/! / .1 ~E*ewv^ V\^6 ^tbrarD of tbe Htuseum OF COMPARATIVE ZOÔLOGY, AT HARVARD COLLEGE, CAMBRIDGE, MASS. The gift of Kw»^-^cvA.èw.~Sisu£XKaAjL«.. No. \<5^aj\j^ MÉMOIRES COURONNÉS ET MÉMOIRES DES SAVANTS ÉTRANGERS, PUBLIÉS PAR L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIE>CES. DES LETTRES ET DES BEAUX- ARTS DE BELGIQUE. MÉMOIRES COURONNÉS O ET MÉMOIRES DES SAVANTS ÉTRANGERS, PUBLIÉS PAR L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. TOME XXX.— 1858-1801. BRUXELLES, M. HAYEZ, IMPRIMEUR DE L'ACADÉMIE ROYALE. 1861. TABLE DES M KM 0 1RES CONTENUS DANS LE TOME XXX. MÉMOIRES DES SAVANTS ÉTRANGERS. CLASSE DES SCIENCES Recherches sur les propriétés géométriques des mouvements plans; par M. P. Gilbert. Exposé d'un principe concernant l'intersection des surfaces, avec application à la recherche de propriétés des surfaces du second ordre ; par M. F. Mcier. Essais analytiques. — Les lignes du troisième ordre; par M. F. Dagoreau. Sur un point de la théorie de la formule de Slirling ; par M. Henri Limbourg. Recherches sur la capillarité; par M. E. Bède. Monographie du genre Piloboltis, Tode, spécialement étudié au point de vue anatomique el physiologique; par M. Eugène Coemans. CLASSE DES LETTRES. Mémoire sur le calendrier arabe avant l'islamisme, et sur la naissance cl l'âge du prophète Mohammad; par Mahmoud Effendi. Inscriptions grecques recueillies en Asie Mineure; par M. A. Wagener. EXPOSÉ PRINCIPE CONCERNANT L'INTERSECTION DES SURFACES, APPLICATION A LA RECHERCHE DE PROPRIETES DES SURFACES DU SECOND ORDRE: F. NEIER, IIOCTEUH EX SCIENCES PHYSIQUES ET M ATHÉ.ÏATIQCES- Presente en la séance du 1er août 1857.' Tome XXX. i5 £■ EXPOSE PRINCIPE CONCERNANT L'INTERSECTION DE8 SURFACES, APPLICATION A LA RECHERCHE DE PROPRIÉTÉS DES SURFACES DU SECOND ORDRE. OBJET DE CE MÉMOIRE. I . On connaît diverses solutions du problème : Reconnaître si une courbe représentée par ses deux équations ? (x, y, *) = », ?, (». y, z) = o, esl plane ou gauche. L'angle de torsion 0 d'une courbe a pour expression : dx cl s {dry d?z — d'2z d?y) (dUf- + d222) (dydïz — dzdhjY2 Si cet angle en chaque point de la courbe est nul, c'est-à-dire si Ton ;i : dïy dzz — {x, y, z) = 0. Éliminant z entre cette équation et l'une des proposées, on devra trouver un résultat identique avec : F (x, y) = o. CONCERNANT L'INTERSECTION DES SURFACES. Or, l'élimination d'une des variables entre des équations dépassant le se- cond degré devient très-compliquée. Si les surfaces sont du second ordre, il s'introduira, en général, des ra- dicaux dans l'équation résultante, ce qui rend la solution laborieuse. Pour s'en convaincre, on pourra résoudre la question : Dans quel cas deux surfaces du second ordre, aux axes principaux paral- lèles, se coupent-elles suivant des courbes planes? i. Une autre solution de la question serait de chercher le plan osculateur de la courbe en un point quelconque. Si la courbe est plane, le plan oscula- teur est celui de la courbe. J'ai indiqué ce moyen ailleurs, dans la discussion d'une courbe parti- culière. Cette méthode ne s'applique généralement avec avantage que dans les questions de mécanique, où il s'agit de la trajectoire d'un point dont les coor- données sont des fonctions explicites du temps. Elle s'applique d'ailleurs plus avantageusement que celle par l'angle de tor- sion, parce qu'elle fait en même temps connaître le plan de la courbe. 5. Passons à une dernière méthode , qui sert en géométrie descriptive pour résoudre la môme question : Si le cône ayant pour sommet un point de la courbe , et pour directrice la courbe môme, se réduit à un ou plusieurs plans, la courbe est plane. Or, si l'on excepte les cas les plus particuliers, celte méthode n'est guère applicable en géométrie analytique. Telles sont les méthodes dont on s'est servi pour juger si une courbe don- née est plane ou gauche. G. J'indiquerai, plus loin, une méthode qui est, en général, plus simple, plus sûre cl plus expédilive que celles que je viens d'exposer. Si les équations de la courbe sont rationnelles , f emploi de cette méthode ne conduira jamais à des résultats dans lesquels les variables se trouvent engagées sous des radicaux. Elle fournit en môme temps les équations des plans, qui contiennent la courbe d'intersection des surfaces. L'emploi de cette méthode m'a conduit à une théorie plus simple et plus a 6 EXPOSE D UN PRINCIPE complète des sections circulaires, que celle par la transformation des coor- données. Elle m'a permis, en outre, de découvrir une suite de nouvelles propriétés, ainsi que de démontrer plus simplement d'autres propriétés déjà connues. En tout cas, la plupart des propriétés que j'exposerai n'ont, à ce que je sache, été énoncées nulle part. 7 . La connaissance de l'espèce de la courbure d'une ligne est d'une grande importance. Chaque courbe prise sur une surface peut engendrer cette sur- lace , si son mouvement et sa déformation sont exprimés par un nombre suf- lisant de lois. Ces lois sont les plus simples , si la courbe génératrice est plane. En considérant cette courbe comme l'intersection de deux surfaces, je ferai voir, à ce sujet, quelles sont les lois auxquelles il faut assujettir le mouvement d'un plan et d'une sphère, pour engendrer les surfaces du second ordre admettant des sections circulaires. L'exposition de ces recherches formera l'objet de ce mémoire. SECTION I. PRINCIPES ET PROBLÈMES GÉNÉRAUX. 8. Lemme fondamental. ? (x, y , z) = o (I) ?I (*, y, z) = o (2) étant les équations de deux surfaces, pour que leur intersection soit comprise dans un plan : Ax + Bi/ -+- Cz -+- D = o (3) il faut qu'en éliminant une des trois variables entre (1) et (3), puis entre (2) et (3), on obtienne des résultats identiques. CONCERNANT L INTERSECTION DES SURFACES. 7 En effet, Tune et l'autre des deux équations résultantes représentent le même cylindre. Remarque. — Si l'intersection est comprise dans plusieurs plans, il y aura plusieurs systèmes de valeurs de A, R, C, D propres à satisfaire à ce lemme. 9. Problème général. (1) et (2) étant les équations de deux surfaces d'ordres quelconques, reconnaître si l'intersection de ces deux surfaces est comprise dans un ou plusieurs plans. El déterminer ces ptans. Solution. — Soit z = Las -f- My ■+- N (4) l'équation d'un plan , L, M, N étant des coefficients indéterminés. On élimi- nera une des variables, z, par exemple, entre (1) et (4), puis entre (2) et (4); on ordonnera les équations résultantes par rapport à X et Y, et Ion égalera les coefficients perspectifs de l'une aux coefficients correspondants de l'autre , multipliés par une constante K. Cela fait, on obtient un certain nombre d'équations de la forme : n (L, M, N, r) = Ks(L,M, N,r,) (3> dans laquelle y et y, sont des fonctions des péramètres des surfaces. Quatre de ces équations serviront à déterminer R, L, M et N; substituant les valeurs trouvées dans les équations restantes de (o), on aura, entre les paramètres des surfaces, les conditions proprement dites pour que l'intersection soit plane. Remarque I. — Au lieu de l'équation (4), on pourra employer l'une ou l'autre des formes : x = L' z -+- M'y -4- N' y = h"z ■+- M'a; -¥■ N". Remarque II. — Si l'on ne peut pas satisfaire aux équations de condition , on conclura que la courbe ne peut être plane. Remarque III. — Les valeurs de L, M, N pourront être imaginaires ou 8 EXPOSÉ D'UN PRINCIPE infinies. Dans ce cas, on conclura, ou bien que l'intersection ne peut être plane, ou bien que l'équation (4) n'est pas la forme propre de l'équation du plan qu'il fallait employer. On emploiera alors l'équation (3), dans laquelle on supprime plusieurs constantes. 10. Application aux surfaces du second ordre. ? = Ax2 -i- Vif- ■+■ A"s2 -+- Byz -+- B'xz -+- K"xy -+- Cx -4- C'y -t- C"z •+- D = o (6) çl= ax2 -4- a'?/2 -1- a".?2 -4- 6«/s -4- b'xz -4- fe"»1!/ -+- cx -+- c'y -4- c"* -4- rf = o (7) L'élimination de ; entre (4) et (6) donne : (A -4- A"L2 -4- B'L) a;2 -4- (A' -4- A"M2 -t- BM)y3 + (2A"LM + B" -4- B'M + Bls)xy 1 -4- (2A"LN -t- B'N -4- C -4- C"L)x -4- (2'A"MN -4- BN -t- C -4- C"M)t/ (8) -4- (D -+- A"N2 -4- C"N) = 0. ) Le résultat de l'élimination de z entre (4) et 7 s'obtient en changeant, dans l'équation précédente , les grandes lettres en petites. Partant, les équations (0) deviennent : A -4- A"L2 -4- B'L = K (a -4- a"L2 -4- 6'L) A' -4- A"M2 -4- BM == K (« -4- a"M2 -4- 6M) 2A"LM -4- B" -4- B'M -4- BL = K (2a"LM -4- b" + 6'M -4- 6L ) 2A"LN -4- B'N + C -4- C"L = K (2o"LN -4- 6'N + c -1- c"L) 2A"MN -4- BN -4 C -+- C"M = K (2a"MN -4- 6N -4- c' + c"M) D -4- A"N2 4- C"N = K(d+ a"N2 -4- c"lN) Quatre de ces équations fourniront K, L, 31, N, et l'élimination de ces quatre quantités entre les équations (x) fournira les conditions auxquelles doivent satisfaire les vingt constantes qui figurent dans les équations (6), (7). Dans chaque cas particulier, on n'aura qu'à remplacer, dans les équa- tions >., les constantes générales par leurs valeurs particulières. 1 1. Avant de procéder à ces cas particuliers, je déduirai quelques consé- quences immédiates de ces équations. • (A). CONCERNANT L'INTERSECTION DES SURFACES. On peut les mettre sous la forme : Lâ(A" — Ko") h- L (B' — K6' ) = Ko — A M2 (A" — Ka") -4- M (B — K6' ) = Ka'— A ML (A" — Ka") -+• L (B — K6 ) h- M (B'— K6') = K6" — B" 2LN (A" — Ka") -t- L (C" — Kc") + N (B'— K6') = Kc - C 2MN (A" — Ka") + M (C" — Kc" ) -+- N (B - K6 ) = KV — C N8(A" — Ko") -4- N (C" — Kc") = Kd — D. ) (8) Si les surfaces sont semblables, K étant le rapport de similitude, on a : A" — Ko" =o, A' — Ko' = o, A — Ko = o. B" — Kb" =o, B' — K6' =o, B — K6 = o. Les équations précédentes se réduisent, dans ce cas, à L (C — Kc") = Kc — C, M (C — Kc") = Kc'— C, N (C" — Kc") = Kd— D, et l'équation du plan , qui contient l'intersection , devient dans ce cas : (C — Kc' ) x ■+■ (C — Kc') y + (C" — Kc") z + D — Kd = o (9) De là on conclut : Si les deux surfaces (6) et (7) sont semblables déforme et de position, l'inter- section sera plane et le plan unique qui la contient est représenté par l'équation (9). Si l'on ajoute les équations (8) et qu'on divise par A" — R«". il vient : (L + M + N)2 + S (L -+- M + N) -t- T, ou bien L + M-hN = -!±\/Ç-T (10) 2 V 4 en posant B - K6 -4- B' — K6' + C" — Kc" S = • A — Ko A - Ko -+- A' — Ko' -4- B" — Kb" -t- G — Kc -4- C — Kc' -4- D — Kd T = — A" — Ko" Tome XXX. 2 10 EXPOSE D'UN PRINCIPE Par là on voit que, si L, M, N sont regardés comme variables, l'équa- tion (10) est celle de deux plans également inclinés sur les trois axes, si Ton regarde L, M, et N comme coordonnées courantes. Ainsi : Si l'on faisait varier les paramètres des surfaces (G), (7) par toutes les valeurs possibles, compatibles avec la condition que l'intersection soit plane, les paramètres des plans qui contiennent l'intersection se trouveraient être les coordonnées de l'un ou de l'autre des plans renfermés dans l'équation (10). SECTION II. INTERSECTION DE LA SPHÈRE AVEC LES AUTRES SURFACES DU SECOND ORDRE. là. Remarque générale. — Si une sphère coupe une surface suivant une ligne plane, celte ligne est une circonférence de cercle. Ainsi cette théorie renferme, comme cas particulier , celle des sections circulaires. Je considérerai en premier lieu l'intersection de la sphère avec l'ellipsoïde, après quoi je n'aurai qu'à changer les signes d'un ou de deux de ses para- mètres, pour avoir des propriétés correspondantes des hyperboloïdes. § 1. - - intersection de la sphère avec i/ellipsoïde. A. Application immédiate des formules (l). 13. Soit Pxa- + Vif- + P"52 = H (I) l'équation d'un ellipsoïde rapportée à son centre et à ses axes principaux , x«- + y2 + z°- — 2ax — -Ipy — <2rz = R* — «2 - /32 — y2 . . . (2) CONCERNANT L'INTERSECTION DES SURFACES. H sera l'équation d'une sphère quelconque ayant son centre au point («, /S, y). Les conditions (?.) de l'intersection plane deviennent, dans ce cas, P .,- P"L2 = K(l + L!) P + P"M2= K(i + M2) l 2P"ML = 2KML ( ,-, 2P"LN = 2K (LN — a — vL) 2P"MN = 2K (MN — 0 - yM) P"N» — H = K (N2 — 2yN — r2) en posant t.2 = R2 _ kï _ p- — y2 (4) La troisième des équations (4) fournil K = p"; celte valeur substituée dans les deux premières donne : p — p" L2 M2 = o P— P" o Concluons de là que s'il existe des sections circulaires , l'équation z = La: -t- Uy + N. qui a servi à fournir les équations (1), n'est pas la forme propre qu'il fallait emplo} er. Si l'on l'ail 31 = o, ce qui réduit l'équation du plan qui contient la sec- tion à z = Lx •+- N (5) les équations (3) deviendront : p + P"La = k ( I -t- L2 ) P' = K LNP" = K (LN — x — yL) 0 = o P" Na - H = K (N2 — 2yN — r»). i2 EXPOSÉ DUN PRINCIPE De là on déduit : , P — P' L == ± * N_ P'(a + yL) PV {?'*) (7) V^ <6> PV (P'«) ( P' — P" ) L " " P' - P" + (P' — P") L La condition que L soit réel exige : p > P' > P" (6 ou encore p < p < P". Admettons la première de ces relations. A ces conditions il faudra joindre /3 = o, ce qui prouve que les sphères, dont les intersections avec l'ellipsoïde sont planes , ont leurs centres dans le plan principal perpendiculaire à Taxe moyen. 11 faut y joindre, en second lieu, l'équation P"i\î _ H = K (N2 — 2rNy — »'"2). qui devient successivement, en ayant égard aux relations (4) et (7), N2 (p' _ p" ) _ 2P'Nr= P'R2 — P'*2 - PV2 — H P'2(»-*-M _ ""M* - M = p,R2 _ _ H L2(P'_p") L(P' — P") P' \ / P \ H P P" H «S y% = R2 P _ P' P' _ P " ? r2 = R2 _ 11 (9) ' P" ' Nous pouvons, dans les résultats précédents, introduire les trois axes principaux de l'ellipsoïde. En effet , on sait que : h , II -H P P' P" a, b, c étant les demi-axes principaux. CONCERNANT L'INTERSECTION DES SURFACES. 15 D après (9), leur ordre de grandeur sera exprimé par a < b < v. Ce qui changerait les équations (G), (7), (9) respectivement en l = ±-\/ fe'2-"2 (6') H = -*- ± ^ (T) c8 — 68 1/ (c8 — 62) (68 - a8) a* y* R* = — - i. ....... (9') 6* _ aJ c8 — fc2 68 Celte dernière équation est d'une grande importance, et nous fera décou- vrir une suite de nouvelles propriétés. Comme /S = o et l'équation (9) sont les seules conditions, auxquelles les quantités «, /3, y, R sont assujetties, on voit que : IA. Propriété. — Il y a une infinité de sphères ayant toutes leurs centres dans le plan principal perpendiculaire à l'axe moyen, coupant l'ellipsoïde suivant un ou deux cercles, dont les plans, parallèles à l'axe moyen, sont donnés par les équations : P'« _ /p_p- P' V p_p" p'_ P'_ P" P'_ P" J/(P — P')(P' — P") (10) %/P-P' P'r P'J .... \/ x -f- ■+■ . • • • Il V P'— P" P' — P" |/(p_P') (P'— P") ou bien par -= + -\/ x h- : — + , . . . (to-) « V c*_ &2 C2 _ 6-2 1/(6*— a8) (c8 - 6') - = - -\/ x -f- — -+- —== = ■ . . (Il') a V cî_ 6* c8 — 6* 1/(6* — a8) (c8 — 6») 15. Propriété. — Chacun des plans : - - ±\ /p-p' 14 EXPOSE D'UN PRINCIPE de même que tout plan parallèle, s'il coupe l'ellipsoïde, il coupera suivant un cercle. Ainsi la surface est couverte de deux systèmes de sections circulaires dont les plans sont parallèles. 1). Développement de ce qui précède cl application à la recherche de nouvelles propriétés. I (>. Par une section circulaire, on peut faire passer une infinité de sphères dont les centres se trouvent rangés sur une même droite, perpendiculaire au plan de la section, et passant par le centre de celte section. Si on donne la section par son plan : z- — Lx ■+■ E (1-2) on devra identifier E avec le terme indépendant des variables dans (10) ou ( 1 1 ), ce qui donne : py P'« E, P'— P" (P'— P")L ou bien : P' — P" r = -+- E (lu) L P'L 1 7. Problème. — Etant donnée une section circulaire par son plan (12) et le rayon de la sphère qui y passe , déterminer les coordonnées du centre. Solution. — Eel R étant connus, les équations (9) et (13) donnent « et 7. 18. Problème. — Étant données les coordonnées du centre d'une sphère cou- pant suivant une section circulaire , déterminer son rayon et le plan suivant lequel elle coupe. Solution. — Les équations (9) et (13) donnent E et R. On trouve, dans le Traité de géométrie analytique de Leroy, la proposition suivante due à M. Machette, démontrée par des considérations géométriques. Noire théorie l'implique comme simple corollaire. CONCERNANT L'INTERSECTION DES SURFACES. 15 19. Propriété. — Deux cercles quelconques, appartenant à des séries di/j'e- rentes, se trouvent toujours sur une même sphère. En effet , soient : - = H- Lx -H E, z = •+- La; -+- E', les plans des sections. En identifiant ces équations a\ec (10) et (Il ), on a : P' — P" P' E « P' — P" y = — -+~ E'. L P Ce sont les équations de deux droites, dont les coordonnées courantes sont a. et y. Leur point d'intersection est le centre de la sphère qui passe par la section proposée, et le rayon est déterminé par l'équation (9). Ainsi, non-seulement la proposition se trouve démontrée, mais la sphère est entièrement déterminée. 20. Discussion de l'équation (9') : bi — a2 c2 _ ft2 fri (10') Si dans cette équation, on regarde R comme constant, a et y comme variables, elle exprime le lieu géométrique des centres des sphères d'égal rayon , coupant l'ellipsoïde suivant des sections circulaires. Nous ferons trois hypothèses sur la grandeur de R. Premier cas. — Soil H H2 = — = &*, p' l'équation proposée devienl D'où «, b* - a* 16 EXPOSE D'UN PRINCIPE ou bien : a - La c Concluons de là que : Propriété. — Si une sphère de rayon égal à l'axe moyen se meut sur l'une ou l'autre des droites (14), elle coupera la surface suivant l'un ou l'autre système de sections circulaires. Corollaire. — Pour «=o, on a y --= o, ainsi : La sphère construite sur l'axe moyen coupe la surface suivant les deux sections circulaires, dont les plans passent par l'origine. 21. Second cas. — Soil R > b, Il vient, en posant — 77—= p2 = quantité positive, (13) équation d'une hyperbole, ayant son axe réel sur le plus petit axe de l'ellip- soïde. Les longueurs des demi-axes sont : celle du demi-axe réel : As _ «i «'=± Y/____(Rî_6»), celle du demi-axe imaginaire : m /V2 - 6* rv=± y bî (R2 - b*-)- En conséquence : Propriété. — Le lieu géométrique des centres de toutes les sphères de rayon égal R, mais plus grand que le demi-axe moyen, se trouve sur l'hyperbole (13), ayant son axe réel sur la direction du petit axe de l'ellipsoïde et réciproquement , si une sphère de rayon R se meut de manière que son centre décrit l'hyperbole (15), les intersections avec l'ellipsoïde seront circulaires. CONCERNANT L'INTERSECTION DES SURFACES. il Remarquons que, en passant d'une sphère à une autre de rayon différent , les hyperboles représentées par l'équation (1 5) restent semblables, et ont pour asymptotes communes les droites (14). 22. Troisième cas. — Soit R < b, l'équation (9') devient : n- v2 - ?2 (<6) b*- — a2 c2 — 62 en posant 62 — R2 62 Celte équation est celle d'une hyperbole ayant son axe réel sur la direction du grand axe de l'ellipsoïde. On a pour les longueurs des demi-axes : pour le demi-axe réel : = ± \jt_JL &2 pour le demi-axe imaginaire : Concluons de là que : Propriété. — Le lieu géométrique des centres des sphères de rayon égal, plus petit que le demi-axe moyen, est l'hyperbole (16), dont l'axe réel se trouve stir la direction du grand axe de l'ellipsoïde , et réciproquement , si une sphère de rayon R, plus petit que le demi-axe moyen, se meut sur l'hyperbole (16), les intersections successives avec l'ellipsoïde seront des cercles. 23. Remarque. — Comme une sphère de rayon R, en se mouvant sur l'une ou l'autre des hyperboles (15), (16), finira par ne plus couper la surface, la solution précédente, qui donne le lieu des centres, paraît assez singulière. Mais l'équation (9') montre que cette solution convient à un problème plus général. En effet , cette dernière se laisse mettre sous la forme : 62 b"- H y« = R2 . Tome XXX. 18 EXPOSE D'UN PRINCIPE Le premier membre de cette équation reste le même pour tous les ellipsoïdes semblables, et l'équation ne change pas, quels que soient R et H, pourvu qu'on ait : il R2 — — = constant = A P H Ainsi : chacune des hyperboles (15), (16) convient à une infinité d'ellipsoïdes semblables et à une infinité de sphères de rayon différent. 24- . Les résultats obtenus au n° 22 montrent que, si l'on fait décroître R depuis R = b jusque R = o, l'axe réel A de l'hyperbole croît depuis A = o, jusque A = ± V'c* — b"2, excentricité de la plus grande des ellipses prin- cipales. A cette dernière limite, c'est-à-dire quand le rayon de la sphère devient nul, l'hyperbole devient : 62 — a2 (/•) Aucune sphère , quel que soit son rayon , ayant son centre sur la courbe ne peut couper la surface suivant une section plane. 25. Cependant la projection de l'intersection d'une telle sphère avec la surface sur le plan de la plus grande section principale, jouit d'une propriété assez remarquable. L'élimination de y entre les équations : donne : x2 if ;■"• — -+- — -t- — =1 a"- 62 c2 ■x- af + ,,â + (z — r)2 ==R* Rî = - ' - x* +. - - z"- - 2*'x — 2y, z h- a'2 + b\ . . (17) a2 c- équation d'une hyperbole, vu que a* - 62 n* < »• Le premier membre de cette équation représente le carré de la dislance CONCERNANT L'INTERSECTION DES SURFACES. 19 de chaque point , qui se trouve sur l'intersection même au point «', /3' de l'hyperbole (f). Voyons si nous pouvons décomposer le second membre de la même équa- tion en fadeurs rationnels par rapport aux variables. Posant, à cet effet, égal à zéro le second membre de l'équation (17) et résolvant par rapport à z, il vient : c° y ± c2 - 62 a V a2 c2 — 62 Cetle équation se change, en vertu de (17), en : cl y c2 — 62 ± î V/Z^! , ± - = • • • (18) a V c2— 62 " |/(e2 — 62) (62 — a2) Cette équation représente deux plans parallèles aux plans des sections cir- culaires. En conséquence, l'équation (18) pourra être mise sous la forme : c2 — 62 r c / 62 — a2 c2y' «j^ "j R = c* L+aV c2 - 62 ~ c2 - 6'2 l/(c2 — 62)(62 — a2) J L a V c2 — 62 c2 — 62 V (c2 — V-) (62 — a2) J Les plans donnés par l'équation (19) peuvent être représentés par : z — Px h- Q = o z -4- Vx -+- Q' = o. Par cette substitution , l'équation (20) devient : R* = f!_ li! [, + px + Q'] [, _ px + q ]. c2 Or, chacun des facteurs entre parenthèses, divisé par V 1 -+- P2> (19) 20 EXPOSE D'UN PRINCIPE exprime la distance d'un point quelconque de l'intersection à l'un ou l'autre des plans renfermés dans l'équation (18). Soient â, ov ces deux distances. H exprime la distance du même point au centre «', /3\ On a, par consé- quent : R'i _ hSS', en posant * = *>(-! _±). Concluons de là que : Propriété. — Le carré de la distance d'un point quelconque de l'ellipsoïde à un point a', y de l'hyperbole (f) est dans un rapport constant avec le rectangle, formé par les perpendiculaires , abaissées du même point sur les plans renfermés dans l'équation (18). On voit qu'à chaque point a, / de l'hyperbole (/'), correspond un sys- tème de deux plans , par rapport auxquels la propriété précédente a lieu et qui sont tous parallèles aux deux systèmes de sections circulaires. Ainsi, un point qui se meut dans l'espace de manière que le carre de sa distance à un point fixe de l'hyperbole (f) soit toujours dans le rapport con- stant h avec le rectangle proposé, restera continuellement sur l'ellipsoïde. Enfin, l'ellipsoïde est le lieu géométrique d'un tel système de points. Cette propriété correspond à une propriété de l'ellipse. 26. Revenons actuellement aux équations (9'), (10'), (11'). Une sphère (a, (S, R) coupe l'ellipsoïde suivant deux sections circulaires dont les plans sont représentés par les équations (10'), (41'). Cependant il pourra arriver aussi que l'un ou l'autre de ces plans ne coupe plus la surface; dans ce cas, l'intersection se réduit à une section circulaire unique. Néanmoins, les deux plans sont parfaitement déterminés; ils se coupent suivant une droite perpendiculaire au plan des xz, que j'appellerai sectrice. Les équations de cette sectrice, ou encore celles de sa trace sur le plan des xz , sont CONCERNANT L'INTERSECTION DES SURFACES. 21 C1 y z = e* — 6"J Appelons ce point conjugué du point a, y. Éliminant « el y entre ces deux équations et l'équation (9), on a : P — a'2 c — 6* . R2 j— X* — Z* = — - 4 (20) a1 cv ô2 équation d'une hyperbole, lieu géométrique des pieds des sectriees de toutes les sphères de rayon R. 27. J'appellerai centriques de l'ellipsoïde toutes les hyperboles renfermées dans l'équation (9') et qui correspondent chacune à une sphère particulière de rayon R. Ainsi la ccntrique (R) sera celle qui correspond à une sphère de rayon R. A chacune de ces hyperboles, il en correspond une autre représentée par l'équation (20); j'appellerai celle-ci Yépicentrique, en désignant par épicentri- que (R) celle qui correspond à une sphère de rayon R. 28. Cela posé, nous avons trouvé au n° 20, pour la centrique [K = b), un système de deux droites, qui sont les asymptotes de toutes les centriques de l'ellipsoïde. L'épicentrique (R = fr), qui lui correspond, se trouve, en faisant R = 6, dans l'équation (21), ce qui donne — ïv^*. équation de deux droites, asymptotes de toutes les épicenlriques. Les asymptotes des centriques forment avec celles des épicentritpies un système de diamètres conjugués de l'ellipse principale du plan des xz. En effet , en désignant par e el ô' les angles des deux systèmes d'asym- ptotes avec Taxe des Z , on a : a2 tang 9 lang S' = • 22 EXPOSE D'UN PRINCIPE 29. Il existe une relation remarquable entre les différents points de la cen- trique et de Pépicentrique correspondante. Une sphère de rayon quelconque p, ayant son centre en un point quel- conque a, y de la centrique (R), coupe l'ellipsoïde suivant une courbe, dont la projection sur le plan des xz est représentée par l'équation F (x, z)= - Z2 x2 — 2«.r — lyz + a2 -»- y2 + b* - ? = o. c2 a2 Les coordonnées du centre de celte projection se trouvent au moyen des équations dV dF _ dx ' dx Nommant X, Z les coordonnées du centre, ces équations donnent : x = z = a2,* 62 — a2 e2 - 62 L'identité de ces résultats avec ceux du n° 20 montre que : Propriété. — Si l'on conçoit une infinité de sphères ayant leur centre com- mun en un point «, y de la centrique (R), les centres des projections sur le plan des \z de toutes les intersections avec l'ellipsoïde se trouveront au point conjugué de l'épicentrique (R). On vérifiera aisément (pie la réciproque a lieu aussi; en sorte que : Propriété. — Si l'on conçoit une infinité de sphères ayant leur centre com- mun en un point XZ de l'épicentrique (R), les projections des intersections avec l'ellipsoïde auront leur centre commun au point conjugué a, y de la centrique. 30. Concevons maintenant deux sphères de rayon égal , mais quelconque o, l'une ayant son centre en a, y, l'autre au point X, Z conjugué. CONCERNANT L'INTERSECTION DES SURFACES. 25 Les deux sphères coupent l'ellipsoïde suivant deux courbes ayant pour projections sur le plan des xz : F ,x z\ = c*"~6* 2i — 6— — a:* — 2*x — 2yz + a» -t- >» -*- 6* — />* = o * ' c'2 «- ,.•2 V2 1.3 a2 F,(jr,*) = - — — c'2 — *2 — 2Xx - 2Zs + X* + Z2 + 6* — ? = o. D'où F - F, = 2.r (« - X) + 2z (y— Z) — (*2 - P) - (r2 - Z8) = o. (21) Celte équation est celle d'une droite ; elle est la même, quel que soit p. J'en conclus que : Propriété. — Si l'on conçoit une infinité de sphères ayant pour centre com- mun un point de la centriuuc a, y, et une autre série de sphères, ayant pour centre commun le point conjugué X, Z ; ces deux systèmes de sphères couperont l'ellipsoïde , suivant deux systèmes de courbes , tels que toutes les projections de l'un de ces sys- tèmes coupent respectivement les projections correspondantes de l'autre en une suite de points situés en ligne droite. (Je nomme projections correspondantes celles qui proviennent de deux sphères d'égal rayon.) 31. Dans tout ce qui précède, nous avons supposé le centre de la sphère en un point quelconque a, y du plan des £2; seulement ces deux coordonnées étaient supposées satisfaire à l'équation (9'). Passons maintenant au cas où le centre de la sphère se trouve sur le grand axe ou le petit axe de l'élipsoïde. Dans le premier, cas, on a a = 0, et les équations (9'), (10'), (11') de- viennent respectivement h". v3 R2 = hi L_ (9") c- — 6- c . /6S — a2 c V c2 — 62 i h c2 — 62 c _ /o- — a- " r iia"\ -y- <,0> c . /b* — a2 c2 r z = \/ — x + — — (H ) d V c'2 — ô2 c2 — O- 24 EXPOSE DUN PRINCIPE La condition (9") montre que, pour que K soit réel, il faut que y soit compris entre o et ^c2 — b-. Si , dans les équations (10"), (1 1 "), on fait X=o, on a : cV z = c2 — 6- ce qui prouve que la sphère passant par deux sections circulaires, dont les plans se coupent en un point de Taxe des Z, a son centre sur cet axe et réciproquement. Voyons ce que, dans ce cas, signifie l'équation (9"). Soit K la distance d'un point quelconque (y, o) de l'axe des Z à un point quelconque de l'ellipse principale, ayant pour axes le grand axe et l'axe moyen de l'ellipsoïde ¥- + 7- = '• on a K*= {y- z? + y\ D'où ,. dK ydy R — = - r— z) + -— . dz dz Posant cette quantité égale à zéro, après y avoir remplacé y -~ par sa valeur, on trouve Z = c2 — 62 pour la valeur qui rend K minimum. Cette valeur minima est donnée par l'expression K2 = 62 — c2 - 62 Remarquons que cette distance K est mesurée par la normale à l'ellipse passant par le point Z, ?/. CONCERNANT L'INTERSECTION DES SURFACES. 25 De là les propriétés suivantes : Propriété. — (Fig. 1.) Soit M le point, où les deux plans de deux sections circulaires viennent couper le grand axe, la sphère qui passe par ces deux sections, a pour rayon la normale abaissée du point correspondant N de l'ellipse, construite sur le grand axe et l'axe moyen , et pour centre le point C, intersection de cette nor- male avec le grand axe. De même , on voit que : Propriété. — Si, en un point C donné sur le grand axe, on mène la normale CN à l'ellipse, la sphère aijant son centre en C et pour rayon CN coupera l'ellipsoïde suivant deux sections circulaires dont les plans passent par l'extrémité de la normale. Autrement. — Si une sphère, de rayon variable, se meut de manière que son centre reste sur le grand axe, et que son rayon soit èi chaque instant égal à la lon- gueur de la normale abaissée de son centre sur l'ellipse principale du grand axe et de l'axe moyen, elle coupera constamment l'ellipsoïde suivant deux sections circulaires, dont les plans passent par l'extrémité de la normale et sont parallèles à l'axe moyen. Comme les relations (9") et (n) sont indépendantes du petit axe, on en conclut cette propriété plus générale, qui implique la précédente : Propriété. — Si le centre d'une sphère , variable de rayon, se meut sur le grand axe d'une ellipse , de manière que son rayon soit à chaque instant égal à la lon- gueur CN de la normale passant par le centre de la sphère , elle coupera , dans chacune de ses positions, suivant deux systèmes de cercles, une infinité d'ellipsoïdes ayant l'ellipse pour section principale commune, et dont le petit axe a une longueur quelconque, comprise entre 0 et le petit axe de l'ellipse. Les plans des sections appartenant èi une même sphère, mais à tous les ellipsoïdes, se coupent suivant une droite unique, parallèle à l'axe moyen des ellipsoïdes. Celte droite passe par l'extrémité N de la normale, et est parallèle à l'axe moyen. 32. Les deux séries de sections circulaires prouvent la génération de ['ellip- soïde au moyen d'un cercle, variable de rayon, se mouvant parallèlement à lui-même, et s'appuyant constamment sur une ellipse. L'inspection des équations (9"), (n) fournil une génération de la même Tome XXX. * 26 EXPOSE D'UN PRINCIPE surface, indépendamment d'une directrice et basée sur des considérations dynamiques : c'est au moyen d'un plan qui se meut parallèlement à lui-même et d'une sphère dont le centre se meut sur une droite. On peut l'énoncer de la manière suivante : Supposons qu'un système de deux plans, passant par la droite AB (fig. 1), et également inclinés sur une même droite OZ, perpendiculaire à AB, et une sphère, de ratjon variable, dont le centre se trouve en 0, se met en mouvement , de manière que : 1° Les deux plans se meuvent ensemble avec une vitesse constante, parallèle- ment à eux-mêmes, leur intersection coupant toujours la droite OZ; 2° Le centre de la sphère se meut avec une vitesse constante sur OZ ; 3° Le carré du rayon diminue proportionnellement au carré du temps, le coefficient de proportionnalité dépendant à la fois du rayon primitif et du rapport des vitesses, l'ensemble des intersections consécutives de la sphère avec chacun des plans engendre les deux séries de cercles de l'ellipsoïde et par conséquent C ellipsoïde même. Dans ce cas, on voit, en outre , que le centre de la surface se trouve au point de départ du centre de la sphère, un des axes se confond avec la ligne des cen- tres, et l'axe moyen est la droite AB, en longueur égale au diamètre de la sphère primitive. Si l'on ne veut obtenir qu'un seul système de cercles , ce qui suffit pour engendrer la surface , on peut modifier les conditions et les énoncer comme suit : Si un plan, passant d'abord par le centre d'une sphère, et la sphère même se mettent en mouvement, en sorte que : 1° Le plan se meut avec une vitesse constante parallèlement èi lui-même; 2° Le centre de la sphère se meut uniformément sur une droite quelconque; 3° La diminution du carré du rayon est proportionnelle au carré du temps , le coefficient de proportionnalité dépendant à la fois du rayon primitif et du rapport des vitesses ; ce système engendrera l'ellipsoïde. On peut même calculer les trois axes de la surface. CONCERNANT L'INTERSECTION DES SURFACES. 27 En effet, soit : 9 l'angle de la droite que parcourt le centre de la sphère avec le plan , R le rayon de la sphère primitive , m le rapport des vitesses, on a : 6 = R, c2 = m, c2 — 62 6 = arc c . / 62 - «2 \ équations qui déterminent a, b, c. 33. Ici se présente la question si , en assujettissant le système à moins de conditions, on peut encore engendrer un ellipsoïde quelconque. La question se résout facilement comme suit : Soit : ji +. y*-i- (z — y)2 = K2 l'équation d'une sphère , z = Lx + N celle d'un plan. Supposons que la sphère , en conservant le même rayon R, se meuve de ma- nière que le centre décrit, d'un mouvement uniforme, Taxe des Z, en sorte que r = /•' , t désignant le temps. Supposons que le plan se meuve parallèlement à lui-même et avec une vitesse constante, de manière que N = pt, on aura pour l'équation du plan et du cercle, par conséquent pour les équations de leur intersection, en un instant quelconque, t. z = La; ■+■ pt, xn + y* -h (Z _ fo)« = k~\ 28 EXPOSE D'UN PRINCIPE En donnant à t des valeurs particulières 0, 1, 2..., on aura la courbe d'in- tersection aux instants 0, 1, 2... ; mais si, au contraire, on élimine / entre ces équations, on a le lieu géométrique de ces intersections. L'élimination donne L'2\ lh — k\ "-(p — k) (!■+-— as* + t -»- - - « s* — Lxa = R2, p2 / \ p I p équation d'un ellipsoïde ayant pour axe moyen le rayon de la sphère primi- tive et dont les autres axes sont déterminés par L, K, p. Nous pouvons conclure de là que : Génération de l'ellipsoïde. — Si un système d'une sphère de rayon constant et d'un plan se meut, en sorte que : 1° Le centre de la sphère parcourt une droite d'un mouvement uniforme; 2° Le plan passant d'abord par le centre de la sphère se meut aussi avec une vitesse constante parallèlement ci lui-même, les intersections successives forment l'ellipsoïde. Le diamètre de la sphère est en même temps la longueur de l'axe moyen. Remarque. — Cette génération étant démontrée, indépendamment de tout ce qui précède, elle implique une nouvelle démonstration de l'existence des sections circulaires dans la surface. 34. Dans les numéros précédents, nous avons considéré les sphères, dont les centres se trouvent sur l'axe des z. Passons au cas où le centre de la sphère , coupant la surface proposée , suivant une section plane , se trouve sur la direction du petit axe de la surface. En posant y = o. dans les équations (9'), (10'), (IL), on obtient : R2 = 6 + 9 ' 62 — a2 CONCERNANT L'INTERSECTION DES SURFACES. 29 - \ /±^1 x + • • . (10'") «V c2 — 62 V (62 - a2) (c2 — 62) « V c2 -a" « — 62 1/ (6* — a2) (c2 - &*) •haeun dos plans coupe Taxe des x au point : • • di'") a-v b2 - a2 el Taxe des 2 , l'un au poinl V (62- - a-) (c* — 6'2) z" aca l'autre au poinl V (6* — u2) (c2 — 62) Par conséquent, si le centre de la sphère, coupant suivant des cercles, est pris sur l'axe des x positifs, les plans suivant lesquels elle coupe passent, parallèlement à l'axe moyen, par un même point de l'axe des x positifs, et coupent l'axe des z l'un au-dessus , l'autre au-dessous du plan des xy à la même distance, et les deux sections sont parfaitement symétriques par rap- port au plan des xy. 35. Si, en procédant d'une manière analogue, comme au nu 29, on cherche la signification de l'équation (9'"), on trouve que R est la distance maxima d'un poinl («, 0) de l'axe des x à l'ellipse construite sur l'axe moyen et le petit axe de l'ellipsoïde, et que la valeur de x, qui correspond à ce maximum, est Cette distance R est mesurée par la longueur de la normale à l'ellipse CN ou CN' (fig. 2) , passant par le centre C de la sphère. L'extrémité de la normale a même ahscisse OM que le point M , où les deux plans viennent rencontrer l'axe des x. De là nous concluons que : 50 i:\pose iruN principe Propriété. — Une sphère, dont le centre se meut sur le petit axe, et dont le rayon est ù chaque instant égal à la normale, passant par son axe à ï ellipse, con- struite sur le petit axe et l'axe moyen, coupe constamment l'ellipsoïde suivant deux sections circulaires, dont les plans passent par l'extrémité de la normale. § 2. - - Intersection de la sphère avec l'hyperboloïde a une nappe. 36. L'équation de cette surface est Vx2 + py — P"^2 = \\ ou bien a* y* z* le ■*■*-■?-* M en posant : H H il — = «', — = 62, — = C2 (2) P P' P" On voit que si, dans les formules obtenues dans le paragraphe précédent, on change le signe de P", les résultats s'appliqueront à la surface proposée. Ainsi une sphère de rayon R, dont le centre a pour coordonnées », o, y, coupera l'ellipsoïde suivant deux sections circulaires comprises dans les plans z = ±\/EEZ , + _Zi_ ± — p,g V P'_P" P' H-P" "" V/(P— P')(P' + P") pour qu'entre a, y et R on ait la relation : p P" ?2 _i_ ,„S P-' H p— P' P' + P" ' P' En vertu des relations (2), cette dernière équation peut être mise sous la forme = « - * (3) 62 _a4 62 -+- ct 62 6* -+- a2 6â a; a; 4- e2 r c3 -+- fc2 c2r C2 -4- 62 ■+- -t- f(C% c2 V (62- -a2) (c2 «Ce ■+- 62) 62 ■+■ a4 62 c2 1/ (c2- -a2) (c2 -4- 62) CONCERNANT L INTERSECTION DES SURFACES. 51 tandis que les équations des plans deviennent z _ i y/ÏEÏ , + J!4. -.,... r...... ■ ■ M — ÎV" Ces équations impliquent la condition P > P' ou a < b. Ainsi : Propriété. — // y a une infinité de sphères ayant toutes leurs centres dans le plan principal perpendiculaire au plus grand axe réel de la surface, qui coupent la surface suivant des circonférences de cercles. Propriété. — Chacun des plans (4), (o), ainsi que tout plan parallèle, donne des sections circulaires. Tous les problèmes, résolus pour l'ellipsoïde dans les nos (16), (17), (18), se résolvent d'une manière analogue pour la surface proposée. Le théorème de Hachette subsiste aussi pour cette surface : on n'a qu'à changer P en — P" dans le n° (9). 37. L'équation (3) représente les centriques de la surface. On voit que : 1° Pour R = b, ce lieu se réduit à un point, l'équation résultante ne peut être satisfaite que pour <* = o, -/ = o. Ainsi : Propriété. — La sphère construite sur les deux axes réels coupe la surface suivant les deux circonférences dont les plans passent par l'origine. 2° Pour R < b, la cen trique devient imaginaire; de sorte qu'aucune sphère de rayon plus petit que le plus grand axe réel ne peut couper la surface sui- vant des cercles. 3° Pour R > b, l'équation (5) représente une ellipse ayant son centre à l'origine et ses axes principaux sur la direction des x et des z. Ainsi : Propriété. — Si une sphère de rayon R se meut sur l'ellipse (5), ses inter- sections consécutives avec les surfaces seront circulaires. 38. Les traces des deux plans (4), (5) se coupent en un point. C2 y a2* 7 ■__ V = c' + 62 ' " 62 — o2 32 EXPOSE DOIS PRINCIPE et le lieu géométrique de ces points où Pépicentrique est représenté par l'équa- tion 6* — a2 c2 -+- fc2 R *« V *' fjui est encore une ellipse. En appliquant à ces résultats le même raisonnement (pie pour l'ellipsoïde , on verra (pie : Propriété. — Si l'on construit une infinité de sphères ayant pour centre un point a, y de la cenlrique, les projections de toutes les intersections auront pour- centre commun te point conjugué X, Z de l'épicenlrique. La réciproque a lieu aussi : Propriété. — Deux systèmes de sphères ayant les unes leur centre commun en un point a, y de la centrique, et les autres en un point conjugué X, Z de l'épi- cenlrique, couperont la surface respectivement suivant deux systèmes de courbes, tels que les projections de l'un de ces systèmes coupent les projections correspon- dantes de l'autre suivant une série de points situés en ligne droite. Si, dans les formules (3) , (i) , (5), on fait a = o, on trouvera facilement les propriétés suivantes : Propriété. — Soit M (fig. 5) le point où les plans des deux sections circu- laires viennent rencontrer l'axe imaginaire, si, au point correspondant de l'hyper- bole principale passant par le plus grand des axes réels , on mène la normale NC , la sphère qui passe par ces deux sections circulaires a son centre en G, et pour rayon ta longueur de la normale GN. Plus généralement : Propriété. — Si une sphère de rayon variable se meut de manière que son centre reste sur l'axe imaginaire d'une hyperbole , et que son rayon soit à chaque instant égal à la longueur de la normale à l'hyperbole passant par le centre de la sphère, elle coupera, dans chacune de ses positions, suivant deux systèmes de sec- tions circulaires, une infinité d'hyperbolo'ides à une nappe ayant l'hyperbole pour CONCERNANT L1NTERSECTION DES SURFACES. 53 section principale commune , cl pour petit axe réel une longueur quelconque com- prise entre o et taxe réel de l'hyperbole. De plus, tous les plans des sections, correspondant à la même sphère, passent par la droite, qui unit les deux points où les normales égales, parlant du centre de la sphère, coupent l'hyperbole. On peut de même, comme pour l'ellipsoïde, assigner en fonction du temps les lois du mouvement du cercle, et de la variation de son rayon, sans donner une hyperbole directrice. En résolvant le problème directement comme pour l'ellipsoïde , mais en faisant varier le rayon , en posant : R2 = f + . 62 " V (62 — a8) (c2 h- 6«) La formule (3) devient : a" y 5 R" 62 — aa c'2 -k- b°- b- On voit par là (pie : PROPRIÉTÉ. — // y a une infinité de sphères, coupant la surface proposée sui- vant des sections planes. Les centres de toutes ces sphères se trouvent dans le plan passant par le grand axe de l'ellipse directrice et par le sommet du cône. Propriété. — Il y a deux séries de sections circulaires , dont les plans sont respectivement parallèles aux deux plans: ± - \ / b* — a* a V r -»- b- a et b étant les axes de l'ellipse directrice et c la distance du sommet au plan de l'ellipse. Remarque. — La direction des plans est la même que pour tous les hyper- boloïdes à une nappe dont le cône est asymptote. 41 . Pour a = o , on voit que les deux plans se coupent en un même point : C~ y c! -t- b' CONCERNANT L'INTERSECTION DES SURFACES. 55 de Paxe de :. Dans ce cas, le rayon devient : R = - 1/ e2 + 6: ou bien : R: y=b;V & -+- b\ Il suil de là que, si S {fuj. 4) est le sommet du cône, AB le grand axe de la hase, SC Taxe des cônes, 0 le centre d'une sphère : Propriété. — Le rayon de la sphère coupant suivant des sections circulaires dont le centre se trouve en un point 0 de l'axe, est une quatrième proportionnelle à la distance OS du centre au sommet , au demi-grand axe AC et « la ligne SA , hypothénuse du triangle rectangle ayant c et h pour côtés. Construction du rayon d'une sphère dont le centre est donné. — De ce qui précède on peut déduire que : 0, 0'. 0" étant les centres de sphères qui coupent le cône suivant des sections planes , les rayons respectifs de ces sphères seront les perpendicu- laires OR, OR', OR", etc., abaissées des points 0, 0', 0" sur la droite SA. En effet, soit SC = SA, la perpendiculaire C'A' à SA sera égale à AC, et l'on a : OR : C'A' = OS : OC, ou R : b = y : V c- ■+- b\ Comme l'expression de R est indépendante du petit axe a de l'ellipse, il est ('vident que : Propriété. — Si une sphère de rayon variable se meut , de manière que son centre 0 décrit la droite SO, et que son rayon est, pour chaque centre, égal à la perpendiculaire OR abaissée du centre sur SA, elle coupera , dans chacune de ses positions, une infinité de cônes droits, ayant tous leur sommet en S et pour base une ellipse qui a pour grand axe AB et pour petit axe une longueur quelconque com- prise entre o et AB. 56 EXPOSÉ D'UN PRINCIPE § 4. — Intersection de la sphère avec l'hyperboloïde a deux nappes. 42. L'équation de l'hyperboloïde à -deux nappes est : Par — py — P'V = H (|) ou bien : x2 y' z'1 ^-F-7 = 1 <*> en posant h .h , H JT ==«"■ p7 = ^p^. =«' (3; Si, dans les formules du § 1er, on change, P' en — P', P" en — P", les résultats de cette substitution s'appliquent à la surface proposée; ainsi on trouve pour les équations des plans : z = V^ P' py P'« * — ™ — -K7 — . , ._ _. _. • • • (4 P'_P' P"-P' |/(P + P') (P" — P') = + \ / P ~*" P x — Pr — V p» — p- * " p" - P' + y~p + F) (P"_p-) équations, auxquelles il faut ajouter la condition : P P" h a2 + y* = Rs .4- — (6) p + p p" _ p' ' P' [°> En vertu des relations (3), on peut mettre ces équations sous les formes a V 62 -c2 * ~~ 62 — c2 " ~ l/TTr* + 62) (ô'-c2) ' 2 — - % / a* + 6* C2 y aCa c* " 62 — e " V (a2 + 62) (62 — c2) ?! R2 a2 + 62 6J — c* 6» "V * (6' Les paramètres des plans ne sont réels que pour b > c. CONCERNANT L INTERSECTION DES SURFACES. 37 Ces plans (4') et (5') sonl, par conséquent, parallèles au plus grand des deux axes imaginaires. De ces formules, il suit que : Propriété. — H y a »»e infinité de sphères ayant toutes leurs centres dans le plan principal perpendiculaire au plus grand des axes imaginaires p'. CONCERNANT L'INTERSECTION DES SURFACES 59 De ces formules on conclut : Propriété. — // y a une infinité de sphères coupant la surface suivant des sec- lions planes. Elles ont toutes leurs centres dans le plan de lu parabole principale dont le paramètre est le plus petit. Les plans des sections sont représentés par les équations : Z — -+- \/ , X 1 1/ - V p-p' (p-p) -2 V p-p' z = - \/ P' x - PY - P ~ 2* \/ P' V p—p'' (p—p') 2 V p — p Propriété. — L'intersection des plans (8) V p — p ainsi que de tout plan parallèle avec (a surface, est circulaire. 45. Les problèmes traités au § 4 se résolvent ici de la même manière. L'équation (G) représente la centrique : c'est une parabole. En transportant l'origine en un point jr» + p- X = de I axe des x, P l'équation (6) prend la forme y2 = — (p — p') a. Ainsi : Propriété. — La centrique du paraboloide elliptique est une parabole ayant son sommet sur l'axe de la surface au point 4R2 -h ,r et pour paramètre la différence des paramètres des sections principales. Le sens de la parabole est opposé à celui de la parabole principale, dont le paramètre est le plus petit. 40 EXPOSE D'UN PRINCIPE On voit, de plus, que : 'foules les centriques, correspondant à des sphères de rayon différent, sont égales et ne diffèrent que par le sommet. Ainsi, une sphère de rayon R dont le centre se meut sur la parabole (6) coupera la surface suivant des sections planes. Mais, comme elle finira par ne plus couper la surface , on voit que l'équation (6) doit convenir à un problème plus général, et, en effet, il suffit de poser — -*- £,= constante, pour que la centrique se rapporte à une infinité de paraboloïdes semblables et à une infinité de sphères de rayons différents. On obtiendrait pour l'équation de l'épicentrique : r = --^ (£ + x - * ) (9) /; — p \ i pi Cette parabole a son sommet en X1 = ~ ■ La centrique et l'épicentrique qui se rapportent à une même sphère, ont leur sommet sur Taxe de la surface distante de la quantité f , moitié du para- mètre de la parabole dont le paramètre est le plus grand. 46. On démontrerait d'une manière analogue, comme pour les surfaces considérées dans les paragraphes précédents, que : Propriété. — Si, d'un point pris arbitrairement sur la centrique, comme centre commun , on décrit une série de sphères, les projections sur le plan de la parabole des lignes d'intersection, suivant lesquelles la surface est pénétrée par différentes sphères, sont des lignes semblables, ayant pour centre commun le point conjugué de l'épicentrique. L'inspection des équations (6) et (9) montre que la dislance des sommet!» . y- p" . (4 -y) («•) p \ 4 Cette centrique-limite jouit des mêmes propriétés que celle des autres sur- faces. Ainsi : Propriété. — Le carré de la distance d'un point x, y, z de la surface à un point de la parabole (6') est dans un rapport constant avec le rectangle formé en menant au même point de la surface deux perpendiculaires sur les plans (7) et (8), dans lesquels on substitue, au lieu de a et y, les valeurs * , y'. 47. Passons maintenant au cas où le centre de la sphère, coupant suivant des sections planes, se trouve sur l'axe du paraboloïde. Après avoir fait y = o dans les équations (6), (7), (8), on trouvera facile- ment : w = Px - Ç (10) tandis que les équations résultantes de (7) et de (8) montrent (pie les deux plans sécants passent en un même point p X = X 2 de l'axe des x. Au moyen de ces résultats, on établira d'une manière analogue, comme on l'a fait pour les propriétés correspondantes dans les surfaces , que : Propriété. — Soit NN' (fig. 5) la ligne suivant laquelle les plans de deux sec- tions circulaires se coupent , la sphère qui coupe la surface suivant ces deux mêmes sections, a son centre au point C, intersection de la normale en N avec l'axe, et pour rayon la longueur CN. Tome XXX. 6 42 EXPOSE D'UN PRINCIPE De même , Propriété. — Si une sphère se meut de manière que son centre décrive l'axe de la surface, et que le rayon soit à chaque instant égal « la longueur de la normale, passant par le centre, à la parabole ayant le plus grand périmètre, elle coupera dans toutes ses positions la surface suivant des sections circulaires. Comme les équations (10) et (11) sont indépendantes de p', on en conclut celte propriété plus générale que celle qui précède : Propriété. — Si une sphère se. meut sur l'axe d'une parabole y- — px de manière que son rayon soit à chaque instant la normale passant par le centre, elle coupera chacune de ces positions suivant deux stjstèmes de sections circulaires , une infinité de paraboloïdes elliptiques ayant la parabole y2 = px pour parabole principale commune et pour l'autre section principale une parabole dont le paru- mètre a une longueur quelconque comprise entre o et p. Pour a = o, R devient imaginaire; ainsi aucune des sphères n'a son centre à l'origine. Pour « = | , on a x' = o, R = | , d'où il suit (pie : Propriété. — La sphère qui renferme les deux sections circulaires dont les plans passent par l'origine, passe elle-même par l'origine et a son centre sur l'axe de la surface à une dislance égale ci la moitié du plus grand des paramètres. Des équations (10) et (11) on déduit la génération suivante de la surface. 48. Génération du paraboloïde elliptique. — Si le centre d'une sphère va- riable de rayon se meut sur une droite d'un mouvement uniforme, de manière que sa distance à un plan qui se meut également d'une vitesse uniforme ne change pas, et qu'en outre, l'accroissement du carré du rayon soit proportionnel au temps, le coefficient de proportionnalité dépendant de la distance de son centre au plan, l'en- semble des intersections du plan avec la sphère formera un paraboloïde elliptique. Le coefficient de proportionnalité est le même nombre qui représente la distance du centre de la sphère au point où le plan coupe la ligne sur laquelle le centre se meut. CONCERNANT L INTERSECTION DES SURFACES 43 §.6. --Intersection de la sphère avec le paraboloïde hyperbolique. 49. Si, dans l'équation (4) du paragraphe précédent, un change le signe de /; ou de //, elle représente la surface proposée. Mais alors on voil que les coefficients des équations (7) et (8) du même paragraphe deviennent imagi- naires; ainsi cette surface n'admet pas de sections circulaires. SECTION III. DIVERS CAS D'INTERSECTION DES SURFACES DU SECOND ORDRE AUTRES QUE LA SPHÈRE ». § 7. - -■ Intersection de deux ellipsoïdes. 50. Soit jr ir z- a* V c2 l ' l'équation d'un des ellipsoïdes, celle de l'autre sera x* if z'- -2x 2/3 2y -tj +,— + — " -7 x — 77 V 7-, z + D = I . . . . (2) a - b - c - a - 6 - c - a, 3, y étant des coordonnées du second ellipsoïde et 0? 3 1 - ° = ^ + F + ï • • • <5» 1 Dans les cas que je vais traiter, je supposerai toujours les axes principaux des deux surfaces respectivement parallèles. 44 EXPOSE D'UN PRINCIPE Les équations (A) deviennent, dans ce cas, i a7 1 ô2 L2 J M2 C LM LN lr MN "7^ K K I a'2 1 V* LM c'2 L2 Y* w "7 = K /LN a It7 " 7* /MN 0 K — r — — r \ c'2 6'2 1 = K 2yN rL c'2 rM D - (*} De la troisième des équations (4) , on tire K = Ç • Substituant cette valeur dans les deux premières , on a a a' (o) Ces conditions doivent être remplies, quels que soient L et M, pourvu que ces valeurs soient différentes de 0 et de oo . Si ce dernier cas arrivait, l'équation ^ = K ^ne donnerait plus la \a- leur de K. Nous verrons ce cas plus loin. Si la condition (5) est remplie, on a L = — C' a a'2 y M = — c'2 H N C2- -c'2 2r (6) (8) a, /5 et y sont supposés différents de o. Concluons de là que : Propriété. — Pour que deux ellipsoïdes ayant leurs axes principatix parallèles. CONCERNANT L'INTERSECTION DES SURFACES. 45 sans que le centre de l'un se trouve dans aucun plan principal de l'autre, se coupent suivant une courbe plane, il faut et il suffit (puis soient semblables de forme et de position. Si celte condition est remplie , on a pour le plan la courbe : r-4_— y -t- — 2— — ■+- -r -+--=■ = ° 1 ■ • 9) ^i J + b"> V c'4 2c"2 2 W" 6" c'2 / Le plan étant unique , la courbe d'entrée se confond avec la courbe de sortie. 51. Supposons «, /3, y variables et L, M constants. Les équations (6) et (7) se mettent, dans ce cas, sous la forme ou encore , en vertu de (5) , a' X T7 L'y, 3 = — b": c's a' Mv a = ~ 7" Ly 3 = — b- 7" Mr (10) (II) équations d'une droite passant par l'origine et le centre du second ellipsoïde. Remarquons qu'elle est conjuguée au plan z = La? ■+■ M//. Concluons de là que : Propriété. — Si deux ellipsoïdes semblables de forme et de position se coupent, le plan de leur intersection est parallèle au plan diamétral conjugué à la droite qui unit les centres des deux ellipsoïdes. Les équations (10) et (1 1) montrent que Propriété. — Si un ellipsoïde se meut de manière que son centre décrive la droite (10), (11), les intersections consécutives avec un ellipsoïde fixe, dont le centre 46 EXPOSE D'UN PRINCIPE est à l'origine, et semblable de forme et de position avec le premier, seront des ellipses dont les plans sont tous parallèles au plan conjugué à la droite proposée dans l'un ou l'antre des deux ellipsoïdes. 52. Supposons actuellement « = a', b = b', c = c', e'est-à-dire que les deux ellipsoïdes soient égaux. Supposons, en outre, que le second ait son centre en un point «, ,5, y de la surface du premier; dans ce cas, on fera, dans les équations précédentes, t. £--" - r'2 - cr lr c~ et l'équation (9) devient : a.x By yz I "a7 + b- + ~b>>7' ou «6c — < TT < - ■ abc Remarque. — Si Cane ou l'autre de ees inégalités n'est pas satisfaite , on aura pour L une valeur imaginaire. 54. Voyons la condition pour que la courbe d'intersection soit parallèle à un des plans coordonnés. L'équation du plan devient : : = N. Les équations (4) se réduisent à : a b a = o B = 0. . le* a*\ 2a'! a" I a- \ N» — r rN = r- — - c~ H f • ' ■ (,2) \ c- a2 / a- a* \ a" — I / cette dernière détermine N. Si la valeur de N devient imaginaire, les deux surfaces ne se coupent pas. Concluons de là que : Propriété. — Si , sur deux ellipses semblables et semblablement placées , dont les plans sont parallèles et les centres sur une même droite perpendiculaire à leurs plans, on construit deux ellipsoïdes, dont les troisièmes axes sont quelconques, s'il y a intersection, ils se coupent suivant des ellipses dont les plans sont parallèles aux plans des ellipses proposées. 48 EXPOSE D'UN PRINCIPE 55. Supposons, en dernier lieu, (pie les centres des deux ellipsoïdes soient les mêmes ; on a , dans ce cas : a b a' b' a = o a = o •y = o N ' y/ gi~ a'* ou encore : N = a' % / ^! ?! Pour que N soil réel , il faul que : 1° Si n' > a on ait aussi : c' c — < - «' a ) OU c' a' 7 < a / 2° Si a > a' ] on ait : / , (O- c a ! Ainsi : Propriété. — .S'? rfewa; ellipsoïdes, ayant les axes principaux sur les mêmes directions, ont leurs sections principales, dans un seid de leurs plans, semblables, et (pie les conditions (c) ou (c') soient remplies, ils se coupent suivant une section plane. CONCERNANT L'INTERSECTION DES SURFACES 49 § 8. - Intersection d'un ellipsoïde avec un hyperboloïde a i'ine nappe. 5(>. Si, dans l'équation (2) du paragraphe précédent, on change c'2 en — c'2, elle représente un hyperboloïde à une nappe ayant Taxe des ; comme axe imaginaire. Les équations (4) du même paragraphe fourniront, dans ce cas : a" c- a'~ c's &' c 6^ c'' résultai absurde, vu que le rapport de deux carrés ne saurait être négatif. Les équations (4) seront absurdes pour cette surface, tant que M et L ne sont pas nulles. Mais si on fait Z = N, on obtient pour condition d'une intersection plane : z = N == - a2 6! a7*' = y* a" c2 , 1/ (a5 — a'2) (a* c'2 -4- a'2 c2) - - a2 a'2 y* IV c -1- a c a c -4- a c ce qui exige « > a1 et / c5 v'1 r < (a* — a") - + — \ a2 a 2 pour que N soit réel. Si l'on employait pour l'équation du plan la forme y = hx -+- N, on arriverait à un résultat absurde. Concluons de là que : L'intersection d'un hyperboloïde à une nappe avec un ellipsoïde ayant ses axes principaux parallèles à ceux de l' hyperboloïde , ne peut jamais être une courbe Tome XXX. 7 50 EXPOSE D'UN PRINCIPE plane que dans le cas on le centre de l'ellipsoïde se trouve sur ta direction de l'axt imaginaire. 57. Si cette dernière condition est satisfaite, il faudra , pour que l'intersec- tion soit plane, que : 1. L'ellipse de gorge soit semblable à la section principale de l'ellipsoïde, dont le plan est parallèle, à celui de l'ellipse de gorge; H. Que le rapport de l'ellipse de gorge à la section principale de Cellipsoidc soit > 1 ; 3. Que la distance des centres des deux surfaces soit plus petite que : „ I c- o — a ) - + — • \ a- c - I Pour y = o , on a : z = ± ce . / a" — a'2 ▼ a1 c"* ■+- a- â équation qui exige a > a' Ce résultat prouve que Propriété. — Si sur deux ellipses semblables et semblablement placées, on construit : 1. Sur la plus petite un hyperboloïde à une nappe; 2. Sur la plus grande un ellipsoïde, les troisièmes axes étant quelconques, les deux surfaces se coupent suivant une ellipse dont le plan est parallèle il celui des ellipses proposées. On peut combiner celte propriété avec la précédente et dire (pic : Propriété. — Si l'ellipsoïde, ainsi construit, se meut de manière que ses axes principaux conservent la même direction et que son centime reste sur l'axe imaginaire, les intersections consécutives seront des ellipses semblables et parallèles. CONCERNANT L'INTERSECTION DES SURFACES. 51 § M = — - (2) 6'î y et l'équation du plan qui contient la section devient ,,'ï h'* J r-i 9 -2 I /^ a'1 Si l'on regarde L et M comme constantes, «,/S, y comme variables, les équa- tions (1) et (2) monlrent que : Propriété. — Si un hyperboloide à une nappe semblable a un hypeiidide donné se meut de manière que ses axes principaux restent parallèles et que son centre parcourt ta droite (1), (2), il coupera constamment ce dernier suivant des courbes planes dont les plans sont parallèles au plan diamétral conjugue a cette droite. 59. L'équation (3) montre, en outre, que si a = a', b = b', c = c'. Propriété. — Si un hyperboloide se meut de manière que son centre 7-eslc sut la surface d'un autre hyperboloide qui lui est égal, de manière que les axes prin- cipaux du premier soient constamment parallèles aux axes respectifs du second, il 52 EXPOSE D'UN PRINC. CONCERN. L'INTERS. DES SURF. coupent celui-ci dans chaque position suivant une courbe plane parallèle au plan tangent mené par le centre mobile au second hyperboldide , et divise en deux par- lies égales la droite qui unit les centres. On \ oit de même que : Le plan sécant est continuellement tangent à un autre hyperboldide construit sur les demi-axes de l' hyperboldide fixe. (i(). C'est ici que se bornent les cas auxquels j'ai appliqué le principe énonce au n° 8 de ce mémoire. En suivant la même marche que dans les derniers paragraphes, on pour- rail appliquer la méthode à l'intersection de deux paraholoïdes, et même à toutes les combinaisons des surfaces du second ordre deux à deux. La discussion fournirait toujours de nouvelles propriétés. On pourrait de même rechercher les cas d'une intersection plane dans l'hypothèse que les axes principaux des surfaces ne sont pas parallèles, et remonter ainsi à des cas plus généraux. Par les problèmes que j'ai traités, ainsi que par les propriétés que j'ai déduites d'une discussion immédiate des formules primitives, on a pu se convaincre que le principe est fécond et (pie la méthode est simple, uniforme <>i expéditive. FIN Mrm . caur. et des sas. >■/;-, Tojne AAA . Mémoire Je MVMeier. RECHERCHES SUR LES PROPRIÉTÉS GÉOMÉTRIQUES DES MOUVEMENTS PLANS; M. P. GILBERT. PROFESSEUR A L UNIVERSITE DE LOUVAM. Mémoire présenté en la séance du 7 novembre 185". Tome XXX. INTRODUCTION. Dans ce travail , je me suis proposé d'étudier d'une manière assez com- plète le mouvement géométrique d'une figure invariable dans son plan, en fondant cette théorie sur de simples considérations géométriques. J'ai eu surtout en vue de raisonner sans cesse d'une manière tout à fait générale et indépendante des conditions particulières qui déterminent le mouvement de la figure , comme aussi des positions relatives des différents points que Ton considère soit dans la ligure mobile, soit dans le plan regardé comme fixe. J'ai cherché à introduire la même généralité dans les énoncés des théorèmes auxquels je suis parvenu, et à rendre ainsi ces théorèmes immédiatement applicables dans tous les cas possibles, sans qu'il soit nécessaire de les modi- fier d'après les circonstances que présente la ligure. Après avoir rappelé, dans les §§ 1, 2, 3, diverses propriétés du mouve- ment d'une figure dans un plan, et ajouté quelques remarques à ce sujet, j'établis à priori un théorème général qui a lieu pour un déplacement fini quelconque et qui me sert de point de départ. Je l'applique en particulier à un déplacement infiniment petit, j'en déduis quelques propriétés remarquables qui ont lieu pour une position quelconque de la figure mobile, et j'obtiens immédiatement un théorème d'un énoncé essentiellement géométrique et tout à fait général, relatif au centre de cour- bure de la trajectoire d'un point quelconque de la figure en mouvement. Je rattache à ce théorème la question du centre de courbure de l'enve- loppe d'une courbe qui fait partie de la figure mobile, et j'en déduis quelques conséquences assez curieuses. Du même théorème découlent encore très-simplement une construction h INTRODUCTION. géométrique générale des centres de courbure et une suite de règles pour la détermination d'un point important à considérer dans toute cette théorie. Je termine, enfin, par des applications à certaines courbes connues, par l'exposé de nouvelles propriétés générales qui se présentent dans les mouve- ments plans, par l'étude analytique du cas intéressant où un point de la figure décrit une ligne droite, et par quelques propositions sur les aires des roulettes. Lorsque je suis parvenu aux résultats qui servent de base à tout ce tra- vail, je n'avais lu sur la question qui m'occupe que ce qui se trouve dans certains traités élémentaires. J'ai reconnu depuis que le même sujet avait occupé plusieurs géomètres. Labire, par exemple, a reconnu l'existence du cercle que j'appelle cercle d'inflexion, bien qu'il ait commis quelques erreurs à ce sujet. J'ai eu ensuite connaissance d'un mémoire de M. Bresse, inséré dans le Journal de l'Ecole polytechnique, et où la question des mouvements plans est envisagée d'une manière nouvelle : j'en ai profité pour perfectionner quelques points de mon travail. Enfin, je n'ai pu lire que très- récemment le remarquable mémoire que M. Lamarle a publié sur la même question dans les Bulletins de l'Académie: tout y est ramené à des considérations d'une entière simplicité. J'ose espérer, toutefois, que mes propres études ne seront pas tout à fait dénuées d'intérêt, même après celles de ces savants géomètres, et que j'aurai apporté, du moins en certains points, quelque perfectionnement à celle théorie. L'Académie aura égard, d'ailleurs, à la difficulté de rencontrer des résultats dignes d'attention dans une question déjà si profondément étudiée. % RECHERCHES SUR LES PROPRIÉTÉS GÉOMÉTRIQUES MOUVEMENTS PLANS. § 1. — Propositions connues sur le déplacement d'une figure dans un plan. M. Chasles a démontré depuis longtemps la proposition suivante : Une figure plane peut être amenée d'une position à une autre quelconque, dans un plan, par une simple rotation autour d'un point fixe de ce plan. La démonstration peut se faire très-simplement comme il suit : (Fig. •/.) Soit M un point de la figure dans sa première position, M' la seconde position de ce point, et M'M" la seconde position de la droite qui était en MM' dans la première position de la figure. Par les points M, M', M" passe une circonférence, soit 0 son centre : on a M0 = M'0 = M'0, et MOM' = WOM", donc évidemment une rotation égale à MOM' autour du centre 0 amènera MM' sur M'M", et par conséquent toute la figure, liée inva- riablement à MM', passera de la première position à la seconde, c. q. f. d. On voit, de plus, que la droite MM', dans ce déplacement, a tourné autour du point M d'un angle égal à la rotation de la figure autour du point 0, et comme le point M est pris arbitrairement sur la figure mobile, il en résulte que lorsqu'une figure passe d'une position à une autre dans un plan, l'angle 4 SUR LES PROPRIÉTÉS GEOMETRIQUES qu'elle décrit autour d'un de ses points en même temps que ce point se trans- porte de sa première à sa seconde position, est de même grandeur et de même sens, quel que soit ce point. C'est ce que nous appellerons désormais simplement la rotation de la figure autour de ce point. Considérons la seconde position de la figure comme se rapprochant indé- finiment de la première : ce qui précède subsiste, et le centre de rotation 0 tend vers une position-limite que Ton appelle le centre instantané de rotation de la figure mobile, dans la première position. De plus , MM' a pour limite la tangente à la trajectoire que décrit le point M dans le mouvement réel de la figure, MO a pour limite la droite qui joint le centre instantané de rotation au point M, et comme l'angle M'MO a évidem- ment pour limite un angle droit , on en conclut : Dans le mouvement continu d'une figure plane , les normales aux trajec- toires de ses différents points, à un même instant , passent toutes par un même point, qui est le centre instantané de rotation pour celte position de la figure. § %— Suite. De ce théorème on déduit facilement les règles suivantes pour déterminer la position du centre instantané clans une position donnée de la figure : — Si un point de la figure mobile est assujetti à décrire une courbe dans le plan, la normale à celte courbe, menée par le point mobile , passe au centre instantané. — Si une courbe invariablement liée à la figure mobile est assujettie à rester constamment tangente à une courbe fixe donnée, la normale aux deux courbes menée par le point de contact passe au centre instantané. — Si elle est assujettie à passer constamment par un point fixe, sa normale en ce point passe au centre instantané. Enfin , on sait depuis longtemps que : Tout déplacement continu d'une figure dans un plan peut être produit en construisant la courbe qui est le lieu du centre instantané sur la figure mobile. DES MOUVEMENTS PLANS. 5 en la liant invariablement à cette figure, et la faisant rouler ensuite sur la courbe qui est le lieu des positions du centre instantané dans le plan. Le point de contact des deux courbes est, à chaque instant, le centre instantané de rotation. Comme nous nous représenterons souvent de cette manière le mouvement d'une figure, nous donnerons à ces deux courbes les noms respectifs de courbe fixe et de courbe roulante; leur commune normale, menée par le centre instantané de rotation , sera la normale commune. §3. — Remarques. Si Ton considère comme fixe la courbe que Ton regardait d'abord comme roulante , tandis que la courbe primitivement fixe roulera sur elle en empor- tant le plan dans son mouvement, il est clair que le mouvement relatif de la figure et du plan restera le môme ; en sorte qu'un point fixe M de la figure trace sur le plan mobile la même courbe que précédemment, lorsque le plan était fixe et le point M mobile. D'ailleurs, le centre instantané est toujours au point de contact des deux courbes : sa position est donc la même dans le> deux cas. Ce mode de description inverse dune même courbe a été indiqué par M. Chasles : or, on peut en déduire des démonstrations très-simples de deux des propositions qui précèdent. Considérons une courbe invariable assujettie à passer constamment par un point fixe. Renversons les mouvements : le point devenu mobile décrira la courbe devenue fixe, donc : la normale à la courbe mobile menée par le point fixe, passe au centre instantané. De même, l'intersection M de deux positions infiniment voisines d'une courbe mobile a pour limite un point de l'enveloppe de cette courbe mobile dans le plan : renversons les mouvements, le point M du plan devenu mobile occupera deux positions infiniment voi- sines sur la courbe devenue fixe ; — le point-limite du point M décrit donc une trajectoire tangente à cette courbe , donc la normale à celte dernière, au point de contact, passe au centre instantané, ce qui renferme une des propositions précédentes. C SUR LES PROPRIÉTÉS GÉOMÉTRIQUES On peut déduire d'une de ces propositions une conséquence assez cu- rieuse, et qui n'a pas non plus, je pense, été remarquée. (Fig. 2.) Soit UV la courbe fixe, U'V la courbe roulante, C le point de contact, et imaginons que la courbe qui se meut, invariablement liée à la tombe roulante, soit une des développantes de celle-ci, U' étant son origine sur la courbe. La tangente commune CM coupe la développante mobile en un point .M, et, d'après ce qui précède, M est le point où elle touche son enve- loppe, puisque CM est évidemment normale à celte développante. .Mais, d'un autre côté, soit U le point de la courbe fixe qui coïncidait avec U' à l'origine du mouvement, et US la développante de celte courbe fixe qui a son origine en U, et qui est aussi normale à CM. Or, d'après la propriété des développées, on a CM = arc U'C, donc CM = arc UC, donc le point M est un point de la développante US. Donc : Lorsqu'une courbe roule sur une autre, en emportant dans son mouve- ment une de ses développantes , ï enveloppe des positions successives de cette dernière est une développante de la courbe fixe. On tire de là plusieurs conséquences; par exemple: lorsqu'un cercle roule sur une droite, toute développante du cercle passe constamment par un cer- tain point de celte droite : ce qui était d'ailleurs évident. § 4. — Conventions. (Fig. 3.) 1. Soient a, u, v les distances respectives de trois points A, U, Y à un même point C, situé avec eux en ligne droite, ces distances étant comptées à partir du point C, positivement dans le sens CA , négativement en sens con- traire, et soit T un point" tel que U soit le milieu de CT. On sait que la con- dition nécessaire et suffisante pour que les poinls A, V soient conjugués har- moniques par rapport à C, T est exprimée par l'équation : 1 \ u a 1 -+- - V 1 1 a u \ V ou 111 (I) DES MOUVEMENTS PLANS 7 quelles que soient les positions relatives des points A, U, V par rapport à C, pourvu qu'on ait égard aux signes dont les distances sont affectées. (Chasles, Géom. sup., p. 42.) Il est, d'ailleurs, facile de vérifier ce résultat. 2. Lorsque nous considérerons les angles décrits par une droite autour d'un point lié invariablement à une figure mobile , nous regarderons comme positifs les angles décrits dans le sens de la rotation de la figure autour de ce point, et comme négatifs, les angles décrits en sens contraire. De celte manière, l'angle total décrit par la droite après un temps quelconque, sera toujours la somme algébrique des angles partiels. [Fig. 4.) 3. Soit M un point quelconque du plan, C le centre instantané de rotation pour l'instant que Ton considère, P un point tel que M soit le milieu de GP. Nous dirons simplement que P est l'homologue du point M, en sorte qu'un point étant donné, son homologue se construira immédiatement. § S. — Théorème général sur le mouvement d'une figure dans un plan. [Fig. 5, 6, 7.) Une figure se déplace d'un mouvement continu : soit C le centre instantané pour une position donnée de la figure , M un point lié à celle-ci, MC est la normale à la trajectoire qu'il décrit, Considérons une seconde position quelconque de la figure, soient alors C, le centre instantané, 31, le point décrivant, 31, C, la normale à sa trajectoire, et soit C le point de la figure mobile dans sa première position qui vient en C, dans la seconde; de sorte que la droite 31C vient en 31, C, coïncider avec la seconde normale. L'angle total V, dont la normale à la trajectoire a tourné autour du point mo- bile, peut être considéré comme résultant de l'angle CMC ou 31, qu'elle décrit autour de ce point dans la figure mobile, et de l'angle Q, dont la figure mobile tourne autour du même point : Q est ce que nous avons appelé la rotation de la figure. D'après nos conventions , on aura donc toujours : v = m -<- n en tenant compte des signes dont les angles sont affectés. 8 SUR LES PROPRIÉTÉS GÉOMÉTRIQUES L'angle M, par exemple, est positif pour tout point situé d'un côté de la droite CC, négatif pour tout point situé de l'autre côté. Sur CC, et du côté de cette droite pour lequel l'angle M est toujours négatif, décrivons le segment capable de l'angle Q. : pour tout point M de cette circon- férence , l'angle M est négatif et égal à — û , ou positif et égal à d 80° — Q , suivant que ce point est de côté ou d'autre de la droit CC; donc l'angle V est nul dans le premier cas, égal à 180° dans le second, d'où : Théorème I. — Lorsqu'une figure invariable se déplace sur un plan d'un mou rement continu, si l'on considère deux quelconques de ses positions, il y a une infinité de points de la figure mobile dont chacun jouit de celte pro- priété : que les normales à la trajectoire qu'il décrit, dans ces deux posi- tions de la figure, sont parallèles entre elles. Le lieu géométrique de ces points est un cercle passant par les deux points de la figure mobile qui coïncident avec le centre instantané dans ces deux positions. § 6. — Application à un mouvement infiniment petit. Supposons infiniment voisines les deux positions de la figure : soit Z le point de rencontre des normales MC, M, C, à la trajectoire d'un point quel- conque M lié à la figure mobile. La rotation infiniment petite Q. ayant pour effet d'amener C en C, , il est clair : (Fig. 3.) 1° Que, si le point décrivant M est de l'autre côté de CC par l'ap- port à C,, l'angle M est négatif, et de plus, il est plus petit que û, si le point M est hors du cercle déterminé dans le théorème Ier. L'angle V est donc positif; donc les normales se coupent en Z au delà du point C par rapport à M; (Fig. 6.) 2° Si M est dans l'intérieur du cercle, l'angle M est négatif et >û, V est négatif; donc les normales se coupent en Z du côté CM et au delà du point M par rapport à C ; [Fig. 7.) 3° Si M est du même côté de CC que le point C,, l'angle M est positif, V est donc positif, et les normales MC, M,C, se coupent en Z entre les points C et M. Mais Z, à la limite, est le centre de courbure de la trajectoire du point M. DES MOUVEMENTS PLANS 9 ce — D'autre part, le rayon du cercle susdit est égal évidemment à 2 sin n ; de sorte que , si Ton désigne par tX le rayon du cercle-limite , on a : ,. CC ,. n 1 ft = hm ■ — , ou lim = • Théorème II. — Lorsqu'une figure se meut sur un plan d'un mouvement continu, il y a dans chaque position de cette figure une infinité de ses points qui décrivent actuellement un point d'inflexion sur leurs trajectoires ; — le lieu de ces points est une circonférence passant par le centre instantané, et qui a son centre sur la normale commune. Ce cercle est d'ailleurs de l'autre côté de la courbe roulante par rapport à la courbe fixe. Nous lui donnerons le nom de cercle d'inflexion, et le point diamétralement opposé au centre instantané sur sa circonférence sera le pôle d'inflexion : il sera toujours noté par la lettre I. Théorème III. — Tout point de la figure mobile situé hors du cercle d'in- flexion décrit une trajectoire qui tourne sa concavité vers le centre instantané de rotation. Tout point situé dans l'intérieur du même cercle, au contraire, décrit une trajectoire qui tourne sa convexité vers le centre instantané. Le cercle d'inflexion jouit donc de propriétés remarquables dans la figure en mouvement : il varie d'ailleurs avec la position de celle-ci. Ces tbéorèmes sont complètement généraux et indépendants des conditions qui règlent les mouvements de la figure. (Figures S, 6, 7.) Désignons par y l'angle aigu de la normale CM à la trajectoire du point .M avec la normale commune, et soient u, v les dis- tances du centre instantané au point 31 et au centre de courbure de sa trajec- toire, ces distances étant comptées à partir du point C, sur la normale, positivement du côté où tombe la projection du pôle d'inflexion sur cette normale, et négativement en sens contraire. II est clair, d'après cette con- vention, (pie u sera toujours de signe contraire à celui de l'angle M, et v de signe contraire à celui de l'angle Y. Les triangles CMC, CZC, donnent, en conséquence : A CC cos f , CC, cos ? u v Tome XXX. 2 10 SUR LES PROPRIETES GEOMETRIQUES A en négligeant des quantités infiniment petites par rapport à 31 et V. Substi- tuons les valeurs de M, V dans l'équation (2), divisons par CC cosy, en observant que il vient ou enfin • CC, ,. a i ira = I , et lim = — , ce ce m î i i V U 211 COS y Remarquons maintenant que 2R cos % exprime la distance du centre in- stantané à la projection I' du pôle d'inflexion sur la normale CM, et que l'équation (3) est d'ailleurs complètement générale, eu égard aux signes des quantités, et, d'après le § 4- , nous pourrons énoncer le théorème suivant : Théorème IV. — La projection du pôle d'inflexion sur la normale à la trajectoire d'un point est le conjugué harmonique du centre de courbure de celle trajectoire , par rapport au centre instantané de rotation et à l'homologue du point décrivant. Cette relation géométrique très-simple est, de plus, indépendante des posi- tions relatives des points I',M,C,Z et des conditions qui déterminent le mou- vement de la figure. ,§ 7. — Détermination géométrique du pôle d'inflexion. [Figures 8 , 9, 10.) Si par le point C, on mène une normale à la courbe fixe, par C une normale à la courbe roulante, soit 0 et 0' les points où ces normales coupent respectivement la normale commune : les arcs CC„ CC étant égaux, C'O' est la droite de la figure mobile qui vient s'appliquer sur la nor- male C,0, lorsque le point C est venu en C,; en sorte que CO, C,0 sont deux normales infiniment voisines à la trajectoire que décrit le point 0'. Mais d'ail- leurs 0',0 ont respectivement pour limites les centres de courbure de la DES MOUVEMENTS PLANS. i\ courbe roulante et de la courbe fixe, relatifs au point C; donc le centre de courbure de la trajectoire que décrit le point de la figure mobile qui coïncide actuellement avec le centre de corn-bure de la courbe roulante, est au centre de courbure de la courbe fixe. En appliquant le théorème IV, nous aurons donc immédiatement celui-ci : Théorème V. — Le pôle du cercle d'inflexion est le conjugué harmonique, sur la normale commune, du centre de courbure de la courbe fixe, par rap- port au centre instantané et à l'homologue du centre de courbure de la courbe roulante. (Fig. 8.) Lorsque la courbe fixe et la courbe roulante tournent leurs con- cavités en sens contraire, le cercle d'inflexion est, d'après ce qui précède, du même côté de la tangente commune que la courbe roulante. (Fig. 9.) Lorsque les deux courbes tournent leurs concavités dans le même sens, si le rayon de courbure IV de la courbe roulante est plus petit que le rayon de courbure R de la courbe fixe, le cercle d'inflexion tombe du même côté de la tangente commune que les deux courbes. (Fig. 10.) Au contraire, lorsque R' > R, il tombe de l'autre côté de la tangente. Dans tous les cas, la détermination du cercle d'inflexion est ramenée à une règle simple, uniforme et générale, et l'on peut en déduire des construc- tions graphiques en n'employant même que des intersections de lignes. On peut aussi obtenir R en fonction de R et R', en faisant dans l'équa- tion (3) : ? = o, u = R', v = R, d'où: — — — (4) m ~ ~~ R' — r et cette formule sera générale , si l'on a égard aux signes dont R et R' doivent être affectés, c'est-à-dire le signe -f- du côté CI, et le signe — du côté opposé. n SUR LES PROPRIÉTÉS GÉOMÉTRIQUES § 8. — Corollaires du théorème IV. Corollaire I. — Si Ton regarde comme fixe la courbe prise d'abord pour roulante, et vice versa, il faut permuter R et R' dans l'équation (4), ce qui donne pour 2ft une valeur égale et de signe contraire : le pôle d'inflexion décrit un arc de 180° autour du centre instantané. D'autre part, si, dans l'équation (3), on permute u et v l'un dans l'autre, en changeant le signe de U, l'équation ne cesse pas d'être satisfaite, donc : Soit Z le centre de courbure de la trajectoire d'un point M; renversons les mouvements en faisant rouler la courbe , regardée d'abord comme fixe, sur celle que l'on regardait comme roulante. La trajectoire du point Z, supposé lié à la nouvelle courbe routante, aura réciproquement son centre de cour- bure au point M. Corollaire II. {Fig. 11.) — Soient A, R deux points pris sur la normale commune, et tels que I soii conjugué harmonique de R par rapport à C et au point homologue du point A. Projetons A, I, R en A', I', R' sur une droite quel- conque passant par le centre instantané, on sait que C, I', R' et l'homologue du point A' seront encore en proportion harmonique; donc, d'après le théo- rème IV, R' est le centre de courbure de la trajectoire qui décrit le point A' de la figure mobile. Or, les lieux des points A', R' sont deux circonférences décrites sur AC, BC comme diamètres; d'où je conclus : Tous les points de la figure mobile , situés sur une circonférence tangente à la courbe fixe au centre instantané, décrivent des trajectoires qui ont leurs centres de courbure sur une même circonférence , tangente aussi à la courbe fixe au centre instantané. Corollaire III. - - Lorsque le point M est situé sur la circonférence du cercle osculateur de la courbe roulante, on a : u = 2R' cos ?, et l'équation (3) devient : t i _[ 2ft cos ï 2R' cos s v DES MOUVEMENTS PLANS. 15 D'ailleurs l'équation (4) donne : i 2 2U COS y 2R' COS y R COS y ' d'où : i _l_ t 2R' COS y R COS y V ' ou bien : i i i K cos y 2R' cos y t' et il faut remarquer que cette équation, en tenant compte des signes de R, R', v, est tout à fait générale. Mais en désignant par N le point où la nor- male fllC coupe le cercle osculateur de la courbe fixe , on a toujours , en gran- deur et en signe : CN = 2R cos y; donc, en vertu du § 4 , l'équation ci-dessus exprime que C, N sont conju- gués harmoniques par rapport à M et au centre de courbure de sa trajec- toire. De là : Théorème VI. — Lorsque le point décrivant se trouve sur le cercle oscu- lateur de la courbe roulante, le centre de courbure de sa trajectoire est le conjugué harmonique du point décrivant par rapport aux deux points où la normale à cette trajectoire coupe le cercle osculateur de la courbe fixe. Le théorème a lieu, quelles que soient les positions relatives de deux cer- cles osculaleurs. Corollaire IV. — Enfin , en rapprochant Tune de l'autre les équations (3) et (4), et désignant par p le rayon de courbure de la trajectoire, on aura l'équation : — — — = COS y W R' R i \ m v I pour déterminer p, en observant que p = ± (m — v). On doit toujours avoir égard aux signes de R, R', u, v. ii SUR LES PROPRIETES GEOMETRIQUES §9. — Centre de courbure d'une courbe de forme invariable mobile sur un plan. [Fig. 12.) Considérons maintenant deux positions infiniment voisines AB, A'B', d'une courbe de forme invariable qui se déplace sur un plan; menons CM normale à AB; M est le point de contact de cette courbe avec son enveloppe, pour la première position, et CM est en même temps la nor- male à l'enveloppe au point M. De même, C,M,, étant menée normale à A'B', sera la normale à l'enveloppe pour cette seconde position, et le point de rencontre Z de ces deux normales a pour limite le centre de courbure de l'enveloppe, relativement au point M. Mais si l'on mène C'iM' normale à AB, la normale C,M, n'est autre chose que la droite C3I' transportée dans la se- conde position de la figure; d'où il résulte que le point de rencontre X des droites CM, CM', supposé lié à AB, décrit une trajectoire dont CM, C,M, sont deux normales infiniment voisines. Mais X, à la limite, coïncide avec le centre de courbure de la courbe AB au point M; donc, enfin, — le centre de courbure de la courbe qui se déplace, relatif au point M où elle touche son enveloppe, décrit, étant lié invariablement à la courbe, une trajectoire dont le centre de courbure coïncide avec celui de l'enveloppe elle-même au point M. La démonstration étant générale, quant aux positions des points que l'on considère, la question actuelle se ramène à celle qui a été traitée, et l'on a ce théorème : Théorème VII. — - Lorsqu'une courbe invariable a un mouvement quel- conque dans un plan, le centre de courbure de l'enveloppe des positions suc- cessives de cette courbe est déterminé, pour une position quelconque, par le théorème IV, en prenant pour point décrivant le centre de courbure de la courbe mobile au point où elle touche son enveloppe. Il n'y aura donc jamais d'incertitude possible, tout étant ramené à un énoncé simple et parfaitement général. DES MOUVEMENTS PLANS. 45 § 10. — Corollaires du théorème VII. Corollaire I. — Il suit immédiatement du ihéorème VII que la position du centre de courbure de l'enveloppe d'une courbe mobile ne dépend pas de celle-ci immédiatement , mais seulement de la position de son centre de cour- bure relatif au point où elle touche l'enveloppe; — d'où résulte (pie, si plu- sieurs courbes mobiles ont leurs centres de courbure coïncidents , leurs enve- loppes auront aussi leurs centres de courbure coïncidents. On déduit facilement de là que : Lorsqu'un système de courbes, développantes d'une même courbe et liées entre elles d'une manière incunable, se meut dans un plan , les enveloppes de ces différentes courbes sont les développantes d'une même courbe fixe. (Fia. /5.) Corollaire II. — Considérons en particulier le cas où la ligne mobile est une droite : son centre de courbure est à l'infini; donc, si nous projetons I en l' sur la perpendiculaire à la droite mobile menée par le centre instantané, et construisons le point Z tel que C soil le milieu de l'Z; Z sera le centre de courbure de l'enveloppe de la droite mobile. Mais le point Z est visiblement sur la circonférence décrite sur CH = 2ÎA comme diamètre; donc on a ce théorème remarquable : Théorème VIII. — Lorsqu'un système de droites liées entre elles invaria- blement se déplace sur un plan d'un mouvement continu, les centres de courbure de leurs enveloppes sont 11 chaque instant sur un même cercle é/jal au cercle d'inflexion et symétriquement placé de l'autre côté du centre instan- tané. Corollaire III. — En désignant par u' la normale CM, par p' le rayon de courbure de la courbe mobile, positif ou négatif dans le même sens que u', par v la dislance du centre instantané au centre de courbure de l'enveloppe, on aura la formule : il / i ■ — — — = cos -, ~- R' R ' \ p -f- u en combinant la formule (o) avec le théorème VII. 16 SUR LES PROPRIÉTÉS GEOMETRIQUES §11.-- Construction géométrique du centre de courbure. [Fig. /-/.) Le théorème IV conduit à une construction géométrique très- simple du centre de courbure de la trajectoire d'un point lié à la figure mo- bile, et par suite du centre de courbure de l'enveloppe d'une ligne mobile, puisque, d'après le théorème VII, cette question rentre dans la première. Soient, en effet, C le centre instantané, 31 le point décrivant, CM la nor- male, et I' la projection du pôle d'inflexion sur cette normale; soient, en outre, M,, I,, les homologues des points M,I; prolongeons la perpendiculaire II' jusqu'à sa rencontre en G avec la droite M, I, , et soit GZ parallèle à la nor- male commune: cette parallèle coupe la normale C3I en Z, centre de cour- bure. En effet, I étant le milieu de CI, , les droites GM„ GI', GC, GZ forment un faisceau harmonique : ce faisceau est coupé par la normale MC en quatre points M„ I', C, Z, qui sont en proportion harmonique; donc, M, étant l'ho- mologue du point M, Z est bien le centre de courbure de la trajectoire de ce dernier. Mais si je joins MI , et si je mène CK parallèle à I'I , ces deux droites se coupent évidemment en K sur la droite GZ, à cause de l'égalité des trian- gles II,G, CIK; donc, comme il suflît de déterminer le point K, nous avons la construction géométrique suivante : {Fig. 15.) Par le point de rencontre K de la droite qui joint le point dé- crivant au pôle d'inflexion, et de la perpendiculaire à la normale élevée par le centre instantané, ou mène une parallèle à la normale commune : cette parallèle coupe la normale à la trajectoire en un point Z qui est le centre de courbure. Cette construction si simple, et qui d'ailleurs est absolument générale, suppose seulement la connaissance du point décrivant, du centre instantané et du pôle d'inflexion. Nous allons nous occuper de la détermination de ce dernier point. DES MOUVEMENTS PLANS. 