+ mtqtanat NE KL O ANALANE 1 (ue RS (UN TENUE CTUEOEL ae Lx AXUC 4 4} à a Z 0 414 1 go ANS U CRC va AMEN PRE, (COEUR À , \ 4 ANC û + à [ha si VRLNCEAENELENX REEUNS « | Le LAN TNENN (RAC LA LEE L EE APE) [UE % AAA EE NRA RUN ATANNE La A AMEL AAA SAC EEE! ELA LA! je LAURE SARL 4 à Le (N° af 1.) 1804. ; MAGASIN ENCYCLOPÉDIQUE, QU'\: je | JOURNAL DES SCIENCES, ue rt hu ET DES ARTS, ce AR US Rue ñ LEE RÉDIGÉ “ En LB MILLIN. E AVIS. Pendant l’abseuce de M. Mrccin, qui avoit été chargé ar le Gouvernement de faire un voyage dans le Midi 2 de la France, le Magasin Ency clopédique a été négligé let absolument nntodiné par une suite des malheurs que hi Libraire a éprouvés daas son commerce. Ce Journal, Mont l'auteur a bien voulu me confier l’entreprise, va “reprendre son activité, et sera livré avec exactitude. Les We Souscripteurs vont recevoir les quatre numéros qui com- plètent lan IX de cette collection , et j'aurai l'honneur Pde leur adresser le nouveau Prospectus pour l’année à suivante, qui commencera avec le 1. janvier 1805. F Les personnes qui desirent être servies promptement “doivent adresser leurs souscriptions, dont le pr ix est tou- Njours le même, à M. Delance, Imprimeur-Libraire, rue des Anar , hôtel Clugny. Dm ee et DE A ESS 9 RS NT ET ae > VENTENAT , CAVANILLES , Ustenr, BoëTTIGER , CONTI, ViLLOIson , Wiztaer » “Winoxuen ; Tome FI. (greme À An, à Fr. Lorsren , ete, etc. fournissent des Mémoires >; … contient l'extrait des principaux ouvrages natio= naux : on s'attache surtout à en faire une ana- | lyse exacte, et à la faire paroître le plus prompte- ment possible après leur publication. On y donne : une notice des meilleurs écrits imprimés chez l'étranger. SGEN EVE 0 MERE RS NE On y insère les mémoires*les plus intéressans sur toutes les parties des art et des sciences; on * choisit principalement ceux qui sont propres à en . accélérer les Pro, RARE A A + On y publie les découvertes ingénieuses , les inventions utiles dans tous lés genres. On yrend compte des expériences nouvelles, On y donne un précis de ce que les séances des sociétés littéraires - ont offert de plus intéressant ; une description de : ce que les dépôts d'objets d'arts et des sciences : renferment de plus curieux. AR RP A UNS CAL On y trouve des notices sur la vie et les ouvrages L ; des Sayans, des Littérateurs et des Artistes distin-. nés dont on regrette la perte ; enfin, les nouvelles. Étéraires de toute espèce. 6 1, Les __ On s'adresse, pour l'abonnement, à Paris, chez ‘ M. Derance, rue des Mathurins , hôtel de Cluny. rh chez la veuve Changuion et d'Hengst, A Amsterdam, j chez Van Gal. à 5 1 A Bruxelles , chez Lemaire. ; Ù * AEAEES À Florence ; chez Molini. : A Francfort-sur-le-Mein, chez Fleischex. A Gené chez Manget. À Genève ; Ÿ chez Paschoud, À Hambourg, chez Hoffmann. A Leipsic, chez Wolf, A Leyde, chez les frères Murray. A Londres, chez de Boffe , Gerard Sixeet. A Strasbourg , chez Levrault. A Vienne, chez Degen. A Wesel , chez Geisler , Directeur des Postes: 1} faut affranchir les lettres, RAC ASIN ENCYCLOPÉDIQUE. IX: ANNÉE. TOME VI. Lou. « ; AA Ÿ : se se CRC a 6 tee Far un À MAGASIN ENCYCLOPÉDIQUE, OU JOURNAL DES SCIENCES: DES LETTRES ET DES ARTS ; RÉDIGÉ PAR A. L. MILLIN, CONSERV ATEUR des Médailles, des Pierres gravées et des Æntiques de la Bibliothèque impériale | Professeur d’Anti- quités , membre de la $Socièté royale des sciences de Gættingue, de celles des Curieux de la Nature, à Erlang, des Sciences phy- siques de Zurich, d'Histoire naturelle et de Minéralogie d’Iéna, de l'Académie royale de Dublin, de la Société linéenne de Londres; des Sociétés d’ Histoire naturelle, philomathique , gal- vanique , de statistique , médicale , d'émulation , des Observateurs de l’homme , et de l'Aihénée des arts de Paris ; des Sociétés des Sriences de Rouen, d' Abbeville, de Boulogne, de Gap, de Poitiers, de Niort, de Nismes, de Marseille, d'Alençon, de Caen, de Gre- noble, de Colmar, de Dijon, de Nancy , de Strasbourg , de Mayence , etc. etc. IX: ANNÉE. LEONE “SPACE ME ARPEA IRIS, Chez Fournrer fils , Imprimeurs-Lübraires, rue des Rats, n.° 5. AN XII ---1004. VE rh YA (ee 4 LES He LAN 2 5? % 1,44 j LS à Nas ESA ie nor SA un A 3 Miche) À fe j L NT 4h 4% 4 p Ar r” de: 2e “À she ACDC Pen Anh PA k mt FL? ETTAUE 0 R ÿ: T1 Di Dal La Lo & où HA & Par) ET Yt LUE Dr 4 RS \ # US EU ETUIS a ef (OR de ver FES LR E Meoniie SRE gra 55 ra “ & Pas atome ie 10 NL n 42 al (8. dress à 539 ts TES 4 pee dé De 4 A # vr Mc PLU LT NES Lee GC LE tn Lg re 'LArt un Nr. xs + Da ca : 0 ce eh OÙ en ANG EN tte) SAS 1 8 #59 FE, CD De EURE NEC sance. she sil w gap. NES 4 ; . Hé Ve à EMPELAN ES) STE WE Eh | EN À ce 70, Lei " 4 re 4 ee nn: L'AN A L PET 2/0 PRAUUT LS OC ATEN LC es. We k sh DROLE x PET Le * à PRE +? VE. #3 Pan * +! nt “ : : » 1 TRS Fe rte ART DEEE » b Û C Qu ! tnt 26. 2 Sa _— RC . PRE Ant tir min . eue pi .— " DRE den CAR: S NS NN PES: à PE Sr nl ton # de 2 és é ATARI, Sshaanec till ee pme End « 2 Lg “ +." où « à } TR d à | . Fe pie d , U ns t ARE + ANS TPS et OPERA OU à Û nu F0 dre TRS 1 Lei er Lt: Je LA 1: BILAN aient oi & og qi Les KA #2 ne sa AE … Lune CLS [re  L'ATHÉNÉE DE VAUCLUSE, sg A1: eut É Me ne | or it, EN | RER ke ji 7 HÉUOUAN AG &> F à 7 RC +, | We L'OUEST & RTS h Li # di HAE 2 LVL S 2 MAGASIN ENCYCLOPÉDIQUE. LITTÉRATURE ORIENTALE. OvPrner’mar (i.e. Secretum tegendum ) opus , etc., C'est-à-dire DocrrTNE qw'il ne Jaut pas révéler, etc. Second Extrait du second volume (x). LES HOMMES, N Dh nature de l'homme, sa destination et ses devoirs , ses moyens d’arriver au bonheur : nous rangerons sous ces trois principaux chefs ce qui concerne l’homme dans le système indien, et Les fragmens corrélatifs tirés des Oupnék'hats. I. Nature de l’homme. D'après ces anciens textes, les corps n’ont qu'une existence relative et réellementillusoire. Mais l'illusion même a ses phénomènes. Les sages de l’Inde avoient étudié avec beaucoup d'application les phénomènes du corps hu- main , et leur physiologie , qui est assez détail- lée , n’est pas sans intérêt pour ceux qui aiment à connoitre les premiers pas , et à épier les pro- grès de l'esprit humain dans toutes les sciences. (x) Voyez le premier extrait dans le tome précédent, p. 504et suiv. ' Tome NI. À 4 8 Littérature orientale. La question qui a fait quelque bruit de nos jours, sur le moyen de procréer les sexes à volonté, est traitée et résolue de deux manières différentes dans les Oupn. XIV , brahm. 112, et XX VIII, brahm. 156 ; mais les deux solutions ne sont que des hypothèses comme celles de nos Européens, qui ont examiné le mème pro- blème avec un grand appareil d’érudition et de raisonnement. Les caractères qui distinguent les hommes des animaux et des végétaux, sont tracés dans le fragment qui suit : « Le signe de la présence « de l’arma (ou de Dieu) dans les végétaux, « c’est la sève ; dans les animaux, c’est le senti- « ment. Dans les animaux il y a mouvement « des liqueurs, et de plus il y a sentiment : c’est « que l’erma s'y montre plus apparent, plus « lumineux. Les végétaux ont des liqueurs, « mais ils n’ont point de sentiment comme les « animaux. « Dans les animaux, dans l'homme, l’ana « se montre plus apparent, plus lumineux : en « effet, l'intelligence est parfaite dans l’homme, « L'homme pense et exprime sa pensée; il « aperçoit , il sait plusieurs choses mème fu- « tures. Il distingue ce qu'il faut apprendre et « ce qu'il ne faut pas apprendre ; et, dans un « corps qui meurt , il desire connoitre l’atma « qui ne meurt point. Ce trésor de la science est particulier à l’homme : c’est-là sa préé- «minence sur les autres animaux; tous savent L] Oupnék’hat. 9 « manger et boire , mais l’homme seul parle «et vit dans l'avenir. Les autres animaux ne « savent pas distinguer ce qu'il faut savoir, ce « qu’il faut ignorer : leur science ne va pas « jusque-là. » Oupn. XI, brahm. 9g. De l'ame humaine, « Dans le corps (de l'homme), au milieu de « l'ouverture du cœur oùréside la science ,ily a « deux ames, le djiw-aima (l'atma lié, ou l'ame « humaine , parcelle de l'ame universelle), et le « pram-atma (la première ame, Dieu). Tous deux « goûtent le plaisir de la récompense des œu- « vres, ou plutôt le djiw-atma seul goûte ce « plaisir : le pram-atma n'y est que spectateur ; « les deux ne font qu’un seul; c’est sous ce rap- « port que les deux goûtent le plaisir. Les brah- « manes savans comparent le pram-atma à la « lumière , et le djiwatma à V'ambre. » Oupn. XXXVII, brahm. 151. « C’est le djiw-atma qui apercoit par les « sens , qui est sensible aux couleurs, aux sa- « veurs, aux odeurs, à l'impression du tou- « cher, etc. Chaque sens fait sa fonction, èt «ne peut en faire une autre : concevez delà « que l’arma est distingué du corps, et opérant « par-tout. « Ce djiw-atma est l'atma lui-même; c’est « lui qui a des perceptions dans le sommeil de « l'homme et pendant la veille. Il est grand : « tout est compris dans son immensité. Quand " 10 Liltérature orientale. « les savans l'ont reconnu (en eux), ils sont pnces par les lettres B. C. D. E., qui inierromperoient trop le fil du discours, se trouvent à la fin de PExtrail, page 661et.sui- vunles: ne Largie aisé Bi püissäns qui en triompheront avec le temps. D'abord , les difficultés de la prononciation lui fermeront Féntrée dès pays méridionaux de FEurope (#4... S4 naturé la rend une langue très-difficile ; et le fondement de cette assertion ést, ditil, dans son ofiginaliré. En effet, qui a üné foïs étudié le latin, ou une des trois langues éuropéennés dont il est la souché, connoit déja un nombre considérable des mots des autres fangues. « On reproche à là grammaire, à la littéra- ture germanique, une incertitude inhérénte à la langue qui, nonobstant la grande culture, ne Sera pas probablement fixée de long-temps. « Une autre difficulté ; dit l’auteur de la Dis- sertation couronnée , est dans notre construc- tion , qui s'éloigne en partie de l’ordre naturel, et qui auroit besoin d’être fixée par beaucoup trop de règles , êt de règles difficiles à retenir. Notre langue est réellement plus difficile que les langue grecque er latine. Le Romain, dans l'arrangement des mots, n'étoit presque pas gèné par aucune règle... : l’homme à quile mé- ‘éanisme de notre langue n’est pas bien fami- lier , court toujours 1 risque dé faire une éonstruction absurde... Les transpositions har- (*) On sait toutes les tentativés inutiles de Charlemagne pour donner aux mois et aux vents des dénominations allemandes ; ét quelle multitude de mots allemands rejetés , adoptés dhus “otre langue par Montaigne, qu’on lit encore aujourd’hui avec £antde plaisir. D 2 52 Littérature. dies chez nos poètes les plus célèbres, et qui sont une source de beautés poétiques, aug- mentent bien davantage encore les difficultés. Cette liberté même des inversions, qui tous les jours fait des progrès sensibles, enfante une multitude de mal-adroits imitateurs ; si bièn qu'on est parvenu à vous couper les mots par moitié, comme Ennius ; saxo cere comminuit Drum. »! M.Klopstock lui-même, beaucoup trop varié, d'ailleurs par M. Schwab, n’est pas exempt de tout reproche ; et son apologiste enthousiaste ne peut s'empêcher de rappeler en passant quelques-unes de ses odes énigmatiques qu'il réprouve : « car l'algèbre , ajoute-t-il, n’est pas « l’art de la poésie. » « M. Haller, ce grand physiologue, ce grand poète germanique, qui a tant enrichi sa langue maternelle, se plaignoit de ne pas entendre en beaucoup d’endroits les fragmens de Lavater, sur les physionomies ; et que, pour en venir à bout , pour entendre sa propre langue, il seroit obligé de retourner à l’école, à son âge! » 9 Le mème poëte écrivoit en 1773 : « Notre « goût est actuellement bien changé, du moins « chez les jeunes poètes. En 1752, nous pre- « nions notre vol trop haut; mais aujourd’hui « notre style est devenu très-prosaïique pour « des poètes. » L'auteur compare ces défaite) et d’autres plus considérables encore, de la littérature Langue Dane 53 allemande, à ceux que Sénèque reprochoit de son temps aux Romains : « ’idebis eloquentiam « ebrit Lominis involutam et errantem , et licentiæ « plenam. » etc. etc. (Dans sa XIV lettre) (2). Par rapport aux vices multipliés qui entrai- nent et corrompent la langue et la littérature germaniques , M. Schwab entre dans une inf- pité d’autres détails plus ou moins étendus, qui confirment la justesse de ses observations ; dé- tails que nous sommes forcés d’élaguer considé- rablement, circonscrits dans les bornes étroites d'un simple, extrait (C). L'auteur de la Dissertation ne manque point de citer des exemples les plus frappans des innovations risibles des néologues modernes. Toutes les fois que l’occasion s’en présente, il ‘aime à rappeler d’utiles vérités qu’on sait, mais qu'il ne faut point se lasser de répéter ; que le néologisme découvre la pauvreté d’un écrivain ; que Cicéron lui-même ne créoit des mots nou- veaux que lorsqu'il y étoit forcé, lorsqu'une nouvelle science exigeoit des expressions nou- velles. Ce sont les innovations dans les mots, dans les tournures , dans les constructions grammaticales, qui corrompront toutes les lan- gues. Il y en a cependant quelques-unes qui, trop plates et trop basses, ne prendront jamais : on ne répétera point (avec L’Anacxansis Clootz)} « Gallophile de tout teisps, mon cœur est sans « fard, et mon æme est sans culotte ». L'auteur, d’après le caractère reconnu de D 3% 54 Littérature. chaque peuple et de sa littérature, préyoit «et assigne les causes qui les perdront infaillible- ment : chez l'Espagnol dont le génie a quelque chose de fier et d’élevé, des métaphores gigan- tesques, des hyperboles outrées , des mots bruyans ; des expressions ridiculement pom- peuses : chez l'Italien, ses concerti () : chez les Français , peuple enjoué et léger, la facilité de faire et la paresse de bien pot la satiété du beau et le goût du bizarre et dy nouveau, dépédéreront en une coquetterie d'esprit ridi- cule; et l'Allemand , ainsi que l'Anglais, qui affectent un caractère penseur et indépendant en voulant passer pour forts et énergiques , ne laisseront échapper dans leurs drames, dans leurs romans, et jusque dans leurs moindres bagatelles ,; que des pensées énigmatiques et contournées ; que des idées recherchées, une construction PARA enfin, un mélange de mé- taphysique et d’ Fe) TA orientale. (P. 154et 262.) Le la prééminence et de l'ascendant , dans tous les temps , des Français et de leurs ancétres sur les peuples leurs contemporains. l'est temps d’ arriver à la partie de l’ ouvrage la plus piquante pour des lecteurs français. Si les louanges fines et délicates de Rivarol ont pu 10 C'était le sentiment d'Addisson. (7. ses Remarques sur Vlialie). Aussi la langue italienne , que messieurs de Port- Royal: qualifioient de file aînée de la langue des Romains » GR ne pee ici sus ant t dégénéré d'une langue mortelle. ’ 0 | | . Langue francaise. 55 être agréables à un peuple avide de gloire, qui de tout de temps s’est montré jaloux de la préé- minence dans tous les genres de gymnastique, et sur-tout dans les arts de l'esprit, les éloges vrais et francs qui abondent dans la Dissertation d’un étranger, qu'onn'accusera pas de partialité, “loges couronnés par une Académie étrangère, doivent flatterencore davantage unetellenation. Ces éloges remontent ici beaucoup plus haut (à dix-sept siècles) : ils sont appuyés de preuves en tout genre , historiques, topographiques, lexiqués, etc. ; en un mot, par une érudition saine et lumineuse. Cette partie, dans tout le volume, est peut-être la plus travaillée et la plus neuve ; celle qui a exigé le plus de recher- ches , et qui offrira bien des choses qu’on cher- cheroit vainement ailleurs. Les Français épris de l'amour de leur pays, qui liront la Dissertation de M. Schwab, auron, la satisfaction d'y voir, et dans les excellentes ossenvarTIoNs de sontraducteur , qui la complè- tent, que les Français et leurs ancêtres ont eu l'honneur, dans tous les temps , de donner le ton à tous les autres peuples leurs contemporains, dont la langue, les arts, les lettres, les sciences et l'influence politique pouvoient les rivaliser ou les surpasser. Il y est comme prouvé que la langue fran- çaise , dans les temps les plus anciens, a été aveg le latin, ou immédiatement après, la langue universelle de l'Europe, L D 4 56 Littérature. T4 En abrégeant le plus possible, je me trouve forcé de m’étendre beaucoup plus que je ne voudroiïs sur cette partie du volume, par plu- sieurs raisons ; parce qu’elle est la plus intéres- sante de toutes ; parce qu'ayant été omise par Rivarol, elle complète en quelque sorte, son éloquent piscours qui se trouve dans toutes nos bibliothèques (*ÿ Les sciences et les lettres Réuriront à Mar- seille à un tel point, et la rendirent si célèbre , que Cicéron l’appeloit la nouvelle Athènes des Gaules, et que les Romains de la première dis- tinction y alloient pour s’y former dans la cul- ture des lettres (**). ? Avant Constantin, les écoles d’'Autun, de Bordeaux, de Trèves, etc., florissoient dans les Gaules : dans toutes les villes étoient érigées des écoles et des académies, où l’on donnoit des leçons de grammaire et d’éloquence. Juvenal indiquoit les Gaules aux Romains mêmes qui vouloient s'exercer dans ce dernier genre (***). Les jurisconsultes gaulois étoient déja célè- bres du temps des Empereurs; et si le latin con- servoit plus de dignité et d’énergie dans la bouche d’un Romain, il étoit plus riche, il avoit plus de graces dans celle d’un Gaulois. (*) Il s’en est fait quatre éditions. (**) Varron surnommoit les habitans de Marseille, Trigloëtes, parce qu’en y parloit trois langucs, le grec, Le latin et le gaulois. (***) Æecipiat te Gallia. Sat. VII, v.fr47 : et ailleurs, Gallia causidicos docuit facunda Britannos. Sat. XV, v. 11% Langue francaise. 97. Saint Jérôme , dans ses lettres, avance que les Gaulois alloient à Rome ur ubertatem Gallici nitoremque sermonis gravitas Romana condi- Telurses.(*)s * La langue des Français, sous les drapeaux victorieux des Normands ; devint la langue do- -.minanñte en Angleterre , à Naples , en Sicile ; et par une suite des mêmes causes, pénétra dans les provinces de la Grèce, et jusque dans sa capitale, pendant le règne des princes francais à Constantinople ; et dans une partie de l’O- rient: Plusieurs savans soutiennent que la lan- gue des Françaisa toujoursété la mieux accueillie et la plus répandue en Europe : ils en apportent en témoignage une multitude de preuves citées de suite dans les savantes Votes de l’auteur. (Pag. 235 à 243) On a vu en diverses circonstances, et pour des négociations importantes, des ambassadeurs anglais , allemands, danois, espagnols , etc. , préférer la langue française à toute autre lan- gue dont l'usage n'’étoit pas aussi universel (225). Charles-Quint appeloit la langue fran- çaise une langue d'Etat (260). . Rymer et Dryden s'accordent à convenir que le séjour des nobles Provençaux en Angle- terre, sous Henri IT , avoit beaucoup enrichi la langue anglaise de mots et de tournures tirés du provencal. L'université de Paris, cette école la plus an- (*) Ep. XCV. 58 Littérature. cienne et la plus savante, ne le cédoit à aucune autre, ni par le nombre des étudians qui s'y PRE en foule de toutes parts (*), ni par la &élébrité des hommes qui en sortirent. L'uni- versité de Paris donna des savans distingués à l'Angleterre , à l'Allemagne , etc. ; et à l'Italie une multitude de princes honorés de la pourpre romaine. Le seul Abaïlard, parmi ses disciples, ent vingt cardinaux et plus decinquante évêques où archevèques. On vante encore la célébrité des écoles françaises où l’on enseignoit les arts lis Ç 5 béraux , de Chartres , de Tours, de Rouen, de Laon, de Lyon, de Citeaux , de l’abbaye du Bec , etc. Il y avoit à Paris , au douzième siècle, un col- lége pour les Danois et un autre pour Îles An- glais. Les fils des rois de Suède ne dédaignèrent pas de venir s'instruire à Paris et à Montpellier (an 1250-1290). Non-seulement les Français ne le cédèrent point aux autres peuples leurs contemporains , dans les arts de l'esprit, mais encore dans ceux du luxe , du goùt, des modes, etc. ; également par leur adresse dans les jeux-et les divers exer- cices du corps. Nos ancêtres sont vantés à cet égard par Diodore de Sicile et par Strabon (**). (*) Les historiens en ont porté le nombre jusqu'a vingt- einq et trente mille. (**) Diod. liv. V., ec. 30, ete. et Strabon > Liv. IV, p. FA bid. Pacis tempore saltationis genus.… à titiitinns Langue francaise. 59 Ce sont les Français qui donnèrent les pre- miers modèles de ces distinctions, de ces ar- moiries , de ces livrées qui décoroient le nou- yeau costume des chevaliers dans les tournois et dans les armées (D). Excellence et prééminence chez les autres na- sions des ouvrages français. Warton, dans son Zistoire de la Poésie anglaise, ‘pense que le Combat entre le Chant du hibou et du rossignol, le premier essai dans la langue vulgaire avec un refrain ou chœur, est d’origine française. Il pense que The geste of king horn , le plus ancien roman anglais que l'on con- noisse , est traduit du francais. Les traductions de Rob. Mannying , sous Edouard I, sont tirées la plupart d'ouvrages écrits dans notre langue. ( V/arton's history ). Chaucer, qui écrivoit sous le règne d’E- douard IT, dans un temps où l'usage du fran- çais avoit été proscrit de l'Angleterre, Chaucer avoit pris un grand nombre de ses contes chez les Provençaux. Jean Gower , qui en appro- che le plus, composa un poëme divisé en trois parties : Speculum meditantis, vox clamantis, Confessio amantis. Cette dernière partie étoit écrite en français : l’auteur y avoit pris pour modèle notre fameux Roman de la Rose. Le Sidrac de Hugues Campden, et les 4ven- qures de Lansal, par Thomas Chester, sont aussi 60 Littérature. tirés du français. C’est encore du français qu'a été traduit le Kalendar of shepherds , imprimé en 1497 , et probablement le Szip of fools, d'Alexandre Barclay, au commencement du XVI.me siècle. Avant l'avènement au trône d'Edouard IV, en 1461, on traduisit un grand nombre d'au- teurs classiques en francais, puis du français en anglais. (Warton, ibid.) En Ecosse, les premiers poèmes furent com- posés en français, et les minstrels y chantèrent dans cette langue jusqu’au quatorzième siècle. On reconnoit en effet , dans la langue écossaise, des mots et des tournures prises dans la langue francaise. ( Pinkerton's ancient scotish Poems. Præf.) En Allemagne, vers le milieu du seizième sié- cle , Opitz, qui en faisoit l’ornement, se plut à imiter dans ses poésies notre Ronsard. # Les anciens romans allemands de chevalerie sont la plupart des traductions et des imita- tions des romans français. Le chef des roman- ciers de l'Allemagne , Henri de Weldeck (an 1207) paroit avoir eu sous les yeux le français de Chrétien de Troyes, lorsqu'il travailla à sa traduction de l’Enéide, Lancelot d'Ulrich de Zezam (an 1294) est composé sur le français d'Arnaud Daniel. Ga- muret, Tschiona Dulander et Percival sont tirés du français de Guyot : également /Vore et Blan- chiflur (an 1226), Tristan (an 1250), ont tous, une origine française. PS PT TE SP TS UE Langue francaise. #i Walther de Metz(1245}écriviten français son Drome moral intitulé. Mappremonde ; de sorte qu'on peut dire avec Eichhorn , que la poésie allemande de ce témps -là-est, en grande par- tie, l'écho de la poésie nude La passion des poètes allemands alla si loin, dit le même auteur , qu'avec un mépris réfléchi pour les richesses de leur propre langue, ils adoptèrent dans leurs rimes et y mélèrent avec affecta- tion beaucoup de mots empruntés des poètes français. « Qui veut entendre le Dante et Pétrarque, « doit à chaque instant recourir au dialecte « provençal »... On pourroit également citer dans l'italien et dans plusieurs autres langues , une foule d'ouvrages et de poëmes imités des écrivains francais; mais ce seroit alonger un extrait déja trop étendu.‘ ‘à Comme l’auteur des OsservarTIoNs, je termi- nerai cette partie honorable au nom français, sur l'excellence , sur la prééminence de la na- tion , par un passage marquant d'un savant étranger (*) : il donnera un nouveau poids aux autorités précitées. « La France servoit la pre- « mière de modèle général au nouveau monde. « De la mer Méditerranée à la mer Baltique , on « admit sa chevalerie et ses tournois. Sur une « moitié de notre globe, on parla sa langue, « non-seulement en Italie , en Espagne , mais à .( Eichhorn. 62 Littérature. | « Constantinople même , dans la Morée , ét « Syrie, dans la Palestine , et dans l'ile de « Chypre. Sa poésie fut chérie de toute l'Eu- « rope.. On admira, on imita, on traduisit « leurs chansons tendres et badines, leurs con- «tes, leurs fabliaux, leurs romans. Toutes les « langues de l'Europe, l’une après l’autre, s'ef- « forcèrent derecueillir les chants galans, héroï- « ques romanesques des Français du’ sud et du « nord de la France, Pour étendre la renommée « de ce peuple vif et gai, tout étoit en mouve- « ment ; rois, princes , clergé , noblesse, péle- «rins, aventuriers , navigation , commerce , “guerre et paix concoururent à la propager « en tous lieux. L'Italie et l'Espagne adoptèrent « ce que les Francais du sud ; l'Allemagne-et le « Nord, ce queles Francais soit du nord, soit du’ « midi, avoient de beau. Bien plus, l Angleterre; « pendant quelques siècles, et l'Italie ellesmème « durant quelque temps, rimèrent toutes deux: « dansila langue du nord de:læ France »(E). Résumons-nous , et tâchions d'apprécier la) Dissertation qui fait l'objet de cet:extrait. De- puis un nombre d'années il y avoit eu pew de: sujets: traités dans aucune société littéraire plus intéressant chez les nations amies des: lettres, où leschefs-d'œuvres français sont mis’ à. côté de ceux de l'antiquité , et par-tout y sont plus lus et relus , en raison de leur utilité jour- nalière et plus usuelle. Cette Dissertation à quelque chose d’extrémement piquant pour des . \ Langue francaise. 63 Français , en ce qu'on a pu y recouvrer tous les _ vieux titres littéraires de notre ancienne no- blesse. : Personne ne pouvoit aborder la question pro- posée, et triompher de toutes les difficultés qu’elle offroit., n’étoit plus capable de traiter d'une manière aussi satisfaisante que la fait M. Schwab , un sujet qui exiveoit une longue étude raisonnée: et aussi étendue des langues ; qui exigeoit des connoissances multipliées et aussi variées, celles de l’histoire des arts, des sciences, et de leurs, progrès; de l'histoire des nations ; et de leur prépondérance en poli- tique , etc. L'estime et l'amitié, de plus, ont su procu- rer à un homme qui avoit la passion de s’ins- truire un. bonheur rare , des facilités de com- fnunications, de dépôts uniques et précieux qui ont beaucoup contribué à doubler le trésor de ses abondantesrecherches, Aussi , l'homme con- sommé, dans cette partie, qui aura fait une étude particulière et suivie des mêmes ma- tières , discutées , approfondies, et en quelque sorte épuisées dans: l'ouvrage de M. Schwab , est sûr, de s’y instruire; encore, et d'y trouver des choses. absolument neuves qu'il ne: trouvera nulle part ailleurs. . Malgré ces ressources infinies, et ses moyens abondans, l4 plupart en lui- mème, le sa- vant couronné, jaloux d'atteindre à la plus grande perfection, appelle la critique, et 64 Littérature. cherche encore la vérité. M. Schawb est digne qu'elle se montre à lui, et qu’elle réponde à son vœu , à la candeur et à la droiture de ses inten- tions : et d'ailleurs, qu’auroit-il à en redouter ? Que pourra reprocher l'examen le plus sévère à un ouvrage aussi recommandable sous tous les aspects ? quelques fautes légères, quelques taches dans un riche et immense tableau? Et puis, enfin, quelques légères blessures dans une pareille joûte, n’humilient point : elles ne sont qu'honorables à l’athlète qui sort victo- rieux de l'arène , et la palme à la main. Dans la comparaison des littératures alle- mande et française , on est choqué d’une paï- tialité nationale excessive, lorsqu'on lit les passages suivans : « Je ne crois pas trop dire en « ayvançant que la Messiade de Klopstock , que « les odes d'Utz et de Ramler, que nos chan- « sons guerrières , que les Idylles de Gessner , «le Musarium de Wieland, le Nathan de « Lessing , surpassent tout ce que les nations « modernes dont l'esprit est le plus cultivé , ont « donné dans ces différens genres. » « Haller et Geller sont des poètes originaux, « parce qu’ils ont un caractère quiles distingue « de rous les poètes didactiques, de rous Les fabu= « listes romains , anglais , FRANÇAIS. » Tout littérateur , je ne dis pas français , mais mème étranger , à qui les chefs-d'œuvre français seront connus comme ceux de la Grèce'et de Rome, qui sera doué d’un peu de goût, saura que Langue française. 65 que penser de telles assertions, et tout ce qu’on seroit en droit d'y répondre. Mais voici pis encore : dans un grand et ma- gnifique monument qu'une savante académie a prétendu élever à la gloire de la langue fran- çaise et des grands écrivains qui, par leurs ouvrages immortels, ont créé, fondé et porté la langue à une perfection qui l’ont rendue la langue de l'univers, on est étonné de voir gravé sur ce même monument d'horribles blasphèmes contre les divinités de notre Parnasse, contre ces dieux mème qui en ont été les fondateurs. Or, voici ce que j'appelle des blasphèmes ou des hérésies en littérature et en poésie : « Je me suis sur-tout appliqué à citer des « chefs-d'œuvre..…. pour transmettre à la posté « rité quelque chose de plus que du médiocre : « d’autres en auroient peut-être grossi la liste « avec les noms d’un J. B. Rousseau, de l’auteur « de la Métromanie , avec ceux d'un Bourdaloue, « d’un Massizzon. » 250. « Nous avons donné à Conwriize le surnom « de Grand, Au jugement de Lessing, ceux de « MONSTRUEUX , de gigantesque, lui convien- « droient mieux. »(Ham.6, Dramat. et 29—532). Et aïlleurs : « Je ne connois chez les Français « aucun chef-d'œuvre comparable à /’Æloge du «roi, par Engel. » À Engel nous opposerons hardiment Bossuet. Qui n'a pas senti les frémis- semens , les élans, les aiguillons du génie à la J'ome V1. E 66 Littérature. lecture de son Oraison funèbre du grand Condé? Il y a dans les beaux-arts un degré d’élévation, de supériorité ou de perfection, au-delà duquel il est impossible d'aller plus loin; que le génie et le travail peuvent à peine quelquefoiségaler, mais qu'ils ne surpasseront jamais. On peut mettre dans cette classe la harangue de Démos- _thènes pour la couronne, le plaidoyer de Cicéron pour Ligarius; Cinna , Athalie, l'art poétique de Boileau, etc. etc.; et, dans son genre, l'Oraison funèbre par Bossuet, qu'on vient de citer. On n’est pas moins surpris de voir dans la même balance oratoire, l'aigle de la chaire et l’ingénieux rival de Fontenelle , Bossuet et d' Alembert. Quelle différence cepen- dant entre tous deux! quelle distance infinie entre celui-ci et le premier ! J'invoquerai ici , comme j ai fait ailleurs, un témoignage qui ne sera point suspect, celui d’un étranger , d’un professeur de littérature et de goût, dont les lecons ont mérité d'être recueillies, imprimées et traduites en plusieurs langues, et qui font autorité. Exempt de toute partialité nationale , et plus juste envers les deux nations britan- nique et française, le docteur Blair (*) met au- dessus de Tilotson et de tous les orateurs sacrés de l'Angleterre, Bourdaloue et Mas- silin ; et le professeur anglais ne balance point d'appeler Bossuet, le plus éloquent des mo- dsrnes. {*) V. Blair's Lectures on Rihetoric and Belles-lettres. Langue francaise. 67 Au reste, dans un ouvrage aussi étendu et d'ailleurs aussi bien rempli, ce ne sont que de légers défauts concernant notre littérature , bien excusables chez un étranger. Cette Disser- tation qui plait, intéresse et instruit, est une des plus satisfaisantes que je connoisse. Cet ouvrage, qui a mérité avec justice les suffrages d’une savante académie , est sûr d'obtenir ceux de tous ses lecteurs: et le critique le plus diffi- cile ne pourra que s’écrier : Je voudrois l'avoir fait ! (°) s E. B. (*) T1 à pu m’arriver quelquefois de citer l’auteur de ia Dissertation , lorsque c’est le traducteur et commentateur qui parle : &’est une erreur légère qu’on me pardonnera sans doute, puisque ce sont ici deux amis que l’amour des lettres , la défense d’une. mème cause, et qu’un même sentiment plus encore, réunissent presque toujours. ( ZVoie du rédacteur. ) NOTES Correspondantes aux renvois oz lettres ANDE COTE, (4) À une époque de notre littérature française , bien remar- quable , où une armée de traducteurs en vers (1), animés d’une aoble émulation nationale , à la suite et comme sous les dra- peaux du célcbre Delille, se proposent de rivaliser les poëtes allemands et anglais, traducteurs en vers, beaucoup plus riches que nous dans cette partie ; on a lieu d’être surpris qu’un zélé patriote, qui a pris à tâche d’étaler toutes les richesses littéraires et poétiques de son pays, n'ait pas dit un mot des étonnantes et uniques traductions en vers, de M. Voss, dans le genre métrique : car les allemands, comme «Homère et Virgile, ont aussi des poëmes en vers métriques, dans un genre qui contribue tant à la beauté et à la fidélité littérale , poétique, harmonique , etc. d’une traduction en vers, des anciens poëtes sur-tout. On auroit donc pu citer les belles tra- ductions métriques d’'Homère, de Virgile, d’Ovide, etc., par M. Voss. Il est à remarquer que dans sa traduction des Géor- giques , le poète allemand a su remplir son double but ; qu’il a su joindre la beauté de la perfection à la plus exacte fidélité : sa version , en effèt , des Géorgiques n’a pas un vers hexamètre de plus dans l'allemand que dans l’original. Par-là, M. Voss a su trouver dans sa propre langue un nombre d’avantages que n’ont point eus dans la leur, Pope, Dryden, Anaibal Caro, Deiille, etc., et qui ont procuré à ces versions germaniques , une supériorité marquée sur toutes les autres traductions en versles plus estimées , dans quelque langue que ce soit (2). M. Voss vient encore d'enrichir la littérature de son pays (1) J'en ai sous les yeux la liste nominale, très-considérable et effrayante en quelque sorte; car le Pindare des hébreux, Île prophète lyrique, l’a prédit : Multiplicasti gentem et non magnificasti lætitiam. Ode 111, str. 17, (2) On pent lire sur ce mème sujet une Lettre d’un homme très-instruit de Ia Mitiérature allemande. Magasin Encyclopéd. AnlV,tom. II, pag. 11 Notes. 6% d’un recueil de pe Briques , très-vantées. Vote du Ré- dacteur. (B) Je me rappelle avoir lu sur ce mème sujet ,;1ilya quelques. annces, une LETTRE piquante, dans laquelle l’auteur, ami d’un goût pur et antique , combat avec les armes d’une plaisan- terie fine et enjouée, tout le ridicule de notre engoûment ger- manique. Il s’escrime sur-tout contre le premier volume de la Bibliothèque germanique , qui venoit de paroitre , lequel nous. menacoit d’une levée en masse de vingt mille gens de lettres, qui débitent tous les ans aux différentes foires de l'Allemagne, de produit de vingt mille mots. L'auteur de la LETTRE n’aime point « le chant (ou chanson > « Barditus ; c’est expression de Tacite ) après la bataille d’Her- « mann, drame de cinquante à soixante pages. » Il sait mettre une distance infinie entre le goût simple et sublime. de Gessner x et le pathos , le boursouflé, le gigantesque du Barde Ossian , de Klopstock , de Bodemer, lé noachiste, etc: Enfin, le critique s’amuse de la guerre éternelle que se font réciproquement les prôneurs fatatiques et les détracteurs ardens de la littérature allemande. ( V. LETTRE de B. V. aux auieurs du Journal des Débats, feuille du 26 brumaire an IX , provoquée-par les repro- ches injustes faits à la langue française, insérés dans le A£ercure V)..D.R. (CKCes détails, qui concernent le technique dés langues, dé leur grammaire , de leur syntaxe , etc., leurs rapprochemens, leurs comparaisons, ne seront pas lus sans intérèt par les personnes mème les plus instruites dans cette partie. Voyez, pour le grec 2 les pages 182,196, 270 ; pour lelatin, 159,162, 175—177 ; pour Pallemand, 157—159, 162,163, 161; pour l’anglais, 23r, 232, 269; pour l'espagnol, 232; pour l’italien , 183, 228, 229 ; et pour- le français , 233, 253 et 254. M. Schawb fait, entre plusieurs autres, cette observation d’une singularité remarquable chez un poëte latin du troisième siècle, et de la première classe pour-son temps, qui dit, plus formosus pour formosior. (Nemesien. Eccl. IV ). On est surpris de ne pas trouver les mots amo dans la langue des Valaques, qui s’appellent encore aujourd’hui Rumini, comme- ayant adopté en partie la langue des Romains. (D) Les poètes comme les peintres, à qui tout est D) > Quid libet audendisemper fuit œqua potestas, E ë . Se To Notes. Jes poëtes , dans leurs chroniques en vers, font remonter bien plus haut l’origine de ces anciens titres de noblesse et de ces distinctions héraldiques ; en Egypte , en Grèce, chez les Troyens , et par suite, chez les Romains, etc. Voici l’ancien usage des armoiries bien établi : At Nilus , qui se genitum semptemplice Nilo Ementitus erat , clypeoque flumina septem Argento partim , partim cælaverat aura... Ovid. Métam. L. V , v. 127. Nilée a vu le jour aux remparts de Memphis, Et du Nil faussementse vante d’être fils. Son écu d’or, empreint des sept bouches du fleuve, Porte de sa naissance une orgueilleuse preuve. Je sais bon gré au poëte Saint-Ange de s’être ici servi du mot technique héraldique. On voit également consacrés par les ancien poëtes, l’origine et l’usage des Colliers, des Chaines, des Cor dons d'honneur, etc. * Ferunt…. Pars leves humero pharetras : it pectore summo Flexilis obtorti per colum circulus auri. AEneid. L, V ,v. 557, etailleurs (1), IL s’agit ici des camarades du jeune lüle, Plusieurs ont un carquois ; et d'un riche collier La flottante parure orne chaque guerrier. Traduction de M. Delille. Et chez le même poëte, nos aïeux se montroient déja du temps de César, amis du luxe et de la parure , autant que des ‘Æombats. Gall per dumos aderant ;...... Aurea Cwsaries vlEs, atque aurea vestis , Virgatis ducent segulis, turn lactea collæ Auro innectuntur...… Ibid. L. VIII, v. 653. (1) J'ai un nombre d'exemples de ce genre recueillis au mot cHA1IN& du Maire de Londres, et autres Dignitaires britanniques , dans un manuscrit tiès- considérable qui se trouve en ce moment dans des mains très-savanles ; à Geneve. { Note du rédacteur, juin, 1624). | ‘ Notes. TL Les Gaulois arrivoient........… Dans ce vivant tableau, l'art avoit figuré Leur chevelure d'or , leur vêtement doré, Et de leurs colliers d'or la parure flottante Qui couvroit de leur cou la blancheur éclatante ; Leurs tabliers pendans, de'it les pans bigarrés Sont rayés de rubans richement colorés. M. Delille. Toutle monde sait que depuis des siècles , chez les modernrs en France, en Angleterre et dans beaucoup d’autres contrées les plus célèbres de l'Europe , les premiers dignitaires à la cour, dans les armées, dans les tribunaux, dans les premières places municipales, ete. , sont décorés de colliers , defchaines , de cordons , de rubans, d’écharpes , d'étoiles, etc. Vote dur diédacteur. (£) A l'appui du sentiment de l’auteur couronné, de son savant commentateur , et de cette multitude d’autorités réunies , j'ajouterai le passage suivant qui enchérit sur les éloges donnés à nos anciens écrivains. Ce passage est tiré de Pexcellent Discours PRÉLIMINAIRE de M. Campenon (Œuvres choisies de Clément Marot. Paris, Didoi ainé, an X.), sur les progrès et les retar- , demens de la langue française. C'est à l'Université de Paris, à ce corps célebre que VIialie , toute précoce qu’elle a été dans la Littérature , doit ses premiers grands écrivains, le Dante et Bocace. C’est dans nos joyeux romanciers que Bocace a puisé , de Vaveu des Italiens même , la plupart de ses Vouvelles. C’est aux traits délicats, recueillis dans Thibaut, dans Gace Brulès, dans Coucy , que leur Pétrarque dut les vers qui charmaient lItalie. Ce fut à l’aide de la romancerie française que le génie de V’Arioste construisit le poème de Roland. Et si le Tasse trouva sa langue perfectionnée et déja digne de seconder son génie, digned’égaler- ses héros à ceux d'Homère ; ses héros , et les premiers récits de- leurs prodiges , sont encore d’origine française. Y. D. R. F1 EN BEAUX-ARTS. De la Peinture considérée dans ses effets sur les hommes de toutes les classes , et de son influence sur les mœurs et le gonver- nement des penples ; par GroRGEs MARIE RaymonD, professeur de mathématiques , elc., avec eette épigraphe : Disce bonas artes, moneo, romana juventus. Ovrp. Seconde édition. Paris, CHARL. PouGEns ; quai Voltaire ,n. 10. An XII. — 1804. | Er ES que nous annonçons, a CONCOUTU sur cette question proposée par l'Institut natio- nal : Quelle a été et quelle peut étre encore l’in- fluence de la peinture sur les mœurs et sur le gou- vernement des peuples ? Il est divisé en deux parties : dans la première, l'auteur esquisse rapi- dement l'histoire et les progrès de la peinture. Après avoir fait passer le lecteur, des premières. ébauches aux compositions les plus sublimes et les plus correctes , il développe successivement les moyens employés. par l’art dans les différens âges, et parle nécessairement des objets de ses. imitations. À cet égard , il ne trouve que chezles anciens le vrai beau, qui n’est plus, pourles mo- dernes , que le beau idéal, image vaineet chan- Peinture. 73 geante, qui recoit l'empreinte des goûts indivi- duels et des préjugés. Tout ce qui existe Cans la nature , la peinture le regarde comme son domaine : cette idée suggère à l’auteur des ré- flexions qui trouveront sans doute nombre de contradicteurs. Il n’y a rien de successif dans un tableau ; on ne peut y voir qu’un instant in- divisible : or , dans un instant indivisible,, il n’y a point de mouvement. Ce cheval, représenté dans l'attitude du galop, et qui ne court pas, offre un mouvement immobile , qui est une véri- table convulsion :voyez ce char qui semble devoir étre emporté par une vitesse, que l'œil suivroit à peine ; les roues restent sur leur essieu, sans changer de place : qu'est-ce encore qu’une tem- pète muette , ou le spectacle d'une bataille qui se donne dans le silence. Ne pouvant donner du mouvement à ce qui doiten avoir, c'est un con- tre-sens d’en tenter l’imitation. Il s'ensuit donc que la peinture ne peut faire le récit d’un évé- mement quelconque. Un tableau sera bien un épisode , un fragment poétique ; mais jamais il ne réunira cet ensemble de faits qui composent une action, et la conduisent à son dénouement : la nature en repos n'est pas non plus universel- lement du ressort de la peinture. M. Raymond infère de tout cela, et avec raison, que la mu- sique et la poésie sur-tout, possèdent au su- prème degré tous les moyens qui manquent à la peinture , ainsi qu'à la sculpture, à laquelle s'appliquent toutes les observations faites sur la 74 Beaux-Arts. première. Le poëte et le musicien ont l'avan- tage d; parler directement à l'ame, au lieu que le sculpteur et le peintre ne frappent l'imagina- tion que par l'entremise des sens. L'auteur, toutefois , est loin d'adopter , il combat mème l'opinion exagérée , ajoutons fausse, de ceux qui-soutiennent l'impuissance absolue de la peinture ; mais il désigne la nature physique et morale comme la source unique où les peintres doivent puiser leurs sujets d'imitation , et les richesses de leur art. Il proscritimpitoyablement l'introduction des divinités de la fable, et ce qu’il appelle le fatras mythologique : en pein- ture comme en poésie, l’usage lui en paroïît un anachronisme insupportable. 11 blâme aussi, en général , les fictions allégoriques, et trouve une inconvenance dans l'emploi du sexe le plus foible pour exprimer les vertus, qui sont le ca- ractère des ames fortes. Il préféreroit, d’ail- leurs, les vertus mises en action, à ces notions abstraites que présente l'iconologie, et pres- que toujours inintelligibles pour le vulgaire. Tels sont les principes que renferme la pre- mière partie. La seconde commence par des considérations sur l’influeace de la peinture en général. Expo- sant ensuite le parti que l’homme peut tirer de cet art, M. Raymond développe ses avantages particuliers sous le rapport des agrémens qui en ; résultent; mais il n'oublie pas d'indiquer tous les genres de moyens par lesquels on peut le | Pernture. 7D rendre utile à toutes les classes. Venant ensuite à ses effets dans leurs conséquences politiques, il appelle toute la vigilance du gouvernement : non - seulement il veut que le législateur dirige les arts vers l'utilité publique, il veut encore qu’il songe à leur assurer une influence perma- nenie, qui soit la même pour les générations qui se succèdent. Mais pour cela, il desire qu'on fixe cette inconstance, cette versatilité de goûts, qui est la source de tant de maux et de tant de jouissances : réduire l'esprit humain à l’unifor- mité , déraciner le luxe et détruire l'empire des modes , nous paroït une opération presqu’im- possible. L'auteur reconnoit comme essentielle- ment utile l'exposition des objets d'arts; mais 1l desireroit qu'elle füt faite avec méthode , et que, par exemple, les ouvrages de pur agré- ment, ou simplement destinés à montrer le mé- rite du travail , ne fussent pas confondus avec ceux dont on attend quelque effet moral. Il place à part, et dans des établissemens diffé- rens, les hommes d'Etat, les savans et les phi- losophes, même les citoyens vertueux: selon lui,ces musées où l’on réunit les chefs- d'œuvre des maîtres de toutes les nations, et où l’on ne ya pas pour prendre des lecons de vertu, ne devroient être consacrés qu’à la gloire des arts ; l'entrée n’en seroit permise qu'aux élèyes pour y puiser le goût du beau , et aux amateurs pour satisfaire leur curiosité. Cet ouvrage, dont nous n’avons offert que 76 Beaux-Arts. les principales idées, est l’un des trois que la commission de l’Institut national à distingué parmi les mémoires envoyés au concours : la. troisième place lui a été assignée. Dans cette se- conde édition , l’auteur a renforcé de réflexions nouvelles son système paradoxal , que nous avons développé plushaut. La manière adroitset. ingénieuse dont il le présente et le discute , l’é- nergie, l'élégance même du style, en un mot, l'intétét qu'il inspire ; tout cela ne sera jamais assez fort, assez puissant pour appaiser la bile des enthousiastes de la peinture. M. Raymond, d’ailleurs , se trouve entrainé dans des raison- nemens que ceux-ci prendront pour des contra- dictions, sans s'embarrasser s'ils naissent du sujet même, ou s'ils sont le produit de l'erreur. Toi, il loue avec chaleur le Laocoon ; là, il ana- lyse froidement un tableau de Raphaël et d’au- tres: mais on aura peine à lui pardonner l'es- pèce d'irrévérence avec laquelle il parle de l’Apollon du Belvédère. Cependant, il faut l’a- vouer, M. Raymond s'exprime sur les beaux-arts, et principalement sur la peinture, en homme éclairé et judicieux : il énonce des vérités frap- pantes que le préjugé seul et qu'une admiration servile et routinière peuvent empécher de re- connoitre ; mais il est bien difficile d’avoir raison contre la tradition commune. On voit aujour- d'hui peu d'ouvrages dont le but moral soit plus marqué. FRamener la peinture à cette sage maxime si négligée, utile dulci, en réprimer les EN Peinture. m7 abus que la dépravation multiplie chaque jour , lui donner une direction utile pour toutes les classes de citoyens ; voilà où tendent les efforts de M. Raymond. D'après cela , tout lecteur sans prévention , sans passion , peut-il lui refuser son estime et des éloges ? J.-L. G.......e. HISTOIRE. Rirurz des Tüätars- Mantchoux , rédigé par l’ordre de l’empereur Kien-Long ; es précédé d’un Discours préliminaire com- posé par ce souverain , avec les dessins des principaux ustensiles et instrumens du culie chamanique : ouvrage traduit par extrait du Tâtar-Mantchou, et ac- compagné des textes en caractères ortgi- nauxz ; par L. LANGLES, r12embre de l'Institut national, conservateur des Manuscrits Orientaux de la Bibliothèque impériale, et professeur de persan à l'Ecole - spéciale des langues orientales vivantes. Paris, de lImprimerie de la République. An XII. — 1804. In-4.° de 74. Pages. . C ouvrage fait partie du tome VII des Notices et Extraits des manuscrits de la biblia- 78 Historre. chèque impériale. M. Langlès en a fait tirer quelques exemplaires pour les offrir aux ama- teurs de la littérature orientale , et pour exciter quelques-uns d’eux à étudier une langue savante, encore ënconnue aujourd'hui en Europe (1). L'ouvrage dont M. Langlès nous donne la notice , est intéressant et curieux. Il l’a choisi le premier , parce qu'il a l'intention de faire connoître Les ouvrages Mantchoux , et qu'ila cru devoir commencer par ceux qui peuvent nous familiariser avec les mœurs et les usages de ce peuple. M. Langlès donne d’abord un précis sur le Chamanisme, que les empereurs chinois allient avec le culte moderne de Chans- ti; et sur Pouth ou Bouddah, le lécislateur des Tâtars. ouvrage lui-même est composé de six vo- lumes contenus dans une espèce de carton, ou d’'enveloppe , comme les livres chinois , et a été imprimé avec des planches de bois. Suivant un ancien usage de la bibliothèque impériale , les livres ainsi imprimés à la manière chinoise, font partie du département des manuscrits, (G) M. Langlès a prouvé, dans plusieurs de ses ouvrages, l'importance du Tâtar-Mantehou, dans lequel on trouve main- tenant des traductions fidèles et authentiques de tous les bons livres chinois. Il continuera l’impression des grammaires qui, jointes au Dictionnaire qu’il a déja publié en 3 volumes in-4.° , l’an 1789 et 1700, formeront un cours complet de la langue Mantchoue ; et ce cours ouvrira, suivant l’expres- sion du savant Amiot , une Libre entrée daus la hittérature chi- noise de tous les siècles. e Täâtars-Mantchoux. 79 et se trouvent conséquemment dans la division dont la garde est confiée à M. Langlès. Ces livres sont compris dans le travail que ce savant distingué a entrepris, sur les manus- crits de cette bibliothèque. L'empereur Kieng-Long lui-même a com- posé la préface que M. Langlès donne en entier avec le texte Mantchoux. On trouve après de nombreuses listes des mandarins préposés à l'inspection de l'écriture , au dessin , à l’impres- sion , à la correction des épreuves , etc. On lit ensuite un discours composé par ces savans , et revu, ainsi que tout l'ouvrage, par l'empereur lui-même , sur les offrandes et les sacrifices qui sont en usage chez les Mantchoux, et une indication du texte contenu dans chaque volume , dont le sixième renfegme 118 gravures en bois , représentant le lieu des sacrifices, les instrumens, ustensiles qu’on emploie dans les libations, offrandes et sacrifices, les principales pièces du costume sacerdotal des chamans, avec des descriptions très - détaillées en Mantchou. M. Langlès donne , dans son ouvrage, soixante- cinq objets qui lui ont paru les plusintéressans, et quil a fait soigneusement réduire : on y trouve également le texte de la description Mantchoue , avec la traduction. Ces planches et ces descriptions sont très- utiles pour faire connoître les mœurs, les usa- ges et les rits des Tartares; et les unes et les au- 80 Îistoire. tres seront d'un grand intérèt pour les amateurs de l’histoire et pour les artistes. M. Langlès promet de publier aussi plusieurs notices d'ouyrages Mantchoux; ce sera ajouter de nouveaux services à tous ceux que lui doivent les lettres, et qui ont rendu son nom respec- table aux sayans , comme il est cher à l'amitié. A. L. M. ———— VARIÉTÉS, NOUVELLES ET L CORRESPONDANCE LITTÉRAIRES. NOUVELLES ÉTRANGÈRES. ALLEMAGNE. Notice sur les travaux des membres de l'Uni- versilé et de l’Académie de Gaœttingue. Arozrônont Atheniensis Bibliothecæ libri tres et Frasmenta, curis secundis illustravit Chr. G. Heyne. Observationes ad Apollodori Bibliothe- cam , auctore Chr. G. Heyne. Chez Dieterich, 1803, gr. in-8. Cet ouvrage a déja été annoncé dans le Magasin Encyclopédique. AgHaNDLuNG vom Scharlach-Ausschlage,vonLud. Christ. Wilh. Capper , Profëssor der medicin in Gœttingen. Traité sur la Fièvre scarlatine ; par Louis-Guillaume Carrez, professeur de médecine ; in-8. , chez Dieterich , 1803. L'Introduction traite de l’origine de cette es- pèce de fièvre. I.€" chapitre. Sur les moyens de reconnoître la fièvre scarlatine, et de la distin- Tome VI. F 82 Nouvelles littéraires. guer des maladies semblables. 2.° chap. Du cours de cette fièvre , avec une description de ses différens accidens. 3.° chap. Des causes de la fièvre scarlatine. 4.° chap. Des différences de cette fièvre. 5.° chap. De la manière de prévoir l'issue de cette maladie. 6.€ chap. Des moyens de se garantir de la fièvre scarlatine. 7.° chap. Des moyens de la guérir. 8.° chap. Des moyens de guérir les maladies qui en sont la suite. Mémoires sur les campagnes des Pays-Bas en 1745, 1746 et 1747, publiés par A. H. L. HEEren, professeur d'histoire à Gœttingue. Rawer, 1803. Jusqu'à présent on n’avoit sur ces campagnes que des rapports français : ces mémoires en offrent du côté des alliés. Le prince régnant de Waldeck , qui a fait ces campagnes à la tète des troupes auxiliaires de Hollande, profita des momens de loisir que lui laissoient ses occupa- tions pour se rendre compte des événemens les plus intéressans dontilavoit été témoin : ses pa- piers, qui se trouvent dans les archives de la maison de Waldeck , sont les sources dont ces mémoires sont tirés directement. Le prince de Waldeck, actuellement régnant, chargea l'éditeur de les faire connoître : ces mémoires doivent avoir de l'intérêt pour tous ceux qui s'occupent de l'histoire. Nouvelles littéraires. 83 Puyrocrapuiscne Blætter, verfasst von einer Gesellschaft Gelehrten und herausgegeben von D. G.F. Horrmanx, æffentlichen ordentlichen Lehrer der Arzneykunde und Botanick. Érster Jahrgang 1803 , Bey $curorper. | Feuirres phytographiques , rédigées par -une société de savans , et mises au jour par G. F. Horrmanx , professeur ordinaire de mé: decine et de botanique. Première année 1803; grand iu-8., avec huit gravures, dont sept sont coloriées. Le premier mémoire de ce recueil a pour titre: Novæ species plantarum Capensium examinatæ et descriptæ à C. P. Thunberg. Depuis que le chevalier Thunberg a mis au jour, il y a plu. sieurs années, sa Flora Capensis , on a eu occa- sion de faire de nouvelles acquisitions : ce sont celles que le premier mémoire fait connoître: Voici les noms des nouvelles espèces : Zxia radians. — Ixia fenestrata: — Ixia squallida. — Ixia elliptica: — Schœnus aggregatus. — Cype: rus hirtus. — Holcus setifolius. — Restio nulans. — Restio elongatus (différent du Restio wagi- natus qui lui ressemble). — Restio bifidus. — Restio cuspidatus. — Restio squamosus. — Pro: tea villosa. — Protea odorata. — Protea tenui- folia: — Protea virgata ( différente de la Protea parviflora par sa fleur plus grande et en boule, et par ses feuilles plus pointues). — Protea venosa. — Protea rugosa.— Protea pyramidalis. F 2 Li 84 Nouvelles littéraires. — Protea hirsuta. — Protea verticillata, — Pro: tea macrocephala.— Protea reticulata.— Protea scabrita ( P. speciosa (A) Diss. de Protea). Protea marginala ( P. speciosa (B) Diss. de Protea ). Protea obtusa.—Galium horridum.—Penœa acuta (différente de la P. squamosa : laciniis corollæ non obtusis, sed acutis et tubo longiori, angus- L'ort).—Cuscuta Africana (Americana Prod. cap. 32).— Parietaria lanceolata.—Brunia comosa.— Brunia phylicoïides. — Phylica glabrata. — Ply- lica hirsuta. — Phylica rosmarini folia. — Cam- panula bracteata. — Campanula stellata.—Lobe- lia setacea, — Lobelia scabra.— Celastrus acumi- natus. — Celastrus obtusus. — Celastrus ellip- ticus. — Celastrus crispus. — Diosma oblonga ( lanceolata Prod. cap). — Diosma cuspidata. — Diosma umbellata. — Diosma dentata. — Diosma pustulata. — Achyranthes verticillata. — Anethum Capense. — Rhus glaucum. — Rhus mucronatum. — Rhus crenatum. — Rhus dimi- diatum. — Rhus dissectum. — Pharnaceum mu- cronatum. — Pharnaceum distichum. Le second mémoire offre un supplément aux observations botaniques de M. le professeur Rerzius à Lund, terminées avec le sixième cahier. M. Retzius décrit comme espèces nouvelles ou rares : Ces- crum citrifolium. — Silene bifida. — Silene dis- color. — Rosa laxa. — Rosa microcarpa ( de Si- bérie). — Lepidium didymum (il n’est pas tout-à- fait le même que le Lepidium d'Hudson, auquelil a donné le mème nom). — Ærysimum rubellum. Nouvelles littéraires. 85 — Hesperis parvula. — Madia viscosa. — Galin- soga laciniata. — Rudbeckia alata ( peut-être plutôt une sorte d’ÆAelenium ). — Silphium tri- foliatum. — Silphium ternatum. — Silphium- ‘atro purpureum. — Le véritable Populus balsa- mifera de Linnæus, doit être le Populus can- dicans recentior. Dans le troisième mémoire, M. le professeur Linck de Rostock, a montré la différence entre la Cardamine hirsuta Web (qui ici est appelée C. Sylvatica), et la Cardamine hirsuta de Linnæus. L'auteur a trouvé souvent la dernièreen Espagne, en Portugal ainsi qu’en Angleterre , sur les chemins et sur de vieux murs ; mais l’autre , au contraire , (la C. Sylva- tica ) ne s’est présentée à lui que dans les bois. Le quatrième mémoire est rempli de remar- ques sur quelques espèces de Carex , du même auteur: Dans le cinquième mémoire, l'éditeur offre les plantes remarquables , ou rares. du jardin botanique de Gœttingue : ces plantes sont tirées des genres Aster et Veronica. On trouve donc la description et le caractère des plantes qui suivent: aster grandiflorus , dumosus, cyaneus, pendulus , wumbellatus, undulatus , thyr- siflorus , tradescanti , veronica virginica, longifo- lia, crenulata , complicata , etc. Le sixième mé- moire de M. le docteur Xteser, concernant l’An- tirrhinum peloria de Linnæus , contient tout ce qui regarde l’histoire de cette singulière ano- malie , et offre en même temps les recher- ches de l’auteur, qui démontre que, des graines F3 86 Nouvelles littéraires. müres de la peloria, on peut tirer, non une autre peloria, mais une antirrhinum linaria; ce qui prouve que le caractère de la peloria n’est aucunement constant pendant plusieurs géné- rations, et que par conséquent cette plante n’est pointune production à-la-fois bâtarde et féconde. Le septième mémoire offre ce qu'il y a de plus remarquable dans l'histoire du Sazyrium cpipo- gium Linn., principalement la structure parti. culière dé ses parties génitales. Dans le huitième mémoire , l'éditeur soumet à son examen l’egui- setum pratense Erh. Ses recherches démontrent la différence de cette plante avec l’equisetum arvense. M.. Sprengel, à Halle, a joint à ces mémoires des détails très-instructifs sur les parties de la génération des fougères. Gescaicare der Entstehung und Entwickelung der hohen Schulen unsers Erdthels, von C.-Mxiners. Histoire de la Fondation et du Développement des Universités de l'Europe; deuxième val. Ce volume est composé de deux livres qui renferment l'histoire des Fonds et des Privi- léges des Universités. Le quatrième livre se di- vise dansles sept sections suivantes: 1.0 Histoire de la Juridiction académique ; 2.0 Histoire du Droit de faire des Statuts ; 5.° Histoire du Droit délire ses supérieurs, ses fonctionnaires , ses subalternes et ses professeurs ; 4.0 Histoire des Dignités académiques; 5.° Histoire de la dignité Nouvelles littéra tres. 87 de comte Palatin ( comes Palatinus ) et de ses priviléges; 6. Histoire du Privilége de sauf- conduit et de la taxation à l'amiable des demeu- res; du Droit de tenir de petits et de grands messagers; particulièrement de l’Immunité d'im- pôts et de charges publiques ; 7.0 Histoire du Droit que les Universités ont de prendre part aux délibérations sur les affaires publiques; du Droitet de la Franchise de censure ; du droit de Patronage et de rotuli nominationum ; du Droit de chasse, et de celui d'établir des cabarets et des apothicaireries. Dans la séance de la Société des Sciences , du 22 octobre , M. Meinérs a lu un mémoire inti- tulé : Commentatio quæ Historiam muneris can- cellariorum academicorum in Universitatibus Gal licis et Italicis pertractat. Les recherches que M. Meiners a été obligé de faire pour écrire son Histoire des Universités , l'ont amené à examiner plus attentivement l'histoire de la dignité de chancelier dans les Universités de France et d'Italie ; et c’est le ré- sultat de ses observations qu’il soumet à la so- ciété dans un mémoire particulier , formant comme une section de son grand ouvrage sur les Universités. Le 19 novembre, la Société royale des Scien. ces tint une séance solennelle en mémoire de sa fondation , il y a cinquante-deux ans. M. Blu- menbach lut un mémoiré intitulé : Spécimen F 4 88 Nouvelles littéraires. Historiæ naturalis antiquæ artis operibus illustraz Læ , eaque vicissim illustrantis. L'auteur com- mence par quelques idées générales sur les trois rapports sous lesquels les ouvrages de l’art que l'antiquité nous a laissés, sont instructifs. pour l'histoire naturelle ; 1.° par les objets rares etsi. gnificatifs qui ysontreprésentés ; 2.0 à cause dela matière dont ces ouvrages sont faits ; et 5.° par les circonstances accessoires , qui sont la posi- tion dans laquelle ils ont été trouvés, ou bien la métamorphose singulière que leur ma- tière a subie dans la suite des temps , etc. Sous le premier rapport, ces monumens anti- ques sont instructifs pour l'anthropologie et la zoologie ; sous le second, pour l’oryctognosie ; sous le troisième , pour la géologie : ces trois rapports sont expliqués par quelques exemples. Les monumens égyptiens sont nommêment d'une grande importance pour la zoologie, par: ticulièrement les dessins fort bien faits de quel- ques animaux remarquables que l’on ne trouve plus à présent au-dessous des cataractes , tel que l'hippopotame amphibie, dont M. Blumenbach montra une petite figure de terre vernissée, qu’il tenoit de M. Boettiger de Weimar : ce dernier l’avoit reçue de M. Hammer, secrétaire de lé- gation , qui l’avoit trouvée dans le sable près des catacombes à momies de Sakara. Quoique la petite figure soit faite sans beaucoup d'art, elle est cependant si fidèle et si caractéristique, soit pour l'expression de l’habitus total, soit Nouvelles littéraires. 89 particulièrement pour la forme du museau re- troussé , laquelle distingue l’hippopotame égyp- tien de celui du Cap , que M. Blumenbach con- jecture que tous deux forment deux espèces différentes. Pour indiquer le second rapport , M. Blumen- bach a montré trois pierres antiques, qui sont ercpmmnne dans les cabinets, mais dont on connoit à présent si peu les carrières, que les minéralogues ne les voient jamais que dans des gemmes antiques : ce sont la corniola nobilis , la cornaline de la Vieille-Roche, le r#icolo et le plasma di Smeraldo. Les graveurs grecs se sont occupés particulièrement de la première, et les romains des deux autres. Le troisième point de vue est expliqué par un nicolo trouvé près de Nimègue , enchässé autre- fois dans un anneau de fer, qui, changé à pré- sent en fer oxidé compacte, a conservé cepen- dant sa forme , et renferme encore très-exacte- ment le cachet. Ici appartiennent plusieurs au- tres exemples que donne l’auteur du mémoire. Viennent ensuite les observations de M. Blu- menbach. Il les a réduites dans un ordre systé- matique , sous quatre sections : 1.° l’anthro- pologie; 2., la zoologie; 3.0 la botanologie ; 4° la minéralogie. Je citerai quelques exemples de chacune des sections. 1.0 Pour déterminer plus précisément les dif- férences que les anciens avoient déja observées dans le genre humain , et qui setrouvent sur les 90 Nouvelles littéraires. monumens de l'antiquité. Tout ce qui reste en core dé ces ouvrages de l’art ne peut sé rappor- ter qu’à deux des cinq principales races dans lesquelles l’auteur divise le génre humain, c’est- à-dire , à celle du Caucase et à l'AEthiopienne. Il n'a jamais vu aucun antique (ce mot pris dans sa signification archæologique ) qui se rapportât à la race mogole; car il ne peut comprendre comment Winkelmann et d’autres savans ont pu trouver la forme de visage égyptienne sem- blable à celle des Chinois. — Le grand nombre de figures humaines que l'on trouve dans les pagodes, sur les deux côtes de la presqu'ile de l'Inde , sont d'une forme, à la vérité, différente, mais toujours déterminée et caractéristique. On distingue entre autres parmi ces figures , une conformation nationale très - singulière avec des têtes en forme de boule et une physiono- mie toute particulière; M. B., qui a vu des têtes et des groupes tirés du plus célèbre de ces temples, celui d'Eléphanta , dans le Musée bri- tannique, dans la collection de Parkinson, et par- ticulièrement dans celle de M. Townléy, trouve dela ressemblance entre ces formes particulières et celles de quelques tribus très-anciennes de montagnards , dans l'intérieur del Inde, que les Asiatick researches viennent de faire connoi- tre davantage. Cette forme ressemble aussi à celle du crâne d’une jeune indienne, morte à l'hôpital de Copenhague, lequel lui à été énvoyé comme une singularité remarquable, à Nouvelles littéraires. OL: cause de sa forme d’une rondeur frappante. Les collections qu'il a vues, ont donné égale- ment l’idée à l’auteur de soumettre à un pareil exa- men la célèbre statue du rotatore , le remouleur. La forme singulière de cette tête l’avoit toujours frappé, sur-tout le front rentrant et les larges pa- rois de la mâchoire inférieure. Ila remarqué que plusieurs crânes de sa collection ont justement la même forme : ces crânes appartiennent à des Cosaques et à d’autres peuples analogues ; ce qui s'accorde avec l'opinion que le remouleur doit représenter un Scythe. Pour finir la section an- thropologique , l’auteur fait mention d’un ex voto d'argent, non encore connu , qui se trouve dans la collection de M. Townley , et qui repré- sente une union hermaphrodite des parties gé- nitales des deux sexes. On l’a pris pour un symbole , comme le lingam ; M. Blumenbach croit que c’est un vice de conformation des païties génitales de l'hommé, et que le con- duit urinal est fendu par derrière. Il parle aussi d’un autre ex voto de bronze, également unique dans son genre, qui se trouve dans la collection de M. Rich. Payne. Il représente les organes sexuels d’un petit garcon , avec un ruban autour du prépuce, tiré par-dessus le gland; c’est vrai- semblablement la cérémonie préparatoire à l’in- fibulation. 2.9 Pour la zoologie. On sait que les Romains ont Connu le rhinocéros à deux cornes, que les naturalistes n’ont retrouvé que dernière- ment ; il y en a une figure de bronze dans le 92 Nouvelles littéraires. muséum de Cassel, et on le trouve sur-tout sur les monnoies de Domitien. L'auteur a vu aussi, sur une pareille monnoie, bien conservée, le rhinocéros à une corne ; sur les monumens de Persépolis , on trouve des chevaux et des cha- meaux sur un même rang. Cela ne paroït pas s'accorder avec le récit que font Hérodote et Xénophon de la défaite de Crésus, qu'ils attri- buent à l’antipathie de ces animaux l’un contre l’autre ; mais cette contradiction apparente se trouve détruite par la comparaison de diver- ses observations. Il est sûr que les chevaux ont peur des chameaux, à moins que de jeunesse on ne les accoutume à la vue de ces animaux, comme le font les Calmoucks, les Maures , etc. Il paroît singulier qu’un lion attaque un croco- dile , comme on le voit sur une lampe de terre dans Passeri : et cependant, d’après l’analogie , cela est possible; car des témoins assurent que, dans l'Amérique méridionale, l’once attaque le caïman. On trouve sur des monumens égyp- tiens des serpens avec le cou extrèmement gon- flé ; comme par exemple , sur ces beaux blocs de basalte que M. Edw. Worsley Montaigue a don- nés au Musée britannique. On a pris ces figures pour des serpens à sonnettes,etonena tiré un argument pour l’origine indienne de cesligures, et de quelques autres que l'on trouve en Egypte: inais quelques espèces de serpens indigènes en Egypte , comme la Coluber haje, ont la pro- priété de gonfler ainsi le cou. 3.° L'étude des anciens monumens offre peu PINS ES ‘Nouvelles littéraires. 03 de résultats intéressans pour la botanologie. Les écrivainsnumismatiques prennent une représen- tation qui se trouve sur des monnoies de l'an- ‘cienne Rhegium , ville dela grande Grèce, pour une branche de laurier avec des bayes : l’auteur n’a pas eu occasion de voir dé ces monnoies ; mais , d’après le dessin qu'en a donné Goltz, cela paroît être une petite plante qui germe avec ses cotyledons ; entr’eux se trouve la plumule , et, en bas, la radicule. L'auteur , pour faire voir la durée presqu’éternelle de quelques espèces de bois, sur-tout du sycomore et du véritable cè- dre (oxy cedrus), a montré un masque fort bien travaillé , de bois de sycomore, tiré de la momie de M. Symmous, à Londres; et un morceau de pomme de cèdre, que M. Hawkins a trouvé entre deux morceaux d’une colonne dorique au propylée. 4o Pour la minéralogie. Une description des différentes roches composées dont est. formée la pagode d’Æléphanta ; d'après un mor- ceau que M. Townley a donné à l’auteur ; un aperçu des différentes pierres, connues vulgai- rement sous le nom de basalte antique, entre autres quelques échantillons remarquables de monumens égyptiens du musée du cardinal Borgia , et de la bibliothèque du docteur Gar!s- chore ; un morceau d’asbeste antique d’une urne romaine , comparé avec des nouveaux es- sais de pareils tissus. Après la lecture de ce mémoire, M. Heyne fit 94 Nouvelles littéraires. unräpportdese qui s'étoit passé pendant l'année, avecuneintroduction adaptée aux circonstances: Tout en déplorant le sort de sa malheureuse patrie , il ne peut s’empècher de reconnoiître la protection généreuse que le gouvernement fran- cais a bien voulu accorder à la ville de Gæœttingue et ses environs, et les heureux résultats de ce mé- nagement. Il compare la position des professeurs du pays d'Hanovre avec celle de Protogènes , lorsque Démétrius Poliorcète assiégeoit Rhodes. Le peintre étoit resté tranquillement dans son: jardin , situé avant les portes, au milieu du camp ennemi, et il travailloit dans son atelier. On dit cela à Démétrius : étonné de cette sé- curité, le prince le fit venir, et lui demanda comment il pouvoit rester avec tant de confiance au milieu des soldats. Tu fais la guerre aux Rhodiens, et non aux arts , lui répondit Proto- gènes. Démétrius , satisfait de cette réponse, mit une garde devant sa maison ; et coinme il aimoit à causer avec lui, et ne vouloit pas cependant le détourner de son travail, il alloit souvent chez lui pour le voir travailler , pendant que les machines de guerre battoieng les murs des assiégés. L'artiste travailloit justement alors à un tableau très-célèbre (ilreprésentoit Jalisus, un héros rhodien); on a dit dans la suite de ce ta: bleau : Tabulam eam a Protogene sub gladio esse pictam. Heureusement nous ne travaillons pas ainsi sub gladio. L'université de Gœttingue peut suivre ses études tranquillement, à la faveur de Nouvelles littéraires. 