LA 4 Lu ANIME (RCE LA er tt ut CRCOAEEETANEN A ACC RIRE etats au DNA YUUEU A xue AL AVAL KOA ae à RES x SAR a CO RANTNES RENE AAA tin A+: , + Dax Ü D A A EURE MANS LUC Run Ke KL tx NN SDS EUX NIAEOE Het EM CE RRTON UE ES US date V NU ‘ + AU xt AA ROULE AUS co (LEUEUN \! EU DAS COQ VA UE AND NENT (RC VA EURO si : VAVAAVAN tort ct KN RAS MKENS KO AU EX x A1 w Ch SNS ns 13 és. à ii RUES Là (We SE IQ AREA OO RE ARTS RUE NN 4 LAS (et tO EUX dus) CORRE RAC ae 1! ut LAURE on ARE À AOC CSC A LEE CEE ARE MEME vitate Li Qu CAO Ù os «ie AL ANNE EN REEX AR CEDEUEUR KO CARRE RERO AA 4 AAC AA EN LUS ei A 4 Lt AA RH LEEENE EHEEEEES AA L LA De Dre VOL IOLAE ELLE RO VAL EAU UNS UE Len A LA LEE UT CRC LRU VA LU AN 4, AO OU ARE UE AAA NE AIRE RE \ AN TRUNSE ROUE va Tin EEE LA En En AUCENE Cou VA: LE vx NX SR Le “ AK +} AL Le Vque \: ‘ us % L ù t 4: NS Lun: *: AYUNS LIN PQ \- { DAME it JA OCEAN S AAA ETS \ à ut L * te is At #4 À ne n° À Let AE “4 RAT EAN « vai & ON LUN RUN 2 AE vt 4! L) Ne UE t v EU AU UN {+ 4 « 41 at SA 4] x ne + HU * x a x S ES REX CO POLE LC ee {e AE +, SALLE it RSS 4) À Ver + PAP Lu A x et F . u RE HOFOORE Vi AU DES berne xr DES ARTS, | us A # D 1 06 à ÿ » SA Pre GOT NERE Par A. L. ART La AVIS DES ÉDITEURS\ Le prix ç de ee Journal est. fxé 5 ke +: à 9 A pour trois mois Se 10 , REETES . Sean AR 18 francs pour six mois, he F7 D ARTE 36 francs pour un a, " ant pour Paris! que pour les Départemsens, jà Franc ds pere ou OK peut adresser au Bureau du 5 ARTE pour se prés Re) . ‘eurer tous les Livres qui peroïssent en France et chez : PEtranger , et pour. :4Sut ce “on concerne la Éibraiie. ans - .æienne et moderne. | D \s, 2 LT. ax Le C3 Journal . ue la our de hommes qui ont un nom distingr gué, une réputation justement acquise Le dans quelque partie des arts ou des sciences, telsque les ; cifoyens AUBENTON ; DOLOMIEU, DESGENETTES , Sicvesrre px Sacy, Fourcroy, HALLÉ, HERMANS, 14 SCRWEIGE AUSER ,.LACÉPÈDE, Lanccès, LALANDE, _ LaGranGe ,| LEBRUx , MarnoN > MENTELLE , Banaien-Dusocacr, Morezcer , NOEL, ORERLIN, % .Cnannon-La-RocRETre CAILLARD, SAINT-LÉGER, re. FRAULLÉ, LÉVEILLÉ, Gauss, Cuvise, | Telle An) Grove, Le ENTENAT, Ca xrLL es DaTthr, TIGER , VISCONTT , etc. etc. ont fourni des Mé contient l’extrait des principaux ouvrages nati on s'attache sur-tout à en donner une aualyse exacte 3. et à la faire paroître le plus promptement possibl . après leur ublication, On y donne une notic meilleurs écrit imprimés Chez étranger. | On y insère les mémoires les plus : inté sur toutes les parties des artset des sciences: on sit sur-tout ceux qui sont proprés les progrès. à . On y publie les Alcoutenes ingénieuses \ 16S° tions ubles dans tous les genres. On y rend cor des expériences nouvelles. On y donne un précis d que les séances dés sociétés littéraires ont offert plus intéressant ; une description de ce que les dép d’objets d'arts et .des sciences renferment de. » : curieux. | ; La On y trouve des notices sur la vic-et les ouvrages des Savans, des Littérateurs et des Artistes distingués | dont on regrette la perte ; es les nouvelles htté- raires de toute espèce. Ce Journal est composé de six re ja-80. par an, de 600 payes chacun. IL paroif le premier de | chaque ois. La livraison est divisée € en deux AUS 20. méros, de chacun 9 feuilles. | On s'adresse, pour l'abonnement à Paris, au Bureau E du Magasin Encyclopédique , chez le GC. Fucas sy Dr x braire, rue des Mathurins ; hôtel Cluny. chez la veuve Chan, uion “es de se A Amsterdam À Lee AR a rar À Bruxelles, chez Lemaire. ; A Florence, chez Molini. À Fraucfort-sur-le-Mein , chez iebeher. | ‘A :Cnère < chez Manget, chez: Paschoud. À Hambourg , chez Hoffmann. A TS MER” A Leipsict, chez Wolf: sl 1 RE A Leyde, chez les frères Murray. A Londres , chez de Boffe, gerard Strest. À Strasbourg , chez Levrault. ee À Vienne, 1 Fa Degen. ; A Wesel, | chez Geisler, Directeur des Postes. ul faut afiranchir les lettres. MAGASIN ENCYCLOPÉDIQUE. IV. ANNÉE * TOME TROISIÈME ss. Re vhs LAS ES 3% Step. are 1% qe 4 vaitei) -AR pr MAGASIN FNCTCLOPEDFIQUE;, © JA 2 JOURNAL, DES SCIENCES, DES LETTRES rt DES ARTS, RÉDIGÉ PR A TL. MILL IL, ConservATEUR du Muséum des Antiques à La Bibliothèque natsonale, Professeur d’ Historre et d'Antiguités ; des Sociétés d'Histoire natu- relle et philomathique de Paris, Emulation deRouen,de Boulogne et d’ Abbeville; de l’ Aca- démie des Curieux de la Nature à Erlang ; de d’ Académie de Dublin, de la Soctété Linnéene de Londres , de celles de Médecine de Bru- æelles , des Sciences physiques de Zurich , d'Histoire naturelle d'Iena. L'V.:A NN ÊE. TOME TROISIÈME. Me DER DES. Chez Fucus;, Libraire, rue des Mathurins, maison de Cluny, n°. 334. AN VII.— 1798. » , 47. (tan nl x NAT | ER HIUO ù D} SU « & | Y ALES 7 rat . » AR | à PR St ru AE ets tŒR PEN 4 MEN : as sa dames 7 + 74 nr 4 CRE : V PER T7 Fa k Ha tarte te hell ? NT RS 1) 144 Aa 41 Ve ‘ CRE 6: COR. PES PARLE d TA CU CRIE 0} IFR DU à pores AS TNA 4 . é 6 PARUS de L72 . de = La Ra 4 tra, Lutte be 8 x Ar bn LR Er ARE ’ L TRAIT", ML LEE OA L hr 4 1 dx | 4 A as Sn #. 24 on es «4 A a > r the SA de Es & à 1 RE 1 4 ax 6 surtt siph sense PS VEUT Fe LUE Se. RTS sas RÉLBTE "ARE Dr Sn GAMBNE cm 40t os Ah Spot dE ANS at LS sr PACA UN CE ab É «hoc Y Vi Es a Re Li ans > a y : Se A2 # FER fi raz. RS CE k à des Da” Va | : BI ANA dir cale le à oi Men "® ) » ds ee ÿ dif { Q 6 ! : ” L ÉPRRE ue a É 7. se Lu HARAS “ \ LÉ 2 < « RS 4 s Det: Hnitest st ‘ét Bend he ana sb EE an +? se vanlo gb LLORIBE ARE ® u h « leve AS aan REC LU Te J on à p - % AE de - r D ñ 1 VA: _ - Ï PS NTM { + aan > “ 4 Dai ET EE | 20 | , HEAPTuE v A ver, ES Les d Ve LA 4 + co de pu e « “ milan $ “ L et ÿ TT ny 2 4 4 REA A JEAN SCHWEIGHÆUSER, PROFESSEUR DE LANGUES ANCIENNES A STRASBOURG, PORN ORNN LE NIV EXT IR D’APPIEN , DE POLYBE ET D’ÉPICTETE, HOMMAGE D’ESTIME ET DE RESPECT, # Ru GEOX. | exramo on» EATORAT ac oaatont | do es ONUOTRARTE “an A a Û s TL £ ÿ À 4: Er 1 3 | monde ax T4 aurterd LOAMUOE | a” EX RÉ AE ss ] 9 d k = > 1 A RER sa s 1% US QUE É — L 2 { The , ‘ # : DL. ne k Ÿ" ire F2 ; \ \ . ÿ Ré” ; rs rt Ru À ‘ " ; cs + Es è “LAME | | j ri # NUE V 7 à | ! : L F4 k % A F 4 Me APCE CRE POV PORN PR 47 , : \ ut à f Ÿ | W£ , . 3 x CL # 1 7 4 ‘= c . . AE NE 4 Rey, É # É | | \ “ HN F he . v ç À » D À . { t — d'à, - Ur - j ” Pa , LES = “! MAGASIN ENCYCLOPÉDIQUE. 1 ANA PONS 1 Ra CARE RE EEE 1 Nosocrarure philosophique, ou la Méthode de l'analyse appliquée à la Médecine , par P. H. Prwer, médecin de l’hospice national de la Salpétrière , et professeur à l’école de Méde- cine de Paris ; 2 vol. in-8°. A Paris, chez Maradan, libraire , rue Cimetière André-des-Arts, n°. g. Prix, 8 francs. Drrvis que Locke et Condillac ont refait la théo- tie des sensations et des idées, depuis que ce der- nier sur-tout a démontré les avantages et la nécessité de l’analyse dans la recherche de la vérité, les sciences d’observation se perfectionnent avec une rapidité qui tient du prodige, et tous les obstacles s’applanissent devant les eforts de esprit humain, On a lieu néanmoins de s'étonner que ce moyen puissant d'agrandir et de rectifier les connoissan- ces ait été si long-temps négligé par les médecins, qui. devroient être la classe du corps social la plus libre de préjugés èt la plus universellement éclai- rée. J’en crois apercevoir la cause dans cet esprit dhypoihèse dont ils sont constamment dominés. Heureusement pour la gloire de notre art , quelques À 4 8 Médecine. | hommes suivent fidellement l'unique et véritable route. Un professeur aussi modeste qu’habile, plus jaloux d’instruire que d’éblouir, a purgé la science de ces fastueuses erreurs qui entravoient sa mar- che et ses progrès. Ii a substitué la méthode sim ple et facile des naturalistes, aux théories obscures et compliquées des écrivains systématiques : nous nous bornons à faire connoître les premières lignes de son travail; ce qui suffira pour faire apprécier sa méthode et l’excellence de son enseignement. Il est peu de parties en médecine sur lesquelles on ait autant écrit que sur les fièvres + aussi les ma- tériaux de leur histoire existent-ils déjà dans l’im- mense multitude d'ouvrages publiés sur cet objet ; et pour en faire un corps complet de doctrine, il pe s’agit plus que de les choisir, et de les coor- donner entr’eux avec un goût pur et un discer- nement éclairé, en cherchant à saisir leurs affinités naturelles et leurs dissemblances ; c'est ce que le citoyen Pinel a heureusement exécuté dans sa No- sographie philosophique. Il a rejeté avec un loua- ble courage toutes les dénominations équivoques fondées sur des descriptions incomplètes ou sur des symptômes particuliers, et a su parvenir par le se- cours de l’analyse, à la distinction des véritables gen- res primitifs. Ïl a établi six ordres de fièvres qui, dans leur état de simplicité ou par leurs diverses combinaisons, embrassent toutes les espèces de fiè- vres connues : il appelle angio-teniques cell s qui sont marquées par une irritation fixée sur les tu- niques des vaisseaux Sanguins ; MENINEO-LASIrÈQUES » Nosographie philosophique. 9 celles dont le siége primitif est dans les membra- nes de l’estomac, du duodenwm, et de leurs dé- pendances ; adeno-meningées , celles dont tous les symptômes indiquent une irritation des membranes muqueuses qui revêtent certaines cavités ; adyna- miques , celles qui consistent dans un état d’atonie dont les fibres musculaires paroissent frappées ; ata- æiques , celles qui manifestent une atteinte direc- tement portée sur le système nerveux ; et enfin ik désigne sous le litre de fèvres adeno-nerveuses , celles où les nerfs et les glandes ont éprouvé l’action d’un principe à la fois délétère et contagieux. IL fait remarquer que cette division est très-propre à éclairer l’appliration des principes de la médecine Expectante et agissante au traitement des fièvres , puisque les trois premiers ordres rentrent en grande partie sous lé domaine de la première, et que les trois derniers sont manifestement du ressort de la seconde, | L'auteur , soit dans l'exposition de ces ordres , soit dans le développement des genres qui en dé- pendent,, justifie pleinement la nomenclature qu’il a adoptée, en faisant \oir qu’elle*est basée sur les traces extérieures et sensibles dés lésions de l’éco- nomie, et non sur les produits arbitraires d’une imagivation prévenue, ou sur des traits fugaces et des apparences trompeuses empruntées pour la plu« part à la médecine humorale, En dessinant avec une sévère exactitude la marche des fièvres angio- teniques , il retrace les inconvéniens que peut en- traîner Pobstination de certains praticiens à ne trou- ) de Médecine. ver par-tout que la diathése inflammatoire, Syden- ham lui-même ne fut pas exempt de cette prévention qu’il puisa sans doute dans les écrits de Botal, par- tisan fanatique dela saignée. Il insiste principalement sur les fausses applications des sciences physiques et mathématiques faites à leur théorie par Boerraave et Sauvages, et sur la nécessité qu’il y a de sim- plifier leur traitement. Il s'attache enfin à démon- irer tous les dangers de la méthode de Brown, adap tée à leur curation 3 il s'exprime à cet égard de la manière suivante : « Brown, dans ces derniers temps, né avec un » esprit frondeur , jaloux d’être chef de secte, et » de rabaisser les ressources de la nature pour mieux » faire admirer les siennes propres, ou plutôt tou- » jours fidelle à sa méthode de mutiler et de tron- » quer l’histoire des maladies pour les assortir à » Son système , assimile la fièvre inflammatoire à » la phrénésie ; et nécligeant ce qui fait le carac- » tère essentiel de l’une et de l’autre, il ne les con- » sidère que sous le rapport général d’un excès de » forces vitales. Le seul objet à remplir , sui- » vant lui, est de faire cesser cet excès, de réité- » rer les purgatifs , de verser le sang à grands flots, » d’employer l’action débilitante du froid à l’inté- » rieur par des boissons froides, et à l’extérieur par » l'impression de l’air atmosphérique , comme si » la guérison étoit un effet exclusif de ces moyens » suprêmes. Si Frank, médecin de l’hôpital Clini- » que de Pavie, et partisan zélé de la médecine de » Brown, n’eût adopté de ee dernier que ce qui Nosographie philosophique. IL » tend à simplifier le traitement des maladies in- » flammatoires ; qu’il eût hautement révendiqué les » droits de la nature et écarté tout esprit d’exagé- ration, n’eût-il pas donné une preuve plus écla- » tante d’un esprit éclairé et d’un jugement solide ? Mais on le voit au contraire embrasser aveuglé- ment tous les principes du médecin écossois 5 » même oubli, ou plutôt mépris affecté pour la mé- » decine hippocratique 3 même négligence d’une » description exacte des maladies ; même confiance » aveugle dans des moyens très-souvent indifférens » et inutiles , et d’autres fois dangereux par leurs » excès. C’est en outre un exemple frappant de - » renversement de la méthode suivie dans toutes les » parties de l’histoire naturelle , où on s’élève gra- » duellement des faits particuliers aux vues géné- rales, puisqu'on voit dans l’ouvrage de Frank (Ratio unstitute clenici ticiniensis, an 1797 }» les faits observés dans un hôpital clinique , subor- donnés à l'esprit de système, et forcés pour ainsi _» dire de se plier à des suppositions arbitraires. » Le citoyen Pinel passe à la description des fiè- vres Mmeningo-gastriques, vulgairement nomimées bilieuses. Il montre le vide des explications galéni- ques sur Îles causes qui les produisent, les défec- tuosités de la distribution qu’en ont faite des no- sologistes célèbres, tels que Sauvages et Selle, et enfin les idées justes et précisesque peuvent en don- ner les tableaux des diverses épidémies , comme par exemple celles qui ont été observées avec soin en Suisse et en Allemagne : il n'oublie pas les com- x g #4 ss’ % Y2 Médecine. plications dont ces fièvres sont susceptibles dans les pays chauds, témoin la fièvre épidémique arrivée à Cadix en 1764. Pour aprendre de plus à ses élè- ves à se garantir d’un asservissement aveugle à cer- taines opinions, il retrace les écarts du célèbre Debaën, quine voyoit dans les fièvres angio-teni- gues que des fièvres inflammatoires, et de Stoll, qui, frappé des erreurs du médecin hollandais ; n’a pas été peu ardent à rendre à la sabure bilieuse sa puissante influence et ses droits les plus exa- gérés. Il étoit sur-tout avantageux de se faire des notions exactes et précises de l’ordre des &deno-menin- gées , et de remonter par l’analyse à leurs caractères primiifs et essentiels. Outre les siéges divers qu’on leur a gratuitement supposés, les meilleurs obser- valeurs ne les ont décrites qu'avec leurs diverses complications ; aussi le citoyen Pinel cite-t-il de préférence le tableau fidelle qu’en a tracé Wagler dans son Traité de Morbo mucoso. Dans le traite- ment de celles qu’il a eu occasion d’observer à l’hospice de la Salpétrière , il a d’ailieurs eu occa- tion de se convaincre de l’efficacité de la méthode de curation de ce praticien, et l’a adoptée daus son entier. Nous allons mettre sous les yeux du lecteur les symp- tôes de la fièvre muqueuse simple , telle qu’elle se manifesta dans l’épidémie de Goecttingue en +760. L'heure ordinaire de son invasion étoit au déclin du jour : elle débutoit par un sentiment plus ou moins vif de froid, par des nausées et des vomisse- mens spontanés ; durant la nuit, le malade éprou Nosographie philosophique. 13 voit une chaleur ardente, une soif vive, une dou- leur de tête à la partie antérieure. Les nausées se continuolent quelques jours avec constipation , mais rarement avec sueur : il y avoit une toux abdomi- pale vive et sèche, quelquefois des douleurs pun- gitives de la poitrine qui augmentoient avec la toux ; en général , anxiétés à la région précordiale, respi- ration diflicile, douleur des hypocondres, agitations continuelles, débilité, abattement, morosité sombre et inquiète. Certains malades tomboient dans le dé- lire ou dans un assoupissement troublé par des rê- ves ; d’autres avoient une diarrhée avec une fièvre légère , mais quelquefois avec des tenesmes, ou bien des douleurs vives dans le colon transverse, ou un sentiment de constriction ; et cette diarrhée, avec excrétion muqueuse, étoit quelquefois utile ; exco- riations de quelques parties de la bouche avec des aphtes sur la langue et les gencives, ou bien des amas de mucosités sur la menbrane interne du la- rynx ; ce qui rendoit la respiration gênée, et comme stertoreuse, Lorsque la fièvre étoit vive , ces excré- tions muqueuses de la bouche n’avoient point lieu ; mais il se formoit seulement un mucus épais, blanc et jaunâtre , et d’une couleur plus ou moins foncée vers la racine de la langue ; l’urine étoit tour-à- tour jaunâtre , rouge , épaisse et sams sédiment ; d’autres fois , dès le quatrième jour , elle étoit trou- ble , limoneuse , avec un sédiment muqueux , blanc, léger. L’excrétion de Purine étoit aussi quelquefois difficile , et accompagnée d’un sentiment d’ardeur ; et cette urine étoit alors pâle et limpide : le 14 Médecine. pouls offroit des variétés non moins singulières , sui- vant la constilution individuelle |, les symptômes spasmodiques où abdominaux, l'approche des cri- ses , cic. Fidelle aux principes qu’il a déjà exposés, le ci- toyen Pinel continue d’appliquer l’instrument de l’a- nalyse à l’étude des fièvres adynamiques , pour déterminer leur vrai caractère , et les isoler en quel- que sorte de leurs nombreuses complications. Il cite en exemple la fièvre putride simple qui régna en Italie l’an 1505 eten 1528, et qui a été exactement décrite par Fracastor ; il retrace Îes observations particulières qu’il a eu occasion de multiplier aux hos- pices de Bicêtre et de la Salpêtrière. L’auteur de la Nosographie philosophique ne pouvoit mieux mon- trer les liens qui mettent notre art en rapport avec ja politique, la morale et la philosophie, qu’en démontrant que les préservatifs de cés sortes de fiè- vrés doivent être puisés dans l’histoire des lois et des institutions de divers peuples, soit anciens, soit modernes, sur divers objets de salubrité til entre à ce sujet dans des détails que nous ometions , mais qui appuyent irrévocablement son assertion. Quant autraitement,après avoir fait mention des moyens chy- miques employés par ies divers praticiens , le citoyen Pinel insiste sur Pusage heureux du bon vin, du quinquina , des vésicatoires, en remarquant jüdicieu- sement avec Stoll, que les complications de éette fièvré doivent en faire varier li méthode de cura- tion. Cet ordre contient deux genres, la fièvre adynamique continue ; dont les principaux symp- L Nosographie philosophique. 15 fômes sont de légers frissons, une douleur de tête gravative, des vertiges , l’abattement , un sommeil fatigant, la prostration des forces, le pouls petit et foible, etc. Dans l’accroissement , on voit se mani. fester la couleur fuligineuse des lèvres, des narines, la noirceur de la langue , elc. au-delà, et dans les cas les plus graves , la perte totale des for- ces, la syncope au moindre mouvement, la langue desséchée , dure, avec des fissures, des sons mal articulés, la stupeur, etc. L’autre genre est la fièvre rémittente adynamique ; c’est-à-dire , celle qui reste continue avec des exacerbations semblables ou inégales. Le citoyen Pinel pense avec raison qu’il y &une lacune à remplir pour la détermination de ses caractères génériques. Le professeur Pinel parle ensuite avec beaucoup de raison sur les incertitudes que peut introduire dans l’étude de cet ordre la dénomination vague de fièvre maligne , attribuée indistinctement aux maladies les plus graves, quoique le judicieux Sydenham ait expressément remarqué que de telles fièvres ne s’ob- servent point tous les jours, et qu’elles diffèrent par leurs caractères essentiels des fièvres qui ont porté le même nom à cause de lanomalie de leurs symp- tômes. Il loue l’école de Goettingue , pour avoir su faire une sage application de la physiologie expéri- mentale de nos jours, à la médecine d’Hippocrate : c’est ce qu’on peut voir, par exemple, dans les Opus- cula medica de Baldinger, qui a rapproché ingé- ricusement les phénomènes de la sensibilité et de l'iriitabilité des notions exactes et lumineuses que 16 Médecine. le père de la médecine nous a transmises sur les sigieé distinctifs des vraies fièvres malignes, sur-tout dans les prénotions coaques. Voici les traits principaux qui caractérisent les fièvres de l’ordre cinquième : frissonnemens avec douleur , affection tétanique , ter= reurs pusillanimes , tristesse profonde sans cause con pue , altération des fonctions de l’entendement, dé- lire taciturne, prostration totale des forces sans au- cune évacuation marquée, vue égarée, langue trems blante , etc. On y observe par fois une opposition frappante entre les symptômes, comme l’augmen: tation ou la diminution excessive de la sensibilité dans les organes de la vue, de l’odorat, de l’ouie, même du tact, etc. Je renvoie le lecteur aux exemples par- ticuliers des complications de la fièvre maligne, qui se trouvent dans la Nosographie philosophique ; et qu'il est utile de comparer avec la même affec- tion considérée dans son état de simplicité primi- tive : c’est donc dans l’ouvrage même qu’il faut lire ce que le citoyen Pinel expose sur la fièvre épidé- mique de Vienne, dont Dehaën donne l’histoire, et qui présentoit des caractères de malignité unis à des phlegmasies locales, sur la complication de la fièvre maligne avec la fièvre bilieuse tracée exacte- ment dans l’ouvrage de Finke (de Morbis biliosis anomalis ) , et avec la fièvre muqueuse dans le Traité de Rœdherer et Wagler ; sur la fièvre épi= démique de 1777, décrite par Stoll sous le nom de fièvre lente nerveuse ; sur la fièvre des prisons de Pringle, parlicipant du caractère de la fièvre ady- namique , et de celui de la fièvre ataxique ; sur la fièvre L Nosographie philosophique. 17 fièvre ataxique simple observée par l’auteur dans les infirmeries de Bicêtre ; sur l’extrêème fréquence des fièvres, soit adynamiques, soit ataxiques , soit d’un genre mixte dans les infirmeries de la Salpétrière durant l’hiver de l’an IV , et enfin sur les heureux eflets des remèdes simples dans leur traitement, Ce même ordre se coupe en plusieurs genres, dont la physionomie individuelle se distingue par des nuances qui n’échappent point à l’œil de l’habile ob« servateur : c’est ainsi que, dans la fièvre ataxique sporadique , on remarque un pouls petit, foible, avec des variations pour la fréquence ; un air égaré, souvent les pupilles dilatées, un son de voix plus aigu par intervalles ; quelquefois des convulsions ou une roideur tétanique du front, une langue âpre, blanche, sèche , tremblante ; des yeux , tantôt ternes ; tantôt brillans ; un tintement d’oreilles, une dureté ou une excessive sensibilité de l’ouie , etc : dans la fièvre ataxzique par contagion ; une douleur de tête vers Pocciput , un pouls déprimé , fréquent et irrégulier, des extrémités froides et pâles, ou même avec un aspect cadavéreux ; des syncopes, l’absence de la soif, un délire taciturne, le tremblement des mem- bres, les soubresauts des tendons, le hoquer , etc. : dansla fièvre /ente nerveuse , des alternatives d’hor- ripilations légères et d’une chaleur errante, un pouls petit, inégal, tantôt fort et plein ; tantôt foible et à peine sensible, quelquefois peu différent de l’état naturel ; des vertiges , des nausées ou des vomisse- mens ; un seutimcnt d’oppression dans la région præcordiale, une sorte de stupeur, une inégale dis- Tome 111, B 18 Médecine. tribution de chaleur et de froid, des mouvemens irréguliers des lèvres et des mains, un regard fixe à l'approche de la mort , une affection comateuse ou des convulsions générales ; et enfin, dans la fièvre remittente ataxique ; à la prostration du système se joignent le hoquet, la perte totale des facultés intellectuelles , et, suivant ses diverses espèces, les plus violens efforts de vomissemens, le tenesme, des déjections sanguinolentes, une douleur extrême à l’épigastre , les $ueurs colliquatives, les syncopes fréquentes , un sentiment de froid opiniâtre qui n’est pas remplacé par celui de la chaleur. L'ordre sixième, qui traite des fièvres adeno-ner- veuses , offre un tableau exact des différentes pestes qui ont ravagé suceessivement le globe, comme la fameuse peste d'Athènes décrite par Thucydide; celle qui ravagea Pempire romain sous Marc-Au- rèle et Lucius Verus; celle qui parut sous Gallus et Volusien, ainsi que celles qui se sont manifestées dans les sixième, huitième et quatorzième siècles, etc. Le citoyen Pinel fait voir que la suette d’Angle- terreet la maladie décrite par Sennert (de Morbo hungarico) avoient les caractères d’une véritable peste : suivent les considérations les plus utiles à re- cueillir sur les progrès et l’intensité de la dernière peste de Marseille en 1720, sur lobstination de Chirac et de quelques autres médecins de Montpel- lier envoyés par la cour, à ne voir en elle qu’une fièvre maligne ‘ordinaire ; sur la vaine complication des formules adoptées par Chicoyneau et Verny, telles que la thériaque ,le diascordium , la confection Nosographie philosophique. 19 dhyacinihe, les eaux thériacales, etc. ; sur les pré- ceptes bien plus sains du docteur Mackensie, qui; dans sa lettre sur la peste de Constantinople , indiqué qu’on doit se diriser sur les mêmes principes de traitement que dans celui des fièvres putrides et ma- Jignes, et employer le vin, le quinquina, le cam- phre , ainsi que les vésicatoires dans le cas de stu- peur et de somuolence , sans oublier comme moyen préservatif l’éloignement de tout sentiment de ter- réur et de tristesse, Un médecin russe, le docteur Samoïlowitz ,a pratiqué très-heureusement les fric- tions glaciales sur le corps des pestiférés. Ces fric- tious étoient prolongées depuis les épaules jusqu’à la paume des mains, et depuis le haut des cuisses jus- qu’à la planté des pieds , moindres sur les hippo- condres, très-légères sur la poitrine et le ventre; quelquefois même on faisoit frotter également le tronc et lesmembres. Ces moyens ont eu les succès les plus marqués ; et certes on ne peut guère les conci- lier avec l’action débilitante que Brown attribue toujours au froid , et à sa propriété de produire l’ato- hie ,le relâchement , etc, « Tous ceux qui sont voués à » un système exclusif, dit Pestimable auteur de la » Nosographie philosophique, n’ont guère d’autres » ressources que de dédaigner de s’instruire des ré- » sultats de l’observation, de les dissimuler s'ils » leur sont conaus, ou de les déguiser par des inter- prétations obliques. » ÿ La ressemblance frappante que l’on remarque entre les différentes pestes observées par les auteurs, ne permettent d’admettre qu'un seul geure, qu’on peut B 2 20 Médecine. désigner sous le nom de fièvre pestilentielle ou peste du Levant, dont les trails principaux sont une prostration des forces et un abattement porté jus- qu’au désespoir ; une chaleur presque naturelle à la surface du corps, avec ardeur brûlante à l’intérieur : il y a des vomissemeus ærugineux, noirâtres ou mé- lés de sang , des syncopes, de la stupeur, et le plus souvent une éruption de charbons et de bubons très- douloureux qui dégénèrent facilement en gan- grène , etc. Je ne pousserai pas plus loin lexamen du livre que je viens d'annoncer , quoique je n’en sois encore qu'aux premières pages. Les détails d’une produc- tion de cette nature sont trop bien liés à son ensemble, pour qu’il soit possible de les extraite sans nuire à leur intérêt : je ne voulois d’ailleurs que faire con- noitre la marche exacte et rigoureuse qu’on y a suivie. En méditant attentivement les quatre classes qui suivent, et qui ont successivement pour objet les phlegmasies, les hémorragies, les névroses et les affections lymphatiques, on se convaincra facile- ment que l’entière exécution de la Nosographie philosophique répond parfaitement à lheureuse idée de sa conception : on y reconnoïîtra un goût épuré par un long commerce avec les grands mo- dèles, une habitude consommée de la saine observa- tion , ainsi que le sentiment le plus profoad du pou- voir et des opérations de la nature: on se convaincra que les principes que lauteur puisa jadis dans cette université fameu-e qu’éclairoit alors le génie im- mortel des Barthez, des Lamure, des Venel, ont été Nosographie philosophique. 21 pour lui une heureuse semence qui a porté son fruit en son temps. Nous nous plaisons à le dire : c’est d’après une lec- ture approfondie des diverses parties de ce Traité,que nous assurons qu’il »’a rien de commun avec ces nouveautés pernicieuses si promptes à nous séduire, et si lentes à nous éclairer. La méthode analytique que le citoyen Pinel employe pour rallier ses élèves autour des vérités éternelles de son art, est celle que nos premiers maîtres ont suivie, même à leur insu, et quia préparé leurs progrès et leurs découvertes. Au moment où tant d’écoles en Europe sont inondées par un torrent de sectaires et de spécula- teurs, il est sans doute intéressant de voir celle de Paris rester debout sur la ligne invariable de l’expé- rience et de l’observation. Le croira-t-on cependant ? Les efforts réitérés de son zèle pour le maiatien et la propagation de la doctrine hippocratique ont déjà trouvé des envieux et des détracteurs. Il étoit digne d’elle de ne se défendre que par des succès. J. L. ALIBERT. B 3 | ammemmmenannanns aan nnsmen en rm emarnmemnemeenememn | VA DIV A CE à V’oraces de la Perse dans l'Inde , et du Ben- gale en Perse, le premier traduit du persan , Le second de l’anglais , avec une notice sur Les révolutions de Perse ; un mémorre histo- rique sur Persépolis , et des notes, par L: LANGLES, 2 vol. in-16. Paris, chez Crapelet, Au VI, Novs avons déjà donné l’annonce de cette jolie collection : il ne sera pas inutile de la faire mieux connoître ; elle est actuellement formée de trois vo- lumes. Le premier contient ce Wor4ce de l'Inde à ta Mekke , par A'’epour-Kérrm , favori de Tahmäs - Qouly Khân , extrait et traduit de la version anglaise de ses Mémoires. Le citoyen Langlès indique dans une préface courte et bien faite, l’utilité de ce petit voyage pour la connois- sance de la géographie : il donne ensuite quelques renseignemens sur son auteur. Khodiah A’bdoûl-Kérym étoit un noble Kach- myryen, d’une naissance distinguée, attaché à Na- dir-Châh , plus connu en Europe sous le nom de Tahmäs-Qouly Khäân ; il le suivit dans son expé- dition de PHindoustän, et obtint ensuite la permis- sion d'accompagner à la Mekke le premier méde- cin de la cour, Myrza Mohhammed Hhachem , sur- Hs Voyages en Perse. 29 nommé A’louy-Khân, célèbre dans sa profession, et poëte distingué , mort à Dehly en 1749. A’bdoul-Kérym est auteur d’une histoire très-cir- constanciée des événemens arrivés dans l’Hindous- tân , depuis 1739 jusqu’en 1749. M. Gladwin, sa- vant anglais de la société littéraire de Calcutta, a traduit le texte persan de cet ouvrage, en suppri- mant tout ce qui est relatif à Nädir-Châh avant son retour de l’Hindoustân, parce que ces détails ont été tracés par des écrivains supérieurs à A’bdoul-Ké. rym. Le citoyen Langlès a été encore plus loin dans ses suppressions : 1l n’en a extrait que ce qui lui a paru d’un intérêt général. Un travail à peu près semblable avoit déjà été fait par un savant orientaliste allemand , M. Paulus, dans son Repertorium für die morgenlaendische und biblische litteratur. Jena , 1789 et suiv. La préface de l’auteur ne contient guère que les mêmes détails, mais moins circonstanciés : il com- mence la relation de son voyage entrepris le 4 mai 1739, jour auquel il partit de Châh-Djihän- Abäd ( Dehly ), avec l’armée de Nâdir-Chäh; il parcourt avec lui différentes contrées de la Perse et de l’Arabie; enfin il arrive à Médyne et à la Mekke, d’où il vient à Djiddah , d’où il retourne par mer à Pondichery ; il visite ensuite Madras et Calcutta, et rentre dans Dehly. Ce petit Voyage, accompagné de notes précieuses et instructives du citoyen Langlès, est utile pour acquérir d’une manière agréable et commode quel- ques connoissances sur l’Inde, connoissances très« B 4 24 Voyages. nécessaires aujourd’hui à tout Européen instruit : il est terminé par une bonne table des matières, et accompagné de deux jolies gravures soigneuse- ment réduites d’après les dessins du citoyen Rosset, qui sont déposés au cabinet des estampes de la bi- bliothèque nationale. Cet artiste a vécu long-temps dans l’Orient, et ses dessins sont d’une grande fi- délité : ils représentent des costumes. Il auroit été à désirer que le citoyen Langlès en eût donné une explication détaillée. Les second et troisième volumes de cette collection contiennent d’abord un For4ce de la Perse dans l’Inde, pendant les années 1442, 1443 et 1444 de l'ère vulgaire, par Æ’BD-OuLrrrzAQ, ambassadeur de Chäh-Rokh, quatrième fils de Tymour (Ta- merlan), auprès du roc de Béisnagor, Ce Voyage est extrait d’un manuscrit persan , n°. 106 , in-4°., de la bibliothèque nationale. L'auteur étoit imän, c’est-à-dire, aumônier de Chäh-Rokh, et il a composé une histoire de Tymour et d’autres ouvrages. Mal- _ gré le bigotisme de ce musulman, on sent que des relations faites à cette époque par des naturels du pays , offrent toujours des détails dont les littéra- teurs européens peuvent utilement profiter. Le ci- toyen Langlès a terminé cette relation par des notes étendues et nombreuses , utiles pour ceux qui étu: dient les langues orientales, et intéressantes pour ceux qui veulent connoître tout ce qu’on peut savoir sans posséder ces langues. A près cela vient /e Force du Bengale à Chy- râx en 1787 et 1788, traduit de A: de % Voyages en Perse. | 25 Wiczram Franexzin. Cet officier de l’établissement anglais au Bengale a fait un séjour de huit mois à Chiraz , et il a donné des choses neuves et inté- ressantes sur ce pays déjà si bien décrit par Char- din, Corneille-le-Bruyn, Niébubr, etc. D'ailleurs, le tableau actuel des mœurs de la Perse forme un contraste frappaut avec celui que Chardin nous en & tracé. Je ne n'arrêterai pas à donner l’analyse de ce voyage, qui a été connu dans le temps par les extraits qui en ont été publiés dans les journaux étrangers 3 mais les lecteurs qui n’entendent pas l'anglais ou qui n’ont pas pu se le procurer, seront bien-aises de le retrouver dans cette collection; il est d’ailleurs accompagné de notes curieuses el sa- vantes du citoyen Langlès. A la suite de son Voyage, M. William Franc- klin donne une notice historique très - importante sur la Perse depuis la mort de Nädir-Chäh en 1747; jusqu’en 1748. On ne peut lire sans frémir le récit. des horreurs et des cruautés auxquelles ce beau pays a été livré par ceux qui se le sont disputé depuis cetle époque. ( | M. William Francklin a donné dans son Voyage une description de Persépolis , qui n’est qu’une ré- pétition de ce que Niebuhrena dit. Le citoyen Lan- glès a cru devoir la supprimer ; mais il la rem- placée par un mémoire très-intéressant , tiré en par- tie des différens manuscrits arabes , turcs et persans de Ja bibliothèque nationale. Les plus longs mor- ceaux extraits deces manuscrits sont les deux extraits que ce savant a déjà publiés dans ce journal (1) ; (1) Troisième année, tom. III, pag. 362. 26 Voyages. ce qui nous dispense de les faire connoître plus amplement, Le citoyen Langlès s’est aussi servi des mémoires du comte de Caylas et du récit de Niebuhr : il pense avec Caylus, que Persépolis n’a point été détruite, comme on le dit, par Alexandre, et que le palais magnifique appelé Tchéchel-Minär (les quarante colonnes), palais qui, dans sa destruction, ne présente aucune trace de feu, n’a point péri par un incendie , ainsi que M. Francklin s’en est as- suré lui- même ; il attribue la destruction de cet édifice au temps et aux tremblemens de terre fré… queus dans celle contrée; il pense qu’il a servi au culte du feu (2). Le citoyen Langlès croit avec raison que les salles que recouvrent une partie des ruines de Persépolis, doivent contenir des trésors encore plus précieux pour les antiquaires : il rapporte le récit d’un voya= . (2) Il paroît que le citoyen Langlès n’a point eu connoiïs- sance des Conjectures sur Persépolis , publiées en allemand par M. de Herder en 1787 : elles ont été traduites en français dans le sixième volume des pièces intéressantes et peu con- aues publiées par le citoyen Jansen. M. de Herdér pense de même que le citoyen Langlès,sur la destruetion de Tchéchel- Minär ; qu’il attribue,non à l'incendie, mais aussi aux trem- blemens de terre : il regarde l’édifice dont les colonnes sub- sistent, comme un des palais des rois. Je ne dirai rien de plus de ce savant et curieux ouvrage de M. de Herder, parce que je sais qu’il travaille à une nouvelle édition dans la- quelle il s’occupera de tous les monumens perséyolitains : dès qu’elle sera publiée, je m’empresserai d’en rendre compte. A. L. M. Voyages en Perse. 27 geur français à un savant orientaliste anglais , M. Ousseley, qui confirme cette observation. Le citoyen Langlès forme des vœux pour que ces considérations puissent engager le gouvernement à employer son crédit auprès des puissances, pour faire exploiter ces mines : tous les vrais amis des lettres s’uniront au citoyen Langlès pour le deman- der (3). Ces deux derniers volumes de la collection con- tiennent quatre jolies gravures , deux de costumes d’après les dessins de Rosset, et deux développées qui offrent la vue de Chiraz, tirée des Voyages de M. Niebuhr, et le tombeau du poëte persan; Hhäfz, tiré des Amænulates exoticæ de Kæmp- Jer. L’impression est bien soignée, et fait honneur aux presses du citoyen Crapelet. | A. L. M. (3) On auroit pu profiter du séjour que les citoyens Bru- guières et Olivier ont fait en Perse, pour tâcher d’obtenirquel- ques monumens. Voyez la lettre qu’ils m'ont écrite de Cons- tantinople , Magasin encyclopédique 4 troisième ae À. L. M. DESTINE ARENA PIE PSE TPS EE PENSER SEPT RE, EC ER SE TS ORNE RTE Memorre abrégé sur les principaux historiens de la Bavière , depurs environ trois siècles. Av jugement de Leibnitz ( et quel nom que celui de ce savant dans la littérature et dans les sciences !}, aucune partie de la Haute-Allemasne n’a eu au- tant de bons historiens que la Bavière, soit pour les affaires ecclésiastiques , soit pour les affaires ci- viles. Le vaste champ de lhistoire ecclésiastique fut défriché pour ce pays par deux savans juriscon- sultes, Viguleius-Hund de Sulzemos, auteur de la Metropolis Salisburgensis , et son commentateur Christophe Géwold , qui avoit le titre de conseil- ler du duc de Bavière. Hund étoit chancelier des états de ce pays dans le seizième siècle ; et cette Métropole de Salsbourg, notice intéressante de tous les évêchés et autres églises célèbres de Bavière, parut pour la première fois à Ingoslstadt , en 1582 : * ce n’éloit qu’un essai, mais un essai précieux. Gé- wold le perfectionna, et en publia à Munich , en 1620, une nouvelle édition augmentée d’une in- finité de chartes qui , suivant Eccard, font le principal mérite de ce livre. Il en a paru depuis à Ratisbonne une troisième édition en 1719 : elle forme trois volumes in-folio qu’on relie en un. C’est ce même Géwold qui a été en dispute avec Freher, de x1612 à 1621, sur la question de Historiens de la Bavière. 29 savoir à qui appartenoit originairement la dignité électorale du comte Palatin du Rhin. Aux deux jurisconsultes historiens de la Métro- * pole de Salsbourg , il faut joindre le P. Mathieu Rader , jésuite de Munich, qui étoir né dans le Tyrol en 1561, et un autre jésuite nommé le P. Marc Hansitz, qui demeuroit à Cologne dans ce siècle-ci. On a du premier, Bavaria Sancta , appelé Ba- ’aria sancta dans le dictionnaire historique de Bar« ral, et Bavaria pia , dont ce dictionnaire ne fait au- cune mention. La Bavière Sainte est en trois vo- lumes in-folio qui parurent successivement à Mu- nich en 1615, 24 et27 , ornés de gravures du célèbre Raphaël Sadeler de Bruxelles, qui s’étoit établi à Munich, comme graveur du duc, Iconographus ducalis. L'autre livre, /a Bavière Pieuse » est .€n un seul volume de même format, imprimé dans la même ville , également avec gravures. Ces deux ouvrages ont eu, en 1704, les honneurs d’une se- conde édition. Pour dire un mot de la personne de lPauteur , le Père Rader étoit un excellent humaniste. On a de lui une édition de Martial et de Quinte-Curce, sans parler d’un commentaire sur la Médée de Sénèque , et il est un des premiers. qui ait songé à purger les auteurs classiques de leurs ‘obscénités ÿ projet très - utile pour l’instruc- tion de la jeunesse, que le P. Jouvency a exécuté depuis avec encore plus de succès. L'histoire du Manichéisme , écrite en grec sous Basile le macé- donien, par Pierre de Sicile, que cet empereur 26 Histoire. avoit envoyé en ambassade chez les Pauliciens, à Tibrique ou Téphrique en Arménie , ouvrage dont Vossius et Bossuet font beaucoup de cas, est due encore aux soins du P. Rader, qui la publia en grec et en latin à Ingolstadt en 1604. Le texte grec est tiré d’un manuscrit de la bibliothèque élec- torale de Munich, conféré avec un autre du Va- tican , dont Velser lui avoit Fe une copie faite par le P. Sirmond. J’omets un hommage rendu à la mémoire du cé- lèbre jésuite Canisius par le P. Rader (1); lédi- dition qu'il a donnée du livre du P. Trigaut sur les martyrs du Japon, avec des figures de Sadeler (Monach: 1623 ) ; son Verger des Saints, tiré ou traduit d’un ménologe des Grecs ; ses éditions de Saint Jean Climaque et de la chronique d’Alexan- drie , et je viens au P. Hansitz. Il n’étoit que critique dans la partie de Vhistoire ; mais cri- tique habile et judicieux. Vers 1727 il entreprit une Germania sacra , que la mort l’a empêché d’ache- ver. Cet ouvrage, fait à l’instar du Gallia chris- tiana ; devoit former aussi une longue suite d’in- folios, dont les grandes bibliothèques n’auroient pas mapqué de s’enrichir. Il n’en a paru que trois, (x) Petrus Canisius historicè descriptus, seu de sitä Petri Canisii, $.J.socioruin è Germai ia primi , libri tres, cum ap- pendice de T'heodorico Canisio Petri fratre. Monachii , 1614, in-4°. etin-8°. Le commentaire de Rader sur Martial a été imprimé à Mayence en 1627 , in-fol., et contient aux livres XIII et XIV des détails intéressans sur les anciens jeux, dont l’ipdication se trouvé dans la Bibliotheca lusoria de Ciodius. 4 Hiloriens de La Bavière. 3t encore n’a-t-on du troisième que le Prodromus ; mais ces trois premiers volumes , qui roulent sur Pancienne Métropole de Lorch, d’où s’est formé Pévêché de Passau , sur celle de Salsbourg et sur lPévêché de Ratisbonne , sont nécessairement trèss précieux pour l’histoire dont nous parlons, Cet ou- vrage a été imprimé à Augsbourg. Passons aux auteurs qui ont écrit l’histoire civilé de Bavière, Le nombre en est bien plus considé- rable , même en laissant de côté les anciens chro- niqueurs, dont Vitus ou Avitus Arnpeck est pres- que le seul qui mérite d'être cité. C’étoit un cha- pelain de l’évêque de Freysing dans le quinzième siècle, et il avoit été prieur des bénédictins d’E- bersperg en Bavière. Sa chronique a resté long- temps manuscrite , quoiqu’estimée. En 1711 Leibnitz songea le premier à en donner des extraits dans le tom. III de ses Scriptores Brunswicenses $ et enfin, en 1723, elle parut toute entière dans le troisième volume du Thesaurus anecdotorum novissimus ; par le P. Bernard Pez, savant bé- pédictin, qui, de concert avec son frère Jérôme Pez, religieux du même ordre, a sauvé de l’ou- bli plusieurs môrceaux curieux sur l'Autriche et sur la Bavière. La chronique d’Arnpeck , qu’il ne faut pas confondre avec celle d’un autre moine d’Ebers= perg, nommé aussi Vitus, en allemand feit, finit en 1463 : ce fut probablement l’année où Arnpeck mourut ; il étoit né à Landshut, ville sur lIser , entre Munich et Ratisbonne, Cependant les lettres commencçoient à renaître en n" 35 Histoire. Europe. La Bavière eut bientôt un historien dans la personne de Jean Thurmayer , plus connu sous le nom latin d’Æventinus, qu’il avoit pris pour désigner la ville d’Abensperg sa patrie. Cette pe- tite ville, célèbre parmi le peuple par ses qua- rante tours construites , dit-on, en l’honneur des quarante enfans d’un comte Babo, qui vivoit sous l’empereur Henri II (2), et par les ossemens énormes d’un comte Nicolas qui devoit avoir au moins sept pieds et demi (3), est située en Hauie-Bavière , sur la petite rivière d’Abens , qui se jette dans le Da- nube au dessous de Neustadt, Aventin y naquit (2) Trente-deux de ces tours sont rondes , et huit quarrées. Le premier nombre est celuides fils de Babo ; le second, celui de ses filles. (3) C’est dans le couvent des Carmes d’Abensperg que sont ces os ; couvent où il y a une bibliothèque d’environ deux mille volumes, parmi lesquels sont quelques Zucunabula typo- graphica. Le château des anciens comtes existe sur une hau- teur , mais ruiné en partie, et ne se distingue guère que par une roue placée sur le faîte horizontalement , pour servir d’asyle aux cicognes qui veulent faire leur nid; usage reçu de temps .immémorial dans le pays, et qui se rapporte à celui que décrit l’auteur français du poëme des Vosges. Le géant Nicolas , dernier comte d’Abensperg , fut tué en 1487 par le duc Christophe de Bavière, qui étoit lui-mème d’une taille et d’une force gigantesques , si l’on en juge par l'énorme granit qu’il lançoit, dit-on, non pas avec la main, comme Diomède dans Homère, mais d’un coup de pied, à huit ou dix pieds de haut et même plus. Cette pierreest conser- vée à Munich sous un des vestibules du château , et Guettard en parle dans son Mémoire sur la minéralogie d'Allemagne, lu à l’Académie des sciences en 1763. vers Historiens de La Bavière. 33 vers 1476 (4). Son père tenoit auberge ou cabaret à une des extrémités de la ville, près de l’Æbens- thor ou porte de l’Abens ; et sa maison , devenue célèbre par son fils, s’y montre encore > quoiqu’elle ait cessé d’être auberge : elle étoit dans ces der- uiers temps occupée par un bourrelier. Aventin étudia à Ingolstadt, et fut reçu maître- ès-arts à Paris, où il suivoit, comme il nous Pap- prend lui-même, le célèbre Lefèvre d’Etaples, qui enseignoit la philosophie dans l’université. De là il alla à Vienne donner des lecons de poésie et d’élo- quence ; et comme il ne restoit pas long-temps dans le même endroit , il étoit en 1497 à Cracovie, oc- cupé à euseigner le grec et les mathématiques : en 1512 il fut appelé à Munich par le duc Guil- laume, pour présider à l’éducation des Jeuves ducs Louis et Ernest, qui lui donnoiïent, dit-on, cent florins par an, somme très -modique aujourd’hui, mais alors assez considérable. Ce fut par l’ordre de ces princes qu’il composa eu latin les sept livres d’Annales de Bavière ( Annales Boiorum ) que nous avons de lui, et qui en ont fait un auteur clas- (4) La Bibliotheca calcographica de Jean - Théodore de Bry porte une date plus précise , et fait naître Aventin en 1466 Deux écrivains français, Genébrard et le Pére Gau- tier l’out fait naître un siècle plus tôt ; ce qui a fait dire fort vaguement à l’abbé du Bos, que cet historien ne sauroit avoir écrit avant le quinzième siècle. La méprise de Genébrard ou de son imprimeur paroît d’autant plus singulière , qu’il est mort à la fin du siècle même où Aventin florissoit. Tome I11. C 34 Histoire. = sique pour tous ceux , dit Kœhler, qui ne remon- tent point aux sources (5). On lui avoit ouvert pour ce travail, les archives et les bibliothèques des monastères : il en tira plu- sieurs volumes d’extraits qui sont encore à Munich dans la bibliothèque de l’électeur, et il entreprit ensuite ses Annales, qu’il commença à écrire au mois de février 1519. Son style latin est élégant, mais quelquefois obscur , par la manie qu’il a de lati- niser tous les noms , et de se servir, par exemple, des termes de Mysta et de Flamen pour désigner les évêques et les cardinaux ; tel est encore séipes sacra- ta pour une croix élevée à Kelheim en mémoire de Louis. De plus, il affecte la précision de Tacite, etila la diffusion de Tite - Live sans en avoir le nombre ni l’harmonie. Quoi qu’il en soit, ces An- nales sont encore estimées , et méritent de l’être. Il. les traduisit lui-même en allemand ; et quoique, dans cette seconde manière dont on avoit publié un ex- trait à Nuremberg en 1522, il y ait des différences et des additions , elles ne vont dans l’uneet l’autre facons que jusqu’en 1533. Aventin mourut l’année suivante, au milieu des chagrins domestiques ; car il avoit eu le malheur de prendre pour femme. une Xantippe, aussi méchante, dit-on , que celle de Socrate, mais moins vertueuse , ce dont Bayle a profité pour s’égayer, à sa manière , aux dépens du savant dupé, qui, au reste, ne fut malheureux que quatre ans, sou mariage étant de 1530. (5) David Kœhler , Instruction sur l’histoire de l’Empire ( en allemand ), int4°. Historiens de La Bavière. 35 Les Annales d’Aventin, dont les manuscrits oriais haux sont en grande partie à Wolfenbutel dans là bibliothèque ducale, n’ont vu le jour que vingt ans après sa mort. Elles furent imprimées en 1554 à Ingolstadt, par les soins de Jérôme Ziegler ; profes- seur de poésie, dont le Gyraldi cite avec élose plu- sieurs tragédies latines dans son second dialogue sur les poëtes de son temps. Cette édition est en beaux caractères , et ornée de Ja vie de l’auteur avec son portrait sur le frontispice ; mais l’éditeur en ayant retranché plusieurs contes et des invectives contre les gens d’église , sous prétexte qu’Aventin les eût retranchés lui-même s’il eût vécu plus longtemps, cette mutilation déplut aux Protestans , et donna lieu en 1560 à une édition nouvelle faite à Bâle par les soins de Nicolas Cisner, professeur en dioit à Hei- delberg ; qui publia aussi la traduction allemande, plus ample que dans l’édition donnée en 1566 par Simon Schardius, assesseur de la chambre impériale. Depuis on a encore réimprimé le latin à Franc: fort et à Leipzig ; et cette troisième édition ; donnée en 1710 par Gundling ; d’après le texte de Cisner, : est la plus connue et la plus recherchée : on y trouve l'Abacus du vénérable Bède, publié séparément par Aventinen 1532; le Traité des Antiquités de la Suisse de François Guilliman, ouvrage devenu rare, et une Vie d’Aventin par Jérôme-Auguste Grosschuf, sa: vant de Halle, qui a écrit sur la bibliographie. En 1529 , Aventin avoit reçu dans sa patrie même un affront qui lui causa beaucoup de‘chagrin et qui abrégea peut-être ses jours : on le tira par force du C 2 36 Histoire. logis de sa sœur à Abensperg , et on le mit en prison. Personne n’a jamais su au vrai le sujet d’une telle vioience , qui auroit eu alors des suites funestes si le duc de Bavière n’eût fait relâcher ce savant. Les liaisons d’Aventin avec Mélanchion, liaisons découvertes après sa mort, l’ont fait soupçonner de luthéranisme par les jésuites; soupçon que ses écrits ont encore augmenté ,; même aux yeux de Bayle, qui le nomme dans son Dictionnaire wn bon Lu- thérien caché. Dans son épitaphe cependant qui se lit à Saint-Emmeran de Ratisbonne, au-dessous de son buste sculpté sur un mur du cimetière des nobles où il est enterré (6), on lui donne l’éloge de bon catholique, veræ religtonis amator, quoiqu’il passe pour avoir emprunté de ce monastère, par confiance ou par autorité, plusieurs manuscrits qu’il n’a jamais rendus. Ajoutons avec Leibnitz, que si Aventin a critiqué quelquefois les vices et les désordres du clergé, il a souvent pris'sa défense et réfuté un des premiers la fable de la papesse Jeanne ; ce qu’aucun Protestant n’eût fait alors, quoique plusieurs d’entre eux s’en soient occupés depuis avec une impartia- lité qui les honore. Quant à son mérite littéraire, comme il a pour ainsi dire rompu la glace à ceux qui ont travaillé sur les antiquités de Bavière , il ne faut pas s'étonner qu’ils aient trouvé des fautes dans ses Annales : les rêveries audacieuses d’Annius de Viterbe l’avoient (6) C’est ce buste en relief que Ziegler a fait graver au devant de son édition d’Aventin. Hisioriens de La Bavière. 