JAN RES 0) ME ae É SK fat sa CE SD, OT. AC € MÉMOIRES DE L'ACADÈMIE IMPÉRIALE DES SCIENCES, . INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES DE TOULOUSE. . Cinquième Série. — TOME Xe, TOULOUSE, IMPRIMERIE DE JEAN-MATTHIEU DOULADOURE, RUE SAINT-ROME , 41. 1857. 1 ) : : \r* ” Let #1 ‘ A! SENTE \ HE ARRETE rs, @ MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE IMPÉRIALE INSCRIPTIONS ET Ér-rt DE TOULOUSE. 2e 0 — Cinquième Série. TOME 1°, TOULOUSE, IMPRIMERIE DE JEAN - MATTHIEU DOULADOURE , rue Saint-Rome , 4. g Buse al il K nu EC y ur Ë | | EME LL de NADINE RRANTET va APE et 2 l4 r nl Cases Et sal ALJCR Get du e OUAIS JAATTAR ME Mer: En sua tt dut TN MEL TT TE (aie ÉTAT DES MEMBRES DE L'ACADEMIE AU 1° JANVIER 1857. OFFICIERS DE L'ACADÉMIE. M. FILHOL %, Professeur à la Faculté dessciences, Prési dent. M. MOLINS , Professeur et Doyen de la Faculté des sciences, Directeur. M. VITRY (Urbain) %, ex-Ingénieur-Architecte en chef de la ville, Secrétaire perpétuel. M. MOLINIER , Professeur à la Faculté de droit, Secrétaire adjoint. M. LARREY (Auguste) %, Docteur en chirurgie, Trésorier perpétuel. ASSOCIÉS HONORAIRES. Mgr. l’Archevêque de Toulouse. M. le Premier Président de la Cour impériale de Toulouse. M. le Préfet du département de la Haute-Garonne. M. Tuexaro, G. O. %, Membre de l'Institut de France. M. pe Beaumoxr (Elie), C. #, Sénateur, Secrétaire perpétuel de l’Institut (Classe des sciences), Commandeur de l’ordre du Christ. ASSOCIÉS ÉTRANGERS. M. Liouvizze % , Membre de l’Institut de France, à Paris. M. Viscoxri (le Commandeur), Commissaire des Antiquités , à Rome. M. Micnecer % , Membre de l’Institut de France, à Paris. M. Dumas, G. O. x, Sénateur, Membre de l’Institut de France, Inspecteur général de l’enseignement supérieur , à Paris. iv ÉTAT DES MEMBRES ACADÉMICIEN-NÉ. M. le Maire de Toulouse. ASSOCIÉS LIBRES. M. Léox (Joseph), ex-Professeur à la Faculté des sciences. M. Ducasse (Jean-Marie-Augustin) %, Professeur honoraire à l'Ecole de médecine. ASSOCIES ORDINAIRES. CLASSE DES SCIENCES. PREMIERE SECTION. SCIENCES MATHÉMATIQUES. Mathématiques pures. M. BrassixxE, Professeur à l'Ecole d'artillerie, rue des Cou- teliers, 53. M. Mouxs, Professeur et Doyen à la Faculté des sciences , rue du Lycée, 1. M. Gascneau %, Professeur à la Faculté des sciences, rue des Couteliers , 49. M. Sorxix, Professeur de mathématiques spéciales au Lycée de Toulouse , allée Louis-Napoléon, 27. Mathématiques appliquées. M. Ganrier % , ancien Professeur à l'Ecole d'artillerie, rue Saint-Rome, 23. M. Virry (Urbain) %, ex-Ingénieur-Architecte en chef de la ville, allée Louis-Napoléon, 3. M. Gierzes (Joseph-Auguste), C. #, % , Colonel du génie en retraite. M. Guisar (Jules), Ingénieur civil, rue Pargaminières , 71. Physique et Astronomie. M. pe SaGer (Charles) #, propriétaire, rue des Fleurs, 15. M. Perir €, Professeur à la Faculté des sciences , Directeur de l'Observatoire, correspondant de l’Institut de France. DE L’ACADÉMIE. v M. Laroque , Professeur de Physique au Lycée de Toulouse, rue de l’Echarpe, 12. M. Dacuix , Professeur à la Faculté des sciences, allée Louis- Napoléon , 15. DEUXIÈME SECTION. SCIENCES PHYSIQUES ET NATURELLES. Chime. M. Couserax, Pharmacien, rue Cujas, 14. M. Macnes-Lanens (Charles), Pharmacien, rue des Coutc- liers , 24. M. Ficnos (Edouard) #, Professeur à la Faculté des sciences, rue du Lycée, 15. M. ‘Trupar-Lacrave (Edouard), Pharmacien , rue Parga- minières, 84. Histoire naturelle. M. Frizac (François) %, ex-Conseiller de préfecture, Bi- bliothécaire de la ville, cloître Saint-Etienne. M. LEYMERIE , Professeur à la Faculté des sciences , rue des Arts, 15. M. Jocy , Professeur à la Faculté des sciences, Econome de l'Académie , quai de Brienne, 9. M. Lavocar, Professeur à l'Ecole vétérinaire , à l'Ecole. M. D. CLos, Professeur à la Faculté des sciences, Directeur du Jardin des Plantes , au Jardin des Plantes. Médecine et Chirurgie. M. Larrey (Auguste) %<, Docteur en chirurgie, rue du Taur, 17. M. Nourer, Professeur à l'Ecole de médecine, rue du Lycée, 8. M. Gaussaiz, Professeur à l'Ecole de médecine, rue Duranti, 1. M. Dessarreaux-Bernarp, Docteur en médecine, Briblio- thécaire , rue Deville, 5. M. Dassier ( Auguste) #, Directeur de l'Ecole de médecine, rue des Couteliers, 46. vj ÉTAT DES MEMBRES CLASSE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES. M. ou Mëce (Alexandre-Louis-Charles-André) #%, ex-Ingé- nieur militaire, l'un des Directeurs du Musée de Toulouse, rue des Lois, 34. M. Packs, Avocat, rue des Récollets, 69. M. Garien-ArwouLr, Professeur à la Faculté des lettres, boulevard Napoléon , 1. M. Crausozces, Homme de lettres, rue Louis-Napoléon , 1. M. Hauez%, Professeur à la Faculté des lettres, rueDeville, 3. M. Sauvace % , Doyen de la Faculté des lettres, à l'hôtel de la Faculté, rue Matabiau, 13. M. pe Vacquié, Avocat, ancien Magistrat , rue des Fleurs, 13. M. Ducos %, Avocat, ex- Conseiller de préfecture , rue Merlane, 2. M. Barry, Professeur à la Faculté des lettres , allée Saint- Michel , 4. M. Mounier , Professeur à la Faculté de droit, rue Ma- laret, 12. M. Dusor (Marcel), Avocat, ancien Magistrat, rue Mage, 20. M. Asrre (Florentin) #, Avocat, ex-Consciller de Préfec- ture, rue des Fleurs, 18. M. Deraviene %, Professeur à la Faculté des lettres, rue Ma- tabiau, 56. M. A. Caze %, Conseiller à la Cour impériale, rue Mage, 24. DE L'ACADÉMIE. vi] ASSOCIES CORRESPONDANTS. CLASSE DES SCIENCES. PREMIÈRE SECTION. SCIENCES MATHÉMATIQUES. Mathématiques pures. M. Tissté, ancien Professeur de mathématiques, à Mont- pellier * (1). M. Vasse DE Sanr-OuEx # , Insp. d’Académie en retraite. * M. Borrez O #, Ingénieur en chef, à Châteauroux. * M. Desreyrous, Prof. suppl. à la Fac. des sciences, à Paris. M. Sanr-GuiLnem %, Ingénieur en chef des Ponts et Chaus- sées, à Perpignan. * M. Troc, Professeur de mathématiques, à Castres (Tarn). M. CaTaLaw, Professeur de mathématiques , à Paris. Mathématiques appliquées. M. Lermier %%, Commissaire en chef des poudres et salpé- tres, en retraite, à Dijon. M. A. Paque , Professeur de mathématiques, à l’Athénée royal de Liége. Physique et Astronomie. M. Barsey , Professeur au Lycée de Besancon. M. Sorun , Professeur au Lycée de Zournon. M. Caaumonr % , Officier supérieur du génie maritime, à Cherbourg.” M. p'Homsres-Firmas %<, Correspondant de l'Institut de France, à Ælais (Gard). (1) Les Associés correspondants dont les noms sont suivis d’un astéris- que *, sont ceux qui ont été Associés ordinaires. vii] ÉTAT DES MEMBRES M. Decun , Professeur de physique, à Lyon. * M. Roswer, Professeur, à Paris. M. Dauriac (Matthieu), à Toulouse. M. Sanuqué (Adolphe), à Poitiers. M. le Baron Pecer, G. 0. %, Sénateur, Membre de l’Institut de France, Général de division , à Paris. M. »’Agganie (Antoine) #%, de Navarrcins (Basses-Pyrénées), Correspondant de l'Institut de France, à Paris. M. Laucier % , Membre de l’Institut et du Bureau des Lon- gitudes , à Paris. M. Lis, Astronome à l'Observatoire de Paris. DEUXIÈME SECTION. SCIENCES PHYSIQUES ET NATURELLES. Chimie. M. Bouis, Pharmacien , à Perpignan. M. Francois # , Ingénieur en chef des mines, à Paris. M. Foxran (Amédée) %, Docteur en médecine, à Bagnères- de- Luchon. M. Dusaronn, Doyen de la Faculté des sciences de Rennes.* M. Fauré, Pharmacien, à Bordeaux. M. Baricriar , Pharmacien , à Mâcon. M. BoxEan, Pharmacien, à Chambéry (Savoie). M. Cuari % , Professeur à l'Ecole de Pharmacie , à Paris. Histoire naturelle. M. Jonan pe Carpentier, Ingénieur des mines de S. M. le Roi de Saxe , Directeur des mines de Bex, en Suisse. M. Lorsezvur pe Lowccmawes, Docteur en médecine, à Paris. M. Tounwas fils, Pharmacien , à Narbonne. M. Bourée (Néréc), à Paris. M. pe Cnesnez , à Paris. * M. Farines , Pharmacien, à Perpignan. DE L'ACADÉMIE. ix M. LaGrkze-Fossar , Avocat, à Moissac. d M. DE Quarreraces %, Membre de l'Institut de France (classe des Sciences). * M. Rorcaxo pu Roquax (Oscar), à Carcassonne. M. Sisuoxpa (Eugène), Docteur, à Turin. M. Merwer , Professeur au Lycée de Marseille. M. Leresouzer, Prof. à la Faculté des sciences de Strasbourg. M. Durour (Léon) #%, Docteur médecin, Correspondant de l'Institut, à Saint-Sever (Landes). M. Scarmrer, Conservateur des collections de la Faculté des sciences de Strasbourg, Correspondant de l'Institut de France. M. Moucror , Docteur en médecine, à Bruyères (Vosges). M. Gassies , Naturaliste, à 4gen. M. Larrer (Edouard) #£, Avocat , à Seissan par Auch. M. Moquix-Taxnox %<, Membre de l'Institut de France, Professeur à la Faculté de Médecine de Paris. * M. Guiserpe DE NaTaLE, Docteur en médecine , à Messine (Deux-Siciles). M. DE Mazsos | Jules), Membre de la Société géologique de France et de plusieurs autres Sociétés savantes, au Chäteau de Saint-Victor par Saint-Ambroix (Gard). M. Poucuer #%, Professeur de zoologie au Muséum d'histoire naturelle de Rouen , Correspondant de l’Institut de France, à Rouen. M. Le Jours, Archiviste de la Société des sciences naturelles , à Cherbourg. Médecine et Chirurgie. M. ScourETTEN *% , Docteur en médecine, à Metz. M. PærQun pe GEmeroux, Inspecteur de l’Académie , à Grenoble. M. Muxarer , Docteur en médecine , à Zyon. M. Hurn (Félix), O0.%, Chirurgien en chef de l'Hôtel des Invalides, à Paris. M. Baryavez , Docteur en médecine, à Carpentras. x ÉTAT DES MEMBRES M. Pavax (Scipion), Chirurgien en chef, à l'hôpital d’4ir. M. le Baron H. Larrey, O. #, Chirurgien de S. M. l'Em- pereur, Médecin en chef de l'hôpital militaire du Val-de-Grâce. M. Le Coeur , Professeur à l'Ecole de médecine de Caën. M. Cazexeuve %, Directeur de l'Ecole de médecine, à Zille. M. Bracuer %, Docteur en médecine, à Zyon. M. Heraro | Hippolyte), Docteur en médecine, à Paris. M. Beaupoiz, Docteur en médecine, à Zngrandes (Indre- et-Loire ). 4 M. Costes, Professeur à l'Ecole de Médecine, à Bordeaux. Z M. Arwreux, Chirurgien aide-major au 12° régiment d’in- fanterie légère, à Calvi ( Corse). D M. Borceau DE Casresvau %e, Docteur en médecine, Membre de plusieurs Sociétés savantes , à Nimes. M. MaureTin , Docteur en médecine, à Baume-les-Messieurs par Voiteur {Jura ). M. Mazave, Docteur en médecine , à Anduse (Gard). CLASSE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES. M. Dam, Avocat, à Condom (Gers). M. Revu, C. #, ancien Conseiller au Conseil de l'ins- truction publique , à Paris. M. CHampozrion - Ficeac %% , à Fontainebleau. M. Weiss, O. #, Bibliothécaire de la ville de Besancon, Correspondant de l’Institut de France. M. le Baron Caaupruc pe CRazannes, O %, Correspondant de l’Institut de France, Officier de l’Université, à Castelsar- rasin. M. Davezac DE Macaya Xe, garde des archives de la marine, à Paris. M. pe Lamore-Lancon (Léon), membre de plusieurs Ordres, à Paris. * M. Forest, Sous-préfet d’'Oloron. | M. Cmarces-Maro % , Homme de lettres, à Paris. DE L'ACADÉMIE. x) M. CnarpENTIER DE SaixT-Presr (Jean-Pierre), Inspecteur d'Académie en retraite, à Paris. M. Bercer pe Xivrey ( Jules) %, Membre de l'Institut de France, à Paris. M. Rarn, Professeur royal Danois , à Copenhague. M. Riraup , Homme de lettres, à Afarseille. M. pe Caumoxr #%, Correspondant de l’Institut de France, à Caën. M. Nayraz ( Magloire), Juge de paix , à Castres. M. Souquer , Avoué, à Saint-Girons. M. Duraurier (Edouard) #% , Professeur à l'Ecole des lan- gues orientales vivantes, à Paris. M. DE SainT-Fecix-MauREMoNT , #, »% , ancien Préfet , à Mauremont. M. Mas-Larre (Louis), de l’Ecole des chartes, à Paris. M. Cros-Mavrevieicce , Docteur en droit, Inspecteur des monuments historiques , à Carcassonne. M. Bresson (Jacques) , Négociant, à Paris. M. Merce, Avocat, à Castelnaudary. M. DE BRIÈRE, à Paris. M. Comses (Anacharsis) #, à Castres. M. pe Lacuisie %e, Conseiller à la Cour impériale de Dijon. M. Durcor DE Morras #, à Paris. M. Ricano ( Adolphe ), Secrétaire général de la Société archéologique , à Montpellier. M. Percer (Auguste) #£, Inspecteur des Monuments histo- riques , à Vismes. M. GarriGou (Adolphe), Propriétaire, à Tarascon (Ariége). M. Trisaucr, Officier de l’Université, principal du Lycée de Valence ( Drôme). M. ne LAvERGNE, O. #%, Membre de l’Institut de France, à Paris. * M. Barox De Mowreez % , ancien Ministre. * M. Jacquemn , Homme de lettres, à {res ( Bouches-du- Rhône). xi] ÉTAT DES MEMBRES DE L'ACADÉMIE. M. Foxps-Lamorue , Avocat, à Zimoux ( Aude). M. Temrier, Avoué près le Tribunal civil de Marseille. M. CLos (Léon), Avocat, à Villespy (Aude). M. Boucner De Crevecoeur , de Perthes %, Président de la Société impériale d’émulation de la Somme, à Æbbewille. M. Bascce pe Lacreze, Conseiller à la Cour impériale , à Pau (Basses-P yrénées ). M. Cnrozes (Hippolyte), Juge au Tribunal d’4/bi (Tarn). M. l'Abbé Caxero, Supérieur du petit Séminaire d’Æuch. M. J. L. Dessazres, Correspondant de la Société des Anti- quaires de France, à Paris. M. Germain, Professeur à la Faculté des lettres de Montpellier. M. le Chevalier pe LE Bipart DE Taumane , Docteur en droit, à Liége. M. 0e CLausanr, Homme de lettres, à Rabastens (Tarn). M. Barrocomeo Boxa, Professeur à l’Université de Turin. M. Sreckerr, Proviseur du Lycée d'Angers. M. Lasar , Organiste de la Cathédrale de Montauban. M. Burvour, Professeur à la Faculté des lettres, à Nancy. M. pe Barraezeuy, Conseiller de Préfecture , à Perpignan. M. Cevac Moxcaur , Homme de lettres , à Mirande (Gers). M. Comarmoxr , Conservateur des Musées archéologiques de la ville de Lyon. AVIS ESSENTIEL. L'AcanëmiE déclare que les opinions émises dans ses Mémoires doivent être considérées comme propres à leurs auteurs, et qu’elle n’entend leur donner aucune approba- tion ni improbation. MÉMOLRES DE L'ACADÉMIE IMPÉRIALE DES SCIENCES, INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES DB TOULOUSE CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES - SUR LA VIE PHYSIQUE ET SUR SES PRINCIPALES MANIFESTATIONS; Par le Docteur N. JOLY. Arrës avoir consacré beaucoup de temps à l'étude des Sciences abstraites, Pascal s’affligeait de rencontrer si peu de gens ca- pables de s’entretenir avec lui sur les sujets dont ces sciences s'occupent. Îl résolut d'étudier l’homme, dans l'espérance de trouver bien des compagnons. Je me trompais, dit-il : il ya encore moins d'hommes qui étudient l'Homme qu'il nyena qui étudient la géométrie (1). Plus heureux que Pascal (puisse sa grande ombre me par- donner ce rapprochement ! } et grâce aux progrès de l'esprit (1) Pensées de Pascal, pag. 99. Paris, 1847, in-12. 5° S.— TOME 1. 1 2! MÉMOIRES humain , je puis aujourd’hui parler de homme , et même des animaux , devant un auditoire rempli de bienveillance, devant vous, Messieurs, qui comprenez si bien tout ce qu'il y a de réel et puissant intérêt dans une étude qui touche de si près à toutes les grandes questions de la philosophie naturelle. Parmi celles-là , une des plus graves à tous les points de vue, est celle qui est relative à la vie, à sa cause, à ses manifes- tations. Mais c’est aussi l’une des plus difliciles à résoudre , ou plutôt la solution en est maintenant impossible. Essayons, toutefois, de résumer ce qu'on sait de moins vague sur un sujet encore si débattu ; mettons les adversaires en pré- sence : citons des faits, et âchors, si cest possible, de ürer de ces faits une conclusion quelconque : Qu'est-ce donc que la vie ? Consultez Voltaire , il vous dira : « La vie est l'organisation avec la faculté de sentir.» Comme si les végétaux , bien qu'ils ne sentent pas, n'étaient pas des êtres vivants. Au physique, vous répond Lamartine, « vivre veut dire, pour les hommes qui sont le mieux partagés en durée de leur existence, respirer un certain nombre infiniment petit de souffles avee un soufflet appelé poumon, qui fait batire un organe appelé cœur, et circuler une sève rouge appelée sang , puisée dans un réservoir commun appelé air (1). » Mais comme Voltaire et Lamartine, malgré tout leur génie , n'ont pas la prétention d’être, en physiologie, des autorités sans réplique, j'ouvre les volumineux traités des savants de profession , et je tâche d’y trouver une réponse satisfaisante à la question précédemment posée. « La vie, me dit Burdach , est l'infini dans le fini, le tout dans la partie, l'unité dans la plu- ralité (2). » Suivant Schelling, un des illustres chefs de cette école de rêveurs qui ont osé dire que « philosopher sur la nature c'est (1) Lamartine, Cours familier de littérature , xx Entretien , pag. BDs (2) Burdach, Traité de Physiologie considérée comme science d’obser- valion , Lom. 1, pag. 149. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES, 3 créer la nature, ou du moins, que c’est repenser la pensée de Dicu ; » suivant Schelling, « le caractère fondamental de la vie consiste particulièrement en ce qu’elle est une succession retournant en elle-même, fixée et entretenue par un principe intérieur (1). » | En s'erveloppant d’un pareil mysticisme, ces écrivains ne nous donnent-ils pas le droit de leur dire, avec le poëte Ménage : Si ton esprit veut cacher Les belles choses qu’il pense, Ami, qui peut l'empêcher De te servir du silence ? Voici qui est un peu plus clair, mais, par malheur, pas plus exact : « La vie est l’ensemble des fonctions qui résistent à la mort (2)» (Bichat). Erreur capitale et naïveté inconcevable de la part d’un génie tel que Bichat. D’après le Docteur Cerise, si connu par ses re- marquables travaux sur le système nerveux, « la vie est cette force mystérieuse qui se révèle dans les êtres organisés par la production des germes , au moyen desquels les espèces se con- servent indéfiniment, et par la production des éléments orga- niques, au moyen desquels les individus se développent et se conservent pendant une durée déterminée. » « L'individu meurt et la vie reste : telle est la pensée qu'il s'agissait de faire prévaloir. » Je trouve dans un des ouvrages les plus spirituels du pro- fesseur Lordat la longue définition, ou plutôt la description que voici : « La vie est un phénomène temporaire, qui consiste en ce qu'une puissance wrlaire , procédant par succession d'un agrégat vivant, primitivement infinitésimale, inimaginable, (1) Schelling, System des transcedentalen Idealismus. Tubingen, 1840, in-8°, (2) Recherches physiologiques sur la vie et la mort, pag. 1. Paris, 1844, in-12. le MÉMOIRES plastique ; compose ct construit lentement de plusieurs élé- ments hétérogènes et insociables, et conserve intact un mixte éminemment corruplible , dans lequel elle exécute un grand nombre de fonctions conservatrices, s'accroît, se développe, acquiert le plus haut degré d'intensité; et, quand le temps est venu , s’affaiblit progressivement dans le même agrégat , et finit par dsparaître, sans que cet agrégat ait perdu les conditions qui étaient nécessaires pour l'habitation de son au- teur, et le laisse à la merci des fermentalions auxquelles il est chimiquement sujet par l'hétérogénéité des éléments et par les affinités divellentes du milieu (1). » D’autres soutiennent , au contraire, que, loin d’être une force , une puissance, une cause, un principe, la vie est sim- plement le résultat , l'effet même de l’organisation. Béclard le déclare en propres termes : « La vie, dit-il, est l'organisation en action. » « C’est la manière d'exister des êtres organisés, » répète M. Dezeiméris , après beaucoup d’autres physiologistes de l’école de Paris (2). Je n’en finirais pas si je voulais passer en revue toutes les définitions qui ont été données de la vie. Selon moi, la meil- leure ne vaut rien. En voici trois, pourtant, et des plus ré- centes, qui ont du moins le mérite de la concision. « La vie est l’activité spéciale des corps organisés (3) » (Dugès). « C'est l’état d’action particulier aux corps organisés (4) » { Carpenter ). « La vie est l’action propre des corps organisés sur eux- (1) Lordat, Preuve de l’insénescence du sens intime de l'homme, p.47. Paris, 1844, in-8°. (2) P. Bérard, Cours de physiologie, lom. 1, pag. 14. Paris, 1848, in-80, (3; Dugès, Traité de physiologie comparée de l'homme et des animaux, lom. 1 , pag. 5. (4) Carpenter, art, Lire, dans Cyclopædia of anatomy and physiology. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 5 mêmes el sur le monde extérieur (1) » (Is. Gcoffroy-Saint- Hilaire ). Ai-je besoin de vous dire que chacune des définitions qui précèdent reflète tout un système ? Ainsi, pour les uns { £cole de Paris), la vie est l'effet de l’organisation; pour les autres ( Ecole de Montpellier), elle en est la cause efficiente et for- matrice, et cette cause est désignée par eux sous le nom de Jorce ou de principe vital. Parmi ces derniers, il en est qui admettent l'identité du principe vital avec l’âme intelligente ou le sens intime( Stahl , Van Helmont \; d'autres, au contraire | Barthez, Lordat), distinguent soigneusement ce principe d'avec le sens intime. Celui-ci, en effet, est immatériel, intelligent, libre dans ses déterminations, indivisible et immortel. La force vitale est inintelligente ; elle agit et tend à un but sans le savoir et sans le vouloir ; elle est normalement indivise, mais non indivisible et surtout non impérissable. Le sens intime préside à tous les actes intellectuels proprement dits ; la force vitale à tous les actes de l'instinct, et aux fonctions vitales qui ont pour but l'entretien de l’agrégat matériel , c'est-à-dire, du corps. Il suit de là que l'on ne doit pas confondre le principe vital avec la vie ; car ce serait confondre la cause avec l'effet. « Agent incilateur des organes , il les met en mouvement ; alors ils pos- sèdent la vie, car cette animation seule constitue la vie. Ainsi, il est principe ou cause ; la vie est effet (2). » Les adversaires déclarés du vitalisme prétendent qu’au mo- ment où il a créé l'Univers, Dieu a donné aux éléments du GRAND Tour les propriétés qui les distinguent aujourd’hui. Or, en tant qu'êtres matériels, les êtres vivants font partie du Grand Tout. Eu organisant la matière, dès l’origine des choses, le Créateur l'a douée en même temps de propriétés spéciales qui ne peu- (1) Is. Geoffroy Saint-Hilaire , Histoire naturelle générale des règnes organiques , tom. 11, pag. 58. (2) J. L. Brachet, Physiologie élémentaire de l’homme, tom. 1, pag. 47. Lyon , 1855. 6 MÉMOIRES vent entrer en jeu que dans certaines conditions et sous l’in- fluence de certains agents (air, chaleur, aliments, etc.). Or, la procréation continue l’œuvre de Dieu. Les parents commu- niquent donc au germe et lui communiquent simultanément l'organisation et les propriétés vitales. Ces propriétés, à leur tour, lui donnent les moyens de s’assimiler, et, par conséquent, de douer de vitalité les matériaux fournis par le monde inor- ganique. En un mot, l’acte même de l'organisation développe les pou- voirs vitaux dans les tissus qu'il construit, absolument comme le frottement développe l'électricité dans le verre ou dans la résine, comme le simple contact transmet à l'acier la vertu magnétique. lei, vous le voyez, la vie est bien le résultat de l’organi- sation. A quoi bon un principe vital, disent les anti-vitalistes? A quoi bon cet + algébrique qui n’explique rien en prétendant tout expliquer ? Pourquoi Dieu aurait-il donné un principe vital à tous les habitants de la terre, tandis qu’il s'est contenté de soumettre à une loi unique (celle de la gravitation où attrac- tion universelle), les myriades de globes que sa main puissante a lancés dans l’espace? Ne vaut-il pas mieux croire que,. dès le commencement du monde, il a doué la matière organisée de propriétés spéciales, dont la mise en jeu constitue la vie? Supposons, ajoutent les partisans de ce système, un jeune physiologiste entièrement étranger aux sciences physiques, mais élevé dans la foi au principe vital, et admettons que ce jeune homme voit, pour la première fois, une machine à vapeur en pleine activité. Il examine curieusement la structure des di- verses parties de cette machine; il s'aperçoit que les actions de chacune d’elles, quoique différentes, concourent à un but com- mun ; il s'étonne des effets opposés de l’eau contenue dans la chaudière et de celle qui se rend dans le condensateur ; enfin, méconnaissant la puissance de la vapeur, il attribue tous les mouvements harmoniques dont il est témoin à un principe inbhérent à la machine elle-même. DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 7 En quoi la conclusion de ce jeune homme est-elle plus illo- gique que celle des physiologistes qui expliquent tous les phéno- mènes de la vie à l'aide d’une force, ou cause imaginaire, qu'ils appellent le principe vital ? Une pareille manière de raisonner nous remet en mémoire celte spirituelle malice de Fontenelle : « Représentés-vous , dit-il, tous les Sages à l'Opéra , ces Pithagores , ces Platons, ces Aristotes , et tous ces gens dont le nom fait aujourd’hui tant de bruit à nos oreilles ; supposons qu'ils voyoient le Vol de Phaëton que les Vents enlèvent, qu'ils ne pouvoient découvrir les cordes, et qu'ils ne sçavoient point comment le derrière du Théatre étoit disposé. L'un d'eux disoit : C’est une certaine vertu secrette qui enlève Phaëton. L'autre, Phaëton est composé de certains nombres qui le font monter. L'autre, Phaëton a une certaine amitié pour le haut du théatre ; il n'est point à son aise quand il n’y est pas. L'autre, Phaëion n'est pas fait pour voler, mais il aime mieux voler, que de laisser le haut du Théatre vuide , ct cent autres rèveries que je m'étonne qui n’ayent perdu de réputation toute l'Antiquité. A la fin Descartes, et quelques autres modernes sont venus , qui ont dit : Phaëlon monte, parce qu’il est tiré par des cordes, et qu'un poids plus pesant que lui descend. Aïnsi........... qui verroit la Nature telle qu'elle est, ne verroit que le denriète du Théatre de l'Opéra (1). » Mais, puisque nous ne savons rien des causes de la vie, pouvons-nous du moins connaître les conditions essentielles à sa manifestation. Ici, l'observation directe semble démontrer que chaque cor- gane ou chaque appareil, pour entrer en exercice, c’est-à-dire pour exécuter sa fonction , a besoin d’un excitant spécial. Ainsi, tous les êtres vivants ne peuvent entretenir leur existence qu’à la condition d'introduire dans leur intérieur une certaine quantité d'aliments empruntés aux deux règnes. Il faut qu’ils soumettent (1) Fontenelle, Entretiens sur la pluralité des mondes, pag. 18. Paris, M. DCC, XLIT , IN-12, 8 MÉMOIRES le fluide nourricier qui en résulte à l'influence de l'air libre (animaux aériens) ou dissous dans l'eau (animaux aquati- ques). Un certain degré de chaleur est indispensable à l'exercice des fonctions vitales chez les végétaux comme chez les animaux. La lumière agit sur les plantes à la manière d’un appareil ré- ducteur, encore sans modèle dans nos laboratoires , puisqu'elle décompose à froid l’acide carbonique , fixe le carbone dans le tissu du végétal, et met l'oxygène en liberté. L'action du fluide électrique sur les êtres vivants est beaucoup moins connue que celle de la chaleur ; mais tout semble prou- ver qu’elle n’est pas non plus sans importance. Quant au magnétisme, et surtout au magnétisme animal, nous croyons que son action sur l'organisme s’est bornée , jusqu’à présent, à exploiter la crédulité humaine, et à faire tourner les têtes encore plus que les tables , ceci soit dit sans aucune allusion et sans malice aucune. Complétement desséché, ou privé d'air ou de chaleur, un animal quelconque ne tarde pas à périr, ou du moins à ne plus manifester aucune action vitale. Nul doute , par conséquent, que les phénomènes vitaux, quoi qu’en disent d’illustres physiologistes, ne soient, en grande par- tie, sous la dépendance de certains stimulants, les uns généraux (air, chaleur, électricité), les autres spéciaux (aliments). Nul doute encore que la soustraction de ces stimulus ne dé- truise complétement la vie ou du moins n’en suspende l’ac- tion , sans toutefois anéantir la vitalité, c’est-à-dire l'aptitude a vivre. Ceci m'amène tout naturellement à vous parler de l’hiberna- tion , de la vitalité inactive ou dormant vitality des physiolo- gistes anglais, et de la résurrection de certains animaux devenus bien célèbres depuis les expériences de Spallanzani , répétées et agrandies par mon ami M. Doyère. Vous avez vu, plus d’une fois, les hirondelles se rassembler en automne, et, après avoir tenu leur bruyant conciliabule, s'envoler ensemble vers des climats où elles trouveront la nour- riture que leur refuse le nôtre. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 9 Les insectes, vous le savez, constituent exclusivement cette nourriture, n'en déplaise à un grand poëte qui veut abso- lument leur donner les miettes de son pain, et le leur faire manger dans la jolié petite main de sa charmante et bien-aimée Graziella. Or, pendant l'hiver, les insectes sont rares, et la pauvre sœur de Philomèle mourrait chez nous de froidure et de faim. Dieu ne l’a pas voulu ; car si, maintenant surtout, il semble ne plus donner leur pâture aux petits des humains, il la donne toujours aux petits des oiseaux. Quant aux chauves-souris, aux loirs , aux marmottes, aux hérissons , à la plupart des reptiles, à beaucoup d'insectes , il les endort pendant l'hiver, réalisant ainsi, pour ces êtres privi- légiés, le proverbe si connu : « Qui dort, dine. » Or, notez comme un fait très-curieux que, chez les animaux, l'activité de la respiration est en raison inverse de l’irritabilité de la fibre musculaire, c’est-à-dire, en raison inverse du pou- voir qu'a cette fibre de se contracter sous l'influence de certains stimulants physiques , chimiques ou intellectuels (galvanisme , volonté, etc.). Ainsi, par exemple, chez les oiseaux , la fonc- tion respiratoire est très-active, et leurs mouvements très-rapi- des et très-énergiques; mais leur fibre musculaire est douée d’une très-faible irritabilité. Le contraire a lieu chez les repti- les, et en général chez tous les animaux à sang froid. Or , un des effets les plus singuliers du sommeil, c’est de di- minuer la respiration en augmentant l’irritabilité musculaire. Chez l’homme et chez la plupart des mammifères, ce double phé- nomène, quoique bien réel, est assez peu prononcé. Mais il l'est bien davantage chez les animaux hibernants, dont le som- meil diffère du nôtre en ce qu’it est beaucoup plus profond et de plus longue durée. Pendant qu’ils dorment de leur sommeil d'hiver, leur respiration est presque nulle , mais leur irritabilité est portée à un très-haut degré. Et il faut bien qu’il en soit ainsi ; car , si la respiration était considérablement diminuée sans que l'irritabilité subit une augmentation notable, le cœur ces- serait d’être stimulé , et l'animal mourrait comme dans le cas de torpeur ou de lente asphyxie. 10 MÉMOIRES Si la respiration était augmentée sans que lirritabilité fût amoindrie, le cœur serait stimulé outre-mesure, et la mort ar- riverait encore, comme elle arrive en effet, lorsqu'on réveille trop subitement un animai plongé dans le sommeil d'hiver. Et quand je dis sommeil d'hiver , je pourrais tout aussi bien dire sommeil d'été; car, au rapport de M. Alexandre de Humboldt, les serpents aquatiques et les crocodiles des grands fleuves de l'Amérique méridionale passent en léthargie tout le temps que durent les chaleurs de ces brülants climats. Il en est de même des tenrecs, espèce de hérisson propre à Madagascar. Cuvier, qui rap- porte ce fait d’après un naturaliste très-digne de foi (Bruguière), a donc {ort d'ajouter que la seule condition de la léthargie est le froid et l'absence des causes irritantes (1). Quoi qu'il en soit, pendant l'hibernation, non-seulement les actes respiratoires sont excessivement ralentis, quelquefois même suspendus par intervalle; mais encore la chaleur de l'animal s’abaisse considérablement ; la circulation devient irrégulière ct lente comme celle d’un reptile; enfin, l'animal, plongé dans cette sorte de sommeil, supporte la privation d'air pendant un temps relativement très-long. Ce sont là des faits parfaitement démontrés depuis les curieuses expériences de Spallanzani , de Saissy, de Mangili, de W. Edwards, de Marshall-Hall, ete, etc. Ainsi, pendant son sommeil d'hiver, une chauve-souris ne consomme pas , en soixante heures , la moitié de l'oxygène at- mosphérique qu’elle consomme en une demi-heure dans son état de veille et d’activité. Ce même animal , en léthargie, peut sé- journer sous l’eau pendant plus d’un quart d'heure, sans paraître en souffrir. Un hérisson y reste pendant vingt-deux minutes; éveillé, il y meurt au bout de trois minutes. Une marmotte en- dormie, plongée dans le gaz acide carbonique, continua de vivre pendant quatre heures dans ce gaz : un rat et un oiseau y périrent à l’instant. Gardez-vous de croire cependant, qu’une fois éveillés les animaux hibernants continuent d’être doués du merveilleux privilége de vivre presque sans respirer. Au contraire, ils ren- (1) Cuvier , Histoire des sciences naturelles, 1829, Lom. 1, pag. 280. DE L'ACADEMIE DES SCIENCES. 11 trent alors sous la loi commune, et succombent bien vite si vous les privez d’air seulement pendant quelques minutes (trois ou quatre, tout au plus). de vous ai dit que la circulation est extrêmement ralentie chez les animaux hibernants. Mais ce qui doit surtout fixer vo- tre attention , c’est que les cavités gauches du cœur qui, à l'état de veille , ne peuvent recevoir et distribuer aux organes que du sang artériel, recoivent et charrient alors du sang veineux, fait très-remarquable, qui prouverait à lui seul l'augmentation de l’irritabilité musculaire, si elle n’était mise hors de doute par une expérience bien cruelle, qu'il faut pourtant vous ra- conter. Ainsi, Mangili, après avoir décapité une marmotte en état d'hibernation , vit son cœur continuer à battre pendant plus de trois heures. Celui d’une marmotte décapitée dans l’état de veille ne battait plus cinquante minutes après la mort de l’animal. Sur un hérisson endormi depuis cent cinquante heures, Marshall-Hall divisa la moëlle épinière au-dessous de l'occiput, et la détruisit dans toute son étendue, après avoir préalablement enlevé le cerveau. Le cœur battait encore vigoureusement quatre heures après cette sanglante opération. Ses battements se ralen- tirent ensuite; mais ils ne cessèrent qu’au bout de onze heures. A ce moment , et même demi-heure après , le cœur répondait encore par des contractions bien visibles aux irritations faites sur son issu avec la pointe d’un canif. Sur un hérisson éveillé et traité comme le précédent, le cœur ne battait plus deux heures après l'expérience (1). Ainsi , en définitive, l’hibernation n’est qu'un long et pro- fond sommeil, pendant lequel l'irritabilité du cœur augmente en raison directe de la diminution des fonctions respiratoires. De là, la possibilité d’une circulation impossible dans l'état d’ac- tivité de l'animal ; de là aussi, diminution notable dans sa tem- pérature ; de là, enfin, pour lui la nécessité d'éviter toutes les (1) Marshall-Hall, article Hisernarion, Cyclopædia of anatomy, elc., pag. 772. J 4 12 MÉMOIRES causes qui pourraient troubler sa léthargie; car le réveil, et sur- tout le réveil subit , ce serait, c’est même souvent la mort. La cause première du sommeil hibernal nous est jusqu’à pré- sent inconnue. Nous pensons toutefois qu'il dépend , en grande partie, de cette loi de périodicité, si générale dans la nature, loi en vertu de laquelle tous les animaux sont obligés de faire succéder à des intervalles d'activité, des intervalles de repos plus ou moins prolongés. Quant aux causes qui favorisent l’hibernation , ce sont : 1° le froid , pourvu qu'il ne soit pas trop intense ; 2° l'absence de tout excitant physique; 3° une atmosphère un peu confinée ; #° enfin, cette influence cachée , mais réelle des saisons, qui faisait dire à une dame très-aimable et très-spirituelle, que « passé le mois de mai, elle avait moins de peine à se garantir des faux pas. » Quelquefois l'homme et surtout certaines femmes (les Aystéri- ques) tombent dans un sommeil qui ressemble assez à la mort pour avoir été malheureusement et trop souvent confondu avec elle. Ce sommeil tout pathologique, et souvent désigné sous le nom de léthargie, de catalepsie, est caractérisé par une im- mobilité complète et par une suspension presque absolue des fonctions nutrilives. Le cœur ne bat plus , ou du moins ses batte- ments deviennent presque insensibles (1) ; le pouls disparaît ; la respiration cesse ou à peu près ; la chaleur abandonne le ma- lade, ct cependant les fonctions sensorielles ne sont pas toujours entièrement éteintes: quelquefois même la faculté de sentir subsiste dans son intégrité. L’individu , plongé dans cet état, entend les gémissements de ses proches, il les voit apprêter ses funérailles , et il ne peut leur faire comprendre qu’il veut et doit rester au milieu d'eux. Affreuse torture, dont les annales de la médecine ou les registres de l’état civil nous ontoffert decélèbres et trop nombreux exemples ! (1) Je dis presque , parce que la persistance des battements du cœur, quelque faibles qu’ils soient, est, chez l’homme, un signe certain d’exis- tence , comme leur cessation complète est un signe de mort infaillible. « Cor ullimum moriens ; » c’est le cœur qui meurt le dernier. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 13 Vous savez à quelles erreurs fatales ces morts apparentes ont donné lieu. Je ne vous parlerai donc pas du pauvre abbé Prévost, puisqu'il est maintenant bien prouvé qu'il ne périt pas victime d'une autopsie prématurée , mais bien des suites d’une apoplexie ou d'une indigestion survenue après un diner copieux qu'il venait de faire dans une maison de Bénédictins des environs de Senlis (1). Mais je vous rappellerai l'histoire de ce gentilhomme Nor- mand , « trois fois mort, trois fois enterré, et, par la grâce de Dieu , trois fois ressuscité. » Je vous rappellerai surtout la scène si émouvante qui, vers le commencement du siècle dernier , se passait au Parlement de Paris, entre Mie d'Olmond, fille de M. d'Olmond, Président au Parlement de Toulouse, et ses deux maris, MM. de Sézanne et de Saint-Alban. Vous n'avez oublié sans doute ni le pathétique plaidoyer de M. de Sézanne, qui lavait épousée après l'avoir arrachée vi- vante à la terre, ni l’ingénieux stratagème auquel M. de Saint- Alban eut recours pour la forcer à déclarer son union légitime avec lui; enfin, le jugement, qui, à l'instar de celui de Sa- lomon , la rendit à son premier époux (2). Voici des faits tout aussi merveilleux, peut-être même plus merveilleux encore. Des crapauds, des chenilles, ont pu , sans perdre les facultés de revenir à la vie, être gelés au point que leurs membres étaient durs et cassants comme le bois, et que leurs yeux ressemblaient à un grelon par l'aspect et pour la consistance. J'ai soumis moi-même les chenilles processionnaires du pin à un froid de 18 degrés. Quand je les laissais tomber sur le marbre de ma commode, leur corps rebondissait et résonnait comme un caillou. Eh bien ! après un réchauffement lent et graduel , je les ai vues reprendre leur mollesse et leurs (1) Por. Bouchut, Traité des signes de la mort, pag. 11, ouvrage cou- ronné par l’Institut de France. Paris, 1841, in-12. (2) Cette curieuse histoire, ou plutôt ce drame déchirant, est rapporté tout au long dans les Causes célèbres , et reproduit par M. Bouchut dans son ouvrage déjà cité, pag. 308 et suiv. 14 MÉMOIRES allures accoutumées. J'ai fait des expériences et des observa- tions analogues sur des paludines vivipares, espèce d’escargot aquatique , qui offre cette particularité remarquable, de faire des petits vivants, et sur l’anodonte des cygnes , autre mol- lusque d’eau douce, qui loge les siens dans ses organes respi- ratoires (1). Enfin, et ceci dépasse tout ce que vous pourrez imaginer de plus extraordinaire, mon ami, M. Doyère, a pu exposer à une chaleur de 120, 140, 145, et même de 153 degrès C., le tardigrade de Spallanzani, petit animal microscopique , qui habite la mousse de nos toits, et il l’a vu reprendre la vie et le mouvement quelques heures après l'avoir humecté d’une simple goutte d'eau (2). Les rotifères desséchés et les anguillules du blé niellé, ont offert à Spailanzani des phénomènes entièrement analogues. Mais, me direz-vous, ces animaux, soumis à un froid si intense , ou à des degrès de chaleur si élevés, devaient avoir réellement perdu la vie; il ne leur restait que la faculté de la recouvrer dès qu'ils seraient placés dans des conditions favo- rables. Ce sont donc des animaux qui ressuscitent ? Oui, sans doute, vous répondront MM. Doyère, et Is. Geoffroy Saint-Hilaire. En effet, il ne s’agit pas ici « d’une simple lé- thargie , comme on l’a dit quelquefois ; car la léthargie est une vie obscure, latente, incomplète , mais pourtant réelle ou ac- tuelle, la vie sous les apparences de la mort; mais d’un état qui n’a de nom dans aucune langue; d’un état qui n'est ni la vie ni la mort, mais qui assurément est encore l'organisa- tion , et avec elle l'aptitude vitale (3). (1) N. Joly, Annales des sciences naturelles, 4. n1,p. 373, 3e série , 1845. (>) Doyère , Annales des sciences naturelles, À. xxu1, p.30, 2° série, 1842. (3) Is. Geoffroy Saint-Hilaire, Histoire naturelle générale des règnes organiques , Low. 11, pag. 64. Les êtres animés, qui nous occupent ici, dit M. Doyère (à la fin de son beau Mémoire), ne sont plus que des réunions de principes organiques chimiquement secs, et la dessiccation établit une solution de continuité absolue entre La vie première des animaux qui nous occupent , el celle qu’une humidité nouvelle leur restitue. NE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 15 Les faits que je viens de vous citer ne sont guère connus que des savants de profession. Il en est d’autres qu'on peut dire vulgaires, et qui pour cela n’en sont pas moins dignes de toute votre attention. Ainsi, personne n ignore que les œufs mis en réserve par la fermière produisent des poulets si on les place sous l’aile de la poule, ou bien dans une couveuse artifi- cielle, ou même dans un four à incubation, construit sur le modèle de ceux des Egyptiens. On sait encore que, s’il est des graines qui perdent très-rapidement leur faculté germinative (café, anpélique, laurier , etc. ), il en est d’autres qui la conservent pendant un temps en quelque sorte illimité { seigle, légumineuses , graminées). Remarquez encore ici une de ces admirablès harmonies dont la nature nous offre tant d'exemples. Plus les chances de destruction sont nombreuses, plus grande est la vitalité des germes ; témoin la résistance invincible qu'of- frent à nos efforts les séminules du botrytis bassiana , qui fait de si grands ravages dans nos magnaneries en y portant la muscardine ; témoin surtout la ténacité de cet oÿdium Tuckeri, venu de je ne sais où, qui résiste à tous nos moyens de des- truction, semble défier la science elle-même, et menace de nous enlever , peut-être pour bien longtemps, les doux pré- sents du joyeux Bacchus (1). (1) Les lignes qui précèdent étaient tracées , quand j’ai reçu le dernier Bulletin de la Société d'Agriculture de l'Hérault, où se trouve consigné un remarquable travail d’un de mes anciens élèves, M. H. Marès, relatif à la maladie de la vigne. Eu employant le procédé du soufrage , l’auteur de ce travail a oblenu de magnifiques résultats sur 72 hectares de vigne de toute nature, et il en promet de semblables à quiconque suivra exactement la méthode qu’il indique. La conclusion du Mémoire de M. Henri Marès est bien propre à nous donner des espérances pour l’avenir. La voici : «Je disais, en terminant la partie historique de ce Mémoire : L'art a vaincu la maladie dans les serres où elle a pris naïssance; je puis dire en- core, en finissant cet ouvrage , l’art est venu à bout de la vaincre aussi dans les vignobles immenses où rien ne semblail pouvoir arrèter sou influence malfaisante (*). » (*) Bulletin de la Société centrale d'Agriculture du département de l'Hérault, 1856, pag. 318. 16 MÉMOIRES La vitalité, quoique très-étonnante encore, est moins grande dans les végétaux phanérogames, c’est-à-dire, à sexes bien distincts. Cependant , on sait que des haricots pris dans l'her- bier de Tournefort, cent ans après y avoir été déposés, ont pu germer dès qu’ils ont été placés dans les conditions favorables à la germination (1). Le professeur Lindley raconte avoir vu, dans les jardins de la Société d'horticulture de Londres, trois plants de framboi- siers, qui provenaient de graines trouvées dans l'estomac d’un homme dont le squelette avait été découvert à 30 pieds au- dessous de la surface du sol. Des monnaies de l'Empereur Adrien , trouvées tout à côté de ce squelette , indiquaient , très- vraisemblablement, pour ces graines, une antiquité de seize à dix-sept cents ans. Enfin , des grains de blé, rapportés des hypogées de Thèbes par les savants de l'expédition d'Égypte, ont donné naissance , après plusieurs milliers d'années , à du blé tout aasi beau que s’il fût provenu de semence récoltée l’année précédente. Dans tous ces cas, comme dans ceux que j'ai précédemment rapportés , la vie existait seulement en puissance , comme di- sent les philosophes , elle n'était pas en acte. En un mot, il y avait seulement l'aptitude à vivre, qui est à la vie ce que le pouvoir est à l’action. Nous pouvons donc affirmer que beaucoup d'êtres organisés conservent à peu près indéfiniment leurs propriétés vitales, tandis que la vie est chez eux suspendue par suite de l'absence des stimulants capables de la mettre ou de la maintenir en exer- cice. Pour que la vitalité subsiste, il suffit donc que la compo- sition normale ne soit point altérée par les agents extérieurs. L'une est donc sous la dépendance de l’autre ; elle en est le résultat. Ainsi s'expriment ceux qui refusent d'admettre la force vitale comme cause, comme principe de la vie, voulant, disent- ils , rester dans le domaine des faits bien positifs. (1) De Candolle, Physiologie végétale, tom. un, pag. 622. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 17 Mais en prétendant que la destruction de la vitalité, c’est-à- dire de l'aptitude à vivre, et celle de la vie elle-même sont dues à un simple changement dans la structure et la composition de l’agrégat matériel, n’ont-ils pas recours à une hypothèse qu'ils ne sauraient prouver dans une foule de cas? Quel changement appréciable produit dans l'organisme une joie subite, une peine excessive? et pourtant la joie vous tue bien plus encore que la douleur. Une goutte d'acide hydrocya- nique suflit pour faire périr un animal : où sont les lésions organiques que le scalpel pourra mettre à nu? En présence du cadavre humain, l'anatomie pathologique avoue chaque jour son impuissance à expliquer la mort. Et l’on prétendrait expliquer la vie par des propriétés générales unies à d’autres propriétés toutes spéciales qui seraient le résultat de l’organisation !.… Sans doute, il est beau , il est digne de l'esprit humain de vouloir ramener à une seule et même loi les phénomènes du monde inorganique et ceux du monde organisé. Peut-être un Jour cetie tentative hardie sera-t-elle couronnée d'un succès que nous appelons de tous nos vœux; mais en attendant la démons- tration de cette loi universelle, l'établissement de cette synthèse magnifique el tout à fait grandiose, nous croyons pouvoir ad- meltre, comme des faits très-acceptables cet assez généralement acceptés , 1° Que tous les êtres vivants jouissent des propriétés généra- les de la matière ; 2° Que ces êtres sont soumis à l'influence des grands agents physiques et chimiques ( calorique , lumière , électricité, at- traction moléculaire , etc.); 3° Que, en tant que corps organisés, ils modifient, en vue d’un but harmonique , l’action de ces agents et les dirigent à leur profit pendant une durée limitée pour chacun d’eux ; 4° Qu'outre les phénomènes physiques et chimiques dont les corps organisés sont le théâtre, il se passe encore en ceux des phénomènes que nous appelons vitaux, et dont les seules lois de la physique et de la chimie ne peuvent nous rendre un compte rigoureusement exact et satisfaisant pour l'esprit ; D° $. — TOME I. 2 18 MÉMOIRES 3° Qu'une force inconnue dans son essence, COMME toutes les causes premières , mais essentiellement distincte de l'âme, pré- side à l’organisation et au maintien de l’agrégat matériel, « se surajoute aux forces inorganiques , les fait concourir à son but, mais ne les détruit point, pas plus que le plan incliné ne détruit l'action de la pesanteur sur les corps dont il modifie la marche (1).» Enfin, nous adoptons complétement celle idée de Bichat : « Dire que la physiologie est la physique des animaux, c'est en donner une idée extrêmement inexacte; j'aimerais autant dire que l'astronomie est la physiologie des astres (2). » Nul doute, cependant, que la physique et surtout la chimie ne puissent rendre et ne rendent en effet, tous les jours, d’im- portants services à la physiologie. Parmi les nombreux exem- ples que nous pourrions citer, en voici deux des plus frappants. Ainsi M. Béchamp, de Strasbourg, vient de transformer l’al- bumine des œufs où du sang en urée (3), sous l’action lente d'un corps oxydant (permanganale de potasse) , et, par ce curieux résultat, il a confirmé des vues physiologiques qui étaient restées jusqu'alors à l’état de théorie. De son côté, M. Pi- card , en dosant l’urée qui se trouve dans le sang que la cir- culation amène aux reins, et dans celui qui en sort, a vu que la différence s’est trouvée égale à la quantité de ce produit con- tenu dans le liquide sécrété. « On croyait à peine, dit M. Bérard, à la possibilité d'atteindre à un tel degré de précision dans la mesure des phénomènes de la vie (4). » Un des caractères essentiels de la vie, c’est la mutation con- tinuelle de la matière; c'est ce double mouvement de compo- sition et de décomposition, que Cuvier désigne sous le nom pittoresque de tourbillon vital, mouvement en vertu duquel de (1) Marié Dary, Discours prononcé à la séance de rentrée des Facultés de Montpellier, 1850. (2) Bichat, ouvr. cité, pag. 58. (3) L'urée est an des principes de l’urine. (4) Bérard , Discours prononcé pour l'inauguration de l'Ecole impériale de médecine et de pharmacie militaire de Strasbourg. (Journal général de l'instruction publique, 20 décembre 1856. DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 19 nouvelles molécules pénètrent sans cesse dans l'organisme, tandis que les molécules anciennes en sont expulsées pour ren- trer dans ce fonds commun de matière nutritive d’où clles- mêmes ont été tirées. Et remarquez bien ceci, je vous prie; cette mutation, ce va-et-vient de molécules s'opère même dans les parties les plus dures, dans les tissus les plus Ut dans les os, et jusque dans Îles dents. « Cet os que je considère et qui se développe, n’a plus en ce moment aucune des parties qu’il avait il y a quelque temps, et bientôt il n'aura plus aucune de celles qu'il a aujourd’hui. Et dans tout ce renouvellement perpétuel de matière, sa forme change très-peu. Là est une des premières et fondamentales lois qui régissent les organismes. Dans tout ce qui a vie, la forme est plus persistante que la matière (1). » En mélant de la garance aux aliments ordinaires des porcs, des chiens, des pigeons, M. Flourens a vu, après Belchier, Duhamel et quelques autres, les os de ces animaux se colorer en rouge plus ou moins foncé. Pour redonner aux os leur couleur normale, il suffisait de cesser pendant quelques semaines le régime garancé. Or, en faisant une coupe transversale d’un os long, de celui du bras, par exemple, on y apercevait distinctement trois zones concen- triques, dont celle du milieu, la seule qui füt colorée, était celle qui s'était formée pendant que l'animal avait été soumis au régime tinc{orial. Des deux zones blanches, l’interne corres- pondait à l'époque écoulée depuis la naissance de l'animal jus- qu’au moment de l'expérience. L'externe indiquait la partie de l'os qui s'était formée après la reprise du régime ordinaire. Des expériences analogues ont prouvé que si l'on ne tue Fani- mal que cinq ou six mois après l'expérience, la coupe de ses os ne présente plus qu’un cercle blanc {l’externe). La zone blanche interne et la zone rouge qui la recouvrait ont disparu. (1) Flourens, Vouvelles recherches concernant l’action de la garance sur les os, Ann. Scienc. nat. , tom. xv, pag. 246 , 2° série. 20 MÉMOIRES Nous avons dit que les dents elles-mêmes se colorent. D'après M. Flourens, au contraire, la partie osseuse (ivoire) scule devient rouge ; l'émail reste incolore. La mâchoire du chien que je fais passer sous vos yeux prouve que l'émail et le cément se colorent aussi bien que l'ivoire (1). Je nc saurais non plus admettre, avec le célèbre Secrétaire de l’Académie des Sciences, que les os et les dents, qui leur ressemblent beaucoup par leur composition chimique et même un peu par leur texture, soient les seules parties du corps sur lesquelles agit la garance. En effet, nous conservons dans les collections de la Faculté des Sciences les preuves péremptoires du contraire. L'une de ces preuves nous est fournie par la membrane interne du gésier d'une poule que nous avions nourrie à la garance. Cette membrane est, dans toute son épaisseur, d’un rouge pourpre très-intense. La seconde preuve nous est donnée par un œuf qui fut pondu par celte même poule, et dont la coque est encore d’un rose assez prononcé , quoique dix ans se soient écoulés depuis l'expérience. Bien que la teinte soit tout à fait superficielle, cet œuf ne démontre pas moins jus- qu'à l'évidence que l'oviducte, c'est-à-dire le canal où s’est formée la coque, était lui-même coloré à l’intérieur : ce qui, d’ailleurs, n’a rien d'étonnant , puisque l’oviducte reçoit de nombreux vaisseaux sanguins , et que le sang lui-même pré- sente uue {einte en rapport avec la quantité de garance mêlée aux aliments (2). (1) Les remarquables travaux de R. Owen, ont prouvé que le cément existe en couche très-mince sur les dents de l’homme et des carnassiers , et que celte partie de la dent est vasculaire comme l’ivoire. (2) Tous ces faits, le dernier surtout, nous semblent prouver que, dans les expériences sur l’alimentation au moyen du régime garancé, il se pro- duit des phénomènes de teinture, de simple affinité chimique de la matière colorante pour la partie Lerreuse des os (phosphate de chaux), peut-être plus que des phénomènes de véritable nutrition. C’est là, du reste, un ré- sultat qu'ont mis hors de doute les recherches de MI. Serres et Doyère (*), (*) Serres et Doyère, Exposé de quelques fails relatifs à la coloration des os chez les animaur soumis au régime de la garance. (Ann. Science. nat., t. xvn, p. 153, 2° sér..) DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 21 J'ai dit, avec le professeur Lordat, que la puissance qui crée la vie est une puissance infinitésimale, c'est-à-dire d’une petitesse infinie à son origine ; mais elle s'accroît progressive- ment, acquiert son plus haut degré d'intensité, puis, quand le temps est venu, finit par disparaître. J'ajoute avec lui, que ces phases diverses, vulgairement désignées sous le nom d’éves, pourraient être figurées sous la forme d’un fuseau , dont l’une des pointes représenterait le point initial de la vie, l’autre son point final ; tandis que le renflement du fuseau indiquerait le moment où elle est le plus active , les deux courbes divergen- tes servant à figurer la naissance et l'accroissement ; les deux courbes convergentes , le déclin et la mort. La vie a ses degrés comme elle a ses phases. Très-simple et très-obscure dans ses manifestations chez les êtres les plus inférieurs, où tous les éléments organiques sont confondus en une pulpe homogène chargée de remplir toutes les fonctions nécessaires à l'entretien de l’ensemble, la vie va se compliquant de plus en plus. Ses actes s’exécutent avec d'au- tant plus de précision que le nombre des organes spéciaux devient plus considérable et que, conséquemment, le travail physiologique se divise davantage. Absolument comme dans l'industrie humaine, la perfection des produits qui exigent plusieurs spécialités est en rapport avec le nombre et l’habileté des ouvriers spéciaux employés à les fabriquer. Cette simplicité de la vie chez les organismes inférieurs nous explique, et leur mode de reproduction par division spon- tanée, et leur resistance étonnante aux mutilations qu’on leur fait subir. Ainsi, Trembley, de Genève, a constaté par des expériences devenues justement célèbres , que l’hydre ou po- lype d’eau douce peut être, non-seulement retourné comme les doigts de vos gants, mais encore divisé en une multitude de *x) ) et surtout celles plus récentes de MM. Brullé et Hugueny ( nous occupe. sur le sujet qui C*) Expériences sur le développement des os dans les mammifères et les oiseaux, faites au moyen de l'alimentation par la garance. (Même recueil , tom. 1v, pag. 290 , 3° série.) 22 MÉMOIRES fragments qui continueront à vivre età se compléter. Ainsi, vous avez beau couper la tête, elle repoussera quelque temps après avec les bras dont elle est pourvue : la tête ancienne acquerra une queue, et même, si vous le désirez, vous pourrez sur cette queue unique obtenir autant de têtes que vous voudrez. Il suffira , pour cela, de vous armer d’un très-fin scalpel, et de fendre la partie antérieure du corps en autant de lanières qu’il y aura de têtes à former. Ainsi se réalisera sous vos yeux la fameuse fable de l’hydre de Lerne , et ce n’est pas la seule fois que la nature vous mon- trera qu’elle est plus féconde en ressources ingénieuses , que notre imagination ne l’est dans ses chimères et ses rêves de toute espèce. A côté de l'hydre , elle vous montrera les Cyclopes et les Po- lyphèmes , avec leur œil unique au milieu du front ; les Ja- niceps avec leur double visage; les Hermaphrodites avec leur double sexe. Chez les Grégarines, vous la verrez confondre deux corps en un seul au moment de la fécondation (1). Enfin, chez les papillons du genre Psyché , et même parfois chez les abeil- les, elle vous rendra témoin d’une vraie Parthénogénèse,, c’est-à-dire d'une génération par des vierges , indépendamment de tout concours du mäle (2). A mesure que vous montez les degrés de l'échelle des êtres , la résistance aux mutilations s’affaiblit de plas en plus. Aïnsi, tandis que chez la Synapte du Duvermoy , la division du corps peut être portée aussi loin que possible, sans que les (1) Les Grégarines sont des vers d’une organisation très-simple qui vivent en parasites dans le canal digestif des insectes. D’après Stein, leur forme, d’abord allongée, devient presque hémisphérique au moment de la repro- duction : c’est alors aussi qu'a lieu la conjugaison ou fusion des deux indi- vidus en un seul. Des faits analogues ont été observés chez les infusoires (Actinophrys , Podophyra, Acineta ) par Koelliker, von Siebold et Cohn. Certains végétaux (a/gues conjuguées) présentent aussi des phénomènes du même genre. (2) Consultez sur ces faits si curieux le récent et remarquable travail de Ch. von Siebold, inséré par extrait dans la Bibliothèque universelle de Genève , décembre 1856. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 23 fragments perdent la faculté de se contracter et même de se mouvoir ; tandis que chacun des segments d’une lanière cou- pée longitudinalement , obliquement, transversalement , en un mot dans tous les sens, peut redevenir un animal parfait, pourvu que ce segment n'ait pas moins de la dixième partie du total ; déjà le ver de terre ou lombric ne peut plus reproduire sa tête, si on lui enlève plus de huit anneaux antérieurs (Dugès). Les colimacons reproduisent encore les tentacules , les yeux et même la tête dont on les a privés ; les salamandres , les écrevis- ses, les homards régénèrent leurs pattes arrachées à dessein ou par accident ; les lézards se font une nouvelle queue, mais rien de semblable ne s'observe ni chez les oiseaux ni chez les mammifères. Bien plus, chez ces derniers, toute mutilation tant soit peu considérable devient bientôt ou subitement fatale. C'est qu'iei tous les organes sont, pour ainsi dire , solidaires les uns des autres ? En mutiler un, c’est gravement compro- mettre la vie de l’ensemble , c'est même lui porter une atteinte mortelle, tandis que chez les êtres inférieurs, chaque partie possède une grande indépendance et jouit des propriétés du tout. Chez les animaux supérieurs, la vie se localise et se con- centre dans quelque organe important (1). Dans les organismes inférieurs, au contraire , elle est, pour ainsi dire, disséminée :sur tous les points du corps. De là, chez ces derniers, une étonnante résistance aux mutilations, une facilité extrême pour réparer les parties perdues ou enlevées, de là, enfin, la possibi- lité des boutures et des greffes animales et végétales. Mais, me demanderez-vous sans doute, où donc est le siége de la vie chez l’homme et chez les animaux supérieurs? A cela Je vous répondrai franchement : Je n’en sais rien ! D’autres, moins embarrassés que moi, vous affirmeront, sans hésiter, que la vie réside dans un point très-circonserit de la moëlle épi- (1) D’après le professeur Lordat et PEcole dont il est et sera toujours l’une des gloires, la vie, ou, commeil dit, l'Esprit de vie est ubiquitaire , c’est-à-dire répandu dans tout organisme, dont il unit toutes les parties , absolument comme l'Esprit national lie entre eux les divers membres d’une sociélé politique. f 24 MÉMOIRES N nière, qu'ils ont nommé lerœud vital : ils iront même jusqu’à vous mesurer en millimètres carrés l’espace occupé par ce nœud ; ils vous diront qu'il est situé immédiatement au-dessus de l’origine de la 8° paire de nerfs (le preumo-g'astrique) , et qu'il a sa limite inférieure trois ou quatre lignes au-dessous de celle origine, etc., etc., et ils ajoutent qu'ils ont constaté tout cela par des expériences auxquelles il n’y a rien à redire. Assurément, personne plus que moi n’admire la sagacité in- génieuse des Flourens , des Magendie , des Longet, etc. , etc. Mais mon admiration ne m'aveugle pas au point de m'empècher de m'adresser à moi-même cette simple question : Où est done le siége de la vie chez les monstres anencépha- les, qui n'ont ni cerveau ni moëlle épinière, et chez les acépha- les, qui n’ont pas même de tête ni de cou ; chez les môles ou monstres anidiens , qui n'ont aucune forme déterminée ? Tous ces monstres , il est vrai , ne vivent pas, ou du moins ne vivent que très-peu de temps dès qu'ils sont sortis du sein de leurs mères ; mais enfin ils ont vécu, puisqu'ils se sont accrus , puisque souvent même ils ont acquis un notable em- bonpoint. Ils ont vécu , il est vrai , d’une vie tout intérieure; mais enfin ils ont vécu sans nœud vital. L'objection, vous le voyez, ne manque pas d’une certaine gravité. Nos savants la résoudront peut-être un jour. A propos d’objections, en voici une qui ne me semble ni moins grave , ni moins difficile à réfuter pour les sectateurs de Barthez et du principe vital. On sait qu'il est possible de res- souder le bout du nez ou de l'oreille aux organes qui viennent d'en être privés par l'instrument tranchant. Ce segment du nez ou de l’oreille avait-il emporté avec lui, en tombant, un reje- ton du principe vital disséminé dans le corps tout entier? S'il en était effectivement ainsi, pourquoi ce rejeton a-t-il quitté la partie qu’il habitait? Si vous supposez qu'il y est resté, il a dû , quand la réunion des parties divisées a eu lieu , se re- plonger dans le principe d’où il émane, ou se soumettre à lui comme un docile enfant. C'est bien pis encore dans le cas des reproductions par division artificielle chez les organismes infé- DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 25 rieurs. Que devient le principe vital dans l’hydre que vous cou- pez en vingt morceaux ? Il se divise, vous répondront Barthez et son Ecole, c’est-à-dire qu'il fera vingt petits. J'avoue que cette réponse me satisfait très-peu , et je pense qu'elle ne vous satisfait pas davantage. J'aimerais mieux dire tout simplement, que tant que la partie coupée a conservé l'intégrité de sa tex- ture et, avec elle, l'aptitude à vivre, cette aptitude passe à l’état d'acte par le seul fait du rapprochement immédiat du nez avec l'organe auquel il appartient. Mais nous voilà retombés en plein organicisme , tant la ques- tion que nous avons eu la témérité d'aborder est hérissée d'in- solubles difficultés ; tant la vérité, telle que se la représentent trop souvent les hommes, a peu les caractères d’évidence de l'E- ternelle Vérité. Consolons-nous donc de notre ignorance, en pensant et en disant avec Pascal : « On doit douter où il faut, se soumettre où il faut , assurer où il faut ; » et avec notre ju- dicieux Bichat, que «la connaissance des causes premières est presque toujours interdite à l'esprit humain , et que le voile épais qui les couvre enveloppe de ses innombrables replis qui- conque tente de le déchirer. » 26 MÉMOIRES USAGE DE LA MÉTHODE DES APPROXIMATIONS SUCCESSIVES POUR LA RÉSOLUTION DE TOUTES LES ÉQUATIONS ALGÉBRIQUES OU TRANS- CENDANTES; Par M. J. SORNIN. 1. Les Traités d’Algèbre indiquent la méthode des approximations successives pour la résolution de quelques équations numériques; mais les exemples que lon en donne ne peuvent servir à en généraliser l'emploi, parce qu'on ne précise pas les conditions dans lesquelles la méthode est applicable. Je me propose, 1° de donner un caractère simple et élémentaire pour reconnaitre si la méthode des approxima- tions successives est immédiatement applicable au caleul de la racine que lon cherche; 2 de transformer, quand la méthode n’est pas applicable immédiatement, l'équation proposée en une autre, donnant, par cette méthode, la raeme demandée. 2. Nous pouvons supposer toute équation ramenée à la forme : x=f(x), f(x) étant une fonction algébrique ou trans- cendante. Soit « une valeur approchée de la racine que l'on veut calculer. La méthode des approximations successives consiste à substituer & dans f (x), pour obtenir une valeur plus approchée de la racine. On opère sur cette nouvelle valeur comme sur la précédente, et ainsi de suite indéfi- niment. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 27 Établissons la condition pour que f (æ) soit plus approchée que « de la racine cherchée que nous désignerons par x. A cet effet, remarquons que l'on a, quel que soit f(x), FG)=F CE (x = [JS "C@)+el: e tendant vers zéro avec x — x. À cause de x = f (x), cette égalité devient : x—f(a)=(x— a) [f'@+el Or, si x est assez rapproché de x pour que l’on puisse négliger e, on voit que x — f(x) ne sera < x — x, en Va- leur absolue, que si l’on a : f'(x) < 1, aussi en valeur abso- lue. De là cette règle : si pour une valeur suffisamment approchée de la racine, ou pour des valeurs qui s’en rappro- chent de plus en plus, la dérivée de f (x) est toujours numé- riquement plus petite que l'unité, la méthode des approxi- mations successives finira toujours par être applicable. Au contraire, si cette dérivée est plus grande que l'unité ou tend à le devenir, à mesure qu’on s'approche de la racine, la mé- thode n’est pas applicable. Quant à la connaissance de la valeur de «& à partir de la- quelle la méthode sera applicable, quand le caractère précé- dent sera satisfait, elle dépendra de la détermination de €, qui pourra s’obtenir à l’aide des dérivées des ordres supé- rieurs; mais ordinairement on pourra regarder comme du même ordre de grandeur que x — «. 3. La condition algébrique qui indique si la méthode des approximations successives est ou n’est pas applicable , est succeptble d’être interprétée par la géométrie. En effet, les racines de l'équation : x =f (x) sont don- nées par les intersections de la courbe y =f(x) et de la bissectrice de l'angle des axes 7 = x ; f(x) est l’ordonnée de la courbe qui correspond à x = «. Puisqu’on prend cette ordonnée pour la valeur de x dans la nouvelle substitution , 28 MÉMOIRES c’est comme si l’on remplaçait la courbe par la bissectrice , c’est-à-dire qu'il faut trouver un point sur cette droite qui ait pour ordonnée f(x) et l’abscisse de ce point sera la nou- velle valeur de x. On opérera sur cette valeur comme sur la première , et en répétant indéfiniment cette construction , 1l pourra arriver qu’on s'éloigne de plus en plus du point d'in- tersection de la courbe et de la droite, comme dans l’exem- ple (E), ou qu'on s'en approche de plus en plus, comme dans l’exemple (2). L’algèbre nous a montré que le premier cas se présente lorsque la tangente au point commun aux deux lignes et aux points voisins sera inclinée sur l'axe des x de plus de 45°, et le second cas, lorsque cette tangente sera inclinée de moins de 45°, J 4. La représentation géométrique qui précède indique le moyen de ramener la résolution de toute équation algé- brique ou transcendante à celle d’une équation ayant les mêmes racines que la proposée et qui satisfasse à la condi- tion qui rend applicable la méthode des approximations successives au calcul de la racine que l’on cherche. En effet, il existe une infinité de courbes qu'on peut faire passer par les points d’intersection des deux lignes J=f(x),y = x; il suffit de choisir Pune d’elles de façon que la tangente, au point qui correspond à la racine cherchée, DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 29 fasse avec l'axe des æ un angle moindre que 45°. La seule difficulté pourrait provenir de ce que lon ne connait pas les coordonnées du point de tangence. Mais si l'on remarque que le système : Y = x, Y— ca peut être remplacé par le système équivalent :Yÿ=X, AY = X—A/ (x), on voit que l’on peut remplacer l'équation x = f(x) par l'équation A , ATTE af æ) ill équivalente: x = mers vue ’on vérifie d’ailleurs immé- diatement. Cela posé, on pourra appliquer là méthode des approxi- mations successives à cette dernière équation, si la dérivée du second membre est numériquement plus petite que l’unité, pour des valeurs de x voisines de la racine cherchée. 5. f' (x) étant supposé plus grand que l'unité, en gran- deur absolue , pour des valeurs de x voisines de la racme cherchée, il y a à distinguer deux cas, suivant le signe de cette dérivée. Soit 1° f' (x) > 0, on rendra Si AE) “A positif et < tr, si l’on prend x < =— j» car 1 — À sera positif, puisque fi G f'(x) > 1, et, pour la même raison, 1 —2/f" (x) sera aussi positif et < 1 — À. Soit 20 f’(x)< o, changeons à en — *, il vient l’expres- Sion : 1+a'f'(x) 1+a' valeur de à” positive , inférieure à , qui est évidemment positive et < 1 pour loute I —f" (x) Ainsi, dans tous les cas, on pourra prendre pour X une quantité de même signe que f’ (x) et dont la valeur absolue soit plus petite que l'inverse de cette dérivée. 6. Nous allons appliquer à quelques exemples les principes précédents, en choisissant de préférence ceux déjà traités par d’autres méthodes dans les ouvrages d’algèbre. 30 MÉMOIRES - jer Exewpee (*). — Résolution de l'équation : x=cos x. Cette équation n’a qu'une racine positive, et il est aisé de voir par le tracé des courbes que la graduation de cette racine est très-rapprochée de 45°. Comme la dérivée de cos x est toujours < 1, la méthode des approximations successives est applicable à cette équation Voici le calcul de la racine par cette méthode; seulement comme les valeurs approchées sont alternativement par défaut et par excès, il y a eu avantage à substituer, à la dernière valeur obtenue, la moyenne entre cette valeur et la précédente. La conversion des degrés en longueurs du rayon et reciproquement à été faite à laide de la table de Callet qui a pour titre : Rapports des longueurs des degrés au rayon pris pour unité. Valeurs données à æ. Valeurs correspondantes de cos #, et graduation de l'arc. Lholnns, © | de meteo Eté ur 45° 0,7071070 40° 30’ 51" 42° 45'25" 0,7342400 42° 4! 8! 42° 24! 46" 0,7383050 42° 18" 6” 42°21" 26" 0,7389585 42° 20! 21" 42° 20' 53" 0,7390663 42° 20' 43" 42° 20'/48" 0,7390825 42° 20" 47" La racine cherchée est done 42° 20’ 47” à 1” près. 9e Exrmrze. — Calcul de la plus petite racine de l’équa- tion : X = tang x. = 1. On cherchera d’abord une valeur approchée de la racine ; en s’aidant du tracé des courbes et par la subsütution de moyennes successives, on démontre que la racine est comprise entre 25° et 2580, Si l’on veut alors en approcher davantage par la méthode des approximations successives, (‘) Cet exemple, ainsi que le suivant, sont traités dans la Théorie géné- rale des approximations numériques de M. Vieille. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 31 il faudra d’abord transformer l'équation, car la dérivée de ? è ir 1 Û : lang æ, c'est-à-dire =, est toujours plus grande que l'unité. D'après les principes du n° 5, on devra prendre À TZ cos? 258°, puisque pour les valeurs voisines de la racine cherchée on a toujours : cos? x > cos? 258. On trouve amsi À TZ 0,043....; on peut done prendre < ? = 0,04. L YATTROU, æ — 0,04 tang x L'équation à résoudre est alors : x — a 0,90 Voiei le tableau des calculs appliqués à cette équation. La valeur de x est donnée soit en degrés, soit en parties du rayon. Le second membre est désigné, pour abréger, par f (x). Valeurs données à z. Valeurs correspondantes de f (x). 2 4,485496197 4,49191373 207 22p 9 25022! 3 | 4,49191025 4,4931626 257° 2621" 2970202 1} 4,493160o1 4,493454x 257°27'21" 2572721" | 4,4934509 4,4934151 2572713" 259°27"13! 4,4934131 4,4934100 25702712" 8. On peut à chaque opération calculer une limite de l'erreur que l’on commet sur la racine. Soit À cette erreur, de sorte que la racme exacte serait & + X, et soit à la dif- férence « — f(x), on doit avoir : a+hk=f(@+h)=f(@)+Al/"(@ +], et si l’on néglige e et que l’on tire la valeur de X, on aura : b — à ire = f} (x) Dans l'exemple qui nous occupe, on à : a —4,4934131, d—0,00000317, et l’on trouvera : 1 — f! (4) = 0,04 tang* à = 0,80762; 32 MÉMOIRES d’où il résulte : 2 — 31 == PTS ou, en valeur absolue, # < 0,000004. 070200 D'ailleurs la longueur de l'arc d’ 1” est > 0,000004 , donc la racine cherchée est 257° 27 13" à mois d’1”, et par excès. —? 3e ExemPLe (*). Résoudre l'équation: A BE 384 x. 9. La construction des courbes : J=e — € ,Y= — 7h D Me montre que cette équation a une racine positive comprise entre 3 et 4. Nous nous proposons de calculer cette racine par la méthode des approximations successives : T — TL : : e — On met l'équation sous la forme : x = ——> . 7387" *. La dérivée æ —?t 3 eke & du second membre est : Or,ona:e > e> 20,donc 7384 cette dérivée est > 1, et il faut transformer d’abord l’équa- tion. On devra, d’après la formule are rs pour l’indéterminée x une valeur plus petite que pe Or cette ce pcs .0 quantité est plus grande que 2 >; 3: n peut donc pren- a I dre À = 3: L'équation à resoudre est ainsi : T —T T 2 x INC GC 8 PE B 07.88 0 753Bf CE — 7 7 — (e) Le tableau ci-joint donne le caleul de la racine à moms d’un ‘2 dixième. (°) Traité dans les compléments d’Algèbre de M, Choquet. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 33 x J (x) Pour prouver que la racine 3,09 F 3,04 est approchée à moins de ! dixième, BA 3,07 On sesert de la formule du n° 8 ; FT 3,07 3,09 laquelle on fait:«—3,09,9 = --0,01 3,09 3,10 dy su & e Ce RD e Loge 5,384 = 0104 Eos ; I Ti sat gs et l’on trouve : À — — < — dixième. 28 2 4° ExemPLe. — Résolution de l'équation :x?—7x+17=0. 10. Cette équation a deux racines positives , l’une com ‘ 3 3 prise entre 1 et —, l’autre entre —- et 2. 3 va PCR On la met sous la forme : x = — + 1. La dérivée du i SEE sr second membre est : — et celte quantité est < 1, pour 3 Un 2 æ = =. On peut doncaffirmer que la première racine sera cal- culable par la méthode des approximations successives. Le caleul ci-joint, fait par logarithme et en prenant pour première substitution la moyenne 1,25 entre rt et —, donne la racine à moins d’un centième. 3 f(x) On a, en effet, en l'arrêtant a la TRE EE dernière approximation : 4 = 1,3510, 1,2700 1,2996 d ——0,0012,1 — f! REZ se 0,10, 1,2006 | 1,3136 J'où l’on conclut : 1,3136 1,3238 S 1,3238 1,3314 TT E- 1,3314 1,3371 Ê= 1609 nono 1,3371 1,3415 ; : ; 1,3415 1,3448 Donc 1,35 est la racine cherchée 1,3448 | 1 Die à moins d'un centième. 1,3474 | 1,3404 1,3494 1,3510 1,3510 PIE FAR 5° $. — TOME I. 3 34 MÉMOIRES 11. On ne peut pas répondre que la méthode des approximations successives soit applicable au calcul de la seconde racine, car il faudrait que cette racine fût plus petite que \/ + = 1,53 environ. El est au contraire probable que la racine est > 1,23; nous allons donc transformer l'équation. I 7 é | 4 On a ‘Fo =3 et puisque æÆest < 2, cette quantité est 7 rendre NL: < hr On peut donc prendre XZ =, et par conséquent = . I lui donner la valeur simple à = ce Il vient alors à résoudre l'équation : 3 1 /X 55 ne. I x 2 \7 su = QUX—=2LX—1—-—, e 7 D — — 2 d’où le tableau suivant : z f(x) On peut s'assurer que la dernière 4 : Fr ? 1,6 He valeur de x est exacte à moins d’un 1,9179 1,9362 dixième. 1,9362 1,9545 19949) x, 572 1,9724 | 1,5895 1,580 1,6053 1,6053 1,6186 1,6186 1,6313 1,6313 1,60325 1,6325 1,6336 12. Application à la résolution de l'équation du second degré. L’équation : a x° + b x + c — 0 étant mise sous la forme: C (24 Der Le la méthode des approximations suc- DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 38 cessives sera immédiatement applicable lorsque la racine x 2 4 sera telle que l’on aura : — x < iet > — 1. On en conclut que la valeur de x doit être numérique- ment < —=, 21 Les deux racines ne pourront évidemment satisfaire à re s b C à cette condition, puisque leur somme est — —. [pourra mé- me se faire qu'aucune d’elles n’y satisfasse. Par exemple, l’é- quation : 2 .x° + x — 1 — 0 n’a aucune racine qui puisse se calculer immédiatement par les approximations successives, et au contraire, l'équation : x° + 2x — 1 — 0 à une racine < 1 qui est calculable par des approximations successives. Il faut de plus, quand il est possible de déterminer la racine par des substitutions successives , que l’on parte d’une valeur assez rapprochée de cette racine pour que la quantité désignée par e, dans le n° 2, soit négligeable. Or ici : f"(@) ar 1.2 D — x —a)=—T(x— 0). Supposons, d’après ue l’on prenne pour première P ; € C approximation : & — — ” On aura :e——% (æ ++ )reten », : a a vertu de l'équation même, e=>x° À M) Ê k ourra donner à «& cette valeur, si -x est très-petit, ou en ki 9 ; ce qui montre que l’on remplaçant x par sa valeur — est très-petit. D Pig C'est dans ce cas, en set , que lon développe la racine suivant les puissances de =, à l’aide d’approximations sue- _— cessives, mais il faut bien remarquer que la grandeur des coefficients est indifférente pour le calcul d'une racine x 5 b Aie (numériquement plus petite que): si l’on part d’une va- 36 MÉMOIRES leur suffisamment approchée de cette racine. La condition à satisfaire est que /’ (æ) +e, 24 (42 (44 . ou — a p(x—e)= . (x+a) ait une valeur numérique plus petite que l'unité. Ainsi on peut calculer la racine inférieure à 1 de l'équation : x° + 2 X— 1 = 0 mise I . . sous la forme : x = 1 — = x", par des substitutions succes- sives dans le second membre, et en partant de x =1. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 37 NOTES SUR LES OBJETS ANTIQUES OU DU MOYEN AGE, Découverts pendant les fouilles opérées pour l'établissement d’un Chemin de fer de Bordeaux jusques à la Méditerranée. PREMIÈRE PARTIE. Par M. pu MÈGE. EN creusant le sol, en bouleversant toutes les terres sur la ligne tracée de Toulouse à Cette, on devait concevoir l’es- pérance de découvrir de nombreux objets, soit antiques, soit de temps moins éloignés de nous; mais, quelque soin que l’on ait apporté à recueillir ces derniers restes, le plus grand nombre a dù nous échapper. Là se trouvaient plusieurs de ces marchands qui ont usurpé le titre d'anliquaires, qu'avait illustré autrefois Montfaucon , Caylus, Winkelmann, Eckel, et une foule d’autres savants écrivains. Ils suivaient les ouvriers , ils achetaient, quelquefois assez cher, les petits monu- ments que la pioche et la houe faisaient jaillir du sol: là étaient aussi ces collecteurs empressés, qui presque toujours font per- dre au pays les moniteurs de son histoire. Puis, l’incurie de quelques-uns, et l’insouciance du plus grand nombre, opposaient des obstacles nombreux à l’accomplissement du devoir qui nous était imposé. Que l'on veuille donc ne pas être surpris du peu d'intérêt qu'offriront ces Notes. Depuis longtemps ceux pour qui l'honneur communal est peu de chose, avaient préparé les moyens de rendre inutiles tous nos efforts. Mais s'ils ont pu les paralyser en partie, ils n’ont pas du moins refroidi notre zèle. 38 MÉMOIRES À Toulouse, les fouilles ont sillonné un terrain nommé Z'err'e- Cavade , terrain que divise en deux portions le Canal du midi, et qui, depuis longtemps, a été regardé comme l’un des plus anciens cimetières de cette ville. Là on retrouvait , jadis, des excayations d’une forme arrondie, qui recélaient des vases en argile, des amphores, devenues urnes sépulerales , et même des tombeaux en pierre. Des vases communs, des lampes, presque toutes brisées, ont en général été les seuls produits des ® fouilles. Parmi les restes de vases mutilés, nous avons ramassé dans les champs voisins de l'Ecole vétérinaire des fragments de lampes sépulcrales qui appartenaient à des chrétiens des pre- miers siècles. Trois fioles à parfums, objets que l’on a pen- dant longtemps désignés sous le nom de lacrymatoires , ont été recueillies par nous, non loin du pont qui conduit à l'Ecole vétérinaire. Des tombeaux en pierre jaunâtre et en grès, entièrement dépourvus de sculptures et d'inscriptions, ont de même été trou- vés dans l’espace limité entre le pont de l'Ecole et celui de Guilleméry. C’est dans cette position, mais sur la rive gauche du canal que furent retrouvés, il y à environ douze années , des objets de ce genre qui paraissaient postérieurs à l’époque de la domination romaine. Nous avons trouvé sur ce point du terrain bouleversé en tout sens, quelques médailles impériales, en grand bronze, toutes frustes, mais couvertes d’une très-belle patine verdâtre. Dans le petit chemin nommé Rue des Juifs, non loin des anciens thermes dits de la Barraquette, à été découvert un petit tombeau en pierre grossièrement travaillé; aucun signe, aucune inscription ne paraissaient sur cet objet, qui n’est pas, nous a-t-on dit, le seul qu’on ait trouvé dans ce lieu. Bien au delà, vers le sud-est, on a découvert deux petits monuments en terre cuite : ce sont deux plaques qui aurontsans douteété attachées par des crampons de fer à un mur. Leur épais- seur est peu forte, elles ont 0" 35° de long sur environ 0" 23° de hauteur. On à gravé sur la première le monogramme de Christ, formé des lettres X et P, entrelacées et renfermées dans DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 39 uue couronne de laurier. Sous ce signe sacré, on lit une ins- cription ainsi conçue : MARCIANO POMPIDIO QUI VIXIT . ANN. XX. M. Il DEPOS . IN. PAC XII. KAL . DEC FLAY . GRATIANVS . AVG FLA . THEGDOSI9 . AVG LONSS Ainsi ce petit monument indiquait le tombeau de Marcianus Pompidius, qui avait vécu vingt anset trois mois, et qui fut iuhumé durant le consulat de Flavius Gratianus, et de Flavius Théodosius, revêtu, comme le premier, du titre d'Auguste. Ce consulat répond, selon les Fastes, à lan 1133 de la ville et l'an 380 de l'ère chrétienne. La seconde inscription estsans date ; dans le baut paraît, ins- crit aussi dans une couronne de laurier, lesaint monogramme ; mais sa forme, commune dans les catacombes, est différente de celle que nous avons vue sur le premier de ces monuments. L'inscription, gravée très-légèrement , est ainsi conçue : MINVCIA FLAVIA QUI VIXIT . ANNE. XII DEFVNCTA . EST. X. KAL. AUG Au-dessous est figuré un vase dans lequel boivent deux co- lombes. -Deux lampes sépulcrales ont de même été ramassées vers le même point. Sar l’une, très-grossière de forme et de matière , on remarque deux personnages portant une grappe énorme : ce sont les espionsenvoyés par Moïse pour reconnaître la Terre- Sainte et qui en rapportent le témoignage de la fertilité du sol où allait bientôt s'établir le peuple de Dieu. Narbonne devait offrir aux archéologues une plus riche moisson. Célèbre par la colonie Romaine établie dans son sein, ayant donné son nom à deux vastes provinces, elle renfermait 40 MÉMOIRES de nombreux monuments. Ausone et Sidonius Apollinaris ont parlé de son magnifique temple en marbre de Paros, de ses arcs de triomphe , de ses palais, de son théâtre, du cirque dont nous avons fait connaître le plan, il y a peu d'années. Ses rem- parts, ses portes modernes sont encore ornés de débris d’archi- tecture qui indiquent la magnificence de cette capitale. Le Musée que l’on y a formé est l’un des plus riches de France, et il devait acquérir une nouvelle importance par suite des fouilles qui viennent d’avoir lieu sur ce sol tout Romain. Parmi les objets retrouvés, on distingue une statue dont je présente le dessin à l'Académie. Elle est en marbre et représente un Faune, le bras droit et les jambes n’ont pas été retrouvés. Le travail est du meilleur style ; cette statue aurait environ 4" 70° si elle était entière. C’est le plus beau débris que les fouilles actuelles aient produit; elle nous a rappelé les temps antérieurs à l'établissement complet du christianisme dans la Gaule Narbonnaise. D'autres monuments sont venus retracer le souvenir du séjour des Juifs de la dispersion dans nos con- trées , et leur puissance à Narbonne, ville où ils avaient établi des écoles fameuses. La lecture de ces monuments épigraphi- ques exigera quelques discussions grammaticales que nous avons réservées pour la seconde partie de ce Mémoire. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. k1 NOTICE TÉRATOLOGIQUE SUR UN AGNEAU DOUBLE , AUTOSITAIRE ; DE LA FAMILLE DES SYCÉPHALIENS , GENRE INIOPS ; Par M. A. LAVOCAT. Dans la série tératologique , comme dans toutes les œuvres de la nature, on rencontre des traits de ressemblance entre les différents groupes, et surtout entre les familles et les genres les plus rapprochés. Ces analogies, ou, pour mieux dire, ces transitions , sont toujours intéressantes à étudier , ne füt-ce qu’au point de vue général de la méthode naturelle, ser- vant à classer les anomalies de l’organisation. Le genre Zniops, de la famille des Sycéphaliens, ressemble au genre Dérodyme, de la famille des Sysomiens, en ce que les deux thorax des sujets constituants sont réunis en un seul. Mais il y a aussi des différences bien caractéristiques. Ainsi, chez l'Iniops, comme, du reste, chez les autres Sycéphaliens , les têtes sont réunies ; les corps sont séparés au-dessus de l’om- bilic: les colonnes vertébrales, au licu d’être simplement pa- rallèles l’une à côté de l’autre, se regardent face à face, et il y a huit membres , quatre thoraciques et quatre pelviens. Le sujet que j'ai eu l’occasion d'observer n’était pas en très- bon état lorsqu'il m’est parvenu. Probablement, par les néces- sités de la mise bas, il avait été coupé en morceaux, et les viscères thoraciques et abdominaux avaient été enlevés; puis, on l'avait recousu et rempli de son. Je fus d’abord arrêté par les doutes résultant de ces mutila- tions et de l'absence complète de renseignements. Mais , pou- vant m'en rapporter sûrement à l’état des têtes, à peu près in- 12 MÉMOIRES tactes , et grâce aux principes de la méthode tératologique, si nettement tracés par M. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, je suis parvenu à déterminer positivement la famille et le genre du monstre que je vais essayer de faire connaître. C'est un agneau double, bi-mâle, arrivé presque à terme. Les deux corps sont réunis en un seul par la face antérieure ou ventrale , depuis l’ombilic jusques et y compris la tête. Il y a deux paires de membres thoraciques , une de chaque côté de l'axe d'union. £ Les deux trones, distincts inférieurement , ont chacun leurs deux membres pelviens et leur queue, ainsi qu'un anus, des bourses, un pénis el un prépuce à l'état normal. La tête est formée d’une partie centrale ou crânienne, pourvue de deux faces, l’une dirigée en avant, et l’autre, moins développée, tournée en arrière. La face qui regarde en avant, a quelque ressemblance avec celle d’un singe; elle porte 1° deux oreilles à peu près nor- males , mais attachées plus bas que d'ordinaire ; 2° deux yeux, paraissant séparés, mais réunis profondément ; 3° point de bouche; son ouverture n’est indiquée que par une ligne trans- verse non fendue; 4° un nez double, c’est-à-dire , deux demi- nez complétement séparés : l’un, à peu près normal ; l’autre, en forme d’une petite trompe cylindrique , longue de 3 centi- mètres , et pourvue, à son extrémité libre, d’un tubercule qui rappelle assez bien le prolongement terminal que porte la trompe de l'éléphant. Chacun de ces demi-nez est percé d’un petit trou, orilice d’une étroite cavité , bientôt terminée en cul de sac. La face tournée en arrière est bien plus incomplète : elle se réduit à un œil situé sur la ligne médiane , au-dessous du- quel sont deux oreilles divergentes, soudées par leur base et se regardant par leur concavité, qui aboutit à un petit cul de sac médian et commun. Enfin, le nez et la bouche ont entiè- rement disparu. Les particularités de cette dernière face sont précisément les traits caractéristiques qui distinguent le genre /xiops des deux DE L'ACADEMIE DES SCIENCES. L3 autres, composant avec lui la famille de Sycéphaliens. En effet, chez le Janiceps , sorte de Janus, les deux faces opposées sont à peu près normales ; dans le Synote, l’une des deux faces, fort incomplète , est réduite à une ou deux oreilles très-rap- prochées ; enfin dans l’Zniops | de iviov occiput et 64, 6r6s, œil, visage), cette même face, outre les deux oreilles , présente encore un œil imparfait. Remarquons, en passant, que ces trois genres forment un groupe très-naturel , justement établi en une même famille par M. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, puisque, chez eux, le corps ne diffère pas essentiellement, et que les dispositions relatives à la tête ne sont que des nuances saisissables , il est vrai, mais évidemment transitoires. Squelette. — Les deux rachis dans toute leur longueur , les os iliaques et ceux des huit membres sont à l’état normal. Les rachis se regardent par leur face viscérale. Les deux thorax, à leur rencontre médiane, se sont ouverts comme deux livres opposés bord à bord ; et, de chaque côté, les côtes droites de l’un se sont unies, bout à bout , aux côtes gauches de l’autre, avec l'intermédiaire d’un sternum, unique en ap- parence, mais formé de deux moitiés fournies par chacun des deux sujets. Il en résulte une grande cage thoracique qui, dans l’atti- tude verticale, est limitée, à droite et à gauche, par une co- lonne vertébrale et treize paires de côtes, nombre ordinaire , et bornée en avant, ainsi qu’en arrière, par un sternum. Cette disposition , qui, au premier abord , parait si étrange, n’a rien cependant que de très-régulier, puisque les deux poi- trines se sont réunies en une seule en se soudant par des parties homologues, par leurs moitiés sternales , absolument comme, dans les phases normales de l'embryogénie, se rapprochent et se soudent les deux moitiés d’un seul et même thorax. Les deux crânes, l’un droit, l’autre gauche, sont réunis, bout à bout , sur la ligne centrale, de manière à ne former qu'une seule boîte crânienne , ovalaire, dans le sens transversal de la double tête. [20 MÉMOIRES Les occipitaux et les pariétaux sont à peu près à l'état nor- mal, si ce n’est que leur moitié latérale , tournée en arrière , est moins développée que l’autre : ils sont minces comme les autres os du crâne. Les frontaux s'opposent et se soudent bout à bout, dans l'axe d'union , par leur partie crânienne; mais la partie faciale de chacun d'eux, divisée par moitié , se reeourbe à angle droit, en avant ainsi qu’en arrière, suivant l’axe longitudinal des deux faces que présente la tête. C’est ainsi que la moitié de chaque frontal concourt à for- mer, en avant, une orbite unique, large et peu profonde, au moyen d'un rebord saillant horizontal et coudé à sa base. Cette lame osseuse , assez étroite, et disposée en arcade , s’ap- puie, comme d'ordinaire, par les extrémités, sur les os ma- laires. En arrière , cette arcade orbitaire , bien plus incomplète, est réduite à son contour supérieur. Les sphénoïdes ne sont pas soudés par leur bord antérieur, parce que les apophyses basilaires des occipitaux, en se réu- nissant bout à bout, ont empêché leur rencontre. Mais chacun d'eux , divisé par moitiés latérales, a été repoussé en avanteten arrière de cette réunion. Chacune de ses moitiés s’est réunie à une autre, de manière à constituer?deux sphénoïdes dirigés en sens inverse, l'un en avant, l’autre en arrière, conservant tous deux leurs connexions essentielles, et appartenant, par moitié, à chacun des deux sujets. Comprimés à la base du crâne, ces deux sphénoïdes , et sur- tout le postérieur , sont peu développés et presque entièrement réduits à leur partie centrale, sur laquelle on peut encore re- connaître : la fossette optique, c’est-à-dire, l'orifice crânien d’un seul conduit optique ; la selle turcique ; la scissure caver- neuse ou carotidienne : le trou ovale, et la fente d'Ingrassias réunie, comme d'ordinaire , au trou grand rond. Enfin, sur la face inférieure, les apophyses ptérygoïdes sont à peine in- diquées. Les quatre temporaux , et surtout les deux postérieurs , sont DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 45 aussi très-imparfaits. La portion écailleuse est encore pourvue, mais seulement sur les temporaux antérieurs, de son apophyse zygomatique, en connexion avec l'os malaire. Mais, ce qu'il y a de plus remarquable, c’est qu'en avant, comme en arrière , les cavités tympaniques sont largement ou- vertes. La lame mince qui forme la paroi inférieure des anfrac- tuosités dites cellules tympaniques , et qui se dispose géné- ralement, chez les quadrupèdes, en une sorte de sac proémi- nent sous le crâne, cette lame osseuse s’est déployée horizon- talement et s’est soudée, bord à bord, dans le plan médian, avec celle du côté opposé. IL en résulte une plaque demi-circulaire qui s’avance sous la face, de manière à figurer une mâchoire inférieure modifiée ; et cela d'autant mieux, que cette pièce, non soudée au crâne par ses angles postérieurs, permet à son bord antérieur une certaine mobilité de haut en bas, analogue aux mouvements de la mastication. Lisse et convexe en dessus, cette lame tympanique est con- cave à sa face inférieure, qui est anfractueuse, et présente parmi ses reliefs, celui du cercle tympanal, situé postérieure- ment , double pour la plaque dirigée en avant sous la face prin- cipale de la tête, et simple , c'est-à-dire , formé de deux moitiés réunies pour la plaque postérieure, moins grande. En arrière de la lame principale ou antérieure, en con- nexion avec le cercle tympanal situé de chaque côté de la ligne médiane, et garni de sa membrane du tympan, on aperçoit aussi deux chaînes tympaniques, marchant l’une vers l’autre de dehors en dedans : chacune d’elles , formée d’un marteau et d’une enclume, aboutit, dans le plan médian, à un étrier massif, simple en apparence, mais réellement double. Ainsi, déviée de sa direction primitive , cette double chaîne ne se ter- mine pas au rocher dont la surface blanche apparaît encore, légèrement renflée, de chaque côté de la base du crâne ; mais les fenêtres vestibulaire et limacienne ne sont pas ouvertes. Enfin , tout près des angles postérieurs de la plaque tympa- nique, on voit, de chaque côté, les traces de l'apophyse va- &6 MÉMOIRES ginale, d'où procède la grande branche de l'hyoïde, en voie d'ossification. Quant au corps de l'appareil hyoïdien , il a été entraîné plus bas, avec le larynx, où on le retrouve entière- ment cartilagineux, en connexion normale avec le cartilage thyroïde. Tous les os de la face rudimentaire ont disparu , et ceux de la face principale sont loin d'être au complet. Les os m#nlaires, seuls à l’état normal, se réunissent en avant , et forment ainsi le contour latéral et inférieur de l'orbite commune. Il y a un vomer, à bord supérieur tranchant et non en goultière. Les palatins , les inter-maxillaires et les os propres du nez manquent complétement, ainsi que les maxillaires inférieurs. Les maxillaires supérieurs, portant chacun trois dents mo- laires apparentes, sont soudés, l’un à l'autre, dans le plan médian, non-seulement par leur bord inférieur ou palatin , mais aussi par leur bord supérieur et leur extrémité antérieure. C’est ainsi qu'ils forment, en avant, un renflement épais el arrondi, ressemblant beaucoup plus à ce qui existe chez l'homme, le singe et les carnassiers, qu’à cette lame aplatie de dessus en dessous , constituée par les inter-maxillaires , à l'ex- trémité antérieure de la tête, chez les ruminants. Par suite de leur rapprochement, les deux maxillaires supé- rieurs comprennent entre eux un espace clos de toute part, simple réunion des sinus maxillaires droit et gauche. En ar- rière , ces mêmes os ne tiennent au crâne que par les os ma- laires et le vomer. Leur point de jonction , supérieur et posté- rieur, correspond au contour inférieur de l’orbite unique, dé- terminé par la jonction centrale des os malaires. En ce même point, et sur la ligne médiane, on voit, au bord inférieur de l'orbite, une petite pièce plate, triangulaire, qui rappelle bien la portion faciale des deux os lacrymaux ; il y a même, en arrière, l’origine d’un double conduit lacrymal. Quant à la portion orbitaire de ces os, unguis, elle se pro- longe dans le fond de l'orbite. Sa lame, très-mince , se recourbe DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. LT postéricurement au contact du crâne, et forme, de chaque côté, un grand cul-de-sac, dont les bords, soudés avec les os maxillaires supérieurs, complétent les sinus compris entre ces os et les ferment en arrière. En résumé, la tête de cet Iniops est formée d’une grande boîte crânienne , résultant de la soudure des deux crânes , non pas réunis parallèlement, mais abouchés par leurs portions frontale et basilaire. Cette cavité ovalaire s’allonge transversale- ment à l’axe d'union, c’est-à-dire, de droite à gauche, ou d’un occipital à l’autre. Ses parois inférieures sont surtout remarquables en ce que les quatre bulles tympaniques , largement ouvertes , déploient en avant leur lame inférieure. Ses parois latérales, tournées l’une en avant, l’autre en ar- rière, sont minces et à peu près verticales. Chacane d’elles ré- pond à l’une des deux régions faciales de la tête, qui sont for- mées chacune de deux demi-faces , déviées suivant l'axe d’union et soudées l’une à l’autre. Ces deux faces sont inégalement développées : lune, posté- rieure , est réduite à une orbite médiane, très-incomplète ; l’au- tre, dirigée en avant, ne présente ni mâchoire inférieure, ni cavités nasales : elle n’est constituée que par une grande orbite centrale , terminée, en avant, par le renflement arrondi des os maxillaires supérieurs. Enfin, comme nous l’a fait observer M. le Professeur Joly, dans l’organisation dégradée de la tête de ce ruminant, on aperçoit quelque analogie avec les Poissons , par l'absence des os palatins, et avec les Cétacés, par l'ouverture inférieure des bulles tympaniques. Système musculaire. — Les muscles du tronc et ceux des membres n’offrent rien de particulier. A la tête, ceux de la face rudimentaire ont presque entière- ment disparu ; on en retrouve cependant quelques traces autour de l'œil et des oreilles. A la face antérieure ou principale, ces mêmes muscles exis- tent ; et ceux qui, de chaque côté, se rendent à l'œil double et &8 MÉMOIRES central, se réunissent, dans le plan médian, à leurs homolo- gues de la paire opposée. Mais, ce qui paraît plus intéressant, c'est de voir persister , peu développés , il est vrai, les crotaphytes, muscles normale- ment préposés à relever la mâchoire inférieure, ici compléte- ment absente. Appareil digestif. — M n'y a qu'une bouche : elle appar- tient à la face principale ; mais elle est close en avant et aussi en arrière. La muqueuse de cette cavité ovalaire est lisse et dé- pourvue de papilles. En haut , elle tapisse la voüte osseuse pa- latine, qui porte dans son milieu une arète tranchante et longi- tudinale. En bas, elle repose sur la face supérieure de la grande lame tympanique déployée sous la face. Là aussi cette mem- brane est soulevée par un léger relief longitudinal , de substance molle , à sillon médian , et paraissant indiquer les deux moitiés d’une langue rudimentaire et non détachée. Au dessous de la tête est un très-large pharynx, commun aux deux individus et offrant à sa partie supérieure une trace de cloison verticale. Cette grande cavité, contiguë de chaque côté aux colonnes cervicales, n’est limitée en avant et en arrière que par la peau qui réunit les deux cous. Là aussi, c’est-à-dire sur la ligne d'union, se trouvent, en avant comme en arrière , le larynx et la trachée des deux sujets. En haut, les bords supérieurs de ce sac pharyngo-æsopha- gien se fixent sous le crâne, ainsi qu'à la circonférence des la- mes tympaniques : ce qui prouve que les trompes d'Eustache se sont largement ouvertes , comme les tympans, dont la cavité est ainsi confondue avec celle du pharynx commun. Là se bornent nos observations possibles sur les viscères di- gestifs, presque tous les organes du thorax et de l'abdomen ayant été enlevés. Mais, en raison de la grande analogie qui existe entre deux genres aussi rapprochés que le sont les Iniops et les Synotes, il est permis d'admettre qu'il en était à peu près de même ici que chez l'agneau Synotus, très-bien étudié, en 1843, par M. Joly. Il est donc probable que l’æsophage aboutis- sait à une masse gastrique incomplétement double, suivie d’un DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. as) intestin d'abord simple, puis double jusqu'à l'orifice anal ap- partenant à chacun des deux sujets. On devait rencontrer aussi deux foies soudés , deux vésicu- les biliaires et un cordon ombilical commun. Par les mêmes raisons , les deux trachées devaient se termi- ner chacune par deux bronches et deux poumons. Il y avait aussi deux cœurs et deux aortes distribuant chacune leurs divi- sions au tronc et aux membres, d'après le mode ordinaire. Appareil génito-urinaire. — Chaque individu était pourvu, comme dans l'état normal, de deux reins et de deux testicules suivis de leurs canaux excréteurs , d'une vessie et d’une verge. Ils étaient donc mâles tous les deux : ce qui vient confirmer de nouveau cette grande loi tératologique établissant que chez les êtres doubles autositaires les sujets composant sont tous deux mäles ou femelles. Mais , à cet égard, nous ferons remarquer, ainsi que l’a déjà fait M. Joly , que la prétendue dominance nu- mérique des femelles, chez les monstres en général, rencontre, comme ici , des exceptions assez fréquentes pour qu’il soit per- mis de la considérer comme loin d'être parfaitement fondée. Organes des sens. — Les appareils sensitifs de notre Iniops sont très-imparfaits. l Les deux yeux de la face principale sont presqu'entièrement réunis en un seul. Il y a encore deux cornées lucides, mais la cavité oculaire est commune, et il n’y a de cloison qu'entre les deux chambres antérieures. De chaque côté est un corps vitré; l'un d'eux seulement porte un cristallin. En arrière, les deux sclérotiques , ainsi que les choroïdes, se confondent en une seule. Il en est de même pour les rétines, qui procèdent d’un nerf op- tique simple en apparence, mais appartenant aux deux sujets. A la face rudimentaire , on ne voit d’abord qu’un œil central, incomplétement développé dans ses diverses parties, telles que l'iris, le corps vitré et la rétine ; il n'y a pas de cristallin, et le nerf optique est simple et très-faible. Sur le côté de cet œil est accolé un autre il, encore plus imparfait : il n’est formé que d'une sclérotique mince, renfermant un liquide noircï par le pig- ment oculaire et ressemblant à une solution d'encre de Chine. D° $. — TOME 1. ke 50 MÉMOIRES À la suite de cet état des yeux , nous devons rappeler que les autres organes sensoriels ne sont pas moins imparfaits. Ainsi, à la face rudimentaire, le nez et les cavités nasales, la bouche, la langue et les mâchoires manquent entièrement. À la face prin- cipale , il y a une bouche close, une langue à peine marquée, sans papilles pi mâchoire inférieure ; point de cavités nasales et seulement deux demi-nez dont un en forme de trompe. Enfin, l'appareil auditif est ici, comme à l’autre face, largement ou- vert dans le pharynx par sa portion tympanique. Toutes ces dégradations des organes sensitifs sont surtout re- marquables en ce que, produites chez un monstre double , elles répètent presque exactement celles qui frappent et caractérisent certains monstres simples, tels que les Otocéphaliens et les Cy- clocéphaliens. N'est-ce pas là une preuve éclatante de l’admirable simplicité des lois de l'organisation qui, même dans lés arrêts de dévelop- pement, conservent leur grand caractère d'unité chez tous les êtres, qu'ils soient simples ou composés. Système nerveux. — Les nerfs spinaux distribués aux deux troncs et aux huit membres, n’offrent rien de particulier. La moëlle épinière et le grand sympathique de chaque sujet sont à peu près à l'état normal. L’encéphale présente seul des particularités intéressantes. Les méninges renferment environ un décilitre de liquide sé- reux , concourant à remplir la boîte crâvienne. La faux du cer- veau n'existe pas; mais il y a deux tentes de cervelet, une à chaque extrémité de la cavité commune, dont le grand axe, comme nous l'avons déjà indiqué, est dirigé transversalement par rapport à la ligne longitudinale des deux faces , c’est-à-dire à l'axe d’union générale. En procédant de chaque région occipitale vers le centre, on voit successivement : un cervelet reposant sur le bulbe crânien de la moëlle; puis deux tubercules bigéminés ; et enfin deux couches optiques qui s'affrontent et se soudent bout à bout, dans le plan médian, avec celles de l'autre sujet disposées en sens contraire. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 514 De chaque côté, le cervelet, la moelle allongée, les tuber- cules quadrijumeaux et la protubérance mésocéphalique sont à l'état normal. Il y a une valvule de Vieussens, mais point de co- narium , et le plexus choroïde est généralement peu prononcé. Entre les quatre couches optiques est une petite cavité, élar- gie à son fond : c’est le troisième ventricule commun aux deux paires de renflements optiques. En bas, il y a deux infundibu- lum, aboutissant chacun sur un corps pituitaire, rougeâtre , près duquel on ne distingue pas de tubercules mamillaires. En haut, sur la jonction des couches optiques, on voit une bandelette blanche , trace du corps calleux et du trigone céré- bral. De ce même point procèdent deux cordons qui montent l’un en avant , l’autre en arrière, et vont constituer , en se di- latant, les hémisphères communs aux deux encéphales. Fort écartés l’un de l’autre et fixés contre les parois cräniennes , ces deux renflements creux sont imparfaitement développés, sur- tout le postérieur qui, répondant à la face rudimentaire , est quatre fois plus petit que l’autre. Tous deux, à parois peu épaisses, sont ouverts par une grande fente qui se prolonge sur le pédicule, ainsi taillé en gouttière : c'est là une conséquence de leur faible développement et de l’é- tat rudimentaire du mésolobe. Leur cavité ventriculaire, à sur- face lisse , renferme une partie du liquide contenu dans la boîte crânienne. En dehors, ils sont mamelonnés de circonvolutions superticielles , mais bien apparentes. Le fait principal qui ressort de cet examen, c’est qu'ici l’état des hémisphères cérébraux est encore plus imparfait que dans le Synote étudié par M. Joly et qui cependant appartient à un genre inférieur dans la famille des Sycéphaliens. Quant aux nerfs crâniens, ils sont loin d'être au complet. D'abord , les nerfs olfactifs manquent absolument , ainsi que les couches olfactives et les corps striés. -— Il en est de même des nerfs glosso-pharyngiens et grands hypoglosses. Ensuite , le nerf pathétique , le facial et le trijumeau, desti- nés à la face rudimentaire , n’existent pas. L'absence complète de tous ces nerfs, même dans leur partie . Le MÉMOIRES centrale, coïncide évidemment avec le non-développement des parties auxquelles ils se distribuent dans l'état normal : c'est done une nouvelle preuve de la marche centripète que suivent en général les formations embryogéniques. Les autres paires nerveuses existent en double; et elles sont nécessairement plus fortes pour la face principale que pour l’au- tre : inégalité qui ne se reproduit pas sur les nerfs destinés aux troncs, tels que le nerf vague et le spinal ou accessoire de Willis. On voit aussi, de chaque côté, le nerf optique, unique en ap- parence, procéder de l’encéphale par deux branches qui se réunissent sans former de chiasma. Enfin , un fait bien digne d'attention apparaît comme consé- quence de la disposition relative des deux centres nerveux sou- dés bout à bout : c’est que toutes les paires de nerfs qui se dis- tribuent aux deux faces de l'être double, sont annexées à l’en- céphale de l’un et de l’autre sujet, et que les deux moitiés d'une même face recoivent chacune des nerfs provenant d’un encéphale différent. En présence de cette disposition curieuse, mais non sans harmonie, en se demande ce qui adviendrait, si deux êtres ainsi réunis pouvaient vivre et se développer. À cette question, uous laisserons répondre M. Is. Gcoffroy Saint-Hilaire : « Qui pourrait dépeindre d'avance, dit le savant tératologue, tous les phénomènes qu'amèneraient ce mélange, cette communauté d'organes? Et surtout quelle imagination pourrait se représen- ter la double et indéfinissable expression de ces visages dont les deux moitiés, appartenant à des individus différents et ani- més par des encéphales divers , auraïent leurs sensations pro- pres, et sur lesquels viendraient se peindre à la fois le désir et la terreur, la colère et la pitié, la douleur et la joie ?... Quel sujet d’études quele jeu de ces fonctions mixtes et les harmonies de ces doubles organes! Quelle source féconde de découvertes physiologiques et psychologiques! » DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 53 RAPPORT SUR L'EXPOSITION UNIVERSELLE DE PARIS EN 1855. je 9ne PARTIE, INDUSTRIES DIVERSES DONT LES PROGRES SONT LIÉS A CEUX DE LA CHIMIE ET DE LA PHYSIQUE ; Par M. FILHOL. L'iveLUENCE que la chimie exerce sur les progrès de l'indus- trie moderne est si grande, qu’il serait difficile de citer une des branches de cette industrie qui ne lui soit redevable d'aucun perfectionnement. Un des premiers chimistes de l'Allemagne écrivait en 1841 (1): « On peut considérer la fabrication de la » soude au moyen du sel marin, comme la base de l’extension » extraordinaire que l'industrie moderne a prise dans toutes » les directions. » En effet, pour préparer économiquement de la soude artificielle, il a fallu produire de l'acide sulfurique à bon marché; en produisant cet acide à bas prix, on a rendu moins coûteuse Ia fabrication des aluns, dont la teinture tire un si grand parti, celle des hypochlorites dont la consommation pour le blanchiment des tissus et du papier est si grande au- jourd'haiï, celle des bougies stéariques , celle du verre, celle du savon, l'épuration des huiles, l’affinage des métaux précieux ; en un mot, on a provoqué l'extension de l’industrie et abaïssé considérablement le prix de plusieurs objets qui sont indispen- sables au bien-être de l’homme. C'est aux progrès de la chimie que sont dus les perfectionne- (1) Liebig, Lettres sur la chimie, pag. 98. 54 MÉMOIRES ments apportés dans la fabrication de la céruse, da blanc de zinc, du prussiate de potasse , des matières colorantes, etc. C'estencore la chimie qui a provoqué les modifications les plus avantageuses dans la préparation des sucres de cannes et de betterave, dans l'extraction de l’amidon , dans les procédés sui- vis pour relirer l'alcool da vin, de la fécule , ‘des betteraves, de l’asphodèle ,... etc. Si nous voulions pousser jusqu’au bout l'énumération des services que la chimie a rendus à l’industrie, nous retrouverions partout son influence bienfaisante et civili- satrice; mais cette énuméralion serait trop longue ; elle serait d’ailleurs inutile, car aujourd’hui tout le monde est fixé sur ce point. Nous allons donc aborder la description succincte des principaux objets qui représentaient à l'Exposition universelle ce qu'on peut appeler les arts chimiques. Nous dirons aussi quelques mots de certains produits dont le travail ne dépend pas des arts chimiques , parce que la description de ces produits trouvera sa place naturelle à côté de celle de quelques-uns de ceux dont nous devons parler, et qu'il nouseüt été difficile de la donner convenablement ailleurs. Combustibles. — Notre département ne renferme aucune mine de houille ; cependant une industrie fort importante qui se rattache à la production du combustible y a été depuis peu de temps introduite, et nous sommes persuadés que ses produits eussent occupé une place fort honorable à côté des produits du même genre dans le palais des Champs-Elysées, nous voulons parler de la fabrication de coke métallurgique, dont la compa- gnie qui est actuellement chargée de l'éclairage de notre ville a fait l'objet principal de son exploitation , considérant le gaz de l'éclairage comme un produit secondaire. Pour préparer le coke métallurgique, la compagnie l’Union des gaz carbonise, dans des fours très-ingénieusement disposés, et dont la description serait trop longue pour trouver place dans ce rapport, de la houille de Cramaux préalablement lavée avec soin. Cette houille est in- troduite dans des fours chauffés au rouge , où l’on en met une quantité suffisante pour former une couche d’une épaisseur con- DE L'ACADÈMIE DES SCIENCES. 55 sidérable. Sous l'influence de la haute température des fours, la houille se ramollit et s’agglutine en même temps qu'il s'en dégage du gaz de l'éclairage, qui s’enflamme et dont la com- bustion est réglée par un courant d'air très-modéré. Ce courant d’air doit être tel que le gaz seul soit brälé et que le coke reste tout entier La flamme que produit le gaz en brûlant cir- cule autour des cornues dans lesquelles on a mis de la houille qui se décompose à son tour et fournit le gaz destiné à l'éclai- rage de Toulouse. Ainsi, grâces à cette ingénieuse disposition, le gaz produit pendant l’agglomération de la houille eu la forma- tion du coke n’est pas perdu ; il sert de combustible, et dans les nouvelles usines on brüle du gaz pour préparer du gaz. Le coke métallurgique produit dans ces fours est d'excellente qualité. Nous avons cru devoir signaler dans notre rapport cette nouvelle industrie, quoiqu'elle n’ait pas été représentée à l'Ex- position uniferselle, parce qu'elle peut rendre de grands servi- ces à notre ville, et qu'il est hors de doute pour nous que ces produits eussent attiré l'attention du jury s'ils eussent pu être envoyés en temps utile. Charbons moulés. — L'industrie des charbons moulés , ré- cemment créée par M. Popelin Ducarre , est trop remarquable pour qu’il nous soit permis de la passer sous silence; disons d’ailleurs qu'elle a valu à son inventeur une des plus hautes ré- compenses. MM. Popelin Ducarre et CŸ° avaient exposé des charbons mou- lés, destinés à être employés comme combustible; des charbons purs pour les piles électriques , et des modèles des fours et des machines qui servent à la fabrication de leurs produits. Voici, en peu de mots, en quoi consiste la fabrication du char- bon moulé, connu sous le nom de charbon de Paris : Les poussières de charbon de bois et de charbon dehouille, le charbon des brindilles des forêts, le tan épuisé et carbonisé, les résidus charboneux pulvérulent(s des usines à gaz et des ma- gasins de coke sont broyés avec soin , mêlés avec 30 à 40 li- tres par hectolitre de goudron brut provenant des usines d'é- 56 MÉMOIRES clairage au gaz. La pâte épaisse qui résulte de ce mélange est moulée sous une forte pression dans des cylindres où elle prend une forme analogue à celle du charbon de bois ; on la fait sécher ; on la carbonise ensuite dans des fours à mouffle ; enfin on laisse refroidir le charbon ainsi produit à l’abri du contact de l'air. Indépendamment des matières premières que nous avons si- gnalées plus haut, MM. Popelin Ducarre et C*° carbonisent des menus bois, des fagots, des bruyères, des genêts, etc., et les transforment en charbon moulé. On comprend immédiatement toute l'importance d’une industrie qui utilise des menus débris dont la plupart étaient perdus ou ne pouvaient servir qu'à des usages très-restreints, et fournit un débouché continuel au goudron qui constitue pour les usines à gaz une matière d'un débit assez difficile. Les charbons moulés brülent d’une ma- nière plus lente et plus régulière que les charbons ordinaires , et leur emploi procure une notable économie, aussi est-il adopté au Conservatoire des arts et métiers, à la Monnaie, à l'Ecole des mines, et dans une foule d'établissements publics. Une fabrique montée, en 1849, à Paris, par M. Popelin Du- carre , consomme 6,000 kilogrammes de goudron par jour et produit par an 52,500,000 kilogrammes de charbon moulé. On ne s’étonnera pas, après ces détails, si les jurys de Londres et de Paris ont décerné à M. Popelin Ducarre leurs plus hautes récompenses. Il serait bien à désirer qu’une semblable fabrication fût tentée dans notre ville , où elle trouverait très-probablement une quan- tité suffisante de matières premières pour se produire dans de bonnes conditions. Allumettes chimiques. — La fabrication des allumettes chi- miques constitue aujourd'hui une industrie considérable; cette industrie est peu développée à Toulouse, où l'on ne fabrique d’ailleurs que des allamettes de qualité très-ordinaire, mais elle n’occupe pas moins de mille ouvriers à Paris seule- ment ; en Allemagne , où elle a pris une extension considéra- ble , elle occupe environ vingt mille ouvriers. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 57 Nous ne décrirons pas dans ce rapport les opérations diverses qu'exige ce genre de fabrication ; tout le monde sait, en effet, qu'elles ont pour but d’enduire successivement l’une des extré- mités des petits morceaux de bois qui doivent constituer les al- lumettes, d’une couche mince de soufre et d’une couche de pâte phosphorée qui doit être superposée à la précédente. La pâte phosphorée se compose de phosphore , de gomme ou de gélatine, d’un peu de sable , d’une matière colorante et d’une quantité d’eau suffisante pour que le mélange possède une con- sistance épaisse. Quelques perfectionnements ont été récemment introduits dans la fabrication des allumettes , et c’est surtout pour en ré- pandre la connaissance que nous avons cru devoir insister un peu sur cette fabrication. Allumettes sans soufre. — Les allumettes préparées à la manière ordinaire répandent, lorsqu’on les fait brüler, une odeur suffocante qui provient de l’acide sulfureux produit par la com- bustion du soufre. On voyait, à l'Exposition, des allumettes dans lesquelles une petite quantité d'acide stéarique avait été substituée au soufre. Ces allumettes brülent sans répandre l'odeur désa- gréable des allumettes soufrées. Leur prix de revient est sensi- blement le même que celui de ces dernières , quoique le prix de l'acide stéarique soit bien supérieur à celui du soufre, parce que chaque allumette exige, pour être convenablement impré- gnée, dix fois moins d'acide gras que de soufre. Allumettes au phosphore rouge. — Un perfectionnement bien autrement utile a été aussi apporté dans la fabrication des allumettes ; il consiste dans la substitution du phosphore rouge, désigné aussi sous le nom de phosphore amorphe, au phosphore ordinaire. Le phosphore rouge possède, comme l'indique son nom , une couleur rouge violacée ; il est assez dur pour pouvoir être pulvérisé ; il n’est pas lumineux, à la température ordinaire, dans l'obscurité ; il ne s’enflamme à l'air qu'à une température de 250 degrés ; il est insoluble dans l’alcool , l’éther , le sul- fure de carbone ; enfin , tandis que le phosphore ordinaire est 58 MÉMOIRES un poison violent, le phosphore amorphe est parfaitement in- nocent ; aussi est-il bien à désirer que son emploi se répande ra- pidement, ou plutôt il serait à désirer que l'usage du phosphore ordinaire, dont les propriétés vénéneuses sont malheureusement trop connues, fût absolument interdit. Pour effectuer la transformation du phosphore ordinaire en phosphore rouge, on le fait chauffer à une température de 170 degrés pendant huit à dix jours; au bout de ce temps on le laisse refroidir, on le pulvérise, et on le purifie, soit par des lavages au sulfure de carbone, soit par une exposition prolon- gée à l'air et des lavages à grande eau. La préparation des allumettes au phosphore rouge est aussi facile et beaucoup moins dangereuse, sous tous les rapports, que celle des allumettes dont on fait aujourd’hui généralement usage. Conservation des bois. — Parmi les applications de la chimie à l’industrie , il en est une dont l'utilité est universellement re- connue et dont on néglige, surtout chez nous, de tirer tout le parti qu’on en pourrait attendre; nous voulons parler de la conservation des bois par les procédés de MM. Boucherie, Bréant, Champy, Moll..., etc. La description détaillée de ces divers procédés nous entrai- nerait trop loin; tout le monde soit d’ailleurs qu'ils ont pour but de faire pénétrer, dans le bois qu'on veut soustraire à l'action des agents destructeurs , une liqueur conservatrice. M. Champy plonge le bois, chauffé à 200 degrés, dans du suif fonda, qui pénètre lentement dans ses pores et le rend imputres- cible. On comprend aisément que l’essence de térébenthine, le goudron, les résines, pourraient aussi être employés avec succès. Plusieurs sels { alun , bichlorure de mercure , sulfate de eui- vre, sulfate ou pyrolignate de fer, acétate de plomb, chlorure de zinc, chlorure de calcium , etc.) peuvent aussi être injectés dans les bois et assurer leur conservation. Pour forcer le liquide conservateur à pénétrer jusque dans le DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 59 cœur du bois, MM. Breant et Payn placent d’abord le bois dans des cylindres où ils injectent de la vapeur d’eau , qui chasse l'air contenu dans les pores du tissu ligneux ; ils introduisent ensuite dans ces cylindres la solution conservatrice et la font pénétrer dans le bois à la faveur d'une pression de 8 à 10 atmosphères. Enfin, M. Boucherie opère sur les bois vivants ou récemment abattus , et utilise la force vitale qui produit l'ascension des fluides nourriciers pour faire pénétrer dans le bois des dissolu- tions de divers sels, parmi lesquels le pyrolignite de fer joue le rôle principal. On peut, au moyen des procédés de M. Boucherie, faire pé- nétrer successivement, dans une même tige, plusieurs solutions, et produire ainsi, dans le bois lui-même, des teintes variées, provenant soit des solutions elles-mêmes, soit des précipités qui résultent de leurs réactions mutuelles. 11 y a mieux, on est parvenu aujourd’hui à blanchir les bois, comme on blanchit le lin ou le chanvre, et on s’en sert pour imiter l’ivoire dans les incrustations ; d’autres fois on les mordance comme les étoffes qu’on veut teindre, et on leur donne ensuite les teintes les plus variées. Les beaux résultats qu'on a obtenus de l'emploi des bois in- jectés, pour la construction du tablier de certains ponts sus- pendus, pour les poteaux des lignes télégraphiques, les traverses des chemins de fer, pour la préparation de bois de construction, ne peuvent laisser aucun doute sur les avantages que présente l'emploi de ces procédés. De nombreux exemples prouvent qu'on pourrait, en se ser- vant de bois ainsi préparés, éviter des accidents fâcheux qui compromettent souvent la solidité des édifices les plus impor- tants. Ces exemples, nous les trouverions en grand nombre dans notre département et même dans notre ville. On se rap- pelle, en effet, avec quelle déplorable rapidité les pièces de bois qui constituaient la charpente de notre Ecole vétérinaire ont été vermoulues ; on n’a pas oublié non plus l'accident qui a failli compromettre, il y a peu d'années, la solidité du dôme de l'Hos- pice de la Grave ; les grilles en bois, qui supportaient les fon- 60 MÉMOIRES dations de ce dôme s'étant pourries sous l'influence alternative de l'air et de l'humidité. Aujourd’hui même, la charpente de la Halle de Saint-Lis, quoique récemment construite, menace de tomber en poussière. L'emploi des bois injectés eût certainement permis d'éviter ces accidents. Mais ce n’est pas seulement dans des cas de ce genre qu'on peut utiliser cette découverte. M. Boucherie a montré , il y a longtemps, que les échalas, qu'on emploie en grande quantité pour soutenir les ceps , et dont la destruction est si rapide, ac- quièrent une durée presque indéfinie quand ils ont été soumis à l’action des liquides conservateurs. — Les cercles qui entou- rent nos futailles, et dont le renouvellement doit avoir heu si fréquemment, acquièrent aussi une souplesse et une inaltérabi- lité remarquables. Nous avons pu voir, à l'Exposition, des échalas parfaitement conservés après plusieurs années d'usage, tandis que d’autres échalas, fabriqués avec des bois de la même qnalité, mais n'ayant subi aucune préparation, tombaient en poussière. Rien n’empécherait, dans nos contrées, où la culture de la vigne occupe une si grande partie du sol, d'utiliser cette application. Nous rappellerons à ce sujet les expériences authentiques qui ont été, il y a déjà longtemps, exécutées dans les caves de Bor- deaux, sur des cercles préparés par M. Boucherie, expériences qui ont démontré que les cercles en bois de châtaignier , pré- parés par son procédé, étaient, après plusieurs années de ser- vice, aussi souples et aussi solides que le premier jour, tandis que des cercles tout pareils, mais non injectés, tombaient en poudre au bout du même temps. Avons-nous besoin de rappeler que c’est en injectant les bois avec des solutions de pyrolignite de fer, de sulfate de cuivre ou de chlorure de calcium, qu’on peut obtenir ces bons ré- sultats? Nous sommes persuadés qu’une simple immersion des échalas ou des cercles, dans l’une des solutions dont nous venons de parler, prolongée pendant cinq à six jours, suffiraient pour aug- DE L'ACADÈMIE DES SCIENCES. 61 menter considérablement leur durée , et procurerait une notable économie. Acide sulfurique. — Va fabrication de l'acide sulfurique exerce une influence si directe sur la prospérité d’une foule de grandes industries qu’on pourrait, dans beaucoup de cas, se faire une idée juste de l'importance manufacturière d’un pays en considérant la quantité de cet acide qu'on y fabrique et qu'on y consomme. Le degré de perfection des procédés auxquels on a recours pour préparer cet acide est tel, qu'on produit, avec un poids déterminé de soufre, une quantité d’acide presque égale à celle qu'indique la théorie. Nous ne décrirons pas ici les perfectionnements dont nous venons de parler, car ils sont ex- posés avec de longs détails dans tous les Traités de Chimie élé- mentaire. Nous n’avons d’ailleurs à établir aucune comparaison entre les acides exposés par diverses maisons, car ils se ressem- blaient tous. C’est avec une vive satisfaction que nous avons rencontré au milieu des nombreux échantillons d'acide sulfurique, envoyés de toutes les parties de la France , un spécimen des produits de la fabrique de MM Rolland et Comp°. Nous eussions bien voulu voir figarer à côté des échantillons de ces beaux aluns, à l’é- preuve du prussiate, de sulfate d'alumine, de sulfate d’ammo- niaque et de couperoses vertes , sortis de la même fabrique, qui avaient attiré l'attention du Jury de la Haute-Garonne lors de la dernière Exposition Toulousaine. La réunion de tous ces produits eût donné une idée plus avantageuse et plus vraie de l'importance de ect établissement. Quoi qu'il en soit , la récom- pense accordée à M. Rolland, par le Jury de l'Exposition uni- verselle, nous parait on ne peut mieux méritée. Cyanure jaune de potassium et de fer. — Parmi les pro- duits de l'Exposition anglaise, nous avons remarqué le cyanure jaune de potassium et de fer ( prussiate } préparé par un procédé connu depuis quelques années, dont il est vraiment malheureux que la France n’ait pas elle-même tiré parti. On sait que le pro- cédé ordinairement employé pour la fabrication de ce sel con- 62 MÉMOIRES siste à calciner, à l'abri de Pair, un mélange de carbonate de potasse, de fer, et de matières azotées d'origine animale ou de charbon azoté, provenant de chairs musculaires, vieux cuirs, etc. Dans ce procédé, c'est la matière animale qui fournit l'azote nécessaire à la production du prussiate. Le procédé utilisé en Angleterre emprunte à l'air l'azote qui doit produire ce sel, et économise ainsi , au profit de l'a- griculture , plusieurs millions de kilogrammes de matières animales. Ce procédé, qui est d'origine française, consiste à faire passer sur du charbon de bois , imprégné de carbonate de po- tasse et chauffé au rouge, un mélange d'azote et d'oxyde de carbone qu’on obtient en faisant passer de l'air sur du coke incandescent. Le charbon potassé, après avoir été maintenu pendant plusieurs heures à la chaleur rouge au milieu de ce courant d'azote, est retiré de l'appareil et mélé avec du fer spa- thique et de l’eau ; on fait chauffer ce mélange, on le filtre en- suite, et lorsque les liqueurs ainsi obtenues ont été concentrées par une évaporation convenable, elles abandonnent, en se re- froidissant , des cristaux de prussiate. L'usine établie à Newcastle, par M. Possoz, produit mille kilogrammes de prussiate en vingt-quatre heures. Le seul in- convénient de ce procédé consiste dans la quantité considérable de charbon qu'on doit consommer pour produire le cyanure, ce qui en élève considérablement le prix de revient partout où le combustible n’est pas à bon marché. Nous croyons pourtant qu'on pourrait, en utilisant la chaleur perdue dans quelques- unes de nos usines, économiser une portion notable de la dé- pense et obtenir un résultat avantageux. C’est un essai que nous recommandons aux Compagnies qui utilisent les menus de houille pour la fabrication du coke destiné aux chemins de fer. Bougies stéariques. — Parmi les applications nombreuses des découvertes scientifiques de notre époque aux progrès de l'industrie , nous devons signaler le parti avantageux qu’on a DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 63 tiré de l'étude approfondie des propriétés des corps gras, pour perfectionner la fabrication des bougies stéariques. Nous croyons utile de faire connaître en peu de mots, les principales modi- fications qu'a subies , dans ces derniers temps, la préparation des bougies stéariques. C'est à M. de Milly que sont dues les améliorations les plus récentes qui ont été introduites dans la fabrication des bougies. Voici en quoi consistent ces amélio- ralions : Ordinairement, pour transformer en savon calcaire 100 par- ties de suif, on les combine, sous l'influence de la vapeur d’eau , avec 14 ou 15 parties de chaux ; on obtient ainsi une masse qui, lorsqu'elle est refroidie, présente une dureté assez considérable. Cette masse savonneuse doit être pulvérisée et sou- mise à l'action de l'acide sulfurique étendu, qui s’unit à la chaux et met les acides gras en liherté. La réaction s'accomplit dans un vase, où l’on fait circuler de la vapeur d’eau, afin de main- tenir les acides gras en fusion; ceux-ci surnagent le liquide, tandis que le sulfate de chaux et la glycerne restent dissous dans l’eau. On n’a plus qu'à enlever les acides après leur re- froidissement , et à les exprimer au moyen d’une forte presse , d'abord à froid, puis à une douce chaleur, pour obtenir l'acide stéarique propre à la préparation des bougies. . M. de Milly a rédait à 4 ou 5 pour cent la quantité de chaux employée pour saponifier le suif, ce qui a diminué beaucoup la proportion d'acide sulfurique nécessaire à la décomposition du savon. Une autre modification non moins heureuse a été introduite par cet habile industriel dans la préparation des bougies. Au- jourd’hui, M. de Milly saponifie le suif dans un vase où il fait arriver un courant de vapeur d’eau , sous une pression de 3 à 4 atmosphères. Le savon ainsi préparé est assez fluide pour qu'on puisse le verser, au sortir du vase où il a été produit, dans les cuves où il doit être décomposé par l'acide sulfurique; on évite ainsi la nécessité de laisser refroidir la masse et de la pulvériser ; on gagne du temps et on diminue la main-d'œuvre. Telles sont les seules améliorations importantes qu’a subies la è préparation des bougies stéariques au moyen du savon à Hi de chaux. Il nous reste à dire quelques mots des procédés qui ont été, dans ces temps, substitués à celui dont nous venons de parler , et qui sont mis actuellement en usage dans plusieurs établissements; nous voulons parler de la saponification des corps gras, soit par l’action seule de la vapeur d’eau surchauf- fée , soit par l’action de l'acide sulfurique et la distillation dans un courant de vapeur d’eau. MM. Chevreul et Frenny ayant démontré, il y a plusieurs années, que, lorsqu'on fait agir de l’acide sulfurique concentré sur les huiles, les graisses ou les suifs , les acides gras sont mis en liberté et peuvent être isolés ensuite par distillation , il de- vint probable que ce nouveau moyen de décomposition des corps gras neutres pourrait être utilisé par l’industrie. C'est ce qui a eu lieu en effet. D'an autre côté , les recherches de MM. Dubrunfaut et Wil- son, ont prouvé que l’action des acides n’est pas indispensable pour séparer la glycerie des graisses ou des suifs et pour isoler les acides gras, el qu'on réussit à opérer cette séparation en chauffant à 325 ou 330 degrés les corps gras neutres , et faisant traverser pendant plusieurs heures la masse par de la vapeur d’eau, et en la distillant ensuite dans un courant de vapeur surchauffée à 350 ou 400 degrés. M. Wilson a appliqué, en Angleterre , l’action de la vapeur d’eau surchauffée sur les graisses et les huiles à la fabrication des bougies au moyen de l'huile de palme , et il a obtenu un plein succès. Le procédé de M. Dubrunfaut a été aussi mis en pratique à Neuilly, par MM. Tribouillet et Masse. On distille dans leur usine , environ 6,000 kilogram. de graisse par Jour. Dans la fabrique de Neuilly, on utilise en même temps l’action de l'acide sulfurique et celle de la vapeur d’eau pour obtenir les acides destinés à la préparation des bougies. Voici en quelques mots comment on opère : Les graisses sont placées dans de grandes chaudières, on les mêle avec une quantité d'acide sulfurique concentré, qui varie entre 6 et 15 pour , de leur poids. On élève la température du mélange à 100 degrés ; on 64 MÉMOIRES DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 65 agite vivement et on prolonge l'opération pendant quinze à vingt heures. La masse brunit et abandonne un dépôt charbon- neux qui gagne à la fin le fond des vases. Les acides gras ainsi obtenus possèdent une couleur noirà- tre ; on les lave à l’eau et on les distille ensuite dans un cou- rant de vapeur à 350 ou 400 degrés. Le produit distillé est d’une blancheur parfaite. Les procédés que nous venons de faire connaître sont avan- tageux , en ce sens qu'ils permettent de préparer de belles bou- gies, en prenant comme matière première des corps gras très- impurs. ‘out porte à penser que ces procédés seront générale- ment adoptés, lorsque les brevets des inventeurs seront expirés, ce qui aura lieu dans quelques mois. Alors très-problablement une révolution complète s’opérera dans la fabrication des bou- gies stéariques. Nous ne décrirons pas ici les produits exposés par les divers fabricants ; cette description, outre qu'elle serait fort longue, ne présenterait aucune utilité : nous nous contenterons de dire que c’est avec un vif regret que nous avons constaté l'absence, parmi ces produits , des bougies fabriquées à Toulouse. Acide sébacique. — A côté des bougies stéariques, et au nombre des substances exposées par M. de Milly, se trouvait un bel échantillon d'acide sébacique. Cet acide, fort rare il y a quelques années , à cause des difficultés que présentait sa fabri- cation, peut être préparé aujourd'hui en quantité considérable et à bas prix, grâces aux recherches récentes de M. Bouis. L’acide sébacique mêlé à l’acide stéarique empêche sa cristalli- sation comme le fait la cire , à laquelle plusieurs fabricants ont encore recours, pour obtenir des bougies dont la surface soit lisse et unie; tout porte à espérer qu'il pourra un jour être x substitué à cette dernière. Alcool caprylique. — A la découverte du nouveau procédé qui permet de retirer de l'huile de ricin de grandes quantités d'acide sébacique, se rattache celle d’un nouvel alcool , l'alcool caprylique , dont les curieuses propriétés deviendront peut-être 9° $. — TOME I. 5) 66 MÉMOIRES avant peu l'objet d'importantes applications. L'alcool caprylique s'obtient en décomposant à chaud l'huile de ricin dans un vase distillatoire, au contact d’une dissolution concentrée de soude caustique ; l'alcool caprylique distille et l’acide sébacique reste combiné à la soude. Savons. —Nous aurons peu de chose à dire de la fabrication des savons, car l'Exposition universelle n'a dévoilé aucune amélioration importante dans cette industrie; les huiles de palme et de coco font aujourd’hui la base de plusieurs savons, et ceux qu’on prépare avec l'huile de coco jouissent de la pro- priété de posséder une consistance ferme et une belle apparence, alors même qu’ils renferment une énorme quantité d’eau ; aussi les bons savons de Marseille sont-ils toujours préférés, et avec raison. Matières colorantes. — On ne saurait imaginer rien de plus beau ni de plus varié que la collection des matières colorantes et des laques qui figuraient à l'Exposition universelle. L'alizarine, la carthamine s'y trouvaient dans un état de pureté parfaite, en volumineux et magnifiques échantillons ; l’indigo , le carmin, le bleu de Prusse , le vermillon , le mi- nium, les cendres bleues, les cendres vertes, la céruse, Île blanc de zinc et une multitude d’autres matières destinées aux besoins de la peinture, el à ceux non moins nombreux de la teinture et de l'impression des tissus, s'y trouvaient groupés avec beaucoup de goût. Des produits moins brillants, mais non moins utiles, figu- raient à côté des précédents ; nous citerons surtout les extraits des plantes tinctoriales, qui jouent aujourd'hui un grand rôle dans la teinture. Ces extraits renferment dans un grand état de concentration les matières colorantes qui sont le plus souvent disséminées dans les bois, ou les plantes qui les ont produits, au milieu d’une masse considérable de matières inertes, dont on évite ainsi le transport. Parmi ces matières colorantes, il en est une dont nous ne devons pas oublier l’origine, car sa découverte, qui fera époque DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 67 dans les annales de la science , s'est produite à Toulouse ; nous voulons parler de l’outremer , si rare autrefois, que l'Europe n’en consommait guère que 2 kilogrammes par an, au prix de 5,000 fr. le kilog. , si commun depuis que M. Guimet a décou- vert le moyen de le produire artificiellement, que la consom- mation de l’Europe s'élève aujourd'hui à 2,500,000 kilog. , et que le prix de cette belle matière n’est plus que d'environ 2 fr. le kilog. Plusieurs fabricants avaient exposé de beaux échantillons d’outremer , mais celui de M. Guimet l’emportait sur tous, sous le rapport de la richesse, de la pureté et de la solidité de sa teinte. La fabrication du blanc de zinc à acquis une grande im- portance, surtout dans ces dernières années. Indépendamment de la propriété précieuse que présente le blanc de zinc de ne pas noircir sous l'influence des émanations sulfureuses , il présente l'avantage inappréciable de ne pas exercer sur les ouvriers qui le préparent ou qui l'emploient cette influence dé- létère qu'exercent la céruse etla plupart des autres couleurs à base de plomb. Il nous suffira, pour donner une idée de l’impor- tance de cette fabrication , de dire que l'usine que la Société de la Vieille-Montagne a fait établir à Asnières, près Paris, produit 1,200 kilog. de blanc de zinc par jour. Nous n'essaierons pas de donner ici une idée de la fa- brication du blanc de zinc; les procédés suivis pour le pré- parer se trouvent décrits avec détail dans tous les ouvrages spéciaux. On se tromperait pourtant si l'on croyait que l'emploi de la céruse a été abandonné : il n'en est pas ainsi; mais la né- cessité de soutenir la concurrence avec les fabricants de blanc de zinc a conduit les fabricants de céruse à perfectionner leurs appareils et à mettre leurs ouvriers, mieux que par le passé, à l'abri des redoutables effets de cette substance. Aujourd'hui , la pulvérisation et le tamisage de la céruse s'effectuent dans des appareils clos, et l’action malfaisante des poussières qui se répandaient autrefois dans toutes les parties des usines n'est 68 MÉMOIRES plus à craindre. Les principaux perfectionnements apportés dans la fabrication de la céruse sont dus à MM. Lefèbre de Lille, et Stameline et Besançon de Paris. Citons, enfin, parmi les matières destinées à la teinture, l'acide urique et l’alloxane, dont on s’est servi pour teindre en rouge vif certains tissus. Nous ne pouvons rien dire sur l'avenir de l'emploi de ce produit en teinture. Le procédé suivi jusqu’à présent est sans doute fort ingénieux, mais il devra probablement subir des modifications profondes avant de devenir d'une application usuelle; car il exige l'emploi du sublimé corrosif, substance très-vénéneuse. Quoi qu'il en soit, il est curieux de voir l’un des éléments du guano pouvoir servir à teindre en rouge écarlate. L'art du teinturier a fait partout des progrès considérables ; mais nulle part il n’a été élevé à un degré de perfection supé- rieur à celui qu'il a atteint à Paris, à Lyon , à Sédan , ct dans les principales villes manufacturières de France. Les limites de ce rapport ne nous permettent pas de donner une descrip- tion, même abrégée, des objets exposés; car, en ne choisis- sissant que les plus remarquables, nous nous exposerions à être trop longs; d’ailleurs, nous n’aurions à signaler aucun perfectionnement récent dont l'importance füt considérable. Nous avons eu aussi le regret de constater l'absence des pro- daits fabriqués par nos teinturiers ; et pourtant quelques-uns de nos industriels eussent pu, ce nous semble, exposer des objets dignes d’attirer l'attention de MM. les Membres du jury. Pourquoi, par exemple, les cotons teints en rouge d’Andri- nople, qui sont depuis longtemps, à Toulouse, l'objet d’une importante fabrication, ne figuraient-ils pas dans le Palais de l'industrie? C’est ce que nous avons de la peine à com- prendre. Toulouse possède d’habiles teinturiers , dont plusieurs ont étudié, soit à Paris, soit à Lyon, les principes de leur art ; nous en connaissons même qui ont reçu aux Gobelins les le- cons d’un illustre chimiste, et qui ont rapporté de cette grande DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 69 école des connaissances suffisantes pour appliquer sur des tissus variés les couleurs les plus vives, les plus brillantes et les mieux assorlies. Parmi nos fabricants de tissus imprimés, un seul à fait figurer ses produits à l'Exposition universelle. I est fâcheux que les autres n'aient pas suivi son exemple , et surtout que celui qui a fondé le premier et le plus important établis- sement de ce genre dans notre ville, n'ait pas cru devoir prendre part à ce concours. Toutefois, nous devons féliciter M. Brun d’avoir compris que le meilleur moyen de perfec- tionner une industrie, consiste à mettre les produits qu'elle fournit en regard avec ceux qu’on obtient ailleurs. C’est par suite de cette comparaison que le fabricant habile apprécie souvent des défauts qui avaient échappé jusqu alors à son at- tention ; souvent aussi, il remarque dans les produits de ses concurrents, des qualités particulières que ne possèdent pas les siens : alors il s’enquiert des procédés qui ont pu conduire les concurrents à des résultats meilleurs. C’est ainsi que s’éta- blit cette noble émulation, cette ardeur salutaire qui produit les efforts les plus honorables, et conduit, presque toujours, ceux qui les ont faits, aux plus belles découvertes ; et, pour l'industriel , toute découverte importante est le gage sùr d’une fortune rapide. L'industrie des tissus imprimés joue à Toulouse un rôle im- portant; elle n’occupe pas moins de # ou 500 ouvriers par joar ; elle peut grandir et prospérer rapidement; car tous Îles éléments de succès se trouvent réunis pour elle dans notre ville. Rien ne le prouve mieux que les efforts de M. Brun lui-même, qui peut livrer certains produits imprimés à la main à des prix aussi bas que ceux où l’on obtient, dans des villes industrielles de premier ordre, des produits du même genre, imprimés au moyen de machines. Il est hors de doute que le jour où nos imprimeurs sur étoffe posséderont les machines si ingénieuses qui permettent d’ob- tenir , avec une incontestable économie , des produits dont la perfection serait difficilement atteinte par les procédés en quel- 70 MÉMOIRES que sorte primitifs qu'on emploie encore à Toulouse , notre ville pourra prendre, comme cité manufacturière, une impor- tance considérable (1). | Ce que nous conseillons surtout à nos industriels d’imiter, c'est la beauté, la pureté et l'élégance des dessins qu'emploient certaines fabriques du Nord de la France. Disons , d'ailleurs, que les produits de la maison de M. Brun ont tenu à Paris un rang honorable, et qu'ils ont valu à ce fabricant distingué une récompense parfaitement méritée. Nous sommes naturellement amenés à dire un mot des toiles pour tableaux qui avaient été exposées dans le palais des Champs-Elysées , par M. Meissonnier : Ces toiles ne cédaient en rien, sous le rapport des qualités qu'on recherche dans les produits de ce genre, à celles qui avaient été envoyées par d’autres exposants. Papiers. — Nous n’essaierons pas de décrire les papiers de tout genre qui avaient été mis sous les yeux du public par les divers exposants, soit français, soit étrangers. Les détails dans lesquels nous pourrions entrer ne nous feraient connaître aucune découverte vraiment remarquable, et ils seraient par conséquent sans objet. Cette partie de l'Exposition était fort riche; les papiers exposés étaient, pour la plupart, très-beaux et d'excellente qualité. Nous n'avons pas besoin de dire qu’à côté du papier à la main, préparé avec des chiffons de pur fil de lin ou de chanvre, figuraient des papiers à la mécanique préparés avec les ma- tières les plus variées. La paille, les jones, les typha, les spar- ganium et une foule d’autres substances avaient été mises à profit pour produire du papier. MM. Blanchet et Kleber de Rives (Isère) avaient exposé (1) Pour donner une idée du bas prix auquel l’emploi des moyens méca- niques permet de livrer certains produits, nous dirons que nous avons vu à l’exposition des foulards en coton imprimés , venant de Manchester, qui élaient cotés à 2 fr. 85 c. la douzaine. DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 71 des cartons préparés avec des débris d’intestins pour les gar- gousses d'artillerie. Le nombre des exposants français était fort considérable. Parmi les produits qui méritent une mention spéciale, nous citerons ceux de MM. Firmin Didot, dont le nom est si hono- rablement connu ; ceux des fabriques d'Angoulême , qui jouis- sent depuis longtemps d’une réputation bien méritée; ceux de MM. Lacroix de la Charente. L'Angleterre, l'Autriche , la Prusse, la Belgique, avaient envoyé de nombreux spécimens de leur fabrication. C'est avec regret que nous avons constaté qu'aucune des fabriques établies dans notre ville n'avait pris part au concours ouvert à Paris. L'indusirie de la fabrication des papiers est une de celles qui peuvent être portées sans difficulté, dans presque toutes les grandes villes, à un égal degré de perfec- tion ; dès lors, des fabricants habiles ne doivent pas craindre la comparaison de leurs produits avec ceux de leurs con- curren(s. Gélatines. — De nombreux et magnifiques échantillons de gélatine se trouvaient exposés, dans l’annexe , au rang des produits chimiques. Comme il fallait s’y attendre, les géla- tines pures et transparentes de M. Grenet de Rouen, se pla- çaient au premier rang. La gélatine se présentait d’ailleurs à l'Exposition sous les formes les plus variées ; tantôt pure et in- colore , tantôt enrichie des teintes les plus vives , tantôt en pla- ques transparentes, tantôt en fils minces et soyeux, d’autres fois sous la forme de jolies fleurs artificielles, de pains à ca- cheter , etc. Ici encore nous n'avons pas trouvé le moindre spécimen de produits de l’industrie toulousaine. Nos fabricants, il est vrai, ne se sont pas attachés jusqu’à ce jour à la prépara- tion des qualités supérieures ; mais c’eût été pour eux une belle occasion de tenter un essai , qui eût été, nous n’en ‘doutons nullement, couronné de succès. Dans une contrée où la culture de la vigne constitue une des principales ressources 72 MÉMOIRES de l’agriculture , la vente des gélatines propres au collage des vins s'effectucrait facilement. Cette industrie pourrait exercer une influence des plus heureuses sur l'amélioration de nos vins. Tout le monde sait combien il est plus facile de con- server des vins collés que des vins qu'on abandonne à eux- mêmes , comme le font la plupart des propriétaires de nos con- trées, sans leur faire subir la moindre opération, dans le but de prévenir les fermentations secondaires qui ne tardent pas à les altérer. Les vins de la Haute-Garonne sont, en général, gros- siers ; ils se conservent difficilement ; mais il est hors de doute qu'ils deviendraient plus délicats et se conserveraient mieux si des collages et des soutirages, faits à propos, les débarras- saient du ferment qui finit par les altérer. Cuirs et peaux. — Les cuirs forts fabriqués en France sont égaux en qualité, sinon supérieurs à ceux qu’on prépare à l'étranger. La fabrication de ces cuirs, par les procédés ordi- naires, exige un temps considérable { quelquefois des années entières }; aussi devait-on s'attendre à voir les savants et les industriels s’efforcer de découvrir des méthodes plus expédi- tives que celles qui sont généralement mises en usage ; c’est ce qui a eu lieu en effet. L'emploi des acides étendus , qui facilite le gonflement des peaux et les rend plus perméables à la matière tannante: l'immersion des peaux dans des infu- sions de tan fréquemment renouvelées et de plus en plus con- centrées, ont été mis à profit par divers fabricants : d'autres font avec les peaux des sacs dans lesquels ils mettent de l’eau avec du tan, et forcent le liquide à traverser les parois du sac sous une pression plus ou moins forte,.… etc. C’est par des procédés de ce genre qu’avaient été préparés les cuirs exposés par M. Dehaux-Lacour, de Guise ( Aisne), et de M. Knoderer de Strasbourg. Les produits de ces fabriques présentent une belle apparence ; mais l’usage seul pourra faire savoir s'ils ont toutes les qualités des cuirs préparés par une longue immersion. L'art du mégissier et celui du chamoiseur étaient aussi très- DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 73 bien représentés à l'Exposition. On y voyait enfin une belle collection de maroquins et de cuirs vernis. Les exposants anglais étaient en grand nombre; ils avaient exposé des cuirs forts de belle qualité, de beaux maroquins, des peaux de mouton avec laine et de très-beaux cuirs vernis. Certains fabricants sont parvenus à préparer, avec la même peau, du maroquin et du cuir ; pour cela ils détachent , avant le tannage , la fleur de la chair. La première fournit le maro- quin, la seconde le cuir. La Belgique et l'Allemagne avaient exposé de beaux produits, parmi lesquels les cuirs vernis jouaient, surtout en ce qui concerne l'Allemagne , un rôle important. La fabrication toulousaine était représentée par MM. Fieux et Ci, quiavaient exposé de très-beaux cuirs de divers genres et notamment des cuirs forts d'excellente qualité. Le mérite des produits que fournit l'établissement de M. Fieux est trop bien connu dans nos contrées pour qu’il soit nécessaire de le faire ressortir ici. Tout le monde a pu l’apprécier depuis longtemps dans les Expositions qu'il y a eu à Toulouse, et l'on sait que le jury dela Haute-Garonne a décerné à ces habiles fabricants la plus haute récompense. De son coté, le jury de l'Exposition uni- verselle leur a accordé une récompense honorable. Cette récom- pense eût été probablement d’un ordre plus élevé, si ce jury eût pu voir, au lieu de petitséchantillons de cuirs, les peaux tout entières, et juger ainsi du mérite de leur fabrication commeavait pu le faire le jury de notre département. Il existe à Toulouse quelques fabriques de cuirs vernis, parmi lesquelles une seule avait envoyé quelques-uns de ses produits à l'Exposition de Paris. Les cuirs vernis fabriqués dans notre ville, sans être irréprochables , nous ont paru bons et bien pré- parés. . L'industrie des cuirs vernis ne peut manquer de réussir dans nos contrées, où ces produits trouveront un écoulement facile et avantageux. Ardoises émaillées. — Parmi les applications de la chimie 74 MÉMOIRES à l'industrie, nous citerons la préparation des ardoises émaillées. Les objets de ce genre exposés par M. Magnus étaient d’une beauté dont il serait bien difficile de donner une idée. L'ardoise émaillée imite les plus beaux marbres, les porce- laines, les granits, les mosaïques... etc. Elle se prête aux usages les plus nombreux et les plus variés ; on s’en sert pour revêtir des cheminées, des salles de bains, des toilettes, etc. , des consoles ou pendules, des devants d’autels, en un mot , on peut l’employer dans presque tous les cas où l’on a l'habitude d'employer le marbre. Son prix est peu élevé en Angleterre. Il serait bien à désirer que nos industriels fissent quelques efforts pour arriver à préparer des produits analogues. Les procédés de M. Magnus sont secrets, mais il ne serait certainement pas dif- ficile de les imiter. Ciment Sorel. —M. Sorel avait exposé des échantillons d’un nouveau ciment sur la composition et les propriétés duquel nous allons fournir quelques détails, car on peut utiliser partout la découverte précieuse de M. Sorel. Ce ciment n’est autre chose qu’un oxychlorure basique de zinc. On le prépare en délayant de l’oxyde de zinc dans une dis- solution concentrée de chlorure du même métal ; les protochlo- rures de fer manganèse, de nickel et de cobalt peuvent être substitués au chlorure de zinc. On peut aussi préparer le ci- ment d’une manière économique en délayant un excès d'oxyde de zinc dans de l’acide chlorhydrique. La dureté du nouveau ciment est comparable à celle du mar- bre ; il est susceptible, comme ce dernier, de prendre un très- beau poli, et rien n'empêche de lui communiquer les couleurs les plus vives et les plus variées en y mêlant divers oxydes métalliques. Le nouveau ciment résiste, sans se désagréger, à une chaleur de 300 degrés : il est inattaquable à l’eau bouillante, et les aci- des concentrés l’attaquent à peine. Son prix de revient est peu élevé; il est d’ailleurs facile de l’amoindrir en mélangeant avec l'oxyde de zinc des matières pulvérulentes dures, telles que du LH DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 75 granit, de l'émeri, du marbre, de la bleude, de la pyrite de fer ,.… etc. M. Fontenelle , sculpteur, s’est servi du nouveau ciment pour faire des tables et des dalles mosaïques d’une grande beauté et d’une dureté remarquable, et l’on peut voir, dans l'église Saint-Etienne du Mont à Paris, des mosaïques formées avec ce nouveau composé. Le ciment à l'oxychlorure de zinc peut être coulé dans des moules, comme du plâtre ; il pénètre, de même que ce dernier, jusque dans les plus petites cavités du moule et reproduit fidè- lement toutes les empreintes. On peut l’employer à faire des objets d'art moulés, statues, statuettes, médaillons, bas-re- liefs , etc. Rien ne prouve mieux l’inaltérabilité du nouveau ciment que l'usage auquel il est consacré depuis plusieurs années par quel- ques bons dentistes de Paris, qui l'emploient pour plomber les dents cariées et même pour confectionner des pièces de dentier, mais l'application la plus utile de cette nouvelle matière serait probablement son emploi comme peinture de bâtiments en rem- placement des peintures à l’huile. Pour former cette peinture , on délaie avec de l’eau et un peu de colle l’oxyde de zinc pur ou coloré, et l'on applique cette peinture, comme les peintures ordinaires à la colle. Quand on a donné le nombre des couches voulu et que la dernière couche est sèche , on passe dessus, au moyen d’une brosse, une dissolu- tion de chlorure de zinc à 25 ou 30 degrés de l'aréomètre de Beaumé. On peut ensuite poncer et vernir cette peinture comme les peintures à l’huile. Cette peinture est solide, sans odeur ; elle sèche avec une grande rapidité. Pour préparer son nouveau ciment, M. Sorel emploie du chlorure de zinc marquant de 50 à 60 degrés à l'aréomètre, et pour que le ciment prenne moins vite, il fait dissoudre dans le chlorure 3 pour 100 de borax ou de sel ammoniac ; il mêle avec ce liquide une quantité d'oxyde de zinc suffisante pour en faire une bouillie qu’on peut ensuite laisser durcir à l'air libre ou couler dans des moules. 76 MÉMOIRES Le ciment est d'autant meilleur qu'il a été préparé avec un oxyde de zinc plus lourd ; aussi est-il avantageux de calciner cet oxyde avant de l’employer. Silicatisation des pierres. — A côté de la découverte de M. Sorel, nous devons placer celle non moins précieuse de M. Kuhlmann. Les travaux de cet habile chimistesur lasilicatisa- tion des pierres tendres et leur transformation en pierres dures remontent déjà à une époque assez éloignée (1840), mais l’appli- cation en grand des procédés de M. Kublmann ne date pas de très- loin ; d’ailleurs ces procédés sont encore assez peu connus pour qu'il nous ail paru nécessaire d'en exposer en peu de mots la substance. M. Kuhlmann ayant remarqué que les chaux hydrauliques et les ciments naturels contiennent toujours des quantités notables de potasse et de soude, imagina que ces alcalis devaient jouer un rôle important dans le durcissement des chaux hydrauliques sous l’eau, et qu’ils servent probablement à transporter la silice sur la chaux; les silicates ainsi formées s’hydrateraient à la facon du plâtre et feraient prise sous l’eau. Pour démontrer qu'il en est ainsi, M. Kuhlmann fit un mé- lange intime de chaux grasse et de silicate de soude pulvérisé, dans la proportion de 10 à 12 de silicate pour 100 de chaux vive, et il oblint ainsi une véritable chaux hydraulique. Il put également transformer un mortier à chaux grasse en mortier hydraulique, en l’arrosant avec une dissolution de silicate ; enfin il produisit , avec le silicate alcalin et la chaux, des ciments dont il fit varier à volonté l'énergie. Ces faits une fois établis, M. Kuhlmann publia de nombreux travaux dans lesquels il montra que rien n’est plus facile que de produire des pierres artificielles possédant une dureté égale à celle des meilleures pierres à bâtir ; et prouva aussi qu’on peut communiquer en peu de temps aux pierres tendres une dureté considérable, et dès lors les silicates alcalins deviennent l'objet d'applications très-étendues et d’une haute utilité. En délayant de la craie pulvérisée dans une dissolution de si- DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 77 licate de potasse, on obtient un mastic qui se solidifie lentement à l'air en prenant une dureté suffisante pour devenir applicable, dans quelques circonstances, à des monuments publics, à la fa- brication des objets de moulure,.…. etc. La craie entière contracte, par une série successive d’im- mersions dans le silicate et d’expositions à l'air, une dureté comparable à celle du marbre ; elle peut prendre un beau poli, et devient susceptible de se prêter à une foule de nouvelles ap- plications. La silicatisation des pierres tendres leur communique parfois une leinte particulière qu’il importe d'éviter. M. Kuhlmann a montré qu'on peut sans peine parer à cet inconvénient. La picrre prend-elle une teinte brune, on éclaircit sa teinte en l’ar- rosant avec du silicate de potasse dans lequel on à délayé du sul- fate de baryte. La pierre devient-elle trop blanche, on la brunit en la traitant par du silicate double de potasse et de manganèse. On peut aussi teindre les pierres en les durcissant. Les sels de fer, de cuivre et plusieurs autres sels métalliques peuvent leur donner des teintes assez vives. Aujourd'hui la fabrication du silicate de potasse a lieu avec assez d'économie pour permettre à chaque architecte d’effectuer la silicatisation à un prix qui ne dépasse pas un franc par mè- tre carré. M. Kuhlmann a aussi montré qu'on peut se mettre à l'abri des inconvénients que pourrait entraîner le séjour d’un excès de silicate de potasse dans les matériaux silicatisés en les impré- gnant d'une dissolution d'acide hydrofluosilicique. Cet acide précipite la potasse à l’état d’un sel parfaitement insoluble. Aujourd'hui la silicatisation est employée à la consolidation des nouveaux travaux du Louvre. Tout fait espérer que cet em- ploi se répandra d’une manière assez rapide. Fonte et tôles émaillées. — Les ustensiles en fonte et en tôle émaillée existaient en grand nombre dans le Palais de l'Indus- trie ; indépendamment des objets destinés à l’art culinaire , des pièces d’une étendue plus considérable prouvaient qu'on peut ti- 78 MÉMOIRES rer un parti considérable de cette industrie. Nous avons vu entre autres pièces d’une dimension considérable , une baignoire en fonte émaillée. L'Autriche avait exposé des objets en tôle émaillée dont le bas prix était vraiment surprenant. L’émail qu'on emploie se prépare avec un mélange de quartz , de borax et d’argile qu’on dépose sous la forme d’une pâte liquide à la surface des pièces; on saupoudre celle pâte avec une poudre composée de feldspath, de borax et d'oxyde de zinc ; on la porte ensuite dans un four dont la température soit suffisamment élevée pour produire la vitrification. Rien n’empêcherait cette industrie de réussir dans nos contrées , qui sont actuellement tributaires du Nord pour ce genre de produits. Produits céramiques. — L'exposition des produits cérami- ques constituait l’un des plus beaux ornements du Palais des Champs-Elysées. La manufacture impériale de Sèvres était re- présentée, dans la Rotonde, par de magnifiques porcelaines dures sur lesquelles des artistes de grand mérite semblaient avoir épuisé toutes les ressources de l’art. Elle avait aussi exposé des émaux sur cuivre d’une grande beauté. Dans la salle des Pano- ramas se trouvaient des porcelaines de la manufacture royale de Berlin, dont la richesse et les belles peintures rappelaient les produits de Sèvres. La fabrication anglaise était dignement re- présentée par les porcelaines de la maison Minton. Enfin, autour des objets appartenant à ces établissements hors ligne, venaient se grouper des productions souvent remarquables des fabriques moins importantes. Il serait trop long de décrire ou simplement d’énumérer les principaux objets que renfermait cette partie de l'Exposition ; nous nous contenterons de jeter un coup d'œil sur les innova- tions qui nous ont paru les plus remarquables. Les fabricants anglais ont produit les premiers une porcelaine imitant le beau marbre blanc de Paros, et pouvant être utilisée avantageuse- mene pour la reproduction des objets de sculpture. Cette matière est connue sous le nom de Parian ou de Paros. de. 2 à "ee de. à à DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 79 Le parian présente des avantages incontestables sur le biscuit de porcelaine ; il possède une teinte iégèrement jaunâtre, qu’on retrouve dans de beaux marbres statuaires ; il prend d’ailleurs, par l’action du feu , et sans le secours d’aucun vernis, un glacé plus beau que celui des biscuits de porcelaine. D'après M. Brogniart, cette pâte, dont la composition varie d'une manufacture à l’autre, est peu plastique et se rapproche par sa nature de la porcelaine tendre anglaise ; elle serait diffi- cilement faconnée au tour, mais elle convient parfaitement pour le moulage. Elle renferme une forte proportion de feldspath ou d’une fritte alcaline: elle contient 61 pour 100 de silice. On trouve dans certains échantillons du phosphate de chaux ; dans d’autres, de la baryte ; dans d’autres , enfin, seulement du kao- lin et du feldspath (1). Les objets en parian qui parurent à l'Exposition de Londres au nombre des produits exposés par M. Minton, avaient vive- ment attiré l'attention des hommes spéciaux ; on s’est attaché depuis à imiter cette matière, et aujourd'hui les fabricants fran- çais font des objets en parian et les livrent au commerce. La fabrique de Creil a, l’une des premières, préparé ce nouveau produit. La fabrication des boutons en porcelaine a fait, en France, des progrès fort remarquables. Cette industrie, d’origine an- glaise , s'est développée d’une manière si heureuse chez nous, que les industriels anglais, qui l’exploitaient, ont renoncé à fa- briquer des boutons en porcelaine, et achètent aujourd'hui dans nos fabriques les produits qu’ils vendent en Angleterre. C’est dans les manufactures de Creil et de Briare que ces résultats re- marquables ont été obtenus. La pâte qui sert à préparer ces boutons se compose de felds- path pur, mêlé avec un peu de phosphate de chaux, on la moule au moyen d’une presse qui produit cinq cents boutons à la fois. On fait cuire les boutons dans de moufles placés dans un four (1) Brogniart , Traité des arts céramiques , tom. 1, pag. 683. 80 MÉMOIRES analogue à ceux dans lesquels on fait cuire les porcelaines tendres. La préparation des porcelaines à glacure plombifère constitue encore une des innovations les plus remarquables dans l'art céramique. Le vernis plombifère, employé par M. Lesme, de Limoges, pour ses rustiques , à l’imitation de ceux de Bernard de Palissy, se compose de borax, de silice et de minium qu'on mêle avec tel ou tel oxyde métallique, suivant qu'on veut obte- nir telle ou telle couleur. Ces porcelaines sont très-brillantes et propres surtout à la préparation des objets d'art ; elles ne sau- raient être recommandées pour les objets destinés aux usages ordinaires , car elles sont loin d’avoir la solidité des porcelaines dont la couverte se compose uniquement de feldspath. A côté des porcelaines, nous avons admiré des objets en faïence exécutés avec une rare perfection. Les fabriques de Creil et Montereau, celle de Bordeaux et celle de Rubelle, près Melun, avaient exposé de très-beaux pro- duits ; nous avens surtout remarqué les émaux ombrants de cette dernière fabrique. Plusieurs fabricants avaient envoyé des poteries communes, pots à fleurs, tuyaux de drainage, etc., dont quelques-unes étaient remarquables par l'élégance de leur forme et le fini de l'exécution. Nous ne dirons rien des briques dont il a été question dans une autre partie de ce rapport. L'industrie de la Haute-Garonne était représentée par M. Gus- tave Fouque, qui avait exposé des produits nombreux de la fabrique de Valentine. Entrons dans quelques détails au sujet de cette manufacture , dont le succès doit nous intéresser à un haut degré. Ce qui constitue, de l'avis des hommes les plus spéciaux , le principal mérite des porcelaiues de Valentine, c’est la beauté et la solidité des couleurs au grand feu employées à leur décoration. Le bleu de cobalt est surtout remarquable par la pureté de sa teinte. Nous citerons aussi le noir, préparé avec de l’oxyde de manganèse, du chromate de fer et de l'oxyde de cobalt ; le gris de platine ; une belle couleur jaune au grand DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 81 feu, composée de protoxyde de titane et d'oxyde de tungstene. Ajoutons à cela que plusieurs pièces , exposées par cette 1m- portante fabrique, se recommandaient par la beauté de leur forme. Les faïences de Valentine sont aussi remarquables par leur bonne confection. MM. Fouque et Arnoux ont été les premiers à appliquer sur la faïence fine une glaçure brillante et dure entièrement dépourvue d'oxyde de plomb, et contenant de l'acide borique. Enfin, la même fabrique produit des grés cérames d’ex- cellente qualité. Il nous reste, pour terminer ce que nous avons à dire sur les produits céramiques , à parler d’une industrie qui est repré- sentée dans notre ville par des hommes d’un grand mérite, et dont les produits ont vivement attiré l'attention du Jury de l'Exposition universelle ; nous voulons parler de la fabrication des objets en terre cuite de grandes dimensions. MM. Virebent frères ont aussi envoyé à l'Exposition universelle des pièces nombreuses et remarquables à plus d'un titre; les succès que ces habiles fabricants avaient déjà obtenus dans les Expositions antérieures permettaient de prévoir que les objets exposés par eux occuperaient un rang honorable parmi les produits du même genre provenant d'autres fabriques. Disons tout de suite qu'il en a été ainsi. En comparant les pièces en terre cuite sorties des ateliers de MM. Virebent à celles qui avaient été en- voyées par les autres manufactures du même genre, soit de la France , soit de l'étranger, on ne pouvait hésiter un seul instant à leur accorder, soit sous le rapport du choix et du travail de la terre, soit sous celui du degré &e fini et de perfection des objets, soit enfin sous celui de l'exactitude avec laquelle cha- cune des pièces qui les formaient s’ajustaient entre elles , une supériorité marquée. Les produits de la fabrique de MM. Virebent sont très-variés ; ils consistent surtout en objets de décor ou d'ornementation ar- chitecturale : ce sont des entablements, des corniches, des bas- reliefs, des caryatides, des statues , des autels, etc. Le portique d'église en terre cuite qui figurait dans la salle des Panoramas 9° $. — TOME I. 6 82 MÉMOIRES constituait certainement la plus belle pièce dans ce genre parmi toutes celles qui avaient été envoyées à l'Exposition univer- selle. Les objets fabriqués par MM. Virebent sont façonnés avec une pâte argileuse fine, compacte , et préparée avec assez de soin pour conserver, après la cuisson, la rectitude de lignes qui fait l’un des principaux mérites des pièces destinées aux besoins de l'architecture. Cette pâte contracte , par la cuisson , une dureté pareille à celle de la pierre; elle est d’une couleur agréable, et résiste très-bien aux intempéries de l'air. MM. Virebent font aussi, depuis fongtemps, des briques mou- lées; enfin, ils ont inventé, dans ces dernières années, une machine fort simple pour la préparation des tuyaux de drainage. Le mérite des objets en terre cuite, sortis des ateliers de ces habiles manufacturiers, est si bien reconnu, que le Conseil des bâtiments civils en a depuis longtemps recommandé l'emploi pour les monuments publics. Le Jury de l'Exposition universelle a accordé à MM. Vire- bent une récompense d’un ordre élevé. Produits chimiques. — L'exposition des produits chimiques était des plus remarquables. Nous signalerons , entre autres choses , 1° De beaux échantillons d'aluminium ; on sait que ce métal, remarquablement léger, plus sonore qu'aucun autre, ductile , malléable, n’éprouvant pas d’altération sensible au contact de l'air et de l’eau à la température ordinaire , constitue l’une des plus belles acquisitions de notre époque. De beaux lingots de ce métal figuraient dans la Rotonde ; on remarquait, à côté d'eux, quelques objets en aluminium, parmi lesquels un chronomètre destiné à Sa Majesté l'Empereur des Français. Le prix de l’alu- minium est encore élevé, beaucoup trop élevé, car il diffère peu de celui de l’or ; mais tout porte à penser que les efforts du chimiste habile qui seconde la bienveillante générosité du chef de l'Etat, parviendront à lever les quelques difficultés que pré- DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 83 sente encore son mode de préparation, et que ce métal de- viendra usuel comme le cuivre, l'étain et le fer. Le sodium figurait à l'Exposition dans les vitrines de plusieurs fabricants, non plus en petits échantillons comme ceux qu'on avait l'habi- tude de rencontrer chez les fabricants de produits chimiques, mais en lingots d’un poids et d’une valeur considérable. Ajou- tons que, grâces à la propriété si curieuse que possède le nouvel alcool ( alcool caprylique), découvert par M. Bouis, le sodium apparaissait avec tout son éclat au milieu de l'huile de naphte à laquelle on avait ajouté quelques gouttes de cet alcool. Les acides , les bases et les sels tant organiques qu'inorgani- ques, se trouvaient presque tous en magnifiques échantillons dans les galeries du Palais de l'Industrie. Les produits les plus rares y figuraient en grand nombre. Les alcaloïdes, et notam- ment ceux qui sont employés en médecine, s’y trouvaient en quantité considérable. Le sulfure de carbone , qui constituait, il y a quelques années, un produit rare, se fabrique aujourd'hui par milliers de kilogrammes et à très-bas prix. Ce produit sert principale- ment à transformer le caoutchouc ordinaire en caoutchouc vul- canisé. Nous avons aussi remarqué parmi les produits chimiques un verre d’une belle transparence, dans lequel l'oxyde de zine a été substitué à l’oxyde de plomb. Ce verre est moins fusible que le cristal ordinaire. Le nombre des substances médicamenteuses qui avaient été envoyées à l'Exposition universelle était fort considérable. Nous n’entreprendrons pas de donner une idée de la variété des produits qui s’y trouvaient rassemblés ; il nous suflira de dire que les objets les plus rares parmi ceux qui sont utilisés par la Médecine, s’y trouvaient à côté des objets les plus ordi- naires. Nous avons été frappés par la belle conservation des plantes médicinales exposées par les pharmaciens anglais. Qu'il y a loin de ces fleurs, dont la forme et les couleurs sont admirable- ment conservées , aux produits informes et souvent méconnais- 8h MÉMOIRES sables qu'on trouve la plupart du temps dans la droguerie française ! Disons cependant qu'il existe en France , quelques maisons qui conservent avec soin les plantes médicinales; mais les droguistes du Midi de la France ont encore beaucoup à faire sous ce rapport, el nous ne saurions trop les engager à suivre l'excellent exemple qui leur est donné par leurs confrè- res du Nord. Il ne faut pas qu'ils perdent de vue que la conser- vation des principes les plus actifs des végétaux est souvent liée d’une manière intime à celle des autres principes, et que les plantes mal conservées sont pour ainsi dire inertes, par rap- port à celles qui ont été l'objet de soins convenables. Opium indigène. —Nous n’abandonnerons pas cette partie de l'Exposition sans dire quelques mots de l'opium indigène, dont M. Aubergier avait exposé de magnifiques échantillons. Tout le monde sait combien il est difficile de trouver , dans le commerce, de l'opium pur. Il n’est peut-être pas de substance sur laquelle les sophisticateurs aient spéculé d’une manière plus hardie et en même temps plus désastreuse pour les malades. Parmi les sophistications dont on a constaté l'existence, nous signalerons le mélange de l'opium avec le suc de réglisse , avec les extraits de cachou, de laitue, d’aloës, avec la gomme adra- gant , les feuilles de pavot hachées, la fécule, le sable, les substances terreuses , etc. Il n’est pas rare de rencontrer, dans le commerce, des opium qui ont été dépouillés de morphine, ct dont l’action sur l’éco- nomie doit être sensiblement nulle. Le jury médical de la Haute-Garonne a dù plusieurs fois signaler à l'autorité l’exis- tence de produits de ce genre dans le commerce de la droguerie toulousaine. La proportion de morphine contenue dans les opium du com- merce varie de 5 à 6 pour cent, suivant le plus ou moins de pureté des échantillons. L'opium indigène est beaucoup plus riche, et doit jouir par conséquent d’une plus grande activité. M. Aubergier a retiré du pavot blanc de l’opium dont la qualité variait avec l'époque de DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 85 la récolte ; celui de la première récolte contenait 8,7 pour cent de morphine , celui de la deuxième , 1,52 seulement. Le pavot pourpre lui a fourni un opium contenant de 19,37 à 11,23 pour cent de morphine; enfin, le pavot œillette a donné un opium dont la teneur en morphine a varié entre 14,78 et 17,83 pour cent. Il ressort évidemment de ces recherches , qu’on peut obtenir en France un opium bien supérieur à celui qui nous vient du Levant, et que cette nouvelle industrie ne saurait Ôtre trop encouragée. M. Aubergier a obtenu une médaille d'honneur de première classe. Caoutchouc. — Une des plus belles applications de la chimie à l’industrie consiste dans le travail et les emplois variés du caoutchouc et de la gutta-percha. Quoique les propriétés re- marquables du caoutchouc eussent mis, depuis quelques an- nées, cette substance au rang de celles dont l'homme peut tirer un excellent parti dans des cas nombreux, la facilité avec la- quelle le caoutchouc devenait mou et gluant à une tempéra- ture médiocrement élevée {50 degrés) jointe à l'inconvénient, non moins grave, qu'il présentait de devenir dur et sans élas- ticité à zéro et au-dessous, avaient singulièrement restreint le nombre des applications de cette substance à l'industrie. Les progrès de la chimie ont fait disparaître ces défauts du caout- chouc; on est allé même jusqu'à les exagérer, pour en tirer parti dans certains cas où l’on n'avait aucun intérêt à les dé- truire. Entrons à cet égard dans quelques détails : Le caoutchouc provient de l’épaississement et de la dessicca- tion du suc laiteux de plusieurs végétaux ( jatropha elastica , ficus elliptica indica, primoïdes , urceola elastica , collophora utilimetc ). Le caoutchouc est importé en Europe de diverses contrées de l'Asie . de l'Afrique et de l'Amérique, sous les formes les plus variées. Tantôt il est en masses blanches volumineuses, amor- phe; tantôt, au contraire, il possède une couleur brune et se présente, soit sous la forme de masses cubiques, soit sous celle de ‘ 86 MÉMOIRES poires creuses, de feuilles minces ou de cordons tressés. Pen- dant longtemps le caoutchouc a été employé à divers usages sans avoir subi aucune modification chimique ; on se contentait dele malaxer pour le rendre homogène, et de le réduire ensuite soit en feuilles minces, soit en fils pour l’introduire dans les tissus qu'il devait rendre imperméables, ou pour divers autres usages. Aujourd'hui, presque tous les objets en caoutchouc qui sont versés dans le commerce, sont préparés avec le caout- chouc vulcanisé. On désigne sous ce nom le caoutchouc qui a été combiné avec du soufre. Caoutchouc vulcanisé. — La vulcanisation du caoutchouc peut s’exécuter par plusieurs moyens : tantôt on plonge le caoutchouc dans du soufre fondu, jusqu’à ce qu'il en ait ab- sorbé une quantité convenable , et on le maintient pendant plu- sieurs heures à une température comprise entre 130 et 150 de- grés ; tantôt on immerge le caoutchouc dans un bain composé de 100 parties de sulfure de carbone et de 2,50 de protochlorure de soufre ; on le plonge ensuite dans l’eau pour empêcher que la sulfuration ne devienne trop forte. Un autre procédé consiste à faire agir pendant trois heures sur le caoutchouc une solution de polysulfure de potassium chauffée à 140 degrés ; on lave en- suite le produit, d’abord avec de l’eau alcalisée , puis avec de l'eau pure. Enfin, on mêle quelquefois le caoutchouc avec de la chaux et du soufre en poudre, et on le plonge ensuite dans de l’eau chaude. Le caoutchouc sulfuré possède l'avantage inappréciable de se ramollir beaucoup moins que le caoutchouc ordinaire sous l'influence de la chaleur, et de conserver son élasticité à de basses températures. Tout le monde sait que le caoutchouc peut être filé, ussé, etc., qu'on en fait des vêtements imperméables , qu’on en fait des pâtes adhésives, des mastics , des coussins élastiques , des balles pleines ou creuses, des ressorts, des soupapes , des tubes , des rouleaux et une foule d'objets dont il serait trop long de donner l'énumération. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 87 Caoutchouc durci. —M. Goodyear avaii exposé une (rès- grande variété d'objets en caoutchouc durei. Ces objets, qui sont pour la plupart d’un beau noir d’ébène et d’une grande dureté, ne rappellent nullement l'aspect ordinaire du caoutchouc; leur surface est brillante et parfaitement polie. La facilité avec la- quelle on peut mouler le caoutchouc durei, a permis de le faire servir à la fabrication des objets les plus variés ; il serait diffi- cile de se faire une idée de l'élégance de la plupart des produits de ce genre qui existaient à l'Exposition. Le caoutchouc durci se prépare avec un mélange de caout- chouc fortement sulfuré (il renferme 30 à 45 p. °/ de soufre), de brai sec et de magnésie. Ce mélange, maintenu pendant long- temps à une température {40° devient homogène, se ramollit et se prête à une foule d'emplois. I nous reste, pour terminer ce résumé, à parler des substan- ces alimentaires qui figuraient à l'Exposition universelle. Cette partie n’est ni la moins utile, ni la moins intéressante de celles que nous avons à signaler. Amidon.— Tout le monde sait que la fabrication de l’ami- don, qui exigeail autrefois l'emploi d’un temps considérable, et qui constituait une cause sérieuse d’insalubrité pour les voi- sins des amidonneries , a été notablement perfectionnée depuis quelques années. A l’ancien procédé, qui consistait à dépouiller l’'amidon du gluten auquel il est associé dans les farines, en laissant putréfier ce dernier jusqu'a ce qu'il devint soluble dans l’eau et püt être séparé par des lavages, MM. Martin, de Vervins, ont substitué un procédé plus rationnel et plus écono- mique. Ce procédé, qui n’est qu'une imitation de celui que les chimistes employaient depuis longtemps pour déterminer la quantité de gluten contenu dans les farines, consiste à faire, avec l’eau et la farine , une pâte ferme qu'on malaxe doucement sous un léger filet d'eau, au-dessus d’un tamis. L'eau entraine l’amidon , qui traverse les mailles du tamis, et le gluten reste dans les mains de l'opérateur. 88 MÉMOIRES Ce procédé offre de nombreux avantages : 1° Il permet de supprimer l'odeur infecte que répandaient les eaux surchargées de gluten putréfié ; 2° Il fournit, toutes choses égales d’ailleurs, plus d'amidon que l’ancien procédé ; 3° Il permet de recueillir et d'utiliser un produit, le gluten, dont la valeur alimentaire est sensiblement égale à celle de la viande. Jusqu'à ces derniers temps, les industriels qui exercent à Toulouse la profession d’amidonniers , avaient suivi l’an- cien procédé. M. Durand a eu , le premier, l’heureuse idée de créer dans notre ville un établissement où les nouveaux pro- cédés sont mis en usage. Cet habile boulanger a joint à sa fabrication d’amidon, une autre industrie dont nous allons parler. 4 MM. Veron et Martin avaient depuis longtemps imaginé d'utiliser le gluten provenant de leur fabrication d’amidon , en le mêlant avec deux fois son poids de farine, et grumelant la pâte ainsi obtenue au moyen d’une machine qui la divise d'abord, et de la granuler au moyen de tamis en toile mé- tallique de divers numércs qui permettent d'obtenir à part les gros grains et les petits. Ce gluten granulé est vendu comme une pâte alimentaire analogue aux pâtes d'Italie, et il leur est incontestablement supérieur quand il a été bien pré- paré. Gluten panifié. — M. Durand tire un excellent parti du gluten en le panifiant;les pains qu’il obtient ainsi sont d’une légèreté remarquable; ils doivent constituer un aliment très-substantiel , et le bas prix auquel M. Durand est parvenu à les livrer les met à la portée de tout le monde. C’est avec une véritable satisfaction que nous avons pu constater la supériorité du pain de gluten de M. Durand sur les produits analogues fabriqués par les boulangers de Paris. M. Durand prépare aussi, au moyen du gluten panifié, une sorte de semoule qui peut servir à préparer des potages ; il prépare encore un chocolat qui joint à un goût agréable une DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 89 grande richesse en principes réparateurs, et qui doit constituer un excellent aliment. Enfin, cet habile boulanger a introduit le gluten dans de vé- ritables bonbons qui sont tout à la fois nourrissants et agréa- bles au gout. Nous ne saurions trop engager les autres industriels qui fa- briquent de l’amidon à Toulouse à suivre l'exemple de M. Du- rand. Puisque nous venons de parler de pâtes alimentaires, nous dirons qu'il s’en trouvait, à l'Exposition universelle, de nom- breux et beaux échantillons de toute sorte ; mais le département de la Haute-Garonne, où il existe de nombreuses fabriques de ce genre, n'y était nullement représenté. Nous sommes conduits naturellement à nous occuper de l’une des parties les plus intéressantes de l'Exposition universelle; nous voulons parler de celle qui est relative aux conserves alimentaires de toutes sortes, qui se trouvaient exposées dans le Palais de l'Industrie. Conservation des viandes. — Plusieurs procédés sont mis en usage pour la conservation des viandes. Les uns sont em- ployés depuis une époque fort reculée, d’autres sont d’origine toute récente. Parmi les anciens procédés, nous signalerons ceux qui consis- tent à dessécher les viandes , à les saler ou à les exposer à l'ac- tion de la fumée. Ces procédés assurent, lorsqu'ils sont bien con- duits, une conservation prolongée; mais les produits qu'ils four- nissent ne valent pas à beaucoup près, sous le rapport du goût, de la saveur et peut-être de la valeur alimentaire, les viandes fraiches. Le procédé d’Appert donne d'excellents résultats ; il est depuis longtemps mis en usage sur une vaste échelle dans plusieurs contrées, et il fournit depuis plusieurs années aux marins un précieux moyen de varier leur régime. Tout le monde sait que ce procédé consiste à renfermer la viande qu'on veut conserver dans des boîtes métalliques qu'on remplit aussi exactement que possible ; à fermer bermétiquement ces boîtes 90 MÉMOIRES \ et à les plonger dans de l'eau où on les fait bouillir pendant quelques heures. Des moyens différents ont été misen usage dans ces derniers temps ; le but qu’on s’est proposé d'atteindre à l’aide des nou- veaux procédés, consiste surtout à conserver les viandes sans leur faire subir la moindre dessiccation et sans les faire cuire; à les préserver en un mot de la putréfaction tout en conservant leur fraicheur originelle. Pour atteindre ce but, on arccouvert des morceaux de viande avec la gélatine appliquée par couches successives de manière à bien préserver la viande du contact de l'air. On a aussi employé, sous lenom de conservatine, une sorte de gelée dont on recouvre la surface des morceaux de viande qu’on veut conserver. Cette conservatine n’est autre chose qu’un bouillon très-con- centré qu’on obtient en faisant bouillir dans un chaudron les os, la moelle, les menus morceaux qui résultent du décou- page, des tendons, etc. On emploie deux litres d’eau par kilogramme de viande ; on fait cuire à un feu modéré , on dé- graisse avec soin, on passe au tamis les bouillons, et on exprime la viande au moyen de la presse, de manière à ea retirer au- tant que possible tout le suc. Ce dernier est ajouté au bouillon filtré ; on concentre alors ce dernier jusqu’à ce qu'il ait atteint la consistance d’un sirop, on y fait dissoudre un peu de gomme et de sucre, enfin on laisse refroidir et on mêle à la gelée ainsi obtenue # centigrammes d'alcool par kilogramme de ce li- quide.. Des essais entrepris sur une quantité de viande assez forte ont fourni, dit-on , des résultats satisfaisants, ce qui nous paraît pourtant bien douteux. Parmi les produits alimentaires les plus remarquables par leur bonne conservation, il faut citer surtout ceux qu'avait exposés M. Lamy. Des gigots de mouton conservés depuis plu- sieurs années, des perdrix avec leurs plumes et leurs entrailles, des poissons (turbots, saumons, brochets\, des raisins, des abri- cots, des pêches , des oranges, des poires, etc., figuraient dans ses vitrines. Le procédé de M. Lamy est fondé surtout sur la pro- priété éminemment anti-septique de l'acide sulfureux, propriété DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES, 91 dont M. Sucquet avait déjà tiré un parti si avantageux pour la conservation des pièces d'anatomie. Les objets qu'on veut pré- server de la putréfaction sont placés dans une atmosphère d'acide sulfureux où ils restent plongés pendant quelques jours. Cette préparation suffit quelquefois pour les rendre susceptibles de se conserver ensuite presque indéfiniment au contact de l'air. Le plus souvent cependant il est nécessaire de les conserver dans un vase ou l’on a placé une substance capable d’absorber l'oxy- gène de l'air pour assurer ainsi une conservation définitive. Il serait facile à nos agriculteurs de tirer un excellent parti de ces moyens de conservation pour garder certains fruits qu’ils pour- raient vendre avec avantage dans la saison d'hiver , où l'on ne peut plus s’en procurer de frais. Disons pourtant que l'application de ce procédé à la conser- vation des viandes ne nous paraît pas à l'abri de tout reproche ; la viande conservée au moyen de l'acide sulfureux est toujours un peu décolorée ; elle posssède d’ailleurs une saveur peu agréa- ble, et ii n'est nullement démontré que ses propriétés nutritives n'ont subi aucune altération. Conservation des légumes. — Nous sommes conduits natu- rellement à nous occuper ici des conserves sèches, à la fabrica- tion desquelles les travaux de MM. Masson et Gannal ont donné une si grande importance et qui constituent aujourd’hui pour les agriculteurs une nouvelle branche d'industrie fort lucrative. Nous voulons parler des conserves de légumes dont on fait gé- néralement usage depuis quelques années à Paris, et qui ont été, dans ces derniers temps, répandues dans le commerce à Tou- louse. Le procédé auquel M. Masson a recours pour conserver les légumes est d’une simplicité extrême ; il consiste à dessécher rapidement ces substances alimentaires , ce qui rend impossible leur fermentation, et à les réduire ensuite, au moyen d'une presse hydraulique , à un volume si faible qu’on peut aisément transporter à de grandes distances des approvisionnements con- sidérables. Les légumes, après avoir étéépluchés à la manière ordinaire, 92 MÉMOIRES sout échaudés légèrement, puis soumis à la dessiceation dans un courant d'air chaud, dont la température ne doit pas atteindre le point où l'albumine se coagule (75°). Après cette dessiccation ils sont comprimés fortement et disposés sous la forme de min- ces plaques rectangulaires. Chaque ration pèse environ 25 grammes et représente 200 grammes de légumes frais. Une caisse d’un mètre cube de capacité peut contenir jusqu'à 25,000 rations. MM. Chollet et C*° préparent ainsi toutes sortes de lé- gumes, fèves, petits pois, haricots verts, choux-fleurs, épi- nards, pommes de terre, etc. Avant de faire cuire ces légumes, on doit les laisser tremper dans de l’eau tiède ; ils se gonflent ct reprennent leur aspect na- turel ; on les prépare alors à la manière ordinaire. Tel est le procédé de conservation créé par M. Masson et qui a été longtemps suivi par la maison Chollet et Ci. Postérieurement à la découverte de M. Masson, M. Gannal apporte d'importantes modifications dans la méthode employée pour conserver les légumes ; le procédé de M. Gannal fut exploité par la maison Morel Fatio et Ci°. Ce procédé consiste à faire cuire d’abord les légumes dans un courant de vapeur d’eau chauffée à une température supérieure à 100 degrés; on les dessèche ensuite dans une étuve où l’on établit un courant d'air rapide. Le procédé suivi par la maison Morel Fatio donne des produits plus inaltérables que ceux qu’on obtient en desséchant les légumes crus. Les légumes desséchés , après avoir été cuits au moyen de la vapeur d’eau, se conservent pendant plusieurs années sans subir la moindre altération ; ils reprennent , lorsqu'on les fait cuire, leur odeur, leur saveur et leur aspect primitif ; aussi leur usage a-t-il pris une grande extension. Aujourd'hui les compagnies qui exploitaient ces deux procédés se sont fusion- nées et utilisent ensemble les avantages de chacune des deux méthodes. La compagnie possède sept usines, distribuées dans diverses parties de la France et dont chacune prépare plus spécialement certains produits. Ces usines disposent d'une force d'environ DE L'ACADÈMIE DES SCIENCES. 93 150 chevaux vapeurs, et ne dessèchent pas moins de 60,000,06G de kilogrammes de légumes frais. Cette industrie nouvelle a rendu les plus grands services à notre armée pendant la guerre d'Orient; les commandes pour le ministère de la guerre se sontélevées jusqu'à 120,000 rations par jour en hiver et à 40,000 en été. Il serait bien à désirer que la préparation des conserves de légumes füt introduite dans nos contrées, où elle ne pourrait manquer de réussir. Toulouse est au centre d’une région essen- tiellement agricole , où la production des légumes est déjà con- sidérable et pourrait prendre une rapide extension ; nos légu- mes sont d’ailleurs d'excellente qualité, et rien ne s'opposerait au succès de cette industrie qui crécrait une ressource nouvelle pour notre agriculture; il est presque honteux pour nous de nous trouver réduits à consommer les légumes du Nord, dans la saison où nous n'avons pas de légumes frais. Vins. — Nous ne pouvons abandonner ce qui est relatif aux subsistances alimentaires sans dire quelques mots des vins qui figuraient à l'Exposition universelle. Il ne nous à pas été permis d'apprécier les qualités ou les défauts de ces vius, mais la plu- part sont connus depuis longtemps, et nous n’aurions eu rien à dire de nouveau sur leur compte; nous ne parlerons donc de cette partie de l'Exposition que pour signaler à nos agriculteurs un fait qui nous paraît avoir une très-grande importance, et sur la portée duquel nous croyons utile d'appeler leur attention. Presque tous les pays dans lesquels la température est suffi- samment élevée pour que le raisin puisse y mèrir, possèdent , soit des vins fins qu'ils exportent, soit au moins de bons vins ordinaires. Sans aucun doute, la nature du cépage, la qualité du sol et son exposition peuvent exercer une influence notable sur la valeur des produits de la vigne; mais on se tromperait fort si l’on pensait que pour obtenir un vin délicat il suffit de choisir un bon cépage, de le cultiver avec soin, de faire fer- menter sans précaution le moût des raisins qu'on a obtenus, et d'abandonner à lui-même dans des tonneaux le produit de cette 9% MÉMOIRES fermentation. Ce n’est pas ainsi qu’on opère dans les pays où l'on attache une importance réelle à la production des vins de qualité supérieure. Là les précautions les plus minutieuses sont prises pour donner au vin toutes les qualités qu’il est suscepti- ble d'acquérir. C’est ainsi qu’au lieu de recueillir et d’écraser ensuite pêle-mêle les raisins verts, les raisins mürs et ceux qui sont déja pourris, on rejetie scrupuleusement tout ce qui ne se trouve pas dans un état convenable de maturité. Sou- vent on procède à plusieurs vendanges successives, et l'on fait fermenter à part le produit de chacune d'elles. Dans certaines localités, on laisse subir au raisin mür un commencement de dessiccation , soit sur le cep lui-même, soit après qu'on l’a cueilli, et on l'écrase ensuite pour obtenir un moût qui est plus sucré que celui qu'on eût obtenu sans cette précaution ; c'est ainsi qu'est préparé entre autres le fameux vin de Tokai. D'autres fois, on fait cuire une portion du moût et on l’a- joute au reste; on fait fermenter le tout, et on prépare ainsi un vin plus spiritueux et plus sucré que celui qu’eût fourni le wuoût naturel. C’est par des procédés de ce genre que sont oh- tenus plusieurs vins de liqueur fort estimés, qui ne posséde- raient pas, à beaucoup près, les qualités qui les font recher- cher, si l'on n'avait recours à ce moyen pour les enrichir en sucre et en alcool sans y introduire aucune substance étran- gère au vin [ui-même. S'agit-il des vins destinés à devenir mousseux , on a recours à des précautions qui semblent minutieuses, et de l’observa- tion desquelles pourtant doit dépendre la délicatesse du produit. S'il faut tant de soins pour donner aux vins les qualités qui les font le plus estimer, quand on opère sur des raisins auxquels le sol lui-même a donné des qualités particulières , combien ne devrait-on pas être plus attentif à ne rien né- gliger pour rendre les vins meilleurs, alors que, comme cela paraît avoir lieu dans nos contrées, le sol ne communique au raisin aucune des qualités précieuses qu'on retrouve dans nn DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 95 les vins recherchés, et pourtant il n'est peut être pas un pays où l’on procède avec plus de négligence : aussi les marchands de vin des départements voisins , mieux avisés que nous, vien- nent-ils acheter ces vins, préparés sans aucun soin ; ils les em- portent , les soutirent, les collent , leur communiquent , par des mélanges habilement faits, une saveur el un bouquet analo- gues à celui des vins ordinaires de Bordeaux , et nous les ven- dent sous un nom nouveau, et à un prix plus élevé. Sans aucun doute, on n'arrive pas ainsi à faire des vins fins de première qualité avec nos raisins ; mais on fait d'excellents vins ordinaires de table, se conservant bien, pouvant sup- porter le transport, et possédant des propriétés qui les font rechercher. Il est hors de doute que le jour où les agriculteurs de notre département voudront soigner leurs vins comme on les soigne dans le département de la Gironde, dans celui de La Côte-d'Or, et dans une foule d'autres, ils en amélioreront les qualités au point de les rendre méconnaissables. C’est un fait sur lequel nous ne saurions {rop appeler leur attention. On tomberait dans une erreur profonde si l’on pensait que notre climat ou notre sol s'oppose à ce que nous obtenions des vins de bonne qualité. Sans doute, il est certain que nos pro- duits n’approcheront jamais de la valeur des vins fins du Médoc ou de la Bourgogne; mais ils pourront , ainsi que nous l'avons dit plus haut , devenir de bons vins ordinaires de table. Rien ne prouve mieux la facilité avec laquelle on peut amé- liorer la qualité des vins par des soins intelligents, que les efforts que font plusieurs pays, et notamment l'Autriche, pour substituer leurs vins à ceux de la France, qu'ils n'imitent pas sans doute avec un succès complet, mais qu’ils imitent pour- tant assez bien pour leur faire, sur certains points, une con- currence dont on s’est sérieusement préoccupé. Il résulte, en effet, de documents que nous empruntons à un rapport lu, en avril 1855, à la Société d'Agriculture de la Marne, que la contrefaçon des vins de France a fait, dans les Etats du Zollverin, l'Allemagne centrale, la Suisse et la Russie 96 MÉMOIRES méridionale, des progrès fàcheux pour notre industrie vi- nicole. Les vins que produit l'Autriche sont très-variés; ceux de Wosslau ne sont pas sans présenter quelque analogie avec cer- tains vins du Médoc et de la Bourgogne, auxquels on cherche à les substituer. Les vins du Tyrol sont naturellement acerbes ; mais ce dé- faut est corrigé, autant que posible, par l'addition des matières sucrées : cependant un dégustateur exercé reconnaît bientôt ce qu'il y a de factice dans ieur composition. La Transylvanie fournit un vin de dessert qui n'est pas sans valeur. Les vins de Hongrie sont, pour la plupart, de bonne qua- lité. Nous mettons de côté le vin de Tokai, comme un vin hors ligne ; mais le vin doux de Rusters et celui de Menesch, qui se vendent à un prix beaucoup moins élevé, possèdent des qualités fort appréciées qui leur donnent une certaine ressem- blance avec nos vins de Frontignan et de Lunel. Les vins rouges de Szochard peuvent lutter contre ceux du Médoc; ceux de Carlowitz contre les vins du Rhin; ceux d’Erlau contre nos Bordeaux ordinaires. Disons cependant que, lorsqu'on compare ces vins aux nô- tres, les vins français conservent, surtout lorsqu'il s’agit de vins fins, une supériorité bien marquée; mais il n’est pas moins bien évident qu'on est parvenu à produire , dans les diverses parties de l’Empire autrichien, des vins assez bons pour pou- voir les substituer assez souvent aux nôtres et tromper plus d’un acheteur. Nous ne saurions assez blâmer la fraude que nous venons de signaler; mais nous ne saurions assez approuver l'ardeur avec laquelle les agriculteurs autrichiens s'efforcent d'améliorer les produits de leur sol, et c’est sur ces efforts que nous attirons l'attention des propriétaires de nos contrées. Espérons que nos agriculteurs, imitant l'exemple qui leur est donné de toutes parts, renonceront enfin aux anciennes habitudes, qu’ils apporteront un soin plus scrupuleux dans le DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 97 choix des cépages ; qu’ils ne méleront pas des raisins verts avec des raisins mûrs ; qu'ils tâcheront de régulariser, autant qu'ils le pourront, la fermentation du moût ; qu’ils apporteront dans le choix de leurs futailles le soin le plus minutieux , et qu'il ne pourra plus leur arriver, comme cela se produit si souvent, de rencontrer, à leur grand étonnement, une barrique de vin gâtée au milieu de deux barriques du même vin parfaitement conservées. Nous savons par expérience que nos vins, quand on les sou- tire, quand on les colle, quand on les soigne enfin comme on le fait partout ailleurs, se conservent fort bien pendant plu- sieurs années , tandis que lorsqu'on les prépare, comme le font la plupart des propriétaires, sans aucun soin, ils se gâtent souvent la première année. Nous n’insisterons pas davantage sur ce point; ce que nous venons de dire suffit pour qu'on sache qu’une ressource consi- dérable est restée longtemps improductive dans nos mains , et qu'il est temps de renoncer à l'indifférence dont nous avons fait preuve jusqu’à ce jour. INDUSTRIES LIÉES AUX PROGRÈS DE LA PHYSIQUE. Photographie, — La photographie constitue, sans aucun doute , l’une des plus glorieuses découvertes de notre époque; aussi ne pouvons-nous terminer ce rapport sans dire quelques mots de la manière dont elle était représentée dans le Palais des Champs-Elysées. L'Exposition de 1856 a mis en évidence le progrès considé- rable de cet art, qui a été porté, surtout en France, à un degré de perfection qui dépasse tout ce qu’on pouvait espérer. Ce qui frappe le plus celui qui étudie aujourd’hui les œuvres des photographes , c’est la substitution du papier aux plaques métalliques, sur lesquelles on fixait autrefois les images. La photographie sur métal a presque entièrement disparu pour faire place à la photographie sur papier. Les avantages de cette substitution sont évidents pour qui- 5° S.