95 la prôtection qui lui a été accordée. M. Heyne exposa ensuite les devoirs qu'impose et à l'Aca- démieet à la Société des Sciences cette heureuse position , et passa alors aux objets qui sont or- dinairement traités dans cette séance. M. le conseiller Mayer , de la classe mathé- matique , a été directeur de la société jusqu’en septembre ; et alors M. Meïners , de la classe historique, lui a succédé. La société a perdu pendant cette année, un de ses membres honoraires, M. d'Ompteda , conseiller intime de légation, et député de l'électorat d’Ha- novre à la diète de Ratisbonne ; deux de ses membres étrangers , M. Daniel-Pierre Layard, membre de la société des sciences de Londres, et M.Christian-Charles-Frédéric de Fredenheim , premier irtendant de la cour du roi de Suède, et inspecteur en chef du Musée royal à Stockholm ; et deux de ses correspondans, M. Jean Upha- gen , sénateur à Dantzik , et M. Théodore- Georges-Auguste Roove , conseiller du duc de Brunswcik , et professeur à l’école de Chirurgie de Brunswick. La société a recu parmi ses membres hono- raires, le comte Széchény de Sarvari Felso Vidék, chambellan de l’empereur d'Autriche , con- seiller-privé et assesseur du tribunal suprème de Junger ; parmi ses membres étrangers, M. Hu- bert Pascal Æmeilhon , membre de l'Institut national dans la classe de l’histoire ancienne ; M. Charles-Guillaume de /Zumbold , ministie 96 Nouvelles littéraires. résident à Rome, et son frère M. Henri-Frédé- ric-Alexandre de Humbold, conseiller des mi- pes du roi de Prusse, voyageur célèbre, à pré- sent à Paris, de retour de ses voyages. M. Soulange Artaud , menibre de la société philotechnique de Paris, et demeurant ordinai- rément à Gœ‘tingue, a été nommé associé rési= dent de la société; et comme amict , ou associés correspondans, ont été reçus, M. Théodore- Charles /artleben, professeur à Salzbourg ; M. Charles-Louis ÆZarding, observateur et ins- pecteur de l'observatoire de Lilienthal; M. Jean- Baptiste Gai!, professeur de littérature grecque au collége de France à Paris ; M. François-Lo- thaire-Auguste Sorg, professeur de physique à . l'université de Wirtzbourg ; M. Jean-Auguste Albert, médecin à Brème; M. Jean-Baptiste van Mons , membre de l’Institut national ; M. Joachim Diederich Prandis, archiâtre et professeur à Kiel; M. Christian-Auguste Fischer; M. George-HenriLangdor/f, à présent voyageant autour du monde avec l'expédition de Russie ; M. Michel-Ange-Bernard Mangourit, membre résident de la société philotechnique de Paris ; et M. Joseph Lavallée, chef de bureau des titres de la grande chancellerie de la légion d’hon- neur. Après cette exposition, M. Heyne passa à la distribution des prix. La question économique proposée par la so- ciété pour le mois de noyembre de cette année, étoit Nouvelles littéraires. 97 &oit: La culture du blé de Turquie ( zea mays) seroit-elle profitable en grand dans le Cercle de Basse-Saxe ? Pourquoi ne cultive-t-on pas davan- tage cette sorte de blé ? En quelle proportion seroit l'utilité de ce blé, comparée avec les autres sortes que nous cultivons à présent ? x La société a recu six mémoires dans l’ordre suivant , d'après le temps où ils sont parvenus : 1.° avec l’épigraphe, O fortunatos nimium ! 2.° Tu te nourriras à la sueur de ton front! 3.° Où ha- birent les hommes , là coule Le lait de Junon ; 4.° Glandes , atque arbuta sacræ deficiunt silvæ ; 5.° Faveat fortuna labori; 6° In magnis voluissé salest. Comme l’objet de la question est en grande partie pratique, la société a consulté un de ses membrés, M. F'estfeld, bailli de #ehnde; et celui-ci nous ayant communiqué ses vues , à confirmé, par son autorité dans la partie pra- tique , le jugement porté sur le mérite des dif: férens mémoires. ” Aucun de ces ouvrages n’est sans mérite. Ce-= pendant l’auteur du numéro I.°° répète seu: lement ce qu’il a lu dans quelques livres , qui ne sont mème pas les meilleurs. Il suppose qu’en Basse - Saxe nous cultivons seulement la plus grande des deux variétés du blé de Turquie, tandis que nous devrions cultiver la petite ou celle qu’on nomme le blé mohaws, qui convient mieux à notre climat septentrional; mais, selon toute apparence, nous cultivons l'espèce qu’il Tome VI, o8 Nouvelles littéraires. demande, ou bien l’auteur auroit dû mieux déterminer celle dont il parle. Les raisons qu’il donne, pour lesquelles nous ne cultivons pas cette sorte de blé, ne sont pas justes ; et il n’a pas répondu à la troisième partie de la question. Le mémoire numéro 4 est précieux pour nous par les témoignages de reconnoissance que l'au- teur offre à notre université où il a été quelque temps, et par le desir qu’ilmontrede vouloir à son tour être utile à notrefpays : l'ouvrage contient aussi sur la culture du maïs en Hongrie! des pro- cédés inconnus dans nos pays, et dontles détails sont fort intéressans : mais avec cela il n’a pas répondu à nos vues. L'auteur du numéro 5 paroît fort bien connoître la culture du maïs : mais on voit qu'il ne l’a cultivé que dans un jardin ; il a lu aussi les meilleurs ouvrages que nous ayons sur cet objet, et il lesa comparésavec ses propres expériences et ses observations ; mais il a laissé de côté le point principal de la question : Dans quelle proportion est l'unlité du mais , comparée avec les autres sortes de blé ? ou du moins il n’y a répondu que par une hypo- thèse qui est bien loin d’être prouvée. Il y a en outre plusieurs autres détails dans lesquels il eùt dû entrer, et qu'il a omis tout-à-fait. Le numéro 6 , in magnis voluisse sat est, ne con- tient rien qui indique que l’auteur ait lui-même cultivé le mais : il offre seulement une ou deux idées qui méritent d’être distinguées. Il ne nous reste donc plus que les numéros 2 et 5. 7. TS Nouvelles littéraires: 09 L'auteur du mémoire numéro 3, avec l’é- pigraphe : Où demeurent les hommes , là coule le lait de Junon , paroïit s'ètre donné toute la peine possible pour répondre convenable- ment à la question, tant d’après ses propres essais en grand , que d’après ses réflexions; mais il paroît lui avoir manqué les connoissances préliminaires , et il n’a pas fait ses expériences avec assez d’exactitude. Il a donc peu satisfait à la question de la société: car , en premier lieu, il n’a point démontré, d’une manière con- vaincante , l’utilité de la culture du maïs, com- parée avec nos autres sortes de blés ; et , en se- cond lieu , il n’a touché que légèrement la seconde partie de la question : Si, d’après les localités de la Basse-Saxe, il y avoit des circons- tances qui s’opposassent à cette culture. L’au- teur du numéro 2, Tu te nourriras & la sueur de ton front, a l'avantage d’être un économe praticien ; il a observé long-temps la cul- ture du maïs en Franconie , et sur les bords du Rhin et du Mein; il l'a ensuite cultivé lui- même en Thuringe, et s’est mis par-là en état de résoudre parfaitement la question, et de donner à la société les instructions qu'elle de- mandoit. En conséquence, le prix a été adjugé à ce numéro 2; mais la société a cru cependant que le numéro 3 méritoit la distinction de l’ac- cessit. Le mémoire qui a été couronné avoit déja été envoyé l’année précédente au premier oc- tobre ; et l’auteur paroït y avoir attaché si peu G 2 100 Nouvelles littéraires. de prétention, qu’il n’y a pas même joint un billet cacheté et contenant son nom; ainsi, il née sera connu que lorsque les papiers lui ap- prendront que son mémoire a obtenu le prix. Quant à la question proposée par la classe mathématique pour le mois de novembre, Sur la faculté qu'ont les corps de s'échauffer à la lu- mière du soleil, la société a reçu deux mémoires, Le premier avoit pour épigraphe : omo naturæ minister et interpres. Ce mémoire avoit été pré- cédé d’un journal détaillé des expériences de lauteur, et d'uné caisse qui renfermoit un des thermomètres dont il s’étoit servi, et beaucoup de boules de métal et d’autres substances. La société remarqua bientôt que ces expériences si pénibles et si chères n’avoient pu être faites que par un physicien actif et ingénieux, et que l’ob- jet étoit traité de manière à répondre parfaite- ment à ses desirs. Il seroit trop long d'entrer dans les détails de toutes ces expériences : l’au+ teur les a fdites sur soixante-six corps différens ; et souvent, pendant des heures entières, il a observé de minute en minute la chaleur que le soleil leur communiquoit. Il a joint à ses expé- riences les précautions les plus ingénieuses pour n'être pas trompé dans ses observations : aussi, la société lui décerna le prix à l’unanimité, Lorsqu'on ouvrit le billet cacheté, on lut le nom de Charles-Guillaume Beckmann , professeur de physique à Carlsruhe, déja connu par plusieurs écrits intéressans. Nodvelles littéraires. TOI Le mémoire, n.° 2, avec l’épigraphe : Rome n'a pas été bätie en un jour , offre aussi plusieurs expériences intéressantes ; mais comme l’auteur ne s’est occupé que de douze corps différens , on voit combien il estinférieur au n.° 1°, relati- vement aux expériences. Cependant l'auteur mérite l’accessit, avec la mention la plus hono- rable; et la société desire qu’il veuille bien se faire connoitre. Il ne restoit plus qu'à énoncer les questions données pour les années suivantes, La première question , pour novembre 1804, a déja été annoncée l’année dernière ; elle a été proposée par la classe historique. La voici : * Cum a vetæribus et recentioribus physicis (inde a sœculo XV°T) multa de meteoris diligenter obser- vata, nec non de eorum natura , causis et legibus ingeniose excogilata et disputata sint ; cumque in his forsitan occurrant ad hodiernam quoque meteorologiam perficiendam utilia , notatu saltem aut severiori examine digna , desiderat societas : Ut historia meteorologiæ accurata et critica, & primis Græcorum et Romanorum in hoc studio conatibus usque ad nostram ætatem , contexatur. Nequaquam autem vult societas , ut afferantur a certantibus quœvis opinionum de meteoris com menta apud veteres et recentiores scriptores ob- via , ab ignorantia aut a vana superstitione pro fecta, quibus ne frustra obruatur commentatio et tœdium moveatur legentibus sollicite cavendum est. Optat illa potius ut tum ex vererum meteorologo- G 3 102 Nouvelles littéraires. | rum, Aristotelis, autoris meteorologiæ inter vex teres principis, Theophrasti, Plinii, Sénecæ at+ que etiam Ptolemæi, tum ex physicorum recentio- rum sæc. XVI et XVII, prœsertim Bernardini Tilesii, Fr. Patricii, Jordani Brunit, Baconis de Verulamio , Jo. Kepleri, Gassendii, Cartesii, et aliorum , scriptis huc spectantibus colligantur , explicentur et dijudicentur graviores eorum de re- bus meteorologicis sententiæ , quas cognitas et per- spectas habere nostræ quoque œtatis meteorologis interfuerit ; ut describantur breviter , aut verbo in- dicentur observationum meteorologicarum modi , rationes et instramenta , adnotato simul climate. Potest quoque ‘inquiri unde orta sit persuasia olim vigens quæ tam altas radices egit , de plane- tarum in meteora influxu; ut definiatur denique generatim et succincte quatenus nostris tempori= bus ope perfectioris physices , astronomiæ et che- miœ meteorologia vero propius accesserie. La classe physique a proposé cette fois , pour le mois de novembre 1805 ; la question sui-. vante : Quum physiologi de vasculaso vegetabilium contextu diversa prorsus statuant, aliis, iisque antiquioribus , illum adserentibus , recentioribus contra in alia omnia eruentibus ; novis experi- mentis, ope microscopii compositi Curate insti- tuendis , elici probarique cupit societas : Utrüm om- nimo a Malpighiis, Grewii, Duhamelii, Mustelir, Hedwigii observationibus ac placitis standum sit ; an vegetabilium natura ab animali fabrica prorr Nouvelles littéraires. 103 sus differat , omninoque vel fibrarum fibrillarum- que, quæ mentor est sententia, vel cellularum ac subulorum (tissu tubulaire) contextu ac structura contineatur. En répondant à cette question, la société demande que l’on ait aussi égard aux questions subordonnées qui suivent : (A) Combien de sor- tes de vaisseaux peut-on reconnoître avec certi« tude , depuis la première période de leur déve- loppement ? (B) Ces fibres contournées, que l’on nomme vaisseaux enspirale (vasa spiralia), sont. elles creuses elles-mêmes , et forment-elles ainsi des vaisseaux ; ou bien servent-elles , par le moyen de leurs spirales, à former des canaux particuliers , et comment? (C) Les fluides , ainsi que les espèces de gaz, se meuvent-ils dans ces canaux? (D) Est-ce de l’endurcissement de ces fibres contournées , que proviennent les con- duits ascendans (treppengænge;), comme le pense M. Sprengel, ou celles-ci proviennent-elles des derniers , comme le dit M. Mirbel. L'aubier et les fibres ligneuses proviennent-elles des conduits ascendans, ou bien de vaisseaux originairement propres , ou des tissus tubulaires ? Le prix de ces questions est de cinquante ducats ; et le terme , pour l’envoi des mémoires, est la fin de septembre 1805. Les questions économiques sont : Pour juillet 1804, | Quelles sont les raisons pour ou contre la G 4 104 Nouvelles littéraires. défense de l'exportation de l'argent comptant, et dans quelle circonstance cette défense est-elle utile ? Pour novembre 1804, La meilleure description et caractéristique des espèces et variétés de choux (brassicæ Linnœæi) que l’on cultive en Europe, avec leurs noms dans les différentes langues européennes. Pour juillet 1805, La meilleure histoire de l'administration des biens domaniaux, en Allemagne, depuis les temps anciens jusqu'à nos jours. _ Le prix de chacune de ces questions est de douze ducats ; les mémoires en réponse aux questions , pour le mois de juillet, doivent être envoyés en mai; et ceux pour le mois de novem- bre, en septembre de cette année. JCPA'LAHE. Académie nationale des Beaux - Arts de Bologne. ExTrA1T des Programmes pour les Acadé- mies de Peinture , Sculpture, Architec- ture, Dessin, Gravure et Ornemens. PEINTURE. L. Q. Cincinnatus quitte la charrue pour prendre la dictature. ( V’oy. Tite-Live , dec. 1, div. 3). Nouvelles littéraires. 109 Le prix sera une médaille d’or de la valeur de 120 sequins. SCULPTURE EN BAS-RELIEF. Ersilie , femme de Romulus , prie son mari, qui revient vainqueur des Antemnates, de par- donner aux époux des Sabines enlevées. ( Yoy. Tite-Live , dec.'1 ,liv. 1). Le prix sera une médaille d’or de la valeur de 40 sequins. ARCHITECTURE. Un hôpital pour une grande ville. Il doit ren- fermer toutes les commodités et usines néces- ‘saires ; une grande chapelle dans le centre commun de toutes les salles; salle de bains pour les différentes espèces de maladies; de plus, le local propre à l'établissement des cours d'ins- truction , et une pharmacie publique. Le prix sera une médaille d’or de la valeur de trente sequins. GRAVURES. La gravure d’un tableau d'auteur classique, qui n'a pas été gravé , ou qui l'ait été mé- diocrement, contenant au moins une figure entière , ou plusieurs demi-figures. Le prix sera une médaille d’or de la valeur de trente sequins. DESSINS D’ORNEMENS. Les meubles pour garnir la chambre d’un 106 Nouvelles littéraires. premier magistrat, avec les détails sur chaque feuille séparée. Le prix sera une médaille d’or de la valeur de vingt sequins. Mètres. Hauteur du tableau , environ.. . . . . 1,624 Largeur ,environ.: . LL. .):214,09,279 Hauteur du bas-relief, environ. . . . 0,646 Lurseur environ. 22104. 00008 Dessin d'architecture. Une feuille ëm- périale , d'une seule pièce ; les détails sur autant de feuilles séparées. Dessin de figure. Hauteur, au plus. . 048 Gravure. Un côté environ. . . . . . « 031 Ornemens. Autant de feuilles séparées qu'il plaira au concurrent, de la dimen- sion de la feuille commune royale. RÉGLEMENTS. 4 Les ouvrages seront remis au secrétaire de l’Académie par un fondé de pouvoir, avant la fin d'avril 1805. Passé ce terme , nul autre ouvrage ne sera reçu. Chaque ouvrage aura une épigraphe qui sera répétée extérieurement sur une lettre cachetée, contenant les noms, prénoms, patrie et domi- cile du concurrent, ainsi qu'une description explicative de l'intention de l’auteur. Les descriptions seront passées aux juges : les lettres cachetées seront fidèlement sous la garde du secrétaire. Le jugement prononcé, on ou- | | | | Nouvelles littéraires. 107 vrira celles qui renfermeront le nom des auteurs couronnés. Après le jugement et l'exposition publique des ouvrages présentés, les autres lettres seront remises aux fondés de pouvoir. Une commission spéciale sera chargée de vé- rifier l’état des ouvrages présentés, au cas où, dans le transport , ils auroient été endommagés au point de ne pouvoir être admis au concours. Les jugemens seront confiés à des commis- sions extraordinaires , qui procéderont avec les précautions les plus rigoureuses. Les votes se- ront raisonnés et signés. Avant et après le jugement , les ouvrages des concurrens seront publiquement exposés ; et, afin de ‘procurer aux artistes, tant nationaux qu'étrangers , le moyen de se faire connoitre, : l'exposition de toute production relative aux beaux-arts sera libre. Les ouvrages qui auront remportés les prix seront distingués par une couronne de laurier, et par une inscription qui marquera le nom et la patrie de l’auteur. SICILE. Des fouilles faites en Sicile sous la direction du savant Landolini, ont déja procuré une Vénus et quelques autres antiquités. TURQUIE EUROPÉENNE. On vient de découvrir en Thessalie, sous des ruines, des objets précieux pour les antiquaires; 108 Nouvelles Littéraires. ce sont : N° les bustes d’Aristote et d'Anacréon; 2.9 une statue de Cérès ; 3.0 un monument de seize pieds te de profondeur, avec une monnoie de Lysimaque et quelques co- lonnes de marbre. On a trouvé , en outre, un manuscrit grec contenant un commentaire de Nicéphore sur les antiennes de l’ancienne église grecque. FRANCE. INSTITUT NATIONAL. Prix proposés par la classe des Sciences ma- thématiques et physiques. PRIX DE MATHÉMATIQUES. Donner la théorie des perturbations de la planète Pallas , découverte par M. Olbers. Les géomètres ont donné la théorie des per- turbations avec une étendue et une exactitude suffisantes pour. toutes les planètes anciennes connues, et pour toutes celles qu’on pourra découvrir encore , tant qu’elles seront renfer- mées dans le même zodiaque, et qu’elles n’au- ront qu’une excentricité peu considérable. Mer- cure étoit, jusqu'ànos jours, la plusexcentrique de toutes les planètes, et en même temps celle qui avoit l’inclinaison la plus forte ; mais son peu de masse , et sa position à l'une des limites du système planétaire, la rendent peu propre à Nouvelles littéraires. 109 causer des altérations bien sensibles dans Îles mouvemens des autres planètes. Uranus, dé- couvert il y a vingt-trois ans par M. Herschell , se trouve placé à l’autre limite du système. Avec peu de masse et une excentricité médiocre , il a encore la plus petite de toutes les inclinaisons connues ; en sorte que les formules qui avoient servi pour Jupiter et Saturne, ont été plus que suffisantes pour cette planète moderne. Cérès , découverte il y a quatre ans par M. Piazzi, ayant, avec une excentricité assez considérable, une inclinaison de 10° 38’, doit étre sujette à de fortes et de nombreuses inégalités. IL paroïit cependant que tous les astronomes qui ont tra- vaillé à les déterminer, se sont contentés de formules connues , dont le développement ne passe pas les produits de trois dimensions des inclinaisons et des excentricités. Ceux de cinq dimensions ont été employés dans la mécanique céleste pour un cas particulier , d’après une formule de M. Burckhardt. Le même astronome a présenté depuis à l’Institut national le déve- loppement général et complet des troisième, quatrième et cinquième ordres; mais ce degré de précision ne sufhroit certainement pas pour la planète Pallas, dont l'excentricité est plus forte même que celle de Mercure , et l'inclinai- son de 34° 37", c’est-à-dire, cinq fois plus grande que celle d'aucune autre planète connue. Il est même difficile de conjecturer quelles seront les puissances , et quelles seront les dimensions des 110 Nouvelles lilléraires. produits qu’il sera permis de négliger; et les calculs pourroient étre d’une longueur, et les - formules d’une complication telles qu’elles pourroient effrayer les astronomes le plus. en état d'exécuter un pareil travail. Cette considé- ration a déterminé la classe des sciences mathé- matiques et physiques de l’Institut national de France, à proposer ce sujet pour le prix qu’elle doit distribuer dans sa séance publique du pre- mier lundi de messidor an 14. En conséquence, elle invite les géomètres et les astronomes à dis- cuter complètement toutes les inégalités de cette théorie , et à n’en omettre aucune qui ne soit . reconnue entièrement négligeable. Et, comme ces inégalités pourroient varier assez sensible- ment, si les élémens elliptiques n’étoient pas.en- core assez exactement connus, il est indispensa- ble que les concurrens ne se bornent pas à don- ner les coëfficiens numériques des équations; ils doivent aussi donner les coéfficiens analytiques, afin que l’on puisse y mettre les valeurs: les plus exactes de la distance moyenne , de l’excen- tricité, de l’aphélie et de l’inclinaison , lorsque ces élémens seront mieux connus. Il résultera de ces coëfliciens analytiques. un autre avan- tage : c'est que les planètes Cérès et Pallas étant à des distances du soleil si peu différentes, qu'il est même aujourd'hui très-difficile de dire la- quelle des deux est la plus voisine ou la plus éloignée, la formule donnée pour Pallas pourra, sans beaucoup de changemens , servir aussi Nouvelles littéraires. 111 pour Cérès, ainsi que pour tout autre planète qu’on pourroit découvrir par la suite, et dont on auroit de cette manière une théorie plus complète et plus certaine. La classe espère que la question paroïtra assez intéressante aux as- tronomes , pour qu'ils y donnent des soins pro- portionnés à la difficulté du sujet. Le prix sera une médaille d’or d’un kilogramme. Les ouvrages envoyés au concours devront ètre écrits en français ou en latin, et ne seront reçus que jusqu’au premier germinal an 14: ce terme est de rigueur. PRIX DE PHYSIQUE. La classe avoit proposé pour sujet de prix la question suivante : Déterminer par l'expérience Les différentes sources de carbone des végétaux. Elle proroge le concours jusqu’au premier germinal an 13. La classe propose aussi, jusqu’au premier germinal an 15, le concours du prix sur cette question : « Déterminer par des observations et « des expériences anatomiques et chimiques, « quels sont les phénomènes de l’'engourdisse- « ment que certains animaux, tels que les mar- « motes , les loirs, etc., éprouvent pendant « l'hiver, sous le rapport de la circulation du « sang , de la respiration et de l'irritabilité ; « chercher quelles gont les causes de ce som- « meil, et pourquoi il est propre à ces animaux. » La valeur de ces deux prix est double, et con- 112 Nouvelles littéraires. siste en deux kilogrammes d’or, environ 6800 F, chacun. La classe avoit proposé pour la seconde fois, le 15 germinal an 10 , pour sujet du prix qu’elle devoit décerner dans la séance publique de mes- sidor an 12, la question suivante: «Quels sont les caractères qui distinguent , « dans les matières végétales et animales , celles « qui servent de ferment de celles auxquelles « elles font subir la fermentation ? » Les mémoires envoyés n'ayant pas rempli les conditions du programme , et la classe considé- rant que cette question est au concours depuis quatre ans, elle a arrété que le sujet sera retiré. PRIX D'ASTRONOMIE. L’arrèté du gouvernement , en date du 1% floréal an 10, qui autorise l’Institut national à accepter le don d'un capital de 10,000 fr. offert par le citvyen Lalande porte, art. II, que « con- « formément aux intentions du donateur, le « produit annuel du capital sera employé par « l’Institut à donner chaque année une médaille & d’or du poids que le montant du revenu per- « mettra, ou la valeur de cette médaille , à la « personne qui, en France ou ailleurs, les seuls « membres de l'Institut exceptés, aura fait l'ob- « servation la plus intéressante, ou le mémoire x le plus utile aux progrès de l'astronomie. » Sur le rapport des commissaires qu’elle avoit nommés à cet effet, la classe des sciences ma- thématiques * Nouvelles littéraires. 113 thématiques et physiques de l’Institut national a décerné le prix à M. Joseph Piazzi, professeur . royal d'astronomie, et directeur de l’observa- toire de Palerme , pour l'ouvrage qu'il vient de publier sous ce titre: Prœcipuarum stellarum iner- rantium positiones medicæ , ineunte sœculo XIX, ex observationibus habitis in specula Panormi- tana. Panormi , 1803, 1 vol. ën-fol. Cet ouvrage, qui renferme les positions d’en- viron six mille étoiles déterminées avec le plus grand soin et avec les meilleurs instrumens, est . le fruit de dix années d'observations et de cal- culs assidus, qui doivent assurer à l’auteur l’es- time et la reconnoissance de tous les astrono- mes. C’est en travaillant à ce catalogue que . M. Piazzi a découvert, le premier janvier 1801, la planète à laquelle il a donné le nom de Cérès L'erdinandea ; mais, même avant cette décou- » verte intéressante , il étoit avantageusement cônnu par la publication de deux volumes d’ob- servations, dans lesquels on trouve les fonde- mens de son catalogue, et une longue suite d'observations très-utiles pour la théorie des réfractions. CONDITIONS DU CONCOURS. D Toute personne, à l'exception des membres de l’Institut , est admise à concourir. Aucun ouvrage envoyé au concours ne doit porter le nom de l’auteur, mais seulement une — sentence ou devise; on pourra, si l’on veut, y Tome VI. H 114 Nouvelles littéraires. attacher un billet séparé et cacheté, qui renfer- mera , outre la sentence ou devise, le nom et l'adresse de l’auteur : ce billet ne sera ouvert que dans le cas où la pièce aura remporté le prix. Les ouvrages destinés au concours peuvent être envoyés au secrétariat de l’Institut, en af- franchissant le paquet qui les contiendra : le commis au secrétariat en donnera des récépis- sés. On peut aussi les adresser francs de port au secrétaire actuel de la classe des sciences ma- thématiques et physiques. Les concurrens sont prévenus que l’Institut ne rendra aucun des ouvrages qui auront été envoyés au concours. Les auteurs auront la liberte d’en faire pren- dre des copies, s'ils en ont besoin. La commission administrative de l’Institut délivrera la médaille d’or au porteur de récé- pissé ; et dans le cas où il n’y auroit point de ré- cépissé, la médaille ne sera remise qu’à l’auteur même , ou au porteur de sa procuration. PARIS. La Société d'agriculture établie à Paris, est autorisée à prendre le titre de Société Impériale d'Agriculture. Le nombre de ses membres rési- dans n’excédera pas soixante. Elle pourra, de plus , avoir vingt associés regnicoles , et vingt associés étrangers. Elle choisira parmi ses mem- bres un secrétaire perpétuel, qui sera présenté Nouvelles littéraires. 115 par le ministre de l’intérieur à l'approbation de Sa Majesté Impériale. On vient de nettoyer, par les ordres du Pré- fet du département de la Seine, les belles sculp- turés dé la fontaine de la rue de Grenelle. MM. Quatremère de Quincy, Molinos et Lie- grand , chargés de cette opération, y ont em- ployé le procédé décrit par Vitruve et par Pline, pour passer les sculptures antiques à l’encaus- tique. Ce moyen, qui consiste à boucher tous les pores du marbre par une mixtion d’huile d’œillet et de cire vierge, appliquée à chaud sur le marbre échauffé lui-même , le préserve , dans la suite, de ces taches noires que l'humidité y produit, et qui ne sont autre chose qu'une vé- gétation de lichen, dont les racines s’implan- tent dans les pores du marbre , les écartent à la longue et en corrodent la surface. Le succès de cette première expérience sur des figures d'une grande proportion, a parfai- tement répondu à l'attente du Préfet. Les fi- gures n'ont éprouvé aucune altération par le chauffage du marbre au moyen des réchauds à main faits exprès, et commodes pour communi- quer la chaleur à toutes les parties d’une figure ou d’un groupe, avant de l’enduire de la mix- tion d'huile et de cire; pour répéter ensuite ce chauffage , et faire fondre la couche de cire qui reste figée sur le marbre lorsqu'il est refroidi. H 2 116 Nouvelles littéraires. Une telle opération, faite avec précaution, remplit parfaitement les pores du marbre, et les bouche à une certaine profondeur. On cire ensuite à froid la superficie, et on la frotte avec un linge lin; ce qui achève de former une es- pèce de vernis sur lequel l’eau glisse sans s’arré- ter; et ne permet plus au Zicken de placer ses racines. y Il n’y a point de doute que les figures antiques les plus précieusement exécutées , telles que l'Antinous , l’Apollon et d’autres , n'aient été ainsi polies à la cire; et l’on doit savoir gré au magistrat, au savant antiquaire et aux artistes zélés qui ont concouru , par cette utile expé- rience , à faire parmi nous l'application d’un procédé inusité jusqu'alors, et auquel on de- vra , s’il est généralement adopté, la conserva- tion de nos plus belles sculptures. L Y O N, L'académie des sciences , belles-lettres: et arts de Lyon propose , pour sujet’ du prix à décerner en l’an 13, la question qui suit 4 « Quels sontles moyens qu’un gouvernement peut employer pour faire tourner au profit de l'agriculture , du commerce et des arts, le déve- loppement qu'une grande révolution donne aux idées , et l'énergie qu’elle imprime aux carac- tères ? » Le prix consiste en deux médailles d’or , cha- « cune de la valeur de 300 fr. Les fonds , pour la seconde, seront fournis par M. ÉRIC mem- Nouvelles lutéraires. 117 bre ordinaire de l'académie, négociant de Lyon. Conditions. Ge prix sera décerné dans la séance publique du mois de thermidor prochain. Les mémoires ne seront admis que jusqu’au 15 prairial , £erme de rigueur. Les mémoires seront écrits en français ou en latin. Prix d'encouragement pour les Arts. L’acadé- mie aura encore à distribuer dans sa séance pu- blique de thermidor prochain, des prix d’encou- ragement aux artistes qui auroient inventé quel- que procédé avantageux pour les manufactures lyonnaises ; tels que des moyens pour faire baisser le prix de la main-d'œuvre, pour écono- miser le temps, pour perfectionner la fabrica- tion, pour introduire de nouvelles branches d'industrie , etc. Des prix semblables seront décernés tous les ans.S. À. S.M. Lebrun, archi-trésorier de l’'Em- pire Français, en a fait les fonds à perpétuité. Les artistes qui veulent concourir peuvent s'adresser , dans tous les temps, à M. Roux, se- crétaire, ou à quelqu'un des autres membres de l'Académie. BORDEAUX. Société des sciences , belles-lettres et arts de Bordeaux. La disette des bois se fait sentir de plus en plus chaque jour, non-seulement en France, mais méme dans tout le nord de l'Europe; et les merreins de bois de chène sont aujourd’hui H 3 118 = Nouvelles litéraires. ‘portés à un prix si haut, qu’il n’est plus possible aux propriétaires de vignobles dont les vins sont de qualités inférieures, de les loger dans des tonneaux faits de ce bois. La société a pensé que s’il étoit possible de substituer au chène celui de quelque arbre indigène dans la fabrication des tonneaux, il en résulteroit un avantage réel pour l’agriculture. En conséquence, elle pro- pose pour sujet d’un prix qui sera décerné dans la séance publique du 15 thermidor an 14, la question suivante : Quels seroient les meilleurs bois indigènes qu'on pourroit substituer au chéne pour les douves de merreins ? Le prix sera une médaille d’or de la valeur de 300 fr. La méme société décernera aussi en l'an 14 un prix de la valeur de 600 francs à l’auteur qui aura le mieux traité la question suivante : Quels seroient les moyens de tirer des pins des Landes de la ci-devant province de Guienne un goudron aussi parfaiten qualités que peuvent l’étre les gou- drons du Nord, et particulièrement ceux qui se Jabriquent en Suède ? Les mémoires pour ces deux objets doivent ètre envoyés à la société avant le premier ger- minal de l’an 14. Elle annonce également qu’elle distribuera dans sa séance publique du 15 thermidor de l'an 13, une médaille d'or de la valeur de 500 fr, à l’auteur qui indiquera le moyen Le plus simple et le plus facile de connoïtre et distinguer les douves de merrein susceptibles de communiquer à au vin le goût du füt, et le meilleur procédé à em Nouvelles littéraires. 119 ployer pour enlever entièrement au vin le goût du füt qu'il a contracté dans les tonneaux. _ Conditions.— Les personnes de tous les pays, les membres résidans de la société exceptés, sont admises à concourir. Aucun ouvrage envoyé au concours ne doit porter le nom de l’auteur, mais seulement une sentence : on pourra, si l’on veut, y attacher un billet séparé et cacheté, qui renfermera ; outre la sentence ou devise , le nom et l'adresse de l’auteur. Ce billet ne sera ouvert par la so- ciété que dans le cas où la pièce auroit remporté le prix. Les mémoires doivent être écrits en français ou en latin. Les ouvrages destinés au concours seront adressés francs de port au secrétaire de la so- ciété , hôtel de l’Académie, rue St.-Dominique, n°1, AGE N. La Société d'agriculture , sciences et arts d’A- gen a proposé pour sujet du prix de littérature qu’elle décernera en thermidor prochain, l'éloge historique et critique du savant Jules Scaliger,, _ mort à Agen, sa patrie adoptive. Le prix est une médaille d’or de la valeur de 200 fr. : HYDRAULIQUE. Le bélier hydraulique de M. Mongolher vient d’être exécuté à Schafhouse, par M. le conseil- ler Fischer, d’une manière si ingénieuse qu’elle H 4 120 © Nouvelles littéraires. | est déja regardée comme un perfectionnement! La machine présente la forme d’un autel an- tique du beau style , à-peu-près dans le goùt de l’autel d'AEsculape , retracé par divers antiques. Un bassin, profond d'environ six pouces, et du diamètre de 18 à 20, réunit d’abord l’eau; mais, par un orifice pratiqué dans le fond du bassin, elle pénètre dans des tuyaux de trois pouces de diamètre, qui descendent en spirale dans la base de l'autel. L'eau, par son poids, met en mou- vement une soupape; un tiers à-peu-près s’en échappe, mais le reste, par la pression de la sou- pape, est chassé dans un récipient, et delà se trouve pompé dans des tuyaux étroits. Comme elle ne monte que lentement, la résistance de l'air est peu sensible; de sorte que par le moyen de cette machine agissant continuellement par elle-même, l’eau peut être portée des lacs ou ri- vières jusque dans les habitations situées sur les montagnes. M. le conseiller Fischer a procuré ainsi de l’eau à un château élevé de plusieurs centaines de pieds au-dessus du niveau du Rhin. AMIENS. Economie industrielle. M. Bralle ; d'Amiens, a inventé, pour lerouis- sage du chanvre , un procédé nouveau dont des essais nombreux et variés faits par des hommes célèbres, ont constaté l'utilité ; il consiste à faire chauffer dé l’eau dans un vase, ou routoir, Nouvelles littéraires. 121 à la température de 72 à 75 degrés du thermo- mètre de Réaumur. On y délaie du savon vert, dans la proportion de 1 à 48, comparativement avec le chanvre en baguette. Quant à l’eau, il faut en employer à-peu-près quatorze fois le poids du même chanvre. On plonge le chanvre dans cette eau , de manière qu’elle surnage. On ferme le vase et l’on fait cesser le feu. Deux heures de séjour suflisent au chanvre pour qu'il soit roui. Les avantages de cette méthode sont, 1.° que le rouissage peut se faire dans toutes les saisons ; 2.° qu'il y a économie de temps et même de frais; 3. que la même quantité de chanvre donne une plus grande quantité de filasse; 4.° que cette nouvelle méthode tend à encourager et à éten- dre la culture du chanvre. En effet, il n’y avoit jusqu'ici que les riverains et les habitans des vallées qui s’en occupassent. L’éloignement des ruisseaux , rivières ou étangs, n'y sera plus dé- sormais un obstacle ; et le pays de plaine, dont la terre sera grasse et profonde , en quelque en- droit qu'il soit situé, en devient susceptible. 5°. On pare aux inconvéniens qui résulteroient du rouissage dans les ruisseaux ou étangs, soit par l'infection de l’air au moment du lavage, soit par l’altération des eaux dont les bestiaux pe pouvoient s’abreuver sans danger, et qui se corrompoient quelquefois au point de faire pé- rirles poissons. Le gouvernement, persuadé de l'utilité de 12 Nouvelles littéraires. cette méthode, a souhaité qu’on en répandit la connoissance. OPTIQUE. M. Laquiane a fait plusieurs améliorations à la chambre obscure. Au moyen d'un miroir in- cliné , Le corps soumis aux expériences est telle- ment grossi, qu'une miniature de 16 lignes de hauteur acquiert les dimensions de la figure hu- maine. Un autre appareil met dans leur posi- tion naturelle les objets peints dans une situa- tion renversée. Enfin, « un microscope solaire adapté à la partie supérieure de la chambre obscure, donne la facilité de se servir de cet instrument en plein air, et de le placer dans un lieu découvert, tel qu’une cour, un jardin, etc. » DIJON. Nécrologie. M. Attiret, sculpteur, est mort depuis peu à Dôle, sa patrie, où quelques travaux l’avoient rappelé, à l’âge de quatre-vingts ans. Il étoit le meilleur sculpteur de la ci-devant Bourgogne : tous ses ouvrages sont remarquables par un grand caractère et une exécution savante. Il avoit remporté un prix à l'Académie royale de Paris; et son talent avoit été couronné à l’Aca- démie de Saint-Luc , à Rome. Il avoit été nommé professeur de l’Académie de Saint-Luc , à Paris; et, quelque temps après la suppression de cet établissement, il alla se &xer à Dijon. Ge fut lui qui exécuta en marbre, d'après le modèle de M. Pigal, la statue de Vol- | Nouvelles littéraires. 123 taire , si connue, qui étoit au foyer de la Comé- die Francaise, et qui fut faite par souscription. Cette statue a été placée depuis dans la salle de l'Institut national. M. Attiret a fait, à Dôle , la fontaine publique , décorée de trois figures en pied. On avoit de lui, à Dijon , six statues de sa composition, représentant les quatre Saisons, et Melpomène et Thalie; on lui doit plusieurs autres ouvrages de sculpture très-estimés, TOURS. La Société d'agriculture, arts et commerce du département d’Indre-et-Loire, séant à Tours, propose pour l'an 14, les prix suivans : 1.° Pour ceux qui, ayant fait servir leurs ca- vales par les étalons, auront en l’an 14 les plus beaux poulains, un premier prix de 100 fr., un second de 6o fr., un troisième de 40 fr. 2.° À celui qui, exploitant au moins six hec- tares par tiers, aura employé, dans l’an 13, avec le plus de succès, un tiers de ses terres labou- rables en fourrages propres à alterner la cul- ture, un prix de 200 fr. 3. À celui qui aura planté, dans l'an 13, avec le plus de succès, cent pieds de müûriers blancs , la médaille d’or envoyée par M. Re- gnaud (de Saint-Jean-d’Angely) du poids de 75 grammes. À celui qui aura, avec plus de succès, planté cent pieds d'ormes, 100 fr.; cent pieds de noyer, 100 fr.; cent pieds de châtaignier, 80 fr.; cent pieds de frène, 5o fr.; cent pieds de peuplier d'Italie ou de bouillards, 20 fr, LIVRES DIVERS. BOTANIQUE. Nomexcraron 8oranicus , ou /Vomenclature bota- nique, contenant toutes les plantes du Species plantarum de Charles-Louis Wirrpenow, pu- bliée par le Comte L..-F.-V .Hencxer de Donners- marck, membre de la société des Curieux de la Nature de Halle. À Halle-Magdebourg , chez Hendel, 1803, in-8°. M. le comte de Henckel auroit dû attendre que la nouvelle édition du Species plantarum , par M. Willdenow, fût entièrement imprimée, avant de publier ce catalogue des dix - huit premières classes , dont le nombre des genres se monte à mille trois cent quatre-vingt-dix-huit. Il ne restoit plus à attendre que les six dernières classes qui vont paroitre incessamment ; alors cette nomenclature auroit été complète , en y ajoutant des tables qui contiendroient les noms génériques , spécifiques et triviaux. D'ailleurs, ces tables seront à coup sûr à la fin de ce Species plantarum important ,'ainsi que Gmelin a ter- miné le sien, il y a dix ans. Le catalogue de M. le Comte de Henckel ne peut donc être utile qu’à ceux qui ne pourront acquérir le Species planta- ruuz de Willdenow. Wirremer. MÉDECINE. ; Journarde Médecine,Chirurgie, Pharmacie, ete.; par MM. Convisanr , Leroux ec BOYER, profes- Nouvelles liftéraires. 129 seurs à l'Ecole de médecine de Paris. (Fructidor an x1r.) Tome VIIT. A Paris, chez Migneret , imprimeur, rue du Sépulcre, F.S. G., n.° 283. — An xir. Ce cahier contient : Observations et remar- ques sur uné mort prompte occasionnée par le gaz nitreux; par J. B. Dsscnanérs , docteur en médecine. — Du procédé de l'injectiof pour la cüré radicale de l’hydrocèle ; par M. Varerraun. — Lettre du ministre de l’intérieur au comité de vaccine, à Paris. — Observations météorols- giques faites à Montmorency dans le mois de messidor de l'an 12; par L. Corre. — Constitu- tions météorologique et médicale observées à Lille dans le mois de messidor an 123% par Douiien. — Nouvelles littéraires. Traïré de la proprièté exclusivement $timu- lante de l'opium , contenant de nouvelles idées sur la nature de l'inflammation , des convul- sions, de la veille et di Sommeil, etc.; par J. F. Cnorrer, médecin, l’un des rédacteurs du journal de la Vraie théorie médicale, et au- teur de plusieurs ouvrages sur le système de Brown, Un vol. in-8. Prix, 2 fr. 25 cent. ; er, Jranc de port, 2 fr. 75 c. À Paris, chez Allut, imprimeut-libraire, et propriétaire de l’ou- vrâge, rue St.-Jacques, n.° 611, et rue de l'École de Médecine , n.° 56; et chez Levrault et Schoell, libraires, rue de Seine, hôtel de la Rochefoucault. On attribue assez ordinairement à l'opium des vertusanti-spasmodiques et calmantes. C'est cette erreur que l’auteur discute et détruit dans le petit ouvrage que nous annonçons. Après 126 Livres divers. avoir démontré les effets et les phénomènes de l'opium, l'auteur donne l'analyse des maladies où ce médicament est très-utile ; et termine le chapitre premier en exposant les différens sen- timens de plusieurs médecins anciens et mo- dernes sur les propriétés de l’opium , et les cir- constances dans lesquelles ils en ont prescrit l'usage. Le deuxième chapitre est employé à ré- futer une infinité d’objections plus ou moins spécieuses, qu’il combat avec avantage , et à la suite desquelles se trouve une nouvelle théorie de l'action de la volonté , et des mouvemens mus- culaires soumis à son empire. L'auteur donne dans le troisième chapitre des préceptes sur les diverses manières d'administrer l’opium, etindi- que dans quels cas il doit l’étre. Il ya beaucoup de méthode et de logique dans ce traité, dont la lecture convaincra qu’effectivement l’opium est exclusivement incitatif, et qu’il est un des plus forts stimulans que la médecine puisse em- ployer. ANATOMIE. Rarponr sur les travaux exécutés à l'amphithéätre d'anatomie de l'Ecole de Médecine de Stras- bourse , pendant le premier semestre de lan 12 : présenté à l'assemblée des professeurs de cette école, par M. J. F. Lossren, D. M. , chef des travaux anatomiques , etc. ; imprimé par Ordre de l'Ecole. Strasbourg, chez Levrault. An 12, 1804. Ce rapport est divisé en deux parties. La pre- mière contient des observations anatomiques extrêmement intéressantes sur les os, les mus- cles, le cœur, les vaisseaux, les nerfs, enfinsur les membranes et les viscères. Beaucoup de ces Livres divers. 127 observations.sont neuves et particulières à l’au- teur, dont nous avons déja fait connoître des dissertations importantes. La seconde partie de ce rapport offre l’'énumération de vingt-neuf ièces d'anatomie conservées au cabinet de l'école. ÉCONOMIE RURALE. MEmorre sur la culture et les avantages du Chou- Naver de Laponie , Ruta-Baga, ou NVavet de Suède ; avec des Considérations générales sur la culture des terres et des prairies , sur les four- -rages ; etc. ; par M. Sonninr pe Manoncour, ancien officier et ingénieur de la marine , alors correspondant du cabinet du roi, et de la société royale d'agriculture de Paris ; l’un des vin titulaires de l'académie des Sciences et Belles- Lettres, fondée en Lorraine par Stanislas-le- Bienfaisant ,'etc., etc. In-12. de 100 pages, Prix , 1 fr. broch., et 1 fr. 25 cent. franc de port par la poste. À Paris, chez }, Buisson, li- braire , rue Hautefeuille , n. 20. M. Sonnini est le premier qui ait traité parti- culièrement du Chou - Navet de Laponie , et qui l'ait cultivé en grand : ilen parle avec une sorte de complaisance. Après avoir indiqué son ori- gine , fl démontre les différences essentielles qui se trouvent entre son espèce et toute autre variété ; il prend de là occasion de relever les erreurs de ceux qui ont mal-à-propos confondu cette plante, soit avec le Chou-rave ou Chou de Siam , soit avec le 7urnep ou Racine de disette , soit enfin avec le Choux -Navet commun. Il fait observer, de plus, qu'aucun auteur n’en a parlé d'une manière un peu étendue, et que l’an- 128 Livres divers. cienné Encyclopédie même ne fait que l'indi- quer. Le Chou-Navet de Laponie a , sur toutes les autres variétés, des propriétés singulières qui devroient en propager la culture : il ré- siste aux frimäs , aux gelées les plus fortes, et végète même sous la neige et la glace. Un autre avantage non moins précieux, c'est que, des semences nombreuses qu’il porte , on tire une huile de très-bonne qualité. Quant à la ma- nière de cultiver le Chou-INavet de Laponie , M. Sonnini entre dans de grands détails, et dé- veloppe, avec beaucoup de lucidité, les procé- dés qu’il a employés depuis nombre d'années avec succès. On lui doit de la reconnoissance d’avoir publié de nouveau un Mémoire sur une plante extrêmement utile, et qui devroit être plus répandue en France. Ce livre est nécessaire aux fermiers et aux habitans de la campagne, que M. Sonnini a eu sur-tout en vue, et pour lesquels il a spécialement écrit. CHRONOLOGIE. TABLEAU synchronique des principaux événemens de l'Histoire ancienne et moderne, par ordre de siècles , avant et après l'ère vulgaire. In-fol. Jésus ; avec une explication. In-8.° broch. ; par M. Mexrezce, de l'Institut national. Prix , 2 f. et2 f. 5o cent. franc de port. A Paris, chez Bernard , libraire , quai des Augustins, n. 31. On trouvée chez le même libraire , le Cours complet de géographie, par Mentelle, deuxième édition , 4 vol. in-8.° avec atlas ; prix, 50 fr. ; et la Géographie de la France, par le même, la- quelle se vend séparément , avec sa carte com- parative enluminée ; prix , 7 fr. pour Paris. GEOGRAPHIE, Livres divers: 130 GÉOGRAPHIE. La Géocrapnre des enfans, ou le Petit Voyageur } méthode nouvelle pour apprendre la géographie, directement fondée sur l'inspection des cartes, et applicable à un système de jeux qui est de- venu fort en vogue en Angleterre; avec un ta- bleau pour deviner un endroit pensé par un au- tre : nouvelle édition ; par M. MonrRin, ins- tituteur. In-8.° Prix, 1 fr. So cent. A Paris, chez Laurens jeune , imprimeur-libraire, rueSt.-Jacques , n.° 32. — An XIIL, 1804. En général, il n’est pas de livre élémentaire qui n'ait un côté utile. Celui-ci nous a paru con- tenir une méthode simple, facile, et tout-à-fait convenable à l’âge auquel il est destiné. Ce qui prouve d'ailleurs en faveur de ce petit ouvrage, c'est qu il est à sa seconde ou troisième édition. HISTOIRE: Züge zu einem Gemcæhlde von Moskwa, in Hin- sicht auf Klima , Cultur, Sitten, Lebensart, Gebrœuche , vorzüglich aber statistische , physische und medicinische Verhæltnisse ; von Engelbert Wicnecnausen, Doctor und Pro- Jessor der Arzneikunde. Berlin, bei Johann Daniel Sander, 1803.=— Æsquisse d'un tableau de Moscow, par rapport au climat, à la culture, aux mœurs, à la maniere de vivre, aux costumes, mais principalementpar rapporta la statistique, physique et à la médecine ; par Engelbert Wr- GHELHAUSEN. Berlin, 1803, in-8. Parmi toutes les nations du Nord, les Russes . ; É Ajn fixent aujourd’hui les regards de toute l'Europe. Tome FI. I 130 - Livres divers. Les ténèbres qui régnoient autrefois dans ce vaste empire se dissipent, et plus on avoit exa- géré sa barbarie, plus on est étonné de ses pro- grès dans la civilisation. Les ouvrages qui ont aru depuis peu sur cette partie intéressante de PEone sont en si grand nombre, qu'il seroit difficile de les citer tous. Beaucoup d'auteurs français , anglais et allemands se sont em- pressés à l'envi de nous faire connoître ce vaste empire. L'ouvrage dont nous nous occupons est digne, sous bien des rapports, de l'attention du public. M. Wichelhausen dit, dans sa préface, que ces feuilles ne sont que des fragmens d’une topographie medico - physicale sur Moscow ; « comme elles offrent, dit-il , des objets qui ne semblent pas être tout-à-fait dénués d’intérét, j'ai cru devoir les publier. » Après avoir parlé, dans les premiers articles , de la topographie de cette ancienne capitale de la Russie, il continue à nous donner un aperçu rapide, mais concis, des mœurs de ses habitans : cette partie est, sans contredit, la plus intéressante de son ou- vrage; ses observations sont justes ; les détails u’il donne de la vie privée des grands et des nobles de cette ville semblent ètre un peu minu- tieux , mais ne laissent cependant pas d’'inté- resser. Ce que l’auteur dit de l'habillement. et des modes de Moscow mérite d’être rapporté. « Les Russes, dit-il, ont gardé en partie leur costume national qui semble être d’une origine orientale. Cette mode, qui consiste dans une longue robe, loin d’ètre embarrassante, leur sied très-bien ; et on doit regretter que les grands s’en soient défait pour languir dans les fers d’une mode tyrannique. » Il faut convenir cependant que l'introduction des nouvelles mo- des a souffert bien des difficultés: au commen- Livres divers. 121 cernent du dix-septième siècle on détestoit en: &ore les modes anglaises et françaises, et tout voyageur qui s’y montroit, se trouvoit exposé à la risée publique : pour remédier à ce mal , les étrangers furent forcés de quitter leur costume pour celui des Russes ; mais bientôt ceux-ci sentirent le ridicule de leur conduite , et les étrangers purent jouir comme autrefois de leurs privilèges. Un événe- ment imprévu cpntribua encore à accélérer leur résolution. Le passage rapporté ici par notre auteur , et qui est tiré d’un ouvrage de M. Mr:- xERSs, nous semble trop curieux pour ne pas être mis sous les yeux du lecteur : il confirme, au reste ;ce qu'on vient d'exposer. « Les étrangers perdirent la liberté de prendre le costume russe, à Moscow , peu avant l’arrivée de M. Oléarius, en voici la cause : Pendant une procession so- lennelle, le patriarche donna la bénédiction au peuple ; tout le peuple se prosterna, mettant les mains en croix, d'après la manière accoutu- mée : les étrangers qui se trouvèrent dans la foule ne firent ni l’un ni l’autre : ce manque de vénération pour les cérémonies religieuses courrouça à un tel point le patriarche, qu’il dé- fendit avec beaucoup d’aigreur , à l'instant même, à tous les étrangers de porter le costume russe. Cette interdiction donna lien aux scènes les plus bizarres du monde : Ceux qui ne trouvoient pas des tailleurs assez habiles à Moscow pour pouvoir leur faire des habits à leur goût, se virent réduits à la nécessité ou de mettre les vieux habits qu'ils avoient apportés dans cette ville, ou de mettre des vêtemens d'une forme encore plus vieille et plus grotes- que , dont les Russes avoient en quelque sorte hérité de leurs aïeux dans la Livonie, et qu'ils 2 132 Livres divers. vénéroient comme de véritables antiques. H n'est pas difficile de concevoir l'embarras des étrangers, qui n’étoient pas peu nombreux: quoi qu'il en soit, il fallut bien qu'ils parussent en ‘public, et même à la cour, avec leurs habits su- rannés. »\ M. Wichelhausen attribue plusieurs des mala- dies qui règnent à Moscow , dans la classe supé- rieure de ses habitans, aux nouveaux usages ; il leur reproche l’inaction et lagvie voluptueuse qu'ils mènent, comme autant de causes des maux dont ils se voient affligés. Ce que l’auteur dit sur le caractère physique des habitans de Moscow , mérite encore d’être rapporté. « Quoi- « qu'il soit ordinairement facile de discerner « par la forme extérieure le Russe d'avec les « autrés européens , cependant il est assez diffi- « cile de désigner les principaux caractères de la « physionomie nationale, parce qu'en général « les traits distinctifs sont rares. Voici au reste « les plus communs : une petite bouche, des « lèvres épaisses, de petits yeux ordinairement « gris bleus, ou d’un brun clair ; la forme du nez « varie beaucoup, maisil est fréquemment épais « et retroussé ; les oreilles sont plates et comme collées sur la peau : ils ont la barbe ordinaire- « ment touffue, les cheveux de toutes les teintes, « longs et épais ; leur teint n’est pas tout-à-fait « blanc; il tient un peu du brun clair : l’expres- « sion de leur hgure est la gravité ou la saga- « cité. » L'auteur ajoute que les Russes ont dans le port et les gestes une vivacité étonnante , qui | les rapproche des Français plus qu'aucune autre nation du nord ; et qu’on trouve même chez les plus simples paysans une grande complaisance et des manières engageantes. « Les mêmes traits, dit encore notre auteur, Livres divers. KE « se trouvent aussi dans le sexe féminin, la « taille est svelte et très-bien prise, et il est « très-rare de trouver des femmes mal faites :- «elles ontles yeux grands et expressifs ; on aper- « çoit beaucoup parmi elles de belles joues cou- « leur de rose, et nulle part le rouge ne com- « pose une partie aussi essentielle de la toilette, « mème parmi les femmes de la plus basse extrac- « tion. » L'auteur gémit sur les maux causés par la féo- dalité et sur la cruauté que les maïtres exercent encore aujourd'hui envers leurs subordonnés. Il espère que le gouvernement sentira enfin le besoin d’abolir un système si contraire à l’huma- nité, et profitera des lecons de ses voisins pour adoucir et améliorer le sort des vassaux. Il ne seroit pas convenable de juger avec sé- vérité un ouvrage auquel l’auteur lui-même « donné le titre modeste de Fragmens: il contient des détails intéressans et curieux ; mais nous lui reprocherons une certaine sécheresse de style qui fatigue le lecteur, et nuit à l’intérèt du récit. EST. > COMMERCE. Méruope simplifiée de la tenue des livres en partie simple et double, par laquelle le journal et le grand-livre se balancent mutuellement, et les Livres les plus volumineux peuvent étre rapportés et balancés tous les jours, sans qu’il soit pos- sible de ne pas decouvrir l'erreur la plus légère : méthode expéditive , sûre et facile’, remédiant à tous les défauts des méthodes en usage, appli- cable à toute espèce de commerce, adoptée par la banque d'Angleterre, et pour laquelle l'au- teur a obtenu un brevet d'invention ; traduite 13 f 134 Livres divers. de l'anglais de E. T. Jones, avec des tableauæ adaptés au nouveau style, pour modèles dx journal et du grand-livre en partie simple et double , d'un état d'entrée et de sortie des mar- chandises, et d'un compte de caïsse. Seconde “édition , revue, corrigée avec soin et augmentée ; par J. GXX*%, Prix, 5 fr., et 4 f. franc de port. A Paris , chez E. Johanneau, libraire, palais du Tribunat, première galerie de bois, n.° 256; et chez madame veuve Duffaux, li- braire, rue du Coq-Honoré, n.° 134. —An XII, 1804. Nota. On trouve aux mêmes adresses des livres rayés selon cette méthode sur carré fin, in-fol., aux prix suivans, savoir : reliés, journal de 200 feuilles , 8 fr.; de 300 f. 12 fr.; de 400 F., 18 fr.; grand-livre de 200 f., 10 fr.; de 300 f., 14 fr.; de 400 F. , 20 fr. ; brochés, pour les élèves qui veulent s'exercer , le journal de 100 feuill. , 2 fr. ; le grand-livre de 100 f., 3 fr.; les mêmes livres, soit reliés , soit brochés, réglés entravers, 6o centimes de plus par 100 feuilles. JURISPRUDENCE: Pran du Dictionnaire universel et raisonné du droit ancien et nouveau, et des principes pro- Jessés à l'Université de jurisprudence et à l'A cadémie de législation. Cétouvrageimmense, entrepris par une société nombreuse de jurisconsultes et de publicistes , est presque achevé. Quoique rédigé avec conci- sion, il formera huit volumes #7-4.° ; maïs il contiendra des remarques indispensables sur les lois qui n’ont plus d'application parmi nous. Les Livres divers. 13 anciens dictionnaires et les répertoires de juris- prudence, considérés sous le rapport des abro- gations, ont trop d’étendue, ou en ont trop peu relativement aux règles qu'il a fallu ou adapter à nos mœurs, ou modifier suivant la révolution qu'elles ont subie. Le Dictionnaire universel offrira le double avantage d’être historique, quant à la partie du droit incompatible avec le code, et d'instruire d’une manière précise sur tous les points de la législation appropriée au nouveau peuple fran- çais. Il indiquera encore les jugemens capables de faire cesser les doutes sur quelques dispositions, ou trop générales , ou trop peu développées ; et par le rapprochement des textes et des déci- ‘sions souveraines, il fera éviter ces longs com- mentaires souvent nuisibles au sens de la loi, dont cependant les commentateurs veulent ai- der la lettre. On souscrit chez Desenne, libraire, palais du TFribunat. Le prix total de la souscription est de 100 liv. Elle ne sera réalisée dans la caisse de l'éditeur qu'après la livraison de chaque volume, et dans la proportion du prix. GRAMMAIRE: ManuEz Larin, ou Choix de compositions fran- çaises , et Recueil de Fables et Histoires latines ; le premier, pour préparer à la traduction des auteurs latins ; le second , pour faciliter l'intelli- gence des écrivains du siècle d' Auguste : l'un et l'autre contenant un vocabulaire ; par J. E. J. F, Boinvirziers , correspondant de l'Institut national de France, des Académies de Rouen , I 4 136 Livres divers. d'Amiens , d'Abbeville, etc. Quatrième éditions Tous les devoirs français que renferme cet ou- vrage, dont la publication à été retardée bien involontairement ; coincident en tout point avec les règles de la syntaxe contenues et développées dans la Grammaire latine du méme auteur. Ces deux ouvrages classiques et généralement adop- tés ne subiront plus de changemens. Il n'y @ d'éditions avoñées par M, Boinvilliers , que celles dont les exemplaires sont signés de lui , à la main. Paris, chez Hocquart, rue de l'Epe- ron, n.° 1; Barbou, rue des Mathurins; à Rouen, chez Delalain. Prix, 2 francs 40 cent., cartonné. De tous les livres élémentaires destinés aux écoles, celui-ci nous a paru le plus méthodique et le plus facile pour les commencans. Le plan en est conséquent et naturel. Cet ouvrage se compose de deux parties : la première consiste en un choix de compositions françaises , par la traduction desquelles les élèves doivent se fami- liariser avec les règles de la grammaire latine; : la seconde offre un recueil de fables et de pe- tites histoires latines, divisé en quatre livres. Dans les deux parties, terminées chacune par un vocabulaire , les sujets de leçons et de tra- duction sont graduellement proportionnés aux progrès et aux forces des jeunes étudians. 4 v Livres divers. - 137 LITTÉRATURE GRECQUE: De Papyris seu valuminibus Grœcis Hérculanen- sibus Commentatio Christoph. ‘Theoph. Dg Mure : accedit Nicolailenarr4e Explicatio la« mellæ æneæ exsecrationis repertæ prope Peti- liam : subjungitur Specimen scripturæ græcæ cursivæ Sœc. Il, vel III. Arsvntorati, tyris F. G. Levrault. An x11, 1804 ; 59 pages in-8.0 ayec deux gravures. (l Les dix-sept cents rouleaux de Papyrus, trou- vés , il y a maintenant plus de cinquante ans , à Herculanum, ont toujours été un objet de l’at- tention du public , sur-tout depuis que la France peut se flatter de posséder une petite par- tie de ce précieux dépôt, dont le roi de Sicile lui fit présent en 1804. On s’est occupé depuis long- temps , à Naples, à dérouler quelques-uns de ces volumes; mais ce travail , dont on connoît assez les grandes difficultés, n’a jamais beau- coup avancé ; et un ouvrage copié et expliqué en 1794, par M. Piaget, savant napolitain , qui y étoit employé par son gouvernement, n’a été donné à l'impression que trente-neuf ans après (en 1793), où il parut sous ce titre : /{/ercula- nensium voluminum quœ supersunt, 10mus pri- mus. Neapoli, 1793: Ex regiä typographié , fol. cum 39. tabulis œneis, delineatis ab Antonio Praccio et G. B. Mazescr , et æri incisis ab Antonio Lentari, Bartolomeo Oratii, Josepho Aloja , et Januario Casanova. Pagin. 180 , pr'æf. 21, ol. maj. On y avoit trouvé un ouvrage de Philodème, philosophe épicurien, contem- orain de Cicéron , et poète, dont plusieurs Épigrammes se sont conservées dans l’Antholo- LS 138 Livres divers. gie grecque. Il tâche , suivant les principes de son école , de démontrer dans son Traité, que la musique est nuisible à l'état , et qu’elle pro- duit sur l’ame et sur le corps une impression fu- - peste. Quoique, comme on voit par-là , l'ouvrage de Philodème ne puisse guère consister qu’en lieux communs et en raisonnemens vagues, il ne laisse cependant pas d’avoir un certain inté- rét, quand il cite les opinions des philosophes antérieurs à lui pour appuyer la sienne ; ou quand il combat ses adversaires , Diogène de Babylone, Persée , et autres, parce qu'alors il nous apprend un grand nombre de faits que nous ignorions avant lui. M. de Murr, à Nuremberg, connu depuis longtemps comme rédacteur d’un journal sur l'histoire des arts et de la littérature , et par une traduction abrégée des Antiquités d'Hercu- lanum , a donné, dans l'ouvrage dont il s’agit ici, un extrait de cette grande édition napoli- taine de Philodème, qui étoit peu connue et peu répandue dans le commerce. On y trouve d’a- bord une introduction historique , dans laquelle M. de Murr parle des travaux que la cour de Na- ples ft entreprendre pour cet objet, et qui nous apprend que jusqu’à l'an 1761 , il yavoit quatre volumes déroulés ; savoir : le quatrième livre de Philodème sur la musique, qui est maintenant publié ; le second livre de la Rhétorique du mème auteur ; un ouvrage de Métrodore sur les lettres ; et un autre encore de Philodème sur les vices, et les vertus qui leur ressemblent. Après avoir interrompu le déroulement d’un cin- quième ouvrage attribué à ?hantias ,on a rempla- cé celui-ci par un sixième , dont on s'occupe de- puis 1761, mais dont le public ne connoît pas encore ni l’arsument, ni l’auteur. M. de Murr Livres divers. 199 donne ensuite une courte notice sur la vie et les écrits de Philodème , et fait l'analyse de l’ou- vrage publié par M. Piagei: il nous montre , sur deux planches, l’échantillon de l'écriture de ce rouleau, du plus ancien manuscrit, sans doute, qui soit parvenu jusqu'à nos jours : chaque planche estsuivie de l'explication et des notes de M. Rosini, auxquelles M. de Murr a ajouté plu- sieurs observations savantes et judicieuses. En général, nous pouvons recommander cet ou- vrage, peu volumineux, à tous ceux qui vou- droient avoir une idée juste de l’état de ces li- vres échappés à la destruction d'une manière si singulière, et des travaux importans qu'il fau- droit entreprendre pour en tirer parti. A cette dissertation, M. de Murr en a joint deux autres, dont la première est tirée de l'ouvrage de M. JZenarra, intitulé: Commentarius de Phra- ris , prühis Grœcorum politicis societatibus. Neapoli , 1797, 4 : elle concerne une inscription sur une plaque de bronze trouvée près de Poli- castro , dans le royaume de Naples, et qui a exercé la sagacité des plus habiles antiquaires de l'Europe, tels que MM. Barthélemi , de Vil- loison , Lanzi et autres. Le dernier de ses com- mentateurs , M. Heeren, actuellement profes- seur à Gœttingue , avoit cru y trouver un con- trat d'hospitalité , rédigé entre deux habitans de la grande Grèce, dans un temps très-ancien : M. Ignarra, au contraire, y voit un décret qui punit d’exil un criminel , et qui menace de la colère des Dieux celui qui oseroit lui donner un asyle. Si les savans qui ont déja décrit ce monu- ment, ont donné des explications qui se recom- mandent par leur simplicité , celle de M. Ignarra nous a paru du moins très-ingénieuse. La seconde dissertation est de M. de Murr lui- 140 Livres divers. | même ; elle fait comme suite à un de ses nom breux ouvrages , qui, sous le titre Specimina antiquissima Scripluræ græcæ tenuioris seu cur- Swæ, ante Imp. Titi V’espaviani tempora. No- rimbergæ , 1792, fol., expliquoit quelques ins- criptions en lettres cursives assez semblables à celles dont nous nous servons maintenant , et que l’on voit à Herculanum dans la colonnade d'un bâtiment qui servoit autrefois de caserne aux troupes. Le cardinal Borgia possédoit, dans son muséum à Velletri, un morceau de papyrus , qui avoit été trouvé en 1758, en AEgvypte, près de Gise, dans un coffre de bois de sycomore ; il échappa , par un hasard extraordi- naire , aux mains des Turcs, qui brülèrent qua- rante ou cinquante rouleaux semblables , et trouvés au même endroit, Ce fragment, écrit en grec et d'une espèce d'écriture cursive , content là liste des ouvriers qui étoient em: ployés pour construire et pour réparer les di- gues du Nil. M. Schow, savant danois, ayant vu ce morceau pendant son séjour en Italie, en donna une description exacte dans un ouvrage intitulé : Charta papyracea grœcè scri pta musei Porgiani Velitris, qué series incolarum Prole- maidis Arsinoiticæ in aggeribus et fossis operan- tium exhibetur; Romcæ, 1788, in-4.; et M. de Murr termine ses trois dissertations par l’histoire de ce monument, et par un extrait qu'il donne de l'ouvrage de M. Schow. Ces dissertations se- ront d’une grande utilité à ceux qui s'occupent de la critique en général, et de la palæogra- phie grecque en particulier ; elles donnent à leur savant et infatigable éditeur de nouveaux titres à la reconnoissance des gens de lettres. Has, Livres divers. i4i ANTIQUITES: Cnorx de Costumes civils et militaires des peuples de l'antiquité , leurs instrumens de musique, leurs meubles et les décorations intérieures de leurs maisons, d'après les monumens antiques ; avec un texte tiré des anciens auteurs , dessiné , gravé et rédigé par N. X. Wirrèmin : 16.e et 17.e livraisons (1). La première de ces deux livraisons contient divers instrumens de musique, des lampes et trépieds , des représentations de repas grecs, des vases à boire et autres , plusieurs ustensiles de table , des anses de vases inédits, trouvées à Herculanum. — La seconde, outre quelques vases à boire des Crecs, d’une forme ‘et d’un travail élégans , offre un beau candelabre grec inédit, des ornemens , des mosaïques et quel- ques meubles grecs, tels que siéges , oreillers , tablettes , encriers , styles, plumes, et enfin des volumes ou rouleaux grecs. Chaque livraison est accompagnée d'une feuille de texte. Nous ne pouvons que confirmer ici les éloges que nous avous déja donnés à M. Willemin sur le choix de ses modèles , sur l'exactitude et la cor- rection du dessin , en un mot, sur l'utilité de son ouvrage. (x) Cet ouvrage, petit in-folio , composé de cent cinquante planches environ , est divisé en trois parties: il traite des habi- tans de l’Afrique et de l'Europe, en commencantparles Ægyp- tiens , eten finissant par les Français. T1 paroït tous les deux mois une livraison de six planches, imprimées sur papier grand-raisin vélin, de Buga, caractères de Didot, dont Le prix est de neuf francs, Il en aété tiré un petit nombre d’exemplaires avant la lettre, sur papier grand-lys ,superfin vélin. On souscrit à Paris, chez l’auteur , seul propriétaire de l’ou- vrage, rue de Seine, hôtel de la Rochefoucault, faubourg Saint-Germain. 142 Livres divers. Les MonuMexs antiques du Musée Napoléon ; gravés par Thom. Prnozr, avec une explication par Louis Petit-Radel ; publiés par F. et P. Pr- RANESsI, frères, etc. IVe et F7. livraisons. — Juillet , ao&s 1804. - La première de ces deux livraisons contient Melpomène, restaurée en Junon.— Melpomène. — Terpsychore. =Erato. — Polymnie. — Ura nie. — Üranie assise.— Calliope. — Buste d’une Muse. — L’Espérance. La seconde offre éga- lement dix sujets, qui sont : Statue de Mnémo- syne.— Le Sommeil. —- Hermès dé la tragédie. — Hermès de la comédie. — Buste du Soleil. — Statue d’AEsculape. — Buste d’AEsculape. — Groupe d’AEsculape et de Télesphore. — Bas- relief représentant AEsculape et Hygiée.— Sta- tue d'Hygiée. Le texte de la cinquième livraison est rédigé, et le reste le sera désormais par M. Petit-Radel, M. Schweighaeuser ayant, sui- vant l'avis des éditeurs , terminé sa part du tra- vail dont il s’étoit chargé. Ceux-ci espèrent avec raison que quelque regret que laisse la retraite de M. J.-G. Schweighacuser , on ne verra pas sans ‘un nouvel intérêt un nom connu dans les lettres et les arts, s'associer, pour la perfection de ce même travail , à celui de M. F'iscontt, qui veut bien toujours en garder la direction. M. Louis Petit-Radel est le même dont nous avons inséré dans le volume précédent de ce journal, p. 446, des Æclaircissemens en forme de mémoire, sur les constructions de plusieurs monumens militaires de l'antiquité. Anriquirés d’'Herculanum gravées par Tu. Pi- nou , et publiées par F. et P. Prmanest, frères. acre , 2e, 3. et 4e livraisons. À Paris, chez Piranesi, frères, place du Tribunat, n.° 1354. — Leblanc, imprimeur-libraire, place et mai- Livres divers. 143 son abbatiale St.-Germain-des-Prés, n. 1121; an x1— 1804. Ces livraisons sont les quatre premières du re- cueil des Antiquités d’Herculanum dont nous avons donné récemment le prospectus. Chacune contient douze gravures, où, en général, la grâce, l'esprit et le sentiment des produc- tions originales nous paroissent exactement con- servés. Le texte ajouté à l'édition romaine n’étoit qu’un extrait de celui des académiciens d'Her- culanum ; ici, on a profité des avantages que le temps fournit pour l'explication des antiques, et l’on a en conséquence inséré dans le texte quelques opinions qui ont paru préférables aux premières. On a également réformé quelques équivoques qui s’étoient glissées dans l'édition romaine. Cet ouvrage , aussi exact, aussi par- fait qu’on peut le desiser, doit être considéré comme une source d'agrément pour l'amateur, et d'instruction pour l'artiste. Le premier , le deuxième et le troisième vo- lumes contiendront les peintures ; le quatrième, les bustes et bas-reliefs en bronze ; le cinquième, les statues en bronze; et le sixième, les lampes et candelabres. ROMANS. Les Trois GÉNÉRATIONS, ou Drusilla, Wilkel- mina et Georgia ; par Charlotte Bournon M1- LARME , de l'Académie des Arcades de Rome. Trois vol. in-12. Prix, 6 fr. pour Paris, et 7 fr. 80 cent. francs de port. À Paris, chez Gerand, libraire , rue St.André-des-Arcs, n.° 44. Ce roman est un tissu d’immoralités , d'invrai- semblances, de fourberies, de noirceurs et de méchancetés. Ceux qui en prendront lecture auront peine à croire qu'une femme en soit l'auteur. 144. Livres ‘divers. Le Taunéau, par L.-F. Jaurrrer. Un vol. in-18; orné d'une figure. Prix, 1 fr. 5o cent. ; et #fr par la poste. À Paris, chez Demoraine , impri- meur-libraire , rue du Petit-Pont, n.° 97. C'est le portrait d’un jeune homme qui ; n'ayant aucune habitude du monde, ne con- noît et n'observe ni égards ni convenances ; et qui, malgré un certain fonds d'esprit, est, à chaque pas, le jouet de sa maladresse. Corrigé enfin par les événemens, et convaincu qu'on ne blesse pas impunément l’amour-propre d'autrui, notre néophite devient souple, flexible, insi- nuant, ofhcieux ; se concilie la bienveillance de ceux qu’il approche, et se fraie ainsi un chemin à la plus haute fortune. MEÉLANGES: OEuvrés choisies de l'abbé de Saint-Réal, con- tenant la Conjuration des Espagnols et celle des Gracques ; des réflexions sur la valeur, la for- tune et la mort; des Fragmens historiques sur Marius, Sylla, Antoine, Auguste, Octavie , Néron; des mélanges, des inaximes , et une ñotice sur la vie et les ouvrages de Saint-Réal. Par N.