37 égaré, comme presque tous les savans de son temps. On lui reproche encore des citations vagues qui pa- roissent autoriser plusieurs faits, et qui ne se rap- portent qu’à un seul : c’étoit un inconvénient de la narration rapide qu’il a affectée. Du reste, on ne peut nier que ce ne füt un homme de lettres d’un grand mérite, et même à certains égards un homme de génie. Il contribua en 1516 à l’établissement d’une société littéraire à Ingolstadt, la première qui se soit formée en Bavière. Dans le premier volume des Mémoires de l’Académie de Munich, où l’on parle de ces compagnies, et à cette occasion de la personne et des ouvrages d’Aventin, on cite un recueil latin publié en 1518 au nom de cette société par ce sa. vant, et qui est devenu fort rare : Aventin y a inséré entr’autres choses une vie de l’empereur Hen- ri IV , avec quelques lettres originales de ce prince. En 1524,le duc Frédéric de Saxe lui écrivit pour engager à fournir des secours à Georges Spalatinus, sur l’histoire de Saxe. Rien ne prouve mieux la grande réputation qu’il s’étoit acquise. Enfin, une chose assez remarquable, c’est qu’A ventin, qui n’ai- moit pas les moines, a été l’historien de trois cou- vens de Bavière, Scheyrn, Osterhofen et Ransho- fen. Cette dernière histoire est encore manuscrite (7) ; mais celle de Scheyrn forme un petit in-4°. sous le titre d' Annales Schyrenses (8} : c’étoient les (7) V’ide Monumenta boïca , tom. III, pag. 233. (8) Chronicon , sive Annales Schyrenses. Biponti , 1600, iu-4°, et réimprimé deux fois, #oy. Nicéron. C 3 38 Histoire, moines eux-mêmes qui avoient invité le docte Ba- varois à ces différens travaux que Géwold imita en 1611 dans sa Chronique du couvent de Reichersperg. Aventin a fait un pareil travail pour la collégiale d’Oeting, et on l’a publié en 1518 (9). Je ne dis rien de ses vers latins, de ses élémens de musique, ni de quelques autres écrits étrangers à l’histoire. On con- serve de lui plusieurs lettres dans la bibliothèque du duc de Gotha, et ce sont probablement celles qu’il écrivit à Georges Spalatin ou à son occasion; mais il y en a une importante dans la centurie des Lettres philologiques de Goldast. Aventin y rend compte à Vadianus, consul de Saint-Gal, d’un plan qu’il avoit formé d’écrire en dix livres une Germania illus- trata ; ouvrage dont Bruschius a publié le dixième bvre en 1541. Ilest en allemand : le reste n’a point paru, et n’a probablement pas été achevé ; car cette lettre est de 1530. On y voit au surplus qu’Avertin avoit renouvelé connoissance avec Vadianus par un ami commun, noramé Christian Fridbold , autre sa- vant de Saint-Gal, d’ailleurs peu connu, Le titre donné par Aventin à son plan est remarquable: Ca- piia rerum quibus illustrabitur Germantia ab Aventino ; modo contingat benignus Mæcenas : et ce litre, il le conserva en 1532 lorsqu'il publia ce plan avec son Æbacus. | | Ce qui a contribué à maintenir jusqu’à nous la (9) ‘'estoria Cœnobii Ætingensis ir Bavaria cum diplomati- bus, curé J.. Aventini. Noribergæ , 1518, in-4°. Il est réim- primé dans:ia collection de Ludewig sur Wirsbourg et Bam- berg. Historiens de la Bavière. 39 grande réputation d’Aventin pour l’histoire de Ba- vière, c’est que Velser , qui entreprit après lui de trai- ter le même sujet, n’a pas eu le temps d'achever son ouvrage. Marc Velser , né à Augsbourg en 1558, d’une ancienne famille qui prétendoit descendre de * Bélisaire, avoit été élevé à Rome sous le célèbre Muret, qui lui inspira du goût pour les antiquités. De retour dans sa patrie , il en fut nommé sénateur , et ensuite Szadtpfleser où Bourgmestre; ce qu’il a exprimé en latin par le mot de Duumpir , parce qu’il wy a que deux Bourgmestres dans le magis- trat d’Augsbours. Velser étoit très-zélé pour la gloire de sa patrie : il Pa embellie des superb:s fontaines . qui décorent ses places publiques , et nous avons de lui plusieurs ouvrages sur les antiquités d’Augsbourg et de la Vindelicie, ouvrages recueillis avec ses lettres en un gros volume in-folio , où se trouvent aussi d’an- ciens livres dont il a été l'éditeur , tels que le Pa- négyrique de Constantin par Optatien Porphyre, et Je roman d’Apollonius de Tyr, promis en vain dans la table du Miroir historial de Vincent de Beau- vais. Ce furent les ducs de Bavière, Guillaume V et Maximilien I, qui engagèrent Velser à s’occuper de l’histoire de leur pays : dès 1602, il en fit pa- roître cinq livres écrits en latin, qui furent publiés à Augsbourg dans une imprimerie qu’il entretenoit à ses frais. Ces cinq livres , où l’on retrouve en abrégé tout ce que les auteurs ont pu nous trans- mettre sur les Boiens, finissent à la déposition de Tassilon. Des infirmités cruelles qui troublèrent la C 4 40 Histoire. fin des jours de l’auteur, suspendirent son travails mais il n’y renonça pas entièrement. En 1614, peu de temps avant sa mort, il écrivit au P. Rader son ami, que si la maladie qui le tourmentoit lui lais- soit seulement quinze jours de repos ; il se flattoit de pouvoir perfectionner cescinq premiers livres, et en achever deux autres qu’il avoit dans son porte- f-uille. L’un de ces nouveaux livres, qui est le si- xième de tout l’ouvrage, a été enfin retrouvé dans ce siècle-ci ; il s’étoit perdu parmi les livres et les pa- piers que le docte Géwold, dont nous avons parlé, avoit laissés à la bibliothèque de l'Université d’In- golstadt; et M. Lippert, de l’académie de Munich, Va fait imprimer à Augsbourg en 1777; à la'suite des cinq premiers livres ; dont il a donné une nouvelle édition grand in-8°. , enrichie de quelques notes du P. Rader et du docte Herwart, ce chancelier du duc Guillaume V , qui joignoit aux études du jurisconsulte une grande connoissance de l'antiquité et des trois langues savantes , Île latin , le grec et l’hébreu. Ce Sixième livre va jusqu’en 842; il faut espérer qu’on retrouvera de même un jour le septième. L'histoire de Bavière de Velser VPavoit mis aux prises avec Rosières , archidiacre de Toul , dont on a un gros ouvrage latin plein de fausses chartes sur la maison de Lorraiue (ro). Velser, dans son qua- (10) Siemmata Lotharing'æ ac Barri ducum ab Antenore , ets Paris. 1580, in-fol. V. les Observ. critiques de Zurlauben sur la no'ice des Diplomes , etc. Par l'abbé de Foy. Académie des belles-lettres , tom. XXXIV , hist. , pag: 171-207. Historiens de la Bavière. 41 trième livre, à l’année 670 , avoit soupçonné de faux deux diplomes du due Martin de Lorraine , produits par Rosières pour prouver que la femme de ce duc étoit une duchesse de Bavière, nommée Berthe. Le nom de Bavaria , imprimé dans ces actes, étoit in- connu dans le septième siècle, puisqu'il n’est guère lque du treizième , et c’est ce que Velser avoit observé. Rosières, piqué au vif de cette simple re- marque , fit en 1604, sous le nom de Leontus- Pamphilus-Alsaticus , une diatribe violente contre son paisible et modeste critique , qu’il tâcha de rendre odieux aux ducs de Lorraine et de Bavière. Velser se défendit par un écrit français fort coutts tandis que Christophe Géwold son ami le ven- geoit plus fortement à son insu par une réponse latine, publiée aussi sous un nom supposé. Tous ces écrits,devenus rares,se trouvent à la fin de l’édition de M. Lippert. Dans toute cette querelle Velser avoit eu nécessairement les rieurs de son côté. Il y avoit long-temps que le gros livre de Rosières, pour lequel on avoit surpris un privilége de Henri LIT, avoit été dénoncé à Paris et condamné par ce prince même , et que le partisan fanatique des Guises s’étoit vu obligé d’avouer en leur présence et celle du duc de Mayenne, qu’une partie des actes dont il appuyoit son système sur la maison de Lorraine, étoitcontrouvée ; amende- honorable que l’avocat-général Güillaume-François Joly de Fleury ne manqua pas de rappeler en 1712, dans son réquisitoire contre deux écrits où lon. tâ- choit de renouveler ce système (rt). (11) Zurlauben, dans les Observations citées ci-dessus,ne dit 42 Histoire. Après la mort de Velser, Maximilien charge de emploi d’historiographe de son pays le P. André Brunner , savant jésuite, qu’on a nommé le Tite- Live bavarois. Il fit un ouvrage tout nouveau qui commence aussi par l’origine des Boïens, et le pu- blia à Munich en trois volumes in-8e, sous ce titre : Annales virtutis et fortunæ Boiorum. Le pre mier volume parut en 1624, le deuxième en 1629, et le troisième en 1637. C’étoit un temps malheureux pour l’Allemagne = le P. Brunner , conduit comme ôtâge à Ausgsbourg par l’armée de Gustave Adolphe, y resta trois ans prisonnier ; ce qui pensa , suivant Leibnitz, nous faire perdre son troisième volume qu’il n’avoit pas encore donné au public. Ce volume fait en 1314; mais on voit par quelques expressions remarquables qui le terminent , que Brunner auroit volontiers con tinué son ouvrage, si la robe qu’il portoit lui eût permis d'écrire librement l’histoire des démélés de Louis de Bavière avec la cour de Rome. Hic ipse annus, dit-il, Ludovicum Cæœsarem videbit. Ad quod nomen nos quidem assurgimus , content pomum aureum Septenviratés insigne, Rhom- bis Boicis inseruisse (12). Augustalem aquilam liberior calamus asseret, minusque invidiæ 0b- nozius, Ea nobis vacationem dedit arduc La- rien de la dispute de Welser avee Rosières ; mais il fait (pag. 190) la même remarque que lui sur l’ancienneté du mot Bavaria. (12) Les armes de la Bavière sont des losanges: | Historiens de la Bavière, 43 boris, manumque suû sponte non cessantem à tabulä summovit, Il laissa donc la palette et les pinceaux, et un autre peintre se chargea du tableau abandonné. Ce peintre fut Nicolas Buround, professeur en droit d’Incolstadt, Tout en aidant son ami Gévwold dans sa dispute avec Freher, il mit en œuvre les maté- riaux amassés par Brunner sur cette histoire déli- cate, et publia en 1630 un val. in-4°, sous ce titre : Historia bavarica , sive Ludovicus IF smpera- tor ; ouvrage qui fut réimprimé à Amsterdam en 1645, et qu’on a encore redonné à Helmstædt dans ce siècle-Ci, à cause deson extrême rareté (13). Au (13) Cette réimpression est de 1705, et faite par les soins de Juste-Christ, Boehmer,parent de l’auteur du Jus Feclesiastie cum Protestantium.l'écrit de Burgund en faveur de Géwold a pour litre : Vic. Burgundi Electoratus Bavaricus, sive Apolo- g'a Christ, Gewoldi de Septemviralu adversus anonymum; sub- jecta est explicatio Legis, Leges et Constitutiones , 7 Cod. de Legibus. Ingolst, , 1634. Je tire ce titre du Catalogue de Ja bibliothèque de Jean Heumaon de Tentschenbrunn , où il est rangé parmi les in-4°. Quant à Louis de Bavière, sa mémoire . avoit déjà été défendue eu 1618 par le célèbre chancelier Her- wart et par Géwold , contre les atteintes qui lui aroient été portées dans la eontinuation des Annales de Baronius par Abrabam Bzovius , dominicain polonois. L'écrit de Gé- wold fut supprimé , mais non anéanti ; et Sche!horn en a pu- blié les exemplaires dans ce siècle-ci. 11 est aussi in-4°., de même que celui d'Herwart , savant évnt j’ai déjà paré, et auquel on peut remarquer en passant que Gretser avoit dédié en 1593 sa Grammaire grecque avec beaucoup d’éloges, come à un protecteur zélé des jésuites. 44 Histoire. reste, nous avons encore de Brunner un livre in-8°. intitulé : Excubiæ tutelares, dans lequel on trouve 60 portraits,gravés par Kilian,des ducs de Bavière jusqu’à Ferdinand Marie , avec une devise ingénieuse au bas de chacun ; ce livre a paru à Munich en 1637. C’est à Brunner aussi que Baillet, dans ses Aureurs dégui- sés , attribue l’ouvrage qui a pour titre : Collegium Monachiense. Brunner étoit né à Hallen Tyrol , et il est mort en 16$0. L’abbé Lavocat, ce qui est assez étonnant, n’a donné aucun article de ce jésuite , dont Leibnitz a fait réimprimer les Annales en 1710. Jacques Balde, autre jésuite, né à Ensisheim dans la Haute-Alsace , et qui avoit prêché deux ans avec succès à la cour de Maximilien, fut chargé par ce prince de continuer les Annales de Brun- ner. Cétoit à la fois un homme d’esprit et un homme savant. Mais voué par goût à la poésie , sur= tout à la poésie latine , il avoit un peu l’humeur de La Fontaine. Les longs ouvrages lui faisoient peur , et soit dégoût de sa part pour le genre historique , soit envie de la part de quelques rivaux, comme l’éditeur de ses poésies le fait assez entendre , il abandonna au bout d’uu an le soin d’écrire l’histoire. On a fait sur lui ce vers : FHic situs est Bojam qui bibit historiam : Ci gît qui des Bavarois Buroit les brillans exploits. Plaisanterie qui peut faire également allusion aux boissons fréquentes dont il usoit, soit comme goutteux , soit comme poëte ; car il avoit le mal- heur d’être l’un et l’autre, ce :que prouveroit son Historiens de La Bavière. 45 seul livre intitulé Solatium Podagricorum , que J'ai vu encore, il y a vingtans, entre les mains d’un vieux goutteux , homme d’esprit, qui en fai- soit ses délices. Il ne faut cependant point prendre à la lettre le vers plaisant qui vient d’être cité, puisque Balde, selon son éditeur ; avoit rassemblé beaucoup de matériaux importans qui sont conservés à Mu- nich, sans doute avec les essais qu’il avoit déjà composés en ce genre, essais que Leiïbnitz dit avoir vus, mais qui ne concernoient que les temps mo- dernes. Balde est mort à Neubourg en 1668, et toutes ses poésies latines, parmi lesquelles on dis- tingue quatre livres d’odes , quoiqu'il s’y trouve quel. ques idées un peu bisarres (14) , ont été recueillies en 1729, en huit volumes in-8°. imprimés à Mu pics. On prétend que des sénateurs de Neubourg (non de Nuremberg comme le disoient autrefois nos dictionnaires historiques) se disputèrent à qui acheteroit la plume de ce littérateur, et que celui à qui elle fut adjugée lui fit faire un étui d’argent : c’est un honneur qu'Horace, Tite - Live ni aucun aucien n’ont jamais eu, et il est très-permis de (x4) Telle est celle de la nymphe Europe, qui marche sur sa tête et les pieds en l’air,par allusion aux troubles politiques de ce temps-là. Gustave Adolphe est nommé dans ces mêmes odes, l’Anthée de la mer Baltique. Malgré cela, comme Balde est souvent très-bon poëte, un des meilleurs littérateurs de VAllemagne , Jean-Georges Herder vient de traduire en vers dans sa Terpsichore , une grande partie des odes de ce jésuite, où d’autres modernes ont aussi puisé des sujets de poésies. 46 Histoire. douter du fait, même en meitant la scène à Neus boug , où les jésuites étoieut aimés et tout-puissanss Enfin, apres tant d’esiais ou d'ouvrages commen cés, qui n’avoient pu faire oublier lannaliste d’Abensperg, la Bavière eut un nouvel historien dans la personne de Jean Adizreitter de T'etteaweis; grand chancelier de Bavière, dont ouvrage parut à Munich en 1662, in-folio, sous ce titre : Ænna- liuum Boicæ gentis partes tres. Il commence aux premières notions que nous avons des Boïens, et finit à la mort de Maximilien I. en 1651.C’est un fait. aujourd’hui avoué, que ce jurisconsulte n’a pas ré» digé seul ce grand ouvrage, et qu'il s’est servi de la plume d’un jésuite lorrain. Ce jésuite, nommé le P. Verveaux , étoit confesseur de Maximilien ; mais suivant la remarque de Leiïbnitz, qui a fait réimprimer cet ouvrage à Francfort avec les Annales de Bruuner, et une préface historique qui m’a beau- coup servi pour toute cette notice, Adizreitter étoit. lui-mêéine assez instruit et assez exercé à écrire en latin pour pouvoir se passer d’une plume étran- gère. ï Son premier plan avoit été de ne commencer qu’à l’époque où Brunner finit , et Liebuitz juge qu’il au- roit pu s’en tenir à cette idée; mais on vouloit un corps d’hisioire qui füt tout entier de la même main, Il parcourut donc de nouveau. une carrière où Velser et Brunner avoient paru avec tant d’honneur. Au reste , les Protestans lui reprochent, ainsi qu’au jé- suite Brunner, d’avoir inséré trop de détails sur les saints, et une foule de faits miraculeux qui n’appar< L . Historïens de la Bavière. ‘47 tiennent point à l’histoire politique. Ad/zreitter est mort en..... Son ouvrage a été traduit en partie, ou plutôt abrégé en français par un nommé Thomas Blanc, qui publia cet extrait en 4 vol. in-8°, à l’occa- sion du mariage du dauphin avec une princesse de Bavière. Il fut obligé de se presser pour metire la cir- constance à profit ; ce qui a nui, selon Struye (15), au mérite de cet abrégé , dont voici le titre: Histoire de Bavière , contenant ce qui s’est passé de plus considérable depuis Oiton IV, duc de Bavière, Jusqu'au règne de Maximilien, par le sieur Blanc, conseiller et historiographe de S. A. R. monseigneur le duc de Savoie. Paris, 1680. Dans sa dédicace au dauphin, l’auteur lui dit que saint Rupert étoit son parent ( du dauphin , bien entendu.) _ De nos jours M. de Falkenstein, conseiller au- lique du margrave d’Anspach , et membre de l'académie de Berlin, le même dont nous ayons un savant ouvrage allemand sur les antiquités du Nord- gau, ou de la Bavière septentrionale, appelée quel- quefois Noricum par méprise (16), entreprit de com= poser une nouvelle histoire, qui va depuis les pre- miers temps jusqu’a l’électeur Maximilien-Joseph, mais qui ressemble plutôt à une suite de disserta- tions hérissées de notes, qu’à une véritable histoire. Le siyle de l’auteur est d’ailleurs très-négligé , et (15) Struv. Biblioth. hist. , ce. XXI. . G6) Le titre est : Joh. Henric. de Falkenstein, Æntiquit, et Memorabilia Nordgaviæ veteris , ete. Schwabach , tom, I s 1734 ; IL , 1743 ; II, 1743 , in-fol, 48 … Histoire. souvent trivial. Les mots Aocus-pocus (17) s’y trouvent, par exemple , à propos de sorcellerie. Ce livre, qui forme quatre paities distribuées en deux volumes in-folio, ayant pour titre : Histoire com- plète du grand duché, autrefois royaume de Bavière, n'a paru qu’en 1776 à Ingolstadt, par les soins du baron d’Ickstadt, ancien professeur de Puniversité de cette ville. M. de Falkenstein étoit mort dès 1760. Tout ce qu’on sait de sa vie, c’est qu’il étoit né vers 1677 en Silésie, de parens luthé- riens, mais qu’il avoit été élevé de bonne heure dans la religion catholique ; ce qui lui avoit procuré une place distinguée à la cour d’un évêque d’Eichstedt. Il est mort à Schwabach, jolie ville du mar:raviat d’Anspach, dans laquelle il s’étoit retiré pour se livrer à son genre d’études au milieu des travaux ac- tifs des différens arts et métiers qui animent cette petite ville, entourée de bois favorables aux médita= tions du philosophe. Tels sont les principaux historiens de la Bavière. T1 y a aussi plusieurs abrégés estimés, deux sur-tout écrits en al'emand ; l’un, de format in-4°,, est du P. Stadler, confesseur du feu électeur Maximilien Joseph,dontil avoit dirigé les premières études (18); (17) Seroit-ce de ce terme d’escamoteur que viendroit celui de Aoche-pot ? (18) La malignité , qui se glisse à la cour des Electeurs comme dans toutes les cours, l’accuse d’avoir trop favorisé les inclinations religieuses de ce prince, et même d’avoir con- tribué à affoiblir son tempérament , en lui faisant prendre dans sa jeunesse des potions trop rafraîchissantes. Mais qui lPautre, Historiens de la Bavière. 49 l'autre, grand in-8°. , est de M. Attenkhofer, archi- Vaire électora!, Il ne commence qu’à Otton de Wit- telspach ; mais il contient beaucoup de choses inté- ressantes pour l’s publicistes, Parmi les écrivains qui, sans embrasser toute Phistoire de Bavière, s’en sont occupés cependant avec beaucoup de succès, il faut distinguer le Père Charles Meichelbeck, bénédictin, auteur d’une hiss toire latine de Freysingue, en 2 vol. in-folio, ac compagnée de chartes précieuses ; un autre bénédic- tin bavarois, nommé le P. Anselme Desing , dont on a un premier volume, aussi in-folio, d’une histoire de l’empire en allemand, et M. Pfeflel, si connu par son abrégé chronologique et par ses savantes disser= tations imprimées parmi celles de l’académie de Munich. Il faut distinguer encore le comte Gabriel-Louis de Buat, long-temps chevalier de Maite, et successive- ment ministre de France à Ratisbonne et à Dresde, Né dans la partie de la Basse-Normandie qui touche peut garantir ces sortes d’anecdotes ? On ne donne celle-ci que pour une tradition populaire , qui peut servir au moins à faire connoître la facon de penser des Bavarois sur le P. Stadler. La femme de César ne doit pas même être soupcon- née , a ditautrefois Marin de lui-même ou d’un autre; et cette phrase semble pouvoir se répéter ici, malgré le ridicule dont un homme d’esprit ( Beaumarchais ) l’a cou verté dans ses. Mémoires contre Goezman, comme l’imprudence de Marin dans cette affaire n’empêche pas qu’on ne doive à cet auteur estimable des ouvrages utiles , n’y eut-il que son Mé- moire sur la ville de Tauroentum , rappelé avec éloge dans les œuvres diverses de Barthélemy. Tome III. D 5o Histoire. à l’abbaye de la Trappe, mais placé dès sa pres mière jeunesse à la cour de Munich auprès du respec- table chevalier de Folard , neveu du fameux militaire de ce nom, il vit naître en 1759 l’académie élec- torale de cette ville, et en fut nommé directeur pour la classe historique , fonction que M. Pfeffel a remplie depuis lui. Le temps que M. de Buat a occupé cette place n’a pas été stérile pour l’histoire de Bavière. C’est lui qui a débrouillé le premier l’ancienne ori- gine de la maison de Wittelspach, que l’on s’obsti- uoit autrefois à faire descendre de Charlemagne, au lieu dela raÿ porter comme l’indiquent les monumens historiques , à la famille des Hoses, l’une des plus puissantes de la nation bavaroise. L'ouvrage de M.de Buat sur cette matière estintitulé: Origenes domûs Boice , et il a été imprimé à Nuremberg en 1764, en 2 volumes in-40., avec une préface de M. Pfeff:!. Il suffit d’ouvrir ce livre pour être convaincu, et de la vaste érudition de lauteur , et de son heureuse adresse à tirer parti des chartes les moins satisfai- santes; talent dont on retrouve des preuves dans son Histoire ancienne des Peuples de l’Europe , en 12 volumes in-12, publiés à Paris en 1772 par deux membres de l’académie francaise, l’abbé Arnaud et l’habile traducteur du Charles V de Robertson. Cette histoire , où l’auteur suit les Boiens sous une infinité de noms jusqu’au siècle de Charlemagne, n’avoit d’abord été entreprise que pour Péclaircisse= ment des antiquités bavaroises ; ensuite l’auteur lavoit intitulée Annales du Danube , parce qu’elle n’embrassoit encore que les jeuples barbares Historiens de La Bavière, 5x qui avoient habité les bordsrle ce fleuve f19); mais peu à peu son plan s’est généralisé , et les Bovarois, qu’il retrouve presque par-'out avec une sagacité merveilleuse , n’en sont pas moins restes l’objet prins cipal de ses complaisances et de ses soins (20). On regrelte pourtant que le goût de ce savant pour les recherches profondes l’ait écaré quelquefois dars des digressions qui mquisent à l’intérêt de l’histoire. Son style est celuï de la chose ; mais, 1l faut avouer, la chose n’est pas toujours de nature à plaire au grand nombre de. lecteurs. Ce fut au mois d’octobre 1787 que la république des Lettres perdit M. de Buat ; il éto:i alors en son château de Nancay en Berry, où il avoit trouvé ofium cum dignitate après ses longs travaux politiques et littéraires commencés avant l’âge de vingt ans, Quelq attachement qu'il eût pour la Bavière, où son premier mariage avec une baronne de Falkemberg l’avoit rendu propriétaire (19) Voyez un discours français lu en 1762 à l’académie de Bavière par M. de Buat, et imprimé celte même année à Munich , in-4°. : il auroit pu être réimprimé à la tête de l’Aistoire ancienne des Peuples de l’Europe. Dans le premier volume des Mémoires de l’académie de Muuich ii y a trois morceaux de lui, qu’on a imprimés en allemand | mais qu’il avoit Jus en laüu à cette compagnie. Deux sont sur Jornandès et un sur le céièbre Cassiodore, qui, comme on sait, avoit fait une hisioire des Goths en XII livres, que Jornandèsa extraits et nous a fait perdre. (20) GENTI ÆTERNÆ LUD. GABRIEL DU BUAT : c’est l'inscription un peu adulatrice qu’il avoit fait mettre sur la gravure qui est à la tête des Origines domûs Boicæ, gravure qui représente une pyramide oruée de l’éeusson bayarois. D 2 5s Histoire. d’une terre considérable (21), il n’en aimoit pas moins son pays natal. Il fut un des premiers à prendre. part aux assemblées provinciales du Berry, sur les délibérations desquelles il étoit plus fier encore d’avoir influé que d’être sorti d’une de ces familles de Normandie appelées du Passage , parce qu’elles remontent au temps de Guillaume le Conquérant (22). (21) Wisent, dans la régence de Neubourg. (22) Les ouvrages qu’on a indiqués ne sont pas les seuls qu’on doive à M. dé Buat, sans y comprendre même plusieurs lettres ou extraits dans la Gazette littéraire de l’Europe, ni ce qu’il a donné dans un ou deux journaux encyclopédiques sous le nom d’Jsophile , c’est-à-dire, ami de légalité; mais on ne parle ici que de ses productions qui ont rapport à la Bavière , et à ce titre on pourroit dire un mot d’une tragédie qui luiaété attribuée : c’est Charlemagne ou le Triomphe des Lois; Vienne, Trattner , 1764, in-8°. 11 se trouve dans cette pièce un rôle de Tassilon, ou au moins d’un ambassadeur de ce prince ; et à juger de l’ouvrage par les connoissances histo- riques répandues dans la préface et dans la pièce, on pourroit la croire de M. de Buat, Souhaitons cependant pour sa réputa- tion littéraire, qu’il »’ait pas fait de pareils vers. Chapelain ;, le dur Chapelain , est un cygne mélodieux auprès de l’auteur de cette tragédie de Charlemagne, dont le long dialogue fa- tigueroit d’ailleurs avec le coloris poétique le plus brillant. Dans un mémoire de Guettard (Acad. dessciences , 1763), il y a une description étendue des salines de Salsbourg. Elle Jui avoit été fournie par de Buat, à qui Guettard ne manqua pas d’en faire honneur en la marquant toute cutière par des guillemets : elle tient depuis la page 203 jusqu’à 211 du vo- lume cité. Ily a quelques détails sur les anciennes lois ba- varoises dans un autre ouvrage de M. de Buat, intitulé les Origines , ou l’ancien Gouvernement de la Francs , de l’Alle- magne et de l’Italie ; ouvrage en quatre vol. in-r2 qu’il pu- blia à vingt-trois ou vingt-quatre ans , mais qu'il ne manqua # : Historcens de la Bavière. 53 J’ai indiqué ci-dessus le Thesaurus Anecdoto- rum en 6 volumes in - folio , par le P. Bernard Pez, qu’on a surnommé le Mabiilon de l’Allemagne, Ce recueil est de 1721, ainsi que le premier tome des Scriptores rerum austriacarum veteres et ge: nuini donnés au public par Jérôme Pez, frère de Bernard, et religieux comme lui dans l’abbaye de Melck. Il y a une collection plus particulière à l’his- toire de Bavière: ce sont Rerum Boicarum scrip- tores antehac numquam editi. August. Vindelic. 1763 ,in-folio, 2 volumes, où il se trouve entr’autres choses quelques extraits des papiers d’Aventin. L’édi- teur est André-Félix Œfelé, mort vers 1780, biflio- thécaire de l’électeur , et son conseiller de cour. Les Monumenta Boica en 16 volumes in-4°, publiés de 1563 à 1795 peuvent aussi être rappelés ici. Ce sont les différens inventaires et recueils d’actes trou- vés dans les couvens de l’électorat. Mais cette esquisse est déjà si longue, qu’il suffira, pour recommander cerecueil, de dire qu’il a été fait par l’académie de Munich, et qu’on se proposoit, il y a quelques années, de l’étendre aux actes conservés dans les archives des villes et de la noblesse, supposé qu’on y pût avoir pas de rappeler , comme son »lus beau titre littéraire, sur le frontispice de son Histoire ancienne des Peuples de l'Europe, Ce livre des Origines, quoique sec et souvent peu lié , est en effet un répertoire très-utile. On l’a réimprimé vers 1788 en trois vol. in-8°. , et il avoit été traduit en allemand en deux vol. in-4°. dès que la première édition avoit paru. C’est ce livre que C. À. Valckenaer, dans son Essar sur l’histoire de l'espèce humaine, cite vaguement sous ce titre: Origine eë Antiquités de la France , par le comte de Buat. D 3 54 Huistoure. accès. Il yavoit eu des moines à qui cette recherche purerent littéraire avoit causé de lalarme. Veyez le recueil même, tome IV, page 514. Ces religieux ou leurs gens d’affaires _excipoient d’une loi du code de edendo (lib. 2,tit. 1) ; mais heureusement ceite loi, donnée dans le troisième siècle de notre ère pour disnenser de produire certains actes dans des matières ltigieuses, n’a pas empêché que linterêt de Pérudition ne prévaiüt dans le dix-huitième auprès du plus grand nombre, ! HEURES Courts éclaircissemens b'bliocraphièues sur trois endroits du Mémoire précédent. 1°, En parlant de l’édilion des Annales d’Aventin, don- née eu 1710 jar Gupdiing, on a dit que c’étoit la troisième édition de ce livre , parce que dais cet endroit on n'a fait at- tention qu’au cheogement d’édiieur : il auroit fallu dire la siæièmne , si 09 avoit eu égard à trois réimipressions du texte de Cisner , faites depuis sa mort à Bäle ei à Francfort- sur-Mein, et qui sont indiquées par Niceron (t. XXX VIII, Ari, Aventin }., Li faräroit même dire la seplième édition si l’on pouvoit compter sur le titre suivant , énoncé dans la Bi- blioiñeca Fortiana ; ou Catalogue des livres du duc de la Force en 1727 : J. Aventini Annales Boiorum , à Nic. Reus- nero eucti. Francofurti , 1626 , in-fol. Mais il est clair que le rédacteur du Catalogue a mis, par une double méprise, Reuinero pour Cisnero , et 1626 pour 1627, qui est la date d’une des ré/:npressions indiquées par Niceron. Au reste, cetie édition de Francfort se distingue par un bon index fort ample, qu’on doit aux soins d’ua uommé Dauiel Brunnius, qui prenoit, ai moins à celte date de 1627 , les titres d’étu- diant en histoire ( Aistoriarum studiosi) , et de poëte impé- rial : il s’est nommé à la tête de l’index même, et en sa qua- lité de poëte lauréat il n’a pas marqué de le terminer par six vers latins à ia louange de l’äuieur, qu’il appelle le prince des historiographes alemands. 2°, Büyie , dans son article Ærentin, prétend que cet écri- yain a feit une histoire dt la ville d’Octingen en Souabe, Bayle s’est trompé : il a mal -ntendu ce que Vossius dit en général , d’après Aventiu même, d’une histoire d’Oetingen { historiæ Utinensium ), sans spécifier ni la Souabe, ni la Ba- Biographie. 55 vière. Le passage d’Aventin , auquel Bayle lui-même ren- voye , décide absolument coutre lui : Quermadmodum , dit l’auteur , Diplomata ab eo ( Carolomanno ) , sacerdotibus et monachis data, quæ adhuc servantur , indicant ; quorum guædam in Utinensi historia jam publicavi, ( Ann. Boi., hib.IV , pag. 267 de l'édition de Francfort en 1627 , et pag. 446 de l'édition de Ziegler ). Ces Diplômes , ces prêtres, ces moines , et ce qui suit dans Aventin, font voir clairement qu’il s’agit :à de l’histoire que j’ai indiquée , c’est-à-dire , de celle du Couvent, depuis Collégiale d’Alten-Oetting ; histoire dont le P. Niceron lui-même n’a pas eu une idée bien nette, puisqu’il se contente de mettre dans le catalogue des ouvrages d’Aventin , Origines Oettingenses , tout en indiquant le vo- lume où Ludewig a fait réim, rimer cet ouvrage. 3°. Je ne trouve nulle part de renseignemens sur le Colle- gium Monachiense ; altribué par Baillet au P. Brunrer : est- ce peut-être la pièce que Lipenius ( Biblioth. philosoph. Healis ) indique sous ce titre au mot Bavaria. Collegii Mo- nachiensis Epithalamium Hazimiliano Septemviro et Hariæ Annæ Austriacæ.Ferdinandi II, tmp. filiæ. Monachii, 1635, Lipénius au même endroit indique une autre pièce du P, Brunner , relative à ce mariage de Maximilien, ou faite à sette occasion. Bt O CR À PE LE; Norice sur Marc-Hirarre Virraris , par le citoyen TourNoN. x léger tribut d'hommage que je viens offrir à la mémoire d’un citoyen utile, étoit un devoir que m’imposoit la reconnoissance pour les témoignages d'amitié sincère qu’il me prodigua pendant les deux dernières années de sa vie. Marc-Hilaire P'ilaris naquit à Bordeaux en 1720, de J. Filaris , bour- geois et maître apothicaire de cette ville, et d’Emi- lie Casimon , fille du vice-sénéchal de Neval. Après ses premières études il travailla sous les yeux de son père, qui le destinoit à lui succéder dans sa profession : à l’âge de dix-huit ans il fut envoyé 56 Biographie. à Paris pour y perfectionner les connoissances qu’il avoit acquises en chymie et en histoire naturelle. Ce fut chez le célèbre Rowuelle qu’il eut le bonheur d'être placé : auprès de ce chymistedistingué, il ap= prit combien les talens, le génie servent à accroître les connoissances des hommes et ajoutent au bonheur de l’humanité. Les entretiens des savans qui fré quentoient le laboratoire de cet habile manipulateur lui donnèrent cette noble émulation à laquelle il dut dans la suite les succès qui l’ont illustré : il fut em ployé dans les armées en qualité de pharmacien pens dant les campagnes d’Hanovre. Son cœur , déjà voué à Paustère vertu, ne lui permit pas d’être long tensps témoin des dilapidations, des désordres, sou- “vent inséparables du terrible fléau de la gue re, ‘Vilaris quitta l’armée et revint à Bordeaux : c’est dans cette ville que son goût et son zèle le mirent à même d’être utile à ses concitoyens ; il fit avec succès des cours de chyniie qui servirent à répandre Pamour d’une science qu’on croyoit alors n’appar- tenir qu’à la seule pharmacie. Ses nombreuses oc cupations ne lui firent point oublier qu’il avoit une dette à payer à la société et à la nature : il touchoit au moment de voir sa main acceptée par la jeune personne à qui déjà il avoit donné son cœur, lors- qu’une mort imprévue enleva celle qu’il avoit choisie pour être sa compagne. Une perte si cruelle le jeta dans une triste mélancolie, et le décida à garder le célibat le reste de ses jours. Son père crui pou- voir adoucir son chagrin en lui cédant la direction de son laboratoire , et il lui fournit ainsi l’occasion de s'appliquer à la pratique de la pharmacie. Le pers Notice sur Vilaris. . 57 fectionnement de certains instrumens, l’invention de quelques nouvelles machines, une meilleure distri- bution dans les presses, furent le résultat de ses premicrs travaux : sa scrupuleuse délicatesse dans le choix et admission des drogues, son habileté dans ses préparetions, sa rare probiié, lui attirèrent dans peu la confiance des médecins et l’estime de ses con- citoyens, Il fit recu apothicaire en 1748 , et c’est à cette époque qu’il proposa de former un seul éta- blissement cù toutes les compositions pharmaceutiques auroient été travaillées (r) : on les eût distribuées par portions égales à chaque pharmacien , et les pro” fits auroient été en commun ; idée grande et qui porte l’empreinte de la pureté des vues et de la loyauté de son auteur. La basse jalousie fit manquer le projet qui auroit pu fait voir plusieurs matières recueillies par M, ilaris, ha- » bile chymiste et naturaliste de Bordeaux, j'y ai reconnu 2 l’espèce de terre que je désirois tant de trouver. » Point du tout , les faits sont bien différens : ilaris ayant découvert et reconnu le kaolin , en fit part à M. de Lussan , archevè- que de cette ville, avec lequel il étoit intimément lié, Celui-ci pressa le ministre Bertin de nommer des commissaires pour venir sur les lieux vérifier cette découverte : Macquer fut choisi , etc, etc. Notice sur V'ilaris. 59 salées étoit la cause première du scorbut des marins: tronver le moyen de nourrir les équipages de viande fraîche, ou celui de la préparer sans sel, étoit rendre un service des plus essentiels à l’humanité. Après bien des essais, il crut avoir trouvé dans la voie de la dessication cette précieuse recette : il en fit part en 1768-69 au gouvernement, qui le chargea de préparer vingt-quatre bœufs à sa ma- nière. Son travail fini , des bâtimens fournis de. viande ainsi préparée furent expédiés pour l’Inde ; cet approvisionnement supporta le voyage et le re- tour sans nulle altération (3) Un ministre bienfai- sant se seroit empressé d’acheter ce secret impor- tant, et auroit récompensé noblement son inven- teur ; mais l'intrigue et l’insouciänce du gouver- nement firent négliger cette heureuse découverte, qu’on sera peut-être long - temps à retrouver. Un amour constant pour ses semblables ne pou- voit laisser tranquille l’imagination de ce chymisie (3) Ce fut à Æmbarès, à trois lieues de Bordeaux, que P'ilaris prépara sa viande en 1769 : on y voit encore les ins- trumens qui ont servi à cette opération. En 1784 , le même essai fut répété par les soins de Laporte ; ordonnateur de la marine; les résultats et les succès furent les mêmes, La gelée animale étoit sur-tout précieuse , parce que cet artiste avoit su la rendre incorruptible : j'en ai vu qui avoit six ans ; elle étoit fraîche et sans altération ; une cueillerée suffisoit pour faire deux tasses d'excellent bouillon , auquel i! falloit ajou- ter un peu de sel marin. On peut consulter le Journal de Paris, année 1783 , n°. 273 - 74, et les autres journaux qui, dans le temps , ont parlé d’une manière avantageuse de ces découvertes, 60 Biographie. laborieux : il s’apercut, par les rapports qu’il avoit reçus de la Martinique, que le défaut de manipu- lation faisoit perdre beaucoup de sucre dans les ate- liers où on le prépare ; il s’occupa particulière- ment de cet objet. En 1780, il adressa un mémoire au gouvernement, avec le plan de machines nou- velles, et la manière différente d’exploiter la canne à sucre : il offroit même de passer en Amérique pour y établir son nouveau procédé, et engager , par son exemple, les Colons à l’adopter. La guerre avec l’Angleterre empêcha l’exécution de ce projet avantageux. Rebuté par les difficultés qui sem- bloient le suivre dans toutes ses entreprises, dé- goûté du commerce des hommes , ce savant ne songea plus qu’à couler ses deruières anntes dans une triste indifférence ; il alloit tous les jours ou- blier leurs injustices ,.en observant les mœurs des tourierelles qu’il élevoit, seul délassement de cet homme sensible, que son caractère ferme et peu endurant avoit, en quelque sorte, isolé de la so- ciété. Au printemps de 1792 un ami le pria de prépa- rer de lextrait de ciguë : il eut l’imprudence de faire cette opération dans son laboratoire ; les va- peurs de cette plante vénéneuse augmentèrent un mal de tête qu’il enduroit depuis dix ans, et le rendirent sérieusement malade. Les soins de l’ami- tié alarmée et les conseils d’un médecin instruit ne purent lui rendre la santé : il mourut le 26 mai de la même année 1792, en laissant le sou- venir d’un citoyen estimable, qui avoit marqué son Philosophie morale. 61 passage par des découvertes essentielles et consacrées au bonheur de ses semblables. Vilaris posséda à un degré éminent les vertus de l’honnête homme , et les connoissances du phar- macien qui honore son état : il fut chymiste sans charlatanerie, habile sans prétentions, et présenta plusieurs fois dans sa vie le modèie animé du bourru bienfaisant. Ah ! si le proet facile à exécuter se réa- lisoit un jour, d’avoir dans chaque chef-lieu de dé- partement une salle d'hommes illustres comme à Toulouse, Bordeaux sans doute s’empresseroit de placer le buste de Pilaris parmi ceux de ses con- citoyens qui ont bien mérité de leur patrie. Tourxon, d.m. PHILOSOPHIE MORALE. Joserai-Isrporr MorAzrrr ad excell. virum Jo- SEPHUM-MAzARREDUM , de filiolæ institutione Commentarius , edidit Tuappzæzus-BrAvus et RiFrerus, avec la traduction espagnole à côté , intitulée Commentario de , etc. C’est- à-dire, DissERTATION de don Joserx-1sr- DORE MORALESs , adressée à don Josrrn de WMAzARREDO , sur l'éducation à donner à sa Jille, publiée par don T4pro-Br4Aro de Rr- vero. Madrid , chez Gabriel de Sancha, 1796, in-8°. de 69 pag. Laura Ma zarredo avoit consulté don Morales sur léducation qu’il pourroit donner à sa petite 62 Philosophie morale. Jeannette ( Joannula ), et en particulier sur le déssein qu’il avoit tie lui faire apprendre la langue latine : et la réponse de don Morales a principa- lement pour objet de déconseill-r à son ami l’exé- cution de ce dernier projet. Don Morales, en répon- danten latin, commence par s’excuser sur les défauts de diction et de’siyle qui pourroient lui échapper dans cette langue , dont il a depuis long-temps, à ce qu’il dit, négligé l’habitude : cela n’empêche pas que sa latinité, pour autant que nous pouvons en juger , ne nous ait paru d’une pureté et d’une élé- gance qu’il est assez rare de reucontrer aujsurd’hui. Former l’esprit et le corps des Jeunes personnes du sexe, tels sont les deux objets dont se compose essentiellement leur éducation. Mulrebrem cnastitu- tionem ego bipartitam esse debere sic statuo , ut et corpus ad urbanas liberalesque artes et quasi dexteritates informandum , et animus sit ingenuis disciplinis , quæ fœæminéis congruant, excotendus. Le mémoire de don Âforales est di- visé en ces deux parties : il traite d’abord de la cul- ture de l'esprit, et eusuite d2s soins à donner à l’ex- térieur,, et de l’acquisition des talens agréables. Parmi ces derniers, il parle avec enthousiasme de la mu- sique , et il félicite la chère Joannula d’avoir à cet égard dans sa mère un modèle rare de goût et d’exécution. Il seroit tenté , dit-il, de donner six cents Cicéron pour un seul Hayden : Cujus ego divi- nam animos permulcendi artem sexcentrs Tul- liis , nedum pertenui hac mea dicendi facul- tate , commutarem. Dans une autre partie de ce mémoire, et qui y fait une digression, à notre avis, Education. 63 un peu longue, don Morales prouve qu’il w’en sait pas moins apprécier à sa juste valeur lorateur romain : un temps fut où il Padmiroit exclusivement ; il a senti depuis qu'avec celle admiration outrée nous risquons de rester au-dessous des lumières de notre siècle. ÆAiqur fuimus quondam et nos in eadem hæ- resi ut putaremus , humaniores , quas vocant, litteras inter humanos conatus omnes summum tenere locum. — Unus miht Cicero non in de- licuis erat modo , sed pro omn£i dusciotina et scuentia esse debere arbitrabar , in ejusque ævi scriptoribus cuique apprime instituto et egregie exculio esse consenescendum. Scripta proba- bantur mihi nulla, quæ non ciceronianum præ se ferrent vultum et. habitum. — Donandum id erat adotescenti. — At cum disciplinas illas adit naturæ contemplatrices , quægue plus ha- bent in recessu quam in fronte promuttunt ; cum immensus itidem phitosophiæ se nuhi campus aperut , erubut , fateor, tantam nostrorum iem- porum lucem optimæque saptentiæ frugem ver= borum nugis et aucupio posthabuisse. Ces dernières expressions de don Morales nous semblent cependant un peu dures, et lui-même con- viendra volontiers avec nous qu’il y a bien autre chose dans Cicéron , que verborum nugæ et aucu- pium.— Nous sommes parfaitement d'accord avec lui sur le danger qu’il y a de ne faire des personnes du sexe que des pédantes ridicules , en les appe- lant à l'étude du latin et du grec : nous croyons que les exceptions sont infiniment rares à cet égard , et nous nous rappelons que, dans son estimable ouvrage L 64 Philosophie morale. de La Famille , considérée comme l'élément des sociétés , le ciioyen Guiraudet s’est depuis peu élevé avec force contre les prétentions des femmes à fournir la carrière des sciences et des lettres (r). _Nous ne nous étendrons pas davantage surc2tte bro- chure de don Morales. Il a encore donné depuis un mémoire plus important, où l’on voit la science des calculs géométriques appliqu‘e à l’un des points capitaux de l’art social, la matière des élections (2). P. H. M. (x) Sa censure a cependant épargné ainsi la savante Dacier: « Respectable et docte Dacier , tu remplis avec autant de > distinction que de zèle les devoirs d’épouse et de fille, » quand , atlachée au double joug de l’hymen et de la > science, tu traças, à côté de ton époux , les pénibles sil- lons de la critique , et que vous défrichâtes ensemble les champs épineux de la philologie ; pénible labeur auquel ton père avoit façonné tes premiers ans. Que d’autres te louent d’avoir été femme savante, je t’admire ette loue bien plus encore , parce que tu n’as été savante que pour mieux remplir ta qualité de femme. Quelle que soit ta ré- putation , tu seras plus justement célèbre peur cette sou- mission aux vœux d’un père , aux goûts d’un époux , que » par la manière dont tu remplis ta part dans cette érudite > association. Recois ici le premier hommage peut-être qu’on > l'ait présenté dans ce genre , et puisse-t-il te consoler de » quelques critiques, comme il doit t’absoudre à jamais de > tout reproche d’ostentation ou de vaine gloire ! ( Pag. 44 » etsuiv.) | (2) Ila pour titre : Memoria mathematica sobra el calculo SO UV VU 4 VU Ov .de la opinion en las éleccions ; por e dr. D. Joseph-Isidoro Morales , presbitero , teniente de ayo de los Caballeros Pages del Rey. Imprimé à Madrid , et par ordre de S. M. catho- lique, à l’imprimerie royale, 1797, in-4°. de 66 p. MORALE. A Ro 8 AGDE Son DS AS MAUMI RU TL, Commenr le sens commun juge-t-il en matière de morale (1)? Traduction du premier cha- pitre de la Philosophie morale de Kanr (2). L, seule chose qui soit généralement bonne sous tous les rapports, c’est la bonté du caractère, Quel- que granis que puissent être les avantages que donnent l'intelligence, Pesprit, le jugement, l’énergie et le courage , toutes ces qualités ne laissent pas d'être tiè-dangereuses lorsqu'elles sont associées à un caractère méchant. Il en est de même des dons que l’on recoit de la fortune: on peut abuser du pouvoir, des ricl.esses , des honneurs, de la santé et d’une pesilion qui ne laisse rien à désirer. Combien de fois ne voit-on pas l’assurance qu’elles sont propres à inspirer, dégénérer en insolence dans des personnes qui manquent de bons principes! J’ajouterai que tout homme ne nous paroit digne du bonheur dont il - fx) Ce morceau , traduit de l’allemand , forme le premier chapitre de la Métaphysique des mœurs par M. Kant. (2) La Philosophie de M. Kant fixe aujourd’hui l’attention d’un grand nombre de personnes , et cependant peu con- noissent encore ses principes ct ses écrits. Le Magasin ency- clopédique est le seul journal francais dans lequel on trouve des morceaux assez étendus sur sa doctrine. Je donne aujour- d’hui la traduotion de deux passages de sa Métaphysique des mœurs et de ses Mélanges , qui m’a été adressée de Leipsig par M. Griesinger. AÀ.L. M. Tome LILI, E 66 Morale. jouit , qu’autant qu’il anaonce des sentimens droits et honnêtes. Les anciens nous présentent la modération des passions, empire sur soi-5ême , un esprit rflichi, toujours calme et serein come le dernier terme de la vertu. Mais, hélas! il faut bien rabattre de leurs éloges pompeux,quand on pense que ds scélérats qui combinent leurs plans avec sang-froid n’en sont que plus formidables. | Ce n’est ni aux eff:ts sensibles ni aux avantages qui résultent d’une action, que l’on peut reconnoître la bonté du caractère. Il suffit, pour être morale- ment bon, qu’on ait pris la ferme résolution de mettre de bons principes en pratique, et qu’on s’y évertue de toutes ses forces. Un destin contraire tra- verse quelquefois nos meilleures intentions; le suc- cès ne répond pas à nos efforts, et nous n’en avons pas moins des titres suffisans à l’estime d’autrui. Cette these paroîtra extravagante. Est-ce donc le vouloir seul , me dira-t-on, qui caractérise l’homme probe ? Pourquoi la raison doit-elle exercer de l’em= pire sur la volonté, si ce n’est pour nous conduire dans le choix de nos jouissances et des moyens de nous les procurer ? Comment donc des principes qui ne contribuent en rien à notre félicité, peuvent-ils être bons ? Voici ce que Je répondrois. Sans doute les êtres organisés ne sont doués que des facultés les plus propres à conduire au but qu’ils doivent atteindre. Or, si ia nature ne nous a doué de raison que pour nous engager à prendre soin de notre conservation et de notre bien-être. , il semble Philosophie &e Kant 6? qu’elle auroit bien inieux fait de nous mettre sous la direction de l'instinct. Les animaux , en suivant ce guide, échäppent du moins à toutes les illusions aux quelles notre espèce est sujette dans la recherche de ses plaisirs: Demandez à ceux dont l’esprit n’est occupé que de projets d’amusement, et qui ne vivent que pour jouir , si c’est la raison qui donne le plaisir. Ne voyez- Vous pas que la science les ennuie, que les arts du luxe ne font qu’augmenter la foule de leurs besoins, et qu’ils envient le sort de cette classe d’hommes qui se laissent aller à l’instinct naturel, sans se soucier si leurs actions s’accordent avec la raison. Non, ce ne sont pas toujours des gens chagrins ou ingrats envers la Providence, qui soutiennent qu’on n’est ni plus heu- . reux ni pluscontenten cultivant la raison. Il paroît plutôt que ceux qui pensent ainsi se doutent qu’on peut faire un usage infiniment plus noble de ce souffle divin, qu’en ne le faisant servir que d’instrument pour se procurer des plaisirs sensuels: En effet, la nature n’est jamais inconséquente, Si elle ne nous a pas donné la raison uniquement pour nous guider dans notre bien-être physique, ne faut-il pas conclure qu’elle a fixé à la raison un büt particulier ? Les sens nous portent aux jouissances; c’est là leurempire : la raison dicte des ordres qui à la vérité paralysent souvent nos désirs, mais dont l’exécution fait naître un bonheur et un contentement tout autre que celui qu’on éprouve en satisfaisant ses goûts et ses penchans, L'homme moral s'attache à ses devoirs: Analysons E à 68 Morale. ce qu’on entend par devoir , afin de mieux faire con- noître cette bonté du caractère, qui ne calcule pas le profit qui pourroit résulter de la marche qu’elle suit. | TI. Je distingue d’abord l’homme qui se conforme à ses devoirs, de celui qui agit par devoir , et je pré- senterai quelques exemples par lesquels on verra clairement ce que c’est qu’agir par devoir. Nous veillons presque tous avec beaucoup de soin à notre conservation : le devoir nous le commande, et l’instinct nous y porte. Nous nous conformons à ce devoir en mabrégeant pas nos Jours; mais nous p’agissons pas par devoir tant que nous n’y sommes déterminés que par attachement à la vie ou par la crainte de la mort. Les hommes qui soutiennent leur existence par devoir, ce sontceux qui, poussés au désespoir et fatigués par une suite de malheurs, ne trouvent plus le moindre charme à vivre, qui souhaitent la mort , et qui ne se la donnent pas parce que l’idée du devoir les retient. On rencorire quelquefois de ces ames compatis- santes qui n° connoissent pas de plus grand plaisir que celui d’essuyer les larmes des souffrans, et de rendre heureux tout ce qui les entoure. Je me gar- derai bien de les blämer ; mais cette bienfaisance ne porte pas le caractère d’une action morale tant qu’elle n’est pas l’effet d’un cœur naturellement facile, ten- dre et sensible. Mettez en parallèle un homme froid, se roidissant contre l’adversité qui l’accable, et in- différent aux plaintes d’autrui : on lui demande un service ; son apathie l’a rendu sourd aux gémisse- = Philosophie de Kant. 69 mens; rien ne sera-t-il capable de l’en tirer ? Il se rappelle de son devoir, et il vole au secours de Pinfortuné. g Parmi les élémens dont la félicité se compose, la santé tient un des premiers rangs. [l a raison,ce gout- teux, de se refuser des boissons échauflan'es, crainte d’agoraver son mal ; mais la sobriété n’est uhe vertu qu’autant qu’elle a le devoir pour motif, C’est dans ce sens qu’il faut commenter les pas- sages où la morale de l’évangile nous exborte d’aimer nos ennemis comme nous-mêmes, Il n’y est pas question d’affection qui part du sentiment , et qui ne se commande pas, mais de bienveillance par devoir. IT. Ce n’est pas au but qu’on a atteint ou que l’on s’est proposé d’atteindre , que l’on reconnoît si une action est faite par devoir, ou si elle est vraiment morale, mais à la maxime ou au principe qui a dirigé la volontés car enfin, il n’y a que deux mo- biles qui nous font agir , c’est ou l’idée des eflets devant provenir de nos actions , ou quelque. principe puisé dans la raison, Or il est clair, d’après ce qui a été dit ci-dessus, que l’effet peut manquer ou être tout différent de ce que nous comptions, sans que cela déroge en rien au prix d’une action ; il ne nous reste donc pour fixer ce prix , que d’examiner si Pacte est conforme ou non aux principes que la rai- son nous dicte. TIT. Il suit des thèses qu’on vient de lire, que devoir veut die être nécessité par respect pour La Loc. Nous n’estimons et ne respectons que le principe P E 3 #® Morale. qui dirige la volonté , mais jamais les effets qui suos cèdent à nos résolutions, ni en général les désirs mêmes les plus innocens auxquels les sens nous portent : ce sont les motifs indépendans de tout ce qui flatte lessens, c’est-à-dire, la loi qui nous arrache de lestime, et on agit par devoir ou on est morale- ment bon quand la volonté n’a pour objet que la loi, et pour motif qu’un saint respect pour elle. On me dira que je rapporte à un sentiment con- fus , tel que le respect ou Pestime, ce qui devroit être expliqué par des notions ciaires et précises. Le respect est à la vérité un sentiment; mais sa source u’a rien de commun avec les autres sentimens, qui tiennent tous ou à l’affection ou à la crainte. Ceux-là nous sont inspirés par des objets hors de nous: le res- pect est provoqué par la raison. Aussitôt que je suis convaincu que telle est la loi que je dois suivre, je ne peux plus m'empê'her de la respecter, ou, ce qui revient au même, il faut que je m’y soumette, quoi qu’il m'en coûte, sans autre motif. Le respect ne donne pas la loi, mais il est l’effet de la loi. Res: pecter une personne veut dire respecter la loi dont elle nous met la pratique sous les yeux, par exempie, celle d’être probe, juste, etc. Nous respectons les gens à talens, parce que nous