—TOME I. Æ 98 MÉMOIRES conque est initié aux procédés du photographe. En effet, quand on fixe les images sur plaque métallique, on n'obtient qu'une seule épreuve ; en outre, cette épreuve est miroitante, et n’est aperçue nettement que lorsque la plaque est regardée sous une inclinaison particulière. Au contraire, la photographie sur papier permet d'obtenir un grand nombre d'exemplaires de chaque épreuve. Ici, en effet, on commence par préparer un papier sensible sur le- quel on produit, par des procédés dont la description serait trop longue pour trouver place ici, une première image qu'on appelle négative. Dans cette image, tous les blancs sont représentés par des noirs, et réciproquement ; c'est au moyen de cette image néga- tive qu’on se procure ensuite les épreuves positives, plus ou moins nombreuses , dont on a besoin. Pour cela on prépare un papier sensible , sur lequel on dépose l'épreuve négative; on comprime le tout entre deux plaques de verre , et on l’expose au soleil de manière à ce que la lumière ne puisse parvenir sur le papier positif qu’au travers de l'épreuve négative. On comprend sans peine que le papier positif doit être plus vivement impres- sionné sur les points où l’image négative offre le moins d'obs- tacles au passage des rayons lumineux , c'est-à-dire sur ceux qui correspondent aux parties les moins foncées de cette image, que sur les points qui sont protégés par la teinte plus sombre des noirs de l'épreuve négative. D'après cela , aux clairs de l’image négative correspondent les noirs de l'épreuve positive , tandis que les clairs de cette dernière correspondent aux parties plus foncées de l’épreuve négative. L'épreuve négative peut servir à préparer un nombre consi- dérable d'images positives, et c’est là, comme nous le disions tout à l'heure , un des principaux avantages de la photographie sur papier. Pour donner plus de finesse aux images qu'on veut obtenir, on prépare quelquefois l'épreuve négative sur une plaque de verre , sur la surface de laquelle on applique une couche mince d’un composé impressionnable à la lumière , qu'on désigne sous DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 99 le nom de collodion ; d’autres fois, c’est une couche très-mince d'albumine rendue également impressionnable par son mélange avec des chlorures, bromure ou iodure d'argent. Les épreuves positives sont d’ailleurs préparées sur papier au moyen du négatif sur verre, absolument de la même manière que si l’on opérait avec un négatif sur papier. IL est incontestable que les épreuves préparées au moyen du collodion ou de l’albumine l'emportent, sous le rapport de la finesse du dessin et de la précision des détails, sur celles que l'on peut préparer avec des négatifs sur papier, maison leur re- proche d'offrir des teintes moins vives, et de produire, quand on les voit à distance, un effet moins agréable que celui de ces dernières. Les magnifiques épreuves exposées par M. Baldus avaient été obtenues avec des négatifs sur papier. Celles qu'avait exposés M. Bisson avaient été préparées au moyen du collodion. Les unes et les autres étaient de véritables chefs-d'œuvre. La vue de l'Arc de triomphe de l'Etoile, les Arènes d’Arles, de M. Baldus; la vue panoramique du Pont-Neuf et la porte de la Bibliothèque impériale du Louvre, de M. Bisson , attiraient l'attention de tous les connaisseurs. Beaucoup de photographes étrangers avaient exposé aussi leurs œuvres ; mais aucun d’eux n'avait, au moins en ce qui concerne la reproduction des monuments, atteint le degré de perfection auquel sont parvenus les deux photographes français que nous venons de citer. Les photographes anglais avaient exposé de beaux paysages, parmi lesquels nous avons remarqué surtout ceux de M. Fenton. Parmi les artistes français, MM. Baldus, Martens et Giroux avaient aussi exposé des paysages d’une grande beauté. Au nombre des photographes qui s'étaient attachés à reproduire les œuvres d'art, nous citerons, au premier rang, M. Bayard. Ses photographies représentant la Vénus à la coquille et la Vénus de Milo, sont admirables sous tous les rapports. Nous avons aussi admiré une épreuve due à M. Alphonse Bilordeaux ; c’est la reproduction d’un bas-relief de Justin , représentant le Cal- 100 MÉMOIRES vaire; les effets du relief sont on ne peut plus remarquables dans celte épreuve. Nous signalerons aussi de belles reproductions de gravures anciennes, au moyen de la photographie, dues à MM. Bisson , Baldus, Negre et Aguado. Nous n’avons rien dit encore des portraits, pourtant si nom- breux, qui avaient été exposés par les artistes tant français qu’étrangers. Plusieurs de ces portraits étaient très-bien exécutés , mais on s’accordait généralement à placer au premier rang ceux qu'avait exécutés M. Haufstængl, de Munich, et ceux non moins beaux d’un artiste qui a exercé longtemps à Toulouse, où il a laissé d'excellents souvenirs, nous voulons parler de M. Belloc, qui a été, dit-on, le maître de M. Haufstængl. Gravure photographique. — Nous n’abandonnerons pas ce sujet sans dire quelques mots de la gravure photographique. IL y a déjà bien longtemps qu'on avait fait des efforts, plus ou moins infructucux, pour reproduire , au moyen de la gra- vure, les épreuves photographiques. M. Niepce Saint-Victor, M. Donné, M. Fizeau , avaient tenté d'obtenir la reproduction de dessins photographiques exécutés sur plaques métalliques ; mais leurs tentatives n'avaient pas été suivies d’un suecès complet. M. Talbot, l'inventeur de la photographie sur papier, a cu, en même temps que M. Niepce Saint-Victor, l’heureuse idée de transporter sur une plaque métallique l'empreinte d’une épreuve photographique sur papier, et de graver ensuite les plaques au moyen de l’eau forte , qui attaquerait le métal dans les parties où il serait à nu et le respecterait partout où le vernis protec- teur serait resté. Nous ne décrirons pas le procédé de M. Talbot, qui n’a fourni jusqu’à ce jour que des résultats assez imparfaits, mais nous essaierons de donner une idée de celui de M. Niepce St-Victor et de celui de M. Poitevin. M. Niepce étend sur une plaque d'acier une couche mince de DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 101 bitume de Judée en dissolution dans l'essence de lavande: il la fait sécher à l'abri de la lumière, puis il applique sur la plaque, ainsi préparée, une épreuve positive obtenue sur verre ou sur papier ciré ; il expose enfin le tout à l'action de la lumière. Les rayons lumineux agissent sur la plaque d’une manière plus ou moins vive, suivant qu'ils ont eu à traverser les clairs ou les ombres de l'épreuve qui la recouvre. Lorsque l’action de la lu- mière a été suffisamment prolongée, on lave la plaque avec un mélange de henzine et d'huile de naphte Ce mélange dissout la matière résineuse qui n’a pas été altérée par la lumière et respecte au contraire celle qui a subi son action. En traitant ensuite la plaque ainsi préparée par de l’eau forte, on attaque le métal dans les parties qui ne sont pas recouvertes de bitume , tandis que les autres sont préservées , et l’on obtient ainsi une planche en creux qui peut fournir, par les procédés ordinaires de la typographie, un nombre indéfini d'épreuves. Malheureusement la planche ainsi préparée a besoin de subir de nombreuses retouches de la part du graveur. M. Poitevin procède d’une manière différente , suivant qu'il veut transporter une épreuve sur pierre lithographique ou obtenir une planche métallique propre à servir au tirage. Dans le premier cas, il recouvre la surface de la pierre d’une couche légère de dissolution de gélatine , mélée avec du bichro- mate de potasse ; il le fait sécher à l'ombre, le recouvre ensuite avec une épreuve négative, et l’expose ainsi au soleil. La ma- tière déposée à la surface de la presse devient insoluble dans l'eau sur tous les points où elle est altérée par la lumière, elle reste soluble sur les autres. Il suffit donc de laver la pierre pour obtenir un dessin qu’il sera facile de reproduire. Quand il s’agit d'obtenir une planche de cuivre propre au tirage, on recouvre une lame de verre d’un mélange de géla- tine et de bichromate de potasse; on laisse sécher ; on applique sur la surface de la lame une épreuve photographique transpa- reute, et on expose le tout au soleil. Quand la lumière a sufli- samment agi, on plonge la lame dans l’eau; toutes les parties de lenduit qui n’ont pas été altérées par la lumière se gonflent et 102 MÉMOIRES donnent un dessin en saillie, les parties altérées par la lumière forment le creux. On moule cette surface soit au moyen du plâtre qui permet d'obtenir ensuite par les moyens ordinaires de la stéréotypie des planches métalliques , soit par la galvano- plastie, et l’on se procure en définitive une planche gravée propre au tirage. Nous en avons dit assez pour faire comprendre les progrès immenses qu'a faits la photographie et le brillant avenir qui lui est destiné. Passons à un autre sujet. Galvanoplastie. — La galvanoplastie était largement repré- sentée à l'Exposition universelle. Tout le monde admirait le magnifique service d'argent plaqué sorti des ateliers de M. Chris- tofe , et destiné à l'Empereur. Plusieurs des pièces qui le com- posent ont été entièrement exécutées par les procédés de la gal- vanoplastie. Parmi les objets d'art en cuivre galvanoplastique , nous signa- lerons , comme fort remarquables, une reproduction du Calvaire de Justin, due à Gueytou ; une réduction de la colonne Ven- dôme, exposée par M. Zier ; des pièces d’un relief considérable, obtenues par M. Lefèvre ; des bustes de grandeur naturelle , des statues d’une assez forte dimension , en cuivre galvanique , ex- posées, au milieu d’une foule d’autres objets d’un goût exquis, par MM. Elkington et Mason. M. de Kreiss, d'Offenbach sur le Mein, avait envoyé des statuettes et des bas-reliefs, dont l’an, représentant la ronde des Willis, d’après le tableau d’Auguste Gendron , constituait l’une des plus belles pièces dans ce genre parmi celles qui figuraient à l'Exposition. M. Wallgold, de Berlin, avait exposé un magnifique bas- relief, en argent, de deux mètres de longueur sur plus d’un mètre de hauteur. Cette pièce a été offerte par la ville de Berlin au Prince de Prusse, à l’occasion du 15° anniversaire de son mariage. Plusieurs objets, exposés par M. Schuch, de Vienne, nous ont aussi paru fort remarquables. La reproduction des caractères DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 103 d'imprimerie , d’un travail délicat, et des planches gravées par des artistes habiles, constitue l’un des plus grands services que la galvanoplastie ait rendus à l’industrie moderne. L'imprimerie impériale de France avait exposé plusieurs ma- tières fort belles , obtenues par les procédés galvaniques. M. Hulot, graveur à la monnaie à Paris, avait exposé la re- production d’une planche de M. Henrique Dupont, représen- tant une Vierge de Raphaël. Enfin , l'imprimerie impériale d'Autriche avait envoyé de belles reproductions de gravures en taille douce obtenues par les mêmes moyens. Nous terminerons cette revue des produits obtenus au moyen de la galvanoplastie, en signalant les objets envoyés à l’Expo- sition par M. Oudry. M. Oudry a exposé un modèle de bâtiment dont l'extérieur a été recouvert de cuivre au moyen de l'électricité. Cette tentative fait entrevoir l'importance des résultats que promet la galvano- plastie. Elle permet d'espérer que, dans un temps peut-être peu éloigné de nous, on effectuera le doublage d’un navire, par les procédés électriques, plus vite et plus économiquement qu'on ne le fait aujourd'hui par les procédés ordinaires. Nous bornerons là le résumé de nos observations sur les in- dustries dont les progrès sont liés à ceux de la chimie et de la physique. Ce rapport, un peu concis peut-être, suffira du moins pour donner une idée des innovations sérieuses qui se sont pro- duites à l'Exposition universelle. 10% MÉMOIRES RAPPORT DE LA COMMISSION DÉPARTEMENTALE DE LA HAUTE-GARONNE (1) , SUR L'EXPOSITION UNIVERSELLE DE PARIS EN 1855. Section des Beaux-Arts; Par M. UrBain VITRY. P Dans l'examen d’une Exposition , et alors qu’il s’agit d'établir en quelque sorte le bilan des richesses artistiques d'un pays ou d’une contrée , les chiffres ont aussi leur éloquence et leur en- seignement ; au point de vue ethnographique, ils peuvent mon- trer, approximativement du moins, le rang occupé dans un Etat par les diverses portions de son territoire , indépendamment toutefois, de la valeur esthétique des œuvres, car le nombre peut être dépassé par le talent hors ligne et le génie d’un seul artiste éminent. En faisant de ces études et de ces recherches le proscénium de son rapport sur l'Exposition universelle des Beaux-Arts, la Commission départementale de la Haute-Garonne a voulu , dès le début, mettre immédiatement en lumière l’idée fondamentale qui a présidé à la rédaction de cette partie de son travail. (1) Cette Commission , instituée par arrêté de M. West, Préfet de la Haute-Garonne , en date du 16 juillet 1855, élait composée de MM. Mather, de Planet, Filhol, Noulet, Vitry, délégués, le premier par la Chambre de commerce, le second par l’Administration municipale, le troisième par l’Académie des Sciences , le quatrième par la Société d'Agriculture , le cinquième par l’École des Beaux-Arts et des Sciences industrielles. DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 105 Certes, aucun sujet ne se prêtait avec autant de facilité aux brillants essors de l'imagination, aux descriptions pittoresques et aux pompes du style. L'art, considéré sous les rapports de son origine , de ses pre- miers pas, de ses développements dans les temps anciens et mo- dernes , de son influence sur la civilisation ; Les affinités ou les dissidences nationales ; les progrès inces- sants des races germano-celtiques sur les nations gréco-latines, qui semblaient prédestinées à la culture des arts ; les écoles modernes de l'Allemagne, de la France et de l’Angleterre effa- çant l'Ecole espagnole autrefois si florissante ; L'Italie, cette patrie de Michel-Ange et de Raphaël, et la Grèce contemporaine qui se croit régénérée, reléguées au der- nier rang: tout en un mot, offrait dans un pareil sujet une mine inépuisable de considérations et d’appréciations poétiques, in- génieuses ou philosophiques. Mais, en abordant ainsi ces diverses questions et en étudiant l'Exposition dans tous ses détails, il aurait fallu répéter , sous d’autres formes seulement , ce que les auteurs les plus en vogue et les plus éminents de notre époque ont écrit dans la presse quotidienne, dans les Revues scientifiques , dans les Recueils hebdomadaires de toute nature , et jusque dans ces mille pro- ductions plus ou moins sérieuses qu'a fait surgir cette grande solennité. Telle n’était pas la mission dela Commission départementale ; cette mission était plus modeste : elle a voulu rester fidèle à son mandat , en se bornant à rappeler les faits les plus saillants, ct à étudier la section des Beaux-Arts principalement dans un but d'utilité pratique et d'intérêt local. DE Notre département était représenté dans la section par huit artistes ; voici leurs noms par ordre alphabétique et le titre des œuvres exposées : 1° M. Bézard (Jean-Louis), premier grand-prix de Rome , à 106 MÉMOIRES Paris, en 1829 ; les Méchants, (n° 2548 du catalogue), (ta- bleau à l'huile ); 2°M. Bida (Alexandre), Retour de la Mecque , (2563); la Cérémonie du Dosséh au Caire (1), (2564); Barbier Armé- nien, (2565); Femme Fellah au Caire , (2566) ; trois por- traits, (2567, 2568, 2569), (dessins ) ; 3° M. Broustet, sculpteur et professeur de dessin à l'Ecole des Beaux-Arts de Toulouse, buste de M. Lafferrière, inspec- teur général de l'Université ; k° M. Cazes (Romain), Cartons des peintures murales exé- cutées dans l'église de Bagnères-de-Luchon, (2675); 5° M. Durand (Gabriel), deux portraits, (5042, 5043), (pastel) ; 6° M. Duston (Benjamin), deux paysages, (3025, 3026), { dessins } ; 1°M. Garipuy (Jules), ancien professeur de dessin à l’Ecole des Beaux-Arts de Toulouse , les Hétaïres (2), (3153), (tableau à l'huile ); 8° M. Leygue (Eugène), Descente de croix , (3612), grand tableau à l'huile, appartenant à l'Etat. (1) Le Dosséh est une singulière cérémonie. Autrefois le Cheikh Säad- Eddin arriva au Caire; le Sultan Mameluk l’invita à entrer dans la ville; Säad-Eddin lui dit : « La ville est pleine de prévarications ; je n’y peux pé- » nétrer qu’en faisant un miracle qui affirmera la toute-puissance de Dieu » Punique ; fais réunir sur la route tous les verres, les flacons, les bouteilles »que lu pourras trouver; c’est en passant sur ce chemin fragile que je » veux entrer au Caire.» Ainsi fut fait, et Säad-Eddin ne brisa pas un seul verre. Ses descendants fondèrent un ordre de derviches, et le chef de l'ordre a conservé le privilége d’accomplir un miracle semblable ; mais aujourd’hui la route est couverte d'hommes au lieu de bouteilles et de ver- res; le Cheikh à cheval chevauche sur cette route humaine qu’il traverse d’un bout à l’autre. Celte scène a été représentée par M. Bida avec beau- coup de talent ; c’est là son œuvre capitale. (2) Dans la Grèce ancienne, où l’épouse retirée dans le silence du Gynécée ne se montrait jamais en public, les Hétaires représentaient leur sexe hors du foyer domestique ; on se réunissait chez elles, mais elles n’étaient pas tout à fait courtisanes. Une Hétaïre était, comme le dit la Bruyère , une belle femme qui a les qualités d'un honnéte homme. M. Garipuy, en abordant un sujet aussi scabreux , l’a trailé cependant avec convenance, d’une manière voluptueuse peut-être, mais non lascive. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 107 Nous ferons remarquer que, dans quelques publications offi- ciclles on n’a compté que sept artistes pour le département de la Haute-Garonne , sans doute parce que les statistiques avaient été faites sur le Livret officiel des Beaux-Arts , qui ne renferme pas, il est vrai, le nom de M. Broustet, dont le buste avait été relégué dans les salles de l'Exposition de l'Industrie ; mais , en résumé, le travail de ce sculpteur ayant été exposé, le nombre des artistes doit être porté à huit. IL est vivement à regretter que la plupart des principaux peintres , sculpteurs et architectes qui ont acquis une brillante réputation parmi nous, se soient abstenus de prendre part au concours, alors qu'ils pouvaient exhiber quelques-unes des œu- vres vraiment importantes dont ils ont enrichi nos places, nos églises, notre Musée et nos monuments publics. Les noms de ces artistes recommandables que l'opinion publique entoure d’es- time et de considération se présentent naturellement à l'esprit ; mais des considérations de convenance ne permettent pas de les désigner dans ce rapport. £ette abstention regrettable , due sans doute à l'absence d’une action stimulante assez active auprès des artistes Toulousains, puise aussi sa raison d’être dans une modestie, ou peut-être même dans un amour-propre exagérés. Les écueils d’une Expo- sition à Paris sont à redouter, il est vrai, pour l'artiste de pro- vince recommandé seulement par ses œuvres, et qui ne peut lutter à armes égales contre une camaraderie exclusive et puis- sante, dont la critique partiale est si souvent injuste ; mais il y avait aussi plus de gloire à ne pas déserter et à courir même les chances d’une chute, plutôt que de se retirer timidement du combat, en demeurant tranquille spectateur de la lutte, alors surtout que la France faisait un appel à toute sa milice artistique. En examinant un grand nombre d'œuvres, même parmi celles qui ont obtenu des récompenses , la Commission départe- mentale a acquis la conviction que plus d’un succès aurait cou- ronné le courage des artistes réfractaires de Toulouse ; elle a cru ne pas devoir passer sous silence cette sorte de censure ni ces 108 MÉMOIRES observations dont les rapprochements suivants feront , du reste, apprécier toute la valeur. Les départements qui, d'après la statistique de M. Ch. Brainne, ont fourni le plus d'artistes exposants, peuvent se classer dans l’ordre suivant : 4.sbaiSéine (Paris) Reg DE ee 398 | 173 Etrangers naturalisés Français et bab. Paris. 75 9. Le Rhône ( Lyon}: ... HR 33 3. Seine ct Oise ( Versailles )................. . 25 &. Les Bouches-du-Rhône (Marseiile) .......... 2% 5: INOrU (AHe) 0... ...<....".. 23 6. Gironde { Bordeaux) ; Côte-d'Or (Dijon). ..... 21 7. Moselle { Metz}... ........« ve nt sets 17 8. Seine-Inférieure (Rouen) ; Loire-Inférieure ( Nan- tea) as. Céemetlbst moe tesetcnhtas < 16 9. Meurthe {Nancy }....................... 1% 10. Bas-Rhin {Strasbourg).................. 12 11. Var (Toulon } ; Saône-et-Loire ( Mâcon ) ; Cal- vados (Caen); Yonne (Auxerre); Seine-et-Marne (Melun)................ oder ae stat ENS 11 12. Isère (Grenoble); Pas-de-Calais (Arras); Doubs (Besançon) ; Aisne (Saint-Quentin}............:. 9 143. ÆauTe- GaRONNE (Toulouse } ; Marne (Reims); Oise (Beauvais)..................... 8 1%. Maine-et-Loire (Angers) ; Somme (Amiens)... 7 15. Orne ( Alençon ) ; Mayenne (Laval) ; Haut-Rhin (Colmar); Héraalt ( Montpellier ); Gard (Nîmes ); Ille-et-Vilaine ( Rennes}...........+...++..... 6 16. Côtes-du-Nord ({ Saint-Brieuc) ; Indre-et-Loire (Tours) ; Aube (Troyes); Ain (Bourg) ; Vaucluse (Avi- gnon) ; Manche (Saint-Lô) ; Tarn (Albi); Loire (Saint- Bienne secs Met Pnaebpaée het 47. Nièvre (Nevers); Charente-Inférieure (La Ro- chelle); Vosges (Epinal); Jura ( Lons-le-Saulnier ) ; C7 DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES, 109 Loir-et-Cher (Blois); Finistère (Brest); Puy-de-Dôme ( Clermont); Haute-Saône (Vesoul }; Haute-Marne (Chaumont ); Ardennes (Mézières)... .. Cu ME NE k 18. Allier (Moulins); Meuse (Bar-le-Duc) ; Lot-et-Ga- ronne (Agen) ; Aude (Carcassonne) ; Cher ( Bourges). 3 19. Loiret (Orléans) ; Sarthe(Le Mans); Morbihan (Vannes); Indre (Châteauroux); Eure (Evreux) ; Haute-Loire {Le Puy) ; Corrèze (Tulle)........... 2 20. Landes (Mont-de-Marsan) ; Pyrénées-Orientales (Perpignan) ; Tarn-et-Garonne (Montauban }; Creuse (Guéret); Aveyron ( Rodez }; Vienne (Poitiers) ; Haute-Vienne (Limoges) ; Hautes-Pyrénées (Tarbes ); Hautes-Alpes (Gap); Corse (Ajaccio)............ 1 21. Onze départements n'avaient point de représentants à l'Exposition des Beaux-Arts, savoir : Basses-Alpes (Digne) ; Ardèche (Privas); Ariége (Foix) ; Charente ( Angoulême) ; Drôme ( Valence) ; Eure-et-Loir (Chartres) ; Gers ( Auch }; Lot ( Cahors ) ; Basses-Pyrénées ( Pau ); Deux-Sèvres (Niort); Ven- dée ( Napoléon-Vendée). Ainsi , sur les soixante-treize départements représentés à l'E x- position, celui de la Haute-Garonne était le vingt-unième, il ne figurait qu’au treizième rang dans les vingt-une catégories entre le maximum et zéro, et Toulouse n'arrive qu'après la plupart des grandes villes de France, telles que Lyon , Mar- seille , Lille, Bordeaux , Rouen , Strasbourg , etc. Si nous établissons le rapport entre le nombre des exposants et la population, nous remarquerons que pour la France en- tière, ce rapport est de trois exposants par 100,000 habitants (1,089 : 35,181,628 (1) — 0,00003) ; mais il est convenable d'écarter le département tout exceptionnel de la Seine, et dès lors la moyenne, pour tous les autres départements, n’est en réalité que de deux exposants sur 100,000 habitants ( 687 : 34,359,563 — 0,0000199). nn (1) Etat de la population de la France annexé au décret du 10 mai 1852. 110 MÉMOIRES Le département de la Haute-Garonne, dont la population est de 480,794 habitants, n'ayant que huit exposants, est resté au-dessous de la moyenne de près d’un sixième (8 : #80,794 — 0,0000168). Par conséquent, de cette seconde comparaison ressort encore une infériorité numérique pour notre département, Heureusement , cette infériorité disparaît sous le rapport de la valeur esthétique des œuvres, lorsqu'on prend pour terme de comparaison le nombre et l'importance des récompenses obtenues. Ainsi, trente-trois médailles de première classe ont été décer- nées dans la section des Beaux-Arts à des artistes français, ce n’est pas tout-à-fait une demi-médaille par département repré- senté au concours (33 : 73—0,452), et l’une de ces médailles a été obtenue par notre compatriote M. Bida , ancien élève de l'Ecole de Beaux-Arts de Toulouse. Cet artiste distingué a étécompris , en outre, parmi les cheva- liers, dans les vingt-huit nominations de la Légion d'Honneur qui ont eu lieu à l’occasion de l'Exposition. C’est encore un succès pour nous, puisque le rapport entre ces nominations etlenombre des départements n’est que d'environ un sur trois (28 : 73 ). En terminant ces arides mais instructives recherches statisti- ques, il faut cependant ajouter que la ville de Toulouse a quel- ques droits à réclamer une part dans la gloire et les triomphes de l’un des plus grands peintres, s’il n’est même pas le plus grand de lépoque moderne. L'expression de l'enthousiasme qu'inspire son admirable talent pourrait paraître partiale dans un rapport destiné à la ville où ilfitses premières études ; aussi croyons-nous devoir laisser la parole à l'homme de goût, au mi- nistre éminent, auquel l'Empereur avait confié l'instruction publique. «M. Ingres est si haut placé dans l’estime des connais- » seurs, dit M. Hippolyte Fortoul (1), que j'en sais qui n'osent » plus témoigner leur admiration tout entière, dans la crainte » de paraître concéder à la passion ce que la froide postérité (1) De l'Art en Allemagne, tom. 1, pag. 397. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 111 » peut seule accorder impunément à la justice. Le Gouverne- » ment qui inviterait M. Ingres à peindre à fresque quelque muraille de cent pieds de long, pourrait être convaincu qu'il assurerait à jamais la supériorité de l'Ecole francaise sur tou- » Les les autres , et qu’il forcerait les artistes étrangers à venir, pendant des siècles, des pays les plus lointains, étudier cette » œuvre unique d’un disciple de Raphaël, fidèle à son maître » après trois cents ans , et souvent plus sévère que lui au milieu » d’une époque de décadence. » Cette appréciation , écrite il y a plus de quinze ans, a été ra- tifiée en 1855, par le jury international , composé des artistes les plus éminents de l’Europe entière. La grande médaille d'hon- neur a été décernée à M. Ingres, et l'Empereur Napoléon a fait briller sur sa poitrine la plaque de grand Officier de la Légion d'Honneur. La ville de Toulouse a quelques droits, avons-nous dit , de s'enorgucillir des triomphes du célèbre peintre; en effet , M. Ingres est né, en 1781, à Montauban ; mais c’est dans notre Ecole des Arts qu'il vint faire ses premières études artistiques, sous un peintre dont le nom a eu quelque célébrité dans le Midi, M. Roques père, alors professeur de peinture dans cette Ecole; il existe encore parmi nous un architecte condisciple de M. Ingres, pour lequel ce peintre , qui devait devenir si cé- lèbre, avait dessiné de petites statues sur des projets d’archi- tecture. En 1801 , M. Ingres obtint le grand prix de Rome ; à son retour d'Italie, il fut le premier à combattre les immobilités théâtrales, les poses forcées et les attitudes extra-humaines de cette Ecole imilative des statues grecques, à laquelle David a donné son nom, mais qui en réalité avait été fondée en Allemagne, par le pein- tre Raphaël Mongs , et sous l'influence du livre auquel Winckel- mann doit son immortalité, l'Histoire de l'art chez les anciens. Cette imitation servile des statues grecques avait été néces- saire pour rendre le sentiment du dessin au xvm siècle, qui semblait en avoir perdu le souvenir, et pendant lequel l’art sérieux et savant des Lesueur, des Philippe de Champaigne, 5 © ÿ 112 MÉMOIRES des Poussin, des Claude Lorrain étaient devenu, avec Boucher et Wateau , une peinture en paniers, poudrée, minaudière et dépravée comme cette société démoralisée qui s'en allait en dissolution. Mais M. Ingres comprit que cette réaction entraînait aux plus grands excès , et qu'à force de vivre avec l’antiquité, l'art ne vivant plus que dans le passé , perdait de vue le présent, et de- venait une sorte de convention mythologique. Tout en restant fidèle au culte du dessin , il voulut associer, comme Raphaël qu'il avait pris pour modèle, la pensée, l'expres- sion et le sentiment élevé à la beauté matérielle; il réussit, et la France applaudit le grand peintre qui la dotait dechefs-d'œu- vre , tels que l'Odalisque, la Vénus Anadyomène, le Vœu de Louis XIIT, Franccis [°° recevant les derniers soupirs de Léonard de Vinci , le Saint Symphorien , V Apothéose d’'Ho- mère, les portraits de Chérubini et de Bertin, et cette Apothéose de Napoléon qu'on a vue, avec un étonnement enthousiaste, surgir toute-puissante d'énergie et de perfection du génie d’un artiste âgé de soixante-treize ans. Mais, au milieu de ses triomphes justement mérités, M. Ingres n'oublia jamais ni l'Ecole de province dans laquelle il avait fait ses premières études, ni les professeurs dont il avait reçu les leçons. M. Roques dut autant à son talent, qu’au souvenir et à la haute influence de M. Ingres, d'être nommé successivement membre correspondant de l’Institut et chevalier de la Légion d'Honneur. Il est encore un autre nom célèbre dans les arts, et que notre ville peut aussi revendiquer, c’est celui du baron Gros, qui était originaire de Toulouse, où son père avait exercé la mi- niature. Gros fut plus réaliste, plus humain que David; il vit dans les hommes autre chose que des demi-dieux d’une beauté hé- roïque, marchant impassibles et nus dans les paysages conven- tionnels de l'Elysée ; il vit des hommes, des mortels; il les re- présenta avec leurs passions , leurs souffrances, leurs inquiétu- des, leurs aspirations. DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 113 Les Pestiférés de Jaffa et le Champ de bataille d'Eylau sont incontestablement deux magnifiques chefs-d’œuvre; nul aujourd'hui , dans cette Ecole réaliste dont il fut le fondateur, ne serait capable non-seulement de les surpasser, mais même d'en approcher. Géricault à trouvé, dans les Pestiférés de Jaffa , Vidée de certains groupes du Naufrage de la Méduse, et M. Eugène Delacroix , qui après quelques modifications , est devenu aujourd'hui le chef de cette Ecole, a copié dans ce ta- bleau plusieurs personnages de son Massacre de Scio et de sa Barque du Dante, ses deux toiles certainement les plus re- marquables. Nommé chevalier de la Légion d'Honneur en 1808 , membre de l’Institut en 1816, puis successivement officier de la Légion d'Honneur , chevalier de Saint-Michel et baron en 1825, après l'achèvement de l'œuvre immense de la coupole de Sainte-Gene- viève, Gros aurait pu se reposer ; mais il voulut se mêler en- core à la lutte, sans avoir le courage de supporter l’insulte; il paya cette tentative de sa vie, et sa mort sinistre pèsera tou- jours comme an remords et comme un crime, sur celte critique ardente de 1830 , qui vint le jeter dans l'éternité. La ville de Toulouse, dont il était originaire , n'avait point été effacée de son souvenir ; il lui légua et ce tableau d’Æercule qui avait occasionné sa mort, et la palette avec laquelle il avait peint les Pestiférés de Jaffa, et cette précieuse branche de palmier que ses concurrents émerveillés avaient déposée spontanément sur ce chef-d'œuvre de l'art. Noble et touchant trophée qui dé- core l’une des salles de notre Musée, dans lequel une main pieuse et reconnaissante a élevé aussi un cénotaphe à la mémoire du grand artiste et de celle qui fut sa compagne. Si notre département et notre ville ont numériquement oc- cupé un rang inférieur dans l'Exposition universelle des Beau x- Arts, on voit du moins que, sous le rapport des récompenses et de l'illustration , elle est toujours en droit de revendiquer une place grande et honorable parmi les cités les plus importantes et les plus artistiques de l'Empire. 5° S,— TOME I. 8 114 MÉMOIRES (LE Il est un sentiment populaire dans le Midi , et qui a été sou- vent propagé et défendu par plusieurs publicistes éminents, c’est ce que l'on appelle l'Emancipation des Provinces, tant sous le rapport de la littérature que sous celui des arts. Cette pensée, développée quelquefois avec talent et toujours avec énergie , re- pose sur un sentiment trop honorable, l'amour du pays, pour. qu’on puisse la blämer. Cependant lorsqu'on y réfléchit, on comprend qu'elle n'est qu'un paradoxe, qu'une anomalie, en opposition avec les tendances et l'esprit du xix° siècle. Cet es- prit dont les Expositions universelles de Londres et de Paris sant une éclatante manifestation, est une tendance irrésistible à la généralisation, où pour mieux dire, à l'unité non-scale- ment de l’Europe, mais de tout le monde civilisé. Dans d’autres temps et sous l'empire d’autres idées, alors que les différents peuples ou leurs subdivisions vivaient d’une vie en quelque sorte propre et individuelle, alors que les frontières des nombreux petits états qui divisaient l'Europe étaient infran- chissables tant au physique qu'au moral, alors que les goûts, les besoins , les intérêts , étaient si profondément séparés et quel- quefois si hostiles, on conçoit l'existence de ces nombreuses écoles qui divisaient aussi le domaine de l'art ; c’est ainsi que s'expliquent les différences tranchées qui se font remarquer en Italie, dans les anciennes écoles de Venise, de Bologne, de Flo- rence et de Rome. De nos jours, quoique s’effacant de plus en plus par la facilité et la rapidité des relations internationales , des divergences sensibles existent néanmoins entre les écoles de Dusseldorf, de la Bavière et de l’Autriche; elles ont leur raison d’être dans cette multiplicité de petits états qui découpent PAI- lemagne, et qui s'opposent à la réalisation de cette unité, vers laquelle s'élèvent toutes ses aspirations. Mais dans notre France, parvenue aujourd'hui à cette unité que nous envient les autres nations, avec nos besoins, nos mœurs , nos habitudes si uniformes et si générales ; avec celte DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 115 facilité des voyages, qui a fait une seule nation de toutes les populations qui occupent notre territoire, réver une Ecole de Lyon , de Toulouse, de Bordeaux ou de Lille, n’est-ce pas vou- loir remonter le courant des idées du siècle, tenter une impossi- bilité anti-nationale, et entraver ce travail de généralisation qui semble vouloir réunir l'humanité tout entière dans une seule et même familie ? Car c'était là, on ne saurait trop le répéter, le grand ensei- gnement et le grand fait dominant de l'Exposition universelle de Paris : celle de Londres n'avait mis en lumière que les ten- dances pacifiques et humanitaires de l'industrie et du com- merce : celle de 1855 a prouvé que les arts concouraient aussi à cette missios providentielle. La plupart des nativns civilisées el chrétiennes avaient pris part à cette grande exhibition dont les événements politiques avaient seuls exciu la Russie. L'Espagne, la Suisse, l'Italie, la Grèce, les Etats-Unis, le Brésil et le Pérou, la Suède, le Danemarck et la Norwége y étaient représentés ; mais quatre grandes nations tenaient surtout le premier rang ; l'Angleterre, D ? l'Allemague, la Belgique ou les Pays-Bas, et la France. IV: L'Ecole anglaise était évidemment la plus nationale et frap- pait par son originalité. L'art, en Angleterre, exclut l'idéal; il n'a pas d'ailes, il ne ravit pas l’homme à la terre, il ne s'envole Jamais, il ne recherche pas le beau , il ne connaît que le joli. Aussi les artistes anglais traitent de préférence des intérieurs, des animaux, des scènes de famille, des portraits; mais dans ce cercle, ils développent des qualités très-remarquables, et les œuvres de MM. Landseer ,. Mulready, Webster, Horsley, Knight, etc., constituent de très-bons et de très-beaux tableaux de genre. L'Ecole allemande peut se résumer en deux mots : romanti- que, catholique. MM. Overbeck , Cornelius et de Kaulbach en sont les chefs. Cette nouvelle Ecole, rompant avec les traditions 116 MÉMOIRES germaniques, est allée étudier la peinture religieuse en Italie, et en est revenue avec de savantes théories, qui ont reçu de belles applications sous l'impulsion du roi Louis de Bavière, dont les goûts éminemment artistiques ont remis en honneur dans les pa- lais et dans les églises de Munich la peinture murale, seule et véritable base de la peinture en général. Cette Ecole très-élevée n’était représentée que d’une manière incomplète à l'Exposition ; car M. Overbeck s'est abstenu. M. Cornelius était entré en lice avec ses grands et majestueux cartons pour les fresques du Campo Santo de Berlin. West impossible de ne pas reconnaître tout d’abord dans cette Ecole un sentiment naturel et profond de noblesse et de grandeur, qui conçoit les sujets Les plus élevés, et tend à porter l'âme dans un monde idéal, comme dans l'his- toire générale de l'humanité, les scènes de l'Apocalypse, et dans ce tableau des quatre Fléaux, ou la réalité réunie au fan- tastique le plus surnaturel et le plus effrayant, sont rendus avec une énergique vérité: c'est bien là l'Allemagne. C’est surtout par la Tour de Babel de M. de Kaulbach, qu’on peu apprécier le caractère épique de cette Ecole; l'ensemble de la scène, les poses des patriarches, ces ancêtres du genre hu- main, ont quelque chose de théâtral qui convient parfaitement à ce sujet biblique. La majesté de cette composition fait qu'on n'admire pas seulement le talent de l'artiste, mais qu'on est porté à se recueillir et à penser. Les Pays-Bas et la Belgique, malgré l'influence française dont l'invasion est évidente, ont conservé leur caractère national. Ainsi, dans les tableaux de M. Van Schendel, on retrouve ces effets de lumière si curieusement étudiés dans les vieux ta- bleaux flamands. M. de Brackelleer reproduit dans ses toiles ces hommes courts, aux grosses faces et aux longs nez, des anciens maîtres nationaux. La France, au contraire, présentait le spectacle d’un ca- ractère général; elle ne se confine pas chez elle, elle porte partout ses pas et touche à tout ; elle possède au plus haut degré cet esprit généralisateur qui fait que l’on n’est pas de {el ou de tel pays. DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 117 Son Exposition reflétait admirablement les idées de ce siècle, où toutes les opinions sont contestées, où chacun cherche, préoc- cupé de son système; où l’on ne s'applique pas à se conformer à l'opinion générale, parce que, à vrai dire, il n’y en a pas ; car il y a seulement plusieurs écoles et plusieurs coteries. Dans cette mobilité des esprits, l'art est emporté par le mouvement de l’époque ; comme elle, il subit ces modifications instantanées et rapides comme l'électricité. J. de Maistre a dit que le prosélytisme est l'élément des Français, leur talent, leur mission : toujours ils agitent l'Europe ou en bien où en mal. Aussi, ces opinions si multi- ples, ces sentiments si divers du temps présent, l’art français les exprime avec plus de force, plus de spontanéité, plus de passion que toutes les autres nations. Le panthéisme, si répandu en Allemagne , n’est certainement pas aussi accusé par ses artistes que dans lÆistoire de lhuma- nité, par M.Chenavard ou dans le Pilori, de M. Glaize : œuvres hardies et presque impies, confondant les temps antiques et modernes, nivelant toutes les religions, réduisant le ciel et l’en- fer à une sorte d’idéalité. La puissance du catholicisme, en matière artistique, et l'ab- sence d'œuvres iconographiques dans le plus grand nombre de temples protestants, peuvent servir à expliquer la supériorité re- lative de la peinture religieuse des artistes français et bavarois sur celle des autres pays ; et cependant, il faut le reconnaitre, c'était Ià la partie la plus faible de l'Exposition universelle. L'une des erreurs les plus accréditées, c’est que la peinture religieuse n’exige pas d’autres qualités qu’un genre quelcon- que; et qu'un peintre d'histoire, habile, bon dessinateur, coloriste et savant compositeur, peut toujours aborder un sujet religieux. De tels sujets cependant exigent autre chose que de l'étude et du talent ; il faut le sentiment, il faut l'amour divin, celte vision commencée, selon la belle expression de saint Thomas ; et l'intelligence la plus vive ne supplée pas à la foi et à la piété. Voilà pourquoi le siècle actuel ne peut donner ce qu'il n'a pas. 118 MÉMOIRES ; Aussi quelle infériorité dans la plupart des tableaux reli- gieux ! On sent, dans presque toutes ces toiles, l'impuissance de l'artiste qui ne croit peut-être pas à cette religion qu’il dédaigne, ni à ce Dicu qu’il veut reproduire sans le connaître ni le com- prendre. Quelques Français ont cependant fait de la peinture reli- gieuse savamment sentie ; on peut citer notamment le tableau de Ange gardien, par M.'Tyr; il se compose d’un Ange, d’un Chrétien qui entre dans la vie, et de la croix que le Christ a rougie de son sang. L'Ange gardien montre au Chrétien fidèle la route laborieuse et rude, et le Chrétien, avant de partir, tombe à genoux devant la croix au matin de la vie. Tout dans ce tableau est en rapport avec la gravité de la pensée, le ton calme de la couleur, comme la dignité simple des poses. Mais c'est surtout hors de l'Exposition qu’il fallait aller cher- cher le sentiment religieux : c'était dans le Portement de Croix, dans l’Entrée à Jérusalem, de la basilique de Saint- Germain-des-Prés, dans la Procession de l’église de Saint- Vincent-de-Paul, par M. Hippolyte Flandin ; et dans les cha- pelles de la Sainte Vierge et de l’Eucharistie à Notre-Dame-de- Lorette, par M. Perrin ; ces belles peintures murales ayant été faites sur place, l'artiste a pu mieux étudier les effets de lumière et de perspective que dans ces tableaux de fabrique, peints dans un atelier, et transportés au hasard dans l’une de nos églises grecques , romanes , ogivales ou de la renaissance , avec lesquelles ils font presque toujours une choquante disparate. La peinture murale, on ne saurait trop le redire, est la seule, la vraie peinture, et ce principe est surtout applicable à la pein- ture religieuse; on commence heureusement à le comprendre aujourd’hui, et de louables efforts sont tentés dans cette voie, à l’imitation de ce qui se fait en Allemagne. Des peintures mu- rales ont été exécutées, non-seulement dans les principales égli- ses de la capitale, mais aussi dans quelques villes de province, à Nimes , par exemple, dans la belle église bysantine de Saint- Paul, construite par M. Questel ; et jusque dans notre départe- ment, dans la petite église de Saint-Mamet et dans celle de Ba- DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 119 gnères-de-Luchon ; M. Romain Cases les a décorées avec autant de talent que d’études consciencieuses : ce sont de bons exemples qu'on devrait suivre pour l’ornementation de nos monuments religieux , tels que Saint-Sernin , la Dalbade, la Daurade, etc. Dans la peinture historique, la France possède trois maîtres dont la grande réputation, à des titres si divers, montre très-exac- tement l'esprit de notre époque. M. Ingres s'applique à la recher- che du beau idéal par la pureté du dessin ; M. Eugène Delacroix, à la passion par la couleur; M. Horace Vernet, à la vérité par l’habile facilité avec laquelle il exécute et conçoit ces immenses toiles panoramiques , véritables portraits de batailles qui lui ont attiré l'admiration et les sympathies des masses; à côté de ces trois artistes célèbres vient se placer M. Paul Delaroche, qui a cru devoir s'abstenir d'exposer, mais qui à su conquérir une brillante position artistique par ses œuvres remarquables, et surtout par son admirable peinture murale de Fhémicycle de l'Ecole des Beaux-Arts, chef-d'œuvre dont un incendie récent a failli priver la postérité (1). La gaieté, l'animation, et ce vieil esprit français, si bien appropriés à la peinture des tableaux de genre, se retrouvent à un haut degré dans cette Ecole dont MM. Decamps et Meisson- nier sont les habiles chefs. Quelle verve inépuisable, quelle fi- nesse d'exécution, et quel rare esprit d'observation dans ces scènes d'Orient, dans ces singes émules de l'homme, et en même temps quelle hardiesse et quelle facilité dans la défaite des Cimbres et dans les dessins de Samson, compositions d’une petite dimension, mais qui, par l'énergie du mouvement et la grandeur de la mise en scène, s'élèvent presqu’à la dignité de l'histoire ! Parmi les tableaux de genre on trouvait un assez grand nombre de toiles remarquables, reproduisant les types de quel- ques populations ei les mœurs de quelques contrées reculées de la France. (1) Depuis la rédaction de ce rapport, la mort de Paul Delaroche a fait un vide immense dans l’art francais. 120 MÉMOIRES La Bretagne surtout avait fourni des sujets d'étude à MM. For- ün, Penguilly et Guillemin qui sont ses enfants. On cherchait malheureusement en vain quelque tableau du même genre, représentant les populations de notre Midi, et sur- tout de nos Pyrénées, où subsistent pourtant encore tant d’usa- ges nationaux et tant de costumes pittoresques. Que nos artistes méridionaux se réveillent donc, et qu'ils se hâtent; car, grâces aux chemins de fer du réseau Pyrénéen, l’affreux chapeau cylindrique et le paletot auront bientôt envahi ces contrées reculées de notre territoire. Ce fut en France, et vers 1830, que les premiers essais furent faits par les paysagistes pour revenir à la reproduction vraie de la nature, car le xvmr siècle et le commencement du xix°, égarés par une imitation fausse de Claude Lorrain, de Poussin et du Gaspre, en étaient arrivés à substituer à la vérité, des paysages de convention, lourds, affectés, impossibles et ri- dicules. Ces elforts furent heureux , et sous ce point de vue la peinture de paysage est de beaucoup supérieure à la peinture d'histoire ; les œuvres de MM. Paul Flandrin, Lecointe, Curzon, Caron, Cabat, etc., suffisent pour le prouver. Les animaux de M. Landsecr ( Angleterre) sont finement étudiés , et cette finesse est surtout dans les détails, les poils, la robe, les plumes; ceux de MM. Stevens , Vallat et Fobbe (Belges), sont plus largement traités; le dessin est au moins aussi correct , la couleur aussi vraie, et la finesse est dans la physionomie ; mais l'Ecole francaise conserve une incontestable supériorité dans les tableau x de M'e Rosa Bonheur (la Fenaison); de M. Troyon (Bœufs allant au labour) , et surtout , dans les drames d'animaux reproduits avec tant d'art par M. Brascassat, cet élève de prédilection de notre paysagiste M. Théodore Ri- chard, qui a fait de Toulouse sa patrie adoptive. Les animaux de M. Brascassat sont passionnés , passionnés comme il convient à des animaux ; et voilà pourquoi il est si supérieur à tous ses rivaux, dans /a Vache attaquée par des loups et défendue par des taureaux, et dans ce magnifique tableau du Chien accou- rant au secours de la brebis attaquée par des loups, qui est DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 121 le plus bel ornement de l'une des galeries particulières de Toulouse. Enfin, la matière, la matière sans idéal, l’objet tel qu'il existe, le réel en un mot, qui est en quelque sorte le domaine des Anglais, est représenté, en France , dans son impudente nudité, par l'école hardie et habile de pinceau de MM. Courbet, Bouvin , etc. , école qui a même créé un nom pour se faire comprendre, le Réalisme. Telle est l'Ecole française, ainsi que la montrait l'Exposi- tion, noble et fantasiste , rêveuse et mouvementée, coloriée et fiévreuse , portant ses qualités et ses défauts plus haut et plus bas que toutes les autres nations. Aussi-son influence est universelle ; toutes les Ecoles la su- bissent ; cela était frappant pour tous les yeux. Les plus person- nelles, celle de l’Angleterre même, ne peuvent s’en défendre, et chaque nation offrait des tableaux de divers genres d’une ressemblance frappante, et qu'on aurait pu croire sortis du même atelier. Est-ce à dire que cet esprit généralisateur a fait surgir quel- que grand progrès , quelque génie supérieur propre à guider l'art dans la nouvelle route qu'il doit suivre, pour répondre aux nouvelles aspirations de cette génération qui s'avance ? Non. Car parmi ce; toiles innombrables qui appendaïent aux murs du Palais de l'Exposition des Beaux-Arts, la supé- riorité était représentée par trois hommes qui, déjà par leur âge, appartiennent à la génération qui finit : ce sont MM. In- gres, H. Vernet, E. Delacroix. Le trait saillant de notre époque est l'abandon presque uni- versel de la grande peinture et de la recherche de l'idéal, tandis que le comfort anglais s’infiltre dans la société, et fait que l'art prend les dimensions exiguës de nos demeures ; de là cette in- nombrable quantité de petits tableaux , payés quelquefois à des prix fabuleux, et que les amateurs contemplent avec admiration à travers le verre d’une loupe. Aussi , en présence de semblables résultats, on pourrait dire que la force généralisatrice de l’art n'est plus en élévation, mais qu'elle est en étendue. 122 MÉMOIRES Vs Cette tendance serait combattue avec succès, et la grande peinture pourrait reprendre son empire si les Gouvernements suivaient avec persévérance l'exemple du roi Louis de Bavière, qui a prodigué les plus grands encouragements à la peinture murale, et par conséquent à lÆrchitecture , beaucoup trop dé- daignée de nos jours, et qui, du premier rang qui lui appartient, est peu à peu descendue au dernier degré, jusque dans les simples catalogues , où elle ne trouve place qu'après la peinture et la sculpture, et même après la gravure et la lithographie. Et cependant, ainsi que l’a dit l’auteur déjà cité de l'Art en Allemagne (M. H. Fortoul) : « Dans l’ordre des créations humaines, l'architecture joue le » rôle de l'unité primordiale; en sorte qu'on peut assurer en » toute vérité que, non-sculement elle est le seul art qui existe » par lui-même, mais encore qu'elle est l’art tout entier. » Comme la nature, et dans un ordre analogue, elle fait » éclore sur les murs , d’abord les efflorescences les plus simples » de la végétation, les herbes sacrées de ses chapiteaux et de » ses frises , les palmes de ses tombes et de ses autels, puis les » reliefs plus saillants des animaux sortant da milieu des plantes, » puis l’homme qui couronne ordinairement cette création, aussi » bien que celle qui est marquée du sceau de Dieu ; elle ne se » contente pas de produire toutes ces formes qui, en se déta- > chant de son sein, donnent naissance à un art séparé, la » sculpture; elle les pare de tous les dons de la vie; elle les » revêt des prestiges de la couleur ; bien plus, elle accorde à la » couleur même la puissance de rendre tout un ordre d’aperçus »et d'idées, et la conduisant, pour ainsi dire, par la main, » elle la mène jusqu’à l’époque où celle-ci, émancipée , constitue » aussi un art isolé, la peinture. C'est ainsi que tout part d'une » unité féconde pour se disperser dans une multiplicité qui, » trop souvent, oublie son origine. » C’est parce que l'architecture est le plus grand de tous les DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 123 » arts qu'elle en est aussi le plus rare, et qu’elle ne brille qu’à » de longs intervalles de siècles, tandis que la peinture et la » sculpture peuvent, jusqu’à un certain point, emprunter leur » vie au caprice, et devoir à la puissante imagination d'un » homme une apparence de splendeur. L'architecture ne sau- » rait rien produire, au contraire, que par l'attachement » d'un peuple entier et sous l'empire d’une idée généralement adoptée : ce n’est que lorsque les nations , parvenues au plus » haut degré de leur développement, ont la pleine possession » de leur force , que s'élèvent de terre ces monuments qui gar- » dent à jamais les traces de leur passage et les marques de leur » civilisation. Et si vous assistez à une époque dont les construc- » Lions manquent d'originalité, dites aussi, sans crainte, que » les idées n’en ont aucune : les monuments sont la véritable » écriture des peuples. Ces lignes éloquentes et profondément vraies caractérisent admirablement l'époque moderne. On ne saurait disconvenir, cependant, que l'architecture, ainsi que nous le disions ailleurs (1), est, de toutes les bran- ches des Beaux-Arts , celle qui se trouve dans les conditions les plus défavorables pour concourir aux Expositions publiques. Comment, en effet, ces frêles feuilles de papier, plus ou moins chargées de lignes et de teintes légères , pourraient-clles lutter, aux yeux du vulgaire, soit avec les pompes du coloris des tableaux, soit avec le grandivse et les réalités de forme de la sculpture ! Le peintre et le statuaire n’ont pas besoin de secours étrangers pour créer le chef-d'œuvre concu par leur. génie : l'architecte, au contraire, est impuissant à lui seul. Sa pensée, sisouvent entravée par des considérations de parcimonie ou par des volontés puissantes, ne peut être réalisée et rendue sensible qu'avec le concours d’une infinité d'ouvriers , et sur- tout avec l'appui de la fortune publique ou privée. Les notions de géométrie descriptive sont , en effet, si peu répandues , que peu de gens sont appelés à comprendre et à lire ÿ (1) Rapport sur l'Exposition de Toulouse en 1845, pag. 77. 124 MÉMOIRES un plan, une coupe et une élévation; de là l'indifférence avec laquelle le public passe généralement devant les projets le plus habilement conçus et le mieux étudiés. Les hommes de l’art eux-mêmes reconnaissent d’ailleurs, qu'une œuvre d'architecture ne peut être réellement et définitivement appré- ciée qu'après qu'elle a reçu la sanction inappréciable de l’exé- cution. Chose étrange ! à quelques rares exceptions près, l’ex- position de l'architecture au Palais des Beaux-Arts , ne ren- fermait aucun dessin rappelant les principaux monuments élevés depuis le commencement de ce siècle, tant en France qu'à l'étranger. L'Angleterre avait néanmoins envoyé quelques spécimens d’édifices déjà exécutés, et notamment ceux du nouveau Palais de Westminster, conçu par sir Charles Barry, dans ce style, dit gothique anglais, dont l'aspect paraît si étrange à tous les artistes qui ne sont point nés sous le ciel brumeux de la Grande-Bretagne. Cependant , abstraction faite de cctte étran- geté de décoration extérieure, le plan de cet immense édifice présente des parties habilement étudiées et d’une remarquable exécution : les grands escaliers, les salles de la Chambre des Communes et celles de la Chambre des Pairs, produisent, quand on les voit sur place, un effet saisissant. Sir Barry avait aussi exposé le plan ct la façade de la villa de Cliefden, somptueuse demeure qu’il a fait élever dans la propriété du Duc de Sutherland , et le jury international a dé- cerné au célèbre architecte anglais une médaille d'honneur de 17° classe. Dans l'Exposition de l'Allemagne, on remarquait aussi la curieuse villa mauresque construite, près Stuttgard , par ordre du roi de Wurtemberg : mais on cherchait vainement les plans de cette Glyptothèque de Munich, qui par son style rappelle l'art Eginétique dont elle renferme les précieux débris, et les plans du W'alhala, ce Panthéon scandinave , tout en marbre, élevé au bout de l'escalier cyclopéen, qui prend le voyageur au bord du fleuve, près de Ratisbonne, pour le con- DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 125 duire jusqu'au faîte de la colline de Brenberg, au sommet de laquelle le roi Louis de Bavière a fait élever ce monument, l’un des plus remarquables qui aient été construits de nos jours en Europe. Dans l'Ecole française on eût voulu retrouver les dessins de l'Ecole des Beaux-Arts, dans laquelle M. Duban à montré ce qu'on devait attendre de son imagination et de son goût épuré ; ceux de la bibliothèque de Sainte-Geneviève, et les heureuses dispositions par lesquelles M. Labrouste a prouvé combien l'emploi du fer et de la fonte pouvait fournir de motifs d'or- nementation à la fois gracieuse et logique, et ouvrir à l’art une voie toute nouvelle, inconnue aux architectes de l'antiquité et du moyen âge. En effet, l'emploi de ces nouveaux matériaux que l'indus- trielivre aux artistes , est appelé , dans un avenir prochain sans doute, à faire une révolution complète dans l'architecture ; révo- lution aussi radicale, plus bardie, plus profonde peut-être que celle opérée par l'apparition du système ogival. L'art tätonne en- core, il est vrai; mais ces tendances nouvelles se font jour peu à peu par les tentatives multipliées que l’on retrouve, soit dans lesimmenses et monumentales gares de chemins de fer (celle de Strasbourg à Paris par exemple), soit dans l'établissement de ces marchés tout en fer et en fonte qui s'élèvent au centre de la ca- pitale de la France ct dans les vastes coupoles du Palais de l'Exposition, soit enfin dans ce magnifique Palais de cristal que sir Paxton avait élevé pour l'Exposition universelle de Lon- dres, et qui forme aujourd'hui une partie du Palais féerique des Beaux-Arts de Sydenham. Ce ne sont encore que des essais; mais, vienne un homme de génie qui s'empare de ces éléments aussi légers que puissants , ef un nouvel art élégant et original surgira peut-être, caractérisé, comme celui du moyen âge, par l'absence de tout ordre, et surtout de tout rhythme, s’affran- chissant ainsi des ordres et du rhythme, qui étaient la base de l'architecture antique, car le fer avec sa ténacité, ses dimen- sions si sveltes et si commodes , permet d'entreprendre des ou- vrages audacieux : les portées et les vides s’accroissent, et il 126 MÉMOIRES devient possible de franchir, sans soutiens intermédiaires , des espaces considérables (1). Cet enfantement d'un art nouveau , dont l'existence apparaît à tous les yeux observateurs et réfléchis, n'était nullement re- présenté à l'Exposition universelle, si ce n’est par une magni- fique aquarelle, reproduisant l'aspect général du Palais de Sy- denbam avec ses jets d’eau, ses beaux arbres et son parc pitto- resque. Un tout autre esprit semble animer les architectes qui ont pris part à cette solennité, c’est l'esprit archéologique , c’est (1) Parmi les nouveaux éléments fournis par l’industrie à l’art des cons- tructions, on remarquait dans le Palais de l’Industrie les briques creuses , les fers à T, les tôles cannelées, et les pilolis en fer. Les briques creuses, qui ont mérité à M. Borie (de Paris) la médaille d'honneur, n’ont pas le seul avantage d’être plus légères que les briques pleines ; elles présentent aussi une immense économie de combustible pour la cuisson ; de plus, elles offrent une grande régularité, parce que le retrait est presque supprimé et que leur résistance relative est beaucoup plus grande par suite de l’absence des fendillés qui déprécient les briques pleines. Les briques creuses sont déja d’un emploi général à Paris pour la construction des voûtes , des cloisons en porte à faux, et des entrevous des planchers en fer, établis au moyen de fers à T. Ces fers, fabriqués dans les usines de la Providence, de Maubeuge, de Montataire , etc., atteignent jusqu’à 11,45 de longueur et o",30 de hau- teur ; ils remplacent les solives et les cornières, et rendent les planchers incombustibles. Malheureusement le prix, comparativement au bois, est encore assez élevé et n’en permet guère l’emploi que dans les riches et im- portantes constructions. Les tôles de l’usine de Maubeuge, à ondulations, de 16 centimètres sur 8, permettent l'établissement de couvertures sans fermes, ni pannes, ni che- vrons, car le métal, par cetle sorte de cannelure, forme un contreventement général qui constitue un ensemble de fermes partielles; ce genre de cou- verlures, éminemment incombustibles, a été employé avec le plus grand succès à la gare des marchandises du chemin de fer de l’Ouest à Paris. Dans le Palais de l’Industrie, l'exposition anglaise présentait une impor- tante innovation relative aux fondations. Ce sont les pieux à vis et en fer de MM. Sunders et Mitchell; cette espèce de pilotis exercera une influence très-srande sur l’exécution des fondations des bâtiments élevés sur des Ler- rains peu résistants, et principalement dans les travaux hydrauliques ; l’em- ploi des sonnettes et le battage des pieux, toujours si chanceux , se trouvent supprimés. On fait pénétrer dans le sol, progressivement et sans choc, les pieux à vis, qui prennent une assiette beaucoup plus ferme et plus stable sur l’arête supérieure de l’hélice métallique qu’ils comportent, DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 127 l'étude des monuments antiques, celle des vieilles cités, des vicilles cathédrales et des vieux châteaux ; sous ce rapport, on peut dire que l'architecture est en arrière de plus de trente an- nées ; car ce fut sous la Restauration que cette préoccupation rétrospective donna un caractère si particulier à la littérature. Du moins, dans celte direction, on ne saurait le méconnaître, les architectes ont fait preuve de connaissances incontestables, et d'uneérudition étendue. Ainsi, on avait exhumé des archives de l'Ecole des Beaux-Arts une foule de travaux de MM. La- brouste, Caristie, Ballard, Questel, Duc, tous anciens pen- sionnaires de Rome. Ces travaux sont relatifs à la restauration ou plutôt à la réédification, sur le papier, des temples de Pæs- tum, du théâtre de Pompée, de l'Arc de triomphe d'Orange, du pont du Gard, du Colisée, du Forum Romain , du Parthénon d'Athènes, des Propylées, de l’Erecthée, etc. Les archives des monuments historiques du Ministère d'Etat et du Ministère des cultes avaient fourni un nombre considé- rable de dessins et de projets de restauration qui faisaient péné- trer en quelque sorte dans le monde du Moyen âge et de la Re- naissance; ici c'étaient les douze magnifiques dessins de la belle restauration du château de Blois, par M. Duban; ceux de l'hôtel de Clugny, par M. Lenoir; le réfectoire de Saint-Martin- des-Champs, rétabli par M. Lassus. Plus loin, M. Vaudoyer donnait les plans, les détails et l'élévation des hôtels de la re- naissance d'Orléans et de Beaugency ; et M. Mellay reconstruisait toute une rue de Montferrand (Puy-de-Dôme), où l'on retrou- vait une vieille ville du xv° siècle avec ses façades à losanges de bois , ses fenêtres croisillonnées, ses toits en sarplomb , et ses pignons sur rue. M. César Daly avait exposé le projet des travaux qui s'exé- cutent à la cathédrale d'Albi. Ce projet renferme le plan, la coupe longitudinale, l’éléva- tion de la façade ouest, une coupe transversale et une élévation latérale ; en tout cinq dessins parfaitement rendus; mais l'ha- bileté de main n'empêche pas néanmoins de remarquer que les clochetons, qui doivent couronner les contreforts cireulaires 128 MÉMOIRES 4 de l’église de Sainte-Cécile, offriront, par leur multiplicité, un aspect monotone , et présenteront, peut-être , une trop grande hauteur qui nuira à l'effet du clocher. Il eût été préférable, selon quelques artistes, que , pour ce clocher lui-même, on eût projeté de Le surmonter d'une flèche en maçonnerie, qui était une sorte de type adopté dans le Midi pour la plupart des mo- numents religieux du Moyen âge. Ce qui a surtout attiré l'attention de la Commission dé- partementale , c'est l'exposition d'architecture de M. Violet Leduc ; elle était en quelque sorte toute méridionale; elle ren- fermait la restauration de la cité de Carcassonne avec sa double ligne de fortifications , son enceinte de tours rondes , sa barba- cane et son chemin tortueux, ses poternes, sa porte Narbon- naise d'un aspect saisissant de sombre grandeur. A côté de cette savante étude, figuraient cinq dessins de l’ancien couvent des Jacobins à Toulouse : le plan général, l'élévation occidentale de l'église, lélévation latérale et la coupe longitu- dinale , les coupes transversales de l’église , du clocher et du ré- fectoire, enfin les détails de la décoration et des peintures mu- rales de la chapelle Saint-Antonin. Mais le travail qui, pour les Toulousains , offrait le plus d'intérêt , était les six admirables dessins composant la restau- ration complète de la belle basilique de Saint-Sernin. En voyant ce que deviendrait cet antique monument, au moyen de la restau- ration projetée par M. Violet Leduc, on regrette vivement que ce projet n'ait pas été exécuté, alors surtout que le Ministère des cultes offrait de se charger de la plus grande partie de Ja dé- pense. Le Conseil municipal de la ville de Toulouse était nanti de cette importante affaire , lorsque les événements de février 1848 vinrent en entraver la solution. Depuis cette époque, ce projet paraît avoir été totalement oublié, et cependant la plu- part des cathédrales et des principales églises de France ont été restaurées ou reconstruites à grands frais, notamment celles d'Amiens , de Chartres, de Bourges, de Rouen , de Bordeaux, de Marseille , etc. Aux portes de Toulouse, l'Etat dépense des sommes considé- DE L’ACADÈMIE DES SCIENCES. 129 rables pour la consolidation, la réparation et l'ornementation des églises de Narbonne, de Carcassonne, du Puy-en-Velay, d'Albi, etc. ; et, par un inconcevable oubli, la ville de Tou- louse, cette Métropole intellectuelle et artistique du midi de la France (1) serait seule déshéritée ! Un aussi déplorable aban- don ne saurait se prolonger plus longtemps. Sans doute, les Administrations ecclésiastiques, départementales et municipales sauront triompher des obstacles qui, jusqu’à ce jour, ont retardé l'exécution d’un projet qui doit compléter et terminer le plus grand, le plus beau et le plus ancien monument dont la cité a droit de s'enorgueillir à {ant de titres, car c’est Jà que sont con- servées les nombreuses reliques de ces saints martyrs qui scel- lèrent de leur sang l’affranchissement de l'humanité par l'Evan- gile ; c’est là que sont venus s’agenouiller et prier plusieurs des Souverains de la France, depuis les temps les plus reculés jusqu'à Napoléon-le-Grand , et même jusqu'à Napoléon IE, alors qu'il n'était encore que Président de cette éphémère et deuxième République française. VI … De l'avis général et unanime des artistes et de la plupart des criliques qui ont étudié l'Exposition universelle des Beaux-Arts, la sculpture moderne est dans un état d’infériorité incontes- table ; elle en est encore à l’école de David , et restant immua- blement attachée à limitation servile et irraisonnée de l'an- tique, elle ne peut se redresser jusqu’à l’époque gloricuse des Coustou et des Houdon. Le caricaturiste Cham, avecsa verve fine et épigramatique a caractérisé très-spirituellement cet état de choses en représentant la galerie de sculpture comme une vaste salle occupée tout entière par un nombre infini de cuisses, de jambes et de seins nus. De là cette prodigieuse quantité de sujets érotiques qui, plus (1) C’est la qualification qui lui est donnée par le Gouvernement lui- même dans l’exposé des motifs de la loi sur les chemins de fer du réseau Pyrénéen. 9° $. — TOME 1, 9 130 MÉMOIRES que tous les autres, se prêtent à la reproduction du nu : Vénus sortant de l'onde, Vérités sortant du puits, Baigneuses , Bac- chantes, Galathées et Acis couchés dans les bras l’un de l’au- tre, Phrynés, Psychés, Divinités femelles de tous les Olympes passés , et autres productions qui prouvent que leurs auteurs, en continvant les obscènes galanteries des Wateau et des Bou- cher, ont cherché, non pas le côté moral, mais immoral des choses, en oubliant que l'art vrai est chaste par essence. Que dire de ces Chasseurs, allant tout nus par monts et par vaux, n'ayant que la queue de leur chien pour tout vêtement pudique ( M. Gibbon, sculpteur anglais), et de ces Guerriers antiques tenant en main des glaives et portant sur la tête des casques magnifiques dont l’ornementation annonce une civilisa- tion très-avancée, et qui cependant, en allant au combat, n'ont pas pu se procurer le plus petit tissu pour garantir leur corps! Est-ce à dire que le nu doit être supprimé en sculpture? Non certes, mais on doit en user et ne pas en abuser ; il faut surtout qu'il soit idéalisé et non matérialisé, surlout dans un art déjà forcément matériel comme l’est la sculpture. Quoi de plus mo- deste, par exemple, que la belle Vénus de Milo, dont le buste n'est cependant pas-voilé! Si le sculpteur veut absolument faire du nu, il doit , avant tout, choisir un sujet qui s’y prêle convenablement, sans heur- ter la pudeur et le goùl; c'est ce qu'ont senti quelques vrais artistes, dont les œuvres étaient remarquées avec intérêt; ainsi, le Démon tentant Eve, par M. Stephens, est un grouppe sai- sissant. Satan, penché sur la tête charmante d'Eve, et profitant de son sommeil , glisse dans son oreille les conseils perfides, les illusions trompeuses , les inquicts désirs. Eve, sous l'influence de cette insidieuse puissance, est pénétrée d’un malaise in- connu ; ses narines sont gonflées, son sein palpite ; d’un autre côté, et malgré ses belles formes, on reconnait Satan ; c’est bien l’Ange déchu de Milton ; les membres, les pieds et les mains sont sayamment ct supérieurement modelés ; c’est l'œuvre capitale de la Sculpture anglaise, et M. Stephens en est incontestablement le maître. DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 131 Dans un autre genre, le modèle en petit du monument du grand Frédéric, à Berlin, exposé par le plus célèbre sculpteur de l'Allemagne, M. Rauch , porte le cachet du génie synthétique allemand ; c'est une épopée tout entière. Il n'existe nulle part, dans le monde, un monument qui puisse lui être comparé. Au lieu de la statue équestre prosaïque- ment élevée sur un piédestal plus ou moins orné de bas-reliefs, M. Rauch a conçu son monument en quatre parties bien dis- tinctes : le Roï, à cheval, est placé au sommet d’an grand sou- bassement , subdivisé en plusieurs échelons; aux angles de la partie supérieurese dressent les statues de la Guerre, des Scien- ces et des Arts; plus bas , sur une sorte d’estrade avancée, se déve- loppe une multitade de figures, en costume de l’époque, repré- tentant les généraux , les savants, les poëtes qui ont illustré le règne du grand Frédéric ; et aux angles de ces grands tableaux, sont quatre statues équestres, en ronde-bosse et en bronze. Enfin, derrière les groupes, on voit des bas-reliefs sculptés sur le piédestal lui-même. C'est un drame tout entier, une œuvre immense, qui prouve que M. Rauch comprend l'art dans ce qu’il y a de plus grand et de plus élevé. La sculpture italienne se fait remarquer surtout par une grande habileté de main ; le marbre est taillé, et en quelque sorte pétri, avec une grande habitude de praticien ; pour les statues d'hommes, ce sont toujours des figures nues, robustes, herculéennes, comme dans le Spartacus de M. Baratta ; et pour celles de femmes , des poses et des détails qui expriment la vo- lupté jusqu’à l'excès, comme dans l'£pouse du Cantique des cantiques , par M. Motelli. M. Magni est le plus fort de ces sculpteurs au talent facile et varié ; il a su vaincre les difficultés du costume moderne de femme qui font reculer les autres artistes. C’est là son origina- lité, etsa meïlleureæuvre est la Femme masquée, en robe courte, en deutelles et en corset; sculpture amusante, vive el tout ita- lienne. Ainsi que dans la peinture, l'Ecole française apporte dans 132 MÉMOIRES la seulpture la même variété, la méme aptitude à tous les gen- res ; les sujets qu’elle traite ne sont pas aussi vastes que ceux créés par l'imagination rêveuse de l'Allemagne, mais elle est au moins aussi savante, elle pénètre peut-être même plus profondé- ment dans le secret de l'antiquité ; la Minerve du Parthénon , sculpiée jadis par Phidias, et restituée par M. Simart, est une œuvre tout à fait exceptionnelle, intéressante et curieuse tout à la fois, tant par l'intention que par les savantes recherches et l’é- rudition qu'elle accuse. Pausanias donne ainsi la description de la Minerve du Par- thénon : « La statue de la Déesse est en ivoire et en or; sur le » milieu de son casque est un sphinx, el des griffons sont » sculptés de deux côtés ; Minerve est debout avec une tunique » qui lui descend jusqu'aux pieds; sur la poitrine est une tête » de Méduse, en ivoire; elle tient d’une main une Victoire, » qui à quatre coudées environ de haut; et de l’autre, une » pique; son bouclier est posé à ses pieds; auprès de la pique » est un serpent qui représente peut-être Erichtonius. La nais- » sance de Pandore est sculptée sur le piédestal de la statue. » Pour entreprendre de donner au public une exacte image de l'un des chefs-d’œuvreies plus vantés et Les moins connus de l’an- tiquité, il ne fallait rien moins que la magnifique fantaisie d’un parfait grand seigneur , tel que M. le due de Luyÿnes, qui sait allier à une immense fortune l'érudition éclairée d’un véritable savant. M. de Luynes avait confié la réalisation de sa pensée à deux artistes de premier ordre, M. Simart, de l'Institut, pour la sculpture , et M. Duponchel pour l'orfévrerie. C’est la première fois que, dans les temps modernes, on # vu se combiner, dans une œuvre aussi importante, l'or et l'ivoire ; et c’est aussi ce qui explique peut-être le peu de popularité qu'a obtenue celte statue exceptionnelle. La plupart des spectateurs éprouvaient un sen- timent d'étrangeté à l'aspect de ce visage d'ivoire, orné de deux yeux en azurite, tout empreint de celte grave et suave beauté des filles d'Athènes , et de cette sorte de tranquillité froide que nécessitait la reproduction d’une œuvre antique. M. Simart , si babile qu'il soit, n’a pas pu éviter cet écueil inhérent à la fidé- lité littéraire dont il ne lui était pas permis de s'écarter. DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 133 Le Berceau primitif, de M. Debay, est une délicicase com- position ; ce berceau, Eve le forme de ses bras, qui retiennent ses deux enfants endormis sur son sein ; l'idée est charmante, et, de plus, elle a été suivie et approfondie dans ses détails : Abel est frêle et délicat , il dort sur le sein de sa mère ; Caïn cest musculeux et fort, il n’est qu'à demi-couché , son poing fermé opprime déjà la poitrise de son frère. La tristesse qui voile le beau visage de la mère annonce l'intuition des malheurs et des crimes qui se perpétueront dans la vie humaine. Un artiste chrétien pouvait seul concevoir et exécuter aussi savamment cette admirable coniposition. Parmi les statues élevées à la mémoire des hommes célèbres, le premier rang était occupé par le Chéteaubriand de M. Pu- ret, et le Buffon de M. Dumont. M. Duret a compris admira- blement la grande figure de Châteaubriand ; il le représente assis, drapé dans son manteau ; son front noble et soucicux re- pose dans sa main. Cet air distingué et rêveur, celte attitude solennelle, un peu affectée, annoncent le génie de l'écrivain et le caractère de cet homme qui fat un de ceux qui remuèrent le plus les esprits dans la première moitié de notre xix° siècle. Le Buffon de M. Damont est au moins aussi vrai ; il est riche- ment vêtu , el que nous le montre la tradition lorsqu'il voulait écrire ses pages éloquentes ; sa tête offre ce caractère qu’on re- marque dans toutes celles du xvmr siècle, le front fuyant, la phy- sionomie fine et distinguée, les yeux pénétrants et expressifs. Cette belle statue témoigne du goût le plus pur; elle est animée et respire la vie. Si la peinture de paysage est d’ nos jours supérieure à la peinture d'histoire , qu'elle est appelée peut-être à régénérer en la ramenant vers la nature, de même la sculpture semble chercher aussi à se retremper dans l'étude des formes multipliées des animaux. Plusieurs artistes ont abandonné la représentation de l'homme pour s’adonner exclusivement à celle des bêtes sauvages ou domestiques. C’est un genre particulier qui paraît prendre chaque jour des développements plus considérables. 15% MÉMOIRES En tête de ces novateurs est M. Barye, dont le nom est de- venu célèbre; cet artiste, comme M. Brascassat dans ses ta- bleaux, a cherché le mouvement, ila donné des passions aux ani- maux , et il les exprime avec une éclatante vérité. Son Jaguar, dévorant un lièvre, est digne du talent et de la réputation de ce sculpteur; l'habitant du désert, aplati sur ses quatre pattes, tient dans sa gueule la pauvre petite victime qui a déjà les reins brisés; le froncement des narines du Jaguar, les replis de la peau, le creusement du râble, le frémissement des muscles, tout ex- prime le mouvement; on entend presque de sourds grognements et l’on redoute un bond démesuré. Cette œuvre remarquable laisse derrière elle bien des statues en marbre, bien des groupes ambitieux, bien des figures pleines de prétention. D’autres œuvres du même genre se faisaient remarquer à l'Ex- position, et sans être comparables à celles du Jaguar, du maître, elles indiquaient néanmoins des efforts, du talent, et des études consciencieuses. Ainsi on peut citer le Lion de M. Jacquemart. Le roi des animaux, en avançant dans le désert, s’est arrêté à la vue du pied d’un voyageur enseveli sous le sable ; tout, en lui, trabit une inquiétude qui bientôt va se changer en gloutonne- rie, Cet épisode, émouvant, est très-habilemernt rendu. M. Fremict avait exposé le groupe charmant de la Chatte et ses pelits ; enfin, on s'arrêtait, avec une profonde émotion, de- vant la Panthère couchée, de M. Louis Vidal, de cet artiste phénoménal , qui, frappé depuis quelque temps d’une cruelle cécité, a su acquérir une si exquise délicatesse du toucher, qu'il modèle comme si son regard pouvait encore diriger sa main. Mais c'est au dehors de l'Exposition des Beaux-Arts, el par une excursion dans celle de l'Industrie , que l'on pouvait apprécier les progrès immenses réalisés dans cette nouvelle car- rière ouverte à la sculpture. L’orfévrerie, la menuiserie , l'ébé- nisterie et l’arquebuserie elle-même, ainsi que les bronzes d'art, renfermaient de véritables chefs-d'œuvre créés par des artistes qui suivent la voie ouverte aatrefois par Benvenuto Cellini. lei, c'est le grand vase d'argent ciselé et modelé par M. Geof- froy Dechaume, représentant la Fable de Pandore; là, l’'Ai- DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 159 guière, de M. Gueyton, dont le plat reproduit l'enlèvement d'Eu- rope, la toilette d'Amphytrite, le couronnement de la reine des mers , et Aréthuse poursuivie par Alphée ; la coupe est for- mée de deux tritons qui portent une vasque dans laquelle s'agite tout un petit monde délicieusement sculpté, de dauphins qui nagent, de tritons qui jouent , et d’une troupe de chevaux marins conduits par des amours qui entourent la divinité des mers. L'abandon des formes roïdes et froides qui furent de mode pour les ameublements dans les premières années de ce siècle, et l’heureux engouement qui a régné, il y a une vingtaine d’an- nées, pour les vieux bahuts, les vieux fauteuils et les vieux dressoirs , a fait faire à l'ébénisterie des progrès immenses, et rarement la sculpture en bois a été aussi loin que de nos jours pour la pureté des formes , la souplesse des contours et la variété des détails; parmi les nombreux chefs-d'œuvre que présentait en ce genre le Palais de l'Industrie, nous nous bornerons à mention- per celui qui a été le plus remarqué : le Dressoir de chasse, de MM. Ribaillier et Mazaros; les deux côtés de l'armoire sont accom- pagnés de figures; à droite, un chasseur lance un faucon sur le poignet; à gauche est un pêcheur tenant d’une main un filet, et de l’autre une poignée de poissons et de plantes mari- nes; au-dessus règne une corniche décorée de têtes d'animaux et de fines arabesques ; elle est surmontée d’un fronton brisé, dans lequel sont sculptés deux chiens poursuivant d’un côté un lièvre dépisté, fuyant sa cachette de bruyères; de l’autre, un canard sauvage poussant des cris en s'élançcant de sa touffe de roseaux. Cette scène d'animaux, modelée par M. Carlier, a été rendue avec une admirable vérité de pose, de forme et de mou- vement. Il est peu de sculpteurs contemporains que l'on puisse com- parer à M. Liénard, pour la sculpture d'ornementation ; ses charmantes compositions se retrouvent dans les ouvrages d'ébé- nisterie et de ciselure, autour des fontaines publiques, dans les gares des chemins de fer, sur les façades de plusieurs riches maisons de Paris, et jusque dans la merveilleuse erosse de 136 MÉMOIRES fusil qui ornait la vitrine de M. Gauvain , armurier. Ce fusil est tout un poëme, on y voit un pauvre petit oiseau prêt à être dévoré par une couleuvre qui se glisse vers le nid bâti dans le feuillage; la crosse représente un taillis dont les branches sont écartées par un chasseur, en costume du moyen âge, qui s’avance, portant un cor et un pieu, tandis que le chien se glisse dans le taillis à la suite d’un sanglier; tout cela est d’un style, d’une pureté irréprochables ; l’exécution et l’arrangement sont merveilleux. Dans les bronzes d'art, nous retrouvons, en première ligne, ceux de M. Barye ; à côté de cette ménagerie, en bronze, de lions, d’antilopes, de crocodiles, de bérons dévorés par des chats sauvages, on voyait un combat d’ Arabes contre des lions dans le désert, et le fameux groupe de l’Æercule et du Cen- taure. Dans cet admirable bronze , Hercule s’est élancé sur la croupe même du Centaure, dont il étreint les bras d’une main vigoureuse , tandis’ que de l’autre il frappe la tête à coups re- doublés de sa massue ; son ennemi , la bouche ouverte , semble jeter des cris de douleur, sa tête s'affaisse , ses yeux se voilent, on sent courir dans tous ses membres les derniers frémissements avant-courcurs de la mort: toute cette scène est mouvementée, heurtée, précipitée et rendue de main de maitre. ‘M. Barye, voulant s'affranchir des exigences des fabricants et conserver son indépendance d'artiste, s’est fait fabricant lui- même ; il est devenu en quelque sorte la personnification des liens de plus en plus intimes qui , de nos jours, tendent à rat- tacher l'Industrie aux Beaux-Arts. Cette fusion , qui semble vouloir faire sortir les Beaux-Arts de la position aristocratique qu’on leur accordait généralement, est une conséquence irrésistible de l'esprit démocratique et gé- néralisateur qui a déjà été signalé; les princes de l’art en su- bissent eux-mêmes l'influence, et M. Ingres avait compris dans. son œuvre exposée, vingt-cinq cartons de vitraux destinés à être exécutés par la fabrique Impériale de Sèvres. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 137 VIT. Cette tendance, plus fortement caractérisée à l'Exposi- tion universelle de 1856 qu’à toute autre époque , a été con- sacrée , en quelque sorte , par une heureuse innovation. Une galerie spéciale avait été réservée à ce que l’on est convenu d’ap- peler le dessin industriel. Depuis quelques années on avait insisté fortement pour que le nom de l’ouvrier qui exécute figurât à côté de celui du fabricant qui commande et qui paye; c'était équitable ; mais on avait oublié jusqu'ici la tête qui crée, c’est-à-dire les dessinateurs ; c'est cependant à eux que l'Industrie française doit ses plus beaux succès , car ce qui constitue la supériorité de la France dans une foule de produits, c’est le goût des dessins, l'élégance des formes, l'harmonie des couleurs, l'agencement de l'ensemble. Néanmoins, il faut le dire, cette innovation a eu le sort de toutes les choses nouvelles ; l'Exposition des dessins aurait dû être plus complète et plus nombreuse ; elle ne comptait qu'une cinquantaine d'artistes seulement. Mais si, pour cette première fois, la réunion des dessi- nateurs a été peu nombreuse, on pouvait louer du moins , sans restriction , plusieurs artistes hors ligne , tels que MM. Adam et Gourdet pour de charmantes esquisses à l'huile, de tapis, de portières ou de panneaux d'appartement ; MM. Berrus frères pour le dessin du chàle de l’Impératrice; M. Dussauce pour des motifs à l'huile, et M. le Maire pour ses charmants pastels de papiers peints; M. Couder pour les dessins de manteaux de cour; M. Brandely et M. Cuvelier père pour leurs dessins de meubles. L'une des choses les plus remarquables de cette galerie, était l'album photographique de M. Brun: rien de plus beau, de plus vrai et de mieux réussi que cet album , exécuté d’a- près des bouquets de fleurs naturelles, disposées cependant de manière à être facilement transformées en ornements d’é- tolfe. C’est une des remarquables applications de la photo- graphie, de ce procédé qui , par ses progrès rapides ct son extension , est appelé à entrer dans le domaine des Arts ; 138 MÉMOIRES car il met à la disposition des architectes, des peintres, des sculpteurs et des dessinateurs de puissants moyens d'étude , d’une exactitude incomparable. Ces résultats artistiques sont incontestables, quand on con- sidère, soit les magnifiques photographies de Londres, la vue panoramique de Paris, celle de la porte de la Bibliothèque Impé- riale, et les reproductions des tableaux de Rembrandt ou d'Albert Durer , par MM. Bisson frères ; soit les statues comme celle de la Vénus de Milo, et les bas-reliefs, d’après Claudion, par M. Bayard; soit enfin les épreuves de M. Lessecq, d’après nos monuments gothiques. Dans le paysage , l'Angleterre avait une supériorité marquée; M. Fenton avait notamment une vue intitulée Zack fall, d'une finesse de modelé et d'une étendue de lointains qu’on ne re- trouvait pas chez les autres photographes ; un autre anglais, M. Maxwell-Lyte, offrait une série de vues de nos Pyrénées très- remarquables par la profondeur et la transparence des effets. Nous avons dû regretter que notre Midi, qui possède cepen- dant des photographes habiles, se soit laissé ainsi devancer par un étranger , pour la reproduction des superbes et majestueux points de vue que présentent nos grandes et belles montagnes. Dans cette partie de l'Exposition, on remarquait encore des reproductions microscopiques de parties d'insectes , d'animaux ou de plantes grossies plusieurs centaines de fois ; des images grossies de la lune très-intéressantes , des épreuves instantanées d'animaux féroces avec leurs aspects sauvages, saisis sur le fait, ou de la physionomie de malades aliénés, à diverses époques de leur traitement ; des scènes militaires prises aussi sur le fait en Valachie, pendant la campagne de 1854, et un grand nom- bre d’autres applications diverses de la photographie , qui mon- trent tout le parti que les Sciences et les Beaux-Arts peuvent tirer de cette belle invention (1). (1) Au moyen des procédés instantanés de photographie, on pourrait faire revivre à Toulouse une ancienne et très-intéressante coutume. Autrefois , et depuis un temps immémorial , lorsque les Capitouls entraient en fonc- tions , le peintre de la ville était chargé de faire leurs portraits en minia- 5 : DE L ACADÉMIE DES SCIENCES. 139 VIII. La Gravure est au moment d'être envahie par la découverte de Dagucrre , et voici venir l'héliographie , c'est-à-dire, la gra- vure obtenue par l’action de la lumière sur la plaque de métal. C’est à M. Niepce de Saint Victor , neveu de Nicéphore Niepce , collaborateur de Daguerre, que l’on doit ce procédé , ainsi que celui de l’héliocromie, qui consiste dans la production, au moyen de la chambre noire, des images avec leurs couleurs naturelles, découverte immense qui malheureusement n’est pas encore arri- vée à l’état pratique, parce que l'inventeur n’a pas pu parvenir jusqu'ici à fixer définitivement les images obtenues, et à les met- tre à l'abri de l’action destractive de la lumière. Toutefois la gravure artistique conservait sa supériorité dans l'Exposition des Beaux-Arts; elle était représentée surtout par les œuvres de la France , de l'Angleterre et de l'Allemagne. La gravure anglaise, d’une grande variété, se faisait remar- quer par ce fini, ce pontillé, ce travail minulieux qui est son caractère essentiellement original; les gravures en bois de M. Thompson étaient dignes de la réputation de perfection que les artistes anglais ont acquise dans ce genre. ture sur le vélin des registres des archives et en tête de leur année d’exer- cice ; on trouvait dans ces registres une suite de portrails unique peut-être dans le monde. Le vandalisme de quelques furieux , qui poussaient jusqu’à la monomanie la haine du passé, nous a privés de cette précieuse collection. Le 10 août 1793, ces peintures, arrachées des volumes des Annales, furent brülées sur l’autel de la patrie, aux cris de : Vive l'égalité ! La précipitation avec laquelle on procéda à cette lacération , fut cause que quelques-unes échappèrent. Un volume du 17° siècle en renferme encore plusieurs , dont la belle conservation sert à augmenter de justes regrets. D’autres furent soustraites et conservées par quelques particuliers ; plusieurs de ces der- nières ont été rachetées par la ville. On conçoit tout l'intérêt historique, artistique et archéologique que présenterait pour nos descendants un album photographique renfermant la suile non interrompue des portraits des Conseillers municipaux , Maires et Adjoints qui remplacent les Capitouls. Celle proposition , dont la réalisation se ferait à si peu de frais, n’a be- soin en quelque sorte que d’être signalée pour qu’il soit inutile d’entrer dans de plus grands développements. 140 MÉMOIRES La gravure allemande a un tout autre cachet; elle ne s'adresse point à la classe riche, mais aux masses; elle n’a point le fini de la gravure anglaise; elle est peu colorée, parfois même un peu pâle, mais elle exprime avec simplicité et vérité les sentiments calmes , tendres et profonds ; elle convient parfai- tement à la reproduction des sujets religieux auxquels s’adon- nent principalement les artistes allemands. Parmi ces œuvres on peut citer celles de MM. Stcifensand et Massau. Ces gravu- res allemandes donnent lieu à une remarque très-importante, c’est qu'elles sont généralement d’un très-bas prix; voilà un excellent exemple à imiter. Car un grand progrès sera accompli en Europe ct en France, le jour où l’art aura pu pénétrer jusque dans les derniers rangs de la société ; lorsque l'habitant de la campagne pourra s'initier au sentiment du beau, en ayant sous les yeux, et à peu de frais , des images purement dessinées et co- loriées avec soin , au lieu de cês grossières représentations du Juif-errant et de sainte Geneviève de Brabant, qui offusquent le goût et pervertissent l'œil , autant par la crudité de l’enluminure que par la défectuosité des contours. La présence continuelle de ces informes estampes exerce une bien plus grande influence qu'on ne le croit généralement sur le peu de popularité de l'art et sur l’état d'ignorance des classes peu aisées. Aujourd'hui que l’estampille est exigée pour tout le colportage, il devien- drait facile de prohiber les productions susceptibles de corrompre le goût, de même qu'on prohibe , avec justice, toutes celles qui peuvent porter atteinte à la morale publique ou à l’ordre social. Quant à la gravure francaise, le génie de la nation y est aussi nettement accusé que dans les tableaux , l'architecture ct les sta- tues ; tous les genres sont représentés ; cependant son caractère principal est le style elassique qui lui a été légué par une longue succession de graveurs célèbres. Les œuvres de MM. Forster, Martinet, Calamatta sont traitées ayec largeur et fermeté. M. Lavieille exécute des gravures sur bois, qui n'ont peut-être pas la finesse de détail des épreuves anglaises du même genre de M. Thompson, mais qui sont taillées d’une manière plus large et plus énergique. L'œuvre capitale de la gravure fran- DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 141 caise était celle de M. Henriquel Dupont, reproduisant avec un talent hors ligne et avec le sentiment le plus élevé, la belle ptinture murale de l'hémicycle de l'Ecole des Beaux-Arts de Paris, par M. Delaroche. IX. Telles sont les observations principales recueillies sur l'Ar- chitecture, la Peinture, la Sculpture et la Gravure, par la Com- mission départementale de la Haute-Garonne, dans le trop rapide examen qu'il lui a été permis de faire de l'Exposition universelle des Beaux-Arts, la plus considérable des temps modernes. Deux grands faits principaux lui ont paru résulter de cette célèbre solennité. Le premier c’est ce principe généralisateur qui, dans l’art comme dans l’industrie , tend à rapprocher les nations civilisées par les mêmes besoins, les mêmes sentiments, les mêmes goûts, les mêmes pensées, les mêmes aspirations : grande et sainte mission à la tête de laquelle la France a con- servé le premier rang. Le second , c’est que le progrès des Arts commeceux des Scien- ces et de l'Industrie, sont en raison directe du degré de civilisa- tion, de richesse et de perfectionnement social des peuples en dehors des influences de nationalité (1). Ainsi la Grèce, l'Italie, l'Espagne , que l’on appelait autrefois les terres classi- ques des Beaux-Arts, se trouvent reléguées au dernier rang et ne vivent plus que dans le passé ; et cependant ces peuples du Midi de l'Europe ont de l'imagination, de la poésie, de la faci- lité ; ils sont doués des plus riches facultés, mais il leur manque (1) Personne n’ignore qu’Albert Torwalsen , né à Copenhague, au milieu des frimas du Danemarck , a Lenu de nos jours, et jusqu’à sa mort, le sceptre de la sculpture pendant plus d’un quart de siècle ; ses ouvrages sont ré- pandus dans presque tous les pays d'Europe. A l'Exposition universelle , M. Hôckert , par son Préche dans une chapelle suédoise, el M. Tidemand, par ses 7unéruilles dans les campagnes de Norwége , qui ont oblenu de grands succès el des médailles de 1r° ciasse, ont prouvé que le ciel glacé des pays septentrionaux ne refroidit pas le génie et n’éteint pas le sentiment des Beaux-Arts. 182 MÉMOIRES les conditions essentielles à la création des grandes œuvres : le calme intérieur de la patrie et le mouvement progressif des es- prits. Elles épuisent leurs forces, non à agir , mais à s’agiter. Les peuples du Centre et du Nord de l'Europe sont, au con- traire , entraînés par un mouvement social éminemment déve- loppé ; leur esprit a moins de spontanéité peut-être, mais ils étu- dient ; ils ont la volonté qui, malgré les obstacles, fait arriver au bat ; ils sont poussés d’ailleurs par une émulation incessante, par les encouragements et par l'estime, qui chez eux s’accor- dent généralement au travail et aux talents, et font arriver aux grandes positions sociales. Mais, pour que la France conserve le rang qu’elle a su con- quérir, et qu'elle ne descende pas comme Flialie, qui fut au xv* siècle son institutrice et son modèle, il faut qu’elle ne soit pas aveuglée par un faux patriotisme ct par le sentiment or- gueilleux de cette supériorité qui lui serait arrachée le jour où elle ne suivrait pas Îles progrès accomplis tous les jours par les nations rivales qui marchent à ses côtés. On a beaucoup dit et répété que les Anglais ne peuvent lutter avec nous dans tous les genres qui exigent de la délicatesse et du goût ; oui, dans l’état actuel des choses ; mais pour les ob- servateurs consciencieux et surtout pour ceux qui ont pu ap- précier, comme nous, les progrès notables réalisés depuis l'Exposition de Londres , il y a là un danger d’autant plus im- mivent, que les Anglais eux-mêmes ont le bon esprit de recon- naître leur infériorité, et qu'ils emploient tous leurs efforts et leurs immenses ressources à la faire disparaître. Depuis trois ou quatre ans, un nombre incalculable d'écoles de dessin ont été fondées de toute part; les bénéfices réalisés par les recettes du Palais de cristal de Hyde Park, ont été consacrés à la création d’une grande institution artistique ; les musées , les galeries , les collections sont livrées gratuitement aux re- gards du public, qui ne pouvait autrefois les visiter qu’en payant ; on dessine dans toutes les écoles primaires, on dessine dans les écoles du dimanche (Surday-Schols) , on dessine dans toutes les villes et jusque dans les plus petits villages de la DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES, 143 Grande-Bretagne; de puissantes associations se sont formées pour patronner cette sorte de nouvelle croisade, à laquelle on atta- che une importance telle, que parmi les produits exposés à Pa- ris, figuraient dans l’une des principales galeries du Palais de l'Industrie, et sous le n° 447, une collection de modèles et de dessins en usage dans les écoles de Sciences et d’Arts du Royaume uni ; collection exposée par le département des Sciences et des Arts du Ministère du Commerce de ce Royaume. C’est avec un sentiment d’orgueil que la Commission dépar- tementale de la Haute-Garonne a retrouvé dans cette collection la reproduction exacte du système d'enseignement des éléments du dessin , introduit, dès 1833, à l'Ecole des Beaux-Arts et des Sciences industrielles de Toulouse , système qui a pour base le dessin des figures de la géométrie plane et de la géométrie à trois dimensions pour arriver ensuite directement à la ronde-bosse ct au dessin de l'ornement et de la figure humaine (1). Cet ensei- gnement, dont le développement a été malheureusement entravé à Toulouse, où pour la première fois il avait été établi sur une grande échelle, s’est propagé rapidement et il est exclusive- ment adopté aujourd'hui non-seulement en Angleterre, mais dans l'Ecole Impériale de dessin à Paris, dans celle de Lyon, et dans un grand nombre d'institutions publiques et parti- cülières. Cette Ecole des Beaux-Arts et des Sciences industrielles est l’an des établissements les plus importants, non-seulement de la ville de Toulouse, mais encore de tout le Midi de la France ; cette importance pourra être facilement appréciée par le tableau du nombre d'élèves qui se sont fait inscrire sur ses registres pendant les vingt dernières années. (r) Ce système d’enseignement et la collection complète des modèles em- ployés à Toulouse , ont été importés en Angleterre par un ancien élève de l'Ecole des Arts et des Sciences industrielles de cette ville » M. Léon Arnoux, fils de l’ancien Maire, et qui a obtenu une médaille d'honneur à l'Exposition universelle en qualité de coopérateur ou superiniendant de la belle fabri- que de M. Minton , dans le Stratfordshire. 