheur dit auoir, de la ville de Santos vers le Sud , cinquante 40 lieues, & vers le Nord, quinze ou vingt. Au mefme Gouuernement appartient aulîi la Colonie de Piratininga, à dix ou dou- ze lieues de 4 ville de S. Vincent y au dedans du pais & dans les campagnes, defquelles nous auous défia fait plufieurs fois mention : dans laquelle les lefuites ont eu leur refi- dence, comme ils parlent, quifutpillee&ruinee l’an cId Idc parles Sauuages, mais elle a efté fans doute reftauree du depuis. G H A P. XVIII. Gouuernement de la riuiere y dite 'vulgairement Rio îennero. 5 O TT E fécond Gouuernement du Brafil à pris fon nom de la riuiere de lanuier yàitc I vulgairement Rio de Iennero 3 pource que luan Diego de Solis y entra premiere- ment en ce mois ; lequel la met félon fà mefure fur la hauteur de vingt & deux degrés & vingt fcrupules vers le Pôle Antardic : mais les François qui ont annobli ce lieu d’vne Colonie appellent la baye & la riuiere Ganabara. Ils entreprirent le premier voyage vers ce lieu l’an cId Id lv fous le comman- dement de Villegagnon, auec deux nauires, & y arriuerent au mois de Nouembre. T 1 1 5 Le 5i8 description des INDES Le Goiiuerneur baftit vne fortereffe de bois, dans la propre emboucheure, qui eft large d’eniiirondemi-iieuëjbordee d’vn cofté & d’autre de fort hautes montagnes, fur vu rocher long decentpiés, & large de foixante, où il plaça fes canons pour defcendre i’entree. La riuiere eft au dedans large, & parfemee de plufieurs îfles agréablement verdes , dans l’vne deLquelles, qui n’eftoit pas fort loin du fufdit rocher, il defcendit fes gens auec les viduailles &: le refte de fes armes & munition de guerre, craignant, pour le petit nombre de fes gens & pour la grande quantité des Sauuages, de fe placer dans la terre ferme. Cette Me a fîx cents pas de long & cent de large , leparee prefque d’autant d’vn cofté & d’autre de la Continente , & deffoiirnie d’eau douce. La fécondé flotte où il y auoit plufieurs de la Religion réformée fde laquelle Fi/le- 1 o gagmn fe difoit eftre) partit de France au mois de Nouembre l’an cIo^Id l vi , fous la conduite du Sieur duPi?»/, &ayans eu vn ennuyeux paffage, ils arriuerent enfin au port le mois de Mars de l’an cIdÎdlvii. deferit au long cette féconde nauigation, comme fait André Theuet la première. Or Villegâgnon qui ne s’eftoit point encore manifefté pour vn trompeur, auoit nommé la forterefle qu’il auoit baftie fur cette roche, ie Collignii à l’honneur de l’Admiral de France. Or cette riuiere &fa baye eft mife par les François fur la hauteur de xxiii degrés du Pôle du Sud, & de Lery la deferit ainfi. le pafle outre (dit ilj ce que les autres ont eferit de cette baye, quant à. moi i’aflèure qu’elle eft large de vingt & quatre mille pas : en quelques lieux elle s’eflargit en forte, 2.0 qu’elle en a quatorze ou feize : Et combien que les montagnes qui la ceignent ne foyent pas fort hautes , comme celles que le lac de Geneue laue , toutesfois elle peut eftre comparée à icelui lac , à caufe de la vicinité des terres d’alentour. Son embou- cheure eft perilleufe , pource que quittant la mer, il faut coftoyer trois Mes defertes, où les nauiires font en grand hazard de fe rompre fur les rochers. Par apres il faut paf- fer le deftroit, qui n’a pas plus de trois cents pas de large, il y a à la main gauche vu rocher qui fe drefle fur vne montagne en forme de pyramide,qui n’eft pas feulement fort haut, mais auffi il femblc de loin auoirefté artificiellement taillé. Or à caufe de fa rondeur & qu’il eft fort femblable à vne tour , il fut nommé des François le Pût de beur- re. Vn peu plus au dedans de la baye mefme il y a vne roche alfés plate , ayant de tour 5 o enuiron exx pas, que nous appellafmes le laquelle ViUegagmn, lors qu’il y arriua premièrement, apres y auoir defehargé fes meubles & bagage , efperoit de pou- uoir fortifier , toutesfois il en fut chaflTé par l’eau. L’Ifle en outre que nous habitions, eft deux mille pas plus loin: elleeftoit deferte auant la venue de Villegâgnon'. elleade circuit enuiron mille pas , eftant fix fois plus longue que large, enuironnee de rochers, qui font à fleur d’eau à haute maree , voila pourquoi les nauires n’en peuuenr appro- cher à la portée du canon ; & ce lieu eft extrêmement fort de nature, de forte qu’on n’y peut aller qu auec des barquettes fi ce n’eft du cofté du portyqui eft à i’opofite de la mer. Qu.e fi elle eufteftéfoigneufementgardee, elle n’euft peu eftre prife, comme elle fut par les Portugais à noftre retour, par la faute de ceux quiy auoyent efté laiflTés. Il y 40 auoit vn petit coftau lequel commandoit d’vn cofté & d’autre , au fommet duquel Villegâgnon auoit bafti vne petite mailbn : & auoit placé fon auditoire fur vn rocher haut de cinquante ou foixante piés, fitué au milieu de Tlfle ; dans le refte d’icelle qui eftoitplat eftoyent baftieslesmaifons,où demeuroyent lxxx hommes ou enuiron y compris la famille de Villegâgnon, T out cela excepté l’auditoire eftoit bafti de pièces de bois charpentées, & y auoit des baftions enduites tellement quellement de mor- tier, les maifons eftoyent pluftoft logettes, bafties à la façon des Ameriquains , de bois en rond, & couuertes d’herbe &c. Outre la fortereffe à prefque dix mille pas, il y a vne fort belle & fertile Me, qui à caufe qu’elle auoit de tourdouzcmilîepas,futparnous nommée la grande Jjle. Et d’autant qu’elle eftoit habitée des Tottouginam baults nos alliés, nous y allions fouuent , pour en apporter de la farine, & autres chofesneceffai- rçs. Il y a en outre dans ce gofle de mer plufieurs Mes non habitées , autour defquelles fe trouuent de fort bonnes huiftres. La riuiere abonde en diuerfes fortes de poiflbns,fur tout en mullets, pourceaux de •. mer & autres moyens. Il y a auffi deux autres riuieres, qui entrent dans la baye,àl’ex- tremité d’icelle, laquelle eft de toutes parts enuironnee des terres. Voila ce qu’en dit . de Zery. ^ Telle ' OCCIDENTALES. LIVRE XV. yic> Telle elloit la condition de cette baye au temps que les François y eftoyent , qui en furent chafles des Portugais commandés ^zxEmanuel deSa, perdirent vne belle occafion d’y bien faire leurs affaires , demeurans priués de ces riches Prouinces : car comme Villegagnon vit qu on ne luienuoyoit nul fecours de France, & que les Portu- gais eftoyentprefts de l’affieger, il s’en retourna en France , laiffant fort peu de foldats dans fou Chafteau ; qui fe rendirent aux Portugais , & furent contre la foi donnée tués pour la plufpart, quelquès-vns fe fauuerent à la fuite , & demeurèrent cachés entre les Sauuages:ces chofes arriuerentl’an cIdId lviii. Or les P ortugais, apres en auoir chaffé les François, y bafliren t la ville de i’. Sebaflieny 10 aucofte du Sud de l’eftroite emboucheure, fur la hauteur de vingt & trois degrés & cinquante fcrupules de l’eleuation du Pôle du Sud, comme ceux de noftre pais ont remarque, a enuiron deux lieues de la mer, lur vne baye demi-ronde, laquelle elle oc- cupe prefque toute, en vn lieu plat, mais qui eft d’vn cofté & d’autre bordé de mon- tagnes qui vont doucement en montant j elle eft tellement eftenduë en long , qu’à peine la peut-on circuit en demie heure de temps:mais de large à peine a-elle dix ou douze maifons : L’an cl d Idc xviii les rues n’eftoyent point encore pauées; &ilny arioit point de portes,ni de murailles ou remparts autour : mais il y a quatre Chafteaux pour la defendre a 1 encontre des ineurfîons de l’ennemi, le premier defquels eft fitué au cofte Oriental de 1 emboucheure de la baye , fur le penchant d’vne fort haute ro- 20 che.; le fécond dans vne Ifle fepareeparvn petit d’eftroit delà terre ferme du cofté de l’Occident : cette Ifle du cofté qu’elle regarde le Sud-eft , fe dreffe en vne ronde roche faite en cône: le troifîeme eft aufîi fur vne roche au cofté de la ville qui regarde le Sud-eft au bord du riuage de la baye : le quatrième eft aiÉCofté de la ville qui regarde le Nord-oueft. Aureftelavilleeft comme diuifèe en trois parties; l’vne defquelles on peut nommer la haute, où eft la principale Eglife & le College des Peres de la Société ; 1 autre la bafïe dans la vallee, qu ils nomment Barrio de S. K^atonio y la troifîeme au. bord de la baye, depuis le Chafteau qui eft le plus au dedans de la terre, iufques au Qonxxentàe S.BenoiJî. Il y a quelques moulins a lucre qui appartiennentfà cette ville, toutesfois le princi- 5,0 pal commerce des Bourgeois eften cotton, bois de envié^uailles ,& autres cho- fes necelfaires à la vie, dont le lieu abonde. ^ Dans cette ville de la riuiere de lanuier ( dit larricus) le Roi de Portugal Sebajlien y fonda vn College de Ieftiites,commeaufîi les autres qui font âiiBraJ//. Il y a dans icelui cinquante lefuites le plus fouuent , fî on y comprend ceux qui demeurent dans les refi- dences qui en de/pendent. Ils y enfeignentia Théologie morale & la langue Latine iufques en la première claffe, & les petits enfans à lire & à eferire. Outre les feruices qui font rendus par les P ortugais, il y a deux grands villages de Brafiliens proche de la ville, dans lefquels demeurent deux mille hommes &plus, qui font commis au foing des lefuites, pource que par leur induftrie ils font venus à la foi,& ont efté baptizés. 40 Le mefme raconte, que l’an cId Id Lxxx,comme leGouuerneur delà ville eftoit abfent auec plufieurs de fes gens , cette ville fut en vain attaquée par trois nauires François montes d vn fort grand nombre de.gens j & elle n’a pas fenti iufques ici , de grande calamite, queiefçache. Le Cap froid / vulgairement appeijé Cabojrio) ap- partient a ce Gouuernement , auprès duquel fe trouuent de fort grands Crocodilles j & au dedans du pais de certains oifeaux, qu’ils nomment Mudas de lagroffcur des coqs d’inde , & vne grande quantité de fangliers. Or les montagnes font fi remplies de certains infeétes (qui femblent des punaifes ou des morpions) qu’à peine les hommes les peuuent- ils chaffer. L autre ville de ce Gouuernement eft appellee diftante de l’em- yo boucheure delà baye de lanuier enuiron douze ou treize lieues versl’Oueft ('comme Figuredo tefmoigne enfbn routier de mer) fituee dans la Continente vis à vis d’vne Ifle qu’ils nomment Grande ^ & d’vne autre plus petite dite Tpoia : il y a peu d’annees que cette Colonie y a eftémenee par les Portugais: Smous n’en auons appris autre chofe : fl ce n’eft que quelqu’vn de noftre pais m’a dit, que c’eft vne place de peu de confequence. Au refte les habitans naturels de ce Gouuernement ont efté autresfois Tououpinam baultSi Szo DESCRIPTION DES INDES hâults, comme de Lery & Theuet racontent, lefquels defcriuent au long leur naturel, mœurs & couftumes ; aufquels à caufe de briefueté ie renuoye les Ledeurs. Il femble que pour Ce iourd’hui ils foyent tous morts ou s’en font allés ailleurs, car ceux qui main- tenant habitent autour du Mârignan , Ce glorifient d ’eftre venus deux 5 & certe leurs mœurs & habitude de corps , mais fur tout leur langage, n’en font pas vne petite foi, comme nous dirons en paffant ci-apres en la defeription de i’ifle du MartgMn, & de fa Continente. Et ceux qui habitent auiourd’hui auprès de ce Gouuernement & dans icelui femblent eftre vn amas de diuerfes nations -, qui font pour la plus grande partie coûfederés des Portugais , & mefines leurs efclaues. C H A P. XIX. Troipeme gouuernement du 'BïÆ.^ que les T^ortugaà nomment yulgairemenî Spiritu fandio. Le troifieme Gouuernement du Brafd, eft appelle des Portugais Spiritu fmBo\ • il eft diftant de la ligne vers le Sud de vingt degrés; depuis la riuiere de lamtier versleNord,ilyafoixantelieuës;&: depuis Porto Seguro vers le Sud d’enuiron cinquante. Antoine Herrera dit qu’il n’y a feulement qu’vn moulin â fucre, mais qu’on y fait vn graûd commerce de cotton & de bois de .S>-^^4dequoi les Teinduriers fe fer- uent. La ville eft habitée de deux cents familles de Portugais ou vn peu plus: les Peres zo de la Société y ont aufîi vne maifon : à la main droite de la porte, quand on y entre , il y avn petit Chafteau quin’eft pas beaucoup fort: Il y en a qui diftnt que les Portugais y habitent deux villes, & font ie nombre des Bourgeois beaucoup plus grand. On eftime ceGouuernement eftre le plus fertile de toutes les Prouinces à\xBrafdytc fourni de routes chofes neceftàires à la yie de l’homme : il y a vne abondance incroya- ble de toutes fortes de poiflbn ? & vne fort belle chafte aux beftes fauuages , pour l’op- portunite des forefts & bocages, il y a auffi des riuicres qui coupentpar vne agréable difpofition Ces campagnes. Les naturels Saunages fe nomment Afargaiates , qui ont efte autresfois ennemis mortels des Portugais, mais maintenant iis font leurs amis & confédérés 5 de Lery 5 0 deferit auftiau long les mœurs & couftumes d’iceux, mais pource qu’ils ne different pas beaucoup des autres Saunages en vie & en mœurs, on en pourra iuger par ce que nous en auons dit ci-deflus en commun. Les Prouinces, qui font entre ce Gouuernement & la riuipre de Unuier^ font cou- pées de la noble & poiflbnneufe riuiere, qu’ils nomment Farayba ou Pareybd, laquelle fort enmerfurlahauteur de vingt &vn degré au Sud delà ligne faufquels ily en aqui adiouftent quarante fcrupules.faute aifee à commettre félon la diligence ou négligen- ce de ceux qui prennent les hauteurs) les pèuplesqui habitent auprès d’icelle font ap- pelles de quelques-vns Paraybes ^ qui ne font pas beaucoup differents des autres Sau- uages. le donnerai cet aduertiffement en paffant, qu’il y a trois riuieres dans cette 40 cofte, nommées du 130m de Parayba-, la première de/quelles entre dans la mer entre la ï\\i\ex.e âe la Plata & le Gouuernement de i*. de laquelle nous auons parlé ci- deffus : la féconde eft celle dont nous traiétons à prefent,que ceux qui ontla cognoif- fance de ces régions difent fourdre fort loin de la mer au dedans du pais, & apres s’eftre grofliedeplufieiirs autres petites riuieres fe mefle dans la mer en cet endroit: la troi- fieme eft prefque au bout Septentrional du Brajd , de laquelle nous parlerons ci- apres. Or le port delà ville, félon que ceux denoftre nation ont remarqué, eft difpofé en cette façon: Il eft dans vne petite baye, qui entre dans la Continente, ouuerre vers l’Orient, où il y a quelques Iflettes parfemees; or du coftédu Nord-eft il y ades baftés Jo & rochers dangereux pour les nauires : Ceux qui veulent entrer dans le port remar- quent premièrement vne fort haute montagne, en forme de cloche, que les Portu- gais nomment vers laquelle ils dreffent leurs cours, elle eft au dedans du pais â enuiroii deux îieüës du riuage dclamer; puis apres coftoyant le riuagede plus prés, on voit vne tour blanche fituee fur vne montagne fort droite affés près de la mer , les Portugais la nomment Nuejîra Sennora de Penna , car c’eft vne petite Eglife ceinde -£ OCCIDENTALES. LIVRE XV. 521 tout autour dVne muraille ; au dcflbus de laquelle il y a eu autresfois vne bourgade, dont il refte encore quelques maifons, & on l’appelle auiourd’hui VilU Veya , vn peu auant que d’en approcher, il faut pafl'erl’eftroite emboucheure du port, qu’vn banc, qui defcendd vne petite Ifle longue, fituee vers le Nord, eftroicit encore dauantagej eftant palfé cette emboucheure la nauigation eft plus libre & moins dangereufe. Or en entrant plus auant on voit à la main droite vne roche laquelle feleue dés la terre en façon d’vn cône obtus; pais à la gauche fe voit vne haute montagne qui fedrelTe fur le riuage mefme,que lesPortugais nomment le Pamdefucre,i^o\ïTcc que là forme eft telle; vis à vis au cofté droit du port,fe voit vn petit Chafteau quatre , de peu de confe- I O qucnce: &: ainli on vient à la parfin à la ville mefme,qui eft baftie à cofté droit du port, fur le riuage meline, à enuiron trois lieues de la pleine mer; laquelle n’eft ceinde ni de murailles ni de remparts ; au cofté de l’Orient d’icelle il y avnMonaftereaucc fon Eglife, qu’ils nomment 5’. enuiron le milieu de la ville , & melme au delTus d’icelle fe voit l’Eglilè de S. François, enfin au bout vers l’Occident eft la maifon des lefuites auec leur Temple. larricm au refte eferit de ce Gouuernement en cette maniéré ; La quatrième re- fidencc des lefuites eft dans la ville de Spiritn fanlfô,<\\xi eft fituee fur le vingtième degré de la latitude Auftrale, au bord de la mer, de forte quelle eft plus près de la ligne, que la ville delà riuiere de lanuier , de laquelle elle eft efloignee de fep- 20 tante lieues. Il y a le plus fouuent fept ou huiét lefuites qui y demeurent , quel- quesfois dauantage , qui ont en charge fix villages de Brafiliens fitués à 1 enuiron, dans lefquels on conte dix mille Chreftiens . Or il y a vn village fort près delà TiovamQ dos Reyes Magos , où demeurent plufieurs Chriftianifés. Enfin les Sauuagcs dits Tapftias & t^piapetangas font leurs voifins , nations farouches & indomptés, ennemis mortels des Portugais & de leurs alliés, aufquels ils font fouuent de grands outrages. C H A P. XX. 1 JO ^atrieme ÇouHernement du Brafil, qui eB a^fel/é des Portugais Porto Seguro. Le quatrième Gouuernement du Srajil retient encore auiourd’hui le nom de Porto Seguro-, que Aluaro Cabrai lui donna anciennement, lors qu’il lui mena (à flotte fort affligée , & fut le premier des Portugais qui aborda en ces terres, comme nous auons dit ci-deftTus. Or il eft diftant de trente lieues vers le Sud du Gouuernement des ijles , comme ils le nomment ;& à cinquante de celui de Spiritu fanSio vers le Nord: fiir la hau- teur de feize degrés &: trente fcrupules de la ligne vers le Sud; comme i’aitrouué 40 qu’il a efté ordinairement marqué dans les routiers de mer. Antoine Herrera donne à ce Gouuernement trois villettes , dont l’vnc porte le nom de S. Amaro, l’autre de S. Crux, &c la troifieme garde le nom & la renommee de Por^ on dit que cette derniere eft habitée non plus que de cent cinquante fa- milles de Portugais : combien qu’il y en ait qui faflfent le nombre plus grand ; car ils ont cinq ou fix moulins à fucre. Or la ville que nous auons dit qui garde le nom de Porto Seguro,c^ baftie furie fom- metd’vne roche blanche, auprès de laquelle on voit la terre fort haute, montant vers le Nord; de l’autre cofté la terre s’applanit, & enfin fe finit envn bas & fablonneux riuage. 50 L’autre ville de S. Crux eft diftante de la première d’enuiron trois lieues, elle a vn moyen port, qui n'eft propre que pour de petits nauires. On dit que ce Gouuernement appartient au Duc d'Aluero ; or les Portugais qui y demeurent, nauigent fort le longde lacofte,& tranfportent aux autres Gouuerne- ments àoBrafd toutes fortes de viurcs,dontce Gouuernement abonde extraordinai- rement, ce qui eft leur principal profit. Affés près de ce riuage , les rochers & bancs nommés vulgairement Ahrolhos , fi Vu U renommés 5x1 DESCRIPTION DES INDES renommés & remarqués parles dangers & naufrages de tant de perfonnes.s’cftendent en pleine mer par vne fort longue fuite & qui n ’eft pas encore affés cogniië, defquels auoyent de couftume de s’efloigner le plus qu’ils pouuoyent les mariniers, principale^ ment ceuxquialloyent aux Indes Orientales, fanseftreaffeurés bien que fort loin d’i- ceux : combien qu’èsannees precedentes on y ait trouué plufieiirs canaux, où les na-^ iiirespeuuentpairer,mais non fans danger & grande preuoyance. Caron a defcou- uert,que la mer eft affés profonde,non feulement auprès de la colle de la Continente, mais on a auffi pafle par le milieu des rochers, à fîx ou fept lieues de la terre ferme, où il y a quatre petites ifles.que les Portugais nomment, de Piedras, llha. Secayllhà dos Pajferos & llha de Meo ; deux defquelles font plus en dehors, à fcauoir llha Seca & ï o Monte de Pîedras,^\x codé Occidental d’icelles il y a vncanalnauigableouuert: Et on peur cofloyer fans danger les deux quifoiit plus en dedans, fçauoir llha dos Pajferos & de CMeo,i2XiX. d’vn codé que d’autre,fi on y prend garde de près. Ces rochers font pref- ' que à fleur d’eau, ou iegerement couuerts à haute maree j mais quand la mer s’eft reti- rée ils leuéne de hauts fommets , & lors ils font moins à craindre , pource que les flots quibrifent à l’encontre, aduertilfent affés à temps du danger ceux qui s’en appro- chent de près , & hors d’iceux la mer eft affés profonde. En outre ceux de noftre nation qui ont voyagé és années precedentes vers ces quar- tiers, & fontdefcenducn cette partie de la Continente, qui eft entre le Gouuerne- ment de Spiritufanclo-,i>c celui dont noiis parlerons maintenant, difent qu’ils n’y virent zo nuis Sauuages, mais des deferts fpacieux &des forefts prefque impénétrables, auec force riuicrespoifibnneufes fur toutes. Enfin larrkm en fon Trefor eferit de ce Gouuernement en cette forte. La ville eft à cinquante lieues de la Bahie( qu’on nomme àctodoslos Sancfos ; vers le Sud, & à vingt de IlheosSituce. fur la colle de laimer. Il y a aufli vne maifonde le fuites, dans la- quelle fixdentfeux demeurent au plus. Les enfans y font enfeignés à lire & àefcrire: àrenuironilyaonze villages de Sauuages, quelcsiefuites fréquentent pour y femer la parolle de Dieu. Le mefme tefmoigne que la ville de Porta Seguro a és années pre- cedentes cfprouué fur toutes l’effort & la violence des Sauuages nommés Guaymures -; ( defquels nous auons aufli parlé ci-deffus ) car, dit-il, ils l’ont tellement ruinée qu’à 5 o peine y fçauroit-on trouuer auiourd’hui vingt; jiabitans, qui pour eftre tous les iours fatigués par les incurfîons de ces Sauuages, fe peuuent à peine nourrir , de forte qu’ils font fouuent contraints, faute deodures à caufe que leurs champs demeurent en fri- che, de fe fubftanter d’herbes & de racines. Et les Portugais ont efté forcés d’aban- donner la ville de S. Amaro, enfèmble dix moulins à fucrc, defquels ils faifbyentvn grand profit,-craignans qu’à la fin ils ne fuffent mangés des Sauuages qui auoyent défia deuoré tous leurs efclaues&ouuriers dorheftiques. ' C H A' P.. XXL 40 ■ ■ i.i i Cinquième Gomernement du3^SLÇi\que les f ortugaù nomment 'ztulgairemene îlhcos. E cinquième Gouuernement du Brafijed nommé des Portugais dos llheosAes. I Iflesquifontaudeuantdela baye,fur laquelle eft baflie la principale ville de ce Gouiieïnement : elle eft diftante de trente lieues vers le Nord-eft de Porto Segtt- ro.&e à prefque autant de la baye de tom les SamSts^ vers le Sud : & de la ligne ( comme z^imc Herrera ) quinze degrés & quarante fcrupules, ou comme les Chartes marines la mettent,quarante cinq fcrupules,qui eft vne petite différence. ^ rr.Cette ^Colonie ,eft d’enuiron deux cenps familles de Portugais ; il y a vne'moy- 50 enne riuiere qui paffe au long de la ville, elle a huift moulins à fucre. H y en a d’au- tres qui afleuréiit quçc’eftvne fort petite ville, & qu’elle n’a pas plus de cinquante mairons,& feulement. trois de tels moulinsique les habitans s’exercent principa- lement à la culture des .champs , & tranfportent dans les barques leurs fruids à Pernamhuco & autres Gouuernements voifîns.îils ont pour Seigneur Lucas Girard Portugais. . ' i - , . A fept OCCIDENTALES. LIVRE XV. 52^ A fcpt lieues de cette ville au dedans du pais, il y a vn lac d’eau douce j long d’enui- ron trois lieues, & autant de large , profond de plus de quinze bralTes , duquel fort vne riuiere.mais par vne emboucheure fi eftroite , qu’à peine les petits bateaux y peuuent pafier,&celac, quandil faitgrand vent, s’efleued’vnc telle forte qüeles ondes y font aulfi grofl'es qu’en pleine mer, il elbfort poifibnneux, & nourrit diuerfes fortes de bon poifl'on , fur tout des qui y font fi grands &gros,qu’on dit qu’ils pefent xl Arobes(cdï vn poids d’Efpagfie,quifaitdu moins vingt huiddes liures denoftre pais) qui eft vn grand poids & prefqueincroyablefil y a aulfi des crocodilles & de ces grands poifi'ons que les Efpagnols nomment Tuherones i & d’autres en abondance. 10 11 fe trouue aulfi dans ce Gouuernement des arbres, qu’eftans Icgerement entamés dillillent vn baulme de fort bonne fenteur,& d’vne vertu finguliere. Ot K^ntoine Herrera. eferit, qu’en vn quartier proche de ce Gouuernement, il eft nouuellement venu des Sauuages , chalTés de leur contrée par leurs ennemis , qui font de grande ftature comme des Geans,plus blancs que les autres Sauuages j nation va- gante & qui n’a nulle maifon.mais couchent ci & là fur terre à la façon des belles dans les forefts & campagnes : leurs arcs font roides & leurs fléchés fort longijes , auec quoi ils font beaucoup de meurtre , non feulement des naturels du pais , mais aulfi des Por- tugais : ce font cruels mangeurs d’hommesrils n’attaquent pas par troupes,ni en guer- re ouuerte,mais feparés & par embufehes: ils furprennent ceux qui ne s’en donnent pas 1 0 garde , voila pourquoi on les peut difficilement efuiter,& on ne les peut trouuer qu’a- uec grand danger. Mais oyons maintenant :Los Ilheos ( àitÀl ) eft vn Gouuernement des Por- tugais,diftant de U Baht avers midy de trente lieues, la ville eft fituee au bord de la mer : il y a vne maifon delefuites,qui a efté fondée des aumofnesdes gens de bien, ou de- meurent d’ordinaire fix ou fept dentr’eux : outre leur exercice ordinaire , ils tiennent Efcole ouuerte,dans laquelle ils enfeignent la icunefle àlire & à eferire. Proche de ce Gouuernement habitent les Aymures ou Guaymures: qu’on dit eftre les plus cruels Sau- uages de tout le Brafihczx ils mangent,comme l’on raconte, leurs propres enfans mem- bre apres membre, & ouurant le ventre des femmes grofl'es, ils en tirent le fruiélhors, 3 O qu’ils deuorent aulfi toft.Ils chaffent les hommes comme nous chafTons les belles ûu- uages,& les ayans pris & tués les deuorent cruellement. La ville du Gouuernement Jlheos baftie dans vn fort bon terroir, a efté prefque du tout deftruite par eux -, mefmes les champs fort fertiles & propres à porter des grains font abandonnés , pource qu'il n’a demeuré perfonne pour les cultiuer,à caulè de la peur qu’on a de ces Aymures.yizis onaapprisparlcttresdel’an clolo Lxxxi,queceuxdc ce Gouuernement, pource qu’ils auoyentreceude Rome fix ans auparauant, duR.P. le General de la Société, quelques reliques de S. Georges,ils auoyent vaincu en plufieurs combats ces Aymures, deftruéleurs de leur Colonie: de forte que du depuis il ne fe perdoit plus de Portugais, & fort peu de Iefuites,ce qu’ils ont attribué aux mérités &: fuffrages du glorieux cham- 40 pion de S. Georges. C H A P. XXIL Sixième Gouuernement du Brafil, la Bahie ou U baye de tous les Sain6ts j defiriftion exaSîe diceüe baye , la mémorable entre^rijè de Pierre Heyn de noflre nation. Le fixieme Gouuernement du Brafd eft la Bahïa de todos los SanBos^ c’eft à dire, la baye de tous les Sainâ:s,diftantde ceixxidos llheos de trente lieues versieNord,& à Cent de la ville de Pernambuco vers le Sud: fur la hauteur de treize degrésau 5 ^ Sud de la ligne. Il a pris fon nom d’vne fort grande baye, que la mer fait au dedans des terres; large d’enuiron deux lieues & demie, profonde de douze brafres,& en quelques endroits de dix huiél,remplie d’Ifles grandes & petites,fort belles & fertiles en cotton. Or cette baye eft comme diuifee en plufieurs reculs & canaux, & entre dans la Conti- nente plus de quatorze lieues ,au grand profité non moindre commodité des habi- tans d’alentour.Il y a trois moyennes riuieres ( fans parler des petites )qui y defeendent du dedans du pais, la première defquelles & la plus proche delà ville principale fe Vu U a • nomme 5^4 DESCRIPTION DES INDES nomme Pitange , celle qui 1 auoifîne s'appelle Gerefipe , &: la troifieme Gachoeira. L’Ifle qui eft la plus au dehors & qui eft aulTi la plus grande eft dite TapericaMs petites quiTont plus en dedans ont auffi chacune leurs noms des Portugais, commeil fera dit bien toft. Car il eft bien neceflaire de defcrire cette noble baye fur toutes vn peu plus exadement, félon que ceux de noftre nation l’ont remarquée & tracee. Cette baye donc eft ouuerte au Sud & s’enfonce vers le Nord , ayant à la main droite quand on y entre la Continente du Brafd, à la gauche la longue Ifle de T aperka -, entre les deux elle eft premièrement large de plus de trois lieuës; &: en cet endroit il y a à la main gauche vne pointe de terre obtufe, auprès de laquelle eft fituee la forterefte de S. Antoine & Vilh Veya, comme ils les nomment, fur vn petit recul qui eft barré vers le Nord d’vn ro Cap, dés lequel la cofte fe courbe vers l’Eft , faifant vn recul demi-circulaire, fur le- quel la ville de S. Salmdor eft fttuee, de laquelle nous allons parler; ce recul fe finit par vne pointe de terre comme vne langue , laquelle-s’anance en cet endroit en angle aigu au dedans de la baye, où fe voit le Chafteâu de Tapagipe^bL làile paflage iufques à l’ille de Tâperka eft le plus eftroit,toutesfois il n’eft pas moins large que de deux lieuës ; de cet angle aigu la cofte fe tourne derechef vers FEft , U la baye s’eflargiffant entre dans la Continente faifant vn certain golfe Méditerranée, qui apres s’eftre prefle en vne emboucheure afles eftroite s ’eflargit au dedans comme en deux bras; dés cette em- boucheure la cofte court derechef vers leNord iufques à l’entree de la riuiere Pitanga^ l’emboucheure de laquelle cftant eftroite fe dilate peu à peu vers le Leuant , receuant ao plufieurs petites riuieres , au bord defquelles , comme aulTi fur la principale , il y à plu- fieurs moulins à fucre; ayant pafle l’emboucheure de cette riuiere la cofté continue derechef vers le Nord prefque vne lieue, & lors elle fe recourbe comme vn coude vers rOueft, faifant dans ce pli vn recul demi-circulaire, au dedans duquel il y a vne petite Ifte cultiuee : la cofte continue puis apres droit à l’Oueft enuiron deux lieuës, iufques à vne pointe de terre obtufe; or en l’efpace dentre-deuxgift vne Me, qu’ils nomment, de longue d’enuiron vne lieue, & qui efteftenduë en long au deuant del’em- boucheure dê là riuiere f />4«iy4,laiflànt entre deux vn deftroit large de demi-lieuë : en cet endroit fort de la terre ferme vne certaine petite riuiere , prelque vis à vis de la pointe du Nord de cètte Me de Mare, Or au deuant de la derniere pointe de cette 5 o cofte, où elle tire vers l’Oueft, iiy a vne autre Me triangulaire, qui a fa baffe tournée vers la terre ferme, qui ie trouue eftreappellee des noftres l'Ifle des Moines. De cette pointe la cofte retourne derechef vers le Nord, ayant vis à vis ou droit à l’Oucft l’em- bouCheure de la riuiere de Cachoera , qui en eft à deux lieuës ou plus. En outre cette cofte; qui dés cet angle obtus court du Sud au Nord , eft coupee de deux petites riuie- res, & eft bordee de quatre petites Mes feparees de la Continente par vn petit de- ftrok, la première defquelles qui eft proche de la pointe mefme eft appellee Burape- bâra j l’autre qui l’auoifine Porto Madero , ie ne fçai pas le nom des autres : or de la der- niere, qui eft longue & au deuant de la bouche d’vne petite riuiere , la cofte de la terre ferme retourne comme vn coude vers l’Oueft, & au deuant de la pointe quelle fa(it4o il y a vne petite Me, qu’ils nomment de Fontes \ la cofte court puis apres vers le Nord, &peud’elpace delà regorge dans la baye vne petite riuiere, qu’on nomme RioTam- baria ; & apres plufieurs tours & deftours, elle va fe rendre à l’emboucheure de la riuie- re de Gerefipe ou au plus profond de la grand baye; Cette riuiere defeend de deuers le Nord , receuant plufieurs autres petites à droit & à gauche , & au deuant de fon em- boucheure il y a deux petites Mes / car la troifieme eft comme au dedans de l’embou- cheure mefme & la diuife en deux canaux ) celle qui eft plus proche d’icelle embou- cheure eft nommee l’Me Pyem , & l’autre Caraibe: mais auant que paffer outre ie ne puis m’empefeher de raconter en paflant l’aéfe mémorable de Pierrez, Pierre Heyn, homme digne d’vne immortelle mémoire, lequel aduint comme s’enfuit. y® Pierre Pierrez Admirai, fous les aulpices de Meflieurs les Eftats Generaux des Prouinces-vnies, de la Compagnie des Indes Occidentales, eftantentré dans la baye de tom 'ks SanEts, l’an clo Inc xxvn au mois de Mars il trouua deuant la ville de S. Salmdor , prefque fous les Chafteaux mefmes , qui commandent de tous coftés au port , vingt fix nauires de l’ennemi , quatre delquels eftoyent fournis de force canon, & montés de grande quantité de foldats outre les matelots , lefquels eftoyent au * deuant / OCCIDENTALES. LIVRE XV. jtj dciiant des autres vingt &: deux, comme pour leur feruir de rempart. Le Gouuerncur de la s 'xWq Diego Olyuerio 2i\xoit outre cela placé en diuers endroits plus de quarante pièces de canon, afin de garder cette flotte de l’aflaut des noitres. Toutesfois noftre homme fans craindre rien de ces chofes , combien que le vent qui venoit de la terre, lui fuft contraire s’approcha fi près en coftoyant, qu’il fe plaça auec fon nauire feul (car Tes autres nauires ne lepeurent fuiure ni approcher plus près) au milieu entre r Admirai & le Vice- Admirai de la flotte de l’ennemi, où il moüilla l’anchre ; là il y eut vn rude combat & grandement defauantageux, car il n’efloitpas feulement canonné des nauires ennemis,mais auflî desChafl:eaux,ôc des autres pièces placées furleriuage I O de tous coftés, comme aufli des moufquetaires qui tiroyent fort & ferme de toutes parts fur fes foldats ; neantmoins le bon heur de ce vaillant homme vainquit , & il eut vn tel fucces , que le Vice-Admiral des ennemis , apres vne demi-heure de combat, eftant brifé de plufieurs coups, s’en alla à fond , & tous fes gens , quatre ou cinq exceptés , y demeurèrent: & les autres nauires le rendirent la vie fauue; cepen- dant arriuerent de nos autres nauires plufieurs chaloupes,pIeines de foldats & ma- telots , qui d’vn grand courage, emmenerentà la veuë de l’ennemi , tous les na- uires d’icelui , trois petits feulement exceptés , lefijuels eftoyent vuides. Noftre Admirai eflayant aufli de retirer le fien delà.pource que la maree baiffoit , il tou- cha le fond fans qu’il le peuft defengager , eftant tellement brifé de coups de canon> lo qu’il eftoit tout creué ; voila pourquoi apres qu’il en eutcaflTé le canon, il le laifTay met- tant fe feu. Le lendemain il vifita toutes fes prifès, & chargea quatre d’icelles, qui fem- bloyenteftre les plus grands &cômodes,delà charge des autres &lcsenuoya auxPays- bas ; en retint quatre pour feruir en fa flotte ; & brufla les autres qui lui eftoyent inuti- les. Or apres qu’il eut feiourné vingt quatre iours dans la baye, il fit voile vers la riuiere àeIennero,CaboJrio,S>L\e Gouuerncmentdei^fma! fanBOiOns’eftznt fourni d’eau &:de bois à fon plaifir, & pris en chemin vn nauire chargé de fucre,il retourna le dixième du mois de luin auec quatre grands nauires & autant de petits pour la fécondé fois dans cette baye, où n’ayant trouué que huiét nauires vuides , anchrés proche du riuage au deflfous de la ville,ne voyant pas de raifon d’hafarder les fiens pour eux, il moüilla i’an- 3 O chre auec fa. flotte derrière la pointe de TapeJipeSi où il pritiàns peine deux nauires qui y eftoyent moüillés,Ieiquels apres en auoir pris cç qui lui eftoit vtile,ii brufla fur le lieu. Cependant qu’il fèiournc en ce lieu, il apprend de quelques Portugais priibnniers, qu’il y auoit quatre nauires chargés de fucrc, qui s’eftoyent cachés dans vne certaine proche riuierc,laquelle toutesfois ils ne fçauoyent pas, voila pourquoi ayant reiblu de les chercher,!! s’en alla auec toute fa flotte vers l’Ifle de Mare , & auec deux barques & plufieurs chaloupes, il entreprit de monter la riuiere, qui defeend de la Continente vis à vis du cofté Septentrional de cette Ifle, & eftant entré trois ou quatre lieues dans icelle,il vit deux nauires.lefqueîs s’eftoyent cachés dans vn canal eftroit , entre des ar- bres qui y penchoyentd vn cofté & d’autre; par ainfi il s’y en alla auec de grandes cha- 40 loupes, car la riuiere ncpouuoit plus porter de barques : l’vn d’iceux apperceuantles noftres s’enfuit a mont de la riuiere,mais il prit l’autre tout aufli toft : & entrât à l’heure mefme plus auant.il vit aufli les autres de loin : mais pource qu’il eftoit tard,& qu’il ne cognoifloit pas bien ni les lieux ni les forces de l’ennemi, il fe déporta d’aller à eux pour ce foir,& fe retira à la flotte qui eftoit fous l’Ifle. Mais le lendemain enuiron le midy, il entra dans la riuiere auec fès chaloupes, & ayant efté falüé de quelques moufquerades fans dommage, par quelques Portugais, qui eftoyent cachés dans vnemaifbnfur le ri-^ uage,il tira vers les nauires de l’ennemi, que les mariniers tafehoyent à force de rames de mener plus haut dans la riuiere, la maree qui venoit fauorifànt leur deflein , mais ce fuft en vain : car apres vn dur combat , les noftres les prindrent tous i’vn apres l’autre, y O auec neuf cents coffres de fucre,force tabac & autres marchandifes. Le