respectons la loi qui ordonne de cultiver les facultés intellectuelles. Mais quelle est donc cette loi qui ne promet rien, et dont l’idée seule doit tenir lieu de tout autre motif à quiconque prétend au titre d'un être moralement bon ? Nous avons combattu l'erreur si funeste aux mœurs, qui juge la bonté des actions d’après les Philosophie de Kant. 7t suites : il ne peut donc y avoir d’autre principe régula- teur de la volonté, que celui de se conformer à la loi, c’est-à-dire, cl faut que La maxime qui me fait agir soit telle, que je puisse désirer qu’elle devienne une loi générale 3). C’est ce principe qui est la base de tous nos de- voirs, et c’est par lui que le simple bon sens sait fort bien se rendie compte de la moralité des ac- tions. Supposons que quelqu'un se demande sil est permis, pour se tirer d’un cas fâcheux , de dcnner une promesse qu’on n’a nulle intention de tenir ; il commencera par mettre en balance le profit et le désavantage qui pourroient résulter du mensonge, et peut-être trouvera-t-il qu’il est, à tout prendre, plus prudent de ne pas s’écarter de la vérité. Mais qu'importe l’intérêt et tous les calculs qui sont en sa faveur ! On veut savoir si c’est un devoir d’être véridique ou non, etil sera aisé de répondre quand on se présentera le problème par la formule : Pour- rois-je consentir que la maxime de faire de fausses promesses, aussitôt qu’on y trouveroit son compte, eût la force d’une loi générale ? Uae loi pareille se détruiroit elle-même ; eile-répugneroit à la r21- son ; personne ne voudroit plus entendre parler de (3) La règle, qui détermine ma volonté individuelle s’an- pelle maxime : le principe qui commande à tous les êtres raisonnables , et qui seroit suivi de tous s’ils sayvoient mieux résister à l'impulsion des sens , c’est la loi, E 4 m2 Morale. foi et-de promesse ; car on ne pourroit plus attacher le mème sens à ces mots. Le principe propre à distinguer ce qui est bon ou mauvais, auquel nos recherches nous ont conduits, sert de bous:ole aux gens les moins instruits, comme au premier des philosophes. Tout homme le porte dans son sein : on ne l’enseigne pas, et il ne s’agit que d’y fixer l’attention à la manière de Socrate. Ne vaudioit-il donc pas mieux s'abstenir en ma- tièôre de morale, de toute spéculation philosophique ? Faut il du raisonnement quand le cœur parle un langage si cleir et si simple ? Reudons à lisnocence les hommages qui lui sont dus, mais n'oublions pas coinbien elle est fragile et difficile à conserver. — Les besoins et les désirs sen- suels s'opposent dans chaque homme aux ordres que la raison prescrit comme devoirs, et äont elle com- mande l’exécution pure et simple, La sévérité de ces lois nous effraye ; nous subtilisons sur leur validité, et nous voudrions les rendre plus conformes à nos penchans et à nos goûis. On court risque de voir anéantis dans le combat qui ne cesse de se renouveler entre les devoirs et les sens , tous les vrais principes de morale. Rien n’est donc plus pressant que de leur tracer des li- mites aux uns et aux autres : .le sens commun n’y sauroit suffire ; ce travail est du ressort du philo- sophe ; c’est à lui qu’il faudra s'adresser. Philosophie de Kant. 73 Conjectures sur Le développement progressif des premiers hommes (4). La nature de l’homme, telle que nous la con- noissons et qu’elle a été probablement de tous les temps : — Voilà les données d’après lesquelles M. Kant a travaillé le Traité qu’on va lire. L'auteur s’est laissé aller au gré de l’imagination en consul- tant le raisonnement et l’expérience , sans cependant perdre de vue la carte tracée au deuxième jusqu’au sixième chapitre de la Genèse. Le lecteur voudra bien relire ces passages, et voir par lui-même jus- qu’à quel point les faits racontés par l’historien s’ac- cordent avec les idées qui sofirent au philo- sophe. | Commençons, pour ne pas nous perdre dans des spéculations inutiles, à l’époque où l’homme existe déjà. Ayant été privé des soins maternels, je sup- pose qu’il avoit Le corps formé en entrant dans le monde, qu’il y eût homme et femme, afin que l’espace se puisse propager, et qu’il n’y eût qu’une seule parre , afin que la guerre ne s’enflammât pas tout de suite entre des hommes rapprochés les uns des autres sans se connoître, ou qu’on n’accuse pas la nature d’avoir semé elle-même le germe de di- vision entre les hommes, en les faisant descendre de différentes races, Cette paire, je l’établis dans un endroit où elle n’a rien à craindre des bêtes fé- (4) Ce morceau est tiré du troisième tome des Œuvres mêlées de M. Kant. 74 Morale. roces, et où la nature lui offre avec profusion tous les moyens de subsistance ; cet endroit ressemble donc à un jardin situé dans un climat doux et serein pendant toute l’année. Je ne m’arrêterai pas à l’é- poque fort longue peut-être, durant laquelle le pre- mier Lomme ne connoissoit pas encore l’usage de ses forces. Je passe au moment où il se fenoct de- bout , où il savoit marcher , articuler ( Gen. Ch. IT, v. 20), même parler , c’est-à-dire, arti- culer d’après des idées liées entr’elles ( v. 23 ), donc réfléchir et penser. Il faut bien que le premier homme ait appris tout cela ; car s’il avoit su dès sa naissance, on hériteroit de cette adresse ; ce qui est contre l’expérience. — Passons maintenant au déve'oppement moral de l’homme. Le novice n’avoit d’abord d’autre guide que l’in- tnct, cette voix divine qui lui conseilla de goû- ter de certains alimens, et qui lui d‘fendit de toucher à d’autres (IIL, 2,3 }. On n’a pas besoin de sup- poser qu’il étoit doué d’un instinct particulier qui nous manque : il peut avoir été dirigé par l’odorat, par le goût et par la correspondance reconnue de ses sens avec l’estomac, donc par un certain pré- sentiment de ce qui est propre à être mangé ou non; que l’on remarque encore dans nous ; peut-être même Vinstinct de nos premiers parens r’avoit - il ni plus de force ni plus de finesse que le nôtre ; car il est connu que des hommes qui ne s'occupent que de leurs sens, ont les organes plus perfectionnés que ceux qui donnent une partie de leur temps à la pensée. Philosophie de Kant. 75 Le bonheur de l’homme ne fut point troublé tant qu’il n’écoutoit que la voix de la nature : mais bientôt la raison se fit entendre ; de nouveaux objets dont la vue de l’homme fut frappée lui promet- toient de nouvelles jouissances, et il n’abandonna plus le choix de ses alimens à l’instinct seul ( IL , 6). Cette tentative auroit pu tourner en bien si l’homme avoit rencontré par hasard un objet conforme à l’ap- pétit sensuel, Mais tel est le pouvoir de l’imagina- tion et de la raison , qu’elles font naître en nous des désirs qui ne sont point commandés par le physique , et qu’elles nous portent de la convoitise à une foule de besoins importuns et contraires à la nature. Il suffisoit d’un sujet très-léger pour soustraire l’homme à l'empire de l’instinctz mais la suite d’un tel essai étoit de la dernière importance, et elle décidoit pour le reste de sa vie. Peut-être ne vouloit-il que savou- rer le goût d’un fruit dont l’aspect le tenta, et dont il vit manger quelqu’animal auquel il ne répugnoit pas come à lui. La nature luttoit donc contre les chicanes de la raison ( HE, r ), et l’homme essaya pour la première fois de faire un choix libre, qui vraisemblablement n’avoit pas les suites qu’il en es- péreit. Queique petit qu’ait été le mal qui en résul- toit, cet acte lança un trait de lumière dans Pesprit de Phomme : il vit qu’il étoit le maître de choisir son genre de vie lui-même, et qu’il n’étoit pas confiné dans des limites aussi étroites que le reste des animaux. Le plaisir de sentir cette supériorité devoit être accompagné de quelque angoise et em+ barras. Quel parti tirera-t-il de la faculté qu’il vient 76 Morale. de découvrir, lui qui ne connoissoit ni les qualités occultes, ni les eflets éloignés d’aucune chose ? Il étoit pour ainsi dire au bord d’un précipice ; car dès-lors ses désirs pouvoient se porter sur une in- finité d'objets, et il n’étoit plus dans son pouvoir de changer l’état de liberté contre l’esclavage de lins- tinct. La nature a eu soin de la vie de l'individu en le douant de Pinstinct du manger : elle conserve l’es- pèce par Le goût pour le sexe. Celui-ci ne tarda - pas d’être influencé par la raison. La volupté ne donne aux brutes que des jouissances passagères et périodiques.L’homme s’apercut qu’il en pouvoit pro- longer la durée, et augmenter la force au moyen de son imagination 3 mais il falloit pour cet effet cacher l’objet des désirs aux sens , pour éviter le dégoût qui accompagne l’assouvissement d’un ap- pétit purement animal, La feuille du figuier ( v.7) prouve donc un effort de la raison dont elle n’au- roit pas été capable dans la première période de son développement ; car il faut bien que cette faculté ait acquis quelqu’empire sur les désirs sensuels, quand on én voile les objets dans le dessein de donner à un penchant plus d’intimité et de durée. C’est le grand art de savoir refuser qui apprit à nos pre- miers parens à se créer des sensations idéales : l’ins- ünct animal se changea en amour ; l’ivresse des sens fut remplacée par l'intérêt aux beautés , d’a- bord de la forme humaine, ensuite de la nature en- tière. On ne sauroit remplir les devoirs envers la société , avapt que d’avoir payé un tribut à la dé- Philosophie de Kant. 77 cence et à la pudeur ; c’est dans ces sentimens que Phomme puise la première lecon de morale. Ne négligeons pas ces foibles commencemens : ils font époque, en ce qu’ils donnèrent à l’esprit une direc- tion tout à fait nouvelle. La raison ayant fait connoître son pouvoir sur les besoins les plus pressans, fit un troisième pas en fixant l’attention de l’homme à l'avenir : rien n’annonce mieux la supériorité de notre espèce, que cette faculté par laquelle nous étendons nos jouis- sances au - delà du présent , et par laquelle nous voyons de loin le but auquel notre destinée nous appelle. L’incertitude de l’avenir nous cause ce- pendant une infinité d’inquiétudes que les aniinaux ne connoissent point (v. 13-19 ). Le mari chargé de son entretien, de celui de sa femme et de ses enfans, prévit combien son travail deviendroit tou jours plus onéreux : la femme commenca à sentir la tâche pénible que la nature avoit imposée à son sexe , et elle devoit craindre le joug de l’homme su« périeur en force ; mais ce qui attristoit l’un et l’autre plus que le reste, c’est l’idée de la mort qui les attendoit après une vie pleine de misère, et qui frappe les autres animaux sans les tourmenter d’a- vance. Îls croyoient commettre un crime en se ser- vant de leur raison ; car c’est elle qui leur suscita tous ces maux. Il n’y eut, pour les consoler, que l’idée de vivre dans une postérité mieux partagée, et occupée à se soulager réciproquement, comme il convient à des membres d’une même famille ( v. 16-20 ). 78 | Morale. La raison ff un dernier élan : l’homme com: meuça à se douter que /a nature rapportoit toub à lui, ét qu'aucun autre animal ne pouvoit lui disputer celte préférence, En dépouillant la pre- mière fois le mouton de sa peau, et en lui disant: Elle est pour moi et non pas pour toi (vw 21); il devoit bien peuser que les animaux ne sauroient pas prétendre aux mêmes droits que lui, et qu’il est dans son pouvoir d’en faire l’usage que bou lui semble. Cette idée conduisit à une autre qui lui est opposée , c’est-à-dire, qu’il n’en est pas de même de nos semblables, et que nous sommes obli« gés de les regarder comme participant également aux dons de la nature. C’étoit tracer au libre ar- bitre la limite qu’il ne doit pas outre-passer en trai- tant d'homme à homme , et c’est ce principe qui est infiniment plus propre à resserrer les liens sociaux que les sentimens de l’attachement et de l’amour, Quel que soit le rang des êtres raisonnables, l’homme les envisagea dès-lors comme ses égaux (III , 22), en ce qu'aucun d’eux ne doit servir rien que d’instrument aux autres, et qu’ils ont tous le même droit de marcher vers le but que la rai- son leur indique. Nos premiers parens n’étoient plus les enfans de Îa nature aussitôt qu’ils con nurent leur dignité ; mais ce changement, tout honorable qu’il est, ne laissa pas d’avoir son dan- ger : VOUS les voyez en eflet sortir d’un état d’aisance et de sécurité; ils sont chassés d’un jardin (v. 23) qui pourvoyoit à tous leurs besoins ;°ils sont jetés dans un monde où tant de troubles et tant de . Philosophie de Kant. 79 maux les attendent de tous les côtes. Combien de fois les tourmens et les chagrins qui accompagnent la vie , leur feront-ils regretter le paradis que leur imagination se plaît à créer ! Conbin de fois le souvenir de ce temps leur sera-t-il cher, où ils s’abandonnoient au loisir et à de douces rêveries ! Mais la raison ne cesse de provoquer l’homme à cultiver ses facultés; elle se place entre lui et ce séjour de délices , et elle ne lui permet pas de re- tourner à. la rudesse et à la simplicité dont il vient d’être tiré (v. 24). Il faut bicn qu’il apprenne à se soumettre patiemment au travail qu’il n’aime pas, qu’il coure après le clinquant qu’il méprise, et qu’il oublie la mort, lPcbjet de ses frayeurs, tout en s’attachant à des riens qu’il estime encore plus que la vie. Observation. En voit, par le récit que nous venons de faire , que le premier homme, en sortant du paradis où il est supposé avoir été placé, a échappé à la lisière de l’instinct pour se soumettre à la direc- tion de la raison ; qu’il a renoncé à la tutelle de la pature pour être libre. Quand on pense que notre espèce doit iendre à la perfection ; quelque vi- cieux que puissent être les longs eflorts qu’on fe- roit pour y parvenir, on se dispensera de demander si l’homme a gagné à un tel chaugement ou non. — Cette marche , qui, par rapport à l’espèce, est un progrès du pire au mieux , ne l’est cependant pas par rapport à l'individu : il n’y eut ni loi mi 80. Morale. défense ni transgression, tant que la raison ne se fit pas entendre. À peine lève-t-elle sa foible voix pour comprimer la fougue des passions, que nous voyons arriver des maux et commettre des vices étrangers à l’état d’ignorance et d’innocence : le premier pas en sortant de cet état devoit conduire, quant. au moral , à une chute ; quant au physique 7 à une foule de calamités et à la punition. La na- ture commence donc par nous combler de bien- faits, car elle est l’ouvrage du Tout-Puissant : la liberté commence par nous entraîner dans le mal, et c’est là ouvrage de Phomumne ; l’individu perdoit à ce changement, l’espèce y gagnoit. Les assertions de Jean-Jaques seroient-elles donc sans fondemens et si contradictoires, comme tant de gens le pré- tendent ? En se cultivant , l'individu doit faire le sacrifice d’une infinité de jouissances auxquelles sa nature le porte : la culture du genre humain est donc en opposition directe avec le développement de nos dispositions physiques. Voilà ce que Rous= seau prouva très-clairement dans son discours sur Vinfluence des sciences, etc, et dans celui sur l'inégalité entre les bommes. Mais comment tra- vaillera-t-on au perfectionnement des facultés mo- rales, sans faire tort aux droits que le physique réclame ? C’est là le problême du Contrat social et de lEmile. Il s’en faut en effet beaucoup que nous ratiquions les véritables principes d’après les- quels il faut former l’1omme et le citoyen en même temps, et jose dire que tous nos vices et nos maux réels proviennent de ce que nos eflorts , qui tendent . v-p . . Philosophie de Kant. 8r tendent à civiliser le genre humain , contrarient de tant de manières nos désirs naturels (5). Les ins- (5) Voici quelques exemples qui prouveront la vérité de ce que je viens d’avaucer. La nature a fixé l’époque de la puberté vers la dix-hui- tième année : c’est à cet âge qu’on est assez fort pour procréer ses semblables , et pourvoir à leur conservation et à cetle d’une femme ; car l'homme de la nature se contente de fort peu. Il n’en est pas de même dans l’étai social : à ; eine y peut-on former un établissement et des liaisons conjugales à l’âge de vingt-huit ans. Le citoyen est donc encore adoles- cent ou enfant tandis que l’homme est formé , et c’est ainsi que l'instinct et les mœurs se font 1our-à-lour le plus grand tort : nous n’avons pas les instincts, ni pour les combattre, ni pour les étouffer ; c’est pour pourvoir à la conservation de notre espèce, que la nature nous en a doué ; mais certes, l’état civilisé n’entroit pour rien dans cet arrangement. Le mot d’Hippocrate , ars longa , vita brevis, prouve en- core que les dispositions que nous avons reçues par rapport à notre nature animale , ne tendent pas au même but que celles qui nous distinguent comme êtres raisonnables. Un seul homme dont le génie ne vieilliroit pas, pendant quelques générations pourroit pousser les arts et les sciences à un degré de perfection infiniment plus haut qu’un grand nombre de savans qui se succèdent : ce n’est done pas l’avance- ment des sciences que la nature a eu en vue en déterminant la durée de notre vie. Le génie le plus distingué perd de sa vigueur à l’époque où l’habitude de réfléchir et l’expérience le devroient faire marcher aux découvertes les plus :mpor- tantes : chaque génération est obligée de recommencer par l’a, b, ec, et de traverser une route déjà parcourue. Aussi l'espèce humaine parcît-elle être continuellement en danger de retomber dans l’ancienne barbarie , et rien n’est plus vrai que la réflexion du philosophe grec :« Combien n’est-il pas triste Tome 111. F 82 Morale. tincts qui séduisent au vice sont très-salutaires dans leur origine ; ils devoient éclore dans l’état de la nature , mais nous les gênons par la civilisation ; faut-il s'étonner qu’elle en souffre à son tour? Il n'y à, pour nous tirer de cette situation critique ; que des gouvernemens et des constitutions parfaites ; il faut que l’art, porté au plus haut degré , rem= place la naturs dans l’homme. Le long intervalle qui nous sépare de cette époque n’offrira qu’une suite.de vices, de crimes el de calamités. in de l’histoire des premiers hommes. L'homme passa, au commencement de la période qui va suivre; de l’aisance et de la paix, à une vie pénible et agitée par la discorde : il quitte peu à peu le métier de ehasseur , et il ne cherche plus au hasard des raciues et des fruits ; il s’entoure d’ani- maux apprivoisés Et il force le sol par le travail de ses mains, de produire une nourriture plus va- riée et plus abondante (IV, 2 ). C'est alors que des disputes s'élèvent entre les habitans paisibles : ceux qui mont pas le même genre de vie se séparent et se répandent sur toute la terre. La vie du ber= de voir avancer l'heure du trépas au moment où ona appris comment il faut vivre!» L’inégalité des droits, dont Rousseau se plaint avec raison, et qui paroît inséparable de l’état civilisé, n’est encore rien moins que conforme aux intentions de la nature : elle nous a tous créés libres, et elle nous a inspiré des lois propres à diri- ger notre conduite. Le Philosophie de Kant 83 ger est commode et exempte de soucis, parce qu’un pays vaste et peu cultivé ne doit pas manquer de pâ- turages. L’agriculteur a beaucoup plus de peine : lé succès de ses ouvrages dépend des saisons ; il Jui faut une demeure fixe, des propriétés et du pouvoir pour les défendre ; mais c’est précisément ce qui fâche le berger , on: le bétail ne peut plus errer si nent que dans le temps où tous les fonds étoient communs. Le berger paroissant plus favo- risé du ciel, l’agriculteur envia son sort (v. 4): le voisinage des troupeaux qui dévastoient ses planta- tions lui étoit à charge; et dans limpossibilité de tirer quelque dédommagement des pâtres vagabonds, il usa de force et finit par s'éloigner ( v. 16 ). La troisième époque commence par cette séparation : les gens voués aux travaux de la campagne se réunissoient et formoient des hämeaux ( appelés im- proprement des villes ) , pour défendre leurs pos- sessions contre les hordes de chasseurs et de pâtres: Chacun doit avoir choisi son genre d’occupation ( v.20 ), parce qu’on n’auroit pas pu changer sans cela les premiers besoins de la vie, Gette activité donaa naissance aux arts agréables et utiles (v.2r, 22 ); mais ce qui est bien plus, c’est qu’on coms imença à fonder un gouvernement civil, et à établir des autorités pour juger les différents ( v:23, 34). — Quelque imparfaites qu’eussent été ces premières institutions , le développement de toutes Les facultés devoit se faire d’un pas plus rapide , dès que l’homme étoit devenu plus social , et dès qu’il _ÿ eut des garans de la sureté, L’inégalité , la sources F 2 84 Morale. de tant de maux et de tant de biens fit déjà sentir son influence à cette époque. Les peuples nomades, ne reconnoissant d’autre maître que Dieu, haïssoient les habitans des ha- meaux et les agriculteurs réunis sous des chefs (VI, 4), et attachés à leurs propriétés ; aussi les guerres ne discontinuèrent-elles pas , du moins fal- loit-il être toujours prêt à se battre : c’étoit un mal, mais ce mal assuroit la liberté dans l’intérieur. (Les dangers de la guerre sont encore dans notre siècle le plus puissant frein pour contenir le despo- tisme ; car la force des états consiste dans les ri- chesses, et il n’y a d’autre moyen pour les acqué- rir, que de ne pas gêner l’industrie des citoyens. Le patriotisme tient lieu des richesses dans des pays pauvres ; mais il n’y a que les peuples libres qui soient pénétrés de cette vertu). Les nomades, cap- tivés par le luxe des villageois, et sur-tout par les charmes de leurs filles , moins mal-propres que celles qui vivoient dans les déserts (v.2), se rappro- chèrent peu à peu des habitans des hameaux. La trêve qui succéda à la réunion des races ennemies depuis si long-temps, fut le tombeau de la liberté: on vit bientôt des esclaves abrutis ramper de- vant des despotes puissans ; le genre humain, ap- pelé à régner sur le globe , se plongea dans toutes les débauches d’un siècle barbare, et il s’étoit rendu indigne de sa haute destinée ( v. 17 ). Réflexions. En se retraçant tous les maux qui s’appesan- Philosophie de Kant. 85 üssent sur le genre humain, et dont on ne prévoit pas le terme , on a peine à se défendre d’un sen- timent douloureux qui nous rend défians contre la providence directrice du monde. I] importe ce- pendant de ne pas se laisser décourager , et de ne point attribuer au destin le mal dont nous sommes peut - être les auteurs nous-mêmes, et auquel nous Pouvons remédier par nos propres forces. Il faut convenir que les plus grandes calamités qui désolent les états policés viennent des guerres, moins de celles qu’on fait ou qu’on a terminées, que de celles qu’on va entreprendre : ces prépara- tifs absorbent toutes les ressources de l'état, qui devroient être consacrées au bien de la Société : on porte atteinte à la liberté personnelle > On grève les individus de charges onéreuses , et c’est par la crainte du danger du dehors que l’on justifie cette rigueur, Mais serions-nous civilisés comme nous le sommes ; y auroit-il autant de prospérité répandue parmi toutes les classes de Ja société 3; nos états seroient-ils aussi peuplés ; jouirions-nous de ce reste de liberté , si la guerre toujours menacçante n’obli- geoit pas les chefs des états de respecter l’huma- nité? Qu’on tourne ses regards sur la Chine, qui, Par sa position, n’a que des incursions à craindre : mais point d’ennemis dangereux > et où il n’y a plus d'ombre de liberté. — La guerre est donc indispene sable pour avancer le perfectionnement du genre bumaiu , et Dieu sait quand une fois une paix perpé.- tuelle tournera à notre bonheur réel. C’est nous- mêmes qu’il faut accuser des maux dont nous nous F 3 66 : | Morale. plaïgnons tant, et l’histoire sacrée a raison de re- garder la réunion des peuples en une société exempte de tous les dangers extérieurs au moment où ils sor- ioient à peine de la barbarie, comme la source de leur perte et de leur détérioration. Un sujet de mécontentement non moins grave parmi les hommes, c'est la briéveté de La vie : sans doute ils ne pensent pas ceux qui désirent d’en voir prolonger la durée, ni aux tourmens dont elle est accompagnée 5 ni aux injustices qui se commettent pour se procurer des jouissances si courtes. Ne seroit- ce pas bien pis, si les hommes pouvoient s’attendre à vivre huit cents ans ou davantage ? Les crimes d’une race se perpétuant pendant si long-temps , se- roient portés à leur comble; il faudroit une inon= dation générale pour purger le globe de tant de mons« tes (v. 12, 19.) Un objet auquel nos désirs nous portent enfin sans cesse, c’est l’âge d’or tant vanté par les poëtes, par les Robinson et par les voyageurs dans les îles de la mer du Sud ; cette époque où il n’y a plus de besoins lactices, où tous les hommes sont égaux, et où ils vivent tous dans l’oisivité et dans l’har- monie la plus parfaite. Ce désir prouve du moins qu’on se dégoûte de la vie civilisée tant qu’on ne l’apprécie que d’après les jouissances qu’elle donne ; mais à quoi sert-il de se bercer de vaines illusions ? Non, nous ne reviendrons jamais à la simplicité ni à l’innocence primitive : cet état ne sauroit au- gunement satisfaire à limpétuosité de nos penchans, et nous ne serions Jamais capables de faire tous les nl H À 4 à | Grammatre. 87 sacrifices nécessaires pour y pouvoir retourner. Nous souffrons moins des maux physiques dès que nous diminuons le mal moral : n’accusons pas la providence des peines dont nous sommes les auteurs nous-mêmes , et contribuons , chacun sui- vant ses forces, à l’avancement et aux progrès du genre humain : tel est le résultat qui soffre au philosophe en se transportant vers les premières périodes de l’histoire de l’homme. , GRAMMAIRE. Celui qui ne connoît pas la valeur des mots est ingapable de juger des choses. GALLIEN. Noure4v Dictionnaireportatif delalanguefran- çaise, composé sur La dernière édition de l Abré- géde Richelet, par Wailly,entièrement refon- due d’après Le Dictionnaire de l’Académie , celui de Trévoux et Le Dictionnaire Critique de La langue française , par Féraud ; Le Dic- tionnaire de grammaire et de littérature dans LEncyclopédie Méthodique, etc.ony a joint, 0. un extrait des synonymes français par Girard , Beauxée, Roubaud , etc. 2°. une Méthode de prononciation aussi facile que sûre , appliquée à tous les mots de la langue ; 30, Les mots nouveaux et les autres chan- gemens introduits dans la langue par La révo- lution française ; 4°. un Focabdlaire géa- F 4 68 Grammaire: | graphique , augmenté des noms latins de cha- que lieu ; par C. M. Garrez , professeur de grammaire générale à l'école centrale du département te l’Isère. À Lyon, chez Bruyset aîne et compagnie , imprimeurs- libraires, et à Paris, chez L. H. Périsse , libraire, rue de la Barilleris , n°. 4, près le Pont Saint - Michel, 2 vol. in-8.°, chacun de 800 p. ; prix, 15 francs. Ly a cinquante ans que Voltaire disoit dans son styie badin, mais toujours instructif et vrai, que la langue française avoit réussi, comme nos cuisiniers, en flattant le goût le plus général. Depuis , en 1784, M. de Kivarol a coufñirmé et développé cette même vérité dans un examen raisonné , philosophique et approfondi de la langue française. Dans cet exa- men suivi de sa marche, de ses progrès, de sa per- fection , il rappelle cette multitude de chefs-d’œuvres qui, dans tous les genres, lui ont acquis une va- riété infinie d’avantages, une souplesse, une pompe, une harmonie , une mollesse, une concision même, düand le sujet le requiert, etc. (1); qu’on cherches roit vainement dans beaucoup d’autres idiomes mo- dernes, et même dans plusieurs langues - mères, Il lui reconnoît un aufre avantage qui n’est pas le moindre ; l’ordre et la clarté dans sa construction, la plus propre et la plus convenable aux discus- (1) Entre plusieurs exemples d’une extrême concision dans notre langue , on peut citer l'éloquent Diseours sur l’his. toire universelle par Bossuet. Peut-on dire plus de choses en moivs de [A et d’une manière plus sublime ? + Sur la langue française. 89 sions littéraires et scientifiques, aux affaires et aux né- gociations politiques. M. de Rivarol prouve que tout à la fois ont concouru à cet ascendant flatteur pour la nation , nos livres, nos découvertes et inventions, notre théâtre, nos mœurs, nos modes mêmes : il a recherché et montré, pour me servir de ses propres expressions, « comment tant de causes diverses ont » pu se combiner et s’unir pour faire à celte langue » une fortune si prodigieuse. » Dans ce discours lu ‘et couronné par une académie étrangère , à plus de cent myriamètres ( 200 lieues) de noire capi- tale, M. de Rivarol, tour-à-tour grammairien, philosophe et orateur , par un nombre d’allusions fines, par une infinité de rapprochemens et de contrastes ingénieux , vrais et sensibles, démon- troit et prouvoit la prééminence et l’universalité reconnues par les étrangers mêmes de la langue française (2). « Le moment, ajoutoit - il, est venu » de dire Le nonde français , comme on disoit au- » trefois /e monde romain. » Mais alors, en 1784, l’auteur du discours entendoit dire seulement que les personnes aisées qui voyageoient pour leur plai- sir, que les gens de lettres, les savans, les gens de cour, les négociateurs politiques, ne pouvoient se dispenser de savoir cette langue universelle ; que l'étude de cette langue chez l'étranger , entroit né- cessairement dans une éducation soignée des classes (2) Cette pièce, à la fois philosophique et oratoire , a four titre : « De l’universalité de la langue française, discours qui a » remporté le prix de l’Académie de Berlin. Paris, Desenne, 2 1784, ia-89. de 92 pages. » 90 Grammaire. supérieures. Mais depuis la révolution française , cette étude, alors d'agrément pour cette classe ai- sée, est devenue de nécessité pour toutes , dans tous les pays, par l’étendue de la grande répu= blique, par le nombre des républiques filles de la république mère, par le nombre des autres na- tions ses alliées, par la multiplicité de ses nouvelles relations en tous genres, principalement commer- ciales et politiques, par-tout centuplées aujourd’hui. Il est constant que la révolution a occasioné un changement considérable par rapport à la propa- gation de la langue française ‘aujourd’hui beau- coup plus générale qu’à l’époque dont on vient de parler, aujourd’hui qu’elle est devenue nationale chez les peuples étrangers ; ce qui dernièrement faisoit dire à un savant dans le fond du Nord : « Bientôt « on ne verra plus sur la terre qu’une seule famille » parlant sa langue- mère , maintenant que son » universalité semble être décidée autant qu’est as- » surée par-tout l’influence de la république fran- » çaise (3). » La révolution a de plus opéré dans cette langue même, une autre révolution bien sensible et bien remarquable. Cet événement mémorable , qui a changé la face d’une grande nation , auquel nous devons des lois, des mœurs, des habitudes nou- velles, a introduit dans le langage une multitude d’expressions jusqu’alors inconnues , et donné à plusieurs autres des significations entièrement diffé» (3) Le professeur Olivarius, dans son Journal du Nord lit, téraire ; N°. I. Paris, Fuchs , in-12. ” Surla langue francaise. 91 rentes de celles qu’elles avoient auparavant. Noire langue, au sein des convulsions politiques qui nous ont agités, a pris un essort rapide qu’il importoit de diriger : ses ressources ont paru se multiplier et son abondance s’accroître; mais en même temps on a vu sa pureté s’altérer. Un néologisme affecté s’est emparé trop souvent de la tribune, des écrits ; du théâtre, de la conversation même ; néologisme dont les surfaces séduisantes ont pu plaire quelque- fois, mais qui, bien examiné et pesé au poids de la raison , n’offroit qu’un sens louche, faux et tou- jours très-ridicule, | Ces circonstances extraordinaires, à la fois réu- nies , sembloient exiger pour la France , et plus en- core pour les étrangers, un nouveau dictionnaire de la langue francaise, qui conservât dans toute sa pureté cette langue des Racine ; des Boileau, des Massillon, des d’Olivet ; qui arrêtât ou épurût la rapidité et la multitude de ces innovations dange= reuses qui sembloient nous devoir faire regretter Pexistence de ce corps antique et célèbre, de ce tribunal suprême et littéraire de la langue , chargé par sa constilution de veiller à sa conservation. Cette tâche devenue nécessaire, étoit difficile : elle exi- geoit une conuoissance approfondie de notre langue, une critique éclairée, une sévérité courageuse, un goût sûr, une finesse de tact et un sentiment ex- quis, qui sussent admettre ou repousser ce qu'il y avoit de bon ou de répréhensible dans ce débor- dement d’innovations. Le citoyen Gattel , profes- seur de grammaire générale au département de 92 Grammaire. l'Isère, avantageusement connu par un autre ou- vrage de glossographie (4), a senti la nécessité et l'importance de l’entreprise 3 mais tout en recon- noissant son utilité, il ne s’est point dissimulé les difficultés attachées à ce travail : elles ne l’ont point rebuté ; il s’y est livré avec ardeur, avec courage, et on peut le dire, avec beaucoup de succès. Le professeur national avoit pris pour première base de son travail, la dernière édition publiée en 1790, du Dictionnaire portatif de la langue française , extrait du grand Dictionnaire de Richelet , par Wailly. On sait que cet Abrégé de Richelet avoit obtenu un succès marqué, mé- rité à bien des égards. Le nouvel éditeur ne s’étoit proposé d’abord que de le revoir avec beaucoup de soin ; mais après un examen approfondi, ilsentit bientôt qu’il n’y régnoit pas l'esprit de méthode et de clarté , la correction, la justesse et la préci- sion qu’on avoit droit d’attendre d’un grammai- rien aussi célèbre ; qu’on avoit à lui reprocher un nombre de définitions vagues, incomplètes, quel- quefois même inexactes ou fausses, comme le nou- veau rédacteur en cite des exemples remarquables dans son avertwssement et dans le corps de l’ou- (4) Le nouveau Dictionnaire espagnol et français , avec linterprélation latine de chaque mot , d’après le Diction- naire de l’Académie royale espagnole et celui de l’Académie francaise , enrichi de plus de dix mille mots qui ne se trouvent point dans les dictionnaires de Sobrino et de Séjour- nant. Lyon , les frères Périsse ; ( Paris, Fuchs ) , 1790, 4 vol. in-8°, Sur la langue française. 03 vrage. On avoit encore à reprocher au premier abré. viateur de Richelet, ses acceptions de mots pres- que toujours confondues ; une multitude de verbes où les significations actives et neutres sont de même indistinctement mêlées ; et d’ailleurs, un très-crand nombre d’autres fautes plus ou moins considérables qui s’étoient glissées dans ce dictionnaire, estimé cependant, et d’autant plus dangereuses, qu’elles sembloient autorisées par un homme qui s’étoit fait un nom parmi nos premiers grammairiens. D’après cet exposé , on ne sera pas étonné que le citoyen Gattel , qui d’abord n’avoit voulu que donner à l’Abrégé de P'ailly un nouveau degré d’in- térêt et de perfection , ait fini par en composer un tout différent , et à beaucoup d’égards entièrement neuf. Lenouveau rédacteur avoit encore senti qu’un grand nombre d’imperfections inévitablement atta- chées à ce genre fastidieux d’un travail longet fati- guant, quiexige beaucoup d’attention, de continuité , de courage et bien des connoissances , déparent sou- vent les dictionnaires, même les meilleurs et les plus accrédités , et outre ces fautes bien pardon- pables que les changemens successifs qui s’intro- duisent nécessairement dans les langues vivantes y font presque toujours désirer des améliorations im- portantes. Pour obvier à ces différens inconvéniens , et non- seulement faire disparoître jusqu'aux moindres im- perfections, mais pour donner encore à son nou- veau dictionnaire toute la perfection et l’intérêt dont il pouvoit être susceptible , pour en accroître les * 94 Grammairé: richesses et en augmenter Putilité, pendant tout Îe cours de son travail , le ciroyen Gattel a conti- nuellement eu fous les yeux le Dictionnaire dé l’Académie , ceux de Trévoux , de Richelet , dé Furetière , pour, d’après ce rapprochement et une comparaison réfléchie, donier des exemples choiï< sis, établir des règles sûres, et tirer des résultats conséquens et les plus instructifs : sur + tout il a tà- ché de fondre dans son nouvel Æbrégé ce qu'il y a de plus substantiel et de plus utile dans le Dic- tionnaire critique de La langue française paf Ferraud ; ouvrage excellent, mais que son vo- lume met hors de la portée du plus grand nombre des lecteurs. Le Dictionnaire de grammaire et de littérature , qui fait partie de Encyclopédie méthodique , ne lui à pas offert moins de ses ‘ cours. Le citoyen Gattel mérite des éloges pour l'esprit de méthode qui règne dans son ouvrage d’un bout à l’autre, et pour être entré jusque clans les plus petits détails qu'on ne trouve pas toujours chez les autres lexicographes les plus accrédités. Corrections, améliorations , augmentations ; rièn ne paroit y avoir été négligé : «la nature des verbes, les chan- » gemens qu’elle éprouve suivant les circonstances, » y sont spécifiés exactement ; l'indication des dif- » férens genres de style auxquels sont appropriées » telle ou telle expression y est beaucoup plus dé- » taillée qu’aileurs. Lorsque la position d’uue épi- » thète qui précède ou qui suit le mot auquel elle » est associée peut en changer le sens, on a soin ve ’ VA Pre ue C9 AS, RP De + : CARE Paz { Sur La langue française. 95 » d’en avertir. Il en est de même des irrégularités » des conjugaisons des verbes seulement usités dans » quelques-uns de leurs temps , à certaines person- » pes, au singulier ou au pluriel; des expressions » vicillies, de celles qui commencent à devenir su- » rannées , de celles que usage a cherché à intro- » duire, de celles employées par des auteurs mo » dernes connus et qu’on cite ; enfin, des idiotis= » mes de l’intérieur de La France, des Locutions » viCICUSES usitées dans telle ou telle partie de » son territoire, ou familières aux étrangers » qui nous avoisinent., » Prémunir contre l’abus de leur emploi, c’est à la fois, et propager la pureté de la langue , et servir l’intérêt de ceux que l’ha- bitude de les entendre , dès leur plus bas âge, pour- roit entraîner. Wailly, dans son Æbrégé de Richelet , avoit in- séré un petit nombre de synonymes extraits de ceux de Girard : cette idée qui a paru au nouveau ré- dacteur être utile, il l’a suivie et étendue ; il ne s’est pas borné aux synonyines de Girard , il a mis à contribution Bauzée , Roubaud , d’Alembert , VPEncyclopédie ; il a puisé encore dans d’autres sources, et ilne s’est pas contenté d’indiquer les différences qui distinguent les synonimes ; il s’est aussi appliqué à faire connoître les oppositions qui se trouvent entre certaines expressions, etc. toujours en se renfermant dans les bornes que prescrivoit à cet ouvrage son titre d’Abrégé , et l’usage auquel il est destiné. L’Abrégé de Richelet étoit déjà beaucoup plus 96 Grammaire. riche que celui de l’Académie : le nouveau rédacteur l’a augmenté considérablement d’acceptions omises, d'exemples utiles, de locutions qui, marquant le génie particulier de la langue , demandoient en fa- veur des étrangers une explication nécessaire en ré- marques qui indiquassent à la fois les expressions que lPusage admet, et celles qu’il rejette, malgré les nuances légères qui semblent les rapprocher; enfin, un nombre de mots omis dans lÆbrégé de Richelet, et dont chacun eût pu lui seul former un article. Dans ces nouvelles augmentations on pourroit faire monter à près de quatre mille les mots choisis parmi les termes d’arts et de sciences les plus essentiels ; ceux relatifs aux objets nombreux de l’histoire na- turelle , aujourd’hui plus cultivée que jamais ; ceux - de la marine encore si nécessaires dans les circons- tances actuelles, etc. les nouvelles dénominations des poids et mesures, de bois de chauffage , de char- pente, etc. de pesanteur, de capacité, de superlcie, de longueur ; des matières sèches ou liquides ; des mesures itinéraires ; la nouvelle nomenclature mo- nétaire , etc. etc. En un mot, le nouvel éditeur, qui mieux que personne, connoit son propre travail, croit pouvoir faire monter les nouvelles additions en différens genres de ce dictionnaire, à plus de dix mille. Un autre objet non moins essentiel a continuelle- ment fixé l’attention du nouveau rédacteur, tandis que dans la plupart des autrès langues l'écriture a Pavantage d’être le tableau de la parole, comme la parole devroit être l’écho de lécriture, ensorte qu’il y Sur La langue francaise. 97 y eût beaucoup de conformité ou de proportion entre Pune et l’autre : il est à remarquer que précisément les deux langues les plas cultivées, les deux plus répandues, sont celles-là mêmes qui, par Péloigne- ment et les contrarictés entre leur orthographe et leur prononciation, offrent le plus de difficultés à ceux qui désirent les apprendre (5). Il er résulte que le principal écueil de x tre langue pour les étrangers, soit pour la parler, soit pour sentir et goûter à la lecture la mélodie de nos meilleurs poëtes et ora- teurs, c’est la prononciation. Presque tous les lexico- graphes anglais ont multiplié à l’infini le* livres où Ja leur est notée : moins attentifs à cet égard, les nôtres avoient beaucoup trop négligé cet objet im- portani. Jusqu’ici on n’avoit irouvé dans nos diction- naires français, estimés les meilleurs, que peu ou de foibles secours pour en déterminer le bon usage, qui varie en mille manières d’une extrémité de ja France à l’autre. Ferrand, dans son excellent ou- vrage, avoit offert, d’après son progre travail et celui du célèbre d’Olivet, cette ressource précieuse aux étrangers et à ceux qui s'appliquent à bien parler notie laugue : en cherchant à peindre la pronon- ciation , il avoit indiqué en même temps la proso- die (6) avec assez de précision pour donner à sa (5) Duclos , Remarques sur la grammaire générale et rai- sonnée de P. R. (6) À propos de prosodie et de d’Oliret, un homme de lettres vient d’avoir une très-bonne idée pour les étudians et pour les étrangers , celle d’avoir réuni en un petit volume plusieurs ouvrages qui leur seront extrêémemeut utiles. On ne sauroit trop contribuer à le répandre et à le faire connoître 5. Tome III. G eë _ Crammatre. à méthode un très-grand avantage. L'auteur du nous veau dictionnaire , en s’appropriant ce travail , a cherché à le perfectionner : il a eu soin d’indiquer les changemens que la prononciation éprouve dans’ cer- taius mots, suivant leur emploi daus la conversation ordinaire ou dans la déclamation oratoire, dans la poésie ou dans la prose , et suivant les mots qui \ il a pour titre : « Recueil de règles et d'exemples sur la pro- >» sodie française , Ja versification et le style figuré ; conte- 2 nant le Traité de la prosodie par d’Olivet , un Abrégé des » règles de la versification par Restaut , l’Art poétique de » Boileau et un Abrésé des règles du style figuré , ex- » traites des ouvrages de Rollin, Gibert , le Batteux , du > Marsäis, ete. avec des remarques. Paris, Dessessaris, > an VI.» On auroit désiré que l’éditeur eût élagué ou corrigé dans de courtes notes quelques règles ou exemples que l'usage a changés, comme dans les mots suivans : les syllabes mar- U quées longues ou brèves > .qui ne le sont plus : creche, mi- Sable . escadre., masse , la derniére syllabe de léger que d’Olivet fait longue , parce qu’on la prononçoit alors comme fer. La licence autrefois admise en poésie avecque , n’a plus lieu aujourd’hui. Parmi les figures de mots on a confondu et placé la syllepse oratoire ; au lieu de la syllepse ou concep- tion ; syllepse grammalicalé , de construction et de mots. L’Abrégé du style figuré est bien court : l'éditeur autoit pu renvoyer le lecteur au Traité ( dans lequel il paroit avoir puisé , et il ne pouvoit mieux faire ) des « Principes‘du style , » ou Observations sur l’art d’écrire. Paris, les frères Etienne, » 1779, in-12. » Ouvrage excellent qu’on devroit bien réimprimer avec des additions désirées , qui en feroient un livre vraiment classique , et qui sera lu avec intérêt par les personnes mêmes qui se piquent d’écrire le mieux. L Sur la langue française. 99 précèdent ou qui suivent; et ce que ses prédécesseurs n’avoient fait qu’indiquer foib'ement , ou expliquer én plusieurs mots et par des phrases entières, le ci- toyen Gattel le peiit à l’œil de la manière la plus .Sûre, la plus courte et Ja plus facile à saisir (7). Par rapport aux mots nouveaux introduits dans la langue française par la révolution, pour l’inteiligence de notre histoire et pour célle des trois constitutions de 1791; de 1793, de 1795, etc. l’auteur du nou- veau dictionnaire a eu l’attention d’en faire un petit vocabulaire séparé, réjeté à la fin du dernier vo- lume , qui a avantage dé pouvoir être lu de suite par ceux qui voudront particulièrement s’instruire sur éet objet. Sans trop s’écarter de son plan, l’auteur est entré dans ce vocabulaire, à chaque article, dans quel- que détail pour mettre son lecteur à portée de juger à cet égard ce qu’est aujourd’hui la constitution fran- gaise , et les variatious qu’elle a progressivement éprouvées. Quant aux néologismes étrangers par eux: imêmes aux événemens mémorables que la révolu- _tion a fait naître dans la forme de notre gouverne- ment, où a fondu dans lé rorps même de |? ouvragé les modifications apportées par les circonstances à la signification des mots anciens. Pour les termes ayant (7) Tous ses lecteurs cependant ne seront peut-être pas d'accord par rapport à la prononciation de quelques mots ; - mais en petit nombre. À propos de prononciation oratoire ; poétique , chantänte j il remarque que le mot Æchéron qui se prononce par-tout dans la conversation , dans les lectures littéraires comme i} $ Écrit ; se prononce dans Le chant de l’opéra, Ackéron. G 2 100 Grammaire. un rapport plus direct à l’histoire révelutionnaire, et qui doivent leur exist nce à l’abu le plus perfde du langage; ceux de ces mots que l: rédacteur a cru nécessaire de rappeler ( mais en petit nombre) , il les accompagne d’une critique toujours sage, juste et éclairée. I; but de l’auteur, et qu’il me paroît avoir atteint, a été de réunir dans les bornes d’un recueil usuel et peu volumineux toutes les connoissances que l’usage régulier de la langue rend nécessaires à ceux qui aspirent à |: bien parler et à l’écrire avec pureté. Ce nouveau dictionnaire , en effet, renferme lui seul tout ce qu’on seroit obligé de chercher dans une foule d’autres ouvrages séparés , hors de la portée de bien des lecteurs par leur étendue, par le nombre de lenrs volumes, et dont aucun ne présente ni le même ensemble ni la mêine réunion de secours. C’est au plan sagement combiné de l’habile rédac- teur , que le public est redevable de cet avantage : c’est par son extrême précision, c’est en se tenant sévèrement en garde contre toute espèce de super- fluité, qu’il est parvenu à concentrer dans un petit espace tels détails qui, sans contenir rien de plus, quelquefois occupent plusieurs pages dans le Drction- naire de l’Académie , et qui, par la diffusion avec laquelle ils s’y trouvent semés, échappent plus faci- lement aux recherches qu’on y veut faire. En mul- tipliant les exemples , on ne les a point accumulés sans nécessité : toujours on a lâché de resserrer les définitions et de leur donner à la fois le mérite de la briéveté et de la plus grande précision. LS +7 . CC SE, — Sur la langue française. 101 Pour concourir avec l’auteur à seconder ses vues, et pour resserrer le plus de choses possibles dans les bornes les plus étroites, on a joint toutes les res- sources typographiques nécessaires à ce but. Pour * celaon a béaucoup agrindi les dimensions des pages de l’ancienne édition : les abréviations ont été mul- tipliées dans celle-ci, et l’on a substitué aux alinéa ( dont la fréquence grossit tant de dictionnaires sans les enrichir ), la séparation des différentes acceptions d’un mot par un petit filet (—), moyen simple et préférable à ces interruptions multipliées, dont la . Monotonie fatigue en,même temps qu’elle éloigne du but qu’on s’est proposé. Dans la nomenclature, par exemple , à la lettre H, cette lettre est précédée de deux guillemets par-tout où elle est aspirée, et par- là on a évité de ie Re bien des fois cette obser- vation. C’est donc à force de travail et par de tels artifices qu’on est parvenu à faire entrer en deux seuls volumes portatifs, mais en pelit texte, et cha- cun de 800 pages, ce qui, autrement et d’un gros caractère, auroit pu former aisément trois forts vo lames in 4°. La correction typographique, si essentielle à tout livre élémentaire, ‘i nécessaire surtout à un diction- naire de langue particulièrement destiné à des étran= gers, m'a paru très-soignée et extrémement exacte: dans seize cents pages à deux colonnes, je n’ai ren- contré que deux fautes peu cbnetdéables de lettres Pune pour l’autre. Quelques personnes prétendront peut-être qu’on ‘auroit dû supprimer dans ce dictionnaire un nombre G 3 ne : Grammaire. de mots atijourd’hui hors d'usage, de féodalité, de jurisprudence canonique ; les termes concernant les maisons religieuses, les universités et quelques autres de ce genre , consacrés à nos anciennes institutions ; aujourd’hui abolies ; mais par la raison même que ces mots , tombés en désuétude , s’oublient , il n’est pas inutile de les conserver pour ceux qui étudient notre langue, sur-lout pour les étrangers à qui cet ouvrage paroît particulièrement destiné , et à qui cette partie sera nécessaire pour l’intelligence de nos livres les plus répandus dans les bibliothèques étran- gères, de Mézerai, Daniel, Velly, Vertot, de l’abrégé du président Haïnault, de Voltaire , Raynal ; pour Pintelligence des antiquités de la France , des fa- meuses Provinciales , des traduetions de Fra-Paolo, de Gianone , etc. etc. Ce reproche, qui seroit injuste, m'en rappelle un autre qui ne paroît pas mieux fondé, avancé par un homme de lettres célèbre , et qui court aujourd’hui la même carrière en glosso- graphie.M.de Rivarol,dans une introduction savante ( peut - être trop métaphysique ) d’an Nouveau Dic- tonnaire de la langue française en trois volumes in-4°., lequel, d’après les talens reconnus de l’au+ teur, promet d’excellentes réformes, des vues pro- fondes, en un mot, unouvrage extrêmement curieux, neuf et utile; M. de Rivarol , dans ce prospectus ou cette introduction blâme le dictionnaire de l’académie d’abonder trop en expressions triviales et en pro- verbes populaires : mais le but d’un dictionnaire de ce venre ( pourroit-on lui répondre } n’est point de faire un orateur , un beau parleur , mais de mettre ” Sur la langue française. 103 les étudians, les ienaians , les étrangers sur-tout, à portée d’entendre tous les livres français bien ou Du ÉL E ne, £ an: | \ ‘ mal écrits’, anciens et modernes, en les prévenant ce- pendant contre les mauvaises locutions , comme & fait le citoyen Gattel dans son dictionnaire ; et à cet écard il est à remarquer que lés éxnressions triviales 4 Il H ét populaires dominent s qui, leur débit , surpassent infinirrent les ouvrages les plus ) [ re] parfaits, soit en éloquence, soit dans la haute poésie, + Un autre reproche qui me sembleroit plus raison= | nable , qu’on pourroit faire à l’auteur du nouveau dictionnaire , c’est d’y avoir suivi trop scrupuleu- sement dans sa nomenclature , orthographe néogra; phique de Waiïilly; dans un nombre de mots français | tirés des langues anciennes, principalement de ceux : sortis du grec, orthographe qui s’éloigne de leur éty< | mologie. Le nouveau rédacteur a si bien senti l’abus ! de cet écart, que cette orthographe vicieuse de son prédéce:seur, qu’il adopte dans la nomenclature, il L Pabandonne dans la suite de son discours. Mais on À doit ajouter à la louange du citoyen Gattel, que si Porthographe , les genres ou la prononciation , etc. semblent présenter quelques doutes, il rapproche presque toujours à ce sujeï, el cornpare les Diction- naires de Académie, de Trévoux , de Restaut , de M don. ha 7. “in ec | Ferraud, de l'Eucycloptdie, le Manuel lexique, etc. et pour se décider, il s'appuie de autorité qui lui paroït la meilleure. « Il m’a toujours semblé, dit » Voltaire ( qu’on ue doit pas se lasser de citer en G 4 ' . 