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LO GIQUE

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BEIKCI£KS DE GRAUiAAlBL,

PAR M. DU MARSAIS.

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SB L XMPRZMSRZS DE XEBSL^ A VERSAILLES*

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LO GÏQUE

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PR I NCIPES

DE G RAMMAIRE,

Far M. du Maksaxç*

Ouvrages posthumes en partie^ et en partie extraits dq plusieurs Traités qui ont déjà paru de cet Auteur,

NOUVELLE JÉDITION

Augmentée du Traité de l'Inversion*

mm

TQME PREMIER.

Aï, 153^ A PARI S,

Chez Moutardier , Libraire^ quai des Augustins, n.® 23.

1807.

\

S.*»S«

LOGIQUE,

OU RÉFLEXIONS

Sur les principales opérations de V Esprit.

J^IEIT a tiré da néant deux svbatances,' la substance spirituelle et la substance cor« porelle.

Par la substance spirituelle, on entend celle qui a la propriété de penser, d'à** percevoir, de vouloir, de raisonner et de sentir ^ c'est-a-dire , d'avoir des affectiçns sensibles.

On ne distingue que deux sortes de $ubs-« tances spirituelles créées \ savoir, Paoge , et ramejiumaine.

A l'égard des anges | nous n*en savons que ce que la foi nous en enseigne. Comme les anges sont des substances spirituelles , ils ne peuvent point affecter nos sens , et par conséquent ils sont au-dessus de nos lumièret

'ïhmç L A

i Logique

natnrelles ; et c'est un axiome reçu de tOQS Us sa vans , qu*à Tégard des anges, la foi nous en apprend fort peu de choses, Tima- gînalion beaucoup, et la raison rien : en effet , le peuple en raconte une infinité d*histoires fabuleuses.

Au reste , par ce mot ange , on entend les anges bons et les anges mauvais 9 c*est- li-dire les démons. Les opérations des uns et des autres ne nous sont connues que par la foi.

' A l'égard de Tame , c'est-à-dire , de cette substance qui pense en nous, qui aperçoit , qui veut ^ qui sent , nous ne la connaissons que par le sentiment intérieur que nous avons de nos pensées , de nos perceptions , de nos vouloirs ou volontés , et de nos sen«» timens de plaisir ou de douleur.

Ainsi . remarquez que nous ne connoîssons point la substance de Tame. Nous ne con- noissons Tame que par le sentiment intérieur que nous avons de ses propriétés d'apercé- Yoir^ de vouloir et de sentir.

eu Réflexions^ -etc. Axu I. ^3

m

ArTCI.£ FR£MI£R.

De la différence de Vange , e/ de twno

humaine.

T,

o (7 T E la différence c[ue les sayatu metteat entre l'ange et Tame humaine., c'est, disent-ils^queTange-est unesubstance complète ^ subsiantia compléta y et que Tame est une substance incomplète, subs^ iantia incompleta \ c'est-à-dire , que l'ange a tout ce qu*il faut pour 6tre ange , et existe independamment.de toule autre subs-- tance; au lieu que Tame humaine doit étris unie au corps \ c'est ainsi qu'un pied et une main ont relation à un corps ; en un mot , l'ange est ud tout , au lieu que l'ame humaine n'est qu'une /^^zr/z>. ^— I Il 1 1 1 I ■——■—— —<i , ^i— ■— 1—

A a T I G li B II.

De la distinction de Vame et du corps, '

L

lA foi nous etlscîgne que Tamè est dif»» tinguée du corps , de la même distinction qu'il y a entre une substance et une autre substance , et non de la distinction qu'il y a entre une substance et ses propriétés»

A 2

14 Lagiçue

Voici la preuve que l'on donne de la dis- tinction de Ta me et du corps parles lumières la raison.

Un étre^st distingué d'un autre être quand ridée que j*ai de l'un est différente de celle qiie j'ai de Tautre , et sur-tout lorsque l'une est incompatible avec Taùtre ; 1 idée que j*ai du soleil est différente de l'idée que j'ai de la terre : donc le soleil et la terre sont deux substances différentes.

La distinction sera encore plus grande , si une idée exclud Tauire idée ; par exemple ^ l'idée du cercle exclud l'idée dii carré : or l'idée que nous avons de l'étendue renferme ridée de parties, de longueur, de largeur ec de profondeur , et elle exclud l'idée de pen- sée et de sentiment : donc ce qui est étendu est distingué de ce qui pense ; même l'idée que nous avons de la pensée ne ren- ferme point l'idée de l'étendue» et même l'exclud ^ ainsi , l'ame étant en nous Véfre qui pense , n'est pas Vêtre gui est étendu et le corps étant en nous Vétre étendu n*esc pas Vêtre qui pense , parce que l'idée do Y^ii n'est pas Tidée de rçiutre.

ou Réflexions ) efc, Arjt. III.

o

A R T I C L £ III.

De Cunion de Vame et du corps*

jn ne conçoit pas comment un être pore* ment spirituel , c'est-à-dire , pensant sans être étendu^ peut être uni à un corps qui est .étendu et ne pense point. Nous ne pou- vons pas cependant douter de cette union , puisque nous pensons et que nous avons un corps.

Cette union est le secret du créateur. ToDt ce que nous en savons , c*est qu*à Toc- casion des pensées et dçs vplontés de Tame/ notre corps fait certains raouvemens y et que réciproquement , à Toccasion des mou- vemens de notre corps, notre aine a certaines pensées et certains senlimens , le tout con*- . formément aux loix établies par TAuteur de la nature. Ce sont ces loix qu*on appelle les loix de l'union de Vame et du corps.

AB.TICX.S IV.

Des propriétés de Vame,

N,

O u S ne connoissons l'ame et ses pro- priétés , que par le sentiment intérieur qut:

A3

ff Logique "

nous en avons. Nous sentons, et m^menoas avons un sentiment réflëchi de nos sensa- tions; nous sentons que nous sentons.

Ce sentiment intérieur est la propriété la plus étendue de l'ame.Le corps estincapable de sentiment ; c'est Tame seule qui sent.

De-la est venue Topiniofi des Cartésiens ^ qui ont ipiaginé que les bêtes n*étoient que de simples automates, comme le Auteur et le canard de M. de Vaucanson ; car , disent- ils , si les bêtes sentent , elles ont une ame; si elles ont une ame, elles sont capables de bien et de mal ; et par conséquent de récom-* pense et de punition; d'où il s'ensuivrait, continuent-ils , que l'ame des bêtes seroit immortelle.

Mais quan4^nous parlons dès propriétés de rame ^ nous ne parlons que de Tarae hu- maine. Ce qui se passe dans les bêtes est connu de Dieu , dont la puissance infinie peut avoir fait des âmes différens ordres , dont* les unes seront immortelles et les autres mortelles : les unes connoîtront le bien et le mal, et les autres n'en auront aucune connoissance, 11 y a différens ordres dans les anges; il y a diffi^rens degrés de lumière parmi les anaes des homnrfs \ et n^

^ t

ou Réflexions , etc. Art. IV. 7

convient-on pas que les imbéciUes , les in* sensés , et même les enfaus jusqu'à un certaia âge , son( incapables de bien et de mal.

Avant Descartps , les anciens et les nio« dernes ont cru que les animaux avoient le sentiment.de la vue , de Touie , etc. çt qu*iU étoient sensibles au plaisir et a la douleur. Je ne sais que vous me voyez , que parce que je vois que vous avez des yeux comme les miens , et que vous agissez en consé-^ quence des impressions que vos yeux re- çoivent : je remarque les mêmes organes et la même suite d'opérations dans les ani<« maux»

Observez deux sortes de seniimens : i.^ l'un que nons appelons sentiment im'^ médiat , et l'autre que nous iippelops senti" ment médiat.

Le sentiment immédiat est celui que nous recevons immédiatement des impressions extérieures des objets sur les organes des sens.

2.^ Le sentÎTùent médiat, est la réflexion ^ntime que nous faisons sur l'impression que nous avons reçue par le seutiment immédiat. C'est le sentiment du sentiment. II est ap«* pelé sentiment m^^diat , parce qu'il suppose*

A4

8 Logique

na moyen , et ce moyen est le sentiment immédiat. Quand j*ai vu le soleil , ce senti- ment que le soleil a excité en moi par lui- même , est ce que nou^ appelons le senti'* ment immédiat , parce que ce sentiment ne suppose que Tobjet et Torgane. Le sen- timent que je reçois à l'occasion d*un ins* Irument de musique , e .1 un sentiment im- médiat, parce qu*il ne suppose que l'iustra- ment et les oreilles.

Mais les réflexions intérieures que je fais

ensuite à l'occasion de ces premiers senti-

mens , se font par un sentiment médiat ;

' c'est-à-dire , par un sentiment qui suppose

lin sentiment antérieur.

L'ame n*a cette faculté de sentir , soit immédiatement , soit médiatement ^ que par les différens organes du corps , selon les loix de l'union établies par le Créateur.,

Elle sent immédiatement par les sens ex« térieurs y et elle sent médiatement par les organes du sens intérieur djci cerveau.

Un sens extérieur est une partie extérieure dje mon corps , par laquelle je suis affecté de manière que toute autre partie de mon eorps ne m'aficctera jamais de même* Ainsi/

ou Réflexian$ 5 etc^ Art, I 9

leae vois que par mes yeux, je n'entends que par raes oreilles.

On compte ordinairement cinq sens exii-* rieurs, la vue , Touie, le goût», le toucher ec Todorat.

La vue , aperçoit la Ijamîère et les cou- leurs; Fouie, est affectée par les sons; le, goût, par les saveurs; Todorat, par. les odeurs ; enfin le toucher , par les difl'érenies qualités tactiles des objets : tels sont la clia- leur, le froid, la dureté, la mollesse, la propriété d'être ou de n'être pas ppÙ , ^t quelques autres semblables, s'il jr en^.

l4a structure des sens extérieurs est digne de la curiosité d'un Philosophe : il suffit de remarquer i«i que Jm nerfs , par lesquels toutes les sensations se font , ont deux ex« trémitéd ; Tune extérieure, qui reçoit Tim- pression des objets ; et.Taptre intérieure .qui la communmue au ^Qrves^u^

Leceryeaue^tuncsu|^staQcenione,pIusott moins blanchâtre , compostée de glau.des ex- trêmement petites , remplies de petites veines capillaires ; elle est le réservoir et la source des esprits animau^. Tous les nerfs par les- quels nous recevons des impressions , afcour tissent, |iu çeryeap et sjir-tput à cette p^rtiW

A ^

du 'cerveau k{u^ôù appelle le càrpts caîtetiSB , €|ue l'on regarde comme le siëge de Tame.

lie variété qui se troavé dans la consist t(îûce , dans la^ nature et dans TarraDgem^nt àts parties fines c[ui composent la substance ' du cérteau',' Viietit là' difi'érence.presqa*iafi- »ie des esprit^'; suivant ' cet axiome , que tout àe qaiest recul est teçusuivaM la diS" position et tétat de àe cjiii reçoit. C'est ainsi que lés rayons du soleil durcissent la terre glaise , et amollissent la cire.

. iQuarid îés impi'essrons des^ objets qui af- i fectent ii partie exiîérieure dés sens, sont' portées par réxtréThité intérieure des nerfs sensuels dans la Vùbstisince duf cervéhu , alors

s I

nous apercevons les objets , et c'est-la une impression ininaédiate,'

Cette première iiiipressîori fiît une; ii*acc dânsie cervieau , tt celte tracé y demeiïre plus ou moins àeion la niollessé ou la so«' lidité la subsUnce' du' têrVeaù.' Quand cette trace , ce pfî \ tette impressioù est réveillée par le cour$ des esprits ani- maux ou du sang , nous nous rappelons l'i* dée première ou immédiate \ et c'est te qu*ioii appelle i7i^«2wV«r. \ ' '

C'est par le secours «iè 'c«i traces 6a vei-

ou Réflexions , etc. Art. IV* if

tif es , qu'en réfléchissant sar nous méoies ^ noos sentons que nous avons senti ; et c*est ce seuiiment réfléchi que nous appelons idée médiate , pi:|isqu*elle ne nous vient que par le moyen des premières impressions que nous avons reçues par les sens.

Après que nous avons reçu quelques int^ pressions par les yeux , nous pouvons noua rappeler Timage des objets qui nous ont affectés. On appelle cette faculté imagi'» nation. C*est encore un effet des traces qui sont restées daos le Cerveau.

Nous ne saurions nous former des idées i ni de% images des choses qui, précédem<« ment , n'auroient fait aucune impression sur nos &ens ; mais voici qiielqoes opérations que BOUS pouvons faire à Toccasion des impres- sions que nous avons reçues.

I.o Nous pouvons joindre ensemble cer«« taines idées. Par exemple , deTidée de mon- tagne et de ridée d*or , nous pouvons uons imaginer une modtagne d'or.

2.<* Nous pouvons nous former des idées

par ampliation , comme lorsque de Tidëe

de rhomme, nous nous formons Tidée d'un

g^ant.

3.^ Noua pouvons aussi nous former des

A S

S% Logique

idées par diminution ^ compit lorsque de ridée d'un homme , nous nous formons ridée d'un nain pu d*un pigmée,

4.^ La manière médiate la plus remar-^ quable de nous former des idées ^ est celle^ qui se fait par abstraction. Abstraire , c*est tgrer , séparer ; ainsi , après avoir reçu des impressions , d*un objet ) nous pouvons faire attention a ces impressions ^ ou à queU ques-unes de ces impressions sans penser à Tobjet qui les a causées. Nous acquérons » par Tusage de la vie 9 une infinité d*idées particulières , à l'occasion des impressions sensibles des objets qui nous affectent. Nous pensons ensuite , séparément et par abstraction à quelqu*une de ces impres- sions , sans nous attacher à aucun objet. Nous avon$ souvent compté des corps particuliers : de - l'idée des nombres, auxquels nous pensons ensuite , et dont nous raisonnons par abstraction ; c'est à- dire , sans penser a aucun corps particulier ; comme quand nous disons : 2 et 2 font 4 , j ajouté à 5 fait 6:2 sont à 4 , comme 4 sont à 8. C'est ainsi que quand on parle de la distance qu'il y a entre une ville et une autre yille , oh ne fait attention qu*à la lon-<

eu Réflexions ^ etc. Art. IV. i d

gnear da chemin , sans avoir aucan égard à h iargeur ^ ni aun autres circonstances du cfaeinià.

C*est par cette opération de Tesprit c|ae Jes Géomètres disent que la ligne u*a point de largeur , et que le point n*a point d*ëten- due. Il n'y a point de lignes physiques sans largeur, ni de points physiques sans éten<« due ; mais comme les Géomètres ne font usage que de la longueur de Ja ligne , et qu'ils ne regardent le point que comme le terme d^ou l'on part, ou celui Toa arrive, sans aucun besoin de Tétendue de ce terme , ou de cette borne ; ils disent, par abstraction , que la ligue n'a^point de lar- geur, et que le point n'a pas d'étendue.

Observez que toutes ces manières de penser , par réminiscence , par imagina^ tion , par ampliation , par diminution , par abstraction , etc. supposent toujours des. impressions antérieures immédiates.

La volonté , c'est-à-dire , la faculté que nous avons de vouloir ou de ne vouloir pas^^ est aussi une propriété de notre ame, ' On observe encore ce que les Philosophes, appellent V appétit sensit(f\ c'est-à-dire , ce penchait que noi^ avons pour le bkn

î8 Logique

■k^rikaaMiMAMM*

Article V.

Des quatre principales opérations de l'esprit* '

p

AR ce mot ^ esprit f'^ on entend ici la faculté que nous avons de concevoir et à^imo" giner. On l'appelle aussi entendement.

Toute affection de notre ame par laquelle nous cùnceçons , ou nous imaginons , est ce qu'on appelle idée» Idée, en général , est donc un terme abstrait. C*cst le point de réunion auquel nous rapportons tout ce qui ii*est qu'une simple considération de notre esprit.

Nous ferons ensuite des applications par«- liculières de ce mot idée» Lorsque je ne fais que me représenter un triangle , cette affec- tion de mon espfit ^ par laquelle je me re* présente le triangle y est appelée Vidée, du. triangle. -

Idée y est donc le nom que je donne aux affections de Tame qui conçoit y ou qui se représente un objet ^ sans en porter aucun , |ugement.

Car si je juge ^ c'est-à-dire , si je pense ^

ou Réflexions j etc. Art. V. 17

par exemple , que le triangle a trois cAlës 9 je passe. de Vidée au jugement.

Le jugement est donc aussi on terme abs- trait ; c^est le nom que Ton donne à l'opéra* tion de l*espric , par laquelle nous pensons qu^un objet esl^ 00 nW/pas de telle ou telle manière.

Tout jugement suppose donc Vidée ; car il faut avoir Fidée d'une chose, avant que de penser qn*elle est^ ou qu'elle n*est pas de telle ou telle manière.

lue jugement suppose nëcessalrement deux idées : l'idée de l'objet dont on juge, el l'idée de ce qu'on juge de l'objet. Il y a de plus dans le jugement une opération de Vesprit par laquelle nous regardons Tobjet , et ce que nous en jugeons , comme ne fai- sant qu'un même tout. Nous unissons , pour ainsi dire , l'un avec l'autre.

L'objet dont on juge s'appelle le sujet du jugement ; et quand le jugement est ex- primé par des mots, l'assemblage de tous ces mots, qui sont l'expression du juge- ment , est appelé proposition , et alors les mots qui expriment l'objet du jugement sont appelés le sujet de la proposition.

Ce que l'on juge de ce sujet ^ est appelé

z8 Logique

Vatlribut^ parce que c'est ce que Ton allrî- bue au sujet. On l'appelle aussi le prédicat , parce que c*est ce qu'on dit du sujet , dont la valeur emporte avec elle le signe ou la marque que l'on Juge ; c'est-à-dire , que l'on regarde un objet comme étant de telle oa telle façon : ainsi le verbe est, est le mot de la proposition qui marque expressément l'action de l'esprit qui unit un attribut au sujet.

Le çerbe est une partie essentielle de l'at-- tribut. La terre est ronde : ces trois mots forment une proposition ; c'est - à - dire j qu'ils sont l'énoncé du jugement intérieur que je-porte,. quand je pense que la terre est ronde.

La terre est le sujet de la proposition \ car c'est de la terre dont on juge.

Est ronde ^ c'est l'attribut; et'*dans cet at- tribut , il y a le verbe est , qui fait connaître cjue je juge que la terre esf ronde ; c'est-k-dire que je regarde la terre comme étant ou exis- tant ronde.

Le jugement est une riQexion ou atten- tion par laquelle n6us exprimons les affec- tions que les objets ont faites en nous : nous disons ce que nous avons senti, L^

ou Réflexions, et€. An. V. TJ

soleil est lumifieux ; j*€Xpnme (|oe.le soleil a excité en moi le sentiment de lumière. Le sucre est doux \ î*exprime que le sucre m*a affecté par sa douceur.

Un est pas inutile de remarquer que Toa distingue ordinairement 4eux sortes de juge- mens-, l'un , qu'on appelle y i/^e/Ti^Ti/ affirma^ tif\ c*est la réflexion que je fais sur ce que j'ai réellement senti. Le sucre est doujs ; je me rends k moi-même le témoignage que le sacre a excité en raoi le sentiment de douceur. *

L'autre sorte de jugement s'appelle juge^ ment négatif : en réfléchissant sur moi- même , j'observe que je n*ai pas senti , et que je n'ai pas reçu l'impression que le juge* ment ai&rmatif supposeroit.

Ce jugement se 'marque dans le langage ou dans la proposition , par les particules négatives , non , ne , pas ott point \ par exemple , le sucre n^est pont amer.

Il y a une affirmation dans tout jugement négatif, en ce qu'on affirme ou assure qu'oa n*a pas senti*

10^ Logique

ARTZCI.S VI.

Remarques sur Vidée*

L

E S Philosophes disiingaent plttsieurt sortes d'idëes y oxx perceptions.

Les idées qu*i1s appellent adventices , ce sont celles qui nous viennent immédiate- ment des objets , comme Tidée da soleil ^ et toutes les autres idées immédiates. Ce mot adventices , vient du '■ latin advbniks ^ arriver.

Il y a d'autrçs idées qu*on ^yç^t factices y dtt mot latin v acb RE ^ faille \ ce sont celles que nous faisons par ampliation, diminution , etc. comme lorsque nous imaginons *uae montagne d*or.

Quelques Philosophes disent qu*il y a des idées innées p c*est-^-dire , nées avec nous ; mais nous croyons que si Ton y fait bien attention , que si on veut prendre la peine de se rappeler Thistoire de ses idées dès la première enfance , on sera convaincu que toutes les idées sont adventices , et qu'il n*y a en nous 6' innée , qu'une disposition plus ou moins grande , à recevoir certaines idées.

ou Réflexions , etc. Art. VI. %t

Ainsi ce principe , qu'il^i/w/ rendre à chacun ce qui lui est , n'est pas un principe inné; il suppose l!idée acquise de rendre ^ ridée de depoiry et l'idée de chacun : idées que nous acquérons dès renfance, parTa* sage de la vie.

Mais ce principe est bien plus facilement entendu , qu'un principe abstrait de meta-* physique. La nécessité de la cooservatioa de la société et notre propre intérêt ^ nous font aisément entendre que tout seroit |>ou« leversé , si on ne rendoit pas à autrui ce qui Ivd appartient.

Les créatures nous élèvent aisément ^ la Gonnoissance du Créateur , * sans qu'il soit nécessaire que l'idée de Dieu soit innée j et si nous voulons nous rappeler de bonne foi l'histoire de notre enfance , nous avouerons que nous ne sommes parvenus à l'idée da Créateur , qu'après que notre cerveau a ea acquis une certaine consistance, et qu'après que âous avons eu observé des causes et des effets.

Les idées. abstraites, (elles que àt couleur en général , à* être ^ de néant , de çérité > de mensonge , sont une p^ductipa de nos r^âexioQis, Noos aroas inyeaté ces motj^i

&4 Logique

jets par Tusage de la vie , et les rëflexîons que nous faisons ensuite sur ces impressions ^ sont les deux seules causes de nos idées ; toute autre opinion n*est qu'un roman. IL faut prendre l'homme tel qu'il est , et oe pas faire des suppositions qui ne sont qu'i« magînëes* La principale cause de ces sortes d'erreurs , vient de ce qu'on réalise 4e sim- ples abstractions , ou des êtres de raison. C'est ainsi que le père Mallebranche re- garde les idées comme des réalités dîs-« Unctes et séparées de l'entendement qui les reçoit*

Les idées ^considéréesséparément de notre entendement) ne sont pas^plus des'étreS) que la }>lancheur considérée par abstraction , in«> dépendamment de tout objet blanc , ou la figure considérée indépendamment de tout objet figuré.

A HT I C L B VIL

Raisonnement,

V^ O M M E tout jugement suppose des idées y de même tout raisonnement suppose des jugemens. Le raisonnement consiste à

déduire |

f

re

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]-

OU Réflexions j etc. Art. VII. ^S on; *<*"'■« > ^ inférer, & tirer un jugement d'au- ns I ""^^ jugcnaens déjà connus, ou plutôt k faire ,^. ' ▼oir que le jugement dont il s'agit, a dëj^ été j- ' porté d'une manière implicite; de sorte qu*îl ^ n'est plus question que de le développer, et d'en faire voir Tidentité avec quelque juge* ^^ ; ment antérieur. Celte opération de l'esprit^ par laquelle noua, tirons un jugement d*au^ Ires jiigemeas, s'appelle raisonnement. Far exemple :

Tonte penonne qui T«at apprtndrai doî| ' ' écouter;

Vous Tooles apprendre: 0on€ Tone cleT«z éconter*

Tous ces jugemens pris ensemble, for* ment ce qu'on appelle un raisonnement j et en latin d i s eu rsu s.

Les êtres particuliers excitent en nons des idées exemplaires ; c'est-à-dire, des idées qui sont le modèle des impressions que nous - trouvons dans la suite , ou semblables ou dif« féreotes. Par exemple , le disque de la lune^ DU quelqu'autre cercle particulier, m'a donné lieu de me former l'idée exemplaire ou gé« nérale du cercle. J'ai donné un nom & cette idée abstraite: j'ai appelé cercle toute figiM

e6 Logique

dont les lignes , tirées du centre k la circon^ férence , sont égales.

Ainsi, toute figure qui me rappellera la même idée^ sera cercle.

Tout objet qui excite la même idée, est le même , par rapport à cette idée : tout ce qui. est rond est rond. Un tel cercle ea particulier, a* toutes les mêmes propriétés qu'un autre cercle , en tant que cercle.

Je yeux prouver que Pierre est animal , je consulte Tidée que j*ai de Pierre, et Tidée que î*ai d*animal; et voyant que Pierre excite en moi l'idée d*animal , je dis qu'en ce point, il est un de ces individus qui m*ont donné lieu de me former Tidée d*animal, et que fe développe par cet arguaient.

*

Tout être 9al a da sentiment et eu mouTe-l

If

ment , est ce <]ue j'appelle animal; Qt je Tois que Fierrf a du èentiqMBt et dm. *^ mouTementî

Donc il eêt animal.'

C*çst donc avec raison que je conclut que Pierre est animaU '

Ce qui est^ est. Une chose ne saurait être et n'être pas. Le cercle est rond , et en tant que rond, il n*est pas carré, et en tant quf irgad} il a toutes les propriétés du rond,

Oïl Jtéflexhm, etc. Art. VIII. sj

Amsi la règle vëritabie et fondamentale

àa raisonnement, ou syllogisme , est qtoo

}e 50jet de la conclusion soit compris dans

1 extension de l'idée générale à laquelle on

a recours pour en tirer la conclusion.

^

L

Aktigz.s VIII.

Du Syllogisme.

E Syllogisme est toujours composé dtt trois propositions ; la première s'appelle la majeure , la seconde s'appelle /a mineure , et la troisième est appellëe la conséquence m

Dans la première proposition , on cherche ce qai , de l'aveu de celui à qui on parle , a la propriété qui est en question. Dans la seconde^ on fait voir que le sujet dont il s'agit) est un des individus compris dans 1* extension de l'idée générale dont les indi- vidus ont cette propriété : d'où l'on conclud, dans la conséquence, que le sujet dont il s'agit a la propriété qu'on lui dispute.

Vous convenez que ce qui est chaud , dilate l'air: or, le soleil est compris dans l'extension Tidée générale de ce qui est chaud ; jdonc le «oleil dilate l'air ^ parce qu'il

%8 Logique

doit avoir le$ mêmes propriëlds que Cie qtii est chand» Puisque ce qui est , esî\ une cho^e tie saurait être et n*étre pas : puisque le soleil «s.t compris dans l*idée générale de ce qui est chaud , il doit avoii^ 4es mêmes proprié-* tés en tant que chaud.

Les deux premières propositions du sylIo« gisme , sont appelées prémisses^ c*est-à-« dire, misés avant la conséquence.

Si les deux prémisses sont véritables , f I qu'on eq conyienpe , on doit accorder la conséquence: ^u contraire, si les préniisses | ou quelqu*une jdes prémisses, n*est pas véri- table , alors on nie la conséquence.

Il arriye souvent qu*une des prémisses est véritable à quelques égards , et fausse à quelques autres égards : alors la conséquence ^st véritable, dans 1^ sens que cette~prémisse ^st véritable; et elle est fausse, dans le sens que cçlte" prémisse est fausse*

En ces occasions, on distingue la prémisse ^ m^is on nie la conséquence. Quelquefois on la distingue, Par exemple, si lorsqu'il est JQur , et que le temps est couvert , queU qu'un vouloit prouver que les cadransf solai- fes doivent marquer l'heure ^ et qu'il seni( 4e ce s^Uogismçji

ou Réflexions, etc. Art. VIII. 1^

IfOrtqae le soleil est tor notre horizon | lef ct^

drans solairea marquent Theore ;, Or le soleil est actaellcment sur notre horison C Donc les cadrans solaires doÎTsnt tctneUenica^

marqaer l*lieure.

«

Ce syllogisme est en bonne forme ; mais il faut distinguer la majeure de celte sorte ; lorsque le soleil' est sur notre horison , et qu'il n'y a point de nuages qui interceptent ses rayons d/e lumière , les cadrans solaires doivent marquer TheUre : j'accorde la ma«» jeure. Lorsque le soleil est sur notre hori-^ KOQ , et qu'il y a des nuages qui interceptent -ses rayons de lumière , les cadrans solaires doivent marquer l'heure; je nie la majeure : doue les cadrans solaires doivent marquer l'heure; actuellement que le Ciel est couvert de nuages ; je nie conséquence.

Oa fait, dans les Ecoles, plusieurs obser- vations sur la forme des syllogismes , comme surlesargumensen^ytfjtjs^ji^ oueii bAroco» Ces observations ne sont pas d*un grand usage dans la pratique ; quelques personne» l<;s'appeUent des bagatelles difficiles , jo/jprz-

La voyelle A , qui est dans tes trois syllabe» de sdRMARA, marque que les trois proposi-

B 3

3o Logique

lions qui composent Targument en bar- j^AKA , doivent être des propositions aftir^* «natives universelles, parce qu'on est convenu ^ue la lettre A seroit le signe de la proposi- tion affirmative universelle.

Aêserit K , n0gat'^\ çerum gênétali-

ier amho. Asserit I, negatQ\ sed particulariter

C*e5t4-dire , A affinne , £ nie; mais Tune et l'autre généralement : -ainsi un syllogisme en BARBARA j cst composé de trois propo* citions affirmatives universelles.

Par exemple :

Cenx qai n*étacli«Dt point sont ignoran»; Les paresseux n'étudient point : Donc les paresseux sont îgnofans.

On a fait des mots- artificiels , ces quatre lettres A, E, I/O, sont combinées selon toutes les combinaisons possibles pour faire voir les différentes espèces de syllogisme.

Mais il nous suffit de bien comprendre le fondement du syllogisme , et les différentes règles que Ton dpit observer.

ou Réflexions, çiç. Art. IX. 3%

Article IX.

Obserçations surlejhndemenl du SyttogUnte^

i.^ Xl n*y a dans le monde que des ^treâ pariiculîers. Pierre , Panl , etc. sont des êtres particaliers \ ce diamant , cette pierre sont aussi des êtres particuliers^ cet ëcn , ce loaîs d*or , sont aussi des êtres particuliers. Il en est de même de tout qui existe dans l'univers.

léCs êtres particuliers sont appelés par les PhiIosoph«S) des inditndus; c'est-k-dire , des êtres qui ne peuvent pas être divisés sans cesser d'être ce qu'ils sont. Ce diamant si ▼DUS le divisez , ne sera plus ce diamant ; il n'aura ni la même valeur , ni le même poids y ni les mêmes propriétés.

Notre esprit fait ensuite des observations sur les individus et sur leur manière d'être ; mx ce sont ces observations , ces réflexions , xes abstractions , qui forment l'ordre méta- physique , et les êtres purement abstraits ^ que nous exprimons par des mots , à l'irai' talion des noms que nous donnons aux êtres véeis. Par exemple, quand je vois un écu 9

B4

3a LogtqËte

)'ea observe la figure , la matière^ le poids ^ etc. j*ai l'idée de cet écu et de ses propriétés. J'apprends ensuite par l'usage, que cet ëca n'est pas le seul qu'il y ait dans le inonde ; je vois d'autres écus qui me réveille l'idée du premier écu et de ses propriétés : j'observe tout ce ea quoi les écas sont semblables tntre eux.

J'observe de même que les louis d'or sont semblables entre eux ^ et que de plus ^ ils ont atissi des propriétés différentes des pro-^ Ipriétés de l'écu. Voilà une ressemblance el une différence.

C'est ce qui a donné lieu & ce que les Philosophes appellent espèce t\ genre. L'écci est une espèce de monnoie; le louis d'or est une antre espèce de monnoie : monnoie est le genre. Tous les étrès dans lesquels nous remarquons des qualités communes , nous ont donné lieu de former l'idée abstraite et inéiaphysique de genre: ainsi, l'idée que nous avons de monnoie , est l'idée du genre « par rapport aux différentes espèces de mon-^ noie. Toutes les monnoies conviennent en- tr'elles , en ce qu'elles sont la matière qui nous sert à acquérir tout ce dont nous svoni J»csoin; mais , panai les monnoies ^ il y en s

ou H^flespîons, etc. Art. IX. 33

^a^ sont d'or, d'autres d'argent, d'autres do cuivre, d'autres plus grandes, d'autres plus petites: c'est ce qui constitue les différentes espèces. C^est la différence que nous remar- quons entre les individus du même genre qui nous a donné lieu de former le terme abstrait espèce*

2.0 Noos appelions animal tout individu qui a du sentiment, qui a la propriété de se monvojr, qui vit, qui mange, etc. Ces pro- priétés , que nons observons dans un si grand nombre d'individus , nous ont donné lieu de former Vidée abstraite A^animaL

Nous avons observé dans ces animaoï. des propriétés qui ne conviennent qu'à un certaia nombre d'individus ; par exemple, quelques- uns de ces animaux voknt , pendant que les autres n'ont point d'ailes; quelques -uns marchent a quatre pieds -^d'antres rampent. Ces propriétés qui ne conviennent qu'à un certain nombre d'apimaax , et par lesquelles ils diffèrent les uns des autres, noua ont donné Heu de former l'idée abstraite d'espèce d'animaux.

Le point de vue de l'esprit qui, après un grand nomibre d'idées acquises par l'usage la vie| observe que les propriétés quHl e

B 5

y

S4 Logique

observées convienneot à tous lesanimaos^

est ce qii*oa appelle genre.

Le point de vue de Tesprit par lequel an considère ensemble les propriétés qui ne con« Tiennent qu*a quelques individus du genre ^ est ce qu*on appelle espèce.

Genre suppose espèce; espèce suppose ^enre réciproquement; cependant observes ^ue ce qui sera genre par rapport k certaînea espèces ) peut n'être considéré par notre esprit que comme une espèce, si vous ne faites attention qu*a des propriétés plus gé- nérales. Par e:xemple > si , par un point de Tue de votre esprit , vous ne considérez ^ dans le nombre infini des individus qui sont dans le monde, que la simple propriétéd*exis- ter, vous vous formez l'idée abstraite d'être^ et les dififérences que vous observerez entre les êtres en feront autant d'espèces. Ainsi animal, qui est genre par rapport k tontes les espèces d^animaux , ne sera plus ici f^VL espèce par rapport h être; et animal, qui est espèce par rapport à être , deviendra genife par rapport à ses inférieurs , parée K\tx^ani» mal se divise en raisonnable et irraisonnable» Tout cela prouve que ce ne sont que les dif- férentes vues de l'esprit qui forsncat tons ces

ou Riflexioni, etc. Art. X. 35

âiffiércns être métaphysiques. Il y ea a cinq ^

qa*on appelle les cioq nniversaax , c'est-à-«

aire , cinq idées abstraites ^ qu*OB exprimo

par des termes absolus on noms substantifs :

genre ^ espèce^ différence^ propre ^ accident*

t

A R T Z C L B X.

De la matière du Syllogisme»

E syllogisme est nécessairement com« posé de trois idées simples ou complexes* La question qui dans le syllogisme devient la conclusion ^ est composée de deux idées ^ dont l'une s'appelle le sujet ^ et l'autre Vattri* but» Le sujet est appelé \t petit terme ^ et en

latin MINUS SXTREMUM»

L'attribut de la conclu3ion , ainsi appelé parce qu'on l'attribue au sujet, est appelé le grand terme ^ et en latin majus sxtmlsmxtm^ parce qu'il peut se dire d'un plus grand nom* bre d'individus.

Outre ces deux idées ^ on a recours k^une troisième, qu'on appelle le moyen^ médium» C'est par l'entremise de cette troisième idée que l'on découvre si l'attribut de la conclue

B 6

36 Logique

sîon coavient ou ne convient pas an sojeç de cette même conclusion. <

L*£tre tont-puÎMtnt doit être «doré; Dieu eat l'Etre tout-puissant: Donc Dieu doit être adoré.

Dieu est le sujet de la propositioù ; doit être adoré est Tattribut ; VÈtre tout-puissant est le moyen terme.

Tous les hommes pevfent se tromper |

Vous êtes homme:'

pone Touf pouYOz tous tromper.

f^ous est le sujet de la conclusion, et par, conséquent le petit terme; pouçez cous tromper^ est Fattribut: tous les hommes^ est le moyen terme ou Tidéè moyenne.

Artxci.£ £I.

Fondement du Syllogisme.

ViOMME dans Tordre physique on ne peut tirer d*un eorps que les diffiérentes matières qdi y sont contenues ; de même dans l'ordre métaphysique on ne peut déduire un juge- ment ou conséquence d'un autre jugement ^ que p^rce que cette conséquence ou juger paent a déjà été porté en d'autres termes )

911 'Réflexions, etc. Art. XL 3^

ÇH) comme on dit comiuunëment , c'est qu^ la majeure on proposition générale contient Ja coQclosion , et la mineure fait voir que <rette conclasîon est contenue dans la ma<« jeore.

Ainsi, c*est ridentité qui est le seul et véri-i table fondement du syllogisme.

La conclusion est en d'autres termes le même jugement qu'on a porté dans la ma-* jeure, avec la seule différence que la majeure est plus étendue et plus générale que la con* clusion ', c'est ce qu'il est aisé de faire voir par des exemples.

Ii'EirexoDt-poiMftiit doit être tdoré \ DJeo e#i l'Etre tout-paisstni : Donc Diea doit être adoré.

Je dis que cette conclusion : Dieu doit éirê adoré ^ est dans le fond le même jugement que celui-ci : l'Etre tout^puissant doit êtrg cdoré. En effet , cette proposition ^ VEtr^ tout^puissant doit être adoré ^ contient celle« ci: Dieu doit être adoré , parce que Dieu seal est VEtre^tout^puissant,

La mineure sert uniquement k faire voir que la conséquence est contenue dans la ma-« jeare, puisqu'elle vous dit que Dieu est VEtre tout'puissant ; d'où il suit que c€ que voua

88 Logique

dites AtVEtre lout^puissantj yoas le dicei de Dieu. ^

Tons les bommes penTent %% trompar;

Or TOos êtes homme : "*

Donc TOUS pouTêz vous trompt

Celte proposition : tous les hommes peu^ cent se tromper ^ contient visiblement celle- ci ^ cous êtes homme. Il est visible K^homme est un mot générique qui contient tous les individus qui sont hommes; et qu'ainsi tout ce que je dis de Vhomme^ seulement en tant ({VL^homme^ je le dis de vous; par consé-* quent lorsque j*ai dit: tous les hommes peur peut se tromper i j'ai déj^ dit de* vous que vous pouviez vous tromper ^ puisque pous. et homme est la même chose, en ce sens que vous êtes contenu dans l'idée exemplaire que j'ai de l'homme y comme le cercle en parti- culier est contenu dans l'idée exemplaire que j'ai du cercle en général. Cette matière étendue que j'appelle cercle , n^est ainsi appelée que parce qu'elle excite en moi une impression que je trouve conforme èi l'idée exemplaire que j'ai acquise du cercle par l'usage de la vie.

6u Réflexions f eic» Art. XIL S9 A a T I G I. B XII»

Règles du SyllogismCé

\^UOlQUEles raotsparoîsseotnous doDner des idées différentes, cependant, quand le sens que nous donnons aux mois est bien apprécié , il est évident que , quoiqnc Toa s'explique en termes différens^ souvent oa entend la mèiue chose. Ainsi, par VEtra tout - puissant ^ )*entends Dieu, D*oii Ton pourroit conclure qu*K la rîgneur il n*y m que deux termes dans le syllogisme, et qu'ea un sens , \sl conclusion est ta même proposi* tîon que la majeure : VEire tout^puissani doit être adoré , et Dieu doit être adoré ^ C*est au fond la même chose.

De ce principe , bien entendu , snivent les règles qu*on donne dans les Ecoles touchant le syllogisme.

Première Règle.

L*idée moyenne, .c'est-à-dire, les mots qui l'expriment , doivent être pris , au moins une fois , universellement.

, ^ E^s^PzicATiom , Le moyen » est Tidée qui doit ccmieair I#

1

40 Logique

sujet de la conclusioo ; il ne pettt le contenir que lorsqu*!! est pris généralement ; par exemple :

Qaê1qa*homme est sivant; Qaelqa'homme est riche : Donc qaelqae riche est MtTanC.

Le mot àHhoinme de la majeure et de la, mineure y étant pris particulièrement, puis- que dans Tune et dans Tautre proposition ^ il signifie diverses sortes d*hommes, ne peut contenir te sujet de la conclusion-, ou y être appliqué, parce que \t particulie m* tsi^oint renfermé dans le particulier, mais dans le général.

Seconde RÈGLE.

Les termes ne doivent pas être pris plas universellement dans la conclusion, qu'ils ne ToBt été dans les prémisses»

Explication.

Puisque la majeure doit contenir la con- clusion, et' que le particulier ne sauroic contenir le général ; il est évident que si les termes de la conclusion sont j>ris univer- sellement dans la conclusion , et particulière- ment dans les prémisses, le raisoAemenc Ifit^ faux; comme si d6 ce que quelqa*homlna

ûu Réflexions, etc. Art. XIL 41

est noir y je concluois que tout homme es| ooir.

T H O I SI tu E RÈGLE.

Oa ne peut rieti conclure de deux propo* filions négatives.

Explication,

Les propositions négatives ne coDtiecnen| que la négation de ce qu'elles nient ; ainsi ^ on n'en peut tirer une autre négation. De ce que je dis que Pierre n'a pas dix louis, il ne s'ensuit pas qu'il n'ait pas d'esprit. D*un« proposition négative, vous pouvez encore moins tirer une conclusion affirmative : de ce que Pierre n'est pas riche , i) ne s'ensuit pas qu'il soit savant.

Iict Espagnols ne sont pas Turei; les Tores ne sont pas Chrétiens : Donc les Espagnols ne sont pas Ghrétlf nf.'

On voit visiblement que la conséquence li*est pas contenue dans la majeure.

Quatrième Règle.

On ne peut pas prouver une conclusioa négative par deux propositions affirmatives*

E X p z I ç A T I o N*

Une proposition est négative , qnand oa

4* Logique

«l'aperçoit aucuee identité entre !e sujet et l'attribut, et qu'au couiraire on y découvre de la différence et de l'opposition.

Au contraire , une proposition est affir— inative, quand on aperçoit que le sujet et l'attribut ne font qu'un. même tout: or la conclusion étant négatif , elle ne peut pas être la même chose qu'une ou deux propo« sitioBs affirmatives.

CiN'QUièME RÈGLE.

Si une des prémisses est particulière , la conclusion doit être particulière; et si une des prémisses est négative , la conclusion doit aussi être négative: c'est ce qu'pn dit communément dans les écoles , que la con« clusion suit toujours la plus foible partie*

Explication.

La conclusion devant toujours être con*»* tenue dans les prémisses , elle ne saurait avoir une plus grande étendue'que les pré<« misses: or elle auroit plus d*étendue, si elle était universelle , lorsqu'une des prémisses est particulière.

D'ailleurs, elle ne peut pas affirmer lors- qu'une des prémisses esc négative par la Blême raison.

ou Kéflemons, etc. Art. XII. 43

De cette règle il suit c|a'une proposition quiconclud le général, conclud le parlicu« 1er: Si tout homme a une amcy Pierre a me ame.

Mais une proposition q[ui conclud le par- ticulier, ne conclud pas pour cela le général, on plutôt n'est pas la même chose que le général , Quelques hommes sont noirs , il ne s*eDsuit pas de-là que tous les homme$ soient noirs.

S l X l è M £^ R è G L E.

On ne peut rien conclure de deux pro- positions particulières, c*est- a-dire, que de deux propositions particuTicres on ne sauroit en déduire une troisième proposition. De ce que Pierre est savant , et que Paul est sage, il ne s'ensuit pas que Jean soit sage ou

saTaat.

E jr p z I c ji T.z^ o 2V.

Les propositions particulières ne sont dites que des objets particuliers qu'elles expri- ment: on ne peut donc pas les appliquer aux autres objets dont elles ne disent rien. Une majeure particulière n'étant dite que de quelques objets particuliers , ne peut donc point contenir une conséquence qui est difCé**» reuie d* elle-même»

44 Logique

■Mi

T

Articlb XIII.

Des Sophismes,

OUT ce qui a*est pas conforme ^ la règle^ n'est pas droit: il faut doue ayoir la coa« coissance de ia règle , pour dire que ceci ou cela n*est pas droit. Il eu est de même du raisonuement; il faut eu savoir les règles j pour biea démêler un raisonnement faux,

i.^ Une des principales observations , c'est que tout jugement doit être excité par une cause extérieure , et que cette cause extérieure doit être la cause propre et pré- cise de ce jugement. Tout jugement doit avoir son motif propre; ainsi un historien qui raconte un fait qui s'est passé plu- sieurs siècles avant lui, n'est pas digne de foi , a moins qu'il ne s'appuie sur le té- moignage des auteurs contemporains, et ce témoignage est encore sujet a l'examen.

2.^ Le raisonnement est intérieur;- oti se raisonne que sur ses propres idées : ainsi , dans la suite d'iio raisonnement il faut toujours conserver les mêmes idées. O^r ce qui est yrai d'une idée ne l'est paa

ou Réflexions,. efc. Art. XIII. 45

»

â*aoe autre; ainsi, qaand on raisonne aveo qaelqo'un , il faut bien prendre garde s*ii a les ffténies id^es que nous > s*il entend Jes mois dont nous nous servons, dans le même sens que nous les entendons.

Il faut sur-tout prendre garde dans la chaleur de la dispute, de donner toujours prëcisëment le même sens aux mots dont on se sert ^ parce que ce que vous dites d'un mot pris en un certain sens n*est pas Vrai lorsque vous prenez ce mot dans une signification différente. C'est pour cela qu'en certain e$ occasions il - est bon de définir les termes, et de convenir de leur signifi* cation.

Les passions sont comme autant de verres colorés, qui nous font voiries objets autre- ment que noQs ne les verrions , si nous 4ltîons dans Tétat tranquille de U' raison. Nous deyops donc nous défier de nos passions si nous voulons porter des juge* mens sains.

Les préjugés, c'est-À-dire, les jugemens que nous avoos portés dans notre^ enfance^ et qui n'ont pas été précédés de Texamea^ nous induisent souvent en erreur.

J^es . o)>scrYation$ que nous yenoM df

\

^6 Logique

faire ne s«roat pas inutiles pour noas aider à démêler les subtilités des ^ophismes. On entend par sophismes , certains raisonne- Aiens éblouissans dont on sent bien la fausseté ; mais on est embarrassé k la dé-i couvrir , et ^ dire précisément pourquoi tel raisonnement est faux, et captieux.»

Premier Sophisme*

Ambiguïté des termes , ou éguiçoque*

sophisme, qui consiste dans Tarn*- bîguité des termes , est appelé par les Philo- sophes , Grammat^ca, falzacia.

Par exemple :

n y t dans le cîel ane constellation qaî «st

lion $ Or le lion rogît : Donc il y à dans le ciel une constellation ^al

rngit.

La fausseté de ce raisonnement consiste dans l'ambiguité du mot lion; défaut ^u'on appelle aussi amphibologie: car dans la pre- mière proposition, le mot lion ne signifie que le simple nom qu'on a donné à une certaine constellation; au lieu que dans la seconde proposition , lion signifie une sorte 'animal qui rugit* Ainsi , cet argument

ou Réflexions, etc. Art. XIII. 47

ft quatre termes, I.^ constellation dans le ciei;2.^ lion esc pris pour le simple 00m ^e Ton donne k cette constellation ;• 3.° /w/i est pris pour un animai véritable; 4.^ ru^i or un argument ne doit avoir que trois termes; savoir , l.^ le sujet de la conclusion; 2.^ l'attribut de la conclusion; 3.^ le mot qui exprime l'idée exemplaire que Ton compare avec le sujet de la con« clusion, pour yoir si ce sujet est contenu dans cette idée moyenne et exemplaire | et s*il est la même chose,

Xe rat ronge ;

Or le rat est une tyllabe:

Donc une aylltbe ronge.

Il est aisé de faire voir dans cet argument le même défaut que dans le précédent : rai y est pris en deux sens différens.

L^homme pense ;

Or rhomme eat composé de genre tt (le

différence: «

Donc le genre et It di£féieuce pensent.

Le défaut de cet argument consiste en ce qu'on passe de Tordre physique à Tordre métaphysique. L'homme dans Tordre phy« ^^ue et réel pense. U esc vrai que Thomme

48 Logique

Il des proprîëtës cominunes k tous les anî*^ maux; on appelle ces propriétés commu— ses, le genre. Il a aussi des propriété» particulières qui le distingueot des autre» animaux \ ces propriétés sont appelées , la différence. Ce genre ei cette d^ffétence , qui ne sont que des êtres métaphysiques , c'est-b-dire, de simples rues de l'esprit, ne sont point l'homme physique qui pense ; ainsi la conclusion n'est point contenue dans la majeure.

Dîea tntpar^tout; Par-iout est an adverbe ; Donc Dien eit an adverbe.

Dans cet argument , le mot par - tout est d'abord pris selon sa signification» Dieu est par^tout , c'cst-k-dire Dieu est en tous lieux; ensuite on considère par-tout gram- maticalement « et en tant que par'tout est un mot.

I I. ^'0 P H I S M E.

Ignoratîo elenchi , tMv^oÇp

Mot grec qai signifie argument ^ sujett i

Ce sophisme consiste dans l'ignoranca du snjet* C*est lorsqu'on prouve contre son

adversaire

•9 kifle^îcmj, eie. Art XIII. 4$

«2rirsaîrt tbpite antre chose qne'ce doÀl il t*agity oa ce qa'il ne nie point ^ on enfim tout ce t|iii est étranger k la question: c'est proprement le qui pro çua.

Les eiempies n'en sont qoe trop frëqnenn âflos ia conversation y daçs ies disputes ^ dans les mémoires d'affaires ^^ l'on s'efirf force souvent ^ieprèttTer ce qui ne fiiit rien à la question dont il s'agît* On en TOt6 aussi plasieors exemples dana les livres dU dactiques. ( Mêtrurn signifie enseigner)^ ,

Les auteurs de cohiédles nous fbomisstfit souvent des exemples de ce^ qui, pro quo» qu'ils n'ont imaginés que podr amuser les ipectâteors* U y eti a un etemple dans la troisième sctoe du cinquième acte de rAvarer de Molière, Har pagon accuse. Valère d'avoir eoi9|i|iis l'attentat le p)ns horrible qçi januLi ait:,éié çommis« Valère répond ïque^puisn qu^ou a ^out. décou¥^r.t k Harpagon, il mi veu^ , p9$ n^er la chose ; .mais. Ijar,pagQ« vonU^it parler de i l'argent qu'on lai avaty volé, et Valère entendoit parler d'Éliscy sa maîtresse, fiile.d*Harpagon, Il y en n un exemple paireil ,dans Je§ Plaideurs^ du Racine ^ oit la comtesse^ 4f« l^in^b^ch^ s'imagiii^e c[u'oa jia iraitey.d^ y&lHc ii Uer^

c

<.^KI ^ « * J^og^tpMC . ^

{iedèadt qa*onJt>i ccioacilLr sknplemtekid'ji^ kr' se jetlevaux pieds de sonjnge.. . - ir^:La préçaatiién> qu*ti y a à prenëre contre ce sQphi^mc ,• c'est de bien défer<^ smnçf Vët^t de la^quesiioa |iea.éYÎAa»ti ^iLfc- ^me&^ réqaivQN|ttè dana l«s «la^s et d^ojl le sens; * ,-»* *•'... .. * .1 r,^f.

: A«^ Qoaod^vne f(risJ*ëtar d^ la qttes|»Qi% «stbien déterminé 9 tl qae voire adv^rsairt» s*en écarte 9 il faiit avoir ^oîft de TjT r^p*^ peler» y. > */...,

;i.:-- .1IL.;S?CI:P » »I s :A<»tj - ^* J^a pétition de principe. ,

< Dtfûfr hs soptiistne pi^éeédent mi' i^é^^m^ è aiïtre chose' que cdqui est éti question'^ 8a Hea que dads la péHîiùn de principe \ oo répond en termes ditfé^eAs îa mértie ek^è^tf qae ieûqiÉifest en qiiéslidn: (lu'eit'be'^<jkàé W àeatif c'est ce tgui^piaii, ou^bièù^ éiêeUt .i|a*4!qaes* anfcJetas', c^'èêt ée -^d Vôtivêenti, f6i\\\in^\étïXkb\^ pétiiiOQ d^' t^rinè$|>é; ' Ce mot s'appelle pétition d^ principe , ixjL mot grec'trcrtf/e«e< I qqi signifie voler pers queîtfue chose ^ se porter , recourir à^ ; y 4 et dd mol f^iin Tftttt ci Rivjsè\ qdS- s^til

y

ou Réflexions, etc. Art. XIIL Six

iîon de principe, c'est recourir en d'auiret

^termes k la même chose que ce qui a d'abord

été mis en question : c'est rendre çn d'autres

termes le même sens que ce .qu*oa voua

a demandé d'abord.

Molière ^. dans le Malade imaginaire^ fait ^exn^nàex pourquoi ropiumjait dormir l on répond que c'est parce qu'il ç un9 pertu dormitive^ vous voyez que c'est répondre, en icrraçs , différons , la même chose que ce qui ^9X, ^ question. Celui qui demande pourquoi l'opium fai; dor- mir, s^Ji fort bien que l'opium a unç vertu dorimtive; luais il demande pourquoi iJL a cette vertu?

Fo^rqiiioi l'opiun» fait-i}. dormir , oi^ pour^» quoi Topium a-t-il une vertu dori^iitive I c'est la même demande., Pourquoi le via cniyre-i-il, ou pourquoi le vin a-i-il une vertu qui eçivre? c'est faire ^,n|ên)ê ques- .tipa; ainsi que /l'un soit la r/éponsé ou

demande, on n'en est pas. plus instrjuit. C'est répondre précisément - ce qui est en question ; c'est ^recourir au principe , an commencenient 4e la queMion, à çd qd'oq^ demandait d'abord«

l^ plupart des Jeune% geos quîapprenaçn|

/

Sj Logique

le latin ) B*Accoiitumeot k cette manTaïse manière de raisonner; car si on leur de« mande pourquoi, quand on dit zumejt soz'iSy soLzs est-il au génitîn ils rëpon« dent que c'est parla règle de ltjbsa Pstrt'7 çfe qui est une pétition de principe, car pourquoi Pétri est-il au génitif? It seraft tnieux , ce me semble , de répondre que ^OLis est au génitif, parce qu*ii détermine ^J7 X s Ny qu'il en fixe la signification'^ iiVJ^Eit signifie toute lumière; niais si tous fijottteK sotTS h. zrrj^Eir vous détermines la signification vague de zvmen ^tie plus fignifier que la lumière du soleil, et telle est en latin la destination du génitif: on met an -génitif un nom qui en détermine vu * ftutrè.

' Il en est de'inéme dans cet eiemple ; jtMQ Pepm. Pourquoi Deûm est - il \ l'accusatif { on répond c'est parce que iirjfO gouverne l'accusatif, ce qui 'est une véri* 4ahle pétition de principe; car c'est dires Veum est à l'accusatif après àmo y par- ce ^'aprè^ ^tf a il est ^ raccçrsatif ; au lïeu'^e dfre que les liiots latins changent de terminaison pour marquer les différentes ivi^^ 9QUS {es^uellis Tesprit considfière le

J

00 Réflexions, eic. Art. Xllt. S3

toème objçt y et que Ja terminaison de i'accasatif est destinée à marquer qne , 1# nom qui est à Taccusatif est )e. terme ou l'objet do sentiment ou de Taction que ie verbe signifie; ainsi y Dsuâi k Taccu^ saiif i||arqoe que Dieu est le terme, du sentiment d'aimer ^ que c'est ce que j*aime. Le cercle vicieux ^ est une pétition de principe. C'est une sorte d'argument vicieux dans lequel on suppose d'abord ce qu'oa doit prouver, et ensuite ce quWa supposé 5 ou le prouve parce qu'on croit avoir prouvé par cette première supposition : Comme cel métaphysiciens qui prouvent Dieu par les créatures, et les créatures, par Tidée qu'ils ont de Dieu; et ceux qui prouvent l'exis» tence des corps par la foi,

IV. Sophisme.

De. falso supponente. Supposer pour ptai ce qui esijausp.

11 n'arrive que trop souvent que pat tine sorte de bonne foi naturelle on ne s'imagine pas qu'on puisse être trompé de sang- froid et saas a^cun intérêt delà part ^ ceux qui pous tfompeut et qui souvent

C 3

$4 : Logîguç »

sont trompes eux - mêmes les pi'emiers ; ainsi, on suppose que ce qu'ils disent est' vrai, ce qui d'ailleurs secoqdé notre pa- resse ) et nous e^t^mpte de la peine def rexameu. C'est ainsi que les anciens ont été trompés ,- en croyant les histoire» fabu-' leuses du Phénix^ du Rémora et de tant d'autres contes populaires dont tous les livres sont remplis.

Il arrive souvent par le même sophisme^ qu'au lieu d'avouer son ignorance , on expli- que ce qui n'est pas, par ce qui n'est pas aussi, témoin l'histoire de la prétendue dent d'or. Un charlatan du dix">septième siècle montroit de ville en ville un jeune homme qui avoit , disoit-il , une dent d'or. Les Philosophes de' ces temps - firent des dissertations pour faire voir que la ma- tière avoit pu s'arranger dans la' dent de ce jeune homme de la même manière qu'elle s'arrange dans les mines d'or ; mais un Chirurgien plus hahile découvrit que cette prétendue dent d'or ne coosistoit qu'en une feuille d*br dont on avoit enveloppa la dent , et qu'on avoit adroitement insinuée dans la gencive. Cet exemple fait voir qu'avant que d^entveprèndre d'expliquer la

\

ou Réflexi^ns^/ r?d Art. XIII. 5S

cause d^fiQ' effet', il faat coramencer par <€ biea ^ssarer si U ffliteiûtt**

, y.. . S O P H I S,V Ç.

' ' "'^ ^i^oii' caàsa prd d&nsa« " '•- '^ Prendre pour cause ce qui n'est /^f paiM|^

Rien ne >coiite tant à r«$prit humaia qae ^ demeurer indëterminé et de diris je H*en sais rii^iv fo^^o'^à ce qu'otf ait la «n^tif ^propre] que le: jugeméàt 8ttppQM>: ^e4alTiefit qae lorsqu'oii T^t« iirfiver «a leSEtS'TàomiOXBiipïoi^ cnnsb^^eijb'iiieti^^âé céaV^oir ; siinplcmênt de ! nolf e igitoraoce natarelle et des bornes des , coDqoissances hutnaîneS', xious prenpos poui^ dstuse de cet effet, oU ce^qpiest arrivé aran^lf'eflec sacia 7 avoir àùcdn ' rapport , aiL c%* 'qui arriva eo inécne len^,- et qui bVaucukie liaisoa physique avec tét\ içâer, Cese ce qa'ôa app^ie^ pàst Moc, ^^sàco ipkaPTSJi jioc > <m bien ctruMoc tiSRC-o PitopTMA m oc»

Souvent après qu'use comète a paru dana .le del, il arrive ^uelqa'ua sie <ées accideiis .^benx i aux quels ies homnDsaisont: m\fkt^ joomate la péste'<^ /la ! îwana^'^&à lai mdi^ «jl'Ha SriaoB*. Cette comète u*a af auoetUaiso«

C4

S6 .^' togiifm » v.c

phjsiqae avec ces ëvéoeméni; ^c^ead^nt û peaple. regarda U comète > «ooNme U cause de révénemeDl : post soc y mm.go wnoFTÉA ikifc^ UéiéntaitùX^tii arrivé «près la comète : donc U^çfl arrivé à •anse de h comète. C'est un sophisme |>opdlairè. ^ - ' \'\M,'^r-V:' -'L

. Il pleiit après la nouvette.du lar pleioa

Jane ; donc il pleot li cause delà pkSnf ou

de la aoïiYelIe'. Itfike* C'est. eticore uoe efreur

populaire. Osk a o)bseryév apffif)it|i gr%«4

«nombre d'expériences réitérées ^ quii» la: lune

.ne prodaisoit sur globe tereeairelattctm

de ces effets physiques que Ir peuple loi

•Uribne, et qu*il est inutile. d'observer 4es

. quartiers de la lune pour semer et 'cultiver

le» plantés ):aussi»bien qué.pouv lee chaii«

igemens dès-temps, Voyet' la* Quâttinie-^

instructiom'sur les ^rdim^ tl une belLs

«diteertatioa éur les prétendues» influencée

la bute , dans le Mercure de 1740. -

Les anciens Romains ne ^çaunençoienc «ucune affaire sans consulter les dieux par * te 0iojen des auspices , pour savoir si Tenu «ffepEÎBe seroit ihearense ou malheurense. Il est r évident que. le vpl des aiseaux -«t les aatjpes opéeâtiont >dc cesaliiikiaux n'nat

0Zf Réflexions, etc. ArU XIII. Sf '

«ticaoe Uaisoa nécessaire avec les ëvéae- meus futurs 9 et qae , par coAsë€(aeDt) ils ne peuvent en être ni la cause ni même le sîgae, ainsi, que iauspice fût favora- ble ou nen , c*ëtoit mal raisoDuer que d'eq attendre un ëvéneipent heureux ott maU heoreuXé

lorsque Claadius Pulchef) Coosnl Ro- main et Gëaëral de l'armée navale « fut enyojré contre les Carthaginois, on'coasnha les sacrés poulets > qui ne youlureot poioi soanger. Le Colasnl ordonna que puisqu'ils ne vouloient point ^hiaDger, on les jettât dans la mer pour les faire hoire ; il arriva par réyénemeat> que les Romains perdirent la bataille; mais on ne doit point attribu<^ cetle perte aux auspices i ' ce seroit prendra pour cause ce qui Ae seroit pas canse ^ et tomber dans le sophisme i^osT soc^ js&cq

JPMOPTSM HOC,

Les Historiens remarquent que les Car^ «baginois avoieut de meilleurs vaisseaux et des rameurs plus habiles que ceux des Romains ; ils ajoutent que les Carthaginois avoient choisi un lieu plus avantageux ; que les Romains: ne poovoient rompre l'or- dre de Teoiiamiy ni Tenveloppcr, à 'çaàse

C5

5S Logique

de la pesanteur, de leurs .vaisseaux et de riacapacilé ^e leurs rameurs: d*aiUeurs le trouble întérieur ei les remords que le mépris de la religiou iuspiroit aux soldats , leur abbatoient le courage , et ils eroyoient combattre cootre les dieux irrités. Voiik les véritables causes de la perte de la ba- taille d^ Claudius Fulcher contre les Car- thaginois. Il faut rapporter les évéuemena à leurs /véritables causes , si on lesjconnoit ^ sinon il faut avouer qu*ott les ignore.

C'est encore prendre pour causô ce qui li'est pas cause) que d'expliquer les effel^s physiques en les attribuant k des qualités occultes, à rhorreur du vuide on a Tat* traction, etc* 11 est plus ^raisonnable de convenir de son ignorance, qub d'être sa- tisfait par des mots qui, ne présentent aucane idée à l'esprité

Les paroles et les autres grimaces des prétendus sorciers ne peuvent pas noa plus raisonnableniei!it être prises pour des véri- tables causes physiques. Les paroles ne sont qu*un air battu 'y ainsi y elles ne peU'- vent produire physiquement et par elles- mêmes d'autre efiet que le son. Ceux qui leur donnent une autre vertu j supposent

ou Réfleasians^ etc. Art. XIIL Sf

icDi choses qai nous sont également 'in«

connues , et qai même sont injuneoses

«OBverain Etre ^ et à l'Etre parfait;. car ^

pnistjue Toa convient qu^ lesidémOD^. n^

{^eavent rien faitei sansila! permkiion d^

Diea, les paroles mtfgique» suppo$ei»| 1^10

ebteyentioQ pacticaliène ? eiàure; Dioa^f^J^

démpii. Il fandroil en effet que DUt| fût

convenu que tontes let fois qii4 eert^îna

hommes diroient celles on telles .paroieS'^

ou feroxent teltovOnitcUfe i action.^ /il* pef^

meuroit aa démpn fieapnodntre telfoubtM

W landroit^ easecoiu^lie««i^.qae non$ie«v sîons une révélation détaillée de cett^ prér tendue convention entre Hwsx et le .démon. Il;y a danï i*uD et Tàntre poinit J^ien.pfeu de raison et de décence. . 1 \. ) : >• .r%

Si une 'femme fonei heùreosement'fpei»» dant que quelqu'un ^t soprèrdjeUe^Ldifa s*iiiiàgkie que cÀte' pertosof lui porte bbn^^ "heur. C*ést le .sophisme cif^f soc , mxgo pjLOPTsR BoCé Le bonheur is?eiN& point ou être réel qu*on paisse porter.

Quelques personnes ont de la peine ^ se

jaiftoxer-à.iftblfi # au nombre jjc treize,, co^-

C 6

. *

^0 r.l.'l * Logique

Eà- effet, il arrive sottvêat que At treize

})ersoiines qui se sont trouvées ensemble h

tab)e , il en meart quelqu'une dans le cott^

Tant de rapnée ; (^e qui vser oit bien imeinf

^tonnâot si au lieu de tftiftè convives il j

en- àvoit <ça trente;- Ainsi j ' nn conviye est

iHort , ' non paiice qu!il : 8*BSb tronvé V table

aVeé'douxe autres personiies;' mais parce

^e tes hommes soiit mortels j et qu'ainsi

(plus il y a de personnes assemblées ^. plus

i) <i$5t vraiaemblable< de >dire que dao&'i'es-

^fkc/t ^*on ce»taia)en4>s quelqu'une de' ces

personnes paiera à la iiature le tribut, que

-iautès les nntret ^paieront chacune à .leur

•t^nr; . '^ •:: - ^ . ...«.••

Ceux qui consultent les songes^» ceux qui

^ajoutent foi % la chiroinanciet , ceux qui

er oient qu'on est he«reux quand >on> esi

-tx}èS[éui etc. tombent dai|is le . sophisme '4onl

qiba^Tenon$^deparler« . : . ic[ '

^ : La bonté d*ign«rer ^ le goût .du luervcjU

leiix et le penchant. à la soperstitioji 9 a^HI

la cause de es sophianse.

1 ,

i^ /■il --Il >

i Ail a«Tin«f ptr h sonfîdératioa dsi vaiés.' t. . >

9u Réflexions^ e/c. Art. XIII. 6i VI. Sophisme.

. Dénombrement imparfait.

Autrefois on se ihoquoic cle quelques Phi« losôphes qui disoiem qu*i! y ayoit des Aa« tîjpodfes : quel est Thomnie assez insensé |- disoit luactance , « podr croire qu'il y a det ^ liommes dont les pieds sont plus élevés :> que la tête*?»

L'expérience a fait' voir que ceux qui tronvoient les Antipodes inijpossibles , se «ont trompés Leur erreur est ycfnti'e du dé^ noiobrenient imparfaite Ils n*avoient pal examiné ni connu la véritable Maison qui fait que les hommes marchent sur la terre , et sont poussés vers le centre du globe ter- •restre , quelque part ils se trou?ent sur 'ce- globe , et ne siOnt jamais poussés vers It ciel.- ,

On tombe donc dans le sophisme du dé« nombrement imparfait , lorsque connois« sant une ou plusieurs 'manières dont une chose se fait , on croit qu*il n*y a que cet manières qui soient la cause de cet effet ^ pendant' qu'il y en a quelqn'autre qu'on ne

f I«tt. 9. C a9.'

M -.

^t \tPgique -,

compte point , et qui cepenclai^t en est Ift cause vérit£j>Ie. Vous connoisseÉ qu'aoe chose se fait ^'iine certaine façon, d'où Tou$ .conclnei^ qu'elle ^e «e peut faire, que de cettç manière«ic^ '/ ç'.e^t tomber dans ]q sophisme du déno^rement ipiparfait.^vaxi t que de décider , yo^\iS, devez ^examiqçr vous connoîssez toutes les manières doa( une chose se peut faire, et ne pas décider témérairement qa* une chose ne peut se faire que delà lanière quç.vons conno^s&ez, C'est comme si-^Q aveugle disoit que la matière pie sauroit être Inmjinettse , ,parce qu'il i^e lui cpnnçît pas cette propriété..

Un officier étoît payé tous les ans de sa peûsion'au trésor royal , 'an bout de la me du Roi de Sicile. Un. autre Officier étoit aussi payé de sa pension :au .irésor royal ^ rve d*Orléans ; enfin , un troisième étoit «jusû ipayéde sa pension au, trésof royal, rn$>les 4^uàtre-Fils. Ces trois Offieiers se >trouy^rent ensejxkble à la promenade* Le premier, die .qu'il avoit été payé de sa pension; au irér 8or royal, rue du Rp^i de Sicilef 1^ auKfts soutiùr^nt que le trésor royal » n^étoitpçint îue du Roi de Sicile *_ et qu'ils avoient été payés ailleurs : ce qui dojcina lif ^*,J^t «ne

0U Réflexions , etc. Art. XIIL 63

(SomesUtioD irès-vive, par le sophisme da

dénombrement ira par fait ; car , c]uoiqu*il

n'j ait proprement qu*ao trésor ro^al,,ii

/ a cepeadaat trois Cardes du trésof royal

qui soQt successivement en exercice , ei

paient chacun ce qui les concerne*

YIL Sophisme.

Induction déjectueuie.

On appelle induction^ une consëqueoce générale, que l'on tire du dénombrement que l'on fait de plusieurs choses particu« lières. Ce sophisme a beaucoup de rapport au dénombrement imparfait dont nous Tenons de parler. La différence consiste co ce que, dans le dénombrement impars- fait § on ne considère pas assez. toutes lea manières dont une chose peut être ou peut avHver; d*où on conclud qu'elle n'est pa8> quoique souvent ^lle soit d'une manière à laquelle on n'a pas fait attention. Dana l'induction , ôh commence par la consi*- dération des choses particulières, d'où on tire ensuite une conséquence générale.^Par exemple, on a . éprouvé ^ sur beaucoup de mers ^ qae l'eau en est salée ,^ et sur

f I

^4 Logtgve

beaucoup jdc rivières, que Tcau en eH douce : de - la on a conclu généralement que Teau de la mer étoit salée, et celle des riwres douce. 0<v n'a point trouvé de peuple, dans aucuns pgys , les hommes ne se servisseut point des sons de la voix pour sigoifier leurs pensées : de-la on a conclu "que tous les peuples avoient Tu- sage de la parole.

Ces sortes de conséquences générales ne •ont justes , qu'autant que le dénombrement des choses singnUères qu'elles .|upposent., est exact. Ainsi, si on disoit, les François «ont blancs, les Anglois sont blancs , les Italiens et les Allemands sont blancs , donc tous les hommes sont blancs; la conséquence ne seroit pas juste, par la faute du dénom.* brcment, qui ne seroit pas exact. L*inductioa seroit tirée d'un dénombrement défectueux^ puisqu'en Ethiopie les hommes sont noirs,

< Avant les expériences que l'on a faites, . vers le milieu du dernier siècle, sur la pesan- teur de l'air, on croyoit qu'il étoit impossible de tirer le piston d'une seringue, bien bou- chée, sans la faire crever; et que l'on pou voit faire Tuonter de l'eau aussi haut que l'on T^udroit , par le mojren des pompes aspiran-

f

mu Réflexions r0U* Art, XIII. SB

tes. On liroh ces conséquences des «erpë*

riences que Ton avoû faites; mais on n*ea

ATok pas fait assez. Les aopt elles expériencei

ont fait Toir qu'on tire le piston, d'une

seringue , quelque bouchée qu'elle soit ,

pourvu qu*ony emploie ubè force supérieure

ma poids de sa colonne d*air. Elles 6nt fait

voir aussi qu'une pompe aspirante ne peut

élever Teau plus haut de 32 à 33 pieds,

' Remarquer la différence qu'il y a entre

Tinduction et l'idée générale ou exemplaire.

L'induction ne tombe que sur les qualités

ftccidentelles des objets , au lieu que )*idée

exemplaire qui nous sert de modèle^ regarde

l'essence. Pour dire que l'eau dçs rivières

est douce , il est nécessaire d'avoir goûté de

l'eau de plusieogrs rivières .'y^n^als pour dire

que tout triangle a trois c6té& , il n'est pat

nécessaire que j'aie vu plusieurs triangles ;

parce que le premier triangle que j'ai VU|

m'a donné l'idée du triangle : j'appelle trian*

gle , tout ce qui est cpnforme k cette idée ;

et je dis que tout ce qui n'y est pas couim

forme, n'est pas ui«Dglé« ^

VIII. Sophisme.

Passer desce qui è$t vrai à quelque égetrd^ à ce qui ^ est* vrai simplement ,'• *

I

Les historiens Roçaains p9f jëcntqueU c{u«s faits fabuleux : il seroU d^raisoTioablç d*ea coaclure que tout ce f|t^*ils ont icrift est fabuleux.

. La forme humaine est, k ce que nços croyons,, la plus belle,, par rapport aiii| autres animaux: de-lk le,s Epicurieus cçn« cluoient que les Dieux avoi^l la fom^ humaine.

Pierre est bon ;

Pierre est Peintre:

Don<i Pterre e«t boa Peinir*!^ '

Ou bien:

•• I. •• •.

« Pierre est hott Peintre ; ' J

Pierre' fsf homme: ^ .t^ ^t

Donc Pierre est boi^ homme;. ;

' Il y aipîasieurs dëfanis dans ces sbphis* mes. I.° Le m^t ûé èon, estiprts en deux sens diffërens. Bon , jofnt à Peintre , si- gnifie habile; dort, joint à Homme ^ signi- fie humain y doujs^ complaisant*

' «

9u Réflexions ^ etc. Art. XIIL 67

^•^ D'ailleurs en disant* ^e Pierre est hon Peintre , si on * étînd le mot bon à sîgœfier toute sorte de bonté, on passera de ce ([ui est vrai , à quelque égard y à ce ^i est vrai simplement.

IX. Sophisme.

Juger d'une chose par ce qui ne lui contfieni que par accideht.

Fallacia accidentîs.

Cesc lorsqu'on tire une conséquence absolue , simple et sans restriction , de ce qui n est vrai que par Itccidéot. C'est ce que font ceux qui blàroeot les sciences et les ans, à cause des abus que quelques personnes en font. L'émétique mal appli-* c[ué j produit de mauvais effets : donc il ne faut jamais s'en servir. La conséquence n'est pas juste. Quelques Médecins font des fautes dans Texercice de la médecine : donc il faut blâmer absolument la méde««

ciné. Ce seroit mal raispnner*

>

X. Sophisme.

tasser du sens dipUé mu sens composé l ou du sens, composé au sens diçisé. .,.

Noos avons déjà remarqué que | danf

f8 Logique

le raisonnement , il faut démêler bien pré- cisément le sens 'des mots , et prendre toujours le même mot dans le même sens , dans tonte la suite du raisonnement.

Saint Jean - Baptiste ayant envoyé deux de ses disciples à Jesus-Christ , pour loi demander s*il étoit celui qui devoit venir i Jesus-Christ répondit : les açeugîes voient^ les boiteux marchent j les sourds entenm denty etc. .

Or, les aveugles ne voient point, les boiteux ne marchent point comme les aa« ires, et les sourds n'entendent point, . C'est que dans la première proposition ^ qui est celle de Jesus-Christ, par les aveugles, on entend ceux qui étoient aveu« gles : ce sont les aveugks , diçisés de leur aveuglement. C'est ce qu'on app£)le le sens divisé. Les sourds entendent: on parle encore des sourds dans le sens divisé , c'est-à-dire, de ceux qui étoient sourds ) et qui ne le sont plus.

Au lieu que dans la seconde proposi- tion , les açeugîes ne voient point , il est clair qu'on veut parler des aveugles ^ en

tant qu'aveugles; ce qui est le sens com« posé.

9u Réflexions^' etc. An, XIII. 6f

Une chose est prise dans le sens com« posëy quand elle est regardée conjointe- méat avec nne^-autre ; et elle est prise dans le sens divisé, qnand elle est considérée léparément. Dieu justifie les impies: impies, est pris la dans le sens divisé ; c*est4-dire ^' qae Dîea les justifie par sa grâce, en les séparant de lear impiété. An lien qne si voas disieE : les impies n'entreront point dans le royaume du Ciel^ vous prendriez impies dans le tenê composé. C*est dans ce sens composé que saint Paul a dit qae les médisons^ les açares^ etc. n* entreront point dans le royaume eu Ciel; c'est»à-« dire s'ils persévèrent jusqu'à la mort dans ces habitudes criminelles.

On ne peut passer^ sans sophisme, de Tan de ces sens à l'autre, dans la suiti^ d'un même raisonnement.

On peut rapporter ici les faux jug^ neos que l'on fait quelquefois sur la con« Qttite des hommes, ea les considérant selon le sens divisé ; c'est *r à « dire , seloA- qnelques-anes de leurs bonnes ou de leurs mauvaises qualités, sans avoir égard aux^ amres.

Anoibal étoit grand capitaûie ; selon ç^tia

ffO Logique

considéra txoii , après ia bataille de Cannes ^ on jugea qa*il alloit se rendre maître de Rome, c'étoit ie sens divise. -Mais le trop de confiance et la^ molesse le retinrent h. Capoae ; et. par cette condioite , selon le sens composé « il donna ^ux Romains le temps^ de se mettre en état de le chasser de lltalie. ; .

Ce magistrat y en tant que roa^strat, ce religieux , en tant que religieux , cet homme d^^esprit , en tant qu'homme d'es- prit, ne fera pas une telle action ; c'est Ih sens composé: mais en tant que sujet h, une passion plus forte que ia considé- ration de ses devoirs,' il se laissera em- porter à cette passion , malgré ses lumières : c*est*U le sens divisé. Ce qui fait voir qu'il ne êatùt^ pas juger des hommes , ni par certaines qualités extérieures, ni même par c^ qui est idè leur propre intérêt ; mais par leur tempérament^ leurs penchans, leurs inclinations; en* un mot, dans le sens composé.

Dans le sens cqmposé , un mot conserve sa signification à tous, égards ,• et œtte "signification entre dans la compositixm de toute la phrase : an li«o que dans le seni

ou Réflexions, eic. Art. XIIL jt

.ditisé, «ce tt!est' qi»*eQ jia certaiâ' sens et ayec residction , qu'an mot cooserve •« première sîgaificaiion. Lesatfêugles voitnt^ C€st*à-dire , ceux qui ont. ëlé aveogtea.,

.X I. ' S O 9 H r S lit £. '

Poêser du $ens àoiiectifuu siens dêsMMdiif^ et du sens di'slHèutifau sens collectif

Par exemple»

. Or VhoBuve 6«| com^pôsé de» co^S et cI*aim: |>onc le corpa et rame pen«eat, i . -

1/homxne pcn^ dau» Je eeos di$triI^iHif 9' c'est- à - dire, «elon Me •de.aès partie» ;. ce qui 8oi&t puoi" faire ^ire ea général que rhomfne pense \ raais l*komnie ne pente pas cuiUesiivemetit. , seloa ilouue» ses pai^*

f '

C^estlaîfiû. qu'on résout.«e «ophi^me pué*»

Xei Apôtres étoient douze ;• . ; Or Saint Fîcf rft étoit Ap6tre : Denc 3i|iac Piecre ^toit dqnce.

- Zè* Apôtres » étaient doUze collèctîve- i^èDt , c'est*è^-dirë , pris tons ^iiseniUIe , et non dist^ibiDtireméiit s c'est «^ii-'dfrfe » P™

yi Logique

chaeao séparément. Donc Striht PUfrè AoU douze , c'cst-à-dîrc , qa'il étoit disctibutive- ixtent Van de3 douze , et non tons les donxe ensembU collecûvement; ^ . :, .

X I I. S O FMI S M fi.

{te naturel au surnatMreh ^ naturel k

V artificiel .

Passer d*ttn genre k un autre.

!•• Lorsque l'on passé de 1-ordre iiiëtA- physique à Pordrfe pliysique. Je sais c'i que j*entends quand je [iarle montagne ^ de ville, d*affirmauoii^^de nég«tion^ de*vle , de mort, etc. Je dis alors que )*ai l'idée de montagne, de ville, etc. Mais le verbi? ai^oir est pris par abus dans un $ens fignré; nous n'avons |yas une idée de la mémer manière qUe nous avons quelque objet ré^l : ainst^ eeu:| qui Regardent' les idéesrâmnseiJeS'êtres réels ) passent de l'ordre métaphysique. : & l'ordre physique» . ? v ?

Il en es« de même de niatière* Les.diffé* rens corps particuliers et réels qui noiis en« vironnenf , ^ous affectent par les inipi^es« «ions qu'ils font sijr les orgaujef ,de no| senSt

Ensuite ;, i^i^nt .a)>strgc(ifW ^ .toutes Jef

^Dressions

eu Réflexions^ etc. Art. XIIL 73

ini]>res$ions particulières ', c'est - & - dire 9 n'ajant égartl ni à la couleur , ni . à la solidité, ni à lainollesse, ni enfin k ancnno notre sorte de propriété sensible des corps parucnliers , nous nous formons par analo* g^ie , avec une base ou un pied-d'escal sur qaoi an pose quelque chose , Tidëe d*iin suppôi^ général de toutes ces propriétés ; et ce suppôt imaginé nous l'appelons ma-* tière ou matière première , que nous regar- dons comme la base de toutes ^ es proprié- tés , et qui n*est qu'un ^ terme abstrait ^ tel que longueur, blancheur , couleur, etc•^ car il n'y a point d'êtVe réel qui ne soit que /TiadVr^ dépouillée de toute autre propriétés

Il n'y a parmi les créatures que des êtres particuliers. La mat'ère en général , ou ma^ tière première , n'est qu'un terme abstrait e( une pure production de notre esprit.

Ainsi, au Heu de nous borner k necon- sidérer la matière que comme le suppâc iftaginé des propriétés des corps , regar- dons-lk comme un signe d'pne afl'ection de notre esprit , en un mot, d'une abstrac- tion, et non comme l'expression d'un objet réelj car c'est passer de l'ordre métaphy-

D

74 Logique

siqoc ou idéal à l'ordre phjsîcjue , que de regarder la matière corons on être réel y susceptible de toutes sprtes de formes , et de croire que les corps particuliers ne sont jce qu*ils «ont » par Tarrangement ou disposition des parties de cette pré- tendue matière^ première ^ quî^ n'étant^lle^ même rien de réel , ne sàurolt avoir de parties.

C'est cette fausse manière de raisonner ^ui a fait imagiaer.k certains^^^ fanatiques ^ toujours dupes de leur prévention , que Texistence . de Tor ne consistoit que dans un certain arrangement de matière; qu*ainsî) Vart pou voit donner cet arrangement aux autres métaux , et par - les faire de- venir or.

^ Mais les corps particuliers , dans. Tordre physique , sont intrinsèquement en eux* mêmes .et par leur propre existence., ce qu'ils sont\, et ne peuvent recevoir d^'alté- ratlon que jusqu'à un certain point , et selon le procédé uniforme et invariable de la nature , et dont le peu de sagacité des organes de nos sens nous dérobe le méca** nisme. Vous n'aurez jamais de bled que par des gracias de bledi ni d'asMUiil vivant

ou RéflexionSj etc. Arr. XIII. 75

<]oe par la voie établie dans la aa'turè pour la production des animaux: vous n'aureft jamais de nourriture solide avec de simples i/qoears, et votre estQmach ne formera jamais de bon chile avec du poison. Ce que Ton dît de Mithrîdate n'est qu'une fable. Le Ctar Pierre* voulut accoutumer les enfuQS de ser matelots à ne boire que de l'eau de la mer. Us moururent tous.

Ainsi) ne regardons le mot de matière que comme un terme abstrait, et comme le suppôt imaginé des qualités sensibles : notons ni n'ajoutons rien à ce que nous entendons par cette idée.

Les Mathématiciens regardent par abs- traction la ligne comme une simple lon-r gueur: ce seroit encore passer de l^ordre métaphysique à Tordre physique y que de ne considérer ensuite la ligne physique uniquement que selon sa longueur, et dire qa*une ligne tirée «ur quelque .corps, n'a y. que de la longueur sans aucune largeur»

2.0 On passe encore d*u.Q genre k un autre^ lorsque l'on veut expliquer les mys-» tères de la Religion, qui sont de Tordre surnaturel , par des raisonuemens- fondés sur Tordre physique. Quelques ^anoiens sont

P a

^

^S Logique

tomMs dans ce sophisme , lorsqu*ils ont vouki expliquer le mystère de la- résur- rection par. le phénix; en qaoi ils se sont encore égarés par le sophisme de la fausse supposition : car, il n*y a jamais eu de phénix reproduit de ses propres cendre^.

Ainsi) quand il s'agit des mystères de la foi , on doit imposer silence à la rai- son; pour s'en tenir sihnplement h. la ré- vélation, c'est T* a - dire , aux choses que Dieu a découvertes aux hommes d'une inanière surnaturelle » au lieu de donner la torture èi l'esprit pour imaginer des systè* mes de conciliation entre la foi et la raison* Si le point dont il s'agft est révélé^ tout est dit; il faut le croire: Q ALTiTUjyo! Plus de raisonnement, plus de comparaison ni d'analogie, plu» de création de termes abstraits, imaginés pour éludeir des diiîi-* €ûltét qui doivent céder à l'autorité divine. Si ce dont il s'agit n'est pas révélé , ou n'est pas une conséquence nécessaire d'une vérité révélée, la raison, dont Dieu même est l'auteur , rentr» dans ses droits. Q9 ne doit suivre alors que les sitnples lu«- mîères naturelles, rectifiées par l'expérience çt par les réflcxlonj^ c'est - à - dire , j^r

ou Réflexions, etc. Art. XUl. 77

^esprit d'observation et àe ]ttstesse, sans recourir à des raisonnemens qui nous pa- roissent analogues avec les mystères.