principal foin fuft d’emmener les nauires pris auec leu rs charges, enquoi ils auacerent fort peu ce foir là,pource que les nauires à baffe maree touchoyent le fondiau comencementils eurent plus affaire aueeles baffes & banGs,qu’auecles ennemis,carau fortdeladefcente de la maree ils eftoyent bouchés defable,quiempefchoitqueles vaiffeaux tant vaincus que vainqueurs ne peufrentdefcêdre;& pour quelque induftrie quel’Admiraly apportaft, ils ne pouuoyent emmener les nauires pris auec leurs charges ; le lendemain ils furent Vuu 3 en plus 52^ DESCRIPTION DES INDÉS en plus grand danger, car cependat qu’ils eftoyent occupés au haut de la riuiere,les en- nemis en boucherentl’entree y enfonçant vne barque,* & afin que nos gens peuflent iè defendre plus aifement, FAdmiral excogita de munir &couurir fa barque & fes cha- loupes de peaux de bœufs ( qu’ils auoyent prifes en quantité fur l’ennemi dans cette riuiere;du coftéqu’eftoit l’ennemi. Le Gouuerncur & pluficurs Officiers Portugais, auoyent fait à la hafte vn retrenchement â l’emboucheure delà riuiere, & y auoyent ameilé toutes leurs forces, fe tenans comme affeurésjde prendre & tuer nos gens prefi- que fans peine : mais noftre Admirai fit tant par fon induftrie & vaillante, qu’il retira non feulement les Tiens delà faufs, mais auffi emmena à fa flotte lesnaujres qu’il auoit pris fur les ennemis auec vn bon butin ; il demeura puis apres dans cette baye à la veuë i o de la ville iufques au quatorzième de Iiiillet,* & mettant les voiles au vent, il arriua en Hollande le'vingt cinquième du mois d’Odobre. Mais retournons maintenant à la defeription de la baye[: de la riuiere Gerejipe» la cofte tourne comme vn coude vers le Sud,& là premièrement elle a vne riuiere qui enferme dans fon emboucheure vne Ifle, & quelques petites Ifles qui la bordent ^ puis fuiuant le mefme cours prefque trois lieues , elle fe rend à l’emboucheure de la riuiere de CâchoerA,Q^\ fortant dans la baye par vne large emboucheure, a au dedans vn large fein comme vn golfe, dans lequel il y a quelques Mes elparfes; Or au bord d’icelle il y a plufieurs moulins à fucre , car elle fe diuifè en plufieurs recoins , qui reçoiuent chacun quelques petites riuieresivis à vis de fon emboucheure efl: fituee i’Ifle de Meue-. enfin la cofte continué toufiours vers le Sud , crenelee de diuerles bayes, & coupce de plufieurs petites riuieres , ayant vers l’Eft cette longue Me de T iperice , de laquelle elle eft fcparee par vn deftroit allés large; & ainfi nous auons fait le tour de cette re- nommée baye de tom les S^in^fs, Maintenant nous parleroris de la ville. C H A P. XXÎÎL Dejeription de la yiUe de S. Saluador ^ des lieux autour d'icelle : item de Seregipe, La principale ville de ce Gouuernement eft nommee S. Saluador i fituee au cofté 5 o du Nord-eft de cette baye, auprès d'vne ance demi-circulaire, fur vn coftau moyennement haut, elle a efté baftie depuis quelques années fcar auparauant elle cftoit en vne autre place, quigarde encore auiourd’hui le nom de vieille ville , vul- gairement Villa Veya, près du Chafteau de S.K^ntoine) par Thomas de Sou/k ; ceinde de murailles , & ornee de temples & autres beaux édifices. On y a bafti en outre quelques Chafteaux pour la feureté de la ville & de fon port; l’vn defquels & qui commande l’emboucheure de cette baye s’appelle le Chafteau de S. Antoine', l’autre qui eft fous la ville mefme de S. Philippe : & le troifieme qui eft le plus grand & le plus fort au deflTus de la ville dans le retour d’vn certain Cap nommé T ipejipe. L’autre ville de ce Gouuernement s’appelle Paripe, diftante de celle de S. Saluador 40 de quatre lieues , elle eft au dedans du païs. 11 n’y a nul Gouuernement en tout le Brajil qui foit plus peuplé & plus riche que ceftui-ci : car il a enuiron quarante moulins à fucre, efpars au long & au large dans les Mes, ances , au bord des riuieres qui fbrtent dans la baye , & tout autour d’icelle. Il y croift du cotton en grande abondance ; & s’il eft permis de conter les chofes qui ar- riuent par hafard , on y trouue fort fouuent de l’ambre gris, comme on l’appelle com- munément : làns parler des grofles balaines , qui y abordent bien fouucnt & font laifi fees à fec fur le riuagede l’Me de Taparicay au grand profit des habitans. Or les Peres de la Société ont en la ville de S. Saluador feomme tefmoigne larricm) vn College fur tous magnifique, dans lequel ily a fix Regcnts;lepremierdefquelsenfeigneIaTheo- 50 logic Scholaftique, l’autre la Morale ; le troifieme lift le cours de la Philofbphie 5 deux ~ enfeignent la langue Latine, & îç dernier inftruid les enfans à lire & à eferire. A ce College font donnés en charge trois villages de Brajiliens, fitués proche de la ville. Or les Pères tefinoignent en leurs lettres anniueriàires, qu’il y a en ce College & lieux voifinsLxxx lefuites, àl’induftrie defquels ils eftimenteftredeuraccroiflTement de ce Gouuernement , la faueur des Indiens & Fauthoriré qu’ils ont fur eux, comjtne auffi leur OCCIDENTALES LIVRE. XV. leurconferuanon. Car comme l’an cIdId lxxxviii quelques nauires Anglois qui cftoyenc venus dans cetce baye, s’efForçoyent d y faire defcente, pour occuper ( ce font les propres mots de /Ærw^)quelque lieu voi(In,ou la ville mefrae s’ils euffent peu: Chrijlojk Gouean\\C\icuT desCollegcs ôr maifons des lefuites par tout le .6^4//, voyant que les forces des Portugais n’eftoyent pas ballantes pour repoulTer les Anglois, il aducrtit de ce péril lesPeres qui habitoyent dans les villages àesBrafiliens.ài leur com- manda , qu’ils eulfent à admonefter leurs fuiets à donner fecours : ce qui fut fait , car vn grand nombre de Sauuages armés d’arcs & de fléchés accoururent au lieu alTigne, pour chalTer l’ennemi du riuage. Et certe ils firent fi bien leur deuoir , encouragés par î o les Peres , que les Anglois apres auoir fouuent elfayé de defcendre , & fe voyans toüf- iours repoulTés des Brajiliens , s’en allèrent enfin làns rien faire. Les Peres racontent aulli dans leurs lettres, qu’vn certain Portugais Seigneur de Gachoeira {cctiQ nmtTQ defcend dans la baye à enuiron douze lieues de la ville de S. Salvador) auoit tellement attiré par douces parolles les Guaymures voidnsy qu’ils eftoyent à prefent plus doux qu’ils n’auoyent efté , & par le moyen des lefuites il y en auoit plufieurs dcntr’eux qui auoyent efté baptizés : ce qui eftant rapporté au Gou- uerneur , il trouua bon d’emmener ces Sauuages dans l’Ifle de Taperka , afin de lés te- nir mieux en obeïflance : mais ce changement de place ne leur auoit pas bienfuccedé, car la plus grande partie dentr’eux y eftoit morte de diuerfes maladiesjpource que cet- lo te Ifle encore qu’elle foit afles fpacieulè & fertile, produife de fort bon tabac, & nour- rilfe force vaches, toutes fois l’aïrn’y eft pas fàin,& fes habitans ne s’y portent pas bien^ Mais retournons à la ville de S. Salmdor: Elle eft fituee , comme nous auons défia dit, fur vne haute coline & qui eft du cofté de la baye droite & couuerte d’efpais hal- Jîers & arbrifleauxoù on nv peut prefque pafler, de forte qu’on n’y monte que par quelques chemins eftroits : elle à deux portes , vne vers le Sud , & l’autre du cofté du Nord, auec fes faulxbourgs : au pié du coftau fur le riuage mefme de la baye il y a plu- fieurs maifons & chais: L’an cId Idc XXIII les Portugais craignans la venue des no- ftres, y baftirent vnefpron triangulaire de pierre furvn roche renuironnè de la mer, afin d’empefcher la defcente & pouuoir garder les nauires qui y feroyent anchrés, 50 & brifer ceux de l’ennemi quien approcheroyent. Il y a dans la ville plufieurs edifii ces publics afles magnifiques, entre lefquels excelle le Mohaftere de S. François, dzns lequel les Peres de la Société ont leur Collegç,- proche delà ils auoyent commencé de baftir vn nouueau Temple dés les fondements, lors que ceux de noftre nation pri- rent la ville. Or combien que la ville foit par tout ceinéte de murailles, ou de rem- parts, toutesfois on ne l’eftime pas pour cela afles forte, à caufe des montagnes qui la commandent , &: qui font beaucoup plus hautes que fon terrain. Dans cette ville demeure le Gouuerneurpour le Roi de ce Gouuernementj com- me aufli l’Euefque, l’Auditeur general de tout le Brafil, & les autres Officiers Royaux. Cette ville fut prife heureufement l’an clDÎocxxivau mois de May, par la flotte 40 de la Compagnie des Indes Occidentales,de laquelle eftoit Admirai laques Wiliekens-, & Pierre Pierrez, Heyn Vice- Admirable $ieurZ)<9r/^ auoit là charge des foldats ; mais il n’eftoit pas encore arriué quand la ville fut prife , & peu apres fon arriuee il fut tué des Sauuages comme il eftoit forti dans le bois prochain vn peu à la legere : Or elle fut derechef rendue aux Eipagnols l’an cIdIdc xxv au moisd’Auril, en partie parla coüardife du Gouuerneur, & en partie par la trahifon de quelques Capitaines & fbl- dats , au grand deshonneur des vns & des autres : mais les Hiftoires de noftre temps traiteront de ceschofes plusaulong.ilmefuffitd’aubirtouchécetteplaye. Entre le Gouuernementde/^^^é/V &eeluide Pernambùto SeregipedelReyj comme il le nomment (qui eft conté par Olyueiro entre les Gouuernements ou Capi- 5 O taines) qui eft vne petite villette, au dedans du païs , à làqucl le on va par vne moyenne riuiere & qui n’a pas plus de treize piés de profond dans fon emboucheure, à la plus haute maree. Elle eft diftantc de Rio Real d’onze lieues vers le Nord , ôefépt de celle de S. François vers le Sud: il y a force vaches: & il y en a qui efcriuent qu'ôtiy a trouué au dedans des terres de veines d’argent. le n’ai veu iufques à cette heure aucun autre olyueiro qui contaft entre lesGouuernements ,S'^rf^/jî>£’,vôilapourquoi nous l’auons cftimé deuoir eftre mis hors du noinbre diceux. Chap. 5i8 description DES INDES » C H A P. XXÎV. Septième Gouuernement du Brafii nommé Pernambuco. Le fèptieme Gouuernement du Brafii eft vulgairement nommé PernambucOi ou comme les François & ceux de noftre nation prononcent Fernambstco i or il eft diftant du precedent de la Bahie de cent lieues vers leNord-eft & cinq de ce- lui de Famarkâ vers le Sud : laquelle diftancefe doit entendre d’vne ville à l’autre, car les limites des Gouuernements fe ioignentj que nous eftayerons d’expliquer vn peu plus foigneulêment. i o Nicolas è O lyueiro Portugais efcrit de ce dernier comme s’enfuit ; Eduard K^lbu- qaerqae eft Seigneur du Gouuernement de Pernambuco i il eft fort fpacieuxjfçauoir vers le Sud de la ville d'olinde iufqucsàlariuiere de S.Framifco d’enuiron cinquante lieues, auprès de laquelle on dit qu’il s’eft trouué es années precedentes vne mine d’ar- gent, que le Roia défendu de trauailler : Alagoa eft au Nord de cette riuiere, où deux fleuües fortent en mer j en ce lieu il y a cinq ou fix moulins à fucrc , qui font peu de fucre tous les ans ; proche delà & du mefme eofte eft Porto Caluo , auprès duquel il y a feptou huid moulins à fucre : & proche delà vers le Nord eft fitué le village dyna^ auec quatre ou cinq moulins ; plus outre la belle & grande bourgade de Serrinhany auprès de laquelle il y a douze moulins, qui rendent chacun d’ordinaire fix ou fept mille aro- 20 bes de fucre j for chaque arobe pefe xxvii ou xxviii des liures de noftre pars j par apres la bourgade de Poyuca , fort peuplée , où il y a treize ou quatorze moulins , qui rendent tous les ans grande quantité de fucre : elle eft fituee fur vne riuiere de mefme nom, laquelle fort en mer vn peu au delTus le Cap de S.Augufim. Le long de ce Cap eft fituee la bourgade de S. Antonio de Cabo, dans la banlieue de laquelle il y a enuiron. XX moulins, qui fant beaucoup & de fort bon fucre. Au deflfous du mefmeCap eft baftie la Chapelle de Nuefira Sennora de la Candelarhy de laquelle il y a vn chemin qui va aux campagnes, qu’on nomme Ctuuranasy où paift vn grand nombre de vaches delà à la ville d'olinde il y a cinq lieues , dans Icfquellcs font compris vingt & deux moulins à fucre. A neuf ou dix lieues de cette ville vers le dedans du pais , eft fituee 0 matta do ^ q Erafily bourgade fort peuplee, où on coupe grande quantité de bois de Brafii y lequel fc mene à la bourgade de S. Laurent y où il y a fept ou huiét moulins, qui font abondance d’excellent fucre ; enfin les limites de ce Gouuernement s’eftendent vers le Nord iuf- ques à flfte de Tamarica enuiron cinq lieues. Voila ce qu’il en dit. Senfuit ce que les noftrcs en ont remarqué vn peu plus Ibigneulèment. De la riuiere de S. François y ç^uieïk.^ xl lieues d’olinde y on conte cinq lieues iuf- ques à vne petite riuiere laquelle n a pas plus de lèpt piés d’eau dans fon emboucheu- re, nommee Coreripe,QÙ demeure vn ou deux Portugais, il y a beaucoup deSauuages dans vn village fitué à cinq ou fix lieues de la mer , en ce lieu on coupe feulement du bois dé Brafii en grande abondance. Delà il y a deux lieues iufques à la riuiere de S, Mi- 40 guely là on coupe aufti de ce bois & on y cultiue des cannes de fucre. Delà iufques à Alagoa on çonte trois lieues ; Or ce Alagoa eft vn lac Méditerranée diftant de la mer de fept ou huiél lieues , dans le circuit duquel fe fait beaucoup de Farinhcy comme les Portugais la nomment, de laquelle on fefert aulieudcblé dans cesProuinces,ony va par vne riuiere afles difficile à monter. De l’emboucheurc de cette riuiere iulques à celle de S. Antoine il y a fept lieues, de S. Antoine iufques à Camaragibe deux 5 c’eft vne : petite riuiere, qui n’a pas plus de fept ou huid piés de profond, enuiron à trois lieues au dedans du païs il y a deux moulins, qui font prefque à vne lieue du riuage de la ri- uiere : de Camaragibe iufques à Porto Caluo on conte trois lieues : c eft vne large riuie- re, mais qui n’a pas plus de fept ou huid piés de profond dans fon emboucheure: de yo. Porto Caluo iuCcçues z Barra grande yi\y 2. cça2itre\ieuës'yceik vne belle baye & où il y a bon anchrage,ony entre tant du cofté du Nord que de celui du Sud; maisdeuersle Nord il n’y peut palTer que des barques ; on y cultiue force Tabac, car la terre eft plate & defcouüerte d’arbres. De cette Barra iufques à Vna il y a trois lieues : dVna iufques à la riuiere nommee vulgairement Rio Formofo quatre ; cette riuiere eft eftimec afles profonde pour de moyens J OCCIDENTALES. LIVRE XV. moyens nauires. Delà on conte deux lieues iufques à Serinhan^ riuiere qui n’a pas plus de huiâ: ou neuf piés de profond; au deuant de fon emboucheure à quelque deini-lieuë d’efpace eft fituee Tlfle de S. Alexis^ deffournie d’eau douce. De Serinhan à la riuiere de (JKacaripe il y a deux lieues : cette-ci n’a que cinq ou fix pics d’eau. De UHacaripe iuiques à quatre; de Foyuca au Cap de S. Augnjtin, enmï on vne : dans le port de ce Cap fort la riuiere de or on entre aifement dans ce portjmais il cft fort difficile d’en fortir, à caufedes rochers & bancs de fable qui font d’vn collé &: d’autre de fon emboucheure; il eft maintenant fortifié d’vn petit Chafteau depuis , que nos gens ont pris Olinde. Suit par apres vers le Nordla riuiere dite vulgairement lo Rio de Sangadosy profonde en fon emboucheure de feptou huid piés, diftante de qua- tre lieues du village nommé vulgairement Reciffcy duquel nous allons parler. Or allans de la ville <3?’ vers le Nord on rencontre premièrement la riuiere de Ta- padoy &c peu apres Rio Bolccy quife bouchent toutes deux de boues aux mois d’efté, puis Pao Amorello , de laquelle iufques à Maria Farinha on conte deux lieues ; d’icelle iulques à la riuiere de GarafuAtmio ; où i’eftime que ce Gouuernement finir. Or auant que pafler à la defeription des villes, ce ne fera point mal à propos d’ad- ioindre ici quelque chofe d'olyueira & autres , de ce qui concerne les trefors du Roi d’Efpagne. Olyueira eferit: Dans ces Prouinces du Rrafil il y aplufieurs moulins où on fait du fucre ^les Portugais les nomment Ingenios) de forte qu’on en mene tous zo les ans à la feule ville de Lifbonne d’ordinaire vingt fîx mille coffres, chacun def. quels pefe du moins quinze arrobes, qui font chacune xxxii arrates; ce qui fut re- marqué l’an cIdIdc xvii: auquel an il en arriuaà plus de cinq mille coffres,- fans parler des autres ports de Portugal , aufquels il eft certain qu’il en aborda grand nombre. l’ai appris d’vn Belge qui y auoit demeuré plufieurs années ; que dans les plus grands moulins il eft requis le plus fouuent quinze ou vingt Portugais & cent Nè- gres : dans les moyens huid ou dix Portugais & cinquante Negres : & dans les plus petits cinq ou fix Portugais & vingt Negres. Que les plus grands d’iceux font tous les ans feptou huid mil le arrobes de fucre; les moyens quatre ou cinq mille; les plus 30 petits trois. Et que dans les Gouucrnements de Pernambuco yTamarica y & Paraihay iufques à il s’en fait d’ordinaire tous les ans quarante mille coffres: ce qui n’eft point de merueilles , car i’ai vn Autheur qui affeure qu’on conte plus de cent de cinq de tels moulins dans le feul Gouuernement de Pernambuco. En outre la difme fe paye au Roi dans le Brajil de tout le fucre: & dans le Roy- aume de Portugal quand il'eft arriué le quint: félon olyueira. Il y en a d’autres qui expliquent cela vn peu autrement : fçauoir que toùs les grains , tout le fucre, mef- mes les vaches & autre beftail payent dans le Brajtllz difme au Roi ; laquelle le Roi à couftume d’affermer à de certains Fermiers pour vne ou plufieurs années; celle du Gohuernement de Pernambuco (eut ie fçai aucunement parler de cette- 40 ci) d’ordinaire foixante mille ducats ou enuiron: il n’y a perfonne exempte de ces difmes , fi ce ne font les gens d’Eglife : Or le Seigneur particulier de chacun Gou- uernement reçoit les Redezimes , comme ils les appellent , qu’ils afferment com- munément feize mille ducats chacun an. Au refte le fucre eft exempt de toute couftume & impoft dans le Brafil , mais en Portugal il paye le quint du prix qu’il fe vent lors dans le Royaume : toutesfois ceux qui font proprietaires de neuues moulins, s’ils emmenent du.Br^/ leur fucre fur leur rifque , ils font libres du quint dans le Royaume pour dix ans ; lefquels paffés ils en payent la difme, de autres dix ans d’apres , le quint comme les autres. Or le bois de Brafd duquel on em- mene vne grande quantité en l’Europe , auoit couftume d’appartenir au Roi ou JO à ceux qui le racheptoyent de lui; & chaque nauire, qui part du Brajilytid tenu d’en porter pour rien en Portugal vn certain poids, félon fa grandeur. Xxx C H AP. ) J 550 DESCRIPTION DES INDES C H A P. XXV. Delà yiUe d’Olinde , 6^ de Garafu. Encore que ceGouuernementfoit de fi grande efl:enduë,toutesfois ii n’a que deux viWtsOlinde &cGaraJùà^ derniere derquellesmerite à peine le nom de ville, Olinde eft vnc ville fort célébré, ficuee fur vn lieu haut au bord de la mèr,il y a dans fbn circuit plufieurs coftaux, & le terrain y eft û inégal , qu’à peine fe peut elle fortifier par aucune inuention humaine ; entre les édifices publics fe fait voir le Col - lege des lêfuites bafti fiir le penchant d’vne coline en vn lieu fort agréable, fondé par le Roi Sehâfiien-y dans lequel , comme eferit larrkm, il y a d’ordinair^ vingt ou i o vingt & cinq lefiiitesj ce College eft le premier veu de tous par ceux qui viennent de la mer pour la hauteur du lieu où il eft affis : ils y enfeignent la Théologie morale ou les Cas de confcience, comme aufli la langue Latine,* & les enfans à Iire.& à eferi- re. De ce College delpend vn certain village de Brafdiem fitué dans le territoire de cette ville, de plus de neuf cents habitans, qui ont tous eftébaptizés. Auprès dece College fe voitie Conuent des Capucins ; & prefque au bord de la mer celui des la- cobins : & en la haute ville le Monaftere qu’ils nomment de S. BentOi fort de nature & par art j outre le Conuent de Moines nommé Comefeion de is(pjfa Sennora 5 or dans ces cinq Monafteres onn'ycontoit pas plusdecene& trente Religieux: outrepref- que fôixante Preftres. La principale Eglifeparochiale de la ville eft dediee au S.Sau- 2.0 tmir, l’autre à S. Pierre : fans l’Eglife de l’hofpital qui y eft prefque ioinde , dite UHi- ferkorde , fituèe prefque au milieu de la ville fur vn haut coftau , au pié duquel fe voit -vn autre Temple nommé NoJfaSermoradel Emparé y outre lefquelles font celles de S. Imn-i lS[pJfa Sennora de Guadalupei item Nojfa Sennora de Monte baftie hors la ville : enfin la chapelle de S. Amaro tout proche de la ville, de forte qu’il y a tant au dedans qu’au dehors de la ville huid Eglifes. Lé nombre des Bourgeois eft eftiméeftre de deux mille, tant hommes, femmes qu’èflfans j fans les Ecclefiaftiques, qui ne font pas de ce nombre,* & vn grand nom- bre d’êfclauéS. Ii n’y a ville en tout le Brajïl qui ait plus de difette de viures, & d’autres chèfes nêcelFaires à la vie de l’hottime , que cette-ci ; de maniéré qu’il y en faut bienL5 o fouüërtt porter des autres Gouucrnemcnts du Brajil, & des Iftes des Canaries t voire de Portugal mefme. Le port de cette ville n’eft pas beaucoup grand ni propre, mais il eft fermé de ro- chers & de bancs , comme d’vne barre ( qui borde la cofte du BrafiL l’efpace de plu- fiéurs lieues) de forte que les grands nauiresn’y entrent que par vne emboucheure èftroite, & font au dedans dans vne petite baye, dans laquelle vne petite riuiere, qui defeend de la Continente fe defeharge, à vnc lieue ou vn peu plus de la ville. Sur le port il y a vn petit village ou pluftoft vn faulxbourg, où il y a quelque mai- fonS & des chais, dans lefquels on porte le fucre & autres marchandifesr il eft deffendu d’vn Chàftèau bafti fur vn long col de terre , vis à vis de l’entree du port, qui peut ah 40 fementempefcherl’entreeauxnauires.Neantmoins l’an cId lo jlcy laques Lancajlre Anglois, èftant parti d’Angleterre auec trois nauires feulement & deux cents feptan- teciûq tant matelots que foldats , ayant en chemin grofli fa flotte de trois ou quatre nauires, qu’il aüoitpris furies Efpagnols,*& apres que Fennes aufli Anglois, fe fut ioind auec lui auec autres quatre.tant nauires que barques ,* il entra d’vne grande hardi efle dans ce port, prit d’vn premier aflfaut ce Chafteau,dontnousauons parlé, dans lequel il y auoit fept pièces de fonte & fix cents hommes , qui y auoy ent efté enuoyés de la Ÿillèpourle garder, les Portugais ayanrpris honteufement la fuite à la premiè- re veüé des Anglois: Car les Anglois refolus de vaincre ou de mourir, auoy ent expref- fementbrifé leurs chaloupes contre les rochers, afin den’auoir autre efperance qu’en fo la vidoire ,* Lamaflre donc eftant maiftre du Chafteau & du faulxbourg, dans lequel ily auoitlors enuiron cent maifons , ayant vn fort riche butin /car outre les ordinai- res marchandifes de ces contrées , comme fucre, cotton , bois de Brafil & autres , il y auoitpar fortune la charge d’vn grand caraque, qui retournant des Indes Orientales s’y eftoit defehargee ) fe fortifia à l’encontre l’effort de l’ennemi, faifant vn rempart de trauers où il plaça cinq pièces de fonte,* car ce deftroit de terre s’auance comme vn col OCCIDENTALES. LIVRE XV. 551 vn col entre la mer & la riuicre,- & quand la marce efthaute, à peine eft-il large de XL pas, de forte qu’il fe pouuoit aifement défendre à l’encontre de ceux de la ville. Et ayant demeuré là trente &vn ioutj il chargea de riches marchandifes de l’Orient, non ieuiemcnthuiétnauires Anglois,maisaulîitroisHollandois,qu’ayanttrouuédans le poftilprintàloage,& quatre François qvû y eflroyent arriués du depuis, lefquels il emmena auec foi charges de diuerfes marchandifos à\\.BraJiL Les Portugais du de- puis ayant baftivn autre petit Chafteau vi^ à vis du premier fur vn rocher dans la mec mefmc,ont rendu prefqùe inacceffible à l’ennemi l’entreede ce port, qui eftoit défia allés diflicile de foi. 10 En outre le long de la ville defcendvne petite riuiere & qui à peine peut porter des barques fqu’ilsnommentii/tf Bibmbe)\^(iuc\\c ayant paflé entre laContinenre & ce col de terre,dont nous auons parlé ci-defliiSjfeioinâ: auprès de Vide d' Antoine VaaT^ corne ils la nomment, auec vne autre riuierc nommée Rio Capefecia ou àtFidalgos f oucorn- me d’autres efcriuent Captbariui ) cette-ci defeend de la Continente le long du cofté Septentrional de la fufdite Iflejcomme vne autre nommee des Portugais Rio dos Afog^- dos,xz[e fon cofté du Sud; feioignant toutes deux en vn certain bras au deflusdei’Ifle, qui fait que cette Ifle eft feparee de la terre ferme par ces riuieres. G^r^yépluftoft bourgade que ville,eft diftante dolindeào, quatre ou cinq lieues, elle eftoit autresfoi's habitée des Portugais depeude moyens & qui gaignoyent leur vie de leur meftier, où à chercher du bois de Braftk mais depuis que nos Belges ont pris Oliur de,i\y en a plufîeurs des plus riches qui fefpnt retirés à cette ville,de laquelle ils vont à la me:r par vne petite riuiere,qui entre en icelle vis à vis de Tamarica. Cette ville fut prife à l’improuifte patries noftres au commencement de May de Pan cl D I D c . X X X 1 1. 11 y eut plus de cent Portugais de tués,beaucoup de pris, vn bon butin en fur tiré , vne bonne partie de la ville ruinee par le feu ; & il y fut gafté vne grande qua ntité de viures, principalement du vin , que l’on y gardoit pourles troupes , que les Portugais auoyent placées près En outre à neuf ou dix lieues d'Olinde il y a vne bourgade fort peupîee nommee 0 matta 5r^^/,leshabitans de laquelles’employentprincipalement à couper dubois 5 O de qu’ils mènent à la mer en grande quantité. Et entre çette-ci & la ville il y a vne autre bourgade afles peuplee, laquelle ils nomment S. Laurenzoy dans le territoire de laquelle il y a fept ou huiét moulins, qui font beaucoup & de fort bon fucre. Enfin on conte cinq lieues des CucuranneSià-oninous ^xxons parlé ci-deftus, & en cet efpace il y a vingt & deux moulins ( combien que ce foit au long & au large dedans les terres ) qui font fitués dans Guararapû ^ Moribeca & Camajfarin i la plus grande partie toutesfois font dans Vergea de Capiuariui, comme, ils la nomment, pource que cette ri- uiere pafle auprès : cette région eft la plus belle de toutes , foit qu’on y confîdere les belles campagnes verdes ,foit les arbres fruiétiers, & autres chofes commodes pour la vie de l’homme ;& ils ne font pas à plus de deux lieues delà mer,de forte que les Ne- 40 grès & autres efeiaues y peuuent commodément courirpour y pefeher. Il refte que nous ramenteuions briefuement, comment la ville d^Olinde & lieux circonuoifins ont efté pris par nos Belges & tenus iufques à ce iourd’hui. C H A P. XXVI. Comment Olinde fut prifi des Beiges i ^ comment ils la tiennent encore auiourdhuL La Compagnie des Indes Occidentales , eftablie és années precedentes fous le^ aufpices des tres-llluftres Seigneurs, MelTeigneurs les Eftats Generaux des Prouinces-vnies des Pays-bas , & augmentée de grandes richefles, que i’annee cId Idc XXVIII elle auoitaflémblédubutindel’armee d’Efpagne, qui retournoitde 50 la Nouuelle EJpagne-, ne defirant rien tant, que de fevanger, par quelque ade mémo- rable, de l’outrage qu’elle auoit auparauant.receuë par l’Efpagnolau Brafih, effacer l’infamie que fes gens auoyent receuë par leur coüardife & perfidie; & affermir fes affaires ; adreffa fes deft'eins derechef vers le BrafiU & eftimant que les chofos les plus difficiles font les plus belles , elle fe refolut d’attaquer Pernambuco. Ils drefferent donc pour cet effeét vne forte armee nauale , compofee de plus de cinquante nauires tant grands que petits, fournie abondamment de munitions de guerre, de plufieurs pièces Xxx Z .de fonte. 552< DESCRIPTION DES INDES de fonte , 8c d’vn grand nombre de foldats & matelots. Henri Loncq eftoit Geheral de cette armee , l'ierre AdrianJ^ Admirai, lojès Trapenne autrement Bankard Vice- Admiral,& noble homme Dideric de Wardenbourg eftoit Colonel de tous les foldats. Lé General Loncq & l’Admiral firent voile de GoereelevingtCcptiemcdc luilletl’an cIoIdc XXIX auec huid nauires î qu’en mefme temps fuiuireritplufieurs autres des autres ports de Hollande & de 2elande. Il arriua auec fes huid nauires aux Ifles des Canaries au mois d’Aouft , & là près de T merijfe il tomba par hafard dans l’armee na- uale d’Efpagne , qui eftoit compofee de quarante nauires , dont la plus grande partie eftoyent grands & bien armés, delaquelle eftoit GencralD.A^^^imr bien que le nombre des nauires de noftrc General ne fuft pas de beaucoup pareil, tou- i o tesfois il ne refufà pas le combat, Tiflue duquel futjqu’apres que quelques. nauires de l’ennemi eurent efté fort brifés & grandement endommagés , Tarmce de l’ennemi le laiffa & pourfuiuit fa route vers les Ifles des Canihales. Eftknt parti delà il arriua le iv de Décembre à lifte de S. Vincent^ l’vne des Hefpe- rides jlefquelles on nomme vulgairement Ijlas de Cabo Fer de -, àn nom àü. Cap>au de- uanc duquel elles font , combien que fort eftoigneesj là peu à peu fe ioignit à lui le refte de fon armee, & enfin fur la fin de Nouembre, arriua aufli le C. Wardenbourg auec lé refte des foldats, lequel eftoit parti du T exel le x x d’Odobre : de forte que l’àrmee eftoit défia de cinquante quatre nauires tant grands que petits fdeux defquels ils auoyent prifes en chemin fur l’ênnemi ) 8c treizegrandes chaloupes 5 fept mille deux to cents & quatre vingts hommes , entre lefquels y auoit trois mille cinq cents foldats. Auec toutes ces troupes eftans parti de Vincent, le xxvi de Décembre, ils arriue- ïenc enfin le fécond deFeburier de l’an cloloc xxx à la terre ferme du fur la hauteur de fept degrés & quatre fcrupules au Sud de la ligne : & le x 1 1 1 du mefme mois ils eurent en veuë le Cap de S.Augufim.OtXd ayant aîTemblé le Confeil des principaux Capitaines , ils prirent refolution de prendre la ville & port d'olinde. Ils ordonnèrent donc auColonel Wardenbourg feize tant nauires que barques, mille fix cents foldats,& fept cents mariniers d’elite, auec lefquels il deuoit mettre pié à terre auprès de Pao Amorello : Le General Lmcq entreprit d attaquer, auec le refte de l’armee, le port & les Chafteaux qui lui commandent. Le quinfiemeils pourfuiuirent, ayant vn petit vent fauorable , 8c vne mer tran- quille fauorifant à leur deffein : & ainfi le General Loncq s’approchant du Cha- fteau, qui eftoit le plus en dehors , commença de le canonner fort & ferme, auec peu ou point d auancemenr, car combien qu’il fuft fort près , fi ne pouuoit-il adreftérfes coups iuftement, pour le branfte des vaiffeaux: & il n’eftoit poftîble d’entrer dans le porta caufe que les ennemis en auoyent bouché Fentree auec quelques nauires en- fondres ; voila pourquoi ils fè retirèrent vers le fbir quelquepeu en mer, fans auoir re- ceu aucun dommage des canons de l’ennemi. Cependant Wardenbourg auoit defeendu fes troupes au lieu affignc, fans qu’aucun l’empefehaft , bien que l’ennemi fe monftraft afles près delà : Or le foir eftant venu on 40 difpofà les troupes enordredebataillej &onlesfeparaentrois (excepté la compagnie des moufquetaires d’elite) le Lieutenant Colonel A/te commandoir l’auant-garde, compofee de neuf cents 8c trente quatre hommes : le Lieutenant Colonel Steyncaiefel menoit la bataille , où il y auoit mille quarante neuf hommes : & Foulques Homq con- duifoit larriere-garde compofee de neuf cents foixante cinq. Le lendemain tout au matin ils s’auancerent : lauant-gardeoù eftoit le Colonel , marchant deuant, ayant quelques îegeres pièces en front, ils marchèrent le long du riuage de la mer , qui auoit à la main droite vn bocage de halliers,- & ainfi fans aucun combat iis ariuerent à Rio JDolcci de l’autre cofté de laquelle huiét cents Portugais ou vn peu moins s’eftoyent retrenchés : nos gens neantmoins fans s’arrefter,gayansla riuiereiufquesàlaceindu- jo re, les mirent en route de prime abord, auec peu de dommage 8c peu de leurs gens tués : delà pourfuiuans leur chemin, fans que l’ennemi, pour la crainte du canon des noftres , ofaft faire tefte,ils arriuerentà la ville; 8c ayans pour guide vn efclaue, ils pri- rent , deuant toutes chofes ^ le Monaftere des lefuites , fitné en la plus haute partie de la ville, apres en auoir rompu les portes ; Or les ennemis , qui defendoyent le rempart fait dans la baffe ville au bord delà mer, (car la ville n’eftoit fortifiée que de ce cofté; voyans OCCIDENTALES. LIVRE XV, voyans que la haute ville eftoic prife , que l’arriere- garde s’auançoit à grands pas vers eux, & que deux compagnies que le General auoit fort à propos difpofees de i autre colle de la ville, approchoyent, s’enfuirent àla defbandade jpar ainli les noftres furent maillres de toute la ville : le butin pour la renommeede la ville ne fut pas de grande confequence; car les Portugais ellans aduertis de la venue des noftres, auoyentaupa- rauant emporté ailleurs ce qu’ils auoyent de plus précieux, bien que leGouuerneur Albuquerqtte l’euft défendu. Voila ce qui fe pafla le feizieme de Feburier. Apres cela les Chafteaux fe rendirent le fécond de Mars : &letroifieme du mefme nos gens pafterent dans lifte d’Antoine Vaazy & fe làifirent dVn célébré Monaftere, I û qu’ils trouuerent vuide,lîtué fur la pointe Septentrionale d’icelle. Or l’ennemi auoit ) mis le feu dés le dix feptieme de Feburier d’âuparauantdans tous les chais du Jledffey où on dit qu’il y euft vingt cinq mille coffres de fucre bruflés. le paffe ces chofes lege- iement,quelcs Hiftoires traiteront plus a plein. Maintenant. i’adioiiftcrai comment ces lieux ont efté fortifies par nos gens: { car l’an precedent nous auons abandonné la ville, comme nous eftant inutile,l'ayantauparauant rüinee & en partie mife bas.; Les fortereftes que nos gens tiennent dans le territoire de PernambttcO} font difpo- fees en cette maniererprefque toute lacoftçdu^r^//,du cofté qu’elle regarde l’Orient eft bordee de rochers qui s’entretiennent d vne fuite prefquc continué , lefquels fc monftrent à maree baffe, larges d’enuiron neuf perches de dix piés, & fouuent déplus, 2.0 comme vne barre ou rempart,& combien qu*en plufieurs endroits ils fbyent entrecou- pés,toutesfois ily a peu de paffages encore fort eftroits , où les nauires puilfent paffer : Or au droit de la ville d' O Unie ce banc finit en angle obtus , où de long temps les Por- tugais ont bafti vne petite fortereffe de pierre. Et de la ville d’olinde defeend vne lef- \he de terre comme vne langue, au bout de laquelle eft fituee la bourgade dite vulgai- rement le Recifè; or ce fentier (car à peine eft-il au plus large de trente ou quarante verges de dix piés, eft preffé vers l’Occident delà riuiere Bibiribe, peu profonde & falc de beaucoup de bancs, & vers 1 Orient de la mer: cette bourgade, que ie viens de dire^ eftoit ci-deuant ouuerte,maintenant elle eft fortifiée d\n rempart & d Vn palliffade. V ers le Nord d’icelle eft fituee la ville,où premièrement les noftres ont fortifié de nou- 3 O ueau le vieux fort des P ortugais,dit S. Georges , diftant de cent fbixante verges de dix piés de la bourgade j puis apres à enuiron cent verges delà ils ont bafti dés les fonde- ments vn fort, qu’ils ont nommé de BruyneiVsx\xis\\. vers la ville d’ vn fort ouurage de cor- ne : vis à vis des deux ils ont fait vn fort triangulaire, nommé de VVardenbourg , fur vne pointe de la terre ferme, au delà de la riuiere , de l’autre cofté de l’Ifle d'Antoine Vaaz, En outre dedans l’Ifle l'titfme d Antoine Vaaz, ^tefc^nevïs^vis àu Recijfe ynos gens ont bafti autour du Monafterele fort Ernejie, auec vne corne qui regarde vers le Sud : à ^ peine a cent & vingt verges delà , vn fort quinquangulaire & extrêmement bien forti- fie,honore du nom de l’Inuincible Prince Frédéric Henrh auec auffi vn fort ouurage de corne du cofte du Sud ; enfin vne autre fortereffe dite Amelia .