104 _ Grammaire. » fait de goût, de grammaire, de littérature, de cri- » tique , etc. ) qu’on doit écrire comme on parle, » pourvu qu’on ne choque pas trop l'usage, pourvu » que l’on conserve les Lettres qui font sentir l’é- » Lymologie et La vraie signification du mot. »° J’ajouterai par rapport à l'importance des étymolo- gies dans un dictionnaire , une autre autorité non moius imposante à cet égard, celle du cito,en Vol- ney : « Que la conmoissance des étymologies est &b- » solument nécéssaire pour l’enseignement et » l’élude de la nomenclature où du Dictionnaire » a’une Langue , et qu’un bon dictionnaire étymo- : » logique seroit la plus parfaite histoire de l’entende« » meut humain.» Les Ruines. Paris, Agasse, 1791 (6). :: Pour confirmer les éloges donnés aux changemens, aux corrections et aux augmentations du nouveau rédacteur, je voulois, avant de terminer cet extrait, citer un nombre d'exemples tirés de l’ouvrage même : c’éloit mon dessein , et j’en avois recueilli un nombre dans cetie vue. La chose m'’auroit été facile ; car * . la nomenclature de ce dictionnaire monte peut-être . (8) Un grammairien instruit et zélé pour la langue ( Sé- bastien Cherrier } avoit adressé à l’Académie française en 1766 , un rapprochement curieux « des équivoques et bizar- » reries de l’orthographe française. Paris, Gueñfier ( au- » jourd'hui Onfroy ) ,in-12 , 173 pag.» L’auteur de ce re- cueil y prétendoit avoir trouvé dans la langue même toutes les ressources nécessaires pour remédier à la plupart de ces abus; L mais les moyens de réforme proposés ne furent point agréés, parce qu’ils s’éloiguoient trop de l’usage et des étymologies. Beaux-Arts. 105 _ à cinquante mille mots, et il n’yena pas un qui ne m’ait passé sous les yeux ; mais cet extrait est déjà trop étendu, ces citations ne feroient que l’alon- ger ençore , et je craindrois d’abuser de la patience des lecteurs. Je me bornerai à dire que, d’après celte leciure et l’examen que j’ai pu en faire, ce dic- tionnaire abrégé, d’un format portatif et commode, dans cet espace borié et dans son genre , me paroît le plus abondant , le plus complet , et jusqu’ici le Meilleur dictionnaire que je connoïisse. | | E. B. DES ES RC RENE) mens B'EAGU NX AR T:S Descrrrrion des Statues des Tuileries, par Æ. L. MirzriN, Conservateur du Muséum des antiques à la Bibliothèque nationale , et Professeur national d'Histoire et d’'Anti- guités ; prix , 1 franc 5o centimes. À Paris, chez l’auteur, à la Bibliothèque nationale | rue Neuve-des-Petits-Champs, n°. 11, et chez Fuchs, libraire , rue des Mathurins, An VI > 1798. Dvrs que le superbe jardin des Tuileries a été encore embelli par une réunion de statues, on voit ces chels-d’œuvres de lart moderne , et sur-tout les copies de Part antique, toujours entourés d’un nombre de curieux qui les adimirent ; €t raisonnent _ to6 Beaux-Arts. plus ou moins bien sur les sujets qu’ils représentent , selon le degré de culture de leur esprit. N Oecupé par goût et par état de l’élude des monu- mens , Clargé'par le gouvernement de conserver et d'expliquer dans des cours publics les trésors de l'antiquité, qui nous retracent l’histoire des mœurs et des usages des nations (1), j’avois formé le projet de décrire ces statues aussitôt que leur réunion seroit complète : je regardai cette Description comme uñ véritable Traité élémentaire, propre à donner aux pures gens, et aux gens du monde, quelques no= tions de l’histoire des arts, et à faire voir que l’ar- chæologie ou la science des monumens n’est pas, comme on le pense trop communément , une étude sèche et aride, mais que c’est au contraire une étude aussi amusante et aussi agréable qu’instructive , puisqu’elle est le résultat de la comparaison des plus beaux passages des classiques , et des plus beanx ouvrabes de l’art. Mais on vient de publier successivement différentes Descriptions de ces stalues, et il n’y en a pas une qui ne contienne une foule d’erreurs, ét qui. ne soit faite pour égarer le goût et le jugement de ceux qui voudront les suivre ; ce qui vient de ceque les études littéraires sont aujourd’hui trop négligées. J’ai donc pensé que je ne devois pas différer d’of- frir au public ce petit essai; je n’y attache d’autre importance que celle de donuer à la jeunesse un (x) Ces cours, établis par une loi du 20 prairial an IV , ont lieu dañs une des salles de Ja bibliothèque nationale, Description de Statues. 107 guide plus sûr, et propre à élever les ames par une considération juite des idées grandes et des beautés sublimes, et de former le goût et le jugement par un examen sévère des fautes que de grands artists ont commises pour n’avoir point nourri leur esprit des connoissances littéraires utiles à leur talent. Jee suis attaché à donner sur chaque monument les opinions des archæologues les plus insiruits j Je les ai discutées brièvement : j'ai indiqué celle qui wa paru la plus probable ; j'ai quelquefois ajouté la mienne. J'ai placé de courtes notés sur quelques sculpteurs, ‘afin de donner une idée générale des principaux statuaires de l’école française. En décrivant les monumens les plus célèbres, tels que l’Apollon , le Laocoon, le Nil, je rapporte les | ‘passages des classiques ; j'ai joint la Description de “Winckelmann, pleine de poésie et d'enthousiasme, persuadé que rien ne pouvoit être plus agréable que Ja lecture de ces productions du génie, en présence | ‘des ouvrages de l’art les plus uBtables: dans le plus beau jardin de PUnivers. L Ce petit Traité pourra encore avoir une autre * utilité. Comme plusieurs statues des Tuileries, tels que Laocoon, Apotlon, Ariane , etc. sont des copies ù des statues apportées de Rome, leur description sera une espèce d’iniroduciion à la connoissance de ces monumens, et préparera à les voir avec plus de * plaisir et de fruit quand ils pourront être exposés. Je n’ai eu d’autre but, en composant cet ouvrage ; \ 108 Beaux-Arts. | | que celui d’être utile ; il fera excuser , j’espère , les défauts qu’on y pourra trouver, Je vais citer ici le premier article pour indiquer la manière dont cet écrit est rédigé. / ANDROMAQUE ET ASTYANAX. Ce groupe de deux personnages est otre ment nommé le groupe de Papyrius. Les sentimens sont tres-partagés à son sujet. L'opinion commune est qu’il représente Papyrius ef sa mère , dont l’histoire est suffisamment connue par le récit qu’Aulu-Gelle nous en a transmis ; récit qu’il emprunte d’un discours de M. Caton à ses soldats marchant contre Galba. Avant cette époque, les sénateurs entroient au sénat accompagnés de leurs fils, encore vêtus de la robe prétexte. Un jour on traita une matière trop im- portante pour que la discussion fût terminée en une séance ,et elle fut remise au lendemain : on convint cependant de garder le plus grand secret sur le sujet mis en délibération, jusqu’à ce que le décret füt rendu. La mère du jeune Papyrius, qui avoit accom- pagné son père, lui demanda de quoi il avoit été question : le jeune homme répondit que le secret lui avoit été recommandé, et qu’il devoit le garder. Cette réponse piqua la curiosité de la mère : elle le pressa tellement ,que, pour mettre fin à ses importunités, 1l eut recours à un mensonge plein d’espritet de gaieté ; il lui confia, avec mystère, qu’on avoit discuté s’il convenoit plutôt qu’un mari eût deux femmes, ou Description de Statues. 109 qu’une femme eût deux maris. La mère de Papyrius pâlit à ces mots, sortit toute troublée, et fut faire à l'instant confidence à d’autres femmes de ce qui se pässoit. Aussitôt le bruit s’en répandit, et le lende- main elles assiégèrent en foule les portes du sénat: elles demandoient en pleurant que si l’on vouloit toucher au lien sacré du mariage, on donnât plutôt deux maris à une seule femmezque deux femmes à un mari. Les sénateurs ne pouvant présumer d’où venoit cetie rumeur, le jeune Papyrius avoua le mensonge qu’il avoit fait à sa mère, mensonge qui étoit la cause de tout ce bruit.Le sénat admira la pru- dence et la discrétion de ce jeune. homme; il dé- créta cependan! qu’à l’avenir fes jeunes gens n’entre roient plus dans l’assemblée avec leur père, à l’ex- ‘ception de Papyrius qui fut surnommé prætextatus , à cause de la prudence qu’il avoit montrée dans un. temps où il portôit encore la prétexte. On ne sauroit déterminer ceite statue d’une ma- nière très-positive ; mais elle ne peut représenter, comme on le croit communément, Fapyrius præ- textatus ; alors ce jeune Romain devroit être vêtu de la prétexte, et avoir suspendu à son cou la bulle que les jeunes gens ne quittoient qu’en prenant la toge et en commencant le tirociniat (2). Sandrart a cru voir dansce groupe Marc-Aurèle et Lucius-Verus : il est vrai que le sexe de la plus (2) Voyez dans le Magasin encyclopédique , troisième année , tome JIL, page 371 , l’extrait d’une exellente Dis- sertation de M. Charles-Auguste Boettiger , sur le tirociniat. xr6 | Beaux-Arts. grande figure n’est pas assez caractérisé pour qu'oi puisse assurer qu elle représente une femine ; mais on ne retrouvé pas dans ces figures les traits bieri connus de Marc-Aurèle ni ceux de Lucius Verus. D’autres y ont vu Faustine et son es mais avec aussi peu de fondement, Beaucoup de personnes regardent ce groupé comme une image de l’amitcé. \Winckel:rann y avoit vu d’abord Phèdre décou- vrantsa passion à Hippolyte ; mais le jeune homme entre à peine dans l’adolescence : d’ailleurs, il pa- roît écouter la personne qui lui parle avec intérêt, et lui répondre avec pläisir ; attitude q#i ne peut conve- nir à Hippolyte. Il a émis dans sa dernière édition de l’Histoire dé PArt, une idée plus vraisemblable : il voit dans ces deux figures, Électre rencontrant son frère Oresté sur la tombe de leur père Agameinnon, où elle sa- crifioit à ses mânes. Les cheveux coupés de la grande figure lui paroissent décider sans réplique en faveur dé ceite opinion. Winckelmaun trouve donc dans ce groupe la re- présentation du premier entretien qu’eut Electre ‘avec son frère Oreste, plus jeune qu’elle, et la scène de Sophocle qui retrace cet entretien : tous deux ne pouvoient être représentés qu’avec des che: veux renaissaus: Sophocle nous apprend qu’Electre voulut se faire couper les cheveux par sa sœur Chrysothemis, pour les déposer avec les siens sur le torubeau de leur père. Oreste avoit fait la même chose avant qu’il se fût découvert à Electre: Ce f / Description de Statues. tt Furent ces cheveux trouvés par Chrysothemis sur le tombeau: son père, qui lui firent conjecturer l’arri- vée de ce frère chéri à Argos; el lorsqu'Oreste se fut découvert à Electre , elle le prit par la main ; ce qui est exprimé dans ce groupe. La circonstance du premier entretien d’Elecire, ajoute Wiuckelmann, est distinctement rendue dans les airs de tête de ces deux figures : les yeux d’Oreste sont humides, pour ainsi dire, de larmes; ses paupières sont mouillées à force d’avoir pleuré. Il en est de même d’Electret on lit sur sa physionomie la joie et la tristesse , lat- tendrissement et l’abattement. à 5 Cette explication est ingénieuse , mais non pas cer- taine. Il est vrai que le costume des deux personnages: est grec : le jeune homme a une simple chlamyde, et il est à moitié nu ; la femme a un vêtement plus ample, mais qui n’est pas celui des dames romaines; cependant, excepté la chevelure coupée, rien n’in- dique que ce soient Electre et Oreste. Le jeune homme est dans un âge plus tendre que celui où il devoit être quand il punit par un matricide le crime d’Ægisthe et de Clytemnestre, Pourquoi n’y verrions-nous pas ce groupe si souvent présenté par les artistes d’Ændromaque et de son cher Æstya- nazx, s’entretenant avec attendrissement du mal- heur de Troie et de la mort d’Hector (3) ? (3) Sur un beau camée qui appartient au ciloyen Giraud , artiste , dont le nom doit être cher à tous les vrais amis des arts, à cause de la maniere généreuse et libérale dont il com- munique la belle suite de plätre qu’il a formée , Astyanax et Andromaque sont dans des proportions relatives , conformes aux figures de ce groupe, 112 Mélanges. Il est impossible d’expliquer cette stat:re d’une manière qui soit sans réplique ; mais on peut assurer qu’elle représente un sujet grec, et non Papyrius et sa mère , comme on le répète tous les jours. Winckelmann , en la regardant de près, y 4 trouvé le nom de Partiste; il ‘appeloit enelaiis. L’original de cette statue est à Rome, dans la villa Ludovisi. Cette copie en marbre blanc étoit dans les jardins de Marly. TES L’original est gravé dans la Raccolta di statue de Maffei, planche 59. A. L. M. MÉLANGES. Lingua melle dulcior fluebat Oratio. CICÉRON. Prosrecrus des Œuvres choisies de FÉNÉION , 6 vol. in-12 brochés , avec des figures en tarlle- douce. “ “2 est un très-petit nombre de bons ouvrages dic- » tés par la racson et le sentiment , qui conviennent » à tous les pays, à tous les siècles, à tous les peu- » ples. Il seroit à désirer pour le bonheur du genre » humain , qu’il n’en existât que de semblables dans » l'Univers. » De ce petit nombre sont les Œuvres choisies » de Œuvres de Fénélon. 113 de Fénélon ;, telle que nous les présentons au public. | » Il existe une collection de tous les écrits de ce » vertueux et sentimental philosophe , en g vol. in- » 4°. ; mais elle ne sauroit convenir à toutes sortes » de lecteurs, soit à cause du nombre des volumes, » soit à raison des matières théologiques qui s’y trou- » vent mêlées. » Le Fénélon dont nous sommes les éditeurs , » ne laissera rien à désirer aux amateurs de la vraie » philosophie. On y retrouvera l'élite des écrits de » ce grand homme, c’est-à-dire, tous ceux de ses » Écrifs qui placent leur auteur à côté des premiers »* sages, et qui rendront à jamais son nom synonyme » de celui de la vertu. » Depuis long - temps les gens de. goût deman- doient cette édition : des femmes, dignes d’en » apprécier le mérite, la sollicitoient , et plusieurs » pères de famille la réclamoient pour leur biblio- thèque et celle de leurs enfans. » Au nom de Fénélon ou de la vertu, qui est la même chose, le cœur se dilate, s’échauffe, s’em- brâse ; la langue la plus engourdie s’anime , se dé- lie et devient diserte ; une foule de pensées s’offrent à Ja fois à lesprit , et lon n’est embarrassé que du choix : le discours devient fécond , abondant ; il dé- borde en quelque sorte , et il ne peut se contenir dans les bornes ordinaires. On nous pardonnera donc cet élan du cœur et de la reconnoissance envers ce bienfaitcur du genre humain , que les peintres , les graveurs, les sculp- Tome III, EH ÿ Lk4 Mélanges. teurs les plus célèbres; les artistes de tous les penres; les poëtes et les oraleurs ont à l’envi cherché à fairé revivre par leurs talens sublimes , et par là ont éu . Pavantage d’associer leur immortalité à la sienne (1). Après des temps d'fficiles et orageux, la double image de Fénélon et de la vertu console des maux qu’on a soufleris ; elle encourage pour le bien, et peut nous servir d'exemple et de leçons pour Pavenir. | ; Chez Fénélon , tout est du plus grand intérêt ; sa vie, ses actions , ses écrits; et toujo®rs, par un même principe , l’amour de ses semblables. On ne prétend rien dire ici de nouveau ni d’ex- traordinaire 5 mais Fénélon est un de ces hommes rares dont il suffit de rappeler quelques faits, quel- ques traits déjà connus, pour procurer à ceux à qui on les rappelle un plaisir toujours nouveau, Un naturel doux et une grande vivacité d’es- prit furent les présages de ses verius et de ses ta- lens. La douceur de ses mœurs ; répandue dan$ sa conversation comme dans ses écrits , le fit égales (x) On cénnoît la belle statue de Fénélon par le Comte ; ses portaits exécutés par le pinceau agréable et vrai du cé- lèbre Vivien, par lé buriu immortel des Drévet, des Au- “dran ; et de nos jours, par Saint-Aubin et Fiquet : les éloges académiques de ce grand homme par Labarpe, Mau ri, etc. la tragédie qui porle son now, par Chenier. On ne vantera point ici, .en parlant de nos poëtes, les traductions en vers français du Téémaque , jusqu’ici peu heureuses ; mais du moins elles ont un hommage rendu à la prose po0é- tique, harmonieuse et cadéncée de ce grand écrivain. Œuvres de Fénéton. 118 ment chérir de ses lecteurs, comme de ceux qui avoient le bonheur de vivre auprès de sa personne. Ï1 savoit allier les différens tons qui convenoient aux personnes et aux circonstance. Aimé et désiré par-tout , on le vitsimple avec le duc de Bourgogne ; sublime avec Bossuet , brillant avec les courtisans ; et dans son diocèse, tour-à-tour bon , aflable, bien- faisant , consolant y Compâtissant y il laissa pour long- temps aux évêques, ses successeurs, un modèle dif- ficile à imiter. S’agissoit-il de ramener une ame à la vértu ? ce m’étoit pas un maître qui parloit avec autorité; c’é- toit un frère , un ami qui ménageoit la délicatesse de son disciple , et qui sembloit douter avec lui pour éclairer ses doutes et pour le gagner à la vérité. Simple à la fois et profond, joignant à des manières douces une éloquence forte et persuasive, il avoit le bonheur de ramener et de s'attacher pour teujours le déserteur de la vertu. Doué d’une candeur admirable, d’une intégrité de mœurs irréprochables , il avoit dans lé premier degré les qualités excellentes et les plus réspectables; en un mot, toutes les vertus qui rendirent sa religion aimable à ses ennemis mêmes. Par sa conduite, par ses Ccrits, par ses fautes mêmes, il semble avoir devancé la révolution fran- çaise ; son quiétisme approchoit en quelque sorte de la morale simple , tolérante et toute aimante des disciples de Penn, qui fait de ses sectateurs un peu- ple de frères. Une de ses maximes, d’une philan- ropie üniverselle, étoit « qu’il falloit plus aimér sa H 2 116 … Mélanges. » famille que soi-même , sa patrie plus que sa fa- » mille, et le genre humain plus que sa patrié. » D’après ce principe, il recevoit les étrangers avec une cordialité peu commune : aussi dans un2 guerre de religion , c’est-à-dire, de toutes communément la plus acharnée et la plus atroce, retenues par un sentiment de vénération pour sa personne, les ar- mées protestantes , entrées dans le Cambresis, épar- gnèrent les terres du prélat. Après la mort du duc de Bourgogne, Louis XIV brûla tous les manuscrits que son petit - his avoit con- servés de son précepteur Fén‘lon. F:nélon ne put obtenir que Ie. Telémaque fût imprimé en France avec permission , laut que vécut Louis XIV. Ce poëme semb'oit être la censure en a&tion des torts d’un monarque ambitieux, trop vain, trop peu Jja- loux de la gloire so'ide et véritaïle, ainsi que du bouheur des peuples qu’il gouvernoit. Si Pimitateur d'Homère rendoit aux rois le scep- tre plus pesant, laôue du GCirist annoit à rendre son joug plus léger aux petits. Un curé de son dio- cèse se plaignoit de u’avoir pu abolir les danses les jours de fêtes. « M. le curé, lui dit l’archevêque , » ne dansons point, mais permettons à ces pauvres » gens de danser, Pourquoi les empêcher d’oublier » un moment qu'ils sont malheureux ? » On a remarqué que Fénélon avoit supporté avec la même tranquillité d’ame ses disgraces de la cour de France et ses revers de la cour de Rome, ainsi que la perte de ses meubles, de ses livres et de ses papiers. consumés dans un incendie vers le. même Œuvres de Fénélon. 11% temps, sans s’affliger ni «e plaindre. Une chose plus admirable encore : on doit le louer de n°:voir jamais dit et écrit que du bien de ses ennemis et de ses per sécuteurs les plus violens, On pourroit à cet égard citer beaucoup de traits qui mettroient le comble à son éloge. Enfin, c’est de lui que d’Alembert , ce phi- losophe vertueux et sensible , qui dans ses éloses et dans ses autres écrits avoit su apprécier tant d’hommes célèbres, fat'gué d’une longue série en style lapi- daire , des talenset des vertus du meilleur deshommes, de l'écrivain immortel, de archevêque le plus res- pect&bl:..... ne vouloit point d’autre inscription que celle-ci : « Passant, n’efface point par tes pleurs cette » épitaphe , afin que d’autres la lisent et pleurent » comme toi. » Quant à ses ouvrages nombreux, admirables et va- riés comme son génie, ce serait une tâche longue et difficile de rendre à chacun le tribut d’éloges qu’ils méritent ; mais on ne peut s'empêcher de s’arrêter sur quelques-uns, sur celui sur-tout qui s’acquit à la fois le plus d’admirateurs et les ennemis les plus puis sans, qui faillit d’être étouflé dès sa naissance, qui est dans toutes les mains, et qui a été traduit dans toutes les langues, poëme admirable, où l’on re- trouve la pompe d’Homére et Pélégance de Vir- gile, toute la force de ia vérité unie aux agrémens de la fable | ouvrage immortel dans lequel l’au- teur a su déployer toutes les richesses de la langue francaise. La morale et instruction de ce poëme divin n’en sont pas le moindre mérite ; tantôt, comme Homère , 3 118 di Mélanges. Fénélon y est le précepteur des pasteurs et des lé- gislateurs des peuples, des guerriers mêmes, pour leur apprendre combien la clémence et la générosité sont encore au- dessus de la valeur et des talens mi- litaires ; tantôt, par uu rapproc hement heureux de la simplicité des mœurs vénérables de Pantiquité ; l’auteur inspire Pamour des vertus les plus essen- tielles au bonheur de homme, Il fait Pél oge de l'agriculture etdes arts les plus utiles, et en même temps la censure de ces vices brillans si chers à nos citadins, qui font toute leur ambition, leur tourment et la source de tous le urs malheurs, On y voit en ac- tion une satyre vivante de l'abus des richesses , d’un luxe et d’un faste insolens qui insuitent publiquement à la misère de l’indigent et de Popprimé. Ce que Fénélon a écrit sur Péloquence et sur la rbétorique, nous offre une critique fine , un PaEnN ment sain ; c’est le fruit d’une lecture sentie et ré- fléchie dus plus beaux modeles de Pantiquité : on y voit un écrivain vourri de la fleur de la littéra- ture aucienne et moderne. Entre un grand nombre d'ouvrages de Fénélon 8 5 on le sait , que la plupart théoloziques et polé- miques ne bout plus aujourd’hui d’un grand intérêt : on doit douc savoir gré à un homme de lettres, ins= truit et plein de goût, d’avoir distingué et su faire un choix déses Œuvres vlhulosophiques , c’est-à- -dire , ‘dans tous ses ouvrages , ceux le plus à portée de toutes les classes des lecteurs, et d’une utilité la plus gé- nérale , où les législateurs , les instituteurs publics et particuliers , où les pères, les mères, leurs eufans À Œuvres de Fénélon. 119 où les vieillards comme les jeunes gens, trouve- ront des règles sûres pour remplir leurs devoirs les plus essentiels, où ils puiseront les meilleurs prin- cipes de conduite dans les difléreutes circonstances de la. vie. Si ces œuvres choisies ont ün point de ressemblance entr’elles par leur utilité , elles varient par la diver- sité des sujets qu’on y traite, et en même ternps par la variété du style de lécrivain, presque tou- jours fleuri , gracieux | élégant , tantôt vifet serré, souvent ‘affectueux , presque loujours coulant et abondant. Enfin, dans ces Œuvres philosophiques , on aimera à trouver par-tout la plus belle morale , amie des Hommes , bienfaisante, pure ét sanstache, qui charme le cœur, élève l’ame et éclaire l’es- prit, commé son style pur , limpide et harmohieux flatte et. enchante l’oreille la plus délicate et la plus difficiles, Ce sera avoir servi les mœurs et les lettres, avoir bien mérité des ames honnêéies et vertueuses, d’avoir rapproché et rendu’ manuel et’classique un choix bien fait des Œuyres philsonhiques de l’homme qui, par son caractère , par ses aclions et par ses écrits vraiment philanthropiques, s’étoit fait aimer , chérir et révérer à ia fois tant de ses com- patriotes que des étrangers, qui le sera de la pos- térité comme il le fut de ses contemporains ; en un mot, de cet écrivain immortel , Pami du genre humain, qui, par ses lälens et par ses vertus, ho- pora son siècle, son pays et l'humanité. H 4 120 \w Mélanges. Conditions de la souscription. .« L'édition entière sera composée de 6 volumes * in-12 de 400 à 45e pages. Nous avons préféré ce, » format, comme l’a fait le C. Bernardin-de-Saint- » Pierre dans ses Etudes de la Nature , attendu » qu'il est un de ceux! qui sont les plus commodes, » et qu'il contient plus de matières. La partie 1y- » pographique y sera parfaitement soignée : on y » emploie les plus beaux caractères de Firmin Di- » dob , et le, papier. choisi dans les fabriques les » plus renommées,. _» Le premier goiume sera décoré du portrait de » FÉNÉLON. Cette gravure , ainsi que.tautes ceiles » analogues au sujet traité dans les divers volumes, » sont l’ouvrage, des meilleurs maîtres (2). (2) J'ai eu le plaisir de voir chez le citoyen Gaucher le portrait de Fénélon , dans lequel on remarquoit déjà la res- semblance, l'effet, l'expression , la pureté de style qui caractérisent les productions: de cet excellent artiste. Sous son burin moëlleux et suave, FÉNÉLON semble sourire €t parler : on cruit entendre cette conversation , l’expression de la bonté de son ame , de la douceur de son caractère , et qui me rappelle ce vers d’Homère : TS 494 ame YAazzys pélires yAuxioy pee æudy. Il. I. 240, [. . Plus. que miel , douce étoit la harangue Qui découloit de sa disoné langue. Hugues SALEL , 1580 17 Les dessins des estampes de ce recueil sont confiés au gé- nie inventif , fécond et heureux du citoyen Aonnet , dont le Style correct , noble et pittoresque est justement prisé par nos meilleurs artistes. E. B. Œuvres de Fénélon. 121 »Enfinrien ne sera négligé dans cette édition , de ce qui pourra la rendre parfaite sous tous les rapports. » L'édition entière sera distribuée en deux livrai- sons, chacune de trois volumes, pour le prix de 12 francs, qui seront payés; savoir , 6 francs en souscrivant de suite , et 6 francs en retirant la première livraison, qui paroîtra incessamment. La seconde sera distribuée gratis aux souscripteurs deux mois après , qui, selon l’ordre de date de leurs souscriptions, recevront les premières épreuvesdes gravures. Le prix du papier vélin sera de 24 francs en souscrivant de suite. » La souscription est ouverte chez le citoyen Le- clere , imprimeur- libraire, rue Saint - Martin, près celle aux Ours, ne. 254et 89, à Paris ,et chez le citoyen Moutardier , imprimeur-libraire, Quai des Augustins, au coin de là rue Giît-le- Cœur. “»La souscription n’aura lieu que d’ici à deux mois : il ne sera tiré que cent exemplaires en sus du nombre des souscripteurs, ‘et le prix sera de 24 francs pour ceux qui n’auront pas sous- crit. » Toutes les lettres de demandes et envois d’ar- » gent doivent être adressés franches de port,sans quoi » elles ne seront pas admises. » À VE € 2 OM DE DR CS 9 . ET CORRESPONDANCE LITTÉRAIRES. Drvrs quatre moïs les travaux du Lycée des arts avoient été suspendus , à cause des réparations qu’exigeoit la couverture du bâtiment ; enfin le fon- dateur $’est déterminé à faire ces réparations à ses frais, et les seances ont repris léur activité ordinaire. Ceile du 29 thérmidor dernier étoit la cinquante- huitième , et elle a présenté un grand intérêt. Parmi les objets importans qui Pont distinguée , on a remarqué principalement ceux qui suivent. 10. Un rapport du citoyen Dirigé, sur deux composi- tions de /aton et de sémslor supérieurs à ceux des Anglais, objets qui manquoient à l’industrie fran- çaise, et qui, si cette fabrication avoit lieu en grand, épargneroient à la France une importation d’autant plus intéressante , qu’elle est fondée sur un besoin de première nécessité, Les inventeurs de ces composi- üons sont les citoyens Tournon et Huguenin , aux- quels une médaille a été décernée. 29.-Rapport par le citoyen Sobry, sur la superbe. édition du voyage de d’infortuné Lapeyrouse ; eet ouvrageaété eurichi de notes et de recherches très-iin- poriantes par le général Milet-Mureau, membre du Lycée, chargé de ce travail important par le gou- _vermemeut, (Mention honorable). Nouvelles Littérarres. ‘123 39. Présentation d’un ouvrage de broderie en soie noire à l’aiguille, imitant la plus belle gravure , ta- bleau de 13 décimètres de hauteur sur 16 de lar- geur ; ce travail a exigé une persévérance sans exem- p'e pendant deux années consécutives ; mais ce qui est très-remarquable , c’est que cette constance est due à un premier encouragement que le Lycée donna en l’an IV à la citoyenne Fay , auteur de ce chef- d'œuvre, qui alors présenta au Lycée un premier essai, dont il fit faire l’acquisition au directoire exécutif, 4° Rapport du citoyen Colson, sur les recherches, notes et dessins des antiquités, et monumens que l’on détruit chaque jour dans le département du Puy- cle - Dôme, recueillis par les soins et aux frais du citoyen Gault , peintre. (Médaille ). 5. Lecture par la citoyenne Pipelet , de l'Eté, pastorale en vers imitée de Pope, par la citoyenne Viot. Le public a vu avec le plus grand intérêt une femme connue par un véritable talent, mettre tous ses soins à faire valoir une autre femme ; aussi les ap- plaudissemens ont été prodignés autant à la manière pleine de grace dont cette lecture a été faite, qu’à la pièce en elle-même, d’ailleurs très-agréable, ;. 6°. Rapport sur le Régulateur du, feu, par le citoyen Bonnemain , qui a appliqué cet appareil à un nouvel alembic dont la construction est beaucoup plus simple, et'infiniment économique pour les dis- üllations des eaux-de-vie en grand, ou pour toute autre opération de ce genre, Cet artiste étant mem- 124 Nouvelles littéraires. bre du Lycée, les réglemens ont forcé la société à se borner à une mention honorable. 7°. D’après l'examen des nouvelles gravures à la manière du crayon , des principes de dessin d’après Moreau le jeune et Regnault, exécutées avec une perfection jusqu’ici inconnue , par le citoyen Carré s graveur, une Médaulle lui a été décernée. 8°. Le Cœur et la Raison, allégorie en vers, par le citoyen La, Wieyille, membre du Lycée, a été fort applaudie. 9°. Mention honorable a été faite d’un mémoire de Regnier sur un nouveau conducteur électrique, à l'aide duquel, parmi plusieurs expériences irès- piquantes, il a présenté celle de deux plateaux, sur lun desquels est écrite la constitution de lan IT, et sur l'autre celle de lan IIL. Lorsque ces deux pla- teaux sont chargés de matière électrique, on peu toucher impunément celui qui contient la consti- tution de l’an II; mais si l’on porte la mai ai second, on éprouve la plus vive commotion. 10°, Rapport de Charles Désaudray , sur divers perfectionnemens de jambes mécaniques propres à remplacer les jambes emportées au-dessus ou au dessous de la rotule, avec le mouvement du pied et celui du genou, anssi faciles:et aussi sûrs que ceux des ja bes naturelles, par le cit. Sannec. (Médaille décernée ). | xro. Rapport du même, sur un nouveau GOMPES d’engrainage pour la roue de champ et le pignon de Nouvelles littéraires. 125 roue de rencontre , qui décrit l’engrainage centrique et excentrique de la montre 3 oulil ingénieux qui manquoit encore à l’horlogerie, par le cit. Hugot. (Medaulle décernée). 12°. Présentation du modèle d’une cuisine am- bulante pour Les armées, disposée sur un seul charriot, et propre à alinenter 1200 hommes, de manière que les vivres peuvent ainsi leur être pré- parés pendant la route , et distribués à leur ar- rivée, après une marche longue et pénible, par le citoyen Leroë. ( Mention honorable pour Les ap- plications utiles dont cette idée ingénieuse est susceptible ). 130. Rapport de Charles Désaudray , sur un nouveau télégraphe de marine, ou wgigraphe, d’une construction très-simple et peu dispendieuse , pouvant exécuter 999 mille signaux et plus avec la plus grande exactitude , précision et céiérité. Cette machine peut être établie en vingt-quatre heures. Ses élémens se trouvent par-tout , et l’épreuve vient d’en être faite en grand avec succès à Rochefort et Charente , distans l’un de l’autre de 525 kilomètres, ou 7,200 toises, par les citoyens Laval , ingénieur, mécanicien, membre du Lycée, et Peytes Montca- brier, chef du mouvement des poris, auquel une Médaille a été décernée. 14°. Dans les essais de musique qui ont suivi les travaux utiles, le public a fort applaudi une nou- velle ouverture du jeune Labarre ; menibre du Lycée, ci-devant premier violon du conservatoire à PE 126: Nouvelles littéraires. Naples, et un concerto de clarinette exécuté par le citoyen Dacosta, Le citoyen Schoencheffer, artiste du théâtre des Arts, a excité le plus vif plaisir dans un concert de flûte. Parmi les Savans et Artistes distingués qui ont été proclamés Membres du Lycée à cètte séance , le public a entendu avec plaisir citer le citoyen Fran- cois de Neufchâteau. Les séances générales du Lycée des Arts auront lieu dorénavant tous les deux mois ; mais.les comités des Arts continuent de tenir exactement le sept de chaque décade à six heures du soir. Les avis, notes, mémoires, dessins ou modèles doivent être adressés , francs de port, au citoyen Charles Désaudray , secrétaire-général au Lycée des Arts, jardin Egalité. Ayrs aux Médecins ; aux Chirurgiens et aux Naturalistes de la république française et des pays étrangers. Un travail chymique déjà fort avancé sur les calculs des reins et de la vessie de l’homme , en- trepris par les citoyens Fourcroy et Vauquelin, exi- geant l’examen et la comparaison d’un grand nom- bre (plusieurs centaines } de ces concrétions , ces citoyens invitent les médecins , les chirurgiens et les naturalistes de la république francaise et des Nouvelles littéraires: 127 nations étrangères , à vouloir bien leur envoyer les calculs dot ils pourront cispos:r. Il est à désirer, pour le complément et Putilité de ce travail, que les physiciens qui voudront bien leur adresser des calculs, y joignent , autant que cela sera possible , une courte notc: sur l’â:e des su- jets , le poids des concrétions au moment où ellesont été extraites, l’état des malades, etc. . Ces recherches, qui intéressent également l’huma- nité et les progrès de l’art de guérir, exigent encore la comparaison des calculs des différens pays , sur- tout ceux du noid et du midi, ceux des habitans des montagnes et des vallées , ceux des deux sexes, des enfans et des vieillards. Cefte comparai on doit encore s'étendre jusqu'aux calculs des différentes réa gions du corps humain et jusqu’à ceux dés animaux domestiques et sauvages. Les citoyens Fourcroy et Vauquelin recevront avec reconnoissance ; et emploiront avec empres- sement les observations qu’on voudra bién leur adresser sur l’affreusse maladie dont ils s’occupent d’examiner le produit et la cause : ils désirent sur-tout un tableau de sa rareté ou de sa fréquence dans des pays différens, une description de l'urine rendue par ceux qui en sont attaqués, relative- iment à son acidité ou à son alcalescence, à ses dépôts spont:nés, à sa précipitation par l’eau de chaux , par l’ammoniaque et par les alcalis purs. Jls espèrent qu’en les aidant de leurs lumières, les savans concourront avec eux à répandre quel- que jour sur la nature d’une affection que l'état 128 Nouvelles littéraires. actuel des sciences permet enfin de connoître , et dont il est si consolant même d’espérer qu’on pourta parvenir à tarir la source ou à soulager les tour- mens. On voudra bien adresser les échantillons de cal- culs et les observations, ou à l’Institut national au palais des, Sciences et des Arts, ou au directeur de l’École de médecine à Paris, en mettant les noms des citoyens Fourcroy et Vauquelin sous la première enveloppe des paquets. Prix d’émulation , proposé par le Lycée des arts , pour la classe de Mécanique. An VIT de la république française. PROGRAMME. - Le but constant de la société du Lycée des arts a été de diriger les efforts des artistes vers les besoins les plus urgens , soit du gouvernement , soit des classes indigentes. C’est dans ces vues d’utilité publique, que cette société savante a déjà proposé différentes recherches importantes ; notamment celles des échelles pour les incendies, dout elle a fourni l’idée il y a déjà trois années , et qu’elle a donné l’éveil sur plu- sieurs opérations dont les avantages ont été sentis et adoptés dans différentes circonstances. Animé du même désir de servir Phumanité, le fondateur du Lycée des arts met à la disposition de Nouvelles littéraires. 129 de la so-ifté une médaille dor du poids de deux onces , en faveur de celui qui trouvera le moyen le plus simpie et le moins coûteux de remédier aux inconvéniens qui existent à Paris dans la ma- nière de tuer de l’eau Les trains de bots flotté. Il »’y a personnes qui p’ait vu avec douleur, en passant sur nos différens quais, dans les endroits où les trains de bois peuvent aborder ; les imalheu- reux qui do'vent s’honorer du noim d’hommes, réduits à passer des journées entières , même au mi- lieu des risueurs de lhiver, le corps à moitié plongé dans l’eau, pour déchirer ces trains , et les transporter au haut de la berge. Ce travail in humain est tellement fatisguant, que pour ranimer leur courage abattu, ces infortunés sont forcés de sacrifier la moitié , souvent la totalité de leurs sa- laires pour soutenir, par un usage immodéré de Peau-de-vie , leurs forces épuisées ; et dans éette cruelle alternative , ils finissent non-seulernent par pe tirer que de irès-foibies journées, mais encore ils ruiuent entièrement leur sanié , qui ne peut résister lone-temps à de si douloureuses épreuves, C’est dans la vue de secourir cette classe indigente et toujours soufirante de la société, et, en même temps, afin d’éviter aux marchands de bois des frais énormes qui, en définitif, sont supportés par lès consommateurs, que la médaille proposée sera adjugée à celui qui fournira le modèle ou les plans, profils et coupes d’une machine simple et peu dis- pendieuse , à l’aide de laquelle on puisse enle,er de l’eau les trains de boïs flotté , et les transpor- Tome III. I 130 Nouvelles littéraires. ter au haut de la berge de la rivière, par por- tions qui vont être indiquées. Ua train de bois ordinaire est lié en dix - huit cou- pons, dont chacun contient deux cordes. Ce n’est que dans ces espèces de portions que ces trains peu- vent être divisés, pour obtenir que chacune de ces parties puisse être enlevée de l’éau sans risquer de se délier entièrement; encore est-il à observer que, lorequ’un train est ainsi partagé , les bûches ne sont plus arrêtées entr’elles que par de trèc-foibles liens, qui exigent de grandes précautions pour qu’ils ne soient pas dans Îe cas de se rompre à leur sortie de l’eau. Il seroit donc à désirer, 1°. que le moyen que Pon présentera laissät subsister la méthode usitée de lier les trains en dix-huit coupons ; 2°, qu’il fût combiné de manière à ce qu’il fortifiât les liens des différens coupons , afin d’aider à la possibilité de les conduire sur la berge sans qu’ils soient ne à se rompre. Pour y parvenir, voici les bases sur lesquelles il faut calculer, La corde de bois se mesure à huit pieds deux pouces de longueur sur quatre pieds et demi de bau- teur ; ainsi le coupon qui contient deux cordes a quatorze pieds et demi de longueur sur quinze pieds de largeur , et trente pouces d'épaisseur y com- pris lés liens. La corde ainsi disposée pèse quatre milliers, sans les agrès et les liens qu’on peut évaluer à 500 li- Nouvelles litléraires. 13r vres. Le coupon, conposé de deux cordes, pese donc 9 milliers ; il faut même y ajouter le poids de la vase qui s’y dépose en assez sraude quautité. À cet égard , il seroit sans doute à désirer avant tout, pour le bien généial, que les exploitans de . bois adoptassent une telle mauière de lier les trains, qu’il füt possible de les diviser en trente-six cou- pous au lieu de dix-huit, — J’observe même que le coupon actuel est djà lié en quatre segmens , mais d’une manière trop foible pour qu’il puisse être ainsi partagé dans l’eau. Si l’on parvenoit à com- poser ces segmens d’uve façon plus solide , le train pourroit alors se diviser en soixante-douze coupons au lieu de dix-huit, et chaque coupon ne peseroit que deux muiliers environ : alors le moyen mé- canique que l’on poarroit imaziner pour l'enlever seroit infininent plus facile et moins dispendieux. Mais on sait à que! point ces :ortes d’oùvriers tien- ment à leurs routines, et comlien il seroit par con- séquent difficile de faire adoter une nouvelle mé- thode en même temps dans tous les lieux où le bois est formé en train pour être amené par eau jus- qu’à Paris. Afñn de procurer un soulagement plus prompt à Phüumanité souffrante, il paroit donc plus sûr de cal- culer le moyen mécanique que l’on propose au con- cours, sur la manière dont les trains sont liés au- jourdhui, par conséquent sur /@ possihilité d’en- lever de l’eau sans lexposer à se rompre , un coupon pesant environ neuf milliers; cètte possibilité est démontrée d’avance par le moyen à l'aide du- Fa LA / us 132 Nouvelles littéraires. .quel deux hommes suffisent , chez les citoyens Perrier à la fonderie de Chaillot, pour enlever de la fonte les pièces de gios calibres;, qui pèsent dix et onze milliers. | Au surplus, on n’exige point une invention nou- velie, et l’on estimera autant la simple application d’un moyen connu qui puisse remplir exactement les conditions du prix qui est proposé. | On préférera les moyens qui, eu évitant à des citoyens malheureux le travail irhumain qu'il sont forcés de faire dans l’eau’, laisseroit cependant la fa- culté de continuer de les employer pour le déblayage . des mêmes bois au haut de la berge et pour leur “transport dans les chantiers, afin que leur existence continuât de se irouver assurée. Le modèle ou les plans, coupes et profils né- cessaires , avec le mémoire explicatif, doivent être remis au secrétaire-général du Lycée de arts, Jar- din Egalité, avant le 30 thermidor prochain , pour que le prix puisse être adjugé à la fin de fructi- dor suivant. EE SNS _ La lettre suivante d’un voyageur à Pétersbourg a Gé insérée dans les Archives berlinoises du temps et dans le Nord Littéraire , etc. du profes- seur Olivartus. « La population de la capitale de l’empire russe n'excède pas celle de Berlin, et peut-être mêine est-elle moins considérable ; mais l’affluence et le gro DS MORE Nouvelles littéraires. 133 bruit dans ses larges rues est extraordinaire. Le luxe de ses habitans, riches ei grande partie , est ex- cessif : il est rare de voir à pied un homme comme il faut ; tout le montre se sert de voitures. Quoiqu’il ne soit permis qu'aux quétre premières classes d’at- teler six chevaux à leurs veitures, on r2ncontre ce- pendant un nombre incroyable de ces équipages : le Russe aine le faste , et il arrive souvent qu’on loge dans une maison un individu des premières classes pour pouvoir se servir de sa voiture. Il est très-commode de trouver tous les objets de luxe réunis dass un mêine quartier, qui est tout rempli de bou- tiques. Les marchands ne rougissent pas de deman- der quatre fois la valeur de leurs marchandises, et ne se fâchent point lorsqu'on leur en offre la hui- tième partie : plusieurs choses sont à très-bon mar- ché; mais la bonté ne répond pas à la facon, I! y a des jardins plantés de milliers d’arbres à fruit : en aulomne, on enveloppe de nattes la tige et les branches pour ne les découvrir qu’au milieu du mois de m'i. Ce procédé est très- pénible à Pégard des grands arbres; aussi sont-ils rares. Je trouvois le spectacle russe assez médiocre ; mais les ballets exci- ièrent mon admiration. Je vis Médée et Jason : le Pique et sa femme, et la Lisinska , exécutèrent parfaitement différentes danses: on comptoit au moins cinquanie figurans des deux sexes de l’âge de douze à seize ans en cosiume grec. lies décorations étoient superbes et les machines jouoient à merveilles. A la fin de la pièce, Médée parut sur un char de triom…. phe, élevé et traîné par des furies. À un mouves 13 134 | Nouvelles littéraires. : ment de sa baguette, le char s’enflamme : des fu- sées, des pctards éclatent de tous côtés autour d’élle 3 il tombe une pluie de feu, et la scène, qui ne pré- sentoit que voutes et masnifi jues colonaades, s'écroule avec up fracas épouvantable (tr). On prétend que /e Pigue a-quatorze mille roubles d’appointemens, On remarquoit dans une loge dix députés kirguisois dans le costume de leur pays : ces gens-là ressembloient aux Chinois ; visage rond , petit nez, œil fendu et sourcil arqueé. Ils parurent prendre plaisir à voir les décorations, La loge contieuë contenoit un Schac, député du despote maintenant chassé de la Perse: son superbe costume étoit de soie rouge et blanche, et son cimelerre et son poignard étiuceloieut de l'éclat des diamans. l Au parterre les places sont séparées et nurnéro- tées; ce qui pré‘ient beaucoup de contestations. Un Anglais, d’un embonpoint un peu considérable , vou- lant se mettre un peu plus à son aise , fit enlever une séparation , el paya pour deux places, a nsi que les frais de réparation. » Un livre propre à donner une idée exacte de la Russie, est l’ouvrage de M. Georgi, intitulé : Des- cription géographique , physique et d’histoure naturelle de l’empire russe , troisième volume. À Konigsberg , 1798 ( en allemand ). (x) IL paroît que ce ballet est celui de Noverre , que le Pique a vu exécuter à Paris, et qu’on devroit bien remettre au théâtre. À. L, M. Nouvelles littéraires. 135 Le second volume , concernant l’économie n’a pas encore paru : l’auteur en donne pour raison les changemens ordonnés par l’empereur actuel dans l’état et l’adiministration des gouvernemens. Il est arrivé que deux gouvernemens ont été réunis dans un seul : on a ordonné dans tous les gouvernemens d’agrandir les cercles, et par conséquent d’en di- minuer le nombre , mesure dont l’exécution n’est pas encore achevée. Ce troisième volume contient la description de toutes les mers , lacs, fleuves, etc. qui arrosent ce vaste empire : en voici quelques passages assez cu rieux. Ov remarque près du lac Pogramna , sur un sol en partie argilleux et en partie sablonneux , une source dont l’eau , d’abord limpide et agréable, laisse ensuile un goût de pourri, et enivre comme les li- queurs fermentées : C’est du moins ce qu’assurent les Russes et les Burettes, qui en font usage, et qui lui ont donné une dénomination qui peint ses effets. Les Bureites en boivent plusieurs semaines de suite pour se guérir de maladies chroniques, et vont pen- dant ce temps-là demeurer près de la source , dans des cabanes formées de branches et de feuillages. Les environs de Bolschaja offrent deux sources chaudes, dont le bouillonnemeat est si bruyant, qu’à peine peut-on s'entendre , et il s’en élève des va- peurs si épaisses, si abondanies, qu’on ne peut rien 1 2 distinguer à une distance assez considérable , et qu’il faut se coucher ventre à terre pour apercevoir les bouillons de Peau, 4 136 Nouvelles littéraires. Le Foscherroja osero ( lac des poux ), qui forme un étang de grandeur médiocre près des lignes d’Orenbourg, fourmille en été d’insectes semblables en quelque facon aux poux. Cette eau tue les ani- maux et les hommes : en tombe:t-il quelques gouttes sur la peau, 11 s’é'ève soudain des pustules d’un ca- ractère gangreneux. Les Kamtschadales regardent toutes les sources chaudes comme des soupiraux de l’enfer, et ont spin de les éviter. O: trouve de la glace éternelle dans quelques petits lacs sur le chemin de Jakuxk, à Ochoz: on en rencontre aussi dans les marais ærctiques, sous la mousse et dans la tourbe. | Sans cette glace les hommes et les animaux ris- queroient de s’enfoncer en été dans ces lieux-là, ainsi que dans d’autres endroits où la terre restant toujours gelée garantit de ces accidens , et préserve de la destruction les ossemens dés éléphans et autres quadrupèdes. | IL paroît à Tubinge, Université de la Souabe, depuis le commencement de 1798 ( v. st. ), tous les jours chez M. Cotta , libraire , un journal politique, raisonué et approfondi, qui mérite sous tous les rap- ports d’attirer les regards du public. Ce journal, intitulé Die neueste Welikuude , c’est-à-lire, Le Tableau Journalier de l’état po- litique du globe ; est rédigé par M. Posselt , pro- fesseur d’histoire ; et historien lui-même aussi dis- tingué par son exactitude que par son goût, OP NS Nouvelles littéraires. 137 Dans les deux premiers numéros, le rédacteur a donné à ses lecteurs, comme introduction , un Ta- bleau de l’état de l’Europe , où se retrouvent les couleurs aussi vraies que brillantes qu’on avoit déjà admirées dans ses ouvrages précédens. M. Olivarius , professeur à Kiel en Holstein, en a donné une traduction française dans son jour- nal intitulé le Nord littéraire, physique , poli- tigue et moral(r), quatrième numéro du 12 ger- miual an VI ( 1 avril 1798), qui depuis a aussi été inséré dans la Décade philosophique du 3o messidor an VI, pag. 182 et suiv. ; mais sans le nom de Pauteur qu’il est intéressant de connvoître. LE sujet du Cordonnier allemand, donné il y a quelques jours sur le théâtre du Vaudeville, est le même que celui du joli opéra des Soulsers mordo- rés. L'auteur s’est contenté de changer le dialogue, et d'ajouter des vaudevilles ; il a fort peu touché au nœud de l'intrigue. Quelques-uns des couplets ren- ferment d’assez bonnes plaisanteries, mais aussi beau- ‘coup trop de calembourgs sur les mots de sans quartier , La forme, Le fond, etc. Cette pièce a été très-bien jouée. L’auteur n’a pas été demandé. / (1) On souscrit pour ce journal intéressant, qui est pu- b'ié en francais , à raison de 10 francs pour l’année , chez le citoyen Fuchs , maison de Clugny , rue des Mathurins, ei Pougens , rue Thomas-du-Louvre , n°. 246. 138 Livres divers. Deputs long-temps le Théâtre des Arts n’avoit pas donné de nouveautés ; enfin il vient d’en pa- roître une sur ce théâtre, c’est Æppele et Cam- paspe , opéra en un acte. Tout le moude connoît le trait de générosité d'Alexandre cédant sa maîtresse à Appele, qui en étoit devenu amoureux en faïsant son portrait : c’est le sujet de l’opéra dont nous par- Jons. Il a été traité dans toute sa simplicité par le cit, Demoustier ; à qui lon pourroit reprocher quel- ques incorrections ei beaucoup de négligence dans son style, Du resie, cet ouvrage est brillant. L’entrée d’Appele est magnifique ; les ballets sont soignés et la musique lrès-belle. Elle est du citoyen ElLer, qui y a fait preuve de talent, RON NS : Los RUE VOLE EE PR VO LME MÉTROLOGIHE. Le CourArATeunr FACILE à l'usage des citoyens peu familiarisés aux nouvelles mesures de la république francaise ; présentant le moyen de transformer toutes les mesures anciennes en nouvelles { notamment celles qui sont le plus en usage en France), depuis la lieue de 20 au degré, formant la première dans l’ordre de leur hiérarchie , jusqu’au 256°. de grain, qui en est la deruière ; le tout sans autre prépa- ration , sans autre travail que de tenir un compas ouvert entre ses mains, et compter Les . Livres divers. 139 transversales qui se trouvent entre ses deux pountes. — Ouvrage indispensable aux juges, greffiers, administrateurs, hommes de loi > HO= taires , huissiers, officiers de santé, gens de lettres, employés , fabricans, banquiers, instituteurs, architectes , orfèvres, arpenteurs, teneurs de li- vres , etc. et généralement à tous ceux que Le gouvernement oblige de parler Le langage des nouvelles mesures dans Leurs actes, dans leurs comptoirs, dans leurs registres , dans leurs ouvrages littéraires. — Prix, compris Le Système des nouvelles mesures, qui lui sert de pendant, 3 francs brochés , pris à Paris; et trois francs 5o centimes franc de port ; et col- lés sur deux cartons, pris à Paris, 4 francs , chez Aubry , libraire , quai des Augustins, n°. 42. M ÉDECINE£. Recuerrz de la société de Médecine de Paris, numéros 21 , 22, 23, suite du tom. IF. Pa- ris, chez Croullsbois et Barrois. Prix, 15 francs par an, franc de port pour les départemens, et 12 francs pour Paris, An VI. Ce recueil paroît tous les mois, par cahier de 5 à 6 feuilles. La pagination en est disposée de ma- nière que les douze cahiers peuvent être reliés en deux volumes. Il est imprimé sur beau papier, et en beau caracière cicéro. On souscrit à Paris, chez Croullebois, libraire | rue des Mathurins, n°. 398 ; Théophile Barrois jeune , libraire, rue Haute-Feuille, 740 Livres divers. n°. 22 , et chez les principaux libraires et direc- teurs des postes, Noïa. La collection de l’an F est actuelle- ment sous presse , et on salisfera incessam- ment aux nombreuses demandes qui en soné faites. Nous avons déjà parlé plusieurs fois de ce recueil périodique et de son utilité 3 il est toujours ré- digé avec le même soin et le même intérêt, LA L'Amr des orphelins où Manvwez des nourrices, | précis sur la manière d’élever Les enfans du premier âge , et notamment ceux privés de la nourriture maternelle , suivi de quelques notes sur le traitement gui leur convient en état de maladie, par J. M. Lamein , officier de santé accoucheur. Paris, chez Villiers, Pa- + Jais Egalñé , n°. 