-1.-M. des Essarts. À Paris , chez dés Essarts, libraire, rue du Théätre-Français ; n.° 9. Deux vol. ir.12. An XII (1804). Il y avoit sans doute un choix à faire dans les ouvrages de Saint-Réal , sur-tout dans la der- nière édition, 1730 , en 5 vol. , faite avec aussi peu de goût que de discernement. M. des Es- sarts a fait très-bien ce choix; peut-être lui re- prochera-t-on d’avoir trop retranché : mais tout ce qu'il a conservé mérite d’être lu ; et l’on ga- gnera beaucoup en se procurant cette édition, imprimée correctement et avec soin. “ae te à ñ= de tire | . quil ne faut; pas révéler. Fag. fe Lorrénaruas Hs versalité de la done pue d par M; Schwab 15 | Braux-Ânrs. ES elfétssur les hommes de toutes les U'hVHirstoTRe, | Luel des Tâtars -Manichoux, tra- duit M.L. Lang ssh) £S | NOUVELLES ET COR- RESPONDANCE LITTÉRAIRES. NOUVÉLLES | ÉTRANGÈRES. ALLEMAGNE. Notice sur les travaux des inembres … de l'Université et de l'Académie de ss Rte pe 8x IPALIE. Prix de par l’Académie natio- # rx des HP AT de Bologne.104 SICILE. Font files en Sicile. Turquie EUROPÉENNE. dress précieux trouvés sous des ruines en Thessalie. Ibid. FRANCE. HR NATIONAL, 4 “ proposés par la classe mathéma- à ea et À ne zoû Panis, . Nouvelle organisation de la Société} * d'Agriculture. 114 ! Procédés employés pour nettoyer les belles sculptures de là fontaine de * Ha rue de Grenelle. xI5 107 ‘Dissertation sur les causes de Püni-| ‘De la peinture considérée dans es! s; par M. G.M: era 72| Rue Pris prop posés par l’Académie des Belles- ettres et Arts de cette ville. 1106 B ORDEAUX. ‘Prix proposés par la Société des - Sciences, Belles-Lettres et Arts de cette villes 117 AGEN. Prix. proposés par la Société d'Agri- ‘culture, Sciences et Arts de cette ville. 119 ST SA er.) Hydraulique. Perfectionnement du belier hydraus ligue de M, Montgolfer. Ibid. Economie industrielle. Nouveau procédé pour le rouissage du nee: par ML Bralle, 120 | Optique. Améliorations faites à la chambre 6bscure ; par M. Laquiane. 122 Drson., Nécrologie. Mort de M. Atiret, sculpteur, Zbid. Touns. | Prix proposés par la Société d’Agri- culture , Arts et merce du dé- partément d’Indre-et-Loire. 12à LIVRES DIVERS. BOTANIQUE. Nomenclature botanique ; par M. L.F.V,Henckel. 124: Médecine. Journal de Médecine; par MM. Côr- visart, Leroux, etc. 124 Traité de Ia propriété exclusive ment stimulante de lopiun; par J. E. cree 12% kr oft sur. den tite ET omiiq DA p ds Let ‘de Siras Mémoire sur vla Ce a: Choux Ne is ." vet de Laponie; par M. AE E * Chronologie. | À: Tibleau ‘synchroni ue des paux événermens s rhone an cieune €t moderne ; pd M. en-| telle, RE ! Géographie. FR La Géographie des Eufans ; ar M Écore ô 6 * 229 | Histoire.” Le RS Esquisse d’un tableau de Moëcow ; par Engelbr. Ffichelhausen, Jbid, Commerce: | ; + Méthode simplifiée de la tenue des livres en partie simple et double; {T par J. CS 193} ., Jurisprudence. | Plan Eva ictionnalte universel ei On peut $ ieiles au Bureau du Matané En IC Pt se procurer tous les Livres qui paroïssent ën Fra "Etranger, et généralement püur tout ce sis conce I braïrie ancienne ét modeéïne, LAS SAR On sy chayge aussi de toutes sortes d'impreseion Les Livre Ouveaux sont annoucés. dans après qu'ils. ont été remis au Bureau ’c est: \ Numéro qui se publie après cette remise. Le Magasin paroit lé prenez de ce mois. … On prie A qui envoient Æ bas pour. Les an” aoncer, d'en indiquer toujours le priæ. 4 TT 1804. : ée AG: SIN ; t23 ENCYCLOPÉDIQUE, £ 70 JOURNAL! DES SCIENCES, Fes _. ET DES ARTS, (RÉDIGR RE: 18 PAR A. L. MILLIN. EL Va LR AVIS pu LIBRAIRE. kr LI à à Liuer pour trois Mois, «16 francs pour six mois, 36 francs pour nn an, ns ut Paris que pour les Déparionène. funk de Frs SSL 2e On p peut s’adresser au Bureau du Journal pour se procurer to@æ es Livres, qui-parôissent en France et chez l’étranger, et Een out ce qui concerne la ue ancienne ‘et moderne, sx Journal, auquel la OR des Éoiidies me cn# nom dising ué , une UE justement ac se dans ué partie des arts ou des sciences, Le les L. LIBERD, DESGENRTTES, BasT, AK DE SACY , “Bédnador-: “Hate, D'onénre AA IGHAEUSER , Licihine , BaRRER , BARBIER Dœ CAGE , Lanerés, Larsnne; Lacnanoe., LEBRUN , RRON * MENTELLS , Bassiwer, Monsrzer, Nort ; RLIN ; CHaRDon-La-Rocrerre ; CariranD , VAN« NS, Sicard, Travizs, Léverzix, Cuvier, GEOF- ; Vsnrenar , Cavaniires , à Usrenr, BorTTiIGER ; DNTT , VicLorsox > WIRREMET , Wii cRLER à orre FT (ge An. } LA. Fr, Lonsres , etc. etc. fournissent des Mémoires contient l'extrait des principaux oùvyrages natids maux : on s'attache sur-tout à en faire une anës Vyse exacte , et à la faire paroître le plus promptes} -mment possible après leur publieation. On y donné une notice des meilleurs écrits imprimés che Vétranger. «ef | un On y insère les mémoires les plus intéressan sur toutes les parties des arts et des sciences; of choisit principalement ceux qui sont propres à em accélérer les progrès. 4 RC EE M 1 On y publie les découvertes ingénieuses , les inventions utiles dans tous les genres, On y rend} compte des expériences nouvelles. On y donne ut précis de ce que les séances des sociétés littéraires} ont offert de plus intéressant ; une description de |: ce que les dépôts d'objets d'arts et des science æenferment de plus curieux. à. On y trouve des notices sur la vie et les ouvrages des Savans , des Littérateurs et des Artistes distinä}| Fo dont on regrette la perte ; enfin, les nouvelles ittéraires de toute espèce. 3 4 -On s'adresse, pour l'abonnement , à Paris, chez ‘M. Dsraxce, rue des Mathurins , hôtel de Cluny ; Ÿ chez la veuve Changuion et d'Hengsts A Amsterdam, $ he VarsGuUL “re ‘À Bruxelles, chéz Lemaire. À Florence , chez Molini. A Rent tn One ECM Ph Fleischer. : «2 $chéz Manget. A Genêre ; RTE NT VE ‘À Hambourg, chez Hoffmann. À. Leipsic, chez Wolf. A Tieyde, chez les frères Murray. : À Londres, chez de Boîe , Gerard Street. A Strasbourg , chez Levrault, A Viénne, ches Degen. LS 4 Wesel, chez Geisler , Directeur des Postes. {1 faut affranchir les lettres. ANTIQUITÉS. MonuMENs ANTIQUES 2rzédits ou nouvelle. ment expliqués ; Collection de statues, bas-reliefs, bustes , peintures , mosaïques, gravures, vases, inscriplions el 1nstru- mens , tirés des collections nationales et particulières , et accompagnés d'un texte explicatif; par À. L. Miruin, conserva- teur des médailles, des pierres gravées et des antiques de la Bibliothèque nationale de France , professeur d'histoire et d’an- iquités, etc. Tome Il. — III. Livraison. + À Paris, chez Laroche , maison de l’auteur , à la Bibliothèque nationale , rue Neuve-des-Petits- Champs , n.° 17 , au coiu de celle de la Loi; Le- vrault, Schoœll et comp.i , rue de Seine, hotel de la Rochefoucault (1). (x) Chaque volume de cet ouvrage, imprimé à l’?mprimerie Impériale , sur beau papier, est composé de cinquante feuilles de texte , d’au moins quarante planches , et distribué en six livraisons. Chaque livraison coûte six fr., prise à Paris, et 6 fr. 60 cent. franche de port dans les départemens. L'ouvrage aura six volumes, et sera terminé en moins de quatre années. Ceux qui voudront souscrire d’avance pour un volume, ne paierent que 33 fr. au lieu de 36, plus, 3 fr. 60 centimes pour le port dans les départemens. L'auteur fait seul les frais de l’ou- rage , et garantit qu’il sera terminé. Les acquéreurs et souscripteurs sont priés d’envoyer leur nom et leur adresse à M. Laroche , afin d’ètre compris dans la liste qui sera imprimée en tête du sécond volume. Cette liste et le titre du tome II seront donnés avec la sixième livraison. * Tome NI, K 145 Antiquités. Dans la première dissertation de cette livrai- son, M. Millin donne la description d’ün vase grec du Cabinet des Antiques de la Bibliothèque impériale : il offre un combat d’'Arimaspes contre des griffons. Les Arimaspes y sont vètues comme les Amazones, figurées sur un autre vase que M. Millin a publié à la planche IX du se- cond volume de cet ouvrage. Les récits des au- teurs anciens sur les Amazones ne font aucune mention des combats qu’elles avoient à soutenir contre des griffons : mais il y est question de pareils combats entre fes Arimaspes et les grif- fons. Après avoir rapporté ces différens récits, M. Millin recherche comment les anciens ont représenté les combats dont il vient d’ètre ques- tion, et qui paroissent avoir été le sujet de plusieurs compositions. Toutes ces relations, copiées les unes sur les autres, disoient que les Arimaspes n’avoient qu’un œil; cela parois- soit impossible à croire. Hérodote rejette entiè- rement cette fable ; mais Eustathe cherche à en donner une explication : il pense que ces peu- ples , excellens archers, étoient accoutumés à ! fermer un œil pour tirer plus juste, et que peut- être ils le cachoient tout-à-fait; ce qui a donné lieu de dire qu'ils n’en avoient qu’un. Cette ex- plication est misérable; car il auroit fallu don- ner le même nom à tous les peuples qui se ser- ! voient de l’arc. M. Bœttiger, dont le nom se retrouve dans» Mélanges. 147 ioutes les questions d’antiquités , a pensé que la tradition répandue dans la Grèce sur les Ari- maspes étoit fondée sur l’usage de plusieurs peupleshyperboréens qui se peignoient le corps, comme le font encore aujourd'huibeaucoup de nations, ou pour se défendre des impressions du froid , ou pour se parer, ou pour se rendre plus formidables. Cet usage a en effet existé chez plusieurs peuples dans une très-haute anti- quité. M. Bœttigser croit que les Cyclopes et les Arimaspes se peignoient un œil au milieu du front, et que c’est ce qui a donné lieu de dire et de croire qu’ils n’avoient qu un œil. Cette explication est ingénieuse ; mais ce n'est qu'une conjecture. Quoiqu'on en pense, il reste toujours constant que l'opinion sur l'œil unique des Ârimaspes étoit due aux idées sin- gulières qu'on se faisoit de tout ce qui existoit ‘dans les régions septentrionalesde l'Europe, qui furent pour la haute antiquité ce qu’a été pour des temps moins reculés l'Afrique, d'où, selon l'expression des anciens, il venoit toujours quel- que chose de monstrueux. Les voyageurs sur- tout aimoient beaucoup à orner leurs récits de -ces faits extraordinaires relativemant aux pro- ductions naturelles. S'il étoit impossible de croire que les Ari- maspes neussent qu'un œil, il l’étoit également de les figurer avec cette difformité. Les Grecs, qui vouloient représenter les combats de ces peuples contre les griffons, n’avoient point de K à 148 Antiquités. modèles à choisir. Comme ces peuples habitoient, . ainsi que les Amazones , les régions hyperbo- réennes, les artistes crurent probablement qu’il ‘y avoit beaucoup de rapport entre leur manière de vivre et de ‘s'habiller; et ils donnèrent aux Arimaspes la figure etle costume de ces femmes guerrières. C’est ainsi du moins que l’on peut expliquer ces monumens dans lesquels on remarque des Amazones qui combattent contre des griffons ; et c’est d'après cela que M. Millin donne le nom d’Arimaspes à toutes celles qu'on voit engagées dans une semblable entreprise. Plusieurs vases grecs les représentent de cette manière. D'Han- carville en a publié un sur lequel le peintre a figuré une Arimaspe dans un char à deux che- vaux; elle combat vivement contre deux grif- fons, et va en percer un avec cette épee courte que les antiquaires nomment parazonium. Sur un autre vase, une Arimaspe, placée entre deux griffons, a un genou en terre : ce qui prouve qu'elle est sur le point de céder ; elle se défend pourtant encore vigoureusement avec l'épée courte dont elle est armée. Sur un autre vase de la collection d'Hamilton , publiée par M. Tisch- bein, trois Arimaspes combattent d’une ma- nière très-animée contre des griffons : deux d’entre elles sont armées de la hache ; la troi- sième porte une lance courte. La composition de toute la peinture a un très-grand rapport ‘avec celle que M. Millin publie dans cette Mélanges. 149 Livraison , quoique le dessin en soit plus correct; ce qui prouve que l’une et l’autre sont des ‘imitations de quelque autre peinture ou de ‘quelque bas-relief célèbre. Dans les combats des Grecs contre les Ama- zones , qu'on voit figurés sur plusieurs vases antiques , il est toujours évident que ces der- nières doivent succomber. Sur le vase publié par M. Millin , on voit au contraire que les Ari- maspes vaincront les griffons : l'honneur de la Grèce n'étant pas intéressé dans ces combats, Vartiste qui a peint ce vase, n’avoit pas de mo- tif particulier pour retracer leur défaite. C’est ainsi que sur un vase du Vatican, figuré pas Pas- seri, on voit une Arimaspe à pied près de son cheval; derrière elle est un griffon que pioba- -blement elle a domté. Cette peinture de vase, et les autres monu- mens semblables, cités par M. Millin, font voir que les anciens artistes représentoient le plus souvent les Arimaspes comme des Amazones. L'auteur pense que peut-être ils regardoient l'amour des combats comme une passion parti- culière aux femmes des pays septentrionaux. Cependant ces mêmes artistes ont aussi figuré les Arimaspes , sans leur donner les traits et le: costume de ces femmes guerrières. Une peinture de la collection d'Hamilton nous fait voir un de ces habitans des régions hyperboréennes à che- val, selon la coutume des peuples septentrio- naux : son casque est accompagné de deux K 3 190 Antiquités. | grandes cornes qui donnent au guerrier un air plus formidable ; il va lancer un court javelot à un griffon qui l'attaque avec intrépidité. Le champ de cette peinture est semé de pièces rondes et carrées qui indiquent peut-être le mé tal précieux et les trésors confiés à la garde de ce courageux animal. Dans la seconde dissertation, on trouve la description d’un joli camée sur agathe- onyx, appartenant à la curieuse dactyliothèque de feu M. le chevalier d'Azara. Cette pierre, malheureusement fragmentée, représente Cu- pidon dans une coquille qui, sans doute, est supposée portée sur les flots; le jeune dieu est couché près du bord de la coquille, qui est pro- bablement celle consacrée à sa mère. Une épi- gramme grecque anonyme de l’ Anthologie dé- crit l'amour dans une coquille, comme on le voit sur ce beau camée de M. d’'Azara , à cela près qu'il est endormi, et que celui du camée est éveillé. Cette épigramme sert d'épigraphe à la dissertation de M. Millin ; en voici la traduc- tion : « Naguère, gisante sur un rocher battu « par les flots, j'étois dédaignée comme une « production commune de la mer profonde ; « mais à présent l’aimable fils de Vénus à la belle « couronne repose dans mon sein. » Cette épi- gramme peut faire penser qu'il y avoit dans l'an- tiquité quelque camée célèbre qui représentoit l'amour endormi dans une coquille. Le camée de M. le chevalier d'Azara en est peut-être une Mélanges. 101 imitation. L'artiste , au lieu de figurer l'Amour endormi, l’a représenté au moment où il vient de s’éveiller. L’explication de deux inscriptions latines , trouvées à Boulogne-sur-Mer , et la description d’un vase grec qui appartient au général Val- ville ,.et sur lequel est représenté Ariadne , épouse de Bacchus, sont l’objet des deux disser- tations suivantes. À l’occasion de cette peinture de vase, M. Millin ajoute quelques détails sur le Thyrse, pour compléter ceux qu'il avoit donnés précédemment sur plusieurs attributs du culte de Bacchus. Un des plus curieux monumens décrits dans cette collection , est une sardonyx appartenant à S.M. l’impératrice. Au milieu d’un cercle en re- lief que forme la seconde couche de la matière, on y voit une tête gravée en creux sur la couche inférieure ; quatre figures prises aussi dans la seconde couche, et ombrées par la troisième, entourent ce médaillon : cette double gravure en creux et en relief rend cette pierre extré- mement rare et intéressante. La figure gravée au milieu du médaillon est en buste ; devant elle est un Thyrse, le principal attribut de Bac- chus ; mais la poirine large, qüi n’est paint or- Dent donnée à ce Dieu, et qu’on re- marque aux images d'Antinoùs, la conformité sensible des traits du visage de cette figure avec ceux du beau Bithynien, font voir évidemment que c’est ici Antinoüs représenté en Bacchus, K 4 152 Antiquités. ainsi que nous l’offrent plusieurs médailles dés villes grecques. À cette occasion , M. Millin discute et rapproche le peu de détails queles au- teurs anciens nous ont laisséssur ce favori d'Ha- drien, et sur la véritable cause de sa mort, et de la douleur profonde que l'Empereur en ressentit. Il pense que la superstition d'Hadrien lui fit commettre la cruelle foiblesse de souffrir le dévouement du bel Antinoüs, mais qu’il n’est pas démontré qu’il eût conçu pour lui une pas- sion honteuse et déréglée , ainsi que quelques auteurs l’ont avancé. Cependant ce prince vou- lut consacrer la mémoire d’un ami si généreux, par d’éternels monumens: il ft bâtir en AEgypte une ville à laquelle il donna son nom ; on lui éleva des statues dans tout l'empire ; bientôt les honneurs divins même lui furent décernés. Les villes de la Grèce , toujours plus ingénieuses dans l’art de la flatterie, se distinguèrent sur- tout dans l'accumulation des honneurs rendus au bel Antinoûs : il eut des autels, des temples, des prêtres et des prophètes : on institua des jeux Antinoïiens , et on lui fit rendre des oracles qu'Hadrien , si l'on en croit Spartien, compo- soit lui-mémé : on le déclara synthrone, c’est-à- dire , assesseur de tous les dieux ; on lui assigna une place dans le ciel, qui eut la constellation d’Antinoüs : lui-méme fut représenté sous les traits d'Apollon, de Mercure et de Bacchus, sur les médailles d'Arcadie , de Smyrne, de Bi- thynie , de Corinthe, de Mantinée et de Cyzique. Mélanges. 153 La sardonyx décrite par M. Millin, a sans doute été destinée à consacrer cette superstition. An- tinoüs y est représenté en Bacchus , ainsi qu'on le voit sur plusieurs monumens, dont le plus remarquable est le bas-relief de la villa Albani, placé actuellement au musée Napoléon , au n.° 211. On ne peut douter que le beau camée , décrit par M. Millin , n'ait été travaillé au temps d'Hadrien, et qu'il n’ait été du nombre des mo- numens qu'il a fait exécuter pour calmer la douleur qu’il ressentoit de la perte de son favo- ri, et pour éterniser sa mémoire. Deux très-jolies lampes de bronze, conservées à à la bibliothèque publique de Nimes , et dont la planche XXII offre la figure sous leurs diffé- rentes faces , fournissent à M. Millin l’occasion de donner d'intéressantes généralités sur les lampes des anciens. Les bornesquenoussommes obligés de nous prescrire dans cet article , nous obligent d'y renvoyer nos lecteurs. Dans la dernière dissertation de cette livrai- son , M. Millin donne la description de la Fa/las de V’elletri, appelée ainsi du lieu où elle a été trouvée , et qui est aujourd'hui exposée au mu- sée Napoléon, sous le n.0 20 : outre cette statue colossale de neuf pieds et demi de hauteur , M. Millin a fait encore graver le beau buste de la même déesse, autrefois à la villa Albani , ac- tuellement aussi au musée Napoléon, qui res- semble tellement à la tête de la Pallas de Velletri, qu'il est aisé de voir qu'il appartenoit à une 104 Antiquités. * statue absolument semblable; ce qui donne lieu de croire que ces deux beaux monu: méêns sont des répétitions de quelque original célèbre. Les amis des arts liront avec plaisir l’histoire de la découverte de cette belle statue dont M. Millin a fait précéder sa description (1). HISTOIRE. TasrEau historique des découvertes et éta- blissemens des Européens dans le nord et l’ouest de l Afrique jusqu’au commence- ment de ce siècle ; augmenté du Voyage de Horn rmANN dans le Fezzan, et de tous les renseignemens qui sont parvenus de- puis à la Société d’ Afrique, sur les empires de Bornou, de Cashna et du Monou. Ou- vrage publié par la Société d'Afrique, et traduit par Cunr. 2 vol, in-8°. Chez Debray , libraire, rue Saint-Honoré , Barrière des Sergeus; chez Colnet, rue du Bacq. Depuis quelque temps, on s’est occupé à pu- quelq PS; blier en Angleterre et à traduire en France des voyages plus ou moins intéressans sur cette Afri- (x) Cette livraison a paru avant le voyage que M. Millin vient de faire dans les départemens méridionaux de la France. Depuis son retour , il s'occupe de la continuation de, cet ouvrage. La quatrième livraison du IL. volume est sous presse, et paroitra incessamment. Histotre. 195 que, devenue barbare, après avoir été, dans les siècles reculés , le centre du commerce et l'asile des arts. Tous les anciens auteurs nous ont fait connoître cette partie du globe; Hérodote y avoit voyagé , et c’est par lui que nous savons ce qu'elle a été ; c’est par les voyageurs mo- dernes-que nous sommes instruits de ce qu’elle est aujourd’hui. On pourra comparer, en lisant ces volumes , les observations des modernes avec celles d’Edrisi, de Léon l'Africain, de Ptolémée , d'Hérodote ; et certainement on trouvera que les Africains , du temps de ces au- teurs , sont bien peu ressemblans à ceux de nos jours. Ce tableau n’est qu’un extrait des voyages en- . trepris, depuis quelques années, par les encoura- gemens de la Société d'Afrique formée à Lon- dres, et qui avoient pour but la civilisation des diverses nations qui habitent l’ouest et le nord de cette terre à peine connue des Européens, et sur-tout le progrès des sciences. Nous avons fait connoître, dans ce journal, plusieurs de ces voyages; nous avons donné des extraits assez étendus de ceux de nos voyageurs frarçais au Sénégal et à Gorée. MM. de Golberi, Durand, et plusieurs autres, nous ont appris ce que le commerce pouvoit trouver d'avantages à traiter avec humanité, et sur-tout avec probité, les peus ples qui habitent sur les bords du Sénégal et de la Gambie, attachés pour la plupart à la France, plus par penchant que par intérèt, 1 56 Histoire. On doit savoir gré à l’auteur et à son traduc- teur de présenter au public un tableau des dé- couvertes modernes faites dans les parties occi- dentales de l'Afrique par Ledyard, Lucas, Saugnier , Brisson, Watt et Winterboton, le major Houghton , Park, Browne, Horneman. Ils ont épargné aux lecteurs les pénibles et sou- vent insipides détails de descriptions , de con- tre-temps , de vexations , de travaux, de pri- vations et de traitemens plus ou moins favora- bles ou cruels. Nous allons aussi extraire de ce tableau ce qui nous paroïtra ou plus nouveat ou plus instructif : L'intérieur de l'Afrique étoit presque in- connu lorsque la Société d'Afrique, qui se forma en 1788 , commenca à envoyer des hommes courageux et instruits pour pénétrer dans ces parties ignorées. M. Ledyard, qui avoit vécu avec les sauvages de l'Amérique, qui avoit fait le tour du monde avec le capitaine Cook, fut le premier de ces voyageurs : il entra en Afrique par l’AEgypte. Quelquesobservations sur ce pays déja fort connu ne nous arréteront pas. Il at- tendoit le départ des caravanes pour pénétrer dans le Fezzan ; mais la mort l’arrêta dans ses projets. M. Lucas fut le second voyageur : la. connoissance qu'il avoit acquise de la langue et des mœurs des Arabes, pendant une captivité de trois ans à Maroc, lui donnoit une grande facilité pour remplirisa mission. Il partit de Tri poli, traversa le désert de Sahara jusqu’au Fez- Afrique. 107 xan, royaume dépendant en quelque sorte de Tripoli ,et avec lequel les marchands d’Agadès, de Tombuctou et de quelques villes principales -de l’intérieur ont un commerce régulier. Il de- voit ensuite faire son retour par la Gambie ou la côte de Guinée. Voici l'idée qu’il nous donne du caractère des Maures : « À toutes les époques « de l’histoire , ce caractère s’est toujours mon- « tré composé des mêmes élémens ; c’est un mé- _« lange d’emportement et de légèreté, de vio- « lence et de foiblesse: les Maures doivent peut- «ètre une partie de leur caractère à des causes « physiques ; mais l'esprit de leurs lois, leurs « usages et leurs mœurs ont toujours conservé «une certaine physionomie que n'ont pu al- .«térer les différentes modifications apportées . « successivement dans le gouvernement par les « Carthaginois, les Romains, les Vandales et les _« Arabes. Les Maures ont été, dans tous les « temps, orgueilleux, violens , indociles, traï- « tres et féroces. Toujours courbés sous le joug « du despotisme , ils font bien quelquefois des «efforts terribles pour le secouer ; mais satis- « faits dès qu'ils sont parvenus à venger l’injure « du moment, ils n’ont jamais pu améliorer ‘« leur condition. C'est encore cette cavalerie « légère et sans ordre, si redoutable dans son at- «-taque et dans sa fuite même , connue sous le «nom de Numides et de Mauritaniens. Parmi ‘& les individus , peu ou point de nuances ni de -« diversité d'opinions ; le despotisme qui com- 158 Historre. LOS « LC Li A = prime les élans du génie, étouffe aussi le germe des idées. Ainsi les Maures, déchus de leur antique gloire par l'effet d'une longue suite de désordres, ont perdu le sentiment naturel du juste et de l’injuste, et vivententre eux dans un état continuel de défiance, d’a- narchie et de guerre. La perfidie est parmi eux un droit naturel dont ils usent dans toute son étendue; ils ne respirent que pour le pil- lage et la destruction, parce qu’eux-mêmes sont à tout instant exposés à être dépouillés ou par des voisins puissans, ou par leur propre gouvernement. Mais le despotisme est foible autant qu’il est violent; il n’a réellement ja- : mais que la moitié du pouvoir dont il prétend user ; il déploie une énergie spasmodique dont il lui seroit impossible de prolonger l'effort ; « et le plus souvent il languit dans l’inaction de la mort : dans cet état de société on estencore : heureux, lorsqu'un frein puissant comme celui de la religion , peut arréter les excès de cette tyrannie sanguinaire, désarmer la vengeance» particulière , et retenir le bras de fer qui gou-" verne. Le respect que les Maures ont pour les Marabouts n’est utile que sous ce rapport. La défiance mutuelle dans laquelle vivent les Mau-" res, accroît leur sagacité naturelle à pénétrer“ les desseins des autres, et devient la source de toutes Les ruses et de toutes les subtilités dont" ils accompagnent ce qu'ils font; et cet excès de défiance les rend aussi capricieux que trom-« Ÿ LI (FA k Afrique. 159 « peurs... Les femmes y sont tyranniquement « sequestrées; et , avec la liberté, elles perdent « les grâces et l'élégance de leurs formes. En « sequestrant les femmes de la société, on s’est : « té les moyens d’y introduire.les arts agréa- « bles, et le goût nécessaire pour les perfection- « ner. La manière de vivre des Maures, leurs « besoins et leur luxe sont encore ce qu'ils « étoient du temps de Mahomet, et peut-être « du temps d'Abraham. La loi de Mahomet ré- « prouve toute idée d'innovation ; et l'ignorance « dans laquelle elle retient ses sectateurs, ne « leur permet pas de faire aucun progrès dans « les sciences et dans les arts. À ce vice du prin- « cipe. social se joint encore le défaut de com- « munication entre les hommes ; ils ne se par- « lent jamais que lorsqu'ils sont en colère. » Nous avons cru que ce portrait de la race mau- resque étoit plus ressemblant et mieux dessiné que ceux qu’on trouve dispersés dans les autres voyageurs. Parmi les habitans des montagnes, le peuple est plus heureux, et parconséquent meilleur : c’est une race différente de celle des Maures de la plaine. L'ancienne race des Arabes en Afri- que s’est presqu'entièrement mélangée et con- fondue avec les naturels du pays ; mais il existe encore, entre Maroc et Alger , différentes tri- bus de montagnards qui sont nomades et indé- pendans ; ils sont plus doux, plus sociables et plus recherchés dans leurs usages que les Mau- 160 Histoire. res. On les nomme Érebers, d'où vient Berberi&, ancien nom de la Barbarie. Ils paroissent ètre le peuple le plus ancien del'Afrique, et ne s'être jamais mélés avec les étrangers, Ils ressemblent aux Mauritaniens des Romains, et ils désignent les Européens sous la dénomination générale de Roumi. Dans ce pays, qui s’est souvent repeuplé de colonies d'Asie et d'Europe, il est difficile de distinguer la race primitive parmi Les différentes tribus qui s’y sont naturalisées. Saugnier traversa le grand désert de Sahara, qui présente une surface presque égale à la moitié de l'Europe : il comprend tout ce qui s'étend depuis la Barbarie jusqu’au pays fertile qui est au midi, entre le Cap-Vert et la Mer- Rouge. La partie occidentale du Sahara , com- prise entre le Fezzan et l'Océan atlantique, a huit cents milles géographiques de large, et plus du double en longueur. Au milieu de cette mer de sable , on trouve des oases ou îles, dans les- quelles ceux qui les habitent ont été séparés du reste de l’univers pendant des siècles entiers. Ils se regardent comme les seuls habitans de la terre , et prennent les limites de leur territoire pour les bornes du monde. Ce voyageur fait connoitre en détail les tribus qu'il a visitées, les Monselemines, les Mongearts, les Trasarts , les Brucnarts , qui sont répandues sur le grand désert. Brisson fit naufrage au nord du Cap-Blanc, et tomba dans les mains des Arabes Labdessebas; son bdd Afriquè. 161 son esclavage fut des plus pénibles ; vendu succes: sivement à plusieurs maîtres, il parcourut avec eux des déserts immenses qui le mirent à portée d'observer le caractère et les mœurs des hordes qui habitent les régions intérieures du Sahara. Les Ouadelins et les Labdessebas sont les plus redoutables ; leurs ravages parviennent quel- quefois jusqu'aux portes de Maroc ; ils sont grands, bien faits, forts et vigoureux; leurs cheveux sont herissés , et leurs ongles, dont ils _se servent souvent dañs les combats, sont aussi longs et aussi durs que des griffes de bètes fé- roces. De larges oreilles qui leur descendent presque sur l'épaule, et une barbe très-longue leur donnent un air farouche et cruel. Les Qua- delins sur-tout sont violens; fiers et guerriers ; mais ils sont bientôt découragés lorsqu'ils trou- vent une résistance soutenue, et qu'ils n'ont point, par le nombre, une supériorité marquées Leurs divers campemens et leur manière de vivre sont toujours les mêmes : ils changent d'habitations aussitôt qu’ils ont épuisé l’eau et le pâturage dans l'emplacement où ils s’étoient établis. La perfidie et la trahison sont les vices naturels des Arabes ; l’assassinat est très-fré- quent entre eux; ils ne croient pas aux pro- messes; le poignard annulle tous les engage- mens et toutes Les obligations. Ils aiment à ra- conter leurs exploits, et l’exagération est souvent mêlée à leurs récits. L’hospitalité s’est encore eonservée parmi eux. Le mème Arabe qui, dans Tome FI. L 162 Histoire. la plaine est un brigand déterminé , devient gé+ néreux dès qu'il entre dans sa tente. Les femmes ne prennent point le nom de leur mari; elles ne mangent jamais avec eux ; elles préparent les alimens ; et, les ayant servis avec une sorte de respect, elles mangent après eux. Ces femmes sont fidèles , aussi ne peuvent-elles se séparer que par un décret des vieillards de la tribu. Les décorations de la vanité se trouvent au milieu de ces déserts. Les Arabes aiment à orner leurs femmes d’anneaux d’or et d'argent, dont leurs oreilles , leurs bras, leurs jambes sont surchar- gés ; la beauté d’une Arabe est d’avoir des dents alongées et saillantes , une taille forte, et des membres très-épais. L'éducation des jeunes gens se borne à leur apprendre à se servir du poignard avec dextérité ; à déchirer adroitement leurs ennemis avec les ongles, et à soutenir un mensonge avec un air de vérité. Plus féroces, plus sauvages que les tribus dont le territoire est voisin de la mer , les Arabes Labdessebas et Ouadelins sont aussi plus bornés dans leurs idées : ils croient être la première nation du monde , et que le soleil ne se lève que pour eux. C'est en voyageant à travers l'Egypte et la Barbarie , qu’on peut comparer ce qu'étoient ces régions dans les temps anciens , et ce que sont aujourd’hui ceux qui les habitent. Quelle dégénération étonnante ! la nature et les indi- vidus ont changé d’une manière incroyable. Afrique. 163 Sans les monumens des siècles, que le temps n’a pu détruire, et les vestiges de civilisation qui subsistent encore , comment pourroit-on croire que ces contrées ont été habitées par des hommes qui connoissoient les arts, qui jouissoient des communications sociales , qui avoient les idées et le sentiment du grand et du beau? On ren- contre , en effet , des débris de temples, de pa- lais, de fortifications , de tombeaux; mais, au milieu de ces ruines, on voit que la nature est épuisée, que les hommes sont retournés à la barbarie. En cotoyant le désert de Sahara , on trouye quelques hordes d'Arabes qui vivent sur cette terre, comme en dépit de la malédiction dont elle est frappée. C’est en approchant des forèts de Gommiers qu’on se réconcilie avec la nature : cet arbre est une espèce d’accacia tou- jours vert, dont les feuilles sont longues , rudes et étroites:ilest garni d’épines, etades fleurs qui sont blanches. La principale forét de Gommiers est à environ soixante lieues de Portendick et de quatre-vingt d’Arguin. On lit des détails assez curieux sur l’ancienne et sur la nouvelle Guinée, et sur le cours du Ni. ger, qui fut connu des Romains. Pline rapporte que ce fleuve débordoit périodiquement comme le Nil, et que ses inondations fertilisoient éga- lement les terres voisines. Dans les temps plus rapprochés de nous , les Européens ont tenté d'établir sur ses côtes des comptoirs de com- merce depuis Arguin jusqu'à Adel; les Portu« L 2 164 Historre. gais, les Hollandais, les Français , les Anglais, les Suédois y ont eu successivement des établis- semens qui auroient pu devenir avantageux, si on avoit été aussi occupé à introduire la civi- lisation parmi les naturels, qu’à faire dominer l'intérèt les uns sur les autres. Les Africains sont restés dans leur état primitif : les Portugais sont les seuls qui ont fait quelques efforts pour les instruire ; ils cherchèrent à les rendre agricul- teurs et chrétiens; mais à peine étoient-ils éta- blis, qu'ils furent chassés par les autres nations du Bénin, de la Guinée, et de la Négritie. Ils y ont cependant encore quelques comptoirs où ils font un commerce plus étendu que les autres Européens, et passent pour faire la traite avec quelque humanité, Les Nègres s’aperçoivent- que leur communication avec les blancs'ont in- flué sur leurs mœurs ; et le chef des Almammy défendit aux Français le passage de ses Etats pour faire venir leurs esclaves de Galam. Notre commerce avec ces peuples n’a eu d'autre effet que de paralyser leur intelligence, et de cor- rompre leur cœur. On peut croire que les éta- blissemens européens n'ont été formés que sur les bases de l'intérêt; et la philantropie de la société anglaise pourroit bien étre attaquée de: ce vice , sous les apparences du desir de tra- vailler à l'amélioration du sort de ces habitans: africains. Les parties basses de la Côte-d'Orsont habitées par les Quojans, soumis à la nation plus puis- LA | Tv. Afrique. 168 _ sante des Fosgians : ces deux peuples reconnois- sent la souveraineté de l’empereur de Monou: ce royaume est encore peu connu ; on pourroit croire qu'il fait partie de l'immense empire de Monlomugi. Le système d'hiérarchie qui existe entre les divers Etats dépendans de cet empire n'a rien de pareil dans l'histoire. Nous remar- querons, dans ce royaume, deuxinstitutions qui ressemblent assez par leur mystère à nos as5o- ciations de franc-maçonnerie; la première, dont le roi est le chef visible , se nomme confrérie de Belli: elle est sous la protection d’un ètre re- doutable et mystique, dont la forme change au gré du grand-prêtre. Les réunions de cette so- ciété n’ont lieu que tous les vingt jours. On a consacré , pour cet objet , un espace de huit ou neuf milles de circonférence , dans un bois de palmiers où l’on a construit des huttes, et formé des plantations : c’est là que les jeunes gens, sous la direction des vieillards leursinstituteurs, passent le temps de leur noviciat qui dure cinq ans. On léur apprend à se battre, à pècher, à planter, à chasser , à danser, et à chanter les louanges de Belli. I] leur est sévèrement dé- fendu de porter des vètemens, de sortir de l’en- ceinte qui leur est prescrite, et de converser avec tout autre qu'un frère initié. On n’admet aucune excuse pour les infractions à ces règle- mens, Il n'est pas permis aux femmes d’appro- cher du bois sacré : elles seroient livrées au Belli, qui les feroit périr au milieu des tour- L 3 166 Histoire mens. Ces jeunes gens reçoivent , en signe de ré- génération , un nouveau nom au moment où ils sont initiés ; et on leur applique avec un fer chaud la marque du Belli, qui va depuis l'oreille jusqu'à l'épaule: elle ressemble à une égrati- gnure faite avec des ongles. Le terme de ce no+ viciat expiré, les instituteurs les rendent à leurs parens , et ils sont admis dans les affaires pu- bliques. La seconde association ressemble à la pre- mière : elle n’est composée que de femmes. Réunies dans une enceinte dont l'accès est in- terdit aux hommes, les jeunes filles à marier y sont conduites, pendant la nuit, par les ma- trones aux soins desquelles elles sont confiées ; après l'initiation , on les baigne, on leur coupe les cheveux , et dès qu’elles ont subi les épreuves de la réclusion , elles restent absolument nues : on exerce leur corps à toutes les fatigues ; on dispose leur ame aux impressions moins douces et profondes que produisent ces forêts silen- cieuses ; on leur enseigne les pratiques religieu- ses et superstitieuses du pays. De retour dans leurs familles, après quatre, mois de retraite ; elles y sont reçues par les femmes jeunes et vieilles qui viennent au-devant d'elles, égale- ment nues, et célèbrent leur initiation par des chants et des danses qui durent jusqu’au jours Tout homme qui auroit eu la curiosité d'être témoin de cette cérémonie, seroit puni de mort s’il étoit découvert, ou obligé de livrer un es- clave à sa place. Afrique. 167 L'association du Belli fait une impression pro- fonde sur tous les esprits, et exerce dans l'Etat une influence considérable. Dans chaque can- ton il y a un chef dé l'ordre, autorisé à procla- mer les ordonnances du Bell. L'association juge les crimes de sneurtre , de sorcellerie ; d’a- dultère , et condamne les coupables à la mort. On les conduit dans le redoutable bois:ils n’en reviennent plus. Les membres de la société passent pour avoir la puissance du diable et lé pouvoir de faire tout le mal qu'il leur plaît, sans craindre qu'il leur en arrive : ils ne sont jamais recherchés pour aucune de leurs actions. Les différentes nations dela Côte-d'Or croient toutes à un Dieu tout-puissant, créateur et con- servateur de toutes choses ; mais pour en fixer l'idées, il lui donnent la forme humaine comme étant la plus parfaite. Croire à un être dont la figure ne tomberoit pas sous les sens, seroit pour les Nègres ne croire à rien. Dans leurs prières à cet Etre suprème, ils se tournent du côté du soleil, qu'ils regardent comme l’em- blème le plus glorieux de sa divine majesté. Il s’élève parmi eux , comme parmi nous, des dis- sensions religieuses et des sectes diverses. Les chefs de ces sectaires croient à deux principes , celui du bien et celui du mal; le premier, afri- cain, et le second, européen. Les Nègres regar- dent leurs fétiches comme les dispensateurs du bien et du mal, au moyen de quelques vertus cachées qu'ils tiennent de Dieu qui les à créés L 4 0 168 Histoire. et les a envoyés surla terre pour le bién de l’hu: manité. Le mot fétiche ou /éitisso est portu- gais ; il signifie charme. Le pouvoir qu’on attri- bue aux fétiches est le même que celui qu'on veut trouver à certains nombres heureux ou malheureux : ces pratiques superstitieuses , qui ont une influence sur les esprits foibles , en ont quelquefois sur les esprits forts eux-mêmes. L'établissement anglais de Sierra-Leone est décrit avec des détails qui annoncent ses pro- grès depuis 1792, et ceux qu’il promet encore. Les colons peuvent étendre leur commerce dans l’intérieur en établissant des rapports d'amitié et de bonne intelligence avec les princes qu’ils rencontreront en remontant la rivière. Les mar- chands du Fezzan qui, avec les Maures, fonttout le commerce de l’intérieur de l'Afrique, sontex- posés à des frais immenses qu’entraine un trans- port de trois mille milles: les objets qu'ils achè- tent en Barbarie sont plus chers et d’une qualité inférieure à ceux que les colons pourroient leur fournir ; ils seroient, de plus, délivrés des vexa- tions de toute espèce dont un gouvernement despotique les accable ; ces commerçans infati- gables n’auroient alors, pour transporter leurs marchandises dans le mème pays, que trois cent cinquante lieues à parcourir dans des con- trées où les peuples ont déja perdu une grande partie de leur ancienne barbarie par les com- munications du commerce. La population du pays qui environne Sierra Afrique. 169 Leone , ne répond pas à son étendue et à la fer- tilité du sol : elle est divisée en plusieurs petits Etats qui n’ont pour loi que des usages, et dont toute la politique se borne à veiller-à la conser- vation de leur indépendance: chacun d'eux est conduit, plutôt que gouverné, par un chef électif choisi parmi les plus riches. La liberté du peuple est précaire ; mais chaque individu est prêt à la défendre avec chaleur. Les usages sont les seuls garans de la sûreté individuelle, et chacun est intéressé à les maintenir, quel- ques ridicules qu'ils soient. De Sierra-Leone à Vionunès, on rencontre les Bullans , les Tima- nais , les Bagos , les Suzis, les Nallos et la tribu particulière des Mandingues , si respectée dans toute l'Afrique. Cette race est répandue non- seulement sur la côte depuis le cap Monté jus- qu'à la Gambia, mais encore fort avant dans l'intérieur de l'Afrique : elle occupe presque toute la partie occidentale de ce continent. Des deux côtés du fleuve, les Mandingues font la masse de la population dans plusieurs royaumes, qui sont sous la domination des Foulahs. Dans tout le pays des Nègres , ils sont en possession de faire le commerce des caravanes, et d’ins- truire la jeunesse. Les Marabouts Mandingues lisent et écrivent l'arabe ; ils professent le ma- hométisme, et parcourentles tribus payennesen y établissant des écoles d'instruction. L’air de sainteté qu’ils ont , le pouvoir de détruire les sortilèges, qu'ils disent posséder, l'absti- 170 Histoire. | nence dés liqueurs fortes, et l'indulgence pour les préjugés des peuples chez lesquels ils vivent, sont les moyens par lesquels ils obtiennent une autorité réelle sur les esprits. Leur nom tire son origine d’un Etat considérable de l’intérieur, nommé Mandiny , situé dans le nord, près des sources du Sénégal, de la Gambie et du Niger. Le gouvernement est une espèce de république aristocratique ; mais ceux qui sontétablis sur les bords de la Gambie ont adopté la forme mo- narchique. Cette nation réunit dans ses mœurs, ses instructions, ses usages et ses opinions , le caractère général de toutes les races nègres. Nous ne pouvons pas les faire connoiïtre dans un extrait; nous nous arrêterons seulement à ob- server un usage qui a été imaginé par la jalousie. La polygamie est permise parmi eux : lorsqu'il y a plusieurs femmes dans un ménage, elles diri- gent les affaires domestiques chacune à leur tour. S'il s’élève quelque querelle entr’elles , et que l'autorité du mari ne puisse pas rétablir la paix, on a recours au Mumbo-Jambo. Cette es- pèce de ministre de la justice n’est autre que le mari lui-même, ou quelqu'un de ses amis : ce juge annonce son approche, vers le soir, par des cris affreux qu'on entend sortir d’un bois voisin ; dès qu'il est nuit, il entre dans la ville, vêtu d’une longue robe d’écorce ; il se rend au Bentang où tous les habitans sont assemblés. Le Mumbo-Jambo a un pouvoir absolu: tous sont découverts en sa présence , et obligés de re ï Œ C4 : # " 4 Afrique. 175 lui obéir. Il a environ huit ou neuf pieds de haut , et porte sur sa tête une touffe de paille fine. Toutes les femmes craignent que la visite ne soit pour leur compte; aucune cependant n'ose refuser de se rendre à l’appel qu’on lui fait. La cérémonie commence par des danses et des chants; ensuite le mungo désigne la coupa- ble , qui est aussitôt mise toute nue, attachée à un poteau, et rudement fouettée avec la verge du mumbo, au milieu des cris de joie et des ris de toute l'assemblée , tandis que les autres femmes cherchent à éloigner d'elles un pareil châtiment , en vomissant toutes sortes d’injures contre l’accusée. Les mystères de cette associa- tion sont dirigés par une société d’illuminés qui s'engagent, par un serment solennel, à ne ja- mais divulguer leur secret à une femme, ni à un garcon au-dessous de seize ans : ils ont, comme les francs-macons, un certain jargon inintelli- _gible pour céux "qui ne sont pas initiés. Le roi de Jogra eut la foiblesse de révéler le.secret à sa favorite , et toutes les femmes de la famille en furent bientôt instruites ; les chefs, craignant l'insubordination et l'infidélité de leurs femmes, s’assemblèrent pour remédier ou pour punir une indiscrétion aussi condamnable. Ils s'arrè- tèrent à une résolution hardie, et dont l’exécu- tion fut adroitement conduite. Lemumbo-jumbo ordonna au roi et à toute sa famille de compa- roître à son tribunal. Le prince eut la foiblesse d'obéir : il se présenta devant le redoutable in« 172 Histoire connu: après avoir été sévèrement censuré , àl fut assassiné sur-le-champ par l'ordre de ce ter- rible juge , ainsi que sa famille. MM. Watt et Winterboton visitèrent toutes les tribus nègres qu'ils rencontrèrent entre Vionunès et la Gambie. Dans la partie supérieure de ce fleuve, le long de Vio-Grande , on trouve l'empire des Foulahs, qui est le plus puissant, et la nation la plus nombreuse de la partie occi- dentale de l'Afrique , après les Mandingues. Les Foulahs ont la souveraineté de divers pays iso- lés entre Sierra-Leone et Tombuctou; ils pos- sèdent aussi une partie considérable du bas Sé- _négal, et la rive méridionale de ce fleuve dans toute l'étendue où il est navigable. Ils ont, en général, « la peau noire, la figure maigre et « alongée, le nez à la romaine, les cheveux longs « et doux comme de la soie; leur couleur varie « cependant depuis le noir de geai jusqu’à l’o- . « live foncée, suivant les cantons qu’ils habitent. « Dans le voisinage des Maures , ils ne sont « Buexe plus’ ee qu Sue tandis que chez « les nègres, ils sont presqu’aussi noirs que les « Mandingues et Les Jaloffs. Les Nègres les re- « gardent comme une race CRIE qui « dérive du sang maure , tandis que les Foulahs « se croyent supérieurs aux Nègres, et s’assimi- « lent aux peuples blancs. » Les voyageurs s'a- vancèrent dans les terres, et parvinrent jusqu'à la capitale du royaume des Foota-Jallo, nommée # Timbou. Le roi, avec lequel ils eurent plusieurs nm à à Afrique. 173 éntretiens, par le moyen de leur interprète, les accueillit avec cordialité. IL y a des écoles dans toutes les villes, et tout le peuple sait lire: il. professe la religion mahométane. Il y a de nombreuses mosquées ; mais la dévotion des -Foulahs est raisonnée et bien entendue. Ils peuvent rassembler seize mille hommes de ca- valerie , avec lesquels ils font des incursions sur le territoire des nations quiles environnent : la religion en est le prétexte, ces peuples étant tous idolâtres ; mais la vraie Cause de ces guer- res est de faire des esclaves. MM. Wost et Win, terton observèrent au roi et à plusieurs autres chefs, que le Dieu qu’ils adoroient étoit offensé . de ces injures faites à des voisins paisibles ; l’un d’eux leur répondit que si les F'oullahs pouvoient . se procurer les objets de commerce d'Europe sans esclaves, ils croiroient én effet que ces guerres offensent l'Eternel; mais que la chose étant impossible , Dieu ne pouvoit s’irriter de leur conduite , puisque le livre. sacré leur or- donne positivement de faire la guerre aux na- tions infidèles. Le peuple venu des sources du Sénégal et du Niger est répandu sur les bords de ces fleuves et sur ceux de la Gambie. L'espace compris entre le Sénégal et la Gambie, dont les sources “ sont à cent milles les unes des autres, forment … un delta alongé, dont l'angle le plus étroit con- tient les royaumes de Bambouk et de Galam, habités par les Serrawoollis, et celui de Fouta- 174 Histoire. Torra, par les Foulahs : les Mandingues occux pent la plus grande partie de la Gambie depuis sa source jusqu’à l'Océan ; mais la région mari- time intérieure qui se trouve entre l’embou- chure de l’une et l’autre rivière , et qui est sou- vent désignée sous le nom de Sénégambie , ap- partient principalement à une race de noirs connue sous le nom de Yalloffs. Cette nation, les Mandingues et les Foulahs sont les peuples qui possèdent toute la partie occidentale de l'Afrique. Presque tous les autres royaumes, toutes les autres tribus leur sont soumis. M. de Golbery , dans ses Fragmens de son Voyage en " Afrique, a fait connoître le gouvernement, les mœurs , les usages , le caractère de ces Yalloffs. MM. Browne et Horneman ont pénétré dans la région intérieure de l'Afrique peu connue jusqu’à eux. Les Etats qui sont arrosés par le Niger, les pays voisins du Kashna , le vaste em- pire de Bornou ont été parcourus par ces voya- geurs intrépides et instruits. Le Fezzan ,malgré les sables qui semblent vouloir le rendre inac- cessible, n’a point échappé à leurs observations. Leurs voyages ont été déja connus par des ex- traits insérés dans ce journal. Celui du .:ma- jor Houghton qui remonta la Gambie jusqu’à ‘ Pisania , est également intéressant, et il l’au- roit été bien davantage , si la mort ne l'avoit arrété dans sa course. Il avoit pénétré dans le royaume de Woolli. À Médème, qui en est la ca- pitale, il fut très-bien reçu par le roi lui-même =. RTS Boss RE nn à 2e «+ reert RAT Afrique. 175 qui lui donna diverses instructions sur les routes qu’il devoit prendre pour arriver avec plus de sûreté dans les contrées intérieures. Les rensei- gnemens le conduisirent dans le royaume de + Bambouk: le roi l’accueillit avec hospitalité, et le fit conduire jusqu'à Tombuctou : on ne sait pas précisément quelle fut la route qu’il prit à son départ de cette ville ; on croit qu'il se dirigea vers le nord , et qu’il tenta de pénétrer dans le Ludamar, Habiré par les Maures. Le voyage de Mongo Park qui lui A PRESS est . connu de tous ceux qui lisent d’autres ouvrages que des romans; on voyage avec lui presque dans tout l'intérieur occidental africain. De Pisania , il se dirigea sur les royaumes de Walli, de Bondou , de Kassou , de Kaarta, de Bambara, du Ludamar, de Tombuctou; et, après avoir supporté tous les dangers d’une entreprise si extraordinaire, toutes les maladies du climat, toutes les peines de l'esclavage, il retourna en Europe par Gorée. Le voyage de Mongo Park dés termine une infnité de positions géographiques sur une ligne directe de plus de onze cent milles, à partir du Cap-Vert. Il a fixé les limites qui sé- parent les Maures des Nègres de l’intérieur ; il a indiqué les sources, jusque-là inconnues, du Sénégal, de la Gambie, du Niger ; il a établi sur la carte le cours de ce dernier tel qu'il est actuellement ; il a expliqué avec clarté l'histoire des anciens Lotophages ; ; et, quoique M. Park n'ait pu parvenir jusqu'à Tombuctou et à 176 Histoire. | Houssa, il a fait connoître la Négritie mieux | qu'elle ne l’avoit été jusqu'ici. L'auteur de ce tableau historique, en ana-. lysant tous les voyages faits dans l’intérieur de » l'Afrique, a voulu instruire toutesles puissances : de l'Europe des avantages qu'elles trouve- M roient dans le commerce d'Afrique, et leur. faire connoiître l'influence qu'auroit un jour la civilisation de cette partie du globe sur les autres parties du monde. Sous ‘ce rapport ,. cette analyse est du plus grand intérêt ; sous le rapport géographique , elle est plus utile en- core : nos cartes ne nous auroient présenté que des déserts où on rencontre un grand nombre de villes et de villages, et quelques” comptoirs sur les côtes assez mal désignées. La # carte du major Rennel a peuplé ces contrées in-" connues jusqu’à nos jours. On est surpris qu'un. ouvrage presque uniquement consacré à nous faire connoître les progrès de la géographie africaine , ne soit pas accompagné d’une carte. A. J. D. B. LITTÉRATURE, mm ne sm LITTÉRATURE ORIENTALE. Brzrioruecæ ArAsicæ, pars III. D. J. præside Chr. Fr. Scunurker, lit. gr. et or. profess., etc., diebus…. aug. 1802, pu- blicè defendent, C: A. Fasen,elc. Tubingæ, in-4.° 02 p. Brerroranscæ ArAagrcæ,p.IV.D.J. » PTS. Chr. Fr.Scanvrrer... diebus.… aug. 1803, publ. def., J. Chr. G. Sriz etc. Tubingæ, in-4.° 48 p. Brarrorurcæ Ar4Bicæ, p. V. D. J., præs. Chr. Fr.Scuxurren, …. diebus.., septem- bris 1803, publ. def., F. G. F. Luz, etc. Tubingæ , in-4.° 40 p. Nous avons fait connoître précédemment dans ce journal (1} et le plan de la Bibliothèque arabe de M. Schnurrer, et les deux premiers morceaux de cet ouvrage qui ont paru sous la forme de programmes, dans les années 1709 et 1800. Les trois nouvelles parties , publiées sous la mème forme , en 1802 et 1803, et dont nous réunissons ici l'annonce , ne sont pas travaillées avec moins de soin que les précédentes, et ont certainement coûté à leur savant auteur plus de recherches et de peines. . (x) Mag. Encycl., année VI , tom. V, p. 340 et suir. Tome FI. 178 Littérature orientale. La troisième et la quatrième parties contien- nent les grammaires , les dictionnaires , et au- tres ouvrages relatifs à l'étude de la langue ärabe. Elles renferment cent quarante articles, et en outre quelques articles doubles. M. Schnurrer a eu soin de distinguer par une * ceux qui ne se trouvent point dans le Catalogue de Dictionnaires, Vocabulaires , Grammaires et Alphabets publié à Londres en 1596 , par M. Will Marsden. Ce sont, pour la plupart, des discours sur l’histoire, Ponte l'usage, la eulture de la langue arabe, et ses rapports avec la langue hébraïque. Parmi les articles importans contenus dans ces deux parties, on distinguera ce qui con- cerne la Grammaire et le Dictionnaire de Pierre d’Alcala ( n.o 34) ; le Dictionnaire de Giggéius (n.0 59) ; celui de Golius (n.0 74); le Diction+ naire arabe-turc de Van-couli (n.°° 88 et 99); les diverses éditions de la Grammaire d’Er- pénius, publiées par Schultens {n.°% 97 et 101); l’'Anthologie arabe de Hirtius (n.° 107); etc. Il ya peu de ces articles quinecontiennent ou des ob servations critiques, ou des anecdotes qui ap- partiennent à l’histoire littéraire. La cinquième partie de la Bibliothèque arabe a pour objet les livres composés ou publiés par des chrétiens pour l'exposition , la propagation ou la défense de la religion chrétienne, ou de la discipline ecclésiastique. Les différens cata- logues publiés à diverses époques, des livres im- Bibliographie. 179 primés par ordre de la Congrégation de la Pro- pagande, ont fourni à M. Schuurrer, comme on doit naturellement s’y attendre, les princi- paux matériaux de cette cinquième partie dans laquelle ne sont point comprises les éditions de la bible, ou de quelques portions de l’ancien et du nouveau testament, l’auteur les ayant réser- vées pour la sixième partie qu'il se propose de publier incessamment. Cette cinquième partie comprend soixante-six articles. Ce n’est pas sans quelque surprise que l’on remarque , en lisant cette cinquième partie, combien il est difficile de former l’état exact de tout ce qui a été imprimé en Europe pour l’u- sase des missions ofientales; et combien cette partie de la bibliographie présente de lacunes à remplir, de doutes à éclaircir, de difficultés à lever. On n'éprouveroit point ce&embarras, si, dans les principales bibliothèques de l'Europe, on eùt eu de tout temps l'attention de se procu- rer tout ce qui sortoit en ce genre des presses de Rome, d'Oxford, de Paris , de Leyde , etc ;et rien assurément n’eût été plus facile que de former ces collections, si l’attention de ceux qui étoient à la tête de ces bibliothèques se fût portée vers cet objet. Mais si, faute d’avoir eu cette atten- tion, la Bibliothèque impériale , par exemple, ne possède qu’une collection très-imparfaite des ouvrages publiés par la Congrégation de la Pro- ‘pagande , est-il étonnant qne l’on y cherche en vain la plupart des livres imprimés dans le cours M 2 180 Littérature ortentale. du 18.e siècle, soit à Alep, soit dans le Liban au monastère de Mar-Youhanna ôu Mar-Hanna, connu sous le nom de Sczoweir? Sans doute il eût été aisé d'obtenir des exemplaires de tous ces livres, curieux sous plus d’un point de vue, par lé moyen des consuls établis dans le Levant. Mais, quoiqu'il s’en trouve plusieurs dans les bibliothèques de divers particuliers, ils man- quent, pour la plupart, dans la Bibliothèque im- périale. Espérons que le travail deM.Schnurrer, en appelant l'attention sur cet objet, engagera les personnes qui consacrent avec tant de suc- cès leur zèle et leurs soins assidus à enrichir ce magnifique dépôt des connoissances et des er- reurs humaines , à prendre les mesures les plus convenables pour réparer une omission si pré- judiciable à l’histoire de la littérature et de la typographie orientales. | L'ouvrage deM. Schnurrer n’estetne doit être regardé, comme nous l'avons dit ailleurs , que comme un essai, et en même temps comme une invitation faite à tous ceux qui peuvent contri- buer à le rendre plus exact et plus complet, de lui communiquer leurs observations, ou des notices supplémentaires. Plusieurs des ouvrages indiqués par ce savant n’ont point passé sous ses yeux, et il seroit injuste de lui attribuer les erreurs que l'on pourroit y reconnoître. Nous en avons remarqué une de ce genre dans la notice d’un livre d'heures imprimé à Rome en 1692, qui se trouve dans la cinquiè me par Bibliographie. 185 tie de la Bibliothèque arabe, sous le n.°. 26. Si l’on en croyoit cette notice, avant l'édi- tion de ces heures, faite en 1692, il y en auroit eu cinq autres, publiées aux frais de diverses personnes dont les noms sont consignés à la fin de celle dont il s’agit. M. Schnurrer, qui n’a pu vérifier ce fait par lui-même, remarque que les catalogues de la Propagande ne font aucune mention de ces cinq éditions. S'il avoit eu sous les yeux ce petit volume, il auroit vu que la note arabe dont il n’a eu qu’une traduction inexacte , ne contenoit point l'indication de plusieurs éditions du mème livre, mais l’énu- mération de tous les bénéfices ou titres ecclé- siastiques conférés par le Saint-siége à l’éditeur de ces heures, tels que ceux de curé de Bagdad, de protonotaire apostolique, de comte du pa- lais , de porte-croix de Saint-Pierre, etc. Cette cinquième partie, à laquelle nous nous arrétons par préférence, parce que c’est celle qui contient l'indication d’un plus grand nom- bre d'ouvrages ou d'éditions peu connus, et que l’on peut considérer comme des raretés typographiques, offre plusieurs articles cu- rieux, et entre autres quelques-uns qui nous avoient paru omis dans les deux premières parties, mais qui, suivant le plan adopté par M. Schnurrer , ne devoient trouver place que parmi les livres relatifs à la religion chré- tienne. Tels sont l’Abrégé des Annales de Baronius , composé en arabe par le P. Brice, de M 3 182 Liltérature orientale. Rennes, missionnaire capucin (P. V, n.° 19 ); divers ouvrages de Timothée Agnellini , évèque de Mardin, imprimés à Padoue en 1688 et 1690 ( ib. n.9 26 et 27) ; le recueil de liturgies en grec et en arabe, imprimé en Valachie en 1701, à la demande d’Athanase , patriarche d'Antioche , et aux frais du Vaivode Jean Cons- tantin (ib. n.° 29). À l’occasion de ce volume liturgique , M. Schnurrer propose une con- jecture remarquable : il croit que les livres arabes imprimés à Alep, par les soins du pa- triarche Athanase ; dans le commencement du 18.° siècle, et dont on trouve de très-courtes notices dans la Bibliotheca orientalis Clem. V’a- ticana, town. T, p. 631, ont été imprimés avec lés mêmes caractères arabes qui avoient été em- ployés à l'édition de ces liturgies, et dont sans doute le Vaivodé Jean Constantin avoit fait présent au patriarche. M. Schnurrer pensoit, quand il a rédigé cet article , que la préface du pseautier imprimé à Alep en 1706 et dédié au ‘prince de Valachie, fourniroit vraisemblable ment des USA en sur cet objet. Cette préface , ou épitre dédicatoire dont il a obtenu depuis peu une copie , et qu il nous a commus niquée , ne répand aucun jour sur cette ques- tion. La conjecture de M. Schnurrer n’est donc encore qu’une conjecture , mais elle a beauccup de vraisemblance. 4 M. Schnurrer 4 donné, sur l'autorité de M. de Volney, la liste de divers ouvrages liturgiques Biblio; graphie. 183 ou ascétiques , imprimés au monastère de Scho- weïr : il n’en a pas connu plusieurs que nous avons eu occasion de voir, et dont nous nous proposons de lui communiquer des notices, tels que l’Ocroëchos et l'Æorologion des Grecs , tra- duits en arabe , et imprimés dans ce monas- tère , le premier en 1767, et le second en 1786, et les Actes du Concile du Liban , tenu en 1756, qui ont été imprimés en 1788, et forment un vo- lume in-4.° de près de 600 pages. Nous pourrons aussi lui donner des notices détaillées de ceux qu'il ne fait qu'indiquer ; tels que la Balance du cemps, les Vanités du monde , l’ Aliment de l'ame , (n.os 53, 55 et 58), et celui qui a pour titre : Taammoul el asbouè , c’est-à-dire , Méditations pour les sept jours de la semaine, et non comme il l’a cru, Méditations pour la Semaine sainte. (n.0 39.) in = Parmi les livres ascétiques , on remarque jus- qu'à six éditions de l’Imitation de J.-C. en arabe (n.0s 19, 46, 53, 54, 55 et 56), dont une sortie des presses du monastère de Schoweïr ; la troisième , faite pour l’usage des Luthériens, a souffert oops retranchemens , afin de l’ac- commoder aux dogmes de leur communion. Nous ne pousserons pas plus loin l extrait du travail de M. Schnurrer , qui, dans l état même où nous le possédons, est un véritable présent fait aux amateurs de la littérature orientale, et de l’histoire de la typographie. Nous ne pou- vons que renouyeler nos yœux pour la continua- M 4 184 Litierature orientale. tion de cet ouvrage, et inviter de nouveau les orientalistes et ceux qui possèdent des collec- tions de livres rares , à communiquer au savant et laborieux auteur de cette Bibliothèque tout ce qui peut servir à compléter son travail. S. de S. MÉDECINE TRAITÉE des maladies vermineuses ; précédé de l'Histoire naturelle des vers et de leur origine dans le corps hiumaïn; par Valérian - Louis Brera , professeur de clinique à l'Université de Pavie ; orné de cinq planches , traduit de l'ita- lien, et ausmenté de notes, par les CC. BarTnorx et CALVET, neveu , docteurs en médecine; 1 vol. in-8. : prix, broché, 6 liv. , et 7 fr. bo centimes par lu poste. À Paris, chez de Laplace, li- braire , rue Pavée -St.- André - des - Arcs, n° AL; A Pause Il est peu de parties de la médecine qui soient restées aussi long-temps sans principes, que le traitement des affections vermineuses : des re- mèdes incertains étoient souvent donnés pour chasser des vers, dont l'existence étoit elle- même incertaine. On s'est pendant long-temps occupé de la manière dont ils pouvoient s’in- troduire dans le corps, de leur génération : on Médecine. 185 paroit étudier aujourd’hui les affections vermi- neuses sous des rapports plus utiles, sous ceux d'histoire naturelle ; les signes qui peuvent faire connoître leur présence, et les moyens de les combattre. Les Italiens possédoient un ouvrage à-la-fois simple, concis et d’une très-grande érudition , les Leçons du professeur Prera-, sur les affec- tions vermineuses. MM. Bartholiet Calvet, neveu, médecins , viennent de le traduire en français : ils y ont ajouté quelques notes intéressantes. Nous ne pouvons juger du mérite de cet ou- vrage comme traducteurs, n’ayant pas l'italien sous les yeux; nous nous bornerons donc à le faire connoître sous les rapports scientifiques. L'auteur divise ce traité en quatre lecons, dans lesquelles il traite successivement de l’his- toire naturelle des vers, de leur origine, des affections qu'ils font naître , enfin du traite- ment qu'ils exigent. Chaque leçon est suivie de notes d’une érudition très-étendue, puisée dans les auteurs de toutes les langues. Le professeur Brera ne parle, dans ce traité, que des vers qui habitent le plus ordinairement le corps humain vivant; il les réduit à cinq classes : le sænia , les vers vesiculaires, le trico- céphale , l'ascaride vermiculaire et le lombricoïde. 1.° Le rœnia est un ver long (il y en a eu, sui- vant Baldinger , de 700 pieds ou 200 mètres de long) : il est blanchâtre, applati. Il en reconnoit deux espèces : le sænia armé , 186 Médecine. ou cucurbitain, qui est formé d’anneaux dis- tincts. Cette espèce a deux rangs de crochets à la tête, avec lesquels il se fixe dans les parois des intestins ; c’est, pour cette raison, le plus difficile à expulser : le /œnia non-armé , qui est plat, sillonné transversalement par des lignes qui le divisent en anneaux très-étroits : sa tête n'est point armée. Ces deux espèces varient dans leurs différentes parties, et suivant l’âge, la nourriture , etc.; ce qui a souvent fait croire que le même tœnia appartenoit à des espèces différentes. 2.0 Les vers vesiculaires habitent l’intérieur de nos parties , principalement celles qui abon- dent en vaisseaux lymphatiques. Il n'admet que celui indiqué par Bloch, sous le nom d’Aermite , parce qu'il est seul dans sa vésicule, et par op- position au ver yésiculaire social, qui est ren- fermé en grand nombre dans une même vési- cule : cependant cette espèce se rencontre SsOou- vent dans l’homme. 3.0 Le tricocéphale, c'est-à-dire à tète capil- laire, dont le siége le plus ordinaire est dans les gros intestins, est un filet long, entortillé , plus gros d’une extrémité qui est la queue, sur-tout dans la femelle: il n’est point hermaphrodite. 