17 §12. — Déterminations géométriques du pôle d'inflexion. Lorsque le mouvement de la figure mobile est déterminé par le roulement d'une courbe sur une autre, le théorème V donne immédiatement le centre instantané et le pôle d'inflexion. Dans les cas suivants, le théorème IV, cpii détermine le centre de courbure de la trajectoire au moyen du pôle d'in- flexion, sert à résoudre immédiatement le problème inverse. Théorème IX. — Connaissant les normales aux trajectoires que décrivent deux points de la figure mobile, dans une position donnée de cette figure, leur point de rencontre est le centre instantané. Prenons sur chaque normale le conjugué harmonique du centre de courbure de la trajectoire , par rapport au centre instantané et à l'homologue du point décrivant : ce point sera la projection du pôle d'inflexion sur cette normale, et la perpendiculaire à celle- ci, menée par ce point , passera au pôle d'inflexion qui se trouvera ainsi dé- terminé par l'intersection de deux droites. Tous les théorèmes suivants se dédufsent aussi immédiatement du théo- rème IV ou du théorème VII, en observant d'ailleurs que, lorsqu'un point est à l'infini, son conjugué harmonique est à égale distance des deux autres. Théorème X. — Lorsqu'un point de la figure mobile décrit une droite, cette droite passe par le pôle d'inflexion. Théorème XL — Une courbe liée invariablement à la figure mobile reste constamment tangente à une courbe fixe: la normale à ces deux courbes au point de contact passe au centre instantané. — On cherchera sur cette nor- male le conjugué harmonique du centre de courbure de la courbe fixe donnée , par rapport au centre instantané et à l'homologue du centre de courbure de la courbe mobile : — - ce point sera la projection, sur la normale, du pôle d'inflexion. Quand la ligne mobile est une droite, son centre de courbure est à l'in- fini, donc : Théorème XII. — Lorsque la ligne mobile du théorème XI est une droite, Tome XXX. 5 18 SUR LES PROPRIÉTÉS GÉOMÉTRIQUES le centre instantané est à égale dislance, sur la normale au point de con- tact, du centre de courbure de la courbe fixe et de la projection l' du pôle d'inflexion, ce qui dé fer mine ce point V. Théorème XIII. - - Lorsqu'une courbe mobile reste toujours tangente à une droite fixe, la projection du pôle d'inflexion, sur la normale qui passe par- lé point de contact , coïncide avec le centre de courbure de la courbe mobile. Si la courbe fixe se réduit à un point , son centre de courbure coïncide avec ce point; donc : Théorème XIV. - - Lorsqu'une courbe, liée à la figure mobile, est assu- jettie éi passer constamment par un point fixe, si on lui mène par ce point une normale, elle passe, comme on sait , au centre instantané ; et le conjugue harmonique , sur cette normale, du point fixe par rapport au centre instan- tané et à l'homologue du centre de courbure de la courbe mobile , est la pro- jection du pôle d'inflexion sur cette même normale. Le théorème suivant est un cas particulier : Théorème XV. - - Lorsqu'une droite de la figure mobile passe constam- ment par un point fixe, si on lui mène par ce point une perpendiculaire, le centre instantané est à égale distance , sur cette perpendiculaire , du point fixe et de la projection du pôle d'inflexion. On voit (pie tous ces théorèmes ne sont que des cas particuliers des théo- rèmes IV et VII , et sont renfermés en quelque sorte dans le même énoncé. Ils serviront, dans les différents cas, à construire le pôle d'inflexion. § 13. — Applications. (Fig. 18.) I. Une droite de longueur constante AB glisse par ses extré- mités sur deux droites fixes OX, OY, faisant entre elles un angle quelconque : on demande le centre de courbure de l'ellipse décrite par un point quel- conque M de cette droite. Par les points A et B, j'élève AC, BC respectivement perpendiculaires à DES MOUVEMENTS PLANS. 19 OX, OY : leur point de rencontre C est le centre instantané de rotation. D'ailleurs, en vertu du théorème X, les droites OX, OY passent par le pôle d'inflexion ; ce pôle coïncide donc avec leur intersection en 0; d'ailleurs, CM est la normale à la trajectoire du point M. Il suffit donc d'appliquer la con- struction géométrique du § 11, et Ton a cette construction très-simple du centre de courbure de l'ellipse décrite par le mouvement d'une droite : On joindra OM, on élèvera CK perpendiculaire à la normale CM, par le centre instantanée, et par le point K, où cette perpendiculaire rencontre OM, on mènera KZ parallèle à OC : KZ coupera la normale CM en Z, centre de courbure de l'ellipse. On sait, d'ailleurs, que le mouvement d'une droite que nous considérons ici se ramène au roulement d'un cercle sur un cercle de rayon double, inté- rieurement : cette considération conduirait aux mêmes conséquences. Relati- vement à ce mouvement, qui a été très-étudié, je ferai encore remarquer que l'enveloppe des positions successives d'un même diamètre du cercle mobile est en même temps l'enveloppe des ellipses décrites par ses différents points, et que deux points conjugués harmoniques , par rapport aux extrémités d'un même diamètre, décrivent des ellipses semblables et semblablement placées. II. Cycloïde ordinaire. — Le cercle oscillateur de la courbe roulante coïn- cide ici avec le cercle roulant lui-même; il suflit d'appliquer le théorème VI, en observant que le cercle oscillateur de la courbe fixe se confond avec une droite , en sorte que le deuxième point de rencontre est à l'infini. Le centre instantané est donc à égale distance du point décrivant et du centre de cour- bure de la cycloïde, ce qui est connu. (Fig. 1S.) III. Epicycloïde. — Soient 0, 0' les centres respectifs du cercle fixe et du cercle roulant, M le point décrivant, C le centre instantané; CM est la normale, et soit N le point où elle coupe le cercle fixe. D'après le théo- rème VI , le centre de courbure de l'èpicycloïde est le conjugué fmrmonùpie du point M, par rapport aux points C, N. J'ignore si celte relation avait été remarquée. Menons le diamètre MO'P, et ON, qui lui sera évidemment parallèle, en sorte que les droites OM, 00', OP, ON forment un faisceau harmonique, puis- 20 SUR LES PROPRIÉTÉS GÉOMÉTRIQUES que 0' esl le milieu de MP. (le faisceau est coupé par la normale CM en quatre poinis M, C, Z, N, qui forment conséquemment une proportion harmonique; donc Z est le centre de courbure cherché. De là résulte celle construction très-simple : On tire le diamètre MO'P, la droite PO, et celle droite coupe la normale à l'épicycloïde au centre de courbure Z. Cela a lieu pour les épicycloïdes intérieures ou extérieures. IV. Spirale. d'Archimède. - - M. Chasles a démontré1 le théorème sui- vant : Si l'on donne un angle droit CSM dont un coté CSest indéfini, et l'autre SM égal au rayon d'un cercle; que l'on fasse rouler le premier coté sur la circon- férence du cercle, l'extrémité M du second côté décrira la spirale d'Archimède. (Fig. 16.) Le centre instantané est au point de contact C : CM est donc la normale à la spirale. Prolongeons le rayon OC du cercle d'une longueur CI = OC; I esl le pôle d'inflexion, d'après le théorème IV, car le centre de courbure de la courbe roulante esl à l'infini. ICO esl la normale commune. Cela posé, il suffit d'employer la conslruclion géométrique du § 11 , et l'on a cette conslruclion très-simple : On élèvera en C une perpendiculaire à la normale CM, et, parle point K, où elle coupe la droite IM qui joint le point décrivant au pôle d'inpexion, on mènera KZ parallèle « ICO; KZ il - désignant le temps infiniment petit pendant lequel le déplacement a lieu. Mais : donc .. CC CC, n lim — = lim = f, et lim — = a, T T T 2U = - , et par suite, V = — • a 2E La vitesse d'un point de la figure mobile est à la vitesse de roulement comme la distance de ce point au centre instantané est au diamètre du cercle d'inflexion. D'où il résulte immédiatement que le point qui coïncide actuellement avec le pôle d'inflexion se meut avec une vitesse égale à la vitesse de roulement. Lorsque le centre instantané décrit une ligne droite, le diamètre 2R est égal au rayon de courbure de la courbe roulante : on déduira de là, par exemple, la vitesse du point décrivant dans la cycloïde ordinaire et une rectification fort simple de cette courbe. On peut encore remarquer que, lorsque le point décrivant est un point du cercle d'inflexion , on a : 2ïl cos en désignant par y l'angle de la normale à la trajectoire du point M avec la normale commune. Donc , pour ce point : V = £ COS ». Mais la direction de la vitesse du centre instantané est perpendiculaire à la normale commune; d'autre part, la vitesse du point mobile est perpendicu- DES MOUVEMENTS PLANS. 27 laire à la normale à sa trajectoire ; les directions de ces deux vitesses font donc entre elles un angle égal à ; d'où je conclus que : La vitesse de roulement projetée sur la tangente à la trajectoire d'un point du cercle d'inflexion , est en grandeur et en direction la vitesse de ce point. § 16. — Autres propriétés du cercle d'inflexion. En général, le cercle d'inflexion se déplace, non-seulement sur le plan fixe, mais aussi sur la figure en mouvement; cependant, s'il arrive qu'un point de la figure en mouvement soit, dans toutes les positions de celle-ci, sur la circonférence du cercle d'inflexion, le rayon de courbure de sa trajec- toire étant constamment infini, ce point décrira une ligne droite, et il est évident (pie cette condition est d'ailleurs nécessaire. Or, cette condition s'exprime facilement par l'analyse, en rapportant la courbe roulante à un système de coordonnées polaires considéré comme lié invariablement avec elle et ayant pour pôle le point décrivant que l'on consi- dère. Soient alors u le rayon vecteur, $ l'angle polaire, compté à partir d'une droite déterminée dans la figure en mouvement, s l'arc de la courbe, compté à partir d'un certain point de celle-ci, et p l'angle que fait le rayon vecteur avec la tangente à la courbe au centre instantané. Le point décrivant étant sur le cercle d'inflexion, son rayon vecteur u satisfait à l'équation : u = 2U sin /x. Or, on sait qu'en général : sm /j. dB u ds ' de plus, comme 1 1 m ='~ r7 " R et que le rayon de courbure R' de la courbe roulante est donné par l'équa- tion : \ dfi dH R7 == rfT "*" ds' 28 SUR LES PROPRIÉTÉS GÉOMÉTRIQUES il vient, réductions faites : dfc i ds ' R ~ °' Or, R, rayon de courbure de la courbe fixe, est une fonction donnée de Tare de cette courbe, ou, ce qui revient au même, de l'arc s de la courbe roulante (puisque les arcs correspondants de ces deux courbes sont toujours égaux). Cette équation peut donc être regardée comme l'équation différen- tielle de la courbe roulante entre l'angle p et l'arc s, et, par l'intégration, elle donnera la solution de cette question : Quelle doit être la courbe qui roule sur une courbe donnée, pour qu'un point lié invariablement à la première décrive une droite. Par exemple, supposons que la courbe fixe soit une droite, R est infini, on a donc : dft d$ du dS —- = o, yu = const, tang /x = u — = const = a, — = — , as du n a et en intégrant Lu = - a C'est l'équation d'une spirale logarithmique : a, c sont deux constantes à déterminer d'après les positions initiales du point et du centre instantané. On retrouve donc ce théorème de Lahire : Lorsqu'une spirale logarithmique roule sur une ligne droite, son pale décrit une autre ligne droite. La méthode qui vient d'être indiquée est toutefois très-incommode et exige que l'on fasse souvent plusieurs intégrations, et que l'on tienne compte du signe de R. On peut résoudre le même problème par une marche beaucoup plus simple, comme il suit : (Fig. 23.) Soient AC la courbe fixe, RC la courbe roulante dans une po- sition quelconque, C le centre instantané, M le point décrivant, MX la droite qu'il décrit et qui sera visiblement perpendiculaire à CM. A, O étant les po- sitions initiales respectives du centre instantané et du point décrivant, rap- DES MOUVEMENTS PLANS. 29 portons la courbe fixe aux axes rectangulaires OX, OA, et soient {x, y) les coordonnées du point C dans ce système d'axes. Rapportons de même la courbe roulante au pôle M et à Taxe polaire MB (B étant la position initiale du centre instantané dans la figure mobile), ce pôle et cet axe étant emportés dans le mouvement de la courbe roulante et liés avec elle; et soient u = MC, e=BMC les coordonnées polaires du point C dans ce système. Enfin, après un temps infiniment petit, soient C4 le centre instantané, M, le point décri- vant et CM la droite qui vient en C,M,. D'après le paragraphe précédent, la vitesse V du point décrivant est donnée par la formule : V = u«; w exprimant la vitesse de rotation de la figure autour du point M. Mais il est clair que ,. MM, dx V = lira = — , dt de que la rotation infiniment petite û est ici égale à CMC ou A l'angle 0 dont le cercle mobile a tourné autour de son centre, on a ba-\ 3 l2 H a — - ttb sin a. 2 / 2 Après une révolution entière du cercle générateur, U est égal à Taire A du cercle lui-même, Taire A'MBC est égale à Taire de la couronne comprise entre les deux cercles; en désignant par B Taire du petit cercle, on a donc : E = 5A — (A — B) = 2A + B. L'aire d'une cycloïde allongée, correspondante à une révolution entière du cercle générateur , est donc égale à deux fois l'aire du cercle générateur, augmentée de l'aire du cercle que décrit le point mobile autour de son centre. Dans la cycloïde ordinaire, le point décrivant est sur la circonférence du cercle roulant, Taire A'iMBC est donc nulle : L'aire comprise entre la cycloïde, sa base et une normale quelconque, est triple de l'aire du segment retranché dans le cercle roulant par cette normale. Après une révolution complète, on retrouve le théorème ordinaire : e = 3A. 36 SUR LES PROPRIÉTÉS GÉOMÉTRIQUES {Fig. 26.) Épicycloïde. — Soient 0, 0' les centres respectifs du cercle fixe et du cercle roulant, C le centre instantané, M le point décrivant et MU la normale à sa trajectoire; A, A' enfin les points en contacta l'origine du mouvement, et BM l'arc de cercle de rayon O'M décrit du centre 0'. L'aire U est toujours le secteur A'MU. Les arcs AC, A'U étant égaux, les angles 0 et 0' sont en raison inverse des rayons R et R', et la rotation totale à partir de l'origine, qui a pour expression 0 -f 0', devient OR' R + R' 0' + = 0'. R R L'angle en 0' est, d'ailleurs, la différence des angles A'MC, MCO', d'où il résulte, par un raisonnement exactement semblable à celui que nous avons fait pour la cycloïde, que, si l'on désigne par S l'aire A'MBU comprise entre les arcs UA', BM et les rayons O'A', O'U, on aura pour expression de l'aire désignée par V : r -+- R' R [2U et, par conséquent, l'aire I, comprise entre l'épicycloïde, le cercle fixe et les normales AO, CM, est donnée par l'équation _„«.Lt* ,„_.,. Après une révolution complète du cercle roulant, U est égal à l'aire A de ce cercle, et S à A — B, B désignant l'aire du cercle que décrit le point 31 autour du centre 0' : on a donc, pour l'aire totale de l'épicycloïde correspon- dante à une révolution entière du cercle roulant , R + R' On passe très-facilement de là aux expressions algébriques de ces aires, comme pour la cycloïde. DES MOUVEMENTS PLANS. 57 Dans I'épicycloïde ordinaire, le point décrivant étant sur la circonférence du cercle roulant, S = 0, et Ton a, pour l'aire terminée à une normale quelconque 5R -+- 2R' s = —s- u- Donc, l'aire comprise entre I'épicycloïde ordinaire, sa base et une normale quelconque, est au segment du cercle roulant retranché par cette normale, comme trois fois le rayon du cercle fixe, plus deux fois le rayon du cercle mobile, est au rayon du cercle fixe. Après une révolution complète , U = A. Lorsque le cercle roulant est intérieur au cercle fixe, le signe de K' seul est changé; et Ton déduit facilement des théorèmes généraux qui précèdent Taire de l'ellipse. HY Mcm.coar. et des sav. <■'//:, Tome. \\\ Mémoire âe MïCUb'crt , /•/ . /. Mem.cour.etctesserp.eù\, Tome \\\. Mémoire ■ M? 'ûûàerf pi. Ment, mur. et des sav. etr., Tome A A A . Mémoire de MC 'Gatat,pl.3 y ' / / ESSAIS ANALYTIQUES. LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. F. DAGOREAl; INSPECTEUR EN CHEF DES CONTRIBUTIONS DIRECTES, DOUANES ET ACCISES. [Mémoire présenté le 5 décembre 1857. j Tome XXX. ESSAIS ANALYTIQUES. LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. EQUATION GÉNÉRALE. 1. Soil A(/5 -+- Bxy2 + Cx2j/ -t- Dot3 +- Ey* -t- Fxy + Gx'2 -»- Hy -t- Kx -t- L = o (A) une équation complète du 3me degré à deux variables. Tous les coefficients de cette équation étant indéterminés, elle est apte à représenter analytique- ment une courbe quelconque du 3me ordre; elle peut donc être considérée comme l'équation générale de cet ordre. BASE DE LA DIVISION. 2. Soit y=zx -j- q l'équation d'une droite rapportée aux mêmes axes que la courbe de l'équation (A) : toutes les positions que ces deux lignes peuvent prendre l'une par rapport à l'autre, résulteront de la détermination des coefficients de l'équation [Az*h- Br2 -+- Cz -+- D]x3h- [ ( 5Az2 -t- 2Bz + C)q -+- Ez2 -t- Fz -+- G]x2 -+- [(3Az -*- B)r/2 -+- (2Ez-+- F)q h- Hz -t- K ] x + hq* + E72 -+- % + L = o (B) , provenant de la combinaison des équations des deux lignes. Or, dans cha- cune de ces positions, la droite conserve la même forme : c'est donc la courbe 4 LES LIGiNES DU TROISIEME ORDRE. qui subit certaines modifications pour passer d'un cas à un autre. La résul- tante (B) doit, par conséquent, fournir les moyens de distinguer entre elles les diverses lignes du 3me ordre. CLASSES. Directions asymptotiques. 3. L'équation (B) étant du 3me degré, peut avoir ses trois racines réelles, et Tune au moins doit l'être. Les deux lignes peuvent donc se rencontrer en (rois points, et elles doivent toujours se rencontrer au moins en un point. Cependant, si le coefficient du terme en x" devient nul, la seule racine réelle ou l'une des trois racines réelles devient infinie, et alors les deux autres racines sont imaginaires ou réelles. Dans ce cas, l'un des points de rencontre est rejeté à distance infinie, et il ne peut plus exister, à distance finie, que deux points de rencontre, ou imaginaires ou réels. Mais l'annulation du coeffi- cient du terme en a? exige l'équation kz* -+- Bz~ -j- Cz -j- D = 0 (C), laquelle ne peut être satisfaite que par certaines valeurs de z. Or, z représente la di- rection de la droite; donc il existe dans les lignes du 3me ordre des directions telles, que les droites qui en sont pourvues rencontrent la courbe en un point à dislance infinie. Nous donnerons à ces directions le nom de directions asymptotiques. 4. Les trois racines de l'équation (C) peuvent être réelles, et l'une d'elles au moins doit l'être. En cas de réalité des trois racines, elles peuvent être toutes inégales ou simples; il se peut aussi que deux d'entre elles soient éga- les ou, ce qui revient au même, qu'il y ait une racine simple et une racine double; enfin elles peuvent être toutes égales, égalité qui produit une racine triple. Il en résulte que les lignes du 3me ordre possèdent toujours au moins une direction asymptotique qui peut être simple ou triple; elles peuvent aussi posséder trois directions asymptotiques simples, ou bien une direction simple et une direction double. Chacun de ces quatre cas pouvant être con- sidéré comme le caractère distinctif d'une classe, les lignes du troisième ordre peuvent être divisées en quatre classes, distinguées par le nombre et la nature des directions asymptotiques. Les conditions analytiques de ces LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. 5 classes consistent dans les relations qui, pour chacune d'elles, doivent exister entre les cocflicients de l'équation (Cj. GENRES. A symptotes rectitignes. 5. L'équation (C) étant indépendante de q, chaque direction asymplolique appartient à un groupe de parallèles en nombre indéfini. Lorsque la valeur de z, tirée de l'équation (C), n'annule que le coeiïîcient du terme en x\ toutes les parallèles du système qui correspond à cette valeur de z rencon- trent la courbe à distance finie, en deux points réels ou imaginaires; mais si cette valeur annule en même temps les coefficients de ar1 et de x'2, l'équa- tion (B) est réduite à une relation du 1er degré en x. Il y a alors deux points de rencontre à dislance infinie, et les droites qui satisfont à la fois aux con- ditions (C) et (3A*S + 2B; + C) q + E^2 + F^ + G = o (D) , ne peuvent rencontrer la courbe à distance finie qu'en un seul point; si, outre les deux coefficients précités, celui de x devient aussi nul, c'est-à-dire, si l'on a aussi {SXz + B)v2 + (2Ec + V)q + H* + K = o (E), l'équation (B) de- vient indépendante de x, et ne peut plus être satisfaite que par des valeurs infinies de cette variable ; car on ne saurait avoir en même temps \q~' -f Eq'2 + Hq-\- L = o, sans que la ligne dégénérât en un système d'une droite et d'une section conique. Les droites qui satisfont aux trois conditions (C), (D) et (E) ne peuvent plus rencontrer la courbe à dislance finie. 6. Le coefficient de x2 est une fonction de z et de q; il peut donc devenir nul par l'une ou par l'autre de ces arbitraires. Lorsque l'équation (C) est satis- faite, la valeur de z est déterminée, et alors le coefficient de ar ne contient plus d'autre arbitraire que q, au moyen de laquelle l'équation (D) peut être satisfaite, pourvu que le coefficient de q ne devienne pas nul lui-même, par la valeur attribuée à z, pour satisfaire à l'équation (C). S'il le devienl , l'équa- tion (D) ne peut plus être satisfaite qu'à condition que la même valeur de z satisfasse aussi à l'équation Ez'2 -\- Fz + G = o («). Or, le coefficient de q dans l'équation (D) n'est autre chose que la dérivée première du coefficient de xr\ ou de (C). Le coefficient de q ne peut donc devenir nul qu'à condition 6 LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. que l'équation (G) admette des racines égales; dans ce cas, le coefficient est forcément nul. Si (C) n'admet que des racines simples, l'équation (D) peut toujours être satisfaite par une valeur réelle et finie de q, mais elle ne peut l'être que par une seule valeur de cette arbitraire. 7. Il résulte de ce qui précède que, dans toute direction asymptolique simple, il v a toujours une unique droite spéciale qui rencontre la courbe en deux points à distance infinie, et, par conséquent, ne peut plus la rencon- trer à distance finie qu'en un seul point. Celte droite spéciale est une asym- ptote de la courbe. Chaque direction asymptotique simple possède donc une asymptote rectihgne, déterminée par les conditions (C) et 9 = - 5A.»+aBg+c> et qui coupe la courbe à distance finie en un seul point dont l'abscisse est ,.= A^ + E^ + Hg + L Cependant, si les valeurs de z et de q, aptes à satisfaire aux équations (C) et (D), satisfont également à l'équation (E), cet unique point de rencontre est lui-même rejeté à l'infini, et l'asymptote ne peut plus rencontrer la courbe à distance finie. Il y a, par conséquent, deux cas possibles pour l'asymptote de chaque direction asymptotique simple. Chacun de ces cas constitue un genre différent. 8. Les lignes des deux premières classes ne possèdent que des direc- tions asymptotiques simples; il n'en existe qu'une seule dans la lre classe, et il y en a trois dans la 2me. Les courbes de la l,e classe ne sont donc pour- vues que d'une seule asymptote rectiligne, qui peut les couper en un point, ou ne pas les rencontrer à distance finie , et par suite cette classe n'admet que deux genres. 9. Chaque ligne de la deuxième classe possède trois asymptotes rectilig- nes , dont chacune peut couper la courbe en un point ou ne pas la rencon- trer à distance finie. Si chacun de ces cas d'une asymptote pouvait exister avec les deux cas de chacune des deux autres asymptotes, il y aurait quatre cas différents possibles; mais si les cas de trois asymptotes sécantes, de deux asymptotes sécantes et d'une asymptote non sécante, et enfin d'aucune asymptote sécante, sont possibles, il n'en est pas de même de celui d'une seule asymptote sécante, à cause de l'incompatibilité qui existe entre les con- ditions analytiques nécessaires à ce cas, ainsi que nous le démontrerons plus loin. La deuxième classe n'admet donc que trois genres. LES LIGNES DU TROISIÈME ORDRE. 7 10. Lorsque la condition (C) est satisfaite, la relation 3A^2+2B3+C=o(/5) ne peut exister que pour les directions asymplotiques multiples pour les- quelles elle est de rigueur. Ce cas se présente dans la 3me classe pour la direction asymplotique double, et dans la 4,ue classe pour la seule direction asymptotique qui y existe et qui est triple. Dans celte dernière classe, la valeur de (3A* + B) doit être nulle, tandis que, dans l'autre, elle ne peut l'être. Si, dans le cas d'une direction asymplotique double, la condition («) n'est pas satisfaite, alors le terme en a?2 subsiste dans l'équation (B), et, par suite, toutes les droites de cette direction rencontrent la courbe en deux points réels ou imaginaires, et il n'existe parmi elles aucune asymptote, ou, pour mieux dire, l'asymptote est située à dislance infinie, puisque, dans ce cas, q = _ tf+ft+B. - «. Lorsque la valeur de z, qui satisfait à l'équation (C) et à sa dérivée première , satisfait aussi à l'équation (a) , les termes en x* et en «-disparaissent de l'équation (B), qui n'est plus que du 1er degré en x, et doit toujours être de ce degré pour toutes les valeurs de g, autres que celles qui annulent le coefficient de x. Mais ce coefficient est une fonction du 2me degré en q, qui ne peut être réduite au 1er, parce que (3A~ + B) ne peut être nul. La condition d'annulation du coefficient de x fournit donc pour q deux valeurs qui peuvent être ou imaginaires, ou réelles et iné- gales, ou réelles et égales. Dans le 1er cas, il y a une direction asympto- tique double; chacune des droites de cette direction coupe la courbe en un point, et il n'existe parmi elles aucune asymptote réelle; dans le second cas, il y a parmi ces droites deux asymptotes distinctes parallèles qui ne peuvent rencontrer la courbe à distance finie ; et dans le 3me cas , ces deux asymptotes coïncident et forment une asymptote unique double. Il y a, par conséquent, pour la direction asymptotique double, quatre cas différents, et comme dans chacun d'eux les deux cas de la direction asymptotique simple sont possibles, il en résulte que la troisième classe admet huit genres différents. 11. Si, dans la 4me classe, on donne à z l'unique valeur apte à satisfaire à l'équation (C), la condition (/3) est satisfaite, et on a aussi 3Az + B=o. Le coefficient du terme en a?2 se réduit donc à (E32 + F^ + G) et celui du terme en x à [(2E^ + F) y-ffts + K]. Si la valeur de z, qui satisfait à 8 LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. l'équation (C), ne satisfait pas en même temps à l'équation («), l'équation (B) reste du 2rae degré en x, et, par suite, toutes les droites de la direction asym- ptotique triple rencontrent la courbe à distance finie en deux points réels ou imaginaires, et il n'existe parmi elles aucune asymptote à distance finie. Si la valeur précitée de z satisfait aux conditions (C) et («), l'équation (B) est réduite au 1er degré en x, et comme le coefficient de cette variable est une fonction du 1er degré en q, et, par conséquent, ne peut être annulé que par une seule valeur de cette arbitraire, toutes les droites de la direction asym- ptotique coupent la courbe en un point et comprennent parmi elles une seule asymptote qui ne rencontre pas la courbe à distance finie. Cette asym- ptote n'existe toutefois à distance finie qu'à condition que (2Es+ F) ne soit pas nul, c'est-à-dire qu'à condition que la racine triple de (C) ne soit pas racine double de (a). La direction asymptotique triple admet donc trois cas différents, et comme dans la bme classe il n'y a qu'une seule direction asym- ptotique, il s'ensuit que cette classe n'admet que trois genres. 12. D'après ce qui précède, les quatre classes du 3me ordre peuvent être sous-divisées comme il suit : la lre classe en deux genres; la 2me classe en trois genres; la 3me classe en huit genres, et la Ame classe en trois genres. Il y a, par conséquent, seize genres de lignes du 3me ordre, distinguées par le nombre de leurs asymptotes rectilignes et par le nombre des points d'in- tersection de la courbe avec chacune de ses asymptotes. Les conditions ana- Iytiques de ces genres consistent dans les relations qui doivent exister entre lès coefficients de l'équation de la courbe , pour satisfaire aux hypothèses constitutives de chacun d'eux, et ces relations sont données par l'annulation successive des coefficients de ar et de x dans la résultante (B) , celui de x7" élant nul. ESPÈCES. Tangentes-limites. 13. Du moment que la classe et le genre sont déterminés, l'équation (B) ne peut plus donner que des racines finies, imaginaires ou réelles. La dis- cussion ultérieure de cette équation, appropriée à la classe et au genre, ne peut donc servir qu'à faire connaître le nombre des racines réelles, leur signe LES LIGNES DU TROISIÈME ORDRE. 9 et leur degré de multiplicité, cl par suite, si cette discussion sert de base à la sous-division des genres en espèces, les caractères géométriques qui dis- tinguent ces dernières doivent consister dans des affections de la courbe dans l'espace limité. 14.. Puisque toute ligne du 3,ne ordre possède au moins une direction asymptotique , on peut toujours donner une pareille direction à l'un des axes des coordonnées. Dans ce cas, Tune des racines de l'équation (C) doit être ou infinie ou nulle : il faut donc que l'un des termes extrêmes de cette équation ait un coefficient nul et, par conséquent, que l'équation de la courbe soit dé- pourvue du terme cube de l'une des deux variables. Cette équation peut donc toujours être privée de l'un de ces termes sans cesser d'être générale, et alors elle peut, par rapport à la variable dont le terme cube manque, être résolue comme une équation du 2me degré. En supposant que l'axe des ordonnées ait une direction asymptotique, l'équation de la courbe sera privée du terme en }f: elle sera donc de la forme Kxy* + Cafy + Dx5 + Ef + Vxy -f Gar-f- Hy + Kx + L = o (À'). En la résolvant par rapport à y, on obtient : Cx2 + F x -4- II « /( Cx* + Fx + H)2 — 4(lix-+-E) ( Dx3 -4- Gx* + Kx -4- L ) V == 2(Bx + F) ± V " 4(Bxh-E)s 15. La valeur de y qui précède n'est réelle que pour autant que l'expres- sion sous-radicale ne soit pas négative. Si l'on fait croître x, depuis l'infini négatif jusqu'à l'infini positif, la partie radicale peut devenir nulle un certain nombre de fois. Chaque fois que cela arrive, les deux valeurs correspon- dantes de y sont égales; par suite, la droite menée, parallèlement à l'axe des ordonnées, par le point correspondant à cette valeur de x , est une tangente à la courbe, et ne peut la rencontrer à distance finie qu'au point de contact, à cause de sa direction asymptotique ; comme les valeurs de x qui précèdent et suivent celles qui annulent le radical donnent au polynôme sous-radical des valeurs de signes contraires, il en résulte que la courbe n'existe que d'un côté de la tangente, qu'elle atteint sans la dépasser. Ce polynôme change de signe en passant par zéro : toutes les valeurs de x comprises entre deux va- leurs consécutives dont chacune annule le radical, doivent donc fournir des résultats de même signe, et, par conséquent, deux tangentes consécutives Tome XXX. 2 10 LES LIGNES DU TROISIÈME ORDRE. comprennent entre elles ou une partie de la courbe, ou un espace dans le- quel la courbe n'existe pas. C'est pourquoi nous donnerons à ces tangentes le nom de tangentes -limites; elles servent à déterminer le nombre el la position des parties distinctes dont la courbe se compose. Cliaque valeur de x qui annule le polynôme sous-radical est une racine réelle de l'équation (Gzr+ Yx + ïïf — i (Ba?+ E) {Dx3-\- Gx2+ Kx + L) = o (F). Chacune de ces racines donne donc une tangente-limite; par consé- quent, en prenant la discussion de cette équation appropriée à la classe et au genre pour base de la sous-division en espèces, ce système a pour consé- quence géométrique la considération du nombre et de la position des tan- gentes-limites et, par suite, celle du nombre et de la position des parties distinctes de la courbe. 16. Les racines réelles différentes de l'équation (F) donnent des tangentes- limites distinctes, et l'égalité de deux ou de plusieurs racines indique la réunion de deux ou de plusieurs tangentes-limites. La réunion de deux tan- gentes-limites réduit à une droite l'espace qui séparait auparavant deux par- ties de la courbe, et, par suite, les réunit sur cette droite; elle peut aussi avoir pour conséquence la simplification de la forme d'une de ces parties; ces deux phénomènes ont lieu à la fois, en cas de réunion de trois tangentes- limites, ou, ce qui revient au même, en cas d'égalité de trois racines de l'équation (F). Les racines de cette équation peuvent être ou toutes plus grandes ou toutes plus petites que - - , ou bien les unes peuvent être plus grandes et les au- tres plus petites que cette quantité. Dans le premier cas, les tangentes-limites sont toutes d'un même côté de l'ordonnée-asymptote à laquelle elles sont parallèles; dans le second cas, les unes sont d'un côté et les autres de l'autre côté de celte asymptote. Si l'une des racines est égale à --, l'une des tangentes-limites coïncide avec l'asymptote; celte dernière devient elle-même une limite, et, par con- séquent, ne peut plus couper la courbe. Mais cette non-intersection con- stitue des genres particuliers : nous n'aurons donc pas à nous occuper de ce cas , lors de la recherche des différentes espèces de chaque genre. 17. D'après ce qui précède, on ne doit admettre comme formant des es- LES LIGNES DU TROISIÈME ORDRE. 1 1 pèces différentes que les eas d'un même genre qui diffèrent entre eux, soil par le nombre des parties dont les lignes se composent, soit par leur posi- tion relative entre elles et par rapport à l'asymptote, soit par leur nature. Toute hypothèse qu'on pourrait faire sur les racines de l'équation (F), et qui n'entraînerait pas l'une ou l'autre des conséquences géométriques précitées, ne doit pas être considérée comme la condition analytique d'une espèce; elle ne peut être admise que comme la condition analytique d'une sous- espèce ou d'une variété. Avant de faire l'application de ces principes à la détermination des espè- ces, nous rechercherons quelles sont les simplifications dont l'équation com- plète (À) est susceptible, soit pour rester générale, soit pour représenter certaines classes ou certains genres. SIMPLIFICATION DE l/ÉQUATION COMPLÈTE. Concluions analytiques des classes et des genres. 48. On sait déjà que l'équation (A) reste générale, lorsqu'elle est privée du terme cube de l'une des variables. Supposons que ce soit le terme en y3 qui manque. On a alors A =o, et par suite, l'équation (C) se réduit à B^2 -l. C.2+ D=o (C). Celte équation donne les deux directions asymptoli- ques autres que celle attribuée à l'axe des ordonnées. Ses deux racines sont imaginaires, réelles et inégales, ou réelles et égales, selon que C2 — 4BD go. Dans chacun de ces trois cas, les directions qui sont réelles diffèrent de celle de l'axe des ordonnées, à moins que B et C ne soient nuls à la fois; elles sont alors égales entre elles et à la direction de l'axe des ordonnées, laquelle, par conséquent, est triple. Si l'on suppose B isolément nul , la direction de l'axe des ordonnées est double ; il en est de même si B et D sont nuls en même temps. En supposant 1) nul isolément, l'une des directions données par l'équation (C) est nulle, et l'autre est égale à --• Les trois directions sont donc réelles et différentes. Les hypothèses de B et de D nuls, soit isolément, soit simultanément, ne peuvent donc convenir à chacune des quatre classes ; mais si l'on suppose 12 LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. C nul, l'équation (C) se réduit à Bc +D = o , et donne s = ±[/I. 2 ; les deux racines sont, par conséquent, imaginaires, si B et D sont de même signe (lre classe); elles sont réelles et différentes, si B et D sont différents de zéro et de signes contraires (2me classe) ; si D est nul , elles sont égales entre elles et différentes de la direction de l'axe des ordonnées (3me classe); et enfin elles sont égales à celte dernière direction, si B est nul (ime classe). Il en résulte qu'une équation privée du terme cube de l'une des variables et du terme dans lequel cette variable multiplie le carré de l'autre, est aussi géné- rale que l'équation complète (À) ; elle Indique seulement que les deux axes des coordonnées ont certaines directions. Nous connaissons déjà celle de l'axe des ordonnées; l'examen de la valeur de y tirée de l'équation (A'), nous fera connaître l'autre. 19. Cette valeur se compose d'une partie rationnelle et d'une partie radi- cale, liée à la première par le double signe. Le lieu géométrique de l'équa- tion y = — '\ ^ x^ coupe donc en deux parties égales chacune des cordes de la direction de l'axe des ordonnées, qui est une direction simple aussi longtemps que B n'est pas nul, et qui, en cas de B = o, devient une di- rection triple. Dans le premier cas, ce lieu géométrique est une hyperbole du 2me ordre , rapportée à un système d'axes dont celui des ordonnées est parallèle à l'une des asymptotes de celte hyperbole, et dont l'autre axe devient parallèle à la deuxième asymptote de la même hyperbole, du moment que C est nul. Ces axes coïncident avec les deux asymptotes de l'hyperbole si, avec C = o, E et F sont aussi nuls. Mais x == — - est l'équation de l'asymptote de la ligne du 3me ordre, dont la direction a été attribuée à l'axe des ordonnées : cette asymptote est donc commune à cette ligne et à l'hyperbole bissectrice des cordes de sa direction. Lorsque B = o, l'équation 2E_y -f- C#2+ Fx -f II = o représente une parabole ; mais si l'on attribue à l'axe des ordonnées la direction asymptotique triple, C doit forcément être nul avec B, et alors l'équation précitée se réduit à 2E# + Fx + \\ = o, équation d'une droite que l'hypothèse de E et F nuls à la fois rejetterait à l'infini. Cette hypo- thèse peut donc bien être faite dans chacune des trois premières classes, mais elle n'est plus généralement possible dans la 4me. Cela se conçoit, du reste, car la condition E = o exige l'existence, à distance finie, d'une asym- LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. 13 ptote, existence qui est générale pour une direction asymplotique simple, mais qui n'a lieu que par exception , dans une direction asymptolique triple. En résumé, on voit qu'une équation de la forme Bxy"2 -\- Dx3 + E//2 + Vxy -j-Gar-f- %+ Ka?-f L = o est générale pour les quatre classes qui, avec cette forme (en supposant R positif, ce qui est permis), seront dis- tinguées par les conditions analytiques suivantes : l'e classe, R et D différents de zéro et D positif; 2me classe, R et D différents de zéro et D négatif; 3me classe, R différent de zéro et D nul; 4me classe, R nul et D différent de zéro. On voit, en outre, qu'une équation de la forme Bxy2 -)- Dr5 + Gr2-f II// -f- Kx -f- L=o (II) est apte à représenter toutes les lignes des trois pre- mières classes, avec les conditions précitées de R différent de zéro et Dg o. Elle indique que la courbe est rapportée à un système d'axes , qui sont les deux asymptotes de l'hyperbole bissectrice des cordes de la direction de l'axe des ordonnées, lequel est l'asymptote de l'une des directions asymptoti- ques simples de la courbe. Pour que l'équation soit générale pour la 4-me classe, il faut qu'elle contienne les six derniers termes de l'équation com- plète (A); elle doit donc être de la forme Dx* -f- Ev/2 -J- Fxy -f Gx- + Hy -\- K.;r + L = o(G). Cette forme indique que la direction asymptotîque triple a été attribuée à l'axe des ordonnées. La position de cet axe, ainsi que la di- rection et la position de celui des abscisses restent indéterminées, et peuvent servir à l'évanouissement de trois termes de l'équation (G), selon le genre qu'elle doit représenter. 20. En donnant à l'équation de la courbe la forme (II), générale pour les trois premières classes, l'équation (R) se réduit à (Rcr-f D) x° -f- (^Bzq + G)ar + (R?2 -f Hs-p-K) x + \\q + L = o (R'); et l'asymptote de la direction simple attribuée à l'axe des ordonnées, est donnée par x = o. Cette valeur introduite dans l'équation (II) donne y = — -■ L'asymptote coupe donc la courbe en un point à distance finie , aussi longtemps que II est différent de zéro, et elle ne la rencontre qu'à l'infini, si II est nul. Les deux cas possibles de la direction asymptolique simple attribuée à l'axe des ordonnées, sont donc distingués par les conditions analytiques H différent de zéro et H nul , et, par suite, ce sont aussi ces conditions qui distinguent les deux genres de la première classe. 14 LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. 21. Dans la 2me classe, D est négatif; les deux asymptotes, autres que relie prise pour axe des ordonnées, sont donc données par les équations . /D G % /D G_ y = x y g - — |- (1) et y = -x y g + 2V/BD ' et l'abscisse du point d'intersection de chacune de ces droites avec la courbe, est donnée par : |/âD(2Ll/D — GH) l/2D(2H/D--GH) G«1/ÏÏ + 4HD V^ + 4KD ^B * * = " GHyB — 4HD Vï> + 4KD ^B La première asymptote coupe la courbe en un point, si (G2l B + 4HD I D + 4KDI/B) est différent de zéro, et, dans le cas contraire, elle ne peut la rencontrer à distance finie. De même, la deuxième asymptote coupe la courbe en un point si (G2|/B — 4HDJ/D + 4KDI/ÎT) est différent de zéro, et, dans le cas contraire, elle ne peut la rencontrer à dislance finie. Or, chacune de ces quantités peut être différente de zéro, si H l'est; mais si H est nul, elles de- viennent identiques : l'une ne peut donc alors devenir nulle sans que l'autre le devienne en même temps. Si Tune de ces quantités est nulle, l'autre se réduit à ± 8HDI/ÏÏ, qui ne peut devenir nulle qu'à condition que H le soit. II en résulte que chacune des trois asymptotes peut couper la courbe; que l'une d'elles peut ne pas la rencontrer à distance finie, pendant que chacune des ^leux autres la coupe en un point , et que chacune de ces asymptotes peut aussi ne pas rencontrer la courbe à distance finie; tandis qu'il est impossible que l'une coupe la courbe , lorsque les deux autres ne la rencontrent pas à distance finie, ainsi que cela a déjà été dit au § 9. En donnant à l'équation la forme (H) , les trois genres de la 2me classe sont distingués par les conditions analytiques suivantes : 1« Genre. H, [G2J/B + 4HD|/D + iKD]/B]} et [G2|/B — 4HDI/D + 4KDI/BJ différents de zéro; 2me Genre. H , ou [G2 VU + 4HD VÔ + 4KD |/BJ , ou [G2 |/B — 4HD |/D + 4KD \/B] nul : LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. lo 3me Genre. H nul, et [GW-f- 4HD \/D + 4RD|/B] nul, ou sim- plement II nul et Ga -f 4RD = o. On peut aussi rapporter les lignes de la 2m0 classe à deux de leurs asym- ptotes prises pour axes; alors l'équation de la courbe est de la forme : Bxy- + Cx*y + Fxy + Hy + Kx + L = o, et les trois genres sont analytiquement distingués comme suit : 1er genre : H, R et (BR — CH) différents de zéro; 2me genre : H ou R ou (BR — CH) nul; 3me genre : H et R nuls. 22. Dans la 3me classe, D est nul; l'équation (C) donne, par conséquent, c-=o, pour la direction double, et alors l'équation (B') se réduit à Gx* + (B ,r w 11 > 11 .• Dx'-i-Gx--+-Kx-h L ^, + Gx* + Uy -f- Kx -\- L = o; d ou 1 on lire y = ^— ^ ■ Cha- que ordonnée ne rencontre donc la courbe qu'en un point, et il y en a une dont le point de rencontre est à distance infinie : c'est l'asymptote donnée par x = — -, qui, par conséquent, n'existe à distance finie qu'à condition que ,_,._. . , , , , .. , Dx5 -4- G x- -+- Kx -f- L . F ne soit pas nul. Si F = 0, la valeur de y se réduit a y = s > elle indique (pie toutes les ordonnées coupent la courbe en un point, et qu'il n'en existe aucune à distance finie qui soit une asymptote ; elle indique en- core que H doit être différent de zéro. Les trois genres de la lme classe sont donc distingués parles conditions analytiques suivantes, en cas d'une équation de la forme (G) : 1er genre : E différent de zéro; 2me genre : E nul et F différent de zéro; 3me genre : E et F nuls et H différent de zéro. Dans le Ie' genre, F et H peuvent être nuls, et dans le 2me genre, H peut l'être. ASYMPTOTES CURVILIGNES. Nature des branches illimitées. 24. On a vu que les cordes de toute direction asymplotique simple ont pour bissectrice une hyperbole dont deux branches convergent avec deux branches de la ligne du 3me ordre, attendu (pie ces quatre branches ont la même droite pour asymptote commune ; pour ce motif, on dit que cette hyperbole est une asymptote curviligne de la courbe du 3me ordre. Mais cette hyperbole n'en est pas la seule asymptote curviligne : toutes les hyper- boles qui ont pour une de leurs asymptotes celle de la direction simple , sont dans le même cas. Les deux branches illimitées de celte direction ad- mettent donc une infinité d'asymptotes curvilignes, et comme toutes sont des hyperboles, on en a conclu que la nature de ces branches est hyper- bolique. En résolvant, par rapport à x, l'équation (II), appropriée à la 5rae classe, on trouve que les cordes de la direction double ont pour bissectrice une LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. 17 parabole qui converge avec les deux branches illimitées que la courbe du 3me ordre possède dans celte direction , et qui , par conséquent , en est une asymptote curviligne, comme le sont toutes les paraboles convergentes avec la parabole précitée; d'où Ton a conclu que les deux branches illimitées de la direction asymptotique double sont de nature parabolique. Cette nature appartient en général aux branches des directions d'un degré pair de mul- tiplicité, comme la nature hyperbolique appartient, en général, aux bran- ches des directions asymptoliques simples. Dans les directions d'un degré impair de multiplicité, la nature parabolique domine toujours, et très-sou- vent s'y rencontre seule; la nature hyperbolique peut cependant aussi s'y ren- contrer avec la nature parabolique, mais elle ne peut jamais y exister seule. Les lignes d'un ordre quelconque fournissent des exemples de branches illimitées de toutes les natures qui se rencontrent dans les ordres inférieurs, mais elles possèdent aussi des branches de natures spéciales à cet ordre qui ne se rencontrent dans aucun ordre inférieur. Ces natures ont été con- sidérées soit comme hyperboliques, soit comme paraboliques, selon qu'on leur a trouvé de l'analogie soit avec la nature hyperbolique, soit avec la nature parabolique du 2me degré. Il en résulte que, si l'on ne veut admettre (pie deux natures générales, il existe cependant pour chacune d'elles cer- taines spécialités dans chaque ordre. Il ne suffît donc pas de dire que la nature d'une branche est hyperbolique ou parabolique, il faut y ajouter qu'elle est hyperbolique ou parabolique de tel ou de tel ordre. C'est Euler qui, le premier, a conçu l'idée de distinguer la nature des branches infinies d'après celles des asymptotes qui leur sont propres : il a pris ces circonstances pour base d'une méthode de division en familles, qu'il nomme espèces et qui, d'après notre méthode, forment le 2me degré de di- vision ou les genres. En opérant de cette manière, Euler a trouvé pour le 3me ordre un nombre d'espèces égal à celui de nos genres ; on ne peut ce- pendant pas conclure de là que les deux méthodes sont identiques ou qu'elles conduisent aux mêmes résultats : les principes qui servent de hase à cha- cune d'elles diffèrent essentiellement, et si, dans le 3me ordre, elles don- nent le même nombre pour l'un des degrés de division , il n'en est cependant pas de même pour les ordres supérieurs au troisième. Tome XXX. ° i8 LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. DIAMÈTRES. 25. On nomme centre des moyennes distances d'un système de points, le point dont la distance à un axe ou à un plan est la moyenne arithmé- tique des distances des points donnés à cet axe ou à ce plan. Le centre des moyennes distances des points d'intersection d'une ligne du 3me ordre avec une transversale rectiligne, y = zx-\-q,'& donc pour abscisse le tiers du coefficient du deuxième terme de la résultante (B), pris en signe con- traire; on a, par conséquent, (3Az2 -+- 2B: + C) q -4- Ez2 h- Fz -t- G 5(Az3-»- Bz2 + Cs + D) ou bien ( 3Az2 + 2Bz + C)y+ (Bz2 + 2Cz -1- 3D)x + Ez'- + Fz + G = 0. Équation du lieu géométrique des centres des moyennes distances des points d'intersection de la courbe avec la tranversale y = zx -(- q , se mouvant pa- rallèlement à elle-même. Ce lieu géométrique est une droite. Les centres des moyennes distances des points d'intersection de la courbe avec un sys- tème de parallèles de la direction z, se trouvent donc sur une ligne droite à laquelle on donne le nom de diamètre relatif à cette direction z. En donnant à l'équation soit la forme (H), soit la forme (G), l'équation du diamètre d'une ligne de l'une des trois premières classes sera SBz.y -\- (Bz? -{- 3D) x -{-G = 0. Pour une ligne de la 4me classe, cette équation sera 3D# + (E32+ F^ -j- G) = 0. Dans cette classe, tous les diamètres ont donc la direction asymptotique triple. CENTRES. 26. On donne le nom de centre au point d'intersection de deux diamètres. Dans les trois premières classes, les seules dans lesquelles le centre peut exister à distance finie, le point d'intersection des deux diamètres relatifs aux ... , G G(;-t-z') directions z et z' aura donc pour coordonnées * = Bzi,_3D et y = - 2(Baz,_5l))- Chacune de ces coordonnées est une fonction de z et de z'; par suite, la posi- LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. 19 tion du centre varie pour chaque couple de diamètres, à moins que les valeurs des coordonnées précitées ne restent invariables, quels que soient z et z', ce qui ne peut être que si G est nul. Les lignes des trois premières classes du 3me ordre admettent donc, en général, une infinité de centres qui, dans le cas spécial d'absence du terme en x*~ dans l'équation de la forme (H), se réunissent à l'origine, pour y former un centre unique et général des dia- mètres. La définition générale du diamètre et celle du centre sont empruntées à la nouvelle théorie de M. Steichen , professeur à l'école militaire, sur les centres et diamètres d'un degré quelconque, que cet auteur a exposée dans son Mémoire sur les courbes algébriques et dans son ouvrage intitulé : Sup- plément à la Géométrie. DIAMÈTRES CONJUGUÉS. 27. Lorsque deux diamètres sont tels que la direction de chacun est celle dont l'autre est le diamètre relatif, on dit que ces deux diamètres ont des directions conjuguées, et lorsque ces deux diamètres existent à distance finie, ils forment un système de diamètres conjugués. Les conditions aux- quelles les directions z et z' sont conjuguées sont donc Bz2 -+- 5D B;'2 -4- 5D ~ = 2B7~ Ct Z~ 2ÎJ7~~ ' d'où l'on tire Bza— Bz'2 = B(z + z") (z — z') = 0. Or, B ne peut être nul ; (z — z') ne peut pas non plus l'être, puisque les deux directions doivent être différentes : il faut, par conséquent, que z-\-z'=o, d'où 2 = — z', ce qui donne « = ± l/Ip et »' = tKt' Ces valeurs démontrent que z et z' ne peuvent être réels que si B et D sont de même signe; il n'y a donc que la première classe qui admette ces diamètres conjugués, et elle n'en admet qu'un seul système. Ce système coupe l'asymptote rectiligne, avec laquelle il forme un triangle qui est l'analogue de celui que les trois asymptotes rectilignes for- ment dans la 2me classe, où il n'existe pas de diamètres conjugués. 20 LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. Lorsque B = 3D, les deux diamètres conjugués sont perpendiculaires, car alors 3 = 1 et z' = — 1; on a, dans ce cas, le système rectangulaire auquel, dans le 2me ordre, on donne le nom d'axes principaux. En prenant les diamètres conjugués pour axes des coordonnées , l'équa- tion de la courbe prend la forme Ay* -{- Dj?3-j- ¥xy -f- IL/ -f- Kx + L = o , forme qui n'appartient qu'aux équations des lignes de la première classe. SYMÉTRIE DIRECTE. 28. On donne le nom d'axe de symétrie directe à toute droite bissectrice d'un système de parallèles. La symétrie est orthogonale, si la droite est perpendiculaire aux cordes ; dans le cas contraire, elle est oblique. Il résulte de cette définition que les cordes ne doivent rencontrer la courbe à distance finie qu'en deux points, ou avoir une direction asymptotique. Ce n'est donc que dans les directions asymptotiques simples et dans les premiers cas de la direction double et de la direction triple que l'axe de symétrie directe est possible. Dans le Ier genre de la &me classe, la bissectrice des cordes de la direction asymptotique triple est en effet une droite; mais dans les deux premiers genres de la 3me classe, c'est une parabole qui ne peut pas dégénérer en une droite, et dans le premier cas d'une direction simple, la bissectrice des cordes de cette direction est une hyperbole qui, dans le deuxième cas, dégénère en une droite. Il s'ensuit que la symétrie directe n'est possible (pie dans le 2me genre de la lre classe, dans le 2me et le 3me genre de la 2me classe, dans chacun des quatre genres de la 3me classe, où II est nul, et enfin, dans le 1er genre de la 4me classe. Dans ces genres, les courbes possèdent forcé- ment un axe de symétrie directe, qui est l'axe des abscisses, lorsque l'équa- tion a la forme (H), ou bien la forme (G), avec les conditions de F et II nuls. Dans chacun de ces genres , la courbe ne possède qu'un seul axe de symé- trie, sauf dans le 3me genre de la 2me classe, où elle en possède trois. SYMÉTRIE INVERSE. 29. On nomme centre de symétrie inverse, un point tel (pie toute droite LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. 21 qui y passe, forme une corde dont les points d'intersection avec la courbe ont des coordonnées de mêmes valeurs numériques et de signes contraires. Il faut donc que l'équation de la courbe ne contienne que des termes dans lesquels Tune des variables seulement soit à une puissance impaire; elle doit être, par conséquent, de la forme Bxy*-{- Dx* + %+ Kx = o. Cette forme indique que la courbe doit passer par l'origine, qui est le centre général des diamètres; elle indique aussi que le terme \\y doit toujours exister dans l'équation, et que, si D = o, le terme Kx doit également s'y trouver. Nous verrons plus tard que la symétrie inverse n'est possible que dans une seule espèce de chacune des lre, 2me et ime classes, et dans deux espèces de la 3n,e classe; encore n'y exisle-t-elle pas forcément. DÉFINITIONS. 30. Pour faciliter la description des espèces, nous adopterons les déno- minations suivantes, dont la majeure partie est empruntée à Newton. Toute partie fermée et rentrant sur elle-même est une ovale conjuguée; lorsqu'une pareille partie se réduit à un point, il y a un point conjugué. Toute partie munie de deux branches illimitées est une nappe, qui est hy- perbolique ou parabolique, si ses branches sont toutes les deux de même na- ture; elle est hyperbolo-parabolique, si ses deux branches sont de natures différentes. La nappe est nouée lorsqu'une ovale s'y réunit; elle est pointue en cas de sa réunion avec un point conjugué, et elle est pure, si elle ne pos- sède ni ovale, ni point conjugué, ni nœud, ni pointe. La réunion de deux nappes forme une nappe cruciforme. La nappe est anguinée, lorsque ses deux branches convergent avec une seule et même asymptote qu'elle coupe, et elle est conchoïdale, lorsqu'elle ne coupe pas cette asymptote. Lorsque cha- cune des deux branches d'une nappe converge avec une asymptote diffé- rente, on la nomme circonscrite , si elle coupe chacune de ces deux asym- ptotes; inscrite, si elle n'en coupe aucune, et ambigène, si elle n'en coupe qu'une seule. Enfin nous nommerons zone l'espace compris entre deux tan- gentes-limites entre lesquelles la courbe est imaginaire. 22 LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. ÉNUMÉRATION DES ESPÈCES. PREMIÈRE CLASSE. 31. Caractère géométrique : Une seule direction asymptotique simple. Forme générale de l'équation : Bxy* -\- Dx* -j- Ga?2 + H^/ + K.x -\-L = o. Conditions analytiques : B et D différents de zéro et de même signe. Valeur générale d'une ordonnée : H 1 - / >im / „ G , K L H2 v 2Bx 2Bx V ^ D D D 4BD/ Equation des tangentes-limites : G K L H'2 x" -+- — x3 -i a?- ■+- — x — = o = (x -t x'1 (r i x'"i (x ■+ s'" ) [x — x" i (fv > . non 4bd v ■ . indiquant par — .r', — x", — x'", -{-x", les racines de cette équation, dont celles de même signe doivent être en nombre impair, à cause du signe invariable du dernier terme de l'équation (K). Il en résulte que Ton a G = D (x'-t- x"-»- x'" — x"); K = D[x'x" h- x'x" + x"x" — x" (x' -+- x" -t- se"')]; L = 1) [x'x"x'" — x"(x'x" -* x'x" -t- x"x'")]; Il = ± 2J/BD x'x"x"'x". Nous supposerons en outre que x' < x" < x'", chaque fois qu'il n'existe pas d'égalité entre les racines. 32. Le polynôme sous -radical de la valeur de y indique que la courbe doit être limitée dans les deux sens des abscisses, et l'équation des tangen- tes-limites fait voir que les deux limites extrêmes sont séparées par l'asym- LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. 23 ptote, et qu'en tout cas, la courbe est réelle entre la tangente -limite située seule d'un côté de l'asymptote, et celle des trois autres tangentes-limites la plus rapprochée de l'asymptote. Les lignes de la lre classe comprennent donc toutes une nappe hyperbolique qui est anguinée ou conchoïdale, selon que l'asymptote coupe ou ne coupe pas la courbe. Elles peuvent, en outre , com- prendre une ovale conjuguée, qui doit se trouver en entier d'un même côté de l'asymptote; d'après les hypothèses précitées, elle doit se trouver du côté des abscisses négatives. PREMIER GENRE. 33. Caractère géométrique : La courbe coupe son asymptote en un point; la nappe est anguinée et hyperbolique du 2me ordre. Condition analytique : H est différent de zéro. G, K et L peuvent être positifs, nuls ou négatifs; mais en cas de réalité des quatre racines de l'équation (K), dès qu'un de ces coefficients est nul, ceux des termes suivants doivent être négatifs, et si, en cas de deux racines imaginaires, K peut toujours être quelconque, L doit être négatif, du moment que G est nul ou négatif. H doit être différent de zéro, mais peut être à volonté positif ou négatif. Son signe, combiné avec celui des trois racines de même signe, indique les angles des coordonnées qui contiennent les deux nappes de l'hyperbole bis- sectrice des cordes de la direction asymptotique, et, par suite, ceux dans lesquels la courbe du 3rae ordre converge avec son asymptote et dans les- quels elle a sa majeure partie. Le signe de L désigne de quel côté de l'axe des ordonnées la courbe coupe cet axe; celui de K. indique si l'ellipse sur laquelle se trouvent les points de contact des tangentes parallèles aux abscisses, ne rencontre pas, touche ou coupe l'asymptote, et celui de G indique de quel côté de cette droite se trouve le centre de ladite ellipse, qui est en même temps le centre des deux diamètres conjugués. Il y a cinq hypothèses différentes possibles à l'égard des racines de l'équa- 24 LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. lion (K)j chacune d'elles donne naissance à une espèce différente; le premier genre comprend, par conséquent, cinq espèces. 34. Première espèce (33me espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose d'une nappe anguinée et d'une ovale conjuguée séparée. Conditions analytiques : Les quatre racines de l'équation (K) sont réelles el inégales: x' < x'1 < x'". Exemple : xy- + Sx* + 36#a + 24# + 99 x'. Exemple : 1x\f + x* + 9x° -f 22,r + 1 6y = o. ( Fig. 2.) 36. Troisième espèce (34mc espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe consiste en une nappe anguinée , nouée. Conditions analytiques : Les quatre racines de l'équation (K) sont réelles, et, des trois racines de même signe, les deux dont la valeur numérique est la plus petite sont égales : x' = x" < x'". Exemple : xy" + xz + 1 5#* -f 39x + GOy — 235 = o. {Fig. 3.) 37. Quatrième espèce (35me espèce de Newton). LES LIGNES DU TROISIÈME ORDRE. 25 Caractères géométriques : La courbe consiste en une nappe anguinée, pointue. Conditions analytiques : Les quatre racines de l'équation (K) sont réelles et les trois racines de même signe sont égales : x' = x" = x' ,m Exemple : xy* -\- x* — 1 Sx -f- 6y — 24 = o. ( Fig. 4.) 38. Dans la lre et dans la 3me espèce, la courbe peut couper Taxe des abscisses en trois points. Si cela a lieu, deux des points d'intersection ap- partiennent à l'ovale, dont la majeure partie reste néanmoins dans l'angle dos abscisses négatives et des ordonnées positives. Dans les deux autres es- pèces, la courbe ne peut couper l'axe des abscisses qu'en un seul point , qui appartient à la nappe, et le point conjugué doit se trouver dans l'angle des abscisses négatives et des ordonnées positives. 39. Cinquième espèce (37me et 38me espèces de Newton). Caractères géométriques : La courbe consiste en une nappe anguinée, pure. Conditions analytiques : L'équation (K) n'admet (pie deux racines réelles de signes contraires: — x' et + x" ; x"= =f « +/3l/ — 1; x'"= =pa — (3\/ — 1. Les lignes de cette espèce peuvent couper l'axe des abscisses en un seul point ou en trois points, ou bien le toucher et le couper, soit en deux points différents, soit en un seul et même point. Les trois premières circon- stances ont lieu dans cette espèce, comme dans la lre et la 3me, selon que 4(G2— 3KD)3g (2G3— 9GKD + 27LD2)2. Les lignes de la 5me espèce peuvent aussi être munies d'un centre de symétrie inverse; ce cas se pré- sente lorsque la partie réelle des deux racines imaginaires est nulle , et que les deux racines réelles de signes contraires ont les mêmes valeurs numéri- ques. Newton en a formé une espèce distincte, sa 38me. Exemples : 2xy8 -f x* -f 1 1 ** + 1 9a; + 3G# — 6 = o. (Fig. S.) xtf -fa3— 9x -f iOy = o. Tome XXX. 4 20 LES LIGNES DU TROISIÈME ORDRE. DEUXIEME GENRE. 40. Caractères géométriques : La courbe ne rencontre pas son asymptote à dislance finie. Elle est directement symétrique par rapport à une droite. La nappe est conchoïdale et hyperbolique du 3me ordre. Condition analytique : H est nul. Cette condition exige que Tune des racines de l'équation (K) soit nulle. Une seconde racine de celte équation ne peut cependant pas l'être; car, pour cela, il faudrait que L fût nul avec H. Or, dans ce cas, l'équation de la courbe serait divisible par x; elle deviendrait donc complexe. La nullité de l'une des racines de l'équation (K) produit la réunion de l'asymptote avec une des tangentes-limites, ou, pour mieux dire, elle donne à l'asymptote la qualité de tangente-limite. La courbe devient par là directement symétrique, par rap- port à l'axe des abscisses. L'une des racines de l'équation (K) étant nulle, les trois autres sont données par l'équation D.r3 -f- Gjr-f Kx -f- L = o (K'), laquelle résulte aussi de la condition y = o. On a donc les mêmes conditions pour la détermination des espèces que pour celle des points d'intersection de la courbe avec l'axe des abscisses, ce qui est une conséquence forcée de sa symétrie par rapport audit axe. Les conditions analytiques des espèces se trouvent donc dans l'expres- sion 4(Ga— 3KD)3§ (2G3— 9GKD + 27LD2)2. L'équation (K') étant du 3me degré, sans détermination du signe du der- nier terme, admet sept hypothèses différentes qui donnent naissance à sept espèces différentes , lesquelles composent le 2me genre et sont les Gme à 1 2me espèces de la lrc classe. 41. Par suite de la non-intersection de la nappe avec l'asymptote, sa convergence avec elle a lieu d'un seul côté de cette droite. Si, à cause de l'existence d'une direction asymptotique simple, la nappe reste hyperbolique, elle ne se comporte cependant plus comme les hyperboles du 2me ordre, qui convergent, dans les deux sens, de deux côtés différents de leurs asymptotes. Aussi la nature hyperbolique des branches des lignes du genre qui nous LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. 27 occupe est-elle spéciale au troisième ordre. Son type, dont l'équation la plus simple est Mxjf-r-N = o, forme le 8me genre de la 3me classe. 42. Sixième espèce (39",e espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose d'une nappe conchoï- dale, et d'une ovale conjuguée disjointe et située, avec la nappe, d'un même côté de l'asymptote. Conditions analytiques : Les trois racines de l'équation (K.') sont réelles, de même signe et inégales : x'(2G3— 9GKD + 27LD2)2. Exemple : xif + *3 + 20z2 + 1 24x -f 240 = o. ( Fig. 6.) 43. Septième espèce (43me espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose d'une nappe conchoï- dale, et d'un point conjugué isolé et situé du même côté de l'asymptote que la nappe. Conditions analytiques : Les trois racines de l'équation (K') sont réelles et de même signe, et les deux racines qui sont numériquement les plus grandes, sont égales : x"=x'" > x'; xlv = o, ou bien — 2|/(G2— 3KD)5 = (2G5— 9GKD -f 27LD2). Exemple : xxf + x3 + 32x2 + 336* + 1 152 = o. {Fig. 7.) 44. Huitième espèce (41me espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe consiste en une seule nappe con- choïdale, nouée. Conditions analytiques : Les trois racines de l'équation (K') sont réelles, de même signe, et les deux racines qui sont numériquement les plus petites, sont égales : x' = x"< x'"; x"=o, ou bien 2^(GJ"^3KD)3= (2G3— 9GKD + 27LD2). 28 LES LIGNES DU TROISIÈME ORDRE. Exemple : xif + x* + 1 5.c2 + 6 Sx + 8 1 = o. [Fig. S.) 45. Neuvième espèce (42me espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe consiste en une seule nappe con- choïdale, pointue. Conditions analytiques : Les trois racines de l'équation (K') sont réelles et égales : x' = x" =x'"; x" = o; G2 = 3KD; G3=27LD2. Exemple : xtf + as3 + 6x2 + d 2x + 8 = o. {Fig. 9.) La courbe inventée par Diodes, pour la résolution du problème de deux moyennes proportionnelles, et à laquelle ce géomètre a donné le nom de rissoïde, appartient à cette espèce. 46. Dans chacune des quatre espèces qui précèdent, G, K et L doivent être invariablement positifs; le centre général y est donc impossible : c'est la racine positive de l'équation (K) qui est devenue.nulle, et, par suite, toute la courbe se trouve d'un seul et même côté de l'asymptote. 47. Dixième espèce (40me espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose d'une nappe coneboï- dale, et d'une ovale conjuguée isolée et séparée de la nappe par l'asymptote. Conditions analytiques : Les trois racines de l'équation (K') sont réelles , de signes différents, et celles qui sont de même signe sont inégales : x" < as'"; x' = o; x" différent de zéro, ou bien 4(G2 =f 3KD)3 > ( ± 2G3 =f 9GKD — 27LD2)2. Exemple : xtf + a;3 -f 9xa— SOx — 200 = o. {Fig. 1 0.) 48. Onzième espèce (44me espèce de Newton). LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. 29 Caractères géométriques : La courbe se compose d'une nappe conchoï- dale, et d'un point conjugué isolé, séparé de la nappe par l'asymptote. Conditions analytiques : Les trois racines de l'équation (K') sont réelles; l'une est d'un signe différent de celui des deux autres, qui sont égales: x"=x'"; x' = o; x™ différent de zéro, ou bien — 2|/(G2T 3KD)3 = (±2G3 T9GKD — 27LD2). Exemple : xif -}- x* — 4 Sx — 1 2 8 = o . ( Fig . H .) 49. Dnns la 10me espèce et dans la 14me, G et K peuvent être positifs, nuls ou négatifs; ces espèces admettent donc un centre général. L doit y être invariablement négatif. C'est la plus petite des racines négatives qui est devenue nulle; l'asymptote est donc une tangente-limite moyenne, et, par suite , elle doit se trouver entre les deux parties de la courbe. 50. Douzième espèce (45rae espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe consiste en une seule nappe con- choïdale, pure. Conditions analytiques : L'équation (K') n'admet qu'une seule racine réelle : 4 (G2— 3KD)3 < (2G5 — 9GKD + 27 LD2)2. Exemple : xtf + a;3 + 1x- + 9x -f 63 = o. {Fig. 1 2.) G et R peuvent être quelconques; le centre général est donc possible. L peut être positif ou négatif, sans pouvoir être nul. 30 LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. DEUXIÈME CLASSE. 5 1 . Caractères géométriques : Trois directions asymptotiques simples. Forme générale de l'équation :Bxy~ — Dxz -f- Gar -\- Kx -f Wy-\-L = o. Conditions analytiques : Dans l'équation de la forme (H), B et D doivent être de signes contraires, sans être nids. Valeur générale d'une ordonnée : H I . / / G K — - ± V 4BU x1 — - x5 2B.x 2Bx V \ D D xl — — x D 4 BU Une équation de la forme qui précède indique que l'asymptote de Tune des directions simples est prise pour axe des ordonnées. Il existe cependant trois pareilles asymptotes; on peut donc en prendre deux pour axes des coordonnées. Dans ce cas, l'équation a la forme Bxy- -j- Cxa-y -f Fary + Hy -f Kx -f- L = o, (L). Cette forme, qui est symétrique, se prête plus facilement à la discussion : par ce motif, nous l'adopterons pour la détermination des espèces de la 2me classe. 52. Dans l'équation (L), le signe d'aucun des termes n'est déterminé; les coefficients B, C, II et K ne peuvent cependant pas devenir nuls, et l'on doit en conclure que la variation de signe de ces coefficients se rapporte à un ordre de faits autre que le changement d'espèce. On peut, en effet, obtenir toutes les combinaisons possibles de signes de ces quatre coefficients par le simple changement de signe des variables, et en remplaçant l'une des deux asym- ptotes prises pour axes des coordonnées, par celle qui, primitivement, n'avait pas servi d'axe. Quant à F et à L, le changement simultané de leurs signes peut être obtenu par le changement de signe des variables : il n'y a que la variation de signe de l'un de ces coefficients isolément qui soit de nature à exercer une influence sur les affections de la courbe. On verra plus loin quelles sont ces conséquences; nous nous bornerons, pour le moment, à dire que LES LIGNES DU TROISIÈME ORDRE. 31 lous les cas possibles sont donnés par les équations Bxi/2-)- Cary -j- Vxy-\- H y + Kx ± L = o (L') et Bxtf + Cary ± F*y + Hy + Rœ + Il — o (L"). La première appartient aux cas dans lesquels F est invariable de signe, et la seconde à ceux dans lesquels le signe de ce coefficient peut changer, sans qu'il en soit de même pour celui de L. Dans chacun de ces deux cas, le coefficient dont le signe est variable peut devenir nul. 53. Dans les classes qui ne possèdent qu'une seule direction asymplotique simple, il n'y a que l'asymptote de cette direction qui puisse être prise pour axe des coordonnées; il n'y a alors qu'une seule équation de la forme (H), et, par suite, qu'une seule équation des tangentes-limites; mais, dans la 2me classe, qui admet trois asymptotes différentes, il y a trois combinaisons diffé- rentes qui permettent de prendre deux de ces asymptotes pour axes des coordonnées; il en résulte trois équations différentes pour la courbe, toutes les trois de la forme (II) ou (L), et, par suite, trois équations différentes des tangentes-limites. Il se pourrait donc que certaines hypothèses faites à l'égard des racines de l'une de ces trois équations, donnassent, pour les deux autres équations ou pour l'une d'elles, une hypothèse différente. Dans ce cas, il est évident qu'en faisant celte dernière hypothèse sur la première équa- tion, on aura pour les deux autres équations ou pour l'une d'elles, les cas de l'hypothèse faite primitivement sur la première. Ces deux hypothèses différentes, possibles à l'égard des racines de la même équation, conduiraient donc à des courbes identiques. Il faut, par conséquent, pour la détermination des espèces , connaître les effets que produiraient sur les racines de deux des équations précitées , toutes les hypothèses possibles à l'égard des racines de la troisième. 54. Si l'on résout l'équation (L) par rapport à y et ensuite par rapport à x, on trouve que la bissectrice des cordes parallèles aux ordonnées a pour équation 2B.xy + Cx* + Fx + H = o, hyperbole dont les asymptotes sont l'axe des ordonnées et la droite 2B//-|-Ca;+F = o; en outre, l'équation de la bissectrice des cordes parallèles aux abscisses est 2Ca;y + Hy'2 -f Fy -+- K = o, hyperbole dont les asymptotes sont l'axe des abscisses et la droite 2Ca; + B//+F = o. Les cordes parallèles à la 3me asymptote ont pour bissec- trice l'hyperbole Wif — CV + BFy — CFœ -f BR — Cil = o , équation qui 52 LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. est la résultante de la combinaison des équations des deux autres bissectrices. Cette dernière hyperbole passe donc aussi par les points communs aux deux autres; ses asymptotes sont les droites By-\-Cx-\-F = o et By = Cx;\a pre- mière est la 3me asymptote de la courbe du 3me ordre, et la deuxième a pour équation la résultante de la combinaison des équations des asymptotes des deux premières hyperboles, autres que celles qui leur sont communes avec la courbe du 3me ordre. Ces trois asymptotes passent donc par le même point. Elles sont les médianes des trois côtés du triangle asymptotique, dont les F F côtés adjacents à l'origine sont x = — - et y = -g- Ce triangle est dans l'angle des coordonnées négatives, si F est positif; dans le cas contraire, il est dans l'angle des coordonnées positives; et il se réduit à un point, si F=o. 55. Chaque hyperbole bissectrice coupe la courbe aux points de contact des tangentes parallèles à l'asymptote commune à la courbe et à cette hy- perbole. On obtient donc les coordonnées des points de contact de toutes les tangentes-limites, ou bien ces tangentes elles-mêmes, en combinant l'équa- tion de la courbe avec celles des trois bissectrices. Cette combinaison donne: ( 1 . C%* -+- 2CFx3 + (F2 -+- 2CH — 4BK) x2 -+- (2FH - 4BL) x + H2 = o. L | 2. Ba%* -+- 2B'Li/* -+- B (FL — 2IIK) tf — 2BKLy -4- L (CL— FK) ■+- HK* = o. ( 1. BV + 2BF/- + (F4 ■+■ 2BK — 4CH) xf- -t- (2FK — 4CL) y + K2 = o. IL \ 2. C2Kx4 -t- 2C*2Lx3 + C (FL — 2HK) x2 — 2CHLx -+- L (BL — FH) -t- H2K = o. I \ . C2 (BR — Cil) x4 -t- 2C2 (BL — FH) x3 -+- [ 2CII (BK - CH) + CF (BL — FH) ] x^ ■+- \ -+- 2CH (BL — FH) x + H2 (BK — CH) -+- BL (BL — FH) = o. lTLm 2. B2 (BK — CH)»/4 — 2B2 (CL — FK)/> + [2BK (BK — CH) — CF (CL — FK)] i/2 - — 2 BK (CL - FK)y — K2 (BK — CH) + CL (CL — FK) = o. Si l'on désigne par X,, X',', X',", X1;, les abscisses des points de contact des tangentes parallèles aux ordonnées et par Y',, Y',', Y,", Y',v, les ordon- nées des mêmes points, l'équation (I. 4) donnera les premières, et l'équation (I. 2) fournira les secondes. De même, les équations (II. 1) et (II. 2) four- niront les ordonnées et les abscisses des points de contact des tangentes pa- rallèles aux abscisses que nous désignerons respectivement par Y'„ Y*, Yâ", Y? et X'2, X'2', X';, Xy. Enfin, les équations (III. 1) et (III. 2) donneront les abscisses et les ordonnées des points de contact des tangentes parallèles à la 3me asymptote : on les désignera par X'3, X'â, X'3', X3V et Y3, Y3, Y3", Y3\ LES LIGNES DU TROISIEME ORDKE. 35 Les coefficients de ces six équations sont tous des fonctions des coeffi- cients de l'équation (I. 1), et, comme les racines d'une équation sont des fonctions de ses coefficients et que, par contre, chaque coefficient peut être exprimé en fonction des racines, il est permis d'en conclure que les racines de cinq quelconques des six équations qui précèdent peuvent être expri- mées en fonction des racines de la sixième. 56. Le dernier terme de l'équation (L 4) étant positif, les racines réelles de même signe doivent être en nombre pair. Supposons-les toutes négatives et désignons-les par — x',- — x", — x'" et — x"; supposons, de plus, en cas d'inégalité des racines, #'< a?"< x' < xn: on aura — =x' -\-x" -\- x'"-\-x", tfoùF=ï{x'+x»+x'" + xn); F2+2CH— 4BK = C2[x'x"-f(a;'+x") (x'»+ x")-\-x'"ar]; 2FII— 4BL = C2[xV(x'" + x'v) + a?"VV + ^")] et H = C| x] x"x"'x'\ Remplaçant F et H par leurs valeurs respectives, on aura : K = — [Vx' + Vx" — \/x'" - Vx"1] [Vx' -+- Vx" -+- \/x'" -+- Vx"] [Vx' — Vx" — Vx'" 1GB -+- Vx"] [Vx' — Vx" -+- Vas'" - Vx"]. C I. = [Vx'x" — Vx'"x"] IVx'x'" — Vx"x"] [Vx'x" - Vx"x'"]. 4B BK — Cil = ^- [Vx' -4- Vx" - Vx'" + Vx'-] [Vx' + Vx" -4- Vx"' - Vx"} [Vx' - Vx" - Vx"' - Vx"] [Vx' — Vx" -+- Vx'" + Vx"]. K sera donc positif, nul ou négatif, selon que \/x' — \/x" - -J/V" + ]/x"% o. L sera positif, nul ou négatif, selon que \/x'x'y — [/x"x'"= o, et BK — Cil sera positif, nul ou négatif, selon quel/V-f- ]/x" -\-\/x'"— \fxx" = o. Portant les valeurs de F, K, L et H dans les six équations du § 55, cha- cune d'elles sera décomposable en quatre facteurs du premier degré en x ou en y, dont chacun donnera une racine de l'équation dont il fait partie. On aura de cette manière : X, = — x, \[= — x", X," = — oc", X" = — x**. cV ■ . /x"x'"x" ! Y,< = T^x'-x"-x'"-x"^^-^-\, c r , „ . /x' x" x"~\ Yi - âlx ~x ~x -*"+9v-i^-Ji Y,' = - - \vx' - Vx" - Vx"' + Vx" ; 4B L -I Vx' + Vx" - Vx'" - Vx" ; C 4B| Tome XXX. Y," = Y,"= c r >, — x" - 4B L c r — x" - 4BL - x' — - x' — x'" — X" x" — x'" 1 ° \ / x x x' V x" -1 Y,"= ■ c Ti/ • - Vx' ' + Vx" ' - Vx"j ; \7<= 4BL -t-l/x' ' + Vx" ' -i- Vx" ; 34 LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. Vx'x'Wx'"— Vx") ~Vx'"x'\Vx'-Vx") „_ Vx,x"(Vx"-Vx"')+Vx"'x"(Vx"-\ -ri x«' = yx' —Vx"- Vx'" ■+- Vx" ' Vx'— i/x"-+-l/x'"-l/x" , _ Vx'"x"(Vx'-t-Vx") - Vxx'(Vx,"+Vx") _ Vx,"x"(Vx'+Vx")-y-Vx'x',(Vx,"+Vr") . Xi"= l/x'-t-l/x" — l/x'"-l/x" ' l/x'-t-l/x"-+-l/x"'-l-l/x" x* " y x" - Vx' -+■ l/x"' -t- Vx" . "~ Vx'-Vx"-t-Vx'"-*-Vx'v . ,„_ Vx'"x"(Vx'+Vx") - Vx'x'Wx" - 1 /x") x „_ _ Vx"'x"(\,/x'-+-Vx")+Vx'x"(Vx"— Vx") . X= ~ l/r' -+- l/x" - l/x"' -+- l/x" 3 ~ " Vx'+VM -+\ x'"— l/x" .,_ c [(Vx"+Vx-) [(Vx-'-vx'y-iyx» -t/x"')a]H-(t/x-,-v/x')[(t/x"-t-y/x",)--(V/x' + i/x)-;~| Yj = iÊL ~~ l/x" — l/x' -f- l/x'" H- l/x" J' . „ _ C ["(l/x" -4- l/x'") [ (l/x" - l/x')- - (l/x" - l/c'")*] -+- (Vx" - Vx') [(l/x'"-t- Vx"f - (Vx11 -t- lxx')-;"| . « " IbL l/x' — l/x" H- l/x'" + l/x" J ' . ,„_ C Rl/X"— l/x"')[(l/x' + V/x")' — (l/x"-4-l/x"Qal + (l/x'H-l/x")[(l/x" — 1/X'")'-(V/X"-1/X,)ijl Yî = TÏÏL l/x'-l-l/x" — l/xr"+l/x" J _ C_ ["(l/x"— l/x"') [ (l'x" -4- 1 i')! - (l/r" -t- Vx'"f] -+- (Vx"+Vx') [(Vx" - Vx-)* - (Vx" - Vx'ril !"= 4BL l/x' h- l/x" + l/x'" -l/x" J Ces valeurs théoriques sont aptes à faire connaître les conséquences de toutes les hypothèses possibles à l'égard des racines de l'équation (I. 1), en donnant kx', x", x'", et xn les valeurs appropriées à ces hypothèses; elles peuvent, par conséquent, servir à faire distinguer tous les cas réellement dif- férents, et, par suite, toutes les espèces possibles dans la 2me classe. 57. Toutes les lignes de la 2me classe possèdent trois asymptotes recti- lignes, avec chacune desquelles elles convergent dans les deux sens; elles doivent donc posséder six branches illimitées, et, par suite, trois nappes, dont une seulement peut être anguinée ou conchoïdale; car, pour converger avec une seule asymptote, il faut que la courbe s'étende tout le long de cette droite, qu'elle peut couper ou ne pas couper à distance finie, selon que la conver- gence a lieu des deux côtés ou d'un seul côté; mais, dans tous les cas, celte nappe doit couper chacune des deux autres asymptotes, attendu qu'elles sont elles-mêmes sécantes à l'asymptote de cette nappe. Les deux autres nappes ne peuvent donc plus couper ces asymptotes, ce qu'elles devraient faire ce- pendant toutes les deux, ou au moins l'une d'elles, si elles pouvaient être anguinées ou conchoïdales. L'observation qui précède montre que l'existence d'une partie anguinée ou conchoïdale exige l'intersection de la courbe avec au moins deux de ses asymptotes. II s'ensuit qu'une pareille nappe ne peut se rencontrer que dans les deux premiers genres. Lorsquelle existe, les deux LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. 35 autres nappes doivent forcément être inscrites. Nous ajouterons qu'elle exclut toute ovale séparée ou réunie, fût-elle même réduite à un point; car, en tirant à cette ovale une sécante parallèle à une des asymptotes des nappes inscrites , celte sécante devrait aussi couper la nappe anguinée : elle rencontrerait ainsi la courbe en trois points, ce qui est impossible à toute droite d'une direction asymptotique. L'ovale, le point, le nœud ou la pointe ne peuvent donc exister qu'avec trois nappes qui ne sont ni anguinées ni conchoïdales. L'ovale et ses analogues doivent toujours être inscrites dans le triangle asymptoti- que; le nœud ou la pointe ne sont, par conséquent, possibles qu'en cas où une des nappes puisse pénétrer dans l'intérieur de ce triangle, c'est-à-dire couper deux asymptotes. L'ovale et toutes ses dérivées sont impossibles avec une nappe cruciforme , qui peut être considérée comme le résultat de la réunion dune nappe anguinée ou conchoïdale avec une autre nappe. Dans le 1er genre, lorsqu'il n'y a pas de nappe anguinée, l'une des nappes doit être cir- conscrite, une autre ambigène, et la dernière inscrite; dans le 2me genre, lors- qu'il n'existe pas de nappe conchoïdale, il peut y avoir deux nappes am- bigènes avec une nappe inscrite, ou bien deux nappes inscrites avec une nappe circonscrite; dans le 3rae genre, les trois nappes sont toujours inscrites. PREMIER GEJNRE. 58. Caractères géométriques : La courbe coupe chacune de ses asymptotes îcciilignes en un point; elle possède trois nappes hyperboliques du 2me ordre. Conditions analytiques : H, K et (BK — CH) différents de zéro. Ces conditions exigent qu'aucune des racines de 1 équation (I. 1) ne soit nulle et que {\/x' + \/x" -\- \/x"< — \/x,y), ainsi que {\/x' — \/x" — \/x'" ■\-\/x"), ne le soient pas non plus; et, comme nous avons supposé II et K positifs, on doit avoir \/x'v + ]/x' > ]/x"-\-\/x'". Cette hypothèse est com- patible avec chacune des hypothèses ]/x" — |/V ^ \/x"-{-\/x'"; (BK — CH) peut donc être positif ou négatif. La supposition de K et H positifs a pour con- séquence que la nappe convergente avec les deux axes coordonnés doit être circonscrite, et si nous y ajoutons l'hypothèse BK — CH< o, nous disons 36 LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. par là que la nappe convergente avec l'axe des abscisses et la 3me asym- ptote doit être ambigène, et, par suite, que celle qui converge avec la 3me asymptote et Taxe des ordonnées doit être inscrite. De cette manière, la posi- tion de chacune des trois nappes à l'égard de leurs asymptotes, se trouve fixée. Lorsque l'équation de la courbe est de la forme (L), les trois asymptotes sont données par les équations x = o, y =u et By -f- Cx -j- F = o. La courbe coupe donc les deux asymptotes prises pour axes aux points y = -^ et * = — — et la droite qui passe par ces deux points a pour équation IL/ + l\x + L = o. En combinant cette équation avec celle de la courbe, on a Bxy*-\- Gx*y -f- Fyx=xy (By + Ca? + F) = o, ce qui indique que la droite passant par les deux points d'intersection de la courbe avec les deux asym- ptotes prises pour axes, passe aussi par son point d'intersection avec la 3me asymptote. Les trois points d'intersection de la courbe avec ses asymptotes sont donc en ligne droite. 59. Les racines réelles de même signe de l'équation (I. 1) doivent être en nombre pair. Lorsqu'elles sont toutes réelles, elles peuvent être toutes de même signe; il se peut aussi que deux soient positives et les deux autres négatives. S'il n'y a que deux racines réelles, elles doivent être de même signe. Enfin les quatre racines peuvent être imaginaires. En cas de quatre racines réelles de même signe, elles peuvent offrir les combinaisons suivantes : les quatre raci- nes sont inégales; deux d'entre elles sont égales, et l'égalité existe entre les deux racines moyennes ou entre les deux racines extrêmes; il y a deux cou- ples de racines égales; trois des racines sont égales; enfin les quatre racines sont égales. Le cas de deux couples de racines réelles de signes différents permet l'inégalité des racines d'un même couple, l'égalité des racines d'un seul couple et celle des deux racines de chaque couple. Lorsqu'il n'y a (pie deux racines réelles, elles peuvent être inégales ou être égales; enfin l'hy- pothèse de quatre racines imaginaires n'admet qu'un seul cas. 60. Les hypothèses d'égalité de deux ou de trois racines dont la valeur numérique est la plus grande, sont incompatibles avec celles de H et K positifs; car en supposant x" = x'" , la relation de condition du signe de K se réduit à \/x' > \/xn, relation inexacte; il en est de même si l'on suppose x'" = x'" — x"; tandis que les suppositions de x'=x", ou de x" = x'"1 ou LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. ." dex' = x" = x'" donnent x" > x'", ou |/#u -{-\/x' >2|/aî", relations dont l'une est vraie et dont l'autre peut l'être : cela est d'ailleurs évident, car l'ovale étant inscrite dans le triangle asymptotique, la nappe à laquelle elle se réunit doit pénétrer dans ce triangle, ce qui n'est possible que pour la nappe circon- scrite, qui, d'après nos hypothèses, est celle qui converge avec les deux axes. 61. L'hypothèse de deux couples de racines égales, n'importe qu'ils soient de même signe ou de signes contraires, ainsi que celle de quatre racines éga- les, rendent K et L nuls à la fois; elles font dégénérer l'équation (L) en une équation complexe, puisqu'elles la rendent divisible par y. Ces hypothèses doivent donc être écartées. 62. L'hypothèse de quatre racines réelles, deux à deux de signes con- traires, exige le changement de signe de deux des racines de l'équation (L 1). En introduisant cette modification dans les expressions théoriques du § 06, on trouve que toutes les racines des équations (IL 1. 2) et (III. 1.2) de- viennent imaginaires ; on peut en conclure que l'hypothèse de quatre racines imaginaires, dans l'équation (I. 1), rend également imaginaires les quatre racines de l'une des équations (IL 1 ) ou (III. I), et laisse celles de l'autre réelles, en plaçant un couple de tangentes- limites de chaque côté de leur asymptote : il suffit, pour s'en assurer, de faire xt.= q= « 4- /3 ]/ - - 1 ; ^"=Ta-|3[/-l; a?'"= t y+^ZTi.. X'y= =fy—SV— 1. On en conclut encore que la courbe doit exister sans discontinuité dans les deux sens de l'une de ses asymptotes; la nappe qui converge avec cette asymptote doit donc être anguinée. D'après ce qui précède, l'hypothèse de deux couples de racines réelles de signes contraires, et celle de quatre ra- cines imaginaires ne fournissent qu'une seule et même espèce. Il en est de même pour l'hypothèse de deux couples de racines réelles de signes con- traires, dont l'un est formé par deux racines égales, et pour celle de deux seules racines réelles égales. Chacune des hypothèses restantes du cas de quatre racines réelles et de celui de deux racines réelles fournit une espèce distincte; car, dans chacun, les tangentes de chacune des trois directions asymptotiques sont en même nombre, de même nature et placées de la même manière par rapport à leurs asymptotes respectives. Il en résulte que le 1er genre de la 2mc classe contient sept espèces. 58 LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. 63. Chaque t'ois que les quatre racines sont réelles et de même signe, le signe de F ne peut changer, ainsi que sa valeur théorique le démontre. Il en est de même dans le cas de deux racines imaginaires, lorsque leur partie réelle est nulle, ou de même signe que les deux racines réelles; tandis que, dans le cas contraire, ainsi que dans celui de deux couples de racines réelles de signes différents, F peut rester positif ou devenir nul ou négatif. Dans le premier cas, le triangle asymplotique reste dans l'angle des coordonnées négatives, et toutes les tangentes-limites se trouvent du côté de leur asymptote tourné vers l'intérieur de ce triangle. Dans le second cas, les trois asymptotes passent par un même point (l'origine). Dans le troisième enfin, le triangle asymptotique est transporté dans l'angle des coordonnées positives, et toutes les tangentes-limites se trouvent du côté de leur asymptote tourné vers l'extérieur dudit triangle; mais ce changement de position est pro- duit par la seule translation de la 3me asymptote parallèlement à elle-même, laquelle, dans sa marche, a entraîné les quatre tangentes de sa direction; le nomhre des tangentes, leur nature et leur position par rapport à leur asym- ptote, restent donc toujours les mêmes. La variation du signe de F et l'an- nulation de ce coefficient ne constituent donc pas des espèces diverses : elles donnent seulement naissance à des sous- espèces de chacune des espèces dans lesquelles ces variations sont possihles. Néanmoins, comme, dans le cas de deux couples de racines réelles de signes contraires, la translation du triangle asymptotique s'opère par le mouvement de l'asymptote de la nappe anguinée, et comme, dans chacune des positions de cette asymptote, il y a toujours deux tangentes-limites du côté de cette droite tourné vers l'intérieur du triangle asymptotique, et deux autres du côté tourné vers l'extérieur dudit triangle, l'espèce répondant au cas n'admet que deux sous- espèces distin- guées par les conditions de F différent de zéro et de F nul; tandis que cha- cune des autres espèces dans lesquelles F peut varier de signe, admet les trois sous-espèces résultant des hypothèses F= o. lii. Première espèce (l,e espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose de trois nappes extrê- mes, disjointes, et d'une ovale intermédiaire, séparée des nappes. LES LIGNES DU TROISIÈME ORDRE. 59 Conditions analytiques : Les quatre racines de l'équation (I. 1 ) sont réel- les, de même signe et inégales : x' < x" < x'" < xl\ Exemple : xxf + hxhj + Wxy + 1 60# -j- x— 240 = o. {Fig. 13.) 65. Deuxième espèce (4rae espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose de trois nappes disjointes, et d'un point conjugué isolé. Conditions analytiques : Les quatre racines de l'équation (1. 1) sont réelles et de même signe, et les deux racines moyennes sont égales. Exemple : xy- + x%y + 8^ + 9y + x = o. {Fig. 14.) 66. Troisième espèce (2me espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose de trois nappes disjointes, dont celle qui est circonscrite, est nouée. Conditions analytiques : Les quatre racines de l'équation (1. 1) sont réelles et de même signe, et les deux racines extrêmes dont les valeurs numériques sont les plus petites, sont égales. Exemple : xya-+ kxhj -f 30^ -f Uy + 57a? + 20 = o. ( Fig. 1 5.) 67. Quatrième espèce (3me espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose de trois nappes disjointes, dont celle qui est circonscrite, est pointue. Conditions analytiques : Les quatre racines de l'équation (1. 1) sont réelles et de même signe, et les trois racines dont les valeurs numériques sont les plus petites, sont égales. 40 LES LIGNES DU TROISIÈME ORDRE. Exemple : xif + kx*y + h1xy-\- 96// + 9x + 32 = o. {Fig. 1 G.) 68. Cinquième espèce (5mc, 6me et 24rae espèces de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose de trois nappes pures, disjointes. Conditions analytiques : L'équation (1. 4) n'admet que deux racines réelles; elles sont de même signe et inégales. a. Première sous-espèce (5me espèce de Newton). Caractères géométriques : Toutes les tangentes-limites se trouvent du côté de l'asymptote de leur direction tourné vers l'intérieur du triangle asym- ptotique. Conditions analytiques : La somme algébrique des racines de l'équation (1.4) est de même signe que les racines réelles; F > o. Exemple : xf + xhj + \§xy + 64// + 25x = o. (Fig. 4 7.) b. Deuxième sous-espèce (24me espèce de Newton). Caractères géométriques : Les trois asymptotes se coupent au même point (l'origine). Conditions analytiques : La somme algébrique des racines de l'équation (1.4) est nulle; F = o. Exemple : ixy2 + hxhj + 4 20// + 49a; — 360 = o. (Fig. 4 8.) c. Troisième sous-espèce (6me espèce de Newton). Caractères géométriques : Toutes les tangentes- limites se trouvent du côté de l'asymptote de leur direction tourné vers l'extérieur du triangle asym- ptotique. LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. 41 Conditions analytiques : La somme algébrique des racines de l'équation (1. 4) est d'un signe différent de celui des racines réelles ; F < o. Exemple: kx\f+ 4x2/ + 243lr — 888 = 0. (Fig. 49.) 69. Sixième espèce (7me, 8n,e et 25n,e espèces de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose d'une nappe cruciforme, et d'une nappe ordinaire, inscrite. Conditions analytiques : Les deux seules racines de l'équation (1.4) sont égales. a. Première sous-espèce (7n,e espèce de Newton). Caractères géométriques : Le point de croisement se trouve au-dessus d'un côté du triangle asymptotique, dans un de ses angles intérieurs, et la nappe inscrite tombe entre les côtés de l'angle extérieur, opposé au sommet à l'angle intérieur précité. Conditions analytiques : La somme algébrique des racines de l'équation (1.4 ) est de même signe que les deux racines réelles; F > 0. Exemple: xif + x*y + Zxy + 2% + 4Gx = 0. (Fig.ZO.) h. Deuxième sous-espèce (25n,e espèce de Newton). Caractères géométriques : Les trois asymptotes se coupent en un même point (l'origine). Conditions analytiques : La somme algébrique des racines de l'équation (1.4 ) est nulle; F = o. Exemple : x\f + xhj -f 4% + Sx — 24 = 0. (Fig. 24.) c Troisième sous-espèce (8me espèce de Newton.) Tome XXX. 6 42 LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE Caractères géométriques : Le point de croisement se trouve dans un des angles extérieurs du triangle asymptotique, et la nappe inscrite tombe entre les prolongements des côtés de l'angle intérieur opposé au sommet à l'angle extérieur précité. Conditions analytiques : La somme algébrique des racines de l'équation (1.4) est d'un signe différent de celui des racines réelles; F < o. Exempte : xf + x*y—xy +10// + ix— 24 = o. ( Fig. 22.) 