144 MÉMOIRES Année. Elèves inscrits. © Année. Elèves inscrits. 1836 — 770 1846 — 6418 1837 — 698 1847 — 613 1838 — 737 1848 — 596 1839 — 650 1849 — 585 1840 — 679 1850 — 643 1841 — 69% 1851 — 4:83 1842 — 660 1852 — 457 1843 — 679 1853 — 520 1844 — 780 1854 — 528 1845 — 739 1855 — 579 Dans ces totaux ne figurent point les auditeurs amateurs non inscrits qui suivent, en assez grand nombre cependant, les diffé- rents Cours. La création de cette école, qui n’a pas ‘de rivale dans les autres villes de province, remonte à 1730, époque à laquelle Dupuy-Duagrès, amateur de peinture, fonda, à ses frais , une classe publique et gratuite où l'on enseignait le dessin. Quelques artistes toulousains, tels que Cammas, architecte, Crozat et Rivals, peintres, continuèrent l’œuvre de Dupuy- Dugrès. En 1738 , elle fut déclarée perpétuelle par les Capi- touls ; bientôt après, elle eut pour auxiliaire l’Académie royale des Beaux-Arts, instituée par lettres patentes du roi Louis XV, datées du mois d'octobre 1750. Les différents cours, professés par plusieurs de ses membres, se trouvèrent emportés , avec l’Acadé- mie elle-même, par la tourmente révolutionnaire de 1793 (1). (1) Le rétablissement de cette Académie des Beaux-Arts serait vivement à désirer ; il compléterait ce faisceau de Sociétés savantes qui entretien- nent et propagent, à Toulouse , le goût des Arts et des Sciences ; peut-être même qu'à limitation de l’Institut de France, il serait possible de réunir par un lien commun l’Académie des Jeux Floraux , l’Académie des Sciences, l’Académie de Législation , la Société impériale de Médecine, l'Académie future des Beaux-Arts et la Société Archéologique. On aurait ainsi une sorte d’Institut méridional , divisé en classes comme l’Institut de France, et dont l’action sur les études deviendrait plus puissante par cette concentration. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 145 La loi du 25 octobre 1795 (3 brumaire an IV ), créa les Ecoles centrales, et les membres de l’ancienne Académie qui avaient survécu , furent appelés aux fonctions du professurat , sous la direction de M. Suau père, pour les classes des Beaux- Arts de l'Ecole centrale de la Haute-Garonne. Enfin , par un ar- rêlé du 13 mai 1804, le Ministre de l’intérieur, sur le rap- port de Fourcroy, organisa définitivement l'Ecole spéciale des Arts de Toulouse, dont les dépenses furent couvertes par Ja ville, qui l’a toujours considérée comme le plus beau fleuron de l'Administration municipale. Depuis cette époque, l’enscignement a été étendu et amélioré. En 1827 , des cours de Sciences appliquées y furent introduits pour satisfaire aux nouveaux besoins réclamés par le dévelop- pement de l’industrie. L'établissement reçut bientôt après le titre d'Ecole des Beaux-Arts et des Sciences industrielles. En 1837, M. Arnoux, dont le passage à la mairie fut marqué par d’heu- reuses améliorations , réunit à l'Ecole des Beaux-Arts l'Ecole de chant, créée par la ville en 1820, afin de ne former qu'un seul faisceau de toutes les branches des Beaux-Arts, Ce faisceau a été malheureusement rompu , et cette Ecole de musique , de- venuc succursale du Conservatoire de Paris, est passée depuis sous une direction séparée. L'Ecole des Beaux-Arts et des Sciences industrielles se compose aujourd’hui : D'un Directeur , D'un Inspecteur, de dix Professeurs titulaires et de sept Pro- fesseurs suppléants. Les cours sont organisés de la manière suivante : 1° Eléments du dessin d’après les figures de la géométrie plane , et d’après les solides en relief ; 2° Principes de la figure , copiés d'après l'estampe ; 3° Ronde-busse ; 4° Modèle vivant ; 5° Copies de tableaux et cours de costumes ; 6° Sculpture statuaire et d'ornement ; 7° Anatomie appliquée aux arts du dessin ; 8° Architecture; 5° $.— TOME 1. 10 146 MÉMOIRES 9° Perspective ; 10° Dessin graphique et dessin des machines ; 11° Mathématiques, arithmétique, algèbre, trigonométrie et géométrie descriptive ; 12° Coupe des pierres, charpente; 13° Mécanique ; 14° Chimie appliquée aux arts. Des prix sont décernés, chaque année, aux élèves qui se sont distingués dans les concours : en outre, l'obtention des grands prix de peinture, de sculpture et d'architecture donne droit, pendant trois ans, à un traitement de quinze cents francs, avec le titre de pensionnaire de la ville de Toulouse à l'Ecole impériale des Beaux-Arts de Paris Enfin, tous les cours généralement quelconques sont entièrement gratuits. Cette organisation , on ne saurait le méconnaître , est grande, large et libérale. Un enfant sorti des écoles primaires peut en- trer à l'Ecole des Arts, en suivre tous les degrés, et devenir peintre, sculpteur, architecte ou ingénieur, sans que sa famille ait à faire aucune espèce de dépense pour son instruction. Depuis l'introduction des cours de Sciences appliquées, des intelligences d'élite, sorties de la classe ouvrière, ont été révélées par cette Ecole. Plusieurs de ses élèves sont parvenus à entrer dans les Ecoles navale, polytechnique ou de Saint-Cyr, et sont devenus de braves et savants ofüciers ou d’intrépides marins. Aussi cette Ecole attire à Toulouse un grand nombre de jeunes gens du département de la Haute-Garonne et des dé- partements limitrophes ; elle est la pépinière des agents voyers, des conducteurs et des constructeurs des contrées voisines; elle forme surtout des ouvriers instruits; et ce résultat, plus mo- deste et tout professionnel, est le plus important de tous. C’est de ce but dont il est essentiel surtout de ne pas s'écarter par le désir trop naturel peut-être d'élever successivement l'ensei- gnement; c’est là l’écueil qui est le plus à craindre dans ces sortes d'établissements, destinés principalement à la elasse laborieuse. Il ne faut pas s'y méprendre ; sur six à sept cents élèves que possède l'Ecole, un très-petit nombre est appelé à devenir DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 147 artiste ou savant ; l'effet contraire devrait être considéré comme un très-grand malheur, car si tous les ans un centième seule- ment de ces sept cents élèves embrassait des professions li- bérales, que pourrait-on faire de ces six ou sept architectes, peintres, sculpteurs ou ingénieurs ? A quel déclassement dé- plorable et dangereux en même temps n’arriverait-on pas ? Heureusement Dieu seul fait les vrais artistes ; et s’il y a beau- coup d'appelés , il y a peu d'élus. Ces observations, si simples, si rationnelles , amènent donc forcément à cette conclusion , que les cours de l’Ecole des Arts, surtout ceux des éléments du dessin et des sciences appliquées, doivent rester dans une sphère peu élevée, de manière à ce qu'ils soient accessibles à la totalité des élèves, et qu’ils offrent de nombreuses et fécondes applications pratiques. £n un mot, il faut éviter que l'avenir de cinq à six cents élèves soit sacrifié aux progrès de cinq ou six intelligences d'élite qui sauront bien arriver au but par une instruction supplémen- taire, et par cette volonté ferme qui accompagne toujours les natures prédestinées , auxquelles d’ailleurs le dévouement des professeurs n'a jamais failli. Quant aux améliorations qui pourraient être apportées à l'enscignement , elles sont peu considérables , et peuvent être considérées comme accessoires. Ainsi, quant aux cours des éléments du dessin , il faudrait que les copies d’après l’estampe ne fussent faites par les élèves qu'après qu'ils auraient passé par la ronde-hosse , c'est-à-dire , qu'après qu'ils sauraient réelle- ment dessiner. Les cours d'architecture devraient être complétés par quel- ques notions d'archéologie, afin d’initier les élèves aux styles roman , byzantin, ogival ou de la renaissance, sous l'empire desquels ont été construits un grand nombre de monuments méridionaux, que des restaurations inintelligentes ont trop souvent dégradés (1). (1) L'introduction d’un cours de Notions d’archéologie sacrée dans l’en- seignemen£ des grands séminaires serail une innovation éminemment ulile 148 MÉMOIRES A côté de la classe de peinture, il conviendrait de développer le cours de costumes qui figurait autrefois dans les programmes de l'Ecole ; car, dans les arts , il faut être vrai, et la scène qu’on représente doit être reproduite , autant que possible, telle qu'elle a dù se passer dans son ensemble et dans ses détails. Enfin , l'élément scientifique pourrait être plus développé; il n’est représenté que par trois professeurs sur les dix que ren- ferme l’Ecole. Il en résulte qu’un trop grand nombre de cours est confié à un même professeur , qui ne peut donner à l’enseigne- ment tous les développements pratiques qui sont la partie la plus utile et la plas essentielle. Il serait aussi rationnel et juste de faire participer les élèves hors ligne des cours de sciences industrielles, au traitement de 1500 fr. et au titre de pen- sionnaire de la ville pendant trois ans à l'Ecole centrale des arts et manufactures. Ici se terminerait naturellement l’accomplissement du man- dat qui avait été donné à la Commission départementale de la Haute-Garonne. Mais, fidèle au but d'utilité qu'elle s'est imposé, elle a pensé qu'en dehors de l'examen de l'Exposition universelle, et dans l'intérêt de la ville de Toulouse en particulier , elle devait con- signer quelques remarques et formuler quelques propositions pratiques qui lui ont été inspirées par des observations recueil- lies pendant son voyage, soit à Paris, soit dans quelques-unes des principales villes de France. X. Ces observations se rapportent à diverses améliorations d'u- tilité publique concernant les alignements, les trottoirs, les plantations, les marchés, etc., améliorations que la sollicitude de l'Administration municipale a mis depuis quelque temps à l'étude. dans l'intérêt de la conservation de nos monuments religieux, car on n’a que trop souvent à déplorer des actes de vandalisme , amenés par le zèle, louable au fond , mais peu raisonné, de quelques curés. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 149 Alignements. — Le plan général des alignements de la ville de Toulouse a été approuvé , en 1842, par ordonnance royale et sous l’empire des lois qui régissaient alors la matière. L'impossibilité dans laquelle se trouvait alors l’Administra- tion de forcer les propriétaires à céder les parties de terrains restant en dehors des alignements, quelle que füt leur surface, créait de grandes difficultés dans l'étude des plans généraux, et nécessitait des dispositions quelquefois peu rationnelles, souvent très-défavorables même, sous le rapport de l’embellis- sement et de l’assainissement des villes. Il fallait cependant subir les prescriptions de la loi, et le plan d’alignement de Toulouse fut rédigé d’après ces bases et sous la pression des entraves que présentait la législation alors en vigueur. Sur tous les points où la nature des propriétés pouvait le permettre, on s’attacha à entrer dans la voie des améliorations et des embellissements d’une manière large et grande. C’est d’après ce plan qu'ont été exécutés, 1° les boulevards qui donnent la vie et la salubrité à des quartiers jadis inhabités , tristes et infects ; 2° l'achèvement si longtemps attendu de la place du Ca- pitole avec sa galerie couverte, si utile sous notre ciel méridio- nal; 3° l'ouverture de la porte Saint-Etienne et l'établissementsur de belles dimensions de la rue Basse-du-Rempart-Saint-Etienne ; &° le dégagement successif de la basilique Saint-Sernin; 5° la large rue qui forme les abords du Tribunal de 1° instance ; 6° la cons- truction des deux ponts, de Saint-Michel et de Saint-Pierre; 7° la place de la Halle aux blés, ete. Mais , à l'intérieur de la ville, la loi faisait une obligation de suivre la direction des anciennes voies publiques, malgré les sinuosités et l'exiguité qu'elles pré- sentent, et l’on dut se borner aux élargissements absolument indispensables , pour amener, plus tard , ces rues à une largeur à peu près suffisante, à mesure que les reculements s’effectue- raient par simple mesure de voirie, c'est-à-dire, lorsque les maisons seraient reconstruites, soit par suite de vétusté, soit par la propre volonté de leurs propriétaires. Or, il est à re- 150 MÉMOIRES marquer que, même dans ces cas, la ville est entraînée à des dépenses considérables, en ce qu'elle est obligée de payer la valeur du terrain situé immédiatement sur la voie publique, là où naturellement il présente la plus grande valeur, L'ouverture de larges voies à travers la vieille ville devenait impossible par l'obligation imposée de laisser aux riverains la propriété du sol limitrophe de ces nouvelles rues, et par con- séquent sans espoir de compensation pour la caisse muni- cipale. Ces difficultés étaient communes à toutes les villes de France, et la capitale elle-même les subissait. Les grands projets que l'Empereur Napoléon ITF avait concus pour transformer et rebâtir en quelque sorte Paris tout entier, auraient été impossibles avec une semblable législation , qui à été profondément modifiée par le décret de 1852 , rendu appli- cable plus tard à toutes les villes qui en feraient la demande : celle de Toulouse se trouve dans ce cas. Mais, pour qu'elle puisse profiter du bénéfice de cet important décret , il faut que son plan d’alignement , étudié selon un tout autre système, soit entièrement refondu ; il faut se borner à di- verses rectifications de détails , et porter tous les soins et toutes les ressources de la ville vers l'ouverture de quelques grandes ar- tères qui ouvriraient des communications larges et faciles du nord au sud ct de l’est à l’ouest , tout en faisant pénétrer l’air et la lumière, si nécessaires à la salubrité publique, dans l'intérieur de la vieille cité. Cette nouvelle étude est d'autant plus urgente, que de nouveaux quartiers s’improvisent, en quelque sorte, vers les extrémités de la ville, et Ià les constructions s'élèvent sans plan d'ensemble , sans unité, et sur des voies ouvertes par les particuliers, suivant des dimensions tellement exiguës, que la ville, pour obtenir des largeurs suffisantes , aura plus tard à dépenser des sommes énormes qu’une sage prévoyance aurait pu et peut encore économiser en partie. Mais il faut se hâter, car l'établissement des chemins de fer et l'élévation toujours crois- sante du prix des loyers font surgir chaque jour de nouvelles constructions sur les terrains situés vers les ponts des Minimes, DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 151 de Matabiau, de Riquet, et dans les quartiers de Bayard , du Busca, du faubourg Saint-Cyprien , etc. L'ouverture de ces nouvelles et grandes voies de communi- cation pourrait être effectuée, sans doute, sans entraîner la ville dans de grandes dépenses, en appelant le concours des compa- gnies, ainsi qu'on vient de le pratiquer à Lyon, à Marseille et dans les principales villes de l'Empire. Ce mode d'exécution permettrait d’ailleurs de compléter les améliorations par l'établissement, sous les voies publiques, d’un système d'égouts disposés de manière à recevoir les conduites d’eau et de gaz, ainsi que l'écoulement des eaux ménagères des maisons , causes incessantes et actives d’insalubrité et d’in- commodité. Trottoirs. — C’est principalement dans les villes dont les rues n’offrent que des largeurs insuffisantes que la construction des trottoirs est d’une indispensable nécessité pour éviter les accidents et protéger la vie de la partie la plas nombreuse de la population, celle des piétons : sous ce rapport, on peut dire que le trottoir est une œuvre éminemment démocratique et l’un des besoins impérieux de notre époque ; le principe en a été, du reste, consacré par la loi de 1845. Depuis cette loi, l'établissement des trottoirs a pris un très- grand développement dans la plupart des grandes villes de France, et les frais de ces ouvrages sont partagés entre les communes et les riverains, suivant des proportions variables, selon les localités et la nature des matériaux employés. Toulouse est restée de beaucoup en arrière dans cette voie d'amélioration ; les quelques essais qui ont été tentés n’offrent aucun ensemble , aucune règle fixe , aucune unité. Cependant, ces constructions importantes ont été , à Paris surtout, l'objet de beaucoup de travaux et de beaucoup d’étu- des, qui ont permis d'établir des règles et des principes à peu près invariables. Ainsi, il est reconnu aujourd'hui, qu’on ne doit laisser à la chaussée que la largeur nécessaire pour le croisement d’un 152 MÉMOIRES nombre exact de voitures, et que lorsqu'une rue ne peut donner passage à trois voitures, par exemple, il faut réduire la chaussée à la largeur nécessaire pour le croisement de deux voitures ; comme la chaussée trop étroite pour permettre ce dernier croi- sement, doit être réduite à la largeur nécessaire pour le pas- sage d’une seule voiture. D’après de nombreuses expériences , uneseule voiture n’exige que 2 mètres 50 centimètres entre des bordures ; 3 voitures, 7 mètres ; 4 voitures , 9 mètres, elc. Mais une largeur de rue peut se prêter au croisement de trois voitures en rétrécissant beaucoup trop le passage laissé aux pié- tons ; dans ce cas, on restreint à deux le nombre des voitures, de manière à ce que le trottoir n'ait jamais moins de 0",75 de largeur. Le trottoir de 1"00 de largeur est pour deux personnes ; 3 mètres sont une bonne largeur; quatre personnes s’y croi- sent aisément. Les grandes villes , et la capitale elle-même, présentent peu de rues dont les redressements soient effectués ; aussi l'aligne- ment du trottoir dépend, non de celui des maisons, mais bien de la position provisoire assignée à l'axe de la chaussée à la- quelle les bordures sont toujours symétriques, tandis que la largeur du trottoir est variable. Si les différences de distance entre les maisons sont trop grandes dans toute la longueur d’une rue, on partage cette longueur en chaussées de 2 ou 3 largeurs variables, toujours dans uu rapport exact avec le nombre de voitures. Le relief, ou saillie du trottoir, ne s'élève qu'à 20 ou 25 centimètres au plus ; cette hauteur descend à 0,08 centimètres devant les portes cochères ; une échancrure de 4 centimètres de profondeur , pratiquée sur le point où passent les roues , réduit encore cette saillie , et l’on amène enfin le ressaut à être à peine sensible en augmentant un peu le bombement du revers de la chaussée près du ruisseau. La pente transversale ordinaire du trottoir est de # centimè- tres; mais elle est souvent modifiée par l'existence des seuils DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 153 des maisons ; dans tous les cas, elle ne peut être au-dessous de 5 millimètres par mètre. En cas d’impossibilité, on est amené à diriger la pente vers les façades , à 30 ou 40 centimètres desquelles on établit paral- lèlement une gargouille en fonte qui reçoit, par sa fente supé- rieure, les eaux pluviales tombant sur le trottoir. A Paris, la pose des tuyaux de descente, celle des gar- gouilles, le remaniement du pavé des cours et des dessous de portes cochères restent à la charge exclusive des propriétaires riverains. Les trottoirs se composent d’une bordure et d’un dallage éta- blis, l’un et l’autre, sur une fondation à mortier de chaux hy- draulique; la bordure est en calcaire, en grès ou en granit. Les dallages étaient faits autrefois en briques, en pavés cassés posés sur bain de mortier , en pierre de Volvic, en granit, etc. Les dallages en briques et en pavés cassés ont été abandonnés parce qu'ils offrent un grand nombre de joints qui fatiguent les pieds, et qui donnent naissance à de la boue par suite de l’eau dont ils se remplissent lors des pluies. La pierre de Volvie et le granit s’usent, à la longue, inégalement , et entraînent des réparations dispendieuses. Le bitume, sur 0"15 millimètres d'épaisseur , et posé sur une aire de béton , est aujourd'hui presque exclusivement employé par suite de la promptitude avec laquelle il se prête soit aux réparations, soit à l'entretien, et de l’agréable facilité qu'il offre pour la marche des piétons. Deux espèces de bitume sont principalement mis en œuvre à Paris et dans les environs ; celui de Seyssel et celui d'Auvergne, connu sous le nom de Lave fusible , mais comme, dans tous les cas, c’est la cuisson et le mode d'emploi qui constituent prin- cipalement la bonté du dallage , l'entretien en est laissé à l’en- trepreneur pendant un certain nombre d'années. En sorte, qu’au moyen d'un prix convenu pour frais de premier établissement, et d'un supplément pour l'entretien , le tout résultant d'une adjudication publique, l'entrepreneur doit remettre les travaux en bon état au bout du terme spécifié. 154 MÉMOIRES Dans presque toutes les grandes villes, ces deux sommes sont réunies et donnent lieu à une annuité qui est payée par l’Admi- nistration municipale; la part afférenie aux propriétaires est seule payée à l’entreprencur immédiatement après l'achèvement des travaux. C'est au moyen de ce système d’annuités que la plupart de ces villes on pu, en très-peu de temps, doter de trottoirs la presque lotalité de leurs rues, tout en reportant les dépenses sur plusieurs budgets successifs ; il est à remarquer que, dans ce cas , les conditions faites par les entrepreneurs ont été toujours beaucoup plus avantageuses, en raison précisément de l’impor- tance et de l'exécution immédiate d’une grande quantité d’ou- vrages. Il serait à désirer que ce mode d'établissement de trottoirs fût adopté à Toulouse, et l'importance de la question motive les détails minutieux qui viennent d’être donnés (1). Plantations. — Les plantations à l’intérieur des villes ne sont pas seulement un objet d’embellissement et d'agrément, elles constituent aussi un moyen puissant d’assainissement ct de salubrité. Les arbres absorbent l'acide carbonique répandu dans l’air des localités où se trouve agglomérée une popula- tion nombreuse, et rejetent dans l'atmosphère de l'oxygène (1) Une formule très-simple, donnée par M. l’Eveillé, Ingénieur de la grande voirie de Paris, sert à calculer le prix de revient d’un mètre courant de trottoir ; la voici : b+pl+p à. b représente le prix du mètre courant de bordure, compris la fondation. { la largeur du trottoir, déduction faile de la largeur de la bordure. p le prix du mètre carré du bitumage, compris le béton et les terrassements. à la largeur en sus ou en dessons de la largeur d’un mètre. Or, à Paris, b— 15 fr. /—=on,70. La valeur de p se compose ainsi : Bitumage de 0,015 d'épaisseur avec garantie de 3 ans. 51,36 Bétone ER MT 1600000030 UCb te EU 2, 00 Terrassements. ........... NT TENTE 0000 00000 Mt 0,41 SOMMIC A VALOITe ee = ee ee see Fee Lans sb 0, 23 Total de la valeur de p......... .. 8f,00 En sorte que pour Paris la formule devient 15f,00 +0,70 X 8f,00 H 8,00 X À. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 155 ou air vital ; aussi les villes principales de l'Europe multiplient de plus en plus dans leurs enceintes ces plantations bienfai- santes , sans parler de ces beaux squares qui, dans Londres, atténuent les inconvénients de l'atmosphère brumeuse et enfu- mée qui enveloppe cette immense fournaise de houille. En France , maintenant, le faux goût des places publiques, des grandes rues, des quais vides, tristes et nus, disparaît heu- reusement sous l'influence et l'accord des hommes d’art et des hommes de science. A ces plaines arides de gravier, de sable ou de pavé , on substitue partout, et notamment à Paris, de nombreuses et belles plantations, où la foule circule le soir et vient s'asseoir sous les arbres. Ainsi, depuis deux ans, la place Royale, la place de l’Europe , la place du Chevet-de-Notre-Dame , celle qui entoure la Tour-Saint-Jacques, les quais, les anciens et les nouveaux boulevards sont devenus des promenades charmantes, par les soins d’une administration prévoyante qui, au moment où la spéculation achevait de dépouiller les terrains particuliers du peu d’arbres existants dans l'enceinte de Paris, a su assurer la salubrité de l'air de la capitale, par cette nouvelle végé- tation. Dans nos climats méridionaux, les plantations d'arbres ont une importance plus grande encore, tant sous le rapport de la salubrité que sous celui de l'agrément. L'arbre est une néces- sité de notre climat, alors que le soleil de juillet et d'août rend nos places et nos grandes voies publiques à peu près inabor- dables. Les Etats de la province de Languedoc, dont l’adminis- tration célèbre a laissé dans tout le Midi des témoignages em- preints de tant de grandeur ct d'utilité, avait pris sous ce rap- port une heureuse initiative en faisant établir dans Toulouse, capitale de la province , ces belles promenades du Grand-Rond, du Jardin-Royal, du quai Dillon et du Canal de Brienne , de même qu'à Montpellier, siége des Etats, elle faisait élever le Peyrou , dont la verdure et les eaux abondantes rappellent ces longues lignes monumentales d'aqueducs qui donnent en- 156 MÉMOIRES core aujourd'hui un aspect si imposant à la campagne de Rome, Mais ces plantations , suivant des lignes régulières et géomé- triques en vogue dans les derniers siècles , offrent quelque chose de froid et de monotone que l’art moderne a heureusement mo- difié par l'introduction des jardins pittoresques. L'un des plus beaux exemples de cette innovation vient d’être donné, à Paris, dans les nouvelles et somptueuses dispositions du bois de Bou- logne, transformé naguère en une délicieuse et verte campagne alpestre. Sur une plus petite échelle et dans un cadre plus res- treint et plus en rapport avec ses ressources financières, la ville de Toulouse ne pourrait-elle pas transformer en jardin pittores- que les promenades du Grand-Rond ? C’est une question que la Commission n’a pas tranchée, mais qu'elle a cru devoir poser pour que la discussion puisse s’en emparer. Cet emplacement est, en effet, d’une vaste étendue; il offre plusieurs fontaines qui pourraient alimenter une pièce.d’eau , à laquelle le voisi- nage du canal du Midi, permettrait de donner une grande im- portance. La promenade actuelle , y compris le Jardin-Royal et le Foirail, pourraient se relier avec le Jardin des Plantes, et fourniraient un immense square, dont les allées sinueuses en- toureraient les habitations, les jardins particuliers, l'église et les bâtiments qui longent les voies publiques actuelles, dont il faudrait seulement modifier les directions rectilignes. Mais quel que soit le sort que la discussion et l'avenir réser- vent à ce grand projet, il est quelques améliorations d’une moindre importance qui pourraient être introduites immédiate- ment sous le rapport des plantations et de l’embellissement de la ville ; en voici l'énumération : 1° Toute la ligne des quais , depuis le Moulin du Château jus- qu'à celui du Bazacle , devrait être plantée d'arbres, comme les quais de Paris : ces arbres , placés en dehors des trottoirs et à une petite distance de la bordure en pierre , procureraient en été une ombre protectrice sur tout ce parcours, aujourd'hui presque impraticable pendant les chaleurs de l'été. 2e Quelques places de la ville, notamment celle de Louis- DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 157 Napoléon , sont susceptibles de recevoir des pelouses de gazon, arrosées par l’eau des fontaines et accompagnées de quelques allées sinueuses qu'ombrageraient plusieurs plantations d’ar- bustes et d'arbres à feuilles persistantes, le tout entouré d’une simple grille sans ornement , et qui se confondrait avec le vert de la végétation. 3° De petits squares avec quelques arbustes seulement, comme on en voit à Londres, jusque dans les carrefours, pourraient être établis sur les places de Saint-Barthélemy, du Salin, de la Monnaie, d'Arnaud-Bernard, de Dupuy, du Chairedon , etc. On ne saurait trop le répéter , les plantations d'arbres doivent être multipliées le plus possible au centre des habitations, tou- tes les fois que l'espace le comporte. 4° Quant aux plantations considérées en elles-mêmes , on ne saurait {rop apporter de soins à l’étude des espèces qui convien- nent le plus à nos localités. Une triste expérience nous a appris que l’ormeau à larges feuilles, généralement employé jusqu’à ce jour , est rapidement attaqué par les vers , et qu’il ne peut con- venir que dans un très-petit nombre de cas. D'ailleurs, le grand développement que prend son bouquet lorsque sa réussite est assurée, offre le grand inconvénient d'atteindre les étages su- périeurs des maisons dont il gêne la vue ; aussi, sur les boule- vards, par exemple, les riverains hâtent souvent sa mort par des moyens occultes. Il convient donc de rechercher, pour ces plantations des voics publiques urbaines , les espèces qui, tout en faisant un bou- quet touffu n’atteignent pas à une grande élévation (1), et dans tous les cas, il convient de maintenir la tige à une hauteur qui ne dépasse pas 2 mètres 50 c. à 3 mètres. Car alors l’om- bre se projette principalement sur la voie publique et non sur les maisons ; c’est malheureusement, il faut le dire, tout le contraire qui a été fait à Toulouse , où cependant la fréquence (1) L’Acacia parasol, par exemple, qui a si hien réussi à l’entrée de Vallée Louis-Napoléon et dans l’avenue du cimetière de Zerre-Cabade. 158 MÉMOIRES des vents d’autan impose plus que partout ailleurs la loi de tenir les arbres aussi bas que possible. 5° La place du Capitole, qu’on peut considérer en quelque sorte comme le Forum toulousain, est déshonorée par le marché aux herbes et aux légumes qui s’y tient tous les jours. Un tel état de choses devrait être changé, non-seulement sous le rapport de la convenance et de la beauté de cette partie de la ville, mais aussi et surtout sous celui de la salubrité. Les matières végétales dont le sol est imprégné entrent en fermentation sous l'influence des rayons solaires, rendus plus ardents encore par la réflexion que produisent les blanches facades des édifices environnants. Ces émanations des matières végétales en putréfaction sont plus dangereuses que celles des matières animales, et cependant c'est sur cette place que se rend, le soir, une nombreuse population qui vient s'y promener et écouter les fanfares des musiques et des tambours de la garnison ; car la place du Ca- pitole est surtout la piace commune pour les habitants de Tou- Jouse , dont le vieil esprit municipal est toujours si vivace et si fortement enraciné. Le marché aux herbes et aux légumes ne peut être convena- blement établi que sous des halles couvertes, bien aérées , comme celles qui s'élèvent en ce moment au centre de la ville de Paris. Ce marché couvert serait placé d’une manière convenable et centrale, soit sur une partie de l'immense terrain vacant qui dépend de l’ancien couvent des Jacobins, aujourd’hui devenu propriété de la ville, soit sur un tout autre point, par exemple, dans l'emplacement oceupé près le boulevard Saint-Aubin , par les grands ateliers des Messageries, dont la suppression est im- minente par suite de l'établissement des chemins de fer du Midi, emplacement qui a , dans le temps, appartenu à la ville, et dont elle pourrait faire de nouveau l'acquisition. Mais, avant tout, il est important de chasser le marché de la place du Capitole, dont la décoration devrait être toute monu- mentale. Là pourraient s'élever les statues des personnages qui se sont illustrés dans les armes, dans les sciences et dans les DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 159 lettres, tels que Raymond de Saint-Gilles, Fermat, Cujas, Clémence Isaure , etc., dont les noms sont célèbres dans toute l'Europe. Le trottoir qui longe le Capitole serait remplacé par une grille entourant un parterre, qui aurait l'avantage d'isoler et de protéger les bureaux et le cabinet du Maire, tout en contri- buant, par ses arbustes , sa verdure et ses fleurs à compléter la décoration pittoresque du Forum toulousain. Arrosage. — La salubrité des marchés et des rues, ainsi que la réussite des plantations , réclament impérieusement un système complet d'arrosage public, qui peut être économique- ment réalisé en établissant sur les conduites des eaux des fontai- nes et à chaque cent mètres de distance , des ajutages s’élevant jusqu'aux bordures des trottoirs, ajulages auxquels viendraient se visser des tuyaux en cuir ou en toile , terminés par un bec conique ou par une pomme d'arrosoir, servant soil pour étein- dre les incendies, soit pour arroser la voie publique. Fontaines publiques.—Ce système d'arrosage se lie évidem- ment à un service de fontaines publiques ; celui de la ville de Toulouse , quoique insuffisant aujourd’hui, pourrait cependant recevoir ce complément peu dispendieux , qui serait plus large- ment développé alors qu'on aura amélioré l’état actuel de la distribution des eaux de Toulouse. Depuis plusieurs années, l'insuffisance de ce service a attiré l'attention des administrations qui se sont succédé ; mais mal- heureusement il n’a été pris aucune résolution. Cependant , de plus longs retards compromettraient infailliblement l'avenir et le développement de la cité ; aussi croyons-nous devoir rappeler succinctement quelques observations péremptoires que nous avons déjà présentées à ce sujet (1). (1) Annuaire de l’Académie des Sciences de Toulouse pour l’année 1855.— Tableau comparalif de la distribution d’eau dans quelques villes de France et de l’Europe. 160 MÉMOIRES Lorsqu'en 1820 , M. l'Ingénieur en chef d’Aubuisson dé Voisins créa et organisa le service des fontaines, on ne comptait à Toulouse que 50,000 hahitants; il avait évalué à 80 litres par tête la consommation journalière , tant pour les usages domestiques que pour le lavage et l’arrosage (1). Cette quantité se trouve réduite aujourd'hui à 49 litres 20, par suite de l'accroissement de la population , accroissement qui tend à se développer de plus en plus, et qui bientôt dépas- sera 160,000 âmes. C'est donc ce chiffre minimum de 100,000 âmes qui devrait être la base du service des eaux publiques à Toulouse. En restant même dans les limites posées par M. d’Aubuisson, ce serait par conséquent 8,000,000 de litres, ou 8,000 mètres cubes équivalant à #00 pouces de fontainier qu'exigerait ce ser- vice : or, le Château-d'eau ne fournissant actuellement que 200 pouces ou #,000 mètres cubes, le déficit est de moitié. La question réduite ainsi à sa plus simple expression , prouve (1) Dans un ouvrage récent sur les fontaines publiques de Dijon, dont il a été donné un extrait dans les Comptes rendus des séances de l’Institut (Académie des Sciences), n° 24, 16 juin 1856, M. Darcy donne la formule suivante pour trouver la quantité d’eau nécessaire à l’alimentation d’une ville, L s : : c - leprésentant le rapport du développement des rues à la population ; V le volume débité par minute et par borne-fontaine; t la durée de l’écoulement ; m un coefficient dépendant du nombre de bornes à placer pour une longueur déterminée ; { la largeur moyenne des rues ; e l'épaisseur de la lame d’eau affectée aux arrosages par jour et par mètre carré. Ù La discussion et l'application de cette formule ont conduit M. Darey à trouver en moyenne que le volume d’eau qu’il est nécessaire de distribuer par habitant est de 150 litres par jour, nombre bien supérieur à celui fixé par M. d’Aubuisson. Dans la capitale de la Grande-Bretagne , ce nombre est de 104 litres 50, ainsi que nous l’avons démontré dans nos Recherches sur la distribution d'eau à Londres (brochure in-8°, 1852), insérées dans les Mémoires de l'A- cadémie des Sciences de Toulouse, 4" série , tome 11, pag. 1. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 161 l'impérieuse nécessité où l’on se trouve d’aviser aux moyens propres à faire cesser l’état actuel des choses. Une solution énergique et prompte, une exécution rapide, peuvent seules procurer enfin à la ville de Toulouse les avan tages de propreté et de salubrité publiques, dont jouissent maintenant tous les grands centres de population. Propositions diverses. — Quelques mesures d’une impor- tance secondaire peuvent être signalées d’une manière succincte ; par exemple, l'inscription du nom des rues sur les lanternes à gaz, pour diriger les étrangers pendant la nuit ; l’établisse- ment, sur ces mêmes lanternes, d'horloges électriques mises en communication avec une horloge régulatrice, comme à Paris et à Lyon ; l'indication gravée sur les façades des monu- ments, et même des maisons particulières, de l’année de la construction et du nom de l'architecte, dans l'intérêt de lhis- toire de l’art; indication qu'il est facile d'imposer comme con- dition obligatoire dans les arrêtés d'autorisation (1). Enfin, maintenant que le pavé dit à l’alsacicnne tend si heu- reusement à remplacer dans toutes les rues de la villele pavage en cailloux roulés si incommode et si fatigant , il y aurait uti- lité à ouvrir un concours avec l'offre d’un prix considérable, huit à dix mille francs, par exemple, en faveur de celui qui présenterait la meilleure machine propre à tailler les cailloux ; (1) Ces indications ne sont pas une chose moderne , car au grand théâtre «le Pompéi nous avons vu , à gauche de la cour et près du grand corridor ’ D D voûlé venant aboutir à l’orchestre , linseriplion suivante : MARTORIVS M. L. PRIMVS ARCHITECT VS. « Martorius Primus architecte, affranchi de Marcus. » Sur la base de l’une des statues de l’ancien cloitre roman de St-Anne, rétabli dans le cloitre du Musée de Toulouse , on lit : GILABERTVS ME FECIT. Les anciens exemples à citer seraient innombrables : de nos jours, sur le piédestal qui supporte l’obélisque de Louqsor, au milieu de la place de la Concorde, on a gravé le nom de M. l’ingénieur Lebas, qui a dirigé les travaux d’érection de ce monolithe ; et sur la plupart des nouveaux bà- timents de Paris on lit avec le millésime le nom de l’architecte. 5° S.— TOME I. 11 162 MÉMOIRES l'économie annuelle qui résulterait pour la ville d’une semblable invention , couvrirait bientôt la dépense faite pour récompenser l'inventeur. Il est encore un certain nombre d'améliorations que la Com- mission aurait à signaler, notamment sous le rapport de la sa- lubrité ; mais la plupart d’entre elles sont consignées dans le rapport spécial faitau Conseil central d'hygiène du département de la Haute-Garonne, en octobre 1854, et qui a été inséré dans le Recueil des actes administratifs: en entrant dans de plus grands détails, elle craindrait, d’ailleurs, de dépasser de beau- coup le mandat qui lui avait été donné ; déjà cette sorte d’appen- dice à son Rapport sur l'Exposition universelle des Beaux-Arts, ne constitue que trop, peut-être, un excès de zèle; son excuse sera dans son ardent dévouement aux intérêts de la cité, ct dans le vif désir qu’elle éprouvait de répondre, autant qu'il était en son pouvoir , à la confiance dont elle avait été honorée. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 163 NOTE SUR GUILLAUME DE PUYLAURENS ; Par M. FLorenTiN DUCOS. Messieurs , Je continue l’examen critique des historiens du xnr° siècle qui ont raconté les événements de la croisade contre les héré- tiques Albigcois. L'année dernière, je me suis occupé du livre écrit par le moine Pierre de Vaux-Sernay ; j'ai ré@uit à sa juste valeur la qualité qu'on lui attribue de témoin oculaire des événements ; J'ai relevé tout ce qu'il y a d’incohérence et de désordre dans la narration des faits ; j'ai signalé les nombreux défauts d’un style dont les couleurs se sont produites sous l'inspiration d’une violente partialité ; j'ai déploré que l'écrivain eût oublié le rôle grave et digne de l'historien , pour prendre la tâche igno- minieuse de pamphlétaire. Aujourd'hui, je viens vous entretenir d’un autre écrivain contemporain de la croisade ; je veux parler de Guillaume de Puylaurens. Guillaume de Puylaurens, Guillelmus de Podio-Laurentii, a écrit aussi une courte histoire de la Guerre des Albigeoïs. Son livre est intitulé : Chronique de maître Guillaume de Paylaurens, CHRONICON MAGISTRI GUILLELMI DE PODIO-LAUREN- Tu. — Il renferme, non un récit détaillé, mais une narration rapide des événements relatifs à la croisade , depuis la mission de saint Bernard jusqu’au règne de Philippe le Hardi, c’est-à- 16% MÉMOIRES dire, jusqu'à la réunion du comté de Toulouse à la couronne de France. Guillaume de Puylaurens vivait en 1245 ; Catel en rap- porte la preuve qu’il a extraite d'un acte de donation ; il était chapelain du Comte Raymond VII.— Cette position aurait pu le rendre suspect de partialité; Catel le défend contre ce reproche, en disant que la vérité qui paraît partout dans cet écrit, le rend assez recommandable. Nous aurons bientôt l'occasion de fournir une preuve convaincante de l’impartialité de ce chroniqueur. Guillaume de Puylaurens parle fort peu des Comtes de Tou- louse qui ont précédé l’époque de la croisade. Il s’est contenté d'écrire leur généalogie au chapitre V de son livre; il ne la commence qu'à Raymond de Saint-Gilles, sans s'occuper le moins du monde de ses prédécesseurs. — Il s’est borné à écrire l'histoire de son temps, c’est-à-dire les guerres faites par les deux derniers Comtes Raymond contre Simon de Montfort et son suceesseur, toutes choses qu’il a vues ou entendues racon- ter, comme il le dit dans la préface de sa chronique : de his, vel queæ ipse vidi, vel audivi à protimo. Tous les autres qui ont écrit les guerres des Albigeois, dit Catel, sont passionnés; tel n’est point , comme nous l’avons déjà dit, le défaut de Guillaume de Puylaurens ; il ne donne pas dans ce travers. Bien loin de prendre aveuglément le parti du Comte de Toulouse , il n'hésite pas à exprimer le blâme sur sa conduite, lorsqu'il le croit mérité. Il regarde la croisade et les maux qu’elle entraîna comme une juste punition des peuples et de ceux qui les gouvernaient, pour les erreurs dans lesquel- les ils étaient tombés : et licet dixerim propter peccata populi, tamen prælatorum aut principum negligentiam non excludo. Il accuse leur négligence et les blâme de s'être endormis , lors- qu'ils auraient dû veiller pour empêcher l'introduction et les progrès des mauvaises doctrines : dormientibus enim olim, qui vigilare debuerant, latenter hostis antiquus in terras istas miseras, homines perditionis filios introduxit, etc. —L'i impar- lialité de l'historien éclate encore davantage dans le passage où DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 165 il parle du meurtre du légat Pierre de Castelnau ; il ne dissi- mule pas que quelque soupçon de complicité pesa sur la tête du Comte de Toulouse : nec multo post, dominus Petrus de Castronovo, legatus, transüt ad Dominum per glaiios impiorum ; cujus rei suspicione Comes non caruit Tolo- sanus. Les hérétiques qui furent désignés sous l'appellation générale d'Albiseois ne formaient point entre eux d'unité religieuse ; ils se divisaient en plusieurs sectes qui différaient essentielle- ment de principes et de doctrines. — Ils n'avaient de commun que le but, qui était le renversement de l'autorité du Pape. — Guillaume de Puylaurens compte quatre sectes principales, savoir : les Æriens, ceux qui niaient la divinité de Jésus- Christ ; les Manichéens, ceux qui croyaient aux deux princi- pes ; les V’audois, qui voulaient ramener à l’exécution littérale de l’évangile et professaient la communauté des biens ; enfin, les simples hérétiques, c'est-à-dire ceux qui rejetaient l'autorité du Pape et de l'Eglise et qui s’obstinaient à ne voir dans le Sou- verain Pontife que le simple Evêque de Rome. Les sectes hérétiques s'étaient ramifiées à l'infini; les mau- vaises doctrines avaient séduit la multitude, et leur progrès incessant portait un coup fatal au catholicisme. Pour démontrer combien elles avaient pris d’empire sur les esprits, Guillaume de Puylaurens raconte, à titre de digression (diverticulum) , la vision qu’eut en songe un Evêque d’Albi, dont la consé- quence fut cette triste démonstration , que l'autorité des prélats était tombée dans le mépris : quam periculosè prælatorum contemnerelur auctorütas. — Noici la traduction de cette page curieuse : « J'ai entendu raconter, dit notre auteur, par le vénérable » Père Guillaume , Evêque d'Albi, Evèque de très-haute con- » sidération, qu'une nuit, étant livré au sommeil , i! eut un » songe, dans lequel il lui semblait étre assis auprès du lit de » Guillaume-Pierre de Berens, son allié, qui était malade ; à » côté du lit il voyait un four ardent , vers lequel le malade » commençait à se diriger. Malgré l'opposition de l'Evêque, Li hf 166 MÉMOIRES ML CS NV Ce D eÙù I 18 a AD AVE ÿ 2 qui s’efforçait de l'arrêter, le malade se traînait en rampant pour entrer dans le four. Voilà qu’il arriva que, pendant que l'Evêque était dans l’angoisse de cette vision, tout à coup l’on frappe à la porte de sa chambre, et des messagers envoyés pendant la nuit lui annoncent que le susdit Pierre de Berens était tombé gravement malade et qu'il implorait la présence de l'Evêque. Celui-ci, excité par ce qu’il avait vu en songe, quoique auparavant il ne sût pas que Berens était malade, s’empressa de se rendre auprès de lui, sans attendre le jour. — Etant arrivé, après trois lieues de marche, l’Evêque le trouva fort malade ; il s’assit à côté de son lit et lui demanda pourquoi il l'avait appelé. Le malade dit qu'il voulait le con- sulter pour savoir ce qu’il valait mieux faire relativement à sa succession ; s’il la partagerait entre ses deux fils, ou bien s’il la leur laisserait indivise. L’Evêque lui répondit qu’il valait mieux faire le partage, dans la crainte que chacun de ses fils ne voulüt s’arroger la succession tout entière ; le malade se rangea à cet avis. Cette affaire et plusieurs autres articles étant réglés, l’'Evêque lui demanda ce qu'il entendait faire de son corps, s’il voulait être enseveli au monastère de Gaillac, ou à celui de Candeil, où bien dans l’église d’Albi. — Le malade lui répondit qu’il ne convenait pas qu'un Evé- que se mit en peine de ces choses-là, et qu’il avait déjà pris un parti à ce sujet. — Sur les vives insistances de l'Evêque pour qu'il fit connaître son option pour un de ces trois lieux, il répondit qu'il voulait être porté à Bononie ou à Bonosie, c’est-à-dire chez les hérétiques. — Le Prélat s’efforçant au contraire de soutenir que cela ne lui serait pas permis, Berens répondit : « N’allez pas vous tracasser sur ce point, car si je ne puis pas arriver à eux d'une autre manière, Je m'y traînerai en rampant, à la maniére des bôtes. » — Ce que l’Evêque ayant entendu , il abandonna celui que Dicu avait abandonné, puisque, tout pontife qu'il était, il n'avait pas pu l'empêcher de se conduire autrement. » — Guillaume de Puylaurens ajoute la réflexion suivante qui résume sa pen- see : « Cet exemple prouve combien la peste hérélique avait DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 167 » prévalu, puisque l'autorité d’un pontife n'avait pas pu la » combattre dans la personne d’un allié qui lui était soumis! » Ce fragment donne une idée dela manière dont notre auteur a écrit sa chronique. — Il raconte les faits avec la plus grande simplicité, les présente exactement dans leur ordre chronelo- gique. Il a le ton grave et calme qui convient à l'historien; son style ne sent point le rhéteur; il est d’une grande sobriété, presque totalement dépourvu de figures; on aurait peine à y signaler une exclamation ou une apostrophe.—Sous ce rapport, c’est un écrivain de bon goût, quoique sa latinité, qui est celle de l’époque. manque d'élégance et de pureté. — Guillaume de Puylaurens, nous devons le dire, a peut-être aussi les défauts de ses qualités. — Cette sobriété que nous avons louée dégénère quelquefois en sécheresse. Cette abstention presque générale d’aperçus moraux laisse dans le récit des faits un vide que le lecteur ne peut pas toujours combler. Toutefois, il est un genre d'éloges que notre historien mérite, Quoique attaché à la maïi- son des Comtes de Toulouse et presque placé dans leur domes- ticité, il a su conserver son entière indépendance , et lorsqu'il raconte un acte odieux , il l'accompagne du blâme sévère que cet acte mérite. Il est vrai qu'il a passé sous silence la péni- tence publique de Saint-Gilles; sans doute il n’a pas voulu réveiller des souvenirs douloureux et humiliants pour la fa- mille puissante au service de laquelle il s'était attaché ; mais il raconte la mort de Baudouin , qui fut pendu par les ordres de son frère Raymond VI, Comte de Toulouse, et il accompagne celte exécution barbare de réflexions flétrissantes. — Voici les circonstances de ce fait. Baudouin, chevalier d’une haute valeur militaire et frère naturel de Raymond VI, dont il n’était pas aimé, était chargé, au commencement de la croisade , de la défense du château de Montferrand. Sous prétexte qu’on lui avait refusé les secours qu'il demandait, Baudouin livra cette place forte à Simon de Montfort. — Le Comte de Toulouse vit dans cette conduite une trahison dont il se montra extrêmement irrité, et dans une entrevue avec Baudouin , il lui (émoigna son indignation. 168 MÉMOIRES Baudouin , se croyant injustement maltraité, passa sous les dra- peaux des croisés, et, à la bataille de Muret, il fit beaucoup dé mal à l’armée toulousaine. Plus tard, une trahison dontil fut la victime , le fit tomber entre les mains de Raymond.— Laissons parler Guillaume de Puylaurens.— Baudouin était allé prendre possession du château de l’Olme, qui lui avait été donné par Simon de Montfort. Le gouverneur de ce château lui fit l'ac- cueil le plus amical ; puis, dans la nuit, il le fit saisir ct atta- cher dans son lit, et il le livra aux partisans du Comte de Toulouse; celui-ci fit conduire Baudouin à Montauban, « où » il le garda plusieurs jours en prison; puis, se rendant » au mauvais conseil de Roger (Bernard }, fils du Comte de » Foix, de Bernard de Portella , Catalan , et de quelques autres » seigneurs, pour venger la mort du Roi d'Aragon, qui avait » été tué à la bataille de Muret, il condamna son frère à être pendu , lui donnant à peine la permission d’avoir un prêtre pour se confesser. Les Frères du Temple demandèrent son corps; l'ayant obtenu, ils le détachèrent de l'arbre et l’em- portèrent à leur château de Ville-Dieu, où ils l’ensevelirent, à côté de l’église. Ce fratricide entacha beaucoup la réputa- tion du Comte; il aurait dù au moins faire grâce à son frère de la potence, qui, d’ailleurs, était une injure pour lui-même; il aurait pu le faire mourir d'un supplice moins ignomi- nieux. Mais le juste, de quelque genre de mort qu'il soit affligé, sera toujours au séjour des élus. Celui qui était lié par un serment envers l'Eglise ne pouvait s’y soustraire, dans une circonstance aussi grave, surtout lorsque son frère n'avait eu pour lui aucun bon sentiment et qu’il Favait exposé aux plus grands dangers. » Pour achever de vous faire connaître notre historien, je vais placer sous vos yeux la plus grande page de sa chronique ; c’est le récit de la bataille de Muret, qui remplit les chapitres XXI et XXII de son livre. a« A la même époque, le Roï d'Aragon, qui avait été heureux » dans sa guerre contre les Sarrasins, voulut aussi essayer sa » fortune contre les Chrétiens, et, vers la fin de été, il vint à D © EL SO NEVER TR » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » > » » » » » » » DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 169 Toulouse ; là, ayant pris conseil avec les Comes, les grands et les citoyens de Toulouse, il partit emmenant une troupe nombreuse; il vint assiéger le château de Muret, dans lequel le Comte Simon avait un fort établissement et d'où il inquiétait les environs de Toulouse. Les alliés rassemblèrent une armée dans les terres voisines. — Le Comte de Monfort en ayant eu connaissance, s’empressa d’accourir au secours de sa garni- son. — J'ai moi-même, pendant plusieurs années, entendu raconter au seigneur Maurin, abbé de Pamiers, homme digne de foi et recommandable sous tous les rapports, qu'il s'était rendu au-devant du Comte de Montfort jusqu'à Boulbonne ; là, ayant appris qu’il venait au secours des assiégés et qu’il allait livrer bataille aux assiégeants, l'Abbé lui dit : « Vous avez bien peu de combattants comparativement à vos adver- saires, parmi lesquels se trouve le Roi d'Aragon, guerrier très-expérimenté dans les batailles et très-éprouvé, qui amène avec lui des Comtes et une grande et forte armée; vous ne pouvez pas, ayant si peu de monde, vous mesurer avec le Roi et une si grande multitude de troupes. » Lequel, à ces mots, tira des lettres de son portefeuille et lui dit : « Lisez ces lettres. » L'Abbé, en les lisant, vit que le Roi d'Aragon les écrivait à une dame noble de Toulouse , lui disant que c'était pour l'amour d'elle qu'il venait chasser les croisés de celle terre, en y ajoutant des compliments. L'Abbé ayant lu ces lettres, dit à Montfort : « Que voulez-vous dire avec cela ? » — Ce que je veux dire, répondit Montfort? c'est que Dicu me soit en aide, je n'ai pas à craindre le Roi qui, pour une femme, prétené renverser l'œuvre de Dieu. Cela dit, il remit bien vite la lettre dans son portefeuille. Sans doute quelque domestique, ou secrétaire de ladite dame noble avait livré ces lettres au Comte, comme chose curieuse , et le Comte les por- tait pour être un témoignage devant le Seigneur contre l’homme efféminé qui, par une aveugle confiance, ne s'abs- tenait pas où ne craignait pas de résister à Dieu. » Et étant partis, ils sont entrés dans Muret, quoique les ennemis eussent pu , au passage du pont, les exterminer jus- 170 MÉMOIRES » » » » » » » » » » > » >» » » » » » » » » » » » Y qu'au dernier. Et lorsqu'ils furent entrés , les Pères vénéra- bles qui étaient venus avec Montfort, Foulque Evêque de Toulouse, les Evêques de Carcassonne et d'Agde commencè- rent, à cause de l'incertitude des événements de la guerre, à rechercher s'il n’y aurait pas un moyen de faire la paix , ou tout au mois d'obtenir une trève. Mais le roi d'Aragon ne voulant accepter ni l’une ni l'autre, si ce n’est à des condi- tions déshonorantes et ruineuses pour l'Eglise; et le Comte Simon présumant que, s’il abandonnait le château à ses adversaires, tout le pays s’insurgerait contre lui, ferait cause commune avec les confédérés, et que le nouvel état des choses scrait pire qu’il n'avait jamais été ; considérant, d’ailleurs, qu'il servait la cause de Dieu et de la foi , tandis que ses enne- mis venaient la combattre, après toutefois que les assiégeants eurent été chargés des liens de l’excommunication , il pensa qu’il valait mieux courir les chances d’un jour de péril, que de languir dans de nouveaux délais, qui augmenteraient l’au- dace de ses ennemis. Que dirai-je de plus? Les soldats de la croix choisirent le jour de la Sainte-Croix pour livrer ba- taille. Après s'être confessés , avoir entendu l'office divin et avoir fortifié leur âme avec le pain salutaire de l'autel, et leur corps par un repas frugal, ils prennent leurs armes et se préparent au combat. Le Comte voulant monter son cheval, une sangle de la selle se rompit ; il mit pied à terre, et la selle fut aussitôt réparée. Lorsqu'il fut remonté, le cheval, se cabrant , le frappa au front; il en resta étourdi pendant quelques instants : accident de mauvais augure, comme plusieurs le croient, qui semblait présager que si dans ce moment il eût attaqué les Ariens, la bataille aurait eu des suites fàcheuses pour lui. — Alors ils eurent l'idée de ne point marcher directement contre l’armée ennemie , afin de ne pas exposer leurs chevaux à la grêle des traits de l’armée toulousaine. Et ils sortirent par une porte qui regarde lorient, tandis que le camp ennemi était du côté de l'occident. Les croisés paraissaient prendre la fuite, pour ceux qui igno- raient leur dessein, jusqu’au moment où, s'étant un peu DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 171 » éloignés, ils traversèrent un ruisseau et débouchèrent dans » une plaine, en face de l’armée. Il y avait avec le Comte de » Montfort, Guy, son frère, Baudouin, frère du Comte de Tou- » louse, Guillaume de Barres, Alain de Roussy et beaucoup » d’autres, jusqu'au nombre de mille chevaliers armés. » Le Roi d'Aragon se prépara donc au combat contre l'avis » du Comte de Toulouse, qui opinait pour que les alliés se » fortiliassent dans leur camp, afin d’affaiblir leurs agresseurs » dont les chevaux seraient blessés à coups de traits et de lan- » ces, et que, par ce moyen, ils repousseraient ct vaincraient » plus facilement; ainsi ils les forceraient à la fuite et à leur aban- » donner le château de Muret qu'ils ne pourraient garder faute » de vivres. -— À quoi le Roi ne voulait pas acquiescer , attri- » buant ce conseil à la crainte et à la lâcheté. Le Roi ayant donc » disposé ses troupes , les alliés marchent au combat. La pre- » mière attaque fut faite par le Comte de Foix , à la tête des » Catalans et d’une multitude considérable de combattants. De » l’autre côté (ainsi que je l'ai entendu raconter par le seigneur » Raymond, dernier Comte de Toulouse, qui, à cause de son » jeune âge, ne pouvant pas prendre part au combat, avait » été conduit à cheval sur une hauteur, d'où il pourrait voir » l’action} , le Comte Simon disposa sa troupe sur trois colon- nes, comme il en avait pratiqué l'usage dans les batailles ; puis, tout à coup, les dernières se joignirent aux premières, et toutes attaquèrent à la fois, sachant bien que les efforts » réunis de tous dans une attaque en assurent le succès ; ainsi, » dans ce premier choc, ils renversèrent les alliés et les chas- » sèrent de leur camp comme le vent chasse la poussière. Ceux- » ci se réfugièrent, comme ils purent, dans les derniers rangs. » » 35 VV ÿ De là, les croisés se portent vers la troupe du Roi dent ils ont reconnu l’étendard , et ils se précipitent avec une telle impé- » tuosité que Le choc des armes et le bruit des coups, portés dans » l’air jusqu’au lieu où était le Prince qui me le racontait , pro- » duisait l'effet du bruit d’une foule de haches qui abattraient » des arbres dans une forêt. Là, le Roi fut tué et plusieurs grands » seigneurs d'Aragon autour de lui. Les autres prirent la fuite, 172 MÉMOIRES et une infinité périrent en fuyant. Les Comtes de Toulouse et de Foix ne durent leur salut qu’à la fuite. Quant à la troupe toulousaine qui était restée dans le camp, défendu par des chars et d’autres barrières, elle ignora qui avait remporté la victoire, jusqu’au moment où elle vit les croisés portant l'étendard royal en signe de trophée. Alors elle se précipita vers la Garonne pour s'emparer des barques ; ceux qui purent y entrer se sauvèrent ; les autres se noyèrent, ou périrent dans la plaine sous l'épée des croisés; en sorte que l'on dit que le nombre des morts fut de quinze mille. Le corps du Roi fut demandé et obtenu par les frères hospitaliers de Saint- Jean : ils le trouvèrent nu , comme il fat dit à cette époque, et ils l’emportèrent. Pendant que cette foule était égorgée, plu- sieurs blâämèrent ce massacre; ils eussent préféré que l'on fit des prisonniers. — Cependant un certain nombre, auxquels la vie fut laissée, moururert plus tard dans les prisons, ou payè- rent une rançon. Il est très-vrai que, du côté de l'Eglise, il n’y eut qu’un seul homme de tué. Voilà le châtiment que s’atti- rèrent dans ce combat de Chrétiens, l’orgueil et l'inconduite d’un Roi qui avait été toujours triomphant, lorsqu'il combat- tait les Sarrasins. — 11 ne fut pas détourné de sa folle entre- prise par l'amour même de son fils qu'il avait confié à son ennemi , par un traité qu’il avait violé, bravant la vengeance de cet ennemi qui pouvait le mettre à mort. Ce fut une pitié de voir à Toulouse la douleur et les lamentations de ceux qui pleuraient les malheureux tués dans le combat ; il n’y avait presque pas de famille qui n’eût à regretter un des siens qui était mort, ou qu’elle croyait mort, où qui était prisonnier. La cause de cette catastrophe doit être attribuée à l'erreur d'un peuple qui, au lieu de recourir à la force divine , avait placé sa confiance dans les forces humaines , et qui se jeta aveuglé- ment dans les projets audacieux d'un chef dont il partageait la fureur. Au contraire, leurs adversaires, se confiant en Dieu , et n’espérant rien de leur petit nombre , mais célébrant dans ce jour, avec ferveur, la fête de la Sainte-Croix , comme les champions de Dieu, vainquirent leurs ennemis. Retournés DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 173 » riomphants dans le camp toulousain, ils rendirent des actions » de grâces à Notre-Seigneur Jésus-Christ qui avait daigné, à » eux en si petit nombre , accorder la victoire sur leurs ennemis » si nombreux. » Tel est le récit de la bataille de Muret. Cette fois , Guillaume de Puylaurens a cru devoir déroger à ses habitudes de laco- nisme et de sobriété de style; il a voulu donner un peu plus d'ampleur au grand drame dont il a tracé le tableau. H n’a pas dédaigné quelque ornement de langage ; il est arrivé jusqu'à la comparaison. Nous en trouvons deux dans cette page ; dans la première, il compare les alliés refoulés par les croisés, à la poussière des champs que le vent chasse devant lui; dans la seconde, le choc des armes, dans l’attaque contre le roi d'Ara- gon, est comparé au bruit des haches qui abattent les arbres d’une forêt. Cette comparaison n’était pas nouvelle ; nous la retrouvons dans le chant 16° de l’'Iliade. Homère s’en est servi pour peindre le bruit du choc des guerriers Grecs et Troyens qui se disputent le cadavre de Sarpédon. — J'emprunte la traduction de M. Bi- gnan. Il s’agit de Patrocle : « I] marche, et tel qu'un dieu Mérion suit sa trace ; » Un vaste bruit s'entend dans un lointain espace ; » Lorsque les bûcherons , sous leurs coups redoublés » Font gémir les échos des vallons ébranlés ; » Tel dans ses flancs profonds le sol s’agite et tremble, » Tandis qu'en se heurtant retentissent ensemble » Les grands casques d’airain , les épais boucliers, » La lame à deux tranchants, les glaives meurtriers... » Un poëte récent, qui appartient à cette localité, l'auteur de l’'Epopée Toulousaine, ayant à retracer la bataille de Muret, s’est aussi emparé de cette comparaison qu'il trouvait dans Guil- laume de Puylaurens : « La lutte ,-au même instant, s'engage plus terrible, » Et dans l’air obseurei s'élève un bruit hornble, » Comme l'écho bruyant qu'éveillent dans les bois » Mille haches tombant et frappant à la fois... » 5° 5. — TOME I. 12 174 MÉMOIRES Je croyais traduire Guillaume de Paÿlaurens que j'avais sous les yeux, et, sans m'en douter, j'imitais Homère à qui je ne pensais pas. Je vous demande pardon, Messieurs , d'avoir cité mes faibles vers; mais j'ai voulu, en passant, fournir une nou- velle preuve de cette éternelle vérité, qu'il n'y a rien de nou- veau sous le soleil ; et que telle idée, telle image, dont un auteur croit avoir fait le premier la découverte, a déjà été mise en circulation depuis des milliers d'années. Je finirai cette notice par un dernier trait qui prouve tout à la fois la loyauté de notre historien et celle du Comte de Toulouse Raymond VI. Je veux parler de la justice rendue à un ennemi tombé. L'on se rappelle avec quelle âcreté et quelle violence le moine Pierre de Vaux-Sernay a deversé l’injure et la diffamation sur le vieux Comte de Toulouse. — Personne ne serait étonné que l'historien des Comtes de Toulouse eùt usé de représailles envers Simon de Montfort. Vous allez voir avec quelle modération , avec quel respect pour une haute renommée , Guillaume de Puylaurens parle de ce dernier. Il raconte la mort de Montfort, tué sous les murs de Toulouse, sous le coup d’une pierre lancée par un mangonneau , et il ajoute : « Voilà que celui dont le » nom portait la terreur, de la mer Méditerranée jusqu'à » l'Océan, tombe sous un seul coup d’une pierre; ce coup fait » tomber celui qui était debout, et l'affection des sujets est » abattue pour celui qui était bon. — Car j'ai entendu, dans la » suite, le Comte même de Toulouse, qui mourut quelque temps » après, bien qu'il füt son ennemi, louer sa fidélité dans les » engagements, Sa prévoyance, son intrépidité et les hautes » qualités qui glorifient un prince. » C'est là un acte de loyauté qui honore autant le Comte de Toulouse , rendant cet hommage au guerrier célèbre qui fut son plus cruel ennemi, que l'historien consciencieux qui s’est fait un devoir de le consigner dans ses écrits. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 173 SUR QUELQUES POINTS DE LA THÉORIE DES ÉQUATIONS DIFFÉRENTIELLES LINÉAIRES ; Par M. E. BRASSINNE. Coxsipérons deux équations différentielles à coeflicients variables , lune du premier ordre et du degré 72 de la forme : @ (Re) +4 +a (ne) +. +a(T)+e so. La seconde linéaire d'ordre 2 de la forme : 6 dm y dm — dy (2) el D +. . Us ne - Y —0. S du _1dy à Les AM ml A uPPOSONS Que 7x * et qu'on veuille déterminer b,b,...b,_,,b,, de telle sorte que les équations (1) (2) fournissent les mêmes solutions pour y. Il suflira d’expri- 1dy 1&7y en fonction de 2e ce qui sera ydx? ydx NET LE] dx q mer d’abord — TE ROUE À du re aisé ; si en eflet nous faisons TZ; On aura par la diffé- rentiation : 14y 1&7y dz. 1dy 2 7 re Wa 3L_— = — z +5 MES. y dx SR VYdm — 21 dr 2% dx? Par ces transformations les équations (1) (2) seront fonc- tions de z et de ses dérivées; éliminant ces dérivées, par la différentiation successive de la première équation, on tom- bera sur une équation algébrique en z du degré "7", qui 176 MÉMOIRES devra être identiquement satisfaite. Par suite ses coeficients égalés à zéro fourniront par des relations du premier degré les valeurs de b,b,...b,. Si on donnait l'équation différentielle linéaire (2) et si on voulait transformer cette équation en une autre équivalente du premier ordre et du degré 7», le problème serait le plus souvent impossible, parce qu’il exigerait l'intégration d’équa- tions simultanées très-compliquées. On conçoit néanmoins cette substitution de léquation de forme algébrique (4) à l'équation (2) toujours possible : en effet, l'équation linéaire d'ordre 72 peut être décomposée en équations linéaires du ; dy : Re premier ordre de la forme Al y =0, d’où se déduisent * I d 4 CE Q les facteurs ; Je Ts de l'équation (4). 1° Remarquons que si les cocflicients à, a,. . . de l’'équa- ; ; du DATA uon (1) sont constants, FF ou PTE sera Constant et que par suite la transformation de Féquation (4) dans l'équation (2) donnera a, —=b, a,—=b,.... considération qui fait dépendre l'intégration connue d’une équation différentielle linéaire à coefhicients constants, d’une méthode plus générale qui con- siste à déterminer, si cela est possible , l'équation algébrique à coefficients variables équivalente à équation différentielle. 2 Remarquons aussi que si les coefficients de léquation (4) sont des fonctions algébriques entières de la forme : a+Bx+Sx"...,les coefficients de l'équation (2), bb... ne pourront être que des fonctions rationnelles de x; et comme on peut varier à l'infini les coeflicients de équation (4), ceux de léquation (2) représenteront une infinité d'équations différentielles linéaires à coefficients variables et de forme algébrique rationnelle, et on voit que l'intégration DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 177 de ces équations suppose la résolution générale des équa- tions algébriques , laquelle n’est connue que pour les quatre premiers degrés. Pour ces degrés , il est visible que dans le cas supposé, les racines de l'équation (E) étant données par des radicaux du second et du troisième degré. . . Fintégrale de l'équation différentielle (2) sera exprimée par des expo- nentielles , dont les exposants seront des fonctions ellipu- ques ou abéliennes de la variable. 3° Remarquons enfin que si les coeflicients à, , 4,...4,, sont exprimés par des transcendantes de diverses classes , les coeflicients D, b,...b,, fonetions des premiers, seront exprimés par des transcendantes de même ordre et d'ordres inférieurs. Ainsi, par exemple, la différentiation pourrail ren- dre algébrique une transcendante qui entrerait dans les eoef- ficients a, , a... telle que log.x par exemple dont la dé- FN . ; . L rivée est la fonction algébrique — a 4° En général, si on veut intégrer une équation difléren- tielle linéaire d'ordre #2 et dont les coefhicients sont des fonctions rationnelles entières de x, on cherchera à trouver l'équation équivalente de degré #2, en prenant pour b,, b, D... des expressions algébriques indéterminées et appliquant la méthode précédemment indiquée pour passer de l’équa- tion (1) à l'équation (2). Il est aisé de trouver par un caleul très-simple et très- élégant, l'équation différentielle d'ordre #2 dont les solu- tions sont celles de l'équation binôme du premier ordre 1 d EX m m mt : ———) —A"—0, ou z®—A"—0o. Ici les valeurs-de z sont «A, AÀ,a"AÀ...,u,a,a... étant les racines de l'unité; mais pour ne pas compliquer inutilement l'écriture, nous nous contenterons de déterminer l'équation du {roi- 178 MÉMOIRES 15 : d? d F . * : DH +, + by = 0 équivalente à sième ordre —— da H \ 1 dy \3 x - à Te. l'équation (7) —A5—o. D'après les notations indiquées: y dx 1dy 1 d?y dz 1d°y ae UE D = 3 ———= 2° —, = =Z BB Cri y dx OT F + y da 2° + CE PAU FE Divisant l'équation du troisième ordre par ÿ, faisant les substitutions, on aura : d2z , dz — + (32:40, )+2+b,2+0b,z+b=0 dx? ‘ dx mais d’après l'équation binôme ; z=4A, DAS QU par suite et en désignant les dérivées successives de À par rapport à x par À’, A”, la relation précédente deviendra : a N!+3 0 À Aa Ab, Ha A+ ba A +b,aA+b,=0 ou : a A3 D La (3 A A'LD, A°)+a(A"+ AD, +b,A)=0 et deux équations pareilles en changeant « en «, «'; or la somme de ces trois équations donne d’abord ( puisque La ta®—o a+a+a/=o), A+b,=0o ou b,=—A;; mais comme &'—1, on peut supprimer les deux premiers termes &°A%-Lb, de la dernière relation qui divisée par « devient : 2 (BA A DA) a (AH AB + DA) 0: celle-ci multipliée par « et ajoutée avec les deux analogues qu’on trouve en changeant « en a’, #” donne 3 A! 3AA'!'+b,A°=o ou DE et par suite A!LA'b,+b,A=o A" 3A" el D À es L'équation différentielle équivalente à l'équation binôme sera donc : DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 179 By QA'dy gr SARNED ai Be TL VE A7 0. Pour le second ordre on trouverait By La ; vie 20h de nm D ——— dx? dx 08 dx Nous reviendrons dans un prochain travail sur la méthode précédente et sur les applications qu’on peut en faire; il nous sullit d’avoir indiqué d’une manière générale les con- sidérations qui nous ont guidé dans nos recherches. NOTE SUR LA RECHERCHE DES SOLUTIONS CONJUGUÉES DES ÉQUATIONS DIFFÉRENTIELLES LINÉAIRES. Dans mon mémoire sur la composition et la décomposition des équations différentielles, j'ai désigné par 'X, "X, "X... les fonctions qu'on déduit d’une équation différentielle li- néaire, en assimilant cette équation à une équation algé- brique dont les ordres seraient les exposants, et en prenant les dérivées successives de ces polynômes symboliques. Cela posé, si l'équation linéaire d'ordre »m, X,,—0 à des solutions simples »,, 7,, 7, , des solutions doubles L Zi, DZ, 2,3 HZ), LA, triples v, xv, L' Vies Dp, ve nous représenterons cette équation sous une forme symbo- lique : ? (IE 7, 24 3 E E L \ (1) X,={U,, @) 1Y37p, ); LE (z, LA 21 Æ2,-- °)5 U>, Cpep æu. ce) | Or nous allons prouver que l'intégration complète de X,,, dépend de l'intégration successive des trois équations d’or- 180 MÉMOIRES dre ps, p,, p,-.. (dans l'égalité précédente on suppose P.+2p,+3p;:=m). En effet, si on cherche les solutions communes à X,,, 'X,, on trouvera l'expression : (2) [U, (z,2,...), D, (v, xv,v,..)]=0 les solutions communes à X,,_, et /X,,_, seront données par : (3) LENCATPENT Par l'intégration d’une équation d'ordre p, on détermi- nera P,0,0,,.+. ON Connaitra par suite æv,xP,... et la fonction U,, (v,x, s,æx...). Par la théorie de la composi- tion des équations on formera Ù,, (2,2, 0,9, 2..)=0 (4) équation qui combinée avec (2) donnera pour la détermina- üon de z,z,..., à résoudre une équation d'ordre p, puis- que les solutions de (4) sont communes à (2). z, z,... étant connus ainsi que z,æ, z,æ... on obtiendra sans difficulté la fonction : [U., (z, LUE D, (Anx, vx.) ]=0o au moyen de laquelle on réduira l'équation (1) à l’ordre P,. Les inconnues seront y,,7,...7, . DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 181 DES TERMES QUI COMPLÈTENT LA FORMULE GÉNÉRALE DE LA MÉCANIQUE ANALYTIQUE , DANS LE CAS DU FROTTEMENT ; Par M. E. BRASSINNE. Ox sait que le principe des vitesses virtuelles, qui sert de base à la mécanique analytique, est rendu général, dans cet admirable ouvrage, au moyen de la méthode des multi- plicateurs. Par cette méthode, les équations de condition entre les points du système, sont en effet introduites comme des forces dans la formule générale, et par suite tous les problèmes de la mécanique sont ramenés au cas le plus simple, celui d’un système libre. Si, par exemple, un point x, j', z' est assujetti à demeurer sur une surface L=o, il sufira d'ajouter aux moments des forces, le terme 0 PA À étant un multiplicateur, dont le rapport à la pression normale N, est donné par la relation : NY MSN En dx dy d2 Nous remarquerons que Lagrange ne s’occupe pas, dans son grand ouvrage, des résistances produites par le frotte- ment des surfaces en contact, soit qu'il n’ait pas cru ces résistances susceptibles d’une évaluation précise, ou qu'il n'ait pas porté son attention sur ce sujet. Quoi qu'il en soit, en supposant une portion de la surface d'un corps, en con- laet avec la surface L=o , il en résultera, d’après Coulomb, 182 MÉMOIRES une résistance dans le plan de contact, indépendante de l’éten- due de la surface, que nous pourrons par suite réduire à un point ou à un élément, et proportionnelle à la pression nor- male N. Cette résistance sera done exprimée par f N, f étant un coefficient empyrique, variable avec la nature des surfaces frottantes. Or il sera aisé d'introduire la force f N dans la formule des vitesses virtuelles, bien que sa direction ne soit complétement déterminée que par les forces qui agissent sur le système. En effet, les équations de la normale, au point a”, y’, z', de la surface L—o sont : dL ! dL ! d L ! d L 1" con our ren Lee à par) Cned en désignant par Î une quantité indéterminée, l'équation d’un plan normal quelconque passant par cette normale, sera : dL , ad, . n dL dt Fr (xx Hd ef jet CH) z)=0 et les cosinus des angles de la résistance f N, supposée per- pendiculaire à ce plan, avec les axes'des x, y, z, seront (Ts D LTeON NCA D Ù (Tr D) ? AE dx' Ruz'' Rd? KR = dl)? dL dL\? en faisant : R—\/(+1 (>) +(7+15) Mais la force f N, agit en sens contraire d’une force per- pendiculaire au plan normal, et dont le moment pourrait être estimé par la méthode des multüplicateurs. Par eonsé- quent, le terme qui devra être ajouté à AÔL, dans le cas du frottement sera : EN de aboli ent 1 g D TRE T0 x so, OR AE CE Ô z . Les conditions du problème feront trouver dans chaque cas les valeurs de x, Let par suite de N et fN. Si les surfaces en contact, faisant partie d’un système de dy DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 183 corps, sont de nature différente, il faudra, pour chacune d'elles , prendre une valeur particulière du coeflicient f. Par cette extension de la formule de Lagrange, les questions d'équilibre, dans lesquelles on fait entrer la considération du frottement, sont ramenées à un procédé analytique uni- forme; de plus, la méthode générale fait ressortir l'insuffi- sance des solutions de quelques problèmes traités par des considérations géométriques. Nous nous contenterons d'in- diquer l'application de ce qui précède à deux questions. 4° Un point sollicité par des forces, P, Q est en équilibre sur un hélicoïde —=2—rtangé—rtangæ.p—y=0; on tient compte du frottement. Les génératrices rectilignes à © E LL de l’hélicoïde rencontrent l'axe des z sous un angle =—6. « est l'angle variable que font avec l'horizon les diverses hélices qu’on trouve en donnant des valeurs particulières à , qui est compté ainsi que ® sur un plan perpendiculaire aux 3. Le pas 27.r.tang x des diverses hélices est constant; si le point placé sur l’hélicoïde à pour coordonnées 3, Fr, ?, on pourra prendre le rayon r pour l'axe des x, et une per- pendieulaire pour l'axe des y, par suite dx=dr, dy=r.de. Or, sans rapporter l'équation de l'hélicoïde à ces nouvelles coordonnées, il est visible qu’on aura : dL adL Haies Te tan g6, GE UT — tang «. De plus, lorsque le point est retenu à une distance fixe x =r de l'axe des z, cette condition introduira dans la formule d'équilibre un moment mÜx. Si, pour abréger, on fait R'=V1 +tang’a— tang’6, la formule générale d'équilibre sera 18 MÉMOIRES Q9g+PSp + s —tang6.d x — tangad y)+ (4) +8 x (3x +1) y (tang6 + Trang )9 2 )—0 qui donnera les trois suivantes , en supposant À dirigé sui- vant des z, et P suivant y. VIe — Q +2 —f (lang 6 + I tang «) 0 P—tange—frpi=0 (2). —\tangé + =fiÈ=0 mais par hypothèse le point ne peut se mouvoir dans le sens des æ; le frottement qui n’a lieu que dans le cas d’un glis- sement possible, est donc nul dans cette direction, ce qui = ' R' . . eo Y\ exige que dans le terme — fa on ait L'infini. Cette hypo- thèse entrainera la relation, m—Xtangé; et les deux pre- mières relations précédentes se réduiront à : —Q+2— fr. R'sine=o P—Atanga—/fà.R'cosa= 0 La qui font trouver de suite la formule de M. Persy en élimi- minant À. Si le point avait été libre sur l'hélicoide, il aurait fallu supposer —0o. Si dans cette hypothèse on a 6—0, «—0 l’hélicoïde se réduit au plan horizontal, et la formule générale (1) devient : (dx+1dy QD GHPIp HI PI EE 0 Vi+t Si P fait avec des axes des angles, «, B, y, Q étant situé d'os le plan zx, et son prolongement faisant avec les axes T7 a dr : Dispo, ds x, z des angles a, clé les trois équations d'équili- bre deviennent : DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 185 À P cosa— Q eos a-—7— 0 Pcosy—Qsna+=0o val P cos dns ê R d'où 1=Qsina—P cosy (P cosæ —Q cos a} +P’cos B—f"(Qsina—Pcosy) si B—0, on trouve les formules connues relatives au plan incliné. 20 Considérons un tour, dont les tourillons cylindriques _de rayons 9, p” sont en contact avec les surfaces L=o, L'—o. Pour plus de simplicité, nous supposerons que l'axe du tour se confond avee celui des x, des tourillons pour- ront alors être considérés comme appuyés sur les plans tangents aux surfaces, lesquels touchant les tourillons se- ront perpendiculaires au plan 27. Si les rayons p, e" sont égaux, ces deux plans tangents se confondront en un seul L=:— ay +eVi+é=o. Nous réduisons à un point x',7,0, le contact du premier tourillon et au point x", 7", z!' le contaet du second. La puissance P appliquée au point x, y,2, fera avec les axes des angles &, 8, y, et le poids Q parallèle aux z, sera appliqué en un point æ=b,y=r,:=0. Le poids du tour, agira sur l'axe des æ en un point dont l’abeisse sera d. Les pressions nor- males N, N’ feront des angles avec les axes des x,7, = : Az 1 à dont les cosinus seront 0, ————,——. Les mêmes Vi+a? Vi+a? cosinus pour les résistances — fN , —/fN', seront, rail . ll ? + = à na — — — d'après le terme complémentaire , R'R'R’ 2 posant R=Vi+Q+ae)F. On substituera ces valeurs dans les six équations d'équilibre d’un corps solide; elles se simplifie- ront, si on remarque que z'—ay' =evVi+a et que 186 MÉMOIRES J'+az!=0o, puisque le premier point de contact est sur la normale 7—4az au plan tangent. Des simplifications analogues auront lieu pour la seconde normale. Si, comme on le suppose ordinairement, la composante P cos « de la puissance, parallèle aux x est nulle, la pre- mière équation d'équilibre Pése PA, prouvera R R que la résistance due au frottement est nulle dans le sens des x, et que par suite E est infini, — avec cette hypothèse, et en observant que dans le cas d'équilibre , inclinaison a du plan L=o est égale au coefficient f du frottement , les cinq équations d'équilibre sont : P cos 8 —(N+N')—— Li es Vi+f° P cos y—Q—GHNEN) (EE) 0 a N'fx" P , SD — ZX, COS P Free P(y,cosy—2,cosB)+fNo+fN'o—Qr—0o re cosy N'a" (= E Ye Qb—Gd=o Vrctie Les deux premières font connaitre NN’, la troisième et la cinquième déterminent N'; la valeur de N+N’ subs- tituée dans la quatrième, conduit à la relation connue. Ces exemples suflisent pour montrer luniformité et la généralité des méthodes de la mécanique analytique, dans les questions relatives au frottement. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 187 THÉORÈME DE CALCUL INTÉGRAL ; Par M. E. BRASSINNE. Tuéorème. 1° Si on connait l'intégrale complète d’une équation différentielle linéaire d'ordre p, et si cette inté- grale satisfait à une seconde équation linéaire d'ordre m+p, l'intégrale complète de cette dernière s’obtiendra immédia- tement sous forme de quadratures, en intégrant une équa- tion linéaire d’ordre 0. 2° L'intégrale de l'équation différentielle d'ordre »#+p sera une fonction des »2+ 1 premiers coefhicients de cette équation , et des intégrales particulières de équation diffé- rentielle d'ordre p. Démoxsrrarion. Si l'équation différentielle linéaire X,—0 d'ordre p , a ses solutions communes avec l'équation linéaire X,,4,=0 d'ordre (+ p), cette dernière prendra la forme : dr dr—\ . D) Xp (X) + (X) + ++ A, (K,)=0 en supposant les coefficients des ordres les plus élevés dans les deux équations, égaux à l'unité. L'intégrale de cette dernière équation pourra s’écrire ainsi : XX cz) ke f(x) +... far) ls) Mais le premier membre X, a une intégrale complète sup- posée connue 4, y,+a,y,——+a,y,. Par suite, l'intégrale complète de léquation (2), en tenant compte du second membre sera, d’après une formule que J'ai donnée : 188 MÉMOIRES œ F(x)dx PERRET RU jet DO ti par! z) d dx ee ‘dx À 4. RARE dif dx \ 7; Le signe = s'étendant aux indices 1,2... p. Si dans la relation (3) on remplace F(x) par sa valeur, et si on grouppe les termes facteurs de €, , c,—c,, la deuxième partie du second membre prendra la forme : HHRAIGALE SM LACA LARMES RATES CES Ces dernières expressions sont les 72 intégrales restantes de l’équation linéaire X,,,,—=0. L'identité (4) au moyen de laquelle se déterminent les coeficients A, À... À,, rend évidente la seconde partie du théorème. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 189 SUR UNE INSCRIPTION INÉDITE, RÉCEMMENT DÉCOUVERTE A TOULOUSE ; Par M. BARRY. L'ixscriprion tumulaire dont nous publions le fac-simile (1), à peu près indispensable pour l'intelligence des développements (1) Ce fac-simile, d’une exactitude et d’un travail remarquables, est de M. Delor, lithographe el graveur de l’Académie des Sciences , Inscriptions et Belles-Lettres de Toulouse. $°S.—TOME I, 13 190 MÉMOIRES dans lesquels nous allons entrer, a été découverte {mars 1856) dans la rue da Taar, à trois ou quatre mètres au-dessous du sol actuel, à égale distance à peu près de la place du Capitole et de la basilique de Saint-Sernin, située, comme on le sait, en dehors et à quelque distance @e l'enceinte primitive de la cité. Des cinq lignes dont elle se compose, l’une, la première, a été légèrement tronquée dans sa partie supérieure ; ce qui rend assez difficile la lecture et l'interprétation des trois lettres ou des trois sigles par lesquelles elle commence (1). Dans son état actuel, elle ne porte point de date , et l’on peut regarder comme à peu près certain qu’elle n’en a jamais porté, puisque c'est toujours à la fin des légendes que se placent, dans les inscrip- tions antiques, les indications chronologiques qui nous en tien- nent lieu. Tout ce que nous apprend son texte, assez lisible (1) Ces trois lettres, mulilées en partie, ne seraient-elles pas une abré- vialion barbare de la formule #2 Dei ou ir Domint nomine, que l’on ren- contre assez souvent en Lêle des inscriptions wisigothiques du vie el du vne siècles ( Foy. M. de Castellane , Note sur les rois Goths, Il9 partie, pass. — ñlém. de la Soc. arch. du Didi de la France, tom. u.) Je retrouve cette formule, syneopée à la manière celtibérienne, en supprimant les voyelles sur les monnaies des rois Erwige et Égica, sous les formes suivantes : IDNNM — IDINM — IDNM Zroigius RX — IAINM — IDINM — JDNM EGICA REX (Zn Dei nomine Egica rex. — Voy..M. de Castellane, cb.), qui répondraient assez aux Lrois premières lettres de linscription qui m'ont bien longtemps embarrassé : ID (liés) NM. On pourrait «lors regarder la légende comme complète et lire : Zx Det nomine sivi (stbt) Drmeneldes qui vixit ann (os) plus menus (minus) LX requiebit (requievit) in paci (pace) do- minica sub d (ie) 1(ante) kal (endas) agustas (augustas ) CTI ( Chrésti ). Sur les monnaies des rois wisigoths, la formule que nous venons de ciler ne remonte point au delà du règne de Wamba, qui date de l’année 672; mais la belle inscription dédicatoire de la basilique Sancta-Maria-in-catholico de Tolède, qui appartient à la première année du règne de Reccarède, 587, nous prouve qu’elle appartient à une époque beaucoup plus reculée. Quant à la formule sb1, si commune sur les monuments de l’époque romaine pro- prement dile et dont on retrouve des exemples sur les monuments chrétiens du Midi : au quatrième siècle, sur Pinscriplion du prêtre Patroclus, que j'ai publiée d’une manière complète ; au sixième , ou au septième , sur un curieux monument des Consorani , aujourd’hui à la bibliothèque de Foix, qui porte sur ses quatre faces FLAVIANV —S SIBI — ADDOLEN — VS EPS, elle me paraît signifier tout simplement que l’inseriplion avait élé gravée pour le défunt tout seul et à ses frais, en vertu, sans doute , de quelque disposition testamentaire. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 191 d’ailleurs, ct assez clair, à quelques abréviations et à quelques entrelacements près, c’est qu’elle avait été gravée pour un cer- tain Ermeneldes, qui avait vécu soixante ans environ (plus menus), et s'était endormi dans la paix du Seigneur {in paci Dominica), le premier jour avant les Calendes d’août d’une année du Christ que l'inscription ne nous fait point connaître. Mais tout est si profondément obscur à l’époque de notre his- toire, à laquelle nous reporte involontairement cette légende barbare, que ces vagues indications elles-mêmes ne seraient pas pour nous sans intérêt , si nous parvenions , à l’aide des induc- tions de divers genres qu’elle peut nous fournir , à lui assigner une date, sinon précise, au moins probable ct approximative. De la formule toute chrétienne requiebit ( requicwil) in paci {pace) Dominica, et du nom du Christ (Christi), écrit en monogramme à la fin de la légende , on pourrait déjà conclure, sans hésitation, que notre monument appartient à l’époque chrétienne, c'est-à-dire , qu’il est postérieur à la première moitié du 1v° siècle, où commencent à se produire publiquement , dans le Sud-ouest de la France, les signes et les emblèmes du chris- tianisme, et cette indication, toute générale et toute vague qu'elle soit encore, ne serait point pour nous sans valeur, puisque nous savons que c’est dès ce moment, qui coïncide lui- même, à peu de chose près, avec le temps des invasions et des conquêtes barbares, que date le déclin de l’épigraphie, comme celui de tous les autres arts. Rapide et continu pendant les trois siècles qui suivirent, ce déclin ne s'arrête momentanément qu'au vin et au 1x° siècles de notre ère, où l'écriture des monuments, ramenée par Char- lemagne aux types et aux modèles classiques de l'antiquité , présente un contraste bien tranché avec le caractère barbare dont était marquée l'écriture aux époques précédentes, dont elle est marquée particulièrement dans le monument que nous publions. Mais, sans sortir encore des inductions historiques que peut nous fournir la langue (1) et le texte de notre inscrip- (2) À propos de la langue dont il est difficile de tirer des inductions bien 192 MÉMOIRES lion, il nous semble possible de resserrer encore le champ de recherches que nous venons de circonscrire, d’entrevoir même à quelle époque et à quelle race d'hommes appartenait cet Erme- neldes, dont le nom nous reporte involontairement à l’époque germanique de notre histoire. C'est un des faits les plus certains et les mieux connus de l'histoire du moyen âge que les populations de race germa- nique, établies, par la conquête, dans les provinces de l'em- pire romain, y étaient arrivées avec leurs mœurs , leurs cos- tumes et leur idiomes nationaux , auxquels étaient empruntés, à de rares exceptions près, les noms propres que portaient les barbares eux-mêmes, ceux des simples hommes libres comme ceux des chefs et des rois. Si ces appellations, très-distinctes chez les deux races rapprochées par la conquête, avaient leur intérêt et leur utilité pour les Romains eux-mêmes, dont elles maintenaient la nationalité, en réservant pour des temps meil- heurs ses titres ct ses droits, celles en avaient une bien plus réelle à coup sür aux yeux des barbares, pour lesquels elles étaient devenues souvent, au bout de quelques générations, le seul témoignage de leur origine et de leur descendance germa- nique, la seule garantie des droits et des prérogatives politi- ques attachées alors à l'origine; et l’on comprendrait, à ce titre seul, la persistance singulière avec laquelle ces appella- tions durent se maintenir chez eux, lors même que le temps eut cFacé par degrés les distinctions de mœurs, de costumes cet d'idiomes qui avaient, à l'origine, séparé les deux races réunies sur le sol de la Gaule. Marquées , à de rares exceptions prés, d’un caractère franchement germanique , ces appellations barbares ne diffèrent pas seulement, d’une manière bien tran- chée , des noms d’origine ct de physionomie romaines, avec les- précises, nous nous contenterons de remarquer que les formes en sont déjà fort altérées et fort barbares; qu’elle confond presque systématiquement, comme le font d’autres monuments wisigothiques , comme on le fait encore dans le sud-ouest de la France, les V et les B (szoi pour sibi, requiebit pour requievit) ; qu’elle écrit »2enus pour minus, paci pour pace, aguslas pour augustas , ele. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 193 quels il est impossible de les confondre; on pourrait aller jus- qu'à dire qu’elles varient d’un peuple à l’autre avec les idiomes auxquels elles sont empruntées, avec la civilisation et les ins- tincts nationaux qui modifient à leur tour les idiomes ou les dia- lectes d’une même langue, de telle sorte qu'il ne serait point impossible, en s'en tenant même à ce genre d'induction, de distinguer un nom franchement gothique ou wisigothique , comme ce nom d'Ermeneldes, abréviation évidente d'Hermene- gildes, des noms germaniques qui dominaient à la même épo- que chez les populations voisines des Burgondes et des Francs. S'il était certain , comme on l’admet généralement sur la foi des historiens contemporains, qu’à la suite de la désastreuse bataille de Vouillé la nation des Wisigoths se soit retirée tout entière en Espagne ou dans la province gothique de la Septi- manie, préférant l'exil et la spoliation à la tyrannie religieuse et politique des Germains d’outre-Loire, ce serait dans Îe v° siècle de notre ère que nous renfermeraient ces premières inductions. Car on sait que l'ère de la domination et de la royauté wisigothique dans les Gaules s'étend d’une manière assez précise, entre l’année #12 et 413 , époque de l’arrivée du roi Ataülf dans la Narbonnaise , et l’année 597 , date de la défaite et de la mort du roi Alaric à Vouillé. Mais, quelque mobiles que fussent encore les habitudes de ces sociétés barbares , campées plutôt qu’établies sur les terres des Romains, qu'elles étaient sûres de retrouver partout où il y avait des Romains propriétaires (possessores) à dépouiller, nous avons toujours eu quelque peine, nous l’avouerons, à comprendre et à admettre, sans de nombreu- ses réserves au moins , ce déplacement et cette émigration en masse d’une population nombreuse et disséminée, établie depuis plus d’un siècle dans le pays qu’elle habitait. Si dans les cam- pagnes elles-mêmes, où vivaient de préférence les Wisigoths de race noble (primores, primates, seniores. Lex Wisig., pass. }, cette assertion nous semble déjà infirmée par la pré- sence des nobles Wisigoths que l’on voit, longtemps après celte époque, figurer encore dans les plaids tenus au nom des rois francs, et réclamer le bénéfice de leur loi nationale, signe in- 19% MÉMOIRES contestable de leur descendance (1), elle souffrirait des exceptions et des restrictions plus nombreuses encore dans les grandes villes romaines de l’ancien royaume des Wisigoths, où avait fini par s’habituer la partie la plus obscure et la plus pauvre de la population wisigothique {mediocres, minores, liti, li- berti idonet et viles. Ib.). Placés dans l’alternative de s’expa- trier à leur tour à la suite de ces rois qui leur étaient devenus étrangers en partie, ou de se soumettre, par une conversion plus ou moins sincère, au gouvernement des évêques catholiques que la victoire de Vouillé avait eu pour résultat de rétablir en maîtres, cten maîtres tout-puissants, sous la suprématie des rois de race franque, dans les villes gallo-romaines du Midi, beau- coup de ces Goths des villes durent préférer ces accommode- ments ou ces transactions à une émigration et à de longs voya- ges que leur pauvreté rendait impossibles au plus grand nom- bre ; et cette induction, qui limiterait de nouveau l’époque que nous cherchons à préciser, nous semble confirmée d’une ma- nière assez significative par le caractère franchement chrétien de notre légende, où nous ne saisissons plus ni trace ni saveur aucune d’arianisme, et par l’omission plus caractéristique en- core de la date de l'ère ou de celle du règne des rois goths, que les inscriptions de l’époque wisigothique proprement dite ne manquent jamais d'indiquer exactement à la fin des légendes (2). Confondus, à dater de ce moment, avec la population gallo- romaine, dont rien ne les séparait plus (à l'exception de ces appellations germaniques dont nous essayions tout à l'heure d'expliquer la persistance), dont ils avaient fini par adopter (1) Voy. passim, les diplômes des vue, ixe et xt siècles, cités dans les Preuves de l'Histoire du Languedoc par les Bénédictins, dans les Capitu- laires de Baluze , et dans le Zimes Hispanicus de Pierre de Marca. (a) Nous citerons , comme preuve de ce fait, les trois tétuli de Jac. Dom- molus (495), de Panelope (591) et de Marta ( 505 ou 528), les seules ins- criptions à nous connues qui appartiennent inconteslablement à l’époque de la domination des Wisigoths en France , et qui sont toutes les trois fort exactement datées ( Voy. M. de Castellane , Note sur les rois Goths du Midi de la France. — fiém. de la Soc. archéol. du Midi, tom. 1, pag. 26 el55, are partie. — Tom.1, pag. 36, 2° partie.) du DE L'ACADÉMIE DES SCIENCFS. 195 non-seulement la langue, mais les habitudes, le genre de vie, les usages domestiques et funéraires , ces débris de la popula- tion wisigothique, restés dans la Gaule n'en conservaient pas moins , comme le font partout les barbares , le souvenir de leur ancienne origine , et une préférence instinctive pour les gens de leur race, que fortifiait encore le sentiment de répugnance, tous les jours plus vif, qu’excitait dans la population de la Gaule méridionale tout entière cette domination des Francs , que l’on s'était repenti bientôt d’avoir appelée et soutenue. Comme les souvenirs ct les regrets des Gallo-Romains de naissance se re- portaient involontairement vers les anciens maîtres civilisés du pays , vers les Césars de Byzance , dont on voit les noms oubliés reparaître, vers cette époque , sur les tombeaux et les légendes funèbres (1); ces restes des Wisigoths suivaient avec un intérêt patriotique les péripéties quelquefois dramatiques de l’his- toire de leurs anciens rois, qui possédaient toujours la province (1) Ce rapprochement m’a été suggéré par un fragment d’inscriplion chrétienne du Musée de Toulouse, sur lequel on lit fort distinctement le nom d’Héraclius (empereur en Orient de G10 à 641), et que son écriture, plus régulière , il est vrai , que celle de notre inscription, me semblait re- porter, à peu de chose près, au même temps : HICIACETHIRACLI. . INOFITVSQUIVI.... XXIETMENSE...... DEROSÉT: ac: Des esprits jaloux de tout ont essayé , nous le savons, de jeter des doutes sur l’authenticilé de ce fragment fort insignifiant en lui-même , mais qui avait le tort irrémissible de n’êlre point découvert et publié par eux. Sans entrer ici dans une discussion fort ennuyeuse et fort inutile, nous nous contenterons de renvoyer ceux qu’elle intéresserait, à l’examen de la pierre elle-même, qui nous parait de nature à lever toute indécision aux yeux des hommes éclairés, el nous nous eslimons heureux de voir sous ce rapport notre opinion complétement partagée par un des archéologues les plus expérimentés du Midi et le plus compétent, à coup sûr, en fait de falsifica- tions épigraphiques. M. le chevalier du Mège de la Haie, auquel je m’élais adressé , il y a quelque temps, pour avoir quelques renseignements sur le quartier de la ville d’où provenait ce fragment, inconnu au directeur du Musée, me répondit , avec son cbligeance habituelle, qu'il figurerait dans son Archéologie pyrénéenne , sous presse depuis très-longlemps (1833), el qu’il m'en enverrait les éprenves dès qu’eiles seraient imprimées. 196 MÉMOIRES voisine de la Septimanie, dont les gouverneurs étaient souvent en guerre avec les ducs de race franco-romaine qui comman- daient à Tolosa. Suivant un usage devenu commun sous l'Em- pire, ils adoptaient ou imposaient volontiers à leurs enfants les noms des princes qui régnaient à Narbonne ou à Tolède, ceux même de leurs enfants ou de leurs héritiers; et ce ne serait point sous ce rapport une induction insignifiante que ce nom d'Her- menegild, qui nous reporte involontairement à une des époques les plus dramatiques de l'histoire des Wisigoths en Espagne , à l'époque où recommence , après un siècle de calme apparent, cette lutte de prépondérance entre le catholicisme et l’arianisme, qui se termina, comme on le sait, par la défaite momentanée du catholicisme, dont Hermenegild s'était fait le champion , et par la fin tragique de ce jeune prince que les populations catholi- ques regardèrent partout et vénérèrent comme un martyr. C’est dans les dernières années du règne du roi Liuwigild (569-586) que se passent les événements auxquels nous faisons allusion ici. Le siége d’Ispalis (Séville), où le jeune prince, “excité ou soutenu sous main par les catholiques , avait pris, du vivant de son père, les insignes et le titre de roi , est de l’année 583; son exil et sa mort, de l’année 584 ; et à s’en tenir à ces inductions un peu générales el un peu vagues il est vrai, ce serait dans la première moitié du vn° siècle que nous reporterait involontairement ce nom d'Hermenegild , porté ici par un homme qui avait soixante ans environ à l'époque de sa mort. La formule wisigothique ir Dei nomine, dont nous croyons reconnaître les sigles en tête de notre légende, irait elle-même à l'appui de ces conjectures, puisque nous savons que c’est précisément à dater de la même époque qu’elle devient d’un usage habituel et général, que nous la voyons pénétrer, par exemple, sur les monnaies des rois wisigoths qui achevèrent de la vulgariser. Mais elle nous semble confirmée d’une manière plus péremp- toire encore par le caractère épigraphique de notre inscription, dont les inductions coïncident, comme nous allons le voir, d’une manière remarquable avec les indications historiques aux- quelles nous venons d'arriver. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 197 Quoiqu'elle ait, par plusieurs côtés, des affinités incontes- tables (1) avec cette écriture rapide , anguleuse , inclinée, cur- sive d’allure plutôt que de forme , dont l’époque barbare a ré- pandu et vulgarisé le type, dont l'épigraphie wisigothique en particulier nous offrirait de remarquables exemples au v° el au vi: siècle, on peut dire cependant que l'écriture de notre ins- cription appartient encore à l’épigraphie antique, qu'elle se rat- tache par des liens évidents à la vieille et noble capitale ro- maine, dont les invasions germaniques n'ont pas plus brisé la tradition qu'elles n’ent brisé celle des autres formes de l’art (2). Prise dans son ensemble, elle nous rappelle beaucoup de choses de cette forme courante et usuelle de l’ancienne capitale que l’on désigne en épigraphie sous le nom de capitale rustique , et dont le type remonte lui-même aux plus anciens et aux plus beaux temps de l’art antique. (1) Le trait le plus marqué de ces affinités, que nous nous bornons à si- gnaler ici , serait incontestablement lX idsnite de VIXIT , si nous n’avions toute raison de supposer que le Zapicida avait écrit d? abord vibit (pour vivit), et que, s’apercevant ensuile de celte faute de grammaire, il a essayé de la corriger au moyen d’un trail transversal tracé “grossièrement sur son B, qu’il coupe en deux moitiés. Parmi les autres lettres du #tulus, les seules qui nous semblent se rattacher franchement à l'écriture onciale, sont les D, à la haste inclinée, légèrement arrondie ; les G à queue Rare que et prolongée , et VR dont la forme altérée et bizarre nous laisse déjà pressentir quelque chose de la forme qu’elle a prise dans l'écriture cursive. (2) Nous nous contenterons de citer comme specimina de cette minuscule inclinée et rapide les inscriptions bien connues de Panelope (à Narbonne, 54), et surtout celle de Léodanus (église de Truillas, près de Narbonne, 582), qui tourne d’une manière plus marquée encore à l’écriture cursive. Quant à la capitale proprement dite, les plus beaux échantillons qu’elle nous ail laissés à celle époque dans le Midi de la France, sont incontesta- blement un fragment de la cinquième année du règne d’Athanagild (556), découvert à Narbonne au commencement du siècle dernier ; la belle ins- cription dédicatoire de la basilique de Sancta-Maria-in-Catholico de Tolède, datée de la première année du roi Reccarède (587), et celle de l'abbé Mum- molenus {Mummolein), qui mourut à Bordeaux la cinquième année du règne de Clovis II, en l’année 643 de notre ère. Les fac-simile de ces divers monuments ont été publiés avec beaucoup de soin et de fidélité par feu M. le marquis de Castellane, dans ses Notes sur les rois Goths et dans son Recueil d'inscriptions chrétiennes du Midi de la France ( Mém. de la Soc. archéol, du Midi, tom.u,mretiv). 198 MÉMOIRES Mais, tout en tenant compte de ce qu'on pourrait appeler le caractère spécial et individuel de ce petit monument, où tout semble trahir un travail hâtif, négligé, rapide, parce qu'il était faiblement rétribué sans doute (1), il nous semble impossible de n'être pas frappé de l’altération profonde qu’a déjà subie, à l'époque à laquelle il appartient, cette forme de l'écriture monu- mentale, de la physionomie exagérée et bizarre que nous offrent individuellement la plupart de ses lettres, de l’aspect général de raideur, de gaucherie, d’inégalité dans les traits, de déviation dans les lignes, qui forme le trait caractéristique de son ensem- ble. S'il n’y aurait sous ce rapport que de vagues inductions à ti- rer de la forme de l’L qui abaisse et allonge depuis plus de deux siècles sa traverse inférieure, de celle de l'A dont le trait inté- rieur, fortement anguleux dans les premières lignes de l’inscrip- tion, devient rectiligne dans la dernière; de celle même du P et du Q qui ont de tout temps dans la capitale Rustique attaché leur croissant sur des hastes d’un trait amaigri et élancé, nous trouverions déja quelque chose de plus caractéristique dans la forme de l’M que l’on ne voit point avant le vi‘ siècle allonger et écarter aussi démesurément ses jambages, jadis parallèles, entre lesquels semble se perdre la boucle anguleuse qui les relie (2); dans celle de VR qui, en abrégeant et en redressant son appen- dice inférieur, prend, comme sur certaines monnaies du roi Reccarède , quelque chose de la forme d’unK, juché au haut d’une lance énorme. La plus ancienne inscription , à nous con- nue, où paraisse le C carré bizarrement mêlé à des C de forme arrondie, est la belle inscription dédicatoire de Sancta-Maria- in-Catholico de Tolède , qui date, comme on le sait, de la pre- mière année du règne de Reccarède, frère d'Hermengild (587), c’est-à-dire de la fin du vi° siècle. Cinquante ans plus tard , (1) Non tabula celeriter incidatur (Sidon. Apollin. Epist. Dh. nr, 12). (2; Les N, au contraire, conservent leur forme classique et leur traverse intérieure étendue de l’une à l’autre extrémité de leurs supports paral- lèles ; preuve nouvelle de la persistance avec laquelle la tradition classique luttait à Toulouse (voy. plus haut l’épitaphe d’'Héraclius) contre les in- fluences de la barbarie et l’invasion générale du mauvais gout. DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 199 avant le milieu du vu° siècle, comme le prouve l'inscription de l'abbé de Fleury Mummolein (dans l’église Sainte-Croix à Bor- deaux }, datée de l’année 643, comme le prouverait avec plus d’exagération encore l'inscription toulousaine de Masilia , pu- bliée par M. de Castellane, les O , les Q, les V, les U, avaient adopté cette forme anguleuse , ovale ou carrée, devant laquelle semble hésiter encore notre inscription (1), qu’elle ne nous offre au moins que d’une manière timide, en mêlant, comme l’ins- cription wisigothique de Tolède, les C de forme carrée aux C de forme ronde. Ce serait encore entre ces deux dates, dans la première moitié du vu’ siècle par conséquent , que nous renfer- meraient à leur tour ces indications épigraphiques que nous ne voyons contredites ni même dérangées par aucun des détails caractéristiques de la légende, puisque les D et les G de forme onciale, que nous signalions tout-à-l’heure , se retrouvent à peu de différence près dans l'inscription bordelaise de abbé Mum- molein (643). Nous ajouterons que, dans ce dernier monu- ment avec lequel notre inscription présente des affinités géné- rales très-marquées , malgré lincontestable supériorité de faire et de style qui distingue l’épitaphe du riche abbé de Fleury-sur- Loire, les abréviations sont marquées aussi par des barres trans- versales rigides et profondes , et que l’âge du défunt y est repré- senté par un chiffre lié que le graveur traduit lui-même par le mot sepiuaginla, et qui a les plus grandes affinités avec celui de notre inscription (2). Quant à la forme adoucie et abrégée du nom (1) Le D la prend à son tour à la fin du siècle, notamment dans l’inscrip- tion de Maria fidelis Christi, etc., datée de la seconde année de Recess- vinta (651), et dans celle de l'abbé Locuber qui appartient à la quatrième année d’Egica (M. de Castellane , 2b., à partie, pag. 73, pl. xvut, n°5; pag. 80, pl. xvur, n° 10.) (2) Les savants auteurs du nouveau Traité de diplomatique ont cru recon- naître dans ce chiffre lié, suivi d’un S bien marqué, les sigles de la formule habituelle p/us minus. Mais cette supposition , que rien n’autorise dans la forme de ces prétendues sigles elles-mêmes, achève de tomber devant le texte de notre inscription où le même chiffre est précédé de la formule plus minus en toutes lettres. Ne pourrait-on pas traduire , dans l'inscription bordelaise, Annus sexaginta S (eu) ou S (ive) septuaginta; ce qui répondrait, un peu Fe” 200 MÉMOIRES d'Ermeneldes , il devient à peu près certain que c'était de cette manière que les gens de langue latine adoucissaient, dans le Midi, les noms germaniques, quand on voit dans l'inscription narbonnaise de Leodanus (582) le nom du roi Liuwigdild, père d'Hermenegild , transformé en celui de Léovild (1). L'inscription que nous venons de commenter est gravée, com- me le sont habituellement les inscriptions chrétiennes du v° et du vi* siècle, sur uné tablette de marbre blanc poli (Pagina le- vigata), sans encadrement et sans moulure, que l'on dressait alors ou que l’on couchait sur la terre fraîchement remuée des tombes (2). A l’exemple des païens, dont ils ne se distinguaient à l'origine que par la foi et les mœurs, les Chrétiens, à cette époque, continuaient à enterrer lears morts (ponere, deponere, depositio) en dehors de l'enceinte romaine des cités restées de- bout presque partout , le long des routes pavées qui rayon- paient en divers sens de leurs diverses portes ; et le lien où a été découvert le monument que nous publions , nous autorise à supposer avec beaucoup de vraisemblance qu’il provient de l’an- tique cimetière de Saint-Saturnin où a été découverte aussi (1824) l'inscription à peu près contemporaine de Masilia que que nous avons plusieurs fois citée. Ce ne serait pas le lieu de rechercher ici comment s'était formé en dehors et à quelque distance des murailles de la cité Romaine, autour du tombeau de l’Apôtre des Tolosates, trans- formé de bonne heure en chapelle et en basilique, un de ces largement il est vrai, au plus minus des inscriptions du temps. Ce qu’il y a de certain, c’est que le chiffre lié de notre titulus se retrouve sur d’autres inscriplions chrétiennes du vie et du vue siècle ; dans celle du lyonnais Felocalus, gravée par M. de Boissieu, avec son exactitude habituelle ( 7rs- cript. de Lyon, pag. 580), et que l’on peut, sans trop d’invraisemblance , y reconnaitre le chiffre 6o représenté par un L (50), coupé intérieurement par un X à traverses inégales. (1) Anno Xrr1r Regno Domini nostri Leovildi regis. (M. de Castellane, Note sur les rois Goths, 2° partie, p. 5o, pl. xix, n° 4). Mém. de la Soc. arch. tom. 11. (2) Resurgat in molem sparsa congeries quam levigala pagina legat. (Sidon. Apollin. Epist. lib. 1, 12.) EN DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 201 vastes cimetières (campus ) (1) où se pressaient hiérarchique- ment, sous l'aile protectrice des Martyrs et des Saints (2), les générations de celte époque féodale ; les nobles, couchés sous les murs, sous les arceaux et sous les porches du sanctuaire qu'ils finiront par envahir à dater du x° siècle (3) ; les humbles, les pauvres, les étrangers ( notre Ermenelde était peut-être tout cela à la fois) dispersés aux quatre vents dans les faubourgs et les dépendances de l'édifice sacré. Attaqué et entamé déjà en plein moyen âge par la révolution qui créa, au xmr° siècle , à côté de la cité romaine et wisigothique, une nouvelle ville désignée longtemps sous le nom de bourg parce qu’elle avait, à l’origine au moins, ses magistratures et son administration distinctes ; cet antique cimetière a achevé de se morceler et de disparaître sous les constructions et les rues qui se croisent aujourd'hui autour de la basilique romane de Saint-Sernin. Mais il est à regrelter que l'on n'ait pas recueilli et conservé avec plus de soin, à l'époque primitive de ces travaux surtout où ils durent être détruits en plus grand nombre, des monuments qui, sous leurs formes simples et laconiques, peuvent éclairer de quelques lueurs au moins les époques les plus obscures de notre an- cienne histoire. (1) De là ce nom d’Alis-Camp à Arles, Zlysius campus , Elysii campi. (2) Ad Martyres..……. positus ad sanctos. (Anse. de Lyon. M. de Boissieu, pag. 547, 553.) (3) Le caveau funéraire des Comtes de Toulouse , que l’on désigne encore sous le nom de Chapelle des Comtes, élait placé sous un des arceaux du porche latéral de gauche de la basilique actuelle, qui date, comme on sait, du x1e siècle. Evw. BARRY. Nora. La pierre de l’inscriplion que je viens de publier m’ayant été cédée par mon excellent ami M. le professeur Fournalès, c’est un devoir et un plaisir pour moi que de pouvoir ici associer à mon nom, le nom d’un homme qui est connu , à Toulouse, de tous ceux qui s'occupent de peinture et de beaux-arts. 202 MÉMOIRES NOTE SUR LES COMMENCEMENTS DE L'UNIVERSITÉ DE TOULOUSE ET SUR UNE PIÈCE RELATIVE A CES PREMIERS TEMPS ; Par M. GATIEN-ARNOULT. AVANT-PROPOS. 1° Ox sait que nous manquons de tout document ou rensei- gnement sur l’histoire de l’enseignement à Toulouse, avant la période gallo-romaine. Cependant on peut supposer qu'il y eut alors quelque établissement animé de l'esprit druidique. I est peut-être encore plus vraisemblable qu'il y en eut quelque autre à l'instar plus ou moins ressemblant des écoles que les Grecs-phocéens établirent à Marseille et dans les autres villes leurs colonies , tout le long du littoral méditerranéen. Ces émi- grés de l'Ionie devaient donner quelque envie de les imiter aux indigènes avec lesquels ils avaient de nombreuses relations. Les habitants du pays toulousain furent probablement de ce nombre. 2e Sous la domination romaine, il est certain que Toulouse eut son Ecole ou ses Ecoles latines, comme tant d’autres villes et principalement celles qui étaient de grands centres de popu- lation. Les Romains les voulaient pour y faire élever leurs pro- pres enfants et pour affermir leur pouvoir en faisant élever les fils des vaincus suivant leurs idées et leurs mœurs. Nous avons les noms de quelques-uns des professeurs, trop connus pour qu'il soit besoin de les rappeler ici. Deux d’entre eux n’ont- ils pas leurs bustes dans notre salle des Illustres ? En même temps que l’école latine païenne se montrait au grand jour à Toulouse, y eut-il, plus ou moins secrète , d’abord DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 203 une Ecole chrétienne grecque, comme à Lyon, celle d'Irénée et de ses disciples ? A côté de l'école orthodoxe, y eut-il aussi, comme à Lyon, une Ecole hétérodoxe de Gnostiques? Nous ne le savons pas. Mais on assure que, parmi les missionnaires grecs venus par la Méditerranée, tandis que les uns remontaient la vallée du Rhône, d’autres atteignirent à l'ouest celle de la Ga- ronne, et que les uns et les autres eurent des Gnostiques, comme leur ombre. Chrétiens orthodoxes et Gnostiques hétérodoxes en- seignaient partout et se faisaient des disciples. L'existence d’éco- les chrétiennes grecques quelconques à Toulouse , en ce temps, est donc probable. — Ensuite, lorsque d’autres missionnaires non plus grecs, mais latins, vinrent reprendre l'œuvre de la propagande chrétienne , il est également probable qu'il y eut aussi une Ecole chrétienne latine. Et celle-ci fat peut-être encore double : d’autres hérétiques , &ont les Priscillianistes faisaient partie, apparaissant comme une queue du Gnosticisme en ce pays. 3° Quand la domination romaine fut partout menacée, ébran- léc et détruite, Toulouse tomba, comme on sait, dans la part des Wisigoths, les plus civilisés de ces Barbares, dont le roi Fhéodoric le Grand ne rêvait rien moins que la restauration de l'Empire. Sous ces maîtres nouveaux, l’ancienne Ecole paraît avoir été conservée. On pourrait même dire qu'elle fut très- florissante, s’il est vrai, comme on le pense d’après un passage de Sidoine Apollinaire, que Théodoric Il (qui fut roi, de l'an 453 à 466) y ait étudié les Belles-Lettres et le Droit. En ce cas, elle put fournir aussi quelques-uns des jurisconsultes qui tra- vaillèrent au commentaire du Code Théodosien , connu sous le nom de Bréviaire d'Anian , et publié par Alaric, le 2 février 506.— On conjecture encore qu’un certain Jeax, dont le même Sidoine fait l'éloge, y enseignait, avec un grand concours d’au- diteurs, vers l'an 480. On ne sait rien de ce que furent, en ce même temps, les Ecoles chrétiennes ou ecclésiastiques. k° Après la ruine du royaume des Wisigoths, et pendant la 204 MÉMOIRES période mérovingienne , l’histoire garde le même silence pro- fond sur toutes les Ecoles , de quelque nature qu'elles fussent. Entre beaucoup d’autres causes, les invasions des Sarrasins ne devaient pas contribuer à la prospérité des études et à la sta- bilité des établissements d'instruction. 5° A l’époque carlovingienne, le zèle de Charlemagne pour l'amélioration des Ecoles qui existaient encore, pour la restau- ration de celles qui tombaient ou étaient tombées, et pour l’érec- tion de nouvelles en tous lieux , se fit probablement sentir à Toulouse. Cependant les détails de cette espèce de renaissance ne sont pas connus ; et les quelques faits que l'on peut recueillir, comme les conjectures qu'ils peuvent suggérer et autoriser, n'ont pas grande importance, La présence des Juifs, très- nombreux en ce pays ; et les rela- tions avec les Arabes d'Espagne durent avoir aussi quelque in- fluence. Mais les effets nous en sont également ignorés. 6° Au commencement de la période capétienne, à la fin du dixième siècle et pendant tout l'onzième, l'histoire ne cite point les Ecoles de Toulouse parmi celles qui jetèrent alors un grand éclat en France, et aucun de ses écolâtres , maîtres ou profes- seurs , n’a son nom parmi ceux qui firent alors tant de bruit. Au contraire, la propag gande de l’hérésie, qui pouvait se rattacher au plus ancien Gnosticisme , parut bientôt y avoir fait de notables progrès. Elle y produisit lAlbigéisme, qui fut une autre Eglise, se disant des Parfaits , de Meilleurs et des Bons id en face de celle qu’ils disaient des Pervers, des Corrompus et des Méchants. Cette église était organisée et cons- tituée, ayant sa hiérarchie , tous ses fonctionnaires , son action et sa vie en opposition avec l’autre qu’elle combattait et aspirait à vaincre et à détruire. Au nombre de ses institutions étaient des Ecoles de plusieurs degrés , depuis celles qui s'ouvraient pour les plus petits enfants, jusqu'aux secrets sanctuaires où l'on n’admettait que les initiés. On ne peut douter que la ville de Toulouse n'ait eu de telles Ecoles : et il paraît même qu’elles y étaient florissantes au point | r DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 205 d’éclipser entièrement et de faire abandonner et tomber celles qui étaient tenues par les orthodoxes. C’est en un tel état des choses qu'éclata la gucrre des Albi- geois, qui se termina , comme on sait, par le traité de l’an 1229. Ce traité du Comte de Toulouse avec le Roi de France com- mence aussi une ère nouvelle pour l’histoire de l'enseignement en notre ville : ce que je veux dire à l’Académie, ainsi que la pièce dont je vais l’entretenir, se rapportent à cette époque. Un article du traité juré à Paris devant le grand portail de l'église de Notre-Dame, le jour du jeudi saint, 12 avril 1229, porte que le Comte de Toulouse devra entretenir , à ses frais, une école où enseigneront 14 professeurs , savoir : k maîtres en théologie, 2 décrétistes, 6 maîtres ès arts libéraux , et 2 ré- gents de grammaire. Le traitement de chacun d'eux y est aussi fixé pour dix ans (1). —Cet article seul pourrait être une preuve de ce que nous venons de dire, savoir, que les écoles tenues par les orthodoxes étaient entièrement ou presque entièrement tombées à Toulouse. Autrement, le vainqueur eût-il imposé au vaincu l'obligation de les relever ? (1) Item IV. M. Marcharum deputabuntur a nobis IV magistris Theolo- giæ , duobus Decretistis, VI magistris Artium liberalium el duobus Gram- malicis regentibus Tolosæ : — quæ dividentur hoc modo; singuli magistro- rum Theologiæ habebunt singulis annis L marchas usque ad decennium ; uterque magistrorum Decretorum habebit XXX marchas usque ad decen- nium singulis annis; singuli magistri Artium habebunt XX marchas usque ad decennium siwiliter annuatim ; uterque magistrorum artis Grammaticæ habebit similiter annuatim X marchas usque ad decennium. A ce compte, les traitements des quatorze professeurs, pendant dix ans, se seraient élevés à la somme de 4,600 »archæ el non pas seulement de 4,000. Les six maitres ès Arts libéraux et les deux régents de Grammaire de- vaient enseigner ce qu’on nommait alors le Zrivium el le Quadrivium , savoir : la Grammaire , la Dialectique , la Rhétorique ; — la Musique, l’Arithmétique , la Géométrie et l’Astronomie. 5° S. — TOME I. 14 206 MÉMOIRES On connaissait cet article ; mais on savait moins comment il fut exécuté, et quelles en furent les conséquences. Nous avons aujourd’hui de nouveaux détails à ce sujet, dans un ouvrage en vers mêlés de quelque prose, publié en Angle- terre , el récemment déposé dans la bibliothèque de l'Institut, à Paris. L'auteur de cet ouvrage fut lui-même professeur à Toulouse à cette époque : de sorte que sa parole est à la fois celle d'un témoin racontant ce qu'il a vu, et d'un acteur rapportant les événements auxquels il a pris part. — Son nom était Jean de Garlande. Son ouvrage est intitulé : Des Triomphes de PEglise. (1). Voici ce qu'il nous apprend. Dès que le traité de Paris fut juré , le Cardinal Légat du Pape, Romain, et | Evêque de Toulouse, Foulques, s occupè- rent de l'exécution de l’article relatif à l'établissement de l'E- cole. Mais ne pouvant s'en charger eux-mêmes au milieu de tant de grandes affaires qui demandaient tous leurs soins et prenaient tout leur temps, ils confièrent cette mission à l'abbé de Grand-Selve, nommé Eiie Guarin (2). Il faut supposer que celui-ci chercha d'abord quels étaient, dans la ville de Toulouse et le pays voisin, les hommes capa- bles de donner quelque éclat à la nouvelle Ecole et d’y faire fleurir les bonnes études. Il faut croire encore qu’il n’en trouva pas, puisqu'il alla les demander à l’Université de Paris (3). (1) Jouaxxis De GarLaxnia, de triumphis Ecclesiæ libri octo, publié par Thomas Wright, Esq., membre correspondant de l’Institut de France, d’après le manuscrit unique qui existe de ce poëme dans le British Museum. M. Leclerc en a rendu compte dans le Lome xxn de l'Histoire liltéraire de France , p. 79 et suiv. C’est au 5° el au 6€ livre de ce poëme qu’il est ques- tion de l’Université de Toulouse. (2) Multa novo studio dedit hic ( Fulco) solatia, postquam Romanus studium sanxit in urbe novum. Sed Grandis Sylvæ pius abbas, dictus Helyas, Sub duce legato proxima fræna capil. (3) Parisius doctos abbas elegit. DE L'ACADÈMIE DES SCIENCES. 207 — Ce fait est encore une preuve de la décadence où les études orthodoxes étaient tombées à Toulouse. Le premier qu’il choisit paraît avoir été RozaxD de Cremone, de l'ordre des Dominicains, dont on dit aussi qu’il fut le pre- mier de son ordre qui eut le titre de Docteur en l'Université de Paris. Quoique notre auteur ne le rapporte pas, je suis porté à croire, pour des raisons inutiles à exposer ici , que l’un de ses collègues fut HELinaxD , de l’ordre de Citeaux, qui avait été trouvère avant de se faire théologien et moine (1). — Je con- jecture encore que Jacques, autre Dominicain, surnommé de Toulouse , fut avec eux. Ils étaient chargés d'enseigner la théologie (2). Jean de Garlande fat ensuite choisi pour être l'un des mai- tres ès arts, vraisemblablement chargé d'enseigner la rhétori- que et par conséquent la poésie. Ce surnom de Garlande lui était sans doute donné parce qu'il avait son école à Paris dans le clos de Garlande, appelé depuis Gallande. Il y était venu de l’école d'Oxford et de l'Angleterre sa patrie, comme il nous le dit lui-même (3). Pour des raisons encore inutiles à rapporter ici, je suis porté à croire qu'un autre maître ès arts, chargé d'enseigner la dialectique, fut Jean de Saint-Gilles, dit aussi de Saint- Quentin et de Saint- Alban, qui avait d'abord professé les arts dans l’Université de Paris, avait fait une grande fortune (1) Non scena, non circus, non theatrum, non amphitheatrum , non forum, non plalea, non gymnasium, non arena sine eo resonabat , dit un auteur, en parlant d’Helinand. Cet ancien trouvère, devenu théologien et moine , n’élail-il pas un personnage bien choisi pour enseigner dans un pays où les troubadours étaient si souvent des poëtes d’hérésie ? (2) Jacques de Toulouse composa un Dictionnaire théologique, en deux gros volumes. (3) Anglia cui mater fuerat, cui Gallia nutrix. Mais il préférait la France à l’Angleterre : Matri nutricem præfero mente meam. 208 MÉMOIRES comme médecin, s'était montré le protecteur des Dominicains , et venait d'entrer dans leur ordre (1). Nous ne savons rien des autres maîtres, à moins qu'on ne veuille compter parmi eux les cinq dont nous trouvons les noms au bas d'une quittance de leur traitement, datée de l'an 1239 (2). Ces professeurs , choisis à Paris par l'abbé de Grand-Selve, furent amenés à Toulouse par le Légat lui-même, qui pourvut largement à tous leurs frais et les combla de présents (3). A leur arrivée, il paraît qu'il y eut une grande assemblée ou synode, et une sorte de séance solennelle pour l'ouverture des cours de la nouvelle Ecole. Maître Hélinand fut l’orateur dans les deux solennités. Au Synode , il attaqua les Albigeois ; à l'Université, il engagea les écoliers à ne pas faire comme tant de leurs camarades dans les autres Universités, c'est-à-dire, à ne pas négliger la vertu en cultivant la science : « Voilà, » s'écriait-il, que les clercs cherchent, à Paris, les arts libé- » raux : à Orléans, les auteurs ; à Bologne, les codes ; à » Salerne, les boîtes (à remèdes); à Tolède, les démons (ou » la magie); et, nulle part, ils ne cherchent la vertu (k): » Nous ne savons pas quels furent les premiers travaux de ces maîtres, ni les succès du nouvel enseignement. Quoi qu'il en ait été, ils sentirent bientôt le besoin de publier ce que nous appellerions aujourd’hui un Prospectus, et de le répandre à (1) Jean de Saint-Gilles fut celui qui , d’une partie de ses biens rebâtit pour les Dominicains, à Paris , l’hospice de Saint-Jacques , d’où ils ont été appelés Jacobins. — On cite de lui plusieurs ouvrages traitant de philoso- phie et de médecine : ils sont restés inédits. (2) Voici ces noms : Magister Luppus ; Magister P. de Monte-laudario ; Macister M. Xantonensis; Magister Sicardus, Canonicus Narbonensis; 5 DRE x 4 Magister G. Arnaldi, Archidiaconus Lantarensis. te) , (3) Parisius doctos abbas elegit : at illos Duxit legatus, munera larga pluens. (4) Ecce quærunt clerici, Parisiis artes liberales, Aurelianis auctores, Bononiæ codices , Salerni pyxides, Foleti dæmones, el nusquam mores. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 209 profusion. Nous l’avons dans le poëme de Jean de Garlande, et c'est cette pièce que j'ai voulu surtout faire connaître à l’Aca- démie. Je la donne d’abord textuellement, et ensuite dans la tra- duction que j'en ai faite. Epistola transmissa a Magistris tholosanis ad universalin Studia alibi florentia. Universis Christi Fidelibus , et precipue Magistris et Schola- ribus ubicumque terrarum studentibus , præsentes litteras inspec- turis, Universitas Magistrorum et Scholarium Tholosæ studium in nova radice statuentinm , vitæ bonæ perseverantiam , exitu cum bealo. Stabile fundamentum non invenit operatio quæ non esl in Christo, sanctæ matris Ecclesiæ fundamento, firmiter collocata. Nos igitur hæc attendentes, summo conamine nostro conati su- mus in Christo Tholosæ studii philosophici fundamentum durabile collocare , super quod ædificent nobiscum cæteri , quorum bona voluntas sit ad hæc Spiritus Sancti luminosis radiis illus- trata. Dicit enim beatus Augustinus : « Deus voluntatem bonam » præparat ad juvandam, et adjuvat præparatam. Ipse quidem » nolentem prævenit, ut velit, volentem vero subsequitur, ne frus- » tra velit. » Unde, dilectissimi , velitis et vos nobiscum bonam voluntatem Domino præparare, quam cum ipse præparatam inveniat , ad opera sancta perducat , ut ubi pridem gladii viam vobis fecere, pugnetis acumine linguæ ; ubi bellica strages inhorruit , pacifica militetis doctrina; ubi pravitatis hæreticæ silvestris spinetum excrevit, cedrus fidei catholicæ per vos ad sidera sublimetur. Et ne vos absterreat tanti laboris aggressio, viam vobis præparavi- mus, prima tædia sustinuimus, vexillum securitatis vobis præ- tendimus , ut, nobis vestris armigeris præcedentibus, valeatis vos, philosophiæ milites , arte Mercurii , telis Phæbi , lancea Minervæ , tulius militare. Ut iterum spem habeatis de incepti studii stabilitate, nobis onus invinctum auctoritate suscepimus Ecclesiæ. Erat enim Moyses noster Dominus Cardinalis et Legatus in regno Franciæ dux et protector et auctor , post Deum et Dominum Papam , tam arduæ 210 MEMOIRES inchoalionis , qui slatuit quod omnes Tholosæ studentes, et ma- gistri et discipuli, omnium peccaminum suorum plenariam in- dulgentiam consequantur. Ob hanc igilur causam et propter continuitatem legendi dis- putandique, quam magistri diligentius et crebrius exercent quam exercuerunt Parisius, multi scolares confluunt Tholosam , videntes quod flores jam apparuerunt in lerra nosira , et lempus putationis advenit. Et iccirco nostrum Achillem novum philosophiæ mili- tantem nulla detineat Deidamia , quin alteram adeat Trojam, de qua sie ilerum posset dicere Statius Tholosanus : Omnis honos illie , 1llie ingentia certant Nomina; vix Limidæ matres aut agmina cessant Virginea ; hic multum steriles damoalus in aunos, Invisusque Deo , si quem hæc nova gloria segnem Præterit. Induat igitur quilibet probus animosum Achillem, ne meti- culosus Thersites occupet laurum promissam Ajaci magnanimo , ut saltem , bello finito, studium militantium et studium philoso- phantium admiretur. Et ut libentius Tholosæ gloriam simul cum studio studiosi di- noscant, sciant hanc alteram esse Lerram promissionis fluentem lac et mel ;ubi fœtosæ paseuæ virent , ubi arbores pomiferæ frondent , ubi Bacchus regnat in vineis, ubi Ceres imperat in arvis, ubi tem- peralus aër antiquis philosophis fuerat consideratis terræ stadiis præelectus. O quam incomprehensibilia sunt omnipotentis Dei magnalia ! Hic est pax, alibi Loto Mars sævit in orbe. Sed Martem prius el mortem lacus iste recepit. Præterea ne ligones ad steriles et incultos deferatis agros , vobis magistri Tholosæ legentes tribulos plebææ ruditalis et spinas asperæ sterilitalis cæteraque removerunt obstacula. Hic enim Theologi discipulos in pulpitis et populos in compitis informant , Logici liberalibus in artibus tyrones Aristotelis eruderant , Gram- matici balbulientium linguas in analogiam efiigiant, Organistæ populares aures melliti gutturis organo demulcent, Decretistæ Justinianum extollunt , et à latere Medici prædicant Galienum. Libros naturales , qui fuerant Parisius probibiti , potuerunt illic audire qui volunt naturæ sinum medullitus perscrutari. DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 211 Quid decrit vobis igitur ? Libertas scholastica ? Nequaquam ; quia nullius habenis dediti, propria gaudebitislibertate, An time- tis maliliam populi sæevientis, vel Lyrannidem principis injuriosi ? Ne timeatis; quia Comitis Tholosani liberalitas nobis suflicientem fecit securitatem , et de salario nostro et de servientibus nostris Tholosam venientibus et redeuntibus. Quod si detrimentum rerum suarum paliantur per manus prædonum in dominio Comitis, ma- lefactores nostros ad satisfactionem tanquam pro Tholosanis ci- vibus per vires Tholosani Capitolii persequetur. Predictis adhuc adjicimus, quod, sicut speramus veraciter, Do- miaus Legatus Theologos et Decretistas alios adhuc advocabit ad augmentationem studii, tempusque determinabit per quod opor- teat scholares Tholosæ propter indulgentiam commorari, si mo- ram illorum non impediat, quod Deus avertal , ille prævaricator invidus humani generis, ut consequenter locum et gentem tollant Romani per crucis saluliferæ triumphale mysteriuin dimicantes. De foro rerum venalium fugata caristia, per prædictam perci- pere polerilis certitudinem ; et super hæc tam famæ quam nuncio credatis, et his versibus : Pro parvo vinum , pro parvo panis habetur, Pro parvo carnes , pro parvo piscis emelur. De curialitate populi non est prætermittendum. Videtur enim hic facetia curialis cum militia simul et cum clero fœdera pe- pigisse. Si volueritis igitur bona plura quam prædiximus admirari, pa- terna postponatis hospilia, collis manticas maritando, illud mo- rale Senecæ complectendo : «Terras omnes tanquam meas videbo, » meas tanquam omnium, sic quod vivam quasi sciam aliis me » notum esse : est enim alta temptare et mente majora concipere, » res homini generosa. » ( De Triumphis Ecclesiæ, lib. 5, p.96-98.) Lettre des Maîtres de Toulouse à toutes les Ecoles qui fleurissent en d'autres pays. A tous les Fidèles du Christ, et principalement aux Maîtres et aux Ecoliers étudiant par toute la terre , qui verront cette présente lettre, l'Université des Maitres et des Ecoliers, qui établissent les études à Toulouse sur une nouvelle base : persévérance dans la bonne vie, avec une fin heureuse. 912 MÉMOIRES Ïl n’y a point de solide fondement pour une œuvre qui n'est pas fermement assise sur le Christ, fondement de notre sainte mère l'Eglise. Faisant donc attention à cela , nous nous sommes efforcés de toutes nos forces à donner le Christ pour fondement durable des études philosophiques à Toulouse, et à construire sur ce fon- dement un édifice , auquel travaillent avec nous tous ceux dont la bonne volonté sera éclairée, pour cela , des rayons lumineux de VEsprit Saint. Car le bienheureux Augustin dit : « Dieu prépare » la bonne volonté qui doit être aidée, et il aide celle qui est pré- » parée. Lui-même il prévient celui qui ne veut pas, pour le faire » vouloir ; et il suit celui qui veut, pour qu’il ne veuille pas en » vain. » C’est pourquoi, nos très-chers, veuillez tous, vous unissant à nous, préparer au Seigneur une bonne volonté, afin que, la trouvant préparée, il la conduise à l’accomplissement des œuvres saintes , et que , dans ces lieux, où naguères les glaives vous ont fait un chemin, vous combattiez avec l’aiguillon de la langue; où les ravages de la guerre ont étalé leurs horreurs , vous soyez les soldats de la doctrine qui pacifie ; où la dépravation hérétique a étendu les épines de sa forét , vous fassiez monter jusqu'aux astres le cèdre de la foi catholique. Et pour que vous ne soyez pas effrayés des difficultés d'un si grand travail, nous vous avons ouvert la voie, nous avons supporté les premiers ennuis, nous avons déployé devant vous l’étendard de la sécurité; nous, comme vos écuyers vous précédant , nous avons fait que vous , chevaliers de la philo- sophie, vous puissiez combattre plus sûrement avec l'art de Mer- cure , les traits de Phébus et la lance de Minerve. De même , pour que vous ayez confiance dans la stabilité de l’éta- blissement que nous venons de fonder , nous n'avons accepté le fardeau qui nous était imposé qu'avec l'autorisation de l'Eglise. Car nous avions notre Moyse dans le seigneur Cardinal , légat en France, notre guide, notre protecteur , et l’auteur , après Dieu et le seigneur Pape , de cette entreprise si difficile, qui a décrété que tous les étudiants à Toulouse, maîtres et écoliers, auront l'indul- gence plénière de tous leurs péchés. Par ces motifs, et à cause de la continuité des leçons et des dis- cussions que les maitres font avec plus de soin et plus d’exactitude qu'à Paris, une grande multitude d’écoliers afflue à Toulouse , voyant que déjà les fleurs ont apparu en notre terre el que le temps DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 213 de la taille est arrivé. C’est pourquoi, qu'aucune Déidamie ne re- tienne notre nouvel Achille, soldat de la philosophie, et ne l'empé- che d’aller à une autre Troie, dont Statius, le poëte de Toulouse(1), pourrait dire encore : Là est tout l’honneur : là combattent les grands noms. A peine les mères timides et les troupes de jeunes filles s’abstiennent-elles. Celui-là est condamné à une longue vie stérile Et haï de Dieu, qui reste indolent en présence de celle gloire nouvelle, El en laisse passer l’occasion. Que tout homme bien pensant devienne donc un courageux Achille, de peur que quelque lâche Thersite n'usurpe le laurier promis au magnanime Ajax : qu'il vienne au moins , à présent que la guerre est finie, admirer l'ardeur des nouveaux soldais, l’ar- deur des soldats de la philosophie. Et pour que les hommes studieux soient plus engagés à venir voir la gloire de Toulouse et son ardeur pour l'étude, qu'ils sachent que c’est une autre terre promise , où coulent le lait et le miel , où verdoient de riches prairies, où les arbres fruitiers étalent leur feuillage , où Bacchus règne dans les vignes, où Cérès commande dans les champs, où l'air est si bien tempéré que les anciens phi- losophes préféraient ce séjour à tous les lieux de la terre les plus estimés. Oh ! combien sont incompréhensibles les grandeurs de Dieu tout- puissant | Ici est la paix; ailleurs , dans tout l’univers, Mars exerce ses fureurs. Mais ces lieux connaissaient aussi naguères Mars et la mort. En outre , pour que vous n’apportiez pas vos hoyaux vers des champs stériles et incultes, les Maitres qui lisent à Toulouse ont arraché les chardons de la rusticité plébéienne et les épines de la sauvage stérilité , et ils ont éloigné tous les autres obstacles. Ici , en effet, les Théologiens instruisent leurs disciples dans les chaires, et le peuple sur les places publiques ; les Logiciens initient aux arts libéraux les apprentis aristotéliciens ; les Grammairiens exercent à parler suivant les règles ceux qui ne savent encore que balbutier ; les Chanteurs flattent les oreilles du peuple par l'instrument de leur (1) Dante disait aussi que Stace était de Toulouse, quoiqu'il füt de Naples. 21% MÉMOIRES gosier emmiellé ; les Décrétistes font voir Justinien, et les Médecins enseignent Galien. Ceux qui veulent étudier jusque dans la moelle le sein de la nature , peuvent entendre lire ici les Livres sur la Nature, interdits à Paris. Que vous manquera-t-il donc? La liberté scholastique? Nulle- ment, parce que n'étant relenus par les rènes de personne, vous jouirez de votre propre liberté. Craindriez-vous la méchanceté d’un peuple en fureur ou la tyrannie d’un prince injuste? Ne craignez rien , parce que la libéralité du Comte de Toulouse nous a donné des garanties suflisantes pour notre salaire et pour la sécurité de tous les nôtres , soit qu'ils viennent à Toulouse, soit qu'ils s’en re- tournent. S'ils souffrent quelque dommage, de la part des voleurs, sur les domaines du Comte, il mettra les forces du Capitole de Tou- louse à la poursuite des malfaiteurs, el en exigera la même satis- faction que pour des citoyens. A ce que nous avons dit , nous ajoulons , comme nous l’espérons, que le seigneur Légat appellera encore d’autres Théologiens et d’au- tres Décrétistes pour donner plus d’étendue aux études ; et qu'il fixera le temps que les écoliers devront séjourner à Toulouse pour gagner l'Indulgence ( à moins que leur séjour ne soit empêché, ce qu'à Dieu ne plaise! par le Prévaricateur , ennemi du genre hu- main), de sorte que cette terre et cette nation soient conquises aux Romains combattant par le mystère triomphal de la Croix qui sauve le monde. Quant au prix des choses qu'on a besoin d'acheter , il n’est pas cher : vous pouvez en être sûrs par ce que nous avons dit plus haut. Vous pouvez vous en rapporter aussi à la renommée, comme à notre témoignage, et encore à ces vers . Pour peu lon a le vin; pour peu l’on a le pain; Pour peu l’on a la viande , et pour peu le poisson. Il ne faut pas oublier de parler des Curions populaires. Car ici la Puissance curiale parait avoir fait alliance avec les Chevaliers et le Clergé. Si vous voulez donc admirer plus de biens que nous ne vous en avons dit, abandonnez vos foyérs paternels , en attachant vos man- teaux à votre cou, ei adoptant cette maxime morale de Senèque : « Je verrai toutes les terres, comme si elles m'appartenaient , et la DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 215 » mienne comme si elle appartenait à tout le monde; je vivrai » comme si je savais que tous me connaissent ; car, ce qui est digne » de l'homme, c’est d'essayer de grandes choses et d'en concevoir » de plus grandes. » Cette pièce, que nous pouvons nommer officielle et authen- tique, est certainement très-curieuse à plusieurs titres, soit pour le fond et quant aux faits, soit pour la forme et quant à l'ex- pression des idées et au style. Cependant je n'appellerai l'at- tention de l'Académie que sur quelques faits, qui sont vraiment importants pour l’histoire de l'Instruction publique en France et à Toulouse. Premièrement , il résulte de cette pièce que, dès ces premiers temps de notre Ecole , la Médecine y était enseignée, et que les Maîtres y expliquaient Galien. — Parmi les ouvrages inédits de Jean deS. Gilles, que nous croyons avoir alors été Maître à Fou- louse, il y en a qui sont intitulés : Sur la formation du corps , Pronostics et pratiques médicales, Expériences de médecine : on cite aussi de lui un traité en vers latins sur la guérison de cer- taines maladies , de Læthargiä, de Tremore, de Gutltä oculi. Ainsi la Bibliographie est en harmonie avec cette assertion. Secondement , il en résulte aussi que l’enscignement du Droit n’y comprenait pas seulement le Droit canonique ; les Maîtres y traitaient encore du Droit civil , que l’Université de Paris n’ad- mettait point en son programme: ils y expliquaient Justinien qu'on repoussait ailleurs : l'expression Justinianum extollunt est d’un pittoresque vrai. Un troisième fait plus grave est celui qui concerne l'ensei- gnement de la Philosophie et l'explication des ouvrages d’Aris- tote, que la pièce nomme ZLibri naturales. Ces livres étaient réellement interdits dans les Ecoles de Paris. Mais celle inter- diction ne résultait pas seulement d’une opposition des Maîtres ; elle avait été décrétée par le Concile de 1209 (1) : elle était con- (1) Ne libri Aristotelis de naturali philosophia,.….. legantur Parisiis pu- blice vel secreto. Et hoc sub pœna excommunicalionis inhibemus. 216 MÉMOIRES signée dans un article exprès du Règlement de l'Université, rendu par le Légat du Pape, Robert de Courçon, et devenu la loi de l'Enseignement , en 1215 (1) : et elle était si peu levée , en 1229, que le Pape Grégoire IX la rappelait et renouvelait dans le Règlement de 1231 (2). Il est donc vraiment remar- quable que les Maîtres de Toulouse aient essayé de flétrir cette interdiction comme une espèce d’attentat contre la science philo- sophique et qu’ils aient déclaré ne pas la respecter. Je citerai, en dernier lieu, la promesse de liberté scholas- tique. I'est certain que, par ces mots, il ne faut pas entendre le droit d'aller et venir, sans obstacles et en sûreté, pour tous les attachés à l'Ecole de Toulouse : car la pièce en parle ailleurs : Comitis Tholosani liberalitas sufficientem fecit securitatem… de servientibus nostris Tholosam venientibus et redeuntibus. Il ne faut pas non plus entendre par là des garanties pour la vie, les biens et les franchises sans lesquelles on ne connaissait point de corporation : car la même pièce en parle encore ailleurs : les attachés à l'Ecole , dit-elle , sont protégés comme s'ils étaient citoyens de Toulouse : malefactores nostros ad satisfactionem tanquam pro Tholosanis civibus per vires Tholosani Capi- tolii persequetur (Comes) : et elle dit plus loin que la Curie tou- lousaine est en excellentes relations avec les clercs : de curiali- tate populi… videtur lic cum clero.… fœdera pepigisse. 11 semble donc qu'on ne peut entendre par cette liberté scholasti- que, spécialement promise, que la liberté d'enseigner, pour les Maîtres ; et pour les écoliers, celle de suivre les lecons des Maîtres qu'ils préféreront : car ni les uns ni les autres ne seront soumis au joug , ni retenus par les rênes de personne : quia nullius habenis dediti propri& gaudebitis libertate. — Les Maîtres de (1) Nec legantur libri Aristotelis de naturali philosophia, nec summa de eisdem. (2) Libris illis naturalibus , qui in concilio provinciali ex certa causa prohibili fuere, Parisiis non ulanlur, quousque examinali fueriut et ab omni errorum suspicione purgali. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 217 Toulouse auraient pu dire aussi qu'il en était autrement à Paris. Ainsi, dans la nouvelle Ecole de Toulouse, liberté générale d'enseignement , restreinte ailleurs ; liberté particulière et spé- ciale d'enseigner tout Aristote , interdit ailleurs en partie ; ensei- gnement du Droit plus étendu et plus libre qu'ailleurs ; ensei- gnement large de la médecine; voilà ce que , sans parler d’au- tres avantages, annonçait et promettait le Prospectus (1). Il faut reconnaître que ces annonces et ces promesses forment un singulier contraste avec l’idée que nos historiens se font gé- néralement de cette Université nouvelle. L'un des plus récents, M. Henri Martin, après avoir dit qu'elle fut « instituée dans le » but de donner à l'étude des lettres en province, une direc- » lion catholique, » ajoute : «C’était la lourde scholastique » du Nord qu'on intronisait sur le cadavre de la littérature na- » tionale du Midi (2). » — M. Sismondi assure qu'alors « V'E- » glise voulait que, dans le lieu même où l'on avait enseigné » les doctrines qu'elle réprouvait, il n’y eût plus désormais » d’autres docteurs que les siens, d'autre étude que celle de la » théologie orthodoxe (3). » (1) En prenant l’entier Programme d’études , Lel qu’il est annoncé dans ce Prospectus, on trouve que cette première Université de Toulouse conte- nail déjà tout ce qui s’y est développé plus tard et que nous y trouvons en- core aujourd’hui, savoir : 1. l'Ecole de Médecine ; 2. l'Ecole de Droit ; 3. la Facullé des Sciences , représentée par les Maitres ès arts du Quadri- vium (l’Arithmétique , la Géométrie, et l’Astronomie ; la Musique, qui était le quatrième art, s’en détachait quelquefois); 4. la Faculté des Let- tres, représentée par les Maitres ès arts du Trivium (la Rhétorique, la Dialectique ; la Grammaire , qui était le troisième art, s’en détachait aussi) ; 5. le Collége ou Lycée, représenté par les Régents de Grammaire; 6, et même l'Ecole de Musique ou le Conservatoire. — La Faculté de Théologie, qui n'existe plus depuis une quinzaine d’années , est la seule branche d’ensei- gnement qui fasse défaut. Ce Prospectus montre d’ailleurs l’enseignement comme ayant élé un peu plus étendu que l’article du traité ne l’exigeait; car il semble qu'aux termes de ce traité, la Médecine ne devait pas y ètre comprise. (2) Histoire de France, 1°e édition, L. 1v, p.362, note. (3) Histoire des Français, L. vu, p. 86. — M. Sismondi, dans ce même 218 MÉMOIRES Et, de fait, il semble bien naturel de supposer que cette pensée fut celle du Nord et de l'Eglise, au moment où ils venaient de remporter une si difficile victoire sur l’hérésie et le Midi. 11 semble même impossible qu'ils ne l'aient pas eue. Bien plus, la pièce même que nous venons de transcrire témoigne, en quelque passage, que telles étaient certaines inten- tions des vainqueurs à l'égard des vaincus : « Venez, disait le » Prospectus , venez faire monter jusqu'aux astres le cèdre de » la foi eatho!ique , en ces mêmes lieux où la dépravation hé- » rétique a étendu les épines de sa forêt. » Mais d’autres paroles et surtout les faits n’en sont pas moins là, nous apportant leur témoignage. Ils déclarent que l'Univer- sité nouvelle se posa, pour employer le mot qui convient le mieux , quoiqu'il paraisse moderne, comme éminemment /i- bérale, et que ce fut au nom de la liberté qu'elle fit appel à la population studieuse. Et cela ne doit pas non plus nous étonner, et nous pouvons aussi le trouver bien naturel. Combien de fois l’histoire de tous les temps ne montre-t-elle pas les vainqueurs obligés de faire des concessions aux vaincus ; les programmes libéraux servant de passe-port et d'amnistie aux révolutions; et cer- taines libertés étant offertes en échange d’autres, comme un dédommagement et une consolation : solatia victo ? Mais il me suffit d'indiquer cette considération et d'ouvrir la voie aux réflexions qu'elle inspire. — Je n’ajoute plus que endroit dit : « L'Ecole de Droit canon fondée à Toulouse et qui y rassemblait » beaucoup de jeunes gens, fil sentir le besoin d’y établir aussi une Ecole de » Droit civil, puis une Faculté des lettres, et l'Université se trouva ainsi » complétée, » On voit que ce sont autant d’inexaclitudes que d’assertions. En effet, 1° l’enseignement du Droit civil fut établi dès le commencement, en même temps que celui du Droit canon ; 2° la Faculté des lettres ou plutôt ce qui la représentait fut de la même époque. Ajoutons, contrairement à l’as- sertion rapportée dans le texte, que 3° l'Eglise voulut, dans la nouvelle école, d’autres études que celle de la théologie orthodoxe. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 219 quelques faits relatifs à cette histoire primitive de noire Université. Nous ne savons quel fut l'effet produit par la letire-pros- pectus des Maîtres en l'Université de Toulouse, ri quelle affluence d’écoliers se fit autour de chacun d'eux, ni quels au- tres Maîtres vinrent concourir à leur œuvre, profitant de la liberté scholastique. Jean de Garlande nous apprend seulement, sur lui-même, qu’il enseigna pendant trois ans (1). Il lisait, dans ses cours, des vers de sa composition. Une de ses pièces fut un Epithalame de la Vierge (2); d'autres étaient sur la Foi, l'Espérance, les Apôtres, les Saints. Il attaquait ainsi les dogmes de l'hérésie vaincue, en lear opposant les croyances de l’orthodoxie victo- rieuse. En faut-il de même de plusieurs de ses collègues ? Et par cet enseignement polémique, excitèrent-ils quelque violente réac- tion de l’ancien esprit albigeois ? D'autres, au contraire, usant et peut-être abusant de la liberté, principalement en matière philosophique, enseignè- rent-ils quelques hérésices anciennes ou nouvelles, sous le nom et l'autorité d’Aristote? Et provoquèrent-ils ainsi quelque grande colère chez les Croisés ou leurs fils, qui s’irritèrent d'avoir su vaincre, mais non profiter de la victoire ? Ou encore, l'esprit général de ces maîtres, venus de Paris, et ces maîtres eux-mêmes déplurent-ils aux hommes de la lo- calité, qui ne virent en eux que des étrangers et voulurent s’en débarrasser ? Nous l’ignorons. Mais ce qui est certain, comme rapporté (4) Ilic exegi spatio studiosa trienni Tempora, Romano sub duce, lector ibi. (2) Virgine de sacra sponsalia carmina legi. 2920 MÉMOIRES par Jean de Garlande, c'est qu’un violent orage se forma bientôt et éclata contre cette Université naissante. Les écoliers ne se réunirent plus autour des maîtres (1); les maîtres ne furent plus même en sûreté de leur vie; et Jean de Garlande s'enfuit un des premiers. Craignant pour ses jours, il s'embarqua sur la Garonne; mais les mariniers ne lui furent guère moins hostiles que ceux qu’il fuyait. Ils prétendirent le mener malgré Jui à Castelsarrasin , ayant l'intention de le voler, peut-être de le tuer (2). Il leur échappa, non sans peine; et, délivré par des pèlerins qui allaient à Paris, il les y accompagna, revenant aux lieux et aux travaux qu’il avait quittés trois ans aupara- vant. Là aussi, il cesse de nous parler de l'Université de Toulouse. ——————— (1) Florentis Studii paulatim turba recedit. (2) Hæc ego qui scribo cuncta, recedo prius. Insidias metuens celeri me trado carinæ : Intus sed prædis insidiator hial. Ad Sarracenum castrum me ducere tentat, Suffocet ut tacitis impia turba dolis. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 221 RÉVISION COMPARATIVE DE L'HERBIER ET DE L'HISTOIRE ABRÉGÉE DES PYRÈNÉES DE LAPEYROUSE ; Par D. CLOS. Par une délibération du Conseil municipal de la ville de Toulouse, en date du 11 février 1843, l'herbier de Lapey- rouse, légué à cette cité par les soins du colonel Dupuy, fut confié à ceux du Directeur du Jardin des Plantes. L'importance de cette collection ne saurait être mise en doute. Si les Pyrénées avaient été visitées par de nombreux botanistes , en tête desquels il faut citer le grand Tournefort, Lapeyrouse eut , le premier, le mérite d’embrasser dans son ensemble la végétation de cette vaste chaîne, et d'en faire l’objet de ses études durant toute sa vie. Dès 1787, il publiait le premier fascicule de la Flore de ces montagnes, dans un for- mat 2#-folio , orné de magnifiques planches (1), dont quelques- (1) Les Figures de la Flore des Pyrénées sont seulement au nombre de quarante-trois. Lapeyrouse, dans l’espoir de compléter un jonr ce beau mo- nument , qui devait comprendre de 400 à 600 figures de plantes , ‘cite fré- quemment, dans son Histoire abrégée, des numérosde ces planches inédites. C'est à Lort que plusieurs auteurs modernes onl suivi son exemple, car il n’est que trop probable que ces planches ne verront pas le jour. Lapeyrouse a laissé aussi sous ce litre : Mémoires pour servir à l'His- toire des Plantes des Pyrénées et d'explication à l’Herbier de ces mon- tagnes, deux gros volumes manuscrits, avec la date de 1770. J'avais espéré puiser dans ce Recueil, classé d’après la méthode naturelle de Jussieu, des matériaux importants pour cette Révision ; mais c’est une simple énumération des espèces pyrénéennes, avec l'indication des localités où elles croissent, 5°S,— TOME 1. 15 292 MÉMOIRES unes sont dues au gracieux pinceau de Redouté ; et, en 1813, paraissait à Toulouse l'Aistoire abrégée des Plantes des Py- rénées | 1 vol. in-8° de 700 pages ), encore aujourd'hui le seul guide général pour celui qui veut s’adonner à l'étude des plantes de ces montagnes , dont la surface n’embrasse pas moins de neuf cents lieues carrées. L'auteur y décrivait plusieurs es- pèces nouvelles, et signalait dans ces contrées l'existence d’un grand nombre de plantes qu'on était loin d'y soupçonner. Depuis lors, la Flore des Pyrénées est devenue l'objet de nombreuses recherches et de nombreux travaux, les uns li- mités dans un cadre plus restreint, les autres embrassant l’en- semble des plantes de France, et comprenant par conséquent celles de nos Pyrénées. Or, bien souvent, les auteurs de ces éctits ont émis des doutes sur la validité ou l'exactitude de détermination de certaines des espèces admises par Lapeyrouse. Ouvrez les Klores francaises de Mutel, de MM. Grenier et Godron, et vous y lirez ces mots, à la suite de telle ou telle espèce du botaniste toulousain : € Nous est complétement in- connue. » Ajoutons que nombre d'espèces de l'Histoire abrégée ne sont pas même mentionnées dans l'ouvrage tout récent et si utile dû à ces deux derniers savants (1). Il est juste aussi de reconnaître que, depuis l'époque de La- peyrouse, la phytographie a fait d'immenses progrès. Les plantes de France sont devenues l'objet d'études incessantes : telle espèce linnéenne à pu être scindée en deux ou trois au- et telles qu’on les trouve dans lAHistoire abrégée. Pourquoi Lapeyrouse qui, dès 1780, remplaçail au Jardin des Plantes de Toulouse la méthode de Tournefort par celle de Jussieu encore toute nouvelle (elle avait paru en 1974), donna-t-il dans son livre la préférence au système Linnéen? C'est, dit-il, parce que c’est celui dont l'usage est le plus généralement adopté, et malgré ses imperfections présente le moins de difficultés dans la pra- tique. (1) Exemples : Digitalis intermedia Lap., pag. 357 ; Chaixia Myconi Lap. Supp., pag. 39; Laserpilium ferulaceum Lap., pag. 152; /lecebrum villosum Lap., pag. 125; Corrigiola imbricata Lap., pag. 169; Cerastium glaberrimum Lap., pag. 265; Rosa aristala Lap., pag. 285; Potentilla heterophylla Lap., pag. 280, etc. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 223 tres ; de là l’origine de plusieurs de nos rectifications qui ne sauraient être imputées à erreur à Lapeyrouse. Enfin, la détermination exacte des espèces a pris de nos jours une importance majeure, en vue des progrès incessants de la géographie botanique. : Ces divers motifs m'ont porté à penser qu’une révision gé- nérale et comparative de l'Herbier et de l'Æistoire abrégée des Pyrénées de Lapeyrouse ne serait peut-être pas un tra- vail inutile pour la botanique descriptive. J'ai cru me con- former ainsi aux vues de ce savant , qui n’eût certainement pas eu la noble pensée de léguer sa collection à ses successeurs, s’il avait pu craindre leur contrôle. a Nous n'avons jamais eu d'autre but, dit-il, (Fig. Flor. Pyrén. viij) que le plus grand progrès de la science et de l’art. Si nous nous sommes trompé, nous prions les lecteurs et les amis des arts de nous éclairer de leur critique. lis ne sauraient faire un accueil plus flatteur au fruit de tant de veilles, de recherches et de travaux que nous leur consacrons. » J'ai suivi dans ce travail l’ordre adopté par Lapeyrouse, c'est-à-dire, le système sexuel de Linné, dans le but de faci- liter les recherches aux botanistes. Dans l'intérêt de ceux qui, en lisant ces notes, n'auraient pas l'ouvrage de l’auteur sous les yeux , j'ai religieusement conservé, à la suite de chaque espèce citée dans l'Æistoire abrégée , le nom de l’auteur au- quel Lapeyrouse l’attribue. Une liste de toutes les plantes qui , signalées ou décrites dans l’Aistoire abrégée , manquent dans l’Herbier, n'a paru utile, et elle servira d’appendice à ces notes. L'élendue de cette liste m'a engagé à omettre toute discussion relative à ces plantes : persuadé d’ailleurs que ces appréciations doivent être laissées aux botanistes qui s’adon- nent presque exclusivement à l'étude comparative des produc- tions végétales de la France. Au commencement de ce siècle, on n'attachait pas assez d'importance à recueillir des échantillons de plantes bien com- plets, à préciser exactement pour chacun d'eux la localité où il a été pris. L'Herbier de Lapeyrouse n'est pas à l'abri de ces 224 MÉMOIRES défauts : 1° nombre d'échantillons ne consistent qu’en fragments de plantes, parfois insuffisants pour une parfaite détermina- tion ; 2° certains d'entre eux ne sont accompagnés d'aucune indication de localité; ce que j'ai cru devoir signaler dans les cas où la station de ces espères m'a semblé avoir de l'importance pour la géographie botanique , ou lorsque ces espèces n’ont été rapportées aux Pyrénées que sur la foi de Lapeyrouse ; 3° à un seul échantillon de plante correspond la désignation de plusieurs localités différentes, sans qu’on sache dans laquelle il a été cueilli; 4° dans une même enveloppe se trouvent parfois con- fondues, sous une seule dénomination, deux où même trois es- pèces distinctes, confusion qui ne doit pas être imputée sans doute à Lapeyrouse; 5° un certain nombre de plantes ont dis- paru , soit parce qu'elles sont devenues en totalité ou en partie la proie des insectes, soit par toute autre cause ; 6° Lapeyrouse n’a pas eu le soin de distinguer toujours les plantes qu'il a re- çues, de celles qu’il a eueillies lui-même; l'époque de la floraison et celle à laquelle ces plantes ontété recueillies, ne sont pas non plus mentionnées. L'Herbier de Lapeyrouse ayant un intérêt historique, Je me suis fait un scrupule de le conserver dans son état actuel et sans la moindre modification, me bornaut à inscrire un nom à côté de l'espèce qui m'a paru le réclamer, mais en laissant toujours intactes les étiquettes de l’auteur. Je me ferai un plaisir et un devoir de le mettre à la disposition des botanistes qui voudront le consulter sur place? M. Henri Loret, botaniste distingué, qui parcourt depuis plusieurs années les Pyrénées, ayant désiré passer aussi en revue l'Herbier Lapeyrouse, m'a puissamment aidé dans la détermination d'un certain nombre de plantes de cette collec- tion. Je me plais à constater ici publiquement la participation qu'il a prise à ce travail. On sait que M. Bubani s'occupe depuis longtemps de rassembler les matériaux d’une Flore pyrénéenne; mon travail était à peu près terminé, lorsque j'ai appris que cet infatigable botaniste pos- sédait , en portefeuille et à l'état de manuscrit, une révision de DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 225 l’'Herbier Lapeyrouse; mais il n’a laissé dans cette collection , ni notes ni rectilications de noms de plantes. Je n'ai donc pu citer dans ce travail que les quelques déterminations de plantes de cet Herbier (au nombre de 45 environ) , signalées par M. Bubani dans un opuscule imprimé en 1842, dans les Nuovi Annali delle scienze naturali di Bologna , et qui a pour titre: Sche- dulæ criticæ ex Mss. Flore Pyrenaicæ et Herbarium La- peyrusianum (lirage à part de 19 pages). On verra que mes déterminations sont d'accord avec celles de cet auteur, pour une moitié environ des plantes citées par lui. Plusieurs autres botanistes ont aussi cherché à faire connaître, soit quelques-unes des plantes de Lapeyrouse , soit une portion de la végétation des Pyrénées, rapportant à leurs espèces celles dont a parlé cet auteur. Tels sont en particulier , MM. Serres, Arnott, Bentham , J. Gay et Duchartre (1); j'ai mis à profit les remarques critiques de ces savants naturalistes. Ainsi compléter ou rectifier les indications de localités à l'aide des étiquettes de l’Herbier ; vérifier si les conjectures de ceux qui ont discuté sur les plantes décrites et signalées par Lapey- rouse, sont ou non fondées ; relever les quelques erreurs de détermination qui peuvent s'être glissées dans l'Herbier (et quel est celui qui, embrassant un si vaste horizon pourrait se dire à l'abri de toute erreur ? ); indiquer les espèces, qui, inscrites dans l'Histoire abrégée , manquent dans la collection ; permettre ainsi, à ceux qui écriront désormais sur les plantes de France ou des Pyrénées , de se prononcer avec plus de hardiesse sur la nature de celles qui sont mentionnées dans cet ouvrage : telle est la tâche que je me suis proposée dans cette Révision. En entre- prenant ce travail, j'ai cru entrer dans les vues de Lapeyrouse, qui avait lui-même, dans un premier supplément à son ouvrage ——————_—_—_—_—_ (1) On doit en particulier à M. Bentham un Catalogue des Plantes indt- gènes des Pyrénées, 1826, in-8° ; à M. J. Gay, si profondément versé dans la contiaissance des plantes du sol français, deux Mémoires importants sur les plantes recueillies dans les Pyrénées par Endress ( vOy. Ann. scien. nal. 17e sér. tom. 25 el 26, année 1832) ; enfin à M. Duchartre, plusieurs fasci- cules d’exsiccata d’une Klore pyrénéenne (1836). 226 MÉMOIRES { Toulouse 1818 ), pris l'initiative de ces réformes, et reconnu, avec la bonne foi du savant , quelques-unes de ses erreurs. Voilà quarante-quatre ans que l’Aistoire abrégée des Pyré- nées a paru : tous les ans, cette vaste chaîne de montagnes est parcourue , scrutée en {ous sens par de nombreux naturalistes , et cependant aucun ouvrage général sur la végétation de cette riche contrée n’est encore venu remplacer celui de Lapeyrouse : n'est-ce pas le plus bel éloge que l’on puisse faire et du livre et de son auteur ? Au rapport de M. du Mège, le nombre des espèces décrites par Lapeyrouse dans son Æistoire abrégée , est de 2,833, et celui des variétés, de 855 (1). L'auteur a suivi dans cet ou- vrage la marche qui, à son époque, était presque générale- ment adoptée ; il emprunte la plupart de ses diagnoses à Linné ou à Willdenow. Toutefois, on lui doit, en ce qui concerne les descriptions en langue française, une heureuse innovation. Il est le premier, ou un des premiers (1790), à supprimer dans celles-ci les verbes et les articles , et à emprunter plusieurs mots au latin, « afin, dit-il, de donner aux phrases et aux descrip- tions botaniques cette tournure, cette précision et ce laconisme si nécessaires, el qu'on admire justement dans les écrits du Pline du Nord. » Comme Linné, qu'il se proposait pour exemple , Lapeyrouse avait embrassé toutes les branches de l'histoire naturelle, et il s’efforçait de contribuer aux progrès de toutes. Il avait formé de bonne heure le projet d’inventorier toutes les productions des Pyrénées ; et de 1763 à 1797, il visita presque chaque année une portion de ces montagnes, tantôt seul , tantôt en compa- gnie du célèbre Dolomieu. « Le plus souvent, je me suis frayé, dit-il, de nouvelles routes, et j'ai vu beaucoup de lieux que l'œil de la science n’avait jamais fixés. » Si ses travaux sur la végétation de cette vaste chaîne sont les plus nombreux et Îles plus importants, la zoologie ne lui doit pas moins, outre plu- (1) Ces plantes sont renfermées dans quarante-quaire grandes boiïles sous la forme de volumes. DE L'ACADÈMIE DES SCIENCES. 227 sieurs Mémoires, des Tables méthodiques des mammifères et des oiseaux observés dans le département de la Haute-Ga- ronne (an vu, in-8°); la minéralogie , plusieurs fragments et un 7raité des mines et forges à fer du Comté de Foix (1786- 1790 ); la paléontologie, une description de plusieurs nouvel- les espèces d’orthocératites et d'ostracites (1786, in-folio). Rap- pelons enfin que Lapeyrouse fut longtemps à la tête de l'édilité toulousaine, qu'il professa avec éclat, soit à la Faculté des Sciences de Toulouse dont il fut le doyen, soit à Paris où il avait été nommé inspecteur des mines, qu’il n’hésita pas à dé- penser au profit de la science une partie de sa fortune, que sa ville natale lui doit plusieurs institutions importantes, et on reconnaîtra que peu de vies ont été aussi utilement employées que la sienne (1). HERBIER LAPEYROUSE. Cazcrrmicne verna L., C. minima Hopp., p. 2. (2). — Montia minor Gmel. { Loret et Clos). — autumnalis L. — C. hamulata Kütz. var. homoiophylla Gr. God. { Loret et Clos). — intermedia Schk. (ir herb.), C. autumnalis $ intermedia H. A. p. 2.-- C. platycarpos Kütz. | Loret et Clos). (1) On lira avec intérêt la Notice biographique sur Lapeyrouse par notre savant collègue M. du Mège (voy. Hist. et Mém. de l’Acad. des Sciences, Inscript. et Belles-Lettres de Toulouse, tom. v, 1'° part., pag. 67-105). (2) Les chiffres placés à la suile des noms d’espèces indiquent la page de l’Histoire abrégée (H. A.) où ces espèces sont décrites ; lorsque ces chiffres sont précédés de la lettre S, celle-ci désigne le Supplément de l’Histoire abrégée des Pyrénées. En rapportant certaines plantes de Lapeyrouse à des espèces récemment décrites par les phytographes et considérées par eux comme bien distinctes, je n’entends préjuger en rien la validité de celles-ci. 298 MÉMOIRES Buirum capitatum L., p. 2. — Æmaranthus prostratus Balb. (Serres). Jasminum bumile L., (ir herb.). — J. fruticans var. B, p. 3. — J. fruticans L. ( Loret et Clos). Veronica longifolia f petiolaris Lap., p. 5. Echantillon sans fleurs et qui me paraît appartenir, comme à M. Bentham , au Teucrium Scoroidonia L. — Ponæ Gou. var. € nana grandiflora Ÿ. pumila Al., p. 6. — V7. Ponæ Gou. non F7. pumila A. — officinalis L. var. foliis acutioribus, caule assurgente, S. p. #. — F. Ponæ Gou. ( Loret et Clos). — Allionii Smith, espèce particulière aux Alpes. Représentée dans l'Herbier, 1° par un échantillon por- tant l'indication : WMadres, Laurenti, Lasposeilles, Amsur, Orlu : frustulum ex herbario Tournefortii sub synonymo reluto ; ® par des échantillons de V. serpyllifolia L. avec l'indication Eyre, Lientz, Madre , etc. — Anagallis L. var. 6 minor, p. 8. — Ÿ. anagalloides Guss. ( Loret et Clos). — obtusata Lap. (x herb.), V. Chamædrys £ obtusata Lap. S., p. 5. — 7. Chamædrys L. var. — latifolia Ait. dubia Chaix, p. 9, V. dubia Chaix (in herb.) — V. Teucrium L. var., non F. prostrata L., espèce à laquelle MM. Grenier et Godron rapportent cette plante. — agrestis L., p. 10. — 7. didyma Ten. — acinifolia L., p. 10. Rapportée avec doute par M. Bentham au V. agrestis L. la plante de l'Herbier est bien le V. acinifolia L. — peregrina L., p. 11. — VF. triphyllosL. — acutiflora Lap. fil., S. p. 7. Rapportée à tort par MM. Grenier et Godron à titre de variélé au V. officinalis L, dont la distingue son calice à DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 22% cinq divisions ; cette plante appartient, comme l'a reconnu M. Bentham , au V. Teucrium L. Lycopus exaitatus L., p. 13. Rapporté avec raison par MM. Bentham, Grenier et Godron au L. europæus L. C’est la variété décrite par Vahl sous le nom de L. europœus 8 laciniatus ( Enum. ?, 210). SaLvia pyrenaica L., p. 1#. Représenté par une feuille empruntée à Fherbier de Vaillant. VacerIANA rubra L., p. 17. — Centranthus angustifolius DC. (C. Lecoquii Jord). — dioica L., sans indication de localité. — Phu L., p.18 ,et V. saxatilis ? Jacq., p. 20. MM. Grenier et Godron rapportent, à l'exemple de M. Bentham, les deux plantes ainsi dénommées par Lapey- rouse au V. montana L. Ils ont raison pour la seconde. Mais quant au V. Phu L., on trouve sous ce nom dans l'Her- bier de ce savant, deux espèces , l’une, récoltée au Pic-de- Gard et à Cagire, est le V. montana L.; l'autre, signalée au Pic-de-Gard et à Crabère, est le V. globulariæfolia Ram. , au fruit subtétragone dépassé par les bractées. — tuberosa L., p. 19. La variété 8 de cette espèce, proposée par Lapeyrouse et caractérisée ainsi par lui, foliis omnibus ovalis integer- rimis, ne doit pas étre maintenue, car le seul échantillon qui la représente dans l'Herbier a les feuilles caulinaires pinnatipartiles. Fepra coronata Schrad., p. 21. — #7. pumila Wild. — coronata Schrad. var. calicibus hirsutissimis. S. p. 8. — Valerianella discoidea Lois. (Loret et Clos). Pocyexeuuu arvense L., p. 21. — P. majus À. Br. (Loret et Clos). Iris lutescens Lamck., p. 22. — 1. chamæiris Bert. 230 MÉMOIRES Avec des fragments d’une autre plante du même genre trop détériorée pour se prêter à une détermination précise. ScHognts ferrugineus L., p. 24. Sans indication de localité dans l'Herbier. Cyrerus glaber L., p. 25. Rapporté à bon droit par M. Bentham au €. fuseus L. — longus. L. La variélé 8, caractérisée ainsi par Lapeyrouse, spicis compactis, confertis, brevibus, est le C. badius Desf., si- gnalée à Toulouse , où cette espèce a été retrouvée récem- ment par M. Timbal-Lagrave. Scareus holoschænus L., var. B capitulis subsessilibus, p. 26. — Juncus conglomeratus L. Au S. palustris L. est mélé le S. cæspitosus Etaurs. Michelianus L. le Cyperus schœnoûles Griseb ; le S. trique- ter L. est sans indication de localité. ErtoPnorum angustifolium Wild., E. latifolium Hopp., p. 28. Il y a dans l'Herbier confusion d'échantillons appartenant à ces deux espèces. Paararis aquatica L., p. 29. — Psamma arenaria Rœm. et Sch. — cylindrica DC. Deux bouts de plante sans racines ni tiges ni feuilles, et paraissant appartenir par leur faux épi allongé, par l'aile entière des glumes, par la glumelle inférieure lan- céolée et velue , au P. nodosa L. Paxicum ambiguum DC. (in herb.), P. sanguinale L. 6 ambi- guum A. A., p. 31. — P. sanguinale L. (Loret et Clos). Puceum nodosum L. var. bulbosa , à Engaudue , Crabère, Cazau d'Estiba (in herb.). — P. alpinum L. (Loret et Clos }. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 231 Acorecurus bulbosus L., p. 32. — Phleum nodosum \. Poryrocox monspeliense Desf., p. 33 (quoad Toulouse à Pech- David}. — Cynosurus echinatus L. var. multibrac- teatus Mut. — monspeliense Desf. var. panicea et var. spica minori mi- nus divisa ( Roussillon}. — P. monspeliense Desf. Muum paradoxum L. et M. purpureum Lap. — M. cœrules- cens Desf. Acrosris alpina Leyss. , pag. 34. — 4. rupestris AI. ( Zoret et Clos). — stolonifera L., p. 35. — Catabrosa ‘aquatica Pal. Beauv. — hispida Willd. , pag. 35. — 4. vuivaris L. Epèce à laquelle Poiret (Encycl. Sup. 1, 252) et Mu- tel le rapportent en synonyme. — rupestris All., S. pag. 12 (quoad Cauterets). — 4. py- renæa Timb. (Mém. Acad. Sc., Toul.,h°s.t. vw, p. 97), cum frustulo Airæ caryophylleæ L. ( Loret et Clos). — atrata? (2x herb. . À. rupestris var. e atrata, nigra, S. p. 12. — 4. alpina Scop. ( Loret et Clos). Aa aqualica L., pag. 36. — Molinia cœrulea Mœnch. Cette espèce se retrouve dans l’Herbier , sous les noms de Melica cœrulea L. et d'Arundo Agrostis Scop. — miliacea Vill. — Poa nemoralis L. — alpina L., pag. 39, mélé au Poa nemoralis L. — montana L., sans indication de localité, p. 37. — 4. flexuosa L. ( Loret et Clos ). — mollis L. (1x herb.), Holcus mollis L. 4. 4. p. 612. — Holcus lanatus L. — Caryophyllea L., p. 38. — 4. aggregata, Tim. ( Loret et Clos ). 232 MÉMUIRES Meuica ciliata L., pag. 38. — M. Magnolii Gr. God. (Loret et Clos). Poa serotina Schrad. , $. pag. 13. — P. trivialis L. Eragrostis L., pag. 40. — P. pilosa L. bulbosa L., p. #1. — Kæleria sctacea Pers. ( Loret et Clos ). Des échantillons de celle espèce se retrouvent encore dans l’'Herbier, mélés à ceux du Kœleria cristata Pers. (Aira cristata L. in herb.). divaricata Gou., p. #1. — P. bulbosa L. vivipara. concinna Gaud? $. pag. 13, P. Molinerii Balb.? — P. alpina L. Mutel réunit à cette dernière espèce le P. Molinerii Balb. Fesruca ovina L., Æ. A., p. #3, F. pumila Vill., F. ovina L. (in herb.). — F. ovina L. var. alpina Gr. God. ( Loret et Clos). flavescens Bell. — F. varia Hænk. var. flavescens Gaud., non }. flavescens Bell. heterophylla Jacq. (in herb.). — F. rubra L., (Loret et Clos). glauca Lamk., p. ##.—F. duriuseula L., espèce à la- quelle les auteurs rapportent le F. glauca Lam. et DC. varia Iænk. — F, varia Mænk. var. eskia Gr. God. { Loret et Clos). Myurus L., p. 45. — F. pseudo-Myuros Soy-Will. arundinacea Mill., p. 45. — F. spadicea L. elatior L., p. #5. — F. arundinacea Schreb. ( Loret et Clos ). loliacea Willd., p. #6, espèce mêlée au Glyceria flui- tans R. Br. cristata L. etF. phleoides Vill. Ces deux plantes , dont la première manque dans l'Her- bier , font double emploi dans l'Histoire abrégée. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 233 Bromus geniculatus L., p. #7. M. Serres, et d'après lui, Mutel, rapportent cette plante au Festuca Myuros L. ; mais sa lige élevée, sa pa- nicule allongée, arquée, sa glume inférieure trois fois plus courte que la supérieure, la font reconnaitre pour le F. pseudo-Myuros Soy-Will. — gracilis Weig., p. #8. — Brachypodium sylvaticum R. et Sch. (pari.) et Agropyrum caninum R. et Sch. — glaucus Lap., S. p. 16. C'est avec raison que celle espèce est réunie par MM. Serres , Mutel , Grenier et Godron au B. erectus L. Sripa juncea , L., p. 49. Cette plante est bien nommée, mais on la retrouve en- core dans une autre feuille du genre Shpa , sous le nom d’Agrostis Spica-venti L., probablement par suite d’une confusion d'étiquettes : car si le type de cette dernière es- pèce manque dans le genre Agrostis , on y retrouve du moins la variété 8 minor , signalée dans l'ouvrage de La- peyrouse. Avexa sempervirens Vill., p. 50 et S. p. 18. Rapporté avec raison , par MM. Muiel, Grenier et Go- dron , à l'A. montana Vill. AruNDO Agroslis SCOp., p. 52. Rapporté avec raison par MM. Serres, Mutel, Grenier et Godron , au Molinia cærulea Mœnch. — Calamagrostis L., sans indication de localité dans l'Her- bier. — Calamagrostis tenella Host. Louvm perenne L. La variété à des Additions, p.633, caractérisée par ces mots: majus glaucum, est VA gropyrum junceum P. Beau. — tenue L. (ir herb.). — Triticum Poa LDC. ( Loret et Clos). Rorrsogcuta incurvata L., p. 53. — À. filiformis Roth. ; épi dressé, glume de la longueur de l'épillet. 234 MÉMOIRES Trrricux biunciale Vill., et T. tenellum L., pag. 54. — T. Poa DC. Moxria fontana L., p. 54. —- A7. rivularis Gmel. ( Loret et Clos ). GLoBuLARIA punctata Lap., p. 57. «M. Arnott, et d’après lui M. Cambessèdes, rapportent la G. punclata Lap., comme synonyme de celle espèce ( G. cordifolia L.) (1). Ce synonyme est faux. Par l’ins- pection de l'échantillon unique et aussi mauvais de l'Her- bier des Pyrénées , il est aisé de se convaincre que ces deux espèces n’ont aucun rapport l’une avec l’autre (Du- chartre, 9% Jasci. de la FI. pyrén., Exsicc, n° 179). » Qu'est donc le G. punctata Lap.? Tout récemment, le colonel Serres l'a rapporté au Jasione amethystina Lag. (Voy. Bull. de la Soc. bot. de France , HE, p. 378); mais c'est bien à tort; car nous avons pu comparer l’échantil- lon de Lapeyrouse à la plante d'Espagne , et entre elles les signes dislinctifs sont nombreux. La première diffère de celle-ci : 1° quant aux caractères de végétation , par sa gla- brescence , par ses feuilles à limbe ovale-apiculé dans les caulinaires , obovale dans les radicales avec le pétiole fili- forme et bien distinct, par les folioles de l'involucre linéai- res et incolores ; 2° quant aux caractères floraux , par son ovaire libre uniloculaire, surmonté d’un long style ; par sa corolle tubuleuse , ses quatre étamines, etc, La plante de Lapeyrouse est sans nul doute , par la lèvre supérieure de la corolle réduite à une seule lanière linéaire uninerviée autant que par ses autres caractères, le Carradoria incanescens Alph. DC. ( Globularia incanescens Viv.), ainsi que l’a bien reconnu M. Bubani (loc. cit. , pag. 4). M. Alph. de Candolle rapporte, d’après M. Cambessèdes , en synonyme au Carradoria , le Globularia alpina minima Origani folio Tourn. (in De Candolle Prodr. xu, p. 610 ); or, Lapeyrouse a donné ce mème synonyme à son G. punclata , si ce n’est que le mot Bellis a été mis par lui à la place du mot Globularia. (1) Cette même opinion est adoptée par M. Aïph. De Candolle ( Prod. regn. veg. x, Gr2). st 5 tt tits a détmnaie DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES, 235 ScaiosA arvensis L. var. £ latifolia, p. 59 ;S. sylvatica L. var. G (in herb.) — Knautia dipsacifolia Most. ( Loret et Clos.) — arvensis L. integrifolia et S. arvensis var. foliis dentatis. — Knautia sylvatica Dub. — hirsuta Lap. — Xnautia collina (sub Scabiosa) Req. { Loret et Clos ). — gramunliaL., p.60 (quoad Coilioures).—S. marilima L. — gramuntia L. (quoad Montlouis, Eynes, la Soulane). — S. Columbaria L. var. pachyphylla Gaud. (Loret et Clos). — Columbaria L, var. latifolia, foliis pinnatifidis (Bains de Vernet et des Escaldes). — $. maritima L. | Loret et Clos). — Columbaria L. var. | Bagnols sur mer ). — S. Loretiana Timb. (inéd. }. — Columbaria L. var. $, var. y, var. e, el var. alpina nuda flore amplissimo , p. 60. — S. Jordani Timb. (Loret et Clos). — Columbaria L. {quoad Prat de Mollo, Saint-Béat), et S. Columbaria L. var. caule simplicissimo foliis dis- tantibus (Saint-Béat). — S. Columbaria var. pachy- phylla Gaud. ( Loret et Clos). — pyrenaica AI. (quoad Esquierry, Lheris), et S. pyrenaica, var. y foliis integris dentatis ( Jisole). — S. velutina Jord. Pugill., p. 87. ( Loret et Clos ). Gauivm rubioides L., p. 62. Ses feuilles grandes et quaternées , ses fruits glabres , etc. , font reconnaitre cette espèce, omise dans la Flore de France, et indiquée par Lapeyrouse dans les haies et les buissons du Roussillon. — palustreL., p. 63. — G. palustreL. (part.) et G. saxa- tile Vill. MÉMOIRES montanum L., p, 63. — G. palustre L. pyrenaieum Gou. var. 8, G. cæspitosum Lam. — G. cæspilosum Ram. non Lam. Mollugo L. — G. erectum Huds. Mollugo L. var. hirsuta (Saint-Béat, port de Vieille ). — G. sylvestre Poll. sylvaticum L. (ir Lerb.), G. Mollugo L. var. B et var. y sylvatieum L. (A. Abr., 64). — G. sylvaticum L. (part.), G.erectum Huds. (part.) et G:. elatum Tbuill. aristatum L., p. 64.— G. Prosti Jord. ( Loret et Clos). Cette espèce se retrouve encore dans l’Herbier sous le nom de G. purpureum L. (Mende). austriacum Jacq., p. 65. — G. elatum Thuill. microcarpum Vahl. G. setaceum Lam. , p. 67. Les échantillons de cette espèce , rapportée avec doule aux Pyrénées , d’après Lapeyrouse, portent l'indication : Eynes, Cambredases. papillosum Lap., p. 66, mêlé au G. sylvestre Bocc. tenue Vill., p. 66. — G. montanum Nill. Aparine L., p. 67. — G. tricorne With. atrovirens Lap., S. p. 22. Cette espèce est réunie par Mutel au G. aristatum L. ; par MM. Grenier et Godron , comme variété , au @. syl- vaticum L. Ces derniers botanistes lui assignent des feuilles petites : or, celles des échantillons de l'Herbier n'ont pas moins de 0",03 de longueur , et 0",005 à 0",008 de lar- geur. La panicule est étroite, pauciflore , cachée en partie par les feuilles qui conservent leur développement Jus- qu'aux nœuds les plus élevés ; la corolle a ses lobes acu- minés. hirsutum Lap. $., p. 25.— G. papillosum Lap. 6 hir- sutum Nob. Toute la plante, la panicule exceptée, est couverte DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 237 d’une villosité courte; les feuilles, dans le seul échan- Lillon de l'Herbier, sont toujours par verticilles de 6, alors que MM. Grenier et Godron donnent au G. papillosum Lap. des verticilles de 8-10 feuilles ; mais quelques échantillons de l’Herbier n’en ont que 6 , comme l'avait remarqué La- peyrouse lui-même ( . A., p.66). — Sans nom spécifique (in herb.\, et pris à la vallée de Plan. — G. corrude folium Nil. ( Loret et Clos LÉ Rusra linctorum L., p. 68. — Galium Aparine L. PLanraGo lanceolata L. var. y alpina sericea, Pp-69.— P. mon- tana L. ( Loret et Clos ). — intermedia Lap., p. 69. Cette plante, réunie par Mutel au P. lusitanica L. , est . rapportée avec raison par De Candolie et MM. Grenier et Godron au P. Lagopus L. -— graminea Pourr., p. 70 — P. serpentina L. — pubescens ? DC. , p. 71. Cette espèce, omise par Mutel, par MM. Duby, Gre- nier et Godron, appartient au P. subulata L. — subulata Walf. { P. subulata L. in herb. ). — mMaritima L. var. f— P. crassifolia Forsk. Les échantillons de l'Herbier appartiennent bien au P. subulata Wulf. ( P. carinata Schrad. ). C’est peut-être parce que Lapeyrouse n'aura pas distingué le P. subulata Walf, de l'espèce ainsi nommée par Linné, qu'il aura con- sidéré la plante qui suit comme une espèce nouvelle. — pungens Lap. Rapportée par Mutel au P. serpentina Lam., dont elle diffère par ses feuilles et ses épis raides , par ses braclées aiguës , cetle espèce est réunie avec raison par MM De- caisne (x De Candolle Prod. XIIT, 730), et Grenier et Godron, au P. subulata L. — Sessiliflora Lap., p. 72. Encore une espèce qui a fourni matière à de nombreuses 5° 8. — TOME 1. 16 238 MÉMOIRES discussions. Mutel n’est pas éloigné d'y voir un état parti- culier du P. Bellardi AN. ; M. Decaisne la rapporte au P. subulata L., et MM. Grenier et Godron l'ont omise. C’est le P. carinata Schrad. var. depauperata Gren. et God. , mais une forme ayant les capitules entièrement ses- siles ( Loret et Clos ). — PsylliumL., P. arenaria Waldst. et K., P.Cynops L., p.72. 11 règne dans l'Herbier une déplorable confusion de ces trois espèces , due sans doute à des remaniements. Le pre- mier n’est autre que le P. Cynops L., si distinct par ses tiges sous- frutescentes , ses petits capitules subglobu- Jeux , etc. ; le deuxième est le P. Psyllium L. , aux capi- tules ovales-oblongs, aux bractées égales , ne dépassant pas le calice, etc. Enfin, l'Herbier possède trois échantillons réunis sous le nom de P. Cynops L.; deux appartenant au P. Cynops L. , l'autre au P. arenaria L. ALcuemicca vulgaris L. var. 6, p. 74h. — 4. pyrenaica Duf. { Loret et Clos ). Hypecoux procumbens L., p. 75. — H. grandiflorum Benth. { Loret et Clos). Sacrva procumbens L., p. 77, mêlé au S. apetala L. — apetala L., avec point de doute (ia herb.). — S. pro- cumbens L. ; plante pérennante. RapioLa millegrana Sm., p. 78. Les échantillons de cette espèce (R. linoides Gm.), sont mélés avec ceux de l'Asteroselinum stellatum Link. Myosoris apula L., p. 85. Cette espèce manque dans l’'Herbier au genre Myosotis; mais se retrouve dans le genre Anchusa , avec cette anno- tation : « Anchusa tinctoria ? L. Dans les fossés le long de la mer, en Roussillon : à comparer avec le Lithospermum apulum L.» — Alpina Lap., p. 85. — A. pyrenaica Pourr. ANCHUSA....... terrains secs près la mer à Bagnols (47 herb.). La plante portant cette indication est V_Alkanna tinctoria Tausch. DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 239 CyNocLossum montanum Lap., p. 87. — Pulmonaria tube- rosa Schrank , avec un fragment de Cynoglossum offi- cinale L. — pellucidum Lap. S. p. 28. — C.montanum L.. Pczmonaria officinalis L. , P. 87. — P. tuberosa Schrank. CEriNTae major L. , p. 68. — C. alpina Kit. — aSpera L. — C. alpina Kit. — Minor L. — C. alpina Kit. La localité assignée dans l'Herbier à ces trois plantes est la même. Dans aucune les feuilles ne sont ciliées (elles le sont dans le C. aspera Roth) : deux d’entre elles (C. major Lap., C. aspera Lap. ) sont en fleur, leurs anthères sont subsessiles , et tous leurs caractères sont identiques : la troisième ( C+ minor Lap.) est dépourvue de corolle ; mais son calice a » Comme celui des deux au- tres, ses segments oblongs, obtus » et elle appartient évi- demment à la même espèce qu'elles. Lycorsis vesicaria L. » P: 89 ; double du Z. arvensis L. EcHiv italicum L. , P-89. — E. vulgare L. — grandiflorum Lap. p. 90, E. megalanthos Lap., S., p- 29. Judicieusement rapporté par Mutel et par MM. Gre- nier et Godron, à l'E. plantagineum L. — Pyramidale Lap., p. 90. Rapporté avec raison , par M. Serres, à l'E. pyre- naicum DC., et par MM. Mutel Grenier et Godron, à V'E. italicum L., synonyme de cette dernière espèce. — luteum Desf., p. 91. La plante de Lapeyrouse est rapportée par M. Alph. de Candolle , à son Æ. Pyramidatum , c’est-à-dire, à l'E. italicum L., E. pyrenaicum Desf. L'échantillon de l'Her- bier , consistant en trois petites fausses grappes détachées el en une feuille, avec cette double indication : Echium luteum Desf. à San Felice D Barrera, Echium flavum 240 MÉMOIRES Flor Att.( celle-ci de la main de Pesfontaines ), appartient bien évidemment à l'E. flavum Desf. : ses étamines, très- longues , la forme de la feuille et les poils jaunâtres très- serrés et apprimés qui la couvrent , ainsi que le calice, ré- pondent en tous points à la figure de FE. flavum du Flora Atlantica. ANDrosacE Chamæjasme Willd. , p. 95. — 4. villosa L. Ce qu'avaient déjà reconnu MM. Bentham et Duchartre. Primuca veris L. et P. acaulis Jacq., p. 96. M. Bubani (/. c., p. 5), rapporte au Primula Columneæ Ten. ( considéré par MM. Grenier et Godron comme une variété du P. officinalis Jacq.) , le Primula veris de La- peyrouse, et un des échantillons du P. acaulis Lap., es- pèce représentée aujourd'hui dans l'Herbier par un seul. La détermination de Lapeyrouse, relativement au P. veris L., est exacte ; sa plante est bien le P. officinulis Jacq. (nom rapporté aussi en synonyme par Lapeyrouse , 1. 4., p- 86); ce dont témoignent les feuilles non cordiformes, le calice non enflé , etc. — elatior Jacq. 8 alpina minor. — P. intricata Gr, God. , si tant est que ce soit une bonne espèce ( Loret et Clos ). — longiflora Jacq. et P. glutinosa L., p. 96. D'après MM. Grenier et Godron, ces espèces ne crois- sent pas dans les Pyrénées. La première est représentée dans l’Herbier par deux échantillons ; la seconde par un seul ; mais ils ne sont suivis d'aucune indication de localité. — marginata Curt., p. 97. Celte espèce, refusée aussi aux Pyrénées par MM. Gre- nier et Godron , est représentée dans l'Herbier par un bel échantillon , avec ces mots : «Roches ombragées au port de la Picade. » — Auricula L. Encore , aux yeux des auteurs de la Flore de France, une plante douteuse pour les Pyrénées ; l'Herbier n’en pos- sède qu'un échantillon , avec ces mots : «au Canigou. » , , = DE L ACADÉMIE DES SCIENCES. 241 — latifolia Lap. Cette espèce doit-elle être distinguéedu P. villosa Jacq. ? M. Duby les réunit {in De Candolle Prod. VIE, 38), tandis qu'aux yeux de MM. Grenier et Godron elles sont diffé- rentes. D’après eux, un des principaux caractères du P. latifolia est d’avoir des pédoncules une ou deux fois plus longs que les feuilles ; mais, dans les deux échantil- lons de l'Herbier , ils dépassent à peine celles-ci. Toutefois, la forme et la grandeur des feuilles semblent établir entre ces deux espèces une distinction motivée : obovales- cu- néiformes , opaques, épaisses, bordées de petites dents, et analogues à celles du Saxifraga umbrosa L. dans le Promula villosa Jacq. : spatulées et un peu elliptiques, minces , à grosses dents, el trois ou quatre fois plus grandes dans le P. latifolia Lap., où elles ressemblent, à part les dimensions , à celles du Saxifraga stellaris L. La variété 8 major du Primula villosa Jacq., établie par Lapeyrouse, appartient au P. latifolia Lap. Nous ne savons pour quelle raison MM. Grenier et Go- dron , à propos du Primula villosa Jacq., P. viscosa Vill., donnent la préférence à ce dernier nom, postérieur en date, contrairement aux lois de la nomenclature botanique. Corrusa Mathioli L., p. 98. Cette espèce, étrangère à la Flore française, d’après MM. Grenier et Godron, est représentée dans l'Herbier par un échantillon , avec l'indication : « Au pic de Mont- vallier. » CYCLAMEN europæum L., p. 98. MM. Grenier et Godron rapportent la plante de Lapey- ronse au C. repandum Sibth. et Sm.; l'échantillon assez incomplet de l’Herbier , consiste en un rhizome (sans tu- bercule }, nu, long de 9 centim., trifurqué dans sa moitié supérieure, portant un bouton floral et une seule feuille bien développée cordiforme , obtuse, à bords très-lègère- ment crénelés et dépourvus d’angles saillants. Convozvuzus siculus L., p. 101. «Parait manquer dans les Pyrénées-Orientales .… où il 242 MÉMOIRES a été signalé par Lapeyrouse (Grenier et Godron). » L'Her- bier possède un seul échantillon de cette espèce , sans in- dicalion de localité. Campaxuza rotundifolia L. var. cæspitosa Scop., p. 103. — C. pusilla Hænk. ( Loret et Clos). — Rapuneulus L., p. 104. — C. patula L. Racine grêle ; longs pédoncules étalés- dressés avec deux bractéoles au-dessus du milieu, etc. ( Loret et Clos ). — rhomboidalis L., p. 104, deux échantillons avec l'indi- cation : Pales de Bouts, Cagire. — lanceolata Lap., p. 105. — C. rhomboïidalis L. var. La plante de Lapeyrouse est réunie par De Candolle (Flor. Fr.) , et Duby ( Bot. Gall.) au C. rhomboidalis L.; considérée comme variété de cette espèce, par Mu- tel et par M. Alphonse De Candolle ( Prodr. vit, 470 ); enfin comme espèce distincte par MM. Grenier et Godron. Mais les nombreux échantillons de l'Herbier Lapeyrouse témoignent du peu de valeur , soit des caractères floraux (eten particulier de la longueur relative des divisions ca- licinales et de la corolle), soit des caractères des feuilles. — Cervicaria L., p. 106. Par son calice à divisions étroites , lancéolées et par son style de la longueur de la corolle, etc., la plante ainsi dé- signée par Lapeyrouse appartient au C. glomerata L. — Medium L., p. 107. Une inflorescence en panicule , des divisions calicinales à peine plus courtes que la corolle et un style à trois stig- mates , ne permettent pas de douter que l’échantillon de l'Herbier n’appartienne au C. speciosa Pourr. (C. longi- folia Lap. ). — bellidifolia Lap. S. p. 36. Représenté dans l'Herbier par une seule feuille , accom- pagnée de ces mots: « à Pyrenœæis. Vaillant Herbier.» Puyreuma pauciflora L., p. 108. — P. orbicularis L. ( Loret et Clos). DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 243 — pauciflora L. var. B cæspitosa villosa , p. 109 (sans indi- cation de localité et avec un point de doute dans l’Her- bier). —Jasione humilis Pers. ( Loret et Clos ). — Michelii All, p.109. Rapporté avec raison par MM. Bentham , Duchartre, Alph. De Candolle ( Prodr. t. vu, p. 451), et Grenier et Godron au P. hemisphæricum L., caractérisé par ses brac- tées ovales , acuminées, ses trois stigmates, etc. — Scheuchzeri AIl., P. scorzonerifolia Vill., p. 109. Dans l'Histoire abrégée comme dans l'Herbier , Lapey- rouse donne à tort ces deux dénominations comme syno- nymes. Sa plante difière de l’une et de l’autre espèce et appartient, comme l'avaient déjà pensé MM. Alph. De Candolle , et Grenier et Godron , à la variété du P. orbi- culare L., appelée P. lanceolatum. — betonicæfolia Vill. (ën herb.), P. spicata & betonicæfolia, p- 114. — P. spicata L., bractées longues, etc. ( Loret et Clos). Versascum phlomoides L., p. 113. La plante ainsi nommée n’a les feuilles ni décurrentes F ni laineuses-tomenteuses aux deux faces, c’est le V. majale DC., comme l’a bien reconnu M. Bubani { L. c. Das) — dentatum Lap.,p. 114, réuni à bon droit au Ÿ. Chaixii Vill., de l'aveu même de Lapeyrouse , (S. p. 37). Darura Metel L., p. 115. Détermination exacte. Cette espèce est omise par MM. Grenier et Godron; il est vrai , que M. Duby prétend l'avoir vainement cherchée dans la localité où l’a cueillie Lapeyrouse. Cmronia uliginosa Lap., S. p. 39. Judicieusement rapporté par MM. Grisebach (in De Candolle, Prod. 1x, 43 )et Grenier et Godron , à l'Elodes palustris Spach. Rises rubrum L., pag. 120 et R. nigrum L., p. 121. — Z. petrœum Wulf. ( Loret et Clos ). 244 MÉMOIRES Vioza odorata L., p. 121, mêlé au 7. sylvatica Fries ( Zoret et Clos \. — montana L , sans indication de localité, pag. 122 — 7. stagnina Kit. ( Loret et Clos). — pummulariæfolia Vill. — F. arenaria DC.; feuilles cré- nelées , obtuses , ete. ( Loret et Clos). — tricolor L., pag. 123 : appartient à la forme décrite par M. Jordan , sous le nom de 7. Timbali (Loret et Clos). — arvensis L.— La forme 7. agrestis Jord. (Loretet Clos\. — hispida Lam. V. rothomagensis Thuill. — Y. cenisia KL. ( Loret et Clos ). — grandiflora L., sans indication de localité. — 7. lutea Sm. (part.\, V. calcarata Sm. (part.),F. cenisia AN. (Loret et Clos). IccecesruM villosum Lap., p. 125. Cette plante, omise par Mutel et par MM. Grenier et Godron, a pour synonyme , d’après Lapeyrouse, d’une part le Paronychia pubescens D.C.( qui n'est autre que l'Herniaria hirsuta L.), de l'autre, l'{llecebrum mariti- mum Vill. (qui n’est peut-être, d’après De Candolle Prod. ut, p.371, que le Paronychia nivea DC.). L'Herbier n'a pas de plante sous le nom d’Illecebrum villosum ; celle qu’il renferme avec la dénomination d’'I. pubescens Lap., n'est autre que le Paronychia serpyllifolia DC. — Paronychia L. et I. capitatum L., p. 125. — Paronychia serpyllifolia DC., d’après la juste remarque de M. Bu- bani (/.c ,p. 5). Taesium linophyllum L., p. 126 (pro parte) et T. alpinum L. — T. pratense Ehrh. ( Loret et Clos). Cnexoroniuu urbicum L., p. 128. — C. Bonus-Henricus L., aux graines verticales, etc. — rubrum L., p. 128. — C. murale L. — glaucum L., sans indication de localité, p. 130 : mêlé à l'Atriplex rosea L. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 245 — glaucum L. var. caulibus prostratis, à Port-Vendres. — Atriplex rosea L. ( Loret et Clos ). — Vulvaria L., p. 130. — C. polyspermum L. SaLsoLa salsa L., p. 130. — Chenopodina maritima Moq.: les feuilles sont subaiguës. — vermiculata L., p. 131. L'échantillon de cette espèce , que les auteurs croient étrangère à la France, porte cette indication : « Très- commune à Colliouvre. » Uzmus pyreraica Lap., S.p. 154. Représenté dans l'Herbier seulement par trois feuilles séparées , longues de 20 cent., larges de 10 à 12, obovales brusquement et longuement acuminées; doit être rapporté à l'U. montana Smith 8 major Fries. GENTIANA punctata Lap., p. 133. — G. Burseri Lap. — asclepiadea L., p. 134, sans indication de localité, et accompagné d'un échantillon de G. cruciata L. — utriculosa L. et sa var. $ acaulis, pag. 135.i— G. verna L. 6 alata Gr. God., G. angulosa Bieb. { Loret et Clos ). — germanica Willd., p.136. — G. campestris L., divisions calicinales très-inégales ( Loret et Clos ). — nana Jacq. — G. tenella Rottb. EryNGrüm planum L., p. 137. — Æ. Bourgati L. Bupcevrux stellatum L., p. 139. Cette espèce qui n’est pas signalée dans les Pyrénées, par MM. Grenier et Godron, est représentée dans l’Herbier par trois échantillons , portant l'indication que l’on re- trouve dans la Flore , c’est-à-dire Pic de Gard. — graminifolium Vahl. La mème enveloppe renferme un échantillon de cette espèce , et un autre de B. ranunculoides L. — repens Lap., p. 139. — Z. ranunculoides L. var. 246 MÉMOIRES — oppositifolium Lap., p. 141. J'ai prouvé’ ailleurs ( Bull. Soc. Bot. t. nt, p.622), que la plante ainsi désignée par Lapeyrouse est une mons- truosité du B. falcatum L. — OdontitesL., rapporté à bon droit au B, aristatum Bartl. par M. Bubani (/. c., p. 6). — obtusatum Lap., S., p. 42. Représenté dans l’Herbier par un seul échantillon ; ne doit pas être distingué du B. ranunculoides L. Au pyrenæum Lap. MM. Grenier et Godron déclarent que cette espèce leur est inconnue. L’échantillon de l’Herbier consiste en une om belle en fleurs ( sans fruits) , qui semble appartenir à l'A. daucifolium Scop. , et en deux fragments de feuille détachés. Buxium Bulbocastanum L., p. 145, B. pyrenæum Lois. , B. flexuosum With., p. 146. Les trois plantes ainsi nommées dans l'Herbier , appar- tiennent à une seule espèce, le Conopodium denudatum Koch. Le B. pyrenœum Lap. ne répond pas à la figure que donne Loiseleur de cette espèce. SELiNUM sylvestre L., p. 146, sans indication de localité. — S. palustre L., Peucedanum palustre Mœnch. Cette dernière espèce se retrouve sous le nom de S. pa- lustre L., mais avec un point de doute dans l’'Herbier. — Chabræi Murr., sans indication de localité, p. 147. — Endressia pyrenaica Gay. { Loret et C los ). — pyrenæum Gou. — Angelica pyrenæa Spreng. — scabrum Lap. — Xatardia scabra Meissn. — Seguierii L. — Peucedanum venctum Koch ( Loret et Clos). — Monierii L., p.148.— Peucedanum Orcoselinum Mænch. ( Loret et Clos ). DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 247 Cavcaus arvensis L., p. 143. — C. leptophyllaL. ( Loret et Clos). Des échantillons de Torilis helvetica Gm. sont mêélés à ceux du Caucalis leptophylla L. et du C. Anthriscus Roth. Daucus lucidus L., p. 144 (Roussillon, Prades, Villefranche }). — D. gummifer Gr. et God., an Lamk? ( Loret et Clos). ATuamanrA crithmoides Lap., p. 148, une des formes l4. Li- banotis L. Lap. ( Libanotis montana A.) Laserprrium Libanotis Lamk., p. 151.—ZL. Nestleri S. Willm. { Loret et Clos ). — trilobum L. MM. Grenier et Godron rapportent à tort cette plante au L. Nestleri S. Willm. Des deux échantillons désignés dans l'Herbier sous ce nom, l’un est le L. latifolium L., l'autre une ombelle d'Angelica sylvestris L. (Loret et Clos ). — ferulaceum Lap., p. 152. Ombelle de fruits de L. Nestleri S. Willm., avec une rosette détachée de feuilles , semblables à celles du Se- necio adonidifolius Lois. ( Loret et Clos ). — hirsutum Lamk. Cette espèce , qui semble n’avoir été signalée dans les Pyrénées que par Lapeyrouse , est représentée dans l'Her- bier par un seul échantillon avee cette indication : Pic de Gard. — simplex L.