4.0 L’ascaride vermiculaire est petit, rond, fiilforme, ridé, blanc. On le trouve ordinaire-. ment dans le rectum , et le vagin chez les fem- mes : il jouit d’une très-grande contractilité. ÿ.0 Le lombricoïde, rond, long etrougeâtre, » Vers. 187 à sexe distinct, est armé d’une bouche à trois lèvres qui lui sert à percer les intestins, et à se frayer une route à travers les parties molles : il est souvent en grand nombre dans les intestins grèles et l'estomac. Les autres vers qu'on a trouvés dans le corps humain, sont regardés par l’auteur comme lui étant étrangers et introduits accidentellement : tels sont la douve , le gor- dius , l'exharidion , etc. La putridité , le système des molécules de M. de Buffon , ne sont point admis comme pouyant expliquer la génération des vers dans le corps humain : il est constant qu'on trouve dans plusieurs autres animaux les vers qu'on croyoit particuliers à l'homme ; il est probable aussi qu'on les retrouve dans la nature, hors des animaux, avec des différences qui tiennent aux diverses nourriture, - Ainsi les vers ne sont point innés dans le corps humain ; ; ils lui sont, pour ainsi dire, exotiques et communs avec ft autres animaux, qui, comme nous, en puisent les germes dans la nourriture nil fant que çertaines circons- tances favorisent leur développement ; sétc'est, en général, la présence des substances mu- queuses et l’asténie générale ou partielle. Les observations d’ Hippocrate , de Brendel, de Selle, qui ont trouyé des vers dans les FE tins de fétus non à terme ,nesont point, pour l'auteur , une objection valable : la ténuité quil fait observer dans les œufs, est une raison e 188 Médecine. suffisante de la possibilité de leur introduction dans les vaisseaux, et de leur passage des orga- nes de la mère dans ceux du fétus. Quand les vers sont développés dans le corps humains , il produisent des affections que l’au- teur distingue en celles qui sont communes à toutes les espèces de vers, et en celles qui ne Sont occasionnées que par une seule : on les dis- tingue encore suivant qu'elles ont lieu à l’en- droit où se trouvent les vers, ou qu’elles se font remarquer dans des parties éloignées. Les sympiômes communs des vers dans les intestins sont : visage pâle et plombé ; yeux fixes, cavés, tristes; pupiles dilatées ; déman- geaison de narines ; salivations ; céphalalgie après avoir mangé ; sommeil inquiet; vertiges ; toux sèche , convulsive ; pouls dur, irrégulier ; appétit ou nul ou vorace; soif intense ; nausées ; vents; sentiment de pierre dans le bas-ventre, supprimé par les alimens ; dérangement des fonctions alvines; urine crue et terne ; maï greur; ordinairement les malades se trouvent bien après avoir pris un verre d’eau froide. Les symptômes qui indiquent la présence de telle ou telle espèce de vers, sont, pour le tœnia , la sensation d’un corps étranger , de froid dans l'abdomen, de morsure vers l’esto- mac. Les malades rendent des papilles'sembla- bles à des graines de courges. Le tœhia armé produit des symptômes plus intenses que celui non armé : il occasionne quelquefois une sensa- Vers. 169. tion singulière ; c'est un sentiment de tension dans le nez. Les vers vesiculaires ou hydatides ont encore été peu étudiés. On en a trouvé dans toutes les parties du corps ; ils causent des accidens di vers et relatifs aux fonctions des parties. Le professeur Brera pense , avec Sæmeringue, qu'on a quelquefois pris des dilatations des vaisseaux lymphatiques pour des vers vesiculaires. Le tricocéphale survient plus ordinairement dans les fièvres adynamiques , ataxiques et mu- queuses , et généralement dans toutes les épidé- mies fébrilles. L’ascaride vermiculaire occupe le plus souvent le rectum ; il cause une très- grande démangeaison à l'anus, des grincemens de dents : on en trouve des boules assez consi- dérables. Le lombricoide fait sentir sa présence par de fortes douleurs ; il perce quelquefois les intes- tins ; il est très-sensible au froid , qui l’asphixie facilement. Il traite des affections vermineuses sympa- thiques, telles que les frissons, sentiment de res- serrement au gosier, démangeaison des narines, douleurs dans différentes parties simulant celles d’un rhumatisme de goutte , enfin une multi- tude d’affections nerveuses. Il indique de mème lesmaladies universelles qui déterminent, accom” pagnent ou suivent les affections vermineuses ; telles que l’état d’asténie, les fièvres des différens grdres. L'auteur ne reconnoît pas de fièvre ver: 190 Médecine. | mineuse ; il pense qu’alors une des fièvres essen- tielles se complique de symp'3mes nerveux, et de ceux qui annoncent particulièrement la pre sence des vers. Le traitement est le sujet de la quatrième le- con , que l’auteur commence ainsi : « La diathèse asténique du corps humain, « sur-tout lorsqu'elle prédomine dans le système « gastrique, est une des principales circons- « tances qui favorisent le développement des « germes vermineux. » Il est donc nécessaire de ne point augmenter cet état d’asténie par l'abus des émétiques, qui ne peuvent agir que par la secousse qu'ils occasionnent ; un régime tonique est donc le meilleur moyen profilactique et cu- ratif. Telle est la base du traitement; mais il doit encore différer suivant l'espèce de vers, les accidens locaux où généraux qu'ils occasion- nent, leut siége, leur qualité. En général, on peut dire qu'il est plus facile d'agir sur les or- ganes que sur les vers , et qu’il y a peu d'anthel- mintiques proprement dits. Les remèdes internes sont plus efficaces que les externes : cependant, il y a quelque cas où les frictions médicamenteuses, les épitèmes, sont les seuls moyens qu'on puisse employer : les substances diffusibles et anti-spasmodiques sont utiles pour combattre les accidens nerveux qui ont souvent lieu. Le règne végétal fournit différens remèdes contre les vers, et applicables à divers cas: Vers. L{oli L'allium cepa et le sativum ont été donnés avec succès contre le sœnia ; l'artemisia-santonica , l'anselica cortex réussissent contre les lombri- coides ; le chenopodium anthelminticum s'em- ploie, à l'Amérique septentrionale, contre les lombricoïdes ; l'assa fætida, le camphre se don- nent comme anthelmintiques , antispasmodi- ques ; lé geoffroya Surinamensis réussit égale- ment contre les /ombricoïdes et les ascarides ver- miculaires : l'huile , en général, qui paroît agir sur les vers en bouchant l’orifice de leurs tra- chées , est très-employée comme vermifuge. Le polypadium filix mas a été recommandé contre le cænia et les lombricoïdes ; mais il faut observer que cette plante n’opère que lorsqu'elle est fraiche. Il cite encore le spigelia anthelmia , le tanace- tum vulgare , la valeriane officinale, le veratrum sabadilla. Les traducteurs ont ajouté une note sur les essais faits en France, avec le lait de papaye , envoyé de l’ile de France ; il en résulte _ que ce médicament , quiparoit être très-eflicace dans le pays où il croit, ne l’est pointen Europe; au moins celles de ses préparations dont on a fait usage. Parmi les minéraux, le ruriate d'ammonia- que de baryte, de soude, le soufre, le fer, l'étain, tous ces moyens forment la matière médicale anti-vermineuse. L'auteur donne ensuite les différens trai- temens proposés pour les différens vers, tels 193 Médecine. que, pour le tœnia, la méthode de Rosenstein ; par l'eau froide etles eaux minérales; de Meyer, par l'acide carbonique ; de Chabert, par le car- bonate ammoniacal liquide et l'huile de théré- bentine ; de Nouffer, avec la fougère mâle ; d'Odier , par l'huile de ricin; de Dessault, mé- decin de Bordeaux, par les frictions mercuriel- les ; celle d’ Aston, par la limaille d’étain; enfin la méthode de Matthieu, qui est jugée la meil- leure , et qui réunit l’'étain , la fougère mâle, la semence santolique et les drastiques. Les tra- ducteurs ont indiqué en note le remède par l'éther, de M. Bourdier, médecin de l'Hôtel- Dieu de Paris. ÿ Il est des malades sur lesquels la plupart de ces remèdes ont échoué. Ne seroit-il pas conve- nable de faire suivre aux malades un régime to- nique , de les mettre à l’usage des médicamens fortifians , comme les amers, le quina, avant de commencer un traitement expulsif des vers? Cette pratique m'a réussi plusieurs fois. Il assimile , pour le traitement, Les vers vesi- culaïires aux hydropisies ; c’est l'habitation des lieux élevés , les diurétiques , les diaphoréti- ques et les toniques. Le ér'cocéphale , qui ne pa- roît que dans certaines maladies fébrilles épidé. miques ; la consomption ne demande que le traitement convenable à la maladie principale. On parvient à détacher du rectum les ascaré- des vermiculaires , par l’intioduction répétée d’un morceau de lard dans l'anus ; les vers s'y attachent Vers. 103 ‘#ttachent, on les retire avec lui, Les lavemens ‘de 2eo/ffroya Surinamensis , d'assa-fotida , de ve- ratrum sebadilla , de lait, ou d’eau bien salée, d’Auile de ricin , les suppositoires de savon sont aussi souveñt utiles. Il est nécessaire de joindre à ces moyens, les remèdes par la bouche; tels que le camphre, la valériane , le fer, l'élixir de Mynsicht , et l'exercice du cheval. | Les lombricoïdes sont quelquefois très-difficiles à expulser. L'auteur rapporte les règles établies par Rosensiein, de donner les remèdes le matin à jeun , dans un véhicule , ou entre le lait, l'hy- dromel. Le malade ne doit point toucher , ni flairer les préparations, car les lombricoïdes sont très-sensibles aux odeurs. Quand il y a des convulsions, qu’on peut présumer être causées par la morsure des vers, il suffit, pour les éloi- guer, d'une friction de pétrole , ou de quelqu’é- pithème odorant. Enfin le malade doit, pendant quelques jours avant, faire usage d’alimens âcres , secs, salés, et boire peu; il recommande sur-tout de manger du hareng le soir, et sans boire. Tous les vermifuges sont employés contre ces vers. On vantesur-tout le sulfate de fer combiné aux semences de l'artemisia, de la santonia , au juleps; l'ail, le chou les broues de noix, le camphre. Lorsque la fièvre complique les affections vermineuses, il faut traiter la maladie princi- pale ; c'est alors qu'on a quelquefois besoin des _émétiques : les toniques conviennent ensuite Tome FI. N 1 04 Medecine. comme traitement des fièvres nerveuses et fa- vorisant l'expulsion des vers. Enfin, les moyens de prévenir les rechutes sont un bon régime et les toniques. Des planches très-bien gravées donnent les Bgures des cinq espèces de vers, et de leurs parties , soit de grandeur naturelle, soit vu à la loupe ou au microscope. Nous pensons que MM. Bartholi et Calvet ont rendu un très-grand service à la médecine fran- çaise , en rendant familier cet excellent travail, qui doit ètre regardé comme classique. Nous avons fait connoitre le plus fidèlement qu'il nous a été possible, les idées de l’auteur ; c’est la meilleure manière de faire Féloge d'un bon ouyrage. GRAPERON, Doeteur-Médecin de Paris. “ < HISTOIRE. Curisroru Gottlicb von Murr über den wahren Ursprung der Rosenkreuzer und eds Freymaurerordens nebst einem An- hange zur Geschichte der Tempelherren. C'est-à-dire : Sur la véritable origine des frères de la Rose-Croïx, et de l’ordre des Francs-Macons; suivi d'un Appendice sur lustoire des Templiers ; par Christophe- Théophile de Mure. Sulzhbach, chez Jeart Esaïe Seidel, 1803; in-8. de 160 pages. La Société des Francs - maçons n'a point, suivant ses sectateurs , üne origine suspecte, et à laquelle on puisse reprochér le défaut d'an- cienneté : à les entendre, ce seroit encore trop peu que de la faire remonter à Salomon ; le temps qui précéda le déluge est l’époque sûre et véritable à laquelle on doit fixer la franche maçonnerie. Mais, avant d'entrer en matière, voyons ce que dit M. de Murr sur l’origine des Frères de la Rose-Croix, les prédécesseurs des francs-macons. On doit la chercher , dit-il, au milieu du seizième siècle; et c’est principalement aprés la mort de Paracelse qu'on vit paroître en Allemagne sur la magie, la théosophie, et l'al- chymie, une foule décrits tous plus diffus et plus obscurs les uns que les autres. Il n’est pas N 2 196 Histoire. . hors de propos de dire ici un mot sur Paracelse? malgré le charlatanisme qu'ilemploya, on ne sauroit cependant nier que la médecine et la _chymie ne lui doivent réellement beaucoup. Avant lui, le langage de la médecine étoit un composé de latin, de grec et d’arabe ; et toute la pratique de cet art se bornoiït à la saign la purgation, aux vomitifs, et aux lavemens. Paracelse fit voir aux médecins leur ignorance , et publia de meilleures maximes ; il écrivit aussi sur la chirurgie qu’il entendoit très-bien. Rapportons ici le jugement de Guntherus d’An- dernach , qui a peut-être le mieux apprécié son mérite. Paracelse, dit-il, est un très- habile chymiste ; il a mis dans ses ouvrages d'excellentes choses: mais il y a mêlé aussi un grand nombre de principes faux et frivoles, eta répandu une si grande obscurité sur ce qui est bon , qu'il demeure presque toujours inintelli- gible. Le fanatisme de ses élèves, qui n’avoient ni les connoissances de leur maître , ni son zèle pour les sciences, embrouilla bien davantage son système en vouant l'étendre ou l’inter- préter. Léonard Thurneisser, dit M. de Murr, fur un de ses enthousiastes. Sachant un peu de mathématiques, il s’occupa beaucoup de l’astro- logie à laquelle il avoit conçu le projet de réunir là chymie et la théosophie , alliance dont il espé- roit de grandes découvertes. Il publia sur ce sujet A/agra Alchymia et Quinta Essontie , | Rose-Croir. 197 ouvrages qui ne renferment que des réveries et des sottises alchymiques. Thurneisser eut aussi des disciples qui cherchèrent à le surpasser: c'est alors qu’on vit naître les idées les plus monstrueuses que jamais l'esprit humain ait éônçu. Aux folies de l’alchymie, dont le prin- cipal but fut de trouver la pierre philosophale, on ajouta la cabalistique : dès-lors, on ne s’ac- cupa qu’à épurer l'or dans le creuset; et il n'étoit pas rare de voir des gens très-riches se. ruiner pour satisfaire leur avarice , ou leur insa- tiable curiosité. M. de Murr donne ici l’'énumé- ration chronologique des principaux ouvrages publiés sur Falchymie et sur la pierre philoso- phale. Il n’existoit point encore à kette époque de sociétés d’alchymistes ; mais les principaux avoient entre eux une correspondance suivie. Entre autres écrits, Jacques Boehm en pu- blia un intitulé l' Aurore, rempli de réveries et d’extravagances: ce fanatique étudia principale- ment l’Apocalypse , d’où il tira des prédictions sur le sort des fidèles : ses ouvrages furent tra- duits en hollandais et en anglais. Ce fut à-peu- près dans ce temps qu'il se forma une société. dont les partisans de Boehm furent les chefs ; ceux qui la composèrent prirent le nom de Frères rose-croix , titre dont on a cfu trouver l'origine dans ces deux vers allemands attribués. à Luther : Der Christen Herz auf Rosen geht VWVanns mitten unterm Kreuze steht. N & 108 Histoire. Ce qui veut dire: /e cœur des chrétiens marche sur des roses , quand il est sous la croix. Cette société eut bientôt une foule de secta- teurs ; il s’en établit une pareille en Hollande et en Angleterre, et même en France. Voici un trait d'un frère de l’ordre de la Rose-Croïx, rapporté par M. de Murr. « Un Rose-croix alla trouver Henry Ier, Le de Bouillon, vers l’an 1620, et lui offrit ses ser- vices. Je veux vous rendre plus riche que tous les rois du monde, lui disoit-il; mais je ne puis rester que deux jours dans vos états : il faut absolument que j'aille joindre à Venise la grande assemblée des frères ; gardez bien le secret que je vais vous apprendre. Envoyez chercher de la Hitharge chez le premier apothicaire de votre ville, jetez-y un grain de cette poudre rouge, que je vous donne , mettez le tout dans un creuset , et en moins d’un quart-d'heure vous aurez der or. L'opération fut faite sur-le-champ, et réussit parfaitement ; car notre alchymiste avoit fait acheter auparavant toute la litharge qui se trouvoit chez les apothicaires ; il l’avoit fait ensuite revendre char gée de quelques onces d'or; en partant il avoit eu l adresse de faire présent de toute sa poudre-au duc. N'ayant plus rien pour aller joindre ses chers confrères, il demanda vingt mille écus comme frais de voyage. Le prince ne doutant pas qu'ayant fait trois onces d’or avec trois grains, il en tirât trois cent mille onces de trois cent mille Rose-Croix. 169 grains , trouva la demande de notre alchymiste trop modeste , et lui ft compter quarante mille écus au lieu de vingt mille. Notre frère Rose- croix partit et ne revint plus ; toutes les expé- riences ultérieures du prince pour faire de l'or, furent vaines et sans aucun produit. » «+ La confrérie des Rose-croix en Angleterre s’accrut de jour en jour ; elle quitta le mot de Rose-Croix pour celui de Sophi,Sapientes. Voici ce qu’on trouve, à ce sujet, dans le Clavis phi- losophiæ et alchemiæ Fluddanæ : « Fratres R. C. « olim sic dicti, quos nos hodiè Sapientes voca- « mus, omisso illo nomine, tanquam odioso , « miseris mortalibus velo ignorantiæ obductis , « et in oblivione hominum j jam ferè sepulto. » C'est dusein decettesociété quenaquit, en An- gleterre , lan 1633, l’ordre des francs-maçons. On quitta les cérémonies puériles des anciens ‘ Rose-Croix, et le but de la nouvelle association fut de propager la philanthropie et la liberté des cultes. M. de Murr donne le détail de ses règle- mens et de ses statuts, trop connus pour en parler ici : il ajoute que Cromwell fut leur prin- cipal protecteur , et ; en quelque sorte , leur chef. Les réflexions que fait M. de Murr sur l'état ancien et actuel des francs-maçons, sont irès-justes , et méritent d’être lues. L'’appendice sur l’histoire des Templiers, en Portugal et en Espagne , que M. de Murr a joint à son livre sur les francs-maçons, est proprement un extrait de l'ouvrage du comta N 4. 200 Historre. de Campomanès, qui porte pour titre: Disser< taciones historicas del Orden y Cavalleria de las Templarios , o resumen historial c'e sus principios Jundacion, instituto, progressos in extencion en el conciiio de l’iena , y un apendice o supièmento, èn que se pone la regla de esta Orden , y diferen- tes privilegtos de ella , con muchas dissertaciones y notes , tocantes no solo a esta Orden , sino a los de $S. Juan, Teutonicos , Santiago , Calatrava , Aicantara, Avis, Montesa , Christo , Monfrac y otras Iglesias y monasterios de Espana , con varios catologos de Maestres. Madrid, 1747. 40. M. de Murr y joint une notice des livres dont ôn peut faire usage. L'ouvrage est terminé par la représentation du sceau d’un grand-maitre de l’ordre. Lossrein. et VARIÉTÉS, NOUVELLES ET CORRESPONDANCE LITTÉRAIRES. NOUVELLES ÉTRANGÈRES. ALLEMAGNE. Suite de la Notice sur les travaux des meri- bres de l'Université et de | Académie de Gaœttingue. (1) Journar für die Botanik, herausgegeben von Professor Scnraper. Journal de botanique, Par M. le professeur Scnraper ; second numéro du cinquième vol. 1803: Gœttingue, Dieterich , avec 4 gravures et le portrait du professeur Schwartz , à Stockholm. Neurs Museum der hilosophie und Litteratur ; von Prof. Bourenwecx. Mélanges de philoso- phie et de littérature, par le prof. Bourer- weck. Troisième cahier. {r) Voyez supra, page 82. 202 Nouvelles littéraires. VonrarTu kleiner Anmerkungen über manche gelehrte Gegenstænde. Différens Mémoires sur quelques objetslittéraires ; par Jean BEzLMANN, professeur d'économie à Gaœættingue. Second vol. , 1803. Rœver. Gœtting. Le mémoire envoyé à la socitté, en réponse à la question proposée par la classe mathéma- tique, pour noyembre 1803 , sur la faculté qu'ont les corps de s'échauffer au soleil, qui por- toit pour épigraphe , Rome n'a pas été bätie en un jour, et qui a obtenu l’accessit, est de M. l'ré- déric Mein/rausen , membre honoraire de la so- ciété rurale du Mecklenbourg. Anfansssründe der }undarzney - Kunst von Hofrath Ricurer. Elémens de Chirurgie, par M. Ricurer. Septième et dernier vol. Diete- rich , Gaœttingue ; avec 12 gravures. Ce volume traite, entr'autres objets, de l'opé- ration césarienne , de l'opération de la pierre, de l’amputation des membres , du panaris, etc. Dans la séance du 17 décembre 1803, M.'Tych- sen a lu un mémoire qui traite de l'origine et de l'histoire des Afganes. Les Afganes , peuple pas- teur et guerrier , qui habite les montagnes de Candalkhar et de Caboul , entre la Perseetl'Indos- tan, ont, dans leur histoire , une ressemblance frappante avec les autres peuples de l'Asie , les Assyriens , les Chaldéens , les Perses , les Turcs, etc., qui, de nomades et de hordes er- \ 0 Nouvelles littéraires. 203 rantes qu'ils étoient, devinrent les conqué- rans et les fondateurs de grands empires. Déja depuis long-temps ils étoient connus dans l'histoire de l’'Indostan , soit comme brigands , soit comme troupes soldées des princes voisins , soit comme conquérans de provinces considérables ; mais ce fut vers le iilieu du dernier siècle , qu'après la conquête d’Ispahan , et après qu'ils eurent détrôné la dynastie des Sophis, en Perse, qu'ils furent connus en Europe. La facilité avec laquelle” un ramas aussi peu considérable de nomades barbares détruisit un ancien et puissant royau- me , étonne tout le monde, quoique ces scènes se soient offertes souvent dans l’Indostan : cet événement occasionna plusieurs mémoires etdes ouvrages publiés par des européens, qui séjour- noient dans l'Orient , et dans la Perse alors plus liée qu’à présent avec l'Europe. Ces écrits firent naître la question : Qui époient ces Afzanes , et, d'où ils venoient ? Comme on étoit peu versé dans l’histoire de l’Indostan , on ne pouvoit ré- pondre à cette question que par des conjectu- res ; mais à présent que les écrits des Anglais, sur l'Indostan, offrent plus de données pour discuter sûrement ce point, il n’est pas inu- tile d'examiner plus attentivement l'origine et l’histoire de ce peuple , et de suivre le chemin qu'a indiqué Jones , qui croyoit trouver dans les Afganes, les anciens peuples d'Israël : peut-être ces recherches serviront à expliquer 204 Nouveilés littéraires. les fables et les hypothèses que l'on nous offre. sur l'origine des Afganes ; et elles seront du. moins intéressantes, en ce qu’élles concernent un peuple florissant encore, et régnant dans uné grande partie de la Perse et de l'Indostan, sous le nom de Patanes d'Abdalis , où de Dura- ais. Il ÿ a deux principalés opinions sui l'origine. des Afganes ; l’une , que l’on peut nommer l'o- pinion européenne , les fait sortir des anciens häbitans d’Albanie surle Caucase, qui, forcés par Tes ravages de Tamerlan ou de Gengis-Kan, ou peut-être par d’autres raisons, doivent s'être retirés peu à peu dans les montagnes éntré l’In- dostan et la Perse. Cetté opinion a été d’abord répandué par le jésuite Xrusinski ; Garber et Reiness s’én emparè-. } (C1 P rent , et elle a été adoptée par la plupart des savans européens. Mais lorsqu'on l’éxamine at- tentivement, elle ne paroit pas soutenable ; et, à la fin, tout sé réduit à la ressemblance du nom. Les Arméniens prononcent lé mot {lba- nien comme /ghwanien, en chan géant /ben gl; ainsi, si le mot #gwane étoit le “réritable nom du peuple, il est clair que ce seroit lé mème mot qu’Albanien. Mais sans objécter que la ressem- blance de non ne suffit pas pour prouver l’iden- tité du peuple , cette ressemblance n'existe À pas ; car , dans tout l'Orient, cette nation À est appeléé Ougané, Awgané , Afgane : le chan- » gement de prononciation paroïît venir des Ar- méniens eux-mêmes. Si les Afganes sont nom ; L 4 ET Nouvelles littéraires. 205 més dans l’histoire d'Arménie , et sont regardés comme appartenans à l’église arménienne, cela paroît être seulement une confusion de noms; tous les passages où il est question des Afganes, dans l’histoire d'Arménie , doivent s'entendre des Albaniens ; enfin on ne trouve pas une seule trace historique de l’émigration des Albaniens à Candahar. Leur séparation, forcée par Tamer- lan et Gengis-Kan, est contraire à l’histoire ; car on trouve déja auparavant dans celle de l’Indostan , les Afganes séjournant dans les pays qu'ils occupent à présent. Un passage d'Ammien (xxx, 2) pourroit offrir l’'idéeque les Albaniens ou les Alains , comme on les nomma plus tard, passèrent dans les Indes vers le quatrième siècle; mais ce passage présente le nom d’A/ains dans un sens si étendu , et comprend , sous cette dé- nomination , tant de différentes peuplades du nord de l'Asie, qu'il est diflicile d'en tirer quel- que conséquence : ainsi il est historiquement peu vraisemblable que ies Afoanes viennent du Caucase. n La seconde opinion repose sur une tradition des Afganes eux-mêmes , qui assurent qu'ils descendent des Hébreux, et mème d'un petit- fils du roi Saul. Cette opinion a plus de probabi- lités pour elle ; car on sait que les Hébreux, non-seulement après les premiers désastres de leur royaume , mais encore après la destruction de Jérusalem , par Titus , se sont répandus au loin dans l'Asie, ont formé des petits états dans 206 Nouvelles littéraires. plusieurs pays, par exemple , en Arabie, sur le Wolga, en Perse et dans le Chorasan; et que dans d'autres pays les familles des rois prétendoient descendre des Juifs. Mais cette tradition , dans laquelle on trouve des allusions évidentes à l'Alcoran , paroït être d’une époque plus ré- cente, qui ne peut remonter qu'au temps où l'islamisme fut répandu parmi les Afoanes. Le penchant qu'ont ceux-ci à regarder leur nation comme très-ancienne , aura occasionné cette fable; c'est aussi de cette manière qu'il faut considérer la tradition que quelques Afganes descendent des AEoyptiens. L'idée que Ferischta, dans Dow, nous donne, et qu'il a vraisemblablement tirée de sources indiennes, est beaucoup plus vraisemblable ; il dit que, déja dans le sixième siècle, avant la naissance de J. C., les tribus indiennes, les, Gicker et les Tschoppis (les premiers demeu- rent encore dans le Pantschab , et les derniers paroissent être leurs voisins ) s'emparèrent des montagnes de Candahar et de Caboul, et s’y maintinrent sous le nom d’Afganes. D'a- près cette tradition, les Afganes viendroient de l'Indostan , ce qui s'accorde fort bien avec ce que l’on sait de leurs mœurs et de leur conformation. La langue des Afganes offriroit une raison très-forte et très-décisive ; mais nous ne la connoissons pas: nous avons seulement quelques lignes de la langue Puschto , dialecte afsane, qui se trouvent dans le quatrième vol, : | [A Î À Nouvelles lutéraires. 207 des Asiatik rescarches , et elles offrent peu de ressources et d'intérêt : cependant, ce que l'on peu affirmer, c’est qu'il ne s'y trouve pas la moindre ressemblance avec le chaldéen , quoi- que Jones prétende avoir observé cette réssem- blance dans un dictionnaire afgane. L'auteur du mémoire a découvert une origine plus vraisemblable des Afganes ; et d’après cela , il expose les principales données deleur histoire , qui, à la vérité, sur-tout dans les anciens temps, ne sont pas d’une égale certitude , mais qui peuvent , dans la suite, être confirmées. L'his- toire la plus reculée des Afganes se perd dans l'obscurité des temps, comme celle de chaque peuple pasteur, peu civilisé. Leur nom ne pa- roit pas encore dans l'histoire d'Alexandre et de ses successenrs , quoique ce conquérant ait, dans ses expéditions, touché leur pays. On a pris la ville d'Alexandrie dans l’Azachosie, poûr Candahar, à cause de la ressemblance du mot avec Secander , nom d'Alexandre chez les Orien-. taux; mais Rennell a assigné, avec raison, à. cette ville, une autre place. C’est vers la fin du septième siècle que l’on entendit parler, pour la première fois , des Afoanes ; car leur prétendue ambassade à Mahomet, et les honneurs que le prophète doit leur avoir rendus, ont été ir- ventés après coup : mais en 681, un Arabe, gouverneur de Caboul, se sauva, avec sa fa- mille, chez les Afsanes, dans les montagnes Soleiman , entre Multan et Pischawer : alors les 208 Nouvelles ltéraires. : Arabes paroissent s'être confondus avec les Afganes. En 760 , ceux-ci se répandirent dans le Kisman , le Pischawer et Schinwaran, et battirent les troupes du Raja de Lahore et de Adschmir. Dans le neuvième siècle, sous les Sam- manides, quisoumirent une partie des Afganes, on croit qu’une colonie de ces derniers se re- tira à Hesareh, à l'est de Herat; ils se firent mahométans , et les autres suivirent leur exem- ple. Du temps des Gasnerides, dans le dixième siècle , ils servirent dans les armées de ces prin- ces, et contribuèrent beaucoup à la conquète de l’Indostan : ils pouvoient lever vingt mille cavaliers. Schehaboddin , fondateur de la dynas- tie des Gaurides , à la fin du douzième siècle, fit servir également les Afganes dans les armées : ils conquirent Dehli et Canudsche; alors ils pri= rent le nom de Paranes, du mot indien Païina, Attaquer ; et leurs chefs prirent le nom de Kan. Dans le milieu du treizième siècle, le grand Kan des Mogols, Mangu , envoya à son frère: Holagu , une armée pour l'aider dans ses con- quêtes vers l'Occidént : une partie de cette ar- mée resta à Æesareh ; ainsi les Mogsols se mélè- rent avec les Afganes. Ces Afsanes se nomment Abdailis , et sont de la secte d’Ali. Tamerlan , lors de son expédition dans l’Indostan , fit. la guerre avec plusieurs tribus afganes : peut-être ia montagne Soliman où demeuroient particu- lièrement celles-ci, tire-t-elle son nom de son chef Soliman. En 1440 s'éleva la dynastie” des Er RE Et Ca ads dd te Nouvelles littéraires. 209 des Lodi - Afsanes qui régnoit à Dehli. Les Ti- murides, Baber et Homainn, firent plusieurs tentatives contre l'Indostan ; mais l'Afgane Schirschah les repoussa, et il s'éleva une seconde dynastie de Patanes en 1542-52, qui, enfin, vainquit /lomainn , et fonda cette dynastie puis- sante qui a duré jusqu'à nos temps sous le nom du grand Mogol. Alors les Afganes étoient d'a bord, sous les Indous et ensuite sous les Per= sans , plutôt comme alliés que comme sujets, parce que leur force et leur courage, ainsi que leur position entre deux royaumes jaloux l’un de l’autre, assuroient leur indépendance. Ils fu- rent gouvernés par des chefs afganes comme eux , jusqu'à ce qu’au commencement du dix-huitième sièele, les Persans les forcèrent _ de se soumettre à un gouverneur de Géorgie qui vint avec des troupes étrangères; mais la suite en fut que sous Mirweis , ils se rendirent tout-à-fait indépendans , et que bientôt , sous son fils Mahmoud , ils conquirent la plus grande partie de la Perse. Nadir les soumit une seconde fois, et en transplanta des colonies dans d'au- tres pays. Sa mort, en 1747, fut le signal du départ de ces peuplades transplantées pour l'ancien lieu de leur séjour. Ahmedkan , un ab- dalli, commandant des troupes afganes de Na- dir, alla à Candahar où, sous le titre de /hmed' Schah (roi) il fonda un nouveau royaume qui comprenoit Caboul , Candahar , Pischawer, Gasna, Gaur, Segestan, Korasan , à-peu-près Tome VI. 310 Nouvelles littéraires. les possessions de l’ancien royaume des Gasne- rides. La puissance des Afsanes atteignit sous lui son plus haut degré , et ils eurent la plus grande part à la sanglante bataille de Paniput en 1761,entre les Marattes et les princes mahomé- tans alliés; bataille qui assura la domination des derniers, et vraisemblablement celle des Européens dans l’Indostan. Ahmed Schah mou- rut en 1775, et laissa son trône à son fils Ténur Schah, auparavant souverain d'Hérat, et qui choisit pour sa résidence Caboul où , en 1785, Forster Le trouva: c’étoit un prince inactif, sous le règne duquel les revenus de l’Etat avoient diminués , et l'armée étoit dans le plus mauvais | ordre. Son fils Zeman Schah , qui lui succéda en 1796, paroît avoir eu des inclinations plusguer- rières ; le temps apprendra si, sous lui, la puis- sance des Afsanes augmentera encore. Venrassunc der æœffentlichen medizinisch-chirur- gischen Xlinik in Gœttingen ; nebsteiner Einlei- tung über klinische Anstalten überhaupt, von 2 K. Hiuzy. Oncanisarion du Cours public de Clinique médico-chirurgicale à Geœættingue , avec une Introduction sur les instituts de Clinique en général; par C. Hruzy. Gat- tingue , Schroëder. Le docteur Olbers annonce à la Société , dans k une lettre à M. Mayer , qu'il & aperçu une comète le 12 mars, vers minuit, sous le bouvier, À î | Nouvelles littéraires. art près de l'étoile de la Vierge, 725 d'après le catalogue de Bode. La comète paroït dans la lunette de nuit, assez vive et plus grande, mais un peu plus pâle et moins terminée que la nébuleuse sur la balance, près du mont Me- nalus , laquelle n'étoit pas très-éloignée de la comète. Avec la plus grande lunette achroma- tique , on distinouoit un noyau mal terminé. D'après une détermination provisoire , l'ascen- sion droite de lx comète étoit , le 12 mars, à 12 heures 37 minutes vrai temps — 220° 16’. La déclinaison boréale 7° 20’. Le 13, à 11 heures 20 minutes , ascension droite = 220°, 20° décli- maison boréale — 11° 20’. Ainsi la comète va par une ascension droite peu variable , assez vite vers le nord , et est par rapport à la longitude , rétrograde. M. Olbers communiquera à la So- ciété ses observations ultérieures, ainsi que ses calculs. Gorrrinerscue Academische Annalen von C. Met- NERs. ANNALES de l'Université de Gæœttingue; par C. Meiners. Premier vol. Hanovre. Le but de ces Annales est d'offrir une expo- sition historique des instituts publics de l’uni- versité ; de courtes biographies des professeurs morts dans l’année, ou des notices sur leurs ouvrages; des:listes des étudians inscrits, et de. ceux qui sont partis, ainsi que de ceux qui sont _ devenus docteurs dans les quatre différentes O 2 212 Nouvelles littéraires. facultés ; des détails sur les changemens sur- venus dans la constitution ou l'administration de l’université ; enfin toutes les recherches que l'auteur, d'après le plan qu'ils’est tracé , ne peut insérer dans son Histoire générale &es. Uni- ..versités. Ce premier volume contient les articles suivans : 1.0 Mémoires pour servir à l’histoire de la bibliothèque de l’université ; 2.° Notices sur un legs que fit M. Dreyer, proto-syndic et président du consistoire à Lubeck , à l’univer- sité de Gœttingue; 30. Histoire de la déposition et da pénalisme ( anciens usages que l’on obser- voit dans les universités , vis-à-vis des nouveaux arrivés); 4.° Remarques sur l’état de la disci- pline académique à Gœttingue en 1802; 5.0 His- toire abrégée des costumes et des lois sur les habillemens dans les universités; 6.2 Liste des ouvrages du professeur Schæncemann , mort le 2 mai 1602; 7.° Histoire abrégée du port d'armes dans les universités ; 8.0 Liste des étudians qui ont pris leurs grades à l’université, depuis le premier mars 1862 jusqu’au premier mars 1805; g-o Remarques sur la population et la mortalité des dernières années; 10.0 Supplément à l'His- ” toire de notre bibliothèque ; 11.° Souhait pieux; 12.0 Notice abrégée des changemens survenus M depuis mars 1802 jusqu'en mars 1803, dans ‘ l'administration et la constitution de l’univer- 4 sité ; 13., sur le nombre des dombstiques et des. Nouvelles littéraires. 213 5.9 quelques détails sur le mal que la guerre a fait à Gœttingue , sur-tout en 1760 ; 16.0 quel- ques lois sur les marchés d'approvisionnement dans les villes où ily a des universités ; 17.° liste de ceux qui sont devenus docteurs depuis 1803 jusqu'en 1804. Horran Gmeun's Grundriss der allzmeinem Chymie zum Gebrauch bei V'orlesungen. Zweite /usgabe. Elémens de chymie générale; par M. Gueux , seconde édition extrémement augmentée. Gættingue, Vandenhœck et Ru- precht. Kirchliche Geographie und Statistik , von Doctor Carl. Sraupuin. Géographie etStatistique de l’église; par le docteur Ch. Sraupun. Pre- mière partie. Tubingue. Cotta. Macasin für a. und DE. chichte. Magasin pour l’histoire de la religion, de la morale et de l’église , par le docteur Charles Srsupzin. Troisième vol. , 1804. Dans la séance du 21 avril, M. Heyne a lu un |. mémoire De Babyloniorum Instituto religioso , ut mulieres ad Feneris templum prostarent ; ad He- rodotum 1,1999. Ce mémoire est, en quelque façon , le pendant de celui que M. Heyne a lu en 1786, et qui se trouve dans le huitième vol. _des mémoires de la Société, De religionibus et sacris cum furore peractis. Il est intéressant de xechercher la trace d'anciens usages, sur-tout 0 3 214 Nouvelles littéraires. des usages religieux, et d'examiner leur origine, et ce qui y a donné lieu. Comment le culte d’une divinité pouvoit-il être associé à la viola- tion des mœurs? Un des usages les plus singu- liers de cette nature , est celui qu'Hérodote ra- conte des Babyloniens (liv. I, ch. 199); que cha- que Babylonienne étoit obligée, une fois dans sa vie, de se prostituer à un étranger dans le tem- ple de Mylitta (Vénus) : nier le fait, lorsqu'il est prouvé historiquement, même quand ce se- roit avec l'esprit de Voltaire , cela ne suffit pas ; il vaut mieux, je crois, examiner attentive- ment les mœurs du peuple et de ces temps, et observer les idées politiques et religieuses des Babyloniens ; Hérodote nous en fournit les moyens. Sans répéter ce que tant de savans ont déja dit (il ne faut que renvoyer aux notes de M. Larcher sur Hérodote ), M. Heyne s’est . borné au fait seul et à son origine. À proprement parler, c’étoit ainsi que cela se passoit. Aucune Babylonienne ne pouvoit semarier avant d’avoir consacré sa chasteté à la déesse; et cette céré- « monie se pratiquoit par un étranger à certains jours de fête , avec certains usages dont nous new rapportons que celui-ci. L’étranger jetoit une pièce d'argent à celle qu'il avoit choisie ;. cette M dernière devoit l’accepter et la remettre au M temple. On n’admettoit aucun habitant du pays , et cela devoit être , si lon vouloit que les mariages fussent respectés , et que, te cependant, cette cérémonie religieuse füt ob- Nouvelles littéraires. 21à servée ; mais ily a des choses qui, avec cela , restent incompréhensibles. Que devenoient les enfans provenus de ces rencontres ? Le mari de- voit-il les regarder comme siens? Le premier né ne devoit-il pas toujours être un peu dé- placé dans la famille? Comment la femme pou- voit -elle, pendant son mariage, conserver la fidélité conjugale ? et c’est cependant ce qu’on assure. C’est peut-être la puissance seule des idées religieuses que les femmes se formoient de la sainteté de l’usage une fois introduit , qui sert à répondre à toutes ces questions. Mais comment un tel usage pouvoit-il ètre admis dans un pays qui n'étoit pas tout-à-fait sans civilisation? L'auteur du mémoire a cru pou- voir le faire dériver des autres détails qu'Héro- dote nous donne sur les mœurs de ce peuple, et de ce que nous savons des Assyriens qui avoient accueilli bien plutôt de pareils usages. Dans les temps les plus reculés, les jeunes filles étoient exposées publiquement en vente, à un certain jour de l’année : les jeunes et les riches se vendoient très-cher ; on réunissoit tout l’argent , et, de cette somme , on donnoit des dots aux filles pauvres et laides. Pour com- prendre comment cette coutume pouvoit avoir lieu et paroiître très-utile , 1l faut penser que les mariages , dans l’ancienne Asie, comme encore en grande partie dans les temps actuels, étoient l’objet d’un contrat de vente. Les jolies filles trouvoient des acheteurs: mais où en auroient 0 4 216 Nouvelles littéraires. trouvé celles que la nature avoit disgraciées ? Elles restoient à charge à leurs parens , peut- être déja peu à leur aise : ainsi cette idée d’une vente n'étoit point du tout mauvaise ; et, de cette manière, ces pauvres filles trouvoient à se marier. Il est clair que les filles riches qui avoient elles-mêmes une bonne dot, n’étoient point com- prises dans la vente ; car , quelques laides qu'elles fussent , elles trouvoient aussi sans doute un mari. Mais Hérodote raconte que cette espèce de négoce public n’existoit plus de son temps. Les Babyloniens, ruinés par la guerre, dit notre his- torien , n’ont plus assez de fortune pour établir un pareil marché aux filles; et on peut le croire, quand on voit dans l’histoire que Cyrus avoit d’abord renversé leur empire et conquis Baby- lone , et qu’ensuite cet Etat étoit tombé , sous Darius, dans l’état le plus déplorable. Hérodote ajoute pour lors toutingénument: Les pauvres, parmi les Balyloniens , offrirent alors leurs filles comme des fiies publiques : la suite et la liaison, avec ce qui précède , montrent que cela avoit rapport à la dot des filles, à laquelle le père ne pouvoit contribuer en rien; et qu'ainsi il laissoit à sa hlle le soin de s’en procurer une , et de trouver, par-là , un mari. Hérodote ajoute pour justifier cette insouciance des parens : Lis ne vouloient ni rendre leurs filles malheureuses , ni les laisser emmener dans d'autres pays; cela signifie, ils ne vouloient pas les vendre comme Nouvelles littéraires. 217 esclaves dans les pays étrangers. Pour expliquer tout ceci, il faut supposer qu’il ny avoit aucun métier et aucune manufacture , par le moyen desquels les pauvres filles auroient pu gagner leur vie, et se procurer une petite fortune en flant, en faisant de la toile ou en travaillant à d’autres travaux. La vente des filles aux étran- gers et la polygamie des riches a été, et est en- core, pour beaucoup de pays asiatiques, une heureuse ressource pour placer le superflu de population des filles. A présent , l'on peut conjecturer comment , avec le temps, ce premier usage a été suivi de l'autre, c'est-à-dire, comment les Babyloniennes, avant leur mariage , ont dû s’abandonner à un étranger dans le temple de leur déesse. Les solennités du culte divin et les jours de fêtes attiroient toujours un grand nombre d’étran- gers , et les environs du temple ressembloient à un marché et à une foire. On concoit que les pauvres filles profitoient de l’occasion , et se trouvoient au temple pour faire leur fortune, et gagner , de la manière énoncée plus haut, l'argent deleur dot: on peutcroire aussi qu’elles se mettoient sous la protection du temple, et, qu'en échange, les prêtres exigeoient une pe- tite rétribution. De-là , cette espèce de com- merce prit peu-à-peu une certaine forme ; les jeunes filles furent considérées comme les protégées , les initiées de la déesse ; l'usage prit vne tournure religieuse , on en fituneinitiation 218 Nouvelles littéraires. préparatoire au mariage; et enfin vint à naître le préjugé qu'il étoit nécessaire à tous les ma- riages , même à ceux des filles riches, pour lui donner plus de solennité , peut-être aussi pour attirer sur eux les bénédictions du ciel, qué la jeune femme se consacrât auparavant à la déesse. { Plusieurs autres circonstances , lorsqu'on les examine , rendent encore plus concevable com- ment il a été possible que les Babyloniens , et avec eux une quantité d’autres peuples , les As- syriens , les Syriens , les Cypriens, les Phéni- ciens et leurs colonies, aient adopté et trans- anis à leurs enfans un tel usage. D'abord la force des impressions religieuses, qui est d'autant plus pnissante, sur-tout chez les péuples peu civilisés, que ces impressions agissent plus sur les sens; ensuite l’état des femmes en Orient , et particu- lièrement dans les anciens temps ; de plus, l’in< différence de certains peuples chez lesquels la polygamie n’étoit pas introduite, pour les pre- mières jouissances de l'amour; et il paroît que e’étoit le cas chez les Babyloniens. Toutes ces différentes considérations , que M. Heyne dé- veloppe dans son mémoire , viennent à l’appui de ses idées , et concourent à les rendre plus vraisemblables. CPaTHALMOLOGISCHE Beobachtunsen und Unter- suckungen oder Beytrag zur richtigen kenntniss und Behandlung der Augen in gesunden un Ÿ Nouvelles littéraires. 219 kranken Zustande. Observations ophthalmolo- giques , ou Mémoires pour servir à connoître et à traiter les yeux sains et malades ; par Charles Himzy. Premier numéro, 1801.Brème, Willemans. Opnrnazmoroctiscne PBibliothek ; herausgegben von K.Himiy undJ. 4. Scumivr. Bibliothèque ophthalmologique : par Ch. Himiy et J. À. Scumipr. Premier numéfo , 1802. Brunswick, Kulemann. — Deuxième numéro du premier vol. , 1803. — Premier numéro du deuxième vol. , 1803. Frommann. Jena. Gescricnre der Poesie und Beredsamkeït seit dem Ende des dreyzehntenJahrhunderts, Histoire de la Poésie et de l'Eloquence , depuis la fin du treizième siècle ; par Frédéric Bourerwex. Troisième vol. , 1804. Gættingue , Rover. Ce volume contient, outre une introduction . générale à l’histoire de la poésie et de l’élo- quence espagnole et portugaise, l’histoire des belles-lettres en Espagne. Das gelehrte England oder Lexicon der jezt leben- den Gelehrten in Gross-Britrannien, Irland und Nord-America nebst einem Verzeichniss ihrer Schriften : vom Jahr 1770 bis 1790.—Nachtras und Fortsetzung : vom Jahr 1790 bis 1803, Theill, A-K : von Jeremias David Revss 220 Nouvelles littéraires. Hofrath-und Professor , etc. L'Angleterre litté- raire, ou Dictionnaire des savans vivant à- présent en Angleterre, en Irlande, et dans l'Amérique septentrionale , avec un catalogue de leurs écrits , depuis 1770 jusqu’en 1803. Partie première , A-K ; par Jérémie-David Reuss , professeur et sous-bibliothécaire à Gœttingue, et membre de la Société royale des Sciences. Berlin et Stettin , Frédéric Ni- colaï. Gescaicure der Christlich - kirchlichen Gesells- c'afts-Verfassung. Histoire de la Constitution de l’église chrétienne ; par le docteur G.-J. Pranx. Deuxième vol. , 1804. Hanovre. La distribution des prix fondés pour les étu- dians, par le roi d'Angleterre, *a eu lieu cette w année , le jour de sa naissance , comme à l’ordi- … naire , dans une assemblée solennelle. Rien ne prouve mieux les idées libérales’des Français, ! qui, en accordant toute sûreté et protection à " notre université , nous laissent également le w droit de mettre au jour nos sentimens de res- pect et de reconnoissance envers notre souve= | rain , le bienfaiteur spécial de notre académie: ils ne cherchent point à étouffer ces sentimens sacrés, ils ne paroissent pas mème les désap- prouver. M. Heyne , dans le discours qu’il tint dans cette assemblée, les témoigna hautement , « en rappelantla position du pays dans ces mêmes Nouvelles littéraires. 221 jours , il y a un an, où la nouvelle encore ré- cente de l'occupation d'Hanovre par une armée ennemie , avoit répandu par-tout le trouble et l'effroi. Ilentra ensuite dans quelques détails sur ce quis’étoit passé dans le cours de cette année. Cette même année offrira à la postérité une épo- . que remarquable: peut-être un jour aura-t-on à opposer à des guerriers ennemis l'exemple que les Français ont donné, de respecter, malgré leur invasion , tous les instituts publics, et de laisser à l’université la jouissance de ses fonds et de ses avantages : aussi jamais l'Académie n'ou- bliera-t-elle le traitement distingué, honorable et plein de ménagement qu'elle a éprouvé d’a- près les ordres exprès du premier Consul de la République, à - présent l'Empereur des Fran- çais. Les principaux articles traités dans le dis- cours académique de M. Heyne , sont : Les soins que les curateurs ont pris de l’Académie, et leurs mesures pour en assurer la tranquillité ; la députation au général en chef , M. le général Mortier, à Hanovre ; la mention de l’université dans la convention de Jehlingen ; lesréponsesre- çues de Paris, dans lesquelles le gouvernement françaisassure à la viile sa pleine etentière protec- tion ; les bontés et la faveur particulières quelui ont accordées le général Mortier, son successeur le général Dessoles , et le général Werlé, com- mandant dans le district de Gæœttingue ; enfin les dangers que l’université a courus par la nomi- mation de plusieurs de ses professeurs à des pla- ces dans d’autres universités. 222 Nouvelles littéraires. Viennent ensuite les questions proposées, et les mémoires couronnés. La faculté de théologie avoit proposé pour le 4 juin 1804: Ut accurate examinarerur ac ponde- ruretur quantum valoris et momenti tum in ad- struenda veritate historiæ Christi, tum in demons« tranda authentia et integritate librorum N. T. testimonia adversariorum qui fidem christianamet hœreticorum etiam qui fidem catholicam in tribus primis sœculis impugnarunt, habeant et habere possint. Elle a reçu un seul mémoire qui an- nonce des talens, de l'application et de l’érudi- tion ; mais elle a cru plus convenable cependant de remettre la question à l’année prochaine : pendant ce temps l’auteur pourra donner plus de perfection à son ouvrage. Le prix homilétique étoit : De veritate pro- videntiæ humanœæ e vitis magnorum clarorum- que hominum adstruenda : sur les preuves que la vie des grands hommes offre d’une pro- vidence divine: sur dix sermons la faculté en avoit choisi trois que les auteurs ont récité , et le prix a été adjugé à M. Henri-Christian-Au- guste Germar de Wernigerode. M. Emile-Guil- laume Arnold, du comté de Lippe, a obtenu le premier accessit , et M. Jean-François Holle, de Gœttingue, le second. La question proposée par la faculté de droit étoit: Exponantur effectus actuum jurisdictionis k voluntariæ et mixtæ in alieno territorio secundunms principia juris civilis,publici germaniciet gentium. Nouvelles littéraires. 223 La fatulté, contre son attente , n'a recu -aucun mémoire. : La faculté de médecine avoit proposé pour question : Deaëre, aquis et locis Gœttingensibus. Elle reçut trois mémoires. Le prix fut décerné avec beaucoup d'éloges à M. Charles-Julius Pickhard de Iolzmunden, et l'accessit avec une mention très-honorable à M. Ferdinand Æorillo de Gœttingue. La, faculté de philosophie avoit donné une question physique : Quæ sunt ea quibus systema dynamicum in physica disciplina jure merito- que præfertur atomistico systemati. Aucun des étudians n’a essayé de concourir. Voici les questions que les différentes facultés ont proposées pour le 4 juin de l’année pro- chaine. La faculté de théologie propose pour une seconde fois la question de l’année 1804. Pour le prix homilétique elle offre pour texte: Eam quam doctrina Christi postulat humilitatem , Justam ac liberalem sui ipsius æstimationem non excludere. Evangile selon Saint-Matthieu XI, V. 29. La faculté de droit propose également pour une seconde fois la question de l’année 1804. La faculté de médecine demande : An prin- cipii azotici sive nitrogenii , atmosphærico aëri nunquam non inhærentis dum hic per respiratio- nem atque exhalationem corpus animale intrat , nihil in ejus interioribus deponatur ? . 224 Nouvelles littéraires. HANOVRE. On a frappé dans cette ville,,en l'honneur de l'empereur des Français, des médailles pour lesquelles on n'a employé que l'argent des mines du Harz. On lit d’un côté : 4 Napoléon, Empereur des Français , 1804 : armée d'Hanovre. On voit au revers, comme attributs des mines, une hoüe et un marteau en sautoir ; et au-des- sous sont ces mots : ÂJes mines et usines du Jiarz , protégées pendant la guerre. WURZBOURG. L'électeur de Bavière a fait , pour cette uni- versité, l'acquisition du cabinet de Blank, con- tenant vingt-huit mille objets d'histoire natu- relle. La bibliothèque a reçu des augmentations considérables par celles des couvens supprimés. ‘édifice cédé à l’université forme un carré, et ne contiendra que les salles où les professeurs : donneront leurs cours, celles qui sont destinées aux classes du gymnase , aux assemblée et aux arts académiques , aux cabinets des objets d'arts et d'histoire naturelle, etc. On avoit d’abord accordé aux professeurs des logemens dans le même édifice ; depuis on leur en a donné dans d'autres bâtimens. MORAVIE. à Le philantrope estimable, M. le comte de. Berchtold , a envoyé à la société , pour l’encou- ragement, . k Nouvelles littéraires. 225 ragement des arts et des métiers utiles à Ham-” bourg, un nombre considérable d'exemplaires d’un ouvrage intitulé : Zastruction sur la manière de prévenir beaucoup de dangers auxquels la vie des hommes est exposée par eau et par terre, et de les sauver, de ceux qu’on n'a pu prévenir. Cet ouvrage avoit remporté le prix proposé par le comte de Berchtold , et c’est encore lui qui l’a fait imprimer à ses frais, à Vienne. Il a invité la Société à se charger de faire distribuer ces. exemplaires dans les différentes villes du nord : PAC ECE | La Société italienne des sciences , qui jouit en Europe d’une réputation méritée, vient de faire publier le onzième volume de ses Mémoires (1), et annonce le douzième. Celui qui vient de pa- roitre, loin d’être inférieur à ceux qui l'ont pré- cédé, les surpasse peut-être par la variété, par la profondeur , par l'utilité des matières qu’on y traite. Ilest facile de concevoir qu’une société savante, qui livre au public des travaux aussi estimables , quoique ses membres soient épars dans toute l'Italie et sans communication habi- . tuelle entre eux, parviendroit à des résultats bien plus grands et à une renommée plus écla- tante , si ceux qui la composent, réunis dans une même cité , s’éclairant mutuellement dans (x) Il se trouve à Modène, à la société typographique; et à T7 Q] Ypo5Tapaiq 2? Milan, chez Galeazi. Tome FI. F 226 Nouvelles littéraires. leurs rapports journaliers, s’excitant à l'étude par l’émulation , ét prenant l'esprit de corps, formoient comme un seul foyer de science et de lumière. : Voici l'indication sommaire des objets que contient le onzième volume de la Société des sciences ; elle fera juger de leur importance. Annales de la Société, continuées par son se- crétaire Pompilio Pozzetti. Eloge de Laurent Mascheroni ; par le mar- quis Ferdinand Landi, de Plaisance. Lettre de Joseph - Marie Giovene à Pombpilio, Pozzetti sur des roses prolifères. Mémoire de François Pezzi sur un problème trigonométrique. Exposition anatomique des parties relatives à l'encéphale des oiseaux ; par Vincent Mala- carne. Expérie nceset Observations surles propriétés physiques des sucs laiteux de nos plantes, et sur leur ressemblance avec la gomme et la résine élastique ; par Joachim Carradoni. . De l’Adhésion ou Attraction de superficie; Mémoire du même. Lettre de Jean Fabroni à Pompilio Pozzetti sur la manière de conserver et de restaurer les livres endommagés, et de former des bibliothè- M | ques. Mémoire de Philippe Uccelli sur deux ju- melles monstru euses. Mémoire hydrostatique de Jérôme Saladini. BELL TANP RÉ AR LE PE dt EE. ee. Tete nn 2 re hp, = dWouvelles littéraires. 227 : Mémoire de Jean-Baptiste Dal! Alio , sur une maladie vermineuse extraordinaire. Lettre de Sébastien Canterzani à Torquato Vareno sur une méthode d'extraire les nom- ‘bres de Bernouilli. Obliquité de l’écliptique, observée dans le solstice du 22 juin 1803 ; par Vincent Chimi- nello. Calcul du passage de Mercure , par le disque du soleil, les 8 et 9 novembre 1802, selon les observations de Padoue et de Naples ; par le méme. R Conjectures sur les causes des diverses varia- tions de l'aiguille aimantée du Nord, du même. Méthode pour trouver les racines numériques de toute équation ; par Joseph Cassella. Observations sur l’action de l’eau hydro-sul- furée et de l'acide sulfurique , sur quelques couleurs végétales ; par Barthélemy Barani. Mémoire de Pierre Franchini sur différens articles qui ont rapport à l'analyse. Mémoire de Jean Maiïironi da Ponte sur les eaux minérales de la province de Bergame. Expériences de Joachim Carradoni ayant pour objet de démontrer que les plantes absor- bent le carbone. Mémoire de Charles-Louis Morozzo sur le gaz très-oxigéné qu'on obtient du charbon mis dans l’eau et exposé aux rayons du soleil. Mémoire de Jean-Baptiste Dal! Alio sur l’art de faire le pain. M ETS 228 Nouvelles littéraires. Dissertation de Michel Araldi sur la force et la puissance de l'organe du cœur dans le système \ de la circulation du sang. Mémoire de Pierre Ferroni sur l’usage de la logistique dans la construction des orgues. Mémoire de François Pezzi sur latransforma- tion d’une fraction quelconque, continue et indéfinie , en une fraction ordinaire , et sur la plus simple solution desé équations ir indéterminées du premier degré. Mémoire PH Joseph Piazzi sur l’obliquité de l'écliptique. Nouvelles Considérations de Joachim Pessuti sur quelques propriétés singulières des coeff- ciens de la formule du binôme de Newton. Opuscule de Giavverardo Zuriani sur le ca- tharre épidémique. Mémoire d'Octavien Tar gioni-Tozzetti surune fausse espèce de quinquina. Mémoire de Jacopo Penada sur une varice singulière , formée dans l’organe du cœur, avec une nouvelle démonstration anatomique des fi- bres qui la composent. Mémoire de Nicolas de Rio sur la Ab ES tion et la classification des odeurs. Doutes proposés à l'associé Paul Ruffini sur la démonstration de l'impossibilité de résoudre les équations supérieures au quatrième degré , par Jean-François Malfatti. À Mémoire de Pompilio Pozzetti sur quelques roses particulières à l'Italie inférieure. 1 j # À { î Nouvelles littéraires. 229 Lettre de Joseph Cassella à Antoine Cagnoli sur l'éclipse du 11 février 1804. Description d’un nouvel électromètre, et ex- périences relatives à la charge de la colonne de Volta ; par l'abbé Salvatore del Negro. Observation de Paul Mascagni sur l'emploi du carbonate de potasse dans les maladies qui affli- gent les voies urinaires. Ë Observations sur les cordes à boyaux et sur les cables et cordes de chanvre; par l'abbé Bonaventure Corti. Mémoire de Jean-Baptiste Mazzari sur un phénomène qui s’est manifesté dans une jeune fille, dontles yeux paroissoientjeter dela flamme. Supplément au Catalogue des étoiles , par Antoine Cagnoli. Expériences et Observations potamologiques de Théodore Donati , etc. , etc. IN DES.ORIENTALES. M. Lambion, major de brigade, à Madras, écrit, en date du 7 août 1803 , qu'il venoit de terminer , dans l’Indostan , la mesure d’un arc du méridien , avec des instrumens de Cary et Remsden. La Compagnie anglaise des Indes orientales a ordonné que ces mesures de trian- gles seroient continuées par 7.ou 8 degrés de latitude , pour déterminer , avec d'autant plus d’exactitude , la longueur d’un degré sous cette latitude : cette ligne servira en même temps de P 3 230 Nouvelles littéraires. base à une carte de toute la presqu'île de lInde, qui sera sur la même échelle que la grande carte d'Angleterre, par le major Mudge. « AMÉRIQUE. Les feuilles publiques ont parlé, il y a quel- que temps, d’une foire de libraires qui s’est éta- blie dans les Etats-Unis d'Amérique septentrio- nale. Dans le courant de cette année (1804) ,ila aussi paru à Boston un Catalogue des ouvrages imprimés dans les Etats-Unis ( Catalogue of books printed in the United-States ), format in-8., rédigé dans le genre du London catalogue ; il doit en paroître tous les deux ans une nou- velle édition , avec les changemens et les addi- tions convenables. Le nombre des livres indi- qués dans ce catalogue , dont on a exclu toutes les brochures d'un intérêt seulement momen- tané ou local , s'élève à 1319; et, à l'exception de trois, tous les autres sont écrits en anglais. Du reste , les différens ouvrages sont rangés sous les chefs suivans; 1.° livres pour les jurisconsul- tes , 2.° pour les médetins, 3.° pour les ecclé- siastiques, 4.° pour les instituteurs, 5.° ouvrages de musique : tout ce qui n’a pas pu se ranger dans ces cinq classes , se trouve compris sous lé titre de Mélanges. La première classe offre 53 productions ; la seconde, 64 ; la troisième, 247, et 24 éditions de la Bible ; la quatrième , 3 ; la cinquième, 25: la classe des Mélanges enfin Nouvelles littéraires: 23t contient 796 ouvrages , et un supplément donne encore l'indication de 19 autres écrits environ. La neuvième partie de ces 1319 livres, sont des ouvrages originaux américains : le reste con- siste en réimpression d'ouvrages anglais et tra- ductions. A Washington, ville du congrés des Etats- Unis, on a construit un théâtre dont l’ouver- turesdevoit se faire le premier novembre. Exrrair d’une lettre du professeur Mrreuizr de New-York, Amérique septentrionale , en date du 1.7 maë 1804, au docteur Louis VALENTIN , à Nancy. On a trouvé dans la Caroline du nord une masse d’or natif, pesant vingt-huit livres , avoir du poids ; et à Rhodeisland , dans une carrière, de la belle serpentine grise. Le docteur Mitchill possède du sulfate de baryte blanc , pesant et très-beau , trouvé depuis peu dans le Nouveau-Jersey ; et # a reçu de la Terre-Ferme un morceau de platine natif, de l'épaisseur du bout du doigt. Ce savant chymiste, réélu représentant pour le prochain congrés , ajoute qu’il est de plus en plus convaincu par son observation journa- lière , que les sels alkalis sont les meilleurs anti- septiques dans la nature; que leur usage pour anéantir l'infection est en grande faveur dans les Etats-Unis, et que l’on n’a plus aucune con- fance dans les fumigations acides. P 4 239 Nouvelles littéraires. Parmi les principaux ouvrages publiés der= nièrement dans ce pays , on distingue , 1.0 celui d'un ecclésiastique , M. Miller de New-York, ayant pour titre : À retrosper! 0j the eighteenth century, 2 vol. in-8.; 2.° un grand ouvrage élémentaire sur la botanique , in-8., par le professeur Zarton, de Philadelphie. Un dûtre, sur les plantes qui croissent dans l'étendue de cent milles de Philadelphie , par M. Ra/inesque, doit paroître incessamment. The medical repo- sitory se poursuit toujours avec activité : les éditeurs Mitchill et Miller en sont au septième volume. LNS TE TU TNA TION AL: Norice des travaux de la classe des Beaux - Arts , de l’Institut national, pendant l'an 12, lue à la séance publique du 7 vendémiaire an 15; par Joachim Lixererox, secrétaire perpétuel de la M classe , membre de celle de l'histoire et de litté- rature ancienne , et de la Légion d'honneur. Il y a peu de jours que, dans une cérémonie h intéressante où les succès de toutes les écoles pu- # bliques étoient mis en commun, sans doutepour M faire sentir que la gloire des arts, des sciences (| et des lettres est la même, cette enceinte a re- tenti de l’éloge des beaux-arts, et des applaudis- semens dus à leur éloquent panégyriste. (1) Le (1) M. Arnault, membre de l’Institut, dans le discours qu’il prononca à la distribution des prix faite par le ministre de l'intérieur, le 4 fructidor dernier. Nouvelles littéraires. 233 disciple d'Hippocrate , comme celui de Quinti- lien, vit avec plaisir l’encens brûler pour Ap- pelles, Phidias et Orphée; de mème que le sa- vant se laissa distraire de ses graves conceptions pour s'abandonner au charme attaché à un pareil sujet. Telle est la magie des arts ! elle agit sur toutes les imaginations , sur tous les âges. Il suffit de les nommer pour que leur éloge naïsse aussitôt : comme on a toujours célébré la puis- sance des dieux, comme l’on admire sans cesse la fécondité et la beauté de la nature, on pour- roit aussi louer toujours les beaux-arts , leurs créations et leur influence heureuse. L'occasion sembleroit l’exiger aujourd’hui, messieurs; car , c'est leur grande solennité , celle où leurs plus belles palmes se distribuent: mais je dois me borner à vous offrir, avec les formes d’un simple exposé, la notice des tra- vaux de la classe des beaux-arts de l’Institut na- tional pendant l’an 12. Ce sera donc de leur utilité seule que ces travaux pourront. tirer quelque lustre. Leur résultat le plus brillant est celui des concours pour les grands prix de peinture , de sculpture , architecture, gravure et de composi- tion musicale. En effet , ce ne sont plus des en- couragemens donnés aux élèves pour les exciter à l’étude et soutenir leur émulation ; c’est la robe virile que les artistes couronnés viennent revêtir. Vous allez les voir parés d’un rayon de gloire, entrer en possession d’une grande ré- 234 Nouvelles littéraires. compense nationale : ilssortiront de cette séance livrés à leur génie, et pensionnaires de l'Empire à l’école de Rome, d’où l’on ne peut point re- venir peintre, sculpteur, architecte, graveur ou musicien médiocre, sans avoir dégénéré de ce qu'on étoit déja en y entrant, sans avoir trahi un engagement solennel envers la patrie. Les concours pour les grands prix des beaux- aris occupent là classe pendant plus de six mois : elle en donne les sujets , les examine, les juge et les couronne. Cette année , 48 concurrens se sont présentés . au concours d'essais pour le grand prix de pein- ture; sept seulement ont été admis au concours du dernier degré. Il existe de méme pour les autres arts des épreuves préliminaires au con- cours définitif. Onze sculpteurs se sont inscrits au premier concours pour le grand prix; six ont été admis au dernier. De 23 architectes entrés ensemble dans la lice, il n’y en a que 8 qui aient fourni toute la carrière. Cinq graveurs, sur sept, ont atteint le dernier terme du concours. Il ne s’est présenté que trois concurrens pour le prix de composition musicale ; ce qu’il faut attribuer à l'institution de ce prix, et aux difficultés qu’on a cru convenable d'imposer au concours. C'est la première fois que la gravure , injuste- meut oubliée dans la distribution des honneurs ei des grâces dont les autres arts étoient en possession , a été admise avec eux au partage de famille. Il a donc fallu lui tracer, sinon la chartre Nouvelles littéraires. 235 de ses droits , du moins l'ordre des études que suivroient les pensionnaires graveurs à l’école de Rome, et les conditions auxquelles ils ob- tiendroient l'avantage d’y être reçus. C’est l’ob- jet de deux réglemens que la classe a faits, et dont le ministre de l’intérieur (M. Chaptal) a bien voulu ordonner l'exécution. Le même mi- nistre a prescrit également au directeur de l’é- cole de Rome de faire exécuter un réglement pour les musiciens-compositeurs, pensionnaires à la même école : etla classe espère qu'il contri- buera à nous donner de grands maîtres. I oblige les pensionnaires-musiciens à envoyer chaque année , à la classe des beaux-arts : 1.° L'analyse des principaux ouvrages d’un célèbre compositeur italien , en commençant par Palestrina , fondateur de l'école ; 2.° une scène italienne de leur composition, dont les paroles seront prises dans Métastase; 3.° une scène française, dont les paroles seront données par la classe des beaux-arts ; 4.° un morceau de musique à quatre parties la première année, à | (Hi 1 : ë in , … cinqla seconde année, à six la troisième année, } à sept la quatrième , et à huit la cinquième et À dernière année. Dans toutes les villes d'Italie où ils séjour- neront quelque temps, ils recueilleront les airs populaires les plus anciens , en s'appliquant à la recherche des particularités traditionnelles qui pourront servir à en expliquer l'origine et l'usage. Ces recherches serviront de matière à 236 Nouvelles littéraires. une notice historique qui sera placée à la téte de chaque recueil. S A l'expiration de leur première année de sé- jour en Italie, les musiciens-compositeurs ne pourront plus correspondre avec le bureau de la classe des beaux-arts, qu’en langue italienne. Ils pourront quitter Rome pour résider et étudier dans les villes d’'Itahe qui offrent des ressources à leur art par la variété des genres et du goût; mais la’ classe des beaux-arts de l'Institut ne déterminera l’époque et la durée de ce déplacement, que d’après un rapport de la section de musique sur le caractère du talent de chaque compositeur. Nous vous donnons ces détails, messieurs, parce qu'ils contiennent des espérances que vous aurez du plaisir à par- tager avec nous. Quoique les travaux relatifs aux progrès des arts dans les grandes écoles aient un attrait par- ticulier pour la classe , par la raison qu’elle en voit mieux les effets , elle saisit cependant avec ‘zèle toutes les occasions qui se présentent de rendre utiles ses connoissances pratiques , quand elles sont réclamées, soit au nom du gouvernement, soit par des particuliers. Ainsi, elle a examiné les procédés de M. Du- peyrat pour perfectionner les poinçons et les. carrés des monnoies. Déja MM. Montgollier , M Conté et Molard avoient été chargés par le M ministre des finances de lui:en rendre compte sous les rapports de la mécanique, et ils en Nouvelles litéraires. 237 avoient fait un éloge extrémement avantageux. La classe a nommé MM. Dejoux, Denon, Ber- vic, Visconti et Jeuffroy pour prendre con- noissance des résultats plus encore que des moyens. Îls ont reconnu quatre ava ntages réels. 1.° L'identité parfaite entre tous les carrés que produit la matrice originale ; 2.0 l'économie dans la construction des mêmes carrés; 3.9 l’a mélioration des carrés ; 4.° le moyen de rendre le foulage presqu'insensible , c’est-à-dire , de diminuer extrêmement un inconvénient auquel il semble que personne n’avoit pu parer avant lui. Les commissaires mécaniciens avoient dit dans leur rapport, qu’outre une économie d’un cinquième sur le prix, il y a tout lieu de croire que les coins de M. Dupeyrat auroient encore l'avantage de durer plus long-temps que les coins dont on s’étoit servi jusqu'alors. C’est aussi l'opinion des commissaires de la classe ; qui annoncent d’ailleurs aux graveurs en mé- dailles qu'ils devront au mème procédé de ré- duire à des cas très-rares le malheur, aujour- d’hui très-frequent , de voir leurs coins brisés, soit à la trempe , soit sous les premiers coups du balancier. À ces témoignages , un membre a ajouté qu'il avoit éprouvé par lui-même, depuislong-temps, l'excellence du procédé de M. Dupeyrat. Le ministre ne laissera pas sans doute de pareils moyens sans application et sans récompense. La classe a prononcé ensuite sur les projets, 238 . Nouvelles littéraires. d'une colonne monumentale destinée à la place : Vendôme. Les plans en ont été mürement exa- minés par la section d'architecture, qui em a rendu un compte détaillé. Elle propose des changemens essentiels ; le rapport où ils sont motivés a été discuté et adopté dans toutes ses parties , ensuite adressé au gouvernement. Mais la classe n’a en qu’à applaudir à la machine inventée par M. Tréchard pour por- ter du secours dans les incendies , et aux expé- riences dont ses commissaires MM. Chalgrin et Dejoux lui ont rendu compte. Elle a eu la M satisfaction de voir que son opinion étoit aussi celle de la classe des sciences physiques et ma- thématiques , avec laquelle il est glorieux de se rencontrer. Les beaux-arts ont, comme les sciences, leur théorie , leur érudition. La première tient aux principes du beau , qui sont plus aisés à sentir qu'à définir et à démontrer. La seconde est vaste ; elle remonte , comme l'histoire , aux monumens des âges les plus reculés ; mais per- sonne n’avoit entrepris encore de rechercher, ainsi que M. Louis Petit-Radel, l’origine et la filiation des peuples par leurs constructions ; ce qui promet en même temps une histoire de l’art A sous bien des rapports nouveaux. L'auteur s’oc- cupe depuis quinze ans de ce grand travail, et M c'est en présence des monumens de l'antique gr Italie qu’il l'a entrepriset presque terminé. Ces recherches sont en grande partie du domaine ï UE - =. a ln 5 à RS d' È | Nouvelles littéraires. 239 de la classe d'histoire et delittérature ancienne: aussi c’est à cette classe que M. FL. Petit-Radel en a déféré le premier hommage ; mais sous ce point de vue même , il n’a pas cru inutile de consulter le sentiment des artistes, et dé leur soumettre les modèles en relief des diverses constructions qu'il prend pour époques. L'œæil de l’art peut saisir des indications qui seroient inaperçues de l’érudit. La classe a entendu le résumé des preuves de l’auteur; elle a consi- déré attentivement les monumens qui leur ser- vent de base, et elle a nommé une commission pour en faire un examen approfondi. Elle a cru en outre devoir rédiger une série de questions qu’elle à fait imprimer , pour être envoyées à l'école de Rome, d'où l’on peut contribuer beaucoup à les éclaircir, etpour être distribuées aux voyageurs ainsi qu'à tous ceux que ces ma- tièresintéressent. Déja M. Dagincourt,à Rome, et les ducs de Caserta et de Sermonetta ont appliqué à ces recherches le zèle qui les dis- tingue pour tout ce qui intéresse les arts : leur correspondance sufhiroit pour justifier l’atten- tion que la classe a donnée aux travaux de M. L. Petit-Radel, dont on doit desirer l'en- tière publication. Parmi les objets d'intérêt général pour les arts , nous devons placer les lectures que nous ont faites MM. Quatremère-de-Quincy et Gin- guené, qui sont venus entretenir des rapports naturels entre la classe d'histoire et de littéra= \ » 240 Nouvelles littéraires. ture ancienne , à laquelle ils appartiennent, et celle des beaux-arts, qui regrette. de n'être pas souvent éclairée par les gens de lettres. La nécessité de restaurer les sculptures de la fontaine Grenelle , ouvrage du célèbre Bou chardon , a engagé M. Quatremère à proposer au conseiller-d'état , préfet du département, de tenter une expérience qui peut devenir d’un avantage inappréciable pour la conservation des ouvrages de sculpture, Il est affligeant de voir avec combien de rapidité les statues, mème celles de marbre, se détériorent sous nos yeux! jamais peut-être un ouvrage de sculpture n’étoit parvenu en si peu d'années, à un état de saleté et de dégradation aussi menaçant que la fon- taine Grenelle : c’est un grand inconvénient de notre climat ; quelques personnes en ont conclu qu'il ne falloit point laisser en plein air des statues dignes d'être conservées. M. Quatre- mère s'élève contre cette exagération: il combat le principe par les conséquences; et, faisant toutefois une exception pour les statues classi- ques, qui sont malheureusement en petit nom- bre, et pour lesquelles on ne sauroit prendre trop de mesures conservatrices , il pense que c'est dans les lieux de réunion publique, que doivent être placés les ouvrages du ciseau sta- tuaire ; que condamner l'art et le goût à ne trouver dans les lieux publics que des produc- tions médiocres, des copies sans valeur, des ouvrages voués au mépris et à la destruction, ce» seroit Nouvelles littérarres. ot seroit_puire à l’un et outrager l’autre, Appli- quant à cette question un principe sage qui s'applique à tout, savoir qu'il faut s'attacher principalement à prévenir le mal, il a cherché à arrêter les effets dans les causes mêmes. Avant de faire connoître les détails de l’opé- ration qu'il a dirigée, M. Quatremère dit com- ment il à été conduit à cette sorte de décou- verte. D'abord, il est incontestable que le plus grand nombre des statues des anciens étoient exposées en plein air; et quoique leur climat fût moins destructeur que le nôtre, l'on ne peut pas expliquer, par cette différence , com- ment des statues de vingt siècles sont moins dé- gradées que ne le sont quelquefois nos statues de vingt ans. L'auteur est convaincu que les anciens donnoient un enduit à leurs statues pour les préserver, La première preuve qu’il en donne est le poli brillant de plusieurs des statues antiques qui nous sont parvenues, et qui ne ressemble en rien au poli des ouvrages modernes. De ces premières inductions , M. Quatremère passe à des autorités positives. Des passages de » Pline et de Vitruve, rapprochés et expliqués par lui, apprennent que les Grecs avoient un enduit au moyen duquel ils préservoient les peintures dont les murailles étoient ornées. En décrivant la manière d'appliquer cet enduit, ils . mentionnent un procédé qui concerne les sta- _ tues de marbre. Tome FI. #2 242 Nouvelles littéraires. Les auteurs cités font plus encore; car M. Qna- tremère y trouve le procédé de cet enduit : iË étoit composé de cire punique , mêlée avec un peu d'huile. La cire punique ne paroît pas pou- voir être autre chose que de la cire blanchie, d’après un procédé des Carthaginois ; et Pline encore dit en quoi il consiste. (1) Mais quel qu'il ait été, la nature de la préparation et du but qu’on se propose , indique assez que si l’on emploie à enduire des marbres, de la cire et de l'huile, il faut qu’elles soient les plus blanches qu’il est possible : ce n’est pas trop présumer de notre âge de dire que nos moyens de blanchiment et d'épuration égalent au moins ceux des Carthaginois. Ainsi il n'y a point de difficulté pour la matière. Voici maintenant le passage de Vitruve , qui ajoute quelque détail au texte de Pline. « Quand la muraille, dit Vitruve , aura été bien polie et bien séchée , on l’enduira avec le pinceau, de cire punique, liquéfiée au feu et mélée avec un peu d'huile. Ensuite , avec des réchauds remplis, de charbon embrasé , on fera ressuer la cire en ’échauffant fortement , jusqu'à ce que la super- ficie reste bien unie. Puis on frottera le. tout avec une bougie et des linges blancs, à la ma- nière dont on procède à l'égard des statues de," marbre nues. Cette opération s'appelle en grec causis, Ainsi la cire punique, continue Vitruve,, (1) À faire bouillir la cire avec de l’eau de mer et de nitre, jusqu’à trois fois. Nouvelles littéraires. 