‘outre quelques petits 40 forts, qu’on nomme Redoutes.» bafties tout autour fur les aduenuësde l’ennemi: par lef- quels ouurages cette place eft tellement forte, qu’elle peut refifter à vne grofte armee deJ’enncmi. C H A P. XXVII. Çouuernement ds Tamarica, Cp de lacofle marine iu^ues à ce lieu. Le huidiemeGouuernementdu5rÆ//,&mefmecommeonveutleplusancicn, eft celui de mais qui eft maintenant moins renommé pour le voifi- nage de celui de Pernambuco & de Pareyba : il a pris fon nom de l’Ifle de Tamara^ so caoM Tamarica y ({\x\ eft feparee de la terre ferme par vn canal fort eftroit; longue de trois lieués,& de large de deux : de la Popilliniere François en fon Liure des trois Mon- des , eferit que cequartiera efté premièrement poflédé par les François, & qu’il leur fut puis apres ofté parles Portugais ,* il garde encore auiourd’hui la mémoire des Fran- çois, & le nom du prochain port de cette Ifle,que les Portugais appellent Porto dosFran- cefes ; autrement la renommee de la chofe eft fort obfcure , & n’a efté remarquée par . aucunes Hiftoires, au moins que i’aye veu. Xxx 3 En ) 554 DESCRIPTION DES INDES En outre cette Me de Tamarica tïk. diftante iolinde de cinq lieues ; elle a vn port alTés commode au cofté du Sud , dans lequel on entre par vn canal profond de quin- ze ou feize pies ; où commande vn Chafteau des Portugais bafti fur vn haut coftau, difficile à monter, qui fut attaqué en vain par les noftres l'an precedent; & depuis pris par iceux;toutesfois pour en dhaffer les Portugais , & leur oher ce port, ils y ont bafti vn fort quarré qu’ils ont nornmé à' Orange^ fur la propre fortie du canal en mer, inac- ceftible détourés parts, à caufedes eftangs &ruiüeauxquiy defeendent de l'Ifle: tel- lement qu’ils ont maintenant bouché cette entree aux Portugais : car l’autre embou- cheure vers le Nord, qu’ils nomment Catwmna eft à peine profonde de dix pies,- de manierequ’iln’y peut pafler que des barques. , Cette Me & fon territoire dans la Continente appartient au Comte de tj^donfanîOy lequel demeure à Lilbonne : qui reçoit,comme on dit,tous les ans des habitans pour tribut, deux mille cinq cents ou trois mille ducats: on dit qu’il y a dans ce Gouuer- nement enuiron vingt & deux moulins à fucre: principalement fur la riuiere GoïmA ou Gouam , comme auffi dans l’i^racipe & Paratibe. A enuiron vne lieue àcTamaricây la petite riuiere de Majfarandu ou Mucurmdibx fort delà Continente, aux bord de laquelle il y a vn moulin, ôù on peut monter auec des barques : & vis à vis de la mefme Me fortent les deux petites riuieres x^ripe & Ambory comme i’ai appris d’vn Portugais inftruid en la cognoiftancc de ces lieux , lef- quelles ont auffi leur moulin chacune. 2,0 A fix lieuès plus outre que Tamarkâ vers le Nord fort la riuiere de Gouane, profonde en fon emboucheure de huid ou dix piés feulément, mais au dedans fon canal eft beaucoup plus creufcjfur les bords de laquelle à fix ou fept lieues de la merily a trois ou quatre moulins auprès dVn petit village, iufques où montent des barques , pour ea emmener le fucre. Enfin à deux lieues de Gouane vers le Nord eft le Port J;'4^p^,dont nous auons par- lé ci-deflus, qui eft comme fermé de deux rochers, derrière lefquels il y a vne rade afles commode, il ny demeure perfonne excepté vn ou deux pefçheurs. Parainfi, nous auons à prefent acheué les huidprincipauxGouuernements du Brafily nous deferirons ceux qui reftent au Liure fuiuant i maintenant vifitons fuccindement la cofte iuf-50 ques ici. De Britiogay port Septentrional du Gouuernemçnt de S. Vincent, iufques à l’Ifle de S. Sebafiien on conte huid ou dix lieues : cette Me eft fituee fur la hauteur de xxiv degrés , comme les noftres ont remarqué ; il y croift auprès de fon riuagc vne efpece de pois fort venimeux,* nous auons ci-deuant parlé des autres choies. De cette Me iufques à celle des Pourceaux lieues, il y a vne commode rade entre l’Ifle & la Continente, où eft la baye d’Vbatuba. De rifle des Pourceaux iufques a l’Me Grande il y a vin lieues, félon Figuredo , &: da- uanrage félon d’autresrcetteîlîeG'zÆ^/sf^eft haute & pleine de bois,& le dedans d’icelle eft tout raboteux de rochers aigus : elle abonde en fontaines ; & a quelques ports no- 40 tables pour la commodité qui y eft de prendre de l’eau & du bois. A deux lieues d icelle vers l’Oueft le Cap Caroujfu s’auance en mer ; & vers le Nord eft fituee Angra dos Reyes , dont nous auons fait mention ci-deflus. En outre, proche de flfle Grande vers l’Eft eft Moremhaya,àç. laquelle iufques à Ga~ ratuha on conte iv lieues, & autant delà à Toyuq^ua: ce font deux riuieres qui ne por- tent que des barques. De Toyuqua il y a deux lieues iufques à vn haut rocher releué en pointe, dont le fbm- met eft toutesfois plat (on le nomme communément Gauea) d’iccluiàla riuiere de lamiier il y en a autant,- de forte que depuis flfle la diftance eft de douze lieues ou vn peu plus. y o De la riuiere de iufques au Capjrio ilyaxviii lieuës,il eft à enuiron xxiii degrés au Sud de la ^ligne; iufques ici la cofte à couru vers l’Eft. Du iufques à la baye de i”. Saluador on conte ix lieues, & la cofte fe tourne vers le Nord: d’iceluiàl Me de S. Anne, qui eft au deuant de la Continente, feparec d’icelle de deux lieues : il y a xii lieues en l’efpace d’entrc-deux,ily a vne bonne rade : riile mefme eft fort belle & couuerte par tout d’arbres , entre lefquels il y en a qui portent r OCCIDENTALES LIVRE. XV. portent des fruits femblables aux cerifes, le noyau eft rude,& la chair d’vn bon gouft; mais ilyadifetted eaudouce. De cette Ifleiufquesau Cap de .y. on conte vin lieues, il eft fur les xxii degrés de la ligne vers le Sud. De ce Cap à la riuiere de Paraeiuaû y a viii lieues. De Paraeiua à Mmage^ cinq ; delà à Itapemeri , autant. Ceux denoftre nation ont remarqué que RiôDolce eft à xxi degré de la ligne, elle eft habitée de Portugais : & à dix fcrupules de plus eft l’Ifle i-. Clara, feparee de la terre ferme de demi-lieuë, elle eft veftuë de beaucoup de palmices,& n’a pas faute d’eau douce. I O En outre d Itapemeri iufques à Gleretehe il y a iv ou v Jieuës,xx degrés & xl y fcru- pules de la ligne. Ti^GleretebeiGuarYapare,it^x.\\t\xHi les Portugaisla nomment Sierra deGuarlparl. Delà à la ville de Spiritu fancioS^\x\Qi lieues. De la baye de cette ville iufques à la nxxitïe dos Reyes Magos on^onte fix lieues : elle eft a XIX degrés & xl fcrupules de la ligne. D’icelle iufques à vne autre nommee Rio dûlce,\imù. lieuës : delà a Cri^uare,(cipt : de Criqmre à Marartepe, ou félon d’autres Mu^ c«r/^c,dix,xviii degrés & xv fcrupules de la ligne. Maranep.e% Parawepe,Q\!LCQTeiV!\Q d autres veulent Perteripe,cinc^. De ce lieu iufques à la riuiere notnmee/st^^ Carauelas, nois,à'icc\\Q^BarreirasVerm€ilhas,comtnQ ils l’appellent, fix j de cette placeà iQ ^i>,deux;fur X V ii degres & demi delaligne. De Corebabo iufques à Seguro il y a XV ni lieuës. De Porto Seguro à S. Crux trois lieuës, en ce lieu abordèrent les Portugais , lorî? qu’ils defcouurirent cette Continente : de S. Crux iufques à Rio Graude,ncuf ou dix lieuës : dans cet efpacc d’entre-deux fbntfîtués ces bancs fi renommés , nommés des Portu- gais Baixos deS.Antomo : De Rio Grande iuCcyuos q\x% Ilheosi& Yiii licuës,dans cet efpace entre-moyenneily a defort hautes montagnes qui fe dreflent furie riuage nommées vulgairement Sierra de Ay mures. Des//^^’^>x à lariuiere das ContasiX y ahuiétou neuflieuësîdelà à CamamuSr%‘. de, Ca~ , mamu à Guepena , trois : de ce lieu iufques à lariuiere de Tinhare , quatre : fur icelle fè 5 O dreffe vne fort haute montagne nommee communément Morro de S. Pablo ; de cette riuiere iufques à la baye de tom les SainBs,à.ou%e lieuës. pel^ha-yc de tous les Sainéls iufques à H nuiQte Regale il y a xxvi lieuës, onze de- grés & trente fcrupules de la ligne. D’icelle à celle de S.Françi/coixvii lieuësî delà iufques a vn Cap nommé G«/>^,quinze j de ce Cap iufques aux rochers de Cameragu- ha,f\x : d’iceux iufques à la riuiere de lasPednu, cinq : delà au Cap de S. Anguflin,dQU- ze ; nous auons vn peu plus à plein fuiui cette colle ci-defTus. A enuiron cinq lieuës du fufdit Cap vers le Sud, eft Pille de S. Alexis, furhuid de- gres & quarante cinq fcrupules delaligne : elle eft fort coinniode,car il y a moyen dy prendre de l’eau & du bois. 40 Du Cap S.Augufiin iufques dPernamhHcofuuidLMeuë^xd^Pernambuco zTamarica, quatre ou cinq : de Tamariea à Pariba ( duquel nous parlerons bien toft ) il y a quinze lieuës. DESCRIPTION 55® DESCRIPTION DES INDES OCCIDENTALES, LIVRE SEIZIEME. BRASIL SEPTENTRIONAL. T" lO C H A P. 1. De la commune langue des Brafiliens. L nous femble que nous ne ferons rien mal à propos, fi nous traitons vn peu au commencement de ce LL üre de la langue des Car combien que plu- ficurs nations du Bra^layentyn langage particulier j neantmoins il fèmble qu’ils ont entr’euxvn certain idiome commun, principalement toutes ces nations qui attouchent en quelque façon le riuage de la Con- tinente, quelques mots defqucls nous auons receu d ’vn certain Belge , qui a demeuré parmi-eux en di- 2,0 uerfes places quelques années , lefquels ont grande affinité auec ceux que Jean de Lery a mis en lumière du langage des Tomupinamhaults ; car encore que cette nation habitaft en ces temps là auprès de la Bahie & de lariuiere de lenneroy tou- tesfois apres que les Portugais en ayans chaffés les François le font emparés de leur païs,il femble qu’ils fe fontelpars au long & au large par toute cette région , & fi loin que mefmes les habitans de Marigmn(c difent eftre defeendus d’eux, comme auffi ceux qui fe tiennent auprès de Para , félon que i’ai appris de ce Belge : or afin que la reflemblâce ou diuerfité de ce langage auec celui des T Quoufmamhaults fe voye mieux, nous conférerons enlêmble les noms des parties du corps de l’home, lefquels font tels, ^ q Sclonleande Lery. Dans la baye de Selon la remarque d’vn Belge. La Teftc ' Les Cheueux Les Oreilles Le Front Les Yeux Le Nez La Bouche Les loues Le Menton La Langue Les Dents Le Col Le Gofier La Poitrine Les Reins Les Fefles Les Efpaules Les Bras Les Mains Les Doigts Le Ventre Les Tetins Les Genoux Les ïambes LesPiés Aue Aua Nemhi Namhi Namhy Shua • • • • Suwa Defa Defa Scefeah Tm Tin Ty lourou • • • « Juron Retoupaue ^ « • • • « • • • Redmiua « • • • T eduhe Apecou - Apecong Tpecon Ram Tannie • Raaingh Aïoedé K^iura Aiure Ajfeoc • • • • Ajjtocke Poca • • • • Potiah Roushony • • • • Tuahehouye Rentre • • • • Sycynarre ou Tobyrre Imanpony • • • • Attiube Ima Giuwa Le To Po ou Gepo Poh Ponça • • • • • a • • Reguk • • • • Zamheh Cam • • • • Gamme Rodouponam T mppha IJupuha Refemea Gretima Touba Pouii ^ Gepu Tpuch. D’oi \ ' — , 40 50 DESCRIPT. DES INDES OCCIDENT. LIV. XVI. 537 . D’où fe voit que le langage des Tomufinambaults , comme de Lery le remarque , eR encore en vfage , pour la plus grande partie , entre les Sauuages habitans en diuerfes régions. Ce qui fe peut auffi obferuer par les noms des nombres ; car comme de remarque les Tououpinambaults prononçoyent. i Angepe. z Moccuein. 5 Mojfaput. 4 Oioicottdic. % Ecoinbo. Ceux de la baye de Trayciaon content aujourd’hui ainfî. I lepé. Z Mokoy. 5 Mofaput. 4 lemdick. 5 Opaue , &c. Le mcfme de Lery remarque que les T ououpinambaults appelloyent le Soleil Gom- r/ïj//,la Lune/^(?,les Eftoilles lafitata. : la mefme façon aufli les habitans de cette baye difen t CoafirAitJïch & lajïtata. Ce qui eft efmerueillable en vne fi grande diuerfité lodelieux. Mais retournons maintenant à noftre propos. C H A P. II. V^ufieme Gouuernement du Bràfil ^/VParaiba. ^ AU Liure precedent nous auons acheuéhuid Gouuernementsdu.S;’^/,& Pa- nons vifité iufqiies aux limites du neufieme & nouueau Gouuernement de fa- r^f/'^/ïjduquel il nous faut maintenant parler. Ce Gouuernement a pris fon commencement des FrançoiSjquijComme nous auons dit au Liure precedent, furent chaflesranclolo lxxxiv :du depuis les Portugais ao l’ont pofledé,y ontbafti vne ville & quelques bourgades, & planté force cannes de fii- cre,de forte qu’auiourd’hui il y a dixhuidoudixneufmoulins, qui rendent, comme on dit, tous les ans enuiron cent & cinquante mille arrobes de fucre. Du Port Francefe fuiuant la cofte vers le Nord, on rencontre premièrement vn Cap appelle vulgairement fur la hauteur de fix degrés & quarante cinq fcrupules au Sud de la ligne ; d’icelui iufques à lariuiere deP4m^4,d’oùleGouuer- nemeht à pris fon nom , on conte deux lieues. Cette riuiere ouure vne emboucheu- re afies large vers l’Eft , déclinant vn peu vers le Sud-efl: : & au dedans de fon en- trée il y a vne longue Ifle couuerte d ’arbrifieaux fort efpais : or les François auoyent baftifur le Cap du Sud nommé Cabo Deloyvn petit Chafteau , que les Portugais| ont 50 par apres augmenté, fur tout, ces dernieres années , depuis que ceux des Prouinces- vnies des Pays-bas ont pris olinde. Par aprc^la riuiere monte vers l’Oueft, fale de beaucoup de bancs de fable & de rochers , de force qu’on' y a befoin dVn bon Pilote. Aucofté Méridional de la riuiere X^yïWeàc Par aibaQ^CitMGQ, laquelle ils nomment auffi de Philippe, 2.vi fonds d’vne certaine ance,à enuiron trois lieues delamer , de forte toutesfois que lesnauires y peuuent monter feurement , & y charger fans danger fixoufept cents coffres de fucre : il yhabitoic és precedentes années cinq cents Por- tugais, maintenant il y en a beaucoup dauantage,auec force Sauuages & Negres. Elle eftoit au temps paffé ouuerte , mais maintenant on dit qu’elle eft ceinde d’vn léger 40 rempart , depuis qu’ils ont commencé à craindre les Hollandais , encore qu’ils ayenc attaqué en vain le Chafteau , qui eft auprès de Cabo DelOimzh depuis en l’aii cId Idc XXXV ils ont pris tant la ville que le Chafteau, Dés la ville la riuiere fe courbe en coude vers le Nord-oueft j & là for la riüé de main droite en montant fe voit premièrement vn moulin à fucre, auec fes mai- fons;puis vn peu plus haut fur l’vn & l’autre riuage des chais de Marchands auec quelques maifons: & montant encore plus haut, on rencontre fur la riue de main droite vn petit village où il y a trois moulins auec leurs marais à cannes,- & plus haut encore vn autre village , les habitans duquel s’employent principalement à cultiuer ces racines , defquelles ils font leur farine, dont ils fe feruent en ces lieux 50 au lieu de blé ; & d’vn cofté & d’autre de la riuiere il y a quelques moulins à fucre. L’autre Cap de ce Gouuernement qui eft vers le Nord eft appeîlé Punta de Lncendi au deuant duquel il y a quelques rochers, derrière lefqueîs il y a vne bonne rade pour de petits nauires. Figureâo eferit que la riuiere de Paraiba s’appelle auffi d’vn autre nom S. Domingo & qu’à deux lieues de fon emboucheure eft la riuiere de Moguangape , à l’entree de Yyy laquelle 53^ DESCRIPTION DES INDES laquelle il y a vnelfle qu’ils nomment de des arbres dont elle eft couuerte. S ur les riuages de cette riuiere, qui ne porte feulement que de petits nauires , habitent quelques Portugais,lefquelss’employentàpaiftre des vaches. Au refte le terroir de ce Gouuernement eft afles fertile j & n eft pas mal pîaiiànt, mefmes il s y trouue en diuers endroits beaucoup d’arbres du Brajil, du bois defquels les T einturiers fe feruent 5 on dit auffi qu’il y a des veines d’argent, notamment au lieu que les Sauuages nomment T myouba. Cet endroit de la Continente eft habité de ces Sauuages, que nous auonsdits’ap- peller P^’^/»Æm,quiontefté autresfois amis & confédérés des François, mais depuis que les Portugais iouïffentde ce Gouuernement, ils leurs font deuenus fortfubiets j & 1 0 font guerre continuelle auec les Sauuages voilîns nommés Tygmres. C H A P. III. Ifle vulgairement nommee de Fernand de Noronha. Avant que de pourfuiure le refte de la Continente , il ne nous faut pas ou- blier l'ille, qu’on nomme vulgairement de Fermnd àcNormhabc aucunesfois Loronha:\2.ç[\jiçMc eft fttuee fur la hauteur de trois degrés & trente ('comme veut Figuredo en fon routier, & autres Pilotes ) ou quarante & cinq fcrupuîes de la ligne vers le Sud : à cinquante ( comme le mefme Figuredohmet) ou à feptantelieuès('com- zo me ie trouue qu’il a efté remarqué prefque par tout ceux de noftre nation ) du Conti- nent du Bra^l en pleine mer : Elle a de long entre le Sud-oueft & le Nord-eft plus de deux lieues, de large vn plus d’vne. La plus grande part deLIfle eft plate, excepté quelques montagnes,qui s’y dreflent en plulieurs endroits j entre lefquelles il y en a vne , dont les rochers font droits de tous coftés , laquelle eft fort haute , de maniéré qu’elle femble vne tour , lors que premièrement on la voit en mer j auprès d’icelle il y en a vne autre moyennement ronde , qui fait que les deux enfemble reprefentent fort bien vne Eglilè auec fon clocher , d’où vient que les noftres les nomment de Kerck. Ceux qui ont biencon- fideré la forme de cette Ifle l’accomparent à vne fueille de laurier, car elle finit aux 3 o deux bouts en pointe. La terre y eft prefque par tout nitreufe,d’où vient que les fources dont elle abonde, & les torrents , qin au temps des pluyes , fçauoir depuis Auril iufques en Septembre, defeendent des coftaux, & arroufent Flfle de tous co- ftés , ont comme vn gouft de falpeftre. Neantmoins la terre y eft fertile , & produit mefme de foi plufieurs racines bonnes à manger, d’excellents melons, de certains pois vers , des febues & fembîables legumes : elle porte fur tout bien le A/ays , & des cottonniers. Claude d’AbbemUe qui y aborda auec les François lors qu’ils alloyent dans l’Ifle à^Marignany eferit, qu’il y croift ci & là des arbres fort beaux , ayans les fueilles d’vn verd gay comme le laurier, mais d’vne qualité fi acre &cauftique, que fi quelqu’vn apres les auoir mà'niees , porte les mains aux yeux , il y fent de gran- 40 des douleurs , & demeure aueugle quelques heures. Toutesfois il s’y trouue auflî vn autre arbre, les fueilles duquel apportent vn prefènt remede à cernai. Les Portugais y ont mis au temps pafte force boucs & cheures,Ie nombre def- quels eft merueilleufement accreu , toutesfois ils, font difficiles à prendre,’ à caufe des halliers & lieux raboteux où ils fe retirent: Ils y menèrent auffi des poules ôc quelque peu de-cheuaux & iuments. 11 s’y trouue grand nombre d’oifeaux , principalement de ceux qu’on nomme vulgairement furgates de la forme de leur queue , nous en auons fait mention ail- leurs; comme auffi de ceux de riuage de diuerfes fortes, entre lefquels il y en a d’vne efpece gros comme des oy es, defquels la poitrine eft d’vn beau rouge, qui enflent jo leur iauoc d’vne effrange maniéré. En outre les riuages de cette Ifle font prefque de tous coftés fort droits & difficiles à aborder, principalement du cofté du Nord-eft, où la mer roule de fort grofles ondes contre ,1e riuage, de forte qu’il eft prefque impoffible d’y defeendre auec les chaloupes. A la poin te dé l’Eft y a quelques petites Mes ou pluftoft rochers feparees de la grande par des canaux pleins de bancs, où les nauires ne peuuent pafler. Or au OCCIDENTALES LIVRE. XVI. 555? Or au coftc qui regarde l’Occident ou le Nord-oueft,il y a deux rades afTés bonnes, l’vne proche de la pointe Orientale de i’i/le, fous Je cofté Occidental d’vne certaine petite montagne , qui s’auance en mer comme vne peninfule, attachée à l’Ifle par vn eftroit col, on defcend en ce lieu afles facilement : il y a aufli vn ruilTeau qui fe précipité dVn prochain coftau dans la mer, fort commode pour y prendre de l’eau j & l’autre rade eft fous cette roche que nous auons dit reprefenter vne Eglife. Du cofté Oriental , prefque au milieu de l’Ifle, il y a vne petite baye, en forme de croiflant J ou vn torrent fait comme vneftang, & puis fe roule dans la baye, on y pour- roitaifemcnt faire des falines. I O La mer qui cnuironne l’Ifle eft fort poifTonneufe , fur tout du cofté du Nord & entre ces petites Iflettes : en la fàifon il y terrift force tortues de mer. cUude d' Abbeuille ïdàx. mention d’vne autre Me proche decette-ci,mais qui eft beau- coup plus petite, laquelle il nomme Ijle de Feu j dans laquelle ils trouuerent grande quantité d’oifeaux. Les Portugais de Pernambuco menèrent dans cette Me vn Portugais auecfèize ou dix fept Sauuages tant hommes que femmes ,* que les François l’an clolocxiiles ayans baptizés furie lieu,cmmenerent auec eux au Marignnni de forte que l’Me eft de- meuré depuis deferte,iufques à ce qu’elle a commencé d’eftrecultiuee par nos Belges, il y a quelques années qui y ont défia mené quelques habitans & peu de Negres. zo C H A P. IV. Cojîe de U Continente Septentrionale du Brafil , depaù la riuiere de Monguangape iujques à Rio Grande. CY defïus nous auons couru la cofte du ^/"^/Septentrional iufques àla riuie- re de Monguangape. Car au Liure precedent nous auons fuiui la Continen- te de 1 Amérique Méridionale & les Prouinces du Brajil iufques au Gouuer- nement de Paraiba , lequel nous auons acheué de deferire iufques au dernier Cap de cette Continente, qui regardant l’Orient, eft le plus auancé vers le Nord: car 30 des icelui la cofte retourne vers l’Oueft & le Nord, par vne fpacieufe eftenduè de terre iufques en la Nouuelle EJpagne. En outre cette partie de i’Amerique Méridio- nale qui eft enfermee entre Je fufHit Cap & le Marannon , eft appellee par quelques- vns d autres noms, des noftres elle eft nommee,de fa fituation Brajil Septentrional. Or en la deferiptiori des coftes ( car nous ne trouuons pas , que le long d’icelles, quel- ques lieux exceptes, il y ait prefque rien d’aftes cogneu & defcouuertjles Autheurs font fort differents ; quant à nous nous fuiuronsencetendroitles Autheurs des rou- tiers de mer , comme guides certaines , & fur tout Figuredo , lequel- en a expliqué le cours en Portugais, & des autres, principalement les obferuations exaéles de ceux de noftre nation, aufquels nous apporterons quelque clarté empruntée des François. 40 La cofte donc eftdifpofee en cette manière depuis la riuiere dt Monguangape ou félon les precedents Autheurs. De la riuiere de Monguangape baye nommee des Portugais de Freyciaon^ &■ des François de Frahifin, on conte vne lieue, comme il a efté remarqué par les noftres. Cette baye eft diftante de Paraiba de fept lieues , félon î’obfèruatioo de ceux de noftre nation; de la ligne fix degrés & vingt fcrupulcs vers le Sud. Elle eftfermee du cofté de 1 Eft par vne baffe pointe , de laquelle court en mer vn banc de rochers, lequel fe defcouure a maree bafïe, & ferme la plus grande partie de cette baye,com- me vne barre, rompant le coup à de groffes ondes que la mer roule vers le riuagc, de forte que derrière iceux douze ou quinze nauires y peuucnt commodément eftre 50 a l’anchre ; comme y feiourna quelque temps la flotte de la Compagnie des Indes Occidentales, conduite par \ KdnwïdX Bauldoûin Henri l’an cId Ioc xxv. La Con- tinente eft couuerte d vne bois efpais,entre lequel & le riuage fablonneuxil y a vn ma- rais ou eftang,qu’on peut paffer àgué,excepté aux mois des piuyes,auquel temps il eft le plus plein: il a de large enuiron vn quart de lieue,* au delà de ce' marais les Portu- gais ont bafti vne petite Eglife & quelques maifons,les habitans defquelles s’exercent à nourrir des vaches & au labourage. Yyy 2, Les I I 540 DESCRIPTION DES INDES Les Sauuages qui habitent és lieux circonuoifms fe nomment Tfg/^arâs,qin different peu ou point des autres en mœurs &: en langage ; ils ont efté depuis peu domptés des ^ Portugais , mais leur eftans encore ennemis de cœur, ils fe ioignirent auffi toft auec nos gens , & entreprirent de leur faire la guerre ; mais pource que les noftres qui n’e- ftoyent pas fournis de tout ce qui eftoit neceffaire, & qui mefmes fe haftoyét à d’autres deireins,nipeurentlaifrerdegarnifon,ilarriua qu apres leur départ, ces Sauuages fu- rent contraints de s’enfuir en diucrs quartiers & plufieurs furent tués des Portugais : toutcsfois quelques-vns dentr’eux s’en vindrentauec les noftres , que nous auons veu fouuent en ces Prouinces vnies appris en noftre langue, fçauoir efcrire, & eftre in- ftruids aux principes de la Religion Chreftienne, nous auons receu en quelque fa- 1 o çon d’eux la cognoiflance de ces régions. De la baye de Trahifon iufques à la moyenne riuiere de Cromatyn on conte vne lieue : Figuredo la nomme Camaratuba ( comme auffi nos Sauuages ) &; efcrit qu a fon riuage de main gauche finiflent les limites du Gouuernement de Paraiba : on ne peut monter cette riuiere qu auec des chaloupes, toutesfois les P ortugais auoyent bafti fur fon riuage vn moulin à fucre,que nos gens mirent bas : à quatre heures de cheipin delà au dedans du pais dcmeuroyent les Tyguares.qxxi habitoyent le village le Capitaine defquels fenommoit ; lequel craignant , apres le départ des q noftres, s’enfuit vers les A enuiron quatre lieues de cette riuiere f félon Figuredo ;fuit vn Cap, derrière le- to quel s’oiîure vne baye , appellee des Portugais Baya Formofa ,• à enuiron demi-lieuë de laquelle vers l’Eft fort de la Continente vne petite riuiere, que Figuredo nomme Rio Hmgau‘,il femble que d’autres l’appellent CongaycuiCQtto. riuiere eft profonde dans fon entree de douze piés , de forte que les barques y péuuent monter quatre ou cinq lieues haut où il y a vn village de Portugais , qui cultiuent des cannes de fucre, & coi^ pent beaucoup de bois de BrafilMos Sauuages rapportent que la Baya Formofa fe nom- me en leur langue ^artapicaba , qu’il y croift par tout des arbres de bois de Brafl^ & que les François auoyent couftume d’y aborder, auant que les Portugais les empef- chaflenr. De la baye Formofa on conte vne lieue iufques àla riuiere de Curumatat^tWc eft afles 5 6 profonde & qui fournit d’vn port commode & affeuré. Suit apres à demi-lieuë delà vne riuiere que Figuredo nommeiîi^? Subauma -, & vn peu plus outre vne pointe de terre,laquelle on nomme Punta dePipayàc la forme d’vn rocher qui eft au deuant, der- riereJaqiielleilyavneaftes bonne rade. Suit apres vnecoftc fans port &: bocageufe, qu’on nomme vulgairement au dedans de la Continente çAlehcGui- raira. Nos Sauuages content quatre lieuës de Curumafau iafques z Paraàambuco ou Guirairay&c de Guiraira à la riuiere de T treyrickyttois : on peut couper là du bois iaune, qu’ils nomment Tatayouba : & difent qu’il s’y trouue au dedans du pais des veines de fer qu’ils appellent Suit par apres à vne lieuë delà ( félon nos Sauuages ) la riuiere PiranguCy & le port 40 que les Portugais nomment dos Bufios. Duquel iufques à vne autre pointe de terre nommee PuntaNegra il y a trois lieuës.felon P'/^»;'^»^^’j du Peru,non gueres loin de ,^uito,cômc le voyage de Pizarre[duquel nous parlerons bien toft j fait foi ; fort dans la mer entrecoupé de plufieurs Iftes à JO deux ou trois degrés de la ligne vers IeNord,& à quelques centaines de lieues de noquevers le Leuant:de forte que c’eft merueille quHerr. qui a employé dans fbn Hi- ftoire cette expédition de Pizarre,bi lequel félon mon iugement à bien eferit ailleurs, que toutes les riuieres qui fourdentau deffiis & au deflous de la vallee do Xauxa,tom~ bentdans le Paraguay & delà par la riuiere de la P lata dans lamer Atlantique,à peu tant faillir que de faire naiftrc/’C?;'^’l^(^;^ près de Cufco ; combien que ie n’ignorepas , queîes Efpagnols du Peru tienfient que le Marannon prenne fon origine dans le Parlement de Zzz Enfin f^6 DESCRIPTION DES INDES Enfin le Maramof^,(oit que ce foit le nom d’vne rîuiere ou non ( car à' Ahheuiüe nit que ce foie vneriuiere, comme nous verrons bien tdftj eft vnanimement recogneu de toutes les Chartes Geografiques, & routiers des Portugais eftré au lieu où Fordre de noftre defeription nous conduit maintenant; Or ces îxois riuicres qui fe conioignent dans cette baye, au dedans de laquelle eft Wfle de UMaragmn ; & notamment celle du milieu nommée d’vn nom particulier fdurdent forcauant dans le pais, & defeendent droit du Midy vers le Nord, derrière les Préuinces du 5r^/; veu que les au- tïeSi£<^2.vioÏT l'Oremque ou'l’Orelîane jurnSMis des montagnes à\i Peru ou du Nouueau Royaume d£ Grenadeiàe(cenàent de TOueft ou Sud-ouéft vers l’Eft bu Nord-eft. Voila pourquoi pour ofter tout à fait cette ambiguité , nous attribuerons le nom àe Maran- 1 6 non à cette riuiere ou riuieres , qui fe defehargent énfèmble dans cette baye & fè pref- fent entre plufieurs Mes ; & nous le conterons entre les Prouinces du Rrafil Septentrio- nali^omcecyàolyueîra K-Vithem Portugais ,lamctentre les Gouuernemënts que les Portugais pofiTedent dans le Brafil. Or en la defeription d’icelle nous fuiurons prin- cipalement Claude d' Àbbeuille Capucin,lequel a fait imprimer à Paris, lan cIdIocxii, fon Commentaire iniiixxlé, Hijioire de la mijjîon des Peres Capucins en l'ijle de Maragnan. C H A P. IX. ' , Defeription de Maragnariy^/o;? Claude d’ Abbeuille. T O V s lesÂutheursGeografiques'(dit-il )quiontefcritdu n ont iamais 2,0 fait mention de l’Ille de LMaragnaniConPoievi qu’ils parlent fouuent de la riuie- re de MarannoniOpxieÇc du tout ihcognuë en ces quartiers, fi ce n’eft qu'on vueil- le prendre la baye de pour vneriuiere, ou donner ce nom âquelquVne des riuieres qui y fortent , ce qui feroit vne grande faute , car elles ont chacunes leur nom propre.commeü fera dit ci-apres , &des naturels habitans n’attribuent ce nom à aucu- ne riuiere, mais a vne Me.En outre cette baye eft longue vers la mer entre deux cornes de terre plus de v lietiës,& à prefque autant de tour au dedans delà terre ferme. Vers le Leuanr elle eft barree premièrement dVne petite Me, que les Sauuages ap- pellent Vpaonmiriy èc les François maintenant Ijlette de S. Anne; fuit apres à quelques lieues delà lagrandeîïle de Maragnan, ayant de tour enuiron quarante & cinq lieu es, 1 0 &diftante delà ligné vers le Sud deux degîés & trente fcrupules. . Au fond delà baye fortent trois belles riuferes, vis à vis de cette grande Me de ragnan,^ la ceignent de toutes parts, de ïbrte que d’vn cofté elle eft à cinq ou fix lieues de laContinenre,de l’autre à deux ou trois, & des autres plus ou moins. Lapremiere ri- uiere bc la plus Orientale s appelle Mounin , qui defeend xl ou l lieues au dedans • du pais de fon emboucheure,& eft: vn quart de lieuelarge en fon emboucheure. La fé- condé ou celle du milieu fe homme Taboucourouj large enuiron demi-lieuë en fon em- boucheure,&’defdend déplus de xl ou peut eftre l lieues du dedans des terres. La troifieme ou la plus Occidentale eft dite Miary , large en la fortie de cinq ou fix lieues, qui fourd, félon la commune opinion, fous le Tropique mefme du Capricor-40 ne, d’où les Sauuages difent qu’elle defcend.il y a encore d’autres riuieres , comme Ma- rac0U(\ni entre dans la riuiere Pinare-yOe Pinareconità^mMiaryi à enuiron lxx ou L x XX lieues au defîus de fon emboucheure. Et outre celle-là encore vne autre, qui eft appellee OuaieoupMeyyxeWe fortant des forefts entre aufli à^nsMiary : qui fait que Miary defeend fort vifte, comme aulîi TaboucourouMc^xxeWe eft aucunement contrainte entre deux rochers prefque en fon emboucheure mefme,-d’où vient que ces riuieres efleuent de fort groftes ondes, & rendent TMe de d’vn difficile accès :ioind à cela les baffes & bancs defquels elle eft enuironnee en dehors vers la mer,de forte que ceux qui veulent entrer dans cette baye & aller à l’Me,ont befoin de bien prendre garde à foi d’auoir des Pilotes expérimentés : Car cette Me eft comme la clef de cette Prouince ; 5: 0 or le refte de la cofte tant vers FEft que l’Oueft eft fort dangercufè,à caufe des baffes & bancs de fable, dont elle eftGouuerre,depuisleCap de laTorîuë i\xC(\nes à celui bres fecsy comme le François l’appellent, s’eftendans en mer quatre ou cinq lieues quelquesfois danantage,- de mefme eft la cofte depuis le Cap de Tapoujtapereeyèxîet- melabaye du cofté de l’Oueft ,iufques à la grande riuiere des K^maz,on€S'. car elle eft par tout bordée d’vn nombre infini d’Mes, & la cofte mefme eft couuerte entieremenc de bois OCCIDENTALES. LIVRE XVI. ^47 de bois efpais d’arbres de Mugais(les François les zpŸ^\\cnx:.‘^pparitHriers(C[w\ ont leurs branches, tellement entrelacees enfemble, qu’ils, bordent la code comme vnchaye d erpines j qui ( outre que le fable fe fond fous les piésjempefche ceux qui defeendent à terre d’entrer dans le païs. Parainlilacofte eftant ain/î dilpofec d’vncofté & d’autreiufques à ladite Ifle,il nê refte feulement que deux pàflagespour entrer dans la baye & aller à ridcjl’vn entre le Cap^« Arbres fecs & la petite Ifle de-S". Anne s qui n’eft pas fans danger, & mefme eft redouté de ceux qui le fçauent fort bien j toutesfois les grands nauires ne peuuent monter plus haut qu’icelle Iflc,mais les petits peuuent aller iufques à la grande. L’au- 1 0 tre palfage quieddefautre cofté derifle de5’.,/^»z2É’aell:é trouué depuis peu^il eft bien propre pour les grands nauiresjmais on ne doit pas entreprendre d’y pafter fans Pilo- te & encore à certaines faifons de l’annee. Les naturels habitans de la grande Ifle de MAr agnaniTiOïaxïxzvsx. leurs villages Oc ou Taue^o^x confiftenten quatre grandes caba- nes feulement, conioints en quarré à la façon des Cloiftres , de forte qu’ils enferment vne grande court au milieu: ils font d’ordinaire longs de deux cents pas & par fois de trois cents, mefmes de cinq cents 5 & vingt cinq ou trente pies de large; compofés de hauts troncs d’arbres & de branches liées enfemblc,-couuertes du basiulques au haut de fueilles de palmes à l’encontre des iniures de l’aïr j Ils nomment les arbres de palmes ?inào,Q^\ y nailTent ci & là dans les forefts en grande abondan ce. 20 II y a dans cettegrande Ifle vingt lepc de tels villages ,de diuerfos grandeurs ; celui auquel on va le premier venant de l’Ifle de ^;2;?^,fe nomme celui qui lut eft plus proche de trois eftangs voiflnsj letroifieme Carnoupiop •.Iç.o^zix.xzvcxç, Buayne :\e. cinquième Ira-Endaue:\ç, fixieme Arofoue-leuue :\ç, Pindot une :\c huiélieme Oua-Timhooup : leneufieme & ip\\xs luniparan ;le dixième Toroiepeep: Ponzieme lanouarem :\e douzième Ouarapiran :\q treizième CoyeupAç, quatorzième Bujfa-ouap : le quinzième Aïaracana-pijtp : le feizieme ‘Taper oùjfou : le dix foptieme T ?- rooup: le dix huiélieme Aketeuue: le dix neufieme Cara.na.-uue : le vingtième leuireu: le vingt vnieme Eucaton : le vingt deuxieme le petit le vingt troifleme Oury- Ouaf- fueupe:\t vingt quatrième le vingt cinquième le vingt flxieme 3 O Euapar ;le vingt foptieme Meruouty-Euue, Dans ces villages iLs’ytrouue par fois deux ou trois cents, par fois cinq ou flx cents habitans ; de forte qùe les François iugeoyent que l’Ifle eftoit pour lors habitée de dix ou douze mille hommes. C H A P. X. Qualités de Ïaïr ^ de la ferre de Mlle de Maragnan. Le Ciel eft le plus fouuent clair dans cette Ifle, & les iours d’ordinaire forains, fans qu’il y aitprefquede froid ni des feicherelTes immodérées : il y a fort peu de nuees & vapeurs mal faines aux habitans: nulles tempeftes ou tourbillons de vent,nulles neiges ou grefle,peu de tonnerres,!! ce n’eft au mois des pluyes ; maisil y a 40 par fois des efclairs fur le foir,& mefme au matin, encore que le Ciel foit fort forain. Or quand le Soleil retourne du Tropique du Capricorne vers celuidu Chancre, il chalTe en toutes ces régions les pluyes deuant foi, xl iours le plus fouuent deuant qu’il monte furlatefte,& apres qu’il a pafle le Zenith,il y pleut deux mois ouauplus trois continuellement , félon la diuerflté des clymats j & en cette Ifle dés la fin de Feburier iufques au commencement ou au rnilieu de luin. Or apres le folftice d’efté , quand le Soleil retourne vers le Tropique du Capricorne, il fe leuedes vents deuers l’Orient ( qu on nomme vulgairement Brifes .) & d’autant plus qu’il approche de leurZenith, d’autant plus foufflent-ils fort ,• & d’autant plus qu’il s en efloigne, d'autant plus font- ils foiblesuls fe leuent prefque toufiours apres le crepufculeTçauoir for les fept ou huiét yo heuresau matin, & à mefureque le Soleil feleue fur l’Horifon , ils fe renforcent, apres midy ils diminuent infonfiblement , & le Soleil eftant couché ils fe calment du tout. On nefontpourtantpasencetteiflenien laContinentevoifine autre ventque de l’O- rient,lequel tempere d’vne bonne fortelà chaleur, & rend l’aïr for tout foin. Et pource que cetteifle eft fi peu efloignee de la ligne, elle iouïft tout du long de l’annee de iours & de nuids égaux & d’vn tempérament d’aïr toufiours vli : & difficilement pourroit-on trouuer aucun clymat plus agréable ni plus commode pour eftre habité des hommes. Zzz 2, Le j48 description des INDES Le terroir de cette Me combien qu’il Ibit de toutes parts eniiironné de la mefj neantmoins il abonde en fontaines & fourcés d’eaux douces , claires & fort faines : il eftarrouféde beaucoup de ruiffeaux: il eft 11 fertile , qü’encore qu’on ne le fume ni ne laiffe repofer iaraais,toutesfois il rend \QMa.ys ( queles habitans de cette Me nomment Auâttn ) dans le troifieme mois apres qu il eft femé, auec vnegrande vfure,& bien fou- uenr tous les ans. Les racines de ^^OTWdefquelles ils fe feruent ordinairement au lieu de blé y croiffent promptement fort groffes: les melons y meurilfent dans le fécond mois qu’oiiles a femés,& on en cueille prefque tous les mois de l’an : la mefme railbn eft des autres fruiéts. En outre les'marchandifes qu’on peut tirerde cette Me & dé la Continente, font lo celles-ci ; du bois de Brafîkcomm^ auffi du iaune Sc autres du cotton, du Rocou^ qui eft vne certaine teinture rouge, qui fe trouuè là partout en grande abondance jd’vne cer- taine efpece de lacque : & du baulme,què lequel nous fuiuons ici, compare à celui d’Arabie; du tabac fort boni du poiure ou axi,& autres femblables. Or ceux qui ont plus curieufement efprouuéles conditions de la terre, iugenr, qu’elle eft fort propre aux cannes de fucre. A la cofte de la mer il s’y trouue fouuent de l’ambre gris. ' ' La terre n’eft pas auffi deft'ournie de pierreries , car il fe trouue au dedans d’icélle d’vne certaine efpece de iaïpe,comme ils veulent , duquel ils policent ces petites pier- rettes qu’ils portent à leurs leures: comme auffi vue veine de cryftal blanc & rouge, 2.0 plus dur que les diamans nommés des François d'Aknço?