70. Septième espèce (9me, 26n,e et 27me espèces de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose de deux nappes exl rénies pures, et d'une nappe anguinée intermédiaire. Conditions analytiques : Les quatre racines de l'équation (1. 1) sont réelles. deux à deux de signes contraires, et celles qui sont de mêmes signes, sont inégales. a. Première sous-espèce (9me espèce de Newton). Caractères géométriques : Les trois asymptotes ne passent pas par un même point. Conditions analytiques : La somme algébrique des racines de l'équation (I. 1) n'est pas nulle; F ^ o. Exemple: 4Gx/+ 16x2// + 104*?/+ 192 o et K < o, relations qui ne peuvent exister en même temps. Il en résulte que, si K est positif, les deux nappes qui convergent avec l'axe des ordonnées coupent chacune sa deuxième asymptote, et que, si Iv est négatif, c'est la nappe qui converge avec l'axe des abscisses et avec la 3me asymptote qui coupe chacune de ces droites. Mais le signe de K n'exerce aucune influence ni sur le nombre des tangentes-limites, ni sur leurs positions relatives; la variation de ce signe ne constitue donc pas des espèces différentes; néanmoins on doit en tenir compte, en partageant en deux sous- divisions chacune des espèces dans lesquelles cette variation est possible. Le signe de K dépend de celui de (l/xiv — \/x" — [/'x'"); il s'ensuit que K ne peut varier de signe que si les trois racines sont de même signe et inégales, ou si x" = x'", ou bien encore s'il n'existe qu'une seule racine réelle; dans tous les autres cas, K est invariable de signe et négatif. Les hypothèses différentes possibles à l'égard des racines de l'équation (1. 1) sont au nombre de sept, dont chacune fournit un cas différent et, par suite, elles donnent naissance à sept espèces, qui sont les 8rae à 14me de la 2me classe. 74. Tous les cas du 1er genre dans lesquels F est invariable de signe, LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. 45 ainsi que ceux dans lesquels F peut changer de signe , ont leurs analogues dans le 2me genre, et dans tous les cas où le signe de F peut varier, cha- cune des trois hypothèses F= o constitue une sous -espèce, même dans celui de trois racines réelles de signes différents; car, si, dans le cas analo- gue du 1er genre, les deux hypothèses F ^ o ne forment qu'une seule sous- espèce, c'est que la nappe étant anguinée, possède une tangente-limite de chaque côté de son asymptote; tandis que, dans le 2me genre, cette nappe étant eonchoïdale, doit rester en entier, soit d'un côté, soit de l'autre de l'asymptote , selon que F est positif ou négatif. 75. Huitième espèce (10rae espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe possède (rois nappes disjointes, e( une ovale conjuguée. Conditions analytiques : Les trois racines de l'équation (F) sont réelles, de même signe et inégales. a. Première sous-division. Caractères géométriques : Chacune des deux nappes convergentes avec l'asymptote non sécante coupe une des deux autres asymptotes, ou bien la courbe est formée de deux nappes ambigènes, d'une nappe inscrite et d'une ovale. (Ce cas a été omis par Newton; il a été donné par Cramer.) Conditions analytiques : K positif. Exemple : xif + hx*y -f Wxy + 1 Sx — 1 08 = o. (Fig. 25 . ) /S. Deuxième sous-division (10n,e espèce de Newton.) Caractères géométriques : La nappe qui converge avec les deux asymptotes sécantes coupe chacune d'elles, ou bien la courbe possède une nappe cir- conscrite, deux nappes inscrites et une ovale. Conditions analytiques : K. négatif. 46 LES LIGNES DU TROISIÈME ORDRE. Exemple : xy- + 2*7/ + 16a?*/ — 5x — 54 = o. [Fig. 26.) 76. Neuvième espèce (13mc espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose de Irois nappes disjointe?. et d'un point conjugué isolé. Conditions analytiques : Les trois racines de l'équation (I') sont réelles et de même signe, et les deux racines qui ont les moindres valeurs numériques, sont égales. a. Première sous-division. Caractères géométriques : L'une des nappes est inscrite et les deux autres sont ambigènes. (Ce cas a été omis par Newton; il a été donné par Cramer.) Conditions analytiques : K positif. Exemple : I O.r/y2 -f \ <5x*y + 1 Obxy + 9* — 1 44 = o. {Fig. 27 . /3. Deuxième sous-division (13me espèce de Newton). Caractères géométriques : L'une des nappes est circonscrite et les deu\ autres sont inscrites. Conditions analytiques : K négatif. Exemple : Kxy- + lx*y -f Sxy — x — 2 = o. ( Fig. 28.) 77. Dixième espèce (4 4me espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose de deux nappes inscrites, et d'une nappe circonscrite , nouée. Conditions analytiques : Les Irois racines de l'équation (I') sont réelles LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. 47 et de même signe, et les deux racines dont la valeur numérique est la plus grande , sont égales. Exemple : kxtf + ix\ij + Mxy — 9x — 50 = o. {Fig. 29.) 78. Onzième espèce (12me espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose de deux nappes in- scrites, et d'une nappe circonscrite, pointue. Conditions analytiques : Les trois racines de l'équation ({') sont réelles, de même signe et égales. Exemple : bxy* + W'g + 1 Sxy —27*— 1 08 = o. { Fig. 30.) 79. Douzième espèce (14"h', 4 5me, 16me, 17me, 28me et 29me espèces de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose de trois nappes pures. Conditions analytiques : L'équation (T) n'admet qu'une seule racine réelle. a. Première sous-division (15me, 17me et 29me espèces de Newton). Caractères géométriques : L'une des nappes est inscrite et les deux autres sont ambigènes. Conditions analytiques : K positif. a. Première sous-espèce (15me espèce de Newton). Caractères géométriques : Toutes les tangentes -limites se trouvent du côté de l'asymptote de leur direction tourné vers l'intérieur du triangle asymptotique. 48 LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. Conciliions analytiques : La somme algébrique des racines de l'équation (F) est de même signe que la racine réelle; F > o. Exemple : xy- -f x2y + 25a?# -f 4 04#— 225 = o. (Fig. 34.) 6. Deuxième sous-espèce (29me espèce de Newton). Caractères géométriques : Les trois asymptotes se coupent au même point (l'origine). Conditions analytiques : La somme algébrique des racines de l'équation (F) est nulle; F= o. Exemple : kxy- -f hx%y -f 4 \x - 4 50 = o. [Fig. 32.) r. Troisième sous-espèce (47me espèce de Newton). Caractères géométriques : Toutes les tangentes -limites sont situées du côté de l'asymptote de leur direction tourné vers l'extérieur du triangle asymptotique. Conditions analytiques : La somme algébrique des racines de l'équation (F) est d'un signe différent de celui de la racine réelle ; F < o. Exemple : ixy- -f kx^y — Sxy -f- i\x~— 400 = o. (Fig. 33.) fi. Deuxième sous-division (44n,e, 46me et 28me espèces de Newton). Caractères géométriques : L'une des nappes est circonscrite et les deux autres sont inscrites. Conditions analytiques : R négatif. a. Première sous-espèce (46me espèce de Newton). Caractères géométriques : Toutes les tangentes-limites se trouvent du côté de l'asymptote de leur direction tourné vers l'intérieur du triangle asympto- tique. LES LIGNES DU TROISIÈME ORDRE. 49 Conditions analytiques : La somme algébrique des racines de l'équation (I7) est de même signe que la racine réelle; F > o. Exemple : xy* + x"y + %xy — 6a; — 2o = o. {Fiij. 34.) b. Deuxième sois-espèce (28",c espèce de Newlon). Caractères géométriques : Les trois asymptotes se coupent au même point (l'origine). Conditions analytiques : La somme algébrique des racines de l'équation (I') est nulle; F = o. Exemple : hxy- + bx*y — ¥>x —18 = o. ( Fig. 35.) c. Troisième sous-espèce (14n,c espèce de Newton). Caractères géométriques : Toutes les tangentes -limites se trouvent du côté de l'asymptote de leur direction tourné vers l'extérieur du triangle asj mptotique. Conditions analytiques : La somme algébrique des racines de l'équation (I ) est d'un signe différent de celui de la racine réelle; F < o. Exemple : ï<àxf + 16*% — Sxy— o. Exemple : Ixy* + bx*y + l&xy + 13r + 42 = o. [Fig. 37.) b. Deuxième sous-espèce (5jme espèce de Newton). Caractères géométriques : Les trois asymptotes passent par un même point (l'origine). Conditions analytiques : La somme algébrique des racines de l'équation (F) csi nulle; F = o. Exemple : ixif -f i.ry + Ix + 6 = o. [Fig. 38.) c. Troisième sous-espèce (21 me espèce de Newton). Caractères géométriques : La partie conchoïdale se trouve du côté de son asymptote tourné vers l'extérieur du triangle asymptotique. Conditions analytiques : La somme algébrique des racines de l'équation (F) est d'un signe différent de celui des deux racines de même signe; F< o. Exemple : xif + x°-y — xy + ISx + 27 = o. {Fig. 39.) 81. Quatorzième espèce (18me, 49me et 30rae espèces de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose d'une nappe inscrite et de deux nappes ambigènes , dont la réunion forme une nappe cruciforme. Conditions analytiques : Les trois racines de l'équation (F) sont réelles; l'une d'elles est d'un signe différent de celui des deux autres, qui sont égales. a. Première sous-espèce (19me espèce de Newton). Caractères géométriques : Le point de croisement est situé du côté de LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. M l'asymptote non sécante tourné vers l'extérieur du triangle asymptotique. Conditions analytiques : La somme algébrique des racines de l'équation (I') est de même signe que la racine double; F > o. Exemple : xy* + x*y -f- xy + 2a? — 1 = o. (Fiy. 40.) b. Deuxième sous-espèce (30me espèce de Newton). Caractères géométriques : Les trois asymptotes se coupent au même point (l'origine). Conditions analytiques : La somme algébrique des racines de l'équation (!') est nulle; F = o. Exemple : hx\f + &x*y -f- 3x — 2 = o. {Fiy. 41.) c. Troisième sous-espèce (18me espèce de Newton). Caractères géométriques : Le point de croisement se trouve du côté de l'asymptote non sécante tourné vers l'intérieur du triangle asymptotique. Conditions analytiques : La somme algébrique des racines de l'équation (I') esl d'un signe différent de celui des deux racines égales ; F < o. Exemple : xy2 -f- x*y — xy + Ix — 9 = o. [Fig. 42.) TROISIÈME GEXRE. 82. Caractères géométriques : La courbe ne rencontre aucune de ses asymptotes à dislance finie. Elle possède trois axes de symétrie directe, qui se coupent en un même point. Ses six brandies illimitées sont hyperboliques du 3""' ordre. Conditions analytiques : H et R nuls. 52 LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. Ces conditions ramènent l'équation (L) à la forme Bxy'2 -)- Cary + Fxy -\- L = o. Celte forme indique que si L est nul, la courbe se réduit à ses trois asymptotes. Puisque II et K sont nuls, on doit avoir x' = o et V^=\/xr' -{-{'x'''. En introduisant ces conditions dans les expressions du § 06, on aura les valeurs théoriques propres au 3me genre. 83. La condition de II et K nuls réduit les équations (1.4. 2.), (II. 1.2.) et (III. 1.2.) comme suit : i" H" III" I . x [ C2x3 ■+- 2 o. a. Première sous-espèce (22me espèce de Newton). Caractères géométriques : Les trois nappes sont inscrites entre les côtés des angles extérieurs du triangle asymptotique. Conditions analytiques : La somme algébrique des racines de l'équation (I".l) est de même signe que la racine réelle; F > o. Exemple : x]f' -J- x-y -j- Ixy — 4 = o. {Fig. 45.) b. Deuxième sous-espéce (32n,e de Newton). Caractères géométriques : Les trois asymptotes se coupent au même point (l'origine). Conditions analytiques : La somme algébrique des racines de l'équation (I". 2) est nulle; F = o. Exemple : xys + x*y — 2 = o. {Fig. 46.) c. Troisième sous-espèce (23""' espèce de Newton). Caractères géométriques : Les trois nappes sont inscrites entre les prolon- gements des côtés des angles intérieurs du triangle asymptotique. Conditions analytiques : La somme algébrique des racines de l'équation (I". \ ) est d'un signe différent de celui de la racine réelle; F < o. Exemple : xif -\- xSj — xy — 25 = o. [Fig. 47.) 89. Dans la 2",e classe, les espèces où F peut varier de signe sont les seules qui admettent un centre général des diamètres, et dans ces espèces, ce ne sont que les sous-espèces données par la condition F = o qui pos- sèdent un pareil centre, lequel est la conséquence de l'intersection des trois asymptotes en un même point. LES LIGNES DlT TROISIEME ORDRE. 55 TROISIEME CLASSE. 90. Caractères géométriques : Doux directions asymptotiques, dont l'une est simple et l'autre double. Forme générale de l'équation : Bxy* + Gr"2 -f- H/y -f- K.x -|- L = o (M). Conditions analytiques : D nul , et B différent de zéro. La forme (M) indique que chacun des deux axes possède une direction asymptotique ; que la direction simple a été attribuée à l'axe des ordonnées, qui est en même temps l'asymptote de cette direction, et que l'axe des ab- scisses possède la direction double. Cet axe ne peut cependant être l'asym- ptote de cette direction qu'en cas de G et de R nuls, et alors il en est l'unique asymptote. 91. En résolvant l'équation (M) par rapport à y, on trouve que l'équation des tangentes-limites de la direction simple est K L H2 X° -4- - X2 -+- — X -f- = 0 (N). G G 4BG [ ' Il n'y a donc que trois tangentes-limites à dislance finie; la 4me est rejetée à l'infini. La courbe est, par conséquent, illimitée, d'un côté, dans le sens des abscisses, et elle est limitée de l'autre côté. Le signe de G indique de quel côté elle est limitée. La résolution de la même équation (M) par rapport ;i j- donne pour équation des tangentes-limites de la direction double : 2K 4GH K — 4GL Il peut donc y avoir quatre tangentes-limites, ou deux, ou aucune; mais, en tout cas, la courbe doit s'étendre à l'infini dans les deux sens des ordonnées, attendu que dans la partie sous- radicale de la valeur de x, le terme en \f est essentiellement positif. 56 LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. On voit aussi par celle valeur de oc que les cordes de la direction asyin- ptotique double ont pour bissectrice une parabole dont l'équation est Bî/2 + 2G# + K = o. Elle coupe Taxe des abscisses au point •* = - — , qui est son sommet, et elle dirige ses brandies dans le sens des abscisses de signe contraire à celui de G. Lorsque G = o, cette parabole dégénère en deux droi- tes parallèles, %" + K = o, qui sonl imaginaires, ou réelles et différentes, ou réelles et coïncidentes, selon que Iv£ o. Dans le premier cas, les brandies paraboliques de la courbe du 3"'c ordre sont imaginaires; dans le second cas, elles existent au nombre de quatre, dont deux sont dirigées dans le sens des x positifs, et les deux autres dans celui des x négatifs; dans le 3me cas, il n'y a que deux branches paraboliques, dirigées dans un même sens des ab- scisses, indiqué par le signe contraire à celui de L. PREMIER GENRE. 92. Caractères géométriques : La courbe coupe l'asymptote de la direc- tion simple; elle ne possède pas, a distance finie, des asymptotes rectilignes dans la direction double, mais elle y possède deux brandies paraboliques du 2me ordre. Conditions analytiques : G et H différents de zéro. Si nous désignons les racines de l'équation (N) par — x'} — x", — x'", tous les termes de cette équation doivent être positifs; par suite, G, K et L doivent être négatifs dans l'équation (M), et, à cause de G négatif, la courbe sera illimitée dans le sens des x positifs; mais la désignation qui précède présuppose l'existence de trois racines réelles de même signe. Il est cepen- dant toujours permis de supposer que les racines négatives sont en nombre impair, alors G sera négatif dans l'équation (M), et les deux autres coefficients pourront aussi y être négatifs. On pourra donc donner à l'équation du I " genre la forme \ïxif — Gx^-\- \\y — K.r — L =0 (M'), et alors les équations (S) et (P) seront: 2K 4GL K2 — 4GL K I, H2 .;•"' -+- G .<:'- + G x + 4BG o ■. et j/1 y2 +• -— y B B- B* LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. 57 93. Sept hypothèses sont possibles à l'égard des racines de l'équation (X), cl toutes fournissent des cas différents. Il y a donc sept espèces dans le 1 er genre. Dans les cinq premières, l'équation (P) admet au moins deux racines réelles et différentes. II existe donc, dans chacune de ces cinq espèces, au moins une zone dans la direction douhle, et, par suite, les deux branches hyperboliques ne peuvent appartenir à une même nappe. Dans la 6me es- pèce, les quatre racines de l'équation (P) sont imaginaires; la courbe existe donc sans discontinuité dans les deux sens des ordonnées; et les deux bran- ches hyperboliques appartiennent à une même nappe qui, par conséquent, doit être anguinée. Dans la 7mc espèce, l'équation (P) admet deux racines réelles qui sont égales, et les deux autres sont imaginaires; la courbe existe donc aussi sans discontinuité dans les deux sens des ordonnées, mais elle possède un point de croisement, résultant de la réunion des deux nappes. La résolution de l'équation (N) par la méthode de Cardan fait connaître que la nature de ses racines dépend du signe et de la valeur du polynôme (8BK5 — 36RGKL -f 27G'H')* — UW (Ks— 3GL)3, ou bien H* — ■— [K(9GL— 2K2) ± 21/R2 — 3GL)3]; ce polynôme fournit donc aussi les con- ditions analytiques des espèces. 9i. Première espèce (4.6me espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe possède deux nappes hyperbolo- paraboliques , dont Tune est ambigène et l'autre inscrite, et une ovale con- juguée. Conditions analytiques : Les trois racines de l'équation (N) sont réelles, de même signe et inégales; ÏP< ^[K(9GL— 2K3) + 2 |/(~K2 — 3GL)31- Exemple : xxf—a*— \\x + 8# — 26 = o. {Fig. 48.) 95. Deuxième espèce (49,m' espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose de deux nappes pareil- les à celles de l'espèce précédente, et d'un point conjugué isolé. Tome XXX. 8 58 LES LIGNES DU TROISIÈME ORDRE. Conditions analytiques : Los trois racines de l'équation (N) sont réelles et de même signe, et les deux racines dont les valeurs numériques sont les plus fortes, sont égales; Ha = -^[K(9GL — 2k2) — 2^(K2— -3GL)5]. Exemple : xy'2 — x2 — 9x + 8# — 24 = o. (Fie/. 49.) 96. Troisième espèce (47n,e espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose de deux nappes hyper- bole-paraboliques, dont Tune est ambigène et nouée, et l'autre inscrite. Conditions analytiques : Les trois racines de l'équation (N) sont réelles, de même signe, et les deux racines dont les valeurs numériques sont les plus fai- bles, sont égales ; Ha --= ~ [K (9GL— 2K2) + 2^(Kâ— 3GL)sj. Exemple : xy- — a?3 — 13j; + 1% — 40 = o. ( Fig. 50. ) 97. Quatrième espèce (48me espèce de Newton). Caractères géométriques : La coui'be se compose de deux nappes hyper- bolo- paraboliques, dont l'une est ambigène et pointue, et l'autre inscrite. Conditions analytiques : Les trois racines de l'équation (N) sont réelles et égales; K2 = 3GL et 27G2H2 = 4BK\ Exemple: xy2 — x3 — lHx-\-l6y — 48 = o. {Fig. 54.') 98. Cinquième espèce (50me espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose de deux nappes hyper- bolo- paraboliques pures, dont l'une est ambigène et l'autre inscrite. Conditions analytiques : L'équation (N) n'admet qu'une seule racine réelle ; H2> ^[K(9GL — 2R2) + 2^(K2— 3GL)31. Exemple: xy- — x2 — 4.7a; + 26y — 65 = o. (Fig. 52.) LES LIGNES DL TROISIÈME ORDRE 59 09. Sixième espèce (o2m,; espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose d'une nappe hyperbo- lique anguinée, et d'une nappe parabolique. Coud il ions analytiques: L'une des trois racines de l'équation (N) est d'un signe différent de celui des deux autres, qui sont inégales; H2< — [K(2K2 — 9GL) + 2l/(Ka— 3GL)3]. Exemple : xy* + x1 -f 7j + i2y = ô. (/%. 33.) 100. Septième espèce (51me espèce de Newton). Caractères géométriques: La courbe consiste en une nappe cruciforme, dont deux branches sont hyperboliques et les deux autres paraboliques. Conditions analytiques : Les trois racines de l'équation (N) sont réelles, et l'une d'elles est d'un signe différent de celui des deux autres, qui sont égales; H2 = ^ [K(2K2— 9GL) + 2|/(K*— 3GL)3J. Exemple : rif + x'2 -f 20a; -f 48y + 48 = o. {Fig. &4.) DEUXIÈME GENRE. 101. Caractères géométriques : La courbe ne rencontre pas, à distance finie, l'asymptote de la direction simple. Elle possède un axe de symétrie directe. La direction double est dépourvue d'asymptotes rectilignes; mais il y existe deux branches paraboliques du 2roe ordre. Les deux branches de la direction simple sont hyperboliques du 3me ordre. Conditions analytiques : G diffèrent de zéro, et H nul. L" T La condition H = o réduit l'équation (N) à xr> -f- -x"2 + s # = x (x'2 -j- " x -f 7)=o;d'où .r = o et xa-(-^ a; + ^ = o (N').Elle réduit l'équation (P) à 2K Ka— 4GL / K\* 4GL y~¥y +-77«r- = [+-*)■ "Bi-=0; dou y = ± V/i*-;^GL(P^ f,() LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. Les deux racines de l'équation (IV) sont réelles, de même signe, et iné- gales, ou égales, ou imaginaires, selon que K2 — 4GL=; o. Si G et L sont de signes différents, ces racines sonl réelles et de signes contraires. L'équa- lion (N') n'admet donc que quatre hypothèses; niais, comme elle est indé- pendante de R, les hypothèses de G et L de même signe, avec K.2— 4GL > o, ne déterminent pas complètement la nature des racines de l'équation (P'); il faut encore savoir si R et K sont de même signe, ou s'ils sont de signes contraires. Chacun des cas de K2 — 4GL^o produit donc deux espèces différentes; par suite, le 2me genre contient six espèces, qui sont les 8n,e à 13me de la 3me classe. 102. Huitième espèce (omise par Newton). Caractères géométriques : La courhe se compose de deux nappes hyperbolo- paraholiques inscrites, et d'une ovale conjuguée, séparée des deux nappes par l'asymptote de la direction simple. (Cette espèce est décrite par Cramer.) Conditions analytiques : Les deux racines de l'équation (N') sont réelles, de même signe, inégales et négatives. Les quatre racines de l'équation (P') sont réelles et inégales; G, K et L sont de même signe et négatifs dans l'équation (M'), et K2 — 4GL > o. Exemple : x\f — y? — 10,r — 16 = o. {Fig. 55..) 103. Neuvième espèce (omise par Newton). Caractères géométriques : La courhe se compose de deux nappes pareilles à celles de l'espèce précédente, et d'un point conjugué, isolé, séparé des deux nappes par l'asymptote de la direction simple. (Cette espèce a été décrite par Cramer.) Conditions analytiques : Les deux racines de l'équation (N') sont réelles, égales et négatives, et l'équation (P') admet quatre racines réelles dont deux sont égales; G, K et L sont négatifs dans l'équation (M'), et K2 — 4GL = o. LES LIGNES DU TROISIÈME ORDRE. (il Exemple : xy'- — x* — 8# — 16 = o. {Fig. 56.) 104. Dixième espèce (53me espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose de deux nappes hyper- bolo-paraboliques pures, inscrites. Conditions analytiques : Les deux racines de l'équation (N') sont imagi- naires, et il en est de même de deux des racines de l'équation (P'), dont les deux autres racines sont réelles et inégales; G et L sont négatifs, et K peut être positif, négatif ou nul ; K'2 — 4GL < o. Exemple : Kxy- — 4ar — 1 G.z — 25 = o. ( Fig. 57 .) 105. Onzième espèce (55me espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose d'une nappe hyperboli- que concboïdale, et d'une nappe parabolique. Ces deux nappes sont disjointes, et sont situées d'un même côté de l'asymptote de la direction simple. Conditions analytiques : Les deux racines de l'équation (N') sont réelles, de même signe, inégales et positives. Les quatre racines de l'équation (P) sont imaginaires ; G et L sont négatifs dans l'équation (M'), et K y est positif; K2- 4GL > o. Exemple : xif — xa~ + 25a? • — 144 = o. {Fig. 58.) 106. Douzième espèce (54me espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe consiste en une nappe cruciforme, dont deux branches sont hyperboliques et les deux autres paraboliques. Conditions analytiques : Les deux racines de l'équation (N') sont réelles, positives et égales. L'équation (P') admet deux racines réelles et égales, et deux racines imaginaires; G et L sont négatifs dans l'équation (M'), et K y est positif; K2 — 4GL = o. 62 LES LIGNES DU TROISIÈME ORDRE. Exemple : xy'2 — x2 + Ax — h = o. {Fig. 59») 107. Treizième espèce (56me espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose d'une nappe conchoïdale, el d'une nappe parabolique , séparée de la première par l'asymptote de la direction simple. Conditions analytiques : Les deux racines de l'équation (N') sont réelles et de signes contraires, et les quatre racines de l'équation (P') sont imagi- naires; G est négatif dans l'équation (31'), L y est positif et K peut être quelconque. Exemple : xy"' — x* + Sx + i = o. [Fig. 60.) TROISIÈME GENRE. 108. Caractères géométriques : La courbe coupe l'asymptote de la di- rection simple. La direction double est dépourvue d'asymptotes et de bran- ches illimitées. Conditions analytiques : G est nul, H est différent de zéro, et R est de même signe que B. Ces conditions donnent à l'équation de la courbe la forme Bxy* -j- K.r + Uy ± L = o (31"). En résolvant cette équation par rapport à y et par 1-apport à x, on trouve, pour la détermination des tangentes -limites de la L H2 direction simple, x* ± - x — — _ = o (N"), et pour celles de la direction double (V + K)2 = o (P"). Mais l'équation (31") donne x = - 3-JË.J. Or, si By'-f K = o, la valeur de x devient infinie. Les tangentes-limites de la direction double, lorsqu'elles existent, sont, par conséquent, des asymptotes, ce qui a lieu pour tous les genres dans lesquels G est nul. Lorsque K est positif, la direction double est dépourvue de tangentes-limites et d'asym- LES LIGNES DL TROISIEME ORDRE 63 ploies; la courbe doit donc exister sans discontinuité dans les deux sens des ordonnées, et comme elle ne possède des branches illimitées que dans celle direction, elle se réduit à une seule nappe hyperbolique anguinée, qui ne peut être coupée qu'en un seul point pour toute droite de la direction asym- ptotique double. L'équation (N") n'admet qu'une seule hypothèse, celle de deux racines réelles de signes contraires. Il n'y a donc dans le 3me ifenre qu'une seule espèce, qui est la \imu de la 3me classe (Gl""' et 62""' espèces de Newton). Les courbes de cette espèce peuvent èire munies d'un centre de symétrie inverse, ce qui a lieu si les deux racines de l'équation (N") ont les mêmes valeurs numériques. L'esi de celle spécialité que Newton a forme sa 62"'e espèce. Exemples : xy* -j- 2a? -f- Sy -f- 4 = o. xi/1 -f- x -\- h y = o. {Fi o. Exemple : aft/a — hx -\- 8y ■ — 20 = o. (Fit/. 03.) 112. Dix-septiéme espèce (58me et 59"""' espèces de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose de deux nappes extrêmes, hyperbolo-paraboliques inscrites, et d'une nappe intermédiaire, parabolique anguinée. Conditions analytiques: Les deux racines de l'équation (N'") sont ima- ginaires ; BL2 — KH2 < o. Les lignes de cette espèce peuvent être pourvues d'un centre de symétrie inverse, ce qui a lieu lorsque les racines imaginaires sont dépourvues de parties réelles; L = o. C'est de cette spécialité que Newton a formé sa 59me espèce. Exemples : xy* — x -f- 2# — 1 = o. (Fig. 04.) xy- — x -J- iij = o. [Fig. 05.) SIXIEME GENRE. 113. Caractères géométriques : La courbe ne coupe pas l'asymptote de la direction simple; les deux branches illimitées qu'elle possède dans celte direction sont de nature hyperbolique du 3me ordre; elle est pourvue d'un axe de symétrie directe et elle possède, dans la direction double, quatre bran- ches de nature parabolique du 3n,e ordre. Conditions analytiqties : G et H sont nuls, et R est d'un signe différent de celui de B. Tome XXX. 9 66 LES LIGNES DU TROISIÈME ORDRE. La condition H = o réduit l'équation (N'") à x ± t = o, et laisse sub- sister l'équation (P'"); H ne peut donc exister qu'un seul cas et, par suite, qu'une seule espèce, qui est la 18me de la 3me classe (60me espèce de Newton). Elle comprend les courbes qui se composent de deux nappes extrêmes, hy- perbolo- paraboliques inscrites, et d'une nappe intermédiaire parabolique. Exemple : xy* - - &x — 12 = o. [Fig. 66.) SEPTIÈME GENRE. 114. Caractères géométriques : La courbe coupe l'asymptote de la di- rection simple. Elle possède, dans la direction double, une asymptote qui coïncide avec l'axe des abscisses vers lequel elle converge des deux côtés, dans un même sens. Conditions analytiques : G et K nuls, H différent de zéro. Les conditions qui précèdent réduisent l'équation (N'") à x =f ^—o, el l'équation (P'") à y1 = o. Il ne peut donc exister qu'un seul cas : il donne naissance à la 19me espèce de la 3me classe (64me espèce de Newton). Les courbes de cette espèce se composent de deux nappes hyperbolo- paraboli- ques, dont l'une est ambigène et l'autre inscrite. Deux brandies sont de nature hyperbolique du 2me ordre, et les deux autres sont de nature para- bolique du 3me ordre. Exemple : xy* -f- 2y — \ = o. {Fig. 67.) HUITIÈME GENRE. US. Caractères géométriques : La courbe ne coupe pas l'asymptote de la direction simple; elle est pourvue d'un axe de symétrie directe, qui est la seule asymptote de la direction double avec laquelle elle converge des deux côtés, dans un seul et même sens. Deux de ses brandies sont de nature hy- perbolique du 3""' ordre, et les deux autres sont de nature parabolique du même ordre. LES LIGNES DU TROISIÈME ORDRE. 67 Conditions analytiques : G, H et K nuls. L'équation (N'") se réduit à x = o, et l'équation (P'") à \f=o; il n'existe donc qu'un seul cas qui forme la vingtième et dernière espèce de la 3me classe (65me espèce de Newton). Les lignes de cette espèce sont les types de la nature hyperbolique du 3me ordre; elles sont en même temps le type d'une des natures paraboliques particulières à cet ordre , à cause de leur convergence avec une droite dou- ble , des deux côtés de cette droite et dans un seul de ses deux sens. Exemple : x\f — 4 = o. [Fig. 68.) QUATRIÈME CLASSE. 116. Caractères géométriques: Une seule direction asymptotique , triple. Forme générale de l'équation : Dxz + E/ + Yxy + G*2 + IL/ + Kx + L = o (G). Conditions analytiques : A, B et C nuls; D différent de zéro. La forme (G) a été obtenue par la seule détermination de la direction de l'axe des ordonnées; la position de cet axe, ainsi que la direction et la posi- tion de l'axe des abscisses restent indéterminées et peuvent servir à l'éva- nouissement de trois termes de l'équation (G), laquelle peut, par ce moyen, être réduite à ne contenir que tout au plus quatre termes. On ne peut cepen- dant, dans chacun des trois genres, faire évanouir les trois mêmes termes. PREMIER GENRE. 117. Caractères géométriques : La courbe ne possède aucune asym- 68 LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. ptote rectiligne à distance finie; elle est pourvue d'un axe de symétrie directe, et elle possède deux branches illimitées d'une nature spéciale. Conditions analytiques : E doit être différent de zéro. En résolvant l'équation (G) par rapport à y , on trouve que la droite 2E// -j- Ex + H = o est un axe de symétrie directe de la courbe. Cette droite coïncide avec l'axe des abscisses, si F et H sont nuls. Dans ce cas, l'équa- tion (G) est réduite à Dr5 -f Ey--\- G*2 -f- Ex -\- L = o, et elle peut encore être privée d'un terme par la détermination de la position de l'axe des ordonnées. En remplaçant x par (x' + a), on trouve que l'évanouissement du terme en x n'est pas toujours possible, mais que celui du terme en xa-, ou celui du dernier terme, est toujours praticable, en prenant pour leva- nouissement du terme en x-, a = — — , et pour celui du dernier ternie a7, A — a2 -t- -a-f: = o. Or, x = — — est le diamètre de la direc- 1 D D ' D ' -->D tion de l'axe des abscisses. Pour faire évanouir le terme en x1, il faut donc transporter l'axe des ordonnées au centre de la moyenne distance des points d'intersection de la courbe avec l'axe des abscisses, et pour faire évanouir le dernier ternie, il faut transporter cet axe à l'un desdits points d'intersection, qui, par suite de la symétrie directe par rapport à l'axe des abscisses, sont en même temps les points de contact des tangentes-limites de la direction de l'axe des ordonnées. Il faut donc prendre l'une de ces tangentes-limites pour axe. L'équation de la courbe aura alors la forme : Dx5-(- Eif-\- Gar + K,z = o, et, par suite, toute la courbe se trouvera du côté des x négatifs. Avec cette forme, c'est une des tangentes-limites extrêmes qui a été prise pour axe des ordonnées, laquelle peut, en certains cas spéciaux, appartenir à la partie illi- mitée de la courbe, mais qui, en général, ne lui appartient pas. Si l'on veut que ce soit toujours la tangente -limite de cette partie qui serve d'axe des ordonnées, il faut changer le signe de E; l'équation de la courbe sera alors Dx* — Ey9-f Gx2-\- Kx = o (O), et la recherche des espèces dépendra de la discussion de l'équation x (Da?2 -j- Gx -f K) = o, ou simplement x3 + - x 4- ^ = o (R). Dans celte équation, l'une des racines peut être nulle, et elles peuvent l'être toutes les deux; ces racines ue peuvent toutefois être réelles LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. 69 et de signes contraires. Il y a donc cinq hypothèses possibles à l'égard des racines de l'équation (R). Chacune de ces hypothèses donne naissance à une espèce distincte; par suite, le Ier genre comprend cinq espèces, dans cha- cune desquelles la courbe possède deux branches illimitées, dont l'une et l'autre sont dirigées dans le sens des x positifs et en même temps dans un des deux sens de l'axe des ordonnées. 118. Première espèce (67me espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose d'une nappe parabolique en forme de cloche, et d'une ovale conjuguée. Conditions analytiques : Les deux racines de l'équation (R) sont réelles et inégales; G'2 — 4KD > o, et K différent de zéro. Exemple : x* — rf + I3*2 + 36* = o. {Fig. 69.) 119. Deuxième espèce (G9me espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe se compose d'une nappe parabolique en forme de cloche, et d'un point conjugué isolé. Conditions analytiques : Les deux racines de l'équation (R) sont égales ; G* — 4KD = o; G et K différents de zéro. Exemple : xz — y- + 18*;' -f 81 « = o. {Fig. 70.) 120. Troisième espèce (68",e espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe consiste en une seule nappe para- bolique nouée. Conditions analytiques : L'une des racines de l'équation (R) est nulle; K = o; G différent de zéro. 70 LES LIGNES DU TROISIÈME ORDRE. Exemple : x° — y* 4- ix* = o. {Fig. 71.) 121. Quatrième espèce (70me espèce de Newton). Caractère* géométriques : La courbe consiste en une seule nappe parabo- lique pointue. Conditions analytiques : Les deux racines de l'équation (R) sont nulles; (i et Iv nuls. Exemple : r5 — if = o. [Fig. 72.) 122. Cinquième espèce (71n,e espèce de Newton). Caractères géométriques : La courbe consiste en une seule nappe para- bolique pure. Conditions analytiques : Les deux racines de l'équation (R) sont imagi- naires; G2 — 4KD < o; G peut être quelconque, K doit être différent de zéro. Exemple : xs — y2 — 6œa + 25* = o. (Fig. 73.) 123. Les lignes du 1er genre de la 4me classe ont une grande analogie de forme avec les lignes du 2me genre de la l'e classe; mais ces dernières convergent vers une asymptote rectiligne à distance finie, et sont limitées dans les deux sens de l'axe de symétrie ; tandis que les premières sont illimi- tées dans un des sens de cet axe, et elles ne possèdent aucune asymptote rec- tiligne à distance finie avec laquelle elles convergent. C'est pour ce motif que Newton leur a donné le nom de paraboles divergentes. L'analogie de forme que nous venons de mentionner pourrait faire croire que les brandies illi- mitées de ces cinq espèces participent en quelque sorte de la nature byper- bolique du 3me ordre. Ce serait une erreur : elles possèdent une nature toute spéciale qui ne se rencontre dans aucune ligne d'un ordre inférieur au 3me et qui, même dans cet ordre, n'appartient qu'à elles. Les lignes de la 4,ue LES LIGNES DU TROISIÈME ORDRE. 71 espèce peuvent être considérées comme les types de cette nature. S'il nous était permis de nous exprimer ainsi, nous dirions que, dans le 1er genre, il y a trois asymptotes rectilignes, dont deux sont imaginaires et la 3me est située à dislance infinie. DEUXIÈME GENRE. 124. Caractères géométriques : ha direction asymptotique contient une asymptote à distance finie qui ne coupe pas la courbe , tandis que toute au- tre droite de cette direction peut et doit la couper en un point. La courbe possède quatre brandies illimitées, dont deux convergent avec l'asymptote rectiligne de chaque côté, dans des sens opposés. Les deux autres branches convergent avec une parabole du 2me degré. Conditions analytiques : L'équation de la courbe est privée du terme en y-{E = o); et elle doit contenir celui en xy (F différent de zéro). Les conditions précitées donnent à l'équation de la courbe la forme : D*3 + Vxy -f Gx- + tiij + Kx + L = o, d où y == - d*'^^*-*-1-. Cette valeur indique que la droite Fx + E = o est l'asymptote qui, par consé- quent, est prise pour axe des ordonnées, lorsque H = o. Dans ce cas, l'équa- tion doit forcément contenir le dernier terme, sans quoi elle serait divisible par x. Les deux termes Uy et L ne peuvent donc pas disparaître ensemble , et l'évanouissement de trois termes de l'équation ci-dessus ne peut produire que les deux formes : Dx3 + Fxy + L =o (S) et Dx3 + Fxy + Uy = o (S'). La première indique que l'asymptote de la direction triple est prise pour axe des ordonnées, et que l'axe des abscisses est une droite tangente à la para- bole 3Dx°--\-Yy = o, au point de son intersection avec l'axe des ordonnées. C'est celte parabole qui converge avec les deux branches paraboliques et qui dirige ses branches dans le sens des ordonnées, de signe contraire à ce- lui de F. La forme (S') indique que l'axe des abscisses est une tangente à la courbe, menée par son unique point d'inflexion, et que l'axe des ordonnées est une parallèle à l'asymptote menée par ledit point d'inflexion. Deux branches de la courbe convergent avec cette asymptote des deux côtés, dans des sens opposés. Comme elle ne coupe pas la courbe, ces branches doivent 72 LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. appartenir à des nappes différentes. Il en est de même des deux branches qui convergent avec la parabole 3Dx-2 -j-F^o. Il y a donc dans le sens de Taxe des ordonnées dans lequel la convergence avec cette parabole a lieu, trois branches de la courbe du 3me ordre, et il n'y en a qu'une seule dans le sens opposé. C'est à cause de cette forme de la courbe que Newton lui a donné le nom de trident. Elle se compose d'une nappe anguinée et d'une nappe ordinaire. En cas d'une équation de la forme (S), cette dernière nappe est limitée par l'unique tangente de la direction de l'axe des abscisses dont le point de contact se trouve au point d'intersection de la courbe et de la parabole Wx--{-Fy = o. Le genre qui nous occupe ne forme qu'une seule espèce, qui est la sixième de la 4me classe (66me espèce de Newton). Exemple : x5 — Ixy -f- 8 = o. (Fig. 74.) Si l'on veut admettre que toute parabole du 2me ordre converge avec deux asymptotes rectilignes parallèles, situées à distance infinie (ce qui est vrai), on peut dire aussi que dans le 2me genre de la 4me classe, la direc- tion triple contient trois asymptotes dont deux sont situées à l'infini. TROISIEME GENRE. 125. Caractères géométriques : La direction asymptotique ne contient aucune asymptote à distance finie, et toute droite de cette direction doit couper la courbe en un point et ne peut la couper qu'en un seul point. La courbe possède deux branches illimitées d'une nature parabolique toute spé- ciale dont elle est elle-même le type. Conditions analytiques : L'équation de la courbe ramenée à la forme (G) est dépourvue des termes en \f et en xy (G et F nuls), et elle doit contenir le terme en y (II différent de zéro). Il résulte de ces conditions que la détermination de la position de l'axe des ordonnées et celle de la direction et de la position de celui des abscisses , ne peuvent faire évanouir que les termes Gx-, Kx et L; l'équation se réduira alors à IXr" -j- \\y = o (T). Celte forme indique que l'axe des abscisses est une LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. 73 tangente menée par l'unique point d'inflexion de la courbe, et que celui des ordonnées passe par le même point. Elle indique aussi que l'origine est un centre de symétrie inverse. Ce genre ne forme qu'une seule espèce, qui est la 7me et dernière de la 4-me classe (72me et dernière espèce de Newton). Les lignes de celte espèce consistent en une seule nappe anguinée, étendant chacune de ses branches illimitées dans un des sens des ordonnées, et aussi dans un des sens des abscisses. Comme suite à ce qui a été dit des asym- ptotes des deux premiers genres, nous dirons que, dans le 3me genre, la direc- tion triple contient trois asymptotes situées à distance infinie. C'est à cause de l'absence complète d'asymptotes rectilignes à distance finie que, par ana- logie avec ce qui se passe dans les paraboles du 2me ordre, Newton a donné aux courbes du 3me genre le nom de parabole cubique. Exemple : x* — Sy = o. (Fig. 75.) RESUME. 1 26. Les conditions analytiques de la division des lignes du 3rae ordre en classes, genres et espèces ont été tirées de l'équation (R), résultant de la combinaison de l'équation générale d'une droite et de l'équation générale d'une ligne du 3mo ordre. Les conditions d'annulation du coefficient du terme en j?3 de l'équation (R) fournissent les classes, et celles d'annulation suc- cessive des coefficients des termes en a?2 et en x (celui en x* étant nul) pro- duisent les genres. Du moment que le coefficient de la plus haute puissance de x qui subsiste dans l'équation n'est pas nul, la discussion ultérieure de cette équation fournit les espèces. Il en résulte que les caractères géomé- triques distinctifs des classes et des genres doivent concerner les affections des parties illimitées de la courbe, et que ceux des espèces doivent se rap- porter aux affections de la courbe dans l'espace limité. Nous avons en effet trouvé que les considérations du nombre et de la nature des directions asymptoliques sont les caractères géométriques des classes; que celles du Tome XXX. 40 74 LES LIGNES DU TROISIÈME ORDRE. nombre et de la nature des asymptotes rectilignes et du nombre de leurs points communs avec la courbe à distance infinie, sont les caractères dis- tinctifs des genres, et enfin que le nombre, la nature et la position relative des tangentes-limites, ou bien, ce qui revient au même, que le nombre et la position relative des parties distinctes dont la courbe se compose, forment les caractères géométriques distinctifs des espèces. Cette méthode de divi- sion fournit, pour le 3me ordre, quatre classes, qui contiennent ensemble cinquante-six espèces, réparties en seize genres, comme il suit : 1" CLASSE : 2 genres Qm, 1 2ml= genre ; 1 " genre ; 2m< CLASSE : 3 genres J 2me genre; 3mc genre ; 1" genre; 2mc genre ; 5me genre ; Ame n-eiire ' 3"" CLASSE : 8 genres / * oLU1L> ' Sme genre ; gme genre ; 7me genre ; gme genre • 1 " genre ; km< CLASSE : 3 genres J 2mc genre; jme genre ; t2 espèces. 5 espèces. 7 espèces. 7 espèces. \ 7 espèces. [ 1 7 espèces. 3 espèces. ; 7 espèces. 6 espèces. 1 espèce. , 1 espèce. 2 espèces. \ espèce. 1 espèce, 1 espèce. 5 espèces. 1 espèce. ( 1 espèce. ) 20 espèces. espèc •es. Ce nombre des espèces est de beaucoup inférieur à celui qui a été trouvé ou présumé par les divers auteurs qui se sont occupés de la même question ; celte différence provient principalement de ce qu'ils ont employé des mé- thodes de division autres que celles dont nous avons fait usage. EXAMEN SUCCINCT DES MÉTHODES OVULER ET DE NEWTON. 127. Les principaux auteurs qui ont traité des lignes du 3ma ordre sont Euler et Newton. Le premier a partagé ces lignes en seize familles qu'il nomme espèces et qui correspondent à nos genres. Le second les a divisées en espèces, LES LIGNES DU TROISIÈME ORDRE. 7S en ayant égard à leur conformation dans l'espace limité, et il en a trouvé soixante-douze, nombre qui a été porté à soixante-dix-huit par Stirling et par Cramer, ses continuateurs. Chacun de ces auteurs commence par distin- guer quatre cas dans l'équation générale des lignes du 3me ordre. MÉTHODE D'EULER. 1 28. Chacun des quatre cas d'Euler répond à une de nos classes, c'est-à-dire à une des hypothèses possibles à l'égard des racines de l'équation (C). Sous ce rapport, notre méthode concorde avec celle de cet auteur; mais elle en diffère, en ce qu'il n'a pas, comme nous, admis ces quatre cas comme formant le Ie' degré de division : ils produisent cependant quatre grandes familles de courbes bien distinctes. Elle en diffère encore, en ce qu'EuIer n'a considéré la dis- tinction de ces cas que comme des conditions analytiques, sans y attacher de signification géométrique; tandis que nous leur avons attribué le caractère géométrique qui leur est propre. Toute expression analytique a une signifi- cation géométrique : il est parfois assez difficile de la déterminer; elle n'en existe pas moins : le tout est de la trouver. 129. Le nombre des espèces d'Euler est le même que celui de nos genres. Euler attache aux conditions analytiques de ses espèces une signification géométrique; mais elle n'est pas la même que celle que nous attribuons aux conditions analytiques de nos genres. Euler distingue ses espèces, par le nombre des branches infinies de la courbe, et par la nature de ces branches qu'il détermine par celle de leurs asymptotes curvilignes. Pour tout ce qui concerne sa division en espèces, il se préoccupe principalement de ce qui se passe à la limite du fini, et il n'a pas égard aux phénomènes qui se passent dans l'espace limité, même lorsqu'ils sont produits par les asymptotes. Il ne peut pas en être autrement, du moment qu'il s'agit d'asymptotes curvilignes; car, sous cette dénomination, on ne doit pas entendre telle ou telle courbe déterminée, mais bien toutes les courbes d'une même nature, ou, pour mieux dire, toutes les parties de courbes douées de celte nature. Les caractères d'Euler sont difficiles à apprécier comme faits : leur recherche exige la con- naissance et l'application des procédés du calcul infinitésimal. On ne peut, 76 LES LIGNES Dl TROISIEME ORDRE. d'ailleurs, apprécier toutes les natures diverses des branches illimitées de toutes les lignes d'un ordre, au moyen de la connaissance des natures des branches illimitées des lignes des ordres inférieurs ; car il existe, dans chaque ordre, des lignes munies de branches illimitées de natures spéciales, étran- gères aux lignes des ordres inférieurs, et parfois aussi à toutes les branches illimitées des autres lignes du même ordre. La méthode d'Euler exige donc- la connaissance a priori de ces natures spéciales, ou bien elle exige que cette connaissance soit acquise par des moyens autres que ceux sur lesquels cette méthode est basée. Aussi fait -elle seulement connaître tpie ces natures sont spéciales à Tordre ou à certains cas de cet ordre; mais elle n'indique pas comment les branches illimitées qui possèdent ces natures spéciales se com- portent à distance finie vis-à-vis d'autres lignes plus simples et connues. Elle ne suffit donc pas pour se faire une idée exacte de la conformation de ces branches. Nous ajouterons, enfin, que si celte méthode se prèle à une application générale, elle donne cependant, pour les ordres supérieurs au 3me, un nombre de genres plus grand que celui qu'on obtient par notre méthode. On doit du moins le croire, puisqu'Euler, en appliquant sa méthode au 4mc ordre, y trouve cent -quarante -six espèces (genres), tandis que les recherches que nous avons faites, au moyen de nos procédés, ne nous ont donné que cent-vingt genres. L'adoption des asymptotes reclilignes et de leurs affections dans l'espace limité, comme caractères géométriques des genres, ne présente pas les incon- vénients précités. Dans toutes les lignes d'un ordre quelconque, le nombre des asymptotes rectilignes est limité, et ces asymptotes sont déterminées de direc- tion et de position. Leurs affections dans l'espace limité sont des faits réels, saisissables , et qui fournissent un moyen facile de se faire une idée exacte de la conformation des branches vers lesquelles elles convergent. Il est vrai qu'il y a des branches illimitées dépourvues d'asymptotes rectilignes, ou dont les asymptotes rectilignes sont situées à distance infinie; mais ces branches sont dans le même cas que celles des paraboles du 2me ordre. Toutes con- vergent, en effet, avec de pareilles paraboles. L'absence d'asjmptotes recti- lignes à distance finie est donc elle-même un indice de la conformation de la courbe. La recherche des asymptotes rectilignes n'exige d'autres pro- LES LIGNES DU TROISIÈME ORDRE. 77 cédés de calcul que ceux de l'analyse élémentaire, et elle est d'une exécution générale très-facile. Enfin, notre méthode établit une propriété qui, si elle n"a pas été contestée, n'a cependant pas été formellement énoncée et admise jus- qu'ici; savoir, qu'une asymptote rectiligne d'une courbe d'un ordre quelconque m, rencontre celle-ci à distance finie en un certain nombre de points qui varie depuis [m — 2) jusqu'à zéro : par suite, notre méthode rectifie la définition res- treinte et défectueuse, qu'une asymptote est une droite qui ne rencontre la courbe qu'à distance infinie. Par conséquent, tout en reconnaissant l'éminenl mérite des principes établis par Euler, ainsi que leur supériorité scientifique , nous croyons cependant être en droit de soutenir que notre méthode, outre le mérite de la nouveauté, possède encore l'avantage d'être élémentaire, simple, précise, d'une application générale facile, et qu'elle fournit, pour les ordres supérieurs au 3me, un nombre de genres plus restreint que celle d'EuIer. MÉTHODE DE NEWTON. 130. Newton distingue aussi quatre cas d'équations; mais les conditions analytiques de ses cas ne sont pas les mêmes que celles qui distinguent les quatre cas d'Euler. Newton établit ensuite quatorze divisions principales et, en dernier lieu, il partage les lignes de ces quatorze divisions en soixante-douze espèces. 11 attache à ces divisions et à ces espèces certains caractères géo- métriques propres aux lignes du 2me ordre; mais comme il se présente dans le 3"": ordre des phénomènes tout à fait étrangers au 2me degré, Newton a dû chercher à établir des assimilations qui sont plus ou moins heureuses. 131. Newton distingue les courbes munies d'une asymptote rectiligne à dislance finie, de celles dans lesquelles celte asymptote est située à l'infini. Les premières, dont les branches illimitées sont, d'après lui, d'espèce hyper- bolique , sont représentées par des équations des deux premiers cas , et les autres, dont il dit que les branches illimitées sont d'espèce parabolique , répondent à des équations des deux derniers cas. Il dislingue ensuite les courbes qui peuvent être coupées en deux points par les parallèles à l'asym- ptote rectiligne, de celles que ces parallèles ne peuvent couper qu'en un point. :S 78 LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. Los premières appartiennent aux équations du premier et du troisième cas et les autres à celles du deuxième et du quatrième cas. Il en résulte que le premier cas de Newton comprend les trois premiers cas d'Euler, par consé- quent, nos trois premières classes, et que les trois derniers cas de Newton sont compris dans le quatrième cas d'Euler, ou dans notre i'"c classe, dont chacun de ces cas forme un genre. 132. Pour établir ses quatorze divisions, Newton a eu égard au nombre et à la qualité des parties de la courbe munies de branches illimitées et, par suile, il partage les lignes du 3"'e ordre en : Hyperboles redondantes (lre, 2n,e, 3n,c et imc divisions); Hyperboles défectives (5me et Gme divisions); Hyperboles paraboliques (7me et 8me divisions); Hijperbolismes (9me, 10me et llme divisions); Trident, paraboles divergentes et parabole cubique (12mc, 13meet lime divisions). Il dislingue ensuite les hyperboles par le nombre de leurs diamètres, en prenant le mot dans l'acception restreinte du 2rae degré. Celles qui en sont dépourvues forment les lre, 5n,e et 7me divisions, celles qui en possèdent un forment les 2me, 6rae et 8me divisions, et la 3me division comprend les hyperboles qui possèdent trois diamètres bissecteurs. Il forme, en dernier lieu, une division distincte des hyperboles redondantes dans lesquelles les trois asymptotes passent par un même point : c'est la 4me division. Dans tous les cas d'un ou de plusieurs diamètres bissecteurs, la courbe est s\ métrique par rapport à ces droites : ce sont les cas de non-intersection de la courbe avec l'asymptote. Les divisions de Newton, sauf la 4me, ne sont donc autre chose que nos genres; et s'il se fût abstenu de former une division dictincte des cas de réduction du triangle asymplotiquc à un point, s'il eût formé deux divisions de chacune des trois espèces d'hyperbolismes dans les- quelles il peut également exister un diamètre bissecteur, il eût obtenu un nombre de divisions égal à celui de nos genres. Nous ajouterons qu'en for- mant une division distincte des hyperboles redondantes dans lesquelles le triangle asymptotique est réduit à un point, circonstance indiquée par l'an- LES LIGNES DU TROISIEME ORDRE. 79 nulation du coefficient b qu'il donne au terme en a?2 de son équation générale, Newton aurait dû, pour opérer systématiquement, former également une di- vision distincte des hyperboles défectives dans les équations desquelles le terme en x* manque. Il est vrai que ces hyperboles ne possèdent qu'une seule asym- ptote; mais elles possèdent, par contre, un système de diamètres conjugués qui forment avec l'asymptote un triangle, qui est l'analogue du triangle asymptotique des hyperboles redondantes et qui se réduit aussi à un point, en cas d'annula- tion du coefficient b. Les modifications qui en résultent dans les hyperboles dé- tectives sont au moins aussi sensibles et aussi remarquables que celles que la réduction du triangle asymptotique produit dans les hyperboles redondantes. 133. Newton prend pour base principale de sa sous-division en espèces la discussion de l'équation fournie par le polynôme sous-radical de la valeur de y : celte équation fournil les tangentes-limites. S'il se fût borné à ce moyen et s'il l'eût appliqué systématiquement, il eût obtenu le même nombre d'es- pèces que nous; mais il a, d'un côté, omis quatre cas, produits par la varia- tion des tangentes-limites : ce sont ceux de nos 15me et 16n,e espèces de la 2",e classe, et 8me et 9me espèces de la 3me classe. Il a aussi omis deux autres cas, qui forment les premières sous-divisions des 8me et 9me espèces de la 2me classe. D'un autre côté, il a, par contre, admis comme signes distinctifs d'espèces, des affections différentes de celles qui sont produites par la variation des tan- gentes-limites, savoir : d'abord, l'annulation du triangle asymptotique, qui a fourni neuf espèces, ses 24me à 32me; ensuite, le changement de position de ce triangle, qui a donné ses 6,ne, 7me, lime, 16me, 17me, 19me et 23me espèces; en troisième lieu, dans les hyperboles redondantes munies d'un seul diamètre, la différence de position de l'hyperbole inscrite et de l'hyperbole circonscrite, ce qui a produit la 15me espèce et la 17me déjà citée; enfin, en dernier lieu, la symétrie inverse, qui a donné les 38me, 59me et 61me espèces, ainsi que la 33me comprise dans les neuf hyperboles redondantes dans lesquelles le triangle asymptotique est réduit à un point. Newton n'a cependant pas admis d'une manière sytématique, comme signes distinctifs d'espèces, les conditions analyiiques des caractères précités. L'est ainsi qu'il n'a pas eu égard au changement de signe du coefficient b et à son annulation dans les hyperboles redondantes munies d'une partie anguinée, 80 LES LIGNES DU TROISIÈME ORDRE. cl en général dans les hyperboles défectives. S'il eût eu égard à ces circon- stances chaque fois qu'elles peuvent se présenter, il eût trouvé dix -sept espèces de plus, lesquelles, ajoutées aux soixante-douze espèces qu'il a énu- mérées et aux six cas qu'il a omis, eussent produit en tout quatre-vingt- quinze espèces. Tel devrait être le nombre des espèces de lignes du 3me ordre, en appliquant, d'une manière systématique, toutes les conditions analytiques admises par Newton pour distinguer ces lignes. 134. Nous avons admis la variation du nombre des tangentes -limites et de leur position relative comme seuls signes distinclifs des espèces. Quant aux autres affections, elles n'ont pas été négligées, mais elles ont été consi- dérées comme des caractères distinctifs de sous-espèces ou de variétés d'une même espèce. En opérant de cette manière, nous sommes parvenu à réduire le nombre des espèces des lignes du troisième ordre à cinquante -six, sans omettre aucune des particularités que ces lignes peuvent présenter. FIN. EKKATA. Page 1-2, 1« ligne. Au lieu de Bz + D = o, il faut lk! + D = o. 13, 11e — DÏo — D|o. — 49, 15e — (Ij _ (i<), 64, 23' par le zone par la zone. Planche !.. . (Fig. 10.) (Fig. 11.) 1 {Fig. 11.) (Fig. 12.) 1 {Fig. 42.) (Fig. 10.) c Mciii coar. et des .ravivas étrangers, t AXX. Fi,,, j. /•'/> -*• fys- * Fuj. j.3. \ 1 -— \p f\ Fui. 6. Fùj j± Iïf.3. %•/ Fi Fig.ii. Fu/. iô . Fù). ££. Fûj. i7. Mim cvnr. et des sazicmts étrangers^ .1.1.1'. Fia. 43 /-ii/. Sy . -V- — ' Fig. So. J/rin .Je M 1J~4 /■) prophète. Ce jour se transportait de mois en mois successivement dans »> Tannée; la détermination de l'époque de ce jour était confiée à un certain » Juif, et, après sa mort, elle l'ut confiée à Zaïd, fils de ïhabit. » Cela nous montre que le jour de âchoura dont il s'agit était , chez les Juifs et les Arabes delà Mekke, un jour fixé d'après l'année luni-solaire. Mais dans quel mois et quel jour de ce mois? C'est ce que nous allons voir. Albirouny nous donne sur ce sujet , dans son ouvrage intitulé : Kitab-el- Athar (manuscrit de l'Arsenal), le passage suivant : « On a dit positivement que âchoura est un mot hébreu arabisé de ùchoitr, » qui est le dixième jour du mois juif ticheri, et dont le jeûne est le jeûne »> de Kippour; que les Arabes l'ont fixé, à l'imitation des Juifs, dans le » dixième jour de leur premier mois. » Je conclus donc de l'ensemble de ces témoignages que Mohammad entra à Médine le dixième jour du mois de ficher/, jour où le jeûne est prescrit par la Bible et dans lequel les Juifs, jusqu'à nos jours, observent rigoureusement cet acte de dévotion. Cette conclusion me parait d'autant plus conforme à la vérité, que ce jour est un lundi, de l'aveu de tous les écrivains. Pour connaître l'époque de cet événe- ment dans le calendrier chrétien, il faut simplement chercher la date corres- pondante au dixième jour de l'an des Juifs ' dans l'année 622 de Jésus-Christ, car l'hégire a eu lieu sans contestation dans le courant de cette année-là. Le calcul "2 nous montre que ce jour était le 20 septembre, et c'est le huitième jour dans le mois lunaire, à partir de l'apparition de l'astre : car la conjonction eut lieu le samedi 11 septembre, à une heure environ après minuit, en comptant de Paris 3; et on ne put voir le croissant à l'œil nu 1 Cette année est la 438ômc de la création, d'après le calcul des Juifs. 2 Voyez mon Mémoire sur le calendrier judaïque , tome XXVI des Mémoires des savants étrangers de l'Académie royale de Belgique. 3 Et à une heure et demie environ avant minuit, selon le temps de Médine. AVANT L'ISLAMISME. H que le dimanche soir du 12 au 13 septembre; de sorte que le lundi 13 sep- tembre a dû être le premier du mois lunaire arabe. Or, les traditions nous apprennent que ce fut, ou le 2, ou le 8, ou enfin le 12 du mois de rabi I que le prophète entra à Médine, et que ce jour était un lundi. Le 2 et le 12, n'étant pas des lundis, le 8 se trouve naturellement fixé pour l'événement, et Ton a pour conclusion finale que : l'hégire ou l'en- trée de l'apôtre de Dieu à Médine, a eu lieu le lundi, 8 du mois de rabi I, correspondant au 20 septembre 622, et au 10 du mois de ticheri de l'an .4383 de la création. Avant de quitter ce sujet, j'ai cru utile d'ajouter quelques observations touchant la tradition principale. Je ferai observer d'abord que la répétition de cette tradition, plusieurs fois par des voies diverses, dans les deux ouvrages les plus authentiques, Al-Boukhari et Mouslim, peut être considérée comme une preuve d'authenticité. Mais il y a un passage de la tradition qui ne s'ac- corde pas avec la Bible. Ce passage est celui-ci : « Le prophète demanda aux Juifs ce qu'était ce jour-là , et on lui répondit » que c'était le jour où le Seigneur fit périr Pharaon dans les eaux et sauva » Moïse. » Le jour dont on parle ici est le dixième du mois de ticheri, tandis que le jour où Moïse avait passé la mer Rouge était, suivant la Bible, le 21 du mois de nissan ou le septième jour après la fête de la Pâque des Juifs. Ce manque de véracité pourrait-il être une preuve de non-authenticité de la tradition? Non certes : Ebn-Abbas n'a fait que rapporter ce qu'il avait vu, et ce qu'il avait entendu dire par quelques Juifs , sans doute peu instruits. Ce fait prouve uniquement leur ignorance de la cause de l'institution de ce jeûne. Ce passage, du reste, se trouve complètement omis dans la même tradi- tion rapportée dans un autre endroit de Boukhari par la voie d'Abou-Mousa , un des plus érudits des compagnons. Ou y lit simplement (Boukhari, n° 301, folio 232, manusc. arab. supp.) : « Abou-Mousa dit (d'après le rapport de Boukhari) que le prophète entra » ii Médine lorsqu'un certain nombre de Juifs jeûnaient âchoura et le véné- 12 SUR LE CALENDRIER ARABE » raient. Le prophète dit alors : Il nous appartient plus qu'à eux de jeûner » ce jour-là, et il prescrivit le jeûne ce jour-là. » Quelques écrivains, n'ayant pas bien saisi le sens de cette tradition, pré- tendaient que l'hégire devait avoir eu lieu le dixième jour du mois de mo- harram, et que ce jour se trouvait en même temps correspondre au dixième jour du mois de lichen' chez les Juifs. L'auteur de Kitab-al-Athar, Albiromn , démontre avec raison l'impossibilité de la concordance sur laquelle se basait cette opinion. Mais il a poussé trop loin sa censure et sa critique; il a cru même prouver la non -authenticité de la tradition d'Ebn-Abbas. Voici ce qu'il dit sur ce sujet dans Kitab-al-Athar (manuscrit arabe de l'Arsenal de Paris) : « La tradition nous rapporte que, quand le prophète entra à Médine, les » Juifs jeûnaient âchoura, et que, sur sa demande, ils répondirent (pie c'était le jour où le Seigneur avait sauvé Moïse et ses compagnons, et fait périr » Pharaon et les siens dans les eaux; que le prophète dit alors : Il nous convient mieux qu'aux Juifs de respecter la mémoire de Moïse, et il jeûna » ce jour-là avec ses compagnons. Plus tard, quand le jeûne de ramadan » fut prescrit, il n'a été question ni de jeûner, ni de ne pas jeûner âchoura. » Cette tradition, ajoute Albirouny, n'est point authentique, parce que les » preuves sont contre elle. •> En effet , continue notre auteur, le premier jour du mois de moharram » de l'an 1 de l'hégire est le vendredi , 1 6 du mois de tkamouz de l'année » 933 d'Alexandre. En calculant le commencement de l'année juive dans » cette année-là, nous trouvons que c'est le dimanche 12 du mois de elottt, » et il correspond au 29 du mois de shafar. Le jeûne de âchoura était donc » le mardi , 9 du mois de rabi I. » Or, d'une part, l'hégire eut lieu dans la première moitié du mois de » rabi I: de l'autre, le prophète dit, quand on lui demanda si l'on jeûnait le » lundi, que c'était le jour où il était né, où il avait été envoyé, et où il avait reçu pour la première fois des versets du Coran : c'est aussi le jour où il a accompli sa fuite (hégire) pour Médine. Mais on n'est pas d'accord » sur là date du lundi de l'hégire : les uns le placent au 2, les autres au 8, » d'autres enfin , prétendent que c'était le 1 2 du mois de rabi I ; le 8 est AVANT L'ISLAMISME. 1ô » généralement adopté : ce jour ne peut être ni le 2, ni le 12 du mois, » parce que ces deux jours ne sont pas des jours de lundi, attendu que ce » mois de rabi commençait un lundi. » On conclut de ce que nous venons d'exposer que l'entrée du prophète » à Médine a eu lieu un jour avant âchoura, et cela ne peut avoir lieu » dans le mois de moharram, que plusieurs années avant l'hégire et vingt n et quelques années après. Comment pourrait-on donc dire que le prophète » avait jeûné âchoura, parce qu'il s'accordait avec le dixième jour du mois » de moharram?.... En outre, le âchoura était, dans la deuxième année de » l'hégire, le samedi du mois de eloul, et le neuvième du mois de rabi I: » tout ce que l'on a dit de la concordance en question est donc absurde. » Quant au dire que le Seigneur avait fait périr Pharaon dans les eaux » ce jour-là , la Bible atteste formellement le contraire. Ce naufrage eut lieu » le 21 ni&an, qui est le septième jour de la fête de la Pàque des juifs. La »> Pâque juive, après l'entrée du prophète à Médine, arriva le mardi 22 » adar de l'année 933 ' d'Alexandre : ce jour s'accordait avec le 17 de » ramadan. Pharaon aurait péri le 23 du même mois : donc, il n'y a aucun » moyen de justifier ce que l'on rapporte. » Albirouny paraît avoir interprété la tradition de la même manière (pie ceux qu'il critiquait , savoir que le prophète serait entré à Médine le jour du âchoura juif, que ce jour était le même que celui des Musulmans, et qu'enfin le Seigneur avait sauvé Moïse à pareil jour. Aussi, dit-il que « cette tradition n'est point authentique, parce que les » preuves sont contre elle. » Les preuves qu'il vient de donner sont : 1° La non-concordance des deux âchoura; 2° Que le âchoura juif aurait eu lieu le mardi , tandis que le jour de l'entrée du prophète à Médine serait le lundi précédent ; 3° Que ce jour n'est point celui où Moïse avait été sauvé. La non-concordance des deux âchoura ne saurait être une preuve contre l'authenticité de la tradition, parce que celte concordance n'y est nullement mentionnée ; elle prouve seulement l'erreur de ceux qui ont cru voir dans la * Le chiffre 933 est inexact : c'est 1)34. 14 SUR LE CALENDRIER ARABE tradition la conséquence de cet accord, tout en en affirmant l'authenticité. Albirouny lui-même ne la donne formellement que comme une preuve de l'absurdité de la concordance, quoique la manière dont elle est exposée laisse apercevoir une attaque contre la tradition , laquelle attaque est sans aucun Inndement. Pour la deuxième preuve, si Ton refait le calcul de notre auteur, on verra qu'elle est plutôt pour que contre l'authenticité de la tradition; en effet, en calculant bien, on trouve que le premier jour du mois de ticheri de Tannée juive qui commence dans le courant de la première année de l'hégire, est le samedi 11 eloul(\\ septembre, qui correspond à la lin du mois de s ha far) et non pas le dimanche 12 eloul, comme le dit Albirouny; le âchoura ou le 10 ticheri était donc le lundi 8 rabi I, et non pas le mardi 9 du même mois arabe. Quant au troisième point, nous l'avons déjà discuté dans ce document, et nous avons montré qu'il ne doit porter aucune atteinte à l'authenticité de la tradition. Du reste, on peut prouver par d'autres moyens que l'entrée du prophète à Médine eut réellement lieu le 20 septembre 622, correspondant au dixième jour du mois de ticheri, qui est le âchoura juif : 1° Masoudi dit, dans Mouroudj-El-dhahab , supplément des manuscrits arabes, n° 715, fol. 152 : « Entre l'ère de Jazdajird et celle de l'hégire, il y a 3624 ' jours. » Or, l'hégire même, ou l'entrée du prophète à Médine, a eu lieu, de l'aveu de tous les écrivains, 67 jours après le premier jour du mois de mokarram, qui commence l'ère de l'hégire: on doit donc avoir 3624- moins 67, ou 3557 jours entre le commencement de l'ère de Jazdajird et le jour de l'entrée du prophète à Médine; et comme l'ère de Jazdajird commence le mardi 16 juin, <)32 de Jésus-Christ (8 ou 9 jours après la mort de Mohammad), il suffit de compter 3557 jours, en rétrogradant, à partir du 16 juin 632, pour avoir la date julienne qui correspont au jour de l'hégire. L'opération faite, on tombe sur le 20 septembre 622, qui est un lundi. L'entrée de l'apôtre à Médine eut donc réellement lieu le lundi 20 septembre 622, lequel jour correspond au 10 ticheri chez les Juifs; 1 Ebn-Jounis et les autres savants de l'Orient sont d'accord pour adopter ce chiffre. AVANT L'ISLAMISME. lo 2° Le manuscrit arabe, n° 1134 du supplément, 3'"" fol. de la fin de l'ouvrage, contient ce qui suil : « Nous disons qu'il y a entre le premier jour de l'année de l'hégire et le » premier jour de l'année qui commence par l'équinoxe du printemps, et » dans laquelle eut lieu la conjonction de Jupiter et de Saturne qui pré- » cède la naissance de Mohammad , 54 années persanes , 4 mois , 8 jours ' et » 16 heures. » L'équinoxe vernal dont il s'agit ici , est suivi par une conjonction de Jupiter et de Saturne; or, le calcul nous montre qu'il y eut, en effet, vers l'époque de la naissance de Mohammad, une conjonction de ces deux astres, vers le 29 ou le 30 mars de l'année 571 de Jésus-Christ, comme on le verra plus tard. L'équinoxe eut lieu, d'après mes calculs, le 49 mars, à 15 heures et 11 minutes après minuit, temps moyen de Médine. Le premier jour du mois de moharram de Tannée de l'hégire tombe donc 51 années persanes, 4 mois, 8 jours et 46 heures après le 49 mars, 45 heures et 1 1 minutes de l'année 574 de Jésus-Christ. En réduisant ce laps de temps en jours, et considérant que l'année persane est de 365 jours, on aura 48743 jours et 46 heures, ou 48744 jours, en ajoutant un jour pour la fraction. Or, l'hégire avait eu lieu 2 mois et 8 jours après le commencement du mois de moharram : on a donc 48744 plus 67 jours ou 4 884 4 jours entre l'hégire même et l'époque de l'équinoxe vernal, savoir le 49 mars 574. Cela fait tomber l'hégire, ou l'entrée du prophète à Médine, le lundi 20 septembre 622, correspondant au 40 ticheri, jour rie la fête de kippour chez les Juifs. Passons maintenant au troisième et dernier document. 1 Le texte arabe a été bien défiguré par les copistes. Le nombre 8 jours est. dans le texte, 5 jours. Ce nombre de 5 jours est à coup sûr une faute : ce doit être 8, car, en comptant 51 années persanes, 4 mois et 3 jours, etc..., à partir de l'équinoxe vernal indiqué dans le texte, ou ne tombera pas sur une nouvelle lune , laquelle doit être celle du mois de moharram de l'année de l'hégire; mais, en restituant le nombre 8, on tombera sur une nouvelle lune, ce qui doit être. Si l'on examine, du reste, l'orthographe arabe du mot trois qui peut être écrit ainsi t-lî, et celle du mot 8 que l'on trace à la hâte ainsi &\*$ , on verra que le copiste a bien pu se tromper et prendre l'un pour l'autre. 16 SUR LE CALENDRIER ARARE TROISIÈME DOCUMENT. SLR LA NAISSANCE DU PROPHÈTE MOHAMMAD. Le manque de traditions formelles sur l'époque de la naissance du pro- phète m'oblige de donner, dans ce document, un grand nombre de traditions et de témoignages touchant ce sujet. 1° Nous trouvons ce qui suit dans le premier volume â'Alsirah-al-Hala- biah, n° 596 du supplément des manuscrits de la Bibliothèque impériale de Paris, fos 47 et suiv. : « Kotadah rapporte que le prophète dit : Le lundi est le jour où je suis » né. Ebn-Rackar et Ebn-Asakir disent que la naissance eut lieu à l'aube du » jour; on a à l'appui de cela les paroles d'Abdoul-Mouttaleb, aïeul du » prophète : Un enfant m'a été donné cette nuit au moment de l'aurore. » Saïd, fds de Mousaïb, rapporte que le prophète est né au milieu de la » journée. Ce jour était le 12 du mois de rabi l, et au printemps. Un poëte » faisant allusion à cette circonstance, dit : » Le langage de la réalité pourrait mettre dans la bouche de Mohammad » cette vérité douce à entendre : » Ma figure, la saison et le mois de ma naissance sont la prospérité, le » printemps et le mois de rabi. » La veille du 1 2 rabi I est adoptée par le peuple pour célébrer la nais- » sauce du prophète dans les grandes villes généralement , et à la Mekke en » particulier, surtout quand on veut visiter l'endroit de sa naissance. D'au- » très disent que la naissance eut lieu le 10 du même mois; Hafiz-Damiathi » justifia cette opinion. On a dit aussi qu'il était né le 17. Les historiens assu- » rent que c'était le 8 ; Ebn-Dehiah soutient cette opinion , et il dit qu'il ne » peut pas en être autrement. » Mohammad est donc né au printemps, le 8, le 10 ou le 12 du mois de rabi I, selon les opinions les plus accréditées. 2° L'exemplaire qui porte le n° 597 de l'ouvrage déjà mentionné du ma- nuscrit arabe, nous donne ce qui suit, dans les feuilles 70 et suiv. : AVANT L'ISLAMISME. 17 « Halima (la nourrice de Mohammad) dit : Quand il (Mohanunad) eut deux » ans, nous ramenâmes chez sa mère à la Mekke; mais tenant beaucoup à » ce qu'il restât avec nous, à cause de la prospérité dont nous jouissions depuis » le jour où il était entré chez nous , nous demandâmes à sa mère de nous » le laisser encore cette année, en lui disant , je redoute pour lui l'air et la » maladie de la Mekke. Nous ne cessâmes d'insister auprès d'elle jusqu'à ce » qu'elle eût consenti à nous le rendre Halima continue : Nous relour- » oâmes avec lui. Je jure (par Dieu) que quelques mois (deux ou trois mois, » au rapport d'Ebn-el-Athir) après notre retour, il était avec son frère de lait » auprès des moutons qui nous appartenaient, ou (selon le rapport de Tha- » bari , qui ne contrarie pas ce qui précède) quand il grandit et eut deux ans » (en supprimant la fraction de deux ou trois mois), tandis qu'il était avec » son frère de lait auprès de nos moutons, derrière nos maisons, celui-ci » arriva en courant nous dire à moi et à son père : Mon frère le korachite » a été pris par deux hommes en habit blanc; ils l'ont fait coucher et ils lui » ont ouvert le ventre J'accourus avec son père vers lui, continue Halima, » nous le trouvâmes debout, mais pâle En retournant avec lui dans notre » demeure, son père (nourricier) me dit : Écoute, Halima, je crains que cet » enfant ne soit possédé du démon; reporte-le à ses parents avant que cette » maladie ne se déclare Nous l'avons porté alors, continue-t-elle, à sa » mère, à la Mekke. » Or, nous trouvons dans le même ouvrage , f° 80 , ce qui suit : « On rapporte que Halima, après son retour de la Mekke avec lui, ne » le laissait pas s'éloigner d'elle, et qu'un jour ne le voyant pas, elle se mit » à sa recherche, et le trouva avec Chima, sa sœur de lait..., qui le faisait » danser en lui chantant : » Voilà un frère que ma mère n'a pas enfanté; il n'est pas non plus la » progéniture de mon père ni de mon oncle; fais-le croître, ô mon Dieu, » parmi les choses que tu fais croître. Halima s'écria alors : Dans cette cha- » leur-là ! voulant dire qu'il était imprudent de le faire sortir par une pareille » chaleur. » Cet incident eut lieu, comme l'on voit, après le retour de Halima de la Mekke avec lui; or, la première tradition nous apprend qu'il avait alors deux Tome XXX. 3 iS SUR LE CALENDRIER ARABE ans., et qu'il fut rendu à sa mère quant il avait deux ans et quelques mois (deux ou trois mois, selon le rapport d'Ebn-el-Athir). Donc, Mohammad était âgé de deux ans à deux ans et trois mois quand sa sœur de lait l'avait fait sortir au moment de la grande chaleur que sa nourrice redoutait pour lui. Ceci a dû se passer en été ou à une époque très-voisine de l'été; d'où il résulte que la naissance de Mohammad a eu lieu au printemps. Cette conclusion me parait d'autant plus vraisemblable qu'elle est eu par- tait accord avec le premier témoignage et avec ceux que je vais donner. 3° Le cheik Imam Chams-el-Dine Mohammad, fils de Salim, connu sous le nom de Khallal, nous dit, dans son ouvrage Al-Djifr-et-Kabir, n° 117 4. manuscrits arabes, ancien fonds, 1" 4, ce qui suit : « Il est certain (pie le prophète était né un lundi dans le mois de rabi I, le » 20 du mois de nisan de l'année de l'éléphant, dans le temps de Kesra- » nou-Cherwan (Rosroès le Grand); il reçut sa mission prophétique après » quarante ans et un jour de sa naissance, et il accomplit son hégire à » Médine à l'âge de cinquante-trois ans. » Or, le mois de nisan, dans ce témoignage, est le mois d'avril. Mohammad est donc né au printemps. 4° Al-Masoudi fixe, dans son ouvrage intitulé Mouromlj-d-Dhahab, la naissance du prophète dans l'année 882 d'Alexandre. Voici ce qu'il dit d'après le manuscrit arabe n° 714, supplément, 1er volume, f° 279 : « Ce qu'il y a de vrai dans tout ce que l'on a dit sur la naissance du pro- » phète, c'est qu'elle eut lieu cinquante jours après l'arrivée des Ethiopiens » avec leurs éléphants à la Mekke; ils avaient assiégé la Mekke le lundi, » treize jours avant l'expiration du mois de moharram de l'année 882 de » l'ère de Dhoul Karnaïn (de l'ère des Séleucides). Abraha (l'Ethiopien ) » arriva donc devant la Mekke le 1 7 du mois de moharram, correspondant » à l'an 216 de l'ère arabe, qui commence par le pèlerinage de trahison, » et à la quarantième année du règne de Kesra-nou-Cherwan. Le prophète » naquit à la Mekke, le 8 du mois de rabi I de cette année-là. » L'époque que Masoudi donne tombe en l'année 571 de Jésus-Christ. 5° A la page 283, vol. Ier de V Essai sur l'histoire des Arabes, par M. Caussin de Perceval, on trouve la note suivante : AVANT L'ISLAMISME. 19 « Suivant Ebn-el-Athir, cité dans le Tarikh-el-Khamiey, f° 86 v°, Kesra régna quarante-sept ans et huit mois. (Les historiens grecs lui donnent , à un mois près, la même durée de règne.) Ehn-el-Athir ajoute : Kesra vécut sepl ans et huit mois après la naissance de Mohammad. » Donc, Kesra avait régné quarante ans complets lors de la naissance de .Mohammad; or, ce monarque avait commencé à régner en 531 de Jésus- Christ; donc Mohammad est né dans le courant de Tannée 574 de Jésus- Christ. 6° L'auteur de Moukhtassar-el-Tawarikh, Gergès *, qui était tîls d'Abi- Élyas , etc., nous affirme (supplément manuscrit arabe n° 754) que Mohammad était âgé de huit ans lors de la mort de Kesra-nou-Cherwan. Or, nous trouvons dans Y Art de vérifier les dates (page 408) le passage suivant : « L'an 579, il (Kesra) meurt à Ctésiphon, vers le mois de mars. » Donc, .Mohammad avait huit ans vers le mois de mars; il était né, par conséquent, vers la même époque de l'année 574 de Jésus-Christ. 7° L'illustre astronome royal de Berlin, M. Idler, cite, dans son Traité de chronologie mathématique, t. II, p. 498, le passage suivant : « Mohammad est né, suivant Almakin, le 22 nisan de l'année 882, de » l'ère des Séleucides. » Ce mois de nisan syriaque correspond au mois d'avril; ce serait donc le 22 avril 574 de Jésus-Christ que Mohammad est venu au monde. 8° M. Silvestre de Sacy donne ( Mémoire de l'Académie des inscriptions, t. XLVIII, p. 530), sur la foi de Gagnier, le passage suivant : « La naissance du prophète avait eu lieu à la sixième heure de la nuit du » lundi, le 20 nisan de l'année 882 d'Alexandre. » Ce jour-là correspond au 20 avril 574 de Jésus-Christ. Les astronomes orientaux paraissent être d'accord pour placer également la naissance de Mohammad vers le mois d'avril de l'année 574 de Jésus- Christ. Ils la fixent presque immédiatement après une conjonction de Jupiter et de Saturne, qui eut lieu dans la constellation du Scorpion. J'ai calculé la position de ces deux astres, en me servant des tables de Bou- 1 Cet auteur est connu en Europe sous le nom d' Almakin, comme le dit M. Keinaud, dans le catalogue du supplément des manuscrits arabes de la Bibliothèque impériale de Paris. 20 SUR LE CALENDRIER ARABE vard, et j'ai trouvé que, pour le 1er avril 571 de Jésus-Christ, Jupiter se trouvait dans 15° 2' l du Scorpion, et Saturne dans 15° 17' de la même constellation. Le mouvement de ces deux planètes était rétrograde. La con- jonction doit avoir eu lieu le 29 ou le 30 mars 571 de Jésus-Christ. Cette conjonction est appelée par les astronomes orientaux : la conjonction de la religion musulmane , ou simplement : la conjonction de la religion. Nous allons donner quelques-uns des témoignages qui s'y rapportent. 9° Le manuscrit arabe 2 n" 1161, ancien fonds, p. 88, contient : « Je dis que la naissance du prophète eut lieu Tannée de l'éléphant , la- » quelle année est celle de 882 d'Alexandre; une conjonction de Saturne el » Jupiter eut lieu dans la constellation du Scorpion cette année-là, peu de » temps avant la naissance. » D'après ce témoignage, Mohammad serait né peu de temps après le 30 mars 571 de Jésus-Christ. 10° Le témoignage suivant, que j'ai puisé dans l'ouvrage intitulé : Moun- taha-ul-ldrak, n° 1115, manuscrit arabe, ancien fonds, 8m'' chapitre, nous donne le même résultat , par ce passage : « Le prophète naquit la première année de la conjonction qui fut connue i» le précurseur de la religion musulmane. » Nous savons déjà que celte conjonction eut lieu le 29 ou le 30 mars de l'année 571; donc le prophète est né la même année. 11° Enfin, on trouve dans les manuscrits n° 1129 3, supplément, fol. 15, et n" 1131 4, supplément, 3me feuille de la fin de l'ouvrage, de pareils lémoi- ' Voici les résultats exacts de mes calculs pour le Ier avril 571 de Jésus-Christ : ï'I. *M. i j:s LOSGIT. héliocentrique. L4T1T. héliocentrique. LOSGIT. géocentrique. LtTII. géocentrique, Jupiter Saturne 210°57'21" 213" 4' 4" 1 9'4" Ii. 2"22'3" B. 815° 2'25" 215°16'47" 1°25'30" Ii. 2°36'40" B - L'auteur de cet ouvrage s'appelle Jahya, fils de Mohammad, fils d'Abi Choukr, al Andalousii 3 Cet ouvrage s'appelle Alkatiiit dans le secret des astres. 4 L'auteur est Ahmed, fils d'Abdoul-Djalil , et le nom de l'ouvrage: Le livre des conjonctions. AVANT L'ISLAMISME. 21 gnages qui prouvent que la naissance de Mohammad a eu lieu dans l'année 37 1 de Jésus-Christ, peu do temps après le 29 mars, époque du phénomène céleste déjà mentionné. 42° On peut ajouter, comme un douzième et dernier témoignage, les opinions des historiens qui placent cette naissance dans la quarantième ' ou quarante et unième année 2 du règne de Kesra-nou-Cherwan. En elïet, comme ces savants n'indiquent pas l'époque précise de l'année, on peut bien supposer que les premiers avaient en vue la fin de la quarantième année, et que les autres entendaient désigner le commencement de la quarante et unième année du règne du grand monarque persan. Par là, ces sentiment se trouvent rapprochés les uns des autres, et ils ne différeraient entre eux que de un ou deux mois; ils s'accorderaient alors pour placer la naissance du prophète dans l'année 571 de Jésus-Christ. J'ajoute qu'Aboul-Féda place la naissance de Mohammad dans la 881"" année d'Alexandre, et dans la 131 6me de l'ère de Nabonassar; il la fait cor- respondre aussi à la 42me année du règne de Kesra-nou-Cherwan. Or, la 881n,e année d'Alexandre commence le 1er octobre 869 de Jésus-Christ, tandis que la 1316me de Nabonassar finit le 2 avril 569. Cette concordance est donc impossible. Nous devons, par conséquent, rejeter comme absurde et sans valeur ce témoignage d'Aboul-Féda, qui se contredit, du resie, lui-même. En effet, à la page 14, édition de Gagnier, de la vie de Mohammad, par Aboul-Féda, cet historien dit que Mohammad a reçu sa mission à l'âge de quarante ans, l'année 922 d'Alexandre. D'après ce passage, Mohammad serait né en 882 de l'ère d'Alexandre ou en 571 de Jésus-Christ. L'accord que l'on remarque dans cette multitude de traditions et de témoi- gnages divers équivaut pour moi à une certitude; aussi je n'hésite pas un instant à admettre que Mohammad est né au printemps de l'année 571 de Jésus-Christ. Le mois d'avril étant désigné formellement dans quelques-uns de ces témoignages et par déduction dans d'autres, je l'admets également pour cet événement. 1 Masoudi et l'auteur de Moudjmil-al-Tawarikh , ete. - Hamza-lsphahani , ete. 22 SLR LE CALENDRIER ARABE M;iis dans quel jour du mois d'avril la naissance du prophète a-t-elle eu lieu? C'est ce que nous allons voir. La conjonction vraie de la lune a eu lieu (d'après les tables abrégées de Largeteau) dans le mois d'avril 574, le 10, à 9 heures 41 minutes environ après minuit, temps moyen de la Mekke '. Le croissant ne put être visible à l"4j.21t; dans le quatrième . un a 3GÏ)j,l32; enfin, dans le cinquième système, la longueur de l'année purement lunaire est de 3r)V,."fi7. AVANT L'ISLAMISME. 25 à Médine, pendant les 62 ans qui précédèrent le pèlerinage d'adieu, fut donc l'année lunaire vague. L'identité de ces deux résultats ne justifie-t-elle pas à la fois, et l'exactitude des trois époques, et celle du résultat lui-même? Il me semble que oui. Tout paraît, du reste, nous le confirmer. Nous avons déjà donné, dans le second document, une tradition rapportée par Thabarani au sujet du mot de âchoura : si on l'examine attentivement, Ton y verra un témoignage direct de l'usage du calendrier purement lunaire cbez les Mekkois avant l'hégire; en effet, cette tradition porte : « Kharidja, fils de Zaid, raconte (pie son père (le compagnon du pro- » phèle) dit : Le jour de âchoura n'est pas ce que le peuple veut dire. C'était » un jour où l'on couvrait la cuba, et où les Éthiopiens venaient jouer chez » le prophète. Ce jour se transportait (de mois en mois successivement) dans » l'année. La détermination de l'époque de ce jour était confiée à un certain » Juif, et après sa mort, elle fut confiée à Zaid, fils de Thabit. » Le véritable jour de âchoura, dont la détermination était confiée à un Juif, est sans doute le âchoura des Juifs (10™e du mois de ticheri), qui avait été, à ce qu'il paraît, adopté par les Arabes païens de la Mekke. Or, pour que le dixième jour du mois de ticheri (de l'année juive luni-solaire) se trans- portât de mois en mois successivement dans une autre année , il faut que celle-ci ait été purement lunaire. Pour ceux qui conserveraient encore quelque doute sur ce point important, malgré les preuves évidentes que je viens de donner, je vais encore en pré- senter d'autres astronomiquement démontrées. Le manuscrit n° 213 du supplément des manuscrits arabes de la Biblio- thèque impériale de Paris, nous apprend, dans la 2me feuille, à partir de la fin du volume, que : « L'auteur de l'ouvrage intitulé : Djema-al-Eddah , dit qu'une éclipse de » lune eut lieu dans le mois de djoumada II de l'an 4 de l'hégire. » On voit sans peine que celte éclipse ne peut être que celle du 20 novembre 62o ' de Jésus-Christ. Le 14 du mois arabe djoumada II correspond donc 1 Le calcul nous montre que la lune s'éclipsa vers 3 heures après minuit de Médine, le 20 no- vembre 625 de Jésus-Christ. Tome XXX. 4 26 SLR LE CALENDRIER ARARE au 20 novembre 625. Voilà une époque astronomiquement déterminée. Nous lisons aussi dans le Journal asiatique, cahier d'avril 1843, ce qui suil : « Procope ' nous apprend (pie, dans une assemblée de généraux romains, convoquée à Dara par Rélisaire, en 541 de Jésus-Christ, pour délibérer » sur un plan de campagne, deux officiers qui commandaient un corps formé » des garnisons de Syrie, déclarèrent qu'ils ne pouvaient suivre l'armée dans » sa marche contre la ville de Nisibe, donnant pour raison que leur absence » laisserait la Syrie et la Phénicie exposées aux incursions du roi des Arabes, » Alamondar (Almoundhir III). Rélisaire démontra à ces officiers que leur » crainte était mal fondée, parce que Ton approchait du solstice d'été, temps » auquel les Arabes païens devaient consacrer deux mois entiers aux pra- » tiques de leur religion , sans faire aucun usage de leurs armes. » Or, les Arabes avaient dans l'année deux époques consacrées à leur culte , et dans lesquelles ils ne faisaient aucun usage de leurs armes. Ces deux époques étaient, l'une d'un mois de durée (le mois de radjah), l'autre de deux ou trois mois {dhoul-câda, dhoul-hedja et moharram). Laquelle de ces deux époques Procope avait-il en vue? La teneur du passage précédent semblerait indiquer que c'est la seconde , et que les deux mois dont il s'agit sont dhoul- câda et dhoul-hedja; mais un examen très-rigoureux nous démontre que cela ne peut pas être; et voici comment : si les deux mois de dhoul-cada et dhoul- hedja se sont réellement présentés à l'époque du solstice d'été, ils ont dû s'écouler, ou tous deux avant, ou l'un avant et l'autre après, ou, enfin, tous deux après le 20 juin 541 , qui est l'époque de ce solstice; de sorte que la nouvelle lune, qui eut lieu le 10 juin 541 de Jésus-Christ, serait celle du mois de dhoul-hedja, de dhoul-câda, ou, enfin, celle du mois de chawâl. Or, d'une part, le système de calendrier qui était alors en usage est l'un des cinq systèmes suivantes : intercalation de 9 mois dans une période de 24 années; intercalation de 7 mois dans 19 ans; celle d'un mois dans 3 ans; un mois dans 2 ans, ou, enfin, le système purement lunaire. D'autre part, nous avons deux époques physiquement déterminées, savoir : • Procope, De Bedo persico, lib. II. cap. XVI. AVANT L'ISLAMISME. 27 1° le 27 janvier 632, date d'une éclipse solaire, qui correspond à la fin d'un mois arabe chawâl, ou, ce qui revient au même, le 28 janvier 632 , qui était la nouvelle lune du mois de dlioul-cada; 2° le 20 novembre 625, date d'une éclipse lunaire, qui tombait dans un mois arabe djoumada II, ou bien le 6 novembre 625, qui était la nouvelle lune du mois de djoumada II. Il faut donc, pour que le passage précédent de Procope soit vrai, qu'en rétrogradant, soit à partir de la nouvelle lune de dhoul-câda, le 28 janvier 632, soit à partir de celle de djoumada II, 6 novembre 625, on tombe, dans les deux cas, et dans un des cinq systèmes déjà mentionnés, sur un même mois, dhoul-hedja, dhoul-câda ou chawâl. Or, le calcul nous montre que cette condition n'est remplie par aucun des cinq systèmes. En effet, si l'on part des deux époques certaines, la nouvelle lune du mois de dhoul- câda correspondant au 28 janvier 632, et celle du mois de djoumada II ou 6 novembre 625, et si l'on rétrograde jusqu'au 10 juin 541, qui correspond à un mois arabe incertain (considérant de plus que ces deux laps de temps font successivement 33104 jours ou 1121 lunaisons, et 30830 jours ou 1044 lunaisons), on compte, dans le premier système intercalaire, d'une part, 90 années et 8 ou 7 lunaisons, de l'autre 84 années et 5 ou 4 lunai- sons; ce qui nous fait tomber sur rabi I ou rabi II, dans le premier cas, et sur moharram ou safar dans le second. Dans le deuxième système intercalaire, on compte également 90 années el 8 lunaisons, d'une part, et 84 et 5 mois de l'autre; ce qui nous fait tomber mu le mois de rabi I dans le premier cas, et sur celui de moharram dans le second. Dans le troisième système intercalaire, on trouve 90 ans et 11 mois, d'une part, et 84 et 8 mois de l'autre; de sorte qu'on tombe sur le mois de dhoul-hedja dans le premier cas, et sur le mois de chawâl dans le second. Dans le quatrième système intercalaire, on a 89 années et 9 mois, d'une part, et 83 et 7 mois de l'autre; el l'on tombe, par conséquent, mt les deux mois de safar et dhoul-cada. Enfin, en suivant le système purement lunaire, on compte 93 années et 5 mois dans le premier cas, et 87 années justes dans le second; de sorte que l'on tombe, dans les deux cas, sur le mois de djoumada II. 28 SUR LE CALENDRIER ARABE Lé 10 juin 541 n'a donc pu êlre ni la nouvelle lune de dhoul-hedja, ni celle de dhoul-câda, ni enfin celle de ehawûl, ou, ce qui revient au même, les deux mois de dhoul-hedja cl dhoul-câda ne se sont pas présentés, en 541, à l'époque du solstice d'été. Voyons à présent si Procope ne s'est pas trompe, et s'il n'a pas pris l'une des deux époques {dhoul-câda et dhoul-hedja) pour l'autre (le mois de radjah); ou du moins, si ses copistes n'ont pas défiguré le passage pré- cédent , en copiant âùo pxha-:» p^aç, , deux mois entiers, à la place de êva u.aù.i-,-o. (jtfjva, un mois entier. Dans ce cas, la nouvelle lune du mois de radjah aurait eu lieu en 541 , ou immédiatement avant le solstice d'été, ou immédiatement après; de sorte que le 10 juin 541, époque d'une nouvelle lune, serait, ou celle du mois de radjah, ou bien celle du mois de djoumada IL Or, pour (pie cela ait eu réellement lieu, il faut qu'en partant des deux époques cer- taines déjà mentionnées, et qu'en remontant jusqu'au 10 juin 541, l'on tombe, dans les deux cas, en suivant l'un des cinq systèmes, sur un même mois arabe, radjah ou djoumada IL Le calcul nous montre , en effet , que cette condition se trouve rigoureu- sement remplie (le tableau de ce calcul est déjà donné plus haut). Il est donc certain que Procope prit l'époque des deux mois dhoul-câda et dhoul-hedja pour celle du mois de radjah, si ses copistes ne l'ont pas toutefois mal copié. Quelle est la conséquence de cela? La voici : La nouvelle lune qui suit immédiatement le solstice d'été de l'année 541, étant celle du mois de radjah, et le temps écoulé entre cette époque, et chacune des deux autres déterminées par les éclipses, étant exclusivement compatible avec le système purement lunaire, c'est donc ce même et unique système qui était certainement alors en usage parmi les Arabes, un siècle environ avant que le législateur de l'islamisme abolit le nacî. L'existence du mois de radjah immédiatement après le solstice d'été de 541 , se vérifie également par les deux époques qui font l'objet des 2m'' et 3me documents. Ainsi , nous avons cinq époques déterminées chacune d'une manière in- dépendante des autres, et qui, combinées deux à deux, donnent dix résul- AVANT L'ISLAMISME. 