—Ændressia pyrenaica Gay (Loret et Clos). Heracceux setosum Lap., p. 153. — À. Panaces L. M. Bentham rapporte l'A. setosum L., à l'A. pyrenaicum Lam., opinion adoptée par De Candolle, qui se demande néanmoins si l'H. setosum Lap.n’appartiendrait pas à l'A. Panaces L. ( Prod. 1v. 193). Les échantillons de l'Herbier correspondant à VA. setosum de la Flore, portent les uns le nom d'A. ternatum Lap., les autres le nom d’H. Pana- 248 MÉMOIRES ces L., et diffèrent des précédents par leurs trois segments longuement pétiolulés. Les fruits manquent. — clegans Jacq. p. 154. Les caractères des organes floraux semblent indiquer dans cette plante l'A. Sphondylium L. (pétales blancs à divisions larges ); les feuilles sont analogues à celles de l'{F. angustifolium Vin. — testiculatum Lap., $. p. 43. — PVerisimiliter H. œs- tvum Jord. in Billot Ærch., p. 316 ( Loret et Clos). Licusricuu simplex Lap. et L. ferulaceum AI, p. 155. — Zi- banotis montana Al. et L. montana Al. var. Sivm repens L., p. 157. — Helosciadium nodiflorum Koch. Tige non radicante à tous les nœuds. — angustifolium EL. ({ partim, quoad environs de Perpignan), — Helosciadium nodiflorum Koch. ( Loret et Clos). OEXANTHE crocata L. , p. 158 (quoad Prades, Montlouis). — Coriandrum sativum L. L'OE. crocata L. est représenté dans l'Herbier par une seule feuille sans indication de localité ( Loret et Clos). Ærausa Cynapium L., p. 159. — Conium maculatum L. (Loret et Clos). CaæroruyzLum bulbosum L., p. 161. Rapporté aux Pyrénées d’après Burser et Pourret, est dans l’Herbier sans indi- calion de localité. — hirsutum L, — Conium maculatum L. ( Loret et Clos). — hirsutum L. var. cicutaria Vill, — Chærophyllum hir- sutum L. SESELI montanum L. var. y ramis divaricatis, etc., p. 162. — Trinia vulsaris DC (Loret et Clos). Carum Carvi L., p. 164 ; à l’espèce est mêlé un échantillon de Ptychotis Timbali Jord. ( Loret et Clos). PiurixecLa dissecta Retz., p. 165. — P. Saxifraga L. ( Loret et Clos ). DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 249 — dissecta Retz. var. e et var. € caule brachiato, etc., p.165. — Puchotis heterophylla Koch (Loret et Clos). Lapeyrouse demande si ces deux variétés ne seraient pas chacune une espèce. — dioica L., p.166, var. £ alpina, nana, glauca, cœæspi- tosa , simplex. — Gaya pyrenaica Gaud. CorriGioLa imbricata Lap., p. 169, espèce représentée dans l'Herbier par un seul échantillon en mauvais état, omise par MM. Grenier et Godron , rapportée avec raison par de Candolle (Prodr. IH. p. 367) et Mutel , à titre de variété , au C. telephiifolia Pourr. Srarice echioides L., p. 170. —S. duriuscula Gir. ( Loret et Clos). Lixum usitalissimum L. var. foliis linearibus (sans indication de localité). — L. angustifolium L. — perenne L., p. 171. — ZL. alpinum 1. — angustifolium Huds., mêlé au Z. suffruticosum L. , et au L. alpinum Gr. God. an L.? — flavum L., p. 172, échantillon très-développé du £. stric- tum L. — grandiflorum Desf., S. p. 45. — L. usitalissimum L. La localité assignée dans l'herbier à ces deux plantes est la même : Vallée d'Eynes, Bains de Luchon. Leucorux æstivum L., p.176. Un seul échantillon sans indi- cation de localité. Narcssus bico!ur L. et N. radians Lap., p. 177. Ces deux espèces ( la seconde est dans l'Herbier sous le nom de N. minor) sont considérées avec raison comme va- riétés du N. pseudo-Narcissus L. — Jonquilla L., p. 178, rapporté à bon droit, ainsi que sa variété 8 au N. juncifolius Req. Azuum sphærocephalon L., p. 179, mêlé à l_4. Schœnopra- sum L. 250 MÉMOIRES — Sphærocephalon L. 6 giganteum , aphyllum S. p. #6. — A. approximatum Gr. God. ( Loret et Clos). — serotinum Lap., p. 179. — 4. ochroleucum W. K. — senescens L. et A. angulosum L., p. 181. — 4. fallax Don. — triquetrum L., p.182. — 4. neapolitanum Cyr. avec feuilles d’Æ. triquetrum L. — Moly L., p. 182.— 4.triquetrum L.; hampe sans feuilles avec cette indication : Villefranche, Montlouis (Loret et Clos). — Sibiricum L., p. 182, double de l_4. Schæœnoprasum L. Furriscaria Meleagris L., p. 183. — F. pyrenaica L. ( Lorct et Clos ). ASPHODELUS ramosus L., p. 188. — 4. subalpinus Gr. God. ANraeriCUm Liliago L., p. 189, mêlé au Phalangium ramo- sum Lam. Hyaaxraus Muscari L., avec l’indication Bagnols, Can-Cam- pa, p. 191. — Muscari racemosum DC. ( Loret et Clos ). Juxcus arcticus W., p. 96. — J. filiformis L.? Le seul échantillon de l’herbier réduit à un seul faisceau de feuilles sans tiges ni fleurs , avec l'indication : Pic du Midi, paraît appartenir au J. filiformis L. — articulatus L., et J. subverticillatus Waulf., p. 19%. —J. lamprocarpus Ehrh. — articulatus L. var. y, p. 194. — J. alpinus ill. — sylvatieus Roth, p. 19%, et J. bulbosus L., p. 195. — J. Gerardi Lois. — Jacquini W., p. 195. L’Herbier ne possède de celte espèce, qui ne paraît pas avoir été retrouvée dans les Pyrénées , qu’un échantillon sans indication de localité. DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 251 — pilosus L. var. y, Luzula parviflora Desv., S. p. 49. — L. Desvauxii K%, à feuilles larges , à étamines sub- sessiles. — albidus Hoffm., p. 196. L'échantillon de cette espèce, signalée dans les Pyrénées par MM. Grenier et Godron sur la foi de Lapeyrouse, n’est accompagné d'aucune indication de localité. Ruwex divaricatus L., p. 198. — À. pulcher L., dont le pre- mier est considéré par quelques auteurs comme une variété. — bucephalophorus L., p. 199 , pris à Bagnols. Des pédicelles glabres, de grands sépales tridentés au sommet avec deux glochidies de chaque côté font rappor- ter les échantillons de cette espèce à la forme appelée par Steinheil À. Hipporeqü. — aquaticus L., p. 199, R. longifolius DC., S. p. 49. — R. oblusifoiius L. ( Loret et Clos). — arifolius All, p. 200. Des deux échantillons de cette plante, l’un qui avait d’abord été nommé par Lapeyrouse R. scutatus L., est cette dernière espèce si bien caractérisée par sa teinte glauque ; l'autre est bien le À. arifolius AL , si distinct des échan- tillons du R, ampleæicaulis Lap., cueillis dans les mêmes localités, par ses ochréas et ses bractées laciniées. Coccmcum montanum L. (in herb.) — C. autumnale L. (Loret et Clos). Buzsoconium autumnale Lap., p. 202. — Merendera PBulbo- codium Ram., dont un échantillon est mélé avec ceux du Bulbocodium vernum L. Erinosium montanum L. var. foliis ternis, sans indication de localité, p.207. — Æ. trigonum Schrank, stigmates soudés en massue, etc. ( Loret et Clos). — montanum L., E. alpestre Smith, sans indication de loca- lité. — Æ. trigonum Schrank ( Loret et Clos ). 252 MÉMOIRES — tetragonum L. — Æ. roseum Schreb. ( Loret et Clos). — palustre L. (quoad var. 8,7%, 0, p.207). — E. alsine- folium Nil. ( Loret et Clos). A la variété à de l'E. palustre L., se trouvent réunis deux échantillons d'£. montanum L. 8 collinum Koch ; et avec VE. hirsutum L. est un fragment d’E. tetragonum L. Passerina tinctoria Pourr., p. 213, un seul échantillon sans fleurs. — Passerina | Daphne) calycina Lap., rameaux étalés, non tomenteux. — empetrifolia Lap. , p. 61. — P. dioica Ram. Rura graveolens L., p. 220. — À. bracteosa DC. — montana Ait. — À. angustifolia Pers. Ruaopone proM hirsutum L., et R. Chamæcistus L. Ces deux espèces, qui, d’après MM. Grenier et Godron, seraient douteuses pour la Flore de France , sont représen- tées dans l’Herbier chacune par un échantillon, accompa- gnées de la même indication que celle qu’on trouve dans l'Histoire abrégée, p.221. Voyez les renseignements donnés sur ces plantes par M. Bentham ( Catal., p. 115). Pyroza rotundifolia L., p. 222. Des deux échantillons ainsi dénommés, l’un est le P.mi- nor L., à style court et droit ; l’autre est l'espèce. SaxtrrAGA diapensoides Bell., $. p. 54. — S. aretioides L. Cette espèce, représentée dans lherbier par un seul échantillon à moilié défleuri, est rapportée à tort par MM. Grenier et Godron au S. media Gou., dont elle diffère par ses longues rosettes pressées de feuilles linéaires , par son calice plus court et longuement dépassé par les péta- les, par les étamines exsertes. Elle offre au contraire tous les caractères du $. aretioides Lap., en particulier les pé- tales obovales denticulés; mais, d'après Lapeyrouse, ceux-ci seraient blanes, tandis que le S. aretioides Lap. les a jaunes. L'Herbier possède deux plantes signalées dans l'ouvrage de Lapeyrouse (S. p. 53), et portant pour désignation : L'une, Saxifraga.… hybride, ayant pour père la calyci- flora, pour mère la luteo-purpurea. Montagne de Rie. - DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES, 253 L'autre, Saxifraga.… hybride, ayant pour père la {uteo- purpurea, pour mère la calyciflora. Montagne de Rie. mulala L., p. 225. — S. Zizoon 1. — recta Lap. — S. Æizoon L. var. P Réuni par MM. Grenier et Godron au S. Aizoon L., auquel De Candolle le rapportail comme variété, le S. recta Lap. mérite d'en être distingué au moins à ce titre , par ses feuilles plus longues (25"") et serretées (non créne- lées ), par sa tige rameuse dans son Liers supérieur, et non simple et terminée par un pelit corymbe floral. burseriana Jacq., p. 226, S. Vandellii Stern. , p. 636. — S. aspera L. Cette plante, représentée dans l'Herbier par un seul échantillon, est réunie, par MM. Grenier et Godron au S. aretioules Lap., dont elle diffère essentiellement : ses tiges courtes uniflores, ses feuilles linéaires-lancéolées , luisantes et bordées de longs cils, ses pétales elliptiques , sa capsule courte et libre ne semblent pas permettre de la distinguer du S. bryoides L., considéré lui-même à bon droit comme variété du S. aspera L. groenlandica L. — S. Zratiana Schul. (F1. de Fr. et d'Allem., p. 176.) mixta Lap., p. 228. — S. pubescens Pourr. Toutefois un échantillon de S. pubescens Pourr., que J'ai tout lieu de croire avoir élé envoyé par l’auteur de cette espèce à Lapeyrouse, semble appartenir aussi bien au S. moschata Lap. Le S. palmata Lap. qui est intermé - diaire entre le S. pubescens Pourr. et le S.geranioides L., pourrait bien être une hybride de ces deux espèces. mixta Lap. y tenuifolia, lobis profunde linearibus subse- taceis. — S. pentadactylis Lap. sedoides L., p. 230. Cette espèce, indiquée aux Pyrénées sur la foi de La- peyrouse , n’est représentée dans l'Herbier que par un frag- ment. 5° 5. — TOME I. It 254 MÉMOIRES stellaris L., et S. leucanthemifolia Lap., p. 231. M. Duchartre a démontré depuis longiemps l'identité spécifique de ces deux plantes. cernua L., p. 232. —S. granulala LA aquatica Lap., p. 232. Cette espèce avait été rapporlée jusqu'ici au S. ascen- dens L.; mais il parait démontré qu'elle diffère de la plante de Suède. cæspitosa L., p. 234, et S. moschata Jacq., p. 235. —S. muscoides Wulf. Lapeyrouse signale la très-grande ressemblance de ces deux plantes. moschata Jaeq. var. major elegantissima floribus majori- bus, foliis subnervosis. — $. erarata Nill. ciliaris Lap., S. p. 54. M. Bentham se demande si celle plante ne pourrait pas se rapporter au S. androsacea L., dont elle diffère par le port, par ses nombreuses rosetles à rejels stériles , par ses fleurs plus grandes, ses pétales écartés et entiers au som- met : elle se distingue aussi du S. planifolia Lap. par ses feuilles quelquefois bi-trifides au sommet, par ses pédicelles plus longs que le calice, par ses fleurs plus grandes. Serait- eile une hybride de ces deux espèces? — ladanifera Lap. Bien distincte du S. geranioides L., si on ne regarde que les extrêmes, cette espèce, d’après la juste remarque de MM. Bentham et Puchartre, se confond avec elle par de nombreux intermédiaires, et peut, comme l'ont fait MM. Grenier et Godron, être rapportée à celle-ci comme variété. L’assertion de Lapeyrouse déclarant que cette dernière espèce manque dans le centre de la chaine des Pyrénées (1. c. p.236), a été depuis longtemps réfutée par M. Duchartre qui l’a trouvée en très-grande quantité aux Estagnoux , à la Palé de Crabère , au Mail de Cristal, etc. (Flor. Pyrén., exsicc. Fasc. 6, n° 111). DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 255 SCLERANTEUS annuus L., p. 237. Aux échantillons de cette espèce se trouve mélé un frag- ment d'une plante bisannuelle ou pérennante, el qui, d'après la comparaison avec l'Herbier Lalanne, a donné lieu à des observations récentes de la part de M. Boutigny (V. Bull. Soc. Bot., L. IX, p.768). 1 appartient à l'espèce décrite par M. Grenier (in Billot, Arch. FL de Franre - p- 203 , non Flore de Fr.), sous le nom de S. poiycarpos L. Sa durée et les divisions forlement crochues de son calice nous ont paru, à Ni. Loret et à moi , des caractères sufli- sants pour la distinguer comme espèce. Gyrsorica saxifraga L., p. 238. — Sifene Saxifraga L. Calice assez grand , obconique, rougcâtre, dépourvu d’angles saillants et de calicule. Saroxaria bellidifolia Sm., p. 239. Un ovaire libre surmonté de deux styles, 10 étamines exerles à filets insérés au sommet de l'onglet de pétales linéaires-cunéiformes , des fleurs Jaunes réunies en capi- tule accompagné de deux grandes bractées oblongues et enlouré de bractéoles à bords ciliés , et presque aussi lon- gues que le calice , ne laissent aucun doute sur la bonne détermination de celte plante. C’est donc à tort que MM. Grenier et Godron donnent » d’après M. Serres (1), le S. bellidifolia Lap. comme Synonyme du Valeriuna glo- bularicæfolia Ram. (1. c. IE, p. 56). — lutea L. Représenté dans l'Herbier par un seul échantitlon ’ comme le S. bellidifolia Sm. , le S. lutea Lap. , ne diffère de cette espèce que par la taille, ayant comme elle un ça- pitule Lerminal jaunâtre, des feuilles spatulées ; mais la longueur de sa tige n'atteint pas 4 centimètres , tandis qu'elle est de 26 centimètres dans le S. bellidifolia. Le ca- lice n’est pas laineux ; les filels staminaux sont jaunes ; c'est donc bien le S. bellilifolia Sm. var. nana. M. Bubani avait ——————_—_— (1) J’ai parcouru avec soin la /ore abrégée de Toulouse, de M. Serres, el je n'ai pu y découvrir cette remarque. 256 MÉMOIRES déjà constaté l'identité spécifique des S. bellidifolia et lutea de Y'Herbier Lapeyrouse ({. c., p. 7). Dravraus Carthusianorum L., p. 240. — D. Carthusiano- rum L. {5 congestus Gr. God. Cette plante se retrouve dans l'Herbier sous le nom de D. atrorubens L., sans indication de localité. — Carthusianorum L. var. à, S. p. 58. — D. Seguierii Chaix ( Loret et Clos ). — prolifer L., p. 241, cum frustulo D pungentis L. — Caryophyllus L. — D. attenuatus Sm. (pro parte) e D. sylvestris Gr. God. an Jacq. ? à écailles du calicule ovales obtuses ; an D. aggericolus Jord. 2x Billot. Annot. décembre 1856 ? ( Loret et Clos). — sylvestris Wulf. — D. tener Balb. ( Loret et Clos). — serratus Lap. — D. neglectus Lois. (pro parte) et D. attenuatus Sm. ( Loret et Clos ). = glaueus L., sans indication de localité (ir herb.) D. del- toides & D. glaucus 7. A. ,p. 242. — D. sylvestris Gr. God. an Jacq. ? ( Loret et Clos }. — alpinus L., p. 243. — D. toner Balb. Grevsazus catholicus L., p. 244, Silene catholica Otth., (2 herb.); plante refusée à la France , et rapportée, à bon droit, par M. Bentham , au S. inaperta L. SILENE quinquevulnera L., p. 244. — S. gallicaL., auquel certains auteurs le rapportent comme variété. — stellata Lap., p. 245. —S. ciliata Pourr. — paradoxa L., p. 2h6. — $. nutans L. — stricta L., p. 246. — S. gallica L. La plante de Lapeyrouse est rapportée à tort, par MM. Grenier et Godron, au S. muscipula L. : ses fleurs sont sessiles, unilatérales, et son calice est hispide, son fruit sans ombilic , etc. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES, 257 — inflata Sm. var. À alpina nana — S. alpina Thomas. { Loret et Clos ). — rubellaL., p. 247. — S.creticaL.., et non S.inaperta L., comme le pensait M. Bentham. — muscipula L., p. 248. — S. brachypetala Rob. et Cast. { Loret et Clos). — polyphylla L. — S. inaperta L. SrELLaRI'A pemorum L., p. 249. — Malachium aquaticum Fries. Feuilles sessiles , 5 styles, capsules dépassant à peine le calice , etc. — Alsine Hoffm. — $S. wliginosa Murr., synonyme cité, du reste, par Lapeyrouse. — cerastoides L., S. multicaulis Willd., etS. radicans Lap. , p. 250. — Cerastium trioynum Nill. ARENanIa peploides L., p.251. — Polycarpon peploides DC., ce qu'a reconnu M. Bubani | /. c., p. 5). — cerastoides Lap., p. 252. Ce nom n’est pas même cité dans la Flore de France, et De Candolle , M. Duby et Mutel le rapportent , en syno- nyme, à l'A. purpurascens Ram. ; dénomination à la- quelle ils donnent la priorité. Cependant M. Puchartre à écrit depuis longtemps : « La dénomination de Lapeyrouse étant la plus ancienne, doit être préférée ( Flor. Pyr. exsicc. Fasc. 5, n° 83 ). » C'était aussi l'opinion de Persoon (Enchir.X, 502). — triflora L., A.montana L. , p.253. A. saxatilis L., p.254, et A. mixta Lap., p.255, justement rapportés à l’4. grandiflora AN. — cherlerioïides Vill., p.254. — {sine recurva Wablenb. La plante ne répond nullement à la figure donnée par Villars , et n’en a pas les caractères : ses feuilles, fascicu- lées , incurvées, linéaires, obtuses, ses sépales striés, aigus, etc., la font reconnaitre pour l'Alsine recurva Wablenb. 258 MÉMOIRES — hispida L., variété pubescente de l°_4. verna L. — liniflora L. , p. 255. — 4. verna L. L'A. liniflora Jacq. est considéré comme synonyme de l’Alsine verna Barth. ; mais le synonyme d’Arenaria striata Vi. donné par Lapeyrouse à 1’A. liniflora L., ne lui convient pas. La plante de Villars , par son calice oblus , appartient à une autre section , et doit être rap- portée à l'Alsine Bauhinorum Gay. — mutabilis Lap., p. 256. — Ælsine mucronata L. Senum Telephium L. , p. 257. Rapporté avec raison par M. Bubani (/. c., p. 8), partie au $S. Fabaria Koch , partie au S. maximum Sut. Les échantillons du premier ont été pris à Prats-de-Mollo ; ceux du second, à Saint-Béat, au Pourlingau , sous le Pic de Tauro. — saxatile Wigg., p. 259. — S. alpestre Nill. , synonyme donné par Lapeyrouse. — saxatile Wigo. var. 6, à fleurs blanchâtres, est un double du $. atratum L. , à fleurs en corymbe. L’'étiquette de Lapeyrouse l'indique déjà par ces mots : var.ramosius, floribus albis, cauliculis calicibusque atro rubentibus. — Sphærieum Lap., p. 259, S. sphæricifolium Lap. (2x herb.\. — Rapporté, à bon droit, par MM. Grenicr et Godron , au S. brevifolium DC., et à tort, par M. Bubani (7. «.,p. 8) au S. dasyphyllum L. — divaricatum Lap., p. 260, rapporté, à bon droit, au S. anruum L. par M. Bubani. ( /. c., p. 8). — sexangulare L. Deux espèces différentes sous ce nom : l’une est le S. annuum L. , Vautre ( reçue par Lapeyrouse , et accom- pagnée de ces mots : rochers des Cevennes) le S. amplext- caule DC. , si bien caractérisée. — annuum L.,p. 260. —S. alpestre L. ; tiges rampantes, courtes , feuilles ovales-obiongues , à base un peu pro- DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 259 longée , fleurs en petit corymbe et subsessiles , pétales ovales-lancéolés , dressés , capsules étalées. rlo- Cerasrium vulgatum L. , p.263. —C. viscosum L. (C.28 meratum Thuill. ). — viscosum L., mêlé au C. vulsaltum L. et au C. varians Coss. et Germ. — semidecandrum L., représenté par un bout de tige uni- flore, sans indication de localité. — C. latifolium V.. ( Loret et Clos ). — tomentosum L., p. 26%. — C. alpinum L. var. lana- tum Gr. et God. ; capsule dépassant du double le calice , flocons laineux sur les rejets stériles , etc. — repens L., sans indication de localité. — C. alpinum KL. { Loret et Clos). — glaberrimum Lap., p. 265. — C. glaucum Gren. La plante de Lapeyrouse n’est pas signalée par MM. Gre- nier et Godron. Le seul échantillon de l'Herbier , qui , d’après l'apparence , appartenait à une plante probable- ment annuelle , bien que Lapeyrouse l'ait dite vivace , a 5 pétales à peine divisés, 8 étamines , 5 styles, elc. — Jatifolium L. — C. pyrenaicum Gay : pétales ciliés à la base, etc. Les localités assignées à cetle plante par Lapeyrouse : 8 P P LS (Canigou , Laurenti), si elles sont exactes , mérilent d’être notées. — aquaticum L. — Stelluria nemorum L. : trois styles, capsule dépassant le calice, etc. SrerGuLa nodosa L. var. 8 floribus purpureis, p. 266. — Gyp- sophila muralisL. : calice monosépale, pentagonal , etc. — glabra Willd. — Un petit échantillon sans indication de localité. Resepa alba L. var. 6 foliis undatis, p. 269. — À. lutea L. { Loret et Clos). 260 MÉMOIRES — undata L. — À. suffruticulosa L. | Loret et Clos). Eupsorgia leptophylla Vill. , p. 270. — Æ. Gerardiana Jacq. { Loret et Clos). — carniolica Jacq., p. 272. — Rapporté, à bon droit, par M. Bubani {/. c., p. 8), à l'E. hyberna L. — pinea L. — £. Paralias L. ( Loret et Clos). — verrucosa L. — Æ. platyphylla L. ( Loret et Clos ). — Esula L., échantillon réduit à un rejet sans fleur et mé- connaissable. Obs. Dans l'enveloppe qui renferme l'E. amygdaloiles L., se trouvent deux fragments d’E. nicæensis AIL. ; et dans celle de l'E. Gerardiana Jacq., un échantillon d’E. verrucosu L. SEMPERVIVUM montanum L., p. 276 , à Rancié, Tourmalet. Des deux échantillons de l’'Herbier , l’un aux feuilles ter- minées par une houppe laineuse , est le S. Pomelii Lamt. ( V. Bull. Soc. Bot. , t. 11, p. 200 ); l'autre , aux feuilles oblongues lancéolées , le S. arvernense Lecoq et Lamt. Rosa villosa L., p. 283. — À. (omentosa Sm. — gallica L., p. 283, et R. pumila Jacq., p. 28#. Ces dénominations, généralement considérées comme synonymes , font double emploi dans l'Histoire abrégée. — sempervirens L., p. 284. — À. prostrata DC. — rubiginosa L. var. 8, R. sepium Thuill. — À. canina L. — moschata L. (in herb.), R. moschata Ait. Æ. A., p. 284. — R. sempervirens L. — aristata Lap., p. 285. Cette espèce, admise par M. Lindley et par Mutel, omise par MM. Grenier et Godron, à sans doute disparu de l'Herbier ; à sa place se trouvent deux espèces, l'une le R. rubiginosa L., l'autre le R. arvensis Huds. var. brac- teata Gren. et God. DE L’'ACADÉMIE DES SCIENCES. 261 — collina Murr. Encore deux plantes sous ce nom ; l’une d'elles à sépales entiers, cadues est le R. rubrifolia Vill. , et l'autre le R. sphærica Gren. in Billot Arch. ( Loret et Clos). — parviflora Ehrh. ? S. pag. 86. — À. parvifolia Ehrb. (in herb.). — R. rubiginosa L. Le R.parvifolia Ehrh., espèce omise par MM. Grenier et Godron , est rapportée par Mutel et par M. Seringe (in De Candolle Prodr. IE, 604), comme variété, au R. gallica L.. Rueus fruticosus L., p. 286. — À. discolor Weih. — corylifolius Sm. — À. tomentosus Borckh. FraGa sterilis 6 parviflora Lap., Æ. 4., pag. 287, Potentilla micrantha Ram. (in herb.). — P. micrantha Ram. (part.) et P. splendens Raw. PorenriLca opaca L. var. $ et y. — P. alpestris Gr. God. an Hall.? ( Loret et Clos ). Cette espèce se retrouve dans l'Herbier, sous les noms de P. subacaulis L. (autant qu’on peut en juger par un échantillon sans fleurs et sans fruits ), et de Potentilla an- ter vernam et heterophyllam. — heterophylla Lap., p. 289 ( un seul échantillon ). Espèce omise par Mutel et par MM. Grenier et Godron, rapportée avec raison par M. Duby au P. verna L. — aurea L., pag. 289. — P. aurea L. (part. ) et P. pyre- naica Ram. — ascendens Lap., rapporté avec raison au P. pyrenaica Ram. — subacaulis L., p. 290, (un seul échantillon sans organes floraux , à feuilles 5-foliolées). Rapporté, probablement à bon droit, au P. verna L. — frigida Vill, (ir herb.), P. subacaulis L. var. y, H. 4., p. 290. — P. opaca L. 262 MÉMOIRES — integrifolia Lap., p. 291 { un seul échantillon), rapporté avec raison au P. nivalis Lap. (1). — alba L., pag. 290, et P. grandiflora L., p. 291; rappor- tées aux Pyrénées sur la foi de Lapeyrouse , ces espèces sont dans l'Herbier sans indication de localité. Gecu rivale L. var. p. 292, à Cauterets. Cette plante, rapportée par M. Bubani (L. c. p. 9) au G. pyrenaicum Ram., dont elle s'éloigne par son long carpo- phore, me paraît appartenir au G. sylvaticum Pourr. Cisrts salvifolius 6 corbariensis Pourr. p. 299, C. corbariensis Pourr. {in herb.). — C. salvifolius L.; feuilles ovales, pon cordiformes, ni acuminées , ni à bords fimbriés : pédoncules uniflores. — crispus L., p 300. — C. crispus L. { pro parte) a C. incanus L. — calycinus L. a Fumana non diversus { in Lerb.\, C. Fu- mana $ calycinus L. ({7. 4., pag. 301). — Fumana Spachii Gr. God. — piloselloides Lap., p. 301.— Æclianthemum canum Dun. — rarifolius L. var. C. canus Jacq. — Æelianthemum ca- num Dun. — ælandicus L. — ÆZelianthemum italicum Pers. y micran- thum Gr. God. (Loret et Clos ). — thymifolius L., p. 302. — Fumana viscida Spach ( Loret et Clos). (1) Il ne sera peut-être pas lout-à-fait inutile pour la bibliographie de faire remarquer qu’à l'égard de cette dernière espèce et de plusieurs autres créées par Lapeyrouse, les auteurs, suivant en cela l’exemple de De Candolle, cilent les Actes de Toulouse (ex. Potentilla nivalis Lap. ac. Toul. in DC. Flore Franç. IV, pag. 465, et Grenier et Godron, Z, c.1. 525); il n’y a pas d'ouvrage sous ce titre, el la citation devrait porter : Histoire et Mémoires de l’Acad. des Sciences, Inscript. et Belles-Lettres de Toulouse, in-4°. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 263 — hirsutus Lap., judicieusement rapporté par Arnott à l'Æe- lianthemum vulgare Gært. — origanifolius Lamk., S. pag. 73. — Helianthemum itali- cum Pers. Pont officinalis L. p. 304. — P. peregrina ML. { Loret et Clos). Decrmwivw Consolida L., sans indication de localité , p. 304. — D. Ajacis L. — jintermedium Ait. et D. elatum L. — D. elatum Pers. var. & Gr. God. ( Loret et Clos). Acoxirum Lycoctonum L., p. 305. — A. Lycoctonum L. y py- renaicum SCT. — neomontanum Kæll., p. 305, et A. paniculatum Lam., p. 306. — 4. Napellus L. AqQuiceGna alpina L., p. 306. — 4. pyrenaica DC. ANEMONE Pulsatilla L. p. 308, sans indication de localité. — sylvestris L., p. 309. Indiquée aux Pyrénées sur la foi de Lapeyrouse ; celte espèce manque dans l'Herbier. Taancrrum fœtidum L., p. 311 ( avec un point de doute dans l'Herbier ; échantillon très-incomplet ) ; paraît être le T. saxatile DC. non Vill. : glabre , pédoncules grêèles, étalés ; anthères plus courtes que celles du 7. minus L. ; cinq carpelles ovales. — tuberosum L. Indiquée aux Pyrénées , d’après Lapeyrouse , celle es- pèce manque dans l'Herbier. — medium Murr. (avec un point de doute dans l'Herbier ). — T, minus L. y glandulosum Koch , T. pubescens DC. — angustifolium L. — 7, spurium Timeroy ( Loret et Clos ). 264 MÉMOIRES Aponis vernalis L., p. 312, est dans l’Herbier sans indication de localité. — apennina L., p. 313. — À, pyrenaica DC. RaNuNCULUS pyrenæus L. 7 buplevrifolius Lap., p. 314. — R. anguslifolius DC. ( Loret et Clos ). — dealbatus Eap., p. 315. Rapporté par De Candolle > M. Duby et Mutel, comme variélé au À. acontlifolius L. (dont le R. platanifolius L. est pour ces auteurs une variété ) , réuni par MM. Grenier et Godron au R. platanifolius L., le R. dealbatus Lap. diffère essentiellement et de l'un et de l’autre. L'échantillon con- siste en deux feuilles radicales détachées (à 12-14 lobes peu profonds , obtus et lobés-dentés , etc. ), et en une inflores- cence médiocrement rameuse ; bractées tripartites à seg- ments oblongs , oblus, bidentés au sommet ; réceptacle pubescent ; sépales ovales , blanchâtres, pubescents étalés ; pétales trois fois plus longs , de forme oblongue ; carpelles nombreux , en tête ovale-globuleuse, dense, pédicellée , triangulaires aplatis , nerviés, à stigmate sessile tomenteux ainsi que le bord supérieur de l'ovaire. Plante à poils blancs laineux , étalés. — giganteus Lap., $. pag. 76 (R. beterophyllus Lap. Æ. A. 316). Cette plante est rapportée par les autenrs au R. aconiti- folius L. Toutefois, il conviendrait, ce semble, d’adjoindre à ce dernier deux variétés : l’une à feuilles ternées (var. « ternatifolius) , désignée dans l'Herbier par ces mots : R. heterophyllus var. minor et R. aconitifolius var. constans foliis ternis ; l'autre d’une haute stature et à feuilles aussi ternées var. 8 giganteus. M. Bubani, qui a pu étudier dans son lieu natal le À. giganteus Lap., dit de cette plante : pro legilima stirpe libenter recipio(L. c. p. 10), et M. Lo- rel n'est pas éloigné non plus d'y voir une espèce dis- lincle. — Philonotis Retz. , p. 319. — À. villosus St.-Am. ( Loret et Clos j DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES, 265 — tuberosus Lap., R. lanuginosus L., p. 320. M. Timbal-Lagrave a prouvé que les deux (1) plantes ainsi nommées par Lapeyrouse , appartiennent à une seule espèce le R. tuberosus Lap. ( Voy. Mémoires Acad. Sci., Toulouse , 4° série, t. v, p. 314 et suiv. ); il faut encore réunir à celle-ci le À. polyanthemos L. de l'Herbier. D’a- près M. Timbal , de même que le R. lanuginosus L. est propre au Dauphiné et à la Suisse, et le R. polyanthemos L. à l'Allemagne, le R. tuberosus Lap. appartient exclu- sivement aux Pyrénées. — parvulus L., p. 320. Deux espèces sous ce nom, d’abord prises par Lapey- rouse pour le R. parviflorus L. : l'une recueillie à Can- Campa et à Bagnols est le R. parviflorus L. ( feuilles trilo- bées , pétales de la longueur des sépales, fruits à poils crochus ) ; l’autre provenant des terrains gras et inondés de Bagnols, a ses carpelles en épi, avec le style aussi long que l'ovaire et crochu, des feuilles tripartites, à lobes cunéiformes trilobés , une tige peu rameuse , à poils soyeux-laineux , une racine grumeuse, le calice velu , c’est le R. monspeliacus. L. var.8 cuneatus DC.( FI. fr. v, 638.) — parviflorus L., p. 321.— À. Philonotis L et aussi pro- bablement À. Xatardi Lap., S. p. 77. M. Walker-Arnott rapporte le R. parviflorus de La- peyrouse au R. trilobus Desf., avec lequel j'ai pu le com- parer et qui en est bien distinet : voici les caractères des deux échantillons de l'Herbier : racine fibreuse , plante rameuse dès la base, chargée de quelques poils épars , ceux-ci nombreux aux gaines ; feuilles inférieures subpin- nées , à pinnules trilobées avec les divisions aiguës (le R. (1) A ces deux plantes, M. Timbal associe à tort, ce nous semble , le R. divaricatus Lap. Sans doute , on trouve dans l’Herbier une plante sous ce nom , mais l'étiquette d’un échantillon de X. tuberosus Lap. porte ces mots : /d. ac divaricatus. Et ce qui prouve que Lapeyrouse avait bien re- connu l'identité de ses Ranunculus tuberosus et divaricatus, est qu'il n’est pas fail mention de ce dernier dans son ouvrage. 266 MÉMOIRES PhilonotisL à, d'après MM. Grenier et Godron, les feuilles inférieures orbiculaires ou ovales , et d'après De Candolle, divisées jusqu'a la base en trois parties qui sont elles-mê- nes incisées ) : calice réfracté , pétales plus grands , mais cependant peu développés, jaunâtres ( Lapeyrouse donne à son À. Aaturdi des pétales jaunes grands brillants , seul caractère qui ne convienne pas à son À. parviflorus ) : Capitules des carpelles globuleux , fruits semblables à ceux du R. Philonotis L., mais chargés de petits tubercules sur toute leur surface. L'Herbier n'a pas de plante sous le nom de R. Xatardi. AuuGa alpina L., p. 325. — 4. pyramidalis L. ( Loret ct Clos ). TeucriUM capitatum L., p. 327. — 7°. Polium L. Feuilles assez larges , cunéiformes , profondément cré- nelées , quatre divisions du calice aiguës , la supérieure ovale ; lobe médian de la corolie suborbiculaire , etc. D'après MM. Grenier et Godron , le T. capitatum L. (dont M. Bentham ne fait qu'une variété du T. Polium L.) ne croit point en France. Nerera graveolens Vill., p. 328. — N. Cataria L. Feuilles inférieures longuement pétiolées , les florales assez grandes ; tube de la corolle inclus, dilaté à la gorge. — graveolens Vill. $ minor angustifolia Lap., p. 329. — NW. graveclens Nil., N. lanceolata Lam. (Loret et Clos). — violacea L. (dans l’Herbier sans indication de localité }.— N. Cataria L. LavavorLa Spica L. (Tarascon, cte.), p. 329. — L. latifolia DC.; bractées linéaires avec bractéoles ({ Loret et Clos). — Spica L. var. $ latifolia, p. 330. — Z. Spica L. { Loret et Clos). Singriris scordioides L. 6 hirta p. 330. — S$. hirsuta L. (Lo- retet Clos). — crenata Lap., p. 331. Réuni par MM. Grenier et Godron au S. lyssopifolia L., DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 267 aux rameaux grêles, aux feuilles linéaires , linéaires-ellip- tiques ou cunéiformes , entières ou bi-tridentées au som- mel, le S. crenata Lap. mérite, à notre avis, d'en être distingué comme variété, par ses feuilles largement ellip- tiques, ou ovales , ou obovales , crénelées ou dentées , au moins dans leur moitié supérieure , et quelquefois jusqu’à la base. Mexrua viridis L., p. 331. — A7. sylvestris Gr. God. an L.? ( Loret et Clos ). — saliva L., p. 332. — A7. aquatica L. — gentilis L., sans indication de localité. — M. sativa L. Lamiom Orvala L., p. 333. — Z. Galeobdolon Crantz. — Orvala L. var. y Lap. — Z. maculatum L. (anthères poilues, etc. ), variété singulière à feuilles très-étroites et longues , à divisions calicinales très-allongées. — stoloniferum Lap., p. 333. — L. maculatum L. , et L. Galeobdolon Crantz. — Stoloniferum Lap. var, floribus albis hirsutissimis, à Prats- de-Mollo (x herb.) — L. flexuosum Ten. (Loret et Clos). Gazrorsis Ladanum L. , pag. 334. — G. angustifolia Ehrb. ( Loret et Clos). — Ladanum L. var. flore albo (x herb.) — G. Filho- liana Timb. — Ladanum L. var. @ hirsuta, pilis glanduligeris, flori- bus capitatis. — G. pyrenaica Bart. (Loret et Clos). — grandiflora Roth., p. 33%, sans indication de localité. — G. pyrenaica Baril. Beronica hirsuta L., p. 335, sans indication de localité. Sracays hirta L., p. 336. — S. maritima L. — barbata Lap., — S. Aeraclea AN. Pacomis fraticosa L. — P. Lychnitis L. OriGaxUu creticum. L., p. 339. — O. vuloare L. (part. } et O. creticum DC. an L ? 268 MÉMOIRES Tavmus Serpyllum L., mêlé avec le 7. montanus W. « Kit., T. Chamædrys Fries ( Loret et Clos). — Serpyllum L. var. foliis nervosis (à Crabère), et var. calycibus et foliis basi ciliatis floribus albis (à Cambre- dazes , ete.) — 7. Serpyllum L. var. angustifolius Gr. God. ( Zoret et Clos). — Lygis L., p. 339. — 7°. vuloaris L. C’est certainement à tort que la plante de Lapeyrouse , réduite à un fragment, et dont le nom est suivi d’un point de doute , est rapportée par MM. Grenier et Go- dron au T. Serpyllum L. var. y confertus Gr. God. Meuissa Nepeta L. p. 341. — Calamintha officinalis Mœnch. (Melissa Calamintha L. ). — Calamintba L. — Calamintha Nepeta Link. Pruxezra laciniata L., p. 343.—P. alba Pall. (Loret et Clos). Bartsia Fagonii Lap., p. 343. — B. alpina Le — imbricata Lap., p. 344. — Euphrasia nemorosa Pers. 7, parviflora Soy-Will. C’est la forme que M. Jordan désigne sous le nom d’E. ericetorum. Cette espèce se retrouve dans l'Herbier , sous le nom d’'E. officinalis L. var. y aphylla caule simplici. — humilis Lap. Ne diffère de la précédente que par ses tiges lâächement rameuses , ses longs entrenœuds , ses feuilles caulinaires crénelées , les florales à dents aiguës. RaixaTaus Trixago L., p. 345 ; R. Trixago L. et R. Alectoro- lophus L. (in herb.) — Eufragia viscosa Benth. Capsule oblongue, feuilles la plupart alternes, fleurs in- férieures espacées, etc. Eurnrasia officinalis L. var. major latifolia, p. 345. — EÆ. nemorosa Pers. (Loret et Clos;. — linifolia L., p. 346. — Æ. viscosa L. Corolle à bords non ciliés, étamines à filets glabres , incluses ainsi que le style. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES, 369 MecamPyruM nemorosum L., p. 346. — Sans indication de lo- calité. Pepicucaris incarnata Jacq., p. 348. Deux échantillons sans in- dication de localité. M. Duchartre a constaté depuis longtemps qu'ils pré- sentent les caractères de l'espèce de Jacquin et ressemblent parfaitement à la figure donnée par cet auteur ({. c., 9° fasc., n° 176). — rostrala L., var. $ el y» P. 349. — P. pyrenaica Gay, d’après la juste observation de M. Duchartre { /. c., fase. Jainr#76): — asparagoides L. , considéré à bon droit comme une variété du P. comosa L. — gyroflexa Vill., rapporté avec raison par MM. Gay, Du- chartre et Bubani au P. pyrenaica Gay. — tuberosa L., p. 350. Indiqué aux Pyrénées sur la foi de Lapeyrouse. Le seul échantillon de l'Herbier appartient au P.comosa L.; épi 2? dense allongé , calice campanulé à dents courtes , ovales , obtuses , etc. ; lèvre supérieure de la corolle bidentée. ANTIRRHINUM Elatine L., p. 350, est rapporté par M. Bubani (4c., p.11) au Linaria commutata Bernh., espèce qui appartient, d'après Chavannes { Monogr., p. 108) et M. Bentham (ix DC. Prod. X, p. 268), au ZL. Elatine Desf.; et, d’après MM. Grenier et Godron , au Z. græca Chav. L’Herbier offre, dans la même feuille, un mé- lange d'échantillons de Z. £latine Desf. et de L. græca L. , espèces si distinctes par leurs graines. — versicolor Lamk., p. 351. — Linaria simplex DC. Plante annuelle, feuilles toutes linéaires quaternées , corolle très-petite, jaune, à lobes de la lèvre supérieure ré- fléchis. D'après M. Bubani ({. c., p. 11), l'Antirrhinum versicolor Lap. est le Linaria arvensis Desf. 9° S. —TOME I. 18 270 MÉMOIRES — spartcum L. Rapporté à bon droit par M. Bubani (L. c., p.11), au Linaria italica Trev. — glaucum L., p. 352, avec un point de doute dans l’Her- bier. — Linaria alpina DC. Feuilles linéaires (non subulées) ; pédoncules très courts, pubescents-glanduleux , etc. — genislifolium L. , sans indication de localité. ScroPauLarta Scopolii Hoppe et S. nodosa L., p. 355 et 356 (1) — S. alpestris Gay. Feuilles grandes cordiformes-ovales , bord des divisions calicinales étroit, etc. — betonicæfolia Lap. — S. aquatica L., et non S. alpestris Gay. Feuilles supérieures (les inférieures manquant ) en cœur à la base, à sommet arrondi, crénelées-dentées; appendice staminal suborbiculaire, un peu échancré à son bord su+ périeur. — vernalis L.? p. 356. Cette plante , dans laquelle Lapeyrouse avait peine à re- connaitre le S. vernalis L., est devenue pour M. Bentham le S. pyrenaica Benth. Dicrrauis intermedia Lap., p. 357. — D. purpurascens Roth. Fleurs longues de trois centimètres, et non en grappe unilatérale ; pédoncule et calice pubescents-glanduleux , celui-ci à divisions lancéolées, corolle jaune veinée de pourpre. Orogaxcee fœsda Desf., p. 358. La plante de Lapeyrouse, rapportée par MM. Grenier et Godron à l'O. cruenta Bert., appartient par les trois lobes inégaux de la lèvre inférieure de la corolle, et par ses éta- mines glabres, à l'O. Rapum Thuill. (1) Le vrai Serophularia nodosa L. est dans l’Herbier sans dénomination. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 19 71 — caryophyllacea Smith , p. 359. — ©. cruenta Bert. Épi lâche, tube de la corolle renflé à la base, bords du limbe fimbriés-dentés , filets lancéolés velus. — major L., p. 358, et O. clatior Sutt., p. 359, font double emploi dans la Flore. Lepinium lberis L., p. 365, et L. graminifolium L., S. p. 90. — L. graminifolium L., d'après la juste remarque de M. Bubani (/. c., p. 11 ). — rotundifolium AI. MM. Grenier et Godron assignent les Alpes seules pour patrie à celle espèce ; l’éliquette de l’'Herbier porte : au Canigou, au-dessus de S'-Martin. — cristatum Lap. , p. 366. — 7hlaspi alliaceum DC. Le Lepidium cristatum Lap. a été rapporté, par Arnott, au Lepidium campestre R. Br., mais les deux échantillons de l'Herbier en diffèrent sensiblement. La comparaison que nous avons faite, M. Loret et moi, de la plante de Lapeyrouse avec des échantitlons authenti- ques de T. alliaceum DC. (espèce qui est fréquemment, si- non toujours, annuelle, contrairement à l’asserlion des au- teurs qui la &onnent comme bisannuelle), ne nous a pas permis de conserver le moindre doute sur leur identité spécifique. TuLaser procumbens Lap., p. 366. — Teesdalia nudicaulis RBE: Espèce reproduite sous les noms de Thlaspi nudicaule Lap., p.366, et d’Iberis nudicaulis L., p. 371. — montanum L.,p. 367. — T° virgatum Gr. Godr. Plante annuelle à tige raide, simple ; rosette de feuilies radicales vbovées ; grappe longue ; fleurs petites ; pédon- cules étalés à angle droit, plus courts que la silicule oblon- gue-cunéiforme ; style dépassant à peine l'échancrure du fruit ; 3-4 graines lisses dans chaque loge. Le T. monta- num L. n’était indiqué aux Pyrénées que sur la foi de La- peyronse. 9272 MÉMOIRES — hirtum L., p. 368. — Lepidium heterophyllum Benth. var. canescens Gr. Godr. Souche non écailleuse , anthères violacées, pédicelles de la longueur du fruit arrondi à la base , graines obluses et lisses. M. Serres ( FL. Toul.) rapporte le L. hirtum Lap. au L. campestre L.. — marginatum Lap., S. p. 90. — T'.saxatile Lap., H. A, p. 367. — Æthionema saxatile R. Br. Cocnzgarn officinalis L., p. 368. — C. officinalis L. $ pyre- naica Gr. Godr.; €. pyrenaica DC. ; espèce que M. Bubani (/. c., p. 11) tient pour légitime. Iegris nana All, p. 370 ; réuni avec raison, par MM. Grenier et Godron , à l’Z. spathulata Berg. (I. carnosa Lap.). C’est à tort, croyons-nous, que M. Grenier, revenant plus tard sur cette opinion (Arch. Flor. Fr. Allem., p. 275) rapporte à l’£. Bernardiana Gr. God. VI. nana Lap. Le seul échantillon de l'Herbier ressemble en tous points à V’L. spathulata Berg. , et ne saurait en être dis- tingué. — saxatilis L., p. 370. «C’est à Lort, dit judicieusement M. Duchartre, que Bentham accole VI. saxalilis Lap. comme synonyme à VI. amara ; la plante de Lapeyrouse est sûrement l'espèce de Linné (F1. Pyr. exsicc. Fasc. 9, n° 164). » — sempervirens L. — I. Garrexiana Al. — pyrenaica Lap.; rapporté à bon droit à l'Æthionema saxa- tile R. Br. ALyssuM halimifolium L., p. 371. — A. macrocarpum DC. La plante de Lapeyrouse est rapportée à bon droit par De Candolle (Syst. Regn. Veqg., T. n, p. 321), Duby ( Bot. Gall.) et par Mutel à l'A. macrocarpum DC. ; et à tort par MM. Grenier et Godron à l'A. perusianum Gay, dont elle diffère par ses grappes courtes, ses sépales étalés, son long style (caractère qui la distingue aussi de l'A. halimifolium L.), sa silicule orbiculaire , ses graines ailées, DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES, 273 — incanum L.,p, 372 ; sans indication de localité. — utriculatum L., rapporté à tort par M. Bentham au Ca- melina sativa L. L'Alyssum utriculatum L. est refusé aux Pyrénées. Le seul échantillon del'Herbier est accompagné dela localité Melles. BiscuTeLca auriculata L., p. 373. — B. cichorüfolia Lois. (B. hispida DC.\. — picridifolia Lap. — 2. lœvigata L. y intermedia Gr. Godr. (2. saxatilis Schleich ). Plante vivace , feuilles pileuses scabres , les radicales oblongues ; sépales égaux à la base, pétales biauriculés , disque des silicules ponctué-scabre. Cette plante a été rap- portée à tort au B. cichoriifolia Lois. — coronopifolia L., p. 374. — B. pyrenaica Huet in Ann. Derat.,;"t. 197 p. 251. Feuilles petites à 3-5 dents profondes et à poils rudes, silicules scabres avec aspérités blanchâtres, sans ailes près du style, etc. La localité de ces plantes est la même ( Loret el Clos ). CarDamixe parviflora L., p. 376 ; sans indication de localité. — C. hirsuta 1. — amara L. — C. pratensis L. — amara L. var. £ foliolis angulosis Lap, — C. amara L.. — beterophylla Lap., p. 377 (un seul échantillon!) — C. resedfolia L. La même localité ( Pic du Midi) est assignée à ces deux plantes. SisymsriUM bursifolium L., p. 379. — S. pinnntifidum DC. Plante vivace multicaule, pédoncules grèles , stigmate sessile. — murale L. var. 8 Lap. — Diplotaxis viminea DC. — Lœselii L., p. 380. — Double du $S. Columneæ Jacq. ; cotylédons incombants. 274 MÉMOIRES — obtusangulum Willd. var. e, p. 381 (avec la localité £x- dretlis\, et S. acutangulum DC. var. $, p. 381 (avec la localité Bagnols, Costebonne). L'une et l’autre de ces plantes appartiennent au Sinapis Cheiranthus Koch , ce qu'avait reconnu Lapeyrouse, don- nant dans son Herbier pour synonymes à la première Brassica Cheiranthus Vil., et B. montana DC. ; à la se- conde cette dernière dénomination. Ervsmmum repandum L. ? p. 383. — Æ. cheiranthvides L. Cneiraxraus erysimoides Jacq. var. $, p.383. — Erysimum ochroleucum DC. var. yintermedium Gay. ( Loret et Clos). Hesrenis africana L. , p. 384. — ÆArabis verna R. Br. Aragis alpina L. var. B foliis sessilibus ellipticis, p. 38%, et A. integrifolia Lap., p. 385. — 4. ciliata Koch var. $ hirsuta Koch.; tige à poils simples, feuilles velues , etc. — stricta Huds., p. 385 (un seul échantillon, sans indication de localité). -— 4. bellidifolia L. Turrrris multiflora Lap., p. 386. (.4rabis mulliflora Vap. in herb.). Judicieusement rapporté à l’Arabis sagittata DC. — hirsuta L. — Arabis sagittata DC. Espèce considérée par Mntel comme une variété de l'A. hirsuta Scop. —. setosa Lap. S. p. 93. Rapporté à bon droit à la variété montana du Sinapis Cheiranthus Koch. Brassica arvensis L., p. 387. — B. Napus L. — alpina L. ? quoad Dent d'Orlu, p. 388. (ir hero.) — B. campestris L. | Eronium lucidum Lap., et E. crispum Lap., p. 390. Ces deux espèces sont réunies à bon droit à l'E. petræum DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. QE Gou., mais méritent d'être distinguées, comme le fait Mutel, à titre de variétés. M. Bubani considère comme des formes de l'E. petrœum W. les E. lucidum Lap., E. radicatum Lap., E. petræum Lap., Ë. crispum Lap. (L. e., p. 12). M. Timbal-Lagrave, qui a aussi étudié ces plantes dans leur lieu natal, voit en elles autant d’espèces distinctes, et trouve surtoul des caractères dilférentiels dans leurs graines. L'examen des se- mences del Æ. lucidum Lap.nous les a montrées plus petites que celles de l'E. crispum Lap. et de VE. petræum Wild. GEranium sylvaticum L., p. 393. — G. pratense L. — acouilifolium Willd. — G. pratense L. — palustre L.; dans l'Herbier, sans indication de localité. — palustre L. var. parvillorum tenuifolium Lap., S. p. 96. — G. Lebelii Bor. Macva sylvestris L., p. 396. — #. moschata L.; pédoncule solitaire , pièces du stpulium linéaires. — rotundifolia L. — A7. moschata L. var. 7 Ramondiana Gr. God ; pédoncules solitaires , pétales très-grands, etc. — moschata L. $ segmentis foliorum filiformibus, à Saint- Cyprien près Elne, S. p.96. — A. Tournefortiana L. (Loret et Clos). Lavarera Olbia L., et L. triloba L., p. 397. (Cette dernière espèce dans l’Herbier sans désignation de nom d'auteur ni de localité.) — Malva sylvestris L. Trois pièces libres au stipulium , pétales très-longs , for- tement échancrés. — trimestris L. — Z. Olbia L. 8 hispida Gr God. Fumaria bulbosa L., p. 400 (un seul échantillon sans indica- tion de localité). — Corydalis solida Sm. Tubercule plein à racines adventives seulement à fa base ; braclées incisées-digitées ; pédicelles très-courts. Dès lors, le F. bulbosa L. ( Corydalis cava Schweigg.), qui n’était indiqué aux Pyrénées que sur la foi de Lapeyrouse , semble étranger à cette chaine de montagnes. 276 MÉMOIRES PoLyGaLa amara L., p. #01. — P. vulgaris L. var. y alpes- tris Koch. — austriaca Crantz. Plusieurs espèces différentes sont réunies sous ce nom dans une même feuille, et proviennent de localités diverses : un échantillon de P. austriaca Crantz est sans indication de localité ; un autre, pris à Las Laquettes, est le P. de- pressa Wend. (feuilles inférieures opposées , obovées , pe- tites, grappes pauciflores , les terminales devenant en ap- parence latérales , etc.); un troisième, cueilli aux bords du Gave à Orthez, est le P. calcarea Sch. ou P. amarella Coss. et Ger. SrarTIUx cinereum Vill., p. #02. — Genista cinerea DC. (part.) et Sarothamnus purgans Gr. God. — radiatum L., p. 403. Cette espèce , à laquelle MM. Grenier et Godron n’assi- gnent pas de localité pyrénéenne, est dans l'Herbier avec l'indication Roussillon, Bayonne. Genisra decumbens Willd., p. 404 (sans indication de localité). — G. pilosa L. Feuilles à deux stipules dentiformes; pédicelles sans bractées, calice à lèvre supérieure bifide avec les lobes lancéolés, étendard velu , soyeux. Le G. decumbens W., indiqué par Mutel aux Pyrénées, d’après Lapeyrouse, n’ap- partient pas à ces montagnes. — humifusa L. var. G. pilosæ L. (ir herb.), G. pilosa L. var. P humifusa Vill. , p. #04. — G. pilosa L. (Loret et Clos ). — pilosa L. var. y caule erecto firmo simplici, pedunculis elongatis. — Ædenocarpus complicatus Gay ( Loret et Clos). Urex curopæus L., p. #05. — Ü. curopœus L, (part.), et U. parviflorus Pourr. DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 277 — nanus Smith, p. #05. (U. minor, x herb. ). Rapporté, par M. Bubani, à VU. autumnalis Thor., qui n’est autre que l'U. nanus Sm. Oxonis senescens Lap., p. #05 (échantillon fort incomplet ). — O. procurrens Wallr. Feuilles florales uni-foliolées , très-petites, plus courtes que le calice; grappe oblongue ; pédoncule non articulé ; divisions calicinales linéaires plus longues que le tube , dé- passées d’un tiers par la corolle ; légume... — hircina Ait., p. #06. — O. procurrens Wallr. Rameaux couchés, fleurs solitaires. — striala Gou. , p. #07, mêlé à l'O. minutissima L. — rhinanthoides Lap., p. 407; (un seul échantillon rabou- gri, ayant noirci par la dessiccation), — ©. striata L. — Scabra Lap., p. 407 (deux sommités de tiges en fruit ). — O. Columne AI. Foliole terminale pétiolulée, fleurs en épi, divisions du calice lancéolées-acuminées , etc. — mitissima L. — O. Columne All. Capsules à 5 graines papilleuses, etc. — villosissima Desf., p. 408. Deux échantillons sans indication de localité : l'un est bien l'espèce , et est accompagné de ces mots : donné et écrit par M. Desfontaines ; l'autre , sans dénomination spé- ciale , est l'O. Columnæ Al. — variegala L. Cette espèce, représentée dans l'Herbier par un seul échantillon , sans autre indication que celle-ci : écrit et donné par M. Desfontaines, 1814, parait manquer aux Pyrénées , où elle n’était rapportée que sur la foi de La- peyrouse. — reclinata L., sans indication de localité. Un seul échantillon , mélé à 3 branches d’'O. procurrens Wallr. 278 MÉMOIRES — viscosa L., p. 409, — O. Natrix L. — picta Desf., p.° 409. — O. Natrix L. var. Perusiana Gr. God. — dumosa Lap., p. #40; justement rapporté à l'O. arrago- nensis Âss. Anrayzus Vulneraria L. var. hirsutissima Lap. (in hrrb.), p. 410. — 4. Vulneraria L. var. Allioni DC. Orogus variegatus Lap., p. #14 et S. p. 107. — Lathyrus cèrrhosus Ser. ( Loret et Clos \. — Tournefortii Lap. S. p. 102. Cette espèce, réduite , dans l'Herbier , à deux échantil- lons fort incomplets , sans fleurs , sans indication de loca- lité, diffère totalement de l'O. luteus L., auquel la rap- portent les auteurs, par ses folioles plus petites, plus rap- prochées, plus coriaces , à trois nervures longitudinales (ce qui l'avait fait d’abord appeler O. nervosus par Lapey- rouse) , ainsi que par ses fruits plus petits ; elle ne semble pouvoir appartenir qu'à l'O. vernus L. ( Loret et Clos ). — ensifolius Lap. var. 6 S. p. 105 (O. filiformis Lam. as- serente De Candolle ipsomet, an varietas ensifolii, tr herb. ). MM. Grenier et Godron rapportent, d’après M. Ben- tham , celte variété à leur Lathyrus asphodeloides, et la variélé « à leur L. canescens ; c’est l'inverse qui est exact , c’est-à-dire, L. asphodeloiles God. Gr. — Orobus en- sifolius L. var. «; et L. canescens God. Gren. — Orobus ensifolius var. 8 Lap. Il me parait inutile de citer aussi en synonyme du L. canescens God. Gren. l'Orobus atropur- pureus Lap. ; l’auteur de l'Histoire abrégée ayant reconnu lui-même (S$. p. 108) que cette dénomination avait été appliquée à tort par lui à l'O. ensifolius Lap. Larayrus angulatus L. (Arles, Ceret}. — L: sphæricus Retz. (part. ) et L. Cicera L. ( Loret et Clos ). — sphæricus L. , p. #15. Des deux échantillons , l’un (sans indication de localité) DE L'ACADEMIE DES SCIENCES. 279 est le L. Nissolia L. ( feuilles réduites à des pétioles folia- cés ); l’autre, le L. sphæricus Retz. — articulatus L. — L. Chymenum L. Gousse plane, carénée sur le dos, style obtus, graines ovoïdes , etc. — heterophyllus L., p. #16 (quoad Saleix, Saint-Béat ) ; jus- tement rapporté au ZL. syluestris L. var. latifolius Peterm. — hetcrophyllus L. foliis quaternis, entre Prades et Mont- Louis { in herb.). — L. cirrhosus Ser. — palustris L. (deux échantillons , sans indication de loca- lité). — L. palustris L. (part.) et Orobus tubero- sus L. Victa dumetoram L., p. #17 (échantillon pris dans le parc de Lapeyrouse ). — Ÿ. sativa L. — sylvatica L., sans indication de localité. — Cracca L. var. & foliolis linearibus subulatis, p. #18. — V. varia Host. — parviflora Lois. Rapporté avec raison au V. hirsuta Koch. — hybrida L. avec point de doute, et ces mots : var. V. lu- teæ , p. 419. — F7. lutea L. : étendard glabre , etc. — pannonica Host., p. #20, sans indication de localité. — F. lutea L. ( F. hirta Balb. ). — narbonensis L. L'échantillon , pris en Roussillon , se rapporte à la va- riété serratifolia Koch. Cynisus nigricans L., avec un point de doute, p. #21. — C. triflorus VHérit. ; comme l'avait judicieusement pensé M. J. Gay. Pédoncules axillaires géminés ou lernés ; calice très- court campanulé, à lèvre supérieure bidentée ; gousse noi- râtre , couverte de poils roux , etc. 280 MÉMOIRES — divaricatus l'Hérit, — Adenocarpus complicatus Gay ( pro parte), et 4. grandiflorus Boiss. (Loret et Clos). — capitatus Murr., p. 421. — C. supinus L.; synonyme donné, du reste, par Lapeyrouse. — heterophyllus Lap., p. #22; (échantillon très-incomplet ). — C. supinus Murr. Coroni£La coronata L., p. #23, avec un point de doute, et sans indication de localité. — C. minima L. $ aus- tralis Gr. God. Hwpocreris mullisiliquosa L., p. #24. — 41. comosa L. ; fleurs nombreuses, graines brunes en demi-cercle, etc. Cette espèce me parait avoir élé rapportée à tort par M. Bubani ({. c., p. 13) à l'H. glauca Ten. Scorricrus muricata L., p. #25. —S. subvillosa L. ; légume contourné , à six rangs d’aiguillons , etc. HenysaruM saxalile L., p. #26. — Onobrychis sativa Lam. AsrraGaLus pentaglottis L., p. #28. L'échantillon, sans fleurs ni fruits, appartient à une plante vivace qui se refuse à une détermination précise. — arenarius L., A. baïonensis Lois. , p. #29. La première de ces dénominations doit être rejetée. — montanus L.— Oxytropis pyrenuica Godr. Gren. | Loret et Clos). — incanus L., p. #30. — 4. monspessulanus Le Trou strictum L. , p. #32. — 7. lœvigatum Desf. ( Loret et Clos). — hybridum L., p. #32, sans indication de localité. — T. badium Schreb. — hispidum Desf. et T. hirtum AIL., p. #33, font double emploi : un échantillon de 7°. striatum L. est réuni au T. hispidum Desf. _ hirtum AIL var. 6. —T. lagopus Pourr. (Loret et Clos). DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 281 saxalile AL. , p. #34. — 7° maritimum Muds. pratense L. var. $ caulibus prostratis. — 77. medium L. pratense L. var. à alpinum hirsutum capitulis foliosis, p. #35. — T, ochroleucum L. pratense L. var. tomentosum ( ir herb.). — T. tomento- sum L. ochroleucum L. , p. 435, et T. squarrosum L. p. #36 ; font double emploi dans l’ouvrage. clypeatum L., p. 436, rapporté à bon droit, par M. Bu- bani, au 7, maritimum Huds. intermedium Lap. p. 437, justementrapporté, par MM. Duby et Gay, au 7. kybridum Sav. ( T. nigrescens Niv. ). gemellum Pourr. — 7. Bocconi Say. resupinatum L. (quoad la Font de Comps), p. #38. — T. Thalii Ni. montanum L. — 7°. montanum L. ( part.), et T. ochro- leucum L. agrarium L., p. 439. — T. acrarium L. var. B minus Koch (7. procumbens Schreb.), cum frust. 7. aurei Poll. spadiceum L. — T. agrarium L. procumbens L.— 7° patens Schreb. ( part.), et 7. agra- rium 6 majus Koch ou 7. campestre Schreb. filiforme L. — T. patens Schreb. | part. ), et T. pro- cumbens L. Lorus angustissimus L., p. #40 (quoad la Pene Saint-Martin à Saint-Béat). — Z. tenuis Kit. — anguslissimus L. (quoad Prades, Vernet, etc.) ; plante en très-mauvais élat, méconnaissable. — diffusus Sm. — Z. angustissimus L. ( L. diffusus Sm.) et ZL. corniculatus L. — pedunculatus Cav. — L. hispidus L. ( rectification déjà faite par M. Serres ). 282 MÉMOIRES — cornicuiatus L. var. major Scop. ( Prats de Mollo). — L. uliginosus Schk. (Loret et Clos). — corniculatus L., caule decumbente, foliis hispidis ( 22 herb.) — L. corniculatus L. | part.) et L. hispidus Desf. — cylisoides L., p. #41. — Z. corniculatus L. Dorxenium herbaceum Vill. — D. suffruticosum L., p. #42 ; étendard apiculé, gousse obtuse, etc. Mepicaco Lupulina L., p. 443. — Trifolium procumbens . ( T°. filiforme DC. ). — intertexta Willd., p. 444. — M7. maculata L. — ciliaris Wild. — AZ. pohycarpa Wild. ( Loret et Clos). — rigidula AÏl. — 47. tribuloides Lam. — scutellata AL. et M. tornata Willd., p. #43, rapportés à bon droit par M. Bubani {/. c., p. 13), au AZ. suffru- ticosa Ram. Hyrericum repens L., p. #47, (un seul échantillon en très- mauvais état). — 47. perforatum L. — Richeri Vill., p. 448. — 1. Burseri Spach. — pulchrum L., p. #49. — JT. Burseri Spach. — Jinearifolium Vahl. — Æ. pulchrum L., sépales ovales- obtus, etc. TraGoPoGON pratense L., p. #55. — 7. orientalis L. { Loret et Clos ). — angustifolium Willd. — 7° australis Jord.? Le T. angustifolium Wild. est, d'après De Candolle (Prodr. VIE, m), une espèce peu connue, repportée par Poirel avec doute au T. crocifolius L. ; les échantillons de l'Herbier sont en très-mauvais état. Scorzoxera austriaca Willd. et S. humilis L., p. #56 ; deux es- pèces occupant la place l’une de l’autre. — graminifolia Willd., S. p. 119. — S. humilis L. ( Loret et Clos ). DE L'ACAD£MIE DES SCIENCES. 283 Lacruca saligna L. (à Vieille), p. #60. — L. chondrillæflora Bor. ( Loret et Clos ). — saligna L. var. foliis eroso-dentatis (à Saleix). — L. Sca- riola L. ( Loret et Clos). — sonchoïdes Lap., p. #61 ; justement rapporté au L. peren- nis L. par M. Bentham. CroxpriLca crepoidesL., p. 462. — Lactuca tenerrima Pourr. PrexanTees tenuifolia L., p. 462. — ZLactuca chondrillæflora Bor. ( Loret et Clos). — viminea L. (à Saiut-Béat). — £actuca chondrillæflora Bor. (Loret et Clos\. AParGi4 alpina Host var, e, p. #64. — Tfillemetia apar- gioides Cass. ( Loret ea Clos ). — Taraxaci Willd., p. 464. Cette espèce, citée dans les Pyrénées sur la foi de La- peyrouse, est représentée dans l’Herbier par un seul échan- tillon , avec cette indication : à Salvanaire. — crispa Willd., p. 465. -— Leontodon proteiformis + cris- patus Godr. — Villarsii Willd. $ ramosissima Lap. — Æypocheæris radi- cata L.; aigrette longuement stipitée , réceptacle pa- léacé , etc. Taricia hirta Roth, p. #65. — T°. hirta Roth et 7. hispida Roth. — hispida Roth, p. 466. — Leontodon proteiformis Vill. 6 vulcaris Koch. Picris pauciflora Willd., p. 466. — P. hieracioides L. — tuberosa Lap., p. 467. — P. pyrenaica L. — Sprengeriana Chaix, p.468. — P. hieracioides L. Obs. Le Thrincia hispida Roth, le Picris pauciflora Wild. et le P. Sprengeriana Lam. , n'ont été rapportés aux Pyré- nées que sur la foi de Lapeyrouse. 284 MÉMOIRES Hiracrom (1) pumilum Hopp.? p. #69. — 77. breviscapum DC. — pumilum Hopp. var. 6. — H. angustifolium B Co- deri DC. dubium L., p. #69, et H. aurantiacum L. , p. #70. — H. Auricula L. Lawsonii Vill, var. « majus foliis grossè dentatis (in herb.) — IH. cerinthoides L. Lawsonii Vill. var. B et à, p. 471. — A. saxatile Nill. Lawsonii Vill. var. e (à Endretlis). — H. sericeum Gr. God. an Lap. ? glaucum AÏl., H. scorzoneræfolium Vill., p. #71. — Plante intermédiaire entre l’/Z. neo-cerinthe Frics et l'A. saxatile Nil. humile Host. — Z7. amplexicaule L. ( pro part.) et H. Jacquini Mill. intermedium Lap.; planteomise par Mutel et par MM. Gre- nier et Godron. — 1, sylvaticum L. , ce qu'avait soupconné M. Duby. murorum L. var. y, nudicaule maltiflorum foliis dentatis hirsulissimis, à la Font de Comps (x Lerb. ). — H. Boutigrianum Sch. (inéd.?). murorum L. pilosissimum (ix Lerb.), H. murorum L. var. y À. À., p. #12. — H. cerinthoides L. sylvaticum Gou., p. #72, et H. denudatum Lap., p. #73. — . borcale Fries. altissimum Lap., S. p. 125. — Crepis succisæfolia Tausch, C. allissima Serres (V. Bull. Soc. bot. , W, p 258). sabaudum L., et H. lanceolatum Vill. (Ce dernier sans in- (1) La détermination des espèces des genres Hieracium , Lepicaune et Crepis, appartenant à l’Herbier, a été faite en commun par M. Loret et par moi. DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 285 dication de localité}, p. #73. — A. controversum Timb. (in Mém. Acad. Toul., 4° sér., VI, p123). — lanceolatum Vill. { Canigou , Cagire). — 77. pyrenaicum Jord., À. nobile Gr. God., verisimiliter Æ. compo- situm Lap. Si cetle synonymie est exacte, comme nous avons tout lieu de le croire, la dénomination de Lapeyrouse devrait obtenir la priorité sur les deux autres. Les échantillons d'A. pyrenaicum Jord., recueillis par M. Loret à Gèdres ; nous ont paru concorder en tous points avec le seul d’A. compositum Lap. que possède l'Herbier. LH. nobile Gr. God. ne semble en différer que par l'absence de cils au sommet des ligules. — eriophorum St.-Am. , p. 474. (Prairies d’Ax, Cagire, Bayonne.) Cette plante, objet d’une controverse sérieuse entre La- peyrouse el De Candolle , n’est nullement l'A. eriophorum de Bayonne. M. Loret, qui l'a cueillie à Ax , la considère comme une espèce voisine de l'A. sabaudum L. , mais dis- tincte ; et il se propose de la décrire sous le nom d’/. pseudo-eriophorum dans un travail sur quelques Hiera- cium, qui lui sera commun avec M. Timbal-Lagrave. — cordifolium Lap., S. p. 128. — 7. umbellatum L. var. cordifolium Nob. Cette plante , réunie par MM. Grenier et Godron à V'L. umbellatum L., mérite d’en être distinguée au moins à titre de variété. — umbellatum L. var. y, p. #74. — Æ. Boreanum Jord. in Boreau , FL. du Cent., 3° éd. — cerinthoides L., et H. cerinthoides L. var. 8 majus lati- folium, à Saleix {ix herb.) et var.e, p.475. — 1. cerinthoides L. — cerinthoides L. var. majus lalifolium foliis obovatis, à Cagire, Pic de Gard (ir herb.), et var. yet 9, p. 475, ct var. €, S. p. 128. — H. nco-cerinthe Fries. 5° $. — TOME 1. es MÉMOIRES flexuosum Waldst. et Kit. — 71. cerinthoides L. ({ part.) et À. neo-cerinthe Fries. croaticum? (2x herb.). MH. croaticam Waldst. et Kit. , p. #75. — A. cerinthoïes L. (part.) et H. sericeum Gr. God. an Lap. ? villosum L., p. #76. — J1. neo-cerinthe Fries, non 1. pyrenaicum Jord., espèce à laquelle MM. Grenier et Godron la rapportent avec doute. villosum L. var. y. — H. saxatile Nil. var. à — I. cerinthoides L. eiongatum Lap., sans indication de localité. — /Z. cerin- thoides L. elongatum Lap. (quoad Mont de Lasset , Laurenti, Rocca- galiniera , etc.) — Æ. prenanthoides Nill. (part.) et IT. neo-cerinthe Fries. elongatum Lap. var. 6 et var. ÿ — H. neo-cerinthe Fries ; la var. B avec un fragment d'A. cerinthoides L. rhomboidale Lap., p. #77. — H. neo-cerinthe Fries. sericeum Lap. — 27. cerinthoides L. , non Æ. sericeum Gr. God. scopulorum Lap. (quond Labatsec, port de Venasque }, et H. scopulorum Lap. var. major (à las Poses, Basses- Pyrénées) , S. p. 124. —. IT. cerinthoides L. scopulorum Lap. ( quoad Penne blanque à la Picade. — H. mixthum Frel. ohovatum Lap., $. p. 129. — 77. neo-cerinthe var., non H. cerinthoides L., comme le veulent MM. Grenier et Godron. Toutefois , M. Loret qui a cueilli cette plante aux lieux mêmes d'où elle fut envoyée à Lapeyrouse (rochers de Sar- rance et d'Escot, Basses-Pyrénées), n’est pas éloigné de la considérer comme une espèce distincte. L’Æ. villosum L. var. 8, p. 476, ne paraît pas différer del’ IT. obovatum Lap. Obs. L’H. aureum Vi, p. 46. indiqué aux Pyrénées sur DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 287 la foi de Lapeyrouse, et l'A. montanum L. , sur la foi de Pourret, sont dans l’Herbier sans désignation de localité ; les échantillons détériorés de l'A. alpinum L. ne parais- sent pas apparlenir à celte espèce. Lericauxe balsamea Lap., et var. f latifolia major, et var. fs etvar. À , et var. &, el var. 6 Hicracium birsutissimum, p. #78 et 479. — Hieracium amplexicaule L. — balsamea Lap. var. €, p- #79. — Crepis grandiflora Tausch , avec un fragment d’Æ. amplexicaule K. — balsamea Lap. var. n. — Hicracium amplexicaule L. ( part.) et Crepis aurea Cass. — intybacea Lap. — /ieracium pulmonarioides Nill., non I. albidum Nil., non Crepis grandiflora Tausch ; espèces auxquelles il a été rapporté. — grandiflora Lap. — Crepis grandiflora Tausch. — multicaulis Lap., p. #80, et var. y, etvar. à , etvar.e, S. p. 129. — Crepis blattarioides Vill. — mullicaulis Lap. var. altissima longifolia , au Castelet (an herb.) — Crepis grandiflora Tausch. — turbinata Lap., p. 480. — Crepis blattarioides Nil. — Spinulosa Lap., — Sonchus olcraceus L., d’après la juste détermination d'Arnott. Creris nemausensis Gou. var. B, p. #82 (à Bagnols). — C. bulbosa Cass. — taurinensis Willd. (quoad Saleix , Vieille) et C. taurinen- sis Willd. var. floribus solitariis, à Perpignan | ix herb.). — Barkhausia fœtida DC. — virgala Desf., p. 483. —— Picris hicracioides L. — lappacea Willd. ? — Barkhausia taraxacifolia DC. — lectorum L. { quoadRap, à Saint-Béat). — Barkhausia taraxacifolia DC. — incana Lap. — Andryala ragusina L. B incana Gr. God., bien que les feuilles soient denticulées. 288 MÉMOIRES — biennis L., p. 484. — Barkhausia laraxacifoliu DC. — scabra Willd. , p. #84. — Picris hieracioides L. Le Crepis scabra Wild. est considéré comme synonyme du Barkhausia taraxacifolia DC. — Dioscoridis? environs de Saint-Béat à Rap (2x herb.) — Picridium vulgare Desf. Hyoseris radiata L., p. 486. La localité Roussillon , mise en doute pour cette plante par MM. Grenier et Godron, lui est assignée dans l'Her- bier. SERIOLA ætnensis L., p. #86. — Hypochæris radicata L. Lapsaxa fœtida Scop., p. #87 ( Hyoseris fœtida L., én hcrb.). Cette espère, qui a élé rapportée aux Pyrénées d’après Lapeyrouse, est dans l’'Herbier sans indication de localité. RaGanioLts stellatus Willd., p. #88 (à Toulouse). — A. stella- tus var. edulis DC. — stellatus Wilid., foliis radicalibus lyratis, caulinis subin- tegris. -— À. stellatus var. intermedius DC. SEerRATULA alpina L., pag. #90. — Saussurea macrophylla Saut. Carpuus nutans L., p. 490. - C. nutans L., et C. carlinæ- _folius Lam. ( Loret et Clos). — acanthoïides L., p. 491.—C. nutans L. et C.spinigerus Jord. { Loret et Clos). — crispus L. — C. crispo-nutans Gren. Kirschl., C.crispus y litigiosus Gr. God. ( Loret et Clos ). — mollis L., p. #92. — Jurinœa Bocconi Guss. Celte espèce n’a pas élé signalée dans les Pyrénées ; à l’époque de Lapeyrouse on confondait sous le nom de Carduus mollis L. le Jurinœæu Bocconi Guss, et le J. pyre- naica Gr. God. DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 289 Cxicus pyrenaicus Willd., p. #92. — Cirsium monspessula- num Al. La var. 8 minor a les feuilles à peine décurrentes. — Gouani Willd., p. 493. — Carduus defloratusL | Loret et Clos). — Gouani Willd. var. e tomentosus. — Carduus medius Gou., Cnicus Gouani Wild. { Loret et Clos). — Argemone Lap. — Carduus medius Gou. — ferox Willd., p. 494.—Cirsium criophorum Scop., et C. echinatum DC. mêlés. — tuberosus Hoffm. | qguoad Pujo de Gery }, p. #95. — C. defloratus L. ( Loret et Clos ). — spinosissimus L., p. #96.— Cirsium glabrum DC. — spinosissimus L.var. acaulis.—Cirsium palustre Scop. CarTHamus Carduncellus L., avec l'indication de localité Nour , p. #95. — Carduncellus mitissimus DC. Cacaua alpina L., p. #49. — Ædenostyles albifrons L. STÆBELINA dubia L., p. 500 , avec l'indication : Toulouse à Pech-David, à Aufray. Cette espèce n’a pas été signalée de nos jours dans la Flore toulousaine. ATHANASIA annua L., avec l'indication Prades , Mont-Louis, p. 502. Cette espèce , qui ne paraît pas avoir été retrouvée en France , est omise par MM. Grenier et Godron. ARTEMISIA Abrotanum L., p. 503. — 4. camphorata Vill. Feuilles toutes pétiolées, auriculées à la base, à divi- sions linéaires ; panicule étroite à rameaux raides, dressés. — Mutellina Vill. et A. spicata Murr. — 4. Villarsii Godr. et Gren. ; réceptacle glabre , corolle poilue ( Zoret et Clos). 290 MÉMOIRES — palmata Lamk., p. 504. Rapporté à bon droit à l'A. gallica Wild. GNarnanium Stæchas L., pag. 505. — ZZelichrysum serotinum Boiss. et ÆZ. decumbens Camb. ( Loret et Clos). — arenarium L., p. 506. — G. lutco-album L. ( Loret et Clos ). — arenarium L,. var. $ sans indication de localité, S. p. 133. — Æelichrysum decumbens Camb. — alpinumL. — Æntennaria carpathica Bluff. et Fing , Gnaphalium alpinum Nil. non L. Le Gnaphalium alpinum L., rapporté par De Candolle (Prodr. vi, 269), comme synonyme à l’Antennaria alpina Gærtn., parait étranger à la Flore de France. — sylvaticam L., G. norvegicum Retz. { dénominations syno- nymes aux yeux de Lapeyrouse, p. 507).— (Pro maxi- ma parle, excluso specimine uno G. sylvatici var. 6) G. norvegicum Gunn. ( Loret et Clos). — germanicum Sm., p. 508. — f'ilago spathu.ata Presl. { Loret et Clos). — montanum Willd. — F'ilaso minima Fries, et F. arvensis L. { Loret et Clos). Obs. Le Gnaphalium supinum L. et le G. pusillumHænk. font double emploi dans l'Herbier et dans l'Histoire abré- gée , p. 507. La même observation s'applique aux G. mon- tanum Willd., G. minimum Smith, p. 508 et 509. XERANTHEMUM annuum L., p. 509. — X. inapertum Willd. EuiGerox glutinosum L. , p. 511. — Cupularia viscosa God. Gren., avec un fragment d’Æieracium umbellatum L. — murale Lap., S. p. 133, réuni à bon droit à l'E. acre L. — canadense L. var. B crispum , p. 511. — Conyza ambi- gua DC., Erigeron crispum Pourr. ( Loret et Clos). Sexecto coronopifolius Wild. ?, p. 514. — S. adonidifolius Lois. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 291 — abrotanifolius L., p. 515. —S. adonidifolius Lois. — aquaticus Smith. — S. erucæfolius L. Bractées extérieures longues , akènes pubescents-sca- bres. — paludosus L., p. 516, sans indication de localité. — sarracenicus L., p. 516. Des deux échantillons de cette plante, l'un sans désigna- tion de localité est l'espèce , l'autre avec celle indication : « Au Mahourat las Poses dans les cavernes , les antres Bas- ses-Pyrénées , 1817, D' Lalanne, » est le S. Tourneforti Lap. (feuilles supérieures sessiles , capitules hémisphéri- ques , bractées à pointe sphacélée , elc. ). — rotundifolius Lap., p. 517. « D'après le seul échantillon sans fleurs , dit M. Duchar- tre (Flore pyrén. exsicc., Fasc. 5 n° 90), qui le représente dans l’'Herbier de cet auteur, n’est sûrement qu'une variété du S. Tournefortii Lap. » J'ajoute , à l'appui de cette opi- nion , que les cannelures de la tige, la consistance des feuilles , leurs dentelures témoignent que le S. rotundifo- lixs Lap. n’est qu'un accident, un état tératologique de ce dernier. Asrer punctatus Waldst. et Kit., p. 518, rapporté à bon droit par M. Bentham au Jasonia tuberosa DC. — acris L. — À. trinervis Desf. ( Loret et Clos). — Amellus L., sans désignation de localité , est l'espèce. — Amellus L., échantillon sans fleurs, avec l'indication : Pâturages secs Can-Damon, Custoja. — A. pyre- nœus L. Cineraria sibirica L., p. 521. Echantillon réduit à deux fragments de feuilles. — aurantiaca Hopp. — Senecio Doronicum L. — longifolia L., C. integrifolia Murr., C. campestris Retz.— Senecio spathulæfolius DC. ( Loret et Clos). 292 MÉMOIRES — longifolia L. 6 uniflora L., rapporté, à bon droit, au Se- necio Doronicum L.. InuLa odora L., p. 522, avec un point de doute et la localité Narbonne. Le seul échantillon incomplet parait appartenir à l'L. montana L. : feuilles supérieures sessiles embrassantes , en- tières , dressées ; deux capitules terminaux , aigrette sim- ple , etc. — Oculus-Christi L., rapporté à bon droit à l’Z. helenioides DC. par M. Bentham. — britannica L., sans indication de localité, p. 523. — Pu- licaria dysenterica Gærtn. — Vaillantii Vill., p. 524 , un seul échantillon sans indica- tion de localité. Annica Doronicum Murr. pag. 525. — Æ{ronicum scorpioi- des DC. — bellidiastram Vill., p. 526. — Bellis sylvestris Cyr., rec- tification déjà faite par M. Bubani (/. c., p. 14). Doroxicux scorpioides Willd., p. 526. Rapporté au D. Pardalianches Wild. , appartient plu- tôt, à en juger par l'échantillon très-détérioré , au D. aus- triacum Jacq. ; feuille radicale ovale-cordiforme, etc. Carysanraemum montanum L., et C. grandiflorum Lap., p. 527. — Leucanthemum atratum DC., L. maximum Gren. God. ( Loret et Clos ). — id. var. Ê. — Leucanthemum vulgare Lam. — id. var. à foliis argutè dentatis, S. p. 138. — Zeucanthe- mum alratum DC. — atratum L., p. 528. — ZLeucanthemum vulgare Lam. — ceratophylloides AÏL., p. 529. — Zeucanthemum palma- tum Lam. Cette espèce et la précédente étaient rapportées avec doute par M. Bentham au Purethrum alpinrm Wild. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 293 — segetum L., sans indication delocalité. — Leucanthemum vuloare Lam.; languettes blanches , etc. — coronarium L., sans indication de localité. — Coronarium L. var. 6, p. 530. — Cota Triumfelli 3. Gay, rectification déjà faite par M. Bubani { /. c., p. 14). ANrHEMIS altissima L., A. pubescens Willd., A. austriaca Murr., p. 532, ct À. tinctoria L., pag. 533. — Cota Trium- Jetti Gay, d’après la juste remarque de M. Bubani (Le, p.14). — australis Willd. — Ormenis mixta Gay. ACHiLLEA Ptarmica EL. var. B, p. 534. — 4. pyrenaica Sibth. var., feuilles ponctuées , etc. — falcata Lap. (A. recurvifolia ix herb.), et 4. capillata Lap., rapportés, à bon droit , par M. Bentham à l’A4. chamæmelifolia Pourr. — nobilis L., p. 535. — 4. odorata L. | Loret et Clos). — atrata L.,p. 535, un seul échantillon sans indication de localité. CENraUREA pbrygia L., pag. 537 , rapporté à bon droit au C. nigra L. — nigrescens Willd., p. 538. — C. rigra L., C. praten- sis Thuill. — axillaris Willd., p. 538. — C. nigra L. ( part.) et C. montana L. var. pinnatifida. — paniculata L. — C. leucophæa Jord. ( Loret et Clos). — corÿymbosa Pourr., p. 539. Un seul échantillon avec la localité Prades , suivie d’un point de doute , et une étiquette de Pourret , portant l'in- dication : Hab. Narbonne à la Clape. — leucantha Pourr. ( C. intybacca Lamk. in herb. ), sans indication de localité. — dJacea L., p. 539. — C. Jacea L. ( part.), et C. amara L. ( Loret et Clos). 29% MÉMOIRES — amara L. et C. alba L., sont dans l’Herbier sans indica- tiun de localité, et font double emploi. — splendens L., p. 540, rapporté avec raison au Wicrolon- chus salmanticus DC. — sonchifolia L. — C. aspera L. — Seridis L. — C. nigra L. — solstitialis L., p 54#1.—C. melitensis L. (Loret et Clos). Micropus erectus L., p. 544. — AZ. erectus L. ( part.) et M. bombycinus Lag. Orcms Morio L., p. 546. — O. latifolia L. ; tubercules pal- més , elc. — tephrosanthos Vill., p. 547, mêlé à l'O. militaris L. — pallens L., p. 548. — O. provincialis Balb.; épi lâche pauciflore , lobe moyen du labelle subbilobé. — Jatifolia L., sans désignation de localité — ©. incarnata L. ( Loret et Clos ). — sambucina L. Les auteurs de la Flore de France ne signalent pas les Pyrénées au nombre des localités de cette plante. L'Her- bier possède de nombreux échantilions de cette espèce qui paraissent en provenir. Orurys Monorchis L., et O. alpina L., p. 550, sans indication de localité dans l'Herbier. — myodes L.— O. aranifera Huds. et non ©. fusca Link , comme on l’a cru ; labelle entier, émarginé au som- met , etc. Seraruas hirsuta Lap., et S. glabra Lap. p. 551 et 552; rap- portés à bon droit, le premier au S. longipetala Poll., le second au $. lingua L. Eripacris pallens Willd., p. 553 (Cephalanthera grandiflora Bab. ). Indiqué dans les Pyrénées d'après Lapeyrouse, est dans l'Herbier sans désignation de localité. DE L' ACADÉMIE DES SCIENCES. 295 CHara tomentosa L., p. 559. L'échantillon très-incomplet , sans organes sexuels , sans indication de localité , parait être ane des formes du C. fœtida Braun., tige médiocre , sans papilles , non coton- neuse , etc. Luna arbiza L., p. 560. — Z. polyrhiza L. Typna angustifolia L., p. 560, sans indication de localité. — T°. minima Hoppe. — mediaL. (in herb.).— T° angustifolia . SparGaNIUM natans L., p. 561 , sans indication de localité. — S. minimum Frics. Carex dioica L., p. 561, sans indication de localité. — C. Da- valliana Smith ; souche cespiteuse , tige rude, utri- cules à la fin réfléchis. — Davalliana Sm. ; mêlé à l’Æleocharis palustris R. Br. — macrostylon Lap., p. 562. Est bien le C. decipiens Gay, si distinct par son épi cy- lindrique, son utricule à long bec subulé. L’échantillon unique de l'Herbier n'a pas , comme le dit Lapeyrouse à propos de cette espèce , une racine rampante, mais une souche très-courte , tronquée , avec des racines adventives un peu plus fortes et des feuilles plus longues, relativement aux tiges, que celles du C. pulicaris L. — fœtida AI. — C. brizoides L. Tiges très-grêles , épillets cylindriques, récurvés, blan- châtres ; utricules verdâtres à bord denticulé. — incurva Smith, p. 563. — C. fœtida Vill. Utricules minces , stipités, à bords aigus, à long bec grèle bidenté , etc. — atrata L. var, 0. — C. nigra L., cum frustulo C. Goo- denowii Gay ( Loret et Clos ). — Linckii Schk. var. capsulis nervosis spicis confertis, avec l'indication : Font de Comps. — C. gynobasis Nill. { Loret et Clos ). 296 MÉMOIRES — arenaria Willd., p. 56% (avec un point de doute et la localité Luchon). — C. paniculata L. ( Loret et Clos). — Schreberi Willd., sans indication de localité. Parait être le C. mucronata AI. ; un épi mâle et un fe- melle rapprochés , sessiles, à écailles brunes , l’inférieure embrassante , aristée; utricules velus lancéolés, deux stig- males , etc. — leporina L. — C. curta Good. — divulsa Good., p. 565. — C. muricata L. @ virens Koch. — loliacea L., C. tenella Schk., p. 566. — C. divulsa Good. L’échantillon (sans désignation de localité), ne répond nullement à la figure citée par Lapeyrouse, du C. tenella de Schkuhr. — elongata L. sans indication de localité. — C. curta Good. — paradoxa Willd. sans désignation de localité. — C. tere- tiuscula Good. ; épillets en épi; utricules ailés et biner- viés latéralement. — curta Willd. L'échantillon unique de l'Herbier a été envoyé de Mende à Lapeyrouse. — collina et globularis Willd., pag. 567. ( C. collina ? èn herb.). Les échantillons de l'Herbier ne répondent nullement à la figure du Carex montana de Schkubhr, citée par La- peyrouse pour cette espèce, et représentent une forme naine du C. sempervirens Vill.; bractée inférieure engai- nante : un épi mâle brun et blanc ; deux épis femelles grèles , utricules verdâtres , lancéolés , trigones , atténués à la base et au sommet en un long col bidenté, hispides sur les bords , trois sligmates. — ciliata Wild. — C. polyrhiza Wallr. ( Loret et Clos). DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 297 tomentosa L., sans indication de localité, — €. piluli- fera L. ( Loret et Clos). furcata Lap., p. 568. — C. vesicaria L.(Loret et Clos). pilulifera Willd., pag. 569. — C. digitata L.. (bractées engaînantes , etc. ). extensa Good. — C. flava L.. ( Loret et Clos ). fulva Good., p. 570. — C. frigida AU. Souche rampante , stolonifère ; un épi mâle brun ; qua- tre épis femelles à écailles mucronées brunes avec la ner- vure médiane verte ; utricules fusiformes , bruns, à bords verts ; trois stigmales. saxalilis L. — €. Goodenowi Gay. sphærica Lap. — C. polyrhiza Wallr. cum frustulo C. frigidæ AU. ( Loret et Clos ). frigida AÏl. , p. 571, var. spicis capitatis aterrimis femi- neis sterilibus, Glaciers d'Oo (ix hcrb.) — C. atrata L. ( Loret et Clos). pilosa Host, pag. 572, sans indication de localité. — C. paricea L. alpestris Wablenb. et All. , C. gynobasis Vill., p. 573. Cette dernière dénomination est celle qui convient à l’es- pèce. verna Schk. —- €. præcox Jacq., C. verna Vill. ( Loret et Clos). cæspitosa L., p. 573. — C. Goodenowii Gay. limosa L., p. 574. Sommité de tige sans feuilles , sans indication de localité. acuminata Willd. — C. glauca L. Des trois échantillons , deux ont chacun deux épis fe- melles et deux mâles ; le troisième, deux femelles et trois mâles. Utricules elliptiques comprimés, de la longueur des écailles ou les dépassant. 298 MÉMOIRES — acuta 6 L., pag. 575. — C. sempervirens Vill. ( Loret et Clos). — secalina Wablenb., p. 576. — €. riparia L. Trois ou quatre épis mâles. à bractées brunes, toutes ai- guës ; utricules ovoides , bruns, nerviés, à bec bidenté. — Dufourii Lap. S. p. 140. Un seul échantillon à feuilles plus courtes que la tige , rapporté à bon droit au C. rupestris AN. — Marchandiana Lap., S. p. 141. Justement rapporté au C. pyrenaica Wablenb. — alopecuros Lap., S. p. 141. Rapporté par les auteurs à l’£riophorum latifolium Hopp. il doit l'être à l'E. angustifolium Roth, ( échantil- lons commencant à fleurir ) : souche stolonifère , feuilles canaliculées à bords lisses , pédoncules lisses , etc. Obs. Les échantillons des Carex filiformis Good. , C. paludosa L., C. stricta Good., C. verna Schk., C. alba Scop., ne sont pas accompagnés d’une désignation de localité. LirroreLLa lacustris L., p. 577. | Tous les échantillons de l’'Herbier viennent de Suède. Nars monosperma Wilid. {N. marina 1x herb. ). — Caulinia fragilis Wild. Awaraxraus prostratus Balb., À. viridis Vill. , p. 579. Cette synonymie est fausse ; l'A. prostratus Balb. man- que dans l'Herbier , où se trouve à sa place A. viridis L. ( A. sylvestris L.). Myriopavecum verticillatum L., p. 580. — A7. spicatum L. Quercus microcarpa Lap., p. 582, Quercus à très-long gland de Donezain (in herb.) — Q. pedunculata Ehrh. — stolonifera Lap. — Q. Tozza Bosc. — alzina Lap., p. 584. — Q. Ilex L. DE L’ACADÈMIE DES SCIENCES. 299 Anvu pyrenaicum Lap., S. p. 143. Représenté dans l'Herbier par une seule feuille , est rap- porté, vraisemblablement à bon droit, à l'A, italicum Mill. Paxus sylvestris L., P. Mugho Poir., P. sanguinea Lap., p. 587. Ces trois prétendues espèces nous paraissent avoir été réunies avec raison au P. uncinata Ram., les deux premiè- res par M. Bubani (L. c., p. 16), la troisième par MM. Ben- tham , Grenier et Godron. — maritima Poir., p. 589 { P. maritima.… x herb.). L'échantillon de l'Herbier par ses feuilles longues de 5-6 centimètres , dressées , aiguës-piquantes , par ses jeu- nes cônes réfléchis , ne paraît pouvoir se rapporter qu’au P. sylvestris L.,.ou au P. uncinata Ram. ; l’état rudimen- taire des organes fructificateurs ne permet pas de décider. CroTox tinetorium L. , p. 590. — Xanthium strumarium. L. Réceptacles femelles terminés par deux gros becs , et couverts d’aiguillons crochus ; tige non tomenteuse ; poils non étoilés ; feuilles en cœur peu rudes , etc. SALIX incerla Lap. p. 594. Cette plante est rapportée avec doute par MM. Grenier et Godron aux S. undulata Ehrh. Les échantillons de l'Her- bier sont identiques avec ceux du S. cinerascens « gran- difolia Ser. ( Rév. Saul. Suiss. exsice.), S. grandifoliu Ser., Helv., p. 20 ). — pontederana? Vill., p. 595. (S. Poniederæ Vill. in herb. La plante de Villars est rapportée par MM. Grenier et Godron au S. hastata L., dont nos échantillons s’éloigaent par leur capsule tomenteuse. Leurs rameaux tortueux . glabres , leurs feuilles à dentelures fines , leurs chatons foliacés à la base , etc., me les ont fait rapporter au S. phylicifolia L.; j'ai pu constater en outre leur identité avec d’autres étiquetés par M. Seringe S. bicolor Ehrh. , dé- nomination synonyme de S. phylicifolia L. — fragilis L., p. 596. — S. pentandraL.. ; pétiole glandu- leux, étamines par 4 ou par 5, etc 300 MÉMOIRES prunifolia Smith. Me paraît répondre à la description donnée par De Candolle (FL. Franç., T.ir, p. 296) du S. fœtida Schleich : feuilles dentées en scie, très-glauques en dessous , à très- petils poils couchés; chatons femelles longs de 0,02, à pédoncule cotonneux, portant deux ou trois feuilles; écail- les arrondies , soyeuses ; fruit tomenteux , etc. myrsinites L., p. 597. Rapporté aux Pyrénées sur la foi de Lapeyrouse , est, dans l'Herbier , sans indication de localité. formosa Willd. — Verosim. $. hastata L. Arbrisseau à feuilles elliptiques aiguës, denticulées , glabres ; chatons femelles feuillés à la base, lâches, à écailles longuement velues , à capsule ovoïde, glabre, sur un court pédicelle. arbuscula L., fragment de plante insignifiant. myrtilloides L. , p. 598, sans indication de localité, Des trois échantillons réunis sous ce nom, deux, par leurs chatons très-courts , par leurs feuilles entières, glauques, par leurs capsules tomenteuses el sessiles, appartiennent au S. cæsia Vill. , le troisième au S. monandra Hoffm. aurigerana Lap., rapporté à bon droit au S. caprea L. fusca L., p. 600. Des deux échantillons , l’un , sans indication de localité, est le S. cæsia L. ; l'autre, (8 sphacelata), pris à Prats- de-Mollo , et appelé , précédemment , par Lapeyrouse S. capræa var. sphacelata, est le S. aurita L., plante qui se retrouve sous le nom de S. aquatica var. 8. acuminata Smith. — S. caprea L. ; ce dont convient La- peyrouse lui-même , p. 603. fluggeana Willd., p. 603. — S. Lapponum L. ( Loret et Clos). Cette plante est, dans l'Herbier , sans indication de lo- calité. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 301 — Villarsiana (2x herb.). Cette plante , omise dans l'Histoire abrégée , et qui a été prise à Souanès, Arconac et l’icdessos, est le S. cinerea L. : Jeunes rameaux gris tomenteux , feuilles elliptiques ou obovales-oblongues , dentées, d’un vert sombre, stipules réniformes , etc. Huwuzus Lupulus L., p. 606. Lamarck avait remarqué que les feuilles de cette plante sont quelquefois simples ( Encycl. 1, p. 138 ). Lapeyrouse crut devoir considérer comme une variété le Houblon à feuilles simples , alors que MM. Grenier et Godron ne si- gnalent pas même ce caractère dans la description qu'ils donnent de cette plante. L’échantillon de la variété & dans l'Herbier , a toutes les feuilles indivises. Poruzus nigra L., p. 606. Des deux échantillons de l’Herbier, l'un, à feuilles non tronquées à la base, parait être le P. fastigiata Poir.; es- pèce que Lapeyrouse considérait probablement , comme le font aujourd’hui MM. Decaisne et Spach , comme une simple modification du P. nigra L. AxproPOGON hirtus L. , p. 612. — 4. hirtum L. (partim) , et A. pubescens Nis. ( Loret et Clos ). Pareraria judaica L. , p. 614. — P. diffusa Mert. et Koch : fleurs mâles campanulées, etc. — lusitanica L. , sans indication de localité. ATRIPLEX palula L. var. 8, p. 615. — Chenopodium album. Fleurs hermaphrodites, graines horizontales , lenticu- laires , lisses , à bords aigus. — rosea L., S. p. 150. — 4. laciniata L. (feuilles et brac- tées hastées , fleurs en panicule), mélé au Chenopo- dium opulifolium L. Acer Pseudo-Platanus L., p. 615. — 4. platanoides L. Lobes et dents des feuilles aigus , à sinus arrondis ; co- rymbes dressés ; ailes de la samare très-divergentes. 5° s, — TOME 1. 20 302 MÉMOIRES — platanoides L. — 4. Pseudo-Platanus L. Fleurs en longues grappes pendantes, pédonculées, etc. Equiserux fluviatile L. , p. 618 , E. eburneum Roth, E. Tel- mateia Ebrh. Ces deux dernières dénominations conviennent seules à l'espèce de l'Herbier. — umbrosum Mey., p. 619, ne diffère pas de l'E. sylva- ticum L. — limosum L., mêlé à l'E. palustre L. — palustre B giganteum {ir herb.), 6 altissimum $. p. 150. — E. ramosum Schl. ( Loret et Clos). Lycoponrum complanatum L. , p.620. — ZL. chamæcyparissus A. Br. — denticulatum L., p. 621, sans indication de localité. Pozyropium byperboreum Willd. , p. 623. Cette espèce , non signalée dans les Pyrénées par MM. Grenier et Godron , paraît avoir été cueillie à Vieille par Lapeyrouse. — Phegopteris L., p. 623. — Polystichum Thelypteris Roth ; indusium subréniforme; lobes des segments à bords réfléchis , ete. Asrinium Thelypteris Swartz, p. 624, sans indication de lo- calité. — spinulosum Swartz. La plante de Swartz , par son 2ndusium réniforme , est rentrée dans le genre Polystichum Roth. Les échantillons de l'Herbier appartiennent à l'Aspidium aculeatum Doœll : (indusiumorbiculaire ) ; seulement, les segments de la fronde , au lieu d’être pinnatiséqués , sont pinnatifides. — rhæticam Swartz, p. 626. — Cystopteris fragilisBernh. Indusium continu à la nervure par un de ses bords ; fronde oblongue lancéolée bipinnatiséquée. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 303 ASPLENIUM germanicum Weiss, p. 626. Les échantillons de l’Herbier appartiennent bien à cette espèce , qui n'est rapportée aux Pyrénées, par MM. Gre- nier et Godron , que sur la foi de Lapeyrouse. CueizanTues odora Swartz, S. p. 152 (Pteris acrosticha Balb. in herb.). Les échantillons de cette espèce (qui n’est rapportée aux Pyrénées par Lapeyrouse que d’après De Candolle) portent l'indication : « Vieux murs de clôture à Bagnols. » Isoeres lacustris L., p. 630 , sans indication de localité. Marsicea quadrifolia L., p. 630 , sans désignation de localité. LISTE des Plantes signalées dans l'ouvrage de Lapeyrouse el qui manquent dans l'Herbier (1). Salicornia fruticosa L. (ex Pourret); Veronica digitata Vahl. ; Verbena supina L.; Salvia Horminum L., S. sylvestris L. ; Cryp- sis aculeata Ait.; [ris sambucina L., I. spuria L., I. sibirica L.; Cyperus pannonicus L. (ex Loiseleur), C. bifidus Pourr. (ex Pourret) ; Scirpus fluitans L., $. multicaulis Smith, S. caricis Retz. ; Nardus aristata L.; Leersia oryzoides Swartz (ex Bergeret) ; Phalaris canariensis L.; Polypogon monspeliense Desf.; Milium len- digerum L. ; Agrostis interrupta L., A. pungens Vahl; Aira pubes- cens Vahl ; Melica aspera Desf., M. pyramidalis Lamk. ; Briza mi- (1) Cette liste comprend quelques espèces qui se trouvent dans l’Herbier, mais sous un nom différent, par suile d’une fausse déterminalion. Les es- pèces sont disposées dans l’ordre de l’ouvrage. J’ai cru devoir distinguer celles que l’auteur n’a pas trouvées lui-même, et qu’il a rapportées aux Pyrénées d’après d’autres botanistes. 30% MÉMOIRES nor L.; Dactylis stricta Willd. (ex Loiseleur); Spartina alterniflora Lois. ; Festuca cristata L., F. curvula Gaud., F. splendens Pourr. (ex auct.); Bromus inermis Leyss., B. racemosus L.; Stipa aristella L. (ex DC.) ; Avena strigosa Willd., A. bromoides Gou. , A. alba Vahl (ex DC.), A. glauca Lap.; Arundo Donax L. (ex Lemonnier), À. arenaria L.; Elymus arenarius L.; Secale villosum L.; Hordeum maritimum Wither.; Triticum rigidum Schrad. ; Scabiosa ochro- leuca L., S. stellata L. ; Galium Jussiæi Vill,, G. saxatile Pall., G. fragile Pourr., G. verticilliflorum Pourr.; Exacum filiformeWilld. (ex Bergerel) ; Plantago atrata Hopp.; Potamogeton compressum L., P. pectinatum L., P. bifolium Lap.; Sagina filiformis Pourr. ; Tillæa Vaillantii Willd.; Heliotropium supinum DC. (ex DC.); Myo- sotis apula L.; Anchusa undulata L.; Cynoglossum apenninum L. (ex Tourn.) ; Lycopsis pulla L. (ex Pourr.); Echium creticum L. (ex Tourn.) ; Androsace elongata Jacq. (ex Pourr.) ; Anagallis cras- sifolia Thor. ; Convolvulus saxatilis Vahl , C. lineatus L. ; Campa- nula elatines All. (ex Pourr.) ; Chenopodium ficifolium Smith, C. serolinum L.: Salsola Kali L., S. Soda L., S. fruticosa L. (ex Tourn.) ; Ulmus suberosa Mœnch , U. efusa Willd.; Lonicera ba- learica Courset (ex Xatard); Chironia spicata Willd.; Gentiana purpurea L., G. pannonica Jacq. (ex auct.); Verbascum blattarioi- des Lamk. (ex Loisel.), V. montanum Schrad. (ex Schrad.); Datura Tatula L.; Atropa Mandragora L. (ex Cazeneuve) ; Lycium euro- pæum L.; Rhamnus oleoides L.; Ribes grossularia L.; Viola calca- rata L. (ex L. et Pourr.); Cynanchum acutum L.; Buplevrum rigi- dum L. (ex Tourn.), B. Gerardi Murr. (ex Pourr.) ; Caucalis pla- tycarpos L. ; Crithmum maritimum L. ; Cachrys Morisoni AIL. (ex Pourr.); Laserpitium Archangelica Willd. (ex Tourn.) ; Heracleum angustifolium L. (ex Pourr.), H. pruthenicum L. (ex J. Gay); Sison inundatum L.: Scandix australis Mill., S. nodosa L. ; Chærôphyl- lum alpioum Vill. ; Rhus coriaria L. ; Statice linearifolia Lois., S. plantaginea AlL., S. auriculæfolia Pourr.; Narcissus triandrus L. (ex L.), N. intermedius Lois. ; Allium scorodoprasum L. (ex Pourr.), A. parviflorum L., A. descendens L., A. moschatum L., À. pallens L. (ex Pourr.), A. flavum L., A. narcissiflorum Vill., A.suaveolens Jacq., A. DE L'ACADÈMIE DES SCIENCES. 305 ericelorum Thor., A. odorum L. (ex Bergeret); Lilium pomponium L. (ex Lin.) ; Fritillaria pyrenaica L. (ex Clusius); Ornithogalum narbonense L., O. arabicum L.; Asphodelus albus L.; Hyacinthus racemosus L.; Juncus flavescens Host , J. sudeticus Willd.; Rumex Palientia L., R. tuberosus L. (ex Bergeret), R. pyrenaicus Pourr. (ex Pourr.) ; Alisma Damasonium L., A. natans L. ; Trientalis eu- ropæa L.; Chlora sessiliflora Desv. ; Erica viridi-purpurea L., E. scoparia L., E. umbellata L. ( ex Loisel.) ; Passerina polygalæfolia Lap. (ex Tourn.); Elatine Hydropiper L. ; Anagyris fœtida L. (ex Gou. et Pourr.) ; Ruta chalepensis L. ; Saxifraga rupestris Willd. (ex DC.); Dianthus ferrugineus L. (ex Pourr.), D. geminiflorus Lois. (ex Loisel.), D. plumarius L., D. virgineus L., D. arenarius L. ; Silene anglica L., S. lusitanica L. (ex Pourr.), S. tridentata Desf. (ex DC.),S. conoidea L., S. Campanula Pers. ; Scleranthus poly- carpos L.; Arenaria multicaulis L., A. cerastifolia DC. (ex DC.), A. media L., A. laricifolia L., A. austriaca Murr., A. Gerardi Willd.; Sedum Anacampseros L., S. stellatum L., S. rupestre L., S. hispa- nicum L.; Lychnis viscaria L.; Spergula pentandra L., S. subulata Swartz ; Euphorbia spinosa L., E. mucronata Lap., E. paniculata Desf., E. Myrsinites L., E. palustris L., E. oleæfolia Gou. (ex Tourn.), E. terracina L., E. longiradiata Lap. ; Mespilus pyra- cantha L. (ex Bergeret) ; Rosa gallica L., R. tomentosa Smith ; Tormentilla reptans L.; Cistus Ledon Lamk., C. incanus L., C. ledifolius L., C. pilosus L. ; Delphinium Staphysagria L. (ex Gou.) , D. peregrinum L. (ex DC.); Anemone pratensis L., A. syl- vestris L.; Thalictrum tuberosum L.; Ranunculus monspeliacus L., R. Xatardi Lap., R. trilobus Desf. ; Teucrium flavescens Schreb.; Nepeta Nepetella L., N. tuberosa L.; Sideritis incana L.; Galeopsis cannabina Roth ; Thymus mastichina L. ; T. corsicus Pers. ; Pru- nella hyssopifolia L.; Euphrasia lutea L.; Melampyrum sylvaticum L.; Antirrhinum pilosum L., A. bipunctatum L., A. simplex L. ; Scro- phularia aquatica L. ; Orobanche major L., O. cærulea Vill.; Mya- grum perenne L. ; Lepidium subulatum L. (ex Xatard ); Thlaspi heterophyllum DC.; Cochlearia Armoracia L.; Iberis umbellata L. ; Alyssum arenarium Lois. (ex Loisel.); Cardamine thalictroides 306 MÉMOIRES AIL. (ex Boccone et Loisel.) ; Sisymbrium supinum L., S. vimineum L.,S. Irio L., S. simplicissimum Lap.; Arabis runcinata Lamk. ; Turritis arenosa Lap., T. ciliataWilld.; Erodium romanumWilld., E. præcox Auct.; Althæa narbonensis L.; Lavatera marilima Gou.; Fumaria claviculata L. (ex Pourr.); Spartium junceum L., S. sphærocarpum L., S. purgans L., S. horridum Vahl (ex Vahl et DC.) ; Anthyllis Gerardi L., À. tetraphylla L. ; Lupinus varius L., L. luteus L. (ex Tourn.); Lathyrus Nissolia L., L. annuus L. ; Vicia cassubica L.; Ervum monanthos L. ; Scorpiurus vermiculata L.; Hedysarum humile L., H. uniflorum Lap., H. Crista-Galli L. (ex Xatard.); Astragalus pilosus L. (ex Pourr.), A. Cicer L. (ex Tourn.), A. Glaux L. (ex Tourn.); Trifolium italicum L., T. Mi- chelianum L., T. maritimum Smith, T. squarrosum L., T. vesi- culosum Savi , T. spumosum L. ; Lotus conjugatus L.; Medicago suffruticosa DC., M. turbinata AIL., M. denticulata Willd., M. muricata All, M. Terebellum Willd.; Arnopogon asperum Willd.; Scorzonera angustifolia L., S. pinifolia Gou.; Sonchus palustris L.; Hicracium bulbosum Willd., H. prenanthoides Vill. ; Helminthia spinosa DC. (ex Lemonnier); Arctium Bardana Willd. ; Carduus paniculatus Vahl (ex Vahl); Cnicus canus Willd., G. rufescens Lois. (ex DC.) ; Onopordon acaule L., O. illyricum L. ; Atractylis humilis L.; Acarna cancellata Willd.; Carthamus tinctorius L., C. mitissimus L.; Bidens bipinnata L.; Santolina squarrosa Willd. (ex Tourn.), S. viridis Willd., S. rosmarinifolia L.:; Tanacetum an- nuum L.; Arlemisia gallica Willd., A. procera Willd. ; Gnapha- lium fuscum Scop.; Conyza sicula Willd.; Erigeron glutinosum L. var. 8 Lap.; Senecio lividus L., S. nebrodensis L., S. nemorensis L. (ex Pourr. et Lois.), S. Doria L., S. Barrelieri Gou. ; Cineraria cordifolia L., C. alpina Willd.; Inula squarrosa L., I. crithmifolia L., L. provincialis L. (ex Pourr.), [. bifrons L. (ex Hermann) ; Achillea alpina L. (ex Pourr.), A. chamæmelifolia Pourr., À. nana L.; Buphthalmum maritimum L.; Centaurea Centaurium L. , C. sicula L., C. pullata L.; Micropus supinus L. ; Ophrys aranifera Huds. ; Epipactis cordata Swartz ; Cymbidium corallorhizon Swartz ; Aristolochia longa L., À. Pistolochia L.; Lemna gibba DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 307 L. ; Typha latifolia L. ; Carex lobata Schk., C. trinervis Degland., C. hordeiformis Wahlenb. ; Ceratophyllum submersum L. ; The- lygonum Cynocrambe L. ; Betula pubescens Ehr., B. viridis Vill. ; Pinus pyrenaica Lap., P. excelsa Poir., P. rubra Mill., P. rigida Lamb. ; Momordica Elaterium L. ; Bryonia alba L. ; Salix glauca L.?, S. cinerea L., S. incubacea L. (ex Pourr.), S. aurita L., S. candidula Willd. ; Myrica Gale L.; Populus canescens Smith ; Rhodiola rosea L. ; Holcus odoratus L.; Ægilops triaristata Willd.; Valantia muralis L.; Atriplex Halimus L., A. glauca L., A. litto- ralis L.; Equisetum elongatum Willd. ; Botrychium matricarioides Willd. ; Polypodium ilvense Swartz, P. calcareum Smith (ex DC.) ; Aspidium regium Swartz.; Hymenophyllum thunbridgense Smith (ex L. Dufour) ; Pilularia globuiifera L. (ex Pourret) ; Salvinia natans Hoffm. 308 MÉMOIRES SUR QUELQUES FORMULES TRÉS-GÉNÉRALES QUI SE PRÉSENTENT DANS LA THÉORIE DES NOMBRES PREMIERS; Présenté à l'Académie des Sciences de Toulouse, Par M. LE PRINCE DE POLIGNAC, Membre correspondant. Lorsqu'on veut étudier les nombres premiers en eux-mé- mes, c’est-à-dire, en les considérant comme faisant partie d’une suite qui les comprendrait tous, on se trouve arrêté par des difficultés qu’on n’a pu vaincre jusqu'à présent et qui sont peut-être invincibles. Mais si, au lieu de procéder ainsi, on cherche les propriétés d’une certaine fonction symétrique des nombres premiers, le problème devient plus facile , comme on le verra dans les recherches suivantes : la fonc- tion que J'ai choisie comme sujet d'étude est le produit de tous les nombres premiers jusqu’à celui qui est immédiate- ment inférieur à x : cette quantité étant une fonction dx, nous la désignerons par m(x). Dans un mémoire inséré dans le xix"® tome du Journal des Mathématiques pures et appliquées, nous avons démon- tré que (x) s’exprimait en fonction de F(x), cette dernière expression désignant le produit de tous les nombres natu- rels depuis 1 jusqu'à æ; mais ce produit que Legendre désigne par T(x+1) a été très-bien étudié par plusieurs DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 309 grands géomêtres. . . la question se trouve donc ramenée à l'étude des fonctions r. Dans le mémoire que je viens de rappeler figure une fonction intermédiaire qui sert à relier 4 (x) et F(x), fonc- tion que j'ai désignée par o(x) et dont voici la définition algébrique : e(x)=x(x). Pr (25. (aires. Le but du travail que je soumets à l’Académie est d’éta- blir des relations entre le produit des nombres naturels élevés à de certaines puissances et le produit des nombres premiers élevés à des puissances analogues : c’est donc une généralisation du travail publié dans le journal de M. Liou- ville. On sera sans doute frappé, dans le courant de cet ouvrage, de l'extrême symétrie des résultats et de la simplicité pres- que élémentaire des démonstrations. Etablissons quelques définitions ; soient : 1m om 3m A 5m 6m Fr)=ns3 45.608... om 3m 5mym Jim RCE MS:SNITÉR ILE m m 27 3m e(x)=w(x). (x?) pe (æ. (ai). Quand il s’agira de relations générales, quel que soit »2, nous désignerons les fonctions F(x), o(x), (x) par les initiales F, © et w. Nous dirons, par exemple : les fonctions & peuvent s'exprimer au moyen des fonctions F par l’inter- médiaire des fonctions o. Cela posé, étudions d’abord les relations des fonctions F entre elles et les propriétés relati- ves à ces fonctions. 310 MÉMOIRES Etude des fonctions F. Remarquons d’abord qu’en vertu de la notation que nous venons d'adopter, nous avons : PER) 1 2:90 4.100 Je dis maintenant qu'entre F,(x) et F,(x) nous aurons la relation suivante : F(x)=F,(x).F(x—1).F(x—2)F,.(x—3).F,(x—4)...F(2) ce qui permet d'exprimer F,(x) en fonction de F,(x). La démonstration de ce théorème est bien simple et peut être présentée d’une manière assez élégante : en effet, écri- vons le produit F,(x) x fois au-dessous de lui-même, et prenons x=—0 , pour fixer les idées ; la démonstration res- tera d’ailleurs tout aussi générale. Nous aurons : B A DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 311 Or, en faisant le produit de toutes les lignes horizontales entre elles, nous aurons évidemment : F°(g); mais si nous faisons le produit des facteurs contenus dans le triangle ABC, nous aurons : 1.069.300 Mec su #0 (0)5 d'autre part, la ligne diagonale a b donne le produit : 1-2-3.4-9:6.7.8= (91); la ligne diagonale a’ b’ donne : 1:2-9-4-0-07—#F (9-2); la ligne diagonale a” D" donne : 1.2.3.4.5.6—F(9—3) et ainsi des autres; en sorte qu’on aura bien : 9)=F,(9).F.(9—1).F.(9—2).F.