Ainsi, ceux qui vemlent ou excuser oa défendre le merveilleux imaginé du paga- nisme, par la ressemblance qu'ils y trouvent avec le merveilleux réel et révélé de'^i'Ecri- lure sainte, me paroissent tomber dai/s le sophisme dont nous parlons.

Homère, à la fin du 19. livre de son Hliade, fait parler le cheval d'Achille. Madame Dacier ne se contente pas de l'excuser; die l'admire. « C'étoit ( dit-elle) » une tradition reçue parmi les Grecs , ^ qae le bélier de Phryxus avoit parlé. ^ L'histoire ancienne , l'on rapporte

* plusieurs miracles semblables ^ par exem« » pie, qu'un i>œnf a parlé , sembloît au- » toriser HoAière. D'ailleurs , il pouvoit » avoir ouï parler du miracle de l'âncsse

* de Balaam , qui parla. » Et dans le livre ^^ h corruption du Goût. p. 187. 4 J'ose

* dire ( c'est Madame Dacier qui parle ) ^ qu'il n'j a point d'endroit dans Homère v> 011 la grande adresse de ce Poète paroisse ^ dans un plus grand jour. »

* Le P. Le Bossu a fort bien dit , ( con-

D 3

fjS * " Logique

V tînuc •» t - elle , ) que cet iacident dofc » être mis ^ntreles miracles dont rilliade ^ est pl^iae; comme on. lit dans l'kistoire

V Romaine que cela est quelquefois arrivé , ». et comme nous le savons de Tânesse de

V Balaam: de sorte que quand Homère y auroit usé plus souvent de cette licence ^

V on ne pourroit blâmer sa fable de quel- » que Irrégularité. Voila ( poursuit tou- i> jour^ Madame Dacier ) comme parlent y les'gens instruits. ^

Il me pçiroît, au contraire, que cVst manquer d*instruction et de justesse dans le raisonnement, et avoir bien peu médite sur le caractère de Tesprit humain , et sur la difi'érence que, i*on.doit mettre entre Tordre naturel , et Tordre surnaturel , que de se, servir de Texeniple de Tânesse de Ba- laam pour justilier la fiction puérile d'Ho- mère, ou pour nous faire croire ce que rhistoire profane rapporte des animaux qui ont parlé. C*est abuser de Técrîture sainte , que de la faire servir à autoriser les rêveries des Poètes ou des Historiens profanes, et les bruits populaires qui cou« roient de leur temps.

Qu'Agamemnon immole sa fille Iphi*

ou Réflexions j etc. Art. XIII. 79 génie, et que notre imagination s'amuse encore aujourd'hui à la représentation de cette histoire, ou de cette fable, si honteuse è la maoière de penser de ces temps-l^; mais qu'on ne l'autorise ni de l'exemple de Jephlë,mde celui d'Abraham. En un mot « teoons-Qous aux. bonnes règles, soit pour former noire goût dans les ouvrages d'es-» prit, soit pour la conduite de nos mœurs , sou enfin pour la croyance que nous devons accorder on refuser à ce que l'histoire nous raconte de raervi'iUeux.

Il â plu autrefois à Dieu it faire con-. noiire sa volonté par des songes ; nor»s serviroQs-nous de ces exemples particuliers pour autoriser le songe d'Hécube , et lanÉ d'autres songes doot il est parlé dans l'his- toire, d^ins la fable? et n'est-ce pas avec raifon que l'Eglise nous défend aujourd'hui <* ajouter foi aux songes et à toute rêvé-, laiîon qu'elle n'autorise pas l Elle seule est ^* colonne de la vérité , la règle , le canal ^^ l'interprète de la divine révélation.

L'ordre naturel est uniforme ; ainsi ^ ^Oûs .avons droit de raisonner par analo* §*^ et sur de simples conformités , dans »^* choses naturelles. Ce qui est vrai

I> 4

\

So Logique

une fois dans Tordre de la naiore, l*esc toujours ) quand les circonstances se trou- vent exactement les mêmes : ainsi , nous TOjrons les Tnèmts apparences , nous de- vons juger la mémç cause ; et il ne nous faut pas moins qu'èi saint Joseph , ce chaste époux de Marie, une divine révélation pour nous tirer de Tordre commun.

Mais la hianière dont Dieu agit dans Tordre surnaturel , n*est point fondée sur - une pamlle uniformité : au contraire , les faits surnaturels ne sont produits que par une volonté particulière de Dieu , ou par une permission Spéciale. Ainsi , nous devons jamais raisonner par analogie dans les faits de Tordre surnaturel , et noua d»* vous nous tenir préciséiue^t à ce qui e,a est relevé.

L'Ecriture sainte nous apprend queNa-^ buchodonosor fut changé en bœuf , par une punition divine : c*est passer d*ua genre à un autre , que de se servir de cet exempte pour autoriser les métamorphoses d'Ovide ; et si quelques fanatiques se croyoi^nt changés en bœufs ou en loups^ les Médecins et les Philosophes ne dc^ vroient psTs moins les traiter d*hjrpoc6n-

ou ï(çfl xtonSj etc. Art. XIII. 6i

drlaques , et regarder ces accideos c oui me des effets de la force et du dcrëglecnent de rimagînatioD. Horace , daus le récit qa'il fait d*ua de ses voyages , dit que lorsquMl fut arrive à Gnatia , les habitaas de cette ville lui fouraireat une occasioa de rire et de plaisanter. « Ils voulurent » nous persuader, dit il , que Tencens qu'ils i> mettent siifr le. seuil de leur temple , )> s'enfîamrae de lui-même sans feu )>. Sur quoi Madame Dacier ne manque pas d'ob- server que ce miracle a beaucoup de con- formité avec celui d^Elie^ qui fit descendre le feu du Ciel sur son sacrifice : ce qui est passer d'un ordre à un autre.

En un mot, tous nos jugemens doivent avoir an motif propre et légitime, sur lequel l'acquiescement de notre "esprit doit éiré fondé. Les faits surnaturels marqués dans l'Ecriture sainte , nous sont connus par un témoigoage qui a droit d'exiger notre consentement; au Heu que ce que les hom- mes nous racontent de contraire aux règles uniformes de la nature , ne peut être qu'une production bu de leur ignorance, ou de lear goût pour le merveilleux, ou de leur imbécillité , ou du- dwrangement de leurs

D 5 ^

8a. , hogiquà

ïdéeS) oa da plaisir <{ae les esprits gauches trouvent à en imposer aux autres , ou en- fin de lenr fourberie, qui s*accorde sou- vent avec leur intérêt.

Ainsi, toutes les fois que les faits extra or-* dinaires ne seront pas autorisés expressé- ment par TAuteur et le Maître de la nature même , la droite raison exige que noas soyous persuadés que ceux qui les racontent se trompent^ ou qu'ils sont trompes, plutôl que de croire, sur leur simple témoignage, dont nous ne connoissons que trop la foi- blesse « que la nature se soit démentie, et que son divin Auteur^ dont nous adorons ritnmutabilité, s'assujettisse a nos caprices.

Mais rien ne coûte tant k V^sprit que d'avouer son ignorance, et de se tenir sim- plement dans cet aveu. D'un autre côté', l'esprit est paresseux , et n'aime pas les discussions de Texamen \ cependant il veut juger , et quand il ne voit pas d'une pre- mière vue la cause d'un efiEet qui l'ctonne, il en imagine une ; et si une cause natu- relle ne se présente point à son esprit , on a recours aux causes surnaturelles. C'est ainsi que les joueurs de gobelets , les dan- seurs de corde, ceux qui paraissent mao-

BU Réflexions, etc. Art. Xllf. 83

ger du feu et £Bkire sortir du ruban leur bouche , et même ceux qui fout )oûer les marionnettes , ont souvent passé pour sorciers parmi le peuple , toujours' avide de inerveilkux> incapable d*examen et de réflexions combinées , et qui ne juge des hommes que par la manière conomune .d'agir de çeax qui l'environ* cent.

Les bergers de la campagne | qui , par des causes très-naturelles , se plaisent à surprendre leurs voisins , ou se vengent de leurs ennemis , passent aussi pour ins-* truits de^ mystères de la magie. Les fu- rieux y les épileptîques , pour lesquels la sagesse des derniers temps a fait construire des b6pitaux utiles ^ qui enlèvent au peu- ple un prétexte de superstition , ont sou- vent passé pour démoniaques : mais voici quelques réflexions qui. pourront servir de préservatif contre ces erreurs.

i^. L'ignorance de la Physique, jointe au goût du merveilleux , et au penchant de vouloir touj^ours décider et trouver une cause quelconque, plutôt qde d'examiner jDU de demeurer iodéterhiiné , a donné lieu de recourir à une cause surnaturelle ; ce qui

84 Logique

est arrivé , même dans le paganisme , et qui arrive encore aujoi^d'hui dans le Nord ^ aux Indes , et chez tous les peuples la pbjsiqne est ignorée.

Ce fut cette îgnoratice de la Physique qui porta autrefois des personnes^/ d'ailleurs très-* respectables, ^ condamner ceux qui^ voyant que le soleil se lève le malin d'un côté et «e couche le soir d'un autre, soupçonnèrent ^ue ce coucher du soleil , par rapport à cous, ponrroît bien être son lever, par rapport à d'autres peuples* Ces malheureux Philosophes furent condamnés, et même exclus de la société des fidèles: cependant, Texpérience a justifié leurs conjectures « et a fait Voir avec combien de sagesse et de retenue on doit agir en ces rencontres, «Tant que de faire éclater la condamnations Je pourroîs en rapporter plusieurs autres exemples; mais je me contenterai d'observer que plus on aura de connoissances détaillées dans la Fhjsîque et. dans l'histoire des mœurs et des opinions des homnftes , moins on sera la dupe des erreurs populaires.

&.• Tons les Théologiens et les' Philo- sophes nous enseignent que les pitres lu- mières naturelles ne nous apprennent rien

ùu Rêflexionè, etc. Art. XIII. 85 toachant les Anges et les Démons: de An^

GELIS ET DœMONIBVS RATIO KULLA^ FIDES PjêVCA , IMAGlfîATlO qVAMl^LV'^

RIMA, Ainsi , lorsqa'aucun motif surna- turel ne nous tire pas de Tordre commun, dans lequel nous n'avons que ia raison pour guide , nous ne devons jamais avoir recours \ une cause qu'eue ne connoit pas : ce- seroit tomber dans le fanatisme | les jugemcns ne sont fondés siâ* aucun motif légitînje.

D'ailleurs , la Religion nous apprend que les. démons ne peuvent rien sans une per.« mission spéciale de Dieu; ainsi , ceux qui croient, comme les payens, qu'il y a des hommes qui peuvent produire des effets sarnatorels par le commerce qu'ils ont avec le démon , ne prennent pas garde qa'outre qu'ils adoptent en cela le système du paganisme , il faut nécessairement -qu'ils admettent deux suppositions , dont ils ne sauroient apporter aucune^ preuve* En «ffei, cette opinion suppose, I.® une con- vention entre Dieu ^ le démon , que toutes les fois qu'il plairoit à quelques fanatiques de faire certaines opératiods on de pro* Ao^urer £eTt|dne$ parojes, Dieu permettroit

8S Logique

8u démon de produire aa gré du fana** tic|ue ce que celui-ci . demanderait* X** Il faudroit au fanatique une révélation de cette convention, pour savoir, et les pa- roles qu*il doit dire, et les grimaces qu'il doit faire : or quelles preuves avons- noua d*un traité si injurieux au souverain Etre, dont nous adorons la sagesse et la bonté infiaie!et puisqu'on n*a aucune révélation de ce traité, comment peut-on savoir que telles paroles ou telles opérations sont plus propres que d'autres à produire les effets dont il s*agit l

3.^ L«s corps observent entr'eux un certain ordre invariable , qui n'est point subordonné à la volonté des esprits créés , qui , par leur nature , n'ont aucune re- lation avec les corps. Il n'y aurait plus rien de certain dans la physique , si des êtres spirituels pouvoieot changer les mou- veniens : ainsi , tous les prétendus effets surnaturels, s*ils ont quelque fondement, ne doivent être attribués qu'à des causes naturelles ; et s*ils sont suppo|és^ ils ne sont que de vaines productions de Yxnvm posture ou du fanatisme.

4.^ Ceruins effets, tek ^ue ceux> d^. U

ou Héflexîons, etc. Art. XIIL 87

pierre d^aimant , de rélectricîlë , de la production des plantes , de la gëoéralioa des animaus , de leur nutrition | etc. (juel- c|iies merveilleux qu*ils soient, n'excitent point en nous ce sentiment d'admiratioa (jui nous fait recourir à .ua€ cause surna- lurelle : pourquoi / seroit - ce parce que nous trouvons ces efieis dans la nature^ cela seul devroît suffire ; mais non : c'est parce qu'ils arrivent tous les jours \ nous y sommes accoutumes.

Or les ëve'nemens plus rares qui nous ëtoonent , sout-ils moins dans la nature T parce qu'ils arrivent rarement, et que nous en ignorons la cause F est-ce-là une raison qui doive nous faire recourir à une cause surnaturelle \ Uue comète ne paroft pas si fréquerument que la iune ou le soleil : en est-elle moins dans l'ordre de la nature! Un bruit soudain nous ëveille pendant la suit : donc c'est un esprit follet ou un re* venant qui l'a cause : n'est-ce pas passer de l'ordre naturel à l'ordre surnaturel I ne seroit-il pa^ plus raisonnable d'atltibuer ce bruit à quelque cause naturelle , quoi- quinconnne.

5.? Il y a eu dans tous les temps de$

88 ^ Log'que

imposteurs et des fanalîqaes de bonne foi) qui) secondés par Tignorance) la foiblesse et la superslilion des peuples , ont établi des sectes, qui , semblables à la contagion , ou, si vous voulez, aux comètes, ont duré plus oif moins loug-tenis. Environ mille fins avant notre ère, le culte de Tidole Fo ou Foê , fut établi dans TAsie orientale ; oii il subsiste encore aujourd'hui. Cest ce dieu que prêchent les Bonzes à la Chine ; c*est en son nom/ dit TAutenr de THis- toire de l'esprit humain , qu'ils prêchent une vie immortelle ^ et que des milliers de Bonzes consacrent leurs jours à des exer- cices de péoîtence qui effraient la nature. Quelques-uns ^passent leur vie nuds et en« chatués , d'autres portent un carcan de fer qui plie leur corps , et tient leur front toujours baissé en terre. On peut dire, à leur égard, ce que Tertulliendisoit autrefois : Ce n'est pas le supplice qui fait le martjr, c'est la caus&i Ces Bonzes sont séduits par leur fanatisme , et leur fanatisme séduit ces peuples par ce qu'il a de merveilleux et de surprenant. Si ces Bonzes menoient une vie commune , et qu'ils donnassent des leçons et des exemples de molesse ou de

ou Réflexions, etc. Art. XIIL 89

volopté, le peuple ne trouveroit rien de surnaturel dans leurs sermons ni dans leur conduite ; au lieu que la vie extraordinaire qu^ils mènent , fait que le peuple , que tout surprend , hors le coniniun et Tordinaire , passe à leur égard de Tordre naturel dont il ne connoit pas l'étendue , à un ordre sur- naturel dont son imagination se trouve étonnée ^ satisfaite et remplie.

C'est encore passer d'un ordre li un autre ^ que de prendre dans le sens propre , ce qui n*est dit que dans le sens fîguré.

Quand Jésus -Chnst dit que est notre trésor , est notre C<EUR, par ce mot cœur on ne doit point entendre cette partie de notre corps qu'on regarde comme la principale ; on entend en cet endroit , par ce mot , V affection de rame, C^est ainsi que Toa dit : Donnez potre C(EUR à Dieu, c*est-à«dire ^ aimez Dieu. U y a plusieurs autres façons de parler , ce mot cœuf ne doit être entendu que dans un sens figuré : c'est ainsi qu'on dit donner son coeur y reprendre son cœur^ etc«

Cependant un grand prédicateur du sei« sième siècle , dit qu'un Seigneur. avare étant

90 Logique

mort , lorsque l'on fit l'ouverture de son corps pour rembaunier , on n'y trouva poiut de cœur* ce qui surprit beaucoup les chi- rurgiens : mais un personnage grave et savant , qui étoit présent à l'ouverture du cadavre, persuada aux parens et aux chirur«« giens d'aller voir si le cœur ne seroit pas daus le cofre-fort : Allez , dit-il y au cofiVe- fort du défunt ; peut-être que ) selon la parole du Seigneur , vous y trouverez ce cœur que vous ne trouvez pas daus son corps. En effet, dit l'auteur, ou va au coffre - fort , on l'ouvre , et on y trouve réellement le cœur de cet avare. De pareilles fubles , débitées de bonne foi, sont plus instructives que les fables d'Esope , parce qu'elles apprennent à connoitre l'esprit humain.

Nota exempîum de Wo aparo diçiie , cujus cùm cadaçer posl mortem aperiretur , forte ut balsamaretur ., sicut Nobilibus inierdàtn Jieri solet , nec à chirurgicis cor ejus inue" nireiury ait quidam vir graçis et doctus ibi adstans : Ite adarcam inquâ reconditi sunt tkesauri ejus , et forte int^enietis , juxtà Domini sentent iam, Qùod cûm Jaclum

ou Réflexions , etc. Art. XIII. gl

Jiiissetj ibi realilcr in^entum estdiçino Jiutu,

cor ejus , in signurh damnationis suœ^ nulU duhium .

Expositio Evangeliorum tfuadragesimalium F. Gain. Pepini, Par/siensis, Doct, TheoL O, d, Pr€edic. VenetiU i658. Expos, in die Cinerum, pag> iSf verto.

XIII. Sophisme.

- Passer de l'ignorance à la science.'

La règle est de passer du connu à Tin* connu; mais iiya , au contraire, des per«« sonnes qui veulent nous faire passer de rincoDi^u à ce qu'ils croient savoir.

X I V. ^ O P H I S M E. '"

Du pouvoir à i'acle. A posse adactum , non çalet consequentia.

Du cercle vicieux.

C'est ce qu'on appelle autrement dlallele ou alternatoire , A<«AA«|<;, i!AX«y«, MUTJ» TlOixXûtarmt MC/TO. Lorsque pour prouver une chose qui est en question , nous nous lervons d'unl^utre chose dont la preuve dépend de celle même qui est en question , les conclus ons doivent être renfermées ddOJi les propositions dont ou l^s tire.

9 2 Logique

y - » _^ .

Artici.£ XIV, Des différentes manières de raisonner*

N,

OUS avons dit que le syllogisme ëtoit composé de trois propositions^ la majeure , la mineure, la coaclûsioQ ou conséquence.

Sans les discours oratoires et dans les conversations familières ^ on ae se sert point explicitement du syllogime; ce seroit une manière de parler trop dure et trop^èche ; mais le syllogisme est toujours exprimé ou renfermé dans tourraisonnemenî« Les Ora- teurs prennent chaque proposition en par- ticulier, les étendent , les emplifient , avant que de venir a la conclusion,. Par exemple ^ le Logicien dira : Tout le nionde est obligé d'honorer les rois ; Louis XV est Roi : donc

toutlemoûde est obligé d'honorer Louis XV. L'Orateur s'étendra sur chaque proposition; il fera voir que les loix naturelles , divines et humaines; que la piété , que la religion obligent les sujets d honoreiiRs ^is. En- suite il passera a la seconde proposition. Il admirera la grandeur, la puissance, la modération , bonté de Louis XV i la

ou Bèflrarions , efc. Art. XIV. 98

vaste étendae de son géqie^ etc* EdBo, il conclura que sts Sujets doivent l'airrier comme leur père , le révérer comme leur maître , et ThoDorer comme celui qui lient la place de Dieu m^me sur la terre.

L*oraisoQ de Cicéron , pour la défense de Miloa , n*est qu*uQ syllogisme tourné en Orateur, Un Logicien auroit dit sim- plement qu*il est permis de tuer celui qui nous dresse des embûches ; que Clomus a dressé des embûches à Miton : donc il a été permis à Milon de' tuer Clodius. Ci* céron étend d*abord la première propo- sition ; il la prouve par le droit naturel ^ par le droit des gens , par Us exemples , etc. Il descend ensuite à la seconde proposition ; il examine Téquipage ^ la suite et toutes les circonstances du voyage de Clodius; et il fait voir que Clodius vouloit exécuter le projet d*assas$iner Milon : d*oii il conclud que Milon ii*ctoit point coupable d'avoir usé du c^roit que donne la nécessité d'une légitime défense.

Outre le syllogisnie , a quoi se réduisent tous les discours suivis, il faut encore obser- ver Tenthymème ^ le dilemme , le sorite et rindùclioii.

94 Logique

L

R .T I C L B XV.

De VEnthymème.

E N T H ï M È M E est un sjUogîsme iiwparfait dans l'expressioa : syllogismus truncatus ; parce qu'on y supprime quel- qu'une des propositioDs, comme trop claires et trop connues. On suppose que ceux à qui rpù parle pourront aisément la suppléer. Far exemple: la comédie est dangereuse, parce qu'elle amollit 4e coeur. Ou bien :

Tout ce qui amollît cœur est dangereux: Doac Ja comédie est dangereuse.

Il est visible que Ton sous-entend la mi- neure dans cet enihymême. Le syllogisme set oit :

Tout ce qai amollit le cœur est dangereux; Or la ccra^die amollit le cœur:. Doue la comédie est dangereuse.

On donne ordinairement pour exemple ce vers que Seuèque fait dire à Médée :

7'ai bien pu te sauver; ne puii-je pas te perdtêf

Le syllogisme seroit :

ou Referions j Hc. Arr. XVI. pS

\\ est plna facile de perdre quelqu'un , ^c

de le saover ; Or je t'ai «auvé: Doac je peux te perdte.

Tel est encore cet enthymème fameux: Mortel, ne garde poînt one htîde imoiortellt. Le syllogisme seroît :

Ce qui eatmoTtel ne doir paa conierrer iin« haiae immortelle qui dure plut que lui;

Or ?oaa ètea mortel:

Doac Tooa ne deTez pts cooterrer une haine immortelle.

Akticxb XVI.

Du Dilemme*

T

-L-iE dilemme est uo raisonnement com<- posé, dans lequel on divise un tout en ses parties , et Ton conclud du tout , ce que l'on a conclud de chacune de ses parties. C'est pourquoi on Tappclle: Argumentum utrim^ que Jeriens ; c'est - à - dire , argun.ent qui [frappe des deux côtés. C'est pour cela en- core qu'on rappelle argument fourchu. Par exemple , on dit aux Pyrrhonien^, qui pré- leudem qu'on ne peut rien savoir: ^

g6 Logique

Oa Yoas tavez ce que voaa dîtef , on tous

le MTfz patfj Si veas saTez ce qne vous dites , on peat dont

aatoir qaelqae choaer Si TOUS ne aavez ce que tous dîtes , TOtis.aTeE

donc tort d^ass'urer qn*on ne peut rien bê^

TOir ; car on ne doit point aaaurer ce qu*os

ne sait pas*

Lu grande règle des dilemmes , c*est que le tout soit divisé exactement en tontes ses parties; car si le dénombrement est impar- fait, il est évident que la conclusion ne sera pas juste.

Par exemple , un Philosophe prouvoit qu'il ne falloit pas se marier, parce que , disoiloil, ou la femme que Ton épous« est belle, ou elle est laide ; si elle est belle elle causera de la jalousie; si elle est laide elle déplaira.

La division n*est pas exacte, et la conclu- sion particulière d^ chaque partie n*est pas nécessaire ; car,

i.o II peut y avoir des, femmes qui ne seront pas belles au point de causer de la jalousie; ni si laides qu*elle$ déplaisent.

2,0 Une. femme peut être belle , et en même temps être si sage et si vertueuse,

qu'elle

OK RéflexionSj eic. Art. XVIT. 97

qu^elle ne causera point de jaloosie : et une laide peat plaire par Tesprit et le caractère.

Il faut sur-tont , . dans le dileninie, dans les autres raîsonnemens , se mettre k Tabri ie la rétorsion. Par exemple , un ancien prouyoit qu'on ne de voit point se charger des affaires de la République, parce dilemme:

Oa FoB s'y condoirt bi«o , ou Von ay con^

doira mal ; Si Ton sV <iondft bien , on se fa» des ea«

nemi» ; Si ?oB i^ conduit mal, on offensera les dlevaui

Oq iui répliqua par cette rétorsion :

Si l'on s'y gouverne erec soupIeaM ot ave«' condescendance , on ae fera dea amia ; ec •i Ton garde'exactemenr la juatice , on coa- teniera les dieux.

I

Articlb XVII.

Du Sorte»

L y a une autre sorte de raisonnement, composé d*nne suite de propositions , dont la seconde doit expliquer l'attribut de U première* la troisième, Tatlribut de la se-

E

$8 Logique

coude j ainsi de suite jus({u*a ce qu'enflo on arrive a la conséquence que Ton veut lîi er.

Par exemple, je veux, prouver que les avares sont nii'sérables , je dis :

I.es avares (ont pleins de désirs ;

Cebx qui sont pleins de à^M9 f manquent

de beaucoup de choses ; C«ux qui manquent de beaucoup de choses

sont misérables: Donc les avares sont misérables*

BeiAarquez qu'il. est essentiel à un bon sorite que les propositions qui se suivent soient liées, et que Tune expliqué Tautre ; autrement elles ne «ero'ient qu'autant de pro- positions particulières qui ne contiendroient pas la conclusion. Par exemple, ce sorite de Cyrano de Bergerac.

L*£urope est la plus belle j^àrtîe do monde ;

La France est le plus beau, royaume de l'Eu- rope ;

paris est U pi «s belle ville de la France ;

liO collège de Beauvais est le plus beau col- lège de Péris;

Ma chambre est la plut belle chambre du col« lège de Beauvaîs;

Je suis le plus bel homme de ma ehambre :

ponc je suis le plos bel bomme du nonde.

ou R^fiespionsj etc. Art, XVIII. 95

Ce raisonoemem n'est composé que de propositions , qui ne sont chacune sëpa« réraent , qu'autant de propositions particu* lières, dont l'une n'explique pas l'autre > et dont aucune ne contient la conséquence.

Ab.tici.eXVIIL

De l'Induction»

L

i*lN DUCTIO N.est encore une sorte de raisonnement) par lequel on. va de la con— noissance de plusieurs choses particulières à la connoissance d'une vérité générale. Far exemple , on a observé que tous les hommes aiment à recevoir des impressions agréables ; ; qu'ils évitoient tout ce qui leur causoit de la douleur: de ces différentes observations par* ticulières on en a conclu , par induction ^ que tous les hommes aimoieut le bien ^ et qu'aucun ne pouvoit aimer le mal, en tant que maU

E a

100 Logique

•i*

I

ArTI43LB XIX.

Conclusion* .

L est ëvidcat, par tout ce que nous ve- nons de dire, que le raisonnenient ce consiste qu*en trois opérations de Tesprit :

l.^ A se rappeler Tidëe exemplaire de ce dont on veut juger. Ces idées exem- plaires , nous les acquérons par Tusage de la vi^ et pa? la réflexion. Kous pre- nons ridée exenipVaire la plus connue , par rapport au sujet dont il s*agit dans la con- clusion.

2.^ A examiner si Tobjet dont il s*agit, est ) ou n*ast pas conforme à celte idée exem- pliiire.

3." A exprimer, par la coùclusioù, ce que je sens louchant cette conformité ou cette non - conformité. Par exemple ^ on me dispute .que cette figure O soit un cercle ; je me rappelle Tidée exemplaire du cercle , je compare cette figure à celte idée , et j*exprime , par la conclusion , ce que je sens à Toccasion de celte compa* r^i^on,

ou Réflexions f etc. Art. XX; itê

Article XX.

De la méthode.

-^x

L

lA Méthode est Tart de disposer ses idëes et ses raisonaemens , de manière qa*on les entende soi-même avec plus d'ordre, et qu*ou les fasse entendre aux autres avec plus de fa- ciLté.

On dît communément qu'il j a deux sortes de méthode ; Tune qu'on appelle analyse , e( l'autre synthèse.

L'analyse se fait lorsque , par les détails , 00 parvient à ce qu'on cherche : c'est une sorte d'induction. On l'appelle aussi méthode de résolution.

La synthèse , qn'on appelle aussi méthode de composition , consiste à commencer par les choses les plus générales , pour passer à celles qui le sont moins ; par exemple , expliquer le genre avant que de parler des espèces et des individus. On appelU aussi cette méthode , méthode de doctrine , parce que ceux qui enseignent , commen*^ cent ordinairement par les principes géno^ raux.

E 3

loa ^ Logique

L'une et l'aatre rnéihode peut pourtant être suivie pour enseigner ; et l'analyse est souvent 4a plus propre , parce qu'eli'e suit rhistoire de nos idées , en nous menant du particulier au général.

Voici quelques principes de méthode :

l.^ Aller toujours du connu à l'inconnu.

a.^ Concevoir nettement et distinctement le point précis de la question. On fait sou- vent ce que feroit un domestique à qui maître diroit : allet me chercher un de mes amis. Si le domestique partoit avant que 4e s'être fait expliquer précisément quel est cet ami que: son maître demande , il tomberait danj le défaut de se déterminer, avant que de concevoir bien distinctement ce qu'on lui demande.

3.^ Ecarter tout ce qui est inutile et éiran- ger à la question» i

4.« N'admettre jamais poiir vrai , que ^ue l'on connoit évidemment être vrai. - 5.® Eviter la précipitation et la préven-* tîon.

6.^ Ne comprendre dans ses jugemens rien de plus que ce qu'ils présentent à l'es- prit.

7.^ Examiner si le jugement est fondé

ou Réflexions j etc. Art. XXI. io3

sar le moiif extérieur et propre qu'il sup- pose.

8.^ Prendre pour vrai ce qui parott ëvi- deiument vrai, pour douteux ce qui est douteux , et pour vraisemblable ce qui est vraîseioblable.

9.9 Diviser le sujet dont il s*agit eu au- tant de parties que cela est nécessaire , pour l*éclaircir et le bien traiter.

10.* Faire par-tout des dénombremeas si entiers I qu'on puisse s'assurer de ne riea omettre.

Article XXI. De la Méthode des Giomètres.

l.° lil

lES Géomètres commencent par les déBnitions ^ afin de ne laisser aucune am- bigaité dans les termes; ils n'emploient dans ces définitions que des ternies connus ou expliqués.

2.^ Ils éta^blissent ensuite des principes clairs et évidens ; par exemple, que le tout est plus grand que quelques-unes de ses par-< ties j prises en particulier.

. ' E4

JI04 Logique ou Réflexions, etc. Art. XXI.

3.0 Ils prouvent les propositions un peu obscures ou difficiles , par les définitions qui ont précédé, ou par les axiomes qui ont été d'abord expliqués ^ ou qui leur ont été accordés, ce qu'ils appellent demande, OU) enfin, par des propositions qu&ioat déjà été démoAtrées.

FIN.

PRINCIPES

DE GRAMMAIRE,

OU

F RA G M EN S

Sur les causes de la Parole.

D

ES que nous venons au monde , nous sommes affectés de différentes sortes de sensatioDs , à l'occasion des impressions sensibles que les objets extérieurs font sur nos sens. Nous sommes capables de voir^ d'entendre , d'imaginer; de concevoir, de ressentir du plaisir et de la douleur ; et dans la suite nous réfléchissons sur toutes res différentes affections ; nous les com- parons, nous eti tirons des inductions , ete^

E 5

\

io6 ÛEuçres posthumes*

. Ces seoii mens ou affections .supposent premièrement, et de noire part, qu*il y. ait en nous tout ce <{u'il faut pour ^en être susceptibles; c*est-à-dire) que nous ayons les organes destinés par l'Auteur de la Nature à produire ces effets, et que ces organes soient bien disposés.

Eu second lieu , il est nécessaire de la part des objets , qu'ils soient tels qu'ils doivent être , afin que tel sentiment résulte de telle impression.

Les aveugles ne voient point, parce que leurs yeux n*ont point la conformation re- quise pour voir \ et nous ne voyons point dans les ténèbres , parce que les corps ne reçoivent aucune lumière qu'ils puissent ren« voyct à nos yeux.

Les impressions que les objets font sknt les parties extérieures de nos sens, sont portées jusqu*au cerveau , qui est le sens interne , et tous les nerfs des sens ex- térieurs aboutissent ; ou , ce qui est la même chose , tous les nerfs partent du cerveau et se terminent aux différentes extrémités de notre corps , propres à recevoir et à porter au cerveau les impressions extérieure^ des objets.

de M* du Marsqis. KfJ

Comment tout cela se faiuil \ c'est le secret du Créateur* Nos conootssances ne peuvent aUer que jusqu'à un certain point , après lequel il vaut mieux reconnottre sim* plement les bornes de notre esprit , que de nous laisser séduire par de frivoles ima- ginations. Si la Nature a des procédés an«i dessus de nos lumières ^ c*est savoir beaucoup que de reconnoitre que nous ne pouvons les pénétrer, et que nous sommes à cet égard ce qu'est l'aveugle^né par rapport aux couleurs , et le sourd de naissance par rapport aux sons.

Je dis donc qu'en conséquence de noire état naturel , et des différentes impressions ^es objets , nous voyons , nous entendons^ nous comparons , nous connoissons. , nous jugeons , nous faisons des réflexions y etc.

Ces différentes pensées et ces divers jugemens se font en nous paf un point de vue de l'esprit qui forme d'abofd sans division toute la pensée*

Je veux dire que nos jugemens «e font d'abord par sentiment ^ c'esv*à*dirc , par une affection intérieure on perception de i*esprît , sans que l'esprit divise sa pensée, et considère premièrement la chose , pi»is

E 6

io8 ÙEuçres posthume$

la qualité, et enfin unisse, comme on dît, une idée ^ une autre idée. Cette divisioa de la pensée est une seconde opération de Tesprit qui se fait relativement k Vélocutioa»

Ces mots idée^ concept^ jugement ^ doute, imagination , ne sont que des ternies abs- traits et métaphysiqnes inventés par imitation pour abréger le discours et réduire à des classes particulières certaines sortes de vues de l'esprit.

Nous avons d'abord donné des noms aux êtres sensibles qui nous ont affectés , te soleil ^ la lune , le pain , un livre , une montre j etc. ensuite nous en avons inventé par imitation, qui nous servent à énoncer des points de vue particuliers de notre esprit. Par exemple, pour marquer l'état >prëcis de Tanimal , en tant qu*i}' exerce ses Fonctions , nous disons fa t^ie \ Tétat ou il est , quand il cesse de vivre , nous l'appelons la mort. Il en est de même de sommeil ^ouie^ peur, amour, haine, em^ie, beauté ^ laideur j et d'une infinité d'autres. Tous ces mots ne marquent point d'objets réels qui existent hors de notre esprit , tels que les noms que nous donnons aux ob- jets sensibles. Les termes métaphysiques

de M^ du Marsais» xo^

dont je parle sont des mois ioventës par imitation ^ pour nous servir à énoncer avec plus de facilité et de précision certaines considérations particulières de notre esprit. C'est «linsi que noas nous servons des signet de Tarithmétique et de ceux de i*a1gébre« Quand je considère le soleil^ je donne «D certain temps à cette considération. Si je pense ensuite à la mer, à la luné^ aux étoiles , cbacuue de ces pensées a aussi son temps , dont l'un est différent de l'autre^ et chacun des objets de ces pensées a son nom. De même , je sens que dans l'état .où je me trouve , quand je suis occupé d'une abstraction, et que je réduis, par exemple, chaque sorte de propri<^lé à un certain point auquel je les rapporte toutes ^ chacune séparément , ces différens états de moi pensant ont chacun leur instant, et je donne des noms particuliers à ces difTérentei pensées iibstraites, sans qu'il y ait bora de moi aucun objet réel qui réponde à chacun de ces noms, comme il y a ua objet qui répond au mot soleil^ un autre au mot lune y et ainsi des autres mots qui sont les noms d'èires qui ont une existence indépendante de ma pensée.

Zto 4Eu(fres posthumes

L'ordre physiqae a des noms appellatifs, qui ue sont au- fond que des termes abstraits quand on n'en fait aucuâe application par- ticulières^ par exemple y ville ^ moniagre ^ riffière , arbre , animal , homme , efcc, ces" noms sont dits' ensuite dts objets par- ticuliers à la manfère des noms adjectifs* Il en est de même dans l'ordre métaphy- sique. Il a aussi âes noms appellatifs , idée y concept y jugement y affirmation ^ né" gation y doute ; etc. On en fait aussi des applications singulières, une telle idée, un tel jugement, etc. et ces noms ainsi appliqués dans Tun ou Taotre ordre n'étant plus considérés selon ce qu'ils ont de commun , ou avec des considérations pa- reilles de Tesprit, ou avec d*&utres êtres semblables, ils deviennent comme aotane de noms propres, en vertu des mots que nous y joignons pour en faire une applt«> cation singulière»

Ces termes métaphysiques étant une fois inventés et adoptés pat l*usage , ils entrent .'dans le dictrotinaire de la lajsgue , et nous en usons de la même manière qu'C nous nsons des mots qui marquent des objets réels.

de M. du Marsais. III

Nous commençons toujours par le sen^ sible. Noua avons ^xl y j'ai un habit ^^ j'ai une pomme , j'ai un livre > Nous nous som- mes familiarisés avec le verbe avoir ^ qui est an miot très-intéressant. Ensuite la disette de termes , et le besoin de nous e:iprimer % nous ont fait transporter ce mot Oifoir ea d'autres occasions , nous observons queU que sorte de rapport à la possession , parce qu'en effet nous voulons exprimer alors un état qui nous est propre. Ainsi , comiuc nous avons dit j'ai un liçre , j'a\ un dia^ mant j j*ai une montre ^ nous disons par imitation, y'a/ la Jièvre , j'ai envie , jai peur , fai vn doute , j'ai pitié , j'ai une idée y etc. mais livre , diamant , montre » sont autant de noms d'objets réels qui existant indépendamment de notre manière de penser ; au lieu que santé ^Jièvre , peur^ doute , envie , ne sont que des termes méta-« physiques qui ne désignent que des ma- nières d*êtres considérés par des points de vu'e particuliers de l'esprit.

Dans cet exemple, j'ai une montre, j* ai est une expression <]ui doit être prise dans le sens propre ; maïs dans j'ai une idée ^ j'ai n'est dit que par nue imitation. C'est

Hz (Euçres posthumes

une expression empruntée. J'ai une idée , c*est-k-dire ^jc pense ^ je conçois de (elle ou telle manière^ J'ai ençie , c'est-a-dire y je désire , j'ai la volonté , c*est-à-dire , j^ ceux , etc.

Ainsi , idée , concept , imagination ^ ne marquent point d'objets réels , et encore moins des êtres sensibles que 'l'on puisse unir l*un avec Tautre.

^ Ce n*est point par de telles opérations que les enfans commencent à juger , ni que les sourds et muets de naissance , for« ment leur jugement. Ils n*ont pas l'usage des mots qui seuls nous servent dans la suite à dlvisernotre pensée. Les mots n'étant formés qu^ par des sons qui se succèdent l'un et l'autre, ils peuvent être joints ou séparés , et c'est ainsi qu'ils nous servent à considérer séparément ce qui en soi n'esl point séparé.

Un enfant à qui pour la première fois on donne du sucre , sent que le sucre est doux; mais il ne considère pas séparément le sucre et puis la qualité de doux , dont il n'a point encore fait un terme abstrait. D'abord , il n'a que le sentiment , et lors- que dans la suite il se rappelle ce senti*

de If. du Marsahé Ii3

ment par la réflexion j ou qu'il le com« . pare avec quelqu 'autre sensation , tout cela se fait par autant de points de vue de l'esprit qui sout la suite ou le résultat des différentes impressions qu'il a reçues , sans qu'il fasse encore aucune de ces considéra^ tions particulières qui divisent la pensée.

Mais il nous importe par bien des mo- tifs de faire connoilre aux autres nos sen- timeos ou nos pensées : or comment leur communiquer les affjctions intérieures l Les autres hommes aussi bien que nous , ne peu-» reat connoitre que ce qui fait quelque im<« pression sensible sur les organes de leurs sens, on ce qui n'est qu'une suite y une con- séquence y une induction de quelques-unes deces impressions : or ce qui se passe au-àe«> dans de nous-mêmes , ce qui nous affecte intérieurement , ne peut par soi exciter aucune impression sur les organes des autres hommes

Nos besoins nous ont appris le secret de cette communication de pensées. D'abord la nature nous a donné les signes des p2ts<« sions *, ils sont entendus dan& toutes lea nations^ à cause d'une sorte d'unisson qu'il j à entre nos organes ti les organes dea

114 Œuçres posthumes

antres hommes. Cea sigoesdes passions soni le rire , les larmes^, les cris, les soupirs , les regards , les éruottons du visage , les gestes , etc. Ua seul mouvement de tête fait cou- noStre une approbation , un conseniemènt ou un refus. Ces signes répondent k la sim- plicité et à Tunité de la pensée ; mais, ils ne la détaillent pas assez , el par-lk ils ne pej^vent suifire a tout.

C'est ce qui nous fait recourir k Tusage delà parole. Les sous articulés qui sont ea grand nombre , et auxquels l'expérience e( Tusage ont enfin donné des destinations par<« ticulières 9 nous fournissent le moyeu d'ha- biller, pour ainsi dire , notre pensée , de la rendre sensible , de la diviser^ de l'ana^» lyser , en ua mot de la rendre telle qu'elle puisse être communiquée aux autres avee plus de précision et de détail.

Ainsi y les pensées . particulières sont ^ pour ainsi dire, chacune un ensemble, «a tout que Tusage de la parole divise , analyse et distribue en détail par le moyen des jli£Pérentes articulations des organes de la paroîe qui forment les* raots«

La nécessité d*attalyser notre pensée ^ ^fâk de poavoir Ténoncer par reotremise

de M. du Marsats» » Ii5

des mois, nous j fait observer ce que nous n'y aurions jamais remarqué, si nous n^avions point été forcés, de recourir k cette analjrse pour rendre nos pensées communicables , et les faire passer , pour aÎQsi dire dans l'esprit des autres.

L'éducation et ie commerce que nous avons avec les autres hommes , nous ap-* prennent peu à peu la valeur des mots , leurs différentes destinations , les divers usages de leurs terminaisons , et ce qui fait qu'ils concourent ensemble à exciter dans l'esprit de celui qui lit , ou qui écoute, le sens total ou la pensée que nous vou? Ions faire naître. L'usage de la vie nous fournit une abondante provision de ces difierens secours , que l'habitude et l'imi^ talion nous font ensuite employer au besoin et à propos.

Mais il s'en faut bien que tous les peu<« pies du monde se servent des mêmes mots et de la même méthode pour analyser leurs pensées y et'ponr les communiquer aux auties.

Comme chaque langue particulière est d'institution humaine, et qu'elles on€ été formées en différentes sociétés d'hOrames

Ii6 (Eupres posthumes

rassemblés en certains pays, qui ae pou- voient point avoir un 'commerce de tous les jours et de toutes les heures avec les autres peuples ', de-là est venue la diffé- rence dans les langages , aussi- bien quç la variété que Ton remarque dans la manière de s'habiller, dans les mœurs , dans les goûts et dans d'autres usages. X.e climat et le concours de mille autres circonstan- ces apportent aussi des différences dans tous les points } mais pour ne parler que du langage, observons qae les langues diiSerent entre elles.

i.° Par la nomenclature , c'est-à-dire , par le ^n particulier des mots. Nous disons le Roi ^ les Latins disoient Reop , les Orecs '&9tvix%uç,

^.^ Les langues diffèrent par l'aboiidance des mots. Il y a des langues bien plus riches en . mots , et même en lettres que d'autres langues. Dans les langues riches « lés pensées sont analysées avec plus de détail, de netteté et de précision» La lan- gue hébraïque est fort stérile; la langue grecque est très-abondante»

On peui observer à ce sujet qu*il.ri*j % point de langue qui n'ait quelque mot

de M. du Marsais, I17

qa*oa ne sauroît rendre en nulle autre langue autrement que par une périphrase* Par exemple, nous avons régne et royaume ; les Latins n'ont que regnum , royaume , et s*ils veulent dire sous le rè^ne d'Au'* giiste, ils ont recours à la périphrase , datis le temps- qu'Auguste régnoit^ sous Auguste régnant: régnante Cœsare Aum

giiSto,

3.^ Il 7 a dans toutes les langues des façons de parler particulières, qu*on ap- pelle idioHsmes^ ou phrases d'une langue* On dit, est une phrase de la langue fran<« çoise. Si àice, esi une phrase de la langue itâlieoae,

H arrive souvent que' les traducteurs ne peuvent rendre ces façons de parler par d'autres qui y répondent exactement; alors on a recours 9 des équivalens , ou k la périphrase.

Tous les mots et toutes les façons de parler qui ne sont point en usage dans uoe nation, blessftnt les oreilles de ceux qui n'y -sont pas accoutumés ^ parce qu'il faut alors q^pe les esprits janimaux se fraient dans le cerveau nne route nouvelle. On dpic , dans ces occasions , se servir de fa«

îi8 (Supres posthumes

çoDS de parler connues qui répondent , autant qu*il est possible , aa sens de la phrase étrangère. Par exemple: comment povs portez-vousl ne saaroit être rendu en latin par quomodo fers tel Celte façon de parler latiae: dabis pœnas , qui veut dire vous en serez puni , vous en porterez la peine ^ ne sauroit être exprimée en Fran- çois par cous donnerez les peines. Si le feu prend à la maison, nous crions au Seu; les Latins crioieut les eaux^

Territa piçinot Te ta clamât aquaSm

Propert. iib. IV. Eleg. IX. Ce qu'on ne aauroit bien rendre en françois qu'en di- sant: Teie épouçantée voulant faire pejiir les voisiiis à son s f cours , se met à crier au feu^ au feu. Ce qui fait bien voir qu'avant de composer en une langue, le bon sens et la droite raison demandent qu'on ait appris par TexplicatioB les différentes façons de parier propres à cette langue: en un mot, on doit conooître Toriginal av.ant que de faire des copies. Tel est le senti- ment de tous les grands Maïunts.

Outre les différences arbitraires qui dis- tinguent les langues Tune de Tautre on

i^e M, du Marsais. I19

doit observer que toutes les laagues con- viennent en ce qu'elles ne forment de sens que par le rapport ou la relation que les mots ont entre eux dans la même propo- sition. Ces rapports sont marqués par Tor- dre successif observé dans la construction simple les mots se divisent en déier" minés et en défcrminans.

Outre cette construction simple et na- turelle qui énonce 4es mois, selon la dé- termination que le mot qui suit donne k celui qui le précède, il y a encore la cons- truction usuelle et élégante ^ selon laquelle à la vérixé cet ordre est interrompu ; mais il doit être rétabli par Tesprlt , qui n'en* tend le sens que par cet ordre ^ et par la détermination successive des mots', sur- tout dans les langues qui ont des cas. Les différentes terminaisons de ces cas aident l'esprit à rétablir Tordre quand toute la proposition est finie.

Tieyre , tu patulA recuhans suh tegmtne

As*'

Formotam resonare doces Amarjrliidm' Syli^as.

Apres que la' phrase est finie, Tesprit aper<- çoit des rapports de tous les corrélatifs , er

lûa (Rùi^res posthumes

les range selon Tordre de ces rapports: Tityre ^ tu recubans sub tegmine J'agi pa» fiiîœ , doces Sylças resonare Amaryllida ^formosam. On trouve dans Cicéron, tuas accepi liiteras, et litteras accepi tuas, et «afin accepi litteras tuas* Ces trois ma- nières signifient également : J*ai^ re^u votre lettre, parce que les terminaisons indiquent a l'esprit Tordre signiHcatif.

En françois , dans la construction usuelle même, on sui( communéiAent Tordre de la construction simple y et Ton ne s*en écarte que qnand cet ordre peut facile- ment être aperça par Tesprît. Le roi aime le peuple: le Roi, le peuple j voilà les noms sans aucune variété d*inflexion, et par con- séquent sans cas. Mais, selon Tordre suc- cessif de leurs relations , le Roi étant mis le premier, ei le peuple étant placé après le. verbe , c*est le Roi qui aime , et c'est le peuple qui est aimé. Ce qui est si vrai , que- si Ton dit le- peuple aime le Roi : cet arran- gement fait un autre sens. Il pient , çient~il l ce sont deux sens différens. Le dernier marque une interrogation. Les Latins pour la mar- quer , se servoient de certaines particules : nùniy an, numguld ^ etc,

.Il

de M, du Marsais* 12 1

Il faut donc non-seulement entendre les mots, mais on doit de plus cooooitre les signes établis dans une langue , pour mar- quer les rapports que l'on met entre les mots qaand on fait Tanalyse des pensées , sans quoi nous ne saurions les développer aux autres* C'est ce qui fait Tembarras setrou- vent les ieunes gens , et ceux qui ont passé dans la solitude les premières années de leui^ vie. Quand ils veulent énoncer leurs pensées^ ils n'ont, point acquis une suflisante provi- sion de mots ou signes pour développer net- tement ce qu'ils pensent , selon l'usage établi parmi ceux qui ont vécu dans le commerce des honnêtes gens d'une nation.

La connoissance du signe de la relation des mots est si nécessaire , que quand même vous entendriez la simple signification de tous les mo^s d^une. langue , saiis avoir la connoissance du signe dont nous parlons ^ vous ne pourriez expliquer que les pbras< s dont les mots seroient arrangés suivant l'ordre quejious suivons en frauçois. Par exemple ^ Phèdre parlant de l'épouvante furent les grenouilles après que Jupiter leur eut en- voyé un hydre pour Roi). dit: Vocemprcc" iiludit metus Je suppose que quelqu'un ne

Ï22 Œttçre^ posH^umed

coanoi^se point te signe de- tu relation des mots latins , et que cependant il saehe qae pocem signifie la çoix , metus la crainte , ^'îl traduit selon l'ordre il irottre que les- mots sont placés en latin , il dira la vo/j? leur J'erme la crainte ; Ce qui fera' un contre-sens ridicule. Mais celui qui connoit le s^g]le ëta« bli en laifn pomr marquer la relation dont nous partons , voyant, fH>cem à raceosatif j et metus au nominatif , comprendra d^abord Tordre significatif que Phèdre SToit dans Tesprit ; qu'ainsi TAuicur a voulu dire que la crainte, étùuffd çoioc^ aux greii&mlles.

Dati« cdnstrutilfon qui est en usage par- mi ceux quf entendent et qui parlent bien une langue , on use de traorspositions , d'el- lipses et des autres figures qui sans nuire à \z clarté du discours , y apportent de la vi- racité'et de l'agrément.

C'est âiAsi que Cicéron a dit: Diûturni Hlentli , quo eram his t^mpûribui utus ^Ji-* mm hodîerhus dies atfulit.

Selon: la même manière , M. Fléclner a dit : <k Ce fut après un solemnel et magoi-^ fique sacrifice , coula le sang de mille * vTctîmes. en présence du Dieu d'Israël, f (|ae Seilonion ^ déjk renipU i% soa esprit

de Mn du Marsaîs* Ia3

f etdesaâagesse, fifi cei éloge du Roisoa y ffère 94 Et ûàns la Henriade :

Sor bords forionés de raniiqat Idalie, Lieux fiait FEarope , et commence l'Ajie ^ S*éihf^ un iltux l^alaîs respecté par le temps.

Cent qui entefident Vnioe et lat^re ko'* gae, conçoJTexit «isénicnt la pensée de l'orateur Romain , celle de rorateor Fràcr-* çois et celle de notre Poète; niai8t:e n'est qu'après qve Voù a achevé de lire Ten- semble des- mots qui -éaonceirt la pensée^ De pltfs^) observez 5 l.o que vous» ne com^if preadrfeK rien dan^ ces exeit»pleSy si vau^ n'entendiez la nometictatitrey c'est-à-dire y la signification de chaque mot particalier« En second lieH) tous n*jf comprendriez rien nos plus, si. par une vue de l'esprit vous ne rapprochiez les mots qui ont re-^ hticm Tua à rautre. Ce que tous ne pouvez faire qu'après avoir entendu route la phrase,> Par exemple, si vous avex quelque usage da Jaùn , lorsque vous Hsel la phrase que je viens de rapporter de Cicéron, en jettaot les yetfx sur àiuturni sihntiiy vous voyea bien qtie ces deux mots ont la ternait»a)S0|i

F a

t26 Œuvres pesihumes

dl&coitrs , c'esi-k-dire , que ce déplacement ne doit pas être ua obstacle qui empêche l'esprit . de celai qui lit ou qui entend , de démêler après que la phrase est finie , les dîfféreuies relaùona que celui qui a écrit » mises entre les moi$ , ou que celoi qoî l^arle y mtt. Le but essentiel du discours » c'e5t que Toa soit emenda^ Les agrémeos QUI: leur prix ) mais ce ne sont que des accessoires. C'est ainsi que Ton «'a inveeté les Jtiabits qne pour se garantir des iajorts de tl'air , quoique dajas la suite on les ait f «H servir à la parure.

AJUâi, lorsque nous parlons une langue qui nous est connue , et oette laago« ;e5t Camilière à ceux qui nou^ Usent ou qoi nous écoutent y nous^ devons analjrser nos .pensées par le secoojs des mois selon la manière la plâs gétiéralemeai usitée parmi les honnêtes gens de la nation«

C*est cette manière qu*on appelle cpns^ truction élégante , constructiaa ordiruUre , -^QnstrucUoH muelle eu d'usQge.

MaU cette manière ne peut être entendue que par la perception des relations oa rap- ports que les mots oui entre en^ dans Tes- ^it de eelui i{^\ parle, aait <jtt*U les ei-

de M, du Mar$€d$. 117

prime tous , soit qu'il n'en énonce qu'une partie.

Reouirqoec que lorsqu'il s*agit de faire enteodre une langue à ceux à qui cette bi^ae est iisçoçinue^ et sur-tout une langue roorte , il est plus, naturel et plus facile de faire d'ebord TauaJyse des pensées selon Tordre de la relation Uei mots , et c'est-là une autre sorte d'analjje dont j'entends parjcr»

Paisque cens xnéines qui entendent une langue morte ue l'entendent que par la perception de la relation des mots , il est iodispensable lie faire apercevoir ces rela- tions à ceux qui veulent apprendre une langue. Or, cette opération n*est-elle pas plus facile , si l'on dépWe les mots, qui in- terrompent les relations ,. et qu'où les rajage tous selon l'pndre du rapport q^î *c$£ entre eux ! C est vua sacrifice indispensable que rélégaucie et l'faarAionie doivent faire à l'intelligechce ;. et voilà pourquoi , qna,od 00 explique uu auteur latin dans les pre* miéres classes , on en fait ce qu'on ^p-* ^lle la construction* Ce <ru'on pratique a cet ^gard 4e -rive-voix 4a99 le* collèges ;>

.1 V ^^ 4 '

iiS Œutfres posthumes

peut fort bien être exécuté par écrit ) afin de faciliter les répétitions , et que ceux qui veulent apprendre puissent toujours .avoir un maître tout prêt. , '

Par-là ils peuvent plus facilement étu- dier les originaux , observer la différence de la construction élégante , d'avec celle qui n'a d*autre but que de donnci: rinteUf- geQce ^ et qui bien que moins usitée ' est Tunique fondement de celle qui est en usage. Enfin par ces observaiîbrts \ on se trouvera en état d'eatèndre les meilleurs auteurs.

Tel est le but que Ton doit se propo- ser dans la couslruction du texte des auteurs latins. ^

Au reste, on doit faire cette construc- tion , non selon le fraoçois ainsi que quel- ques persoi^nes publie^nt , mais selon rordl'e significatif des mots de toutes lân* gues; et telle est la relation que Tesprit de tout auteur met entre les membres de cha- que proposition particulière de son' dis- cours.

Ainsi , la phrase de Cicéron que j*ai rapportée plus hao^ , sera; l'àngée' de cette

de M. du Marsais. ti^

îorte : Dies hodiemus attuHt Jinem silentil tliutumi f quo eram mus itt his 'iémpo^

La phrase de M. Fléchîcr , qnand on vctit CD faire entendre la consiructiofia uu étran** ger^ doii être rangée ainsi : '

Ce , à savoir que Sùlotnon déjà rempli de la sagesse 9t de l'esprit de Dieu ^Jit cet tloge du roi son père ; cela , dis je , Jut, c*est-à-dire , arriva après un sacrifice solen%m nelet magnifique ^ w te sang de mille pic'^ Ornes coula,

pkus la même vue , les vers de la- Hen- riade doivent être coi^struits s«lon l'analyse ' doot il s*agit > en la manière ^ai suit. Un vieux palais respecté pat les temps s'élépe, c*esi-à-dîre , est élevé , est bâii sur les borch fortunés de tldalie antique /heux ozi /'^«U tope finit et l'Asie commence.' ' ' *

Le but de celle sorte d*arlaljst^ri'cst q^ife pour donner rînteUigence, et faire aperce* voir les rapports des mots b ceiix qui veulent -apprendre tinclanguc , ou entendre un au^- tear difficile à leur égard. '■ '

Il y a une grande injustice , ou 'peu -db bonutfbi , ou , ce qui th^parOlt'plus vrai- ^mWafole'^t plus digne d'eicii se , il -y -A

r 5

j3o ŒupiTS pcsthu/9i£i

t^reo peu de luniièrie dans ceux qui piw

.bliexu que celle rnaniire éloigue les }eupe5

gens de rélégance. C'est précisétneat (p|iX

le cûotraif^. Cette «ualy^e &it v^fr les

ionderrieii^ de la copsiructioo ^liga^e -j et

quand une fois ou ^uteud bien 1^ sens de

ce qu*ao lit) ou pr«u4 avec bien plu3 de

facilité le gojCl; de la cpp^trujctipn.éligante,

par la fréquente lecture du texte de rauteujr.

Qu y ob^e;rve 1^9 tran^pQsiuonjB , les el--

Jipses et tout j^equirçud Je .discours plus

^if, plus harmonieux ) et le f«iit lire gyeq

plaisir et avec gpût» Je pjeods :^ ^oaoia ce

.jgrand çoiubre de persono^es x{iU ont u^t-

,gUgé leurs ^Lude$ pendau^ le temps pré.«-

cieux . qui y était destinée JJ Uur e^t ar^

jivé quelquef<^îs daus Ja ^iu d'ayçtir pivert

uu/^Ipr.ace ou un Virgile, et d'aroir rç-

ferraé le livre par la seule rai$OQ ..qu'ils o*/

,iCOmpr€ucûent rien.

l\ y ^ V^ çxempl^^ bieu plus\d'bar<- .mo^e à dirp. ^vec flléchi^r dafis le ^tjfle ,i}^\éi coula le. sang de mille, pù^ffm^s, qu'à suivre l'ordre de U . çoi^triKlioo qûf jUOu^ a>cpP8^ rappomf . ,. ,, . Je pourrons .aji));|t^r ici pla5Îeujj:$! ^^tr«^ #x^niples^ Pji}44r. .fa3>,e ym^ qu§ p§P5, ^çm

dfi M, du li^arsais» l3t

9ussi 40S ÎQversioqs^ en fraoçois; mai$elJef <Joiveo( toujours être de fiaçoa k ae point C9ij^s<r d\é.^uivo(jues^ et oe doivent point çrppécher Tesprit d'^jp^rceyoir aisément le^ différentes relations des rhots , ainsi qnt PQOS TayoAS déjà reipar^ué.

C^ n'est pas sçuiUment lorsque les xiiot9 sont déplacés 'et transportés selon la cons- truction usuelle et élégante, ju*oa doi( les rapger suivant l'ordre de leur relation respective; on doii eqcore jsuivre cet or- dre ou cçtte seconde sorte d'analyse , lors4]^ue dans la phrase élégante tous )cs mots ne ^Qt pQs exprin)és ainsi qu'ils le seroient si .quelque raison particulière n'étoit paa la cause de leur suppression.

Comme npus saisissons toute notre pen- sée par <nn seul point de vue de l'esprit^ ;U)us aimons à abréger le discouri, et ^ le faire répondre, autant qu*il est possi* ble, à la simplicité et à l'unité de la pftnsép.

Ainsi, dans les cirçonstfiaces nous jugeons ^u'.un mot ou deux sui&sent pour nous fajjce epten^re, nous ppus dispensons dVs^primer les aujtres njot? éiablis selojj r^alpgie <^.i*Hsagp 4^ .^a Janine, pour

l32 Œuçres posthumes

^aoQcer en détail toote la pensëe^ Sf nous nous exprimions alors tout au lopg , ^ous BOUS servirions de plusieurs mots qui de- venus inutiles par les circonstances, ne fourniroieut aucune occupation k. Tesprit. Quand une ^fois on a représenté à l'esprit tout ce qu'on veut qu*il saisisse, et qu'on s'aperçoit qu'il l'a saisi , c'est le blesser que de lui faire prendre la peine d'écou* ter ce qui n'ajoute rien de nouveau k la pensée qu'on y à fait naître.

Telle est la cause de toutes ces propo* sîtions abrégées qui sont en usage non-> seulement dans la coùversation , mais encore dans les meilleurs Auteurs en toutes les langues. Quand tfiendrez^t^ousl demain» Il est évident que ce seul mot, demain^ pré- sente à Tesprit de celui qui a fait Vinlerro- gation, un sens complet qui ne 'peut étr^ analysé en détail que par ces mots: Je tfiendrai demain.

Dans Corneille, le père des trois Horaces ne sachant point encore le motif de la fuite de son Hts, apprend avec douleur qu'il a fui devant les trois Ciiriaccs : Quà couliez cous qu'il Jit contre trois ^ loi dit Julie? Qu'il mourût, répond le père. Or

de Af. du Marsah, iSS

TOUS Toyes qae ces mots, çu'il mourût^ prâenteat un sens total dçnt Fanalyse est: J' aurais miçua; aime qu'il mourût^ que de le Ç'ir ^ouçert de honte et d'in/aniie par la fuite.

Dans une autre tragédie de Corneille ^ Frusias dit qu*il veut se conduire en père , en mari: Ae soyez ni l'un ni Vautre, lui dit Nicomède. Prusias rëpond ; Et ' que doii^je être l Roi, réplique Nicomède. Ce seul mot Roi^ excite dans Tesprit un sens total qui est aisément entendu par ce qui précéda, et qi)i peu» être énoncé en détail que par proposition entière: Vous d-f^ejt pous conduire en Roi; pous depe^^ etc.

Observez que tous ces mots isolés sont toujours cobstruitis dans toutes les langue^ de la même manière qu'ils le seroient si le sens qui est dans Tesprit àfi celui qui parle éioît énoncé en détail par une pî^o«' position entière*^ ce qui est encore plus sensible en latin, à cause la différence des terminaisons.

Quaîid on Voit un' étourdi qui , «ans condaite et sans lumlèr'esï se mékidé aonjâèf des avisi ^ liomiiie * $âg^ ' et instriiit^

13+ Œupres po^Hmmes

Cesi gnos Jean , 4i$oDS*nous , çui r^mon^^ tre à sou Curé. L«« lAiW en pareil ca$ di^oîepi: Sus Minerçam; c*eçt ua cochpn, UQ aaiwal^ qpe grosse l>dte qui veut (iouQ^ des legoos à Minerve, déesse de la sagesse^ de la ({Qienc^ et des beaux arts. Pourrruioi l.e premier de <;çs djeux mots est-il ^n BOraioatif et le second à l*4ccusatif? c'est que si la pensée que ces deux, mois ^exciten^ dans lesprii de celui qui parle et de celju i|ui «coûte j élQit exprimée en détail sdon Tosage de la langue latine, on diroit: Sus^ 4ocel Minerifûm; ainsi ^ sus est au QOxi;ii«r natif parce qu*il est le sujet de la proposi** -tion, et AUner(fam e$i à Taccusatif, parce qu^il est le terme de l'action de docei oa doc€at^ quoique ce ^Oit ne $oit pas expri- mé. Ainsi, Qss mots isolés ont uae vérijt^ble relation à ceqx avec lesqut]^ iU expntra^** roient le sens total qui es4; dans Te^prù de c^lui qui parle, si la construçtiQu létoit pleine, et entière.

Sur ie rideau ou la doilp de la comédie italienne on lit ; Sublato fur0 nocejidi^ Pourquoi .ce;9 trois n^ats^sopt-riU Af|9^ i^s c^s ohli<|Ui9$j .c>^( qujB .les cirppn^Vf^npe^

du lifeu, et ce ^'4>^,\%m iijui ^ypas^e^

àfi il. du MarsaU. x3S

r^ffîllenc daps . l'esprit de tout homme iDitrolt an feins qui seroit exprimé tout au long eo ces terme$ : Ridcmus^ çiiia sui jure nocendi ^blâto. Nous rions ici des défauts d' autrui y san9 nous permettre de hUAêer per$onne^

II ea est de même du fameux quos ego de Virgile, du quid ais omnium de Té«- reoce, et de tous les autres exemples pa« xeils, les mots ne peuvent jamais être construit^ que dépendamment de la r^ Ia« lion qu ils om avec ceux qu'on exprime* roii si la pensée étoii énoncée en détail.

Ainsi, en toute langue^ les mots ex- primés ou sous - entendus sont toujours coastruits selon le signe du rapport qu'ils ont entre eux dans la même, proposition* C'est*là le priodpe fondamental de toute sjotaxe; c'est le fil d'Ariane > qui doit BOUS conduire dans le labyrinthe des trans- positions et des ellipses. On doit tt)u)ourt rapprocher les mots de leurs corrélatifs, et exprimer ceux qui sont sous-entendus, lorsque l*on peut pénétrer le. sens de V\nm t€ur qui, dans le tcwps même qu*il ne renonce qu'ea peu de mots, parle lou^ jours co&Cornaémient k raoalogie de sa laa^

tZ6 XEuores posthume»

gue, et imite les façons de parler ob tons les mots sont ei^priniës. Ce n'est qne p^r cette imitation I et en vertu de cette uni* formité , ' que ces énoncittions abrégée»

' peuvent être eûieùdues'.

Cette remarque nous auroit épargné bien des règles inutiles et embarrassantes de la méthode vulgaire. M. l'abbé Girard , de TAcadémie Françoise , dit que ces règles , quoique faites pour nous guider , noas égarent dans un labyrinthe d'exceptions ^ d^où il ne résulte qu'un cahos dans Tima- ginaiion , et un poids assommant pour la mémoire. Tome premier^ poge *jo, * Ce 'P qui fait) ajoute -t -il ^ que l'esprit des » jeunes gens est continuellement dans > Tincertitude , et flotte entre ^un flux et V reflux perpétuel de règles et d'irrégula- !^ rites. s> Tome premier^ poge 96.

En effet, ces règles ne sont pas tirées du rapport établi en toutes langues entre les pensées et les signes destinés à les exprimer,* Par exemple, le responsif , dit-on, doit être au même cas que l'interrogatif.

. Quis te redemit ? IÇ. Christus. Chrhtus , dit- on , est an nominatif, parce que l'in- Urrogaiif quis est au nominatif. Cujus

de Jlf, du Marsais. 187

est UberX If. Pétri. Pétri est au génitif, parce que cujus est aa génitif»

Cette règle, ajoute- t-on, a deux excep- tions, i.^ si vous répondez par un pronom, ce pronom doit être au nominatif. Cujus est liber! Bf. Meus. 2.^ Si le responsif est un nom de prix, on le met à Tablatif» Quanti emistii Bit* decem assibus.

Poor moi, qui connoîs Tinutilîté de tou- tes ces règles, et qui suis persuadé qu'au liea dVclairer et de former la raison dea jeunes gens, elles ne sont propres qu*ii leur gâter Tesprit , parce qu'elles n'ont aucun fondement dans la Mature, et que ce oe sont point ces règles qui ont guidé ceux qui les premiers ont fait usage la parole, je îes réduis toutes à. la con- noissance de la proposition, de la période et des signes des différentes relations que les mots ont entre ^ux dans la même proposi- tion; car les mots d'une proposition ne se construisent pas avec ceux d'une autre pro- position. Il n'y a de construction qo^'entre les mots de la même proposition, p;<rce qu'il n'y a d'assemblages de mots proprea ^ former un sens selon l'institution d'un*

z38 Œupres posthumeâ

langue, qa*aut9nt qu*i\ y a de SfQS par- ticuliers à exprimer. Ainsi , les mots ne doivent concourir entre eux c{n*à exprimer chacttç de ces ^eas particub'ers , autrenienc ioat seroit confondu, Quis te re démit l Voila un sens particulier, avec iequal les s)iots de la réponsa n*om rien de commun par rapport à leur coostruction^ et si on répond Christus, c'est que le répondant a dans Tesprit Christus red^mit me^ Ainsi, Christus est au nominatif, non par la rai&an de ^uU , mais parce que Xyhri^ius est «ujet de la proposition du répondant, qui anroitpu donner un autre'^our à sa réponse , «ans en alté/er le-se^. Cujus ett liber l ^f. Pétri ^ c'esttà'-dire , hic liber est Ub£f' Fetri.^CitjuB est liber l ^,'méiAS^ ç'esX-à- dire, hic liber est meus^ Quanti emistll j^. decem assibus^ c'eS't«-à-dir.e, emi pro éecem assidus.

Les mots. étant une fois trouvés , et leur valeur ainsi que leur destination et leur em^ ploi étant déterminés par Tusage , rarr^nge* meut que i*oo en a fait dans ia proposition , selon Tordre de lei^ir relation , est la nva-v oière la plus simple d'imaljr^er la peoeée*

4k M. du Marsais, 239

Tâchons donc 4e donner de la proposi- tion ei; d€ la période la conqaissance néces- saire Il tonl graïamaîrien judicieux. «

J-e fais bien qn'îl y a des CrammairieD^ dontrespriâ eçtames pey philosophique pour 4és9pprpuTer la pratiqixque je propose* Ils veulent qu'on s*en lieone seulement à un usage avengl« , comme $\ cette pratique avoit d*aiitre bui que d'éclairer le bon usage , et de le faire suivre avec plus de hin»i4ie; par GOU^iéquentavec piusdegoût« Comnoe lesper* soonçs àoni )e parle se rendent plutôt à lau*- iotité qu*à la raison , je me contente de leux opposer cepassagede Prisa en, Oramniairien célèbre ^ qui vivoil a la fin du cinquième siècle et an comnienceAient du sixième :

Sicut recta ratio scripturardûcet Uttcra^ Tum congruam juncturam j sic et ia m rec^ ipm oratioJiis comp^isitionem ratio ordinC" tionis oslfndit, Solet çuceri causa ordînis elt" mentorum^ sic eiiamde ordînatione casaum^ f / ipsarum partium orathnis soUt çuœri : qit.amçis quidam suœ sçlatium impçritim guœr^njtcs , aiwtt non ppportere de hujus^-» modi rébus quœrere , suspicantes fortuit ci esse ordinatoinis positiones ; guod exis^ti" marC penitùs stultum est. Si autçm in qui'»

140 CEuçres posthumes

busdam cenceduni esse ordinationem , nC" vesse est etiam mcnmibus eam concedercÇ^i)

A Taxitonté de cet ancien Grammairien , on se contentera d'à jcMflf^ celle d^un célèbre Grammairien du XV®. siècle , qui avoît été pendant plus de trente ans Principal d'un fa- meux colléga d'Allemagne.

In grammat/ca dictionum syntaxî, pue^- Torum plurmium interest ut ijiter exportent diim j non modo sensum , plurièus perdis ut^ cunque ac confuse coacerçûtis ^ reddant , sed digérant etiam ordine gratnmatico voces alicujus perioâi ^quœ aîioqui apud autores acri aurium judicio consuleiites ^ rhetoricâ conipositione commissœ sunt.

Hune vtrhorum x>rdinem àpuerîs in inter-^ preiando ad unguem exigere , quidnam uti^ lilaTTs afferat-i ego ipse , qui duos et triginr- ta jam annos Phrontisterii sordes , moîes^ ti'asac curas pertulij.non se met expertus sum» lut enim ac çiâjixis , ut aiunt^ oculis in» tuentur, accuratiusque animadçeriuntj quot potes sensum absolç^int , qvo pacto dictio^ nvm structura cohœrcat, quod modis singu*

(i) Fn8cUàu9, de Constructiçine f lih* (kxK , fub inilio.

dt M. du Marsais. 14I

Us nominibus singula i^rba respondeani, Quod quidemJieH nèqidt, prœcipuè in ion* giusculâ periodo , nisi hoc ordine peluti per scalarum gradusper singulas periodi partes progrediemiur ( l ).

J> E LA

CONSTRUCTION

GRAMMATICALE.

iM I f ^mimmÊmmu

E

N terme de Grammaire, OD appelle ^0725- truciion , rarrangeraent des mots dans le dinars. Le mot est pris ici dans un seii& métaphorique , et viejjit du latin , consJrner€f construire , bâtir , arranger.

La consiroction est vicieuse, quand les mots d*nae phrase ne sont^pas arrangés se-*

( I ) Grammaticte aitîs instJtatio per Joannem Fa- tembrotam Raveospurgi ladî msgistraoi jam dena* AC€aratè conciaxitta. Basilate^ aa 1639.

Ï4* Principes

Ion rosaged'uâe langue. dit qu*n»« con9« croctîoti ct\ grecque ou latine ^ lorsqiJ'e ^^^ mots sont rangés dans aa ordre confornite à Tasage , ao tour, aa génie de la langue gr'eC'- <{iie , ou a celui de la langue latine.

. Conriruetkfft huche, C'evt Wyrsqne Ves iBOts sont placés de façon qu*ils semblent se rapportent à ce qui précède , pendant qu'ils se rapporter à ce qui suit. On a donné ce nom à Cent sorte de construction , par une métaphore tirée de ce que dans le sens propre , les louches semblent regarder d'ua cdté , pendant qu'ils regardent d'un autre.

On dit Construction pleine , quand on exprime tous les mots dont les rapports suc- cessifs forment le sens que l'on veut énoii'- eer. An contraire , la construction est ellip'» tique , lorsque quelqu'un de ces mots G»t aous-enteodu.

Je crois qu'on doit pas confoirdre cons^ truction avec syntaxe. Construction ne prë^ ^ente cfue l'idée de combinaison et d'arran* gemeat. Cicéron a dit , selon trois combkiai- sons différentes , Accepi Uitert^ tuas ; tuas accepilitteras, et littéras accepi tuas, U y a trois constructions différentes , puisqu'il y a trois-différens arraogefncss de mots : ce*

de Grammaire. 143

pendant il xlj a qa'ude sjutaxe ; car dans chacune de ces constroctioas , il y a les mêmes signet des rapports que les mots ont entre eux : ainsi ces rapports sont Icfs mêraes ^ dans chacune ces phi'ases'. Chaque mo€ de Tune indique ë'galemeat même corré- latif qui est indiqué dans chacune des deun antres : eu sorte qu'après qu*on a achevé de lire ou d*eatefndre quelqu'une de ces trois propositions , Tesprit voit également que litteras est le déterminant d*accepi', qlie tua0 est Vadjectif He Hiitras. Ainsi , «hacnn de cti tfuis arrangemeâs excite daos Fesprit le même sens , J*ai reçu ivoire lettre. Or ce qui hkeù chaque laogile, que les mots excitent le sens que Ton veut faire naître dans Tes* prit de ceux qui savent la langue « c'est ce qu'on appelle ^jf^rtfaa:^. La syntaxe est donc la partie de la Grammaire qni donne la con*^ lioissance des signes établis dans une langue pour exciter un sensdân^ l'esprit. Ces signes, qtiand on en sait la destination , font con«- lioitre les rapports successifs que les mott oot entre eux. C'est pourquoi , lorsque ce- lai qoi parle ou qui écrit s*écarte de cet o^rdre , pctr des transpositions que l'usage au-^ (crise ^ l'esprit de celai qtiî éc<ntte on qui

K

Ï44' ' Principes

lit, rétablit cependant tout dans Tordre ,.en

vertu des signes dont nous parlons , et dont

il connoît la destination par usage.

^ Il y a en toute langue trois sortes de

constructions ^ qu*il faMt bien remarquer,

I. Construction nécessaire^sign'I'' FicATirs ou ÉNONCiATirE. C'est celle par laquelle seule les mots font un sens. On rappelle aussi Construction simpzs et Construction naturelle , .farce que c'est celle qui est la' plus conforme à l'état des choses , comme nous le ferons Toir dans la suite, et que d'ailleurs cette construction est le moyen le plus propre et le plus facile qne la nature noas ait donné pour faire connoître nos pensées par la parole. C'est ainsi que lorsque dans un traité de 'Géométrie , les propositions sont rangées dans un ordre successif qui nous en fait apercevoir aisément la liaison et le rappprty^ sans quil y ait aucune pro- position intermédiaire k suppléer, nous disons que les propositions de ce traité sont rangées dans Tordre naturel.

Cette construction est encore appellée NÉCESSAIRE, parce que c'est d'elle seule qoe les autres constructions empranieut la

propriété

de Grammaire, i^5

propriété qu'elles ont de signifier : a a point que si la consthtction nécessaire ne poavoit pas se retrouver dans les autres sories d*éaonciations, celles-ci n*exciteroienc aacan sens dans Tesprit, ou n*y excite-* roient pas celui qu'on vouloity faire oaftre. C'est ce que nous ferons voir bientôt plut seasiblement«

II. La seconde sorte de construction^ est la Construction figurée,

m

m. Enfin, la troisième est celle les mots ne sont ni tous arrangés suivant Tordre de la construction simple, ni tous disposés selon la construction figurée. Cette troi<« siéme sorte d'arrangement est le plus en usage; c'est pourquoi je l'appelle Coirs»»

TRffCTION USUELLE*

I. De la Construction simple,

«

Four bien comprendre ce que j'entends par Construction simple et nécessaI" RE, il faut observer qu'il y a bien la différence entre concevoir un sens total , et énoncer ensuite par la parole ce qu'on a conçu.

L'homme est un être vivant, capabU

G

2^6 Principes

de sentir, de penser , de coonoftrc^ d'Ima^ ^iner, de. juger, de vouloir, de se ressou- veair, etc. Les «êtes particuliers de ces facultës se fout en nous d'une manière qui se nous est pas plus connue que la. cause du mo«/enient da cœur, ou de celui des pieds jpt des mains. Nous savons par sen« tiiiient intérieur, que chaque acte particulier de la faculté de penser,, ou chaque pensée singulière, esi excitée en nous en un instant , sans divisions ) et par une simple affection intérieure de nous-mêmes. C'est une vérité dont nous pouvons aisément nous con^ vaincre par noire propre expérience ^ et sur - tout , en nous rappelant ce qui se passe en nous dans les premières années de notre enfance. Avant que nous eussions fait une ,assesL grande provision de mots pour énoncer nos pensées, les mots nous manquoient, et nous ne laissions pas de penser, de septir, d'imaginer, de concevoir et de juger. C'est ainsi que nous voulons ^ par* un acte simple du notre volonté ^ acte dont notre sens interne est a fleclé aussi prompiement que nos yeux le sont par les dilTérêntes impressions singulières de la lumière, Ainsi je crois que si après la créa»

de Grammaire, n^a

tioQ riioinme f&t demeuré seul dans le mon* de, il ne se serait jumais avisé d'observer dans sa pensée un Sujet, ua Attribut , Sobstaotif , un Adjectif, une Conjonctiou^ un Adverbe, une particule négative, etc.

C'est ainsi que souvent nous ne faisons connoitre nos sentîmens intérieurs que par des gestes, des mines, des regarda ^ des soupirs, des larmes, et par tous les autres sîgoes, qui sont le langage des passions plutôt que celui de l'intelligence. La pensée^ tant qu'elle n'est que dans notre esprit, sans aucun égard à renonciation, n'a besoin ni de bouche, ni de langue, ni du son des sjllabes : elle n'est ni hébraïque, ni grecque, ni \atine, ni barbare } elle n'esit qu'à nous. l'ttus , in domicilio cogitationis , nec he^ hrœa, nec grœca^ nec latina, nec barbara Veritas^ sine oris et linguœ organis^ sine éfrepitu syllabarum (l).

Mais dès qu'il s'agit de faire connoîire aux autres les a£fections pu pensées sin- gulières et, pour ainsi dire, individuelles de l'intelligence, nous ne pouvons pro- duire cet effet qu'en faisant en détail des

l^mmmm^

(i> S. Angutuo t Confifêf. A u ^ (^ 5.

G %

ï48 Prmc0s

impressions, ou sur l*organe de l'ouïe, par des sons, dont les autres hommes couQoisseut, comme nous, la destmation; -:0u sur Torgane de la vue, en exposant à leurs yeux par l'écriture, les signes con- venus de ces raêrties sons. Or, pour exciter ces impressions, nous sommes contraints de donner li notre penséç de Tétendue , pour ainsi dire, et des parties, afin de la faire passer dans -l'esprit des autres, elle ne peut s*introduire que par leurs sens. ' Ces parties que nous donnons ainsi à .nôtre pensée par la nécessité de Télocu- tiôn', deviennent ensuite Torij^inal des signes dont nous nous servons dans Tusa^e de la parole. Ainsi nous divisons , nous ana« .iysons)' comme par instinct, notre pensée : nous en rassemblons toutes les parties , selon Tordi'e de leurs rapports: nous lions ces parties a des signes. Ce sont les mots , dont nous nous servons ensuite pour eu afféctrer lés* sens de'cetix à qui nous vou- lons cortimqnicjïïer notre pensée. Ainsi les xpots spnt mêmp-lemps, et Tipstruraent, et le signe de la division de la pensée. Ç*Mt-de4ë que vieat la différence des lan- gues et c#lla 4^S idiotisme^; purce cpiç les

de Grammaire. 145.

hommes ne se servent pas des uiénies sigaes par-tout, et que le même fonds de peusée peut être analysé et exprimé en plus d'une manière.

Dès les preipières années de la vie, le penchant que la nature et la constiiuûou. des organes donnent aux enfans . pour li- mitation , les besoins , la curiosité , et la présence des objets qui excitent» Tattention, les signes qu*on fait aux enfaâs en leur montrant les objets ; les noms qu'ils en<- tendent en même- temps qu*on leur donne ; Tordre successif qu'ils obse^^yent que Ton. suitj, en gommant d'abord* les objets , el en énonçant ensuite les modificatifs et las mots déterminans ; l'expérience répétée à chaque instant et d'une manière uniforme ; toutes ces circonstances , et la liaison qui se trouve entre tant de mouvemens excités en même-temps : tout cela / dis- je ^ apprend aux enfant,^ non - seulement les sons et la valeur des roots ; mais encore l'analyse qu'iU. doivent faire de la pensée qu'ils ont à énoncer , et de quelle manière ils doivent se servir des mots pour faire cette analyse, et pour forn^er un sens dans l'esprit de\,

G 3

l5o Principes

citoyens parmi lesquels la Proviclence les a Mt naiire.

Cette méthode , dont on is*est seryi a BOtre égard , est la même qu'on a employée ^ans'tous les temps et dans tous les pays du monde ; et c*est celle que les Nations les plus policées et les peuples les plus barbares mettent en œuvre pour apprendre à parler à leurs enfaors : c'est uit art que la Nature même enseigna. Ainsi , je trouve que dans toutes les langues du monde, il n*y a qu'une même manière' nécessaire pour former un stns avec les mots : c*est l'ordre successif dés relations qui se trouvent entre les inots^ dent les uns sont énoncés comme devant être modifiés ou déterminés , et les autres comme modifiant ou déterminant. Les pre- miers excitent l'attention et la curiosité; ceux qui suivent , la satisfont successive- ment.

C'est par cette manière que l'on a com^ mencé dans notre enfance h nous donner l'exemple et l'usage de l'élocuiiour D'abord on nous a montré l'objet; ensuite on l'a nommé. Si le nom vulgairfB était composé 4z lettres dont la prononciation f&t alors

de Grammaire, x5ï

f r«p difficile poar ooos , on ca Jubstituort d*aiitres ,plas aisées à articuler. Après le nom de Tobjet , oa ajoatoil le^ mots qui le niQdifioieat , qai en niarquoieoi les qualitë« ou les actions , et que les circoijistaiices et les idées accessoires poa votent aisément, noos faire connoître.

À mesore que nous avancions en âge ^ et que Texpérience nous apprenoit le sens et Tusage des Prépositions , des Adverbes , des Conjonctions , et sur -tout des diffé- rentes terminaisons des Verbes , destinées k marquer le nombre , les personnes et le» temps, Bhous devenions plui habiles à dé- mêler les rapports des mots , et a en aper- cevoir Tordre successif, qui forme le sen» total des phrases , et qu'on avoit grande attention de suivre en nous, parlaot.

Cette' manière d'énoncer ï^ mots, succes* sHementy selon l'ordre la iiiodificaiipii on détermination que le mot qui.^pit donne à celai qui le précède a fait règle dans notre esprit. Elle est devenue notre modèle in- variabU ; au point ^e,. saiis^elle, ou da moins sans les sepour^ qui nous aident à la rétabKr ^ les mots ne présentent que leur signification absolue.) sans que leur en*.