29 lats ou laps de temps dont l'écoulement se trouve exclusivement conforme au système purement lunaire. L'accord parfait de tous ces résultats est assu- rément une preuve certaine de l'erreur de ceux qui ont admis l'usage d'un calendrier luni-solaire chez les Arabes païens. Sans aller même plus loin , la comparaison seule de l'époque de l'éclipsé solaire avec celle de l'éclipsé lunaire est une preuve mathématique de l'usage du calendrier lunaire vague chez ce peuple. Je conclus donc, en résumant, que les Arabes, avant comme après l'isla- misme , ne se sont servis que d'un calendrier purement lunaire. Age du prophète Mohammed. Mohammad est mort le 1 2 du mois de rabi I de l'an 1 1 de l'hégire , d'après l'opinion la plus accréditée et généralement admise. Ce jour tombe au commencement du mois de juin 632 de Jésus -Christ; c'était, dit-on, un lundi; or, la nouvelle lune ou la conjonction vraie eut lieu le dimanche 24 mai, 9 heures environ après midi moyen de Médine; de sorte qu'on ne put voir la nouvelle lune à l'œil nu que le mardi au soir; donc le mois arabe rabi I commença le mercredi 27 mai. Le 12 de ce mois tombe un dimanche 7 juin. Mohammad mourut donc ou le dimanche 12 rabi I (7 juin 632), ou le lundi 13 rabi I (8 juin 632). Et comme la naissance du législateur eut lieu , d'après le troisième document, le 20 avril 571 , et que du 20 avril 37 I au 7 juin 632, on compte 22329 jours, Mohammad a donc vécu ce nombre de jours, ce qui fait 61 années solaires, plus 48 jours, ou bien 63 années lunaires vagues et 3 jours. Les traditions que Boukhari et Mouslim rapportent sur ce sujet l'ont vivre le prophète 60, 63 ou 65 années. Le chiffre de 63 a été adopté par la majorité des écrivains anciens et par l'unanimité des modernes. Almasoudi . après avoir donné toutes les traditions qui ont été rapportées sur l'âge de Mohammad, dit ' : « Nous avons trouvé que la postérité de Mohammad et de ses parenls ne » lui donnait que 63 années d'existence. » 1 Mouzoudj-el-Dhahad, a" 71 o, supplément arabe, fol. 179 et suiv. 50 SUR LE CALENDRIER ARARE Cet accord que l'on remarque entre les traditions généralement adoptées et le résultat précédent ne juslifie-t-il pas encore notre conclusion sur l'usage d'une année purement lunaire avant l'islamisme? Axant de terminer, disons quelques mots sur l'époque de la mission pro- phétique de Mohammad. Les traditions de Roukhari et de Mouslim, ainsi que les témoignages des historiens s'accordent (sauf quelques rares exceptions) à fixer le commence- ment de la mission prophétique de Mohammad 40 ans après sa naissance; or, Mohammad est né, d'après mes calculs, le 20 avril 571 ; si l'on compte 40 années lunaires ou 14174 jours à partir de cette époque, on tombe dans le commencement du mois de février de l'année 610 de Jésus-Christ. Ce fut donc en février, c'est-à-dire dans l'hiver de l'année 610 que Mohammad reçut sa mission. Le 1er verset de la 74me surah : « 0 toi qui es enveloppé dans » les vêtements, lève-toi et va prêcher les hommes, » qui lui avait annoncé sa mission divine, ne montre-t-il pas, par son énoncé même, qu'il lui a été révélé dans les rigueurs de l'hiver x ? S'il en est ainsi, ce serait un autre témoignage pour justifier l'usage du calendrier purement lunaire parmi les Arabes païens. 1 Les commentateurs du Coran disent, les uns que Mohammad s'était enveloppé dans son manteau, à la suite d'une nouvelle fâcheuse que ses ennemis les Coraïchites avaient fait courir; les autres, qu'il s'était endormi enveloppé dans son manteau. Mohie-el-Dinc Ebn-al-Arahi dit : cest à cause du froid que le prophète éprouvait après la révélation qu'il s'enveloppa dans ses vêtements. AVANT L'ISLAMISME. 31 APPENDICE. Les noms des mois qui étaient en usage parmi les Arabes païens , lors de l'apparition de l'islamisme, sont encore les mêmes aujourd'hui, savoir : Moharram i" mois Safar 2™ » Rabil 3°" * RabilJ 4me » Djoumada I $m' » Djoumada II 6mc » Radjab 7me » Chabân 8°" » Ramadhan 9mc » Chawdl 10me » Dhoul-câda H" » Dhoul-hedja i2me - Quatre de ces mois, radjab, dhoul-câda, dhoul-hedja et moharram étaient considérés, depuis un temps immémorial, comme sacrés ou inviolables; de sorte que toute espèce d'hostilité devait cesser pendant ce laps de temps de l'année. « C'était, comme le dit M. Caussin de Perceval , une espèce de trêve de Dieu, sagement instituée chez un peuple avide de guerre, de pillage et de vengeance. Elle contribuait à empêcher les diverses tribus de s'entre-détruire, et donnait au commerce quelques moments fixes de sécurité. » Il y avait donc deux époques différentes dans l'année arabe où toute hos- tilité devait cesser : c'étaient le mois de radjab, d'une part, et ceux de dhoul- câda, dhoul-hedja et moharram de l'autre. Or, l'inaction, pendant trois mois consécutifs, parut pénible à ce peuple actif, qui ne vivait, pour ainsi dire, que de pillage. 52 SUR LE CALENDRIER ARABE Pour satisfaire à ses instincts belliqueux et à son ambition, on établit ce qu'on appelle le nacî, c'est-à-dire l'ajournement de l'observance d'un mois sacre à un autre mois non sacré. De temps en temps, on remettait le privilège sacré du mois de rnoharram au mois suivant, m far; de sorte que l'on avait seulement deux mois consécu- tifs sacrés au lieu de trois. Voici ce qu'AImasoudi nous dit à ce sujet [voir Mouroudj-Aldhahab ', chapitre de l'histoire de la Mekke) : « Les Naçaa 2 étaient de la tribu des enfants de Mâlik, fds de Rinânab ; le » premier était Hodhaïfah, fds d'Obaïd, et ensuite son fils Rai, fils de Hod- >» haïfah ; celui-ci a vu naître l'islamisme. Le dernier des Naçaa est Abou- » Temâmali. » Quand les Arabes avaient accompli la cérémonie du pèlerinage, ils se » rassemblaient, avant de s'en aller, autour du nâci. Celui-ci se levait, et » il disait : Mon Dieu, je déclare non sacré l'un des deux sa fars, et je » remets l'autre à l'année procbaine. » L'islamisme parut lorsque les mois sacrés avaient repris leur place » primitive dans l'année; c'est là le sens de la parole du prophète : Le » temps est redevenu tel qu'il était le jour où Dieu créa les cieux et la terre. »» Ce que dit le législateur dans ce hadith fut révélé par Dieu même dans » ce verset du Coran : Le nacî est un surcroît d'infidélité. Umaïr , fils de » kaïs, dit, en se glorifiant : N'est-ce pas nous qui autorisions la remise » des mois parmi les enfants de Maadd, qui leur ordonnions de tenir pour » sacrés les mois qui étaient profanes ? » Les noms que nous avons déjà cités ont été , dit-on , donnés aux mois arabes dans le temps de Kilab, fds de Morra, un des aïeux de Mohammad, deux siècles environ avant l'islamisme. Les noms que ces mois avaient an- ciennement ne nous sont pas connus d'une manière positive; Almasoudi nous en donne, dans le Mouroudj-el-Dhakab , les dénominations suivantes, qui sont, en commençant par moharmm : natik, 1er mois; thakil, 2mt mois, talik, 3me mois; nadjir, ime mois, asiakh ou àsmâkh, suivant les différents manuscrits, 5n,e mois;aww«/*, G",emois; ahlah, 7",e mois; kdsà, 8im' mois; 1 Manuscrit arabe n" 715, fol. 11G verso du supplément. - Naçaa est le pluriel de inhi ; le nt'u-i esl l'homme «iviî pratique le naci. AVANT LISLAMISME 33 zaher, 9mcmois; bart ou mart, 10me mois; harf pissante et corrompue qu'il n'osait naguère aborder '. » Le mois de nadjir, à l'époque où il a reçu son nom, devait donc tomber en plein été; de sorte que moût amer, nadjir et khawan ont dû être les trois mois de l'été. Les trois mois suivants, ssawann, robba et baidach, seront ceux de l'au- tomne. En effet , on distingue le caractère de cette saison par la signification du mot robba, qui dérive ou de rabab, qui veut dire grande quantité d'eau , ou bien de rabàbah, qui signifie nuage qui change de nuance, qui parait tour à tour blanc ou noir. Les septième, huitième et neuvième mois, savoir: assamm, waghel et aaltel, qui doivent avoir été ceux de l'hiver, ont également, dans le mois de nattel, quelque chose qui caractérise l'hiver; car nattêl signifie celui qui puise de l'eau d'une rivière, d'un puits ou autre source, pour le verser ail- leurs, dans l'intention d'arroser la terre, ou pour une autre destination. Enfin , le printemps se trouve caractérisé par le premier des trois derniers mois, adel, hewah et barak; car adel est celui qui égalise, qui observe l'éga- lité, qui met autant d'un côté que de l'autre. C'est donc parce que ce mois-là tombait, lors de la nomenclature, à l'époque de l'équinoxe du printemps, où les jours égalent les nuits, qu'on l'a nommé adel, ou égalisateur. On remarque également des rapports entre les saisons et les noms de quel- ques-uns des mois modernes, moharram, safar, rabi, etc.: car ramadhan signifie grande chaleur; rabi, pluie printanière, végétation printanière, etc. ; et enfin djownada veut dire sec, et djamdd , desséché, à cause du manque de pluie. La racine djamada veut dire geler, et djoumadi , froid glacial. Ces rapports frappants entre les noms des mois, soit anciens, soit nou- veaux, et les saisons indiquent-ils que les mêmes mois appartiennent à une année luni-solaire? Pour les mois anciens, les témoignages unanimes de tous • Cette traduction est un peu libre ; je ne sais même pas si j'en ai bien saisi le sens. Voici, du reste, la traduction littérale : « L'homme se cache la figure à l'aspect d'une eau croupissante et corrompue; mais si l'homme altéré, dans le mois de nadjir, goûtait cette même eau.... ! » AVANT L'ISLAMISME. 35 les écrivains (historiens ou autres), l'absence complète de toute tradition affirmative, et le caractère nomade des Arabes de cette époque, qui connais- saient à peine l'agriculture, tout enfin porte à croire que ce peuple ne se servait que d'une année purement lunaire. Ces rapports ne peuvent donc pas prouver que les mois nudjir... robba... naitel... et adel... appartiennent à une année luni-solaire ou agronomique. Les Arabes auraient simplement lié ces mois avec les circonstances atmosphériques ou autres, pour Tannée de la nomenclature, sans porter leur vue plus loin, et sans remarquer qu'après tli\-sept ans, les mois d'été passeraient en hiver, et vice versa. Cela étant, les nouveaux mois, rabi , djoumada et ramadhan, etc., peuvent-ils avoir été à leur tour institués pour former une année agronomique? Il me semble fants de Kinànah; on l'appelait alkalammas : ses enfants, investis de ce » privilège, se nommaient kalâmesah; ils étaient également appelés nasaa. » Kalammas veut dire grosse mer. Le dernier de ses enfants qui avait exercé » cette fonction est Abou-Temâmah Djenàdah, fils de Auf, fils deOmaiah, » fils de Kala, fils de Abbâd, fils de Kala, fils de Hodhaïfah. Le kalammas » haranguait le peuple rassemblé à Arafat, après la cérémonie du pèlerinage. » Il commence quand le pèlerinage tombe dans le mois de dhoul-hedja, AVANT L'ISLAMISME. 57 » et il ajourne moharram, sans le compter parmi les douze mois de Tannée; » de sorte que safar devient le premier mois de Tannée et moharram le » dernier; celui-ci prend alors la place de dhoul-hedja > et Ton y célèbre le » pèlerinage deux années consécutives. La troisième année, après le pèle- » rinage, le kalammas harangue le peuple, et il ajourne safar, dont il » avait fait le premier mois des deux années précédentes. Le mois de ràbi I » devient ainsi le premier mois de la troisième et de la quatrième année ; » de sorte que le pèlerinage tombe, pour ces deux années, dans le mois de » safar, qui devient le dernier de leurs mois. Le kalammas continue celle » œuvre tous les deux ans, jusqu'à ce que dhoul-hedja tombe, dans les vingt- » troisième et vingt-quatrième années, le premier mois de Tannée, et qu'il » porte le nom de moharram. Le pèlerinage tombe, dans ces deux années, » au mois de dhoul-càda, qui en est le dernier. Ensuite, dans la vingt-cin- » quième année , moharram redevient le premier mois, le pèlerinage retombe » dans dhoul-hedja, et le tour recommence de la même manière. Les Arabes » comptaient tous les deux ans, vingt-cinq mois. » L'année de l'hégire se trouvait la seizième année de la dernière pé- » riodc. Cette année-là commençait par châban et finissait par radjah; et » c'est pendant ce dernier mois que le pèlerinage eut lieu ; car les Arabes » observaient cela. La vingt -troisième année de celte période commença » par dhoul-hedja ; elle était Tan 8 de Thégire, et ce fut cette année que la » Mekke fut prise par les Musulmans, le 13 ou le 17 du mois de ramadhan. » Le prophète n'a pas fait le pèlerinage cette année, parce qu'il tomba dans » dhoul-càda; mais dans la vingt- cinquième année, dixième de Thégire, » moharram redevenant le premier mois, le législateur a accompli son pèle- » rinage le 10 du mois de dhoul-hedja, suivant Tordre des noms des mois. » Ce pèlerinage fut nommé le pèlerinage d'adieu. Le prophète harangua le » peuple et lui ordonna ce que Dieu voulut. 11 dit dans celte harangue : Le » temps est redevenu tel qu'il était lors de la création des cieux et de la terre , » voulant dire par là que les noms des mois sont redevenus tels qu'ils étaient » au commencement du temps. 11 leur défendit de se servir du nacî dans leur » année. Par là leurs années et leurs mois sont devenus, jusqu'à nos jours, « mobiles dans les quatre saisons, savoir : le printemps, Télé, L'automne et 58 SUR LE CALENDRIER ARABE » l'hiver. Voilà ce que nous avons copié de KitaO-cl-Oitlouf, d'après le récit » d'Abou-Màchar. » » Abou-Mâchar ajoute encore dans le même ouvrage que , selon quelques » narrateurs, les Arabes païens intercalaient 9 mois lunaires dans 24 années » lunaires; ils portaient leur vue sur la différence de 10 jours, 21 heures et » une cinquième partie environ de 1 heure, qui existe entre leur année et » Tannée solaire, pour ajouter à leur année un mois entier, chaque fois qu'il » s'accumulait de cette différence de quoi faire un mois; cependant ils » opéraient, d'après la considération que cette différence n'était que de 10 » jours et 20 heures : leurs mois étaient conséquemment immobiles dans les » saisons, indiquant toujours les mêmes époques dans l'année, jusqu'à ce que » le prophète fit son pèlerinage d'adieu. Alors, les significations de leurs noms » devinrent inapplicables; car ces noms dérivaient (dans l'origine) des cir- » constances relatives aux époques de ces mois qui, devenant mobiles, ne » pouvaient plus s'accorder avec les mêmes circonstances. Le premier mois » est moharram, qui veut dire sacré; il fut ainsi nommé, parce qu'il est un » des quatre mois sacrés chez les Arabes. Ces quatre mois, dont un est isolé » et les trois autres consécutifs, sont dhoid-cdda, dhoul-hedja, moharram et » radjah. La guerre était interdite pendant ces quatre mois; il n'était permis » à personne de lever les armes contre quelqu'un , fùt-il même l'assassin de » ses parents. Safar (qui veut dire jaune, selon cet auteur) fut ainsi nomme , » parce qu'une maladie qui jaunissait le teint venait frapper les Arabes à » celle époque de l'année. Rabi I et rabi II (qui veut dire printemps) furent » ainsi nommés, parce qu'ils arrivaient en automne et que les Arabes appe- » laient l'automne printemps. Quant aux djoumada I et djoumada II (gelée), » ils furent ainsi nommés, parce qu'ils venaient en hiver, quand l'eau gèle. » Radjah (abstinence, selon cet auteur *) fut ainsi nommé, parce que les » Arabes disaient en ce mois : erdjebou, c'est-à-dire abstenez-vous de faire » la guerre. Châban (dispersion) fut ainsi nommé, parce que les tribus se » dispersaient dans ce mois pour aller chercher les eaux et pour faire des » incursions. Ramadhan (grande chaleur) fut ainsi nommé, parce qu'il tom- 1 Le sens qu'on trouve dans les dictionnaires est crainte, avec l'idée de respect et de véné- ration. AVANT L'ISLAMISME. 59 » bail quand la chaleur commençait et que la terre se réchauffait. Ghawdl » (départ ou accouplement), fut ainsi nommé, parce que les Arabes disaient » choulou, voulant dire partez; ou parce que c'était l'époque de Paccou- » plement des chameaux ; c'est là la cause pour laquelle les Arabes n'aulo- » risaient pas le mariage à celte époque. Quant à dkoul-câda (repos), il a été » ainsi nommé parce que les Arabes, dans ce mois, se reposaient des fatigues » de la guerre; dhoul-hedja (pèlerinage), parce qu'il était le mois du pèle- » ri nage. » Les mois élaient ainsi partagés suivant les quatre saisons; leurs noms » dérivaient des circonstances propres à chacun d'eux. Les Arabes commen- » çaient par l'automne; ils l'appelaient printemps. Venaient ensuite l'hiver et a le printemps; le printemps était appelé été ; quelques-uns l'appelaient second » printemps. L'été était appelé kaïdh (été rigoureux). » Quand le naci fut aboli , les mois ne pouvaient plus tomber aux mêmes » époques dans les saisons; leurs noms restèrent seuls en usage dans l'isla- » misme. » Avant d'examiner ce long passage d'Abou-Mâchar, et pour pouvoir en tirer parti, j'ai cru devoir donner ce que Albirouny dit sur ce sujet. Cet auteur esi également très-ancien; il mourut, d'après la biographie de Hadj-Khalifah, en l'an 330 de l'hégire. Il parait avoir fait beaucoup de recherches : tout en reproduisant les idées d'Abou-màchar , il donne les traditions anciennes sur lesquelles le système intercalaire paraît avoir été basé. Albirouny parle de ce sujet dans deux endroits de son ouvrage intitulé : Kitab-el-Athar. Dans le premier il dit : « Les Arabes païens réglaient leurs années comme les Juifs; ils portaient » leur vue sur la différence de 10 jours, 21 heures et f d'heure, existant » entre leur année et l'année solaire; ils ajoutaient à leur année un mois, » chaque fois qu'il s'accumulait de cette différence de quoi faire un mois » complet; cependant ils faisaient leur calcul comme si la différence de deux » années n'était que de 10 jours et 20 heures seulement. Ceux qui étaient » chargés de cette opération étaient les naeaa, choisis parmi les enfants de » Kinànah; ils s'appelaient kalames, dont l'un est kalammas, ou grosse mer; » ils sont : Aboutemâmah, Djenàdah, fils de Auf , fils d'Omeïah, fils de Kala , iO SUR LE CALENDRIER ARABE » fils de Abbâd, fils de Kala, fils de Hodheïfah; ils élaient tous des naçaa. » Le premier qui ait exercé cette fonction, était Hodheïfah, qui est Ebn- » Abd-Fokaïm, fils d'Adi, fils de Amer, fils de ïhalahah, fils de Malik, fils de Kinànah. Le dernier fui Abou -Temâmah. Un de leurs poètes dit : » Tokaïm était appelé kalammas; il réglait les affaires religieuses; il était chef obéi. Un autre poète dit : C'est lui , parmi les enfants de Kinànah, qui réglait les mois; il était respecté et honoré dans sa dignité; il a passé ainsi tout son » temps. Un autre dit : Quand la différence entre Tannée solaire et Tannée lunaire s'accumulait, il l'additionnait pour en faire un mois complet. Il avait appris cela des Juifs , deux siècles environ avant l'islamisme. Cependant les Arabes intercalaient 9 mois dans chaque période de 24 ans. Leurs mois étaient immobiles dans les saisons ; ils ne retardaient ni n'avan- çaient sur leurs époques, jusqu'à ce que le prophète fit son pèlerinage d'adieu, et qu'il reçût du ciel le verset suivant : Le naci est un surcroit d'infidélité, etc. Alors il harangua le peuple et dit : Le temps est redevenu tel qu'il était lorsque Dieu créa les deux et la terre. Il leur lut le verset ■ précédent pour abolir le naci, qui est Tembolisme. Ils l'ont abandonné ainsi, et leurs mois cessèrent de correspondre aux mêmes époques : leur » signification devint fautive. » Le second passage d'Albirouny est le suivant : « Anciennement, les Arabes païens se servaient de leurs mois delà même » manière que les Musulmans. Leur pèlerinage était mobile; il se transpor- tait d'une saison à une autre. Voulant faire leur pèlerinage à l'époque delà maturité de leurs denrées et de leurs produits, tels que les cuirs, les peaux , les fruits...., etc.; voulant qu'il restât invariable dans la meilleure et la plus abondante saison , les Arabes empruntèrent Tintercalation , deux siècles environ avant l'hégire, des Juifs qui les avoisinaient. Ils se servirent de Tembolisme de la même manière que les Juifs , c'est-à-dire qu'ils inlerca- >• laient un mois chaque fois qu'il y avait de quoi ajouter un mois par suite >• de l'accumulation de la différence existant entre leur année et Tannée » solaire1. Les kalames, parmi les enfants de Kinànah, avaient seuls le pri- 1 Je crois que c'est ce passage qui a suggéré à Hadj-klialifu l'idée que les Arabes païens inter- calaient, comme les Juifs, 7 mois dans 19 ans. AVANT L ISLAMISME. 41 » vilége de régler et d'exercer cet ordre; ils haranguaient le peuple, après » la cérémonie du pèlerinage, et ils intercalaient le mois en donnant son >> nom au mois suivant. Les Arabes l'admettaient alors. Cette opération a été > appelée le naci (Tintercalation); car ils intercalaient un mois au com- >■ mencement de Tannée, tous les deux ou trois ans, selon ce qu'exigeait » l'avance. Un ancien poète dit : Nous avons un naci sous Tordre duquel nous « marchons; il déclare profanes les mois sacrés, et il sanctifie les profanes, quand il le veut. » Le premier naci était pour moharram ; sa far fut alors appelé mohar- » ram ; rabi l , sa far , et ainsi de suite pour tous les mois. » Le second naci était pour sa far ; de sorte que le mois suivant, rabi ï , » fut appelé sa far, et ainsi de suite. Le mois du naci se transportait donc de » mois en mois dans les douze mois de Tannée, jusqu'à ce qu'il revînt au » mois de moharram (après douze intercalations); alors ils recommençaient » la même opération. Les Arabes comptaient les périodes du naci, et ils » s'en servaient dans leur chronologie; ils disaient, par exemple : Les an- » nées firent une période, ou une révolution, de telle époque à telle époque. » Si les Arabes s'apercevaient que, malgré Tembolisme pratiqué, ils allaient » se trouver en avance d'un mois sur une saison quelconque par suite de » l'accumulation des fractions1 de Tannée solaire et du restant2 de la diffé- » rence entre cette année et Tannée lunaire à laquelle cette différence était » ajoutée , ils faisaient une seconde intercalation ; le lever ou le coucher des » étoiles qui occupent les mansions de la lune leur permettaient de connaître » cet écart. Les Arabes continuèrent ce mode d'embolisme; le tour du mois » intercalaire tomba, Tannée de l'hégire, sur châhan. Ce mois fut nommé » alors moharram; ramadhan fut appelé sa far. Le prophète dut donc alten- » dre la fin de la période pour accomplir le pèlerinage d'adieu dans lequel .» il harangua le peuple, et dit : Le temps est redevenu tel qu'il était lorsque 1 La fraction dont il s'agit ici ne peut être que celle qui reste d'une intercalation régulière d'un mois toutes les trois années. Ce passage paraît, au reste, comme l'a déjà fait remarquer M. Caussin de Perceval, en contradiction avec le reste. - Ce restant est sans doute la petite fraction d'une heure et un cinquième qu'on avait né- gligée. Tome XXX. 6 42 SUR LE CALENDRIER ARABE » Dieu créa les cieux et la terre, voulant dire par là que les mois reprirent » chacun leur place primitive, et qu'ils ne sont plus affectés des altérations » que les Arabes leur faisaient subir. » La seule comparaison des passages de Makrisi et de Mohammad-Charcaci . dont nous avons déjà parlé, avec ceux d'Abou-Mâchar et d'Albirouin que nous venons de donner, montre clairement que ces auteurs se sont copiés les uns les autres. De plus , en jetant les yeux sur le passage suivant de Ma- soudi , on verra facilement qu'Aboul-Féda a copié cet auteur : « Les Arabes païens intercalaient un mois toutes les trois années; ils appe- la laientee mois-là le naci, ou retard. Dieu blâme cette action lorsqu'il dit : » Le naci est un surcroît d'infidélité %. » Masoudi me paraît avoir puisé cette idée dans la phrase suivante du pas- sage d'Albirouny que nous venons de rapporter : « Si les Arabes s'apercevaient que, malgré l'embolisme pratiqué;, ils allaient » se trouver en avance d'un mois sur une saison quelconque, par suite île » l'accumulation des fractions de Tannée solaire et du restant de la différence » entre cette année et l'année lunaire à laquelle celle différence était ajoutée, » ils faisaient une seconde inlercalation. » Car ce passage ne peut se rap- porter qu'à une intercalation régulière d'un. mois tous les trois années. On voit par là que tous les historiens ont puisé leurs idées sur l'embolisme, et leur mode d'inlercalalion dans Albirouny ou dans Abou-Màchar. L'auto- rïté de l'usage d'une année luni-solaire parmi les Arabes païens se trouve donc réduite à celle d'Abou-Mâchar et d'Albirouny. Or, en lisant avec un peu d'attention les passages de ces deux écrivains, l'on voit que ni l'un ni l'autre n'étaient sûrs de ce qu'ils avançaient; les paragraphes qui touchent de près au sujet principal sont empreints du cachet de l'incertitude : Àbou-Màchar prétend d'abord, sans dire sur quoi cette prétention est basée, que les Arabes païens intercalaient un mois tous les deux ans, et plus loin , il dit : « Selon quelques narrateurs, les Arabes païens intercalaient 9 mois dans chaque » période de 24 années..., etc. » Albirouny, à son tour, admet d'abord une intercalation de 9 mois en 24 ans. Plus loin, il donne deux paragraphes 1 Voir Mouroudj-el-Dhahab, o" 715, fol. 15'», supplément arabe. AVAINT L'ISLAMISME. 43 (que j'ai annotés), dont le premier exige une intercalalion identique à celle des Juifs, savoir, 7 mois dans chaque période de 19 ans; le second, l'ad- mission d'une intercalalion régulière d'un mois dans chaque période de 3 ans. L'embarras de ces deux écrivains, pour le choix du mode d'intercalation, doit affaiblir, pour ne pas dire annuler leur autorité, quant à l'attribution aux Arabes païens de l'usage d'une année embolismique. Quoi qu'il en soit, voyons quelles sont les traditions sur lesquelles ces deux anciens écrivains basèrent ce système de calendrier embolismique. Ces tradi- tions se trouvent renfermées dans le premier passage d'Albirouny. Elles sont au nombre de trois, savoir : 1° « Quand la différence entre l'année solaire et l'année lunaire s'accu- » mulait, il l'additionnait pour en faire un mois complet. 2° » Le temps est redevenu tel qu'il était le jour où Dieu créa les deux » et la terre. 3° » Le naci est un surcroît d'infidélité » On a, à l'appui de ces trois traditions, les rapports existant entre les nom> des mois et les saisons. Or, par ces rapports, les Arabes pourraient bien n'avoir eu en vue que l'année de la dénomination, sans regarder plus loin, comme cela eut lieu à l'égard des mois anciens. Le troisième point : « Le naci est un surcroît d'infidélité, » n'est pas bon plus une preuve de l'emploi d'une année embolismique parmi les Arabes païens; car le mot naci signifie la remise de l'observance d'un mois sacré à un mois profane, de l'aveu de tous les commentateurs du Coran et des lexi- cographes, lesquels sont les plus compétents '. Pour le second point : « Le temps est redevenu tel qu'il était le jour où » Dieu créa les cieux et la terre, » il faut chercher s'il n'y avait pas, à l'époque du pèlerinage d'adieu, une certaine circonstance chronologique qui puisse nous être utile pour bien saisir le sens que le prophète a voulu atta- cher au passage susdit. ' Le mot naci, d'après les démonstrations que j'ai données de l'usage du calendrier pure- ment lunaire chez les Arabes païens, ne peut, en effet, signifier autre chose que la remise de 1 observance d'un mois sacré à un autre. U SUR LE CALENDRIER ARARE Le calcul nous fait connaître la particularité suivante, qui a une intime liaison avec la tradition dont il s'agit. Le dernier mois de Tan 10 de l'hégire, le mois de dhoul-hedja, coïncida, à cette époque, avec le dernier mois de l'année religieuse chez les Juifs, de sorte que le mois de moharram, qui allait ouvrir l'an 41 de l'hégire, a été le même que le mois de nisan, par lequel a dû commencer l'année religieuse juive. Les pères des Israélites et des Arahes, Isaak et lsmaïl, fils du patriarche Ahraham , se servaient, ainsi que leur père, selon toute probabilité, de l'année lunaire vague. Le cours des mois de cette année fut interrompu par l'interca- lation introduite par le peuple de Dieu; mais il n'a cessé d'être religieusement suivi par les descendants d'Abraham issus d'Ismaïl. Le nombre total des mois intercalés depuis le commencement des choses , aurait fait , à l'époque du pèlerinage d'adieu, un nombre entier de périodes de douze mois chacune, de sorte que le commencement de l'an 1 i de l'hégire coïncidait avec celui de l'an juif, comme le démontre le calcul; l'année d'Isaak, lsmaïl et Abra- ham redevenait donc, à l'époque du pèlerinage d'adieu, telle qu'elle était primitivement , et comme si elle n'avait jamais été interrompue par aucune espèce d'intercalation apportée par les enfants d'Isaak. Cela étant, si l'on réfléchit attentivement, on verra que tel est le sens voulu par les mots :« Le » temps est redevenu tel qu'il était, ele » Enfin, le premier point :« Quand la différence entre l'année solaire et » l'année lunaire s'accumulait , il l'additionnait pour en faire un mois com- » plot, » ne peut pas indiquer non plus, d'une manière positive, l'usage de l'embolisme parmi les Arabes païens; car, outre l'obscurité de l'origine de cette tradition, le nom de celui dont on parlait (Fokaïm) n'y étant pas men- tionné, elle pourrait bien se rapporter à un Juif arabe, qui calculait et réglait pour les Juifs leur année luni-solaire. On voit par ce rapide examen que nos premiers écrivains n'ont émis que des conjectures sur l'usage de l'année luni-solaire parmi les Arabes païens, et qu'il est excessivement difficile de donner son dernier mot, en se basant exclusivement sur les témoignages des historiens. Aussi ne suis-je arrivé, dans ce mémoire, à une solution définitive, qu'en me guidant par plusieurs phénomènes célestes et en me basant sur des calculs astronomiques. AVANT L'ISLAMISME. 45' Disons deux mois, en terminant, sur la semaine chez les Arabes. Les Arabes païens se servaient anciennement des noms suivants pour indiquer les sept jours de la semaine, savoir: A wal Dimanche. Ahwan - . . Lundi. Djabar Mardi. Dabar Mercredi. Mounis Jeudi. Aroubali Vendredi. Chabar Samedi. Masoudi et Albirouny donnent, à l'appui de cela, la tradition suivante : « J'espère vivre; cependant, mon dernier jour sera, ou dirai, ou ahwan, » ou djabar: enfin , si je ne meurs pas dans le fatal dabar, ce sera dans » mounis, aroubali ou chabar. » Pour la division du jour en vingt -quatre heures, je remarque, avec M. Caussin de Perceval, que les Arabes du paganisme l'ignoraient complè- tement. FIN. INSCRIPTIONS GRECQUES RECUEILLI!* EN ASIE MINEURE M. A. WAGENER , PROFESSEUR A L'UN IVE RSITÉ DE GAND. (Présente le 4 mai 1859. Tome XXX. INSCRIPTIONS RECUEILLIES EN ASIE MINEURE PAR M. WAGEINER. RAPPORTS PRÉSENTÉS A L'ACADÉMIE SUR CE MÉMOIRE. Rapport de M. Flouiez. « La classe a reçu, en 1855, de M. Wagener, et a l'ait insérer dans ses Mémoires, une notice sur un monument métrologique découvert à Ushak. L'honorable professeur de Gand lui adresse maintenant une première série d'inscriptions grecques inédites qu'il a rapportées également de son voyage dans l'Asie Mineure. Ces inscriptions, au nombre de quinze, proviennent de Koula, de Goerdis et d'Akhissar. Sans offrir toutes un égal intérêt, elles méritent d'être publiées; trois d'entre elles ont même une véritable impor- tance. La géographie comparée de l'Asie Mineure présente encore beaucoup d'obscurité, à cause de l'état incomplet des renseignements que contiennent les ouvrages historiques et géographiques parvenus jusqu'à nous. Ce sont les médailles et les inscriptions qui nous viennent en aide pour combler ces lacunes; elles ont déjà révélé l'existence de plu- sieurs villes que ne mentionnent pas les auteurs et les itinéraires anciens. Les inscrip- tions sont surtout précieuses pour fixer la position géographique des lieux. La première des inscriptions de M. Wagener nous fait connaître une cité ancienne du nom de Coloé. et, par la raison qu'elle est une dédicace, elle nous apprend que Coloé occupait rempla- cement de la ville moderne de Koula. La huitième et la neuvième , recueillies toutes deux à Goerdis, changent en fait certain l'hypothèse des savants, qui placent dans cet endroit la Julia Gordos des médailles. Voici en quelques mots le plan du travail de M. Wagener. Huit planches, placées à la fin, reproduisent en fac-similé la copie des inscriptions. Dans le corps du mémoire, l'au- teur en donne la transcription en caractères courants, en y joignant les restitutions qu'il propose. Puis il fait suivre chaque inscription d'une traduction française et d'un com- mentaire. Ses explications sont des plus complètes : aucun point n'est resté sans éclair- cissement, aucune difficulté n'a été éludée. M. Wagener a fait preuve dans cet ouvrage de beaucoup de sagacité, d'un excellent esprit critique et d'une connaissance approfondie de la langue et de l'antiquité. Par la multiplicité et la variété des observations dont il se IV compose, un commentaire épigraphique échappe à l'analyse. Je me bornerai donc à indi- quer la nature et les faits saillants de chaque inscription; je me permettrai aussi de glisser ici et là une remarque ou d'exposer les motifs de mon dissentiment avec l'auteur sur quelques points à l'égard desquels il ne me semble pas avoir rencontré aussi juste que sur le reste. Le n° 1 est une inscription commémoralive de la consécration, par la cité de Coloé, d'une statue à Jupiter Sabazius. La stèle de marbre qui la porte est ornée à sa partie supérieure de ligures en bas-relief distribuées sur deux plans. M. Wagener, n'ayant pu se procurer un dessin de cette représentation figurée , a dû se borner à la décrire. La description qu'il donne, d'après son journal de voyage, peut, combinée avec son expli- cation, improvisée sans doute sur les lieux, lui paraître suffisamment détaillée. Pour moi, certains détails me manquent pour me former une idée nette et précise, et pour me rendre complètement compte de cette représentation curieuse et intéressante. Au centre de la composition du premier plan s'élève, sur un piédestal, la statue d'un dieu que le docte voyageur a pris, certainement bien à tort, pour un sacrificateur monté sur un autel. A droite se voient trois personnages dans l'attitude de suppliants. A gauche, sur un char attelé de deux chevaux, est assis Jupiter Sabazius, caractérisé par l'aigle posé sur l'un des chevaux et par le serpent qui se roule à leurs pieds; le dieu Mon ou Lunus, reconnaissable au bonnet asiatique dont il est coiffé et au croissant placé près de lui , se tient à côté des chevaux qu'il conduit de la main gauche. Dans la main droite il porte le caducée. M. Wagener a savamment établi les rapports de Lunus, personnifica- tion mâle de la lune, avec Sabazius, dieu du soleil. Ce dernier, s'identifiant ici avec Jupiter, il n'est pas surprenant de voir le caducée de Mercure attribué à son acolyte. Le milieu de la composition du plan inférieur est occupé par un autel chargé de gâteaux derrière lequel s'élève un arbre, probablement un cyprès. Des deux côtés se tiennent debout treize personnages, sept à gauche, six à droite. Le savant voyageur les regarde comme des prêtres de Jupiter Sabazius, et attribue le même caractère aux trois suppliants du plan supérieur. Quoique ce nombre de seize prêtres me paraisse un peu considérable, je ne contredirai pas son interprétation, parce que j'ignore si, en l'absence de tout autre indice, il n'y a pas dans la taille, l'attitude, le vêtement de ces figures des différences qui devraient faire distinguer diverses catégories de personnes. D'après l'opi- nion de M. Wagener, l'ensemble du bas-relief représenterait l'installation de Jupiter Sabazius à Coloé; on le verrait conduit dans son temple par Lunus. Ce dernier point me semble au moins douteux. La présence d'un char ne fait pas nécessairement allusion à l'arrivée du dieu dans l'endroit; elle pourrait servir seulement à caractériser la divinité solaire. Aux termes de l'inscription , la cité de Coloé a consacré une statue à Jupiter Sabazius (xo&Upa>G. 500, n° 605 et u" 604 (médailles d'Hiérapolis); p. 575, n" 2 et n° 4; p. 576, n° 12 el n» 15; p. 597, n" 142 (médailles de la Galatie). Les médailles asiatiques relatives à Lunus ont fait l'objet d'une étude spéciale de la pari de Streber (Numis. gr., pp. 169 et suiv.), dont je regrette vivement de ne pas avoir t'ou- RECUEILLIES EN ASIE MINEURE. 5 enfin à lever tous les doutes, ce sont deux autres bas-reliefs que j'ai vus également à Koula *, et qui représentent le dieu de la lune avec des attributs analogues. Les inscriptions qui accompagnent ces sculptures et qui ont été publiées en dernier lieu par M. Pb. Lebas -, nous font voir qu'on adorait à Koula le dieu du soleil sous le nom de Zeus Masphalaténos et celui de la lune sous le titre de Mèn 5. Sur d'autres monuments , recueillis dans la même ville, le dieu Mèn est appelé 'A£»tt>?i«3ç , Ylezpa£iz-/}<;i et 'Afxkftiàùpvç6. Il résulte clairement de tous ces faits réunis une circonstance importante et sur laquelle je reviendrai plus loin, savoir, que le dieu de la lune était tout particuliè- rement honoré à Koula. Ce qui distingue le dieu Mon, tel qu'il est représenté sur le monument dont nous nous occupons, c'est que de la main droite il tient un caducée. Cette particularité nous fait voir que, dans le cas actuel , Lunus occupe les fonctions de Mercure, qu'on voit chargé très-souvent , sur les monuments figurés , d'es- corter dans leurs voyages les divinités de l'Olympe. Mais pourquoi Mercure est-il ici remplacé par Lunus? Voici, si je ne me trompe , l'explication de ce fait. Sabazius, ainsi que nous le verrons plus tard, était représenté très-sou- vent comme dieu du soleil. De là un premier rapport qui l'unissait au dieu Mèn. Toutefois ces deux divinités, bien qu'unies par une affinité naturelle, n'occupaient pas le même rang dans la hiérarchie céleste. Lunus était regardé comme inférieur au dieu du soleil. Je ne citerai pour le prouver que les deux vrage sous les yeux. M. Gerhard (Arch. Zeitg., ann. 1854, pp. 210 et suiv.), à qui j'emprunte cette indication, a démontré que la prétendue amazone à cheval, qu'on rencontre sur un grand nombre de médailles de l'Asie, n'est en général autre chose qu'une image de Lunus, armé d'un marteau ou plutôt d'une bipenne. 1 Ils sont dessinés dans Keppel, Narrative af a Journey across the Bâfra», 1. 11, pp. 275- 281,546 et suiv. *- Voyage en Grèce et en Asie Mineure, 5mc partie, p. 212, n° GT>7, et p. 213, n° G68. 3 Le nom de Zeus Masphalaténos est accompagné sur ces deux monuments des épithètes de Ménitiamos et de Ménityrannos. Ne pourrait-on pas expliquer le premier de ces titres eu supposant que le mot rix/wt; doive être dérivé de la racine riu avec la terminaison xfte; , que nous rencontrons assez souvent en Asie (népyx/xx, nplxfisç, Teinx/vn, Tôpr*^ ) ; de sorte que twc^s; serait à peu près la même chose que cspvôi. Les mots Ménitiamos et Ménityrannos devraient alors être traduits en latin par Luno venembilis , Luno imperans. 4 Voyez Lebas, /. /., p. 215, n° C80, et p. 214, n. 678. 5 Voyez Bôckh, Corpus inscriptionum graecarum , n" 3442 et n° 5448. 6 INSCRIPTIONS GRECQUES inscriptions mentionnées plus haut, où l'on voit que Zeus Masphalaténos (c'est- à-dire lo dieu du soleil) porte le titre de Ménityrannos. Or, dans plusieurs inscriptions latines rapportées par Orelli ', nous trouvons le nom à peu près identique de Ménotyrannus. Cette fois c'est une épithète donnée à Attis, dont le culte, comme on sait, était intimement lié à celui de Cybèle. Maintenant comme Cybèle est appelée parfois mère de Sabazius2, celui-ci pouvait, au même titre qu'Allis, porter le surnom de Ménotyrannus3. Ce qui démontre de plus qu'il y avait beaucoup de rapports entre le culte de Mèn et celui de Sabazius, c'est un passage fort remarquable de Proclus l, où il est dit que, chez les Phrygiens, le- dieu Mèn était vénéré (ùpoûfiei/oç) sous le nom de Sabazius et invoqué au milieu des cérémonies accomplies en l'honneur de t-f dieu. Si de cette manière nous avons établi, d'une part, l'affinité qui existait entre Sabazius et Mèn, d'autre part, la supériorité du premier sur le second, il n'y a plus rien de surprenant à voir le dieu de la lune conduire les che- vaux du char de Jupiter Sabazius. Mais vers quel endroit se dirige ce dieu? L'inscription doit nous éclairer sur ce point. Voici, en effet, ce qu'elle porte : h YUkoipâv Kaxoma Y.«Oiêpa>aoaj Àt'« ly.jly.Ç'.w. Notons d'abord que le pluriel x*9Upuaoa>, se rapportant au singulier x«t«>w«, n'est autre chose qu'une construction y.a-à oiaeaiv. Mais que signifie proprement *aB*pdto? Comme le prouvent les exemples cités au bas de cette page8, ce mot veut dire diviniser, sanctifier, consacrer. Il n'a nulle part le sens de vénérer. En effet, quelque fréquent que soit son emploi dans les inscriptions, 1 Orelli, Inscriptionum latinarum amplissima collectio, n°s 1900, 1901, 2264-, 2553. 3 Voyez Strab., Geocjr., X, pp. 470 et 471 , et l'article de Pfau, dans Real Encyclopédie d. klass. Altertk, VI, p. 405. 3 Je regrette de ne pas avoir pu me procurer la dissertation de M. Ed. Miiller, intitulée : ])•> Attide et Sabazio. i Ad Tim., IV, 251. s Plutarq. Mur. C. 26. WJÎ-xto ; îfftêpxs ïxnhm. Plutarq., Camil., C. 21, û« eÔutoù; ùxèp Tijç Tar/iicfe; tw âaifavi xxQiepcùvru. Dion Cass., 1. 45, 22, zàv vcàv riji 'Aj>/»« ait été employé pour désigner tantôt Sabazius, tantôt Jupiter3. Le culte de Sabazius paraît avoir été introduit en Grèce vers l'époque de la guerre du Péloponèse, et, au milieu du deuxième siècle avant J. C, on tâcha de le faire pénétrer à Rome. Valère Maxime, qui rapporte3 que le pré- teur des étrangers, C. Cornélius Hispallus (an. 6 14 de Rome), ordonna aux sectateurs de ce dieu de regagner leur pays , désigne la divinité nouvelle sous le nom de Sabazius Jupiter, et nous retrouvons la même dénomination dans une inscription rapportée par Orelli 4. Ceci nous ramène directement au mo- nument de Roula. Je ne doute nullement que le culte de Sabazius n'ait été de bonne heure introduit en Lydie, notamment dans cette partie de la Lydie où se trouve Koula et qui touche à la Phrygie. Ce qui le prouve, c'est que, dans les hymnes attribués à Orphée s, il est dit que Sabazius, fils de Saturne, déposa sur le mont Tmolus, le jeune Racchus. De plus, Jean le Lydien ( De Menss., p. 96) prétend que sur le sommet du Tmolus se trouvait jadis un endroit appelé : IW A«ôç ùerîou. Or, ce Zùç ùêuoç n'est guère différent de"Y>jÇ, qui, comme nous l'avons vu plus haut, se confond avec Sabazius6. C'est donc à tort que Rernhardy ' a mis en doute que Sabazius fût vénéré en Lydie, et l'on comprend pourquoi Cicéron, en faisant rénumération des différents Racchus 8, a prétendu que celui d'entre eux en l'honneur duquel avaient été instituées les Sabazies, était considéré comme roi de l'Asie, ce qui revient à dire que le culte de Sabazius était répandu dans une très-grande 1 Diod. Sic, IV, 15; Valer. Max., 1,5.2. 2 Voyez Lobcck, Aglaophamus, pp. 1046 et 1048. 3 Sat., I, 3, 2. 4 Jovi Sabazio. Inscr. lut., a. 1259. s Hymn. Orph., 47, w. 5 et 4. 6 Voyez Lobeck, Aglaoph., p. 1047. 7 Ad Dionys. Perieg., p. 757. 8 De Mut. Deor., III, 23. RECUEILLIES EN ASIE MINEURE. 9 partie de l'Asie. Je ne crois donc pas que le monument qui nous occupe marque la date de l'introduction à Koula du culte de Sabazius, mais celle de la consécration de cette forme du dieu qui est désignée comme une combi- naison de Sabazius et de Zeus. Si nous ajoutons ce double nom à celui de Zeus Masphalaténos , surnommé également Ménitiamos et Ménityrannos , nous verrons dans ces nombreuses épilhètes une preuve de plus de cette tendance dont j'ai parlé plus haut, et qui consistait à ramener peu à peu tous les dieux particuliers à un dieu souverain et unique, représenté sous ses aspects divers par des dénominations différentes. Quant au serpent qui se trouve sur notre monument , nous ferons observer que cet animal était consacré à Sabazius, ainsi (pie le prouvent des passages de Théophraste ' et d'Artémidore2. L'aigle placé sur un des chevaux du char de Zeus Sabazius est l'attribut bien connu de Jupiter. Il convient d'autant mieux au dieu de Koula, qu'on peut envisager celui-ci comme dieu du* soleil, et que l'aigle — F. Lajard 5 l'a démontré — est un des symboles du dieu solaire asiatique. J'ai identifié le personnage qui vient à la suite du dieu avec le stéphano- phore Glycon, que mentionne l'inscription. En effet, le mot areyœmy&poç, ou porte-couronne, est le titre d'un magistrat éponyme qui exerçait dans beau- coup de villes de l'Asie4 des fonctions à la fois civiles et sacerdotales3; de sorte que Denys d'IIalicarnasse a pu ajuste titre le comparer aux flamines6. Il n'y a, par conséquent, rien d'étonnant à ce que le stëphanophore Glycon préside à une cérémonie religieuse. Le nom de Glycon paraît avoir été assez commun à Coloé. Nous le retrou- verons plus bas 7 et on le rencontre encore dans cinq inscriptions de Koula *, 1 Char., XVI. 2 Oneir., H, 15. 3 Mém.del'Acad. des inscript, et belles-lettres, t. XX, 2mc partie, pp. 14 et 15. 4 Voyez Corp. iriser, graec, n»s 2693, 2715, 2826, 2827, 2834, 2852, 2905, 5137. s Voyez Athén., 6, 215 B. (Lysias) -jxî rijs jrxzpiùi â«. s Ph. Lebas, /. /., p. 112, n° 667. 6 Avant de connaître les conclusions de Frantz, j'étais arrivé moi-même à un résultai iden- tique. Qu'il me soit permis de dire que cette coïncidence est, sinon un argument, du moins une probabilité de plus en faveur de la théorie déduite par Frantz. 7 I/undb. d. Chronol., I, p. 419. RECUEILLIES EN ASIE MINEURE. il qui, au printemps, fait revivre la nature. Denys le Périégète1 décrit longue- ment les fêtes de Bacchus qui, dans la saison prinlanière (««/>«? ôôpn) avaient lieu en Méonie, au milieu des plaines du Caïstre, et M. Bernhardy, dans son commentaire sur ces vers -, cite des passages d'Himérius 3 et de Claudien \ où il est parlé des solennités bachiques célébrées au printemps en Lydie. Or, j'ai fait observer plus haut qu'il y a le plus grand rapport entre le culte de Sabazius et celui de Bacchus; de plus, quant à ce dernier, nous savons qu'il était honoré d'une façon toute particulière dans cette partie de la Phrygie ou de la Lydie qui porte le nom de Ka-ay.r/.a^ , et au milieu de laquelle est située la ville de Koula 5. Il serait donc fort possible que la date de notre monument (le 1er Daesius) marquât l'époque précise à laquelle on célébrait habituellement, en Lydie, les fêtes de Bacchus ou de Sabazius. C'est à cette circonstance qu'il faut peut-être aussi rapporter l'arbre sym- bolique sculpté sur le monument de Roula. Je suis assez disposé à considérer cet arbre comme un cyprès. Félix Lajard, dont on connaît les savantes recher- ches sur le culte du cyprès 6, a montré que cet arbre était regardé générale- ment en Asie comme un symbole de fécondité et de vie. Cela seul pourrait déjà nous autoriser à admettre que le cyprès devait être consacré à Sabazius. Mais il y a plus : F. Lajard a cité deux médaillons de bronze, frappés à Éphèse, en l'honneur d'Antonin le Pieux, et sur chacun desquels on voit Jupiter Pluvius , dont l'image est accompagnée d'un cyprès7. Or, nous avons montré plus haut que Jupiter Pluvius est une divinité peu différente de Sabazius. Ce qui prouve, d'autre part, que le culte du cyprès n'était nullement étranger aux Lydiens, ce sont plusieurs médailles de la ville de Mostène 8. Une de ces médailles nous montre un personnage à cheval , brandissant de la droite un marteau 1 V. 855 et suiv. 2 Page 757. 3 Page 436. 4 Rapt. Pros., II, 67 et suiv. s Ce fait est démontré par plusieurs médailles frappées dans la ville de Maionia. Cf. Eckhel, Doetrina numm., vol. III, p. 105. « Mém. de l'Inst de France. — Acad. des inscript, et belles-lettres, t. XX, 2me partie, 1854. i Ibid., p. 101. s Ibid., p. 109. 12 INSCRIPTIONS GRECQUES ou une bipenne. Un second personnage, tenant un caducée de la gauche, guide de la droite le cheval du premier. Entre ces deux personnes sont re- présentés un cyprès et un autel allumé. L'analogie qu'il y a entre cette médaille et le monument de Ivoula ne peut manquer de sauter aux yeux, et peut-être faudra-t-il, à cause même de cette analogie, expliquer la mé- daille de Mostène tout autrement que ne l'a t'ait F. Lajard. En effet, le savant académicien français considère le personnage à cheval comme un portrait d'amazone, et il donne le nom de Mercure à l'homme au caducée. Mais d'ahord, pour ce qui est de l'amazone, cette interprétation, qui ne se fonde que sur la présence de la hipenne, a été suflîsamment réfutée par les observations de M. Gerhard1. Cette prétendue amazone sera-t-elle maintenant un Lunus, qu'on rencontre très-fréquemment sur les médailles de l'Asie? Cette conclusion ne me paraît nullement nécessaire. Pourquoi la hipenne, qu'on a regardée à tort comme un attribut dis- tinctif des amazones, serait-elle le signe caractéristique du dieu de la lune? M. Gerhard a publié2 une plaque de bronze extrêmement curieuse, où l'on aperçoit entre autres un dieu à cheval, coiffé du bonnet phrygien et armé d'une hipenne. Or ce dieu, d'après MM. Gerhard et Lajard, n'est point celui delà lune, mais une divinité solaire à laquelle ces deux savants donnent, de commun accord, le nom de Sabazius. Si cette désignation, comme tout porte à le croire, est exacte, rien ne nous empêche de reconnaître également Saba- zius sur la médaille de Mostène. Le dieu de la plaque de bronze est, à la vérité, barbu, particularité qui ne se retrouve pas dans la médaille prémention- née. Mais ce détail ne doit pas nous arrêter. En effet, sur une médaille de la ville de Trébizonde, on voit un dieu non barbu à cheval, coiffé du bonnet phrygien et tourné du côté d'un autel allumé. Derrière le dieu on aperçoit un arbre; sous les pieds de son cheval se roule un serpent. De part et d'autre du dieu sont placés deux jeunes gens, coiffés, eux aussi, du bonnet phrygien et tenant, le premier, une torche baissée , le second , une torche levée. M. Ger- hard 3 voit avec raison dans ce personnage à cheval , non pas Lunus , mais le 1 Voyez plus haut. - Arclteol. Zcitg., 1854, pi. 65, 5. 3 tbid., n° 1 , p. 210. RECUEILLIES EN ASIE MINEURE. 15 dieu du soleil, et je crois avec lui que les deux jeunes gens qui portent des torches et qui accompagnent ce dieu doivent être considérés comme des repré- sentants de Fétoile du matin et de l'étoile du soir, de Phospliorus et d'Hespé- rus, symboles naturels du lever et du coucher du soleil. Or, s'il en est ainsi, rien ne s'oppose plus à ce que nous regardions le personnage à cheval de la médaille de Mostène comme un dieu solaire et notamment comme Sabazius; en outre, cela étant admis, la personne qui, sur la même médaille, tient la bride du cheval de Sabazius sera non pas Mercure, mais le dieu de la lune. Si ces déductions ne sont pas trop hasardées , l'analogie que j'ai signalée plus haut entre la médaille de Mostène et le bas -relief de Roula s'explique par la quasi-identité du sujet , et la présence sur ces deux monuments d'un autel et d'un arbre sacré nous amène à conclure que le culte du cyprès se rattache de préférence, en Lydie comme ailleurs, aux dieux de la lumière et surtout au soleil. Celle conclusion est encore confirmée par des médailles de Mastaura, autre ville de Lydie '. Pour ce qui regarde enfin les petits corps ronds qui, sur le monument de Koula, sont placés au pied du cyprès, je les considère comme des gâteaux sacrés, et je crois qu'il font- allusion à la circonstance suivante. Démosthène nous rapporte 2 que l'orateur Eschine parcourait dans sa jeunesse les rues d'Athènes, à la tête des serviteurs de Sabazius 3, couronnés de fenouil et de feuilles de peuplier*, et il ajoute que les vieilles femmes le récompensaient de ses services en l'appelant l'&pyoc,, np a un village du nom de Mennéh. Il est donc fort probable que le village de Mennéh occupe l'emplacement de l'ancienne Méonie. Je dois toutefois faire observer que l'inscription 3440 (C. I. G.), sur laquelle M. Rockh, et avant lui M. Leake et le major Keppel ont cru pouvoir se fonder pour convertir cette probabilité en certitude complète, a été copiée par Keppel d'une façon inexacte. La copie que j'en ai prise moi-même coïncide de tout point (sauf un détail de peu d'importance), avec celle qu'a publiée M. Lebas2, de sorte qu'il 1 Aglaoph. Epi»)., XIV, pp. 1050 et suiv. 2 Ouvr. cité, sect. III, p. 213, n° 671 RECUEILLIES EN ASIE MINEURE. 15 est inutile que je la transcrive à mon tour. Qu'il me suffise de dire que celle inscription, qu'on prétend avoir été découverte à Mennéh, mais qui se trouve actuellement à Koula, est l'épitaphe d'une jeune fille où sont énumérés, comme cela se fait habituellement, les principaux membres de sa famille. Or, si nous nous en rapportons à la transcription de Keppel, on aurait compris dans cette liste, contrairement à toute analogie, deux habitants de Méonie qui n'auraient point été ses parents (Mrçfowç M«p.oç y.al Na'xvç) , mais que, d'après M. Leake ', il faudrait considérer comme ayant été ses amants {lier lovers). Il y a dans cette conjecture, tout le monde en conviendra, quelque chose de singulièrement insolite. Aussi bien la copie de M. Lebas et la mienne por- tent-elles, l'une et l'autre, non pas JVtjfoveç, mais pi-r^coi/sç. Le nom de fjofyxav ne se trouve pas encore, il est vrai, dans les dictionnaires, mais combien d'au- tres provincialismes n'a-t-on pas déjà recueillis dans les inscriptions de l'Asie! Néanmoins, si l'on voulait contester l'existence du mot pirpas/, en se fondant sur ce fait que l'on rencontre parfois, dans les monuments épigraphiques , des erreurs provenant de l'ignorance ou de l'incurie du graveur, je ferais observer que nous retrouvons le même terme dans une inscription copiée également à Roula et publiée par 31. Hamilton3. Il me parait donc établi, d'une part, que le mot fofr/ww désignait, à Roula, un degré de parenté qu'il ne nous importe pas ici de déterminer d'une ma- nière rigoureuse, d'autre part, que l'argument tiré du mot Mntoveç, n'a plus aujourd'hui la moindre valeur. Ce n'est pas que je veuille nier l'identité de Méonie et de Mennéh ; car M. Hamilton prétend avoir vu le mot M«tiw sur un des murs de la mos- quée de Mennéh. Ce que je tiens à établir, c'est que toutes les inscriptions trouvées à Roula ne doivent pas nécessairement provenir de Mennéh, et qu'en l'absence de preuves du contraire, il convient de les attribuer à la ville de Coloé, dont l'existence est prouvée par la présente inscription et dont l'em- placement ne peut guère différer de celui de Roula ; car il est pour moi hors de doute que le nom de la ville de Roula se rattache directement à celui de 1 Apud Keppel, Journal of a tour across the Balcon, II, p. 553. "2 Researches in Asia Minor, Ponlus and Armenia, vol. II, p. 468, n° 345 : 'EXxi&tf&pw rw Tome XXX. 4 16 INSCRIPTIONS GRECQUES Coloé, d'autant plus que ce nom ne peut pas être expliqué par un radical turc. Cette dernière circonstance résulte d'une lettre qui m'a été adressée dans le temps par iM. le professeur E. Curtius. La ville de Coloé porte le titre de tmoma , dénomination assez obscure; car Strabon rapplique quelquefois à des cités de peu d'importance1, tandis qu'ail- leurs le même auteur2, Appicn 3 cl Plutarque 4 emploient ce mot dans le sens de «.mm*, colonie. On le trouve encore dans l'inscription 3454 (C. I.G.), pour désigner la ville de Césarée Sébasté, située entre Smyrne et Sardes, à l'endroit qu'occupe aujourd'hui Cassabab. S'il était démontré que, pour être présidée par un stéphanéphore, il fallait qu'une cité eût une certaine importance, le stéphanéphore Glycon de l'in- scription de Coloé déterminerait, d'une façon approximative, le rang qu'il convient d'assigner à cette ville. Mais, comme cette question n'est point ré- solue, on peut dire seulement que la plupart des villes importantes de la Turquie occupent l'emplacement de cités également considérables dans l'an- tiquité, d'où il résulte que, selon toute probabilité, la -mtov/Jm de Coloé était plus qu'une bourgade. Je ne voudrais cependant pas trop fortement appuyer sur celte circon- stance; car jusqu'à présent, on n'a pas, que je sache, trouvé de médailles frappées à Coloé, et c'est en vain que j'ai cherché le nom de cette ville dans les géographes anciens, dans les itinéraires et dans les Nofiliae episcopa- tuum publiées par Goar. Il est bien vrai que, dans le Sijnecdème d'Hiéroclès, on trouve8 le nom de KoTaian, et qu'il est parlé souvent dans l'histoire des conciles d'un évêque de K«)i>, , ou de Kakmî, ou de Kolw , ou de KoAwwj , ou enfin de Kalén6-, mais il faut chercher cet évêché dans la province d'Asie {ér.apxl« 'Aaîocç), tandis que l'emplacement de Koula était compris dans Yépar- chie lydienne. 1 Geoar., V, p. 249: Nouxf/iia, N<ûA«, 'A%c>« , 'A&êXXa xxi xllxi et/ tùt-m èiâTTouç icxToaiiai. Voyez «6., V, p. 257. î Ibid., p. 272. '" Bell. Civ., 5, 19. ' Anton., c. 10. '■■ Ed. Wessel., p. C60. Voyez sur ces différentes leçons \» noie de Wesseling, /. I- RECUEILLIES EN ASIE MINEURE. 17 Le nom de Coloé ne se trouve plus qu'une seule fois dans toute l'antiquité grecque. Il avait été donné à un lac salé situé à quelques lieues au nord de Sardes, dans le voisinage des célèbres tombeaux décrits par Hérodote et par Strabon. Sur les bords de ce lac, qui jadis s'appelait Gygaea limné1, s'éle- vait un temple d'une grande célébrité consacré à Artémis Coloéné. La manière dont Strabon 2 nous parle de cette divinité l'ait voir clairement com- bien son culte devait avoir d'importance, et M. E. Millier a prouvé, dans le Philoloçjus 5, que le lac de Coloé était le centre de toutes les traditions mythologiques appartenant en propre à la Lydie. Cela étant, on se résoudra difficilement à admettre que, si nous rencontrons le nom de Coloé aux deux extrémités de la Lydie et nulle part ailleurs , cette similitude de noms soit un pur effet du hasard. Je crois qu'on peut s'en rendre compte et l'expliquer de la manière suivante. Jadis la plus grande partie de la Lydie était appelée Maeonia. Homère, en parlant des Méoniens qui sont nés au pied du T moins {imo T^Qm yeyaùvas), nous dit qu'ils étaient commandés à la guerre de Troie par les fils de Pylé- ménès et du lac Gygée (vu Y-oyâ* vhs fcp»)*. Plus tard, lorsque le peuple lydien se fut rendu maître de presque toute celle contrée, le nom de Maeonia fut réservé exclusivement à la portion de territoire appelée aussi K«t«!esxaupi»j. Il me paraît résulter de ce fait que les habitants primitifs, ex- pulsés des environs de Sardes et du Tmolus, réussirent à se maintenir, du moins en partie, à l'entour des volcans qui avoisinent la Pbrygie. Il est, en outre, probable et conforme à ce qui se pratiquait habituellement dans l'an- tiquité s que ces Méoniens orientaux auront conservé avec soin leurs ancien- nes traditions, et s'il est vrai, comme on me l'a assuré à Roula, qu'il existe, à quelque distance de cette ville, un lac d'une certaine étendue, il est fort possible qu'on lui ait donné le nom de Coloé, pour rappeler le grand lac de la mère patrie, et qu'à ce lac aussi se soit rattaché le cube de la bine vénérée sous le nom d'Artémis Coloéné. 1 Voyez Hom., //., II, v. SGo-867. J Geogr., 1. 13, 026. 3 Année 1852, pp. 259-254. * IL, l. I. 5 Voyez Welcker, Griechische Goetterlehre , p. 16. 18 INSCRIPTIONS GRECQUES J'ai insisté plus haut sur ce fait, démontré par les inscriptions, que la lune était adorée à Coloé sous une foule de noms différents. Cette circonstance me parait être une preuve de plus en faveur de mon hypothèse relative à l'ori- gine de Coloé. Nous n'y trouvons pas, il est vrai, "A/>tsu<ç KoXctjw), mais celte lacune est peut-être tout à fait accidentelle; d'ailleurs, en admettant même que son culte n'y existât pas au premier siècle de l'ère chrétienne, rien ne serait plus simple que de supposer qu'il y fut remplacé peu à peu par celui de Lunus ou de M*jv. Cette transformation s'expliquerait, en effet, très-faci- lement par le voisinage des cultes phrygiens. J'ai dit précédemment que je ne prétendais nullement nier l'identité de Méonie et de Mennéh. Je vais maintenant plus loin et je crois pouvoir sou- tenir que celte identification est d'autant plus plausible, (pie nous pouvons désormais- substituer Coloé à Roula. De même que, dans la plaine de Sardes, nous trouvons le lac Coloé et le culte de la lune à quelque distance de l'an- cienne capitale des Méoniens, de même, dans le voisinage des volcans qui dominent la Catacécaumené, nous retrouvons une nouvelle Méonie et quel- ques lieues plus loin un nouveau Coloé. Je ne sais ce qui a déterminé M. Riepert à placer dans son Atlas de PHellade (pi. 19) la ville de Méonie sur la grande route royale qui unissait jadis la Lydie à l'Assyrie. La décadence complète de Méonie et l'accroisse- ment considérable de Coloé me porteraient à croire que c'est plutôt cette der- nière localité qui se trouvait dans le voisinage immédiat de la grande route assyrienne. Roula est actuellement un des principaux centres pour la fabrica- tion des tapis dits de Smyrne. Or nous savons que les tapis de pied n'étaient tissés nulle part plus magnifiquement qu'à Bab\lone, et que de là ces lapis étaient exportés en très-grande quantité dans les parties occidentales de l'Asie '. Nous savons, en outre, par le témoignage d'Homère3, (pie, dès les temps les plus anciens, les Méoniens étaient réputés pour leurs procédés de teinture et que, dans la ville de Troie, on fabriquait des étoffes en couleur d'une beauté remarquable3. 11 ne serait donc nullement étonnant que les Méoniens établis 1 Voyez Heeren, Idées, etc., (mil. franc., i. II, pp. "233 et suiv. a Iliad., IV, 141. ~° Ibid., VI, 2'.IO ei suiv., XXIII, 7i0 et suiv. RECUEILLIES EN ASIE MINEURE. 19 à l'orient de la Lvdie eussent tâché d'introduire chez eux la fabrication de J ces tapis que leur fournissait le commerce bah) Ionien. Maintenant, si la ville de Coloé était située sur la grande route royale, on comprend facilement comment, dans cette localité, dut se concentrer peu à peu la fabrication et l'exportation des tapis, dits de Smyrne. Des considérations d'une nature ana- logue expliquent l'importance de la ville d'Ushak. IL AfaxT/jaiov Taria ïlxniav tîv satoT»j[ç] txvdox, Tei[j.o-i<.p lia , dont j'ai parlé plus haut , correspond à l'an 175 après J. C. Le 7 du mois d'Audnaeus est, d'après Ideler2, le premier décembre. Le nom de ce mois est habituellement remplacé, dans les manuscrits, par celui d'/lw- dunaeus; mais comme, jusqu'à présent, on n'a rencontré cette forme dans aucune des inscriptions, d'ailleurs assez nombreuses, où ce mois se trouve signalé, il faut en conclure qu'elle est inexacte. III. Devant la même mosquée Esky-Djamé, sur une pierre assez fruste, on lit les mots suivants: Aû[jo]>j'Xt[o]s ' ApTcpifo)f,o; o àpyj.axpoc, y.où UpViâv- t/jç eidpU3a.ro « Aurélius Artémidore, médecin en chef et hiérophante, s'est érigé (ce monument). » On sait que, depuis les temps les plus reculés, les médecins avaient habi- tuellement, en Grèce, un caractère sacerdotal. Les médecins les plus renom- més étaient des prêtres attachés au culte d'Esculape, comme, par exemple, ceux d'Épidaure et de Cos. Pendant des siècles, l'exercice de leur art ne fut que fort imparfaitement contrôlé par l'État 4. Cette situation dura jusque sous les premiers empereurs romains. Ce n'est qu'alors que le gouvernement im- périal , qui paraît s'être imposé la mission de mettre de l'ordre dans toutes les branches de l'activité humaine, organisa aussi d'une manière durable le service médical et créa l'institution des médecins de l'État , qui devaient passer 1 Voyez Frantz, Elément a epigraphices yraecue, p. 551. - ffand. d. Claonol., I, p. 419. r> Voyez pi. A, n° III. 1 Vovez Hermann, Griech. Alterth., III, p. 195. RECUEILLIES EN ASIE MINEURE. 21 un examen et s'appelaient archiatri. Ces médecins en chef, distribués dans toute l'étendue de l'empire , recevaient des appointements et avaient l'obli- gation de traiter gratuitement, certaines catégories de malades et d'inspecter les médecins ordinaires. C'est dans celte classe cpie nous devrons ranger Aurélius Artémidore. Sou prénom d'Aurélius paraît indiquer qu'il n'est pas antérieur au siècle des Antonins '. En tout cas, on ne peut pas le faire remonter au delà de Néron, qui fut le créateur de l'organisation médicale sous l'empire. Ce qu'il y a de remarquable dans notre inscription, c'est que le médecin Artémidore y porte aussi le litre d'hiérophante. Je crois que cette circon- stance nous autorise à conclure que les médecins, même du temps de l'em- pire, ne cessèrent de conserver en partie leur ancien caractère sacerdotal. Il est probable que beaucoup d'entre eux étaient encore toujours considères comme des Asclépiades. Il était donc naturel qu'ils fissent en commun des sacrifices à Esculape, et qu'à la tête de leur collège se trouvât Varchiatrus , qui occupait ainsi en même temps les fonctions d'hiérophante. Parmi les mé- dailles de la ville d'Acmonie, il s'en trouve une2 sur le revers de laquelle on voit Esculape, tandis que l'exergue porte les mots suivants : 'Ay.^ovémv Qeéfozoc lspoyxvTï>ç. On peut supposer, sans trop de témérité, que ce Théodote était médecin ou serviteur d'Esculape, et qu'à cause de cela même, il portait le titre d'hiérophante. J'ai traduit le mot etâpbacm par s'est érigé et non par a érigé, parce que rien ne nous autorise à admettre que la forme moyenne ne conserve pas ici toute sa valeur. — Maintenant quel est le monument que s'est érigé le médecin en chef Artémidore? Ce ne peut être qu'une statue ou un monument funéraire. Or l'érection d'une statue était un honneur qu'on ne pouvait naturellement pas se décer- ner soi-même. Conséquemment, s'il avait existé un décret ou une décision quelconque autorisant ou engageant Artémidore à se faire élever une statue , celte décision serait à coup sûr mentionnée dans l'inscription. Comme il n'en 1 Voyez sur ce point la fin de !a note de M. Bôckh, relative au n° 3420 du Corp. inse. graec. 2 Voyez Mionnet, Descr. des méd., etc., t. IV, p. 196, n» 6. 22 INSCRIPTIONS GRECQUES esl pas ainsi, on ne peut songer raisonnablement qu'à un monument funé- raire qu'Artémidore se sera fait construire de son vivant. Toutefois il convient de faire observer que parmi toutes les formules de ce genre recueillies par Frantz, dans ses Elementa epigraphices graecae (p.34 1 ), il n'en est aucune qui renferme le mot eiàpixsaxo, ou, pour parler plus cor- rectement , Idpùaazo. IV. Le monument suivant se trouve à Roula, dans la cour d'une maison par- ticulière, habitée par un Grec. Au-dessous d'un bas-relief qui représente un jeune homme à cheval, on lit l'inscription que voici : Etouç j&, p|V/yà;] Tmpfiepvod- ov x , M'/jvoyâç D.ÙYMVGÇ Y.ct.1 TaTt'aç éze.i.p.rftcxu [Asù]- y.to'j TGV £c«;t[w]!' ùiov r,p'j)[a\. Xoùpe 1 . « En l'année 209, le 20 du mois d'Hvperbertaeus, Ménogas (fds) de » Glvcon, etTatias, honorèrent leur fils [Lujcius, décédé. Adieu.» Pour ce qui concerne la figure de cavalier dont cette inscription est sur- montée, il suffira de rappeler que le cheval est un attribut qu'on rencontre dans un très-grand nombre de monuments figurés, mais sur la signification duquel les maîtres de la science n'ont pas encore pu se mettre d'accord. Ainsi, tandis que Raoul-Rochette et M. Ph. Lebas y voient la représen- tation du cheval de la Mort, Lelronne et M. Welcker2 prétendent que c'est l'indication du titre de chevalier que portail le défunt ou son père. Si , comme je suis porté à le croire, cette dernière manière de voir est exacte, Ménogas appartenait à une des premières familles de Coloé, et son père, Glvcon, était * Voyez pi. 15, n° IV. 2 Al h' Denkmàler, II, pp. 253 et suiv. ; 257. 2GI et suiv. RECUEILLIES EN ASIE MINEURE. 25 probablement le stéphanéphore de l'inscription I, ainsi que cela résulte du rapprochement des dates 185 et 209. Le nom de Ménogas est fort naturel dans une ville où le culte du dieu Mén avait une si grande importance. Aussi trouvons-nous les noms de Mrpoy&k et de M^s'Jbïoç dans deux autres inscriptions de Koula1. La forme abrégée My/voyâç au lieu de Myji/oyéwjç2 est analogue à celles de Nnwptç, de Aiepës5, de A>5(x2a5âç4 et surtout de 'Eppoyâç 5. Taviac, est un nom de femme, ainsi que le démontre la teneur de l'inscrip- tion. La terminaison ««? (accusatif <«/), comme signe d'un nominatif féminin, est assurément fort étrange; néanmoins, il ne faut pas y voir une erreur de graveur. En effet, on rencontre une terminaison analogue dans une inscrip- tion d'Aezani 6, et à propos de cette forme, Frantz rappelle les noms féminins "Amoiç, Tvyrts, Tv/i/Ms, Zutooi'ç 7. Il aurait pu y ajouter les nominatifs Tari«?8 et AuyJ.y.ç, . C'est pour ne pas avoir tenu compte de cette forme , qui désormais ne peut plus être révoquée en doute, que M. Bockh a mal interprété l'inscrip- tion 3446 (C. I. G.), où il a pris le nominatif 'Anpos pour un génitif. Dans l'inscription 3447, Taxiez est très-probablement aussi un nominatif et non un génitif, comme le pense M. Bockh. Dans la troisième ligne, j'ai écrit Aowww, parce que ce nom se trouve dans l'inscription de Koula, n° 3438, et que les lettres A et û, marquées comme douteuses dans ma copie, peuvent très-facilement avoir été confondues par moi avec un A et un 0. 1 Corp. inscr. graec, n°s 5441 et 54-45. ï Ibid., n° 3827 x. s Ibid., n° 3827 bb. 1 Ibid., ii" 3846 r. s Ibid., n° 3865 o. ''• Corp. inscr. graec, n" 3836 ». Nai/«« [ï]«utjj. 7 Corp. inscr. graec, vol. II, p. 1086. 8 Ce nom se trouve déjà dans le Corp. inscr. graec, aux nos 3827 y, 3827 «a (Tara; vû»^) et 3857 t. Frantz écrit Tariàç avec l'accent sur la dernière syllabe, ce qui me paraît contraire à toute analogie, attendu qu'on ne rencontre nulle part l'accusatif Tantôt. 9 Corp. inscr. graec, n° 3445 6. La même forme se trouve encore dans une inscription iné- dite d'Ushak que je publierai plus tard. Tome XXX. S 24 INSCRIPTIONS GRECQUES La date de 209 correspond à Tannée 125 de l'ère chrétienne; le mois d'Hyperbertaeus comprend, d'après M. Idcler, la fin du mois d'août (depuis le 24) et le commencement de septembre. Ce monument se trouve dans la même maison que le précédent. Au-des- sous d'un bas-relief qui représente un homme ayant à ses côtés deux figures de femme plus petites que le personnage du milieu, on lil l'inscription sui- vante 1 : ~Nuy.Yi]l/9ç) Top- ( maiou) m , Yoé.oç, (A Voyez ibid., n» 3865 k. RECUEILLIES EN ASIE MINEURE. 55 XII. Le monument suivant se trouve dans une maison particulière habitée par un Grec. Ezo'jç aotx ftjVjvèçj [$]auTrii/a YLpuoyéw) T«[v] TMZépa., v.cà FXûkuv b y■ Entre la deuxième et la troisième ligne de ce monument , on voit un bas- relief représentant une femme voilée, assise dans un fauteuil et devant la- quelle un homme se tient debout. Ceci nous prouve qu'il ne faut pas considérer comme absolue la règle établie par Millier2, d'après laquelle, dans les bas- reliefs funéraires, où la mort est figurée sous la forme d'un adieu, le person- nage assis est le défunt et l'autre le survivant. Évidemment la personne qui se tient debout est ici Hermogène. Le 2 qui se trouve à la fin de la troisième ligne ne peut guère être autre chose qu'une abréviation de léfrtx 5. La dénomination de Fausline est empruntée à l'une des deux impératrices de ce nom. On trouve sur une médaille frappée à Goerdis la tète de Fausline mère *. i Voyez pi. F, n° XII. 2 Handbuch der Arehaeologie , 3me éd., p. 758. s Voyez Orelli, Inscr. lut., t. III, n° 6939. 4 Voyez Mionnet, Descr. des méd., IV, p. 41 , a0 213. 30 INSCRIPTIONS GRECQUES Dans la cinquième ligne, ré pour tw est une abréviation que nous retrou- vons à la septième ligne et qui explique pourquoi, au lieu de yau(3p6ç, notre inscription porte yctfipôç,. Les membres de la famille d'Hermogène sont énumérés dans notre mo- nument d'une manière tout à fait insolite; car la femme et le fils du défunt ne sont nommés qu'après sa fille et son gendre. L'année 261 correspond a Tan 177 après .1. C. Le mois de Panémus com- mençai! le 24 mai. INSCRIPTIONS DAKHISSAR (THYATIRE). XIII. L'inscription suivante se trouve dans la cour d'une maison particulière. J'en dois la copie à un de mes compagnons de voyage, M. le professeur Schlottmann. kycâr, tityrt. H yàoaéfiaazsç, (îouAr, ■/.où h iepùraroç d/jf-oç xrii ).a.pLTtpoZ(X~riÇ y.où ùvx- O rsYi[xordry]ç xcà p.iyljxr,z , xarà ràç iepàq àv~cypcx.(f-/.; •/.al /.axa rà tîô|avTa xoù tyq- (Biadévza ùnb roû launporj- zcu ty]ç Aai'a; i8vovi , Qjarïc- 1 0 pr/Vûv zôÀewç [ Màp/.O'A TluÏAtoa'ov ênû\y'jfj.ov\ apywTct npù'.ov /.al [ây(a«o]9é[r])j[v] '. 1 Voyez pi. F et (i. nc XIII. RECUEILLIES EN ASIE MINEURE. 37 A la bonne fortune. « Le sénat ami de César et le très-saint peuple de la ville de Thyatire, » très-illustre, très-distinguée et très-grande, — conformément aux rescrits » sacrés et à ce qui a été statué et décrété par la plus illustre nation de l'Asie, — » (ont honoré))!. Pollianus, premier archonte éponyme et(agonothète). » La date approximative de ce monument nous est fournie, si je ne me trompe , par le nom de Pollianus , qu'on rencontre cinq fois sur les médailles de Thyatire *, où il porte constamment le titre de stratège. Deux de ces mé- dailles remontent au règne d'Alexandre Sévère, deux autres sont frappées à l'effigie de Julia Mammaea. Or, comme le règne d'Alexandre Sévère est com- pris entre les années 222-235 après J. C, c'est entre les mêmes limites qu'il convient de placer le monument qui nous occupe. Il est bien vrai que notre inscription, du moins dans les parties qui nous en restent, ne donne pas à Pollianus le nom de stratège; mais, comme il y est désigné sous le titre de premier archonte éponyme, rien ne s'oppose à la supposition que la dignité de stratège lui fut accordée plus tôt ou plus tard. Peut-être même remplissait-il ces deux fonctions à la fois. En effet, sur une médaille de Cilhia2, il est fait mention ft Apollonidès , stratège et archonte. La coexistence de l'archonte et du stratège, éponymes tous deux, n'a rien qui nous doive étonner, attendu que du temps de l'empire, on rencontre la même chose , par exemple , à Athènes 5. Qu'il y ait identité entre le Pollianus des médailles et celui de notre in- scription, je n'oserais pas l'affirmer d'une manière absolue ; mais cette iden- tification me paraît très -plausible, eu égard aux nombreuses médailles de Thyatire qui contiennent des noms de magistrats. Les mots «yaft? zùxn se trouvent très -fréquemment dans les inscriptions de Thyatire. Le sénat (/3cu?.ri) porte sur notre monument le titre xn est donné, en Asie, aux villes de Pergame , d'Éphèse et de Smyrne5, mais c'est notamment Éphèse qui parait avoir été la véritable capitale de la province d'Asie6. 1 Voyez Corp. inscr. graec, n° 2951. - Ibid., nos 5485, 5504 et 5505. s Oral. 58, vol. II, pp. 141, 14'< et 148(édit. de Reiske). * Voyez Beckcr-Marquardt, Handb. der Roem. Alterth., t. 111, ]>• 140. ■ Ibid., p. 159. '; Ibid. RECUEILLIES EN ASIE MINEURE. 39 D'après notre première hypothèse, c'est donc à un décret de cette ville que fait très-probablement allusion le monument de Thyatire. Mais peut-être faut -il voir plutôt dans les termes dont nous cherchons l'explication la mention d'une décision officielle prise par le maib» 'Aoiàz, c'est-à-dire par cette commission qui était chargée de l'organisation des fètc> célébrées en commun par les villes grecques de l'Asie x et dont les membres paraissent avoir porté le titre de oi M rr.c, 'kvîaç "EXVeç2. Dans cette seconde hypothèse, que je crois préférable à la première, le la^pôm-zw «fe 'kiiaz e&«s représente les Grecs de l'Asie. Le stratège Pollianus porte sur les médailles le prénom de Marcus : c'est ce qui justifie la manière dont j'ai rempli la lacune de la dixième ligne. Dans la treizième ligne, j'ai écrit (àywo)6s(r)Y](v) , parce que la dignité d'ago- nothèle paraît avoir été, à Thyatire, une espèce de charge officielle 3, et que ce supplément nous est en quelque sorte commandé par des considérations d'un ordre purement matériel qu'il serait trop long de développer. XIV L'inscription suivante a été copiée dans la maison d'un iman. Elle est gravée au-dessous de l'image d'un aigle. 0£to ùpitjxo) iuyrtv *. « Moschianus Bassianus au Dieu suprême (a consacré) cet ex-voto. » On trouve plusieurs fois sur les médailles de Thyatire le nom d'un Mos- chianus qui remplissait les fonctions de stratège du temps de Commode \ Le surnom de Bassianus parait avoir été emprunté à l'un des deux em- 1 Cf. Becker-Marquardt, ffandb.,p. 140. - II-, sont mentionnes au n° 5487 du Corp. inscr. graec. 3 Voyez Corp. inscr. graec, n° 5478 : Hjaurria» '\Tc\tedâpcu iy[a]voOért)i euttrapyri» àvêfyxev. * Voyez pi. G, n" XIV. 5 Voyez Mionnet, Descr., etc.. IV, p. 162, n05 926. 927 et 928. Tome XXX. 7 40 INSCRIPTIONS GRECQUES pereurs Caracalla et Héliogabale qui, comme on sait, portaient d'abord le même nom1. Les mots 0aj> ùpiazu semblent difficilement pouvoir s'appliquer à un dieu du paganisme, tandis qu'il n'y aurait rien d'étonnant à ce que, dans une \ille où le christianisme s'introduisit de bonne heure, on les eût employés pour désigner le Dieu des chrétiens. Néanmoins, comme l'inscription dont nous nous occupons est gravée au-dessous d'un aigle, nous sommes forcé d'y voir une désignation assez étrange, il est vrai, de Jupiter, qu'il faut rapporter probablement à cette tendance, déjà signalée plusieurs fois, du paganisme mourant de revenir peu à peu au culte d'un seul Dieu. XV. L'inscription suivante a déjà été publiée par M. Bockh, sous le n° 3487 du Corp. inscr. graec; mais comme ma copie est plus exacte que celles dont s'est servi le célèbre épigraphiste de Berlin, et comme c'est précisément le point capital que ma transcription rectifie, il me sera permis d'en remettre l'ensemble sous les yeux de l'Académie. ov -ov nepl T/)f Aai'«y 1 II est curieux d'observer dans les inscriptions comment, à l'avènement d'un nouvel empe- reur, on voit tout à coup son nom devenir presque universel. Il ne m'est pas encore dé- montré jusqu'ici que toutes les personnes portant un nom d'empereur doivent être rangées nécessairement dans la classe des affranchis. s On trouve quelquefois la dénomination de Zeùç ty/«. RECUEILLIES EN ASIE MINEURE. 41 [$)act[in> ysvéadcu ktv.a. l 10 £v[a]vy_o[ç] i>ip aùzoû [■Kp\e<7[fiei'a] [otÈjo] zrjç, A.Gtccç, zsl£a6ua[/x] [ TTy&Ôç t] à [v] kÙZ0Y*piT0ptX — IpiqyîlIfJM- [ti tco ùirjcyî^a/^i'to — E<îb££ toi? «ri Trjç Aatîz; E/Oj^ow. r[i/'JJ- 1 5 prj Ti. Klauôlou 3 Àoi/7rrau ^PXteP~ [e' mta feypapftpém , mais tw Ù7Toysy/5flfftpé/w, ce qui se rapproche davantage et de ma copie et de l'usage habituel. < Voyez Franlz, Elem. epig. gr., p. 317, et Corp. inscr. gruec, ri" 3067. i Ou même seulement deux, en tenant compte des copies consultées par M. Bockh. 3 Voyez les copies de M. Bockh. 4 Cf. Corp. inscr. graec, n° 3069, 1. 7 : » ôf éxvToiï amntyfihav xù xei/névav. 44 INSCRIPTIONS GRECQUES Lignes 14 cl 15, ma copie fournit la véritable leçon : yvâ^ Ti. KXav&ej, au lieu de êv wtvq Kkxu&ou, comme le porte le texte de M. Bôckh '. Lignes 16 et 17, au lieu de à[pyyi]v r{py]ùs, c'est-à-dire au lieu de la con- jecture de Franck, adoptée par M. Bôckh, bien que celui-ci la considère comme fort douteuse, ma copie donne encore une fois la seule leçon admis- sible : à [et] [ilov ètyjYMç,. Ligne 20, il n'y a pas de doute qu'il ne faille lire é-apyja; ou é-apysiac au lieu de 'Aaicg. Ligne 21, le mot àpiaroeç, qui paraissait douteux à M. Bôckh, est rendu certain par ma copie. Lignes 22 et 23, ma transcription porte clairement îmkp zr,ç a'xoffrfc. C'est ici le point capital de toute l'inscription, mais l'interprétation en est fort difficile. Er/ssTr] est évidemment le nom d'un impôt ou d'une contribution. Mais «le quel impôt d'un vingtième peut-il être question? Nous connaissons la vicesima haereditatium et la vicesima manumissio- num. Cette dernière, qui existait déjà en l'année 3o7 avant J. C. et qui fut prélevée plus tard dans toute l'étendue de l'empire 2, était un impôt qui ne frappait que le luxe. On conçoit difficilement que les membres du komw8 aient réclamé l'abolition ou la diminution de cet impôt en se fondant sur les malheurs de la province (eV ta àvayy.aiizà.T/1 ypsitx vfc ènapyjaç). La même observation s'applique en partie à la vicesima haereditatium. En effet, cet impôt ne frappait que les héritages de cent mille sesterces au moins, et, en outre, les plus proches parents en étaient exemptés4. D'ailleurs cette contribution n'était applicable qu'aux seuls citoyens romains5, et même, en admettant qu'il y en eût un grand nombre dans la province d'Asie, on a de la peine à comprendre comment une commission dont les membres s'ap- pelaient oi inl t7t, 'Adaç"EX>iYivc<; et qui devait naturellement veiller avant tout 1 Cf. Corp. inscr. graec, n° 3957, col. II, 1. 3 : "E&fe* roï.; Isri r?; '\alat "E//jjfl,iv yvâftv, roD àp\yvpoTafibv\ /.. t. >. J Voyez Becker-Marquardt, Handb., etc., III, 2, p. 210. " Cf. ce que j'ai dit plus haut au sujet de ce xcivôv. 4 Voyez Becker-Marquardt, /. /., III, 2, p. 195. s Bachofen, Ausgewàhlte Lekren des rômischen Civilrechts, p. 555. RECUEILLIES EN ASIE MINEURE. 45 aux intérêts des Grecs de l'Asie, aurait pu convenablement décerner des distinctions honorifiques à Claudius Amphimaque, si celui-ci s'était adjoint à une députation ayant en vue exclusivement les citoyens romains établis en Asie. On peut toutefois échapper à celte dernière difficulté, en supposant notre inscription postérieure à l'édit de Caracalla, en vertu duquel le droit de cité romaine fut attribué indistinctement à tous les habitants de l'empire '. Cette supposition qui, comme telle, n'énonce qu'une simple possibilité, acquiert un certain degré de probabilité, si l'on prend en considération le l'ail suivant. Le nom d'Amphimaque se trouve encore dans une autre inscription de Thyatire 2, où il est question de sa fille Julia Severina Stratonice. Or si c'est le môme Amphimaque que mentionnent les deux monuments3, et si, d'autre part, comme il est permis de le croire, Severina a été ainsi appelée d'après l'impératrice du même nom, c'est-à-dire d'après l'épouse d'Aurélien*, nous sommes presque nécessairement amené à conclure que l'ambassade présidée par Amphimaque est postérieure à l'édit de Caracalla. Si l'on admet celte série d'hypothèses et si l'on tient compte, en outre , de la circonstance que les formalités qui accompagnaient le payement de la vicesima haereditatium étaient parfois extrêmement vexatoires3, on com- prend qu'il se soit élevé de ce chef des plaintes et des réclamations. Quoi qu'il en soit, il se pourrait aussi que l'impôt du vingtième, mentionné dans l'inscription de Thyatire, fût non pas la vicesima haereditatium, mais une contribution indirecte, telle, par exemple, que le portwium, qui frappait indistinctement toutes les classes de citoyens. On sait en effet que le porto- rium existait en Asie sous l'empire 6 et qu'il faut comprendre sous ce nom non-seulement les droits d'entrée et de sortie prélevés dans les ports, mais, d'une manière plus générale, les droits qu'on payait sur les ponts, les grandes 1 Voyez Bachofen, /. /., p. 594. *- Corp. inscr. f/ruec, n° 3488. :' Telle est l'opinion de M. Bôckh. 4 Cf. OveUi, Inscr. lui., n° 1052. :' Cf. Bachofen, /. /., pp. 542, 547 et 394. c Beeker-Marqiiardt, I/andb., etc., III, 2, 207. 46 INSCRIPTIONS GRECQUES routes, les canaux et les fleuves'. Il est vrai que cette taxe ne s'élevait en général qu'à 2 lJi 0l9(quadragesima) et qu'elle ne s'appliquait qu'aux arti- cles commerciaux; mais en Sicile, du temps de la république, elle était de 5 °/0(vicesima)*. Il se pourrait donc qu'en Asie, la quadragesima eût été changée passagèrement en vicesima, ce qui aurait certes entravé fortement les opérations commerciales, surtout à une époque de crise. Je sais très-bien (pie tout cela est fort conjectural; mais en l'absence d'une solution claire et définitive, il faut du moins épuiser les différentes hypo- thèses qui pourraient conduire à des conclusions plus certaines. C'est pourquoi je me permettrai d'appeler encore l'attention de la classe sur le point suivant. Ne se pourrait-il pas que les mots yoB' busmm eûpecm-, au lieu de se rapporter à Amphimaque, qui se serait adjoint volontairement aux députés de l'Asie, ne fussent qu'une qualification de l'impôt du vingtième? Ce serait alors une contribution volontaire, votée, par exemple, par les mem- bres du y.olvôv pour l'érection d'Un temple ou de quelque autre construction importante, et dont le payement, dans un moment de détresse générale, serait devenu une charge particulièrement onéreuse. Lignes 23 et 24- , il faut lire ôedfyBau (à.v)a.'n«.fciv«i et non avec M. Bocfch : &&yBw. {aÙToïi Av)onx TPOOANHN XAIPE Màm Cour, ri t/es Sapants étrangers, ti>me X.U X H PLaichc h. rOYIZAAMAYAN AiOY ET El M H I EN EEIACJ) PO A El TOI TOIATAOHNTHNTN EAYTOYI Y M B IONAPIAANH E nA({) PO A ElTOZArAOHMEPOZ THNMHTEPA ETOYC TjUL^ Avl AYÀ NAl OYAAYP'[TE(j)ANOL ZC/UC I MO Y ETEIMHCEN T H N EAYTOYTYNAI KA s AYP'AlONYI AAAnPOCTO TEQHNAITHN EYTYXIAN THNEAYTHEUHTEPA Méffi.Cotw. et cLcs Sct&cLnts étrangers, tome XXX . Planche F. XII ETOYL nA n V. s IOAM hMOY ETIHH IANI AYZTI NAEPMOTENH 5 TO n ATEPAKAITAYKQN OTA BPOIKAINIKHTONAN KAI EPMOrENHITOnA TEPA XAIPE XIII ATAOH ITYXH I H(f)l AOI E BAITOIBOYAH KAI OIE POT A TOI A. H MOI THIAAMnPOTATMLKAl AIA rHMOTATHIKAIMErïITHZ KATATAI I E PAIANTI rPA^Al KAlKATATAAOZANTAKAlfH .Cour et des Sapant? étrangers, ù/rne AAA l'iamiie (> (blZOEN TAYnOTOYAAMnPOTA TOYTHIAZIAXEONOYIOYATEI w PHNDN noAEni/vi 1 nnAAiANONEnn APXONTAnPnTONKAI El H' ilih 1 1 Ces lettres sont douteuses XIV M O CX I A N O C BACC I A W///// OeCJY^ICTCJ€YXHN xv. o o ONTON- 10 TOY OIANAITPA~ AYTOYTOCJDIAOTEI MO» nEPITHNAZIAN AIMONTENEIGAIAIKA en%nxo%yc|daytoyiii El %ém Cour. et t/es Savants étrangers, tome XU ^THIAIIAITEAEIOEII/^# 15 zo •AYTOKPATOPA-tHCJOlZMA »0 TEPPA M M ENn- EAOZE TOlIEniTHIAIlAlEAAHIINniO MHTlKAAYAlOYAOYnnOYAPXIEP «EnElKAAYAlOIAMtlMAXOlA» BlONEZHKQIANEniAHnTON^E* ^NEniIHMONKAITAITHinATPIAOL EKî ENOinEHAH POKQXAEITOYPnAi ENTHANANKAlOTATHXPEIATHIEnAI* AIEAYTONEI1EAQKENTOIIAI I Z I 0» zYMnPEIBEYlANTAYnEPTHIEIKOI T HI KA©EKOYIIONAIPEIINAE£OXOA1«* ALTAeHNAlAYTOYTEIMAlENTQEni 5 I H MOTATDI H I H AT P I AOITO H a 1 EMc|x3HNAIAEKAI nPOIGYATEl PH NOYITOYAETOYfHc|D!IMATOlTO ANTITPActONINArEINOIXHHnOAII OTIKATAKOINONOIAENHALIATOYX 3o nOIOYNTAIAYTHNAMEIBEZOAl AEAOXOAITOlIEniTHIAIlAIEMIf// IINrENEIGAlKAIOTinPOrErPAnTAI^ MONOGRAPHIE DU Genre PILOBOLUS, Tode, SPECIALEMENT ETUDIE AL POINT DE VUE ANATOMIQUE ET PHYSIOLOGIQUE ; Eugène COEMANS. Mémoire présenté le 14 mai 1861.) Tome XXX. 4 INTRODUCTION. vent que trop souvent ceux qui se sont donné la noble mais laborieuse mis- sion d'approfondir les œuvres de Dieu. Une étrange confusion, nous devons l'avouer, règne encore aujourd'hui parmi les espèces de ce genre, et bien peu de phénomènes, si remarqua- bles pourtant, de la vie de ces gentilles mucorinées ont reçu une explica- tion satisfaisante. Nous n'accusons point pour cela la légèreté des anciennes observations : la faute en est plutôt aux nombreuses difficultés (pie rencontre l'observateur qui veut étudier ces fragiles productions , dont l'existence mo- mentanée et fugitive s'évanouit au moindre loucher. Et quand on considère combien d'éminents botanistes se sont trompés en écrivant sur ce genre, on serait presque tenté d'adresser aux Pilobolus le reproche des anciens poètes aux sirènes de Lucanie, d'avoir égaré tous leurs admirateurs. En 1860, j'eus le bonheur de rencontrer et de pouvoir cultiver en même temps les espèces principales de ce genre. Pour les voir de plus près , et surprendre leurs secrets, je les ai cultivées pendant quatre mois dans ma chambre de travail, je les observais là tous les jours; j'ai vu ainsi les géné- rations succéder aux générations, je les ai vues naître cent fois et mourir de même. L'élude de leur vie m'est devenue facile; et je me plais aujourd'hui à présenter à l'appréciation savante de l'Académie les résultats de ces heu- res de paisibles et chères études , moments heureux pour ceux qui en con- naissent les charmes, doux moments où le cœur se repose des fatigues de la vie, puisqu'ils faisaient dire au vénérable doyen des mycologues, au grand Fries, à la fin d'une carrière d'immenses travaux : Sub vitae meae crépus- cule» meminisse juvat , quantas voluptates fungorum studium, per quinqua- ginta et quod excurit annos continuatum, mihi paravent 1. Les Pilobolus, il est vrai, ne sont pas délicats sur le choix de leur ha- bitat : c'est sur des excréments d'animaux ou sur la vase des bourbiers qu'on les trouve comme des perles tombées d'une riche parure; mais la science ' Monographia hymenomycetum Sueciae. — Historia studii mei mycologici, p. xi. INTRODUCTION. g ennoblit tout, et la nature aussi, qui ne connaît pas nos préventions, se plaît parfois, pour nous apprendre, dirait-on, à ne rien mépriser dans son empire , à placer sur certains théâtres pour lesquels le vulgaire n'éprouverait que du dégoût, les scènes les plus pures et les plus délicates de la vie végétale. J'ai divisé ce travail en quatre parties : La première donne l'histoire du genre et résume les observations an- ciennes ; La deuxième est consacrée à l'anatomie générale des Pilobolus, dont les organes offrent peu de variations spécifiques; Dans la troisième partie, j'ai tâché de décrire les différentes phases de leur développement, et de grouper méthodiquement les observations phy- siologiques; Enfin, dans la quatrième partie, je m'occupe de la description et de la critique des espèces connues jusqu'à ce jour. Garni, le 1er mai 1861. MONOGRAPHIE m Genre PILOBOLUS, Tode ^.PECIAEEMEXT ETUDIE Al POINT DE VUE ANATOMIQUE ET PHYSIOLOGIQUE I. PARTIE HISTORIQUE. 