^ , & plufieurs. autres telles pierres. . ; - Tout ce qui eft requis pour baftir s’y trouue par toutjdu bois dur & ferme, des pier- res propres, de l’argille auffi bonnepour en faire des briques , enfin du ciment & de la chaux. v- ^ = Au refte cette Me n’eft pas cftenduè en plattes campagnes, ni ne fe drefle en hautes ( montagnes,mais elle eft releuee par moyens coftaux, au pié defquels fburdent des fon- taines fort claires, qui arroufent la plaine, & font beaucoup de ruifleaux & torrents, où les Saunages vont auec leurs canoas. Le refte eft couuert de bois elpais ( entre lefquels excellent les, palmes, comme nous dirons bien toft)fort propres pourlachaffe des 50 beftes&desoîfeaux. , \ C H A P. XL üArbres frmSîiers qui fi trouuent dans cette IJle. CEt T E Me a beaucoup d’arbres fruidiers qui fe trouuent auffi au refte du /f/,!efquels nousauons deferit ci-deftus , de forte que ce feroitvne chofe fuper- fluë d’en parler derechef ici j n’eftoit que les noms en font vnpeu differents, & qu’il fomble d' Abheuille en ayeobferué plus diligemment les marques , voila pourquoiie n’eftime pas faire chofe defagreable au Le6tcur,de les deforire ici félon là 40 remarque. Entre iceux excelle /’^r^j^ij^jfurpaffant bien fouuent en hauteur &grof- feur de tronc nos pommiers ou poiriers; les fueilles font aucunement femblables à celles du noyer; les fleurs petites, rougeaftres &d’affés bonne odeur, qui fe faitfentir de loin : il porte vnfruid dediuerfes formes & couleurs : carily en a vn femblable aux poires , iannes par dehors lors qu’il eft meur , au dedans d’vne chair blanche & pleine de fuc ; au bout duquel croift vne certaine noix , de la forme d’vn roignon de mouton, couuert d’vne dure efcorce oleagineufe,de forte qu’elle s enflammeauffi toft,le noyau eft comme vne amende. Vn autre qui eft plus rouge , mais le fuc en eft plus aigre. Le troifieme eft de beaucoup plus petit & plus aigre,duquel ils font du vinaigre. Le qua- trième eft fort gros & d’vn bon gouft, qu’ils nommenro^f^/<7#-0^s!^^^ .-Ils commen- jo cent à meurir tous au mois de Mars & Auril, & prefque tous les mois de l’an. Les Saunages en preffent vne liqueur, qu’ils nommenr<_//(frf/tf» C^ÿ»;w ou Acaûuig, blanche & fort bonne à boire, agréable fur tout au palais. Il y a par toutvn grand nombre de de ces arbres, car ils viennent aifementdes noix, & portent la fécondé annee. Mais nous auons ailés parié de ces arbres ci-deffus. Le Bannanne eft vn grand arbre ayant de grandes fueilles , longues de plus d’vn coudee OCCIDENTALES, LIVRE XVI. y4P . coudee & larges de deux paulmes: fbn fruideftprefqiiede lagrofl'eur d’vn concom- bre,d'vne peau iaune.mais la chair en eft blanche comme d’vne pomme. Le porte vn fruid comme vn abricot j mais il eft vn peu plus gros & fans noyau, d’vne dôüce & agréable faueur. Nous Tauons defcrit ci-deftus fous le nom de Matigaba. '•■'>0 Viracaha eft vn grand arbre,ayant des branches efparfes & elpaiftes au fommet, fes fueilles font prefquefemblables à celles du figuyetifon fruid eft de la forme d’vne poi- re, ayant l'efcorce iaunaftre, fa chair eft au dedans d’vn bon gouft, comme ils croyent, d vne bonne nourriture. ^ . I O L'Ouaieroua eft vn haut & fpacieux arbre, ayant les fueilles comme Iccheftieymais vn peu plus grandes, & fes fleurs font d’vn iaune clair; il porte vn fruid long d’vn pié, &femblable aux plus gros melons, iaune dedans & dehors, d’vn bon gouft & d’vne bonne odeur, mais il eft plein de petits noyaux noirs. 'l.tIumpapo\iIampabat(kvngï2LnàzthïQ branchu ,qui a les fueilles aufli comme le chelhe, mais deux fois aufli grandes, les fleurs en font blanches, &le fruid rond comme vne pomme ; quand il n’eft pas meur il eft'umer : les Saunages le mafchent* 2,0 pour en tirer le fuc, qui encore qu’il foit clair & blanc , toutesfois fl on en frotte la face ou les mains, dans peu d’heure il de- uient tellement noir , qu’il fbmble que ce foit de l’encre,fans qu’il fe puiflTe lauer,mais huidf ou dix iours apres il fe paflfe de foi.- . mefme,les Saunages fe teignent la peau de ce ius. Quand il eft meur, il eft iaune de- dans & dehors & eft d’vn bon gouft. Nous auons ci-deflTus efcrit le mefme arbre fous ^ O le nom de lampaba , &nous en auons fait mettre ici la figure tiree des Exotiques du fameux Charles de tBclufe. L' Agoutitreua ou Acutitreua eft vn arbre Ipacieux , ayant les fueilles comme l’oran- ger,mais plus larges; les fleurs rougeaftres, le fruid en eft gros, d’vne efcorce verde,au dedans il y a de petits grains comme ceux de la grenade,doux & agréables au palais. UAraticou eft femblable au precedent 40 en fueilles & en fleurs , mais le fruid eft vn peu plus gros , d’vn bon gouft & d’vne odeur fort agréable. Le Caoup a les fueilles de pommier, mais elles font plus larges,fes fleurs font meflees de iaune &: de rouge ; il porte vn fruid femblable en formel en gouft à l’orange, qui eft plein de noyaux. VeutiouirapçSi vn grand arbre & large, qui a de petites fueilles, des fleurs rouges, vn petit fruid, qui ne reflTemble pas mal tant en forme qu’en grolfeur à vne groflelle. L’ Ama-uueo\x Ambaiba3.ipŸmch& fort tant en fueilles qu’en fruids au figuyer. Le GoyaueowMorgoya eft vne efpece d’arbriflreau,qui embralTe les arbres, il a les fueil- 50 les comme la campanelle, vne fort belle fleur large d’vne paulme, dont les fueilles font velues &: compofees en forme d’eftoille,de couleur de pourpre ; il porte vn fruid de la grolfeur d’vn œuf, mais plus rond, plein de grains , comiert d’vne efcorce meflee de verd & de iaune, d’vn bon gouft quand il eft cuit : voila pourquoi on le confit auec du fucre. 11 s’y trouue de quatre fortes de palmes ; la première fe nomme Ouacourü , qui eft la vraye palme des Indiens, portantles fueilles dites findo^ defquelles ils couurent leurs Z Z Z 5 loges : f 550 DESCRIPTION DES INDÉS loges telle porte des noix longues femblables en forme de groffeut à vn œuf dbye, d’vne coque ligneufe , contenant quatre ou'cinq noyaux longs , d’vn bon gouft , def- quels les Saunages tirent vne huile fort douce& fort bonne. On trouue dans le tronc de l’arbre vne moüelle blanche, qui eft félon la groffeur d.e.i’arbrejplus Qü moins grolTe quelaiambed’vn homme, les Sauuages la nomment Ouacûury-rûuan, c^uils mangent crue & cuite. ' : . v Ils appellent l’autre elpece Meuruty-uue, qui porte auffi vnfruiâ; de la groffeur dVn œuf, dont lacqque eft par .dehors rougeaftre & marquetee de petites, taches noires, rouges au dedans 5 qui n’enferme au dedans qu’vnnoyau,doux & bon mangerj.,, Lâtroifieme s’appelle r^4/4!fcmblable en tronc & en fueilles aux precedentes, elle lo porte Tes fruids par grappe, de la groffeur des oliues, deux cents & par fois trois cents en yne grappe, :.deforte qu’yn homme àpeine en peut porter vne. La quatrième efpeceeftdite Car ana-uue :^oïtç'\ç.s fueilles larges oomme des fouftlets,defquelles les femmes fe ferùent àmefôiè vfage.,elle porte.yn fruidfort fem- blable,â vne prune de damas. Peut eftre qu on doit mettre aulïiau rang des palmes vn arbre , duquel nous auons feulement recouuert le fruid, que nous auons fait peindre ci-deffous, quiauôitlaco- qub ligneufe & fort dure , dans laquelle y auok deux noix de la mefme groffeur, qu’on en peut voir vne reprefentee auprès de la figure du fruiôf. ; Le Tûucon-uue a les fueilles fort femblables aux deux premières eipeces de palmes, mais elles font pleines d’aiguillons , comqie aulli le tronc & les branches, la moüelle eft au dedans noire & dure, les Sauuages fo feruentdefonbois à faire leurs arcs 6c leurs maffuës. Ses fruids croiffent par grappes, qu’ils nomment Tocom^qm font ronds & iaunes par dehors quand ils font meurs, le noyau en eft blanc & fort doux. Le Pacoury eft vn grand & Ipacieux arbre, ayant les fueilles femblables au pommier, fa fleur blanche, fonfruidgros comme deux poings, la peau d’icelui efpaifled'vnde- mi poulce,qui eft fort eftimè quand il eft cuit & confi’t ; il contient en outre deux ou trois noyaux très-bons. ÜFua-ouaJfourac^L vn grand arbre, ayant les fueilles d’vn poirier, les fleurs blan- ches,!! porte vn fruid femblable à celui du Pacoury y dVne peau iaune,dvne faueur douce, l’oflelet eft fait au dedans comme celui d'vn percer, le noyau vn peu plus gros qu’vne amende & de mefme gouft. ^ L'VVamenbec I OCCIDENTALES LIVRE. XVI. V VVAmenbec ne différé pas beaucoup en grandeur, fueillesjfleurs&fruid du pom- mier : le fruid en eft iaune & délicat ; mais on n’en mange point le noyau, à caufe de fa tres-grandeafpretcou^crimonie. ' Le Copouich-ouajfoti eft fort femblable en fueilles & fruiff au poirier, û ce n’eft que le fruid eft plus long ou plus iaüne,& contient ail dedans trois offélet^ fdrt dufé. ^ T ' Le Cofouich-aiduŸ eft de la grandeur d-vn jpruhietjayant les füéillescomfiiè IdtHa- ftagner,les fleurs blanches meflecs de iaune, il porte vn fruid comme vne petite' pdm- me,iaune,auec vn petit os au dedans, dont le noyau eft bon à manger. VAcdia eft vn grahd arbre,ày‘aht les füéflles fembiabîes au poirier, les fleurs rouges; I O il porte vn fruid comme vfle petitèToiïinîe,maisquicft plus long &d’vn go uft plus aigre. i \ ^ À’ Taûdranda eft fot t femblâblê aü ptuniet ^mais il a les fueilles plus larges , fa fleur eft blanche ; il porte vn fruid gros comme les deux poings,& bon à manger lors qu’il eft cuit r ies Sauùages font 4'icelüi vne certaine boüillie fur tout bonne & faine àl'efto- màchiqü’ils nomment ’ L'Onhctu a les fueilles femblâbles 'àu Mangas , il porte vn fruid fort femblable à vn pcrcet, iaune dedans & dehors quandilèft meur; iln’eftpas bon à manger fi cenTeft quand il tombe de foi-mefme à Caufede fa trop grande aigreur ; nous en auons encore fait mentiomci-deffus. , lo Le Pdiûurd potte desfruids femblables àüx abricots, combien que l’arbre foit beau- coup plus petit. ’ Wud-cAue auïfi grand qùVii poirier* ayant les fueilles comme roranger,lafleür eft iaunaftre ,‘iî porte vii fruid loUg comme yn œufiaUhe & d vn bon gouft. ; / ‘ Le Piiom eft femblable èn graïideur,füèilles & fruids au prunier, mais le ftuid en eft plus doux. - . . J ' VAuenonhouih-aMou eft fort femblable au pommier , mais fes fruids reffemblent mieux aux prunes, fifee n eft ^U’ils font iaüties & plus doux;iis ont vn offelet fort petit. VTachka eft fort femblable au prunier, il a les fleurs iaunes , mais fes fruids font du tout femblables aux prunes,ils font iaunes, & ont vn noyau blanc & doux. ■ 30 II y a en outre le C^oueen & le MmkÂkene qui different peu des precedents. l!Ouâgïron r\2\^ le pluS foüuent dans les fables dü riuage,& ne croift pas plus haut qu’vn arbriffeaujil porte vn fruid comme vnegroffe prune,rouge de couleur. Le Morecii fe plâift aufli fur les riuages fâblonneux, fon fruid eft fort aigre. L’Amytou a les fueilles comme le poirier,mais plus longues,fcs fleurs font blanches î il porte vn fruid delagroffeur dVne pomme, plein de petites boffettes comme vn concombre, & d’vn gouft dVn pcrcet. Le Mouroure ne différé pas beaucoup dVn prunier, il porte des fleurs iaunes , & des fruids femblables-aux cerifes,auec de longues queues, & vn petit os,iachâir en eft iau- ne & douce. 40 L^Fmpirup eft vn arbre fort plein d’aiguillons , fes fueilles font comme celles du noyer , fes fleurs font extrêmement bien bigarrées de iaune, bleu & roüge j il porté vn fruid rond comme vne pomme & fort bon à manger, mais on ne le cueille qu’aux mois des pluyes. JÜOumery porte vn fruid comme vne greffe poire î l'Arafà comme vne petite pom- * me; qui font contésjlors qu’ils font meurs,entre les premiers &meilleursfrüids. ■ Le ?ekey a par fois le tronc fi gros, qu’à peine trois voire quatre hommes le peuuent embraffer,il a des fueilles de prunier, de porte vn fruid gros comme les deux poingsi d’vne efcorce efpaiffe & dure , laquelle contient dedans foi trois ou quatre fruids iau^ nés, de la forme d’vn roignon, d’vne fort bonne odeur,& dVn gouft agréable , àiiec vn y O os fort aigu. Voyés ce que nous en auons dit ci-deffus. l’en obmets plufieurs autres pour eftre brief; & ie foupçonnerois que lès noms de ceux que fai rapporté ont efté quelque peu changés desFrançois , qui prononcent mal aifement & eferiuent encore auec plus de difficulté cette lettre W,fort familière, comme il femble, à ces nations ; or il faut conférer les deferiptions d’iceux auec celles de ceux que nous auons deferits au precedent Liure, afin qu'on puiffe d’autant mieux voir ce qu’il y a entr’eux de femblable oude different. 552. DESCRIPTION DES INDES C H A P. XII. & De quelques fJerbes & Plantes de çette Ifle de Maragnan. Entre toutes les plantes de cette lïiçyt Ananas mérité à bon droit la principa- ?le place 3 dufruid de laquelle nous auons défia fait plufieurs fois mention &en ’ auons donné la figure, . Âpres fuit la Karouata, £oït fèmblable à la premiere,fice n eft quelle produit des fueil- les longues d\ne brade & larges de. deux i o pouîces, efpailTes & clpineufcs d’vn cofté & dautrc ,-au milieu delquelles fort vne tefté, à laquelle naififent à quelques deux pajilmcs de terre , cinquante fruits & par fois beaur coup dauantage, de la longueur d’vn doigt entâlTés enfemble,de la forme dVne pyrami- de triangulaire 3 iaunaftres dehors & dedans, d’vn bon gouft & agréables au palais, Ayant recouuert de Tlfie de T abago de ces fruids aflfés recens , nous en auons fait peindre vn 2.0 entier & vn coupé par le milieu, lafigure def- quels nous auons fait mettre ici. Ceux de noftrc païs lesnomfncnt Sly^tongen 3 bc le§ François Cypreceuijile. Or c*eft vn frufd plein dVne matière fpongieufe & de plufieurs grains ou rnenuë femencejfon fuc eft d’vn aigre-doux , /agréable au palais , mais fi on en mange beaucoup , il fait làigner la langue & les genciues , d’où vient qu’il a efté ainfi nommé des noftres.- il eft fort bon és fiebures ^ 0 & contre le feorbut ;; elle commence à met- tre fbnfruid hors apres les pluyes. Î^Trammacaru eft vne plante admirable & prefque monftrueufcjcàr elle croift hau- te de dix ou douze paulmes,de la grofîeur de la iambe d’vn homme, elle efpart trois ou quatre branches de mefme grandeur ; & le tronc eft fi tendre, qu’il eft aifé de couper aucc vne eipee plufieurs de ces plantes d’vn coup,-refcorçe en eftverdei&lamoüelle blanche , elle ne porte nuîles fueilîes , mais des elpines longues d’vn doigt ; elle porte des fleurs rouges entremeflees de bleu , aufquelles fuccedent vn fruid de la grofteur d’vn poing, d’vn fin rouge par dehors, & blanc par dedans, rempli de petits grains, que l’on mange auec ,• il eft d’vn bon gouft,qui ne différé en rien de celui de nos fraifès. 40 Le Gyromon eft vne plante qui a les fueilîes & les fleurs prefque femblables à celles de lacitroüille j le fruid en eft rond & plat, auec vne efcorce forttendre,- eftant cuit il eft d’vn manger fortfàin. Le ou eft prefque fèmblable àla precedente, fi cen’eftque lefruideft plus long & gros: & a l’efcorce beaucoup plus dure. DVua-een fcmble eftre vne efpece de melon, elle porte vn fruid de lagroftèur de la. tefte d’vn homme,par dehors d’vn verd gay, dedans il eft tout plein d’vne chair blan- che,meflee de petits grains noirs, remplie d’vn fuc fort doux & agrcable,de forte qu’on le mange crud comme vne pomme: eftant coupé par le milieu il fediffoult tout en eau, & fionlecreufè feulementaufli toft il remplit le vuided’vnç fort douce liqueur, yo laquelle recree merueilleufement. La font leurs febues, qui font fort groftès, plates, & de diuerfes cour leurs : Or Cû^manda-m'n font leurs pois 3 plus longs que ronds, & de meilleur gouft queîesnoftresjparfoisil s’en troiiue dix hiiidou vingt dans vnegoufTc ou efeoffe. Ci-deffus nous auons ouy de de lery, queîes febues &lespoisroncainfî appellés des T moapinambaults. Les I OCCIDENTALES. LIVRE XVI. ^5 Les racines qu’on nomme ailleurs Patates y s’appellent là Teteuch-, de Lery & T'heuet difent que leurs Sauuages les nommoyenc Hetich. Les Caras (ont d’autres racines, qui font bien plus folides que les mais elles ne font pas fi bonnes de beaucoup. 'L^.Taya-ouaJfou eft vne racine ronde & blanche comme vne raue de nos pais , d’vn bon gouftquand elle eft cuite. 'Lz Mandant vnetrufle de terre qu’vne racine, les la nomment Manobt ,• voyés la figure ci-delTuSjCar ie croi que c’eft la mefme plante. 'LzCMamochcik. vnegrofiTe racine d’vne plante qu’ils nomment Manieup , elle porte lo des fueilles fort femblables à celle du figuyer, les Sauuages en font de la farine, de la- quelle ils fe feruent au lieu de blé. La Marachet & IzCMamoch-etCy comme aufli la Ma- nioch-caue font racines prefque de mefme efpece & vfage , qui different peu entr'elles : de mefme que rFjènpopontta qui eft rouge. C H A P. XIII. Des dîners Oijèaux qui fi trouuent dans cette Ifle O* dans U Continente ‘uoifine. IL fe trouue en outre dans cette Ifie deMaragnan & dans laContinente qui l’aduoi- fine vne grande abondance & diuerfité déroutes fortes d’oifeaux, quelques-vns defquels nous deferirons ici briefuement, comme nous les auons tirés desConx- mentaires d" Ahheuille François, afin de nepafter rien à la leger. Entre les oifeauxde proye & qui viuent de rapine,/’<5«jr/î-<î»4j^^ mérité à bon droit ^ le premier lieu ( or on remarque que de Lery efcrit,que les Sauuages Touaufinarnhaults appelloyent tous les oifeaux d vn nom commun Oura ou Ouyra ) qui eft vn oifeau deux fois plus grand qu’vn aigle,couuert d’vn fort beau plumage, d’vne telle force & coura- ge, qu’il rauit & deuore vne brebis entiere,& iette aifementles hommes par terre,mef- men’efpargnepasles cerfs :ie mefouuiend’auoir veu vneplume quiauoit, comme ic penfe,efté tiree des ailes de cette oifeau, laquelle auoit plus dVne aulne de ces pais de 05 long, d’vne belle couleur,& bigarrée de petites taches rondes , comme font les poules qu’on apporte d’Afrique : il a aufli le beefort, & les ongles extrêmement aigus. jJOuirata-ouyran fécondé le precedent en force & en grandeur ,• & l’ Ouyra-ouajfi- Tûuytan & plufieurs autres oifeaux de proye,qui font plus gros ou quelque peu plus pe- tits que des aigles,d’vne forme finguliere,& élégamment bigarrés de plumes de diuer- fes couleurs. Il s’y trouue aufli par tout vn grand nombre & vne grande variété de perroquets. 'LotJM.oyton ou Mouton ( duquel de Lery fait mention j eft vn oifeau aufli gros, ou mefme vn peu plus qu’vn paon de noftre pais, qui a vne belle & grande crefte & genti- ment bigarrée tout le corps de plumes noires & blanches, fa chair eft fort bonne; ^0 il y en a aufli diuerfes efpeces là. Il y a aufli d'autres oifeaux fort femblables auxFaifans de l’Europe, que les Sauuages nomment lacou & lacou-Obough Aracouanyà'vne beauté & variété de plumage admirable : de Lery en fait mention en fes Commentaires. D’autres qui font femblables à des perdris qu’ils nomment & iSlambou-Ouafi fiu,co\xnetis déplumés bleues &qui ponnent aufli des œufs bleus,- aufli des TS^ambou- ims & des Macoucaouasycommo de Lery eferit. Le Toucan ( duquel de Lery & Theuet font mention ) eft de la groflfeur d’vn ramier, ayant vn bec long Sz large, & le iauot fous la poitrine,d’vn fort beauiaune,trois ou qua- tre doigts de large , bordé de plumes d’vn fin rouge , auec la poitrine blanche , le dos JO d’vn rouge parfait,les ailes & la queue noires ,-fort beau à voir, & la chair délicate : il y en a encore d’vne autre efpece appellé des Sauuages Ouayehoy qui a le bec vn peu different & d’vn rouge iauniffant. L’Ouroueü. delà groffeur d’vne perdrix , mais il a vne crefte comme vn coq,les plu- mes rouges, noires & blanches par vn beau meflange j il y en a vn autre de mefme nom, fort femblable à nos cailles, mais il eft plus gros. Le Tata Ouyra Ouajfin & le Tata Ouiramiri , item VAroumara font chacun de la Aaaa . groffeur 554 DESCRIPTION DES INDES groffeurdenos pigeons, mais ils font dVne finguliere variété & beauté de plumage. B y a d autres oilèaux fort petits qui ne font gueres plus gros que les hannetons de ^ noftre païs,que les Sauuages de ces quartiers appellent lapyii & Omnonbouch ,• defquels ' nous auons ânes parlé ci-delTus. ^ Il s’y trouue des chauues-fouris extrêmement groffes, appellees des Sauuages Æd- heurâ , qui font vn grand bruit en volant , & mordent tellement les hommes de nuid qu’elles tirent vne grande quantité de fang,fouuent difficile à eftanchendc forte qu'on les conte à bon droit entre les playes de ces Prouinces. ’ ^ Il y a auffi vn grand nombre d’oifeaux aquatiques ou de marefcages , entre lefquels font renommés ceux que les Sauuages appellent Omm-Tamatian & Ouara-Caon%m~ i o' blables à ceux que les François nomment Corlimx ou Corlis.ü ce neft qu’ils different * grandement en beauté & plumage,- on les voit en grande quantité auprès du riuage & rarement au dedans du païs. ■ On y trouue auffi de certains oifeaux qu’on peut dire eftre pluftoft portés fur terre que voler ; tels que font ceux que les Sauuages nomment , efpece , comme il femble,d’auftruches, plus grands que les hommes,& extrêmement légers. Et \oSalian de la grandeur d vn coq d’inde,ayant le bec & les iambes d’vne cigoigne, qui encore qu’il ne puiffe voler , neantmoins court fi vifte qu’il fe fauue des chiens de ehaffe. Les Sauuages appellent les coqs & poules dinde Arâignan:^ les communes qui 20 font prefque fcmblables au noftres Outra- Safoukai. ^ Ils nomment les oyes elles font beaucoup plus belles que les iioffres &la chair en eft plus délicate. Ils nomment auffiles canes Potiry : les ramiers FicaJJbu & les pigeons ; ils ne different pas beaucoup des noffres. ' I C H A P. XIV. l?oiJpin$ de mer de rimer es qui fi trmuent en ees quartiers. OÎM dit que la mer qui enuironne cette Me & les riuicres qui defeendent dans 5 o la baye font fort poiffonneufès j nous remarquerons quelques fortes de poif- fons tirés des Commentaires de Claude d'Ahheutlle. Les Sauuages nomment la Ouaroaualos Manatis Aontnous auons parlé ailleurs. Ils nomment Vyraon vn poiffon bon à manger long de fix ou fept piés,de la groffeur d vn tonneau, couuertde grandes efcailles noires. Le Piraf em ou Camauroupoui eft vn autre poifîbn de mefme forme, groffeur &gran- deurjmais il a les efcailles beaucoup plus petites. L Ouyrii eft long de trois ou quatre piés , auec vne tefte large î il a fur le dos deux ai- guillons longs d enuiron demfpie & fort aigus, lapiqueure defquels on dit eftre fort dangereufe,aurefte on le peut bien conter entre les plus excellents poifîbns j il s’en 40 trouue quelques-vns dans les riuieres que l’on dit fentir lemufe. VOury-Ioime eft fort femblable au precedent, excepté qu’il eft iaune. L Ouaraçara eft femblable a nos aIofes,mais il n’a pas tantdefchardes, voila pour- quoi il eft meilleur & plus délicat. ^ rouatoucoupou eft vn poiffon cruftace, long d’enuiron d’vne paulme, ayant la tefté iaune, & bon à manger. Le Paraty & le Pira-cuuaue font femblables aux mullets làoLery les nomme Paraîi & Kurema. Le Camboury OuaJJhufçSk. long d enuiron quatre paulmes,il a la tefte comme vn pour- ceau, la queue iaune,&couuert par tout d’efcailles. yo Il s y trouueplufîeurs efpeces de poiffons plats,commeonlesappelle: eft de la forme d vne raye, mais ileft plus grand, il eft long & large de deux coudees , efpais d vne paulme, la queue eft longue d’vnc coudee & demie, armee au milieu d’vn aiguillon, grandement aigu & venimeux. Le Narrinnarii tQ: de mefme efpece,mais il a la queuëpîus courte, l’aiguillon plus long,& atout le corps tracé de lignes noires & blanches. VOuara X OCCIDENTALES. LIVRE XVI. yjç Z’ü^^r^eftauflidelamefmeefpece, longle plus fouuentde deux pics &: large d’vn> d’vne couleur d’argent reluilànt,auec les mafchoires iaunes ou oranges. L'Acara-ouaJfûu eft encore de lamefmeerpecejlongde trois piés &prerquc aulïi lar- ge,couuert par tout d'efcailles noires : V Ac ara,- feue eft vn peu plus petit que le prece- dent : & Acara-foytan femblable au dernier.mais il eft peint de lignes blanches noi- res; r Acara-fourourou bigarré gentiment de lignes iaunes, au refte r\o\xQSk.vç.\L’ Acaraiou eft ièulemênt long d’vn pié , tout couuert d’efcailles , la tefte verde, le deftlis du corps iaune,ô£ le deflbus prefque blanc. ÜK^ramajfa eft encore de la mefme efpece, femblable à nos foies, long de deux piés, I O & elpais de trois trauers doigts, le ventre blanc, le dos noir; on dit que c’eft vn fort bon manger,d’où vient que les Sauuagei l’eftiment fort. L'Araouâoua eft par fois long de huid piés , d Vne peau dure & rude , il a vne efpee longue de deux ou trois piés au lieu de nez,dontil tuëles autres poiftbns:& le Tanafan fort femblable au precedent,!! ce n’eft qu’il a l’efpee plus courte. Le Faca;>»a eO: vn poiftôn fans efcailles, de couleur grife, long de deux piés, il a Vne tefte fortgrofle pour la grandeur de fon corps , il fe trouuele plus fouirent fous les ro- chers ; comme aulfi le Caramourou femblable à vne anguille , duquel nous auons défia fait mention ci-deuant. Le Tinmocou-otiajfouzin^i la forme d’vne anguille, mais il a la peau blanchaftre xo ^ eft long de deuxeoudees ou plus , il a le nez comme noftre brochet, long d’vn pié. Le Panyamiou eft femblable au precedent , fi ce n’eft que la partie d’enhaut du muleau eft vn peu plus longue que celle d’embas. Entre les poiftbnsde riuiere le Pi?»- rake eft du tout à admirer, il eft par fois long de quatre piés, extrêmement marqueté de diuerfes couleurs, de bleu, de rouge, verd & blanc, il ne craint nuis coups, non pas mefme d’elpee , que fi en le frappant il fe remué , il caufe vne telle douleur au bras de celui qui le frappe , qu’il s’endort par fois , de forte qu’il faut que ce foit vne efpece de torpille. Le Caurimata eft fort femblable à vne carpe , mais il eft plus long &: plus large, & eft 3 O tenu à bon droit pour le meilleur de tous ces quartiers. ÜTaconda e^ vn poiftbn long de trois piés, couuert de toutes parts d’vn teft , & fort bien rayé de lignes iaunes, rouges & blanches. Le Pyrain eft long d’vn pié , large d’vn demi fans teft > mais il eft couuert d’vne fort belle peau iaune & rouge, il a les dents au flîtrenchantes qu’vnrafoir: on efcritauflî que l'Ofean^c^m eft vn autre poiftbn eft aufti armé de mefme. Le T arehure eft femblable au Paraty , fi ce n’eft qu’il eft plus efpineux , il a les dents aiguës ,* comme aufti le IeroU)\e(\\xe\ a la tefte plus ronde, eft de couleur bleue, & a la queue rouge. Le Tamoata eft long d’vn demi- pié, garni d’efcailles, ayant la chair iaune, qui eft d’vn bon gouft. Le Saraho eft fort femblable à la lamproye , fi ce n’eft qu’il eft plus large & a le mu- feau plus long. Il s’y trouue aufti abondance de cancres & fort difterents,des elp eces d’efcreuices & de gammares; delquels il y en a qu’ils nomment OuegnonioinyCfii ont les piés de deuant longs & bleus ; d’autres qu’ils appellent Oujfa , ayans les piés rouges & velus , lefquels fortent le plus fouuent fur terre, & fe trouuent d’ordinaire fous les racines de ces ar- bres du riuage,que les François nomment L’ Ouca-ouajfoueù. vne elpece de grandes efcreuices, qui fe prennent fous les pierres auec les huiftres. y O Les K^ouara-ouajfou font des cancres blancs, vn peu plus gros que le poing d’vn homme,qui aiment fort l’ambre gris, de forte qu’on en trouue de gros morceaux dans leurs trous. Les Ourarauf font aufti efpeces d’efcreuices , qui fe trouuent feulement dans les riuieres. Les Saunages de ces quartiers nomment aufti les Crocodilles TacareM s’y en trouue de fort grands. Aaaaz Ilya 55^ DESCRIPTION DES INDES Il y a auffi beaucoup d’huiftres, plus greffes & meilleures que les noftres,les Sauuâ- ges les appellent en leur langage iümV, elles font le plus fouuent attachées aux bran- ches des arbres du riuage : ils nomment les moufles Xerourou, qui font plus greffes que lesnoftres.lesSauuagesenviuent dordinairej & les aiment vniquement.pource que c'efl; vne viande bien rofl: prefte. Il s’y fait au temps des pluyes beaucoup d eftangs , dans lefquels s’engendrent de certains petits poiffons longs d’vne paulme, qui font fort délicats, que les Saunages prennent auant que ces eftangs fe feichent,cequifefàit apres les pluyes: quandles pluyes reuiennent St que l’eau s’y amaffe derechef, ces poiffons renaiffent de nouueau, par vn rare miracle de nature. iq; C H A P. XV. IBefles d quatre pies dé cette l/le çls* de la Continente ^oipne, IL s y trouue vn grand nombre de beftes à quatre piés,toutesfois nous n’en remar- querons que quelques efpeces des plus eftrangeSjpource que nous auons fait men- tion au Liure precedent de la plus grand part,tirecs Atlean deLery & d’autres. H y a beaucoup de cerfs du tout femblables à ceux de ces païs , les Sauuages les ap- pellent SouaJfoH-aper : il y a auffi vne infinité de cheutes fauuages î force fangliers qu’ils nomment T petits pourtant que les noftres,& qui ont le nombril furie dos, lo ils enontaufli déplus grands que ceux de noftre païs, qu’ils nomment Tayajfou-ete. Ils ont des porcs-efpics,qu’ils nomment Coendou, qui font fort grands ôtprefque de ‘ la hauteur des làngliers.armés d’aiguillons fort longs &: aigus. Le T nmandoua eft vn animal de la grandeur d’vn cheual de ces pais , ayant la tefte d’vn pourceau, les oreilles d’vn chien, vn mufeau long d’vne paulme & aigu , la langue longue & eftroite , vn crin prefque comme vn cheual , des piés de bœuf j il vit de four- mis : fa chair eft d’vn mauuaisgouft, qui eft caufequeles Sauuages en mangent peu fouuent. Nous l’auons deferit ci-deffus fous le nom de T 1 ) Enfin 5 comme i ai remarqué dVne Charte marine exadement faite, ieGouuerneur ou la Capitanie du Maranhaonc^ comme s’enfuit j ayant pafle i’emboucheure de la j riuiere de Pereta, & montant la riuiere on rencontre à la riue de main gauche le Fort | de -S. que les Portugais y ont bafti fur vne petite ance; vis à vis duquel h y a plu- ^o J jfieurs petites Mes dans vne Ipacieufe baye ou emboucheure, tant de cette riuiere , que | de quelques autres petites, quiy defcendentdela terre ferme. Ayant palTé au dehors de ces Mes ( affés loin vers la mer , afin d’efiiiter les baffes qui s’auance des Mes ; on rencontre vne autre emboucheure ou vn canal, comme ils le 1 nomment, fortant de la baye de il commença en ce Heu de baftir yne barque ('&de démolir l'autre na- vire pour fe feruir des ferrailles ) qu’il acheua le troifieme mois. ^ 0 Î1 monta par apres la riuiere vingt lieues, & rompit là l'autre nauire, des planches duquel il fit vne autre barque, que trente hommes acheuerent à peine en deux mois ôr demi. Orellana cependant monta la riuiere auec la première fufte, cherchant diligem- ment & auec grand defir le principal canal de cette riuiere, mais n’ayant rien fait de remarquable eftant retourné vers fes gens, il y retourna derechef, commandant que fi i îoft que leur fufte feroitparacheuee, ils le fuiuiflent vers la pointe de S.Iean. îïftai ' ’ - LesEfpagnols obeïftans à leurChef,lafufteeftantfaite&:ayantrecouuertdesvi- ures,monterent la riuiere iufques à i’Ifle àc Marribui^uei & plus outre à l’Ifle àcCari- /æ;?, au deflus de laquelle enuiron trente lieues Iariuiere fe diuifoit en trois branches, qui fe reioignoyent derechef en vne,de forte qu’elle eftoit large en cet endroit d’enui- ^ ton douze lieues. Mais fe voÿans beaucoup diminués de nombre & deftitués de tou- tes chofes,ils ne trouuerent pas bon de monter plus haut j voila pourquoi defcendans Iariuiere, ils mirent pié à terre ferme à enuiron quarante lieues de l’emboucheure de la riuiere , comme ils penfoyent , fur vne terre afles efleuee j les Sauuages difoyent que ce lieu s’appelloit Comaoi où ils trouuerent des viures à vilprix. Et là, félon que Berrera dit, il y eut cent Efpagnols qui s’y placèrent, attirés par la bonté & beauté du pais ( ce qui n’eft pourtant nullement vrai femblable,car qui croiroit,qu’apres tant de gens morts de diuerfes maladies , il leur en reftaft encore tant , ou qu vne barque en peuft porter,^ que les autres eftans fortis hors de la riuiere fuiuans la cofte de la Con- tinente,arr iuerent enfin à ilile de Margarita -, & que là ils trouuerent la vefue d'Orella- y o ??4,qtd affeuroit que fon mari eftoit mort de trifteffedans la nuiere,decc qu’il auoit défia cherché en vain par deux fois le principarcanal, & auoit confommé ces moyens en vn fi inutile deffein. Voila quelles furent les deux expéditions à' Orellana ; defquelles certes on ne peut tirer grande lumière pour la Geographie,pourcequ’on n’y trouüe aucunes hauteurs obferueesjni la conftitution des lieux remarquée, comme la chofe requeroir. Seulement OCCIDENTALES LIVRE. XVII. jcTp Seulement i’eftime qu’il appert parintlicesaflesmanifeftes,qii’(9rf’///ï;^^cn;defcendii cette riiiieredelaquellenous traitons maintenant, &:qu’il y eft retourne pour la fé- condé fois, de forte qu’à bon droit elle doit encore eftreappellee de fon nom. Pierre de Orfna fuiuit Orellana, mais ce fut vn fort long temps apres ,fcauoir l’an cio lo LX, comme efcrit/«4!;2 de Cajîellanos, du voyage duquel lo/èph Acofia fait men- tion en cette maniéré fie Capitaine Pedro de Orfua, ( dit-il ) entreprit vn autre voyage le long de cette riuiere (or il parle de lariuieredes Arnaz^ones parvnc erreur familière illanommc aulli M{lrannoi^ )S>c eftant mort, les autres Capitaines pourfuiuirent,bien quelesfoldatsfemutinaifent.iufquesà ce qu’ils arriuerent à la mer I O du Nord. Il y a vn Religieux ( dit-il ) de noftre Société, qui ma raconté, qu’il auoit efté à ce voyage eftant encore feculier; & qu’il auoit trouué que la maree montoit cent lieues haut dans la riuiere, & quandla riuiere commence à fe mefter dans la mer, qui eft fous la ligne mefme ou enuiron , fon emboucheure eft large de feptante lieues , ce qui n’eft pas croyable, & excede la largeur de la mer Méditerranée : veu que d’autres en leurs deferiptions ne lui donnent feulement quexxv ou xxx lieués;voila ce qu’il en dit. VValther Raleg faitmention de ce voyage en la defeription de Guiane; &: eferit que de OrfuA eftant partide entra parla riuiere dans celle des Amâzones : ^ qu’il fut tué par Agio Bijeayen. Lopez FazfaitzulVi mention du mefme. le ne trouuepas qu’apres cela aucun Efpagnol ait viiité cette riuiere, où qu’on ait 20 eflàyé de mener aucune Colonie dans ces Prouinces,de forte qu’il n’eft point parlé du tout de cette riuiere d2insHerrera & autres Autheurs Efpagnols, au moins que i’aye véu; le feulZ Caep i d’icelui il y a vn grand banc qui s’edend quelques lieuè's en mer; fur lequel , 7 comme auffi au Cap mefme la mer brife furieufement, de forte que ceux qui font con- - traints de moüillerranchreaupres,ont befoind’auoirbon chablc & bonne anchre. # En outre de ce Cap fuiuant la code de la terre ferme, on rencontre premièrement * a enuiron neuf lieuè’s , qui n’ed pas tant riuiere que branche d’vne riuiere ou canafeoupan t le Cap auec vne grande partie de k Continente ; de forte que ceux qui % fans y penfer ont padé ce Cap, pcuuent codoyant par ce canal entrer dans la riuiere : Or l’emboucheure Septentrionale d’icelui ed à vn degré & trente fcrupules de Ia4oi'# ligne vers le Nord & entre premièrement droit vers le Sud, puis apres vers le Sud- ed, S d’où il fe tourne comme vn coude & enfin fort vers l’Ed-nord-ed. Âenuiron deux m lieues au dedbus de l’emboucheure de ce canal s’auance vne pointe de la Continente, ÿ c^iVonnomm^t^rrepoco. » D'Arrewary iufques à la plus Septentrionale Ide ( l’vne de celles qui font en grand J nombre dans la (pacieufe emboucheure de cette riuiere d Vne riue à l’autre ) on conte , i, deux lieues , cette-ci ed appellee de quelques-vns Kaluarie , par d’autres ^rrepoco,^ mefme autrement. D’icelle iufques à Sapno ou Sapenou , qui eH à la riue de main droite de la riuiere, ils content quatorze lieuè's, & à cinquante fcrupules de la ligne vers le Nord, comme ie j o trouue qu’il a edé exadement remarqué par ceux de nodre nation : or auant que de venir s. Sapno, on trouue vne petite riuiere qui fort de la Continente, laquelle on nom- me ‘S'iîy>»^,aflesfemblable ànosvaches,fi ce n’eft: qu’il n’a pas descor- nes:au refte ces riuieres font fort poiflbnneufes,& nourriflTent entre autres de fort gros Manatis. Il y en a qui difent que cette région efl: fort mal faine & incommodée dVnmauüais Harcourt le nie, parvne raifon qui n’efi: pas impertinente ; car y ayant l’an cIdIdc VI II laiflfé trente de fes gens auecfonfrere,lefquels y demeurèrent trois ans 20 dans vn village nommé des Sauuages Caripo,Çitnk au bord de la baye mefme fur vn co- fliau pierreux , d’vn fort difficile accès , à caufe des bocages & rochers droits & entre- coupés dont il efl: prefquc ceinét de toutes parts : tout ce temps il n’en mourut que fix dentr’eux,& cela par diuerfès infortunes pluflofl que par maladies. Ceux de noflre na- tion,qui y ont habité auant les Anglois, afleurent lemefmej&eflimentquel’aïry eft pluflofl fain,pource qu’on y a veu les malades qui y venoyent d’ailleurs s y porter aufli toftbien. Les Sauuages qui habitent les riuages de cetre riuiere & la Continente voifine, font pour la plus grande part Yaios ou Maraons % les vns & les autres afles courtois & bénins: les Taios fe tiennent autou r de i’emboucheute de la riuiere & le long de la cofte iufques 5 0 à Commaribo \ & les Maraons au dedans du païs iufques au fault de la riuiere & mefme au dcffiis : il y a aufli quelque peu d’ArwaeaSi notamment entre VVaymari & Commaribo qui demeurent fur vne haute montagne que les Sauuages nomment Majfoure. Or tous ces SauuagesVont entièrement nuds,combien qu’ils ne refufent pas les habits ; quand on leurs endonne:ilsfeplaifentfurtoutàlapefche,&pourcet effet ils feferuentd’vne certaine forte debois,qu’ils nomment AyauWià^vnç, fort mauuaife odeur ; & qui eftant ietté dans l’eau enyure tellement le poifl'on , qu’il fe laifle prendreàlamain.Au lieu de blé ils vfent de Cajfauci duquel ils font auflîleur breuuage en le mafehant à la façon des .S^^/Z/V^^jjdont ils boiuent beau coup & iufques à s’enyurer, vice fort familier à ces na- tions : ils nomment ce breuuage Pernou, lequel ils font de Cajfaue premièrement rofti 40 &: prefque bruflé, puis apres mafehé & boüilli , & e^fîn pafle par vne corbeille d’ofier î de forte qu’il eft clair, prefque de mefme couleur que la biere de Lubec-, mais il fe gar- de fort peu. Ils font eftrangement tourmentés à^sNiguas & non moins des moucherôs. Harcourt raconte qu’à enuiron trois iournees de chemin par deflus le fault de la ri- uiere,habitent d’autres Sauuages Cartbes'àcn.2.iïon( cin ihnomm&tit Mar anshewaccas) qui ontdes oreilles fort grandes & comme monftrueufes, s'il eft permis d’adioufter foi au rapportdes Sauuages : quidifent de plus que ces Sauuages ont entr’eux vne Idole, qu’ils honorenrgrandement,c’eft l’effigie d’vn homme affis fur fes talons, tenant les genoux efcarquillés,fur lefquels font appuyés les coudes, auec les mains efleuees, & les paulmes renuerfees,au refte les yeux efleuésau Ciel,&laboucheouuerte. 