372 ; chez Fuchs, rue des Ma- iburins, n°, 334, in-8°. de ro0 pages, beau pa- pier, caractère de Didot. Prix, 1 franc 50 cen- times pour Paris, et 1 franc 8o centimes franc de port. L'auteur se place avantageusement dansla liste ho- | norable des écrivains utiles. Observer la nature dans les premiers pas qu’elle fait faire à l’homme ; montrer au gouvernement les vices qui infecteut les asyles de Porphelin et de l’enfant délaissé ; rechercher les moyens de suppléer à l’esard des enfans privés de Ja mamelle, l’aliment que la nature leur destinoit ; découvrir aux bonnes mères les pratiques nuisibles Livres divers. TAT ou avantageuses qui peuvent influer sur la santé du fruit chéri de leur tendresse 3 lés prémunir contre les dangers de la routine et de la pr: ven- tion , telle est la tâche que le citoyen Limbin éest imposée et qu’il remplit avec succès. Son ouvrage " Fe ‘ / doit être recherché par toutes les mères de fa- miile. AUGANT CUVE TU LE, L'ART du Taupier, suivant Les procédés du citoyen AurrGNAc, par le citoyen DRaer , membre de plusieurs sociétés d'agriculture , avec fig. À Paris, de l'imprimerie et au bureau de la Feuille du Cultivateur, rue des.Fossés- Victor , n°. 12; et chez Desenne et Debray, li- braires au Paluis Egalité ; in-8o. Prix, 1 franc pour Paris, et 1 franc 20 centimes ( 24 sous ) pour les départemens. -La taupe est un trop grand ennemi des campagnes pour que l’art de la détruire ne soit pas regardé comire un bienfait : ce petit écrit pour lequel Pau- teur a reçu un encourag:meut du gouvernement , doit donc êire recherché des agriculteurs. L'auteur donne d’abord un vocabulaire de l’art du taupier, les traits principaux de l’histoire naturelle des taupes, puis les principes de Part du jaupier. Cette partie de l’ouvrage est infiniment curieuse ei expliquée avec une grande netteté : il west personne qui, l’ayant lu et regardant les planches qui Paccompagnent , ne puisse devenir un excellent taupier. 142 Livres divers. ECcoONOMTE PIONL ICETT QUE: TraiTÉ de l'Esprit public, par Drruponné T'HIEBAUT , professeur aux Écoles centirates du département de la Seune. Strasbouig , chez Levrault ; et à Paris, chez Fuchs, n°. 334. An VI : in-8e. de 400 pag. Prix, 4 francs 50 cen- times, et 5 francs 75 centimes. L'auteur traite successivement de la nature et de l'essence de l’esprit public en général , de son im- portance , de son histoire chez les diflérens peuples, des moyens de le déterminer et de le diriger. L’au- teur voit l’homme malbeureux par -tout : son but est de le rendre plus heureux en indiquant des moyens pour perfectionner les gouvernemens et les associa- tions politiques. À ce ttre il mérite la reconnoissance des philanthropes : son nom est déjà honorablement conbu clans les lettres. . Haxpeuca der Congresser zu Rastadt, mit exn:m Anhange über die Negociation in Seltz. Rastadt, und Basel bey Jacob Decker, 1798. Manusz du Congrès de Rastadt et Précis des Négociations de Selts. Le Congrès de Rastadt , qui, depuis son crigine, fixe les yeux de l'Europe et paruît n’étre pas en- core pres du terme de ses travaux, méritoit d’être l’objet d’un monument littéraire qui réunit dans un même volume toutes les notices sur les personnes qui le composent , la suite de ses opérations et tous les Livres divers. 143 détails imporlans pour le littérateur el le publiciste. Tel est le but de ce Manuel : on y trouve la liste de toutesles ambassades, disposée méthodiquement ; celle des étrangers intéressans qui ont passé à Ras- tadt pendant la durée du congrès ; une notice sur la police de Rastadt et les établissemens d’utilité pu- blique et de société ; un journal des opérations de la députation de l'Empire avec le précis de ses relations avec les plénipotentiaires français ; une notice sur Îe théâtre ( français ) établi à Rastadt ; une liste al- phabétique des adresses des différens personnages di- » plomatiques ; enfin, sous le titre de Zuttérature du Congrès , un catalogue raisonné des livres et bro- chures qui ont paru à l’occasion du Congrès, tant en Allemagne qu’en France. Dans le supplément qui concerne les négociations de Seltz , on trouve la liste } t Les Fa + 4 des personnes qui y ont pris part, les époques des’ conférences et une notice des écrits qui ont paru à cette occasion. Cet ouvrage, le plus complet de tous ceux qui ont fait connoitre le Congrès de Rastadt, sera continué de temps en temps : l’auteur , qui a gardé l’anonyme, est le conseiller de Iégation d’Hanovre, M. le baron de Schwartzkopf, d’ailleurs ministre résident aux cercles du Rhin, associé ciranger de la Société des sciences à Goettingue, liftérateur connu par plusieurs . ouvrages de bib'iographie fort estimés, et le premier parmi les savans de P Allemagne qui a répandu dans étranger des notions justes sur l’Institut national de France dans un mémoire très-détaillé, remis en 1797 à la Société de Goettingue, et imprimé par son ordre. 144 Livres divers MORALE. Drscours prononcé à la société littéraire des Rosati de Paris, pour Le couronnement des Rosières , Le 21 floréal an F de la républr. que française , par Le citoyen F. V. Mucor, président de la société , membre du Lycée des Arts et de La soccété libre des sciences , lettres et arts. Mayence, chez André Crass , imprimenr du département du Mont - Tonnère ; in-8°. de 20 pages. Le citoyen Mulot rappelle d'abord l’ancien usage d'offrir une rose à une fille vertueuse ; il indique les effets utiles de cet usage. Nous avons déjà parlé de ce discours qui a été fort applaudi, en annon- çcant cette cérémonie dans nos nouvelles litiéraires : il ne féra pas moins de plaisir à la lecture. AxNV ES On peut s’adresser au Bureau du Magasin Encyclopédique, pour se procurer tous les Livres qui paroissent en France et chez l’Étranger , et généralement pour tout ce qui concerne la Librairie ancienne et moderne. On s’y charge aussi de toutes sortes d’impressions. Les Livres nouveaux sont annoncés dans ce Journal aussi- tôt après qu’ils ont été remis au Bureau, c’est-à-dire, dans le Numéro qui se publie après cette remise. Le Magasin paroît régulièrement le premier de chaque mois. On prie les Libra’res qui envoient des Livres pour les ane noncer , d'en indiquer toujours le prix, FF écoles , Fabre. la Loi du 11 Are an. IF, contenant Les explications qui accompa- $ gnent Les figures dans l'édition in-4., par Les. auteurs du Porte-feuille des enfans voulant tre leur ouvrage à la portée : des écoles, pour édition in-4°. devenoit trop chère , viennent de imprimer leur ouvrage en petit. PSE et sans pures : chaque petit volume renferme cinq cahiers. rix est de 75 centimes : il n’a encore paru que Jesedix premiers cahiers en deux volumes ; les aute: urs ai die incéssamment les autres. P et 42 citoyen ; la constitution de Jan 111 ; toutes He. lois organiques qui: ont Les et électorales ; s aux. dns > ROMINA= ) tions, elc, 2 pariles. Pix, y franc 25 centi res” kb our Paris , et 1 franc 5 décimes franc de pore Pe aris Chez Bernard, quai des-Augustins. An VI. DRE" * Ce petit Ci déiois ie he essentielles à con- Oître ; est d’une utilité incontestable. à TA: BL E. ne dE À v | Des és pu dans ce > numéro. Ë 1 | V OYAGES. L. Lars. Voyages de la bourg À Ye Perse dans l’Inde.et du Ben-| Ouvrage de M. FRE | . gale en Perse , etc. 22| Journal politique de rene , HISTOIRE. e Hi TiT, Mémoire abrégé sur Théâtre du. Faudeville. Le s _ les principaux historiens de la, Cordsnnier allemand. ‘* 1390 ÿ Bavière ; ere. 28| Théâtre des arts.” Appele et" | “BrocrAPuix. AREA VAE 138 . % donbs. Notice sur, Marc- el Hilaire Vilaris, 54 PuaicosoPnte MORALE, ? Josephi-Jsidori Moralii ad ex- $ cell, virum Josephum | Mazar- rédum ; ete, BTE re MoRAL E. | Livres DIV + AD | Métrologie. | Le. Comparateur facile , KA ‘ + Médecine. | ! Griesinger. Traduction du pre- Recueil de la Société de: Mie mier chapitre.de la phi osa-| decine de Paris. phie de Kant. -651J. M. Lambin, L'ami nee GRAMMAIRE, phelins, ete. €. M. Gatel. Mouyeau Dis VE RE “Agriculture. . tionnaire portatif de la langue Aurignac. Lo ‘française, ele. | 87 etc... BEAUX-ARTS Lidadete Énolitiqhe À. LR Millin. Description des) Dieudonné ‘Thiebaut. Trar Stelues des Tuileries. | 105 2 l'esprit PHblte. 142 MÉLANGESs. |Handbuch der Congresser zut E. "8. Prospsctus des Œuvres Rastadt, ete, ibid choisies de Fénélon. #%-9\. Morale. Ÿ NouvELLES ET CORRESPON-|F, Y. Muülot, Discours pro- DANCE LITTÉRAIRES. noncé pour le "couronnement } Ærycée des arte, FRE 122) des Hosieres, 14400 2 pers À, 28 ao Par A. L pre %e à 9 PRE pour trois mois s 18 francs pour six mois | 36 francs pour un an, Paris que pour les Départemens, frane de port L peut s'adresser au Bureau du Journal peur 3e pros 1 les Livres qui paroissent en France et ehex et pour D à au dors la Librairie an- e et moderne. “ de E Journal , id le a Pb des hommes qui ont nom distingné, uue répulation justement acquise dai roue partié des arts ou des sciences, tels qui les. # toyens AUBFNTON ; DoromiEu ; DYSGENETTES 4 LVESTRE DE SACY, Fourcroy, HALLÉ, Hurmanr, SCHWEIGHÆUSER + Lace ÈDE, LANGLÈS, L'ALANDE, LAGRANGE , LEBRUX , Marron ; MENTELLE , k ARBIER-DUSOCAGE , MORFLLET , Noëc, OBERLIN, ARDON-LA-ROCHETTE, CATLLARD, SarnT-Lécer, an-Mons, ŒRAULLÉ, LÉVELLLÉ, Cousin, Cuviss, J : à one fes ( 4ue, An. ) et à la faire paroître le plus promptement æprès leur publication. On y se. une ] meilleurs écrits imprimés chez l’étranger. On y insère les mémoires les plus intéressans , sur toutes les parties des artset des sciences : on choi- . sit s\r-tout ceux qui sont propres à en accélé les progrès. Te d'u On y publie les découvertes ingénieuses , les 1a tions utiles dans tous lés genres. On y rend compte des expériences nouvelles. On y donne un précis que les séances des sociétés littéraires ont offert de lus intéressant ; une description de ce que les ts d'objets d’arts et des sciences renferment de pli | Curieux, ‘ = | LE Le . On y trouve des notices sur Ja vie et les ouvrag des Savans , des Littérateurs et des Artistes distingués dont on regrette la perte ; enfin , les nouvelles littés « raires de toute espèce. SR PAL PE ue Ce Journal est composé de six volumes£n - 8° an , de 600 payes chacun. Il paroît le premie chaque mois. La livraison est divisée en deux : méros, de chacun 9 feuilles. a { ' On s’adresse, pour Pabonnement à Paris, au Bureau | du Magasin Encyclopédique, chez le C. Fucas , Li-. braire, rue des Mathurins , hôtel Cluny. chez la veuve Changuion et d'Hengst, À Amsterdam ,{ cher Von. Gui gui MERS A | A Bruxelles , chez Lemaire, F 5 A Florence , chez Molini. | À A re EE ; chez Fleischer. LE à chez Manget. | ae A he AS N chez Parce : À Hambourg, chez Hoffmann, A 'Leïpsie, chez Wolf, À Leyde, chez les frères Murray. À Londres , chez de Boffe, gerard'Street. À. SENTE chez Levrault. À Vienne , chez Degen. LM DEEE Lo A Wesel, chez Geisler, Direeteur des Postes El faut affranchir les lettres. - MAMMIFERES. Exrrair d’un Mémoire sur les ossemens fos: siles defquadrupèdes , lu à la Société d’his- toure naturelle , par Le citoyen Cuvrer (1). L'ivr EU R s’est proposé, dans ce mémoire, de rase sembler , autant qu’il lui a été possible , tous les os fossiles qui ont appartenu à chaque espèce , soit qu’il les ait vus per lui-même, ou qu’il en ait seu: lement trouvé la description dans les auteurs ;. d’en réformer les squelettes de ces espèces ; et de les comparer avec celles qui existent à la surface du globe , pour en déterminer les rapports et les diffé rences. Voici la série des espèces sur lesquelles i] a travaillé. 1. L'animal dont viennent les os et les défenses , nommés os, et cornes de mammouth par les . Russes et les habitans de la Sibérie : on en trouve aussi des dépouilles fossiles dans plusieurs parties de l'Europe. C’est une espèce d’éléphant , voisine de l'éléphant d'Asie, mais qui en diffère parce que _ les alvéoles de ses défenses sont plus longues que l’angle que forme sa mâchoire inférieure est plus obtus, et que les lames dont ses molaires sont com= “posées sont plus minces. Son véritable analogue (x) Les Mémoires de cette Société s’impriment à présent chez le citoyen Baudouin. Le premier volume paroîtra bien- tôt : ce Mémoire y sera inséréen entier. À. L. M. Tome 111, x 146 Mammifères: vivant n’est pas connu, quoiqu’on l’ait regardé jusqu'ici comme un éléphant ordinaire, 2. L’animal dont on trouve les dépouilles sur les bords de l’Ohio , dans l’Amérique septentrionale, et que les Américains et les Anglais ont aussi nommé mammouth , quoiqu'il diffère beaucoup du précé- dent : on en trouve aussi des,restes en Europe et en Asie. 11 devoit être à peu près de la taille de l'éléphant , mais plus massif : ses défenses sont plus petites, ses dents moiaires sont armées de grosses pointes iranchantes , dout la coupe présente, lors- qu’elles sont usées, des doubles losanges transver- sales. Il y a de chaque côté trois dents molaires ; une à quatre, une à six et une à huit pointes. 8. L’animal dout les dents, teintes par le cuivre, fournissent les turquoises, dont il y avoit une mine à Simore en Languedoc : on trouve des dépouilles dé cette même espèce dans le département de l’Aiïn, au Pérou et ailleurs. Elle a dù être assez semblable à la précédente ; mais les pointes de ses molaires sont coniques , et, lorsqu’elles s’usent , leur tranche présente d’abord un cercle, puis un demi -ovale , puis une figure de trefle ; ce qui les a fait confondre avec des dents d’hyppopotame. Il ÿ a de ces dents à douze pointes, d’autres à six et d’autres à quatre. 4. L’hippopotame. On trouve en France et ail- leurs des dents et des fragmens de mâchoires , dans lesquels l’auteur n’a trouvé jusqu'ici rien qui difière des hippopotames ordinaires : comme il n’a cepen- dant vu encore aucun os entier , il ne peut afhr- mer l'identité. Ossemens fossiles. 147 5. L'espèce de rhinocéros à crâne alongé , que lon trouve en Sibérie, en Allemagne et dans d’autres pays. L’auteur a vu ds dents et des portions de mâchoires trouvées en France, qui lui paroissent aussi en provenir. Le principal caractère de cette espèce consiste dans la cloison osseuse du nez ; son analogue vivant est inconnu. 6. Une dent molaire, à deux éminences trans- Versales, que possède le citoyen Gillet, et dont le Muséum national possède un germe, ne ressemble ni aux dents , ni aux germes de dents d’aucun ani- mal connu vivant ni {ossile, La seule dent dont celle-là se rapproche un peu, c’est la dernière (110= laire d’en bas du rhinocéros. Cette dent indique donc Pexistence d’une sixième espèce fossile, dont l’ana- logue vivant est inconnu, 7. L’animal, de douze pieds de longueur sur six de hauteur , dont le squelette trouvé sous terre au Paraguay, se conserve dans le cabinet du roi d’Es- pagne à Madrid. L’auteur prouve, par une com- paraïison détaillée de ses os avec ceux de tous les quadrupèdes connus, que c’est une espèce propre et distincte, plus voisine des paresseux que d’un autre genre , et qu’on pourroit nommer paresseux géant. Le citoyen Cuvier consigne ici en passant la découverte intéressante qu’il a faite , que l’aï ou paresseux à trois doigts ( bradypus tridactylus Linn.), a naturellement et constamment neuf ver= tèbres cervicales, C’est la première exception con- nue à la règle établie par le citoyen Daubenton, Ron" 148 Mammifères. que tous les quadrupèdes vivipares n’ont ni plus ni moins de sept vertèbres cervicales, 8. L’animal dont on trouve les dépouilles dans des cavernes près de Gaylenreuth et de Muggendorf, dans le margraviat de Bareuth en Franconie. Plu- sieurs l’ont regardé comme un ours marin, mais ilen diffère , ainsi que de tous les ours connus, par la forme de sa tête, caractériée sur-tout par la sail- lie du front, par l’absence de la petite dent que les ours connus ont tous derrière chaque canine ; par le canal osseux de l’humérus , dans lequel passe l’ar- tère brachiale, et par plusieurs autres points dans la figure et la proportion des os : cependant c’est des ours que cet animal se rapprochoit le plus. 9. L'animal carnassier dont on trouve des os dans la pierre à plâtre de Montmartre : la forme de ses mâchoires , le nombre de ses dents molaires, les pointes dont elles sont armées, indiquent que cette espèce devoit se rapporter au genre canis ; cependant elle ne ressembie complétement à aucune espèce de ce genre. La marque distinctive la plus frappante , c’est que c’est la septième molaire d’en bas qui est la plus grande dans l’animal de Mont- martre , tandis que c’est la cinquième dans les chieus, les loups, les renards , etc. 10. L’animal dont la mâchoire inférieure trou- vée près de Véroune a été regardée, par Joseph Monti, comme une portion du crâne de la vache marine ; idée que tous les géologistes ont adoptée, quoiqu elle soit contraire aux notions les plus simples de l'anatomie comparée. Cette mâchoire , selon le Ossemens fossiles. 149 citoyen Cuvier, a apparteuu à un animal voisin, quoique différent , spécifiquement du mammouih, de l’animal de POhio et de celui de Simore. Son caractère le plus particulier consiste dans le bec que forme sa symphyse. | 11. L’animal du genre du cerf, dont on trouve les os et les bois en Irlande, en Angleterre, à Maestricht, etc. : il est suffisamment distinct de tous les cerfs , et même de l’élan, auquel on l’a rapporté par la grandeur énorme de son bois, par l’aplatissement de sa partie supérieure, et par les branches qui naissent de sa base. On en voit plu- sieurs figures dans les transactions philosophiques. 12. Le genre des bœufs fournit à lui seul plusieurs espèces fossiles. On trouve en Sibérie les crânes de deux qui ont été décrits par Pallas. Il avoit rap- porté les uns au buffle ordinaire; mais depuis il les a attribués à une espèce particulière , originaire du Thibet, nommée arni. Le citoyen Cuvier prouve par la comparaison ostéologique , que ces crânes ne proviennent point du buffle. Les autres ont pa- ru à Palias, venir du bufle du Cap ou du bœuf imusqué du Canada, Le citoyen Cuvier montre qu’ils ne peuvent pas venir du premier ; mais ayant point de crâne d’arni ni de bœuf musqué , il ne porte aucune décision sur leur identité ou leur non-iden- tité avec les crânes fossiles, L’auteur décrit aussi deux sortes de crânes qui ont £te trouvés dans les tourbières du département de la Somme , et qui réssemblent beaucoup à ceux de K 3 150 Physiologie. notre bœuf commun, et à ceux de l’aurochs, mais qui les surpasert en grandeur de plus d’un quart. Le citoyen Cavier conclut de ses recherches, 1 qu'il n’est pas vrai de dire que les animaux du midi ont autrefois vécu dans le nord, leurs es- pèces n'étant pas parfaitemeut identiques ; 2°. qu’il a vécu dans toutes sortes de pays des animaux qui n’y vivent plus aujourd’hui, et qui ne se retrouvent même nulle part dans lés pays connus. Il laisse d'après cela aux géologues à faire à leurs sys- tèmes les chingemens ou les additions qu’ils croiront convenables pour expliquer les faits qu’il a ainsi cons- tatés. PHYSIOE OGÉE CONSIDERATIONS phystologiques sur La produc- tion de la graisse chez les animaux, par J.* J. Virer , du Val-de-Grûce. Si quid novisti rectius istis , Candidus imperti: sinon, his utere mecum. Horat. , Epist. VI, ad finem. LP me semble qu’il y a dans les corps organisés et sur-tout chez les animaux une certaine quantité d’ac- tion et de vie qui, s’exercant quelquefois en maæxc- mum dans certains organes, prive d’autant plus les ’ Graisse chez les animaux. 151 autres parlies du corps de cette action vitale, que ce marimum est plus considérable (r). Souvent cette énergie vitale particulière dépend de la conformation , soit générale, soit individuelle : elle est aussi originelle ou factice , variable ou cons- tante , simple ou composée. Cette vie prépondéranté de certains organes a lieu en général chez l’homme , celui sur-tout qui est policé, dans le système cérébral et nerveux ; chez les oiseaux, dans l’organe respiratoire ; chez les reptiles, dans l’éxercice de V'irritabilité ; chez les poissons , dans les organes de la génération, etc. Elle a lieu individuellement pour les divers tem- péramens de chaque espèce d’êtres , chez lesquels elle forme cette idiosyncrasie particulière qui influe sur tout le resté de la machine, sur-tout dans l’état morbifique ou nosoique : elle est alors originelle, et le plus souvent constante. On la voit factice chez l’homme de lettres, chez celui qui ‘’adonne à un fort travail, etc. et dépend de ces sortes d’occupations. Elle est variable dans l'acte de la réproduction, par exemple : ainsi dans la gestation la matrice à une vie prépondérante ; mais parvenue à un certain point d'rritation , cette vie (1) Les athlètes ont le système musculaire prépondérant , @ais très-ordinairement l’entendement obtus. Les personnes voraces ne savent souvent rien faire que manger : l’homme de lettres a le système cérébral très-exercé , Ms pour ainsi dire beaucoup d'intelligence ; mais le reste du corps est foible | etc. On pourroit démontrer ceci par une infinité d'exemples que chacun pourra connoître. K 4 152 Physiologie. change de détermination ; elle se fixe par une es< pèce de sympathie (2) dans les organes de lactation ; qui se remplissent alors d’un liquide nourricier. Cette espèce de métastase paroît être une des causes de l'accouchement (3). Cette vitalité particulière d'organes est ordinai= rement simple, mais quelquefois elle se compose comme, par exemple, chez les poissons , où elle a lieu pour les organes de la génération ; mais cette fonction-ci tenant à celle de la nutrition, la vita- lité se répand de même sur elle en maximum aussi ces animaux sont très voraces, comme très- prolifiques (4). Elle a lieu encore dans certains temps de la vie, comme dans celui de la puberté. Il y a aussi un Maximum de vie particulière pour la formation de la graisse 3 on pourroit croire que , comme celle-ci a son siége dans le tissu cel- lulaire , il seroit aussi celui de cette vitalité 3 mais on peut apercevoir encore quelques autres rap- ports. On connoit ceux de la transpiration , du (2) On connoît depuis long-temps la sympathie de la ma- trice avec les mamelles : la nature lie ensemble les organes dont les fonctions sont analogues ; il y a mème un mouvement fébrile alors. (3) Je pense que ceci pourroit acquérir une grande proba- bilité , en considérant physiologiquement ces organes dans les dideiph:s Bdciphys. L. (4) Si le trop fréquent usage du coït débilite l'estomac, geci doit être considéré comme une maladie, mais ne change pas la proposition qu'on doit envisager pour l’état sain. 4 a 1 £ Graisse chez Les animaux, 153 mouvement, des passions, de l’exercice , du som- meil, etc. nous ne nous en occuperons pas parti: culièrement, Les animaux les plus sujets à s’engraiseer parmi les mammifères, sont, 1°. ceux qui sont dormeurs pendant lhiver (5)3 2°. les ruminans; 38 les pa- chydermes (6); 4°. les aquatiques, et sur-tout les cétacés. Parmi les oiseaux, ce sont les palmipèdes et les granivores en général : il n’y a rien de bien mare qué chez les reptiles ; enfin, presque tous les pois- sons sont sujets à devenir très-gras. Les autres animaux à sang rouge, sur-tout ceux qui sont carnivores, sont ordinairement maigres. Les animaux à sang blanc (ou plutôt énverté- brés ; puisque les zoophytes n’ont pas véritable- ment un sang blanc, car il paroît que c’est l’eau où ils sont qui s’infiltre dans leur corps); tous les in- Yertébrés, dis-je, mé paroissent dépourvus de vraie graisse. On a dit (7) que les insectes en avoient, (5) Ainsi que ceux qui passent l’hiver renfermés, comme la plupart des rongeurs, et même des édentés, qui vivent dans des climats plus chauds que les nôtres, (6) Je compterois volontiers dans ce nombre l'éléphant dontona, je crois, trop vanté l'intelligence , bien qu’elle soit moins boraée, à raison de son orgauisation, que celle des autres animaux: les pachydlermes ont l’organe du toucher ,prin- cipalement à la lèvre supérieure ou au nez, un odorat fort bon et le sens de la vue foible; toutes shoses qui conviennent à l’éléphant et peut-être aux solipèdes. (7) Malpighi, de Bombryce , pag. 16; Sivammerdam , de ÆEplemera , pag. 576 ; Lyonnet, Chenile du saule et Théo» logie des ins.; de Géer. Mém. , pag. 11. z. 154 Physiologie. mais on peut s’assurer. que ce n’est qu’une substance muqueuse pleine de trachées, et qui n’a que lap- parence de la graisse , comme le célèbre Lyonnet (8) paroît l’avoir senti. Enfin , cette prétendue graisse est précisément la matière qui forme les organes exté- rieurs de l’insecte sous son dernier état. Ce qui semble confirmer ceci, c’est que j’ai ob- servé que plusieurs diptères (9) sont sujets, en sor- tant de l’état de nymphe, à une maladie : cest une sorte d’empâtement à la base et à la moitié de la largeur de chacun des anneaux de leur ab- domen. Cette espèce d’engorgement est plus consi- dérable sous le ventre ; il paroît d’un tissu fon- gueux et d’une couleur blanchätre : ces insectes en périssent promptement , car les ouvertures de leurs stigmates sont bouchées, et ils sont étouflés. On peut attribuer cette maladie au travail imparfait de la chrysalidation , ou à une sortie prématurée de l’érat de nymphe (ro); ce qui auraempêchéun développement plus parfait des organes extérieurs de ces animaux : une chaleur plus vive qu’à lors dinaire aura trop hâté ce travail, et l’attente de la nature aura été trompée. (8) Cette maladie est peut-être due aussi à une nourriture trop abondante de ces larves, qui sont excessivement voraces. (9) Zbid. Si cette matière paroît devenir huileuse au feu , on doit attribuer cela à l’action du calorique , qui, comme on sait, forme de l’huile empyreumatique en agissant sur les substances animales. (10) Ou Æntliata de Fabricius, mais jusqu’à présent sur la Musca scybalaria et la Domestica seulement; c’est sur-tout au milieu de l’automne pour cette dernière. à Ver rap, PT NS PL LP + Graisse chex les animaux, °° x55 Le sang rouge paroît donc être nécessaire pour la formation de la graisse, quoiqu’on ait remarqué que les animaux gras (11) aient moins de sang que les autres : il est aussi plulôt veineux qu’ar- téziel chez eux (12), car on peut considérer l’ac- tion des artères (13) sur le sang, comme une sorte de digestion qui le rend éminemment , propre à la réparation de l’économie animale , mais non pas à la formation de la graisse , qui n’est qu’une sura- bondance de nutrition (14); ce qui paroit être le propre du système veineux. Une raison puissante se réunit encore à celle-ci ; c’est que le sang artériel est plus oxigéné que le | veineux , qui est pourvu d’une plus grande quantité d'hydrogène et de carbone , élémens principaux de la graisse. Nous en avons déjà fait mention en parlant des hommes marins (15) ; aussi les animaux qui (ar) Arist, , Hist, anim. , IUT, cap. XIX; Fabrio. Hil- danus ,; cent. VI, obs. XCXVII ; Francesco Redi, Oper. omn.,; tom. VII, pag. 61; Boerhaare ; Prælect. ad inst. med ; tom. IV , pag. 527 ; c’est parce que ce sang est em- ployé à produire la graisse. (12) Ceci est sensible chez les enfans et les vieillards ; mais Jes hommes et les animaux d’un âge moyen, chez lesquels il y a une pléthore artérieile assez souvent , sont maigres. (13) Elles paroissent agir sur le sang , et par les nerfs qui les accompagnent , et par leur contractilité, de même que les intestins avec lesquels elles sont comparables. (1x4) Les enfans engraissent parce qu’ils mangent plus qu’il ue faut pour leur accroissemeut , et Les vieillards parce qu’ils pe croissent plus : il y a d’autres causes qui empêchent … quelques vieillards de devenir gras. (15) Dans le journal de cette année , mois de messidor , sur la fin de la dissertation. 156 Physiologie. respirent moins que les autres, tels que les cétacés et les poissons, ont une graisse fluide et considé- rable : ils exhalent, lorsqu'on les ouvre, une odeur de gaz hydrogène phosphoré, qu’on a même vu s’en- flammer spontanément quelquefois (16). Enfin, les animaux qui respirent beaucoup, comme les oiseaux ; sont ordinairement maigres. Les animaux des pays froids sont plus gras que ceux des climats plus rapprochés de l'équateur, parce qu’ils transpirent moins (17) : cet eflet se voit aussi sur les animaux lents et qui s’exercent peu ; il dé- pend de la même cause. Par une raison contraire , les animaux agiles sont maigres (18), tels que les quadrupèdes et les oiseaux carnivores ; et la colère qui les enflamme à la vue de leur proie , y contribue encore. L'influence de laccroissement sur la graisse se voit chez les reptiles qui ont une croissance ex- trêmement longue (19), et qui, à cause de cela, deviennent rarement gras : quoique quelques-uos de (16) Sur-tout en dépéçant des baleines mortes depuis quelques jours. " (x7) L'effet de la transpiration est sur-tout sensible chez les animaux dans l’automne, où le gibier s’engraisse ou mai- grit dans l’espace de deux à trois jours : les chasseurs le savent bien, (18) Kaauw Boerhaave ; de Persp. , n°. $6g, sur-tout au. tour des reins. (19) On a dit de temps immémorial que le crocodile erois- soit toute sa vie. Voyez Bochard , Hierozoïcon, tom. I. Tous. les reptiles ont une vie très-longue. Graisse chex les animaux, 157 ces animaux ne paroissent pas transpirer (20), le renouvellement de l’épiderme chez les autres me pa- roît une sorte de transpiration (21) ; s’ils respirent peu , ils vivent aussi de choses peu nourrissantes, et digèrent lentement; ce qui compense ces fonc- tions. Si Pon voit dans les animaux les parties pourvues de tissu! cellulaire susceptibles de s’engraisser ; cer- tains organes, sur-tout ceux qui ont beaucoup de vaisseaux artériels, tels que le cœur ; les pou- mons , etc. ne le sont presque jamais : voilà la cause du décroissement apparent de leur poids, à mesure que les autres parties se chargent de graisse. On observe cet effet, sur-tout chez les animaux domes- tiques (22). On observe encore que les personnes bossues sont . toujours maigres (23) : la capacité de leur poitrine seroit-elle plus ample que chez les autres hommes? et auroit-elle plus d’influence sur tout le corps par une respiration plus considérable ? Les oiseaux sont bien moins sujets à s’engraisser (20) On a observé que les tortues ne perdoïent rien par la transpiration, Margraf assure qu’elles ne changent pas de carapace. (21) Plus ils mangent , plus ils changent souvent de peau, . etsur-tout en été ; car ils ne mangent point en hiver :ils vivent d'insectes le plus ordinairement. (22) Senae , Struct. du cœur , tom. I , pag. 133, seconde édition. Voyez aussi Robinson. | (23) Sinibald , Geneanthropia , pag. 156 : il attribue cette émaciation à leur ardeur en amour; on sait combien cette passion y inilue, 158 | Physiologie. que les mammifères : on connoit par là l’empire de leur respiration. Ceux qui sont aquatiques respi- rent presqu’autant que les autres (24); et s’il était vrai comme on l’a cru (25), que les hirondelles vécussent pendant l’hiver sous les eaux, elles de- vraient être d’une constitution plus grasse. Presque tousles mammifères qui aiment l’eau (26) ont leur graisse à la périphérie du corps; ce qui sert à les défendre des impressions de ce liquide : ‘tels sont les pachydermes en général , les phoques, les morses et sur-tout les cétacés (27). Ces ani- maux-ci sont couverts d’une couehe épaisse de lard ; sa substance huileuse transude continuellement au travers des pores de la peau (28). Je crois que la matière qu’on appelle blanc de baleine n’a pas d’autre usage, chez le cachalot à grosse tête (29), (24) Robert Boyle l’a éprouvé ; ils retiennent un peu plus long-temps leur haleine : s’ils sont plus gras , c’est qu’ils ont une nourriture abondante qui assouvit à peine leur immense voracité, (25) Olaüs magnus , Schæffer ; Hévélius ; Kirker, Pech- lin , Klein , etc. mème deux célèbres naturalistes étrangers : vivans ; cependant cela est impossible à croire et répugne à la raison. (26) Excepté ceux qui ont beaucoup de poils , comme cas- tors , loutres , rats d’eau , ete. (27) Le lamantin n’ayant point de pieds postérieurs , ayant un nez rapproché du front comme les évenis chez les cé- tacés , peut entrer dans cet ordre. (28) Martens ; Spitzherg , pag. 103 : il dit qu’elle est très- glissante. (29) Physeter macrocephalus L. Tous les autres cétacés , sans en excepter le lamantin, ont le dessus de la tête couvert PORT En in Rene Graisse chez les animaux. 159 que de servir à lubréfier la peau de son corps: cela est d'autant plus probable, qu’elle est fluide daus le corps de Pauimal, et qu’on sait, à n’en pas douter, qu’elle ne doit sa solidescence qu’à Paction de l’oxigène : elle est placée d’ailleurs sur la tête de cet animal , ce qui fait qu’elle peut se répandre sur lui par l’action de son impétueuse natation. La position de cette substance a une grande analogie avec celle de l’organe mucifère qui est placé sur le front des poissons (30), et qui répand une matière visqueuse sur leur corps. Les oiseaux pilimipèdes et les mammifères aquati- ques,garnis de longs poils,çsemblent sécréter par toute leur peau une humeur huileuse qui défend leurs couveriures de l’humectation ; aussi ne les voit-on presque jamais mouillés (31). Les reptiles aquatiques ayaut une couverture épaisse et solide , n’ont pas eu besoin de cette sécrétion (32), non plus que les crus= tacés et les coléoptères aquatiques : les mollusques, les vers et les zoophytes sécrètent tous une hue d’une épaisse couche de graisse , dont les cellules contiennent une sorte de blanc de baleine plus ou moins abondamment, Hunter , Phil. trans.; Anderson , Nachr. vonisl. , theil 1]. (39) Voyez ce qu’en ont dit. Hunter, P. Camper , Geof- Jroy père, Ficg-d’Azyr , qui ont bien connu cet organe. (31) On a supposé que la glande coccygienne des oiseaux leur servoit à huiler leurs plumes ; mais leur bee ne peut en faire l’office | et celle huile est en trop petite quantité; outre qu'il est impossible d’huiler toutes les plumes. (32) Quelques reptiles aquatiques semblent cependant sécré- ter une liqueur muqueuse ,qui paroît tenir lieu de changement de peau chez eux. : 160 Physrologié. meur muqueuse qui les garautit des impressions dé Peau (33). Quels que soient ces rapports de la graisse avec ces besoins des-animaux , il me semble qu’il y en à de plus généraux et de plus frappans. En effet, si lon considère dans les diverses familles de ces êtres les organes de la nutrition, on remarquera qu’une certaine conformation produit des différences dans la quantité et les propiétés de la graisse. Cela est frappant dans les ruminans, qui ont tous du suif (34) : il paroîtroit même que quand ils ne font pas usage de leurs quatre estomacs, leur suif en est moins solide, comme dans le temps qu’ils tettent. Ces animaux sont non - seulement sujets à s’en- graisser, mais ils ont encore la plupart des espèces de congestions stéatomateuses naturelles, telles que les bosses dorsales des chameaux, dromadaires , bi< sons et zébus, les queues des moutons de Barba- tie, etc. (35). (33) Tous ces gymnodermes paroissent avoir des glandes mucifères cutanées : les insectes n’en ont pas. (34) Cela paroît en dépendre , et la solidité de cette subs- tance graisseuse paroît tenir à une digeslion faite à plusieurs fois : des crétins du Valais , ont les énormes sérumes ont l’air de congestions sébacées , ruminent quelquefois. Voyez Peyer, Mérycol. et Valmont de Bomare, (35) Le célèbre Buffon a remarqué que la semence du be- Lier se durcissoit comme du suif en se refroidissant : peut-être cela est-il commun à tous les ruminans , comme il le pense. On observe que les animaux gras ont moins de semence que les maigres , et qu’ils sont moins ardens en amour : on les On voit moins féconds aussi. Graisse chex les animaux. t6t On trouvée chez les cétacés, des intestins très-vas- tes et dés estomacs souvent multiples (36), même plus considérables que chez les précédens ; et s'ils ont la graisse plus molle, elle dépose aussi beau- coup de blanc de baleine, lorsque Poxigène a brûlé une grande partie de l’hydrogène qui la tenoit fluide, IL faut observer en passant, que cette concrescibilité est tout à fait analogue à celle du camphre dans : les huiles volatiles ; ce qui semble pousser aussi loin qu’il est possible l’analogie des deux immenses fa- milles d’êtres organisés : on pourroit peut-être pro- duire par une oxigénation bien entendue , une plus grande quantité de ces deux sortes de substance con- crètes, quoiqu’on n’ait obtenu de l’une qu’une es- pèce d’adipo-cire (37), et de l’autre une matière résineuse, = Les pachydernes, tels que les cochons, les ta pirs, les rhinoceros, les hyppopotames, etc. sont ordinairement gras aussi : on leur irouve de grands intestins , un cœcum et un estomac très-considé- rables. - L’estomac des édentés , tels que les mÿrmécopha- ges, les pangolins , les paresseux , les tatous , etc, est (36) Les baleines l’ont simple, mais immense: on en a trouvé trois ( Tyson, pagzr, lab,I,fig. VI; Bartholin , cent. II, hist. XXV ), et même jusqu’à cinq (le citoyen Cuvier ) dans le marsouin. (37) Nom imposé par le célèbre Fourcroy,à ce que les fos- soyeurs appellent le gras : la graisse oxigénée du citoyen lyon a une sorte d’analogie avec elle, quoiqu'il y ait des différences assez considérables. Tome IIL TL Lt PA Physiologie. aussi fort grand , eu égard à leur grosseur : ces ani- maux sont ordinairement gras, quoiqu’ils puissent : maigrir promptement. La graisse, quoique moins marquée clez les oei- seaux que chez les mammifères (38), est cependant plus considérable chez ceux qui ont un grand jabot, tels que les gallinacés. Les palmipèdes, voraces qui ont aussi un large œsophage (39), ont beaucoup de graisse molle qu’on doit en grande partie attribuer aussi à leur nourriture, Enfin les poissons, qui ont presque tous de grands estomacs et intestins, ainsi que beau:oup de cœcums chez la plupart, sont ordinairement fort gras, d’au- tant plus qu'ils ont une respiration fort bornée. Les reptiles out des intestins simples d’une lar- geur médiocre : ils sont assez maigres ; ils mangent et respirent peu , aus:1 leur graisse est molle, Les mammifères et les oiseaux carnivores, dont les intestins et l’estomac sont simples et courts, sont tou- jours maigres (40), et le peu de graisse qu’ils ont est toujouis molle. L’homme, qui a quelqu’analosie de. conformation avec ls quadrupèdes carnivores, a aussi une graisse assez fluide. (38) Parce qu’ils respirent beavcoup plus. (39) Tels que les pinguins, grèbes , goëlands , etc. Dans les oies qu’on engraisse, on distend Je jabot qui devient très-grand : alors cel organe a un maximum d’activité qui semble ètre le centre de la vie de l’animal. < (40) Un avimial sarcophage n’est gras que contre nature c’est une sorte de difformité chez lui ; c’est une entrave à sa vigueur , à sa légéreté ; ce qui peut le priver de sa proie. La nature n’avoit pas non plus destiné l’homme à être si gras. ! Graisse chex Les animaux. 163 En général les animaux herbivores sont plus gras que les carnassiers 3 car ils ont des intestins plus considérables : ceci ne doit point comprendre la grande classe des invertébrés , dont l’organisation est trop différente pour admettre les mémes règles, Il est encore un fait qui servira à démontrer les rapports de l’organe nutritif avec la graisse ; per- sonne ne révoquera en doute l’aualosie d’acticn de la peau avec celle du tube intestinal , et en parlicu- lier de l’estomac (45); elle est, pour ainsi cire , un estomac extérieur qui, nous recouvrant de toutes’ parts, digère tout ce qui nous eutoure : voilà pour- quoi on observe que les personnes qui sont expo= sées aux vapeurs animales, tels que les bouchers , : les cuisiniers et autres, sont presque toujours gras, . Ceci est donc une suite naturelle de lanalogie que nous avons lâché de faire apercevoir, : il en est sans doute beaucoup d’autres que le temps seul et les recherches pourront nous dévoiler. Je pourrois peut-être en présenter encore, mais elles ne sont pas assez mûries ; et si je n’ai pas gardé celle-ci, c’est parce que j'ai compté sur la sagacité du lec- teur qui saura y suppléer. (41) Jamais ses rapports n’ont été mieux démontrés que par le retournement des polypes, qui digèrent aussi bien qu'avec leur estomac naturel. Voyez Trembley , Mém, sur les polypes d’eau douce , n°. 3, si je ne me trompe. bi » MS Re Ce CLEAN Te OBSERVATIONS sur une Esquinancie membra- neuse où Angine polypeuse , guérie à l’aide de La vapeur de L’ Éther , lues à la Suciété de médecine par le citoyen PiInez , médecin de l’hospice de la Salpétrière. Lis Médecins de Paris ont eu occasion d'observer cette année quatre eufans attaqués de la maladie appelée angine polypeuse : les deux premiers ont été traités dans des maisons particulières, à peu de jour d’espace l’un de Pautre. Chez lun, il s’étoit manifesté le symptôme particulier d’une suppression presque totale des urines,avec de vives douleurs dans leurs conduits ; celui - là mourut , l’autre fut sauvé ; ils avoient cependant été traités tous deux avec l’é- métique et les cantharides; les deux autres petits malades se sont montrés à l’hospice de la Salpé- trière , quinze jours après Pinvasion de langine chez les premiers, et à vingt-quatre heures l’un de l’au- tre. Le premier est mort ; il avoit été traité comme lés précédens, mais les urines avoient été rares, Par l’ouverture du cadavre , on ne reconnut aucune trace d’affection dans les voies urinaires : on trouva dans le larinx la fausse membrane ou la concré= tion albumineuse décrite par les auteurs ; cependant on ne put-observer aucune marque d’inflammation, Le quatrième enfant, celui qui est objet de cette observation , avoit éprouvé les mêmes symptômes : Voyage. - -165 il urinoit mieux à la vérité, et l’émétique l’avoit d’a- ‘bord beaucoup soulagé ; mais ce remède n’excitant ‘plus le vomissement à la seconde période de la ma- ladie, le citoyen Pinel a fait respirer à l’enfant la vapeur de léther, qui, en déterminant l’expectora- tion des matières gluantes , a dissipé la suffocation et l’a sauvé du danger le plus immiuent. La poi- trine continuant de s’embarrasser pendant quelques jours, la vapeur de l’éther a été administrée avec le même succès , et l’enfant est parfaitement guéri. C. D. VOLTAGE Vor4ce du ci-devant duc du Châtelet en Por- tugal, où se trouvent des détails intéressans sur ses colonies , sur Le tremblement de terre de Lisbonne , sur M. de PomuzaL et La cour ; revu eb corrigé sur le manuscrit , et augmenté de notes sur la situation actuelle de ce royaume et de ses colonies , par J. Fr. Bour- GOING , ct- devant ministre plénipotentiaire de la république française en Espagne , mem- bre associé de l’Institut natwonal ; avec la carte du Portugal et la vue de La bace de Lis- bonne : 2 vol. in-8°. A Paris, chez Buisson ; imprimeur-libraire , rne Haute-Feuille , n°. 20. Les Portugais, qui, dans le seizième siècle, s’é- toient emparés du globe par la hardiesse de leurs D 166 Voyage. entreprises, par l’intrépidité de leurs navigateurs, . par leurs connoissances nautiques et géographiques ; qui surent s'ouvrir une nouvelle route vers l’[ude par la conquête du cap des Tourmentes ; qui ap- prirent à Christophe Coiomb la science des décou- veries, à V’asco de Gama., à Améric-Vespuce., - à Barthélems Diaz, à Albuquerque , celle des conquêtes, virent décheoir dans le dix-septième siè- cle et sous la tyrannie espagnole , leur commerce, leurs colonies et leur gloire. Les Espagnols et les Hollandais, jaloux d’une puissance qui sembloit,, par ses rombreux établissemens en Asie, en Afrique, en Amfrique, par l’étendüe de ses rapports comer- ciaux en Europe, vouloir soumettre les autres peu- ples à sa domination, l’attaquèrent sur tous les points de son existence, et lui arrachèrent suscessivement : les pays immenses 4 elle avoit soumis, les sour- ces de richesses qu’elle s’étoit créées. Au dix- -sep- time siècle, le Portugal , affaissé sus le poids des rivalités, dépouiilé par les combinaisons de lPinté- - rêt, vit consommer sa dégénération et arriva à sa nullité politique : à peine s’apercevoit-on que cette nation occupât une place sur le sol européen, lors-. que M. du Châtelet voulut connoître les causes de cet anéantiss-ment. Il parcourt les six provinces qui composent ce royaume ; il interroge le sol, le climat , les mœurs, les lois, les préjugés, les hom mes, la religion même d2 ce pays oublié , et tou_ ensemble lui répondent : « Nous somines sans pro- » tections, sans encouragemeus; ce que la nature » a fait pour nous est sans cesse déiruit par Îles faux >» 2 Bi és Voyage en Portugal. 167 » Calculs du gouvernement. Nous vivons sous la pe- » santeur d'impôts multipliés et injustement répar- » tis : nous sommes courbés sous le joug d’une su- .» perstition imbécille ; les sciences qui instruisent .» les nations comme les individus, les arts qui ani- » ment les talens comme ils eimbellissent les cités, 5 l’émulation qui répand l'instruction comme elle » multiplie les découvertes, tout languit, tout pa- » ralyse le caractère national , tout appésantit les » chaînes de la dépendance ecclésiastique, tout flé- » chit sous les entraves de l’influence étrangère , » et conquérans sous Alphons, navigateurs heureux » sous Emmanuel, puissans sous Sébastien , les Por- » tugais sont aujourd’hui presque effacés de la carte » de l’Europe. » En effet, le Portugal nous étoit : aussi peu connu que la Chine, lorsque Dumouries, dans son Tableau de Lisbonne , et James Mur- phis , architecte anglais, dans son état du Por- tugal , ont voulu nous rappeler qu’il existoit encore ; mais le premier n’a donné que quelques détails sur la capitale, détails dictés plus par humeur que par la vérité, et peu propres à nous faire apprécier ce peuple plus à plaindre qu’à mépriser. Le second n’a parlé dans le premier volume qui a été traduit, que des objets qui avoient un rapport “lus direct à l’art qu’il professe. « Il restoit encore à présenter le » Portugal sous ses différentes faces . à décrire, et » ses provinces d'Europe et ses colonies lointaines, » ses mœurs, ses habitudes, sa population, ses pro- » grés dans les sciences et les arts, sa politique, » etc. M. du Châtelet s’est trouvé à portée de rem- L 4 168 Voyage. plir cette tâche ; il a consulté les personnes Îles plus instruites ; ila vu de près le marquis de Pombal dans sa retraite ; il en a tiré des no- tions aussi curieuses qu’authentiques, et en a'sou- vent vérifié exactitude sur les lieux mêmes. » Son manuscrit étoit entre les mains de son secré- taire (1): il a été confié, pour en faire disparoître les incorreciions et les inexactitudes, à un homme bien en état d’y répandre ce même intérêt qu’on trouve dans la lecture de son Tableau de l'Espa- gne. Le citoyen Bourgoing , chargé successivement des relations politiqnes de la France avec l’Espa- gne sous l’ancien et le nouveau gouvernement, étoit pour ainsi dire le seul en état de donner de l’au- thenticité aux observations du voyageur , et d’y ajouter tout ce qui, depuis vingt ans, a pu pro- EE SL % & duire de variations dans la politique, dans l’écono- mie intérieure , dans les intérêts commerciaux de. celte partie de l’Europe. Des notes et des suplé- mens aussi instructifs que curieux augmentent le prix de cet ouvrage, en nous faisänt connoître la situation actuelle de ce royaume. Nous ne nous arrêtons ni sur la description to- pographique du Portugal , ni sur l’état présent de. ses colonies : l'africulture, le commerce, les finan- ces, la Shbulirion , ces sources intarissables de la santé des corps politiques, nous occuperont d’abord ; nous jetterons ensuite un. coup-d’œil sur la rehigièe les mœurs et le gouvernement qui en sont les soutiens. (1) Cormatin. Voyage en Portugal. _ 169 Les découvertes éloignées que firent les Portugais dans le seizième siècle, les colonies riches et nombreu- ses qu’ils fondèrent étoient autant d’appâtsd’attraction qui devoient faire sortir ce peuple de son indolence naturelle , et produire le même effet qu’éprouva l’Es- “pagne après la conquête du Pérou et du Mexique : ‘da population en souffrit, l’agriculture fut négligée , et la terre ne satisfit plus aux besoins 3 la rareté influa sur les prix : ce fut alors que les Anglais of- frirent au gouvernement de répandre l’abondance dans ce royaume par limportation de leurs blés, Cette proposition, impolitiquementacceptée, fit aban- donner ce qui restoit de culture : les cargaisons mulüpliées ne suflisant pas aux demandes impé- - rieuses de la nécessité , la disette produisit les mur- mures et même des mouvemens d’insurrection : on les appaisa en faisant croire au peuple quesbrentôl él auroit du pain sans travailler , et c’est tou- jours de cétte manière qu’il est la dupe et la vic- time des vues intéressées ou secrètes de ceux qui le gouvernent, Le ministère portugais ne s'aperç nt que sept ou huit ans après ce traité désastreux , que . les terres resloient incultes ov étoient abandonnées ; mais il n’étoit plus temps d’y remédier: Les An+ glais , devenus successivement mäîtres des richesses ‘du Portugal, cherchèrent à persuader que /e pays, naturellement stérile, ne pouvoit fournir à sa subsistance ; 20, que l’agriculture devenoit inu- vüle au Portugal, parce que les autres états de l'Europe étoient vôligés à lui fournir Le né- cessaure. LA | ee 170 Voyage. | M. du Châtelet réfute sans peine ces deuxassertions de l'intérêt , en «prouvant que , dans les temps «n- cienset jusqu’au dix-septième siècle, le Portugal re- cueilloit assez de grains pour pouvoir en exporter, et que ce n’étoit pas la faute de la terre si ses pro- : ductions ne répondoient pas aux besoins de ses ha- bitans. M. de Pombal , qui connoissoit les vrais prine cipes d’une bonne administration , qui auroit été le Sully et le Richelieu de sa patrie s’il n’avoit eu à lutter sans cesse contre la paresse du peuple et la . haine des grands, chercha , en arrivant au ministère, - à secouer le joug anglais : il voulut rappeler à l’agri- : culture des bras inactifs ; il mit des bornes à Ja culture des vignes, dont le produit étoit presque le - seul objet d’exportation pour les Anglais. Ses in- tentions furent calomniées, sa sévère fermeté fit taire les murmures, et ses efforts auroient eu le succès - qu’il en attendoîit si sa disgrace n’avoit pas ramené la lanoueur et la domination étrangère. Sur la fin de son ministère , les productions du sol portugais | remplissoient cependant les marchés, et les habi- | tans convenoient que l’encouragement donné à Pa- griculture produisoit déjà plus de la moitié de leur subsistance ; ce qu’ils n’avoient point éprouvé depuis le dernier siècle. Le commerce que le Portugal faisoit avec ses dia mans, ses topazes, ses perles, son or, ses cotons, son tabac, ses sucres, ses beaux cuirs, ses bois de tein- » ture, son poivre, son indigo, etc. leur fut enlevé par. le traité de 1703 , que Methuen , habile négociateur anglais, eut l’adre:se de surprendre sous le prétexte Voyage en Portugal. 171 de fournir des étoff:s de laine en échange des vins portugais. Ce traité ne paroissoit être d’abord qu'une liberté de circulation des marchandises respective- * ment locales ; il devint bientôt la ruine de l’industrie portugaise. Sous le titre d’alluée , Angleterre a cons- - tamment éloigné toute concurrence , a défendu aux Portugais d’avoir d’autres besoins que ceux qu’elle * pouroit satisfaire, leur a ainsi enlevé toute leur exis- tence commerciale , et leur a plus pui que n’auroient pu faire des ennemis déclarés. Avant le tremblement de terre, les Anglais pompoient chaque année trente * miilions de livres tournois en espèce. M. du Châteiet avance qu’à cette époque il ne restoit pas plus de quinze millions de numéraire dans ce royaume. Le citoyen Bourgoing croit qu’il n’est plus aussi rare: on le doit sans doute aux mesures heureuses dont se servit constamment M. de Pombal, pour se soustraire au despotisme anglais. Celle de 1766 , qui encoura- ” geoit l'importation des blés de France lorsqu'on en permettoit exportation, étoit un essai qui auroit pu rompre un des principaux liens qui assujeltissoit le Portugal, si le ministère français n’y avoit mis des obstacles par la vaxillation de ses déterminations. Ce * ministre, supérieur à sa nation, à ses contemporains en aduninistration, établit à grand frais des manu- factures de soie, de drap, de cuir, de savonnerie, de chapeaux, de verrerie 3 il fit des ordonnances sé- vères pour empêcher toute importation d'étoffes étrangères ; s'il ne réussit pas toujours dans ses tenta- tives é: onomiques, on ne peut l’impuier qu'à lim- per feciion des ouvrages manufacturés, et sur-tout à 172 À Voyage. la lenteur insouciante des ouvriers. Il voulut aussi ât- tirer les nations du nord par des traités avantageux s mais ces relations ne pouvoient acquérir une activité utile aux Portugais, qui n’ont jamais tenté de parcou- rir les mers septentrionales. Si les successeurs de M. de Pombal avoient voulu suivre ses vues et per fectiouner ce qu’il avoit commencé, les Portugais seroient parvenus insensiblement à se débarrasser des gènes dont les Anplais ont su les entasser , et à opérer dans le commerce ane révolution aussi remarquable que leurs nombreuses découvertes firent autrefois dans les diverses parties du mond:3; « mais il fau- » droit avant tout, dit le voyageur , attirer dans leurs ports toutes les at commercantes ; il faudroit renoncer au moins pour plusieurs années à une partie des droits d’entrée et de sortie; il faudroit guérir son gouvernement du préjugé , qu’on peut impunément grever d’impositions l’agriculture , l’industrie et le commerce : la religion mal enten- due est aussi pour les Portugais un obstacle à leurs progrès dans tous les arts qui exigent une applica- tion soutenues ce n’est pas qu’à beaucoup près ils manquent d’aptitude pour, les diverses branches d'industrie ; ils ont de la vivacité, de l’intelligence, de la constance; mais ces heureuses dispositions avortent sous la funeste influence de l'ignorance et de la superstition. » Les relations des Portnuene avec leurs colonies sont entachées des vices dont nous venons de parler. Leurs établissemens dans le royaume de Congo, a la côte d’Angola, au Monomotapa ; leurs mines du Bré- EE EEE XX = +% À . Voyage en Portugal. 