1. C'est aux zoologues que nous devons les premières données sur les Pilobolus. Henry Baker (1744), micrographe anglais distingué, élevait des polypes d'eau douce dont il nous a laissé une intéressante histoire. Un vase rempli de limon noir de la Tamise lui servait à conserver les vers dont il nour- rissait ses favoris. Un jour il vit cette vase brillante et toute couverte de corpuscules ova- laires d'une belle transparence, dont chacun portait une espèce de petit bouton noir. Courant à son miscroscope, il reconnut dans ces êtres singu- liers une infinité de petites plantes lagéniformes, remplies d'un liquide clair 8 MONOGRAPHIE et couronnées d'une belle» boule noire, qu'il considère avec raison comme le fruit de la plante : c'étaient des Pilobolus. La description et les dessins de Baker1 ne laissent à ce sujet aucun doute; les phénomènes de la transsuda- tion et de la projection lui échappèrent cependant. La station qu'indique le zoologue de Londres me fait rapporter la première espèce trouvée au Pilo- bolus oedipus, Montagne. 2. Vingt ans plus tard (1764), le célèbre zoologue danois, F.-Otto Muller , découvrit une seconde espèce: le Pilobolus cristallinus , qu'il décrivit et figura avec beaucoup de soin ; mais l'amour du merveilleux l'égara, trop de poésie et une observation un peu légère lui firent voir dans ce frêle champignon , couvert de gouttelettes cristallines et qu'habitent par- fois de petits vers blancs, d'abord un cristal-végétal , puis une plante-animal, un merveilleux organisme , comme il dit , dans lequel les trois règnes de la nature, oubliant leurs limites, venaient se donner la main. Cette singulière découverte eut un certain retentissement dans les recueils scientifiques de l'époque2. 3. J.-A. Scopoli (1772) fit ensuite connaître son Mucor obliquus5, qui est certainement un Pilobolus. Il l'avait trouvé sur un peu de terre dans laquelle il conservait une larve de Sphinx atropos. La description qu'il en donne ne permet pas de préciser avec certitude l'espèce qu'il trouva; mais la station de provenance et la position oblique du renflement inférieur de la tige, très-fréquente chez le Pilobolus oedipus, me font croire que ce fut cette dernière espèce. Scopoli signala le premier le renflement radical, les gouttelettes cristallines et la durée éphémère de cette gentille plante. 1 Essai, sur ïhist. nul. du polype-insecte , par M. Henry Baker, de la Société royale de Lon- dres. Traduit de l'anglais par M. P. Demours, médecin à Paris; Paris, 1744. Chap. XI, pp. 522-527; pi. XXII, fig. 9 et 10. C'est à l'extrême obligeance de M. Tulasne, de l'Institut, que nous devons la communication du chapitre et des dessins de Baker qui ont rapport aux Pilobolus. "2 Berlinische Summltnig zur Beforderung der Arzneiwissenschaft , 1778. — Gazette litté- raire de Francheville, 1767. — F.-O. Muller, Kleine Schriften aus der IVatur historié, publié par Gôzc. Dessau, 1782. 3 Flora Carniolica , pars II, p. 494. DU GENRE PILOBOLUS. 9 i. Weber (1780), en faisant la flore du Holslein, trouva le Pilobolus crystallïnus , et en fil un genre nouveau sous le nom ftHydrogera*. Ce genre n'a guère été adopté que dans la Flora danica et dans la Flora germanica de Roth 2. 5. Jules Tode (1784) fit le premier du Pilobolus crystallims une élude approfondie 5, et ses observations portent un cachet de justesse qu'on cherche vainement chez la plupart des mycologues qui le suivirent. Le singulier phénomène de la projection du globule lui suggéra le nom générique de Pilobolus (mXoçj chapeau, et /3«tàw, je jette) que la plante a conservé depuis. On trouve dans sa description les premières données de l'histoire du développement de ce champignon et d'excellentes idées sur la projection du globule. Tode csl le seul des anciens botanistes qui ait figuré le Pilobolus crystallïnus avec son renflement inférieur. Quelques années plus lard (1790) il indiqua, dans ses Fungi Mecklen- burgenses *, une variété du Pilobolus crystallinus , qu'il différencie par cette courte phrase : Capsula solum hydrophorâ, aliquantum strictiori. Il y a ici évidemment erreur, cl l'auteur aura observé ses plantes après la projection , alors qu'une grosse goutte limpide vient remplacer le globule coloré. 6. Jacob Dickson (1785) décrivit en deux lignes, comme on faisait à celle époque, un Pilobolus qu'il nomme Mucor urceolatuss à cause de la forme de sa cupule. L'habitat de sa plante , sur excréments d'herbivores et la figure assez médiocre qu'il en donne, me font croire qu'elle est le Pilobolus crystallinus. 7. Jacob Bolton (1789) mentionne parmi les champignons remarqua- bles des environs d'Halifax0 le Pilobolus crystallinus, sous le même nom que Dickson. Mais il se méprend singulièrement sur la nature du globule , qu il décrit comme couvert d'abord d'une fine membrane qui crève ensuite pour montrer une masse laineuse où les spores sont attachées à des filaments 1 Primitiae Flora Holsaticae, p. 110. i Flora germanica, I, p. 557. 3 Beschreibung des Hutwerfer, in Schrifïen der Naiurfor. Berlin, Gesell., pars V, p. 40 , tait. I . 4 Fungi Mecklenburgenses selecti, p. 41. 5 Fasciculus plant, crypt. Britanniae, I, p. 25. 0 Hystory of Fimguses. Traduction de Willdenow (1795), vol. 111, p. 08, lab. 133. Tome XXX. 2 10 MONOGRAPHIE comme chez les lyeopèrdonàcées. Nous croyons que Bollun aura examiné des sporanges séjournant à terre depuis quelques jours, où ils sont souvent envahis par des parasites divers. A côté de cette première espèce, Bolton place encore le Mucor roridus ' [Pilobolus roridus, Pers.), espèce très- problématique et qui demande de nouvelles recherches. La description et les figures de Bolton ont été repro- duites par Relham2, ainsi que dans l'Encyclopédie de Loudon 5. 8. Un des continuateurs du bel ouvrage d'Oeder, Martes Vahl(1792), fit peindre, pour la Flora dattica, le Pilobolus crystallinus (H ydroyera crys- tallina4); mais celle figure ne répond pas à la réputation d'exactitude et de ressemblance dont jouit cette flore. 9. Le Pilobolus crystallinus n'était pas encore connu en France; Bulliakd (1790-1809) le peignit dans ses Champignons de France'6. Sa planche représente bien le port de la plante, sauf les figures B et C; mais il se trompe entièrement sur l'origine des gouttelettes cristallines, sur la nature du glo- bule, qui n'est pas un sporange pour lui, ainsi que sur le phénomène de la projection, qu'il ne soupçonne même point. 10. Persoon ( 1796), excellent observateur, étudia la même plante dans ses Observationes mycologicae 6. 11 expose et décrit très-bien les formes variées et les différentes couleurs que cette gentille mucorinée prend en se dévelop- pant; mais son explication du mécanisme de la projection n'est pas heureuse7. 11 remarqua le premier que les gouttelettes cristallines qui ornent ce petit champignon, proviennent du liquide intérieur; ce fut lui aussi qui plaça le Mucor roridus de Bolton parmi les Pilobolus 8. Les figures de Persoon, assez médiocres, au reste, ont été reproduites par Nées von Esenbeck , Henry et Chevalier. il. Schumacher (1801), dans son Énumération des plantes de l'île de 1 Bolton, Le, n' 1(>8, tab. 132. 2 Flora Cantabrig., p. 122, fig. 4. 3 Loudon' s Encyclopédie of plants, p. 1024, gen. 2418. 4 Flora danica, tom. VI, fig. 1080. « Tom.ï, p. 111, tab. 480, fig. I. 6 Observationes mycologicae , pars I, p. 76, tab. IV, fig. 9-11. 7 Loc. cil. et Traité sur les Champignons comestibles. Paris. 1818, p. 113. 8 Synopsis methodica Fungorum ; pars I, pp. 1 17-1 18. DU GENRE PILOBOLUS. H Seeland l, ne fournit de nouveau pour l'histoire des Pilobolus que son ex- plication de la projection du globule. Selon lui, le phénomène est produit par une vésicule diaphane, cachée dans la cupule cl faisant l'effet d'un ressort qui, sortant brusquement, chasse devant lui le globule noirâtre. Bisschoft"2 et M. Léveillé3 ont partagé plus tard cette manière de voir; nous y revien- drons, quand nous aurons à discuter les différentes opinions émises sur cette décapitation singulière. 12. Link (1809), qui s'occupa beaucoup des champignons inférieurs, de- vait expliquer à son tour ce mode de dissémination qui avait tant intrigué ses devanciers. 11 admet4, pour expliquer le phénomène, une véritable explo- sion, occasionnée par une contraction subite de la cupule. Nous verrons que cette théorie se rapproche assez de la vérité. 13. Nées von Esenbeck. (senior) (4816), publiant une classification géné- rale des champignons 5, plaça les Pilobolus parmi les mucorinées et donna du P. crystalUnus une série de figures qui laissent beaucoup à désirer. F.-L. von Esenbeck et Henry reprirent ces mêmes figures dans leur System der Pilze (1837)«. 14. Elias Fries(1822), le père de la mycologie moderne, devait néces- sairement s'occuper des Pilobolus. Il les plaça d'abord 7, à l'exemple de Persoon et de Schumacher, parmi ses gasteromyces , angiogastres , cafpo- boles; l'analogie le portait à les réunir aux Sphaerobolus et aux Thelobolus, et il avait cru leur reconnaître au jeune âge une double enveloppe (in statu juniori evidenter contexti). Mais plus tard , il reconnut son erreur et les classa parmi les mucorinées (1829) 8, place qu'il leur conserva dans sa Summa vegetabilium Scandinaviae (1849) 9. 1 Enumeratio plantarum in Saelandia, II, pp. 18S-18'.). - Handbuch der Bot. Termin, vol. II, p. 1012. 5 Mém. de la Société Linnéenne de Paris, t. IV, p. 622. 1 Observationes in ordin. Plant, natnr., in Abhand. der Berlin. Naiurfor. Gesell., ann. III. pars IV. 5 System, der Pilze und Schwamme , p. 83, fig. 81. 6 System, der Pilze. Bonn, I Abtheil, p. 52, lab. V. ^ Sijst. myc, vol. II, p. 308. s IL, vol. III, p. 312. 9 Su m. veg. Scand., pars II, p. 478. 12 MONOGRAPHIE 15. En 1826, lePilobolus cryslallinus fixa l'attention de plusieurs bota- nistes français. M. Durieu de Maisonneuve, dans une courte notice, s'occupa spécialement de son développement1. En parlant du globule, M. Durieu avait dit que le Sclerotium sterçorarium, que Ton trouve dans la bouse de vache, pour- rail bien n'être que le sporange du Pilobolus, observé après la projection. M. Desmazières releva vivement cette erreur, et prouva l'autonomie de cette sclérote 2. La même année, M. le docteur Léveillé, qui a rendu tant de services à la mycologie, publia un mémoire sur le genre entier5. Mais l'illustre mycologue ne fut point heureux dans ce travail. Il y considère, entre autres, le sporange comme un simple opercule, se méprend sur la cause delà projection, et prend pour le Pilobolus roridus 4 une simple forme grèle du Pilobolus cryslallinus. BisschoIF, en copiant les planches de M. Léveillé, a reproduit cette erreur. 16. Les Pilobolus cryslallinus et roridus étaient jusqu'alors les seules espèces reçues, Camille Montagne (1828) en créa une troisième, dans les Bulletins de la Société Linnéenne de Lyon6, et lui imposa le nom cYOedipus, à cause du renflement inférieur de la tige qu'il croyait exclusivement propre à cette espèce. Quoique ce caractère soit commun à toutes celles du genre, le Pilobolus oedipus représente cependant une véritable espèce, s'éloignant du P. crys- lallinus par la nature de ses spores et un port massif et trapu. Celte espèce semble ne pas avoir été reçue ou connue par les mycologues modernes; mais Camille Montagne, qui avait foi en son espèce, la conserva néanmoins dans son Sylloge (1856) 7, et son autonomie est incontestable au- jourd'hui. 1 Notice sur le Pilobolus crystalu.nus, A un. Scienc. nul., t. IX, p. 221. 2 Sur le Pilobolus crystallinus et le Sclerotium sterçorarium, par M. Desmazières. Ânn. Scieur, mit., 1827, p. 145. 3 Mém. de la Soc. Linn. de Paris., tom. IV, p. G22, tal>. XX. 1 Loe. cit., [i. 632, tab.XX, fig. 1-0. 3 Handb. der Bot. Termin., vol. II, fig. 5725. 0 Mémoire sur le genre Pilobole et sur une nouvelle espèce, Mém. de la Soc. Linn. de Lyon . pp. 1-7, cuin icône. 7 C. Montagne, Syllogc gen. et spec. cryptogamarum , p. 299. DU GENRE PILOBOLUS. 15 La même année (1828), M. H. Gachet publia une courte notice sur le P. crystallimis '. Il y signale à l'attention des botanistes la présence d'un anneau jaunâtre placé sous la cupule, et l'apparition irrégulière de vésicules secondaires dans le voisinage du globule. Ces prétendues vésicules ne sont (pie des gouttes de liquide cristallin, qui viennent remplacer le sporange ou lui adhèrent de différentes manières. 17. Corda (1837-1854.), dans son grand ouvrage iconograpbiquesurles champignons2, créa pour notre genre une famille nouvelle, celle des pilobo- lées, en lui associant les genres Chordostylum , Todc, et Coloyasler, Corda. Rapprochement malheureux et fondé certainement sur une connaissance im- parfaite des plantes qu'il réunissait ainsi. Dans son Introduction à l'étude de la mycologie3 (1842), Corda ne fit (pie reproduire, sans y apporter de changement, les descriptions de ses Icônes. Quelques années après la mort malheureuse du mycologue de Prague, le docteur Zobel, publia (1834) le tome VI de ses Icônes. Nous y trouvons une longue description et de nombreuses figures du Pilobolus crystallimis *. Au milieu d'excellentes remarques et de bonnes observations, on est étonné de trouver bien des erreurs. Ainsi on conçoit difficilement comment Corda a pu voir la tige de ses plantes se terminant en un pinceau de filaments radicellaires 5 et le globule se rompant, à la façon des gastéromyces, à la partie supérieure; comment il a trouvé le sporange formé tout d'une pièce et couvert de verrues. Le prétendu réseau jaunâtre6, qui revêt, selon lui, l'in- térieur de la plante, n'est encore' qu'un effet de la pression excessive à la- quelle Corda soumettait d'ordinaire ses préparations microscopiques. Corda n'a pas recherché la cause de la projection du globule; mais ce qui nous intéresse davantage, c'est une nouvelle espèce qu'il décrivit d'abord sous le nom de Pilobolus lentigerus 7, puis sous celui de Pycnopodium lentige- 1 Note sur le Pilobolus crystai.linus, Bull, de la Soc. Liiut de Bordeaux, lom. II , pp. 159-100. 2 Icônes Fungorum., tom. I, p. 22, tab VI, fig. 286, et lom. V, p. IS. 3 Anleitung zum studium der Mycologie, pp. 71-72, tab. C, fig. 2"j. 1 Icônes Fungorum, tom. VI, 1854, edidit Zobel, lab. Il, fig. 52. 5 Anleitung, tab. C, icon. 25, fig. I. 6 Icon. Fung., tom. VI, tab. II, icon. 52, fig. 12. 7 /&., tom. I, p. 22. i i MONOGRAPHIE rumi. Je ne crois pas à l'autonomie de celte espèce, qui n'est qu'une forme maladive du Pilobolus oedipus , comme je l'expliquerai plus au long dans la quatrième partie de ce travail. La famille des pilobolées, créée par Corda , a été assez généralement admise jusqu'à ce jour, et 3131. Léveillé2 et Bonorden3 l'ont adoptée dans leurs classifications des champignons. 18. En 1850, le baron de Cesati découvrit, sur de la fiente de porc, aux environs de Verceil, une mucorinée qu'il prit pour un Pilobolus, et qu'il publia dans l'Herbier mycologique de Klotzscb, sous le nom de Pilobolus ano- mdlus 4. La description détaillée qui accompagne l'échantillon, les dessins de M. Cesati même et l'analyse d'échantillons authentiques m'ont convaincu que sa plante appartient plutôt au genre Ascophora. 19. Bonorden (1851) considère, comme nous l'avons déjà dit, les Pilo- bolus comme le type d'une petite famille qu'il place à la suite de ses mu- corées. Son Pilobolus crystallinus me semble, à voir la forme des spores et la figure qu'il en donne5, devoir être rapporté au Pilobolus oedipus, Montg. 20. Ferdinand Cohn (1851), aujourd'hui professeur à l'université de Breslau, donna dans les Actes des curieux de la nature de Bonn, une histoire complète du Pilobolus oedipus, qu'il prend pour le crystallinus6. C'est de loin le plus beau travail qui ait paru sur la matière. Une érudition étendue, de belles applications d'anatomie comparée et de physiologie philosophique ca- ractérisent cette monographie. Nos vues diffèrent cependant , comme on le verra dans notre partie physiologique, en plusieurs points de celles du savant professeur. 21. 31. le docteur Tu. Guigneau, secrétaire de la Société Linnéenne de Bordeaux, consacra également une note au Pilobolus crystallinus (1852- 1 Icon. Fung., tom. V, p. 18. - Considérations wycologiques , suivies d'une nouvelle classification des champignons. Paris. 1846, p. 127. (Extrait du Dict. d'Hist. nat. de d'Orbigny.) "■ Handbuch der allgemeine Mycologie (1851), p. 128. 1 Klotzscb , Herbarium vivum Mycologicum, 1851 , n° 1542, cm»; descriptione. — Hermann Hoffman, Index Myeologicus (f860) , p. 64. s Haadbuch d. allg. Mykol., p. 128, die sporen sitid rund. Tab. X. fîg. 203, 6. 6 Entwickelungsgeschichte des Pilobolus crystallinus, I\'ov. Act. Acad. C. L. C. naluraecu- riosorum. Bon., vol. XIII, pp. 493-555, tab. 51 et 52. DU GENRE PILOBOLUS. 15 1853) '. Il y constate de nouveau la réalité du phénomène de la projection, et recherche avec soin les différents habitat et les époques de provenance de ce petit champignon. Cette jolie notice ne renferme qu'une erreur, celle de ne voir dans le chapeau qu'un simple opercule, tandis qu'il est le sporange du champignon même. Vu la station de provenance sur des conferves semi- putrescentes, je crois que M. Guigneau aura rencontré le P. oedipus. 22. Théodore Bail (1855) publia aussi, dans la Bolanische Zeilung, une note intéressante sur le genre Pilobolus 2. La différence entre le Pilobolus crystattinus et le Pilobolus roridus l'occupe d'abord, et ses observations le conduisent à douter sérieusement de l'existence de cette dernière espèce. 11 parle ensuite des fameuses anguillules qu'on a voulu associer classi- quement aux Pilobolus, et prouve que leur présence sur ces petits champi- gnons n'est qu'accidentelle, ce que M. Léveillé avait déjà reconnu. 23. Frédéric Currey (1857) décrivit en dernier lieu, dans le Journal (If- la Société Linnéenne de Londres , une espèce du genre Pilobolus trouvée sui- des bouses de vache 3. C'est un joli travail plein d'observations exactes; mais l'auteur prenant pour type du Pilobolus cryslallinus l'espèce étudiée par AI. Cohn, s'est mépris en rapportant son espèce au Pilobolus roridus, tandis qu'elle n'est que le Pilobolus crystattinus de Tode. 24. Enfin j'écrivis, en 1859, une notice sur le Pilobolus cryslallinus, à la- quelle l'Académie voulut bien accorder les honneurs de l'impression *. Ce travail incomplet se bornait à étudier l'anatomie et à esquisser les principaux phénomènes de la vie de cette gentille mucorinée. Nous osons espérer que la Monographie qui nous a occupé l'automne dernier, répondra mieux à l'at- tente des mycologues. 1 Actes de la Société Linnéenne de Bordeaux , t. XVIII, 3"jc livr. 2 Botanische Zeitung von Mohl ti. Schlechtendal ; 1835.— Mgkologisclw. Berichte von 1) Th. Bail., pp. G29-655. 3 Journal of the proceedings of the Linnean Society. London, vol. I, n° 4, p. 162, tab. 11. 4 Eugène Coemans, Notice sur le Pilobolus crystallinus , Bull, de l'Acad. royale de Bel- gique, 1850, t. VIII, p. 770, fig. 1-16. 16 MONOGRAPHIE II. PARTIE ANATOM10UE. Puisque nous nous proposons d'étudier la vie des Pilobolus dans un eha- pitre spécial, bornons-nous ici, pour faire connaître leur structure analo- mique, à examiner la plante adulte et parvenue à son entier développement. La plante présente alors trois parties distinctes , savoir : A. Le rhizome radicellaire , B. La tige ou cellule fructifère et C. Le globule ou sporange. A. Examinons d'abord le rhizome badicellaire (pi. I, fig. 9 et 10). Cet organe, plongé dans la bouse de vache chez le Pilobolus crystaliinus, ou cacbé dans la vase cbez le Pilobolus oedipus, n'est pas une racine pro- prement dite, telle qu'on l'entend strictement en pbylologic; la racine, ici comme cbez toutes les mucorinées que j'ai eu l'occasion d'étudier, joue simul- tanément un double rôle : celui de tige souterraine et celui de racine nour- ricière; car, en effet, si, d'une part, elle fixe le végétal et lui apporte ses éléments nourriciers, de l'autre aussi, elle abonde en renflements divers, véritables bourgeons ayant la même valeur physiologique que ceux de l'axe ascendant des végétaux supérieurs. Cette partie souterraine, ayant souvent plusieurs pouces d'étendue, forme un vaste réseau de filaments mycéliens de formes variables et d'une irrégu- larité caractéristique. La dissémination des spores exigeant , chez les Pilobolus, une dépense de liquide toute particulière, un système absorbant puissant et étendu devenait nécessaire. Comme chez la plupart des mucédinées, les gros stolons, qui produisent DU GENRE P1L0B0LUS. 17 les cellules fructifères, se ramifient, généralement d'une manière dichoto- mique, en canaux plus grêles, qui se terminent à leur tour en radicelles à extrémités obtuses. Ces dernières sont les véritables racines, les organes absorbants; plus tard cependant, elles s'allongent et deviennent de simples canaux vecteurs. La position des stolons est ordinairement horizontale et leur direction rayonnante. Pour la forme, on rencontre deux types : le plus souvent, de longs stolons rameux et bizarrement contournés (pi. I, fig. 9 a), d'autres fois, surtout chez les vieilles plantes, des bouquets de tubes courts en forme de ressacs arrondis (pi. I, fig. 10) rappelant assez bien la structure des Caulerpa. Tous ces stolons sont creux et communiquent librement entre eux; les cloisons, assez rares, ne se trouvent généralement que dans des radicelles de faibles dimensions. (PI. I, fig. 9 b.) Un protoplasma jaunâtre et d'autant plus coloré qu'il se trouve plus rapproché des cellules fructifères, remplit et vivifie tout ce système; les radicelles extrêmes charrient un liquide plus clair et non élaboré. On se tromperait en croyant qu'un même rhizome ne produit en même temps qu'une seule cellule fructifère; une seule plante peut en émettre un grand nombre à la fois (pi. I , fig. 6), quelquefois une cinquantaine, comme on peut s'en assurer en débarrassant , par des lavages successifs , la plante de son sol nourricier. L'endroit où un stolon se change en cellule fructifère est caractérisé par un évasement ou dilatation en forme d'entonnoir, (pie j'ai nommé primitive- ment ' cellule conique, quoiqu'il ne constitue pas une véritable cellule dis- tincte. (PI. I, fig. 6 a.) B. La tige ou cellule fructifère (pi. I, fig. 7 et- 8; pi. II, fig. 7) est tou- jours simple, sauf quelques cas de ramification anormale (pi. II, fig. 5 el 20), et se compose : L" Du renflement inférieur placé verticalement (pi. I, fig. 7 et 8«) ou obliquement (pi. II, fig. 7 a) sur la cellule conique du rhizome, 2° De la tigelle (pi. I et II, fig. 7 b), tube creux, grêle, court ou très- ailongé, droit ou flexueux et 1 Notice sur le Pilobolus crystai.linus. p. 9. Tome XXX. 3 18 MONOGRAPHIE 3° De la cupule ou renflement supérieur (pi. I et II, fig. 7 c). Cette tige est pleine d'un liquide cristallin, légèrement visqueux, qui la ballonne fortement, comme on peut s'en convaincre en la pressant doucement avec des pinces légères. Ce liquide est acide, au moins avant la projection du globule, et rougit le papier de tournesol ; mais je n'ai pu déterminer la nature de l'acide , vu la difficulté, pour ne pas dire l'impossibilité de s'en procurer des quantités suffisantes. Il me parait trop énergique pour être l'acide carbonique ; peut- être est-ce l'acide malique, qu'on trouve dans les gouttelettes que laisse suinter le Cicer arielinum; ou bien l'acide formique, dont je n'ai cependant pas reconnu la saveur caractéristique. Cette tige est incolore, claire, transparente, cristalline, quoique souvent un peu lavée de jaune pâle, dû à des restants de matières plasmatiques qui la revêtent à l'intérieur. Jamais cependant je n'ai observé ces bandes ou dessins rétiformes que mentionne et figure Corda ' : on peut les obtenir arti- ficiellement en écrasant la plante sous le compresseur. L'étude de la membrane cellulaire qui forme cette tige est extrêmement intéressante, et j'ai cru devoir lui donner une attention spéciale. Elle est double dans toute l'étendue de la plante, c'est-à-dire qu'on peut facilement la dédoubler par voie de macération ou par l'emploi de divers réactifs chi- miques. L'acide nitrique à froid ou le chlorure de zinc iodé sont ici du meilleur emploi. Sous leur action , on voit la paroi cellulaire se séparer en deux membranes bien distinctes. c. La membrane extérieure (pi. II, fig. 8 /S), incolore, tenace, élastique, par- faitement transparente, sans texture appréciable, se compose d'une variété de cellulose très-analogue à celle de la gaine cellulaire de plusieurs algues [Chor- daria scorpioïdes, Fucus vesiculosus, serralus, etc., etc.) et se teint en rose ou en pourpre pâle par le chlorure de zinc iodé. (PI. I, fig. 1 1 a.) La constitution chimique de celle membrane n'est pas la mémo à tous les moments de sa vie , comme le prouve la diversité des teintes que lui donnent le chlorure de zinc- iodé ou le sucre et l'acide sulfurique. Ses deux faces sont aussi inégalement sensibles aux réactifs chimiques, surtout à l'iode; c'est ainsi que, plongeant 1 lcon. Fung., tom. VI. tab. II, icon. 32, fig. 12. DU GENRE P1L0B0LUS. 19 clans cette teinture une cellule fructifère, on a peu ou point de coloration, quand la surface externe seule est baignée, et, au contraire, une coloration rose plus ou moins intense, quand le liquide peut pénétrer à l'intérieur et venir mouiller la paroi interne. Un séjour prolongé du protoplasma dans le renflement inférieur de la tige 1 a pour effet d'y produire des couches d'épaississement remarquables, comme j'ai eu l'occasion de l'observer plusieurs fois. Cette partie paraît alors formée de trois membranes concentriques (pi. I, fig. H), dont les deux premières, a el b, sont de même nature et généralement intimement soudées Tune à l'autre. On peut cependant les isoler artificiellement sous le micros- cope de préparation , après quelque temps de macération dans l'acide sulfu- rique dilué ou dans le chlorure de zinc iodé , comme je l'ai fait pour la figure il de la première planche. Ces deux premières membranes, formées de cellulose, varient en épais- seur, et laissent distinguer chacune souvent deux ou trois feuillets d'épaissis- sement qui rappellent parfaitement l'organisation de l'épispore chez le genre Pertusaria. (3. La membrane interne (pi. II, fig. 8 y.) est opaque, colorée, fragile et peu résistante, finement granuleuse et de nature protéinique, comme l'ac- cuse la belle couleur rose que lui donnent le sucre et l'acide sulfurique. (PI. I, fig. 12.) Elle se contracte sensiblement sous l'influence des acides et perd en vieillissant ses principes azotés. Cette membrane n'est pas strictement simple, elle se compose d'une membranelle externe et d'une couche d'incrustation granuleuse qu'elle doit évidemment au proloplasma qu'elle a longtemps con- tenu. Cette constitution se révèle à toute évidence quand on traite cette mem- brane par l'acide sulfurique concentré ; les granules protoplasmatiques qui revêtent sa face interne se gonflent alors excessivement et se laissent facile- ment reconnaître. Je regarde cette membrane interne comme le Primor- dialschlauch de H. von Mohi, la ptychode externe de Hartig. Les genres Ascophora, Hydrophora, Mucor, Periconta, Aspergillus, Polyactis et certainement d'autres encore, se dédoublent de même sous l'ac- 1 Nous indiquerons dans notre partie physiologique les cas dans lesquels ces couches d'épais- sissement se forment. 20 MONOGRAPHIE lion des acides, et le chlorure de zinc iodé colore leur membrane externe en rose. Ces genres se prêteraient merveilleusement à des études spéciales sur la nature encore incertaine de l'utricule primordial. Le protoplasma qui remplit les jeunes cellules, et plus tard le globule, se distingue par la multiplicité des éléments qui le constituent. Ainsi on y trouve : 1° un liquide aqueux; 2° de nombreuses granules de nature azotée, mais à base de cellulose; 3° une huile abondante jaune ou jaune rougeàtre; 4" de la choléstérine ou une substance assez analogue, qui se colore en rouge acajou par l'acide sulfurique 1; 5° enfin, une matière colorante destinée à teindre plus tard l'hémisphère supérieur du globule. Cette connaissance de la consti- tution des membranes tégumentaires et des éléments du protoplasma est né- cessaire pour expliquer les réactions chimiques assez remarquables que l'on observe en soumettant la tige des Pilobolus aux agents chimiques générale- ment usités en botanique. Ainsi : L'acide sulfurique concentré dissout les tissus avec boursouflement et teint la membrane interne et le protoplasma en bleu. (PI. I, fig. 13.) Cette réaction singulière me semble inexplicable pour le moment , car je ne con- nais aucune substance qui se colore en bleu par l'acide sulfurique. La partie bleue est ordinairement entourée d'un halo rougeàtre qui accuse, si je ne me trompe, la présence de la choléstérine. L'acide nitrique isole parfaitement bien les deux membranes, sans les co- lorer, et fait passer le pourpre sale du globule au jaune rougeàtre. L'iode teint la plante tantôt en jaune pâle, tantôt en rose, surtout quand il pénètre entre les membranes. L'iode et l'acide sulfurique dilué donnent une couleur pourprée à la mem- brane externe et d'un brun rouge à la membrane interne. La potasse caustique, à froid, est sans action sensible; elle dédouble ce- pendant la membrane cellulaire. Voxyde de cuivre ammoniacal corrode lentement les deux membranes. Le chlorure de zinc iodé colore en rose ou en pourpre pâle la membrane 1 Los excréments d'herbivores , qui servent de sol au Pilobolus crystallinus, renfermant en abondance des matières biliaires, et la vase, où croissait le Pilobolus oedipus que j'ai observé, rece. tant des intestins de poisson , peuvent expliquer la présence de la choléstérine chez les Pilobolus. DU GENRE P1L0B0LUS. 21 externe, et communique une teinte verdâtre à la membrane interne, au pro- toplasma, ainsi qu'à l'endochrome des spores, en laissant subsister le jaune primitif au centre des masses. (PI. I, fig, 11.) Ce sont ici, si je ne m'abuse, des matières cellulosiques qui verdissent en passant au bleu, à cause du mé- lange inévitable de riiuile jaune qui les imprègne. Enfin le sucre avec l'acide suif urk/ue (pi. I, fig. 12) fait prendre à la mem- brane interne une belle couleur rose, plus ou moins intense selon l'âge de la plante. Ce rose passe souvent au violet et finit par disparaître ensuite, comme la plupart des colorations chimiques précédentes. La tige, considérée morphologiquement, forme un tube grêle et allongé, et régulièrement gonflé aux deux bouts. Trois cloisons la partagent : Une première cloison termine le renflement inférieur et sépare la tige du rhizome radicellaire : c'est la cloison radicale; elle est formée d'un prolonge- ment de la membrane externe, que revêt sur les deux faces le primordialsch- lauch. (PI. I, fig. 11 et 12 c;pl. II, fig. 7 et 8 a'.) La deuxième cloison ferme le renflement supérieur ou cupule et le sépare du globule; je l'ai nommée cloison sous -globulaire. (PI. II, fig. 7 et 8 a".) Comme la première cloison, elle se compose d'une membrane cellulosique, doublée inférieurement par le primordialschlauch , et supporte à sa partie su- périeure le bourrelet sporifère. Sa forme est toujours conique et son adhé- rence à la membrane externe moins forte que celle de la première cloison. La troisième cloison , que je nommerai sous-cupulaire , sépare la cupule de la tigelle proprement dite (pi. Il, fig. 7 et 8a'"); elle appartient tout entière au primordialschlauch, qui, retenant en cet endroit les restants plas- matiques accumulés au fond de la cupule, en forme une membrane molle et fragile. Frédéric Currey ' est le seul botaniste qui ait soupçonné l'existence de cette membrane; une bande jaune, très- visible à l'œil nu, indique cepen- dant toujours sa place au fond de la cupule. 1 M. Currey doute de l'existenee d'une véritable membrane; il serait plus porté à croire que cette zone jaunâtre n'est que l'effet d'une différence de nature entre deux liquides super- posés. Cette différence existe en effet, et prouve, à mon avis, la nécessité d'une membrane interposée. 22 MONOGRAPHIE Celle cloison manque quelquefois chez les plantes faibles, aussi dans celles dont la cupule, à défaut de liquide cristallin, ne s'est que peu développée. Il arrive, par contre, dans quelques cas rares, que cette cloison se double d'une membrane de cellulose et s'attache à la membrane externe; elle ne diffère alors en rien des cloisons précédentes. C. Je vais maintenant faire connaître la structure assez compliquée du globule ou sporange, dont l'anatomie avait jusqu'ici été négligée par tous les observateurs; mais avant de décrire les différentes membranes qui le for- ment, je crois devoir expliquer en deux mots pourquoi je considère la mem- brane sous-globulaire comme appartenant au globule; manière de voir qui peut paraître d'autant plus étrange que je viens de classer celte membrane parmi les cloisons qui partagent la lige. Les raisons qui me portent à la rap- porter au globule sont : 1° que celte cloison sous-globulaire ne se détache pas du globule au moment de la projection, mais suit le globule, et lui reste adhérent jusqu'à sa destruction par la germination des spores; 2° que cette cloison, quoique insérée effectivement sur la tige, forme cependant morpho- logiquement la partie inférieure du globule, où elle fait l'effet d'une fausse cohunelle autour de laquelle se trouve disposé le bourrelet sporifère. Le sporange des Pilobolus est double; deux enveloppes concentriques pro- tègent les spores. a. La membrane interne, ou sporochlaniyde (pi. II. fig. 8 d), est une pellicule fine et transparente qui enveloppe étroitement la masse des spores. C'est le primordialschlauch qui a conservé sa ténuité primitive; il est beaucoup plus mince que celui que l'on retrouve dans la tige, parce qu'il n'est revêtu d'aucune couche d'encroûtement plasmatique. La sporochlamyde n'est libre que dans sa moitié inférieure; sa partie supérieure adhère toujours, si je ne m'abuse, à la calotte colorée du globule. La présence de cette membrane interne est très-difficile à constater; je ne suis parvenu à m'assurer de son existence qu'en employant les acides les plus énergiques , et en contournant le globule sous le microscope dans les sens les plus divers. h. Le sporange externe , ou sporange proprement dit, est formé de trois membranes, unies au jeune âge, mais bien distinctes à la maturité du spo- DU GENRE P1L0B0LUS. 23 range, savoir: 1° d'une membrane supérieure, colorée, formant une calotte hémisphérique et se détachant facilement; 2° d'une membrane inférieure, incolore, de forme conique et relevée dans l'intérieur du sporange; 3° d'une membrane médiane, également incolore, particulièrement fine et transpa- rente, et réunissant les deux membranes précédentes. 1. La membrane supérieure (pi. II, fig. Se) forme un véritable hémi- sphère creux; elle est d'abord incolore et non distincte de l'enveloppe géné- rale du globule; mais, lors de la formation des spores, elle s'épaissit d'une forte couche pigmentaire qui vient s'interposer, pour autant que j*ai pu l'observer, entre cette membrane et la sporochlamyde et n'adhère plus (pie faiblement à la membrane médiane; on peut l'enlever facilement avec la pointe d'une fine aiguille, et sous le microscope la pression du verre cou- vreur suffit souvent pour la détacher. M. Currey est le seul botaniste qui ail observé cette disjonction des membranes du sporange, et Corda se trompe certainement en disant, dans le tome VI de ses Ieones : Dus peridium ist einfach. Cette membrane supérieure est de couleur violette sale, souvent si foncée qu'elle parait noire, comme les auteurs nous la décrivent communément. Chez le Pilobolus oedipus, la teinte de coloration est uniforme, mais chez le Pilobolus erystallinus, elle présente parfois de beaux dessins hexagonaux qui ont la plus grande analogie avec les cellules hexagonales de la choroïde des animaux supérieurs. Ces dessins sont d'une grande régularité; une alvéole principale occupe le centre au sommet du globule et six autres cellules par- faitement semblables se trouvent adossées aux côtés du polyèdre principal. (PI. II, fig. 12.) Ces alvéoles ont des nuances de coloration, leur centre est ordinairement pâle, et un filet non coloré ou plus pâle les sépare entre elles. J'ai remarqué des dessins semblables, mais de forme ovoïde, sur le spo- range de VAscophora Cesatii. (PI. II , fig. E.) 11 est remarquable que ces dessins ne se produisent pas régulièrement chaque année. En 1859, par un été chaud, Hs ornaient tous les globules des Pilobolus erystallinus que j'observai; en 1860, l'été étant froid et hu- mide, je ne les trouvai que très-rarement et toujours faiblement indiqués. La cause de ces variations se lie probablement à des influences de lumière et -H MONOGRAPHIE de chaleur. Remarquons aussi que l'irrégularité d'apparition de ces dessins étant constatée, ils ne peuvent avoir de valeur diagnostique. Le genre Ascophora, qui vient se placer naturellement après les Pibbolus dans la série des mucorinées, offre, comme ces derniers, un sporange par- tagé et discolore. 2. La membrane inférieure (pi. Il, fig. 8 a") appartient autant, comme nous Pavons déjà dit, à la tige qu'au globule; son point d'insertion n'est pas toujours le même: elle est attachée tantôt un peu à l'intérieur du col court de la cupide, tantôt précisément sur la ligne de jonction de la cupule et de la mbrane médiane. Celle dernière position facilite beaucoup la projection. Celle membrane n'est jamais plane; elle forme dès son apparition un cène creux, une espèce de pivot sur lequel repose le bourrelet sporifère, et celui- ci est doué à cet effet , comme Persoon l'avait déjà remarqué , d'une cavité correspondant exactement aux dimensions du support. L'anneau et les filaments sporifères dont j'ai parlé dans ma première no- lice ' n'existent pas; le premier n'était qu'un pli circulaire, qui se forme assez facilement sous la pression du verre couvreur, et j'avais pris pour des filaments de simples lanières de membrane , provenant de la rupture du sporange. Les spores n'ont aucune adhérence à celte membrane, elles en sont même sépa- rées par la sporochlamyde; une mucosité verdâtre semble cependant relier quelquefois la masse des spores à leur support. 3. La membrane médiane (pi. Il, fig. 8 /".) sert à unir en même temps la membrane supérieure à l'inférieure et le globule à la cellule fructifère : c'est ordinairement au point où ces trois membranes se touchent et se joignent que s'effectue la rupture lors de la projection du globule. Celle partie médiane du sporange est formée par la membrane extérieure seule, aussi sa transparence permet-elle de distinguer parfaitement les spores à son intérieur; le priinordialscblauch, qui devait lui adhérer avant l'orga- nisation du globule, est devenu la sporochlamyde. Pour achever la description analomique des Pilobolus, je dirai encore un mot de l'organisation générale des spores, réservant les différences spécifi- ques pour notre partie descriptive. ' Xiihrr sur le Pilobolus ciwstàllinus , 1859, p. Il fig. Il DU GENRE PILOBOLUS. 25 Le sporange des Pilobolus contient un grand nombre de spores (pi. I, fig. I ; pi. II, fig. 14) rondes ou ovalaires selon l'espèce, mais toujours simples, c'est-à-dire sans cloisons; car il arrive de rencontrer des spores didymes, comme cela se voit encore chez d'autres mucorinées et même chez les algues. La spore se compose d'un épispore de cellulose renfermant un protoplasma jaune ou jaune rougeàtre, grumeleux et azoté; ce dernier est contenu, je crois, par un endospore qui représente le primordialschlauch ; mais je n'ai jamais pu l'isoler bien clairement du plasma qu'il protège. On distingue encore dans le protoplasma, surtout par l'emploi des acides, des granules solides et quelques vacuoles de dimensions variables; elles sont généralement au nombre de cinq à sept chez le Pilobolus oedipus, et au nombre de deux, placées à chaque extrémité de la spore, chez le Pilobolus crystallims. (PI. II, fig. 14 /a) Quant au nombre de spores renfermées dans un sporange, M. Cohn l'évalue de quinze à trente mille, et ce chiffre ne me paraît pas trop fort, surtout pour le Pilobolus crystallinus, dont les spores sont relativement beaucoup plus petites que celles du Pilobolus oedipus. Tome XXX 4 26 MONOGRAPHIE III. PARTIE PHYSIOLOGIQUE. En étudiant les plantes inférieures, on ne s'est occupé depuis trop longtemps que de leur classification, ou tout au plus de la recherche et de la description de leurs caractères anatomiques. L'étude de leur développement, de leur vie, de leurs transformations, de leurs mœurs, si je puis parler ainsi, forme cependant une partie instructive et bien attrayante de leur histoire, peut-être la plus importante et la plus philosophique de toutes. C'est faute d'observations consciencieuses dirigées dans ce sens, que nous voyons encore aujourd'hui la mycologie encombrée de tant de genres incertains et apo- cryphes. Je veux donc consacrer ici un chapitre spécial à l'exposé de la vie de ces petits champignons, espérant qu'on ne suivra pas sans quelque intérêt la succession rapide et variée des phénomènes vitaux d'une existence tout exceptionnelle parmi les mucédinées. 1, Germination. — Commençons l'histoire de la vie des Pilobolus par celle de leur germination. Je décrirai plus particulièrement celle du Pilobolus oedipus, que j'ai la mieux suivie; celle du Pilobolus crijslallinus , au reste, n'en diffère en rien. Les spores, au moment de leur sortie du sporange, sont parfaitement rondes; un épispore très-visible se distingue de la masse protoplasmatique opaque, qui renferme, outre des granules solides de dimensions variables, quelques vacuoles, quand on les observe dans l'eau. (PI. I, fig. 1.) Ces spores sont de grandeur inégale ( ~ min.), comme cela se remarque souvent chez les plantes où elles se forment par voie de génération libre ( frète Zellenb ildung). DU GENRE PILOBOLUS. 27 Les granules solides qu'on y trouve varient en nombre de un à dix ; elles ont, pour autant que j'ai pu m'en assurer, la structure ordinaire des cyto- blastes et ne possèdent point de membrane propre. Au moment de la germination, les granules solides et les vacuoles com- mencent par disparaître, le proloplasma plus clair et finement granuleux de- vient homogène et plus limpide. En même temps, le contour de séparation , autrefois fortement accusé entre le protoplasma et l'épispore, s'atténue, et la spore, sans changer de forme ou devenant seulement un peu plus ovale, acquiert les dimensions doubles. (PI. I, fig. 2 a.) (Test le protoplasma, dans lequel réside le principe vital , qui s'élabore et se met en contact avec la membrane cellulaire qu'il doit nourrir, au moment où celle-ci va émettre les premiers filaments du mycélium. Quelque temps après ce premier agrandissement, on remarque, sur un on plusieurs points de la circonférence des spores, des endroits plus clairs, où le protoplasma paraît plus aqueux et la membrane tégumenlaire plus transpa- rente. Ces endroits plus clairs forment d'abord un léger sinus, grandissent ensuite et deviennent enfin de grosses hernies ordinairement sacciformes (pi. I, fig. 2) : c'est le premier pas vers la formation du mycélium. Les spores des Pilobolus commencent souvent déjà à germer quand elles sont encore contenues dans leurs sporanges. Cette germination n'est pas parfaitement na- turelle; celle que je décris ici a été observée sur des spores se trouvant libres dans la vase nourricière des Pilobolus. Les germinations artificielles, que j'ai produites en plaçant les spores dans de petites capsules remplies d'eau vaseuse, ont toujours marché lentement et ne m'ont fourni que des spores de moindre grandeur, munies de filaments plus grêles ou presque filiformes. (PI. I, fig. 3.) On a souvent dit, et d'une manière assez générale, que les mucorinées re- jettent leur épispore dans l'acte de la germination ; je ne sais si cette re- nia rque est fondée en vérité, toujours est-il sur que rien de semblable ne se remarque chez les Pilobolus, ni chez les Mucor vulguris, Pers., M. sloloni- fer, M. tenuis, Bon., Ascophora mucedo, Tode, et A. elegans, que j'ai fait germer cette année. Chez beaucoup de champignons, chez plusieurs algues, par exemple. 28 MONOGRAPHIE pour les oospores des Vaucheria, c'est l'endospore qui perce l'épispore pour former les filaments germinatifs; ici c'est plutôt la membrane externe même qui semble s'étendre et se ramifier, comme cela s'observe dans la germina- tion des zoospores des saprolégniées et de beaucoup d'autres algues. Mais revenons à nos Pilobolm. Une fois que les spores commencent à émettre leurs filaments germinatifs, elles se déforment rapidement. C'est tantôt d'un côté, tantôt des deux bouts opposés de la spore, tantôt de plu- sieurs points à la fois que naissent les prolongements : ce qui donne souvent aux spores germantes les formes les plus bizarres. (PI. I, fig. 4.) Ces premiers prolongements ne tardent pas à se ramifier à leur tour, se bifurquant ou se trifurquant sous les angles les plus divers, et les jeunes mycéliums présentent alors un amas confus de gros stolons, plus ou moins rayonnants, et faisant, en petit, l'effet d'une racine de tubéreuse ou (VAs- phodelus. Cette germination se rapproche d'une manière remarquable de celle de beaucoup d'algues filamenteuses, par exemple, des Vaucheria, Spi- rogyra, Oedogonium, etc., etc., et surtout de celle des saprolégniées. A côté de ce premier mode de germination, qui rappelle bien celui des mucorinées, s'en présente un autre, qui me semble plus exceptionnel. (PI. 1, fig. 5.) La spore, après s'être gonflée et étendue, comme dans les cas ordi- naires, émet un tube simple qui se renfle de suite en manière de vésicule et devient semblable à la spore qui l'a produit (pi. I, fig. 5 a); une troisième et même une quatrième vésicule viennent souvent se placer, selon le même mode de formation, à la suite des premières. (PI. I, fig. 5 b.) Dans certains cas, les utricules germinatifs ne se touebent pas , mais des bouts de tubes les relient entre eux de manière à former un chapelet. (PI. I , fig. S c. ) Quant au sort ultérieur de ces spores anormales, elles finissent, je crois, par former des mycéliums semblables à ceux que produit la germination ordinaire. Je ne connais aucun champignon, en dehors des mucorinées, qui offre une germination semblable; elle se rapproche néanmoins de la multiplication des zoosporanges de la Peronospora devastatrix, que 31. de Bary nous a fait naguère connaître '. C'est le cas de faire observer encore ici combien je me * Sur la formation de zoospores chez quelques champignons, Ann. des se. nat., tom. XII (1860), p. 243. DU GENRE PILOBOLUS. 29 suis trompé, dans ma notice sur lePilobolus crystaUinus, en croyant que les spores de cette plante émettaient des cellules fructifères sans se transformer préalablement en mycélium. 2. Mycélium et formation des cellules fructifères. — La spore en per- dant sa forme primitive devient un mycélium, dont les filaments massifs et nombreux rampent, rayonnent, se multiplient et s'avancent de toutes parts. Leur direction est généralement horizontale ou descendante et leur couleur gris jaunâtre, sauf les extrémités lilamcntaires, qui sont colorées en blanc. La jeune plante s'étend ainsi, pendant quelques jours, dans la vase ou à l'intérieur des bouses de vache avant de se montrer à l'extérieur, et quand elle parait, le mycélium devenu fort, occupe déjà un espace assez con- sidérable. Le temps nécessaire aux spores pour former un mycélium fructifiant dé- pend , d'après mes observations , de la température de l'atmosphère et varie de quatre à huit jours. Les jours de pluie contrarient singulièrement leur avancement. Les stolons possèdent une force de pénétration assez remar- quable : on les trouve à une profondeur de quatre à cinq centimètres dans le sol qu'ils occupent, et je les ai vus percer un carton humide d'au moins un centimètre d'épaisseur. Nous venons de voir la formation du système végétatif; la plante, main- tenant, doit songer à sa reproduction. A cet effet, un certain nombre de sto- lons, ou de ramifications des stolons principaux, prennent une direction ascendante et se dirigent vers la lumière : ils vont changer de nature et de- venir des cellules fructifères. Les premiers indices de fructification se trouvent dans l'aggloméralion d'un protoplasma jaunâtre ou un peu rougeâtre, à l'extrémité des stolons ascendants. C'est toujours à une petite profondeur dans le sol ou à sa surface (pie se prépare la cellule fructifère; les filaments enfouis plus profondément contiennent un protoplasma plus pâle et moins dense. Le stolon destiné à devenir cellule fructifère commence par se gonfler légèrement, il s'accroît ensuite rapidement et offre bientôt à son exlrémité un renflement sphérique ou ovalaire assez considérable. (PI. 1, fig. 0 b; pl. II, fig. 1.) Le filament qui le porte se montre toujours rempli d'un épais 50 MONOGRAPHIE protoplasma. C'est ce tout jeune âge de la cellule fructifère qui a été pris par M. Léveillé pour un Sclerotium donnant naissance au Pilobolus 1. La cellule fructifère communiquait jusqu'alors librement avec le mycé- lium mère; une fois bien remplie de protoplasma, elle s'en sépare par une cloison, toute mince d'abord et à peine perceptible, mais qui ne tarde pas à devenir épaisse et solide. (PI. II, fig. 2.) On croirait à la formation d'un oogonium de vauebériacée ou de saprolégniée ; cependant la cellule fructi- fère doit encore passer par bien des modifications avant de produire son sporange. Les deux premiers jours que le mycélium fructifie, les cellules qu'il produit sont peu nombreuses et comparativement plus petites que celles des jours suivants; quand il commence à s'épuiser, les cellules redeviennent également plus petites et plus rares. .le ferai remarquer, ici, que la cellule fructifère avait été prise par tous les observateurs pour la plante elle-même, tandis qu'elle n'en est qu'une partie, une simple cellule porte-sporange. 3. Développement de la cellule fructifère. — Ce développement est assez remarquable pour mériter d'être exposé avec soin. Je vais suivre celui du Pilobolus crystallinus , parce qu'il correspond à ma planche II. La cellule fructifère forme primitivement, comme nous l'avons déjà vu. une vésicule ronde ou ovalaire d'environ un demi-millimètre de diamètre et remplie d'un protoplasma épais et opaque. Une cloison solide occupe sa partie inférieure et la sépare du mycélium. Celte vésicule primitive représente le renflement inférieur de la tige et préexiste à sa formation. M. Ferdinand Cohn se trompe donc en pensant qu'elle n'apparaît que pendant l'allonge- ment de la tige 2. Le mycélium , durant son développement , n'avait semblé obéir à aucune influence étrangère, maintenant l'heure du jour et l'intensité de la lumière solaire vont régler les destinées de la cellule fructifère avec une régularité presque invariable. Vers le milieu du jour, entre midi et trois heures de relevée, la cellule fructifère, dont je viens de décrire l'état rudimentaire, commence par mon- 1 Mémoire sur le genre Sclerotium , Ami. des ne. iuil., l. XX, 1843. -' Cohn. /. c, p. 508. DU GENRE PILOBOLUS. 31 trer, à l'extrémité opposée à la cellule conique, un allongement de forme également conique, et sensiblement plus clair que la vésicule elle-même (pi. II, fig. 3) : c'est la ligelle qui commence à apparaître. En même temps un changement s'est opéré à l'intérieur de la vésicule ; un liquide clair et limpide, fourni par le mycélium et que je nommerai liquide cristallin, pénètre par endosmose à travers la cloison radicale, à Pin- térieur de la vésicule et vient occuper le centre inférieur de la masse proto- plasmatique sans s'y mêler sensiblement. Je me suis assuré plusieurs fois de la vérité de ce fait en coagulant par un acide fort le contenu des jeunes cellules et en les ouvrant ensuite sous le microscope de préparation. L'alïluence du liquide cristallin, vers l'époque de l'allongement des cellules fructifères, explique très-bien la diminution du protoplasma dans la cellule conique et donne la raison de sa teinte plus pâle et plus transparente. (PI. Il , fig. 2 et 3 a.) La couleur blanche du cône d'allongement (pi. I, fig. 18 b, et pi. II, fig. 3 b) des jeunes cellules est due, si je ne m'abuse, à une autre cause, à la présence de cellulose amorphe, destinée à l'entretien de la mem- brane cellulaire, qui va considérablement s'allonger en cet endroit. En effet, quand on traite déjeunes cellules par le chlorure de zinc iodé, on voit leur cône d'allongement verdir sensiblement. J'explique cette coloration verte par le mélange du bleu, provenant de la réaction du chlorure de zinc iodé, avec le jaune de l'huile du proloplasma. Durant l'après-midi, les ligelles, que nous avons vues naître sous forme d'allongements coniques , se développent assez rapidement et deviennent des tubes cylindriques qui atteignent deux tiers à un millimètre de longueur. Leur couleur est d'un beau jaune vitcllin et on les prendrait facilement pour de jeunes clavaires perçant la bouse de vache. (PI. I, fig. 6 c, et pi. II, fig. 4 et 5.) Le protoplasma aussi vient d'éprouver une modification importante. Le liquide cristallin qui a pénétré dans le renflement inférieur de la tige, com- mence à pousser devant lui, en agissant comme la colonne ascendante d'une pompe foulante, la masse épaisse du protoplasma. Son action, cependant, n'est pas celle d'une surface plane, mais plutôt celle d'une colonne conique qui perce le protoplasma et le force à monter en le pressant obliquement 52 MONOGRAPHIE contre les parois de la tige. Refoulé de cette manière , le protoplasma forme , à l'intérieur de la tigelle , un étui gélatineux dont le centre est occupé par la colonne de liquide cristallin. J'ai remarqué la même disposition du prolo- plasma chez beaucoup de mucorinées et chez les saprolégniées. C'est ainsi qu'on voit diminuer insensiblement, puis disparaître tout le pro- loplasma jaunâtre, d'abord dans le renflement inférieur, ensuite dans la tige même, et que s'explique tout naturellement le changement de couleur de la tige, qui, jaune dans les premières heures de l'après-midi, se trouve incolore et transparente vers le soir. Une partie de protoplasma jaune reste cependant toujours dans le renflement inférieur de la tige, à cause de sa forme évasée, et le rend plus opaque que la jeune tigelle. (PI. II, fig. 5 et 6.) Vers le soir, on voit les sommets des jeunes tigelles se gonfler sensiblement; le courant cristallin y refoule et y condense tout le protoplasma, et ces renflements éga- lent bientôt ou dépassent même souvent le volume des renflements inférieurs. La coloration jaune du globule supérieur n'est que passagère; à la suite d'une décomposition chimique qui se fait dans le protoplasma, l'hémisphère supérieur du globule passe au bistre, et prenant des teintes de plus en plus foncées, passe enfin à un beau noir-violet. Ce n'est pas cependant le proto- plasma qui change de couleur, mais un dépôt pigmcntaire qui vient revêtir très-régulièrement et exclusivement l'hémisphère supérieur du globule. C'est ordinairement entre huit heures du soir et minuit que s'accomplissent ces variations de couleurs. Le globule va maintenant s'isoler à son tour et devenir un véritable spo- range. Pendant la nuit, une cloison se forme à sa base et vient le séparer pour toujours de la tige. Ce moment n'est pas le même pour toutes les plantes et varie de neuf heures du soir à deux heures du matin. Cette cloison se formant sous la pression du courant cristallin , ne sous-tend pas le globule comme une surface plane , mais prend la forme conique qu'elle conservera jusqu'au moment de la projection. (PI. II, fig. S a".) La cloison sous-globulaire vient donc de séparer le sporange de la cellule fructifère; le courant cristallin continue néanmoins à faire monter dans la tige de nouvelles eaux, qui, retenues par cette cloison, doivent néces- sairemenl exercer une pression latérale en cet endroit; il en résulte une DU GEISRE PILOBOLUS. 53 dilatation assez régulière de la partie supérieure de la lige, qui se gonfle et se ballonne sous le globule coloré. Je donne à ce renflement le nom de cupule. parce qu'il fait l'effet d'une petite coupe de cristal qui supporterait une boule d'ébène. (Test pendant la dernière moitié de la nuit qu'on remarque ordinai- rement cet évasement et que les cupules se perfectionnent. Plusieurs causes peuvent arrêter ou retarder le développement des cellules fructifères; par exemple le manque d'humidité nécessaire et la trop grande sécheresse du sol nourricier ; les pluies de longue durée , et enfin un abais- sement considérable de température. J'ai remarqué ainsi que lorsque le thermomètre descendait sous zéro ou n'indiquait que deux ou trois degrés au-dessus, toute végétation semblait suspendue pendant plusieurs jours. J'ai même vu, cet hiver, de jeunes cellules fructifères, surprises par les neiges, passer près de trois mois sous cette bienfaisante couverture et se développer, au mois de mars, lors de la fonte de celles-ci. J'ai examiné dans la partie anatomique de ce mémoire, pag. 19, l'influence qu'exerce, dans ces cas, sur la membrane cellulaire, un séjour prolongé du protoplasma à l'intérieur des jeunes cellules. Ces divers phénomènes de développement se répètent tous les jours, pour le Pilobolus cryslallinus , avec une régularité et une précision qu'on ne peut se défendre d'admirer; seulement ils se produisent à une heure un peu plus avancée et marchent plus lentement pendant les jours froids et sombres. Quand on les cultive longtemps en captivité, et qu'on les soustrait par là même, du moins en partie, aux influences atmosphériques, leur régularité n'en est guère troublée, mais quand on les retient plusieurs jours dans l'ob- scurité, ils finissent par s'écarter de leurs habitudes régulières et se dévelop- pent à toutes les heures du jour ou de la nuit, jusqu'à ce que, rendus à la lumière, il se hâtent d'obéir à ses douces lois. Le Pilobolus oedipus est plus irrégulier et montre souvent en même temps ses cellules fructifères à divers états de perfectionnement. 11 est vrai que je ne l'ai jamais trouvé en rase campagne, mais vivant à l'ombre des brous- sailles. En captivité, il dérange facilement ses habitudes et s'éloigne sensi- blement, sous ce rapport, du Pilobolus crystallinus. Nous en sommes venus au moment où les cellules fructifères, au lever Tome XXX. S 54 MONOGRAPHIE du jour, se montrent comme autant crûmes gracieuses toutes chargées de perles cristallines et vont achever la maturation de leurs spores pour les lancer au loin avec leurs sporanges bicolores. Mais avant de décrire ce phé- nomène, le plus important de tous, je dois toucher quelques points non moins intéressants de la vie de ces petits champignons. A. Courants et vacuoles. — Existe-t-il dans la cellule fructifère des Pilo- bolus, en dehors du mouvement lent et presque imperceplihle de la colonne cristalline ascendante, d'autres courants charriant ou déplaçant le proto- plasma à l'intérieur de cette cellule? M. Cohn1 a cru observer des courants de cette nature, souvent assez nombreux, s 'anastomosant entre eux et transportant le plasma des parois de la cellule vers sa partie supérieure. Pour moi, malgré des essais multipliés, jamais je n'ai pu observer rien de semblable. Quand on examine une jeune cellule fructifère (pi. I, fig. 18), on voit bien un espace plus clair occuper le centre de la cellule, et deux bandes opaques et obscures en suivre les parois pour se réunir à son sommet (même fig. a, a); mais ces bandes ne sont pas des courants et je n'en ai jamais vu à l'intérieur de cet espace. S'il s'en trouvait, on pourrait cependant les apercevoir très-facilement, car, quand on blesse une cellule semblable sous le microscope, soit fortuitement, soit à dessein, des déplacements de liquide en résultant nécessairement, on voit se former des filets de protoplasma qu'on peut suivre aussi facilement que ceux qu'on observe dans les cellules de Vallisneria ou de Tradescantia. Corda dit également n'avoir jamais trouvé de courants dans les Pilobolus crystallinus. Les bandes opaques dont je viens de parler correspondent aux parois de l'étui protoplasmatique, et l'espace clair du milieu représente la colonne cristalline. Tout ceci, au reste, n'est qu'un effet de lumière, et l'on déplace ces bandes à volonté en changeant le foyer du microscope. Je crois donc devoir n'admettre à l'intérieur des cellules fructifères qu'un courant unique, lent et uniforme, mais dont les effets sont multiples, puis- qu'il produit : 1° le renflement du globule; 2° l'évasement de la cupule et 3° l'éjaculation des spores. Quiconque a observé quelque temps dans l'eau de jeunes cellules de 1 F. Cohn, /. c, p. 509. 510, pi. 51 , fig. 7 a et 8. DU GENRE PILOBOLIS. 55 Pilobolm a dû voir s'y former de nombreuses cellules vesiculaires (pi. I, fig. 17) se multipliant à vue d'œil et remplissant quelquefois presque tout l'intérieur des cellules fructifères. Leur contour est assez précis et finement granuleux et leur aspect celui des vacuoles ordinaires. Sont-ce de véritables cellules munies d'une membrane tégumentaire? On serait tenté de le croire, d'autant plus qu'elles se maintiennent dans l'eau quand on fait crever la cellule fructifère; mais M. Hugo von Mobi ' a déjà reconnu, dans des for- mations semblables, que ce ne sont que des globules aqueux enveloppés d'une couebe de protoplasma et, en effet, ils disparaissent, quand on les presse entre deux verres, sans laisser de traces de pellicule tégumentaire. La même ebose s'observe chez les Mucor, Ascophora, Pohjactis, etc., etc. Corda avait aussi rencontré ces formations en étudiant ses Ascophora1*; mais il les avait crues, à tort certainement, propres à une espèce particulière. Elles ne sont dues qu'à l'action de l'eau pénétrant, par endosmose, au milieu du protoplasma au moment de son activité génératrice. S. Formation des cloisons. — Il n'est aucun point de la vie des Pilobolus qui m'a coûté autant de peine à éclaircir que celui de la formation des diver- ses cloisons qui, durant le développement de la tige, viennent diviser cette immense cellule en trois parties inégales. Ces cloisons se forment malheureusement toujours dans des renflements opaques et remplis d'un protoplasma épais, qui permettent rarement une observation heureuse. Sur un grand nombre d'essais, quelques-uns m'ont cependant pleinement satisfait , et j'ai le mieux réussi en traitant les jeunes cellules que je voulais examiner par le chlorure de zinc iodé et en les reprenant ensuite par l'acide nitrique ou sulfurique concentré. J'obtenais ainsi de fortes contractions de protoplasma, des colorations et des décolorations successives qui facilitaient beaucoup l'observation. Je me bornerai à donner ici le résumé de mes recherches dont l'exposé pourrait être long et fastidieux. a. La cloison radicale (pi. I , fig. 15 d) et la cloison sous-globulaire (pi. I, 1 Ueber die Saftbemegung im inneren der Zclkn, Bot. Zeit., 1 840 , p. 77-78. 2 Icônes Fungorum , lom. II, p. 20, tab. XI, fig. 80, (4 et fi.) 56 MONOGRAPHIE fig. 1G(/) se forment de la même manière. La cloison sous-cupulaire a une autre origine. b. La cloison radicale apparaît la première, la cloison sous-globulaire se forme la seconde, et la cloison sous-cupulaire est la dernière à se montrer. c. Cette cloison sous-cupulaire se forme lentement de matières protoplas- matiques qui descendent au fond de la cupule après la formation de la cloison sous -globulaire et s'y organisent en membrane. Elle est de nature protéi- nique et peu résistante. d. Les deux autres cloisons se forment de la manière suivante : Au moment marqué par la nature, le primordialscblauch commence par faire un pli rentrant, dont l'intérieur est occupé par une mince saillie circu- laire de la membrane cellulosique. Je ne sais si c'est le primordialscblauch qui s'étrangle, comme chez les saprolégniées au moment de la formation des zoospores, ou bien si c'est la jeune cloison naissante qui le force à reculer. Cette dernière opinion me semble la plus probable. La cloison cellulosique s'accroît, le protoplasma et le primordialscblauch qui l'entoure s'étranglent en même proportion , et la tige semble coupée par un diaphragme membraneux, percé d'un trou rond par lequel le protoplasma passe encore. (PI. I , fig. 16.) Enfin, le diaphragme se ferme et le primordialschlauch , qui s'est étranglé et accru graduellement, le revêt sur les deux faces. (PI. I, fig. 15.) e. Ces deux cloisons sont extrêmement minces au jeune âge; le primor- dialschlauch est également d'une ténuité remarquable à cette époque; mais plus fard ils s'épaississent tous et se laissent facilement dédouhler dans les cellules plus âgées. /'. La formation de ces cloisons rappelle assez exactement celle que Hartig a observée chez les Vaucheria et Pringsheim chez les Spirogyra. 6. Gouttelettes cristallines. — Scopoli et tous les auteurs qui ont parlé du genre Pilobolus se sont plu à décrire ces nombreuses gouttelettes limpides , semblables à des gouttes de rosée, qui ornent la tige et la cupule de ces gen- tils champignons et leur donnent cette parure de perles si gracieuse; mais là se sont bornées leurs observations. Persoon ', cependant, émit l'opinion que c'était le liquide intérieur de la 1 Observ. myc, pars I, p. 76. DU GENRE PILOBOLUS. 57 plante qui transsudait; M. Léveillé1, au contraire, tâcha de prouver que ces gouttelettes n'étaient que des vapeurs acqueuses qui s'élevaient d'alentour et venaient se condenser sur le Pilobolus. M. Cohn 2 semble préférer la pre- mière de ces opinions. Un examen attentif décide, il me semble , facilement cette question. D'abord ces gouttelettes ne sont pas de simples gouttes de rosée, puisqu'elles rougis- sent le papier de tournesol, comme le fait l'eau fortement chargée d'acide carbonique, et qu'elles laissent un résidu organique gluant quand on les fait évaporer sur une lame de verre au-dessus de la lampe d'alcool. Deux obser- vations viennent encore contrarier singulièrement la théorie de la conden- sation des vapeurs ambiantes, c'est : 1°, (pie ces gouttelettes ne se remarquent point sur le globule5, mais seulement sur les parties remplies de liquide cristallin et, 2°, qu'elles n'apparaissent que quand le protoplasma a été rem- placé par ce liquide. J'ai observé ceci parfaitement, pendant une nuit, sur une grande peuplade de Pilobolus oedipus, qui offrait des individus à tous les degrés de développe- ment. Les tout jeunes, encore remplis de protoplasma, ne montraient pas de gouttelettes; on les voyait naître sur les cellules plus âgées, mais encore jaunes; enfin elles étaient déjà assez grosses sur les cellules parfaites dont le globule commençait à se colorer. Les conditions atmosphériques étant les mêmes pour toutes ces cellules , il faut nécessairement chercher ailleurs la cause de la formation de ces gouttelettes. Je crois donc que les gouttelettes cristallines qui caractérisent toutes les espèces du genre Pilobolus, se forment aux dépens de la sève de ces plantes, en vertu de la pression intérieure de la colonne cristalline qui est incontes- table; formation, au reste, singulièrement favorisée par l'absence de lumière et l'humidité de l'air qui accompagnent le développement nocturne de ce champignon. Une nouvelle preuve de cette assertion est que, quand on fait dessécher 1 Menu de la Soc. Linn. de Paris, tom. IV, p. 630-31. * L.c, p. 520. 3 Les gouttelettes qu'on trouve parfois sur le globule sont rares, très -petites et s'y sont formées avant l'apparition de la cloison sous-globulaire. 38 MONOGRAPHIE le sol des Pilobolus , le liquide cristallin devenant nécessairement plus rare, les gouttelettes diminuent également et finissent même par disparaître. J'ai répété ces expériences plusieurs fois , tant sur le Pilobolus crysftillînus que sur le P. oedipus. Une transsudation analogue, sous forme de gouttelettes cristallines, est bien connue chez un certain nombre de phanérogames. La mycologie nous en offre des exemples à son tour. UAgarieuë tacrymabufidus , Bull., semble émettre du tranchant de ses lamelles de grosses larmes, quand le temps est humide; les Polyporus squamosus, Fr., et suâveo'lens, Fr., excrètent souvent au jeune âge des gouttelettes légèrement jaunâtres. J'ai observé la même chose pour la Telephora purpurea et le Merulius destruens, Pers.; les mycéliums de la Peziza sclerotiorum , Lib., du Pemcellium glaucum et du Sepedonium mycophilum (Hypomyces ehrysospermus , Tul.) produisent également de grosses gouttes claires, quand leurs filaments se serrent pour former des masses scléroliennes; enfin le Mucor indgaris, YAscophora elegans, Cd. *, et différents Polyactis m'ont offert plus d'une fois de semblables gouttelettes, quand ils croissaient dans des endroits humides. Les champignons, au reste, doivent transpirer comme la généralité des plantes, et cette transpiration doit plus ou moins être en rapport avec la ra- pidité de leur développement; je m'en suis assuré souvent en plaçant des champignons des familles les plus diverses, parfaitement isolés de tout sup- port humide, sous des lames de verre ou d'acier. 7. Projection dit globule. — Nous avons vu, dans les paragraphes précé- dents, la formation et le développement des cellules fructifères. Vers le matin, le globule se trouve être complet et parfait. Vous voyez alors des milliers et des milliers de cellules brillantes couvrir les bouses de vache ou les ondula- lions de la vase nourricière; les rayons du soleil naissant leur communiquent une blancheur éclatante, et, venant se décomposer dans les innombrables sphères de cristal qu'ils rencontrent, vous prodiguent toutes les couleurs du spectre solaire. Rien de plus beau que ces légions de légères cellules, habillées de perles cristallines et portant chacune un sporange coloré dont le viole! ' Cette plante n'appartient pas véritablement aux Aseophora, puisqu'elle ouvre son sporange comme 1rs Mucor. DU GENRE P1L0B0LUS. 59 foncé tranche admirablement sur la blancheur des cupules. Toutefois ces grâces .'I cette beauté doivent disparaître avec le jour : ordinairement entre huit et dix heures du matin, quand le soleil s'est élevé et que la lumière a ac- quis une certaine intensité, on voit crever, les unes après les autres, toutes ces élégantes cupules projetant perpendiculairement et avec force leurs petits globules sporifères. Dans le silence de l'observation vous entendez dis- tinctement le bruit des cupules qui crèvent et dont les détonations se succèdent quelquefois comme un long feu de peloton. Mais bientôt tout rentre dans le calme, tout a disparu, et on ne trouve plus que les pellicules arides de ces champignons éphémères et quelques sporanges délaissés. Il était curieux de constater à quelle hauteur le globule pouvait être lancé. Les auteurs parlent de quelques pouces de distance, M. le docteur Guigneau , plus heureux, observa la projection à une hauteur de cinquante centimètres '. J'ai trouvé plus encore. Plaçant au-dessus des colonies de Pilobolus, des écrans de papier blanc (pie j'élevais tous les jours, j'ai pu constater de la manière la plus positive que les globules peuvent être lancés à des hauteurs de soixante-trois centimètres , quatre-vingt-onze centimètres et même d'un mètre cinq centimètres, c'est-à-dire à une hauteur surpassant plus de trois cents fois celle du champignon lui-même. Ces données disent assez que les hauteurs obtenues varient d'un jour à l'autre ; j'ajouterai que c'est le Pilobolus oedipus qui me semble posséder la plus grande force de propulsion. Le globule lancé décrit une parabole plus ou inoins étendue, selon la posi- tion plus ou moins inclinée de la cupule au moment de la projection, et vient retomber sur les corps environnants. Il est remarquable que, soit que le glo- bule retombe naturellement, soit qu'on le reçoive, au milieu de sa course, sur une surface verticale ou fortement oblique, quelle que soit la distance qu'on observe, on le retrouve toujours offrant supérieurement son hémisphère coloré et se collant par l'autre, plus faible, au corps qui le reçoit, Sur quatre cent treize globules que je comptais un jour, après les avoir reçus sur un feuillet de papier blanc, trois seulement me montraient leur côté concave. 1 Addition à la note sur le Pilobolus crystallinus (14 janv. 1853), Actes Soc. Linn. de Bor- deaux, t. XVIII, ômcliv. 40 MONOGRAPHIE Il est très-difficile d'observer la projection du globule, parce que les cellules fructifères disparaissent comme par enchantement : vous admirez une de ces cellules, belle et fraîche, et voilà qu'en un clin d'œil elle s'évanouit, et cela avec une rapidité telle que l'observateur le plus attentif ne peut saisir le moindre mouvement. Aucun phénomène précurseur ne vient annoncer cette disparition. Les gouttelettes cristallines découlent, il est vrai, quelque temps avant la pro- jection, mais c'est leur propre poids et leur augmentation de volume, qui s'est incessamment accru pendant toute la nuit et une partie de la matinée, qui les forcent à se réunir et les fait couler le long des tigelles, entraînant avec elles toutes les gouttelettes qu'elles rencontrent. Entre ce fait et celui de la propulsion du globule il n'y a, ce me semble, aucune relation. Vers l'époque de la maturité, on voit cependant le globule monter lentement , comme un bouchon poussé par un gaz élastique, et la cellule entière souffrir une forte distension; au moment de l'éjaculation même, on remarque un petit ébranlement, une espèce d'élancement : voilà tout ce qu'on peut saisir du phénomène. Après la projection, la cellule fructifère se retrouve flasque, presque aride et couchée contre le sol; d'autre fois, quand l'éjaculation a été probablement moins violente, elle reste quelque temps debout , et une grosse goutte lim- pide sortant de la cupule vient remplacer le sporange. (PI. II, fig. 10.) Cette goutte grandit visiblement et force la ligelle à s'incliner d'abord, puis l'entraîne à terre, où elle ne tarde pas à s'affaisser et à se vider entièrement. C'est dans cette goutte qui couronne la cupule béante que se remarque, avec le simple grossissement de la loupe, ce singulier mouvement gyratoire dont Ehrenberg, Fries, Currey et M. le docteur Guigneau nous ont parle; je l'expliquerai dans le paragraphe prochain. Quelle est maintenant la cause de la projection du globule? Quel est le puissant et mystérieux ressort, qui, pour servir les vues de la Providence, lance ainsi dans les airs, à plus d'un mètre de hauteur, le sporange d'un pauvre et petit champignon? Avant d'exposer et d'établir ma manière de voir à ce sujet, il ne sera pas sans intérêt de rechercher et de comparer les opinions, les hypothèses DU GENRE PILOBOLUS. 41 souvent bien ingénieuses, des différents auteurs qui ont voulu expliquer e<> mystère. Les premiers observateurs n'avaient fait que constater la durée éphémère des Pilobolus, Tode l, le premier, rechercha la cause de la projection. Le renflement de la tige, dit-il, se remplissant sans cesse de nouvelles eaux que lui apporte la tigelle, ou recevant peut-être de celle-ci une impul- sion irritante, crève subitement et lance au loin, souvent même au visage de l'observateur, le chapeau qu'il porte. Cette explication se rapproche de bien près de la vérité; c'est la meilleure de toutes celles qu'on a tentées depuis. BulUard- comprend le phénomène d'une autre façon. Pour lui, il n'y a pas de projection, les cupules crèvent latéralement, s'arrosant mutuelle- ment de gouttelettes nombreuses, et s'affaissent ensuite sans perdre leurs globules. Belle invention, qui expliquerait en même temps l'origine des gout- telettes cristallines, mais qui tombe devant la simple observation. Il arrive (pie les cellules fructifères se dessèchent sans lancer leurs sporanges, toute- fois il n'y a jamais de rupture latérale. Persoon*, après de longues recherches, crut pouvoir expliquer ainsi la disparition du globule. La cupule, dit-il, se termine en pointe sur laquelle est posé le sporange, qui a reçu à cet effet une cavité particulière. Le soleil ou la chaleur du jour venant ensuite à échauffer le liquide qu'elle renferme, la cupule se dilate, élargit sa pointe, et fait sauter ainsi le globule qu'elle porte. Persoon avait senti lui-même la faiblesse de cette explication qu'il donne sous la réserve : forte talis est. L'hypothèse de Schumacher i n'est pas moins ingénieuse et semblait indi- quée par la nature elle-même. J'ai déjà dit que le globule, après la projec- tion, est souvent remplacé par une grosse goutte transparente qui se main- tient parfois assez longtemps; Schumacher en fait une cellule vésiculaire qui, sortant brusquement de la cupule, chasse le sporange avec l'élasticité d'un 1 Schrift. d. Nat. Berlin. Ges., B. V, p. 46. - Champ, de Fiance, 1. 1, p. 111, fig. 480. 3 Observ. Myeol. , pars I , p. 76. K Enum. Plant. Sael., pars H, p. 188. Tome XXX. 6 42 MONOGRAPHIE ressort. C'est une double erreur, car cette vésicule n'est qu'une simple goutte de liquide cristallin, et elle n'apparaît qu'après la propulsion du globule sémi- n itère. L'idée de Linck ' est meilleure; il croit à une contraction générale de la cellule fructifère, qui détermine une explosion et fait partir le sporange. L'ac- tion du courant ascendant, quoique incontestable, est méconnue dans cette manière de voir, qui n'est, du reste, qu'une hypothèse probable. M. Ferdinand Cohn, dans son beau mémoire sur le Pilobolus oedipus -, n'admet aucune des explications précédentes, et assigne pour cause du phénomène la tension et l'élasticité de la cloison sous-globulaire. Selon lui, l'implétion toujours croissante de la cupule surtend et presse cette mem- brane contre le globule, qui finit par céder; cette cloison se relève alors avec élasticité, projette le sporange, et reste adhérer à la cupule sous forme d'opercule conique , comme le représentent les figures 12 et 13 de sa seconde planche. Malheureusement deux faits d'observation viennent contredire cette théorie. 1° La cloison sous-globulaire affecte la forme conique dès sa naissance, comme je m'en suis assuré maintes fois; longtemps avant la projection , avant même que la formation des spores soit achevée, son sommet a pénétré jus- que tout près de la membrane supérieure du globule, et les spores l'entou- rent comme un bourrelet jaunâtre : ce n'est donc pas en se relevant brus- quement que cette cloison peut chasser le globule. 2° La cloison sous-globulaire ne se retrouve pas d'ordinaire sur la cupule après la projection. Dans l'immense majorité des cas, il y a éjaculation violente du liquide contenu dans la cupule, et ce n'est pas seulement le sporange strictement dit, mais encore la cloison sous-globulaire, et même quelquefois une partie de la membrane interne de la cupule, qui sont lancés dans les airs. Puisque cette cloison est lancée elle-même, ce n'est pas elle qui peut projeter le globule dont elle fait partie. Les preuves de cette asser- tion sont faciles à fournir : ainsi on trouve les cupules ouvertes et béantes après la projection (pi. 11 , fig. 11); examinez les sporanges après l'éjacuîa- 1 Abhand. der Derl. Nal. Gescl., ann. III, pars IV. 2 F. Cohn, /. c, pp. 51 fi et 517, lab. LU, fig. 12 et 13. DU GENRE P1L0B0LUS. 45 lion, vous y retrouverez toujours la cloison sous-globulaire; enfin si vous recevez les globules, au moment de leur projection, sur une lame de verre ou sur un carton noir, vous y verrez facilement les gouttelettes du liquide cristallin qui ont formé le jet d'éjaculation. Je ne puis donc admettre l'explication de M. Colin, qui ne serait, tout au plus, applicable qu'à un seul des divers cas que la nature nous pré- sente. D'après mes observations, la cellule fructifère peut périr de cinq manières différentes : 1° Quelquefois elle s'affaisse sans projection aucune et se dessèche avec son sporange, comme chez le Mucor caninus et XAscophora Cesœtii '. Ce cas est assez rare. 2° D'autres fois, la partie supérieure du globule se détache circulaire- ment , et la cloison sous-globulaire seule reste adhérer à la cupule en guise d'opercule conique. (PI. II, fig. 9.) Ce cas se présente quand le mouvement de propulsion n'a pas été assez vif pour lancer le globule entier, mais cepen- dant suffisant pour rompre la membrane médiane du globule, la plus délicate de toutes. Il peut être produit aussi par une adhérence extraordinaire de la cloison sous-globulaire à la cupule, et j'ai, en effet, observé des cas de soli- dité de soudure extraordinaire. 11 se rencontre encore souvent sous le mi- croscope , quand on enlève aux cellules fructifères leurs sporanges au moyen d'une aiguille , ou par la pression ou le déplacement du verre couvreur. C'est probablement ce qui aura fait croire à M. Colin que tel était le procédé ordi- naire de la nature. La cellule , ainsi privée de son sporange, ne larde pas à dis- paraître. 3° Dans la généralité des cas, le globule entier et une partie du liquide cristallin sont lancés avec une vivacité remarquable , et la cellule s'affaisse peu après : c'est le mode normal que je vais expliquer tout à l'heure. 4° Il arrive que la cupule crève par son milieu, suivant une ligne circu- laire, mais irrégulière. J'ai produit ce cas artificiellement en arrosant le Pilobolus oedipus après une longue sécheresse. 5» Enfin, dans des conditions également exceptionnelles, quand les Pilo- 1 Voyez la quatrième partie de ce Mémoire. 44 MONOGRAPHIE bolus manquent de liquide nécessaire pour la projection, les cellules fruc- tifères se conservent plusieurs jours , et les spores, entrant en germination, soulèvent elles-mêmes l'hémisphère coloré du globule et se répandent à l'extérieur. Je ferai remarquer ici que, sur des milliers de globules que j'ai examinés, jamais je n'ai observé la rupture de leur sommet telle que Corda la décrit et la figure 1. La véritable cause de la projection se trouve, si je ne m'abuse, dans le courant ascendant dont j'ai déjà parlé plus d'une fois. Quand diverses cloisons sont venues diviser la cellule fructifère, le liquide cristallin continue néanmoins d'y pénétrer par endosmose. L'exsudation des gouttelettes cristallines la décharge , il est vrai , d'une partie de ses eaux surabondantes; mais cette transpiration n'est pas en rapport avec l'activité et la durée du phénomène d'endosmose, qui se continue pendant douze à quinze heures. En supposant, à bon droit, que les gouttelettes forment la partie la plus claire du liquide intérieur, cette exsudation devrait même activer le phénomène en augmentant la densité du liquide de la cupule. 11 en résulte enfin une implétion extrême qui provoque une réaction de la part de cette cellule élastique, et détermine ainsi l'explosion de la cupule. Une partie du liquide interne doit se projeter nécessairement en ce moment, comme l'ob- servation le confirme, et la cupule cède à l'endroit le plus faible, qui est évidemment celui où le globule n'est retenu sur la lige que par deux minces membranes. La nature a d'ailleurs probablement préparé d'avance la désu- nion des membranes, car la cloison sous-globulaire, qui au jeune âge n'était qu'un prolongement latéral et continu de la membrane de la cupule, ne s'j rattache plus vers la maturité que par une suture. L'action du courant ascen- dant est si nécessaire à la projection, (pie quand celui-ci fait défaut ou n'est que très-faible, parce que le sol des Pilobolus est entièrement desséché, la projection peut être retardée de plusieurs jours, ou même n'avoir pas lieu. Un arrosement opportun détermine l'explosion dans des cas semblables, comme j'en ai fait plusieurs fois l'expérience. Le volume d'eau assez considérable qui, en partie, est projeté avec le globule • lion. Fting., 1, p. 22, lab. VI, 6g. 206. — Anleitung zur Mycologie, p. i.xix. DU GENRE PILOBOLUS. 45 et qui, d'autre part, sort de la cupide quelque temps après l'explosion, et la diminution de volume de la cellule fructifère après le phénomène, constatent encore la forte distension que celle-ci a dû éprouver avant de lancer le sporange. A cette première cause, insuffisante peut-être pour produire elle seule, dans les cas ordinaires, une pareille projection, viendrait s'en ajouter une seconde : un mouvement de contraction générale de la membrane cellulaire des cellules fructifères, déterminé par l'action de la lumière. La lumière est le grand agent de l'excitabilité végétale; c'est elle qui provoque ces mouve- ments quasi spontanés que nous remarquerons chez le Mimosa pudica, le Robinia speudo-acacia , chez les Oxalis, les Phaseolus, chez le Drosera rotundifolia, etc., etc. Or l'influence de la lumière sur les Pilobolus et sur le phénomène de la propulsion est ici incontestable : de nombreuses obser- vations le prouvent ; ainsi : 1° Contrairement à ce qui s'observe chez les autres mucorinées , les cellules fructifères des Pilobolus recherchent la lumière avec une avidité sans exem- ple. J'ai cultivé le P. oedipus et le P. cnjslalliims pendant plusieurs mois dans ma chambre de travail ; non-seulement leurs tiges se dirigeaient tou- jours vers les fenêtres, mais elles se courbaient en arc et se couchaient tout plat par terre pour trouver la lumière. Si je les enfermais dans une petite maisonnette de carton, percée d'une seule fenêtre, toutes les jeunes tiges se dirigeaient vers cette ouverture. Si le soir, au moment où les jeunes tiges commençaient à s'incliner vers la lumière, je donnais aux colonies une po- sition inverse, les cellules fructifères prenaient une nouvelle direction, celle de la lumière. Le redressement n'avait cependant plus lieu quand les cellules fructifères n'étaient plus très-jeunes. 2° Pendant les jours sombres et pluvieux, les globules sont lancés beau- coup plus lard que pendant les jours clairs et sereins : aux mois de juillet el d'août, la différence était parfois de trois heures. De même, à mesure que les jours se raccourcissent et que la lumière solaire diminue par nos brumes d'hiver, l'heure de la projection se trouve retardée et finit par coïncider avec les premières heures de l'après-midi. 3° On peut reculer à volonté le moment de la propulsion en plaçant les Pilobolus dans l'obscurité. Le manque de lumière n'empêche cependant pns £6 MONOGRAPHIE entièrement le phénomène, mais peut facilement le relarder de douze à quinze heures. J'ai parfois disposé dans ma chambre des séries de petites colonies de Pilobolus-, leur ménageant une lumière graduée au moyen d'écrans de car- ton ; les premières recevaient une lumière vive, tandis que les dernières se trouvaient presque dans l'obscurité; la durée des cellules fructifères coïnci- dait alors parfaitement avec la quantité de lumière perçue. En automne, à l'époque de la chute des feuilles, combien de fois n'ai-je pas trouvé, même après midi, des Pilobolus qui avaient conservé leur cellules fructifères à l'ombre de quelques feuilles tombées par hasard sur les bouses de vache, tandis que les cellules exposées à la lumière avaient crevé depuis longtemps. i. Enfin on peut faire la contre-expérience en soumettant à l'action de la lumière des Pilobolus conservés dans l'obscurité. Les explosions commencent après quelques minutes et se succèdent rapidement quand les cellules fruc- tifères sont parvenues au degré de maturité voulue. Tout ceci prouve à l'évidence l'influence de la lumière, et son action étant suivie de ce mouvement d'élancement qui accompagne la projection, il est possible, je dirai même très -probable, que la lumière est un des agents qui déterminent le phénomène. Le mouvement de contraction de la membrane cellulaire n'est cependant qu'une supposition, car il est impossible de l'ob- server; mais cette hypothèse me semble légitime et parfaitement naturelle. Ces deux causes, la réaction due à l'implétion d'endosmose et la contrac- tion cellulaire déterminée par l'influence de la lumière, agissant en même temps et dans le même sens, c'est-à-dire faisant contracter la cellule fructi- fère, doivent nécessairement faire monter vivement la colonne de liquide cristallin, et c'est son éjaculation qui détache et chasse le globule. La première de ces causes me semble principale et déterminante, la seconde ne me parait que secondaire et auxiliaire. On trouve également en phanérogamie quelques exemples de projection du liquide contenu dans les cellules. Quand on arrache rapidement un fragment d'épiderme de la face infé- rieure d'une feuille de Lycium barbarwm, de Primula auricula, d'Iris et de plusieurs monocotylédonées, on voit le liquide intracellulaire se projeter DU GENRE PILOBOLUS. 47 comme un petit nuage roriforme f. La cause de cette éjaculation n'est certai- nement pas la même que chez les Pilobolus, mais le fait a néanmoins quelque analogie avec le phénomène qui nous occupe, et doit probablement s'expliquer aussi, du moins en partie, par l'irritabilité et la contractibilité des cellules blessées. La chaleur, loin de favoriser la projection du globule la contrarie, et quand on expose des cellules fructifères à une chaleur artificielle ou bien aux rayons du soleil traversant un verre coloré, elles perdent bientôt leur turgescence et ne lardent pas à se flétrir. L'influence du courant électrique n'accélère non plus en rien le phénomène, soit qu'on fasse passer le courant induit par le rhizome radicellaire, ou plus directement par la cupule elle-même. Puisque j'ai parlé dans ce paragraphe de l'influence de la lumière, je dirai ici que son absence agit sur ces petits champignons comme sur la généralité des plantes, et a pour résultat de produire des tiges démesuré- ment grêles et longues; j'en ai rencontré qui mesuraient un centimètre de longueur et davantage. 8. Formation des spores. — Il n'est guère possible d'observer directement dans le sporange la transformation du plasma en spores, vu l'opacité de la membrane supérieure. J'ai donc dû me contenter d'ouvrir sous le microscope un grand nombre de sporanges à divers étals de maturité pour suivre les changements que subit son contenu. Les spores se forment chez les Pilobolus, comme chez les mucorinées, par voie de génération libre. La cloison sous-globulaire une fois formée, le protoplasma commence par se condenser et s'épaissir, et le primordialschlauch, qui va devenir la spo- rochlamyde, semble se détacher de la membrane cellulosique, mais seule- ment dans l'hémisphère inférieur du globule, pour envelopper étroitement les spores. Une semblable désunion de membrane s'observe chez les sapro- légniées au moment de la formation des zoospores. Le protoplasma se modifie en même temps, les granules qui y préexis- taient grossissent considérablement et une gélatine incolore commence à s'y 1 Welker, Noliz uber dus Ausspritzen des Safies beim Zerrissen saftiger Pflanzentheile , JumiiUCH F. WISSEN. Botanik VON Dr Pkingsheim, II Bancl , III Ifcft, pp. 468-i69. 48 MONOGRAPHIE remarquer; alors, à un moment donné, il se fait une division générale du protoplasma en autant de pelotes gélatineuses qu'il y aura de spores dans le globule; leur réunion constitue cependant encore une niasse unique et cohérente. Je n'ai pas remarqué de nucléus central ou générateur dans ces formations, mais chaque spore rudimentaire contenait un nombre variable de granules (2-7) disposés irrégulièrement *. Les spores possèdent déjà probablement à cette époque une enveloppe rudimentaire ou endospore , quoiqu'on ne l'aperçoive pas, à cause de l'adhé- rence des jeunes spores entre elles; car bientôt après elles s'isolent et appa- raissent munies d'une membrane cellulosique (I'épispore) qui se colore en rose pâle par le chlorure de zinc iodé. C'est ordinairement pendant la seconde moitié de la nuit que le proto- plasma s'organise ainsi en spores. A mesure que celles-ci se forment, et même avant le commencement du phénomène, une substance colorante est lente- ment et successivement mise en liberté clans le globule et vient se fixer sur la membrane de l'hémisphère supérieur du sporange. Elle est probablement d'abord incolore comme l'indigo et combinée, comme lui, à l'un ou l'autre des éléments du protoplasma. Les combinaisons chimiques, qui doivent né- cessairement accompagner la formation des spores, la mettraient en liberté, et ce serait alors qu'elle passerait au violet foncé , en venant en contact avec l'air. Les additions successives de violet noirâtre sur un fond jaune, qui est la couleur primitive du globule, expliquent très-bien les teintes jaune ver- dâtre, vertes, olivâtres et les nuances de violet par lesquelles le globule passe en se formant. 