50 Ceux de noftre nation font mention d’vne autre nation de Sauuages , qu’ils nom- ment qui demeurent enuiron foixante lieues au deflus l’emboucheure delà riuiere de lefquels cultiuent force cotton,duquel ils font des AmackasoM. îiéts pendans afles induftrieufement, qu’ils vendent aux autres Sauuages moins diligens qu’eux; ils recueillent aufli beaucoup : ces Sauuages iouïflent d vnaïr beau- coup plus fain que ceux qui demeurent près du riuage. 11 fe trouue dans leur Prouince de certaines pierres , qui approchent en couleur des rubis, que nous nommons balais. Dddd Chap, 57S DESCRIPTION DES INDES C H A P. VIIL De beaucotip de chofes qui ont efié remarquées par , ceux de noflre nation dans cette rmere,î^ des petites rimeres qm l' aduoiftnent ^principalement d’Apiirwaka. I’A I appris de ceux de iioftre nation qui ont diligemment vifité la riuiere de FFia^ poc0,\x. zo de laquelle eft extrêmement eftimé à caufedefa fertilité remarquable, par ceux de noftre nation , qui y ont demçuré quelque temps : Les mefmes a/Teurent que ça efté autresfois vne Ifle.feparee par vn petit canal de la terre ferme, mais qu’à prefent, ce ca- nal eftant bouché & comblé de fable, elle eft coniointe auec la terre ferme. Or entre la derniere pointe de la riuiere & la montagne dont nous parlions à cette heure,fort la riuiere de FFamary^ciuc d’autres nient eftre vneriuiere, pource qu’il fem- ble quelle n’ait point de fource , & qu’à quelques lieues au, dedans de la terre ferme elle court droit àl’Oueftjde forte qu’en vne iournee de chemin on en atteind le bout. Dés FFainary commencent de hautes montagnes , qui s’eftendentvers le Nord & Nord-oueft, courant iufques à Apur^akaAc laquelle nous allons parler: or on dit que 5 o la terre des penchans ^vallees de ces montagnes eft fertile, qui porte d’excellent ta- bac, & eft propre fur toute pour y planter des cottonniers. A enuiron cinq lieues de la baye de FFiapoco, & de Commaribovcxs lê Nord-oueft, la riuiere à' Apur'^aka fort en mer, appelleepar d’autres Caperwaka ; que Harcourt dit eftre fort peuplee de Sauuages;mais Laurens Keymü qui accompagna Ralegh enfes voyages,affirme au contraire, qu eftant entré dans icelle & l’ayant montée enuiron x l lieiiès, il n’y trouua aucun Sauuage( ce qui n’eft point eftrange ni hors delà couftume de ces quartiers, car les Saunages font accouftumés à changer fouuentde demeures, de forte qu’aux mefmes lieux on en trouue quelquesfois beaucoup, par fois peu;& aucu- nesfois nuls)mais qu’au piéd’vne certaine montagne,ilsauoyent coupé autant de bois 40 de £r^y?/,que leur chaloupe peut porter. Et qu’il s’y trouue aufli beaucoup d’arbres, dont l’efcorce approchoit de la canelle,tels que nous auons dit qu’il en croift en grand nombre fur les riuages du Deftroit àc Magallan. Il faut que cette riuiere foit large, félon la délinéation aftes çxade que i’en ai veuë, il y a aulTi dans fon emboucheure quelques petites Iftesjelle reçoit en outre quelques pe- tites riuieres & torrents d’vn cofté & d’autre; on dit que fa pointe la plus auancee, en mer eft à quatre degrés & xxiv fcrupules auNordde la ligne, fon canal monte prc-^ mierement vers le Sud-eft, & delà il fe courbe comme vn coude vers le Sud-oueft. Ceux de noftre nation qui ont efté dans cette riuiere l’an cio Id xcviir, affirment, que dans fon emboucheure il y a vne petite Me longue , qui finit en pointe; & qu’il fe jo trouue dans les bois qui bordent fes riuages vn grand nombre de perroquets & d’au- tres fort beaux oifeaux : commeauffi beaucoup de tres-beauxguenons. A enuiron fix lieues de fon emboucheure vers le Nord il y a vne Me en mer, qifon nomme Oncaiarie ou Aocayari ; extrêmement fuietteaiix tempeftes,& trauades, exce- pte aufolfticed hiuer,commeie trouue qu’il a efté remarqué par plufieurs. Chap. c -■ / OCCIDENTALES. LIVRE XVII. C H A P. IX. Dejcription des rmieres de Cauwo 'èS de '^i^j.auecles T’rouinces adiacentes. APr E s P ur'^ak a {mt\Q.\or\gàt\d. mefmecofte, à quelques deux lieues, com- me ie trouue que les noftres ont remarquera riuiere de Camvo ou Cou^a ; ayant dans Ton emboucheure deux à trois brades de profond;& au dedans trois ou i v. Laurens Keymis KngXois t(cniiÇ[\ie. l’an doloxcvi il y trouua des Sauuages delà nation des Taos, qui s y eftoyenc retirés vn peu anparauant , ayant efté chaffés par les I O Efpagnols de Moruga & des Prouinces fituees le long de la riuiere de l’Oronoque i(\\xQ les Ar'^acas^oi^Qàoye.nt lors , nation vagante & fuiette aux Efpagnols. Car ces Taos, comme il raconte, ont occupé beaucoup du riuage de la mer ; & eftoyent accouftumés pour fe diftinguer des autres nations, de fe marqueter la face &: le refte du corps de cer- taines marques; fe feruans pour cet effed des dents aiguës de certains petits animaux, qui ne relTemblent pas mal quant à la forme auxloirs, dequoi ilsfepiquotoyentla peau , de mefme que c’eftoit d’vn aiguille ou efpingle: de forte que ces cicatrices ne s’effaçoy ent iamais. Ceux de noftre nation qui vifîterent ces coftes l’an c I o I o x c v i ii, y trouuerent les mefmes Sauuages. Mais Harcoart qni y fut quelques années apres, dit qu’il n'y en trou- iouapasvn. Keymû receut des Sauuages vne certaine forte de bois , qu’il eftimoit eftre du Brafil, que les Sauuages nommoyent Frap'o,6L difoyent qu’ils’en portoitvnegrande quantité àl’Iflealela Trimdad,bc que les François l’emmenoyentdelà ; mais nos gens nient que ce foit du vrai bois de^^‘^/;bien qu’il s’y trouue vne autre efpece de bois rouge,appel- lé des Sauuages qui ne différé pas, beaucoup du Enfin cette riuiere eft diftante de la ligne de quatre degrés & vingt fcrupules, & monte faifant vn deftour vers le Sud-oueft. A deux lieues plus outre fuit le long de la mefmecofte la riuiere de Frw,* à quatre degrés & quarante fcrupules de la ligne vers le Nord ; riuiere fort belle, & qui entre 5 O fort auant dans le païs,dont les riuages font fort deledables & fertiles, & qui a vne em- boucheure aufli large qu’vne baye. LaurensKeymisc(cnz qu’afOueft de cette baye, il y a vne bonne rade, au deffous de certaines Mes , qui font au deuant de la Continente ; la plus grande defquelles il nom- me Gawateri,\i^h\ZQ& des Sauuages Shebaios,S)Càix. qu’elle abonde en fangliers & autres belles fàuuages, en oifeaux en toute forte de viures, enfin que la mer qui l’enuironne eft fort fablonneufe.il y a en outre vn beau port,profond de quatre ou cinq braftes»ca- pable de plufieurs nauires & fort afteuré.Les trois dernieres vers rOueft,ficuees en for- me de triangle,dont elles ont receu leur nom, font aufli fournies des mefmes animaux & de viures, il y a aufli vne bonne rade, mais qui n’eft pas accomparable au precedent 40 port. Il remarque enfin qu’au dedans delà Continente, il s’y trouue prefque par tout d’vne certaine herbe, que les Sauuages nomment Wiapajfai la racine de laquelle eft forte comme gingembre, & doiiee d’vne finguliere vertu,fur tout contre ie flux de ven- tre,^ les douleurs de telle. L’Iflé qui eft cniscWiaèLCaianayC^c appellee ipztHarcourt,Mattoorji,c(i^ vne terre fort haute &d’enuiron feize lieues de tour: d’autres nomment cette Me Mayeri,^ lesmon- tagneSjquifontaudeflTusdelabaye, laquelle s’encline vers VVia,Moriori-, & celles qui font prefque au milieu de l’Me , ce qui ne différé pas beaucoup du premier nom de l’Ifle.Ie trouue que ceux de noftrenation ont remarqué que cette Me eft habi-^ tee par la nation des Caribes , qui ne font point mauuais : & qu’il y croift prefque par 50 tout de fa nature, principalement dans les campagnes, certains arbriffeaux de deux piés de haut, qui portent des fruids femblables aux prunes, de couleur pourprée, prefque de mefme goufl que les myrobalans. Or ces petites Mes qui font au deuant de la grande vers le Leuant , defquelles nous venons de parler,font appellees d’aucuns, fçauoir,laplus Oncntsile Sannawom }\d.'p\ns Occidentale Spenefari & les deux autres qui font au deuant des premières vers la mer Tpomregemera-,çm\iom. noms de Sauuagesicar les Chreflies varient fort en leurs noms. Dddd a CAIANE. 580 DESCRIPTION C A I A N E. C H A P. X. Definpîton de la rlukre de Caiane de la Continente qui l'aduoijtne^ ^ des mœurs des peuples y habkans. Près FFia fuit Caiane^ enuiron trois îicuës d’interualle , riuiere renommee,* diftante de la ligne de quatre degrés &: cinquante fcrupules vers le Nord, com- me ie trouue qu il a efté remarqué par les noftres. Or il faut noter qu’il y a deux i o riuieresquifortentenfemble enmerpar vnemefme emboucheure,Fr4f/é^ & Caiane', la première defquelles fourt des montagnes voifines,& ne court que fept lieues ou en- uiron ; l’autre vient déplus auant d’au dedans laterreferme. L’emboucheurede Ca- iane eft alfés large , & a trois & quatre bralfes de profond ; mais il faut bien prendre garde à foi en y entrant, à caufe des rochers qui font loin en mer au deuant d’icelle, principalement vn,que les Sauuages nomment Hocaiari-, & ceux de noftre nation Con- fiapeli qui eft diftant de l’emboucheure de trois ou quatre iieuës vers i’Eft : &pourle grand courant qui porte vers l’Oueft. Harcourt remarque, qu’il y a à la main droite de cette riuiere en y entrant vneîfle, que les Sauuages nomment Muccumbro j fermee du cofté de l’Eft de Caiane, de celui 10 deTOueft de la riuiere de ayant de circuit enuiron fei2e lieues, plate & plei- ne de campagnes pour la plus grande part, mais aumilieu d’icelle il y a deux monta- gnes,l’vne derquelles fe nomme Muccumhro, de l’autre Cillicedemo, du fommet defquel- les on voit tout autour ce beau païfage ; il y a peu de bois, & force campagnes, dans lef-’ quelles vaguent vn grand nombre de belles fauuages. Le mefme dit, que les habitans de Caiane, & ceux qui tiennent en cette partie de Continente, font Carihes de nation,le principal Cajjtque defquels eftoit Arra'^icari, qui demeuroit auprès de la montagne de Cillicedemo,ïonià.SedLion.n.é&L fidelle aux Eftran- gers, principalement aux Anglois f comme dit Harcourt ) & on eftime que les Carihes font les anciens habitans de ces régions, car les laos, Sappai, Ar'^'acas & Paragoti, fe font 3 o retirés là de fille de la T rinidad ou des Prouinces de l’ Oronoque -, chz^îés par lesElpa- gnols ou craignans leur cruauté ; de forte qu’iceux & les Carihes qui fe tiennent le long de la colî:e,ne s’accordent pas trop bien,encore qu’ils fe facent bonne mine & fouuent ils viennent à fe quereller & fe tuer les vns les autres : car il y a guerre perpétuelle entre les Carihes qui demeurent au dedans du païs dans les montagnes; & ces Sauuages mef- mes ils defeendent fouuent des montagnes au riuage de la mer, & furprennent ces mi- ferables, en tuent vne partie & emmenent les autres en miferable feruitude: mais de- puis que les Chreftiens ont commencé de voyager vers ces codes & de trafiquer auec les Sauuages habitans le long d’icelles, ils ont recouuert d’eux quelques armes, & ayans appris às’en feruir tellement quellement,ils ne craignent plus tant ces Carihes, d>L mef- 40 mes ils les vont attaquer quelquesfois. Plus outre dans la Continente, au païs des montagnes qui font vers ie Sud-oued il y a plufieurs autres nations de Sauuages,les noms & les mœurs defquels ne font pas en- core ades cognus lencoreque ces contrées pour leur grandeur foyent fort mal peu- plées ; car c’ed vne chofe ordinaire à plufieurs des Sauuages , qui fe tiennent en cette Continente , de changer fouuent de demeures , & de ne fe placer que rarement, ail- leurs qu’au bord des riuieres,ou fur la code de la mer, pource qu’ils fe plaifent fort à la pefche,& qu’ils ediment le poidbn edre vne viande bien tod prede & fort commode,* car ils font parelfeux de leur naturel , fuyans le trauail & abliorrans la culture des champs, contans de ce qui fe trouue fans peine. Ils n’ont prefque nulle forme de Re- 50 publique, fl ce n’ed qu’ils ont des Cajftques à qui ils obeïffent,fi long temps qu’il leur pîaidron dit qu’ils ne punident que deux crimes par les bourreaux dedinés à cet effed; fçauoir,lhomicide,& fadulcere .Ils prennent plufieurs femmes,& veillent fort fur leur chadeté ; & quand ils les ont furprifes en adultéré iis leurs cadentaufii tod la tede,lans autre forme de ludice. La multitudedes femmes ed là edimee en grand honneur,& ed vn tefmoîgnage de grandes richeffes : Car, principalement les plus vieilles feruent leurs % ÏO OCCIDENTALES. LIVRE XVIL ygi leurs maris, comme efclaues, & font tout ce qui eft neceffaire au mefnage, cependant que leurs maris font à rien faire ou à fe donner du bon temps. Or puis que nous Tom- mes paruenus prefqueau centre de cette moyenne partie, auant quedepourfuiure la defeription des autres riuieres, il nous faut vn peu parler des qualités 'de l’aïr & de la terre,des habitans,des plantes & des animaux d’icelle. C H A P. XI. Des qualités de taïr de la terre de ces contrées de la C ontinentei (s* du naturel, moeurs coujîumes des habit ans d’icelles. Le s faifons de lannee varient fort en ce clymat ; car en la partie Orientale de Guiane qui approche la riuiere des Amazones , l’efté commence dés le mois d’Aouft,&; l’hiuer dés Feburier,mais en la partieOccidentale &: vers l^Oronoque, l’efté commence dés Odobre.&l’hiuer en Aurildefquelles faifons, commenousauons dit ailleurs, fe diftinguent feulement par les pluyes ( d’où vient que les Sauuages appel- lent d'vn mefme nom les pluyes &: l’hiuer ) & par les feichereires,comme auffi par les grands vents & par le calme : car veu que ces régions font fi peu efloignees de la ligne, elles Tentent vn fort petit changement de chaut & de froid: non pas pourtant que tous les ans il y pleuuent egalement ou toufîours aufïi longtemps; mais elles different 2-0 par fois d’vn mois ou de dcux,& par l’abondance ou médiocrité des pluyes. Le terroir eft auffi beaucoup different : car au bord de la mer il eft prefque par tout bas,&fi le vent qui y eft fort grand de iour,prefquetoufiours de l’Orient ne temperoit rardeur,il feroitdu tout impoffible d’y habiter, mais maintenent il eft peuplé fur tout autre de Sauuages, pour la commodité des riuieres qui y fortent ci & là,& pour la ferti- lité de la terre, comme auffi pour la bonté &fanté défait , excepté quelques endroits- eftimés mal fains. Au dedans de la terre ferme fe voyent plufieurs montagnes , quel- ques-vnes defquelles font d’vn terroir fertile & aifees à.cultiuer ; d’aiitres font du tout rudes, mais on croit qu’elles font remplies de veines de métaux : dans ces montagnes ily faitvnpeufroid,neantmoins l’aïr y eft eftimé fortfain, qui fait que beaucoup de 3 O Sauuages s’y tiennent. 11 y a comme vn milieu entre ces deuxextremités,fçauoir,vne terre moyennement haute, beaucoup plus belle & fertile que les çrecedentes,diftin6te en forefts & bocages , en campagnes & prez par vne belle variété, ioinél: qu’elle eft ar- roufee de plufieurs riuieres & torrents,- &doüee fur toutes d’vn air fort fain ; &n eft pas deftituee du tout de métaux , au moins en plufieurs quartiers. Au refteles habi- tarts y font tourmentés de deux peftes , de moucherons , qu’ils nomment CMapery , & deniguas qu’ils appellent iS’/>Ë!S ÎNDÈS ïly cfeiïl en outre vn arbre le bois duquel eft vn peu cher, les Sauuages le noinment firâHimintre^^ ceux de noftre païs communément Letter-hmtiCQÙ. à dire bois de let- tre,car il eft fort folide, dur &: pelant , de couleur roufîè , tacheté de petites marques hoiraftrcs parvne belle variété, & fort beau en menuiferie : l’arbre eft haut & droit, d vneefcorcepoiie, neportant des fueilles qu’au fommet, qui font fort fomblables à celles de poirier. - On dit auffi qu’il s’y trounedes picrriKs precieufos en pîufieurs lieux, comme du ia^ pe,du porphire,& celle qu’on recommande tant contre la grauelle. On croit auffi que la terre n’y eft iâns mines ,mefines de riches métaux , combien que iufques ici on n’y en ait trouué aucune dbr ou d’argent, encore que pîufieurs y en ayent cherché foi- 1 o ' gneufoment. . M A il W I N. C H A P. XV. •xi A 'De/cnptrù^ des autres riinetes quifirtent en mer le long de cette cofie^ ; mîamment de Martine. REtoVrnons, maintenant à la defoription de la Continente. Apres CaiânSi de laquelle nous venons de parler, fuit le long de la mefme cofteao la petite riuiere de Meccaeria, ou comme d’autres Veu lent , dequoi ^ nous n’âuons rien de particulier, car elle eft de peu de confoquencc. Et apres icelle Cûunvâtcomme Hartourt la nomme, ou CÀwrmra , félon ceux de noftre nation , à 1 huidiieucs de Caiané'^ets l’Oueft , ainfi que ie trouue que quelques-vns des noftres ^ ont remarqué d’vneemboucheureeftroite, mais afles profonde , de forte qu’il y a vn m bon port: or il y a dans fon emboucheure trois Ifles : & la terre eft le long de fes riuagcs îimonneufe , produifant grande quantité de cannes , qui fcmblent bien à celles de fii- m cre,mais elles fontfî venimeufes , qu elles font enfler la langue d’vne eftrange forte , & 1 empefehent qu’on ne puifle parler , voila pourquoi ceux qui vont en icelle foront ad- * uertis de s’en garder. ^ 5o i Suicapres la riuiere à&Manmmuriï à neuf lieues de Caianevets le Nord-oueft j vers i le Nord de fon emboucheure les noftres mettent trois Ifles au deuanc de la Continen- ï te :iceux content deux lieues de cette emboucheure iulques à la petite riuiere de Ica^ i Tomdryi &: delà à SmmmAry cinq ou fix : de laquelle ils en content quinze iufques à ; AmondOwAmana. Haredurt nommt apres Câwrordy tManmanury^ Smmmara, Oordjjhmnt CoonannonUt Tfdsce Bc Amam : mais Ldurens Keymisy Cunammmdi FraccOj xjüawdri Bc Md'^ar^droz d’autres ont encore eferit d’autres noms que nous laiflTons ici. ; Ceux de noftre nation content deux lieues d Amans iniques à Marwyne : laquelle eft i àcinq degrés & xlv fcrupules de la ligne vers leNord: ceftvne belle riuiere, ayant 40 ! plus d’vne lieuë d’Âlemagne de large dans fon emboucheure, & eft afles profonde; i mais elle eft comme trauerfee de certains bancs de iàblc,qui cftans paiTés on troûue au ’ dedans de fon emboucheure , notamment proche du riuagc de main gauche en y en- tran t,fcpt bu huiéb braflTes d’eau ; ce qui dure iniques à trois petites îfles,car au deflus j on la trouue de plus en plus moins profonde : ces Ifles font appellees des Sauuages j Curewaporyy^VLes ne font pas cultiuees, pourcc que quand au temps des pluyes la riuie- 1 re s’enfle, elles font couuertes d’eau : D'vn cofté & d’autre il y a quelques petites riuie- J res qui defcenden t dans cette-ci,& notamment vne petite dite laquelle y en- ? tre à deux lieues au deflus de l’emboucheure. j raconte que l’an cId Inc vi 11 il monta cette riuiere, &qu^pres auoirpaf- yo J fé ces petites Ifles,il fut au village de MQyemmiÇit.\xk iuila riuc de maiü gauche , qui eft fl habité des Varagotes^ç. €a£tque dciqucls s’appelloit Maperitakdj bon homme & fidclle fl aux Eftrangers,que le lendemain il monta au village de Cre'^ynay iuir le riuage de main ’fl droite, habité de Cariées CaJfqMeéeO^és fe nommoit Mmapa, Bc ayant receu d eux ^ deux canoasjil paffa outre pîufieurs villages qui eftoyent d'vn cofté k d’a utre iniques ^ à vingt lieues de l’emboucheure,&qu’ürcncontrabcaucoup de rochers, deiquels l’eau M fo précipite | OCCIDENTALES. LIVRE XVII. 587 feprecipicoicdegrandefurie,derortequ'iIs montèrent plus haut auec beaucoup de difficulté, &: plus ils montoyent, pliis troüuoyent-ils de faults , & qu’ayant pafîé la première montagne que les Saunages nomment5’^yy>tfrtf«ij^,ilauoit vende loin de hauts monts appelles des S^nnn^gQsCMatatvere Moupanana^ mais comme il eut délia monté fixiours &enuiron quarante lieues de l’emboucheure, il rencontra tant de rochers & de faults, qu’ils ne peurent iamais monter plus haut. Or il dit qu’il vit là cette plante, de laquelle nous auons fait métion ailleurs, femblable au rolier.qui femble ellre doüee de fentiment; car fi on touche tant foit peu vne fueille du doigt, elle Ce ferme auffi tofi, que fi on la coupe aucc des cifeaux,toute la plante femble feffinir,&: n’ouurefes fueil- 1 0 les à peine de demie heure apres. Le mefme raconte que fon coufinF^^f’r accompagné de quelques autres & du Sau ua- geMapeyitalla,zipies queles eaux furent groires,monteren.t la mefme riuiereneufiour- nees de chemin & qu’ils allèrent iufques au village de T aupuramune habité de Carihes, à enuiron c lieues de l’emboucheure : duquel iufques à Moreshego autre village habité de la mefme nation il y a quatre ioursde chemin : auquel lieu il apprit des Sauuages qu’à fix iournees au delTus de Moreshego , il y habitoit force Sauuages, beaucoup plus grands & plus forts que les autres,qui auoyenc les oreilles, les narines, & la leure d’em- bas percee,&fe feruoyent d’arcs grands & roids : Or en ce lieu il y auoit plufieurs ri- uieresquientroyentd’vn cofté & d’autre dans Manvyne, C(^a.\xo\v, Arrenneen,Toppana~ mn^Erremn^Cowommay Poorakette^ArrouayArretorvenei Waouney Anapey^Munime ^ Ca- rapion. Enfin que de Taupuramune iufques à la fource de la riu^ere de Marwjne il y auoitvingtiournees de chemin. Or i’ai appris de ceuxde noftre nation qurontvifité cette riuiereés années prece- dentes, qu’il y a cinq nations qui habitent les riuages de ce fleuue ; fçauoir vn peu au deffius 1 ’emboucheure les Ver cottes , les Ar'^aopues & les Shebaios : & au delTus de ceux-ci les CaribesyTisxion peuplee , hardie & à laquelle il y a peu de fiance ; les hommes font grands &gras,ayans les cheueux tondus en couronnecomme les Moines, & la peau teinteen rouge, ils couurent leurs parties honteulès d’vn drapeau large d’vn pié &: long dedeux,nuds quand aurefte : mais les femmes font petites , lient leurs cheueux ^ O de cetaines bandes, & font nues du tout rieur viurc ordinaire eft du Cajfaucy du poiure ànBraJilSiC des cancres : leur boire auffi de Cajfaue mafehé & fort efpois, qu’ils nom- ment VVocke J ils obeïficnt à des Cajjtques, qu'ils elifent des plus forts dentr’eux , & les nomment P«»^’,c’efi: à dire Peresrenfinau deflfus d’iceux demeurent les les mœurs elefquels ne font pas beaucoup differentes des Caribes, fi ce n’eft qu’ils font plus hu- mains & qu’on fe peutmieux fier en eux j ioignant ceux-ci font les Sappajosy de mefmes mœurs, mais differents de langage. Les Arwaques auffi. & les Par cottes habitent le plus fouuent.enfemble: les derniers defquels font fort addonnés à l’yurognerie,au relie c’cftvne nation a ffés bonne jles hommes & les femmes vont entièrement nuds r ies femmes accouchent aifement,que fi quelque dur accouchement leur arriue, les peres 40 tuent le plus fouuentles enfans; comme auffi quand ils naiffent boiteux ou manques de quelque membre,* ou fi la femme accouche d’vne fille quand le pere aura ardem- ment defiré vn fils : enfin fi elle accouche de deux , ce qui pourtant adulent fort rarc- ment>elle eft auffi en danger d’eftre tuee de fon mari, tant la barbarie de ces nations eft grande. Tous les habitans d’Amana font Caribes yCou\me i’ai appris de ceux de noftre nation. La terre auprès de l’emboucheure de Mar'^weed'büÛe & rougeaftre , & qui n’eft pas fort fertile .-mais fixoufept lieues au dedans ellefe releue en moyennes colines d’vn terroir auffi rouge & maigre r il s’y trouue beaucoup de cannes defucre.quine font pas cultiuees ibeaucoup de cdttonniers,mais la pareffe de cette nation eftfigran- j O de qu’ils négligent de les recueillir. Enfin il y croift de fort bon bois que ceux de noftre nation nomment Letter-hout yceCk. à dire bois de lettre. Le temps des pluyes y com- mence dés l’entree de Décembre , & au mois de lanuier , Feburier & Mars il y pleut prefque fans ceffe i en cette faifon principalement il faut amener ce bois , qu’on trai- te des Sauuages pour peu de chofe,commenonante & par fois plus de centliures pour vne hache, pour vn couteau vingt ou trente. E eee 2, C H A P, C H A P. XVI. Defcri^îion de quelques autres rmieres qui fortent de cette Continente ^fçauoiVy Sarname, Sorame, Coretine, Berbice, Demarari, APRES LMarwine fuit le long de la mefme cofte , à dix huid lieuês d’interualle ( comme ie trouue qu’il a efté remarqué parles noftres ) la riuiere de Sarname, ou comme d’autres veulent Sewrano : diftante de la ligne de fix degrés vers le Sudjc’eft vne riuiere remarquable, d’vneemboucheureaffés eftroite,mais fortprofon- de ; a quelque trois lieues au dedans de fon emboucheure,il y a vne autre riuiere qui y i ô defcend du Sud-efl:,appellee des Sauuages IkoutecaAès le confluant de laquelle, la prin- cipale riuiere monte par vn canal tortu iufques au village Noyebe, les habitans duquel font Caribes & Sapaios, diftant de l’emboucheure de la riuiere d’enuiron douze lieues. Or il fe faut foigneufement donner garde de ces nations.carils fontinfidellcs & cruels* diffames du meurtre de plufîeurs Chreftiens. Il s y trouue aufli grande quantité de ce bois duquel nous auons parlé ci-deflTuSjmais il n efl: pas du meilleur. Ayant monte la riuiere d Icoteca vingt ou vingt cinq lieues , iufques à vne petite ri- uiere que les Sauuages nomment il s’y trouue de ce bois beaucoup meil^ leur ; mais il faut fe garder bien des Sauuages , qui font Caribes ôc ennemis mortels de ceux de noftre nation. On conte que les noftres font tombés dans cette haine és an- to nees precedentes, par leur impudicité & lafliueté, qui fit , qu’ils commirent adultéré auec plufîeurs femmes de Sauuages, ce que les Sauuages ont fort en horreur. De Sarname iufques à Sorame les hoâres content xii lieuës; cette riuiere a fon em- boucheure large d’enuiron demi-lieuë,mais pource qu’il y a vn banc de fable au deuant, les nauires n’y peuuent entrer : les habitans d’icelle font Caribes, qui ont grande quan- tité de ce bois, & de cotton. ^ Il y a douze ou treize lieues de Sorame a Coreline : c’eft vne petite riuiere,qui a bien vne large emboucheure , mais elle eft fort peu profonde, au dedans d’icelle il y a vne petite Ifle ; elle eft diftante de la ligne de fix degres vers le Nord; les Sauuages qui s’y tiennent font Caribes. Thomas Masham Anglois qui la diligemment vifitee, l’accom- ^ o pare a Âiarwine ,• & eferit qu il y a de fon emboucheure iufques à la première cataraéfe ou faultenuiron cinquante lieuè’s, que dans icelle defeendent les riuieres de Aianone, Tapuero & Tabuebâi: & qu’il y a fix villages de Szuuz^es,fq3LUoiï,rrarrarvalie,Mawrana- rne,Maapuere,M.accharibi,Tohoron^Vaperon. Suit apres a dix lieues ^€i2.Berbice , autrement Berbiu, petite riuiere, diftante delà ligne de fix degres & xxx fcrupulcs vers le Nord ; fon emboucheure eft d’enuiron vn quart de lieue de large,& à quelques deux braffes de profond, par fois treize piés,mais au dedans elle a vn peu plus d’eau, toutefois elle n’eft nullement propre pour de grands nauires. Cette riuiere a cinquante ou fbixante lieues de fon emboucheure, fe précipi- té auec vn grand bruit du haut d vn fàult fur les rochers qui font au deflous : Or elle eft 40 fort tortue ,• au dedans de fon emboucheure, la terre eft d’vn cofté & d’autre baffe , & couuerte d vn bois efpois , mais quand on a monté vingt ou vingt cinq lieué’s,elle eft vnpeu plus haute,fàbionncufè&fterile, s eftendant en plaines, qu’ils nomment nas, ou les arbres ne peuuent croiftre,aulfi n’y eft elle pas propre, voila pourquoi les In- diens ont de la peine d y trouuer de bonne terre pour le Cajfaue : Or les Sauuages qui y habitent font t_y/w^^«f^,nation humaine & fidelîe aux Eftrangers: il s’y trouue beau- coup de beftes de chaffe, comme cerfs,& des fàngliers de deux fortes, mais iis font diffi- ciles a prendre, pource qu ils fe cachent dans les forefts & marefcages/& les Sauua- ges qui ont guerre continuelle auec les Caribes de Coretine, n’ofentà peine entrer dans les bois, de peur d’eftre pris ou tués, par leurs ennemis embuchés dansiceux. La terre 50 n y produit que des arbres qui portent le cotton, & cette teinture qu’ils nomment üreilan , les autres arbres font prefque tous fauuages & inutiles. Ceux de noftre nation demeurent entreîcs Sauuages il y a défia quelques années, &y ont mené vne Colonie: outre lesiY/^«/&r,dont ils font tourmentés, ils ont encore vne autre incômodité,fçauoir vne demangeaifon aux talons & aux pies, fi grande qu’à peine la peut-on fupporter, & fi on fe grate tant foitpeu,on eft en grand dâger,mefine d’eftre boiteux quelques mois. De 10 OCCIDENTALES. LIVR^ XVII. y8^ De Berhice iufques à Demarari les noftres content onze lieues vers le Nord-oueft j elle eft à fept degrés au Nord de la ligne : fon emboucheure eft alTés profonde , de for- te que les grands nauircs y peuuent eritrer j mais les Saunages fe tiennent loin de fon emboucheure au dedans du pais, & il eft fort difficile de traiter auec eux. E SSEQ^VEBE. C H A P. XVII. Dejeription de la riuïere d’Eflèquebe autres prochaines. AP R È s Demarari fuit le long de la mefme colle, à quelque quatre lieues d’in-î terualle, ou DeJfekebe,Çoit belle riuiere,& qui a bien vne emboucheure fort large, mais fi empefehee de bancs de làble, qu’on a befoin pour y entrer d’vn Pilote diligent & bien experimentéjil y a en outre entre fa fpacieufe emboucheu- re trois longues nies afles grandes qui la diuilent en autant de canaux : Or on a le plus fouuent couftume d’entrer par fon canal Oriental j audelfiis il y a encores plufieurs Ifles,mais elles font plus petites. Laurem Keymis raconte qu’il a appris des Sauuages , qu’à vingt iournees de chemin defemboucheurelanuiereprend fon origine; & qu’à vne iournee de chemin delà il lo y a vn grand & renommé lac, que les Taos nommant RopomwiniySiLlQS CaribesyParime ; ipacieux comme vne mer ; au bords duquel ils difent que la ville de Marna efl baftie ; que plufieurs Efpagnols & Anglois ont de fi long temps cherchée en vain. Selon que i’ ai appris de quelquVn desnofl:res,au deffus le premier fàult de la riuiere ( car elle en a plufieurs, de forte qu’on ne peut en façon qui foit monter iufques à fa fource ) les Sau- uages y trouuent du cryftal fort dur & tran^arant. Le long de fesriuages fe tiennent premièrement les ( plus humains que les autres, & ennemis des Efpagnols^ dans plufieurs villages,quatre ou cinq familles en chaque cabane, ils s’exercent fort à cultiuer ces arbres, des fruids defquels on fait la teinture , dont nous auons fouuent fait mention , que ceux de noflre nation ont de ^ O couftume d’aller charger,comme la meilleure qui foit. Les hommes y font outre me- fureaddonnésàl’yurognerie;ils vont tous nuds autant les hommes que les femmes; excepté que les hommes fe couurentles parties honteufes d’vn petit drapeau, pluftoft pour ornement que parhonnefteté,les hommes tondent leurs cheueux en rond, mais les femmes les nourriflent longs : qui ont auffi cela de particulier dés leur ieuneffe , de fe prefler fi fort les iambes,tant au droit de la iarretiere qu’audefius des chenilles, auec de certaines bandes qu’elles fçauent induftrieufement s’y lacer, que le gras de la iambe leur croiftd’vne grofreurdefmefuree,ce qu’elles eftimentfort beau & bien feant: ils ne reuerent que le Diabre,non pas qu’ils ne fçaehent bien qu’il eft mauuais, mais de peur qu’ils ne leur face du mal. 40 Au deftus de ceux-ci habitent d’autres Sauuages, qu’ils nomment Waeeewayes ne different des i^r'^aques que de langage ; ils ont guerre continuelle contre les Cari- bes-, ils haïffent auffi les Chreftiens; en leurs Prouinces fe trouue auffi de cette tein- ture; &vne grande quantité dece bois de lettre. Enfin les Crf/z^^’i-fe tiennent au deffus des faults de la riuiere &:prefque iufques à fa fource, de forte qu’on peut difficilement aller iufques à eux, fi ce n’eft par le moyen des autres Saunages; ils demeurent dans des villages , chacune famille famaifon à part, mais au milieu du village ils ont vne loge vn peu plus grande que les autres,ouuerte de tous coftés, dans laquelle ils reçoiuent leurs hoftesd’ vne façon bigearre: car les CaJJt- ques conduifent celui qui les vient voir , fans parler toutesfois,puis apres ils lui prefen- 5 O tent vn fiege &: du tabac , & le laiffent ainfi quelque temps iufques à ce qu’il fe foit re- pofé & ait acheué de humer fon tabac; lors le approche de lui, & demande s’il eftvenujl’autrefaifantfigne queouy,il fe fietpresde lui & difeourt de beaucoup de chofes auec : par apres viennent les autres du commun , demandans en la mefme fa- çon s’il eft venu , & babillent enfemble par fois quelques heures. Ces Sauuages font fort fobfesjbien que leur contrée abonde en fauuagine; leur commun viure eft du Caf- faue , de la faulce de poiure , des cancres de terre, & du poiflbn aucunesfois : ils vont £ eee 5 tous S90 DESCRIPTION DES INDES tous nuds : & font fort inciuiis &arrogans enuers les Eftrangers : les femmes font fort foigneufes àfe peigner, & eftiment cela forthonnefte; ils prennent plufieurs femmes chacun, & quand elles leurs defplaifent,ils en font leurs efclaues. Ils fe lailTent perfua- der par leurs Pyais toutes chofes, & quand quelqu Vneft mort, fes alliés ont couftume de demander pourquoi il eftmort, que fi ce Sorcier cftant ennemi de quelqu vnref- pond,que ceftui-ci ou celui-là en eft la caufe, fes parens ne ceiferont iamais tant qu’ils ayent faitmourir celui qucleF^^^auranommé. Ils font degrandes plaintes quand ils cnfeuelilTent leurs morts ; ils couurent le corps de terre, & lors que la chair eft toute confommee.ils deterrent les os, & apres auoir célébré quelques faites & dances, ils les enterrent derechef^ puis ils bruhent tout le village, &fe remuent ailleurs, de peur d’y lo mouriraulîî. . Le terroir le long des riuages de ce fleuue eft, auprès de fon emboucheure, bas & di- uifé en plufîeurs Mes ; mais fept ou huid lieues au defliis il commence d’eftre plus haut & fertile pour la plus grande part. Or la riuierc fe diuife plus auant , comme en trois branches,quidefcendent de diuers quartiers, &arroufent des contrées fort fertiles. Il ■ s’y trouue beaucoup de fort bon bois de lettre , mais on ne le peut amener iufques aux naiîires qu’auec grand labeur & beaucoup de frais. Suiuent apres le long delamefme cofte quelques autres riuicrcs , fçauoir Co4y>/V/, Pa'^rooma &L Moruga (queles noftres nomv(\ç,Vit Ammegore ) les habitans de laquelle,les Efpagnols venus de \2.MArgârite & de C4r<«r^»^r,chaüerentdupaïs de leurs predeceft iQ feurs,parlemoyen deso^r'ft’^2'^f5,ran cId Id xevr. T R O I S I E M E P A R T I E. ORENOQ^VE. C H A P. xvin. Dejcriptioft de la rimere de rOrenoqùc en general^ félon que les Espagnols en ont efirit. 