173 sil, que le hasard leur découvrit à la fin du dernier siècle ; toutes les précieuses productions de ces con- trées qui auroïent dû être les canaux de la force com- merciale du Portugal , ont fait douter si leur posses- sion ne lui étoit pas plus nuisible qu’utile. Ce pro- blême n’en a pas même paru un à certains spécula= teurs, puisqu'on a été jusqu’à proposer au gouverne= ment de fermer les mines du Brésil, d’arrêter l’in- troduction des espèces d’or et d’argent , et de forcer le Portugais à s'adresser à l’agriculture et aux fa- briques , comme aux sources constantes de la prospé- rité publique ; mais favorisé dans sa paresse , dans son incurie par la réunion de causes physiques et morales, accoutumé à être approvisionné de tous les objets de nécessité, d'utilité, d'agrément, de luxe même , les spéculations économiques ne le persuade- ront jamais, et il verra toujours avec indifférence couler vers l'Angleterre les ruisseaux de ses richesses. On calculoit en 1778 , d’après les relevés des douanes, qu’en étoffes de laine et en clincaillerie seulement , le ” Portugal lui payoit chaque année plus de 2,500,069 liv.; que des vins, des huiles, des fruits et du sel extraits deson sol ne pouvoieñt entrer en balance, sans y ajouter des diamans et de l'or : il faut donc que le Portugal soit une dépendance de la puissance au- glaise, moins favorisée même qu'aucun des comtés de cetie île. Tel étoit l’état des choses lorsque ie génie de Pombal cessa de protéger sa patrie ; son éloignement ne l’a pas certainement amélioré : on peut même dire qu’elle est retombée dans l’inertie dont il avoit -arrachée, Une administration en proie à la rivalité 174 … Poyage. des ministres, enveloppée des chaînes d’or que l'Ane glais répand autour d’elle, ne peut que perpétuer l’en- gourdissement , le découragement et la misère. On lit à la suite de ce chapitre sur le commerce, lextrait d’un mémoire sur le même sujet, communiqué à l’au- teur, dans lequel où développe les rapports utiles que le Portugal pourroit avoir avec ses colonies et ceux qu’il pourroit établir avec les nations euro- péennes. L'éditeur y ajoute, dans un supplément, des notions plus détaillées et plus récentes sur cette matière, notions qu’il a été à porlée de se procurer pendant son séjour en Espagne, que le citoyen Ar-, nould, dans sa balance du commerce de La France, et James Murphy, dans son second volume non encore traduit , lui ont fournies, Tout est obstacle à la population du Portugal: la chaleur du climat, les développemens précoces de la nature, la corruption dés mœurs, les trop nombreux établissemens ecclésiastiques , les fré-. quentes émigrations , la quantité de nègres, de mé- tis , de créoles qui vicicnt la race portugaise , tout. concourt à arrêter les progrès de ce principe de. vie sociale : le voyageur, y comprend encore le tri- bunal de l’inquisition ; et de toutes ces causes , il en résulte que le Portugal ne contient que deux mil- lions trois cent mille habitans. Un auteur nati ional a voulu porter cette population jusqu’à trois mil- lions, maisil n’en a pas administré les preuves. Les finances ne sont pas en meilleur état que la : population : outre les vices qui sont communs à tous les autres gouvernemens dans cette partie de D =" à 4 Voyage en Portugal. 175 Péconomie intérieure dont les élémens sont à peine connu; , il y en a qui sont exclusivement propres à celui du Portugal, Les impositions pèsent prin- cipalement sur les campagnes, et la forme de leur per- ception augmente encore leur dureté : ces impôts établis sur les terres sont égaux pour toutes: mal- gré la différence du sol , et une armée de percep- teurs les rend encore plus insupportables : tout est soumis aux influences fiscales , l’artisan même en est directement frappé ; il lui est défendu de tra- vailler sans payer une certaine somme. « Défendre » de travailler ! s’écria M. du Châtelet. La na- » ture a-t-elle donné à un gouvernement Le pou- » voir d'empêcher le peuple de travailler? Un » roi peut-il jusques-là étendre ses droits P = L’impéritie des ministres , en jetant sur l’agriculture et sur l’industrie une interdiction fiscale, avoit ré- duit les revenus publics à soixante millions tour- nois lorsque Jean V parvint au trône : les profu- sions de ce prince les rendirent bientôt insuffisans, et multiplièrent les dettes que son successeur Jo- seph I paya en grande partie. Son ministre Pombal donna bientôt une forme nouvelle à 'cette branche administrative ; il sentit la nécessité de la suppres- sion,des dépenses inutiles, des pensions exclusives, le besoin de. réformes de toute espèce : il attaqua les abus qui faisoient sortir en pure perte le numéraire; il crut au bienfait de l’ordre, sans lequel les nations se précipitent vers leur ruine comme les parti- culiers ; il créa un bureau des finances dont il fut toujours le chef et le régulateur. Bientôt les finances 176 P'oyage. furent administrées avec plus de surveillance , et leur produit, en 1778, avoit été augmenté sans vexatiôn jusqu’à quarante millions , etil ne s’en dépensoit pas la moitié, malgré beaucoup de travaux publics, malgré la construction de la nouvelle ville et l’entre= tien d’une armée qui, à diverses époques , fut portée de trente-six à quarante mille hommes : une des causes qui obéroient lé trésor de l’état étoit l’exis- tence de vingt - deux mille hommes de plume ré- partis dans une foule de bureaux et de tribunaux, et dont lès appointemens étoient un surcroît d’im- pôt pour le peuple. M. de Pombal eut le courage d’attaquér cette armée de vampires, et de la réduire à trente-deux individus : cette réforme nous a paru dévoir être remarquée , et désignée à ces adminis- trations surcharsées de cette cohorte d’agens subal- : ternes aussi insolens qu’inutiles, que souvent des motifs-particuliers laissent subsister au détriment de . la chose publique. La religion catholique est la seule permise en Portugal ; mais cette religion est défigurée par des pratiques superstitieuses , par des momeries ridicules, par uné ignorance honteuse de son véritable esprit Cette ignorance avoit été entretenue jusqu’à nos jours par la puissance intéressée d’un clergé nombreux. M. de Pombal , de concert avec dés patriarches éclai- rés, chercha les moyens de diminuer le nombre de ces actes de crédulité qui ont dans tous les temps déshonoré les religions, et qui sont bien peu néces- saires à produire le respect qui naît de la con- viction et de la confiance ; mais le caractère por- tugais - Voyage en Portugal. 177 tugais l'emporte encore sur la volonté de la raison et du législateur. Il se compose de Palliage monstrueux des usages les plus superstitieux avec les désordres les plus coupables, Toutes les cérémonies relisieuses se font à Lisbonne avec une magnificence extraor- divaire : il n’est point de pays où l’on sacrifie autant aux démonstrations extérieures de la religion, et où cependant on en viole plus impunément les préceptes, Les fêtes, les proces:ions, ont été en grande partie supprimces malgré la résistance du peuple : c-Îles de la Fête - Dieu et de la Semaine sainte sont le vé- ritable carnaval des Portugais, sur-tout pour Lis- bonne, Le prétexte de visiter les églises dans cette se- maine favorise d’autant plus les aventures galantes, que ces pieuses promenades se font pendant la nuit ; aussi a-t-on remarqué que cette époque de l’année produisoit un plus grand nombre de baptêmes. Le voyageur nous donne une preuve de la sotte crédu- lité de ce peuple, en nous apprenant que dans la guerre de la succession , à laquelle les Portugais prirent im politiquement part, entraînés par le cabinet de Saint James, voyant que leur armée étoit saus chef, et voulant qu’elle eût un chef de leur nation, imagi= nèrent d’élire saint Antoine pour leur général. Le roc don Pèdre lui en expédia la commission avec trois cent mille reis d’äppointemens : ce Saint a con- servé jusqu’à présent cette suprême autorité, et tous les ans, la veille de sa fête , le roi va l’attendre à son église, et porte avec lui la pension de ce vaillant général. La couronne est héréditaire en Portugal, de mâle Tome 111. M 178 Voyage. | en mâle : si les héritiers de la branche régnante finissent, les filles règnent à leur tour ; mais elles ne peuvent avoir d'autre mari qu’un seigneur portugais, pour que les princes étrangers ne devrennent. pont les maîtres du royaums, dit la constitution. Cette loi a été rigoureu:einent observée jusqu’à nos jours. Tous les jugemens des tribunaux inférieurs sont subordonues aux parlemens de Lisbonne et de Porto, auxquels toutes les affiires ressortissent par appel : lé droit romain, réuni aux ordonnances royales, forme le droit civil du royaume. On ne parvient à aucune charge de magistrature sans des examens ri- goureux , et les /ettrados ou avocats subissent les mêmes épreuves ; elles ne sont pas insignifiantes et seulement d’étiquette, comme dans les autres états: on n’est admis au barreau qu'après avoir été reconnu capable d’en remplir les fonctions. Nous avons pu faire apprécier le gouvernement de Portugal par ce que nous en avons déjà dit. M. de Pombal, qui en connoissoit toute la foiblesse , voulut le tirer de sa léthargië en donnant à Pagriculture, au commerce, à l’industrie, à la marine, à l’armée toute l’activité dont ils étoient susceptibles, en ‘atta- quant la superstition et le libertinage du clergé, la hauteur et l'indépendance de la noblesse, en dési- gnant aux Portugais la nation anglaise comme sa seule ennemie , comme cherchant à assimiler le Portugal à ses colonies. C’est dans ce chapitre que le voyageur place un précis de la vie de ce grand ministre , que le chevalier Goudar nous avoit d‘jà fait estimer comme administrateur, patriote et comine homme à carac- Voyage en Portugal. 179 tère : On y trouve aussi quelques détails sur les épou- vantables eflets du tremblement de terre de 1755, qui engloutit dans Lisbonne seulement trente mille habitans et deux milliars deux cent quatre - vingt- quatre millions en maisons, en meubles, en argent monnoyé , en pierreries , bijoux , vases sacrés, or- nemens , tableaux, statues, etc. L'activité, la cons- tance , la fermeté, la surveillance, toutesles ressources du génie de Pombal furent déployées en cette cir- constance pour secourir tant d’infortunés , pour ar- rêter la dépopulation de la capitale : des vivres arrivèrent aussitôt des provinces qui avoient le moins souffert de cette horrib}® catastrophe. Placé pendant deux jours au milieu de ces ruines fumantes , l’in- fatigable ministre n’eut pour cabinet et pour lit que son carrosse, pour nourriture qu’un bouillon. Cette conduite devoit accroître la confiance de Joseph Ier, et l’autorité du ministre ; aussi la jalousie et la haine en acquirent plus d’intensité , et créèrent peu de temps après ce complot dans lequel presque toute la noblesse distinguée du Portugal s’engagea , et qui de- voit précipiter le souverain du trône par l’assassinat et y placer un d’entr’eux. Les conjurés ne réussirent pas à l’exécution , quoique le secret eût été fidélement gardé ; mais Pombal réussit mieux à les en punir et à anéantir les deux principales maisons dont les chefs avoient été les auteurs de la conspiration. Les mœurs, sans lesquelles les meilleures lois sont insuffisantes, et les gouvernemens , quels qu’ils soient, sans cesse en oscillation, ne présentent en Portugal que Pexcès de la corruption : à l’extérieur le plus dés- M 2 160 Voyage. agréable, les Portugais réunissent tous les vices de Pame , sur-tout dans la capitale. On trouve au nord: de ce royaume une différence marquée sous ces deux rapports : les hommes sont moins laids, plus francs, plus sociables, plus laborieux, plus braves, mais encore plus soumis aux préjugés ; les femmes aussi sont plus blanches que celles du sud. M. du Chä- telet, cons'#rant en général les Portugais, les voit vdicatifs, bas, vains, railleurs , présomp- tueux, jaloux et ignorans : maïs en parlant de leurs défauts , il ne tait point leurs bonnes qualités : ils sont attachés à leur patrie , fidelles, sobres, chari- tables, amis généreux ; ils sont si accoutumés aux pratiques de la religion, qu’ils sont plus superstitieux que dévots. Les figaldos ou grands de Portugal ont une éducation très-négligée : ignorans, orgueil- Jeux et insolens , ils dédaignent de sortir de leur crapuleuse apathie pour aller chercher chez les autres nations l’instruction qu’ils ne peuvent trouver chez eux. « On peut sans exagération vanter les charmes des Portugaises : il n’y a pas d’Européennes qui aient » une plus belle earnation ; elles ont les dents blan- » ches, des cheveux très-beaux dont elles ont beau- » coup de soin. Elles les relèvent en catogans énor- » mes, souvent plus larges que leur tête : elles y » ajoutent des fleurs et des diamans qu’elles placent n avec beaucoup d’art et de coquelterie ; mais en » général les Portugaises s’habillent d’une manière » peu favorable. Elles portent le jupon court , sont » mal chaussées : leur démarche est lente et sans 7 TEA - Voyage en Portugal. 187 grâce ; leurs jambes vilaines et leurs pieds larges ; Cependant , avec une taille un peu plus avanta- geuse, les Portugaises pourroient passer pour de belles femmes. Élles ont beaucoup d’esprit et peul- être plus de vivacité que les Françaises. Quant à la galanterie , elles l’emportent sur toutes les femmes de l’Europe : elles ont dans Pexpression celte ten- dresse séduisante qui appelle et promet le plaisir ; mais s’il est facile, il est encore plus dangereux de Pobienir auprès d'elles, et c’est de plus d’an oenre,. Uu tête à tête conduit presqu’infailliblement au succès ; mais on ne l’cbtient pas sans peine. Comme les maris et les parens connoïssent l'extrême foi- blesse de leurs femmes et de leurs filles, ils viennent à leurs secours par une surveillance continuelle : jamais ils ne les abandonnent à elles-mêmes ; ils es- pionnent ceux qui rodent autour de la maison, et s’il y entre ou s’il en sort queiqu’un qui éveille leur soupçon, ils leur plongent dans le cœur un couteau dont ils sont toujours munis. » Les dames d’un certain rang s’habillent à la fran- çaise, à l'exception de la tête qu’elles arrangent à la mode de leur pays : elles sont ordinairement assises sur leurs talons et sur une natte étendue par terre, Les hommes, également vêtus à la française, sont enveloppés d’un manteau et portent une longue épée : ils sont tous d’une grande malpropreté ,-qui contrast: singulièrement avec les couleurs brillantes et les riches galons dont ils chargent leurs habits et leur cha peau. La nation portucaise aime la musique, la danse, M5 x82 Voyage. les spectacles, les combats des taureaux 5 en un mot, tout ce qui pent leur retracer les plaisirs des sens = sous l’influence d’un climat brûlant, elle poursuit la volupté et veut l’atteindre à tout prix. Ses chansons sont très - licencieuses ; sa musique est vive, gaie, et n’est pas sans attrait ; la danse a le même carac- tère , et la fofa qui lui est particulière , s’exécute non-seulement en particulier, mais dans les rues, . dans les campagnes, sur les théâtres, avec une lubri- cité qui étonne et qui révolte. Les spectacles man- quent également ei de pièces et d’acteurs : c’est tou jours une intrigue amoureuse accompagnée d’un bouffon nommé Gracioso , qui est destiné à amuser l’auditoire par ses platitudes et ses propos dégoûtans, Les acteurs portugais chantent et dansent avec beau- coup de grâce ; la musique de leurs petites pièces» connues sous le nom d’intermèdes, est excellente et pleine de goût. On a traduit plusieurs de nos pièces et de nos opéra comiques ; mais on les joue rarement, Le roi Joseph Ier, avoit un opéra italien qui étoit le mieux composé de fous ceux qui existolent en Europe : les femmes attachées à la cour et celles des ministres étrangers y étoient seules admises; toutes les autres femmes en étoient exclues par une défense expresse de la reine, dont la jalousie étoit portée si loin , qu'aucune femme n’osoit se présenter devant elle. Cette reine, destinée dès son enfance à être la femme de Louis XV, auroit eu bien des occasions de déployer tout l’odieux de cette tyrannique passion : auroit-elle réussi, comme en Portugal, à éloigner de la cour de France ce qui en faisoit le principal orne= ment ? Voyage en Portugal. 183 « Le plus grand divertissement de la nation por- tugaise est le combat des taureaux, spectacle bar- bare et fécond en accidens : quant à la frénésie avec laquelle on y court, à l’atirait que les femmes sur-tout y trouvent, et aux dangers qui résultent de cel attrait pour l’innocence et la fidélité conjugale , les Porlugais peuvent être entièrement assimilés aux Espasr ols. » Nous voudrions bien donner une idée à nos lecteurs, de la marine portugaise si elle éloit ce qu’elle de- vroit être. En considérant les nombreux établisse- mens coloniaux de cette nation et les précieux pro- duits qu’ils lui donnent, on pourroit être étonné de la dégénération de ses moyens maritimes si les causes n’en étoient pas généralement connues : elles sont très - bien appréciées par le citoyen Arnoud, dans excellent ouviage qu’il a publié depuis peu sur le Système maritime et politique des Européens. Les forces de terre ne sont as en meilleur état que celles de mer. Le comte de la Lippe avoit été ap- pelé pour créer Parmée et lui donner une forme analogue aux troupes des autres puissances, Re- poussé par les contradictions et plus encore par la jalousie haineuse des Portugais pour tout ce qui est étranger ; il fut oblisé d'abandonner l’ouvraze qu’il avoit commencé : cette partie de la force pationale est retonibée dans sa première nullité, Les soldats, mal vêtus, mal nourris, demandent laumône , et l:s officiers sont réduiis à se mettre au service des grands et à remplir auprès d’eux les fonctions les plus avilissautes : cependant les M 4 184 _ Poyage. Portugais sont braves, courageux , patiens et sobres, comme les Français ont pu s’en apercevoir dans la guerre qu’ils ont eue en dernier lieu contre l’Es- pagne, et où les Portugais agissoient comme auxis liaires, Ou voit à quelle distance le Portugal est des autres nations evropéennes, dans ses rapports politiques; commerciaux ; économiques : on le tronvera encore à une plus grande distance, s’il est possible, en le considéraut quant aux connoissances scientifiques et littéraires ; cependant dès le treizième siècle les sciences Ctoi: nt dejà en honneur auprès du trône. Alphonse JIL fit venir plusieurs maîtres français pour donner à son fils une éducation convenable: ce fis, devenu son successeur sous le nom de Dé nis er, cultiva les leitres; ce fut lui qui le pre- mier introduisit la rime dans les vers portugais 3 ce qui lui obtint le Etre de Père des Muses. Jean ILE regardoit les sciences comme un des principaux moyens d’embellir et de faire prospérer un état ÿ ce fut sous son malheureux successeur S'bastien,que parut ce Camoëns dont les Portugais sont si vains. Ils ont eu d’autres poëtes , quelques historiens, beau coup de théologiens, comme on doit croire; mais tous ces auteurs sont inconnus hors du Portugal : l’'éloquence ne s’y est jamais montrée, malgré les faveurs du climat. La médecine, la botanique , l’ana- tomie., la chymie , Pétude même de la langue, y sont négligées moins encore que les mathématiques 3; et dansles beaux siècles de cette monarchie, eiles étoient cultivées, non - seulement des particuliers ; mais les PRIT PT JE Voyage en Portugal. 185 rois Henri, Jean I:r., Jean IT, le Grand Emma- nuel , princes sous les règnes desquels les Acores, ‘Madère , la côte de Guinée, le Congo , le Cap- de-Bonne-E:pérance, furent découverts, connurent cette science, et protégèrent ceux qui s’y livroient. Peut-on croire que sanselle Magellan, dont le nom s’amalgame si bien avec le génie des grandes en- treprises , eût pu parvenir à ouvrir au commerce du monde des routes jusqu'alors inconnues ? Com-= ment se fait-il que cette nation, qui a possédé des connoissances géographiques , astronomiques qui lui ont fait découvrir la moitié du globle, soit tombée dans cette inertie absolue sur tout ce qui vivifie les sociétés politiques ? Ne peut-on pas lattribuer à Pempire de la superstition, à l’incurie du gouverne- ment , aux faux principes de l’économie intérieure, à Poppression d’une domination étrangère, à la tyran- nie inquisitoriale? Toutes ces causes ont également éffarouché les beaux arts. Au moment où M. du Châtelet voyageoit , il n’y avoit à Lisbonne ni peintre, ni sculpteur , niarchitecte : on n’y trouvait pas même des maîtres de dessin , d'équitation, d’es- crime , de danse: on ne doit donc pasêtre étonné de lignorance qui couvre ce beau pays. Le citoyen Bourgoing , dans un supplément à ce chapitre des sccences et des arts , cherche à faire honneur aux Portugais, des efforts qu’ils ont faits pour s’arracher à cette profonde ignorance dans laquelle M. du Châtelet les avoit laissés : il nous apprend que la reine , quoique scrupuleusement soumise aux ordres de son confesseur , n’a point eu de pénitence à +86 . Voyage. faire pour avoir permis qu’il s’établit sous sa pro- tection une Académie royale des sciences , qui a déjà publié quelques volumes de mémoires sur des matières d’utiliié publique : on lit dans le pre- mier de ces volumes, une dissertation de M. de Souda Cotinho , dans laquelle il cherche à prouver que ce west point à la possession des mines d’or et d’argent qu’il faut attribuer la décadnce de l’in- dustrie et l’abandon de l’agriculture en Espagne et en Portugal ; que ce fat, dans le premier royaume, l'expulsion des mœurs et des Juifs, et les guerres de Charles V et de Püilippe IT ; dans le secun |, la domi- pation despotique de Espagne etlesguerres qui suivi- rent l’avénement de la maison de Bragance au trône, et il seroit facile d’avoir une opinion différente de celle de l’académicien, en observant seulement que depuis la découverte des mines du Brésil, postérieure aux époques qu’il assigne, le commerce et l’indus- trie des Portugais ont encore plus dégénéré qu'’a- vant cette source de richesses, et que le fatal traité de 1703 n’en a pas été la cause , mais l'effet. Pres- que tous les rfémoires contenus dans ce recueil traitent d’objets intéressans pour le Portugal : il est à dé- sirer que ceux qui le gouvernent profitent des lu- mières qu’on leur présente. L'éditeur donne ensuite une note des ouvrages dont j’académie a favorisé lPimpression,pour venger ses concitoyens du reproche qu’on leur fait de négliger encore les sciences dans un siècle où elles on fait des progrès si utiles : il termine ce supplément par la nomenclature des su- jets que cette académie a proposés à l’émulation, Voyage en Portugal. 187 depuis 1783, et pour lesquels elle a destiné des prix proportionnés à l'importance des matières ; elle ‘en a proposé aussi pour la meilleure tragédie, pour une comédie, soit en prose, soit en vers, qui re- tracera des caractères portugais : physique, éco- nomie politique, agriculture sur-tout, art de la na- vigation, astronomie, médecine, litérature natio- nale, histoire, scrence militaire, art typographique, jurisprudence , toutes les sciences spéculatives et pratiques sont de son domaine , et attirent ses en- couragemens. Le citoyen Bourgoing prétend que les fauteuils de ses académiciens ne sont pas so- porifiques comme l’ont été ceux de certains corps littéraires : c’est ce qui est le plus à dési- rer pour le Portugal; ce qui l’est autant , c’est que les modestes siéges de ces nombreuses associations qui s'accumulent ailleurs ne soient pas livrés à la cabale , à la partialité, à la faveur des opinions do- mipantes ; c’est ce qu’on auroit déjà lieu de craindre, et alors qu’y gagneroient les sciences , les lettres et les arts?» Le voyage de M. du Châtelet, les notes et les supplémens de l’éditeur noùs présentent le Portugal, à la fin du dix-huitième siècle, tel que les autres nations étoient dans le seizième , tandis qu’il pour- roit être, comme autrefois , une puissance prépon- dérante dans la balance politique et maritime. Le manuscrit du voyageur ne pouvoit passer sous les yeux d’un bomme plus instruit des matières qui y sont traitées; c’est sans doute des travaux plus im- à porlans ou la briéveté du temps qui ne lui ant 188 Archæologie. pas perihis d'en ôter quelques contradictions et plu- sieurs répétitions. Quant aux incorrections de style, une correspondance de M. Châtelet qu’on lit dans ce qu’on a bien voulu intituler Mémoires de Choi- seuil, prouvo assez combien cette partie de l’ou. vrage avoit besoin d’un censeur en état d’en effa- cer les négli’ences et les imperfections. « Nous nous » sommes permis, dit le eitoyen Bourgoing, de faire » disparoître ces léoères taches sans altérer son plan » et ses idées : le texte peut donc être regardé comme » lui appartenant exclusivement. » A. J. D.E. ARCHÆOLOGIE. ÆEsquisse d’une historre de la sculpture chez Les Grecs (1) ,par M. Mrrenr, professeur à Wec- mar , traduit par G. ScurerGRhAEUSER. Par les progrès qu’ont fait les sciences dans no- tre siècle, 1l ne faut pas compter pour peu de chose, (x) Ce morceau se trouve dans les Heures , journal alle- maud, dirigé par M. Schiller,et imprimé à Tubingue chez M. Cotta , dans un des Numéros de l’année 1795 : j’en ai cru la traduction utile en ce moment , parce qu’il me semble que tout ce qui concerne l’histoire des arts gagne un nouvel in- térêt pour nous dans un temps où Paris va rassembler le monumens les plus précieux , et devenir pour ce genre d’études un point central d’autant plus avantageux, qu’il of- frira plus de moyens de comparaison, Dans ces circonstances, Sculpture chez les Grecs. 189 que la connoissance de l’antiquité et sur-tout l’his- toire des beaux-arts aient été débarrassés par les ef- forts de plusieurs hommes de mérite, et sur-tout par ceux de Winkelmann ,; de beaucoup d’erreurs et d’un pédantisme inutile qui auparavant les défigu- roit, Ces sciences sont devenues par là non moins agréables qu’utiles ; aussi faut-il convenir que l’in- térêt pour les chefs-d’œuvres des arts est devenu plus répandu , et que le goût a pris une direction plus juste. Malgré les erreurs qu’on peut reprocher à Winkelmann, c’est à lui que nous devons la plu- part de ces avantages : mais depuis la mort de cet homme si zélé pour les arts et les sciences, nous n’avons fait que très-peu de pas en avant, quoiqu’on ait découvert une foule de monumens importans et iostructifs qui, bien expliqués, pourroient répandre bien des lumières , et malgré que les savans n’aient pas laissé que de faire paroître beaucoup décrits sur cette matière. Pour arriver à la perfection, la science et les arts doivent nécessairement se prêter un se- cours mutuel : la suite de ces observations montrera dans quelles circonstances et par quels moyens ou peut atteindre à ce but. On y essayera’de choisir dans toute la masse des monumens antiques qui nous les connoïssances historiques qui servent à donner plus d’étendue aux idées des artistes et à fixer le goût , ne peuvent ètre mises trop souvent à portée de tous ceux qui s’inté_ ressent aux progrès des arts. J’observe encore que l’auteur de ce Traité , homme de beaucoup de goût et de connoïssances, a fait un long séjour à Rome, d’où il est reyenu depuis peu en passant par la France. N. D. T. 190 ‘Archæologe. sont connus, les plus importans, pour les classer de mauière à faire connoître, depuis les temps les plus reculés , la marche et les progrès de la sculpture chez les Grecs. Ce premier essai ne peut être que très - im- parfait, d’autant plus que très-peu de monumens pouvoient jusqu’à présent être comparés immédia- tement ; aussi n’est-il desiiné qu’à prouver que si l’on parvenoit par la suite à classer les monumens, bien examints et comparés entr’eux, dans une série parfaite , on auroit fait la chose la plus importaute pour leur explication et pour la classification de tous ceux qui pourroient encore être découverts. Si on y joignuit encore les morceaux tronquts dont lo- rigine et l’antiquité sont hors de doute, on pour- roit par analogie fixer l’opinion sur les autres, et donner à l’histoire de l’art (2) une précision et une clarté dont jusqu’à présent elle est encore fort éloignée. La première réflexion qui se présente ici est que les essais de chercher l’origine des beaux arts chez les Grecs , en Egypte et même dans l’Inde, prou- vent très-peu de discernement de la part de leurs auteurs. L’expérience de tous les temps nous apprend que l’homme est conduit par sa nature , même aussi bien vers la sculpture et la peinture, que vers la (2) L'auteur de cette esquisse , ainsi que Winkelmann , se sert ordinairement du mot arf ( par excellence ) en parlant de la sculpture : je me suis permis quelquefois de suivre son exemple pour rendre son idée avec plus de fidélité. Q Ne DT Sculpture chez les Grecs. 197 musique et là poésie ; aussi n’y a-1-il peut être pas de peuple sur la terre chez lequel on n’ait pas trouvé quelques essais de ces arts plus où moins imparfails, en raison de l’état de sa civilisation. I! est douc bien peu croyable qu’une disj osition aussi universelle ait attendu précisément chez les Grecs, chez ce peuple si favorisé par la nature , des encou:agemens et des modèles étrangers, Un bas-relief de la villa Aïbani, qui représente l'éducation de Bacchus , est probablement le plus an- cien marbre grec dont nous ayons une connois- sance exacte. Il paroît duter de l’époque de l’en- fance de l'art, de ce temps où les Grecs étoient encore surpassés par les Egyptiens daus le talent d’i- miter, et où ils pouvoient à peine soutenir la com- paraison avec les Indiens, les Chinois et les Ja. ponais d’aujourd’hui : mais quoique cet ouvrage manque absolument de la connoissance approfondie du beau , on y découvre néanmoins, à travers cette difformité des figures , le principe d’un goût qui donne à sa simplicité quelque chose de solide et d’agréa- ble ; qualités qui manquent aux premiers ouvrages des autres peuples, et qui forment à notre avis le caracière du génie grec. Une statue de Minerve, conservée dans 'e même endroit, est travaillée, pour les formes et les traits, d’après des principes à peu près semblables ; ce qui fait présumer qu’elle est de la même époyue, ou du moins presqu’aussi ancienne. On y remarque un travail plus pénible et un ensemble moins agréable 3 - cette différence peut résulier de ce que lobjet de 192 Arc/.æologie. ce monument est plus sérieux et sa destination plus élevée ; 1l paroît avoir été exposé au culte public dans un temple de la déesse , tandis que l’autre ne paroît avoir servi qu’à décorer quelque place pu- blique (3). Les progrès ultérieurs de l’art peuvent être ob- servés dans le cippe, avec les figures de Mercure, d’Apollon et de Diane, qui se trouve dans le Mu- sée du Capitole : ils sont encore plus inarqués dans V’autel triangulaire de la villa Borghèse. Les deux font voir combien alors on recherchoit les éludes : les artistes de ces ouvrages avoient acquis des con- noissances anatomiques qui les avoient misen état d’imiter la nature avec plus d'exactitude que leurs (3) Il faut probablement rapporter ici plusieurs vases peints, en terre cuite, du style le plus antique, dont les fi- gures sont souvent encore plus difformes , et qui, par celte raison même , peuvent être réputés encore plus anciens : ce- pendant on peut supposer aussi que les artistes metioient plus de soin à leurs ouvrages en marbre , qu’à ces vases dont la peinture n’est qu’une esquisse exécutée légérement. Du reste, nous ne faisons cette observation qu’ n passant; car notre intention, dans ces recherches, n’est point de prendre des exemples dans les vases, gemmes ou petits bronzes. Nous nous en tiendrons aux ouvrages plus considérables qui, pat | leur destination, leur grandeur et leur exécution, peuvent donner uue idée plus complète de l’état de l’art dans le temps où ils ont éié faits : ee n’est pas que nous n’estimions point | les monumens plus petits; car plusieurs de ceux qui se trouvent même chez des particuliers sont très - curieux et peuvent être très-utiles pour l’histoire de l’art; mais il ne. s’agit ici que de faire une esquisse , et il sera réservé à l’ave- nir de remplir ce cadre. L prédécesseurs. - Sculprure chez les Grecs. 193 prédécesseurs. L'art paroît ne pas s'être élevé en- core à cette époque à des idées sublimes : la jus- tesse.et la précision dans l’imitation des formes na- tureiles faisoient le dernier terme de ses efforts ; mais en tâchant d’imiter en tout la nature avec un soin anxieux , on devoit nécessairement outrer. Il arriva aux artistes d’alors, ce qui arrive encore à quelques modernes ; ils firent trop, de peur de faire {rop peus Ce style, que nous nomwmerons l’ancien ou pour mieux le distinguer des ouvrages qui vont suivre, le plus ancien ; paroît avoir duré assez long-temps; car on peut conclure d’une quantité de restes grands et petits de ce style, qu’il a fallu les efforts de plu- "sieurs générations pour donner à l’art le fini de l’exé- cution et quelque degré de grâce et de justesse. L’art de la sculpture, ainsi que tous les arts dans leurs commencemens , s’étoit occupé davantage dans cette première période , de la perfection de la par- tie mécanique, que de la création de l’id ‘ai : de même Parchitecture a dû se borner au soin d’offrir un asyle contre l’intempérie des saisons, avant de pouvoir s’oc- cuper de l’invention des ordres , des ornemens et des belles proportions. Mais tandis,qu’on faisoit plus d’attention à la manière du travail qu’à l’objet, le poli et le fini devinrent petits et minutieux ; lalégéreté devint maigre et décharnée, et une justesse recher- chée dégénéra en manière eten monotonie. Toutes les figures sont formées de même, sans distinction mar- quante de l’âge, de la dignité ou de Pétat ; elles ne Sont reconnoissables que par leurs attributions. Tome 111, N 194 Archæologie. Sans le caducée , Mercure ressembleroit à Hercule ; et celui-ci, si on lui 6ioit sa peau de lion, ne dif- féreroit poivt d’Apoilon : de même Junon, Vé- nus, Diane et Minerve se ressemblent toutes ene tr’elles. IL est remarquable que l’art au berceau et l’art dans son déclin ont cette qualité en commun. L'idée du beau et du varié commence à disparoi- tre dans les bas-reliefs qui crnent l’arc de triomphe de Septime Sevère , et il n’en reste plus de trace dans les travaux barbares de l’arc de Constantin : la même figure est répétée cent fois avec le même défaut de proportion , avec les mêmes plis, dans la même position. un enfin les difficultés de Phbeution furent vaincues, et la matière soumise à la volonté, il s’ouvrit bientôt une plus belle carrière, et la partie idéale de l’art commença à se former. Dans un bas- relief de la villa Albani, qui représente les neuf divinités, et qui, au premier coup-d’œæil, ressemble assez aux précédens , où remarque par un examen plus approfondi le dessein de Partiste, de donner à ses figures plus de grandeur et d’élévation , et d’ex- primer la différence des caractères par la variété des formes et des traits : cet ouvrage est donc très- important pour le but que nous nous proposons ; puisqu'il montre pour ainsi dire le germe et le com- mencement de toutes ces belles formes qui ont été tant perfectionnées par la suite, Il nous laisse plu- tôt déviner qu’apercevoir la majesté de Jupiter, la mollesse de Bacchus, la fierté et le dépit de Ju- non : il les présente comme une image réfléchie DOVE FSU Lie À t f: | ( 4 4 fl Sculpture chez lesGrecs 195 par une eau troublée ou par un miroir terni, plu- tôt à imagination qu’aux sens. . On doit rapporter ici un ouvrage à trois faces dans la collection des antiquités à Dresde, qui pa- roit avoir été le pied d’un grand lustre dédié à Apollon, puisque lés ornemens des trbis côtés sont relatifs à ce dieu et à son culte. La pièce prin- cipale le représente poursuivant Hercule qui lui avoit enlevé le trépied. Quoique le dessin des fi- gures soit assez maigre et roide, et le travail anxieux et pénible, architecte a su cependant ennoblir son ouvrage par de l’expression et du caractère. Apol- lon et Hercule se distinguent, du moins conformé- ment à leur état, dans les traits de leur visage, et Vartiste a su donner, sur - tout aux figures mâles des bas-reliefs des deux autres faces, beaucoup de dignité , et même de l’élégance, de la grâce et du naturel, Les ornemens, les feuillages et autres accessoires sont dignes de fixer l’attention, puisqu'ils se présentent encore dans leur forme ancienne peu gracieuse , et qu’ils sont entremêlés de figures dif- formes que le goût plus agréable de l’époque pos- térieure a embelli. En suivant l’art dans ses progrès, nous sortons pour ainsi dire ici d’une vallée étroite pour ar- river à une large plaine dont la vue immense semble se mêler au ciel dans un vaste lointain qui échappe à la vue : la base de tout ce qui est beau, varié, caractéristique , sublime, étoit jetée, et si les principes n’étoient encore clairement développés, Pame du moins les avoit saisis par pressen timent, N 2 196 Archæologie. Aussi peut-on supposer qu'il n’a pas fallu peu de temps , mais des essais et des expériences à l'infini, avant que ces idées ‘e fussent assez conso- lidées pour pouvoir en tirer les premières règles, les premières théories. [l seroit très à désirer que bien- tôt tous les monumens de ce genre fussent recueil- lis, pour jeter plus de lumières sur cette période si intéressante de l’art et de ses progrès ; mais tan- dis que la sculpture se perfectionnoit dans les carac- tères , elle paroît ne pas avoir fait les mêines pro- grès dans le goût. Nous remarquons encore, tant dans l’ouvrage rond des douze divinités, que dans le bas-relief de Callimaque au capitole ( qui cepen- dant paroïissent être postérieurs aux précédens ), les mêmes plis, petits, droits ou à angles rectilignes ; ce contour dur et fortement prononcé , la même roideur, et quelque chose de maniéré et de gêné dans le mouvement des membres et sur-tout d:s doigts , tout presque de même que dans les figures de cet autel à trois faces de la villa Borghèse et du cippe du capitole. Cependant le Faune du bas-re- lief de Callimaque peut servir d’exemple de la variété que dès-lors on savoit mettre dans ces ouvrages : cette figure 1eprésente si heureusement, et avec tant de justesse, de proportion dans toutes ses parties, l'idéal de ces êtres, que même dans les plus beaux siècles de l’art ils ont toujours été fisurés d’après les mêmes idées , quoiqu'avec plus de grâce et de beauté. On peut ajouter ici la vestale du palais Jus- tinianc et deux statues mâles non vêtues , qui sa Sculpture chex les Grecs. 197 trouvoient autrefois dans le palais de Farnèse, el qui ont été transportées à Naples, quoique nous de- vons 1emarquer qu’ils n’ont point la maigreur dont nous avons caractérisé cette époque , pu sque leurs formes sont plutôt larges que carrées : mais la du- reté de la manière , esprit mesquin et le fini pé- nible du détail, ainsi que l’idée si imparfaite du beau qui y règne , nous autorisent à les joindre aux ‘aulres, et à donner pour raison de la diff rence, qu’ils sont effectivement plus modernes et plus rap- prochés des ouvrages du grand style qui'suit cette période, et doivent par conséquent être regardés comme des intermédiaires de l’une à Pautre- Il faut joindre à ces ouvrages le torse d’une sta- tue de Minerve, qui se trouve parmi les antiquités de Dresde , morceau intéressant pour la connois- sance de l'antiquité , et sans contredit un des monumens les plus instructifs de la première période de Part; car cet ouvrage étant travaillé avec un soin extraordinaire et qui surpasse toute idée ; nous pouvons avec raison le prendre pour un des mor- ceaux les plus achevés de cette époque , peut-être pour l’idéal du genre. La tête cepeudant étant beau- coup plus moderne et n’appartenant point au tronc, on ne peut point juger du caractère de la figure ; «mais on peut conclure des épaules très-larses, de la poitrine et des hanches foi:les et étroites, qu’on avoit suivi le même genre en faisant quelques pro- grès : les plis du vêtement sont collés sur Le corps ; ils sont nombreux et petits, absolument comme dans le bas-relief des neuf divinités à la villa Al N 3 } 198 Archæologie. ( bani et dans celui de Callimaque au capitole, mais bien préférables pour la correction , la finesse et la justesse du dessin et de l’exécution. Depuis la poitrine jusque sur les pieds, il y a par- dessus Îles habits une bande divisée en compartimens ornés de beaucoup de petites figures en bas-relief, qui re- présentent des actions guerrières de la divinité ; ces petits bas-relifs se rapprochent, quant au style, des travaux d'Hercule sur l’autel dans le musée du capitole, et ceux-ci ressemblent, pour les formes carrées et réservées, aux statues du palais Farnèse dont on vient de parler. Nous trouvons ainsi une suite très-heureuse dans ces ouvrages , qui peut nous rendre sensible la transition du style antique de Part dans le grand style. Jusqu’ici nous avons parcouru les ouvrages les plus anciens de la sculpture grecque , et nous avons ob- servé avec quelle peine, quelle assiduité et quels efforts il a fallu vaincre des difficultés et faire des essais et des découvertes , jusqu’à ce qu’on fût par- venu à imiter les formes de la nature, à les réduire en principes , et enfin à en saisir l’esprit : mais les artistes. étoient encore toujours retenus par le poids de la matière, et les difficultés de l’exécution les occupoient encore trop fortement pour leur per- mettre de s'élever à Pidéal et de s’abandonner au vol de leur imagination. Mais lorsqu’enfin ils eurent pris le dessus et se furent débarrassés de la petitesse et des bornes étrdites de l’ancien style, leurs forces plus libres s’élevèrent d’un essort plus hardi, et le grand style prit son origine : c’est le plus sublime effort et l’éternel monument du génie de l’homme. . nt & Re ee Sculpture chez les Grecs. 199 Seconde partie. Nous iadiquons comme transition du style ancien au grand style , et comme intermédiaire des deux cette Minerve en marbre placée sur l’escalier du Mu- sée de Portici : nous y remarquons des traits plus beaux , des formes et des proportions plus nobles, et en même lemps plus de choix et de goût dans les plis qu’aux .ouvrages précédens, Cependant la théorie des proportions étoit encore trop imparfaite pour qu’on eût pu lui donner un caractère vraiment divin et au-dessus des imperfections et de la foiblesse humaine : par cette raïson , latitude de la déesse , qui est libre, menaçanite et presque forcée, fait beau. coup moins d’eflet, et ne donne point cette idée dune force supérieure qu’apparemment l’artisie vou- loit exprimer en représentant dans la divinité le sym- bole de la force et du courage, envisagés comme ses premières qualités dans ces temps reculés ; car dans presque toutes les statues plus modernes elle est plus tranquille et plus douce , ainsi que doit être la divinité des sciences et des arts. L: torse colossal d’une Minerve de la villa Mé- dicis peut être regardé comme le plus ancien des ouvrages du grand style qui nous soient connus : il est d’un caractère élevé et tragique, grand, majes- tueux et d’an sublime presque terrible ; même la manière du style antique parpît contribuer à cette expression ; puisque la roideur et les angles pronon- cés de la figure lui donnent une dignité et une fermeté de plus, et que les plis, tombant pe:pendiculaire. N 4 S600K — Archæologie. ment et profondément taillés, concourent à faire paroître ses membres vigoureux encore plus gigan- tesques. C’est une grande perte, tant pour Part que pour l’archæologie, que la tête de cette figure n’ait point été conservée ; ce qui apparemment a été cause qu’elle est restée absolument inconnue jusqu’à ce moment, et qu’il n’en a été fait mention nulle part. La Muse de Barbérini doit être de la même époque, ou guère plus moderne : elle est connue par la des- cription de Winkelmann , qu’on peut consulter à son sujet. La tête de ceite figure, très-bien conservée, pourroit suppléer en partie à l’idée de la précédente : son exécution est plus libre; mais les deux ont la même srandeur sublime , et ne diffèrent que par la distance de la Muse à la déesse. Une Minerve de grandeur plus qu’humaine dans la collection d’antiques à Dresde, doit aussi être placée dans cette période. Quoiqu’elle soit bien endomma- gée, le visage a été heureusement conservé : ses traits sont sévères et réguliers, plutôt grands que beaux , et toute la figure porte ce caractère. On observe que les plis sont un peu plus larges.et mieux variés qu’aux ouvrages précédens ; ce qui fait soup- çonner que le goût commencoit alors à tirer parti des accessoires et à les mettre plus au niveau du ca- ractère de l’ensemble, Malgré la grandeur, le su- blime et la perfection de ces ouvrages , ils manquent toujours de liberté et de facilité dans les mouvemens et dans Pexécution. 9 Le sublime s’y rapproche du gigantesque, et est Sculpture-chez les Grecs. 201 trop peu proportionné à notre nature ; aussi sont- ils plutôt faits pour étonner les sens que pour émou- voir le cœur: mais ces défauts sont heureusement imités dans la figure qui se trouve sur le Monte : Cavallo, et qui porte le nom de Phidias. Si, dans les ouvrages que nous venons de considérer , nous avons trouvé de la force et de l’audace , et des traits . grossiers du sublime et du beau, dans cet ouvrage au contraire nous les trouvons développés, perfection- nés et transformés en loi éternelle. En effet, si jamais l’esprit humain concut et créa quelque chose de grand et de beau, ce sont ces pro- portions, qui, quoiqu’imitées en détail d’après les plus belles formes de la nature, sont assemblées et ordonnancées par le génie, et dont l'expression et leflet sont calculés d’après les règles de Part les plus transcendantes. Le Héros demi-dieu est représenté avec cette abondance de courage et de force qui caractérise son état : il est entreprenant , actif, plein de vigueur. Mais Minerve au palais Justincanc est une vraie déesse dont le repos éternel est au-dessus du besoin et des passions : recueillie, se suflisant à elle-même, remplie d’une force intérieure et indépendante , elle a une beauté céleste ; trop élevée et trop sérieuse pour Pintimité ou lPamour , elle réprime et étouffe tout désir et toute idée profane dans l’ame de celui qui la contemple. Elie respire quelque chose de divin qui commande le respect et la soumission : la sta- tue de cette déesse à Portici devoit, d’après l’idée de lartiste , inspirer la crainte, et le torse de la 202 Archæologie. ville de Médicis nous frapper de terreur ; celle-ci , par son élévation douce et tranquille, commande le respect et l’adoration. Une tête d’A pollon dans le même palais, non moins parfaite et bien conservée, mérite d’être placée ici comnie pendant digne de cette Minerve : elle est encore plus importante pour nous, puisqu'elle paroît avoir donné l’idée de l’Apollon du Vatican , auquel elle ressemble, quoiqu’ayant plus de grandeur et d’élévation ;, tandis que ce dernier tient de la per- fection de Part à l’époque où il a été fait, eta plus de grâces aimables, de rondeur et de mollesse, Niobé et ses enfans succèdent ici dans l’ordre des ouvrages du grand style : la description et les es- fampes de ces statues se trouvant entre les mains de tous les amateurs, nous croyons qu’il suffira de les indiquer ici. Nous remarquerons cependant que, dans ce groupe, il n’y a vraisemblablement de figures ori- ginales que la mère et deux des filles, et que les autres ne sont que d’une valeur très-inférieure , et paroissent n'être que des copies plus.ou moins par- faites d'ouvrages perdus : il faut observer aussi qu’il règne dans le jet des plis nne manière un peu difs férente des autres ouvrages de ce siècle de Part, Comme cependant ni les têtes, ni la forme des membres, ni l’idée de l’ensemble , ni l’exécution des parties originales ne permettent de douter de Pantiquité de cet ouvrage , il faut attribuer cette dif- férence àla manière particulière, ou de l’artiste, ou de Pécole dans laquelle il avoit été formé. Les plus petits restes de ce genre sublime devant être consi- Sculpture chez Les Grecs. 203 dérés comme des morceaux précieux pour les arts, nous devons aussi faire mention ici d’un buste co- lossal de Minerve et d’une statue de cette déesse un peu au-dessus de la taille ordinaire , qui tous les deux se trouvent dans la villa Albani. La statue de celle de Justinien mérite la préférence ; mais elles sont faites d’après les mêmes principes et les mêimes règles, et paroissent être de la même époque. Nous rappelons aussi le grand lion de l’arsenal de Venise ,; qui, quoique tellement endommagé qu’on ne reconnoit plus que très-peu de chose du travail et de Pexécution, montre cependant même dans ce reste tronqué la forme du roi des animaux dans toute sa grandeur : il faut ajouter ici la figure d’un beau jeune homme qui se trouve au Musée de Dresde, et qui est vraisemblablement de cette époque. L’'Amazone du Musée Clémentin fait la clôture de la série des monumens qui paroissent appartenir ‘au grand style : cette figure en porte encore tous les caractères , les cheveux en forme de fils d’ar- chal , la lisière autour des lèvres , orbite des ÿeux trèc-forte , et le contour en général extrêmement pro- noncé ; cependant on y découvre déjà une lueur de Pélésance et des grâces du temps suivant , et le désir de plaire est joint à son sérieux. La contemplation de ces ouvrages nous étonne et nous saisit : nous nous perdons dans l’extase, ravis, ‘élevés par eux-et avec eux au-dessus de nous-mêmes, au-dessus de la terre et de tout ce qui est passager. C’étoient là les temps héroïques de Part, où , consa- cré à la patrie et aux dieux, il produisoit de telles 204 ÆArchæologie. formes l'expression la plus pure de la suprême beanté, lorsqu'il ne vouloit qu'émouvoir et dédaignoit de plaire en flattant les sens. \ Troisième partie. Nous avons vu l’ancien style passer dans le grand style, non d’un sant, mais peu à peu et par degrés: nous sommes conduits de même du grand style au style gracieux par différens monumens qui réunissent les qualités des deux , et servent ainsi de lien entre les deux époques, | Parmi ceux-ci, la grande Junon de la villa Lu- dovisi mérite la première notre attention , puisqu'elle paroît avoir le plus de rapport avec les monumens de l’époque précédente, parmi lesquels l’Amazone devoit encore être comptée à cause de son grand rapport avec eux ; mais dans cette Junon l'élévation et le sublime du grand style sont joints, autant qu’il a été possible , à la grâce de celui que nous allons traiter. Toute l'exécution est plus agréable , plus molle; les cheveux sont mieux bouclés, et l’orbite de l’œil est nême moins saillaute et moins forte- menti expiimée que dans la Minerve de Justinien, dans Niobé ou dans PAmazone , quoique l’ouvrage, élant colossal, doive être vu de loin. Ce seroit trop nous éloigner de notre sujet, que de nous étendre en di tail sur étonnante précision et l’art qui règnent dans les propo tions de cette tête :. qu’il suffise à celui qui désire de s’instruire et de faire lui-même des recherches, de savoir que toute l’idée sommaire de ‘a partie la plus transcendante de Part est con- teuuc daus cette tête, Sculpture chez les Grecs. 