243 forme comme une cuirasse qui empèche les rayons de la lune ou du soleil d’altérer Les couleurs. » | Il restoit à savoir si l'enduit pour les statues étoit précisément le même que celui pour les fresques, et s'il s'appliquoit de la mème ma- nière ; quel étoit l'emploi de la bougie , candela; si c’étoit ce que nous entendons par ce mot, ou nn outil qui tiroit sa dénomination de sa matière ou de sa forme. Mais ces difficultés n’étoient pas capables d'arrêter M. Quatremère dans l’utile application d’un procédé dont il connois- soit déja l'essentiel. Il savoit , par le poli des marbres antiques, par Pline et par Vitruve, qu’on enduisoit les statues; son érudition lui avoit fait connoître - encore que le peintre Nicias donnoit une pré- paration aux ouvrages de Praxitèle : l'analogie et le raisonnement l'ont dirigé pour le reste. La question de savoir s’il faut appliquer l’en- caustique à froid , par le frottement seulement, ou au moyen du feu et du frottement, est . résolue avec sagacité par cette double considé- ration, qu'un enduit de cire appliqué à froid ne pourroit être que léger , et qu’il n’empécheroit pas, du moins pour long -temps, l'air, les plantes, les corps étrangers enfin , de s’intro- duire dans les pores du marbre; tandis que l'action du feu fait pénétrer l'encaustique à une profondeur d’une ou deux lignes : ce qui forme une vraie cuirasse, selon l'expression figurée de Q 2 24À Nouvelles littéraires. Vitruve. Une autorité récente sé joignoit à ces considérations : il y a quelques années que, sur l'invitation du ministre de l’intérieur , une com: mission formée dans le sein de l'Institut, cher- chant des moyens de nettoyer les statues, re- connut que c'étoit par le feu que les anciens appliquoient la cire au marbre ; mais cette com- mission ne sembla pas apercevoir alors toute l'utilité que M. Quatremère est fondé à espérer de ce moyen. L’encaustique donnée aux fisures et marbres sculptés de la fontaine Grenelle, a été com- posée de cire-vierge en pain, à laquelle on a mélé une cuillerée d'huile d’œillette clarihée, par demi-livre de cire. La cire étant fondue au degré de chaleur qui précède l’ébullition , l’on en a enduit, avec une brosse ordinaire de peintre , la partie qu’on avoit fortement échauf- fée auparavant, au moyen de réchauds porta- u tifs, ayant des manches à crochet et mobiles, pour qu'on puisse les changer à volonté et approcher le brasier des parties rentrantes comme des parties saillantes. Ces réchauds sont l'objet le plus important et le seul outil qu’on soit obligé de faire exprès. Lorsque le marbre, à ainsi échauffé , refuse de recevoir l’encaus- tique dont le pinceau l’'abreuve, l’on porte plus loin le réchaud. Il reste au refroidissement , un épiderme de cire qu'on laisse subsister jusqu'à. la seconde opération, qui consiste, lorsque l’enduit a été donné par-tout, à approcher de LY Nouvelles littéraires. 243 nouveau les réchauds de l’épiderme refroidi. Il pénètre ce qui peut de la cire qui refond ; le reste s'écoule vers les parties inférieures , et c'est pour cela que cette seconde opération doit se faire du haut en bas des figures. L'on _ frotte ensuite avec un linge. En dernier lieu, l’on frotte à froid et à sec avec de la cire en pain , puis avec des linges blancs. On n’a employé que dix livres de cire pour les trois grandes statues et les accessoires de la fontaine Grenelle. Cette préparation n’enlève point les taches que le marbre a contractées , et ce n’est pas son objet; mais elle n’en altère point la blancheur. Düt-elle par la suite lui donner ce ton jaunâtre de l’ivoire qu'on remar- que aux belles statues antiques, M. Quatremère pense que ce seroit une obligation de plus qu’on auroit à l'encaustique. Le méme membre nous a communiqué une dissertation sur la diversité du génie poétique des différens arts, Comme il a bien voulu se ren- dre à l'invitation que nous lui avons faite de la lire dans cette séance , l'assemblée va partager le plaisir que la classe des beaux-arts a éprouvé à l'entendre. Le sujet de le lecture de M. Ginguené étoit nouveau aussi, car il s’agissoit de supprimer le si de la gamme musicale; de prouver que la gamme d’ut n’est point en wr, et que l'échelle n'en est point d'accord avec la nature ; que mo- duler n’est point sortir du ton ; qu'il n’y apas, Q 5 246 Nouvelles littérarres. en musique , un seul son rigoureusement juste ; et que tout instrument accordé en proportions géométriques n’est pas d'accord ; enfin , que la nomenclature musicale est obscure et même pauvre, malgré son abondance ; qu’elle est in- signifante et plus vicieuse que celle d'aucun au- tre art. Sans doute on ne manquera pas de dire que ce sont des paradoxes ; c’est ainsi que les nomme M. Framery lui-même , correspondant de la classe des beaux-arts , et auteur du mémoiresur lequel M. Ginguené est venu nous faire un rap- port au nom d'une commission composée de MM. Lacépède , Prony , Gossec, Méhul, et du rapporteur. Mais M. Framery prend le mot pa- radoxe dans le sens que lui a donné Cicéron , en le plaçant à la tête d'un de ses ouvrages philo- sophiques : il entend par-là des propositions qui surprennent par leur nouveauté, qu’on transforme ensuite en vérités, au moins proba- bles ; par les preuves dont on les appuie. C'est aussi la marche qu’a suivie M: Framery. Son mémoire est composé de six paradoxes qu'il tâche de prouver successivement. Il accuse d’a- bord le st d’avoir vicié la gamme naturelle et brouillé toutes les idées musicales , depuis envi- ron un siècle qu’il est admis. Ce n'est pas qu'il nie que son intervention n'ait eu des avantages réels ; il les développe au contraire , de même qu'il fait connoître le chaos qui existoit aupara- vant : mais il prétend que le st laisse, pour les Nouvelles littéraires. 247 éreilles délicates , quelque chose de choquant ; et pour les voix, une difficulté à vaincre , dans le trop grand intervalle qui existe du /a au si. Il propose d’y remédier , en faisant monter la voix par deux intervalles à-peu-près égaux du /a à l'ur. Nous ne pourrions pas ; sans excéder les bor- nes de cette notice, amener l'esprit, comme le fait l'ouvrage, de la surprise du paradoxe à l'at- tention qui balance et qui attend la lumière. Nous nous contenterons de dire que l’auteur relève dans son second paradoxe d’autres dé- fauts de la gamme actuelle , et qu’il propose de la modifier ; qu’il établit dans le troisième para- doxe une nouvelle théorie fondée sur ce que ‘tous les sons musicaux sont nés d’un seul son générateur. Si on lui faisoit l’objection que les sons ne moduleroient donc jamais, il répon- droit « que moduler n’est point sortir du ton.» I développe , à ce sujet, un système de modu- lation qui pourroit non-seulement éclaircir plu- sieurs points de doctrine jusqu'ici assez obs- curs , mais qui donneroient à l’art de nouveaux moyens d'expression , et par conséquent de nouvelles sources de richesses. - Quand il dit qu’il n’y a pas en musique un seul son rigoureusement juste , et que tout ins- trument accordé en proportions géométriques n'est pas d'accord , il a dû s'attendre que ceux qui croient que la musique est, sous certains rapports, une science de calcul, et ceux qui Q 4 . 248 Nouvelles litléraires. imaginent que ce titre de science l’efnoblit , le traiteroient de paradoxal, dans le sens vulgaire. Mais il établit d'abord sa thèse , puis il affirme que c’est l’acoustique et non la musique qui est une science; que la première fixe les propor- tions dans lesquelles l’art musical doit se cir- conscrire , sans pourtant lui en imposer toute la rigueur : et il ne croit pas que la musique, avec sa puissance, son charme, et tout son apa- nage , ait lieu de regretter le titre qu'il lui en- lève. Si, comme l’affirme l’auteur, la musique étoit défectueuse sous ces différens rapports, il n'y auroit aucun doute que ‘sa langue ne le füt aussi; car les langues des sciences et des arts sont le thermomètre de leur perfection ou de leur imperfection. La commission chargée de l'examen de cet ouvrage , et que l’ancien Institut avoit férmée de membres choisis dans chaque classe, a pensé que l'ouvrage de M. Framery contenoit des. vues ingénieuses et qui peuvent être utiles ; qu’il prouve daus son auteur une grande connois-, sance de art ; enfin, que pour en tirer tout le fruit, il convenoit de l’exposer à l'examen et aux observations du conservatoire de musique, où la théorie est éclairée par la pratique de l’art dans tous ses rapports, et qui est, par consé- quent, à portée d'expliquer comme d'apprécier ge système. 2 1591 Le même M. Framery a intéressé la classe par « Nouvelles littéraires. 249 la lecture d’un mémoire sur l'opéra Buffa, sur la nature de ce genre de théâtre, et sur les moyens de le faire réussir en France. L'auteur y a montré des vues nouvelles et une parfaite connoissance du sujet. Dans un autre mémoire sur les progrès que semble avoir faits la musique dans les lieux de plaisir où le peuple se rassem- ble les jours de repos, il a prouvé qu’il n'y a point de sujet au-dessous de l’homme qui sait observer. Dans le compte que nous rendimes l'an der- nier, des travaux de la classe , nous donnâmes un précis de l’histoire de chacun des arts dont elle se compose, à l'exception de la gravure. Nous allons compléter ce tableau en le rédui- sant beaucoup, ainsi que l’exigent les propor- tions de cette notice. - M. Bervic, au nom de la section de gravure, a tracé les principaux points de l’histoire de cet art qui embrasse la gravure en médailles, en pierres fines et en taille-douce. Comme les autres arts, celui qui produit les médailles et les pierres g-avées, est venu de la. Grèce en Italie, et d'Italie en France , sur les. traces de François Ier. Les Grecs le firent fleurir en consacrant les événemens de l’histoire de leurs nombreuses et brillantes Républiques par des médailles ou monnoies, en se servant de cachets au lieu de signatures , en faisant des images de leurs dieux et de leurs grands hommes des ornemens de 200 Nouvelles littéraires. parure. Les Romains imitèrent en cela les Grecs; et l’art de la gravure prospéra aussi chez eux jusqu'aux troubles qui suivirent la mort des Antonins. Alors la profession des armes usur- pant toute la considération publique, les beaux- arts et ceux qui les cultivent furent d’abord négligés, bientôt dédaignés , puis s’éclipsèrent.: C’est une des grandes leçons de l'histoire, que l'influence de cette cause qui s’est reproduite plus d’une fois. Du mème mouvement , elle fait rétrograder les arts, les lettres , les sciences et Ja-civilisation. Au cinquième siècle , la barbarie fut complète ; d’autres armées plus barbares éteignirent le flambeau des arts. À peine en re- trouve-t-on dans l’espace de plusieurs siècles , quelques étincelles échappées par hasard et con- servées on ne sait comment. . La France eut d’habiles graveurs en pierres fines sous François Ier.; on en retrouve sous HenrilV.Varin, sous Louis XIII, rendit dignes d’admiration nos monnoies, si déchues de cette première gloire. Après ce graveur , l’art dégé- nère ; il n’a plus aucun-éclat après Louis XIV. Pour la gravure en taille-douce , c’est un art nouveau; car il ne date que du quinzième siècle. Nous passerons son histoire en Italie et en Hol- ‘jande , pour ne le considérer que chez nous. IL s’y montra bientôt presqu'inimitable sous les Poilly, les Ant. Masson, les Nanteuil , les Gérard Audran, les Edelink, les Callotet lesS. Leclerc; mais il déchut avec la peinture et le dessin, qui Nouvelles littéraires. 25t le dirigent. Le style lâche et maniéré qui cor- rompit l’école, la négligence del’étude du dessin, le firent tomber au moins au niveau des autres arts dégénérés. Une cause étrangère mit le comble à sa déca- dence ; ce fut l'engouement pour les gravures anglaises. Pour prouver combien cet engoue- ment étoit déraisonnable , le rapporteur fait ‘voir comment la gravure a été créée en quelque scrte de nos jours, en Angleterre, par le Fran- çais Vivarès et le Florentin Bartholozzi ; com- ment l'amour du gain s’en empara utilement , mais comment aussi il l’a déja fait décheoir. Malheureusement la vogue des estampes an- glaises , soutenue par le traité de commerce de 1766 , par l’anglomanie , par les gains considé- rables qu’y trouvoiert les marchands français , devint chez nous une cause très-prompte de dé cadence pour l’art: les jeunes artistes aban- donnèrent la route longue et pénible des succès, pour des gains faciles et prompts. Un très-petit : nombre de graveurs luttoient contre le mauvais goût et la mode; mais-rien ne les soutenoit : l'art n’étoit pas aperçu du gouvernement; il falloit qu’ils attendissent de l'étranger la consi- dération dont ils manquoient dans, leur patrie. Cette erreur est réparée en plaçant dans l'Ins- titut national une section de gravure, et en lui accordant un grand prix. Bonaparte a plus fait pour cet art que tous les gouvernemens qui ont précédé le sien : il le vefra bientôt florissant ; 253 Nouvelles" littéraires: car. l'émulation a pénétré parmi les jeunes ar- tistes. Le grand prix qui va être décerné dans cette séance en est un heureux indice. Les encouragemens qui restent à desirer. -peuvent se réduire , pour la gravure en mé- dailles , à la continuation de notre histoire mé- ‘allique ; interrompue depuis 1789: mais c’est sur-tout la gravure en pierres fines qui a besoin -de travaux ; elle n’en a aucun d'important. Ce- pendant ses monumens sont les plus durables, -et devroient, à ce titre, être consacrés à l’his- doire. La mode et le luxe peuvent s’en enrichir; c'est un art très-productif, en ce qu'il ajoute une valeur idéale à la matière travaillée. Nous avons le bonheur presqu'inexplicable de pos- -séder un artiste habile en ce genre ; le laissera- t-on détourner son talent vers une autre bran- -che de l’art, tandis qu'il est le seul qui puisse produire dans celle-là des ouvrages dignes de d'état où sont tous les autres arts en France ? Il est une partie des sciences mathématiques nécessaire à la profession des arts du dessin; inais que peu d'artistes apprennent , parce qu'elle offre des difficultés que le grand nombre n'a pas le courage de vaincre: c’est la perspec- tive. M. Peyre s’est proposé de faire disparoitre ces difficultés, d'en rendre l’étude facile en simpliBant la théorie. Il nous a exposé ses prin- cipes et son plan, dans une introduction à un traité de perspective qu'il est sur le point de publier. Il espère amener cette partie de la Nouvelles litréraires. 253 science à ètre aussi simple pour les cas ordi- maires, qu'une addition de nombres égaux ; et ce qui doit inspirer de la confiance, c'est qu’il annonce ce résultat comme étant celui de sa longue pratique et de l'expérience de l'e nsei- gnement dans son école. M. Peyre à communiqué aussi à la classe le projet d’un palais impérial digne de toute la majesté de la nation et de son chef, et il a cherché des combinaisons propres à rendre cette dépense peu sensible au peuple. L'auteur s'occupe de faire imprimer ce vaste projet. | M. Grétry a ajouté aux titres nombreux qu'il a à la reconnoissance, par la publication d'un ouvrage intitulé: Méchode simple pour apprendre à préluder en peu de temps‘, avec toutes les res- sources de l'harmonie. Les autres ouvrages de théorie sur les arts, accueillis par la classe dans le cours de l'année, sont : : L'Art de bâtir, par M. Rondelet, architecte du Panthéon ; ouvrage d’une science profonde, éclairée par la pratique. Les dessins anatomiques que M. Salvage, docteur en médecine, a présentés à la classe, donneront l’espérance d’avoir un ouvrage élé- mentaire qui manquoit à l'enseignement de l'art du dessin. IL est quelques ouvrages relatifs aux arts, ét que la classe a cru devoir encourager, pour leur utilité relative ; d’autres qu’elle voit avec 354 Nouvelles littéraires: plaisir se placer dans la bibliothèque de l’Ins- titut , à cause du rare mérite de leur exécution. Parmi les premiers , sont les grands prix d’ar- chitecture publiés par MM. Détournelles, Allais et Vaudoyer : ces travaux restoient ensevelis dans les porte-feuilles et perdus pour l'instruc- tion. Cependant ce sont des monumens qui, indépendamment du talent qui les distingue, ont un autre genre d'intérèt : ils ont été le sujet de la plus grande récompense que l'art ob- tienne, le grand prix et la pension à l’école de Rome; ce sont done les annales de l’étude de l'architecture dans l'école. Il étoit utile de les publier. ét 4 Le motif qui a principalement engagé la classe à encourager l'ouvrage que fait paroitre M. Bal- tard sous le titre de Paris et ses Monumens , c’est que d’après le plan connu de cet œuvre, qui ne doit retracer que les monumens d'un beau caractère, tels que le Louvre et ceux de cette nature, elle a cru qu'il seroit utile aux jeunes élèves pour les rappeler aux grandes formes et à la noblesse de l’art, dont plusieurs causes ont pu faire craindre qu’ils s’éloignassent. Enfin , sous le rapport de l'honneur national et du commerce très-avantageux de la gravure, ce sera encore un œuvre utile. A ces deux titres , on doit de grands éloges à MM. Robillard , pour leur immense entreprise de faire graver notre Musée avec tout le luxe et les moyens de l'art. Ils sont les premiers depuis Nouvelles littéraires. 209 la révolution , qui ont consacré de grands capi- taux aux arts, et qui ont compté pour quelque chose l'honneur de leur être utiles. Puisse leur exemple amener parmi les fortunes opulentes, au moins la mode de paroître goûter les arts! elles arriveroient au plaisir de les sentir, au bonheur de les aimer , et à remplir le devoir de les encourager. Je dis devoir ; car lorsqu'il y a une partie de la gloire nationale attachée à la prééminence dans les beaux-arts ; quand, au milieu de tous les besoins publics , le gouvernement les encou- rage avec largesse et les honore , il est desrangs et des états qui leur doivent un tribut. Le sénat le paie avec grandeur par la magnificence avec laquelle il rétablit son palais , par le bon choix qu’il a fait d’un architecte recommandable pour diriger ces grands travaux, par le grand nombre de statues qu'il a ordonnées ; encouragement utile à la sculpture, et qui aura produit plu: sieurs beaux ouvrages. ‘La Vie des peintres célèbres, par M. Landon, eontenant toutes leurs œuvres gravées au trait, et les magnifiques descriptions des Liliacées et du jardin botanique de Malmaison par M. Re- douté l’ainé , sont au nombre des ouvrages que les artistes ont présentés à la classe, et aux- quels elle a donné ses suffrages. - La correspondance avec les associés étran- gers n’a pas encore eu le temps de s'établir avec l’activité qu’elle aura par la suite. Cepen- 256 Nouvelles littéraires, dant, l'un de ceux dont la célébrité est vaste; M. Canova , a fait plus que de correspondre avec nous : il a offert à l'Institut des copies en plâtre de plusieurs de ses ouvrages , que M. le maréchal Murat a bien voulu prendre le soin de nous faire parvenir. La classe des Beaux-Arts a desiré que le pu- blic jouit, comme elle, de ces productions d’un sculpteur justement célèbre ; et M. le directeur- général des Musées a secondé son vœu, en fai- sant placer les figures de M. Canova dans le salon d'exposition publique , où elles sont res- tées plusieurs mois. La classe à nommé, dans le cours de cette année , six correspondans , savoir : MM. Suvée, peintre, directeur de l’Académie de France à Rome ; Sainte-Ourse , peintre à Genève; Bois- sieu, graveur à Lyon; Porporati, graveur à Turin ; Fabre, peintre à Florence; Réga, gra- veur en pierres fines , à Naples. | Elle a aussi fait des pertes: M. Calderari, architecte distingué, à Vicence, et associé étran- ger, y est mort dans un äge avancé. Nous ren- drons à sa mémoire, dans une autre séance, Fhommage public qui lui est dû. M. de Humboldt, correspondant de l’Institut a lu , dans la dernière séance de la classe de phy- sique et de mathématiques, le troisième mé- moire sur Le voyage qu'il a exécuté avec M. Bom- pland , dans l'interieur de l'Amérique méridio- nale " Nouvelles Hittéraires. 285 nâle et le Mexique. Dans le premier, il a tracé les observations faites dans l'Océan Atlantique , à la cime du pic de Ténériffe , et dans la pro- vince de la Nouvelle-Andalousie. Dans le se= cond, ila indiqué les opérations exécutées dans la province de Venezuela et les plaines de Ca- lobozo , où il a fait des expériences curieuses sur le Gymnotus electricus. Dans le troisième iné- moire , il a présenté le précis abrégé de sa navi- gation sur l’'Orenoque et le Rio-Negro ; naviga- tion dangereuse, exécutée pour déterminer as- tronomiquement Ja communication de l'Ori- naro avec la rivière des Amazones. Ces mémoires, qui embrassent tout ce qui peut intéresser dans ces contrées, la géographie, la botanique, la minéralogie et l’histoire morale de l’homme , seront bientôt imprimés pour donner au public un précis abrégé de cette ex- pédition , jusqu’à ce que les observations elles- mêmes lui puissent ètre présentées. On a déjà commencé la gravure de plusieurs dessins de M. de Humboldt. P4RIS. Néerologie. Nicolas-Joseph Gucnor, né à Void, en Lor- raine , le 26 février 1725 , vient de mourir à Paris, rue de Tournon. Il avoit servi en Al- lemagne, comme ingénieur ; il passa ensuite dans les Pays-Bas, au service du prince Charles. Des Pays-Bas, il vint à Paris en 1763; il y donna Tome VIT, R Î 258 Nouvelles littéraires. des lecons sur l’art militaire. Il y publia diffé- rens ouvrages : en 1766, des Elémens de l'art militaire, ancien et moderne, 2 vol. in-12 ; en 1769 , une f'ortification de campagne ; ou Traité de la science de la construction, de la défense ét de l'attaque des retranchemens , ouvrage estimé , 1 vol. in-12; en 1778, la Théorie de la fortifica- Lion , avec des observations sur les différens sys- tèmes qui ont paru depuis l'invention de l’artil- lerie, et une nouvelle manière de construire des places, vol. in-12, qui contient de plus une description d’une nouvelle planchette , avec la manière de s’en servir. Cugnot imagina un nouveau fusil qu'il pré- senta au maréchal de Saxe , et qui fut adopté pour ses houlans. Il avoit construit à Bruxelles, un abricot qui étoit conduit par le feu et la vapeur de l’eau. M. de Choiseuil , ministre de a guerre , le chargea de faire construire une grande voiture sur les mêmes principes ; elle fut exécutée à l’Arsenal , et mise à l'épreuve : cette voiture existe à Paris au dépôt des machines. Cugnot, avant la révolution , jouissoit d'une pension sur l'Etat, de Goo liv. , seule ressource qui le faisoit vivre ; elle lui fut ôtée. À son âge, il auroit péri de misère sans les secours d’une dame bienfaisante de Bruxelles , qui étoit à Paris pendant la révolution ; mais les besoinside son âge augmentant , un ami de quarante ans , M. Messier , de l’Institut , fit, en sa faveur, un mémoire qui fut remis au mois de floréal an 8, À Nouvelles littéraires. 259 sous les yeux du Premier Consuc: sa pension de 6oo liv. Fut rétablie , et l’on y ajouta 400 liv. de plus. Il ne sortoit plus depuis quatre ans. Il est mortcélibataire , avec une vue excellente. La mort de M. Mécnain est une des plus grandes pertes que pouvoit faire l'astronomie : il ajoute un article bien remarquable au marty- rologe de cettescience, puisqu'il est mort victime de son zèle pour une des plus importantes et des plus difficiles opérations. Pierre-François- André Méchain naquit à Laon , le 16 août 1744. Ses lettres m'avoient ap- pris ses dispositions pour l'astronomie, et j'eus le bonheur de pouvoir le fixer à Paris en 1772. Le 13 août 1774 , l'Académie approuva son pre- mier mémoire sur une éclipse qu'il avoit obser- vée à Versailles le 11 avril. Il étoit alors attaché au dépôt de la marine , où il a fait d'immenses calculs pour la perfection des cartes. IL décou- vrit et calcula plusieurs comètes. Il remporta le prix de l’Académie en 1782, sur la comète de 1661 dont on espéroit le retour pour 1790 , et il y fut reçu la même année. H fut chargé de la connoissance des temps ; et, depuis 1788 , cet ouvrage a pris une nouvelle perfection : il étoit enrichi, chaque année , des travaux de M. Mé- chain. En 1592, il fut chargé du grand travail de la méridienne depuis Dunkerque jusqu’à Barcelone , conjointement avec M. Delambre : il revint en 1798. Mais pour compléter cet ou= R 3 260 Nouvelles littéraires. vrage , il voulut la prolonger jusqu'aux îles Baléares ; -et il partit en 18053. Il avoit déja re- connu , avec des peines inouies , toutes les sta- tions, et en avoit terminé trois, lorsqu'il est mort , le 20 septembre 1804, d’une fièvre qui règne tous les ans sur la côte de Valence , à cause des marécages et des rivières. On trouvera une notice plus étendue de ses travaux, avec son portrait gravé en 1800, dans le journal de M. Zach ; et je me propose de l'étendre encore dans l’histoire de l'astronomie pour 1804. De Laranpe. D O U A x. Société libre des Sciences , Lettres et Arts de Douay. Dans la dernière séance de cette Société , M. Moucheron, secrétaire - général, a rendu compte destravaux deses membres pendant l’an- née. Voici quelques-uns des plus intéressans : M. Tertelin a présenté de nouveaux procédés pour la purification des eaux. M. Drapier a fait diverses observations phar- maceutiques sur la préparation de l’éther ni- trique , sur l'analyse de la douce amère. Le docteur Vaudier a présenté des considéra- tions sur la production de la chaleur dans l'éco- : nomie animale. Il a combattu la théorie des éhimistes modernes, qui attribuent son déve- loppement aux divers changemens chymiques qui s'opèrent dans les phénomènes de la respi- Nouvelles littéraires. 261 ration ; et il a cherché à établir que la chaleur animale est entièrement due àla force vitale. Divers mémoires ont été lus par M. Duquesne, sur la nature et les propriétés de l’eau; par MM. Potier et Lebreton, sur diverses expé- riences galvaniques faites à Douay, sur des sup- pliciés ; par M. Mauroy, sur un pont de nou- velle invention, propre à remplacer les ponts tournans ; par M. Loœillet, sur les moyens d’ac- célérer les progrès des sciences et des arts. MM. de Lalande, Silvy, Thellier , de Wavre- chin , ont lu plusieurs pièces de vers remplies d'intérêt. La Société a mentionné honorablement les travaux qui lui ont été adressés par plusieurs de ses membres-associés, MM. Volney, sénateur , Nauche, Charpentier, Winckler , Dudangeon et autres. É s La Société d'agriculture et arts du départe- ment du Nord, établie et séant dans la même ville de Douay , propose les deux questions sui- vantes, pour sujets de deux prix qui seront décernés dans les séances publiques que la So- aiété tiendra aux époques ci-après indiquées. Première question. « Quelle méthode de propager , élever, nour- « rir et renfermer les moutons de la race exis- « tante actuellement dans le département du R 3 262 Nouvelles littéraires. « Nord, doit être suivie dans ce département « pour obtenir de ces animaux une laine égale « en qualité aux meilleures laines fournies par « les moutons d'Angleterre » ? Deuxième question. Un insecte, connu dans les campagnes sous la dénomination impropre de puceron , a , cette année , et plusieurs années précédentes, atta- qué et détruit la plupart des fleurs des colzas. » Quel est cet insecte? Sous quel nom générique « et spécifique les naturalistes les plus célèbres « l’ont-ils désigné? Quelle est sa vie, soit dans « l’état de coléoptère , où il se trouve sur les « colzas , soit dans l’état de larve ? Quels enne- « mis naturels , quels moyens artificiels de des- «truction pourroient lui être opposés avec « succès dans l’un et l’autre état? En général , « quels soins pourroient préserver les colzas de ses ravages ? » Il sera délivré à l'auteur du meilleur mémoire, sur l’une ou l’autre des deux questions propo- sées , un prix consistant en une médaille en or de la valeur de 150 francs. L'auteur du meilleur mémoire sur la pre-+ mière question , recevra cette médaille à la séance publique que la société tiendra dans la première quinzaine du mois de fructidor an 13. Les mémoires rélatifs à cette question devront être envoyés et parvenus, francs de port, au ee ext dur. De Fiac) 2m de ES. Nouvelles littéraires. 263 secrétaire de la société , avant le premier ther- midor prochain. Le terme est de rigueur. L'auteur du meilleur mémoire sur la deuxième question, recevra la médaille proposée à la séance publique que la société tiendra dans la première quinzaine du mois de fructidor an 14. Les mémoires qui traiteront de cette se- conde question , devront être envoyés et parve- nus, francs de port, au secrétaire de la société, avant le premier thermidopr an 14. Le terme est aussi de rigueur. Les mémoires envoyés pour le concours ne … porteront point le nom de leur auteur, mais * seulement une devise ou sentence qui puisse … servir à le faire connoitre. À cet effet, il sera ‘joint à chaque mémoire un billet cacheté , con- tenant la mème devise ou sentence qui aura été mise au mémoire, et de plus, le nom et l'adresse de l’auteur. Ce billet ne sera ouvert que dansle cas où le mémoire , auquel il sera joint , rem- porteroit le prix. Les membres résidans de la société sont seuls exclus du concours. Tanrancer , président ; Taomassin , secrétaire. MONTPELLIER. Nécrologie. L'Histoire naturelle vient de perdre Jacques- Philippe Raymond Draparnau , né à Mont- pellier le 5 juin 1772 , âgé de 32 ans environ. R 4 l 264 Nouvelles littéraires. Draparnau fut studieux dès sa plus tendre jeunesse. À quinze ans, il soutint en philosophie une thèse qu'il avoit composée et dédiée à la Société royale des sciences. Cette thèse avoit pour titre : Theses ex universé philosophiä. C'é- toit l’usage de faire soutenir les thèses de philo- sophie par deux élèves : mais Draparnau eut cette fois l'honneur de soutenir seul le choc des argumentateurs. Toute la Société des sciences assista à ses premiers succès ; et plusieurs mem- brés de cet illustre corps l’interrogèrent , no- tamment MM. Poitevin et Chaptal : ces savans furent .si satisfaits des réponses du jeune Dra- parnau , que le dernier se transporta chez son respectable père pour l’inviter à diriger son fils vers l'étude des sciences ; il employa tous ses efforts pour en obtenir la promesse. Draparnau savoit le grec, l’hébreu, l'italien, l'anglais, l'allemand et l'espagnol ; il dessinoit supérieurement , et joignoit divers talens agréa- bles à ses grandes connoissances. _ Je m’étois particulièrement occupé d’un genre de plantes cryptogames , nommé les confèrves. J'avois trouvé dans les environs de Bordeaux, un grand nombre d'espèces nouvelles de ce genre , que je dessinai et que je décrivis avec le plus grand Sin ; je me proposois de publier un assez grand'travail à ce sujet , lorsque j'appris que Draparnau s’occupoit de la même matière : je lui fs le sacrifice de tous les matériaux que j'avois acquis, et depuis ce temps, je n’avois Se ne. Gé © |.) ad ee do À dé Nouvelles littéraires. 265 cessé de lui adresser tout ce que je pouvois acquérir de nouveau et d’intéressant sur les conferves. L'histoire des Mollusques est une des parties de la science sur laquelle nous avons le moins de connoissances: Draparnau préparoit un grand travail sur ces animaux informes, qui jouent peut-être un des plus grands rôles dans la nature. La Monographie des Conferves et l'Histoire des Mollusques sont les deux ouvrages que Draparnau avoit presque terminés, et qu'il alloit donner au public , comme le fruit de quinze ans d'observations, quand il fut attaqué de la maladie dont il est mort. Une foule de sociétés savantes avoient donné à Draparnau le titre de membre et de corres- pondant ; il avoit envoyé à ces diverses sociétés un grand nombre de mémoires sur divers sujets, qui prouvent tous et ses profondes connois- sances en tout genre, et l'élégance de son style. S'il se fût pressé de donner au public les ou- vrages dont il avoit arrêté le plan , il y a dixans que Draparnau auroit un nom célèbre en Eu- rope: mais il craignoit de publier; il vouloit produire des œuvres parfaites ; et ialheureuse- ment il n’étoit encore connut@e des savans qui s’oocupent d'histoire “en 4 ceux d’Al- lemagne sur-tout avoient la plus haute opinion de son mérite , et lui rendoient justice. Ilest mortie 12 pluviose, à la suite d’une mala- die de langueur , causée par la perte de son fils. 266 Nonvelles littérarres. Cependani les sciences ne perdront pas tour le fruit des longs travaux de mon ami. M. Sé- neaux , sombeau-père, médecin à Montpellier , possède tous les manuscrits qu’avoit recueillis. son gendre. Il les mettra en ordre , et les pu- bliera sans doute. Pour la Monographie des Con- ferves , attendue par les botanistes de toute FEurope , la famille de Draparnau me propose d'en publier l'édition : je me chargerai de ce travail, comme ancien collaborateur d’un sa- xant malheureux ; je tâcherai de répondre à la confiance que m'’accorde une famille respec- table; et le desir de servir la gloire de Dra- parnau et les progrès des sciences, me tien- dront lieu des talens qui me manquent. Une vie détaillée de l’auteur et un grand nombre de planches exécutées d’après ses des- sins, une foule d'observations nouvelles et une. excellente méthode, feront de la Monographie és Conferves , un ouvrage intéressant. Cet ou vrage sera d'autant plus nécessaire au progrès. ce l'histoire naturelle, que le genre des con- {trves est absolument inconnu, et que tout ce u'on en a écrit ne contribue pas à le faire. (5) On y insere les Mémoires les plus importans sur ioutes les parties des Aris et des Sciences; on choisit principalement ceux qui sont propres à en accélérer les progrès. On y publie également les Découvertes ingé- nieuses, les Inventions utiles dans tous les genres. On y rend éompte des Expériences nouvelles. On y donne un précis de ce que les Séances des Sociétés littéraires ont offert de plus intéressant; une descrip- lion de ce que les dépôts d'objets d’Arts et de Sciences renferment de plus curieux. On y trouve des Notices sur la Vie et les ee vrages ‘des Sayans, des Littérateurs et des Artistes distingués dont on regrette la perte; enfin Les Nôue velles littéraires de toute espèce. La correspondance que le Rédacteur entretient avec plusieurs Savans étrangers, lui procure, sous ce rapport , beaucoup de Notices qu'on ne trouve point ailleurs. Ce Journal est composé de six volumes #7-8.° par an. I paroït le premier de chaque mois une livraison de 15 feuilles, faisant 240 pages. Lé prix de ce Journal est fixé : à 9 francs pour trois mois, 18 francs pour six mois, 36 francs pour un an, tant pour Paris que pour les Pépartemens, franc de port. On s'adresse, pour l'abonnement, à Paris, chez (4) M. Drraxcr, luprimeur-Libraire, rue des Mathu- rins, hôtel Cluny , chez la veuve Clianguion èt d’Henget,' chez Van-Gulik. ‘À Bruxelles , chez Lemaire. À Florence , chez Molini. A Francfort-sur-le-Mein, chez Fleischer. À Genève, : A Amsterdam, ; chez Manget. chez Paschoud, ‘À Hambourg, chez Hoffmann: | A Leipsic, chez Wolf. A Leyde, chez les frères Murray. A Londres, chez de Bofle, Gerard Street, À Strasbourg, chez Levrault. A Vienne, chez Degen. A Wesel, chez Geisler, Directeur des Postes. Il faut affranchir les. lettres. AVS: On peut s'adresser au Bureau du Magasin Encyclopé- dique, pour se procurer tous les Livres qui paroissent en France et chez l'Etranger, et généralement pour tout ce qui concerne la Librairie ancienne et moderne. On sy charge aussi de toutes sortes d’impressions. Les Livres nouveaux sont annoncés dans ce Journal aussitôt après qu'ils ont été remis au Bureau, c’est'à-dire, dans le Numéro qui se publie après cette remise. Le Magasin paroît le premier de chaque mois. On prie les Libraires qui envoient des Livres pour les annoncer, d'en indiquer toujours le prix. 1 \ Table des Articles contenus dans ce Numéro. ANTIQUITES. [onumens antiques inédits ou nou- vellement ‘expliqués ; par, A. L. Millin.. SANTE 445 Hirsrorre, ableau historique des découvertes et établissemens dés Européens dans le nord et l’ouest de PAfri- que. 154 rigine des frères de la Rose-Croix, eic.; par Christophe - Théophile de Murr. 195 LITTÉRATURE ORIENTALE. ibliothecæ Arabicæ , PTIT, IV et VW. D.J., presideG.F: Schnurrér: 177 Fe, À Medecine. railé des maladies vermineusés ; par Valérian-Louis Brera , traduit. | “de l'italien ; par les CC. Bartholi | et Calvet , neveu. ARIÉTÉS , NOUVELLES ET CON= RESPONDANCE LITTERAIRES. JOUVELLES ETRANGÈRES. ALLEMAGNE. lite de la Notice sur les travaux des membres de l’Université et de PA- cadémie de Gættingue, 1 2or & Hanovre. édailles frappées dans cette ville, -n l'honneur de l’empereur des Erançuis. | n Wurzsourc. fquisition du cabinet de Blank, par l’électeur de Bavière , pour élte université, in Moravis. ésent fait à la Société par M. le omte de Berchiol, Ibid. 184 «LFALTIE. Publication du onzième volume des . Mémoires de la Société italienne des Sciences. 225 INDES ORIENTALES. Lettre de M. Lambton , sur la mesure d’un arc du méridien. 229 AMERIQUE. Catalogue des ouvrages imprimés dans les Etats-Unis. | Extrait d’une lettre du professeur Mitchill, sur une masse d’or natif trouvée dans la Caroline du Nord, \ : 23T INSTITUT NATIONAL. Notice des travaux de la classe des- Beaux-Arts de l’Institut national, . pendant lan 12. 232 Pants. Nécrologie. 4 Mort de Nicolas-Joseph Cugnot. 257 : Mort de M. Méchaïn, 259 MonTPELLIER. Mort de Jacques-Philippe-Raymond -Draparnau. 263 Douay. Notice des trayaux de la Société libre des Sciences , Lettres et Arts de Douar. 1. 202 ORLBEANS. Prix proposé à l’auteur du meilleur mémoire sur cette question : {n- diquer les moyens les plus sûrs, ete. d'amener des eaux salubres dans * l'enceinte de la ville d Orléans, 207 LIVRES DIVERS. Botanique. Jardin de Berlin , ou Descriptions e$ Î É cl Heufes des Plantes” rires et penl Jurispradentes connues du jardin royal botanique ARR PT AE do Bar BIC QE M. PRE PONS Je cherche le Bonheur, de Willdenow. 270 Prodrome des cinquième et sixième, familles de l'Æthéogamie : les : Mousses; les Lycopodes; par M. Bibliothèque Conimér Peuchet. . : - Palisot de Beauvais. +. | 293 Art maili aire, Botanographie universelle ; par Fi. | Réflexions critiques sur Faut Loétqudoe Le 274 red de font i ÿ par | ‘Chimie. Monrket. Élémens de PArt de la teinture ; por] :: Géographie. A.B. Berthollet. ! ù I id. Abrégé élémentaire de £ Médecine. gi ancienne et moderne. - © Journal de Médecine , par MM. Cor-} : Voyages. - visart, Leroux et Boyer. … Abid. Voyagé pittôresque de ts Sy Lomie rurale et domestique. re Biographie. VII, VIT et IXe, Cahiers de la seconde année de la Bibliothèque ysico économique; par CS, onnunts ‘275 Recueil pratique d'économie rurale domestique ; par madame Gacon ufour. PORTES | .27 ; Littérature arabe. SC TENTE “ Supplémens pour la: Littérature] Fableties philosophiques re arabe; par Che-Théoph. de Mur. | #61 ti0:; par Duronéeren. ‘2771 Le Natrateur de la Meuse. Plutarque ; on Abrégé! des ! hommes. illustres de ce deritaun n NE de Antiquités. Monumens antiques du Musée léon ; par Louis Petit-Radel, 7, Mélanges. | —— mn . sens RD t LR t A V IS. "à rs i£, ; NV ES DATE NV EI 2 OR On peut s’adresser au Bureau du Magasin Encyclopédiqui pour se procurer tous les Livres qui paroïssent-en France et ché l'Etranger, et généralement pour tout Ce qui concerne la £ brairie ancienne ét moderne, . Rx : On s’y chargé aussi de toutes s0 Les Livres nouveaux sont annoncés dans ce Journäl aussitôl après qu'ils ont été remis. au Bureau ; c’est-à-dire, dans Numéro qui se publie après cette remise. : ‘4 Le Magasin paroît le premier de chaque mois, 4 tes d’impressions. . On prie les Libraires qu, envoient des Livres peur les en noncer, d'en indiquer (Ou)Ours le PriÆ. 7 4 4 CN 23) 1804. MA GASIN . ENCYCLOPÉDIQUE, or | DES LETTRES ET DES ARTS, RÉDIGÉ PAR À. L MILLIN, ; bre de l'Insriur, Conservateur des Médailles , des Pierres: 5 gravées et des Antiques de Ja Bibliothèque ae, Pro : fesseux d’Archæologie, Membre de l'Académie de Goettin+ Prix dé ce Journal , tant pour Paris que pour les à Départémens ; franc de port: pour trois mois, /..r.«.4tr.de.. 9 francs “pour six MOIS... Vaeu ts sant 210 francs pour un an ,- parsre nee. i5.ese. 06 francs, NE TS 7 Er fe fi E, s AN) à AVIS ESSENTIEL. Les abonnés qui ont des réclamations de N°, à faire pour l'an IX, sont invités à les adresser dans la quinzaine au bureau du Magasin. Passé cette époque, on ne garantit pas de pouvoir les compléter. Dsscrxerres, Desaurr, Desronraïines, Duxenix, Fo: # TANES, Fourcroy, Grorrroy, Hazzé, Haüy, Herman, | Lasovisse, Liacérène, LAcRANGs, LALANDE, LAMARGK, Lanorès, Lesrun, L'Hentrier , Lévernré, MannoN, M Menrezze, Morerzer, Noer, Osrrrin , Sainre-Croix, | SCHWEIGHÆUSER, SICARD, SILVESTRE DE SACY, SUARD, | TrAuLzLé, Van-Mows, VenNTENAT, Visconri, ViLLotsoN, Usrent, Wircemer, Wincxzse, et d’autres Savans ou Littérateurs estimables. On y insère les Mémoires les plus importans sur tontes | Jes parties des Arts ei des Sciences; on choisit principa- ” lement ceux qui sont propres à en accélérer les progrès. On y publie également les Découvertes ingénieuses, M les Inventions utiles dans tous les genres. On y rend + compte des Expériences nouvelles. On y donne un pré- * cis de ce que les Séances des Sociétés littéraires ont offert ‘4 de plus intéressant; une description de ce que les dépôts ’ “4 » . . d'objets d’Arts et de Sciences renferment de plus curieux, On y trouve des Notices sur la Vie et les Ouvrages des Savans, des Littérateurs et des Artistes distingués L. dont on regrette la perte ; enfin les Nouvelles littéraires de toute espèce. ; Gi La correspondance que le Rédacteur entretient avec plusieurs Savans étrangers, et principalement en Alle- magne, lui procure beaucoup de Notices quon ne trouve M point ailleurs, On s'adresse, pour l'abonnement, à Paris, chez Drcancr, ? c : ? , L) Imprimeur - Libraire, rue des Mathurins, hôtel Cluny, chez la veuve Changuion et d'Henget. À AnearRnS $ chez Van-Gulik. “ re À Bruxelles , chez Lemaire. A Florence , chez Molini. À Francfort-sur-le-Mein, chez Fleischer. s chez Manget. , A Genève, 3 chez Paéchoud = À Hambourg, chez Hoffmann. À Leipsic, chez Wolf. A Leyde, chez les frères Murray. A Londres, chez de Botte, Gerard Street; A Strasbourg, chez Levrault, A Vienne, chez Degen. A Wesel , chez Geisler , Directeur des Postes, J1 faut affranclur les lettres. * Nota ne. 1 “ÿV\O'Y À GE: TagzeAu du climat et du sol des Etats: Unis d’ Amérique; suivi d’éclaircissemens sur la Floride, sur la colonie françoise au iSoioto, sur quelques colonies canadiennes et sur les Sauvages ; enrichi de planches gravées, dont deux cartes géographiques, et une coupe figurée de la chute de Nia- gara; par C. F. VoznE* , membre du Sénat Conservateur, de l’Institut national de France ; inembre honoraire de la So- ciété Philosophique- Américaine de Phi- ladelphie, de la Société Anglaise-Asia- tique de Calcutta, etc.:2 vol. in-8.° 652 pag., Y compris un vocabulaire de la langue des Miamis. Paris, chez Courcier, imprimeur- libraire, quai des Augustins, n° 72; et chez Dentu, imprimeur-libraire, palais du Tri- bunat, galeries de bois, n.° 240: — 1805, L'Avreur judicieux qui a dépeint avec tant de vérité l’état physique et politique de l'Égypte et de la Syrie , les ruines de Palmyre, les mœurs et le gouvernement des Arabes, nous donne aujourd’hui ses vues sux le climat et le Tom eYI. si 200 Voyage. sol des États-Unis d'Amérique, et des éclaircis- semens, principalement sur des Colonies Franco- Américaines et sur les Sauvages. La juste célé- brité du premier Ouvrage, garantit l'heureuse destinée du second. Une analyse de cette nouvelle production, est un tribut de reconnaissance bien dù à l'homme instruit qui a sacrifié les plus belles années de sa vie pour éclairer ses semblables, En résumant les choses , nous conserverons les propres paroles de l’Auteur, autant que l'exposé le permettra. Leur clarté et leur énergie nous en font un devoir. M. Volney exprime dans sa Préface la dif- férence des circonstances de tems et de sa sitüa- tion d'esprit, qui ont accompagné ses deux grands Voyages, ; Lorsqu’en 1783 il partit de Marseille, ce fut de plein gré, avec cette alacrité, cette confiance en autrui et en soi-même, quinspire la jeu- nesse. Il quittait gaiment un pays d’abondance et de paix, pour aller vivre dans un pays de barbarie et de misère, sans autre motif que d'employer le tems d'une jeunesse inquiète et active, à lui procurer des connaissances d’un genre neuf, et embellir par elles le reste de sa vie d'une auréole de considération ét d'estime. M. Volney a, dans le premier Voyage , plus que rempli son objet. Lorsqu'au contraire, en 1796, il s'est em= barqué au Hävre , c'est avec le dégoût et l'in Amérique Septentrionale. 294 différence que donne l'expérience de l'injustice et de la persécution. Triste du passé, soucieux de l'avenir ; ïl est allé avec défiance chez un peuple khbre, voir si un ami sincère de cette liberté profanée trouverait, pour sa vieillesse , un asyle de paix dont l'Europe me lui offrait plus l'espérance. Il a été cette fois cruellement trompé. Une * épidémie d'animosité contre les Français , traités en général de Jacobins et d'Athées ; ,et dés mécontentemens personnels produits par des soupcons les plus absurdes conçus contre lui, l'ont obligé de se retirer des États- -Unis ,ssiprès trois ans “lle séjour. Il n'avoit pas été précédemment plus heureux en Corse : il nous dit, dans le cours de son Ouvrage, que dès 1790, en méditant sur les conséquences que pourraient avoir sur nos Co- lonies les principes et sur-tout la conduite de quelques amis des Noirs , il avait imaginé qu'il pourrait être d’une grande utilité publique et privée, d'établir dans la Méditerranée la culture des productions du tropique : et parce que plusieurs plages de Corse sont assez chaudes pour nourrir en pleine terre des orangers de vingt pieds de hauteur, des ice ; des dattes, et que des échantillons de coton, de canneset de café y avoient déjà réussi , il avoit projeté d'y cultiver ces denrées, et de susciter par son exemple ce genre d'industrie. Pour cet effet , il avoit acheté en 1792, près d’Ajaceio ; 292 Voyage. un domaine dans une position très-favorable ; auquel il avoit donné le nom de petites Indes. Tout réussissoit à son gré, lorsque, trahi par la perfidie de Pascal Paoli, qui mit à l'encan le domaine des petites Indes, M. Volney se vit forcé de fuir d'une île qui a produit le génie. Depuis, il a eu au moins le bonheur de. rentrer dans sa possession, et de la revendre sans beaucoup de perte. M. le Cardinal Fesch en est aujourd'hui propriétaire. De retour en France en 1798, M. Volney conçut un plan vaste, une Histoire générale des États Unis. Il eût remonté à l'époque la plus reculée : il eût fait un tableau de leur révolu- tion, plus ressemblante à la nôtre que l’on ne 2 pense : il eùt tracé ensuite la conduite de ce peuple et de son gouvernement , depuis 1783 jusqu'en 1708. Mais entraîné par des affaires , tantôt privées, tantôt publiques, et arriéré de-. puis un an par de graves incommodités, il a senti que le temps et les forces lui manqueroient pour porter le travail à son terme : il s’est borné à ne publier que le tableau du climat et du sol, | qui, sans nuire au reste, peut en être séparé. C'est de cet Ouvrage dont nous entreprenons l'analyse. Pour lui donner plus de clarté, nous divi- serons l'ouvrage de M. Volney en cinq Sections, qui auront pour objet: 1.0 le so! des Etats- Unis, 2.0 leur climat, 3.° des éclaircissemens sur la Floride, le New-Hampshire et le Ver- mont, 4.° des éclaircissemens sur des colonies F L 1 Amérique Septentrionale. 295 franco-américaines, 5.0 des observations géné- rales sur les Sauvages. Notre analyse sera longue. Mais quel état mérite plus d’être connu, d'être : approfondi, que les républiques dAnéque $ qui, dans leur immense étendue formant une espèce de triangle , présentent une circonfé- rence d'environ 180olieues communes de France; dont la population, depuis vingt ans que l'An- gleterre a reconnu leur indépendance, est de- venue cinq fois plus considérable qu’elle ne l'étoit alors; qui notamment contenoient il y a trois ans 8,053,000 individus, suivant les dé- nombremens de 1800 et de 1801, tandis qu'elles n'en contenoient il y a quinze ans que 3,083,622 suivant les dénombremens de 1787 et 1788 ; Elémens de Statistique, traduits de W. Play- fair par Donnant ; qui, enfin, depuis la réu- nion de la Louisiane, vendue par la France, et des pays cédés par des nations indigènes, ont acquis une influence plus réelle et plus relative, plus directe et plus indirecte, que la France » trouva à 8h. 111207, temps moyen à Brême, » l'ascension droite d: l'étoile — 1° 29! 39" et la » déclinaison australe — 0° 47' 19". » Les 5, 6 et 7 septembre je fus obligé, pour comparer cette étoile erraate , d'employer une petite étoile de hui:ième grandeur, quise trouve, il est vrai, dans l'hi toire céleste , tome 1 . P: 110, mais qui est défi uré: par une faute d'impression, J'ai cherché à déchiffrer sa position juste autant qu'on peut corriger la leçon par conjecture , et j'ai calculé, d'après elle , les lieux de la planète pour les jour: suivans. Comme cette nouvelle planète passe à présent bientôt après minuit par le méridien , nous aurons dans peu lesobservationsles plusexactesau moyen d'instrumens fixes, et alors son orbite et sa véri- table position dans l’espace pouront être détermi- nées. S'ileconfrmoit, ce quiest très-vraisembla- ble, que cette étoile est une planète inconnue jus- qu'ici dans notre système solaire, laquellese meut entre marsetjupiter autour dus /leil, l'hypothèse de M. le docteur Olbers , sur l’origine de cérès et Nouvelles littéraires. 395 de pallas, prendroit, par cette dernière décou- verte, un nouveau degré de vraisemblance. Prusse. Académie royale. La classe de belles - lettres fait la déclaration suivante : Sur la question proposée par elle sur les Goths et le gothicisme, il n'est ainsi que la dernière fois , entré pour le concours que deux pièces, l'une en allemand , avec l’épigrapüe : Vestaque Gothorum ut niteat velata recenti Flore; l'autre en français, avec celle-ci: /mita- piini certè Gothos, etc. qui étoit aussi sur la française de 1802 ; mais cette fois-ci sans billet cacheté , dont cependant nos lois prescrivent l'addition à toutes les pièces concurrentes. Ni l’une ni l’autre des deux n'ayant satisfait la classe des belles-lettres, elle renouvelle la même question pour l’année 1806 , encore avec un double prix. Elle ose espérer qu’un sujet si intéressant produira enfin une solution qui ne laissera plus rien à désirer , soit de la part des mêmes auteurs en complétant ce qu'ils sentiront manquer à la leur, soit de la part d’autres savans qui voudront s'en occuper. Voici la question même: « Déterminer l’état 596 Nouvelles littéraires. où se trouvoient les arts de la parole et les arts du dessin parmi les peuples du moyen âge. La question se divise en trois parties. » « I. Les peuples du Nord; les Gots, les Vandales, les Longobards, les Francs, les Bourguignons , les Anglo Saxons et les autres ; tous ceux, en un mot , qui ont partagé entr eux l'Empire d'Occident, y ont-ils apporté de leurs terres natales quelque chose que l’on puisse regarder comme leur appartenant en propre en fait de sciences et d'arts? ou plutôt ne peut-on pas prouver que la culture de l'esprit en toute genre ne commença ch:z eux que par leur double communication avec les provinces occupées par les anciens habitans romains, d'abord comme limitrophes, et dans la suite comme conquérans et maîtres de ces mêmes provinces ? » « 11, Peut-on donc avec raison, dans les arts de la parole et dans les arts du dessin, attribuer à ces peuples septentrionaux un style particulier, et qui ne soit qu’à eux? ou bien les phénomènes que le moyen-âge nous offre dans ces deux arts, ne sont-ils autre chose que des modifications de l’ancien goût grec transmis aux Romains , modifications produites après la chute de l’Empire de Rome, par les nouyelles situations politiques, religieuses et Nouvelles liltéraires. 59” morales auxquelles toutes ces contrées furent soumises ? » « III. Et dans cette dernière supposition, 10. Quelles sont les marques caractéristiques des productions du moÿen âge relativement aux arts de la parole aussi bieu qu'à ceux du dessin ? «. 2°. Dans quel ordre historique se rangent- elles à la suite les unes des autres ? » 30. Quelle est l'influence qu’a exercée la culture des belles-lettres et des arts des Arabes sur celle qui a eu vogue dans l'Europe occident: tale? par quel chemin le goût Arabe s'y estil introduit ? et quels sont les caractères distinctifs des ouvrages qui ont paru après l'époque de son introdnction ? » Le prix sera double et se distribuera en 1606. On invite les savans de tout pays, excepté les membres ordinaires de l'Académie, à tra- vailler sur ces questions. Le prix sera donné à ceux qui, au jugement de l'Académie, auront le mieux réussi. Les pièces écrites d'une caractère lisible seront adressées franches de port , au secrétaire perpétuel de l'Académie. Celles qui n'auront point mérité le prix au jugement de l'Académie, ne pouvant être rendues aux auteurs, mais devant être déposées en original dans les ar- 598 Nouvelles littéraires. chives de l'Académie , tous ceux qui enverront des mémoires au concours, sont invités à en tirer copie avant de les remettre. Ceux qui, malgré cette. déclaration si souvent répétée, persisteront à les redemander‘, ne trouveront pas mauvais qu'on ne leur réponde plus. Le terme pour les recevoir est fixé au 1.°r mai de l'année indiquée ci-dessus ; après quoi on n'en recevra absolument aucun , quelque raison de retardement qui puisse être alléguée en sa faveur. Francs. Lettre de M. Sixvestre DE Sacy à M, Millin. Je m'étois proposé, mon cher confrère, de vous donner une notice du petit recueil publié l’année dernière à Erlangue , sous le titre de Beytræge zur arabischen Litteratur, par l'esti- mable et savant M. de Murr, pour l'insérer dans le Magasin Encyclopédique.Cette tâche ayant été remplie par M. H....n(1), je me contenterai de vous communiquer un petit nombre d'obser- vations, dont le but est de rectilier quelques inexactitudes que j'ai remarquées , soit dans l'ouvrage même, soit dans la notice que vous avez publiée. Je crois utile surtout de faire dis- (1) Voy. ann, g, tome VI, page 277. Nouvelles littéraires. 599 paroître ces légères taches d'un recueil qui ne peut être sans intérêt pour les amateurs de la lit- térature arabe. 1°. Daus l'inscription arabe du M'hrab de la grande mosquée de Cordoue , qui est la première pièce de ce recueil, et que mon ami M. Tychsen, célèbre professeur de Ro:tock , avoit déjà pu- bliée , mais en arabe seulement , dans son Æle- mentale arabicum, on lit aux lisnes5, 4et5, un passage que ce savant traduit ainsi : Postquam Imamus Almostanser -billah Abdallah Alhakem princeps fidelium, cui Deus benefaciat ! divino auxilio ad imperium evectus fuerat , in manda- cis dedit ut hæc cella (Mihrab) pario marmore obduceretur | multisque luminaribus et magni- fico propylæo ornaretur. M. H....n observe, avec raison, qu'on ne voit pas sur quelle autorité M. Tychsen a rendu le mot almar par propy- Zœum ; et il propose delire «/manarati, et de tra- duire multis luminaribus et magnifico candelabro; mais il ne faut rien corriger , il ne faut que mieux lire le texte , qui porte clairement rogbatan fi djazili ‘lthawdbi, wakerimi ‘’lmadbi. Ce passage exige encore une autre correction ; au lieu de sayyadahou , comme lit M. Tychsen ligne 4, il faut lire schayyadahou , mot qui signile batir , construire solidement , et que je retrouve dans d’autresinscriptions arabes d'Espagne en ce sens. 400 Nouvelles littéraires. Voici maintenant le sens du passage entier : Al- mostanser - billah Abdallah Alhakem princeps fidelium , cui benefaciat Deus ! postquam auxi- lium Dei expertus esset in ædificandä hæc ædi- culé, jussit eam marmore obduci , desiderio mo- tus copiosam mercedem , et excellentem locum {in futuro seculo) demerendi. Je ne m'arrête point à justifier cette traduction , qui n’est, je crois, susceptible d'aucune difficulté ; j'ajoute seule- ment que le commencement de l'inscription ,. observate orationes , et orationem mediam , et state Déo devoti , est une sentence tirée de l’al- coran, surate II, v. 239, et que c'est dans les commentateurs de ce livre qu'il faut chercher le sens de cette expression obscure, orationem mediam , au risque de dire, après les avoir con- sultés : Fecistis probè: Incertior sum multo, quam dudum. 2°, L'inscription arabe de la patène d'argent de la collégiale de S. Cassien à Imola , a certai- nement été mal lue jusqu'ici ; mais les réflexions que M. H...n fait sur la manière dont M. Tych: sen interprète le mot /aën sont sans aucune application ; je ne les conçois même pas par- faitement. Je sais que le savant professeur de Padoue , M. Simon Assémani, a donné récem- ment une dissertation sur cette inscription. En attendant Nouvelles littéraires. 40 attendant qu'elle me soit parvenue, je hasarde de lire ala la yacoul icaloun (ohe ! ne comedat impu- rus) ! Ala est une particule indéclinable qui sert, suivant les lexicographes arabes , à faire faire at- cention (liltenbih) et à réprimander {liltawbikh). Cette inscription est un avis donné à ceux qui ont contracté quelque souillure spirituelle , de s'éloigner de la victime eucharistique dont cette patène offre l'emblème. 30. La prétendue lettre de la Sainte Vierge aux habitans de Messine , ne mérite guères d'at- tention. Il y a, dans ce que dit à ce sujet M. H....n, quelques méprises ; mais comma plusieurs ne sont certainement que des fautes d'impression, je ne m'y arrête pas. Je remarque seulement que dans le texte arabe donné par M. de Murr , d’après M. Tychsen , il faut lire, ligne 1 , moutawadhaa par uu dhad et un aïn, au lieu de moutawasila ; ligne 7, almokhtar par un ha au lieu d'un caf ; et peut-être, ligne 4, istaslahna {comprobavimus) au lieu de istaslahà, qui n’est pas arabe. 4°. L'inscription de la lionne de bronze, con- servée à Cassel, n’a point besoin de correction, comme l’a cru M. Tychsen, et après lui M. H....n. Il faut seulement prononcer matthal au lieu de mithal : alors ce mot signifie un homme qui exerce Tome FT. Ge 402 Nouvelles littéraires. l'art de faire des figures, un modeleur, et le sens est : Fait par Abd-allah, fabricant de figures. 5°. En ‘parlant de Saadi , M. H....n cite le second volume de l'ÆZistoire Arabe et Persanne de Saadi, publiée à Calcutta en 1795. Il a sans doute voulu parler de la collection des œuvres de Saadi. Voilà, mon cher collègue, a quoi se bornent mes observations. Je vous engage à leur donner place dans un des prochains numéros de votre journal. Recevez l'assurance de mon sincère at- tachement. Empreintes de médailles grecques et romaines de M. Mionner. Cette collection qui montoit à 1,500, est actuel- lement de 20,000 ; elle n'est plus susceptible que d'une légère augmentation , et le catalogue sera très-incessamment à l'impression, On peut dans ce moment se procurer , en outre des empreintes déjà décrites , les médailles suivantes : 1°. Un supplément aux peuples, villes et rois. 20, Les familles romaines ; or , argent et bronze. 3°. Impériales ; or et argent. 4°. Impériales ; en médailles d'or, d'argent et de bronze. 50. Impériales ; grand , moyen et petit bronze. Nouvelles littéraires. 405 Les personnes qui voudront acquérir cette col- lection, en totalité ou en partie, s’adresseront directement à M. Mionnet , rue Neuve-des-Pe- tits-Champs, n°. 46, au coin de la rue de la Loi, sans avoir égard au domicile qu'il avoit précé- demment indiqué sur son catalogue. On voudra bien affranchir les lettres. À LIVRES DIVERS (1). BoTANIQUE. BotanocRapute BeLcique. Troisième édition , corrivée ,augmentée et divisée en deuxparties, par François-Joseph LEsrisoupois , médecin, professeur de botanique, et membre de la so- ciété des amateurs des sciences et arts de la ville de Lille. — 2 vol. in-8°. de pius de 600 pages, avec23 planches gravées en taille-douce. Prix, 10 francs et 12 fr. francs de port par la poste.—A Paris, chez F. Buisson , imprimeur- libraire, rue Hautefeuille , n°. 20;et à Lille, chez Vanackere, libraire , Grande Place. | () Les articles marqués d’une * sont ceux dont on don- era un extrait. 40% Livres divers. PHysiQue. M£morne sur la chaleur, par le Comte de Ruw- FoRD. À Paris, chez Firmin Didot, an XII — 1804. Il est intéressant de suivre dans ses recherches un savant dont l'attention a été fixée dès sa jeunesse sur une seule branche de physique, et qui, par ses travaux , a également contribué aux prosrès de la science et de l'industrie hu- maine; mérile qui jusqu'ici sembloit appartenir exclusivement aux chymistes. Les esais publiés par M. Rumronp ont assez prouvé l'heureuse application des expériences a l'utilité publique. Ces mémoires paroissent consacrés à exposer la science et la connoissance plus intime de la nature de la chaleur. La chymie moderne , après avoir détrôné le phlogistique, a introduit , comme on sait, le calorique; et quoique les premiers chymistes l'aient plutôt resardé comme un nom, on l'a bientôt envisagé comme une substance réelle, un fluide impondérable , sans penser qu'on na presque fait que changer de nom, en passant sous silence les phénomènes de la Jumière, La théorie calorique se prétoit , en effet, si bien à l'explication des phénomènes chy- miques , dès qu'on s'étoit formé le système dun calorique latent, de la capacité, etc.. qu'on ne cherchoit plus à s'assurer de l'existence et de la réalité de ce fluile; et l'on ne s'étonnoit pas de l'iñmense quantité de fluide lumineux , ca- lorique , magnifique , électrique , galvanique , etc. qu'ôr accumuloit däns une même substance, le fer, par exemple , sans que le poids en fût aug- menté. Pour obvier à ces difhcultés, on com- Livres divers. 405 mencça , en Allemagne , à croire tous ces fluides comme les modifications d'un seul, fondé sur des analogies qu'ils présentent ; et les recherches faites depuis sur le galvanisme et l'électricité semblèrent assurer le triomphe aux physiciens Allemands. Ce fluide , que beaucoup nommoient une force, sans s'expliquer clairement sur ce qu'ils entendent par ce mot, passa pour double, ou originairement composé de deux fluides, dont les caractères sont opposés, et dont le conflit à différentes quantités ou proportions cons- titue les différens phénomènes. L'un fut ap- pelé positif, l’autre nésatif. On trouvoit cette duplicité de principes très-favorable à l'explica- tion des nouvelles expériences chymiques qu'on fait avec le prisme , de même que de celles qui semblent nécessiter l'existence d’un frigorique à côté d'un calorique. Il seroit hors de propos d'entrer ici dans un examen de ce système de duplicité ou d'an- tagonisme des forces physiques, ou de tenter une application aux expériences contenues dans ces mémoires , et qui ont déterminé M. de R. à abandonner le système du calorique , ét à re- garder la chaleur comme une simple propriété des corps; comme Euren l'avoit fait à l'égard de la lumière. M. de R. donne un précis de sa théorie dans le second mémoire. Il croit que la force de l’attraction qui agit entre les molécules d’un corps suppose ou nécessite même un MmOou- vement continuel dans ses molécules ; ce mou- vement ondulatoire se communique , comme les vibrations d'un corps sonore, à l'atmosphère , ou à un fluide plus in encore, qui environne et pénètre tons les corps (l'Ether), lequel se ré- pandainsien rayonnant dans toutes les directions, 406 Livres divers. et produit sur notre corps la sensation de la cha- leur ou du froid, suivant que ce mouvement est accéléré ou lent. On voit par cette exposé que M. de R. assimile les phénomènes de la cha- leur entièrement à ceux du son ; aussi dit-il d'un corps qui change de température, qu'il change de note ( à l'égard du toucher.) M. pe Rumrorp cherche dans ces mémoires moins à adapter sa théorie à l’explication de tous les phénomènes dela chaleur , qu’à prouver quil est des expériences qui ne peuvent s'accor- der avec l'existence du calorique , et qui sem- blent exiger le système qu'il vient d'admettre ; ces expériences sont celles qu'il a faites sur l'extrême quantité de chaleur produit par le frottement des corps et sur le rayonnement des corps tant chauds que froids. Il a trouvé à l’aide d'ua instrument qu'il a imaginé pour ces recher- ches et qu'il a nommé Thermoscope , que tous les corps étoient capables de produire ce rayon- nement et à toutes les températures; que non-seulement la nature, mais aussi la surface des corps faisoit varier à l’inlini l'intensité de ce rayonnement, laquelle étoit en raison inverse de la propriété d'une surface de réfléchir ces rayons. Il s’est convaincu que les mêmes surfaces qui réfléchissent faciiement les rayons de la lumière réfléchissent aussi le plus les rayons non- lumineux d'un corps froid ou chaud. La com- munication de la chaleur et cette tendance à rétablir l'équilibre des températures étant due en grande partie au rayonnement des corps qui environnent un autre plus ou moins chaud, il a vu que les métaux mettent le plus de temps à changer de température, qu'une surface claire en demande plus qu'une surface foncée , une Livres divers. 407 substance opaque plus qu'une autre imparfai- tement diaphane. Une des expériences les plus curieuses, est celle qu'il a faite avec un porte- voix. Ayant placé à l'un des orifices un vase rempli d'eau froide et à l’autre un thermomètre , il a trouvé que l’eau forçoit le thermomètre non-seu- lement à descendre , mais qu’elle produisoit cet effet 3 fois plus vite, que quand il avoit ôté le porte-voix. On sait que M5. Berruozzer et Hauy, l'un dans sa statique chymique , et l’autre dans son traité élémentaire de physique, ont cherché à ex- pliquer par la théorie du calorique les expériences que M. de R avoit déja publiées. M. BerrHozzer a attribué le développement de la chaleur par la friction au changement de capacité que le bronze éprouvoit en passant à l'état de poudre. M. de R. cherche à réfuter cette explication. Il observe que sans doute quelqu'autre corps pourroit être supposé avoir fourni de la chaleur que telle pou- dre métallique , ou que tousles autres reçevoient plutôt de la chaleur; mais 1°. que la poudre n'avoit pas changé de capacité. 2°. Que toutefois le changement de capacité d'un corps qui ne change pas d'état ne peut pas être considérable. 3°. Que la quantité de chaleur aété si grande que sitoute la barre de bronze qui pesoit 113 liv. avoit été réduite en poudre , la chaleur développée eût été capable d’élever 5078 livres d'eau de zéro à 800. R. chaleur qui eût suffi pour fondre 1811 liv. de métal, par conséquent 16 fois la quantité qui a seulement été réduite en poudre. Cette notice suffira pour faire voir combien ces mémoires qui sont remplis d'expériences in- génieuses , méritent l'attention de tous les phy- siciens , qui préfèrent la vérité à tout système, 408 Livres divers. et qui ne craignent pas d'examiner des faits , qui puissent leur inspirer des doutes sur une théorie qui leur a suffi jusqu'alors. En un mot cerecueil de mémoires a d'autant plus de prix qu'il est pré- cédé d'une notice historique des diverses expé- riences que le célèbre auteur a faites depuis trente ans. IL est terminé par des observationssur les puits ui se forment en été dans les grandes masses 50- lides de glace, aux glaciers de Chamouni. B. LEGISLATION. Awazysedes observations des tribunarx d'appel et du tribunal de cassation sur le projet du Code civil, rapprochées du texte. — À Paris, chez Crussaire, éditeur , rue de la Verrerie , n°. 8; Rondonneau, rue Saint- Honoré , hôtel de Bou- logne ; la veuve Dufresne et Méquignon, au Palais ; Deseine, palais du Tr'bunat; Le Nor- mand, cloître Saint-Germain-l’Auxerrois : un très-fort volume in-4°, de 1042 pages. Prix 13 francs ; et 19 francs par la poste. Il n’est pas nécessaire de vanter l'utilité de ce recueil à ceux pour quiil est destiné : il leur suf- fra de l'ouvrir, de le parcourir ; et mieux en- core, de l'étudier pour en connoitre les avanta- es, pour sentir quel a été l'objet et le but de l’auteur de l'Analyse, quelles ont été ses vues, etpour s'assurer qu'il les a parfaitementremplies. On s'apercevra d’abord, puis en l'étudiant, on sera bientôt convaincu que ce volume vraiment classique , sera d'une utilité indispensable aux jeunes.£ens qui s'adonnent à l'étude des lois, soit pour la procédure , soit pour l'éloquence du Livres divers. 406 barreau ; aux professeurs desécolesde législation, et aux magistrats les plus consommés dans l'é- tude de notre jurisprudence qui se trouvent quel- quefois embarrassés eux-mêmes: et qui (à raison de leurs connoissances et de leur sagacité) voient des difficultés dans le texte du Code qui doit être la base de leurs jugemens. Le texte, en effet, Presque toujours court , sec et précis, renferme souvent un double sens, ou obscur, qui demande à être éclairci et développé : et ce n’est que par une étude réfléchie du texte de la loi et en l’ap- profondissant, qu'on parvient à découvrir alors ce sens intime et les intentions pures d’un sage législateur. Car on l’a dit (et c'est malheureuse- ment une vérité prouvée par l'expérience), que la loi souvent est une épée à deux tranchans, qui peut blesser celui qui la manie imprudemment Sans en connoître le danger; et que le défenseur ignorant peut assassiner lui-même son propre client, loin de le sauver avec la loi qu'il invoque. Rien n’est plusintéressant pour toutes les clas- ses de lectears que le principal objet du nouveau / Code, surlequelportentles observations destrente tribunaux dont on trouve ici l'Analyse. Leur objet est de remplir le vœu des hommes les plus Savans , des plus grands politiques et des meilleurs esprits : qu'il n'y eùt dans toute la France qu'une même loi, comme il n’y a qu’une même mesure ; et que le nouveau Code put atteindre toute la perfection permise à la foiblesse humaine. Pour mieux faire connoiître l’érudition et la sagacité des observations des tribunaux d'appel et de cassation sur le projet du nouveau Code ; et en même temps pour mieux faire sentir le tra- vail et l'utilité de l'Analyse de ces observations rapprochées du texte, peut-être aurois-je dû rap- 410 Livres divers. peler plusieurs des questions difficiles, qui en se prétant aux ruses tortueuses , aux épines et aux ronces de la chicane, auroient pu embarrasser ou paralyser le but et l'action de la loi ? J'ai cru devoir plutôt les abandonner aux jurisconsultes, qui ne manqueront point de les lire en leur lieu et de suite en leur entier, dans Le livre même : et j'ai préféré de recueillir dans le Discours préli- minaire du projet du Code, des articles qui plus faciles à saisir et d’un intérêt plus général , se- ront plus agréables, sans doute , au plus grand nombre des lecteurs. La lecture entière du Discours PRÉLIMINAIRE des législateurs, de plus de soixante pages, est d’un bout à l’autre infiniment attachante. On voit à découvert tous les fils, quelquefois cachés, naturels , civils, politiques, agraires, commer- ciaux , religieux , etc. , de la nouvelle législature. On y expose les ressources infinies qui se sont offertes en abondance sous leurs mains savantes; les diflicultés qu'ils ont eu à vaincre, et les écueils qu'il leur a fallu éviter. On y voit qu'ils ont senti toute l'importance de la tâche qui leur était im- posée ; une législation la plus parfaite possible , générale et universelle pour un grand peuple qui occupe lé premier rang parmi les nations poli- cées. Avant de se livrer à la lecture du projet de Code, l’on seraretenu et l'on reviendra plus d'une fois à celle deleur Discours PRÉLIMINAIRE : c’est un vestibule digne de la majesté du temple de la jus- tice ; c’est un superbe frontispice dont la gran- deur , les proportions et l'élévation répondent parfaitement à la beauté de ce vaste édifice, Ce qui concerne le mariage et ses différens rap- ports (mariage, contrat , dot, rapprochement des deux sexes, maternité, enfans, éducation , Livres divers. 