G 4

iSft Principes

semble puisse former aucun sens. Par exemple :

Jtrmm vtrumgue cano'^, Trojct quiprtmti»

ah orîs f '

Xtatiam ^fato prp/ugus, ZaviAa^uê-veni^

t

Otec II ces mots latins les terminaisons on dësinances ^ qui sont^ les signes de leur valeur relative , et ne leur laissez que la pre- mière terminaison , qui n'indiqué aucun rapport , vous ne formerez aucun sens. Ce seroit comme ai l'on disoit :

termes, homme , /e ehànte'f Troie, futf

premier « dês câtê» f Italie^ destinyfitgiH/^ X^yimienê , vini , rivAgeë,

Si ces ihots étoient ainsi énonces en latin avec leurs* 'terminaisons absolues , quand même on les ranger oit daâs l^ordre oit on les voit dans Virgile , non - seulement ils perdroient leur grâce , mais encore ils ne formeroient ancnn sensi propriété qu'ils n*ont que par lenk's terminaisons rèktires , qui ^ après' que toute la Proposition est (nie , nous les font régarder selon' l'ordre de leurs rapports y et par conséquent «don

àe Grammaire. i53

i'ordre de la construction simple^ nécet^ iaire et significative.

Cano arma atçue i^irum^ qui ifir, pro^'

Jiigus àjato, venitprimus, ab oris Trojœ^

in lialiam , atque ad Ut tara Lapina : tant

la suite des mots et- leurs désiaaDces ont

de force ponr faire entendre le sens I

Tanium itries junctwraqut poUêt-

Horace, Art FoeL t. a4(r;

Qaand une fois cette opération m'a con-« duit V l'intelligence du sens , je lis et je relis le texte de l'Auteor ; je me livre aa |ilaiaîr qife me cause le soin de rétablir , sans IRop de peine , Tordre que la Vivacité et i*empressement de Timagination p Vé\é-* gance et Tharraonie avoient renverse : et ces fréquentes lectures me font acquérir un goùc éclairé pour la belle latinité. La construction simple est andsi appelée CoysTRiTCTJON NATVmzzE , parce que c'est celle que nous avons apprise sans maître , par la seule constitation mécha- nique de nos organes , par notre attention et notre penchant *a l'imitation. Elle est le seul mojren nécessaire pour énoncer nos pensées par la parole , puisque les autres sortes de

G 5

x54 Principrs

constructions ne forment un a^ns qge \or$^ que par un simple regard de l'espril « nous y apercevons aisément l'ordre successif de la construction simple»

Cet ordre est, le plus propre à faire aper-^ cevoir les parties qa« la nécessité de Pélo- Ctttiou nous fait donner à la pensée. Il nous indique les rapports que ces parties ont en- tr'elles : rapports dont le concert ' produit ^ensemble , et , pour ainsi dire , le corps de chaque pensée particulière. Telle est la relation établie entre la pensée et les mots ; c'est'» à - dire , entre la chose et les signes qui la font connoitre : connoissanq^cquise. dès les premières années de la vie ^ f^t des ac^es si souvent . répétés , qu'il en résulte une habitude que nous regardons comme un effet nature). Que celui qui parle emploie ce que l'art a de plus séduisant ^pour nous plaire ) et de plus propre li nous toucher^ nous applaudirons à ses talens. Mais son premier devoir est de respecter les règles de la construction simple , et d'éviter lea obstacles qui pourraient nous empêcher d'jf réduire sans peine ce qu*il nous dit.

Comme par*tout les hammes pensent , et <{u'ils cherchent k faire connoitre la pens^^

de Grammaire. \ i55

par la parole. Tordre dout uous parlous esc au fond unifonne par-tout; et c'est encore ua.autre motif pour l'appeler naturel,

11 e&t vrai qu'il jr a des diffère aces dana les langues \ différeuce dans le vocabulaire ou la noaieuclature ^ qui énonce les noms des objets et ceux de leurs qualificatifs ; différeace dans les terminaisons , qui sont les signes de Tordre successif des cor* relatifs ; différence dans Tusage des méta«« phores , dans les idiotismes , et dans les tours de la construction usuelle : mais il y a uniformité , en ce que par-tout la pensée qui est à énoncer est divisée par les mots qui en représentent les parties , et que ces parties ont des signes de leur relation.

Enfin cette construction est encore ap« pelée JXATURELLE,^ par.ce qu'elle suit la nature; je veux dire ^ parce qu-elle énonce les mots selon Télat l'esprit conçoit les choses. Le soleil est lumineujp. On sait on Tordre de la relation des causes avec les effets , ou celui des effets avec leur cause. Je veux dire que la construc^ t'on simple procède , ou ^n allant de la cause à Teffet , ou de Tagent au patient; c^mme q«iand on dit ; Dieu a créé le

G 6

Ï56 Prîncîi.es

monde : Julien le Roi ajaii celle montre : Auguste painguft Antoine : c'est ce que les Grammairiens appellent la poia: actiçe: ou bien la construction énonce la petisëei en remontant de l'effet à la cause, et au patient à Tagent^ selon le langage des philosophes : ce que les .Grammairiens ap- pellent la (foîjp passipe: Le monde a été créé par l'Etre tout-puissant : cette montre a été faite par Julien le Roi: Antoine fut Paincu par Auguste, La construction simple présente d*abord l'objet sujet*, ensuite elle le qualifie selon les propriétés ou les accidens que les sens j décôuvreut, ou que ^imagination y suppose.

Or, dans l'un et dans Tautre de ces deax cas, l'état des choses demandé que Voa commence pstr notamer le sujet. En effet , la nature et la raison ne nous apprennent^ elles pas, ï.^ qu'il faut être avant qae d'opérer : prius est esse çuàYn operari ; 2.0 qu'il fàiit existei^ avant que de pou- voir être l'objet de l'action d'un autre; 3.° enfin , qu'il faut avoir une existence réelle ou imaginée , avant que de pouvoir être qualifié, c*est - à - dire , avant que de pouvoir être considéré comme ayant telle

de Grammaire* 167

ott lelle modîfieauoa propre^ ou bien tel ou tel de ces accidens qui dooDCOt lieu a ce que les Logiciens appellent des déno'^ minations externes: ïî est aimé: Il est haï: Il est loufsî II est blâmé.

On observe, la même pratique par inii- lation, quand on parle de noms abstraits et d*êtres purement métaphysiques. Ainsi on dit que la vertu a des cffarmes , comme on . dit que le Roi a des Soldats,

L'a copslruction simple, comme nous Tavons déjà remarqué^ énonce d'abord le sujet dont on juge: après quoi elle dit, ou qu'il est ^ on quiljait^ ou qa* il souffre ^ ou qu*/7 a y soit dans le sens propre, soit au figuré. ^

Pour mieux faire entendre ma pensée , quand je dis que la construction simple suit Véiai des choses^ j'observerai que dans la réa- lité l'Adjectif n'énonce qu'une qaaiifîcatioa du Substantif. L'Adjectif n'est donc que le Substantif même , considéré avec telle ou telle modification. Tel est l'état des choses. Aussi) la construction simple ut sépare t-elle jamais l'Adjectif du Substantif. Ainsi quand Virgile a dit t

jiSi Principei'

Frigidus^ jtgricolam , si tfuando êontinet

L'Adjectif frigidm étant s<^paré par plu- sieurs mots ile son substantif iniher^ cette construction sera, tant 4U*il vous plaira, une construction élégante , mais jamais une phrase de la construction simple, parce qu*on n'j ^uit pas Tordre de Tétat des cho- ses, ni du rapport immédiat qui est entre les mots, en conséquence de cet état.

Lorsque les mots essentiels à la propo- sition ont des modiilcaiifs qui en étendant ou <{uî en restreîgiicnt la valeur, la cons- truction simple place ces* modificatifs à la ^uite des mots qu*ils ;modifient« Ainsi tous les mots se trouvent rangés successivement, iïclpii le rapport immédiat du mot qui suit avec celui qui le précède. Par exemple : Alexandre çùinquît Darius ; voici une sim- ple proposition. Mais si j'ajoute des mo- dîftcatifs ou adjoints h chacun de ses termes, la construction simple les placera successive- ment selon Tordre de leur relation. Âlexan^ dre^Jilf de Philippe et Roi de Macédoine ,

<i>G«org. l^, jT, y. aSg.

àe Grammaire. xSy

painquit apec peu de troupes, Darius^ Roi, des Perses^ qui étoit à la tête d'une armé€ nombreuse.

Si l*on énonce des circonstances , dont le sens tombe sar toute la proposition , on peut les placer ou au commencement ^ ou à la fia de la proposition. Par exemple : En la troisième année de la CXIL* olym^ liade, 33o ans atfont Jesus^Chrisi, onze jours après une éclipse de Lune, Alexandre çainquit Darius: ou bien, Alexandre tfain^» qnit Darius en la troisième année ^ etc.

Les liaisons des différeutes parties du discours, telles que cependant ^ sur ces en^ trefaites^ dans ces circonstances ^ mais.^ quoique, tiprès que ^ avant que^ etc. doivent précéder le sujet de la proposition ellea se trouvent; parce •qfue ces liaisons ne sont que des adjoints, ou àt^ transitions oa des conjonctions particulières qui lient les propositions partielles dont les périodes sont composées*

Far la même raison , le relatif qvi^ quœ^ /jùodj et nos qui^ 9*^f dont, précèdent tous les mois de la proposition à laquelle ils appartiennent , parce qu'ils sefvent à lier cette proposition à quelque mot d*ttBe

x6o Principes

autre, et que ce qui lie doit être entre deux termes. Ainsi dans cet exemple vul- gaire , Deus quem adoramus est omnipo^ tens , le Dieu que nous adorons est tout- puissant, quem précède adoramus^ et que^ est avant nous adorons , quoique l'un dé- pende à* adoramus et Tautre de nous adorons , quem détermine Deus, Cette place du relatif entre les deux propositions corrélatives» eu fait apercevoir la liaison plus aisé- ment, que si le quem on le que étoient. placés après les verbes qu'ils déterminent. . Je dis donc que pour s'exprimer selon k construction simple, on doit l,^' énoncer ions les mots qui sont les signes des difi'érentes parties que l'on est obligé de donner a la pensée,, par la nécessité de réiocutîon', et selon l'analogie de la langue en laquelle on a à s'énoncer.

2.® En second lieu, la construction sim« pie exige que les mots soient énoncés dans l'ordre successif des rapports qu'il y a entr'eux, en sorte que le mot qui est ii modifier ou à déterminer, précède celui qui le modifie ou le déter/uîne.

3 ^ Enfin , ' dans les langues les mot» ont des terminaison^ qui sont les signes

de Grammaire. î^t

de lear proposition et de leurs relations, ce seroit une faute, si Ton se conteatoit de placer un mot dans Tordre il doit être selon la construction simple , sans lui donner la terminaison destinée à indiquer cette proposition. Ainsi on qe dira pas en latin | Diliges Dominus Deus tuus, ce qui seroit la terminaison de la valeur absolue, oa celle du sujet de la proposition; mais on dira DiHges Dominum Deum tuum, ce qui est la terininaison de la valeur rela- tive de ces trois derniers mots. Tel est dans ces langues le service et 1^ destina- tion des terminaisops : elles indiquent la place et les rapports des mots: ce qui est d'un grand usage lorsqu'il y a inversion ^ c'est-k-dire, lorsque les mots ne sont pas énoncés dans l'ordre de la construction simple : ordre toujours indiqué , mais rare- ment observé dans la construction usuelle* des langues dont les noms ont des cas^, c'esl-a-dire\ des terminaisons particulières destinées en toute construction à marquer Us différentes relations ou les différentes sortes de valeurs relatives des mots.

x62 Principes

II. De ta Constr action Jigurée^

L'ordre saccessif des rapports des mets n'est pas toujours exactement suivi dans TexëcutiOQ de la parole* La vivacité de ri- magiuatioQ , rempressement à faine cou- noître ce qu'on pense , le concours des^ idées accessoires 9 rharnionie , le nonib^'e , le ryihme , foat souvent que Ton supprime des mots ^ dont on se contente d*énoncer les corrélatifs. On interrorapt Tordre de Tanalyse , on donne aux mots une place on une forme ^ qui au premier aspect ne paroh pas être celle qu'on auroît d& leur donner. Cependant , celui qui lit ou qui écoute , ne laisse pas d'entendre le sens de ce qu'on lai dit 4 parce que l'esprit rectifie l'irrëgalarité àé renonciation, et place dans l'ordre d^* l'analyse les divers sens particuliers , et m^nie le sens des mots qui ne sont pas ex« primés.

C'est en ces occasii[>ns que l'analogie est d'un grand 'usage. Ce n'est alors que par analogie > par imitation ^ et en allant du connu à Tinconnu , que lious pouroiw coa* cevoir ce qu'on nous dit. Si cette ajoalogiq BOUS manquoit , que pourrions -nous com^

de Grammaire. i63

prendre dans ce qoe nous entendrions dire î Ce seroit pour nous un langage [inconnu et îniDlelligiblc, La connpissance et la pratiqua de cette analogie ne s*acquièrent que par imitation , et par un long usage commence dès les premières années de notre vie*

Les façons de parler dont l'analogie est , pour ainsi dire ^ Tinterprâte , sont des phrases de la construction 'figurée.

La Construction figtêrée est donc celle ok l'ordre et le procédé de l'analyse édoncia* tive ne sont pas suivis , quoiqu'ils doivent toujours être aperçus , rectifiés ou suppléés.*

Cette seconde sorte de construction «si appelée Construction Jigurée , parce qu'en eitet elle pren4 une figure , une forme , qui B*est pas celle de la construction simple. La construction figurée est a la vérité au« torisée par un usage particulier; ihais elle n'est pas conforme ë la manière de parler la plus réguHèts» , c'est - à - dire , \ cette construction pleine et suivie dont nous avons . parlé d'abord. Par eiserople , selon cette preiriiére sorte de construction, on dit i La fotblesse des hommes est grande : le verbe est s'acoorde en nombre et en personne avec %otx -sujet la foibiesse , et non avec des

l€6 Principes

doit pëûëtrer le mystère de leur irrégU" larilé, et faire voir que malgré le masque qu'elles portent de ranomalîe, elles sont pourtant analogues à la construction simple^ C'est ce que nous tâcherons de faire voir par plusieurs exemples^ Mais pour y procéder avec plus de clarté, il faut ob- server qu*il 7 a six sortes de figures qui sont d*un grand usage daus l'espèce de construction dont noas parlons et auxquelles on peut réduire toutes les autres*

I. L'Ellipse.

L'Ellipse, c'est-à-dire, manquement, défaut, suppression : ce. qui arrive lorsque quelque mot nécessaire pour réduire la phrase à la construction simple n'est pas exprimé , et que cependant ce mot est la seule cause de la modification d'un autre mot de la phrase. Par exemple: Ne sus Mmerçatn. Minerçam n'est à Taccusatif , que parce que ceux qui entendent le sens de ce proverbe se rappellent aisément dans l'esprit le Verbe docedt, Cicéron la exprimé^(i). Ainsi le sens est, Sus non

(i) jiciij, ip c. 4*

de Grammaire^ l^y

doceat Minerifam; Qu*ua cochon, qu^ut^Q béte , qu*ua igoorant ne s'avise pas de vouloir donner des leçon» à Minerve , déesse de la Science et des beaux Arts. Triste lupus stabuîisj c*est-k*dire, Lupus est nego^» iium triste stabuUs. Ad Castoris , supplées eedem^ ou templum Castorist Sanctius et les autres Analogistes ont recueilli un grand nonibre^*exe^ples cette figure est en usa- ge. Mais coninie les Auteurs latins emploient souvent cette iîgure, et que la langue latine est, pour ainsi dire, toute elliptique, 11 n*est pas possible de rapporter toutes les occasions cette figure peut avoir lieu.' Peut-être même n'y a-t-il aucun" mot* latin qui ne soit sous-entendu en quelque phrase. Vulcani item cumplures , suppléer y/ierM«^ Vrimus cœlo natus; exquo Minert^a Àpotli-^ nem, Ton sous^entend peperit (^l). Et dans Térence (â). Egone illam! Quœ illitm'l Quœ me l Quca non l Sur quoi Donat observe que Tusage de TEIlipse est fréquent dans la colère, et qu'ici le sens est: Egone illam non ulciscar! Quœ illum recepitl Quœ

(i) CiciEOBy de nûtura Dûcrum^ lib. III 9 e. a»^ (3) Swiu€* Act. I. Se. I.'

1^8 'Principes

exclusit me! Quas non admfsitt Prisciea remplit ces £Hipse$ de la manière suivante: Egone iliam dignor adçentu meo ! Quœ ilîum prœposuU mihil^Quœ me sp répit l Quœ non suscepit heril

Il est indiffëreat que TEllipse soit rem- plie par tel ou tel mot, poury4i que le sens indiqué par les adjoints et par les circonstances soit rendu.

Ces sous -^ ententes , dit M. Patru (i) j sont fréquentes en notre langue, comme en toutes les autres» Cependant elles j sont bien moins ordiqaires qu'elles ne le sont dans des langues qui ont des cas , parcç que dans celles-ci le rapport du mot exprimé avec le mot sous - entendu , est indiqué par une terminaison relative : au lieu qu*en François et dans les langues, dont les mots gardent toujours Leur ter- minaison absolue, il n*y a que Tordre, ou observé ou facilement aperçu et réta- bli par Tesprit, qui puisse faire entendre le sens des mots énoncés.

Ce n*est qu'à cette condition^ que Tusage

iiy Notes tur te9 llein«rqa«| éê \tiUgtU», A7J9. pag. 399^ édit. 4e i/^Sy

autorise

de Grammaire» i6f

autorise les transposiiioDS et les Ellipses. Or cette coadhioa est bien plus facile à rem« plir dans les langues qui ont des cas: ce qai est sensible dans l'exemple que nous avons rapporté , Ne sus Mmerpam : ces deux mots rendus en François n'indique^ roient pas ce qu'il y a à suppléer. Maïs quand la condition dont nous venons de parler peut aisément être remplie^ alors nous faisons usage de l'Ellipse , sur-tout quand nous sommes animés de quelque passion.

(i) le i'aimoîs înscontani: Quaurois-je /ai$ fidèU ?

On voit aisément que le sens est^ Que n'aurois-^je pas Jait si tu a (fois étéjidèle l Apec qu'elle ardeur ne t'aurois-^je pas aimé si tu apois été Jidèîe. Mais l'Ellipse rend l'expression de Racine bien plus vive ^ que si ce poète a voit fait parler Hermione selon la construction pleine. C'est ainsi que lorsque dans la conversation on nous demande , Quand repiendrez^pous ! nous répondons, la semaine prochaine; c'est- à-dire , Je repiendrai dans la semaine

(») Racine, tragéd, d'Andrwna^ue , Mt, IV, Se. Vt

H

i^

l*jo Principes

jtrochaine: A la mi-Août^ c'est-à-dire, à la moitié du mois d'Août, A la Saint^Mar^ Un; à la Toussa inis ; aa lieu de à lajeie de Saint - Martin / à la fête de tous les Saints» Qjue cous O'^t^il dit \ Rien : c*est- à--dire , il ne m'a rien' dit; nullam rem; Qu sous - entend la négation ne. Qu'il Jasse ce qu'il coudra , ce qu'il lui plaira: on sous-entend faire et c'^st de ce mot sous-entendu que dépend le ^2/& apostro- phé devant il.

C'est par l'Ellipse qu'on doit rendre raison d'une façon de parler qui n*est plus en usage aujourd'hui dans notre langue; mais qu'on trouve dans les livres, même du siècle .passé. C'est, Et qu'ainsi ne soit, pour dire, ce que je cous dis est si tfrai que, etc. Cette manière de parler, dit Danet, perbo Ainsi , se prend en an sens tout contraire à celui qu'elle semble avoir; car, dit-il, elle est affirmative, nonobstant la négation, J'étois dans ce jardin , et qu'ainsi ne soit, çoilà une fleur que j'y ai cueillie: c'est comme si je disois; et pour preuçe de cela, voilà une fleur que j'y ai cueillie: ' Atque ut rem ita esse intelligas, Joubert dit aussi. Et qu'ainsi

de Grammaire. vjl .

ne soitj c'est-à-dire, pour preuçe que. cela est; Argumenta est qubd^ au mot , Ainsi.

Molière, dans Foarceaugaac , Acte I, Se. XI , fait dire à uq Médecin , <|ae M. de Pourceaugnac e&t atteint et convaincu \\ Dtaladie qu'on appelle Méîancholie hypq^ condtiaque : Et qu'ainsi' ne soit, ajoute le Médecin I pour diagnostic incontestable de ce que je dis ^ cous 71'açez qu'à con^» sidérer en grand Jsérieux , etc.

M. de la Fontaine^ dans son Belphégor,

qiû est imprimé à la fin du Xll,^ livre

des fables, dit:

/ C'est le coeor senl qaî pent rendre traiM{aîlle: ht cœar fait tout^ le re|te est inutile. Qu'ainsi ne soityrojonn d'aatres états, etc.

L'EUipse expli(]ae cette façon de parler» En voici la construction pleine; Et rfin que ifous ne disiez point que cela ne soit, pas ainsi, c'est que, etc.

Passons aux exemples que nous avons. rapportés plus haut : De$. saçans m'ont dit; des ignorons s'imaginejit. Quand je dis, Les sapans disent ^^ les ignorons s'imaginent, je parle 4^ Ip^s les savans et de tous les

Ha

lyi ' Principes

îgnoran's: je prends sapans et ignorans , dans un sens appellatif ; c*est-a-dire , dans une. étendue qui comprend tous les iodi^ yidus auit quels ces mots peuvent être appli- qués. Mais quand je dis , Ues saçans m'ont ait; Des ignorans s'imaginent, je ne veux parler que de quelques-uns d'entre les savans, ou d'entre les ignorans: c*est une façon de parler abrégée. On a dans Tesprit, quelques * uns : c*est ce plurief qui est le vrai sujet de la proposition : de et des ne sont en ces occasions que des prépositions éxtraçtives ou partitiveSé Sur quoi je ferai en passant une légère observations c'est qu*on dit .qu'alors encans et ignorans sont pris dans un sens partitif. Je crois que te par-» tage ou re:i^tractioQ n'est marqué que par la préposition et par le mot sous-entendu , et qiie le mot exprimé est dans toute sa valeur, et par conséquent dans tonte son étendue, puisque c'est de cette étendue ou généralité que l'on tire les individus dont ont parlé: Quelques-uns de les sapons. 11 en est de même de ces phrases; Du pain et de Veau suffisent ; Donne z^moid u pain et de Veau , etc. c'est-à-dire , quel-^ ^ue chose de , une portion d^ ou du ) etc«

de Grammaire* X73

11 j a dans ces façons de parler Syllepse et Ellipse. Il y a SylUpse , puisqu'on fait la construction selon . le sens ffat Ton a dans l'esprit , comme nous le dirons bien* lèt] et il y a Ellipse , c'est-à-dire sup^- pression, mançuement de quelques * mots dont la valeur ou le. s.ens est dans l'fes- prit. L'empressement que nous avons à iaoncer notre pensée, et k savoir celle de ceux qui nous parlent ) est la cause de la sappression.de biea des mots qui seroient exprimés, si l'on jSuivoit exactement ' le détail de l'analyse énoi^siative des pensées* Muliis ante annis» H y a encore ici une Ellipse. Ante n'est pas le corrélatif de an^ nfs ; car on veut dire que le fait do.ot il s'agit s'est passé dans un temps qui est bien antérieur au tenips ou Ton parle: Illud JuU gestum in annis muUis anfc hoc tempus* Voicj un exerpple de Cicéroo (i) qui justifiebien cette explication : HqS'» pitiumy multis annis ante lioc tempus Gadi^ tani cuw^ttcio Cornelio Balbojecerant ; vous voyez que la construction selon l'ordre de l'analyse éaonciative est , Gaditani J"^"

(1) Dans rOraisoa,/7rx7 £.. CoFti, JSai^o,

H 3

174 Principes

cerani hospit'um cum Lucia G^rnelio BaU bo , in multis annis ante Hoc tempus,

*

Pœniiet' me peccati; Je me repéns de tnon péché. Voîlk sans doate aac propo- sition en latin et en françois. Il doit donc j avoir on sujet et tin attribut exprimés ou sous-entendus. J'aperçois l'attfibdt , car je vois le yerbepœnlt'ei me. L'attribut com- mence toujours par le verbe, et ici pœ^ nitet me est toiït l^attribut. Cherchons le sujet. Je ne vois d'autre mot que peccati. Mais ce mot étant au génitif ^ ne saurolt *éire le sujct de \tk 'proposition \ puisque , selon Tanalogie de la construction ordi- naire, le génitif est un cas oblique qui ne sert qu*à détei'miDer un nom d'espèce. Quel est ce îiom que peccati détermine l Le fond de^apenséie et rimifation doifeot 410US aider ^ le trouver. Conûnénçon» par Timitation. Plante fait dire à une jeune tnariée (i) : £^ me quiâeih kœc c&ndiiio nunc non pcenitèt. Cette condition , c'est- à» dir e , ce mariage ne me fait point de peine , fie m* affecte pas de repentir: Je ne me 'repens pas d*apoir épousé î& mari que mon

0

'6).^//cA. Act. Ti Se. L V. 5o*

l de Grammaire, 176

père m'a donné \ voas voyet que ro/f«

ditio est le ^nominatif de pœmtei. Et Ci-

céron dk(i) : Sapientis est proprium ^ni^

hil quod pœniiere possii jjacere : c'est-k-

dire , Non jfacere hitum quod possit pœ^ nitere sapieniem , est propriàun sapientis :

vous yoyez que quod est le nominatif

dt possit pœnitere* rien qui puisse affecter

le sage de repentir. Accius dit (2) que ,

neque id sanè me pœnitet : cela ne n)*af->

fecte point de repentir. ^

Voici encore un autre exemple: Si i*ous

aviez un peu plus de déférence pour mes apis

dit Cic^ron à son frère; si pous aptes^saciifié

quelques bons mots, quelques plaisanteries,

nous n'aurions pas lieu aujourd'hui de nous

repentir» Si apud te plus autoritas mea,

quam dicendij'aljacetiœque ifaluisset, rjrhH

sanè esset quod nos pceniteret. Il n'y xiwoU

rien qui iwus affectât de repentir (3).

Souvent, dit Faber dans. son Trésor, aa

mot pœnitet, les Anciens ont donné ua

•■ I II I I I ■! ^— > I .m

<i) Tofc. iiè. V. c. a8. (a) ^pûd Gâll. n. A, W. XIH , e, x (5) Cîcéroo, ûd Quint, fratr, lib. I, ep. ^

H 4

X'jê Principes

Bominatif à ce verbe. Veteres et cum nomi" naiiço copuîarunt»

Foursuivans notre analogicr Cicéron a dit (i) , Conscientia pcccatvrum timoré 7iocent.es qfficit; et ailleurs (jz), l^uœ libi^ dînes, targuent te ; conscientice malejiciorurn tùorum stimulant te: Veê remords tfous tourmentent: et ailleurs on trouve, CoriS'- €ientia scelerum improbos in morte vexât : A l'article de la mort, les méchans sont tourmentés par leur propre conscience.

Je dirai donc par analogie, par imita- tion : Conscientia peccati pœnitet ; «*est-à*dire , ajîcit me pœnâ; comme Cicé- ron a dit, ajfficit timoré , stimulât j çeacat, torquet , mordet: le remords, le souvenir, ila pensée de ma faute m'affecte de peine , <m'affiige , me tourmente *, je m'enajfflige; je m'en peine; je m^en repens. Notre verbe repentir est formé de la préposition insé- parable, re, rétro, et de peine, se peiner eu passé. Nicot écrit se pèner de : ainsi se Tppentir, c'est s*affiger, se puoir soi-même

»*■

{i) Parad. V* (a) Ptftd. U.

de Grammaire* I77

.â«: Quempœniiet, U, dglcudo^ à se quasf pœnam suas .iemeritati$ exigit (l).

Le sens de la période entière fait sauvent entendre le root qui est sous-entendu. Par exemple: Félix çui potuit rerum cogiios^ cere causas (2^). L'ai^técéde.nt de qui n'est point exprimé. Cependant le sens nous fait Toir <|ue Tordre de la . construction esi,^ lUe gui potuit cognoscere causas rerurn estjelix. Il j a une sorte d*£lUpse qu*oa appelle zeugma, mot jgrec, qui signifie connexion, assemblage , Cette figure sera facilement entendue parles exemples. Sal- Juste a. dit: Hon de tyromno, sed de cipe , non de domino , sed de pgrente loquin\ur; vous vojez que ce mot loquimur lie tous ces divers sens particuliers, et qu*il est soos-entendu en cHacun« Voilà TEUipse qu*on appelle zeugma. Ainsi le^çeugma se fait lorsqu'un mot exprin^ié dans quelque membre d'une, période^ e§t, sons«enteDdu dans un autre. membre de la même période. Souvent le^niol es|:bienle niém.ey eu égar,d à la signification; mats il est différent par

(1) Martin as , verho Pœnîtftt.

(a) Virgile, <r?^jfi[-+.j;v,.49p. .

H 5

tyÔ * Principes

Rapport aa nombre ou aa genre. Aqmlœ^ polarunt, hœc qb oriente, illa ah accidente. La 'constructioa pleine est, Hœc Qolaçit nh oriente; iiîa valaçît çb occidente: 'voas voyez que çolàpU , qui est sous- entendu , AiSkrt de çélarunt par le nombre. Et de même dans Virgile (i), Hic iilius 'arma, hic ^ currus fuit: vous voyez qu'il faut sous - entendre Juerunt dans le premier membre. Voici une dfffîérence par rapport au genre: Utinam aut hic sur dus , aut hœc mutajacta sit (2). Dans le premier sens on sous^'entend factus sit, et il y a Jacta dans ^e second^ L*nsage de cette sorte de zeugma^est sonfTert en latin ; mais la langue Françoise lest plus délfcateet pltls difficile à cet égard. Comme elle est plus assuj4|pe à Tordre significatif^ on 'n*y doit ^ sous- entendre un mot déjà exprimé , que quand ce mot peut convenir légalement au membre de phrase il iest sous-^entendà. Voici un exemple qui fera entendre mfa pensée. Un Auteur moderùe ^ dit: Cette histoire achètera de désabuser -ceux çùi

0) AEn. 1. 1. *

(a) Tèrenct^ jinJr, Act. tU^Sc, t.

de Grammaire, ^ ijg

mérUent de l'être: oa sous-eniead désà^ buser dans ce dernfer m^inbre oa incisej et c*.est désabuser qui est exprimé dans le premier. C*eai: jane në§BgeDoe dans •h-' quelle de boos Autours som tombés»

II. Le Pléonasme.

La seconde sorte de figicupe est le con- traire de TEUipse. C'est lorsqu'il y « daas la phrase quelque motsuperflu , qui pourroit eu être retrandië sans rteo faire perdre du seus. Ue^tftMbè^et mots ajouiés^lonneut au discofifV>9f ^lus de grâce ^ ou plus ide netteté, ou enfin plus de «force .oii plus d'énergie, ils font une figure, appstouwtée* Par exemple, quand, en certaines occi^- .sions, on dit, Jel'aii^u de mes yeûx^; Je Vai entendu de mes propres oeeiiles ^ ^c. Je me meurs ; ce me n'est que par énergie» C'est peut - être cette raisonne l'énergie qui a consacré le pléoiMitme en certaines façons de parler; comme quand on dit: Ceèt une affaire il y pa du '^alut de l'Etat; ce qui est mieux , qp$ si l'on disoit, C'est une qffaire pu il pa^ etcjenjuiçpjjmantj^^ qui ^i iputile.à cause de oà» Car, comme. on l'a obser,Yé 4a^>

H 6

î€o Princifieê

•> l€^^J{èmarçues et décrions de V Académie JrançoUe, 1698, pag. 39; Il y pa, il y

a, il eh est, soot des formules aotoiisées

dont on ne peut rien ôi«r. La figure dont nous parlons, est appelée

Pléonasme j root grec qui signifie surabon^

dance. Au reste , la surabondance qui n*est

pas consacrée par Tusage^, et qui n'apporte . al plus de. netteté , ni plus de grâce « ni

plus d'énergie, est un vice, ou du mmns vne négligence qu'on d^t. éviter. Ainsi, ~ on ne: doit pas joindre i^^igMibi^tantif une épiihète qili n'ajoute riea iifi '|f «f , et qui n'excite que ia même idée: paf exemple,

.wW'^temf^ te orageuse* H en est de ménae de cette façon de parler: Il est prai de

.dire que; de dire est entièrement inutile.

,Vn de nos Auteurs a dit (£),.qne Cicé- rpn- avoit étendu les bornes et les limites 4e l'éloquence. Limites n'ajoute rien a l'idée

'àelwmes: c^esi un Pléonasme.

III. La Syllçj)se ou Synthèse,

La troisième sorte de figure est celle ^u'on appelle SrzLJSPSs.on SrNTSÈss,

' 0) X>éfèns9 Voîtttr*, pag* u

de Grammaire. iSx

C'est lorsque les mots sont coosMmîfts seloa le sens et la pensée, pluiAt que seloi» Tusage de la coDSiructioQ ordinaire. Par. exemple, monstrum étant du genre neatre , le relatif qoi suit ce mot doit aassi être rois au genre q.eiitre ; monstrum guod. Cependant Horace, lié, Ij md. 37, a dit: Fatale mons^ trum, quœ gènerositts perire qjuœrens* Mais ..ce prodige, ce monstre faial, c'est Cleo- pâtre : ainsi Horace a dit quœ au fëmioia , parce qu'il avoit Clëopatre dans Tesprit* Il a donc fait la construction selon la pensée et non seloa les lAots. Ce sont des hommes qui ont : sont est au pluriel , aussi bien que ont, pafce que T objet de la pensée c^est des hommes, plutât que ce ^ qui est pris ici collectivement.

On peut aussi résoudre ces façons de parler par TEVlipse. Car ^ ce soûtdes hommes qui ont, etc. ce , c'est-à-dire, les personnes qui ont, etc. sont du nombre des hommes qui, etc. Quand on dit: Lajhiblesse des hommes est grande, le verbe est étant au singulier, s'accorde avec son nominatif la foiblesse: mais quand on dit, La plupart des hommes s^im/tgînent , etc. ce mot la plupart présente une pluralité a l'esprit:

î8l Principes

%\xk%\ le verbe répond k cette plaralitë , qvi est soii corrélatif. C*est eaçore ici oii« SylUpse ou Synthèse; c^est'-à-dire^ une iigure selon laquelle les mots sont cona- traits selon la pensée et la chose, pluti6t ^ue ^elon la lettre et la forme grammali* -cale. C'est pat la même ligure que le mot •de personne , qui grammaticalement est du •genre féminia , «e trouve souvent suivi de. il ou ils au masculin ; parce qu'alors on a dans l'esprit l'homme. ou les hommes dont on parle ^ qui sont physiquement du genre mascub'o* C'est par ;cejite figure que i'on peut rendre raisoo de .certaines phrases Ton exprime la particule ne , quoiqu'il semble qu'elle dût être supprimée , commç lorsqu'on dit: Je crains qu'il ne pienne ; j'empêcherai qu'ils fie pienne; j'ai peur qu'il n'oublie ; etc. En ces occasioi)s, on est occupé du désir q«ç la chose n'arrive pas : on a la volonté de faire tout ce qu'on pourra, afin que rien n'apporte d'obstacle k ce qu'on souhaite. Voilà ce qui fait ënon- £er la Tttégatioa.

IV. V Hyperbole.

' '10 quatrième sone- de %are*c*pst l'//ru

/

de Grammaire. i8S

"Pisr^ATe; c'est-à-dire, confusion-, mélange de mots. C'est lorsqu'oo s'écarte de Tordre successif de la consiructioa simple. Saxa vacant îiali ^ mediis quœ in Jiuctiàus, aras (c). La cous truc tioa est, Itali vocani ûras ilià saxa quœ sunl injïuciiàus mediis* Cette figure étoit, pour ainsi dire, natu- relle au latio. Comme il n'y avoit que les terminaisons des mots, qui dans l'usage t^f^lnaire fussent les lignes de la relation que les mots avoient entr'eûx, les Lalius n*avoieAt égard qu'à ces terminaisons, et ils plaçoient les mots selon qu*ils étoient -présentés a l'imagination , ou -selon que cet arrangement leur paroissoit produire une cadence et une harmonie plus agréables ;^ mais parce qu'en françois les noms ne changent point de terminaison, nous sommes obligés communément de suivre l'ordre de la relation que les mots ont entr'eui. Ainsi nous ne saurions faire usage de cette figure I que lorsque le rapport des corré- latifs n'est pas .difGicile à apercevoir. Nous ne pourrions pas dire comme Virale (2):

(1) .^^neid, 1. 1, t. ii3.

l84 Principes

w

Frigidu»^ é puûri ^ fêàgUa hine ^latet (fngiàit in hêrha.

L'adjectif ;/ri^î(f«5 commence le vers , et le substantif anguis en esc séparé par plu- sieurs mots , sans que cette séparation ap- porte la moindre confusion. Les terminai;*' sons font' aisément rapprocfaer l'un de Tautre Il ceux qui savent la langae.'Mais nous ne serions pas entendus en françois^.si nous mettions un si grand intervalle entre Je subs- tantif etTadjectif. Il faut que nous disions: Fuyez , Unfroid serpent est caché sous V herbe. Nous ne pouvons donc faire* usage des •inversions, que lorsqu'elles sont aisées à ramener a l'ordre significatif de la construc- tion simple. Ce n'est que relativement k cet ordre , que lorsqu'il u'est pas suivi , on dit en toute langue qu'il y a inversion , et non par rapport à un prétendu ordre cTinié- rèt et de passion, qui ne saùroit jamais être un ordre certain , auquel on peut opposer •le tefrae d'inversion : Incerta hœc si ia pos* 'fuies ratione certâfacere j nikilù plus agaSj ^uàm si des operam ut cum ratione insa* ^nias (i).

(i) T*r«iice , JSunuch, Act, L ^ h v. 16.

de Grammaire. i85

En effet on trouve dans Cicëroa* et dans chacan des Auteurs qui ont beaucoup écrit ; on trouve, dis-je, eo différeos endroits , le même fond de pensée énoncé avec les mêmes mots ; mais toujours disposé dans un ordre différent. Quel est celui de ces divers arrangemens, par rapport auquel oa doit dire qu'il y a inversion? Ce ne. peut jamais être que relativement à la construc- tion simple. Il n'y a inversion que lorsque cet ordre n*est pas suivi. Toute antre idée est sans fondement , et n'oppose inversion qu'au caprice ou à un goût particulier et momentanée.

Mais revenons a nos inversions françoise^ Madame Deshoulières dit:

Que les foagaeas A^uiloni, Sous sa nef^ ouvrent de l'oade L«j gooffrsa lea plus profonds.

La construction simple est , Que les Açui» loTis fougueux ouçrent sous sa nèfles govf- J*res les plus profonds de Vonde, M. Flé- chier, dans une de ses Oraisons funèbres, a dit, Satrifice coula le sang de mille victimes» La construction est y Sacrijicè le sang de mille victimes coula »

/

J

i86 Principes

Il faut prendre garde que les trànsposi* ' tioDS et le renversement d'ordre ae dounent pas lieu a des phrases louches et équivoques, et Tesprit ne puisse pas aisëment rétablir l'ordre significatif. Car on ne doit jamais per- dre de vue qu*on ne parle que pour être en« |endu. Ainsi lorsque les transpositions ser- vent h la clarté , on doit , même dans le discours ordinaire, les préférer à la cons- truction simple. Madame Deshoulières a dit :

Dans TtB transporta qQ*Snspîr« Cette agréable aaîaoïi , le cœur , & «on empire ^ Assu)ettit U raison.

Ij*esprit saisit plus aisément la pensée , que si cette illustre Dame avoit dit , Dans les transports que celte agréable saison , le cœur assujettit la raison à son e/w- pire , inspire. Cependant y en ces occasions- même , Tesprît aperçoit les rapports de$ mots , selon l'ordre de la construction si- gnificative.

V, "L'Hellénisme , etc.

La cinquième sorte de figure , c'est l'î* mîtation de quelque faç,on 4e parler d'une

de Grammaire* 187

langue ëtrangcrc , ou même de la langue qu'on parle. Le commerce et les felaliooa qu'uDc'Natîoa a avec les autres peuples , fout souvent passer , dans une langue , non- seulement des mots , mais encore des fa- çons de parler , qui ne sont pas conformes il t^ construction ordinaire de cette langue. C'est ainsi que dans les meilleurs Auteurs la- tins on observe des phrases grecques qu'on appelle Héllénismes. C'est par une telle imitation qu'Horace a dit (1), Daunus agrestiam regnatfit populorum. Les Grecs disent %* SaTt^.ivo' ruf XuSf^ Il j en a plu- sieurs autres es^emples. Mais daus ces fa- çons de parler grecques , i) y a ou un nom substantif sous-enteodu , ou quelqu'une de ces prépositions grecques qui se construisent avec le génitif. Ici on sous. entend , Btertxit^w coiunie M. Dacier l'a remarqué i Reg^ notait regnujn popuforum, Horace a dit ailleurs ( i ) regnata rura. Ainsi quand on dit que telle façon de parler est une phrase grecque , cela veut dire que l'Ellipse d'un certain mot est en usage en grec dans ces

(1) Lib, nr. Ode, 3o, V. la. (a) Ub. II. Odû 6, t>. II.

l88 Principes

occassions , et-que cttte Ellipse D*est pas en usage eu latia daos U cpastructioa usuelle ; qu*aiasi on ne Vy trouve que par imitation des Grecs« Les Grecs ont plusieurs pré- positions qu'ils construisent avec le génitif; et dans Tusage ordinaire ils suppriment les prépositions , eu sorte qu'il ne reste que le génitif. C'est ce que les Latins ont souvent imité. Voyex Sanctius > et la Méthode de P. R, de l'Hellénisme, p^ SS^. Mais, soit •n latin , soit en grec , on doit toujours 'tout réduire à la construction pleine. et à l'analogie ordinaire. Cette figure est aussi usitée dans la même langue , sur*tont quand on passe du sens propre au sens figuré , on dit au sens propre qu'un homme a de l'argent , une montre , un liçre ^ etj'on dit par imitation , qu'il a ençie , qu'il a peur q^u'il a besoin , qu'il a faim , etc.

L'imitation a donné lieu \ plusieurs fa- çons de parler , qui ne sont, que des for- mules que l'usage a consacrées. On se sert si souvent du pronom il , pour rappeller dans Tesprit la personne déjà nommée , que ce pronom a passé ensuite par imitation dans plusieurs façons de parler , il rappelle l'idée d'aucun individu particulier.

de Grammaire, 189

n est plutôt uoe sorie de nom métaphy- sique idéal ) ou d*îmitatioa.C*est ainsi que Ton dit : // pleut , il tonne , il S^^^ > '^ y a des gens qui s'imaginent ^ etc. Ce //, ilîud^ est un mot qu'on employé par analogie , k l'imitation de la constrnction usuelle , qui donne un nominatif à tout verbe au mode fini. Ainsi il pleut ^ c'est le ciel ou le tems qui est tel , qu'il fait tomber la pluie. // Jaut , c'est-à-dire ^ cela , illud , telle chos9 est nécessaire ^ sat^oir , etc.

yi. L'Attraction.

On rapporte li l'Hellénisme une figure re«- marquable , qu'on appelle Attractiott^ En ejffet cette figure est fort ordinaire aux Grecs. Mais parce qu'on en trouve aussi des exemples dans les autres langues , j*ea fais ici une figure particulière.

Pour bien comprendre cette figure , il faut observer , que souvent le méchanisme des organes de la parole apporte des chan- gemens dans les lettres des mot$ t[ui pré« cèdent ou qui suivent d'autres mots* Ainsi, au lieu de dire régulièrement adlqqi^i alU quem , on change le d delà préposition i^d en / ,. à cause de 1'/ . ^*oii va prononcer ,

% îço Principes

et que Ton dit , al-!ogui aliqaem , plulAc que ad-'Iogui ; et de même ir-ruerre , au lieu de in^ruere , col - loqui , au lieu de cum ou coTi'^îogui^ etc« Ainsi 17 attire une autre /, etc.

Ce"^ que le méchaaisme de la parole fait faire à Tégard des lettres , la vue de l*esprit tournée vers ua mol principal , le fait pra« tiquer a Tégard de la termioaisoif des piots. Ou prend un mot selon sa signification ; on n'en change point la valeur^ mais à cause du cas ou du genre , ou du nombre , on enfin de la terminaison d*un autre mot dont rimagination est occupée , on donne a un iljiot voisin de celui-là, une terminaison dif- férente de celle qu'il auroiieu selon la cons<* truction ordinaire ; en sorte que la termi- naison du mot dont l'esprit est occupé; attire une terminaison semblable , mais qui n*est pas la néguli^re. Vrbem guam statuo i^esira est ( i ). Quam siatuo a attiré i^r* hem au lieu de urbs \ et de même Populo ut placèrent giiasje£isset ^fabulas \ au lieu de fabulœ ( 2 ).

^«i

0) ^^«. 1. I.

(a) Térencê , *dndr, Prol,

de Grammaire. 19I

Je sais bien qu*ou peut expliquer (;es exemples par TEllipse : IHœc urbs , quatn urbem statua ^ etc. lUœ^fabu'cBj çuasja^ hulasJecissJSt: mais l'attraclioa en est peut- être la véritable raison. Du non concessére poetis esse medioçrièus ( I )• Mediocrihus est attiré par poetis. Animal protfidum et Siigax , quem^çocofnus hominem (a ) ; vous YOjez que hominem a attiré quem ^ parce qa'ea effet hominem étoit daas l'es- prit de CicéroD dans le temps qu il a dit i* animal proçidum, Benepoîeniia , gui est amicitiœ Jons (3). Fons a auiré qui^ au lieu de quof Benepolentia est Jons , qui est fom ùtnicitiœ. Il y a un grand nombre d'exemples pareils ilaas Sanctius , et dans la Méthode latine F. J?. On doit en rendre raison , par la direction de la vue de Tes-- prit, qui se porte plus particulièrement vers ua certain mot , ainsi que nous venons de l'observer. C'est le ressort des idées ac* cessoires.

tâmammmÊ^ÊÊmitMIt

(1) Rortce, de Arte Poêticm. (a) Cicéron , Leg, I, 7, (5) Cîc«roa.

19* Principes

III. De la Construction usuelle,

La troisième sorte de coDstraction est composée des deux précédentes. Je l'appelle CoNSTRUCTiouf USUELLE , pafce qoe j'en- tends par cette construction, rarrangenMïQt des mots qui est en usage dans les livres , dans les lettres et dans la conversation des bonnêtes - gens. Celte construction n'est souvent y' ni toute simple, ni toute figurée. Les mots doivent être sin^ptes, clairs ^ na- turels , et exciter dans l'esprit plus de seus que la lettre ne paroit en exprimer. Les mots doivent être énoncés dans un ordre qui n'excite pas^ un sentiment désagréable à Toreille. On doit y observer, autant que la convenance des difFérens styles le permet , ce qu'on appelle le nombre, le rythme ^Vhar^ monie, etc. Je ne m'arrêterai point h recueillir les différentes remarques que plusieurs boas Auteurs ont faites au sujot de cette cons- truction. Telles sont celles de MM. de l!Académie Françoise , de Vaugelas , de M. l'Abbé d*01ivet, du P. Bouhours, de l'Abbé de Bellegarde, de M* deGamaches, etc. Je remarquerai seulement, que les figures dont nous avons pa]:lé, se trouvent

souvent

de Grammaire, I9S

sourcnt dans la constrcyctîoa usuelle; maïs «Iles n*y sont pas nécessaires; et niénié conimanément) l'élégance est jointe \l la simplicité; et si elle admet des transposi- tions , des ellipses , ou qaelqu autr« figure y elles spot aisées à ramener à Tordre de i analyse énonciative. Les endroits qui sont les plus beaas. dans les anciens , sont aussi les plus simples et les plus faciles.

Il j a donc i.« une Con STS.ucTioir SIMPLE , nécessaire, naturelle , ou chaque pensée est analysée relativement %. renon- ciation. Les mots forment un tout qui a des parties : or la perception simple du rapport que ces parties ont l'une li l'autre^ et qui nous en* fait coùcevoif Tèlûsemble î nous vient uniquement de constructiba simple, quii énonçant les mots suivant Tordre successif de leurs rapports , nous les présente de la manière la plus propre k nous faire apercevoir ces rapports,^ et 1 faire naître la pensée totale.

Celte pi*èmière sorte dfe' construction est ' le fondement de tonte énonciaiiôn. Si elle ne ^ert de base k l'Orateur , la chute du discours est certaine, dit Quintilien (i).

«ÉAi

(i) Insfit. or* /. I. c, iv*

f.4 Piincipes

iV/ii OratorLjoniamentaJiéleUlerjecerii, çuidquicl superstruserii corruçt. Mais il ne faut pas cr^re^ ^v^c qaelc|ues^ Grammaî- riens ^ que ce soit par celte manière sîntple que quelque Ungue ait déjà été formée. 'Ça été ^près des assemblages sans ordre de pierres et de matériaux ^ qu*oot été faits les édifices les plus réguliers : sont-ils élevés , Tordre simple *tju*on y observe cache ce qu*U en a coûté à Tart. Comme nous saisissons aisément ce qui est simple et bien ordonné, et que nous apercevons sans peine -les rapports des parties qui font Tensenible, PO us ne faisons pas assez d'attention que ce qui nous paroit avoir été fait sans peine y est le fruit de la réflçxion^^du travail, de 1 expérience ei< de Texercice. Rien de plus irrégulier qu'une langue qui se forme oq qui se perd.

Ain^i) qqoique dfin^ Tétat d'une langue formée, la construction dpnt noos^ parlons soit la prémièrt) k çau^i^ de l'ordre qui (ni aperqev^oir la Jiaison,..la dépendance et le rappprt des mqts; cepe^daût les langues n'otit pas çu d*abord cette première sorte de corisiruçiioq. Jl, j a, une espèce de ni6» tji^lijrsji^ua jd'ia&UocL e£. de. scatiiuent ^ ç^

lie Cram:uai*e, rp5

a prësidl^ à la formaiioii des langues': sor quoi les Grammairiens ont fait eosuUe ieara observations, et ont aperçu un ordre gramma- tical, fondé sur l'analyse de la pensée ^ sur les parties que la nécessité de Pélo- cuiion £ait dotmer h la pensée, sur les signes de ces parties , et sur le rapport et le service de ces signes. Us ont observé encore Tordre pratique et d*usage.

s*o La seconde sorte de constrnctioa est appelée Construction figuméjs. Celle - d s*écarte de l'arrangement de la construction simple, et de Tordre de Tana* lyse éooociative.

3.^ Enfin, il y a une CoNSTRucTro» vsujBzzE , Ton suit la manièrre ordi« naire de parler des honnêtes - gens de la Ballon dont on parle la langue, soit que les expressions dont on se sert se trouvent conformes h la construction simple, ou qn'oji s*énonce par la con^ruction figurée. Au restée , par les honnêies^gçns de la nation , j entends les personnes que la condition', la fortune ou le mérite élèvent an^-dessus du vulgïiire, et qui ont l'esprit cultivé par la lecture, parla réEexion, et par le commerce avec d*autrc5 personnes qui ont ces mêmes

I %

ij^ Principes

avanl4g«8. Trois points qu'il ne faat pas siîpver;. i.^ Disiinctioo au-dessus da vo!- gaire, ou par la naissance et la fortune y ou par le mérite personnel; 2. «^ avoir i*esprit cultivé; d.^ être en commerce avec ée% personnes qui ont ces mêoies avantages.

Toute construction simple n'est pas t4iu- jours confornféà la construciiop usuelle* Mais une pEirasè de la construction usuelle ^ même de la plus élégante y peut être éoon* cée selon Tordre de Is^ construction simple. Titre nne est mortl la fortune chancelle; la t^icielre s'arrête; le courage des troupes est abattu par la douleur^ et ranimé par la (engeance; tout le camp démettre immo^ bile (i). Quoi de plas simple dans la cons- tructioal quoi de plus éloquent et de plus élégant dans l'expression i

11 en est de même de la construction fi* guréi. Une construction figurée peut'^étr^ ou n'être pas élégante. Les Ellipses ^ les transpositions et les autres Hgures^ se trou* veut dans^les discours vulgaires, coaurae elle$^ se trouvant dans les plus subîmes. Je fais ici cette remarque , parce ^ae la

I .

(1) Fléclûer^ OraUm/Unébreik ^. de Turemm^

* de Grammaire. Ï57

plupart des Gramniatriens confondent la construction élégante avec la construclioa figar^e , et s'imaginent que tonte construo- tion figurée est élégante , et que toute cons* traction simple ne Uest pas.

An reste , la construction figurée est dé- fectueuse , quand elle n*est pas autorisée par lasage. Mais, quoique Tusage et rhabi- tude sous fassent concevoir aisément le %^xi:& de ces constructioqs. figurées ^ il n*e$t j)as iou}aurs si facile d'en réduire les mots à Tordre de la coostrucliofi sitnple. C*es^t pourtant k cet ordr^ qu'il faut tout rame-* ner, si l'on veut pénétrer la raison des différentes modifications que les mots re- çoivent dans le discours. Car , coijume nous Tavons déjà remarqué , les coi^t^O* tions figurées i»e sont eqiienduef ^ que parce que Tesprit eu rectifie Tirjrégularité , par Je secours des idées. accessoires , qui fonc concevoir ce qu'on lit et ce qu'on entepd ^ comme si le sens étoit énoncé dans TordrQ de la construction siipple.

C'est par ce motif, sans doute, que dans les écoles Ton enseigne le latin ^ sur-tout selon la méthode de l'explication ^ les tiiaiircs habiles commencent par arraa«

I 3

n

198 Principes "

•ger les mots selon Tordre, dost nous par- lons;, et c*est ce qu*on appelle ^<>^ la construction. Après quoi on accoutuoie les jeunes gens à Télëgance ^ par de fréquentes lectures du texte , dont ils entendent aloss le sens ^ bien mieux , ei »vec plus de fruit , que si Ton avait conioieobé par le texte , sans le réduire à la construction simple.

Hé, n'est- cr pas ainsi que, quand on enseigne quelqu^un des Arts libéraux , la danse , la «nusique , peinture , Té^ riture, etc. on mën^ long-temps les jeunes élèves comme par la main : ouïes i^it passer par ce qu'il y a de plus simple e^t de plus fa- cile ; on 4eur montre les fondemens et les principes de l'Art , et on les mène ensuite lanV^eine ^ ce que l'Art a de plus sublime.

Ainsi , quoiqiTeti paissem àir^ quelques personnes^ peu accoutumées à l'exactitude du raisonnement , et à remonter en tout ant Yraîs principes , ta méthode dont je parle est 'extréraeraeDt utile. Je vais en exposer ici les fondemens ^ et donner les connaissances nécessaires pour la pratiquer aVec succès.

ie Gramma're. tpj

DU DISCOURS

CONSIDÉRÉ

GRAMMATICALEMENT,

Ei des patries qui le composent»

jLiE Discoars est an assemblage de pro-^ positions) d'ëaoaciatioas , el de périodes , qui toutes doivent se rapporter à ua bat principaL

La proposition est un assemblage de mots , qui par le concours des différens rapports qu'ils ont entr'eux ^ énoncent un jugement ou quelque considération parti- culière de Tesprit , qui regarde un objet comme tel.

Cette considération de l'ésprît peut 1^ Taire en plusieurs manières di£Pérentes ; et ce sont ces différentes manières qui ont don- né lieu aux modes des verbes

I4

20P principes

Les mots dùnt l*assemb1age forme nii

seDs y soni donc , ou le signe d'un jugemcnl y

•ti l'expression d*i»Q simpU regard de re^prit,

4jui considère un t)bj%t' avec telle ou telle

Biodificalion ; ce, ^u'il faut bien distinguer.

Juger y ç'e^t penser qu'un objet est de

telle ou de telle façon; c'est ailirmer ou

ttîer ; c'est décider relativement à Télat

Ton suppose que les objets sont eux-mêmes.

Nos jugemens sont donc ou affirma tifs ou

négatifs. La terre tourne autour du soleil:

Yoilà un jugemeat affînoAtif. Le soleil ne

tourne point autour de la terre: voilk ua

jugement négatif. Toutes les propositions

•xpximées par le mode indicatif énoncent

autant de jugemens. Je chante y je chantais ^

}*ai chanté, j'açois chanté j je chantera ij c%

<ont-là ^autant de propositions affirmatives ,

qui deviennent négatives parla seule addition

ilei particules ne^ non^ ne pas y etc.

Ces propositions marquent un état réel de l'objet dont on fuge. Je veux dire, que nous supposons alors que l'objet est, ou qu'il a .été, ou çnfîn qu'il sera tel que nous le disons , indépendamment de notre manière de penser. Mais quand je dis, Soyex scfg^^ ce n!est

N

de Cramm&ire. JOX

^ue daQs moa esprit. qae je raporte à vou$ la perceptioa ou idée d*étre sage, s^QS riea ëaoncer, aa moins directement, de voire ëtat actael. Je ne fais qae dire ce que je .souhaite qae voos soyez: l*actioà de mon esprit a'a que cela poor objet, et non d*^aoncer que, vous éies sage , ai. ^ue TOUS ne l*étes pas. 11 en est de même de CCS autres phrases : Si t^ous étiez sage ; afin que pous soyez sage; et même des phrases énoncées dans un sens abstrait par l'infiniiif; Pierre être sage. Dans toutes <^s phrases, il y a toufonrs fe signe de l'action de l'esprit^ qui applique, qui 'apporte, qui adapte perception ou une qualification à un objet; ..mais qui 1 adapte , ou avec la forme ^e^ eotaman'- dement, ou avec celle âe conditiouin de touhait, de dépendance, etc. mais il n'y. ^ ppint de dlécision qui ailirme ou qui nie, relativement à Tétat positif de Tobjet. Voilà une différence essentielle entre les propositions : les unes sont directement *ffirm^ives ou négïUiyes , et énoncent des iage(ne|i«; les autres n'entrent dans le dis^ «Oitfs que \p9ur y éaoocer certaines .vue»

15

%0% Principes

de l'esprit. Ainsi elles peaveot éire appelées simplement énoncêations.

Tous les modes da verbe ^ autres que Tindicatif) nous donnent de ces sortes d'éaonciations ) même Tinfînitif, .sar-tout en latin: ce que nous expliquerons bien- tôt plus en détail. Il suf&t raaintenaat d*obserTer cette première division générale de la proposition.

L Proposition directe .énoncée par le mode

indicatif,

Propotiti^H Mi^U€ » 0u simple énonciaiian exprùmém par ^u§ifu'tm det autftt modes du verbe»

Il ne sera pas inutile d'observer , que les propositions et les éoonciatîons sont quelquefois appelées Phrases. Mais phrase est an mot générique qui se dit de tout assemblage de mots liés entr'eux , soit qu*îls fassent un sens fini , ou que ce sens ne soit qu'incomplet.

Ce mot phrase se dit plus paticulièrement d*une façon de parler, d*un tour d'ex-^ pression, en tant que. les mots y sont construits et assemblés d'une manière par- ticulière. Par exemple, On dit, est une

/

de Grammairei lO

phrase Françoise; Hoc dkiiur^ est ane' phrase latine; Si dice^ est ane phrase lia henné : Il y a long - temps » est une phrase Françoise ; E molto tempo , est nne phrase italienne: voilk autant de ma-»' niéres différentes d*analjrser et de rendre la pensée. Quand on reut rendre raison d'une phrase, il Faut toujours la réduira . à la proposition I et en athever le seus, par démêler exactement les rapports que' les mots ont entr*eux, selon Tusâge de la langue dont il 8*agit«

<

Des parties de la proposition et dp renonciation.

La proposittôn a deux parties essentielles : I.« le Sujet: a.** VAttribut. Il en est de même de renonciation.

!.<' Le Sujet. C'est le mot qui marque' la personne ou la chose dont on juge, ou que Ton regarde avec telle ou telle ^ qualité ou modification.

2.^ JJAttrîbut. Ce sont les mots qui marquent ce que Ton juge du sujet, ou' ce que l'on regarde comhae mode du sujet.

L^attribut contîeût ess'eùtiellement le ver- be, parce que le Vcrbé est dit du sujet,

1 e

a04 Principes

et marque Taction de l'esprit, qtfî consî«- dère le sujet comme étant de telle ou telle façon, comme ayant ou faisant telle aa telle chose. Observez donc ^ue Tattribal comm69ce toujours par lie verbe.

Différentes sortes de Sujets,

. -

Il y a quatre sortes de Sujets, i.^ Sujet simple , . tant au singulier qu'au- plurier ; a.^ Sujet multiple; 3.^ Sujet compIej:fe; 4.° Sujet énoncé par plusieurs mots gui forment un sens total, et qui sont équi^ païens à un nom,

l.^ Sujet simple, énoncé- en un seul mot. he soleU estleçé; le soleil est le sujet simple au singulier. Lès astres brillent; les astres sont le sujet, simple au plurier^

a.** Sujet TiPuUiple* C'esit lorsque pour abréger, on ^onne un attrîbajt coniman ^ plusieurs objets différens.Xa^i^/V^jp^'* rance et la charité sont trois çertus tliéo" logales; ce qui est plus court q^ue si i*oa disoitj La Jbi est une periu théologale; î* espérance est une çertu théologale; la charité est u^ ç^ttu théologale Ces trois mots 9 lajoi, V espérance , IcTtfkarité, sont le &ujet multiple. Et de même, 5.

de Grammaire* stoS

Pierre j S., Jean, S^ Mathieu, etc. étaient apôtres : S. Pierre , S. Jean / S. Mathieu , iroilà le sujet multiple ; étaient affaires , ca est Taltribut commun .

3..* Sujet complexe. Ce mot complexe vient du latin complexus , qui signifie embarrassé y composé. Un Sujet est com- plexe, lorsqu'il est accompagné de quel- qu'adjectif, oa de quelqu*autre modificatif. Alexandre vainquit Darius ; Alexandre est «Q Sujet simple. Mais si je dis Alexandre^ fili de Philippe, ou Alexandre^ roi de Macédoine^ voila un sujet complexe. Il faut bien distinguer, dans le sujet com- plexe, le sujet personnel ou individuel « et les mots qui rendent le sujet complexe, Dans Texemple ci -dessus, Alexandre est Je sujet personnel ; jfî/5 de Philippe, ott roi de Macédoine y ce sont les mots qui n étant point sépares à* Alexandre^ rendent <^e mot sujet complexe.

On peut comparer le sujet complexe à une personne habillée. Le mot qui énonce le sujet est, pour ainsi dire, la personne; *^ les mots qui rendent le sujet complexe y ^e sont comme les habits de la personne. Observez que lors<^ue le sujet est com-

ao6 Principes

plexe , on dit que la proposition est complene oa composée.

L'attribut peut aussi être complexe» Si je dis , i^xx Alexandre painquii Darius, Roi de Perse j Tattribut est complexe: ainsi la proposition est composée par rapport k ^attribut. Une proposition peut aussi être complexe, par rapport an sujet, et par rapport k Tattribut.

4.^ La quatrième sorte de sujet , est on sujet énoncé par plusieurs mots, qui forment un sens total , et qui sont équi*- valens k un nom.

Il n*y a point de langues qui ait un assex grand nombre de mots, pour suffire k exprimer par un mot particulier chaque idée ou pensée qui *peut nous venir dans l'esprit: alors on a recours à la périphrase. Par exemple, les Latins n'avoient point de mot pour exprimer la durée do temps pendant lequel un prince exerce son autorité. Ils ne pouvoicnt pas dire , comme nous. Sous ie régne d'Auguste: ils disoient alors. Dans le temps qu Auguste étoit Empereur: Imperante Ccesare Augusto; car regnum De signifie que royaume.

Ce que je veux dire de cette quatrième

de Gramrnahe. %oj

sorte it sujets s*eoteoclra mieux par des cTemples, Différer de profiter de l'occasion , c'est souvent la laisser échapper sans retour. Différer de profiter de l'occasion , voilà le sujet énoncé par plusieurs mois qui forment on &ens total , dont on dit que c'est souifent laisser échapper l'occasion sans retour. .

C'est un grand art^ de cacher l'art, Ce^ hoc^ à savoir, cacher l'art ^ voilà le sujet ^ dont on dît qne c'est un grand art.

Bien çit>re est un moyen sûr de àésar'» mer la médisance. Bien tfii^re est le sujet; est un moyen sûr de désarmer la médi^' sance^ c*est Tattribut.

// çaut mieux être juste que d'êUm riche; être raisonnable ^ que d'être savante Il y a quatre propositions, selon l'ana- lyse grammaticale; deux affirmatives eC deux négatives, du moins en françôis.

I.* 7/, iltud^ ceci^ à savoir être juste vaut mieux que l'avantage è^être rithe ne vaut. Etre juste est le sujet de la pre- mière proposition , qui est affirmative. Etre riche est le sujet de la seconde proposition ^ qui est négative en français ^ parc$ qu'on tous-entend ne vaut^ être riche ne vaut pas tant.

^8 Principes

a.^ Il en est de même de la suivante: Etre raisonnable vaut mieox que d'être saçanL Etre raisonnable est le sujet, dont on dit çaut mieux ^ et cette proposition est af&^mative. Dans la corrélative , être saçant vaut pas tant; être sapant est le sujet.

Majus est^ certeque gratiusy prodesse haminibus ^ quàm opes magnas habere(j,')^ Prodesse hominibus^ être utile aiup hommes; XpiWx le sujet; c*est de quoi on affirme que c'est uue chose plus grande , plus louable et plus satisfaisante , que ^e posséder de grands biens.

Remarquez, l^o que dans ces sortes de sujets I il n'y a point de ^ujet personnel , que Ton puisse séparer dçs . autres mots. C'est le sens total, qui résulte dès divers rapports que les mots ont entr*eux , qui est sujet de la proposition.. Le jugement . ne tombe que sur Tensemblei et non. sur aucun mot particulier de la phrase. 2,^ Observez que l*on n*a recours à plusieurs mots pour énoncer un sens ^ total, que

« «

(i) Cic^ron , de Nat. Deor» c. a5.

^

de Grammaire, 209

parce qu^on ne trouve pas dans la langue uu noui substantif destiné à l'expriiuer. Ainsi les mots qui énoncent ce sens total y suppléent à un nom qui manque. Par exem- ple , Aimer à obliger et à J^aire du bien , est une qualité qui marque une grande ame. Aimer à obliger et affaire, du bien ^ voila le sujet de la proposition. M. Tabbé de Saint-Pierre a mis en usage le mot de bienfaisance ^ qui exprime. le stni d'aimer à obliger et à J'aire du bien. Ainsi , au lieu de ces mots y nous pouvons dire , la bienfaisance est une qualité qui marque une grande ame. Si nous n'avions pas le mot Nourrice j n,ous dirions , une Jemme qui donne à te ter à un enfant y et qui prend soin dfi la prerrUère enfance,

àâutres'9di*l:ês proposiiiaru à distinguer ^ pou» bien faire la coniipuoiion,

II. Proposition absolue ou complétée: Propo^ sition relative ou partielle,

1.® Lorsqu'une proposition est telle, que l'esprit ù'a besoin que des mb!s qui y sont énoncés pour en entendre le scns^ jQous disons que c'est - uae proposition alisjlue ou complet le.

%i% Principes

je ceux dire ^ et lors même qa*il est verbe ) il forme uo. sens partiel avec un ooni ; et ce sens est exprimé par aae énonctatioo, qui est, qu le sujet d'une proposition logi- que, ou le ternie de 1 action d'un verbe; ce qui est très - ordinaire en latin. Voici des exemples de* Tun et de Taulre; et premièrement , d*une énobciation , qui est le sujet d'une proposition logique. Ovide fait dir^au Noyer, qu*il est bien fâcheux pour lui de porter des fruits Nocet esse Jeracem; mot à mot. Etre fertile est nuisible à Ynoii vous voyez que ces mots, être fertile ^ fout un sens total, qui est le sujet âe^ est nuisible y nocet. Et d^ même, Magna ars est^ non apparere artem; mot à mot , l'art ne poin^ paroUrç , 0st un grand art; c'est un grand art de cacher l^rt: de travailler de fa^on qu'on ne recpnnoisse pas la peine, que l'ouvrier a eue; il faut qu'il semble que les choses se soient faites ainsi naturellement. Daas un autre sens, cacher l'art ^ c'est ne pas donner lien de se dë&er de quelqu'utifice* Ainsi, tart ne point parçUre^^ voilà, le sujet dont on dit que c'est hn grand. art. Te duci ad mortem , CatUina , jam pridem

de Grammaire. %l%

^portehat (l): mot à mot, Toi être mené à la mort^ est ce qu'on aurait du faire il y a long- temps. Toi être mené à la mortj voilà le sujet. Et quet<|ues lignes après^ Cicéron ajoute Interfectum te esse. Cati-^ lina^ contfenit. Toi être tué, CaiUina^ cont/ient à la République. Tci éire tué y Toilà le sujet; Confient à la République ^ c*est i'atiribut. Hominem ésse solum non est bonums Hominem esse àolum , voilà Je sujet: non est bonum^ c'est Tattribut.

Ce sens formé par ua ooni avec un infiaitif, est aussi fore souvent le terme de Taction d'Un verbe: Cupio me esse

démente m i^')» Cupio, je désire: et quoiî me es se^ clément em^ moii être indulgent: vous voyei, cjue me esse démentent fait UA sens total, qui «si le terme de Taclion de cupio. Cupio , hoc nempe , me esse clementem. Il j^% en latiii un très* grand «ombre d'etemples , de ce ieus total formé par un nom avec un infinitif; sent qui étant #quita(e'nt k on nom, peut égale-'

mm^

<i) Cicéroa , J. Cafilin,

(a) Cicêioii; /• Catil, 9ttb initie.

^*i4 Principes

ment être^ oa le sujet d*une proposition, ou le terme de raction du verbe.

Ces sortes d^ëaoDciations , qui dëler- miuent un verbe, et qui en fpat une appli- cation, comme quand on dit, Je 9€ux ê^re sage; être sage détermine ;e. i^^«4?; ces sortes d'éaonciations , dis -je, ou de déterminations^ ne se font pas seulement par des infinitifs; elles se font aussi qneU quefois par des propositions même, comme quand on dit^ Je ne sais qui a Jait ceia; et eu latin y Nesciç quisjedi; Nescio 14 ter \ etc.

Il y .a donc des propositions on énon* ciations, qui ne servent qu*à expliquer ou déterminer un mot d^uae proposition, précédente. Mais avant que de parler de ces sortes de propositions, et de quitter la période , il ne sera pa$ inutile de faire les observations suivantes.

Chaque phrase ou assemblage de mots qui forme an sens partiel dans une période , et qui a une certaine étendue <, eH appelée membre de la période , ««A^y Si le sens est énoncé en peu de mots , ou Pappelle Incise^ KifAfi^tty segmen^ incisum. Si tous les sens

de Gramma.re* alîj

particoUers qui composent la période , soDt ainsi énoncés en peu de mots , c'est le itjle coupé; c'est ce que Cicéroa appelle, Incisum dicere; Parler par incise. C'est ainsi, connine nous l'avons dé)k vjii, que M. Fiéchier a dit: Turenne est mort; la pictoife s'arrête; la fortune chancelle; tout le camp demeure immobile, Voilk ({ualre propositions, qui ot sont regardées que comme des incises , parée qu'elles sont courtes : le style périodique emploie de« phrases plus longues.

Ainsi ^ une période peut être composée^ oa seulement de membres , ce qui arrive loî^sqae chaque membre a une certaine étendue ; oo seulement d'incises , lorsque chaque sens particulier est énoncé en. peu de mots ; ou enfin une période est com« posée de membres et d'incises.

1 1 K Proposition explicative»

Proposition déterminativ^, '

La proposition explicative est différente de la déterminotive^ en ce que celle qui lie sert qa*à expliquer un mot , laisse le mot dans toute sa valeur , sans aucune r««tnctioQ : elle nt sert qu'à faire rema(«

%

tï6 Principes^

quer quelque propriété y quelque qualité de robjet. Par exemple : L'homme , çtdi est un animal raisonnable , décroît s^attacher à régler ses ^passions : Qui est un an: mal raisouTÎable , c'est une proposition expli- cative ) qui ne restreint point Téteudue du mot à! homme. L'on pou^rroit dire égale- nieol : Uhomme deproit s*attacher à régler ses passions. Cette proposition explicative fait seulement remarquer en Thomme une propriété , qui est une raison qui devroit le porter k régler ses passions.

Mais si je dis, V homme m'est f^tnu par, ce matin , ou l* homme quet nous pènons de rencontrer, ou dont vous m'apez parlé ^ est fort savant : ces trois propositions sont déterminantes. Chacune d'elles restreint la siguiiication d'homme , à un seul in* dividu de l^espèce humaine \ el je ne pais pas dire simplement , V homme, est fort sapant y parce que l'homme seroit pris alors dans toute son étendue : c'est-à-dire q'u*il seroit dit de tous les' individus de l'espèce humaine. Les hommes qui sont créés pour aimer Dieu , ne doivent point s'attacher aux bagatelles : Qui sont créés pour aimer Dieu ; Toilk une proposition

explicative

de Grammaire. 217

explicative , qui ne restreint point Tétcn- due du mot hommes. Les hommes qui sont complaisans se Jbnt aimer : Qui sont comphisans y c'est une proposition déter- minalive , qui reçtreîojt l'étendue à' hommes j à canx qui soril complaisans : en sorte que l'attribut , sejhnt aimer , n'est pas dit de tous les hônitues y mais seulement de ceur <jui sont complaisans.

Ces énonciations, ou propositions, qui De sont ^{1 e.Tplicatiçes ou déterminât ipe s , , Sont coramunément liées aux mots qu'elles expliquent , ou à ceux qu'elles déterminent , par qui , ou pSir que , ou par dont , du- quel ^ etc.

Elles sont liées par qui , lorsque ce mot est le sujet de la proposition explicative ou détermina tive. Celui qui cra'nt le Sei» gneur: Les jeunes gens qui étudient.

Elles sont liées par que : ce qui arrive deux manières.

I a

I.* Ce mot que y est souvent le terme àe l'action du verbe qui suit. Par exemple , Le li'çre cj^ue je lis\ que est le terme de l'action de lire. C'e:t ainsi que dont , du-^ guel'y desquels , à qui , auquel , auxquels , servent aussi à lier les propositions , selon

K

al8 Principes^

les rapports que <:es pronoms relaiifs ont avec les mots qui suivent.

2.^ Ce mot que «st encore souvent le représentatif de la proposition détermina" tive qui va' suivre un verbe : Je dis que; que est d'abord le terme de Taction je dis ; Dico quod : la proposition qui le suit est re:xplication de que ; Je dis que les gens de bien sont estimés. Ainsi il y a des propositions, qui servent à ^expliquer ou à déterminer quelque mot , avec lequel elles entrent ensuite dans composition d*une période.

IV. Proposition principtàè:

PrQpostiîon inei4finte.

Un mot n*a de rapport grammatical avec un autre mot , que dans la même propo« siiion. Il est donc essentiel de rapporter chaque raOt à la proposition particulière dont il fait partie sur^tout quand le rapport des mots se trouve iuterrom pu par quelque proposition incidente ^ ou par queiqu'iocist ou sens détaché,

La proposition incidente est celle qni se trouve entre le sujet personnel et Tattribut d^UQe autre proposition , qu*on appelle

de Grammaire, alç

proposition principale , par4:e que celle-ci contient ordinairement ce qae Ton veut princi paiement faire ebwndre.

Ce root incidente vient du latin incidere , tomber dans. Par exemple , Alexandre , gui étoit roi de Macédoine ^ çainquit Darius. Alexandre vainquit Darius , voila la proposition principale. Alexandre en est le sujet; ifaingtiit Darius ^ c*est rattribut. Mais entre Alexandre et çainquit il y a UQe autre proposition , qui étoit roi de Macédoine, Comme elle tombe entre le sajet et Tattribut de la proposition prin- cipale ) on rappelle proposition incidente^ Qui , en est le sujet : ce ^/f/i rappelle Tidée ^'Alexandre qui , c'est - à - dire , lequel Alexandre \ étoit roi de Macédoine^ c'est l'attribut. Deus quem adoramus est omni^* potens : Le Dieu que nous adorons est tout-' puissant» Deus est omnipotens ^ voilà la proposition principale ; quem adoramus , c'est la proposition incidente. îios adora^- mus quem JJeum, nous adorons lequel Dieu,

Ces propositions incidentes sont aussi des propositions explicatives ^ ou des pro- positions déterminatives.

K a

àzo principes

V. Proposition explicite» proposition implicite ou elliptiçue.

Une proposition est explicite, lorsque le «ujet et raiiributy sont exprimés.

Elle est implicite, imparfaite ou ellip- tique ) lorsque ie sujet ou le verbe ue sont pas exprimés , et que Ton se cpnteute d'é- noncer quelque mot ^ qui par la liaison que îes idées accessoires oqt entr*elles , esX des- tiné a révçiller dans l'esprit de celui qui lit , sens de toutes la proposition.

Ces propositions elliptiques ^ont fort en usage dfins les devises et dans les proverbes. En ces occasions, le^^ mots exprimés doi- vent réveiller aisément Tidée cjes autres mots que Tellipae suppritrie.

Il faut observer , que les mots énoncés àoivent être présentés , dans la forme qu'ils le seroientsi la proposition étoit explicite: ce qui est sensible latin. Par exeiiiple j dans le proverbe dont nogs avons parlé , Ne sus Minerçam : Jdineruarn n'est à l'ac- cusalif, que parce qu*il v* s croit dans la proposition explicite , à laquelle ces mots doivent être rapportés : Sus non doceat ^inçfifÇfn ; cfu^un ignorant ne ^^ mçlç

/

de Grammaire. 2it

point de Poul:>ir instruire Miner pjs. Et , de même ces trois mots Deo opiimo maxinw ^ qu'on ne désigne souvent que par les lettres iailiales , i?. O, M. font une proposition implicite , dont la construction pleine est , Hoc monumentum ou Thesàs hœc dicaiur , voçetur , consecratur Deo opt'mo>maximo^ Sur le rideau de la comédie italienne , ou lit ces mots ; tirés de l'Art poétique d'Ho- race : Sublato jure nccendi ; le droit de nuire ôtê. Les circonstances du lieu doi- vent faire entendre au lecteur inielligeat , ({ue celui qui a donné celte inscription , a eu dessein de faire dire aux Comédiens : Ridemus çitia , sublato f'jre nocendi : l^ous rions ici des défauts d* autrui , sans nous permettre de blesser personne.

La devise est une représentation allé- gorique , dont on se sert pour faire enten- dre une pensée ^ par une comparaison. La devise doit avoir un corps et une anie, ' Le corps de la devise , c*est l'image ou représentalipn. L*ame de la devise , sont les paroles qui doivent s'entendre d'abord littéralement de l'image ou corps ^^mbo- lique, et en même- temps, le concours du •orps et de Tame. 4e la» devise , doit

K 3

1

5122 Principes

porter Tesprit a rapplication que ron vent faire , c'est-à-dire , a l'objet de la compa- raison.

L'ame de la devise est ordliraîrernent une proposition elliptique. Je ni« conten- terai de ce seul' exemple. On a représenté le soleil an milieu d'un cartouche, et autour du soleil on a peint d'abord les planettes; ce qu^on a négligé de faire dans U suite. L'ame de cette devise est, Nec pluribus impar: mot à mot, il n'est pas insuffisant pour plusieurs. Le Roi Louis XIV fut l'objet de cette allégorie. Le dessein de l'Auteur fut de faire entendre, que comme le soleil peut fournir assez de lumière pour éclairar ces différentes pla- nettes , et qu*il a assez de force pour sur- monter tous les obstacles , et produire dans la nature les différeos effets que nous voyons tous les jours qu'il produit: ainsi le Roi est doué de qualités si éminantes^ qu'il seroit capable de gouverner plusieurs royau- mes. Il a d'ailleurs tant de ressources et tant de forces qu'il peut résister a ce grand . nombre d'enoemis ligués contre loi, et les vaincre. De sorte que la construction pleine «st , Sicut sol non est impar pluribus or-'

de Gvammaire, 22 3

àihus illuminandis , iia hudoi>icus XIV non est impar plnribus regnls regendis, riec pluribus hostibus prqfl lundis. Ce qui fait bien voir, que lorsqu'il s'agit de construc- tion, il fatit toujours réduire toutes les phrases et toutes les propositions à la construction pleine.

VL Proposition considérée grantmatica'^

lement»

Proposition considérée logiquement.

On peut considérer une proposition , ou grammaticalement) ou- logiquement. Quand on considère une proposition gramma- ticalement, on n'a égard qu'aux rapports réciproques qui sont entre les mots; au lieu qUe dans la proposition logique, on n'a égard qu'au sens total t|ui résulte de l'assemblage des mots. En sorte qu'on pourroit dire , que la proposition consi- dérée grararaa*ticaleraent, est la proposition de l'élocution; au lieu que la proposition considérée logiquement, est celle de l'eu- tendement, qui n'a égard qu'aux différentes parties, je veux dire aux différens points de vue de sa pensée. Il en considère uq# partie comme sujet 4 loutre comme attribut ,

K4

£24. Principes

sans avoir ëgard aux mots; ou bieD, il en regarde une comme cause , Tautre comme effet; ainsi des autrét manières qui sont Tobj^t de la pensée. C'est ce qui va être éclairci par des exemples.

Celui qui^ne suit, dit Jesus-^Gàristj ne marche point dans les ténèbres. Consi- dérons d'abord cette phrase ou cet assem- blage de mots grammaticalement , c'est- à-dire , selon les rapports que les mois ont entr'eux ; rapports d'où résulte le sens. Je trouve que cette phrase, au lien d'une seule proposition , en contient trois.

I.o Celui esiv le sujet de ne marché point dans les ténèbres; tX voilà une pro- position principale. Celui étant le sujet, est ce que les Grammairiens appellent le nominatif du perbe.

Ne marche point dans les ténèbres, c'est l'attribut. Marche est le verbe ^ qui est au singulier, et à lit troisième per- sonne , parce que le sujet est au singulier » ^t est un nom de la troisième personne ^ puisqu'il ne marque ni la personne qui parle , ni celle à qui l'on parle. Ne points est la négation, qui nie du sujet , l'actioB de marcher dans les ténèbres.

ée Grammaire. ^21

Dans les ténèbres, est une modification àe Taction de celui qui marche; Il mar-^ che dans les ténèbres» Dans est une pré- position qui ne marque d*abord qu'une modification ou maniçre incompleUe, c*estf à-dire , que dans étant une préposition , n'indique d*abord qu'une espèce, une sorte de modification , qui doit être ensuite singularisée , appliquée , déterminée par un autre mot, qu'on appelle *par cette raison le complément de la préposition. Ainsi les ténèbres est le complément de dans: et alors ces mois, dans les ténèbres , forment un sens particulier qui modifie marche; ci*est - à - dire , qui énonce une manière particulière de marcher»

'2.^ Qui me suit. Ces trois mot$ font une proposition incidente > qui détermine celui, et le restreint à ne signifier que le disciple de Jesus^Christ , c'est-à-dire, celui qui règle sa conduite et ses mœurs sur les maximes de l'Evangile. Les pro- positions incidentes, énoncées par gui^ sont équivalentes \ un adjectif.

Qui e&t le sujet, de cette proposition incidente; me, suH est l'attribut; fi//^ est le verbe ; me e&t le déterminant , ou

K 5

n

aa6 Principes

terme de Taction de suit; car selon Tordre de pensée et 'des rapports, me est après suit, mais selon l'étocutioa ordinaire, oa construction usuelle , ces Sortes de pro- noms précèdent le verbe. Notre langue a conservé beaucoup plus d'inversions latiaei c{u*on ne pense.

3.^ Dit JesuS'Christ. C'est une troisième proposition , qui fait une incise, ou sens

détaché ; c'est un adjoint. En ces occasions,

<

la construction usuelle met le sujet de la proposition* après le verbe ; Jésus - Christ est le sujet , et dit est l'attribut.

Considérons maintenant cette proposition a la manière des Logiciens. Commençons d'abord h en séparer l'incise , dit JesuS" Christ: il ne nous restera plus qu'une seule proposition: Celui gui me suit. Ces mots ne forment qu'un sens total. Qui est le sujet de la proposition logique , sujet complexe ou co.fiiposé: car on ne juge de celui ^ qu'en tant qu'il est celui qui me suit. Yoilà le sujet logique ou de l'entendement. C'est de ce sujet que l'on pense, et que Ton dit qu'I/ /2^ marche point dans les ténèèrêS*

H en est de même de celte autre pro- position : Âlçjrqndre^ qui éto\t roi de iiocé*

ie Grammaire. a 27

doinâj i>ainquit Darius. Et^niinonsd^abord celte phrase grammaticaleraent. J*y trouve deux propositioDS : Alexandre çainquit Darius: voilà une propositioa principale; Alexandre en est le sujet \ çainquit Darius ^ c'est l'attribut. Q^ui était roi de Macédoine ^ c*est une proposition incidente ; Q^iti en est le sujet) et étoit roi de Macédoine ^ l'attribut. Mais logiquement , ces mots ^ Alexandre qui étoit roi de Macédoine y forment un sens total , équivalant à Alexan^ dre roi de Macédoine. Ce sen« ^otal est le sujet complexe de la proposition; Vain^ quît Darius c'est 1 attribut.