50 NO V s fommes à prefent paruenus à cette noble riuiere,que prefque tous ceux de l’Europe appellent maintenant Orenoo^ue : de laquelle les Efpagnols &les Anglois ont eferit des merueilles ; la renommee eftant dés long temps ferme, qu’on pouuoit par icélle aller dans la Prouince remplie d’or de GuaianaiOw Dorado ,• &: à la ville tant renommee & fi curieufement cherchée de Manoa ; laquelle fèmble auoir receu fon nom de la vérité, car plufîeurs amorcés par vne vraye efperance d’or, ont en- trepris de très-difficiles chemins , pour trouucr cette ville & la Prouince doree : prin- cipalement par cette riuiere,pource qu’ils la croyoyenteftrela plus proche du Peru, & & Q^'OrelUn l’auoit nauigee, d’où vient que fouuent ils lui donnent ion nom. Or afin que nous exprimions plus commodementlafîtuationde cette riuiere &desProuin- 40 ces qui i’aduoifînent, nous commencerons par les voyages des Efpagnols ( comrrie nous auons fait ailleursjqu ils ont entrepris en diuers temps & pour diuerfès occafîons. 11 femble o^zchrifiofle Colurnhon fa troifîeme expeditionl’an clocccc xcviiine fut pas loin de l’emboucheure de cette riuiere , car ayant trouué l’Ifle appellee auiour- d hui U Trimdad} do\ih\è fon Cap Oriental , entré dans le deftroit , qui la fêpare delà Continente, veu de loin par l’eftroite emboucheure, qu’on nomme la del DragOid.o\\z. iufques à la i M^rannony & là il prit à la defpourueuè dans vn canoa quatre Sauuages, qui àuoyent deux pierres comme des efmeraudesjrvncdefquelleseftoit plusgrofle que le poing: dont ils difoyent qu’il s’en trouuoit en quantité au dedans de lariuiere ; de plus qu’il y auoit à quelques quarante lieues au dedans du pâïs vhe haute montagne fur le bord de iariuiere.couuerte d’vn nombre infini d’arbres,. qui portoyent de l’encens ;ainfî incité par ces chofesdl defiroit vniquement de vifiter tctte riuiere : mais ne pouuant appro- cher plus près à caufe des bancs, & ayant brifé vn de fies nauires contre les rochers auec la perte de plufieurs de fes gens',àprfesâüoîr efté emporté parvn fort courant vers rOueft outre l’emboucheure de cette riuiere, il courut le long de la cofte de cette Con- I O tinen te iu fques à P4m,où arriuant.il trouua que le Gouuerneur de Tlfle de U T rmidad^ jintoine Sedenno y auoit défia bafti vne forterefie en la Prouince du Cajpque Jurifarh & y auoit laifie Ton Lieutenant Gonz^aks auec vne bonnegarnifonpour lagarder; neantmoins mettant pié à terre > il prit la fortereflTe & la donna à fes foldats 5 & y efta- blit pour commander Martin luan Tafur ; fa raifon eftoit que Sedenno auoit pafle les li- mites de fon Gouuernement , & auoit pris efclaues contre l’Edid du Roi d’Efpagne, leslndiens de cette contrée & les auoit emmené ailleurs en miferable (èruitude. Apres cela il entreprit de vifiter la riuiere, & eut grande difettc de viures, iufques à ce qu'il ar- riua au village du CaJJtqne Fiaparh du nom duquel, la plus grande part de cette riuiere eftoit appellee au pafte. Il fut là receu amiablemcnt de ce CaJJiqnei&L y prit place pour 2, 0 hiuerner,contre le gré de fes foldats, qui euflcnt mieux aimédepaflfer outre, & de baftir vne ville plus audedans du pais. Or i’hiuereftantpafic,iicommençademonter lari- uierc,mais ayant brifé le principal de fes nauires contre vn certain rocher ,il mita ter- re deux cents hommes de pié & quarante à cheual j & pourfuiuit fon chemin par terre le long des bords de la riuiere ; ils marchèrent beaucoup deioursfans voirperfonne, excepté quelques Saunages qui viuoyent de poiftbn,rudes au refte & deftitués de tou- tes chofes, de la nation des Cariées s czc il n’ofoitpas s’efloignerdu riuageà caufe du petit nombre de fes gens. Ayant cheminé en cette façon cinquante iours auec grand peine & difette de viures,il trouua vne autre riuiere, qui fer defehargeoit dans cette- ci : Et combien qu’vn Sauuage jûruvaqne de nation, lequel l’auoit guide iufques-la , lui con- 50 feillaft de quitter la grande riuiere, & de monter le long de l’autre, lui promettant qu’apres quelques iournees de chemin il trouueroit de riches nations & qui vfo^enc .d’habits ; il n’y voulut point confentir , mais il fuiuit le grand canal , iufques à ce qu’il arriua à la cataraéte, du haut de laquelleTéaufeprecipitoit auec grand bruit fur les rochers qui eftoyent au delïbus , de forte que les nauires ne pouuoyent en façon qui foit monter plus haut: par ainfi fon defifein cftant rompu, il retourna vers fes gens GU jl arriua dans peu de iours. Il fe refolut puis apres de nauiger vers legolfe qu’on nomme CariacoM d’ychoifirvn lieu pour y baftir vne ville: mais ayant eftè reiettépae vne tempefte contraire à Çuhagua^A fut là abandonné de fes foldats j voila pourquoi il s’en alla tout êLcicox\îoxth^HiJpaniola,tc delà enEfpagne,& peu apres ilmourut,on ne 40 fçait pas fi ce fut enEfpagne ou en y allant.Yoila quelle fut la première expédition des Efpagnols dans cette riuiere r»^/m,comme elle fe nommoit lors : delaquelle Ralegh s’eftoit laifie perfuaderbeaucoupde fables par les Efpagnols, qui ne font confirmées par aucun digne Autheur. Or nous auons pris ce que nous venons d’en direde Her- rera Hiftoriographe du Roi. C H A P. XIX. Dijeours des chofis qui ont ejîé du depuù faites par les Espagnols en wifitant eette riuiere^ notamment par Orcal. ^ Près la mort de T>iego de Ordasylc Gouuernement de TarU fut coneedé par VEmpcïeuïàiHierome de Ortalïnn cIdîo xxxiii :qui arriuant à cette forte- refre,eftablit pour fon Lieutenant de Herreraj lequel il enuoya auec deux cents foldats & cinq barques defcouurir plus à plein la riuiere de TuaparL Icelui entrant dans cette riuiere arriua premièrement à Caroailicxx cognu défia d’auparauanr, où il feiourna quelque temps 5 cnuoyant cependant quelques-vns de fes gens pour defcouurir $9^ DESCRIPTION DËS INDES ■ ' ' d'ércouanriepaïspîusauant; qui n’ayans troüLiéperfonnequifoit, retour'neireht Vers leurs nauires ; puis apres il cira vers la riuiere de Cependant Om/s’eneftant allé à pourquerir de fès foldaCs, qui auoyenc cfté portés là par vne tempefte contraire; ayant efté retardé en plufieurs façons, chan- gea de refolution 5c entreprit vne autre expédition, comme nous dirons en fon lieu. Or Merrera voyant qu’il y auoit force Sauuages qui demeuroyent au cofté droit de lariuieredeCrfr/»4i?Æ,ily dercenditfesgens, &: apres vn douteux combat il battit les Sauuages, & en prit plufieurs dentr eux : ils trouuerent-là quelques peu de viures,dont ils aflbuuirent leur faim. Il monta puis apres la riüiere de C4A'Æ»4;?^,quipaffeautra- uers des defertSjde forte que fes foldats dclfailloyent faute de viures; & il ne rencon- lo’ tra nulle perfonne,!! ce né fut quelques qui dclcendoyentauec leurs pyragues; lefquels il tua ou prit auec p,erte de quelque peu des fiensdl apprit là de ces prifonniers qu’il auoit défia laide derrière, & qu’au deuant de lui il y auoit lafpacieufe ré- gion de Mcta-y\çs habicails de laquelle eftoyent ven:us,& remplis de grandes richeffes.- Ces Sauuâges lui monftrerentpuis apres le chemin vers Caburutu. Il eft neceflàire d’ouïr vn peu le iugemenc d’Antoine de Hef rera i plufieurs ( dit-il } croyenc encore auiqurd’hui, que lariuiercquicrauerfct:^lfé’/^,foitlamefmequecelle quilburd du Nouueau Royaume de Grânad'e75c^ik.\^2LŸ^^\\t^Q des Sauuages!7»;';»e^//e,par cette raifon , que des riuîeres qui prennent leur origine dans ledit JS(ouueau Royaumey les vues courent vers l’Eft, les autres vers l’Oueft : mais cette opinion ii’eft pas approu- 2,0 Uce; car ceux qui ont parcouru ces régions, alfeurénr, que cette riuiere eft appellee Orinoco , ç,nx,XQ laquelle & lei^4r.!!î;^w»ily adesProuinces {pacieules,qu’on nomme vulgairement El Dorade. Mais pour en donner aufll mon iugement, cette derniere opinion ne deftruit point la première , car ce n’eft point chofe nouuelle ni eftrange, qu vne mefme riuiere foit en diuers lieux & par diuerfès nations, appellee de diuers :> noms : de ïorte que / Oreno^ue dcT^rmeiyae ne pùifte eftre vne mefine : de fait il y a grande apparence que l’Orenoqtce defcend pdiir la plus grand part du comme nous dirons ci-apres. Mais retournons à l’expedition. Les Efpagnols partans de Cabaruto , trouuerent que tout le pais auoit efté gafté par^ les Ci4mi’^'jr,&paruindrent enfin aiacatara6î;e,de laquelle deOrd<^eftoitretourné:maiS|0 Herrerai^ws s eneftonner, fit defcharger les chaloupes, & les porter outre auec beau- coup de peine & de danger;cftant au deïTus d’icelle, ils entrèrent dans vne côtree platC: 5l pleine de campagnes , mais qui n’eftoit habitée deperfbnne j & arriuerent enfin, apres plufieurs iourneesalemboucheure delà riuiere qui trauerfe Meta i là ayanstirç leurs chaloupes a terre, & y ayans defi:endu,ils trauerferentpar vn chemin fort ennuy- eux au trauers des marais & lieux fort empefthés ; iuïqucs aux villages des Sauuages, ^ qu ils nomment Xaguas : ( qu on difoit eftre fort furieux 5c mangeurs d’hommes J 5c À eftant entre dans 1 vn d’iceux apres en auoir cfiafte les Sauuages , ils y prirent vne afles bonne abondance de viures. Puis païTans del autre cofté de la riuiere, ils fe logèrent !- pour s hiuerner dans vn autre village, où ils trouuerent , entre autres animaux, des cniens muets , que les Sauuages appelloyent Mayi 5c Auries^ dont la chair n’eftoit pas moins délicate que celledes cheureaux.Mais les Sauuages les alTaillirentpeu de temps, y apres fi inopinément, qu ils en tuerent & blefterent plufieurs dentr’eux,& entre autres ?!. Herrera,qm mourut enragé vn peuapres it^harode OrdasÇncccà^Ltn fa place, lequel remmena le refte aux nàuires, & enfin s’en retourna à mais y ayant trouué la f forterefle abandonnée ( pource qü’(5r/^4!/, comme nous auons dit ci-deftlis, auoit chan- gé de refolution ) il mena fes gens ailleurs. Voila ce qui a efté fait par les Efpagnols dans lâ riuiere de r/4/^riiufqties à lan cId Id XXXVI. Ils y ont du depuis entrepris beaucôup d’autres voyages , lors qu’fis cherchoyent auec beaucoup de peine El Dorado , dont plufieurs Autheurs ont fait mention , mais f \ pource qu ils font mal aifeures nous les auons obmis en ce lieu : pour nous hafter aux ehofes quiy fontaduenués denoftretemps. , C H A P. I OCCIDENTALES LIVRE, XVIL C H A P. XX. Dés chojés que les Espagnols y ont faites depuis td notamment Gon!zaIue Ximcnes de Quefada , Antoine de Berreo. CO M M E Peâro de ûrfm, ^ l’imitation de Pizarre-, aüoit cherché du Gouuer- nement de la contrée h riche enor,aulIi Gonzdue Ximenes de ^uyfada elTaya lé melhie du Nouueau Royaume de Granadey par la riuicre de Papa- mene^commc raconte VValther Ralegh en la delcription de Guiane ; mais auec auffi peu 10 de fucces. Iceîui donna fa fille en mariage à Antoine de Berreo -^o^xx pourfiiiuant ledefi- fein de fonbeau-pere, tomba enfin entre les mains de qui le prit dans lifiede la T'rinidad, auquel il raconta la fuite & l’euehement de fon entreprife , comme Ralegh l’a rapporté dans fes Commentaires, defquels nous en reciterons ici quelque chofe briefuement. Antoine de Berreo fdit-ii ) chercha vn pafiage pour entrer du Nouueak' Royaume de Granade àd.ns Guianeyd^ deCcendit par la riüiere de CaJJanar, laquelle tombe danslagrande riuiereappellee/’<«/<»,quidercend dans .(ï/c/^daquelle enfin fe rend dans la Barraqua,(\nç. d’autres nomment Orenoque. Or Cajfanar lourd dans le Nouueau Royaume de Granade des montagnes de Üimia y defquelies defcend aufii Pato -, qui fe mellent IVne & l’autre dans (JMetad^cyxxedlQ prend âo fon origine près de PampeîonayWiWedw mefme Royaume de Granade. Nous auons ci défi {uSiQnlzdcicn^ixon du Nouueau Roy aume,izit mention de la riuierede Pato ^ àcnons auons ditjfuiuanti/^’^'rÉ’r^, qu’elle entre dans la grande riuiere delà Ma'gdeîèné. ‘Meta, auffi, auec Guaiare (qui lourd des montagnes, lefqüelles font au dellhs dcTimana ) cou- rent dans la toutes ces riuieres font comme autant de branches de cette grande riuiere,dans laquelle elles fe perdent auec leur noms, tour de mefme que la r4^«rf,quieftappelleeplus bas Ùrenoque. Par ainfi de auec fes troupes defcendit par dans delà dans \2.Barraqùa,païtie cn marchant le long des bords desriuieres,en partie porté par chaloupes ; mais apres qu’il fut entré danslecanal dé la grande riuicre, il perdit beaucoup d’hommes & belles de charge,à caufeque plu^ 3 0 fieurs de fes chaloupes furent brifees contre des rochers aueugles, ou renuerfees par le grand courant & par le grand nombre des remoux : il per,dit auffi beaucoup de fes gens encombatant contre lesSauuages habitans les montagnes; & ne fit rien de re- marquable durant vn an entier, beaucoup plus incertain de la fituation de Guiane qu’auparauant; iufques à ce qu’il arriua fur les limites d^Amapaiaikhmék iomnces de chemin de la riuiere qu’ils nomment Carolk LaProuince/^îf»^^4/i?eftfituee le long des riuâges dc fOrenoqaei riche fur tout en. or, fi on doit croire Antoine de Berreo Sic les Sauuages qui y habitent. Il y feiourna fix mois,6t apres auoir perdu le meilleur de.fes gens, & pluficurs cheuaux en diuérs côbats contre des Sauuages fort hardis,énfin il impetra d’eux la paix, & huief ftatuës d’or fin, 40 fuites fi induftrieufement, comme il tefmoigne lui mefme, qu’elles difputoyent auec celles de l’Europe ; qui furent enuoyés au Roi d’Efpagne : Les Sauuages defquels il auoit receu ce prefent fe nommoy ent du nom de leur natjon xMnahas ,• or la riuiere de l’Orenoque au droit de leur Prouince auoitdefia douze lieues de large , combien qu’on eftime que cette Prouince foit à fept ou huiéteent lieues de remboucheure d’icelle. En outre le terroir de la Prouince d'Amapaia eft le long de la riuiere bas &marefca- geux,& les ruiffeaux bc torrents qui paffentpar icelui, prennent. vne couleur rouge dii limon i & engendre beaucoup d’infedes fort venimeux, de forte qu’il fait fort dange- reux, voire mortefd’en boire, commQ Berreo raconte qu’il a elle expérimenté parla mort deplufieurs. 5 O Eftant parti delà & marchant le long du bord du Sud de la riuieré , il commença de chercher diligemment & auec grande peine, s’il ne pourroit point trouuer quel- que paffage pour entrer dans Guiane,ïrxâ\s eh vain,car par tout il y auoit des montagnes fort hautes & droites: ioint qu’il rencontra plufîeurs riuieres,qui defeendoyent de co- llé & d’autre dans nom defquelies il difoitn’auoir pas appris ouïes auoir oubliésjcxcepté de la riuiere de Caroli ( car il fe faifoit fi ignorant de la Cofmographie, qu’il ne fçauoit pas difeerner les places du monde ) de forte qu’il auoit mauuaife Ffff efperance r DËSCRIÎ^TÎON DE S iNDÈS fefperaîîcc du fucces dë fou entreprife , fufques à ce qu’il fufl: venu dahs la Proüiiicc itEmmatO'à il trouua des viures en affés bonne abondance , & des habitans beau- toup plus ciuilifés. Le Capq-ue de cette Prouince fe nommoit Carafana , vieux de prefque cent ans, lequel audit en fa ieuneife viiité les Ides de la Trinidad & de Mar- garine, & auoit trafiqué auec les Ghreftiens encore en d’autres quartiers ; de forte queftant imbu de leurs couftumes, il gouuernoit fes fuiets plus paifiblement , Sc s’accordoit affés bien auec les fes voifins. De Berretf ayant feiourné là quelque temps , comme il eftîma qu’il fçauoit affés que c’eftoit de GMane, il defcendit le long delà riuiere iufques à la Trinidad , ' là nauigea vers Igi Margarine î d ou il retourna auec cinquante foîdats vers Tlfle deio^ la Trinidad, & fe logea là : mais vn peu apres il cnuoya quelques-vns de fes gens à Garaf ana j qui les renuoya a More^uitt, Cajjftfiee voiïînj'^ui fcauoit mieux fans dou- te le chemin de Gaiane ,pouxcQ que fon pais , comme on dimit j n’cftoit diftant que de cinq ioernees de Mamregmra , première ville de Gmane. Ce M&reqàite auoit porté quelques années auparauant beaucoup d*or à CUmattà & à la Margarine % & auoit tant exalté les grandes richeffes de Guiane à Vkda , qui cftoit pour lors Gouuerneur de fl/le de la Margarine j qu’il pourchaffoit d’obtenir du Roi d’Efpagne priuilege de la pouuoir feul defcouurir & fubiuguer î dequoieftant caille Mwequite & qui làns doute fauorilbit moins à de Berreû,ïic. receut pas volon- tiers lès foldats 5 toutesfois n’olànt pas ouuertement refulèr , il commit quelques- ^>0 vns de fes gens , pour monftrer le chemin de Guiane à ceux de Berreo,cntïc lefquels eftoit vn Moine: de forte qu’apres onze iournees de chemin, ils arriuerent à la vil- le de Marna, &c recouurerent beaucoup d’or ( comme de Berne racontoit, car les Sauuages nient qu’ils ayent iamais efté iufques-là ) mais comme ils retournoyent, &: qu’ils eftoyent défia fur les limites d’Aromaia , ils furent tous tués par les fubiets de Mùrequite, excepté vn qui apporta les nouuelles de ce defaftre, & comme le tout s’eftoit paffé à Berreo, lequel enuoya aulfi toft plufieurs de fes gens pour vanger la mort de leur camarades j mais LMorequine craignant cela paffant la riuiere de iOrenoquè s’enfuit au trauers de la Prouince de Saima & de la Contrée des Viquires à Cumana par deuers le Gouuerneur Fiedo , croyant en vain de s’y pouuoir garentir & d’obte- î 0 nir pardon de fa faute ; mais icelui, combien que LMoreqmte lui promift vne gran- de quantité d’or pour fauuer fa vie, toutesfois pource que par fon moyen tantd’Ef. pagnois & entre iceux ce Religieux auoyent efté tués , n’ofant le refufer à Berreo, qui le demandoit au nom du Roi , il enuoya ce milèrable lié à l'ille de la Trinidad^ où il fut fait mourir par Berreo. Or les foldats qu’il auoit enuoyes gafterent la Pro- uince, & prirent Tofid^ari oucIq àc Morequite fe rachepta apres pour cent lames d’or & plufieurs jpierres precieufes , que les Efpagnols nomment FiedrasHia^ das & fut Gouuerneur aAromaia. Cependant de Berreo fe voyant pour le mal qu’il auoit fait eftrc ha'i de plufieurs habitans de l'Orenoque, qui aimoyent Morequite ,x\v olâ plus enuoyer f&s gens , ex- 40 1 cepte a Carapana,^zx le moyen duquel il efperoit de trouuer quelque iour le chc- _ . . ' ■ ;fc' min de Guiane. Et afin de pouuoir derechef obliger \ts Merequites ,il fit baptizer le coufin du defund:, le fit nommer honluan, & le commit pour leur commander. Il enuoya aufli grande quantité d’or enEfpagnc & en diuers quartiers tle l’Amerique Méridionale , pour recueillir des foldats , auec lefquels il peuft vn iour eonquefter Guiane : ccpznàmt qu’il pourfuiuoit & entreprenoit ces chofes il fut pris de FVd- îher Raiegh. Apres cela les Efpagnols menèrent vne Colonie fur les bords àti^Oremque,^ y ba- ftirent la ville dciS". Thomas laquelle nous parlerons quand nous aurons acheué de traiter ce que VVakher Raiegh a i^t en ces quartiers > feion qu’il le raconte lui jo mefme. - _ ' ‘ -J' yr . OCCIDENTALES. LIVRE XVIÎ. fSf • C k A P. XXL^t , ' T^remiere expédition àuCheualteriS^ûxhtx Ralegh^r/^^j/i yiüierede \Oïcnoc^nc,qéi fatTancloloyicw» RAlegh croyant auoir efté affés informé par Èeryeo des richefles de Guiane & des chemins pour y aller ; fe refolurde l’eflàyer par toutes fortes de moyens ; mais il fe prefentoit beaucoup de difficultésy & entre autres vnela plus grande de tou- X O tes, qui eftoitquiisne fçauoyent pas par qu^élle emboucheure iis deüoyent entrer, pour venir dans le canal de lagrande riuiere î voila pourquoi il enuoya premièrement Ton Vice- Admirai Georges Gifford auec vne fregade & vne petite barque j pour elTaycr l^emboucheurc de la riuiere , qu’on nommoitC*/»»r/,mais iln’yfîtrien, car combien qu’à l’entree il y euft neuf piés d’eau à la maree haute , & fèulcmentxinq à bafle mer, toutesfoisils nepéurent s’auancertantvers le Leuant, ou paieries baffes quis’eften- dent des Ides vers la mer,auant quc la maree s’en retournaft: puis apres ilenunya auec vne chaloupe, pour effayer l’autre branche ( que les Sauuages nomment Amana ) qui fort au fond de la baye de Gnxhipk^ comnic ils l’appellent , mais il trouuà auffiquecette-cieftoit peu profonde St feulementpropre pour des barques :Toutes- âo fois àla fin IeânDo\vglaffexxQ\x\x2iQ^‘3XKt emboucheures fort larges,mais qüi fortoyént dans vne baye.laquellc n’auoit que fix piés de fohdj Voila pourquoiJaiffans leurs grands nauires dans le port, ils fe mirent dans vne fregade,^ Ils tracafferent quelque temps en- tre des Ifles&plufieurs canaux car le Sauuage qii’ils auoyenî^mené auec eux pour guide, eftoit du tout ignorant deces lieux liufques au vingtième de Mayjau.^ quel lourde bonne fortune ils rencontrèrent vn canoade Sauuages, dans le canal de lariuiere ('auquel ils donnèrent le nom de là Croix ronge)^ contraignirenr vn dentr eux de leur monftrcr lé chemin, or c’eftoit vn vieillard qüi fçauoic fort bien ces lièux-là. Les Sauuages ( dit Ràlegh ) qui habitent dans ces Ifles, font appelles d’vn nom com- mun TiuitifioSi & font de deux nations , dont ceux de l’vne font Caiwam-, 6c de l’autre 3 ^ FFarraryeerj.’rohüiïcs decorpsôt nullement laids, qui vfentd’vh langage fort viril &: magnifique. Aux mois de l’efté ils baftiffent leurs cabanes fur terre, mais l’hiuerils les font au fommet des arbres j car depuis le mois de May iufques en Septembre la riuiere de /’0>'é’wg'»^s’enfle fi fort & apporte tant d’eaux , que les Ifles pour la plufpart énfbnc inoüidees, quelques-vnes des plus hautes exceptés ,& l’eau croifl: bien fbuuent vingt piés par deffus fes riuages. Ils viuent de palmites & d’autres fruids d’arbres , comme aufli de venaifon J &:nefe trauaillent pointà cukiuer les champs, eftansfaincans&ne^ pouuans fupporterlerrauail. Or la riuiere de i’Orenoque fortant en mer parfeize emboucheures 6c peut eftre da- uantage,fepare vn grand nombre d’Ifles,qüelques- vnes delquelles on eftime eftre aufli 40 grande que celle de r7'k^r,que|ques-vnes moindres j de forte qu’on penfè quei’em- boucheure la plus au Sud , eft diftante de celle qui eft là plus au Nord d’enuiron cent iieuës,& que touteremboucheure en general aplusde ccc milles Angloifès ,furpaff fant de beaucoup cellede la riuiere des Amazones ces Ifles font ap- pellees dés Sauuages Pallames i 6c les autres Horotomeka , dont ces deniieres font à la main droite en entrant, & les premières àla main gauche s enfin le canal qui va mana à CapuriiCÇi nommé des Sauuages Macuri. Ralegh ayant trouué ce guide fi à propos,partant de l’Ifle des Gtawani, vogua quatre iours iufques au canal ouuert de la riuiere, qui eft nommé le grand {^mana,6c delà tira plus droitvers le Sud: il eftoit défia venu iufques au cinquième degré de la ligne vers 5 O le Nordj quand les matelots commencèrent à fe débiliter par trop de chaleur & de trauail , & tous enfemble à eftre preffés de difotte de viures ; 6c fàtis dbute ils s’en fuff fent retournés fiins rien faire , n euft efté que leur guide les mena par vn canal qui for* toità la main droite,à vn certain village de Sauuages ^ bu ils recbuurerent quelques vi* ures ,* qui fuffirent feulement pour peu de iours , & derechef eftbyent tombés en meC- me ncceffité , lors que fort à propos quelques canoas les renconcrercnt,qui alloyent, chargés de viures, à IJÜedehMargaritecD'iccüxils nerecouurcrentpas feulement Ffff Z des I ^$6 BESCRÎÏ^TION DES INDES des viures contre leur faim, mais auffivn certain de la nation des Arwaquei, baptizé par lesElpagnols, qui leur monftra le plus court chemin pour aller dansJc principal canal dcl'Oremque, defortequ’ils voyoyent défia de loin îes hautes montai gnes limites de ... Or apres qu’ils eurent mouillé i'anchre ein ce lieu vis à vis de trois’, riuieres qui fbr- toyent dans la grandCiTépartmaca, Cajjtque dccttcc. Prouihee vint à eux, apportant dî- ners fruids de ce quartier & d’autres viures,“& les meha à Ibn village , litué fur yne peti- te montagne , enuironné de toutes parts de iardins 6cde champs fertiles ,• le nom du village eftoit & les hafaitans eftoyent de la nation des Nefoios. Ayans rc- couucrt en ce lieu vn autre guide, qui fçauoit fort bien la fituation de ces lieux & le i o cours de la riuiere , iis partirent derechef, àc auec vn fort vent d’Eftjqui leur eftoit fa- norabîe ( car ce canal court prefque droit à i’Oueft ) ils pafferent premièrement outre Vers vnc Ifle qui eft au cofté gauche , laquelle auoit enuiron vingt cinq milles de long, & fix de large ( les SauuageS k nommoyent Ajpifm& ) que le principal canal de la ri- uiere rafoit de l’autre cofté : puis apres droit vers vne autre Ifle prefque deux fois plus > grande,qu’ils appelloyent Iwmn & le canal qui la feparc du Continent de Guianct Ar- ' de forte que la terre ferme eftdiftante d’vn cofté & d’autre de trente milles. Aîamain droite &vcrsrOucft dcrrfled’^^/>^»;*,iariaiere d'Emr^tpa entre dans l’Ore- aoqueivm'&tit de deuers le Nord : ayant pafle ce confluant ils moüilierent I’anchre au deflbus de l’Ifle d'Omywiia , longue de fix milles & large de deux : &: le lendemain au dfiflôus de rifle de PmaymSiVr^ à vis de îaqüclie il y a vne haute montagne dans la terre ferme, que les Sauuages nbmment àecop€:âLtiù voguans vers l’Oueft, ils virent à la main droite vnc fort belle plaine &: des champs fertiîeS; que le Sauuage qui les guidoit dflbit eftre appellee la campagne dé Saymdt & qu’elle s’eftendoit par Vn grand efpace de ter- res îufques à Camma i & mefmes iufques à Cmacsi prefque cent 6c vingt lieues vers le Nord,& qu’en cet efpace il y auoit quatre diuetfes nations qui y habitoyent, première- ment les Saymanesi puis apres les Ajfâwuyes t en troifieme lieu les VVikires nation fort jpeuplce , qui auoyent tué és années paflees f edro Herdezde Serpà i enfin Xc^KjîroŸos^ qui eftoyent prefque aufli noirs que les Neg:res,& auoyent le poil de la tefte poli & non friféi nation au refte fort belliqueufèjfèferuant de flefehesenuénimees. ib Le troifieme iour ils moüillerentl’anchre proche de là riue gauche de la riuiere en- tre les deux montagnes KjArmmi 6c Kyîiu i le quatrième iour ils paflèrent outre Flflc de MdnoripârayÇLtvLtQ au milieu de la riuiere ; enfin le cinquième ils ârriucrcnt dans la Pro- nincc dAromaiâ, 6c momWQTîcnt I’anchre près de la pointe Occidentale de l’Ifle de O^mrecolima, qui auoit de long dix milles 6c de large cinq ; & le derrière iour ils arri- iierént dans le port mefme dé Mûrequite, où vint à eux l’oncle de Msreqùitei de Ton vil- lage qui eftoit à quatorze lieues du riuage, combien qu’il euft défia plus de cent dix ans. Ce vieillard expliquoit la fituation de Gnime en cette façon. Que toute cette re- gioniufques à Bmerm s G uims y 6c les habitans dVn nom commun Oremque- pdnesy iufques à la montagne de qu’on pouuoit voir bienloin au dedans du 40 païsv Qu’au delà des montàgnes il y auoit encore vne plaine, nommée la vallée d'Ami-- rkpâcam , les habitans de laquelle font aufli Guimites ; & que dans les Prouinces qui font au dcfliis celles-là il y eftoit arriué au temps paflfé des nations eftrangeres , qui fe nomment Oreioms 6c Êpurtmes ; qui auoyent en partie tués , en partie chafles des de- meures de leurs anceftresjles habitans d’icelles ( exceptés feulement les & les CafftpagôUs) 6c y auoyent bafti vne belle ville aucc'de magnifiques édifices, qu’ils nomment Mâcuregmrd. Eftans partis du port de Mônqmt€y6lmor\vSiXit plus haut la riuiere, ils s’arrefterent la première nuid au deffous de l’Ifle de CMamayOphX a cinq ou fix milles de long : le lende- main ils arriuerent à i’emboucheure de lariuieré de C«r^/jr,maisà caufe defbngrand yo courant ils ne la peurent iamais monter; par ainfi ayans enuoyé quelques Sauuages pour prier CamuriaydedcCcendtQ vers eux ; le lendemain le Cdjjique Vf'amyetonalcs vint troiiuer auec plufieurs de fès gens , qui apportoyent toutes fortes de viures 6c di^ uers fruids : car iis n’eftoyentpas feulement ennemis mortels des Epinememy mais aufli des Efpagnols. Ce Cdjpque racontoit qu’au dedans de la Continente fur les bords du lac de Câ^paydüqnd la riuiere de Càrffli fortoit , habitoyent trois puiflans peuples les 10 OCCIDENTALES. LIVRE XVtl, les Cajjiapaaotes , les Eparagotes & les extrêmement ennemis desEfpagnoIs. jRalegh enuoya quelques-vns de fes genspour vJfîter la contrée voifine 5 des richelfes de laquelle il conte merueilles dans ïès Commentàires. Lelongdclâriüe de main gauche de la riuiere de Càroli Ce tiennentles x^warapaques ideCc^xxehnom venons de faire mention. Du mefme lac fort vne autre riuiere nommee Arey ; apres laquelle cou- lent deux autres riuieres A/aûa & Caûra ,• le long des riuages du dernier on dit que de- meurent ces Sauuagesjquront la teftefîpfé^dcs erpâülesjquê plufieurs ont creu qu’ils auoyent les yeux & la boiiche dans la poitrine, ils ïestiômmentJÉ'^aypamwa^. La qua- trième riuiere vers hOueft de Cara/^ eft appellee C'4/»^’;'^, laquelle fe perd dâns/’ôr^i>=> lelong grande qu’aucune riuiere de iioftre Europe. C H A P. XXIÏ. Catalagm des rintem qui entrent dans rOrenotJûe j ^ lé téfie de {expédition de Ràlegh. AV A N T que de pôurfuiurèl’expedition dé Raîéghi il eft rieceflaire de mettre ici le catalogue des riuieresj qui entrent dans forenaque, La première riuierè ( dit Ralegh } qui defeend de deuers le Nord; dans l'Oren&qtte eft appellee Cari % & la féconde d’apres vers rOueft,Z4>»tf:entre les deux habitent tant fur le riuage qu’au a, O dedans du pais les Carnhales ou Antropophages 9 le priïlcipaî village dcfquels eft nom- mé Acamaearhoà Ce tient tous les iours marché de femmes, que les Anvaqms acheptent chacune trois ou quatre haches , &: les mènent vendre en d’autres Prouinces de l’A- merique Méridionale. Suit apres versl’Oueft la riuierè de peu apres celle de Catari Voari & Capuri^iC^x fort de la grande riuiere de Jdf^r4,laqueliettous auons dit que Berree auoit defeendu venant du Nomea» Royaume de Gramde. V ers l’Oueft de Capuri eft fîtuee laProuince d’ Amapaiàidzns laquelle il hiuerna,ô£ perdit beaucoup de Tes gen$ qui moururent par les eaux enuenimees. Au deftus d’Amapaia cirant vers le T^pmeau Royaume de Granade, defeendent dedans Meta les riuieres de Pauo ôc de €a_ffknar. Vers rOueft de cette riuiere & la Prouinee des Sauuagcs nommés Ashaguas & Catety ftii- 3 O uentles riuieres de ^^/4,de J>aa>ney 8£ dYbarro ; & dans les limites du Peru Ibnt les Pro« uinces de Tomebamha &c de Caxamalca. Enfin proche de , vers le cofté Septem trional du Peru paffent les riuieres de Guiacar & àtGoauar : finalement de l’autre cofté des montagnes la riuiere de Papamene ( qui apres auoir trauerfé la Prouinee des Muty- loues defeend dans la riuiere du Marannon ou des Amazones ) fur les riuages de laquelle Pedro de Orjka 20X0X1 baftifes chaloupes, lors qu’il chetchoitpaflageparlariuieredes Amazones ipom entrer dans la DoradoMn. chacun qui a tant foitpeu veula delcriptioii du PerUiCOgnoxCkïz aiièment que ces chofes font fort confules. Or entre Datvney &c Beta,\2i riuiere de la Êarraqm( czt l’Orenoque s’appelle ainfi en cet endroit ) embralTe l’Ifle d'Athuki au deftus de laquelle les barques vn peu gran- 40 des ne peuuent monter, à caufe des grands làults & du grand courant. Au refte, comme la riuiere àel‘Orenoquecommevi• voila pourquoi il im- petra permifïion d’y aller auec vne flotte de force nauires , qu’il auoit efquipee tant à tes dcfpens que de ceux defes amis. On pourra voir quelle mt la fin de cette encrepri*. fe,par la lettre deiî^/f^^ mefme qu’il efcriuit deTIfle de S.chrijlofie \ Rûdtdphe Win?. Secrétaire du Roi de la grande Bretagne, qui contient ces mots. LMonJCeurCi^nQ vous ai point iufques ici rendu conte de mon expédition aux Indes raufline eeftril point prefenté de fuiet pour vous eferire que trifte & infortuné , car combien qu’il n’y ait d’ordinaire que xv ou au plus xx iours depaflage des Mes Hejperides iufques au Continent de l’ Amérique, i’y ai rencontré des vents fi contraires & des tempeftes & trauades fifurieufes,qu’à peine Fai-ie peu faire en fix fèpmaines ; ioind la grande cha- 50 leur & la difette d’eau, la perte de chables & d’anchres au defrousdeFlflej?;'*?»ir& du Cap Verd,où. nous auons efté en grand danger de la vie: ioinélla maladie & la mort tant de nos meilleurs foldats que de nos plus experts mariniers. Enfin le dix feptiemede Nouembre nous vinfmes à la veuë de Guiane, & moüillafmes l’anchre à Femboucheu- redelariuieredeC4////ï»f(que nous auons nommee ci-defTus Caiane)à cinq degrés au Nord de la ligne, où nous auons demeuré iufques au quatrième de Décembre. Nous mifmes là à terre tous nos malades , montafnjies nos chaloupes & barques que nous V- ^■O-O DESCRIPTION DES INDES îsous'aüions amenées d’Angleterre , & nous pourueufmes d’eau , cependant dé €alliane,Caj]î^ue de ce quartier, noftre ancien ami, nous aida fort amiablement & de Ton \ labeur & deviures. Feftois pour lors malade & en grand danger de la vie, de forte que durant fixfepmainesie me peu à peine remuer. Par ainfi recommandai à d’en-- trerauec cinq nauircs dans l' Orenoque,&c\e.s meeerà lamine. Il y auoit dans chacun- de ces iiauires cinquante cinq foIdatSjfnr lefquels commandoyent les Capitaines Par- ker de North ( frétés des Seigneurs àG'Mont- aigle ^ de ^^i^r/ï^/Gentilshommes pour fupporter la fatigue, la faim & le chaud; mon fils, le Capitaine de & le Ca- pitaine chudléy par fon LieutenantrP^^eZ eftoit défia mort, & mon Lieutenant le Sieur VVarran de S. Leger cQioït griefuement malade & hors de toute efperance d’en re- i® ^ chapper : & mon coufin Georges Ralegh^ qui auoit ferui à la guerre des Pays-bas auec grand honneur, qui pour lors eftoit en ma place, n’auoitpas i’authorité requife, pour . j eftre obeï des fbldats, comme le mérité de l’affaire requeroit. Lors que nos gens mon- tèrent la riuiere,les Efpagnols commencèrent aufti toft à fe porter à lencontre en en- nemis, tirant fur iceux à coups de canons & de moufqueîs , de manière qu’ils furent , r:ontraints de repoufrer la force par la force , &■ de les chafter peu apres de leur ville : mon fils fût tué nu premier aflault , pluftoft defireux d’acquérir de l’honneu r que foi- gneuxdeconferuer fa vie: auec lequel, pour confefler la vérité, ie n’ai pas feulement perdu vn cher gage, mais aufti tout ce quei’auoisdecheren cette vie. Le refte de mes naiiires fe retirèrent au deftbus dei’Ifle,netrouuansnul port plus commode en rousles lieux voifins deG'W^^^if.Sur le fécond d’iceuxcommandoitmonVice-Admiral leanPen- duquel ie peux tefmoigner à bon droit, qu’il mérité bien d’eftire conté entre les plus experts és affaires delà mer , que l’Angleterre ay e point : fur le troifieme le vail- ^ tant & généreux Cheualier VVarran de S. Léger :Cmï le quatrieîiie le Cheualier lean , fur le cinquième le Capitaine Auec ces cinq nauiresi’at- îendois l armee nauale d’Efpagne; que fi elle nous eüft attaqué, cependant que noftre flotte eftoit ainfidiuifee, fans doute elle n’euft pas feulement deffait nous autres fans peine, mais aufti ceux qui auoycnt monté la riûiere;toutesfois nous aimions mieux périr & nous bruflcr auec les Efpagnols , que de leur ceder tant fbit peu. Ilfemble ' pourtant que les Efpagnols trouuerent pour le mieux de nous attendre fous rifle de la 5 O c^4r^Æme,oûilnousfalioitpafl'erpour aller en l’Amerique. Car quand il pleutau Roi de m’obliger par ferment, que ie lui defignerois nom par nom toutes les terres & riuie- res où i’auois refblu d’aller, & que ie lui declarerois par eferit la grandeur de mes naui- ïcs,le nombre des foldats & des pièces de candn , & le refte des munitions de guerre : Toutes ces chbfes furent aufti toft déclarées à rAmbaffadeurd’Efpagnejquirefcri- uit promptement à ^^^s?r/7,auant que iepartifl'ede la car les premières let- tres du Roi, qu’il enuoya par vne caruelle à fes Gouuerneurs en l’ Amérique, cftoyenc Vferitesduquatorzieme deMarsdel’an cIdIdc xVii ; le vôus lés enuoyc,& garde les autres, craignant que d’auanture celles-ci ne foyent furprifes. Les autres lettres du Roi eftoyehtdu dixfepdeme de May enuoyces à Diego de Palameque, Gouucvncm de 40 Gmàne.d El Dorado & de la Trinidad': Les troifiemes eftoyent eferites à l’Euefque de Fùrto Rico,$)CzPalameqitexccQVi'és\ç.cimnzïtmtàelm\\ci‘3im\’lù.eàc\2.Trinidad:hc% quacricmes eftoyent eferites au Secrétaire de Iftmpoft des Indes, &enuoyees auec les , lettres du Roi. On y enuoya aufli des perfbnnes, pour aflémblcr en toute diligence trois cents foldats , & pour mener dix pièces d’artillerie de Porto Rico à Guiane s outre cent cinquante foldats conduits pa![ le Capitaine JntomeJEexia^qu’onfaifoit y enk du ÿ^uueau Royaume de Gramde, & autant de Porto Rico , fous le Capitaine Prancifeo San- ehio. Or puis qu’il eft cognu à tous ceux qui ont efté en rAmeriquejComme, depuis le fegne de noftre Roi , les Efpagnols ont traité cruellement tous lesEftrangers qu’ils ont peu attraper, combien qu’ils n’y fuffent allés que pour trafiquer, vous pouués pen- jo fer que c’euft efté de nous, fi nous fuftioris tombés entre leurs mains, de qui iisfça- uoyent bien les forcesdes deffeins & I'arriuee?Mais on me pourra obieder, pourquoi ie ii’ai pas attaqué la minejcombien que ie ne fois pas obligé de rendre conte à perfbnnc f SaMaieftéexceptee) qu’àmoi-mefme,qui aperduen cette maiheureufeentreprife ce qui m’eftoit plus cher, auec tous mes biens, toutesfois c’eft vne chofe affés manife- fte que les Efpagnols eftoyent plus en peine de la mine que de la ville mefme; & il leur euft i OCCIDENTALES LIVRE. XVIL cnft eftéaifé de nous chafrcr, notamment pource que, comme parlent les lettres du Roi, le chemin pour y aller ell raboteux & difficile. En outre il ell bien vrai , que Key- mis trouua la riuiere courte d’eau , de forte qu’il ne peut approcher du riuage plus près qued’vnelieuë;& quand il eut trouué vn lieu commode pour defeendre à terre, il pleut vue telle nuée de baies fur nos gens, tirees du bois prochain , quedeux rameurs enfu^ rent tues , hx griefuement bielles, &fut tout le Capitaine Tornap fut blelTc en la telle, de laquelle playe il ell encore languilfant. ZC^jvJ^^auffirefolu en fon opinion, difoit, qu’il n’elloitpas bon de pourfuiure; poureeque nosgens'qui auoyent eftélaiffés ai". Thomasytù.2iï\tto\is\cs iours fatigués par les aflaults des Efpagnols feroyentàla finies I O plus foibles: que le chemin pour.aller à la mine, palTeparvn bois efpais ; & qu’il n’a~ uoit pas pour lors des ouu tiers pour tirer la mine & pour la fondre. Au relie ie fçai alTés que les Efpagnols ont deux mines d’or proche de cette ville : l’vne defquelles ell pof- fedee par Pedro Rodriguez, de Parafa, Vautre ^ar Heruiano Frontino: enfin vne troifieme, laquelle ell d’argent , par Frmcifco Fafeiardo : mais ils n’ont point de Negres ; car il ne leur ell pas permis de contraindre les Saunages à y trauailleri caufe de la deffence faite par Charles V. & les Efpagnols ne Veulent ni ne peuuent pas fupporter ce labeur. Quë Praggadocia KmhaKaàeur dElpagne die ce qu’il voudra, iemonllrerai par les lettres du PolTelTeurjpar le conte de l’Impoli, & par le Quint du Roi, que la chofe ell ainfi. En- fin ie ferai voir combien il ell aifé de fe rendre maillrefans peiné, non feulement de 2-0 celles-là, mais auffi de fix ou fept autres, que les ennemis n’ont iamais touchées iufques ici.ni où les Anglois, François ou ceux des Pays-bas-vriisjn’ont iamais ellé. Or Keymù ellant retourné de l'Oremque ^ comme ie n’approuuois pas ni fon cOnfeil ni ce qu’il auoit fait,& queie meplaignois qu’il m’auoit du rout ruiné , & blelTé tellement ma re- nommée enuers le Roi , qu’elle ne pourroit iamais retourner en Ibn entier , entrant dans fa chambre il fe tua,&c. Ces lettres eltoyént eferites du vingt & vnieme de May l’ancloloc xvil. de forte qu’audattede celles dont Ralegh fait mention, il y doit auoir de la faute. V oila qu’elle fut la fin de cette derniere entreprife de Ralegh en Gu~ iane } qui ellant retourné en Angleterrc,futcondamné à auoir la telle tranchée & fut executéle vingtneùfiem.e d’Odobrel’an cio loc xviir. 