0. Habitants des Pilobolus. — Je veux parler ici de quelques animalcules et de certains corpuscules étrangers que les auteurs ont rencontrés en étudiant les Pilobolus. F.-O. Millier2 avait trouvé un être merveilleux qui, plante à sa partie inférieure, portait un globule de cristal, dans lequel nageait « comme dans un petit océan » un ver microscopique blanc et tendre. Il nous en laissa heu- 1 Cette observation n"a porte que sur des sporanges de Pilobolus oedipus. ~2 F.-O. Miiller, Kleine Schriften ans der Naturhist., licrausgegeben von Giize. Dessau, 1782, p, 122. — Berl. Samm. z. Befbrd. der Arzneims., Stuek I, p. 41 (1778). DU GENRE PILOBOLUS. 49 reusement la description et la figure, qui nous montrent que ce n'était que le Pilobolus crystallinus observé après la projection, alors que, par hasard, une anguillule s'était engagée dans la grosse goutte qui couronne la cupule. L'éveil donné, les fameux vers furent retrouvés par plusieurs observateurs. Tode les remarqua sur les globules du Pilobolus crystallinus1; MM. Du- rieu de Maisonneuve 2 et Léveillé 3 les virent dans les bulles sphériques qui sortent des cupules; tous deux crurent qu'ils se trouvaient aussi dans les cupules elles-mêmes; M. Léveillé supposa même qu'ils y pénétraient par quelque ouverture pratiquée à la base du champignon. Persoon * et M. Currey 5 les examinèrent avec plus de sagacité et recon- nurent que ces anguillules ne se trouvent qu'à l'extérieur de la cellule fructi- fère et montent en se tortillant le long des pédicelles. Ce ver, qui n'est que le Rhàbditis terricola, Dujardin 6, se rencontre tant sur le P. oedipus que sur le P. crystallinus. Il naît en abondance dans la bouse de vache ou dans le limon qui porte 1rs Pilobobus, et on l'y trouve à tous les degrés de développement. Une cellule fructifère porte quelquefois cinq ou six de ces vers, et on les voit, non- seulement dans la goutte terminale après la projection , mais encore dans les gouttelettes latérales et même sur le globule. Ils se meuvent en tout sens, tantôt lentement , tantôt rapidement , sans doute sous l'influence peu agréable du bain acide dans lequel ils se trouvent plongés. Le Rhàbditis terricola (pi. II, fig. C) se rencontre, comme on le sait, sur un grand nombre de substances en putréfaction; je l'ai trouvé aussi sur plusieurs Ascobolus et Peziza et sur diverses mucorinées croissant sur des matières putrides. Le Rhàbditis n'est pas le seul animalcule qui hante les Pilobolus. Souvent un petit infusoire blanc (pi. II, fig. D.), qui vit en colonies comme les jiiégarines et se rapproche beaucoup au jeune âge des amibes, choisit les 1 Schrift. d. Berl. Naturf. Ges. , Sluek. V. 8 Ann. se. nat., t. IX, p. 223. (182G.) ~> Mém. Soc. Linn. de Paris , tom. IV, p. 628. * Observ. Mycol., pars I, p. 77. 5 Journal of the Proeed. Linn. Soc. Lond., vol. I, n° 4, p. 166. 6 Je dois cette détermination à la bonté de M. Van Beneden, professeur de zoologie à l'univer- siié de Louvain. Tome XXX. 7 50 MONOGRAPHIE cellules fructifères ou le globule du Pilobolus cn/slallinus pour y établir sa demeure. Il ne connaît pas, sans doute, le sol volcanique sur lequel il se fixe, mais il est dans les mœurs de ce petit infusoire de grimper sur les corps saillants qu'il rencontre, et c'est ainsi qu'il monte, en longues processions , le long des ligelles pour se peloter d'ordinaire sous les cupules des Pilobolus (pi. Il, fig. D., a et h); on le trouve aussi sur les brins d'herbe qui font saillie sur la bouse de vache. Au jeune âge, ces infusoires vivent libres et marchent comme les amibes, mais plus lard ils se pelotent, perdent leur mobilité, et ressemblent alors plutôt à des bursaires. Outre les Rhabdilis et ces infusoires, j'ai encore quelquefois observé, dans la goutte cristalline qui couronne quelque temps la cupule après la projec- tion, un corps allongé jaunâtre, souvent courbé en demi-cercle ou replié sur lui-même, imitant assez grossièrement un ver et se mouvant lentement au fond de la goutte limpide qui le renferme. Ce sont certainement les filaments oscillants dont nous parle Ehrenberg * et que Frédéric Currey rencontra dans les mêmes conditions, sans réussir à les observer 2. Portés sous le microscope, j'ai vu que ce n'étaient que des filets de gra- nules protoplasmiques agglutinés entre eux et associés parfois à de petites vacuoles. (PI. II, fig. 19.) Des granules de dimensions variables, mais de même origine, nageaient souvent alentour. Pour expliquer leur mouvement oscillatoire, il ne faut pas, je crois, re- courir, comme Ehrenberg, à des « forces physiques inconnues; » la chose est plus simple : le courant ascendant, qui pénètre dans la goutte cristalline par une ouverture ponctiforme et vient continuellement augmenter son volume, y détermine un courant circulaire; poussé par ce courant, le filament monte un instant ; mais, trop lourd pour faire le tour de la goutte, il retombe tout de suite et revient en arrière; il en résulte un mouvement ascendant et descen- dant continuel qui imite très-bien une lente oscillation. On voit de temps en temps ce corps allongé accuser un mouvement plus vif ou plus irrégulier, c'est probablement quand le courant ascendant le touche plus en plein , ou qu'il est momentanément plus fort que de coutume. 1 Mykoloy. Hefte von Kuiize und Schmidt , Heft II, p. (i7. - Journal of the Proced. <>f the Linn. Soc. London, vol. I, n° 4, p. 1G6. DU GENRE PILOBOLUS. .il Eu observant un grand nombre de cupules immédiatement après l'éjaculation , j'ai pu me rendre compte de l'origine de ces filaments : on les voit monter du fond de la cupule, essayer plusieurs l'ois d'en sortir avec le liquide, et enfin passer par son ouverture pour entrer dans la goutte cristalline. Ceci s'observe facilement au moyen d'une bonne loupe. Ehrenberg a trouvé plus d'une fois ces filaments dans des gouttelettes po- sées sur les globules mêmes : ce sont alors des gouttelettes provenant de l'éjaculation des cupules voisines et renfermant par hasard l'un ou l'autre filet protoplasmatique; ces fragments se trouvent fréquemment dans le liquide éjaculé. M. Léveillé1 et quelques mycologues ont vu une foule de petits corps irréguliers tournoyer dans la goutte terminale. J'ai souvent transporté de pareilles gouttes sous le microscope; les corps qui s'y rencontrent sont tantôt des granules protoplasmatiques, tantôt les petits infusoires dont j'ai parlé plus haut. M. Currey indique encore sur le globule de petits points blancs et lui- sants qu'il n'a pas examinés. Ils ne sont pas communs, mais on en rencontre toujours quelques-uns quand, l'œil armé d'une loupe, on passe en revue une grande peuplade des Piloholus crystallinus. Ces points varient de nature : l'une fois ils ne sont que des gouttelettes cristallines de fort petite dimen- sion, d'autres fois j'y ai reconnu de petites pelotes d'infusoires qui avaient gagné le sommet du champignon. Enfin, le même auteur trouva, dans une cupule qu'il avait fait probable- ment crever, des corpuscules cylindriques ou en forme de sablier des an- ciens , et à peu près de même couleur et de même grandeur que les spores 2. M. Currey les regarde comme des spores imparfaites qui auraient passé du globule dans la cupule par quelques fissures. J'ai observé les mêmes cor- puscules, non dans les cupules, mais autour de certaines préparations de Pilobolus faites au chlorure de calcium. J'en ai dessiné quelques-uns à la figure 19 de ma première planche, et je leur attribue la même origine que le savant cryptogamiste de Londres. 1 Mêm. Soc. Linn. de Paris, tora. IV, p. 627. - Currey, /. c. , p. 167, tab. II, fig. 10. 52 MONOGRAPHIE Je crois ainsi avoirheureusement retrouvé tous les corps étrangers ou énigmatiques signalés jusqu'à ce jour sur les Pilobolus et dont l'existence semblait entourée de phénomènes mystérieux, qui s'évanouissent maintenant devant une observation patiente et attentive. 10. Vie et type des Pilobolus. — La vie des Pilobolus est celle des mucé- dinées putrédinifages , et leur rôle dans la nature celui de hâter et de faciliter la résolution des matières en décomposition. Comme chez tous les parasites de ce genre, le système absorbant ou destructeur est extrêmement puissant <>l étendu, la période de vie courte et limitée à l'existence des substances qu'ils habitent, le mode de reproduction assuré et le nombre de leurs spores presque innombrable. J'ai calculé qu'une plante de Pilobolus oedipus, (pie j'ai vue naitre et s'étendre en colonie, depuis le 17 septembre jusqu'au 15 décembre, c'est-à-dire pendant quatre-vingt-neuf jours, avait produit, dans cet intervalle, le nombre énorme de trente et un milliards trois cent vingt millions de spores fertiles. Quand un Pilobolus (prenons le Pilobolus crystallinus que nous pouvons considérer comme type du genre) a envahi une bouse de vache, ses nom- breuses radicelles s'étendent et s'approprient bientôt les substances liquides qu'elles rencontrent. Une partie de ces liquides est convertie en suc nourri- cier, en protoplasma , l'autre , plus considérable , est réservée à la dissémi- nation des spores. Ce mode de dissémination est des plus intéressants. VAscobolus lance ses thèques \ maintes Peziza émettent, comme on le sait, de petits nuages colorés, uniquement formés de milliers et de milliers de spores invisibles, les Vibrissa, munies d'un arc invisible, décochent leurs spores acérées, comme des flèches rapides; ici la cellule fructifère devient une véritable arquebuse hydraulique, dont le sporange est l'innocent pro- jectile. Les cellules fructifères sont nombreuses pour une même plante; tous les jours, avec une admirable régularité, vous la voyez forger, dans les pre- 1 Ce fait, généralement admis, n'est pas prouvé. Les thèques, d'après mes observations, deviennent saillantes, rejettent ensuite leur opercule et lancent leurs spores. Les thèques vides disparaissent; mais je ne sais si elles sont lancées ou bien si elles se renversent simplement après la projection. DU GENRE PILOBOLUS. 53 mières heures de l'après-midi, ses instruments de projection, la nuit les per- fectionne et prépare la charge; le matin venu, la lumière solaire détermine l'explosion et la plante envoie au loin des générations futures. Ce mode de reproduction est singulièrement dispendieux : chaque jour exige la confec- tion de nouvelles cellules, chaque jour amène une nouvelle dépense de liquide, aussi voit-on bientôt cette petite artillerie végétale ralentir son feu, puis Téteindre faute de munitions, et la plante mourir d'épuisement au bout de dix à quinze jours. Mais ne croyez pas que le globule lancé soit livré au hasard, sa chute est calculée et tout est prévu : la nature Ta pourvu d'un enduit collant qui lui permet de s'attacher aux corps sur lesquels il tombe. Comme le Pilobolus vit à l'état de nature dans les prés ou au milieu des herbages que fréquentent les herbivores, son sporange s'attachera naturellement aux graminées d'alen- tour; vient une vache ou un herbivore quelconque qui mange l'herbe et le sporange en même temps , et la reproduction de la plante est assurée. Le sporange s'ouvre dans l'estomac, les spores se mêlent aux aliments, la chaleur animale favorise leur germination i , et les spores en sortant avec le résidu de la digestion se trouvent ainsi plantées en naissant dans le sol indispensable à leur développement. Pendant tout l'été de 1860, j'ai vu ainsi deux vaches que j'avais à ma disposition, semer et propager à leur insu le Pilobolus crystullinus , et le répandre dans tous les prés où je les faisais conduire : il est beau de voir ici les deux règnes organiques s'entendre et s'entr'aider pour assurer la repro- duction et la conservation d'un frêle petit champignon. J'ai dit que les Pilobolus forment chaque jour de nouvelles cellules fructi- fères, elles ne sont cependant pas toujours entièrement neuves; les anciennes se renouvellent parfois plusieurs jours de suite. Dans ces cas, la cellule conique de la lige se remplit, comme la première fois, de proloplasma et se distingue de l'ancienne tige par sa turgescence, son opacité et sa couleur foncée. (PI. II, fig. 15, 16, 17.) 11 se forme ensuite à sa partie supérieure, ou plus souvent sur le côté, un renflement qui s'allonge et qui devient une nouvelle cellule fructifère en tout 1 J'ai souvent rencontre des spores germant déjà au moment où elles sortaient de l'animal. :,i MONOGRAPHIE semblable à la première. Le renouvellement de la cellule fructifère par stolons latéraux n'avait pas échappé aux yeux clairvoyants de M. Cohn *. Les Pilobolus sont en général des plantes très-régulières et offrent peu d'anomalies; j'ai cependant observé cpiekpies cas de tératologie que je vais enregistrer ici : I " Le renflement inférieur de la lige produit quelquefois deux tigelles. (PI. II, fig. 5.) L'une d'elles avorte alors ordinairement. 2° Outre la cloison radicale et la cloison sous-globulaire, qui sont des membranes cellulosiques, il se forme parfois dans la ligclle une ou deux cloisons de même nature : ce cas s'est présenté dans quelques cellules petites et atrophiées. 3" La cellule fructifère peut devenir rameuse et présenter deux globules, dont l'un est hydrocéphale. Cette anomalie s'expliquera par l'exposé des circonstances qui l'ont produite. Le 25 septembre 1860, un violent ouragan s'éleva vers le soir et dura pendant une bonne partie de la nuit. Surprises par la tempête, les jeunes cellules fructifères suspendirent leur développement jusqu'au lendemain vers midi. Le courant cristallin avait néanmoins faible- ment continué, et , s'élevant au-dessus du proloplasma , ses eaux avaient pro- duit un allongement de tige plus ou moins régulier et terminé en vésicule. (PI. II, fig. 20.) Le protoplasma, revenu à la vie et commençant son ascension normale l'après-dînée du second jour, avait nécessairement dû se sentir retenu par la colonne aqueuse superposée; il s'était alors détourné pour former un rameau latéral qui produisit un sporange considérablement moindre que de coutume. Les Pilobolus crystaliinus qui me fournirent cette observation croissaient dans un verger ouvert et peu abrité. 4° Le renflement inférieur de la lige ne forme quelquefois pas de tigelle ; à sa place apparaît un faisceau de radicelles rameuses qui se désarticulent en conidies ovalaires ou ovalo-fusiformes et mesurant -^f^ mm. de lon- gueur. (PI. I, flg. 20.) Le Pilobolus oedipus seul m'a offert cet exemple de génération coni- dienne , quand à l'épuisement du sol nourricier venait s'ajouter un com- mencement de fermentation des substances azotées contenues dans le limon. 1 F. Colin, I. c, ]>. 518-519, tab. o-2. fis 17. DU GENRE PILOBOEUS. i-> J'ai déjà souvent remarqué que les mucorinées et les mucédinées en général mil une grande tendance à se désarticuler en conidies sous l'influence ou en présence d'un corps en fermentation. Puisque j'ai tâché de faire ici l'histoire complète des Pilobolus, }e puis me demander encore : Comment passent-ils l'hiver? Le plus souvent, les spores se conservent abritées dans leurs sporanges et collées aux brins d'herbe des prairies jusqu'à la belle saison. 11 faut que le hasard les fassent alors manger par l'un des herbivores que la nature a chargé de leurs semailles. D'autres fois, quand les bouses de vache n'ont pas été détruites avant l'hiver, le mycélium persiste et sommeille pendant tout l'hiver pour reproduire aux premiers beaux jours ses cellules fructifères. J'ai vu ainsi pendant l'hiver de 1860, malgré un froid de— 22 degrés centigrades, le Pilobolus crystallinus renaître et fructifier au mois de mars. Je n'ai pas observé l'hibernation du Pilobolus oedipus. J'avais cru placer ici quelques recherches sur l'anatomie et la physiologie comparées des Pilobolus et des différents types de la famille des mucorinées, mais l'étendue de ce mémoire m'engage à les réserver pour un travail plus spécial. Je me bornerai donc à dire en résumé que l'ensemble des détails anatomiques et toutes les données de physiologie s'accordent à assigner aux Pilobolus, comme place naturelle dans la famille des mucorinées, la place la plus voisine du genre Ascophora. C'est dans la famille des champignons, et plus encore dans celle des algues, que se rencontrent ces organismes simples et gradués qui nous permettent de suivre ces séries, ces degrés de perfectionnement naturel qui commencent par une plante unicellulaire pour aboutir aux organismes les plus compliqués et nous révèlent si bien l'unité et la variété des types de création. C'est en se laissant aller à des considérations philosophiques de ce genre , et qui certes me sourient, que M. Colin ' présente le Pilobolus comme type d'une plante tricellulaire. Pour moi, le Pilobolus des auteurs n'est qu'un organe, la cellule fructifère d'une mucorinée, dont le mycélium, il est vrai, est normalement unicellulaire, mais dont les cellules fructifères, toujpurs nombreuses, ne nous permettent pas d'y voir une plante tricellulaire. ' Cohn , /. <■., p. 529-550. 56 MONOGRAPHIE IV. PARTIR DESCRIPTIVE. L étude comparative des Pilobolus et des mucorinées ne laisse, comme nous venons de le voir, aucun doute sur la place qu'ils doivent occuper dans une classification naturelle des champignons : ce sont de véritables muco- rinées par leur port , leurs caractères et tout l'ensemble de leur vie. C'est aussi la place que leur avaient sagement assignée les premiers observateurs, et celle qu'ils occupent dans les classifications les plus récentes1. Persoon, Schumacher, Fries, Wahlenherg, Rabenhorst et Berkely, en les réunissant autrefois aux gastéromyces, méconnurent l'ensemble de leurs caractères, autant que Corda, MM. Léveillé et Benorden, en en faisant, sans raison suffisante, le type d'une famille nouvelle. Gen. PILOBOLIS, Tode, emendatum. Mlcor, Scop. Boit. Hydrogera, Web. Pilobolus, Tod., Pers., Frics. Pïcnopodium, Corda. Char. gen. — Germinatio, evolutio or hyphasma stoloniferum oi in mucorineis; cel- lulae fructiferae septo distinctae, hydrophorae, roridae, supernè ventricoso-bullatae , fugacissimae, sporangio discolore, non innovato, coronatae. Sporangium compositum, explose ejaculatum. Sporae simplices, coloratae. Ce genre mérite, à cause de l'élégance de son port et de la supériorité . 155-150; Herb. Myc. (RI. edt. nov.), cent. 1. n. 7is: Fung. Europ. , cent. III, n. 270. — Wallroth, Comp. Flor. Gerin., pars II, p. 518. - Loudon, Encyclop., p. 1024, fig. 16349. - Currcy, Journ. of the proced. Lin. Soc. Lond., vol. I, n. 4, p. 102, tab. II (sub P. rorido). Pilobolus uiiceolatus, Purton , vol. III, p. 523, tab. XXXI (fide Berk). Icon. nostra, tab. II, fig. 1-20. Le Pilobolus crystallims a normalement le renflement inférieur de la lige caché dans le fumier qui lui sert de sol ; ce renflement est cependant décou- vert quand la plante se trouve sur des excréments humains. La tige varie beau- coup en hauteur, selon lage de la plante et le degré de lumière auquel elle est exposée; ainsi elle n'a souvent qu'un demi-millimètre ou un millimètre d'élévation les premiers jours de végétation; elle peut atteindre, par contre, la longueur de deux centimètres quand elle s'étiole dans l'obscurité ; la cu- pule prend alors une position penchée, et le globule devient ponetiforme. La hauteur ordinaire de la plante, y compris le globule, est de trois à quatre millimètres; les plantes robustes atteignent cependant six à sept millimètres. L'endroit où la tige s'élargit pour former la cupule est d'ordinaire marqué , excepté chez des individus faibles ou maladifs, d'une bande ou zone jaune roussâtre qui varie en largeur. La couleur de la plante n'est pas toujours la même : elle est ordinairement d'une belle transparence cristalline; plus rare- ment la plante entière conserve une teinte jaune ou roussâtre due à l'abon- dance de l'huile colorante qui l'imprègne. Le Pilobolus cri/stallinus est toujours monocéphale; exceptionnellement il peut produire sur la même tige deux globules fertiles , qui sont alors sen- siblement plus petits. Le globule sporifère offre des dimensions très-varia- bles : les plus gros mesurent un demi-millimètre de diamètre, les plus petits n'ont souvent qu'un quart ou même un neuvième de millimètre de largeur. Cette espèce vit habituellement sur les excréments d'animaux herbivores paissant en liberté. Les auteurs l'indiquent sur la fiente de cheval, de vache, de cerf, de daim, d'élan, de chevreuil, de mouton, de porc et de lapin. Elle croît aussi, mais rarement, sur les excréments de l'homme. M. Cachet Ta trouvée sur les déjections de chat. Elle est généralement indiquée comme plante automnale; je l'ai cependant observée depuis le mois de mars jus- qu'au milieu de décembre. DL GENRE P1L0B0LUS. 59 2. Pilobolus oedipus, Montagne. Cellulis fructiferis brevïoribus et robustioribus; sporangio ampliore, hemisphaerico , minus depresso, nigro-violaceo, sporis m.uoribi's, sphaericis, subincarnato-luteis , bpis- porio discreto, f^f mm. crassis. Syn. — Mucor obliqcus, Scopoli, Flor. Carniol,, pars II, p. 494-495? Pilobolus oedipus, Montagne, Mém.Soc. Lin. de Lyon , I82G, p. 1-7, fig. /v ' 1A i/ân.para< ■ Pilobolus oedipus Montagne. Mém.cour.et Mém.dea savetranç. loin. XXX Mo m A M'KCoeinansPl 11. ■ ■ Pilobolus crystallinus Tode. SUR UN POINT DE LA THÉORIE DE LA FORMULE DE STIRLING, HENRI LIMBOURG, RÉPÉTITEUR DANALYSE A L ECOLE DU GENIE CIVIL. (Mémoire présenté le *1 juin 1860. Tome XXX. SUR UN POINT DE LA THÉORIE DE LA FORMULE DE STIRLING. % 1 . La question dont je vais m'occuper dans celte note est la suivante : Si l'on prend d'une manière approchée pour développement de logT(l -)-«), ,, . .. .. B,. B,. B,. (-t)-'B^, i os; 2r« -+- alioea — 1 ) ■+- : + ; -+- — ; — r , 13 v & ' 1.2.o 3.4a3 5.6a5 (2m — 1). 2m. a"-4 déterminer la valeur de m qui fournit la plus grande approximation; ou, en d'autres ternies , déterminer à priori le nombre de termes qu'il faut pren- dre dans la formule de Stirling* , pour que l'erreur soit la moindre possible. La série de Stirling, dont la haute importance pratique n'est pas discuta- ble, mais dont la théorie est restée longtemps fort incomplète, a été, dans ces vingt dernières années, l'objet de travaux remarquables, et l'on a aujour- d'hui diverses démonstrations de ce beau théorème qui fut un pas décisif dans cette théorie **. " La formule citée est due à Stirling, seulement lorsque a est un nombre entier. Nous la désignerons cependant toujours sous le nom de formule (te Stirling. " On peut consulter à ce sujet, dans le Journal île Crelle, les mémoires de M. Raabe, t. XXV et XXVIII, et un mémoire de M. Malmsten, t. XXXV; un mémoire de Cauchy, dans le t. II des Exercices d'analyse et de physique mathématique ; enfin un mémoire de M. Schaar, dans le XXII' volume des Mémoires des sava?its étrangers de l'Académie de Bruxelles. 4 SUR UN POINT DE LA THEORIE Si on arrête la série de Stiriing à un terme quelconque, l'erreur commise rsf moindre que le dernier terme conservé, et moindre encore que le ferme qui aurait suivi. La question que je me suis proposée est relativement sans aucune impor- tance. Il est rare, lorsqu'on emploie la formule de Stiriing, que Ton pousse le calcul jusqu'au terme qui donnerait l'erreur minimum. Il suffit que Ton sache que chaque terme est une limite supérieure de l'erreur commise en calculant la série jusque-là, et que de plus, on ait démontré, comme l'ont fait Legendre et Cauchy, que les termes vont en décroissant aussi longtemps (pie m n'est pas supérieur à r.a. Mais lors même que leur utilité pratique serait tout à fait nulle, on ne doit pas moins étudier les points restés ohscurs des théories importantes et qui n'ont pas encore été abordés par des mé- thodes rigoureuses. A ce titre, la présente recherche ne sera peut-être pas dénuée d'intérêt. On verra, du reste, qu'elle nous permettra d'énoncer sur la série de Stiriing elle-même quelques propositions assez remarquables. § 2. Cauchy a démontré (Exercices d'analyse et de physique mathémati- que, t, II, pages 393 et suiv.) que l'on a rigoureusement pour toute valeur positive de a : loSr(i+«) = *lo^« + «(log«-i)+-^a--^ + (2w_i).2,„.^--» -+-(-))"'/ v„,e—dx, O où B,, B3, Bs ... B2„,_, représentent les nombres de Bernoulli, et ^ r xîm x5'" xim 1 ''"' == 2 \_{<2r)im [{**)* -t-x*] + (4t)5"- [(4t)4-i- xf] + (6*fm [(6t)2 + x-] + ' J L'intégrale définie /v,„e-x dx est donc égale o 2 / — ilx )* [(Zrx)% + a?] Si dans chacune des intégrales dont se compose cette somme, on rem- DE LA FORMULE DE STIRLING. place x par %'nx , on aura : v„ e dx = 2, / . e dx. Et comme : 2r = , - e = log « — 2,7 ax r I — e on aura pour le terme sommatoire la forme remarquable r,„ e""1 dx = - ! -f—ï log *- — airax 1 — e Ainsi on a pour toute valeur de a positive, la formule rigoureuse B, B3. logr(l-Ki)= ilog2sra -+- n (logo — 1) 1.2a 5.4a5 (*2»i— 1)2»iaîm- ' /m Xim 1 log , dx, dont on peut voir la démonstration directe dans le mémoire cité de M. Schaar, qui a le premier présenté sous cette forme élégante le terme sommatoire de la formule de Stirling *. Ainsi la valeur absolue de Terreur commise, en prenant, dans la série de Stirling, m termes à partir de jfa , est représentée par /ximdx 1 log — - • 1 + x* ° 1— e-*"1 ' Remarquons en passant que, sous cette forme, le théorème énoncé au § 1 est évident; car lintégrale / log — dx , o étant essentiellement positive, il résulte que l'erreur est toujours de signe contraire au dernier terme conservé, et comme les termes sont alternativement positifs et négatifs, l'erreur change de signe à chaque terme, ce qui exige qu'elle soit moindre que le dernier terme conservé, et moindre que celui qui aurait suivi. 6 SUR UN POINT DE LA THÉORIE Si Ton avait pris un terme de moins, cette erreur aurait été exprimée par f rïm— 2 dx „! '"S toc l_e-»"= La différence entre ces deux erreurs est exprimée par l'intégrale définie 1— x*)dx \f lOfi -I- X2 Si je considère celte intégrale définie en elle-même et comme une fonc- tion continue de w, je remarquerai que sa dérivée par rapport à m est con- stamment négative. Cette intégrale va donc constamment en décroissant à mesure que m croit. Si elle passe par zéro, elle ne peut y passer qu'une seule fois, et est constamment positive pour des valeurs inférieures de m, et con- stamment négative pour des valeurs supérieures. Représentons donc par p la fonction de a qui satisfait à l'équation transcendante ./' I — x2 ) dx -T2— ioS Puis représentons par m' le nombre entier contenu entre u — 1 et ,«, il est facile de voir que m' sera la valeur de m, qui satisfera à la question posée. En effet, aussi longtemps que l'on n'aura pas m > m' , l'erreur, en prenant m — 1 termes, serait plus forte qu'en prenant m termes. En prenant w»'+l termes, au contraire, et d'autres valeurs plus grandes pour m, l'erreur serait constamment plus forte qu'en prenant un terme de moins. Dans le cas où p. serait un nombre entier, il y aurait deux termes qui donneraient l'erreur minimum, et il serait indifférent de prendre, soit log r ( 1 h- a) = i log 2*-a + a (Iog a — 1 ) ■ 1.2a (2a* — 3) (2a*— 2)o2^3 OU b, (— iy-*B»i-3 log r ( I + a ) = a log 2;ra -f- a { log a — 1 ) ■+- 1.2a ' ' (8fç— 3)('2/«— 2)0*-* (-If-'B^., + ( 2a* — I ) 2a*. a*-1 ' DE LA FORMULE DE STIRLING. 7 L'erreur serait la même au signe près dans les deux cas, et on aurait alors exactement la valeur de logr(l +«.) en prenant une moyenne entre ces deux valeurs, c'est-à-dire : b, 1-irVi logr (4 ■+- a) = i log 2?r — 3) (2^-2)o^-3 2 (2/tt — 1)2a«. a**1-1' Sauf ce cas, il existe une valeur m' de w* qui donne une erreur moindre (pie toutes les autres : ce sera le plus grand entier contenu dans p. .Nous allons donc essayer sinon de déterminer exactement p. en fonction de a , du moins de fixer des limites suffisamment resserrées entre lesquelles ^ se trouve compris. Nous bornerons du reste cette recherche aux seuls cas où l'on em- ploie la formule de Stirling, c'est-à-dire que nous supposerons que a est au moins égal à l'unité. §3. De la limite inférieure de p. Posons - dx log 1-e- O on a r = « 1. />Vm-2(l— X1) _ n = z _ , — / ' r*" O Prenons la première des intégrales de cette somme dx. -S1 ; tr**" dx, \ h- .r'2 et appelons /*' la valeur de m, qui rend cette intégrale égale à zéro. La dérivée de cette intégrale par rapport à a est — 2 / - e~irax dx. t/ 1 -+- a:5 0 Si ^ e"5 "' ((«c 4 + x* /" 8 SLR UN POINT DE LA THEORIE est supposé nul, /a"*",(lT*) r— rfx 0 est négatif, et, par conséquent, la dérivée de a- ,y 1 -+- a? e-ÎT" p'. .Nous pourrons donc prendre la limite inférieure de p' pour limite infé- rieure de fi. Soit donc 1. /°* x2' "■■7 y "'-2(1— X2) — ! ! e-»'» (/x. 4 -+- x2 Or, remarquons que si, au dénominateur de cette intégrale définie, nous remplaçons 1 -\- x"2 par 1 -\-x, nous diminuons la partie positive de D', et DE LA FORMULE DE STIRL1NG. 9 nous augmentons sa partie négative; si, au contraire, nous remplaçons 1 _f #2 par a -fa;2, nous diminuons la partie négative, et nous augmentons la partie positive. Nous aurons donc : ^W-3 e^„dx et riy< i rW^? e_,^ D'OÙ rD' > /" J-Îm-'2 e-2Tai dx — f xtM~' (r22""' ;rD' < r(2m— l) r(2w) (2;ra)2"'-' (2a-a)2m r(2m — 2) r(2»t — 1) (2z-a)2'"-2 (ârtf-1 OU *D' < lb^ [«—<*—«»■ Il est visible d'après cela que D' sera constamment positif aussi longtemps que Ton n'aura pas -Iza — ( -2m — 1 ) < 0, ou m > *« -t- f , qu'il sera négatif au contraire dès que m > sra -t- I . Ainsi la valeur de p' est constamment supérieure à m -f {. Elle est infé- Tome XXX. 2 io sur m poent de la théorie rieure à m + i. Ces limites ne diffèrent entre elles que d'une demi -unité. Nous allons en trouver d'autres qui convergeront vers une valeur commune à mesure que a augmentera. Nous avons trouvé plus haut : r(2»<-t) r(2«) (2s-af"-' (2a-a)-"' et r(2i«— 2) r(2»« — I) tD' < (2to)s'"-2 (2xa)2"-' Jl est très-facile, en partant de la valeur exacte de r\)' , de trouver les in- tégrales définies qu'il faut ajouter dans un cas, retrancher dans l'autre, pour retrouver la vraie valeur de dD'. On trouve ainsi : (2m) (l r(2m— 1) r(2»i (2Ta)!"-r " (2T*)5™ / I + x- el r(2m — 2) r(2«~i) / j-"'-3 (l - a)2 "■D = r — — — ■ ■ — / e ■!r'" ils. f Si nous ajoutons ces deux égalités membre à membre, il vient r(2»i-2) r(2»Q / ^"'-3(]-x')(i-if ZtU = — / — p—.. — rW 4- * " TT2-^ r (2m —1)( 4. ( 2m— 1 ) 2//» ( 2m — 1 ) ) 2tD' < — 5 -+- - : — L ■ (2«()'2"'-' ( 2tio (2to)s ] En égalant à zéro les quantités comprises entre parenthèses, résolvant par rapport à m, et choisissant la racine comprise entre m + 4 et 7ra+ 1, on obtient pour nouvelles limites de p' : 1S .+_ Ut •+- V ('mit — 6)2 — 27 i" > 12 et 1 -h 8ax — V ( 4«t — 2/ — 5 "' < ï Ces limites sont visiblement plus rapprochées (pie les premières, si a n'est pas inférieur à l'unité. Elles convergent du reste rapidement toutes les deux vers tm + f , à mesure que a augmente. En procédant de la même manière que précédemment, on peut, dans les inégalités qui donnent les limites de 2-D', ajouter aux seconds membres les intégrales définies nécessaires pour rétablir l'égalité. L'on a ainsi : 4.r(2m-2) r(2m — 3) 3.r(2m-l) Ç x2"-4 (1— x)4 _,Tax , 2z-D'= ; ! ' ■+- / : e dx (2*0)*—' (2,to/"-3 (2TO)2"-1 ,/ 1-t-x* O 3.r(2m-l) 4.r(2»i) r(2m-+-l) f* xim-°- (\ — x)' _STax , -VD' = S L _ . ! : + — ! '- — ! e dx. (-2*af-' [Ixaf" (2™)2'" + l ,/ I + x2 D'où, en ajoutant, il vient : r(2m+l) 4.r(2m) 4. r(2m— 2) r(2wi — 3) 4*D' = — — ,. , , — — - — + [2*aY"'+< (2Ta)2'" (2-a-a)'— ■/ - xj_ _i,Tai 1 -f- X'2 12 SUR UN POINT DE LA THÉORIE L'on en tire, par un raisonnement identique aux précédents r(2m + l) 4. r(2»i) 4.r(2m — 2) r(2m— 3) (2ira)s"+l (2ra)2"' (2ra)3"- * (Sm»)*— B -4- f X2"-'(l— X)1 r2T"-' ; — - j — i -*- r~ 7^ h 7m (iraf" ■ ( 2t« 4t*oî 8TJfC (2m -4- l)2m (2m— 1) (2m — 2) ) 16tW )' Comme, en égalant à zéro la quantité entre parenthèses, on aurait à ré- soudre une équation du quatrième degré , je me bornerai à remplacer, dans la parenthèse, la quantité m par la valeur rapprochée 3 k. ira + - — — , 4 za k étant un coefficient numérique que nous déterminerons. Le résultat de la substitution donne pour reste dans la parenthèse : 64A- — 6 192A.-4-10 34.lG.fc -t- 15 — 2. 16F A(12/c-4- I) ft*(52fc-t-14) " IGtV- ~ ~4.1GtV ~Tg2.»V 8A5 ÎG^V 2A3 fe* Lorsque a est au moins égal à l'unité, ce reste est constamment supérieur à : 64A:— G 192A-4-10 34. 1 6A ; + 1 5 — 2. 1 6/c2 &(12A--4- I) Àr(52fc-4- 14) 16tV- ~ 12.16tV "*" llr'TV Ô.S.^'a1 16.9.tV 2&3 A' z-'a 5. sra7 ou bien : 576 il— 82 135 + 100.3. 1G k — 104. \Gk>- — 16.32. fc* 6P — k* 1G. 12. tV 162.9.^'a4 3r'a' Or, si je posais 576 k — 82 = 0, j'obtiendrais k = -~, valeur très-voi- DE LA FORMULE DE STIRLING. 13 sine de |. Et comme, en posant k = \, les termes restent positifs, j'en con- clus que pour 3. t. m = ra -+- — — . 4 1.TH D' est encore positif, et, par conséquent, je puis poser p'} et a fortiori 3. I. A > y« -+- " = 4 7. -ii C'est la limite inférieure que nous garderons pour p. Nous allons mainte- nant procéder à la recherche de la limite supérieure de p.. § i. De la limite supérieure de //.. — Nous avons posé : D. = I /V2(t-x)2 _^_ rfx== r=. K /\ y o r = x / *-*'! — a?) e 1 H- X* nr. 1 -+- r2 (/x, '' X ) e-2r,r" r2"-4(l— xY(\— X2) ■/ 1-4-X2 M SUR UN POINT DE LA THEORIE Or comme on a : - — '-e-t*"dx = I x,"-*(l— x)se-ïT"*<7x-t- I - e-*'" dx, n ut, el /, X ^ ^-»x ,r^-*(l_j;)*(l_x2) / . . , / s*— "M— a?)' ' , -e-2*Mr/x = / x2™-5 (l-^e-'^rfx- / K—^-L 1 -t- X2 t/ t/ \ +x~ e'ir"' dx. on «mi lire x-'" * ( 1 - x)«(l —x2) e_2Toj rf^ = / ga»-m__xye-**-fc + J xsm-s(1_a;)»e-îr« rfa,. - et comme ,y î +x'- o r'—'H-a)' (<-«') e_ Wm rfj / ^,„_5 ( _^, e_ ST„ dx ^ I -4- X2 t/ -xni-x2)^^^. on aura : 2 / J'"">(1 X)'(1 JV"~rfx < / x2"'-\''l-x)5e-2T»'dx + / a* , / 1 -4- X* . / tX 1 — xf e-2"" dx (I— x)' e'-*" dx. O L'on aura donc : 2.r(2m-+-l) 8r(2»i) 8r(2m— 2) 2r(2m — 3) ^ (Sra)*"*' (2to)"" (2t«)-"-2 (2«02m-" + /x2'"-'(l — x)3 e-270' (3 — x) rca + f avec la restriction r« -f f 55 5. Cette condition nous fait sortir un peu des limites que nous nous nous sommes imposées; puisque nous avons dit que nos formules seraient applicables dès que a = 1 ; mais nous allons y rentrer immédiatement pour la valeur de m'. § 5. De la valeur de m'. — Avant d'aller plus loin et de tirer des para- graphes précédents les conclusions sur la valeur de m', nous remarquerons Avec un peu d'attention, Ton reconnaîtra pourquoi nous avons choisi certaines équations plutôt que certaines autres pour rechercher les limites inférieure et supérieure de /*; et l'on verra que l'on a pris les équations les plus favorables dans les limites où l'on s'était placé. 16 SUR UN POINT DE LA THÉORIE que si on calcule la valeur numérique de l'intégrale définie I P b*"-*(1— »*) 1 «■ J I -+- x2 ° 1 — e-1*"1 dx pour la valeur particulière m = 7tfl + f=4, on trouve que cette intégrale est négative et comprise entre — 0, 0000006 c! — 0, 0000007. On en conclut (pie la valeur de p, qui donne : ~~ 1 x* 1 — e -'■ est inférieure à 4 pour la valeur particulière r.a + -f = 4. dM Or, si de cette équation nous tirons la valeur de — , on trouve : /xs//-2(l— a;') log x , 1 log — «X n/Lt. o da -f sc^-'fl— X2) 1 — «x , 1 + x2 e™"' — 1 et comme l'on pourrait procéder par un moyen identique à ceux que nous avons employés précédemment; que, pour toute valeur positive de a au moins égale à l'unité, l'intégrale du dénominateur est négative pour f = tt« + \ — — , et a fortiori pour la vraie valeur, qui est supérieure à celle-ci; que, / Ta " ' de plus, l'intégrale du numérateur est essentiellement négative, on en con- clura que — va en croissant dès que a = 1. On en conclut que ^ est tou- jours inférieur à 4 pour toute valeur de a qui donne na + f % 4. On en con- clut aussi que p est toujours inférieur à 5 pour toute valeur de a, telle que -(, _|_ | ^5? puisqu'il est démontré que ^ est inférieur à 5. Ainsi depuis a égal à l'unité jusqu'à na+f , on aura w'=3; et depuis r.a-\- f — 7— = 4 jusqu'à 7t« + f =S, on aura m' = 4. DE LA FORMULE DE STIRLING. 17 Ces considérations, jointes à ce que nous avons trouvé précédemment sur les limites de p, nous permettent d'énoncer sur le nombre m', le théorème suivant : Si a n'est pas inférieur à l'unité, et qu'il uy ait point d'entier compris mtre m _i_ s L et r a 4- 4, on obtendra la valeur de ni' qui donne ' » 7. Ta * l'erreur minimum, en prenant pour m' le plus grand entier contenu dons S'il tombe en entier entre ces deux limites, il y aura doute s'il faudra prendre ou cet entier ou celui qui le précède pour la valeur de m'; mais il faut remarquer que ces cas, très-rares d'ailleurs, sont les moins importants, car ce sont justement ceux où il est indifférent de prendre soit ce nombre en- tier, soit celui qui le précède, Terreur étant à peu près la même dans les deux cas. § 6. Nous pouvons maintenant énoncer sur la formule de Slirling les théorèmes suivants : I. Dans la formule de Slirling, Terreur va constamment en décroissant , aussi longtemps que Ton n'a pas m > m + f — — ■ Dès que m atteint r.a 4-t, Terreur recommence à croître et croit indéfiniment. IL Aussi longtemps que m n'est pas supérieur à ~«+f — YTa> 'erreur esl moindre que la moitié du terme auquel on s'arrête. ÏII. Tant que m n'est pas supérieur à m — ■- - - ^ , Terreur est moindre que la moitié du terme auquel on s'arrête, mais en même temps elle est plus forte que la moitié du terme qui aurait suivi. IV. Si m, atteint m — {, Terreur est plus faible que la moitié du terme qui aurait suivi. V. Si m atteint m -{- f , Terreur est plus faible que la moitié du ternie qui aurait suivi, et plus forte que la moitié du dernier terme. VI. Enfin si m n'est pas supérieur à -.a -j- } — — , on peut prendre indifféremment : loa T (1 -t- a) = \ log w2t« -f- a (log a — I ) -+- — 5-r-r -+- { — çtt: — ~^T^, p v ' ° 1.2a 3.4a3 (2m—a) (2m— 2) a* Tome XXX. J 18 SUR LIS POINT DE LA THEORIE ou bien b, b5 (— i)"-lB,i_, loe. r ( I -i a) = l log 2t« + « (log a — I ) + — — — ; -+- — — — b * 3 1.2a 3.4a5 (2m - 3) (2m— 2) a*— . (— <)— 'lW-i 2 (2m— 1.1. 2m. a* l'erreur sera, dans les deux cas, de même signe que le dernier terme, el moindre numériquement que , r Bim_3 Bam_t 1 4 |_(2m — 3)(2nt — 2) a'—3 "" (2m— 1 ) 2m. a*"-' J ' Tous ces théorèmes se démontrent avec la plus grande facilité. Le premier résulte évidemment des considérations sur lesquelles nous avons appuyé la recherche de m' dans le § 2. Les 25, 35, 43 et 55 résultent de l'égalité x*»7* , I . .< / -i-'"' 1 '=- 1 / , log -■ ete h / log — — = 2, . _ , — / x — » r;"™ I + x' 1 — e-*™ < B2„,_i < 2 (2m— I). 2m. /"-*, /"■■* A = / cos — dz = I cos — dz — / cos — dz = { — / vos — dz. J 2 J 2 J 2 J 2 o o m m B = / sin — ■ dz = i — / sin — dz. J 2 J 2 O m Or on a : / S-^~ dk = — / dk. sin k I e'" x'-' dx. ,/ k" «*(»)./ '/ r\-osk . V" r~ 20 SUR UN POINT DE LA THEORIE Et, si dans ces intégrales doubles, on intègre d'abord par rapport à k, on obtient : /— — dk = (os k' I - dx — sin k' I — dx . k" r(«) L *s \+xt J 1 + x* J 1 + K8 Or ces deux intégrales se développent facilement comme suit : / -L- dx = / e-2'T" x1 f/x— y e-!I"i' dx +J e~lrU x' dx • o I -+- r" ' „ o o 30 J +j,,-i ,/x + (-1 )-.J { + jg dx . o o / - dx = / e~-*" x' dx - I /s+2(„-l)-l / !■--'* X1 e-*** x< dx + (—1)" J ; 7 •/ 1 -t- x- En remplaçant dans les seconds membres les intégrales définies connues dx. DE LA FORMULE DE STIRLlMi «21 par leur valeurs, on obtient immédiatement les formules de développement c ho reliées : 1 1.5 l.ôïî.7. mr «V wtV 2+în-l I / d + |, ou » > «/ + 1, n ^ + 1, et, dans le second cas, par la relation : f+n — !>n/ + f, '< - En partant de là, il démontre que les constantes H,, H„ sont du même ordre que les intégrales ffàffif), frdff(f) , et que ces différentes intégrales sont toutes successivement négligeables les unes par rapport aux autres. Ces principes sont fort importants pour la théo- rie des phénomènes capillaires; mais nous montrerons plus loin qu'ils ne sont nullement généraux, et que, dans certains cas, ils sont absolument faux. Le reste du mémoire de Petit n'est qu'une répétition , sous une forme très- SUR LA CAPILLARITE. 23 peu différente, de la théorie de Laplace. Toutefois, on doit reconnaître à ce travail le mérite d'une exposition claire et bien ordonnée. Quelque admiration que doive inspirer le talent avec lequel Laplace a su , en partant d'un même principe, résoudre complètement des questions en apparence très-différentes, on doit reconnaître que sa théorie est toute à la fois moins élégante, moins générale et moins complète que celle de M. Gauss '. En effet, l'analyse de cet illustre géomètre s'attaque directement à ce vaste problème : Déterminer l'équilibre d'une masse fluide en contact avec un corps solide; pour le résoudre, elle n'a besoin que d'un principe mathématique, celui des vitesses virtuelles, et d'un principe hypothétique, celui de l'in- sensibilité de l'attraction moléculaire à une dislance sensible. Nous passerons, pour y revenir bientôt, sur les quelques objections (pie M. Gauss présente d'abord contre la théorie de Laplace. Nous ne faisons en ce moment que l'histoire des théories, nous réservant de les comparer ensuite et de signaler les imperfections qu'elles nous paraissent renfermer, et que nous reconnaîtrons plus facilement après un examen général. Voici un résumé très-succinct de la théorie de M. Gauss. L'équilibre d'un liquide en contact avec un solide, a lieu sous l'influence de trois espèces de forces : la pesanteur, les attractions des molécules liquides (Mitre elles, et les attractions réciproques des molécules solides et des molé- cules liquides. Soient m, m' deux molécules liquides, 31 une molécule solide, et soient : mm' f(m,m') l'attraction des deux molécules m, m', et ///MF (m, M) celle des deux molécules m, M, en supposant, pour plus de généralité, les fonctions d'attraction différentes : m, m' et m, M désignent les distances des molécules. 1 Comment. Soc. Gottingensis , VII, 1828-32. — Principia generalis theorîae figurae flui- dorum in statu aequilibrii. C.-F. Gauss. 24 RECHERCHES Eu appelant d [m, m') et d (m, M) les déplacements virtuels projetés clans les directions de ces forces, et dz le déplacement virtuel dans le sens de la pesanteur g, on aura pour le moment virtuel du point M : — mzin'f(i», m') d(m, m') — »rasMF(m, TA)d(m, M) — gdz, el l'équilibre du système exigera que l'on ait zm [— gdz— Zm'f(m, m') d[m, m') — sMF (m, M) d(m, M)] = o Cela posé, si Ton fait ? (X) =Jf{x)dx, et $ (x) = / F (x) f/.r) . x j l'expression précédente sera la différentielle totale de la suivante : sm[—gz + }a»'f(»i, m') -+- sM* (wi, M)]. En effet, bien que la différentielle d (m, m') dans l'expression mm'f{m , m') d [m, m') soit seulement partielle par rapport au mouvement virtuel de m , la sommation 2 apportera avec le terme m'm f(m>, m)d(m', m) la différentielle partielle complément de la précédente. En représentant l'expression précédente paru, on voit que l'équation d'équi- libre se réduit à dQ = o. La condition d'équilibre est donc que la quantité Q. soit un maximum. Le facteur | qui affecte le second terme de cette expression provient de ce qu'en donnant les termes : mm' f(m, m') d{m, m') comme si d(m, m') était une différentielle totale, nous sommons en réalité deux fois le même terme. Si, au lieu de points détachés m, m', M, on a des éléments ds, ds' et rfS de deux corps de densités uniformes c, C, remplissant des espaces continus s el S, les sommes précédentes deviendront des intégrales, et l'on aura n = — gefzds -t- - fdsfds' 9[d^ds') + eC fds/dS *(rf«,dS). SUR LA CAPILLARITE. 25 Dans celle formule, z est la hauteur de l'élément ds au-dessus d'un plan hori- zontal quelconque. Les deux intégrales précédentes sont des intégrales sextuples. M. Gauss, en considérant les éléments ds' , r/S comme des éléments de pyramides ayant leurs sommets en ds , parvient à ramener l'expression précédente à celle-ci : n = — ycjzds h sf{o) ta(o) -4- tcCT©(o) w cC %dt dl' cos q cos q' 6 (dt, dt' ff {dt, dtf dt dl cos q cos Q9 ( dt, dl ) [dt, (/T)2 Dans cette équation, s représente le volume entier du liquide, / sa surface, dt , dt' deux éléments de cette surface, q et q' les angles que font les nor- males à ces éléments avec leur distance dt, dt' , T la surface du liquide en contact avec le solide, d'Y un élément de cette surface et q, Q les angles des normales aux éléments dl, dT avec la ligne dt, dT qui les joint. Enfin $, 6, 0, sont des fonctions ainsi définies. i (x) = — / x2 ? (x) dx , x Mi) = - f ï(x)dx, X 0 (x) = — / Y {x) dx = J dx Ç x* (x) dx. x xx Les deux dernières intégrales de la valeur de Q sont des intégrales qua- druples qu'il resterait à déterminer. Mais on peut reconnaître qu'elles sont généralement négligeahles. Il suffit en effet d'observer que l'on a dt' cos q' du étant l'élément de surface sphérique de rayon 1 , compris dans les pyra- Tome XXX. 4 26 RECHERCHES mides dont la base est dl' et le sommet dt; il résulte de là que la première des deux intégrales quadruples précédentes se réduit à fdtjdn cos rji (dt, dt) ; on peut reconnaître que tous les éléments de cette intégrale seront très-petits, si l'on admet que la fonction B(x) n'a pas de valeur sensible dès que x est une quantité appréciable. En effet, si Ton suppose alors la distance dl, dl' sensible, le facteur S (dt, dt') sera très-petit; si au contraire on suppose cette dislance insensible, on voit que sa direction sera à peu près tangente à la surface, de sorte que l'angle q étant très-voisin d'un angle droit, cos q sera très-voisin de 0. Le même raisonnement s'applique à la seconde intégrale quadruple. Mais nous devons remarquer avec 31. Gauss que ces considérations se trou- vent en défaut dans le cas où la surface du liquide offre certains points sin- guliers, ou lorsque le liquide forme en certains points une couche d'épaisseur insensible; on conçoit que, dans ces cas, l'angle q peut être fort différent d'un angle droit, sans que la distance des éléments dt, dt' soit sensible. En écartant pour un moment ces cas d'exception, on voit que nous pouvons prendre „ {o) — *e(o) -+- tcCT©(o), pour la quantité qui devra être un maximum; si nous observons que, dans tous les changements que l'on peut faire subir à la ligure du fluide, le volume reste le même , nous pourrons supprimer le terme ^ s ty (o) dont la varia- tion sera toujours nulle ; cela fait, en divisant par gc et changeant les signes, nous aurons une expression W = fzds + — t cos A = ; ou sin \ A = — a1 x C'est le résultat donné par Young, et déduit par Laplace de la comparaison de ses deux théories. L'inspection seule de la quantité - ^f^- qui entre dans toutes les for- mules de M. Gauss conduit au théorème de Clairaut, il suffit de donner à a2, fy différentes valeurs relatives. L'illustre géomètre de Gôttingue s'attache particulièrement au cas où l'on a /32 > a ; il montre que c'est précisément celui où il se forme le long des parois des corps solides une couche liquide d'épaisseur insensible; c'est donc un de ceux que nous avons écartés d'abord. En y appliquant l'analyse, on reconnaitque l'équilibre est le même que dans 28 RECHERCHES le cas où /3s = a2, parce qu'alors la couche liquide remplace le corps solide. C'est ce que Laplace avait conjecturé. M. Gauss termine son admirable mémoire par quelques considérations générales; il y indique, entre autres choses, la différence qui peut exister dans l'état de repos et l'état iï équilibre. Le premier correspondrait à une valeur de l'angle A différente de celle que la théorie assigne, et qui résulte de quelque cause de résistance. La théorie de 31. Gauss a été l'objet de deux travaux remarquables, l'un de 31. Pagani, inséré dans le Journal de M. d'elle, travail purement analy- tique, et dans lequel le problème est traité, comme dans le mémoire de 31. Gauss, à l'aide du calcul des variations, mais par des méthodes diffé- rentes; l'autre, de 31. Bertrand, publié dans le Journal de M. Liouville, t. XIII, 1848. Ce dernier travail a pour but de simplifier cette belle théo- rie, et il est difficile, en effet, de la réduire à une expression plus simple (pie celle que 31. Bertrand a su lui donner au moyen de considérations géomé- triques et mécaniques extrêmement ingénieuses. Ce travail contient en outre quelques résultats nouveaux, dont nous aurons l'occasion de parler dans la seconde partie de ce mémoire. Poisson publia sa grande théorie de l'action capillaire ' un an après l 'ap- parition du mémoire de 31. Gauss. II avait déjà abordé la question de la capillarité dans son beau mémoire Sur l'équilibre des fluides, inséré dans les Mémoires de l'Institut, t. IX, 1830. Dans ce travail, il émettait cette opinion grave que, dans la seule hypothèse de Laplace, qui attribue les phénomènes capillaires à la courbure de la surface, ces phénomènes étaient impossibles. H faudrait en outre, pour les expliquer, considérer la variation rapide de la densité près de la surface, variation que Laplace, ainsi que nous l'avons dit, avait signalée en admettant qu'elle put, en certains cas, modifier les phéno- mènes. Mais il y avait loin de cette conjecture de Laplace à l'affirmation ab- solue de Poisson. Aussi, dans sa Nouvelle théorie de l'action capillaire, ce grand géomètre, sentant toute la gravité de son assertion, cherche-t-il à la justifier de nouveau. Il observe que Laplace n'a pas tenu compte, dans sa 1 Poisson. Nouvelle théorie de l'action capillaire , 1831. SUR LA CAPILLARITE. 29 ihéoric, de l'action répulsive de la chaleur; nous avons vu , en effet, que dans la Mécanique céleste l'illustre auteur se borne à dire que l'action de la chaleur étant uniforme sur toute la surface du liquide ne peut, pas plus que la pres- sion atmosphérique, modifier l'équilibre. Plus tard, dans une note insérée dans le Bulletin de la Société Philomatique de 1819, il corrige un peu sa première opinion, en indiquant que l'on devra considérer la fonction de Fat- traction qui entre dans son analyse , comme la différence de l'attraction el de la répulsion; mais le caractère de cette fonction restant le même, les con- séquences de la théorie subsistent. Poisson n'admet pas qu'il en soit ainsi, et il cherche à prouver que, du moment où l'on fait abstraction de la variation de densité dont nous avons parlé , la quantité K de l'analyse de Laplace , qui exprime l'action d'un fluide terminé par un plan sur un filet perpendiculaire à sa surface, est une quantité négative, loin d'être une quantité positive extrê- mement considérable comme Laplace le veut. A cet effet , considérant un filet 00, [fig. 2) normal à la surface du liquide, il montre que les forces qui agissent sur ce filet sont la pression due à la courbure au point 0, où X, /' expriment les deux rayons de cour- bure, plus la pression de l'air n, plus l'action de la pesanteur, c'est-à-dire le poids du filet décomposé suivant la verticale ou gpa. (p étant la densité et a. la différence de niveau des points 0,0,), plus enfin l'action du liquide inférieur terminé par le plan C, 0, D, perpendiculaire au filet, action qui , d'après la définition même de K, sera égale à cette quantité. 11 est clair d'ailleurs que, dans l'hypothèse d'une densité constante, le liquide compris entre le plan 0,0,0, et le plan tangent COD, n'exercera aucune action. La somme des forces précédentes devant, pour l'équilibre, être nulle, on a : K -+- fi -f- gpx -+- n = o, d'où l'on tire : H l\ i K = — n — gpa -+- (\ ^ 7} 30 RECHERCHES Si la surface est plane, on aura simplement K = — n — gpx et à la surface K = — n. On voit donc bien que K sera une quantité négative; mais ce raisonne- ment, si même on le suppose fondé, ne faisait que relever une inexactitude dans les assertions de Laplace, sans détruire en rien sa théorie, attendu que cette quantité K s'éliminant dans les équations d'équilibre, peu importe sa nature. Mais Poisson va plus loin, et cherche à prouver que, dans l'hypo- thèse d'une densité constante, la quantité H des formules précédentes et de celles de Laplace doit être nulle. Pour cela, au lieu de considérer un filet cylindrique normal à la surface, il considère un fdet à section variable, dont la section va en augmentant vers l'intérieur de la masse liquide. En appelant s la distance OM (/?//. 3), à la surface de l'élément 0 et w' celle de la section du fdet en M, on pourra prendre J = w ( 1 + ks), et concevoir le filet 00, comme partagé en deux, l'un cylindrique de base w, l'autre ayant une sec- tion variable exprimée par o>ks. L'équilibre de la première partie aura lieu sous l'influence des forces que nous avons examinées tout à l'heure; l'équi- libre de la seconde partie sera dû à des forces toutes semblables; seulement, deux de ces forces seront négligeables par rapport aux précédentes : ce sont l'action du ménisque et la pesanteur. Les seules forces qui resteront à consi- dérer seront l'action sur 00, de la portion de liquide comprise entre les deux plans COD, C,0,D, et celle qui est au-dessous de ce dernier plan. En re- présentant ces actions par \uk et Vak , l'équation d'équilibre sera : K. -4- /t -*- gpx -»- n -i- VK -+- UK. = o. qui, à cause de celle que nous avons posée, se réduit à D + V = o. Cela posé, au moyen de remarquables intégrations Poisson trouve u = IK — H. V = 2H — LK . SUR LA CAPILLARITÉ. 31 / étant la longueur du filet 00,. On aura par suite ce que Poisson voulait démontrer. Non content de ce résultat, Poisson montre encore qu'il faut avoir égard à la compression que le liquide subit près de la paroi du tube, à cause de l'attraction de celui-ci. Appelant A le poids de liquide soulevé ou déprimé, de contour du tube, et 7,7' deux constantes relatives à la nature du liquide et à celle du tube, il établit dans l'hypothèse d'une densité constante, la formule posée par Laplace : a = (27' — q) c. Pour faire voir ensuite l'inexactitude du coefficient de c, il partage le liquide en plusieurs parties, au moyen d'un plan horizontal GH (/?>/. i) mené à une distance sensible au-dessous de la surface AOB, et d'une surface cylin- drique parallèle à la surface intérieure du tube, et distante de celle-ci d'une longueur KL insensible, mais plus grande cependant que le rayon d'activité des molécules du tube sur celles du liquide. Il désigne par C, C les parties du liquide comprises entre cette surface et la paroi, et par D, D' celles qui sont dans l'intérieur de cette surface , puis il appelle Q, Q', P, les actions verticales exercées sur C par D, D', C. En négligeant, à cause de l'insensibilité de l'épais- seur KL, le poids de C,et la pression exercée sur sa surface supérieure pas l'atmosphère , on a pour l'équilibre de cette partie l'équation : Q + Q' + p = 0. Observant que l'attraction du tube n'agit pas sur D, et que par suite le poids de cette partie, qui ne diffère de A que d'une quantité insensible, n'est soutenu que par l'action de C sur D égale à l'action réciproque Q de I) sur C, Poisson admet Q= A. L'action mutuelle de C et de D' étant analogue à celle qu'exerce un tube 32 RECHERCHES sur une colonne liquide placée dans son intérieur, on aura, en confondant le contour intérieur de c avec le contour du tube : Q' = cg. Enfin , en intégrant l'expression de l'attraction de deux éléments des par- ties c, c', on trouve, P = ici/. Ces valeurs rassemblées donnent : A = cq. Valeur qui ne peut s"accorder avec la précédente de A, que dans le cas où ' = &> {\-\-ks),u étant la section à la surface, et u' la section à une distance normale s de la surface; A- était une constante. Pour poser l'équation d'équilibre de ce filet, le savant géomètre le décomposait en deux parties , l'une cylindrique de sec- tion constante co, l'autre de section variable Àws. L'équilibre de la première partie avait lieu sous l'influence des forces dont la somme forme le premier membre de l'équation (1). L'équilibre de la seconde partie était déterminé: 1° par la pesanteur; 2° par l'action du ménisque C'C DD'; 3° par l'action du liquide compris entre le plan tangent COD et le plan parallèle CjO.Dj situé à une distance insensible du premier; 4° par l'action du liquide situé sous ce plan C,0,D,. Poisson néglige les deux premières forces, et représentant les deux dernières par Va>k et Uuk, pose l'équation : 2 U A + n-hVK + UK = o . . . . (2) qui, à cause de (1), se réduit à U -+- V = o (3) D'ailleurs, en calculant les intégrales représentées par ces deux lettres, on trouve u = /k — H v =2H — IK, et l'égalité (3) se réduit à H = o 3G RECHERCHES Donc, affirme Poisson, dans l'hypothèse d'une densité constante, la quan- tité H doit être nulle, et les phénomènes capillaires ne peuvent avoir lieu. Nous irons plus loin, car nous ferons voir qu'en tenant compte des forces «pie néglige Poisson, on arrive à cette conséquence que la quantité H n'est pas nulle, mais négative comme R, de sorte que les phénomènes capillaires doivent également avoir lieu dans l'hypothèse d'une densité constante; seu- lement, ils devront être tout à fait contraires à ceux que prévoit Laplace: c'est-à-dire qu'il devra y avoir dépression là où Laplace trouve une éléva- tion et réciproquement. Pour plus de simplicité, supposons le fdet vertical de sorte que « = l, et admettons qu'à la hase de ce filet, la surface du liquide soit de révolution et que l'on ait ainsi l = V. L'équation (1) deviendra n K — • — ■+- qpa ■+-[!= 0. Complétons l'équation (2) en y introduisant les forces que Poisson a négli- gées, savoir la pesanteur, dont l'expression sera fl, , gpkuP J kasds = — - — , et l'action du ménisque que nous devrons calculer. A cet effet, suivant la méthode de Laplace, nous déterminerons l'action d'une sphère sur un filet à section variable ko>s normal et extérieur à la sur- face. Soit dm la masse d'un élément de ce filet, situé à une distance r du centre c de la sphère , et à une distance f d'un élément rfM d'une couche sphérique dont le rayon est u : en appelant 6 l'angle mCM et ci l'angle du rayon CM avec un plan fixe passant par Cm, on aura f/M = du di> de. u2 sin « , et l'attraction de cet élément sur dm, décomposée suivant la distance Cm, aura pour valeur, ? étant la fonction d'attraction r r — m cos 6 dm ih dr dû 'i1 sin 8?{f) j. SUR LA CAPILLARITE. 37 En suivant l'analyse de Laplace, on reconnaît que l'attraction de toute la couche sphérique de rayon u sur l'élément dm est égale à d rQxu du I \~\ dm — ( V (r— u) — T (r -+- u)} , lF étant donné par les formules : fdf f(f) = c' - u[f), ffdfn(f) = c' - *{f). En admettant, comme Laplace et Poisson, que la fonction m(f') devienne nulle ou insensible, pour une valeur sensible de /', nous pourrons négliger >i (r _j_ a) } r _j- u étant toujours supérieur au rayon b de la sphère entière , que nous supposons de grandeur sensible. Nous prendrons donc seulement pour l'attraction de la couche de rayon u sur l'élément dm, la valeur d I , r — u dm — 2sru du T dr \ r Remplaçons dm par sa valeur, qui est kasds , s étant la distance Mm. On a s=r — b, ds = dr, donc dm = ku(r — b) dr. La valeur de l'attraction de la couche de rayon u sur le fdet supposé de lon- gueur indéfinie sera : 2tu du ! ka (r — 6 dr - 5 • J dr r Cette intégrale se décompose en deux autres : %xkaudu [ I rdr b / dr \J dr r J dr r 38 RECHERCHES la seconde intégrale se réduit à Y ( 6 — II) b ou 'i (b — m ) ; la seconde, intégrée par parties, donne y ( r — u } >i lb — v)- / dr — ■ de sorte que l'attraction cherchée a pour valeur : d y ( r — m ] r r Pour déterminer cette intégrale nous faisons : r — u =-z, d'où r = u ■+- z, et nous remplaçons - par son développement : l i_ z_ £ ii -+- z u «2 u' On aura ainsi />• = ■» si' — ' dz m (z) / zdz « ./ Nous pouvons nous arrêter à ce second terme, les intégrales successives étant négligeâmes, chacune par rapport à celle qui la précède. Posons 2r / dx. s (x) = K (x), -2t fxdx. m (x) = H (oc) , (on voit que pour x=o, on a les constantes K et H de Laplace) on aura, SUR LA CAPILLARITE 39 au lieu de l'expression précédente , duH(b-u) — kadu K (6 — h) h- ka • Enfin , en intégrant depuis u = o jusqu'à u = b, on aura l'attraction lolale cherchée de la sphère sur le filet. Le premier terme intégré donne -t- K«K,(o), en faisant — /~K (z) rfx = K, (x) , X et négligeant K,(6). Pour intégrer le second terme, on doit encore faire b — u = y, et déve- lopper - = — -7 suivant les puissances ascendantes de y; on trouve ainsi, en s'arrêtant au premier terme K« H, (0) 6 L'action cherchée est donc / H,(o)\ , ^K,(o) + -fcV-j ko. Il est facile de reconnaître que R,(o) = H. En effet : K,(X) = _ f" K{x) dx = -t- xK(x) — /""zK' (x) rfx /OC x2t *f'(x)rfx, d'où K, (0) = 2x /z Y (z) dx = H. Quant à H,(o), on trouve de même que sa valeur est 2t I zJ y(z) rfx. 40 RECHERCHES En faisant b = oc on a K,(o) ka = H/m pour l'action d'une masse ler- minée par un plan sur un filet normal à section variable ka>s, et Faction d'un ménisque tel que celui que nous considérons sera HJfc ou — K a — Kw I H + — , 6 Tel est le dernier terme que nous avons à introduire dans l'équation (2), qui, complétée, devient / II, upl api + n -t- k U -4- V — - ■ + — ^ \ 6 2 H / H, wH En prenant le résultat des intégrations de Poisson U -t- V = H , on aura D'où l'on tire P H + qa — = o (4) b y 2 !!i a b étant très-petit par rapport à H, et #/> -étant positif, on voit «pie H doit être négatif. Du reste, on démontrerait de même que H, doit être négatif aussi; il suffirait de considérer un filet dont la section variable serait à une distances, u' = a (1 -+- ks -t- fcV). On peut prévoir d'avance que l'on devra à l'équation (3) ajouter le terme A'lH'- y -h g,- SLR LA CAPILLARITE 41 ce qui donnerait encore Hi— -r + gp- = o (5) b ; elle aura pour valeur, en employant les notations précédentes : X = kafsds fds'. dr. rdc>. f\f) s — s f Une intégration identique à celle que nous avons effectuée plus haut nous donne X = ^Tkufds.s J\W (s' — s) n (s' — s ). SUR LA CAPILLARITÉ. 43 En intégrant depuis s'=o , jusqu'à s'=cc , ou a Enfin, intégrant depuis s=o jusqu'à s=î ou jusqu'à s=ao , on a : X = 2srA:co ¥ (o) = ko H , ce qui est le résultat de Poisson. En rassemblant ces différents résultats el divisant par L, on aura l'équation (5) H, , r- H — — -*- in -+- o/> — = o , 6 y" 2 dont nous avons montré l'impossibilité. Toutefois , la valeur précédente de X suppose que l'on a négligé la valeur de l'intégrale précédente pour s = l, c'est-à-dire la fonction x(0 si l'on fait : const. — % (x) = 2t fxYxdx, H — x (x) = 2r fvxdx. O Or, nous trouvons ici, chez Poisson, une contradiction évidente. En effet , lorsqu'il pose l'équation d'équilibre d'un fdet cylindrique, il suppose la lon- gueur / quelconque; mais, lorsqu'il considère le fdet à section variable, il suppose / insensible, afin de pouvoir négliger le poids de la partie variable. Cependant, afin de pouvoir négliger aussi les intégrales telles que /(/), il suppose / plus grand que le rayon d'activité de l'attraction moléculaire. De là résulte qu'il peut donner aux trois intégrales qui forment la valeur U, les mêmes limites o et l'oo , bien que celle qui est relative à la quantité qu'il ap- pelle s, et qui est égale à / — s, ne devrait être prise que de o à /. Enfin, plus loin Poisson dit que l'on peut négliger /2K à côté de H, et ceci suppose que / soit de l'ordre du rayon d'activité moléculaire; car l'inté- grale /"2K est formée d'éléments tels que M{x), tandis que l'intégrale H a pour éléments .rt' [x). Donc, pour que la première soit négligeable par rap- 44 RECHERCHES port à la seconde, il faut que /' le soit par rapport à x; mais on ne peut consi- dérer dans la valeur de H que les termes dans lesquels x a une valeur inférieure à celle du rayon d'activité, la valeur dex¥(x) étant nulle dans tous les autres; donc, enfin, l'2 doit être négligeable par rapport au rayon d'activité, et, par suite, / doit au plus être de l'ordre de ce rayon. De là résulte que , pour rester conséquent avec l'hypothèse de / insensible , nous n'avions point le droit de négliger ni la fonction X (/) , ni la fonction y.{l) = K — -2x f\ (./') il.r . (pie nous eussions rencontrée, si nous avions intégré séparément les valeurs de U et de V. Et je dois dire, en passant, que cette intégration séparée n'offre aucune difficulté , bien que Poisson , pour une raison que je ne m'explique point, ait entrepris une analyse longue et pénible pour la valeur de Y. En effet , en suivant la marche précédente de l'intégration de X , on trouve : et ou et sr/.s / ds' f f (/■) df = ul*kx j sds J ds' (s' — s) U (s' — s) . o I r — <> ut V = "2*kQ /sds fis' Cm (f) df = -2*ku /sds pis' {s' — s) n (s' — s) , O o r=o o o U = 2t^ /sds v(l — s), O V = 2xka / Si ds ['i (—s)— 'l' '(/ — *) O On a enfin : U = 2dU> f{l—s)d{l — syv{l — s) — lp\{l -s)d{l — s)'s o *o = *» [(/K-H-MO + %(l)], et V = 2dfcs> fd(-s)(—s)v{-s) — f(l—s)V(l-s)d(l-s) + l fv (l — s)d{l-s)'s à o ° = ka [2H — x ( — 0 — X (0 — *K -+- U [l)]. SUR LA CAPILLARITE. 45 On voit qu'en négligeant les fonctions *(/), %{l), et /( — /), on a les valeurs données par Poisson; mais si nous conservons ces fonctions, nous trouvons : U + y = H — *(-/). delà posé, prenons le développement de la fonction %{ — /), savoir : P P %(-/) = %(°) -/se» + j^ x"(o)~ YJs ^"(0)-,- •••• On a: x' x f= — 2t. x i x. d'où %' (u) = a x" x = — 2a- [va ■*■ m' x) x" (°) = -T>t <") x"'x = — 2t (2T'x -+- ¥*' x) Se"» = o Z" x = — 2t (5V'x + xH"'x) %,v (x) = 2t5'1" (o) Donc P li ,, x(_/) = z(o)-2t-T(o) + 2* - W o- D'ailleurs on trouve sans peine, y" o = — n (o). On a ainsi x(-0 = k(<>)-2t- ) multipliée par la différentielle dr de la distance, et par une puissance entière positive de cette même distance , ont le même caractère que la fonction y (r) , et même décroissent beaucoup plus rapide- 48 RECHERCHES ment que celle fonction, quand r augmente. Il eu sera ainsi des fonctions n (»-) = «■ —j?(r)dr, 'r ('') = ''' — fr " <'') '" • dans la théorie de Laplace, et des fonctions : ?(r) = c -ff(r)dr, f(r) = c' -fr*f{r) dr, dans la théorie de Gauss. On admet même qu'il en sera également ainsi pour des fonctions telles que la fonction 0 de celte dernière théorie : ' * (r) y' & (n Laplace considère comme évidente celle transmission des caractères de la fonction u(r) et V(r) , de sorte qu'il sera toujours permis de remplacer, dans l'intégration de telles fonctions , une limite finie par l'infini ; c'est ainsi •pie nous avons vu entrer dans la valeur de R Finlégrale /¥(.;) tfc au lieu de fW (z) dz. Gauss, plus prudent, montre que ces principes ne sont pas rigoureusement exacts, et que l'on peut imaginer un grand nombre de fonc- tions * ayant les caractères attribués à la fonction ■); dans cette hypothèse, on aura /R f> R' /)R' F (»•) dr — f F (r) dr — j f(r) dr. Tome XXX. 7 50 RECHERCHES Il en serait ainsi d'après Newton; de plus, ce grand homme admet que la répulsion est en raison inverse de la distance, ce qui suppose évidemment son rayon d'activité infini. Alors l'intégrale — ff(r)dr peut être prise de- puis o jusqu'à l'infini, ce qui la rend infinie. On esquive ces difficultés en admettant que les rayons d'activité de l'at- traction et de la répulsion moléculaires sont réellement infinis, mais que leurs rayons d'activité sensible sont inappréciables. On admet donc ainsi que les fonctions F(r) , f(r) ne peuvent pas changer de signe , mais qu'elles décroissent avec une excessive rapidité. Pour fixer les idées, on peut repré- senter les valeurs de ces fonctions par des ordonnées correspondantes aux distances prises comme abscisses. Les deux courbes qui relieraient les points ainsi obtenus devront couper l'axe des Y aux points dont les ordonnées sont F(o) et /'(o). A partir de ces points , elles se rapprocheront très-rapidement de l'axe des x, de sorte qu'à partir d'une abscisse d'une longueur sensible R, les ordonnées des deux courbes seront insensibles. On voit immédiatement par la considération de ces courbes que les intégralesyF(r) tfr elff(r)dr, représentent les aires comprises entre les courbes ; les axes des coordon- nées et les ordonnées correspondantes à l'abscisse /■, auront pour toute valeur finie de r une grandeur sensiblement la même , quelle que soit cette valeur finie; mais on voit aussi que, dans la plupart des cas, ces intégrales étendues jusqu'à l'infini auront des valeurs infinies, comme le fait observer M. Gauss. On voit de plus combien doit être absolu le principe de l'insensibilité des forces moléculaires à une distance sensible, pour que l'aire comprise entre l'abscisse X = R et une abscisse x = b de grandeur finie assez considérable, et comprise seulement dans les dimensions des corps soumis à l'expérience , soit tout à fait insensible par rapport à l'aire FORM , quoique le rapport de h à R soit un nombre immense auquel ne pourrait être comparé aucun rapport de dislances connues. Au reste, je dois dire que Poisson seul pousse l'hypo- thèse à ce point. On peut voir que Laplace considère le rayon d'activité moléculaire comme moins inappréciable. Les considérations précédentes ne me paraissent pas lever toutes les diffi- cultés. En effet, considérons de nouveau le filet liquide AR; supposons-le vertical, et, pour plus de simplicité, placé dans le vide. D'après les idées qui SUR LA CAPILLARITÉ. oi précèdent, Faction du fdet sur une molécule de masse /* placée en A, sera : yW)-/W]dr, o h étant une quantité finie quelconque , comprise seulement dans les dimen- sions des corps sur lesquels on peut expérimenter. Le poids de cette molé- cule fi étant pg, on devra, pour son équilibre, avoir : vg *-fU(r)-f(r)]dr = o. Ce qui indique que la répulsion /(;) doit surpasser l'attraction F(r). Ceci ri est au fond que l'argument à l'aide duquel Poisson démontre que la quantité R est négative, et la traduction analytique de cette idée généralement admise, (pie, dans les liquides, la répulsion surpasse légèrement l'attraction. Or, en présence de cette idée, je ne puis comprendre comment la théorie a pu immé- diatement poser comme principe l'attraction de deux molécules , représentée par une fonction positive de la distance. Je comprends encore bien moins cette énorme action des liquides sur eux-mêmes, affirmée par Laplace et Poisson, et qui, selon eux, et selon Poisson plus particulièrement, peut pro- duire une variation sensible de la densité , malgré l'excessive petitesse de la compressibilité des liquides. Je ne vois d'un point à un autre d'une masse liquide d'autre variation possible de la densité, que celle qui est due au poids des couches supérieures à ces points. Il peut en être autrement lorsque l'on considère un liquide en contact avec un solide : on comprend aisément que, le solide exerçant une véritable attraction non équilibrée par une répulsion, il puisse y avoir près de la surface commune du liquide et du solide des variations de densité dans les couches fluides ; mais il me paraît difficile d'ad- mettre qu'elle soit beaucoup plus considérable que celle qui est due à la pesanteur, attendu que l'attraction du tube est une force comparable à la gravité. Il serait inutile de rechercher quels changements apporterait dans les dé- veloppements théoriques le signe — donné à la fonction y(r). Il est clair que 52 RECHERCHES le résultai final de ce changement de signe sera de rendre négatives les cons- tantes K et H des formules de Laplace, et la constante a de celles de Gauss. Cette hypothèse de a négatif, et par conséquent de 2/32 — a2 constamment po- sitif, ne serait pas contraire aux phénomènes d'ascension dans les tubes capil- laires et à d'autres semblables; mais elle le serait entièrement à ceux de dépression , et plus généralement à tous les phénomènes dans lesquels la surface du fluide doit être convexe. Au surplus cette même hypothèse serait la néga- tion absolue de la cohésion des fluides, et comme celte cohésion ne peut pas être mise en doute, il faut pouvoir l'expliquer, tout en admettant l'exis- tence des forces répulsives et leur supériorité sur les forces attractives, dans l'état d'équilibre d'un fluide pesant. Il suffît pour cela de recourir à l'expli- cation, très-simple et très-connue , fondée sur celle hypothèse, que la force répulsive décroit beaucoup plus rapidement que l'attraction, lorsque la dis- tance augmente. Nous verrons, en développant cette idée, dans la dernière partie de notre travail , qu'elle justifie parfaitement le point de départ des théories de Laplace et de Gauss , et mieux encore celui de Poisson et d'Young. Les observations précédentes n'ont donc nullement pour but de nier l'exac- titude ou plutôt la réalité des principes posés par ces illustres savants, prin- cipes généralement acceptés, et qui ne peuvent tout au plus qu'être incomplets, du moins considérés à priori. Il est possible que ces principes, en ce qu'ils ont de particulier, de purement hypothétique, soient entièrement faux ; mais c'est l'expérience seule qui a le droit de porter une telle décision. Nous avons voulu uniquement combler une lacune dans la théorie de l'action capillaire , en montrant la possibilité de l'excès d'attraction qu'elle admet en principe. Toutefois, il est juste de remarquer que cette lacune n'existe pas dans la théorie de Young; nous avons rapporté le passage où il s'efforce d'établir physiquement son principe de la cohésion , par la considération simultanée de l'attraction et de la répulsion. Nous admettons donc, comme impossible à nier, le principe d'une attrac- tion capable de dominer la répulsion et la pesanteur. Il nous resterait à exa- miner le degré de confiance que l'on peut accorder à la loi que l'on a admise pour celte attraction. Je le répète, l'expérience peut seule prononcer sur ce point, et deux chiffres nous en apprendront plus que ne le pourraient faire SUR LA CAPILLARITE. 53 toutes les spéculations métaphysiques. Néanmoins, je crois pouvoir entrer dans quelques considérations qui nous conduiront d'ailleurs à des consé- quences importantes. Nous aimons à rencontrer dans les lois de la nature le plus de simpli- cité et d'unité possible ; c'est cette tendance de notre esprit qui a engendré et engendrera encore tant de lois inexactes, parce qu'elle applique la simplicité non pas aux principes mêmes des choses, mais aux conséquences de ces principes. Or, l'analyse montre bien que, dans la plupart des cas, des prin- cipes extrêmement simples conduisent aux formules les plus compliquées , et que, réciproquement, la simplicité d'une conséquence exige la complication du principe. C'est un peu ce qui arrive dans le cas actuel ; on a vu toutes les hypothèses que l'on doit faire sur la fonction de l'attraction moléculaire et sur les fonctions qui s'en déduisent, pour arriver à expliquer les lois si simples des phénomènes capillaires; on a vu qu'il fallait supposer à cette fonction de l'attraction des formes toutes spéciales, telles que celle d'une exponentielle dont l'exposant est le produit d'un très-grand nombre négatif par la distance. Ici je me permettrai d'émettre cette pensée, au fond très- sérieuse, que la construction de l'immense édifice que nous appelons l'uni- vers n'a pas dû être basée sur des calculs algébriques, et en particulier sui- des calculs d'exponentielles. Dans cette admirable machine, chacune des pièces qui était un atome, apportait avec elle la force qui devait la réunir à d'autres et concourir à l'équilibre du système; mais cette force ne pouvait à son tour apporter avec elle cette chose idéale que nous nommons une loi. La loi devait donc se trouver dans l'existence même de la force. Sous ce point de vue, le principe de la gravitation universelle, et en général tous les prin- cipes qui font varier une action émanée d'un centre d'activité en raison in- verse du carré de la distance, présentent un remarquable cachet de vérité. Car cette loi n'est alors qu'une conséquence géométrique de l'existence même de la force et de la manière dont elle étend son action. En est-il de même du principe de l'attraction moléculaire? Je ne le pense pas : les géomètres ont bien, à la vérité, énoncé que cette attraction dépendait de la forme et de la nature des molécules, tandis que l'attraction universelle en est indé- pendante; mais je ne crois pas qu'ils aient fait voir que cette dépendance M RECHERCHES devait donner à la fonction de l'attraction une forme et un caractère tels qu'ils l'admettent. Ce principe n'aura donc aucun autre caractère de vérité <|ue celui (pic lui donnera la vérification de ses conséquences. Il est une hypothèse sur la nature des forces moléculaires qui peut con- duire à une loi analogue à celle de rinsensihilité de l'attraction moléculaire à une distance sensihle, et qui a été repoussée par Laplace comme lui parais- sant peu naturelle. Elle consiste à admettre qu'une partie de l'attraction des molécules, celle qui est différente de la gravitation universelle, peut être absorhée de molécules en molécules. Quoi qu'en dise Laplace, je ne vois rien d'inadmissible dwis cette idée, et je trouve qu'elle offre beaucoup d'analogie avec celles de la chaleur latente et de la chaleur sensible. Acceptons donc pour un instant cette conception sur la nature des attractions moléculaires, et voyons quelle loi elle nous fournira; considérons encore un filet rectiligne infiniment étroit, formé d'un fluide continu. Soient m, m' deux éléments de ce filet , dont j'appelle la section w. J'imagine un cône dont m soit le sommet et m' la base. L'attraction émanée de m vers m' sera à l'attraction totale A de m , comme la portion de surface découpée par le cône que nous considérons dans la sphère de rayon \ , dont le centre est en m, est à la surface totale de cette sphère, c'est-à-dire à 4n, ou comme w est à la surface de la sphère dont le centre est en m, et dont le rayon est mm' = r. Elle sera donc ~^- Mais une fraction seulement de cette attraction parviendra à m' ; l'autre partie aura été absorbée par le fluide contenu dans le cône mm'. Cette partie absorbée sera naturellement proportionnelle au volume de ce cône, et par suite à sa hauteur r, de sorte que nous pourrons prendre pour l'action de m sur m' : a ( 1 — kr) mm' - a. et /.étant des constantes qui dépendent de la nature du fluide. On voit que cette attraction sera sensible jusqu'à une distance r = -, et qu'au delà elle i est absolument nulle. Le rayon d'activité ^ sera d'autant plus grand que l'at- traction sera moins absorbée. SUR LA CAPILLARITE. 55 Déterminons l'action du filet sur son extrémité A ; elle sera : rT1 kr — dr, en substituant à m' le produit de l'élément «dr par la densité p. Or, cette intégrale, prise entre ces limites, est infinie, et il est à observer que, réduite à son premier terme , qui n'est autre que le terme de l'attraction universelle , elle serait encore infinie. Il faut donc qu'il ne soit pas permis de prendre l'intégrale à partir de o , limite qui détermine cette valeur infinie. Et, en effet, on conçoit facilement l'interdiction de cette limite: en l'admet- tant, on comprend dans les actions des molécules du filet sur m, l'action de cette molécule sur elle-même, action qui est évidemment indéterminée, et même infinie, puisque l'on considère les atomes comme doués d'une résistance illimitée aux forces de la nature. La valeur infinie de l'intégrale précédente et de la force a {-^- elle-même pour x = o , n'exprime donc que l'inséca- Itilité idéale des atomes. On voit par là que, dans l'intégration précédente et dans toutes celles qui se rapporteront aux actions moléculaires, on ne devra jamais prendre pour limite inférieure o, mais bien une longueur s égale à l'intervalle de deux molécules, c'est-à-dire qu'il faudra commencer la sommation des actions exercées sur m par celle de la molécule la plus voisine. Mais ceci n'est pas conciliable avec .l'hypothèse d'un fluide continu, hypothèse nécessaire pour que l'on puisse appliquer l'analyse infinitésimale. Donc cette analyse ne peut pas s'appliquer avec rigueur à ces sortes de questions, et, à l'intégrale précé- dente, on devra substituer la somme : " 1 - ksn xmm '2. /* étant le nombre de molécules comprises dans la longueur du rayon d ac- tivité sensible -■ Poisson est le seul , je pense, qui ait insisté sur l'emploi des différences finies dans ces sortes de questions. M. Gauss pose nettement l'hypothèse d'un 56 RECHERCHES fluide continu ; mais il faut remarquer que c'est toujours là ce qui a lieu dans la plupart des questions de physique mathématique et de mécanique, où Ton substitue à une question physique un problème mathématique analogue. L'exemple précédent a seulement pour but de montrer que le calcul des diffé- rences finies permettrait l'usage de certaines hypothèses que repousserait le calcul différentiel. En effet, la première de ces deux analyses bannissant des sommations la limite inférieure o,, n'exigerait pas, comme la seconde, que les fonctions 0(0), »F(o) etc., des théories précédentes ne fussent pas infinies. De plus, elle introduirait dans les valeurs des constantes une donnée particu- lière à chaque fluide, savoir l'intervalle moyen de leurs molécules. Ainsi, par exemple, les constantes fr, «"des formules de M. Gauss ne seront plus simplement proportionnelles aux densités du solide et du liquide, comme elles devraient l'être si Ton admettait, chose vraisemblable, que les fonc- tions, f[r), F(r) ne varient pas de forme d'un liquide à un autre. Le même exemple montre encore l'importance de la remarque faite plus haut , que Ton doil intégrer seulement jusqu'au rayon d'activité et point au delà. Il est facile de reconnaître que l'on aurait ici des valeurs très-diffé- rentes si, au lieu d'intégrer jusqu'à r = J, on prenait comme limite supé- rieure une quantité finie quelconque, et, à plus forte raison, l'infini, qui donnerait une valeur infinie à l'intégrale. 11 est clair d'ailleurs que toute valeur de r supérieure à \; introduirait une force négative qui n'existait pas, puisque l'attraction n'est pas détruite clans notre hypothèse par une répul- sion, mais va en diminuant jusqu'à o, parle seul fait de son absorption. Et l'on doit bien remarquer que je n'ai pas supposé l'absorption de l'attraction proportionnelle à cette attraction même : la discussion précédente suppose, au contraire, que chaque molécule a un pouvoir absorbant donné, de sorte que, plus l'attraction qu'elle reçoit a perdu de son intensité, plus elle doit en absorber pour en être en quelque sorte saturée. Au reste, il est évident que ce ne sont là que de pures hypothèses, que je me garderai bien de vouloir faire entrer dans les théories, mais dont le développement m'a paru utile pour faire voir que les limites des intégrales de la théorie de l'action capil- laire peuvent être inexactes. Observons encore, pour terminer ces considé- rations, que l'intégration jusqu'au rayon d'activité moléculaire seulement, SUR LA CAPILLARITE. 57 n'apportera pas de changement dans les résultais théoriques; puisque ce n'est que substituer à une grandeur finie quelconque d'autres grandeurs très-pe- tites constantes pour un même liquide et un même solide; mais on voit que les constantes des phénomènes capillaires K, II, *, /52 renfermeront encore par là un nouvel élément variable d'un liquide à l'autre. El celle intro- duction d'éléments spéciaux dans ces constantes, loin d'être défavorable aux théories, les met au contraire à l'abri de puissantes objections que leur ferait l'expérience. Il nous reste un dernier mot à dire sur les théories dont nous avons l'ail l'histoire. On s'est étonné qu'elles aient pu conduire toutes aux mêmes résul- tais. Il est facile de reconnaître qu'il en devait être ainsi pour les théories de Laplàce et de M. Gauss. Les principes de ces théories étant identiques, leurs résultats devaient l'être, et ils le sont en effet; car on peut s'assurer sans peine que les constantes des formules de ces deux grands géomètres sont les mêmes. Ainsi, dans la théorie de Laplace, nous avons vu que l'on avait pour le vo- lume de liquide soulevé dans un tube prismatique ou cylindrique : H V = cos €>. c. 29D Dans la théorie de M. Gauss on a : V = a2 cos à. e. On doit donc avoir a =^- Or, les valeurs des constantes « et II sont : H = 2tI)5 f"rir jTrdr ff(r) dr. On doit donc avoir : /OC X _ 30 X 30 00 rdr frdr f'f(r) dr = C dr fr* dr f '/'(>•) dr. o r r a r r Pour vérifier cette égalité il suffira de poser : dr ar d. x(r) d. l!r) dr ' M''-"- rf|. ' Tome XXX. 58 RECHERCHES on verra facilement qu'elle se réduit à l'identité 2a (o) = 2> (o). La théorie d'Young ne doit pas non plus être en désaccord avec les précé- dentes, au moins dans toutes les questions qui dépendront de l'attraction du tube et de la pression due à la courbure de la surface. Car Young admet le même principe pour l'attraction du tube, et la même tension de la surface que Laplace et Gauss. La seule différence réside dans les principes qui con- duisent à la valeur commune de cette tension; encore n'y a-t-il d'essentielle- ment différent dans ces principes que le rôle attribué par Young à la force répulsive; quant aux forces attractives, il admet aussi qu'elles ne s'étendent qu'à de très-petites distances. La seule harmonie dont nous ayons lieu d'être surpris est celle qui règne entre les résultats de Poisson et ceux des autres géomètres. Cependant , il me paraît extrêmement simple de relier sa théorie avec celle d'Young , et par suite avec celles de Laplace et de Gauss. En effet , imaginons une série de surfaces semblables superposées et soumises à des tensions uniformes pour une même surface, mais croissantes d'une surface à l'autre depuis la surface supérieure jusqu'à la surface inférieure. Il est clair que l'action de chacune de ces surfaces sur une normale commune sera proportionnelle à la somme des courbures, et comme cette somme ne varie pas d'une surface à l'autre dans tous les points coupés par cette normale, les actions réunies de toutes ces surfaces donneront une pression normale égale à la somme des courbures multipliée par la somme des coefficients relatifs à chaque surface. Ainsi , si j'appelle a] le coefficient relatif à la surface supérieure, et de même aé , «!, ... *; les coefficients des autres surfaces , et R, R' les rayons et courbures com- munes à tous les points coupés par la normale MN (fig. 5 ) , l'action totale des surfaces suivant cette normale sera : lit + r') (a' "*" a* H h ""*' Il est évident que ces considérations peuvent s'appliquer à un fluide dont la SUR LA CAPILLARITÉ. 39 densité va en croissant à partir de la surface : il suffit d'imaginer une série de surfaces parallèles à celle-ci et détendant jusqu'au rayon d'activité molécu- laire. Sur chacune d'elles la densité, et, par suite, la tension, sera uniforme ; mais l'une et l'autre croîtront depuis la surface supérieure jusqu'à la surface inférieure. La formule précédente exprimera encore l'action de ces surfaces réunies, suivant une normale commune, et les coefficients^, 4, — • "* dé- pendront des densités croissantes, et iront également en croissant. Mais ces coefficients étant constants pour un même liquide, leur somme sera aussi un nombre constant, de sorte que la tension de la surface pourra être encore représentée par l'expression : \R R'/ On voit donc que le seul effet de l'hypothèse de Poisson sera, comme il l'indique lui-même , de donner aux constantes des valeurs différentes de celles qu'elles auraient sans cette hypothèse. Le raisonnement précédent ne s'applique parfaitement qu'à la comparaison de la théorie de Poisson avec celle d'Young; mais il me parait qu'on peut l'étendre sans peine à celles de Laplace et de M. Gauss, parce qu'elles con- duisent en résultat à ce que Young avait admis eu principe, c'est-à-dire que, d'après les résultats de ces théories, on pourra, pour faciliter l'analyse, y introduire la conception d'une tension uniforme de la surface admise comme point de départ par Young. C'est même ce qu'a fait M. Bertrand en différents points du lra\ail que nous avons cité, et dans lequel il simplifie la théorie de M. Gauss. Ainsi, l'on arrive à reconnaître l'accord des théories de l'action capillaire, en reliant la théorie si compliquée de Poisson à la théorie si simple d'^ oung, celle-ci à la théorie élégante et complète de Laplace, et enfin celte dernière à la rigoureuse et admirable théorie de M. Gauss, véritable sanction mathé- matique des précédentes. 60 RECHERCHES DEUXIÈME PARTIE. KEGHERCIIES EXPERIMENTALES. L'étude expérimentale de la capillarité peut être envisagée sous deux points de vue différents. Elle peut être purement physique, c'est-à-dire que l'observateur, supposant tout inconnu ou au moins douteux dans cette (pies- lion, peut chercher à préciser les causes des phénomènes capillaires, à reconnaître les influences capables de les modifier et les liaisons possibles entre les forces qui les produisent et les autres forces de la nature : on peut , en un mol, se proposer de faire l'histoire naturelle de la capillarité. On peut encore étudier la question au point de vue théorique, c'est-à- dire admettre (pie les causes des phénomènes à observer sont connues, que Ton a pu leur appliquer l'analyse mathématique et prédire leurs effets. H ne reste plus alors qu'à chercher si ces effets annoncés se réalisent, si l'observa- tion confirme ou infirme le calcul. Os deux études, l'une physique, l'autre théorique, sont intimement liées. Sans nul doute les premières données d'une théorie exacte seraient d'un puissant secours pour un examen plus complet de la question, ("est le carac- tère distinctif et précieux des bonnes théories de conduire à des découvertes imprévues en guidant l'observation. En revanche, il serait dangereux de prendre pour point de départ des principes que l'expérience n'aurait pas sulli- samment sanctionnés. C'est ainsi que le travail le plus complet, je pense, qui ait été fait sur la capillarité, le Traité de la cohésion de M. Frankenheim, perd en certains points beaucoup de son importance, par le seul fait qu'il s'appuie sur la loi connue de l'ascension des liquides dans les tubes capil- a e SUR LA CAPILLARITÉ. «il laires, loi mal démontrée et contestée. Plusieurs résultats d'expériences faites vec soin, mais calculées d'après cette loi, peuvent être entachés de l'inexac- titude de leur principe, et perdre ainsi le caractère de rigueur cpie l'on est n droit de demander aux observations de nos jours. Or, si Ton examine de quelle manière ont été trouvées et vérifiées les lois fondamentales des phénomènes capillaires, on sent vivement la nécessité de nouvelles vérifications. On le sent plus vivement encore , lorsque Ton aborde l'étude expérimentale de ces phénomènes , lorsque l'on se trouve en face des innombrables difficultés qu'elle présente. On se demande comment, sans instruments précis et sans indications premières, il a été possible d'obtenir les résultats assez concordants que nous trouvons dans les anciens travaux , tandis que nous , munis d'instruments d'une grande perfection , et connaissant d'avance la question que nous éludions, nous n'arrivons qu'à l'aide de mille soins à obtenir des résultats constants. On est en droit de supposer que les chiffres qui nous sont transmis ont été choisis, comme concordants, parmi beaucoup d'autres, et l'on peut se demander si les nombres élagués n'étaient pas les meilleurs, si l'irrégularité n'était pas la loi. D'ailleurs, en admettant même l'exactitude de quelques résultats, et l'on doit le faire au moins poul- ies expériences deGay-Lussac et pour celles de M. Frankenheim, on ne peut pas en conclure pour les lois déduites une exactitude complète. En effet , les expériences qui jusqu'aujourd'hui vérifient ces lois sont fort peu nombreuses, et ne s'étendent qu'entre des limites beaucoup plus restreintes que celles qu'assignent les lois théoriques, tandis que les travaux récents effectués dans des limites plus étendues mettent en doute les principes théoriques plutôt qu'ils ne les confirment. En résumé donc, les lois des phénomènes capillaires n'ont pas encore reçu de l'expérience une incontestable sanction, et l'on doit considérer comme nécessaire une vérification complète de presque tous les résultats physiques admis jusqu'aujourd'hui. L'étude physique , l'histoire naturelle de la capillarité , est peut-être en- core moins avancée que son étude théorique, et doit offrir certainement autant d'intérêt. Il s'agirait de séparer, dans chaque ordre de phénomènes , les causes purement mécaniques des forces électives dépendant de la nature des «2 RECHERCHES corps, de déterminer l'influence d'autres causes introduites dans les phéno- mènes, par exemple, les influences de la chaleur, de la lumière, de l'élec- tricité. Il \ aurait là une source inépuisable d'importantes recherches; mais ces recherches seraient, comme nous Pavons déjà dit, singulièrement facili- tées, si Ton pouvait s'appuyer sur des lois générales, dérivées d'un même principe, comme celles que donnent les théories mathématiques de la capilla- rité. Il importe donc, avant loui , de soumettre celles-ci au contrôle de l'ex- périence. La question, ainsi réduite à la vérification des lois théoriques, reste en- core extrêmement vaste. Car chacune des lois des phénomènes capillaires est la solution mathématique d'un cas particulier du problème général que s'était posé Gauss : déterminer l'équilibre d'un corps liquide en contact avec un corps solide. Et Ton peut exiger que, dans chaque cas, l'expérience s'applique à différents liquides pour un même solide , à différents solides pour un même liquide, et enfin, dans chaque combinaison de deux corps, à des dimensions différentes de ceux-ci. En présence du nombre et de l'étendue des questions à traiter, je me suis vu forcé de laisser de côté quelques-unes de celles dont la théorie s'est oc- cupée , afin de pouvoir porter toute mon attention sur les phénomènes que nous pouvons appeler fondamentaux , dans lesquels le problème mathéma- tique est à la fois le plus simple et le plus semblable possible au problème physique. J'ai commencé par l'étude de l'équilibre des liquides dans les tubes capillaires. Je me suis étendu particulièrement sur la dépression du mer- cure, dont l'observation signalai! au premier abord des anomalies exigeant une discussion sérieuse. SLR LA CAPILLARITE. 