Je crois qu'un Grammairien ne peut pas se dispenser de reconnoître ces difFc* rentes sortes de propositions , s'il veuc faire la construction d'une manière rai« sonnable.

Les divers noms que l'on donne aux diiTérentes propositions, et souvent à la- même , sont tirés des divers points de viie sous lesquels on les considère. Nous slloBS rassembler ici celles dont nogs venons 4e parler, et que nous cfoyôns qu'ua Grammairien doit connottre.

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228

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Principes

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II faat observer que les Logiciens donoeot le nom de Prçposition composée à tout seDS total qui résulte du rapport que deux propositions grammaticales ont entr'elles : rapport qui est marque par la valeur des différentes conjonctions qui unissent les propositioas" grammaticales.

Ces propositions composées ont divers noms, selon la valeur de la conjonction Ott de l'adverb^e conjonctif , ou du relatif qui unit les simples propositions partielles , et en fait un tout. Par «xemple, ou, aut, vel, est une conjonction disjonctive ou de division. Oo rassemble d'abord deiix objets pour donner, ensuite l'alternative de l'un ou de l'eutre. Ainsi, après avoir d'abord, rassemblé dans mon esprit l'idée du soleil et celle de la terre, je dis que c'est le soleil qui tourne , ou que c'est la terre. Voila deux propositio^ss grammaticales rela- tives , dont les Logiciens ne font qu'une proposition composée, qu'ils appellent Pro^ position âisjonctiçe.

Telles sont encore les propositions con- ditionnelles, qui résultent du rapport de deux propositions, par la conjonction condi- tionnelle ii, Qnxpourçu que: Si i^ous étudier

l3o Principes

hien^ cous deviendrez sapant: voilà une proposilion composée qu*on appelle co/i- ditionnelle. Ces proposilioâssonl coniposdes de deux proposilions particulières , dont l*uQe exprime une condition, d*où dépend un eftet que Tautre énonce. Celle est la condition s'appelle V antécédent: Si pous étudiez bien. Celle <jui énonce Teffet qui suivra la condition est appelée le consé'^ çuent: vous depiendrez sapant»

Il est estimé parce qu'il est sapant et pertueuûp. Voila une proposition composée, que les Logiciens appellent causale, du mot parce que, qui sert a exprimer la cause de l'effet que la première proposition énonce. 1/ est estimé, voilà TefFct: pour- quoi? Parce qu'il est sapant et pertueux: voilà- la cause de Tcstime.

La fortune peut bien 6 ter les riches^^es] mais elle ne peut pas o ter la vertu.. Voilà une proposition composée qu'on appelle adpersaiipe ou discrétipe (i) , qui sert à séparer, à distinguer, parce qu'elle est composée de deux propositions , dont la seconde marque une distinction , une sé-

<i) Du Utin , Discretivus,

de Grammaire. a3t

paratioQ ^ une sorte de contrariëtë et d*oppo«> sillon, par rapport à la première; et cette séparation est marquée par la conjoactioa adversative mais.

11 est facile de démêler ainsi les autres sortes de propositions composées. 11 suffît pour cela ^e connoîire la râleur dçs con« joDctioDS qui lient les propositions parti- culières, et qui par cette liaison forment un tout, qu'où appelle Proposition com^ posée. On fait ensuite aisément la cons« traction détaillée de chacune des propo- sitions particulières qu'on appelle aussi partielles, ou corrélatiçes.

Je ne parle point ici des autres sortes de propositions , comme des propositions universelles j des particulières , des singu^ Hères ^ des indéfinies, des ajffirmatiçes^ des négatrices, des contradictoires^ etc. Quoique ces cofïuoissances soient très« utiles, î'ai cru ne devoir parler ici de la proposition ) qu'autant qu'il est nécessaire de la coanoîtrc , pour avoir des principes surs de construction.

aSa principes

Deux rapports généraux entre tes mots, dans la construction,

I. Rapport d'Identité,

II. Rapport de détermination.

Tous les rapports particuliers de cons- truction, se réduisent à deux sortes de rapports généraux.

I. Rapport d*identîté« C'est le fondement de Taccord de Tadjectif avec son\ substan- tif; car Tadjectif oe fait qu'énoncer ou déclarer ce que Ton dit qu*est le substantif; en sorte que Tadjeciif, c*est le substantif analysé, c'est-à-dire, considéré comme étant de telle ou telle façon, comme ayant telle ou' telle qualité. Ainsi Tadjectif ne .doit pas marquer , par rapport au genre, au nombre et au ca^;, des vues qui soient différentes de celles sous lesquelles l'esprit *"; /considère le substantif.

* , 11 en est de. même entre le verbe et le

'^ sujet delà proposition, parce que le verbe

^ inonce que l'esprit considère le sujet comme

f étant, ayant, ou faisant quelque chose.

Ainsi le verbe doit indiquer le même nom- bre et la même personne que le sujet in- dique: et il- y a des langues, tel est

f

de Grammaire,'' a33

THébrcu, le verbe indique même le genre. Voilà ce que j'appelle rapport ou raison d'idem ité^ du Latin idem,

II. La seconde sorte de rapport, qui règle la corjstruction des mois, c'est U rapport de détermination.

Le service des mots dans le discours ^ ne consiste qu'en deux points.

i.^ A énoncer une idée: Lumen ^ lu- mière; Sol. solîîil.

^.° A faire connoître le rapport qu'une idée a avec lioe autre idée. Ce qui se fait P^r les signes établis en chaque langue pour éiendre, ou restreindre les idées, et en faire des applications particulières.

L'esprit conçoft une pensée tout d'ua coup, par la simple intelligence, comme nous l'àvQns déjà remarqué. Mais quand 31 s'agit d'énoncer une pensée,, nous sommes obligés de la diviser , de la présenter ca détail par les mots, et de nous servir des signes établis, pour en marquer les divers ''apports. Si }je veux parler de la lumière du soleil, je dirai en latin. Lumen, solis, et eu françois , De le soleily et par con-- traction^ Du soleil^ selon la construction Quelle. Ainsi en l^tin, U terminaison de

234 Principes

Solis , détermine Lumen à âe sîgnîder alors que la lumière du soleil. Cette détermi- tiatioD se marque eu frauçois par la pré- position de, dont les Latios ont souvent fait le même usage , comme nous le ferons voir en parlant de rArlicîfe: Tempîum de marmore; un temple DE marbre v

La détermination qui se fait en latin par la terminaison de Taccusatif. Diliges Pominum Deum tuum , ou Domi'num Deum tuum diliges : celte" détermination , dis-je ^ 6c marque en françois par la place ou position du mot, qui, selon la construc- tion ordinaire, se met après le verbe: Tu aimeras le Seigneur ton Dieu. Les autres déterminations ne se font aujourd'hui, en françois , que par le secours des prépo- sitions. Je dis aujourd'hui , ipafte qu'autre- fois un nom substantif placé immédiatement après un autrenom substantif, le déierminou de la même manière qu*en latin. Un nom qui a la terminaison du génitif, détermine le nom auquel il se rapporte: Lumen solis; Liber Pétri: Al iens Innocent lll (i); au temps c/'Innocent III : L'Incarnation Notre^

s*— *— I IMPI— ^—^ I Il I .1 II MW

(0 VilUhardoain,

de Grammaire* a35

Seigneur^ pour .riocarnalion de Notre- Seigncur : Le Serpice Dieu , pour le service de Dieu: Le Jrère l'Empereur^ pour Le frère de V Empereur : et c'est de-lk qu'on dit encore YHôieî^ Dieu^ etc. Voyez la Préface dés Antiquités Gauloises de Borel. Ainsi nos Pères ont d*abord imîtë Tune et Tautre manière des Latins: premièrement, en se servant en ces occasions de la pré- position de : Templum de marmore , un temple de marbre; secondement, en pla* çant le substantif modifiant immédiatement après le modifié; Frater Jmperatoris^ le Frère V Empereur; Domus Dei^ l'Hôlel- Diea. Mais alors le latin désignoit , par une terminaison particulière, Teffet du nom modifiant: avantage qui ne se trouvoit point dans les noms François, dont la terminaison ne varie point. On a enfin donné la préférence à la première manière, qui marque cette sorte de détermination par le secours de la préposition de: La gloire de Dieu.

La syntaxe d'unç langue ne consiste que dans les signes de ces différentes détermi- nations. Quand on connoît bien l'usage ek la destination de ces signes on sait la syn-

236 Principes

taxe de la langue. J'eatends \2i^yntaxe né* ceSsaire ; car la syntaxe usuelle et élé" ^tf/2/e' demande encore d'au tresL observa- tions. Mais ces observations supposent tou- jours celles de la syntaxe nécessaire ^ et ne regardent que la netteté, la vivacité et les grâces de Péloculion ; ce qui n'est pas maintenant de notre sujet.

Un mot doit être suivi d'un ou de plu- sieurs autres mots déterminans , toutes les fois jjue par lui-niénie , il ne fait qu'une partie de l'analyse d'un sens particulier. L'esprit se trouve alors dans la nécessité d'attendre et de demander le mot déter- minant , pour avoir tout le secs particulier que le prer^ier mot ne lui annonce qu'en partie. C'est ce qui arrive à toutes les prépositions, et à tous les verbes actifs tran- sitifs : Il est allé à-; à n'énonce pas tout le sens particulier; et je demande oà? on répond ^ à la chasse , à Versailles ^ selon le sens particulier qu'on a à désigner. Alors le mot qui achève le sens , dont la préposition n'a énoncé qu'une partie , est le complément de la préposition : c'est-à- dire , que la préposition et le niot qui la déterminé^ font ensemble un sens partiel |

de GPammùire. l3^

cours qui ayent besoin d*éire déterminées : car l'adverbe ajoute quelque circoostaoce de temps, de Uea, ou de manière. Ainsi il détermine lui - même Tactiou , ou ce qu'on dit du sujet , et D*a pas besoin d'éire déterminé. Les conjonctions lient les propositions, et à Tégard de ]*adjectif, il se construit ayec sou substantif, par le rapport d*identité.

\J^ Lorsqu'un nom substantif détermine

hq autre nom. substantif, le substantif

déterminant se met au génitif en latin ,

lumen soîis; et en françois , ce rapport se

marque par la préposition de. Sur quoi

il faut remarquer, que lorsque le nom

déterminant est un individu de Tespéce

qu'il détermine , on peut considérer

nom d'espèce comme un adjectif, et alors

on met les deux noms au même cas, par

rapport d'identité : Urbs Roma ^ Roma guœ

esPurhs: c'est ce que les Grauimairiens

appellent apposition. C'est ainsi que nous

disons le Mont^Parnasse ^ le Jleuve Don^

Cl le chepal Pégase ^ etc. mais en dépit

des Grammairiens modernes, les meilleurs

Auteurs latins ont aussi inis au génitif le

nom de l'individu , par rapport de détermi*

l

n

240 Ptînâipes

nation : Inoppido .^nil&chiœ (l) , €t Celsam Butraii ascendimus urbeni (2). Exemple remarquable; car urhem Butroii est à la question quo^ Aussi les Commentateurs qai préfèreot la règle de .nos Grammairiens à Virgile , n'ont pas manqué de mettre dans leurs notes j Ascendimus in urhem BuirO' tlim. Pour nous, qui préférons Tautorité incontestable et soutenue des Auteurs latias, aux remarques frivoles de 00s grammairiens , nous croyons que quand on dit , Maneo Lutetiœ j il faut sous-entendre, in urbe.

2,0 Quand un uôra détermine un \erbe, il faut suivre Tusag^ établi dans une lan- gue , pour marquer cette détermination. Un verbe doit être suivi d'autant de noms décerminans, qu'il y a de sortes d'émotions que le verbe excite nécessairement dans Tesprit. J*ai donné ; quoi ? et a qui l

3." A l'égard de la préposition, nous venons d'en parler. Nous observerons seule- ment ici, qu'une préposition ne détermine qu'un liOm substantif, ou un mot pris substantivement ; et que quand on trouve

(i) Cicéron. (2) Virgile, .^n. /. III. y. agj,

voe

d^ Grammaire. 24 1

«se prëpQ^itioD suivie d'une autre ^ comme ^uand on dit, pour du pain, par deê hommes, etc. alors il y 9 ellipse , pour queU que partie du pain, par quelques-uns des hommes, ^

Autres remarques pour bien faire la cons^

truction,

I. Quand on rent faire la constrnctîott d'une Période « on doit d*âbord la lire eotièrement ; et s'il y a quelque mot de sous -* entendu , le sens doit aider* à le suppléer, ^iasi l'exemple trivial des rudi«* mens , Deui^em adoramus, est défectueux. Ou ne voit pas pourquoi Deus est au no- minatif: il faut dire, Deus quem adora- mus est ofnnipoiens. Deus est omnipotens ; voilà une proposition: Quem adoramus , en est une autre.

H. Dans les propositions absolues od coin pie tt es ) il faut toujours commencer par le sujet de la propoMtion; et ce sujet est toujours on un individu, soit réel, soit métaphysique, ou bien un sens total exprimé par plusieurs mots.

III. Mais lorsque les propositions soni relatives, et qu'elles forment des Périodes |

L

/

2^^, Principes

on commence par les conjonciions ou par les adverbes conjonctifs^ qui les rendent relatives; par c;xemple , si^ quand j lors^ que^ pendant que , etc. On met à part la conjonction, ou l'adverbe conjonclif, et Ton examine easùite chaque proposition séparément ; car il faut bien observer qa*un mot n'a aucun accident grammatical , qu'à cause de son service dans la seule propoi» sition oîi il est employé.

IV. Divisez d'abord la proposition en sujet *et en attribut^ le plus simplement qu'il sera possible, Après quoi , ajoutez au sujet personnel, ou réel, ob abstrait/ chaque mot qui y a rapport, soit par la raison de V id entité , ou par la raison de }a détermination. Ensuite passez à l'attribut eu commençant par le verbe, et ajoutant chaque mot qui y a rapport selon l'ordre le plus simple , et selon les détermina lions que les mots se donnent successivement. ' S'il y. a -quelque adjoint ou incise, qui ajoute à la proposition , quelque circoos* tance de temps , de manière , ou quel- qu'autre; après avoir fait la construclioo de cet incise , et après avoir connu la rfti$P^ de \% m^dificatioii qu'il a , placezT

de Grammaire» 24.3

le au commeDcement ou à la ,fio de la période, selon que cela vous parottra plus simple et plus naturel.

Far exemple y Imperante Cœsare Au» §mtOj unigeniius Dei Jilius Christus , in cwitaie Daçid , qùœ çocatur Bethléem^ natus est. Je cherche d*abord le sujet personnel , et je trouve Christus» Je passe à rattribot, et je vois est natus. Je dis d*abord, Christus^ est natus. Ensuite je connois par la terminaison, que Filius uni-' genitus, se rapporte à Christus j par rapport d'idendiiité ^ et je vois que Dei étant a a génitif) se rapporte à Filius, par rapport de détermination. Ce mot Dei détermine Filius à signifier ici le Fils' unique de Dieu. Ainsi j*écris le sujet total: Christus unigeniius filius Dei»

Est natus ^ Voilà l'attribut nécessaire. Natus est au oominatif , par rapport d'iden« tité avec Christus : car le verbe est mar- que simplement que le sujet est , et le mot^/ia/i<5 dit ce qu*il est, né: Est natus ^ est né^ est celui t^ui naquit^ est natus y comme nous disons, il est pcnuj il est allé. L'indication du temps passé est dans le participe çenu^ alléy natus ^ etc.

^ L a

244 Pnncipes

In chUaie Dapid;* voîlk un adjolot, qui marque la circonstance du lieu de la naissance. In , préposition de lieu , déier* xnioée par cipitate Dapid, Daçid^ nom propre, qui détermine switate, Dapid: ce mot se trouve quelquefois déclina à la manière des Latins , Dapid ^ Dapidis. Mais ici il est employé comme un nom hébreu , qui , passant dans la langue latine , sans en prendre les inflexioùs, est considéré eommè indéclinable.

Celte citée de David est déterminée plus singulièrement par la proposition incidente, ^uœ vocûtur Bethléem.

Il y a de plus ici un autre adjoint, qui énonce une circonstance de temps , hnperante Cœsare Augusto* On place ce» -sortes d'adjoints ou. au commencement, OU' à la fin de la- proposition y selon que l'on sent que la manière de les placer apporte ou plus de grâce, ou plus clarté. Je ne voudrois pas que Ton fatiguât les jeunes gens qui convtnencent, en les obligeant de faire ainsi eux-mêmes la coustructioa , ni d*eu rendre raison de la manière que nous venons de le faire, JLeur cerveau n*a pas encore asses

de Grammaire, 246

consistance pour ces opérations, réfléchies. Je voudrois seulement, qu'on oe les occupât d'abord qa*à expliquer un texte suivi , construit selon ces idées. Ils commenceront aiosi à les saisir par sentiment: et lors'- (ju'ils seront en état de concevoir L^s raisons de la construction ^ on ne leur en apprendra point d'autres., que celles dont la nature et leurs propres lumières leur feront sentir la vérité. Rien de plus facile que de les leur faire entendre peu«à-peu, sur un latin elles sont observées , et qu'on leur a faib^expliquer plusieurs fois. II en résulte deux grands avantages: 1.*^ moins de dégoût et moins de peine; 2.0 leur raison se forme, leur esprit ne se {>âte point , et ne s'accoutume point à prendre le faux pour le vrai ; les ténèbres pour la lumière , ni à admettre des mots pour les choses.

Quand on connoîc bien les fondemens de 4a construction , on prend le goût de l'élégance par de fréquentes lectures des Auteurs qui ont le plus de réputation.

Les principes métaphysiques de la cons^ truction ^ sont les mêmes dans toutes les langues. Je vais en faire l'application sur QQe IdjUe de Madaiùe Deshoulières.

L 3

_ ^. -

>

24^ Principes

Idylle de Madame Deshoulières, LES MOUTONS.

XJ. i L A i ! petits moutons , qa« tous kt9^ beureox Yous paissez dans nos champs p s«ns sooei , sans «larmss.

Aussi-tôt aimés qu'amonrenx , On ne tou» force point à répandre des larmes. Vous ne formez jamais d'inutiles désirs : Dans vos tranquilles cœurs l'amonr suit la nature £ans ressentir %e% nuax, Tous.arez ses plaisirs. L^ambition , Thonneur^ l'intérêt . ISmpostare,

Qui font tant de maux parmi nous ,

Ne se rencontrent point chez tous. Cependant nous avons la raison pour partage %

Et TOUS en ignorez l'usage. Innocens animaux n'en soyez point jatoux^

Ce n'est pas un grand avantage. Cette fiére raison , dont on fait tant del>rait> Contre les passions n'est pas un sûr remède»

Un peu de vin la trouble ,

Un enfant la séduit. Et déchirer un cœur qui Tappelle k son aidé »

Est trut l'effet qu'elle produit.

T6ujours impuissante et sévère ^ Zlle s'oppose & tout , et ne surmonte pies.

iious la garde de votre chien , Vous devez beaucoup moins redouter la colère

1

de Grmjunaire, 247

Ocsloaps cruels et ravissans ^ Que , SODS Taotorité d*ane telle chimère,

NooA ne deTons craindre nos seniu Ne Tsudroit-il pat uieaz tivre , comme vous faîtil «

Dans une doace oisiveté ? Ke vaudroit-il pas mieux être , comme tous êtes ,

Dans une heureuse obscurité,

Que d'avoir , sans tranquillité ,

Des richesses , de U naissance ,

De Tesprit et de la beauté ? Ces prétendus trésors , dont on fait vanité ,

Valent moins que votre indolence. Us nous h'vrent sans cesse à des soins criminels.

Par eux > plus d^un remors nous ronge.

Nous voulons les rendre éternels , Sans songer, qu*eax et nous, passeront comme un songe.

U n^esc , dans ce vaste univers .

Rien d'assuré , rien de solide. Des choset d*ici>bas , la fortune décide,

Selon ses caprises divers.

Tout Teffort de notre prudence Ke peut nous dérober au moindre de $e% coups. Paissez y montons , paissez sans régie et sans science*

Malgré la trompeuse apparence , Toos êtes plua heureux et plus sages que nous.

L4

a 4? Principes

Construction grammaticale et raisonnée à$

cette Idylle,

Eélai ! petiis moui^ns ^ue vous êtes heureux /

•» . Vous êtes heureux. C'est la proposition.

Helas! petits moutons. Ce sont les adjoints

à la propositioo; c'est-à-dire , <]^ue ce sont

des mots qui D*eatreat grammaticalement,

ni dans le sujet, ni dans Tattribut de la

proposition.

Hélas î est une interjection, qui marque un sentiment de compassion. Ce sentiment a ici pour objet, la personne même qui parle. Elle se croit dans un état plus mal- heureux que la condition des moutons.

Petits moutons» Ces deux mots sont ont suite de Texclamation. Ils marquent, qat c'est aux moutons que l'Auteur adresse la parole. Il leur parle comme à des per- sonnes raisonnables.

Cloutons, c'est le substantif; c'est-à-dire, le suppôt , l'être existant , c'est le mot qui expliqua vous.

Petits: c'est l'adjectif ou qualificatif. C'est le mot qui marque que l'on regarde le substantif arec la qualification que ce mot

ie Grammaire» 249

exprime. C'est le sabstantif même considéré sous un tel point de vue.

Petits , n*est pas ici un adjectif qui mar- que directement le volume et la petitesse des moutons: ^c'est plutôt un terme d'af- fection et de tendresse. La nature nous ins- pire ce sentiment pour les enfans et pou^ les petits animaux , qui ont plus de besoia de notre recours que les grands.

Petits moutons. Selon l'ordre de l'ana- lyse énonciative de la pensée, il faudroît dire moutons Petits ^ car Petits suppose moutons: on ne met petits au pluriel ec au masculin , que parce que moutons est au pluriel et au masculin. L'adjectif suie le nombre et le genre de son substantif, parce que l'adjectif n'est que le substantif même considéré avec telle ou telle quali- fication. Mais: parce que ces différentes considérations de l'esprit se font intérieure- ment dans le même instant, et quelles ne sont divisées que par la nécessité de re- nonciation,, la construction usuelle place au gré de l'usage certains adjectifs avant, et d'aii^tres après leurs substantifs.

Que vous êtes heureux l Qise est pris ad-* verbiâlement , et vi^N^ du latin quantum,

L 5

n

25o Principes ■-

ad quantum i à quel point/ combien, Ainn, que modifie* le verbe : il marque une rua- nière d*étre, et vaut auunt que Ijidverbe combien.

Vous, est le sujet de la proposition; c*est de cous que l'on juge. Vous^ est le pro- nom de la seconde personne. Il est ici aa pluriel.

Etes heureuse, c'est Tattribut: c'est ce qu'on juge de pous.

Etes, est le verbe qui, outre la valeur eu signification particulière de marquer l'existence, fait connoître l'action de l'esprit qui attribue celte existence heureuse à çous: et c'est par cette propriété que ce mot est verbe. On affirme que pous existez heu" reux»

Les autres mots ne sont que des dé- nomination» : mais le verbe , outre la valeur ou signification particulière du qualificatif qn*il. renferme^ marque encore l'action de l'esprit qui attribue ou ^ppli^ue cette valeur \ un sujet.

Etes, La terminaison de ce verbe marque encore le nombre , la personne et le temps présent.

Heareujtj est le qaalifkatif , qne l'esprit

de Grammaire. 25 c

considère comme uoi et identifié a pou$, à votre exisieace. C'est ce que nous ap- pelé os rapport d'identité.

Vous paisses dans nos champs ^ sans souci, sans

alarmes.

Voici une autre proposition* Vous , en est encore le sujet simple» C*est un pronom substantif, car c'est le nom de la seconde personne , en tant qu'elle est la personne à qui on . adresse la parole^ comme roi, pape ^ sont des noms de personnes, en tant qu*elles pos- sèdent ces dignités. Ensuite , les circons- tances font cdnnoitre de quel roi ou de quel pape on entend parler. De même ici, les circonstances, les 'adjoints, font connoître que ce çouSj ce sont les mou- tons, C*est se faire une fausse idée des pronoms, que de les prendre pour de simples vice-gérens, et les regarder com- me des mots mis à la place des vrais noms. Si cela était, quand les Latins di- sent Cêrès foutlepain, ou Bacchus pour le vin ; Cérèi et Bacchus seroicnt des pronoms-.

Paisses^ est le v^rbe^ dans un sens

L 6

a 52 Principes

neutre, c'est-h-dire ^ que ce. verbe mar- que ici un état de sujet : il exprime en même-temps Taction et le terme de Tao tion. C«r cous paissez, est autant que pous mange» V herbe. Si le terme de Tac- tion ëioit exprima séparément , et qu'on dît cous paissez l'herbe naissante , le ver- be seroît actif transitif.

Dans nos champs, voila une circons-» tance de l'action.

Dans est une proposition qui marque nne vue de l'esprit par rapport au lien. Mais dans ne détermine point le lieu : c'est nn de ces mots incomplets dont nous avons parlé y. qui ne foot qo'uue partie d'un . sens particulier , et^ qui ont besoin d'un antre mot pour former ce sens. Ainsi dans est la préposition , et nos champs en est le complément. Alors, ces mots , dans nos champs ^ font un sens particulier , qui entre dans la com- position de la préposition. Ces sortes de sens ' sont souvent exprimés en un seul mot, qu'on appelle adverbe.

Sans souci ; voilà encore une préposi- tion avec son complément : c'est un sens particulier qui fait un incise. Incise vient

ie Grammaire*. 253

du ladn incisum, qui signifie coopë. C'est nn sens dëiaché qai ajoute une circons- tance de plus à la proposition. Si ce sens étoit sapprimë, la proposition auroic une circonstance >de moins ; mais elle n'eu se* roit pas moins proposition.

Sans alarmes j est un autre incise.

jiu$ii-tât aimés qu'amoureux^ On n€ vous force point à répandre des larmei^

Voici une nouvelle période : elle a deux membres.

Aussi' tôt aimés çu'amoureuic , c'est le premier membre , c'est-à-dire , le premier sens partiel, qui entre dans la composi- tion'iie la période.

Il y a ici ellipse, c'est-à-dire, que pour faire la construction pleine, il faut sup« pléer des mots que la construction usuelle supprime, mais dont ie sens est dans l'espriK,

Aussi'tôt aimés qu'amoureux ; c'est-à-« dire , comme vous êtes aimés aussi- tôt qu^ pous êtes amoureux»

Comme j est ici un adverbe relatif, qui sert au raisonnement, et qui doit avoir

a54 Prùicifcs

UQ corrélatif, €omme, c'est-à-dire, et parce que vous êtes , etc.

VouS'i est le sujet; êtes aimés aussi-- tôt, est l'attribut. Aussi ^ tôt esc uq ad- verbe relatif de temps , dans 'le . même temps.

Que y autre adverbe de temps ; c'est le corrélatif' à' Aussi-tôt. Que appartient à la proposition suivante, que pous êtes amoureux: ce que vient duMatin^i/i quo^ dans lequel ^ cum.

Vous êtes amoureux ; c'est la proposi- tion corrélative de la pré<:édente.

Ofi ne vous Jorce point à répandre des larmes. Cette proposition est la corréla- tive du sens total des deux propositions précédentes.

0/2, est le sujet de la proposition. On vient de homo. Nos pères di9t>i€nt kom^ nôu y a hom sur la terre (l). On, se prend dans un sens indéfini , indéterminé, ~ une personne quelconque, un individu de votre espèce.

Ne vous force point à tépandre des lar^^

i* !■ I IXI M— ^— i^—

(i) Voyez Boffel ap met Hom.

de Grammaire. 255

tnes. Voilà tout l'attribat : c'est l'attribut total : c'est ce ^u'on juge de On,

Force , est le verbe qui est dit de on : c'est pour cela qu'il est au singulier, et à la troisième personne.

AV point : ces deux mots font une né- gation ; ainsi la proposition est négative, VoyeK ce que nous disons de jjoint , ea parlant de Y Article , vers la fin.

Vous, Ce mot^ selon la construction usuelle , est ici avant le verbe ; mais , se- lon Tordre de la construction des vues de l'esprit , vous est après le verbe , puis- qu'il est le terme ou l objet de l'action de forcer.

Cette transposition du pronom n'est pas en usage dans toutes les langues. Les An- glois disent , I dress my self; mot-à->niot , j'habille moi-même. Nous disons/^ m'ha-^ bille , selon ia construction usuelle ; ce qui est une véritable inversion , que l'ha- bitude nous fait préférer à la construc- tructioQ^régulière, Ou lit trois fois , au der- nier chapitre de l'Evangile de Saint- Jean ^ Simon , diligis me l Simon j^ amas me? Pierre , ainiez - cous moi l Nom disons Pierre > m'aimcÂ^vous l

^56 Principes

La plupart des étrangers qui viennent du nord, disent j'aime cous y faime lui\ au lieu de dire, je cous aime <^ je t aime , selon notre construction usuelle,

A répandre des larn^s. Répandre des lat" mes; ces trois mots font un sens'^total) qui est le complément de la préposition à. Cette préposition met le sens total en rap« port avec force , forcer à , cogère ad. Vir- gile a dit, Cogitur ire ad lacrymas (l), et Vocant ad lacrymas (2).

Répandre des larmes* Des larmes n*est pas ici le complément immédiat de ré^ pandre* Des larmes est ici dans un sens partitif. 11 y a ellipse d*un substantif gé- nérique , répandre une certaine quantité de les larmes^ \ ou., comme disent les Poètes latins , Imbrem lacrymarum , une pluie de larmes*

VaA9 ne forme» Jamaii d^inuttUê deiirs.

Vous y est le sujet de la proposition. Les autres mots sont Tattribut. Formez , est \t verbe, k la seconde personne du présent de l'indicatif.

^a) X* XI* 96.

àe GrammaUe. aSy

î^e , est la mégatîon, qui rend la propo- litîon négative. Jamah est an adveme de temps. Jamais , en aucun temps. Ce mot vient de deux mots latins , jatn et ma gis,

D* inutiles désirs. C'est cucore ua sens partitif. Vous ne Jbrmez jamais certains désirs , quelques desirs qui soient du nom'» bre des desirs inutiles,

DUnutiles desirs. Quand le substantif et Tadjeciif 5ont ainsi le déterminant d'un verbe, ou le complément d'une préposition dans un sensaffirmatif , si Tadjectif précèdfs le substantif, il tient lieu d'article^ et marque la sorte ou espèce. Vous formez d'inutiles desirs. On qualifie d* inutil es , les desirs que vous formez. Si au contraire , le substan<« lif précède l'adjectif, on lui rend l'article; c'est le seni individuel : Vous formez, des desirs inutiles. On veut dire que les desirs particuliers ou singuliers que vous formez , sont du nombre de les desirs inutiles. Maift dans le sens négatif, on diroit , Vous ne formez jamah, , pas , point , de desirs inu^ tiles. C'est alors, le sens spécifique. I! ne s'agit point de déterminer tels ou tels^desirs singuliers. On ne fait que marquer l'espèce oa sorte de desirs que vous former.

258 Principes

I>ans vos tranfuilies cœun l'amour mit la nature,

La construction est: L'amour suit la nature dans 00$ cœurs tranquilles, £'û- mour ^ est le sujet de la proposition , et par cette raifon il précède le verbe. La nature , est le terme de Taction , de suit , et par cette raison ce mot est après le verbe. Celte position est dans toutes les langues , selon l'ordre de renonciation et de TaDa- lyse des pensëeis. Mais lorsque cet ordre ««t interrompu par des transpositions ) dans les langues qui ont des cas , il est indiqué par une terminaison particulière , qu'on z^^^ feWé accusatif. En sorte qu*après que toute la phrase est finie , Tesprit remet le mot a sa place.

Sans ressentir ses maux « vcus avez ses plaisirs.

Construction , Vous açez ses plaisirs , sans ressentir ses maux , Vous i est le sujet: Jes autres mots sont l'attribut.

Sans ressentir ses maux est une prépo- sition , dont ressentir les maux est le. com- plément. Ressentir ses maux , est un sens particulier , équivalent à un nom. Ressentir^ «st ici un nom verbal. Sans ressentir , est «ne préposition implicite, sans que vous

de Grammaire. 25^

ressenUez, Ses maux , est après Tinfi- niiif ressentir , parce qu'il en est le dé- terminant. 11 est le terme de l'action de ressentir,

L'amhîtion f thonne tir , f intérêt^ V imposture y Çui font tant de maux pa^rmi nous , ife se rencontrent point chez çôus.

Voilà la proposition principauté.

L'ambition^ l* honneur , V intérêt ^ l'im» posture \ c*est le sujet de la proposition* Cette sorte de sujet est appelé sujet mul^ tiple ) parce.qae ce sont plusieurs individus, qui ont un^ attribut commun. Ces indivi- dus sont ici dçs iodividus métaphysiques) des termes , abstraits à l'imitation d'objets réels.

Ne se rencontrent point chez pous ; c'est l'attribut. On pouvoit dire> Vambition ne se rencontre point chez pous , l'honneur ne se rencontre point chez t^ous^ l'intérêt , 6tc. ce qui auroit fait quatre propositions. En rassemblant les divers sujets dont on veut dire la même chose, on abrège le discours j et on le rend plus vif.

Qui font tant de mau^ parmi nousu

a6o Principes

C'est la proposition incidente. Qui^ en est le sujet. C*est le pronom relatif. It rap- pelle k Tesprit ï! ambition, ^ honneur , rin^ térêiff imposture, dont on vient de parler 1

Font tant de maux parmi nous, C*est l'atlribut de la proposition incidente. /

Tant de maux; c'est le déterminant de ybnt \ c'est le terme de l'action de [font.

Tant^ vient de l'adjectif tantus^ a, um, Taat^ est pris ici substantivement. Tantuni malotttm , tanium xf'if*^ malorum ; une $i grande quantité de maux.

De maux , est le qualificatif de tant. C'est un des usages de la préposition de^ de servir à la qualification.

Maux 9 est ici dans un sens spécifique , in- défini, et non dans un sens individuel. Âinsi^ maux n'est pas précédé de l'article les.

Parmi nous^ est une circonstance de lieu. Nous , est Le complément de la préposition parmi.

Cependant, nous avons la raison pour partage ; £f vous en ignorez ^t' usage.

Voilà deux propositions liées entre elles ^ par la conjonction et. Cependant^ adverbe,

Grammaire, 25 1

ou conjonction adversdtive) c'esi-à-dirc , qui^ marque restriction ou opposition, par rapport à une autre idëe~ ou pensée. Ici cette pensée est^ Nous apons la raison; cependant malgré cet açantage^ les paS" mnsfonl tant de maux parmi nous. Ainsi, cependant marque opposition, contrariété, «ntrc Offoirla raison^ et atioir des passions» Il y a dooe ici une de ces propositions qpe les logiciens appellent adt^ersatwe ou discrétiffe.

Nous, est le sujet ; aidons la raison pour partage, est l'attribut.

La raison pour partage. L'auteur pou- voit dire , la raison en partage : mais alors il y anroit eu un bâillement ou hiatus , parce que la raison finit dar la voyelle naialle on , qui auroit été suivie de en. Les Poètes ne sont pas toujours si exacts , et redoublent ^n en cej occasions ; la rai'* ion-n-en partage : ce -qui est une pronon- ciation vicieuse. D'un autre côté j en disant, pour partage^ la rencontre de ces deux syllabes, pourf par, est désagréable à l'o- reille.

Vous en ignorjez Vusage, Vous^ est le Ç'^J^t, er^ ignorez l'usage^ est l'attribut.

±6z Principes

Ignorez , est le verbe', L* usage ^ est le déter- minant de ignorez^ c'est le terme de la signi- fication à* ignorer: c*est la chose ignorée ; c'est le mot qui détermine ignorez.

En y est une sorte d'adverbe pronomi- nal. Je dis que en est une sorte d'ad- verbe j parce qu'il signifie autant qu'une préposition et un nom. En, inde^ de cela ; de la raison* En , est un adverbe pronominal , parce qu'il n'est employé que pour réveiller l'idée d'un autre mot*, Vous ignorez l'usrge de la raison,

Tnnocens animaux, n'en soyes point jaloux:

C'est ici une énonciation à l'impératif.

Innocens animau:c. Ces mots ne dépen- dent d'aucun autre qui les précède, et sont énoncés sans articles. Ils ijtarquent, en pareil cas , la personne à qui l'on adresse la parole. *

Soyez , es^ le verbe à l'impératif. Ne point , est la négation.

En, de cela, de ce que nous açons la raison pour partage.

Jaloux est l'adjectif. C'est ce qu'on dit

«ue les animaux ne doivent pas être.

Ainsi , selon la pensée , ;a/owj? se rapporte

de Grammaire^ 2(>3

\ animaux j\p^T rapp'ort d'identî.lé , mais négativenieat ', ne soyez pas jaloux.

Ce n6St pas un grand avantage.

Ce, pronom de la troisième personne* Hoc , ce, cela, à savoir que, nous apons la raison , n*est pas un grand avantage.

Cène Jt ère raison j dont on fait tant de brait f Contre les passions n*est pas un sûr remède*

Voici proposition principale, et propo- sition incidente.

Cette Jière raison n'est pas un remède sûr contre les passions \ Voilh' la propo- sition principale.

Dont on Jait tant de bruit : c'est U proposition incidente.

I7o72/,est encore un adverbe pronomi- nal, de laquelle, touchant laquelle. Dont vient du mot unde , par mutation ou transposition de lettres, dit Nicot, Nous nous en aervons pour duquel, de laquelle^ de qui^ de quoi,

On^ est le sujet de cette proposition in* eidente.

Fait tant bruit , en est l'attribuw. Fait , (551 le verbe. Tant de bruit ^ est le déter*

3^4 Principes

Tninant de fait. Tant de bruit , tantum

xfnficajacfatrionis , tantam rein jactationis.

Un peu de vin la trouble:

Un peu: peu est ua substantif : parum çini \ une petite quantité de pin» On dit , le peu , de peu , à peu^ pour. peu. Peu, est ordinairement suivi d*an qualificatif. De çin , est le qualificatif de peu. Vnpeu] un et le sont des adjectifs prépositifs qai indiquent des individus. Le et ce indiquent des individus déterminés; au lieu que un in- dique un individu indéterminé: il a le même sens que quelque. Ainsi un peu est bien diffé- rent de le peu: celui-ci précède Tindividu déterminé) et l^autre Tindividu iodétermiaé.

Un peu de çin. Ces quatre mots expri- ment une idée particuli 6*1*6 qui est le sujet de la proposition.

"La trouble , c'est l'attribut. Trouble , est le verbe, ha^ est le terme de Taction àg verbe. La , est un pronom de la troisième personne c'est-à-dire, que la rappelle l'idée de la personne ou de la chose dont on a parlé : Trouble la elle , la raison,

Vn enfant ( i^aaioiir ) la tédtàt.

C'est

âe Grammaire» l65

m

C«st'1a même coQstruciion qae dans le proposition préjédente.

Et déchirer un cœur, qui l'appelle- à son aide. Sst" tout V effet t/uetle produit.

La -constructiou de cette petite période mérite attentioQ. Je dis période , gramnia- ticalement parlant y parce que cette phrase est composée de trois propositions gram- maticales : car il y a trois verbes à l*ia« dicalif , appelle , est , produit.

Déchirer un cœur est tout V effet: c'est la première proposition grammaticale , c'est l«i propotsition principale.

Déchirer un casur ^ c'est le sujet énon- cé par plusieurs mots , qui font un sens qai pourroit être énoncé par un seul mot , si Tasage en avoit établi un. Trouble , ^7^;'- tatiorij repentir , remors , sont a- peu-près les équivalens de déchirer un cœur.

Déchirer un cœur est donc le sujet; et est tout l'effet, c'est l'attribut.

()ui l'appelle à s^n aide ; c'est une pro- position incidente.

Q^ui , en est le sujet : ce qui est le pro- duit relatif qui rappelle , cœur. I L'appelle à son aide, c'est l'attribut de \ M

2^6 Principes

qui; la, est le terme de raclîoo â*ip^ pelle ; appelle elle , appelle la raison.

Qu'elle produit j elle produit lequel effet \ c'est la troisième proposition. * Elle ^ est le sujet, elle est uu pronom qui rapelle raison.

Produit que, c'est l'attribut à* elle. Que est le terme de produit. C'est un pro- nom qui rappelle effet.

Que étant le déterminant) ou terme de l'action de produit j est après produit, dans l'ordre des pensées, et selon la .cons- truction simple : n)ais ^la construction usuelle l'énonce avant produit ; parce que le que étant un relatif conjonctif , il ra* pelle (ffet,^ et joint , elle produit, avec effet. Or, ce qui joint, doit être entre deux termes. La relation en est plus ai- sément aperçue , comme nous l'avons déjà remarqué.

Voilà trois propositions grammaticales; •mais logiquement , il n'y a qu'une seule proposition*

Et déchirer un cœur qui l'appelle et son aide: ces mots font un sens total ^ qui est le sujet de la proposition logique,

flst tout l'effet qu'elle produit: voilU

' de Grammahe. £67

iinqLU're sens total, qui est raliribut. C'est ce qu'on dit de déchirer un cœur, .

Toujours impuissante et sévère , £ilii s'oppose à tout et ne surmonte rien.

Il y a encarc ici ellipse, dans le pre- mier membre de cette phrase. La cons- truction pleine est : La raison est toujours impuissante et se ç ère. Elle s'oppose à tout^ parce qu'elle est séifère.; et elle ne surmonte rien^ parce quelle est impuissante.

Elle s^ oppose à tout^ ce que nous vou- drions faire quinousseroit agréable. Opposer^ ponere ob ^ poser devant , s'opposer^ opposer soi , se mettre deçant comme un obstacle. Se, est le terme de l'action d"" opposer. La. construction usuelle le met avant son verbe, comme me, te, le, que, etc. à tout; Cicëron a dit, Opponere ad.

Ne surmonte rieiu Rien, est ici le terme de Taciion de surmonte. Rien, est toujours accompagné de la négàrtion exprimée ou sous-entendue. Rien^ nullam rem.

Sur toutes riens garde ces points. Me- hup , au Testament : vous voyez que sur toutes riens , veut dire ^ sur toutes

choses.

M a '

SlSS ^ Principes

S9US ta garde de votre chien » Kcus devez beaucoup moins redouter la colère

Des loups cruels et ravissans » Que f sous V autorité d'une telle chimère^

Nous ne devons craindre fios sens.

Il y a ici ellipse et synthèse. La syn- thèse se fait Iorsc[ue les mots se troavéïit exprimés oa arrangés selon un certain sens que Ton a dans Tesprit.

De ce que ( ea: eo quod, propierea guod) vous êtes- sous la garde de votre chien, vous devez . redouter la colère des loups cruels et ravissans , beaucoup moins; au lieu que nous^ qui ne sommes que sous la garde de la raison , qui n*est qu^uoe chimère, nous n'en devons pas craindre nos sens beaucoup moins.

Nous n'en devons pas moins craindre nos sens: voila la synthèse ou syllepse, qui attire le ne dans oetteph rase.

La colère des loups, La poésie se per- met cette expression. L'image eu est plus noble et plus vivp. Mais ce n'est pas par colère , que les loups et nous mangeons les moutons. Phèdre a àh^Jauce improbâ; et la Fontaine a dit, lajaim,

beaucoup moins j muH(> minus: c'esï

de Grammaire. 269

une expression adverbiale , qui sert k la GoniparaisoD , et cjoi , par conséquent , demande un corrélatif , que^ etc. Beaucoup moins, selon un coup moins beau , moins grand Voyez ce q^e nous disons de Bsau^ couip, en parlant de Tarticle.

ife 9audroit'il pas mieux vitre, comme vous faites^ Dans une douce oisiveté.

Voilà une proposition qui fait un sens incomplet, parce que la corrélative n*est pas exprimée : mais elle va Têtre dans la pdriode suivante , qui a le môme tour.

Comme vous J^ai tes , est une proposi» tioQ incidente.

Comme ^ adverbe. Quomodo : à la ma"- nière que cous le faites,

^t vaudroit'il pas mieux être, comme vous étes^ Dans une heureuse obscurité Que d'avoir, iaps tranquillité , Des richesses f de la naissance p De tesprif e$ de beauté,

11 n'y a dans celle période, que deux propositions relatives, et une incidente.

Ne vaudroit^il pas mieux êire^ comme voiis êtes , dans une heureuse obscurité : c'est la première proposition relative, avec l'incidente, comme cous êtes,

M 3

ayo Principes

Noire syntaxe marque rinlcrrogalîon , en mettant les pronoms personnels après le verbe, même lorsque le nom est ex- primé. Le Roi ira- 1'* il à Fontainebleau l A im ez^i>ous la périté ! Irai -je l

-J^^oici quel est le sujet de cette propo- sition. //, lllud^ ceci, a savoir, être dam une heureuse obscurité; sens total énoncé par plusieurs mots équivalens à un seul. Ce'^ens total gst le sujet de la proposition. Ne çaudroit-il pas jnieux ! Voilà l'al- iribut, avec le signe de l*interrogaiîOD. Ce ne interrogatif nous vient des Latins, Egone^ adeone^ super aine ^ jamne çides! Voyez'-tfûus ! Ne çoyez-çous pas !

Que^ çuam. C'est la conjonction ou particule, qui lie la proposition suivante; en sorte que la proposition précédente et colle qui suii^ sont les deux corrélatives de comparaison.

Que la chose y l'agrément d^apoir^ sans tranquillité ^ V abondance des richesses ^ Vai^antage de la na'ssance , de l'esprit et de la beauté. Voilà le sujet de la propo- tion corrélative.

Ne (faut, qui est sous-cntcndu , en est Tattribut." iVc, parce qu*on a dans Tesprir,

de Grammaire, ini

venant pas tant que voire obscurité vaut^

Ces prétendus trésors^ dont on fait vanité f fiaient moins çue votre indolence.

Ces prétendus trésors calent moins; voila une proposition grammaticale relative.

Que voire indolence ne vaut; voilà la corrélative.

Votre indolence n*est pas dans le même cas: elle ne vaut pas ce moins: elle vaut bica davantage.

Dont on Jait çanité , est une proposition incidente : Qn fait çanité desquels, à cause desquels. On âii^J'aire çanité j tirer vanité de , dont , desquels. On fait çanité} ce mot vanité entre dans la composition du verbe ^ et ne marque pas une telle vanité en particulier; ainsi il n'y a point d'articles.

Ui nous livrent sans cessa à des soins criminels.

Ils (ces trésors, ces avantages): Ils est le sujet.

Liçrent nous sans cesse à, etc. c'est l'aiiribut.

À des soins criminels ; c'est le sens partitif; c'est-à-dire, que les soins auxquels ils nous livrent, sont du nombre des i>oins

M 4

1

aya Principes

criminels; ils en font partie. Ces prétendus avantages nous livrent à certains soins , k quelques soins , qui sont de la classe des soins criminels.

Sans cesse^ façon de parler adverbiale, Jiue ulla intermissione.

Par eux^ plus d'un remors nous ronge.

Plus d^un remors', voilà le sujet com<- plexe de la proposition.

Ronge nous par eux^ h Toccasioa ces trésors; c'est Tattribut.

Plus d'un remàrs. Plus , est ici le subs- tantif) et signifie une quantité d^ remors plus grande que celle d'un seul remors.

Nous voulons les rendre éternels^ ^Sans songer qu'eux eS nous passerons comme k*

songe,

Nous^ est le sujet de la proposition.

Voulojis les rendre étemels^ sans sort" ger ^ etc. c'est Tattribut logique.

VouloJïs, est un verbe actif. Quand oa veut, on veut quelque chose; les rendre éternels , rendre ces trésors éternels : ces mots forment un sens , qui est le terme de raction de poulons: c'est la chose que nous voulons.

\

\

de Grammaire, 275

5«nj songer queux et nous passeroni comme ujt songe.

Sans sbn^er. Sans ^ préposition. Soîigery est pris ici substantivement. C*est le com- plément de la préposition sans ; sans pensée çue. Sans songer peut aussi être regardé comme une proposition implicite: sans que nous songions.

Que, est ici une conjonction, qui unit à songer, la chose à quoi l'on ne >soDge point. »

Eux et nou^ passerons comme un songe* Ces mots forment un sens total , qui exprime la chose à quoi Ton devroit songer. Ce sens total est énoncé dans la forme d*une proposition; ce qui est ordinaire en toutes les langues. Je ne sais qui a J'ai t cela ^ Nescio quis Jecit; Quisjecil est le terme ou Tobjèt de nescio: Nescio hoc, nempè , quls Jecit, ; .

// n'est dans ce vaste univers , Rien d'assuré, rien de solides

II, illud, nempè, ceci, à savoir, rien d'assuré^ rien de solide. Quelque chose d^ assuré , quelque chose de solide: voilà le sujet de la proposition. N'est ( pas )

M 5

/

274 Principes-

dans ce caste univers; en voilà l'attribut. La négation ne rend la proposition négative. D'assuré* Ce mol est pris ici substan- liveiiïent: Ne hiîum quidem çerii. D'assuré est encore ici dans un sens qualificatif, et non dens un sens individuel; et c'est pour cela qu*il n*est précédé que de la préposition de , sans article.

Des choses d'ici bas la Fortune décide » Selon ses caprices divers,

ha Fortune^ sujet simple , terme abstrait personnifié : c'est le sujet de proposition. Quand nous ne connoissons pas la cause d'un événement, notre imagiuation vient au secours de notre esprit, qui n'aime pas k demeurer dans un état vagae et indéterminé. Elle le tixe à des faoïôrues qu'elle réalise, et auxquels elle donne des noms, Fortune^ Hasard^ Bonheur ^ Malheur,

Décide des choses d'ici bas , selon ses

m

caprices diçers» C'est Tauribut complexe.

Des choseiy de les choses: de signifie ici touchant.

D'ici bas détçrrnine choses. Ici bas est pris substantivement.

Selon ses caprices dipers^ est une ma*

de Grammaire, .ayS

niète de ddfider. Selon, est la prëpositioa. Ses caprices divers ^ est le coniplëment de la prépositiou.

Tout V effort de notre prudence 2V« peut nous dérober au moindre de ses coups.

Tout report de notre Prudence, voilk le sujet complexe : de notre prudence détermine l'effort, et le rend sujet com- plexe. Uejfort de est un individu méta- physique, et par imitation; comme un tel humme ne peut, de même tout Veffort ne peut»

lie peut dérober nous\ et selon la construc- tion usuelle, nous . dérober ,

,Ju moindre ^ à le moindre; à ^ est la préposition \ le moindre^ est le. complé- * ment de la préposition.

Au moindre de ses coups; au moindre coup de ses coup^. De ses coups, est dans le sens partitif.

Paissez f moutons^ paissez sans règle et sans science Malgré la trompeuse apparence p Tous êtes plus heureux. et plus sages que nous.

La trompeuse apparence , . est ici ua individu métaphysique personnifié.

M 6

276 Principes

Malgré. Ce mot est composé de Tad- ]^ecy\î mauvais ^ et du substantif ^r^' , qui se prend pour colon , goût^ Apec le mau" pais gré de ^ en retranchant \t de^ à ia manière de nos pères , qui supprimoienC souvent cette préposition , comme nous l'avons observé en parlant du rapport de détermination. Les anciens disoient /7i<7z/^rf; puis on a dit 'malgré. Malgré moi, auec le maut^ais gré deNTJoi] Cum mea mala gràtia^ me int>ito. Aujourd'hui on fait de malgré une préposition, malgré la irom^ peuse apparence^ qui ne cherche qu'à en imposer et à nons en faire accroire , vous êtes ) au fond et dans la réalité, plus heureux et plus sages que nous ne le sommes.

Tel est le détail de la constroclion des mots de cette Idylle.' Il n'y a point d'ou- vrage, en quelque langue que ce paisse être, qu'on ne pût réduire aux principes que je vient d'exposer, pourvu que Toa connût les signes des rapports des mots en cette langue , et ce qu'il y a d'arbitraire^ qui la distingue des auires.

Au reste , si Jes observations que j'ai faites paroissent trop mélàph^si^ues à qaeU

ie Grammaire, 3177

ques personnes , péo accoutumées peut* être à réfléchir sur ce qui^sc passe en cUeS'- mêines ; je les prie de considérer qu*oa ne sauroît traiter raisonnablement de ce qui concerue les mots*, que ce ne soit relativement à la forme que Ton donne a la pensée^ à l'analyse que l*on est obligé d'en faire par la nécessité de réiocuiion ^ c'est-à-dire , pour la faire passer dans l'esprit des autres; et dès-lors on se trouve dans le pays de la Métaphysique. Je n'ai donc pas éié chercher de la Métaphysique , pour en amener dans une contrée étrangère^ je n'ai fait que montrer ce qui est dans l'esprit, relativement au discours et a la nécessité de Télocution. C'est ainsi que l'anatomîste montre les parties du corps humain 9 sans y en ajouter de nouvelles. Tout ce qu'o^ dit des mots, qui n'a pas une relation directe avec la pensée y ou avec la forme de la pensée ; tout cela , dis -je, n*excite aucune idée nette dans l'esprit. On doit connoitre la raison des règles de l'élocution , c'est - à * dire , de Tart de parler et d'écrire , afin d'éyitsr les fautes de la construction , et pour acquérir l'habitude ^de s'énoncer avec une

2»78 Principes

exactitude raisonnable qui ne contraigne point le génie.

Il est vrai que rimagination auroit ëié plus agréablement afiiusée^ par quelques réflexions sur la simplicité et la mérité des images, aussi bien que sur les expressions iînes et naïves ; par lesquelles cette illustre Dame peint si bien le sentiment.

Mais, comme la construction simple et nécessaire , est la base et le fondement de. toute construction usuelle et élégante que les pensées les plus sublimes, aussi- bien que les plus simples , perdent leur prix , quand elles sont énoncées par des phrases irrégulières ; et que d'ailleurs le public est moins riche en observations sur cette construction fondamentale, j'ai cru qu'après avoir taché d*en développer les véritables principes, il ne seroit pas inutile â*en faire Tapplicalion sur un otrvrage aussi connu et aussi généralement estimé que Test ridylle à^s .Moutons ^^ Madame Dcshoulières.

de Grammaire. 279

I NVE RS ION

Par du MARSAIS.

•V

S

PURIUS CarvulÎQS étoit devenu boiteux ^ d'ane blessure qu*il avoit reçue dans un conilVat. Il se faisoit une sorte de honte de paroitre en public en cet état. Que ne vous roontrcz - vous , mon (ils , lui dit sa mère; à chaque pas que vous ferez, vous vous ressouviendrez de votre valeur.

Voici comme Cicéron fait' parler cette femme respectable.

Quin prodis ) mi Spuri! ut quotiescum- que graduni faciès , loties tibi tuarum vir- tutura veniat in mentem. Cic. de. Orat» II. LXI.

Bornons-nous à la, dernière proposition ioties tïbi iuarum çirtutum p^niat.in mentem.

Je veux expliquer cette proposition à

iSo Principes

un jeune homme , et suivre la méthode de M. Pluche, el de M. Chompré (l).

Premièrement. Le premier pas que j*ai à faire, selon M. PJuche , c*est de rap- porter nettement en langue vulgaire , ce qui est le sujet de la traduction.

Soit. Je viens de faire ce premier pas.

Le second , c'est de lire et de rendre fidèlement en notre langue , le latin donc on a annoncé le contenu , en un mot^ de traduire (2),

Ce ïjLioi traduire^ est imprimé en Ita tique, je soupçonne quelque mystère.

Le troisième pas est de relire de suite tout le latin ^ traduit , en donnant à chaque mot ie ton, (et le bon ton, p. 160) et l'inflexion de la voix qu'on lui donneroit dans la conversation.

Ces trois premières démarches sont l'af- faire du Maître, dit M. Fluche.

C'est précisément ce qui ne me paroit pas assez développé.

Qu'entendez-vous dans le second pas, lire, et rendre fidèlement en notre langue le latin,

(1) Page 1 54. (a) Page i55.

ie Grammaire, 281

qu'est-ce que cejidèlement et ce traduire l

*Ce.qui fait' ma difficulië , c'est que dans votre troisième pas vous dites que le Maître doit relire de suite tout le latia traduit. Cela semble supposer que dans le second procédé , il n^a pas lu de suite le latin ^• qu'il Ta décomposé , qu'il en a fait la cons- truction et qu^il Ta expliqué littéralement et mot à mot. G*est-là vraisemblablement ce que vous avez entendu par votre traduire ^ eu Italique. Kn effet, que feroit le Maîtire dans ce second pas , qui fut différent , ce que vous voulez qu'il fasse dans It troisième , il n'a qu'à relire de suite tout le latin traduit.

Les Maîtres de pratiques m'entendront bien.

Si mes soupçons sont fondés , le Maître , dans son second procédé, a fait la cons- truction, et il a traduit mot à mot.

En ce cas , je suis ravi de me trouver de même sentiment avec M. Plpche , et avec M. Chohipré. La seule différence qu'il y aura entre nous , c'est que ces Messieurs veulent seulement que le Maître parle , au lieu que je donne par écrit toute la be- sogne faite , tant pour le soulagement des

28a Principes

Maitres , que pour faciliter l'élude et la ripéiition à TEcolier, qui trouve même de quoi s*occuper utilement quand il Q*est pas sous les yeux du Maître.

Mais poursuivons lapplicatioil de la mé- thode de ces Messieurs ^ sur la phrase de Cicëron , que j*ai prise pour exemple.

Nous venons de voir ce que M. Fluctie veut que le Maître fasse , voici ce qu*il prescrit au Disciple.

Me voici a ma' place , refhrenons notre phrase de Cicéron ; Toties tibi tuarum vir» ' tutum çeniat in mentem,

M. Pluche(i) veut que moi, disciple^ je répète la traduction sans déranger Tordre «les mots latins Je dirai donc ^ selon les modèles que M. Chompré en donne ( 2) , cuiant de J'ai s , à ioi^ de tes t^ertus, pienne^ dans l'esprit.

Mais n'est-ce pas la un françois bien ex* traordinaire . oîi il n'y a ni grammaire , ni bon usage. De tes t>ertus au pluriel , ç tenue au singulier 5 on n'y entend rien.

N'est-ce pas la accoutumer un enfant k -

"*^

(i) Page i55.

(a) Page 4o de la Synraxe.

f

de Grammaire. 28 3

UQ mauvais goût X N'est-ce pas exciter dans soQ esprit une idée exemplaire, qui sera pour lui un mauvais modèle ^ une règle fausse.

ha première et longue habitude du mal^ a des suites aussi fâcheuses en fait de langues , qu'enfuit de mœurs. C'est Jaiie parler limosin ou auçergnmc à un jeune Espagnol j dans l* intention de le perfec tionner ensuite à Versailles» Que ne corn 'm mencez- cous par Vamen. Versailles. S'il y est sédentaire , pou& le prendrez bientâl pour un jeune François ; il n'entendra que le langage de Versait les , et retiendra aussi bien le lonfrançois , qu'il auroit retenu le mauvais ; et ne sera jamais réduit à se dé" faire des tours et des accens limosins.

Rendons plus de justice à ces Messieurs. AL Chomprë nous donne quelques passages latins , qu*il explique ensuite à sa manière , par exemple celui-ci tiré des Tusculanes de Cicéron , I , C. l5.

Phidias sui similem speciem inclusit in Clypeo Miner çœ cum scnbere non li^ ceret. ( l )

(1) De la Syntaxe , page 5a.

aÔ4 Principes

M. Chomprë explique ce passage; (i)pre» mièrement selon le tour latin en ces termes.

Phidias , de soi , le semblable portr'ait , enferma , dans le bouclier de Minerpe , lorsque d'y graver son nom , il n'était pas perm's»

Ce frangoîs , a la vérité , est pis que Tau- vergaac et le limosin , mais TAuteur n*a d'abord d*autre vue que de donner h. son disciple un François qui ue soil que l'iraage du latin:

Il est important d'observer ici que le pur auvergnac et le pur limosin ^ ne conduisent ni au François^ ni au latin, Tapplication qu'on en feroit contre M. Chompré ne seroit pas juste. Le jeune Espagnol doot parle M. Pluche, après^avoir appris pendant quelques années Tauvergnarc ou le limosin , n'en seroit que plus reculé par rapport au bon François, au<»lieu que le mauvais François qui répond au bon latin , conduit à l'intelligence de ce latin.

Mais de pl^is , a côté de ce François barbare , M. Chompré met le François -I «i^— ^»^ Il I ^— I . —————— ^——1—

(i) De la Syntaxe 'faaDfôife> Pa^e 4o.

de Grammaire» 2S5

u$uel et régulier qui fait eocore mieux entendre le sens.

Phidias n'ayant pas la liberté d'écrire son nom sur le bouclier de Minerpe y graça son propre portrait.

y Messieurs, n'ayons pas deux poids * et deux mesures , le François dont , je me sers d'abord dans mes versions interlinéaires n*est que pour expliquer le latin mot à mot, et selon Tordre significatif de la construction^ ce françoîs , dis -je., n'est- il pas toujours accompagné du fraoçois d'usage, et lorsqu'en 1722 je donnai pour la première fois l'exposition de celte mé- thode, n'en fis-je pas l'application sur le poème séculaire d'Horace avec ce double françois , et ne suis-je pas autorisé à dire que j'en ai eu la pensée long-temps avant vous : mais permettez - moi de vous dire que vous n'ave% pas voulu vous donner la peine de la saisir cette méthode; c'est ce que je vais tâcher de développer.

Votre grand principe, votre marche, votre. point d'appui (l)i c'est quiXJaut toujours laisser les mots latins d0ns la

4«a

^i) Avert. page «. ^

l88 Frincipes

a Marcelfus, cet Orateur avoit ënoncé les qbjets de ses idées selon Tordre dont parle M. Batteux \ en se contentant de les nommer sans leur donner aucune autre modification; il n*auroît excité aucun sens dans Tesprii de se.s auditeurs.

Diuturnum » JiUntium , finis , hodiernus , dtes p afferre.

On n*auroît rien compris à de langage. Pourquoi l parce que les^ mots y marquent à la vérité ce qu'ils signifient , mais ils le marquent sans indiquer aucune liaison , aucune dépendance, aurun enchaînement , en un mot aucun rapport réciproque. Or, ce n*est que par ces rapports que les mois font un sens ; et l'on n'entend ce sens que parce que Ton connoit \e& signes de ces rapports. Ainsi^ à parler exactement , on ne peut pas dire que dans cette phrase Cicéron n'ait présenté que les objets ptiis^ qu'il les a présentés avec le signe destiné par l'usage de sa langue à marquer les vues de^ l'esprit , sous lesquelles il vouloit que ces mots fussent considérés , sous lesquelles ils le sont en eflfet ; quand l'Orateur

a

r

de Grammaire. 189

a prononcé toute la phrase, Tesprit de celui i|ui a entendu, les place par un simple' regard , dans l'ordre significatif.

Diuturni siîéntii finem hodiernus dies attulit,

L*auditeur qui entend la langue latine en- tend i.^ que ce- sont les terminaisons qui sont le signe des divers rapports que les mots OQt entr'eux, et que ces terminaisons ont leur destination particulière \ ce que Tusage , plus que la Grammaire a appris èi tous ceux qui savent la langue.

Lorsque les terminaisons toutes seules ne suffisent pas pour exprimer certaines vues de l'esprit, on a recours aux prépositions; la préposition du datif suilira pour marquer que j'ai donné ou dit telle chose à mon père ^ dedi ou dioei pat ri ; mais il n*y a aucune terminaison en latin qui puisse me servir pour marquer que j'ai, fait ou dit telle chose devant mon «père ou pour mon père , j'aurai doùc recours alors à une pré- position Jeci I on dixi çorcitn paire , ou propier patrem ^ Simsi les prép(:jition« sup.. pléent aux défauts des cas, et U^ a^ » em* portent la valeur, des prépositions.

II» Les mots n'ont ejitr'eux de relation.

N

ago Principes

grammaticale ^lon leurs diverses termi- naisons , que dans même propositloo ; ou y ce qui est la même chose , Us mots ne sont construits grammaticalement que selon les rapports qu*ils ont entr'eux dans la même proposition*

III. Chaque pensée particulière est un tout séparé qui a pour signe une propo- sition , et cette proposition est énoncée «n plus ou moins de mots ; selon l'usage de la langue. Ces mots sont comme les parties de la pensée que chaque langue divise en sa manière.

IV. L'enchaînement des mots entre eu% ne peut être aperçu en quelque langue que Ton s'exprime, qu'après qu'on a énoncé explicitement ou implicitement tous les mots qui forment la proposition ou la période.

Ainsi dans cette phrase de Cicéron ; Diuturni silentii Jinem hodtenius dies ai" tulit. Je ne puis entendre le sens qu'après que jai lu atfi^îit.

Si j'entends le sens , c'est une preuvo que l.^ je sais la signification des mots ; a.^ que j'aperçois la dépendance et la suite des rapports que ces mots ont entre W%' je voisine sileniium^ change ici la

f'.

de Grammaire. aqi

terraioaîsonde sa première dénoniioation ea celle d'un cas obli({ue doot je connois la destination; tout ce qui change, change par autrui, tout chapgement de termioai- soa est un effet \ tout effet a une cause. Or je vois ici que j^/i^/n est la seule t:a use du génitif diuturni sileniii\ je dis donc Jinem diuturni siîentii^ non parce que je dirois en François la fin du silence y mais parce que la cause précède Teffet , et que ce qui est déterminé et modifié , doit être avant ce qui le modifie et le détermine : c*est la priorité de cause. Or , diuturni siîentii détermine ^/le/zi ; ces deux mots font prendre Jinem daus une acception singulière , il ne s'agit pas de toute fin , mais de la fin du silence que Cicéroa gardoit depuis long-temps.

Finem est encore un cas oblique , à cause de attulit^ et atiulit a pour raison de sa terminaison dies hodiernus*

Ces deux derniers mots conservent la terminaison de leur première détermina- tion, parce qu'ils ne sont précédés d'aucun autre mot qui puisse faire changer cette première détermination. Ce V[iOl^dies est donc le sujet de la proposition , c'e^t lui

N 2-

/

\

t^ii Principes

qui mène le branle, si j'ose parler- aiosi«

Je dis donc que si je n'aperçois entre les mots d'une ^proposition renchaîuement dont je viens de parler , je n*entends rien au sens. Les mots n*excitebt alors aucune pensée dans mon esprit , et c*eSt en vain qu*ils fatiguent mes yeux ou mes oreilles.

Je) dis< en second lieu que si j'aperçois la suite et rénchaînemenl de ces rapports, î*entends le sens. Or Ja perception de celle suite de rapports u*est autre chose que la c >usiruction aperçue ] si vous récitez les mots selon cet enchaînement tit cette suite ) ce sera Ta construction prononcée , et si vous )*tcrivez , ce sera la construction écrite.

Dites donc tant qu'il vous plaira , que construction est destruction , vous n'ave& que ce seul moyen pour entendre le sens d'un Auteur, tel est la base et le fon- dein^nt de ^harmonie , du nombre et de Félégance. Tout sens énoncé suppose uae construction , parce que toute énonciation suppose des rapports entre les mots.

Construction est destruction , comme le Jour est la nuit , comme le cercle est carré y pomme Têtre est le néant. JN*esl-ce p.-^s V^ prç^drç Martre pour 'Rençrd ^ sdo^

âe Grammaire, 2j)3

k noble expression de M. Chomprc ^ 'p. XIV. Quoi qu'il en soit , anius^ votre imaginatipa tant qu'il vous plaira , par de pareilles antithèses , votre propre raison vous démentira y et vous n*en împo^reK qu'à ces hommes vulgaires ^ qui n*out ja-* mais appris à penser ni à rechercher les véritables principes des choses.

Ce n*est donc que par la connoissance qae j'aide Tanalôgie générale de la langue latine^ que j'entends un discours latin que je lis pour la première fois ; je n*ai pas besoin que Ton m'explique chaque phrase en particulier tant que je puis y observer cette analogie.

Mais si lorsqu'on m'a montré le latin dans ma jeunesse , on n'a fait que nie donner une ample provision de mots , çx qu'on ne m'ait pas appris les principes généraux et les signes des rapports que les mots ont enlr'eux , quand je trouverai cer- taines phrases que je ne pourrai pas ré- duire a l'analogie générale, par exemple pœniiet me peccati^ mea refertj sus Miner ^ çarriy etc. alors j'aurai besoin premièrement que l'on m'explique ces phrases d'abord , si l'on veut , par des équivalens , et sa.ns égard à l'analogie, ;7<3P/2*Ytf/ me jjeccati^ signifie

N 3

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294 Principes

. Je me repens de ma Jaule ; mea rejert j veut dîre , il m'importe', sus Minerçfam , qu'un écolier ne s'avise pas de 'vouloir donner des leçons a son maître.

Maïs ensuke on doit , autant (|u*il est possible , rapporter ces façons de parler a l'analogie générale) et k la construction régulière , par laquelle seule les mots as- semblés ont d'abord fait un sens. Cet.te construction se découvre par la voix de rimitatîon , c'esl-h-dire j par des exemples sfnalogucs. On trouve conscientia sceîerum morde i eos , ainsi je dis conscientia peccatè pœnitet me , le remords de mon péché , le sentiment intérieur que je ressens m'af- fecte de peine , m'afflige , etc. méni« ffomme on trouve souvent dans Piaule et aîHeurs , quid ad rem meam refert ? Persa , Act. IV 5 Sç. III , y. 44. Quam ad rem istuc refert» Plaut. Epidic, Act. Il ,-Sc. II , v. 91. Ainsi par analogie mea refert^ la cods« iruction est hoc refert ad meâ negotia. Sus Minerçam^ la construction est sus docet Minerçam\ un cochon , qjU un vil animal^ >eut donner des leçons a Minerve.

11 en est de même de noire on dit y de notre il y a des personnes qui , etc. sur

âe Grammaire, lr,S

rjuoi il faut observer , que quand on i)« pourroit pas démêler Toriginc de ces façons de palier ^ ni les rapporter aux priucipes géoéraux^ on ne «doit pas faire de diffi- culté de s*en servir, pourvu qu'elles soient autorisées par un usage constant ; Nmaîs d'ailleurs elles ne doivent servir ni à in- troduire des façons de parler irrëgulières , ni à faire douter des règles générales, ni à troubler Tanalogie de la langue.

Nous avons vu que les différentes terniî- Daisons des mots latins étoient le signe dci divers ra^jports que les mots ont entr*eux , selon la destination de chacune de ces ter- minaisons , pour achever de développer ce que îe pense sur le système de M. Pluche et de M. Chompré, il faut observer qu'ea françois , hors peut-être dans les pronoms personnels , nous n'avons ni cas ni décli- naisons , et que uousne faisons que nom- mer ; il n*y a que nos verbes qui changent de terminaison: les noms ne reçoivent qu'un lé<^er changement du singuher au pluriel.

Quel est donc le signe dont nous nous servons pour* marquer la suite et l'enchaî- nement dtfS rapports que les mots doivent' avoir nécessairement pour faire un sen&t

N4

2()6 Principes

Car si ce moyen manque, et qu'on ne fasse que nommer , il D*y a plus que des mots qui ne réveillent aucune pensée suivie ; par exemple , si nous ôlons les terminaisons des cas obliques « cTes mots latins du premier vers de PEnéidc de Virgile ^ nous n'aurons aucun sens.

^Arma , virtjue » eanere i troja , ^ui , primûs , ab

orœ y Itûlia, fatum f profuguiy l,ayina, ^uat ventre»

Lùfora.

I

Rendons au latin ]es terminaisons qui sont le signe des rapports réciproques des

mots , nous aurons un sens.

~#

'Arma , virum^ue cano , Troja ^ui primut ah orit Italiam, fato profuguiy havina que venit hittora»

Dérangex Tordre qui fait le vers, et l'har- monie ) mais sans changer les tejpminaisons , le sens sera toujour»' également entendu.

Cano arma f virum^ue ^ çui prefugus fato Venit primu» ab oris TrojàB , Itaîiam , atçue Littora lavina»

Est-ce la même chose en François? Non. Parce qu'encore uu coup , lei terminai- sons des noms ne font rien au sens, nous ne

de Grammaire, 297

ferons que nommer les objets de nos idées ; et ce qui noas indique les rapports réci- proques des motS) c'est leur place, c*esl leur position immédiate et successive, qui lie les mots, et qui marque la détermination ou mo- dification que le mot qui suit donne à celui qui le précède. Et si Tharraonie , renthou- siasme ou la mesure du vers dérange cet ordre et cette suite ^ il faut que le déran« gement soit tel, qu*il ne puisse causer aucune méprise , ni aucune confusion , et <)u'une simple vue de Tesprit , puisse ai- sément considérer les mots dans Tordre de Tanalogie générale de la langue. L<à coule un clair ruisseau.

J*entends le sens aussi aisément que s'il y avoit un clair ruisseau coule» . ,

De l'amour j'ai toutes les fureurs; Tesprît entend la pensée comme s*il y avoit, selon l'analogie ordinaire , j'ai toutes les fureurs de l'amour* £t il ne doit rien y avoir avant ni après les mots de la proposition ^ui puisse induire l'esprit à donner aux mots un rapport différent de celui qu'on a intention de leur donner.

Ces principes bien entendus, principes certains *y voyons laquelle des deux méthodes

N 5

\

aqB Principes

élérnentaîres est la plus raisoDoaLle , la plus sûre et la plus facile a prati<]uer, celle de M. Plache et de M. Chompré; ou celle X]ue je proposai, eo 1722.

Avant que d'entrer dans la discussion des preuves que Von donne , 'pour fîiirc voir que c'est nous qui renversons Tor— " dre naturel; je Vais tâcher de développer ce qu'on entend ici par ordre j par in- çsrsion et par naturel. Je Ferai voir en même - temps ce que les anciens gram- mairiens^ en ont pensé, et ce que nou»- devons ecf penser nous - mêmes; après ^ quoi je passerai aux preuves du système moderne, elles seront alors moins diiHciles SI 4claircir.

De Vordre et de Vinçersion.

En général ordre veut dire, arrangement soit^des choses )*soit des mots.

Quand le mot ai ordre ^ est pris abso- lument y sans aucune qualification, et qu'on parle d'êtres physiques , on .entend que les objets nous sont préseiyës de manière que nous faisons aisément l'image de réas- semble et des rapports selon lesquels ces objets sont disposés entr'éux.

âe Grammaire Sçc)

Si nous ne.poavoQS pas noas représeoter aisëiuent cet ensemble, et que nous aper- cevions que les objets ne sont pas disposés saivant la c<$uvenance et les rapports qu'ils ont eoir'eux') nous disons qu'il y a cou- fasion, dérangement, désordre.

S'il s*agit de Syntaxe ou construction gramifiaiicalc , ordre, ne se dit pas tout arrangement des tuots ; il semble que CCS termes arrangement ^ structure^ aient en grammaire un sens plus étendu que le mot d*0rdre: ou dit la structure d*ua discours , Tarrangement des mots d'un# phrase.

A regard d^ordre, il ne se dit a la rigueur que de la construction gramma- ticale régulière.

Lorsque les anciens grammairiens trou- Toieut dans les Auteurs, certaines phrases embarrassées, et qu'ils vouloient en éclaircir la construction, ils en rangeoient les mêmes mots d'une autre manière , et selon ce nouvel arrangement , l'esprit avoit moins de peine à apercevoir les rapports des mots corrélatifs. C'est cet arrangement que les anciens appelloieut ordo^ ordo^ esi%

N 6

\

/

3oo Principes

disoienl-ile. Priseîea l'appelle anssisiructuraj ordinaiiOy conjunctio seqùenliumi

11 en a fait deux livres , lo XVII et le XVllL, qu'il a intitulé~s , De Constructione^ Sif^e de ordinaiione partium orationis,

AÎQsi ordre ne siguifie pas «alors ua arrangement quelconque, il n^ marque eu ces occasions que Parrangement particulier des mots , selon la suite des signes des rapports qu'ils ont entr'eux pour faire ua sens conjunctio seguentium , dit Priscien.

Les miois en quelque langue que ce puisse être, ne^ peuvent exciter de sens dans Tesprit de celui, qui lit ou qui écpute; que par la coanoissance qu'il a des signes de ces rapports. Connoissance qui s'acquiert ou simplement par usage , c'est - à - dire ^ par le commerce que Ton a avec les per- sonnes qui parlent \ine langue ,' ou biea par la voie de l'étude ^ de Tinstructioa et de la lecture. '

Le sens total qui résulte de l'assemblage et de la construction des mots , ne peut être entendu , en quelque^ langue que ce soit, qu'après que toute la proposition est énoncée.

iJ^V

^

de Grammaire, Sot

Alors Vesprit par u& sinipte regard ^ aperçoit toute la suite et renchaiuement des rapports ; c*est cette suite de rapports qu*OD appelle siinplemeot ordre^ et souveuC aussi ordre grammatical, ordre ualuret.

Il faut encore observer que Télocution a trois objets.

Le premier, qu'on peut appeler Tobjet primitif ou principal , c'est d*exciter dans Tesprit de celui qui lit ou qui écoute la pensée qu'on a dessein d'exciter. On parle pour être enieada , c'est le premier but de la parole, c'est le premier objet de toute la langue , et en chaque langue il j a un moyen propre établi pour arriver à cette fin uidépendamment de toute autre considération. /

Les deux autres objets que l'on se pro- pose souvent en parlant , c'est ou de plaire , ou de toucher.

Ces deux objets supposent toujours le premier, il est leur instrument nécessaire, sans lequel les autres ne peuvent arriver à leur but.

Il en est, pour ainsi dire, de la parole | comme d'une jeune personne , veut - elle

go 2 Principes

plaire, veat-cile toucher et intéresser, il ^ faut qu'elle commence k se faire voir.

Voulez - vous plaire par rithme , par l'Wûrmonie, p^r le nombre, c'est-à-dire par une certaine convenance de syllabes*, par la liaison , renchainenient , la mesure ou proportion des mots entr*eux , de façon qu'il en résulte une cadejice agréable à l'oreille-; soit en prose, soit en vers, i! faut que vous commenciez par vous faire entendre.

Les mots les plus sonores , rarrangement )e plus harmonieux. , ne peuvent plaire que comme le feroit un instrument de musique; mais ce B*est plus alors plaire par la parole qui est ici uniquerfient ce dont il s'agît.

11 est également impossible de toucher, et d'intéresser si l'on b'e^t pas entendu.

Ainsi quoique mon intérêt ou le vôtre soit le motif principal qui me jporte à vous adresser la parole, je suis toujours obligé de me faire entendre , et de me servir- da mojen établi k cet effet dans la langue connue entre nous.

Ce moyen peut bien être ms en usage piKt l'intérêt ; mais il n'en dépend en aucune

de Grammaire, 3o3

nanière , il a pour ainsi dire son èire à part , auquel riatërêt n^iuflue en rien. C'est ainsi que Tiuiérét porte le pilote à se servir de l'aiguille aimantée; mais cette aiguille se meut indépendamiivent de rin« térét du pilote.

Ainsi la construction usuelle, c*est*a* dire, celle qui est communément en usage ^ la construction élégante , aussi bien que la figure, sont toujours subordonnées â la construction analogue d*une langue, elles la supposent toujours ; et ce n*est jamais que par cette construction analogue que les mots font un sens | en quelque langue que ce puisse être.

Il y a donc d*dbord dans les roots larr^ngement de la construction, analogue et nécessaire , en vertu duquel seul on se fait entendre , soit que de plus on veuille plaire ou toucher; c*est cet arrangement que les Grammairiens anciens, et les Gram- mairiens modernes ont appelé ordre; c*est le seul qa*ils reconnoissent quand il ne s*agit que de sjntaxe. Et ce n*a jamais été que relativement à cet ordre que jusqu'ici les Grammairiens ont dit qu'il jr avoit) on qu'il n'y avoit pas inversion.

L

3o4 Principes

Quand tous les mois d'-unè phrase sont , exprimés , et qu'ils sont rangés »elon la suite et reachaîuement de leurs rapports y on dit qu*il n*y a pas immersion. Si les ni6ts ne sont pas rangés selon la suite de leurs rapports il y a inçersion, c'est- à-dire que renchaïuenient des rapports est ou renversé ou interrompu.

Si tous les mots nécessaires pour rendre la construction pleine et entière ne sont pas exprimés, on dit pas pour cela qu'il y ait inversion , on dit qu'il y a ellipse, c'est-a-dire, suppression, omission de quelque mot, dont l'esprit suplée ai- séme^it la valeur. Les ellipses rendent le discours^ plus vif et plus concis \ mais il faut éviter qu*ellës ne donnent lieu k quelque équivoque, ou qu'elles ne jettept de l'obscurité dans le discours.

^Les ellipses doivent être telles que celui qui lit ou qui écoute entende si aisément le seny, qu'il ne s'aperçoive pas seulement qu'il y ait des mots supprimés dans ce qu'oniuidit. Quand viendrez-vous? demain. Ce seul mot demain excite la même idée que si Je disois tout au lopg. Je rofiendrai demain. Et gue idois-je être! dit Prusiaî -

àe Grammaife. 3o5

k Nicomècle. Roi, lui réplique Nicomède. Voilà une ellipse qui fait eutendre à Ni- coniède , qu'il ue doit écouter que rintërél de sa grandeur et de son autorité. La fé- poose de Nicomède par ce senl mot est bien plus vive et bien plus sublirpe que si Nicomède se fût énoncé d'une manière plus étendue. .

Ainsi ellipse est opposé à construction pleine et entière , et itwersion à construc- tion selon Tordre analogue et successif des rapports des mots.

Si je dis Cano arma ^rumque , il n*y a pas d'inversion , la causç précède Teffet. Le mot qui détermine esl. après celui qui est -déterminé , çirum esl un cas oblique, la première dénomination de ce mot, c'est wr.' Pourquoi prend - il ici une nouvelle terminaison? C*est pour marquer et sa dé- pendance et son rapport avec cano. Je chante; eh quoi? çirum; ainsi çirum dé- termine cano; et cano modifie çirum; je veux dire qu'il est la cause pourquoi çirum prend une terminaison qui n'est, pas celle de la première dénomination; tout ce qui change, change par autrui.

Tous les mots sont donc dans l'ordrt

J

5o6 Principes

gramnriatîcal. Lorsque je dis cano armH çirumque , ils sont tous selon la suite immé- diate et Teachaiaement successif de leurs rapports.

Ainsi il n'y a point alors d'invtrsion.

Mais- par est arrangement simple je fais perdre a L'esprit le plaisir qu'il auroit de lever, pour ainsi dire^ le voile léger avec lequel ~ Tinversion sembleroit lui cacher le sens.

Au lieu que si j'interromps , avec tnëna- gemeat pourtant , la suite des mots ^ sans en changer les-termir^aisons , ces terminaisons feront apercevdi^à l'esprit l'ordre des rapports des mot^ et il croira trouyer^lnsi comme de lui-^môme le sens de la phrase.

Je conviens donc que lorsque je dis cano arma çirumque ^ ma phrase est bien moins élégante, bien moins vive, et biea moins^ harmonieuse que si je disois comme Virgîle, arma çirumque- cano, AJors il y aura inversion, puisque les mots ûe seront pas rangés selon la .dépendance et la suite immédiate de leurs rapports. Au contraire , l'effet sera présenté avant la cause , et le modifié avant le mot qui modifie : mais ce dérangement n'a qu'une apparence d'irré^ Çnlarité, dit Quintilien. Ce Rhéteur le

de Grammaire* 807

compare k un acide agréable) qui réveille l'appélit des convives.

Les inversions bien ménagées donnent donc de la grâce au discours , sur-tout dans )cs langues les rapports des mots sont indiqués par la destination connue des différentes terminaisons; mais en quelque langue que ce puisse être, les inversiong ou transpositions doivent être faciles à dé- mêler. L'esprit veut être occupé \ maia d'une occupation douce, et facile ^ et non pas par un travail pénible.

Çue Tinversion n'ôte donc jamais à l'esprit le plaisir de se savoir gré d'apercevoir le sens malgré la transposition, et de placer en lui-même, par un simple regard, tous' les mots dans Tordre selon lequel seul ila lai présentent un sens , après que la phrase est fmie.

Tout ce que nous venons d'observer , est , au fond , la doctrine des anciens Grammairiens , qui ont écrit dans un temps la langue latine étoit encore une langue vivante. *

Priscîen , Grammairien célèbre , qui vivoîtau conmiencement du sixième siècle, .a fait un ouvrage bien sec , à la vérité ,

3o8 Principes ^

mais d*oti Ton peut tirer des lamières par rapport a la graïri^iiaire. Il s*est douné la peine de faire , ce qu'on appelle encore aujourd'hui, les parties et la conslructioa de chaque premier vers des douze livres de TEnéide de Virgile.