50 C H A P. XXV. Dejeriptiofi de la r'miere de i’Orenoque félon les ohfermüons de nos "belges NO V s auonsbriefuement deferit aux Chapitres precedents , ce que les An- glois ont fait dans Guiane & fur la riuiere de l'Orenoque,Vous les aufpices de Sire P'Falther Ralegh, àt^uisVan. cio loc v iufques à fannee cloloc xvii : du- rant cela toutesfois & mefmes auparauanr, les Anglois, comme auffi ceux de nollre nation ont fait plufieurs voyages dans la riuiere de roremque,èl a la ville de S. Tho~ 40 mas , pour y trafiquer , notamment du Tabac , que les Efpagnols y cultiuoyent foigneufement: de forte qu’il ell tout certain,que les nollres ont monté la riuiere pat fois en vn an auec huiét ou neufnauires,& ont traité auec le Gouuerneur de S. T homas, auantque le Roi d Elpagne eull fait vne ellroite defence aux Elpagnols de trafiquer auec tous Ellrangers. Il eft tombé entre mes mains vn routier d’vn certain Belge alTés bien fait, duquel i’ai bxtraiét de la fituation &: condition de cette riuiere ce qui s’enfuitè Or palTant outre ce qui touche la nauigation iufques au Continent de cette Améri- que Méridionale, qui ell défia alTés vulgaire j la colle court depuis la riuiere d'Ejfequebe enuiron dix lieues versleNord,iufquesoù on voit Vn bois, qui fembledeloinvn villa- ge de Saunages, duquel courant le long de la colle for trois bralTes te quelques piés de 5 0 fond, on rencontre Temboucheure d’vne autre riuiere, & dcrechefvn bois,& apres ice- lui vne grande forcll,cctte colle tire vers le Nord -ouell; fur la hauteur de huift degrés & quinze fcrupules de la ligne vers leNord,il y a trois petites Illes,airés près de laCon- tinente , & les ayans palTees la colle fo courbe vn peu failànt vne baye , fur laquelle fo voyent trois colines comme fi c’elloyent des muions de foin, & vn peu plus outre en- core trois, & Temboucheure d’vne autre riuiere audeuanc de laquelle il y a vne Iflej toute cette colle efthalTe courant Nord-oueft , & la mer n’a que deux brades de fond, Gggg pa»-' DESCRIPTION DES INDES )ar fois mefme oüze pies feulement, fort loin de la terre ferme , de forte qu’elle brife brt à lacofte,iufques au Cap d’au deffus l’emboucheure de lariuiere de l’Oreno^ue, qui eft haut fur toute la cofte rayant pafTé ce Cap & voyant de loin les Ifles , il faut ap fait fort profond , de maniéré quepremieremen procher k terre de plus près, car il y raie lorc prorona , ae maniéré que premièrement ony trouuedeuxbraffes,puis trois, apres fept,&mefmehuidj il faut courir là vers lie Sud-oueft & par fois plus au Sud. L emboucheure de là riiiiere de l'Orem^ue^k diftan- re delà ligne vers le Nord de huid degrés & cinquante fcrupules. Courant plus outre ilfautcolloyerlariuedemain gaucheiufquesàvne Ifle ronde, qu’il faut laiffer à bas bord,& courir le long des ifles qui font à ftier-bord, où le canal à plus de fond; or à bas-bord la terre femble eftre diuifee en plufieurs canaux & efl: couuerte de petits ar- 1 b bres; & delà s’ouurentplufieursemboucheures de cofté & d’autre, mais il faut fuiure le canal du milieu vers l’Oueftiufques àvneîflcj où defeendent deux canaux de cofté ' & d’autrejmais il faut entrer dans celuide la main droite vers le Nord-oueft.iufques à ce qu’on vienne à vne autre Me, de laquelle il faut tourner vers le Sud-oueft : on ren- contre plufieurs Iflesjqu’iifautlaiflTer les vnes à droite & les autres à gauche iufques à vne grandeemboucheurej d’où il faut retourner vers le Nord- oueft, fans toutesfois entrer dans les canaux qui deftournent à la main droite, mais il faut fuiure le cofté de bas-bord & tenir le milieu du canal, il ne faut pas auffi fe deftourner dans les embou- cheures qui s’ouurent à ftier-bord.ni dans les canaux qui paflfent entre les Mes. Ainfi on vient enfin à vn large canal qui mene a 1 Me de la nommé vulgairement i6 (J?f4p/^rf,lequel on laiiTe à ftier-bord, comme auffi vn autre quidefeend de la Conti- nente à bas-bord, pourfuiuant tout droit iufques à ce qu’on defcouure à bas-bord qua- tre ou cinq hautes montagnes ,defquç.lles iufques à la ville àQS.thomas on conte fix ou fept lieues. Voilacequ’ilendit, , Or cette riuiere fut exadement vifitee & deferite par les noftres l’an ciblocxxîx, qui y entrèrent fous les aufpices de la Compagnie des Indes Occidentales, fous la con- duite de l’Admiral Adrian lanfon Paten des routiers defquelsi’ai remarqué ce qui fuir. De la riuiere £ Amagore {({ne ie me doute eftre celle qui eft nommee par Kegmü Atyidcuï' ) laquelle defeend de la Continente , fort en mer par vne emboucheure large d’enuiron deux tiers de.lieuës,profonde de quelques huid piés,à maree baffe ; d’icelle 5 o dif-ie iufques à vne pointe de terre qui eft au Nord, le long de laquelle paffe la riuiere de roremqueM y a quatre lieues Eft & Ôueft. Plus outre,l’emboucheure de l'Orenoque ; eft entrecoupée de plufieurs Mes, defquelles il y a des bancs de fable, qui s’eftendent iufques a trois ou i v lieues en mer , dequoi on fo doit donner garde de bonne heure. Or d’Amâgore on va à vne petite Mc ronde , qui eft proche d’vne autre plus grande fi- tuee au deuantl’emboucheure de la riuiere, dés laquelle il faut deftourner vers le Sud- oueft & courir vers vne pointe de terre, qui eft à bas-bord,prefque à vne lieue de l’Mè, &: cela eft la largeur de la riuiere en cet endroit. De cette pointe on prend fon cours vers l’ Oueft vne licuë,vers vne autre Me qu’il faut coftoyer de fort près à ftier-bord,&: puis tirer au Sud-oueft demi-lieuë vers vne autre petite Me, qu’on laiffe à bas-bord, ôc^o derechef vne autre à ftier-bord 5 à peine vne lieue de ces Mes, tirant vers le Sud-oueft^ le canal s’eftroicift fort,de forte qu’en quelques endroits il n’a pas vn quart de lieuë; & ainfi par plufieurs deftours , qui tendent principalement vers le Sud-oueft , il monte iufques à la ville de S. Thomas, profond feulement en vne ou deux places de douze ou treize piés : la maree commence à faillir en ce lieu. L’emboucheure de la riuiere eft diftante de la ligne vers le Nord de huiéb degrés & quarante cinq ou cinquante fcrupules ; mais la ville de S. Thomas eft fur huid de- grés & quinze ou vingt fcrupules. Auprès de l’emboucheure de la riuiere & dans les Mes habitent les Tiuitiuas, n^ition fort pauure , qui vit le plus fouuent de poifTon ôz de certaines noix de palmites,de la grofleur d’vn osufiqui croiffent cinquante ou foi- yo Xante enfemble, d’vne coque rude & pointue, auec vne chair comme celle des cocos. Il y vole auffi vn nombre infini de certains infedes,de lagroffeur & forme des four- mis , qui ont quatre ailes, qu’ils laiftent tomber auffi toft qu’ils s’appuyent, les Sau- nages s’en feruent au lieu de fuif. Il y demeure auffi des Caribes , mais fort loin au dedans du païs , de maniéré que les riuages de la riuiere ne font habités que de fort peu de Sauuagesi De I ÔCCibENTALES. LIVRE XVII. De remboUchcLire iiifqucs à vingt ou vingt cinq lieues haut les riuagés font fort bas & prefqueaulii ras que l’eau, qui fait qu’au temps des pluyes ils font inondés. Dés ce lieu la terre fe haulfe infeniiblement, de forte qu’elle eft plus ha.ute que la furface de l’eau de deuxbraffes ou plus ; ,& quand on a monté trente lieüësialors finilTentles Ifles & on entre dans le vrai canal de les bords d’icelle font hauts d’vn collé & «i’autre j de ce lieu iufques à la ville on conte treize ou quatorze lieues. La ville de S. Thomas eft baftie fur la riue de main gauche quand on monte, & a pref- que de long vn quart de lieue. Ceux de noftre nation y arriuerent i’onzieme de Dé- cembre de l’an cId Idc xxix ,mais les habitans n’ofans attendre les noftres s’en ïo eftoyent défia fuis apres auoir brufié les maifons: quiyauoyentefté au nombre de cxxx ou XL, bafties fort legerernent, au milieu il y auoit vne petite Eglife, &: au bout de rOueft vn Conuent de Cordeliers. 11 pleut fort en ces quartiers, comme difpyentles Elpagnols, aux mois d’Audi & de May, de forte que la riuiere s’enfle par fois trois bralTes : & auprès de i’emboucheure il pleut prefque roufiours,qui fait que l’aïr y eft mal fain. Sur cette riuiere proche de fon emboucheure ( au contraire des autres riuieres qui font le long de cette cofte ) il ne fe trouue point ou peu de moufcherons,mais au dedans il y en a beaucoup. Cette riuie- re eft fort poiflbnneufe,&: nourrit diuerfes fortes de poiflbn & entre iceux vn fembla- ble au congre, long de trois ou quatre piés, ayant le ventre iaune , tacheté de marques 2,0 bleues, auec vnegrande gueule comme IaTorpille,auec laquelle il a ceci de commun, qu’il engourdift quand on le touche de la main ou dVn couteau, mais cela dure peu de temps, eftant au refte fans danger & bon à manger. Il y a auffi vn grand nombre d'oi- feauX,& entre iceux d’vne forte qu’on peut bien nommer Pocheçulicres,couuertde plumes rouges fi belles, qu’on nefçauroit s’imaginer rien de plus beau. Or la Conti- nente nourrit tous les mefmes animaux , que ceux dont nous auons fait mention ci- defltis \ mais il y a fort peii de Saüuagès, quicraignans la cruauté des Elpagnols fe font retirés ci & là. C H A P. XXVIL 30 Defiription de tïjle qn'on nomme la Trinidad, L’î s L E que les Efpagnols nomment auiourd’huiîa T rimdââ:>z^ plus grande de beaucoup que toutes celles qui font en ce quartier de l’Amerique Méridional© c^yîils nomment àc Sotouento que leurs flottes qui vont à la terre ferme paflant par le milieu des Iflês des Cm^eJcripiion de l'ifle de Cubagua 0* de Cocbc. NO V s auons dit ci-deflus , qu’entre l’ifle de la LMargarite & la terre ferme de l’Amerique Méridionale, y auoit deux petites Iflesj fçauoir, Cubagua &C Coche, qui ont au ftecle precedent efté en grande eftimé, lors que la pefche des perles fioriftbit,mais maintenant qu’elle a celTé font de ft peu de confequence,que feufle bien, peu les pafler fous ftlence,n’euft efté que les precedentes m’y obligent. Cubagua, félon Ouiedo, au temps duquel elle eftoit en fbn principal luftre,eft efloi- 40 gnee de Tlfle d’HiJpagniole d’enuiron cent & foixante lieues, de ce deftroit qu’on norn- me Bûca delT)rago,o\x du Cap des Salines,cpi\ le borde prefque de cinquante vers l’Oueft, de XditJilargarite enuiron vne licuë,elle a trois lieues de circuit* Sa terre eft fort fterile, & prefque par tout nitreufe ou falee ; eft du tout deftituee de fontaines &: d’eau douce, couuerte de peu d’arbres, fi ce n’eft de Guayac^iX y a pourtant force halliers qui la ren- dent prefque impénétrable :Car ie dirai en paflant,que tant en ces Ifles,qu’en la Con- tinente es lieux non cultiués & ailleurs , il y croift de certains buiflbns ou chardons, munis d’elpines longues & aiguës ; dont le fameux Charles de l'Bclufe fait mention Sc reprefente la figure en fes Exotiques. Il y auoit ( dit-iU vne elpine adiointe , dont il ne me fouuien pas auoir iamais veu de femblable: car, combien quelle ne fuft pas entière, 50 elleeftoitplus de cinq poulces de long, polie & luilante de noirceur , de forte qu elle me deceut de prime-veuë, eftimant que ce fuft vn curedent fait d’ëfcaille de tôrtue de mer, bien qu’vn peu plus eftroite. Il femble qu’elle auoit efté prifè delà fommité de quelque chardon: car il y en auoit vn autre ioinde,qui eftoit rompue ( pource qu’elles font fort fragilles) laquelle auoit encore en la partie d’embas le veftige auecquoi elle fembloit auoir efté attachée à latcfte du chardon ou autre plante qui l’auoit pro- duite. V oila ce qu’il en dit, Hhhh Z Nous 6IZ DESCRIPTION DES INDES Nous auohs vâu plufieurs de telles efpînes &: de diüerfes loïigueiirs , kibn toutes^ fois fi graiides que celles dont parle en cet endroit ; mais nous n auons iamafs peu en apprendre parfaitement la vraye defcription delà plante, mais nous Içauohs allés qu’elles croiflent tout autour de foh tronc : or la partie attachée â la plante cïi couuerte dVn certain duuet brun, le relie eft luifarit & fort noir. Au relie la terre y porte fort peu d’herbe, d^où vient qu'il n’y a point d’animaux , ifi ce ne font quelques lapins : il y ainefine peu dbifeàuxi excepté de ceux qüi hancentla mer St le riuage. Les Sauuages qui l’habitoyent au commencement que les Ëlpaghols y abordèrent, viuoycnt pour le plus fouuent d’huiftres perle-meres , & aîloyeri't quérir leur eau à C»- k o mdM^qui en eft àfept îieuè's : ils fepeignoyentle corps de diüerfes couleurs àla façon des autres Indiens. Le collé du Sud de cette Me eft dîllant d ’ehüirbn quatre où cinq lieues, félon omedot elle a Vnpbrt oüplüïïoft vne rade affés commode au collé du Nord. Oukdo aïTeure qu’au Cap de hEft d'icelle fort de terre vne certaine liqueut aromatique & refineufe, qui a quelque vfage en Médecine, laquelle flore fur l’eau. Au fiecle paflé la pefche des perles elloit fur tout richéaütbür dé cette Me , de telle forte qu’on â lailTé par eferit comme choie digne de memoîre,que durant plufieurs an- nées le quint d'icelles deu au Roi d’Elpagne,auoitvaiüparan quinze mille ducats j tbutesfois les perlés, à cauféde leur abondance valoyent à peîhele tiers de ce qu elles le vendent auiourd’hui : chofe comme incroyable queh vn fi petit elpace on a pfi cha- cun an tiret tant de threfors de la mer, & qui fait que ce n’ell pas merueilles fila propa- gationde ces huiftres a cefle. Les Efpagnols attirés par cette richeflîe de la mer & par l’opportunité de rîlîe,y me- nèrent au commencement vne Colonie &y baftirent la villette dé la 1%uueÜe Cadiz, Mais l'an cIdId xxr apres que les Sâuuâges de la terre ferme eurent ruiné de fond ei^ comble le Monallere des Freres mineurs àQ -Cumamt les Efpagnols, bien qu’ils fuflenc trois cents, prenant Fefpouuante, abandonnèrent l’IHe & s’enfuirent à BiJ^Agniok: Mais le Parlement de S. Domingo y enuoya aulfi toll ïago CàfieÜos aüec cinq nauires,qui repara la ville & l’augmenta & orna de plufieurs édifices de pierre : elle a du depuis Ab- ri plufieurs années , &: fi long temps que la pefche à perles a duré , mais apres elle n’a | b pas feulement decliné,ains à efté du tout abandonnee,de forte qu’il ne s’y voit auiour- d’hui nulle trace de ville, & rifle mefrne eft de nulle eftime Coche eft l’autre Me, mais plus petite que la première 5 elle eft diftante de Cubaguà d’eniiiron quatre lieuê’s vers f Eft & la Continente j ayant vn peu mains de trois lieues de tour : elle eft d’vn bas terroir & prefque aüflî ras que la mer: autour d'icelle la pef. che des perles a efté aulfi tres-bonne plufieurs annees,depuis l’an cio Id xxix qu’elle fut premièrement defcouuerte. Il y en a qui efcriuent qu’il s’y eft pefché en vn mois cinq cents marcs de perles, de diuerfe grolTeur &: forme : mais auiourd’hüi on n’en fait plus de conte, & il ne s’y trouue plu^ de perles , non plus qü’autour de Cuhagua & de la xMcirgaŸiie. 4® Ce qui eft remarquable, c’eft qu'au fiecle pafle il ne fe pefehoit pas feulement abon- dance de perles autour de ces Mes , mais auflî toutle long de cette colle, depuis le de- ftroit dé Variâ, iufques au Cap qu’on nomme de la Veh & au delà, dcfqüelles les Elpa- gnols ont tiré de grandes richélTes, d’où vient, qu’ils ont couftume de nommer cetté cofte,quis‘cftend prêfque quatre cents lieues dcIong,C^4 de las ferlas, A R A V A. C H A P. IIÎ. Dejefi^tïon du Cap nommé ArayUjC^ des renommées Salines qm en fint proches, NO V s retournerons maintenant à la Côntmente,8é commencerons par cetté partie,qui prend Ibn origine de ce Cap qu’on nomme de SalindSt bu de Pariay vis a vis du dernier Cap de l’Ilîe de la Trinidad vers l’Oueft, lèparé d’icelüi par cet eftroit paflage nommé Baca del s’eftend iulques à l’aucte Cap dit vulgaire- ment Punta de auprès duquel Ibüt ées renommées Salines: On tient qu’il y a d’eftenduc’ OC'CÎDENTA LÊ s. LIVRE XVÎli. - €13 '^’eftenduf feptante lieues î mais il n’y a rien de remarquable, de maniéré qu a peine y a-il lieu en toute l’Ameriquè Méridionale qui ait moins de renom ; car outre quelques tiOms de Caps !k Bayes > qui font marqués ci & là és Chartes marines ; comme le Cap comme on le nomme ,& autres 5 nous netrouuons pasqueperfonne y ait remarqué choie digne de mémoire. Or le Cap o^-aj'^jqui eft fort renommé en ce quartier, s’auance en mer prefque en angle aigu , vis à vis du Cap Occidental de fille de la.Margarite , & ferme du collé de I'ETI ce golfe, qui entre plulieurs lieues auant dans la terre ferme, dit vulgairement des EfpagnolsGtf^i^É’C^mfi^.-Iequeleftbien en cet endroit fort large, mais vn peu plus ou- I O tre s ’eftroicitîprefque vis à vis du chemin qui va à la bourgade deCumam.Lc terroir de ce Cap, comme aulïî de la Continente Uufques à quelques lieues , eft bas & couuertde halliers & chardons dont nous auons parlé. Derrière le Cap il y a vne Saline qui n’eft ni fortgrande ni abondante enfel,& cequieft le plus incommode pour les nauires, forteftoignec du riuage , d’où vient qu on n’en peut charger le felqu’auec grande dif- ficulté. Vn peu plus au dedans, la terre le courbe en forme de coude, & ouure vne baye fort grande, le long delaquelley a vne tres-grande & riche Saline , celle que îufqües à pre- fentilnes’en eft pointtrouué de telle; & qui n’eft pas à plus de trois cents pas delà mer,oùil fé trouuetous-lesmois de fan de tres-bon fel & fort dur ; par fois caché fous la lô (àulmure,parfois par deftus, félon les fàifbns de l'annee ; car au temps des pluyes il ne s’y crouue pas en figrande quantité , ni n’eft pas fi aifé à charger qu’au temps des feiehereftès. Les opinions , touchant l’origine de ce fel, font diuerfès; car il y en a qui eftiment, que les flots de la mer poufles de furie parles tempeftes contre le riuage entrent dans ceceftang , d’où ne pouuans fortir , l’eau eft congelee en fel par le Soleil , comme c’eft fordinaireés Salines d'Efpagne ou de France, faites par rinduftrîedes hommes: les autres nient que les flots de la mer y puiffent entrer pour la hauteur du riuage, mais que cet eau falee vient de fource ou y reflue de la mer par des pafBges foüfterrains. lapprouuerois pluftoft l’opinion de ceux qui tiennent qnelley vient des fontaines; 3 O fi ce n’eft que nous vueillons croire que l’eau des pluyes rendue falee par la terre, qu’on fçait bien eftrc là par coutnitreufe, eft congelee en fel par l’ardeur du Soleil en ces quartiers làfort vehemente. Cequicftaffés euidentparl’exempledeplufieurs Salines, qui fc trouuent auant dans la terre & fort efloignecs de toute mer, tant en Afie, qu’en Afrique,où il n’y a point d’apparence que l’eau de la mer puifTe pénétrer par aucuns conduits foufterrains. Or ceux qui chargent du fel de cette Saline,y encrent auec des chaloupes & bateaux à font plat , & rompent le fèl auec des inftruments de fer , & en ayant empli leurs vaiffeaux le mertent fur le riuage auec beaucoup de labeur & d apa- reil;delà ils le charoyent auec des broüettes au bord de la mer, d’où auec de plus grands bateaux ils le portent aux nauires. 40 Cette Saline eft fituee en vn lieu plat, elle eft toutesfois fermee de plufieurs coftés, principalement du cofté du Sud, où de hautes montagnes la bordent : tout le pais d’a- lentour eft fterile , fcc & n’eft arroufé d’aucunes riuieres , de forte que les habitans d’i- celle font contraints d’aller quérir leur eau pour boire & leurs viures àilleurs: or ils ont couftume de l’aller quérir à laterreferme qui eft à l’oppofite, l’eau d’vne petite riuie- re affés claire qui en eft à enüiron trois lieues entre ce deflroit Méditerranée , appelle desEfpagnols & leurs viures de la bourgade de CummafLc pais voifin nour- rit pourtant beaucoup de beftes de chaflTe, comme cerfs, eh eures, Heures & eonnils, ou- tre plufieurs autres animaux incognus en nos quartiers ; comme auffî des tigres&fer- pents dangereux: la mer y nourrit aufli force poiflbn, de forte qu’on en peut pefeher JO auec des rets quantité le longdu riuage. Aureftelaterrequi enuironne ces Salines, eft couuerte iufques fur le bord de la mer , de halliers tellement efpineux,que le che- min en eft fort difficile, fi on ne l’y préparé premièrement auec beaucoup de peine* Ceux de noftre nation, dés plufieurs années , auoyent couftume d’y aller & s y char- ger de fel,fans aucun empefehement : mais au mois de Nouemb. del’an cia Inc v,ils y furent furpris par vne flotte de dix huidnauires efquipés à raduantage & fournis de force foldats , qui les accaquans à l’improuifte eurent bon marché de leurs nauires, Hhhh 5 qu’ils ^14 DESCRIPTION DES INDES . qu ils emmenerent: caria plurpart eftans occupés à charger leurs chaloupes dans îà. ' Saline, les autres le charoyoyentauec des broüettes, ou le menoyenc auec les grandes chaloupes auxnauircs ; il n’y aiioit rien de prefl; pour faire rcfiftance , pource qu’ils ne : fedoutoyent encore lors d'aucunennemi- par apres les Efpagnols exerçans leur cru- , > auté naturelle & leur haine- mortelle à l’encontre des Hollandois , ils en pendirent quelques-vns,&en emmenerent plnfieurs aùx Galeres à Cartagenei dÈfquels quelque peu font retournés apres les tréues faites auec le Roi d’E%agne,& âpres auoir en- duré de grandes miferes. Par apres durant le temps des tréues plufieurs notamment ceux de la Frife-Occiden- tale y retournèrent, mais appris aux defpens d’autrui.ils fe tenoyent mieux fur leur gar- i b de. lufques à ce que le Roi d’Efpagne en eut empefché l’accès, par vne fortt fortérelTe qu’il yfitbaftir. . Car l’an cIdîdc xxii apres que la Compagnie des Indes Occidentales eut eftc oécroyé par Meffieurs les Eftats Generaux des Prouinces-vnies,& qu’vn grand débat fe fut leué entre les Prouinciaux de l’vne &: l’autre Hollande pour raifon de ces Sali- nes, que ceux de Nord-Hollande ne vouloyeht pas eftre inèlufes fous les limites^de la Compagnie, les Direéteurs au contraire maiotenoyent y eftre du tout compris: le Roi- d’Efpagne,quin’eftoit pas ignorant de leur deffein, fe refolutd’empefcherl’vlàgede ces Salines à ceux de noftre nation, ce que ne pouuant faire que par le moyen d’vnc fortereffe, il y en fit baftir vne forte,qu ilmunitde force canon,& d’vne bonegarnifon. 20 Or ce Fortjcomme nous l’àuons appris de plufieurs qui l’ont veu,efl: bafti en cette façon 5 il eft placé fur vne roche moyennement efleuee furie refte de la terre qui l’en- üironne,àenuironcentpasdeîanîer:deformequarree,aueC|iv baftions aux quatre coins : le cofté deuers l’Eft & qui regarde vers la terre ferme , eft veftu d’vne forte mu- raillede pierre haute prefquedex L piés, les autres deux eoftés le mur n’eft que la moi- tié auffi haut : celui qui regarde la rade eft le plus foible & plus bas de tous: On n’eft pas bien d’accord du nombre du canon, ceux qui en content le moins en mettent trente & trois,dont prefquela moitié font de fonte. Le nombre aufli delagarnifoneftincer*. tain, toutesfois on ne tient pas qu’il y en a moins de deux cents. Il y a vne montagne qui commande à ce Fort j feparee feülement d’iceîui par vne 50 vallee : ils vont quérir toutes leurs viétuailles deüx fois la fepmaine à Cumam j outre ce qu’ils reçoiuent d’Efpagnejcomme huile, vin,habits & chofes femblables. Ils ont nommé ce Fort /. Tago :cim eft certe placé en vn lieu fi aduanrageux pour gar- der ces Salines, & en chafier les nauires de leur ennemi, qu’il n’eft pas poffible de mieux; carà coups demoufquets ils peuuentémpefcher i’entreedes Salines, Omettre à fond auec leur canon les nauires moüillés à la rade. C V M A N A ou C O M E N A. C H A P. IV. ■ Définition de la Preuiàœ de Cumana , qualités de fin air ^ de fa terre ^ animaux qui sy tfoumnt , ^ mœurs des Indiens. CVmana ou Comem fuit Araya^ vis à vis du Cap d'Araya & de l’I/le de la Margarite: feparé de ces renommées Salines & du païs voifin par ce golfe , que nous auons dit eftre nommé Golfo de Cariacoon,àQComenai\t(y\JiQ\ entreau dedans delà terrefermeenuiron quarante lieues, comme les Efpagnols difent, habité ancienne- ment de force Sauujages,qui habitoyent auprès les riuages: lefquels à la façon pre/que" de tous les autres alloyent nuds, excepté que les hommes tafchoyent de couurir leur partie honteufe,d’vn col de courge, ou de quelque coquille, ou bien d’eftuis d’or; yo ceux du commun d’vne bande tifthé' de cottonqui Icurpaftbit entre les cuiiTes. Lors qu’ils vont à laguerreilsfecouurent les efpaulesd’vn petit manteau, &s’or- -nent de plufieurs plumages : les ioiirs de fefte ils l’oignent la peau d’vne certaine colle fort gluante,&y fouffloyentdüduuetde diUers oifeaux, imitansencelalesoifeaux: ils s’arrachent du toutla barbe ;& fe tondent les cheueuxdu tout en rond audeffus des oreilles , ils eftiment les dents noires pour les plus belles ; voila pourquoi ils ont de couftume OCCIDENTALES LIVRE. XVIIL couftume demafchci- prelquc continuellement les fueilles d’vne certaine herbe, pat Je moyen dcfquclles ils fe les rendent noires, & Je plus fouuent s’cnpreferuentde la douleur, & aulîife rendent l’haleine douce. Les Elles y vont du tout nues, & tiennent pour chofe belle d’auoirdegroffes ciiifTes &; bien o-rafles ; ce quelles acquerenten fe liant termemerit furie gcnôüil dés leur en- fanccjeïlesne fcfoucient pas guere de leur pudidté:mais quand elles font vne fois ma- riées,alors elles commencent à fecouurir leur partie honteufe& à viure plus chade- ment,craignant que leurs hiaris ne les puniflent de cet adultère. Les Cajjiques prennent plufieurs femmes & tant qu’il leur plaid, & tiennent fur tout I O pourvnebonne réception dêdonnerpourvn tempsieurs côcubinesàleurshodesih s femriies y accouchent fans peine, & nourrilTent leurs enfans foigneufement ; & pour- ce qu’elles ediment pourvue chofe bienfeanted’auoir vne longue facc& desiouës maio-res, elles predent la tede de leurs enfans entre deux coudinets. Ils mangent de toutes fortes d animaux ^ de forte, que comme on diî, ils ne reiettent pas les plus im- mondes,bien qu’ils ayent ades de leur blé & de bonnes viandes & d’excellent poidbn j mefmefçauent faire de bonne boidbn. Il y a encore quantité de cesSauuages en ce quartier de la terre ferme, qui ontcourageufenient iufques ici maintenu leur liberté à l’encontre desEfpagnols,& fouuent leur font grand dommage. Ces Saunages pour la plufpart voyent fort trouble, ce que quelques-vns penfent io leur aduenir de l’eau qu’ils boiuent,îaquelle iis puifent de la plus grande riuiere de cet- te Prouince, nommée d’ordinaire Rio de i’approuue pludod l’opinion de ceux qui attribuent la caufe de cela à leur mauuaife nourriture. Les femmes y culti- uent la terre, & y fement le Ma,ys,\ KxiMs citroüilles & autres fruids pour leur proui- fion. Ils mangeoyent anciennement lachair de leurs ennemis, qu’ils prelioyent en guerre oupardnede,& n’efpargnoyent pasmefmes les efclaues qu’ils acheptoyenr, iefqucls ils engraidbyent à la façon des pourceaux,s’ils edoyent maigres. Entre les arbres qui croilTent de leur natureLen cette contrée , les Efpagnojs font mention de quelques-vns qui rendent vne certaine liqueur comme du laid, laquelle deuientaùfli dure que de la gomme, adonne vne bonne odeur j d’autres qui iettenc 5 O vn fuc femblable au laid pris, dont ils mangentfans danger. D’autres qui portent vnfruidfemblable à des mœures,defqueîs ils font vn fyrop fort propre contre l’enroLieure 5 le bois de ces arbres eft fi dur qu’on en tire du feu, comme d’vn caillou eftant frappé d’vn fufil. Il y a encore vn autre arbre , le bois duquel fent comme le cedre, duquel il femble eftre vne elpece,donton le fort à beaucoup d ouurages de charpenterie &menuiforie, mais fi on enferme, çs vaifleaux qui font faits, du pain ou autre viande , ils deuien- nent fort amers, on le tient fort propre pour en faire des nauires, car il ne fe ver- mouliftpas. ^ ^ 11 s’en trouue aulïi vn qui tend vne glus fort gluante, dequoi ils fo foruent a prendre 40 les oifeanx,& s’en oignent la peau, lors qu’ils fo veulent emplumacer. Enfin il y croift prcfque par tout de la caflfo folutiue,mais ie fais doute que ce ne foit de cette fauuage donc nous auons fait mention ci-defius , combien qu’il y en ait auffi de la bonne. La terre abonde aulïi en fleurs odorantes , principalement en rofes , combien que quelques-vnes de ces fleurs fentent fi fort quelles en offencent le cerueau. Outre les lions , tigres, fangliers , & autres animaux furieux , il s’y en trouue encore d’autres qui ne font pas és autres Prouinces, ou à tout le moins s’y trouuent fort rare- ment ; entre lefquels les Autheurs font mention d’vne efpece, que les Sauuages nom- ment en leur langue qui eft vn animal aulîi grand ou plus qu vnafne, fort velu, 50 noir & fort furieux, combien qu’il s’efpouuante & fuye au regard de 1 homme, mais hardi contrôles chiens, defquels il ne s’eftonne pas pour le nombre, ains demeure coi, & bien fouuent les tuè &: les deuore. Il y en a encore vn autre qu’ils nomment t^ranata ; de la grandeur d’vn chien de chaflcjauec vne longue barbe de bouc 5 qui donne vn certain ôt horrible murmure . il ne mange pourtant pas de chair, mais vit de fruiéls d’arbres, au haut defquels il monte legerement 5 on dit qu’ils fo tiennent par troupes. DESCRIPTION DES INDES Il s’y prend auffi de certains chats ^uuages , qui ne font pas fort differents des fin^ gesdefqueis aiment fort leurs petits, & les portent par tout les tenans embraffés , mef- mes pendant qu’ils font encores petits ; montent fur les arbres auec eux : les ieunes font grandement beaux, & fort iiigenieux , qui fait que les Efpagnols en font o-rande On y trouue aufîi vn certain animal fort furieux & dommageable aux hommes, grand comme vn dogue, que les Sauuagescraignentaupofïible,quifaitqu’ilsnefor- tentiamaisdenuidfans vntifonenlamainjcarcetrebeftc ne va que de nuid & rare- ment la voit-on de ioür,ils en racontent vne merueilleufe aftuce, qui eft qu’il a couftu- me de venir crier auprès des maifons, comme fi c’eftoit vn enfant , afin d’en faire fortir i O les hommes, &]esfurprendre au defpourueu. Il y a auffi vne grande abondance & diuerfité de toutes fortes d’oifeaux,furtoutde fort beaux perroquets & autres femblables , grand nombre de greffes chauue-fourisj qui font à bon droit contees entre les playesde ces païs : comme auffi des moufche- rons, qu’ils nommentA/^^//^3j',pctits à la vérité, mais qui peignent fi viuement, qu’on n’y peut prefquc dormir de nuidjfi on n’y apporte quelque remedc, 11 s’y trouue trois fortes d’abeilles qui font du miel. ^ Les araignées & phalanges y font plus grandes de beaucoup qu’eh l’Europe i & de diuerfes couleurs, qui filentleur toile fi fortejqu’à peinelapeut-onrompre. Lamerqui lalaue eftfortpoiffonneufe,lesriuieres y font auffi remplies de poifïbn, 2,0 de maniéré que cette Prouince abonde en toute forte de viures. Enfin on trouue dans les riuieres grand nombre de Crocodilles, que les Sauuages nomment la Cajma?^es,èc les Efpagnols Lagertos; qui ne different en forme ni nature de ceux du iV//, combien qu ils different vn peu en grandeur* C H A P. V* hes cruautés exeteees par les E^agnols es ftecles pafésdans ce quartier t ^ la defiription de la Ville de Cumana. COMBIEN que les Efpagnols ayent exercé force cruautéf contre les Sauua- j o uages prefque en tous les quartiers de rAmerique,toutesfois iis ne fe font iamais portes fi eauteleufement& cruellemêten aucun autre que Herfeya raconte que les lacobinsl an cîd lo xiii auoyent inftamment fopplié le Roid’Efpa- gne,qu il fuft permis a eux fouis d attirer les naturels de cette contrée à la Meffe & les inftruire és principes de la Religion, ce qu’ayant aifoment obtenu de l’Empereur fore religieux, il y en eut deux qui furent laiffés à terre proche de Cumana^ où ils furent bien receüs des Indiens , de forte quil y auoit grande efperance non feulement de les poimoiraddoucir & ciuilifer,mais auffi de les pouuoir emmener à noftre foi: mais peu. apies il y arriua vn nauire d Efpagnols, qui, comme ils difoyent, vouloyent traiter des pelles des Sauuages ^ceux-ci firent tant eiiuers ces Moines, qui ne fçauoyent rien de ao leur tromperie,qu ils perfuaderent le CaJJtque d’aller boire dans le nauire : mais ieuant 1 anchreilsl emmenerent auec fà femme & dix foptde fos gens pour en faire de mifo- rables efclaues,en vain implorans lafoi des Moines & de fès hoftes : les autres Sauua- ges qui foupçonnoyent les lacobins d’eftre confontans à cette trahifon, foietterenc fur eux pour les tuer ; mais les lacobins promirent par forment que le Calque de Ces gens retourneroyenr en bref 5 voila pourquoi ils les laifferent pour vn peu de temps, iufiyues à ce que Ce voyans trompés tout à fait,ils les tuerent, Neantmoinsl an cio lo xviii piufieurs Moines,partieIacobins, partieCordeîiers arriuerentla,- qui y baftirentdeux Conuents en deux diuerfes places, pour tant plus aifoment pouuoir s’employer a linftruélion des Sauuages. Or les lacobins placèrent y© leur Cloiftre dans la Prouince descl;^rié>iq^û^ , à Cept lieuës del’Ifle de Cubagua vers 1 Occident, auquel ils donnèrent le nom de S. Fé ( lequel nom, la baye qui eft à ehuiron deux lieues delà bourgade deCumanavexs rOccidenr,retient encore auiourd’hui)pla- ce fort commode pour les nauires, qui ont couftume par fois des’y fournir d’eau & de bois,& des y anchrer reurement,& où les Sauuages font fort traitables. Or lanclolo xxily arnua derechef d’autres £fpagnoIs,fouslaconduitede/^/^;^ de Oieda^ OCCIDENTALES. LIVRE XVIII. cri7 de O/W.î j la venue diiquc! cEonna fort les Saunages, mais les Efpagnolspour d’autant mieux les tromper, ayant leuéles anchres s’en allèrent ci quatre lieues delà vers (JMdrà- «■.ïp/î;M,faignans d’y dire venus exprès pour traiter du d/^jrrauec lesT'^i^^.