411 paternité, majorité , légitime, tutelle, divorce même et à regret , etc. ) tous ces articles sont ex- trêmement intéressans à raison de leur impor- tance. « Les mariages , en effet , sont la pépinière » de l'Etat : chaque famille est une société par- » ticulière , dont le gouvernement importe à la » grande famille qui les comprend toutes. » Il n'y a pas un lecteur qui ne soit plus ou moins inté- ressé à la discussion de la plupart de ces détails exposés par nos législateurs dans leur Discours PRÉLIMINAIRE. Toute cette partie, d’ailleurs , est écrite avec une sagesse, avec une finesse et une profondeur d'idées, avec une décence et un charme inex- primables. Voilà ce qui donne un attrait parti- culier à toute cette lecture: car il ne suftit pas d'écrire sur des objets importans par eax-mêmes, il faut encore bien écrire : Buffon l’a dit, et l’on ne sauroit trop le répéter : Le style est l'homme. Voici plusieurs passages de ce Discours pré- liminaire , très-courts et tels que le cadre étroit de ce journal peut le permettre. Maternité : « Les » opérations de la nature dans le mystère de la » génération sont impénétrables. [1 nous serait » impossible de soulever le voile qui nous les dé- » robe. Sans un mariage public et solennel, » toutes les questions de filiations resteroient » dans le nuage: la maternité pourroit être cer- » taine, la paternité ne le seroit pas.... » La qualité d’épouse est si honorable, que » suivant l'expression des anciens, ce n’est point » la volupté, mais la vertu méme qui la fait ap- » peler de ce nom. . Paternité : » Les enfans doivent être soumis au » père, mais celui-ci ne doit écouter quela voix de » la nature, la plus douce et la plus tendre de 412 Livres divers. toutes les voix. Son nom est à la fois un nom » d'amour , de dignité et de puissance ; et sa ma- » gistrature qui a été si religieusement appelée » piété paternelle, ne comporte d'autre sévérité » que celle qui peut ramener le repentir dans un » cœur égaré, et qui a moins pour objet d'infliger » une peine que de mériter le pardon. » Ce discours préliminaire est semé d’un nombre de maximes et d'adages dictés par une étude ré- fléchie des lois et par l'expérience, qui donnent du poids et de l'énergie à ce qui précède ou à ce qui suit dans ce discours. Nous rappellerons ici quelques-uns de ces adages : quoique séparés de leur liaison naturelle avec le texte, on peut les lire encore avec quelque intérêt et avec profit : « Que les lois sont faites pour les hommes et » non les hommes pour les lois. » . » Que les lois ne doivent pas être plus par- » faites que les hommes. » Divorce : « Quand les abus sont l'ouvrage des » lois, le mal est incurable parce qu’il est dans » le remède même. » Avantages du commerce. « La boussole ouvrit » l'univers, le commerce l’a rendu sociable. Le » taux de l'intérêt est le poulx de l'Etat, il mar- » que toutes les maladies du corps politique... » Le prix de l'argent ne peut être fixé par des » réglemens..... Le grand principe sur ces ma- » ières est de s’abandonner à la concurrence et » à la liberté, etc. etc. » Plusieurs de ces adages renferment un grand sens , et quelques-uns valent un chapitre entier. On remarque partout que l’esprit de douceur, d'union et de paix a constamment animé les lé- gislateurs ; qu'ils se sont attachés principalement CA Livres divers. 413 » à prévenir les rivalités, les haines dans les fa- » milles, à y propager l'esprit de fraternité et de » justice, et à maintenir le plus solidement l'har- » monie générale : » et comme ils aiment à le déclarer eux-mêmes : que presque toujours «leur » objet a été de lier les mœurs aux lois et de » propager l'esprit de famille , si favorable à l’es- » prit de cité: car les vertus privées peuvent » seules garantir les vertus publiques. C'est par » la petite patrie, qui est la famille, que l'on. »-s’attache à La grande. Ge sont les bons pères, » les bons maris, les bons fils, qui font les bons » citoyens. » On aime à voir partout que c'est à cette ilée mère que se rattachent continuelle- ment les vues patriotiques, libérales, bienfai- santes et paternelles de la nouvelle législature. Il n'est pas besoin de s'étendre pour faire sen- tir le triple avantage du projet du Code; des ob- serpations qu'ila occasionnées , et de l'analyse de ces observations rapprochées du texte. « Ces discussions servent à pénétrer l'esprit du » législateur, elles nous rendent en quelque » sorte confidens de sa pensée; elles garantis- » sent les lois des fausses applications, la justice » des surprises d’une dangereuse éloquence ; elles » donnent enfin de la fixité à la jurisprudence. »° Le procès-verbal des conférences sur les ordon- nances civiles et criminelles de 1667 et de 1670, par les Zamoisnon , les Talon, les Pussort étoient dans toutes les bibliothéques des moindres juris- consultes, dans celles des magistrats et des hom- mes d'Etat, etc. On peut dire que cette nouvelle Analyse présente une utilité plus marquée et plus générale. Le procès-verbal n’embrassoit guère que la procédure; la nouveile Analyse des observations des trente tribunaux supérieurs , 314 Livres divers. montre dans le eadre d'un seul volume , tous les plus grands intérêts traités , discutés avec autant d'étendue que de profondeur. Ce recueil de jurisprudence est l'ouvrage d’un homme de l'état , qui a fait toute sa vie une étude particulière et suivie , théorie et pratique , de la science des lois ; M. Crussaire , d'une probité peu commune ,etdoué ,commecelivreen fait preuve, de toutes les connoissances nécessaires dans sa profession. J'ai eu le plaisir de manier et de lire un nom- bre de lettres remplies d'éloges et de remerci- mens adressés à l'auteur de l'Analyse par ses souscripteurs , Ce qui n'est pas ordinaire. Des per- sonnes qui s'engagent d'avance en aveugles , pres- que toujours séduites par le charme d’un pros- pectus, après avoir semé libéralement dans le champ de l'entrepreneur littéraire , ne recueil- lent trop souvent que du dégoût et des regrets. Mais les éloges les plus flatteurs , les plus hono- rables , et qui doivent avoir le plus de poids , sont ceux des personnes dont le nom, les titres et les travaux sont célèbres dans la carrière de la judi- cature ; cesont ceux de M. Abrial, de M. Séguier, de M. Moure, de M. Pérignon , président de l'a- cadémie de législation, et de quelques autres magistrats et savans jurisconsultes. En général, les apologistes du travail de M. Crussaire s'ac- cordent à en sentir toutel’utilité; et à le féliciter surtout de la méthode, de l'ordre et de la clarté qu'ila su y répandre. C'était là ce que d’Agues- seau recommandoit essentiellement à son fils dans son admirable Plan d’études : et voilà ce qui ren- dra le recueil de M. Crussaire un livre classique. Outre la Table des articles, une seconde Ta- ble alphabétique des matières, raisonnée et com- Livres divers. 4195 posée avec soin , donne à ce volume de 1040 pages, l'avantage d'un Dictionnaire alphabétique , dans lequel on peut en un instant se satisfaire , et trou- ver tel article de droit qu'on voudra y consulter. On trouve chez les mémes libraires de l'ÂNALYSE: Osservarrons sur le projet du Code judiciaire, par le même M. CrussarRe, avoué près le tribunal d'appel.—Paris, an XII — 1804. Brochure in-4°. de 58 pages. Prix 1 fr. 5o c. ,et 2 fr. par la poste. POLITIQUE, Érar actuel de la Grande-Bretagne, par Arraur O’ Connor. — In-80.; prix, 2 francs, et 2 fr. 5o cent. franc de port. — Le même ouvrage en anglais, parle même auteur. In-8°.; prix, 2 francs, et 2 francs 5o cent. franc ce port. À Paris, chez Crapart, Caille et Ravier, libraires, rue Pavée-Saint-André, n°. 12. Àn 12 — 1804. Depuis nombre d'années il a paru beaucoup d'écrits politiques sur l'Angleterre. Le but de celui-ci est de prouver son ambition déme- surée , et d'en développer les motifs et les ressorts secrets. Dans le premier chapitre, on voit cette puissance , un pied sur le nouveau continent et l’autre sur les bords du Gange , éta- blir un monopole universel, en accaparant les matières premières qu'elle revend à des prix excessifs, et en introduisant de force ses pro- ductions industrielles dans tous les marchés. L'auteur est amené par le sujet à parler de la compagnie en société de fonds , qui règne en sou- veraine dans les deux Indes , dont l'asservisse- ment devient si préjudiciable à l'Europe. Jusqu'à quel point l'Angleterre sera-t-elle en état de trionr- 416 Livres divers. pher ; et jusqu'à quel point les nations européennes seront-elles forces de se soumettre à son despo- tisme ? Le reste de l'ouvrage semble consacré à résoudre cette double question. Dans les deuxième et troisième chapitres, après avoir exposé l'énormité des taxes , les dissipations pro- digieuses du ministère, après avoir démontré les conséquences funestes de La loi qui, depuis la faillite de la banque en février 1797, a substitné le papier à l’or et à l'argent, justement effrayé de l'émission énorme du papier-monnoie et de sa dé- préciation, M.O'Connor prévoit la ruine certaine du gouvernement et des particuliers. Le 4°. cha- pitre indique le moyen dont le ministère anclais se sert depuis long-temps pour étendre et affer- mir son pouvoir; ce moyen est le système de corruption adopté pour influencer et diriger l'es- prit des deux chambres ; ce système a été mis en usage pour subjuguer l'Irlande, pays dont il im- portoit tant à l'Angleterre de s'assurer , vu sa position relative avec les puissances maritimes, et vu les ressources qu'elle y trouve en matelots excellens et en bons soldats. Ainsi l'objet du cin- quième chapitre est de représenter d'abord le ministère répandant des semences de division dans tout le royaume, armant, pour la défense d'un gouvernement qu'il vouloit dissoudre, une partie des citoyens contre l'autre , et le soutenant lui même contre les efforts du peuple ; puis dé- duisant de cette lutte désastreuse le principe que les germes du mal étuient dans la constitution irlandaise, on le voit établir un parlement favo- rable à ses projets, et le forcer . par tous les geures de séduction, à dépouiller l'Irlande de la puissance législative. L’Angleterre , malgré la crise alarmaute qui la menace, continue son plan de me a Livres divers. 417 de conquête et de monopole universel. Ses efforts sont proportionnés à $es vastes projets et à ses dangers; des mesures extraordinaires l'épuisent; mais onze millions d'hommes ne peuvent pas as- servir long-temps l'univers, et cette apparence de force et de santé doit disparoître aux premiers rayons de paix.La France au contraire loin d’avoir perdu ses anciennes ressources , a non-seulement amélioré toutes les branches d'industrie, mais en a créé de nouvelles ; et la paix , si funeste à son ennemie, deviendra pour elle une source,de ri- chesse, de grandeur et de prospérité. C'est ce que M. O’ Connor s'efforce de prouver dans le paral- lèle entre la France et Angleterre , que con- tiennent le sixième et le septième chapitres. L'ob- jet du huitième est de convaincre que la base sur laquelle repose la caisse d'amortissement est ruineuse , et que les ressources que le ministère en promet sont absolument illusoires , puisque les dilapidations , les dépenses , les exactions excèdent de beaucoup le produit réservé pour les liquidations. La lecture du neuvième chapitre dispose à croire que le système de la Grande- Bretagne, tendant à la rendre la manufacturière du monde entier , détruit son agriculture, en la privant des capitaux nécessaires , et nuit à l'in- dustrie de ses h:bitans antant qu'au négoce de toute l'Europe. Le dixième et dernier chapitre explique les motifs qui ont déterminé le cabinet secret, dont M. Pitt n’est que l'instrument, à hasarder la guerre actuelle, motifs qu'il ne faut point chercher dans son manifeste contre la France. L'ouvrage est terminé par une conclu- sion qui en est le résumé, et où M. O Connor énonce, comme dans tout Je reste, des asser- Tome FI. D d 418 Livres divers. tions frappantes et quelques bons principes en politique, J. L. G. ARTS UTILES. Secours contre les incendies et pour sauver les in- cendiés, par M. 'TYrecHARD , sculpteur, médail- liste du cabinet de feu son altesse royale le prince Henri de Prusse ; —in-40. de 19 pages. Cette brochure ne contient qu’un extrait des différens rapports faits sur l’isvention de M. T'ré- chard, par l'institut national et la société d’en- courasement , ainsi que ceux faits par le corps des pompiers et l'ingénieur en chef du dépar- tement, EconomrïE RURALE ET DOMESTIQUE. Xe XIe et XIIe Cahiers qui complètent la seconde année de la Breitoruèque - Paysrco - Ecowo- MIQUE, énstructive et amusante, à l'usage des villes et des campaghes ; publiée par ca- hiers avec des planches, le premier de chaque mois, à commeneéer du 1%. bramiire an XI, pàr une société de savans, d'artistes et d’agro- nomes, et rédigée par C.S. Sowxint, de la Société d'agriculture, etc. Ces trois cahiers, de 216 pages, avec des plan- ches, contiennent, entr'autres articles inté- réssans et utiles : Manière nouvelle de planter et greffer les pom- miers et poiriers : — Nouvelle machine à baitre les grains ; — Moyen de détruire les loups ; — Charrue-semoir ; — Nouvelle ruche; — Manière Livres divers. 419 de faire la récolte des blés dans les années pluvieuses ; — Diverses préparations des grains * près d'être semés , en usage en Argleterre ; — Préparation de la toile dont on forme les lits de ‘plumes , les traversins , etc. — Nouvelle teinture en noir et fabrication des encres ; — Nouveau moyen pour la guérison de la goutte ; — Traitement de la maladie des chiens ; — Procédé pour préparer la soie de la Chine ; — Expériences et succès du bélier hydraulique de M. Montgollier ; — Perfectionnement dans la construction des voitures de roulage, etc. Le prix de l'abonnement de la troisième année de cette Bibliothèque est, comme pour cha- cune des deux premières , de 10 francs pour les 12 cahiers que l'on reçoit mois par mois, francs de port par la poste. Les lettres d’avis et l’argent doivent être affranchis et adressés à F, Buisson , imprimeut-libraire , rue Haute- feuille, n°. 20, à Paris. REeLIc1on. Histoire abrégée de l'ancien et du nouveau T'es- tament , semée de courtes réflexions pour.les enfans et les adolescens , par madame de Ba- RENTIN-MonrcnaL , dédiée au pape Pie VII, — 2 vol. in-12. Chez Le Clére , imprim.-libraire , quai des Augustins , n°. 39. 3 francs et 4 fr. 55 cent, par la poste. , Cet extrait des livres ‘saints a été fait par une mère uniquement occupée de l'éducation de sa fille, et qui a cru que la religion devoit y entrer comme un des points essentiels de l’instruction. Dans le précis qu'elle a f&it des livres sacrés ; 430 Livres divers. précisqui nous a parn un peu trop abrégé, l’au- teur n'a omis cependant aucunes des particula- rité. qui forment l'histoire suivie de la religion. Les h'stoires détachées sont rapportées suivant l'ordre de la chronolo ie; les pseaumes de David et leslivres de Salemon sont placés après le régne de ces princes ; la division des tribus est rangée sur deux colonnes, ce qui donne une grande fa- cilité pour distinguer tout ce qui a rapport à ces tribus en particulier; les prophéties et leurs mystères sont accompagnés d'explications :ti- rées des pères de l'église. L'auteur a suivi le même plan pour le nouveau Testament, en se guidant par la concordance des quatre évan- gélistes. Il finit par un abrégé historique des actes des apôtres , et de la morale contenue dans leurs épltrés, morale quicontient toutl'esprit du chris- tianisme , et la croyance des vrais chrétiens. Nous né doutons pas que le travail de madame de Môurtchal ne facilite anx mères qui s'occupent encore de former le cœur et l'esprit deleurs en- fans , et aux institutrices dont Ja destruction des maisons religieuses d'éducation a trop multiplié les établissemens , les moyens de diriger leurs élèves dans les routes de la vertu et de la sainè imnorale. Lectures chrétiennes , en forme d'instructions ‘. familières, sur les Epitres et les Evangiles des dimanches et dès principales fêtes de l'année. — 2 vol. in 12. Chez Le Clere, impr.-libraire, quai des Augustins, n°, 5g. 5 fr. et. 7 fr.-par la poste. Les sources danslesquelles l’auteur de ces lec- tures a puisé ne peuvent que faire estimer son Livres divers. 423 ouvrage. Il avoit été entrepris pour l'instruction d’une famille chrétienne, qui n'oublioit point les devoirs de la religion dans un temps où c'etoit uu crime d'en avoir une. Depuis qu'il est permis de se faire honneur des principes puisés dans cette morale sublime et d’en pratiquer les préceptes , on à cru, en rendant ces lectures publiques, qu’elles seroient bien accueillies par ceux qui ne négligent pas d'obéir à ce que l'église exige d'eux. J'out ce qui a rapport aux dimanches est extrait des prônes de M. Cochin. Les homélies sur les fêtes ont été puisées dans Bossuet, Fénélon, Bourdaloue , Massillon , Berthier, Godescard , Baudvaud, Duquesne, etc. VoyaAces. Vovace En Espace, par M. Dreraxcre. Sixième édition, seule avouée par l'auteur. — 1 vol. in-80. Chéz Perlet, imprimeur-libraire, rue de Touruon, et Lebour, palais du Tribunar. Ce voyage avoit paru depuis long-temps , et avoitété oublié, malgré ses nombreuses éditions : quelques augmentations que l'auteur à jugé à propos d'y faire; quelques rémiaiscences qu'il a cru pouvoir y ajouter, nous procurent cette reproduction qui ne nous apprend rien sur l'Es- pagne que ce que tout lecteur sait, et tout ce qui est peu intéressant à savoir. M. Delansle reproche aux autres voyageurs d'issérer dans leurs relations une multitude de rem:rques oi- seusés et des minuties qui leur sont personnelles. Croit-il donc être à l'abri du même reproche ; y ‘at-il rien de plus minutieux, de plus insipide que ce quil dit sur les mauvaises auberges quil a 429 Livres divers. rencontrées, sur les mauvais chemins quil a parcourus. Deux articles seuls /paroïîtront cer- tainement neufs et remarquables. C'est d'abord celui où il veut qu'on mette Rousseau au rang des saints, et qu'on jette au feu tous les autres écrits religieux, pour ne méditer que les œu- vres du philosophe de Genève; il en excepte cependant l'Imitation de J. Ch., la Bibie, Nicole et Bourdaloue. On doit lui savoir gré d'avoir bien voulu préserver ces ouvrages de cet incendie général; on voit qu'il se souvient que cette mère vertueuse qu'ilregrette , lui avoit ap- pris qu'il y avoit une religion venue d'en haut, un culte qu'il falloit suivre, dés ministres qu'il falloit respecter lorsqu'ils le méritoient; cesont sans doute ces principes dont le cher fils a bien voulu se rappeler en ce moment. Le paragraphe intitulé Bibliothéques particu- lières , doit être désigné comme un des moins oiseux de ce recueil. Le voyageur est introduit dans la bibliothéque d'un M. Henriquez, M..., où il trouve des ouvrages français assez bien choisis , composés par des auteurs qui jouissent d'une assez grande considération. Cesauteurssont Ja Métrie, Montesquieu , Corneille, La Bruyère, Cartaud , Voltaire, Marmontel, Rousseau , Se- vigné. Quel mélange! La Métrie, Cartaud ; le premier qui n'a êté connu que par des produc- tions singulières, peu morales, et tenant du délire ; le sécond, par un Æssai sur le goût, production estimable à la vérité, mais unique. Les autres auteurs cités , sont ainsi appréciés et jugés irrévocablement par M. Delangle, à qui ils n’en imposent pas par la grande considération dont il parle. « Montesquieu est un écrivain pu+ » sillanime, un enfant qui sait sa leçon , mais » Livres divers. 493 qui la bégaie , la récite mal , en oublie la moitié parce que son instituteur ou son régent lui en impose. Jamais Voltaire n'écrivit d'äme ; tous ses livres sortent de sa tête. Sa sensibi- lité n’est qu'apparente, n'est qu’un mélange de mémoire, d'esprit, d'orgueil : Méitez-la dans un creuset, touchez-la, si je puis ie dire, ce n'est qu'une composition. On regrette que Corneille ait écrit en vers. Quelques beaux que soient les vers , la poésie n'est jamais qu'une traduction, une copie ; la prose est le premier jet : le génie conçoit, Jette en prose; il est épuisé, il est éteint quand il traduit en vers. La Bruyère est un écrivain trop froid , dépourvu de tout sentiment ; Marmontel n’a fait que du pathos , ses romans ne sont que des capucinades.» Les Lettres de madame de Se- vigné ont trouvé grâce devant le rigide censeur ; on n'a jamais écrit dans aucune langue un ou- vrage aussi extraordinaire. Ceux qui voudront relire ce voya'e, y trou- veront de la gaieté , de la plaisanterie , tant bonne que mauvaise, quelques apperçus raisounables, quelques réflexions inexactes ou déplacées, et une partialité condamnable. A. J. D. B. H:sSTOIRE. Hisroine générale de la Belgique , par M. De- Wwez, Sous Préfetde l'arrondissement de Saint- Hubert, département de Sambre-et-Meuse, Et pius est patriæ facta referre labor. Ov1D. PROSPECTUS. Le défaut d'ouvrage méthodique, dit l'auteur, \ N 494 Livres divers. met les Belges dans l'impossibilité de connoître leur histoire , de façon qu'à cet égard, is sont, pour ainsi dire, étrangers daus leur propre pays. J'ai donc cru que mes concitoyens n'aceueil- leroient pas avec indifférence un essai que je n'ai hasardé que pour leur faciliter les moyens d'acquérir cette connoissance si importante et si négligée. PREMIÈRE ÉPOQUE. Les Belges soumis aux Romaïns. (54 ans avant LB] ère vulgaire. ) Je comprends dans cette époque le récit des événemens mémorables qui se sont passés clans cette vaste étendue de pays désigné dans l’ancienne géographie sous la dénomination de Belsique, qui formait la troisième partie des Gaules. J’entends donc par la dénomination de Belgique et de Belges, les provinces et les peu- ples qui, sous les Émpereurs, formèrent quatre provinces, deux Belgiques et deux Germaniques, dont Jes métropoles étoient Reims, Trèves, Maiïence et Tongres. Les grandes expéditions de Germanicus, la fameuse révolte de Civilis , les exploits de Julien , les incursions des Allemands, des Francs , des Huns, etc., trouveront place dans l'histoire de la Belgique, comme y étant essentiellement liés. Cette époque compreud un espace de 463 ans. DEuxIEME ÉPOQUE. Les Belges associés aux Francs. ( 409 de lère vulgaire.) Phiäramond , premier Roi des Francs, qui fut proclamé dans la Taxanderie , doit être regardé 3 Livres divers. 425 autant comme le Roi des Belges, que comme le Roi des Francs. J'ai rassemblé dans cette époque tous les événemens intéressans dont la Belgique a été le théâtre sous le règne des pre- miers Rois Francs, la fuite et le retour de Chil- déric , les conquêtes, la conversion et les fureurs de Clovis, etc., le gouvernement des Maires dü Palais, etc. Cette époque renferme une es- pace de 205 ans. TROISIÈME ÉPOQUE. Ducs d'Austrasie. (614 de l’ère vulgaire. } Je traite ici l'histoire des événemens arrivés sous le gouvernement de Pepin de Landen ; de Grimoald, de Begge et Ansegise; de Pepin Héristel, de Charles Martel ; de Carloman et de Pepin ; sous les règnes de Charlemagne et de Louis le Débonnaire. Cette époque comprend une intervalle de 227 ans. QUATRIÈME ÉPOQUE, Royaume de Lorraine. (841 de l'ère vulgaire. Les trois fils de Louis le Débonnaire parta- gèrent les états de leur père. Toutes les contrées enclavées entre le Rhône , la Saône , le Rhin , la Meuse et l'Escaut , échu- rent à Lothaire; et c’est cette vaste étendue de pays, qui, selon l'usage du temps, fut ap- pelée Royaume de Lothaire, par contraction Lotharingia, et par corruption Lorraine. Par cet arrangement toute la Bel:ique moderne tomba au pouvoir de Lothaïre, excepté la Flandre et l'Artois qui échurent à Charles le Chauve. Cette époque renferme un espace de 71 ans. 2 426 Livres dis ers. CiNQUIÈME ÉPOQUE. Ducs de Lorraine. (912 de l’ère vulgaire. ) Le gouvernement de la Lorraine fût confié à des Ducs. Brunon, Archevêque de Cologne, 5e. Duc, partagea avecl'agrément del'Empereur, la Lorraine en deux provinces , dont l'une qui fut appelée Haute-Lorraine ,comprenoit l'Alsace, la Lorraine moderne, le Luxembourg et l'Evêché de Trèves; et l'autre qui fut nommée Basse- Lorraine, comprenoitl’Archevêché de Cologne, les Duchés de Limbourg, de Julierset de Gueldre, en un mot, la plus grande partie des provinces Belgiques; elle fut, depuis cette division , gou- vernée par des Ducs de la maison des Comtes d'Ardenne. Cette époque comprend un espace de 194 ans. SIXIÈME ÉPOQUE. Maison de Louvain, (1106 de l'ère vulgaire.) Cette époque qui retrace les commencemens et les progrès de cette maison, comprend un intervalle de 300 ans. SEPTIÈME ÉPOQUE. Maison de Bourgogne (1406 de l'ère vulgaire. ) Le tableau que présente cette époque , offre dans un très-court espace une suite d'événemens publiques qui donnent à cette partie de l'histoire un intérêt toujours croissant. Toutes les pro- vinces Belgiques sont successivement réunies par Philippe le Bon. Cette époque ne comprend que 71 ans. Livres divers. 427 HuiTiÈèmME EPOQUE. Maison d'Autriche. (1477 de l'ère vulgaire.) Cette époque renferme un espace de 324 ans. Tel est le plan de cet ouvrage. Je ne me suis point attaché dans la division de ces époques à leur donner un égal espace de temps. Mais j'ai cru qu'il étoit plus méthodique et plus conforme à la nature de l'histoire de les désigner par les différentes révolutions dans l’ordre politique et constitutionnel. J'ai été particulièrement attentif à discuter les points ou obscurs ou douteux soit de géogra- phie, soit d’antiquités. J'ai taché de débrouiller les origines, de fixer les délimitations et de suivre les variations qu'ont éprouvées les différentes contrées comprises dans l'étendue de la Belgique , et je me suis ap- puyé à cet égard, non sur des conjectures ha- sardées, sur des observations puériles , sur des étymologies forcées, mais sur des documens authentiques , sur des faits prouvés et sur des rapprochemens raisonnés. J'aisuivi les mêmes principes dansla recherche ‘des antiquités ; et sur l’un comme sur l'autre point , j'ai évité ces digressions prolixes qui in- terrompent le fil de la narration et détournent l'attention du lecteur. Le plan succinct que j'ai présenté , fera suf- fisamment comprendre que , dans la plupart des époques, l'histoire des Belges est essentiellement liée a celle des Français. J'ai pensé que la réunion de la Belgique à la France étoit une raison puissante pour traiter 428 Livres divers. particulièrement l'histoire de la Belgique , parce que comme d'une part, les événemens de cette histoire n’entroient point dans le plan des his- toriens Français, et que d’un autre côté, les Belges n'ont point une histoire suivie de leur pays, il sensuit que celle de France est in- complète. L'histoire Belgique doit donc dès ce moment, fixer l'attention de tous les Français, puisque les événemens qu'elle présente se sont passés dans une étendue de pays qui est compris dans leur ancienne patrie. Ainsi l'histoire que je donne au public, est véritablement le complément de l'histoire de France. Cet ouvrage comprendra 5 à 6 volumes, grand in-8°, , de 300 à 3)0 pages, même caractère et même format que ce Prospectus. Le prix de l'abonnement est de srois francs par volume. Le premier devra être payé d'avance, en souscrivant , et le second en recevant le pre- mier , et ainsi successivement. Il en paroîtra un volume tous les deux ou trois mois. On souscrit : à Saint-Hubert ,chez M. Dewez, sous-préfet du 4°. arrondissement.— À Liège, chez M. Latour, Imprimeur , sur le Pont-d'Ile. — À Bruxelles, chez M. ayez, imprimeur , ci-devant place Royale. — A Gand, à l'Impri- merie du Journal de Comnierce , rue neuve St. Pierre. — Et chez les principaux Libraires de Paris et des départemens. Livres divers. 429 ANTIQUITEÉS. Les Monumens antiques inédits du musée Napoléon , gravés pur Thomas Pirorr, avecune explication, par M. Louis Prerir- Ravez, publiés par F. et P. Pinanesi, frères, à Paris, dans leur établissement chalcographique à l'ancien céllège de Navarre. — 1Xe. et Xe. livraisons. La première contient : tête de Bacchus ; — buste de Bacchus ; — Bacchus et Icarius ; — Bacchus Sardanapale ; — Bacchus Indien , ter; — Ariadue, dite Cléopâtre ; — buste d'Ariadne ; — et Silène. La seconde offre Silène avec l'outre ; — Silène et Cérès sacrifant; — Faune en repos; :— Faune et Panthère, bis ; — Faune danseur; — Faune chasseur ; — Faune, dit à la tache; —Faune, buste en brouze; —etFaure amoureux. Anriquires d Herculanum , gravées par Thomas Prmorr, et publiées par F.et P. Piran Es1, frères. VIII. et IXe. livraisons. à Paris, chez Pira- nési ; frères , place du Tribunat, n°. 1554. et Leblanc, imprimeur-libraire , place et maison abbatiale St. -Germain - des - Prés, n°. 1121. an XIII. __ 1804. Romans. La Fucrmve de la Forét , traduit de l'Anglais. — 2 vol. in 12., chez PLrassan, Imprimeur- libraire, rue de Vaugirard, n°. 1195. Parmi ces rapsodies romanesques qui se à50 Livres divers. multiplient tous les jours, malgré le bon goût qui sen irrite, et les bonnes mœurs qui en souffrent, on peut distinguer quelques-unes de ces compositions futiles qui, comme celle que nous annonçons , ne contiennent ni invrai- semblancechoquante, ni événemenssurnaturels, ni détails licentieux, ni principes immoraux ; mais quelque soit le respect que quelques au- teurs peuvent avoir pour la décence et la saine morale , nous ne pouvons que condamner ces sortes d'ouvrages qui sont devenus la lec- ture de toutes les classes, de tous les âges; lecture qui, non-seulement n'apprend rien, cé qui nest que trop vrai, mais qui conduit à une excessive exaltation d'esprit , à une grande effervescense d'imagination, ce qui est très-con- damnable. Il n’y a qu'une censure sévère qui puisse arrêter ce débordement de corruption, d’absurdité, d'extravagance , qui est l'aliment des passions, et presque la seule instruction des jeunes personnes. Nous n'aurions pas tant d'éditions d’Antenor, on ne chercheroit pas à lire avidemment Delphine, M. et Mad. Botte, et tant d'autres sources d'immoralité ; certai- nemnet, l'honnêteté, les mœurs sociales et le sentiment de ce qu'on se doit à soi-même, n'y perdront rien. Ea lisant la Frgirive de la forêt, on s'aperçoit que la traduction en ‘a été peu soignée, on y trouve des négligences de styie, et des tournures de phrase peu exactes. As, 4, ,D:.B: Livres divers, 451 MELANGES. OEuvres de Berquin, mises en ordre par L.F. JAUFFRET. — 22 vol. in-18, chez Leclere, im- primeur-libraire , quai des Augustins , n°. 39. Prix: 30 fr. Les divers ouvrages de Berquin sont aussi connus qu'estimés. Cet auteur avoit dirigé tous ses travaux en faveur de l’éducation de l’en- fance et de l'adolescence’; Gessner lui donna, par ses Pastorales, l’idée de se livrer à ce genre de composition, qui avoit beaucoup d’analogie avec son âme sensible et aimante. Ses Idylles et ses Riomances furent accueillies avec em- pressement , et lues avec plaisir. Ses succès ne ouvoient satisfaire son penchant pour cet âge aimable dont la franchise, l'abandon, et même l’insouciance sont presque des vertus; il cher- cha à se mettre en rapport avec lui, et à l’ins- truire d'une manière également utile et agréable. L'amour de la vertu, la douce sensibilité, le oùt du travail, l’attachement à ses devoirs, la piété filiale, la nécessité d'avoir un caractère, sont les principaux objets de ses leçons. Peu occupé de la vanité dont les auteurs quels qu'ils soient ne sont jamais exempts, il se servit de tout ce que les auteurs allemands et anglais avoient publié sur l’objet dont il s'étoit fait son unique occupation ; mais il en fit usage avec goût ; il ne laissa subsister, dans ce qu'il leur emprunta , ni les détails minutieux, ni les lon- gueurs inutiles, ni cette physionomie, si on peut parler ainsi, qui nous paroît toujours étran- gère; Berquin a puisé dans ces sources esti- 459 Livres divers. mables tout ce que le Livre de famille , l’ Ami des enfans set d'autres ouvrages ayant le même but d'instruction, lui ont paru propres à rem- plir ses vues, mais il a su les accommoder à notre goût, à nos usages et à nos mœurs. M. Jaurrner a suivi les traces de Berquin, avec la même sensibilité; il s'occupe d'inspirer à la jeunesse le goût des sciences, l'amour de l'étude, et la connoissance des beautés et des dons de la nature. On connoît l'utilité de ses cours , et l'instruction pratique de ses courses champêtres, On applaudit volontiers à un zèle qui ne peut que concourir à rendre la généra- tion qui s'avance plus éclairée, plus désireuse de connoître, et plus attachée à l'auteur de tout ce qu'il lui découvre dans les bienfaits dont la nature lui sert à prouver l'existence. Sans doute M. Jauffret a cru que les ouvrages de Berquin, pourroient être utiles à cette jeunesse, et c'est dans cette vue qu'il a formé ce Recueil, qui mérite d'être accueilli par les pères de famille, et par. les instituteurs qui les suppléent. A. Je D. B. …. Table des Articles contenus dans ce Numéro. VoyAcGs. 4 États - Unis d'Amérique, par C, … F, Voiney. AGRICULTURE. Ê Le Théâtre d'Agriculture et Ménage !. des Champs ; d'Olivier de Serres, lg ment de le Seine: 337 M Sur la Culture de la Vigne dans la Guyenne, à M. Walion. 357 Pois. Contes par Henry Boileau. . VaRtÉTÉS , Novverxes FT LA DARRESEURAANerS LITTÉRAIRES. EN ÉTRANGÈRES, NW ALLEMAGNE. "Fin de la Notice sur les travaux des * membres de l'université de Geœt- | tingue, 375 Le titre de M. Silvesrre de Sacy à . M. DE 898 | Tableau du climat let du sol des 289 seigneur de Pradel; publiée par la ù Société d'Agriculture du départe: |. PR | Empreintes de médailles grecques et romaines de M. Mionnet, 402 LIVRES DIVERS. Botanique. Botanographie Belgique , par Franç.- Joseph Lestiboudois. 405 Physique. Mémoire sur la Chaleur, par le comte de Rumford. 404 Législation. Analyse des Observations des Tri- bunaux d'appel et du Tribunal de cassation sur le projet du Code civil, rapprochées du texte; par M. Crussaire. 408 Politique. Erat actuel de la Grande-Bretagne, par Arthur O’ Connor. .. 415 Arts utiles, Secours contre les Incendies et pour sauver les incendiés , par M. Trec- hard. 48 Économie rurale et domestique. Xe, XI° er XII° Cahiers qui com plètent la seconde année de la Bi- bliothéque-Plysico -Economique , ‘instructive et amusante , à usage des villes et des campagnes, pu- bliée par une Société de Savans , d'Artistes et d'Agronomes , et rédi- gée par CS, Son”. Did Rech. 4 à Histoire, ‘abrégée de tn et du nouveau Testament, par madame. de Barentin-Montchal. 4 9 Lectures chrétiennes , en forme d'in- structions familières ; sur les Epi- tres et les Evangiles des Diranches | et des principales Fos de j année, 430 Musée Napoléon , , gravés par k Piroli, avec une explication ; . M. Louié Perit-Radel ; publiés p Æ. et P. Piranesi frères. mr |‘vraisont Le 14 ni }'Hotanss Voyages. ra, Fagiive) de la Forêt, traduit de Voyage e en Espagne par M. De- Leuglaier : PA DRE dangle. 4 Mélanie, # Histoire. | OEuvres de Berquin ; mises en ordre Histoire générale de là Belgique, par L. F, Jauffrec, ; MT LT par M. Dewez. v 423 s& A NAN AE Se rie On LE s'adresser à au Bureau du ;4 le Eneyelopédique) 4 Cluny, ; pour se procurer tous les Ein qui paroissent en a ? et chez P'Étranger , et généralement, es ue dei qui concerné à, É Librairie ancienne et moderne. LA PRET SEA A RES au ASE LR RTS 4 On s y charge Het de ie bons dinpreions à ct d'édiion en langues anciennes et modernes. à { 'ARE A = * Les Livres nouveaux sont annoncés F. ar ce e Tétraal. ; AussitôEN après qu'ils. out.été remis au Bureau: (3 està-dire, dans le Numér qui se publie après cette remise. | | ‘Le? Magasin paroit! le; premier de éhaque mois. PANER ‘4 l faut afranchär. les Lettres eb Les Envois. FRS ASE On prieiles Libraires qui envoient des Livres por es e anhore # en indiquer tomes le: pr C0 PE MEE de NAT EN ÿC C JANAL DES SCIENCES ue ne “ci ue ET DES ne & 7 TL Impériale, ut de “Fate Le Ga ua FE TP ri da Sen FA “hé us Paris. Geo 2 ps Tes ; : Département »granes ie. fout 3277 ARE DR PEAR PE SERRE g:francss pour se mois , de pasee indus 18 fines L 54 ni ed ve franes. LE TRES Fan : Pr “ bre ure ; Fi Uh re. lle Li és br “ei a dr. vént “point aflouts, Fe: arafte répiiation: Ov | + on dés Pre En de ee ‘ Drscenerres, Drsaurr, Desrox _ manes, Fouroroy, Grorrroy, dé. Larousse, Läeérène, LAGRANGE, La ë& Lancouës, Leénon, L'Herrrigr, Léve Etes AA RRO Menrere, Monerrer, Nogz, Osencin j SaiN%E-Cnorx, Scuwé#icnÆusER, SICARD, SILVESTRE DE Sac ,-Suarp, Trauiré, Van-Moxs, VENTENAT, VISCONTI, » ÉLLOISON,| Usreni, Wiccemer, WinckLen, et d’autres Savans ou! Littérateurs estimables, | 2 AN Er On y insère les Mémoires les plus importans sur toutes les parties des Arts et des Sciences; on choisit principa- lement ceux qui sont propres à en accélérer les progrès. ! On y publie également les Découvertes ingénieuses, % les Inventions ‘utiles dans tous les genres. On 7rend} compte des Expériences nouvelles. On y donne un pré- cis de ce que les Séances des Sociétés littéraires ont offert : de plus intéressant; une description de ce que les dépôts d'obiets d'Arts et de Sciences renferment de plus'curieux. 4 On y trouve des Notices sur la Vie et les mn des Savans, des Littérateurs et des Artistes distingués 4 À JN dont on regrette la perte ; enfin les Nouvelles littéraires de toute espèce. k ‘Ja correspondance que le Rédacteur entretient avec * plusieurs Savans étrangers, ét principalement en Alle= ! magne, lui procure beaucoup de Notices qu'on ne trouve } point ailleurs. | On s'adresse, pour l'abonnement, à Paris, chez DeLANCr, : Imprimeur - Libraire, rue des Mathurins, hôtel Cluny; | F "À chez la veuve Changuion et d'Hengets te A Amsterdam, $ chez Van-Gulik. A Bruxelles, chez Lemaire, À Florence , chez Molini., 4 A Francfort-sw-le-Mein, chez Fleischere à'Uénèe, $ chez Manget, PRE: chez Paschoud, À Hambourg, chez Hoffmann. : A Leipsic, chez Wolf. À Leyde, chez les frères Murray, | À Londres , chez de Botte, Gerard Strecf: © À Strasboürg, chez Levrault, A Viebne, chez Degen. A Wesel , chez Geisler, Directeur des Postes, IL faut affranchir les Lettres, n | 1 \ ITTÉRATURE. À GÉNIE DU CHRISTIANISME, où Beautés _« de la Religion Chrétienne; par F. Au- A S 2 | guste DE CHATEAUBRIANT. Chose admirable ! la Réligion chrétienne , qui ne semble avoir d'objet que la félicité de l’autre vie, fait encore notre bonheur dans celle-ci. Montesquieu, Esprit des Lois. 4 se .N AGUÈRE la religion, cachée He les ruines, n'offroit en France que les solitudes de la dou- leur. Les marbres de nos temples qui avoient Li . été consacrés à des inscriptions pieuses, étoient ulés sous les pieds des chevaux; la crain fou] les pieds des ch Il te et la tristesse parcouroient , silencieuses, cette terre immense , où réenoient jadis la confiance et l’allégresse : les arts, les lettres gémissoient; mais la providence veilloit sur nous, et pendant 27 . . que l'étranger sensible, pleuroit sur les malheurs d'une nation qui fut si florissante; elle se relevoit pleine de gloire, d'espérance et de pros- périté. Le génie d'un seul homme a tout changé; le démon du mal a fait place à l'ange du à Je 2 D ;: . bonheur. Quand limmoralité s'épure, quand _ la licence se corrige, quand le culte divin Ù+ æ FU » reprend sa pompe, ses honneurs et sa piété, Tome FI, : E e 454 Littérature. il étoit de la justice de M. de CaarrAunranr de dédier son sublime ouvrage à celui qui a été l’ins- trument dont s’est servi l'éternel pour opérer ces nouveaux miracles. Cet ouvrage lui-même n'a pas peu contribué au triomphe de la vérité sur le septicisme. Le libertin et l'incrédule ont été surpris de leur émotion; ils deman- doient des preuves, ils ont été touchés; et ils ont senti leur cœur démentir les erremens de leur esprit. Cette nouvelle édition renferme de nom- breux changemens et d'heureuses additions. Cependant il reste encore quelque chose à désirer. Analisons l'ouvrage etrelevons quelques négligences , qu'avec plus d'attention l'auteur » fera disparoître. Non que nous pensions que le génie soit l'aptiude à la patience, comme on prétend que Burron le disoit ; mais il est bon que la patience seconde le génie. Prouver que de toutes les religions qui ont existé, « la religion ‘chrétienne est la plus » poëtique, la plus humaine , la plus favorable »#à la liberté, aux arts et aux lettres ; que le » monde moderne lui doit tout, depuis l'agricul- Î » ture jusqu'aux sciences (1)abstraites , depuis { () C’est peut-être annoncer plus qu'on ne peut prouver. Les arts mécaniques et ceux de l’imagination existoient avant 4 da venue de J. C. Ils se perfectionnent chaque jour, parce | / Ps G'énie du Christianisme. 435 » les hospices pour les malheureux jusqu'aux » temples bâtis par les Michel- Ange et décorés » par les Raphaël ; que rien n'est plus divin » qne sa morale, rien de plus aimable et de » plus pompeux qne ses dogmes, sa doctrine » et son culte; qu'elle favorise le génie, épure le goùt, développe les passions vertueuses, » donne de la vigueur à la pensée, offre des » formes nobles à l'écrivain et des moules par- » faits aux artistes ; qu'il n'y a point de honte » à croire avec JVewton et Bossuet, Pascal et » Racine: enfin appeler tous les enchantemens » de l'imagination et tous les intérêts du cœur » au secours de cette religion contre laquelle » on les avoit armés. » Il falloit avoir un grand talent, beaucoup d'imagination, et une inspiration divine pour former un projét aussi vaste. Quelle heureuse qu'il est dans l’ordre que tout ce qui a eu un commencement imparfait ait un accroissement. Mais certainement FC. n'est pas venu pour inspirer des poëtes, pour former des politiques ; il est venu pour racheter des peines éternelles , l'homme déchu par le péché; pour rendre aimables les pré- cepres d’une religion divine, pour les fortifier par son exemple; et loin d'établir que depuis l’agriculture jus- qu'aux sciences abstraites, le monde moderne lui doit tout ; il étoit plus sage de démontrer avec moins d’emphase et pour suivre son plan, ce que M. de Ch. avance ailleurs : . » que la religion a ses joies, ses transports, ses plaisirs, » comme le cœur humain, » 436 Littérature. conception! Combattre les incrédules en les foudroyant par l'évidence, en les subjugant par le doux langage de la persuasion ; faire aimer ce qu'on admire, remplacer la crainte par l'amour, la rudesse par les grâces; peut- il exister d'ouvrage plus agréable et plus utile ? Malheureusement à côté des peintures les plus sublimes, des traits les plus remarquables, il en échappe d’autres à l’auteur que le goût désavoue, parceque le néologisme les réclame. Si l’on y trouve que dans les écrits des phi- losophes modernes « l’immensité n’y est point » parce que dieu ÿ manque : » qu'une « grande » âme doit contenir plus de douleurs qu'une » petite:» que « chaque heure dans la société » ouvre un tombeau et amène des larmes:» que « l'athée dans sa veille impie , au son de la » cloche funèbre, laisse échapper sa plume et » compte avec effroi les coups de la mort: » que les mariniers , « passent des jours de » danger sur les mers: » toutes expressions fortes et caractéristiques; on y trouve aussi qu'on ne «revient pas impie des royaumes de » la solitude : » que, « pas une mousse 7e sou- A s » pire: » que, « les légions émaillées , viennent » conter à nos fontaines, les magnifcences » des régions des tempétes : » ( devineroit-on, qu'il s'agit là, des migrations marines?) qu’on PE e L Génie du Christianisme. 437 peut prêter « l'oreille au silence de l'automne : » qu'on peut posséder une âme que le temps » et le malheur ont devastée; » que le soleil, « enflammant les vapeurs de la cité, sem- » bloit osciller lentement dans un fluide d’or, » comme le pendule de la grande horloge des » siècles: » qu'on « entre avec rayissement » dans le mois des tempêtes: » que, «l'éternel » a placé la naissance et la mort, sousla forme » de deux fantômes voilés, aux deux bouts de » notre carrière; et du haut de son trône, » il a jeté notre vie ,commewne petite colonne » brisée, roulant sans base et sans sommet, dans. . » le vague du temps: » qu'on peut « connoître: » la poësie des tortures ,. et les hymnes de la » chairet du sang. » Que signifient ces expres- sions étranges (2)? Dans toutes les langues il (2) C’est avec peine que je relève de pareilles taches dans: une si belle composition. Pourquoi l’auteur veut-il toujours décrire , toujours courir après l’expression, et travailler tou- jours péniblement le tour de ses phrases? M. de Ch, n’est pas fait pour imiter ces auteurs descriptifs qui heurtent l'ima= h: gination par des images forcées, éronnent l'esprit par des termes impropres, ne touchent point le cœur, et au lieu de donner des émotions , ne recueillent que des ridicules, Quelle différence du style de ces passages avec le tableau que je vais extraire d'un des articles intéressans que M. de Ch, a placés b. “dans le Mercure de France sur la littérature anglaise. I] rend compte du voyage de Mackensie dans l’intérieur de FAmérique 438 Lillérature. y a des hardiesses , des ellipses , des pro- verbes inimitables. Un traducteur doit se pé- nétrer du génie de l’auteur qu'il traduit, et de la langue dont il se sert pour les faire con- Septentrionale. L'auteur, plein des riches souvenirs , des beaux sites qu'il a parcourus pendant nos jours de douleur , décrit une scène d'une pauvre indienne qui danse avec un chasseur errant et sauvage. Il ajoute: « Lorsque les danses » sont exécutées au bord d'un fleuve , dans la profondeur des » bois, que des échos inconnus répètent pour la première fois » les soupirs d'une voix humaine, que l’ourse du désert re- » garde du haut de son rocher ces jeux de l’homme sauvage, » ‘on ne peut s'empêcher de trouver quelque chose de grand » dans Ja rudesse mème du tableau, de s’attendrir sur la » destinée de cet enfant de la nature, qui naît inconnu du » monde , danse un moment dans la vallée où il ne repassera » jamais, et bientôt cache sa tombé sous la mousse de ces » déserts, qui n’a pas même gardé l'empreinte de ses pas!!! Quand ‘les expressions et les images répondent aux pensées , elles forment un easembie de grandeur qui attache et subjugue ; Landis qu’on trouve froides les phrases orgueilleuses où l'on rencontre l'assemblage de quelques idées triviales avec des termes emphatiques. Et j'établirois par une profusion d’exem- pleS ce contraste piquant, si j'ouvrois les déclamations de l'abbé Raynol.—Dans un second extrait se trouve cette image gracieuse:; « La nature (toujours dans l'Amérique Septen- » trionale) aux approches du soleil, entr’ouvre par degrés » son voile de neïge. Les poëtes américains pourront un jour » la comparer à une épouse nouvelle, qui dépouille timide- » ment, et comme à regret, sa robe virginale, décelant en » partie et essayant encore de cacher ses charmes à son x époux. » Génie du Christianisme. 43q corder ensemble. Mais l'imitateur est obligé d’être encore plus sévère dans le choix de ses locutions, car, «les Grecs n’auroient pas plus » aimé un temple Égyptien à Athènes, que » les Égyptiens un temple Grec à Memphis. » Ces deux monumens changés de place auroient » perdu leur principale beauté, c'est-à-dire » leurs rapports, avec les institutions et les » habitudes des peuples. » M. de Ch. vient de me fournir cette comparaison heureuse, où il se condamne lui-même. Le Français n’est ni Grec, ni Hébreu. Nous avons dejà annoncé le plan de l’auteur ; il est temps de faire connoître sa marche à ceux qui ne l'ont pas encore lu. Ce n'est point par des citations isolées qu'on critique un écrivain qu’on estime et qu'on admire. Cette méthode insidieuse n'appartient qu'aux ruses de l'envie, ou au système des partis et de la haine. Des hommes puissans en paroles ont tour à tour défendu le Christianisme, contre les atta- ques des Hérésiarques et des Sophistes. M. da Ch. cite leurs nomsavec reconnaissance ,et leurs ouvrages avec éloge. Mais en vain ces hommes ont repoussé les coups des incrédules et des fanatiques , une ligue puissante, armée des traits du ridicule, aidée par l'ignorance et les 44o Littérature. passions, avoit jeté la défaveur de l'opinion sur les choses saintes. M. de Ch. , revenu des erreurs ou , pour mieux dire, de l'indifférence du premier âge; révolté des sarcasmes, des injures mêmes, prodigués à tout ce qu'il y a de respectable dans les institutions humaines et divises, a pris la plume; et comme une colère profane avoit jadis servi d’Apollon à Juvenaz, une colere céleste a donné l'essor à son génie. I] relève tout ce qu’on a déprimé, Sa division est heureuse : il traite d’abord des dogmes et de la doctrine; de leur onction, de leur beauté. Avant sa mort, M. de St. Lambert publia un Catéchisme moral ; les lecteurs curieux de raprochemens, pourront comparer la séche- resse , la morgue philosophique, avec la douceur et l’urbanité de l’athlète de l’évangile. Escorté par les vertus et les mystères, il enchante l'ima- gination et touche l'âme: peut-être on pourroit. lui reprocher des pages qui ont la prétention d'être poëtiques , des traits exagérés et bizarres, des expressions ambitieuses, des digressions étrangères à son sujet; quand il annonce des preuves, il se livre à des peintures (3); mais (3) M. de Ch. a dù peindre pour toucher. Quand l'esprit. est totalement perverti, il ne suffit pas de le convaincre; il faut croire de cœur aux grands mys'ères de la religion. C'est ce que M. Clément a fort bien exprimé dans son Génie du Christianisme. L41 ces peintures ont de la grâce et de la force; c’est le pinceau du Cerrège et de Michel-Ange ; il ne subjugue pas la raison, mais il entraine le cœur. On s'étonne , on admire, on se tait. Il passe ensuite à l’analyse descriptive des rap- ports de la poësie avec les passions des hommes; et du merveilleux des fictions célestes avec les allégories mythologiques. Il mêle une critique judicieuse et savante aux créations de son génie; et toujours son style répond à la richesse d’un si beau sujet. S'élevant avec audace, quand on commence à croire quil pourroit décli- ner (4), ilmontre la religion chrétienne en har- monie avecles scènes de la nature et les pas- sions du cœur humain. Sa plume jette avec Introduction du Tableau. annuel de la Litrérature. « Le « christianisme ne peut être une affaire de parti; la convic- >? tion même de l'esprit ne suffiroit pas ; il faut y croire de .» cœur; et c’est au cœur que l’impiété a fait ses blessures , » c'est le cœur qu’elle a desséché , qu’elle a endurci; et » qui ne sait qu'au moral, comme au physique, les mala- » dies du cœur sont mortelles. » C'est trop vrai: Montaigne disoit qu'il étoit plus aisé de décroire que de croire une se- conde fois. (4) Cependant il faut convenir que trop souvent après une phrase brillante et sonore, on rencontre des expressions foibles et négligées ; et une image pompeuse est suivie ou précédée d’une image triviale, et de termes si déplacés, et si mal choisis, qu'on croit entendre les Précieuses Ridicules de Molière. 44o Littérature. profusion les tableaux magnifiques, les idées nouvelles et les épisodes. Ici celui de Rexe, qui prouve combien la solitude est funeste quand la religion ne bride pas les écarts du cœur ; à l'époque où l'orage des passions tour- mente le jeune âge, et le livre à ces désirs vagues et concentrés qui lui rendent l'existence pénible et sa sensibilité à charge, tant qu'il n'a pas trouvé l’objet de ses amours. Plus loin, le roman d'Arara , qui est en quelque sorte la poëtique chrétienne mise en œuvre (5). Ce grand ouvrage se termine par l’exaltation des cérémonies usitées dans l'église Romaine. Gette partie est son chef-d'œuvre. La diction en est riche et pure; on y trouve cette pompe admi- rable qui brilloit jadis dans nos temples, avant qu'ils fussent dépouillés par les mains de la phi- losophie, ou de Ja destruction. \ Nous avons donné des éloges à la manière de M. de Ch. , avant de censurer les écarts de (5) Cet agréable roman a été traduit dans plusieurs lan- gues ; il a fait naître un grand nombre d'imitations, a fait composer des romances et des héroïdes, et a même fourni à M. d’Acuirar , aujourd'hui retiré en Espagne , le sujet d’un poëme où il y a de belles tirades. Pouvoit-il en être au- trement ? Ne trouve-t-on pas dans cet ouvrage des passages éloquens dignes de Bossuet , et des tableaux descriptifs , rivaux de ceux que nous devons à la plume de M. Berwan- DIR DE ST. PiEnne ? LL PERS: Génie du Christianisme. 443 son génie, nous ne pouvons nous empêcher d'extraire divers fragmens estimables de son livre. Mälheur à ceux qui peuvent blâmer les négli- gences des grands écrivains, et qui n'osent se livrer au plaisir de louer ce qu'ils admirent. Laissons un froid Sophyste (*) prétendre que l'en- thousiasme de l'admiration annonce un jugement étroit, un esprit limité ; il vaut mieux laisser calomnier son esprit que son cœur. « Qui l'auroit pu penser? le moment où l'on » découvrit tant de nouvelles preuves de la » grandeur et de la sagesse de la Providence, » fut celui-là même, où on ferma davantage » les yeux à la lumière, non, toutefois que » ces hommes immortels , les Copernic , les » TuycnoërAr, les Kixrer , les Lergnirz, les » Newrox , fussent des athées ; mais leurs suc- » cesseurs, par une fatalité inexplicable , s'ima- » ginèrent teuir Dieu dans leurs creusets et dans » leurs télescopes , parce qu'ils y voyoient quel- » ques-uns des élémens sur lesquels l'intelligence » universelle a fondé les mondes. » Plus loin, armé du flambeau de la Foi, il éclaire tous les replis de l’âme de l'Athée. Il le rapelle à Dieu par des peintures aimables (@) L'abbé Trubler, « 414 Tattérature. ou fortes. Nous ferons connoître celle de la femme esprit-fort. « Nous ne voyons pas qu'il » » » » » » » » » 2 » po] soit plus utile dans les divers états de la nature, que dans les conditions de la société. Si la morale porte toute entière sur le dogme de l'existence de Dieu et de l'immortalité de l'âme, un père, un fils, un époux , une épouse, n’ont aucun intérêt à être incré- dules. Eh ! comment , par exemple , concevoir qu'une, femme puisse être Athée. Qui ap- puiera ce roseau , si la religion n’en soutient la fragilité? Être le plus foible de la nature, toujours à la veilie de la mort, ou de la perte de ses charmes, qui le soutiendra cet être qui sourit et qui meurt , si son espoir n'est point an delà d'une existence éphémère? par le seul intérét de sa beauté, la femme doit être pieuse. La douceur , la soumission, l'aménité, la tendresse, furent une partie des charmes que le créateur prodigua à notre première mère, et la philosophie est mor- telle à cette sorte d'attraits. » La femme, qui a naturellement l'instinct du mystère, qui prend plaisir à se voiler ; qui ne découvre jamais qu’une moitié de ses grâces et de sa pensée; qu'on peut deviner, mais non pas connoître; qui comme mère » Génie du Christianisme. 445 et comme vierge est pleine de secrets; qui séduit surtout par son ignorance, et que le ciel forma pour la vertu et les sentimens les plus mystérieux, la pudeur et l'amour; cette femme renonçant au doux instinct de son sèxe, ira d’un main foible et téméraire chercher à soulever l'épais rideau qui couvre la divinité! à qui pense-t-elle plaire par cet effort ridicule et sacrilége? croit-elle nous donner une grande idée de son génie, en joignant ses petits blasphêmes et sa frivole méthaphysique aux imprécations des Spinosa et aux Sophismes des Bayie? sans doute elle n'a pas dessein de se choisir un époux ; car, quel est l’homme de bons sens, qui vou- droit s'associer une compagne impie ? » Mais le jour vengeur approche; le temps arrive, menant la vieillesse par la main: le spectre aux cheveux blancs , aux épaules voûtées, aux mains de glace , s’assied sur le seuil du logis de la femme incrédule; elle l'aperçoit, et pousse un cri. Mais qui peut entendre sa voix? » Voilà toute l’effroyable vé- rité des vengeances divines ; tel est le sort ré- servé à l'être isolé dans la nature. Que sera-ce des peuples ? Les bonnes mœurs peuvent seules lui donner une grande gloire, et un grand âge. Mais un peuple d'Athées auroit-il des 446 Littérature. mœurs ? Qui crée les mœurs ? Qui les soutient? La religion. Quels seront les devoirs de l'Athée (6)? Qui bornera ses désirs ? aucun lien ne peut le retenir. Sera - ce l'honneur? chimère ! l’hon- neur est-il blessé, quand il assassine son ami pour une réponse trop vive? Nos préjugés ne disent-ils pas le contraire? L’est-il davantage quand il séduit et trompe l'épouse de celui qui lui ouvre sa maison avec bonté et confiance ? Sera-ce l'honnéteté? Ah! qu'elle est foible contre les passions ; l'ambition lui commande-t- elle la perte d'un rival? un poignard ou de l'arsenic le seconde. A-t-il abusé de l’innocence d'une jeune fille? il détruit sans remord, ce : témoin futur qui doit trahir sa faute. Se croit-il malheureux ? Il termine des jours inutiles par une mort violente. Rien ne l’arrête: ni une épouse en pleurs , ni une mère inconsolable, ni la patrie qui le réclame, ni une conscience contre laquelle il combattit toute sa vie. Avec quelles douces et suaves couleurs M. de Ch. peint l'amitié ! on est digne de le sentir quand on définit aussi bien les rapports du cœur et du génie et leurs contrastes; surtout quand on retrace avec tant de charmes, cette sépa- (6) Une femme disoit: Quand je rencontre un athée, je désire que le créateur ne tire de lui d'autre vengeance que de le faire vivre environné d'athées. an... dd Bab cils Génie du Christianisme. 4g7 ration éternelle de deux amans qui se quittoient aux portes de la mort. » Chez les hommes de » l’antiquité , l'avenir des sentimens ne passoit » pas le tombeau..... Le comble de leurs » félicités se réduisoit à mêler leurs cendres » ensemble: mais combien devoit étre dou- » loureuse une urne qui ne contenoit que » des souvenirs! Le polythéisme avoit établi » l’homme dans les régions du passé ; le Chrys- » tianisme l'a placé dans les champs de l'espé- » rance. » De pareils morceaux ne sont pas les fruits d’une plume ordinaire. Ils’écrie dans un autre chap.«Malheur à qui » insulte son pays ! Que la patrie se lasse d'être » ingrate, avant que nous nous lassions de » l'aimer; ayons le cœur plus grand que ses » injustices. » Et l’auteur étoit banni!.... Autre part il fait cette remarque : « Jamais » on n'a vu tant de vertus parmi les Chrétiens, » que dans les âges où pour bénir le Dieu de » la lumière et de la vie, il falloit se cacher » dans la nuit et dans la mort. » Cette ob- servation est si juste, et la domination des Robespieristes à si fort mis dans tout son jour cette profonde vérité, qu’à peine on s'aperçoit de l’antithèse, __ On trouve plus bas: » La religion chrétienne, non contente 448 Littérature. » d'augmenter le jeu des passions dans le drame et dans l'épopée, semble même une sorte de passion qui a ses transports , ses ardeurs , ses soupirs, ses joies, ses larmes, eo Ÿ Ÿ 2 ca » ses amours du monde et du désert. » Sans doute de pareilles peintures sont sublimes , elles ont même quelquefois beaucoup d'onction et de grâce; mais leur fréquente répétition devient emphatique, recherchée et peut-être puérile. Rien ne s'oppose plus à la chaleur que le désir de mettre partout des traits saillans..... qui ne vous éblouissent pendant quelques instans, que pour vous laisser ensuite dans les ténèbres. (Burron.) Certainement , sans imiter cette pompe orientale (7), Bossuzr, Fenécon et Racine, (7) Les Orientaux ont l'ange de l’'adversite, celui du bonheur, celui de l'instruction ; et s'ils parlent à une per- sonne qui gémit, ils l’appellent fils de l'affliction. S'adres- sent-ils à un puissant Calife ? le malheur et le bonheur sont enfans de ta volonté. Ils se soumettent aux lois éternelles ; ils respectent le Livre de la Providence; ils craignent le piège de la faveur, etc. ; ces expressions, ces figures sont grandes et sublimes ; mais leur fréquent usage devient ridicule dans notre langue, qui est plus simple , plus claire que figurée. Non que je l’accuse, comme tant d’autres, de stérilité. Nos bons écrivains n’ont-ils pas suen tirer tout l'avantage qu'ils ont voulu et lui donner chacun l'empreinte de son génie! Que de genres d’éloquence ne fourni::2lle point dans d'Aguesseau, ont Génie du Christianisme. 449 ont de ces expressions vastes, pra » Colos- sales, qui surprennent Îles esprits” Étüni des et commandent l'attention ; mais ils évitent de prodiguer ces tours qui semblent produits avec fatigue. Une cascade ne tombe pas toujours; après avoir étonné par le bruit de sa chute, souvent, changée en ruisseau paisible, elle murmure dans son cours à travers les fleurs et les berceaux de verdure qui ornent son rivage. J'éprouve un certain charme à transcrire les passages qui me plaisent dans M. de Ch. mais je commence à craindre qu'on ne m’accuse d'être trop abondant à citer ce que tout le monde à déjà lu avec plaisir, et sans doute retenu ; cependant c’est avec uue certaine répu- gnance que je passe aux reproches: heureux si ceux que je vais adresser à M. de Ch. fruc- tilient. Il a assez de talent pour faire di-paroître les taches que je vais relever, il a déjà prouvé Bossuet , Massillon ; J. J. Rousseau , Buffon, Maury? Pittoresque avec Montaigne, naïve avec Lafontaine, douce et mélodieuse avec Racine , concise avec Montesquieu, pro- ; fonde avec Pascal, légère avec tant d’autres, elle se prète à tous les tons.—Cependant elle se refuse à ces tournures étran- gères dont M. de Cb. a fait un trop fréquent usage ; mais l’on peut dire aussi : que si dans ces caprices elle rejette certaines formes, elle les adopte toutes, quand on les lui fait prendre avec ménagement et avec goût, Tome FI. D'£E 450 Littéra:ure. qu'il voulait et pouvait les corriger: et s'il doit nous revenir de plus grandes jouissances de son travail, ces jouissances ne seront pas perdues pour sa gloire. Quand on n'a point parlé d'harmonies, qu'est-ce que les dernieres harmonies que la lune répand sur une fête? qu'est-ce qu'un cœur qui palpite sous Le poïds de l'amour ? Que signifie cette phrase : « Les tombeaux parmi les hommes » sont les feuillets de leur histoire; la nature » au contrairen'imprime que sur la vie. « Et cette exclamation : « Que sont devenus les per- » sonnages qui firent tant de bruit? le temps » a fait un pas, et la face de la terre à été 5 renouvelée, » L'image est belle; se ter- mine-t-elle heureusement? Qu'est-ce qu'une face renouvelée ? que cette expression est mesquine et peu sonore, Que veut dire: « une pesante » sonnerie, qui proclame dans la région des » nuées le triomphe du Dieu des batailles? » Comment M. de Ch. a-t-il pu oublier les principes du goût, qu'il a mis eu prat que souvent, et qu'il semble si bien connoître ; il dit de Milton : « On conuoit les tenèbres visibles , » le silence ravi , etc. Ces hardiesses lorsqu'elles » sont bien sauvées, comme les détonations » en musique par des passages ou des demi-sons ». font un effet très-brillant , elles ont un faux Génie du Christianisme. 451 » air de génie; mais il faut prendre garde » d'en abuser ; quand on les recherche, elles » ne deyiennent plus qu'un jeu de mots puéril, » aussi pernicieux à la langue qu'au bon goût. » Il dit ailleurs : « Avec notre hardiesse de style » et de pensées, sommes-nous plus originaux » que les auteurs du siècle de Louis-le-Grand?» Helas ! non: mais après la vigueur de l’âge arrive la décrépitude et la faiblesse; comme après l’ardeur du mit, arrive Ia fraîcheur du soir; comme après le règne brillant de l'élo- quence vient celui de la boufissure, des échasses et des mots; c'est l'enfant qui monte sur une table, pour paroitre plus grand qu’un homme. Aussi j'approuve beaucoup ce que dit M. de Ch. « TacrTe, Macxriavecz, et Monresqureu, ont » formé Kfhe école dacgereuse , en introduisant x ces mots ambitieux, ces phrases sèches, ces » tours prompts, qui sous une apparence de » briéveté touchent à l’obscur et au mauvais » goût. » Îl ne faut pas imiter ce qu'on blâme avec tant de raison, et si bien. Je sais qu’il est une audace d'expressions refusée à l’écrivaia vulgaire, dont l’âme est aussi impassible que son imagination est apathique; mais dont le poëte fait usage avec succès. Borreau a dit: Ce viellard, de qui l’âge ‘allonge le chemin, et cet autre qui hâte de ses ans l'importune lan- 452 Lattérature. gueur. Voilà des: hardiesses heureuses, des traits qui annoncent un poëte, qui se sert de sa langue, comme d’une puissance , pour rendre les inspirations du génie. Mais il faut être sobre de ces hardiesses. Un autre reproche qu'on peut adresser à M. de Ch. ; c’est de ne point assez varier ses formes. Je lis: « Un bonheur absolu nous en- » nuie; un malheur absolu nous repousse : Le |» premier est dépouillé de morale et de pleurs; » le second d'espérance et de sourire. Ailleurs : « si le chagrin ferme l'âme , la félicité la dilate. » Dans le premier cas, on n'a pas assez de dé- » serts où cacher ses peines; dans le second, » pas assez de cœurs à qui raconter ses plai- » sirs. » Cela est exageré; et si le premier trait est admirable , Le second parait l'effet d'une gageure , d'employer toujours les mêmes formes et de les faire toujours admirer. ‘Comment M. de Ch., qui a censuré le mot fixer, dans une traduction de Fivarol, fait-il fixer le soleil, fait-il fixer une salle ? Il manie trop bien sa langue pour l’appauvyrir , en fai- sant un usage ridicule des termes qu'elle fournit. Qu'il laisse ces tournures forcées à ces auteurs éthiques, sur qui ne souffle jamais la muse, et qui, faute du chêne noueux et du haut pal- | Génie du Christianisme. 453 mier, s'appuient sur de frêles roseaux on s'at- tachent au jonc du rivage. Quelques personnes scrupuleuses ont blâmé aussi le continuel mélange des scènes mytho- logiques, littéraires, historiques et religieuses. Nous étions loin de partager leur sévérité , prévenussurtoutpar notre opinion si bien rendue par l’auteur, que Dieu ne défend pas les routes fleuries pour revenir à lui. Mais en lisant la peinture des quêtes dans le chap. 6 du liv. IITe., 4°. partie, nous n'avons pu retenir notre surprise, et nous avons été forcé de convenir que ce tableau de fantaisie étoit plein d'idéés disparates. C'est peut-être ce qui a fait dire à un lecteur de cet ouvrage : Le Génie de M. de Ch. a traversé le ridicule ; et il s’est envolé. Je n'aime pas les jeux de mots; mais je crains bien que celni-ci ne soit à sa place. Comme l'aigle audacieux qui vole au-dessus des nuées, sans craindre qu'aucun obstacle arrête son essor; élancé par la force de son génie, M. de Ch. plane à la source de la vérité. Quelquefois il s’y égare par trop d'en- thousiasme; il généralise trop les idées qu'il emploie pour la défense de la religion. Par exemple à propos du mystère incompréhensible , et par conséquent inexplicable de la Trinité, ël cite Pythagore et les trois nombres sans mère 454 Littérature. le ternaire dans l’objet ou dans l'espèce indi- viduelle qui est /a cime, La racine et la sève, et les divers trinités des Indes, de la Chine, et même des sauvages de la mer du Sud; son éloge pompeux des cloches ; sa naïve admira- tion pour une foule de coutumes populaires, qui appartiennent, il faut le dire , aux siècles de barbarie et d'ignorance, et qui loin d'être l'es- sence de la religion, sont plutôt les moyens du fanatisme, et le but perpétuel des ironies de l'athéisme et de la frivolité ; enfin son ostra- cisme des images mytholoziques : tout cela nous | parait plaisant ou déplacé. Nous allions défendre le domaine de la poésie. Arosron, les Muses, les Gréces, L'Amour, Venus et FLoRE., souriaient ànotre projet. Nous aurions marché escorté d'OrPHÉE, d'HoMrRE, de Sapno, d'Anacreon, d'Horace, de Pro- pence et de ‘Tisurze. Mais nous avons relu les belles pages que M. de Fonraxes a consignées dans le Mercure de France. Il y défend sa richesse avec éloquence; ses comparaisons sont justes, brillantes et morales. Pouvait-il en être autrement? Virçizx eut sans doute déve- loppé les lois de l'Épopée aussi bien qu'ArisTors. Peut - être M. de Ch. a-t-il tort de rapporter toute la perfection des arts et des sciences au christianisme, Il est des découvertes qui Génie du Christianisme. 455 en sont indépendantes, et il n'a pas besoin de ce'secours et de ces enchantemens, pour faire chérir son empire ; mais il est beau de s'égarer dans un pareil sujet; on ne pèche point par un excès de zèle pour le bien. D'ailleurs il est certain que le hasard n’a présidé à rien, et que Dieu est le père de toutes choses. Il faut donc le louer de tout, chanter et décrire les merveilles de ses œuvres ; surtout quand on possède cette plume d’or, dont M. de Ch. semble avoir hérité de Platon. Ce grand ouvrage se termine par cette prière: » Créateur de la lumière , pardonne à nos pre- » mières erreurs. Si nous fümes assez infor- » tunés pour te méconnoitre dans le siècle » qui finit, tu n'auras pas roulé envain le nou- » peau siècle sur notre téte. I à retenti pour nous » comme l'éclat de ta foudre. Nous nous sommes » éveillés de notre assoupissement, et ouvrant » les yeux ; nous avons vu ceNT ANNÉES AVEC » LEURSCRIMES ET LEURS GENÉRATIONS, S'ENFONCER » DANS L'ABIME : elles emportoient dans leure » bras, nos amis! à ce spectacle nous nous » sommes émus ; la rapidité de la vie nous a » troublés. Nous avons senti combien il est » inutile de vouloir se défendre de toi. Seigneur, » nous te louerons désormais avec le prophète ! » daigne recevoir le premier hymne que nous 456 Littérature. » t'adressons sur /'aile de ce siècle, qui nenrns » DANS TON ÉTERNITE, »— On y trouve le genre de beautés et de défauts qui semble être la manière habituelle de l'auteur. les mots en lettres majuscules sont admirables , ceux que nous avons soulignés nous paroissent petits ou ridicules. y Le dernier Ch. renferme un magnifique ta- bleau ; c'est la peinture des Romains, non tels qu'on les a exaltés jusqu’à ce jour, mais tels qu'ils ont existé " c'est-à-dire, méprisables et féroces. « Quel peuple que celui-là, qui » avoit placé l'opprobre à la naissance et à » la mort, et élevé sur un théâtre ces deux » grands mystères dela nature, pour déshonorer- » d'un seul coup tout l’ouvrage de Dieu. » Qu'ajouter à ce passage? Tout éloge est foible et l’admiration reste muette. Ce travail de M. de Ch. est l’émanation d’une belle âme et d’un grand génie. Son style est brillant et simple, antithétique et noble, brûlant et doux , ner- veux et abondant , inégal et sublime; quand il ne mêle rien d'étranger à son sujet, il a cette suavité enchanteresse, cette grâce, cette onc- tion qui fait oublier à l'incrédulité ses doutes, à l’impiété ses craintes, à la critique ses armes (*) ; {*) Paroles de M. Villeterque. - Génie du Christianisme. 