Cet ouvrage se trouve après le livro XVllI De construciione , il a pour titre: Prisciani Grammatici partitiones versuum XII j^neidos principalium. Il est par de- îiiaodes et par réponses. On lit d'abord le premier vers du premier livre: Arma pirumque cano ^ etCy. Ensuite, après (^uelquiçs questions , le disciple demande a son maître , en quel cas e^t arma, car il peut être regardé ,. dit-il , -ou comme étant, au no- niinatif plurier, ou comme étant a l'accu- sa tif. Le maître lui répond : qu'en ces occasions il faut changer le mot qui a une terminaison équivoque en un autre root dont la désinance indique le cas d'une manière précise et déterminée \ qu'il n*y a d'ailleurs qu'à prendre la peine de faire - la construction , et que cette construction analogue lui fera connoître que arma est k l'accusatif. Hoc certum est, dit Priscien , à structura, id est ordinaiione et con-^

/\

de Grammaire. 809

junciione sequeniium , c'esi-à-dirc, l'ordre successif des vues de l'esprit, relativement à rélocution. ^ Alors dit Priscien : mani^ festabitur tibi casus , ut in hoc loco cano ffirum dîxit Virgîlius,

Ainsi, cano çirum selon Priscien est la ionstruction simple. Structura^ ordinatio ^ conjunctio sequentium. Or, si cano f^irum est la construction simple çirum cano est l'inversion ; cette inversion est donc dans la construction usuelle et élégante des Latins, selon les Grammairiens même ; et il est bien évident ce me semble , que Priscien De Tauroit pas trouvée dans le François qui dit iQfWl de suite: Je chante ce héros^ Cano vîrnm.

Au reste, ce n'est pas pour en imposer que nous disons avec Priscien que Virgile a dit cano çirum. Il s'agissoit de ter- niîner le cas de arma. Faites la construc- tion, dit Priscien, et vous trouverez que selon l'analogie, 't7r/7?a *doit être au même cas que çirum dont la terminaison vous indique clairement raccusatif. Si Virgile a dit çirum ^ c'est que selon l'ordre de la syntaxe des vues de l'esprit, çirum est ^près çano^ ^usi (quoique selon la coo$«

8iO Principes

iruclion ëléganle et usuelle, qui admet presque toujours l'inversioa eu latin , Vir- gile ait dit arma çirum que çano , il avoit eu nécessairement dans Tesprit par une priorité d'ordre, cano avant arma çirumque ^ telle est la suite des vues de Tesprit dë- pendammjttt, de l'ofdre nécessaire de rélo- cution ,. eRe n'est jamais que relativement à cette suite qu'il y a inversion dans la construction usuelle et élégante de toute langue. Alors les mots ne sont pas énoncés selon* Tordre et la suite de leurs rapports, mais quand la transposition n'^st pas forcée , l'esprit rapproche ais.ément deux corrélatifs qu'on lui présente séparés, et malgré le dérangement , il .aperçoit avec une sorte plaisir tous les mots selon l'enchaînement, la dépendance et la liaison de leurs rapports. Et cette sorte de plaisir que l'écrivain ménage avec art à son lecteur , n'est pas une des moindres causes qui. fait trouver de l'élégance dans le stjle.

Les différentes observations que les Rhé- teurs ont faites sur l'arrangement des mots ^ en tant que cet arrangement peut donner à la phrase, ou plus de grâce, Oii plus d'harmonie, ou la rendre plus vive ou

de Grammaire. 3il

plus pathétique ) ces observations , dis-je, appartiennexit à rëlocutioo oratoire, ^t sont ëiraugères à la Grammaire, qai n'a pro- preraoQt pour objet que l'emploi des sigaes des rappprts des mots, eu tant que i*eQ- seiiible et la suite de ces signes forment , selon l'analogie de la langue , ^ sens que Ton veut énoncer* II' est indili'érent par rapport à la Grammaire, que dans cet ensemble > il y ait des dissonnances , qu*il s y rencontre des baillemens, que les mots ne soient pas rangés selon les raouvémens de l'intérêt , et que la nécessité de cons^ traction , pour me servir des termes de Quintillien ) nécessitas ordinis sui^ donne à la phrase un air sec et dur.

Ne confondons point la grammaire né<* cessaire avec Télégance, ni avec le pathé- tique ou Tart de remuer les passions.

C*est la grammaire qui donne la pre<« mière forme extérieure aux pensées qù*oa veut énoncer , c*est elle qui leur fait prendre, pour ainsi dire, un corpà , c^est elle qui leur donne des membres et diilcrentes parties, ensuite elle les livre h l'élocutioq pratoire , pour les orner et les embellir,

P^Qus ayons plusieurs ouvrages vUiU%

/

^ 3l2 ' Principes

sur Tël^gance et la politesse du 'style, sur l'arrangement des mots, par rapport à la netteté, ou k la grâce, ou à rhar(nonie ou à la force des expressions; or s*il , arrive que dans l'arrangement des mois' TorateiK ne se conforme point à ces obser- vations, les orçilles en seront plus ou moins blessées ; on dira que c*esr ub€ faute contre rharmonie, contre la pureté du style , on donnera à cette faute telle qualiiicatiaa qu'il conviendra , mais jamais on ne s'avisera de l'appeler inversion ^ ni de dire qu'il . y a inversion, à moins que ce ne soit relativement Ll'ordre grammatical nécessaire et analogue.

Il y a plus, c'est qu'il suffit d'avoir une légère connoissance de quelque langue que ce soit, pour apercevoir.

Premièrement, qu'il y a dans celte langue un ordre analogue et nécessaire , par lequel seul les mots assemblés font un sens.

. Secondement , que dans le langage usuel , ou s'écarte de cet ordre, qu'il y a de même de la grâce de s'eu écarter, qu'ainsi ces écarts sout autorisés, pourvu quelorsque la phrase est finie , Tesprit puisse rapporter gi^éuieat tous les mots à l'ordre analogue,

et

. de Grammaire. 3rS

et suppléer même cetil qui ne sont pa^ exprimés.

Troisièmement enfin ^ que c"e8t princi- palement de ces écarts que résultent l'élé- gance, la grâce ^ et la vivacité du «tjle , sur-tout du style élevé, et du style poétique.

On tombe donc dans Terreur, lorsque l'on veut se faire une mesure comm.une entre Tordre nécessaire des mots selon la construction analogue, et entre Tarrauge- ment arbitraire de la construction usuelle et élégante, et que l'on parie de l'une et de l'autre de ces constructions, comme si elles avoient les mêmes règles, saos pren- dre garde que l'une est nécessaire , et ncL dépend que d'elle-même.

Au Heu que l'autre, c'est-à-dine l'élégante, est subordonnée à la première , mais d'ail- leors elle est arbitraire en tout ce qui n'empêche pas l'effet de celle qui lui im- pose des loix , dont elle ne peut être dispensée.

Denis dUalicarnasse , cité par M. Baiteux est tombé dans la méprise dont nous par- loàs. Jem'imaginois, dit-il, que les noms exprimant l'objet y deçoient être avant le verbe ^ qui ri est qu'accessoire à l'objet;

O

3i4 Principes

le perhe açant Vaâçerbe^ parce qu'il Jaut savoir l'action açant la manière de VaC'^ tion ; le substantif açant V adjectif par une raison pareille : mais j'ai troupe tant d'exemples contraires ^ de l'un et de l'autre arrangement^ continue Denis ^ que je suis persuadé que la logique ne peut diriger ïoraieur dans cette partie.

Voici les réfié&ioa$ de M. BaUeux, sur ces paroles,

Denis d'Halicarnassej dit M. BaUeux , pçoit bien senti qu'il déçoit y avoir un principe pour les constructions « rnais if chercha dans V esprit de l'homme j au lifcu qu'il eût fallu le chercher dans son cœur. C'est l'intérêt qmjait parler les hommes, et c'est aussi lui qui règle V ordre des mots, en lès plaçant selon leur degré d'importance. Ce sont les ternies de M. Batteux, p. iS,

Voici ce que je diroisàDenis d*Halicar* nasse. Vous aviez raison de chercher des règles et des principes pour les construc* tioQs: mais Vous cherchiez une chimère, si vous vouliez rëduire en un seul mot et même principe la construction nécessaire, et la construction oratoire ou élégante. Vous ave?i eu grande raison d'être fnfin pcrr

/

d^ Grammaire. 3i5

soadë <jue la logique oe -pouvoit diriger J 'orateur en ce qui regarde rarrangemeot des mots dans le stjie oratoire.

La logique et la graniniaire prescrivent à l'orateur certaines règles dont il ne peut, se dispenser 9 et qui sont communes ë tous ceux qui veulent faire usage de leur raisoa et de la parole ; mais d*ailleurs Torateur ajoute à ces règles, celles de son art , et celles-ci jettent des grâces et des orne- mens sur Tœuvre de la logique et de la grammaire , œuvre qu'elles conservent dans toute son intégrité ; c'est ainsi que , malgré toute Téloquence et les oroemens que Cicéron a mis en usage dans sa^ Miloniene, on j découvre en entier le sylogisrae, à quoi cette harangue peut être réduite* Ce que nous venons de dire de la logique est également vrai à Tégard de la grammaire ) Toeuvre de la grammaire, est un diamant brut, que la rhétorique polit, ce qui a fait dire à un de nos^plus judicieuse Grammairiens : que Jinit la gram^ maire ^ c'est même que commence la rhétorique. ( Grammaire du P. Buffier, édition de 17^3, p. 92. )

Les écoliers de rhétorique doivent tou-*

O a

)

3i6 Principes

jours observer les règles fondameo'tales de grammaire , qq*ils ont appris« en sixième, * Ainsi comme les Rhéteurs et M. Baiteux luî-mêmè, (Couip^s 4e Belles-Lettres, toraç I, Notions Préliminaires, p. 451.) distiu<r guent fort bien le syllogisme philosophique du syllogisme ou argument' oratoire, dis-? tinguons de même la construction gram- maticale nécessaire de l'arrangement des motS) selon le style oratoire, '

Mais continuons a faire voir que: nous pensons au fond sur les inversions comme les anciens Grammairiens en, ont pensé.

Quintilien, ce Rhéteur judicieux, dit que V ordre ^ c'est-à-dire, la construction analogue n*est point une figure, mais que la transposition des nfiots , faite ayec grâce , est une véritable figure qu'on ^appelle hyper- bate, et qu*a Texempie de Çéci)ius ^ il la compte parmi les figures.

Ce mot Hyperbate est grec, y«-fpC«ro», id est trajectus çerbofum ordo , ^ manière parler, qui est au-delà de l'ordre na- tur:el , et analogue p^s-èf, ultra au-pdelà et l«ifl/y«, ea , je vas, Hyperbate répond pré- cisément à inversion ou transposition. ^(^ucedam omnii^o non sunt figurée^ sic^t

de Grammaire, 31*7

orâo verborum autem concinna

transgression id est hyperbalon^ quod Ceci- lius quoqae putat schéma) à nobis est interposita. . (QuintilieU) lib. IX, Chap. 3, de verborum figurîs, ^iS. )

Quelquefois , dit-il au même chapitre, par certaines suppressions, par des chan- gernens, et par des tours singulier^ dans Tordre, on rëveille l'attenliou de l'audi- teur, et il arrive que ces défectuosités appa- rentes jettent de la grâce dans le discours. C'est ainsi, dit-il, que dans les repas, un peu d'acide aiguise l'appétit.

Hœc schemata^ et his similia quœ erunt per mutationem^ adjectionem, deiractionem , ordinem , contfertunt in se auditorem , nec languere paiiuntur, et habeni quandain ex ilîa çitii similitudine gratiam : ut in cibis intérim acor ipse jucundus est. Quint. Inst. Orat. l. IX, c. 5.

Souçent^ dit encore Quintilien au livre VIII, c. 6, la grâce de Télocutiou nous fait transporter les mots, et c'est ce que nous appelons hyperbate. C'est aînsi^ poursuît-il, que Cicéron, dans son Oraison pour Cluentius , a dit: Animadçerti judices, omnem accusatoris orationein in duas dii>i*

O 3

3 i 8 Principes

satn esse paries» S'il avoit dît, in dua$ partes^ l'expression auroît été régulière, dit Quintilien, mais dure et saas grâces. Çum decoris graiiâ distrahitur ïongius ^^z- bum. proprie fiyperbati tenet nomeri, ut animadiferti judices^ omnem accusatoris eratiojtetn in duas diçisam esse partes: nain in duas partes divisam esse rectum erat sed durum et inc&nceptum. La simple séparation de duas d'avec partes, par les deux mots diçisam esse^ est regardée, par Quintilien^ comme uue inversion , comme une hjperbate.

Or, le françoîs dit: divisée en dcus parties, elnon jamais en deux diçiséç parties s Eu laquelle des deux langues Quintilieii auroit*il trouvé Pinversion l

Encore un passage de Quintiljen.

L'hyperbate, dit ce sage Rhéteur, est une traasposition de mots, que la grâce du discours demande, couvent. C'est avec juste raison que nous mettons cette figure ou rang des principaux agrémens du lan- gage : car il n'arrive que trop souvent que le discours est rude, sans mesure, sans harmonie et que les oreilles sont blessées par des sons désagréables^ lorsque chaque

de Grammaire^ 3 19

mot est placé selon la suite nécessaire de son ordre, (c'est-à-dire^ de la construction et de la syntaxe. ) Il faut donc alors trans- porter les mots ) placer les uns après , et mettre les autres de vaut. Imitons les Architectes qui dans l'arrangement des pierres les plus grossières trouvent à cha- cunentie place convenable. Nous ne pouvons pas corriger les mots ^ ni leur douoer plus de grâce qu'ils n'en ont. Il faut les prendre comme nous les trouvons, et leur choisir une place qui leur convienne.; rîen ne con- tribue tant à rharnrxonic et au nombre du discours que le changement d'ordre, quand il est fait avec discernement.

Hyperbaton quoque id est çerhi trans-^ gressionem^ quam fréquenter ratio com" position/s ^ et décor poscit^ non immerità inter çir tûtes habemus. Fit enim ft eqwn-^ tissimè aspena et dura et dissolu fa et hians oratio , si ad necessitatetn ordinis sui çerba redlgantury et ut quodque oritur^ ita pro^ scimis etiam alligetur, dijferenda igitur quœdam et prœsumenda , atque ut in struc^ turis lapidum impolitorum loco quo conveiiit quidque.ponendum j non enim recidere ea-^ nec polira possumus, quo coagmentata sff

04

320 Principes

magis jungant^ se fi utendum hisy çualia sunt, eligendœ que se des , nec aliud potest sermonem Jacer^ numerosum quam opor^ iuna ordinis mutatio. Quiat« înst. Orat. LVIII. C. VI. de Tropis.

Quel autre seos peut-on donner à neces" siiatem ordinis suiy sinon celui de cons- truction ) et que peat-on entendre par ordinis mutatis'. sinon Tinversion, conformément a Tacception que nous avons donnée à i*ua et à Tautre de ces mots.

Voici encore un passage d'Isidore « qui fera plaisir ce nie semble aux lecteurs qui aiment les preuves.

Isidore trouve de la confusion et de I*em-f barras dans ces vers de Virgile. JEn. L 2, k.

547'

Juvenes^ fortisiima fruurm Pectora , si vobis , audenfem extrema eupido est Certa sequi^ ( tfuœ sii rébus fortuna videiis. Excessere omnes aditis , arisque relictis Du f'ifuibus imperium hoc sttterati ) succurritiâ urhi Incensœ : mon'amur , et in média arfna ruamus.

L'arrangement des mots dans ces vers^ sur-tout dans les premiers, paroît obscur à Isidore,, conjusa sunt verha^ ce sont « ses termes. Que fait-iH il range \t% mêmes

de Grammaire^. Sai

mots selon l'ordre de la coDstructîon. Ordo talis est, dit*il , cela ne veut'-il pas dire ; Il y a in^ersfon dans ces i/ers, mais poici ia construction.

Juçenes , fortissima pectora^ frustra êuccarritis urbi incensœ^ quia excessere Du y quitus lioc imperium sieterat, Unde si pobis cupido certo est sequi me au^ dentem extrema, ruamus in média arma et moriamur,

Isidori, Orig, 1. I. c. 3^.

Servius , ancien GramnialrieD , dont les commentaires sur Virgile sont si fort estimés, fait souvent la construction des vers de ce Poète , quand ils ne lui paroissent pas assez clairs, par exemple.

Saxa çocant Itali^ mediis quœ injluctibus aras , ordo estj dit cet ancien Grammai*" rien , quœ saxa latentia in mediisjluctibus , Itaîi aras pocant, JEn. \, i. v. i3.

Donat, ce fameux Grammairien, qui fut l'un des maîtres de S. Jérôme , observe aa<îsî la même pratique à l'égard des vers de Térence^ quand la construction en est QQ peu trop embarrassée.

Ordo est y dit-il, etc.

Dirons-nous après ces autorités et après

O 5

323 Principes .

taûc d'autres que je sacriftè) dirons nous que si ces anciens Grammairiens reveuoienc au monde ils trouveroient que l'inversion est dans le François^ et qu'elle n'étoit pas dans le latin usuel \ Mais voyons ce qu'oa entend par naturel.

Selon les Physiciens, ce qui est naturel ^ c'est ce qui se fait dans le ministère de ]*art y par ua enchaînement qui nous est inconnu de causes et d'effets, et qui dépend de celte force supérieure f de ce méca- nisme inflexible qui n^ prend conseil ni de noire volonté, ni de nos imérèis, et qui n'est suboidofsné qu'aux loix du Créateur. C'est ainsi que le printemps est suivi de l'éié, l'été de -l'automne , l'automne de l'hiver, que la nuit vient après le jour, et que le jour succède à la nuit^ C'est encore ainsi qne l'on dit* que l'or est naturel, parce qu'il est formé dans les entrailles delà terre sans aucune opération de notre part, aa lieu que nous disons que le tombac est artificiel, parce que dans la productioa du tombac , c*est l'art qui fait opérer la nature. Nous avons aussi des fleurs na- turelles dt des fleurs artificielles. C'est une division qui dislingue un grand nombre

âe Grammaire. 3i3

d'objets , les uns ne sont que de simples productions la nature, et les autres sont des effets de l'art. La nature toute seule produit le blë, Tart fait le paTti: en em- pruQtaut le secours de la nature , dont il est toujours Tesclave , Tartiste ne peuc opérer qu'en étudiant la nature, et en se conformant a ses loix.

Comnie ce qui est produit par le seul ordre naturel et physique n*eiige pas de grands soins de noire part , que ivous xi*avons qu*a mettre la nature en état de produire, que souvent nous n*avons besoin que de recueillir ce qu'elle i!ious offre, de la par extension on s*est servi du mot de naturel pour marquer ce qui est facile , ce qui n'a aucun air de travail ni de con- trainte, ce qui paroit , pour ainsi dire, se faire tout seul, ce qui se présente^ comnie de soi-même, et n'exige qu'une légère attention de notre part. Ut quodque orilûrj selon l'expression que nous venons de citer de Quintiliën.

C'est selon cette idée, que jusqu'ici les Grammairiens anciens, et les Grammairiens modernes, par ordre naturel des mofs^ ont entendu cet arrangement suivi, qui

O 6

824 [Principes

fait concevoir aisément le sens d*une phrase à ceux qui conooissent ranalogie et la syntaxe d*une langue, et qui sont en état de comprendre la pensée que le discours leu^ présente.

Dans le dialogue que Cicéron a composé touchant la partition pratoire, ( de par^ tiiione oratoriâ ) et oh. Cicéron père t% Cicéron fils , sont les deux interlocuteurs ; Cicéron fils prie son père de lui expliquer comment il faut s*y prendre pour exprimer la même pensée en [Plusieurs manières différentes. Le père répond qu'on peut, parier le discours j premièrement en substi- tuant d*autres mots à la place de ceux dont on s'est servi 'd'abord. Id ioium genus sifum in commutatione çerborum. Ce que Ci*<téron remarque sur ce point est indifférent à notre sujet, mais ce qui suit vient à propos. /

Dans les mots construits, dit Cicéron^ on peut user de trois sortes de changemens, en conservant toujours \es mêmes mots, et ne faisant qu'en changer l'ordre. l.^ D*abord on s'énonce directement et de la manière que la nature niême Tinspir^. ^,^ Ensuite on peut mettre a la fin de

de Gramfhaire, 3^5

la phrase les mots qui ëtoient d*abord au conimeocemeot) ou bien mettre au commeo- eeraent ceux qui étoient à la iiu. 3.<^ On peut eocore séparer les mots corrélatifs , et les mêler avec d'autres.

C*est ainsi que nous avons vu plus haut duas séparé de partes, in duas diçisam esse partes* Tiiyrç tu patulœ n^cudans sub tegmine S^S^' patulœ est séparé de son substantif y^^^i. Ces sortes de séparations ou de désunions sont très -fréquentes ea latin , parce que la terminaison indique le corrélatif. Frigidus , ô pueri Jugite hinc , latet anguis in herbâ, Virg, Eclog, 3, V. 93.

Frigidus, agricolam si .quando continet imher, Virgile, Géorg. Liv. I, V. ^69.

L'exercice , dit Cicéron, apprend k faire javec art ces différentes inversions.

In conjunctis autem perbis triplex adhiberi potest commutatio , non çerborum , sed ùrdînis tantummodo , ut cum semel dictum iit directe, sic ut natura ipsa tulerit, in-^ pertitur ordo, et idem quasi sursum^çersus retroque dicatur, Deindè idem intercisè atque permisiè, Eloquendi autem exerci'* iatio maxime in hoc toto cowertendi génère

326 Principes

çersatur, Cicéron , De partitione Oratorià C. VIL

Nos diclîoDDaires (Danet, Boudot, etc y traduisent directe j par selon l'ordre tiû- iurel. Faisons ^application de ce que Çicéroa dit ici, sur une seule petite phrase de ce grand homme:

Legituaslitteras quitus ad me scribis, etc.

Ce sont les premiers mots d*une lettre qu'il écrit ^ Lentulus. ( £p. ad Famil. L. I, Epist. Vil ) J'ai reçu cotre lettre, dit-il , par laquelle cous m'écriviez que , _ elc. Voilà une phrase écrite directe, sicut natura ipsa tulit. C'est ia première façon; mais à la lettre IV, du troisième .livre,, Cicéron met ao commencement ce ^ue dans la première lettre il avoit mis à la fin, Lifteras tuas accepi, c'est la seconde sorte d'arrangement sursum persus. Passons à la troisième manière qui est lorsque les mots corrélatifs sont séparés et coupés par d'autres mots intercisè atque permistè,

Raras tuas quidem , fortassè enim noQ perferuntur, sed suaves accipio litteras, Epist. ad. famil. L. 2, Ep. -XIII.

Dans le premier exemple, les mots sont rangés^ selon la suite * de leurs rapports,

de Grammaire^ ZoTj

Icgh \^^ lu» )'^^ reçu. quoi? tuas litteras^ vos lettres. Outre cet arrangement , chat{ue riiot a encore la «terminaison ([ui indique sa relation avec un autre mot ^ selon l'analogie établie dans la langue latine. Voilà ce que jusqu'ici tous les Grammai- riens ont appelé Tordre naturel , c*est-à- dire, celui, auquel tous les autres arran-- gemens de mots, doivent être rapportés parce qu'il est le premier moyen établi parmi les hommes , pour faire connoître les pensées par la parole , et qu*il est le premier dans Tesprit de celui qui parle. Arrêtons - nous un moment aux deux autres exemples de Cieéron , ou plutôt pour abréger , ne rappelons que le deruier , Raras tuas guide m , portasse enim non perjeruntur , sed suatfes. Quel *ens ces paroles peuvent -^ elles exciter dans mon esprit, si je n*achève pas de lire toute la proposition \ Voilà d'abord deux adjectifs raras tuas , mais les adjectifs y c'est-à-dire les mots qui ne sont que de simples qua- lificaûfk , ne peuvent pas entrer dans le discoars sans qu'on y voye l'objet ou le supost qu'ils qualifient.

3^8 Princlpei

Mais que vois-)e encore ! ces AtMX mots raras tuas ^ ont une terminaison qui in»- dique un sens oblique , un sens dépendant : voyons tout. Âccipio litteras , ces deux der- niers mots répandent la lumière dans toute la phrase , je rois les rapports de tous les mots entr'eux. Je préfère le conseil de Friscien à celui de nos Grammairiens , qui ne veulent pas qu*on déplacé les mots* Je fars la construction Accipio litteras tuas , raras quidem , sed suaçes» Tout est dans Tordre naturel , ordre conforme k notre manière de concevoir par la parole et à Thabitude que nous avons contractée na- turellement dès Tenfance , quand nous avons appris notre langue naturelle ou quel- qu'autre. Ordre enfin qui doit avoir été le premier ^ans l'esprit de Cicéron , quand il a commencé sa lettre par raras tuas ^ car comment auroit-il donné k ces deux, mots y la terminaison du genre féminin , s^il n'avoit pas eu dans l'esprit Litteras ^ et pourquoi leur auroit-il donné la ter- minaison de Taccusatif; s*il n'avoit pas voulu faire connoîire que ces mots se rap- portoient à Je reçois dans le -moment une

ëe Grammaire. 3^9

êe vos lettres , cous m-en écrirez bien ra^ rement , mais eUci me font toujours un sensible plaisir* ^

Ordre enfin que nos Grammaîriens ino-« dernes qui ne veulent poinb^ de construc- tion ) sont obliges d'apercevoir , car s'ils ne Taperçoiveot point , ils ne pourroient pas comprendre le sens de la phrase.

Ainsi Tordre naturel n'est autre chose que l'arrangement des mots , selon la suite des signes des rapporté , sous lesquels celui qui parle veut faire considérer les mots. Uae liste de tous les mots d'uue langue ^ selon leUr première dénomination , et sans aucun signe de rapport d'un mot à un autre , ne feroit aucun sens.

Observations sur ce que les Grammairiens appellent Disconvena2S[ces*

On se sert du terme de Disconçenance , pour désigner des mots qui composent les divers membres d'une période , lorsque ces mots ne conviennent pas entr'eux , soit parce qu'ils sont construits contre l'ana- logie y ou parce qu'ils rassemblent des idées disparates, entre lesquelles l'esprit aper- çoit de l'opposition, ou ne voit aucun

33o Principes

rapport. Il semble qu'on tourne d'abord l'esprit d'ua.ceriain côlé , et que lorsqu'il croit poursuivre la même route , il se sent tout d'un coup transporté dans un autre chemin. Ce que je ^\xx dire s'entendra mieux par des exemples.

Un de nos Auteurs a dit que, Noire ré- putation ne dépend pas des louanges qu^-on nous donne , mais des actions louables que nous faisons.

Il y a disconvenauce entre les deux membres de cette période , eu ce que le premier présente d abord un sens négatif) ne dépend pas] et dans le second membre oa sous-eutend le même verbe dans un sens af- firmaiif. Il falloit dire, Notre réputation dé" pend , non des louanges qu'on nous donne , ma^'s des actions louables que nousjtn'sons*

Nos Grammairiens soutiennent, que lors- que dans le premier membre d'une période , on a exprimé un adjectif, auquel on a donné, ou le genre masculin , ou leféaiinio, on ne doit pas dans le second membre sous-entendrc cet adjectif en un autre genre , comme dans ce vers de Racine*

Sa réponse est dictée, et mime son silence*

de Grammaire, 33 1

Les oreilles et les imaginations délicates veulent qu*en ces occasions ) l'Ellipse soit précisément du même mot aa même genre ; autrement, ce seroit un mot difl'érent.

Les adjectifs qui ont la même thermi» naîson au masculin et au féminin ^ sage , Jidèle , polage , ne sont pas exposés a celle disconvenance.

Voici une disconvenance- de temps. Il regarde cotre malheur comme une punillon du peu de complaisance que çoua atfes eue pour lui , .dans le temps qu'il cous pria , elc II faltoit dire , que vous eûtes pour lui dans le temps qu'il cous pria.

On du fort bien : Les nouveaux phi' losophes disent que la couleur est un sentà^ ment de l'ame : mais il faut dire , les nouifeaujp philosophes veulent que la COU'^ leur soit un sentiment de Vame.

On dit , Je ci ois ^ je soutiens , j'assure , que cous êtes savant : mais il faut dire , je ceux , je souhaite , je désire que t>ous soyez satfanf.

Une disconvenance bien sensible , est celle qui se trouve assez souvent dans les mots d*uDe métaphore. Les expressions métaphoriques doiv^eat itre liées entr*elles

332 ' Principes

de la même manière qu'elles le seroient dans le sens propre. On a reproché' à Malherbe d*avoîr dit :

Prends ta foudre , Louis , et va comme un lion.

Il falloît dire , comme Jupiter. 11 y a disconvenance emre foudre et linn»

Dans les premières éditions du Cid , Chî- xnène disoit:

V. Malgré des feux si heaux ; <jui rompent ma colère»

Feux et rompre ne vont point ensemble : c'est une disconvenance) comme VÂcadé- mie l'a remarqué*

Ecorce se dit fort bien dans un sens mé- taphorique, pour les dehors ^ V apparence des choses. Ainsi , Ton dit que les igno-^ rans s'arrêtent à Vécorce] qu'ils s'amusent à^*écorce. Ces verbes conviennent fort bien avec .écorce pris au propre. Mais on ne diroit pas au propre , fondre Vécorce : Fondre se dit de la glace ou du métal. J'avoue ^t fondre Vécorce m'a paru une expression trop hardie dans uujb Ode de Rousseau :

Et les Jeunes zéphirs , par leurs chaudes haleines^ Ont fondu l'écorct deê eaux.

lim zii. 04p Vl>

». de Grammaire* 333

Il y a un grand nombre d'exemples de disconvenances de mots , dans nos meil- leurs Ecrivains ^ parce que , 4^ns la cha- leur de la composition , on est plus occupé des pensées , qu*ou Test des mots qui servent à énoncer les pensées.

On doit encore éviter les discoi^venances dans le stjle ; comme ^ lorsque traitant un sujet grave , on se sert de termes bas ^ oa qui ne conviennent qu*au stjle simple. Il y a aussi des disconvenances dans les pensées , dans les gestes , etc.

^îngula foâeqat locum tenetnt aortita d«center, IJtt'MbBtibaa «rrident, ita Hentibas adsont liDmâoi Toltua. Si tîs me flere, dolcndam eat Priiiiùni ips^ til>i , etc. (i)

Des mots explétifs.

Le mot explétifs vient du latin expîçre |- remplir. £n effet , les mots explétifs ne ^rvent , comme les interjections ; qu*à remplir le discours, et n'entrent^ pour rien dans la construction de la phrase , dont on entend également le sens ) soit que le mot explétif soit énoncé , ou qu*il ne le soit pas,

y "m II I nu

^i) Horace I de ufrfe ^oëtîea^

\

334 ' Principes

Notre moi et notre po^ts sont quelquefois eipîëlifs dans le style familier.

On se sert de moi , quand on ^arle à Tinipératif et au présent. On se sert de t^oiis y dans les narrations. Tartuffe, dans Molière , Acte I//, Scène 1/ , voyant Do- riiie , dont la gorge ne lui paroissoit pas assez couverte , tire un mouchoir de sa poche I et lui dit :

. . . . Jh ! mon Dieu , /e vous prie , Avant ifut d€ parler, prencf'Vc^oi mouchoir»

et Marot a dit:

Faites- les-moi les plus laids que l'on puisse t Pochez cet mil , ^sstz-moi cette euissê :

En sorte que , lorsque je lis dans Té- rcnce (ï) , Jac me ut sciam , je suis fort tenté de croire que ce me est explétif ea latin, comme notre moi en françois.

On a aussi plusieurs exemples du vous «xplétif, dans les façons de parler familières: //vous la prend et V emporte , etc. Noire même est souvent explétif: Le Roi y est çenu /«/-même: J'irai moi -même. Ce

l>ll*IIM

(i) HeauC. act, h scen, lY. 5a.

de Grammaire, 335

même a*ajoute rieo à la valeur du mot ^oi , ni à celle de je.

Au troisième livre de l'Enéide , v. 632 , Achëmënide dit qu'il a va lui-même le Cyclope se saisir de deux autres com^ pagnoQs d*Uljrsse , et les dévorer :

Vidi ego-met duo de numéro , ete.

vous voyet qu'après çidiel après ego^ la particule met o'ajonte rien au sens. Ainsi met est une particule explëùve ^ dont il y a plusieurs exemples : Ego-nitt narrabo (i): suscipe me^met totum , dit Valînius h Ci- céron , en le priant de le recevoir tout entier sous sa protection. C'est ainsi c|u'on lit dans les manuscrits.

L^ syllabe er , ajoutée k l'infiniiif passif d'un verbe latin , est explétive ^ puisqu'elle n'indique ni temps ^ ni personne, ni aucun autre accident particulicr'du verbe. U est vrai qu'en vers elle sert h abréifier Vi de Tin- ftoitif^ et à fournir une dactyle au Poëte. C'est la raison qu'en donne Servius, snr^ ce vert de Virgile, Enéide, liçre III, v. 493.

Dulce caput, magicas invitant accingi^tr artes,

■I' '■■ V ' Il I W II. Pi

(0 Térence, Ad^Ip, acp, lY, tcen, UI v».tX

336 Principes

Accingîerj id est preepararî , dit Servius. AcciNGiEB. aiitem, ut ad irifinitum niodum er addatur^ ratio efficit metri, Nam cùm in eo AcciVGi uîtima sit longa, àddita ER syllaba , brei^is Jit.

Mais y ce qui est remarquable , et' ce qui nous autorise à regarder cette syllabe coninie explétive, c'est qu'on en trouve aussi des exemples en prose. Vatinius cliens pro se causam dicier pult (i). Quand pD ajoute ainsi quelque syllabe à la fia d'uQ mot, les Grammairiens disent qae c'est une figure qu'on appelle Paragoge^

Parmi nous ^ dit l'Abbé Régnier (a) , il y a aussi des particules explétives. Par exemple^ les pronoms me^ te^ se^ joints, et la particule en^ comme quand on dit, je m'en retourne: Il s'en ça. Les pronoms moi , toi, lui , employés par répétition ; S'il ne çeut pas pous Ifi dire , je cous le dirai , moi ; Il ne m'appartient pas , à moi, de me mêler (ie ços araires: il lui appprtîent bien^ à lui, de parler comme iljait.

Ces mots, enfin, seulement^ à tout

(i) Afud CfcéVon. lib. V. adfamiU epUt. xzr (i) Grammaire ^ ]p«g* £65, <>i-4.

hasard ,

de Grammaire^ 337

hasard^ apfès iouty et quelques autres, ne doivent souvent être regardés que comme des mots explétifs et suraboadans; c*est- k-dire , des mots qui ne tontrîbuent en rien à la construction ni au sens de U proposition; mais ils ont deux services.

I. Nous avons remarqué ailleurs , que les langues se sont formées , par usage, et comme par une espèce d'iastiDçt, ec non après une délibération raison née do tout UD peuple. > Ainsi, quand certaines' façons de parler ont été autorisées par une longue pratique , et qu'elles sont reçues parmi les honnêtes gens de la nation , nous devons les admettre , quoiqu'elles nous paroissent . composées mots redondans et combinés d'une manière iqui ne nous paroit pas régulière.

Avons*noas à traduire ces deux mots d'Horace 9 suni çuos, etc. auiieu de dire, quelques-uns sont^ qui, etc. ou prendre quelqu'autre tour qui soit en usage parmi nous.

L'Académie Françoise a remarqué, que dans ceue phrase : Cçit une agraire il y ça du salut de Vétat^ la particule y paroit inutile, puisque suffît pour le

P

338 Trincipeê

aeos. .Jtfoi/, dit T Académie (i), ce sont de^Jormuies dont on ne peut rien ôter^ La particule ne est aBft»i fest sîùavent explétive, et ne doit paa pour cela, être rètrauchiéew Tai ajfaire , çt je se (>eii» pas qu'on tienne m* interrompre : Je eradns pourtant que pous ne ueniez. Qu« fai^Ià ce nel c'est votre venue que je crains: je deyrois donc vous dire simplement , 79 crains que vous veniez^ Non^ dit i'Aca-* demie. // est certain, aJQule«-t*elU, ai»si bien que Vaugelas^ Boohour», etc. qu'avec craindre ) empêcher, et' quelques autres verbes j iljiuit nécessairement ajouter 4 la négative ne. J'empêcherai bien que vous ne soyez du nombre ^ etc.

C^est la pensée habituelk de celui qui parle, qui attire cette négation. Je ne vewv pas que vous veniez ; Je crains en sou^ haitant que vous ne veniez pas* Mo9 esprit tourné vers la négation , la met dans le discours. Voyez ce que nous avons dit de la syllepse et de Vattraction , dans l'article de la «onstruction.

\ '.'"■■ ' ' ' -.y

(0 Remarques et décisions de ï'jicadéniic Jf^r^n*^ foise. Cl|«z Coign^r^, 16^8.

de Grammaire. 335

Ainsi) le premier service des particules ^ expiétives , c'est d*eatrer dans certaines façons de parler consacrées par Tusage.

IL Le second service , et . le plas rai^^ tonnable, c'est de- répondre au sentiment intérieur dont on est afi'ecté) et de donner ainsi plus de force et d'énergie à l'expression. L'intelligence est prompte: elle n'a qu'un instant. Mais le sentiment est plus durable ; il nous affecte; et P*est dans le temps que dure cette afl'ection , que nous laissons échapper les interjections, et que nous prononçons les mots explétifs , qui sont iine sorte d'interjection, puisqu'ils sout nn e£Fet du sentiment.

Çest à vous à sortir, vous çui parlez (i).

f^ous qui parlez, est une phrase explétive, qui donne plus de force au discours.

Je tai TU , dis - /e 9 tu « de mes propres yeux

Ta , ce qu'on appelle tu (a). Et je ne puis da toat mei mettre dans l'esprit y. Qu'il ait osé tenter les choses que l'on dit.

Ces mots, çu de mes yeux ^ du tout,

(t) Molière.

(3) Idem Tartuffe, act. V. scèn. UI,

34^ Principes de Grammaire.

tout explétifs , «t ne servent qu'à mleax assurer ce que Toa dit. Je ne parle pas sur le témoignage d'un autre; Je l'ai pté moi-même \ je Vai entendu de mes propres oreiUes: et dans Virgile» au neuvième livre de V Enéide^ vers 467:

Mt me adsum çui/eci: in me eçnvûrtite fsrrum.

Ces deux premiers me ne sont que par énergie , et par senlimeat. Elocutiç est dolore turbati, dit Serviu$.

fin du Tome premier.

LOGIQUE

E T

PRINCIPJBS

DE GRAMMAIRE;

Par M. DIT M A R s A I s.

Ouprages posthumes en partie^ et en partie extraits de plusieurs Traités gui ont déjà paru de cet auteur.

NOUVELLE ÉDITION Augmentée du Traité de l* Inversion,

TOME II.

/Il lS"3é

A PARI S,

Chez Moutardier, Libraire, quai des Augnstins, n.® 23.

1807.

^âiH

:aUE CANTQNj/

AUSANNE

f^^

PRINCIPES

DE GRAMMAIRE.

DE L'ARTICLE.

L

>E mot article, vient du latia articulas diminutif de artus ^ membre, parce que dans le sens propre Q.n ente ad par article les jointures des os du corps des animaux, unies de différentes manières, et selon les divers mouvemens qui leur sont propres; de -là, par mélaphore et par extension, on a donné divers sens à ce mot.

Les Grammairiens ont appelé articles, certains petits mots qui ne signifient rien de physique, qui sont identifiés avec ceux devant lesquels on les place, et les font prendre dans une acception particulière. Par exemple, Le roi aime h peuple; 1er Tome lï^ A

a Principes

premier le ne présente qu'une même idëe avec roi; mais il m*indic{ue un roi par- ticulier que les circonstances du pays ou je suiS) ou du pays dont on parle me font entendre. L'autre le qvtlf recède peuple, fait aussi le même effet à l'égard dépeuple ; et de plus le peuple étant, placé après aime, cette position fait connoitre .que le peuple est le terme ou l'objet du sen- timent ^ue l'on attribue au roi.

Les articles ne signifient point des choses ni des qualités seulement: ils indiquent à l'esprit le mot qu'ils précèdent , et le font considérer comme un objet tel^ que sans l'article, /cet objet seroit regardé ■DUS un autre point de vue.: ce qui s*en« tendra mieux .dans la suite, sur-tout par les exemples.

Les mots que les Grammairiens appellent articles ) n'ont pas toujours dans les autres langues des équivalens qui ayeut le même usage. Les Grecs mettent souvent leurs articles devant les noms propres, tels que Philippe j Alexandre , César ^ etc. Nous ne mettons point l'article devant ces mots -> là« E uBn, il y a des langues qui ont des articles | %\ 4*auires qui n'eu ont point,

de Grammaire. S

Les Latins faisoîent un ulsagt si fré<- queat de leur adjectif démonstratif, ilîe^ illa^ iV/z/ff) qu'il y a lieu croire que c*est de ces mots que vienoeot notre le €t notre la. Ule ego; Muîier illa: Hi€ iila parça Petilia Whiloctetœ (i). Cesi que la petite taille de Petite fut bâtie par Phi-^ loctète, Ausoniœ ' pars illa procul quam pandit Apollo (2). Pétrone faisant parler un guerrier qui se plaignoit de ce que soa bras éloit devenu paralytique, lui fait dire: Funerata est pars iila corporis mei^ quâ quondam Achilles eram : Il est mort^ ce bras , par lequel fétois autrefois un Àchile* Ille D'eum pater. Quisquisfuit itle Qeorum» Ovid.

11 y a un grand nombre d'exemples de cet usage que les Latins faisoieot de leur ille^ illa^ illud, sur-tout dans les comiques , dans Plièdre, et dans les Auteurs de la basse Jaiioité. C'est de la dernière syllabe de ce mot ille y quand il n'est'pas employé comme pronom , et qu'il n'est qu'uo simple adjectif indicatif, que vient notre article

(i) Virgile, y^ntid, ï. 3. v. 401. (3) tbid. T. 479.

A 2

4 - Principes

le: à regard de notre article la^ il vient du féminin illa, La première s;yllahe du masculin ille a donné lieu à notre pronom j7, dont nous faisons usage avec les verbes. îlle affirmai, Illejecit. Ingehio cires ille dat^ ille rapit* A l'égard de ell0; il vient de illa^ Illa çereiutu

Dans presque toutes les langues vulgaires , les peuples, soil à T^xemple de. Grecs , soit plutôt par uue pareille disposition d*esprit , ae sont fait de ces prépositifs qu*on appelle articles. Nous nous arrêterons principa-* lement à Varticle françois, ".Tout prépositif n*est pas appelé article^ Ce, ces; cet^ cette; ceci^ cela; celui ^ celle; ceux^ celles; celui ^ ci ^ celui '^ là; celles " d^ celles m ; certain , quelque , tout^ chaque, nul, aucune mon y ma, meSj^ etc. ne sont que des adjectifs niétaphy«r siques. Ils précèdent toujoujrs -leurs subs- tautifs: et puisqu'ils ne servent qu'à leur donner une qualiiîcation métaph;ysique , je ne sais pourquoi on .les met dans la classe des pronoms. Quoi qu'il ^n soit, on ne donne pas le nom Ôl article à ces adjectifs: ce sont spécialement ces trois mots, le ^ /a, Içs^ que nos Grammairiens ^ox^mJÇ^^

de Grammaire^ 8

eriîcles^^ peut-être parce que ces mots sont 4l'ua usage plus fréquent. Avant que d*ea. parler plus eu détail , observons que : ; 1,^ Nous aous servons de le devant le» noms inaseulins au singulier, le roi, le- jour. 2.« Nous empKayoQS /a devant lés noi\i» féràînius au singulier , la reine , la nuit, . 3.^ La lettre s, qui, selon Tajialogie de la langue, marque le pluriel, quand elle est ajoutée au. singulier , a formé , les , du siugulier le. Les sert également pour les deux geares,ie5 rois , les reines i les jours ^ . les MuU^,'>4é^ Le^ la^Jesy sont les trois article simples ; mais ils entrent aussi ea composition avec la préposition à^et avec la prpéosition de. Alors ils forment les quatre articles composés, oa, aux, du, des» , Au est composé de la .préposition à^ et 4e Tarticle le; en sorte que au est autant que à le. Nos pères disqieni al^ al tems ïanO^^nt I//: .c'est-à-dire y au.Hemps d'iu- aocisnt JI1« L'apos toile mahda al prodome^ ^ic. Le pape envoya au prud'homme (i). ' Mainte lerme iSuplorée de pitié al dépar^-

(i) VnUhtrdooio ^ liv^ t. p. i.

A 3

# Principes

tir (i)« Vîgeoere . traduit ; Maintes larmes Jitreni plorées à leur département ^ et mu prendre congés C*est te son obscur de Ve muet assê« commua ea notre -laague de i eu i/^ comme mal^ maux; cheval^ chevaux*, altus^ haut; alnus^aulnp (arbre*) alna^ aune ( mesure \ ) alter^ autre ^ qui ont fait iUre au au , lieu de <^ le ^ ou de aU Ce n*est que quand les noms masculins cora«» mencent par une consonne ou une vojeJle aspirée, que l'on se sert de au^ au lieu de à le. Car si le nom masculin commence par une voyelle ^ alors on ne fait poiot de contraction, la prêpotsiiion à et l'artîcte le demeurent chacun dans leur entier. Aiiksi) quoiqu'on dise le cœur, au cœur^ on dit l'esprit^ à l'esprit; le père, au père ] et on dit r enfantai à V enfant; on dit le plomb^ au plomb; et on dit l*or^ à Vor^ l'argent, à l'argent. Car quand le substaoïif «om« raence par uneToyelle , Temuet te s*éHde^ avec cette voyelle. Ainsi la raison qui a' donné Heu- k la çomraetiod aa ne subsiste plus; et d'ailleurs , il se feroit un bâillement désagréable si Ton disoita2< esprit y au ar^

{i) VillehardouiD y /iV.!. fag. i6.

d0 Grammaire^ f

geni , au ejifant , etc. Si nom est féniî* nin, n'y ayant point dV muet dans l*^ar- tlcle la , on ne peut plus en faire au; ainsi l'on conserve alors la préposition et Tarti* clc , la raison ^ à la raison ; la vertu , à la t^ertu.

Aux sert au pluriel pour les deux genres.

. C'esl une contraction pour à ies^ aux hom*

mes, aux femmes; aux rois ^ aux reines,

pour à les hommes^ à les femmes; à les

rois ^ à les reines^ etc.

Du est encore une contraction pour de le, Oest le sou obscur des 4eux e muets de suite de le , qui a amené la contraction du. Autrefois on disoit del : La fn del conseil si fut tel: U arrêté du conseilfut^ etc. (!)• Cervaise del Châtel ^ Gertfais du Casiel. On dit donc du lien et du mal^ pour de le bien y de le mal ^ ^X ainsi de tous les Doms masculins qui commencent par une consonne : car si le nom commence par une voyelle , ou qu'il soit du genre fémi-* nîn y alors on revient à la simplicité de la . préposition, et à celle de l'article qui con-

(i) YiUthardoois , lilf. 7tpag, loj,

A4

\

8 Principes

vient au genre du nom. Ainsi un dit , âc- V esprit^ de la vertu ^ de la peine. Par-lk on évite le ba^illenient : c'est la même raison que Von a marquée sur au:

Enfin, des sert pour les deux genres au pluriel, et se dit pour de les ^ des rois y deS' reines.

Nos eafans, qui commencent à parler, i^énoncent d'abord sans contraction. Us disent de le pain , de le pin. Tel est encore l*usage dans presque toutes nos provinces limitrophes, sur-tout parmi 1^ peuple. C'esl peut-être ce qui a donné lieu aux premières observations que nos Grammaiuciis ont fai- tes de ces contractions.

Les Italiens ont un plus grand nombre de prépositions qui se contractent avec leurf articles.

Mais les Aoglois, qui ont comme nour des prépositions et des articles , ne font pas ces contractions. Ainsi Us disent qf tîh0^ de ^, nous disons du; the king^ le roi; qf ^he king^ de le roi; et en frauçois du roi; ojihe que en , de la reine; the king^ à le roi ^ au roi ; to the queen la reine* Celte remarque n*est pas de simple curio- 9ité. Il est important j pour rendre raisom

de Grammaire. 9

de J4 coas^ruçtion ^ de séparer If préposi- tion de rarticl^) quand ils s^nt Tun et Tauire en composition. Par exemple , si je veux rendre raison de cette façon de parler, du pain suffit; je commence a dire de le pain. Alors la préposition extractive, et qui cftmme toutes les autres prépositions doit être entre deux termes , cette préposition , dis-je ) me fait connoitre qu'il y a ici une ellipse.

Phèdre, dans la fable de la Vipère et >de la Lime^ pour dire que cette vipère cherchoil de quoi marger , . dit : Hœc , çuùm tentaret si qua res esset cibi ; vous voyei que aliqua r^s cibi, fait con- Hûître ^par analogie ^ que du pain, c'est aliq'ta res panis, paululum panis; quelque chose j une partie y une portion du pain. C'est ainsi que les Anglois , pour dire , Donnez-^moi du pain^ àis^ul Gii>e me sqme hreàd , Donnez-^moi quelque pain: et pour dire , J'ai pu des hommes ; I hâve seen some men; mot à mot, J'ai çu quelques hommes; à des médecins^ io some physicians^ à quel- ques médecins.

L'usage de sous-entendre ainsi quelque aom générique devait de, du^ des, qui

as'

lA - Principes

Cepeûdant, communément nos Gratntiûiî- rîeas ne regardent ces deux mot& ( de et £( ) que comme des particules) quisarveut, disent^ils, à décliner nos noms. L'une «st, dit-on, la marque du génitif, et Tautre^ c&Ile du datif. MaiS) u*est-il pas plus simple, et plus analogue au procédé des langues > dont les noms ne changent point leur dernière syllabe, de n*y admettre ni cas, ni décli- naisons , et d*observer seulement comment ces langues énoncent les mêmes vues de Tesprit, que les latins font connoître par la différence des terminaisons? Tout cela se fait ou par la place du mot, ou par It secours des prépositions.

Les Latins n*ont que six cas; cependant il y a bien plus de rapports à marquer: ce plus, ils renoncent par le secours de leurs prépositions. bie'n^ quand la place du mot ne peut pas nous servir à faire connoître le rapport que nous avons K mar- quer, nous faisons alors ce que les Latins faisoient au défaut d'une désinance ou ter- minaison particulière. Comme nous n'avont point de tenuinaison destinée à marquer le géniiify nous avons recours à une prépo- siiion. 11 en esj, de même du rapport d'attri-

de Grammaire* x5

bnti'.oD : nous le marquons par la prëposiuou à ou par la préposilion pour, et même par quelques autres , et les Latins marquoient ce rapport par une terminaison particulière) qui faisoit dire que le mot étoit alors au datif.

Nos Grammairiens ne nous donnent que tix cas, sans doute parce que les Latins n*en ont que six. Notre accusatif^ dit-on ^ est toujours semblable au nominatif. Hé^ y a-t-il autre chose qui les distingue, sinon la place? Tun se met devant et l'autre après: dans Tune et dans Tautre occasion , le nom n'est qu'une simpledénominatioa. Legënitif, selon nos Grammaires , est aussi toujours semblable à l'ablatif. Le datif a le privi- lège d'être seul avec le prétendu article à^ Mais de et à ont toujours un complément ^ comme les autres prépositioâs, et ont éga« iement des rapports particuliers \ marqner. Far conséquent, ^\ de €l à font ^es cas ^ iur , par, pour , sous, dans, açec, et les autres prépositions, devr oient en faire aussi. Il n'y a que le nombre déterminé des six cas latins, qui s'y oppose. Ce que jt veux dire est encore plus sensible en italien. On trouvera dans la Grammaire de Buommatëi ,

l6 . Principes

gati dt pacet des envoyés touchant la paîx ^ pour parler de paix. De captiçis^ commu'^ tandis: pour rechange des prisonniers. .

5.^ De j à cause de , pour: Nos amas de J^dicinâ istac: vous m*aiiiiez à cause de cette musicienne. Lœtus de arnica: il est gai k cause de sa maîtresse. Rapto de Jràtre do-* lentis: inconsolable St la mort de son frère. Accusare, argueredé: accuser, reprendre de'.

6.^ Enfin 5 celle préposition sert K former des façons de parler adverbiales. De integroy de nouveau. De induslriâ , de propos àéXi-^ béré , à dessein. \

Si aous passions aux Auteurs de la basse latinité , nous trouverions encore un plus grand nombre d*eiemple ; De cœlis Deus^ Dieu des Cieux. Paunus de lanâ , un drap ^ .une étoffe de laine.

Ainsi l'usage que les Latins ont fait de cette préposition a donné lieu à celui que nous en faisons. Les autorités que je viens de rapporter dpi vent suffire*) ce nie semble ^ pour détruire le préjugé répandu daus t.OLUtes nos Grammaires, que notre de estla marque du génitif. Mais , encore un coup , puis- qu*en latin , Templum de fnQrmore\ primus de plèbe ; rabula dejbro ;• declamcior de

de Grammaire» 17

iudo ; homo de scholâ ; muUereè de nostro -^œculo , quœ sponte peccant ; reliquum de ratiuncula; panniis de lanâ ; de n*est qu'une prëposition avec son complément à l'ablatif, pourquoi ce même de passant dans la langue fravçoise avec un pareil conipléiuent , se trpuveroit-il transformé en particule, et pour- <juoi ce complément qui est à Tablatif ea la tin ) se trouvcroit-il au génitif en françois \ Il n'y est ni au génitif , ni à rablatif* Nouf n'avons point de ca$ proprement dits en françois. Nous ne faisons que nommer : et à l'égard des rapports ou vues différentes sous lesquels nous considérons les mots , nouf marquons ces vues , ou par la place du mo( 00 par le secours de quelque préposition,

La préposition de est employée le plus soa« vent à la qualification et à la détermination : c'est-à-dire , qu'elle sert a mettre en rap- port le mot qui qualifie avec celui qui est qua- lifié. Un palais de Roi^un courage de héros» Lorsqu'il n'y a que la simple prépo- tition de , sans l'article , la préposition et ton complément sont pris adjectivement. Un palais de Roi est équivalent à un Palais^ Royal \ une çaleur de héros ^ équivaut à une çaleur héroïque» C*est un sens spéci«

\

do Principes

ûçec , elc. Les unes et les autres servent à faire connoître eu François les rapports particuliers que Tusage les a chargés de marquer, sauf à la langue latine à exprimer autrement ces mêmes rapports»^

A lëgard de le , /^f , les , je n'en fais pas une classe particulière de mots sous le nom à* Article \ Je les place avec les ad- jectifs prëposilifs , qui ne se mettent jamais que devant leurs substantifs , et qui ont chacun un service qui leur est propre. Oo pourroit les appeler Prénoms, .

Comme^ la société civile ne 9aur|Oit em- ployer trop de moyens pour faire saitr» dans le cœur des hommes des sentimens ^ qui d*uoe.part les portent li éviter le mal . qui est contraire à cette société , et de l'auU'e les engagent ^ pratiquer le bien , qui seifl à la maintenir et ^ la rendre florissante ; de même l'art de la parole ne sauroit nou« donner trop de secours pour nous faire éviter l'obscttrité et l'amphibologie , nt in- venter un assea^ grand nombre de mots^.pour énoncer non-seulement les diverses idées que nous avons dans l'esprit , mais encore pour exprimer les différentes faces sous lesquelles nous considérons las objets de ces idées»

de Grammaire, %%

fait ripgnrder comme un iodividu mëtaphy-' sique. Mais le second /a, qui est après aimez^ rappelle la pcrtu; el c*est pour cela qu*il est pronom , et qu*il va tout seul. Alors la yieat de illam , elle.

C'est la différence du service ou emploi des mots, et non la différence matérielle da fion , qui les fait placer en différentes classes. C'est ainsi que Tinfinitif des verbes est Si\a« vent nom , le boire ^ le manger.

Maïs sans quitter no^ mots , ce même son la n*est-il pas aussi quelquefois un adverbe qui répond aux adverbes latins ibi^ hâc ^ isthâc, illâc: il demeure là^ il ça là^ etc. N'est-il pas encore un nom substantif, quand il signifie une particule explétive qui sert ^ Ténergie î Ce jeune homme ^ la y cette Jimme^la,

A Tégard de un , une , dans le sens quelque on certain^ en latin quidam y c*est encore un adjectif prépositif qui désigne uQ individu particulier, tiré d*une espèce, mait sans déterminer singulièrement quel est cet individu , si c'est Pierre ou Paul. Ce mot nous vient aussi du latin, Quis est is hemo^ mr^usne amatorî Hic est unus servue piolen^

±j( Principes

tisiimus (i). Si^ut unus paterfamilias (2). Q^ui variare cupit rem prodigialiter unam (3). Celai ({uî croit einbellir ud sujet, unam rem^ en y faisant entrer du merveilleux. Forte vnam aspicio adolescentulam (4)^ Donat, qui a commenté Térence, dans le temps que la langue latine ëtojt encore une langue vi- vante) dit sur ce passage, que Térence a parfé selon l'usage; et que s'il a dit unam au lieu de cjuandam , c'est que telle ëtoit , dit-il , et que telle est encore la manière de parler,

La Grammaire générale de P. R. dit que un est un article indéfini. Ce mot ne me paroît pas plus article indéfîni , qu« tout article universel y ou ce ^ cette^ cet, articles définis. L'anteùr ajoute , qu'o/z croit d'ordinaire que DD n'a point de pluriel; quil est prai qu'il n'en a point qui soitjbrmé de lui-même : on dit pourtant les uns , quelques-uns ; et les Latins ont dit au pluriel j uni, unoBj etc. Eae unis geminas mihi conjîciet nuptias (5),

t.

(1) Plaote. (a) Cicéron. |5) Hora<0. (4) Térence

A4mt

de Grammaire, 25

Aderituna in unis œdibus (i ). J^ dis^ poarsuit l'Auteur , que uq a un pluriel pris d'un autre mot , qui est des ^ apani les substantifs , des animaux y et de ^ quand l'adjectif précède , de beaux lits. De ua pluriel ! cela est nouveau.

Si i*on veut bien faire aitention que des

est pour de les; que quand on dit ^ à des

hommes, c'est à de les hommes , que de ne

sauroit alors déterminer à; qu'ainsi il y a

ellipse) à des hommes ^ c'est-à-dire, à

quelques - uns de les hommes , ^uibusdam

ex hominibus; qu'au coutraire, quand oa

dit le Sauveur des hommes^ la construction

est toute simple; on dit au singulier, le

Sauçeur Ae t homme ^ et au pluriel le SaU'*

çeur de les hommes, il n'y a de différence

que de le, à les, et non à la préposition:

il seroit inutile et ridicule de la répéter. Il

en est de des , comme.de aux; Tun est de

les y et l'autre à les. Or, comme lorsque le

sens n*est pas partitif, on dit aux hommes^

sans ellipse, on dit Aussi des hommes, dans le

même sens général. Uignorance des hommes^

la çanité des hommes.

Ainsi regardons i,^ le^la^ les^ comme de

(0 Tireocb.

- B

2.6 Principes

simples adjectifsiadicatifs et métaphysiques, aussi--bien que c^^ cet, cette, un, quelqu'un, certain i «le. v

2,° Considérons de comme une prépo- sition y qui , ainsi que par , pour ^ en, cpec , sanf, etc. sert à tourner l'esprit vers deux . objets , et à faire apercevoir le rapport qu*oa veut indiquer entre Tun et Tautre.

5.^ Enfin ) décomposons az^/auo?, du ^ des ) faisant attention à la destination et à la nature de chacun des mots décomposés, et tout se trouvera applani.

Mais ayant que de passer à oo plus grand détail , touchant Temploi et Pusage de ces adjectifs, je crois qu'il ne sera pas;nutile de nous arrêter un moment aux considérations suivantes.

Chaque être singulier devroil avoir son nom propre, comme dans chaque famille , chaque personne a le sien. Mais cela n'a pas été possible, à cause de la multitude innom- brable de ces êtres particuliers , de leurs prow prîétés , et de leurs rapports. On a donc été obligé de donner le même nom a tous les individus qui ont entr'eux certaines qualités communes , c'est-à-dire ^ qui çn formça( rçspècç.

de Gramtrmire, %j

1,0 Le nom propre , c'est le flom qiii n^est dit que d*un être particulier) du moins dads la ^hère cet être se trouve. Ainsi inouïs y Marie ^ sont des noms piopres, qui, dans les lieux on en connoît la/^estina<- tionV^e désignent que telle ou telle personne et non une sorte ou espèce de personnes.

Les objets particuliers auxquels on donne . CCS sortes de noms , sont appelés des indi'^ ffidus; c'est-à-dire, que chacun d'eux ne sauroit être divisé en un autre lui - même ^ sans cesser d'être ce qu'il est. Ce diamant ^ ti vous le divises, ne sera plus ce diamant. L'idée qui le représente ne vous offre que kii et n'en renferme pas d'autres qui lui soient subordonnés.

2.^ Les noms à' espèce , ce sont des noms qui conviennent à tous les individus qui ont cntr'eux certaines qualités communes. Ainsi, chien est un nom d'espèce , parce que ce nom convient à tous les chiens particuliers ^ dont chacun est un indiindu , semblable en certains points essentiels à tous les autres individus, qui, a cause de cette ressem- blance , sont dits être de même espèce et ont entr'eux un nom commun , chien,

3.^ 11 y a une troisième sorte de noms

B 2r

28 Principes ,

qu*n a plu aux maîtres de Tart d*app«1er noms de genre y c*est— à -dire, noms plus généraux , plus étendus encore que les sim- ples noms d'espèce. Ce sont ceux^qui sont commuas h chaqae individu de toutes les «spèces subordonnées à ce genre* Par exem-* pie, animal^ se dit du chien ^ du chepal^ du lion , du cerf^ et. de tous les individus particuliers qui vivent, qui peuvent se trans- porter par eux*>mêmés d*un lieu fi un àutise , ,qui ont /des organes,

Les espèces subordonnées à leur genre , sont distinguées les unes des autres par quel- que propriété essentielle. Chaque espèce a un caractère propre , qui' la distingue d*une vautre espèce, comme chaque î/zff/Vz'^u a son suppôt particulier inconimuniquabie k tout autre.

Ce caractère distinctif, ce motif, cette raison qm nous a donné lieu de nous former ces divers noms d'espèce, est ce qu'on appelle différence.

Remarquer bien que tous ces nonis^^Azr^, espèce j différence ^ ne sont que des termes métaphysiques, tels que les jQoms abstraits humanité^ bonté ^ et une infinité d'autres ^ui ne marqujept que des cônsidériiftions p^r^*

\

de Grammaire, ^ 29

ticulières de notre esprit, sans qu*Il y ^it hors de nous d'objet réel qui soit on espèce, ou genre ^ ou humanité ^ etc.

L'usage -nous sommes de donner des noms aux objets des idées qui nous repré« sentent des êtres réels ^ nous a porlrés à ea donner aussi par imitation aux objets mé- taphysiques àt.% idées abstraites dont nous avons counoissance. Ainsi nous en parlons comme nous faisons des objets réels. En sorte que l'ordre métaphysique a aussi ses noms d'espèce et ses noms d'individus. Cette çérité, cette çertu, ce çice, voilà des mots pris par imitation dans un sens individiAel*

C'est le besoin de faice oonnoitre aux autres les objets singuliers de nos idées , et certaines vues ou manieras particulières de considérer ces objets, soit réels, soit abstraits ou métaphysiques ; c'est ce besoin , dis-je , qui , au défaut des noms propres pour chaque idée particulière , nous a donné lieu d'in*^ ▼enter , d'un eâté les noms d'espèce , et de l'autre les adjectifs prépositifs, qui eu font des applications individuelles. Les objeta particuliers dont nous voulons parler, et qui n'ont pas de nom propre, trouvent con-« fondit av«c tans ivs «littes individus?.de leur

B 3

3a Principes

tspècesXe nom de cefte espèce leur convient é$§lement a tous. Chacun de ces êtres innom- brable^ qui nagent dans la mer e^t également appelé potssop» Ainsi le nom d*espèce tout seulj^'et par lui-même) n*a qu'une valeur iadéfinL|.^ c'est^a-diret) une valeur appli^ cable , qui fQ*est adaptée à aucun objet par- ticulier; ^omme quand on dit prai, boTtj beau, sans joindre ces adjectif&à quelqu^étre réel ou métaphysique. Ce sont les prénoms qui) de concert avec les autres mots de la phrase. tirent l'objet partfculier doot on parle, de rindéterminàtioo^u nom d'espèce , ek en font arnsl une soria de nom propre. Par exemple, si Ij^str^^ qui nous éclaii^t n'aVoit pas son nom propre, soleil , et que noas eussions à en p^arlec^i^cMi^prendrion» d'abord le nom d'espèce, astre,.enêuite jpoug nous aer^irigns du prépfsitif qui 'oonviendroit pour faire çooDoître que nous. ne .vouloni^ parier que d'un individu de l'espèce 4'â5/r« ; ainsi nous dirions cçilâr^/i-^^ on Vustrei aprèa^ qji;ioi nous apurions recoars aux mots, qui noua -paroitroient les plus propres à déter-^- niiner singulièrement ^ individu d'mtre, Nous4Ârio«is donc. Cet astre gmn^s^claiiéi r astre père du four ^.^ l'orna jfe J0 na^tuçc^

de Grammaire. 3l

etc. Aatre exemple, hwre est un ûom d'espèce dont la valeur n'est point appliquée. Mais si je dis , M.on îipre ^ ce îwre , le Iwre que je çiens d'acheter , on conçoit d*abord par les prénams^ou prépositifs, mon^ ce^ le ^ et ensuite par les adjoints ou mois ajoutés, que je parle d'un tel livre, d'un tel individu de l'espèce de livre.

Observez que, lorsque nous avons ^ appli- quer quelque qualification à des individus d'une espèce ; ou nous voulons faire cette application i»^ à tous les individus de cette espèce; 2.0 ou seulement à quelques-uns que nous ne voulons ou que nous ne pouvons pas déterminer ; 3*^ ou enfin à un seul que nous voulons faire connoître singulièrement. Ce sont ces t^rois sortes de vues de l'esprit que les Logiciens appellent V étendue delapro^ position .

Tout discours est composé de divers sens particuliers énoncés par des assemblages de mots qui forment des propositions , et les propositions font les périodes. Or, toute pro- position a i.** on une étendue universelle; c'est le premier cas dont nous avons parlé : d.o ou une étendue particulière ; c'est le

B4

3a Principes

second cas ; 3.* ou enfiD , une ëtendae sin- gulière , c'est le dernier ca$.

i."* Si celui qui parle donne un sens oni- versel au sujet de sa proposition, c'est-b-dire, s*il applique quelque qualificatif a tous Its individus d'une espèce , alors Tëlendue de la proposition est universelle^ ou , ce qui est la même chose , la proposition est uni- verselle.

2.0 Si l'individu dont on parle, n'est pas déterminé expressément, alors on dit que la proposition est particulière : elle n'a qu'une' éleodoe particulière. C'est-à-dire , que qu'on dit, n'est dit que d'uiT sujet qui n'est pas désigné expressément.

3*^ Enfin, les propositions sont singu- lières, lorsque le sujet, c'est-à-dire^ la per- sonne ou la chose dont on parle , dont on juge, est un Individu singulier déterminé. Alors l'attribut de la proposition, c'est-b- dire , ce qu'on juge du sujet , n'a qu'une étendue singulière , ou ce .qui est la même chose , ne doit s'entendre que de ce sujet. Louis XV a triomphé de ses ennemis : Le soleil est levé.

Dans chacun de ces trois cas, notre langue

de Grammaire. 33

nous fournit oàpréaom destiné k chacane^ de ces vues pàrticiilières de notre esprit. Voirons donc l*efifet propre, ou le service particulier de tes prénoms. «

Tout homme est animal: Cl^aquehomme est animal, Voilli chaque individu de l'espèce humaine qualifié par* animal , qui alOrs se prend ''adjectivement. Car touLhomme est animal, c'est-à-dire, */om/ homme pégète ^ est çiifant ^ se meut ^ a des sensations ;' tn un mot , tout horhme a les qualités qui distinguent TaDimal de l'être insensible. Ainsi , tout étant le prépositif d'un nom appellatif, donne à ce nom une extension universelle; c'est-à-dire, que ce que l'on dit alors du nom , par exemple à^homme , est censé dit de chaque individu de l'espèce : ftînsi la proposition est universelle. Quand je dis tout homme est mortel , c'est autant que si je disois , Alexandre étoit mortel; César étoit mortel; Philippe est mortel ^ et dinsi de chaque individu, passé , présent et à Tenir, et même possible de l'espèce humaine.

Remarquez ces trois façons de parler , tout homme est ignorant , tous les hommes sont ignorahs j tout homme n'est que J^oi^ blesse. Tout homme, c'est-a-dire , chaque

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34 Principe t .\

indiviila d^t V^spéce htiruaioe^ «juelqu'iadi- \idu que ce puisse être de Tespèce humaioe : alors /ei//estuo pur adjectif . Tous les hommes sont ignorons; c*e$t encore le même sens; ces deux propo$i lions ne spot différentes que par la forme. Dans la première , tout veut dire chaque , é\t présente Ja . totalité 4i$lriba- tiveraent , c*est-^-dire, qu'elle prend en quel- que sorte ^es individu Tua après Tautre \ au lien qiie tous les hommes les pi^sente collecti- vement tous ensemble. Alors tous^BX un pré- positif destiné à marquer l'universalité de les hommes. Tç^s a ici une sorte de signi- licatioQ adverbiale , avec la forme adjective: c'est ainsi que le participe tient du verbe et du nom. Tom^^ <V€Sl-à-dire , uniffersellemént , sans exception : ce qui est si vrai, qu*9n peut séparer tous de son substantif, et le joindre au verJbe.'Quinault, parlant des oiseaux, dit: En amour ils sont tous moins bêtes quenous% Et voilà pourquoi, en ces phrases, Tarticle les ne quitte point son substantif, et ne se met pas avant tous. Tout V homme , c'est-à-dire^ l'homme en entier j Thomme entièrement j rhonime considéré comme un individu spé- cifique. Nul^ aucun, donnent aussi une exten- sion universelle à leur substantif; mais dans

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de Grammaire. 35

un sens néf^6Xi{,4{ul homme, aucun homme, ^ est immortel: }e ok l'immortalité de chaque Individu de l'eftpèce humaine* La propositio^a est universelle, mais négative^ au lieu qu'a- vec tous sans négation, la proposition est universelle ) affirmative. Dans les propo- sitions dont nous parlons, nu/ et aucun étant adjectifs du su}et , doivent étr^accompagnés d'une négation. Kul homme n^esi exempt de la nécessité de mourir. Aucun philosophe de l'a/Hiçuité n'a eu autant de connaissance de physique qu'on en a aujourd'hui.

II. Tout ^ chaque y nul j^ aucun ^ sont donc la marque tte la généralité ou univer- salité des propositions. Mais souvent ces mots oe sont pas exprimés , cpmnie quand on dit : Les françois sont polis ; Les Italiens sânt politiques. Alors ces propositions ne sont que moralement universelles , de more , ut sunt mores ; c'est-à-dire , selon ce qu'on voit coiâmuoément parmi les hommes. Ces proposîtioKt sont aussi appelées indéfinies , parce que d'un câté on ne, peut pas assurer qu'elles comprennent généralement et sans exception tous les individus dont on parle ; et d'un autre côté , on ne peut pas dire non plus qu'elles excluent tel ou tel in-

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X \

36 Principes

divida. Ainsî, comme les indi vidas compris et les -individus exclus ne sont pas prëci- sèment déterminés y et que ces propositioDS ne doivent être entendues que du plus grand nombre , on dit qu'elles sont indéfinies.

IlL Quelque , un , marquent aussi un in- dividu de l'espèce dont on parle. Mais ces prénoms ne désignent pas singulièrement cei individu. Quelque homme est riche ^ un sapant m'est çenu voir : je parle d'un in- ' dividu de Tespèce humaine ; mais je ne détermine pas si cet individu est Pierre oa Pauf, C'est ainsi qu'on dit , une certaine personne ^ un particulier 5 et alors partie culier est opposé à général et à singulier. 11 marque à la vérité un îndivida ; mais un individu qui n*est pas déterminé 8in-> gulièrement. Ces propositions sont appelées particulières, *• * .

Aucun i sans négation, a aussi un sens particulier dans les vieux livres , et signifie quelquun , quispiam , non - njullus , non-^ nemo» Ce mot est encore en usage en ce sens parmi le peuple , et dans le stylé da Palais. Aucuns soutiennent , etc. quidam qf^ Jirmant^ etc. Ainsi , aucunejois ^ dans le vieux style , veut dire quelquefois , de temps

de Grammaire. 87

en temps ; pïeruwque) interdum , nonnun^ quam.

On sert aussi aux jhroposîtions parti* culières. On m'a dit , c'est-à-dire , Quel'» çu'un m* a dit y un homme m* a dit. Car on vient da homme ; et c'est par cette raison que pour éviter le bâillement ou rencontre de deux vQ^Hes , on dit souvent Von^ comme on dit VJiomme , si Von. Dans plu- sieurs autres langues , le mot qui signifie homme , se prend aus^i en un sens indéfini , comme notre on. Pe\ -des , qui sont des prépositions extractives , servent aussi à faire' des propositions particulières. Des Philosophes ou d* anciens Philosophes ont cru qu'ity açort des antipodes , c'est-à- dire , Quelques-uns des Philosophas ^ om un certain nombre ^anciens Philosophes^ ou en vieux stjle , aucuns Philosophes. . \Y. Ce marque un individu déterminé^ qu'il présente à l'imagination. Ce liçre , cet homme , cette Jemme , cet enfant , etc.

y. Le ^la^ les , indiquent que l'on parle , 7.0 ou d'un tel individu réel , que l'on tire de son espèce, comme quand on dit. Le roi t la reine ^ le soleil^ la lune: 2." on d'un individu métaphysique ^ et par

38 Principes^

imiutîo;! oa aiuiK)gie: La çérité ^ le men<^ songe ; V esprit ^ c'est-à-dire, ie génâe; le cœur^ c est- a-dire y /tf sensibilité ; tenten^ dément , la polonté , la pie , la mort , la na-^ ture^ le mout^emeni ^ le repos , le néant , etc.

Oest ainsi que Ton parle de Tespècc tirée du genre auquel elle est subordonnée , l^squ'on la considère par allstraction , et pour ainsi dire , en elle-même sous la forme d'un tout individuel et métaphysique. Par exemple , quand on dit que parmi les animaujÊ , Vhon^fie seul est raisonnable^ rhomme est un individu spécifique.

C*est encore ainsi que ,'sans parler tl*au* cuQ objet réel en particulier , on dit par abstraction , Vor est le plus jjrécieux des métaux ; le xfer se fond et se forge ; ^ marbre sert Somement aux édifices ; le çerre n^est point malUa^le ; la pierre est utile) le cercle'^est rand^ etc. tous ces mots y tor^ le fer ^ le marbre^ etc. sont pris dans un sens individuel ^ mais méta- physique et sféciUque ; c*eat-à-dirte , que sous UQ nom singulier ils compirenaent tons bs indivij^us d*ûqe espèce; en sorte que ces mots ne sont proprement qu^ les noms à% ridée exemplaire du point de rëaaion ,

/

âe Grammaire, 3$

•a concept , que nous avons dans rcsprit ^ 4e chacune de ces espèces d'êtres. Ce sont ces individus métaphysiques qui sont Tobjet des Mathématiques , le point , la ligne , le cercle , triangle ^ etc*

C'est par une pareille ..opération de Tes- «^ , que Toà pfrsouoifie si souvent la^a» iure et l'art^

Ces noms d'individu» spécifiques^ sont fort en usage dans ^'Apologue. Le loup et VoffieaUj l" pommer et Je^cheff al ^ ^ic. On ne fait parler ni aucun loup ni aucun agneau par* ticulier.: c'est un individu spéciiique et ra'é>« lapfaysique qui parle avec uq autre iodividu*

Ajoutons ici quelques observations k l'oc- casion de ces noms spécifiques.

I.° Quand un nom d'espèce est pris ad<- jeciivement , il n'a pas besoin d'article : Tout homme est animal: homme est pris subs- ' tantivemeat ; , c'est un individu spécifique qui a son prépositif tout; mais animal est pris adjectivement , comme nous l'avons déjà observé. Ainsi il n'a paç plus de pré« positif <{ue tout autre adjectif n'en aUroit; et l'on dit ici animal^ comme Voo diroit ^Ctrtçlji ignqranjj etç, \ C'est ai^si que l*£criture dit que ^oute

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40 Principes

chair estfoin^ omnts carofœnum (ï;);.c'e^t- à-dire, peu durable, périssable, corrupti« ble , elc. et c*est ainsi que nofis disons d*ua liomnie sans esprit, quV/^5/ hêJ0^

2.® Le nom d^espèce a*adniet pas l'arti- cle lorsqu'il est pns &eloa sa valeur indéfiaie | . sans aucune extension ni restriction, ou ap* plicalion individuelle, c'est-à-dire, qu'alors le nom est considéré indéfiniment comme sorte ^ comme espèce , et non comme un individu spécifique.. C'est ce qui arrive sur- tout lorsque le nom d'espèce précédé d'une préposition, forme un sens adverbial avec cette préposition, comme— quand on dit: par jalousie ^ avec prudence, en présence ^ sans contrainte, sans feinte. C'est dans ce même sens indéfini que l'on dit, avoir peur^ avoir honte , faire pitié» Ainsi on dira sans article: Cheval e H un nom d'espèce: Hemme est un nom d'espèce ; et l'on ne dipapas, le cheval €st un nom d* espèce ; l'homme est un nom d'espèce , parce que le prénom le marqueroit que l'on voudroit parler d'un individu , ou d'un noxn con- sidéré individuellement.

<i} IiiîèV c. 4'o. V, 6t

1

àe Grammaire. 41

3.*' C'est par la mè^me raison qu« le nom d'espèce n*a point de prépositif, lorsqu'avec le secours de la préposition de , il ne fait que Toffice de simple qualificatif d'espèée; c'est-à-dire ^""lorsqu'il ne sert qu'à désigner qa'un tel individu est de telle espèce ; Une montre d'or; une épée d'argent; un homme de robe; un marchand de pin; un joueur de violon, etc. une action de clémence ; une femme de vertu*

4^.0 Mais quand on personnî&e Tespèce^ qu'on en parle comme d*un individu spé- cifique , ou qu'il ne ^s'agit que d'un indi- vidu particulier tiré de la généralité de cette luéme espèce , alors le nom d'espèce étant considéré individuellement , est pré* ' cédé d'un prénom ^ ha peur trouble la rai^ son ; la peur que j*ai de mal faire ; la " crainte de vous importuner; t'envie de bien faire ; l'animal est p[us par/ait que Vêtre insensible ; jouer du violon , du luth , de la harpe : on regarde alors le viçlon y le luth ^ la harpe ^ etc< comme tel instrument particulier, et on n'a point d'individu à qualifier adjectivement.

Ainsi on dira dans le^ sens qualificatif ad- jectif, Un rayon d'espérancç , un rajon

42 Principes

de gloire , un sentiment d'amour : aa lieu que si l'oQ personnifie la gloire, l'amour, «te. on dira avec un prépositif;

Uu héros que la gloire élèVe . , N*e«t qa*à demi réeompensé:

Et c^eat peu , si l*amour n'achève Ce que la gloire a commencé (i).

Et \de même on dira , J<^i acheté une tabatière d'or j et J'aifaitjaire une taba» tière d'un or ou de l'or qui m* est penu d'Espagne, Dans le premier exemple, d'or est qualificatif indéfini , ou plutôt c*est an -qualificatif pris adjecliveoRent; au lieu que dans le second, de l'or^ ou d*unor^ il%*agit ^*un tel or: c*est un qualificatif individuel; cf'esLtUn individu de l'espèce àç Ton

On dit d*un prince ou d*un ministre qu'i/ €t l'esprit de gouvernement ; de gouiferne-^ me/i/ est un qualificatif pris adjectivement* Ou veut dire que ce ministre gouverneroit bien, dans quelque pays que ce paisse être il seroit -employé; ail lieu que si Toa disoit de ce ministre, qu7/ a l'esprit du gouvernement^ du gouvernement seroit un qualificatif individuel de Tes^^rit de ce mi-*

(0 QBÎaaaltr

de Gràmnialre* / 43

nistre; on le regarderoit conime propre sin- gulièrement à la conduite des affaires du pays particulier on le met eo œuvre.

Il faut donc bien distinguer qualificatif* spécifique adjectif, du qualificatif individuel. Une tabatière iïor, voilà un qualificatif ad*» jectif : une tabatière de Vor que, ou d'un or que, c'est un qualificatif individuel: c*est un individu de l'espèce de l'or. Mon esprit est occupé de deux substantifs; i.' de la tabatière; 2.^ de Tor particulier dont elle a été faite.

"* Observez qu*il y a aussi des individus collectifs, ou plutôt des noms collectifs, dontl^n parle comme si c*étoit autant d*indi«« vidus particuliers. C'est ainsi qile Ton dit y le peuplé, l'armée , la natioM, le parler ment, elc^

-j^n considère ces mots -là comme noma d'un tout , d*un ensemble ; l'esprîllef regarde par imitation comme autant de noms d'in- dividus réels qui ont plusieurs parties ;• et c'est, par cette raison , que Idfvque quelqu'un de ces ni«ts est le sujet d'une proposition , les Légiciens disent que la proposition esl singulière.

On voit donc que /^annonce toujours um

1

1

44 Principes

objet considère individuellement par celui qui parle; soit au singulier, la maison de mon çoisin; soit au pluriel, les maisons d'une telle cille sont bâties de brique*

Ce ajoute à Tidëe de le, en ce ^u*il montre^ pour ainsi cUre , robjet à Timagination , et suppose que cet objet est déjà connu : on qu*on en a parlé auparavant. C*est ainsi que Cicéron a dit, Quidestenim hoc ipsum diul Qu'est*ce-^n effet que ce long-temps. ~ Dans le style didactique , ceux qui écrivent en laiio, lorsqu'ils veulent faire remarquer jun mot, en tant qu'il est un tel mot, se serveut Les uns de ]*article grec les autres de* /y. To adhuc est adçerbium compositum : Ce mot adhuc est un adverbe composé (i).

Et TAutear d'une Logique, après avoir dit que l'homme seul est raisonnable; homp tantum ratiofialis^ ajoute que ly tanturr^ re^ ligua entiaexcludit: Ce mot t^niun^^%c\ui. •tous les autres êtres (2).

Ce fut Pierre Lombard, dans le XII.^ siècle, et saint Thomas dans le XIII.^, qui introduisirent l'usage de ce /y. Leur» disciples

ML

. (0 Porisonîus^ fa Sanctii Minerva ,\p. 765.

Jf) Philos, rmthn, «Bct. P. Fl^tic. C»ro, Ktn^. lOfiS-

>

de Grammaire* 48

les ont irnités. Ce ly n*est autre chose que rarciclefrançois li , qui ëtoit eu usage dans ces temps-lb. Ainsi futli chat iau de Galathas pris: Li baronet li duxde Venise; Li Véni-m tiens paumer et li François par terre (i).

Villehardouin et ses couteniporains ëcri« voient //, et quelquefois Ij, ô*oh on a fait ly, soit pour reoipHr la lettre, soit pour donner à ce mot un air scientifique , et l'élever au-dessus du langage vulgaire de ces temps-là. .

Les Italiens "^uj^ conservé cet article au pluriel, et en ont fait aussi un adverbe qui signifie là: en sorte que ly iantum , c'est comme si l*on disoit ce mot-'là tantum.

Notre ce et notre le ont le même ofEce- iadicatif que to et^que ly; mais ce avec plus d'énergie que le»

5.^ Mon, ma, mes; ion, ta, tes; son, sa^ ses^ etc. ne sont que simples adjectifs tirés des pronoms personnels. Ils marquent que leur substantif a un rapport de propriété avec la première, U seconde, ou la troisième per- sonne. Mais de plus, comme ils sont eux* mêmes adjectifs prépositif, et qu'ils in- diquent leurs substantifs , ils n'ont pas besoin

^MWPM«iVi

(1; YilUlurdouio , liy, 3# pag. 6$.

46 7 Principes

d*êtrc accompagaës de l'artide le. Que ToQ dit le mien, le tien, c*est que ces mots soat alors des pronoms substantifs. On dit proverbialement que Le mien et le tien sont pères de la discorde. ^

6.^ Les noms de ^nombre cardinal un, deux j etc. font aussi ToiRce de prénoms on adjectifs prépositifs ,*Dir soldats, cent écus»

Mais si Tadjectif numérique et son substan- tif font ensemble un tout, une sorte d*individu collectif^* et que Ton veuille marquer que Ton considère ce toat sous qqielque. vue de l*esprit, autre encore que ceHe de j^ombre, alors le nom de non\)3re f st précédé de l*ar-^ ticle ou préûoni, qui indique ce nouveau rapport. Le jour de la multiplication des pains , les A pôtres dirent à Jesus-Christ : Notts n'aidons que cinq pains et deux poissons : voilà cinq pains et deux poissons dans un sens numérique absolu. Mais ensuite ]*£van-> géliste ajoute que Jçsus-Christ prenant les cinq pains et les deux poissons, les bénit, etc. voiik les cinq pains et iei deux poissons dans un sens relatif h ce qui précède. €e sont les cinq pains et les deux, poissons dont on avoit parlé d'abord. Cet exemple doit bien faire sentir que le, la, les^ ce, cette, ces; ne sont

de Grammaire, 47

«[ue des adjectifs qui marquent le mouvement de l'esprit qui* se tourne vers l*objet parti- culier de son idée.