205 Le Taureau Fa n'se, la Flore ct le Gladiateur Borghèse peuvent être mis à la suite de cette tête ; car dans ces figures on voit l’esprit sublime allié au doux et au moelleux, et à cet usage des masses qui forme le caractère constant , ou plutôt l’essence du siyle gracieux. © Si nous pouvons nous fier à nos observations et aux conclusions que nous en tirons, le Taureau et la Flore doivent étre plus anciens que le Gladiateur, puisque, dans ce dernier, Part, quiailleurs s’étoit élevé au-dessus de la nature pour chercher l’idéal, rentre dans les bornes de la réalité et de limitation (4). En observant les Lutteurs de Florence , la Zin- gara , le torse d’une Muse de la villa Borglièse , celui du Bacchus à Naples, et même le célèbre torse du Belvédère , que d’ailleurs on ne peut trop vanter, on remarque coinment l’art quitte peu à peu sa su- blime grandeur, se rapproche de nos idées, et gegne en même temps plus de grâce : c’est ainsi que furent préparés ces ouvrages que nous sommes tentés d’ap- peler la fleur de l’art et le triomphe des grâces ai- (4) Cependant une statue très-bien conservée du Musée de Dresde nous prouve que, même dans l’époque antérieure : on ne dédaigna pas toujours d’imiter la nature lorsqu’un des- sin plus élevé ne demandoit pas ‘application du beau idéal 4 c’est l’image d’un garcon qui touche à l’âge de l’adolescence, peut-ètre d’un vainqueur dans les jeux. Avec toute la beauté et la perfection des formes en général, on remarque une fidélité très-scrupuleuse dans l’imitation de ce qui a été propre à quelques parties ; mais du reste, le travail et l’exécu- tion dans cet ouvrage sont absolument les mêmes que dan, tousles autres monumens de la fn du grand style, - 206 Archæologie. mables , où le sublime et même la beauté sont subor- donnés au gracieux, et ne sont mises en usage qu’au tant que l’eflet désiré de plaire etde charmer pouvoit. en résulter. Ces ouvrages , nés du sentiment le plus dé- licat et exécutés avec l'esprit le plus exquis, parlent immédiatement au Cœur et s’insinuwent dans l’ame :, tels sont Bacchus Ludovisi, lHermaphrodite debout dans la villa Borghèse , le Joueur de flûte et la Bacchante du même lieu, Enfant avec un oiseau dans la galerie Borghèse , et Ganimèdes dans le Mu- sée Clémentin, que nous pouvons citer tous comme les restes les plus distingués de ce genre. Dans ces ouvrages l’art modeste et sage s’est caché, afin que l'esprit de l'observateur ne soit point attiré sur des détails, pour que la jouissance ne soit point inter-. rompue par l'apparition des règles , et que l'unité, gracieuse de l’ensemble puisse parler au sentiment sans aucune altération. Dans Laocoon , le Faune de Barbtrini et le Faune dansant de Florence au con- iraire, on remarque une cerlaine prétention de Par- tiste et le désir de faire admirer son art, tandis que. lPaudace et la sureté avec laquelle il conduit son burin paroissent devoir nous faire croire qu'il a achevé son ouvrage en peu de temps et sans peine. Nous croyons pressentir dans le Centaure Bor- ghèse le Silène qui porte Bacchus, et dans Apollon du Vatican les degrés par lesquels le génie de Part se laissa aller à ce luxe , à cette mollesse et à cette délicatesse que nous apercevons dans le soi-disant Antinoüs du Belvédère, l’Apollino de Florence, la: Vénus dite de Bupalus, et celle dite Callipyge,et dans Sculpture chex les Grecs. 207 la tête d’Ariane au capitole. On a donné la plus grande grâce au plan et à l’exéculion de ces ou- vrages , au contour et à l’ensemble, par ces lignes ondoyantes où tous les angles sont évités ou arrondis: l’œil glisse sur elles sans être arrêté par rien, et trouve dans leur contemplation , moins une occupation , que du repos et une jouissance toujours nouvelle. Mais ici l’art paroïit avoir trouvé ses bornes; car dèsque, dans ses progrès ultérieurs , il avoit outre- passé ce terme, il donna dans des écarts, et sa déca- dence s’annonce par l’oubli, ou du moins la négli- gence des principes simples et uniformes du gracieux et du beau ; car on remarque quelque chose de chargé dans la soi - disant Cléopatre, dans le groupe d’Electre et d’Oreste à la villa Ludovisi, dans la Junon de Porphyre de la villa Borghèse, dans le torse de Porphyre sur lescalier du capito!le, dans une Muse à Venise et les soi - disans Vestales à Dresde. (Aussi tous ces ouvrages doivent être rangés, par des raisons qui seront développées ailleurs, dans le temps des Ptolémées ). Les masses sont de plus en plus interrompues , et les petits plis très-accu- mules vont souvent jusqu'aux endroits les plus élevés des membres. Nous n’étendrons pas plus loin cesréflexions, parce qu'après ce temps l’art ne s’appliqua plus à l’étude de la nature et du beau , mais puisa presque tou- jours dans les ouvrages antérieurs ; et quoique , par d’autres raisons, [ès ouvrages postérieurs ne laissent pas que d’être très-estimables , il seroit cependant superflu d’en parler ici, puisque l’histoire de Part 208 Géographie. dans les temps de la monarchie romaine est assez connue. Qi ee GE" O'CR A P'H-TE GrocrAPursKE Chartor osver Svenge , eic. Cartes géographiques de la Suède, accom- pagnées de vues dessinées d’après nature ; Le tout publié par le baron S. G. HERMELIN , conseiller des mines. Première livraison ; que comprend les provinces connues sous le nom de Norrland. Stockolm , 1797, format atlas. LD plusieurs autres qualités excellentes , les Suédois ont cellé de préférer leur pays à tous les autres, bien différens en cela de tant d’hommes pré- venus, frondeurs ou ingrats, à qui rien ne peut plaire s’il n’est étranger. Les savans de cette nation se sont appliqués à bien connoître leur patrie , et à la faire counoître avantageusement aux autres peuples : veilies, recherches, dépenses même , rien ne leur a coûté pour remplir cette tâche estimable. Peut- êire «même les accusera-t-on d’avoir porté un peu lis cetie partialité : on citera Rudbeck et son at- laniique (1)3 mais de semblables erreurs ont une (1) Ouire l’ouvrage de Rudbeck , on en peut citer encore un grand nombre sur les plantes , les animaux , les mines et les maladies de la Suède, Linneus a consigné les témoignages de cetie ardeur pour bien connoître sa patrie ,; dans sa Disser- tation De necessitate peregrinationum intrà ‘patriam , de la nécessité des voyages dans la patrie. A. L. M. cause ‘Cartes de la Suède. 209 cause si louable, que le sentiment les excuse, lors même que le jugement les condamne, L'ouvrage que nous annonçons est une nouvelle preuve de cet esprit public qui fait tant d’honneur à la Suède. Ce n’est point une de ces entreprises qui doivent la naissance à l’espérance de quelque bénéfice. Son auteur, en y cousacrant son temps, ses peines et sa fortune, n’a pu en espérer d’autre récompense, que l’honneur d’avoir élevé un neuveau monument littéraire à Ia gloire de son pays. La beauté même de l’exécution typographique , qui rend cet ouvrage propre à servir d’ornement aux cabinets des curieux , doit en rendre le débit diflicile. Ce qui en a été publié jusqu'ici consiste en cartes géographiques et en vues, les unes et les autres tracées sur les lieux et gravées avec le plus grand soin, Ou regrette que l’auteur n’y ait pas Joint un texie qui leur servit d’explications peut-être,an reste,en a-t-il publié un depuis que cette première livraison a paru; elle n’embrasse encore que ce que les Suédois nomment les Norrland , c’est-à-dire, les provinces situées du côté occidental du golfe de Bothnie, au nord de la Suède propre. On y trouve une carte générale de la Suède et des pays adjacens, et quatre cartes particulières ; savoir s 1°. De Vestro-Bothnie et Laponie ; 2°, D’ An= germanie, Medelpadie et Jemiland ; 3 De Heriedal ; 4°. De Gestricie et Helsingie. Ces cartes ont été, cu levées à l’occasion de cet ouvrage, ou dressées d’après les meilleures cartes existantes, rec- tifiées et augmentées d’après des observations ré- centes : l’auteur en a fait les frais , et il a été secondé Tome 11IL, O 210 Géographie, par MM. Svab, membre de l’académie de Stoc- kholm 3 Wallmann , ingénieur des mines , etc. Ces vues sont au nombre de six : nous avons parti- culièrement diitingué les suivantes. 1°. Vue de la montagne de Wigel, au-dessus du lac d'Œresund, prise de Beckäas en Norwège, dess sinée d’après nature par C. M. Robsabm , et 20. Vue des montignes de Rute, prise de l'extrémité du lac de Malmag-n,du côté du nord-est, Ces deux endroits sont en Heériedal : on les trouve sur la carte que l’auteur a donnée de cette province. Les montagnes qué ces estanipes représentent font pârtie de la grande chaîne qui sépare la Suede de la Norwège : elles en formest peut-être la partie la plus élevée ; mais c’est ce qu’on pe saura positivement que quand les physiciens suédois nous auront donné la mesure de lélevation de leurs sommets les plus remar- quables. C’est là un dés objets dont il est probable que s’est occupé le baron de Hermelin , et que nous espérons trouver dans l’ouvrage dont ces estampes et ces cartes nous semblent devoir faire partie. Ces Aipes du Nord méritent d’être mieux connues qu’elles ne l’ont été jusqu’à présent : l’élévation en latitude du pays où elles sont placées, doit compenser ce qui parcît leur manquer en élévation absolue pour être assimilées, quant au climat, aux Alpes de la Suisse et du département du Mont-Blanc. Il sera intéressant de savoir quelle est dans ces régions du Nord la limite des neiges et des glaces éternelles ; quelle est la nature de l’air atmosphérique a differentes hauteurs ; quelle est sur ces sommets la marche du baromètre, etc. Cartes de La Suède. 21É Une autre vue remarquable est celle que présente la vignette servant de frontispice : c’est une cataracte de la Laponie de Luleo près de Quickiock et du lac de Saggat. Il est difficile de voir un site plus pittoresque. En songeant à cette Laponie , où des observateurs français et suédois mesurèrent , il y a plus d’un demi- siècle, un degré du méridien , nous n’avons pu nous empêcher de désirer que les savans de Stockholm et d’Upsal prissent la peine de renouveler dans ces contrées boréales une opération dece genre, en pre- nant, s’il est possible, un plus grand arc du méri- dien , une plus grande base, et en profitant de la perfection que les instrumens et les méthodes ont ac= quises depuis le temps des Maupertuis et des Celsius. Ces travaux répandroïent un nouveau jour sur la grande question de la figure de la terre ; et quel mo- ment plus favorable pour les entreprendre, que ce- lui où plusieurs savans réunis ‘’occupent à déterminer avec la dernière précision la véritable mesure de l’arc du méridien qui traverse la France! COQUEBERT. t0°P OCR PHTIE. Toro cr4Pure historique et médicale de Padoue, suivie du tableau des maladies observées dans Les hôpitaux militaires de cette place, pendant le trimestre de messidor an VF ,jar Sarmon, médecin des hôpiiaux militaires de France. Cr ouvrage, publié à Padoue dans le mois de brumaire an VI, avoit pour objet de déterminer l’in= fluence du climat de la Marche Trévigiarne, par rap- port à la santé des troupes. On s’y occupe particu- lièrement de la situation de Padoue, du niveau de son plan, de ses rivières, de l’ordre des saisons, des vents dominans, de la mesure, du temps et de l’im- pression des pluies, de l’état de la chaleur , des éma- nations gazeuses, de la composition de l’atmosphère, de ses vicissitudes, de ses bouleversemens, de la dé- clinaison de l’aiguille aimantée, de la température, des hauteurs du thermomètre depuis le commence- ment du siècle, de celles du baromètre, de leurs va- riations diurnes , de leurs points extrêmes et de leur moyenne élévation, etc. etc. On ne néglige rien pour présenter avec exactitude le caractère des mé téores. On examine la nature de l’eau qui sert aux usages de la vie, et celle des eaux thermales d’Aba- non.On donne l’analyse des dernières, avec la des- cription des procédés qu’on a employés, et une no- tice de leurs vertus médicales. Ce sujet amène cer- tains aperçus géologiques et quelques discussions li- Padoue. 213 thologiques. La qualité du sol et ses productions fixant un moment les regards de l’auteur, il fait des recherches sur l’état de l’agriculture, sur le produit des prairies, sur l’éducation des jeunes animaux et sur la condition déplorable du laboureur. Passant bientôt à l’origine de Padoue, il expose les principaux événemens de son histoire politique et militaire. Ici Puniversité arrête son attention ; il parle de l’époque de son établissement, des bienfaits des princes à son égard , des causes de sa splendeur et de sa décadence, des hommes illustres qu’elle posséda, des hommes recommardables qu’elle reunit encore, des vices de son organisalion, etc. etc. (On considère ensuite Pa- doue comme place de guerre : on traite de sa forme ancienne, de sa fortification actuelle et des ressources qu’elle pourroit offrir. L’on termine enfin par un tableau des mœurs des habitans, par des données relatives aux rapports de vitalité dans des classes diverses de citoyens , par des considérations physiques générales, par des remarques sur l’in- fluence du ciel et sur l’allure des épidémies, etc. etc, La seconde partie présente le tableau des maladies observées dans les hôpitaux de la place, pendant le trimestre de messidor. On a cherché à déterminer le rapport des maladies entr’elles, d’une manière rigou- reu5e : l’auteur, bannissant le vague des descriptions ordinaires, a tout soumis au calcul ; il a construit une forraule ou un cadre resserré dans lequel les maladies ont été renfermées avec leurs expressions numé- riques, On a pris pour sujet d'observation une masse de cent malades, et pour terme de durée la décade du O 3 214 Topographie. calendrier francais. La nomenclature adoptée est celle du docteur Cullen, Telle est donc la mérhode qu’on a suivie, G L'histoire de la décade s’ouvre par un léger énoncé des phénomènes du ciel déduits des tables météorolo- giques portant huit colonnes, jours du mois, vents, thermomètre, hygromètre, baromètre, état du ciel, météores, points lunaires. L’épidémie se décrit avec la plus grande précision : on suit sa marche, ses progrès , ses pas rétrogrades, ses lieux stationnaires, ses nuances, ses passages, ses mutations , etc. etc. On indique le mode curatif qui a paru le plus avantageux ; l’on discute quelquefois des points de doctrine importans, et l’on donne entin sonmairement les observations des cas les plus singuliers. La formule ou le cadre numérique forme en ré- sultat l’histoire de chaque décade : on y conclut les rapports exacts des maladies entr’elles, et l’on dé- termine la proportion des morts à celle des guérisons. LITTERATURE GRECQUE, SrrcrmEen Editionis novæ Epistolarum Aris- tanele ,etc. Cura FE. J. Basr. Vindobonæ. — Essar d’une nouvelle Edition des Letrres d’Aristœænete, par M, B4asr. À Vienne en Au- triche, 1796, LETTRE AU CITOYEN MiILLin. | 16 thermm. an 6. Vovs avez annoncé, citoyen, il y a quelques mois, dans l’intéressant Journal auquel vous donnez vos soins, le Specimen de la nouvelle édition des Lettres d’Aristænete, que M. Bast , littérateur allemand , a publié à Vienne il y a deux ans. Permettez-moi de relever une erreur qui me semb'e vous être échap- pée dans le court article que vous avez consacré à cet ouvrage. Vous y dites que M. Bast a soigneuse- ment collationné « les manuscrits de la bibliothèque » de Vienne, dont un classique, et qui servit à J. » Sambucus pour la première édition de cet auteur. » N'est-il pas naturel de conclure de cette phrase, qu’il y a dans la bibliothèque impériale plusieurs manus- crits d’Aristænete, outre celui dont s’est servi Same bucus. Il est pourtant lrès-vrai que ce manuscrit est le seul qui existe à Vienne, le seul qui existe en Eu- rope , le seul au moins qui soit connu (1), et M. Bast (1) Abresh et Bast, 17 pra fationibus, O 4 aVant tout , d’indiquer les ou Vrages que J'ai été à même de consulter. Ce sont : 1°. Des titres publiés par D. Calmet, dans les Preuves de son Histoire de Lorraine , entre autres Ceux regardant les droits de évêque au XITe. siècle 3 d’autres contenus dans la Dissertation de l’ancienne Jurisprudence de Lorraine tel que celui du Maître- Echevinage de Metz; ctem , les Statuts des Arans ou Notaires de ceite ville » dudit siècle, 2°, Des Jugemens des Maîtres - Echevins de Metz, copiés autrefois par Dom Francois Robert, én-fol. ms. (Chez le citoyen Tabouillot ). 3. Les Coutumes générales dela ville de Metz et du pays messin, £n - 4°, à Metz, 1613, avec des notes ms. (Cet ouvrage m'a été prêté par le citoyen Bouchard > libraire }, 4°. Des épitaphes trouvées dans les églises de Metz , recueillies par Dom Séb. Dieudonné, ms. ( Chez le citoyen Tabouillot ; à S°. Le Roman de Garin te Lohérans , écrit en vers, ouvrage de Hugues Metellus > Chanoine régulier de Saint- Léon de Toul > du XIIe. siècle. D. Calmet l’a publié dans l'Histoire de Lorraine , tome I. | 6°. La Chronique rimée de Saint - Clément , compilée par Jean Châtelaun , religieux Augus- tin, fameux prédicateur » Condamné au feu pour cause d’iérésie en 1525. C’est une espèce d’analyse Tome III. P 226 Mélanges. de la Chronique de Phil, Vigneules , laquelle $ commence l’an du monde 2659 , et conduite jus= qu’en 1546, est conservée dans les archives de la commune de Metz, en trois volumes én-folio. La Ehronique de Saint-Clément commence, COMME de coutume ; par Adam, et se {ermine en 14714 Elle fut continuée par plusiturs personnes. Dans l’édi- tion qu’en a faite D. Calmet, au volume EIT de PHistoire de Lorraine, elle est poussée jusqu'en 1550. Eu quelques manuscrits elle finit en 1603 ; en d’autres, en 16°0. Dans l'exemplaire imprimé én-12 chez là veuve Bouchard en 1698, cette Chronique à élé modernisée et tronquée. Les vieux chroniqueurs , comme Of sait, n'ignorént riènme Gélui-ci nous apprend que M:tz fut bâti par Azita, fille de Noel Suer de Sem. C’est elle aussi qui bâtit, avec ses trois fils, le pont de la Muselle. De sy très-grand magnificence Qu'il valoit d’ung roy la puissance, Elle fut si ravie de voir son œuvre achevée , qu’elle dit : J’ay de mon volloir j0ÿ; Et, dit-on, les arches de Joy. Ainsi lé pont en question est Paqueduc de Jouy. Lo nom de Juif-rue vient du culte de Jupiter: Au plus haut lieu de la cité Y estoit ung pilier plantez , E: sur ce pillier ung el duile De Jupiter estoit le molle ; Ét disoit-on Jupite Tue, Depuis on ne dique Juicue. Ancien langage Mmessin. 227 Par la suite la ville de Metz fut agrandie par les Troyens; ellé fut détruite et reconstruite par Mé- üius , capitaine de César , qui lui donna le nom de Metz ; car aupaiavant elle étoit appelée Medroma- tricum ; parce qu’elle se trouvoit située au milieu, entre Paris, Lyon et Mian. D. Calmet-a sauté toutes ces fables, de même que la vie et les mi- racles de Saint Clément ; qui, à son avis , ne valent pas mieux, pour commencer à l’époque du duc Nervin, père aux Lorrains Guérin et Belco de’ Belin. Le plus grand usage à faire de cet ouvrage sera/toujours pour l’ancien langage. 70. La Chronique où Les Annales de Saint- Thiebaut de Metz , dont l’auteur a vécu souÿ Gharles VIT, et a écrit en 1429. Eilé commence en 1229, êt finit en 1445. D. Calinet l’a publiée dans le cinquième volume de l’Histoire de Lorraine * 82. Les Observations séculaires de Paul Ferry, célèbre ministre protestant de Metz, mort en 1669; lesquelles D. Calinet dit avoir vues chez M. Ferry, conseiller au parlement de Metz, mais qui se trouvent aujourd’hui chez le citoyen Tabouillot. Cet ouvrage manuscrit et intéressant de l’infatigable Ferry offre d’abord des tables synchroniques faites avec beau- ‘ coup de netteté et de précision, et contenant les faits et les événemens remarquables depuis le premier siècle de Père chrétienne, jusqu’au seizièine. Dans les séries des colonnes, il s’en trouve toujours une desti- née particulièrement pour la ville de Metz. A la suite de chaque table synchronique ; Ferry a nus des P = 228 Mélanges. extraits d'auteurs qui fournissent les matériaux pour composer une histoire suivie de tous les siècles, et puis une suit d’atours ou statuts de la ville de Metz. Ces tables synchroniques, avec lesdites pièces justifi= catives et probantes, remplissent les deux premiers volumes ; ie troisième contient un indice général aui se rapporte à des tables faites séparément pour chaque siècle, dans lesquelles il y a par-tout un article pour le langage messin et pour le style. 9°. La Com:die messine , intitulée La Famille ridicule , imprimée £n - 8°. Le fond de cette pièce, écrite en patois, est une histoire véritable , dans las quelle Claude Demange, sa femme , sa fille, etc. ont joué leurs rôles, Le procureur étoit Vignon, qui a épousé Nanon. L'affaire s’est passée au’ comence- ment de ce siècle. Parmi les plaisans auteurs de la pièce, qui a été jouée sur un théâtre domestique, et dont il se trouve encore quelques exemplaires chez un libraire de Nancy , étoient Bouy , notaire, et Féticq, avocat. Il existe encore nombre d’autres ouvrages intéres- sans à Metz, dont on pourroit se servir pour compos ser un glossaire de la langue ancienne et vulgaire , en compulsant aussi entre les ouvrages cités et mon glossaire patois, le dictionnaire étymologique de Menage , augmenté par Jault ; le trésor de Borel, les dictionnaires praticiens gothiques de Battheney , Lemoëine et autres, C’étoit au céièbre auteur de l’histoire des Troubadours, Zacurné de Saint- Palaie , à enrichir la Litératwe française d’un glossaire francais. Aussi Pavoit-il entrepris; mals Ancien langàège messin. 229 heureusement le plan qu’il en avoit concu étoit trop vasie, embrassant la langue française ancienne , moyenne et moderne, Il est à désirer que le citoyen Bréquigny, s’il est encore dépositaire des grands re- cueils de son devancier, se renferme dans les bornes du moyen âge. Nous aurons alors un ouvrage à pla- cer à côté des glossaires allemands de Wachter, Haltaus et Scherz, et du glossaire suio-gothique d'JAre. Quant à mes supplémens, ma délivrance, arrivée par la révolution du 9 thermidor, après onze mois de détention, ne me permit heureusement pas de les continuer. Voici une série de mots tirés de mon recueil. à pairt, de la part. à leilz, tellement , de même. & toujours mais y pour loujours , désormais. aaivier , pevpler , multiplier, planter. abezignest , ait besoin. il ne vous abesoigne mie , vous n’avez pas besoin. abillement , machine. Je crois que c’est une faute, pour atillement , artil- lement. aeboulestrez , arbalétres. aboulestries , arbalêtriers. abrévié , abrevé ; vite, promptement. abriéner , abrieneir , abolir , réduire à rien. absoliir un acquaist , purger une acquisition d’hypo- thèque , du latin absolvere, Voyez J. François. accroissant , Auguste. Dans le titre semper Augustus. ; echillé , - assailli. P 3 e 230 Mélanges. acondire , mettre obstacle aux publications. acquastour » | collecteur de tailles. acquerellez., inquiétés. acrastre ; accroître , du latin accrescere. acitour demandeur. ad cy À à présent, ad si, ainsi. adjuel , adjuelle , aïeul, aïeule,en espagnol abjuele. adneuwa , désavoua , abnegabat. son adwenant y sa quote part. afautré , équipé , enharnaché , affuté. ofiche , épingle , item mouchoir, agayts dégât. agouslé y régalé, servi. - aichiet , échéance. | aïei ÿ aies y âge, vivre par ati, vivre son âge. aiewe , aide | adjutorium. ains » avant, ane. ainsiens 3 anciens, ancêtres, ajoisté ; ajosté y assemblé en ost, en compagnie d’armes. air ; atrdre s brûler, ardere. air ; Qirs y place, places, areæ. airareir , poursuivre, atraniens , poursuivons. atrler y après , arrière. De là s’entend le mot catenaire ; qui veut dire çai , en arrière, ci- devant, V. l’'Hist. de l’Acad. des Inscr. tome I et V. 4 remeitre airier » remettre auparavant. atrlmone aumône , éleemosyna. à l’aistaiche employ ;, en place publique. aistre ; aitre , cimetière , afrium. ajuwes » adjoints , adjuyantes, Ms ie : Ancien langage messin. eleun , LT alleweir , aleveir , aliemans , alignier , allée , alloier , alaier , elle allit de vie à mort ;, alloé , Alsois, Aussais , eltretant, alstre , amainri » amainrissement y emanderte y améableté , amener à jour y en amont, ample , amplaidiement , amuit y anci ; un ancien homme » anelostre ;, aucun , aliquis unus. ajouter , allevare. alliance. allier. sortie. allier. elle mourut. aliéné , perdu , dépensé. Alsace. autant , alterum tantum. autre, diminuer , amoindrir. dimioulion. office d’Amans , de Notaire. affabilité, améable , aimable. faire droit. ci-devant. plus, amplius. en procès. ému, ci-devant. un vieillard. au cloitre. annexement » appendice. anport » soutien. la Notre-Dame anpouze la N.-D. de l’Annonciation. Æn- en Mars , pouse pour épouse. Dans le Diet- roman, il y a N.-D. enpoullée, pour N.-D. de Assomption. ans , dedans , en. ansigne 3 collier , insigne. ansegne , un reçu. antravés » logés sous des trefs , tentes. ostruvés ; estrérés » antreport y soulien. aoré , de bone heure. apasier » paciher, P 4 »32 apanlement y il est à apinsaige » aplegier » 4 appaire , apoc ; aposer 3 GPOUSEr p appant s apparilliez , approchier , aprement y aprusmne » arier » escrit d’'arche ; asoigne , asoine assamont » essauroit y assentir 3 assévir y ASCevir » assignal , ast, atillement, artillement , atrayti s atlrez ; altainchier x attrahier 3 au fuer » autel, aval , avant taire » avani-mur 3 avani-part » Mélanges: pacification. il est taillé d’échantillon. donner caution. Voyez plege » dans le Dict. Roman. soit connu. à peu. épouser. appartient , appendet. prêts à faire. répéter , exiger , s’en prendre à... avec acharnement. seulement. Au ban de la Roche on dit domprum , que j’ai ex- pliqué dans le Glossaire. La racine est le latin primum. loin , précédemment , ensuite, acte de Notaire. excuse , empèchement. effectivement. assailliroit. pressentir. exécuter , contenter. assignation. pour ost, armée , hostis, artillerie. sorti , aftractus , traclus. débiteur. étancher , cesser. aubaine. Voyez aussi atraysres dans le Dict. Roman. autour, tellement. parmi. produire, allem. vorziehen. mur avancé, allem. sor-mauer. préciput. Ancien langage messin. au dei, averoit , augues douces avigner ; avos , avou , aoul , avoulz, aut , jeaiaut, auteicum , autres de mi , antrepourteir : N. D. awast , ayme 3» x 233 en arrière. auroit , Aaberet. eaux douces , aqguæ dulces, peupler de vignes, avec ; au ban de la Rocke, évo, aveu. eu , habitum. j'ai eu. de même que. autres que moi. favoriser ,| entreporter. N. D. de l’août , l’Assomption de N. D. ame. Je finis en ajoutant quelques sentences ou ma- ximes tirées de la Chronique de Saint- Clément , qui en fourmille, De bonne vie vient bon los. Mauvais qui chante , pire qui répond. Fortune va ainsi par le monde, Quand l’un avalle , l’autre monte. Trabison ne dort, ni ne choque. ( Le traître n’a ni repos ni plaisir.) Mieulx vault assez | que trop gaïgnier , Qui a ung seul crapault mengé, Mil en peult mengier sans denger. Les penseurs trop bon temps auroient , Si les eontrepenseurs n’y estoient. Si fort n’est, qu'aussi fort ne soit. PO LS TUE. MA JOURNÉE, POÈME, Jar bien dormi : le jour en sursaut me réveille, Et dix heures déjà sonnent à mon oreille. Mais l’oiseau de son chant saluoit le matin Que je veillois encor La Fontaine à la main : J'aime son vers facile et sa grâce naïve. On croit, pour limiter, qu’il suffit qu’on écrive: Aussi combien d’auteurs veulent suivre ses pas ! Ils ont tous de l’esprit et lui n’en avoit pas. Le bonhomme , entre nous, n’avoit que du génie : On dit qu’il figuroit fort mal en compagnie, Moi, je n’en doute point ; là tout cœur est fardé , Et je vois que souvent un sot y tient le dé. La Fontaine, à ce soir ; et que demain l’aurore | Puisse me retrouver te relisant encore ! l Que ferai-je ? voyons. Des vers ? on en fait tant. De la prose ? à quoi bon ? J’apercois là pourtant Trois actes, nouveau fruit de ma docile veine, D | Et qui, pour se montrer, n’attendent qu’une scène ; L’ébauche d’un poëme et quelques madrigaux Dont pourroient s’engraisser quelques maigres journaux ; Vingt pages d’un roman, où plus d’une aveniure Peut mettre du lecteur l’esprit à la torture; Car Lucifer y joue un rôle assez plaisant. Allons, Pégase, à moi ! que ton dos complaisant , Me porte sans délais au pays des chimères ! Tu te cabres, je crois? Tes ailes si légères N’ont-elles plus leur force et leur agilité ? Je gage que Lourdis hier t’aura monté. Les meilleurs écuyers ne sont pas au Parnasse, Et tu peux d’un Lourdis encourager l’audace ! Ma Journée. 235 Tu veux te reposer, jy consens; aussi bien Des Muses aujourd’hui je craignois l’entretien. Oui, lorsque le soleil , embrâsant l'atmosphère, De ses longs réseaux d’or enveloppe laterre , Je me sens ay pelé par ce mouvant tableau Que m’offre de Paris l'aspect toujours nouyeau ; Et de l’enfantement d’un vers lourd et maussade, Je me sauve en faisant un tour de promenade. Eh bien ! quittons Le lit : habillons-nous. Du moins Dix valets ne vont pas m’accabler de leurs soins. Je fais seu] ma toilette , et J'habitude est bonne : On est bien sur alors de ne gronder personne. A me faire servir j’étois accoutumé ; Mais huit mois de prison sur ce point m’ont formé. J’en rends grace au destin , et pourtant le conjure De ne plus me donner une leçon si dure. Me voilà prêt : sortons. Je vais, à tout hasard, Suivre l’orme aligné qui borde le rempart ; Admirer, en passant, ces galans édifices, Tous ces temples du luxe aux voluptés propices ; Solitaire et pensif , traverser le jardin Que Le Nôtre a ;lanté de son habile main; À l’aspect du château que réfléchit la Seine , Rêver sur le néant de la grandeur humaine ; Puis aux champs de leur nom par la Fable dotés, Contemyler du printemps Les naissantes beautés, Eb ! bon dieu ! quel fracas ! quel rain ! quelle cohuel Le rempart aujourd’hui n’est qu’une étroite rue. Que de gens à cheval et que de gens à jié ! On ne peut faire un pas sans être coudoyé. C’est le premier beau jour de la saison nouvelle ; Et ces chars , ‘ces coursiers volent à Bagatelle. N'est-ce pas là Mysis? Qui, vraiment. Autrefois Un clavier s’animoit sous ses agiles doigts ; 236 : Poésie. Et Plutus l’enlevant au dieu de l’harmonie, LI est presque honteux d’avoir eu du génie. Ah! je vous remets bien, c’est vous, heureux Damon : Je vous ai vu d’un saint ne portant que le nom ; Vous n’aviez point encor brillé dans jes affaires. Vous avez aujourd hui quatre maisons, deux terres. Les temps sont bien changés ! car , soit dit entre nous, Vous serviez chez autrui le vin qu’on boit chez vous. Lysidor, au’on vous voie ! oui, bäissez votre glace: Jadis petit commis d’un petit homme en place, Cent pistoles bornoïient vos minces revenus ; Vous u’étiez pas alors au tang des parvenus ; Ft si j'en veux pourtant croire la renommée, Vous ne fütes qu’un an fournisseur de l’armée. Qu’on se range ! Cliton s’avance. Son coursier Bondit fier d’obéir à a main d’un guerrier : Tandis que nos soldats signaloient ieur courage, Cliton étoit toujours le ptemier.... au pillage, La fontaine mourant comme il avoit vécu, À sa veuve , à son fils, laisse à peine un écu. Il faut, je le vois trop et le dis sans rancune , Être sot ou fripon pour faire sa fortune: Mais Psyché, mais Vénus vient-elle parmi nous, Et Paris de ;’Olimpe est-il le rendez-vous ? Tout à mes yeux charmés révè'e une Déesse : Ces cheveux où l'or pur se mêle à chaque tresse, Et ce lin sur l’épaule heureusement jeté, Et ce sein qui d’un voile affranchit sa beauté ; Ce bras dont le contour s> déploie avec grâce, Ce pied que de ses nœuds un cothurne entrelasse, Ces vêtemens légers qui semblent à regret Ou quitter une forme , ou cacher un attrait. O spectacle enchanteur ! dans mon heureuse ivresse, Je me crois transporté sous le ciel de La Grèce. L'heure avance : je sais que tout est pour le mieux, Et que l’on dine à l'heure où sou;oient nos aïeux. Ma Journée. 237 Mais je puis pour six francs manger à table d'hôte: Là , les originaux ne me feront Las faute; Le repas sera sobre et seryi promptement. Abrégeons le chemin. Bon: v. i'à justement Une rue, une enseigne ; entrons. La compagnie Est nombreuse, Lanl mieux. La maitresseæst jolie , Cela ne gâte rien. Le vin aigre, tout beau : Je n’en boirai que,peu , trempé de beaucoup d’eau. J aurois pu'chez Méct faire meilleure chere; Mais ce Palais Royal est vraiment un repaire Où tout vice est certain de rencontrer son lot. I1à, jusques au Perr.n tout se change en tri ôt ; Et d’un être vivant à peine on sent l’approcbe.. Qu'on croit déjà sur reidre une main dans sa poche. Je suis fort bien ici , j'y reste. Mon voisin Etvit sans doute àjeun; car il y va d’un train... Il se croit seul.1lLe mets que son assiette implore, Son œil même, son œil d’avance le dévore.f Presqu’en face de moi c’est un peu différent ; Si l’on goute de tout, de rien l’on n’est content. Voyons si je serois bon physionomiste. « Homme de loi, rentier, marchand forain, artiste, > Fermier des environs, commis à mille ecus, » Celui-ei nouvelliste, et celui-là .… motus : » Je juge à son regard, à son geste, à sa mine, > Que dans un lieu publie il a l’oreille fine. » Mais là-bas on s’échauffe ! éeoutons. - Non, morbleu! : Molé v’a joint d'esprit , de grâce dans son jeu, — Moi , je pleure sur-tout à l’oéra-comique. — Monsieur apparemment n’aime que la musique. — La musique est un art !.... C’est le premier de tous. — Eh ! sans la poésie où diable en seriez-vous ? — Pour rien assurément vous comptez la peinture ? — Fadaises que cela. La loi... - L'agriculture. — L'argent. - Les bons trois-quarts. - La guerre. -La paix. - Non. — Piccini. - Buonaparte. - Un duo, - Du çanon... 238 Poésue. Oh ! quel bruit ! sauvons-nous. La querelle s'engage, Et je suis par nature ennemi du tapage : Abordons la maîtresse avec un compliment ; Payons vite, et courons prendre l’air un moment. k Que vois-je écrit là haut? Cabinet de lecture , Rassemblement d’oisifs dont la carricature M’amusera peut-être ; au surplus , essiyons. De Calot et d’Hogast que n’ai-je les crayons ! Comme il est bien posé ! l’excellente figure ! Il ne dort ni ne veiile. Il tient une brochure: I1 voudroit y fixer son regard incértain, Et toujours la brochure échappe de sa main. Au fond de la cité je gage qu’il demeure : Pour arriver ici, que lui faut-il? une heure, Trois pour lire à peu près comme il lit aujourd’hui, Une bonne heure encor pour retourser chez lui. Eh bien! cet homme-ià bénit sa destinée, Et se couche enchanté le soir de sa journée ! Quelle pièce aujourd’hui donne-t-on à Feydeau ? Si j’en crois ce journal, c’est un drame nouveau. Pour la prémière fois ! courons , le temps me presse. La crainte te poursuit et l’espoir te caresse, Pauvre auteur ! le travail est pour nous le moment Du plaisir , du bonheur et de l’enchantement : . Nous nous voyons déjà sur la double colline A côté de Molière , à côté de Racine , Et du juste avenir notre nom respecté S’en va de siècle en siècle à l’immortalité, Mais à l'instant fatal où le rideau se lève , L’illusion, hélas ! s’enfuitavec le rève, Quoi ! l’orchestre tout p'ein et les balcons aussi ! Tâchons dé pénétrer... À Ja fin m’y voici. Autour des nouveautés tout le monde se presse, Il est plaisaut de voir la chute d’unt pièce. ne Ma Journée. | 339 En pareil eas pourtant si chaque spectateur Pouvoit prendre un moment la place de l’auteurt Qu’entends-je ? Du succès agréable présage 1 Déjà , sans l’avoir vu, l’on déchire l’ouvrage. Le titre est mal choisi. Cinq actes, c’est bien long. Regnard même, Regnard n’a rien produit de bon. Par bonheur du public craignant l’impatience Un acteur à paru. L’on écoute en silence : Jusqu’à prése:t du moins le Parterre est décent; Trois actés bien remplis , sujet intéressant, Ce début pour la pièce # gagné son suffrage ; Maïs attendons la fin. J’enténds gronder l’orage : De temps en Llemps le cie! s’obscurcit, et les vents Exercént leur füréur par de longs siflemens. Pauvre auteur! c’est ici le fort de la tempête : Tout est perdu ; la f udre éclate sur la tête. Pilote malheureux ! je plains ton triste sort: - Ton vaisseau vient, hélas ! d’échouer près du port. Que vas-tu devenir? Cé soir, dans la coulisse, Oseras-tu braver le dédain d’une aetricé Et le souris malin de tes joyeux rivaux ? _ Demain à ton réveil liras-tu les journaux ? El ! sur-tout, de quel front aborder ta maîtresse ? Tu lui faisois sans doute hommage de la pièce. Déjà la dédicace où s’épanchoït ton cœur, À Didot (1) ,en secret, reprochoit sa lenteur. Crois-moi, ne brigues plus le stérile avantage D’amuser le publie : jette au feu ton ouvrage. Sois bou époux, bon père, utile citôÿen; Ton siècle , il est trop vrai, de toi ne dira rien; Ton nom ne vivra päs chez les races futures, Qu’importe ! jouissant de tes vertus obscures, Tu connoîtras du moins la paix et le bonheur : Il n’est pire métier que le métier d'auteur. (x) Célèbre imprimeur. y ! 240 _ Poésie. Moi-même , renonçant à mon œuvre comique, Vais-je enfin regagner mon manoir poétique ? Hélas ! je crains de faire un bien triste souper. Des pensers doulouieux reviendront m'occuper : On doit plaindre après tout la muse infortunée Qui perd en un instant le travail d’une année. Ne pourrai-je finir le jour un peu gaîment ? Si j'ai bonne mémoire... Eh ! oui, dans ee moment, Je suis sur de trouver un thé chez Aspasie. Un thé ! qui n’en a pas ? c’est une frénésie. Quel cerc.e ! juste ciel ! il paroît qu’ aujourd’hui On a craint dans ce lieu de connoître l’ennui. Je comptois sur un thé, je risquois l’aventure , Et je trouve de plus, bal, concertet lecture. Pourquoi pas ? Selon moi, varier le plaisir, C’est connoitre en effet le grand art de jouir. L’autel, disons le mot, la able est préparés : Le fauteuil ,.le flambeau, le verre d’eau sucrée * Rien ne manque, Fort bien. Eh ! quel est le lecteur ? | Un jeune homme charmant. De plus d’un auditeur | Je iui garantirois d'avance le suffrage. La jeunesse a son prix. Le titre de l’ouvrage ? L’Amour auteur. Eh ! oui. Se met-on sur les rangs ? Ce sont là les sujets qu’on traite à dix-huit ans. L'Amour auteur | je crois, s’il s’avisoit d’écrire, Que l’Amour en auroit de bonnes à nous dire. Cemment donc ! c’est fini ? Tout le cercle enchanté Applaudit; c’est sans doute à la briéveté. Heureux jeune homme ! on vante et son goût et sa grâce; Chacun auprès de soi lui prépare une place : On veut savoir son nom, tout haut on le redit, Et vingt femmes demain l’auront mis en crédit. Mais tandis qu’il lisoit , déjà près d’un pupitre, Et fièrement assis, j’ai vu {Orphée en titre. Sous Énaes : - Ma Journée. Sous le mobile archet la corde aretenti, Et je crois , par moment » eutendre Zotti, Heureux qui nous feroit oublier son absence Ecrasant ce fauteuil de sa lourde opulence, Midas s’est endormi, Lise appelle Zoë, Valcour en souriant parle bas à Chloé : Germeuil a raconté la nouvelle publique, Et c’est ainsi par-tout qu’on enterd la musique, Mais le chant va du moins fixer l’attention ? Vain espoir ! même bruit, même distraction, On ne pourra danser que Jusques à l’aurore, Et Linus doit céder la place à Therpsicore : Il usurpoit sur elle un temps trop précieux. La gaîté maintenant brille dans tous les yeux. 241 On se croise , on se mêle , on s’a proche, on s’évite: ; ; P , 5 La main vole au devant de la main qui la quitte ; La Grâce suit les pas de la Légéreté; C’est ici le Plaisir; là , c’est la Volupté; D'une vive rougeur elle-même embellie : L'’Innocenee à mes Jeux n’est plus que la Folie; Et dans ce groupe heureux de talens réunis ; C’est V’estris ou Zéphir que je vois dans Trénits, L’orchestre enfin soupire une molle cadence. On attendoit la valse, et la valse commence. Ce ne sont } lus ces pas ; Ces bonds impétueux. La scène va changer. En marchant deux à deux, Du ; arquet lentement on mesure l’espace : Mais déployant soudain sa souplesse et sa grâce, Au signal qu'on recoit > qu’on donne tour-à-tour , De vingt cercles pressés on décrit le contour. La Beauté que dès-lors le Plaisir environne 5 Au bras qui la soutient mollement s’abandonne : Une tendre langueur se répand sur ses traits ; Son œil demi-voilé n’en a que plus d’attraits ; Sa bouche de l'Amour semble as pirer les flammes. Je ne sais à quel point la valse plaît aux femmes, Tome Ill, Q 242 Nouvelles littéraires. Je n’ai pas leur secret; mais dans mon jeune temps Je pense que par goût j’aurois valsé long-temps. K Maintenant je rourrois, plus complaisant que sage, Autour d’un tapis vert, jouet du sort volage, D'’heure en heure passer jusqu’à demain matin » Et du gain à la perte , et de la perte au gain ; Car, que!s que soient les lieux où le hasard m’appelle, Je rencontre lcujours la boutllotte éternelle. Mais si je suis tenté de veiller aujourd'hui, Que ce soit sans fatigue et sur-tout sans ennui ! À minuit écoulé déjà succède une heure. Je vais, sans plus tarder, retrouver ma demeure, Lire mon La Fontaine; et, si le doux sommeil À mes sens rafraichis ménage un doux réveil, Si la rime à me fuir n’est pas trop obstinée, Demain, pour mes amis , j’écrirai MA JOURNÉE. L. J. B. E. VicÉE. PARTS TR N, COUV ER S E T CORRESPONDANCE LITTÉRAIRES. Nous avons déjà rendu compte dans ce journal, de la formation de diverses sociétés littéraires : il vient de s’en organiser une nouvelle à Poitiers , sous le nom déjà adopté par plusieurs autres, de Soccété d'émulation. Gette société est composée de trente cinq membres et d’un nombre indéterminé de cor- respondans ; son but est de cultiver les sciences et les Nouvelles littéraires. 243 lettres par des travaux utiles. Son secrétaire , en nous faisant passer l’annonce de sa formation, nous pro- met le résultat de ses travaux et les articles les plus intéressans pour les insérer dans ce journal. LA comédie nouvelle intitulée /es Projets de ma- rage ,jouée dernièrement au théâtre Feydeau,ressem- ble assez,pour le fond,à la charmante pièce du Prison- nier. L’intrigue roule sur le déguisement d’un officier qui s’introduit dans une maison sous un nom supposé, pour épouser la personne qu’il aime : celui dont il a pris le nom et qui étoit attendu, arrive presqu’en mêmetemps que lui. Un valet intrigant , qui leur pro- met à tous deux de les. servir, et trouve le secret de recevoir de l’argent de tout le monde, embrouille de son mieux l'intrigue ; qui se dénoue ensuite par des reconnoissances. Le citoyen Dazincourt a joué su- périeurement le rôle du valet. La pièce est du citoyen Duval, auteur du Prisonnier. On a donné au théâtre Feydeau, sous le titre de Palma ou Le Voyage en Grèce , un opéra qui a eu le plus brillant succès. Palma passe pour la fille d’un Grec : elle habite avec lui au milieu de quelques ruines que ce Grec fait exploiter, et qu’il fait servir à des constructions nouvelles. Paul , jeune artiste français , est venu en Grèce pour dessiner ces ruines : il est amoureux Q 244 Nouvelles littéraires. de Palma ; il apprend d'un fourbe italien nommé Calini , que cite jeune pérsonne n’est pas ce qu’on croit, mais uue Géorg énue achetée par le Grec et destinée au sérail. Eu effet, on annonce le grand eu- nuque accompagué de sa suite : il vient voir si Palma est telle qu’on la lui a annoncé’; et la trouvant plus belle encore qu’il ne croyoit, il en donne le prix sur< Le-champ et lui fait présent d'un écrin de pierreries. Calini, que Paul a pris pour confident, prend la ré- solution d'enlever Palma et la cassette : pour cela, il se met dans un palan juin qu’il veut faire introduire dans lPappartement de Palma ; mais celle-ci, qui a surpris ses projets, en avertit Paul, Calini est enfermé dans le palanquin, et pris par l’eunuque pour la sul- tane. Mais eufin tout se découvre : l’eunuque ne peut pas se résoudre à offrir au sultan uue femme qui a eté au pouvoir d’un énfédelle ; et par un trait de générosité, peut-ê.re bien peau vraisemblable de la part d’un Turc et d’uu eunuqus, il laisse au Grec le prix de Palma qu'il donne au jeune Français. Telle est l’intrigue de cette pièce,dont la décoration est d’un effet surprenant (1) : les chœurs d’esclaves et d'ouvriers turcs et grecs la rendent extrêmement brillante. Le citoyen Juliet a été vivement applaudi dans le rôle de Calint, ainsi que la citoyenne Scio dans le rôle de Palma. La musi ue est du citoyen lantade, L'auteur des paroles est le citoyen De- moncy. (x) Elle représente uh site d'Athènes auprès du Parthenon : les dessins en ont été faits d’après le Vuyage de la Grèce de Choiseuil-Goufher, El 5 eh in Le, Nouvelles littéraires. 245 Gotha , 18 août. I£ y aura une assemblée d’astronomes les plus ha- biles ici, au Seeberg : le professeur Hlüsel, harile mathématicien , auteur cé'èbre d’une encyclopedie qui est dans toutes les mains, et professeur de ma- thématiques à Halle , et arrivé aujourd’hui avec deux autres professturs , Gilbert et Pistor. Dans quelques jours on attend le professeur Seyffer de Gottingue, qui y dirige ”Observatoire : le célèbre Bode arrivera de Berlin vers le 16 ; Bugse viendra de Copenhague ; enfin, PObservatoire de Gotha fera époque dans les arna!es de l’astrono: ie >» même par cette convention qui nous donnera sans doute vos poids et vos mesures, | LE 11 vendémiaire an VII et jours suivans, on meltra en veute, à Strasbourg, la bibl'othèque de feu le citoyen Jean-Leypold , professeur au Gymnase de Strasbourg. Les amateurs trouveront dans cette bib'iotkèque, composée de plus de dix mille volumes, des curiosités littéraires de toute espèce, sur-tout des monumens de l’art d'imprimer du quinzième siècle , des éditions rares. ( qu’on a distinguées dans le catalogue par un renvoi aux auteurs qui ont traité de ce genre de litt« rature ), et des pièces du jour caractérisant le génie et le goût du temps qui les a produites. On y trouvera entr’autres : Mornay, Hit. de la Papauté ; Saumur , 1611. — Flatiuna de vutis sum- Q 3 246 Nouvelles littéraires. morum Pontificam ; Colon. , 551.— Bibl. lat. Rob. Stephani ; Paris, 1557, trois vol. — Piolomæi Cosmograph.; Ulm , 1486. — Boëthi Opp.; Ve- pet., 1409. — Strabo lat. Mancinelli; Venet., 1494. — Petrarchæ Opera ; Bas., 1496. — Gra- mond , Hist. Galliæ ; Tolos., 1643. — Gesneri Bibliotheca universa amplificata per Fristum ; Turici, 1583. — Quatuor Évangelia gothice et anglo-saxonice , c. gloss ; Amst., 1684. — Ale- thei Potygamia triumphatrix ; Lond,, Sean. 1682. — Pontani Origines Franciæ ; Hardervic., 1616. — Trithemic polygraphiæ, L.6; Argent., 1613. — Agrippa , de incertitudine et vanitate scientiarum , 1532. — Il decamerone di Boccac- cio ; Firenze , 516, (éd.rare). — Navdé, Addi- tion à l’hust. de Louis XI; Paris, 1630. — Ali meloreen vitæ Stephanorum ; Amst., 1683, Le citoyen Oberlin , professeur, rue Barbe, n°. 10, et le citoyen Jean- Georges Dahler, homme de lettres, rue des Orfèvres, n°. 18, offrent leurs ser- vices aux étrangers qui voudront leur confier Jeurs commissions franches de port , avec les prix fixes qu’ils ont l’intention d’y mettre. Le catalogue se trouve aussi à Paris chez le citoyem Fuchs, libraire, rue des Mathurins , maison Cluny et le citoyen Kœnig , libraire, quai des Augustins. : Nouvelles littéraires. 247 Disrrisurion des prix d'émulation à l'hôpital militaire d'instruction à Paris, Le réglement sur les hôpitaux militaires d’instruc- tion accorde chaque année des prix d’émulation à ceux des élèves qui se sont distingués pendant celle qui a précédé, La distribution de ces prix s’est faite le 26 ther. À midor dernier, en séance publique , à l'hôpital mili- taire d’instruction de Paris, établi au Val-de- Grace, Quelques jours auparavant il y avoit eu un con- cours entre les élèves, pour la nomination à deux places de chirurgien de deuxième classe | qui étoient vacantes dans cet hôpital. Les inspecteurs- généraux formant le conseil de santé près le ministre de la guerre, charoés de lui présenter les officiers de santé qu’ils jugent dignes d’être employés aux armées et dans les hôpitaux mi-- litaires, avoient attendu jusqu’à ce jour afin de le rendre plus solennel, en faisant connoître la nomi- nation qui étoit le résullat du concours. Trois d'entr’eux ont assisté à la séance du 26, et le citoyen Heurteloup, Pun de ces inspecteurs, l’a éu- verte par un discours dans lequel il a rappelé les motifs qui ont déterminé le Gouvernement à établir un hôpital militaire d'instruct on à Paris. Le citoyen Vergez, secrétaire - adjoint de l’inspez- tiou , a ensuite lu les rapports approuvés par le mi- nistre sur la distribution des prix et sur la nomination aux deux places vacantes, Ces prix , qui consistoient en instrumevs de chirur- Q 4 248 Nouvelles littéraires. gie et en livres qui traitent de l’art de guérir, ou des sciences qui y sont relatives, ont été distribués ainsi qu’il suit : Chirurgie. Aux citoyens M. Caarpez, de Rennes, département d’flle-et- Vilaine, le premier prix de la valeur de 100 francs ; L.-P. Dacoreau, de Gervais, département de la Sarthe, lé deuxième prix de 100 francs ; V.-O. Gouraun , de Cholet , département de Maine et Loire, le premier prix de la valeur de 5o francs ; L.-J. RenaurDiN, de Nancy , département de la Meurthe, le deuxième prix de 50 francs. Pharmacie. Aux cifoycns J.-I. Vinrey , d’Hortes , département de la Haute-Marne, un prix de la valeur de 100 franés ; J. MarGueroN, de Tours, département d’Indre- et-Loire, un prix de bo francs. Les citoyens Gouraud., ci-dessus mentionné , et G. B. A. Coutanceau , de Rennes , département d’Ille-et-Vilaine , ont été proclamés chirurgiens de deuxième classe ,et on leur a délivré sur-le-champ les titres de leur nomination. Le citoyen Dhullerin , commissaire des guerres, chargé de la police de l’hôpital, a rappelé, dans un aa ent ie ESS RÉ ETATS Dit À ordis: Lo Ée — Nouvelles littéraires. 249 discours concis, mais plein de choses , l’utilité de Pétablissement. La séance a été terminée par l’annonce d’un con- cours qui aura lieu dans Pamphit(âtre du même hô- pital au commencement de vendémiaire prochain, pour la nomination aux deux places de chirurgiens de troisième classe , devenues vacantes par la promo- tion des citoyens Gouraud et Coutanceau, Tous les élèves ; qui , aux termes du réglement , pourront prouver deux années de service dans les hôpitaux militaires , et qui auront moins de vingi-cinq ans d’âge, seront admis à ce concours en se faisant ins- cire d'ici au 29 fructidor : un registre est ouvert à cet effet à l’inspection générate du service des armées » maison Tessé , rue de Varennes , faubourg Ger- main. Les plantes apportées par le capitaine Baudin, et contenues dans cent cinquante caisses, végètent avec beaucoup d’activité, Plusieurs d’entr’elles ont donné des fleurs ; savoir : une espèce de Bignone, Bzgno- nca pentaphylla , L. Ses fleurs, couleur de chair, sont plus grandes que celles du Cata/pa , et en ont la forme. — Une espèce de Tournefortia qui pa- roit nouvelle. — Une Euphorbe dont les feuilles, d’un vert très- agréable , ressemblent un peu à celles du Fustet, — Enfin, le Jatropha gossipifolia , L. Celle-ci commence à montrer des fruits. Parmi cette foule de végétaux étrangers, il est des arbres fruitiers qu’on espère pouvoir naturaliser dans les départemens les plus méridionaux de la France, | 250 Nouvelles littéraires. tels que l’Avocayer, Laurus persea , L., arbre que les Espagnols ont transporté du nouveau-monde dans le royaume de Valence, où il donne des fruits. Ces fruits sont pulpeux, de la grosseur d’une très-gro:se poire : on en mange la chair avec du sel et du poivre, — Le Papayer, Carica papaya , Lux On y compte aussi des plantes alimentaires, telles que deux espèces d’Tgnames, Dioscorea alata et Déscorea aculeata. — La Patate blanche et rouge, Convol- vulus Batatas , etc. Parmi les plantes curieuses, on remarque particu- lièrement une Fougère en arbre , dont la tige a trois pieds et demi de haut sur trois pouces de diamètre, et se termine en ce moment par deux feuilles qui ont plus de deux pieds de long, à divisions très fines et très-égales. Les quatre espèces de Palmier commencent à pousser , sur-tout le Cocotcer et le Chou palmiste : ces arbres majestueux promettent de s’acclimater dans nos serres, qui bientôt seront trop petites pour les contenir. Le public a vu avec intérêt les éléphans du Mu- séum d’histoire naturelle, jouissant déjà de l’entrée du parc qui leur a été préparé avec une activité et un zèle qui attestent le soin que l’administration de cet établissement met à la conservalion des objets confiés à sa garde. Ce parc, dont la disposition est coordonnée avec le plan général d’une grande ména- gerie, est entouré de bois assez solides pour que le public n’ait à redouter aucun accident de la part de Nouvelles Léttérarres. et ces animaux : il communique avec leur écurie par une espèce de corridor , de manière qu’ils peuvent aller et venir librement de l’écurie au parc et du parc à l’écurie, Son enceinte, qui doit être embellie d’arbres et agrandie dans l’exécution du plan géné- ral , leur donne aujourd’hui assez d'espace pour y prendre un exercice salutaire, Le premier jour qu’on leur en a ouvert la porte ils paroissoient soupçonner quelqu’embüche , et ce n’est qu’à force de caresses qu’on les a déterminés à jouir de la liberté qui leur étoit offerte : aujourd’hui plus co:fians, ilsen pro- fitent avec un extrême plaisir ; un de leurs plus grands amusemens est de s’arroser le corps avec l’eau d’une grande auge qui est à leur disposition. On at- tend l’hiver pour y semer du gazon et planter des arbres, qui, en leur présentant une perspective de leurs antiques demeures , étendront leur instinct par le sentiment de la liberté. Les gazettes disent que le voyageur anglais Haw- kins , après avoir parcouru lPAsie mineure et la Grèce, vient d’arriver à Berlin : elles ajoutent qu’il a recueilli une si grande quantité de médailles, d’ins- criptions, de manuscrits anciens conservés dans des -couvens, etc. que sa collection sera la plus considé- rable de toutes celles de ce genre qui existent en Angleterre ; mais cette collection est retenue en Mo- rée ( l’ancien Péloponèse ) par la crainte qu’inspirent les Français sur la Méditerranée. 