63 RECHERCHES SUR l/ÉQOJLlBRE DES LIQUIDES DANS LES TUBES CAPILLAIRES. PROCÉDÉ D'OBSERVATION. Mesure du rayon d'un tube en un point quelconque de ce tube. II existe peu de tubes dont la section soit rigoureusement circulaire , el j'ai remarqué que les tubes les plus elliptiques sont généralement ceux dont le diamètre intérieur est très-petit , el l'épaisseur des parois assez considé- rable. Ce fait s'explique , du reste, par le mode de construction des tubes; on sait qu'on les obtient au moyen d'une boule de verre que l'on étire en soufflant en môme temps dans son intérieur; l'égalité de pression résultant du souffle tend à donner au tube une section circulaire , mais la pesanteur, agis- sant en même temps sur celte masse très-molle , doit modifier cette forme circulaire , et déterminer un aplatissement qui sera d'autant plus grand que cette dernière force sera plus considérable par rapport à la première, c'est- à-dire à la pression de l'air intérieur. Or, il est clair que cette pression devra être d'autant plus grande que l'on voudra obtenir des tubes plus larges, tandis que la force tendant à produire l'aplatissement croîtra seulement avec l'épais- seur des parois. On voit donc que deux causes concourent à donner aux tubes très-capillaires et à parois épaisses une section plus ou moins elliptique. Une troisième cause, essentiellement variable, déterminera différents degrés d'ellipticité : c'est la fluidité du verre au moment où on l'étiré. On obtiendra généralement d'autant plus de régularité dans le tube, que la masse de la boule sera moins refroidie. C'est un fait que l'on peut constater à la lampe d'émailleur. Comme nous emploierons dans les expériences que nous allons décrire beaucoup de tubes à parois épaisses et d'un diamètre très-petit, nous devrons nous résigner à choisir seulement parmi ces luîtes ceux dont la section se rapproche le plus de la forme circulaire , sans espérer en rencontrer qui rem- plissent exactement cette condition. Dès lors, il faut que nous précisions ce que nous entendons par rayon de ces tubes. La loi du rapport inverse de l'élévation d'un liquide dans un tube au 64 RECHERCHES rayon de ce tube n'est qu'un cas particulier de celle loi théorique générale, que le volume liquide soulevé ou déprimé dans un tube capillaire esl , pour un même liquide, proportionnel au contour de ce tube; d'où il résulte que la hauteur qui mesure ce volume est en raison inverse du rapport * de la section du tube à son contour. Dans le cas d'un tube circulaire, ce rapport esl la moitié du rayon , de sorte que la bailleur est en raison inverse du rayon. Il est évident que nous pourrons appliquer cette loi à des tubes ellip- tiques, pourvu que nous entendions par rayon h double du rapport - de la section au contour. C'est donc ce rapport que nous devons déterminer. On peut y arriver assez facilement au moyen d'un fort microscope muni d'une chambre claire et d'un micromètre donnant les centièmes de millimètres. On dessinera l'image amplifiée de la section dont on suit facilement les contours, et l'image du micromètre donnera l'échelle. On pourra alors, si le tube est sensiblement elliptique, mesurer sur le papier les axes 2a, 26 de l'ellipse, et en déduire le rapport - et le rayon R = — ; pour peu que l'on ait choisi les tubes les moins irréguliers, il sera permis de calculer ce rapport par la formule : R = 2 - = c 1-r e étant l'excentricité ^a% 6' , et si cette excentricité est fort petite, il suffira d'employer la formule plus commode R =Vab, et même a -+• /> R = Pour la plupart des tubes dont nous nous sommes servis, Terreur résultant de l'emploi de ces formules n'affectait pas les millièmes de millimètre. On reconnaît du reste facilement qu'elle est de l'ordre de (a — b)-. On peut, au moyen d'un fort bon microscope, capable de grossir mille fois, obtenir avec exactitude les 1000mes de millimètre. Mais ce n'est qu'avec les plus grands soins qu'on atteint cette approximation , et il ne faut pas espe- SLR LA CAPILLARITE. 65 rer la dépasser; aussi les 4mes décimales que nous donnons dans nos résultats ne sont-elles destinées qu'à préciser la valeur des précédentes. On peut encore connaître très-exactement le diamètre d'un tube cylin- drique en y introduisant une colonne de mercure dont on mesure la longueur et le poids. En déterminant ces deux derniers à l'aide d'une machine à diviser et d'une balance trébuchant au i/a milligramme, on pourrait évaluer le rayon d'un tube parfaitement cylindrique et circulaire àOmm,0001 près; mais de tels tubes n'existent guère; il faut donc pouvoir tenir compte de Fellipticité et de l'inégalité de la section dans les différents points du tube. Il ne me pa- raît pas que l'on puisse, par le procédé en question, connaître la première de ces irrégularités, on ne peut que chercher à l'éviter autant que possible. Cette seule cause, sans compter la brièveté des opérations, suffirait pour faire préférer l'emploi du microscope. Cependant cet emploi peut conduire à de notables erreurs, surtout si l'on n'a pas la précaution de reprendre presque à chaque mesure d'un tube, l'image du micromètre servant d'échelle. C'est pour- quoi j'ai cru nécessaire de contrôler par les procédés précédents les mesures faites au microscope, et c'est avec satisfaction que j'ai vu les résultats de ces deux modes de mesure s'accorder toujours de la manière la plus complète. J'ai dû toutefois modifier d'une manière essentielle le procédé de mesure par un jaugeage au mercure; j'opérais de la manière suivante : Au moyen d'un microscope simple, je m'assurai d'abord que la section du tube n'était que très-faiblement elliptique; cette simple inspection donne une garantie suffisante. En effet, nous avons vu que dans le cas où l'excentricité est très-petite, le rapport R est sensiblement égal à \/ab, quantité qui nous est immédiatement donnée par le procédé que nous allons employer. Si l'on introduit dans le tube une longue colonne de mercure, sa longueur et son poids pourront être mesurés avec exactitude , mais nous ne pourrons en dé- duire que le rayon moyen du tube, rayon qui peut être sensiblement diffé- rent de ceux des points du tube où nous avons observé les sommets des colonnes soulevées ou déprimées par la capillarité. A la vérité j'ai fait voir, dans mon premier mémoire , qu'en admettant la loi du rapport inverse de la hauteur au rayon comme exacte pour des valeurs de rayons peu différentes , la moyenne des hauteurs obtenues en différents points du tube doit corres- Tome XXX. 9 66 RECHERCHES pondre au rayon moyen. Néanmoins, il m1a paru préférable de rapporter chaque hauteur au rayon de la section du tube qui renferme le haut ou le lias du ménisque. On peut y arriver de la manière suivante. On calibre le tube comme si on voulait le partage en parties d'égale capa- cité, c'est-à-dire que l'on mesure les longueurs /, , /._,, k,.... d'une petite colonne de mercure que Ton promène dans tout le tube. Cela fait, on détermine le rayon moyen d'une certaine partie du tube à l'aide d'une longue colonne de mercure commençant à l'origine des longueurs /, , L2, l3, — et embrassant un certain nombre de ces parties. Soient L la longueur de cette colonne, /// le nombre entier de longueurs /, , L qu'elle comprend , et - la partie de /,„_,., qu'elle renferme également; soient de plus R le rayon moyen de la longueur L et rt,r.2, r- les rayons correspondants aux longueurs /, , L2, ls on aura évidemment LR2 = /, r; -4- /2 r\ -+- -+- - lm+l /■!„+,. D'ailleurs, si / représente une longueur quelconque de calibrage, et r le rayon qui lui correspond, on aura aussi /,r? = /sr!= = if: Donc LR- = (m -*- i] lr\ Cela posé, en appelant P le poids de la colonne de mercure de longueur L. A le poids spécifique du mercure et tt le rapport de la circonférence au dia- mètre, nous aurons i> == taR2L. D'où enfin nous déduirons , pour la valeur du rayon r de la section du lube en un point quelconque , r = \/7^iyj = V'i> /étant la longueur calibrée à laquelle appartient le point donné, et q la quantité ta ( m -y- i ) constante pour un même tube. SUR LA CAPILLARITE 67 On peut abréger de beaucoup les opérations en déterminant directement le poids p de la colonne qui ;i servi au calibrage. On a simplement alors ▼ ri i Ce poids /> es! généralement trop faible pour qu'on puisse l'obtenir avec précision à l'aide de la balance ; mais on le détermine fort exactement en employant un tube divisé en parties d'égale capacité. A cet effet, on calibrera, on divisera et Ton vérifiera un tube capillaire, absolument comme si l'on voulait en faire la tige d'un thermomètre à divisions arbitraires. De plus, on déterminera , par la pesée d'une colonne de mercure occupant un grand nombre de divisions, le poids contenu dans une seule de celles-ci. Enfin, l'on ouvrira à la lampe l'une des extrémités du tube en forme d'entonnoir, et l'on aura ainsi un petit instrument fort simple, et qui m'a été d'un grand secours dans toutes ces expériences. Pour abréger le langage, j'appellerai ce tube divisé un mesureur. Pour déterminer le poids de la petite colonne de mercure ayant servi au calibrage, il suffira de la faire tomber dans l'entonnoir du mesureur, puis de l'aspirer dans la tige et de lire le nombre n de divisions qu'elle occupe. En appelant /,• le poids de mercure contenu dans une division , on a p = nk , cl ou r = \ / — . - • Toutes ces opérations se font très-vite et très-facilement, surtout en em- ployant le souffle de la bouche; on abrège particulièrement l'opération du calibrage, en faisant ainsi marcher par le souille la colonne calibrante. On peut le faire sans inconvénient, pourvu (pie l'on ne souffle jamais qu'à travers un appareil desséchant; il suffit d'attacher au tube, à l'aide d'un tuyau de caoutchouc , un tube en U rempli de ponce imbibée d'acide sulfurique. A ce tube, on attache un autre tuyau de caoutchouc de 60 à 70' , et enfin à ce tuyau, un tube à boules qui absorbe la plus grande partie de l'humidité. Malgré la sécurité que donne cet appareil, je crois préférable de ne faire subir au tube aucune opération avant les expériences auxquelles il est destiné. 68 RECHERCHES Je n'admets même pas qu'on puisse le netlo\er, si ce n'est pour certains liquides très-mobiles, tels que l'alcool , l'éther, etc.; mais nous verrons plus tard, en parlant delà dépression du mercure, quelles irrégularités peut faire naître un nettoyage en apparence parfait. On devra donc généralement n'employer que des tubes n'ayanl jamais servi, et, par suite, ne déterminer leurs rayons qu'après avoir terminé les expériences faites sur ces tubes. Il suffira de noter au catbélomètre, dans chaque expérience, la hauteur d'un point fixe du tube, son extrémité supé- rieure, par exemple; on pourra alors retrouver plus lard chaque point où l'on a observé le ménisque. 11 est clair que Ton pourra aussi, en opérant de cette manière , s'abstenir d'un calibrage complet. Il suffira de mesurer la lon- gueur d'une petite colonne de mercure dont on amène le milieu dans les points du tube où l'on veut connaître son diamètre, puis de déterminer son poids à l'aide d'un mesureur. Nous allons maintenant entrer dans quelques détails généraux sur la me- sure de la différence de hauteur du niveau d'un liquide dans un tube, et de son niveau dans un vase où plonge ce tube. Mesure de l'élévation ou de la dépression d'un liquide il au s un tube capillaire. Après avoir essayé différents procédés de mesure, pour les hauteurs dans les tubes capillaires , je suis revenu au procédé direct indiqué par Gay- Lussac, c'est-à-dire la mesure de ces hauteurs au moyen du cathétomèlre. On vise directement le point le plus haut ou le plus bas du ménisque, en amenant en contact le fil horizontal du réticule. Quant à la hauteur du niveau, elle peut être prise de différentes manières : on peut se servir d'une pointe que l'on amène en contact avec le niveau, et que l'on vise après avoir retiré le vase. Cette nécessité de retirer le vase est une gêne souvent considérable; il est plus commode d'employer une vis terminée par deux pointes dont on a mesuré la distance, ou, ce que je trouve préférable, un petit tube termine par deux pointes dont l'une est fermée , tandis que l'autre est traversée par un fil enroulé sur un arbre tournant. On peut laisser descendre très-lente- SUR LA CAPILLARITE. 69 ment ce tube, jusqu'à ce que la pointe inférieure touche le liquide. On vise alors le point le plus haut de l'extrémité supérieure , point dont on a mesuré d'avance la distance au point le plus has de la pointe inférieure. Je préfère ce système à l'emploi de la vis, qu'il faut toujours avoir soin de placer bien verticalement , tandis que le tube se place ainsi de lui-même. Ce moyen est très-commode pour toutes les expériences où il sérail difficile de viser directement le niveau avec une précision suffisante ; mais il ne donne facilement des résultats rigoureux que pour le mercure seul. Avec des liquides capables de mouiller le tube ou la vis, on peut, si Ton ne prend pas les plus grandes précautions, et si l'on n'a pas soin de reprendre deux ou trois fois la mesure de la hauteur du niveau, commettre dans cette mesure des erreurs accidentelles de 0,ni,ni, ce qui est considérable, quand il s'agit de faibles hauteurs. C'est pourquoi je préfère, lorsque la disposition des appa- reils le permet, l'observation directe du niveau. Si l'on prend un vase cylin- drique ou prismatique d'un beau verre d'égale épaisseur, dont les parois soient bien verticales, et si l'on a soin que la lunette du cathétomètre soit rigoureusement horizontale, on peut, en visant directement le niveau qui apparaît comme une ligne droite bien tranchée, déterminer sa hauteur avec la plus grande précision. Cette observation directe n'est pas aussi sûre pour le mercure, parce que la ligne du niveau ne se détache pas aussi nettement, ce qui se conçoit facilement : en effet, un ménisque concave présente des teintes de plus en plus foncées à mesure qu'on approche du niveau , de sorte que celui-ci tranche fortement sur la masse transparente du liquide; un ménisque convexe au contraire présente des teintes décroissantes vers le haut , et il suffit de certains jeux de lumière, avec le mercure surtout, pour que la teinte supérieure se fonde dans celle de l'atmosphère. Ces jeux de lumière se produisent difficilement dans des tubes de moins de 4 ou 5 centimètres de diamètre, mais il faut s'en défier quand on observe de larges surfaces, et il est prudent alors de ne prendre le niveau qu'avec une pointe. Lorsqu'on observe le niveau directement, on a toujours, même en choi- sissant les vases les mieux dressés, lieu de craindre quelque erreur de réfrac- tion ; c'est pourquoi il est bon de faire avant chaque expérience une observa- tion préalable fort simple. On introduit dans le vase une pointe fixe à peu 70 RECHERCHES près à la hauteur à laquelle on amènera plus tard le niveau. Après avoir \i>r cette pointe, on relire le vase et Ton s'assure si la coïncidence de la pointe et ilu lil de la lunette subsiste. Je n'ai jamais trouvé aucune déviation sensible à mon cathétomètre, c'est-à-dire allant jusqu'à ^ de millimètre. J<> suis entré dans ees détails sur la mesure de la hauteur du niveau, afin de ne plus avoir à nous en préoccuper dans la suite. Les autres détails d'ex- périences seront particuliers aux différents phénomènes observés, et dans la description desquels nous allons entrer, en commençant par ceux de dépres- sion . qui s'appliquent à un moins grand nombre de liquides. Dépression des liquides dans les tubes de rené. Le mercure et les métaux fondus sont, je pense, les seuls liquides qui se dépriment dans les tubes de verre. D'autres liquides peuvent présenter des phénomènes de dépression au contact d'autres corps; c'est ainsi que l'eau peut être déprimée dans un tube de verre graissé. Ce fait a été contesté par G. de Morveau ', qui lit voir que l'eau s'élève entre deux plaques couvertes d'une couche de suif. Néanmoins le fait de la dépression est exact, tout aussi bien que l'expérience de C. de Morveau ; tout dépend de la manière dont on pro- duit le phénomène. Si Ton plonge un tube graissé dans l'eau , on observe une dépression très- sensible, au moins aussi forte que celle que présenterait le mercure dans le même tube non graissé. De plus, chose fort remarquable, la surface inté- rieure du liquide est parfaitement plane. Au premier abord on croit décou- vrir dans ce fait vuw puissante objection aux théories de l'action capillaire, mais on ne tarde pas à reconnaître que cette anomalie n'est que momentanée; car au bout de quelques heures la dépression est entièrement disparue, l'éga- lité de niveau s'est établie dans le tube et dans le vase. Si alors on relire le tube, la surface du liquide devient concave, et l'on observe une élévation dans le tube. En continuant à retirer le tube, le li- quide \ descend de manière à conserver à peu près l'élévation précédente. Parfois il en est de cette élévation comme de la dépression primitive, c'est- ' joui nui de Physique de t'abbé ttozier, t. 1. |>. 169. SUR LA CAPILLARITÉ. à-dire qu'au bout d'un temps assez long, elle est réduite à 0. Mais ce tait est moins général; j'ai observé plusieurs fois que l'élévation persistait, même dans des tubes de 2'm" de diamètre. Ces phénomènes sont sans doute fort intéressants, et je me propose de l'- observer attentivement plus lard; actuellement, ils ne me paraissent pas pou- voir être mesurés avec assez de précision pour remplir le but que nous nous proposons, c'est-à-dire la vérification des principaux résultats de la théorie. C'est pour cette raison que nos observations ont uniquement porté sur la dépression du mercure. J'ai bien, à la vérité, fait quelques tentatives pont observer la dépression de quelques métaux fondus; mais elles n'ont abouti à aucun résultat satisfaisant, ainsi que nous le verrons bientôt. Dépression du mercure. J'ai commencé par purifier une quantité assez considérable de mercure (environ 10 kilog. ) afin de ne pas devoir me servir trop longtemps d'une même masse. J'opérai cette purification par des lavages successifs et pro- longés à l'acide azotique étendu, et à l'alcool. Cela fait, je pris à peu près au hasard différents tubes d'un même cristal. L'expérience m'avait appris que tout nettoyage, ou en général toute opé- ration exécutée à l'intérieur d'un tube , agissait très-sensiblement sur la de- pression. J'évitai donc toute altération possible, et par suite je m'abstins de rechercher si les tubes étaient bien calibrés. Je me contentai , pour obtenir quelque indice sur ce point, d'observer au moyen de la lunette inicrométrique d'une machine à diviser, si les diamètres des deux extrémités des tubes ne différaient pas notablement. Je m'assurai en même temps du degré d'ellipli- cité de la section des tubes, et je rejetai ceux qui s'écartaient trop de la forme cylindrique. Je désirais surtout vérifier le fait si important, signalé par mes premières expériences, savoir : l'influence de l'épaisseur des parois du tube sur la dé- pression. Je choisis donc de préférence des tubes très-épais , et je m'en con- struisis de très-minces, en elfilanl des tubes de même nature que les tubes épais. J'éprouvai d'abord quelque difficulté à obtenir de ces tubes ellilés suffi- n RECHERCHES samment cylindriques. Je reconnus que Ton pouvait y arriver en soufflant dans le tube en même temps qu'on l'étiré. On obtient ainsi des tubes bien réguliers sur une longueur de 1 à 2 décimètres, ce qui me suffisait, et de plus, remarquablement circulaires; aucun d'eux, observés au microscope, ne m'a présenté d'elliplicité sensible. Afin de pouvoir faire sur ces tubes quelques séries d'expériences, sans crainte de les briser, je les mastiquai dans un tube plus large, qui leur servait d'enveloppe. J'adoptai dans ces expériences le procédé d'observation le plus simple , qui consiste à faire communiquer le tube avec un vase assez large pour (pie la surface du mercure y fût un plan horizontal. Je pris pour cela des frag- ments de tubes de quatre à cinq centimètres de diamètre, et, à une extré- mité, je mastiquai un bouchon à travers lequel passaient cinq bouts de tubes recourbés. Enfin, sur ces tubes je raccordai, au moyen de tuyaux en caout- chouc , les tubes capillaires. Il ne restait plus qu'à fixer ceux-ci bien vertica- lement, à verser du mercure dans l'appareil, et à viser successivement au cathétomètre le niveau dans le tube large et dans les cinq tubes capillaires. J'avais songé d'abord à un autre genre d'appareil, qui paraissait débarrasser l'observation de deux causes possibles d'erreurs, savoir : les impuretés qui peuvent se déposer à la surface du mercure , et la couche d'air adhérente aux parois du tube. Pour éliminer ces deux causes , j'imaginai de construire de longs thermomètres d'environ quatre-vingts centimètres de hauteur. En appor- tant à cette construction tous les soins nécessaires à la fabrication d'un ther- momètre de précision, on peut être certain que la tige et le mercure sont parfaitement purgés d'air et de toute impureté. .Mais j'avais à craindre une cause d'erreurs très-puissante , et qui consisterait dans le dépôt par le souffle d'une couche de matière grasse sur la surface intérieure du tube. Pour éviter cette source d'irrégularités, je pris des tubes parfaitement propres, qui n'avaient pas encore été débouchés; j'en fermai une extrémité à la lampe, et à l'autre je colai , toujours à la lampe et sans l'aide de la bouche, un tube terminé par une forte boule de verre; ce fut en dilatant l'air de cette boule que je soufflai dans le verre même du tube capillaire une série de petites boules , lesquelles constituèrent mon réservoir. — Les personnes initiées à Cari du souffleur à la lampe, reconnaîtront dans l'opération précédente celle SUR LA CAPILLARITE. 73 par laquelle on commence la formation d'un réservoir thermométrique cylin- drique. — Ayant ainsi construit deux thermomètres, je les plongeai dans une cuvette à mercure, et sous le liquide, au moyen d'une pince, je brisai les réservoirs. Les thermomètres devenaient aussitôt de véritables baromètres, dont les hauteurs ne devaient différer de celle d'un baromètre normal , plongé dans la même cuvette, que par la dépression capillaire. Malgré les précautions minutieuses que j'ai décrites, je n'obtins dans ces expériences aucun résultat; je reconnus que l'on pouvait produire à peu près telle dépression que l'on voulait. En effet, lorsque l'équilibre semble établi, on peut soulever le tube ou l'enfoncer davantage dans la cuvette sans que le haut de la colonne de mercure se déplace. Ce fait est très-probablement dû à la puissance du frottement s'exerçant sur une grande longueur. Et nous de- vons observer qu'il s'agit ici d'un frottement tout à fait naturel, c'est-à-dire produit par le contact réel du mercure et du verre, et non par l'interposition d'une substance étrangère. Il esta présumer qu'en employant des tubes moins capillaires que ceux que j'ai employés (leurs diamètres n'excédaient pasOm'",2), ce mode d'observation pourrait donner quelque résultat; mais il aurait loti- jours l'inconvénient de donner trop d'importance au frottement. Je revins donc à l'appareil simple décrit d'abord , et j'observai la dépres- sion du mercure dans les tubes capillaires : 1° Lorsque ce liquide s'élève librement dans ces tubes sous l'influence de la pression dans le vase ; 2° Lorsqu'il y descend librement ; 3° Lorsqu'il s'élève et que son ascension est aidée par des secousses ; 4° Lorsqu'il descend et que son mouvement descendant est aussi aidé par des secousses. Ces observations sont comprises dans les tableaux I, II , III, IV : E repré- sente l'épaisseur des tubes, r leur rayon, hlf les dépressions observées, // la dépression moyenne correspondante à un rayon donné. Enfin ( h -\- \ )r est le produit du rayon par la hauteur corrigée. Cette correction , qui a été indiquée par Gay-Lussac et Laplace, suppose que le ménisque est à très-peu près une demi-sphère. D'après quelques-unes de mes premières observations, il pa- raîtrait que, même pour des rayons assez petits, la hauteur du ménisque n'est Tome XXX. 10 74 RECHERCHES pas égale au rayon , mais seulement à la moitié du rayon. En supposant (pie la surface du ménisque soit un ellipsoïde de révolution dont le petit axe égale la moitié du grand axe, on trouve qu'il faut ajouter à la hauteur ob- servée non pas le tiers , mais le sixième du rayon. Quoi qu'il en soit, comme nous avons surtout pour but de vérifier la théorie, nous nous astreindrons aux corrections qu'elle indique. Dépression du mercure. TIBLEti: I. des tubes. E r *, h ('<+0r N" | E des lUDCS. r A, h (*+')'' 1 0.117 0,05835 0.05023 70.90 70.60 71.15 78.20 79.90 70.88 79.05 4.156 4. US 0,07075 0,07159 72.55 71.70 72.00 70.85 77.10 72.15 75.52 5.104 5.420 2 4.447 0,00545 0,06357 88.90 89.00 88.90 88.03 5.040 5.579 7 0 . 090 0,07151 63.40 62.20 62.80 4.478 88.80 8 0.115 0,06925 69 . 90 69 03 4 . 795 86.30 68.20 0,00216 90.40 88.50 89.95 5 . 592 0,06894 68.05 67 . 25 67.95 i . 683 0,06268 80.80 86.10 86.95 86.28 5.409 0,07580 00.50 00 . 20 56.10 00.55 56 98 4.576 4.464 5 0 . 090 0,06537 70.20 67.90 69 . 85 09.32 4.555 57.85 57.00 0,06600 72.50 72.45 4.785 9 4.889 0,08424 09 . 50 68 . 75 5.794 72.40 69.55 4 2.480 0,0685 72.40 72.40 4.947 07.40 5 0.095 0,07033 0,00375 63.80 62.30 62.40 69.50 68.30 62.85 68.90 4.420 4.595 0,08956 0,08656 0,086.-9 58.20 59.85 60.50 62.90 58.50 59.05 61.00 58.55 5.277 5.554 5.045 6 4.687 0,06951 82.40 79.95 78.99 5.491 57.55 59.20 77.75 10 0.105 0,09307 47.10 47.08 i 45!' 75.85 !8 23 SLR LA CAPILLARITE. 75 ! •JestUlies. E r '<, h (*+.*> des lulies. E r *, h (»+f> 11 4.715 0,09435 0,09624 55.95 54.15 55.40 47.80 54.50 47.05 5.145 4.529 0,1270 37.50 57.40 58.60 57.70 57.90 4.819 46.25 17 0.150 0,1242 56.85 57.08 4.611 0,09500 55.15 57.50 52.50 52.57 4.978 0,1278 54.80 54 . 1 5 4.570 51.45 35 . 50 0,09452 49.45 49.50 49.48 4.680 0,1514 31.55 29.50 30.45 4.611 12 0.160 0,09903 47.55 47.28 4.685 0,1447 50.85 50.85 4.471 87.60 18 5.928 0,1302 58.80 57.42 4.878 46.90 57.45 0,09759 49.85 48.55 49.20 4.805 0,1500 35.95 38.70 56.42 4.745 15 0.171 0,1051 0,09885 42.50 41.40 39.05 48.25 49.50 41.02 48.78 4.514 4.870 0,1274 55.60 54.95 58.00 57.25 56.60 57.28 4 . 756 14 2.414 0,1069 41.55 40.70 4 . 553 19 5.040 0,1539 50 4.847 40.00 20 4.158 0,1700 55.40 34.03 5.794 40.15 54.65 0,1062 46.40 45.15 44.75 45.45 4.851 0,1751 0,1716 29.25 27.05 50.60 28.15 30.60 4.885 5.260 0,1055 42.65 45.95 45.97 4.642 0,1711 0,1719 50.15 51.70 50.15 51.70 5.169 5.458 45.50 21 4.000 0,1771 24.80 25.13 4.461 15 0.100 0,1221 55.50 34.80 54.15 4.174 0,1771 25.45 55.60 55 . 60 5.951 0,1162 57.85 55.40 5C.63 4.262 0,1785 51 .75 51.55 51.55 5.654 0,1155 38.80 58 . 80 4.400 0,1785 58.05 58 . 1 5 6.807 0,1206 37.90 37.53 4.530 58.20 57.15 22 4.005 0,1790 25.45 25.48 4.560 16 3.073 0,1275 40.00 58.70 57.45 58.72 4.954 0,1804 25.50 40.00 57.85 58.92 7.051 0,1270 58.70 58.20 58.15 4.848 0,1798 58.15 42.00 59 15 7.041 76 RECHERCHES des tubes. E r ft, h (* + £> JJO. dos tubes. E r '<■ h (*+i> 50.70 24.70 25 2. 205 0,1920 22.85 22.40 22.55 4 . 557 19.00 21.20 0,1920 27.40 27.25 27.33 5.259 25 0.09 0,6706 6.25 6.25 0.25 4 . 285 0,1893 32.15 52 . 98 6.255 6.25 54.20 26 1.45 0,8900 4.90 5.05 4.040 52.00 5.50 24 1 .410 0,0200 7.20 6.75 4.515 4.95 0.50 27 1.62 0,9094 3.95 4.05 4.091 0,0200 1 3 . 50 20.80 19.96 12.500 4.00 4.21) ruii.i :ai il. 1 52.00 0,0009 51.75 52.00 5.204 0,0689 53.00 53.00 5.690 53 . 45 8 4.889 0,0825 54.40 54.55 4.501 2 74.40 0,0043 75.20 74.80 75.20 74.40 4.788 0,0805 54.40 54.85 29.90 29.90 2.588 61.45 0,0624 01.45 5.850 0,0842 50 . 95 36.95 5.115 50.90 0,0654 56.90 5.609 9 0.105 0,0910 56.50 30.50 3.324 3 40.70 52.25 0,0077 0,0005 46.70 52.25 0.090 3 . 1 05 5.470 10 4.715 0,0943 54.40 51.70 52.97 4.998 4 59.50 0,0790 58.70 40.30 0.095 3.122 0,0958 52.80 41.00 40.27 5.859 5 05.10 0,0085 65.20 65.00 4.687 4.479 58.45 41.55 70.90 0,0095 70.90 4 . 928 0,0949 47.80 47.80 4.557 57.00 0,0721 57.75 56.25 4 . 039 II 0.160 0,0974 30.95 54.70 52.85 5.198 47.85 0,0095 47.85 3.526 12 0.171 0,1048 52.45 52.45 5.599 0 35.05 0,0722 55.65" 0.090 2.570 0,1006 57.00 57.00 3.722 44.90 0,0710 44.90 5.218 13 2.414 0,1066 54.60 54.60 3.088 7 39.83 0,0783 59.55 0.115 3.120 0,1055 59.90 59.90 4.209 40.10 14 0.100 0,1221 28.55 28.55 5.480 49.55 0,0735 49.55 3.042 0,1160 32.70 52.70 5.794 SLR LA CAPILLARITE. // des tubes E r '', h (*+:ï> des lubes. E r 6, h ■ 0,1155 58.40 58.40 4.351 0,1711 25.70 25.58 4.350 15 3.075 0,1275 29.55 29.55 5.750 25.05 0,1270 51.50 51.50 4.001 0,1719 20.60 20.60 4.585 16 0.150 0,1255 29.05 51.75 50.40 5.818 19 4.000 0,1783 0,1795 25.70 55.20 25.70 55.20 4.580 5.981 0,1318 51.00 51.00 4.086 20 4.003 0,1777 15.15 15.15 2 . 702 0,1541 27.05 27.05 4.108 0,1801 27.10 27.10 4.888 17 5.928 0,1302 26.85 26.85 5.495 21 2.203 0,1918 10.50 10.50 1.989 0,1274 50.50 50.30 5.861 0,1893 12.00 12.00 2.279 1S 4.158 0,1700 25.65 52.25 54.60 5.992 22 1.410 0,6200 8.10 11.70 8.10 11.70 5.152 7.378 52.90 1, TABLEAl III. 1 ides lubcs. E r », (*•+;> Produit moyeu. ri- des lubcs. E r h, (*»+;> Produit moyen. 1 0.117 0,0015 0,0634 0,0003 58.00 G9.15 05 . 90 5.606 4.589 5.855 5.929 15 2.414 0,1069 0,1002 0,1055 58.10 45.60 44.00 4.075 4.050 4.045 4.452 5 0 090 0,007 1 0,0059 0,0077 55.20 06.50 65.85 5.572 4.585 4.460 4.159 14 0.100 0,1221 0,1102 0,1135 55.50 55.80 41.05 4.095 4.165 4.656 4.401 4 0 . 095 0,0707 44.05 5.430 4.258 0,1206 57.00 4.466 0,0703 02.20 4.577 15 5.075 0,1275 55.95 4.581 4.015 0,0707 05.90 4.908 0,1270 50.10 4.590 6 0.090 0,0722 56.85 4.110 4.199 0,1270 57.10 4.717 0,0715 60.50 4.516 16 0.150 0,1242 57.00 4.601 4.628 0,0719 57.80 4.172 0,1278 35.50 4.517 7 0.115 0,0770 54.50 4.187 4.484 0,1514 51.45 4.766 0,0758 59.40 4.505 17 3.928 0,1502 30.00 5.911 4.330 0,0089 66.95 4.018 0,1282 54.05 4.446 0,0092 66.80 4.626 0,1274 54.75 4.455 9 0.105 0,0905 50.55 4.689 4.689 19 4 000 0,1785 24.80 4.452 4.707 11 0.160 0,0982 0,0982 57.55 42.90 5.691 4.217 5.893 0,1783 0,1771 28.55 20.05 5.005 4.025 0,0977 58.55 3.772 20 4.005 0,1790 24.90 4.408 4.955 12 0.171 0,1022 0,1010 54.90 1 59.45 5.570 4.575 5.972 0,1790 0,1800 25.50 32.25 4.570 5.814 78 RECHERCHES i .les labea E r A, (i.+S> Produit moyen» des tubes. E r ft, (*.+;> Produit moyen. 21 2 . 203 0,1920 0,1920 0,1893 23.00 22.70 30.05 4 . 545 4.570 5.870 4.928 22 1.410 0,6200 7.20 5.90 17 05 4.588 5.782 10.695 ■ AIII.EAI IV. 1 0 117 0,0615 59.00 5.651 5 . 539 14 0.100 0,1221 51.65 5.869 4.072 0,0615 56.00 5.446 0,1221 34.50 4.192 3 0.090 0,0071 54.60 5 666 3.675 0,1160 35.00 5.831 0,0671 54.85 5 . 685 0,1155 38.75 4.595 4 0.093 0,0703 61.45 4.525 4.084 15 0.075 0,1275 55.10 4.473 4.716 0,0703 54.65 5.845 0,1270 59.00 4.958 6 0.090. 0,0719 49.80 5.586 3 . 455 16 0.150 0,1254 50.45 3.824 4.350 0,0719 46.10 5.520 0,1254 54.00 4.269 i 0.115 0,0808 43.70 5 . 556 4.106 0,1248 36.85 4.604 0,0808 51.00 4.127 0,1308 54.00 4.452 0,0824 55 . 55 4.4I9 0,1541 29.35 4.530 0,0754 50.60 4 . 295 17 5.928 0,1502 27.40 5.571 0,0689 60.25 4.I55 0,1274 50 75 3.922 9 0.105 0,0900 51.15 4.760 4.995 19 4.000 0,1785 25.25 4.156 4.959 0,0930 56.15 5.226 0,1771 51.90 5.661 11 0.160 0,0986 43.80 4.525 5.924 20 4.005 0,1790 24.25 4.552 4.866 0,0974 36.15 5.525 0,1798 29.85 5.579 13 0.171 0,1040 54.35 5.575 5 . 650 21 2.205 0,1920 25.20 4.466 4.355 0,0988 37.25 5.685 0,1895 22.55 4.243 13 2.414 0,1069 58.25 4.090 4.254 22 1.410 0,6200 7.50 4.656 0,1055 41.85 4.418 0,6200 16.50 10.360 — Nous allons examiner successivement les résultats précédents , et particu- lièrement ceux des tableaux I et II (relatifs à l'ascension ou à la descente libres du mercure dans les tubes, sous l'influence de la pression dans le vase ou dans le tube) , qui sont les seuls présentant une constance assez satisfai- sante. C'est de ces tableaux que nous tirerons les conclusions suivantes ; mais nous devons tout d'abord expliquer d'où proviennent les fortes irrégularités présentées par les tubes 21 , 22 , 23 et 24. Les deux premières observations faites sur ces tubes m'avaient fourni les nombres que j'ai inscrits d'abord , ei qui SLR LA CAPILLARITE. 79 donnent des produits très-faibles. J'attribuai cette anomalie à l'état delà sur- face intérieure du verre, et je nettoyai ces quatre tubes à l'alcool et à l'eau, puis à l'acide sulfurique et , pour terminer , de nouveau à l'eau et à l'alcool. J'obtins alors les autres valeurs qui sont , on le voit, très-irrégulières et beau- coup trop fortes. C'est de cette expérience que je crois pouvoir conclure que tout nettoyage d'un tube, quelque parfait qu'il soit, doit modifier l'état de la surface du verre, et par suite les phénomènes capillaires. On ne devra opérer ce nettoyage que dans le cas où il peut se terminer à l'aide du liquide même sur lequel on veut observer. Dans ce cas, la surface du verre agissant moins immédiatement, un changement dans son état a peu d'influence. Si, écartant ces derniers résultats anormaux, nous partageons les tubes en trois classes, d'après leur épaisseur, et si nous prenons les moyennes des produits (/* + \)r pour chaque tube, puis les moyennes pour chaque classe de tubes , nous trouverons les résultats suivants : Dépression du mercure dans des tubes capillaires , succédant à un mouvement ascendant de ce liquide dans ces tubes. TUBES dont l'épaisseur est de TUBES dont l'épaisseur est de TUBES dont l'épaisseur surpasse 4»"». des tulies. Rayon r l'j 0 Inil de In dépression par le rayon des tubes Rfiyoa r Produits de la dépression par le rayon des tubes. ttayon Produit de la dépression | par le rayon (. + ;> i 3 5 7 8 10 12 13 15 17 25 0,057 0,066 0,007 0,071 0,071 0,093 0,098 0,102 0,121 0,157 0,671 4.473 4.658 4.407 4.478 4 . 030 4.439 4.745 4.592 4.342 4.516 4.285 4 14 16 18 19 20 27 0,068 0,106 0,127 0,129 0,154 0,891 0,969 4.947 4 . 009 4.867 4 . 792 4. 847 4.640 4.091 2 6 9 II 20 0,063 0,071 0,080 0,095 0,171 5.555 5.538 5.562 S 833 5.513 4.813 5.280 80 RECHERCHES Dépression du mercure dans les tubes capillaires , succédant à un mouvement descendant de ce liquide dans ces tubes. TUBES dont l'épaisseur est de TUBES dont 1 épaisseur est de 1"" a 2-". TL'BES dont 1 épaisseur surpasse Ng» Rayon des tubes. r Produit des tubes. Rayon V Produit des tubes. Rayon r Produit 1 3 4 G 7 9 11 12 14 16 0,037 0,066 0,067 0,071 0,071 0,093 0,098 0,102 0,121 0,137 5.204 3.340 3.122 2.897 3.486 3.324 3.193 5.531 3.877 4.024 13 15 17 0,106 0,127 0,129 3.949 5.869 3.C78 5 8 10 18 0,065 0,071 0,086 0,093 0,171 4.078 4.193 i 5.401 4.465 4.952 4 217 i De ces lableaux on conclut : 1° Que la dépression du mercure dans un tube capillaire est plus forte lorsqu'elle succède à un mouvement ascendant de ce liquide , que lorsqu'elle s'établit après un mouvement descendant ; 2' Que le phénomène se produit avec plus de régularité dans le premier cas que dans le second; 3° Que la dépression du mercure dans les deux cas paraît dépendre de l'épaisseur des parois des tubes ; 4° Que, pour des tubes d'épaisseur peu ditïérenles et dont les rayons ne dépassent pas 0mm,2 , les dépressions sont en raison inverse des rayons ; 5° Que les différences des dépressions observées dans les deux cas sont indépendantes des épaisseurs des parois , c'est-à-dire que les dépressions dans les tubes minces, après un mouvement ascendant et après un mouvement descendant , diffèrent autant l'une de l'autre que les dépressions analogues observées dans les tubes de moyenne épaisseur, ou dans les tubes très-épais. SUR LA CAPILLARITE. 84 Je m'abstiens de discuter les chiffres que j'ai obtenus en donnant aux tubes des secousses; ces résultats sont, comme on pouvait s'y attendre, très-irré- guliers; cependant on peut en conclure avec quelque certitude que les dé- pressions obtenues de cette manière étaient les mêmes, soit que le liquide s'élevât ou s'abaissât dans le tube. De plus, je me suis convaincu que cette même valeur des deux dépressions en était bien une limite commune; c'est- à-dire que l'on ne pouvait pas faire descendre le mercure descendant plus bas que le point auquel il était possible de le faire monter quand il s'élevait; quand on était arrivé à cette limite commune, la continuation des secousses n'amenait plus qu'un changement de direction dans le sens du mouvement, de sorte que le mercure, au lieu de continuer à descendre, remontait et réci- proquement. Remarquons encore que, dans ces mesures, on ne constate pas l'influence de l'épaisseur des parois. Des conclusions précédentes, deux méritent un examen approfondi : ce sont celles qui concernent l'influence de l'épaisseur et la loi du rapport inverse de la dépression au rayon ; nous examinerons bientôt celte dernière en détail ; mais nous devons d'abord reprendre attentivement l'étude de cette question si importante de l'influence de l'épaisseur. La solution affirmative que nous en avons obtenue déciderait si nettement l'inexactitude du principe fondamental de l'attraction moléculaire, que les résultats précédents, malgré leur con- stance, malgré la confiance que nous devions avoir dans l'évaluation des dé- pressions et des diamètres , n'avaient pu dissiper tous nos doutes. C'est pourquoi je repris la mesure du diamètre de tous les tubes qui me restaient, mais les valeurs que j'obtins différaient si peu de celles qui sont inscrites dans mes tableaux, qu'il est inutile de les rapporter ici. Il ne restait donc aucune incer- titude sur l'exactitude des mesures ; car les valeurs trouvées pour une même dépression se contrôlent mutuellement. Il fallait dès lors chercher à recon- naître si l'influence observée était essentielle au phénomène, ou seulement due à des causes accidentelles de nature telle que les théories ne puissent ni les prévoir, ni en calculer les effets. En rendant compte , dans la Bibliothèque universelle de Genève (juin 1855), de mon premier mémoire, M. Soret indique un moyen de résoudre cette question. Il conseille de diminuer l'épaisseur des tubes par un moyen méca- Tome XXX. 82 RECHERCHES nique, ou mieux, par une corrosion à l'acide fluorhydrique. Ce sérail un nio\ en de reconnaître si l'influence observée de l'épaisseur est réellement due a une action sensible à distance, et M. Soret croit que Ton pourrait expliquer cette influence autrement que par une telle action. Évidemment, dit-il, les tubes de verre ramollis au moment de leur fabrication doivent se refroidir bien plus lentement quand ils sont épais que lorsqu'ils sont minces, et l'état de la surface intérieure a dû être modifié par un phénomène analogue au recuit et à la trempe, qui pourrait bien influer sur l'attraction moléculaire latérale. Avant d'avoir lu cet article, j'avais fait quelques expériences fondées sur un principe tout différent de celui des observations proposées par .M. Suret . et ces deux modes d'investigations me paraissent se compléter heureusement. En effet, tandis que M. Soret conseille de réduire artificiellement l'épaisseur des parois de tubes épais, je m'étais proposé d'augmenter artificiellement l'épaisseur des tubes à parois très-minces. Voici comment j'opérai. Quatre tubes effilés / (fig. 10) étaient mastiqués dans un tube T réuni à un autre tube T' très-large par un tube de caoutchouc, et mastiqué lui-même dans un tube 31 de 25 millimètres de diamètre, qui formait ainsi un manchon entourant les quatre tubes capillaires. Au fond de ce manchon s'ouvrait un robinet. On commençait par observer la dépression du mercure dans les tubes capillaires en versant du mercure dans le tube T'. Cela fait, on reti- rait de ce tube une certaine quantité de mercure que l'on conservait à part. Le niveau baissait dans les quatre tubes/; alors, tout autour de ces tubes je versais du mercure jusqu'à une hauteur plus grande que celle à laquelle le mercure s'était élevé le plus haut dans ces tubes , pendant l'observation pré- cédente. Enfin je reversai dans le tube T' le mercure que j'en avais retiré, et je laissai l'équilibre s'établir pendant vingt-quatre heures. Au bout de ce temps je faisais écouler le mercure du manchon , jusqu'à découvrir successi- vement le niveau dans chacun des tubes. La lenteur, constamment observée, des mouvements du mercure dans les tubes capillaires , m'était un garant que, pendant cette opération , le liquide n'était pas descendu d'une quantité sen- sible dans les tubes /, en admettant même qu'il eût une tendance à suivre le mouvemenl du mercure extérieur. Je pouvais de cette façon observer la dé- pression qui s'était produite dans les tubes entourés de mercure. Ce mêlai SUR LA CAPILLARITE. 83 constituait une épaisseur additionnelle qui devait, à cause de sa grande densité, agir beaucoup plus fortement que n'aurait pu le faire une épaisseur égale de verre. J'ai effectué ainsi huit observations, quatre pour déterminer la dépression dans les tubes capillaires non entourés de mercure, et quatre autres pour déterminer cette dépression produite pendant (pie le manchon était rempli de mercure. Les résultats cpie j'ai obtenus sont consignés dans le le tableau suivant. Dépressions sans mercure ambiant. T F. M I> F I: VTURE dvs isji'Ti. 'lires TUBE I r= 0,327. TUBE 11 r = 0.17-2- TUBE III r = 0,149. TUBE IV r = 0,108. I ti°5 II 6,3 IV 9,1 1 1 . 30 11.55 11.15 23.35 25.65 0 23.80 mm- 27.95 27.40 25.60 26.05 mm. 59.65 38.50 37.15 37.20 Moyennes 1 1 . 33 25.60 26.75 38.15 Dépre&sioni avec mercure ambiant. I s;o II 12,0 III 9,1 IV '.',0 10.55 10.90 1 1 .05 11.40 23.00 23.90 23.10 22.00 20.70 27.40 26.05 26.55 37.15 37.50 37 . 40 50 . 80 Moyennes 10.98 25.40 26.68 57 . 2 1 Moyennes -^ 11.15 25.50 26.71 37 .07 Ces nombres indiquent clairement que la présence du mercure ambiant n'a exercé aucune influence sur la dépression, et qu'à la petite dislance pro- duite par la faible épaisseur des parois, il n'avait point d'action sensible sur le mercure intérieur. D'ailleurs, je ne puis mettre en doute l'exactitude des résultats précédents; 84 RECHERCHES car ils m'ont été confirmés par d'autres observations dignes d'être rapportées. J'avais remarqué qu'en serrant et desserrant brusquement le tube de caout- chouc /, qui lie le tube large aux quatre tubes capillaires, on donnait au mercure contenu dans ces quatre tubes un mouvement suivi d'un repos pres- que immédiat. Je mesurai plusieurs fois les dépressions ainsi produites immé- diatement après l'agitation du liquide et je trouvai : Dépressions sans mercure ambiant. TEMPS et n°' des eipcricnces. TUBE I r = 0,327. TUBE 11 r={J,172. TUBE 111 r = 0,U9. TUBE IV r = O.I0t. 1 8°5 11 » 111 » 11.45 11.35 11.15 22 . 85 22.75 22.75 2G.25 2G.10 26.15 36 . 50 30.30 3G.10 MoYENMES 11.52 22.78 2G.17 36 . 23 Dépression^ avec mercure ambiant. 1 8?5 11 » 111 » 11.70 11. GO 11.90 23.15 22.75 25.15 25.80 25.80 26.15 55.25 35. 15 55 . 65 11.73 25.02 25.92 55.55 MOYESKES 11.57 22.90 20.04 55.79 On peut reconnaître que les dépressions observées dans les mêmes condi- tions sont remarquablement concordantes, et que les moyennes des deux groupes d'observations diffèrent fort peu l'une de l'autre. Elles ne diffèrent pas non plus des précédentes de quantités notablement supérieures aux iné- galités que nous n'avons cessé de rencontrer dans toutes ces observations, lors même que les conditions étaient identiques, inégalités qui me paraissent inévitables. SUR LA CAPILLARITE. 83 Cette égalité approchée des dépressions obtenues dans l'ascension lente du mercure et de celles qui se produisent immédiatement après une forte agitation , me parait donner un grand poids aux observations précédentes, et par con- séquent, à l'argument qu'elles renferment contre l'influence de l'épaisseur des parois. Il faudrait donc attribuer les inégalités qui semblaient indiquer cette influence à des causes étrangères, qui cependant ne peuvent être accidentelles; la constance de nos résultats ne nous permet point de l'admettre , et il est à remarquer que ces derniers résultats concordent avec nos précédents ; en effet, nous trouvons, comme produits des rayons parles dépressions observées après vingt-quatre heures, les nombres 5,68 — 4,06 — 4,00 — 4,07 . qui sont encore sensiblement inférieurs à ceux que nous avons rapportes plus haut, également pour les tubes minces, et si l'on compare ces chiffres à celui que nous avons obtenu comme moyenne pour les tubes épais, savoir 5,28, on doit reconnaître que des causes accidentelles ou des erreurs d'observation ne peuvent amener de semblables différences. Si donc nous sommes d'un côté forcés d'admettre que l'épaisseur des parois n'a pas une action directe sur la dépression , de l'autre côté nous devons re- connaître qu'il existe , liées à cette épaisseur, des causes permanentes de fortes inégalités, causes que nous devons chercher à découvrir; on conçoit aisément tout ce qu'une semblable recherche présente de difficultés. Combien de phy- siciens, en effet, et des plus éminents, se sont bornés à reconnaître les grandes divergences qu'offrent les résultats des expériences faites sur la dépression du mercure , sans présenter pour les expliquer autre chose (pie des hypothèses hasardées avec crainte. On se rattache généralement à cette idée, exprimées par Gauss et Poisson , que l'équilibre peut s'établir avant que l'angle de con- tact ait atteint sa valeur normale; mais il est évident que ce n'est là que sub- stituer à un fait l'hypothèse d'un autre fait qu'il reste à expliquer. Je me suis demandé d'abord si la plus grande dépression observée dans les tubes épais ne pouvait pas résulter de leur elliptieité. En effet, j'ai dit dans mon précédent travail, que ces tubes épais ont ordinairement une section sensiblement elliptique, et je crois avoir donné la raison de ce fait; nous avons 86 RECHERCHES fait voir dans ce nouveau mémoire que Terreur résultant de celte ellipticilé ne peut porter sur l'évaluation du rayon moyen : en effet , en calculant très-exac- lement ce rayon, d'après la formule qui donne le contour de l'ellipse, nous avons trouvé des valeurs à peu près identiques à celles que nous avions rap- portées dans nos tableaux. 11 faudrait donc admettre une influence de l'ellipti- cité de la section sur la dépression même, c'est-à-dire supposer que, même à égalité de rapport du contour à la surface, la dépression n'est pas la même dans un tube elliptique que dans un tube circulaire. Nos résultats, que nous indiquerons plus tard, concernant les tubes prismatiques, bien plus différents des tubes circulaires que les tubes elliptiques, ne permettaient guère d'admettre cette hypothèse; cependant j'ai voulu la soumettre à une observation directe. Je pris 5 tubes à sections très-elliptiques, tubes appelés liges plate* , et qui servent à construire des thermomètres à la fois sensibles et faciles à observer à l'œil nu. Ces tubes paraissaient parfaitement propres, et n'avaient jamais servi. Je mesurai les dépressions dans ces tubes et les diamètres aux points où le mercure s'était arrêté. Les résultats obtenus sont consignés dans le tableau suivant. Dépression du mercure (Unis des tubes à section très-elliptique. ' Demi-grand Demi-petit axe v. Ray on -moyen. Dépressions observées. II. 120. Dépression moyenne (/. Produit. I. 5°0. o,4in 0,130 0,1 80 24.65 20,15 •-'5,40 4,80 0,527 0.150 0,170 27,20 28,00 27,90 5,00 0,188 0,058 0,084 00,10 60,25 60,18 5,04 0,096 0,051 0,065 85,05 84,65 85,30 5,52 0,052 0,033 0,041 121.25 1 20,40 123,83 5,03 Les valeurs des produits contenus dans la dernière colonne sont fort peu différentes de celles que nous avons obtenues pour des tubes circulaires laies- capillaires , et concordent tout à fait avec les valeurs plus nombreuses trou- vées dans mon premier travail; le quatrième tube seul présente un résultat beaucoup plus fort; mais ce ne peut être là qu'une anomalie, due probable- SUR LA CAPILLARITE 87 ment à quelque impureté de la surface du tube. On ne peut donc point attri- buer à Pellipticité des tubes épais les fortes dépressions qu'ils produisent. M. Frankenheim *, en reconnaissant combien on rencontre d'irrégularités dans les diverses expériences faites sur le mercure, signale une source de différences notables entre les dépressions dans un même tube, savoir l'état hygrométrique de la surface intérieure du tube. D'après lui , le produit de la dépression corrigée par le rayon serait à 0° , le tube étant bien sec 4mm,90 , et le mercure étant au contraire couvert d'une couche d'eau, 4,5 à 4,0. Enfin, dans l'état moyen de l'atmosphère, ce produit à 0° serait 4,5. J'ai songé d'abord à attribuer à cette cause les inégalités que j'avais obte- nues. Je regardais comme possible que le mode de fabrication des tubes ca- pillaires introduisit dans leur intérieur des quantités d'humidité en relation avec leurs épaisseurs. En effet, les tubes épais s'étirent plus lentement que les tubes minces , et pendant cette opération , l'ouvrier ne cesse pas de souffler dans le tube. 11 se pourrait donc qu'une plus grande quantité d'hu- midité s'attachât à une même grandeur de surface dans les tubes épais que dans les tubes minces, et que la capillarité des tubes, que d'ailleurs on con- serve souvent bouchés , ne permettant point un renouvellement suffisant de l'air intérieur, l'humidité ayant une fois pénétré dans les tubes n'en sortit plus. Cependant , pour expliquer ainsi les résultats que j'ai obtenus, il fallait, tout en admettant le fait signalé par M. Frankenheim de la variation de la dépression avec l'état hygrométrique du tube, rejeter les résultats numéri- ques de ce physicien. En effet, la plus grande valeur qu'il ait obtenue est 4,9, tandis que, pour les tubes épais , nous avons trouvé jusqu'à 5,5. Peut-on admettre que cette différence soit due à la différence dénature des tubes de M. Frankenheim et des miens, et ne déduire des résultats de ce savant que les rapports £jj, £§ des dépressions dans les tubes saturés d'humidité à celles qui ont lieu dans les tubes parfaitement secs, rapports qui, du reste, dif- fèrent assez de ceux que nous avons trouvés entre nos moyennes j|jj, £jji? Dans l'impossibilité de résoudre cette question , j'ai dû observer l'influence 1 Frankenheim, Dépression du mercure à différentes températures, Pogg. Annal., t. LXXV. p. 221». 88 RECHERCHES do l'état hygrométrique du tube sur les tubes mêmes de mes observations. Comme mon principal but était de savoir ce que pouvait avoir de fondé l'hypothèse que j'ai présentée tout à l'heure relativement à une liaison pos- sible entre l'état hygrométrique et l'épaisseur du tube, j'ai voulu déterminer particulièrement l'influence de l'humidité introduite dans le tube par insuf- flation. Je soufflai donc dans les quatre tubes minces employés dans les ob- servations rapportées plus haut, et je mesurai les dépressions, aussi bien celles qui se produisaient immédiatement, que celles qui subsistaient après vingt-quatre heures. Voici les résultats de ces observations. Dépression après insufflation dans le liée. des mbes. 84 ayons. Dépressions iiiim ïdlales moyennes. Produits Dépres* !'• exp. ions après 24 h. Produits 1" «p. 2' rip 2e exp. min i- -s i mm. 0.Ô-J7 16.10 14.50 15.30 5.08 13.95 15.90 13.93 4 04 2 0,172 27.30 20.45 26.88 4.67 25.25 25.00 25.13 4 36 5 0,149 32.20 31.90 32.05 4.82 29.95 29.40 29.68 4.47 4 0,108 46.40 " 46.40 5.02 46.15 " 46.15 5.00 On voit par là que l'insufflation dans les tubes a exercé une forte influence sur la dépression immédiate; mais cette influence s'est affaiblie rapidement dans les trois premiers tubes ; s'il n'en a pas été de même pour le 4 e tube , c est que dans ce dernier l'humidité introduite avait été suffisante pour cons- tituer une couche d'eau de plus de 0mm,5 d'épaisseur qui, au bout de plu- sieurs jours, persistait encore. L'état du tube, après vingt-quatre heures, était donc le même qu'immédiatement après l'insufflation. Dans la plupart des observations que nous avons faites sur la dépression du mercure, la mesure de celle-ci ne se faisait que vingt-quatre heures après l'introduction du mercure dans les appareils; ce sont donc les produits ins- crits dans la dernière colonne du tableau précédent que nous devons com- parer aux produits analogues des expériences antérieures; or, les nombres 4,64, 4,36, 4,47 ne sont que de l'ordre des produits relatifs aux tubes très- SUR LA CAPILLARITÉ. 89 minces. Leur moyenne 4,49 diffère très-peu de celle que nous avons trouvée pour ces derniers, savoir 4,55. Ainsi donc nous ne pouvons pas expliquer les inégalités présentées par les tubes de différentes épaisseurs par l'hypothèse d'un état hygrométrique différent. Cependant remarquons que les produits que nous venons d'obtenir sont notablement supérieurs à ceux obtenus d'abord avec les mêmes tubes, et qui étaient 3,68, 4,06, 4,00, 4,07. II y a donc eu certainement persistance pendant vingt-quatre heures de l'influence de l'état de surface produit par l'insufflation. Il restait à savoir si cette influence persisterait pendant un temps assez long. Je repris les observations sur ces tubes au bout de cinquante-quatre jours, et j'obtins les résultats suivants : nbes. Dépressions. l'roduil ( h 1 1-2.45 4.15 <■> -26.10 4.55 ô 27.20 4.10 4 59.70 4.29 Ces nombres se rapprochent beaucoup de ceux que nous avons obtenus avant l'insufflation dans les tubes ; ainsi l'altération de la surface intérieure qui a pu en résulter, ou bien a été passagère, ou bien n'est pas capable d'exercer une influence sensible sur la dépression du mercure. Ce n'est donc point à une insufflation prolongée dans les tubes épais que l'on doit attribuer la forte dépression observée dans leur intérieur. La conjecture exprimée par M. Soret (p. 82) peut être soumise à une vérification plus directe que celle qu'il indique. J'aurais cependant désiré pou- voir observer, comme il le conseille, la dépression du mercure dans des tubes dont on aurait réduit l'épaisseur par un moyen mécanique, on mieux, par l'acide lluorhydrique. J'ai dit pourquoi ce dernier moyen me semblait seul devoir être employé; malheureusement quelques essais m'ont fait voir qu'il présentait de grandes difficultés d'exécution , et qu'il faudrait de grandes quantités d'acide lluorhydrique dissous dans l'eau, et des appareils spéciaux, pour obtenir une usure régulière, suffisante et laissant au verre sa transpa- rence. Au lieu de poursuivre ces expériences assez coûteuses, j'ai préféré Tome XXX 12 90 RECHERCHES chercher si la chaleur pouvait exercer sur les tubes une influence persistante, capable de modifier la dépression qui a lieu dans leur intérieur. Je pris deux tubes de diamètres parfaitement réguliers, je les partageai chacun en deux parties. L'une de ces parties fut chauffée jusqu'à ce que le verre fut ramolli au point de pouvoir être courbé, mais faiblement seule- ment; on laissait ensuite refroidir librement le tube ainsi chauffé. Ajoutons que, pour ne pas avoir à se préoccuper des différences d'état hygrométrique (pie cette opération pouvait apporter, on avait préalablement fermé le tube à la lampe, et qu'on l'avait laissé refroidir tout fermé. Ce n'est qu'après un temps assez long que l'on a ouvert les deux extrémités et mesuré la dépres- sion du mercure dans l'intérieur des quatre fragments des deux tubes. Ces rayons ont été ensuite mesurés au microscope dans les points mêmes ou se trouvaient les ménisques. J'ai obtenu les résultats suivants : et tempéhàtubbs des expériences. 1er Tl ÉPAISSEUR JBE. 3mm,l. Frag1 chauffé. 1=0,132. H» TUBE. ÉPiissEua 401m,2. Frag' non chauffe. r=0,152. Frag1 non chauffe. r=0,i74. Frag' cbaaffi r=0,l73. 1 15"6 II .... 14,0 III. . . . 10,0 31.90 32.10 32.19 29.15 29.75 29.00 28.90 29.00 « 25.35 25.20 » Moyennes. . . Prod. (*+t)r. 32.05 4.8!) 29 30 4.47 28.95 5.00 25.28 4.40 Ces résultats offrent une confirmation bien remarquable de l'idée émise par M. Soret. En effet, nous voyons que, par suite du changement d'état moléculaire que nous avons amené en chauffant les tubes, les produits de la dépression corrigée par le rayon sont descendus des valeurs correspon- dantes à celles que nous avons trouvées pour les tubes de moyenne ou de torte épaisseur, à des valeurs du même ordre que celles que nous avons obtenues avec des tubes très-minces. Or, dans la fabrication de ces derniers nous avons précisément effectué l'opération précédente, avec cette seule s SUR LA CAPILLARITE. 91 différence que les tubes ont été chauffés plus fortement, puis étirés. Donc les résultats de ces dernières expériences expliquent parfaitement l'inégalité que nous avions attribuée à la différence d'épaisseur des tubes épais et des tubes très-minces. De plus, cette explication s'applique aussi bien aux différences trouvées pour les tubes de moyenne et de forte épaisseur, si on admet l'opi- nion très-vraisemblable de M. Soret, que les différences de vitesses de refroi- dissement de ces tubes amènent des différences d'état moléculaire. Ces expériences, jointes à celles qui les précèdent, me paraissent résoudre complètement cette grave question de l'influence de l'épaisseur, et prouver "2AH. Une petite erreur sur chacun de ces poids pourra donc en apporter une fort notable sur le poids cherché. Toutefois la première erreur que j'ai signalée est beaucoup plus impor- tante; pour l'éviter, il faut recourir à un instrument plus précis que le cathéto- mètre, et le plus simple que l'on puisse employer est le spbéromètre. On pourrait sans beaucoup de peine appliquer cet instrument au procédé précé- dent; mais j'ai préféré suivre une autre méthode, consistant à mesurer sé- parément la dépression dans un tube, et le volume compris entre le plan horizontal langent à la surface capillaire et cette surface. Ce volume se dé- terminait exactement de la manière suivante : un tube soigneusement rodé ( fig. 13) est posé sur un plan; on verse dans son intérieur une certaine quantité de mercure; on mesure au spbéromètre la hauteur h du point le plus élevé du ménisque au-dessus du plan , puis on retire le mercure et on le pèse ; il est clair que si ce poids est/; , on aura pour le volume cherché HA _-£-), XA / et si D est la dépression , le volume déprimé sera .[rV,-.D)-£). 104 RECHERCHES La dépression D se mesure aussi au sphéromètre, il suffit de fixer au moyen d'un peu de cire molle un bout de tube vertical dans une large cu- vette remplie de mercure. Celle-ci est placée sur une glace rigoureusement horizontale, sur laquelle posent aussi les trois pieds du sphéromètre. On amène d'abord la pointe de la vis micrométrique en contact avec la surface du mercure de la cuvette, à une distance assez grande des parois et du tube; puis, taisant glisser l'instrument sur la glace, on amène la pointe de la vis dans Taxe du tube, et on la fait descendre jusqu'à ce qu'elle soit en contact avec le haut du ménisque; le chemin qu'elle parcourt ainsi verticalement est la dépression cherchée. Ce moyen serait parfait , si l'œil était capable de juger de la perfection du contact entre la pointe de la vis et la surface du mercure. Or, je doute qu'il existe un œil humain assez perçant pour reconnaître que le contact n'existe pas encore quand la pointe de la vis est à y^ de millimètre de la surface, ou bien lorsqu'il est dépassé d'une semblable longueur; on m'objectera qu'il suffit d'armer l'œil d'une lunette pour lui donner la puissance nécessaire ; mais l'usage fera bientôt reconnaître combien l'emploi d'instruments de ce genre serait incommode dans l'observation actuelle. Il est d'ailleurs un moyen connu, si simple et d'une si admirable exactitude que je ne conçois pas qu'il n'ait pas été appliqué déjà dans un grand nombre d'expériences, et à la plupart des instruments de précision. L'examen de la figure 12 le fera com- prendre immédiatement. Tout près de l'observateur se trouve une pile très-faible (un élément de Daniel est plus que suffisant) et une boussole assez sensible; l'un des fils conducteurs s'attache à la boussole, l'autre va s'enrouler autour de la tète du sphéromètre , un fil de platine attaché à un autre point de la boussole va plonger dans le mercure de la cuvette. L'appareil étant ainsi disposé, on voit que, tant que la pointe du sphéromètre ne touchera pas le mercure, il n'\ aura pas de courant, et la boussole aura sa position naturelle d'équilibre; mais aussitôt que la pointe arrivera en contact , le courant naîtra et un mouvement brusque de l'aiguille aimantée avertira l'observateur. Si la pointe de la vis et la surface du mercure sont toutes deux parfaitement propres , on atteindra à un degré de précision extrême. C'est ainsi que je puis affirmer l'exactitude SUR LA CAPILLARITE. 105 de chacune des mesures rapportées plus loin à trois ou quatre millièmes de millimètre près. Encore cette erreur n'est possible que dans le cas actuel, où l'on juge du contact de la pointe de la vis avec une surface de mercure. Dans l'intervalle d'une observation à l'autre, cette surface se couvre d'une couche d'oxyde excessivement faible, mais suffisante pour produire une sem- blable erreur. Mais lorsqu'il s'agit de déterminer l'instant du contact entre la pointe de la vis et une surface métallique solide et moins rapidement alté- rable, la sensibilité de l'instrument n'a presque plus de limites; c'est à tel point que , lorsque dans ces expériences j'amenais la pointe en contact avec une plaque de fer bien dressée et bien nette, le contact se produisait tou- jours à la même fraction de division du sphéromèlre, et une division de cet instrument correspondait à 0mm,0020625. Aussi, je le répète, je ne com- prends pas qu'un semblable système n'ait pas été appliqué depuis longtemps à des instruments dont on pourrait réduire la construction , généralement très-compliquée, de manière à la rendre fort simple : il me suffit de citer le comparateur et les instruments destinés à la mesure des dilatations linéaires, appareils compliqués de lunettes, de leviers, de verniers et de vis micromé- tiques. Je suis convaincu que, dans ces sortes d'instruments, avec un élé- ment de Daniel! , une boussole et une vis micrométrique, on atteindrait une exactitude qui ne serait limitée que par le degré possible de perfection d'une vis , et l'on sait combien est élevé celui que les habiles constructeurs .de nos jours ont su atteindre. Et voici une observation qui montre combien une telle application de l'électro-magnélisme, est non-seulement utile, mais encore nécessaire : si , après avoir amené le contact entre les points de la vis et une plaque de fer, vous voulez juger de ce contact par le moyen ordinaire, c'est-à-dire par le ballottement du sphéromètre , vous devez encore tourner la tête de la vis de dix, quinze et même vingt divisions; ceci prouve déjà que vous ne jugez du contact qu'après qu'il a eu lieu. Il n'y aurait là aucune source d'erreur, si l'on était certain que le ballottement commence après que le contact a été dépassé d'une quantité toujours la même; mais, a priori, on ne peut pas espérer qu'il en soit ainsi, quand on amène la pointe de la vis successivement en contact avec des surfaces différentes, et surtout différemment compressi- Tome XXX. 14 s 10(> RECHERCHES blés; car Ton ne comprend d'autre cause à ce retard dans le ballottement du sphéromètre, qu'un mouvement de lavis dans son écrou et une légère com- pression dans l'instrument et dans la surface sur laquelle s'appuie la pointe de la vis. Si maintenant l'on observe qu'avec les instruments dont j'ai parlé une erreur semblable peut se produire dans chaque communication de mou- vement d'une pièce à l'autre, on sentira que la sécurité de l'observation augmentera considérablement à mesure que l'on simplifiera l'appareil, et je doute qu'on puisse le faire davantage par un procédé différent de celui que je viens d'indiquer, et qui, je le répèle, était bien connu; car il \ a plusieurs années déjà que M. Rcgnault, dans son cours au Collège de France, a pro- posé ce moyen d'observation comme applicable aux recherches qui nous occupent, et je sais que M. Stas avait déjà proposé ce même moyen pour d'autres observations, et en particulier pour celles des dilatations. La flg. 12 représente la disposition complète de l'appareil que j'ai em- ployé dans les mesures actuelles. On voit que la glace qui porte la cuvette et le sphéromètre repose sur un pied en cuivre très-solide, reposant lui-même par trois vis calantes sur une lourde plaque de verre dépoli. C'est au moyen de ces trois vis calantes que l'on dispose horizontalement la glace qui porte le sphéromètre, et l'on conçoit aisément que celte horizontalité doit être aussi rigoureuse que possible. Il faut même avoir soin de ne l'établir qu'alors cpie la cuvette contient tout le mercure qu'elle doit renfermer; car toute addition de mercure produit une flexion, ou plutôt une compression, et un mouvement des vis calantes dans leur écrou. On devra aussi avoir soin de vérifier, immédiatement après l'observation, si l'horizontalité n'a pas été changée, et, de plus, non content de l'avoir établie au moyen d'un niveau à huile d'air, on s'assurera, en amenant la pointe du sphéromètre en des points éloignés de la surface du mercure , (pic la hauteur de ces points est rigoureusement la même. J'insiste sur ces détails, parce que j'ai pu recon- naître au dépens de séries d'expériences entièrement perdues, que la moindre inclinaison de la glace suffit pour affecter d'erreurs énormes les mesures de très-petites dépressions. Ces observations devront être faites dans un lieu extrêmement tranquille, le moindre ébranlement déterminant une agitation sensible dans la surface s SUR LA CAPILLARITE. 107 du mercure. Le mieux est d'observer pendant la nuit, à l'heure où les mai- sons ne tremblent pas. Une fois arrivé à mesurer avec exactitude de petites dépressions, je trouvai dans ces recherches plus d'intérêt que dans celles dont elles ne devaient être qu'une partie. En effet, si d'un côté la loi qui donne les volumes déprimés proportionnels au contour est une loi remarquable, importante à vérifier, de l'autre, les dépressions ont été calculées par Laplace à l'aide de la formule qui conduit à cette loi. Il y a donc également ici une vérification intéressante à chercher; de plus, cette recherche acquiert une importance particulière, parce qu'elle peut fournir des données certaines sur les corrections que l'on doit , à cause de la capillarité , faire subir aux hauteurs barométriques obser- vées. Toutefois, je n'ai pas perdu de vue le but que je m'étais proposé d'abord, et je rapporterai plus loin quelques expériences faites à ce sujet; ces expériences sont seulement moins nombreuses que celles qui concernent les dépressions , mais elles me paraissent assez décisives. J'ai mesuré autant de dépressions qu'il m'a été possible de le faire; je n'avais malheureusement à ma disposition qu'un très-petit choix de tubes convenables. Je regrette surtout bien vivement de n'avoir pas pu me pro- curer des tubes en cristal de diamètre différents. Ceux dans lesquels j'ai observé les dépressions, offraient du reste un intérêt particulier. Ils étaient formés du même cristal que les tubes capillaires des expériences précédentes, et, par une heureuse coïncidence, le produit moyen 4,8 13 , que j'ai obtenu pour ceux de ces tubes dont l'épaisseur est du même ordre que celle des tubes actuels , est à peu près égal à celui que Laplace a admis dans le calcul de sa table des dépressions, savoir 4,738. Les autres tubes étaient en verre, tous de même nature et ayant pour densité 2,48. Les dépressions rapportées dans le tableau suivant ont été produites de manières très-différentes, soit en faisant arriver très-lentement du mer- cure dans la cuvette à travers un siphon très-étroit, soit en en retirant et en secouant l'appareil ; nous allons voir qu'il y a fort peu de différences entre elles, de sorte que les causes qui font varier les dépressions dans les tubes capillaires, d'après leur mode de production, n'ont pas ici d'influence appré- ciable. 108 RECHERCHES Dépressions du mercure dans les tubes non capillaires. Désignation Epaisseur Diamètre. Dépressions Digressions Désignation Épaisseur. Diamètre. ii' [.i . s- Dépressions des lulies observées. moyennes, des lulies. observées. moyennes mm, mm. 1UI11 111 m. mm. mm UilJI. mm 1 crislal . . 5,76 5,105 1,425 1,401 1,401 1,586 1,404 7 verre . . 0,74 11,848 0,219 0,217 0,229 0,241 0,250 2 cristal . . 5,22 7,210 0,810 0,810 0,801 0,259 0,255 0,802 8 cristal , 1,31 15,702 0,085 0,085 0,809 0,086 0,790 0,085 0,800 0,084 0,790 0,080 0,788 0,087 5 verre. . . 0,85 7,752 0,658 0,059 0,648 0,059 0,000 0,049 9 cristal . 1,76 18,455 0,055 0,042 0,059 0,056 0,045 0,059 4 verre. . . 1,54 9,150 0,429 0,455 0.441 0,441 0,457 10 crislal . 1,615 20,050 0,057 0,056 0,056 0,055 0,050 5 verre . . . 0,79 10,590 0,501 0,505 0,295 0,509 0,502 0,057 0.055 0,050 6 verre. . . 1,95 1 1 ,565 0,250 0,245 0,250 0,250 0,255 0,247 • Afin de tirer le meilleur parti possible des résultais précédents, et de pou- voir les eomparer aisément à ceux de Laplace, j'ai tracé les courbes qui représentent les lois de ces deux espèces de résultats, en portant sur une SUR LA CAPILLARITE. 109 feuille de papier divisée les valeurs des rayons et des dépressions contenues dans les tables de Laplace et celles (pie j'ai trouvées. Dans toutes les courbes de la planche II, les abscisses représentent les diamètres; chaque division de ces abscisses vaut 0mm,l , de sorte que les chiffres horizontaux expri- ment des millimètres. Une division pouvant être facilement partagée en dix parties, on a pu fixer les valeurs des diamètres à Om,n,01 près. Dans les courbes ah, a'b', les ordonnées représentant les dépressions, ont la même valeur que les abscisses, chaque division verticale valant aussi Omn,,l ; mais dans les courbes AB, A'B', il n'en est pas de même; afin d'obtenir une plus grande approximation, on a donné à chaque division verticale une valeur de Omm,01 seulement, de sorte qu'une division pouvant se partager en dix par- ties, les dépressions sont rapportées exactement à 0mra,001 près. J'ai marqué les points correspondants aux dépressions observées par les lettres C, V, qui indiquent si les tubes sont en cristal ou en verre, en y joi- gnant des indices qui sont les numéros des tubes auxquels correspondent ces valeurs. Je n'ai pas tracé d'un trait continu la courbe des dépressions observées , parce que je ne suis pas certain que celle que j'indique soit la véritable courbe : en effet, on remarquera que le point correspondant au tube C2 s'écarte notablement de la courbe qui joint cependant tous les autres points aussi exactement qu'on peut le désirer. D'un autre côté, on doit observer que ce point est celui qui a été déterminé par le plus grand nombre d'expériences : les quatre premières ont été faites sur un même fragment de tube, mais dans des conditions différentes; le point supérieur de la triple croix figurée dans la construction graphique indique leur moyenne. Les quatre dernières expé- riences ont été faites sur un autre fragment de tube dont le diamètre était, du reste, exactement le même que celui du précédent, leur moyenne est indiquée par le trait inférieur de la croix; ces deux moyennes ne diffèrent que de 0mm,009 , et les valeurs extrêmes des deux séries diffèrent de 0ram,022 ; or, il faudrait, pour faire rentrer le point dans la courbe, ajouter à la va- leur extrême 0mm,788 une erreur négative égale à la précédente, et sup- poser la moyenne Omm,801 susceptible d'une erreur de Omm,036, ce qui me parait inadmissible. Je suis plus porté à croire que le point C.2 appartient à 110 RECHERCHES une autre courbe qui relierait les dépressions que l'on observerait dans les tubes de cristal; je n'ai pas pu la tracer faute d'un nombre suffisant de points, niais on peut, d'après la position des points C, présumer qu'elle se rapprocherait beaucoup de celle de Laplace. La courbe des points V s'écarte notablement de cette dernière , mais on voit qu'elle tend à s'en rapprocher sers ses deux extrémités, où elle se confond en même temps avec celle des points C. Je crois donc pouvoir conclure que les dépressions calculées par Laplace sont à très-peu près celles qui ont lieu dans des tubes de cristal, et qu'elles sont notablement supérieures à celles qui se produisent dans les tubes de verre. On pourra, par suite, dans les corrections barométriques, recourir à la table de Laplace , quand le baromètre sera en cristal ; mais dans les expé- riences très-précises, on ne pourra pas appliquer ces corrections à des tubes de verre ordinaire. Je n'oserais pas affirmer que l'on pourra en toute con- fiance prendre les dépressions sur la courbe de mes expériences; car tant que je n'aurai pas observé les dépressions du mercure dans des tubes de verre de nature très-différente et bien connue, je ne me croirai pas fondé à admettre que les résultats de mes expériences s'appliquent à tous les tubes de verre. Néanmoins, comme les différents verres du commerce se rappro- chent par leur composition beaucoup plus l'un de l'autre que du cristal, je crois qu'il sera préférable d'emprunter les corrections à faire aux hauteurs barométriques observées dans les tubes de verre plutôt à la courbe que j'ai tracée qu'à la table de Laplace. Toutefois, il serait prématuré peut-être île traduire en table les données de ma construction graphique. Une table de cette importance doit reposer sur un bien plus grand nombre d'observations, que je me propose d'effectuer aussitôt que j'aurai à ma disposition un choix considérable de tubes. Bien que nous ayons pu admettre comme une approximation la coïnci- dence de la courbe naturelle des dépressions du mercure dans les tubes de cristal avec celle des dépressions calculées par Laplace, les observations actuelles, jointes à d'autres données, nous obligent cependant à reconnaître que celte coïncidence n'est pas rigoureuse, et nous permettent d'assigner au SUR LA CAPILLARITÉ. 1 1 1 phénomène de la dépression du mercure dans les tubes en cristal de rayon quelconque sa véritable marche. Les données de la table de Laplace ont été calculées en intégrant, par approximation, l'équation différentielle du second ordre 4m,"i,738 I! dans laquelle D est la dépression dans un tube dont le diamètre est 2r, et R le rayon de courbure au point supérieur du ménisque. De plus, Laplace a admis dans son intégration que la surface du mercure coupait la surface du tube sous un angle de 48° centésimaux , indépendant du rayon du tube. La courbe qui joint les points dont les dépressions ainsi calculées sont les abscisses, sera pour nous la courbe théorique; celle qui joint les points fournis par l'observation sera la courbe naturelle. Si nous supposons les points C, , C2, C8,C9, C10 joints par une courbe que nous nous sommes abstenu de tracer, parce que nous n'eussions pu le faire avec une certitude suffisante, il est visible que cette courbe naturelle coupera la courbe théorique en deux points, dont l'un est précisément le point C10, et dont l'autre sera situé plus haut que le point C,; par suite, la courbe naturelle, après être restée inférieure à la courbe théorique entre ces points, passera des deux côtés au-dessus d'elle. Il n'est pas douteux qu'il en sera ainsi dans la partie inférieure des courbes ; car on voit qu'au point Cl0, elles se coupent sous un angle trop sensible pour que l'on puisse admettre qu'à partir de ce point, elles se confondent. La dépression naturelle conver- gerait donc moins rapidement vers 0 que la dépression théorique. Nous pou- vons aussi nous convaincre que les courbes se coupent dans leurs parties supérieures, en considérant les trois résultats que j'ai obtenus dans mon pre- mier mémoire pour des tubes très-capillaires. Ces résultats sont les suivants : r Dépressions. D Produits. Dr mm 0,0566 154.42 4.920 0,0472 107.02 5.051 0,0492 101.62 3.000 , H 2 RECHERCHES La moyenne de ces résultats est 4.990; elle est notablement supérieure au nombre 4.758 que Laplace admet, et que nous avons trouvé à peu près pour des tubes moins capillaires. II résulte de là, qu'en un point dont l'abscisse est une fraction de milli- mètre, les deux courbes se coupent de nouveau, et que la courbe théorique passe au-dessous de la courbe naturelle, de sorte que la dépression réelle converge plus rapidement vers l'infini que la dépression théorique. Comme le point d'intersection des deux courbes se trouve dans la partie qui correspond à de petits diamètres, nous voyons que, dans ces limites mêmes, la loi du rapport inverse de la dépression au diamètre n'est pas rigoureuse, et qu'au-dessus d'une certaine valeur du rayon, elle est plus petite que ne le veut cette loi , tandis qu'au-dessous elle est plus grande. Nous rencontre- rons plus tard un grand nombre de résultats de ce genre. En considérant la courbe relative aux tubes de verre, on retrouve avec plus de certitude encore les conclusions précédentes; car la différence de courbure de cette courbe et de la courbe théorique est beaucoup plus forte (jue celle que pouvait offrir la courbe des tubes de cristal. Manquant abso- lument de données à l'égard des dépressions dans les tubes capillaires de verre, j'observai ces dépressions dans de semblables tubes; tous ceux que j'avais à ma disposition étaient à section très-elliptique, ce qui m'avait fait renoncer à effectuer sur eux aucune observation; voici les données des deux tubes que j'ai choisis comme les moins irréguliers : 1 2. Épaisseur .... 1.78 1.75 Demi-axes .... l 0.54G9 ( j 0.5575 ( . .. j 0.6413 ) 0.6788 \ R — 0.3421 0.6698 45.65 1 "' 1 7.70 | Dépressions observées. ! 15.50 j 7.20 ( 15.30 7.60 J Dépressions moyennes. 15.42 7.50 J'ai porté les poinls V, V", correspondants à ces données, sur la courbe SUR LA CAPILLARITE. 113 ah, et Ton voit qu'ils sont en dehors de cette courbe, du côté opposé aux points V3, V4 La courbe naturelle coupe donc la courbe théorique entre les points Vs et V". Si Ton calcule les produits ( /* -f- \ ) r relatifs à ces tubes , on trouve pour le premier 5.313 et pour le second 5.171 , nombres qui s'écartent bien da- vantage du produit 4.738 que ceux qui sont relatifs au cristal : c'est ce que Ion pouvait prévoir d'après la forme de la courbe. J'ai tracé aussi sur la figure précédente la courbe correspondante aux résultais obtenus par lord Cavendish; son irrégularité montre bien la néces- sité de ces nouvelles expériences. Revenons actuellement à la question primitive, c'est-à-dire à la mesure des volumes déprimés. J'ai dit qu'après avoir déterminé la dépression dans un tube de rayon donné, je mesurai la hauteur h du point supérieur d'une petite colonne de mercure contenue dans ce tube, au-dessus d'un plan horizontal servant de base au tube {(îy. 13). Afin de pouvoir appliquer également ici la détermination du contact par la naissance d'un courant électrique, je pre- nais comme plan horizontal une plaque de fer soigneusement dressée, et qui communiquait par un fil métallique avec la boussole. Après avoir pris la hauteur du mercure, en soulevant un peu le tube je laissais s'échapper le mercure contenu, que je recueillais ensuite pour le peser, puis enlevant le tube même, je prenais la hauteur du plan de fer. .l'ai mesuré ainsi les poids des volumes déprimés dans les tubes 1 , 2, 8 et 9 des expériences précédentes. Voici les résultats que j'ai obtenus; les nota- tions sont celles de la page 102. N"* Poids Rapports Hayons. h. P- X dis tubes. déprimé <. 7i/" mm. mm. mg. mg. nini <]. i 2,583 G,90ô 1800 507 5.140 2 5,003 7,244 3705 705 4.955 5(>) 5,024 ô,294 5185 1169 5.141 9 9,228 5,767 19130 1987 4.920 0 1 5,091 17095 2057 5.219 (1) Ce tube est un fragment du même tube i et 10.590 sont assez peu différents puur que 1 serite dans te tableau. ue le n" S du t.ib on puisse prend eau procèdent. Les c ici la valeur de diamètres 10.6W j dépreaiioD iu Tome XXX. 1S H 4 RECHERCHES Los nombres de la dernière colonne présentent une égalité satisfaisante; leur moyenne est 5,077, nombre un peu plus fort tpie le nombre 4.813 re- latif aux tubes capillaires. Cependant, nous avons vu que, dans nos premières expériences, le produit de la dépression par le rayon pour les tubes très-ca- pillaires est 4.990, nombre très-voisin de la moyenne actuelle, et supérieur même à deux des résultats précédents. 11 n'y aurait donc que les tubes dont les diamètres sont compris entre 0""n,l et 5""", qui pourraient se soustraire à la loi des volumes déprimés; encore la différence est-elle assez faible pour qu'il soit permis de Pattribuer à quelque cause d'erreur inaperçue. Quoi qu'il en soit, nous pouvons affirmer que la loi en vertu de laquelle les volumes de mercure déprimés dans des tubes cylindriques à section circulaire sont proportionnels aux rayons de ces tubes, est à très- peu près exacte pour des rayons compris entre Omm,04 et 9mm, et présumer qu'elle peut s'étendre, avec la même approximation , à toutes les limites d'espace mesurables. C'est là certainement un des plus beaux résultats théoriques que puisse vérifier l'expérience; mais l'on doit s'étonner de son exactitude, en présence des différences que nous avons constatées entre les dépressions observées et celles qui se déduisent de la formule même, dont l'intégration a conduit à ce résultat. Et l'on doit remarquer que l'on ne pourrait rétablir l'accord entre ces dépressions qu'aux dépens de la vérification précédente; c'est-à-dire que celle-ci cesserait d'exister si , dans le calcul des volumes déprimés , nous nous étions servi des dépressions calculées. Dépression d'une colonne de mercure interrompue par des bulles d'air. M. Bertrand, dans son travail sur les phénomènes capillaires *, pose le théorème suivant, qui, si la théorie est exacte, doit être rigoureusement vrai. « Si un tube capillaire est plongé dans un liquide, et que la colonne du liquide soulevé soit séparée en plusieurs parties par des bulles d'air intro- duites artificiellement, la masse totale du liquide soulevé ne dépendra ni du nombre ni du volume de ces bulles. » 1 Journal de M. Liouville, t. XIII. pp. 186 et -204, 1848. SUR LA CAPILLARITE. 115 Quoique cel énoncé s'applique seulement aux phénomènes d'élévation, rien dans l'analyse qui y conduit ne me paraît restreindre ce théorème à ces phénomènes, et empêcher son application aux dépressions. J'ai donc cherché à le vérifier par l'expérience, bien que je fusse certain d'avance que le ré- sultat de celle-ci serait contraire à la loi précédente. Une observation trop fréquente avait motivé cette conviction, et tous ceux qui ont calibré des tubes très-capillaires (de moins de 0mra,l de diamètre) l'ont faite bien malgré eux. Lorsqu'on fait marcher dans ces tubes une petite colonne de mercure, soit à l'aide du souffle, soit par tout autre moyen, il arrive souvent qu'en un point du tube, sans cause apparente, la colonne s'arrête. Si alors, pour lui faire franchir l'invisible obstacle, on la ramène en arrière afin de lui imprimer une nouvelle impulsion, on voit parfois la colonne se diviser malgré l'extrême finesse du tube. Dès ce moment tous les efforts sont inu- tiles; même dans ces parties du tube, où tout à l'heure elle se mouvait sans peine, la colonne est devenue immobile, à tel point que le souffle le plus fort, les secousses les plus violentes, sont impuissants à la déplacer; c'est à peine si , à l'aide d'une machine pneumatique , on peut retirer du tube la colonne rebelle. Le même effet se produit , mais en sens inverse , dans des tubes assez larges, de ln,m à 2mm de diamètre; on a peine dans ce cas à amener la colonne de mercure dans une position voulue, qu'elle dépasse malgré vous; si pour la ramener on aspire, on la voit souvent aussi se diviser, et aussitôt offrir une résistance très-sensible; et lorsqu'en continuant à aspirer on surmonte cette résistance, il arrive presque toujours que la colonne divisée prend, à peine a-t-elle cédé, une telle vitesse qu'elle se précipite hors du tube. Ces variations de résistance, produites par la division de la colonne, ne peuvent pas être attribuées au frottement, car rien dans celte division n'est de nature à modifier cette force. Les phénomènes précédents sont donc bien des phénomènes capillaires qui nous apprennent qu'il faut, pour mouvoir une colonne de mercure divisée, une pression plus forte que celle qui met en mouvement la même colonne non interrompue. Il résultait immédiatement de là , que la dépression du mercure dans les tubes capillaires devait être nota- blement augmentée par l'interposition de bulles d'air dans la colonne inté- 1 10 RECHERCHES rieure du lubc ; c'est en effet ce que les deux expériences suivantes indiquent . 1 . Dans un tube de Onim,0944 de rayon , la dépression d'une colonne con- tinue était 55mn,,95; encore est-ce là la plus forte dépression observée (voir tableau I , n° 1 1 ). Cette colonne , étant ensuite divisée par trois bulles d'air de longueur lmm,85, 0"'m,60, 0""",90, se composait d'une partie continue plus s trois fragments, dont les longueurs étaient 7mm,60, 2mm,55, onim,95; l'ex- trémité supérieure de ce dernier, qui formait le sommet de la colonne, était à une hauteur de 92""", 18 au-dessous du niveau dans le vase. En ajoutant à cette dépression la somme des hauteurs des bulles d'air, nous trouvons pour hauteur du volume déprimé 95"mi,90, et en apportant les corrections dues aux ménisques, et dont la somme sera 7^, nous aurons 96,12 au lieu de 55,98. 2. Dans le tube 8 du tableau 1 , une seule bulle d'air de 0mm,9 de hauteur séparait du reste de la colonne une petite colonne de 3mm,25. Le sommet de cette colonne était déprimé de 100mm,55, en ajoutant 0,9 et la correction 3.;, on a comme hauteur de volume déprimé la valeur I01mm,53. Or, la dépression la plus forte, et visiblement trop forte, observée dans ce tube sans interposition de bulle d'air était 69mm,30. Le théorème de M. Bertrand n'est donc pas vérifié en ce qui concerne lu dépression du mercure; nous verrons plus loin son application aux phéno- mènes d'élévation. Dépression des métaux fondus. On n'a pas, je pense, sur ce sujet, d'autres expériences que celles de Gellert. Elles ont été faites sur le plomb fondu seulement, et l'on ne peut guère en tirer d'autres conclusions que le fait simple de la dépression. Gel- lert néanmoins en conclut aussi (pie la dépression ne dépend que du diamètre du tube au point où se trouve le niveau, et qu'elle est à peu près en raison inverse de ce diamètre. Il déduit cette loi des dépressions 7',3 et 2',7 obser- vées dans des tubes dont les diamètres étaient 0',7 et 2',1- Le rapport des dépressions est 2',7 ; celui des diamètres 3,0; la différence est de -^ de ce dernier rapport. Outre que cette différence est déjà assez sensible, les ex- SUR LA CAPILLARITE. 117 périences qui l'ont fournie sont faites de telle manière que l'on est en droit de supposer qu'elle est la plus petite de celles que Gellert a observées, de sorte que les observations rapportées seraient des expériences de choix '. En effet, ce physicien opérait des deux manières suivantes : 1° il plon- geait un tube de verre dans le plomb fondu , et mesurait la distance du niveau à l'extrémité supérieure du tube; puis, appliquant le doigt sur cette extré- mité, il relirait le tube et mesurait la distance du niveau intérieur à la même extrémité; la différence des deux mesures donnait la dépression. Les vices d'un pareil mode d'expérience n'ont pas besoin d'être indiqués; 2° Gellert avait observé que la surface du métal fondu dans le tube se figeait avant le reste de la masse, et il relirait le tube lorsque la solidification de la masse entière commençait. Cette manière d'opérer ne me paraît guère plus sûre (pie la précédente. Toutefois, il suffit de modifier légèrement ce dernier procédé pour obtenir des garanties suffisantes d'exactitude. Après avoir fondu le métal dans un creuset assez large et y avoir plongé un ou plusieurs tubes, on laisse soli- difier toute la masse, et, en prenant le niveau au moyen d'une pointe, on mesure au cathétomètre la hauteur au-dessus de ce niveau de l'extrémité supérieure du tube. Cela fait , on reporte le creuset au feu , et lorsque le métal commence à fondre, on retire les tubes; le métal qui se trouve dans leur intérieur, préservé par la mauvaise conductibilité du verre, n'a pas encore éprouvé de fusion. On doit, pendant la première fusion, préserver la surface métallique de l'oxydation qui se produit rapidement à ces températures. Il suffit pour cela de faire arriver continuellement dans le tube et dans le creuset de l'acide carbonique. Sans cette précaution , dont Gellert ne fait pas mention , on obtient les résultats les plus discordants , et nous allons voir que, malgré son emploi , on rencontre encore peu de constance. Après avoir retiré les tubes, on mesure, toujours au cathétomètre, la dis- tance de la surface du métal intérieur au haut du tube , qui doit être retran- chée de la première mesure, pour donner la dépression. J'ai trouvé ainsi, 1 Mém. de l'Acad. de Saint-Pétersbourg , 1740, t. XII. — De phoenomenis plumbi fiisi in tubis çapillaribus ; C.-E. Gellert. 118 RECHERCHES pour la dépression de l'étain dans un même tube de 2mn',013 de diamètre, 14-mm,30, 13mm,90 et 10,nm,70, nombres qui diffèrent considérablement entre eux et de leur moyenne 13,00. Pour m'assurer si cette discordance était due au mode d'observation ou à la nature même du phénomène, j'opérai de la manière suivante, qui offre toutes garanties. Après avoir laissé se solidifier entièrement le métal fondu, je faisais pénétrer dans l'intérieur du tube un fil de platine bien droit, ou mieux une petite tige en verre étiré, de longueur bien connue. Ce fil ou cette lijie, beaucoup plus étroit (pie l'intérieur du tube, ne s'arrêtait que sur la surface solidifiée du métal, et Ton pouvait, en visant l'extrémité supérieure , connaître le niveau dans le tube comme on le connaissait dans le creuset au moyen d'une pointe. J'ai trouvé ainsi pour l'étain et le tube précédent une dépression = llmn,,8. Pour un autre tube de lmm,26 de diamètre, et toujours avec l'étain, j'ai trouvé comme dépression 26mm,9 et 24mm,7. La différence est encore de xjw environ. Enfin, avec le plomb et dans un tube de même diamètre, lmm,26, j'ai trouvé 5mm,4 et 7mm,2 , nombres qui diffèrent dans le rapport de 3 à 4. Il ressort immédiatement de ces divergences la nécessité de modifier les circonstances dans lesquelles le phénomène se produit. Je crois que le seul moyen d'arriver à quelque résultat dans ce genre d'observation , consisterait à fondre le métal dans un tube large, auquel serait soudé ou étiré un tube capillaire, et dans lequel passerait continuellement un courant d'acide carbo- nique, ou mieux d'azote. Je me suis convaincu que ce mode d'observation était praticable, au moins pour l'étain , le plomb , le bismuth et l'antimoine : mais comme il faudrait , pour observer le véritable état d'équilibre, maintenir pendant plusieurs heures la température de fusion constante, et le dégage- ment de gaz continuel, cette expérience exigerait une complication d'appareils et surtout une dépense de temps que ne m'a pas paru mériter l'importance du sujet , eu égard au but du travail actuel. SUR LA CAPILLARITE. 