Les prépositifs désignent donc des indi- vidus déterminas dans l*esprit de celui qui parle. Mais lorsque cette première determi- uation n*est pas aisée à apercevoir par celui ^i lit ouquiécoute ) ce sont les circonstances ou les ifiots qui suivent, qui ajoutent ce que l*article ne sauroit faire entendre Par excm- ple^ si je d s, J^ çiens de Versailles, j'y ai tfu teroiy les circonstances font connoître que je parlede notre auguste monarque. Mais si je vou^pis faire entendre que ]y ^ vu le roi de Pologne , je serois obligé d'ajouter de Po" logne'k le roi: et de même si enlisant Thistoire de quelque monarchie ancienne ou étrangère, je voyois qu'en un tet temps le roijit telle chose , je compreodrois bien que ce seroit le roi du royaume dont il s*agiroit.

DES NOMS PROPRES.

Les noms propres n*étant pas des noms d'espèces , nos pères n*ont pas cru avoir be- poia de recourir à Particle pour en faire des

4.8 Principes

ooms d*indîvidus , puisque par eux-mêmes iis ne sont que cela.

II eu est de même des êtres inanimés aux- quels on adresse la parole. On les voit , ces êtres , puisqu'on leur parle : ils sont pré- sens au moins à l'imagination. On n'a donc . pas J;)è$oin d article pour les tirer de la g^« néralité de leur espèce , et en faire des in<* dividus.

Coulez y ruîiseaa , coalez^ fayez-nons.

Hélas , petits moutons t'^® vous êtes heureux !

Fille des piaisirs, triste goutte (i). ,

Cependant , quand on veut appeler ua homme ou une femme du peuple qui passe ^ on dit communément^ ï homme , la femme; écoutez la belle Jîlle , la belle enfant , etc. Je crois qu*alors il y a ellipse : Ecoutez cous qui êtes la belle Jille , etc. Vous qui êtes V homme à qui je ceux parler , etc. Nous ne mettons pas l'article , sur-tout de- vant les noms propres personnels : Pierre j J\Iarie , Alexandre, César ^ etc. Voici quel- ques remarques à ce sujet.

(i) Deehonlières,

l. Si

de Grammaire, 45

I. Si par figure on donne à un nom propre une signification de nom d*espèce , et qu*oa applique ensuite cette signification , alors oa aura besoin de l'article. Par exemple , si vous donnez au nom i^ Alexandre la signi- fication A^ conquérant ou>de héroê y voua dires .que Cliarles XII a été V Alexandre de flotte sééole. C'est ainsi qu*on dit les dcérons , les Démosthènes ; c'est-à-dire , les grands orateurs , tels que Ccéron ec Démosthènes. Les Virgiles , c'est-à-dire ^ les grands poètes.

I><>ae8tle nom du souverain Etre. Mais si par rapport à ses divers attributs , on en fait: une sorte de nom.d*espèce , on dira , Le Dieu de miséricorde ; le Dieu des Chrétiens ^ etc.

IL II y a un très-grand nombre de noms propres^ , qui dans leur origine n'ëtoient que des noms appellatifs. Par exemple , Ferté qui vient par syncope de J'ermeté ^ signi- Sott autrefois citadelle. Ainsi ^ quand oa vouloit parier d'une citadelle particulière , on disoit la Ferté d'un tel endroit : et c'est de-lk que nous viennent la Ferté-Imbault ^ la Ferté^Milon , etc.

Mesnil est aussi un vieux mot ^ qui si- gnifioit maison de campagne '^ . village , du

C

So Principes

latin Monile et Masniîe dans la basse la» tinitév C*est d^-là que nous vienotnl les noms de tant de petits bourgs appelés le MesniL 11 en est de même de ïe Mans , le Perche , etc. Le Câteiet , ejest«à->dire , le pe tu château i le Quesnoi ^ ÂX^éioit un lieu planté de Chênes ; le ché prononcé par à la manière de Picardie , et des pays cir^ convoisios.

Il y a aussi plusieurs qualificaitifs qui sont devenus noms propres d*hommes , tels que le Blanc , le Noir, le Bmn^ le Beau , le Bel\^ le Blond^ etc. . et cels noms conservent leurs prénoms, quand on parle delà femme. Madame le Blanc -^ c*est-à-dire , femme de Jtf . le Blanc^

III, Quand on parle de certaines femmes , on se sert du prénom la , parce qn*il y a un nom d*espèce sous-entendu. La le Maire , c'est-à-dire , V actrice le Maire. ' IV. C'est peut-être parla méme^raison qu'on dit , Le Tasse*>^ VAri^ste^ le J^ante , en sous-enteûdant poète } et qu'on -dit le Titien , le Carache , en sous - entendant peintre \ ce qui nous vient des Italiens.

Qu'il me soit permis d'observer ici que l^% noms propres de famille ne doivent çtte

de Grammaire, 5r

précèdes de la préposition de^ qae lors- qu'ils sont tirés de noms de terre. Nou^ayons en France de grandes maisons qui ne «ont coonaes que par le nom de la principale terre que le chef de la maison possédoîc ayantque les nomspropres de famille fussent en usage. Alors le nom est précédé de la« préposition de ^ parce qu*on sous-entend sire , seigneur^ duc , marquis , etc. ou sieur d^un tel fief. Telle est la maison de France , dont la branche d*aîné en aîné n'a d'autre nom que France *

Nous avons aussi des maisons très-illustres et très -anciennes , dont le nom n'est point précédé de la préposition de ^ parce que ce nom n'a pas été tiré d'un nom de terre. C'est un nom de famille ou maison.

Il y a de la petitesse à certains gentils- homfiies d'ajouter le de à leur nom de fa- mille \ rien ne décèle tant l'homme nouveau et peu instruit.

Quelquefois les noms propres sont ar-* compagnes d'adjectifs ; sur quoi il y a quel- ques observations k faire.

I. Si l'adjectif est un nom dencTmbre or« dînai ^ tel que premier ^ second^ etc. et qu'il suive immédiatement son substantif, comme

C 2

5a 'Ei'iricipes

faisant ensemble qu'u* même t6i;it y alors on ne f^it aucim^ usage de rarlicle. Ainsi oa ànyFrançoisI ^ Charleà,JIj Henri'iV, pour quatrième, '^

II. Qiiand qn se sert de radjcctif pour marquer une simple qualité du substantif ifu'il précède , alors Tarticle est mis avant l'adjectif. Le savant Scaliger ^ le galant O^'lde,

III. De même , si Tadjectif Q*est ajouté que pour distinguer le substantif des autres qui portent le même nom , alors l'adjeclif suit le substantif, et cet adjectif est précédé derariicle. Henri le Grande Louis le Juste^ etc. oîi vous voyez que le tire~ Henri et Lo^is ) du nombre des autres Henris et des autres Louis > et en fait des individus parti- culiers ) distingués par une qualités péciale.

IV. On dit aussi avec le comparatif et avec le superlatif relatif, Homère , le meil-- leur poète de l* antiquité; Vairon j, le plus sat^nnt des Romains,

Il paroît, paroles observations ci-dessus, que lorsqu'à la simple idée du nom propre o(i joint quelqu*autre idée, ou que le nom d^ns sa première origine a été tiré d*ua nptn , ou d'un qualificatif qui a été adapté

de Grammaire 53

\ un objet particulier, par le chaD^emcnc de quelques lettres , alors ou a recours i\x prépositif, par une suiie de la première origine. C'est ainsi que nou5 disons le para" dis t n)Ot qui à la lettre signifie un jardin |»)ànté d*arSres q;ui portent toulofN» sortes d'çxcellens fruits, et par exten^on un liou de délices. i,

L'eiifer, c*fst un lieu bas , d'injerus. Via tTifera, la rue d'enfer, rue inférieure par rapport h une autre qui est au-dessus.

L'uniçerSj uniçersus orhis; l'être uniiferm sel; Vassemi^lage de tous les êtres créés.

Le monde , du latii| mundus, adjectif qui signifie propre, élêganl, mjuêté ^ parê^ et qai est pr^s ici substantivement. Les Pa'icns, frappés de Téelat des* «MreS y et de rôrcTre qui leur p^roissoit régner dans l'univers, lui donnèrem^n ao|p ti^é de celte beauté et i^ cet ordres ^ - ' *

Mundks est ^core prit tubstantivemertt , lorsqu'on dît Sfundus muUebris, la loilclie des dames, oit sont tous les peiits meubles dont elles se servent poui* se rendre plii^ prj^pnes, plus aju&t^ûi, plus séduisantes. Letiiot grec x;<^«? ? qui signifie ordre, orne^ ment, beauté, répond B^muridusà^s Latins,

C 3

54 Principes^

Le soleil, de.solus ^ selon Cicëron , parce que c*€st le seul astre qui nous paroisse aussi grand; et que lorsqu'il est levé, tous les autres ilisparoissent h nos jeux.

La lune ^ à lùcendoy c'est» à*dire^ la pla- . nète qui nous éclaire-) sur - tout en certains temps pendant la nuit. Sol^ çelguia solus ex omnibus slderibus est tantifs , çel quia cim " exortus^ obscuratis omnibus^ soins apparet, Luna à lucendo nominata; eadem est enim X>ucina (i).

La /72fr,c*est-f«dire, Z'ea« amère. Proprîè mutem Mare appellaiùr^ io quod aquçe ejus ^ mmarœ sint (a).

La terre,- c'est-k-dire , Vêlement sec , da grec re/(« sécher^ et au futur second r«^«. Aussi voyons-nous qu'elle est appelée Arida dans la Genèse, ch, l, ç. 9t* ^^ ^^ saint Mathieu, ch, ^3, P. i5. Cirouiiis mare et - aridam. Celle étymologie me parott plus na- turelle que celle que Varron en donne. Terra dicta eo quod teritur(3)»~ -

Elément est donc le nom générique de

(i) Cicéron, tU Natura D^orum^ ]. a, e. 37.

(a) Isidore. A i3. c. 14.

(3) Varron deLingua latina, XKf 4*

de Grammaire. 55

quatre espèces , qui sont \ejeii, l'air, l'eau ei la terre.

DES NOMS DE P^YS.

Les noms de pays, de royaumes, de pro- vinces, de montagnes, de rivières, enlrent souvent daos le discours sans article , comme noms qualificatifs , le royaume de France , d'Espagne ^ etc. En d'autres occasions , ils prennent Tarticle , soit qu*on sous - entende alors terre f ou région^ P^y^ ^ montagne ^ Jleuifc ^ rhière y vaisseau ^ etc. Ils prennent sur-tout l'article quand ils sont personnifiés : l'intérêt de la France; la politesse de la France.

Quoi qu'il en soit, j*ai cru qu'on seroît bien aise de trouver dans les exemples suivansy quel est aujourd'hui Tusage a Tëgard de ces mots, sauf au lecteur h s'en tenir simplement « cet usage I, ou k chercher k faire Tapplica- tion des principes que nous avons établis , s*il trouvfB qu'il y ait lieu.

c +

5fi

Noms propres em^ plnyés seulement ai>ec une préposi^ iion sans l'article.

Hoyaume de FaUnce.

Islt de Candie,

noyau me de France , etc.

ïl vient de Pologne, Il est «lié en Perse ^ en Suède y etc.

II est revenu d'Espagne , de Perse , d*Afri<jue , d'Asie^ etc.

XI demeure en 'Italie^ en France, et à Malthe y à Rouen , à Avignoh (i), etc.

Xef modes, lei vins de France, les vins deBour- gogne y fe Champagne , de Bofjdéauxj.de Tokay,

V'

Principes '

Noms propres ployés affcc l'arii^ de.

Il vient de Flandre, A mon départ d'Allemagne, L'Empire d'Allemagne. Chevaux d' Angleterre ^der Barbarie, etc.

La France, L'Espagne,

L'Angleterre. La Chine, Le Japon,

Il vient de la Chine ^ du Japon y de l'Amérique ^ du Pérou,

Il demeare au Pérou ^ au •Japon , à la Chine , aux Indes, à VUU St,'Do*

mingue.

La politesse de la France,' L'intérêt de l'Espagne. On attribne à l'Ai/ema"

gne l'ii^ention de l'Im-

prhnene* ;

<

Le Mexique, le PÀrou^ les Indes,

Le Maine, la, Marche ^ le Perche,' le Milanea*, fe Mantouan , le Par-' mesan, Yin du Rhin,

ïl vient fie la Flandre

Françoise, La gloire de l' Allemagne

(i) Les* Laagnedociens et les Provençaux disent en Avignon, pour éviter le baillein^nc. C'cit une fautv

ée Cramjnaire. Sj

On dit par oppositiou, le Montf^P amasse, h Mont^Valérien j etc. et on dit la montO'^ gne de Tarare, On dit lejleuçe Don, et la riçière de Seine: ainsi de quelques Entres ^ fur qqkoi nous renvoyons a Tusage^

RgMi^RQUES SUR CES PHRASES.

t*' Il a beaucoup d'argent; il a bieij^âe far^ ^ent: a,° tl i$ beaucoup d'argent; il n'm

pêfni <f argent, ^

I. L'or » l'argent, l'esprit, £tc. peuvent ^tre considérés, ainsi que nous l'avons ob- servé , CQmmti des 'individus spécinques. Alors , chacun de ces individus est regardé comme ijn tout ,.dont on peut tirer une por- tion. AiûSi , Il a de Targent^ c'est lia une portion de ce tout qu'on appelle argent^ es^ prit, etc. La préposition det%l alors eXtensive d'un individu, comme la préposition latine ex ou de. Il a bien de V argent^ de l'esprit , etc. C'est ainsi que Plaute dit , Credo ego illic inesse auri et argenti largiier,

II. A regard de // a beaucoup d'argent ^ d'esprit, etc. : il n'a point d* argent, d'esprit, etc. ; il faut observer que ces mots beaucoup^

peu , pas , point ^ rien , sorte , espèce , tanî^

C ô

St Principes .'

moins , plus , que lorsqu'il Ttent de quantum^ comme dans ces vers ,

Que.de mépris toos tTez 1*911 p»ur l'antre I

Et qae TOQS avez de raison !

* >

ces mots, di's-je , ne sont point des adverbes» ils sont de véritables ^oms, du moins dans leur origine ; et c*est pour cela qu*ils sont modifiés par un simple qualificatif indéfini, qui n^étant point pris individuellement , n*a pas besoin d*article/Il ne lui faut que la seule préposition pour le mettre en rapport avec beaucoup^ peu^ point ^ pas^ rien, sorte^ elc«

Beaucoup vient, selon Nicot, de bella^ id est, bona et magna copia; une belle abon^ dance, comme on dit une belle récolte^ etc. Ainsi, d'argent^ d'esprit y sont les qualifia catifs de coup ^ en tant qu*il vient de copia. Il a abondance d'argent , d*esprit , etc.

M. Ménage dit que ce mot est formé de l'ad- jectif ^f^u, et du substantif cou/;. Ainsi quel- qu'étjmologie qu'on lui donne, on voit que ce n*est que par abu qu*il est considérécomme un adverbe. On dit, 1/ est meilleur de beau^ coupy c*est«a-dire, selon un beaucoup: vous voyez que la préposition décèle le substantif.

Peu , signifie petite quantité. On dit le

de Grammaire* 5^

peu , MTi peu y- de peu^ à peu , quelgue peu. Tous les analogisies soutiedoent qu*ea laiia avec parum , on soos-entend ad pu per , e( qu'on dit parum^per ^ corame on dit te^cum^ ten mettant la préposition après le nom. Ainsi nous disons un peu de pin^ comme les Latins disent /7âm/n çinL En sorte que comme çini qualifie parum substantif, notre de if in qua- lifie peu par le moyen de la préposition de.

Rien vient de rem , accusatif de res. Les langues qui se sont formées du latin , ont souvent' pris des cas obliques pour en faire des dénominations directes ; ce qui est fort ordinaire en italien. Nos pères disoiem, sur toutes riens (i) ; et dans NicoC, Elle le hait sur tout rien , c*est-^-dire , Sur toutes choses. Aujourd'hui rien, veut dire aucune chose. On sous*enteod la négation, et on l'exprime même ordinairement : Ne dites rien^ nefaites rien. On dit, le rien çaut mieux que le mauçais. Ainsi, rien de hen^ ni de beau ^ c'est aucune chose de bouj etc.

De bon ou de beau , sont donc des quali* ficatifs de rien; et alors de bon ou de beau étant pris dans un sens qualificatif de sorte

(i) Melittii»

C 6

}

66 Ptint^pés

ou d^espece, ils^n*oitt point r*rtîcle. Au lîea que si Von preodit bon ou ^«a» individoelle- . ment, ils seroient précédés d*uD préaom- beau cous touche; j'aime le vrai^ étc«

Nos pères , pour exprimer le sens négatif, se servireai d*abord ^ comme en latin , de la «impie négative ne: Sachiez nos ne penismes por ços mal J'aère ,(^\). Dans la suite, pour donner plus de force et plus d'énergie à la négation , on y djouta quelqu'un des mots qui ne marquent que de petits objets, tels que grain , goutte , mie ^ brin , p^% point; Quia res est minuta , sermoni t^ernaculo additur ad majoremlegatiofum (a). 11 y a toujours quelcpe hwt de sous -< entendu en ces occasions : Je n'en ai grain nmgoute: Je n'en ai pour la çaîeur ou la grosseur d'un grain , etc. Ainsi quoique ces iQOts servent^ à la négation , .Is n'en sont pas moins de vrais substantifs^ Je ne ceux pas ou point; c*eH* SI -dire, Je ne veux cela même de kt lon^ gueur d'un Pa3 , ni àe la gro^ur d'un Point. Je n'irmi point: c'est comme si je dis ois: Je ne Je rai un Pas pour y aller;

(t) YiDehardoom , pag. 4€. <a) Nicot; au mot QQUtf^

de Grammùire* 6i

Je ne m 'ai^ancerai d'un Point : Quasi dicas^ dit Nic^t , ne punctum guident progrediar uteam ///d. C'est ainsi que mie^ dans le sens de miette de pain , s*employoit autrefois avec la particule négative: Il ne taura mie: Il n'est mie un homme de bien : Ne probitaiis quidem mica in eo est (i). Cette fa çoa .de parler est encort^ en usage en Flandre.

Le substantif brin^ qui se dit au propre des menus jets des herbes , sert souvent par figure à faire une négation , comme pas et point. El si Tusagfi de ce^ot. étoit aussi fréquent parmi les honnêtes gens ) qu'il l*esl: parmi te peuple, il sêroit regardé , aussi-bien que pas ci point <^ comme iHie particule né^ gative: A^t-il de V esprit î il n'en a brin» Je ^f l'ai çu qu'un petit hrui^ et^

On doit^gar^er nep^s , nepQint^ comme le nihil des Latins^ tHhil^st composé- de la négatioa ne^ et du mot hilum qui signifia la petite marque noire qct\>Q voit au b.out d'une .fève. Les Latins disoient: Hoc nos- neçue pertinet hilum (2). Cela ne nous intéresse en rien , pas même de la valeur de la petite

«

(i) Jificot, «a met Goutte^ (a) Lafrèc«, Ity, S. v. 849.

marque noire d'une Sève* Neque prnficit hilum^ etc.

Or, comme dans la snite le hilum des Latins s'unit si fort avep la négation ne^ que €«s,deui mots n*en firent plus qu'un seul nihilumy nihil^ nil, et.qve nihil se prend souvent pour le simple non: NihH- circuiiione usus es (i)^ de même noivt pas et noirt point ne sont plus regardés dans Tusage , que comme des particules négatives qui accom« pagueiit la négation ne; mais qui ne laissent pas de conserver toujours des marques de leur origine.

.Or y comme en latin. Tii^iV est souvent suivi d'un qualificatif, mhiljalsi dia^i , mi sene» (2), nihil incommodiy nihil gratice ^ nihU lucri ^ nihil sanctiy etc. de même le pas et le point étant, pris pour une très-»petite quan- tité , pour un rien ,■ s#nt suivis eiT françois d'un qualificatif: Il n'd pas de pain^ d'ar^- gent y d'esprit y 9tc<..ees novas pain , argent ^ esprit y éi9Lnt alors des qualificatifs indéfinis » ils ne doivent point avoir de prép«>sitif.

Les Latins disoient aussi , Ne faire pas

(0 Tér«iice. >• . . .

(a) Idem,

de Grammaire. 63^

plus de cas de quelqu'un ou de quelque chose^ qu*oQ n*ea fait de ces petits flocons de laine ou de soie que le vent emporte, ^occi^^c^r^, c'est-à-dire )^/ac^re remjlocci; nous disons iinfétu*

La. Grammaire générale dit ( 82 ) , que -dans le sens affirmatif , on dit avec Tarticle , // a de l'argent y du cœur^ de la charité ^ de Vambition; au lieu qu*on dit négative- ment sans article: Il n'a point d'argent ^ de cœur y de charit^ d^ ambition ^ psiTce que, dit- on, le propre de la négation est de tout 6 ter.

Je conviens que selon le sens , la négation âte le toutdela chose; mais je ne vois pas pour* quoi dans l'expression , elle nous âteroit l'ar* licle, sans Uous ôter la préposition . D'ailleurs, ne dit - on pas dans le sens affirmatif , sans article, lia encore un peu d'argent y ei dans le sens négatif avec l'article, Il n'a pas le sou ; Il n'a plus un sou de l'argent qu'il apoit; Les langues ne sont point des sciences ; On ne coupe point des mots inséparables , dit fort bien M. l'abbé d'Olivet, Ainsi, je croîs que la véritable raison-de la différence de ces façons de parler doit se tirer du sens in- dividuel tt défini , qui seul admet l'aritcle 9

64 Principes

tt du sens spécidqae iDdé&aî et qualificatif > qui n*est jamais précédé de rartide.

Les éclaircissemens que Ton vient de donner pourront servir à résoudre les principales difficultés que Ton pourroit avoii* au sujet des articles. Cependant on croitdevôir encore ajouter ici des exemples qui ne seront poiat iuutiles dans les cas pareils.

Nonu construits sarU prénom ni préposition^ à la suite 4^ un çer$ê dont ils sent le cmM^

' plément»

m

m

Souvent un nom ej|t mi^ sans prénom ni préposition après un verbe qu*il détermine; ce qui arrive en deux occasions : l.* parce que le nom est pris alors dans on sens indé« liai, comme quand on dit, Il aime à faire plaisir , à rendre service-; car il ne s'agit pas alors d*un tel plaisir , ni d*un tel service particulier \ en ce cas on diroit , faites-moi ce ou le plaisir ; rendez -moi ce service , ou le service^ ou un serçice ^ qui, etc. 2.0 Cela se fait aussi souvent pour abréger^ |$ar eAipse , ou dans des façons de parler familières et proverbiales ; ou enfin , parce que les deux mots ne font qu'une sorl;è de ddol composé :

de Grammaire» 65

ce qui sera facile^ démêler daus les exemples suivans :

Avoir faim ^ soif, dessein^ honte ^ coU'* iume^' pitié , .compassion , froid ^ chaud ^ mal^ besoin , part au gâteau , ençie ^ etc.

Cherche s: fortune^ malheur.

Cou RI & fortune ^ risque»

Demander raison^ çengeance ^ grâce ^ pardon , Justice,

Dire çrai^faux , matines , çêpres,

DoHSER prise <iJour^ parole^ apis , ctf»- iion , quittance , qttsinte , etc«

Echapper, Il l* a échappé belle ; c*est-a- à\T^ ^^eu s' eh est fallu qu'il ne lui soit arrivé quelque malheur.

Entendre raison , raillerie , malice pépres ^ etc.

Faire pie qui dure^ bonne chère ^ entfie |

corps neuf réflexion ^ honte y honneur ^ P^^^%

plaisir<f cas de quelqu'un , alliance ^ marché ^

argent de tout^ provision ^ setnblant y route ^

front y face , difficulté.

Gagner pays , gros, ^ "^Mettre ordmjjin.

Parler tarait raison^ bon sens^ latin ^ françois j èic* * :♦

66 Principes

PoRTXR enpie^ témoignage^ Cffup, bon" heur y malheur^ compassion,

P&SNJORE garde ^ patience^ séance^ mé^ decine^ congé ^ conseil^ langue ^ etc»

Rendre îertnce , amour pour agpour^ pi- site , gorge , etc.

SArom lire , vivre , chanter , etc.

Tenir parole , prison , bon ^Jerme»

Ces adjectifs sont pris adverbialecnent.

Noms construits açec une préposition sans

artiché

Les noms d*es|>àce qai sont pris selpn leur simple sigDÎficatioj] spécifique , se cons- . truîsent avec uae préposition sans article.

Changez ces pierres en pain. L* éducation ^ue le père d'Horace donna à sonjils est digne d'être prise pour modèle. À Romcj à Athènes j à bras ouverts. II. est arripé ^ bon port, â minuit. Il est à jeun. A Dimanche , à Vêpres, Tout ce que V Espagne a nourri de vaillans. Vivre sans pain. Une livre de pain. Il 71 a pas de pain. Un. peu de pain. Beaucoup ,de pain. Une grande quantité de pain.

J'ai un coquin de frère ^ c'est-à-dire, qui

de Grammaire* €'J

est de l'espèce de frère, comme on dit , quelle espèce d'homme êtes^çous l Térencc a dît , Quid hominis , et ailleurs , Quid monstri.

RçmarqaeE que dans ces exemples, le qui ne se rapporte point au nom spéciiique , mais au nom individuel qui précède. C'est un bon homme de père qui; le qui se rapporte à bon homme»

Se conduire -par sentiment; parler at^ee esprit, açec grâce ^ at>ec facilité ; agir par dépit ^ par colère, par amour, par faiblesse.

En fait de physique , on donne souvent des mots pour des choses. Physique est pris dans un sens spécifique qualificatif de fait, A regard de on donne des mots, c'est le sens individuel partitif. Il y a ellipse; Le régime ou complément immédiat du verbe donner ta ici sous ^ entendu : ce que Ton entendra mieu]( par les exemples suivansi

Noms construits açec l'article ou prénom

sans préposition.

C0 que j'aime le mieux ^ c'est le pain , (individu spécifique). Apportez le pain; yQÎWle pain qui est le complément immédiat

C8 Principes

ou régime namrel du verbe. Ce qui fait voir (|U£ quaud ou dit^ apportez ou donnez^ mol du pain j alors il y a ellipse. Donnez-^ moi une portion , quelque chose ^ du pain* C*est le sens individuel pariitif* -

Tous les pains du marché j ou Collecti- vement y Tout le pain du marché ne suffiroit pas pour f elc. ^

Donne z-^moi un pain. Emportons quelques pains pour le tioy âge.

Noms construits açec la préposition et

l'article,

t^onneZ'-moi du pain ^ c'est-à-dire , de le pain. Encore on coup 9 il y a ellipse dans les phrases par<|j;lles. Car la chose donnée se joint a^ui verbe donner sans le seci^urs d'ua^ prépositi<ra« Ainsi ^ donnez - moi du paif^-, c'est do^ie^moi quelque chose de le pain ^ de ce tout spécifique individuel qu'on appelle pain* Le nom^te des pains que cous ai^ez apportés n'est pas suffisant.

Voilà bien des pains , de les pairH ; indl- yiduellenicnt , c'est - à - dire y considérés comme faisant chacun un être à part.

de Grammaire. ffg

Remarques sur l'usage de V article , quand l'adjectif précède le substantifs ou quand il est après le substantif,

m

Si un nom substantif est employé dans 1^ discours avec un adjectif, il arrive ou que Tadjectif précède le substantif , ou qu'illc suit.

L*adjectif n*est séparé de son substantif quft- lorsque le substantif est le sujet de la prépositiofl , «et que Tadjectif en est affirmé dans Tattribut. Dieu es4 le Tout -^ puissant» Dieu est le sujet; tmit-puissant^ qui est dans Tattribut, en est séparé par le verbe est^ qui selon notre inanière' d'expliquer la proposi- tion , fait partie dcf Tattribut. Car ce n*est pas seulement tout ^ puissant que je juge de Dieu ; j*en juge qu'il est , qu*il existe tel.

Lorsqu'une phrase commence par un ad-^ jectif seul, par exemple, Sapant en l'art de régner , ce prince se Jit aimer de ses sujets et craindre de ses çoisins\ il est évi- dent qu'alors on sous<entend , ce prince qui était savant ^ etc. Ainsi sapant en l'art de régner^ cst^ane proposition incidente , ira- pliciie , je veux dire , dont tout les mots ne

yo Principes ^

sont pa$ exprimés. Ed réduisant ces propo- sitions à la construction simple ^ on voit qa*il n*jr a rien contre les règles ; et que û dans la construction usuelle on préfère la. façon de parler elliptique, c'est que l'ex- pression en est plus serrée et plus vive.

Quand le substantif et Tadjectif font en- semble le sujet de la proposition ^ ils forment un tout inséparable. Alors les prépositifs se mettent «vant celui des deux qui commence la phrase. Ainsi on dit :

I.* Dans les propositions universelles : Tout homme , chaque homme ^ tous les hommes , nul homme , aucun homme.

2.* Dans les propositions indéfinies : Les Turcs , les Persans , les hommes saçans, les savons philosophes.

3.® Dans les propositions^ particulières: (Quelques hommes , certaines personnes sou^ tiennent , etc. Un saçant m'a dit; des sa^ çans ni ont dit^ en sous-enlendant quelques- uns , aucuns, ou de savons philosophes^ en sous-entendant un certain nombre , ou quelqu'autre mot,

4»o Dans les propositions singulières : he soleil est levé : la lune est dajts son plein ; cet homme , cette femme , ce liPte.

âe Grammaire, ^1

Ce que nous venons de dire des noms qui sont sujets d'une proposition , se doit aussi entendre de ceux qui soqt complément immédiat de quelque verbe ou de quelques prépositions : Détestons'ieus les çices , pra-* tiquons toutes les çerius ) etc. Dans le ci-el ^ sur t(^ terre ^ etc.

J'ai (|iit le complément immédiat : j'en- tends par-là tout substantif qui fait un sens avec un verbe ou une préposition, sans qu'il y ait de mot sous-entendu eutre Tun et L*auUre* Car quand on dit , Vous aime» des ingrats , des ingrats n*est pas le complé* ment immédiat de aimez, La consiruction .entière est yous aimez certaines personnes ^ gui sont du nombre des ingrats , ou quel-» ques'uns des ingrats , de les ingrats. Ainsi des ingrats énonce une partition ; c'est un sens partitif» Nous en ayons souvent parlé.

Mais dans l'une ou dans l'autre de ces deux occasions^ c'est-à-diré , i.° quand Tadjectif et le substantif , sont le sujet de la propo* sltion, 2.^ ou qu'il sont le complément d'un verbe ou d'une préposition, en quelles oc« casions faut- il n'employer que cette simple prépositiDQ , çt eu quelles occasions faut^

7* Principes

îi y joindre Tarticle , et dire du on de le ^ et des ) c'est-à-dire , de les ?

La Grammaire générale dît ( page 54 ) qa*ap£77i/ les substantifs on dit Des , des animamx ,,e\. qu'^n^/^ De quand V adjectif précède ^ de beaux lits.

Mais cette règle Q*est pas génërale*. Cêr dans le scas qualificatif iDdéfini os se sert de la simple préposition de y même devant le substantif, sur-tout quand le nom qua- lifié est précédé du prépositif un^ et on se Sert de des ou de leSj quand le m6t qui qua- lifie est individuel: Les lumières des philo'^ sopIiL s anciens j ou des anciens philosophes»

Voici une liste d'ejLcmples, dont le lec- teur judicieux pourra faire usage, et juger des principes qui nous avons établis.

tes OQrrage« de Cîcéron sont p'eins des idée.% les plus saines, (de lesiclê«8.)

Voiià idées dans le seaa iodividael,

Faites-TOus de» princi- pes,

Cest le aena individuel.

t5éfa^ tes TOUS des préju- gea de renfvKce.

I Les oovrsges de Cîoêron sont pleios a idées saines»

idées sa. tes est dans la sens spécifique indéfini ,. général de sorte.

Nos connoissances doi- vent être tirées de princi- pes évident.

^ens spécifique : voas vovez qae le substantif précède.

N'avez - vous point de^ préjugé sur cett* question.

Cet

Cet urbre porte fruits excelUns,

htA espèces (lîfférentet des arummux qaî sont sur la terre, (sens îndividueî universel. )

Entrez dune le xlétai des régies ë'one saîne dh- Iflctîque,

de Grammaire.

des

7^

Cw raisons aon t des con- jectures bien folbles. ' Faire des mots nouveaux^

Choisir des fruits excei- îens.

Chercher ^/eJ détours.

Se «<»rvir des termes éfa- blîs p«r Tusage.

Eviter Tair de Vfiffec- tation. ( sens individuel métaphysiqae. )

Charger 'Sa mémoire ^«j phrases de Cicéron.

Di&coiiis soutenas par des expressions fortes.

Plein des sentimeru les p!ai beaux.

Il a recueîni des précep- tes p9iir la langue et pour 'la morale.

Servez vom des signes dont nous sommes con- yeuus

Le choix des étudei»

Lei connoîiuocea ont

Cet arbre porte d'éxcel» /ens fruits, (sens de sorte.)

Il y a différentes espèces d'animaux sur la terre.

Différentes sortes d& poissons, etc.

Il entre dans un grand détail de règles frivoles.

Voilà le substantif qui précède. C'est le sens spé- cifique indéfini. On ne parle d'aucunes règles par* ticuiières. C'e^t le sens de sorte.

Ces raisons sont defoî» blcs conjecturer.

Faire de nouveaux mots. Choisir d'excellent fruits.

Chercher de longs dé" tours p ur exprimer \e% choses les plus aisées.

Ces exemples peuvent servir de modèles,

Evitez tout ce quî'a nn air d'affectation»

Charger sa mémoire de phrases.

Discours soutenus par de 'vi\>es expressions.

Plein de sent'/nens.

Plein de grands sont(r. mens.

Recueil de précepte* pour la langue et pour mor«le.

Nous sommes obli^é^ d*user de signes e'xXhùi^wtm pour ne us faire entendre.

Il a fait un choix de H" vres qui sont, etc. ' C*6St un sujet d'estime ^

74

Principes

toujours été Tobjet de tes- time , dêi louanges et de ^'admiration dethommea.

Les richesses de ]*cspric ne peuvent être acqutjes qae par l'étdde.

^Lea biena de la fortune font fragiles.

L'enchahffement des •preuves fait qo*eIle8 plai- sent et qu'elles p«raa«- dent. .

C'est par la nCédîtation sur ce qu'on lit quVn ac- quiert des counoistances nouvelles»

Les arantages de Ia mé" moire,

La mémoire des faits •st la plus brillante.

de louanges et d'admira» tion.

Il y a an Pérou une aboa> dance prodigieuse de ri' c^' estes inutiles^

Des biens de fortune*

Il y a <3ani ce livre oa admirable enchavnemeDt de preuves solides* (sens de sorte. )

Cest ptr Ta 'màditatioa qu*on acquiert de nouvel- les connoissanceSm

"Lit mémoire est tré- lOT de l'esprit f\e fruit de /'attention et de la réfle- xion. - ^

Le but des hons maîtres doit être de cultiver Tea- prit de leurs disciples.

On ne doit proposer des difficultés que pour faire triompher la vérité.

Le goût des hommes est •ojet à àti vicissitudes*

Il n*a pas besoin de la Jeçon. que voua voulez lui 4oiiner«

II y a différentes sortes de mémoire.

Il n^a qu'une mémoire de faits f^tx n* retient au- cun raisonnement.

Présence d'esprit. La mémoire d'esprit et de raison est plus utile que les autres aortee de mé- moire.

Il a un air de /luUtre qui dioque.

Il a fait un recueil d^ difficultés^ dont il cherche ia solution.

Due société d*hov%mes choieis: (d'h6mn%es choi' sis qualité la sociéié adjec- tivement. )

César n'eut pas besoin d'exemple.

U n'a pa« beaoiç d^ fe» (ons^

'\

et Grammaire» '75'

4

Remarque,

Lorsque le substantif précède) comme il ftigaiiîe par lui-même ^ oa un être réel ou a a être métaphysique considéré par imita- tion ^ è la manière des êtres réels, il pré- teate d'abord à J'espnt une idée d'indivi- dualité d*être séparé existant par lui-même; au lieu que lorsque Tadjectif précède, il offre k Tesprit une idée de qualification , une idée sorte, un sens adjectif. Ainsi Tarti- cle doit précéder le substantif: au lieu qu'il suffît que la préposition précède Tadjectif , à moins que radjectif ne serve lui-même avec le substantif à donner Tidée indivi- duelle , comme quand on dit : Les saçans hommes l'antiquité ; le sentiment des grands philosophes de l'antiquité , des plus saçans philosophes. On a fait la des^ cription des beaux lits qu'on envoie en Poriugàl»

Vt

'pt . Principes

RÉFLEXIONS SUR CETTE RÈGLE de ]\f. de Vaugelas.

Qi/on ne doit point mettre de reîatij^ après un nom sans article,

L'Auteur de la Grammaire générale a tiamiaé cette règle (Il partie y. cà. io ). Cet Auteur paroît la restreindre à l'usage présent de notre langue. Cependant, de la maoière que je la conçois , je la crois de toutes les langues , et de tous les temps.

En toute langue et en toute construc* tion, il y a une juslesse a observer dans remploi que Ton fait des signes destinés par Tusage pour marquer non -seulement les objets de nos idées , mais encore Us diiTërentes vues sous lesquelles Tesprit con- sidère ces objets. L'article, les préposi- tions y les cou jonctions , les verbes avec leurs différentes inflexions, enfin tous les mots qui^ne marquent point des choses, D*ont d*autre destination que de faire conf noître ces difiPéreutes vues de Tesprît,

D'ailleurs , c'est une règle des plus commu-r nés du raisonnement , que lorsqu'au com- mencement du discours on ci. donné k un

de Grammaire. 7y

mot une certaine sigoiAcation , on ne doil pas lui en donner une autre dans la suite da nvème discours, llanestdemêmeparrappocc au sens grammatical. Je veux dire ^ que dans la même période , un mot qui est au singulier dans le premier membre de cette période , ne doit pas avoir dans Tautre membre un corrélatif ou adjectif qui le suppose au plu-- riel. En voici un exemple lire de la Princesse deOèf/es,(^iom,2^ p. II9): M. de Nemours ne laissoit échaper aucune occasion de çoir* Madame de Ciéres , sans laisser paroître Tiéanmoins qu'il les cherchât * Ce les du se- cond membre étant au pluriel , ne de voit pas être destiné à rappeler occasion^c[ai est au sin- gulier dans le premier membre de la période. Par la même raison , si dans le premier membre de la phrasé ^ vous m'avez d*abord présenté le mot dans un sens spécifique | c'est-à-dire, comme nous Tavous dit , dan$ un sens qualificatif adjectif , vous ne deveill pas 9 dans le membre qui suit, donner à ce mot un rela(if , parce que le relatif rappelle toujours Tidéed'une personne ou d'une chose, d'un individu réel ou métaphysique , et jamais celle d'un simple qualificatif, qui n'a aucune

D 8

yB Principes

existence ) et qai <ii*est qae mode. C'est nnî- quenieot à on substantif, on à on adjectif considéré comme substantif, et non comme mode , que le qui peut se rapporter. L'anté- cédent de qui doit être pris daoa le même sens , aussi - bien dans tome Téteudae la période, que dans toute la suite da syllogisme.

Aiasi, quand on dit, Il a été reçu aifcc politesse j ces deux mois, at^ec politesse t.soiii une ^pression adverbiale, modificaiive, adjective , qui ne présente aucun être réel ni métaphysique. Ces roots at^ec politesse ne marquent point une telle politesse indiîi- duelle. Si ▼ous voules marquer une telle poli- tesse, vous avez besoin d'un prépositif qai donne k politesse un sens individuel, réel, soit universel , soit particulier , soit singulier ; alors le qui fera son office*

Encore un coup, apec politesse y est une expression adverbiale. C'est L*adverbe po^ liment décomposé.

Or, ces sortes d'adverbes sont absolus, c'est-à-dire , qu'ils a*ont ni suîfe ni complé- ment: et quand on veut les rendre relatifs ^ il fautajouter quelque mot qui marque la cor- rélation, lia été reçu si poliment quCj etc. ,

de Grammaire. ^g

Il a été reçu apec tant de politesse ^ que etc. : oa bien , at^ec une politesse qui , etc.

Ainsi , je crois qacf le sens d% la règle de Vaugelas est que ^ lorsqu'ea un premier mem- bre de la période un mot est pris dans uq sens absolu , adjectivement ou advérbia- lement, ce qui est ordinairement marqué ea françois par la suppression de l'article, et par les circonstances) on ne doit pas , dans le membre suivant, ajouter un relatif , ni même quelqu*autre mot qui supposeroit qu« la première expression auroit été prise dans un sens fini et iÀdividuel , soit universel, soit particuHerou singulier. Ce seroit tomber dans le sophisme que les Logiciens appellent ^ Passer de l'espèce à Vindiçidu ; passer du général au particulier.

Ainsi, je ne puis pas dire, L'hofnme est animal qui raisonne^ parce que animal, dans le premier membre, é^âht sans article , est un nom d*espèce pris adjectivement et dans un sens qualificatif. Or, qui raisonne ne peut se dire que d'un individu réel qui est ou déterminé ou indéterminé; c'est-k-dire, pris dans le sens particulier dont nous avons parlé. Ainsi je dois dire, L'homme est le seul animal, o\x un animal qui raiso?ine.

D 4

8o Principes

Far la mime raison , cm dira fort •» bien f Il n'a point de livre qu'il n'ait lu. Cette pro- position est équivalente à celles-ci : Il n'a pas un seul lii^re qu'il n'ait lu. Chaque lii^re qu'il a , il l'a lu* Il n'y a point d'injustice qu'Une commette; c'est-à-dire, Chaque sorte d'in^ justice , il la commet, Est-'il Mie dans le royaume qui soit plus obéissante ! c'esl-à- dire, Est'' il dans le royaume quelqu' autre cille , une cille qui soit plus ohéissariie que I etc. il n'y a homme qui sache cela ;' aucun homme ne sait cela*

Ainsi, c'est le sens individuel qni aotorise le relatif; el c'est le sens ^aliiicaitf adjectif ou adverbial qui fait supprimer Tarticle \ la négation n*j fait rien , quoi qu'en dise 1* Auteur de la Grammaire générale. Si l'on dit de ^uelqu*un qu'il agit en roi ^en père ^ en ami^ et qu'on prenne roi, père , ami^ dans le sens spécifique , et ^^Ipn toute la valeur que ces znots peuvent avoir ^ on ne doit point ajouter le qui. Mais si les circonstances font connoitre gu'en disant roij père, ami, on a dans Tesprit l'idée particulière de tel roi, de tel père, de tel ami, et que l'expression ne soit pas con- sacrée par l'usage au seul sens spécifique ou adverbial, alors on peut ajouter le qui. Il se

Grammaire. ht

conàuit enpère tendre qui: car c'est autant cpie si l'on disott , comme itn père tendre» C'est le sens particaliery ifxi peut recevoir ensuite une dëiermioation singulière,

// est accablé de maux , c*est-à««>dire , de rnaux particuliers , ou de dettes particu^ Hères , qui ^ etc. Une sorte de fruits qui, etc. Une sorte tire ce mol fruits de la géné- ralité du nom Jruit, Une sorte tst un indi- vidu spécifique, ou un individu colleclif.

Ainsi , je crois que la vivacité , le feu , Tenthousiasme, que le style poétique de- mande, ont pu autoriser Racine à dire ( Esther, Act. 2 , Se. 8 )- Nulle paix pour l'impie : il la cherche, elle le fuit. Mais cette expression ne seroit pas régulière en prose , parce que la première proposition étant universelle.né- gative, et nulle emporte toute paix pour rimpie, les pronoms la et elle des propo- sitions qui suivent ne doivent pas rappeller dans un sens aiHrmatif et individuel , un mot 'qui a d*abord été pris dans un sens négatif universel. Peut-être pourroit-on dire, Nulle paix qui soit durable n'est donnée auM hommes ; mais on feroit mieux de dij^: Une paix durable n'est point donnée aintù hommes.

Telle est la justesse dlesprit ^ et la précision

D 5

(

8a Princlp€$

que nous demandons dans ceux qat veulent écrire eo notre langue , et même dans ceax qui la parlent. Ainsi», on dit absolument dans un sens indéfini, Se donner en spectacle^ açoirpeur, upoir pitié, un esprit de parti, un esprit d'erreur* On ne doit donc pas ajoo- ter ensuite a ces substantifs , pris dans un seos général , des adjectifs qui les supposeroieot dans un seps fini , et en feroient des individus niétaphjrsiques. On ne doit donc point dire, Se donner en spectacle Juneste ^ ni un esprit d* erreur Jatale y de sécurité téméraire, ni açoir peur terrible. On dit pourtant açoir grand*peur , parce qu'alors cet adjectif grand, qui précède son substantif, et qui perd même ici sa terminaison féminine , ne fait qu*an même mot avec pei{r^ comme dans^ gi^nd' messe, grand' mère. Par lemêmeprin* cipe^ î« crois qu'un de nos Anteurs n*a pas parlé es^aclement, quand il a dit (t), Octa^ çien déclare en plein sénat, qu'il peut lui re* mettre le gouvernement de la république* En plein sénat est une circonstance de lien : c'est une sorte d'expression adverbiale^ ou sénat ne se présente pas sousTidée d'nnétrc

(i) Le P. Saïuidon, ^/« d' Horace ^ f. 47«

"de Grammaire* f 83

persoaoifié* X*e$t cependant ceite id^e que suppose lui remettre^ 11 falloit dire, Octaçien déclare au sénat assétnblé, qu'il peut lui re^ mettre , etc. ou prendre qoeiqu*autre tour.

Si les langues qui ont des Articles ont u^ açantage sur celles qui n*en ont point*

La perfection des langues consiste princî** paiement en deux points. i.° Avoir une assez grande abondance de mots pour suffire à énoncer les différens objets des idées que BOUS avon^ dans Tesprit. Par exemple, en latin , regnum signiBe royaume ; c'est le pays dans lequel un souverain exercé son autorité. Mais les Latins n*ont point de nom particulier pour exprimer la durée de l'au- torité du souverain. Alors ils ont recours à la périphlrase. Ainsi, pour dire, sous le régne d'Auguste, ils dis«ut Imperante Ceesare Au>^ gusio^ dcms le temps qu'Auguste régivoit. Au lien qu'en "françois nous avons royaume ^tx de plus règne* La langue françoise n'a pas toujours de pareils avantages sur la latine* 2.^ Une langue est plus parfaite, lorsqu'elle a plus de moyens pour -exprimer les divers points de yne sous lesquels notre esprit peut

D 6

^

(

S4 Principes

considérer le même ob}et. Le roi aime îe peuple ) et le peuple aime le roi. Dans cha- cune de ces phrases le roi et le peuple sont considérés sous un rapport différent. Dans la première, c'est le roi <\\i\aime; dans la seconde , c'est le roi qui est aimé* La place 'OU position dans laquelle on met roi et pea^ plcj fait connoître l'un et Tautre de ces points de vue*

Les prépositifs et les prépositions seryeni aussi à de pareils usages en françois.

Selon ces principes , il paroit qu'une lan- gue qui a une sorte de mots de plus qu'une autre , doit avoir un moyen de plus pour exprimer quelque vue fine de l'esprit ; qu'ainsi les langues qui ont des articles- ou prépositifs, doivent s'énoncer avec plus de justesse et de précision que celles qui n'en ont point. L'ar<^ ticle le tire un nom de 4a généralité du nom d'espèce , et en fait un nom- d'individu , h roi, ou d'individus ,. /e^ no/5. Le. nom sans article ou prépositif est un nom d'espèce ; c'est un adjectif. Les Latins , qui n*avoîent point d'articles ) avoient souvent recours aux adjectifs démonstratifs. Die ut lapides isti panes fiant i Dites que ces pierres da^iennent pains. Quand ces adjectifs niÉC^uant, les

\

âe Grammaire 8S

fidjumtsne sul&sent pas toujours pour mettre la phrase dans toute la clarté qu'elle doit avoir : Si Jilius Dei est , ou peut traduire ^ Si cous êtesji's de Dieu , et voilà j/î/j nom d*espèce; au lieu q^u'en traduisant Si pous êtes lejils de Dieuj.lejils est individu.

Noms mettons de la différence entre ces quatre expressions : l.Jils deroii *> /ils d'un roi; Z'Jils du roi; 4. lejils du rp- ^xxjils d9 roi, roi est un d*fîspèce , qui^ avvt ièi prépo- sition ,' n*est qu*ua qualificatif. 2. Fils d'un

m

roi; d'un roi est pris daai le sens particulier dont nous avons >parlé<, c'est lejils de quelr que{ roi, 3. Fils du rai;Jl-s est un nom d'es^ pèce ou appellatif) et roi estrun nom d'in^ dividu , Jils de le roi. 4. Lejils du roi ^ le Jih marque un individu. Filius régis ne fail pas sentir ces différences. .

EteS'Çous roiî Etes'uous le roiJ\i^Vk% la première phrase , roi est un nom appellatif : dans la seconde , roi est pris individuellement. Reop es tulne distingue pas ces diverses accep- tions. Nemo satis gratiam rcgi rejert (i) , régi peut signiRer au roi, ou à un roi.

Un palais de prince , est un beau palais

(I) Téniicfy Phorm* H, a4>

/

86 Principes

c[u*uD prîoce habite , on qu'un prince poarroit habiter décemmene. Mais ie palais du prince ( de le prince ) est le palais déterminé qu'un tel prince habite. Ces différentes vues ne sont pas distinguées en latin d*une manière aussi simple. Si ^ en se mettant a table , on demande léf pain , c'est une totalité qu'on demande : le latin dira da ou q^er panent. Si, étant à table , on demande du pain y c*e$t une portion de le pain^. cependant le latin dira également panem.

Il est dit au second chapitre de saint Ma* thîeu , que les Mages s'étant mis en chemin zn$onirdnp9i\9i)sd*l{érode^çidentessieliam, gaifisi sunt; et entrantes domum, inpenerunt puerum. Voila étoile , maison, enfant , sans aucun adjectif détermina tif. Je conviens que ce qui précède fait entendre que cette étoile «rst celle qui aVoit guidé les Mages depuis rOrient ; que cette maison est la maison que l-étoile leur indîquoit ; et que cet enfant est celui qu'ils venoient adorer. Mais le latin n'a rien qui présente ces mots avec leur détermi- nation particulière. Il faut que l'esprit sup- plée à tout. Ces mots ne seroient pas énoncés autrement, quand ils seroient noms d^spècë. N -est « ce pas un avantage de la langue frap^

àe Grammaire. 8^

çoise ) de ne pouvoir employer ces trois moU qu'avec un prépositif qui fasse conâoitre qu'ils sont pris dans un sens individuel dé- terminé par les circonstances ! Ils pirent r étoile; ils entrèrent dans la maison; et trouvèrent l'enfant.

Je pourrois rapporter plusieurs exemples , qui feroiënt voir que lorsqu'on veut s'expri- mer en latin d'une manière qui distingue le sens individuel du sens adjectif ou indéfini , ou bien le sens partitif du sens total , on est obligé d'avoir recours a quelcju'adjectif dé- monstratif, ou k qudqu'autre adjoint. On ne doit donc pas nous reprocher que nos articles rendent nos expres«it)ns moins fortes et moins serrées que celte de la la^igne latine* Le défaut de for ce et de précision estle défaut de l'écrivain , et don celui de la langue*

Je conviens que quand l'article ne serl point b rendre 4'ei:pression. plus claire, et plus précise , on devrait être autorisé b le supprimer. J'aimrrois mieux dire, comme nos pères \ Paupieté n'est pas çice , que de dire , la pauçreté n'est pas un çîce. Il y a' plus de vivacité et d'énergie dans la phrase ancienne; mais ce^e vivacité et cette énergie ne sont louables , que lorsque la suppression

88 Principes

de l'article ne fait rien perdre de la précision de ridée, et ne donne a^ucun Heu à rindéler« miaation du sens.

L'habitude de parler avec précision , de distinguer le sens individuel du sens spéci^ fiquè adjectif et indéfini, nous fait quel- quefois mettre l'article nous pouvions le supprimer. Mais n4;»us aimons mi^ux que notre style soit alors moins serré , que de nous exposer à être obscurs. Car en général , il est certain ( i) que l'article mis ou supprimé depantun nom^Jait quelquefois une si grande différence de sens , qu'on ne peut douter que les langues qui admettent V9Jl\c\e ^ n'ayent un grand avantage sur la langue latine, pour exprimer nettement et clairement cer^ tains rapports on vues de l'esprit, qi^e l'ar^ ticle seul peut désigner-, sans quoi le lecteur est exposé à se méprendre.

Je me contenterai de ce seul exemple. Ovide faisant la description des enchante-* mens qu'il imagine que Médée fit pour ra- jeunir Jason, dit queMédée(2) TecliSj nuda pedem^ egreditur.'Lts traducteurs instruits

(i) Kegaler, Grammaire , pag. iSa. (a) Jl£eiam, lib. 7, y. 1S4.

ile Grammaire. 89

que les Poètes emploient souvent un singu- lier pour un plurier , ligure dont ils avoient ' ttn exemple devant les ;yeux eu crinem irro^^ raçil aguis (i) , qui se trouvent quelques vers plus bas; ces traducteurs , dis- je, ont cra qu'en nuda pedem , pedem ëtoit aussi ua singulier pour un plurier; et tous hors l'abbé Bauier, ont traduit nuda pedem ^ par ayant ies pieds nuds.Ws dévoient mettre , comme l'abbé Banier, ayant un pied nud. C'étoit efiectiveineât Ita pratique de ces magiciens ^ dans leurs prestiges, d'avoir un pied chaussé et l'autre nud. Nuda pedem peut donc si* gnificr ayant un pied nudj ou ayant les pieds nuds; et tilors la langue, faute d'articles, manque de ppëcisioo , et donne lieu aux méprises, 11 est vrai que par le secours des Adjectifs déterminatifs , le lalin peut suppléer au défaut des articles : et c'est ce que Vir- gile a fait en une occasion pareille à celle dont parle Ovide. Mais alors le latin perd le prétendu avantage d'être plus serré et Iplus concis que le fraoçois.

Lorsque Dîdou eut recours aux enchan* temcns , elle avoit un pied nud , dit Vir-

tmimmm

(1) M^tam» lib. j, 169.

50 X Principes »

gile . (i)« Vnum exuia pedem pinclis] et . ce pied , c*étoit le gauche , selon les Commentateurs.

Je conviens qu*Ovide s'est énonce d*ane manière p!us serrée ; nuda pedem ; mais il a donné lieu a une méprise, Virgile a parlé comme- il auroit fait, s*il.avoit écrit en françois ; unum exuta pedem ^ ayant un pied nud. lia évité l'équivoque y par le accours de l'adjectif indicatif unu/7i;et ainsi il •*€St exprimé avec plus de justesse qu'Ovide.

£u un mot , la netteté et la précision sont les premières qualités que le discours doit avoir. On ne^parle que pour etciter dans Tesprît des autres une pensée, précisément telle qu'on la conçoit. Or les langues qui ont des articles ^ ont un instrument de plus pour arriver i cette fin ; et j'ose assurer qu'il y a dans les livres latins bien des passages obscurs , qui ne sont tels que par le défaut d'articles ; défaut qui a souvent indpit les Auteurs à négliger les autres adjectifs dé- monstratifs , à cause de .l'habitude oii étoient CCS auteurs d'énoncer les mots sans articles , et de laisser au lecteur à suppléer.

(i) y^H, lib. 4, T. 5i8.

1

de Grammaire» ^t

Je (ÎQis par noe réflexion jadicieuse da F. Buffier (l). Nousf avons tiré nos éclaircîs- seniens d'une m<'taphysique , peut-être un

peu subtiie ; mais très --réelle. C'est

ainsi que les sciences se prêtent mutuel'» lement leurs secours. Si la Métaphysique contribue à démêler nettement des points essentiels à la Grammaire, celle-ci blerh apprise, ne coniribueroii peut m être pa$ mpins à éelaircir le$ discours les plus méta^ physiques*

(i) Qrammûire, n. 54o*

9^ Principes

OBSERVATIONS

8 V A

LES LETTRÉS DE L'ALPHABET.

•i-"«"

O

'n divise les lettres en voyelles el^en consonnes. Les çoyelles sont ainsi appelées du mot voix y parce qu'elles se font enieo- dre par elles-mêmes. Elles forment toutes seules un son , une voix. Les consonnes , au contraire , ne sont entendues qu*avec Tair qui fait la voix ou voyelle ; et c'est de que vient le nom de consonne ^ conson-* nansj c'e'sl-à-dire, gui sonne açec une autre» Il n'y a aucun être particulier qui soit voyelle , ni aucun qui soit consonne. Mais on a observe des différences dans les modi- fications que Ton donne à l'air qui sort des poumons , lorsqu'on en fait usage pour for-

de Grammaire, gS

Iner les sons destinés à être les signes des pensées. Ce sont ces diffërenies considéra^ tions ou précisions de notre esprit » k l'oc- casion des modifications de la voix ; ce sont , dis-je , ces précisions qui nous ont donné lieu de former let ïi\Qi% Ae çoyelle y de consonne^ A* articulation^ et autres. Ce qui distingue les différens points de vue de notre esprit , sur le mécanisme de la parole , et nous donne lieu d*en discourir avec plus de justesse.

Mon dessein n*est pas d*entrer ici dans l*examen et dans le détail de' la formation de chaque lettre particulière. Mais comme la mécanique de la voix est un sujet inté- ressant, que c*c!t principalement par la pa- role qae nous vivons en société, j'ai cru devoir donner ude idée générale de la mé* caniquc de la voix , qui fera entendre plus aisément la différence qu'il y a entre la con- tonriii et la çoyeîle,

D'aliord il faut observer, que Tair qui sort des poumons est la matière de la voix , c'efil-à-dire, du chant et de la parole. Lors- que la poitrine s*élève par l'action de cer- tains muscles, l'air extérieur entre dans les Tésicules des poumons , comme il entre

()6 Principes

temps de Son passage' il soit rendu sonore par les organes de la parole. Ce 4 ui lui arrive par deux causes différentes,

l;^ L'air étant poussé avec plus 011 moios de violence par les poumons, il est rendu sonore par la seule situation se trouvent les organes de la bouche. 2,^ L'air qui sort delà trachée atère est rendu sonore dans son passage ) par l'action ou mouvement de quel- qu'un des organes de la parole.

Voilà deux causes qu'il faut bien distin- guer; I.o simple situation des organes; 2.0 action ou mouvement de quelqu'organe par- ticulier sur l'air qui sort de la trachée artère. * Je compare la première manière h ces fentes qui rendent sonore le vent qui y passe ; et 'e trouve qu'il en est à peu près de la seconde, comme de l'eflfet que produit l'action d'un corps solide qui en frpppe un autre^

Les différentes sortes de partiesqni forment l'ensemble de Torgane de la voix , donnent Heu de comparer celte organe , selon les différens effets de ces parties , tantôt à un instrument à vent tel que l'orgue ou la flûte, . tantôt à un instrument à corde, tantôt coiia jiquclqu'aulfe corps capabledel^ire entendre lia sou y Q9^i«ue uae.cJoche frappée par soa

battant I

de Grammaire, ('/

>attant)OuuQeeQclamesurlaqueIleondoane les coups de marteau. *"

Parexemple, s'agit-il d'expliquer la voyelle^ 3a aura recours k une comparaison tirée de [[ue]t|u'ii»tTttment à yfinx. Supposons ua tuyau d'orgue ouvert ; A est certain que tant que ce tu jau demeurera ouvert , et tant que le loufHet fournira de vent ou d'air , le tuyau rendra le son qui est l'effet propre de l'état et de la situation se trouvent les parties par lesquellet l'air pa4se. Il en est de même de la flûte, Tantque celui qui en joue y souffle de l'air ) on entend le son propre au trou que les doigts laissent ouvert. Le' tuyau d'orgue ni la flûte n'agissent point ; ils ne font que se prêter à l'air ponssé, et demeurent dans l'état ou cal air les trouve. /

Voilà précisément la voyelle. Chaque voyelle exige que les organes de la bouche soient dans la sitaatioa requise pour faire prendra à l'air qui sort de la trachée artère la modification propre à exciter le son de telle ou telle voyelle. La situation qui doit fair« entendre 1*^^ n'est pas la même que celle qui doit exciter le son de Vi, Ainsi des autres.

Tant qu^ la situation des organes subsiste

E

p8 Principes

dans le même état, on entend la même voyelle, aussi long-temps que la respiration peut fournir d'air. Les poumons sont à cet égard ce que les soufflets sont h Torgae. .

Selon ce que nous v^ons d'observer, il suit que le nombre des voyelles est bien plos grand qu'on ne le dit communément*

Tout son qui ne résulte que d'une sitoatîon d'organe , sans exiger aucun battement ni mouvement qui survienne aux parties delà bouche , et qui peut être continuée aussi long - temps que l'expiration peut fournir d*air , un tel son est une voyelle. Ainsi a, à, é, è , ^, i, o, u, ou, eu, et sa f oible # muet,.ejt les natales, an, en, etc.; tous ces sons-là sont autant de voyelles particulières, tant celles qui ne sont écrites que par un seul caractère , tet que a, e, ijO, m, -que celles qui faute d'un caractère propre, sont écrites par plusieurs lettres, telles que ou, eu, oient, eic. Ce n'est pas la manière d'écrire qui fait la voyelle, c'est la simplicité du soo, qui ne dépend que çl'une situation d'organes , el qui peut être continué. Ainsi, ou y eau^ cu^ eu, aient j etc. quoiqu'écriis par plus d'une lettre , n'en sont pas moins de simples ypyelks. P^ous avpns donc h voyelle u etU

de Grammaire, ç^

voyelle OUI les Italiens n*ont qae Vou , qa*ils écrîveot par le simple u, Noas avons de plus la voyelle eu, J^eu^ lieu: Ve muet en est la foible., et aussi une voyelle partictdière.

U n*eii est pas dje même de la consonne. £Ue ne dépeojdl pas, comme la voyelle , d'une situation d'organi^s qui puisse être perma-^ nente. Elle est Teffet d'une action passagère, d'un trémoussement, ou d'un mouvement niomenianëe (i) de quelque organe de la parole , comme de la langue , des lèvres , etc. En sorte que si j'ai comparé la voyelle an son qui résulte d'un tuyau d'orgue ou du trou d'une flûte, je crois pouvoir comparer la. consonne à l'effet que produit le battant d'une cloche ou le marteau s^r renclurae. Fournissez de l'air à un tuyau d'orgue ou au. trou d'aoe flûte , vous entendeit toujours le

( ) Ecrivez momentanée par deux ee. Telle est l*ana-. logie des mots françoîs qui viennent des mots latins eUf eus. C'est ainsi que Ton dit les Champs -E Usées ^ lès Monts -Pyrénées; le Colisée , et non le Cotisé; le ileave Alphée^ et non le ileuve Alphé , Huvius Alpheus, Voyez le Dictionnaire de T Académie, celui <t» -nr^TOfiz et celai 4e Joubert ^ aux mots momen» tmoàm «t êyoManée,

E %

N

too /Principes

même son : au lieu qu'il faut répéter les coups du battant de la cloche et ceux, du marteaa sur renclume, pour avoir encore le son qu'oc a entendu la première fois. De niêtne , si vous cesseK de répéter le mouvement des lèvres qui a fait entendre le 3; ou le ; d tous dc redoublez point le trémoussement de la bo- ^ue qui a produit le r^ , on n'entendra ploi ces consonnes. On n'entend de son, que par 1^ trémoussement que les -parties sonores de l'air reçoivent des divers corpsqai les agitent. Or l'action èt$ lèvres ou les agi talions de la langue, donnent k l'air qui sort de la boucbe la modification 9 propre à faire entendre telle ou telle consonne. Or, si après une telle mo* di&caiion , l'émission de l'air qui l'a reçoe dure encore , la bouche demeurant nécessai- rement ouverte pour donner passage h. l'air , et les organes ^e trouvant dans la situalioo qui a fait entendre la voyelle , le son de cet* voyelle pourra être continué aussi long-temps que rémission de l'air dprera : au lieu que le son de la consonne n'est plus entendu , aprèf l'action de l'organe qui Ta produite.

L'union on combinaison d'jme consonne livec une voyelle ne peut se faille q^ue par une ip^me émi$3ion de voix. Ceue union eftt ap*

de Grammaire, lot

()e1ëe articulation. Il y a des articulations sim- ples et d'autres qui sont pl-us ou moins com- posées : ce que M. Hardouiu , secrétaire de la Société Littéraire d*Arras a extrêmement bien développé dans un mémoire particu- lier. Cette combinaison se faitd*une manière successive , et elle ne peut être que momen- tanée. L'oreille distingue l'effet du battemen t et celui de la situation : etle entend séparé- ment Tuu après l'autre. Par exemple , dans la syllabe ba^ l'oreille entend d'abord le h , ensuite Va ; et Ton garde ce même ordre j quand 6n écrit les lettres qui fout les syllabes , et les syllabes qui l'ont les mots,

EnliU) cette union est de peu de durée ^ parce qu'il ne seroit pas possible que les or* janes.de la parole fussent en même temps en }eux> états , qUi ont chacun leur, effet propre it différent. Ce que nous venons d'observer I l'égard de la consonne qui entre dans la :ompo5itioo d'une sj-llabe , arrive aussi par a même raison dans les deux voyelles qui l'ont utie diphtongue , comme uiy dans lui, luiiy hrmt, tic, L'i< e&t entendu le premier; l n'y a que ie son' de Vi qui puisse, être con- iaué j parce ^ue la sûaatioa des oi-ganea qui

E 3

lôa Principes

forme Vi a succédé subitement k celle qui a voit fait entendre Vtu

L'articulation ou combinaison d'une con- sonne avec une voyelle fait une syllabe: ce- peirdant une seule voyelle fait aussi foU souvent une syllabe. La syllabe est un son oa simple ou composé , prononcé par une seule impulsion voix, A ^jou •té, ré^U" ni^ eré^é.

Les syllabes qui sont terminées par des consonnes sont toujours suivies d'un soa foible, qui est regardé comme un-e muet. C'est le nom qu'on donne & l'elfet de la der- nière ondulation , ou du dernier trémousse- ,raent de l'air sonore ; c'est le dernier ébran- lement que le nerf auditif reçoit de cet air. Jevcujtdire que cet e muet foibkn*est pas de mémt nature que Te muet excité k desseins tel que 1*^ de la fin des mots çu-e, pi^Cj et tels que sont tous les e de nos rimes féminines, Ainsi il y a bien de la di^rence entre le son foible queTorb entend à la fin du mot Michel, et le dernier du mot Michèle ; entre bel et Jbelle; entre cog et coque\ entre Job et robt, bal et balle; cap et C€tpe\ iiam et ame^ etc.

S'il y a dans un mot plusieurs consonnes suite I il faut toujourr supposer votre cha-

de Grammaire, Io3

que consonne -cet e foible et fort bref. Il est conime le son que Ton distiogae entre chaque coup de marteau y quand il y en. a plusieurs qui se suivent d'aussi près qu*il est possible. Ces réflexions font voir que Te muetfoibU est dans toutes les langues.

Recueillons de ce que nous avons dit, que la voyelle est le son qui résulte de la sit uatioa oii les organes de la parole se trouvent dans . le temps que l'air de la voix, sort par la trachée artère^ et que la consonne est l'effet de la nioditicaiiou passagère que cet air reçoit de l'action momentanée de quelque organe par- ticulier de la parole.

C'est relativement a chacun de ces organes , que dans toutes les langues on divise les lettres en certaines classes, elles sonl-nommées <lu nom de i*organe particulier qui paroîc contribuer le plus a leur formation. Ainsi les unes 'Sont appelées labiales ^ d'autres ///i« gualeSj ou bien palatiaîes^ ou dentales , ou nazaJes ou gutturales. Quelques-unes peu- vent être dans Tune et dans l'autre -de ces tla^ses, lorsque divers organes concoufeat à leur formation.

Labiales. B,P,F, V,M.

Linguales. D,T,W,L,R.

E 4

,«Ï04 Principes

Fa1atiale9. G, J, G fort ou K on Q; le mouillé fort Ille et le mouillé foible ye.

Dentales ou siflantes. S ou C doux^ tel que se , si, Z ) CH. C*est à cause de ce sifle- xnent que les Anciens ont appelé ces consonnes sémiçocales , semiçocales , demi - voyelles ; %ujieu qu*ils appelloient les. autres muetUs,

Nasales. M, N. GN.

Gutturales. C'est le Jiom c|ti'on donne à celles qui sont prononcées avec une aspira- tion forte) par un mouvement du fond delà trachée artère. Ces aspirations fortes sont Jfréqu entes en Orient et au Midi. Il y a des lettres gutturales |)armî les peuples du Nord. Ces lettres paroissent rudes a ceux qui n*J «ont pas accouluniés. Nous n'avons de son guttural que le j qu'on appelle commu- nément//<75/7/>£'>. Cetie aspiration est l'effet d'un mouvement particulier di s parties inter. nés de la trachée artère. Nous -ne TarticuloiK qn'avec les voyelles , le hétos , la hauteur*

il y a des Grammairiens qui mettent le H au rang des co»5072/z^i^ d'autres , au con- traire, soutiennent que ce signe ne marquant aucun son particulier, analogue aux sods des autres consonnes , il ne doit être consi« 4|cré que comme un signe d*aspiratioo.

de Cfçmntàk'^* loS

. Pour moi, je crois que puisqiie .les uni e| Us atunes de ces Granjmairkas coavieDpeuK de la valeur de ce signe, ils doivent ^e per- nieiire réciproqueD>«;ût de l'appeler^ qu ^oh^ soi2^,, OU $igi\€ d' a^pireiioJhn s^Ipa le'ppiac de vue qui les affecte 1^ plus. . . . La diversité d^s climats cause desdiffë- rences^dans la prononciation des langues, Il y a des peuples qui mettent en action certains organes , et même certaines partie^ de^ or- ganes y dont les autres ne font point usage. Il j a aussi une forme ou manière particu*» lière de faire agir les organes. De plus, en chaqi^e nation , enchaque province, et méni^fc en chaque ville , on s'énonce avec une sorte de modulation particulière : c'est ce qu'on appelle accent national^ ou accent proçin" ciaL On en contracte Thai^ilude par Tédu*^ cation , et quand les esprits aniiuaux ont pris une certains route , il est bien duâi^Lcile , malgré Tcmpire de Ta^e , de leur en faire prendr4i une nouvelle. De-là vient aussi qu'il j a des peuples qui ne sa uroieut prononcer certaioes lettres. Les réfIes.ions qu'on peut faire sur .ce sujet sont fort utiles pour rendre raison des changemens arrivés à certains mots, qui ont passé d'une langue dans-une autre. Voyeii

ES

^

•lôtf Principes

la Dissertation d^ M. Falconcl^ Jar Icsprin' cipes de l^éfymolagie ^ dans V Histoire de TÀcùdémie des Belles^ Lettres. Il faut voir -aussi lés Graip maires èes différemes tangues.

A, l'égard <lti- iKimbre de nos coosoniiei, si Ton ,o€ compte qne ceis sons et ({a'on ne s'arrête point aux caractcrei de notre al- phabet, ni à i*asage souvent déraisonnable que l'on fait de ces caractères, on trouvera que nous avons dix*huit consonnes, qui ont •un son bienymarqaé, et auxquelles la quali- 'fication de consonne n* est point contestée*

Nous devrions donner uncaractèrepropre, déterminé, unique et invariable à chacun de ces sons: ce que les Grecs ont fait exacte- ment, conformément aux lumières natnrelles, Est-il en efièt raisonnable que le mente signe ait des destinations différentes dans le méifie genre, et que \e même objet soit indi({i3é tantât par un signe , tantôt par un autre l

Avant que d'entrer dans le compte de nos consonnes, je crois devoir faii'c une tïoortc observation sur la manière de les nommer.

Il y a cent ans que la Grammaire générale de Port-Royal (i) proposa une manière d'ap-

(I) Partt%4, ch, ^

de Grammaire, loL

prendre h Ifre facilement en toutes sortes de langues. Cette manicre consiste è nommer les consonnes par le son propre qu'elles ont * dans les syllabes elles se trouTent , en ajootaut seulement k ce son propre celui de Ve muet y qui est reffet de Timpulsion de i*aîr nécessaire pour faire entendre la con- sonne. Par exemple , si }e teux nommer la lettre B dans Us mois Babylone^ Biâus^ etc« je l'appellerai be , comme on le prononce dans la dernière syllabe de tombe. ^ ou daps la première de besoin.

Ainsi du D , que je nommerai de, comme on Tentend dans ronde.

Je ne dirai plus effe; je diraj^è, comrtie dansera , étojfe.

Cette pratique facilite extrêmement la liai- son des consonnes avec les voyelles , pour en faire des sylUbes. Elle a été renopvellée de nos jours, par MM. de'LaunayJ père et fils, et par d*autres maitres habihes. Les mouvemer.s que M. Dumas s*est dounës pendant sa vie pour établir son bureau typographique ; ont aussi beaucoup contribué à faire connoître cette dénomination > en sorte qu'elle est au-« jourdliui pratiquée même dans les petites écoles.

E G

r

108 Pri^ipes

Voyons maiotenant le nombre de nos con« f onnes. Je les joindrai , autant qa*^ sert possible^ à chacune de noshuit voyelles prio- cipales*

Figure delà, lettre.

Nom de lateftre.

B, b.

Cy c dur

Be.

Que.

D, d.

t>e.

Exemples de chaque consonne açcc chaque poyeîle,

« 1

Babylone , Béat , bière,

u

oa

bonnc^ , bule , boule >

eu muet»

beurre ) bedeau.

Cadre ou quadre , karat ou carat) kalendcs ou ca- ieudes, le Quénoi, qui) kirielle ) coco , cure , le cou , queue , quérir, que- relle.

Comme )• ne cherche qoe IH sons propres de chaqae lettre de notre langue , désignés |Mir nn seui ceractère incommunicable & tout autre son, je ne donne ici au c que le son fort qu^il a dans lei 1 syllabes ca,coy eu. Le son doax ce, ci, appartient à VS, et le êoa jBé, zij sppartîent à h leitre s.

David, un de, Dîane, dodu , duché , douleur, deux, demander. .

^

'àe Gramihaire*

i^

Figuré de la lettre.

Komde la lettre.

Fe.

Gfgdur,

Gnei

J, j.

Je.

L, I.

Ui

M,

Me.

Favênr, fëmînÎQ) fim^ forêt, faneste, le four, le feu^ femelle.

Gage, guérir, guide, k g^6^ » guttural , goulu ^ gueux , guéd^.

Je donne ici k ce cara^ tère , que le son qa*il a devaiit a I o, tt ; 9aa foible g€, gif •ppAi tient AU 7.

Jamais, jésuite, j'irai ^ joli , jupe , joue , jeu , jetter, jetton.

Le son du 7>d«vant i # M donné liane notre orthographe vulgaire au is; doux, gibi&r^ ^*f^t giboulée <t etc. et souvent mal- gré Tétymologie , comme dan< ^* g^^% nie //i cet. Les partisane de rorthographe Tuîgaire ne ree^ pectent 1 étymologie que lora- qu'elle est favorable à leurf pré-* jBgéi,

La , légion , livre , loge y la lune , Louis , leutrer^ leçons.

Machine , médisant , midi, morale, muse,m()a« lin } meunier, mener.

1

ÏXO

*de la Uttn,

N, n.

P, p.

R, r.

S, 9.

T, t.

V»^.

Z, 2.

1

Principes

No/mie la lettre.

N«.

Pt.

Re.

St.

Te.

V«.

Z«.

Nager, Nëron, Nicole, novice , oaage , nourrice, uéutrie, mener.

Pape , péril , pigeon , pohiTiiade , paaiiioD) pou- pée, peuple y pelé, pelote.

Ragoût , règle , rivage , Rente , rade , rouge , Reul- liD'geii ) ville de Souabe^ revenir.

Sage, séjour, Sion, So- Ion , sucre, souvenir, seul, semaine.

Table, ténèbres, tiarre, tonnerre, tuteur, Toulou- se, r ordre Tcuioui<j[ue en Allemagne^ tenir.

Valeur, véiîn , ville , vo- lonté, vulgaire , vouloir, fe veux, venir.

2acharie, zéphire , zi- zanie, t^one^ Zurich , t^iUe de Suisse.

'Aux qnîflze sons que BOiist^ n<m« «Se rcmar^ittcr on d<»it fo

de Grammaire.

lie

de la lettre,

h hêtre.

Cky ch.

Gn,gn.

Cbe.

Gne.

L, 1.

, Lîê mouillé

I ajouter cneora qaatré tnfEe» qui derrojent arofr un carartère par» ticulier. Lea Greca n'«uroie.nt pas manqué de .leur en donnai ua comme ils firent k Ve long, à Yo long et aux lettres aspirées. Les quatre sons dont je veux par- 1er ici sont le ch , qu ofi nomma chey le gn, qu'on nomme gne^

le //en //«f qui est un son mouillé fort, €l le j qu*on nomme yé^ qui est un son mouillé foible.

Chapeau , chérir, chi- cane , chose . chute , chou ^ cheniiu, cheval.

Il ne s*agît pas de cas deux lettres, quand elles gardent leur son propre, comme dans gnO' mes, magnus ; il s^agit du Son mouillé qu^on leur donne dans»

Pays de Coca-gae , ^I- lenia-gne , nia-guanirae , Champa-gae , rè-gne , li- gne , insi-gne , nia-gmf|M' que j ANi-gQon , oi-gnon.

Les Espagnols marquent ce son pat un n surmontée d'une petite ligne, qu'i s appellent ///^tf, cVlC â-diie , titre. Montana , mon* tagne ; Espana , Espagne.

Noirs devrions avoir aussi un caractère parti- cuher destiné unique ment à marquer le son de l diouiilé. Comme ce caraCo

1^% Principes ..

tére nous manque , notre oithogrâphe n'est

pas uuiforme daus )a niaDière de désigner ce son. Tantôt dous l'indiquons par un seul /, tantôt par deux li\ quelquefois par Ih. On doit seuleraeot observer que / mouille est presque toujours précédé d*un i. M^is cet i n'est pas pour cela la niarqiae carac- téristique dû / mouillé ^ comme ou le voit

dans c^ffil , nil y ejpîl^ fi^tfi^^'i ^A ^'^^ ) ^^ le / n*est point mouillé, non plus que dans Achille^ pupille^ tranquille^ qu'on feroit mieux de n^écrire qu avec un seul /•

Il faut observer, qu*en plusieurs mots Ti se fait entendre dans la syllabe avant le son mouillé ;.conime dans péril ^ on entend Ti, ensuite le son mouillé pé^ri^L.

Il y a au contraire , plusieurs mots Ti est muet; c'est-à-dire, qu'il n'y est pas en- tendu séparément du son mouillé. Il est con- fondu avec ce son \ ou plutôt , ou il n'y est .point quoiqu'on l'écrive', ou il y est bien foible,

ExempU V\ esi entendu^

Péri-l ^ avri-l , babi-1 , du mi*l ^ gentî« Ihomme ^ Bréd-} , fi-lle.^ babi-Ue^ véli'-lle ,

de Grammçire» xiS

freti-lle ) chevi«He , fami-lle , cédi->IIe , Sé- vi-llc.

0

Exemples ri est muet , et confondu apec

le son mouillé.

De ra«-il, de l'ail ^ qu'il s'en ai-l!e, boa* îll-oo, bouillir, boute-ille, ber-ca-il| ema- il, éventa-il, qu'il fou-ille, qu'il fa-ille , le village de SuUi , merve-ille) mou-ille , mou- iller ) ni sOu .ni mai-iiie ) sans pare-ille, il ra-ille , le duc de Sulli , le seu-il de la porte , le spmnie-il, il somme-ille, sou-iller , ira* va-il , trava-illtr^ qu*il veu-ille^ la ve-ille, rien qui va-ille.

Le son mouillé du / est aussi marqué dans quelques noms propres par Ih , Millau , ville de Rouergue, M. Silhon, M. de Pardalhac.

On a observé que nous n*avons point de jupts qui commancent par le son mouillé*

Du , ou mouillé Joiàle*

Le peuple de Paris change le mouillé fort tn mouillé foible. Il prononce^-jK^ , au^iea àejilley Versa^yes ^ pour Versailles. Cette pronoaciatioA a doi^né lieu à quelques Cranu^

XI4 ^ Principes

mairiens modernes d'observer ce moaillë f ci- ble. Eu effet, il y a bien de la différence dans la prononciation de ieii dans mien , tienj etc. et de celle àQ^mo^yen , pa-yen^ y eux , a^yant ^ Ba^yonne ^ Ma^yence ^ Bla^^e^ ville de Guienne , ^iz-j-anc^ , emplo^yonsï l'indicatif, alla que nous emplo-^i'-yons ^ <jue vous a-i^yex^ que vous so^i'yez au sub- jonctif. La ville de No^yon , le duc de Aia- yenne^ le chevalier Ba-yard^ la Ca-yenne^ ca^yer , Jo-yer , ho^^eaux. . Ces Gramniairiens disent que ceson mouillé est une consonne^ M. du Mas, qui a inremé le bureau typographique , dit que dans les mois pa^yer , emplo^yer , etc. est une espèce 'd*i mouill^ consonne ou demi^con* sonne (i).

M. de Launay dit que cette lettre y est amphibie; qu'elle est voyelle qn^nd elle a la prononciation de 1'/; mais qu'elle est con- sonne , quand on Tem ploie avec les voyelles , comme dans les syllabes ya, , etc.; et qu'alors il la met au rang des consonnes (2).

Pour moi, je ne dispute point sur le 00m \

II*

(1) Bibliothèque deê Eoftns , Ille. vcL p. 309. (^) Méfhodt Bi. de I^annay, pag^ 59 €0 4o*

de Grammaire* 1 1 5

l'essentiel est de biea distiuguer et de bien prononcer celte lettre. Je regarde ce son jk^ dans les exemples ci->dessus , comme un son mixte , qai me pàroît tenir de la voyelle et de la consonne ) et faire une classe à part.

Ainsi, en ajoutant le che et les deux sons raomWéygn et //, aux quinze premières con- sonnes , cela fait dix-hoit consonnes , sans compter le h aspiré , ni le mouillé foible ou son mixte j^é.

Je n*ai point place la lettre x parmi les consonnes, parce qu'elle n*a pointVjeson qui lui soit propre. C'est une lettre double , que les copistes ont mise en usage pour abréger. Elle fait quelquefois le service de deux lettres fortes es , et quelquefois celui des deus^ foibles gz.

X pour es.

Exemples.

Prononcez»

Axe.

Ac-se.

Axiome.

' Ac-siome.

Alexandre»

Alec-sandre

Fluxion,

Fluc^sion*

S««e.

Sec-se.

Taxe.

Tac^»«.

ii6 -

Principes

Exemples,

Prononces»

Vexé.

Vcc-sé.

Xavier.

Csavier.

XéaôphoD.

Csé-aophoQ

X pour GZ*

Examen.

Eg-zamen.

Exemple.

Eg-zemple.

Exauce r<^

Eg-iaucer.

Exarque^

Eg-zarque.

Exercice.

Eg-zercice.

Exil.

Eg-zil.

Exiger.

Eg-ziger.

Exode.

Eg-zode.

Exhorter.

Eg-zhorter.

A la fia des mots , I'^ a , en quelqaes noms propres ) le sou da çs; Ajaxy PoIIujp^ Stisc: on pronoiice Ajacs , Pollues , Stycs, Il en est de raêm« Tadjectif /?r<^:r , qaW pro- nonce préfics»

Mais dans les .autres mots qae les maîtres à écrire , pour donner plus de jeu \ la plum« , ont terminas par mq .or^ ce ^ tient sevklemeni la place du s, comme dans^^ peux^ les cietêx^ les yeux jf la ff9ix^six\ dix^ ch^i^auae^ ,*

de. Grammaire. II7

\ax est employé pour deux ss dans soixan^ te, Bruxelles y Auxone^ Àuxerre, Oa di( Àusserre y soissante y Brusstlles , Ausione y à la manière des Italieoii qui n*OLit point def w, daoa leur Alphabet , et «|ni emploient les ^ daus. s$ hi Ja place de cette lettre : AUssaU'^ 4ro, Ales*io»

. Ou écrit aussi , par abus y le jr an lieu du S, en ces mots siaièmey deuxième^ quoi- qu*on proQOQce sixième y dfuzième. Le x tient lieu du c dans ex^a lient ^^ronoiict% eccellent.

Dans liste que j *al donnée des consonnes y î*ai rejette les caractères auxquels un usage «^ eugle a drjiuné le son de quelqu'un de ceux que j*yai comptés. Tels sont le AretÇ) puisque lec dnr marque exactement Je son de ces lettfit^. Je n*iî point donné au c le son du ^ , . ai au ^^le^oa du z. C'est ai^si qu'en grec le j?, cappa y hi\ toujours capplay le $ y sigma , toujours sigma* De sorte que si en grec la proDoûoîadon d'un mot vient & changer 01& par contraction , on par la forme de la coo« ')ugaison , ou par la raison de quelque dia«- lecte, l'orthographe de ce mot se conforniç au nouveau son qu'oq lui donne. On n'a ^gard , eu grec , qu'a la manière de proQoncar

Il8 Principes

les mot5 ) et non à la source d*oii ils vienneot , quand elle n^influe en rien sur la pronoo- ciatioti , qui est le seul but de Torthographe. Elle ne doit que peindre la parole , qui est SOQ original \ elle ne doit point en doubler les traits , ni lui en donner qu'il n*a pas , ni s'obstiner à le peindre \ présent tel qa*iléloit il y a plusieurs années.