(9—3).F e(9—4).F o(g—5). F (9 6).F et en général : F. (x)= EF, (x).F(x—1).F(x—2).F(x—3).....F (2). mais ce théorême peut être généralisé, et on aura, quel que soit 2 : F(x)=F(x).F(x—1).F(x— 2) ARE F(3): m m+i1i m m m La démonstration est d’ailleurs exactement la même que ci-dessus : nous ne la répéterons pas. Remarquons que, dans cette formule , #2 peut recevoir une valeur entière quelconque positive ou négative. Quand 2 est positif, on voit qu'il 77 aura aucune difh- culté à exprimer F, n(X) en fonction de F,,_,(x), et de pro- che en proche on arrivera à exprimer F,,(x) au moyen de F, (x). Mais quand m» est négatif, il est plus difficile de dé- gager l’inconnue qui figure un grand nombre de fois dans les deux membres. Mais au lieu de considérer les fonctions F elles-mêmes, (2). 312 MÉMOIRES il est plus commode d’opérer au moyen de leurs logarithmes; ce sont donc les logarithmes de F qui figureront seuls dans nos recherches. On sait que pour log F,(x) on à : logF, (= xlogr—2— {log x +log/27 +: «, est un reste que quelques mathématiciens ont désigné par (x); c’est là une notation que nous sommes obligés de rejeter pour éviter la confusion. D'ailleurs : | e < log x + —— Æ 5 TS Nous appellerons degré d’une fonction la partie variable du terme par rapport auquel tous les autres sont nuls pour x infini; ainsi, par exemple, le degré de log F, (x) est xlog x; c’est aussi Jà son premier terme. Nous allons chercher quel sera le degré de logF,,(x); commençons par le degré de F,(x.) En posant : log F,(x—1)+logF,(x— 2) +. ..#log F(2)= 3 logF, (2) nous avons : logF,(x)+ 2logF,(r)=xlogF, (x) ou bien : LogF,(a)+-5logF(n)=| vlog x — Lloga+log Var +: | ou, développant le premier membre, log F,(x) +2 [riogn—n {logos 55 + | = | 2log2—s— {logs +log Er +4 | Examinons la manière dont se compose le terme : D) [mio n—n—n?logn; donc, en ne considérant toujours que les termes du plus haut degré, 3 log F, (x) =log Et log x 3 ne x 5 los F, = log x; logF,(r) = log x DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 315 en négligeant tous les termes inférieurs au premier , on au- rait encore 4 log F; (x) +. log F;(x) —— log x ÀogF, (1)= = hgz; logF;(x) = log x en ne tenant toujours compte que du premier terme. Dès lors on voit que, quel que soit »2, le premier terme de log F,,(x) sera : m1 zx mi Jusqu'à présent, dans la recherche du degré et du premier terme de log F,,(x), nous n’avons considéré que le cas de m > 0; Sin est plus petit que zéro, le problème est un peu plus difficile et se traite moins directement. En effet, si nous faisons m—— 1, nous aurons : xlog F(x)=logF,(x) +5 log F(x) EE log x. et de cette expression nous ne pouvons plus tirer commodé- ment log F_, (x) puisqu'il entie un nombre considérable de fois dans les deux membres. Cherchons donc logF_,(x) directement. Rappelons que : LEGS Fe Les 3 , log4 nr Or, en donnant une règle sur la convergence des séries , M. Duhamel remarque que : Il ] l log x log x d: tee SBPIÇ c'e GS pyusess x 2 log3 , lo log x log x dx c'e 2 316 MÉMOIRES | 7 13 d: , °4 donc je — = représente pour toute valeur entière d'x la A À log 2 valeur de la série avec une erreur moindre que — ; MAIS : É logx dx __log’x log’2 Gén 2 L donc : log’ x __log’2 ne log2 , log3 , log4 2 ...... > log2 , log3 | log logx ,log2 log°2 er PO ere LAN a 3 2 2 2 et par conséquent : LS log®x log’2 log F(x) > = = log?æx , log2 log?2 log F (x) < EEE. 1 Donc le degré de logF_,(x) est : log’ (x) et son premier log? x terme est ——. La formule : log F(x) +2 log F,(2)= xlog F, (x) ne fournit pas de vérification lorsqu'elle est laissée sous cette forme ; mais en revanche elle donne un théorème fort inté- ressant, et dont voici l'énoncé : Le 4x terme de la somme des quarrés des logarithmes des membres naturels est : x log” x. En effet, nous aurons pour x suffisamment grand, en né- gligeant les quantités d'ordre inférieur : Log x =xlog x += [log (e— 1) log" (x — 2) +...+# log" 2]. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 317 Prenons maintenant la relation : HE 2 log F (: r)=xlog E( h L—1 —1 il faudra encore chercher directement logF_, (x); or : l log F( = EE SE GA, den &e et d’après la règle de M. Duhamel : log2 , log3 , log4 log x log x dx ere IX F1 16 steotslté"s + x? > Te" log 3 logÀ log x Jogx dx A. 7 er a og x dx # : A donc — représente pour toute valeur entière d’x la 2 7e = log 2 = valeur de la série avec une erreur moindre que Ti Mais : erdx logx 1 log2 D M CALE donc : log2 , log3 , log4 log x = n + à +— È = EPA CES + ta log 2 _ log lbgz | PE MR Er DTA tbe 2) de le premier terme de log as est une constante C Æ nu a ét 1 À 1 comprise entre : (1 —log2) et ={1—:log 2). Il en sera de même pour log F_,(x), log F_,(x) ete... Comme il sera encore question de ces constantes, nous choi- sirons une notation pour les désigner commodément : ainsi C, sera la valeur limite de log F_, (x) qui est une série con- vergente; C,; sera la limite de logF_,(x) et, en général, D°S.— TOME I. 21 318 MÉMOIRES C,, sera la limite de logF_,,(x). Il est à peine besoin d'indiquer qu’on aura : G>G>G >... En résumant ce que nous venons d'établir relativement aux degrés de log F (x) nous aurons le tableau suivant : an + 1 Pour m > o ou : —o le 1° terme de log F,, (x) est : log x re à log? x Pourm——1..... le 1er terme de logF,, (x) est : Pour m <—1..... le 1 terme de logF,,(x) est une constante C,, Nous allons maintenant passer à l'étude des propriétés des fonctions ® et u. Etude des fonctions o et y. Il y a entre ®,(x) et F,(x) une relation extrêmement remarquable et que voici : lg F(r)=b6e (+ 2log : (5 +3 log ne (3)#4os Q G}+ 5e et cette relation subsiste quel que soit 72 positif ou négatif, pourvu seulement qu'il soit entier. Si on fait m—0o, on trouve : REP )= log 9 (0) +oge (2 )+ige (3 )+bge( )+. + théorème que nous avons démontré dans le xix"e volume du journal de M. Liouville. Commençons par démontrer que : og (a)=loge(2) +2 loge (2 =) +086 (3 )+ Hg) +. et pour cela cherchons à exprimer F,(x) au moyen des fonetions y. DE L'ACADÉMIE DES. SCIENCES. 319 On aura : Lac 4 Louer ral Il n’est pas difficile d'établir cette formule en groupant convenablement les termes. Voici encore quel mode de dé- monstration on peut employer, et je pense que c’est le plus simple de tous. Remarquons d’abord que dans le second membre les nombres premiers ne figurent isolément ni dans les indices ni dans les exposants; ils ne se présentent que par les grou- pes symétriques pu, , L,, Masse. Considérons donc combien un nombre premier quelcon- que élevé à la puissance p figure dans le produit F,(x). SI : pP logF(x)— 2logF (à) 0 0 % log e(x)—log 9 (:) < log F(x)—2l0ogF (2): OT: 1 1 _ log F(x) < ælogx—x+-logx+— + log V2r > æ log x — x ——log x log 2 7. par conséquent : loge(x) > (log x — 2 — {loge log Tr) x x x 1 % I = 2 A LUE log V2 =) <(ælogx—x+ log x +— ser) en 5 LA — 2 ec nel Ds © 2 S Re ee js © LE ° AT + Es ou bien, en réduisant : loge(x) > æ log —logr +-log 2—#— log /27 loge(a)—logg(= 5)< ælog2 += Log 2 ++— loga — log V3. Mais puisque x est tes on aura aussi : log 9 (æ) — loge :) < x log 24+- Ÿ log x +2 — log 2—logÿ27 loge (+) 1066 (7) < = log 2 + og T4 — log 2 — log ÿ27 log g (res ($ 5) < Tlo8 2 +Slog Ed — log 2 — log 2% 0ge (=)-106 g (E)<= DE —— log 2+- S10g — +— — log 2—logy27. o DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 325 En ajoutant membre à membre ces inégalités , il arrive : loge (x se () < xlog2 (-——) 3 m(m— à log 2 + log 2 — m log 27 ; ré po pompe re los HN G mais si nous prenons 72 de telle sorte que sRoce: Ur, il s’ensuivra que log x == << —— OU“ 71. < log 2 u log x : logo = )=° m > Fe ] 2 et remplaçant 72 par ste dans les termes positifs, et supprimant les termes négatifs, il vient : 3 log’x loge ( (mer! 21082 +—. DRE EHse(5+ ) 12.log2 ou pour simplifier : 3 = loge(x) < x. 210$ 2+= D log x + et d'autre part : loge (x) > x.log »—Ÿ10g x log 2— 5 —log V27. Il résulte de là que le degré de log 8 Po (x) est x et que par suite le degré de log ae est aussi x, car en vertu de for- mules établies dans le mémoire inséré dans le journal de M. Liouville, log #(x) < log g (x) — log p(x:) logæ(x) > logo(x)—2 108 ç(x°) done dans le développement ordonné de log 8 P(X) le premier terme est de la forme a x et a sera compris entre log 2 et 2log2; mais nous pouvons aller plus loin et trouver la va- leur de «, ce qui nous donnera le premier terme de log@, (x) et de log y, (x). 326 MÉMOIRES Pour cela, remplaçons dans l'expression : x x x log (x)=log ? (x) dog (2) + log o (5) + log ç () +... ba OL a CRE . he logg= par —+n,, n, étant une quantité d'ordre inférieur = ax n Alors il vient lgF(a=sloge (E)=r +20 é 20 LE es mais Zn a autant de termes que Sa et dans la première 172 ï de ces deux sommes chaque terme est d'ordre inférieur à l'ordre du terme correspondant de la seconde somme : donc æ Le Ta : ’ Zn est d'ordre inférieur à > — et le premier terme du dé- n I L x : ax : veloppement de xlog@(=) sera fourni par È —- : mais a : n ; [12 E étant constant, on a : Tax OT 2 ——=axi -, SVT AUIL , \ I Nous sommes ramenés à chercher la valeur de 2 I 1 1 1 he Tr CRETE + or, d'après M. Duhamel, on à : æ +1 d tite > og (x +1) | x +1 TNA ral 1 1 dx Sa ee SLA D < | —=log(x +1) ou mieux : 1 + At +— > logx 1 Li L 1 I CHE LE DE Au gén ni Dh log x Lil DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 397 d’où RU UE are +- > logx+- bot et += < logæ+ 1 22 fl . . donc : 2 — est toujours compris entre logx et logx +1; I c’est là un théorème intéressant dont la démonstration est E È Ce : Ca bien simple. Mais dès lors le premier terme de = = est log æ Li et on peut même ajouter que le second terme est de degré au plus égal à une constante. Posons : eux > ==logx+: 1 donc : s >> a x logx+a x X £. OT Par suite le premier terme de x log ee .) est axlogæx ; mais d’autre part le premier terme de log F, (x) est x log x et en vertu de l'égalité ci-dessus : a xlog x=xlog x d'où : GE ainsi le premier terme de logo, (x) et de logy, (x) est : x. De même on trouverait que le degré de 5 go, (x) est x° et que par suite a/x* est son premier terme; pour déter- miner a’ nous aurons recours à l'expression : log F()=2n log e (+ =ina (©) +En.n £ 1\72 n or le premier terme de znlogo, (©) sera le premier terme de 1 1 Èn.a té 2) ia x.-—=a' x 2 -—=a'x°|logx+:] n 328 MÉMOIRES donc le premier terme de > loge, (2 2) est ax log x; mais . x? d'autre part le premier terme de logF,(x) est: —log x, et en vertu de l'égalité ci-dessus : “x a’ x° log z——log TL d’où : L 1 a = 2 done le premier terme de log®, (x) est x : On trouverait de même que le premier terme de log o,(x) est 2x et en général que le premier terme de log @,(x) est : an +1 m + 1 mais Ceci suppose que 72 > O où M—O. Examinons maintenant le cas où m7 < 0, et prenons d'abord m—=— 1. Cherchons alors le degré de logo_, (x). ra : AU log x dx Nous avons vu dans le chapitre précédent que | —=— 2 représente la valeur de log F_,(x) avec une erreur moindre l : que =; donc , quel que soit x: x logæxdx | log2 log x Jlog’2 , log2 ER A Sala tant eo an sem tie logxdæx Jlogx log?2 Len» ] HERSME ES et par suite ! 2 log < log 2 log F F ( Ÿive () —— = =; log" x — log 2.log x DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 329 donc : log F (x )—logF (EEE Eee Togo. DepseEs _ LEE) LE p (DER Er tee NE losiz ou simplifiant : ; x f: ; se log? 2 2 , log2 RG), É 2) <'og æ log Se SE ne log22 Jog2 PEUT 2 + log x .log 2 2 2 2 LogE (æ)—log F (5) > 108 x log 3 — mais, d'autre part, il est facile de voir par les formules établies, que : log o (x) —=logF (x) — = log F (5) En 1 x 1 x I PA 1 r — [anse G)4ivee GHae G)+inee CO) 1 x 1 x I x 1 x 3108 e ()=iver (©) mie e (5) —glos e () see s.e d’où : Log F ( s)=ste 1È )+glse (5)+sise (5)+... > log e (5)+31s e ()+ Fe à donc : | loge (x) > log F (x) — “log F () et, à fortiori : log g(x) > log F (x)— log F () d'autre part, 330 MÉMOIRES donc : LEP æ) log x. PRE 2": loge (x ) << log x.2 log 2 — log? 2 + log 2 d’où il suit que le degré de log SP (x) est : logx, ou, ce qui revient au même, que le premier terme est de la forme b.logx, b étant une constante : pour trouver la valeur de b, remplaçons logo_,(x) par log x +1 dans l'expression : loge x)+> logo (He (3)+08e (7)+-=1088 (x) il vient alors : b [os x += [og æ—log2]+sllogx — log 3] +.. + = blogæ| 14545 1 log me m = blog & — 6.2 log +5 n+e mais Zn—+e est d'ordre inférieur, donc le premier terme de ul = : Élog® x. D'autre part, | ier { -logo_,(=) sera : =log’ x. D'autre part, le premier terme log? x de log F_, (x) est —., donc b— 1. Par suite : logx est le premier terme de logo_, (x). Si on fait m——2 la série logo _,(x) est convergente ; DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 331 en effet, logF_,(x) est convergent et on a évidemment : logo_,(x) < logF_,(x) soit € la limite vers laquelle tend logp_,(x) pour x = ; exprimons € en fonction de € li- mite de log F_,(x).... Pour cela nous avons la relation : bge(r)-Hgloge (5)+iloge (5) 4e e (7 )+= or (s) Posons : | x log © (F)=e+e: —9\72 e étant une quantité qui s’annule pour æ très-grand, on obtiendra alors : 1 (e+petletet. 2 .)}+(e+zetie +—e +. ) (tit nérirars | .)=c or : 1 I 1 En 3 +itotit..= - donc : 6C CG za de même en désignant par € la limite de logo_,,(x) on aurait Récapitulons tout ce que nous avons trouvé concernant les premiers termes de logo, (x) et signalons l'extrême analogie qui existe entre ces résultats et ceux que nous avons obtenus pour log F,, (x). x +: Pour »m > o on a pour le 1°" terme de log 9 (x) : = m Tri +1 CA do sise état AARCIeRe log x Pour m <—1ona, Quant au premier terme de log pu, (x) il est facile de dé- montrer qu'il est le même que celui de log +,, (x). Commen- 332 MÉMOIRES çons par faire voir que le premier terme de log u, (x) est le même que celui de loge,(x) (*) c’est-à-dire qu'il est L4 * TL? égal à — : Nous avons : L L _ — log pa) loge (2) log (a) + loge (2) log (x )+..... par conséquent le premier terme de la somme : Le 1 Or na ARS (CAE Te T0 de » = . est —; mais nous allons faire voir que la somme : I 1 log ge (x°) + log ke (x) log # (ti) +... ne peut fournir de terme en x*; done le premier terme de T2 ’ 2 ? D log u, (x) est TZ en vertu de l'égalité ci-dessus. En effet, nous avons évidemment les inégalités suivantes : 3 à 4 L ne log (27) —2 ; dans ce cas la constante à laquelle se ré- duit log g(x)n’est pas la même que celle de log #(x). —n" nr DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 333 mais : ÿe ne peut fournir de terme en x° si la somme Ra Er HA LS. | LA l 2 DA MR HUE .... n’en fournit pas, or cette somme elle- même est inférieure à LI 1 I L 1 a 2 a a 12 EX x PH T4 [ee logx+x 31 4 donc le premier terme de la somme 5, log u,(x") est infé- = 4 += = 2 à PARUS ME : rieur à æ ‘logx qui lui-même est inférieur à 7 ce qui démontre le théorème énoncé dans le cas de m>0o. Si m—o on trouve encore facilement que le premier terme de log g., (x) est le même que celui de logo, (x). Pour »m—— 1 cela est évident ear : log (x) > log e(x) — 2 log e(x°) L log (x) < log e(x)—log ç (x°) Ainsi, en nous résumant , nous pouvons encore inscrire pour les degrés de log, (x), les résultats suivants : am +1 Pour m > 0, on a pour le 1°** terme de log #(x): = m m+- 1 POI OA. ss 8e ee su 0. OCR Pour 71 <—1, 0n4...-.- ss 4 ete og assis Ce Des principes que nous venons d'établir on peut tirer un grand nombre de théorèmes qu'il serait bien difhicile de démontrer autrement; nous n’en citerons que deux pour donner une idée de ce genre de résultats. 1° Le premier terme de la somme des quarrés des loga- rithmes des nombres naturels est : x log” x. Ce théorème, déjà mentionné ci-dessus, résulte des re- lations suivantes : 5° S. — TOME 1. 22 334 MÉMOIRES / log? Premier terme de logF_, (x) ; premier lerme de log F (x) = x log x ; et : T—1 x log F(x)=log F(x)+ x log F(x) 2 o 20 Si on divise le quarré de la somme des rapports des logarithmes des nombres premiers à ces nombres premuers eux-mêmes par le double de la somme des rapports des lo- garithmes des nombres naturels à ces nombres nalurels eux-mêmes, on oblient un rapport dont la limite est l'unité pour x très-grand. Algébriquement ce théorème s'écrit ainsi : log2 Jlog3 log5 2 re 4 £ S ° = (poure =) u Re log 4 log5 3 ie (+ - HE ++ Ce théorème résulte évidemment de ce que : 4° terme log? x 2 de log F_,(x)=— : 4% terme de log u_,(x)=log x. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 339 DU PROCÉDÉ OU DE L'APPAREIL DE MITSCHERLICH l POUR RECONNAÎTRE LA PRÉSENCE DU PHOSPHORE DANS LES CAS D'EMPOISONNEMENT PAR LES ALLUMETTES CHIMIQUES , Comparé à l'appareil de Marsch pour la découverte de l’arsenic dans les analyses de chimie légale ; Par M. COUSERAN. IL y a quelques mois, M. Mitscherlich proposa, pour re- connaître le phosphore dans les cas d’empoisonnement, un moyen qui permet de signaler le phosphore d'une manière promple et facile dans les matières à analyser, ce toxique n’y existerait-il qu'à la faible dose d’un cent millième. Et dans un Recueil publié il y a peu de temps, sur les dé- couvertes qui ont eu lieu dans les sciences physiques pendant l'année 1856 , l’auteur de cette Revue, après avoir décrit avec soin le procédé du savant chimiste , s'exprime ainsi: « Ce pro- cédé paraît aussi sensible pour reconnaître le phosphore dans les empoisonnements que l'appareil de Marsch pour déceler l’arsenic. » Cette assertion pouvant faire croire aux personnes qui n'ont pas l'habitude des opérations de chimie légale, et sur- tout aux membres de la magistrature chargés des instructions criminelles, qu'il n’y a point d'empoisonnement par le phos- phore qui ne puisse être démontré par l'expert chimiste , j'ai cru devoir appeler l'attention de l’Académie sur cette question , et lui faire connaître les résultats de quelques expériences que J'ai faites avec l'appareil de Mitscherlich. 336 MÉMOIRES Ce procédé à , en effet, l'avantage sur les moyens employés jusques ici, de pouvoir opérer à vases clos, et de laisser apercevoir , pendant assez longtemps, dans le serpentin trans- parent où s'opère la combustion da phosphore , la lueur phos- phorescente qui caractérise la présence de ce métalloïde , lueur qui n'est souvent que très-passagère lorsqu'on opère à l'air libre et sar de faibles parties de phosphore. Cette manière de procé- der permet aussi, d’après l’auteur, de recueillir en même temps, dans le récipient de cet appareil distillatoire, des glo- bules de phosphore, si ce corps se trouve en suffisante quantité dans les matières à analyser, et l'acide phosphorique qui s’est formé pendant la combustion qui a donné lieu à la lueur phos- phorescente. Mais il ne s'ensuit pas de à que ce procédé soit comparable à celui par l'appareil de Marsch , pour la recherche de l’arsenie à la suite d’un empoisonnement arsenical. Car quoique ces deux toxiques produisent sur nos organes des effets qui ont la plus grande analogie , ils ne se comportent pas l’un et l’autre de la même manière dans l'économie ani- male. Le phosphore ne devient toxique qu'en changeant d’état , c'est-à-dire en passant à l’état d'acide hypophosphorique , ou phosphorique, et en se combinant pour cela avec l'oxygène de l'air qui se trouve mêlé aux matières alimentaires ingérées avec lui, ou qu'il emprunte peut-être aux parties des organes avec lesquelles il se trouve en contact, qu'il enflamme et corrode ; ou bien en passant à l’état d'hydrogène phosphoré , gaz que quelques auteurs regardent comme un des toxiques les plus subtils. L'arsenic, au contraire, une fois ingéré , suivant la quan- tité employée , non-seulement enflamme et corrode les tissus sur lesquels il séjourne , mais il passe dans la circulation par ab- sorption, et est déposé dans certains viscères, où il séjourne assez longtemps pour pouvoir y être retrouvé après son élimi- nation complète de l'appareil digestif. Aussi , il est très-probable que dans lesempoisonnements par DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 337 le phosphore, lorsque les déjections buccales et alvines n'auront pas été recueillies avec soin et mises dans un liquide conserva- teur du phosphore, le procédé de Mitscherlich sera impuissant : les parties enflammées de l'estomac et des intestins ne produi- ront point de phosphorescence , et les réactions que la présence de l'acide phosphoriqueet des phosphates signaleront à l'expert, ne lui permettront pas d'affirmer qn'il y a eu empoisonnement par le phosphore, l'acide phosphorique et les phosphates fai- sant toujours partie de notre économie; Tandis que dans l'empoisonnement par l’arsenic , lors même que les organes digestifs seront dans un état de vacuité com- plet , l'expert, à l’aide de l'appareil de Marsch , retirera du corps de la victime assez de matière toxique, pour qu'il puisse affirmer qu’il y a eu empoisonnement , et mettre sous les yeux de la justice le corps du délit. Après ces observations qui ont eu pour but de faire remar- quer la différence d’utilité des deux procédés pour arriver à la démonstration de ces deux intoxications, je vais rapporter à l’Académie quelques-unes des expériences que j'ai faites avec l'appareil de Mitscherlich. Il y a quelques mois, un homme des environs de Toulouse, en parfaite santé la veille, mourut en quelques heures avec des symptômes assez graves pour que la justice crût devoir inter- venir et ordonner l’autopsie du cadavre. Les médecins qui pro- cédèrent à cette opération, ayant trouvé dans l'estomac et dans une partie des intestins des lésions dont ils ne purent se rendre compte , ils recueillirent alors convenablement ces organes pour qu'ils fussent soumis à une analyse chimique. Je fus chargé par la justice, avec un de mes confrères et mon collaborateur d'examiner ces matières et de rechercher quel au- rail été le poison employé dans le cas où il y aurait eu crime. Ces organes , qui avaient été conservés dans de l'alcool , étaient entièrement vides ; ils présentaient des traces d’une forte inflammation, et l’on remarquait sur la partie inférieure de l'estomac, des taches violacées qui pénétraient assez profon- dément dans les tissus de cet organe. 338 MÉMOIRES Après avoir recherché avec beaucoup de soin et inutilement , dans leur intérieur, au fond des vases qui les avaient contenus et dans le liquide où ils étaient plongés, quelques corps étran- gers qui pussent nous mettre sur la voie du toxique employé, s’il y avait eu intoxication, nous en soumîmes une partie aux expériences propres à nous faire reconnaître la présence des poisons minéraux ; nos investigations furent sans résultat. Ce fut alors que nous employâmes pour la première fois le procédé Mitscherlich qui venait d’être publié ; nous y soumimes une bonne partie des matières qui nous restaient; après plus d’une heure de distillation , n'ayant pas obtenu la moindre trace de phosphorescence, nous ajoutâmes dans la cornue et par son tube supérieur le bout d’une allumette chimique, et peu de temps après, nous vimes se manifester au bec de la cornue et dans le serpentin , la lueur phosphorescente , caractère qui vint nous démontrer la sensibilité du procédé. En présence de pareils résultats, malgré l'acidité de l'inté- rieur de l'estomac , des intestins et du liquide dans lequel ils étaient plongés; lorsque l'alcool que les médecins avaient em- ployé , et dont un échantillon nous avait été remis par la jus- tice , était parfaitement neutre, et les caractères des phosphates que nous avaient fournis les réactifs, nous conclümes qu'il était possible qu'une préparation phosphorée eüt été la cause des désordres pathologiques observés par les médecins experts, mais que, n'ayant pas trouvé des traces de phosphore, nous ne pouvions pas affirmer qu'il y eût eu empoisonnement. Aurions-nous été plus heureux, si, au lieu de nous livrer à la recherche des divers toxiques que pouvaient nous faire soup- conner ces désordres, nous avions soumis immédiatement la totalité des matières qui nous avaient été remises à l’action du procédé de Mitscherlich ? Pour moi , je crois que ce serait l'in- dication à suivre en pareil cas, car cela n’empêcherait pas la recherche des autres poisons dans le résidu et le produit de la distillation. Il résulte des essais que j'ai faits postérieurement à cette ana- lyse, et qu'il serait trop long de rapporter ici, que du phos- DE L’ACADÈMIE DES SCIENCES. 339 phore très-divisé et mêlé à des matières alimentaires, peut être retrouvé plusieurs Jours après leur exposition à l’air , par les méthodes ordinaires , et plus facilement par le procédé de Mits- cherlich. Il en est de même des fragments détachés des bouts d’allu- meltes chimiques. Ces allumettes macérées dans des liquides alimentaires , tels que le lait, le bouillon, le café au lait, le vin, etc., laissent déposer des fragments qui restés à sec pendant plusieurs jours à l'air, brülent encore avec phosphorescence quand on les tou- che avec le bout d’une baguette chaude, ou qu’on les projete sur un corps suffisamment chauffé ; et les liquides séparés par simple décantation de ces fragments, ainsi que ceux où l’on a fait bouillir des allumettes, donnent, même après avoir été abandonnés plusieurs jours au contact de l'air , des luenrs phos- phorescentes par Le procédé Mitscherlich. L'eau dans laquelle est conservé Ie phosphore du commerce, est un poison énergique. Cette eau, légèrement opaque, très- acide et qui ne laisse point apercevoir de traces de phosphore , évaporée par sa simple exposition à l'air ou légèrement chauf- fée , arrivée à un certain degré de concentration et à une tem- pérature assez élevée, s’enflamme sur certains points, comme le feraient des grains de poudre de chasse, et mise dans l’ap- pareil de Mitscherlich, ne donne cependant point lieu à la moindre lueur phosphorescente, et le résidu de sa distillation évaporé à l'air dans une capsule, arrivé à un certain degré de concentration , produit le même phénomène de combustion que nous venons de citer. Ce procédé offre donc à la chimie légale un moyen de re- connaître plus facilement les moindres traces de phosphore contenues dans les matières ingérées , et à l'expert de pouvoir agir sur la totalité des matières qui lui sont confiées pour la recherche des toxiques, sans qu'il soit exposé à les détruire. Mais il restera la question de savoir si La phosphorescence sera toujours le fait de l'emploi du phosphore , ou si, dans quelques cas pathologiques , du phosphore ne se trouverait pas naturelle- 340 MÉMOIRES ment dans l’économie ; et ne pourrait-il pas arriver quelquefois aussi que dans cet appareil, des phosphates, en présence de l’a- cide sulfurique et de la matière organique carbonisée par cet acide , fussent réduits, et donnassent lieu à la phosphores- cence ? Quant à la comparaison du procédé de Mitscherlich avec celui de Marsch, ce serait une grave erreur , je pense , de croire que l’intoxication par le phosphore peut être démontrée aussi faci- lement que celle par l’arsenic avec celui de Marsch. Dans les empoisonnements par le phosphore, il sera toujours très-important , du reste , de conserver les déjections de toute nature, si l’on ne veut pas être exposé à ce que le crime ne puisse pas être constaté. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 3h1 EEE —————_————— LA SATYRE MÉNIPPÉE, ÉTUDE HISTORIQUE ET LITTÈRAIRE; | Par M. FerpiNaxp DELAVIGNE. Quand je vois ces braves formes de s'exprimer si vives et si profondes, je ne dis pas que c’est bien dire, je dis que c’est bien penser. MONTAIGNE. Ex France, la comédie ne meurt jamais, mais parfois son nom change. Protée insaisissable, elle revét toutes les formes comme elle sait prendre tous les tons. Tantôt piquant fabliau , tantôt railleuse épopée comme dans le roman du Renard, ou bien farce populaire comme dans l’Avocat patelin, elle inspire tour à tour la verve sensée mais grossière de Panurge, voue au ridicule Tartufe ou Escobar, se déguise en une sorte d'Ana- charsis persan avee Montesquieu, en attendant que, pamphlet acéré et mortei, elle arme les mains de Voltaire ou de Bcau- marchais. Cette sève comique, qu’on retrouve à tous les âges de notre histoire , aurait-elle disparu à la fin du xvi° siècle ? L’6- poque était triste et dure, je l'avoue. Mais au milieu de ces sanglantes tragédies des guerres civiles et religieuses , le ridi- cule ne manquait pas. Ici, c’est l’hypocrite qui couvre d’un masque de patriotisme son dévouement vénal à Philippe I; là, c'est le Rodomont , le Capitan lâche au combat, hardi au pil- lage; plus loin, c’ést le Fanatisme, la Ruse, l'Ambition ; la Sottise ; enfin, tous ces masques éternels qui figurent dans cette sorte de danse macabre que la mort conduit successivement sur celte terre, dans celte divine comédie de la vie humaine. Patelin, Panurge , Escobar, Tartufe, Bridoison, sont là, disséminés, confondus dans ce tourbillon de vices din térêts, de passions qu’on appelle la Ligue. Mais, qui va les discerner, les fixer sur une toile vivante et indestructible ? 5° $. — TOME 1. 23 342 MÉMOIRES Quel sera leur Rabelais, leur Pascal, leur Molière ? Ce sera la Satrye Ménippée, gaie comme Gargentua, logique, incisive comme les Provinciales , profonde de vérité, admirable de vie comme les comédies de Molière. la compare à une comédie. Ai-je tort ? Si la Ménippée n'était qu'un pamphlet, mériterait-elle un sérieux regard? Ecrite sur le sable mouvant des opinions, des passions humaines, mériterait-elle d'échapper au coup de vent qui les emporte tour à tour sans les anéantir jamais ? Qu'est-ce, en effet, qu’un pamphlet ? Une de ces feuilles volantes, noircies par la colère et la haine, minces de vérité, grosses de mensonges. Nés dans toutes les grandes commotions de l'âme ou des sociétés humai- nes, dans les révolutions politiques et religieuses , ils dispa- raissent avec elles : semblables à ces myriades d'insectes éclos à la chaleur d’un orage, et qui, sous un ciel purifié, rentrent bientôt dans la mort. Quelques formidables bouffonneries de Luther, l’Encomium moriæ d'Erasme, les Obscurorum viro- rum epistolæ de Reucblin et d'Ulrich de Hutten, Îles Tragi- ques de d’Aubigné et sa Confession de Sancy, les Provinciales, quelques pages s de Camille Desmoulins, les rares pamphlets de Paul-Louis Courrier, voilà ce qui survit à tant de passions et à tant de colères. L'art, dans sa majesté paisible et immor- telle, l’art n’a guère à voir avec ces fugitifs délires, ces flammes vite éteintes, avec ces éphémères de la passion humaine. Le flux les apporta, comme disait le grand Corneille, le reflux les remporte. La Ménippée est mieux qu'un pamphlet; mais n'est-elle qu'une satire? La salire marche droit aux ridicules, les dis- cerne, les abstrait. Elle les burine, disait d’Aubigné, avec l'acier de ses vers ; ou bien, les attachant, pour un instant à son pilori, elle les fouette de ses cuisants hémistiches ; mais voilà tout. Ce qu'elle abstrait, elle ne sait pas l’individualiser, en faire quelque chose de vivant, de particulier à la fois et d'universel ; un type, en un mot, qui se grave dans toutes les imaginations et tous les souvenirs. À la comédie seule appar- tient cette puissance. Rassemblant tous ces coups de pinceau DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 343 que disperse le moraliste où le satirique, elle les dirige, les concentre sur un point unique : elle rattache ces traits divers à une seule figure, ces observations détachées à un seul carac- tère. Et alors, si le génie l’inspire, la comédie a fait acte de divine puissance, elle a créé. Par le don de peindre, de saisir les caractères, d’abstraire non-seulement les ridicules, mais de les individualiser; par son pouvoir d'illusion, la Ménippéce entre dans le cadre élargi de la comédie. Et je m'assure que ces Athéniens spirituels, qui applaudissaient si bien ce grand pamphlétaire de l'antiquité qu'on nommait Aristophane , eussent reconnu quelques-uns des traits de la comédie antique dans cette revue vivante des travers et des passions de la Ligue, dans ce panorama varié des Etats généraux de 1593. Plus qu'an pamphlet, mieux qu’une sa- üre, presque une comédie, la Ménippée, à tous ces titres, mérile un souvenir. J'examine donc cette œuvre plus souvent citée qu’attentive- ment lue. Et, pour plus de clarté, je me pose successivement ces trois questions : 1° Quelle fut l’occasion particulière et directe de la Mé- nippée ? 2° Quels sont ses auteurs ? 3° Quel est le plan, l'esprit de l'ouvrage, la cause de son succès politique et littéraire ? La cause de la Ménippée fut le dégoût de la Ligue, l’aversion de l'étranger, le désir de voir régner la paix, l'ordre et le droit avec Henri IV. Son occasion particulière et directe fat la tenue des Etats généraux , convoqués à Paris le 10 février 1593, par le due de Mayenne, et par conséquent sans mandement royal. Il y a déjà cinq ans que dure la Ligue (4) ; ou plutôt , comme di- (1) La Ligue nait en 1576, après le 5° édit de pacification, si favorable aux réformés ; mais comme parti activement révolutionnaire, elle date de la journée des barricades et du meurtre des Guises , c'est-à-dire de 1588. S AL MÉMOIRES saient les contemporains, il y a cinq ans que se déchaînent, dans la chaire ou sur la place publique, ces trompettes desédition, vrais boute-feux , coupables de tant de meurtres commis par toute la Krance. Or, toute crise violente n’a qu'une courte durée : et, d’ailleurs, les trois partis qui se disputent la couronne, de- mandent à grands cris et veulent brusquer le dénouement. Ces trois partis sont : la Maison de Lorraine, la Maison de Bourbon, l'Espagne avec Philippe IL. La Maison de Lorraine est repré- sentée, dans sa branche aînée, par le jeune duc de Guise, pauvre enfant qui naquit quelques jours après l'assassinat du Balafré, et qui ne tire sa force que des souveniss et du grand nom de son père; dans sa branche cadette, par Mayenne, assez bon général , mais corps obèse et esprit irrésolu , qui a l'am- bition du trône, et ne sait faire que la guerre aux bouteilles , disent les pamphlets. Mayenne est le seul qui n’ait point de ca- ractère, d'énergie , d’audace dans cette grande Maison de Lor- raine, qui remplit toute la fin du xvi° siècle de ses prétentions et de ses maibeurs , dans ces Machabées de l'Eglise, dans ces ardents champions du catholicisme, que décime tour à tour le poignard protestant de Poltrot , la hache d’Elisabeth frap- pant Marie Stuart, et enfin le fer de ce roi, presque italien, qui n'a que trop lu Machiavel, le fer de Henri HE qui égorge le Balafré et le Cardinal. La Maison de Bourbon n'a plus qu'un seul prétendant de- puis la mort du cardinal de Bourbon , oncle du roi de Navarre, et couronné sous le nom de Charles X. C’est le hardi monta- gnard , le gai chevalier qui couche sur la dure, expose son armure à tous les coups, son panache blanc à toutes les balles, qui conquiert, pied à pied, son royaume, el à grands coups d'épée comme Les fabuleux compagnons de Roland et d’Artus. IL a pour lui son courage, Sa gaîlé toute française, son bon droit, ses Huguenots bardés de fer, les Catholiques fidèles à la légitimité que commande Biron. Mais il a contre lui le bas peuple, les Seize, les prédicateurs , le légat du Pape; il est hérétique, et hérétique relaps. Enfin, vient Philippe IT, ce sombre et puissant génie, qui du fond de son palais de l’'Es- DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 345 curial, ce cloître en forme de gril qui rappelle l'effroyable supplice de saint Laurent, domine, agite, combat toute l'Eu- rope. Malheur à ceux qu’il soupçonne ; à son fils Don Carlos, à son frère Don Juan qu'il fait tous deux empoisonner , au comte d'Egmont et de Horn qu'il fait décapiter, au prince d'Orange qu'il fait assassiner ! Mais, ce que hait surtout Phi- lippe IL, c’est l'hérésie, et c'est à l'écraser qu'il use sa vie, qu'il consume ses prodigieux efforts. L’exil refoule les Maures au delà de son empire. Les büchers de l'Inquisition, les cris des mourants dans ces horribles fêtes de l'auto-da-fé, frappent l'Espagne d’une dévote stupeur. Contre la protestante Angle- terre il déchaîne son invincible armada , que la tempête lui renvoie brisée en mille pièces, tandis que son duc d'Albe fait passer les Pays-Bas par le fer et par le feu. Tout lui échappe à cet impitoyable fils de Charles-Quint, au chef de cette grande révolution catholique, qui eut à lutter, dans lAngle- terre, contre Elisabeth ; dans le Nord, contre Gustave Wasa ; dans l'Allemagne, contre l'aristocratie fédérative de la noblesse. Tout échappe à sa rage convulsive, à ses mains avides. Mais il reste la France; et quelle proie ! Ses ambassadeurs soufflent partout la discorde, aiguisent les poignards de la Saint- Barthélemi, vont remercier Dieu pour Henri I assassiné ! Son or, il le verse à pleines mains. Ses soldats gardent Paris , com- battent, meurent pour la Ligue. Et aussi, quet beau rêve ! Un instant, le fils de Charles-Quint peut croire que, plus heu- reux que son père , il ne tiendra pas seulement le roi de France, mais la France tout entière prisonnière ; que les Pyrénées s’a- baisseront sous sa monarchie puissante; que, rattachée à ses possessions lointaines des Pays-Bas, la France ne sera plus qu’un enclave de son immense empire. Et en effet, ii s’en fallut de bien peu que la France , qui comptait déjà un roi anglais dans ses annales, y inserivit encore le nom d’un roi espagnol. Le peuple était pour lui; les Seize l’appelaient à grands cris ; les prédica- leurs, out espagnolisés voyaient en lui l'oint du Seigneur. Et si dans sa morgue, dans son ambition démesurée, il n’eût pas d'abord demandé pour lui le trône, puis ne se füt pas obstiné 346 MÉMOIRES pour faire sa fille l'infante, royne propriélaire de France, s'il eût consenti plutôt à confondre les droits de l'Espagne ct de la Maison de Lorraine en proposant le mariage de l’infante et du duc de Guise, peut-être Henri IV n’eût jamais régné. Heureusement le patriotisme n'est pas éteint dans tous les cœurs. Dans la ruine de cette vaste association provinciale et catholi- que, de ce gouvernement par les municipalités, par les con- fréries , par les congrégations ; au milieu de ce pêle-mêle d’in- térêts égoïstes et brouillons, grandit peu à peu le tiers-partt, ce qu'on appelle le parti politique , le parti des parlementaires, de la haute bourgooisie, des Molé, des de Thou , des Pasquier, des Pithou, des Séguier , des du Vair, de tous les auteurs de la Ménippée. Dans ces Etats de 1593, qui ont à leur disposition une couronne, qui peuvent choisir entre les droits de l’hérédité ou le pouvoir d’une élection ; dans ces Etats, dis-je, malgré les al- tüières prétentions des Féria, des Ybarra, des Taxis, c’est ce parti des politiques qui domine et triomphe; ce sont eux qui rejettent les Lorrains; qui, à la conférence de Suresne , con- sentent à s’aboucher avec les envoyés de Henri IV, le reconnais- sant ainsi implicilement. C'est le Parlemeut, enfin, qui, sur la proposition de du Vair, sur l’insistance du procureur général Edouard Molé et du président Lemaistre, rend, le 28 juin 4593, ce glorieux, ce national arrêt qui consacre la loi salique, et déclare que la couronne de France ne peut appar- tenir qu'à un prince français; anéantissant ainsi tous ces droits que Philippe IL prétendait tenir de sa troisième femme , Elisa- beth de France, fille de Henri Il et de Catherine de Médicis (1). Bientôt après, le 25 juillet 4593 , Henri IV abjure à Saint- Denis ; l’auile sainte consacre son front: il entre dans Paris, que lui remet le gouverneur Cossé-Brissac. Mayenne est en faite ; et quand la garnison espagnole défile devant le Béarnais, (1) Faisant acte de souveraineté à la face des Etats et contre eux, ils ren- dirent une sentence qui déclarait nul tout acte fait ou à faire pour l'éta- blissement de princes ou princesses étrangers, et protestèrent qu'ils mourraient Lous plutôt que de rompre ou de changer cet arrèt. A. Thierry, Hist. du tiers Etat, ©. v1, p. 124. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 347 à la porte Saint-Denis, il peut leur dire : « Adieu, Messieurs, et n’y revenez plus. » Etils n'y reviendront de longtemps, ou plutôt ils n’y reviendront jamais : car en France, on se re- lève d’une défaite, on se fait pardonner une imprudence, une faute, un vice même , mais On ne se guérit pas du ridicule; et le ridicule vient d’être versé à pleines mains sur ces étrangers ambitieux , sur ce gouvernement de populace, sur Mayenne, sur la Ligue, par ces mille caricatures, par ces mille pamphlets, qui, depuis la convocation des Etats, s’affichant dans la rue, se passant sous le manteau , frayaient ainsi sourdement et effi- cacement la voie au Béarnais : pamphiets que domine de toute son incomparable puissance d'esprit, de verve, de bon sens, la Satyre Ménippée. Ceci nous amène à notre seconde question : Quels sont les auteurs de la Ménippée ? 11. Celui qui en eut la première idée, qui en traça le cadre, le plan général , fut Pierre Leroy , un de ces chanoines qui, soit dit en passant et sans vouloir faire tort au Lutrin, ne s'en- graissaient pas encore de cette longue et sainte oisiveté tant raillée par Boileau. Du reste, nous ne le connaissons absolument que par un mot jeté en passant par l'historien de Thou : Pr probus et à factione summè alienus; c'est-à-dire, homme de bien, profondément ennemi des factions, Ame ferme , hon- nête et modeste, Pierre Leroy n’écrivit que pour la justice et pour la France, et, une fois sa tâche accomplie, il rentra dans le silence, laissant d’autres se disputer les fruits d’une victoire que son esprit avait provoquée. Pierre Leroy se réunissait , toutes les semaines , chez le conseiller clerc au Parlement de Paris , Gillot, dans sa maison du quai des Orfèvres , avec Rapin, prévôt de la connétablie, avec Passerat, professeur d’éloquence au Collége de France, avec le jurisconsulte Pithou , avec Flo- rent Chrestien , précepteur de Henri IV. C'était une sorte d’Aca- démie au petit pied , de cercle littéraire à la facon de celui que 348 MÉMOIRES formera plus tard Malherbe dans sa petite chambre, sinon qu'il y aura moins d'égalité et de gaîté. Tandis qu’autour d'eux commençait à gronder le tumaulte populaire, que le soir on entendait tendre les chaînes, passer la garde bourgeoise, ou retentir les proclamations lugubres des crieurs annonçant l’as- sassinat des Guises, nos bons amis, souvent, dans un gai repas, comme l’attestent de charmants vers latins de Rapin, mettaient en commun leur esprit, leur science profonde, leur gaîté caus- tique, et surtout leur désir de voir revenir l'ordre et la paix. La Ligue, dans sa fureur toujours croissante, emporta bientôt ces douces réunions. Bussi-Leclerc jeta Gillot à la Bastille avec Achille de Harlay. — Rapin, pauvre et paresseux comme un poëte, lui qui ne demandait au ciel qu'un peu d'ombre et de silence, qui s'écriait à la façon d'Horace : Et moi je vis de mon petit domaine, A peu de train, sans pension du roi, Faisant des vers, et ne me donnant peine De ce qu'on dit de moi. Rapin est obligé de quitter son Paris, ses amis, sa charge de prévôt dont on le dépouille , ses neuf enfants qu'on lui con- serve, et qu'il ne sait comment nourrir : sa muse seule lui est fidèle. Aussi s’indigne-til en bons hexamètres latins contre ces maudits ligueurs, contre ces brigands d'Espagne ; tandis qu'il se console à grands coups d'épée , en combattant non pas cette fois comme Horace, mais vaillamment et en tenant bien son bouclier, dans les plaines d'Ivry , par exemple, où son courage fat signalé par le maréchal d’Aumont. Pour Passerat , l'ami de Xonsard et de Muret, le savant successeur de Ramus, l'admira- teur et le commentateur de Pantagruel, il n’a plus, au Collége de France, ni auditeurs, ni appointements. Il descend de sa chaire, et dans ce loisir forcé que lui fait la Ligue, il relit plus de quarante fois le théâtre de Plaute. Ne nous en plaignons pas : la Satyre Ménippée n’y perdra rien, ni la Ligue surtout qu'il affubla de tant de quatrains populaires. Passerat était excellent poële. C'est lui qui, avec Rapin, a composé presque tous les DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 349 vers semés dans la Ménippée. Sans citer ici son petit chef- d'œuvre de la métamorphose d’un homme en oiseau , n'est-ce pas Passerat qui soupira cette chanson , empreinte à la fois dela vivacité d'Anacréon et de la grâce rêveuse d'Horace : ..... Viens, belle, viens te pourmener Dans ce bocage ; Entends les oiseaux jargonner De leur ramage. Mais écoute comme sur tous Le rossignol est le plus doux Sans qu'il se lasse. Oublions tout deuil, tout ennui, Pour nous réjouir comme lui ; Le temps se passe. Ce vieillard, contraire aux amants, a) Des ailes porte, Et, en fuyant, nos meilleurs ans Bien loin emporte. Quand ridée un jour tu seras , Mélancolique, tu diras : J'étais peu sage, Qui n’usais point de la beauté , Que sitôt le temps a ôté De mon visage. Je cite ces vers, pour leur contraste avec cette verve mali- cieuse qui anime ses chansons de la Ménippée , comme celle sur la fuite du duc d’Aumale à la journée de Senlis. Quant à Florent Chrestien, ce premier précepteur du Béarnais , il alla suivre la fortune un peu vagabonde de son élève. Et Pierre Pithou , ce digne successeur des Cujas (1) et des Dumoulin , ce citoyen intrépide qui eut le droit de prononcer à son lit de mort ces belles paroles que répétera son testament : Patriam unicè dilexi ; Pierre Pithou, renfermé à Paris pendant la Ligue, (1) Nicolas Lefevre , depuis précepteur de Louis XIII, a pu dire de lui avec justesse : Cujacius discipulo præripuit ne primus jurisconsullus es- sel ; ille præceptori ne solus. 350 MÉMOIRES chercha à oublier sa gène et son indignation contre l'Espagnol envahisseur , en écrivant des traités gallicans sur le Droit cano- nique , en publiant son édition des Capitulaires, en se mon- trant savant illustre et universel dans ce siècle qu’on peut appeler le siècle de toutes les éruditions. A quelle époque tous nos amis captifs ou exilés se retrou- vèrent-ils à Paris? C’est ce qu’il est difficile de préciser ; tout, dans la Satyre Ménippée , fut d’abord enveloppé de mystère. Au xvne siècle seulement, on en connut les auteurs , et encore, sans pouvoir bien exactement assigner et délimiter la part de chacun. La première publication, par morceaux détachés et cir- culant sous le manteau , remonte au plus tôt vers le milieu de l’année 1593, pendant celte conférence de Suresne , où les en- voyés de Henri IV et les députés des Etats généraux préparaient les voies d’une réconciliation si désirée entre le peuple et son roi. La Ligue , qui jusqu'alors avait eu le monopole de toutes les insultes et de toutes les violences, de toutes les caricatures et de tous les pamphlets, se voyait à son tour attaquée par les mêmes armes. La caricature et le pamphlet, voilà, du reste, l'arme favorite du xvr° siècle. La vérité sous forme bouffonne , le poison caché sous la plaisanterie grossière ou le rire cffréné, le bon sens affectant à dessein la joie, l'ivresse, et jusqu'aux mascarades du carnaval pour se faire accepter d’une foule mo- queuse : voilà un des secrets de la puissance de Luther, de Ra- belais, de tous ces incisifs railleurs de la Hollande et de la Flandre , dont les auteurs de la Ménippée se firent les hardis continuateurs. Indignés contre toutes ces folies théocratiques et sacerdotales , contre ces saturnales de la populace, contre ces tyrannies de Lorrains ou d'Espagnols ; bons catholiques , mais catholiques gallicans ; bons Francais, mais qui ne veulent obéir qu’au roi de France; animés à la fois par l'amour du bien public, et, ce qui ne gâte rien, par de bonnes rancunes per- sonnelles , tous mettent en commun esprit, haine, verve et bon sens. Tous veulent , comme ils le disent eux-mêmes , « piquer ceux qui languissent encore sous le joug de la tyrannie ; car il faudra qu'ils soient parfaitement ladres clavelés, s'ils ne se sen- DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 391 tent ce poignant aiguillon , et ne jettent pour le moins quelque soupir de leur mourante liberté (1). » II. Entrons un instant dans le vieux Paris. Pénétrons dans ces rues tortueuses , où circulent encore quelques bourgeois attar- dés. Le matin , ils ont entendu la messe à Saint-Côme; ils ont vu le curé la dire en cuirasse; et en pleine église, baptiser un nouveau-né sans se donner la peine d’ôter son armure. Le soir, ils ont entendu peut-être le cordelier et prédicateur Garin. Et ceux d’entre eux que le zèle de l’Union n’embrase pas , qui du manteau de religion n’ont pas fait cape à l’espagnole, qui se- raient peut-être disposés , s'ils l’osaient , à ceindre écharpes blanches et à appeler le Béarnais roi de France , ceux-là se re- mémorent en tremblant ce bourgeois fanatique qui se dressait au pied de la chaire. C’est un gantier, l’un des Seize, celui qu'on appelle le chapelain de Garin : terrible chapelain qui, à chaque sermon , est là, l’œil et la main sur sa grande flamberge à deux gardes , tout prêt à entrer en conférences religieuses avec ces damnés politiques , la raison au poing et la main à leur gorge. Paris , du reste , est bien gardé ; partout les chaî- nes sont tendues ; les quarteniers , les gardes de nuit font leurs rondes à cheval. Lances , arquebuses , maniées par des mains bourgcoises ou bénies , brillent de tous côtés. Partout cireulent gardes espagnoles , wallonnes. Les Wallons portent hoquetons noirs , (out parsemés de croix de Lorraine rouges (2). Les officiers espagnols , haut de chausses à demi détachés , fraises à la confusion , dagues au poing , se filent la moustache en con- tenance joyeuse ; car Paris est bien à eux ; le Béarnais restera aux portes, et son droit divin, ils l’espèrent du moins, ne saura —————_—_—————— (1) Sat. Ménippée. — Avis de l’imprimeur, en tête des premières édi- lions. (>) Sat. Ménippée, pag. 17; — et Nouvelles des régions de la Lune, pag. 352. 352 MÉMOIRES bientôt plus que répondre à leur droit canon. Peu à peu le bruit s'éteint, plus de lumières aux fenêtres, plus de bourgeois à leurs parloirs ; partout la nuit, le silence. C'est à peine s’il est troublé par ces quatre ou cinq bourgeois qui se glissent discrètement le long des rives désertes de la Seine, dans une vieille maison du quai des Orfèvres, chez le conseiller clerc Gillot. Et qu'est-ce encore que ces bourgeois? Un ancien prévôt de la Connétablie, un professeur au Collége de France que la Ligue a laissé sans chaire et sans argent, un jurisconsulte sans clients, un chanoine de la sainte Chapelle, un ancien précep- teur du Béarnais. Est-ce là de quoi vous inquiéter , Philippe U, Mayenne , Clément VIT, et vous, gouvernement de la Ligue, municipalités puissantes et révoltées? Hôtes de l'Escurial et du Vatican , auriez-vous à compter avec les hôtes de cette réunion obscure ? Oui, car ces hôtes s'appellent Rapin, Passerat, Pi- thou, Leroy, Florent Chrestien ; car sous leurs manteaux noirs, ces bons bourgeois cachent mieux que pistolets de lourd calibre. Ils cachent une de ces feuilles volantes.qu'ils ont composée le jour, qu'ils vont discuter en commun le soir. Et demain, cette feuille colportée par toutes les mains , affichée à tous les carre- fours, circulant au souffle de mille passions à travers la foule, secouera dans tous les cœurs la haine de l'étranger , l'amour du Béarnais , le désir d’être catholiques, mais catholiques galli- cans , le désir d’être gouvernés par un roi , mais par le vrai roi de France. D'ailleurs , en France, rien ne prévaut contre le hon sens , quand il est aiguisé par l'esprit. Le bon sens tout seul , c'est le bois effilé, mais inerte. À ce bois , ajoutez une plume, et vous avez la flèche qui siffle , vole , perce de loin, la flèche de Voltaire , de Beaumarchais, de Pascal, de la Satyre Ménip- née , la flèche dont parle le poëte antique, qui, une fois à vos flancs , ne s’en détache plus , Aœret lateri lethalis arundo. Et maintenant , d’où vient ce nom de Ménippée ; quel est son plan ; de quelles parties se compose-t-elle ? Lucien nous a peint au vif, sous son manteau sali , avec ses cheveux hérissés , sa longue barbe et surtout sa caustique iro- nie, ce Ménippe , esclave phénicien qui, à Thèbes, devint ci- DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 359 toyen et riche à force d’usures, et mourut quand il se vit ruiné, Deux siècles avant Lucien, Varron , sous Auguste, avait composé de mordantes satires où la prose se mélait aux vers; et sans traduire Ménippe , l’imitant peut-être ou plutôt s’inspi- rant de cet esprit proverbialement railleur , il leur donna par reconnaissance le nom de Ménippées (1). Les débris trop rares de ces Ménippées varroniennes avaient été recueillis, en 156#, par Robert Etienne, dans ses Fragments des vieux poëtes latins : et expliqués par le professeur Passerat , ils lui donnè- rent sans doute l’idée du titre devenu si fameux. — Quant au plan , à proprement parler , il n’y en a pas. Ce sont des mor- ceaux produits et publiés à des intervalles irréguliers, selon les besoins de la cause. I! y a unité profonde , essentielle , organi- que , mais seulement dans l'inspiration générale , dans la mar- che commune vers un but unique. Et il est plus aisé de compa- rer celle satire à une galerie de tableaux représentant les phases diverses d’un même sujet, qu'aux scènes bien suivies , bien régulières d’une même comédie. — Enfin , de quelles parties se compose-t-elle ? — En oubliant toute cette pluie d’épigram- mes , soit latines , soit francaises , tous ces petits corps détachés qui entretiennent escarmouche dans l'intervalle de la bataille, nous trouvons dans la Ménippée une sorte de préface composée de quatre pièces distinctes : la vertu du Catholicon , l'abrégé des Estats de Paris, les pièces de tapisseries dont la salle fut tendue, l'ordre tenu pour les séances; et enfin, sept ha- rangues prononcées successivement par les acteurs les plus saillants de la Ligue , par le duc de Mayenne, le légat du Pape, le cardinal de Pelvé, monsieur de Lyon, monsieur le recteur Roze, le sieur de Rieux pour la noblesse de l'Union , et enfin, monsieur d'Aubray pour le tiers état. Réunissons les quatre pièces de la préface par une rapide analyse , et entrons ainsi dans la salle , avant que les acteurs montent sur le théâtre. Les chefs de la Ligne ont convoqué , au 10 février 1593, les (1) Cicer, Quest. Acad. 1. 3. — Quintilien, X, 1. — Aulu-Gelle , IL, 18. 354 MÉMOIRES Etats généraux. On fait les préparatifs ct eschaffauts au Louvre, ancien temple et habitacle des roys de France. En la cour du- dit Louvre , deux charlatans, Pun Lorrain, l’autre Espagnol , en attendant la réunion des députés , jouent de passe-passe tout le long du jour devant tous ceux qui vouloyent les aller veoir sans rien payer. Tous deux vendent la même drogue, le Catho- licon composé. Mais le pauvre charlatan lorrain, affublé d’un caban tout pelé, se morfond devant son petit escaheau couvert d’une vieille serviette , où se voit d’un côté sa üirelire toujours vide, et de l’autre, sa boîte de Catholicon toujours pleine. Com- ment débiterait-il ce Catholicon éventé, auquel manque l'in- grédient le plus nécessaire qui est l'or. Tandis qu’à ses côtés, au son de la musique , faisant reluire ses parchemins en plu- sieurs langues, avec titres en lettres d'or, le Fontanarose espagnol annonce à tous , qu’à force de manier , remuer, alam- biquer , calciner ct sublimer son Catholicon , il en a composé un électuaire souverain , qui surpasse toute pierre philosophale. Et en effet, écoutez quelques-unes de ses merveilleuses proprié- tés : « Que ce lieutenant ait du Catholicon en ses enseignes et cornettes… et, bien qu'il ruyne, ravage, usurpe , rassacre el saccage tout, qu'il emporte, ravisse , brusle et mette tout en désert , le peuple du pays dira: ce sont de nos gens , ce sont de bons catholiques; ils le font pour la paix et pour nostre mère saincte Eglise. — Soyez reconnu pour pensionnaire d'Espagne, monopolez , trahissez, changez , vendez, trocquez , désunissez les princes, pourvu qu'ayez un grain de Catholicon en la bou- che, l'on vous embrassera... — Que l'Espagne mette le pied sur la gorge de l'honneur de la France , que les Lorrains s'efforcent de voler le légitime héritage aux princes de sang royal... ser- vez-vous là-dessus de Catholicon, vous verrez qu'on s’amusera à toat plutôt qu’à travailler à rames et à voiles pour faire lascher prise aux tyrans malois qui tremblent de peur. » Tous ces beaux discours sont interrompus par l’arrivée des députés attendus de toutes parts. Mais avant de prendre possession du Louvre et de commencer leur saint œuvre, ils veulent une procession. Le recteur de l'Université, Roze, en fait dresser l'appareil et les DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES, 399 personnages. Lui-même, l’épée au côté et une pertuisane sur l'épaule , entouré de moynetons et novices , des curés Hamil- ton , Bouché , Guincestre, de‘toute sorte de gendarmes scolas- tiques , de Capucins aux arquebuses rouillées, de Feuillants boiteux qui , armés tout à crud , la hache d'armes à la cein- ture , le bréviaire pendu par derrière, faisaient Je moulinet devant les dames , il s’avance avec cet imposant cortége, en belle ordonnance catholique , apostolique et romaine. Tout Pa- ris suil, Eschevins, Parlements, Gardes italiennes, espagnoles, wallones , ct jusqu'aux Seize qui sont maintenant réduits au nombre des Apôtres , car Mayenne en a fait pendre quatre. La Chapelle de Baurbon s'ouvre. Le recteur se dépouillant de ses lourdes armures , s'élance en chaire et r'atiocine avec tant de véhémence en l'honneur du roi catholique et des princes lor- rains, que, divin pouvoir de l'éloquence ! son régiment de moynes et de pédants tressaille de joie et veut de ce pas attaquer les forts de Gournay et de Saint-Denis. Mais on les relicnt avec un peu d’eau bénite, comme on apaise les mouches et les frelons avec un peu de poussière. Et alors, M. le Cathe- drant achève par cette conclusion : Beali pauperes spiritu. Pais on se lève ; les députés accompagnent M. le Lieutenant au Louvre. Les manants se retirent en confusion , qui cà , qui là , chacun cheux sor. Nous pénétrons enfin, avec les cent vingt-huit députés, dans la salle des Estats. Et d'abord, ressemblance singulière, c'est la même décoration qu'aux Estats de Troyes, en 1420, sous Charles VI, Estats tenus à l'instance et poursuite du roi d’An- gleterre ct du duc de Bourgogne , pour faire dégrader et excom- munier Charles VI, dauphin et vrai héritier de la couronne de France. — On nous a reproché longtemps de négliger notre histoire, d'ignorer notre passé. Race mobile, spirituelle, in- soucieuse , nous vivions au jour le jour , dépensant notre esprit en gaies chansons, notre courage en périlleux tournois, en duels étourdis, notre raison en la science du subtil amour : pauvre science qui, toute meurtrie des coups de pied de Villon, de Rabelais, de Pierre Faifeu, de Brantome , d'Eutrapel, de 356 MÉMOIRES tous les matois gaudisseurs du xvi° siècle, est venue mourir aux cabinets bleus de l'hôtel de Rambouillet. Contre ce reproche sou- vent mérité d'irréflexion ou d’ignorance historique , la Ménippée proteste pour sa part. Cette science de l’honneste amitié, comme dira d'Urfé, nos amis l’ignorent. Mais l’histoire de leur pays, mais la tradition des luttes, des douleurs de leurs pères , mais cette âme de la France passée, ils la portent vivante dans leur âme: et voyez comme cette flamme immortelle jaillit dans leurs écrits en héroïques souvenirs. Bras puissants de la France, qui avezsecoué jadis et lancé loin de notre sol ce roi d'Angleterre et ce duc de Bourgogne, serez-vous maintenant sans force contre le Lorrain Mayenne , contre l'Espagnol Philippe Il, contre cette foule sans nom , sans raison , sans vergogne, qui les entoure, les appuie, et dont je retrouve l’image dans ces Maillotins sous Charles VI, dans leurs brigandages sous les capitaines Simonnel, Caboche et Jacques Aubriot, roi des bouchers ct escorcheurs : brigandages que me retracent de toutes parts les beaux dessins de ces tapisseries de haute lice qui ornent la salle des Estats ? Quelle histoire accusatrice! Quel mane , thecel et phares, pour ces odieux usurpateurs ! S'ils lèvent la tête, ils voient ici l'his- toire d’Absalon qui barricada son père , et le chassa de Jéru- salem. Là , c'est un moine débauché, qui frappe proditoirement d’un couteau un roi de France et de Pologne. Ce moine porte sur son front, non pas son nom de Jacques Clément , mais l’a- nagramme de son nom : C'est l'enfer qui m’a créé. Le duc d’Aumale, ce fugitif de la bataille de Senlis, peut voir tout au long la description de ses hauts faits dans cette mémorable journée. Si ses pieds agiles lui ont sauvé toute bles- sure , iln'échappepas, du moins, à ces quatrains acérés que lui décoche Passerat ; quatrains qu'il peut lire Sur les tapisseries , comme il peut les entendre sur toutes les bouches , et dont je citcrai quelques piquants échantillons : À chacun nature donne Des pieds pour le secourir : DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 357 Les pieds sauvent la personne ; Il n’est que de bien courir. nm se CREER REC] Ce vaillant prince d’Aumale , Pour avoir fort bien couru , Quoy qu'il ait perdu sa male, N'a pas la mort encouru. Souvent celuy qui demeure , Est cause de son meschef ; Celuy qui fuit de bonne heure , Peut combattre derechef, Il vaut mieux des pieds combattre En fendant l'air et le vent, Que se faire occire ou battre Pour n'avoir pris le devant. ! Qui a de l'honneur envie, Ne doit pourtant en mourir : Où il y va de la vie, Il n’est que de bien courir. Cependant, la préface s'achève, et nous voici à la dernière partie, à l’ordre tenu pour les séances. Le héraut d'armes appelle successivement tous les principaux personnages, et à travers un feu roulant de brocards , d’allusions, de parodies bouffonnes , chacun des députés s’assied sur ces bancs couverts de tapis parsemés de croiseltes de Lorraine noires et rouges. Ils prennent place à raison de leurs pensions. Et maintenant que le théâtre de la comédie est bien connu, que toutes les tapis- series sont dépeintes , que tous les personnages sont rangés, le monologue commence. Et c'est monsieur le lieutenant Mayenne qui prononce la première de ces sept merveilleuses harangues, qui sont le véritable fond , le corps de la Ménippée, et où se dépense toute la gaîté, toute la verve, toute l’éloquence de ses auteurs. À celte tribune comique, où ils monteront successive- 5° 8. — TOME I. 24 358 MÉMOIRES ment, chacun des sept orateurs , poussé par je ne sais quelle puissance, révèle naïvement, et comme à son insu , tous les se- crets , tous les faux-fuyants, toutes les cupidités, tous les dessous de cartes de sa conscience. Il semble que , comme dans les Mille et une Nuits, ils portent sur eux un talisman enchanté qui les force à ouvrir leur âme, à éclairer toutes ses ténèbres, à nous la montrer visible à l'œil. Et il y a tant d'art que, peu à peu, ce qui devrait être une choquante invraisemblance, devient, au contraire, une inspiration charmante, un entraînement ir- résistible, une confidence railleuse à laquelle nous nous asso- cions malgré nous, tant l’auteur a su mettre son parterre d'u- nisson et comme d'accord avec lui pour railler ses acteurs. Je ne tenterai pas ici une impossible et monotone analyse. Et d’ailleurs, que détacher dans ce tissu serré de patriotique éloquence ? Que choisir sous cette pluie de brocards salés et de gausseries saupoudrées de bons mots ? Jugeons d'ensemble, et disons seulement : Cette comédie de caractère qu'entrevoit Pascal et que Molière réalise, se trouve déjà en germe dans la Ménippée. A travers tout ce vin qui a encore un peu:sa lie; à travers tout ce flot de plaisanterie, parfois un peu épaisse, un peu marquée comme toute plaisanterie qui s'adresse au peuple, où trouver un crayon plus fin et plus sûr, un pinceau plus énergique pour nous montrer l'ambition unie à la faiblesse, à l'irrésolution , à la défaillance d'âme dans Mayenne, le pateli- nage dévot dans le légat et dans le cardinal de Pelevé, le pé- dantisme fougueux dans Roze, le rodomont, le fendeur de na- seaux , le mangeur de Qi A D dans le discours du sieur se Rieux , sorte de miles gloriosus, où Passerat s’est si bien souvenu de son Plaute qu il avait lu quarante fois. Et, enfin , quel plus généreux bon sens, quelle plus mâle éloquence que celle du lieutenant d'Aubray ! Jusqu’alors nous avons ri de tous ces brocards, nous nous sommes moqués de ces silhouettes fagitives, dignes du pinceau des Callot et des Hogarth , et qui nous ont successivement apparu à travers tout ce pandémo- pium de la Ligue. Qui sait si Mayenne, si Rose, si le légat n'avaient pas eux-mêmes ri de cette comédie aux premiers actes DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 359 si bouffons ? Mais, quand arrive cette moralité suprême et indignée, ce chœur de tous les honnêtes gens qui se résume et s’incarne, en quelque sorte , dans d’Aubray, quel effroi ! quelle déroute ! quel sauve qui peut général sous le fouet à triple nœud de ce mordant, incisif, inexorable orateur ! — Partez donc, et ne revenez plus, comme disait gaîment Henri IV aux garnisaires de Philippe I; partez vous tous archicatholiques , princes Lorrains et supercatholiques Espagnols, gendarmes de l'Eglise militante, vaillants coqueplumets qui couvrez le pavé de Paris, conseillers qui avez un grain de Catholicon sur la langue ; vous tous, enfin, qui, changeant votre couverture française en cape à l’espagnole, nous rongez jusqu'aux os et curez notre bourse jusqu'au fond. Fanatiques qui, au nom du Christ, pillez ou tuez vos frères, retournez à l'Evangile et ap- prenez-y la première de toutes les charités, c'est-à-dire, la tolérance. Français qui voulez nous espagnoliser, nous mettre sous les pieds du pape ou de Mayenne, tournez-vous vers le Béarnais, vers ce panache blanc qui brille à Arques et à Ivry : c'est là qu'est l’honneur ct le drapeau de la France. Vraie en religion , vraie en politique, la Ménippée n’est pas moins vraie dans sa forme littéraire. Elle a le parler francais, comme elle en a l'esprit et le cœur. Je retrouve là notre vieille langue, ner- veuse, hardie, pittoresque, un peu fruste peut-être, et d’une franchise qui sent parfois son Villon et son Rabelais. Mais qu importe? la Fontaine et Molière ne s’en seraient pas fàchés ; et n'est-ce pas ici le lieu de dire avec le premier auteur des M6 nippées , avec le savant Varron : « Nos aïcux et nos arrierc-aïeux, quoique leurs paroles sentissent l'oignon et l'ail, avaient la no- blesse du cœur. » Cette noblesse de cœur, que relève tant d’ironie , de verve et de logiqne, nous explique bien le succès littéraire ; mais son succès politique , la Ménippée le dut surtout à son merveilleux à-propos. L’à-propos en politique, comme on l'a dit spirituelle- ment, est la rencontre que les passions font de la justice: car elles la rencontrent parfois(1). Seulement, entre la passion et la ———_—_—_———_——— 1) St Marc Girardin, Essais de Littérature et de Morale, 1. 17, p, 420, » P: 429 360 _ MÉMOIRES justice , les entrevues sont courtes. La Satyre Ménippée fut une de ces courtes entrevues. Bien mieux, ce fut la première ba- taille, la première victoire remportée par l'opinion publique. Soixante ans plus tard, Pascal, dans son immortel pamphlet, appellera cette opinion publique /a Reine du monde. Mais, con- venons-en, en France surtout, c'était une reine singulière- ment modeste et humiliée. Qu'est-ce que le tiers état, dira un jour Sieyes ? Tout et rien. Tout, le lendemain de la révolution ; mais, rien, sinon la veille, du moins deux cents ans avant. Comme le chœur du drame antique, il avait bien le droit de jeter ses plaintes, ses réflexions, ses railleries même, sur les événements dont il était le spectateur ; mais il n'avait guère le droit d'en changer la marche. À ces puissances qui, depuis tant de siècles, occupent sans partage le devant de la scène et le maniement des choses humaines , il est temps de faire con- naître une nouvelle puissance, l’opinion, c’est-à-dire, la vo- lonté de tous manifestée par l'esprit et le bon sens de quelques- uns. Désormais, le dica des armées ne sera plus seulement du côté des gros bataillons, il sera aussi du côté de la vérité et de la justice, quand la justice et la vérité trouveront, comme dans la Ménippée, de courageux, de spirituels, d’éloquents défen- seurs. Animée du bon sens d'Erasme, de la tolérance de l'Hôpital, de la formidable gaîté de Rabelais, la Ménippée termine bien le xvre siècle : elle est son dernier sourire, sa dernière plaisan- terie, sa dernière comédie; car, maintenant, le génie comi- que, pendant longtemps, ne visitera plus la France. Il est en Espagne avec Cervantes, en Angleterre avec Shakspeare; et la - France, un demi-siècle encore, attendra son Molière. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES, 361 étain ai à DE L'EMPLOI DE L'EAU COMME ORGANE DE TRANSMISSION ET DE MODIFICATION DE MOUVEMENT A DE GRANDES DISTANCES ; Par M. GUIBAL. Les forces motrices , auxquelles l'Industrie emprunte ea gé- néral le travail mécanique, peuvent se diviser en deux espèces bien distinctes : celles qui, par des procédés différents , s’ob- tiennent en tous lieux , et celles que la nature produit directe- ment sur des points particuliers. Les forces de la première espèce ( à l'exception des moteurs animés}, résultent de la production de la vapeur d'eau par la chaleur. Célles de la deuxième, sont fournies par les chutes d'eau. Ainsi : machines à vapeur et chutes d’eau résument à peu près ces deux catégories. Il est à remarquer que, dans beaucoup de localités, l'un de ces éléments de travail domine presque à l'exclusion de l’autre. Chez nous, par exemple, et surtout à mesure qu'on approche des Pyrénées, les chutes d’eau abondent » et, par suite de cette générosité de la nature, et sans doute aussi à cause de la cherté du combustible minéral, qu’il faut aller chercher fort loin, l’on ne voit que peu de machines à vapeur. Mais celte force qui nous est donnée gratuitement, et souvent à profusion sur des points fixes, ou à peu près, ne peut pas toujours être utilisée ; la majeure partie est perdue; nous di- rions même la presque totalité, si nous suivions cet observateur 362 MÉMOIRES spirituel qui a calculé un jour, et écrit quelque part l'énorme travail développé sans cesse par la cascade du lac d’Ov, et que ce dernier absorbe sans effet. Ce qui fait que tant de forces demeurent sans emploi, c'est qu’il est rare que l'industrie puisse s'éloigner des centres de production et de consommation ; et puis, le plus souvent, la déviation des cours d’eau , les ouvrages qui servent à créer des chutes, sont trop coûteux ; ou bien, enfin, là où se trouvent des chutes d’eau déjà existantes , les abords ne permettent pas de placer des usines ; une assez faible distance entre la chute et le point où l’on pourrait s'établir est quelquefois un obstacle qu'on ne surmonte que difficilement, ou qui fait renoncer. Cet état de choses a souvent fixé notre attention, et nous pen- sons qu'il y aurait, peut-être, un moyen facile de vaincre les difficultés que nous venons de signaler. Nous proposerions d'employer, dans ces cas , des transmis- sions de mouvement hydrauliques, au moyen de l’eau renfer- mée dans de simples tuyaux de fonte, qu'on peut si facilement assujettir partout et tourner dans tous les sens , au-dessus et au- dessous du sol, à volonté. Les procédés usités le plus souvent dans les transmissions et transformations de mouvement à de grandes distances, consis- tent dans l'emploi d’engrenages et arbres de couche. Ces arbres sont d'autant plus gros et plus lourds que les forces à trans- mettre sont plus considérables , ce qui nécessite un plus grand nombre d'appuis. Et, si l’on doit changer souvent de direction, il faut multiplier les engrenages d'angle; toutes choses qui ab- sorbent une notable partie de la force par suite des frottements. Il est à propos de rappeler ici les lois toutes différentes du frottement des solides et des liquides. Le frottement est, en effet , Pour les solides : proportionnel à la pression , indépendant de la surface de contact , indépendant de la vitesse. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 363 Pour les liquides : indépendant de la pression, proportionnel à la surface de contact, 4 proportionnel à une fonction de la vitesse. Les lois du frottement des liquides seraient donc très-favo- rables aux transmissions hydrauliques, car il en résulte, en effet, qu'on pourrait employer des tuyaux de petit diamètre sous de très-grandes pressions, en évitant toutefois de donner à l’eau une trop grande vitesse. On pourrait, au moyen de coudes, et avec la plus grande facilité, multiplier les changements de direction, sans pertes sensibles de force, là où précisément les autres systèmes en at- sorbent une grande partie. Les transmissions hydrauliques présenteraient donc, sur les arbres à engrenages, une très-sensible économie d'argent et de force, et seraient, en outre , applicables dans bien des cas où ces derniers ne le sont pas. Il y a quelques années , la Compagnie du Moulin du Bazacle établit une turbine de la force de quarante chevaux effectifs , pour donner le mouvement à des ateliers placés à l’'amont de l'usine sur le quai Saint-Pierre. On dut construire à grands frais une galerie souterraine, dans laquelle sont placés des ar- bres de couche non en ligne droite, et raccordés par des engre- nages. Nous avons eu l’occasion de déterminer le travail utile, au moyen de freins dynamométriques placés simultanément sur les points de prise de force de chaque atelier, et nous avons constaté, à plusieurs reprises, une perte de onze chevaux sur quarante, pour une longueur totale d'arbres de couche de quatre-vingts mètres , compris trois engrenages. Il y a donc un déchet de plus d’un quart dans la transmission entre la turbine et les ateliers, soit un cheval et demi par dix mètres de parcours. Nous ne développerons ici aucun calcul pour démontrer l'économie de force qui résulterait de l'emploi d’une commu- 364 MÉMOIRES nication hydraulique; ce serait sortir des borues que nous nous sommes tracées pour un simple exposé; l'économie est vraie en principe, cela suffit pour le moment; celle qui a rap- port à la dépense d'établissement est plus évidente encore. Voici comment nous entendrions disposer ces transmissions et modifications de mouvement : Près du récepteur hydraulique serait placé un cylindre fermé à ses deux bouts et muni d’un piston intérieur fixé sur une tige qui traverserait les deux fonds du cylindre et qui serait mise en mouvement, d’une manière directe, si le récepleur était une machine à colonne d'eau, ou par une bielle et manivelle dans tout aatre cas. Des deux extrémités de ce cylindre partiraient deux tuyaux, qui, placés le plus souvent sous lessol , se dirige- raient , en suivant toutes les sinuosités obligées, vers le point où devrait être transmis le mouvement. Ces deux tuyaux viendraient aboutir aux deux extrémités d’un autre cylindre, muni d'un piston disposé comme le premier. Les proportions de ces deux cylindres seraient déterminées d'après la modi- lication de vitesse qu'on voudrait obtenir dans le sens recti- ligne. A l'exception des machines à colonne d’eau , les récepteurs bydrauliques sont animés d’un mouvement circulaire. Il con- viendrait, dans ces cas, de remplacer les deux cylindres par deux machines rotatives d’un système quelconque. Les pro- portions entre ces deux appareils seraient données par la modification qu'on voudrait apporter dans le mouvement, c’est- à-dire que, pour une vitesse des opérateurs double de celle du récepteur hydraulique, on donnerait à la machine rotative com- mandée une dimension moitié de celle de la machine qui com- mande, ou inversement s’il fallait ralentir la vitesse. Nous citerons pour exemple de ce mode de transmission de mouvement cerlains appareils d'invention allemande, appelés Fabrkunts, destinés à monter et descendre les ouvricrs dans ies mines. Quelques-uns de ces appareils sont mus au moyen d'une transmission hydraulique. Les Fahrkunts consistent en deux tiges verticales, placées à DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 365 côté l’une de l’autre, dans toute la hauteur d’un puits de mine, c’est-à-dire sur une longueur de 300 à 500 mètres. Des petits paliers ou planchers sont fixés en nombre égal et à égales dis- tances sur ces deux tiges, qui sont mues d’un mouvement ver- tical de va-et-vient, en sens inverse, et dont l'amplitude est égale à la demi-distance comprise entre deux paliers consécu- tifs. Il suffit que la personne qui veut descendre se porte sur le palier opposé à celui qu’elle occupe lorsque la rencontre des paliers a lieu ; il en est de même pour la personne qui veut monter; et chacune d'elles, cheminant en sens inverse, arrive à sa destination, à la condition qu’en s’engageant dans l'appareil, la première se place sur un palier descendant et la seconde sur un palier montant. Ces deux tiges sont surmontées chacune, à l'extérieur du puits, d’un cylindre vertical dans lequel elles pénètrent à tra- vers un fond, et, au moyen d’un piston obturateur fixé à leur tête, dans ce cylindre, elles sont soulevées par la pression de l'eau introduite dans l’espace cylindrique. Les tuyaux qui amènent l’eau dans chacun de ces cylindres aboutissent chacun à l’une des extrémités d’un cylindre hori- zontal plein d’eau, fermé à ses deux bouts, et dans lequel se meut un piston. Le mouvement de va-et-vient est donné à ce pis- ton par un moteur quelconque plus ou moins éloigné. La course des tiges est ordinairement de trois mètres, mais celte course étant trop grande pour le moteur, on donne au cylindre qui commande une section trois fois plus grande que celle des cy- lindres verticaux , pour rendre la course de son piston trois fois plus petite , c'est-à-dire égale à un mètre. L'on voit qu'une solidarité parfaite existe entre les mouve- ments des deux tiges. Les frottements sont à peu près nuls quant au mouvement de l’eau qui sert de transmission. Ajoutons que les charges sont énormes, et que dans ces conditions, des organes métalliques s’usent et se détériorent très-vite. Nous citerons encore un mécanisme établi dans ces dernières années par M. Vuignier, à l’entrepôt général des grains et fari- nes de la Villette. Ce mécanisme qu'on a appelé Treuil hy- 366 MÉMOIRES draulique, sert de tire-sac ; il est mis en mouvement par de l'eau renfermée dans des tuyaux à la manière des machines à colonne d’eau , et ne diffère, comme principe, avec ce que nous proposons , qu’en ce que l’eau se renouvelle dans les tuyaux. Il y a quatre ou cinq ans, M. Flachat a établi au chemin de fer de l'Ouest, à la gare de Saint-Lazare, un appareil qu'il a appelé monte-charge hydraulique. La Compagnie dispose d’une concession d’eau qui lui four- nit une force motrice assez considérable ; on l’a utilisée comme moteur. lei encore, ce sont des tuyaux et des cylindres avec des pistons. C’est l'application qui se rapproche le plus de la question qui nous occupe, puisque l'opérateur dont il s’agit est situé rue Saint-Lazare, alors que le moteur est à une autre extrémité de Paris, et que la transmission a lieu par le moyen des tuyaux de conduite du service hydraulique de la ville, après un parcours de plusieurs kilomètres. Nous ne doutons pas qu’au moyen de dispositions analogues , convenablement appliquées , dans bien des localités de nos con- trées méridionales, si riches en chates d’eau , on ne parvienne à utiliser avantageusement une plus grande partie de tant de forces perdues. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 367 \ SUR UNE NOUVELLE MÉTHODE POUR LA PRÉPARATION DU CHLORE; Par M. LAROQUE. Ox prépare aujourd'hui tout l'oxygène pur nécessaire aux besoins des laboratoires, en décomposant par la chaleur le chlo- rate de potasse. En effet, ce sel, soumis à l’action de cet agent, entre en fusion vers 4#00°; à une température un peu plus éle- vée, il se décompose en oxygène gazeux et en chlorure de potassium. Mais, à un instant donné de la réaction , la tempé- rature restant stationnaire , la masse devient pâteuse , le déga- gement d'oxygène se ralentit , et finit par s'arrêter avant que tout le chlorate de potasse soit décomposé. Cela tient à ce qu'une partie de l’oxygène provenant du chlorate réduit, se combine avec le chlorate non altéré pour le transformer en perchlorate , sel plus résistant à l’action de la chaleur , et qui exige une tem- pérature beaucoup plus élevée que le chlorate , pour se transfor- mer à son tour en oxygène et en chlorure de potassium. Lors donc que l’on opère avec une cornue en verre, il faut arrêter l’action de la chaleur à partir du moment où la cornue ne contient plus qu’un mélange de chlorure de potassium et de perchlorate de potasse. Sans cette précaution, on s'expose à voir la cornue se boursouffler , se trouer , surtout si l’on recueille le gaz oxygène sur le mercure ; car la décomposition du perchlo- rate de potasse n’a lieu qu'à une température voisine de celle de la fusion du verre. Il fallait donc renoncer, ou bien à l'emploi 368 MÉMOIRES des cornues en verre, ou bien à retirer du chlorate de potasse tout l'oxygène qu'il contient. C’est ce dernier résultat que l’on a tout d’abord préféré réaliser dans les laboratoires, parce que l'on retirait ensuite du résidu de l'opération le perchlorate qu'il contient. Mais depuis qu'il a été reconnu que le chlorate de potasse mêlé avec des corps inactifs tels que le bioxyde de manganèse, le bioxyde de cuivre , le platine divisé se décompose très-faci- lement par la chalenr, bien avant la fusion du verre , sans for- mation de perchlorate de potasse , avec dégagement régulier d'oxygène , fait-on toujours usage d’un mélange de chlorate de potasse et de bioxyde de manganèse pour obtenir tout l'oxygène que nécessitent les cours et les expériences de laboratoire. Après que tout le chlorate de potasse a été réduit par la chaleur , il ne reste plas qu'un mélange de chlorure de potassium et de bioxyde de manganèse. En attaquant ce résidu par l'eau bouillante, on obtient , d’un côté une dissolution de chlorure de potassium; de l’autre , du bioxyde de manganèse qui, bien lavé et entièrement séché , peut servir à de nouvelles préparations. Il est bien rare que dans les laboratoires on s'assujettisse à pratiquer les manipulations que j'ai indiquées. Aussi le résidu de la préparation de l'oxygène devient-il un capul mortuum , d’après le langage des anciens chimistes. Cependant il est pos- sible d'utiliser ce résidu sans manipulation préalable , en prati- quant la nouvelle méthode pour la préparation du chlore que je viens proposer. Le mélange de chlorure de potassium et de bioxyde de man- ganèse, traité par l'acide sulfurique à la manière du mélange de chlorure de sodium et de bioxyde de manganèse, donne lieu à un dégagement de chlore. Cette nouvelle méthode pour la préparation du chlore a, sur l'ancienne, ce double avantage, c’est qu'elle permet, en utili- sant un résidu qui était généralement abandonné , de préparer plus économiquement l’oxygène et le chlore, et de faire du sulfate de potasse plus utile dans les laboratoires, que les sels que l’on peut extraire, soit du résidu de la préparation de DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 369 \ l'oxygène , soit du résidu de la préparation du chlore par les procédés déjà connus. J'ajouterai, en terminant celte note, qu'il est utile : premiè- rement , que le chlorate de potasse et le bioxyde de manganèse soient mêlés intimément et dans le rapport de leurs équivalents respectifs ; secondement , que le mélange enfermé dans une cor- nue en grès, soit d’abord soumis à un feu modéré, afin que l'oxygène n’entraine pas dans le tube abducteur, en trop grande abondance , ni du chlorate de potasse , ni du bioxyde de man- ganèse réduits préalablement en poudre. C’est seulement quand le dégagement de l'oxygène commence à se ralentir, qu'il est indispensable de chauffer plus fortement , afin d'assurer la transformation entière du chlorate de potasse en chlorure de potassium. Le mélange de ce dernier composé et de bioxyde de man- ganèse traité par l'acide sulfurique étendu, donne lieu à un dégagement de chlore avec effervescence , même aux températu- res ordinaires. Si donc on opère la réaction dans un matras d’une capacité double de celle du mélange, et si l'on ajoute l'acide sulfurique par parties, on obtient un dégagement régu- lier de chlore , que l’on peut activer en plaçant sous le matras quelques charbons ardents. 370 MÉMOIRES DISCOURS D'OUVERTURE DE LA SÉANCE PUBLIQUE DU 7 qUIN 1857; Par M. FILHOL, Président. MESSIEURS , En prenant la parole pour remplir l'honorable et difficile devoir que vos usages imposent au Président de l’Académie, je m'empresserais de solliciter votre indulgeace, si le souvenir de votre bonté habituelle ne me rassurait un peu. Je m’efforcerai, d’ailleurs, d’être court pour mieux mériter cette indulgence. Je me propose de vous entretenir pendant quelques instants de l'influence que les études scientifiques exercent sur le ca- ractère de l'homme. d'essaierai de montrer ce dont vous êtes tous convaincus , que le culte des sciences développe, chez celui qui l’embrasse avec ardeur, les sentiments les plus élevés, et que ce culte, loin de pousser l’homme vers le soin de ses inté- rêts matériels, est plutôt de nature à l'en détourner. Je tâcherai de montrer, enfin, que cet amour effréné des richesses qui domine à notre époque, n’est ni l’œuvre de la science ni celle des savants. Celui qui aime réellement la science la cultive pour elle- même, en dehors de toute pensée d'intérêt personnel; le seul but qu’il se propose est d'acquérir des connaissances nouvelles et de les livrer à la société qui en fera son profit : la seule récompense qu'il ambitionne , est de voir le fruit de ses tra- vaux contribuer au bien-être de tous. C'est à ces sentiments nobles et purs qu'il faut attribuer cette ardeur qui pousse les hommes de science à sacrifier sans regret les fêtes et les plaisirs du monde, à s'inquiéter peu du soin de DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 371 leur fortune, à compromettre quelquefois leur vie pour attein- dre le but qu'ils se proposent, alors même que les questions qu'ils cherchent à résoudre ne peuvent amener aucun profit pour eux , et semblent souvent ne devoir être, en aucun cas, l'objet d'applications utiles. Cette passion, que le vulgaire prend pour une folie, est pourtant ce qui caractérise le mieux les vrais savants; elle est chez eux l'effet d’une conviction profonde que rien ne saurait amoindrir. Ils savent bien qu'autour d'eux on rit de leur con- tinuelle préoccupation, de leur désintéressement sans bornes, de leurs fatigues , et pourtant ils poursuivent paisiblement leurs recherches, pleins de confiance dans l'avenir. À leurs yeux, une découverte bien constatée est toujours d’un grand prix, car ils savent que des faits nouveaux, dont l'utilité ne se ré- vèle pas tout d’abord , et que des esprits superficiels considè- rent comme indignes d'attention, sont souvent de nature à devenir tôt ou tard, pour la société, une source de richesse et de prospérité. Sans doute , nul ne pourrait dire aujourd'hni d’une manière certaine, quel parti lon tirera, d'ici à quelques années, des découvertes si curieuses de la chimie moderne. Mais il est permis d'espérer que l'aluminium, ce métal si léger, si ductile , si sonore, si inaltérable, sera bientôt obtenu facilement en quantités considérables et à bas prix. Les travaux récents de M. Deville sur le bore , ne nous font- ils pas entrevoir la possibilité de préparer artificieliement de nouvelles pierres précieuses dures et brillantes comme le dia- mant, et peut-être de fabriquer le diamant lui-même ? N'est-il pas possible qu’on parvienne un jour à tirer parti des remarquables découvertes de M. Berthelot? D'ailleurs, en sup- posant qu'on n’y parvint jamais, n'est-il pas curieux de savoir qu'on peut fabriquer de toutes pièces de l'alcool en fixant de l’eau sur l'an des carbures d'hydrogène qui constituent le guz de l'éclairage; qu'on peut préparer artificiellement des corps gras, de l'acide formique et une foule d’autres composés ? On ne saurait prévoir , à notre époque, si la médecine pourra 372 MÉMOIRES tirer quelque parti de la découverte si remarquable dont M. Be- champ a récemment enrichi la science ; mais on ne peut discon- venir que la fabrication artificielle de l’urée par une combus- tion lente des matières albuminoïdes a jeté un grand jour sur les phénomènes de combustion qui s'accomplissent au sein de notre économie. Certes, à l’époque où Galvani remarqua , pour la première fois, qu'une grenouille récemment écorchée éprouve des con- tractions vives lorsque ses nerfs et ses muscles sont mis en com- munication par un arc métallique, et au moment où Volta construisit la pile qui porte son nom, personne n'eùt pu prévoir toutes les merveilles qui ont été la conséquence des travaux de ces deux savants. Qui eût pu soupconner alors que l’on isole- rait, au moyen de la pile, une foule de métaux inconnus, po- tassium, sodium, elc., et, comme eonséquence, l'aluminium lui-même ? Qui eût osé dire que l'électricité, devenant l'esclave obéissante de l’homme, serait un jour ce messager fidèle et dis- cret, rapide comme la foudre, qui transporte au loin la pen- sée, silencieux et invisible comme elle? Qui eût osé prédire que des malheureux sans nombre seraient soustraits à l’in- fluence perniciense des vapeurs mercurielles , grâces à l’élec- tricité, qui permet aujourd'hui de déposer , sans danger, l'or et l'argent à la surface des métaux communs ? Qui eût osé pré- dire, enfin , que le fluide électrique deviendrait une source de lumière , de chaleur et de mouvement ? Sans doute, Volta lui-même n’entrevoyait pas tout ce que produirait dans l'avenir la découverte qui a immortalisé son nom ; il agissait comme tous les vrais savants qui , sachant que la vie d’un homme est rarement assez longue, pour leur per- mettre de parcourir les voies nouvelles qu’ils découvrent, s'at- tachent à bien en démontrer la direction, laissant à d’autres le soin d'achever ce qu'eux-mêmes n’ont pu faire. Voilà comment il arrive, presque toujours, qu'autour des hommes de génie se groupent des hommes de talent, qui, s'inspirant de la pensée du maître, en font jaillir une foule d'applications utiles. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 373 Cependant , quelque nombreuses et quelque remarquables que puissent être ces applications, elles ne font jamais oublier la source dont elles dérivent, et la gloire de leur découverte rejaillit, presque en totalité, sur celui qui a donné l'impulsion première. Il'est juste, Messieurs, qu'il en soit ainsi, car ces décou- vertes si belles, qui dérivent de l'observation de faits simples en apparence, ont souvent coûté à leurs auteurs beaucoup plus qu on ne pense. Quoi de plus touchant que les quelques pages dans lesquelles Bernard de Palissy raconte tous les essais infructueux qu’il a dû faire avant d'arriver à produire ces belles poteries qui font encore notre admiration ? N'est-on pas saisi de pitié quand on le voit ruiné, à bout de moyens, jeter ses meubles au feu pour cuire une fournée nou- velle? Bien peu de gens se doutent aujourd'hui du nombre des découvertes qui sont dues à l’illustre potier. Il faut être animé, à un très-haut degré, de l'amour des sciences pour affronter ainsi sans crainte la misère, les priva- tions de toutes sortes , les sarcasmes et le mépris des ignorants, et persévérer à poursuivre des recherches dont on ne recueillera souvent ni gloire ni profit. Qu'on ne dise donc plus que les études scientifiques condui- sent l’homme à ne s'occuper que de lui-même, et le détournent des idées généreuses qui sont le plus bel attribut des grandes âmes. Un coup d'œil jeté sur l’histoire des savants dont les décou- vertes ont iliustré les siècles dans lesquels ils ont vécu , suffirait pour détruire une grossière erreur. Est-il rien de plus beau que ce dévouement de Lavoisier qui, voulant étudier une question relative à la lumière , s’enferme pendant six semaines dans une chambre tendue de noir , afin de communiquer à ses yeux cette sensibilité exquise sans laquelle il n’eût pu obtenir des résul- tats précis ? Vous montrerai-Je des physiologistes , vivant pendant des an- nées entières sur le plateau d’une balance, pour étudier les lois 5° $. —TOME I. 25 374 MÉMOIRES de la transpiration ? et sans aller chercher si loin mes exemples , vous rappellerai-je lun de nos physiciens les plus illustres, Dulong, qui, après avoir été blessé par une explosion produite pendant une de ses opérations sur le chlorure d'azote qu’il venait de découvrir, reprend bientôt ses analyses, voulant doter la science d’une découverte, dût-il perdre la vie pour la compléter? Vous rappellerai-je le malheureux Boullay , qui pendant le cours d’un travail sur les éthers, qu’il exécutait en commun avec l’une des gloires de la France (M. Dumas) , fut brülé d'une manière si cruelle, qu'il en mourut peu de jours après? A ces exemples si frappants, j'en pourrais joindre d’autres, mais ceux-ci suffisent et au delà. Ce zèle des vrais savants, dont je voudrais pouvoir mieux faire ressortir le caractère, fut donc toujours pur et désintéressé. Certes , les découvertes scientifiques ont contribué largement au perfectionnement de l’industrie moderne; elles ont été, pour un grand nombre de manufacturiers, des sources de richesse ; mais combien compterez-vous de savants qui aient su tirer parti de ce qu'ils ont souvent si péniblement découvert ? Combien n’en trouverez-vous pas, au contraire, qui, n'écou- tant que cette ardeur irrésistible avec laquelle ils se sentent entraînés vers les recherches qui doivent agrandir le cercle des connaissances humaines , dépensent le peu qu'ils possèdent, sans s'inquiéter du lendemain , jusqu'au jour où l’âge et les maladies venant mettre un terme à-leurs laborieuses recherches, ils s'aperçoivent, sans regret, qu'ils ont fait tout pour la so- ciété et rien pour eux-mêmes. Combien de fois les auteurs des plus remarquables découvertes n’ont-ils pas terminé leurs jours dans la plus affreuse misère? Aussi, lorsque l'illustre et vénérable doyen des chimistes français , toujours jeune par le cœur, a voulu fonder une so- ciété, dans le but de venir en aide aux savants malheureux, à leurs veuves et à leurs enfants, vous avez vu avec quel empres- sement une foule d'hommes généreux se sont groupés autour de lui ; savants , artistes, industriels, tous ont voulu prendre part à cette institution. Et c'était justice , Messieurs, car il se- DE L'ACADÈMIE DES SCIENCES. 375 rait honteux pour notre siècle , que des hommes dont le génie a reculé les limites de nos connaissances et créé pour toutes les nations du monde des sources fécondes de richesses finissent leurs jours dans les souffrances et les privations. Aussi, Messieurs, quoi qu'en aient pu dire quelques écrivains passionnés , il n’est pas vrai que le culte des sciences se con- fonde avec celui des intérêts matériels de l’homme. Au reste, ces exagérations ont toujours été repoussées par les hommes vraiment sérieux, et si j'en voulais la preuve, je n'aurais pas besoin de sortir de cette Académie , dont les Mé- moires fourmillent de dissertations savantes où les préventions contre lesquelles je m'élève en ce moment, sont combattues d’une manière brillante. C’est ainsi que dans des discours remarquables, auxquels ma pauvreté m'a contraint de faire quelques emprunts, MM. de Malaret, Tajan, Ducasse et une foule de nos prédécesseurs nous montrent les poëtes les plus renommés, les historiens , les litté- rateurs les plus illustres possédant toutes ces sciences dont on voudrait vainement nous montrer l’inutilité; ils nous font voir Homère, Hésiode possédant toutes les sciences de l’archéolo- gue, du géographe et de l'historien ; Aristote embrassant dans ses vastes méditations tout ce qui était du ressort de l'intelli- gence humaine, dictant des lois aux poëtes, aux orateurs , et déroulant des secrets inconnus jusqu’à lui. C’est par une heureuse association des études littéraires et des études scientifiques que les hommes de génie répandent sur leurs œuvres ce charme infini qui en rend la lecture si utile et si agréable à la fois. En lisant les œuvres d'Hippocrate, ne se rappelle-t-on pas involontairement qu’Apollon était à la fois le dieu des médecins et celui des poëtes ? A ceux qui voudraient qu'on amoindrit outre mesure l'en- seignement des sciences dans nos établissements d'instruction publique, je rappellerais volontiers ces mots de Montaigne : « Aristippe ne défendait que le corps , comme si nous n'avions » pas d'âme; Zénon ne défendait que l'âme , comme si nous » n'avions pas de corps, et tous les deux vicieusement. » 376 MÉMOIRES Permettez-moi, d'ailleurs, d'emprunter à l’un des plus grands écrivains de la France, son opinion sur l'influence que les étu- des scientifiques exercent sur la conduite de l'homme (1) : a Que si les exemples de sagesse, de grandeur d'âme , de » générosité, d'amour de la patrie deviennent plus rares que » jamais, c'est parce que la mollesse et la vanité de notre » âge ont rompu les nœuds de cette douce et utile société que » la science forme entre les vivants et les illustres morts, dont » elle ranime les cendres pour en former le modèle de notre » conduite. » « L'étude des sciences, dit Lacepède, enchante nos jeunes » années, elle plait à l’âge mür, elle pare la vieillesse de fleurs, » dissipant les chagrins , calmant les douleurs , écartant les » ennuis , allégeant le fardeau du pouvoir , soulageant du soin » des affaires pénibles , faisant oublier jusque à la misère , con- » solant du malheur d’une trop grande renommée: quelle » adversité , ne diminue-t-elle pas (2) ? > Jetez les yeux sur les hommes célèbres dont on nous a trans- » mis les actionsles plus secrètes : quels ont été les plus heureux ? » ceux qui se sont livrés à la contemplation de la nature. J'en » atteste Linné, Buffon, Bossuet; j'en atteste même les illustres » victimes de leur passion sacrée, tant de célèbres voyageurs qui » expirent pour la science sur une terre étrangère; ces infortunés » compagnons de Lapérouse, dont la mer a tout englouti , ex- » cepté leurs titres à la postérité. Et les sacrifices utiles , le dé- » vouement généreux, le saint enthousiasme, n'ont-ils pas aussi » leur bonheur suprême? » En général, les savants font leurs découvertes sous une im- pulsion pareille à celle qui dicte à l’orateur ou à l'écrivain leurs plus belles pensées ; l’un et l’autre sont mus par un sentiment presque surnaturel , inconnu des âmes vulgaires ; ils sont l’un et l’autre inspirés. (1) D’Aguesseau. Vécessilé de la science. (2) Discours de clôture du Cours d'Histoire naturelle. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 317 Il existe, en effet , entre le vrai savant et l'homme de let- tres les rapports les plus étroits. De part et d'autre l'habitude de la méditation élève et agrandit la pensée ; or, celui qui est capable d’avoir de nobles pensées , trouve toujours pour les ex- primer de nobles paroles. Voilà pourquoi nous voyons tous les jours des savants auxquels leur pauvreté première n'avait pas fourni les moyens d'acquérir des connaissances littéraires qui font l'ornement et le charme de l’esprit , s'élever quelquefois dans leurs ouvrages à la hauteur des plus grands écrivains , et avoir sur plusieurs de ces derniers , l'avantage d’être éloquents sans s’en douter. Certes , personne n'oserait nier la beauté du style de Bernard de Palissy , et pourtant voyez comme il se juge lui-même : « Si ces choses ne sont écrites à telle dextérité que votre » grandeur le mérite, il vous plaira me pardonner , ce que » j'espère que ferez , veu que je ne sais ni grec , ni hébrieu , » ni rhétoricien , ains un simple artisan bien pauvrement ins- » truit aux lettres (1). » Ecoutez pourtant la noble réponse de ce simple artisan au roi Henri IL , qui le priait de changer de religion : « Mon bon homme , lui disait le roi, il y a quarante-cinq » ans que vous êtes au service de ma mère et de moi. Nous » avons enduré que vous ayez vécu dans votre religion , parmi » les feux et les massacres ; maintenant, je suis tellement pressé » par ceux de Guise et mon peuple , que je suis contraint de » vous laisser entre les mains de mes ennemis , et que demain » vous serez brûlé si vous ne vous convertissez. — Sire , répond » Palissy , je suis prêt à donner ma vie pour la gloire de Dieu. » Vous m'avez dit plusieurs fois que vous aviez pitié de moi, » et moi j'ai pitié de vous, qui avez prononcé ces mots : Je suis » contraint. Ce n'est pas parler en roi, Sire, et c’est ce que vous- » même , ceux qui vous contraignent , les guisards eux-mêmes » ettout votre peuple ne pourrez jamais sur moi , car je sais » mourir. » (1) Lettre au Duc de Montmorency. 