119 Élévation des liquides dans les tubes capillaires. L'étude de l'élévation des liquides dans les tubes capillaires semble offrir à l'expérience des quantités plus faciles encore à mesurer que les dépres- sions ; elle présente peut-être aussi plus d'intérêt, parce que le fait de l'ascen- sion d'un liquide contre l'action de la pesanteur peut au premier abord pa- raître plus frappant que le phénomène contraire. C'est ainsi que Jurin déclare avoir fait quelques expériences, dans le but de s'expliquer pourquoi l'élé- vation de l'eau dans les tubes capillaires ne peut pas fournir un moyen de résoudre l'éternel problème du mouvement perpétuel. II n'est donc pas éton- nant que ces phénomènes aient été beaucoup observés. Déjà au milieu du dix-septième siècle, on connaissait sur ce sujet à peu près tout ce que nous savons aujourd'hui. Je ne m'arrêterai pas à raconter les travaux de cette époque; il me suffira de renvoyer de nouveau, pour l'étude de cette histoire, au Traité de la cohésion de M. Frankenheim. J'arriverai donc immédiate- ment aux expériences plus récentes, qui ont été invoquées comme appuis des théories de Laplace et de Poisson, et qui, par cela seul, ont pour nous plus qu'un intérêt historique. Ces expériences sont en si petit nombre , que l'on s'étonne de la facilité avec laquelle on s'en est contenté. Laplace cite d'abord les expériences de Haùy et Tremery , sur l'ascension de l'eau et de l'huile d'orange dans trois tubes de diamètres différents. Les nombres obtenus vérifient assez bien la loi du rapport inverse de l'élévation au diamètre ; mais des expériences pos- térieures ont montré que ces nombres sont trop petits de plus de moitié. Laplace lui-même cite plus loin des expériences de Gay-Lussac , donnant pour l'élévation de l'eau dans un tube de lmm de diamètre, 30mm,l, tandis que, d'après Haùy et Tremery, elle ne serait que 13mm,6; il attribue cette énorme différence à ce que ces deux physiciens observaient sur des tubes secs, tandis que Gay-Lussac humectait fortement les siens. Mais Poisson cite une autre expérience de Gay-Lussac, d'après laquelle l'élévation de l'huile d'orange donnée par Haùy et Tremery, serait de moitié trop faible, et les résultats que j'ai obtenus donnent la même conclusion. Or, l'huile 120 RECHERCHES d'orange s'élève tout aussi haut dans un tube sec que dans un tube mouillé; de plus ce liquide fournit à l'observation des résultats très-constants. On doit donc soupçonner dans les chiffres indiqués par Hauy et Tremery quelque erreur considérable. M. Frankenheim suppose que ces physiciens ont con- fondu les lignes françaises avec les millimètres que l'on commençait seule- ment à employer alors, et il trouve, qu'en admettant cette confusion, leurs résultats s'accordent avec ceux de Gay-Lussac; mais il faudrait admettre en outre que celte substitution des lignes aux millimètres n'a été faite que pour rime des données, c'est-à-dire ou pour l'élévation ou pour le diamètre, et cela me paraît invraisemblable. J'admettrais plus volontiers que Hauy et Tremery ont donné pour les diamètres des tubes des valeurs qui n'étaient que celles des rayons. Quoi qu'il en soit, ces expériences ne peuvent pas être regardées comme des expériences précises; il suffît de considérer les va- leurs 2mm,fmni, et |mm données comme diamètres des tubes, pour être con- vaincu du peu de précision des mesures. Laplace cite aussi deux expériences de ces physiciens, sur la dépression du mercure, lesquelles vérifient encore rigoureusement la théorie; mais elles sont faites de telle façon qu'il est impossible de leur accorder la moindre confiance. Enfin, on doit ajouter à ces observations les deux expériences de Gay- Lussac qui sont rapportées par Laplace, Poisson, et dans tous les traités de physique; elles ont constitué longtemps la seule démonstration expérimen- tale de la loi du rapport inverse de l'élévation au diamètre. Or, en outre qu'elles sont en aussi petit nombre que possible, ces deux expériences ont le défaut d'être faites sur deux tubes dont les diamètres ne diffèrent pas beau- coup l'un de l'autre; elles n'apprennent donc nullement entre quelles limites la loi est exacte. Les premières expériences faites en vue de décider ce point important sont celles de Simon ' (de Metz); elles ont été effectuées avec beaucoup de soin et entre des limites extrêmement étendues. Ainsi les diamètres des tubes employés variaient d'une manière assez continue entre Omm,006 et 31""". La conclusion principale de ce travail, en ce qui concerne les tubes capillaires, 1 Annales de phys. et de chimie; 1851. SUR LA CAPILLARITE. 121 est que le produit de l'élévation par le diamètre, qui devrait être un nombre constant, varie d'une manière continue, en croissant à mesure que le dia- mètre décroît. On peut reprocher à ces expériences de reposer sur un principe qui n'est pas bien certain. En effet, Simon, faisant communiquer le tube capillaire plongé dans l'eau avec un réservoir d'air portant un manomètre à eau, dé- terminait l'élévation de l'eau dans le tube par la colonne d'eau soulevée dans le manomètre au moment où, par une compression suffisante, on forçait l'air du réservoir h s'échapper par l'extrémité immergée du tube. 11 admet- tait que cette colonne, diminuée delà dislance de cette extrémité au-dessous du niveau, était égale à la hauteur à laquelle l'eau s'élèverait librement dans le tube. Simon avait adopté ce procédé pour plusieurs raisons, dont aucune ne me parait bien valable. Il nie la possibilité d'observer directement, au moyen du cathétomèlre, l'élévation des liquides dans les tubes très-étroits; or, rien n'est plus aisé avec une lunette grossissant seulement six ou sept fois. Ce grossissement étant augmenté de celui qui est dû aux parois mêmes du tube, on peut observer sans peine le niveau d'un liquide dans un tube dont le diamètre est 0mm,03 , ce qui est une limite inférieure bien suffisante, d'autant [dus qu'il est fort difficile de mesurer avec rigueur des diamètres moindres. Simon allègue en outre ce fait, que la hauteur de l'eau dans un tube capillaire n'est pas la même lorsque l'eau s'élève clans le tube et lors- qu'elle y descend , après avoir été soulevée trop haut. Nous verrons plus loin que ce fait ne se produit pas quand on opère sur des tubes mouillés; d'ail- leurs, en admettant qu'il fût vrai, on serait en droit de demander à Simon laquelle de ces deux hauteurs doit être donnée par son procédé, ou si c'est une troisième hauteur intermédiaire qu'il détermine. Enfin , ce physicien justifie le principe de ses expériences par un raison- nement qui ne me parait pas parfaitement concluant et qui se réduit à ceci : si, dans un tube capillaire, l'eau s'élève à une hauteur H, et si l'on com- prime l'air intérieur de ce tube de façon à ce que l'excès de sa pression sur la pression extérieure soit marqué par une colonne d'eau // , la hauteur II se réduira à II — h , cl si h = H , elle se réduira à 0 , l'eau ne s'élèvera pas dans le tube. Réciproquement, si l'extrémité d'un tube louché la surface de Tour XXX. 16 122 RECHERCHES l'eau , et si on comprime l'air intérieur de ce tube de manière à empêcher Peau de s'y élever, la colonne d'eau h mesurant l'excès de pression scia égale à la hauteur II à laquelle l'eau s'élèverait librement dans le tube. Il est probable, quoique non évident, que l'excès de pression mesuré par la hauteur h doit réduire l'élévation II d'une quantité égale à cette hauteur h, tant que le liquide est dans l'intérieur du tube, parce qu'alors il peut conser- ver la même surface et qu'il est soumis aux mêmes forces; mais il n'en est plus ainsi dès qu'il arrive à l'extrémité du tube. Aussitôt sa surface change et devient celle d'une bulle d'air ayant pour base la section intérieure du tube, et dont la surface peut être très-différente, selon la rapidité avec laquelle les bulles d'air se dégagent. Il est naturel de supposer que les colonnes mano- métriques peuvent être influencées par ces différences de surface. Le doute est encore augmenté par le tort que Simon a eu de ne publier que les moyen- nes de ses expériences; on ignore jusqu'à quel point elles s'accordaient en lie elles. C'est pour décider le degré de confiance que l'on peut accorder aux résul- tats de ce physicien, que j'ai cru nécessaire d'entreprendre les quelques expériences dont je donne ici les résultats. Elles ont été faites d'abord avec un appareil aussi simple que possible (fig. 6 ), et consistant en un manomètre deux fois recourbé et soudé à un tube capillaire. J'avais adopté cette simple disposition afin d'éviter d'une manière certaine toute fuite d'air. Après avoir plongé le tube dans un liquide, on mesurait d'abord la hauteur H à laquelle ce liquide s'élevait soit directement, par un mouvement ascensionnel, soit après avoir été aspiré jusqu'au haut du tube et être redescendu librement : une fois cette hauteur déterminée, on versait de l'eau dans le manomètre jusqu'à ce que l'air comprimé se dégageât par le bas du tube; après quelque temps, on mesurait au moyen d'un cathétomèire la hauteur h de la colonne manométrique et la distance D du bas du tube au niveau dans le vase, on devait avoir h — D = II. C'est au moyen d'appareils de ce genre qu'ont été laites les trois premières expériences concernant l'eau, et celles qui concernent l'acide sulfurique. En ayant construit un semblable pour un tube plus large, je reconnus avec surprise une différence énorme entre les hauteurs II et h — I). Je l'attribuai d'abord à ce que les bulles d'air, se dégageant avec SUR LA CAPILLARITE. 123 une certaine vitesse, il en sortait davantage qu'il ne devait en sortir, d'où il résultait une diminution de pression de l'air intérieur d'autant plus considé- rable (pie le volume de celui-ci était plus petit. Pour diminuer à la fin la vitesse d'écoulement des dernières bulles et l'influence exercée sur la pression par les bulles échappées, je remplaçai l'appareil précédent par un autre tout aussi simple, et consistant en un flacon à deux tubulures dans lesquelles étaient mastiqués le tube et le manomètre. C'est avec cet appareil qu'ont éfé faites les observations IV, V, VI, relatives à l'eau, et celles qui concernent l'huile d'orange et le brome. Mesure manométrique de l'élévation des liquides dans les tubes capillaires. des observa- tions. Rayon des tubes. Hauteur observée direc- tement H. Hauteur mano- métrique h. Hauteur du niveandans le tube D. Élévation déduite. Différen- ces, Nos des observa- tions. Rayon des tubes. Hauteurs observées. Hauteur mano- métrique h. Hauteur du niveau dans le tube D. Élévation déduite. différen- ces. i. 0.0000 155.70 165.10 11.10 154.10 -0.40 IV. 0,590 24.90 26.00 - 10.40 15.60 + 9.50 100.50 52.80 153.50 + 0.40 24.60 50.25 " 19.85 + 4.75 100.80 52.80 133.60 + 0.10 24.60 26.55 » 10 15 + 8.45 137.15 - 5.50 155.65 + 0.03 24.60 27.45 » 17.05 + 7.55 137.10 - 3.50 155.60 + 0.10 27.05 •' 16.65 + 7.93 157.80 - 2.43155.55 - 1.63 26.10 >• 15.70 + 8.90 98.15 57.10 155.25 - 1.55 58.65 - 22.95 15.70 + 8.90 174.80 19.00 155.80 - 2.10 42.1(1 19.15 5.45 ii. 0,09703 155.55 100.50 162.80 - 12.33 148.15 150.45 + 5.40 + 5.10 V. 0,945 15.30 - 10.15 - 65.05 + 31.45 80.35 15.30 15.50 + 0.00 + O.00 165.50 151.15 + 2.40 - 22.65 38 . 1 5 15.5o|- 0.20 167.50 « 155.15 - 1.00 - 44.65 59.95 15 30+ 0.00 m. 0,1802 80.05 85.45 - 4.25 81.20 - 1.13 - 02.30 77.00 15.10:+ 0.20 85.90 - 5.45 80.45 - 0.40 -105.45 118.05 14.60 + 0.70 85.05 - 4.55 80.50 - 0.45 VI. 0,935 15.55 4.25 10.75 15.00 + 0.55 84.60 - 4.53 80.05 0.00 15.55 5.15 12.50 15.45'+ 0.10 85.00 - 4.55 80.43 - 0.40 - 9.05 27.45 18.40 - 2.85 124 RECHERCHES Mesure manométrique de l'élévation des liquides dans les tubes capillaires. Union Hauteurs Hauteurs llauteur Élévation des observées mannmeirirçucs du niveau Différence. tubes. directement H h. dans le lune D. déduite. Acide sulfurique. 0,0900 70.15 80.14 - 12.05 75 . 49 + 2.66 91.17 .. 78.52 - 2.57 87.12 » 74.47 + 1.68 88 . 23 » 75.58 + 0.57 80 . 05 - 5.25 74.78 + 1.57 Huile d'orange. 0.1802 55.05 39.86 5.55 54.51 + 0.54 39.86 » 34.51 + 0.54 40.05 » 35.50 - 0.25 59.97 » 54.02 + 0.45 59 . 1 2 - 4.55 54.57 + 0.48 Brome. 0,1039 15.51 25.75 0.50 25.25 - 7.74 22.07 22.17 - 6.66 22.24 21.74 - 6.23 20.49 -19.99 - 4.48 19.04 19.14 - 5.65 Dans plusieurs de ees expériences je n'ai pas entièrement refoulé la co- lonne soulevée dans le tube capillaire , alors la valeur de D est celle de l'élévation restant dans le tube; on reconnaît facilement ces expériences parce que 1) y est positif. En général, cette quantité D exprime la hauteur du niveau dans le tube au-dessus du niveau dans le vase; quand les bulles se dégagent, cette hauteur est sensiblement égale à la dislance du bas du tube au-dessous du niveau. Elle est donc alors négative. Cette quantité étant ainsi considérée, on voit qu'au lieu de la retrancher il faudra ici rajouter, en lui conservant le signe que nous lui donnons dans les tableaux suivants. Les rayons des tubes ont été déterminés par les procédés que nous avons décrits SUR LA CAPILLARITE. 12S précédemment. Les hauteurs manométriques étant toujours colles de colonnes d'eau, on les a, pour d'autres liquides, ramenées à ce qu'elles eussent été en employant ces liquides eux-mêmes. Ces expériences montrent que le procédé employé par Simon peut donner , pour certains liquides tels que l'eau, l'acide sulfurique et l'huile d'orange, des résultats suffisamment exacts, lorsqu'on ne L'applique qu'à des tubes très- capillaires, et je m'empresse d'ajouter que Simon n'a appliqué exclusivement ce mode de mesure qu'à ces sortes de tubes. On peut donc avoir confiance dans la plupart de ses résultats. L'expérience IV nous montre que la mesure manométrique ne donne aucun résultat tant soit peu approximatif, quand le rayon atteint la valeur Omn,,590, et les deux expériences suivantes prouvent que c'est à l'extrémité du tube, et non tant que le liquide est dans son intérieur, que le principe de cette mesure devient inexact, c'est-à-dire que la somme algébrique de l'élévation et de la hauteur manométrique est constante tant que le ménisque est dans le tube même, et ne cesse de l'être que lorsque des bulles se dégagent. On voit du reste, lorsqu'on observe sur des tubes d'environ 2",m de diamètre, qu'aussitôt que le dégagement des bulles a cessé, l'eau remonte à une certaine hauteur dans le tube. Il est probable que le même phénomène s'est produit dans le tube V, sans que je l'aie remarqué ; mais il est clair que si l'on doit , en même temps 1 0,002155 175.10 0.95 2.99 0,01280 » 0,002056 241.35 0.35 5.10 0,01210 0,01251 0,001925 0,001958 r « 0.45 0.15 5.05 2.85 0,0125; » 0,001990 6 0,600 0.00 8.10 8.10 0,004600 0,007510 0,001591 0,002182 0,505 30.05 8.10 8.24 0,007779 » 0,002522 0,506 110.55 7.35 8.21 0,009492 » 0,002855 0,500 150.65 6.95 8.58 0,015240 0,015805 0,004524 0,004705 >■ 0,580 » 0.10 8.41 0,016570 » 0,004885 » 0,604 n 5.50 7.99 148 RECHERCHES Alcool absolu. t ii i i i t ■■. N" et rayons. d / l — V d L— L' D e E N- cl rayons. d / l-V L—V e E d D i. 0,0 55,9 IV. 0,0 55,0 0,05779 125,4 55,2 0,00588 0,00909 0,000158 0,000257 0,1788 144,3 30,5 0,01753 0,01890 0,001549 0,001690 276,2 53,9 0,00724 0,000204 310,8 26,6 0,02059 0,001680 418,9 29,85 0,01444 0,000408 409,8 25,3 0,01879 » 0,001841 r. 456,9 32,65 0,00744 0,00744 0,000210 0,000210 r. 1) 25,0 0,01952 0,01952 0,001745 0,001745 11 0,0 53,1 V. 0,0 29,7 0,08775 194,3 51,0 0,01080 0,00905 0,000474 0,000590 0,2869 155,7 25,7 0,03849 0,02955 0,005528 0,004279 413,4 50,1 0,00720 0,000318 295,2 21,5 0,02778 « 0,005985 0,0 06,6 458,1 16,9 0,02794 » 0,004008 471,2 60,7 0,01252 0,01252 0,000549 0,000549 542,5 16,7 0,02391 » 0,005430 r. r. 11 61,1 61,2 0,01107 0,01140 0,01156 0,000512 0,000505 0,000507 r. " 12,9 14,3 0,03097 0,02859 0,02514 0.004445 0,004072 0,003319 III. 0,09703 0,0 120,43 226,45 327,95 349,35 0,0 104,75 200,95 513,65 29,05 27,90 20,30 25,50 24,90 41,9 40,6 59,3 58,0 0,00910 0,01284 0,01085 0,01188 0,01194 0,01215 0,01245 0,01099 0,01217 0,000441 0,000589 0,000525 0,000576 0.000588 0,000579 0,000590 0,000533 0,000580 r. a. n 18,5 18,0 19,0 19,3 18,0 25,2 0,02101 0,02157 0,01928 0,01917 0,02157 0,00830 0,00830 0,005014 0,005094 0,002705 0,002750 0,005094 0,001190 0,001190 r. 527,30 37,05 0,01322 0,01522 0,000641 0,000041 Eau. I. 0,0 95,5 0,0 38,2 0,05779 98,1 94, 1 0,01427 0,01425 0,000403 0,000402 83,5 56,4 0,02156 0,01902 0,001046 0,000925 200,8 92,6 0,01444 « 0,000408 194,3 35,0 0,01647 0,000799 307,6 91,2 0,01398 )) 0,000395 III. 0 0 74,5 72,5 r. » 91,2 0,01598 0,01598 0,000395 0,000395 0,1788 194,0 0,01134 0,01134 0,001014 0,001014 II. 0.0 48,0 0,0 150,5 0,09703 117,4 46,8 0,01022 0,00702 0,000490 0,0003G9 158,6 127,5 0,01892 0,01895 0,001091 0,001692 251,9 46,5 0,00590 » 0,000289 195,4 126,8 0,01894 .» 0,001693 r. 352,95 375,6 n 45,65 43,4 42,5 0,00007 0,01225 0,01517 0,01371 0,000325 0,000594 0,000750 0,000665 IV. 0,2809 0,0 116,6 515,7 93,4 91,2 87,0 0,01887 0,02027 0,01937 0,002707 0,002908 0,002808 SUR LA CAPILLARITE. li'J Ether. et rayons. d ( l — V d L—V D e E el rayon9 d l l-V d~ L — L' D e E I. 0,0 84,7 r. 5,2 0,01520 0,01159 0,000579 0,05779 207,8 83,0 0,00818 0,00854 0,000251 0,000241 » » 5,4 0,01255 0,000551 404,5 81,1 0,00890 0,000251 0,0 50,5 T. « 0,0 80,0 40,8 0,01162 0,01162 0,000328 0,000328 113,6 521,9 29,7 27,4 0,00704 0,00905 0,00880 0,000509 0,000425 0,000580 158,2 38,5 0,00941 0,00920 0,000260 0.000260 461,8 26,0 0,00974 •' 0,000427 356,4 57,6 0,00898 » 0,000254 « .. 25,8 0,01018 0,01102 0,000447 0,000510, T rt 37,1 0,01038 0,01038 0,000293 0,000295 « .. 25,1 0,01169 " 0,000515 II. 0,0 9,5 » » 24,5 0,01299 » 0,000570 0,08775 139,7 8,7 0,00430 0,00489 0,000188:0,000214 III. 0,0 52,6 310,7 7,6 0,00547 » 0,000240 0,2869 329,1 46,8 0,01762 0,01611 0,002528 0,002510 r. » 6,5 0,00901 » 0,000395 jO,000508 r 47,8 0,01459 » 0,002092 Acide sulfurique. I 0,0 45,7 III 0,0 52,7 0,03779 101,0 43,5 0,02178 0,02158 0,000615 0,000604 0,2869 265,6 50,1 0,00979 0,01018 0,001404 0,001460 200,3 41,7 0,01997 » 0,000564 570,7 28,8 0,01033 » 0,001485 272,5 39,6 0,02239 » 0,000632 461,6 27,9 0,01040 » 0,001492 r. » 58,7 0,02309 00,2569 0,000723 0,000725 r. » 26,6 0,01322 0,01582 0,001896 0,002002 Il 0,1758 0,0 96,0 200,9 52,9 52,2 51,7 0,00729 0,00597 0,00663 0,000652 0,000534 0,000593 r, a. r a » 24,2 52.6 52,5 0,01841 0,00022 0,00087 0,00054 0,002108 0,000051 0,000124 0,000077 r. » 49,4 0,01742 0,01742 0,001558 0,001558 r. a. » 52,9 0,00000 0,00000 0,000000 0,000000 Huile d'orange. 1. 0,0 49,9 II 0,0 19,6 0,1758 288,9 45,5 0,01525 0,01525 0,001502 0,001362 0,2869 102,5 17,0 0,02542 0,02395 0,003640 0,005433 a. 50' ii 46,4 0,01212 o 0,001085 207,9 15,0 0,02213 » 0,005174 35' » 47,2 0,00935 „ 0,000836 554,8 11,2 0,02509 » 0,005599 50' » 48,0 0,00058 „ 0,000585 519,9 7,6 0,02308 » 0,003311 P'O » 48,2 0,00588 » 0,000326 a. 3'' 30' 521,1 18,0 0,00307 0,00507 0,000440 0,000440 1 45 . » 48,6 0,00450 » 0,000402 5 0 o 49,0 0,00312 0,00512 0,000278 0,000278 3 jours. " 48,7 0,00415 " 0,000371 1§0 RECHERCHES Je lire des expériences précédentes quelques conclusions qui me paraissent ne pas manquer d'intérêt : 1. Les épaisseurs des couches laissées dans différents tubes par une co- lonne liquide qui y descend librement ne sont pas constantes. Elles croissent plus que proportionnellement au rayon, c'est-à-dire qu'elles peuvent être re- présentées par une formule de la forme f(r) étant une fonction de r, positive et croissant avec r. Cette conclusion s'applique aussi bien aux épaisseurs des couches formées par un seul mouvement descendant que par plusieurs parcours du tube. Elle se déduit immédiatement des valeurs du rapport -^— qui, si les couches avaient, dans différents tubes, les mêmes épaisseurs, devraient être en raison inverse du rayon , et par conséquent diminuer rapidement quand celui-ci augmente. Or nous voyons ce rapport croître avec r. 2. La couche laissée par un liquide le long des parois d'un tube n'y reste point adhérente, mais s'en détache au bout d'un temps plus ou moins long, au bout duquel il ne reste plus de couche mouillante. Il suffit, pour se convaincre de la vérité de cette assertion, de considérer les expériences II et III sur l'acide sulfuriqueel I et II sur l'huile d'orange; nous y trouvons sous l'indice r.a., pour le premier de ces liquides, les épaisseurs 0m,0000000et 0m,000077, l'une tout à fait nulle, l'autre vraiment inap- préciable. Pour l'huile d'orange, aux indices a.5h et «.3!l,30' se trouvent les épaisseurs 0,000278 et 0,000440 qui sont plus sensibles, mais inférieures aux limites que l'expérience peut franchir avec certitude. Ainsi donc, pour l'acide sulfurique et l'huile d'orange, l'épaisseur des couches mouillantes ob- servées après un temps suffisamment long est nulle ou insensible. Comment admettre qu'il puisse en être ainsi pour des liquides visqueux comme l'acide sulfurique et l'huile d'orange, et non pour des liquides tels (pie l'alcool et l'élher, qui montrent bien moins d'adhérence au verre? Nous ne trouvons dans les tableaux précédents qu'une seule expérience capable de nous éclairer sur cette question ; elle concerne l'alcool (y,r.a) et nous montre (pie, bien que l'épaisseur se soit , par le repos du liquide pendant vingt-quatre SUR LA CAPILLARITE. loi heures, réduite au tiers de ce qu'elle était d'abord, elle a néanmoins conservé une grandeur appréciable Omm,00119. Depuis, j'ai fait quelques observations sur l'éther, et j'ai toujours trouvé que la colonne liquide , au bout de viii£t- quatre heures, n'avait pas augmenté de longueur, de sorte que l'épaisseur de la couche mouillante n'avait pas diminué par le repos. Or, il répugnerait d'admettre que l'éther pût rester plus adhérent aux parois du tube que l'alcool, et celui-ci plus que l'acide sulfurique et l'huile d'orange. On s'ex- plique d'ailleurs très-facilement comment l'expérience peut conduire à un tel résultat : en effet, l'acide sulfurique et l'huile d'orange sont des liquides très- peu volatils, le premier surtout. Par suite, les couches de ces liquides peuvent , sans s'évaporer, se détacher lentement des parois du tube et rejoindre la co- lonne restée dans le tube. Pour des liquides volatils, au contraire, il peut et il doit arriver (pie la couche mouillante, à mesure qu'elle se forme, s'évapore en partie. La vapeur produite peut s'échapper par les extrémités du tube que l'on doit maintenir ouvertes pour laisser descendre la colonne. Celle qui ne s'échappe pas peut, lorsque le tube est ensuite fermé, rester à l'état de satu- ration, ou se condenser en partie, si la température s'abaisse. Celte partie condensée s'ajouterait alors à la partie de la couche mouillante qui ne s'est pas évaporée, pour rendre à la colonne liquide une partie de sa longueur primi- tive. Voici sur ce sujet deux expériences qui me paraissent décisives : 1° Ayant introduit dans le tube de rayon 0n,m,1758 une colonne d'éther, je fermai aussitôt les deux extrémités de ce tube et le plongeai dans de la glace pilée. Au bout d'une demi-heure, je mesurai la longueur de la colonne qui se trouva de 60D,0. Je retirai alors le tube et j'ouvris les deux extrémi- tés, puis fermant imparfaitement l'extrémité inférieure au moyen d'un tam- pon de cire molle, je replongeai le tube dans la glace, et lorsque la colonne eut parcouru une longueur suffisante, j'appuyai le tube contre le fond du vase plein de glace, de manière à achever de fermer l'extrémité inférieure, en même temps je bouchai l'extrémité supérieure à l'aide d'un second tampon de cire molle. Observant alors à la lunette, je reconnus que la longueur par- courue était 271D,0 et celle de la colonne de 58°/*. Au bout d'une demi-heure j'observai de nouveau, et je retrouvai à la colonne exactement sa longueur primitive 60D,0 ; I §2 RECHERCHES 2" Ayanl effilé les deux extrémités d'un tube de rayon 0,2869, j'y fis pénétrer une colonne d'élher, et je mesurai sa longueur, qui était de 29D,0, après avoir fermé à la lampe les deux extrémités du tube; les a^ant do nouveau brisées , je vis la colonne descendre très-lentement ; après un parcours de 29iD,0 le tube ayant été refermé, je trouvai à la colonne une longueur de 28D,5. Au bout de trois heures, cette colonne n'avait pas varié. Ces deux expériences fournissent des indications précises sur le phéno- mène qui nous occupe. Je ne puis, en effet, inexpliquer leurs résultats dif- férents que de la manière suivante : Lorsqu'une colonne d'éther descend dans un tube, la couche qu'elle aban- donne le long des parois n'y adhère que très-peu ; une partie rejoint con- stamment la colonne mobile, une autre s'évapore et s'échappe; celle-ci est d'autant moindre que la température est plus basse et que les vapeurs formées peuvent moins s'échapper. C'est ce qui explique les très-petites pertes de lon- gueur observées dans ces deux expériences. En effet , dans la première nous avons : / — /• 1,0 0,005904 . d '21 \ et dans la seconde : / — V 0,5 = 0,001735 29i Or, au lieu de cette dernière valeur, nous trouvons pour le même tube dans le tableau concernant l'éther le nombre 0,01702. On s'explique facilement pourquoi, malgré l'infériorité de la température, la perte a été plus considérable d'abord dans le premier tube, et pourquoi cette perte s'est ensuite réduite à 0°, tandis que la seconde plus faible d'abord a subsisté. Il suffit de remarquer que l'air pénétrant difficilement à travers les extrémités effilées du deuxième tube, le mouvement de la colonne était très-lent, de sorte que la partie non évaporée pouvait la rejoindre constam- ment. Dans le premier tube il en était tout autrement, le mouvement se faisait plus rapidement, mais la partie évaporée devait être presque nulle, le tube étant à 0°. La colonne a donc pu diminuer momentanément de longueur pour se reconstituer ensuite, la perte par l'évaporation étant insensible. SUR LA CAPILLARITE. 155 Ces considérations se trouvent confirmées par différents phénomènes qui se présentent pendant l'observation, surtout avec l'alcool et l'éther. Après (pie Ton a fermé l'extrémité supérieure du tube , la colonne continue quelque temps à descendre, mais bientôt on la voit remonter de quelques millimètres, pour redescendre ensuite ; elle exécute ainsi plusieurs oscillations dont l'am- plitude va en décroissant, et il faut attendre assez longtemps avant que le mouvement s'arrête; alors une secousse donnée au tube suffît pour le repro- duire. Enfin , au moment où l'on ouvre le haut du tube, l'extrémité inférieure étant ouverte aussi, on voit la colonne s'élever brusquement de quelques mil- limètres, avant de descendre librement. Ces faits me paraissent ne pouvoir être attribués qu'à la tension de l'air et des vapeurs contenues dans le tube. Nous devons faire observer ici que ce mouvement d'oscillation, bien qu'il soit gênant pour l'observation , ne peut entraîner d'erreur sensible dans l'éva- luation de '-^ et de e; en effet, outre que ce mouvement est assez faible , la longueur de la colonne au bout de deux ou trois oscillations ne doit plus \arier, le tube étant saturé de liquide dans l'étendue de ces oscillations. Il faudra seulement prendre pour d la plus grande longueur parcourue. La conclusion la plus importante de ces expériences est certainement celle que nous venons de discuter, et que nous pouvons énoncer ainsi : Une couche liquide d'épaisseur sensible ne peut pus rester adhérente à uni' surface verticale. Ce résultat remarquable rend inutiles les efforts que Poisson a faits pour accorder le fait d'une couche mouillante d'épaisseur sensible avec le principe de l'insensibilité de l'attraction à une distance sensible. II permet également de supposer que la correction indiquée par M. Pla- teau ne doit pas s'appliquer aux résultats de mes expériences, puisque je ne mesurais l'élévation de l'eau qu'après l'avoir laissée se produire pendant 24 heures. Nous n'aurons pas non plus désormais à nous préoccuper de celle correction , parce (pie , si dans nos observations nous n'avons pas toujours laissé écouler un temps aussi long entre le commencement du phénomène et sa mesure (ce qui eût été difficile pour les liquides très-volatils), nous avons au moins attendu suffisamment pour que l'épaisseur de la couche mouillante formée fût devenue insensible. Tome XXX. 20 io4 RECHERCHES D'ailleurs la correction de M. Plateau, appliquée même à des observations immédiates, ne conduirait pas aux résultats que ce savant avait prévus, puis- qu'elle ne retrancherait point du rayon une quantité constante, mais une quantité croissant avec lui. Toutefois ces considérations relatives à cette correction ne sont pas d'une rigueur absolue , attendu que les couches mouillantes que nous avons obser- vées ne se produisaient pas d'une manière identique à celles qui peuvent se former au-dessus du ménisque d'un liquide en équilibre dans un tube capil- laire. Il est possible qu'une couche d'une très-petite hauteur se maintienne immédiatement au-dessus du ménisque, de manière à terminer celui-ci ; dès lors la correction de M. Plateau pourrait être fondée. Mais les expériences précédentes montrent tout au moins l'incertitude de cette correction. Élévation des liquides dans les tubes de verre. L'élévation des liquides dans les tubes de verre d'un petit diamètre est certainement l'un des phénomènes capillaires qui ont les premiers frappé l'attention des observateurs ; cependant les expériences sérieuses faites sur ce sujet sont loin d'être suffisantes. Au lieu de chercher à vérifier les lois indi- quées par les théories et très-incomplélement confirmées, la plupart des physiciens ont accepté ces lois et ont fondé sur elles des recherches qui, par cela même, ont perdu beaucoup de leur valeur. Il en a été ainsi surtout de la loi du rapport inverse de félévation au diamètre, loi fondamentale cependant, puisque de sa vérification dépend non-seulement celle des théories de l'action capillaire , mais encore la dé- termination d'une constante qui se retrouve dans l'expression analytique de tous les phénomènes qu'embrassent ces théories, savoir le produit , constant d'après cette loi , de l'élévation d'un liquide dans un tube capillaire par le rayon de ce tube ; c'est la constante II de la théorie de Laplace , la constante x de la théorie de Gauss. Les traités de physique ne constatent guère qu'une seule vérification de cette loi , vérification dont il est vraiment étonnant que l'on se soit contenté aussi longtemps ; car elle n'est basée que sur deux xpériences faites avec SUR LA CAPILLARITE. 155 soin sans doute par Gay-Lussac, mais absolument insuffisantes, comme nous l'avons déjà dit, aussi bien par le nombre aussi petit que possible des tubes soumis à l'observation que par le peu de différence des diamètres de ces tubes. Le travail de Simon, dont nous nous sommes déjà longuement occupé , est le premier dans lequel on trouve sur ce sujet des expériences faites, comme l'exige l'importance de la question , en très-grand nombre et dans des limites très-étendues. Nous avons vu que les résultats de ces expériences étaient contraires à la loi théorique , même dans les limites où cette loi devrait se trouver le mieux vérifiée : en effet, Simon trouve que le produit de l'éléva- tion capillaire par le rayon du tube croit assez rapidement à mesure que le rayon diminue. Les expériences dont je présentais en 1852 les résultats à l'Académie conduisaient à la même conclusion, mais d'une manière moins nette; les inégalités que je constatais entre les produits en question étaient loin d'être aussi fortes que celles trouvées par Simon; on pouvait même expliquer ces inégalités en admettant la correction indiquée par M. Plateau , qui consistait à retrancher du rayon du tube l'épaisseur de la couche liquide que l'on pouvait supposer adhérente aux parois du tube. J'ai montré dans le chapitre précédent que cette correction était très-incertaine; mais il n'en reste pas moins vrai qu'il suffit d'admettre une erreur de '/ioooe de millimètre sur la valeur des rayons des tubes, pour expliquer les inégalités observées. J'ai montré d'ailleurs , par la discussion expérimentale du procédé d'ob- servation de Simon, que l'on pouvait expliquer la valeur plus grande de ses inégalités par le seul fait que Simon mesurait les hauteurs capillaires avant que l'équilibre fût parfaitement établi , et alors que ces hauteurs étaient d'au- tant plus supérieures aux hauteurs finales que les diamètres des tubes étaient plus petits. Ainsi, d'une part celle incertitude ou plutôt cette présomption basée sur l'expérience d'une inexactitude dans ies résultats de Simon, d'autre part la petitesse des inégalités résultant de mes recherches, ne permettaient pas de considérer la loi du rapport inverse de l'ascension au diamètre, comme infir- mée par l'expérience d'une manière bien certaine et bien nette. D'ailleurs les 1S6 RECHERCHES recherches de Simon et les miennes n'avaient été effectuées que sur un seul liquide, et encore sur Tun de ceux dont l'observation donne les résultats les moins constants. Depuis, M. Ed. Dessains a publié ' parmi les résultats de ses recherches sur la capillarité, ceux des observations faites sur trois tubes capillaires dont les rayons étaient 0mm,620 , 2m,",627 eUmm,G39. Ces obser- vations ne concernant encore que l'ascension de l'eau ont fourni une remar- quable confirmation de la loi en question, mais à la condition de supposer au ménisque liquide la forme ellipsoïdale; la correction résultant de cette hypo- thèse était nécessaire à cause de la valeur considérable des rayons des tubes ; on remarquera en effet que les valeurs indiquées sont toutes trois notables. Plus loin, il est vrai, 31. Dessains rapporte d'autres expériences, faites sur deux tubes plus capillaires, l'un deOmra,20l de rayon , l'autre de Onim,074., et qui sont encore d'accord avec la loi théorique. Néanmoins le nombre total des tubes est encore trop restreint, et l'emploi d'un seul liquide d'une obser- vation difficile, trop peu décisif pour que l'on puisse se contenter d'une telle vérification d'une loi aussi fondamentale. J'ai donc cru devoir reprendre cette vérification et faire sur ce sujet des expériences aussi complètes que possible , en observant l'ascension d'un grand nombre de liquides dans un grand nombre de tubes de diamètres très-diffé- rents; ces observations devaient d'ailleurs fournir des données intéressantes pour d'autres recherches. Les liquides dont j'ai observé l'ascension sont au nombre de 29, savoir : l'eau, l'acide sulfurique, l'huile de naphte, l'alcool ordinaire du commerce, l'alcool absolu, l'éther, le collodion, les éthers chlorhydrique, iodhydrique, bromhydrique, formique, acétique, mélhylacétique, oxalique, le chloro- forme, l'acétone, l'alcool méthylique, l'alcool amylique, la liqueur des Hol- landais, la benzine, l'huile d'orange, l'essence de térébenthine, le brome, le sulfure de carbone, le protochlorure de soufre, l'ammoniaque et les acides chlorhydrique, azotique et acétique. J'ai préparé ou rectifié moi-môme avec le plus grand soin tous ces liquides, à l'exception de la benzine, de l'huile d'orange et de l'alcool du commerce. « Ann. de chimie ri il,- physique, 3mr série, t. LI, [>. 402. (Décembre IS.'iT. SUR LA CAPILLARITÉ. 137 J'ai indiqué précédemment les différents procédés que j'ai employés aussi bien pour la mesure des rayons des tubes que pour celle des élévations ca- pillaires. Je me bornerai à rappeler que cette dernière mesure se faisait au moyen du catbétomètre pour les tubes d'un petit diamètre , et au moyen du spbéromètre pour les tubes d'un diamètre plus considérable. L'emploi de ce dernier instrument est dans le cas actuel fort simple, et n'exige pas d'artifice particulier d'observation , comme lorsqu'il s'agit de la mesure des dépressions du mercure; on est en effet immédiatement averti de l'instant précis du contact entre la pointe du spbéromètre et le liquide, par un mouvement brusque de celui-ci, qui en cet instant se soulève pour mouiller la pointe; il faut seulement que celle-ci soit bien aiguë et bien propre. Autrement elle peut s'enfoncer d'une quantité sensible dans le liquide sans que celui-ci s'élève contre la surface. Il se produit alors un phénomène analogue à l'équilibre d'une aiguille d'acier, ou de certains insectes qui se soutiennent sur la sur- face de l'eau en la déprimant légèrement. Les tableaux suivants contiennent les résultats détaillés de mes expé- riences. On verra immédiatement par leur inspection que je n'ai pas cherché à vérifier, pour tous les liquides soumis à l'observation, la loi du rapport inverse de l'ascension au diamètre, dans des limites également étendues; je me proposai seulement pour plusieurs d'entre eux de déterminer ce que nous pourrons appeler désormais la constante capillaire, c'est-à-dire le produit supposé constant du rayon du tube par l'élévation corrigée. Je n'ai également indiqué que pour quelques liquides les différentes don- nées relatives aux tubes employés , me dispensant de ce soin pour les liquides sur l'élévation desquels certaines de ces données, telles que la nature (cristal ou verre) et l'épaisseur des tubes, paraissaient sans aucune influence. Il me reste à ajouter que toutes les expériences dont les résultats sont indi- qués dans ces tableaux ont été faites sur les tubes mouillés ; dans la première de chaque groupe, le liquide soulevé redescendait librement pendant long- lemps; dans la seconde, le tube ayant été enfoncé dans le liquide, celui-ci •levait remonter; dans la troisième enfin, le tube était relevé et le liquide redescendait. m RECHERCHES Elévation des liquides dans (es tubes de ven NATURE ili". liquides Nos NÀTUBE des Épaisseur. ft ayons HiC TEURS OBSERVÉES. Hauteurs C ,..,,,, 1 . et température- des tubes. tulies- r. 1" expérience. il* expérience. ((■•expérience. moyennes. ('-;->• ni m. mm. Eau. i C. 1,62 10,015 0,094- 0,091 0,080 0,090 54,31 15J4. 2 c. 1,31 7,851 0,252 0,237 0,228 0,239 22,45 5 V. 0,70 5,205 0.730 0,724 0,718 0,726 13,24 4 c. 5,22 5,605 1,584 1,508 1 ,560 1,570 9,97 5 c. 5,76 2,585 5,293 3,192 5,159 3,215 10,52 6 V. 0,12 0,881 11,65 11,40 » 11,53 10,41 7 V. 0,20 0,270 59,75 40,90 40,35 40,33 10,90 8 c. 0,16 0,217 69,10 09,00 68,95 69,02 13,89 0 c. 4,00 0,180 82,80 82,00 83,25 82,88 14,95 10 c. 4,20 0,172 89,10 88,95 89,25 89,10 15,32 11 c. 4,20 0,170 90,60 90,15* » 90,58 15,57 12 c. 0,10 0,115 120,15 120,00 120,20 120,12 15,02 13 c. 4,70 0,004 161,00 159,00 » 100,30 15,13 14 c. 0.15 0,078 187,85 188,20 187,75 187,95 14,73 15 c. 4,40 0,063 244,80 242,05 243,55 243,40 15,26 16 c. 5,70 0,0516 288,85 287,20 287,85 287,97 14,87 17 c. 0,18 0,0182 824,80 " " 824,80 15,05 Acide sulfu- 1 c. 1,62 10,015 0,038 0,058 0,038 35,81 rique. 2 c. 1,31 7,851 0,087 0,085 ii 0,086 21,20 16». 5 V. 0,79 5,295 0,169 0,175 0,170 0,171 10,90 4 c. 3,22 5,005 0,572 0,509 » 0,570 6,58 5 c. 3,76 2,583 1,007 1,024 1,039 1,020 4,86 6 V. 1,12 2,107 5,00 5,00 5,00 3,00 7,80 7 c. 1,40 1,505 3,05 4,05 5,85 3.85 6,53 S c. 1,20 0,955 6,00 0,75 6,05 6,68 6,69 '.) V. 0,57 0,89G 6,60 7,25 « 6,93 6,48 10 c. 1,25 0,015 10,30 11,15 >• 10,75 6,76 11 c. 0,38 0,501 14,50 14,45 14,20 14,38 7,28 12 V. 1,00 0,545 18,85 18,80 ». 18,85 6,52 15 c. 0,20 0,284 23,80 )) » 23,80 6,75 14 c. 0,27 0,270 24,95 25,00 25,25 25,07 6,78 15 c. 2,50 0,204 51,90 52.95 .> 32,43 6,62 16 c. 4,01 0,180 58,05 59,05 » 38,85 7,75 17 c. 4,01 0,179 57,45 38,70 » 58,08 7,25 SUR LA CAPILLARITE. 159 NATURE des liquides Nos NATURE des Épaisseur. Hayons IUUTEURS OBSERVÉES. Hauteurs i Produit** , et température. des tulles. tubes. r. 1'° expérience. 11' expérience. lll'oxpéiïenec. moyennes. ; (*+ï>- mm. mm. Acide sulffu- 18 C. 2,05 0,100 4 1 ,20 41,05 » 41,43 0,62 rlque (suite). 19 C. 3,38 0,128 50,80 55,75 58,75 57,03 7,31 16». 20 C. 2,71 0,127 57,80 59,75 ». 58,78 7,47 21 c. 0,13 0,122 57,75 59,05 .. 58,40 7,11 22 c. 2,79 0,100 07,00 67,30 68,70 07,07 7,14 25 c. 0,17 0,097 71,10 71,50 71,00 7 1 ,55 0,95 24 c. 2,95 0,094 79,85 79,80 n 79,85 7,48 Huile » c. 1,02 10,015 0,029 0,030 0,031 0,050 33,73 de naphlc. » c. 1,31 7,8"51 0,120 0,128^ 0,130 0,128 21,55 13J5. » V. 0,79 5,295 0,447 0,455 0,405 0,455 11,80 » c. 3,22 3,003 1,110 1,114 1,116 1,115 8,54 „ c. 3,70 2,583 1,902 1,909 1,915 1,908 7,20 ,, V. 1,12 2,107 2,50 2,70 » 2,00 0,95 ,, c. 1,40 1,505 4,05 4,00 4,15 4,07 6,88 .. c. 1,20 0,955 0,05 6,55 6,70 6,65 6,64 » V. 0,57 0,890 7,10 7,05 .. 7,08 6,62 .. c. 1,23 0,013 10,75 10,40 10,50 10,55 6,59 » V. 1,00 0,343 19,15 19,10 19,20 19,15 6,65 » c. 4,05 0,175 57,00 37,85 57,85 37,77 6,63 » c. 2,05 0,1G0 45,15 43,75 45,50 43,47 6,92 » c. 2,95 0,094 08,90 69,10 « 09,00 0,49 » c. 2,00 0,058 110,45 110,70 110,65 110,00 0,39 NATURE DES LIQUIDES ■layons des lubes un i i.i i;-. m ■ i m ÉES. Hauteurs Produits et observations. r. I[B expérience. il* expérience. Ill" expérience. moyenne*. (*+.>■ Alcool ordinaire. 10,015 0,029 0,051 0,055 0.031 53,74 Température 7". 7,851 0,098 0,100 0,102 0,100 21,35 Densilé à 0» : 0,8422. 5,295 0,380 0,580 0,392 0,380 11,07 5,005 0,960 0,984 1,000 0,985 7,88 2,583 1,747 0,757 0,708 1,757 6,70 160 RECHERCHES NATURE DES LIQUIDES , t observations' Rayons des lubes r. HADT EIRS OBSERVÉES. IIe expérience. ni" expérience. Hauteurs moyennes. Produits I" expérience Alcool ordinaire (SUlte). 2,107 2,60 2,50 2,55 6,86 1,505 5,70 5,60 » 5,65 6,24 0,955 6.70 6,60 6,65 6,65 6,66 0,896 7,10 6,90 6,80 6,95 6,48 0,615 10,10 9,95 10,65 10,25 6,45 0,545 18,20 1 8,00 17,90 18,05 6,24 0,024 51,20 51,05 51,05 51,10 6,55 0,160 58,65 58,85 58,45 58,65 6,18 0,094 64,75 64,70 64,80 64,75 6,09 0,041 154,75 155,80 154,50 154,28 6,55 0,0182 562,20 561,00 561,00 561,60 6,60 tlniic alcool. 0,156 59,25 59,50 59,58 6,15 i erapéraiure 13" ,7 0,155 59,90 40,40 » 40,15 6,12 0,140 45,80 » » 45,80 6,14 0,095 66,00 »> » 66,00 6,26 0,074 85,25 82,00 » 82,65 6,12 0,068 88,45 89,25 90,90 89,55 6,16 0,056 108,80 109,40 111,40 1 09,87 6,11 0,050 121,50 125,40 125,80 122,90 6,15 Alcool absolu. 0,881 6,20 6,15 6,25 6,20 5,71 Température li'1 0,505 19,15 19,20 19,55 19,25 5,87 Oensilp à 0" . 0,8275. 0,288 19,45 19,55 19,65 19,55 5,67 0,256 24,20 24,65 24,55 24,40 5,78 0,094 61,75 62,75 62,60 62,57 5,88 0,078 72,00 72,75 72,70 72.48 5,65 0,047 125,85 119,45 121,00 121,45 5,71 1 Éther. 2,107 2,00 2,15 „ 2,08 5,87 Tcm péra i u re .i>°,8. 1,505 5,20 5,50 5,05 5,18 5,58 Densité à 0» : 0,7450. 0,955 5,15 5,55 5,55 5,28 5,55 0,915 5,45 5,50 5,55 5,50 5,52 0,896 5,65 5,60 1 5,55 5,60 5,29 SUR LA CAPILLARITE. 161 NATURE DES LIQUIDES ei observations. Klhcr [SUtte). Bayons des tubes HAUTEURS OBSERVEES. [Ta expérience 11* expérience. 0,615 8,45 0,002 8,50 0,545 15,15 0,288 17,60 0,204 26,00 0,160 51,95 0,117 45,30 0,094 54,05 0,086 58,70 0,078 62,55 0,047 105,90 0,041 129,85 0,0183 518,40 0,0182 315,80 ni" expérience. 8,40 8,30 15,55 17,50 26,45 32,60 45,28 56,25 58,75 63,85 106,20 127,90 8,70 8,40 15,50 17,65 26,30 52,15 46,40 54,05 59,10 63,40 106,25 152,65 Hauteurs moyennes- Produits 8,52 5,42 8,55 5,14 15,40 5,54 17,58 5,10 26,25 5,56 52,25 5,17 45,68 5,53 54,78 5,15 58,85 5,09 65,27 4,94 106,12 4,99 150,15 5,54 518,40 5,82 515,80 5,74 4 ollodion. Température 12",!> Ce coiloclion est fait avec l'élher précédent, saturé de pyroxyle, sans addition d'alr-nol. Kther chlorhydriiiue. Température u°. iodhydrique. Température I6°0. Kther bruuihy dric|ue. Température )i°7, Tome XXX. 1,505 0,955 0,896 0,613 0,345 0,204 0,160 0,094 0,175 0,120 0,0416 0,287 0,054 0,287 0,054 5,20 5,50 5,50 8,50 15,10 26,00 32,95 54,40 25,30 55,85 111,85 10,50 52,50 12,60 62,95 8,50 15,10 26,20 52,75 54,20 25,15 35,85 111,75 10,55 52,95 12,80 65,15 25,50 56,25 1 1 1 ,60 10,40 52,90 12,90 65,20 25,25 55,92 112,07 10,45 52,78 12,77 03,10 5,20 5,56 5,50 5,57 5,50 5,20 8,50 5,28 15,10 5,25 26,10 5,55 52,85 5,20 54,50 5,10 4,42 4,51 4,66 5,05 2,85 5,69 5,41 21 162 RECHERCHES NATURE DES LIQUIDES. Hayons des tubes HAUTEURS OBSERVÉES. Hauteurs Produits el observations. c. I" eipérieoce. IIe ex pé rie n o-. III* eiperieuce. moyennes. ÉCtier formiqDC. 0,287 19,70 19,80 19,85 19,78 5,70 Température MM. 0,092 00,70 60,65 60,90 00,75 5,61 0,054 101,40 102,00 101,90 101,77 5.50 i il., i acétique. 0,287 20,20 20,20 20,20 20,20 5,8 i Température il0,?. 0,092 59,85 60,25 60,35 60,15 5,55 0,054 101,40 101,85 101,80 101,08 5,49 Étber metnylacétiquc. 0,180 50,50 50,35 50,55 5,47 Température 16%0. 1 Hier oxalique. 0,287 20,05 20,55 20,40 20,27 5,84 Température 15°,8. 0,092 01,90 62,25 62,40 62,18 5,74 0,054 104,10 105,25 105,00 104,78 5,66 Acétone. 0,180 34,30 54,25 54,55 54,50 0,18 Température 19°,3. Alcool métbylique. 0,287 21,30 21,40 21,55 0,15 Température ii°,l. 0,180 52,85 33,00 » 52,93 5,95 0,092 01,00 04,80 04,70 64,90 5,97 0.054 110,50 110,25 110,05 110,40 5,96 Alcool amylique. 0,884 G,55 6,65 6,80 6,60 6,10 Température 16° ,0. 0,180 32,85 35,05 55,20 55,05 5,95 0,092 05,50 02,65 65,48 5,85 Liqueur des Uollandais. 0,180 29,00 29,05 29,05 5,23 Température 16° ,2. 0,092 54,90 55,00 54,95 5,19 SUR LA CAPILLARITE. 165 NATURE DES LIQUIDES et observations. Rayons des lubes r. HAUTEURS ODSERV ËES. lit* expérience. Daatenrs moyennes. Produits I'e expérience. 11* expérience. Bensinc. 0,287 22,85 22,95 22,90 22,90 6,60 I- mpéralure 16", t. 0,180 36,65 36,65 56,65 56,65 6,60 0,002 69,10 69,55 69,40 69,28 6,38 0,054 110,10 115,70 117,65 116,52 6,60 Huile d orange. 0,946 6,65 6,90 6,95 6,82 6,75 Température li",4. 0,605 10,95 10,80 10,45 10,73 6,61 0,280 23,85 24,20 24,20 24,08 6,76 0,168 39,45 39,45 » 59,45 6,65 0,166 40,25 40,75 40,70 40,57 6,76 0,129 51,75 51,00 51,30 51,35 6,64 0,127 55,15 52,90 52,35 52,80 6,71 0,102 65,95 65,55 65,20 65,53 6,68 0,0675 97,50 97,95 97,90 97,78 6,6° essence de térébenthine. 0,012 6,65 6,60 6,55 6,60 6,29 Température t4",i. 0,250 25,35 25,35 25,40 25,37 6,56 0,288 22,75 21,50 22,00 22,08 6,40 0,120 50,25 50,00 50,60 50,28 6,05 0,086 73,05 70,80 71,80 71,88 6,21 0,078 80,00 79,90 81,65 80,52 6,26 0,058 105,75 104,50 107,70 105,98 6,19 0,047 131.85 130,10 150,70 130,88 6,16 ■rame. 0,614 3,90 4,20 5,85 5,98 2,51 rempérature 6°,8 0,301 8,00 8,15 8,50 8,20 2,57 0,166 15,85 15,35 15,50 15,51 2,57 0,054 52,05 52,00 51,85 51,98 2,81 0,048 56,55 56,10 55,80 55,99 2,60 0.0--7 72,85 73,10 76,55 74,17 2,75 Nulturc de carbone 0,620 9,10 9,20 9,10 9,13 5,85 Température 12" ,0. 0,317 17,05 17,20 17,00 17,08 5,48 0,175 31,10 31,70 51,85 51,67 5,56 1()4 RECHERCHES NATURE DES LIQUIDES. Rayons des tubes HAUTEURS OBSERVÉES. Hauteurs Produits et observations. r. \" expérience. II" expérience. 111* esperienee. moyennes. Sulfure de earbone (suite). 0,097 55,00 55,50 55,05 55,18 5,56 0,088 59,60 59,20 59,55 59,45 5,22 0,058 91,50 91,00 " 91,25 5,20 Protochlorure de soufre. 0,287 17,95 18,05 18,50 18,05 5,21 Température 15° ,8. 0,180 27,05 27,50 27,60 27,25 4,91 0,092 95,25 94,45 94,G5 94,12 5,35 Ammoniaque. 0,955 15,75 14,10 14,00 15,95 1 5,55 Température I8°,7. 0,505 42,95 42,45 45,50 42,90 15,10 Acide chlorhfdrique. 0,929 15,20 15,20 15,50 15,25 12,28 Température 18° ,7. 0,180 67,45 67,50 67,70 67,55 12,18 Acide azotique. 0,955 10,75 10,80 10,85 10,80 10,10 Température t8°,7. 0,289 52,55 52,50 52,55 52,47 9,41 0,097 101,00 101,10 101,15 101,05 9,81 Acide acétique. 0,915 5,50 5,45 5,48 5,30 Température 12"fB. 0,602 8,65 8,60 8,65 8,63 5,52 0,287 19,15 19,25 19,45 19,29 5,56 0,274 20,55 20,55 20,45 20,42 5,61 0,175 52,80 55,05 55,10 55,00 5,89 0,097 59,10 57,80 59,20 58,70 5,70 0,088 61,45 65,50 62,85 62,60 5,49 0,081 07,95 68,15 68,25 G8,12 5,51 0,058 97,60 98,25 97,60 97,82 5,65 Chloroforme. 1,505 2,15 2,00 2,08 3,88 Température 12°,4. 0,955 5,80 5,70 ,. 5,75 5,89 0,896 5,90 5,80 » 5,85 5,71 SUR LA CAPILLARITE. 165 NATURE DES LIQUIDES i*t observations. Hayons des tubes r. UADTEIRS OBSEIU ÉES. III' expérience. Hauteurs moj ennes. Produits I" expérience. IIe expérience. Chloroforme (Slliie). 0,6 1 ô 0,00 6,00 6,00 3,86 0,344 11,10 11,20 11,15 5,88 0,287 13,20 13,80 13,70 1 3,57 5,92 0,204 18,85 18,90 » 18,88 5,86 0,100 25,20 23,15 » 23,18 5,71 0,136 28,40 28,50 » 28,45 3,87 0,094 40,10 40,50 o 40,50 5,79 0,092 39,10 39,80 59,50 59,50 5,04 0,054 65,05 66,40 66,40 66,15 3,59 0,0375 1 03,50 103,50 » 105,50 3,88 0,0182 272,50 276,50 274,50 5,01 1 Nous tirerons des résultats consignés dans ces tableaux les conclusions suivantes : 1° L'élévation des liquides dans les tubes mouillés atteint la même valeur, qu'elle se produise après un mouvement ascendant ou après un mouvement descendant dans le Uibe ; 2° La nature et l'épaisseur des parois du tube n'influent pas sur l'éléva- tion de la plupart des liquides. L'eau et l'acide sulfurique sont les seuls parmi ceux que nous avons ob- servés qui fassent exception. Les inégalités constatées étant du même ordre et dans le même sens (pie celles présentées par le mercure, et pouvant être attribuées aux mêmes causes, nous ne nous arrêterons pas à les discuter. Nous pouvons en effet nous borner à dire que ces deux liquides, mouillant assez difficilement le verre, des causes légères de résistance peuvent altérer l'angle de contact de ces liquides, de même que celui du mercure, et produire ainsi des inégalités considérables; 3° Le produit du rayon du tube par l'élévation capillaire augmentée du tiers du rayon, commence à être sensiblement constant pour des rayons de l11"" jusqu'à la limite inférieure des rayons de nos observations, soit 0min,Qo. Pour des rayons supérieurs à lmm, le produit en question croit rapidement 166 RECHERCHES avec le rayon, ce qui, du reste, peut prouver seulement que la correction du tiers du rayon est beaucoup trop forte ; et , sous ce rapport , l'expérience est d'accord avec la théorie. Les inégalités que Ton rencontre entre les résultats correspondants aux tubes vraiment capillaires ne sont pas assez importantes (abstraction faite de celles (pie présentent l'eau et l'acide sulfurique) et sont trop irrégulières pour que nous ne puissions les attribuer aux erreurs inhérentes à ces délicates observations. Cependant nous voyons, pour l'éther et l'alcool, le produit (hr\- ^)r prendre un accroissement notable quand le rayon est très-petit. .Nous pouvons donc considérer la loi du rapport inverse de l'élévation au diamètre comme suffisamment exacte pour des rayons compris entre Oran,,05 et lmm; mais il ne nous est pas encore permis d'étendre cette loi au delà de ces limites. Nous venons de dire que, pour les tubes d'un rayon supérieur à 4™'", l'ad- dition du tiers du rayon à l'élévation constituait une correction trop forte : en effet, dans ce cas, le ménisque est visiblement d'une forme différente de la sphère, et si, comme nous l'avons déjà fait, on assimile sa surface à celle d'un ellipsoïde de révolution ayant ses deux grands axes égaux au diamètre de la sphère, et son demi-petit axe égal à la hauteur du ménis- que, la correction approximative indiquée par la théorie consistera dans l'addition du tiers de cette hauteur, toujours plus petite que le rayon du tube. Il nous faut donc tout d'abord, pour apprécier les résultats relatifs à des rayons notables, mesurer les hauteurs des ménisques correspondantes à ces rayons. Je n'avais pour mesurer ces hauteurs que le calhétomètre dont les indi- cations étaient, du reste, suffisamment exactes pour le but que nous nous proposons, savoir l'appréciation d'une correction. Les observations ayant fourni des résultats identiques ou ne différant tout au plus que de 0mm,05, je me borne à indiquer les moyennes de ces observations. SLR LA CAPILLARITE. Hi7 IUY0Ï1S des tubes. HAUTEURS DES MÉNISQUES. Eau. Alcool. Étber. Chloroforme. *aphte. Acide sulfurique. 0,158 0,15 „ 0,13 0,15 0,15 0,15 0,5 Iô » » 0.55 .. 0,28 0,543 » » » 0,35 « 0,35 0,613 » 0,58 0,60 0,58 0,58 0,623 0,63 0,65 0,60 0,63 ,i „ 0,838 » » l) 0,85 0,83 0,88 0,055 » >■ 1 ,0b 0,80 0,85 0,93 1,138 0,95 1.05 1,05 n ,. „ 1,365 1,20 1,15 1,28 „ 1,450 » » 1,15 1,50 1,55 1,28 1,725 1,55 1,58 1,45 0 „ 2,107 » » » .. 1,80 1.75 2,165 1,95 1,70 1,70 » 2,550 2,15 1,83 1,78 5,600 2,55 2,20 2,05 5,700 2,88 2,50 2,25 » 5,058 3,55 2,55 2,30 » „ 7,100 5,68 • 2,55 2,30 „ 8,565 3,78 2,45 2,25 » » On déduit de ces résultais les deux conclusions suivantes : 1" Les hauteurs des ménisques sont sensiblement égales aux rayons des tubes tant que ces rayons ne dépassent pas lmm ; 2° A partir d'un certain rayon, dont la valeur dépend de la nature du liquide, les hauteurs des ménisques sont constantes et égales à l'élévation du liquide contre une paroi verticale peu courbée '. On rend ces conclusions évidentes en construisant des courbes dans les- quelles les abscisses sont les rayons, et les hauteurs des ménisques les ordonnées; ces courbes se terminent sensiblement par deux lignes droites, Tune faisant un angle de 45° avec l'axe de x , l'autre parallèle à cet axe. La limite à laquelle parait cesser la constance des produits de l'élévation 1 Les observations relatives à l'élévation des liquides contre une paroi verticale plane ou peu courbée, seront publiées postérieurement. 168 RECHERCHES par le rayon est bien celle qu'indique la théorie, puisque les hauteurs des ménisques ne sont égales aux rayons que pour autant que ceux-ci soient infé- rieurs à lmm; au delà de cette valeur les hauteurs des ménisques deviennent inférieures aux rayons, et en corrigeant les élévations par l'addition du tiers du rayon, on commet des erreurs d'autant plus grandes que les rayons soni plus grands, le volume Ttr(h -f ^) devenant de plus en plus supérieur au véritable volume soulevé. A partir de celle limite, il devient dillicile de comparer les élévations ob- servées avec les élévations théoriques, parce que Ton n'a pour calculer celles-ci que des formules très-faiblement approximatives; ces formules ne s'accordent nullement avec les expériences; elles n'ont même pas le mérite d'une bonne formule d'interpolation. Pour comparer avec sécurité l'observa- tion à la théorie, on devrait, en ne considérant que les élévations, calculer celles qui doivent se produire théoriquement dans les tubes non capillaires , à l'aide de la méthode que Laplace a indiquée pour le calcul des dépressions du mercure dans les tubes barométriques. Ces calculs sont très-laborieux, ei il ne m'a point paru que l'importance des résultats fût ici en rapport avec la difficulté de les obtenir. En effet, les élévations des liquides dans les tubes d'un diamètre notable ne présentent pas un intérêt immédiat d'application , comme les dépressions du mercure , mais uniquement ce que nous pourrions appeler un intérêt de vérification. Or, l'on peut obtenir une confirmation ou une infirmation plus complète des lois théoriques en mesurant les volumes liquides soulevés dans des tubes, de la même manière que nous avons déter- miné les volumes déprimés de mercure. Après avoir rodé avec soin l'extré- mité d'un tube, je le mastique sur un petit fragment de glace; on a ainsi une sorte de petit vase. Je détermine le poids que l'on doit y ajouter lorsqu'on le place sur le plateau d'une balance, pour faire équilibre à un poids quel- conque placé sur l'autre plateau ; puis je verse un liquide dans son intérieur et je tare de nouveau; la différence des pesées donne exactement le poids V du liquide. Cela fait, je mesure au sphéromètre la hauteur H du point le plus bas du ménisque au-dessus du fond de ce petit vase. Il est clair que le volume du ménisque sera : p ! = TJ-II. SLR LA CAPILLARITE. 169 On appelle r le rayon du tube et S le poids spécifique du liquide. De plus, comme le ménisque doit être dans ce cas le même que si le tube était ouvert à la partie inférieure et plongé dans le liquide , le volume qui serait soulevé alors serait p V = - *T H -H T>'2 /( , OU p V = t)-s(H — h), h étant l'élévation observée précédemment dans le tube. Si maintenant la loi générale du rapport du volume soulevé au contour est exacte, on devra avoir rigoureusement v — = const. 2*T .Mais pour, les tubes très-étroits on a v = «- (* + i) d'où y i (h r) -— 2^r _= I \ •• + 3/ r=~ 2 ' en désignant par as la constante égale pour chaque liquide au produit de l'élévation corrigée dans un tube capillaire par le rayon de ce tube. Donc enfin , si la loi générale et rigoureuse que nous venons de citer est exacte, on devra avoir : 7-Tfs(H-A) Or, voici les résultats de quelques expériences faites dans le but de vé- rifier cette égalité. Tome XXX. 22 170 RECHERCHES Eau. r. h H P a- MOÏENSES. | mm. mm. mm. m. g. mm. -2. 7,851 0,239 6,989 1,510 8,25 7,54 5.806 1,254 7,H 2,643 644 7,26 5,295 0,726 6,856 685 8,72 5,547 570 8,72 8,58 8,793 755 8,50 3,605 1,570 5,152 239 8,21 )' 9,250 399 7,50 • 7,74 7,703 535 7,50 ) Alcool, o = = 0,8268. 7,851 0,100 7,990 6,082 1,350 890 5,03 4,93 j 4,99 5,295 0,386 5,880 480 5,85 i 5,80 5,408 445 5,77 3,605 0,985 8,141 298 6,00 | 6,14 9,677 352 6,27 Naphte. 0,625 24,00 1 5,00 15,15 1,1 12,80 14,08 14,49 1,7 7,70 1 5,0!» 14,11 1,8 7,02 12,64 1 5,72 2," 5,65 9,80 12,50 3,55 2,41 8.05 11,75 Nous serions donc porté à conclure que les volumes d'eau soulevés dans les tubes de verre ne sont proportionnels aux contours de ces tubes que pour des valeurs du rayon inférieur à 1""", et qu'au delà de celte valeur ils crois- sent moins vite que le contour. Les expériences de Simon conduiraient même à admettre, que déjà poul- ies tubes de moins de lmm de rayon , le rapport du volume d'eau soulevé au contour décroît quand le rayon augmente. Nos premières observations pré- sentaient la même conséquence ; mais des expériences dont je vais indiquer les résultats font supposer que les inégalités offertes par les valeurs de a~ relatives à l'eau, dans des limites où pour les autres liquides cette quantité est constante , peuvent être attribuées à des causes semblables à celles que nous avons vues agir si fortement sur la dépression du mercure. En effet , pour éliminer les causes perturbatrices principales, et ne pas avoir à nous préoccuper des effets possibles de différences de nature ou d'état de la sur- face des tubes, j'ai étiré, comme je l'avais déjà fait dans l'élude de la dépres- sion du mercure, d'un même tube de cristal, cinq tubes minces de diamètres différents , et j'ai mesuré l'élévation de l'eau dans leur intérieur. Après cette mesure, je déterminais au microscope le rayon du tube au point même ou 172 RECHERCHES s'était trouvé le ménisque. Voici les données de ces observations et les va- leurs de a- = (h + ^)r, que Ton en déduit. Température 15°. épaisseur des tubes. Rayons dis tubes. ÉlévatioDS observées. Valeur!. Ve expérience. IIe expérience. de a2. m. mm. mm. mm. mm. mm. g. 0,35 0,708 20,50 20,80 20,05 14,80 0,35 0,328 42,80 45,05 42,93 14,80 0,18 0,180 81,10 82,00 81,70 14,75 0,11 0,130 139,45 140,20 139,83 14,41 0,081 178,95 180,00 179,48 14,54 Nous voyons que ces valeurs de a2 ne présentent entre elles que des diffé- rences très-faibles et irrégulières. Nous devons donc admettre que l'élévation de Peau dans des tubes identiques de nature et d'état moléculaire , et diffé- rents seulement par les diamètres, est en raison inverse du rayon, au moins pour toutes les valeurs de celui-ci comprises entre Omm,708 et 0mm,081. En d'autres termes, la loi du rapport inverse de l'élévation au diamètre est exacte pour l'eau, au moins pour toutes les valeurs du diamètre comprises entre lmm,416 et 0,162. Entre ces limites, la valeur constante du produit de l'élévation corrigée parle rayon est 14mm,2,69 (moyenne des cinq valeurs précédentes de a2) à la température 15°, ou, d'après la règle donnée par Simon et vérifiée par nos expériences, 15,23 à 0°. Les expériences dont les résultats sont contenus dans le tableau de la page 158 permettent de supposer beaucoup plus éloignée, sinon indéfinie, la limite inférieure des valeurs du rayon pour lesquelles la loi en question est exacte. Les expériences de Simon montrent au contraire que la quantité a2 prend des accroissements notables et continus à mesure que le rayon devient de plus en plus petit. J'ai déjà expliqué, en parlant de sa méthode, com- ment Simon a pu trouver des valeurs plus grandes pour les tubes très-étroits que pour les tubes d'un diamètre plussensible; mais il y a dans les résultats SIR LA CAPILLARITE. 175 rapportés dans le tableau de ses expériences une continuité remarquable, qui ferait repousser toute idée d'erreurs, naturellement irrégulières, et dont quel- ques-unes au moins devraient avoir lieu dans différents sens, s'il n'y avait aussi dans ce tableau une cbose dont on ne peut s'empêcher d'être frappé : c'est le peu de précision des valeurs des diamètres. Ce n'est que pour les diamètres inférieurs à 0m,",05 que Simon indique les 1000es de millimètres. Or, il pouvait les évaluer avec une précision suffisante , puisqu'il a pu mesurer des diamètres de Omm,007 et 0n,m,00G. Pour moi je déclare que j'ai eu beau- coup de peine à mesurer bien exactement un rayon de Omm,018, donc un diamètre de 0mm,036, c'est-à-dire six fois plus fort que le plus petit de ceux mesurés par Simon. Cependant je ne crains pas de garantir, à 1/iooo de milli- mètre près , l'exactitude des valeurs des rayons que j'ai rapportées. De même Simon n'a pas indiqué les fractions de millimètre dans les valeurs des élévations supérieures à 76""". Bien que ces indications n'eussent pas eu grande importance à cause de leur incertitude, cependant leur ab- sence, jointe au peu de précision des valeurs des diamètres, nous conduit à supposer que les données présentées par Simon ne sont pas les véritables moyennes de toutes ses observations , mais des valeurs cboisies de manière à présenter cette continuité d'accroissement des produits du rayon par la hauteur, que l'on remarque dans le tableau de Simon et que présentait proba- blement la majorité de ses résultats. En effet, comment expliquer autrement une aussi grande régularité d'accroissement d'un produit dont les deux fac- teurs ne sont déterminés qu'avec une faible approximation? Nous ne pouvons admettre que les diamètres indiqués en 100es de millimètre soient précisé- ment égaux à un certain nombre de 400es de millimètre. Ainsi, pour le dia- mètre 0,05, supposons seulement une erreur en trop de 0,001 , le produit 33,1 50 descendra à 32,49, et nous remonterons de deux tubes dans l'ordre du tableau; une erreur de 0,002, en réduisant à 31,84, nous reporte à cinq tubes en arrière. Or, nous pouvons admettre une erreur plus grande encore, car le chiffre 0,05 nous dit seulement que le diamètre est compris entre 0,045 et 0,055. Pour résumer cette discussion, je conclus que la parfaite continuité des produits donnés par Simon ne peut, en présence du peu de précision de leurs 174 RECHERCHES facteurs, s'expliquer que par un choix fait entre un grand nombre d'obser- vations, sous l'influence d'une idée préconçue, et qu'il est permis de soup- çonner des résultats présentant une régularité impossible. Les résultats de nos premières expériences s'écartent moins de ceux de ces nouvelles recherches que ceux de Simon. En effet , nous en déduisons : Pour )■ 1 .025 h = 12,51 a- = 15,17 0,621 25,25 14,5(i 0.0795 189,60 15,07. La différence des deux dernières valeurs de a- esl'/ôo de la dernière, et peut être attribuée à une différence de nature ou d'étal du tube aussi bien qu'aux erreurs d'observation. Nous pouvons donc admettre comme bien décisifs les résultats de nos dernières expériences, et en conclure que l'eau, aussi bien que les autres liquides de nos observations, satisfait à la loi du rapport inverse de l'éléva- tion au diamètre , lorsque celui-ci ne dépasse pas 2mm. Constatons enfin que les dernières expériences prouvent encore l'absence totale de l'influence de l'épaisseur des parois du tube. En effet, les cinq pro- duits que nous avons obtenus en dernier lieu avec des tubes très-minces, ont la même valeur que ceux que l'on obtient avec des tubes d'une épaisseur sensible. Les résultats contraires que nous avons observés doivent donc être considérés comme exceptionnels, et dus à des causes purement accidentelles . ou à un état particulier de la surface du verre. .Mais un autre fait important parait résulter de nos expériences, c'est l'in- fluence de la nature du tube; nous voyons en effet, dans le tableau relatif a l'eau, que pour deux tubes de diamètre et d'épaisseur peu différents, mais l'un de verre, l'autre de cristal, les produits de l'élévation par le rayon diffè- rent notablement : les rayons étant 0,270 pour le tube de verre et 0,227 pour le tube de cristal, les produits en question sont 10,90 pour le pre- mier, et 13,89 pour le second; mais ce résultat étant le seul bien décisif de nos observations, nous ne pouvons admettre sans contrôle la conclusion importante qu'il semble fournir. C'est pourquoi j'ai mesuré l'élévation de l'eau dans un tube de verre de Bohème et dans quatre tubes minces tirés de SUR LA CAPILLARITE 175 celui-ci. Los températures des deux observations étaient 13° et 17". Nous pou- vons rapporter leur moyenne à 15°, car des deux égalités on déduit h =h.(i —et) h' =h(i —at), Il H- /(' l -+- I' Voici les résultats obtenus Hayons Élévations observées. Moyennes à l.i". Produits 1" expérience : 17". 11* expérience : 13°. 1,40 10,2 10,2 10,2 14,94 0,281 52,2 55,2 52,7 14,S2 0,207 54,5 55,9 55,2 14,75 0,112 150,4 151,8 131,1 14,75 9,109 132,2 135,8 133,0 14,47 Nous concluons de ces expériences que l'élévation de l'eau, dans les tubes de verre de Bohème, est la même que dans les tubes de cristal. En effet, la moyenne des produits précédents est H,7i, nombre fort peu différent de celui que nous avons trouvé , à la même température , pour les tubes en cristal , savoir 14,00. Si nous considérons les données de nos tableaux , relatives au tube de rayon 0n"",0l82, nous reconnaîtrons sur-le-cbamp que le produit (A -f -. )r n'est égal aux précédents que pour l'eau seulement. Pour l'alcool , l'éther, le chloroforme surtout, les valeurs de ce produit sont très-supérieures aux va- leurs relatives à des tubes moins capillaires. Mais il est permis de croire à une erreur provenant soit d'une fausse mesure du diamètre de ce tube, soit de l'état de sa surface intérieure ; surtout si l'on remarque , dans le tableau relatif au chloroforme, le résultat obtenu avec un tube de Omm,037o do rayon , c'est-à-dire double seulement de celui du tube qui nous occupe , résultat qui s'accorde parfaitement avec ceux qui se rapportent à des rayons 176 RECHERCHES atteignant jusqu'à lram,50o. Il répugnerait d'admettre qu'entre ces deux valeurs de rayon Omm,0375 et Oram,0182, les lois physiques du phénomène de l'élévation des liquides dans les tuhes capillaires éprouvassent de soudaines et considérables perturbations. Cependant je ne puis écarter mes doutes sur ce sujet, en présence d'au- tres résultats qu'il me reste à rapporter. Désirant avoir une donnée nouvelle sur l'élévation dans les tubes très-étroits, et ne pouvant mesurer exactement les diamètres très-petits, j'ai recouru à un procédé indirect, savoir la com- paraison des hauteurs à laquelle des liquides différents s'élèveraient dans un même tube. Pour mesurer ces hauteurs, j'ai dû employer la méthode mano- métrique de Simon, qui m'avait du reste donné des résultats concordants pour l'éther, avec un tube de Omm,0182 (voir pp. 137 et 161). Le liquide du manomètre était du mercure; pour avoir les hauteurs capillaires cherchées, il suffisait de multiplier Tes colonnes manométriques soulevées par le rapport de la densité du mercure à celle du liquide observé; la profondeur de I ou 2mm du bas du tube au-dessous du niveau était tout à fait négligeable. Pour comparer les résultats obtenus, nous supposerons que l'eau, suivant exactement la loi du rapport inverse de l'élévation au diamètre, le produit hr conserve, pour le petit tube observé, la valeur 15mm2 obtenue avec des tubes moins capillaires. En divisant cette valeur par la hauteur capillaire mesurée, nous aurons une valeur hypothétique du rayon ( cette valeur sera ici environ Omm,007), par laquelle nous multiplions ensuite les hauteurs des autres li- quides, pour nous assurer si les produits ainsi obtenus concordent également pour ces liquides avec ceux trouvés pour des tubes moins capillaires. En d'autres termes, nous multiplions le produit hr= 15mm"2, admis pour l'eau, par le rapport des hauteurs observées de chacun des liquides à la hauteur observée de l'eau, et nous aurons ainsi les valeurs que doit avoir ce produit /// pour ce liquide, si sa valeur pour l'eau est réellement 15mm-s. Si ce calcul nous donne pour ces autres liquides des valeurs concordantes avec celles qui se rapportent à des tubes moins étroits, ce sera une forte présomption en laveur de l'exactitude de la loi même pour des tubes très-étroits. Or, il n'en est pas ainsi, car nous avons obtenu les résultats suivants : SLR LA CAPILLARITE 177 Température folonne*. nanomét de mrreurc. riqoes Hauteur fmdaîls \-i :, 15°. capillaire moyenne. hr. 1' iifjcTicnce. IIr eipérienic. III* expérience. Eau - . Iôn mm 158,0 160,(1 hiiii 159,0 2147 15,00 (supposé.) Alcool. . .15'. 58,fi 57,7 58,15 950 6,63 Éther. . 15. 46,1 45,5 45,8 825 5,76 Chloroforme 15". 1 115,2 115,4 115,3 1040 7,27 Si ces résultats sont exacts, nous sommes forcés de conclure que la loi du rap- port inverse des hauteurs aux rayons n'est pas vraie, pour tous les liquides, pour des rayons très-petits. Car, si nous admettons son exactitude pour l'eau , et par suite la valeur supposée Ar=15, nous devrons aussi admettre les valeurs (i,63 pour l'alcool, S, 76 pour l'éther, 7,27 pour le chloroforme, valeurs qui ne s'accordent pas avec les produits que nous ont donnés ces liquides pour des tubes moins capillaires, mais qui, chose remarquable, s'accordent très- bien avec celles que nous a données pour l'alcool et l'éther le tube de rayon Omn,,OI82. Quant au produit relatif au chloroforme, son accroissement est tellement rapide qu'il me paraît peu naturel, et jette même des doutes sur les autres chiffres. Ces doutes ne pourraient être levés que par des expériences directes, faites avec des moyens de précision suffisants. C'est pourquoi je n'in- sisterai pas sur les conséquences de ces dernières observations. Je m'abstiendrai également de formuler une conclusion bien nette sur l'élévation des liquides dans les tubes d'un diamètre notable. Les inégalités constatées avec l'alcool et l'huile de naphte ne sont pas assez certaines pour que l'on puisse en rien conclure. Celles que nous a présentées l'eau sont beaucoup plus fortes, et montrent une perturbation complète dans la loi du phénomène, perturbation que nous verrons se reproduire quand nous obser- verons l'élévation entre deux glaces parallèles. Mais ce seul fait, que l'eau seule s'écarte à ce point de la loi théorique, nous permet d'attribuer celte anomalie à des propriétés particulières de ce liquide, dont l'action devient très-puissante dès que l'angle du contact de la surface et du verre peut prendre des valeurs différentes de 0°. Il n'en est pas de même des autres Tome XXX. 25 178 RECHERCHES liquides qui, s'étendant facilement sur le verre, tendent toujours à former avec sa surface un angle nul. C'est ainsi, je crois, qu'il faut expliquer les anomalies continuelles que présentent les phénomènes capillaires observés avec Peau. .Nous nous bornerons donc, en résumé, pour rester dans le domaine des faits bien acquis, à poser cette conclusion : Les liquides capables de mouiller le verre suivent la loi du rapport inverse de l'élévation au rayon du tube, pour toutes les valeurs du rayon comprises entre Omm, 05, et la valeur pour laquelle la bailleur du ménisque cesse d'être sensiblement égale au rayon. Elévation d'une colonne liquide interrompue par des bulles d'air. Nous avons précédemment (p. H&) rapporté l'énoncé d'un théorème posé par M. Bertrand , et en vertu duquel le volume d'une colonne liquide soulevée ou déprimée dans un tube capillaire et interrompue par des bulles d'air, doit être indépendant du nombre et du volume de ces bulles, et par conséquent égal au volume d'une colonne continue soulevée ou déprimée dans ce tube. Nous avons vu que ce théorème, appliqué à la dépression du mercure, ne se vérifiait nullement. Nous allons examiner maintenant s'il s'applique à l'élévation d'autres liquides. J'ai choisi pour ces observations quatre liquides capables de présenter dans ces phénomènes des différences notables : ce sont l'eau , l'acide sulfurique concentré, l'éther sulfurique et l'huile d'orange. Dans un tube mouillé de 0mm,096 de rayon , l'eau s'est élevée de 1 54 """,00. Une petite bulle d'air de 0mm,25 de hauteur ayant été introduite dans la colonne, la colonne soulevée s'est composée d'une colonne continue de 179mm,05 surmontée de cette bulle et d'une petite colonne d'eau de o""",s:> : la hauteur totale soulevée était ainsi 184,90. Le théorème ne se vérifie donc pas pour l'eau. Dans le même tube, l'acide sulfurique s'est élevé de 76mm,00. Deux bulles d'air ayant été introduites, la composition de la colonne a été la suivante : SUR LA CAPILLARITE. 179 (olonnes liquides soulevées. Uulles d air. -2.75 55.80 .~>..y> 45.45 204.90 La hauteur soulevée totale était donc de 2i lmm,20, c'est-à-dire presque triple de l'élévation d'une colonne continue. J'ai observé le même phénomène avec I'éther, dans deux tubes différents : le premier avait 0mm,2884 de rayon, I'éther s'y élevait de I7mm,75. Après l'introduction de deux bulles d'air, la colonne était ainsi formée : Colonnes liquides soulevées. Bulles d air. 5.Ô0 15.90 5.45 84.75 9.25 La hauteur du liquide soulevé était donc 1 8ni[U,G0 ■ mais nous devons, pour que cette hauteur représente le volume soulevé, lui faire subir une correc- tion, fort inutile dans les expériences précédentes, et qui consiste à ajouter deux fois le tiers du rayon pour chaque bulle d'air, et une fois cette quan- tité pour le haut de la colonne. Ici nous aurons donc à ajouter - — f1— ou 0,4-6, ce qui donne la hauteur corrigée 18mm,46. Elle diffère de 0mm,71 ou de ,'„ de celle de la colonne continue 17""", 75. Dans un tube de 0mm,0o78 de rayon, I'éther s'élevait de 90mni,70 au- (lc>su> du niveau. J'observai ensuite deux colonnes interrompues par des bulles d'air. Dans la première observation, la composition de la colonne était hi suivante : Colonnes liquides soulevées. Bulles d'air. 11.05 0.40 2.40 18.50 11.15 16.50 65.70 ISO RECHERCHES Ce qui donne pour la hauteur totale observée 93mni,30, et pour cette hauteur corrigée 93D"n,43. Dans la seconde observation on avait : - «Iiiii.li - liquides soulevées. Bulles d'air. 1.70 3.95 0.55 . . " 5.40 0.55 2.70 0.50 5.15 0.55 2.05 0.40 3.85 0.50 1.55 0.20 8,05 0.75 16.75 1.05 12.40 0.85 14.15 93.05 La somme des hauteurs liquides est 100mm,15; il faut y ajouter — — — — ou 0n,n',44, ce qui donne 100mm,59. Nous constatons entre les deux colonnes précédentes et la colonne continue de longueur corrigée 90.72 les diffé- rences 93.43— 90.72= 2.71, ou environ ^ et 100.44 — 90.72 = 9.72, ou à peu prèsf. Il paraît donc admissible que le volume soulevé d'une co- lonne d'éther sulfurique interrompue par des bulles d'air croit avec le nombre et le volume de ces bulles. J'ai aussi observé l'huile d'orange dans deux tubes différents, dont l'un était le premier des deux tubes précédents, celui dont le rayon est 0,2884. Ce liquide s'y élevait à une hauteur de 23mm,35. Deux expériences m'ont donné : SUR LA CAPILLARITE. 181 I" EXPÉRIENCE. 11° EXPÉRIENCE Colonnes liquides. Dulles d'air. Colonnes liquides. Bulles d'air. 14.10 1 2.00 52.60 1.55 5.95 0.50 41.90 0.65 3.10 0.40 1.35 1 .35 48. 00 13.10 19.10 14.05 81.55 2.90 i La première expérience donne comme hauteur corrigée 23.71, et la se- conde 25,35. Ces valeurs diffèrent de la hauteur continue corrigée 23,45 ('eToo etiV- ^ette dernière différence est seule sensible. Dans un tube de 0mm,0447. de rayon , l'huile d'orange s'est élevée, sans que le tube fût mouillé , à 149mm,70 et, après avoir été soulevée plus haut, elle est revenue à une élévation de 149mm,95. Nous admettrons comme éléva- tion dans ce tube la moyenne 149,83. J'ai ensuite observé dans.ee tube une colonne divisée ainsi formée : Colonnes liquides. Bulles d air. 26.45. 5.73 îe.so 4.50 5.70 0.15 2.25 2.10 0.20 0.15 0.25 2.10 4.50 4.60 2.45 3.15 90.25 182 RECHERCHES La somme des hauteurs des colonnes liquides esl 148. 80. En \ ajoutant 17 x ""iK!s on a H9,09 , ce qui ne diffère de 149.83 que de ^. 11 résulte de ces expériences que le théorème de M. Bertrand peut être considéré comme vrai pour l'huile d'orange, à peu près exact pour Féther sulfurique et tout à fait inadmissihle pour l'eau et l'acide sulfurique. On constate avec ce dernier liquide un phénomène curieux, dont l'étude me paraît se rattacher à celle que nous venons de faire : le tube employé dans l'expérience précédente sur ce liquide n'était autre (pie le tube soude à un manomètre dont je m'étais servi pour l'examen du procédé de Simon. Voulant faire une nouvelle expérience relative à cet examen , je versai dans le manomètre une certaine quantité d'acide sulfurique, afin d'expulser le liquide resté dans le tube et de faire naître le dégagement de bulles d'air, principe du procédé; mais mon attente fut trompée. A mesure que la colonne liquide descendait dans le tube, il se formait au-dessus d'elle une série de petites colonnes liquides sensiblement égaies entre elles, et séparées les unes des autres par des distances à très-peu près égales. Ces petites colonnes descendaient lentement, chassant devant elles le liquide resté dans le tube, et toujours suivies de colonnes semblables. J'ai observé ce phénomène pen- dant plus d'un mois , temps au bout duquel je fus forcé de déplacer mon appareil. De jour en jour la distance de deux petites colonnes consécutives augmentait, mais leur longueur n'a subi qu'une seule variation : le jour même de leur formation, cette longueur était lmm,9 (les valeurs extrêmes étaient 1,65 et 2,20), le lendemain, elle était de lmm,30, et depuis elle n'a plus varié. La distance des bulles a varié de 5mm à 23rara,5. Pendant tout le temps tpie ce phénomène s'est produit, la colonne manométrique , diminuée de la hauteur du niveau au-dessus de l'extrémité du tube, a toujours mesuré exactement l'élévation 7Gmni,0 qui avait lieu dans ce tube, et il me parait (pie l'on voit dans ce fait une vérification remarquable du principe du théo- rème précédent, principe également posé par M. Bertrand, et qui consiste en ce qu'une colonne liquide suspendue dans un tube vertical n'est soumise à d'autres forces qu'à son poids (abstraction faite du frottement). En effet, la colonne manométrique ayant précisément la même hauteur qu'elle aurait eue si le tube eût été entièrement vide de liquide , nous devons admettre que SUR LA CAPILLARITÉ. 183 les bulles liquides et gazeuses renfermées dans le tube ne modifiaient pas l'équilibre et ne se mouvaient que sous Faction de la pesanteur. Par suite, il est présumable que si l'on observait une colonne divisée d'acide sulfurique, plusieurs mois après sa formation, on reconnaîtrait pour ce liquide l'exacti- tude du théorème dont nous nous sommes occupés. Il me paraît facile d'expliquer cette formation pendant fort longtemps de bulles liquides sans cesse renaissantes et se succédant dans un ordre remar- quable : elle se fait probablement aux dépens d'une couche restée adhérente aux parois de la partie du manomètre soudée au tube capillaire, et qui ne peut pas s'écouler assez vite par ce tube. Les portions détachées de cette couche s'amassent dans le haut du tube capillaire , et y forment une petite bulle qui se met en mouvement aussitôt que son poids lui permet de vaincre le frottement; aussitôt une autre commence à se former, qui se mettra en mouvement quand elle aura acquis le même poids, et ainsi de suite. On comprend ainsi l'égalité de longueur et de distance de deux bulles ; on s'ex- plique aussi l'augmentation de cette distance, résultant de ce que la couche génératrice devient de plus en plus faible, de sorte que les bulles liquides n'acquièrent pas aussitôt le volume nécessaire pour entrer en mouvement. 11 est probable aussi (pie l'excès de longueur observé le premier jour pro- vient de ce que le tube n'était pas alors parfaitement mouillé dans toute sa longueur, de sorte que le frottement étant plus considérable, les bulles de- vaient, avant de se mouvoir, acquérir plus de poids. Élévation de l'eau dans les tubes métalliques. J'ai fait un assez grand nombre d'expériences sur l'élévation de l'eau dans les tubes métalliques. J'ai essayé d'abord le procédé de Simon , qui pa- rait très-commode pour des observations de ce genre : cependant il ne m'a donné aucun résultat sérieux : appliqué à l'observation de l'élévation dans des tubes d'élain, de cuivre et d'argent, dont les rayons variaient de Oran,,258 à 0""u,79 1 , il m'a fourni des nombres si différents d'une expérience à l'autre, que j'ai été réduit à tirer comme seule conclusion de ces observa- ]M RECHERCHES lions, une nouvelle preuve du peu de précision que peut donner la mesure manométrique appliquée à des tubes qui ne sont pas très-capillaires. .rai essayé ensuite un autre procédé fondé sur l'observation de différents niveaux de Peau dans la branche de verre d'un siphon formé d'un tube de verre recourbé et mastiqué à un tube de métal. Ce procédé ne m'a pas non plus donné de résultats constants. La véritable difficulté de ces expériences réside dans l'ignorance absolue où l'on est de l'état de la surface intérieure du tube. Nous trouverons d'ailleurs dans l'observation de l'élévation des liquides entre des plaques parallèles, un moyen beaucoup plus sûr de résou- dre la question de l'influence de la nature du solide en contact avec le liquide. Comparaison des élévations clans les tubes capillaires d'an liquide et de ses solutions. Je me suis proposé, dans cette série d'observations, de déterminer quelle influence exerçait sur la cohésion d'un liquide une substance solide en disso- lution dans ce liquide. À cet effet, j'ai déterminé par la méthode de Simon les colonnes d'eau capables de faire équilibre au poids de liquide que la capillarité tend à soulever dans le tube , en un mot , de mesurer la cohésion du liquide. Car l'on doit bien remarquer que la cohésion ne peut être mesurée par la hauteur soulevée, mais par le produit de cette hauteur par la densité, c'est-à-dire par le poids soulevé. Or , c'est ce que donne immédiatement la mesure manométrique, lorsque la colonne du manomètre est de l'eau, et que l'on en retranche la profondeur du tube au-dessous du niveau multipliée par la densité du liquide observé. Je me borne à rapporter, dans le tableau suivant, les résultats moyens de mes observations, les données de celles-ci différant tellement peu les unes des autres, qu'il serait superflu de les présenter en détail : Densité. Poids soulevé. Rayon Mu tube = 0,180. Eao "1 000 85.4 Sol. saturée de sulfate ferreux 87.9 » » étendue de { volume d'eau 87.0 J> » 9 » 5 ^ T> » ou..} SUR LA CAPILLARITE. 185 Densité. Poids soulevé. *ieooi (11",8) 0.827 28.5 > saturé de chlorure de calcium 0.929 50.4 » ». étendu de 1 vol. alcool 0.878 29.6 2 " i 0.86) 28.4 5 0.840 27.0 aicooi 0.825 26.6 saturé de potasse 0.906 27.6 » » d'acide gallique 0.825 27.0 Eiher étendu de '/io d'alcool en volume 0.734 19.0 toiiodion fail avec cet éther 0.774 19.9 Rayon du tube = 0,145. ,,„„ 1.000 101.1 » saturée de chlorure de calcium 1.260 113.5 » » » étendue de l vol. d'eau 1.150 107.7 de 2 1-087 106.0 de 3 1.065 104.7 Rayon il» ml»' 0,093. »ic„«i 0.825 51.1 » saturé de potasse 0.906 54.9 » d'acide gallique 0.835 51.2 Rayon du lui»' 0,042. *.,•„«. 0.825 118.'.) saturé de potasse 0.906 125.6 Toutes ces expériences, excepté une seule, s'accordent à montrer que la cohésion d'un liquide est augmentée par la dissolution d'une substance solide dans ce liquide, et d'autant plus fortement que cette solution est plus con- centrée. La seule expérience qui tend à mettre en doute cette conclusion est la première de celles qui concernent l'alcool; encore peut-on suspecter for- tementle chiffre relatif à l'alcool même ; car dans l'expérience suivante, pour mi alcool de densité à peu près égale, nous trouvons dans les mêmes condi- tions 26.6 au lieu de 28.3. On ne peut guère espérer pouvoir tirer des résultats précédents une rela- Tome XXX. 24 186 RECHERCHES tion entre la cohésion el la densité d'une solution; cependant nos expériences sur les solutions de chlorure de calcium semblent en fournir une remarquable. En effet, si nous comparons d'une part le rapport des cohésions de ces solu- tions à celles de l'eau , de l'autre les densités de ces solutions, nous trouvons que les carrés de ces rapports diffèrent peu des densités. Voici ces nombres, la cohésion de l'eau étant supposée égale à 1. Eau Sol. saturée de la cl. . » plus 1 vol. d'eau. )> » 2 » » » 5 » Carrés des cohésion. Densités 1,000 1,000 1,263 1,260 1,156 1,150 1,099 1,087 1,074 1,065 lt.1l. I . 5 /(îôO «/*90 7no Il résulterait de cette comparaison que les cohésions de différentes solu- tions d'une même substance solide dans un liquide, sont proportionnelles aux racines carrées des densités de ces solutions. Cette loi n'est point vérifiée par nos autres observations; mais on doit remarquer que la série que nous venons de considère)' est la seule qui nous fournisse des résultats à la fois bien certains et bien tranchés , des nombres assez différents les uns des autres pour que des erreurs faibles ne puissent pas influer fortement sur les résultats de leur comparaison. Ainsi, si nous comparons la cohésion de la solution alcoolique saturée de potasse avec la cohésion de l'alcool, nos trois expériences nous donnent pour les carrés du rapport de ces cohésions 1.155, 1.079, 1.117, nombres dont la moyenne est 1.116. Eh bien, le rapport des densités de cette solution et de l'alcool est 1.100, qui ne diffère que de1/?*) de cette moyenne, tandis que la différence s'élève à ijw, si nous comparons les nom- bres 1.153 et 1.100. SUR LA CAPILLARITE. 187 Équilibre de deux liquides superposés dans un tube capillaire. La loi théorique de cet équilibre peut s'énoncer ainsi ' : Le poids total de deux liquides, soulevé dans un tube capillaire, est le même que si ce tube ne renfermait que le liquide inférieur. Ainsi appelons /«, la hauteur du ménisque du liquide inférieur au-dessous du niveau extérieur, dt la densité de ce li- quide, ha la hauteur de la colonne superposée du second liquide, d.2 la den- sité, et H, la hauteur à laquelle le liquide inférieur s'élèverait dans le tube s'il s'y trouvait seul , on devra avoir : on M, h, h,,l, = H,,/, H,. L'est cette égalité que je nie suis proposé de vérifier. J'ai, à cet effet, me- suré les hauteurs h,, ho, en employant successivement de l'eau et de l'huile de naphte, de l'acide sulfurique et de l'huile de naphte, du chloroforme et de l'eau. Les résultats moyens de ces expériences sont rapportés dans les tableaux suivants. H2 y représente l'élévation qu'atteindrait le liquide supérieur s'il se trouvait seul dans le tube. Rayons des tubes. hl + Kdi H, H, Eau de naphte dl = 1,000 rf„ = 0,791 0,935 6,7 15.8 6.6 0,615 10,9 24 5 10.6 0,345 19,4 44.0 19.2 0,204 34,2 73.9 32.5 0,160 42,7 94.1 43.5 Poisson, Nouvelle théorie de l'action capillaire, % 72. 188 RECHERCHES Rayons des tubes. '"-'<-4i », H2 Acide sulfuriijue et naphle 25,7 41,43 o,oti 1 8 35,0 40,55 o,oo! y Ces expériences confirment les conclusions de MM. Briinner, Wolf elSimon, sur la proportionnalité au moins approximative du décroissemenl de la hau- teur capillaire à l'accroissement de température, conclusions que l'on peut tirer également de la plupart des expériences de M. Frankenheim, surtout des expériences faites sur les liquides qui donnent généralement des résul- tats constants. On sait que c'est particulièrement de la température du ménisque que dé- pend l'élévation d'un liquide dans un tube. 11 était important de chercher si l'état de température du reste de liquide n'a d'autre effet que de modifier la densité, et indirectement seulement l'élévation. A cet effet, j'ai mastiqué un tube capillaire au fond d'un cylindre ; une partie du tube se trouvait à l'intérieur, l'autre à l'extérieur de ce cylindre; cette dernière plongeait dans de l'alcool dont on relevait le niveau jusqu'à ce que Je ménisque parvint dans la partie du tube intérieur au cylindre , et seulement 1 ou 2mm au-dessus du fond de celui-ci. On versait alors dans ce cylindre de l'eau dont on maintenait la tempé- rature constante. Le ménisque d'alcool prenait la température de ce bain d'eau , tandis que le reste de la colonne se maintenait à la température extérieure. Soit h la hauteur totale soulevée, l la partie du tube non chauffée, T la température du ménisque et t la température de l'air. On pourra considérer la hauteur soulevée comme représentant le poids soulevé, si, supposant toute la colonne à T°, on ajoute à h, la quantité al(T-t), ?. étant le coefficient moyen de dilatation du liquide = 0,0014 pour l'alcool. 198 RECHERCHES SLR LA CAPILLARITÉ. S'il est vrai que la température du ménisque seule influe sur la dépres- sion, on devra trouver pour // + «/(T — t), les mêmes valeurs que Pou observe quand toute la colonne est à ï". Avec un fragment du tube précédent, ayant exactement le même diamètre, j'ai trouvé dans une expérience de ce genre faite sur l'alcool : Température extérieure l = 10,0 — 2 = 35""" TEMPÉRATURE .lu ménisque. T llaateup soulevée. h*xl{T-t.) ha — ^t T ho. 0» 40,7 40,1 10 44,5 44,5 0,0022 30 42,5 45,0 0,0022 52 39,3 40,0 0,0025 71 37,0 59,0 0,0022 Ces résultats diffèrent fort peu de ceux que nous avons obtenus précé- demment. Nous pouvons donc admettre, sinon comme rigoureuse, au moins connue tiés-approcbée, cette loi : « Les poids de liquides soulevés à différentes températures dans un tube » capillaire, décroissent proportionnellement aux températures des ménis- » ques, et sont indépendants des températures des autres parties de la masse » liquide. » TABLE DES MATIÈRES. Page*. Introduction PREMIÈRE PARTIE. Examen des théories de l'action capillaire 5 DEUXIÈME PARTIE. Recherches expérimentales 60 Recherches sur l'équilibre des liquides dans les tubes capillaires. — Procède d'observa- tion. — Mesure du rayon d'un tube en un point quelconque de ce tube 05 Mesure de l'élévation ou de la dépression d'un liquide dans un tube capillaire .... 68 Dépression des liquides dans les tubes de verre 70 — du mercure dans les tubes capillaires 71 — dans les tubes d'un diamètre considérable 101 d'une colonne de mercure interrompue par des bulles d'air 114 des métaux fondus 116 Élévation des liquides dans les tubes capillaires. — Examen des procédés d'observation. 1 19 Recherches sur l'épaisseur de la couche liquide qui peut adhérer aux parois d'un tube vertical '** Recherches sur l'élévation de dilférents liquides dans les tubes de verre. . . loi Élévation d'une colonne liquide interrompue par des bulles d'air .... ... 1 78 — de l'eau dans les tubes métalliques '85 Comparaison des élévations dans les tubes capillaires d'un liquide et de ses solutions. . 184 Équilibre de deux liquides superposés dans un tube capillaire 187 Influence de la température sur l'élévation des liquides dans les tubes capillaires. . 189 Mémoires t/rj- saoaïits ctrtawe/v, 7'tt7/te \XX . /'/. / J'y ' v , 'y fia :: J'y JL B J'y "' ^I>_3 /' - /, ■ 1 l n ; \ — S TU \\" /. 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