Au reste ^ les réflexions que je fais ici n*ont d'autre but, que 4^ tâchef de découvrir les Sions de notre langue. Je ne cherche que le fait. D*ailleurs , je respecte l'usage , dans le temps nié nie que j'en reconnoîs les écarts et la déraison ^ et je m'y conforme , malgré la réflexion sage du célèbre prote de Poitiers ^ de M. Restant, qui nous disent (l) quil est toujours louable , enjait à* orthographe , de quitter une mauvaise habitude pour en con" tracter une meilleure; c'est -à» dire, plus conforme aux lumières naturelles et au but de l'art.

Que si quelqu'un trocTve qu'il y a delà con- trariété dans cette conduite, je loi réponsque tel est le procédé du genrehunruiin. Agissons-

il) Traité de l'Orthographe en forme de Diction» limite ^ à la lettre X.

de Grammaire. II9

tous toujours conforniéniedt à nos lumières it à nos principes!

Depuis M. Tabbé Dangeau, nos Grammaî- "iens divisent les consonnes enjoibles et en ^ortes, EÇeclivemeat il y a plusieurs lettres :jui se prononcent facilement Tune pt>ur L'autre , parce que ces lettres étant produites parles mêmes organes ^^1 suffit d*appuyer un peu plus ou un peu moins pour les faire en- tendre^ ou.rune ou Tautre. Ainsi le même organe poussé par un mouvement doux , pro- duit une consonne foiÊle, comme B^ et s'il a un mouvement plus fort et plus appuyé , il fait entendre une consonne forte, comme P. B est donc la foible de P^ et P est la forte de B. Je rais opposer ici ces lettres les unes aux autres.

Consonnes Jbièles, Consonnes fortes.

B.

P.

Bâcha. -

Baigner.

Bain.

Bal.

Balle.

Pacha,

peigner.

Pain.

Pal , terme de blason.

Pâle.

120^ Principes

Consonne s foihle s. Consonne s Jvrtes,

Ban.

Pan , divinité du pa*

« .

ganUmç»

Baquet.

Paquet*

Bar, duché en

Lor-^

Par.

raine^

•.

Bâië.

*

Pâle. '

Bâtard.

Patar, petite mon-

-*

noie.

Beau.

Peau,

Bêcher.

fr

Pécher,

Bercer.

. Percer.

Billard. ,

Pillard,

Blanche,

Planche.

Bois.

Pois.

,D. T.

Dactyle, term^ (fs Tactile^ çui peut être Poésie, touché, ou çni con-

cerne le sçns du toucher: les qua* lités tactiles. Datistr. .^ Tanscr , répriman-

. . d9r.

D«^d.

âe Grammaire. Il}

7onsonntS f cibles.

Consonnes fortei.

)ard.

Tard.

)ater.

Tâtcr.

)éiste«

Théiste.

)ette.

Tcttc, Téter

>ogc. '

Toge.

)oigt.

Toit.

>oauer.

Tonner.

Cygue.

C dur^KouQ, gue.

labaret (i).

Cabaret.

jachek

Cache.

îagc.

Cage.

raie.

Cale y terme ds Ma-*

rine.

rand. Quand.

Can, (ju'onécrltcom*

munémeni Caên.

rIace.

Classe.

jracc.

Crasse.

rraod.

Cran.

rrèvc.

Crève.

rris.

Cri , cris.

rrosse.

Crosse.

jrotte.

Crotte.

.0) ViUo de OMcogae^

s2S Principes

Consonnes Joibles, Consonnes ^fortes.

3 y je.

*

Ch, che.

Japon.

Chapon.

Jarretière.

Charretière.

Jatte.

Chatte.

V, ^r.

F,yîr.

Vain.

Faim.

Valoir.

Faloir.

Vàner.

Faner.

Vendre , vendu.

Fendre, fendu.

Z) ze.

S 9 se.

Zèle:

Selle.

Zone,

il Sonne , àe sonner.

La Saône , rimrc^

Ye mouillé Jbible»

L , Il mouilléjort.

Qu*il pa-ye.

Pa.îlîe.

Pa-yen.

Manille.

Mo-ycn.

Va-ille.

La cille de Bla-yc en

Versa^illes.

Guyenne.

,

Les isles Luca-ycs en

Fi-lle.

Amérique.

L<i ville de Noyon en

Fami-lle, etc.

Picardie, etc.

ê€ Grammaire, laS

par ce détail des consonnes foîbles et des fortes, il paroîtqu*il n'y a que les deux lettres Da7.;)les m, ftj et Us deux liquides l, r, dont le sonne change point d*un plus foible en un plus fort , ni d'un plus fort en un plus foible. Et ce qu'il y a de plus remarquable à Tëgard de ces quatre lettres y selon Tobservalion que M. Harduin a faite dans le Mémoire dont i*ai parlé , c'est qu'elles peuvent se lier avec chaque espèce de consonne, soit avec les foibles ) soit avec les fortes , sans apporter aucune altération k ces lettres. Par exemple ^ imbibé; voilà le m devant une foible, impi» foyable ^ \e, voilk devant une forte. Je ne prétens pas dire que- ces quatre consonnes soient immuables ; elles se changent souvent , sur - tout entre elles : je dis seulement qu'elles peuvent précéder ou suivre indiffé- remment ou une lettre foible ou une lettre^ Forte. C'est peut-être par cette raison que les anciens ont^donné le nom de liquides à ces quatre consonnes ^ î, m^ n , r, ''

Au-Heu qu'à l'égard des autres , si une fciblc vient à être suivie d'une forte, les or- ganes prenant la disposition requise pour articuler cette lettre forte, font prendre le son fort à la foible qui précède^ en sorte que

F a

tS4 Principes

celle qui doit être prononcée la dernière) change celle qui est devant en une lettre de son espèce : la forte change la foible en forte | et la foible fait que la forte devient foible. C*est ainsi que nous avons vu que le J vaut tantôt £75, qui sont deux fortes , et tantôt ^z ) qui sont deux foibles. C'est par la même raison , qu'au prétérit le b d^ scriào se change tnp, à cause d'une lettre forte qui doit suivre : ainsi on dit, scriboy scripsi^ scriptum.Vi* Hai duin, est entré à ce sujet dans un détail fprt exact) par rapport à la langue françoise, çt il observe que, quoique nous écrivions absent, si nous voulons y prendre garde, nous trouverons que nous prononçons apsenU

,'■'■ " 'I .1 II iii.ii I ■■ .1 I t ^

DE LA LETTRE JE,

lA lettre £^ c, est la cinquième de la plu- part des al phabets , et la seconde des voyelles. Les anciens Grecs s'étant aperçus qu'en certaines syllabes de leurs mots, IV étoit ]pioios long et moins ouyert ^u'il ne VjX(À\

de Grammaire ' 12$

en d*atttres syllabes , trouvèrent à propos de marquer par des caractères particulier cette di£féreoce, qui étoit si sensible daos la pro-* nouciation»

En latin y et dans la plupart des langues ^ IV est ^prononcé , comme notre e ouvert commun au milieu des mots, lorsqu'il est suivi d'une consonne ) avec laquelle il ne fait qu'une même syllabe ; cœ-lèbs ^ mèl, pér ^ patrèm omnipo - tèn - tèm^ pès , èt^ etc. : mais selon notre manière de prononcer \% latin , Ve est fermé , quand il fmit le mot^ mare^ cubile^ pâtre ^ etc. Dans nos pro«^ vinces d'au delà de la Loire, on prononce 1*^ final latin , comme un c ouvert. C'est une faute.

11 y a beaucoup d'analogie entre Ve fer« et 17: c'est pour cela que J*on trouve souvent Tune de ces lettres au lieu de l'autre^ herè , herl. C'est par la même raison , que l'ablatif de plusieurs mots latins est en e ou en i \ prudente et prudenti.

Mais passons à notre e françois. J'obser«« verai d abord , que plusieurs de nos Gram- mairien^ disent , que nous avons quatre sortes d'^. La Méthode de Port^-Royal au Traité des Lettres, pag. 6z%^ dit que cet

F 3

xaS

Principes

quatre prononciatioDs diffërenles de Ve st peaveot remarquer dans ce seul mot , et- tèrremçnt ; mais il est aisé de voir qu'au- jourd*hui Ve de la dernière syllabe , meni^ n'est e que dans L'écriture.

La projdeDciatioQ de nos mots a TariJ. L*écriture n'a été inveniée , qae posr in- diquer la prononcialioa ; mais elle ne sanroû en suivre tous les écarts , je veux dire, les divers chaugemeus. Les enfaas s'éloi- gnent insensiblement de la pronoaclstios de leurs pères : ainsi l'orthographe « peut se conformer à sa destination que de loin en loin. Elle a d'abord été Hm dans les livres , au gré des premiers inves* teors. Chaque signe ne signifioit d'abord que le son pour lequel il avoit é\é invei}* te ; le sigae a , marqaoit le soq a; le si- gne ^, le son «?, etc. C'est ce que nous voyons encore aujourd'hui dans la langce grecque ^ dans la latiae , et même dans l'ita- lienne et dans l'espagnole. Ces deux, der- nières^ quoique langues vivantes , sont moins sujettes aux variations que. la nôtre. Parçii nous, nos yeux s'accoutiunent dés renfauce à la manière dont nos pères écn- voient un mot , conforinémeuil à leur xiA-

de Grammaire* la^

nière de le prononcer ; de sorte que , quand la prononciation est veau à changer, les yeux accoutumés à la roasière d'écrire de « nos pères , se sont opposés au concert que la raison auroit voulu introduire entre la prononciation et Torthograptie ^ selon la première destination des caractères. Ainsi il y a eu alors parmi nous , la langue qui parle à l'oreille , et qui seule est la vërita^ ble langue; et il y a eu la manière de la représenter aux yeux « non telle que nous Tarticulons , mais telle que nos pères la prononçoient; en sorte que nous avons à reconnoître un moderne sous un habil- lement antique. Nous iaisous alors une double faute : celle d'écrire un mot autre- ment que nous ne le prononçons , et pelle de le prononcer ensuite autrement qu'il n'est écrit. Nous prononçons ^x'et nous écrivons e , uniquement parce que nos pères pro- nonçoient et écrivoient e # . Le pre- mier € dans les mots empereur , enfant ^ femme , etc. fait voir seulement , que l'on prououçoit empereur^ énfant^féme, et c'est ainsi que ces mots sont prononcés- dans quelques-unes de nos provinces. Mais cela ne fait pas cme quatrième sorte d'^.

F4

128 Principes

Nous n'avons proprement que trois sortes dV. Ce qui les distingue , c'est la manière de prononcer Ye , on en un temps plus oo mçins long , ou en ouvrant plus ou moins la bouche. Ces trois sortes dV , sont IV ouvert , Ve fermé , et Ve muet. On les trouve tous trois en plusieurs mots. Fèrmc' y honnêteté , épêque , séçère , échelle^ etc.

Le premier e àtjèrmeté est ouvert : c*esl pourquoi il est marqué d*UQ accent grave. La seconde syllabe me n'a point d'acceat parce que Ve y est muet. est marqué de Taccent aigu; c'est le si^e de l'e fermé.

Ces trois sortes d*e sont encore suscep- tibles de plus ou de moios.

"L'e ouvert est de trois sortes : i.*^ IV

V I

ouvert commun : 2.^ Ve plus ouvert : 3/ Ve très-ouvert.

lo. LV ouvert commun; c'est Ve de presque toutes les langues : c'est Ve que nous prononçons dans les premières syl- labes de père , mère , Jt-êre , et dans il appelle y il mène ^ nia nièce , et encore dans tous les mots Ve est suivi d'une consonne , avec laquelle il forme sjrllabe , à moins que celte coosoune ne soit Vs pu le fi y qui marquent le pluriel ^ ou de 1< I

àe Grammaire* I25

troisième personne du pluriel des verbes. Ainsi ou dit examen et non examen^ On dit tel , bèlj ciel , chèf^ l>^kf 'i Josèf^ ^^^Si relief Jsraèl ^ Abèl^ Babel, réel ^ Michel^ miel j pluriel , criminel , çuèl , naturel^ hô" tel , mortel, mutuel ^ l'hymen, Sadducéèn ^ Chaldéèn , il piènt , il soutient , etc.

Toutes les fois qu'un mot finit par un e muet ^ on ne sauroit soutenir la voix sur cet e muet , puisque si on la soutcnoit , Ve ne seroit plus muet. 11 faut donc que Ton appuie sur la sjUabe qui précède cet e muet) et alors, si cette syllabe est elle-même un e muet , cet e devient ouvert commun , et sert de point d'appui à la voix , pour , rendre le dernier e muet : ce qui s'enten- dra mieux par les exemples. Dans mener j appeller , etc. le premier e est muet et n'est point accentué. "Mais si je dis je mène^ y appelle'^ cet;^ muet devient ouvert com- mun , et doit être accentué :je mène , j'ap^ pèle. De même ^ quand je dis, y aime , je de* mande , le dernier e de chacun de ces mots est muet : mais si je dis , par interrogation , aimè'je , ne demandé -je pas l alors Ve qui éloit muet ^ devient e ouvert commun.

Je sais qu'a cette occasion « nos Grammai*

F 5

i3o Principes

riens disent que Ta raisoo de ce changement de IV maet , c'est qu*i7 ne saurait y avoir deux e muets de suite: mais il faut ajouter, à lajfin d'un mot. Car , dès que la voix passe dans le même mot, h. une syllabe soutenue, cette syllabe peut être précédée de plus d*DO e knùet, REVEmander , RErsnîrj etc. Noos avons même plusieurs e muets de suite , par des monosyllabes;, mais il faut que la voix passe de Ve muet à une syllabe soutenue. Par exemple ^ëe ce que je redemande ce qui m*estdù^ etc. ; voil^ six e muets de suite, aa commencement de cette p'hrase, et il nesauroit 8*en trouver deux précisément à la fin du mot.

a.® LV est plus ouvert en plusieurs mots, comme dans la première syllabe i^^fermeté^ il est ouvert bref* Il est ouvert long dans greffe.

3.* LV est très- ouvert dans accès , succès , être ^ tempête^ il est ^ abbèsse^ sans cesse j professe <i arrêt ^ forêt ^ treize , la grève ^ il rèi>e , la tête>

LV ouvert commun au singulier , devient ouvert long au pluriel, le chef ^ les chefs; un mot brèf^ les mots brefs; un autel ^ des autels. Il en est de même des autres voyelles, qui deviennent plus longues au plurier. Voye»

de Grammaire^ i3l

le traité de la Prosodie ^ de M. Tabbè d'OIivet.

Ces différences sont très-sensibles aux per- sonnes qui ont reçu une bonne éducationdans la capitale. Depuis qu*un certain esprit de justesse, uG prcCision f». d'e^çtilude s'est un peu répandu parmi nous , nous marquons par des accens la différence des e.

C'est sur-tout à l'occasion de nos e brefs et de nos e longs , que nos Grammairiens font deux observations qui ne me paroissenC pas justes.

La première, c'est qu'ils prétendent que nos pères ont doublé les consonnes, pour marquer que la voyelle qui précède ëtoit brève. Celte opération ne me paroît pas na- turelle. Il ne seroit pas difficile de trouver plusieurs mots la voyelle est longue , mal- gré la consonne doublée , comme dans greffe , et nèfle. Le premier e est long , selon M. l'abbé d'Olivet (i)*.

L'e est. ouvert long dans abbèsse^ pro^

J'esse , sans cêsîe ^ malgré Vs redoublée. Je

crois que ce prétendu effet de la consonne

- redoublée , a été imaginé par zèle pour Tan-

: r ' ' "^

(i) Proaod, pag. ^j\

T 6

i3a Principes

cienne orthographe. Nos pères ëcnvoient cej doubles lettres, parce qu'ils les prononçoient, ainsi qa*on les prononce en latin ; et comme on a trouvé par tradition ces lettres écrites , les jeux s*y sont tellement accoutumés, qa*ils en souffrent avec peine le retranchement. 11 fajjcîc bîcu trouver une raison pour excuser cette foiblesse.

Qttoiqu*il en soit, 'il faut considérer la voyelle en elle-même, qui en tel mot est brève, et en tel autre longue. L*a est bref dans place , et long dans grâce , etc.

Quand les poètes Latins avoient besoin â*allonger une voyelle , ils redoubloient la consonne suivante, relligio. La première de ces consonnes étant prononcée avec la voyelle, la rendoit longue: cela paroit raisonnable. Nîcot , dans son Dictionnaire j au mot Aage, observe que, ce moi est écrit par un double aa , pour dénoter ce grand A François , ainsi que l'a grec: lequel aa nous prononçons avec traînée de la çoix en aucuns mots, comme en ChaaloQS. Aujourd'hui, nous mettons Taccent circonflexe sur Va, Il serait bien extraordinaire que nos pères eussent doublé les voyelles pour allonger, et les consonnes pour abréger.

de Grammaire. i33

La seconde observation , qui ne me paroit pas exacte, c*ést qu*on dit qu'anciennement les vo^relles longues étoient suivies d'5 muettes qui en niarquoient la longueur. Les Gram- mairiens qui ont fait cette remarque , n*ont pas voyagé au midi de la France , toutes ces s se prononcent encore , même celle de la troisième personne du verbe ^5/: ce qui fait voir que toutes ces ^ n*ont d*abord été écrites , que parce qu'elles éloicnt prononcées* L'orthographe a d'abord suivi, fort exacte-" ment , sa première destination : on écrivoit une 5, parce qu'on prononçoit une 5. On prononce encore ces 5 en plusieurs mots^ qui ont la même racine que ceux oii elle ne se prononce plus. Nous disons ençorefestinj de Jeté; la Bastille j et en Provence , la Bastide, de bâtir, J^oxxB disons prendre une ville par escalade , à' échelle ; donner la bastonade , de bâton ; ce jeune homme a fait une esca^ pade , quoique nous disions Rechaper, sans s.

En Provence ) en Languedoc, et dans les autres provinces méridionales , on prononc# \s de Pasques ; et à Paris , quoiqu'on dise Fâgue , on dit , Pascal ^ Pasquin^ pasqui'^ Tiade»

Nous av.ons une espèce de chiens > qu'on

l34 Principes

appelloît aairefois , Espagnols , parce qti^ils nous viennent d'Espagne. Aujourd'hui , on écrit Epagneul ^ oo prononce ce mot sans s, et IV y est bref. On Aiiprestolei* preslytérç^ de prêtre , prestation de serment; prestesse, celeritas^ de presto esse ^ être prêt,

LV est aussi bref en plusieurs mots , quoi- que suivi d*une 5) corame ddiUs presque^ 7770- deste ^ leste .^ terrestre, trimestre^ etc.

Selon M. Tabbé d'OHvei (l), il y a aussi plusieurs mots Ttf est bref, quoique 1*5 en ait éië reiranchée, échelle. Etre est long à Tinfinitif ; mais.il est bref dans cous êtes^ il a été,

Eufin , M. Restant, dans le Dictionnaire de V Orthographe française , au mol registre j dit que Vs sonne aussi sensiblement dans rc" gistre , que dans liste etjïineste ; ei il observe que du temps de Marot, on prononçoit épistre ^ comme registre^ et que c'est par cette raison que Marot a fait rimer registre avec épislre. Tant il est vrai, que c'est de la prononciation que Ton doit tirer les règles de l'orthographe. Mais revenons à nos 0,

L'e fermé est celui que Ton prononce en

i*Ma

(1) Proiod,

de Grammaire. i35

ouvrant moins la bouche qu'on ne Touvre lorsqu'on prononce' un e ouvert commun. Tel est r^dela dernière sjrljabe AtJ'ermeié , bonté ^ etc.

Cet e est aussi appelé masculin^ parce que lorsqu'il se trouve k la fin d'un participe ou d'un adjectif, il indique le masculin , aisé^ habillé^ aiméy etc.

Ue des infinitifs est fermé, tant que IVoe se prononce point j mais si l'on vient à pro« nonccr l'r, ce qui arrive touie les fois que le mot qui suit. commence par une voyelle^ alors Ve fermé devient ouvert commun ; ce qui donne lieu a deux observations.

1 .0 \j*e fermé ne rime point avec Ve ouvert : aimer ^ abîmer^ ne riment point avec la mer^ mare, A'\fis\ Madame Dcshoulières n*a pas été exacte , lorsque dans Vîdylîedu ruisseau , elle a dit:

DAns vBire sein il cherché à s'abtmer^ . yous et iuif jusqu'à la mer, Fous n^étes qu'une même chose,

a.** Mais comme 1'^ de l'infinitif devient ouvert commun , lorsque Vr qui le suit est lié avec la voyelle qui commence le mot suivant , on peut rappeler la rime en disant ;

l36 Principes

Dans votre sein il cherche à s'abîmer j Et vous et lui^jusqiCà la mer. Vous n'êtes qu'une même chose.

Ue muet est ainsi appelé relativement aox autres é. Il n*a pas, comme ceux-ci , un soa fort, distinct et marqué. Par exemple dans mener ^ demander^ on fait entendre T/netle d^ comme si Ton écrivoit , mner^ dmander.

Le son foible qui se fait à peine sentir entre Vm , et Vn de mener ^ et entre le d et Vrh de demander^ est précisément Te muet. C"est une suite de Tair sonore qui a été modifié par les organes de la parole , pour faire en- tendre ces consonnes.

L*e rouet des monosyllabes me , te , se^ le, de ^ est un peu plus marqué. Mais il ne faut pas en faire un e ouvert, comme font ceux qui disent amène-^lè : Ve prend plutôt alors !e son de Veu foible.

Dans le chant , à la fin des mots, tels que gloire ^ Jidè le j triomphe j Ve mnet est moins foible que 1'^ muet commun* et approche d'avantage de Veu foible.

LV muet foible , tel qu'il est dans mener, demander , se trouve dans toutes les langues , toutes les fois qu*une consonoe est suivie

de Grammaire, ï3j

îmmëdîatemeQt par une autre consonne. Alors )laprenjièrecle ces consonnes nesauroic être prononcée sans le secours d*un esprit foîble. Tel est le son qne Ton entend entre le p et 1*5, dans^ speudo^ psalmus , Psittacus ^ et entre Vm et Vn de mna^ une mine , espèce de monaoie ; Mnemoéine ^ la mère des Muses , la Déesse de la mémoire.

On peut comparer Ve miiet, au son foible

que Ton entend après le son fort que produit

un coup de marteau qui frappe un corps solide.

Aiusiil faut toujours s*arrê(er sur la syllabe

qui précède un e muet à la fin des mots.

Nous avons déjà observé , qu'on ne sauroît

prononcer deux e mueu de suite , b la fin d*ui^

mot, et que c*est la raison pour laquelle Ve

muet de mener devient ouvert dans je mène.

Les vers qui finissent par un e muet, ont

une syllabe de plus que les autres , par la

raison que la dernière syllabe étant muette , .

on appuie sur la pénultième. Alors , je veux

dire à celte pénultième , Tgrcille est satisfaite ,

par rapport au complément du riihine et du

nombre des syllabes : et comme la dernière

lorabe foiblemerit , et qu'elle n*a pas un son

plein , clic n'est point comptée , et la mesure

est remplie à la pénultième :

l38 Principes

Jeune et vaillant héros , doni la haute sagesse.

L*oreîlle est satisfaite a la pénuliîème , geSj qui est le point d*appui, après lequel OQ en- tend Ve muet de la dernière syllabe se,

Ue muet est appelé^/î^/Timi/j ^ parce qu'il sert à former le féminin, des adjectifs* Far exemple, saint ^ sainte; pur ^ pure ; bon^ bonne , etc. Au lieu que IV fermé est appelé masculin , parce que lorsqu'il termine ua adjectif) il indique ie genre masculin) m homme aimé ) etc.

LV qu'on ajoute après le^, il mangea^ etc. ) n'est que pour empêcher qu'on ne donne au g le son (ort ga , qui est le seul qu*il devroit marquer. Or , cet e fait qu'on lui donne le son foible , il menja. Ainsi cet e n*est ni ouvert , ni fermé , ni muet. 11 marque seulement ^ qu'il faut adoucir le gy et pro- noncer yV^ comme dans la dernière syllabe dégage. On trouve en ce mot le son fort et le son foible du g,

LV muet est la voyelle foible de eu: ce qui paroît dans le chant ^ lorsqu'un mot fiai( par un e muet ii^oins foible.

Hien ne peut l'arrêter Quand la gloire f appelle.

de Grammaire, l3,9

Cet eUf qui est la forte deJ*^ muet, est uoe véritable voyelle. Ce n'est qu'un son simple^ sur lequel on peut faire une tenue. Cette voyelle est marquée dans Técriture par deux caractères : il ne s'ensuit pas de que eu soit une diphtongue a l*oreille , puisqu'on n'en- tend pas deux sons voyelles. Tout ce que nous pouvons en conclure ) c'est que les au- teurs de notre Alphabet'ne lui ont pas dounii un caractère propre.

Les Iciires écrites , qui , par les chaQgemen» survenus à la prononciation , ne se prononcent point aujourd'hui , ne doivent que nous aver- tir que la prononciation a changé. Mais ces lettres multipliées ne changent pas la nature du son simple, qui seul est aujourd'hui ea usage ^ comme dans la dernière syllabe de ils aimoient y amabûnt,

L'e est muet long dans leâ dernières syllabes des troisièmes personnes du plurier des verbes , quoique cet e soit* suivi d'/ï/ qu'oa prononçoit autrefois, et que les vieillards prononcent encore en certaines provinces. Ces deux lettres viennent du latin , amant ^ ils aiment.

Cet e muet est plus long et plus sensible qu*il ne l'est an singulier», U y a peu de per-

«#

ï4o, Principes

sonnes qni ne sentent pas la différence qu'il ja dans la prononciation^ entre il aimetx ils aimenU

DES DIPHTONGUES;

X^E mot diphtongue par Ini-même est ad- jectif de syllabe t mais dans Tusa^e on le prend subsiantivemeut. A e$t uue syllabe nionophtongue, c*est -a -dire , uue syllabe énoncée par un son unique ou simple ; ao lieu que la vsyllabe ou prononcée à la latine a ou^ et comme on la prononce encore en Italie ^ etc. et même dans nos provinces mé- ridionales; au , dis-je, ou plutôt a^^ou, c'est une dipbtongue , c'est-à-dire , une syllabe qui fait entendre le son de deux voyelles par une même émission tle voix. , Hiodifîée parle concours des mouvernens simultanés des or- ganes de la parole. De J"/?, et ^B^ôyy^i^ seniu,

L*esseDce de la diphtongue consiste donc en deux points.

I.® Qu'il n'y ait pas^ du lytoins sensible-

J

de Grammaire, Î4t/

Kient y deux niouvemens successifs dans lea orgaues de la parole.

2.^ Que Toreille sente dislinctement les deux voyelles par la même émission de yoix« Dieu, j'entens Vi et la voyelle eu; et ces deux sons se trouvent réunis en une seule syllabe , et énoncés en un seul temps. Cettt réunion , qui est TefTet d'une seule émission de voix , fait la diphtongue; s\n%\xiu, ai, oient ^ etc. prononcés a la françoise, o, è^ é^ ne sont point diphtongues. Le premier est prononcé comme uu 6 long, au-mône^ait^ne. Les par- tisans même de Tancienne orthographe récria- vent par o en plusieurs mots^ malgré Téty* mologie, or de aurum; o^reille de auris ; et a regard de ai^ oit , aient , on les pro- nonce comme un ^, qui le plus souvent est ouvert, palais comme succès^ ils ap-^oient^ ils affê I etc.

Celte dift'érence entre rorihographe et la prononciation , a donné lieu h nos Gram-* mairiens de diviser les diphtongues en vraies on propres , et en fausses ou impropres. Us appellent aussi les premières diphtongues de l'oreille^ et les autres diphtongues aux yeuse. Ainsi VjE et , qui ne se prononcent plus ^uj0urd*hui que comme un ^^ oc sont

14» Principes

diphtongaes qu'aux yeux; c*csl înipropre- nicnt qu'on le« appelle diphtongues.

Nos voyelles sont a ^é, è^ é, i, o, euy e muet ou. Nous avons eucore nos voyeiles nazalfs ^ an ^ en. in , on , un» C'est la com- binaison ou TunioD de doux de ces voyelles en uoe seule syllabe , eu un seul temps , tjai fait la dipluoQgue.

Les Grecs nomment prépositwe la pre- mière voyelle de la diphtongue , et postpo-' iiliçe la seconde: ce n'est que sur celle-ci que Ton peut faire une tenue comme noos l'avons remarque en parlant des consonnes. Il seroit à souhaiter que nos Grammaineos fussent d'accord enlr*eux sur le nombre de DOS diphtongues ; mais nous n*en sommes pas eucore a ce ]point-là. Nous avons ooe Grammaire qui commence la liste des diph- tongues par eo ^ dont elledonne pour exemple Géographie ^ Théologie, Cependant jl me Semble que ces mots sont de cinq syllabes, Cé^o^gra''phi'-e ^ Thé-o-îo-gi^e, Noç Gram- mairiens et nos Dictionnaires nie paroissent avoir manqué de justesse et d'exactitude an sojct des diphtongues ; mais sans me croire plus infaillible, voici celles que j'ai remar« ^oées en suivant l'ordre des voyelles. Les

\

de Grammaire^ 148

aoes se trouveot ed plusieurs mots , et les autres seulement eu queiqucs-uos.

Ai , tel qu'on Teuteiid dans rioierjeclîoa de douleur ou d'exclamation, ai^ ai, ai; et quand Va entre en composition dans la même syllabe avec le mouille fort, comme dans m^ail, b^ail, de Va^il ^ a-ti^r*ai\ éçan^ t^ail j por^i^ail^ etc. ou qu'il est suivi du mouillé foible ; la ville àv Bl^aye, en Guienne , les îles hu^Cwayes en Amérique.

Cette dipKtongue ai est fort en usage dans nos provinces d'au-delà de la Loire. Tout les mots qu'on écrit en François par ^21^ comme faire, nécessaire, jamais , plaire , palais , etc. y sont prononcés para-», diphtongue : on entend Va et 1'/. Telle étoit la pronon- ciation de nos pères , et c'est* ainsi qu'on prononce cette diphtongue en grec, fictftit^ Tif^ut, Telle est aussi la prononciation des Ita- liens, des Espagnols, eic. ce qui fait bien voir avec combien peu de raison quelques per- sonnes s'obstinent à vouloir introduire cette diphtongue oculaire à la place de la diphton- gue oculaire ci dans les mois français, croire, comme si ai étoit plus propre que oi à repré- senter le son de l'^. Si vous avez a réformef oi dans les mots il se prononce ê , mettefi^

f44 Principes

è; autreruent c*est réformer nu abas par uif plus grand, et c'est pêcher contre Tanaiogie. Si Ton écrit François ^ j'açois ^ c'est que nos pères proaoDçoieDl François , j'ovois ; mai* on n*a jamais prononcé Français eu faisaot entendre Va et Vi, En un mot si l'on vonloit une réforme , il falloit plutôt la tirer depro^ ces y succès^ très^ auprès^ dès , etc. que de se régler sur palais et sur un petit nombre de mots pareils qu'on écrit en ai y par la raison de i*étymqlogie palatium, et parce que telle éioit la prononciation de nos pères: prononciation qui se conserve encore, noD« seulement dans les autres langues vulgaires, mais même dans quelques-unes de nos pro-* vinces.

Il n*y a pas long-temps qUe Ton écrivoit naiy natus; il est nai. Mais enfin la pronon- ciation a soumis l'orthographe en ce mot, et Ton écrit né»

Mais passons aux autres diphtongues.

J*observerài d'abord que IVne doit être écrit parj/*^ que lorsqu'il est signe du mouillé foible.

F^àu, Fléau , ce mot est de deux syllabes.

Btre V effroi du monde ^ et le &éêQ de Dieu (i). (i) Coraeille*

' de Grammaire, 145

A l'égard de seau^ eau^ communément ces trois lettres eau se prononcent comme un o f or t long , et alors leur ensemble n*cst qu'une diphtongue Oculaire ou une sorte de demi- diphtongue f dont la prononciation doit être remarquée; car il y a bien de la différence ^ans la prononciation entre un seau à puiser de Teau et un sot y entre de Veau et un os^ eatre la peau et le y rivière, ou Pau^

_ #

ville; M. l'abbé Régnier dit (r) que qui est joint à au dans cette diphtongue se pro-* nouce comme un ^féminin ,et d'une manière presqu'imperceptible.

£/^ comme eu grec rth»^ iendo. Nous ne prononçons guère cette diphtongue que dans des mot» étrangers, bei ou bey; dei ou dey; le Dei de Tunis ; ou avec l'/i nasal , commo dâa% teindre y Reims j ville.

Selon quelques Grammairiens , on entend en ces mots un i très-r-fcible, ou un son par- ticulier , qui tient de Ve et de Vi, Il en est de même devant le son mouillé dans les mots ^O'I'-eily con-S'-eilj som-ni-cil ^ etc.

Mais selon d'autres, il n'y a en ces der- niers, que Ve suivi du son mouillé; le ç^ie-il

(1) Grammaire , pag, 7c.

\

146 Principes

homme , con^s^^e'^il^ somm^e^îl^ elc. ; et de Tnêoie avec les voyelles a, ou, eu, Aimi , selon ces Grammairiens, dans œil^ qu'oa prononce euil, il n*y a qcre eu suivi da son mouillé , ce qui me paroit plus exact. Comme dans la prononciation du son mouille , les organes commencent d*abord par être dis« posés , comme si Ton alloit prononcer i , il semble qu*ily ait un i: mais on n'entend que le son mouillé , qui dans le mouillé fort est une consonne. Mais àTégard du mouillé foi- ble , c'est un son mitoyen , qui me paroît tenir de la voyelle et de la consonne : mo^-yen , pa- yen : en ces mots ^ yen est ^n son bien diffé- rent de celui qu'on entend dans bien y mien , t^en,

Ia. D'ia^crej D'^ia^mant, sur- tout dans le discours ordînairp. F'ia»cre; les Plé-ia-des; de iBrV'ia-nde ; négo^c^iani; incon-çé-n^ien-t

Ie. P^ié ou p^iéd y les p^ié^ds ; ami^Uié l pi'rUié ; pre-'ni'-'iery der-^nfier; mé-l-ier.

ouvert. Une p-iè^le ^ inslruraenl ; ^o/- iè-re^ Gu-^'^-ne, province de France 3 F"-**^- ne , ville , ou verbe , {fcniati n-^iai-s , b^iai^s , on prononce niés ^ hiès ^f^iè^r \ un t^ié^rs; le C'-ie^l; Ga-br-ierl; ^5-5(?/2-^-ï>-/; du

de Grammaire. tù^n

IsN, Vi n*est pas niouiHé foible ; b^ien , m-ien^ i^ieny s^feiij en^trC'^t^ien ^ ch^ien ^ C0'mé''d''ien<^ In^d^-ien t^ gar^d-ien^ pra^ti'* e-'ien, lu*i et la vojelle uasàle en en sont 1& diphtongue*

Ijsu; D^ieu^ Uieu^ les c^ieux, miteux, loifcia-le^ t:a''pr*iQ'le f car^iO'-le ^ p'-'iom le , snr-tout en prose.

ÎON , p^'ion^ que nous ai^m^ion-s ^ di^-s-^ ion^s ) etc. Ac-'i^ion ; occa'^s-ion. Ion est souvent de deux syllabes en vers.

lou. Cette diphtongue Q*est d'usage que dans nos provinces méridionales , ou bien en des mots qui viennent de là. Mon-teS'» çu'iou^ Ch^iouii'r'>me ; O'I-iou-les^ ville de Provence , la Ciotat , ville de Provence ) on dît la 0-ioii»tat.

Y A ) y an ^ ye , e muet , , etc. L*i ou ly a souvent devant les v^oyeMes un son mouillé foible; c'est-à-dire, un son exprimé par un mouveroent moins fort^ que celui qui fait entendre le son mouillé, dans Ver^ s aille s ^ pallie: mais le peuple de Paris, qui prononce Versa^ye^ P^y^-i fait entendre un mouillé foible. Ce son est l'effet du mou- vecuent affoibli qui produit le mouillé fort. Ce qui fait une prononciation particulière,

G ^

1 48 Principes

" diûiérente de celle qu'on eatcnd dans mien, tien , ou il n'y a point de son mouillé, oomme nous l'avons déjà observé.

Ait\ji je crois pouvoir mettre au ran^' des diphtongues les sons composes , qai résultent d'une voy^le jointe au mouillé foible. A-ycmi^ vo-yant , payen , pai-yanl, je pai^ye^ emplo-yer^ do^yen, afin que voo» so^yer-z , dé'laUjre-r^ bro^e^n

Oi» La prononciation naturelle de ceut ^diphtongue est celle que Ton suit en grec, >,ùfyot.'On entend Vo et Tr. C'est ainsi qo'on prononce comi^junément ^ *Y>/-^ff-»i^j po/- ye-;-, moi-yen y lopyal^ roi^aume* On écrit communément^ çoyeîle^ 4^yer,. moyen y loyale royaume. On proootice encore ainsi plusieurs mots, daosles pro.Tinces d'au-delà de la Loire. On dit Sat^'Oi-e^, en faisaoi entendre Vo et \% A Paris , on dit Sai^o- ya»rd: ya est U diphtongue.

Les autres^niAnières de prononcer la diph- tongue oi ne peuvent pas se faire entendre Citacten^nt par écrit. Cependant, ce que nous allons observer, ne sera pas inutile^ ceux qui ont les organes assez dëlicais et 96SCZ. souples pour écouler et pour iruiter }jis persQuoes ^ui put çu Tayanta^^ d'ayoif

de Grammaire, ï40 i

iSië élevées dans la capitale, et d'y avoir reçu*^ une éducation perfectionnée par le commerce des personnes qui ont Tesprit cultivé.

Il y a des mots * oi est aujourd'hui presque toujours changé en oe , d'autres oi se change' en o'er, et d*aulres enfiir en oua. Mais il ne faut pas perdre de vue ^ qoie hors les mots l'on entend Vo et Tr, comme en grec A^y^i , il n'est pas possible de représenter bien exacteinrent par écrit les difféirentes prononciations de cette diph- tongue. _

Oi, prononcé par oe, l'^r a un son ou-* vert , qui approcbe de l'o ; F-oi , l'oy^fr-*

c-^i-ffe ) oiseau , j^-ci-e , d^oi^gt ^ d-oUt , ab^oi^s , t^oi-rle , etc.

Oi ^ prononcé par ou: M'Ois ^ p-'oi^s ^ n-oUx^y tr-oî'S , U ville de Tr^ot e , etc. Prononcez, m^oa^p'oa^ etc. s

Oi, prononcé par oua\ b^oi-^s*, prononcez, b^oti^-a»

OtN* S'oiti , l-orri , be^S'Oin ^f-oin ^j-oin" dre y ni'oin^^ On doit plutôt prononcer en ces mots une sorte d'e nasal après Ve , que de prononcer ouin ; ainsi prononcez soein ^ plutôt que soui/f»

G 3

l5o Princiffeâ.

Il faut toujours »e ressouvenir qut nôos Bravons pas de signes pour représeater exac- tement €e$ sortes de sous,

Oua , écrit par ua^ éç-^ua^ieur^ équa- tion , aq^uch'iique , {jfmnq^uagésime , Pro- noncez é^c^ouorteur^ é^g^oua^tion , a-^ fiuO'^iiçue. , çuin^ç»Qua'gésime*

Oe, P^oC'-te , p^^d'^me. Ces mots sont plus ordinairement de trois sjUabes en ven. Mais dans la liberl4 la conTersation,0D prononce poe^ comme diphtongue»

Ou EN, Ecmouen , R^ouen , villes. Dipb* longues en prose.

OuK. Ouest, Sud'Oue^si.

Oui, Bouis^ Louis ^ eu prose. Ge denii«} mot est de deux Syllabes en vers , oui, ita.

Oui,_ ca sont ces plaisirs et cef pleurs qum fexuM* Oui f Je t'achèterai le Praticien Français,

Ractneg

Ouivr. BoKOrg-^nin^ ba-b^uin,

Ve, Statue éq-^uesire , caS'-ue^l, ann" uâ'l, éc^^ue-'llCj r-ue^e, tr^ue^llCj sur-toot en prose.

Ui. L'ui, ét'-ui, n^ui^tj hr^ui^t ,Jruit , h^ui^i , l^ui-re j je s^uis un S'-ui^sse»

UiN^ Al^c^uin, théologien célèbre do

de Qrammaire, l5l

temps de Charlemagne. Qj'uin^quagésime , prOQOocez çru/zi) comme ea laiia; et de même , Q^uin^tiUien ^ le mois de J-uin* On enteod Vu et Vi nasal.

Je ne parle point de Caen^ Laon^ paon^ Jean^ etc. parce qu*on n*eateod plus au- jourd'hui qu'une voyelle nasale en ces mots- là. Cany pan y Lan y Jan.

Eofin , il faut observer, qu'il y a des com- binaisons de voyelles qui sont diphtongues en prose et dans la conversation , et que nos poètes font de deux syllabes.

Voudroîi-tu bien chanter pour moi, cher UetdaSi Queî^uair Si-ci-li>eii (i).

On dit Si'Ci'îien , en trois syllabes , dans le discours ordinaire. .

t,a foi^ ce nœud sacré ^ ce lî-en précieux (^; XI est juste , grand Roi , çu'un mtuTlr ['tT périsse (3)* AUez y vous deyri>ez mourir de pure honte (4). Vous p«rdri ez le temps en discourt superflus (5). Cette fièro raison dont on fait tant de bruit y

immmmÊammmmmm^mmmm

(i) Longepierre. (a) firébeaf. (5) Coroeii!«.

(4) Molière.

(5) FoïTlcncIIè.

G4

t5a Principes

Contre ie$ piU»i-ons rCtstpas un sûr remède (*). Ifonyje ne hais n'en tant tfue les contorsions De tous ces grands faiseurs de protestati-ons (a).

j Jjfii plupart des mots en ion et ions soct diphtongues en prose. Voyei les divers trai- tés que nous avons de la versification frau- Soîae.

Au reste, qu*il y ait en notre langne pb ou moins de diphtongues que je n'en ai mar- qué , cela est fort indifférent y poorTu qa'oA les prononce bien. 11 est utile dit Quintilieo, de faire ces observations. César y dit-il^Ci- céroD, et d'autres grands bomines ^ les oni faites ; mail il ne faut les faire qu^en passant. Marcus Tullius orator, artis hujus diligent ils si/nus fuit ^ et inJiUo ^ ut in epistoiis ap- •par et. Non obstant disciplmœ per iiias suntibus , sed circa illas hoBrenlibus (3).

^0mÊ^^mmm'i0mmmmtmmmi^t0^mmmmmmmmm

-<)} De«hou1ière«« (a) Molière, |3) Quiatilicn, Insttt, orat. lib. i, cap. 7, in Jim-

ie Grammaire. l55

DES ACCENS.

immmmi

Li

lE mol Accent vient à^accentum ,^\x^\m, du verbe accinere^ qui vicoudc aâtx de ca- jiere. Les Grecs rappellent U^oTmlU^ modu— latio quœsyllahis adhibetur^ venant jrpàf , préposition grecque qui entre dans la com- position des mots ^ et qui a divers osages , et d'tfJ'if , cantus ^ chant. On l'appelle aussi roVdç, ton»

Il faut ici distinguer la chose , ti le sifine de la chose.

La chose, c'est la vdix ; la parole, c'est le mot, en tant que prononcé avec toutes les modifie a (ions établies par l'usage de ialango^ que l'on parle.

Chaque nation, chaque ^peuple, chaque province, chaque ville même, diffère d'un autre dans le langage, non-seulement parce qu'on se sert de mots différens; mais encore par ta manière^d'articuler et de prononcer les mots,

G 5

l54 Principes

Cette manière différente dans raniculauoB des mots est appelée accent. En ce sens les mois écrits Q*ODt point d*accens; car Taccent ou ]*articulation modifiée-^ ne peut affecter queToreille: or Técriiure n'est aperçue que par les yeux.

C'est encore en ce sens queles Poètes disent: prêtez l'oreille à mes tristes accens; et qae M. Pelisson disoitaux réfugiés: Vous tâche- rez de vous former aux accens d'une langut étrangère.

Celte espèce de modulation dans le dis- cours , particulière à chaque pays ^ e$t ce que M* l'abbé d'OUvet, dans son excellent Traita de la Prosodie <y appelle accent nationçh

Pour bien parler une langue. vivante , il faudroit avoir le même accent , la même in- flexion de voix qu'ont les honnêtes gens de la capitale. Ainsi , quand ^n dit que pour bien parler Jrançois , */ ne Saut point apoir d'accent ^^ on veut dire qu'il ne faut avoir ni Tjiccent italien, ni l'accent gascon, ni l'ac- cent picard, ni aucun autre accent, qui n'es£ pas celui des honnêtes gens de la capitale.

Accent 'i ou modulation de la yoix dans le . disceurs , est le genre dont chaque accent oa- ^4ional est une espèce particulière. C'est ijnsi

de Grammaire;^ j55

qu*on àilY accent gascon, V accent Jiamand. L*acceDt gascoo élève la voix où^ selou le bon usage, on la baisse ; il abrège des syllabet que le bon usage allonge. Far exemple uo Gascon dit pûrconsguent ^ au lieu de dir^ peur conséquent. Il prononce séc hement toutes les voyelles nasales an^ en^ in^ on^ un y etc.

Selon le mëchaBisme des organes de la parole ^ il y a plusieurs aortes niodifica-f tions particulières à observer dans Tacceot en général, et toutes ceS' niodificaiious se trouvent aussi dans chaque accent national , quoiqu'elles soieiU appliquées différemment : car si Ton veut y prendre garde i on trouve par-tout uniformité et variété. Par- tout les hommes ont un visage , et pas un ne ressem- ble parfaitement à un autre ; par - tout les hommes parlent , et chaque pays a sa ma*f nière particulière de parler et de modifier la voix . Voyons donc quelles sont ces différentes modificatrons de vbix qui sont comprises sous le mot général d*accent,

I. Premièrement , il faut observer que les syllabes en toute langue , ne sont pas pro* noncées du même ton. Il y a diverses in<» flexions de voix , dont les unes éîèveni le ton , les autres le baissçpt, et d'autres enfin , Télé-

ce.

i56 Principes

vent d*abord «t le rabaissent ensaite snr It rnéme syllabe. Le ton élevé est ce qa*0B appelle accent aigu; le tonbas ou baissé est "ce qu*OQ nomoie accent grape; enfin le toa élevé et baissé saccesivement et presqu*ea mérne-temps sur la même syllabe , estraccent circonflexe*

« La nature de la voix €St admirable , dii Cicéron : toute sorte de chant est agréa- » blement varié par le ton circonflexe , par >> Taigu et par le grave: or le discours ordi- ^ naire y poursuit' il , est aussi une- espèce de y chant )^. Mira est natura pocisy cujus qui' éiem^ è tribus omninà sonis, inftexo^ acute^ graçi ) tant a sit et fam suaçis parieias per^ jfecta in cantibus : est autem in dicendo etiam quidam confus ( l ). Cette dififôrente modification du ton , taniôt aigu , tantôt grave et tantôt circonflexe , est encore seâsible dans le cri des animaux et dans les iostrument de musique. "*

* 11. Outre cettfe variété dans le ton , qui est ou grave, q^jl aigu, ou circonflexe ^ il y a encore à observer le temps que Ton meta prononcer chaque syllabe. Les ones sont

<t) CÎGéron, Oratqr, n. ^7 et 18.

^

de Grammaire. iSy

prononcées en moins de temps que les autres^ et Ton dit de celle-ci qu'elles sont longues, et de celles-là qu'elles sont brèves. Les brèves »o1R prononcées dans le moins de temps qu'il est possible: aussi dit-on qu'elles n*ont qu'ua temps, c'est-à-dire, une mesure, un batte- ment: au lieu que les longues en ont deux ; et voilà pourquoi les anciens doubloient sou» vent dans récriture les voyelles longues , ce cjue nos pères ont imités en écrivant aûge^

Les anciens relevoîent la voix sur l'a da nominatif, et le marqaoient par un accent aigu Mu^à: au Heu qu'à l'ablatif, ils l'élevoien t - d'abord, et la rabaissoit ensuite, comme s'il y avoit eu Musâà; et voilà l'accent circon- flexe que nous avons conservé dans l'écrr- tiire , quoique nous en ayons perdu la pro- nonciation.

III. On observe encore l'aspiration qui se fait devant les voyelles en certains mots , et qui ne se pratique pas en d'autres, quoi- qu'avec la même voyelle et dans une syllabe pareille. C*est ainsi que nous prononçons le

héros avec aspiration , et que nous disons .

rhéroïqe, V héroïsme et les vertus héroïques sans aspiration.

IV. A ces troisdifférencesquenoas venoM ,

i58 Principes

d'observer daD$ la proDoociatiou , il faut en- eore ajouter lu variété du ton pathétique , comme daDs l'interrogatioa) radmiration, rironîe ) la colère ei les autres passions* G'est ce que M. Tabbé d'Olivet appelle V accent oratoire,

y. Eofin , il y a à observer les intervalles que l'on met daos la proAonciatipn ^ dopais la fia d'une période )ttsquVu commencement de la période qui suit ; et entre une propo- sition et une autre proposition: entre uoe incise) une parenthèse) une proposition in- cidente ) et les mots de la proposition prin- cipale , dans lesquels cette incise , cette pa- renthèse ou cette proposition incidente sont enfermées.

Toutes ces modiiications de la voix , qui sont très - sensibles dans rélocutioU) sont, ou peuvent être marquées dans récritare, par des signes particuliers y que les anciens Xîrammairiens ont aussi appelés acc^/?^. Ainsi ils ont donné le même nom ^ la chose, et au signe de la chose. ^

Quoique Ton dise communient que ces lignes oU accens sont une invention gai n*est pas trop ancienne ) et quoiqu'on montre des inaniiscrits de mille ans ^ dafifi lesquels on ne

ie Grammaire. i5^

voU aucun de ces signés , et ou les mots sont écrits de suite ^ sans être séparés les ups des. autres, j'ai bien de la peine à croire que lors<|u*une langue a eu acquis^ un certain de-« gré ^e perfection, lorsquelle a eu des Ora* tears et des Foëtcs, et que' les Muses ont joui de la tranquillité qui leur est nécessaire pour faire usage de leurs talena; j'ai, dis*je^ bien de la peine à me persuader qu^alors les copistes habiles n'ajent pas fait tout ce qu'il falloic pour peindre la parole avec toute Inexactitude dont ils étoient capables ; qu'ils n'ayent pas séparé les mots par de petits in-« . lervalles , comme-nous les séparons aujour* d'hui , et qu'ib ne se soient pas servi de quelques signes pour indiquer la bonne pro« nonciation.

Voici un passage de Cicéron qui me paroît prouver bien clairenoent qu'il y avoit de son temps des notes ou signes dont les copistes 'fais oient usage. Hanc diligeniiam suhse-^ quitur modus eiiam et forma verborum» Versus enim çeteres illi j in hac soluta ùratione propemodàm , hoc est numéros cjuasdam nobis ess^ adhibendos putarunt^ Interspîrationis enim^ non dejaiigationis nostrœ^ neque liirariorum notis^ sed per^*

l£# Principes

borum et sententiarum modb interpunciot clausuîas in orationibus esse çoluerunt : id- que princeps îsocrates insiUuissej€rtur{i), Les anciens , dit-il , oat voulu qu'il j eût » dans la prose même des intervalles , des "P séparations , du nombre et de la mesure, » cornnie dans les vers : et par ces intervalles, 1^ cette mesure ) ce nombre , ils ne veulent ^ pas parler ici de ce qui est déjà établi poor 1^ la facilité de la respiration et pour soulager "P la poitrine de l*Oratcur , ni des notes ou ^ signes des copistes : n>ais ils veulent parler "P de cette manière de prononcer qui donne de ^ Tame et du sentiment aux mots et aoi 9 phrases, par une sorte de modulation pa- » thétiqne ». Il me semble que l'on peut conclure de ce passage , que les signes , les notes, les accens, étoient connus et prati- qués dès avant Cicéroo, au moins par les copistes habiles.

Isidore , qui vivoît il y a environ dooze cens^ans, après avoir parlé des accens, parle encore de certaines notes qui étoient en usage , dit*il , chez les Auteurs célèbres , et

que les anciens avotent inventées ^ poorsuit-

i

■■■'•■ ...■■■■ I . n II*

(i) Cicéron , Orcior. lib. 5, n. 44.

de Grammaire. i6i

il , poar la distinction de Técritare , et pour montrer la raison , c'ést-à-dire , le mode , U manière de chaque mot et de chaque phrase. Prœterea , quœdam sentent iarum notœ apua celeberrimos autoresjïierunt , guasque an^ tiqui ad distinctioneni scripturarum^ carmi" nibu^ ethistoriis apposuerunty addemonstran» dam unamquamque verbi, sente ntiarumque, ac versuum rationem (l). .-^

Quoi qu'il en soit, il est certain que la manière d'écrire a été sujette à bien des variations | comme tous les autres arts* Ainsi ^ tout ce que Too peut conclure de ces manuscrits, l'on ne voit ni distance entre les mois, ni accens, ni points, ni vir- gules , c'est qu'ils ont été écrits qu dans dea temps d'ignorance, ou par des copistes peu instruits.

Les Grecs paroissent être les premiers qui ont introduit l'usage des accens dans l'écri- ture. Mais leurs accens n'^voîent pour objet que les inflexions de la voix, en tant qu'elle, peut être ou élevée ou rabaissée.

L'accent aigu , que l'on écrivait de droite b gauche- ' , marquoit qu'il falloit élever la

ttm

, (i) Uidore, Origin, Mb, i| c^ a««

'l(Î4 Principes

Cette différence entre la prononciation des anciens et la nôtre , me paroit être la véri- table raison pour laquelle , qtioic|ue ^nous ayons une quantité , comme ils en àvoieot . une, cependant la différence 'd« nos longaes et de nos brèves n*étant pas également sen^ sible en tous nos mois, nos vers ne sont formés que par Vharmonie qui résulte du nombre des syllabes ^ au lieu que les vert grecs et les vers latins tirent leur harmonie du nombre des piedd assortis par certaines combinaisons de longues et de brèves.

Aujourd'hui , dans la Grammaire latine, on donne le nom d'acceni qu'aux trois signes dont nous avons parlé , le grave , Taiga et le circonflexe. Mais les anciens Grammai- riens latins donnoient le nom d'accent à plusieurs autres signes employés davi récri- ture. Priscien, qui vivoit dans \t siiriénie siècle, et Isidore, qui \ivoit pe« de temps après , disent également que les latms oni dix accens.

A notre égard , nous donnons te nom

d'accent, premièrement aux ' inflexions dt

~ voix, et à la manière de prononcer des pays

particuliers. Ainsi , comme nous IVvons

déjà remarqué , Qous disons V accent gascon.

de Grammaire» l6S

etc. Cet homme a l'accent étranger , c'est- à-dire , qu*il a<]es ioftexions de voix et une manière de parler, qui n'est pas celle des personnes nées dans la capitale. En ce sens , accent comprend i'ëlération de la ypvt , la quantité et la prononciation particulière d* chaque mot et de chaque syllabe.

En second lien, nous avons conservé le nom d'accent à chacun des trois signes du^ ton, qui est ou aigu, ou grave, ou circonflexe. Mais ces trois signes ont perdu parmi nous leur ancienne destination. Ils ne sont plus, ^ notre égard , que de^ accent imprimés.

En fran^oîi , nous élevons la syllabe qui * précède un e muet. Ainsi , quoique dans tnener, Ve de la pr^emière syllabe me soit muet* cet e devient ouvert, et doit être sou- tenu dans je mène ^ parce qu'alors il est suivi d'un e muet, qui finit le mot. Cet e iinal devient plus aiséjrnent muet, quand la syllabe qui le précède est soutenue. C'est le méôani^rae de la parole , qui produit toutes ces variétés, qui paroissent des bisarreries ou des caprices de l'usage à ceux qui ignorent les véritables causes des choses.

L'usage n'a point encore établi de mettre nu acc;^ot $ur Ve ouvert, quand cet e est

t66 Principes

i V

suivi d*uae consûone , avec laquelle il oe fait(ia*une syllabe. Ainsi on ëcriisansacceot , la mer^ \ejer^ aimer ^ donner^ clc.

mmmm

DES NOMS ADJECTIFS.

L

£ mot adjectif Tient da laiin adjectus, ajouté j parce qu'en effet le nom adjectif est toujours ajouté à un nom substantif^ qui est ou exprimé ou sous-enteodu. L'ad- jectif est un mot qui donne une qualifica- tion au substantif : il en dësigue la qualité ou manière d*éire. Or, comme toute qua- lité suppose la substance dont elle est qua<* lilé, il est évident que tout adjectif suppose un substantif: car il faut être, pour être tel; Que si nous disons , le beau cous tou^ che; le çrai doit être l'objet de nos recher* ches ; le bon est préférable au beau , etc. U est évident que sous ne considérons mérae alors ces qualités , qu'en tant qu'elles sont attachées à quelque substance ou suppôt: le ^^au ,^c'est-k«dire , ce çui est beau ^ le

de Grammaire» 16 j

if rai , c'est* k- dire , ce qui est vrai, etc. En ces exemples 9 le beau , le çrai / ne sont pas de purs adjeétifs. Ce sont des adjectifs pris substantivement , qui désignent un sup- pôt quelconque ^ en tant qu'il est ou heau \ ou vrai^ ou bon ^ etc. Ces mots sont donc alors en uiême-teraps adjectifs et substan- tifs. Ils sont substantifs , puisqu'ils désignent un suppôt , /^..,. Ils sont adjectifs puisqu'ils désignent ce suppôt , en tant qu'il est tel.

Il y a autant de sortes d'adjectifs qu'il y a de sortes -de qualités, de manières et de relations que notre esprit peut considérer dans les objets.

Nons jie connoissons point les substances en elles-mêmes, nous ne les connoissons que par les impressions qiî^elles font sur DOS sens ; et alors nous disons que 1^ objets sont tels ) selon le sens que ces irapressioas affectent. Si ce sont les yeux qui sont affec* tés, nous disons que l'objet est coloré, qu'il est ou blanc, ou noir, oa rouge, ou bleu ^ etc. Si c'est le goût , le tdrps est ou doux , ou amer, ou aigre , ou fade , etc. Si c'est le tact , l'objet est ou rude , ou poli , ou dur, ou mou, gras, huileux ou sec , etc.

4^iosij ces inots ^ blanc, noir, rouge ^

t^S Principes '^

hleu , doux , amer, aigre , ^fade , elc. sont amant de c|ualifica lions que Dotis dounoos aux objets , et sont j[yar conséquent auiàm de noms adjectifs. Et parce que ce sont les expressions que les objets physiques fout f Ur nos sens ) qui nous foât donner à ces objets les qualifications dont nous venons de parler^ nous appellerons ces sortes d'ad- jectifs , adjectifs physiques.

Comme uoas sommes accoolaxnés à qua- lifier les êtres physiques, en conséquence des impressions immédiates qu*ils font sur nous , nous qualifions aussi les êtres méta- physiques et abstraits y en conséquence de quelque considération de notre esprit à notre égard. Les adjectifs qui expriment ces sortes de vues ou considérations , sont ceux que j^appelhe adjectifs métaphysiques.

Les adjectifs métaphysiques sont ea très* grand nombre. On pourroît en faire autant déclasses différentes , qu*il y a de sortes de vues, sous lesquelles Tesprit peut considérer les êtres physiques et les êtres métaphysiques.

Supposons une allée d^arbres , dans une vaste plaine. Deux hommes arrivent à cette allée, l'un par un bout, Tautre par le bout opposé. Chacun de ces hommes regardant

les

de Grammaire, 169

les arbres de celte allée , dit : Voilà le pre^ mieri de sorte que l'arbre que 'l'un appelle le premier, est le dernier^ par rapport a l'autre. Ainsi premier^ dernier ^ et -les autres Qoms de nombre ordinal, ne sont que des adjectifs raë ta physiques. Ce sont des adjectifs de relation et de rapport numéral.

Les- noms de nombre cardinal , tels que ieux^ trois^ etc. sont aussi des adjectifs mé- taphysiques, qui qualifieiit une collection d'individus.

Mon ^ ma: ton, ta; son, sa, etc. sont

«

aussi des adjectifs métaphysiques ) qui dé- signent un rapport d'appartenance ou de propriété I et non une qualité physique et permanente des objets.

Grand et petit sont encore des adjectifs métaphysiques. Car un corps , quel qu'il soit Q*est ni grand, ni petit en lui-même^ il n'est appelé tel , que par rapport à un autre corps. Ce à quoi nous avons donné le nom àt grand; i fait en nous une impression difiiérente de celle que' ce que nous appelons /;ér//7 nous a fait. C'est la perception de celte différence , qui nous a -donné lieu d'inventer les noms ^^ grand , Appétit, de moindre j etc.

^iffcrçnt, pareil, semblable, sont aussi

H

jyo Principes

des adjectifs métaphysiques , qaî qualifient les noms substantifs , en conséquence de certaines vues particulières de l'esprit. Dij' J^étent qualifie un nom, précisément en tact que je sens que la chose n*a pas fait en moi des impressions pareilles à celles qu'un autre y a faite. Deux objets, tels que j'aperçois que l'un n*est pas l'autre ,' font pourtant cq moi des impressions pareilles en certains points. Je dis qu'ils sont semblables en ces points-'lh , parce que je me sens afTeclc » cet égard de la même manière. Ainsi, sem* hlahle est un adjectif métaphysique.

Tout corps me paroît borné, et je vois une étendue au-delà. Je dis donc que ces corps sont terminés , bornés , Jinis. Aiosi borné ^ terminé fjini j ne supposent que des bornes et la connoissance d'une étendoe ultérieure; ce sont donc des adjectifs méta- physiques.

Tout ce qui nous paroit tel, que noos n'apercevons pas qiî'il puisse avoir.un degré de bonté et d'excellence au-delà, nous l'ap- pelons parfait.

Voici encore d'aigres adjectifs métaphj* siques qui demandent l'attention.

IJn nom est adjectif ^ quand il qualifie o&

de Grammaire, » lyl

nom substantif. Or, qaaliiierun nom' subs- tantif, ce n'est pas seulement dire qu'il est rouge ou bîeu^ grand ou petit ; c'est en fixer l'étendue, la valeur, l'acception , étendre celte acception ou la restreindre^, en sorte pourtant que toujours l'adjectif et le subs- tantif pris ensemble, ne présentent qu'un même objet à l'esprit. Au lieu que si je dis liber Pétri j Pétri fixe à la vérité l'étendue de la signification de iiber: mais ces deux mots présentent à l'esprit deux objets diffé- rens , dont l'un n'est pas l'autre. Au contraire , quand je dis , le beau liçre, il n'y a qu'un objet réel , mais dont j'énonce qu'il est beau. Ainsi , tout mot qui fixe l'acceptioa du substantif, qui en étend ou qui en restreint la valeur, et qui ne présente que le même objet à l'esprit, est un véritable adjectif. Ainsi nécessaire ^ accidentel ^ possible , //w- possible, tout, nul, quelque, aucun^ chaque^ tel^ quel^ certain ^ ce ^ cet ^ cette ^ mon ^ ma , ton^ ta ^ pos^ çofre ^ notre ^ et même le , /a>, les^ sont de véritables adjectifs mé- taphysiques, puisqu'ils modifient des subs- tantifs , et les font regarder souï .des points de vue particuliers. Tout hamme , présente homme dans un sens général affirmat^if: 7iul

H 2

l^a Principes

homme Tannoace dans un. sens général né« gatif : quelque homme présente un sens par- ticulier indéterminé : $on ^ sa^ ses , t^os y eic. font considérer le substaniif^sous un seoi d'appartenance et de propriété. Car qaaiid je dis meus ensis y meus est autant simple adjectif que Epandrius y dan^ ce vers de Virgile (l).

Nànt tihi y Thymhre y caput Ei^ndriits àistuUi tnsis.

Meus marque l'appartenance par rapport i mdi , et Eçandrius la marque par rapport à E(fandre.

Il fauticî observer , que les mots changent de valeur, selon les différentes vues qQC Tusage leur donne a exprimer. Boire ^ man^ ger y sont des verbes^ mais quand on dit/f boire y le manger y etc. alors boire et man' ger sont des noms. Aimer est un verbe actif; mais dans ce vers de TOpëra d*Atjs ,

J'aime , c'en mon detiin ^aimer toute ma pie.

Aimer est pris dans un sens Qeuire. Mien^ tien y sien y étoieiit autrefois adjectifs. Oa disoit un sien, frère y un mien ami. Au jour*

(i) ^neid. lib. , y. 3^

de Grammaire. 178

d*hui , en ce sens ) il n*y a que mon ^ ton , son ) qai soient adjectifs. Mien , tien ^ sien^ sont de vrais substantifs de la classe des pro- noms} le mien , ie tien , le sien. La diS" corde y dit la Fontaine , tfint

Avec Que si^ Que non, son frère ^ Avec le tien , le mien , ion père.

Nos , f^os , sont toujours adjectifs ; mais ffôtre y nôtre , sont souvent adjectifs et sou- vent pronoms : le pôtre l le nôtre, Vous et les ifôtres : t>oilà le vôtre ^ poici le sien et le mien. Ces pronoms indiquent alors des objets certains dont on a déjà parlé.

Ces réflexions servent a décider si ces nio ts ^ père^i roi y et autres semblables, sont ad- jectifs ou substantifs: qualifient-ils! ils sont adjectifs. Louis XV est roi; roi qualifie Louis XV; donc roi est-là adjectif. Le roi à l'armée: le roi désigne alors un individu : il est donc substantif. Ainsi ces mots sont pris, tantôt adjectivement , tantdt substantivement : cela dépend de leur service.; c'est-à-dire, delà valeur qu'on leur donne dans Temploi qu*oa en fait.

Il reste à parler delà sjrntaxedes adjectifs. Ce qu'on peut dire à ce sujet se réduit à deux

-* H 3

174 Principes

, points : x.o Ja terminaison de l'adjectif: 2.^ la position de l'adjectif.

I. A regard du premier point ^ il faut se rappeler ce principe dont nous avons parié ci-dessus, que ladjectif et le substantif nus ensemble en consiruciion, ne prëscntcm> Tesprit, qu'un seul et même individu, ou physique ou métaphysique. Ainsi, l'adjectif n'étant réertement que le substantif même considéré avec la qualification que ladjectif énonce; ils doivent^'avoir l'un et l'autre le» mêmes signes des vues particulière* sous lesquelles l'esprit considère la chose quali- fiée. Parle-t-ou d'un objet singuBer.' l'aJ- jectif doit avoir la terminaison destinée à marquer le singulier. Le substantif est-il de h classe des noms qu*on appelle masculins l Tadjectif doit avoir le signe destinée marquer les noms de cette classe. Enfin , y a-i-il dans une langue une manière étabUe pour marquer les rapports qu points de vue qu'on appelle c^75/ l'adjectif doit encore se conformer ici au-substantif. En un mot, il doit énoncer les mêmes rapports, et se présenter sous les mêmes faces que le substantif, parce qu'il n*èsi qû'uB avec lui. C'est ce que les Gram- - iMairietis appclieai /a concordance de icd-^

de Grammaire, IjS

jectif açec 'le substantifs qui n'est fondée «Jue sur ridenlité physique de l*adjeclif avec Le substantif.

II. A l'égard &e \dL position del'adjeclif, c'est-a-dire , s*il faut le placer avant ou après 1 e substantif , s*il doit être au commencement ou a la fin de la phrase , s*il peut êtr^ séparé du substantif par d'autres mots, je réponds que dans les langues qui ont des cas., c*est<-i a-dire , qui marquant par des terminaisons les rapports que les mots ont enlr'eux y la position n'est d'aucun usage ppur faire con- iioître l'identité de l'adjectif avec son subs- tantif. C'est l'ouvrage ou plutôt TadestiDatioa de la terminaison ; elle seule a ce privilège. Et dans ces langues, ou consulte seulement l'oreille pour la position de l'adjectif, ^ui même peut être séparé de son substantif par d'autres mots.

Mais dans les langues qui n'ont poiat de cas, comme le François, radjectti est tou- jours joint a son substantif. Il n'en «st séparé que lorsque l'adjectif est attribut , comme luouis est juste ; Phébus est sourd ; Pégase est rétif; et encore avec rendre ^ devenir <^ paraître.

H4

lyô Principes

Un vert étoît trop foible , et toos Te rendes dor. J'évit« d'être lotfg , et je deviens obscnr.

Daos les phrases telles que celle qui suit, les adjectifs qui paroissent isolés forroeot seuls, par ellipse) une proposition parti' culière.

Heureux qui peut Toîr du rivage. Le terrible Océan par les yen ta agité.

Il y a Ih d&ux propositions grammatical». Celui ( qui peut voir , du rivage ^ le terrible 1 Océan par les vents agité ) est heureax. vous voyez que heureux est Tattribut de li proposition principale.

Il n*est point indifférent en François , selon la syntaxe élégante et d^usage y d'ënoncerle substantif avant Tadjectif , ou Tadjectif avant le substantif. Il est vrai que pour faire en- tendre le sens , il est égal de dire bonnet blanc ou blanc bonnet ; mais par rapport à Téloca- tion et à la syntaxe d*usage , on ne doit dire que bonnet blanc» Nous n'avons sur ce point d'autre règle que l'oreille exercée , c'cst-a- dire , accoutumée au commerce des personnes de la nation qui font le bon usage. Ainsi je me contenterai de donner ici des exemples

de Grammaire. . 177

qui pourront servir de guide dans les occa- sions analogues. On dit habit rouge j ainsi dites habit bleu , habit gris , et non bleu habit , gris habit. On dit mon livre ; ainsi dites ion litfre , son lipre , leur livre. Vous, verrez dans. la liste suivante , zone torride^ ainsi dites par analogie zone tempérée ^ zone glaciale ; ainsi des antres exemples*

Liste de plusieurs adjectifs gui ne vont qu^après leurs substantifs daris les exemples qu^ on en donner ici.

Accent gascon. Air indolent, Ange gar^ dien. Beauté parfaite. Beauté romaine» Bonnet blanc. Cas direct. Cas oblique. Cha-* peau noir. Chemin raboteux. Contrat clan'^ destin. Couleur jaune. Dîme royale. Discours concis. Empire Ottoman, Esprit invincibles . Etat ecclésiastique. Etoiles fixes. Exprès^ sion littérale. Fables choisies. Figure ronde.- Forme oîf aie. Canif aiguisé. Génie supérieur. Grammaire raisonnée. Hommage rendu. Homme instruit. Homme juste. Laine blan^ che. Lettre anonyme. Lieu inaccessible*

H 5

1178 ' Principes

Ligne droite. Libres choisis. Vue courte. Vue basse. Des yeux noirs. Zone torride, etc. U y a aa contraire des adjectifs qui pré- cèdent toujours les substantifs qu'ils quaii- fient » comme ,

Certaines gens. Grand général. Grand capitaine. Mauvaise habitude. Braçe sd' dat. Belle situation. Juste défense. Beau jardin. Bon oui^rier. Gros arbre. Petit ar- bre. Petit animal. Saint religieu»^ Profond respect. Jeune homme. Vieux pécheur. Cher ami. Réduit à la dernière misère. Tiers^ Ordre. Triple alliance , etc.

Je n*ai pas prétendu insérer dans ces listes tous les adjclifs qui se placent les uns devaDt les substantifs, et les autres après. J*ai voula seulement faire voir que cette position n'étoit pas arbitraire.

Lçs adjectifs métaphysiques , coramt le ^ la , les ^ ce j cet \% quelque , un , tout, cho" que g tel, quel, son, sa, ses, cotre, nos, leur, se placent toujours avant les substantifs qu'ils i{ualifient.

Les adjectifs de nombre précèdent aussi les substantifs appellatifs , et suivent les noms propres. Le premier homme y Fran* fois premier ; quatre personnes , Henri

de Grammaire. 179

quatre^ pour quatrième* Mais tn parlant du nombre de nos rois ^ nous disons dans ua sens appellalif , v^xxilya eu quinze Louis ^ et qae nous en sommes au seizième. Ou dit aussi dans les c\idi\.\oïi%\liçre premiep-^ cha^ pitre second: hors de- on dit le premier livre , le Second liçre,

D*autres enfin se placent également bien devant ou après leurs substantifs. C^est un saçant homme j c'est un homme saçant : c'est un habile at^ocat, ou un apocat habile ; et encore mieux , c'est un homme fort sa-* ifant^ c'est un aifocat fort habile. Mais on uc dit point ^ c'est un expérimenté oçocat , au lieu qu'on dit , c'est un avocat expéri^ mente n^ ow fort expérimenté. C'est un beau livre', c'tst un livre fort beau. Ami véritable, véritable ami. De tendres regards , des re- gards tendres. L'intelligence suprême ^ la suprême intelligence. Savoir profond ^ pro" fond'èavoir. Affaire malheureuse ^ malheu'* reuse affaire , etc.

Voila des pratiques que le seul bon usage peut apprendre \ et ce sont-là de ces finesses qui nous échappent dans les langues mortes ; et qui étoient sans doute très-sensibles à ceux

. H ^

i8o frincipeÈ

' qui parloient ces langues , dans le temps qu'elles étoient vivantes..

La poésie , oii les transpositions sont per- mises, et même elles sont quelquefois des grâces , a sur ce point plus de liberté que la prose.

Cette position de Tadjectif devant on après le substantif est si peu indifférente « qa*elle change quelquefois entièrement la valeur du substantif. En voici des exemples bieo sensibles.

Cest une nouvelle certaine \ c'est une chose certaine \ c'est-à-dire , assurée , pé" table j constante. J'ai appris certaines choses^ certaine nouvelle : alors certaine répond as çuidam des Latins, et fait prendre les subs- tantifs dans un sens vague et indéterminé.

Un honnête homme est un homme qui a des mœurs , de la probité et de la droiture. Vu homme honnête est unhpmme poli, qui a envie déplaire. Les honnêtes gens d*ano ville, ce sont les personnes de la ville qui sont an- dessus du peuple , qui ont du bien , une répu- tation intègre, une naissance honnête , et qoi ont eu de l'éducation. Ce sont ceux^ dont Horace dit, Quibus est eguus etpater et rcs»

de Grammaire. i8l

Vrai 9. un sens diffifrem, selon qu'il est placé avant ou après un substantif. Gilles est un çrai charlatan ^ c^est- à-dire , qu*il est réellement un charlatan. Cest un homme çrai^ c'est-b-dîre, çéridique. C'est une nou" celle craie , c'est- îi -dire , péritable.

C'est unpauçre homme ^ se dit paf mépris â*un homme , qui n*a pas une sorte de mé- rite , d*un homme qui néglige ou qui est in- capable de faire ce qu'on attend de lui ; et ce pauçre homme peut être riche. Au lieu qu'un homme pauvre est un homme sans biens.

Un homme galant n'est pas toujours un galant homme. Le premier est un homme qui cherche a plaire aux femmes , qui leur rend de petits soins» Au lieu qu'un galant homme est un honnête homme 9 qui n'a que des procédés simples.

En François , nos adjectifs sont terminés , I.^ ou par un e muet , comme sage ^fidèle , utile , facile , habile , timide^ riche , û/- mable^ polage^ troisième , quatrième ^ etc. Alors l'adjectif sert également pour le mas- culin et pour le féminin. Un amant Jidèle , une femme fidèle,. Ceux qui écrivent ^if^/ , itiil ) font la même faute que s'ils écrivoient

iSa Principes

sagy au liea'de sage , qui se dit également pour les» deux genres. .

2.^ Si Tadjectif est terminé dans sa pre- mière dénomination par quelqu'autre lettre que par un e muet , alors cette première ter- minaison sert pour le genre masculin , pur , dur^ brun , savant ^fort , bon,

A l'égard du genre féminin , il faut dis- tinguer. Ou l'adjectif finit au masculin par une voyelle , ou il est terminé par une con- sonne.

Si Tadjectif masculin finit par toute autre voyelle ^ùe par un e muet , ajoutez seule- ment IV muet après cette Voyelle , vous aurez la terminaison féminine de Tadjectif. Sensé , sensée» Joli , jolie. Bourru , bourrue,

S^ Tadjeclif masculin finit par une con- sonne, détachez cette consonne de la lettre qui la précède , et ajoutez un e muet à cette ^ consonne détacliée, vous aurez la termi- naison féminine de Tadjectif, Purj.pu-re, Saint, Sain'" te. Sain, sai-ne. Grand, gran-- de» Sot , sO'tet Bon , bo-^ne.

Je sais bien que les maîtres ^ écrire, pour multiplier les jambages , dont la suite rend l'écriture plus unie et plus agréable à la vue , ont introduit une seconde n dans bo^ne^

de Grammaire, l83

«

comme ils ont iniroduit une m dans ho^me : ainii on écrit communément Z^o^z/zr^ homme, honneur^ etc. mais ces lettres redoublées sont contraires à Tanalogie , et ne servent qu'à multiplier les difficultés pour les étran- gers et pour les gens qui apprennent à lire.

Il y a quelques adjectifs qui s'écartent de la règle : en voici le détail.

On disoît autrefois au masculin , bel, nou» pel^Jvl^ mol y et au féminin, selon la règle , belle , nouvelle ^ Jolie j molle. Ces féminins se sont conservés: mais les masculins ne sont en usage que- devant une voyelle , un bel homme, un nouvel amant , un fol amour: ainsi beau, nouveau, fou, mou, ne forment point de féminin. Mais Espagnol est en usage, d*oii vient Espagnole ^ selon la règle générale. Blanc fait blanche ; franc ^Jran^ . che. Long fait longue : ce qui fait voir que le g de long est le g fort que les modernes appellent gue. Il est bon , dans ces occasions , d'avoir recours à l'analogie qu'il y a entre l'adjectif et le substantif abstrait. P^r exem- ple , longueur^ long , longue ; douceur, doua: , douce ; jalousie , jaloux , jalouse ;Jraîcheur<^ Jrais , fraîche ; sécheresse , sec , sèche,

'Lfif et le y sont au fondla même leitre

1

l84 " Principes

divisée en forte et en foible. Ljeyest la forte, et le tf est la foible. De-là naïf, natpe; abusif, abusii^e; chétif^ chélipe; défensij^ iféjensiçe; passif y passive ; négatifs néga' tiçe ; purgatifs purgatit^e^ etc. . On dit //to/i) ma: ton, ta: son, sa; mais devant ane voyelle on dit également au fé- minin mon^ ton, son; mon ame , ion ar^ deur, son épée. Ce que le mécanisme des organes de la parole a introduit pour éviter le bâillement qui se feroit à la rencontre des deux voyelles ma ame ^ ta épée , sa épouse. En ces occasions son , ton , mon^ sont fé- minins , de la même manière que mes , tes , ses^ les le sont au plurier, quand on dit me% Jilles , les femmes , etc.

L'adjectif doit avoir la terminaison qui convient au genre que l'usage a donné au substantif. Sur quoi on doit faire une re- marque singulière sur le mot Gens. On donne la terminaison féminine à l'adjectif qui précède ce mot , et la masculine a celle qui le suit , fût«ce dans la même phrase* // y a de certaines gens qui sont bien sots.

Le plurier de l'adjectif se forme en ajou- tant une 5 au singulier , bon , bons ; fort , forts. Par conséquent puisqu'qn écrit aa

/

de Grammaire, l8S

singulier gâté, gâtée ^ on doit écrire au plurier gâtés , gâtées 5 ajoutant simplement 1*5 pour le plurier masculin) comme on rajoute pour le plurier féminin. Cela me paroît plus analogue, que d^ôtcr Tacceot aigu au masculin, et ajouter un z, gâtez* Je ne vois pas que le z ait plutât que Vs privilège de marquer que qui le précède est un e fermé. Pour moi je ne fais usage du z après Ve fermé , que pour la seconde per- sonne plurielle du verbe , cous aimez , ce qui distingue le verbe du participe et- de Tadjectif: cous êtes aimés; les perdreaux sont gâtés; vous gâtez ce livre.

Les adjectifs terminés au singulier par une s servent aux. deux nombres. Il est gros et gras ; ils sont gros et gras*

Il y a quelques adjectifs qu*il a plu aux Maîtres à écrire de terminer par un x^ au lieu de 5) qui finissant en dedans ne donne pas à la main la liberté de faire de ces figures inutiles qu'ils appellent traits. Il faut re- garder cet 00 comme une véritable s. Ainsi on dit il est jaloux, et ils sont jaloux ; il est doux , et ils sont doux ; Vépoux\ les époux ^ etr, L7 final se change en aux, qu'on fcroit

\

186 Principes

mieux d'écrire aM5 , égal, égaus ; verbal^ perhaus; féodal y féodam; nuptial^ nup-

iiaus , etc. * .

A l'égard des adjectifs qui finissent pare/2/ ou à/2/au singulier, on forme leur plurierea ajoutant 5, selon la règle générale ; et alors on peut laisser ou rejetier le t ; cependant lorsque le t sert au féminin , Tanalogie de- mande qu*on le garde : excellent ^ ejccellen* te , excellents , excellentes»

Outre le genre , le nombre et le cas , dont nous venons de parler, les adjectifs sont encore sujets a un autre accident , qu on appelle les degrés de comparaison , et qu oa devroit plutôtappeler degré de qualification; car la qualification est susceptible de plus ou de moins , bon , meilleur j ejrcellent; savant^ plus sat^ant^ très-^saifant. Le pre- mier de ces degrés est appelé 7705////*; le se- cond comparatifs et le troisième superlatif,

11 ne sera pas inutile d^ajouter ici deux observations.

La première, c'est que les adjectifs se prennent souvent adverbialement. Facile et difficile j dit Donat , quœ adperbia ponun' tur, nomina pot lus dicenda sunt j pro ad-

de Grammaire^ 187

çerbiis posita ; ut est ^ torvùm clamât; horreadùm resoaat; et dans Horace (i) ^ turbidùm lœtatur ; ressent les saillies d*uQe joie agitée et confuse (2) ; Perjidùm ridcns Venus , Vénus avec un sourire perfide. Et niênae, /7ri/wô , secundo , tertià , posiremb^ sera , optatà , ne sont 4ue des adjectifs pris adverbialement. Il est vrai qu'au fond l'ad* jectif conserve toujours sa nature, et qu*ca ces occasions même il faut toujours sous-* entendre une préposition et un nom substan- tif 9 a quoi tout adverbe est rédùcirble. Ainsi turbidùm lœtaiur , id est , lœtatur juxta negotium^ ou modum tt^ràidurii. Primo ^ secundo , id est , in pfimùxM^\ secundo loco*, optatà adtfenis ^ id est, in tempore optaio,

A Timitation de cette /açOn de parler latine ^ nos adjectifs sont souvent pris adver- bialement. Parler haut ^ parler bas , sentir s mauvais f çoir clair ^ chanter J^aux , chan^ ter juste j etc. On peut en ces occasions sous-entendre une préposition et un nom substantif. Parler d^un ton haut j sentir un mauçaiâ goût , voir d'un œd clair , chanter

( ) t.ih, a, Od. ig, v. 6. (3) Lih. 3. Od. 37, c. 67.

l88 Principes

d'un ton faux, Maistjuand il seroît vrai qu*on ne pourroit poiut trouver de nom substantif convenable et usité , la façon de parler n*en seroit pas moins elliptique ; on) Bous-entendroit i*idée de chose ou dV//r dans un sens neutre.

La seconde remarque , c*est qa*il ne faut pas confondre Tadjectif avec le nom substan- tif qui énonce une qualité, comme blancheur, étendue* L'adjectif qualifie un substantif; c'est le substantif même considéré comme étant tel : Magistrat équitable* Ainsi l'ad- jectif n'existe dans le discours que relative- ment au substantif) qui en est le. suppôt, et auquel il se rapporte par l'identité ; an Heo que le subsùtntif qui exprime une qualité, est un terme abstrait et métaphysique , qoi énonce un concept particulier de l'esprit, qui considère la qualité indépendamment de toute application particulière , et comme si le mot étoit le nom d'un être réel et subsis- tant par lui-même. Tels sont , couieur^ éten- due, équité, etc. ce sont des noms substantifs par imitation;

Au reste, les adjectifs sont d'un grand usage , sur - tout en poésie , oii ils servent à faire des images et à doAner de l'énergie.

de Grammaire. 189

Mais il faut toujours que TOrateur ou le Poëie aient Tart d*eQ user èi propos , et que Tadjeciif D*ajoute jamais au substautif uoe idée" accessoire ) inutile, vaine ou déplacée.

DU COMPARATIF.

i«»*>

p

O U R bien entendre ce mot, c'est un adjectif pris substantivement , il faut ob- server que les^ objets peuvent être qualifiés ou absolument sans aucuo rapporta d*autres objets , ou relativement , c*est*à-dire , par ''apport a d'autres.