457 et pour’ finir à la manière de M. de Ch. : quelquefois tel qu'un fleuve enrichi du tri- but des hivers et des montagnes, qui dévore son rivage , et entraine tout ce qu'il rencontre : d’autres fois il imite dans ses agréables détours les ondulations gracieuses des bouleaux du boc- cage ; où pittoresque et sauvage , il porte l'em- preinte du désert. * Aug. de L. ‘Nota. Cet article est d’une date ancienne ; ‘depuis qu'il est écrit, il a paru plusieurs éditions du Génie du Christia- nisme , et la dernière vient d'être annoncée dans ce Journal, N°. d'Avril. M. de Ch. y a fait d’heureux changemens. Aussi aurions-nous supprimé notre article s'il n’étoit pas composé depuis longtems ; mais nous n'avons pâs voulu interrompre © Ka marche des N°*, que le Libraire , prédécesseur de M. Dr- LANCE , avait laissés en retard. — Nous saisirons cette occa- sion pour-faire faire une temarque à nos lecteurs. Tons les écrivains qui donnent des mémoires ou des analyses au Ma- gasin, n'ont pês tous la même opinion ; , mais ils sentent tous le besoin de l’indulgence et de la tolérance ; et ils vivent d'accord , avec des avis différens.” POÉSIE. ALMANACH. des Muses des départemens méridionaux. À Toulouse, chez Guira- mand, libraire, rue S. Rome. Prix: à fr. 50 cent. Ni pu Derranp trouvoit l'incrédulité peu amusante, et elle avoit raison. Aujourd'hui on estincrédulesur tout. Morale, religion , litté- rature, ne présentent qu'une cruelleincertitude; on ne sait plus que nier et douter. Mais laissant à MM. de Cuareausrianr et de Bonwacp, le soin de défendre la religion et la morale, je vais m'occuper d’une question littéraire. Long-temps les Troubadours régnèrent sur l'Europe savante. Le Danre, Boccace, BEn8o, Crescemsinr, en Italie, Rimen , Drynen , CHau- cer, en Angleterre, ont loué leurs ouvrages. Pérranqueleur doit ses meilleurs sonnets. Quels hommages plus éclatans leur fallait-il pour les préserver des attaques qu'ils ont essuyées ? Dans une dissertation écrite avec beaucoup de cha- leur et d'esprit, LecRanD dément l'ancienneté des Troubadours, ct récuse leur influence. La manière dont il s’y prend n’est pas heureuse. « Tous les historiens, tous les littérateurs u Muses. ’ 459 » Français, Italiens, Espagnols, et tous ceux » des autres nations ont dit, écrit ou assuré, » que nos provinces méridionales avoient non- » seulement les premières cultivé la poésie » vulgaire, mais qu’elles avoient eu l'honneur » plus grand encore d'avoir en ce genre fourni w 2 au reste de la France ies premiers modèles , s Ÿ et les premiers maitres qu'elle ait eus. » Cet aveu me semble condamner d'une manière assez forte l'opinion de Lecrawp. Pouvoit-il pré- tendre avoir seul raison contre tous ? Croyoit-il que son témoignage l’emporteroit sur celui des Pasquier, des FonTENezze , des Muizror ; des Ducance, des Ricouey DE Juvieny, etc.? Je n'ai point leurs livres sous les yeux, et il seroit trop long de les citer. D'ailleurs qu'ai-je besoin de leurs suffrages? qui est étranger au souvenir des gentilles et courtoises causes d'amour et à cette gaie science ( gai saber), dans laquelle brillèrent les comtes d'Auvencne, D'ANJOU , de Toucouse, de ra Marcus; le bon Roi RENE, Ricnano Ier. Roi d'Angleterre, Arpnonse, Roi d'Arragon , les Empereurs Frepenic I, II, I, et tant d’autres barons et chevaliers attachés aux charmes , aux grâces, aux vertus des Ma- srLE , des Vizreneuve, des Dacourr, des Hu- cuatre et GARSENDE pe Sasnan , des BLancne- FLEUR D& Ponrevés, des EsTepHANETE De Gan- 460 Poésie. TELME , des BEATRIX DE Savoye, des ELEONORE DE GUyENNE , etc. ? Qui ne connoit les bords enchanteurs du Var, de la Sorgue, de la Durance et dé l'Adour? Qui a pu ne pas en- tendre parler des rives de Vaucluse, de celles du Lignon, et des riantes plaines d'Hyères? Tous ces sites pittoresques et ravissans ont été célébrés par des poëtes illustres. Les guerres civiles ont pu dévorer presque tous leurs ou- vrages ; mais le temps , toujours funeste aux écrivains sans génie , le temps a respecté leur Mémoire. Ne pouvant me livrer ea ce moment aux recherches qu'un pareil sujet mérite ( elles m'entraineroient trop loin), je rassemble ra- pidement quelques notes et mes souvenirs, me réservant de prouver quelque jour avec plus. d'étendue, que la poësie fut d'abord cultivée en France dans les contrées méridionales. « La » Provence(dit un auteur dans une dissertation » qui parut en 1781, dans le Mercure de » France), ce jardin des Hespérides, qui, sous » un beau ciel, produit les parfums de l'Arabie, » les richesses de l'Orient, de l'Espagne et de » l'Afrique, mérite bien de fixer l'attention et » le goût des curieux et des savans. Eh! qui » ne seroit jaloux de connoître une nation » dont le génie, les vertus et les vices, la Muses. 461 » politesse, les arts , le commerce et les lettres, » prouvent sa liaison avec les Romains, les » Grecs et les Gaulois; peuple spirituel, actif, » d'une imagination vive et sensible, dont la » langue par se liberté et ses grâces, devint » celle des Cours, et chez qui l'amour dans » les temps de franche et loyale chevalerie, fut » le juge et le prix des héros? » C'est chez eux qu'on vit briller dans tous ses charmes , la sœur des grâces, des ris, et des amours. Fille aimable de la folie, La chanson naquit parmi nous ; Souple et légère, elle se plie Au ton des sages et des fous. dit Bernis, combattant pour ses foyers, car: À tous les cœurs bien nés la patrie est si chère! DuseLzLox. Mais on a prétendu que depuis long-temps déchues de leurs prérogatives, nos provinces sembloient frappées d'impuissance. Je crois qu'on se trompe. Cependant, supposons que le génie y fut entièrement perdu, comme on voit l'ignorance régner aujourd'hui dans les villes où habitèrent jadis SocrATE, HomerEe, PLATON, Corinne et SAPHO; serait-ce assez pour avoir le droit de nier le passé? qu’en conclure contre elles? M. Czemenr de Dijon a très ju- 462 | Poésie. dicieusement observé, que lorsque le gouver- nement fut centralisé en France, la capitale dut l'emporter à la fin sur les provinces éloignées. La dépendance a fait naître la flatterie, dit Me. Sraaz ; et la flatterie suffisait pour faire adopter l'idiôme de la Cour, quoiqu'il fut plus dur et moins riche que celui de l’harmonieuse occi- tanie. En outre comme l'a remarqué unécrivain : « Quelle somptueuse suite d’établissemens utiles, » d'institutions honorables, de monumens pré- » cieux, de merveilles propres à exalter l'ima- » gination dans le nord de la France! Est-il » possible que dans un tel séjour, le génie » soit rebelle à cette éducation de gloire que » tout conspire à lui donner? L'enthousiasme, » qui dans la capitale est à la fois la récom- » pense et l'aiguillon du génie , anime rarement » nos méridionaux. » Cependant malgré sa prééminence, malgré l'éloignement où se trou- vèrent de Paris les peuples de Provence, du Languedoc et de l’Aquitaine , ils ne perdirent pas leurs droits au laurier d'Apollon. L'Aca- démie de Marseille, celle de Nimes, se firent distinguer de leurs rivales ; celle de Toulouse surtout. Elle fut instituée par cette CLemexce Isaure, dont FLorian a chanté les infortunes. Quand les fleurs annonçoient la saison des amours, Dans Je temple des arts d'aimables Troubadours Muses. 465 Retraçant les malheurs de la tendre Clémence, Consacroient leurs accords à la reconnoissance. C'étoit dans la capitale de la ville Palladienne, que les magistrats distribuoient aux poëtes l'Églantine, la Violette d’or et d’argent , que leurs odes ou leurs idylles avoient méritées. Peut-être on va me dire, quels noms oppose- rez-vous dans le midi, à ceuxqu'à vu naître le nord depuis que les Troubadours n'existent plus? Je sais qu'il en est dont on n'a point égalé le génie. Mais sans me rejeter sur la cause de cette différence , dont j'ai déjà parlé, quelle foule d'auteurs se présente, dont les travaux n'ont pas été davantage effacés, que ceux de Conweirce, de Racine, de Moiëre, de La Fonraie et de Me. de Sevicné. Ces écrivains sublimes, qu'on admirera, qu'on aimera sans cesse , désavoueroient-ils le voisinage de ce Moxruens, dont le style est si naïf et si original; de ce GasseNDr, si savant et si modeste; de ce Pascaz , si profond et si bril- lant; de ce Monresquieu , si piquant et si énergique ; et de ce FENELON, si vertueux et si éloquent ? Dans tous les genres ne trouve-t-on pas les créations des d’Ossar, D'AGUEssEAU, Moxcrarn, DuparTy, VAUVENARGUES, MAIRAN, Casriron, l'abbé Poure , Barraerzemr, R- can», Raynaz, Lacrancx - Caancez, Rapin- 464 Poésie. Torras, Mascarow, Fiecnier, Baitye, Monery . TourNeroRT, Donnar, ‘THomas, LAPAUMELLE, Miraseau , l'abbé Annaurr, Pezisson, Mar- MONTEL, SeGUIER, RIQUETI qui fit construire le superbe canal de Languedoc; Monponvire et Campra, dans la musique; Verner et Vanroo, dans la peinture; Aupran et le Pucrr, dans la sculpture? Mais c’est surtout en poésie qu'ils peuvent fièrement repousser ce reproche de stérilité. Maror, Dunrré , Prenac, BRUEYS, ParapraT, Camprisrron, GonpouLr, SAURIN, BernarDp, Rayrac, Boissy , le P. de Larour, Vanreres, BERNARD, Lirranc, BARTHE , BAzze, Lauris, Cnamrortr, DurarD qui a chanté Les merveilles de la nature, et dont le poème n'est pas assez connu. ImrerT, fécond auteur d’agréables bagatelles, à qui il n'a manqué, dit, M. Guyor DESHERBIERS, pour laisser un long souvenir , que le tems de corriger des ouvrages inspirés , et la force de contenir une facilité éblouissante , maïs trompeuse. BERQUIN, talent aimable et pur , qui consacra sa plume à mériter. le titre d'ami des enfans , et qui périt victime du monstre révolutionnaire, ainsi que ce Rou- CHER, à qui mademoiselle de LespiNasse disoit , après la lecture d’un fragment du Poëme des Mois : C’est un boisseau de diamans que vous nous avez jeté à la téte; ainsi que le P. Ves- | NANCE , Muses. 465 nance, dont l'Elégie sur l'Ennui faisoit présager un poëte très-agréable M". Morscur, Verprer, Bournic, CareLan , Drruiirer, etc. Et parmi nos auteurs vivans , ne distingue-t-on pas dans plusieurs branches, l’estimable instituteur des sourds-muets (M. l'abbé Srccarp), l’élégant tra- ducteur d'Homere, (M. Brrausé), le chantre des Jardins (M. Dezure), cetorateur qui montra au sein de /a Convention le coura:e , les vertus, et les talens réunis ( M. Boissy-n'Anczas. }, le continuateur , l'émule, l’ami De Burron ( M. pe Lacerëne.) Mrs. GaRAT, CHAPTAL, SERVAN, Despazes, Pasrorer, LANTIER, LATRESNE, au- teur de la jolie comédie des Questionneurs , Sararuier de Castres, Esmknarp, dont le poëme sur la Navigation est plein de verve et d'heureux détails, de Gassenpr, RexouArD, Carton DE Nisas ce M. Porraz, qui , suivant un bon mot de Vor- TAIRE , @ lon£-temps interrogé la mort, pour ap- prendre à conserver la vie ; M. LaPEYROUSE; enfa, Toulouse énorgueillie A donné deux amans à l’aimable Thalie. L'un peignit l'Egoiste et le Tuteur dupé , On crut retrouver PLAUTE, on ne fut pas trompé. L'autre vint après lui courir la même lice, Et peindre en jolis vers Défiance et Malice. Après MM. Carzuava et Dreu-La-For, L'ingénieux Nanreuiz a par fois dans la ville 4 Fait courir le refrein d’un joyeux vaudeville ; Tome F1. Gg 466 Poésie. Czausores, combinant la force et l’art des sons, A vu SicanD lui-même adopter ses leçons. Cazarès, si fameux par sa mâle éloquence, Tächa de prévenir les malheurs de la France : Vipaz, favorisé d’Uranie et des Dieux, De son hardi compas a mesuré les Cieux, Et Barruzz, confident de la déesse Hygie, À joint dans ses écrits la grâce à l'énergie. Avec de de pareils noms, et ceux queje citerai bientôt, etle grand nombre de ceux que j'oublie sans doute, pourra-t-on nous accuser de sté- rilité? Continuera-t-on à soutenir avec LecRAND, que les provinces septentrionales sont seules, douées de la faculté ou de la vigueur d'esprit qui enfante, nourrit et développe les talens ? C'est aux cerveaux brülans du midi qu'on refuse limagination et le talent poëtique! Il est si inhérent à ces contrées, que nos écrivains en prose (la remarque est frappante) ont écrit avec tant de vehémence , il leur est échappé des métaphores si hardies que les vers ne les rejeteroient pas. Eutr’autres dans ce Massiron , qui joignait la sensibilité de l'âme aux dons de l’éloquence , et que j’ai gardé pour ma dernière preuve, ne trouve-t-on pas: « Le juste peut » avec confiance condamner dans les autres » ce qu'il s'interdit à lui-même, ses instructions » ne rougissent pas de sa conduite? » RACINE, a-t-il de trait plus fortet plus poétique. Quoi ! Muses. 407 ce sera le pays de la gaîté, de la vivacité qu'on accusera de sécheresse et de langueur ! La Provence, le Béarn, n'ont-ils pas eu le goût de la belle poésie en héritage? Qui a oublié les chansons de ce bon Henrr IV? Qui parle un langage plus figuré, plus passionné, plus elliptique que les habitans de la Gascogne et du Quercy!« Il n’y a point d’idiôme ( dit » M. Berançcer) plus riche, plus doux, dont » les mots soient si expressifs et si pittoresques, » et par conséquent plus propres à la poésie » que le Languedocien. Ceux qui l’entendent » sont forcés de convenir, que plusieurs de » leurs petits ouvrages l'emportent sur ce » que nous avons de plus délicat dans nos » pièces fugitives. » Plus étourdis au fond que méchans (dit M.Gurs, dans son Parallèle des Grecs et des Marseillais ) nous sommes tous en général plus ou moins ,comme nos premiers pères, légers, vifs, extrêmes, inconséquens : oui, Nous sommes tous d’Athénes en ce poiut. La FonTains. Nous nous passionnons pour ou contre , sans réflexion , sans. motif et quelquefois sans in- cérét. Comme nous déliberons peu , nous faisons tout gaiement, une bonne action comme une fausse démarche ; mais avouez aussi qu’on trouve parmi nous des amis chauds et sincères, de. s 468 Poésie. la générosité, de la franchise, de la bravoure , tous les talens de l'esprit, la plus grande ac- civité , etc. Le Languedocien est vraiment si aimable! Dire de lui qu'il a de l'esprit ou de l'imagination seroit presque lui faire une épigramme , de méme (dit Cocarprau en parlant de MonrrsquiEu:) qu'il y auroit du ridicule à louer l'esprit d'un homme de génie. J. J. Rousseau a plaisamment observé qu’on y menace son ennemi d'une chanson comme un Îtalien le menacerait d'un coup de stylet. Certes l'un vaut mieux que l’autre, et cette différence fait bien l'éloge de la bonté des habitans de la Garonne. Leurs mœurs sont aussi douces que leur esprit est brillant. Presque tous pourroient répéter ces vers de Reignier: Et le surnom de bon me va-t-on reprochant , D'autant que je n’ai pas l'esprit d’être méchant. l'esprit: c'est peut être une erreur. Les gens d'esprit dit RuuiteRes se permettent des bons mots , les sots seuls font des méchancetés. Mais il est temps de parler de l’almanach des Muses qui vient de paroître à Toulouse. Les Muses y sont là dans leur domaine. Leur récolte a-t-elle été bonne? Elle eut pu être meilleure. Mais telle qu’elle est il me semble qu'elle a été accueillie avec trop d'indifférence par nos critiques. | sn Muses. On a retenu un mot charmant d’un grand seigneur de la Cour de Louis XV, a dis-. crétion des poètes ne leur défend pas de chanter leurs amours, et la poésie le leur ordonne. M. Auguste Gaude, pour lui obéir, marche sur les traces de Tisuze et de PRoperce. Parmi plusieurs pièces charmantes, faites pour sa ZELrs , on distinguera celle intitulée : Souvenir. Douce retraite, asyle heureux Où l’amour amenoit ma jeune et tendre amie , Myrthes, qui voilâtes nos jeux ; Vous rappelez à mon cœur amoureux Les plus beaux momens de ma vie. O temps! cette flatteuse erreur Echappera sans doute à ta poursuite. Mais le souvenir du bonheur Nous. console-t-il de sa. fuite ? Dans uneépitre assez considérable , ou l'auteut nous confie ses vœux,, il nous apprend que, J'ai vu les dignités, l’éclat et l'opulence, Et rien n'a pu tenter ma modeste espérance. Un palais fastueux ne fait pas le bonheur: Le bonheur, c’est la paix de l'esprit et du cœur. AR er eee de aale s en Eat e CS Cependant je voudrois sur un coteau fertile, Une maison modeste, un solitaire asile, Qui m'offrit du repos la douce volupté. Son luxe peu coùteux seroit la propreté ; Une source abondante , en cascade agitée, . Rouleroit les trésors de son onde argensée ,. 70 Poésie. Dans un vallon tranquille et fait pour les amours : Un rivage de fleurs couronneroit son cours ; Etc c'est là que Zkzis, mollement étendue, De fraicheur et d'éclat verroit FLoRe vaincue. Quelquefois pour CËnës je quitterois Vénus. Qu'il est doux d’égarer sa vue et sa pensée Sur l’onde qui gémit de sa fuite forcée ; De respirer en paix sur les monts embauriés, L'air qui baisa les fleurs et les fruits parfumés ? Heureux l'ami des vers, qui voit de son asile Et la roche sauvage et la plaine fertile, Et le pampre, enfestons , riant sous le figuier, Et le front des coteaux où règne l'olivier ! Son œil ne peut quitter ni la forêt altière Déployant dans les airs sa robe printanière, Ni les jardins fleuris, ni les müriers touffus, Ni les dons de Pomone aux rameaux suspendus ; Et sa muse redit cet ensemble admirable, Des plus riches tableaux modèle inimitable, Ouvrez-vous à l'amant, bosquets, voûtes de fleurs. C'est sous l’ombrage frais que naquit l’art des vers, Cet art dont les tableaux embrassent l'univers. L'homme froid goûte peù sa brillante peinture; Les fleurs sont à ses yeux un tort de la nature ; Le poëte pour lui n’est qu'un décorateur ; L'amour a trop de feux, Les prés trop de fraicheur; Son esprit méthodique, assis sur les surfaces, Soumet tout au compas et ne croit point aux grâcés. Art charmant! n’es-tu pas un peu trop décrié ? Les bons vers font plaisir, les mauvais font pitié. Mais le choix est permis, et ma lyre tremblante Méèlera quelques sons au concert qui m'enchante, AMuses. 471 Venez, chantres divins, venez m'environner ; De myrthe et de laurier je veux vous couronner ; Qu’un indigne rival, dans son jaloux délire, Insulte avec orgueil aux maîtres de la lyre, Qu'il les chasse du trône où tendent tous ses vœux, Moi, je ne sais qu’aimer ce qui me rend heureux. Certainement M. Gaude par ses sentimens et sa diction ne dégénère pas de son origine Trou- baderesque. A la vérité, tous ceux qui ont con- tribué à grossir les pages de ce recueil n'écrivent pas avec la même facilité , la même grâce et le même abandon. Me. VETERAN , ou si l’on veut M. TAvEeRNE, car l'anagramme de ce nom a été trouvée par les éditeurs, Belle et sublime découverte ! écrit en style de son nom une lettre d'une grand'tante à sa petite nièce sur les modes grecques. Cette grahd’tante qui se moque du temps où, Manche à grands plis se mesuroit à toises, s’écrie : L'ardente et prompte imagination, Sous le rideau qui couvre son image.... Je ne sais pas trop ce que c'est que ce rideau quicouvre l'image de l'imagination. Mais peut- être la grand-tante le sait. Après cela M. Demore chante à quelques amis réunis à table chez lui: 472 Poésie. Pressez-vous autour de mon &me, Vous que j'aime, vous qui m'aimez. Ce qui fait un plaisant groupe. Le même; dans une imitation de CATULLE, a mis, Donne mille baisers à l'amant qui t'adore ; Joins-en cent, joins-en mille, encor cent, mille encore. et M. Gereaun , traducteur de la même pièce: Donne-moi ta bouche, 6 mon ame, Et dans un mutuel transport. . ..…. Certes d’autres poëtes ont rendu dans notre langue cette pièce pleine d'amour, avec plus de bonheur et de charmes. Entr'’autres Dorar, et M. de Gassennt. Mais si les vers de M. Cras sont un peu foibles, si ceux de M: Dryné manquent de force et d'harmonie; si ceux de M. Roux sont privés de poésie et d'élégance, si l'on retrouve auprès de Mrs. Pauanere et Trey , M. Carara- CONTURE, illustré jadis par Rivaror, dans son petit Almanach des grands hommes, en re- vanche on est consolé de ces niaiseries par les’ fables de Mrs. Hrxry Borrreau et GRANCHER ; par des pièces de Mrs. de Parwy , de Fonraxess, AiczauD, Tourouser , Cuanpruc, par celles de Mesdes. de Monrenczos, Jucie CRABERE et de Bournic-Vior , qu’une mort cruelle a enlevée aux lettres et à ses amis. Elle a laissé plusieurs ouvrages très-agréables, Nous ne pouvons nous Muses. 47ë empêcher de témoigner ici le désir de voir M. Vior recueillir tous les manuscrits de cette aimable Muse. L'auteur de cet article eut l'hon- neur d’être lié avec elle ; en apprenant la nou- velle de sa perte, il écrivit cette épitaphe. Gaïîté , ralens , «elle eut tout ce qui plaît ; Ses vertus, ses écrits la rendirent célèbre ; La Muse des Amours, pour oraison funébre, Sur sa tombe pleure et se tait, Nous ne nouslivrerons'pas au plaisir d'extraire et de louer diverses citations que pourroient nous fournir les odes, les contes, les madri- gaux ou les épiîtres que nous avons sous les yeux. Get article est déjà un peu long, et il nous reste encore à parler de beaucoup d’autres choses. Nous recommanderons seulement à l'éditeur d’être à l'avenir plus sevère et de ne point placer des vers de M. Hazarp, entre ceux de Vorrare et de M. Duaurr, comme il l’a fait, sans doute par distraction. Dans la notice qui termine ce volume, on apprend que la guerre est sur le parnasse Tou- lousain. Les attaques ont été vives. Les ripostes l'ont été aussi : car comme dit VozratRe : «Il » yadela justice dans ce monde, et pour peu » que vous soyez poli, vous trouvez à coup sûr » des gens fort polis qui ne sont pas en reste » avec vous; cela compose une société char- » mante.» VoLTaiRE étoit du nombre de ces 474 Poésie. gens polis... Mais revenons à la guerre de ces messieurs. Un anonyme attaque sans pitié tous les hommes instruits qui sont dans Toulouse, ville réputée de tout temps par son amour et ses succès dans les sciences, les arts et les lettres. Il prétend les poursuivre sans relâche de ses sifflets. Je sais fort bien que de pareilles disgrâces n'arrivent qu'à charge de revanche. Vous me sifflez, je vous siffle à mon tour. Encore si on ne fesoit que siffler, le jeu pour- roit être plaisant, et dans ce genre on pardonne bien volontiers ces traits où l'esprit se pare des défauts du cœur, suivant l'expression de M. de Nivernais. Mais des injures grossières.et plates, des calomnies révoltaates remplissent les pages du libelliste. Après y avoir reflechi un moment, je n'en ai pas été surpris. Envie et impuissance, a dit Lanarpe, c'est par là que commencent tous les mauvaïs satiriques en prose eten vers... Quoi! d'autres sont quelque chose , et je ne suis rien ! Cependant soyons vrais même envers ceux qui ne le sont pas. Quelques traits heureux brillent dans ces satires. Si le style est diffus et plein de négligences, on y remarque de temps en temps quelques vers concis et bien frappés. 11 en est jusqu’à trois que je pourrois citer. DesPRÉAUX. Muses. 475 * Mais c’est bien peu de chose aux yeux de la critique, c’est un foible mérite pour plaire aux gens de goût, et surtout ce n'est pas un titre pour être injuste et méchant. Parcourrai - je les ennuis , les adieux , le tes- tament de l'inconnu, que j'ai sous les yeux , et citerai-je ses épigrammes contre tous ceux qu'il veut livrer à l'injure publique ? Non: il est peu délicat de se rendre l’écho de pareils outrages. Plusieurs poëtes ont pris la défense des Trou- badours modernes , l’un d'eux lui dit : Pourquoi déchires-tu nos aimables auteurs ? Ils te déplairoient moins s'ils étoient sans lecteurs. C'est à les déprimer que ton esprit s'amuse ; Tu prétends à la gloire, et l'envie est ta muse! Ah! ce n'est pas pour eux qu'on garde les sifflets. Plus loin, après avoir loué dignement MM. Gaupe, Borreau, Carre, etc., il s’écrie : Mais il en est encor, qui de nos Tectosages Honorent la patrie et forcent nos hommages : Soyons vrais sans murmure et justes sans effort. Ne te souvient-il plus de la tendre BraurorTt ? Le myrthe a couronné ses grâces naturelles , Et l'amour a redit ses chansons immortelles. Tu peux à ses côtés admirer Lormran. Silence, vils jaloux ! la lvre d'Ossran Soupire en sons plaintifs la complainte nocturne. Je l’entends : il gémit, sauvage et taciturne; Ses accens ont frappé les voûtes de Selma Des amours de SaLcar, dés regrets de Cozm:1 ; Des pleurs de Mazviwa, dont la harpe sonore Chante Oscar, ses combats aux plaines d’Ymistore; La gloire de Fincaz, le trépas de Catxmor ; Tant d'illustres guerriers illustrés par leur mort : Il enchante leur ombre au palais des nuages, Et transmet leurs malheurs au souvenir des âges. 476 Poésie. , Dans un autre passage, il repousse de cette manière l'attaque qui le concerne lui-même : Et moi, que v’ai-je fait, Zoïze de Toulouse ? Pourquoi troubler des jourstqu’embellit mon épouse ? Que ne me laissois-tu dans mon obscurité Contempler la nature et vivre en liberté ! Mes chants sont ignorés des filles de Mémoire, Mais j'aspire au bonheur et non pas à la gloire. Devois-tu persiffler un amant si parfait? - La constance à tes yeux seroit-elle un forfait ? Il finit par donner dans sa Contre-Satyre , de fort bons avis à l’archiloque anonyme, Les voici : Suis mes sages conseils, détracteur de Toulouse ; Modère les transports de ta veine jalouse. Si tu te sens épris du charme des beaux vers, Redis les premiers jours de ce vieil univers. Oui, si les doctes Sœurs président à tes veilies , De la création célèbre les merveilles; Observe la nature, et d’un style profond, Deviens, avec DEzILLE, émule de Burrow. Ou plus heureux encor, dans un tendre délire, . Sur des tons plus touchans viens accorder ta lyre. Elève de Parny , dans d’aimables portraits Peins d'un sexe divin la grâce et/les attraits ; Chante les doux ébats des nymphes boccagères, Et leur jeune allégresse et leurs danses légères, Et les pâtres joyeux sous des berceaux épais, Énivrés de bonheur, d’espérance et de paix. Ou chante BowaparTe aux bords de la Tamise.... Sur un si beau sujet l'audace t'est permise ; Et sans se préparer un fâcheux avenir , En chantant un grand homme on peut le devenir. Muses. 477 Nous terminerons cet extrait par les paroles de Vorraine: Un satirique qui ne couvre pas par des talens éminens, ce vice né de l'orgueil et de la bassesse , croupit toute sa vie dans l'oppro- bre ; on le hait sans le craindre, onle méprise sans qu'il fasse pitié. Puisse cette leçon être salutaire à l’auteur caché, dont il est question dans cet article. Puisse - t - il encore avant de céder au besoin de nuire, qui trouble ses jours et ses nuits, lire l'excellente histoire de Zoïre par Taomas Pernerze, auteur Anglais : il y apprendra que, Le mal qu’on dit d'autrui ne produit que du mal. DESPRÉ AUX. même à celui qui se charge de cette fâcheuse mission. Celui-ci paroit être d'un goût difficile ; tout attire ses dédains, rien ne lui plait. Quoi! d'Apollon les favoris Sont tous sur ton martyrologe! Que je te plains! dans tes mépris Ces méchans n’ont vu qu'un éloge. Tu leur offres dans ta fureur Une épine au lieu d’une rose. Infortuné ! pour ton bonheur Tâäche-donc d'aimer quelque chose. Auc. de L. LITTÉRATURE ANGLAISE. Parsons and Galignanÿs British Library, in vers and prose ; being the most exten- sive selection ever offered to the public, from every admired author in the english language. — Paris, printed by Didot se- nior. 1804. Lx goût pour les ouvrages anglais est devenu depuis quelque temps universel ; nous cher- chons à nous approprier leurs ouvrages, soit en en publiant de nouvelles éditions, soit en les traduisant ; et du moins on ne pourra plus à l’a- venir nous reprocher d'être indifférens pour les productions étrangères, et de négliger les autres langues de l'Europe. MM. Parsons et Galignani ont formé le dessein de publier par livraisons tout ce que peut offrir d'excellent la littérature anglaise , soit ancienne soit moderne. Cette entreprise est louable, utile, et mérite d'être encouragée. Si quelquefois le titre d'un ouvrage semble inspirer le désir de le connoître, on peut assurer d'ayance que cette collection obtiendra les suffrages des littérateurs distingués. Il suffit de nommer Shakespear, Milton , Driden, Thomson, Addisson , Hume, Mélanges. 479 Chesterfeld, Sterne, Young, Swift, et autres, pour en donner une idée favorable ; on voit que ces extraits comprendront tous les genres. Les vingt deux premiers numéros donnent, pour ainsi dire, la quintessence d'un grand nombre d'ouvrages, qu'il est très-difficile et prequ'im- possible de se procurer. Nous allons indiquer ce que chaque numéro contient de principal ; le Ne. I est principalement destiné à la poésie descriptive et lyrique ; on y lira avec plaisir un poëme sur la Pucelle. d'Orléans, par ÆAobert Sourney.—Le Peintre de Florence , poëme par le même. — La Princesse et l'Esclave , par Lewis. — L'Invitation, par Bancray. — Le Re- peniir des passions, tiré du Poetry ofthe World. — Le Rocher saïgnant, par la célèbre Hannah More , et plusieurs autres petits poèmes. Les numéros 2, 4, 6, 8, 10 et 12 sontentièrement en prose ; les premiers contiennent pour la plupart des caractères d'hommes célèbres, tracés par les premiers écrivains de l'Angleterre , tels que Hume , Smolett , Chesterheld , Burnet , Claren- don, Robertson, et autres. On y trouve quel- quefois les mêmes portraits, faits par des mains différentes ; ceux de plusieurs rois d'Angleterre , par exemple, sont de Hume et de Smolett ; ce qui donne lieu à des rapprochemens d'un grand intérêt, et à établir un juste parallèle entre 480 Littérature anglaise. deux auteurs également distingués, en exami- nant leur mérite particulier. Mais on voit mém quelquefois un seul caractère décrit par quatre\ différens auteurs, tel est celui de Charler Irr. qui a été tracé par Hume, Smollett, Macaulagy et Clarendon. Les autres numéros en prose , con- tiennent l'histoire de plusieurs personnages qui ont figuré sur le théâtre politique de l'Angle- terre, ou bien qui y jouent encore en ce moment un grand rôle : tels que Pitt, Shéridan, Fox, Horne - Tooke , Erskine, Jefferson, prési- dent des États - Unis. Le numéro 3 , contient des ballades et différentes autres pièces de poésie. Les quatre Saisons, poëme pastoral du célèbre Blomfeld , font le contenu du numéro 5. Ce poëme est de la plus grande beauté; ce sont des tableaux faits d'après nature, dont les cou- leurs ont la plus grande fraicheur. Dans l’hi- ver, on remarquera encore cette teinte sombre et mélancolique, genre dans lequel les Anglais sont si supérieurs à toutes les autres nations. Le numéro VII renferme encore différentes pièces de poésies pastorales par le même auteur, ces pièces sont entremêlées par des ballades , qui en rendent la lecture plus piquante et plus agréable. Le numéro 9 — 11 offre un poème très-singulier , intitulé The triumphs of tempeér ; l'expression temper n'est pas facile à rendre, et notre cl RE es . " 0 M GRR Ci es Mélanges. ÂB: notre langue n’a pas de terme qui seul puisse exe primer le sens complet du mot anglais. Il faut donc périphraser et traduire à-peu-près de cette manière: les triomphes d’un homme dont l'âme reste toujours dans la même assiette ; en un mot, d'un homme qui conserve son naturel. Ce poëme est l’histoire d'une jeune fille, sous l'empire d’un bon et d'un mauvais génie ; énivrée de la lecture des romans, tyrannisée par un oncle tourmenté de la goutte, devenant tour à tour le jouet de l’a- mour et de la vanité, elle est près mille fois de succomber à des passions honteuses, mais elle finit par se sauver à l’aide de son bon et excellent naturel ; peut-être seroit-ce là plutôt le sujet d'un roman , que celui d’un poëme ; aussi y a-t-il des endroits languissans; mais ce défaut est racheté par des descriptions vraiment poétiques. Le nu- méro XIII contient un poëme sérieux et comique en même-temps, de James BraTre , intitulé The Minstrel or the progress of genius, en deux chants. Le numéro XV — XVII contient un poëme héroï-comique , de Peter Pixpar, intitulé The Lousiad ; ce poème respire l'originalité. En voici àa-peu-près le sujet : un roi d'Angleterre ayant trouvé dans des mets qu'on lui servit un objet dégoûtant, se fit amener son cuisinier et donna ordre qu'on lui rasât la tête, voulant par cette punition le rendre plus propre et plus Tome VW]. Hh 46° Littérature anglaise. attentif à l’avenir dans ce qui concernoit son arts La gravure du frontispice représente le roi, et en face le cuisinier tondu. Nous parlons mainte- nant d’un ouvrage qui nous a paru le plus utile de toute cette collection ; ce sont les british syYnonymy , par madame Prozzr ; trois parties ont déjà été publiées, les éditeurs nous promettent la quatrièrue et dernière dans le numéro pro- chain. L'étude des synonymes d'une langue est dune nécessité absolue pour celui qui veut la bien parler,et même en lire avec fruit les différens écrivains. Sans la parfaite connoissance des syno- nymes et des homonymes, on ne peut com- prendre les poëtes d’une nation ; les poésies an- glaises et celles de Shakespear surtout en four- millent ; nous nous dispenserons d'en citer ici des exemples, nous renvoyons le lecteur à ceux que les éditeurs en ont donnés; on ne peut que les féliciter d'avoir enrichi leurs mélanges d'un ouvrage aussi agréable qu'utile. Madame Piozzi qui, comme on vient de le voir ,en est l'auteur, estitalienne d'origine, ainsi que l'indique lenom ; mais elle a été élevée en Angleterre, et s’y est fait avantageusement connoître par plusieurs produc- tions littéraires; elle étoit de plus intimement liée avec le célèbre Johnson, qui lui a fourni plusieurs articles; cet ouvrage a eu les suffrages de tous les littérateurs anglais, et cela sufhra, je Délanges. 485 trois, pour en attester le méritée. Le numéro XXI de cette collection vient de paroître; il contient l'excellent poëme d’Alexender Thomson . intitulé The paradise of taste, le Paradis du goût. Le frontispice de chaque numéro offre les por- traits des poëtes dont les œuvres sont renfermées dans le numéro , ou bien des objets qui ont rap- port à ces poésies ; le frontispice du numéro VII, par exemple, représente un jeune berger assis sur un £azon , avec sa houlette, par allusion aux poésies pastorales de Bloomfeld. On auroit tort de vouloir prétendre que cette collection n’est qu'une spéculation mercantile du libraire ; on doit la resarder comme très-pré- cieuse et propre à entretenir le bon goùt. Nous nous joignons volontiers aux amateurs de la bonne littérature, pour encourager les éditeurs à la continuer ; mais nous leur recommandons d'être toujours très sévères dans le choix des morceaux, et de ne pas se laisser entraîner par un air d'originalité qui souvent n’est que bur- lesque , et dès lors très-contraire au bon goût. MM. Parsons et Galignagni seront à l'abride tout reproche , tant qu'ils n'admettront dans le genre gai et original, que les poèmes pareils à la Lousiad de Peter Pindar, et le Triumphs of cemper de William Hayley. Ces deux ouvrags sont remplis de beautés absolument neuves et 48% Littérature anglaise. piquantes qui rachètent bien les écarts de l’ima- gination ; on peut appliquer à leurs auteurs ces vers de Boileau : Quelquefois dans sa course un esprit vigoureux, Trop resserré par l'art, sort des règles prescrites, Et de l’art même apprend à franchir les limites. Le prix de la souscription pour les vingt-deux premières livraisons, est de 30 francs, et de " . {4 25 francs pour les vingt-deux autres numéros prochains. Celui qui désire souscrire pour deux services , paiera 48 francs. Cu. LoBsTEIn. NO P'O'G'EMASP HTE. CurrTis BEronis, l’Erimitage du Soli- taire & Coubron, près Mont-Fermeil et Livry , département de Seine et Oise. L'avré Lebeuf nous dit, dans son Histoire du diocèse de Paris , que Coubron est un pays de la- bourages, de vignes , de vergers et de prairies : il ajoute que ce lieu ne manque point de bocages, qui ont eu de temps en temps des attraïts pour ceux qui ont voulu mener la vie érémitique. I] a décidé un ami du travail et de la tranquillité à s'y choisir une paisible demeure. C'est là que le solitaire se livre , sans trouble, à l’inépuisable étude de la nature; qu'il relit chaque jour , avec un plaisir nouveau, les pré- ceptes pleins de charmes d'Hésiode et de Vir- gile ;et que, placé dans une campagne délicieuse, il a sans cesse devant les yeux la perspective la plus r'ante et la plus variée. Derrière le village, un vallon fertile, couvert d’arbres fruitiers de toute espèce, entouré au couchant et au nord de montagnes et de bois, dont il reçoit naturelles ment les sucs qui en émanent; une fontaine (1) (1) La fontaine des Grands Champs. 486 Topographie. dans le fond du vallon; une autre fontaine (2) dans le bois, peu éloignée et plus abondante; un ruisseau prenant sa source au pied de la mon- tagne, qui, lorsqu'elle étoit couverte d’épaisses : forêts vieillies par le temps, fournissoit assez d'eau pour faire tourner plusieurs moulins , et remplir plusieurs étangs , Mais qui n'a de cours aujourd’hui que pendant l'hiver; devant le vil- lase, au milieu du vallon, une prairie qui se prolonge jusqu’à la Marne, à une lieue de dis- tance; deux riches côteaux qui bordent, sans in- terruption, le vallon et la prairie, et terminent la vue au midi et au levant; une douzaine de vil- laces, formant sur la côte un demi-cercle dans l'éloignement le .plus rapproché. Tels sont les objets dont l’ensernble rend en effet la situation de Coubron iufiniment pittoresque. Tout intéresse le solitaire, et dans son ermi- tage et au dehors, à deux et trois lieues à la ronde. Au dedans, un choix d'arbres et d'ar- bustes, tous utiles, des quatre parties du monde: au dehors ; des bois plantés et percés comme des jardins ; des terreins produisant à leur surface tout ce qui est nécessaire à la vie, et renfermant dans leur sein d'excellentes carrières; des monu- mens rappelant debrillantes époques de l'histoire; (2) La fontaine de l'Érmitage, ou du frère Jean, Coubron. 487 enfin des lieux long-temps habités par des favoris d’Apollon et des Grâces, fixent tour à tour son attention et sa curiosité. Ainsi un aperçu des occupations du solitaire, présente à la fois une notice d'agriculture, de botanique , de minéralo- gie et d'antiquités. Agriculture. I. Son verger-potager , dans sa petite étendue, lui offre l’agréable et l’utile. Les quatre parties du monde semblent s'être réunies, pour flatter en même-temps sa vue, son odorat et son goût. Il parcourt ses arbres, ses arbrisseaux, ses ar- bustes, ses plantes, avec une reconuoissance mélée de joie; il étudie leur port, leur feuillage, leurs fleuraisons, leurs fruits. Ils forment sa so- ciété habituelle; il veille à leur culture ; il fournit à leurs besoins ; ils sont ses véritables amis. Ah! combien à chaque instant il applaudit aux tra- vaux des Diostoride , des Columelle , des Pline, des Gessner , des Bauhin, des ‘lournefort, des Jussieu, des Linnée , ét de tant. d’autres bienfai- teurs du genre humain, qui sont parvenus à donner à la connoissance des végétaux, c'est. à-dire, à la science, à-la-fois la plus vaste et la plus compliquée, et l’une des plus intéres- santes et des plus nécessaires, cette noble sim- 488 Topographie. plicité et cette clarté sublime qui sont le carac- tère du génie et le sceau de la nature. Rendons d'abord hommage à l'Aste, à qui la réunion de toutes les températures et des con- trées les plus fertiles de la terre , a procuré dans tous les temps l'avantage unique de produire des plantes de toute nature, et spécialement les fruits les plus succulens et les plus délicats, les légumes les plus nourrissan: et les fleurs de l’o- deur la plus suave et des couleurs les plus vives. L’Arménie a fourni au solitaire, l’abricotier, l'alsergier , le figuier. | L,/Asie mineure lui a fourni le cerisier, le bi- garreautier , le griottier , le guignier ,le mürier, l'olivier, le melon, le haricot, le pois, la lentille le framboisier, le chèvre-feuille, le laurier des poètes, le baguenaudier du Levant, le laurier rose. La Syrie lui a fourni le prunier de Damas, le lys, la jacinthe, l’anémone, le rosier muscade ou de Damas, l’althæa des jardins , l'orme de Sama- rie , le sycomore , l'hyssope. Le Mont Liban, le cèdre, le sorbier des oi- seaux , le groseiller vineux. L'Arabie Heureuse, cet Yemen, si renommé pour sa continuelle verdure et sa prodigieuse fé- condité , a produit au solitaire le muscat blanc, le muscat rouge, le rosier des quatre saisons, le Coubron. 489 rosier à cent feuilles, le buisson ardent ou le buisson de Moyse. La Perse, le pêcher, le fraisier , la tulipe, le lilas, l'amandier nain. L’Zndostan , le maïs, le cioutat, la menthe, le rosier canelle , la tubéreuse , le jasmin , le pe- tit baguenaudier. La Chine, l'oranger , le glédistia épineux. Le Japon, le myrte, le catalpa, l'érable jaspé, le vernis. La T'artarie, le Lonicera T'atarica. La Sibérie, l'arbre aux pois, le caragana à quatre feuilles , le fusain galeux , le pommier hy- bride, la quinte-feuille en arbre, le spiræœa à feuilles crénelées , le spirœa à feuilles de saule , le spiræa à feuilles de sorbier. L'Arrique, que le jardin des hespérides et la terre atlantique ont rendu à jamais célèbre, con- tribue aussi au bonheur du solitaire. Les Iles Açores lui ont fourni le jasmin des ÀAcores. Les Côtes de Barbarie , le grenadier à fruits, l'amandier, l’acacia rose de Tunis, l'amélan- chier de Mauritanie , le géranium. La Cüte de Guinée, le millet, Madagascar , la pervenche, L'Ethiopie, l'arbre à cire. &90 Topographie. L'Ezypte, le raisia d'Alexandrie, le laurier alexandrin. L'Amérique, cette terre vierge qui possède, comme J’Asie, toutes les températures, et qui, comme elle, est susceptible de toutes les pro- ductions , a fourni au solitaire une ample mois- son de richesses. Le Pérou, ia belle de nuit, ou merveille du Pérou. La Guyane, le rosier carné. La Caroline, la Clethra alnëfolia. La l’irginie le gledistiatriacanthos , le padus virginiana , l'épine ergot decoq, le cèdre rouge, l'Andromeda caliculata. L' Acadie , le lonicera diervilla , le tulipier. La Nouvelle Jersey , son thé , que ses effets cu- ratifs ont rendu fameux. Le Canada, le cornouiller sanguin, le viorne à feuilles de poirier , le pin du lord Weymouth. Le nord de l'Amérique, l'épine à feuilles de prunier , le spiræa à feuilles d'osier , l'indigo bâ- tard , le viorne à feuilles dentées, le cornouiller à fleurs bleues , le cornouiller à feuilles alternes, le lonicera symphoricarpos , le staphilea à trois feuilles , l’2ypericum prolificum. L'Eurore, dont le climat tempéré semble le plus favorisé de la nature, a complété de ses dons les jouissances du solitaire. Coubron. A91 La Zaponie lui a fourni le /ychnis, œillet de Dieu. La Suède, le groscilier. La Hongrie, le fusain à larges feuilles. La Bohéme, l'angélique. L'Autriche, le cytise austriacus, le cytise velu. La Carinthie, la graine des teinturiers , dont les baies, non müres, sont de couleur jaune ou saffranée, mûres, d'un beau vert , et en novem- bre, de couleur écarlate. La Æollande , le rosier petite hollande. Les Alpes, le sapin, l'ébénier , le Daphne al- père, le lonicera cærula à fleurs bleues. La France, le pommier et le poirier , origi- naires des Gaules, le grand et le petit rosier de Provins , la rose de Meaux grand pompon, la rose de Bourgogne cramoisie , la giroflée , la ju- lienne , le thlaspi. Les Pyrénées , la sabine. L'Espagne, le trifolium des jardins, ie genêt, le filaria à feuilles moyennes, L Jralie, le syringa de Véronre, l'alaterne ar- genté et le doré. La Corse , le raisin de Corse. L'Zsthme de Corinthe , le raisin de Corinthe et le cornichon blanc. L'Ile de Crète, aujourd'hui Candie, l’artichaut, le cyprès pyramidal , et le cupressus expansa. 492 Topographie. Enfin l’Europe, en général, lui a fourni le raisin de Madelaine , la carotte , l'asperge, le choux, le navet, la rave, la laitue, l'épinard, nos légumes usuels, la lavande, la mélisse , le thym, le serpolet, la véronique, ainsi que l’ar- rête-bœuf en arbre, le merisier à fleurs doubles, le merisier à grappes, le filaria à larges feuilles, le troëne. Placé, sous un ciel pur, au milieu de tant de productions de tous les climats, des glaces du pôle aux feux brülans de la ligne et des deux tropiques , le solitaire contemple la variété inf- nie des ouvrages de la nature : il admire le génie industrieux , l’active sociabilité de l'homme , qui dans tous les habitans du globe ne voit que des amis et des frères; qui pense que tout ce qui res- pire, tout ce qui existe, tout ce qui a été ima- giné , ne doit être employé qu’au bonheur com- mun et général ; qui naturalise en conséquence dans son pays les sciences, les arts , les animaux, les végétaux des quatre parties du monde, pour les nécessités et les agrémens de la vie. Planant ensuite sur le présent et le passé, il parcourt les grands événemens de l'univers ; les révolu= tions physiques , politiques et morales ; les conti- nens engloutis par les mers, les mers déplacées et devenues continens ; les hommes civilisés; l'agriculture découverte; les langues inyen- Coubron. 495 tées et perfectionnées ; la formation, l'accroisse- -mentet la chute des empires ; la poésie et l'élo- quence , les premières sciences de l'homme , por- tées presque d’abord à leur plus haut période ; la morale et l'étude du cœur humain approfon- dies ; l’art de conserver et de rétablir la santé soigneusement et avantageusement médité ; les phénomènes du ciel, de l'air et de la terre, observés et connus; les grandeurs mesurées et calculées ; les lois des corps célestes déterminées ; en un mot ce que les anciens et les modernes nous ont enseigné de plus important sur les deux hémisphères. Herborisation. IT. À dix pas de son ermitage, le solitaire trouve des bois charmans , les bois de Coubron, Mont-Fermeil , Clichy et Livry. Ils ont environ trois lieues de long , sur une demi-lieue de large. Des routes à perte de vue, entretenues comme les allées d'un parterre, les percent dans tous les sens. Ils couvrent, dans presque toute sa longueur , le haut de la montagne qui sépare Coubron et Livry, et qui rèsne du midi au nord-est, à peu près depuis Villemonble jusqu'à Pomponne. Aussi n'a-t-on sur la hauteur que d'admirables points de vue. Au couchant, l'œil se perd dans la magnifique vallée de Montmo- rency, etsur les riches plaines de Roissy, Mau- 494 Topographie. regard , Thieux, Compans et Mitry, depuis les montagnes de Sannoy , Ecouen, Mariel et Mont- méliant , jusqu'à Dammartin. Au levant , les re- gards ne peuvent se lasser de se promener surle beau bassin de la Marne , depuis Lagny, Torcy, Champs, Noisy le Grand , Chenevières et Saint- Maur, jusqu'aux ruines du château de Beauté (3). Le solitaire, désirant herboriser, pénètre dans l’intérieur de la forêt. Une variété infinie l'enchante et le distrait, Des bois touffus, quel- ques clarières, de fréquens monticules qui ne semblent élevés que pour former autour d'eux et à leurs pieds d'épaisses et profondes solitudes, des sources abondantes (4), doat les unes don- nent naissance à des ruisseaux limpides, et les autres forment sur le haut de la montagne un assez vaste archipel (5), partout la végétation la plus active et la plus diversifiée. (3) Personne n'ignore que le château de Beauté, construit par Charles V dans la plus belle exposition, entre Nogent-sar- Marne et le bois de Vincennes, a été donné par Charles VIL à Agnès Sorel, fille, avec quatre frères, de Jean Soreau, de Fromenteau en Touraine , à deux lieues de Chätillon- sur-Indre. (4) Les sources de l’Ermitage et de N£.-D°.-des-Anges, (5) Les sources qui, sur le plateau de Montfermeil, for- ment une grande pièce d’eau, parsemée de sept ilots , qu! rappellent le gouvernement des Sept-Iles. Si para licet cormpornere INASTUSe Coubron. 4g6 Au milieu de tant de merveilles, le solitaire, son Virgile à la main, trouve dans les descrip- tions champêtres, et des églogues et des géor- giques , une source inépuisable de plaisirs : tout lui retrace la vérité des peintures du poëte: chaque site, chaque plante lui rappelle les vers harmonieux du ‘Théocrite et de l'Hésiode de Mantoue: à chaque pas il croit entendre Îles chants de ses bergers. Ici une touffe de coudriers et d’ormes invite le solitaire à se reposer à leur ombre, avec Mé- nalque et Mopsus. Hic corylis mixtas inter consedimus ulmos ? Fo. 5. Là , cet orme élevé lui fait plaindre , avec Mé- libée et Tytire, la gémissante tourterelle. Nec gemere aërià cessabit turtur ab ulmo. Ægl. 1. Plus loin , assis au pied d'une roche, il revoit toujours avec une surprise mêlée de crainte, la chèvre broutante, suspendue pour ainsi dire à la cime. Viridi projectus in antro, Dumosà pendere vider de rupe capellam. Eol, 1. Sur cette espèce de tertre, il voit Tytire prenant le frais et chantant Amaryllis à l'ombre de ce hêtre immense; le Doyen , encore plein de yie , de la forêt: Tytire, tu patulæ recubans sub tegmine fagi.... Ægl. à. 496 Topographie. A midi, au fort de la chaleur, ils’enfonce sous ces chènes antiques Dont l'ombre au loin descend dans les sombres vallons. Deuriee. AËstibus at mediis umbrosam exquirere vallem : Sicubi magna Jovis antiquo robore quercus Ingentes tendat ramos, aut sicubi nigrum Hicibus crebris sacrâ nemus accubet umbrä. Georg. lib. 3, Dans une fraiche soirée , la pâle violette , le pavot assoupissant , le blanc narcisse , le noir vaciet , le souci doré, le romarin, l'aneth , mille herbes odoriférantes, lui montrent le charmant bouquet de l’ingénue et franche Naïs: Tibi, candida Naïs, Pallentes violas et summa papavera carpens, Narcissum et florem jungit bene olentis anethi.! Tum casia, atque aliis intexens suavibus herbis : Mollia luteolà pingit vaccinia calhà. ÆEgl. 2. , Le solitaire se détourne : il aperçoit un groupe de coudriers; il prête l'oreille : il entend les chants mélodieux de Corydon et de Tyrsis. Phyllis préfère le coudrier! Le peuplier, quoi- que l'arbre favori d'Hercule, la vigne, quoique chère à Bacchus, le laurier. quoiqu'énorgueilli de la prédilection d'Apollon, le myrte, quoique les délices de Vénus, tous doivent le céder au coudrier Coubron. 497 coudrier , tant que le coudrier aura le bonheur de plaire à Phyllis. Populus Alcidæ gratissima, vitis laccho, Formosæ myrtus Veneri, sua lauræa Phœbo. Phyllis amat corylos : illas dum Phyllis amabit, Nec myrtus vince: corylos , nec laurea Phœbi, ÆEgl. 7. Des hyèbles lui font voir le dieu de l'Arcadie accourant à la fête, le visage barbouillé du jus sanglant de la plante et de Vermillon. Pan deus Arcadiæ venit, quem vidimus ipsi Sanguineis ebuli baccis minioque rubentem. Ægl. 10. Tout auprès, une source fraiche , un vert et tendre gazon , un bosquet ombragé des mains de la nature, attirent le solitaire. Il est épris des charmes de ce neuvel Eden ; il invoque Lycoris, il lui offre l'hommage de sa vie toute entière, dans ce lieu fortuné. Hic gelidi fontes , hic mollia prata, Lycori: Hic nemus. Hic ipso tecum consumerer ævo. Egl. 10. Aucun auteur n’a parlé des plantes avec plus de grâces et de vérité, que Virgile: il anime, il vivifie, il fait aimer ce règne brillant de la nature. En même tems il émeut et charme le cœur et l'esprit. Malheur à celui qui ne fait pas ses délices de la lecture de ce poëte de l’âme et du sentiment, de ce poëte, le Racine des Latins. Tome FT. Ji 498 Topographie. Minéralogie II. Si le sol de Coubron et de ses environs produit en général, pour la consommation du pays, d'excellent froment et un vin franc et droit, quand il est fait avec soin; s'il produit de plus de très-bons fruits et de très-bons légumes, en assez grande quantité pour être apportés aux marchés de Paris, et faire l’aisance du cultiva- teur, on y trouve encore , en quantité plus que suffisante pour le pays, diverses sortes de car- rières propres aux ouvrages de l'art! Coubron, Vaujour, Carnetin, Bordeaux et Chelles contiennent des lits de plâtre, étendus et de bonne espèce. Les carrières de Carnetin ont cela de particulier , qu'elles produisent des crys= tallisations curieuses. Dans une des carrières de Vaujour, il s’est formé une fontaine plâtreuse et séléniteuse. ‘ Mont-Fermeil, Gagny, Bordeaux, Montjay et Annet, abondent en carrières, de bonnes pierres meulières. Au Pin, à Brou, à Vaires et à Chelles, on trouve beaucoup de pierres coquillières. On remarque , le long des bords de la Marne, au-dessus et au-dessous de Lagny, dans un es- pace de plusieurs Jicues, des coquilles fossiles roulées, et des cailloux roulés demi - trans- pare ns, Coubron. 409 Le canton possède aussi des terres propres à faire de la tuile et de la brique. On en fabrique à Mont-Fermeil , qui sont estimées. A ntiquités. IV; Ce qui achève de répandre de l'agrément sur l'habitation du solitaire, c’est qu’elle est en- tourée de lieux célèbres, ou par des traits d’his- toire ; ou par des personnages distingués qui y ont fait leur demeure. - Les rois de la première et de la seconde race ont eu un château à Coubron, La forêt de Bondy qui, dans les premiers temps, couvroit tout le pays , les y avoit appelés. Ils avoient fait construire dans le hameau de Montauban, dé- pendant en partie de Coubron, une chapelle, dans laquelle ils entendoient la messe avant d'entrer en chasse. Au douzième siècle , lors de l'établissement des communes, le terroir de Cou- brou fut concédé à un chevalier nommé Beron , Bero, qui donna son nom au terroir curtis Be- ronis. Il défricha le pays, et transmit sa pro- priété à sa famille , qui en a joui pendant environ une centaine d'années. Vers la fin du treizième siècle, Coubron est rentré dans la main de nos rois, qui l'ont aliéné pour toujours au commence cement du quinzième siècle. Depuis , Coubron a passé à la famille de Nesmond, à madame Fortin 500 Topographie. de la Hoguette, maréchale de Nangis, et à la famille Hocquart. Montjay, Mons-Gaudü qu Ga, qui fait le principal point de vue du solitaire, étoit une des plus belles terres du pays. Sa mouvance ‘étoit considérable ; son château, sur le sommet d'une haute montagne, étoit une place forte. Montjay a soutenu un grand nombre de sièges, principalement sous le régne de Charles VI. Sa tour (1) fameuse servoit encore de défense en 1430. Elle étoit un des télégraphes du temps ; elle répondait à la tour de la Queue, en Brie, qui répondoit à la tour de Monlhery, qui ré- pondoit à celle de Pocancy, entre Arpajon et Etampes. On peut juger de l'importance de la Terre de Montjay , par les seigneurs qui l'ont possédée, pour ainsi dire, dansla même famille, (6) La tour de Montjay, dit l'abbé Lebeuf dans son His- toire du Dioc. de Paris, t. VI, « n'est plus qu'une espèce » de demie tour, dont ce qui reste est élevé de 12 à 14 » toises environ. On y voit des marques qu'il y a eu deux » ou trois voûtes les unes sur les autres, ce qui formoit » plusieurs étages ; et qu'il y avoit des galeries en haut, pra- » tiquées dans l'épaisseur du mur, pour découvrir de quel » côté venoient les ennemis. » Les révolutionnaires ont coupé perpendiculairement la partie de la tour qui regarde le levant. Mais n'ayant trouvé, ni trésors, ni même de bone matériaux, ils ont abandonné l'ouvrage. Coubror.. 501 par des mariages successifs, depuis le commen- cement du douzième siècle, jusqu’en 1610, que Ja famille de Gesvres, qui en jouit encore , en a fait l'acquisition. Gaucher de Chatillon en étoit seigneur en 1130; Archambault de Bourbon en 1227 ; Eudes de Bourgogne en 1255; Jean de France, l'un des fils de St. Louis, en 1260; Robert, comte de Flandre, eu 1272; Frédéric de Saluces, en 1370; Amaury d'Orgemont, er 1400; Guillaume de Montmorency, en 1478; François d'Angennes de Rambouillet, en 1573; enfin la famille de Gesvres, en 1610, jusqu'à nos jours. Clichy , Clippiacum superius, a eu un château des rois de la première et de la seconde race, ainsi que Clychy-la-Garenne, Clippiacum. in- ferius. Il a passé immédiatement à l’ordre des Templiers , auquel a succédé l’ordre de Malte, jusqu'à la révolution. Le solitaire, né dans le jardin de la France , ne peut que faire des stations agréables à Clichy, dans l'habitation de la belle Gabrielle , sa compa- triote , née au château de la Bourdaisière , a trois lieues de Tours. Son clavecin, enrichi d’un ta- bleau de l'albane de son bon temps, y est con- servé précieusement par M. Greffulhe, pro- priétaire actuel , et M. Brongniard , architecte célèbre, dont nous parlerons plus bas, a sans 5o2 Topographie. doute été inspiré par les grâces et par la beauté, lorsqu'il a décoré les appartemens et les jardins de cette charmante habitation ; mais surtout lorsqu'il a créé cette £rotte, on peut dire ro- mantique , qui le dispute à la fontaine de Vau- cluse, et cet archipel, dont les îles, embellies par des platanes et des saules orientaux , nous rappellent ce que les mers de la Grèce ont ja- mais renfermé de plus délicieux. Courtry St°.-Fère, quidans sa situation riante et fertile est le lieu le plus proche de Coubron , a été successivement possédé jusqu'à ce jour par les maisons d'Angennes de Rambouillet, de Cas- tries , de Cossé, de Castella , de Mortemar et de Sainte-Fère, À l'égard de Chelles, on n'en fera qu'une simple mention, Son château et son abbaye sont (Top connus, pour en répéter même une courte notice. Quant aux terres les plus voisines qui ont ap- partenu à des hommes qui ont rendu des services à leur siècle, ou qui l'ont illustré, le solitaire s'est empressé de les connoître. Il a rendu ses premiers devoirs dans la terre de Fresnes , à l'immortel d'Aguesseau , l'oracle du barreau , le flambeau de la magistrature , un des Solon de sa patrie. Le solitaire a admiré dans la chapelle du château de Fresnes, l'exé- Coubron. 503 cution en petit du modèle que François Mansart avoit dessiné pour l'église du Val-de-gräce, à Paris, modèle dont l'intrigue a privé les arts d’une exécution en grand. Rien de plus agréable au coup-d'æil , rien de plus noble et de meilleur goùt que cette chapelle. En mème temps qu'elle inspire les plus vifs regrets, elle est une leçon, toujours subsistante, pour maudire l'intrigue, et chercher par tous les moyens imaginables à en déjouer les exécrables complots. La T'erre du Pin-a mérité un hommage du so- litaire. Elle a appartenu , pendant environ qua- rante ans, à la fin du aix-septième siècle. et au commencement du dix-häitième, à Aimé Severt, savant avocat , père de M. Aimé Severt, mort doyen du parlement de-Paris. , La gloire toute récente que le célèbre Doul- cet , inscrit sur le tableau des avocats à la date de 1735 , s’est acquise par sa probité , ses vertus sociales , et sa profonde éloquence, fait visiter avec empressement sur les bords d'un joli ruis- seau,au dessous de Lagny, laterrede Vau-deuil, Vallis Dicili, que cetillustre orateur a possédée jusqu'a sa mort ,le 21 janvier 1766, à l'âge de quarante-neuf ans , et quiappartient aujourd'hui à sa famille. M. Doulcet a laissé, entre autres enfans , tous infiniment estimables , un fils aîné qui, dans la même profession, marche digne- ment sur les traces de son père. 5o4 Topographie. On ne peut voir aussi tout auprès , sans éprou- ver d’agréables souvenirs, la terre de Bucy Saint- Martin, Boscus Sancti Martini, acquise vers 1550 par Pierre Versoris, qui fut, dit Loysel, un des premiers avocats de son temps ; l'arrêt d'appoin- tement qu'ilobtint en 1565 pourles jésuites contre l'université de Paris, défendue par le fameux Etienne Pasquier, fit le plus grand honneur à ses talens. Versoris porta la parole pour le tiers- état aux Etats de Blois en 1576; il étoit chef du Conseil de la Maison de Guise, sans y avoir néanmoins , dit Loysel, aucune part ni commu- nication , que de ses affaires domestiques. Il mourut de douleur en 1588, le lendemain du jour où il apprit la câtastrophe de Henri de Lor- raine , duc de Guise. De Pierre, dit Loysel, sont venus tous les V'ersoris. Ils ont conservé la terre de Bucy-St.-Martin, et ont continué d'il- lustrer le barreau de Paris pendant environ deux cents ans. Leur nomde famille n'étoit point Versoris dans l'origine, mais Letourneur. Il avoit été latinisé par Jean , grand oncle de Pierre, docteur de l’université de Paris , connu par des ouvrages théologiques, qui ne sont pas sans mérite. On s'arrête au-dessous de Bucy-St.-Martin’, à Conches, pour y révérer la mémoire d’un ami intime de M. de Lamoignon de Malesherbes, de Coubron. 505 feu M. Defays, Conseiller, très-considéré, à la Cour des Aides de Paris. Au retour , le solitaire se sent pénétré deres- pect en approchant de la terre de Pomponne. Elle a été possédée, pendant quatre générations, par les descendans d'Antoine Arnauld, célèbre avocat au parlement, qui aima mieux, disent Abel de Sainte Marthe et Loysel , demeurer au palais en qualité d'avocat, que de prendre la charge d’avocat-général de M. Marion , son beau- père , et une place dans le Conseil du roi, l'une et l'autre lui ayant été offertes. Pomponne étoit en- tré dans la famille Arnauld par le mariage du recommandable Robert Arnauld d’Andilly, l’un des vingt enfans d'Antoine , avec l’héritière de la terre. Pomponne a passé au fils de Robert, Si- mon Arnauld, marquis de Pomponne , célèbre ministre d'état , illustre par sa probité , l'étendue de son génie, et sa capacité dans les affaires. Simon étoit petit-fils d'Antoine , neveu du doc- teur Arnauld et de la mère Angélique, abbesse de Port-Royal, et cousia issu de germain d’An- toine Lemaistre , avocat des plus renommés , et de Louis Isaac Lemaistre de Sacy. Que de titres de gloire ! Il suffit de prononcer tant de noms célèbres ! Leurs ouvrages, lesservices qu'ils ont rendus à la religion , à l'Etat, aux sciences/et 506 Topographie. aux lettres, et la mémoire de leurs vertus, ne périront jamais ! M. de Sacy est mort en 1684 à 71 ans , dans le château de Pomponne, où il s'é- toit retiré sur la fin de ses jours. Lors de la des- truction de Port-Royal, le fils de Simon obtint que les ossemens de Robert Arnauld d'Andilly, son ayeul, et d’autres de la même famille , qui y étoient inhumés, seroient transportés à Pom- ponne. C'est également avec vénération , que le soli- taire va visiter la terre de Vaujour, Wallis jo- cosa. Elle a appartenu à Jacques Amyot. Grâces et honneur soient mille fois rendus au traduc- teur immortel de Théagène et Gharyclée, de Plutarque, et de la pastorale de Longuüs; à l'homme d'Etat, à l'ambassadeur , à l'auteur de cette protestation si hardie et si judicieuse au concile de Trente ! La terre de Vaujour a appartenu depuis suc- cessivement à trois Scarron, conseillers au par- lement. Elle a joui de l'enfance et d’une partie de la jeunesse de Paul Scarron, l'illustration de sa famille; le solitaire fait avec joie et douleur, des remercimens à l’auteur du roman comique , de Jodelet et. de. Dom Japhet d'Arménie; des complimens de condoléance à l’un des esprits les plus originaux et les plus gais, au milieu des \ Coubron. 5o7 infirmités et des souffrances les plus cruelles ; enfin des félicitations au mari de madame de Maintenon. M. de Mestre possède aujourd’hui Vaujour. Mais c’est à l'abbaye de Livry , que le soli- taire renouvelle le plus souvent ses plus agréa- bles jouissances. Toutes les fois qu'il la visite , il parcourt , le cœur saisi , tremblant d'admiration, tous les étages , toutes Les pièces , toutes les pro- menades , de ce pavillon fortuné , véritable mo- nument à conserver à la postérité , bâti et occu- pé pendant tant d’années par une des merveilles de son siècle, par la meilleur des mères, par ce prodige de naïveté, d'enjouement, même de génie, nous ne craignons pas de le dire, qui ca- ractérisent ses lettres , uniques dans leur genre, sans modèle et'sans égales , par madame de Sévi- gné. Elle a passé trente étés dans cette retraite heureuse. Tous ont été consacrés à la tendresse maternelle , au bon goût, à la plus saine littéra- ture , à l'amitié. Il n'est point de plaisir sans peine ! Le solitaire recherche partout ces alléso- ries , ces devises, ces sentences , pleines d’es- prit et de sentiment, gravées avec tant de soin sur l'écorce de tous les arbres. Hélas! nous avons perdu madame de Sévigné en 1696, cent sept ans ont tout fait disparoitre ! | Le solitaire rentre dans sa chaumière ; il y 508 Topograplue. retrouve des agrémens toujours nouveaux ; il les doit aux talens , aux connaissances , au bon goût ; il en fait hommage à M. Brongniart, membre de l’ancienne Académie d’architecture, son camarade dé classes; et à M. Cels, membre de l'Institut national de France. JR Ep: Ce pare à IN. B. On renvoie, pour de plus amples détails sur Cou bron et sur les communes qui l’environnent ;, aux tomes VE et VII de l'Histoire du Diocèse de Paris, par M. l'Abbé Lzsnur, de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres. BIOGRAPHIE, LETTRE & M. Mizzirn, Membre de l’Institut, etc., Rédacteur du Magasin ÆEncyclopédique. arms a écrit une longue lettre apologé- _tique de ses principes au P. de la Tour; mais il n'a point parlé de lui dans son catalogue des écrivains célèbres , sous Louis XIV et sous Louis XV. M. l'abbé Sabatier de Castres, et M. Palissot , ont oublié d'en faire mention dans Jeurs dictionnaires. C’est pour réparer ces omis- sions que je vous prie d'accueillir les deux articles que je vous adresse. Auguste DE LA Bouisss. Sur le P. ne A Tour, Jesuite. Naître , croître , s’agiter quelques momens ét mourir ; tel est l'abrégé historique de l’exis- tence de la plupart des hommes. La parole doit se taire sur eux; mais elle doit rappeler à la reconnoissance des peuples, ceux qui consacrè- rent leur vie à d’utiles découvertes, ou qui 510 Biogräplie. l’embellirent par de belles actions. Oui, que pour l'adulation elle reste muette, mais qu'elle se fasse entendre pour le mérite et la vertu. Jean-Baptiste de Bonaffos , de la Tour , naquît à Mont-Réal , le 12 avril 1712. Ilétoit destiné au service ; mais son père mourut, et sa piété lui fit préférer d'entrer au noviciat des Jésuites à l'époque ou il passa , âgé de 20 ans , docteur en théologie ; deux ans après il fut envoyé au collège de Castres, d’où il revint peu après à Tou- louse professer la réthorique. Les Jésuites pré- sidoient alors à l'éducation. « L'Europe sa- « vante ( dit M. de Chateaubriant ) a fait dans « eux une perte irréparable. L'éducation ne « s'est jamais bien relevée depuis leur chute. « Ils étoient singulièrement agréables à la jeu- _« nesse ; leurs manières polies’ ôtoient à leurs « leçons, ce ton pédantesque qui rebute l’en- « fance. Comme la plupart de leurs professeurs « étoient des hommes de lettres recherchés « dans le monde, les jeunes-gens ne se croyoient « avec eux que dans une illustre académie. « Que peut-on reprocher aux Jésuites? Un peu K« d'ambition si naturelle au génie. Il sera tou- « jours beau , dit M. de Montesquieu , en par- « Jlant de ces Pères, de gouverner les hommes , « en les rendant heureux. Pesez la masse du D le mc 22 Den cafe ns CR nu Latour. bi « bien que les Jésuites ont fait ; rappelez- « vous les écrivains célèbres qu'ils ont donnés « à la France , ou qui se sont formés dans leurs « écoles, les royaumes entiers conquis à notre « commerce par leur habileté, leurs sueurs et « leur sang; les miracles de leurs missions au « Canada, au Paragay, à la Chine, et vous « verrez que le peutle mal dont on les accuse « ne balance pas un moment les services qu'ils «< ont rendus à la Société. » * Dans le nombre d'hommes instruits que le P. de la Tour a formés, on compte Casthillon ; Montaigut qui est mort victime de la révolution (1), Marmontel et Dom Despaulx. Dom Despaulx! homme rempli de vertus, de savoir et de grandes qualités ; Lénédictin de la congrésation de S. Maur, placé à la tête de l'école Royale et militaire de Sorrèze, et au- jourd'hui directeur d’un Lycée (2). (1) Il étoit fils de cette madame de Montaigut , qui fut maîtresse des jeux floraux de Toulouse, et dont on a quel- ques vers agréables. (2) J'ai saisi avec une satisfaction bien douce l'occasion de payer à Dom Despaulx le tribut de ma gratitude. Lors- que j'arrivai à Sorrèze, il voulut être mon préfet, en re- connoissance des leçons qu’il avoit reçues de. mon grand oncle; dont il s’honoroit d’être l'élève. 51a Biographie. Le P. de la Tour fut nommé préfet de la congrégation des jeunes-gens. Son caractère, son honnêteté, sa douceur, lui attirèrent la con- fiance générale. Souvent il donnoiïit pour eux des retraites , et plusieurs de ses auditeurs pas- sèrent d’une extrême dissipation à une vie ré- gulière. Il eut en outre la direction des pro- fesseurs des basses classes. Tant d'emplois réunis et l’activité de son zèle altérèrent sa santé. II fut envoyé par ses supérieurs à la maïson pro- fesse pour s'y rétablir. Mais on s’aperçut bien tôt que le travail lui étoit nécessaire, et il fut placé au grand Séminaire de Toulouse, en qua- lité de supérieur. Il occupoit ce poste depuis 4 ans, lorsque le 15 avril 1765, il fut forcé d’en sortir, pour obéir à l'arrêt du Parlement qui supprimoit la société des Jésuites dans toute l'étendue de la juridiction. Ce fut surtout à cette époque qu'il ft briller sa douceur et son entière soumission aux décrets de la Providence. Sa résignation fut admirée de ceux mêmes qui détestoient son ordre et qui oublioient tout ce que leur devoit la religion, les belles-lettres et l'état. Les mêmes magistrats qui avoient ordonné la des- truction des Jésuites, s'empressèrent de lui of- frir un asile; il les remercia obligeamment et alla Le P. de Latour. b13 alla se réunir à sa famille, dont il étoit aussi vénéré que chéri. A peine jouissoit-il dans son seiu des consolantes douceurs de l'amitié, qu'il fut forcé de quitter sa patrie. Suplice dou- loureux: obligation cruelle!..... Il se rendit dans le Comtat d'Avignon où il fut chargé de diriger la paroisse de Boulaine. Le chapitre $e l’associa en lui donnant un canonicat, et il passa 5 ou 6 années, préchant toujours d'exemple, et toujours aimé. Les Jésuites ayant obtenu de rentrer en France, le P. de Latour profta de cette 0c- occasion pour rejoindre son frère, doué comme lui de toutes Les vertus; mais il s'éloigna bien- tôt de Mont Réal , navré &e ne pouvoir y.exer- cer son ministère apostolique, par la diversité d'opinions qui existait entre l'Éyéque de Car- cassonne (M. de Besons) et lui, Il céda aux instances réitérées de M. de Langles, Évêque de S. Papoul, et fut porter la parole de Dieu dans son diocèse. De là il Parcourut ceux de Pamiers, de Mirepoix, d'Aach, pour y don- ner des missions. La révolution n’a pas en- tièrement effacé la trace du bien qu'y opérè- rent ses courses évangéliques. Enfin épuisé de fatigues, accablé des longs jours de la douleur, il revint dans sa ville natale, et y mourut âgé de 64 ans, 11 mois, le 11 mars 1777: Tome FT. Kk 514 Biographie. laissant le souvenir de ses vertus , de ses bien- faits et de ses talens (1). Aus. de L. Sur les ouvrages du P. vx LA Tour, Jésuite. Je ne sais pourquoi la muse lyrique ne s'énor- gueillit pas des cantiques du P. de la Tour. Serait-ce parce qu'ils sont livrés à l'enfance et chantés dans tous les villages ? Les fables de La Fontaine ne sont-elles pas tous les jours récitées par des petits perroquets de sallon, sans rien perdre de leur mérite ? On m'objec- tera : ou que ces cantiques ont toujours paru anonymement, ou qu'il y a de fortes négli- gences dans plusieurs, et que d’autres sont très-foibles. Je le sais: mais si l'auteur n'a pu consacrer un long loisir à ses enfans de son zèle et de sa ferveur , on y voit souvent briller une imagination riante, une morale aimable, une sensibilité douce et chrétienne. Occupé du soin de remplir fidèlement de nombreux (1) Avant que la societé des Jésuites , ceste société st lé- gèrement condamnée ct si durement abolie, suivant l’ex- pression de MarMonTEL, fat détruite, VozTarre adressa au P. de Larour une lettre pleine d'estime et de tendres sentimens. Elle se trouve dans le T. 4 des Mélanges littéraires , page 89 du 64°. volume de l'édition in-12, publiée par BEaumar- cæais. On y voit la reconnoïssance de VoLTaRE pour ce corps célèbre qu’il chérissoit , et qu'il eût dû toujours res- pecter. Le P. de Latour. 