252 Nouvelles littéraires. LEs paysans de la ci-devant Pologne passoient pour malins, inofficieux, rampans, mal-propres et ivrognes, Un auteur allemand, M. Fritze, vient de les dis- culper dans un Traité inséré dans les Archives berlinoises du temps : s'ils sont malins, dit-il, c'est lorsqu'on les traite d’une manière indigne de Phomimne ; ils sont inoMicieux envers les Allemands, c’est qu’ils leur ont été peints comme des héré- tiques ; ils s’ag-nouillent quelquefois par respect, et pour cela on a dit qu’ils sont rampans, mais il faut observer qu’on ne leur a jamais prêché que Pesclavage. Leur mal-propreté vient de ce que leurs seigneurs leur donnent une misérable habitation , telle que quatre personnes la pourioient commodément consiruire en deux jours. Quant à leur passion pour l’eau-de-vie, ils ne l’aiment pas plus que plusieurs paysans de l'Allemagne et d’autres con-: trées ; ainsi ils ne méritent pas tout à fait, du moins pas exclusivement, la réputation qu’on leur a faite. IL est honorable pour la Scandinavie, que deux des meilleures ; et l’on pouvoit dire les deux seules descripions de Maroc soient sorties de la plume de ses écrivains, et dans les langues da- noise et suédoise. La première fut publiée en da- nois il y a environ vingt ans, par M. Hoesti , et traduite en allemand. L’auteur avoit fait un long séjour ème le pays, et a été jugé digne de la plus grande confiance. Le livre de M. Agrell est également le fruit de Nouvelles littéraires. 253 plusieurs recherches locales : on vient. de le traduire en allemand , en l’accompagnant d’un appendice qui contient le voyage du médecin anglais Lem- prière , dans une partie plusreculée de l'empire de Maroc ,et qui renferme des remarques curieuses sur Pintérieur du Harem, que son état l’avoit mis à même de visiter. Il y a éte joint une carte de Fezet de Maroc, par le savant docteur Canzler : cette traduction a paru à Nuremberg en 1797. M. Agrell exercoit les fonctions de sécretaire au consulat suédois à Maroc dès l’année 1769, et il eut occasion de pénétrer fort avant dans le pays. On peut compter sur sa véracité ; il confirma les rapports de M. Hoest , eten donua la continua- tion. À son retour il passa à Gibraltar : il en peint les fortifications, même celles de Part, comme ia- comparables ; la dernière de ses lettres date de Tanger , le 6 octobre 1791. Voici un trait cité par l’auteur : « Il est rare de voir un Maure sourire ; ja- » mais il ne rit. » Nous avons déja donné plusieurs fois des pro- grammes des cours de quelques Universités de l”Ad- lemagne. L'état suivant , que nous prenons dans le journal littéraire de Jena , fera voir facilement com- bien ces cours sont suivis. Il faut observer que l’année scholaire se partage,en Allemagne, en deux semestres qui commencent à Pâques et à la Saint-Michel ; qu’à ces deux époques les différens cours commencent , et que les jeunes 254 Nouvelles littéraires. gens qui viennent de quitter les gymnases , se ren dent à l’Université à ces deux époques ; a leur ar- rivée, ils se font inscrire chez le recteur , à la ju- ridiction duquel ils sont soumis, pendant tout le temps qu’ils restent à l’Université. A j’Université de Jena , ont été inscrits, En 1994, Pâques. 8r Théol. 77 Jurisp.46 Méd. total 204 S. Michel. 66 55 35 156 Dans toute l’année. 147 132 êt 360 En 1795 , Pâques. 78 O9) 3/88 231 S.-Michel. 56 1108 46 s 170 Dans toute l’année. 135 163 104 401 En 1796 , Pâques. 79 86 67 ‘: 132 S.-Michel. 53 65 57 169 Dans toute l’année. 132 IÔI 118 401 En 1597 ; Pâques. 80 80 7L 237 S.-Michel. 52 68 50 170 Dans toute l’année. 132 148 I2I 40I Par les dénombremens qu’on a faits, l’effectif des Etudians qui se trouvoient à l’Université s’est trouvé être , F 1794, en Déc. 363 Théol. 292 Jurisc. 206 Méd. total 861 1795 ——— 299 BL MTS 203 803 1796 ——— 291 323 218 832 1797 ——— 276 297 243 816 Dans le semestre d’été, le nombre des Etudians est de quarante ou de cinquante à peu près plus grand qu’eu hiver, Lors du dénombrement fait à la ES TR +, 7 _ Nouvelles littéraires. 255 Saint-Jean, en 1797, on a trouvé 307 Théologiens, 307 Jurisconsultes, 242 Médecins. Total , 856. L'Université de Jena dépend des principautés suivantes de la Saxe 5 savoir , de Weimar , Eisenach, Gotha, Altenbourg, Cheining, Cobourg , Saalfeld et Henneberge 3 l’état suivant indique le rapport des Ftudians nés dans ces principautés, aux Etudians étrangeis. Etudians du pays. 1794 98 Théol. 84 Juriscons. 37 Médecins. total 219 1795 71 88 43 202 1796 65 93 40 198 1797 78 76 33 192 Etudians étrangers. 1794 265 Théol. 208 Juriscons. 169 Médecins. total 642 1795 228 113 160 6or 1796 226 230 178. 634 1797 198 221 205 624 Puissent les Professeurs de nos écoles centrales et spéciales, avoir bientôt des auditoires avssi nom- breux que les ont les Professeurs de l’Allemagne ! Programme de la fête de la fondation de la _ République. I. La fête de la fondation de la République, fixée au premier vendémaire an VII, sera précé- dée , pendant les cinq jours complémentaires de l’an 256 Nouvelles littéraires. VI, d’une exposition publique des produits de l’in- dustrie nationale. Cette exposition aura lieu dans le Champ-de- Mars. On aura préparé à cet effet, à la suite de l’am phitéâtre du milieu dn Champ-de-Mars , une enceinte Carrée , décorée de portiques , sous lesquels seront déposés les objets les plus précieux de nos fabriques et manufactures. Un catalogue imprimé apprendra le nom de cha- que manufacture , fabrique ou industrie dont les produits ont été admis à l'exposition , le département et la commune où elle est située, le prix de l’objet Exposé. L'ouverture solennelle de cette exposition sera faite le matin du premier jour complémentaire, par le ministre de l’intérieur, précédé du bureau cen. tral et du jury dont il sera parlé ci-après. Tous les soirs, les portiques seront illuminés. Au milieu de l’enceinte occupée par l’exposition ? un orchestre nombreux exécutera chaque soir, pen”: dant une heure, les plus belles symphonies de nos compositeurs actuels. Le quatrième jour, à quatre heures de Paprès- midi, le jury choisi par lé Gouvernement , parmi yes meilleurs manufacturiers et savans dans les arts industriels, se rassembléra au Champ-de-Mars, par- courra les portiques , visitera les objets exposés. Il désignera ceux qui lui paroîtront les plus dignes d’être honorablement Nouvelles littéraires. 257 honorablement cités comme des modèles de l’indus= trie française. Ces objets seront séparés des autres, et exposés le jour suivant dans un Temple à l'Industrie , élevé au milieu de l’enceinte et ouvert de tous côtés. IT. Le cinquième jour complémentaire, veille de la fête, à huit heures du soir, une salve d’artille- rie se fera entendre près le palais directorial , et sera répétée dans les environs de Paris. A neuf heures, on entendra une seconde salve d'artillerie. Au même instant , six cents fusées volantes par= tiront à la fois, de la place construite sur le grand éperon du Pont-Neuf, A ‘ce signal, de grosses masses de feu paroîtront sur les tours, sur les dômes les plus élevés et sur les télégraphes. Journée du premier vendémiaire. I. À six heures du matin , une salve d’artille- rie appeliera le peuple au Champ-de-Mars. Le cirque sera divisé en deux parties égales. La partie méridionale sera consacrée aux céré- monies et aux courses qui s’exécuteront l’après-midi ; Pautre partie, aux jeux du matin. La ligne de séparation sera formée par des tro- phées et des figures emblématiques. Tome III. R \ 258 P Nouvelles littéraures. Au milieu de la partie septentrionale du Champ- de-Mars , deux énormes figures reprsenteront le Despotisme et le Fanatisme. Au milieu de la partie méridionale sera figuré un vaisseau anglais. Jeux de La matinée du premier vendémiaire. 1°. Dans une joute sur l’eau, au bas du Champ- de-Mars, les marins, vêtus en blanc, déveluppe- ront leur adresse. — Elle commencera à huit - heures. Les bateaux seront ornés de drapeaux tricolors. Les quatre plus anciens marins seront les juges de la joute. 29, La lutte succédera. Ce jeu s’exécutera dans une portion de la moitié septentrionale du cirque. Les lutteurs seront divisés en deux ‘bandes, l’une distinguée par des couleurs bleues, l’autre par des. couleurs rouges. A un signal, les deux partis s’avanceront l’un vers l’autre : chacun des concurrens cherchera à renverser, à force de bras , l’adversaire que le ha- sard aura placé devant lui. Celui qui tombera sera obligé à l’instant de don- mer au vainqueur les rubans qui distinguoient le parti dans lequel il combattoit, et une carte qui contiendra son nom. Des appariteurs nombreux , répandus parmi les Nouvelles littéraires, 259 combattans, veilleront à ce que cette loi de la lutte soit ponctuellement exécutée, Le bureau central sera juge de la lutte. Il décer- pera les prix aux deux concurrens qui auront à montrer le plus de rubans et cartes du parti opposé, ITT. A près ces jeux , s’avanceront dans l’arêne deux grands chars ornés de lauriers et de diverses em- blèmes de la souveraineté du peuple, Ces chars porteront des groupes de citoyens qui figureront le Peuple français. Tous auront des couronnes de chêne et de laurier. L'un des chars aura pour inscription : Le Peuple français vainqueur au 14 juillet ? L’autre char : Le Peuple français vainqueur au 10 août ! Les citoyens qui occuperont les deux chars des- cendront vers le milieu de l’arêne, et prenant des flambeaux allumés , mettront le feu aux figures du Despotisme et du Fanatisme. Ils formeront ensuite des danses autour du bûcher qui aura consumé ces figures. Des orchestres placés dans cette partie joueront des chants patriotiques , et des airs pour les danses. IV. À midi, des hérauts, précédés de trompettes, appelleront à un banquet les vainqueurs dans la joute et dans la lutte, Une table aura été servie pour eux sous uye R 2 3 260 Nouvelles littéraires. \ tente. Ils s’y assoieront au milieu des juges des jeux. \ D’autres tables et des tentes seront préparées pour le public, dans les allées latérales du cirque. Les restaurateurs ne pourront rien vendre au des- sus du prix convenu précédemment/entr’eux et le bureau central. Ce prix sera affiché sur la tente dans laquelle ils étaleront. à V. Cérémonies et jeux de l'après - midi du premier vendémiarre. — À deux heures après- midi une salve d’artillerie annoncera la seconde par- tie de la fête. Des hérauts, précédés de trompettes, parcourront le cirque, en invitant leurs concitoyens à se placer sur les talus de la partie méridionale. Des orchestres distribués sur les talus exécuteront, pen- dant ce temps, des airs patriotiques. VI. Le directoire et le cortége, les autorités, ad- ministrations , etc. qui auront été convoqués, iront - se placer sur l’amphithéâtre qui entoure l’autel de la patrie. La marche se fera dans l’ordre accoutumé et prescrit dans les programmes précédens. Immédiatement avant le directoire et les minis. tres on portera un énorme faisceau, sur lequel se- ront inscrits les noms de tous les départemens, et sur lequel on verra tracés les emblêmes des fleuves ou des montagnes qui ont donné leur nom à ces dépar- temens. Des hommes vêtus des anciens habits des principaux peuples qui occupent les Gaules , porte- ront le faisceau. Avant eux marchera une baunière Nouvelles littéraires. 261 qui portera pour inscription: La république Les æ tous réunis. Ce n’est plus qu’un même peuple. À côté du faisceau départemental et sur une ligne parallèle on portera un trophée formé des écussons des républiques batave cisalpine, ligurienne, hel- vétique , romaine, et soutenu par des figures emblé. matiques. Au devant d’eux une bannière portera ces mots : Que leur alliance avec Le peuple français soit éternelle ! À arrivée du cortége, le conserva= toire exécutera un chant triomphal. Le faisceau et le trophée seront placés sur deux cippes près de l’autel de la patrie. Ceux qui les auront portés se grouperont à l’entour. Le président du directoire prononcera un discours qui sera suivi du Chant du premier vendémiaire , paroles du citoyen Chénier, musique du citoyen Martiny, \ VII. Le ministre de l’intérieur annoncera ensuite que le président du directoire va proclamer les noms des citoyens qui, par des actions héroïques, par des découvertes utiles, ou par des succès dans les beaux- arts, ont bien mérité de la patrie. Il remettra au pré sident les noms de ceux qui, durant l’année, ont ex- posé leur vie pour sauver celle de leurs concitoyens, Une fanfare suivra cette proclamativn , et des hé. rauts iront des deux côtés du cirque la répéter au peuple. Le ministre de l’intérieur remettra encore la liste de ceux qui ont obtenu des brevets d’invention set celle des manufactures dont les produits auront été R 3 262 Nouvelles Littéraures. distingués dans l’exposition des jours complémen- taires. Cette proclamation sera faite dans la même forme que la précédente. Des hérauts iront ensuite chercher le président de l’Institut national des sciences et des arts, qui re” mettra entre les mains du président du directoire exécutif, 1.° la notice des ouvrages sur les sciences qui ont été distingués par la classe des sciences phy. siques et mathématiques pendant le cours de lan 6; 2.9 la notice des meilleurs livres élémentaires de morale qui ont été publiés dans l’année, au juge- ment de la classe des sciences morales et politiques ; 3.° les noms des auteurs des meilleures tragédies ou comédies , et des meilleurs opéra qui ont paru depuis la révolution, suix ant le jugement de la classe de lit- térature et des beaux arts, Les noms des musiciens qui se distinguent dans leur art suivront ceux des au- teurs dramatiques que la classe de littérature et des beaux-arts aura également désignés, et le président de l’Institut remeftra aussi au directoire les noms de ceux qui, dans les écoles de peinture, sculpture et architecture, ont obtenu les grands prix, et une notice des meilleurs tableaux, statues, dessins et estampes exposés dans le salon du Musée. Toutes ces notices et ces noms seront proclamés par le di- rectoire, puis donnés aux hérauts, qui répéteront la proclamation autour du cirque. On distribuera au peuple des billets imprimés contenant ces notices. On lui distribuera également les paroles des hymnes qui seront chantés à la fête. VIII. Une salve d’a.tillerie annoncera les Jeux. PS Nouvelles littéraires. 263 Tous les concurrens dans les divers jeux feront le tour du cirque, précédés d’une musique mili- taire. Ceux qui aurontété vainqueurs dans les jeux du matin auront une place dans cette marche. Les prix seront portés sur un brancard orné de fleurs et de verdure ; ces prix seront des objets précieux provenant des manufactures nationales, et entre- tenues aux frais de la République. Tous les concur- rens dans les jeux auront précédemment prouvé qu’ils jouissent ou pourroient jouir , s'ils avoient l’âge prescrit, du droit dé voter dans les assemblées politiques. Les concurrens ne seront point admis dans l’arêre , vêtus du costume d’un état ou pro- fession quelconque. Le costume des concurrens, dans chaque espèce de course, va ci-après être désigné, Le ministre de l’intérieur décernera les prix aux vainqueurs , lorsque les courses seront terminées, 10. Courses à pied.— Tous les concurrens seront vêtus d’une veste et d’un pantalon de nankin ou de quelque étofle blanche. Les concurrens auront été précédemment divisés en divers pelottons de quinze hommes. Chaque pelotton s’élancera , l’un après l’au- tre, d’une barrière près des termes, vers le but placé devant Pautel de la patrie. Les vainqueurs dans ces courses d'essai recevrout une plume donti!s orneront leur chapeau, et redescendront an bruit d’une musique militaire , vers la barrière du départ, pour fournir la course décisive. Les prix seront décernés aux trois concurrens qui arriveront les pre- miers au but. Ils iront occuper sur l’amphithéâire R 4 264 . Nouvelles littéraires. les places destinées aux vainqueurs dans les jeux, 2°. Courses à cheval.— Les concurrens devront être vêtus d’une veste à l’écuyère ; ils auront un chapeau rond , surmonté d’une plume, et qui sera attaché sous le menton par un ruban. On leur don- nera à chacun une ceinture de soie de couleurs difé- rentes. Tous les chevaux destinés à cette course au- ront été , dans les jours précédens, scrupuleusement examinés , et on n’aura admis que les chevaux nés en France. Les concurrens partiront du milieu de Varêne , et après en avoir fait deux fois le tour, reviendront au point du départ. 3°. Courses des chars.— Les concurrens devrogt être vêtus d’un habit francais (espèce de tunique courte, ouverte par le milieu et attachée par des gances sur la poitrine) ; ils auront un chapeau relevé pardevant et surmonté d’une plume. On leur don- nera à chicun un manteau de couleurs différentes. A un signal , les concurrens dans la course des chars s’élanceront du milieu de l’arêne vers l’autel de la patrie. Là, ils se diviseront en deux bandes, qui, après avoir parcouru chacune un côté de l’a- rêne , en suivant diverses voies désienées par des jalons, reviendont par la grande allée, en face de l’autel de la patrie, au point du départ. 4° Expérience aérostatique. — Un ballon de neuf à dix mètres de diamètre sera monté de deux aéronautes, Manœuvré sous cordes par quelques aéros. tiers , il fera le tour du Champ-de-Mars, dans lin- térieur, à quaraute ou quarante-cinq mètres d Nouvelles littéraires. 265 hauteur ; de sorte qu’on pourra voir par-tout divers emblèmes patriotiques dont il sera décoré. Au milieu du Champ-de-Mars, on aura préparé un bätis re- présentant un vaisseau de guerre anglais. Les aréo- pautes, portés dans la perpendiculaire de ce bâtis, y projetteront chacun un boulet d’une composition particulière qui, sans feu ni mêche, s’allumera en arrivant , et le vaisseau sera consumé. Les aéronau- tes viendront ensuite descendre au pied de l’autel de la patrie. IX. Trois coups dé canon annonceront la fin des jeux et le départ du directoire et du cortége pour la maison du Champ-de-Mars. Les vainqueurs dans les jeux auront place dans le cortége. X. Le soir , les Champs-Elysées et le chemin du milieu jusqu’à la barrière , seront illuminés. Il y aura , en divers endroits, des orchestres pour les danses. ; Nota. — Ceux qui sont admis à figurer dans cette fête , soit dans les jeux, soit parmi les autorités cons- tituées, sont prévenus qu’ils ne pourront entrer dans lenceinte, vêtus d’étofles étrangères , et qu’ils doi- vent au contraire, ainsi que tous les citoyens et les citoyennes, se vêtir d’étoffes de fabrique française. ———— L’ouverTuRE du théâtre de la République s’est faite le 19 fructidor , par une représentation du Misantrhope de Molière, et du Legs de Ma- rivaux. Nous ne répéterons pas les éloges et les cri- 266 Nouvelles littéraires, tiques dont la nouvelle construction peut être l’objet. Nous aimons mieux porter l'attention de nos lecteurs vers l’intérêt de ce bel art, dont la pureté a été si fort altérée par de funestes divisions, et dont une réunion heureuse permet d’augurer la restauration et les progrès. Les artistes, chers au public, vont s’applaudir de jour en jour d’un rapprochement , dont l’intérêt de l’art leur faisoit la loi encore plus que leur intérêt propre ; et la tradition qui mena- çoit de se perdre , perpétuera le goût de la bonne comédie , les plaisirs des spectateurs, et l’honneur de la scène française , que nous devons regarder comme une partie de la gloire nationale, Au citoyen Mrrrrn , rédacteur du Magasin encyclopédique. Lisieux, 22 messidor an VI. = CITOYEN, On r’avoit traduit encore , dans notre langue, que “le rawssement de Proserpine , le Phénix , et lesépi- grammes de Claudien ; mais un anonyme vient de publier {es Œuvres complètes de Claudien , tra- dites en français pour La première fois , avec des notes mythologiques , historiques , et Le texte latin ; 2 vol. tn-8°. Paris, Dugour et Durand, rue et hôtel Serpente. Je n’examinerai ni les beau- és ni les défauts de cette version ; c’est à des cri- tiques d’un goût plus sûr qu’il appartient de l’ap- piccier. Je vais me borner à relever une omission Nouvelles littéraires. 267 commise par le nouvel interprète. En citant les tra- ductions francaises du ravissement de Proserpine , il n’a pas fait mention de celle de G. 4.(ALD1BERT), Adyocat. Toulouse, chez Dominique et Pierre Bose , 1621. Cet ouvrage l’emporte cependant sur ceux de mademoiselle Desroches et de Claude Ni- cole, tant pour l’exactitude et l’élégance , que pour le quatrième livre qu’Aldibert a ajouté aux trois premiers de Claudien : il joint d’ailleurs, à la fidé- lité de la traduction , la viguenr du style et les g'âces naives du vieux langage. Ovide , Pausanias, Pline, Sirabon, Plutarque , sont les auteurs qu’il a mis à contribution. Il s’est bien gardé , comme le versifi- cateur auquel on doit Cérès Legifera , de trainer sa déesse dans les trois parties du monde, comme autrefois, et de la ramener dans les manufactures de Lyon , les rafineries d'Orléans, les plaines de la Beauce, les chamoss de la Sologne , les vergers de Montmorency, etc. Tels sont les «bsurdes anachro- nismes que fait le poëte anonyme dont Clavéiius a publié l’ouvrage en 1619. | Aldibert a plus de goût, et son quatrième livre prouve qu’il avoit mis son esprit à la teinture des anciens. Un exemple justifiera ce que j’avance. Cé- rès, fatignée de chercher inutilement sa fille, prend le parti de se retirer dans une montagne de l’Arcadie. « Le Mont Flée, dit Aldibert, est flanqué de rochers si aspres et raboteux , que c’est le repaire ordinaire des bestes les plus dangereuses. C’est là que: la triste Cérès, pour mieux entretenir ses re- grets qui ne se paissent que de solitude, se résoult 268 Nouvelles littéraires. de faire sa dernière retraite, et tout autre objet qui ne porte pas leurs funestes livrées , estant contraire à sa résolution, puisque son espérance estoit morte, elle veut en porter le deuil 3 de sorte que, quit- tant sa robe de la couleur des javelles , prêtes à tomber soubs la faucille du moissonneur , elle s’affu- ble du noir, compagnon des ennuis. Allez, dit- elle, robes infortunées, je ne veux plus de vous ; puisque j'ai perdu la chère jouissance de tout mon bien avec l’espérance de la ravoir, dois-je pas, avec la couleur noire , espouser à jamais le deuil et la tristesse ? C’en est fait , je ne veux plus voir le soleil ; je me veux cacher aux yeux de tout le monde, et m’abismer, si faire se peut ,dans une si grande perte, que toute la terre soit attirée dans la ruine. « Îl y avoit une caverne d’une profondeur effroya- ble, qui, pour être remparée d’une ceinture espaisse de rochers et de haliers , estoit presque inaccessible :. elle donne à travers de toutes ces aspres diflicultés; et ayant descouvert un lieu si convenable aux vœux de son deuil , elle le choisit, pour y confirmer à jamais les tristes reliques de ses jours, etc. » Le nouvel interprète a également oublié de ci- tr la traduction en vers héroïques, d’une partie du vremier livre du ravissement de Proserpine , par V'infatigable abbé de Marolles , ainsi que la burles- que version de Coypeau d’Assoucy 3 mais ces taches légères n’empécheront pas que cet ouvrage; dont on vient d’enrichir notre langue, n’oblienne le suc- cès qu’il mérite. Ja vous salue, J. B. C. GRAINVILLE. LT atll RARE CRIE EURE PER ESEE PLEIN PURE LT LL STEEL LEADER ES LU TI IEC VER em — LAENR ES : DLVERS. LETTRES. Zrerrres de Ninon de Lenclos au mgrquis de Sévigné ,avec sa vie , nouvelle et belle édition, ornée de son portrait, 2 vol. in-18 brochés- Prix , 2 francs pour Paris, et 3 francs francs de port. À Paris, chez Deroy, libraire, rue Haute- Feuille , n°. 34. Ce petit ouvrage , d’un jurisconsulte homme d’es- . prit, le citoyen Damours, est suffisamment connu par les différentes éditions qui en ont été faites : celle-ci est très-soignée. MÉTROLOGIE. SUR LE SYSTÈME MONÉTAIRE DÉCIMAL, 24 nivôse an VI, | TYPE ET LÉGENDE DE LA PIÈCE D'OR, 6 thermidor. LE GÉNIE planant au dessus du globe, et d’une main hardie osant poser le compas sur sa circonférence : de l’autre main il tient la canne métrique, dont un centimètre est divisé scrupuleusement en millimètres, avec cette Lé- gende : POUR L'UNIVERS. Ces deux mémoires sont du citoyen Auguste Sa- venien Leblond, qui, en 1790, proposa le premier à l’académie des sciences le nom de mètre. On voit que , sans être appelé à aucune fonction publique, 270 Livres divers. un bon citoyen sait faire servir ses réflexions au bien général, et on ne peut trop désirer que ceux qui ont ainsi des idées heureuses n’attendent pas, pour les communiquer aux autorités constituées, qu’il y ait pour eux cet intérêt sordide de tous les don- peuis de projets. | Le citoyen Leblond n’a fait imprimer ces deux mémoires que pour pouvoir les distribuer aux mem- bies des deux conseils, à l’instant où les monnoies doivent les occuper de nouveau. La première réso- lution avoit admis pour la pièce d’or, le type et la légende dont le citoyen Leblond , dans son second mémoire, explique de nouveau les avantages : tous les amis des sciences et des arts doivent soutenir et propager l’idée qu’il a eue de faire de la monnoie décimale, une médaille par laquelle non-seulement tous les Français, maïs tous les peuples et tous les âces apprendront que, pour l'Univers, sous la main du Génie, la distance du pole à l’équa- teur est devenue l’unité invariable des mesures, des poids et des monnoies. ORNITHOLOGIE. _Hrsrorre Naturelle des oiseaux d'Afrique, par Françors LE V'AaiLLaNT. Six premières livraisons qui commencent le premier tome, in-folio, papier vélin. Prix, 30 francs; in-4.° papier vélin, 15 francs; in-4.° papier fin, 6 francs; in-12,tom.1 et 2 brochés , 7 francs 20 centimes, et 9 francs francs de port. À Paris, chez J. J. Fuchs, rue des Mathurins. Nous avons déjà rendu compte des deux pre- ’ Livres divers. 27t mières livraisons de cet ouvrage (1), et de la ma- nière dont il est rédigé, Les gravures des dernières sont également soignées. On a publié chez le même libraire une édition in-12 pour faire suite aux oiseaux de Buflon. Nous reviendrons encore sur cet important ouvrage quand il sera complet. DO :T'A NI Q UE. F1ORA ATLANTICA. — FLORE ATLANTIQUE, par le citoyen DEsFONTAINES , troisème et quatrième livraisons. Voyez dans notre tome II, page 276 de cette an- née, l’annonce de ce bel ouvrage, dont nous donne= rons un extrait plus détaillé quand il sera plus avancé, CHYMIIE. R£érrexioNs sur La doctrine du phlogistique et La décomposition de l’eau, par JosePa PrresTier , traduit et suivi d’une réponse par ADer. Prix, 1 franc 80 centimes pour Paris, et 2 francs 40 centimes pour les departemens, franc de port. À Paris, chez Guillaume, rue de l’Epe- _ ron, an VI de la république. Le nom de l’auteur et celui du traducteur suf- fisent pour inspirer aux amateurs de chymie le désir de lire cet ouvrage. » (1) Magasin encyclop. , seconde année , tom. V , p. 550. « 272 Livres divers. MÉDECINE. De BEHANDELING , etc., c’est-à-dire, La ma- nière de traiter La petite vérole cnoculée , ap- pliquée à la petite vérole naturelle , par B. Tensrer. À Harlem, chez Fr. Bohn, 1707, in« 8.° de 76 pages. — ÆNMERKINGEN, etc., C’est= à-dire, OsserpATioNs sur l’opuscule de B. Tersier, intitulé La manière, etc., par L. Broken. À Harlem, chez Fr. Bohn, 1798, in-8.° de 8o pages. La brochure de Teérsier attaque indirectement la pratique de l’inoculation, dont le professeur Brcker, fondé sur vingt-cinq années de succès personnels, prend la défense avec chaleur, mais en même temps avec modération et honnêteté. Le citoyen Terscer est plus partisan de l’air frais à entrete- nir auprès des malades que de l’air frocd dont son antavoniste croit l’application salutaire en plusieurs pp P cas, en évitant toutefois les extiêmes de certains praticiens. Le professeur Bicker s’altache sur-tout à démontrer les avantages particuliers de l’inocu- lation, qui consistent à écartér beaucoup d’acci- dens dangereux ; à épargner à l’économie animale une secousse dont les suites peuvent devenir incal- culables, etc. Heæc memim ; et viefum frustra contendere T'hyrsin : Æz illo Corydon ,; Corydon est tempors nobis, Les r, Livres divers. 273 LES ŒUVRES complètes d'Hippocrate, traduites du grec en français, par J, N. BELIN-DE-BA11v, professeur de langues anciennes et de littérature grecque, à l’école centrale du département de la Gironde, et membre de la société de médecine de Bordeaux. Hippocrate est le père de la médecine, et le plus ancien des médecins est encore aujourd’hui le pre- mier. Nul n’a porté plus loin la théorie de Part, et la science spéculative n’a pas fait un pas depuis ce grand homme. Son nom est au-dessus de tout éloge : ses ouvrages sont trop célèbres pour qu’il soit nécessaire d’en recommander la lecture ; mais ils sont écrits dans une langue aujourd’hui si peu cultivée, que le plus grand nombre de ceux qui se destinent à l’art de guérir ne les connoissent que de nom. Nous avons pensé que ce seroit rendre à l’art un service important, et faire plaisir aux élèves et aux maitres, que de leur offrir la collection com- plète des Œuvres d’Hippocrate traduites en fran- çais : c’est la première fois qu’elles paroissent en cette langue ; à la vérité quelques parties détachées de ce grand corps ont paru en francais à différen- tes époques. Dacier a traduit les Æphorismes dans le dernier siècle. Dans celui-ci , le docteur Lorri a traduit le Traité de la Diète. Celui de l’air, des eaux et des lieux , un des plus intéressans d’Hip- pocrate , a été défiguré il y a quelques années par un médecin qui ignoroit entièrement l’art d’écrire. Tome 111. S 274 Livres divers: Le savant Koraï , médecin à Paris, et ’un des home mes les plus versés dans la langue et les écrits d'Hip- pocrate , a fait, de ce beau Traité, une excellente traduction accompaghée d’un texte très-épuré ; mais je crains que l’iniquité des temps n’ait étouffé ce chef-d'œuvre , et qu’il n’ait point encore vu le jour. Il y à environ trois ans que le citoyen Lefèvre de Villebrune a publié une traduction française des Pronostics de Cos, frænotiones Coacæ. Il ap- partenoit à ce citoyen , également habile dans la langue grecque et dans la médecine , ‘de traduire toutes lës Œuvres d’Hippocrate, et l’on ne peut que regretter qu’il ne se soit pas chargé d’une si belle entreprise. © Si la fidélité est un mérite dans toute traduction, elle devient une qualité indispensable dans un ou- vrage de la nature de celui-ci. Ce n’est point afsez de saisir le sens général de la phrase : la justesse de l'expression est de la plus grande importance. C’est sur-tout ici qu’on ne doit ni augmenter, ni affoiblir l’idée de l’auteur, et tel a été le juste mi- lieu que le traducteur s’est efforcé de garder. Toute- fois, en se faisant un devoir d’être fidelle, il n’a point néoligé les srâces.du style, autre genre de fidélité non moins cssensiel , et il a fait tout ce qui étoit en lui pour rendre la lecture d’Hippotrate agréa* ble, même aux personnes qui ne sont point initiées dans les mystères de l’art. Il auroit été facile d’accumuler sur Hippocrate Livres divérs. 275 ün grahd nombre d'observations : plus de six cents auteurs l’ont traduit en latin, expliqué, commenté , et l’on pouvoit faire une ample moisson de remar= ques, en dérobant un épi à chacun de ces com- mentateurs, Nous avons mieux aimé produire le texte pur, et laisser à chaque lecteur le droit et la liberté dé Plinterpréter à son gré. Nous ne nous sommes permis que les remarques les plus nécessaires sur l’ambiguité d’un mot, ou pour rappeler un sens littéral , dont le génie de notre langue nous obli- geoit de nous écarter, L'ouvrage sera divisé en cinq volumes in-8°, de cinq cents pages chacun: En tête du premier sera le portrait d’Hippocrate, gravé d’après un marbre antique par un artiste célèbre ; et à la fin du cin- quième on trouvera une table des matières fort ample. Cet ouvrage sera imprimé sur carré fin d’Angou- lême : le caractère sera le même que celui du prospectus. | Le prix de la souscripiion sera de 25 francs, que l’on paiera en ceng parties , pour la commodité et l'avantage des élèves ; et de fa nmianière sui- “vante : En souscrivant, 5 francs. En recevant le premier volume, qui paroîlra au premier nivôse prochain, 5 francs, et ainsi en re- cevant les suivans de trois mois en trois mois, le S 2 276 Livres divers. dernier volume se trouvera payé , et sera reçu gralis. N. B. Ceux qui n'auront pas souscrit paie- ront l’ouvrage 30 francs en feuilles. V4 On souscrit à Bordeaux, chez Moreau, impri- meur-libraire , mue des Remparts, n°. 55. Chez l’auteur , à l’Ecole centrale, rue de Gour- gues, A Paris, chez Barrois l'aîné, quai des Au- gustins. TrAITÉ du diabète sucré, des affections gas- triques et des maladies qui en dépendent, suive du résultat , des essais, des acides et autres substances oxygénées dans le traitement de la maladie vénérienne , d’une nouvelie noso- logie , d’un Traité de quelques poisons mor- bifiques , de l’analyse chymique du sucre , ei de plusieurs applications de la chymte à la médecine , par Jonx Rozo , docteuren méde- cine , chirurgien-général de l’artillerie royale, traduit de l’anglais par le citoyen Alyon , of- Jicier de santé de l'hôpital militaire du Val- de- Grace , avec des notes du citoyen Four- croy. Paris, chez Moutardier, imprimeur-libraire, quai des Auguslins, n°, 28 ; Gerioux, libraire , quai Voltaire , n°. 0. Cette traduction, si long-temps attendue, est dé- diée à la société médicale de Paris, dont l’auteur Ed (Eh Th - Livres divers. 277 est lui-même un des membres les plus distingués, Les gens de l’art doivent accueillir avec intérêt, puise qu’ils peuvent y puiser des indications plus certaines Pour combattre une maladie ‘rès-peu observée jus- qu’à ce jour, et sur laquelle les livres de patholo- gie n’ont rien présenté qui ne soit faux ou insuffisant. Indépendamment des vues entièrement neuves pré- sentées par Rollo sur le diabète sucré, ce qu’on y lira sur le scorbut > la goutte et autres maladies provenant de l’état morbifique de l'estomac, ne Sauroit être assez sérieusement médité. Parmi les points intéressans de doctrine médicale que Contient la seconde partie de cet Ouvrage , on ÿ remarque principalement le résultat de l'essai des acides et autres substances oxygénées dans le trai- tement de la maladie vénérienne, et notamment des faits nombreux qui constatent la propriété auti- siphilitique de l'acide nitreux. Il appartenoit sans doute au citoyen Alyon d’enrichir la langue fran- çaise d’une production aussi intéressante, puisqu'il a fait lui-même , sur le même objet, les expériences les plus curieuses : nous apprenons même que cet estimable traducteur est sur le point de publier des élémens de chymie , où l’on'‘trouvera infailliblement le résultat des travaux auxquels il ne cesse de se livrer avec un zèle infatigable et un succès toujours soutenu, _ Au surplus, les notes détaillées du professeur Foureroy doublent le mérite de cette traduction , et, sous ce point de vue, la rendent préférable à S 3 278 Livres divers. Poriginal pour ceux mêmes auxquels la langue an glaise est familière. | ANG Ar '0 0 LT Ur "E DesscrrpTion topographique du ci-devant dis- trict de Boulogne-sur-Mer, état de son agri- culture et moyens de l’améliorer , par Les citoyens Henry et DezrorTE , publiée par la société. d'agriculture et des arts de Bou- logne-sur-Mer. À Paris, chez Merlin, rue du Hurepoix. Broch. in-8°. de 64 pages. An VE. Si la France avoit des descriptions topographiques aussi bien faites que celle du département de la Seine- fnférieure, par le citoyen Noël (r), celle du Loiret par la c:-devant académie d'Orléans, elle seroit bientôt connue sous tous les rapports, L'ouvrage des citoyens Delporte et Henry est donc à la fois digne d’es-. time par son objet; il l’est encore par son eExXÉ- . cution : ils traitent d’abord de la situation de ce département, puis de son étendue, de son sol, de son climat, de ses rivières et de ses routes. Le reste de cet écrit est. particulièrement consacré à Pagriculture , et il offre sous ce rapport le plus grand intérêt ; c’est ainsi qu’en ont parlé les auteurs de la feuille du Caltivateur , qui ont inséré ce mor: ceau en entier dans leur excellent journal. (1) Magasin encyelop., ann, IL, tom. IT, p. 561. L Livres divers. 279 JURISPRUDENCE MORALE. DisPuTATIO juridico-politica, quâ. quæritur: An populé erroribus et superstitiont leges ac- commodare liceat? cestà-dre, Dissertations de jurisprudence et de politique sur La ques- tion : « S'il est permis d’accommoder les lois » aux erreurs et à la superstition du peuple ,» soutenue publiquement par J.- Marru.F'4N- GEUNS. À Utrecht, le 8 jauvier 1798. Ceux qui pensent qu’en morale et en politique il vaut mieux acheminer les innovations avec dis- cernement ei avec mesure, que de les brusquer, qu'il est de la sagesse d’imiter la nature qui ne fait rien par sauts et par bonds, applaudiront à la solution et aux raisonnemens du jeune Vangeuns, qui semble fait pour honorer un nom déjà illustré dans la littérature batave : peu de thèses acadé- miques sont aussi soigneusement traitées que cellesci. BEaAux-ARTSs. Vorace pilloresque de l'Istrie et de la Dal- matie ; contenant La descrip'ion historique des monumens, des sites, productions , cos- tumes , mœurs et usages des habitans, et enriche d’estampes , cartes et plans au nombre de soixante à soixante-six, exécutés par Les plus habiles graveurs , sur Les dessins colo- riés du plus bel effet, et pris sur Les lieux S 4 280 Livres divers: par Cassas ; un des artistes employés par ” Pauteur du voyage de la Grèce, cinquième livraison. À Paris, chez Née, rue des Francs- bourgeois ; Barez, rue Mêlée. An VL Cette cinquième livraison est composée de six estampes représentant une vue générale de Pola ; une de l’amphithéâtre de Pola, une autre des an- ciennes murailles de Pola; la quatrième, une porte du palais de Dioclétien, appelée porta aurea ; la cinquième, une partie de la galerie du temple de Jupiter; et la sixième, une Vu de l’aqueduc de Sa- lones, qui conduisoit l’eau à Spalatro. Ces gravures sont toutes exécutées avec le plus grand soin. Voyez ce que nous avons déjà dit sur ce bel ouvrage: VOYAGE. LE PRISONNIER en Espagne, ou Coup-d'æil phi- losophique et sentimental sur les provinces de - Catalogne et de Grenade, par N. MAsSSIAS, officier d'artillerie; 1 vol. in-18 de 200 pages ; caractère petit texte, beau papier, édition très-sot- gnée. Prix, ! franc cinquante centimes, et 2 francs franc de port. Se vend chez Potey , libraire, quai Voltaire, au coin de la rue du Bacq, et chez les marchands de nouveautés. L'auteur n’a- voue que les exemplaires signés de sa main. En lisant cet ouvrage, il est impossible de ne pas sentir que l’auteur n’a peint que ce € wila vu,na exprimé que ce qu'il a senti : les couieurs en sont Livres divers. aët locales, et les sentimens y paroissent modifiés par le climat et par les mœurs espagnoles. La manière descriptive employée par les voya- geurs nous paroît insuffisante pour faire connoître un pays : il est impossible que les peintures qu’ils en font soient des images parfaites de la réalité. Le citoyen Massias , en joignant à la description des lieux qu’il a vus, le tableau des sensations qu’il a éprouvées à leur aspect , donne au lecteur un moyen de plus de saisir la ressemblance , et de juger des mœurs de la nation chez laquelle il a vécu. S’il est vrai que, par la cause, on peut juger de leffet , il n’est pas moins vrai que les effets doi- vent servir à faire connoître les causes : la peinture des sensations contribue donc à la connoissance des objets qui les ont produites. Aussi est-il possible que, de tous les voyages en Espagne , aucun ne donne d’idée plus présise et plus exacte sur les mœurs de la nation espa- gnole. En considérant maintenant le Prisonnier en Es- pagne comme ouvrage purement littéraire, au mérite d’un style pur et facile, il nous a paru réu- nir celui de la clarté et de la précision : la manière en est vive et originale. On voit que l’auteur a pris pour modèles, Sterne et l’auteur du tableau de Paris. On pourra juger du ton qui règne dans cet ou- vrage, par le chapitre suivant. « Le costume distingue la nation espagnole des au- 262 Livres divers. tres nations de l’Europs-— Le manteau est l’autre peau des Espagnols, qu’ils ne dépouillent ni en hiver nien été; ils le portent, ouvrent , le développent , le jettent sur leurs épaules avec une aisance inimitable. Des enfans de huit ans, qui nous voyoient déguisés sous nos manteaux, s’écrioient : voilà des Francais. Le manteau écarlate est une grande partie du luxe qui se manifeste en public, La montera , couvre-chef des Espagnols, est un genre de coiffure qui n’est bon ni contre le soleil, ni contre la pluie, et que jamais nous n’avons pu essayer sans rire. Les deux houpes placées aux ex- trémités supérieures ne figurent point mal les cornes emplumées du grand duc. Je m’imagine que quel- que maligne Espagnole aura ajouté cet ornement symbolique, pour se venger d’un mari dupe et jaloux. Les femmes ne peuvent paroître en public sans là jupe noire et sans la mantille. La mantille , suivant les saisons, est une pièce oblongue, d’étofle ou de mousseline, qui leur cou- vre la tête, les épaules, les reins, et revient en- suite se croiser sur la poitrine. A l’aide de ce voile mobile, une Espagnole multiplie ses charmes, ca- che ou découvre son visage, en montre les beau tés, en diminue Îles défauts. — Elle vous regarde tendrement à travers la dentelle qui tombe sur ses Jeux .... Ses mains ennuyées abandonnent la man- tille qu’elles retenoient, et vous laissent voir un joli sein, ou pluiôi le fichu‘qui le couvre religieusement..… Tout-à-coup elle s’élance, et relevant avec adresse un voile qui paroissoit l’incommoder, elle s'enfuit Livres divers. 283 en laissant à découvert les formes légères d’une taille svelte, dessinées par un corset élégant. Elles ne sortent pas sans le bas de soie blanc, et sans le soulier neuf, ou presque neuf. La partie ex- térieure de leur parure est, dit-on, la seule qui soit propre: on ajoute même que les confesseurs rigo- ristes leur font un péché mortel d’une propreté plus :-recherchée. Cette vestale et cette matrone marchent d’un air grave , ayant l’üne et l’autre dans leurs mains un grand chapelet, dont la croix leur tombe au-dessous des genoux... Où vont-elles, Eléonore?.… Je ne puis vous dire où elles vont... Les filles vont ordinairement de compagnie avec une vieille femme, qui finit par se laisser attendrir, et par chavger son rôle odieux en celui de confi- dente. Les jeunes femmes vont de compagnie avec les jeunes femmes, qui s'aiment en Espagne, et se servent mutuellement dans leurs amours. Une Espagnole prend quelquefois l’habit mona- cal , et le froc s’énorgueillit de donner des charmes à la beauté. Il leur est permis de paroïtre à leurs balcons en habits de couleur : leurs cheveux retroussés et noués au milieu de la tête avec un ruban sont leur unique coiffure. — Nos françaises se. ruinent pour embellir leur laideur ou pour gâter leur beauté. » L'auteur a assez estimé le public pour essayer de lui plaire, sans avoir recours à une odieuse satyre d 3 on sent qu’il loue plus volontiers qu'il ne blime. 284 Livres divers. Les femmes espagnoles sur-tout y sont peintes avec les couleurs d’une sensibilité peut-être intéressée. Si lutile, joint à l’agréable est le plus sûr garant de la réussite d’un Ouvrage, On ne peut que pré sager le succes à celui-ci. | HISTOIRE. HISTOIRE secrète de la Révolution française, depuis la convocation des Notables Jusqu'à la ca- pitulation de Malte, la cessation des conférences tenues à Seltz, etc., par FRANÇOIS PAGÈS, 3 vol. in-8.0 de 500 pages chacun. Prix, brochés, 13 francs 5 décimes, et 18 francs par la poste. Le troisième et dernier volume vient de paroîïtre, et se vend séparément 4 francs 5 décimes, et 6 francs par la poste. À Paris, chez Deterville, libraire, rue du Battoir, n. 16, près celle de l’Eperon. Il con- tient ce qui s’est passé de plus-intéressant jusque et compris la capitulation de Malte et la cessation des conférences tenues à Seliz, et principalement les Journées des 18 fructidor et 22 floréal; les cam- pagnes de Buonaparte en Italie, dans le plus grand détail; nos campagnes en Suisse et en Allemagne; tous les traités de paix conclus depuis la révolution ; les nouvelles dénominations des poids et mesures, avec leur explication ; le tableau géographique de la république française, en y comprenant la cession de Ja rive gauche du Rhin, et un précis historique et chronologique de la révolution, depuis l’assemblée des Notables jusqu’à ce jour, précédé d’un tableau Livres divers. 285 à colonnes des victoires remportées par nos ar- mées, etc. HISTOIRE LITTÉRAIRE. FErsucu einer allgemeinen geschichte der Poë- . se, etc. ©. à d. Essar d’une historre générale de la Poésie, depuis les temps les plus an- ciens , par le D. Je4n-Dayin HARTMANX , Professeur royal, Recteur du Gymnase Fré- déricien à Erford, et Membre de La Société hittéraire d'Halbersiadt , 2 vol. in-8°. ; Le pre- mier de 604 pag., le second de 629 pag. A Leipsic, chez Jean - Ambroise Barth , 1707 et 1798. Ces deux volumes n’offrent encore que l’histoire ancienne de la poésie : en voici le sommaire, Tomx E Introduction , pag. 1-61. Division de PHistoire ancienne de la Poésie , en trois périodes, Première période, qus s'étend jusqu’à la fonda- tion de La république des Hébreux , l’an du monde 2685. I. Poésie orientale , pag. 65-84. a. Poésie hébraïque , p. 85-140. b. Poésie arabe , p. 141-174. c. Poésie syriaque , p. 175-165. 286 Livres divers IT. Poésie occidentale, p. 186-263. &. Poésie grécque, p. 203-216. b. Poésie italique , p. 217-229. Deuxième période, qui s'étend Jusqu'au tempé d’Alexandre-le-Grand , lan du monde 3865 ;, 336 avant l'ère chrétienne: Culture générale de l'esprit humain dans l'Orient et dans l'Occident , pendant cette seconde période ; pag. 233-239. I. Poésie orientale, pag.240-277. a. Poésie hébraïque, p. 278-477: b. Poésie persane ; p. 478-404. c. Poésie de l'Hidostan, p. 485-489: d. Poésie chinoise , p. 490-498. II. Poésie occidentale , p. 499-510. a. Poésie grecque , p. 511-630. b. Poésie romaine, p. 631-644: Tome Il. Troisième période , qui s'étend jusqu'au qua- trième siècle de l’ère chrétienne. Réflexions générales sur la culture de l’Orient et, de l’Occident , pendant cette troisième période ; pag. 3-10 | I. Poésie orientale ; pag. 11-82. a. Poésie hébraïque ,, p. 53-104: b. Poésie arabe, p. 105-118. € Poésie persane , p. 119*124» Livres divers. 287 d, Poésie des Hindires, p. 125-163. €. Poésie des Chinois, p. 164-172. IT. Poésie occidentale, p. 173-215. @. Poésie grecque, p. 216-479. b. Poésie romaine , p. 480-619. c. Poésie des Gallois et des Calédoniens, p: 620-627 d. Poésie des Germains ou Allemands , p. 628-629. MÉLANGE'Ss. Suire des Œuvres posthumes de Lafontaine , recuerllies et publiées par Srmiex DErsPRÉAUXx, - elc. Boudin,;rueNeuve-des-Petits-Champs, n°, 74r. Il y a peu de supercheries aussi révoltantes que celles dont ce prétendu éditeur vient de donner l’exem ple, quoique les ruses typographiques de ce genre se soient extrêmement multipliées depuis quelques années, sur-tout dans le genre des romans. Là , du moins , la fraude peut espérer quelques suecès. Maïs prétendre tromper toute une nation sur le mérite qui caractérise un de ses écrivains les plus originaux et les plus inimitables , c’est une audace qu'il est difficile de qualifier, à moins que l’édi- teur n’ait été trompé le premier ; ce qui ne don- neroit pas une haute idée de son goût. Un littérateur estimé , le citoyen Grainville, vient de démasquer cette spéculation coupable. Des vingt- une fables qui composent ce prétendu supplément, il en rend douze à Furetière , une à Falincourt , \ 288 Livres divers. ami de Racine et de Boileau ; une à Fieubet ; pour les sept autres , elles étoient dispersées dans des re- cueils, et le lecteur le plus inattentif peut aisément se convaincre qu’aucune ne porte le cachet de notre Lafontaine. Quant au conte, c’est tout bonnement /e Florentin , satyre dirigée contre Lully , et la seule que le bon Lafontaine se soit permise. | Ces sortes de piéges, tendns à la crédulité, sont. de tousles pays. C’est ainsi que, dans le cours de l’an- née derniere un spéculateur anglais a voulu faire: du Shakespéar. Il a déterré dans le tombeau de ce sublime et monstrueux écrivain, une tragédie inti- tulée Forugern.; etl’a fait jouer. Mais la fraude étoit trop grossière , et la découverte a été sifflée à grand chœur et de grand cœur. C’est ce qui adviendra à toutes les mauvaises plaisanteries de ce genre. à AN : T:06: On peut s’adresser au Bureau du Magasin Encyclopédique, pour se procurer tous les Livres qui paroissent en France et chez l’Étranger , ét généralement pour tout ce qui concerne la Librairie ancienne et moderne. On s’y charge aussi de toutes sortes d’impressions. Les Livres nouveaux sont annoncés dans ce Journal aussi- tôt après qu’ils ont été remis au Bureau, c’est-à-dire, dans le Numéro qui se publié après cette remise. 4 Le Magasin paroît régulièrement le premier de chaque mois. On prie les Libraires qui envoient des Livres pour les GT = noncer , d'en indiquer toujours le prix. \ ANNONCES. Cnorx de costumes civils et militaires des Peuples de l'antiquité, leurs instrumens de ne musique, leurs meubles et les décorations Ên= L + térieures de leurs maisons > d’après les monus mens antiques, avec un tetetiré des anciens | auteurs, dessiné, gravé et rédigé par N. ZX, 0 Winiemin, deuxième livraison >; in - folio. À Paris, chez l’auteur, au Musée des petits Au« Bustins, et chez Firmin Didot , rue de Thionville, Cette livraison renferme six planches de la suite es _des costumes ægyptiens. On voit entr’autres, dans la première, une tête d’Isis en bas-relief de terre cuite F - 8ppartenant au Muséum national. Cette tête avoit été mal gravée dans Caylus ; elle est ici beaucoup mieux rendue, Les autres morceaux sont tirés des | ouvrages de Pockoke , Norden et autres voyageurs si # connus ; ils sont tous exécutés avec la plus grande précision: en tout, cet ouvrage est fait avec beaucoup de soin, et la gravure sur-tout mérite des éloges, 7 TABLE Des articles contenus dans ce numéro. MAMMIFrèÈRESs, tion de la graisse chez les CRUE | enimaut. 150 Cuvier. Eztrait & in mémoire MÉDECINE, Sur les ossemensg'ossiles de C. D, Observations sur une Es- guadripèdes. 145| quinancie membraneuse, 164 Me 28 : VoyraAGzxs. PrsroLocrr. 2: F. Bourgoing. Foyage du J. J. Virey. Considérations| ci-devant duc dw Châtelet en physiologiques sur la produc-| Portugal , to. 365 VA Su d A Tablé. ARCHÆOLOGIE. pre VAE) DIVERS NES. M. Meycr. squisse d’une his ttres. Me ue dé ia Sculpture chez ME As dé Ninon de Loti Grecs. 188 269 ÉOGR MTrE. “Métro! wi &. # Le 7 aphiste\A. S: Leblond qe le Système hartor œfrer Seerige el. 208! ne OPOGRAPHIE. * Salmon. Topographie histo-| rique médioale de Padoue, etè. 212| LiTrén. ATURE GRECQUE. M. Bast, Specimem ed'lionis he ds décimal | Fu de Omilhologie. F. ke Vaillant, Histoire natum. telle fee 9ÉsauE rt Bétanique.. "MÉLANGES À Liane. 24 Ÿ ë Oberlin. Sur l’anoien Lar= 3. Priestley: Réflexions sur la gage messin. + 228" daorris iné du cpvue > 10.» P'ORÉ ST Re: | 1 ibid, 7. 7 L. J.B. E, Vigée, Le boit Médecine. poëme. 234 B. Tersier. De Behandeling , sa 4 NouvELLES ET CORRESPON-|! eo. : DANCE. LITTÉRAIRES. iJ. N. Belin @ de- Ballu. ES Î # Nouvelle société d'émulation. à Œuvres d'Hippocrate. 273. Poitiers: 242 John Rollo, Traité du diabèta + (1) Théâtre Faydeau. Les Propre, sucré ; etc. 276. de mariage , Comédie. * 243! ‘Agriculture. rs Palma , Opéra. rh Henry et Delporte. Description - Assemblée d’' astronomes au|. topographique du ci- devant Secberg. me district de Boulogne-sur-Mer. : Vente dune biblioihèque à à etc. 278 Strasbourg. äbid.) Jurisprudence morale. Distribution des prix d’émula-| Disputatio juridico-poliica #ion à l'hôpital militaire sine etc. 279. ‘‘truction à Paris. 247! Beaux-Arts. Plant apportées par le capr=| Poyege pittoresque de l’'Istrie taine Baudin. 249, 4! de la Dolmatie ; rc. mia : Construction d’un pare (a Voyage... | les Eléphans. 250 N. Massias. Le . risommier, En : Coton fi voyageur anglais| Espagne. SRG Le 280 Hawkins. : 251! "Histoire. “Doicristion de Maroc. an 4 P, Pacs Histoire secrète de Cours de auels s Uni side ANR “y 486 nine MAD _d Allems. 24e 11 a GPaire. Programme de Îo fête de la Je D. Hartmann, Persuch ete Mn dé de la République. ner. allgemcinen gesohichte 255) der Poësie, eto: 285 Ouverture &u Théâtre ds la Mélanges. ‘République. : 265 Simien Despréaux. Suite des Œuvres eue Claudien,| Œuvres ca ue de Poe 266! taince 287. novæ Epis + cd Desfontaines. Flora ailantiea. de z RE Lo # «9 b » % » 0 : L° Dr UART 1 2 0 « Le. Vo