I. Lorsqu'on qualifie un objet absolumeot, l*adjectîf qualificatif çs( dit étrç au positif. Ce premier degré est appelé ;e705i7//, parce qu'il çst comme la première pierre qui est posée pour servir de fondement aux autres dégrés de signification. Ces degrés sont ap- pelés communément degrés de comparaison^

César étoit vaillant : le soleil est briU Unt ^ vaillant > et brillant sont au positif,

ijb * Principes

En second lieu , quand on qualifie on objet reUtivement à iin autre ou à d'autres , alors il y a entre ces objets ou un rap^rt d*ëgalité , ou un rapport de sapériorké,oo enfin nn rapport de prééminence.

S'il y a un rapport d*égalité , l'adjcciif qualificatif est toujours regardé comme étant au positif; alors Tégalité est marquée par des adverbes , ceque ac , tam quam , iia ut ) et en français par autant que » au$ii que. César étoit aussi hraçe qu'Alexandre l'avoit été. Si nous étions plus proches des étoiles, elles nous paroitroieut aussi hril* tantes que le soleil.

Aux équiooxes , les nuits sont aussi longues que les jours.

IL Lorsqu*on observe un rapport de plus ou un rapport de moins dans la qualité de deux choses comparées, alors l'adjectif qui énonce ce rapport est dit être au compQ'* ratif. C'est le second degré de signification , ou , comme on dit , de comparaison : P^- trus est âoctlor Pauto , Pierre est plus sa» çoni que Paul : le soleil est plus brillant que la lune. vous voyez qu'en latin le comparatif est distingué du positif par une terminaison particulière, et qu'en français y

. _i

de Grammaire, i^\

il est distingué par l'addition du mot plus ou du mot moins.

III. Enfla, le troisième degré est ap- pelé superlaiij. Ce mot est formé de deux iDOts latins, super ^ au-dessus, et latus , porté. Ainsi le superlatif marque la qualité portée au suprême degré de plus ou de moins.

Il y a deux sortes de superlatifs ec^ fran- çais.

î. Le superlatif absolu, que nous for- mons a^ec les mots très , fort , extrême^ ment; et quand il y a admiration , avec bien* Il est bien raisonnable. Très vient du latin /^r, trois fois, très^grand , c'est-à- dire ^ trois fois grand. Fort est uh abrégé ût fortement,

H. Nou5 avons encore le superlatif re-' taiify il est le plus raisannable de ses frères.

Les adverbes ont aussi des degrés de si- gnification , bien^ mieux ^ fort bien; bene melius , optime, ^

^ Notre langue , dit le P. Bouhours n'a ^ point pris de superlatifs des Latins. Elle » n'en a point d'autre que Généralissime , ^ qui est tout français , et que le cardinal de y Richelieu fit de son autorité , allant com-

igt Principes

» mander les armées -^e France en Italie , » si noos en croyons Balzac (i) »•

Nous avons emprunté des Italiens cinq oa six termes de dignités , dont nous nous ser- vons en certaines formules , et auxquels nous nous contentons de donner une ter- minaison Françoise , qui n'empêche pas de reconnoître leur origine laCTne. Tels sont} rei^erendissime ^ illustrissime , excelkn» tissime , eminentissime.

DES CAS.

L

mot Cas vient du latin casuSj chute: racine , cadere , tomber. Les cas d'un nom sont les différentes inflexions ou lerminai- sons de ce nom. On a.regâirdé ces teri^inù* sons comme autant de différentes chutes d'on même mol. L'imagination et les idées acccs-

(i) Doutes sur la langue française pag. 60.

soircs

de Grammaire. 1^3

, soîrei ont l^^eaucoup de part aox dëaomi«> nations et à biea d*autres sortes de pensées; ainsi ce mot cas est dit ici. dans un sens figuré et métaphorique* Le nominatif^ c*est"*à-dire ) la première dénonanatioa tom- bant, poçr ainsi dire, en d*amres terminai- sons, fait les autres cas qu'on appelle obli^ €fues. Nominatipus^ sipe Redits ^ cadens. à sua terminatione in alias , Jacit obliçuoe casus (l).

Ces terminaisons sont aussi appelées dési* nances , mais ces mots terminaison , dési* nance , sont le genre. Cas est Vespèce^ qui ne se dit que des noms car les verbes ont aussi des .terminaisons àxfSéttni^s ^ j' aime ^ j'aimoiSj x' aimerai j^ etc. Cependant on ne donne le nom de cas qu'aux terminaisons des noms , soie au singulier, soit au plu-. rieU Pater^ patris,^ P<^iK* * pat rem y paire Voilà toutes les terminaisons de ce mot' au singulier^ en voiià tous 4es cas, en ob- servant seulement que la première termi-

»

naisoQr paier sert également pour nommer et pour appeler.

Les Latins ont six cas, tant au singulier

(i) Friic. //V. 5| de casug

I

T^ PHncipes

qu'au plurirf, nominatif j génitifs àatif^ accusatifs çocatif^ ablatif.

Le premier, c'est le nominatif, li est appelé ca$ par exteusioa , et parce qu'il doit se trouver dans la liste des autres ter- mioaisons' du ncm, H nomme; il énonce Tobjet dans tonte Tétendué de l'idée qu'on en a , sans aucune mddifttation. C*est pour cela qu'on l'appelle aussi le cas direct^ reclus. Quand un nom est au .nominatif, les Grammairiens dirent qu'il est in recto.

Le génitif tst ainsi appdé, parce qu'il est, pour ainsi dire, le ftll atné du nomi- natif, et qu'il sert ensuite plus particn- lièrement à former les cas qui l^ suivent. Ils en gardent toujqups la lettre caracté^ jristique ou figurative , c'est-à-dire , celle qui précède la terminaison propre qui fait la différence des déclitmisons : par exemple j i5, iy em , du im, e on i , sont les temii* naisoBs des uoms de la troisième déclinaison des Latins \ an singulier. Si vous avez k décliner quelqu'un de ces noms , gardez la lettre qui précédera is au génitif* Far exeînple , nominatif rex y c'est-à-dire, rrgs^ génitif rcgwry , ensimt reg-i , reg-em^ reg^^ et de même au pltrtriel , reg-es > reg^um ^

de Grammaire* jyS

reg^ibu^» G^nitwm naturale çincuîum gc^ neris possidet: nascitur quidem à nomU natiffo^ générât aiUem omnes oàliçuos se-' çuentes (i).

Le dat{f$wl à marquer principalement le rapport d'attribution, le profit, le dommage, par rapport à quoi, le pourquoi ,^/7X5 cuL

là* accusatif etccu&e , c'est-à-dire , déclare l'objet ou le terme de l'action que le verbe signifie. On le construit aussi avec certaines prépositions et avec rinfinitif.

Le çocatif sert k appeler. Priscieo Tap^* pelle aussi salutatorius»

1j* ablatif itti à ôter, avec le^secourf d'une préposition.

Il ne faut pas oublier la remarque judî*- ciense de Priscien. « Chaque cas , dit-il , ff a plusieurs usages ; mais les déoonffna- )^ tions se tirent de Tusage le plus connu 3r et le plus fréquent >>. Mulias alias quo^ que et diçersas unusquisque casus habet si^ gnificationes; sed à notioribus etfrequcntio^ ribus acceperunt nominationem , sicui in aliis quoque multis hoc inçenimus (2).

(i) Prîsc. ibid, (3} f riic. ibid.

I 2

156 . Principes

Qaand on dît de saite et dans un certaia ordre toutes les termînaisoQsd'an nom , c*est ce qu'on appelle décliner. C*est encore ont métaphore. On commence par la première terminaison d'un nom , ensuite on descend, on décline^ on va jtosqu'â la dernière.

Les anciens Grammairiens se servoicnt également du mot décliner , tant à Tégard des noms q^u'à l'égard des verbes. Mais il t a long-temps que Ton a consacré le mot décliner aux noms ; et que lorsqu'il Vagit de verbes on dit conjuguer ^ c'est-rk-dire , ranger toutes les terminaisons d'un verbe dans -une même liste, et tout de «uiie comme sous un même joug. C'est encore une métaphore.

li y a eu latin quelques mots qui gardeot toujours la terminaison d&lcur première de- nomination. On dit alors que ces mois soat indéclinables. Tels sont^^ ^ nef as , corna au singulier y eic* ainsi ces mots n'ont poioi de cas.

Cependant^ quand ces mots se tronvcil dans une phrase^ comme 1 orsqu' Horace l dit (i) : Fas aiguë nef as esiguo Jine liW

iO Lib. 1. Od. i8. Vf lOt

de Grammaire* 197

dînum discernunt apidi ; et ailleurs (i) : Et peccare nef as ^ aut pretium est mori ; et Virgile (2) : Jam cornu peiat ; cl (3) cornu ferit iliey cai^eto ; alors le sens y c'est-à- dîre, Tensemble des mois de la phrase , fait coQQoîire la relatipn qae ces mots indëclî* nables ont avec les autres mots de la même i proposition, et sous quel rapport ils y doivent être considérés*

Ainsi dans le premier passage d*Horace ^

je vois bien que la construction est) ilU

açidi discernunt f as etnefas. Je dirai donc

que^ài et jiejas sont le terme de Tactioa

ou l'objet de discernunt , etc. Si je dis

qu'ils sont à Taccusatif , ce ne sera que par

extension et par analogie avec les autres

mots latins qui ont des cas , et qui en une

pareille position aur oient la terminaison de

Vaccusatif. J'en dis autant de cornu Jerit:

ce ne sera non plus que par analogie que

cornu est W à l'ablatif; et l'on ne diroit

ni Tua ni l'antre , si les autres mots de la

langue latine étoient également indéclinables.

(1) Uh, 3. Od. 4»,v. 24. (a) Eclogue 9 , v. 5/. (3) Ecl. g , 1». a5»

13

ijS Principes

Je fais CCS observalions pottV faire voîr,

I. Que ce sodI les termiaaîsoDS seules qoi par leur viirîëté constituent les câs, et doi'* vent être appelées cas ; en sorte qu'il n'j a poini de cas , ni par conséquent de dé- clinaison dans les langues les noms gar- dent toujours la terminaison de leur pre- mière dénomination; et que lorsque nous disons iiii temple de marbre^ ces deux mots de marbre na sont pas plus au génitif que les mots latins de marmore , quand Virgile t dit , Templum de marmore ponam (l). Ain- si à et de ne marquent pas plus des cas en françoiS) que/7ar, pour ^ en > sur^ etc. Voyez ce que nous avons dit sur cf sujet en traitant de VjlRTtczs^ ^

II. Le second point qui est à GODSidérer dans les cas , c*est l'usage qu'on en fut dans les langues ^ui ont des cas»

Ainsi il faut bien observer la desiinatloii de chaqua terminaison particulière. T el rap- port, telle vue de l'esprit est marqué par tel cas ) c'est-a-dire , par telle terminaison.

Or ces terminaisons supposent un ordre dans les mots de la phrase. C'est l*ordr€ ^■^^■^^————— >————■*— —^1^— (i) G«org. /. i, «r. i3 » et aiU«ai'«*

de Grammaire* 199

successif des vues de l'esprit de celui qui a parié. C'est cet ordre (|ui est le fondement de3 relations inimédiates des mots , de leuri enchaîaemens et de leurs terrainaisoas, Pierre àat Paul ^ moi aime toi, etc. Ou va eu-" tendre «e que je veux dire.

Les cas ne sont en usage que dans lef langues les mots sont transposés , soit par la raison de l'harmonie ^ soit par le feu dt l'imagination, ou.par quelqu'autre cause.

Or , quand les mots sont transposés ^ comment puis^jei cpnnoiirc leurs relations l

Ce spnt les différentes terminaisons ; sont les cas qui .m'indiquent ces relations,^ et qui , lorsque la phrase est finie , m^ donnent le moyen de rétablir l'ordre des znais^ lel qv'il a ^té nécessairement daiui l'esprit de celui qui a parlé ^ lorsqu'il a voulu énoncer sa pensée par des mots. Pajr exemple :

Frigidus agmûoftim ai ^aando eoniinei imb9r {i).

Je ne puis pas douter que , lorsq^ Virgile a fait ce vers , il n'ait joint dans son esprit ridée à^ frigidus à celle é*imàer; puisque

'' -.y, >■■>■■ ^ I— ^wp

(1) Georg. //*. I, V. 459.

I 4

Soo frincipes

Yxxn est le substantif et l'aotre l'âdjectif. Or le substantif et l*ad)ectif sont la chose même: c'estrobjèt considéré comme tel : ainsi Tespiit se les a point séparés.

Cependant I voyes combien ici ces deux mots sont éloignés l'un de Taotre* Frigidus commence le vers et imber le finit*

Les terminaisons font que mon esprit rapproche ces deux mots , et les remet dans Tordre des vues de l'esprit relatives à Tëlo- cution : car l*esprit ne divise ainsi ses pensées que par la nécessité de renonciation.

Comme la terminaison àejyigidus méfait rapporter cet adjectif à imber ^ de m^me Voyant q\i*Agricolam est ^ l'accusatif, j'aper- çois qu'il ne peut avoir de rapport qu'avec continet. Ainsi je range ces mots selon lear ordre successif )' par let^iie} seul ils fonluo sens : Si quando imber frigidus continei domi Agricolam, Ce que nous disons ici est encore pins sensible dansée vers :

Aret ager^ vitiop moHens^ jîrnr, éiëris, hetèa (i).

Ces mots , ainsi séparés de leurs corré« latifs , ne font aucun sens.

méAMm

^i) Eclog. 7p V* ^p

ie Grammaire, aoi

Ksi sec , le champ , çice , mourant , a ioif'i de rair, l'herbe. Mais les tenninaisoot m'iadiqùent les corrélalifs , et dès - tors ]• trouve le sens. Voila le vrai usage des cas»

étger arei, hêrba moriem tifit pr» viiio aëriê,

AÎQsi les cas sont les signes des rapports , et indiquent Tordre successif par lequel seu)^ les mots foot un sens. Les cas n*indiquent donc le sens que relativement II cet ordre ; et voila pourquoi les langues dont la syn** taxe suit cet ordre, et ne s'en écarte que par des inversions légères, aisées à apercev^oir, et que Tesprit rétablit aisément; ces langues , dis-je , n*ont point de cas : ils y seroienc inutiles , puisqu'ils ne servent qn*à indi- quer un ordre que ers langues suivent: ce seroit un double emploi. Ainsi, si je veux rendre raison d'une phrase françoise; par exemple, de celle-ci , Le roi aime le peuple, je ne dirai pas que le roi est au noniinatif, ni que le peuple est à l'accusatif : je ne voit en Tun ni en l'autre mot qu'une simple dé- nomination le roi, le peuple t Mais comme je sais , par l'usage , l'analogie et la syntaxe de ma langue, la simple position de cet Rkots me fait connoStre leurs rapports , et

15

^

a04 Principes

ks différentes vues de Tesprit de celai qoi a parlé.

Ainsi je dis i..* Qae le roi paroîssant le premier, est le sujet de la proposition; qu'il est l*ageQt , que c'est la personne qui a k sentiment d*aimer« '

z.^ Que le peuple étant énoncé après le Teibe, le peuple est le complément à^aime: je veux dire que aime , tout seul , ne feroit pas un sens suffisant ; l'esprit ne seroit pas satisfait. 11 aime, quoi! le peuple. Ces deux mots ) aime le peuple , font un sens partiel dans la proposition. Ainsi le peuple est le terme du sentiment d'aimer ; c'est l'objet, c'est le patient ; c'est l'objet du sen- timent que jlattribue au roi. Or , ces rapports sont indiqués en françois p^r la place ou position des mots , et ce même ordre est montré en latin par les terminaisons.

Qu'il me soit permis d'emprunter ici pour un moment Je style figuré. dirai donc, qu'en, latin l'harmonie ou le caprice accorde aux mots la liberté de s'écarter Ae la place que rintelligence leur avoit d'abord mar- quée. Mais ils n'ont cette permission qu'à condition qu'après que toute la proposition sera finie , l'esprit de cdui* qui lit ou qui

\

ie%Grampmire. xqS

écoute ) les riemeura par i)n simple point de voe. dans le même ordre ils auront été d*àt»ôrd dans Tesprit^de^celui qui aura parle.

Ajuusons-nous un moment a une fiction* $*U;plaïsoit a Dieu de faire revivre Cicéron , 4e nous en donner la connoissance , et que Jlieu pe dopç^ à CicérQn que Tin tell igence d^ *inpt3 £ran|^ot8, et nullement celle de «notre syntaxe , c'est-à^^dire,. de ce qui fait que BOj^ mots assemblés et rangés dans nn certain ordre ^ font un sens. Je dis que si jg^elqja'un disoitji Cicéron^ Illustre Romain, après t^otre mort Auguste vainquit Antoine* Cicéron entendroit chacune de ççs paroles en particulier; mais il ne coJUU)!troit pas qui est celui qui a été le vainqueur) ni celui quia ét4 le vaincu. Il auroit besoin de quel* ques }OMrs d*usage , pour apprendre parmi nous que c*est Tordre des mots y leur posi- tion, et leur place , qui est le signe principal de leurs rapports.

0r , cpwme en latin il faut que le mot ait la terminaison destinée à sa position ^ et que .saisis cette condition. la place n'influe en rien pour faire, entendre le sens , Augusius vicit Anionius ne veut rien dire en latin. AmsiçAu^ guste çainguit Antoine ne formeroit d^abbrd

I tf

m

^#4 ^9rincipe$

aucun sens dans Kesprit ^e Cicërott; parce que Tordre successif ou significatif des yuei de Pesprit n*est indiqué en latin que par les cas pu terminaisons des mots: ainsi il est in- différent (iè dire Antoniuni victt Augustus^ ou Augustus picii AntuMiun, Cicéron oe concevroit donc point le sens d'une phrase | dont la syntaxe lui seroit eutiérenient io« connue. Ainsi il n*enteudroit rien à Au uste çainguii Antoine: ce serttit pour loi trois liiots qui n'auroient laocun signe de rapport. Mais reprenons la suite de nos réflexions sar les cas.

Il y a des langoes qui ont pins de six cas » et d'autres. qui en ont moins. Le P. Galanss, Théattn ^ qui avoit dt'nieur<^ plusieurs anoéet chez les Arméniens, dit qu'il y a dix cas dans la langue arméuienne. Les Arabes n*cn ont que trois.

Les Grecs n*ont qne cinq cas nominaUj, génitifs datifs accusatif, çocQÎiJ. Mais la force de Tablatif est souvent rendae par le génitif, et quelquefois par le datif, Ablatwï Jhrmâ Grœci carent^ non pi^ çuœ geniiiço €taliquanelp datitfo rejet tur ij,^.

m

(0 Ctaiiîi Hslleaisaûi P«f#. ormt^ Jb 87,

St Grammùire. to9

Nous avoDS dit qD*i1 y a. dans une tangua «t eo chaque dëcliaaisoa', autant de cas que de terminaisous difliârentes dans les^nonis. Cependant le gëiikif et le datif de la première déclinaison des Latins, sont semblables au sia» gulier. Le datif de la seconde est aussi terminé comme Tablatif. Il semble donc quM ne de«* Troit y avoir que cinq cas en ces déclinaisons.

Mais 1,^ il est C4.Tiain que la proiionciatioa de Va au uoniiuatif de la première declinaisoo ëtott différeute de Va à l'ablatif. Le premier est bref, l'autre est long.

2,^ Le Génitif fut d'abord terminé en ai, d*oii l*on forma ce pour le dutif. în frima der/matione dictum olim iiiansai , el hinc demde Jurmalum n datipo meiisœ (l).

3." Entirj , Taualogie demande cette uui- foniiité de six. cas dans les cinq décliuaisousj et alors cent qui ont une termmriison sem«- blable , sont des cas par imitation avec les cas des autres terminaisons : ce qui rend uni- forme la raison descoastructions. Casus sunt non çocis^ sedsignijicaiionis^ necnon etiam structuras rationem $erçamus (a).

<i) PariionîuSy în 5^tiictîi MÎAfffrt i /• i> «• C| »• J^ ia) Pnta. l* Sft de Coim

lo6 Principe^

. Les rapports (jai;ie $pQt pas indiqués par des cas en grec , en latin ) et dans les autres langues qui ont des cas, ce^ rapports, dis- je, sont suppléés par des prépositions^, Clam patrem.

Ces prépositions qui précèdent les noms, équivalent à des cas pour le sens , puisqu'elles marquent ^^.^ vues pArticulières de Tesprit. Mais elles ne font point des cas proprement dits ; car Tessence du cas ne consiste que ilans la terminaison du nom , destinée à in- diquer une telle relation particulière d*us mot à quelqu*autre mot de la proposition.

«

I II

OBSERVATIONS

SUR LES VERBES.

DES VERBES AUXILIAIRES.

X^E mot auxiliaire vient du latin ausei" liaris , et signifie gui çie^nt.au secours* On appelle perbes auxiliaires le verl)e être et U

ie Grammaire. %o*)

rerbe apoir , parce qa'ils aident a coQJuger certains temps des autres verbes y et ces temps sont appelés temps composés^

Il y a dans les verbes des temps qu*oi| appelle simples, C*est lorsque la valeur du verbe est énoncée en un seul moi: j'aime j^ j'aimois ^ f aimerai, etc.

11 y a encore des temps composés : j'ai aimé , j'aptois aimé , f aurais aimé ) etc. ces temps sont énoncés en deux mots.

Il y a même des temps doublement com« posés , qa*on appelle sur-composés. C'est lorsque le verbe est énoncé par trois mots } quand il a eu diné; j'aurois été aimé^ etc.

Plusieurs de ces temps, qui sont composés ou sur-composés en franrois , sont simples en latin, sur-tout à Vacû^ ^ama^i. J'ai aimé, etc. Le François, n'a point de temps simples au passif* Il en est de même en espagnol , en italien , en allemand, et dans plusieurs aigres langues vulgaires. Ainsi , quoiqu^on dise en latin, en un seul mot , amor, amaris, amatur, on dit en françois , je suis aimé y etc. en espagnol , soy amado, cres amado, es amado; en italien , sono amatoy sei amato , e amato.

Les verbes passifs des Latins ne sont com-« posés qn'aus; prétérits et aux autres temps

^

lo8 Principeê

qui se forment du participe passé , amatu$ sum ou /ui, j'ai été aimé ; ama tus ero ou Juero, y aurai été aimé* Ou dit aussi à l'actif, amatùm ire | qu'il aimera ou qu'il doit aimer; et au passif, amatum iri , qu'il êera ou qu'il doit être aimé, Amatum est alors un aoni indéclinabie) ire ou iri ad amatum.

Cependant , on ne s*est point avise en latin de donner en ces occasions le nom d*auxi« liaire au verbe sum^ m à habeo^ ni à ire ^ quoiqu'on dise habeo perguasum ; et que César ai dit , Misit copias quas habebatpa^ ratas : habcre grates ,Jidem , mentionem , odium , etc.

Notre verbe devoir ne sert-il pas aossi d'auxiliaire aux autres verbes, par niéia«- phore , ou par extension , pour signifier ce qui arrivera \ je dois aller demain à Ver^ satles; je dois recepoir; il doit partir; il doit arrif/er; etc.

Le \erhe Jaire a souvent aussi le mêuit usage, faire çoir^ Jaire piirt, faire des com^ plimcns , jaire honte , Jaire peur ^ Jairp pitié , etc.

' Je crois qu*on n'a donné le nom d'auxi-* liaire à être et à apoir , que parce que caa

de Grammaire, . 209

verbes ëtant suivis d*an nom verbal , de- viennent équiyàlens a un verbe simple des Latins* f^eni fje suis penu. C'est ainsi que parce que propter est une prépositioo en latin , on a mis aussi notre à cause au rang des prépositions françoises, et ainsi de qucU ques autres.

Pour moi je suis persuade qu'il ne faut loger delà nature des mots , que relativement au service qu'ils rendent dans la langue ils sont en usage, et non par rapport k quel- qtt*autre langue , dont ils sont Tëqui valent. Ainsi ce n'est que par périphrase ou circon-* locution que,/^ suis penu est le prétérit de çenir. Je est le sujet; c'est un pronom per- sonnel : suis est seul le verbe , li la première personne du temps frésent^ je suis actuelle- ment : çenu est un participe ou adjectif verbal, qui signifie une action passée , et qui la signifie adjectivement comme arrivée ; au lieu qu*r7^^/iem^/i/ la signifie substantivement et dans un sens abstrait. Ainsi , il est penu , c'est -k- dire , il est actuellement <;elui qui est penu, comme les Latins disent, pentu^^ rus est , il est actuellement celui gui doit ecnir*

ti2 Principes

ces Uogaes ^ et qui D*y auroient jamais été reçus, si les Grammairiens o'avoient pas commencé par Tétude de la langue latine. Ils ont assujéti desimpies équîvalens à des règles ëtrangères. Mais on ne doit pas régler la Grammaire d*une langue , par les formules de la Grammaire d'une autre langue.

Xes règles d'une langue ne doivent se ti(er que de cette langue même. Les langues ont précédé les Grammairiens; et celles-ci ne doivent être formées que d'observations justes tirées du bon usage de la langue par- ticulière dont elles traitent.

DES CONJUGAISONS.

L

lA Conjugaison (i) est un arrangement

suivi) de toutes les terminaisons 4'an verbe, selon les voiK, les modes, les temps, les

(i) Ea latin y ConJugaHo, Ce mot ^gaiÈ^Jon/Clk^t

1 de Grammaire* 2x3

nombres elles personnes, termes deGwn^ maire qu'il faut d*abord expliquer.

Le mot voix est pris ici dans un sens figuré. On personnifie le verbe , on lui donne une voix , comme si le verbe parloit ; car les hommes pensent de tontes choses par ressem- blance à eux-mêmes : ainsi la voix est comme le ton du verbe. On range toutes les termi- naisons des verbes en deux classes différexites * I.o les terminaisons qui font connoitre que le sujet de la proposition fait une action , sont dites être delà çoix actiçe ^ c'est-a-dire , que le sujet, est considéra alors comme agent : c'est le sens actif: ^.^ toutes celles qui sont destinées h indiquer que le sujet de la pro- position est le terme de l'action qu'un autre fait , qu'il en est le patient, ces terminaisons sont dites être de la çoix passipe^ c'est-à- dire , que le verbe énonce alors un sens passif.

Far modes , on entend les différentes ma- nières d'exprimer l'action. Il y a quatre prif!?' cipaux modes , Vindicatifs le subjonctifs V impératif et Vinjinitif, auxquels en cer- taines langues on ajoute VoptatiJ,

"L'indicatif énonce l'action d'une manière ftbsoJi:|c, comme j'aime ^ j'ai aimé ^/as/QU

21 6 Principes

Ces trois temps soat des temps simples et absolus. Od^ ajoute les temps relatifs et çombioés , comme je lisais j quand vous étés venu.

Les nombres. Ce mot se dit de la pro- priété qu'ont les terminaisons des noms et celles des verbes de marquer si le mot doit être entendu d*une seule personne , ou si on doit TentendrfK de plusieurs^ ^ amo , amamuSp

Enfin , il faut savoir ce qu*on entend par les personnes grammaticales. Pour cela il faut observer que tons les objets qui pea« vent faire la matière du discours ^ ;iont | l.^ ou la personne qui parle d'elle-même^ amo^ j'aime ; 2.^ ou 1^ .personne k qui on adresse la pai^ple ^ amas ^ pous aimez \ 3*^ ou enfin quelqu*autre objet, qui n*est la personne qui parle , ni celle à q^ui Ton parle | Rpx amat popuîum^ Roi aime h peuplCf

Cette considération des mots , selon quel- qu'une de ces trois vues de l'esprit , a 'donné lieu aux Grammairiens de faire ud usage particulier du mot personne par rap- port au discovirs. Us appellent première persQnne celle qui parle | parce <^oe c'est

d'elle

âe Xxrammàire* tif

d'elle que vieijt le. discours. La personne è qai s'adresse le discours est appelée Ta seconde personne» Enlia , la troisième per^ sonne y c'est tout ce qui est considéré comme étant Tobjet dont la première personne parle' à la seconde.

Voyez combien de sortes de vnes de Tes- f»rit sont énoncées en méme*temps par une seule terminaison ajoutée aux lettres ra- dicales du verbe* Far exemple , dans amare^ ces deux lettres a, m , sont les radicales ou immuables. Si à ces deux lettres j'a« joute o ) je forme amo. Or en disant amo , je fais connoitre qu« je juge de moi; je< m'attribue le sentiment d'aimer. Je marque donc en mêm-etemps la voix ^ le mode^ le temps y le nombre, la personne*

Je fkis ici en passant cette observation^^ pour faire voir qu'outre la propriété de marquer la voix , le mode , la personne , etc. et outre la valeur particulière de chaque verbe , qui énonce ou l'essence , ou l'exis- tence ) ou quelqu'aCtion , ou quelque sen«- timent , etc. le verbe marque encore l'action de l'esprit qui applique cette valeur à un sujet, soit dans les propositions , soii dans les simples énonciatiuos|et c'est ce qui dis-

K

îi8 Principes

tiogue le verbe des autres mots , qui ne sont que de simples dëàominatioos. Mais rêve* Qonsaumot conjugaison.

On peut aussi, regarder ce mot comme nn terme métaphorique tiré de l'action d'at« teler les animaux sous le joug aa même char , et à la même charrue) cei}ni emporte toujours ridée d^ssemblage, de liaison et de jonction. Les anciens Grammairiens se sont servi indifféremment du mot de conjur gaison et de celui de déclinaison , soit en parlant d*un verbe , soit en garla'nt d'un nom. Mais aujourd'hui on emploie déclinatio et décUnare quand il s^agit des noms ; et on se sert de 'Conjugatio et de conjugare quand it est question des Verbes.

Les Grammairiens de chaque langue ont observé qu'il y avoit des verbes qui énon» çoient les modes , les temps, les nombres et les personnes par certaines terminaisons » et que d'autres verbes de la même laifgue a voient des terminaisons toutes différentes pour mar- quer les mêmes modes , les mêmes temps , les tnêraes nombres et ' les mêmes personnes. Alors les Grammairiens ont fait autant de classes différentes de ces verbes ^ qu'il j a de variétés entré leurs terminaisons ^ ^oi

de Grammaire. 219

maigre leurs diiFérences ont cependant une égale destination par rapport au temps, au nombre et à la personne. Far exemple , amo^ amaifiy amatum, amare; moneo ^ monui ^ monitum, monerei lego^ legi^lectum, légère; audÎQj audiui, auditum, audire. Ces quatre jsortes de terminaisons diâ^rentes entr'eiles , énoncent également des vues de l'esprit de même espèce* Amapi j*ai aimé; monuij j'ai averti; legi^ j'ai lu; audipi^ j'ai entendu. Vous voyez que ces différentes terminaisons, marquent également la première personne au singulier^ et au temps passé de l'indicatif. Il n'y a de différence que dans l'action que l'on attribue a chacune de ces premières pcr-< . sonnes; et cette action est marquée par les lettres radicales du verbe , am , mon ^ leg , aud»

A l'égard du François, il faut d'a^rd observer que tous nos verbes sont terminés à l'infinitif, ou en er^ ou en i>, ou en oir , ou en r^. Ainsi ce seul mot technique , er^ir" oir^re , énonce par cl^acune de ses syllabes , cbacune de nos quatre conjugaisons géné- rales*

Ces quatre conjugaisons générales sont ensuite subdivisées en d'autres , & cause des

%t0 Principes

voyelles ou des diphtongues > oudesconson* nés qui précèdent la teroain^ison générale. Par exemple , er est une terminaison générale : mais si er est précédé d*nn son mouillé foible, comme dans ent^O'^yer^ ennu^yer^ ce son apporte quelques dift'érences dans la conja-^ gaison, U en est de même' dans re. Ces deux lettres sopt quelquefois précédées de coDr* tonnes , comme dans paincre , rendre , battre , etc.

Je crois que plutôt que de fatiguer Tesprit , et la mémoire de règles ^ il vaut mieux

w

donner un paradygme de chacune de ces quatre conjugaisons générales , et mettre ensuite au - de;ssus une liste alphabétique des verbes que Tusage a exceptés de la règle.

Je crois aussi que l'on peut s'épargner la peine de se fatiguer après les observations que les Grammairiens ont faites sur les for- mations des temps, La seule inspection du paradigme donne lieu k chacun de faire ses ipemarques sur ce point.

D'ailleurs les Grammairiens ne s'accordent point sur ices formations. Les uns commen- cent par l'infinilif. U y en a qui tirent les formations de la première personne du pré«

ie Grammaire. As^X

«ent de Vindicatif: d^autres de la seconde ^ etc. L'essentiel est de bien connoitre la signi- fication , Tusage et le service d*un mot. Amusez-vous ensuite, tant qu*il vous plaira, à observer les rapports de filiation du d^ paternité que ce mot peut avoir avec d*autres. S'il eût été possible que les langues eusseni été le résultat d'une assemblée générale de la nation 9 et qu'après bien des discussions et des raisonnemens , les philosophes y eussent été écoutés , et eussent eu voix délibérative \ il est vraisemblable qu*il y aurbit eu plus d'uniformité dans les langues. Il n'y auroit eu, par exemple, qu'une seule con^jugaison, et un seul para'dygme pour tous les verbes d'une langue. Mais comme les langues n*on( élé formées que par une sorte de métaphy- sique d'instinct et de sentiment , s'il est permis de perler ainsi ; il n'est pas étonnant qu'on* n*y trouve pas une analogie bien exacte , et qu'il y ait des irrégularités. Par exemple , nous désignons la même vue de l'esprit par plus d'une manière , soit que la nature des lettres radicales qui forment le mot amène ce|te différence, ou par la seule raison da caprice et d'un usage aveugle. Ainsi nous marquons la première personne au singulier^

K3

X \

«22 Principes

quand nous disons j'aime. Nous dësîgaons aussi cette première personne,^ en disaot, je finis , ou bien ]e reçois , ou je prends ^ etc. Ce sont ces différentes sortes de teriûi- naisons auxquelles les verbes sont assujétis dans une langue , qui font les dififéreutes con« jugaisons , comme nous Pavons déjà observe. Il y a des langues les différentes vues dft l'esprit sont marquées. par des particules/ dont les unes précèdent, et les autres suivent les radicales. Qu'importe comment, pourvu que les vues de l'esprit soient distinguées avec netteté-, et que l'on apprenne par usage k connoitre les signes de ces diniactiouit

de Grammaire. 223

DES PRÉPOSITIONS,

ET EN PARTICULIER

DE LA PRÉPOSITION A.

I

L faut observer , à Tégard des prépositions :

I. Que toute prëposîtîoa est entre deux termes r]u*elle lie , et qu'elle met en rapport*

II. Que ce rapport est souvent marqué par la sigaîflcatioa propre de la préposition même) comme, açec, dans^ sur, etc*^.

III. Mais que souvent aussi les prépo- sitions, sur-tout , jd ,) de ^ ou du, outre le rapport qu'elles indiquent quand elles sont prises dans leur senç primitif et propre , ne. sont ensuite par ligure et par extension, que' de simples prépositions uuiliTes ou indica- tives , qui ne font que mettre deux mots en rapport ; en sorte qu'alort c'est k l'esprit niê^ine ï remarquer la sorte de rapport qu'il y a entre les deux termes de la relation unis

K4

%%4 Principes

cntr'eux par la préposition. Par exemple y Approche z-'pous du jfeu : du lie Jeu avec approchez^pous : et i* esprit observe ensuite na rapport â*approxiniation, que du ne mar« <{ae pas. Eloignez'- P0us du Jeu ; du Mejeu avec éloignez^çous ^ et l'esprit observe un rapport d'éloigaement. Vous voyez que la mime préposition sert k marquer des rapporU ' opposés. On dit de même donnera^ et Mer à. Ainsi ces sortes de rapports différent autant que les mots différent entr'eux.

Je crois donc, que lorsque les prépositions ne sont 9 ou ne paroissent pas prises dans le ^ens propre de leur première destination, et que par conséquent elles n'indiquent pas par elles mêmes la sorte de rapport particulier que celui qui parle veut faire entendre; alors c'est à celui qui écoule ou qui lit, à recon* noître la sorte de rapport qui se trouve entre les mot* liés par la préposition ïimplemeol unitiv.e ou indicative.

Cependant, quelques Grammairiens ont mieut aimé épuiser la métaphysique la plus recherchée, et si je Tosc dire, la plus inutile «t la plus vaine , que d'abandonner le lecteur au discernement que lui donne la connois- f ance et l'usa^^e de sa propre langue. Rapport

âe Grammaire. 125

lie cause; rapport d'effet ^ d'instrument j de situation j d'époque. Table à pieds de biche 1 c'est un rapport déforme, dit Tabbé Girard (i). Bassin à barbe ^ rapport de ser-* pice\ pierre à fou^ rapport de propriété productiue (2), etc. La prépositioa à n'esta point destiaëe à marquer par elle-même ua rapport àt propriété productive ^ ou de ser^- vice^ ou déforme^ etc. quoique ces rapports se trouvebt entre les mots liés par la prépo- position à. D*ailleurs, les mêmes rapports sont souvent indiqués par des prépositions différentes , et souvent des rapports opposés sont indiquée par la même préposition.

U me paroît donc que l'on doit d*abord observer la première et principale destinatioa d'une préposition. Par exemple , la principale - destination de la préposition à, est de marquer la relation d'une chose à une autre , comme, le terme l'on va, ou à quoi ce qu'on fait se termine , le but , la fin^, l'attribution . le pouri* quoi. Aller à Rome: Prêter de V argent à usure ^ à gros intérêts: Donner quelque chose à quelqu'un , etc. Les autres usages de cette

'm*'

(1)' Tom, n, pag, 199.

(a) Girard, iome XI; p^gé 19g.

K 5

3A6 Prin^pes

préposition reviennent ensuite ^ ceox*là)par catachrèse, ab'as, extension ^ on imitation» Mais il est bon de remarquer quelques-uni de ces usages, afin d'avoir des ei^emples qui puissent servir de règle , et aider à décider les doutes par analogie et par imitation. On dit donc :

Après un nom substantif.

Air à chanter. Billet à ordre , c'est-i-dîre, payable à prdre. Chaise à deux. Doute à éclaircir. Entreprise à exécuter. Grenier à seL Habit à la mode. Instrument à cent» Matière à procès. Plaine à perte de pue, etc.

Après un adjectif*

Agréable à la pue. Contraire à la santé. Délicieux à manger. Facile à faire.

Observer qu*on dit , il est facile dejairi ^ela.

Quand on U ¥êu9^ il ett/œU^ De »' assurer un repos plein happai,

La raison de cette différence est que dans le dernier exemple de n*a pas rapport ifacile', mais k tl, 11 , fioe^ cria^ h savoir défaire, etc. est facile j est une chose facile. Ainsi) il , de s'assurer un repos plein d'appas ^ est k

âe- Grammaire* a>7

sujet de la prëposition, et e$i facile^ ea esi i*attnbut.

Après un perhe.

S'abandonner à ses passions ^ s'amuser à des bagateUef, Applaudira quelqu* un. Aimer à boite g àjaire du bien. Le^ hotnmes n'ai^ ment point à admirer les autres; ils cherchent eux-mêmes à être goûtés et à être applaudis* La Bruyère. Aller à cheçaL S'appliquer à. S*attaeher à. Blesser à. Crier à l'aide , au ^eu , eCc . Conseiller quelque chose à quel*» qu*an. Demander à. Donner à boire à qutl^ qu'un. Etre à, etc. Voyons à qui l'autre^ c'est-à-dire, tfoyons à ceci, ( attendamas ^ hoc , aempe ) à saçoir qui Vaura*

Açant une autre préposition.

A se trouve quelquefois avaut la prépo* sillon de , comme en ces exemples :

Pèut'On ne pas céder k àt ti puiêt^n» ehafmes 9 Et peut'on refuser son cœur A de beaux jreuat gui le demandctu»

Je crois qu'en ces occasions , il y a une ellipse synthétique: Tesprit est occupe de« charmes qui Tont frappé \ et il met ces char- mes au rang des charmes puissant dont om

KG

iiaS Principes

»e sabroit se garantir. Feui-on ne pas céder àT attrait , au pouçoir de sipuissans char^ mes. Peui'On refuser son cœur à ces yeux y qui sont de la classe des beaux yeux. L'usage abrège ensuite l'expression, et introduit des façons de parler particnlières ^ auxquelles on doit se conformer , et qui ne détruisent pas les règles. . Ainsi je crois qne^^ ovides^ sont toDJonrs des prépositions extractives, et que quand on dit) des Saçans soutiennent; des hommes m'ont dit^ etc. des sapans^ des hommes, ne aont pas an nominatif. Et de même , quand on dit ) j'ai tfu des Jemmes , fai pu des hommes ^ etc. des femmes, des hommes^ ne sont pas a l'accusalifè Car si Ton vent bien y prendre garde, on reconnoStra que ex homi^» nihus y ex mulierilfus , etc. ne peuvent être ni le sujet de la proposition , ni le terme de l'action du yerbe ; et que celui qui parle , vent dire y que quelques-uns des sapans soih tiennent y etc. quetques-^uns des hommes; quelques-unes des Jemmes , disent, etc»

A , après des adperbes.

On ne se sert de la préposition à après mdyerbe ^ que Iprjsqae IVdyerbe marque

i

de Crammair9. M)

Isitîon. Alofs Padverbe exprime la sorte de relation , et la préposition indique le corré-« latiF. Ainsi on dit conformément à. On a juge conformément à TOrdonnancede 1667, On dit aussi relativement à.

D*ailleurs, Tadverbe ne marquant qu'une circonstance absolue et déterminée de Tac- tion^ n*est pas suivi de la préposition â.

A > en des façons de parler adverbiales i et en celles qui sont équiçalentes à^ des prépositions latines , ou de quelqu' autre langue,

A jamais, A toujours , à V encontre. Tour* Jk'iour, Pas - ^ - f^as. Vis - à - vis, A pleines mains, A Jur et à mesure, A lajin, tao^ dem ^ aliquando. O est -à" dire ^ nempe , scilicet. Suivre à la piste. Faire le diable à quatre. Se faire tenir à quatre* A cause | qu'on cend en latiu par la préposition. propter, A raison de. Jusqu'à ^ ou jusqueS à, Au'det4» Au-dessus, Au-dessous, A quo^ bon , quorsum. A la vue ^ à la présence ^ ou en présence^ corani.

Telles sont les principales occasions l*asage a consacré la préposition à, Les

îtSo Principes

exemples qoe nous venons de rapporter ^^ serviront à décider par analogie les diffi- cultés que 1*00 pourroit avoir sur cette préposition.

Au reste , la préposition au est la même que la préposaion à. La seule dif- férence qu'il y a entre Tune et l'autre , c'est que à est un* mot simple , et que au est on mot composé.

^ Ainsi il faut considérer la préposition à en deux états différens.

I. Dans son état simple: l.^ Rendez à César ^ ce qui appartient à César: z.^ Se prêter à l'exemple: 3.® Se rendre à la raison. Dans le premier exemple à est devant un nom sans article. Dans le second e;Lemple, à est suivi de l'article masculin, parce que le mot commence par unré^ voyelle ; à V exemple y à T esprit^ à l'amour. Enfin dans le dernier, la préposition di précède l'article féminin.

II. Hors de ces trois cas , préposition à devient un mot composé par sa jonction avec l'article /<?, ou avec Tarticlc pluriel les*. L'article îe^ k cause du son sourd de Ve muet, a amené au^ de sorte qu*au lien de dir» àle^ nous disons au^ si le nomen com«

de . Grammaire. 5tSt

menqe pas par une voyelle; s^ adonner au bien. Et au pluriel , au lieu de dire à les ^ nous chaugeons / en <i; ce qui arrive souvent dans4»ptre langue , et nous disons aux , soit que le nom commence par une voyelle , ou par une consonne , aux hommes , auxjem* mes. Ainsi au est autant que à le y et aux que à les»

' , <np

DE L'ADVERBE.

L

lE mot adçerhe est formé de la prëpo« sition ad y vers^ auprès ^ et du mot çerbe^ parce que Tadverbe se met ordinairement auprès du verbe , auquel il ajoute quelque modification ou circonstance. Il aime conS'* tammenty il écrit mal. Les dénominations se tirent de Tusage le plus fréquent: or le service le plus ordinaire des adverbes est de modifier Taction que le verbe signi* fie , et par conséquent de n*en être pal éloigné : et voilà pourquoi on les a appelés adverbes; c'est-à-dire ^ mots joints au verbe*

ftSi Princîpeê

Ce qui a*eni pèche {)as qu'il n*y ait des zA* verbes qui se rapportent aussi au nom ad- jectif) aji participé et à des nonis quali- ficatifs, tels que roi ^ père , etc. car ou dit| il m'a paru fort changé: c'est une Jemme extrêniemeot sagt et fort aimable. Il est véritablement roi.

En faisant rénumératîon des différentes sortes de mots qui entrent dans le discours ^ je plac^ Tad verbe après la préposition, parce qu'il me paroit (juè ce qui distingue Tadverbe des autres espèces de mots , c*est que Tad- verbe vaut autant qu*uoe préposition et un nom : il a la valeur d*une préposition avec son complément : c*est un iiiot qui abrège. Par exemple sagement ^ vaut autant que^ ûçec sagesse.

Ainsi , tout mot qui peut être rendu par

une préposition et un nom , est un adverbe.

Par conséquent ce mot y^ quand on dit^

il y est, ce mot , dis-je, est un adverbe

qui vient du latin lài. Car, il y est^ est

comme si l'on disoit , il est dans ce lieu^là.

est encore un adverbe qui vient du

latin Uôij que Ton prononçoit oudL Oik

eSt^Hy c'est-k-dire^ en quel lieu.

Si, quand il n'est pas conjonction cos«

êe Grammaire* 233

ditionnelle ) est aussi adverbe , comme quand on die, elle est si sage^ il est si savante Alors, 51 vient du latin 5ic, c*est-^-dire à ce point j au point que ^ etc. c'est la valeur ou signification du mot, et non le nombre des syllabes , qui doit faire mettre un mot en telle classe, plutôt qu*en telle autre. Ainsi A est préposition , quand il a le sens de la préposition latine à ^ o\k celui de ad : au lieu que A est mis au rang des verbes ^ quand il signifie habet , et alory nos pères écrivoient ha.

Puisque l'adverbe emporte toujours avec lui la valeur d'une préposition , et qae chaque préposition marque une espèce de vnanière d'être, une sorte de modification dont le mot qui suit la préposition fait une application particulière, il est évident que l'adverbe doit ajouter quelque modification ou quelque circonstance à l'action que le yerbe signifie. Par exemple , il a été reçu ai^ec politesse^ ou poliment.

Il suit encore de- la que l'adverbe n*a pas besoin lui-même de complément. C'est un mot qui sert à modifier d'autres mots , et c|ui ne laisse pas l'esprit dans l'attente né- cessaire d'un autre root) comme font It

a34 Principes

verbe actif et la préposition. Car si je dis âa roi qu'il a donné ^ on me demandera quoi y et à qui. Si je dis de quelqu'un qa'il s'est conduit avec , ou par^ ou sans^ ces prépositions font attendre leur complément. Au lieu que si je dis , il s'est conduit pru* demmeht ^ etc. l'esprit n'a plus de question nécessaire à faire par rapport à prudem^ ment. Je puis bien ^ k la vérité , demander en quoi a consisté cette prudence; mais ce n'est plus Ih le sens nécessaire et gram* matical.

Pour bien enteniSre ce que je veux dire, il faut ^server que toute proposition qui forme un sens complet , est composée de divers sens ou concepts, particuliers , qai^ par le rapport qu'ils ont entre eux, for- ment Fensemble ou sens complet.

Ces divers sens particuliers , qui sont cofnme les pierres du bâtiment, ont aussi leur ensemble. Quand je dis, le^ soleil, est levé , yoilsL un sens 'complet. Mais ce sens complet est composé de deux concepts par- ticuliers : j'ai le concept de spleii ^ et le concept de est levé* Or remarquer , que ce dernier concept est composé de deux mots, est et levé^ et que ce dernier suppose 11

de Grammaire* 235

premier» Pierre dort , voilk deux concepts ënoDcés par deux mots : tuais si je dis Pierre bat^ ce mol bat n'est qu'une partie de mon concept ; il faut que j'énonce* la personne ou la chbse que Pierre bat, Pierre bat Paul y alors Paul est le complément de bat: bat Paul est le concept entier; mais concept partiel de la proposition Pierre bat Paul.

De même, si je AW Pierre est apec^ sur ou dans , ces mots apec , sur ou dans y ne sont que des parties de concept , et ont besoin chacun d'un complément. Or ces mots joints à un complément font un con- cept, qui, étant énoncé en un seul mot, forme Tadverbe, qui en tant que concept particulier m tout formé , n'a pas besoin de complément pour être tel concept par- ticulier.

Selon cette faotion de l'adverbe , il est évident que les mots qui ne peuvent pas être réduits à une préposition suivie de son complément, sont ou des conjonctions ou des particules , qui ont des usages partî«- culiers. Mais ces mots ne doivent point être mis dans la classe des adverbes. Ainsi Je ne mets pas non , ni oui parmi les ard-

é '

a36 Principes

verbes* Non^ ne, soat des parlicàUs ni* gatives.

.A regard de oui^ je croîs qae c*est le -participe passif du verbe ouir^ et que nous disons omI, par ellipse, cela est oui^ cela est entendu* C'est dans le même sens que les Latins disoient dictum puta (i).

Il y a donc autant de sortes d'adverbes

qu'il j a d'espèces de manières d'être qui

peuvent être énoncées par une préposition

et son complément. On peut les réduire à

.certaines classes.

A D r E R s D s Temps.

Il y a deux questions de. temps qui sr font par des adverbes,, et auxquelles on répond ou par des adverbes, ou par des prépositions avec un complément.

1. Quand viendrez- vous ! demain^ dont iroii jours,

2. Combien de temps l Si long-temps que. Autant de temps que. Combien de temps Jésus-Christ a-t-il vécu l Trente-trois aïïs; on sous-entend , pendant.

Voici encore quelques adverbes de temps ,

\ . - ..

(i) Xértacd» ^ndr, act. I, icw L

de Grammaire. '237

Jusqu'à ce que. Tous les jours ! on soo»- eotend la préposition pendant* Maintenant» Présentement. Alors, c'est-à-dire, à l'heure.

Auparavant, Ce niot ëtant adverbe ^ ne doit point avoir de complément. Ainsi c'est une faute de dire auparavant celar il faut dire, avant cela. Autrefois. Dernièrement.

Aujourd'hui, c'est-à-dire, au jour de hul, au jour présent. On disoit autrefois simple- ment huii je n'irai hui, Nicod. Hui est en-« core en usage dans nos provinces niéri«« dionales.

Hier. Demain» Autrefois. Un jour, pour le passé et pour l'avenir. Quelquefois^ le matin, le soir. Tard. Avant ''hier. Quel-^ que jour, avec affirmation. Jamais^ avec pégation. Déjà. Long^temps, Depuis peu» Quand. Ci ^devant, diaprés. A l'avenir» Aidant que. Jusqu'à ee que. Tandis que» ' pientôt. D'abord. Tout A l'heure. Alors. 'Dés'lors. Ehfin. 4. l'avenir. Ordinairement. I^' ordinaire.

AiyrsABES d jb Lieu.'

Ji y a quatre manières d^enyisager le Heu, On peut le regarder, 1.0 comme étant le U^a ofi l'on est 3 Ton demeure ; 2.* comme

a38 Principes

étant le lieu i*oa va : 5** comme étant le lieu par Ton passe : 4.*^ comme étant le lieu d*^ù l'oa vieot. C'est ce que les prammairiens appellent , in loco , ad lo-^ cum , per locum ^ de loco , ou autrement^ ubi , quo , i^uâ , unde. est-il l U est M* et Ik sont des adverbes : car on pent dire; En quel lieu! En ce lieu; etc.

Voici encore quelques adverbes de lieu s ou de situation. Y: A y est. Ailleurs, Devant. Derrière, Dessus, Dessous^ Dedans, pehors, Par^tout, Autour*

Adveress ve Quanti

TÉ.

Combien, Beaucoup, Peu. Davantage, TrèS'Jort, Un peu. Médiocrement. Ample^ ment. En abondance, A foison, Largemeni^

ADrERB*ES DE QUALITÉ.

Saçamment, Pieusement, Ardemment, Sagement, Gaiement, Bien, Mal, Heureu* sèment; et grand nombre d*autres formés des adjectifs qui qualifient leurs substantifs.

A D r s RB 9 s DE- M A N I È R S.

Promptement» Tout d'un coup. Lente»

de Grammaire. aSç

menU A la hâte» Peu à peu» Confusément» Insolemment» De diverses manières,'^

Il y a àe% adverbes gui servent à marquer le rapport ou la relation de ressemblance. Ainsi que. Comme. De la même manière que. De même que.

D'autres au contraire marquent diversité. Autrement. D'ailleurs.

D'autres adverbes servent k compter com« Ucn de fois. Qutlquefois. Combien de fois. Encore. Soutfent. Rarement. Vnejbis, deux Jhisy trois Jois, cent fois ^ mille fois : en Fran- çois nous sous-en tendons ici quelques pré- positions , pendant y pour^ par.

D'autres sont adverbes de nombre or- dinal. Premièrement. Secondement. En troisième lieu ^ etc.

Adverbes d* I nt e rko gati o n.

Pourquoi. Pour quel sujet. Comment. Il y a aussi, sur«-tout en latin, des particules qui servent à l'interrogation. An^ anne , num, nunquid ^ nonne. Ne joint k un mot, Vides ne l Voyez^çous l Ec joint ^ certains mots y Ecquando , quand \ Ecquis ) qui { JEcqua mulier^ quelle femme/

ti^ Principes

^ B^S RBSS D*Af fi R UA TlOlf»

Ainsi. Certainement. Vraiment oui. Sarii doute.

ADrSRBSS JD s N É GAT 1 o ir.

En aucune manière. Niiliement. Poim eu tout. Nulle part.

A DVE RBES DS DlMIUUTION.

Presque. Peu s'en faut*

Ai>rsRMasvE D o u t s^

Peut'-être.

Il y a aussi des adverBes qui servent dans le raisonnement. Ainsi. Or. Par conséquent,

D*autres marquent assemblage, ^/zj^/n^/^i conjointeFfient t pareillement. D'autres , di- vision. A part^ en particulier^ séparément , en détail y Vun après Vautre. D autres d'ex- ception. Seulement^ etc.

Il y 9 aussi des mots qui servent daos les comparaisons , pour augmenter la srgQifi- catiou des adjectifs^ Par exemple, on dit au positif ) pieux , plus pieux ^ très ou Jvrt pieux. Ces mots plus , très ^fort , sont Con- •idér^s comme des adverbeSt Port\ c'est-à*

dire,

de Grammaire, 24t

AiTt ^ fortement , extrêmement. Très vient de ter ^ trois Jois, Plus , c'est-à-dire^ selon une plus grande çaleur. Moins est encore UQ adverbe qui sert à la comparaison.

Il y a des adverbes qui se comparent , sur-tout les adverbes de qualités , ou qui espiiment ce qui est siftceptible de plus ou de moins. Comme long^ temps , plus long" temps. Savamment^ plus sat^ammant , irèS" Baçamment. Vaillamment , plus paillani'* ment, très-çaillamment.

Il y a des mots que certains Gramniairiens placent avec les conjonctions , et que d*auires mettent avec les adverbes. Mais si ces mots renferment la valeur d'une préposition et de f(m complément ii comme yy^rce ^we, c'est pourquoi^ etc. ils sont adverbes*, et s'ils font de plus Toilice de conjonction, nous dirons que ce sont des adverbes con}onctifs.

Il y a plusieurs adjectifs qui sont pris ad- verbialement. // sent bon. Il sent mauçais. Il çoit clair. Il chante juste., Parlez has. Parlez haut. Frappezjort. Tenir bon. Tenir ferme , etc.

On appelle, expression adverbiale , celle qui est équivalente à un adverbe. Si l'usage «Y^it établi ui^ seul mot pour exprimer le

L

24^ Principes

même sens ^ ce mot seroit un adverbe : maïs comme ce sens est énoncé eo deux mots , oa dit que c'est une expression adverbiale. 11 ea est de même de pis^à-çis^ tout d'un coup^ tout-'à'COup , à coup sûr , qu'on exprime ea latin en un seul moi^ par des adverbes parti- culiers ; Improvisé ^ subite : ccrtb , et tout de bon , serià , etc.

C

DES CONJONCTIONS.

X^ES conjonctions sont de petits mots qui marquent que l'esprit , outre la perception qu'il a de deux objets , aperçoit entre ces objets un rapport ou d'accompagnement, ou d'opposition , ou de qnelqu 'autre espèce. L'esprit rapproche alors en lui-même ces objets , et les considère l'un par rapport à l'antre , selon cette vue particulière. Or le mot qui n'a d'autre office que de marquer cette considération relative de l'esprit est appelé Conjonction.

{^ar exemple, si je dis que Ciccron et

i

de Grammaire. a^

Quintilien sont les auteurs les plus judicieujf de r antiquité , je porte de Quintilien le même jugement que j*énonce de Cicéron, Voilà le motif qui fait que je rassemble Ci« cérou avec Quintilien. Le mot ef qui marque cette liaison , est la conjonction.

Il en est de même si Ton veut marquer quelque rapport d'opposition ou de discon* venance. Par exemple , si je dis qu*f/^ a un açantage réel à être instruit; et que j'ajoute ensuite , sans aucune liaison ^ qu'i7 nejaut pas que la science inspire de l'orgueil, î'énonce deux sens séparés. Mais si je veux rapprocher ces deux sens , et en former Tua àç ces ensembles qu'on appelle Période ^ j.'aper.çois d*abord de la disconvenance , et une sorte d'éloignement et d'opposition qui doit se trouver entre la science et l'orgueil.

Voilà le motif qui me fait réuoir ces deux objets. C'est pour en marquer la disconve- nance. Aiosi en les rassemblant, j'énoncerai cette idée accessoire parla conjonction mai$\ Je dirai donc : Il y a un avantage réel à être instruit; mais Une faut pas que celai^an'- ta ge inspire de l'orgueil, -Ce mais rapproche les deux propositions* ou membres de la pé- riode , ei les met en opposition.

La

A44' Principes

Ainsi la valeur de la conjonction consiste à lier des mots par une nopvelle niodidca» tion , ou idée accessoire , ajoutée à l'un par rapport k l'autre. Les anciens Grammairiens ont balancé s'ils placeroient les coujonclions au nombre des parties du discours ; et cela par la raison que les conjonctions ne repré- sentent point d'idées de choses. Mais questr- ce qu'être partie du discours, dit Priscien (i), sinon énoncer quelque concept, quel-^ ^ qWqffection ou^moutfement intérieur de l'esprit! Quid enim est aliud pars oratioms, nisi çox indicans mentis conceptum , id est cogitaiionem /Il est vrai que les conjonctions n'énoncent pas , comme font les noms , des idées d'êtres ou réels ou .métaphysiques : mais elles ei^priment l'état ou affection de l'esprit entre une idée et une autre idée; ebtrc une proposition et une autre proposition. Ainsi les conjonctions supposent toujours deux idées et deux propositions , et elles font connoître l'espèce d'idée accessoire que l'es- prit conçoit entre l'une et l'autre.

Si l'on ne regarde dans les conjonctions , que la seule propriété de lier un sens à

p) \\]>. XI, suh irutÎQ,

de Grammaire. ^43

un aulre ^ on doit reconnoître que ce service leur est commun avec bien d'autres mots.

I.<^ Le verbe, par exemple , lie Tattribut au sujet. Les pronoms', lui^ elle » eux , le ^ la y les, leur y lient une proposition à une autre. Mais ces mots tirent leur déoomioation d*uu autre emploi qui leur est plus partie culier.

2,^ Il y a aussi des adjectifs relatifs qui font Tofiice de conjonction. Tel est le relatif çuiy lequel l laquelle. Car outre que ce nioC rappelle et indique Tobjet dont on a parlé, il joint encore et unit une autre proposition à cet objet. Il identifie même cette nouvelle proposition avec l'objet. Dieu que nous gdorons est tout'- puissant : cet attribut est^ tout-^puissant i est affirmé de Dieu, en tane qu'il est celui qne nous adorons. Tel, quel^ Talis , quaiis , tantus , quantus , toi , quot ^ etc. fout aussi l'office de conjonctions.

3.^ ily a des adverbes qui , outre la propriété de marquer une circon$t<')nce de temps ou de lieu, supposent de plus'quelqu^autre pensée qui précède la propositionH)ii ils se trouvent. Alors ces adverbes font aussi l'office de con- jouctioQ. Tels sont ajin que. Ou trouve dans quelques aucieus , €t Ton dit m^me encore

L 3

24^ Principes

aa)oarct*hui éa Gertaioes provinces , ^ c^//# Jin que , ad huncjinem secondàm çuem ; TOUS vojes la préposition et le nom qui font l'adverbe ^ et de plus Tidée accessoire de liaison et de dépendance. Il en est de même de à cause que , propterea quod; parce que, quia; encore^ adhuc ; déjà y jatn^ etc. Ces mo' s doivent être considérés comme adverbes conjonctifs , puisqu'ils font en même-temps Toi&ce d'adverbes et celai de conjonctions* C'est du service des mots dans.la phrase qu*oa doit tirer leur dénomination.

A l'égard d«s conjonctions proprement dites, il y en a d'autant de sortes , qu'il y eo a de différences dans les points de vue sons lesquels notre esprit observe un rapport enti^ un mot et un mot , ou entre une pensée et une autre pensée. Ces différences font autant de manières particulières de lier les propo- sitions et les périodes.

Les Grammairiens , sur cbaque partie du discours , observant ce qu'ils appellent les accidens. Or ils en remarquent de deux sortes dans les conjonctions.

I.^ La simplicité et la composition. C'est «ce que les Grammairiens appellent /a^^2/r^. Jls entendent par ce terme , la propriété

de Grammaire. 247

d*étre un mot simple, oa d*étre un mot composé,

II y a des conjonctions simples, telles sont et^ ou, mais , si , car , ni ^ aussi , or^ donc^ etc.

11 y en a d*aatres qui sont composées , à moins que^pourçu que, de sorte que^ parce que , par conséquent^ elc.

2.* Le second accident des conjonctions ^ c'est leur signification, leur effet ou leur va-* leur. Cesi ce qui leur a fait donner les diver/i noms dont nous allons parler. Sur quoi j*ai cru ne pouvoir mieux faire que de suivre Tordre que M. l*abbé Girard a gardé ddns •a Çrammaire y au traité des conjonctions (i). Cet ouvrage est rempli d'observations utiles , qui donnent lieu d'en faire d'autres , que l'on n'auroit peut-être jamais faites , si l'on n'avoit point lu avec réflexion l'ouvragt de ce digne académicien,

I. Conjonctions copulathes.

Et, 72/, sont deux conjonctions, qu'on appelle copulatii^es , du lalio , copulare y

(1) Les véritables principes de la langue frari" foise. mu, DiscoarSi

L4

248 Principes

joindre , assembler, lier. La première est es usage dans Taifirmation, et Tautre daos la négation. // n'a ni çice ni vertu. Ni vient du nec des Latins, qui vaut autant qae el non. On trouve souvent et au lieu de ni daos les propositions négatives ; mais cela ne me paroît pas exact.

Je ae coanoissoîs pas Almanzor et TAaioiir.

X*aînieroîs mieux, ni l' amour. De même : La poésie n admet pas les expressions et tes ira>tspositiàns particulières , qui ne peuvent pas trouver quelquefois leur place en prose dans le style vif et élevé. Il faut dire avec le père Bui&er : la poésie ri admet ni expression ni transposition , etc.

Observez que comme Tesprit est plus prompt queja parole , Tenipressement d'énon- cer ce que Ton conçoit , fait souvent suppri* mer les conjonctions , et sur-tout les copu- latives^ Attention^ soins, crédit^ argent^ j'ai mis fouî en usage pour j etc. Cette sup- pression rend le discours plus vif. On peu! faire la même remarque a l'égard de quel- ques autres coojonctions, sur-tout dans le st^le poétique , et dans le langage de la passion et de Tenlhousiasme.

de Grammaire. ^4^

IL Conjonctions augmentatipes ^cu adfferheê ^ conjonctifs augmentatifs.

De plus , d'ailleurs. Ces mots servent sou veut de transition dans le discours*

' III. Conjonctions alternatitfes»

Ou , sinon , tantôt. Il faut fju^une porte soit ouverte ou fermée* Lisez ou écrii^ez* pratiquez la çertu , sinon tfous serez malm heureux. Tantôt il rit , tantôt il pleure. Tantôt il peut , tantôt // ne peut pas.

Ces conjonctions, que M. l'abbë Girard appelle alternatipeSj f^vct qu'elles marquent une alternative, une distinction, on séparation dans les choses dont on parte ; ces conjonc- tions, dis->je, sont appelées plus^ communé- ment disjouotiveaf. Ce sont des coàjonctions , parce qu'elles unissent d^abord deux objets, pour nier ensuite de l'un ce qu'on affirme

derautre.ParëicmplejOnconsidèred'abord le soleil et la terre , et Ton dit ensuite , que c'est le soleil qui tourne autour de la terre on bien que c'est la terre qui tourne autour du soleil. De même, en certaines circons-

L 3

&5.0 Principes

tances, on regarde Pierre et Paul comme les seules personnes qui peuvent avoir fait une telle aation. Les voilà donc d*abord considères ensemble, c*est la coujonclion r ensuite on les désunit , si Ton ajoute : Cest ou Pierre ou Paul gui ajait cela : c*eêi l'un ou c'est Vautre,

IV. Conjonctions hypothétiques*

m

Sij soiij pourvu que, à moins que, quand, sauf, M. Tabbé Girard les appelle hypothé" tiques, c*es^^-dire, conditionnelles, parce qu*ea effet ces conjonctions énoncent une condition , une supposition , une hypothèse.

Si, Il y a un 5i conditionnel. Vous dç" çiendre^ savant si pous aimez V étude. Si cous aimez l'étude , voilà Thypolbèse ou la condition.. Il y a Vitisi de doute ; Je ne sais êi , etc. Il y a encore un si qui vient du sic des Latins. // est sistudieum^ qu^il de^ çicndra sapant* Ce si est alors adverbe : sic adeo , à ce point ^ tellement.

Soiti sipe ;. soit goût ^ soit raison, soit caprice , il aimfi la retraite. On peut aussi regarder soity.n'pe ^ comme une conjonction alternative de distinction. .

de Grammaire^ iSt

Sauf y dësigue une hypoihèse , mais avec restriction.

V. Conjonctions adtfersaiitf es* .

On' appelle Conjonctions adversatives , des conjonctions qui marquent quelque dif- férence ^ quelque restriction ou opposition entre ce qui suit et ce qui procède. Elles ras* semblent les idées , et font servir Pune à contrebalancer l'autre. Le mot adçersative vient du latin ad versus y contraire , opposé. Il y a sept conjonctions adversatives : mais, quoique , bien que ^ cepmdant , pourquoi ^ néanmoins , toutefoi^}l\ y a celle différence entre les conjonctions adversatives et les dis- Jonctives , que dans les adversatives^ lèpre* mier sens peut subsister sans le second ^ qui lui est opposé ; au lieu qu'avec les dis- jonctives , l'esprit considère d'abord les deux membres ensemble, et ensuite les divise , en donnant ralternative, en les partageant et les distinguant. Cesl le soleil on la terre 'qui tourne. C'est pous onmoi. Soit que pous mangiez , «oit que cous buçiez. En un mot y l'adversative restreîni ou contrarie , au lieu que la disj^ncliv» sépare ou diyise»

L 6

%5i Principes

, Il y a des conîonctÎQQS qae M. l'abbé Girard appelle exUnsiçes , parce qu'elles lient par extension de sens : telles sonljuS" ques j encore , aussi , même , tant que^ non, plus , enjin.

Il y a des adverbjj^s de temps que Ton peut aussi regjarder cororme de véritables conjonctiona^ Par exemple/, lorsque , quand, dès que , tandis que. Le lien que ces mots expriment consiste dans une correspondance de temps.

* YL D'autres marquent un motif;^ un bot, une raison» Afin que , parce que , puisque , car , comme , aussi, attendu que, ajoutant que. M* Tabbé Girard prétend (i) qu'il faut bien distinguer dautant que , conjonction, qu*on écrit sans apostrophe , et d'autant y adverbe qui est toujours séparé àe^que , par plus, mieux ou moins , d'autant plus que, et qu'on écrit avec l'apostrophe. Le père Jxiubert , dans son Dictionnaire , dit aussi dautant que ^ conjonction: on Técrit, dit- il , sans apostrophe , quia , quoniam. Mais M. Tabbé Régnier, dans sa Grammaire ^ écrit d'autant que, conjonction, avec Ta-

(i) Tome U, pag, aSo.

de Grammaire^ 353

pbstrophe; et observe que ce mot, qui autrefois étoit fort en usage , est renfernié aujourd'hui au style de chancellerie et de pratique. Pour moi , je crois que d'autant que , et d'autant mieux qu^ sont le même âdveFbe , qui de plus fait l'office de con- joDctloQ dans cet exemple , que M. l'abbé Girard cite pour faire voir que ajoutant que est conjonction sans apostrophe. On ne déçoit pas si Jort le louer , d'autant qu'il ne le méri/oit pas, N'est*il pas évident que d'autant que répond à ex eo quod , ex eo mompnto secundùm quod, ex ration» secundùm quam ; et que l'on pourroit aussi dire , d'autant mieux qu'il ne le mérita ii pas. Dans les premières éditions de Danct , on avoit écrit dautant que sans apostrophe ; mais on a corrigé cette faute dans Tédition de I721. La même faute est aussi dans Richelet. Nicol^ Dictionnaire 1606 ^ écrit toujours d'autant que avec l'apostrophe. VII. On compte quatre conjonctions con^ dusitfes^ c'est-k-dire, qui servent à déduire une conséquence, donc j par conséquent, ainsi j partante Mais ce dernier n'est guère d*usage que dans les comptes , il marque un résultat.

a 54 Principes

VIII. Il y a des conjonctions explicatiçes, comme lorsqu'il se présente une similitude ou une conformité, en tant que ^ sapoir^ sur-tout.

Auxquelles on joint le? cinq expressions suivantes , qui sont des conjonctions com- posées, de sorte que j ainsi gue^ dejuçon que ^ c'est-à-dire y si bien que.

On observe des conjonctions transH'peSj qui marquent un passage ou une transition d*une chose a nne autre. Or, au reste, quant à, pour ^ c'est-à-dire, à réfard de; comme quand on dit, t*un est penu; pour l'autre , il est demeuré,

IX. La conjonction que. Ce mot est d*ua grand usage franc ois. M. Tabbé Girard rap- pelle conjonction conductipe , parce qu'elle sert h conduire le sens à son coiiiplément. Elle est toujours placée entre deux idées , dont celle qui précède en fait toujours atten- dre une autre pour former un sens, de ma« nière que Tunion des deux est nécessaire pour former une continuité de sens. Par exemple : Il est important que Von soit instruit de ses de pairs. Cette conjonction est d'un grand usage dans les comparaisons. Elle conduit du terme comparé^ au terme qu'on prend

de Gramtnaire. 255

pour modèle oa pour exemple : Lesjemmes ont autant d'intelligence que les hommes i alorà elle est comparative. Eoiia la conjonc- tioa que sert eucore à marquer une restrictioa dans les propositions négatives. Par exemple : Iléiestjait mention que d'un tel prédicateur* Sur quoi il faut observer aue Ton présente d'abord une négation , d'où Ton tire la chose pour la présenter dans un sens aifirmatff exclusivement à tout autre. Il n'y at^oit dans cette assemblée que tel qui eût de l'esprit : Nous n'açons que peu de temps à piprej et nous rie cherchons qu'à le perdre, M. Tabbé Girard appelle alors cette conjonction re5- trictiçe.

Au fond,' cette conjonction que, n'est souvent que le quàd des Latins, pris dans le sens de hoc* Je dis que t>ous êtes sage, dico quàd; c'est-à-dire, dico hoc, nempè , vous êtes sage. Que vient aussi quelquefois de quam , ou àe quantum, ou enfin de quot,

' Au rcfste on peut se dispenser de charger sa mémoire de divers noms de chaque sorte de conjonction ; parce qu'indépendamment à% quelqu'autre fonction qu'il peut avoir , il lie un mot à un autre mot, ou un sens à un autre sens, de la manière que nous Tavons expii-

256 Principes

que d*abord. Ainsi il y a dei adverbes et des prépositioos qui sont aussi des conjonctions composées; comme afin que , parce que , à cause que , etc. Ce qui est bien différent du simple adverbe et de la simple préposition , qui ne font que marquer une circonMi«nce q^ une manière d*étre du nom ou du vei be.

De ce qu^on appelle Accibent^ en termes de Grammaire*

I

^E terme accident est sur « tout en usage daus les anciens Grammairiens Ils ont d*abord regardé le mot, comme ayant la propriété signifier. Telle est, pour ainsi dire, la substance du mot. C'est ce qu'ils appellent 710/721/225 /705i//o. Ensuite ils ont fait des observations particulières sur cette posi- tion, ou substance métaphysique : et ce sont ces observations qui ont donné lieu à ce qu'ils ont appelé accidens des dictions ; dictionwn accidentia,

Aiasi, par accident, les Grammairiens

de Grammaire, a57

entendent ane propriété qui, à la yérité^est attachée au mot; mais qui n*entre point dans la définition essentielle du mot. Car, de ce qu'un mot sera primitif, ou qu'il sera dérivé , simple ou composé, ii n'eu sera pas moins un terme ayant une signification. Voici quels sont ces accidens,

I. Toute diction ou mot , peut avoir an sens propre ou un sens figuré. Un mot est au pro- pre, quand il signifie , ce pourquoi il a été pre- micreraenl établi. Le mot hion a été d'abord destiné à signifier cet auimal qu'on appellt / hion. Si en parlant d'un homnle emporté , je dis que c'est un lion; lion est alors dans un sens figuré. Quand par comparaison , ou analogie , un mot se prend en quelque senr, autre que celui de sa première destination , «et. accident peut être appelé V acception da mot.

. IL En second lieu , on peut observer si un mot est primitif, ou s'il est dérivé.

Un mot est primitif, lorsqu'il n*est tiré d'aucun autre mot de la langue dans laquelle il^st en usage. Ainsi en frauçois, ciel, roi , ibo72^ sont des mots primitifs.

Un mot est dérivé, lorsqu'il est tiré de quelqu'autre mot^ comme de sa source.

a53 Principes

AÎQSÎ céleste, royal ^ royaume^ royauté, royalement ^ bonté , bonnement soat autaot de dérivés. Cet accideot^est appelé par les Granimairieas Vespèce du mot* Us disent qu*uQ mot est de l'espèce primitive « oa de l'espèce dérivée.

III; On peut observer si nn mot est simple , ou s'il est composé. Juste ^ justice , soot des mots simples: injuste, injustice, sont des mots composés. Eu laiio, res est un^ mot simple \ publica est encore un mot simple : mais respublica est nn mot composé.

Cet accident d*étre simple ou d*étre com- posé , a été appelé par les anciens Grammai** riens, lajigure, ils disent qu*ùn mot est de la figure simple , ou qu'il est de la figure com- posée; en sorte que^^reyient ici àtjingere, «t se prend povr la forme ou constitution d'un mot , qui peut être ou simple ou com- posé. C'est ainsi que les anciens ont appelé* Vùsa sictilia^ ces vases qoLse font en a)ou« tant matière à matière fet^V^ii/iif^ l'ouvrier qui les fait, àjingendo.

W: Un autre accident des mots regarde la prononciation. Sur quoi il faut distinguer Tacccnt , qai est une élévation , on nu abaisse- ment de la voix, toujours invariable dans le

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de Grammaire. 269

même mot; et le ton et TemphÀse, qui sont des inflexions de voixqai varient selon lesdi<* vers passions et les différentes circonstances^ un tonjier^ un ton soumis ^un ton insolent, etc.

Voila qua'tre accidens , qui se trouvent en- toutes sortes de mots. Mais de plus chaque sorte particulière de mot a ses accidens, qui lui sont propres.

Ainsi le nom substantif a encore pour accî<^ dens, le genre ,\q cas, la déclinaison, U nombre.

Le nom adjectif a un accident de plus , qui est la comparaison: doctus,doctior, doctissi» mas, saçant, plus savant, très^saçant.

Les pronoms ont les mêmes accidens qa« les noms.

A l'égard des rerbes, ils oot aussi par accident:

i.^ \J acception , qui est on propre on figurée. Ce pieillard march e d'un pas ferme : marcher est au propre. Celui qui me suit ne marche point dans les ténèbres, dit Jesus- Christ ; suit et marche sont pris dans an sens figure.

2.^ "U espèce est aussi un accident des verbes, lis sont, ou primitifs, comme par-^ ler^ boire, sauter, trembler i ou dérivés.

i6o - Principes

comme parlementer , buçoter , sautiller, iremblotter. Celte espèce de verbes dérivés en renferme plusieurs antres \ tels sont les inchoaltfs , \esjréguenfat(fs ^ les augmen* ta! if s, les diminutifs ^ les imiiat\fs et les dé-- sidéral f s*

3.^ Le3 verbes ont aussi la figure , c'est- à-dire, qu'ils sont simples, comme venir , tenir ^ faire \ ou composés commt prét^enir , contenir, refaire ^ etc.

4.^ La Poix ou forme du verbe. Elle est de trois sortes^ la poix ou Jbrme active j la (orme passive j et la forme neutre,

5.^ Le modCj c*est*à*dire ,.les difi'érentes manières d'exprimer ce que le verbe signifie , ou par Vindicatif, qui est le mode direct et absolu y ou par V impératif , ou par le sub-r jonctif, ou enfin , par Vinjiniiif

6.^ Le sixième accident de^ verbes, c'est de marquer le temps par des terminaisons particulières. J'aimeJ'aimois, j'ai aimé, etc. . 7.® Le septième est de marquer les per- sonnes , celle qui parle , celle à qui on parle , celle ou ce dont on parle.

En latin et en grec , les personnes et les temps sont marqués d'une manière plus dis-> iiacte, par des terminaisons particulières.

de Grammaire. aôt

Au lîcu qu'cD François , la différence des ter- minaisons n*est sourent pas bien sensible ; etc*est pour cela que nous joignooSQuiL verbes les pronoms, qui marquent Ic^ personnes : Je chante, tu chantes, il chante,

8.^ Le huitième accident des verbes est !a Conjugaison, La conjugaison est une dis- tribution ou liste de toutes les parties et de toutes ks inflexions du verbe, selon une cer- taine analogie.

9.^ Enfin , le dernier accident des verbes » est V analogie , ou Vanomàlie : c'est-a dire, tl*étre réguliers , et de suivte r^/z^77c»^/> de leur paradigme, ou bien de- s'en écarter; %i alori on dit qu'ils- sont irréguliers ou anomaux.

Que s'il arrive qu'ils manquent de quel- que mode, de quelque temps, ou de quelque personne , on les appelle défectifs»

A l'égard'des pr*ë|1ositions , elles sont toutes primitives et siitiples', à , de, dans ^ açec ^ etc. Sur quoi il faut observer , qu'il y a des langues qui énoncent en 'Un seul mot ces vues de l'esprit , ces rapports , ces ma- nières d'être '/au lieu qu*éu 'd'autres langues , ces mêmes rapports sont divisfés.par l élacu- tion y et exprimés -pûf plusieurs tnots. Par

afia - Principes

exemple ^ coram pâtre , en présence de son père : ce mot coram j en latin , est un mot primitif et simple qui n'exprime qu*une ma« .nîère d*étre considérée par une vue simple de. Tesprit. L*élocution n'a point en françois de terme pour l'exprimer. On la divise en trois mois ^ en présence de. Il en est de même 3c propter , pour l'amour de^ et de quelques autres expressions , que nos Graramairiena françois ne mettent au nombre des préposi- tions, que p^rce qu'elles répondent à des prépositions latines.

La prépositiop ne fait qu'ajouter une cir- constance ou manière au root qui précède , et elle est toujours considérée sous le même point de vue : c'est toujours la même manière ou circonstance qu'elle exprime. Il est dans, i}ue ce soit dans la ville y op. dans la fpaison, ou dans le coffre , ce serâ^ toujours être dans. Voilà pourquoi les prépo$îtioQS ne se dé- clipent.point. r.; , ^

l^ais il faut^bserver qu'il y a des pré- positions sép<irableSj,\t]it% ({Qe dans ^ sur ^ apec^ etc. e(.d!aatres,qtti sOnt appelées insé'^ parabieSy-fATce q^'relles entrent dans la çQiripoftition des nio^;,,de façon \qa'elles

de Grammaire, a63

n'en peuvent ^tre séparées sans changer la signification particulière du mot. Par exemple , refaire ^ surfaire , défaire , contre^ Jaire : ces mots re, sur^ dé^ contre^ etc. sont alors des prépositions inséparables.

A regard de Tadverbe > c'est un mot , qui dans sa valeur vaut autant qu'une préposition et son complément. Aiusi ^ prudemment^ c'est avec prudence, sagement, avec sagesse^ etc. WojtzV9inic\eADVEA£S , ci-devant page 23r.

Il y a trois accidens à remarquer dans l*adverbe , outre la signification , comme dans tous les autres mots. Ces trois accidens sont :

l.^ IJ espèce , qui est toujours prlmit've ou déripatiçe. Ici y ^ ailleurs , quand ^ lors ^ hier y où^ etc. sont des adverbes de l'espèce primitive ) parce qu'ils ne viennent d'aucun autre .mot de la langue.

Au lieu qu« justement ^ sensément , poli" ment ^ absolument ^ tellement ^ etc. sont de l'espèce dérivative. Us viennent des noms a,d« jeclifs , juste , sensé , poli , absolu , tel y etc. a.® "Laijlgurâ : c'est d'être simple ou com- posé. Les adverbes sont de la figure simple , quand aucun autre niOt| ni aucune prépositioa

afi^ Principes

inséparable n*entre dans Uur composition. Ainsi ^ Justement y lors, jamais^ sont des ad- verbes de la figure simple.

Mais ) injustement j alors » aujourd'hui , et en latin , fwdie , sont de la figure composée.

3*^ La Comparaison est le troisième acci*' dent des adverbes. Les adverbes qui viennent des noms de qualité se cotnpArenx justement , plus justement , très ou Jort justement, le plus jvstement; bien, mieux, le mieux ; mal, pis,4e pïs^ plus mal, irès^mal^Jort mal, etc.

A regard de la conjonction, c'est-à-dire , de ces petits mots qui servent à exprimer la liaison que l'esprit met entre des i^ots et des Tnois , ou entre des phrases et des phrases^ outre leur signification particulière , il y ^ encore leur figure et leur position.

I.* Qant à X^Jigure , il y en a de simples , comme ^et^ ou^ mais^ si | car ^ ni^ etc.

II y en a beaucoup de composées, et^ si^ mais si; et même il y en a qui sont corn*- posées de noms ou de verbes : par exemple , à moins que ^ de sorte que , bien entendu que , pourvu que»

2.^ Pour ce qui est de leur position ^ c'est-à- dire , de l'ordre on rang que les 0onjonctions doivent tenir dans le discours,

il

de Grammaire. 265

u ^i\ faut observer, qu*il n'y en a point qui \t' ne suppose au moins un sens précédent ; car ce qui ]oint , doit être entre deux termes* ;,a Ainsi vous ne sauriez commencer un dis« à cours par mais j eij or^ donc , etc« Mais ce sens peut quelquefois être transposé : :i ce qui arrive avec la conditionnelle si^ qui (il) peut fort .bien commencer un discours. Si i} cous êtes utiles à la société -^ elle pourvoira i; û ços besoins. Ces deux phrases sont liées par la con}onction si, C*est comme s*il y a voit: La société pourvoira à ços besoins ^ si cous y êtes utile.

S'il arrive' qu'un discours commence par ;6) or ou donc^ discours n'est point censé yi la suite d'un autre qui s'est tenu intérieu- rement, et que l'orateur ou l'écrivain st sous -entendu, pour donner plus de véhé- mence à son début ; c'est plutôt une ex- clamation , une interrogation. Malherbe , dans son Ode à Louis XIII partant pour la Rochelle, lui dit:

Donc un nouveau labeur à tes armes s'apréfei

C'est coi^ime s'il y avoit , Vn nouçeau labeur s'aprête donc à tes armes l Mais cette manière de s'exprimer est rare. Elle

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H66 PîinclptB de Grammaire^»

ne peut être en usage que dans la poësîe ou le style oratoire. Dans le style muins orné, Malherbe auroit.dit, Voici un nou' peau labeur gui s'apréte à' tés xirmes*

A l*ëgard des Interjections^ elles ne servent qu*à tnarqner des mouvemens subits de Tame. U jr a autant de sortes d'interjec* lions ) qu*il y a de passions différentes. Ainsi il y en a pour la tristesse et la coni« |>assion : hêlas I ha I pour douleur^ ai ai ^ ha I pour Taversion et le dégoût , Ji. Les interjections ne servent qu*à ce seul usage; et n'étant jamais considérées Sous la même face ne sont sujettes à aucun autre accident. On f eut seulement observer, qu'il y a des noms, des verbes et des adverbes, qui étant prononcés dans certains mouve- mens de passions , ont la force de l'inter- jection : Courage , allons , hon Dieu , çoyez^ marche , tout- beau , paix^ etc. C'est le ton , plutôt que le mot, qui fait alors Tin- terjectioD.

Tin du Tome IL^ ei dernier p^otumc.

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