515 devoirs, il n'a pu s'appliquer à faire un chef d'œu\re de son livre. Tel quil est, je pense qu'il mérite quelque estime; et l'on peut le citer sans honte à coté des œuvres sacrées de L. Racine et de Pompignan. Du vivant du P. de la Tour, des libraires associés imprimèrent deux volumes de ses canti- ques, et deux autres de cantiques rassemblés et corrigés par lui. À sa mort , S>s papiers furent dispersés et volés. On a perdu des changemens très - considérables et des hymnes nouvelles, travail dont il sanctifiait ses retraites. La seule chose conservée de ses manuscrits, ce sont des notes pleines d’érudition sur la ville de Moit- Réal sa patrie. Quant à ses sermons, ils sont peu à regretter : non qu'il ne préchât avec succès , mais il avait adopté la méthode déve- loppée par Fénélon, dans ses dialogues sur l’éloquence de parler d'après l'inspiration. Mais si ces canevas sont perdus , nous pos- sédons une ancienne édition de ses cantiques onctueux et faciles, dont plusieurs furent com- posés dans le joli vallon du château de la Tour. Dans celui sur les béatitudes on trouve ces strophes superbes. Mais malheur à l'homme avide Qu’éblouit l’éclat de l'or, Et dont le cœur toujours vide Fait son dieu de son trésor. BE : Biographie. Les seuls biens, le seul salaire Qu'aura sa cupidité ; Sont des trésors de colère Qu'entasse l'éternité. Maudit l'homme sanguinaire Qui dans sa féroce humeur, Du venin de la vipère Exhale au loin la noirceur ! Contre lui-même implacable , Et de lui-même abhorré , Par sa rage insatiable Son cœur sera dévoré. Bienheureux l'homme modeste » Qui, dans son néant, confus» Va loin du jour qu'il déteste Couvrir d’oubli ses vertus. Le seul juge de la gloire, Aux grands jours de l'équité, Viendra mettre à sa mémoire Un sceau d'immortalité. Ailleurs on lit ces stances SuT le sort du juste en contraste avec celui du mondain. Le sort du juste est bien plus désirable ; De son bonheur rien n'arrête le cours. Toujours content, Son CŒUT goûte toujours La pure joie et la paix véritable. Ses jours pour Jui ne sont que d'heureux jours. À tout revers son âme est toujours prête Et son esprit n'est jamais agité. Tous les efforts de l'enfer irrité, Tous les malheurs rassemblés sur sa tête N'eltèrent rien de sa tranquillité. Le P. Latour. 517 Chéri de Dieu, toujours à Dieu fidèle, Toujours constant à l'aimer à son tour, Des saints trésors qu'il gagne chaque jour Il enrichit la couronne immortelle Que le Seigneur réserve à son amour. Pour les pécheurs la mort si redoutable S'offre à ses yeux sous des traits de douceur : Rempli d'espoir, sans trouble, sans frayeur; Il meurt tranquille, et d'un sommeil aimable, Il passe au sein de son Dieu créateur. Voici un cantique très-court et plein de grâce. On croiroit entendre la muse de Ti- bulle, si un amour céleste n'inspiroit le poëte. Non , non; l’inconstance volage Ne pourra plus rien sur mon cœur. Jusqu'au dernier des instans de mon âge, Je veux qu’il soit sans partage au Seigneur. Jusqu'ici ce cœur trop coupable Vers mille objets a porté ses désirs. Il est temps que le seul aimable Ait pour lui seul tous mes soupirs. Dans un Noël il dit à ceux qui gouvernent, en parlant du Christ : Vous que la grandeur environne, : Monarques , accourez la soumettre à ses pieds. Plus devant lui vos fronts seront humiliés, Plus vous releverez l'éclat de votre trône. Nous terminerons ces citations, que nous pourrions multiplier d'avantage sans crainte 518 Biographie. d'offenser le goût , par les paroles qu'il adresse aux fonts de baptême. Fonts sacrés où j'eus l'innocence, Temple heureux , divins monumens, Soyez témoins de mes sermens, Vous le serez de ma constance. Je voudrois louer ces diverses passages comme ils le méritent ; malheureusement, je ne sais quelle délicatesse me force à m'en abstenir. Doit-on rougir de chanter ce qu'on aime ? BERNARD. J'ose espérer du moins qu'on ne me blâmera pas d'avoir cédé au plaisir de rappeler l’exis- tence de ces charmans ouvrages et d'en nom- mer l'arteur. Par le même. N. B. Pag. 511, lig. 14, c’est par erreur qu’on a placé le nom de Marmontel au nombre des hommes formés par le P. de Latour. MÉMOIRE Sur la position des Villes et des Pays qu’habitoit PHINÉE, fils d’Agénor. + fe — Avcux point d’antiquité n'a peut-être été plus discuté , et cependant rien n’est encore resté plus obscur chez les savans et les géographes mo- dernes , que la position de la ville qu’habitoit, ‘et du peuple que gouvernoit Phinée , à l'époque de l’expédition des Argonautes. Ainsi Gyllius (1) la place entre Sclétrine et le fleuve Myrléanus, sur la côte européenne du Bosphore : Tournefort (2) la met aussi en Europe, à Mauromolo , vers l'entrée du Bosphore, en quittant les Cyanées, et il croit retrouver dans Belgrade l’ancienne Salmydesse : Apollodore (3) et Diodore de Sicile (4) ne désignent le pays de Phinée que sous le nom générique de Thrace, et le premier fixe sa demeure à Salmydesse, ce qui fait croire au (1) De Bosphoro Thracio, lib. 2, p. 243. (2) Voyage au Levant , tom.2, pag. 151, 154. (GE lac t9 Nain (4) L. 4, pag. 288, ed. Wesseling. 520 Antiquités. comte Carli (5) qu'il y avoit en Asie une autre ville de ce nom, dont les géographes n’ont point parlé : Étienne de Byzance (6), d'après le senti- ment unanime des Anciens , place Salmydesse en Europe sur la côte baignée par l'Euxin ; et c'est là aussi où la fixent Budrand (7) et d’An- ville (8) : le cardinal Flangini (9) croit encore re- trouver'en Europe la ville où les Argonautes visitèrent Phinée : M. Fawkes (10), traducteur anglais d’Apollonius, et M. Schneider (11) pen- sent aussi la retrouver à Salmydesse, dans la Thrace, européenne , au bord de l’Euxin : Schœnemann, dans sa dissertation sur la géo- graphie des Argonauies, couronnée à Gættingen en 1788, renvoie à Tournefort, et se dispense de traiter ce sujet}, qui lui semble fort em- brouillé. | | Cette incertitude tient à plusieurs causes ; d’a- bord aux noms de, Thyniens , de Bithyniens et de Thyniaques, qui, se ressemblant beaucoup, (5) Della spedizione degli Argonauti » l: 3, pro :28a, Venezia , 1745. | (6) De urbib. voc. Salmydess. ” (7) Géograph:, Paris 1681, s. v. Salmyd. (8) Tabula Asiæ Minoris. Paris’; 1764. (9) Trad. dell. argonautica d’Apollonio ; p. 387 » not. ad vers. 267. (10) Pag. 449, v. 221, 8°. London. 1780. {11} Orphei Argonautica , v., 668: pag. 194; Iena, 1803. Phinée. 521 ont causé beaucoup d'erreurs dans les manus- crits où le nom de Bithynie, plus connu, a aù nécessairement prévaloir ; ensuite à la proximité des côtes d’Asie et d'Europe, qui, n étant séparées que par le petit bras du Bosphore , ont permis aux mêmes peuples de s'établir sur les deux rives; en outre , à ce que ces peuples étoient tous Thraces d'origine, et ne furent souvent désignés que par ce nom générique seulement ; et enfin à la double habitation de Phinée, qui ayant régné d'abord à Salmydesse et à Phinopolis, en Thrace, sur le bord de l'Euxin, en fut exilé par ses sujets, et vint conduire une colonie de Thy- niens et fonder une seconde Phinopolis sur la côte d'Asie, tout près des Cyanées,et des bouches du Bosphore. Essayons de dissiper cette obscu- rité en nous attachant aux traces des géographes anciens, et des écrivains du voyage des Argo- pautes dont l'autorité est d'un grand poids dans cette discussion. On m'objectera peut-être que Strabon (12), Pline (153) et Ptolémée (14) plaçant Phinopolis en Thrace sur le Pont-Euxin, il est tout simple d'y chercher la demeure de Phinée lorsqu'il fut visité par les Argonautes. Mais il est évident que (2) 1.7 :2p. 529.6 C: (13) L4 4e: 18, p. 205, ed. Harduin. (14) L.5, ps 89,,c. 10, ed. Bertü , Amstelod. 1618 522 Antiquités. les Argonautes ne visitèrent pas Phinée à Phino- polis ni à Salmydesse sur l’Euxin , puisqu'ils n’avoient pas traversé les Cyanées, et que ce roi devin leur donne des avis pour franchir ce pé- rilleux passage. L'opinion du comte Carli qu'il y avoit sur la côte d'Asie une autre Salmydesse inconnue aux géographes et habitée par Phinée, n'est appuyée sur aucune preuve, et montre seulement que ce savant Italien croyoit devoir placer en Asie la demeure de ce prince. Il me reste à réfuter maintenant l’opinion de Tourne- fort (15), de Gyllius (16)et de Flangini, qui veulent retrouver la demeure de Phinée sur la côte européenne du Bosphore , le premier à Mauromolo , les deux autres à Gypopolis , entre Sclétrine et le fleuve Myrléanus: c’est ce que je vais entreprendre. Pline (17), Ammien Marcellin et Etienne de Bysance (18) sont ici d’une précision extrême : ils vont eux-mêmes détruire toutes les conjec- tures avancées jusqu'à ce jour, et concilier toutes les prétendues différences des, Argonautiques entre eux. (RH) Nc: (16) L. c. 0 (17) L. 5 ,c. 43, p. 291, lin. 15, ed. Paris, 1741. (18) Deurb., p. 741, ed. Berkelii, 1694. Plhinée. 523 Pline décrit la côte d'Asie depuis l'entrée du Bosphore. « Au delà de Chalcédoine fut Chry- » sopolis, ensuite Nicopolis qui a douné son nom » au golfe où étoit le port d'Amycus, puis le » promontoire Naulochus, les Esties (19) ( oules (19) J’avois cru d’abord, d’après l’antorité du manuscrit du Vatican, n°. 395, qu'il falloit lire Naulochum promon- torium Ostié, le manuscrit porte Owiæ, Pline ne nommant dans ce chapitre que les lieux de la côte d'Asie, et Polybe, CL 4, c. 43, p- 108, ed. Schweighæuser. ) plaçant en Europe le promontoire Hestias. ‘Eorius, dxpa xangueve rns Evparyse Mais Procope nomme Anaplus le même lieu que Sozomènes nomme ‘Ecries et Michaëlium : donc l'Hestias et l'Anaplus sont le m'me cap. Or Etienne de Byzance place sur la rive droite du Bosphore le cap Anaplus que Pline nomme Estiæ, et il se sert de ces expressions : « Chrysopolis est près de Chal- » cédoine en Bithynie, et l’Anaplus à droite quand on navigue » dans le Bosphore. » Je ne sais donc pas pourquoi Gyllius ( p+ 151 ) ne veut reconnoître qu'on promontoire Estia , situé sur la côte d'Europe ; d'autant plus que la description que donne de ce lieu Procope, tend beaucoup à faire croire qu'il avoit reçu , d'après sa forme, le nom d’Estia, c.-à-d. Ara. « Sur le rivage d’Asie , à peu de distance de la mer » » est un lieu, dit Procope, naturellement plat, mais qui » s'élève en hauteur par l’arrangement et l’amas des pierres » qui le composent. » Je suis d'autant plus fortement induit à penser que cette opinion est la vraie, qu'on sait que les Grecs , et les Latins à leur exemple , appeloient les rochers larges et plats qui s'élevoient sur une éminence au dessus de Ja mer £4 ou ara, parce qu'ils leur présentoient la forme d'un autel ou d’un foyer. Vid.Gessuer et Forcellini , s. v. 4ra. 524 Antiquités. « autels), le temple de Neptune : le Bosphore sé- « parant de nouveau l'Europe de l'Asie par un Le promontoire Naulochus doit être rangé au nombre de ces lieux qu'Ammien( p.239, ed. Gronov. } nomme sfationes obscuras. Cependant , comme ce nom , tiré du grec, signifie mot à mot station des vaisseaux ; que Gyllius ( p. 307) dé- crit, sur la côte d'Asie, auprès du temple de Neptune , un port très-bon et très-profond qui ne se trouve presque jamais sans vaisseaux , et qu'il n’y a point de port semblable sur la côte d'Europe , nous y fixerons la position de ce cap. Quant à ce temple de Neptune, bien que Gyllius, p. 290, veuille prouver que c’étoit le même monument que l’ipoy de Denys de Byzance, le temple de Jupiter Urius d’Etienne de Byzance, d’Arrien, de Ménippe , de Méla, et même que le temple de Diane de Ptolémée p. 131 , ed. Bert.; comme Pindare, Pyth. IV, 462), dont j'apporterai ici l'autorité, fixe ce temple vers et non pas aux bouches de l'Euxin, qu’on sait que les Anciens prolongeoient la mer Noire jusqu'à l'extrémité du Bosphore où est situé l'Hiéron , comme il attribue ce monu- ment à Neptune, ainsi que Timosthènes, cité dans les scho- lies d'Apollonius (II, 692), Pline, et enfin Aristide , oratione isthmica ; comme Tournefort ( Voy. au Lev. t.2, p.146), dont j’opposerai ici l'autorité à celle de Pierre Gylles, a re- trouvé un peu en decà du nouveau château d’Anatolie, qui est l'Hiéron ou le temple de Jupiter Urius,fles ruines d’un ancien château situé sur une des éminences qui du côté d’Asie forme le premier coude de l'entrée du Bosphore ; que Denys de Byzance dit en avoir vu les ruines encore existantes, au dessus du temple de Phrixus ; qu’enfin l'exact et savant T'ournefort ajoute que toutes ces côtes sont couvertes de vieux. maté- riaux , et que tout le détroit de l'embouchure éloit nommé Hiera, c'est-à-dire, lieux sacrés, de la quantité de temples Phinée. 25 « intervalle de 500 pas, est éloigné de Chalcé- « doine de 12500( ou plutôt, de 7500) pas; de là qui y furent élevés , je me permettrai de distinguer le temple de Neptune que Pline, Pindare , Hérodote, Nymphis d'Hé- raclée placent vers les bouches de l'Euxin , du temple d'Urius , de l'Hiéron, qui étoit situé à l'embouchure même du Bos- phore , et dont T'ournefort a encore retrouvé le nom dans le village d'Ioro bàti tout contre le nouveau château d'Asie. Ce temple de Neptune, dont parle Pline, est probablement le même que celui où lon dit que Phrixus sacrifia à Neptune et aux douze dieux ; où, selon Hérodote, Jason sacrifia à Neptune sur l’autel de Phrixus , le même peut-être que , selon Polybe , Jason éleva aux douze dieux à son retour de Colchide, mais bien différent, à coup sûr, de l’Hiéron , et du temple de Diane que Gyllius, p. 294, veut encore fondre dans celui de Jupiter , et que Ptolémée place pourtant beau- coup plus loin même que le temple de Jupiter Urius sur le promontoire de Bithynie, Guyyidos #x1%s , d’Apollonius , que je crois être le cap Coraca d'aujourd'hui, et qui forme le commencement du détroit presque en face des Cyanées. La position une fois bien déterminée du temple où Jason va sacrifier aux douze dieux , nous fournira l’explication précise de ces vers d’Apollonius, IL, 531 : Ex dY roley Hana pere Mode d'uuyravris Buproy dos print mépny, moi 1 itpe Dévres, Ne Droyy irSauvoy tpeorépey * 80% menciys Tppavos Anboyra era œDiriv. ses ryolns dm dirhou meicuur tauc. C’est chez Phinée que les Grecs viennent se rem- barquer et prendre la colombe qui doit les guider dans le passage des Cyanées , après avoir été par terre au temple de Jupiter Urius sacrifier aux douze dieux, et leur élever un autel sur le cap de la côte d'Asie où étoit placé ce temple. Je 526 Antiquités. » jusqu'à la première embouchure où étoit située » la ville de Phinopolis, 8750 pas. Les Thyniens . crois que c’est là le sens précis de cet hémistiche dos fryuin, mépnv, que le scholiaste inédit explique fort mal, comme le remarque Brunck en le citant, et en ajoutant lui- même : sensum illum in verbis auctoris non video ; suspecta mihi est vox mtpy. En effet, Brunck ne sachant sur quelle côte placer la demeure de Phinée, et n'ayant fait aucune re- cherche géographique à ce sujet, devoit être fort embarrassé. Suidas, voc. mtpæ, et Hésychius, voc. mépæ, mehparepos Tépéæireroey , concourent à fixer , de la manière la plus précise, le sens de cet adverbe xépyv. Suidas , éd. Küst, t. IL, p. 79. Tlépa, émlpônue, avri r$ mepirrorepor. EPA adverbium , ULTRA, ulerius, amplius. Hésychius , éd. Albert, t. Il, p- 518. Ilépe, mAëor éméxeæ, umepava. Tlepiaæirærov, ILOP- POTATON. Ileppouripo , mheiw Eumporber. Le scholiaste fait embarquer les Argonautes sur la côte d'Europe chez Phinée , pour aller en Asie sacrifier aux douze dieux , quoiqu'Apollonius dise formellement que ce n’est qu'au retour qu’ils délient les cables du rivage. Enfin , l'interprète anglais d’Apollonius, Fawkes, qui en traduisant n’avoit sûrement pas jeté les yeux sur une carte, ayant fait aborder les Argonautes à Salmydesse , ville sur la côte de Thrace à l’opposite de la Thrace asiatique , to Salmy- dessus, a city on the coast of Thrace opposite to asiatic Bi- thynia, leur fait tout bonnement offrir leurs sacrifices sur cetre côte. M. Flangini, qui a aussi placé en Europe le séjour de Phinée, leur fait trouver le temple sur certe même côte , et traduit comme s'il y avoit xéaas dans le texte : quindi ai dodici dei costrutta un’ ara presso il lido del mare. On peut juger, par ce foible échantillon quelle masse d’erreurs et quelle Plhinée. 527 » habitent toute la côte; les Bithyniens , l'inté- » rieur du pays. C'est là la fin de l'Asie et des confusion cette fausse détermination du séjour de Phinée a dù jeter dans les commentaires et dans les traductions de ce long épisode de l’histoire des Argonautes. Hérodote, Polybe, Arrien et Ménippus cité par Etienne de Byzance , donnent au Bosphore de Thrace 120 stades ou 15 mille pas romains, Je pas de 5 pieds , à compter de l'endroit entre Byzance et Chalcédoine où le détroit a 14 stades olympiques de large , jusqu’au temple de Jupiter Urius , auxquels il faut ajouter la distance de 40 stades depuis ce temple jusqu'aux Cyanées. « Des Cÿanées , dit Arrien, » au temple de Jupiter Urius où est l'entrée de l'Euxin, « 40 stades : de là au port d’Âmycus, nommé Laurus in » sana , 4o stades : du port d'Amycus à Byzance, 80 stades. » Pierre Gylles ( p. 47) a vérifié certe mesure que donnent les Anciens que j'ai cités ; et Zosime se trouve entièrement d’ac- cord avec eux, quoiqu'il donne au détroit 300 stades : car il est évident qu'il s’est servi du petit stade, comme l’a prouvé M. de la Barre, mém. de l'acad. des Inscript., Littérature, De l'usage du grand stade chez les Grees ; tom. 19,p. 573, seqg. La table de Peutinger compte XXV M. de Byzance au temple de Jupiter ; mais il me semble positif qu'on s’est trompé dans la copie en mettant deux X au lieu d'un : avec cette correction, cette mesure s'accorde avec toutes les autres. Il y a aussi une correction à faire dans les chiffres de Pline, relativement à la longueur du Bosphore, dans l'endroit où il dit que le Bosphore , qui ne laïsse entre l'Europe et l'Asie qu'un” intervalle de 500 pas, est à 12500 pas de Chalcédoine ; car ce qu’il entend là par le Bosphore est le passage du Bœuf proprement dit , l'endroit où Darius fit jeter un pont entre la côte d'Asie et l'Hermæum. Or l’Her- 5928 Antiquités. » 282 peuples qu'on reconnoît depuis le golfe de » Lycie jusqu à ce lieu (20). » Ammien Marcellin (1. 22, c. 8, p. 239, ed. Gronovii, Leyd. 1693), après avoir dit que lamer de la Propontide se rétrécissant de nouveau, sépare l'Europe et la Bithyme , et baigne Chal- cédoine , Chrysopolis et quelques ports moins connus (21), ajoute : « c’est donc le côté droit » du Bosphore de Thrace que bordent les flancs » de la Bithynie appelée par les Anciens Myg- mæum , le Pont de Darius, ou le lieu le plus étroit du Bosphore à qui ce nom de Bowropos Convenoit proprement, étant pré- cisément à la moitié du canal qui avoit 120 stades dans toute sa longueur , la moitié de cette longueur, ou 60 stades, à compter 8 stades au mille, forme justement 7500 pas. C’est donc , à coup-sûr, 7/11. mill. D. passuum que Pline a écrit; et la faute est venue de la ressemblance du V romain avec le X. (20) Ultra Chalcedona Chrysopolis fuit ; deinde Nico- polis , à qua nomen etiamnum sinus retènet.…., in quo portus Amyci, deinde Naulochum promontorium , Estiæ, templum Neptuni. Bosphorus D. passuum intervallo Asiam Europæ iterum auferens abest à Chalcedone XII mall. D. passuum : inde fauces primæ VII mill. DCCL passuum, ubi Phinopolis oppidum fuit. Tenent oram omnem Thyni, interivra Bithyni. T5 finis Asiæ est , populorumque CCLXXXII, qui ad eum locum a sinu Lyciæ numerantur. (21) Zn angustias rursus extenuatum , Europam atque Bithyniam intercurrens, per Chalcedona , Chrysopolim et stationes transit obscuras. donie - k.* Phinée. 529 » donie, qui renferme les contrées de la Thynie » et de la Mariandénie , et les Bébryces délivrés » par le courage de Pollux de la férocité d'Amy- » eus, et ce port écarté où le devin Phinée étoit » assiégé par les Harpies au vol menaçant (22). » Vous voyez ici Ammien décrire absolument la côte d'Asie , de même que Pline, nommer, en entrant dans le Bo:phore, Chalcédoine, Chry- sopolis, quelques lieux moins connus qui sont le port d'Amycus, le Naulochus , promontoire de l'embouchure du Bosphore , le temple de Neptune , et enfin la demeure où Phinée fut désolé par les Harpies, par conséquent , celle où il fut visité par les Argonautes, et quirépond évidemment à cette ville de Phinopolis que Pline fixe aussi dans la Thynie, aux bouches du Bos- phore. C'est cette ville de Phinopolis où l’auteur argonautique , connu sous le nom d'Orphée {vers 667), fait de même aborder les Grecs au sortir des états d'Amycus.;« Etant partis de ce » port, et avançant avec la rame, nous abor- » dâmes à la grande ville des Bithyniens, située » sur un rivage uni: cest là que demeuroit (22) Dextram igitur inflexionem Bosphori T'hracit excipie. Bithyniæ latus, quam veteres dixere Mygdoniam , in qua hynia € artandena sunt regiones , e myci sævilia T1 t M di t reg >, € À ævpil Bebryces exempti virtute Pollucis, remotaque statio in qua solitantes minaciter Harpyias Phineus vates horrebat. \ Tom, VI, L 1 530 Antiquités. » Phinée, qui jadis, dans un accès de colère, » troublé par des philtres que lui avoit fait » prendre sa femme , avoit aveuglé ses deux » enfans, et les avoit exposés sur des rochers » escarpés. Les fils de Borée leur sauvèrent la » vie, leur rendirent la vue, et firent subir à » Phinée la peine du talion en le privant à son » tour de la lumière. Cependant , enlevé par les » tourbillons orageux du fougueux Borée, il » roula jusque sous les chênes et les forêts » épaisses de la Bistonie , où il trouva enfin une » mort funeste (23). Après avoir quitté la cour (25) Le faux Orphée semble ici avoir suivi, pour la mort de Phinée , une tradition qu'on avoit faussement attribuée à Hésiode , comme l’a bien remarqué M: Heyne ad Apollod. , d'après un passage de Strabon, 1. 7, p. 302, 463, C. ed. Almeloven. Ce géographe cite Ephore qui , dans le quatrième livre de son histoire, intitulé l'Europe, dit que, parmi les Scythes ctles Thraces, il y a des peuples très-humains ; et il ajoute: peuvichas | ur r&s mourés ; VOpenpoy prEv » ThexroDayoy AGloy re dickioraloy dvbporey @yrayra Tv y#y xadopéy, roy ‘Hotod'oy d%, ( ou plutôt ’EudoËey ) év r# au}spn vis meptodw Toy Diée vro TOY ApzUIGY ayerba ; Taaxroayar tis valu, dzrivess cuxi ÉXoYT@r. Comme on appeloit Homère et Hésiode les poëtes par excel- lence , et qu'on avoit même établi entre eux une rivalité qui accoutumoit à associer toujours ces deux grands écrivains, l’analogie et le rapprochement des idées , qui sont peut-être dans les manuscrits la source d'autant de fautes que la pronon- ciation et la ressemblance des lettres, ont probablement accolé ce nom d'Hésiode à un ouvrage qui ne lui appartenoit pas, eten Phinée. 531 » de Phinée, fils d'Agénor, nous arriy4mes près » des roches Cyanées. » On voit donc que cette ville est fixée par ce poëte aux bouches du Bosphore , dans la même position que lui assignent Ammien et Pline, Puisque c’est tout de suite après avoir quitté la cour de Phinée, queles Argonautes arrivent aux Cyanées ; et sur ce point encere Apollonius et Valérius sont unanimes. Le premier. (11, 3:17) fait dire à Phinée, qui donne aux Argonautes des renseignemens sur leur navigation : « sitôt » que vous m'aurez quitté, vous trouverez les » deux Cyanées au débouché du détroit , TÉTRES & raupaoro, éPopunbérres eue, Kuavtas Verbe du dhès ?v » 146403 ont exclu le véritable auteur Eudoxe de Cnide, fils d'AEschine, élève de Platon, qui mourut 368 ans avant J.-C. , qui avoit fait un ouvrage intitulé Fÿs mepiod os, et qui étoit poëte, puisque Suidas et Plutarque ( de Pithyæ oraculo , p. 402, t. 4ÿ"3, C:18.p. 11, 12, 13) citent de jui une Astronomie en vers, drrpovopiæ dŸ tméys et il est bon de relever en passant une erreur de M. Harles, qui dit ( Biblioth. Græc. , 1. 2, c. 8, P+ 592) que ce vers placé par Heinsius dans les fragmens d'Hésiode , est le vers 912 de Denys Périégète. Non-seulement ce n'est pas le vers 912 , mais il ne se trouve pas dans tour le poëme , que cetté assertion fausse m'a fait relire d’un bout à l’autre : d’ailleurs Denys Périégète n’est pas cité une seule fois dans l'ouvrage de Strabon. M. Clavier, que j'engage à consulter dans ses notes savantes sur Apollodore, (r. 2, P- 180 ) a lu ce passage gité par Strabon, comme s’il appar- tenoit à Hésiode, 552 Antiquités. Euwoxñn, ce que Valérius a exprimé ainsi (IV, 561} Hinc iter ad Ponti caput, errantesque per altum Cyaneas. Et plus loin (IV, 636): «à peine se sont- « ils rembarqués, qu'ils entendent le fracasde la « mer bouillonnant contre ces écueils; » absce- dunt terris et littora condunt .... cm procul audiri sonitus , insanaque saxa. Scymnus de Chios ( édit. des petits Géogr. Oxford, 1703, pag. 55) place aussi en Asie la de- meure de Phinée, et le fait régner au temps de l'irruption des Cimmériens en Asie (24). Le Périple d'Arrien, ou plutôt d'un anonyme (ibid. p. 5) s'accorde avec Scymnus, et fixe de même en Asie le séjour de ce Roi. Etienne de Byzance enfin , après avoir parlé d’une ville située sur la côte Thracienne de l’Euxin , fondée par Phinée, qu'il nomme Phineum, Vivéiov, romos roû Iloyrs, xriloua Duéos, et que je crois positivement être la Phinopolis que Strabon, Ptolémée et Pline ( Z c.) pla- cent dans la Thrace européenne sur la rive de l'Euxin , nonime encore une Phinopolis, autre ville bâtie par Phinée, près de l'Euxin : ŒINOTIOAIE és mpès rû Ilevræ, dd DINEQZ : urbs (24) Je cite ses vers : #uxe © Kippeploy paTos TE dhaus rhy'Aclar..-... wv d'y roma ‘Aphai Duéa roù Tupis AE: à, 4 ROSE ; : Dorsxas * Usépors Xpoyois xaTeADEsy &Z Iœoyias sañor MiAyriwr 1 u ‘ 1 æul XTITUL TŒUTAS TOUS MOIS. Phinée. 533 juætà&. Pontum , dit la traduction latine. Il est clair, d'après ces deux passages, que Phinopolis étoit située dans la Thynie à l'issue du Bosphore, mais avant les Cyanées. C'est aussi dans cette contrée de l’Asie où Apollonius (25) fait aborder les Argonautes, le lendemain du jour où ils ont quitté Amycus (26). Maintenant il est facile de se figurer qu'outre la ressemblance du nom de Thyniens et de Bi- thyniens, la proximité de leurs pays dont sou- C5) 2, v. 417: (26) “Hpcrs ed GA Avrimépn yain BIOYNIAI revus” gyfVer. Je lis ici @urytdt , fondé sur le manuscrit renfermant les scholies inédites, qui donne contre la mesure du vers Bebuvyid, sur ce que le même poëte appelle le pays de Phinée, Thynie, @undr ain, vers 462; Ovyyid'os dxrÿs , v. 550; les peuples @vwoi » 53r; les’ nymphes, Ounxdvs vm@ns, 487. Je m'appuie encore sur la note du scholiaste inédit ad. vers. 176, où l’on trouve ces expressions précises. » Phérécyde dit dans le 9°. livre, que Phinée règnoit sur » tous]les Thraces de l’Asie jusqu’au Bosphore; ces Thraces » sont les Thyniens et les Paphlagoniens. Hésiode rapporte » qu'il eut deux fils, Thynnus et Mariandénus, et que Thynnus » donna son nom à la Thynie, et Mariandénus à la Marian » dénie. » Je me fonde encore sur ce que Valériüs-Flaccus, qui est, au fait, le meilleur commentateur d’Apollonius bien qu'on l'ait peu employé jusqu'ici pour en expliquer les difficultés , a traduit le poëte grec dans cet endroit , et nomme ee pays Thynnée, IV, 424. 534 Antiquités. vent les frontières n'avoient pas été exactement déterminées, a dù nécessairement jeter beaucoup de confusion dan: la description de ces provin- ces. Sirabon (27) distingue cependant en Asie les T'hyniens et les Bithyniens, &t dit « qu’on con- y y ) q » vient généralement que ies Bithyniens , qui étoient auparavant Mysienss, prirent leur nom Ë » des Thraces Bithyniens et Thyniens, qui pas- » sèrent en Bithynie. On en apporte pour preuve, » à l'égard des Bithyniens, qu'il y a encore » actuellement en Thrace quelques Bithyniens , » et à l'égarddes Thyniens , qu’on voit encore le » promontoire Thynias près d'Apollonie et de Sal- » mydesse. » Hérodote (1. 1, c.28, je cite la trad. de M. Larcher ) dit que « Crésus soumit tous les » peuples en decà du fleuve Hacis, les Phrygiens, » les Mysiens, les Mariandyniens, les Chalybes, les Traces (de l'Asie), c.-à-d. les Thyniens et les Bithyniens.» Nousavons vu déjà qu'Ammien Marcellin , distingue dans la Bithynie deux provinces, la Thynie et la Mariandénie ; bithy- nia quam veteres dixere Mygdoniam , in qua Thynia et Mariandena sunt regiones. Catulle, qui avoit été envoyé en Bithynie avec un com- mandement, place aussi en Asie ces deux peuples, lorsqu'il adresse ces vers À la peninsule Sirmium, V © 2 2 (a7) L. 12, p. 54%e r Plhinée. 535 { Carm. 31, v. 4.) Quam te libenter, quamque lœtus inviso, Vix me ipse credens Thyniam at- que Bithynos Liquisse campos. Nous allons voir maintenant que ces peuples et cette province d'Asie n'étoient souvent dési- gnés que par le nom de Thrace, ce qu'a très- bien remarqué M. Larcher, et ce qui est devenu une autre source d'erreur daus la détermination du lieu qu'habitoit Phinée. Xénophon, dans ses Helléniques (28), appelle la Bithynie Thrace Bithynienne ; et ailleurs, il lui donne tout simple- ment le nom de Thrace. Calpé, port situé au milieu de la Thrace , dit cet auteur dans sa re- traite des Dix-Mille, 1.6, c.2, $.11,p. 336: Cbirisophe , au sortir d'Héraclée » arriva par terre en Thrace ; mais Xénophon aborda avec ses vaisseaux sur les frontières de l’'Héracléo- tide et de la Thrace. Dans le même ouvrage, (c.4, 6.1, p. 345 ) vous trouvez que le port de Calpé est situé dans la Thrace asiatique. Diodore (4, c. 51, p.288), ne désigne que par le nom de Thrace seulement, le pays qu'habitoit Phinée au passage des Argonautes; et il me semble évi- dent qu'il a voulu parler de la Thrace d'Asie ou Bithynie, qu'Arrien (Péripl. Pont. Eux. , p. 14.) à l'exemple de Xénophon , appelle tout simple- (28) Etc, 2,6. 2" p. 140 Er à 5356 Antiquilés. ment du nom de Thrace. C’est encore la Thrace asiatique où étoit située Placie, près de Cyzique, qu'Hesychius, voc. Iaexie, ne désigne que par le seul nom de Thrace : Hauxia papa ep Ty Opaxns cs m amcixier EmeueVar Almaiu. Placie étoit située près de Cyzique , comme le prouve l'inscription rap- portée par Bouhier, p. 117 de ses D'issertations sur Hérodote, Dijon, 1746. Alberti a donc eu tort de vouloir fixer cette ville dans la Chersén- nèse de Thrace, à cause de ce mot Opæxyy ; et Bouhier à son tour, en rétablissant cette ville dans sa véritable position , a proposé une,cor- rection au moins inutile en voulant lire rap@ rxv Zxvaarm, au lieu de @péxw, , puisque, comme le dit Strabon (1. 13, p. 586), et comme je le prou- vera! plus bas, les Thraces occupoient les côtes de l'Hellespont et de la Propontide, et que cette contrée recevoit aussi le nom de Thrace seu- lement. Après avoir établi, je crois, d'une manière assez positive que Phinée résidoit sur la côte asiatique du Bosphore, lors du passage des Argo- nautes , il me reste à prouver qu'il avoit régné auparavant dans la ‘Fhrace d'Europe sur les rives de l’Euxin , où il avoit déjà bâti une ville de son nom ; et si j y réussis, comme je l'espère, on verra se concilier bien des difficultés ,!et bien des passages obscurs s'éclaircir dans les écrivains Phinée. 5357 qui ont traité de l’histoire de ce prince et des peuples soumis à ses lois. Apollonius et Valérius fixent d’abord , d'une manière très-précise , lâse de Phinée. Le premier (IT, 254, 266) le traite toujours de vieillard, © yegarès, 0 year, et plus haut (IT, 109), il dit que dans sa marche ses membres trembloient de vieillesse. Tige A 2Ÿ:æ JET TOHLEVOL 0 "Adpein Vipæ Te. Le second (IV, 426 ) ajoute qu'il étoit dans l'âge ie plus avancé , dira dem summoque lues urgebat in ævo ; ensuite ïl nous apprend qu'il avoit été exilé, extorrem , et (v. 444) qu'avant d'être tourmenté par les Har- pyes (29), il avoit erré en plusieurs lieux , ilavoit (29) Les Harpyes auxquelles les poëtes donnent des ailes, des pieds d’oiseaux, et une rapidité supérieure à celle des vents , ne sont certainement que le symbole des sempétes, déifées par la terreur superstitieuse des Anciens. C’est ce que prouvent les anciennes théogonies, Hésiode , Théog. 267, Apollodore, 1, 2, 6, qui les font naïtre de Thaumas ou de Typhon, et d'Electre fille de l'Océan ; leurs noms PEUUVE Quuréry , Todupys , qui tous rappellent , dans leur étymo- logie , la vitesse de la course des ouragans ; enfin, leur union avec le Zépbvre , Iliad. 7. 150 : c'est ce que confirme encore ce passage de l'Odyssée (#, 241) où le poëte dit d’Ulÿsse batiu par les tempêtes, Apæutes œympeidavro, les Harpyes l'empor- tèrent , rapproché decet autre du mème ouvrage (æ, 241), où l'on trouve qu'Ulysse fut emporté par la tempite, #vap- nabare Jverae alger Pipes celui d'Eudoxe( dans Strab. VIE p- 465, C., qui dit que Phinée fut emporté par les Harpyes chez les Glactophages) comparé avec ces vers du faux Orphée, 538 Antiquités. perdu ses foyers, et enfin il avoit été frappé de cécité. C'est Phinée qui s'adresse aux Argo- Argon. 685 , où il est enlevé par les tempétes Lourbillonantes, spoQud'ecriy æéthdais , jusque dans la Thrace où il trouve une , vie malheureuse. Voilà, ce me semble, l'explication la plus naturelle de la fable de Phinée qni régnoit d’abord à Salmydesse sur lEuxin, côte extrêmement orageuse et en butte à des bourrasques qui Vauront jeté loin de sa patrie sur la côte asiatique du Bosphore: et si l'on vouloit suivre plus loin l’allégorie, on pourroit dire que les tempêtes qui règnent continuellement, et qui empê- chent les poissons d’en approcher, selon Strabon (1. 7 , p. 320) comme de véritables Harpyes , le privoient de cet aliment, le plus utile et le plus ordinaire aux nations peu civilisées , qui d’ailleurs devoit être sa seule ressource en abordant chez des peuples inconnus. Du temps d'Homère (Odyss. v, v. 77 ) on représentoit déjà les hommes emportés par une mort subite, comme ayant été enlevés par les Harpyes ; et c’est de là qu’on les trouve figurées sur les monumens antiques, comme ce vase de Tischbein (tom. IL, pl. 59, tom. I, pl. 26) et ceux gravés par M. Heyne dans.son Virgile, \à la tête de son septième Excursus, t, 2, p. 589, Lipsiæ, 1800, six vol. in-8°. M. Visconti, que j'ai consulté sur cepoint, nereconnoît pas, comnge le veut M. Bættiger dans ses notes sur les furies , pour des harpyes bien authentiques celles figurées sur l’anse d'un vase de Caylus, pl. 47, n°. 5 ; sur l'anse d’une patère de Winkelmann, monum. ined., n°. 156 , et sur le char de bronze de son Museo Pio Clement. , t. 5, pl. suppl. B , n°. 4. M. Heyne cite, à l'appui de son opinion que les Harpyes ont été prises pour les Parques, un passage des inscriptions Trio- péennes, in Regillam. 2. 14. apruias Kw Sons évnpér are \ Phinée. 539 nautes : « ]Von ego nunc, magno quod cretus Age- » nore Phineus, aut memorem mea quod vates in pédave. Mais # prose est ici un adjectif qui se rapporte aux noires fileuses, péreuvas KhwSwÿs $ qui vient de l’ancien mot dpao , pour dpralo, et qui signifie ici rapaces , comme le ‘remarque très-bien M, Visconti dans ses notes, pag. 81., Rome 1794, mais qui peut-être l’a étendu trop loin, si j'ose émettre une opinion opposée à celle d'un savant si illustre , en prenant pour une Antonomase des Parques le passage que j'ai cité» Od. &. 241, £. 371. et où le poëte a désigné les Tempêtes. Je puis ajouter maintenant que M. Visconti m’a permis lui- même d'imprimer qu’il se rangeoit à mon avis , et qu'il croyoit devoir rectifier cette légère erreur. Dans les temps postérieurs on associa les Harpyes aux Peines et aux Furies , eton en fit les vengeresses des crimes : et c'est de cette manière que nous les offrent AEschyle, Bien v. 51 ; Apollodore, I, 9, 21 ; Apollonius , IL, 188; Virgile ( AEn. 3, 209, seq.) et Valérius, qui, dans cette attribution , s’écartent d'Homère qui les avoit soigneusement distinguées des Euménides. Cette explication me semble plus naturelle que celle de Bochart et de l’auteur de la Bibliothéque Universelle, qui pensent que les Harpyes n’étoient autre chose que des Sauterelles qui infestoient les terres de Phinée, et dévoroient ses moissons , et les fils de Borée , que les vents du nord qui chassèrent ces insectes, ou bien que ces monstres sont une allégorie pour exprimer que Phinée avoit des maîtresses qui le dépouillèrent , et le réduisirent à la dernière extrémité. Il faut reléouer ces conjectures, dénuées de preuves , avec cette autre citée par Tournefort (t. 2, p. 153 ), où l'on prétend que les Argonautes, que toute l'antiquité traite de héros , n'étoient que des marchands plus hardis que les autres, qui allèrent 540 Antiquités. * sedit Apollo Pectora, NEC Mini DIVERSIS ERRATUM casiBus orbem ; AMISSAS AUT FLERE domos, alt dulcia tempus Lumina : consuetis serum.est ex ordine fatis Ixcemere ; Harpyiæ semper mea pa- bula servant.» Enfin, en s'adressant aux fils de Borée , roi de Thrace, il dit positivement quil avoit régné sur les Odrysiens, et qu'il s’y étoit marié dans sa jeunesse avec une fille de Borée, leur roi : Aquilonia proles non externa mil : nam rex ego divitis Hebri, junctaque vestra meo guondam Cleopatra cubili ; traduction littérale de ces vers d'Apollonius : Tév de xarrynrm, oT Oprxerouw dvarroy KAtiomærpyv Ed Voici moy d'omoy Ayo duorriv. On voit cependant que le mot @pyrerw doit être pris au propre des peuples de ce nom qui habitent l'Europe, puisque le poëte latin conti- nueainsi: romen ad Actœæ Calais Zetesquesororis Prosiliunt : Zetesque prior : quem cernimus , in- quit? Tu ne ille Odrysiæ Phineus rex inclytus oræ ? Tu Phœbi comes , et nostro dilecte parenti? Enfin, on ne peut plus douter que ce Phinée, jusque dans la Colchide acheter des moutons pour en peupler la Grèce. Voilà tout ce que les Anciens ont laissé de plus précis sur cette fable, que M. Heyne , que j'engage à consulter dans ses Excursus I, x, 150 , AEn. L. c. , et Observat. ad Apollod., P. 79» désiroit voir éclaircie par un commentateur de quelqu'un ‘des argonautiques. Phinée. 54a Els d'Agévor roi de Tyr, ne füt venu d’abord fonder une colonie dans la Thrace européenne puisque lorsqu'il est délivré des Harpyes (4, 630), il s'écrie encore : quas, decus 6 Boreæ , possim persolvere grates ? Me, PANGAEA SUPER RURSUS JUGA , mnmeque paternd Stare Tyro, dul- cesque iterum mihi surgere soles Nunc reor. C’est cette première habitation de Phinée en Thrace que Sophocle , dans son Antigone, (v. 966) décrit avec l’exactitude géographique la plus scrupuleuse en faisant dire au chœur: « Auprès des Cyanées on voit une mer qui bai- « gne deux rivages, les promontoires du Bos- « phore , et Salmydesse des Thraces, où Mars, « qui habitoit la ville voisine, vit la cruelle = « blessure des deux fils de Phinée aveuglés par « une farouche marâtre ..... qui pourtant tiroit « son origine des antiques descendans d'Erech- « thée. » Le scholiaste ajoute que Borée eut d'Orithye, Zétès, Calaïs et Cléopâtre qui fut mariée à Phinée , récit qui, excepté les circons- tances de l’aveuglement des fils de ce roi, s’ac- corde entièrement avec celui de Valérius et d'Apollonius. C’est encore à cette première demeure de Phi- née qu'Éuripide (Iphig. en Taur., v. 421 ) fait allusion , et qu'il place après les Cyanées sur la côte orageuse de la Thrace européenne et sur 42 Antiquités. ©7 la route que prend Iphigénie au sortir du Bos- phore pour se rendre en Crimée, quand le chœur s'écrie : « Comment ont-ils traversé les roches » mouvantes ? comment ont-ils franchiles rivages » toujours agités de Phinée, en côtoyant les bords » de la mer à travers les gouffres d'Amphitrite ? » et comment sont-ils arrivés à la terre féconde » en oiseaux , à l'ile Blanche d'Achille, au lieu » que ses courses ont rendu célèbre, le long des » rives de J'Euxin ? » Je releverai en passant l'erreur d'Héath qui entasse des passages pour prouver qu'Euripide, par ce vers ir ‘Au@irpires jolis, a voulu désigner le Bosphore, tandis qu’il peint ici la côte ora- geuse de Salmydesse et du Cap Thynias, qu'O- vide, en traçant sa route vers Tômes, nomme aussi après les Cyanées. Propulsaque fortibus austris (navis) Transeat instabiles strenua Cya- neas , T'hyniacosque sinus, et ab his per Apol- linis urbem Acta, sub Anchiali mænia tendat icer, Inde Mesembriacos portus et Odesson….. Quant à ce passage d’Apollodore (1,9, 21), où il décrit la navigation des Argonautes , et où, au Re des états d'Amycus, il les fait aborder à Salmydesse de Thrace, chez Phinée, comme dans le même chapitre il leur fait donner par ce roi des conseils sur la manière de passer les Cya- neés, je suis fortement induit à croire que Sal- Phinée. 545 mydesse est une glose qui se sera introduite dans le texte, à la suite du mot Thrace, qui signi- foit ici la Thrace d'Asie, et dont le nom trop vague aura encore été la source d’une erreur. Je rétablirois donc ainsi le texte d’A pollodore : Évreodey ayeyDévrEs, 2aTeyTomy is Tyy Opens EySa due Dorvs paris, ras cVus memypouives. Je supprimerois ce nom de Zzauodérro avec d'autant plus de rai- son, ce me semble, qu’Apollodore cite Apollonius et suit sa narration jusque dans les plus petites circonstances. M. Clavier traduit(t. I, p. 91.) « Ils abordèrent ensuite à Salmydesse en Thrace, » où demeuroit alors Phinée. » Cependant M. Heyne (observ., pag. 77, 2°. ed.) sans propo- ‘ser de correction sur ce passage , s’étoit bien ap- perçu que Salmydesse, située sur l'Euxin, au delà des Cyanées, ne s'accordoit pas bien avec l’ordre de la navigation des Argonautes, et M. Schneider a laissé échapper à sa plume une petite erreur, lorsqu'il prend dans Orphée (1. , c. p. 154) cette grande ville des Bithyniens, que je crois avoir prouvé être la Phinopolis asiatique de Pline et d’Ammien, pour Salmydessesituée dans la Bithy- nie européenne. Cette preuve estencoreappuyée sur un passage d'Asclépiade , rapporté par les petits Scholiastes de l'Odyssée, (.. 70 ) où cet au- teur fait l'histoire du voyage des Argonautes, et où l'on voit encore clairement que le pays des 544 Antiquités. Bithyniens étoit situé dans le Bosphore avant les Cyanées, puisque c'est d’après l'avis salutaire du vieux Phinée qu'ils passent sains et saufs à travers ces écueils, et que cette histoire res- semble en beaucoup de points à celle qu'ont suivie Apollonius et Valerius Flaccus. Maintenant, en rapprochant le passage de Strabon sur les Thyniens et les Bithyniens d'Eu- rope et d'Asie, de celui de Phérécyde que j'ai cité, celui où Hérodote { |. 7, c. 75) (50) dit que (30) Ce passage du dénombrement de l'armée de Xerxès a l'été jusqu'ici regardé comme très-aliéré : je vais le citer en en- tier, et tâcher d'en rétablir le texte. Oprines de, émi pev Thot mare dhumextas Exovres ; Esp revoyro, mept dE ro ru, miles" tnt dE, Ceipus mEpt2eSAmgevos mouminus. mepi de rous moduSTE mal ras Mas, mEdIAG Gps" moôs dt duovrié Temal nEÂTUS, Hal y hide culapa. Svros dE duubarres pts tis ray Aciyv, ExaySucay EiSuvol. ro ÔE mhoTepoy ExwhtoyTo , @5 ŒUToi EVETI, ETpUpOVIOI, oixéovTEs mi Zrpouon * ébavasqru dé Durs? nor umo Teuxpay Te tai Murar. Opyinoy de Tv ty Th ‘Acin npxE Bacrauns à LAprabais * aomidus de &LoSoivas to Hu ÇES , ai TpoocAES do Auxepytus Enasos tige tri de Tic xtQairi xpdvte déduca * mods dE roici xpdveri, dré Te mai népeæ mporhy Goës Aahusa" trou dE nai RoQor* ras dE amas paxeri Poivixéoucs xareshiyaro. à Téreurs roirs apart Aptos Est XpnsMploy. 1. VIL, c. 75, p 542, ed. Wesseling. « Les Thraces avoient sur la tête une peau de renard, et pour » habillement destuniques ; et par dessus, une robe de diverses « couleurs ; très-ample, avec des brodequins de peau de jeune les Punée. 545 les Thraces qui passèrent en Asie prirent le nom de Bithyniens, et ceux où Pline (1. 5. p. 290, c. » chevreuil : ils avoient outre cela des javelots , des boucliers » légers, et de petits poignards. Ces peuples passèrent en Asie, » où ils prirent le nom de Bithyniens. Ils s’appeloient aupara- » vant Strymoniens , comme ilsen conviennent eux-mêmes, » dans Je temps qu'ils habitoient sur les bords du Strymon; » d'où les chassèrent , suivant eux, les Teucriens et les » Mysiens. » « Bassaces , fils d'Artabane, commandoit les Thraces asia » tiques............. (Ici il y a une lacune). Ils portoient » de petits boucliers de peau de bœuf crue ; chacun deux épieux » à la lycienne, des casques d’airain, et, outre ces casques, des » oreilles et des cornes de bœuf en airain avec des aigrettes : » des bandes d’étoffe rouge enveloppoiene leurs jambes. Il y a » chez ces peuples un oracle de Mars. ( Traduction d’'Héro- » dote par M. Larcher , t. 5, 1.7, p. 54, 2°. édition. ) » Paw , Wesseling et M. Larcher soupçonnent une lacune dans ce passage. Wesseling suppose qu’il manque lé nom d'un peuple et d’un chef; et il conjecture que ce pouvoïient être les Chalybes , à cause de cet oracle de Mars : mais Eustathe, ad Dionys. v. 793, rapporte ; d’après Hérodote , que cet oracle existoit chez les Thraces d'Asie. ‘Hpodoros dE Aéyes Opanes Ohabarras ts Ty Aciuy, xAn04ves Biluyss, xai eives map GuTois pyspioy ” Apeos. Aucun des éditeurs d'Hérodote n’a cité ce passage ; et c’est une preuve au moins ou que la faute existoit déjà dans les ma- auscrits d'Eustathe , ou qu'il n’attribuoit pas à d’autres peuples qu'à des Thraces ce chapitre dont les savans que j'ai cités croient qu'il manque le commencement. En effet, les premiers Thraces ne peuvent être les Thraces d'Europe , comme l'ont trés-bien observé MM, Wesseling et Larcher, puisqu'Héro- Tom, V1. M m 546 Antiquités. 41), dit que les Thyniens étant passés en Eu- dote les nomme au chapitre 185 avec les autres peuples d'Eu- rope, et qu'il ne fait ici le dénombrement que des troupes d'Asie seulement. Je suis fondé à croire qu'Hérodote a écrit : Opnixwy x ETépay ty Th Avin npxe Barcuxys-.....Bassacès commandoit aussi aux autres Thraces de l'Asie , er par ce léger changement tout se trouve concilié. Bassacès comman- doit tous les peuples d'Asie , Thraces d’origine , c'est-à-dire, les Thraces Bühyniens , les Thyniens et les Trères : et j'ap- porterois à l'appui l’autre passage cité d'Hérodote (1 1) sur les Thyniens et les Bithyniens soumis par Crœsus , un passage de Strabon (1. 13, p. 586, ed. Casaub. ) où il dit que les Thraces occupèrent lesenvirons d'Abydos, et queles contrées au-dessus de cette ville furent peuplées par les Trères , qui étoientaussiun peuple Thrace : ra de mepi AGudy Opèxes ÉTHxATUY- ++ Ta d'tEñs Tpñpes, ai durot Opéxes. Les Trères, comme nous l’apprend encore Strabon{1, 61, ed. Cas., Par. 1620) étoient un peuple de la Scythie , et du nord de la Thrace. Ils furent chassés par Madys, roi des Cimmériens : une partie de cette nation resta pourtant en Europe, où elle fut inquiétée par les Saces (511, D) : une autre se jeta, après la guerre de Troie, sur l'Asie (XII, 575), ÿ détruisit entièrement la race des Magnètes, peuple d'Eolie (647, D); et continuant toujours ses victorieuses excursions s’empara de Sardes après les Cimmériens , selon Callis- thènes et l’élégiaque Callinus, cités par Strabon ( 1. XIII, p. 627, C. D.), vint s'établir dans les environs de la Propontide , et enfin se répandit jusqu'aux frontières de la Bithynie, aux environs du lac Aphnitis, qui dans des temps postérieurs se déborda sur leur territoire , et détruisit plusieurs de leurs villes (1, 59 ). Ces peuples , comme tous les Thraces , avoient une grande Plhinée. 547 rope, prirent le nom de Bithyniens (31); et où Solinus ( pag. 27) rapporte que sur les bords de l'Hèbre, dans le pays même où régna Phinée, il y avait des Thyniens (32). En rapprochant, dis-je, ces différens passages de ceux ou Hé- siode (1. c.) assure que Thynus et Mar yandé- nus, fils de Phinée , donnèrent leur nom à deux provinces d'Asie, où Eustathe assure, d’après les poëtes (ad. Dionys. Perieg., v. 793), que Thynus et Bithynus, les enfans de Phinée, firent prendre leur nom aux Thyniens et aux Bithy- niens ; et Solinus (p.72) que la Bithynie recut ce nom de son roi Bithynus , en y joignant enfin ceux où Scymnus de Chio (1. 1.) et le périple ano- * vénération pour le dieu Mars ; ce qui a engagé Ovide, qui avoit vécu parmi les Gètes et les Thraces, dont les Thyniens et les Trères tiroient leur origine , à leur donner l’épithète de Marticolas, Trist. V , 3, 22, et ex Ponto IV , 14, 14. Cependant une partie des Trères étoit restée dans la Thrace européenne. Théopompe, Thucydide ( L. 2, c. 06), et Tite- Live( 42, 51), parlent de ce peuple qui habitoit entre les Péoniens , les Triballes et la chaîne du Rhodope. (31) Transisse ex Europé Mysos, Bryges et Thynos , à quibus appellantur Mysi, Phryges, Bithyni. (52) Hebrum Odrysarum solum fundit , qui fluvius ex- currit inter Priantas, Doloncos, Thynos, Corpilos aliosque Barbaros tangit et Ciconas. 548 Antiquités. nyme du Pont-Euxin, rapportent que Phinée régnoit en Asie sur de vastes provinces, On sera fortement induit à conclure que Phinée, fils d'Agénor , roi de Tyr, et Tyrien lui-même vint d’abord s'établir à Salmydesse et à Phinopolis, en Thrace, et que de là , soit ayant été chassé par ses nouveaux sujets , égaré par les tempêtes, ou poussé par ce désir de colonisation qui étoit le signe caractéristique de sa patrie, il trans- planta les Thyniens et les Bithyniens d'Europe sur les côtes de l’Asie, leur donna le nom de ses fils, selon l'usage de ces temps reculés ; et là, sur la rive du Bosphore, il se plut, comme Hélénus en Epire , à faire revivre les noms des lieux qu’il avoit habités dans sa jeunesse, bâtit une seconde ville de Phinopolis, en mémoire de celle qu’il avoit laissée sur l'Euxin , nomma Nau- lochus un Cap de l'embouchure du Bosphore , parce qu'il y avoit un promontoire de ce nom dans ses premiers états, Thynias, une ile etun cap de l’Asie qui lui rappeloient le golfe et le pro- montoire Thynias, près de sa chère Salmydesse, et que c’est enfin dans cette seconde Phinopolis, située en Asie , avant les Cyanées, sur la rive orientale du Bosphore, qu'il reçutles Argonautes lorsqu'ils traversèrent ce détroit pour se rendre. en Colchide. C’est peut-être ici l'occasion d'ajouter quel- Phinée. 54g ques détails sur la vie de Phinée, qui offre plu- sieurs variations , d'abord , comme l’a très-bien remarqué M. Heyne , parce que cette fable avoit été traitée dans les argonautiques, dans les poëmes sur Hercule, et dans plusienrs tragé- dies attiques ; mais je crois aussi, parce que ce prince ayant eu des aventures très-diverses, une destinée très-errante , et une vie très-lon- gue , on a pris pour une tradition différente ce qui nétoit que le récit d'un événement différent , arrivé au même individu. En effet, Valerius, qui nous rapporte de suite (ex ordine ) les principaux faits de son histoire, nous dit qu'il avoit passé son enfance à Tyr, chez son père Agénor; que là il avoit reçu d'Apollon le don de la divination, ce qu’Apollonius( II. 236) confirme par ces vers, iyav à mp érixhures &v0 pri Deus OA pavrorüyn re, rurip dE féyeivar "Ayivag: qu'ensuite ayant quitté sa patrie, il avoit erré sur la terre avec des aventures diverses, qu'il s'étoit établi en Thrace, depuis les bords de l'Hèbré jus- qu’à la chaîne del'Hémus et du Pangée qu'il y avoit épousé Cléopâtre, fille de Borée ; qu’il avoit été le fils chéri de ce roi , à qui il avoit donné deux petits-fils, Plexippe et Pandion ( Schol. Sophocl. ad Antig. v. 977), qu’ensuite il avait été chassé de sa nouvelle patrie, qu’il avoit été frappé d'ayeuglement , et qu'il avoit enfin été jeté par 550 Antiquités. les tempêtes avec une partie de ses Thyniens sur la côte asiatique du Bosphore , où il avoit bâti une nouvelle ville, et où il étoit désolé sans cesse par les Harpyes. Maintenant le Scholiaste de Sophocle, Apollodore (1. c.) et Eustathe, ad Dionys. (v. 795 ) vont remplir la lacune de quelques faits, et en expliquer d’autres. Après la mort de Cléopâtre, il épousa une seconde femme , Idée, fille de Dardanus, roi des Scythes, qui, par ses artifices, l'engagea à faire crever les yeux à ses beaux-fils, et il est très-probable que ce fut Borée, comme le rapportent Orphée et Diodore (1. 1.) qui lui Bt subir la peine du talion (ce que les poëtes ont attribué à l'indis- crétion dont il révéla les desseins de Jupiter, ou enseigna à Phrixus la route de Golchide), que l'horreur de ce crime le fit chasser de Thrace avec quelques-uns de ses plus fidèles sujets, et qu il, vint fonder.une colonie en Bithynie où il eut de cette Idée , ou peut-être. d'une troisième femme Idothée, dont parle Sophoclé dans ses Tympanistes , à Tuuranrrais, quatre autres en- fans, Thynus, Bithynus, Maryandynus et Pa- phlagon ,. dont les deux premiers reçurent , suivant son usage, le nom des lieux chéris où il avoit régné heureux et puissant , et qui tous laissèrent leur nom à différens peuples de l'Asie dont ils furent les rois et les civilisateurs. Je Phineée. 551 serois même plus porté à croire que ces deux enfans Gérumbas et Aspondos , cités par le Scho- liaste de Sophocle, il les eut de cette marâtre Idée que son père même condamna à mort, selon Diodore de Sicile, et qu'ils furent proba- blement enveloppés dans la proscription de leur mère, ce qui fait qu'on ne les retrouve plus dans son histoire. VARIÉTÉS, NOUVELLES ET CORRESPONDANCES LITTÉRAIRES. NOUVELLES ÉTRANGÈRES. ALLEMAGNE. JNotice sur le jardin botanique impérial de Schoœn- brunn , près de Fienne en Autriche. Ex 1753, l'Empereur François 1°. fitarranger une portion de terrein derrière le jardin du château de Schœnbrunn, pour y faire cultiver différens végétaux exotiques et des plantes rares et belles. Sur le conseil du grand van Swieten , on appela de Leyde à Schoœnbrunn le célè- bre fleuriste Adrien Steckhoven, qui y fit con- struire beaucoup de serres, une serre-chaude très-belle et vaste, et différens autres bâti- mens. Sur ces entrefaites Richard van der Schot, de Delft en Hollande , fut nommé premier jar- dinier , et chargé d'apporter à Vienne un grand nombre de plantes rares et exotiques, achetées dans différens jardins de la Hollande. C’est ainsi qu’au bout d’une année le jardin était déjà riche en végétaux précieux. Nouvelles littéraires. 553 M. Jacquin , qui alors étoit à Vienne, alla visiter le jardin de Schœnbrunn pour déterminer les plantes qui n'avoient pas encore de déno- mination systématique. À cette occasion, il fut connu de l'Empereur, qui lui proposa de voya- ger à ses frais dans les îles et la partie méri- dionale de l'Amérique, añn d'enrichir le jar- din de végétaux de ces contrées éloignées. Ac- compagné du jardinier van der Schot, il partit de Vienne en 1754. En passant par l'Italie il s’associa deux Italiens Jean Buonamict. et Fer- dinand Barculli, qui étoient chargés de la par- tie zoologique de ce voyage , par lequel on se proposoit en même temps d'augmenter la mé- nagerie et le cabinet d'histoire naturelle. Après avoir visité les îles de la Martinique , de Gre- pade, de St. Vincent, de St. Eustache, de St. Christophe , de St. Martin, de St. Barthé- lemy, d'Aruba, de la Jamaïque, de Cuba, de Curaçao, il revint à Vienne en 1759. De- puis le mois d'août 1757 jusque vers le milieu de 1759, M. Jacquin ne püt faire que peu de chose pour la science , ayant été malade quatre mois entiers de la lienterie, dont il fut enfin gueri dans la Jamaïque. La guerre qui com- mença alors entre l'Angleterre et la France, paralysa aussi ses travaux ; le vaisseau dans lequel il se trouva, fut pris, et il se vit obligé 5o4 Nouvelles littéraires. de passer quelque temps, malgré lui, à Mon- serrat et dans l'ile déserte de la Gonave. Au mois d'août 1757 onfit, de la Martinique, le premier envoi de végétaux pour le jardin de Schœnbrunn ; il y arriva par Marseille. Au mois de février 1756 van der Schot revint aussi de la Martinique, et de cette même Île il em- porta avec lui une grande quantité d'arbres et d'arbustes. Tout cet envoi arriva en bon état, à l'exception des espèces d’Æeliconia, qui fu- rent attaquées en route par les souris. Les arbres étoient de la hauteur d’un homme, de la grosseur du bras et même plus forts. La plupart avoient déjà porté des fruits dans leur sol natal, on leur avoit Ôté la couronne, et on n'en avait laissé subsister que les prin- cipales branches, de la longueur à peu près de deux pieds. Les arbustes étoient restés tels qu'ils étoient. Pour enlever ces. différens vé- gétaux de leur sol natal , on avait creusé au- tour d'eux, à une distance convenable, un fossé circulaire, de sorte qu'entre les racines il resta une masse, aussi grande que possible, de la terre qui leur avait donné naissance. Cette masse qui formoit une espèce de ballot fut en- tièrement enveloppée des feuilles de la Musa , et de cordages faits. d'écorce de l’Aibiscus tilia= ceus , de manière .que la terre ne pouvoit pont Nouvelles litiéraires. 555 se détacher. Un seul arbre, disposé de cette manière , pesoit ordinairement cent et quelques livres. Les ballots furent peu humectés et avec le soin nécessaire, et suspendus en plein air, où la végétation commença bientôt à se mon- trer. Pour empêcher la terre de se détacher des racines pendant le transport, on fit passer tout cet envoi dans des barques jusqu’au port de St. Pierre de la Martinique. De là, il fut transporté par mer à Marseille; de cette ville à Livourne , par la même voie, et de ce port par des mulets jusqu’à Schœnbrunn. Ce fut, sans contredit, le transport le plus riche de végétaux vivans qui eut jamais été fait des pays chauds en Europe. En 1756, au mois d’août , Buonamici partit avec le troisième con- voi de l’île de St. Eustache, pour Livourne. Le quatrième convoi partit vers la fin de la même année. Le cinquième partit de Curaçao pour Amsterdam, et fut accompagné par J. A. Vesuntin, mort en Allemagne de la dys- senterie. Cet envoi étoit extrêmement riche en coraux et autres productions de la mer, qui font encore aujourd'hui un des précieux ornemens du cabinet Impérial. Dans la même année, M. Jacquin fit partir, de la même île, le sixième convoi pour Amsterdam. Enfin, au mois de janvier 1759, MM. Jacquin et Bar- 556 Nouvelles littéraires. culli partirent avec le septième convoi, de la Havane, pour le Ferrol en Espagne; ils ar- rivèrent à Vienne au mois de juillet. Cé der- nier envoi étoit surtout riche en animaux de toutes les espèces. C'est ainsi que dans l’espace de quelques années le nombre des végétaux du jardin de Schœnbrunn fut augmenté considérablement ; car outre ceux qui étoient parvenus de l'Amé- rique , on avoit encore trouvé moyen de faire plusieurs acquisitions importantes dans diffé- rentes contrées. En 1765, après la mort de François 1, Marie - Thérèse ordonna de con- tinuer l'entretien de ce jardin , sur le même pied qu’il étoit alors. En 1780 , peu de temps avant la mort de cette princesse, ce bel éta- blissement souffrit une petite perte irréparable. Le jardinier van der Schot, alors très-âgé, fut retenu dans sa chambre plusieurs semai- nes par des attaques de goutte. Ceux à qui on avoit été obligé de confier le soin des végétaux, pendant ce temps , s'en acquittèrent avec beau- coup de négligence; dans une des nuits les plus froides de cet hiver, celui qui devoit avoir soin de la grande serre-chaude, oublia de la chauffer ; le matin il crüt réparer sa né- gligence en la chauffant davantage; mais le passage subit du froid au chaud , tua un nombre Nouvelles littéraires. b57 considérable des plus beaux végétaux, entre autres tous les canneliers de la Martinique, dont les troncs étoient de l'épaisseur d’un bras, et dont les couronnes étoient larges et de la plus grande beauté ; des Crescentia, Achras, Annona, Portlandia, une Coccoloba grandi- Jolia, qui avoit 20 pieds de hauteur, et dont les feuilles avoient 2 pieds de largeur. Ce jardin subit encore une autre perte. Une collection considérable envoyée de l’le de France, par M. Géré, arriva toute gatée à Trieste. les arbres étoient morts, et les grai- nes abimées. Sur ces entrefaites l'Empereur Joseph II avait chargé M. Jacquin et M. Born, de proposer quelques hommes habiles pour entreprendre un voyage dans des pays éloignés. Le prof. Mar- cer fut nommé directeur de cette expédition ; on lui associa le docteur Stupicz, les jardiniers Poor et Bredemeyer , et le peintre Moll. Cette société de voyageurs quitta Vienne au mois d'avril 1783, et arriva en septembre à Phila- delphie. Ils parcoururent la Pensylvanie , la Virginie et la Caroline. M. Boor se réunit à M. Schopf, et ils firent ensemble un voyage dans la Floride , de là ils passèrent dans l'ile de la Providence. M. Bredemeyer retourna de la Caroline, et, en passant par l'Angleterre, il ar- 558 Nouvelles littéraires. riva au mois de novembre 1784 à Vienne, avec de très-beaux végétaux. Boor, qui pendant un séjour de huit mois dans les iles de Bahame avoit recueilli beaucoup de plantes rares , re- vint à Vienne au mois de septembre 1785. Mais le peintre Moll et le Dr. Stupicz s'étoient séparés de leurs compaz:nons de voyage. Par ordre de l'Empereur, M. Bredemeyer et le jardinier Schücht, allèrent vers la fin de l'année 1784 rejoindre le directeur de cette expédition , M. Marter ; qui étoit resté pendant tout ce temps en Amérique ; ils parcoururent plusieurs des grandes îles, et une partie du continent jusqu à l'embouchure de l'Orenoque. En 1788, ils revinrent par Amsterdam à Vienne, ét rapportèrent beaucoup de plantes rares et nouvelles. M. Marter y arriva aussi la même année, par Londres et Bruxelles, avec une nouvelle collection de végétaux. L'Empereur n'avoit encore pu oublier la perte des plantes de l'île de France; il chargea donc M. Boor et le jardinier Scholl de s'y ren- dre , en passant par le Cap de Bonne-Espérance. Au mois de mai 1786, ils arrivèrent au Cap avec des vaisseaux hollandais ; M. Boor y resta jusqu’en 1587, et partit alors seul pour l'ile de France et celle de Bourbon. Au mois de jan- vier 1788 il revint au Cap avec 280 caisses remplies de plantes rares ; et le 20 juillet de la x Nouvelles liltéraires. 559 même année il arriva à Vienne avec un grand nombre de végétaux magnifiques ; mais comme on n'avait pas pu se charger de toutes les caisses dans le vaisseau , le jardinier resta au Cap, avec celles qu'on n'avoit pu emporter. Jusqu'à présent il n'a pas encore été possible de les faire parvenir de là à Vienne ,ainsi que beaucoup d'autres végétaux vivans; le jardinier Scholl a depuis ce temps resté au Cap, d'où il a en- voyé de temps en temps des oignons et des graines. Outre ce nouvel accroissement con- sidérable du jardin, le nombre de ses végé- taux fut encore augmenté de différentes ma- nières. C’est ainsi qu'à la vente du jardin de Schwenk, à la Haie, l'Empereur fitacheter toutes les plantes rares, et M. Jacquin, le fils, lors- qu'il fit un voyage dans la plus grande partie de l'Europe, envoya aussi à Schœnbrunn beau- coup de plantes exotiques ; qu'il trouva dans d’autres jardins. L'Empereur Joseph fit aussi agrandir les serres-chaudes, et en bâtir plusieurs nouvelles. Pour faire revenir à Vienne le jardinier Scholl, et les végétaux avec lesquels il étoit resté au Cap, l'Empereur Zéopold ordonna en 1791, au jardinier Bredemeyer et au jeune van der Schor, fils de celui qui avoit été avec M. Jacquin dans les Indes occidentales, de faire un voyage à le de France, ou Céré avoit déjà recueilli 560 Nouvelles lilléraires. plusieurs végétaux pour le jardin impérial. À leur retour , ils devoient passer au Cap pour y prendre tout ce qui y étoit resté auprès du jardinier Scholl. Le capitaine de vaisseau avec lequelles deux jardiniers devoient faire le trajet, aborda à Malaga ; ils s'aperçurent encore à temps qu'il avoit à leur égard de mauvaises in- tentions; c'est ce qui les obligea de retourner à Vienne, sans avoir pu s'acquitter de leur commission. Après la mort de l'Empereur Léo- pold , son successeur François Il fit construire une nouvelle serre-chaude de 255 pieds de longueur , pour les végétaux du Cap. On établit encore un nouveau jardin dont le Dr. Host a été nommé inspecteur , et dans lequel on cul- tive avec soin toutes les plantes qui croissent dans les États de la maison d'Autriche. On peut voir, par ces détails, vec quel soin ce jardin, justement célèbre, a été ä, smenté depuis le règne de l'Empercur François f; et on ne sera plusétonné des richesses qu’il contient, et qui ont fourni matière à différens maguifiques ou- yrages de botanique , tels que les Zcones planta- rum rariorum ; publiées par M. Jaceuix , et surtout celui qui a paru, il y a peu d'années, sous le titre : Plantarum rariorum Horti Cæsarei Schæœnbrunnensis descriptiones et icones , en 2 vol. in-fole., contenant 150 gravures coloriées. LIVRES À LIVRE S..DLVEIR.S. Discours qui a obtenu la mention honorable sur cette question proposée par l'Institut national : Quelle est l'influence de la peinture sur les arts d'industrie commerciale ? Faire connoi- tre les avantages que l'Etat retire de cette in- fluence , et ceux qu’il peut encore s'en pro- mettre; par P. T. Decuazerre, membre de la Chambre de commerce et du Conservatoire des arts de Lyon. — A Paris, Crapeler, in-8°. Les arts ont une source commune, la nature. C'est dans l’imitation , dans l'expression plus ou moins exacte de ses beautés , que se trouve le bon ou le mauvais goût. Mais la perfection est le produit du génie, aussi bien que du temps et d'une longue expérience. Les arts sont dé- pendans les uns des autres, et s’entr'aident mutuellement. Aussi pour la plupart de ceux qui tiennent à l’industrie commerciale , quels secours n’a-t-on pas tirés de la peinture et du dessin? Que ne leur doivent pas l'orfévrerie , la ciselure, la gravure , la broderie, la teinture des bois et des fils ou étoffes de toute espèce ; en up mot, tout ce qui tient au luxe bien dirigé des édifices, de leurs décorations intérieures on extérieures, à celui des habits, des meubles, des bijoux de tout genre. Mais la question pro- . posée se borne à l'influence de la peinture seule sur les productions industrielles en France, c'est- à-dire , sur les manufactures de toiles peintes ou imprimées, sur celles d'étoffes de soie, d'or ou Tome VI. Na 562 | Livres divers. > d'argent , sur celles de tapisseries, d'armes, de porcelaine, et même de vases d'argile, sur celles de papiers peints, sur les ouvrages en émail, en mosaïque, en marqueterie. Entrainé par sa prédilection pour une ville où il jouit à justetitre de l'estime de ses concitoyens, M. De- chazelle paroît n'avoir eu en vue que le com- merce lyonnais; et c'est cette complaisanterres- _triction.qui l’a privé dela couronne que ses ta- Jens. pouvoient lui mériter. Persuadé que le. des- sin est inséparable de la peinture, il s'arrête à tous, les objets sur lesquels lun.et l'autre;ont pu ERPEGE leur influence. Le discours de M, De- chazelle:, tel qu'il l'a -enyoyé au concours, se divise en deux parties. Dans la première, il re- trace d’abord très-succinctement les progrès des arts ‘én Italie et'en France, ‘où plutôt à Paris. Il nous montre ensuite. Liéonard de Vinci, le ‘Primatice , le Rosso , faire pénétrer successive- , ment dans lés ateliérs français le ‘goût du vrai béau ;'et Jéan Cousin , et quelques autres , l'y maintenir par la leçon ét par l'exemple. Peu ‘à peu dla pureté des formes antiques s’altère , en Italie, dans l'école des Carraches, et en France sous la dictature de Lebrun ; ainsi, tousles objets susceptibles d'être influencés par la peinture ou le dessin , se ressentent alternativement de cette - dégénération. ‘On voit cependant Claude Balin et les deux Gérmains fonder, par leurs oùvra- ges immortels, la réputation de l'orfévrerie pa- risienue; mais au commencement du siècle der- ‘nier , Borromini la ternit par des ornemens égalément'insignifians et ridicules. Les talens de Petitot iliustrèrent à peu près dans le même . temps, la peincure en émail, qui, aujourd'hui, est au plus haut point de prospérité dans la cà- pitale. Jadis les fusils, les épées et les cuirasses Livres divers. 563 .dé n6s chevaliers étoient enrichis d'emblèmes et d’ornemens élégans , ingénieux et d’un grand goût. L'auteur regrette qu'à ce genre précieux d'industrie, on ait substitué dans nos fabriques d'armes ce poli mis à la mode par les Anglais, et qui, néanmoins, seroit compatible avec de _riches embellissemens. Il'se félicite de voir re- naître l'emploi des sculptures plastiques, dont les Grecs et les Romains ornoient leurs édifices avec tant de goût et à si peu de frais. Il ne s’ap- -plaudit pas moins de la réforme opérée dans l'école française par M. Vien , et maintenue par les efforts constans de ses élèves. Et, en effet, ces formes élégantes , ces contours gracieux , qui donnent tant de prix à nos meubles, à nos -vases, à nos pendules , ne sont-ils pas les résul- ‘tats heureux de ce retour au bon goût? M. De- .chazelle vante, avec raison , les chefs-d'æuvres dela manufacture de Sèvres , les riches tentures des Gobelins, les brillantes productions de la Savonnerie, et nos belles tapisseries en papiers peints. Mais on doit gémir avec lui du dépéris- sément de nos manufactures de toiles peintes ou d’indiennes , et de l’état de langueur où se trou- vent les ateliers de broderie en nuances. On est forcé de reconnoître la supériorité des An- glais dans ces deux genres. Enfin, l’auteur in: siste sur la nécessité de ranimer à Lyon la fa- brication des étoffes brochées , art. merveilleux par lequel cette ville acquit tant de splendeur , et qui n'y conserve plus aujourd'hui qu’un simu- dacre d'existence. La perte en seroit d'autant plus déplorable qu'il appartient encore presque exclusivement aux Français. Quel. fut le principe de la prospérité de ces -fabriques célèbres ? Quelles causes amenèrent leur décadence actuelle ? Telles sont les ques- 564 Livres divers. tions qui font l'objet de la seconde partie du dis- cours. : / Jusque bien avant dansle 16e, siècle, l'Italie posséda seule la fabrication et le commerce des étoffes de soie. Les premières manufactures de cette espèce furent fondées à Tours vers 1470. On les doit à Louis XI. Dans le siècle suivant, -Lyon vit naître et prospérer presque à la fois de semblables établissemens. On ne s’étonnera point que François Ie'. leur accorde une pro- tection signalée. « Pendant long temps, dit l'au- » teur, la prospérité de ces fabriques ne fut .» fondée. que sur la riche qualité des différens » tissus. Des rayures ou des ramiages. exprimés » par. l'introduction de quelques dorures, ou » par l’effet de deux nuances contrastées , fu- » rent d'abord les seuls embellissemens répañdus » sur ces etoffes. Des moyens encore si bornés » ne pouvoient les mettre en rapport avec la » peinture, » * Cette espèce d'enfance dura jusqu'au com- mencement du siècle dernier. : C’est à cette époque seulement que, par les heureuses tentarves de Revel, on parvint à marquer la dégradation des teintes, et à dis- tribuer , avec quelque intelligence , les lumières et les ombres. Un certain Dagailler imagina peu après le procédé des points rentrés , à l’aide duquel on put fondre les nuances-les unes dans les autres, et douner aux objets une rondeur apparente. La plupart des successeurs de Revel, nayant pas ses connoissances en pelutures ;, en restèrent là, et devinrent en quelque sorte de simples routiniers. 4 est vrai de dire que l'excès de faveur dont jouissoient les ateliers, amena Tindulgence. Mais au plaisir, à l’orgueil de porter de riches habits d'un long etsolide usage, Livres divers. 565 succéda une fâcheuse négligence dans le cos- tune. Ce caprice fatal prit peu à peu de l’as- cendant; et, sous Louis XVI, le mal fut au comble; on vit la cour de France elle-même accréditer la fantaisie des toiles des Indes , des mousselines, des linons et autres tissus légers, d'une imitation si facile. Ainsi, ces travestissee mens périodiques , que la mode multiplie encore tous les jours, ne laissent point aux dessinateurs et aux manufacturiers bien intentionnés, ni le loisir, niles moyens de perfectionner leurs tra- vaux, Enfin M. Dechazelle démontre d’une ma- nière évidente que l'inconstance sera toujours le fléau des belles manufactures , et que les objets de luxe qui