Æm habitans des montagncs:Mais comme ces Saunages eurent apporté cinquante charges d’hom- mes de furie riuage, & attendoyent ce qu’on leur auoit promis pour payement, les Efpagnols feietterent fur eux à rimprouifte, en empoignèrent trente fix &:en b)d- ferent pluiîeurs. Le Caffi'iue de cette Prouince,qui dloit défia baptize & le nommoit Cil Gonfales, ïoïi frfehe de cet aÜTontj& foupçonnant, félon Je nature! de ces Sauuagcs grandement foupçonn'eux & enclin à la vangeance , que les Moines auoyenc trempé to dansceddlcin ou l'anoyenc à tout le moins feeu , fit complot auec le Câfjtqne A^ara- gu.ey,‘M\ territoire duquel ces Conuents eftoyent ftués, ç[wQ^MardgHcy maliàcreroit les Moines, & lui attaqueroit Oieda ; &r peu apres comme Oieda eut mis pic à, terre vn peu tropàlalegereauecpeude gens, il fut accablé Se tué lui Exiemey &: les Moines quel- que temps apres furent tues & leurs Monafteres brufies. Or comme le bruit de ce defallre fut venu aux oreilles du Parlement dlabli à S. Dommgodûîut ordonné que ce crime feroit puni par toute forte de rigueurs &mefme vangé par la ruine de tous les Indiens de Cimana,Y>onx. cet efleét on deipefeha auffi toft trois cents foldats fur trois nauires , qui par hafardfctrouuerent prefts,aucc Gonfalo-de pour les commander, qu’on y enuoya. ^o Pendant que cet exploit fe fait en la terre ferme, ârriua à dj HiJl)âgnioles IclAcQmikBarthelemi de lasCafas ; cynienverm du contraéf paflé entre le Roi dEipa- gne &lui,y auoit amené quelques pa'ifaiis Vautres manouuriers auec leurs familles, pouiTes placer dans vne Colonie qu’il penfoit eftablir en la terre ferme auprès des Conuents de ces Moines. Où ayant appris cette infortune, il en fut fort trille, & s’ef- força d’empefeher cette expedicionjmais ce fut en vain. Gonjalo de Ocampo donc abordant auec deux nauires au port de A^araenpanf. , fe refo- lutd’vfer de Enefle , pour furprendre plus aifementles Saunages , par ainli il feignit de venir d’Efpagne; St non des lfles,Stde ne fçauoir rien de ce quis’eËoitpalfé: &dc peur que les Indiens ne s’efpouuantadént de la multitude de fes gens, il en fit cachet la 3 O plus grand partiVoilapourquoijiceuxnefedoutansderien entrèrent librement dans les nauires, excepté le Cajpque qui fe tint dans Ton canoa; lors les Efpagnols forcans de leur cachette, tuerent le CaJJîq^e dans fort canoa, Stpendirent aux verges du naui- rele relie qu’ils auoyent pris ; puis miettans piè à terre , ils pillèrent, puis ruinèrent leur village , St commencèrent à ballir vne bourgade furie riuagede la riuiere à enuiron demi-lieuéde la mer, qu’ils nommcrentTi?/e^tf. Cependant leLicentiéde Us Câfas tafehoit par tous moyens de paracheiieiTon en- ■'tréprife, St ayant formé compagnie auec l’Admiral Columh St autres Olïîciers du Roi quielloyent dans nile il aborda à la terre ferme, où ayant trouue Ocampo dans lanouuellebourgade deToledo,\es conditions quele Licentiéapportoir auec loi defpleurent aces nouueaux habitansfils le quittèrent St abandonnèrent leur bourga- de à peine bien conimencee. Lui pourtant ferme en larefolution,fe tranfportaauec peu de fes amis St quelques ouuriers qu’il auoit à gages, au lieu ouïe Contient des Cordelliers auoit elle premièrement, alTcs près de la mer, St le long de la riuiere dé , CamAnd , St là commença à ballir vn Clialleau. Mais les Elpagnols habitans de l’Ifle de CubaguA ,n en ellans pas trop contans à caufeque par ce moyen les courfés qu’ils auoyent coullume de faire fur ces mifcrables Sauuages feroyent empefehees, attirè- rent à eux par grandes promelTes l’Architede du Licentié,qui lui relloit feul 3 St par ce moyen firent que l’oiiurage demeura imparfait. Le Licentié de las Cafas, g>onr preuenir à tous ces empefehements, St pour fe plain- jo fii'e ^n Parlement des habitans de CnhAgua] commit en fa place FrAncifeo de Soto , puis trauerfa à HiJpAgniole. Ce âe’Soto, par vne grande imprudence, St contre le comman- dement que lui auoit fait le Licentié, enuoya les deux nauires qu’on lui auoit laifié ( afin de pouuoir retirer fes gens en fcnreté,s’il tomhoit en quelque danger des Sauua- ges) le long de la colle, pour traiter auec les Sauuages : Voila pourquoi les Indiens ellans animés de tant de malTacres qu’ils auoyent foulferts de ces Ellrangers, dont i’vn elloit encore tout fanglant , fe feruans de cette occafion fe ruèrent fur le relie de liii ces ^i8 DESCRIPTION DES INDES ces nouueâux h'àhitzns.De Soto bleflcjdont il mourut apres, fe fauua auec vne chaloupé & dix neuf defcsgensjau Cap de K^rayaM refte fut tout tué,& la bourgade entière- ment mife bas. Le Licentié ayant ouy ces nouuelles dans Hijpagmole , fafché de ce malheur i' & de ce que tout ce qu’il auoit eifayé iufques-là pour conferuer ces Saiina- ges,& les retirer du mal, pour les mener à laReligion Chreftienne , qui eüoit fon vni- que delTein J quitta le monde pour fe faire Iacobin,& depuis il deuint Euefque de Ch’a~ fa. C’eft ce Barthelemi Cafas.ofxi defcriuitaulongàrEmpereur Roi d’EE pagne, tous les ades inhumains & cruels que les Efpagnols auoyent exercés à l’en- contre des Sauuages,prefque en tous les quartiers de l’vne & de l’autre Amérique ; des Commentaires duquel la Chreftiente a appris , quelles ruines de nations toutes en- 1 o tieres, de quels grands horribles fupplices ce Nouueau monde a veu & combien de fois gemi,depuisque les Efpagnols y ont fait entree. Apres que 1 Admirai Diego Columh,^ le Parlement eurent entendu cet infortune, ils fe refoliirent de la vanger , pour cet effeélils y enuoyerent lago deCajlel« l’an cio loxxiijqui aborda premièrement a Flfle de , & y laiifa des gens pour rebaftir la ville de Cadiz, & l’habiter derechef, laquelle les Efpagnols auoyent au- parauant abandonnée pour la crainte des Sauuagesrpuis delà alla à Cumana,où. il s’efta- blit. il enuoya de ce lieu fes gens pour prendre les Indiens de ce quartier, plufieurs defquels il fit mourir de diuers& cruels tourmens,notamment ceux qu’il foupçonnoit auoirefte autheurs de la mort des Moines & d’autres Sauuages .Enfin il y baftit vnFort^® fur i’emboucheure de la riuiere de Cumana,ipom fauorifer ceux de CuhagitaXoïs qu’ils y venoyent prendre de 1 eau:depuis lequel temps lesEIpagnols y ont toufiours demeuré. Or cette bourgade de Cumana ou Comena efl; fituee au dedans de la terre ferme,à enui- ron deux lieues delà mer, dedans vn bois elpais, de Ibr te que ceux qui defcendent la riuierelepeuuent difficilement voir, fl ce n’eft la maifon du Gouuerneur , baftie fur vne haute coline. Elle a vne rade fur la mer fort commode dans vne baye femilunaire, ou on peut feurementanchrer proche du riuage, fur douze ou treize bradés d’eau, d’va fond nullement fale de rochers. C H A P. VI. 50 ^cit de ce que Hieronymo de Ortal Antonio Sedcnno ont exfloiSîé en ces Prouinces, \ NO v s auons fuccindement traité au Liure precedent , que Hieronymo de Or- ÿ^/auoit fait dans la grand riuiere de ViafarifM^cfx^s au temps qu’il s’en partit, pour alleren ce quartier delaterre ferme dont nous parierons maintenant, voila pourquoi nous pourfuiurons auec la mefme briefueté le refte de fon expédition ' en ce lieu. * De Ortal donc prit pour Ion Lieutenant ^.^uguJlinDelgade , lequel il enuoya vers la^ liuiere ISleuerin laquelle le delcharge en mer a deux lieuè’s de t^laracafana charge exprefté d’y baftirvnFort, ce qu’il exécuta promptement. o^'/^/cependantl’alla ioindrc auec cent loldats,pour auancer Ion voyage: mais il s’y rencontra deux difficul- tés jls^ première delquelles eftoit la plainte que ceux de Cubagua eut contre lui, d auoir mis la faucille auffibien dans la moifton d’autrui qu’en la fiennei l’autre & la plus grande eftoit la dilette de toutes choies qu auoyent les gens , retournés du prece- dent voyage prefquenuds, a laquelle il ne pouuoit remedier , pource que l’Empereur Roi d Elpagne auoit eftroitement défendu d emmener les Sauuages ailleurs pour s’en, leruir d elclaues,ou pour les vendre: qui failoit queluimefine eftoit deffourni de tout: jq Mais afin de lliruenir eû quelque façon a laneceffité de lès loldatç, il leur permit de maquignonner de ces Sauuages dont les Indiens mefines le le.ruoyent d’elciaues : qui fut vne licence fortpernicieule: car les loldatslous ce manteau traitèrent fort cruel- le ment les Sauuages, & en vendirent aux maquignons plufieurs de libres pour en faire des efclaues. Or De^adcjâpres auoir appris par lés elpies qu’il auoit enuoyé deuant, qu’vn grand nombre OCCIDENTALES. LIVRE XVIÎI. nombre de Sauuages habitoicau dedans de la terre ferme.il Te mit auffi tofl: eh chemin auec cinquante foldats ; il rencontra au commencement des foreds fortefpaides, ôc des rentiers fort difficiles & peu de villages d’indiens : il pafl'aau traiiersde Guacharuett Panpomûtel?i:ouinccs habitées par des Saunages hardis, furieux Bc en grand nombre: qui pourtant à caufedes querelles & guerres continuelles qu’ils auoyent auec leurs voifins,receurentcesEftrangers humainement,& leurs donnèrent des guides, pour les paffierdansvne autreProuince fort peuplee, & abondante en toute forte deviurescils furent là premièrement attaqués hardiment des Sauuages, qu'ils mirent pourtant en route prefque fans peine ; delà ils prirent leur chemin vers la riuiere de Fmre . laquelle lo ilstrauerferentnonfans grand combat auec les Sauuages qui les attendoyentdel’au- rre code: ils rencontrèrent vn village rempli de viures , & ayant fait paix auec les In- dien§ voifins.ilsreprirentcourage. Or les Efpagnols eftiment qu’Or/^/ euli fort bien fait d’y baftir vue fortereffie, mais il fehaftoit pour aller vers la riuiere de CMcU : voila pourquoi apres auoir receu quelque prefens des Calques de ces Prouinces, ^ s’en retourna vers fon Capitaine. Nous auons auffi ditau Liure precedent Antoine de Sedenno auoit eu difpute auec Om/ touchant ces Prouinces; Bc qu’il auoit efte premièrement accorde entr’euxj qu’ils pourfuiuroyent enfemble auec leurs gens cette expédition : mais qu’om/ auoit puis apres contreuenu à cet accord. V oila pourquoi Sedenno alléché par le bruit qui 2L fans doute eftoit du Gouuernement de -J. t - Le mefmc Aifinger entreprit vn autre voyage l’an cîo Id xxx,& prit fon chemin vers les Sauuages nommés Tocabuyes , qu’on croyoit auoir beaucoup d’or qu’ils chan- 40 geoyent auec leurs voifînsjd'iceuxil alla vers vne autre nation de Sauuages, qui fe nommoyent Alcoholades , qui auoyent autant d’or que les autres .‘Leur terre eftoic pourtant fertile,&eftoyent pour des Sauuages d'affés bon cfprit; de forte que s’il eut bien penfé à ces affaires, c’eftoit le vrai temps pour s’y eftabîir & y baftir quelque bour- gade ; car il euft peu lors fort aifement entrer delà dans le T^uueau Royaume àn depuis nommé Granade , & parce moyen eftabîir tout à fait les affaires de fes Maiftres : mais mefprifant cette occafion, il s’en alla delà à Rio Grande, & plus outre à Tamalemeque, degaftant miferablementtous lespa'is où ilpaftbit iufques àZe^rÂv4.*d’où fe deftour- nant,il entra dans vn pais montagneux & froid , qu’il trouua peuplé de beaucoup de Sauuages, defquels il fut repouffé auec grande perte de fes gens , & lui mefme ayant jo cfté bieflé,s’en retourna à Coriana, ou il mourut de fa playe fan de Chrift c î oî ox x x 1 1. ' Par apres les Velfers yenuoyetent en la place du 'çxcm\tiIeanAlleman,o^\ne.uuz- prit aucuns voyages au dedans du pa'is, mais y mourut bien toft. ^ En la place fut derechef eftabli George d'EJpire auec fon Lieutenant NicolasFerder- manouFredemanYoLnclolo 'KX.yiy . Ceftui-ci auec trois cents Piétons & cent Caua- liers, partit de Coriana au mois de May,tirant vers le Midyjfuiuant le chemin d' Aifinger, commandant OCCIDENTALES LIVRE. XVlII. 6i^ cbmmandant à fon Lieutenant de le fuiure apres qu’il auroit place vne Colonie auprès du Cap de la P'cla, nuec le rcfle de les troupes. Cependant il auoit pris pour Ton Lieu- tenant Francifco de FeldJcoECpîignol, qui, comme ils auoyent preique marché dcinc Cents lieuës, félon la coullume ordinaire à cette nation, lors qu’ils font fous des Eflran- gerSjS’efTaya de faire mutiner les foldats : mais le Chefaduerci de bonne heure de fon defTeinde cafTa de fà charge, & le laiflïilà pour toute punition. Or Federman fuiuant fon Capitaine , apres auoir trauerfé beaucoup de pais, entra dans la valleede7//e//y(?, fort eftroite & ceindede toutes parts de montagnes, où il hi- uerna; & cependant alla aufTi dans la Prouince de B arioj^mzemet o ,2LinÇi appellee d’vne I O fiuiere qui la trauerfe. Ayant pafTé l’hiuer dans Tucnyo-,^ laifTé François Vanega pour Gouuerneur d’icelle, il partit delà au mois de Décembre , &à grandes iournees , pafî'antàtrauers de rudes montagnes, des forefts efpaifTes , & des lieux fort difficiles , il entra enfin dans le Noû- ueau Royaume de Granade. Cependant que les Allemands exploitent ces chofes en diuers quartiers de l’Ame- ZïCçyiQ i EJpire efteafle defàcharge, &-Ff^cButhele~ »?ir^'^rfonLieutenant,Iiésde chaines à Coro^ouil les fit mourir. Par apres luan Perefio de T olofa auffi Licentié és Droids y fut enuoyé,qui arriua à Co- ytf l’an cio Id xlvi,oii ayant affcmblé feptante foldats , qu’il trouua à propos dans la ville, s’en alla pour rencontrer afin de le punir félon qu’il mbritoit. Icelui prit fon chemin par les montagnes, afin decouperàC<3r»^ïw/le chemin du Nouueau Royaume de Granade^oVi on difoit qu’il s’enfuyoït : & ayant trauerfé la plaine de Car or a^ il rencontra quelques foldats, qu’il adioignit aifement auec fes gens 5 Ôc comme il eut appris d’iceux,qu’il audit quitté R ucuyo & eftoit logé à ^r^,qui en eftoit à enuiron 50 cinq lieuësjil tira celle part à grandes iournees,oùeftantarriué, il attrapa fon homme, qui ne fe doutoit de rien , & l’ayant enchainé ,1e mena dans la Prouince de tucuyo ■> où il le fit mourir. Enfin l’an cio lo l, les Negres, dont on auoit défia amené là vn fort grand nombre d’Afrique, commencèrent à fe mutiner ; mais les Efpagnols aduertis de leurs menees, les faifirent,& tuerent tous les malles dentr’eux.Ce qui a efté fait de plus en ceGouuer- nement l’an c 1 0 1 o l i i,fera plus à propos traité en la defeription de la ville de Segouie. Chap. KjlH m 6x4. DESCRIPTION DES INDES H A P. X. De Coro Métropolitaine de ce Goimernement. La principale ville de ce Gouuernement s’appelle Cord , les Sâuuages-la nom- ment Corana , & les Efpagnols fort fouuent Venez^ueU , du nom de toute la Pro- uince. - y Elle eftfituee, félon la commune opinion ,furlahauteurd’onze degrés delefleua- tionduPoleduNordjdans vnpaïs bien temperé, mais fort deffourni d’eau douce, fut tout de fontaines, & n’eft arroufé d’aucunes riuieres. Elle eft baftie dans vnc plaine, jq combien que fon territoire foit pour la plus grande partie montueux. EileiouïE d’vn aïr fort fain,de forte qu’on n’a pas grand befoin de Médecin ni de médicaments, autres que des herbes, plantes Vautres Amples, que la terre y produit benignement de fa na- ture : Elle a les mefmes animaux tant terrcAres que volatiles , qui fe troüiient és autres quartiers de i’Amerique Méridionale; mais les lions y font fi lafches & craintifs, que les Saunages les tuent aifement à coups de bâfrons ; au contraire les tigres y font A fu- rieux & cruels, qu’ils furpaATent de beaucoup les beftes fauuages des autres quartiers. Le terroir de cette ville eft fort fertile,- caries cannes de fucre y croiftent d’vnemer- ucilleufe grandeur & groifeur; Il s’y trouue abondance de miel & de pois Scia terre n y produit pas mal le froment; les habitans fe plaifent pourtant mieux au Majs , en la 2,0 pafte duquel ils meflent du fuc de cannes de fucre ,& en cuifent des tourteaux, d’vn tres-bongouft,quife gardent long temps, comme A c’eftoit du bifcuit. Ils font aufti du breuuage du mefme Maysy&ede racines de patates,fi fort, qu’il enyure promptement les Saunages. Cette villeadeux hauresou ports, i’vn vers rOueft,à enuiron vne lieuë d’icelle, dans vne certaine baye,qui eft derrière le Cap de.?. Roman^commc ilsl’appel- ientjOii lamer y eftia plus cran quille, & n a pas plus de trois brades de profond d’autre vers le Nord à deux lieues & demie de la ville, où la meneft beaucoup plus agitee de plus profonde, Ily aaufli leslfies de Curaçao ^Bonaire & Aruba, qui bordent la Conti- nente quatorze lieues de long, comme Herrera afteure, cette derniere rade eft fort mal afteuree,(Sc n’eft nullement garentie àTencontrederincertitude des vents, mefme elle 5 0 eft expofeeauventdeNord-eft, qui fouffle en ce quartier coiitinuellement, &eft au- cun esfois très-fort ; il y a de tres-bonnes Salines à vne lieue de ce port ou enuiron. Or dés la ville deC7^?r^,lareiTes’auanceen mer douze lieues loin, & fait comme vne peninfule, que les Saunages nomment & la derniere pointe d’icclle eft ap- pellee des mariniers Cap de S. Roman: cette peninfule a de tour enuiron vingt cinq lieuës , eftenduë pour la plufpart en vne plaine, abondante en beftes Sauuages iln’y a prefque point d’eau, & n’eft arroufee d’aucune riuiere. Les Indiens font d’vn natu- rel doux & traitable. Le Gouucrneur de toute la Prouince fait le plus fouuent fa refidence en cette ville, comme aulA rEuefque, qui eft Suffragant de l Archeuefque de S. Domingo dans l’IAe qo à' Hîfpagniok. Cette ville futfurprife des Anglois l’an clolo xcv,qui l’a bruAerent prefque toute. Allés proche de la ville, près du chemin quimene aux montagnes, eft Atuee cette plainCjque les Efpagnols nomment d’ordinaire los Lanoc de CaroraMopxeVie a de long feize lieuës,& de large Ax: fort fertile & abondante en viures & autres chofes necelTai- res à la vie : notamment en Mays & en beftes de charge. De la ville de Coro on va dans la Prouince de Bariquezimeto par les rnontagnesjnom- meesen \2.Xïg2Lgelndiei\ Xizaharas commencent près de la ville; ce ne font pas tant montagnes que de hauts champs bolTus, fauuages &non cultiués,oiiily a ci & là de moyennes colines,elles font habitées d’vne nation Sauuage nommés jo don farouche &raccouftumeeàviure de chair humaine, que les Efpagnols n’ont peu encore iufqucs ici pleinement dompter. Ch A P. î L, ■ 'f,’ OCCIDENTALES. LIVRE XVIII. C H A P. XI. Des autres Villes de ce Gouuernement Nueftra Sennora de Carualledà, S. lago de Leon, Noua Valentia Xeres. La fécondé ville de ce Gouuernement eft nommee des Efpagnols Nueftra Sernw- rade Car fialleda,{izncQ dans laProL]incedes peuples nommés Caracas afles pies du riuage de la mer du Nord. Elle eftdiftante de la Métropolitaine Coro denuiron quatre vingts lieues, comme veulent leS Efpagnols , vers le Leuant celle a 5 Q bien vn port, mais il efl: incomrnode & mal,-aireuré. Or les Efpagnols ont bafti vn Fort en cette Prouince, furie bord de là naetj qu’ils nomment Caracas. La terre ferme fecfrelfe en cet endroit, en de tres-hautes monta- gnes,quine cedentgueres en hauteur, à cefommerdelllle de TeneriffedÎMTizdt^ Cana- ries ,worcstc\k d’ordinaire el Vkü proche de la cofte de la mer brife fort & eft grande- ment agitecjde forte qu’il eft fort difficile d’en aborder auec des chaloupes, pour y met- tre pié à tcrre,fi ce n’eft auprès du Fort, dans vne petite baye ou emboucheure. La troifieme ville de ce Gouuernement fe norhme S. lago de Leùn^ fituee dans la meft me Prouince de Caracas,^ cinq ou fept lieues du bord de la mer,& à feptante fept delà Métropolitaine Coro,vtcs le Leuant : à trois ou quatre de Nuejîra Sennora de Carualleddi xo vers le yiidy , (don Herrera :\q Gouuerneurde toute la Prouince y fait par fois la de- meure. Cette ville fut inopinément prife des Anglois l’an cl d Id xc v , & fut pillee vn peu apres qu’ils eurent pris le Fort de Caracas. On dit qu’il y a deux chemins qui vont de la mer à cette ville , l’vn court & fort aifé , mais que les habitans peuuentaife- ment boucher & garder j pource que prefque au milieu d’iceiui , il eft tellement prefie des hautes montagnes & bocages inaccelfibleSjqui le bordent de cofté & d’autre, qu a peine a-t’il vingt cinq piés de large : l’autre eft fort difficile & raboteux au trauers des montagnes & précipices , les Sauuages toutesfois s’en feruent d’ordinaire. Ces mon- tagnes eftant pairees,on defeend dans vne campagne, où cette ville eft baftie. La quatrième ville de ce Gouuernement eft appelleei\r^>^/* r4A^//^,diftante de la 50 ville de S. lago de Leon do Vingt cinqlieuës,du port de comme on le nommer fept : &de la Métropolitaine Cï>r<7,foixante,felon Herrera. En quoi ie penfe pourtant qu’il s’eft trompé : car le conte du chemin monftre clairement qu’il n’y en peut auoir gueres plus de quarante &: cinq. La cinquième ville de ce Gouuernement s’appelle T^oua Xeres ; diftantc de la Nouuelle Valence quinze lieues prefque vers le Midy : de Noua Segouia vingt & vne ; de la Métropolitaine foixante prefque vers leSud-eft. Il femble qu’il n’y a pas long temps qu’elle a efté baftie, & fonnomn’eft pas ancien parmi les Autheurs El- pagnols. 40 C H A P. XII. Ville dite Noua Segouia, le fit O" qualités cle tàïr 0* la terre des régions ^oi fines. Devant que de commencer à deferire cette ville , il eft neceftairé de re- citer ce que nous auons promis ci-deuant , qui eft ce que les Allemands ÿ ont fait. lean de Villegas Gouuerneur pour les Velfers de cette Prouince, l’an cId Io lu, partantaueefes troupes de defcouurit premièrement certaines veines d’or au JO pié de fort hautes montagnes , qui d’vne fuite prefque continue trauerfenttoüte cette Prouince , on les nomme auiourd’hui de S. Pedro , le long de la riuiere dite des Sauua- ges Buria , & des Efpagnols de S. Pedro , pource qu’on y alla premièrement ce lour de fefte. Icelui alléché par cette bonne rencontre y mena vne Colonie ; qui ayant efté peu apres abandonnée à caufe de finclemence de l’aïr & du lieu mal fain , les habitans furent tranfportés fur les bords de la riuiere de Bariquicemetej la ville fut nommee Noua Segouia, Kkkk Or J DESCRIPTION DES INDES Or ce fleuue a pris fon nom de la couleur de Tes eaux } car eftant efmuees elles font de couleur de cendre. • . L’aïr de cette Prouinceeftprefque delà mermetemperie, que celui des régions voi- ïînes : car elle a l’efté au mefme temps qu’eft rhiuer en Efpagne ; toutcsfois dans la plai- ne il y fait fort chaud ; mais il y s ouffle de petits vents , qui defcendent du haut des montagnes , dont cette plaine eft de toutes parts ceinde comme de remparts, lefquels temperent grandement la chaleur, & apportent vn grand foulagement aux habitans. Il y a plufieurs fortes donations Sauuages,diffcrenteslapîu/partenlangages. il y a vne grande difettede viures: & les Indiens tirent vnfuc du tronc d’vne certai-i o ne plantesqu’iis nomment Cocuy y fort femblab^ aux chardons dTfpagne, lequel fuc reÏÏembîeau fyropjduquel ils fe feruentpour leur viande ordinaire; car ils ont peu de Map,m-àis ils ont d’vne efpeee de courges , qu’on nomme en Efpagne Calebafîes. Ils ont pourtant grand nombre de cerfs &.de connils de l’Amerique. Au delà des mon- tagnes vers le Midy il fe trouue grande quantité de Mays , comme auffi du Tuca, de au- tres racines , dont on fe fert en ces païs là au lieu de blé, pource que la terre y eftplus humide. Les riuieres auffi de Hacariguay de Boraute & plufieurs autres ruiffeaux & tor- rents,qui trauerfentei & là cette Prouince, fontfort remplis de fort bon poiffon, que les Indiens, par le moyen d’vne racine, qu’ils nomment Barhafeo premièrement de iettee dans l’eau, enyurent ou pluftofteftourdiffent.de forte qu ils felailfent prendre 2>o à la main ; moyen qui eft auffi familiet aux Sauuages ailleurs. Il y a auffi vue grande quantité de beftesfauuages, comme cerfs, fàngliers, dains & connils, lefquels aux mois des feichereffies , mettant le feu au herbes , feiches par tout en ce temps là, ils tuent à coups de flefehes, comme ils fortent de leurs terriers. Il n y a pas auffi faute dhnimaux furieux & nuifibles , des tigres ; de diuerfes couleuures , no- tamment de fort grands ferpents, que les Sauuages nomment Enfin il y a le long des riuages des riuieres, force abeilles, qui font leur miel dans les creux & au pié des arbres. En outre on croit que toutes les riuieres de cette contrée , & plufieurs autres , qui fourdent du cofté du Sud dé ces montagnes , apres auoir couru prefque cent lieues de 5 o païs , fe rendent dans la grande riuiere de Fiapari ou Huriapariy c’eft àdire rorenocyncy par de grandes emboucheures. Or le païs des montagnes , qui efl; à la main droite de la ville de habité des Sauuages nommés €htcaiyt9ty comme on croit, abondant en mines d’or, defquelles on poürroit tirer de^grands trefors, fi onanoit quantité d’efclaues. Cette Prouince a efté anciennement fort peuplee de*Sauuages, mais maintenant la plusgrandepartiefoncmortsdemaladies,& autres incommodités; mais fur tout par leurs propres vices , fi nous en croyons lesEfpagnols : car ils font d’vn efprit lourd & fortabie£t,effeminés ôt addonnes à beaucoup de vices,fur tout à l’yurognerie, aux que- relles & aux meurtres, q uand ils ont le cerueau efehauffé de boiffon ; ils font oififs fans 40 fonger au lendemain, ce font vrais enfans fans fouci, qui gourmandcntfouuent en vil iour cequi leur pouuoit fuffire pour long temps : voila pourquoi lors que les viures leurmanquent,iis fouftiennent miferàblement leur vie déracinés & herbes fàüuages, iufques à ce que leur nou.uelle moiffon de cJ^^jvj'foit meure ; qu’on dit y croiftre à fa perfeébion en quarante iours en d’aucuns lieux,& d’autres en trois mois. Affés près de la ville de Segouie paffie vn certain torrent ou riuiere, que les Efpa- gnols nomment Rio Chroyàt la netteté defes eaux, qui fe cache fous terre pas trop loin de fa fource : laquelle eft fort petite au temps des pluyes, mais l’Efté, lors qu’il femble quelle le deüroiteflre moins, fegroffit,de fortequeles habitansen ce temps fec arroufent leurs champs de fon eau; & font par ce moyen vne abondante cueil- 50 lette de \J\4ays. . ^ Les vaches, brebis, pourceaux, & les belles de chafge y profitent fort bien, car la plufpart des habitans s’exercent à pourrir du beflail , d’oii vient leur principal profit ; car ils meneur vendre au 2{ûuueati Royaume, de Granade toutes fortes d’ani- maux domeftiques ; les Sauuages ont mefme appris à tiftre des efloffes de cotton. Enfin la ville dcNoua SegouiayüxuQe. dans la Prouince, que nous auons défia deferire, efl OCCIDENTALES. LIVRE XVIII. dl disante de Nouk versîe-Midy , de vingt cinq lieues : de Tucuyo de dix: de la Métropolitaine Coroxcïs le Snd-efl: de quatre vingts. Or le chemin deTucnyo^ Cette ville pâlie par vne vallee longue de douze lieues. C H A P. XIlL Refie des Villes de ce G outi'ernement , Tucuyo ^ Truxillo Laguni, dt4ec U qualité des Proumees qui les aduoifnent . lo A lepticme ville de ccGouucrnementrenomrneT«r/o'(7,de la vallee dans laqueL i le elle eft baftie : Or cette vallee s ellend du Sud au Nord , & a de long & de Tat- .A gç enuiron demi-lieue j enuironnêe de toutes parts de montagnes : il y a vncri- iiiere de mefme nomjqui la coupe prefque par le milieu. Elle eft fur tout prilee pour la bonté de Ton air; non moins pour l'abondance de toute forte deviures,& quantité de fruiftsjdefortequerienii’y manque auxEfpagnols &auxSauuâgesde ce qui eftnecef- làire tant pour la Vie que pour la volupté. Or cette ville ell; efloignee de la mer du Nord de cinquante lieues : de la ville de S. lago de Leon feptante : de NouaSegouia onze : de Pvc\2xs aulfi la terre ferme.Elle a delong entre î’Eft & l’Oueft trois ou qua- 5 O tre lieuès,de large vne & demie. Son cofté Oriental, comme aufli la plus grande partie de rifle,eft d’vn terroir pierreux,fterile,nud d’herbe ; ces pierres font rudes , troüees U. entrouuertes, de maniéré qu’on n’y peut que difficilement planter lepiéferme,ily a quelques bocages le long du riuage ; & la cofte eft prefque toute cou uerte de marais & eftangs, qui font remplis de cancres inutiles. Le cofté Occidental prefque iufques au milieu de l’Ifle eft couuert d’vn bois efpais,oii il y a grand nombre de Gitaiac, &c le bord de la mer eft couuert de buiffons fi efpais qu’on n’y peut pafTer. Cette Ifle n a rien de mémorable outre vne petite Saline, qui eft derrière fon Cap de Sud-eft , ou es mois de Septembre,Oaobre & Nouembre,il s’y trouue du fel affés pour charger trois ou qua- tre nauires : mais la rade eft fort mal commode pour les nauires. Cette Ifle nourrit auffi 40 force cheures , fur tout au cofté Occidental 5 qui font tourcsfois difficiles à prendre ; force Tguanes au cofté de l’Eft.qui font fort maigres , à caufe de la fterilité de la terre ; fi ce ne font celles qu’on prend dans les bois, qui font plus grafles.Or fon cofté du Sud eft tellement rempli de fables & de rochers, qu’on n’y peut anchrer fans danger.Elle a vne feule rade affés bonne derrière fon CapduNord-eft, qui s’auance par vn coleftroit comme vn fentier auantdans la mer 5 où on peut tirer à fec les nauires pour les net- toyer ou raccommoder. ‘ Orchilla^vXiS.^. T^^r/^^^.diftante d’icelle d’enuiron quinze lieues vers leNord-oucft quart àl’Oueftrde l’Ifle Blanca prefque dix neufiou vn peu moins, comme d’autres veu- lent. Les mariniers ne font pas bien d’accord de fa hauteur: les vns affeurent quelle eft 5 O à onze degrés & quinze fcrupules de la ligne vers le Nord} d’autres y en mettent tren- te fcrupules }& d’autres cinquante: mais ie penfe que ceux qui lui en donnent trente approchent plus de la vérité. Elle eft diuifee en plufieurs parties 5 dont la plus grande eft prefque comme vn croiffant, & d’autres petites feparees les vnes des autres par des canaux peu profonds.La plus grande eft en fa plus grande partie baffe, feulement au Capd'Orient &d’Occident ily a quelques montagnes,où principalement fe gardent les cheures* Afon cofté méridional &qui regarde leNord-oueft.la mer eft fort profonde Kkkk 5 &le ^30 DESCRIÏ>TlON t) ES INDES & le riüâge y eft droit comme vn mur, de Forte que les grands nauires en peuuent ap procher de fort près : du côfté duNôrd-ôueft il y à fort peu d’arbres, & peu d herbe aulfi ,fi ce n’eft du perfil demer j mais du cofté de l’EftSe duNordily a plus d’arbres : au refte la terre eft falee & impropre aux plantes : il ne s’y trouue nûlles fontaines ou fources d’eau douce; mefme les arbres qui y croiftent font fecs & contrefaits : voila pourquoi il s’y tronue peu (^’oifeaux nuis autres animaux qued’vne efpece de lé- zards. Au Nord font les autres petitei Mes j'auffi baftes que la mer , qui font par fois inondées d’icelie. ^ Suit apres Rocca eftoignee d’Orchilla d’enuiron fix lieues vers rOueft quart au Sud ; & de la ligne douze degrés & quatre fcrupules vers le Nord, comme nos mariniers ont I O remarqué. Ce n’eft pas tant vne Me qu’vne fuite de plufieurs rochers & Mettes eften- dus en long de l’Eft à l’Oueft cinq lieues, &prefque trois de large. On peut aifement de ces Mes Voir la terre ferme de l’ Amérique Méridionale. Au Nord il y a vhe petite Me dans laquelle fe drefle vne haute montagne, qui à caufede fa blancheur fe voit de fort loin en mer.Le cofté du Sud eft fi droir,& la mer fi profonde, qudn y iettela fonde en vain. Mais le coft'é de l’Oueft eft vn peu profond,& il fe trouüe là quelque peu de fel au temps des Icichereftes.ElIe ne nourrit nuis animaux,& fort peu ddifeaux , excepté deceuxque]esEfpagnols,commenousauonsdit,appellentPWw^j,quiontdelon- ' gués iambes ainfi que les cigoignes,les plumes rougeaftres & belles, vn bec long & re- courbé. Laterrecft partoutpierreufe&prefqueauffirafequela mer. ^ L Me des comme on 1 appelle, eft aufti compolèe de plufieurs petites Mesîdcf. quelles la plus Orientale eft la plus grande, de forme triangulaire,prcfqucauffi baffe que la mer, & couiierte d’arbres, combien que la terre foitpierreufe selle eft diftante dcRocca vers rOueft quart au Nord d'enuiron x îieuësrde la ligne vers le Nordde xii degrés, comme ie trouue que quelqiies-vns ontrcmarqué.Il y ahuiO: ou neuf petites Mes en l’efpace d’vne lieué,qui en font proches,feparees d’vnemer peu profonde, qui n’ont rien de remarquable non plus que la grande. ^ C H A P. XVI. T>eferif}tion des Jjles de Bonaire, Curaçao Aruba. ^ L’Is L E de .B^?;^4/>£eft diftante de celle des y^^erde fix ou huidiieuës vers rOueft quart au Nord & Oueft-nord-oueft; delà ligne vers le Nord de douze degrés &: quelques fcrupules ; elle eft allés Ipacieufe , & croit-bn qü’elle a enuiron feize ou dix fept lieues de tour; fes bords font prefqtie par tout droits, combien que fon terroir nefoit que moyennement haut auprès dü riuage, de forte qu’au coftédcucrsle Nord-oueft,ou eft la meilleure rade,il faut necefïairêment attacher les nauires auxar- biss,ou porter 1 anchrefur le riuage : de ce cofté il y a vne petite Ifle : il s’y trouuefor- ce bœufs & vaches, & des brebis & des cheures aufti , des chenaux & des pourceaux, que les Efpagnols y ont mis,qui y ont merueilleufement multiplié. La plus grand part 40 des habitans font Saunages , qui y ont efté amenés parles Efpagnols de l’Me d'Utêa- gniole, &déslongtemps baptizés;il y a fort peu d’Efpagnols aiiecleur Gouuerneur ; qui demeurent dans vne certaine vallée entre les montagnes de cette Me. Au refte le terroir de cette Me ne porte pas fort bien les grains ; mais il y croift force arbres, le bois defquels eft rouge, & on s en fèrt a teindre 1 le tronc d’iceux eft feabreux & tortu, pref- que comme les ceps de vignes, mais fortfolide & pefànt;i’efcorce en eft ccndree,qu’on n eftime pas leruir a rien. Ceux de noftre nation le nomment Stock-vijch-houî : depuis quelques années plufieurs nations,notamment la noftre, ont commencé d’en empor- ter en 1 Europe, de forte que pour l’abondance il commence à venir de vil prix, & il ne s en trouue plus tant en cette Me, ou on ne le peut pas charger fi aifement. j’o La petite Me eft diftante de lagrande d’vn fort petit efpace, elle a aufti fes riuages fort droits, & la mer eft a l’entour fort profonde , de forte que tout proche de l’Ifle on trouue foixante braffes, elle a enuiron trois lieues de circuit , en ayant prefque deux de Mng. Son terroir eft la plufpart pierreux , le refte nitreux ou falé, d’où vient qu’on y trouue difficilement dei eau pour boire. Il n’y a rien de remarquable, fi ce ne font les mefines arbres de lagrande, du & quelques cottonniers. Caracao I 0 OCCIDENTALES LIVRE. XVIII. Curaçao cd vne Ifîe didantc de Bonairc vers i’Oueft-nord-eft d’enuiron neuf lieues, de manière qu’en vn temps clair on la peut voir de Bonaire ; de la ligne vers le Nord douze degrés & quarante fcrtipules , comme ie trouue qu’il a efté remarqué de quel- ques-vns. Elle a de tour neuf ou dixlieués,elles’eftend entre le Nord-oueft & le Sud- cd. On tient que Ton terroir ed meilleur que celui de ^tf»^/>e,d’où vient quelle a plus d’habitans, qui s employeur à nourrir du bedail , &font tous les ans force formages qu’ils portent vendre à la terre ferme. Il y croidauflides mefmes arbres mais non pas en fi grande abondance. Elle a vne large baye du codé du Nord-ed, mais l’anchrage ed fort incommode pour les grands nauires, à caufe que la falaife ed fort droite. Lesnodres l'ont prife depuis peu d’annees, en la façon dont nous parlerons ailleurs. L’Itle d’ Aruba eddidante de Curaçao auNord d’enuiron neuf lieues, comme i’ai trouué qu’il a edé remarqué par les nodres ades exadement , elle s’edend du Nord-oued au Sud-ed trois lieues : elle a vne rade du codé du Nord-oued derrière vn Cap ; auprès d’vne petite Ide qui lui ed au deuant, fur vn fond de fable propre pour anchrer,à cinq brades de profond, les autres riuagesde Tlde/ont des falaifes droites, maisquelamercouurcaugrosdemaree. La plus grand part de l’Ideed bade, & en' quelques endroits a quelques montagnes, l’vne delquelles redemble à vn pain de fu- cre : fon circuit ed d’enuiron cinq Üeuës ; elle ed habitée de quelque peu d’îndiens & 2.0 Efpagnols ; enfin elle ed didante du Cap de 5'. Roman d’enuiron hnid lieues vers le Nord-nord-ed. ‘ C H A P. XVIL Defcriptiofi de toute U cofîe des deux Gouuernemenî s de Ciimana de Venezueie Vmana ou Comena ed didante du Cap d' Araya ou de ces renommées Salines vers le Sud, de quatre lieues ; nousauons parlé du rede ci-dedus. De Cumana la. code court premièrement vers l’Oued quart au Sud, & là for- j 0 tent en mer la riuiere que les Eipagnols nomment Rio de Canoaa,^Gu apres celle de Bar- dones: & puis vn port fortadeuré de toutes parts, garenti des tempedes, nommé vul- gairement ; plus outre la baye que nousauons ci-dedus dit retenir le nom de S. Fé: en cet endroit on rencontre vn rocher edroit,mais qui ed feparé delà terre fer- me par vn dedroit profond &nauigable,appellé des nodres lequel pade , l’en- treevers vne autre baye s’ouure, qui fe nomme vulgairement Commenagot vne belle baye & fort commode pour les mariniers , vers l'Occident Mar acapana, où le riuage ed fablonneux , & le fond propre à tenir les aiichres , au codé d’Oued de cette baye fort vne petite riuiere, de laquelle on peut aifement prendre de l’eau : au tour de cette baye & au dedans de la terre ferme ci-oidcncplufieurs arbres dont le bois edfort /{.O bon, comme on dit,à teindre en rouge & orangé. Delà rade de Ctfz®;^(?;^4'^<;^iufques aux petites Ides de P ir ko ^ on conte quatre lieuê’s, de forte que le coin Occidental de cette baye, relpond au Cap Oriental de ces Ides. Les Idés de ?/># Impérial ville. ^.6.7 loalarmois. 497 S. lolèph ville. 303 S. lorge de Olancha. 47 Mes de perlas. 2^0 MedePinos. 345 415 ZS4- 340 ^25 17 ^ 539 348 1^5 485 487 11 ît.iz Arouata herbe. K. L. K T A Paz ville. "^^Labapi riuiere. Lac admirable. Laguna bourgade. Laguna de Nicaragua. S. Laurens ou Me de Bretons. Laxa (entier, Lecandones peuples. Lecandon. 49Î 508 494. ibid. 15 50E 522 jjS 422.430 ^57