378 MÉMOIRES Voilà , si je ne m’abuse , de belles pensées exprimées en un beau langage ; ainsi se trouve justifié ce rapprochement que j'établissais tout à l'heure entre le caractère des littérateurs illustres et celui des vrais savants. Mais qu'ai-je besoin d'insister ? ne suis-je pasau milieu d’une assemblée où les lettres et fes sciences sont également en bon- neur , dans une assemblée où tout le monde est convaincu que le culte des sciences , tel que l'entendent les vrais savants , est une chose aussi grande, aussi noble, aussi pure que le culte désintéressé des lettres ? Je m’arrête donc, Messieurs, pour ne pas fatiguer votre bienveillante attention : peut-être en ai-je abusé déjà; mais vous me le pardonnerez, je l'espère, en vous souvenant qu'il est facile de s’oublier au milieu de ceux vers lesquels on est entraîné par les sympathies les plus vives, celles qui naissent de l'amour du vrai et de l'amour du beau. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES, 3179 nu RAPPORT SUR LE CONCOURS DE 1897; Par M. D. CLOS. LA plupart des êtres organisés sont limités dans leur disper- sion géographique, chaque espèce réclamant certaines condi- tions de sol, de lumière, de chaleur, d'humidité, en dehors desquelles elle ne peut pas vivre. Mais il est une classe de vé- gétaux qui semblent échapper à cette loi générale, presque éga - lement insensibles à l’action du climat et du sol. De l'air hu- mide et un point d'appui, c'en est assez pour leur développe- ment. Les premiers à apparaître lorsqu'il s’agit de transformer, de fertiliser une terre aride, ils disparaissent aussi les derniers quand une contrée a été ravagée. Répandus partout avec pro- fusion , ils sont les premiers créateurs de l'humus, et, malgré leur petitesse, qui les fait à peine distinguer par le vulgaire, le rôle qu'ils jouent dans l'économie générale de la nature est immense. Doués, au plus haut degré, de la force de résistance vitale, ils semblent braver toutes les causes de destruction; la dessiccation peut interrompre leur accroissement , mais sans les priver toujours de la vie. Deux grandes familles de plantes, les Mousses et les Lichens sont les seules à jouir de ces priviléges. Le nombre de ces êtres est si considérable, leurs formes sont à ce point variées, que la plapart de ceux qui veulent décrire la végétation d’un pays, reculent , non sans raison, devant cette étude et les négligent. C'est , en particulier , ce qui a eu lieu jusqu'ici pour la Flore 380 MÉMOIRES de Toulouse ou du département de la Haute-Garonne. Ce que Linné avait osé entreprendre pour l'univers entier, bien peu l'ont tenté ou du moins réalisé pour des localités restreintes (1), effrayés à la vue de cette multitude d'êtres à la fois si sembla- bles et si divers , et qui suffiraient à absorber la vie de l'homme la mieux remplie. Il est vrai que le chiffre des espèces de plantes cryplogames connues ne dépassait guère alors #00; et aujour- d’hui il est de plus de 20,000. Mue par ces considérations, l’Académie impériale des Sciences, Inscriptions et Belles-Lettres de Toulouse a voulu signaler cette lacune aux naturalistes ; et elle a espéré contribuer aux progrès des études cryptogamiques en mettant au concours , pour 1857, la question suivante : Faire connaître, à l’aide de bonnes des- criplions et de figures, les Mousses et les Lichens qui croissent dans un des départements du bassin sous-pyrénéen. L'opportunité de cette question ressortait encore, à ses yeux, de ce fait, qu’à nulle autre époque, les phénomènes physio- logiques dont ces végétaux sont le siége, n’ont été mieux et plus activement étudiés que de nos jours. Le voile épais qui couvrait leur mode de reproduction, et qui avait valu à ces plantes le nom de eryptog'ames , ou celui , plus faux encore, de plantes agames, a été soulevé. Aussi, dès 1847, l’Académie des Sciences de l’Institut de France couronnait-clle deux Mé- moires riches de découvertes sur la sexualité d’une des familles de ce vaste groupe (les Algues) , et, plus récemment, elle choi- sissait, pour sujet d’un grand prix des Sciences physiques à décerner, en 1857, la question du mode de reproduction d’une autre de ces familles , celle des Champignons. Enfin, un de nos honorables collègues , aujourd’hui membre de ce corps savant, (M. Moquin-Tandon), avait si bien senti l'importance d’un semblable travail, qu'en 1848 il vous communiquait un cata- (1) Tournon, dans sa ÆVore de Toulouse, in-8°, 1811, a bien, il est vrai, signalé et décril un certain nombre de ces plantes; mais le nombre des espèces mentionnées par lui ne s'élève pas au delà de quarante-cinq pour les Mousses, et de trente-neuf pour les Lichens. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 384 logue des Mousses qui croissent dans le département de la Haute- Garonne (1). Un seul Mémoire est parvenu au secrétariat, sur la question que vous aviez proposée (2) ; mais il n’a pas fallu longtemps à votre Commission pour reconnaître qu’elle avait à faire à un travail important, et digne à tous égards d’un sérieux examen. En demandant à la fois aux concurrents des descriptions et des figures des Mousses et des Lichens, l’Académie voulait élargir , le plus possible, le cadre de la question et en faciliter la solu- tion. On peut dire qu’elle a reçu plus qu’elle ne demandait ; car l’auteur du Mémoire, tout en satisfaisant aux termes du programme , à joint à son envoi une collection des objets eux- mêmes , décrits et figurés, contenus dans cinq grands cartons , et qu'il laisse à la disposition de l’Académie. Les généralités relatives aux deux familles de plantes dési- gnées dans le programme , et les descriptions des tribus, gen- res, espèces ou variétés de celles-ci, n’occupent pas moins de seize cahiers d'écriture, dont quatorze affectés aux Lichens. L'auteur commence par se justifier d’avoir donné à son ou- vrage un titre différent de celui que proposait l’Académie. Afin de faciliter les recherches, vous aviez limité le cadre des in- vestigations à un des départements du bassin sous-pyrénéen. Mais l’auteur a cru , et avec raison, pouvoir l’élargir , cédant , dit-il, qu désir d'utiliser des recherches faites sur un terri- toire un peu plus étendu. Son travail a pour titre: Descriptions et figures des Mousses et des Lichens du bassin de Bordeaux. La région explorée par ce naturaliste représente à peu près la dixième partie de la France, et est circonscrite par des lignes (1) Voy. Mém. de l’Acad. des Scienc. de Toulouse, 3° série, Lom.1v, p. 19. Malheureusement des circonstances particulières n’ont pas encore permis à M. Moquin-Tandon de livrer à l’impression un travail si plein d’intérèt pour la Flore locale. (2) Ce Mémoire porte pour épigraphe : « Les descriptions les plus exactes et accompagnées de figures les plus parfaites laissent encore quelque chose à désirer à celui qui veut connaître complétement un être naturel. Ce quel- que chose que rien ne peut suppléer ne s'obtient que par l’autopsie ou la vue de l’objet lui-même. » ( De Candolle , Zhéorie élément.) 382 MÉMOIRES qui passeraient , indépendamment de l'Océan , par Pau , Tarbes, Saint-Gaudens , Pamiers, Carcassonne, Castres, Albi, Cahors et Blaye, au-dessus de Bordeaux. La division de l'ouvrage est des plus méthodiques. Une large part est faite aux généralités préliminaires. Le premier chapitre nous retrace à grands traits les carac- tères du bassin de Bordeaux , envisagé au point de vue géogra- phique et géologique. Un deuxième chapitre est consacré à la bibliographie cryptogamique, afin, dit l'auteur, d'épargner des recherches longues et pénibles à ceux de nos lecteurs qui voudraient remonter aux sources. Une liste comprend les ouvrages généraux dont la cryptogamie fait partie; une autre , les traités particuliers relatifs d’abord aux Mousses , puis aux Lichens. Cette énumération est complète, embrassant tout ce qui a été écrit soit en France , soit à l'étranger, sur les familles désignées. Abordant ensuite l'étude spéciale des Lichens, l’auteur débute par des généralités intéressantes sur l'histoire de ces êtres, sur les principes qui, depuis Acharius, le fondateur de la Liché- nographie, ont été successivement mis en usage pour leur clas- sification; et enfin, il se range à l'opinion de M. Nylander, qui ne donne la préférence à aucun caractère isolé, mais Îles emprunte à la fois au thalle, à l’apothécie, aux spermogonies, c'est-à-dire , aux appareils de végétation et aux organes sexuels. La définition des Lichens, la place qu'ils doivent occuper dans la méthode naturelle , une revue des organes de végétation et de reproduction où sont signalées les principales modifications organiques et les anamorphoses de ces êtres ; puis un chapitre consacré à la végétation et à l'habitat, un autre aux usages, enfin un dernier sur la meilleure manière de se livrer à l'étude de cette partie de la botanique , tel est l’ensemble des considéra- tions générales qui précèdent la description des êtres de cette famille. La seconde partie du travail de l’auteur ,sou la phytographie des Lichens, est tout à fait digne de la première. Considérant avec plusieurs naturalistes modernes le groupe des Lichens comme DE L'ACADÉMIE DÉS SCIENCES. 383 une vaste classe, il la divise en familles, tribus, genres, espèces et variétés, donnant une description complète et en langue la- tine de chacun de ces degrés de la classification. Une large part est faite, soit à la synonymie, suivie de la citation des collec- tions de plantes sèches , soit à l'habitat de ces plantes dans cha- cun des douze départements explorés par l’auteur , qui a joint encore à son travail des observations complémentaires ou criti- ques. C'est là, il faut le dire , la partic capitale du Mémoire, dans laquelle sont énumérés les caractères de deux cent quatre- vingt-sept espèces réparties en soixante dix-neuf genres, rappor- tés eux-mêmes à dix-huit tribus et à trois families, Une subdi- vision en six séries a été adoptée pour la famille si vaste des Lichénacées. Il convient d'ajouter qu’on aurait pu grossir ce travail d’un beaucoup plus grand nombre d'espèces , si on n’a- vait préféré, à bon droit, multiplier les variétés. L'auteur avait eu d’abord l’idée de reproduire par la photo- graphie les échantillons qui ont servi de types à ses descrip- tions , espérant obtenir ainsi, comme il le dit, ce double résul- tat : promptitude et image fidèle. Mais ses expériences n'ayant pas été satisfaisantes, ce dont témoigne un essai de cette na- ture annexé à son travail , il a dù y renoncer. Il s’est borné à représenter au trait, à côté de l'échantillon desséché , l'analyse des organes fructificateurs, et cela non-seulement pour un indi- vidu de chaque genre , mais aussi pour un grand nombre d’es- pèces d'un même groupe générique. Pour ceux qui connaissent toutes les difficultés et les exigen- ces des observations microscopiques , il n’est pas douteux qu’un semblable travail a coùté à son auteur de longues et pénibles recherches. Les travaux les plus récents, ceux de M. Tulasne pour l'organographie des Lichens , de MM. Massalongo , Nylan- der et Mougeot pour leur classification , sont partout misà profit avec une intelligence parfaite et une rare perspicacité. Ce n’est pas le travail d'un élève que l’Académie a recu , mais bien celui d’un homme depuis longtemps familiarisé avec les secrets de la Lichénographie. Telle est en quelques mots l'analyse de la partie du Mémoire 384 MÉMOIRES qui concerne les Lichens. Tout en donnant de grands éloges à cet ouvrage, la Commission a regretté que l’auteur , trop pressé sans doute par le temps, ne l'ait pas accompagné de tableaux dichotomiques si utiles en histoire naturelle, et surtout d’un index général propre à faciliter les recherches. La famille des Mousses n’est ni moins vaste ni moins in- téressante que celle des Lichens. L’utilité de ces plantes dans l'é- conomie de la nature est souvent considérable. Il en est dont la mission est de dessécher les marais, et de transformer à la longue les marécages infects en tourbières et en terreau. S'il faut en croire le naturaliste qui, dans les temps modernes les a le mieux étudiées, c'est au suc que plusieurs d’entre elles exsudent par leurs racines que les dunes de la Hollande et de la France doivent leur première fixation et leur fertilité. L’exis- tence des belles forêts de Pin sylvestre sur les bords de la mer du Nord, et de Pin maritime entre Bordeaux et Bayonne, ne reconnaîtrait pas une autre cause. Votre Commission avait espéré que la partie du Mémoire re- lative aux Mousses serait aussi satisfaisante que la première. Mais l’auteur, trop limité par le temps, n’a pu atteindre ce résultat. Il avait dans la Bryolosie d'Europe un guide sûr et précieux qu'il a eu le bon esprit de suivre. Il divise la classe des Mousses en ordres, tribus, familles , et il donne les carac- tères de ces degrés de la classification. Mais arrivé aux genres et aux espèces , il se borne à la citation des synonymes et des loca- lités où croissent celles-ci. Toutefois, comme l’auteur a le soin de renvoyer à l'ouvrage fondamental et tout récent deM. Schim- per , où ces espèces sont décrites et analysées avec détail, l’ab- sence de descriptions est une lacune moindre qu’on ne serait tenté de le croire au premier abord. Le nombre d'espèces de Mousses signalées est de deux cent cinquante-trois , rapportées à quatre-vingt-sept genres ; el ceux- ei à leur tour sont répartis en trente-sept familles. Il ressort de toutes les considérations précédentes , que le ju- gement définitif sur le mérite du travail adressé à l'Académie ne saurait être que très-favorable. Mais est-ce à dire que tout DE L’'ACADEMIE DES SCIENCES. 385 soit à louer dans ce Mémoire ? La Commission , tout en faisant une part assez large aux erreurs provenant du copiste, a eu à relever quelques légères taches de détail, qu'elle croit devoir “ signaler à l’auteur , pour le cas où son travail scrait livré à la publicité (1); mais elle s’empresse d'ajouter qu’elles s’effacent en quelque sorte devant l'importance et l'étendue de l'ouvrage. Elle avait à se demander, avant de vous soumettre ses conclu- sions : 1° Si l'énumération des espèces était , sinon complète , au moins suffisante; 2° si ces espèces étaient bien déterminées, convenablement disposées en genres et en tribus ; 3° si les des- criplions et les figures étaient exactes et développées dans de justes limites ; 4° enfin , si l’ensemble et les proportions des diverses parties de ce travail témoignaient de cet esprit d'analyse et de méthode si indispensable en histoire naturelle ? Elle est heureuse de pouvoir répondre affirmativement à ces diverses questions. Aussi n’hésite-t-elle pas à vous proposer de décerner à l’auteur le prix annuel dontil est, àses yeux, tout-à-fait digne. (1) Bien que M. Tulasne ait parfaitement dévoilé le premier l’organisa- tion des spermogonies , la découverte de ces appareils, dont le rôle avait élé soupçonné par Hedwig, appartient à M. Itzigson, et le nom de ce dernier aurait dû trouver place dans le chapitre des considérations géné- rales relatives aux organes reproducteurs. Les mots de plantes agames appliqués aux Lichens, et reproduits plusieurs fois dans le cours de l’ou- vrage, ont paru très-défectueux , surlout depuis les découvertes récentes des spermogonies dans cette famille. Le mot fruit, souvent répété, et celui de corps embryonnaire , aussi employé par l’auteur, doivent être réservés aux phanérogames, IL est encore à regretter que l’auteur n’ait pas cru devoir relire avec soin son manuscrit pour rectifier au moins l’orthographe des mots techniques ou des noms soit génériques soit spécifiques. L’orcine et les matières linctoriales des Lichens , est-il dit au chapitre des usages de ces plantes , se forment sous l’action de l’ammoniaque ; il eût fallu dire de l’ammoniaque et de l’air. Il y a quelques erreurs relatives à la géographie des localités citées : ainsi, à propos du Bryum erythrocarpon Schwgr. et du B. marginatum Br. et Sch., Revel est indiqué dans le Tarn ; el à propos du Webera an- notina Hedw., Arfons l’est dans l'Aude. Enfin, signalons quelques négligences de style , telles que Frèes qui avait éludié son Acharius, où bien : une autre anamorphose «a fourni sujet à des contestations scientifiques nombreuses d’où il est résulté la consécra- Lion d'un genre, ele. 386 . MÉMOIRES Elle vous propose encore , de le remercier du don qu'il vous a fait de la collection des objets décrits et figurés par lui , et de lui accorder le titre de Membre correspondant. Le Bureau général, adoptant à l’unanimité les conclusions du rapport , propose à l’Académie d’accorder à l’auteur : 1° Le prix de l’année; 2° Le titre de Membre correspondant. Les conclusions du Bureau général ayant été adoptées à l’u- nanimité, M. le Président a procédé à l'ouverture du bulletin cacheté ; le nom de l’auteur proclamé lauréat , est M. C. Roume- guère , naturaliste à Toulouse. DE L'ACADÈMIE DES SCIENCES. 387 RAPPORT DE LA COMMISSION DES MÉDAILLES D ENCOURAGEMENT (CLASSE DES SCIENCES) ; Par M. BRASSINNE. MESSIEURS , Les Académies n'ont pas été instituées seulement en faveur de quelques hommes d'étude qui se réunissent périodiquement pour se communiquer leurs travaux , elles ont encore recu de leurs fondateurs une mission d'utilité publique qui prend tous les jours une importance plus grande. Pour accomplir cette mission , elles doivent entretenir des relations avec tous ceux qui cultivent sérieusement les Sciences et les Lettres , accueillir leurs essais, encourager et mettre en lumière leurs recherches, détourner quelquefois d’une voice erronée des esprits irréflé- chis qui substituent aux vrais principes les caprices d’une ima- gination trop vive. Notre Société a bien compris les devoirs qui lui sont im. posés et les services qu'elle est appelée à rendre à nos contrées. Toujours accessible à ceux qui réclament son concours, l'examen ou l'appréciation de leurs travaux, elle n’a jamais reçu une com- munication de quelque valeur sans répondre par un conseil ou par un rapport consciencieux. Aussi voyons-nous s’'augmenter , chaque année, le nombre des Mémoires qui nous sont adressés de toutes les parties de la France. Nos séances intimes sont , er quelque sorte ,agrandies et vivifiées par cette correspondance avec le dehors. L'Académie, loin de se plaindre du surcroît de tra- vail que nécessitent de nombreux rapports, des réunions spé- 388 MÉMOIRES ciales, des visites d'atelier, sollicite ces relations avec les vrais amis de la science, et elle offre à leurs recherches, à leurs mé- ditations , les récompenses dont elle peut disposer. Votre Com- mission des médailles se plaît à constater que le nombre des travaux qui ont mérité des distinctions particulières s'est beau- coup accru depuis l'année dernière. L'importance et l'utilité de ces travaux, au point de vue de la science pure et de ses applications, ressortira naturellement de l'analyse succincte des rapports de nos confrères, que nous devons vous présenter. Pour conserver un ordre rationnel, nous vous entretiendrons d’abord des Mémoires relatifs aux questions mathématiques et industrielles; nous grouperons en- suite ceux qui ont l’histoire naturelle pour objet. Une Commission , composée de MM. Vitry, du Mège, La- roque, Daguin, Petit, Brassinne, a été chargée d'examiner un Mémoire de M. Gabolde, relatif à la navigation sur les canaux en général, et en particulier sur les canaux du Midi. La partie la plus essentielle de l'ouvrage est consacrée à l'étude des lois de la résistance que les fluides opposent aux corps en mouvement. Ces lois, établies d’abord par Newton, ont été suc- cessivement modifiées, à la suite d'expériences nombreuses, par d'Alembert, Bossut, Dubuat, Morin , d'Aubuisson, etc. L'ingénieur anglais Russel a étudié spécialement la résistance qu'éprouvent les corps flottants sur les canaux. M. Gabolde s'est proposé de vérifier par ses propres expérien- ces les résultats des hydrauliciens qui l’ont précédé, et de les modifier, s’il y a lieu, surtout par le cas pratique de la naviga- tion intérieure. Il a fait usage, dans ses essais, de bateaux des formes les plus variées, depuis le bateau de poste aux formes arrondies, jusqu’au coutrillon, que d'Aubuisson compare à une espèce de coffre. Par suite de ses longues recherches, l'auteur du Mémoire croit pouvoir affirmer que les résultats de Dubuat, relatifs à la résistance sur les canaux, ne méritent pas de eon- fiance , mais que ceux de Russel sont suffisamment exacts lors- que la section du bateau n'excède pas le tiers de celle du canal. Néanmoins, l'ingénieur anglais n’aurail pas dû négliger, DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 389 comme il le fait, le terme de la résistance provenant de l’adhé- sion de l'eau aux parois du bateau, dont l'immersion par- tielle pendant le mouvement paraît incontestable ; enfin , quel- ques résultats de M. Gabolde , relatifs aux bateaux légers, dif- fèrent de ceux du général Morin. Son Mémoire est terminé par des considérations sur les divers moteurs qu'on peut appliquer à la navigation des canaux, et sur leur importance au point de vue économique. Prenant en considération les études persévérantes que M. Ga- bolde a poursuivies pendant plusieurs années , sur un sujet qui non-seulement se rattache à l'étude des sciences proprement dites, mais encore dont les résultats peuvent avoir une heu- reuse influence sur la prospérité publique, l'Académie lui dé- cerne une médaille de vermeil. Si nos encouragements sont acquis , à juste litre, aux expé- rimentateurs habiles qui cherchent à perfectionner les branches de l'hydraulique applicables à l'industrie, nous ne devons pas moins estimer les améliorations introduites dans les professions les plus répandues , surtout si ces améliorations ont pour ré- sultat la substitution d’une machine à la main de l’homme. Dans les arts du menuisier , da charpentier , de l’ébéniste, par exemple, les assemblages nombreux dont on fait usage sont travaillés par des ouvriers habiles, avec lenteur et difficulté. Et quoique ces assemblages aient presque tous pour principe le tenon et la mortaise , il n'existe guère de machines d’un prix modéré, qui les exécutent avec précision. MM. Maybon et Baptiste, dont l'établissement a été visité par une Commission composée de MM. Vitry, Petit, Guibal , Brassinne , ont résolu, avec un plein succès, cet important problème, En 185%, ils ont construit une machine dont toutes les parties , à l'exception de l'outil , étaient en bois. Des modifications heureuses ont suivi cette première invention Le bois a été remplacé par le fer et la fonte; et, en 1855, l'appareil à mortaises a atteint un rare degré de perfection. L'outil est un ciseau creux de section carrée à quatre tranchants , doué , dans le sens vertical , d’un mouve- ment de va-et-vient. Dans ce mouvement il perfore la pièce à 9° S.—TOME I. 26 390 MÉMOIRES mortaiser placée au-dessous. En substituant au ciseau creux une double bédane, le même mécanisme l'applique à l'exécution du tenon. Le moyen employé pour diriger le ciscau, pour le dégorger, d'autres accessoires de 1a machine, qui exécute avec rapidité et perfection des assemblages de dimensions très- variables, ont fixé l’attention de votre Commission, et elle a pensé que la création de l'établissement de MM. Maybon et Bap- tiste était, pour notre cité, un véritable progrès dans les arts mécaniques. L'Académie décerne à ces honorables industricis une médaille de vermeil. La mécanique , vous le voyez, exécute sur le bois des opéra- tions délicates, qui ne sont ordinairement confiées qu’à des ouvriers exercés : son emploi , pour donner des formes définies aux matériaux de construction, n’est pas moins avantageux , comme l’a bien démontré M. Galinié {Bertrand }, en soumet- tant à l'examen d'une Commission composée de MM. Sornin, Petit, Brassinne, sa machine à tailler la brique. Dans notre cité, et dans plusieurs villes du Midi, la brique cuite est presque exclusivement employée pour la construction des édifices, des murs de quai, des aquedues , etc. Son utilité et son prix élevé, font depuis longtemps désirer que des modi- fcations apportées à sa fabrication la rendent plus parfaite et surtout plus économique. Des avantages réels seraient obtenus si les fours et les chantiers étaient placés loin des grandes villes, dans des localités où la main d'œuvre, la matière première et: le combustible sont d’un prix peu élevé. L’accroissement et la facilité des voies de communication , par les canaux et les che- mins de fer, rendront sans doute possible, et sans inconvénient, l'éloignement des fours des grands centres de population. Après leur fabrication, une partie des briques livrées aux construc- teurs doit subir un travail de tailie, qui a pour objet de rendre rectangulaires les faces concourantes , de dresser celles qui font parement, d’amincir en figure cunéiforme celles qui doivent servir de claveaux ; enfin , de donner aux /ancis des profils dé- terminés. M. Galinié a cu l’heureuse idée d'effectuer la taille des bri- DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 391 ques au moyen de machines mues par l’eau. A cet effet, il em- ploie une force de dix chevaux { vapeur) empruntée à la chute du Bazacle, pour mettre en mouvement , 1° une scie circulaire qui trace un trait profond dans la brique, et commence, sans le terminer, le protil du lancis ; 2 une meule portée sur un axe horizontal, autour duquel elle a une rotation rapide, et dont une face verticale dresse, par un frottement vif, les bri- ques de parement , qui sont placées , au nombre de quatre , dans une espèce de chariot oscillant parallèlement à la face de la meule. Un seul appareil dresse 2000 briques par jour, et donne , tout compte fait, une économie de 90 pour cent sur la main d'œuvre. L'Académie pense que M. Galinié a réalisé l'exécution d’une idée très-utile pour nos contrées , et elle lui décerne une mé- daille de vermeil. Nous signaierons aussi à votre attention un de nos indus- triels distingués, M. Bouzigues, qui est parvenu à exécuter avec précision , économie , el sans autres ressources que celles de son outillage, le cosmographe de M. E. Burnouf. On sait que cet ingénieux appareil représente d’une manière heureuse les principaux mouvements de la terre et de la lune, tels que la précession équinoxiale, le mouvement en nœuds lunaires , du périgée , etc. Une grande perfection dans le travail est une condition indispensable au jeu de la machine. Votre Commis- sion, composée de MM. Petit, Vitry et Brassinne, a examiné avec soin le nouveau cosmographe, et elle juge que M. Bouzi- gues avait bien rendu la pensée de l'inventeur , et exécuté, à peu de frais, un instrument utile à l’enseignement. L'Académie adopte ces conclusions, et elle décerne à M. Bouzigues une médaille d'argent. Une pareille récompense est accordée à M. Espinasse, ouvrier aussi intelligent que laborieux , pour la belle exécution de ses clichés, employés pour les lettres de grande dimension. On sait que, depuis 1760 , il existe à Toulouse une fonderie typo- graphique | l'établissement Peyrane ) d'une grande importance, grâce à l'empressement que mettent les propriétaires à profiter 392 MÉMOIRES des progrès et des perfectionnements de l’art de la gravure et de l'imprimerie. À coté de cette maison , M. Espinasse a établi une fabrique de clichés, que notre confrère M. Vitry a examinés avec attention. Dans ce système, on fait usage de cloisons per- pendiculaires qui permettent de produire des hauteurs égales à celles des caractères mobiles , et de diminuer considérablement la matière. M. Espinasse a produit des lettres d’une belle exé- culion, quelques-unes de dimension colossale, qui répondent aux exigences des affiches à grand effet. L'Académie, exerce un acte de justice en lui décernant une médaille d'argent. Les procédés mécaniques appliqués à des conceptions abstrai- tes , ne sont pas une des choses les moins curieuses parmi les inventions humaines. Tout le monde a entendu parler avec surprise de la machine arithmétique due au génie de Pascal ; malheureusement cette admirable conception était trop compli- quée pour devenir populaire. De nos jours, elle a été remplacée par la règle à calcul, qui se trouve à la fois dans le cabinet de l'ingénieur et sur l’établi de l’ouvrier, et qui réduit la table de logarithmes en un instrument assez simple. M. Cunq, employé des ponts et chaussées , ancien élève de notre Ecole des Arts, a tenté de perfectionner cet instrument et d'en étendre l'usage. II a soumis à une Commission , composée de MM. Sornin, Petit, Brassinne, un nouvel appareil dont les divisions, au lieu d'être en ligne droite, sont tracées sur quatre couronnes concentri- ques ; trois de ces couronnes tournent autour d’une d'elles qui est immobile, une nouvelle échelle de division donne aux In- génicurs la vitesse théorique de l’eau, correspondant à une charge variable. La combinaison des couronnes mobiles , l’ex- tension du nouvel appareil , présentent des avantages réels sur l’ancienne règle; aussi l'Académie, pour récompenser les efforts persévérants de M. Cunq, lui décerne une médaille d'argent. Une médaille d'argent est aussi accordée à M. Lago , profes- seur au Lycée d’Auch, pour ses reliefs de géométrie, qui ont été examinés par M. Sornin. Ces reliefs en carton, d’un prix mé- diocre, qu’un élève apprend aisément à confectionner , peuvent DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 393 être employés avec succès dans les Ecoles primaires , secondai- res et industrielles, pour faciliter l'étude de la géométrie et des premiers principes de la géométrie descriptive. Il nous reste à vous présenter le résumé des rapports de nos confrères , sur les travaux relatifs aux sciences naturelles, qui nous ont été adressés pendant le cours de l’année dernière , et qui ont mérité vos suffrages. Nous mentionnerons d'abord les intéressantes recherches des débris fossiles du bassin sous-pyré- néen , dont l'importance scientifique s'accroît tous les jours. Les fossiles sans nombre que le hasard , où des explorations dirigées avec intelligence ont fait découvrir, ont prouvé aux natura- listes modernes , que la vie fleurit de temps immémorial avec une merveilleuse variété de formes, sur l'écorce tourmentée de notre planète, et ils ont pu reconstituer en partie avec des dé- bris, une série de créations animales éteintes depuis des siècles. Leur étude a été pour les philosophes un témoignage de plus de l'unité et de l’immutabilité des lois divines, et pour la géologie, encore à son berceau , une lumière et un secours inattendus. Les races d'animaux des époques reculées, enfouis dans les couches supérieures du globe terrestre, donnent au terrain qui les renferme, des caractères spéciaux que la science emploie sans cesse dans ses classifications. Notre confrère M. Leymerie a examiné avec un grand soin les ossements fossiles découverts par M. Abadie (pharmacien au Fousseret }, qui a déjà mérité, l’année dernière, une médaille d'argent avec éloges. M. Abadie a continué ses explorations avec zèle et persistance , et il a fait de nombreuses découvertes d’ossements sur les points élevés du bassin sous-pyrénéen et dans la plupart des terrains sablonneux ou graveleux qui couronnent la formation miocène. Les osse- ments des environs du Fousseret sont même en entier dans le terrain miocène ; ce terrain est le prolongement horizontal des fameuses localités de Sansan et de Simorre dans le Gers, et la Faune du canton du Fousseret rappelle celle qui a été si heu- reusement ressuscilée par M. Lartet. L'Académie a jugé ces ré- sultats comme éminerament intéressants pour la géologie du 39% MÉMOIRES département de la Haute-Garonne , et elle a été d'avis d’accor- der à M. Abadie ane médaille de vermeil. Un second concurrent, M. Vieu, conducteur des ponts et chaussées , vous a présenté une précieuse collection de débris fossiles. Ces débris, trouvés en 1853-54-55 dans les cantons d'Aurignac, de Boulogne, de lIsle-en-Dodon, forment deux catégories distinctes, l’une appartenant à la période tertiaire { étage moyen}, l’autre à un ordre de choses plus récent qui se rapporte aux phénomènes de remplissage des cavernes. M. Vieu se recommande, comme M. Abadie, non-seulement par quelques découvertes dues au hasard, mais par un ensemble d’explora- tions susceptibles d’intéresser à un assez haut degré la géologie de nos contrées. Il a eu, de plus, la bonne fortune d’être témoin d'un fait très-curieux , de la présence du squelette entier du dinothérium, dans notre bassin sous-pyrénéen. Il est regrettable que cet immense squelette qui , d’après les indications des ou- vriers, occupait un espace de sept mètres en longueur et d’une largeur de quatre mètres, ail été détruit avant l’arrivée de M. Vicu, qui n’a pu sauver que quelques débris , notamment une belle portion de mâchoire portant une magnifique molaire. Néanmoins les connaissances même incomplètes qu'on peut ac- quérir, relativement à un animal dont la tête seule a été obser- vée et dont le squelette était si indéterminé , que certains pa- léontologistes célèbres (de Blanville ), en font un animal marin, sont d’an grand prix. M. Vieu a aussi le mérite d’avoir décou- vert dans une couche où ce genre de faits était inconnu , un gisement d’ossements appartenant à l'époque diluvienne : ces nombreux travaux justifient la décision de l’Académie , qui dé- cerne à M. Vieu une médaille d'argent avec éloges. Nous mentionnerons, enfin, le Mémoire de M. Martin Du- claux, médecin des épidémies à Saint-Julia , relatif à l’état des sécrétions dans quelques maladies palmonaires. Une Commission composée de MM. Filhol , Gaussail , D. Bernard , a examiné ce travail , dans lequel M. Duclaux confirme par des observations bien faites, ce fait connu : que toutes les fois que les voies de la respiration sont dans un état tel que l'hématose s’accomplit DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 395 incomplètement , les sécrétions des malades contiennent du su- cre. L'Académie accorde à M. Martin Duclaux une médaille de bronze. Vous pouvez juger , Messieurs, par ce résumé qu'il était difficile de faire moins long, l'importance et l'utilité des tra- vaux adressés celte dernière année à l’Académie. En finissant , nous inviterons, en votre nom , ceux auxquels vous avez dé- cerné des distinctions, à persévérer dans leurs efforts et à continuer avec nous des relations qui ne peuvent manquer d'être utiles à la science et au pays. Cet appel, nous l'adressons à tous les hommes d'étude , aux artistes, aux industriels, aux théori- ciens comme aux praticiens ; nos sympathies ne sont pas exclu- sives ; elles sont acquises à tous les hommes d'intelligence’, qui, dans la mesure de leurs forces , travaillent à l'édifice indéfini de la science humaine , qui s'élève tous les jours en se perfec- tionnant , et dont nous pouvons déjà entrevoir les merveilleu- ses proportions. 396 MÉMOIRES RAPPORT DE LA COMMISSION DES MÉDAILLES D ENCOURAGEMENT (CLASSE DES LETTRES); Par M. BARRY. Messieurs , Dans un temps comme le nôtre, où tout change, se déplace, se modifie au moins sous les apparences même de l’ordre et du repos, ce sont de véritables services rendus à l'érudition, à notre histoire elle-même, que de lui signaler quelques-uns de ces monuments de tous les genres qui disparaissent souvent sans laisser d’autres traces que celles que nous en recueillons ici. En instituant les récompenses que nous décernons aujourd'hui , l’Académie, comme on vient de vous le rappeler, n’a point eu d'autre but que d'encourager, en le développant, ce culte pieux des souvenirs ; et l’attention que vous portez aux simples rap- ports qu’elle vous présente , l'intérêt qui accueille les noms de ces savants ou de ces collecteurs modestes, étrangers pour la plu- part aux travaux el aux luttes académiques, nous prouveraient seuls que l'opinion publique a été tout-à-fait de notre avis. A Grandselve, que M. Jouglar a adopté depuis longtemps comme objet habituel de ses études, il y avait plus à faire qu'à constater et à décrire, car cette illustre abbaye, l’une des plus riches sinon des plus anciennes du comté de Toulouse, a disparu sans laisser de traces. Dans le travail étendu qu'il a soumis à vos suffrages , M. Jouglar ne s’est proposé rien moins que de resti- tuer ce monument disparu , comme on restitue les temples ou- bliés de Memphis ou d'Athènes. En s’aidant de quelques-uns des débris échappés à ce récent naufrage, des documents imprimés ou manuscrits qu'il a pu recueillir, des procès-verbaux détaillés DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 397 qui furent dressés à l'époque de la suppression de l’abbaye, il a essayé d'en retrouver le plan, d'en rétablir la disposition géné- rale, d'en reconstruire les bâtiments , d'y replacer jusqu'aux dé- tails du mobilier et de l’ornementation intérieure. Nous sommes loin de prétendre que l’auteur de cette monographie ait rempli tout entier le programme difficile qu'il s'était tracé. On a trouvé, dans la Commission dont je suis l'organe, que les documents qu'il invoque étaient empruntés en général à des époques trop modernes; que certaines parties de son travail rappelaient de trop près des livres connus de tout le monde, la Gallia christiana, par exemple; que ses appréciations comme sa critique man- quaient parfois de largeur et d’impartialité. La révolution, dont il est difficile de ne pas dire du mal dans une histoire mo- nastique , pour peu que l’on s’identilie avec son sujet, a eu le résultat fort inattendu à coup sûr d’entourer, sans distinction , d'une espèce d’auréole ces monuments confus et disparates sou- vent que nos pères admiraient certainement beaucoup moins que nous ne le faisons aujourd’hui, qu’ils ont pris rarement la peine de nous signaler et de nous décrire; et, quelque regretta- bles que soient toujours les violences , nous rappellerons en pas- sant que les siennes n’ont porté le plus souvent que sur le mau- vais art et sur le mauvais goût des époques monarchiques qui travaillait , depuis deux siècles, à substituer ses productions sans caractère et sans foi à l’art sincère et inspiré des époques romanes et ogivales, regardées alors et traitées comme barbares. L'Académie cependant a voulu tenir compte à l’auteur, qui est jeune , à ce que l’on assure, de la hardiesse même de son entre- prise, des détails intéressants qu’il a pu recueillir sur les der- niers moments de sa chère abbaye, de la description détaillée qu’il nous a donnée (sans dessins, il est vrai) de ses vases sacrés et de ses reliquaires qui ont trouvé asile dans la petite église du village de Bouillac , et elle lui a , à ces titres divers, décerné la première de ses récompenses , la médaille de vermeil. Il y a si loin des études ascétiques de M. Jouglar aux recher- ches d'économie publique et privée de M. Trescazes, sur le renchérissement des denrées de consommation, et en particulier 398 MÉMOIRES sur celui de la viande de boncherie, que j'aurais quelque peine à établir uve transition de l’un à l’autre de ces mémoires , si je ne la trouvais dans la nature encyclopédique de nos propres travaux ct dans notre désir unanime de provoquer des recher- ches utiles et sérieuses , quel que soit du reste l’objet qu’elles se proposent, la méthode qui les dirige, l'esprit même qui les anime. A quel titre d’ailleurs l'Académie, qui est le pays lui- même, resterait-elle étrangère ou indifférente à des problèmes d'un intérêt tout actuel, qui touchent, par leurs côtés élevés, aux questions de perfectionnement où d'amélioration agricole, d’acclimatation et de croisement des espèces , d'hygiène publique et privée, d'économie domestique et politique, c'est-à-dire, à la plupart des sciences dont nous nous occupons. Sans avoir eu cer- tainement la prétention d'épuiser un sujet aussi vaste et aussi complexe, M. Trescazes a au moins le mérite de l'avoir abordé avec sincérité et avec franchise. Il ne s’est pas contenté de si- gnaler les causes anciennes ou modernes de cet état de choses qui touche au développement même de notre civilisation, à ses temps d'arrêt ou à ses brusques secousses. Il a essayé d’en‘indi- quer les remèdes pratiques, les moyens de rétablir l'équilibre détruit aujourd’hui entre la production et la consommation ; et l'Académie, en lui décernant une de ses médailles d'argent, n’a cru que rendre justice à un esprit judicieux et éclairé , animé toujours d’intentions droites et pures. Le bat primitif de l'institution des médailles que nous décer- nons aujourd'hui, leur but unique, à l'origine, avait été d’en- courager , en les récompensant , les découvertes d'archéologie ou d'histoire naturelle que des fouilles heureuses, que des re- cherches intelligentes viennent fréquemment exhumer sur un sol habité, civilisé même depuis des milliers d'années, de les amener au moins à une publicité relative, la seule que com- portent ces travaux ou ces découvertes, et il est assez singu- lier que nous ayons reçu moins de communications de ce genre dans une année où tant de terres ont été remuées à côté de nous, presque sous nos pieds. Un seul concurrent a répondu cette année à l'appel de l'Académie, et notre impartialité de DE L'ACADÉMIE DES-SCIENCES. 399 rapporteur nous oblige à déclarer qu'il ne touche ni de près ni de loin à l'administration des chemins de fer du Midi dont le sol fertile et plein d'avenir pour tout le monde, nous aimons à le croire, est resté pour nous avare et improductif. En faisant exécuter des fouilles à Rennes-les-Bains, à très- peu de distance de l'établissement thermal dont il est proprié- taire, M. de Fleury a pu se convaincre par de nouvelles et in- téressantes découvertes, que ces thermes avaient été, comme la plupart des eaux thermales de la Gaule, connus et exploités par les Romains , et que cette gorge déserte, d’un aspect sau- vage, recèle encore de nombreux vestiges de leur civilisation monumentale. En homme de sens et de goût, M. de Fleury n’a voulu ni choisir ni exclure parmi ces débris de toute espèce que lui livrait le sol antique. A côté de simples tessons de po- terie grossière ou de ces fines poteries rouges à relief { poteries de Samos ) que consommait et que produisait peut-être la Gaule tout entière, car on les trouve partout , on y voit des fragments d’antéfixes d’un grand caractère qui servaient à la décoration du toit de quelque édicule ou petit temple, des fibules et des bou- cles de formes variées , une main monumentale en marbre blanc qui doit avoir fait partie de quelque statue drapée, dédiée ou offerte à la divinité bienfaisante de la source thermale , en sup- posant que ce ne soit pas cette divinité elle-même, car la main est encore chargée de la patère au-dessus de laquelle s’enroule un serpent, le serpent salutaire d'Hygie ou de la Santé. J'allais ou- blier quelques fragments d'inscriptions, trop mutilés évidem- ment pour qu'il soit possible d’en rien tirer, mais qui nous prou- vent au moins, rapprochés surtout de quelques monnaies de Néron et de Nerva, recueillies au milieu de ces débris, que la pros- périté des thermes antiques de Rennes remonte aux plus beaux temps de la civilisation romaine dans les Gaules. Quelques dé- bris de plus , quelques nouveaux fragments, par exemple , des inscriptions dont nous venons de parler, nous révéleraient peut- être le nom inconnu jusqu'ici, de ces thermes antiques, et en décernant à M. de Fleury une de ses médailles d'argent avec éloge , l'Académie a tenu surtout à l’encourager dans la voie de recherches fructucuses où il est entré. h00 MÉMOIRES I nous est impossible d'oublier, en terminant, que c'est prés du lieu dont nous venons de parler, à peu de distance de ses thermes antiques, dont l'éclat se révèle ainsi par degrés, que l’on a découvert, dans la seconde moitié du siècle dernier, un des objets les plus curieux et les moins connus de notre Musée, qui ignore souvent ses propres richesses, les débris de ce char de bronze que le Musée du Louvre nous envie. Sans l'esprit éclairé et généreux d'un de nos anciens confrères, M. de Saint-Amans + qui sauva de la destruction les deux roues de ce bige, dont les débris sont venus successivement se réunir dans la collection de l’ancienne Académie, point de départ, comme on lesait, du Musée actuel ; sans les soins intelligents et attentifs qu'a mis M. de Fleury à sauver et à recueillir les débris qu’il a soumis à notre examen ; que serait-il resté de ces découvertes intéres- Santes qui viennent de loin en loin éclairer quelque coin de notre vieille histoire en enrichissant notre art d'idées, de types ou de formes nouvelles? Que resterait-il des découvertes qui s’opèrent encore de loin en loin sur les points les plus inattendus de notre sol, sans l'attention pieuse de quelques hommes ins- truits qui s'intéressent encore à ces souvenirs du passé, et qui essayent avec nous de les soustraire à une dispersion ou à une destruction inévitable. Le but que s'était proposé l’Académie en instituant , il y a quelques années, ces médailles d’encourage- ment , était précisément d'offrir un centre et un lien à ce mou- vement brisé d’investigations et de recherches, d'en constater et d'en apprécier les résultats, de les fixer par la description et le dessin s’ils en valaient la peine. 11 y a là intérêt si évident pour les inventeurs comme pour les découvertes, utilité si réelle et si facile pour la science, que nous persistons à croire que notre appel sera entendu, et que l’heureuse idée que formu- lait, il y a trois ou quatre ans, le Président de notre Académie, finira par porter des fruits sérieux et utiles. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. hO1 NOTICE HISTORIQUE SUR M. BELHOMME, MEMBRE RÉSIDANT DE L'ACADÉMIE ; Par M. ou MÈGE. Messieurs , En rappelant à vos souvenirs affectueux le nom d’un homme de bien , qui fut, pendant plus de vingt années, notre con- frère et notre ami, je n'aurai recours ni à une phraséo- logie pompeuse, ni aux artifices du langage. Je dirai avec sim- plicité ce que fut ce savant recommandable, et j'indiquerai les divers travaux qui honoreront sa mémoire. En province, l’é- loge d’un homme de lettres, qui ne rechercha point les dignités politiques (1), ne consiste, le plus souvent, que dans le récit d'une vie modeste et laborieuse , et dans une juste appréciation de ses écrits. GuiLLauME-GasparD BELHOMME naquit à Castres , où sa fa- mille, originaire du duché de Lorraine, était en possession de l’estime générale. Au temps de nos discordes civiles, elle donna des preuves d’une moralité profonde , convaincue que l’attache- ment aux strictes prescriptions de l'honneur était préférable à tous les avantages de la fortune. Petit-neveu d'un savant ecclé- siastique , Dom Belhomme , de Moyen-Vic, notre confrère reçut dans le séminaire du diocèse d’Albi une éducation pieuse (1) Parent de M. le Général Excelmans , devenu, plus tard, Maréchal de France et grand Chancelier de la Légion d'honneur, M. Belhomme aurait pu obtenir de hautes fonctions ; mais, fidèle à ses goûts studieux, fidèle aux gloires du Languedoc , il n’a montré d’autre ambition que celle d’éclairer, par de savantes recherches , les Annales de cette partie de la France. k02 MÉMOIRES qui semblait le préparer aux saintes fonctions du sacerdoce. Dès ses premières années. il avait entendu parler avec respect de ce vénérable clergé de France, naguères, alors, en butte à une persécution longue et cruelle, et qui, dans Castres même, avait compté plusieurs martyrs; il admirait le dévouement des mi- nistres des autels, et il aurait voulu limiter. Mais des circons- tances douloureuses le détournèrent , à son grand regret, de la carrière qui semblait s'ouvrir devant lui. IL vint alors à Tou- louse dans le dessein de perfectionner ses études historiques ; mais là n’existaient point encore ces cours savants, intéressantes préparations à des élucubrations plus profondes, et que l’on croyait être reservées à ceux qui, dans la capitale, pouvaient suivre les leçons des écrivains les plus profonds, des savants les plus dignes d'estime. Retenu en Languedoc, il crut pouvoir suppléer par des lectures suivies à ce qui lui manquait pour acquérir la science des anciens jours. Des voyages nombreux, et constamment signalés par des observations importantes, lui prouvèrent bientôt que ses lectures ne sufliraient point pour le placer au nombre de ce petit nombre d’érudits , dont l'ambition est toujours satisfaite alors qu’ils ont le bonheur de rendre aux Annales de la France des pages depuis longtemps perdues. IL accompagna dans tout le Languedoc, dans une partie de la Provence et dans les Pyrénées , l’un des membres de cette Aca- démie, et souvent il sut, par des remarques qui lui ont mérité une haute estime, jeter des lumières nouvelles et inattendues sur des points historiques fortement controversés. Il admira les amphithéâtres d'Arles et de Nîmes. Saint-Gilles lui montra son église monumentale, et ce ne fut point sans manifester une vénératien profonde , qu'il foula le sol d’Aigues-Mortes , où tout parle encore et du saint Roi et des nobles entreprises des Chevaliers français saisissant leur redoutable épée pour délivrer du joug avilissant de l'Islamisme le berceau de la reli- gion chrétienne. Peu avant cette époque, dont notre confrère aimait le sou- venir, des recherches heureuses, provoquées par l’un des mem- bres de cette compagnie, avaient rendu à l'Histoire et aux Arts DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES, 103 cette longue série de sculptures qui ont enrichi notre Musée ar- chéologique. On le sait, ces découvertes, qui ne furent point l'effet du hasard, eurent un grand retentissement : l'Europe savant(e s’occupa de ces champs de Martres où , chaque jour, on exhumait des restes précieux. Notre confrère vint alors passer quelques heures près de celui qui avait eu le bonheur d'enlever à l'oubli ces monuments si beaux et si nombreux. Dans son en- thousiasme , et dans son désir de tout conserver , M. Belhomme aurait voulu tamiser eu quelque sorte la poussière de ce sol classi- que qui avait gardé pour nous les images des déités de la Grèce et de l'Italie , et celles des anciens dominateurs du monde Romain. Mais bientôt des menaces, demecurées heureusement impuis- santes, firent naître des craintes pour une notable portion de ces monuments , et ce fut pour les défendre, ce fut pour agrandir le champ des études sérieuses que fut fondée la Societé archéo- logique du midi de la France, qui eut pour chef le Marquis de Castellanc, révéré comme le bienfaiteur des pauvres, et qui cachait, sous les dehors de l’homme du monde, les talents de l'artiste et la science de l'historien. M. Belhomme devint non- seulement l’un des fondateurs de cette nouvelle Académie, mais aussi l’un de ceux dont les travaux furent les plus remarqués parmi ceux que publia cette Société. Dans le nombre on distingua surtout l’opuscule dans lequel il démontra que sa ville natale devait son origine à l'une de ces stations militaires que Rome échelonnait dans les contrées qui lui étaient soumises. De nom- breuses communications faites à la Société archéologique avaient montré tout ce que M. Belhomme avait de talent et de zèle, et l'Académiel'admit dans son sein, non par unesorte de faveur, non comme un encouragement, mais parce qu'elle avait la certitude qu'il justifierait le choix de la compagnie par de nouveaux efforts, et, s’il était possible, par de plus intéressants travaux. L'Académie ne s'était pas trompée. Le Recueil de ses Actes renferme beaucoup d’écrits dus à la piume facile de M. Belhom- me, et qui, tous, font connaître des faits importants, négligés par les historiens, des institutions respectables , des personnages vertueux et dont le nom ne devait pas mourir. h0k MÉMOIRES Livré entièrement à ces recherches, toujours pleines de char- mes, notre confrère semblait oublier et les intérêts du présent et même ceux de son avenir. Cependant il n'était pas riche. En province, la profession d'homme de lettres, alors qu'elle n’at- tache point au corps enseignant , esl toujours improductive. Peyresc, Seguier, Ménard , et une foule d’autres, auraient, on peut l’affirmer, été en proie aux privations les plus nombreuses, si leur fortune personnelle ne les eût préservés de toute préoc- cupation pénible, de tout souci domestique. Mais un emploi qui jusqu'alors n'avait, dans la hiérarchie administrative, été ins- crit que pour mémoire, fut transformé en une place impor- tante par les résultats que l’on pouvait en espérer. Chaque Préfecture dut avoir un archiviste, et M. Belhomme, chargé de cette fonction pour la Haute-Garonne, obtint et mérita toute la confiance , toute l'estime des magistrats sous l'influence desquels il allait remplir des fonctions difficiles et qui supposaient à la réunion de connaissances diverses , et à une étude approfondie de l'histoire générale, celle de l'histoire locale dans ses plus minutieux détails. La création du corps des archivistes provinciaux fut un bien- fait réel. Mais des esprits chagrins , qui semblaient ignorer toute l'importance des souvenirs , osèrent blâmer cette création. « Pourquoi donc, disaient-ils, ce luxe d'archives? Pourquoi garder avec soin ces liasses poudreuses qui ne nous apprennent rien de ce qui peut assurer le bonheur matériel des masses populaires ? » A ces sophismes on a répondu : « Voyez comme le monde instruit s’émeut , alors que quelques savants vont visiter les catacombes, les hypogées de la grande Diospolis ; voyez quel enthousiasme se produit alors que ces savants retrou- vent, sur la terre conservatrice de l'Egypte, quelques légères feuilles de papyrus sur lesquelles sont inscrites et les prières adressées aux dieux de l’antique Misraïm , et les lois , les déci- sions, jusqu'alors inconnues, des Pharaons ct des Ptolémées , et méme les simples transactions des particuliers les plus obscurs ; cependant il n’y a là rien de ce qui est relatif à ce que l’on nomme le bonheur matériel. Et nous , descendants d'une vieille DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 405 ration , nous pourrions demeurer étrangers à tout ce qu'ont fait nos aïeux ! Ces archives, échappées en grande partie à toutes les causes de destruction, renferment les pensées, le tableau vrai des croyances, des institutions de ceux auxquels nous avons succédé. Voilà les textes originaux des lois qui ont régi le pays pendant une longue suite de siècles; voilà les ordon- nances du saint Roi ; voilà les écrits signés de sa main; voilà les chartes d’affranchissement ; voilà les fors, les priviléges et les coutumes de nos provinces ; voilà ces fondations pieuses, où respirent encore et l’ardente charité et la piété de ceux qui ne sont plus ; voilà toute notre histoire, non comme elle a été écrite trop souvent par des hommes passionnés, et d’après des idées préconçues, mais l'histoire vraie, mais ses monuments trop sou- vent méconnus. Recueillir avec amour, conserver avec respect ces vénérables moniteurs, n'est-ce pas, surtout en France, faire un acte de vrai patriotisme? N'est-ce pas sauvegarder une notable portion de la gloire d'un grand peuple, qui ne voit dans son passé, en dépit de toutes les vicissitudes de la fortune, que des faits dignes d'une admiration profonde, que des actes dignes d’ane éternelle mémoire? » M. Belhomme comprit toute l’importance de la tâche que lui imposait le litre qui venait de lui être décerné, et cependant, que de difficultés s'offraient devant lui ! Dans le territoire assigné pour la formation du département de la Haute-Garonne, il existait trois diocèses ; deux d’entre eux furent supprimés en 1790 (1). De nombreuses abbayes , des mo- nastères plus nombreux encore, des corporations, tenant par leurs statuts à l'église, eurent le même sort. Chaque diocèse, chaque institution avait des archives ; le tout fut d’abord jetésans ordre dans les salles de l'Administration de chaque district, puis de même placé sans ordre dans les archives départementales de Toulouse. On y entassa aussi tout ce qui était relatif à l'Admi- nistration politique , à l'Intendance , aux Subdélégations, aux Etats provinciaux du Languedoc. Certes, en réunissant tous ces (1) Ceux de Comminges el de Rieux. 5° S,— TOME I. 27 k06 MÉMOIRES documents , on n'avait point la pensée de les détruire tous à la fois ; mais les événements de chaque jour amenaient de nou- veaux hommes au pouvoir , et des orateurs fougueux demandè- rent souvent la disparition de tous ces objets qui rappelaient un ordre de choses que l’on ne voulait pas même mentionner com- me ayant existé. Il y eut alors des commissaires chargés d’épu- rer, ce fut le mot dont on se servit, les archives départemen- tales, et cette épuration consistait dans le choix des objets à garder et de ceux qui devaient être jetés dans les flammes. Ces commissaires commencèrent leur travail devenu de plus en plus difficile , car il ne s’agissait de rien moins que de retirer de ces monceaux de registres, de liasses de diverses espèces , que l’on trouvait dans les archives départementales , tout ce qui était , comme on le disait alors , extaché de féodalité ou de fanatisme. On recula devant une recherche si longue, et ce fut un vrai bonheur ; mais on avait tout entassé , tout mêlé , et l’on avait opéré, non pas un choix , mais un chaos qui sem- blait inextricable. Par les soins de M. Belhomme, ce chaos fit place à un ordre parfait. Chaque registre, chaque dossier prit la place qu'il de- vait occuper; on retrouva tout ce qui restait de nos vieux ordres chevaleresques , éternel honneur de la France ; les Tem- pliers, les Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem , reparurent avec leurs chartes; les abbayes, les monastères, supprimés pour toujours, reprirent en quelque sorte une nouvelle existence; on retrouva leurs titres de fondation et les noms de leurs bienfai- teurs ; la hiérarchie épiscopale recouvra ses annales ; l’admi- nistration provinciale , alors peu étudiée, admirée maintenant, put justifier par des actes nombreux le bien qu’elle avait fait et celui qu'elle avait projeté ; l’état des classes populaires, si peu connu , put enfin être déterminé par de sérieuses études basées sur des documents authentiques. Tout ce grand travail fut l’œuvre de peu d'années; mais ces travaux n’empêchèrent point M. Belhomme de s'occuper de l’ar- chéologie en général et des découvertes qui pouvaient accroître les richesses de notre Musée. Notre confrère savait qu'il ne suffi- DE L’ACADÈMIE DES SCIENCES. 407 sait point d’ajouter à l'intérêt des annales du moyen âge , et de peindre l’état de la société religieuse, civile et politique à des époques peu éloignées, et cependant trop peu appréciées, trop peu connues. Il sentait le besoin , éprouvé par beaucoup d’au- tres savants, de montrer ce qu'étaient, sous le rapport artistique, la Gaule Narbonnaise et l’Aquitaine , sous la domination des Romains. Ainsi, lorsqu'il apprit que des restes remarquables de sculpture avaient été découverts à Béziers, il sollicita de Ja Société archéologique l'honorable mission d'aller les recueillir, et cette Société, oubliant le peu de ressources dont elle pouvait disposer, seconda puissamment le zèle de notre confrère. Le Musée de Toulôuse posséda quelques bustes historiques de plus, et entre autres celui d’Agrippa , cet heureux ami d’Octave. Ce zèle actif, éclairé , n’abandonna point M. Belhomme , alors que la création du Canal latéral à la Garonne put faire espérer la découverte de quelques objets antiques, dans les fouilles entreprises pour l'établissement de cette ligne navigable. Un jour , en cflet, il apprit que des ouvriers avaient trouvé un torque antique en or et des bracelets de même métal; tous ses soins furent alors dirigés vers les moyens de persuasion, qu'il espérait être assez puissan(s pour obtenir la cession de ces objets; il ne réussit point; mais l’autorité prévenue, allait prendre des mesures pour parvenir à une restitution. L’édilité toulousaine ne voulut point que l’on eût recours à la rigueur, et racheta gé- néreusement ces monuments précieux qui seraient l’ornement d’un Musée, s'ils y étaient offerts à la curiosité publique. Pendant ces travaux, spécialement archéologiques, notre ho- norable confrère ne cessait point de rechercher dans les archives confiées à ses soins , tout ce qu’elles contenaient de piquant ct d’inédit ; il faisait avec empressement à tous les hommes d’é- tude, les honneurs de l'établissement qu'il dirigeait avec une distinction dont le souvenir ne doit pas s’éteindre parmi nous. L'histoire de la constitution politique de nos villes était en quelque sorte inconnue, il ya peu d'années encore; les écrivains n'avaient porté le plus souvent leur attention que sur les faits généraux , et cette sorte d’oubli ôtait aux annales de nos cités h08 MÉMOIRES leur intérêt réel , en les privant de tous les détails attachants qui peuvent nous retracer la vie propre de chaque localité. Pour y suppléer, et profitant de cette lacune immense , des écrivains passionnés avaient tracé des tableaux, la plupart incomplets, et dus trop souvent à une haine instinclive contre le moyen âge, et contre ses institutions que l’on n’avait pas sérieusement étu- diées. Cependant, des documents nombreux échappés par hasard au temps destructeur et à des causes plus actives , à la méchan- ceté des factions , à la stupidité de quelques hommes, et à l’in- curie de beaucoup d’autres , existent encore, et nous font con- naître en détail les habitudes et les lois de cette vicille société, calomniée durant près de deux siècles, et qui ne peut se défendre aujourd'hui que par ses monuments. Les annalistes de Toulouse avaient négligé cette source si riche en aperçus nouveaux et en peintures de mœurs depuis longtemps oubliées. Mais les progrès réels des études historiques, progrès qui honoreront toujours notre époque , exigeaient l'examen approfondi de nos archives, et parmi ceux qui ont le plus contribué à ce travail, dont l'im- portance ne peut plus être mise en doute , on distingua surtout l'honorable confrère dont nous regretterons longtemps la perte. L'administration de la ville de Toulouse, sous le pouvoir pa- ternel de ses Comtes, fut particulièrement l’objet de ses recher- ches. On croyait généralement que Catel avait réuni toutes les chartes émanées de ces princes. Les découvertes de M. Bel- homme en ce genre , ont prouvé ce que l’on osait à peine soup- conner, à savoir, que l'historien des Comtes de Tolose avait souvent mal lu les actes insérés dans son livre, et surtout qu'il avait ignoré l'existence d’une foule de ces documents , tous importants , tous remarquables , et qui prouvent que sous les Raimonds, la métropole de leurs Etats jouissait de toutes les franchises , de tous les biens qu’assure une sage liberté. Peu de mois avant sa mort, M. Belhomme a encore entretenu l’Académie de quelques autres chartes retrouvées par lui, et l'Académie a voulu que ce dernier travail fût inséré dans $es Mémoires : hommage réel rendu au souvenir de l’un de ses Membres les plus actifs , les plus dévoués à sa gloire. DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. k09 Ce ne fut point seulement par la découverte de Chartes in- connues que M. Belhomme honora sa carrière d’archiviste , ce fut aussi par celle d’anecdotes précieuses , entièrement plongées dans l'oubli, et qu’il recueillait avec bonheur. lci nous pourrions rappeler son curieux Mémoire sur le Christ dit de Saint-Remésy , et aussi celui relatif aux Bons Hommes (Boni homines), où des documents inédits jettent de nouvelles lumières, d’abord sur les vraies croyances des habitants de Toulouse , et aussi sur les erreurs des hérétiques du Languedoc au xm° siècle ; nous pourrions rappeler aussi une foule d’autres opuscules, tous relatifs à l’histoire locale, tous dignes d'intérêt, parce qu'ils font connaître des faits importants ; opuscules dont la réunion en un seul volume serait un monument durable élevé à la mémoire de l'ami que nous avons perdu. Dans ce Recueil, dont nous osons provoquer la publication , l’Europe savante qui s'intéresse à la mémoire des hommes célè- bres, lirait avec plaisir le travail relatif à Cujas. Vous le savez, Messieurs, Toulouse a été accusée d’avoir mé- connu le mérite éclatant de Jacques Cujas, auquel un homme médiocre , Forcatel, aurait été préféré pour l'obtention d’une chaire de professeur dans l'Université de cette ville. Depuis bientôt trois siècles, cette accusation a été formulée contre cette ville. Cependant, dans les livres du grand juriscon- sulte, dans nos archives et dans celles du Parlement, rien n’in- diquait l'existence d’un concours dans lequel Cujas aurait été vaincu , chose possible pourtant, si ce concours avait eu lieu , car à l'époque que l’on fixe pour celui-ci, l'homme dont la statue décore l’une de nos places publiques , n’avait pas, bien jeune encore, acquis la science et la renommée qui, dans la suite, ont immortaliséson nom.Cujas avait alors une Ecole particulière, et il était agrégé à l'Université, fonction honorable mais peu lu- crative , et Cujas était pauvre ; il demanda une pension plus forte que celle dont il était titulaire; il ne put l'obtenir, et alors il quitta sa patrie avec un autre jurisconsulte estimé, mais moins célèbre que lui. Ces faits étaient oubliés, et Toulouse h10 MÉMOIRES venait d’être de nouveau flétrie du reproche d’avoir méconnu le mérite éminent de Cujas ; mais des recherches dans les archi- ves de la ville procurèrent à M. Belhomme la découverte d’un rapport fait par Vincent Cabot au conseil général , et dès lors il fut démontré que Cujas n'avait pas succombé dans un con- cours ; qu'il avait volontairement quitté sa ville natale, et que celle-ci ne fut jamais injuste envers le grand jurisconsulte. Les travaux de notre confrère avaient attiré sur lui les re- gards des Académies , la confiance de la haute administra- tration ct la reconnaissance de l’un de ces hommes rares qui honorent toute une époque. M. Augustin Thierry l’a souvent remercié avec effusion de lui avoir fourni les moyens de résou- dre des problèmes importants relatifs à l’ancien état des classes populaires. Il fut compris parmi les Membres correspondants du Comité de la langue et des arts de la France. Aimé , estimé de tous ceux qui entretenaient des relations avec lui, heureux par une union qui devait, selon toute apparence , répandre une félicité parfaite sur sa vie, et qui n’a laissé à sa veuve éplorée que de longs et bien justes regrets , M. Belhomme nous a été enlevé, encore dans la force de l’âge, fidèle aux croyances et aux convictions de toute sa vie. Une maladie cruelle , triste fruit d'une incessante ardeur pour le travail, a détruit en lui les sources de l’existence. Mais espérons , Messieurs , que sa mémoire vivra parmi nous, et que ses travaux seront cités dans l'avenir. On l’a dit , et je me plais à le répéter : « L’écri- vain laborieux , semblable au flambeau qui reste dans l’obscu- rité alors qu'il éclaire tout ce qui l’environne , n'obtiendra peut-être qu’une gloire tardive , tandis que ses travaux toujours estimés , toujours utiles, offriront des sujets de profondes ré- flexions aux philosophes dignes de ce nom; des traits nouveaux au pinceau de l'historien , et surtout des peintures , des études intéressantes , parce qu’elles tiendront de près à nos affections , à l’orgueil national, aux lieux que nous habitons, et à la mé- moire toujours chérie , toujours vénérée de nos pères. » DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. L11 / NOTE SUR LES FIGURES DE LA FLORE DES PYRÉNÉES Et sur deux planches nouvellement découvertes appartenant à cet ouvrage ; Par M. C. ROUMEGUÈRE , Correspondant. L'ouvrAGE qui a pour titre ; Figures de la Flore des Py- rénées | grand in-folio vélin, Paris, imp. Dupont 1795), est une de ces publications de luxe qui marquèrent, avec les Flores d'Autriche et de Russie, la faveur dont jouissaient, à fin du siècle dernier, les travaux de botanique descriptive. La pre- mière décade, ou livraison, parut en 1794, et la deuxième en 14801. Là se borna malheureusement ce bel ouvrage qui de- vait former 4 volumes , et contenir l'illustration de #00 plantes de grandeur naturelle. { Foër la préface, page 5.) Lapeyrouse nous apprend plustard , dans l'avant-propos desa Flore abrégée des Pyrénées, que le format, le genre de gravure et le luxe typographique nécessairement dispendieux qu'il avait adoptés, le mirent dans la nécessité de suspendre la continuation de la première édition de sa Flore. En l’année 1812, 53 dessins, dit-il, étaient gravés; ce qui élevait le total des figures pu- bliées ou à publier à la même époque, à 96, puisque les deux premières décades en renfermaient #3. — Lapeyrouse consigna ensuite, dans le tome 1, p. 653 de la Flore abrégée, une table de 195 figures « publiées ou inédites » de la Flore des Pyrénées, rapportées dans l'édition in-8°. Il s'agissait dans cette table des #3 planches publiées et de celles que l'auteur avait en porte- feuille. Le fragment qui nous est resté de l'édition in-folio , est Fun 412 MÉMOIRES des plus beaux livres intéressant l’histoire naturelle de notre contrée qui ait encore été publié (je parle ici en bibliophile ). L'auteur ne s'était pas proposé un ordre méthodique de publica- tion ; il éditait ses genres ‘et ses espèces de plantes isolément , et selon l'avancement des illustrations qui devaient accompa- gnerletexte, imitant en cela les éditeurs de plantes desséchées. Quoique ce fragment ait été tiré à un assez petit nombre d'exemplaires, on le retrouve quelquefois dans le commerce de la librairie ancienne, avec le titre de Monographie des saxifrages, titre évidemment impropre, puisqu'il contient des genres et des espèces étrangers à cette famille de plantes. L’exemplaire de la bibliothèque de la ville de Toulouse, ins- crit sous le n° 110 du catalogue; celui de la bibliothèque du Muséum d'Histoire naturelle de Paris; celui du Muséum Deles- sert, quelques autres exemplaires appartenant à des bibliothè- ques particulières , et le mien, contiennent #3 planches (n°° 1 à 43), toutes gravées par Durisseau , et peintes par Redouté et par Laferrerie , architecte de Toulouse. J'étais autorisé à penser que les autres planches complémentaires étaient perdues, lors- qu'un heureux hasard, comme il en naît pour le collectionneur qui butine sur l'étalage du bouquiniste, m’a fait découvrir ré- cemment une décade de texte et à peu près toute l'édition des planches 44 et 46 de la Flore in-folio. — J'ai fait cette décou- verte, je pourrais dire presque dans l'escalier de l’Académie, chez le concierge, qui employait depuis longtemps le côté blanc du vélin à tracer des écriteaux ! Il est à remarquer que les planches connues ou mentionnées de cet ouvrage, représentent toutes des phanérogames , tandis que celles que j'ai retrouvées sont consacrées aux cryptogames pyrénéennes (lichens crus- tacés de la tribu des Parmeliaceæ, et des Endocarpeæ fort abondants sur les rochers granitiques de la chaîne); elles sont aussi intéressantes que les premières par la netteté du dessin , la beauté et la vérité du coloris. Au premier aspect, la mention de la découverte de deux plan- ches manquant à un ouvrage scientifique arriéré , inachevé, et dont personne ne parle plus, semblera un propos oiseux; mais DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 413 des considérations qui ont une importance relative, et que quelques-uns d’entre vous, Messieurs, adopteront peut-être, m'ont déterminé à vous en entretenir. La découverte des planches #4 et 46 de la Flore des Pyré- nées indique : 1° que Lapeyrouse avait l'intention de traiter la cryptogamie dans son grand ouvrage ; témoignage qui n'existe nulle part, ni dans ses propres ouvrages, ni dans ceux où il est cité. (Vous savez tous que cette section si importante des végétaux a été omise dans l'édition de 1818 , et que Lapeyrouse n’a rien imprimé touchant ces végétaux. ) 2° Elle révèle la gravure et la peinture de huit espèces ou formes de lichens propres à la chaîne des Pyrénées , qui n’avait donné lieu encore à aucune illustration en ce genre. 3° Elle fait connaître, comme collaborateur des illustrations de la Flore, un artiste toulousain , qui occupe un rang dis- tingué parmi nos annalistes, M. Auguste d’Aldéguier , quand vivait bibliothécaire de la ville, et qu’il faut regarder aujour- d'hui, à bon droit, comme peintre d'histoire naturelle. Je mets à la disposition de l’Académie 30 exemplaires des planches qui font l’objet de ma communication, l’autorisant à les offrir aux bibliophiles possesseurs d'exemplaires incomplets qui lui seraient connus , ou aux naturalistes, à titre de sou- venir lichenographique. Séance du 8 janvier. k1% MÉMOIRES BULLETIN DES TRAVAUX DE L'ACADÈMIE PENDANT L'ANNÉE 1857. M. le Secrétaire perpétuel donne connaissance des nombreux envois de publications scientifiques qui ont été faits à l’Acadé- mie pendant les vacances et provenant, soit de la France, soit de l'étranger. M. Paque, ingénieur à Liége, remercie l’Académie du titre de correspondant qui lui a été décerné. M. Sorni adresse une lettre à l’Académie pour lui exprimer ses regrets d'être obligé de se séparer d'elle, par les nouvelles fonctions qu'il est appelé à remplir au lycée de Versailles ; il demande le titre de correspondant. L'Académie, partageant les regrets de M. Sornin, décide que, conformément aux règle- ments, cet académicien sera inscrit parmi les correspondants. A cette occasion, M. Molins fait connaître que M. Sornin lui a remis, avant son départ, un travail de mathématiques dont il sera donné connaissance dans l’une des prochaines séances. M. Joy communique à l’Académie une lettre dans laquelle M. le colonel Gleizes, membre de l’Académie, annonce avoir fait, aux environs de Cazères , la découverte d’une vaste né- cropole occupant plus d’un hectare en étendue. Les fouilles de M. Gleizes ont eu pour résultat l'extraction, dans un périmètre de moins de 50 mètres carrés, de douze tombes en belle pierre de taille ou en marbre de Saint-Béat. L'une d'elles portait des sculptures, mais sans nul autre indice. Les plus grandes ont 1*87 de longueur sur 0"57 de largeur et 0"38 de profondeur. La face du cadavre était tournée vers l’orient. Toutes ces tombes étaient très-rapprochées entre elles ; quel- ques-unes étaient séparées des autres par une enceinte murée. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. h15 On a trouvé dans ce cimetière des débris informes de po- terie, quelques médailles du Bas-empire , entre autres une à l'effigie de Valens, en or et parfaitement conservée. Deux des sarcophages renfermaient des flacons de forme antique en beau verre, et contenant une liqueur colorée semblable à du vin. « Toutes les conjectures, dit M. Gleizes , et surtout l'absence de symboles religieux, rendent très-vraisemblable l'opinion que ces tombeaux appartiennent au v° ou vr siècle, alors que le culte Arien dominait dans le pays. Cette hypothèse m'est presque confirmée par la découverte que j'ai faite récemment dans une vieille construction voisine du cimetière , d’une pierre portant des caractères gothiques romains, avec la date CCCCC. » On ne peut douter, ajoute M. le colonel Gleïzes , qu’il n'ait existé une ville considérable dans le voisinage de cette nécro- pole. Quel était son nom? Par qui avait-elle été bâtie? Quels sont les barbares qui l'ont détruite? Questions difficiles à ré- soudre, et pour la solution desquelles je m'en rapporte aux lu- mières de ceux de mes confrères qui s'occupent spécialement d'archéologie, et particulièrement à celles de M. du Mège, qui connaît les lieux et à qui la science doit l’importante découverte de Calagorris. » M. du Mège prend la parole pour faire ressortir tout l'inté- rêt que présente la communication de M: le colonel Gleizes, et il émet le vœu que les fouilles de Cazères soient continuées avec le zèle éclairé qui a présidé aux premiers travaux. Il voudrait surtout que l’auteur de ces découvertes prit un calque des sculp- tures et de l'inscription mentionnées dans sa lettre. M. Joly est chargé par l’Académie d'écrire dans ce sens à M. le colonel Gleizes. M. le Secrétaire perpétuel remet sur le bureau un volumi- neux herbier, accompagné d’un Mémoire présenté pour le con- cours du prix ordinaire de l’année 1857. M. le Président an- nonce que le bureau général sera convoqué pour examiner ce travail ; il déclare ensuite que la barre est mise sur la liste des concurrents. 15 janvier. k16 MÉMOIRES Ces formalités étant accomplies, M. le Président entretient l'Académie des principaux faits qui se sont accomplis pendant les vacances. IL annonce que, selon l'usage, M. le Trésorier a procédé , contradictoirement avec le délégué de M. le Maire, au récole- ment du médailler déposé dans le Musée. Il communique officiellement la mort de M. le comte de Sal- vandy, membre honoraire , et de M. Belhomme , associé or- dinaire. L'Académie charge MM. du Mège, Ducos et Astre de présenter ses compliments de condoléance à M° veuve Bel- homme. M. le Président désigne M. Vitry pour faire l'éloge de feu M. Maguès, M. Dassier pour faire celui de M. Duffourc, M. De- lavigne pour faire celui de M. Fortoul. M. le Secrétaire de l’Institut de Milan adresse plusieurs pu- blications de ce corps savant ; il réclame en même temps deux volumes manquants de la collection des Mémoires de l’Aca- démie. M. le Ministre de l'instruction publique accuse réception des Mémoires qui lui ont été envoyés. M. Le Pennec, ancien élève de l'Ecole polytechnique, pré- sente à l'examen de l'Académie des études expérimentales et théoriques sur l’ajutage divergent de Venturi. — Renvoyé à l'examen de MM. Brassinne , Gascheau et Vitry. M. Decaviqne informe l’Académie que ses occupations et l'état de sa santé ne lui permettent pas de se charger de l'éloge de M. Fortoul. M. D. Bervaro dépose sur le bureau un paquet cacheté qui sera conservé aux archives. M. Mouws fait hommage d’un Mémoire imprimé, intitulé : De la surface développable passant par une courbe donnée quelconque, et qui par son développement transformerait cette courbe en un arc de cercle de rayon donné. Cet académicien dépose en outre sur le bureau un travail de DE L’'ACADÉMIE DES SCIENCES. 417 M. Sornin relatif à une méthode des approximations successives pour la résolution des équations. — Ce manuscrit est renvoyé au comité de librairie et d'impression. Au nom de M. le prince de Polignac, ancien élève de l'Ecole polytechnique, officier d'artillerie en garnison à Toulouse, M. Morws soumet à l’Académie un Mémoire manuscrit concer- nant la théorie des nombres. M. Molins donne un aperçu rapide de cet important travail, dont l'examen est renvoyé à une com- mission composée de MM. Brassinne , Gascheau et Molins. M. Ducos appelle l’attention de l’Académie sur une pièce ar- chéologique trouvée dans le voisinage de sa propriété, commune de Clermont, non loin de Vieille-Toulouse. Cette pièce en cui- vre, d'une parfaite conservation , et couverte de la patine an- tique, est l’agrafe d’un baudrier, munie de sa boucle et de son ardillon. Elle est ornée tout autour d'une facon de clous; sa surface présente divers guillochis, ciselés avec beaucoup de soin. Sa longueur est de 14 centimètres , sur 7 centimètres de largeur et 5 centimètres au bout le plus étroit. Les croix que l’on remarque dans des ciselures de forme circulaire, font pré- sumer que cette agrafe a appartenu à quelque chevalier chrétien et qu'elle remonte au premier âge de l'établissement du chris- tianisme dans nos contrées. C’est en déracinant un vieux chêne qu'on a découvert cet intéressant monument. M. Joy communique à l’Académie des considérations sur la vie physique et sur ses principales manifestations. (Imprimé, page 1. ) Cette lecture terminée, M. Barry demande la parole pour un rapport sur un ouvrage de M. de Barthélemy, intitulé : Histoire des établissements monastiques du Roussillon. — Après quel- ques observations de MM. Vitry et du Mège, le dépôt aux ar- chives est prononcé. M. Perrot , antiquaire à Nimes, adresse un Mémoire sur le prétendu polythéisme des Egyptiens. — Renvoyé à l'examen de M. du Mège. 22 janvier. k18 MÉMOIRES M. Jocy communique à l’Académie une découverte toute ré- cente, qui lui paraît offrir un très-haut intérêt, au point de vue physiologique. « Depuis longtemps, dit-il, Malpighi avait annoncé que des femelles de vers à soie, non fécondées, peuvent pondre des œufs susceptibles de produire des mäles et des fe- melles. Cette assertion , répétée par Hénold , et plus récemment par Filippi, n'avait cependant pas entraîné la conviction des zoologistes. On savait, toutefois, qu’au printemps , c’est-à-dire à une époque où il n’y a pas de mâles dans la ruche , les jeunes reines-abeilles pondent, sans fécondation préalable, des œufs d’où sortent des mâles , et rien que des mâles. On savait encore, depuis les belles observations de Dzierzon, curé de Silésie, qu'il en est de même des reines qui, dès leur naissance , sont ineptes au vol, et qui par conséquent n’ont jamais été fécondées. En effet, c’est seulement au retour de son voyage de noces dans les airs que la reine est apte à produire, à volonté, des œufs pouvant se développer en abeilles femelles (reines et ouvrières, ces dernières n’étant que des femelles incomplètes) , ou bien en abeilles mâles. » M. Joly annonce qu’un de ses correspondants d'Allemagne, le professeur C. Th. von Sichold, vient de découvrir des faits analogues chez les Psyché helix, papillons nocturnes voisins du Bombyx, et chez les Solenoviatriquetrella et S. Lichenella, espèces de teignes qui, à l'instar de celles des blés, se fabri- quent des fourreaux de soie où elles passent leur vie de chenille et de chrysalide ; Sichold a parfaitement constaté que des Psy- chés et des Solenovias femelles, parfaitement isolées dès leur naissance, ont produit des œufs, qui à leur tour ont produit des femelles et jamais aucun mâle. « Voilà donc, dit M. Joly, une vraie Parthenogénèse, éta- blie sur des faits judicieusement et scrupuleusement observés. » Da reste, tout extraordinaires et tout inexplicables qu'ils sont dans l’état actuel de la science, ces faits ne sont pas sans ana- logues, même dans le règne végétal. En effet , le Cælebogyne ilicifolia, espèce d'Euphorbiacée , DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 419 dont le mâle n'existe pas en Europe, produit partout et depuis longtemps des graines susceptibles de se développer. D’autres plantes, surtout parmi les plantes dioïques , ressemblent , sous ce rapport, au Cælebogyne. M. Lavocar , désigné par l'ordre du travail, communique à l’Académie un Mémoire sur un agneau double, appartenant à la famille tératologique des Sycéphaliens , c’est-à-dire dont les deux têtes sont réunies en une seule. {Imprimé , page 41.) M. Barry lit un travail sur les Eaux thermales de Lez à l'époque romaine, travail qui es incessamment dans la Revue archéologique. Au nom de la Commission nommée dans la précédente séance, M. Brassinxe fait un rapport sur un Mémoire présenté par M. le prince A. de Polignac, relatif à quelques formules très-générales concernant la théorie des nombres premiers. Dans ce Mémoire, M. de Polignac transforme et généralise une relation fondamentale, qu'il a fait connaître depuis quel- ques années; il obtient ainsi une égalité entre le produit de certaines puissances , de la suite naturelle des nombres et des produits de puissances analogues de nombres premiers. La Com- mission donne une entière approbation aux recherches origi- nales d@M. de Polignac, et elle pense que la voie dans laquelle est entré ce savant géomètre, est destinée à faire progresser une des branches les plus importantes de la science des nombres. M. Molins se joint à M. Brassinne pour applaudir aux décou- vertes faites par l’auteur; il se félicite surtout qu’elles aient été communiquées à l’Académie des Sciences de Toulouse, dans cette ville qui fut la patrie de Fermat , auquel la science doit les plus beaux travaux sur la théorie des nombres. A M. Saint-André, architecte à Toulouse, fait hommage à l’Académie d’un ouvrage publié 1813, par son père, et inti- tulé : Topographie médicale de la Haute-Garonne. MM. Baptiste et Maybon demandent que leur machine à faire les mortaises et l’ensemble de leur atelier soient admis 29 janvier 5 février. 120 MÉMOIRES au concours pour les médailles d'encouragement que l’Aca- mie doit décerner en 1857. M. ou Mëce, appelé par l’ordre du travail, demande le renvoi de son tour de lecture à une autre séance. Il annonce qu’il présentera prochainement son rapport sur le Mémoire de M. Perrot, concernant le polythéisme des Egyptiens. M. Barry fait un rapport sur des médailles antiques décou- vertes par M. Grat, dans le département de l’Ariége. Une médaille consulaire en argent, de la famille Marsia , deux petits bronzes de l’empereur Probus , un de Crispus, fils de Constantin, et un de Galien, ont été trouvés à Saint-Jean de Verges , où déjà d’autres monuments, recueillis par M. Grat, fixent incontestablement l'existence d’une station romaine. Deux petits bronzes de Galien et une pièce baronnale en ar- gent, avec légende effacée, mais qui paraît appartenir à la maison de Savoie, proviennent de la ville de Foix. Ces diverses découvertes, quoique moins importantes que celles précédem- ment communiquées , attestent le zèle de M. Grat, et l’Aca- démie exprime le désir que cet explorateur persévère dans cette voie de recherches qui peuvent amener des résultats utiles pour l’archéologie et l’histoire de nos contrées méridionales. Afin de provoquer les observations de ses confrères d@la sec- tion des mathématiques, M. Brassinne développe au tableau les principales modifications que M. Le Pennec propose de faire subir à l’ajutage divergent de Venturi pour l'appliquer à la construction des turbines. MM. Petit et Vitry prennent part à la discussion , après laquelle M. Brassinne annonce qu'il sou- mettra prochainement son rapport sur le Mémoire présenté par M. Le Pennec. M. Fimo, appelé par l’ordre du travail, communique à l’Académie un fragment du rapport qui a été adressé à M. le Préfet de la Haute-Garonne par la Commission qui fut chargée, l'an dernier, de visiter l'Exposition universelle. La partie de ce rapport qui fait l’objet de cette lecture est relative aux in- DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 421 dustries dont les progrès sont liés à ceux de la chimie. (Im- primé, page 53.) M. Jocy communique, au nom de M. Barthélemy, profes- seur des sciences naturelles au Lycée de Toulouse, des obser- vations sur la grêle. M. Brassinne fait remarquer que l'hypothèse de deux nuages qui se repoussent et forment le vide dans lequel le refroïdisse- ment a lieu, lui paraît présenter une idée ingénieuse qui mé- rite d’être étudiée; et après quelques observations de MM. Joly et Molins, le Mémoire de M. Barthélemy est renvoyé à l'examen d’une Commission composée de MM. Laroque et Daguin. M. le Prince de Polignac adresse un troisième Mémoire sur la théorie des nombres premiers. Ce travail est renvoyé à la Com- mission déjà nommée pour examiner la communication précé- demment faite par M. de Polignac. M. ou Mëce lit la première partie d’une notice sur Îles objets antiques ou du moyen âge qui ont été retrouvés dans les fouilles exécutées pour l’établissement de la voie ferrée de Toulouse à la Méditerranée. (Imprimé, page 37.) M. Vrrey, s’empressant de répondre au désir qui a été ma- nifesté dans la précédente séance, devance son tour de lecture en communiquant à l’Académie la partie du rapport concer- nant les Beaux-arts, et rédigée par lui au nom de la Com- mission chargée d'étudier l'Exposition universelle de Paris. (Imprimé, page 104.) M. l’abbé Corblet, directeur de la Revue de l’art chrétien , propose d'insérer dans ce recueil les travaux de l’Académie con- cernant l'archéologie sacrée. — Il sera écrit à M. l'abbé Corblet pour lui annoncer l'envoi des Mémoires à mesure de leur pu- blication. M. Brassinxe lit un travail sur quelques points de la théorie des équations différentielles linéaires. (Imprimé, page 175. ) M. Brassinne remet à l’Académie la démonstration d'un 5°s.— TOME I. 28 42 février. 19 février. 26 février. 422 MÉMOIRES théorème de calcul intégral qu’il a présenté à l’Académie des Sciences de Paris. (Imprimé, page 187.) MM. Gascheau et Petit, en donnant une pleine adhésion au Mémoiré de M. Brassinne, l’engagent à continuer ses recher- ches dans cette voie ingrate et difficile de la théorie des équa- tions différentielles. MM. les Secrétaires du Congrès scientifique de France, qui doit se réunir à Grenoble, et celui de l'assemblée des délégués des Sociétés savantes, invitent les membres de l’Académie à prendre part aux travaux de ces deux institutions. M. Mons communique la continuation des recherches de M. le Prince de Polignac sur les nombres premiers. Cet appen- diee est renvoyé à la Commission déjà nommée. M. Garen-ArvouzrT , appelé par l’ordre du travail, lit une nole sur les commencements de l'Université de Toulouse, et sur une pièce relative à ces premiers temps. (Imprimé, p.202.) M. Molinier demande la parole pour faire remarquer tout l'intérêt que présente le travail de M. Gatien-Arnoult. Toute- fois, il exprime quelques doutes sur la convenance de l’expres- sion décrétistes, qui a été employée à propos des professeurs du Droit romain, car cette dénomination n’était donnée qu’à ceux qui enseignaient le Droit canon. M. Gatien-Arnoult répond en donnant lecture du texte, dans lequel le mot décréliste est en toutes lettres. M. Molinier réplique que, dès lors, il paraît probable que les mêmes pro- fesseurs enscignaient à la fois le Droit canon et le Droit de Jus- tinien , qui était la loi nationale du comté de Toulouse. M. Petit désirerait que M. Gatien-Arnoult continuât ses études de manière à développer les diverses phases qui ont pro- duit la transformation de cette école et l’ont amenée à devenir l’Académie de Toulouse. M. Astre fait remarquer que, pour établir l'authenticité du poëme dont M. Gatien-Arnoult a donné la traduction, il eût été heureux qu'on püt connaître comment il a été découvert , / DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 423 car ces détails ajouteraient encore à sa valeur, qui lui paraît d'autant plus considérable que ce document vient corroborer l'opinion soutenue par lui dans un précédent travail , à savoir : que le Droit de Justinien était reconnu et enseigné alors que fut rédigée la coutume de Toulouse. Du reste, il pense, avec M. Molinier , que les décrétistes enseignaient à la fois le Droit romain et le Droit canon. Enfin, M. Barry exprime quelques doutes sur ces couches d'écoles successives que M. Gatien-Arnoult aurait présentées comme ayant succédé aux écoles grecques et latines; il trouve là quelque chose d’un peu téméraire , alors qu’à l'exception de deux où trois noms de professeur , il n'existe réellement aucun document , aucune trace de ces écoles. Dans quelques mots de réplique , M. Gatien-Arnoull dit que le poëme dont s’agit vient d'être inséré dans l’Aistoire litté- ratre de France, et que, relativement aux écoles qui auraient précédé celle dont ce poëme fait connaître l'établissement , c’est une sorte de présomption qui lui a servi de préface pour le travail qu'il voulait communiquer à l’Académie. M. Ducos lit une notice sur Guillaume de Puylaurens, au- teur d'une chronique sur les événements de la croisade contre les hérétiques albigeoïs. Cet écrivain a raconté l’histoire des comtes de Toulouse depuis la mission de saint Bernard jusqu’au règne de Philippe-le-Hardi, c'est-à-dire, jusqu’à la réunion du comté de Toulouse à la couronne de France. (Imprimé, page 163.) M. BnassiNE communique à l’Académie un travail dans le- quel il complète la formule générale de la mécanique analyti- que, en y introduisant les termes dus au frottement des sur- faces. ( Imprimé, page 181. ) M. Molins prend la parole sur cette communication pour constater , avec M. Brassinne, que M. Poncelet et son école ne sont point fondés en reprochant à la mécanique analytique de ne pas être rationnelle ; car si, en effet , les corps solides ne sont pas parfaitement durs, ni les corps fluides parfaitement 5 mars. 12 mars. h2% MÉMOIRES liquides, ainsi que le suppose la mécanique analytique, on peut du moins les concevoir ainsi par la raison, et c’est pré- cisément ce qui justifie la qualification de rationnelle. IL pense que M. Brassinne a eu une très-heureuse idée en in- troduisant le frottement dans la formule générale ; introduc- tion qui n'avait pas été faite jusqu’à ce jour. M. Ficnoz donne lecture de la suite de son rapport sur l'Ex- position universelle. (Imprimé, page 53.) A l'occasion de cette lecture, M. TimBar-LaGRAvE croit devoir constater que la culture en grand du pavot a été essayée, celte année, aux environs de Toulouse, et qu'ayant été appelé à analyser l'opium qui en a été extrait, il l’a trouvé très-riche en morphine; enfin, que la Société d'Horticulture a nommé une Commission chargée d'étudier cette importante question. M. Gaussaiz dépose sur le bureau un immense volume ren- fermant les rapports du jury international sur l'Exposition universelle de 1855. IL fait observer que cet envoi lui a été adressé par le Gouvernement, en sa qualité de Président du jury d'examen du département de la Haute-Garonne; mais que ces fonctions lui ayant été décernées, sans doute, parce qu'il occupait alors le fauteuil de la présidence de l'Académie des Sciences de Toulouse, il considère comme un devoir de faire hom- mage à cette Compagnie de l'important ouvrage qu'il a recu. L'Académie ordonne le dépôt du volume dans sa bibliothè- que, et vote des remerciments à M. Gaussail. M. Barry lit une note sur une inscription récemment décou- verte à Toulouse, etrelative à un barbare du nom d’Ermeneldés, de race visigothique selon toute apparence. (Imprimé, p 189.) En s'appuyant sur les inductions historiques, grammaticales et épigraphiques que lui fournit le texte de cette inscription , M. Barry essaie de prouver dans son travail qu’elle appartient, par sa date, à la première moitié du vn° siècle ; il signale aussi, dans une note, deux inscriptions inédites existant dans le Musée de Toulouse. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES, 425 M. du Mège demande la parole pour faire observer que si ces dernières inscriptions n'ont pas été cataloguées, c'est que, selon lui , elles sont fausses ; car , ajoute M. du Mège, les anti- quaires ont souvent fabriqué de semblables monuments ; ils ont même plusieurs fois présenté comme des statues antiques , de simples figurines modernes en cuivre, recouvertes d'une patine factice, et qui n'étaient en réalité que des manches de pelles ou de pincettes. M. Barry réplique que ces deux inscriptions, données d'ail- leurs comme une simple note, lui ont paru présenter un cer- tain cachet d'authenticité, mais que l’expérience de M. du Mège en ces matières lui impose l'obligation de vérifier de nouveau ces monuments épigraphiques. M. Virry continue la lecture de son rapport sur l'Exposition universelle. (Imprimé, page 104.) M. Mouns remet sur le bureau un cinquième Mémoire de M. le Prince de Polignac. Ce nouveau travail est renvoyé à la Commission déjà chargée de faire un rapport. M. Couserax lit une note sur la comparaison du procédé de Mitschelrich, pour reconnaître la présence du phosphore dans les cas d’empoisonnement par les allumettes chimiques, et de l'appareil de Marsch, pour la découverte de Parsenic dans les analyses de chimie légale. (Imprimé, page 335.) M. Brassinne présente quelques observations à l'appui de l’o- pinion émise par M. Couseran ; il fait observer qu’en effet les phosphates existant dans le corps bumain, pourraient peut- 4 être donner lieu par leur décomposition à des phosphorescen- ces, quoique Île phosphore n'ait pas été ingéré. M. Barry déclare qu'ayant examiné l'inscription du Musée dont il a été question dans la dernière séance, il persiste à croire, jusqu’à preuve incontestable du contraire, que cette inscription est authentique. Il ajoute, quant à celle qui a été trouvée dans la rue du Taur, qu'il est parvenu à traduire les 19 mars. 126 MÉMOIRES premières lettres, en les comparant aux monnaies de l'époque. Ces lettres signifient 7 Dei nomine. M. Jouy annonce qu'il se propose de publier une série de lettres sur les motions d'anatomie et de physiologie compar- rées, les plus indispensables pour tout homme qui veut sé- rieusement se connaître et ne pas rester complétement étranger au mouvement scientifique de notre époque. Il rappelle que la première de ces lettres, communiquée à l’Académie dans l’une de ses dernières séances , est relative à la vie physique et à ses principales manifestations dans la série des êtres. La seconde lettreest intitulée, Considérations générales sur la physiologie de l'espèce. I en donne lecture en examinant successivement les différences physiques, intellectuelles et morales des deux sexes , et en exposant les grandes et admirables lois providen- tielles qui président à la transmission de la vie et à sa succession indéfinie dans le temps et l’espace. Quelques membres prennent la parole à l'occasion de cette lecture. M. Brassinne ne croit pas devoir s’appesantir sur la question qui fait l'objet du travail de M. Joly; mais il insiste sur celte observation, à savoir, qu'il existe une séparation profonde entre la nature humaine et la nature animale ; que la pudeur , par exemple, n'appartient qu’à la créature intelligente , et qu'elle ne s'applique pas seulement à l'amour, mais aussi à un grand nombre de sentiments. M. Joly répond qu'il partage entièrement l'avis de M. Bras- sinne ; il remercie, d’ailleurs , les préopinants de leurs obser- vations; car c'était pour recueillir l'avis de ses confrères sur un travail aussi délicat, qu'il a cru devoir le communiquer à l’Académie avant de le livrer à l'impression. M. Mous propose de nommer M. le prince de Polignac à une place de correspondant. La proposition étant appuyée par MM. Brassinne et Vitry, il sera slatué dans la prochaine séance , après convocation moti- vée, conformément au règlement. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. k27 M. Le Pennec adresse un supplément à ses études sur l’ajutage divergent de Venturi. — Renvoyé à l'examen de M. Brassinne. M. Timgac-LaGrAvE , communique à l’Académie un Mémoire sur les Erodium pætreum (Wild.), lucidum (Lap. ) , crispum { Lap.) et macradenum | \'Her.). ( A imprimer.) A l’occasion de cette lecture, M. Clos déclare qu'il n'a pu étudier ces plantes à l’état vivant; mais que, d’après ses re- cherches sur les échantillons secs , il est de l’avis des auteurs de la Flore de la France, qui n’admettent pas ces distinctions ; cela tient peut-être à ce que l’on n’est pas bien d'accord sur les mots espèce et varietés; toutefois, le travail qui vient d'être communiqué étant très-développé , il étudiera de nou- veau la question. Il ajoute que si les caractères tirés des graines sont constam- ment tels qu’ils sont représentés dans la planche qui accom- pagne le travail de M. Timbal, les £rodium pætreum et lucidum devront être considérés peut-être comme des espèces distinctes. M. Joly se déclare partisan de l’école qui pense qu'en histoire naturelle on multiplie beaucoup trop les espèces, et qu’on encom- bre inutilement la science. Cela est vrai en botanique comme en zoologie , car le climat exerce une grande influence et peut pro- duire de grandes variétés dans une espèce. Il cite notamment l'opinion de savants modernes en grand nombre qui n'admet- tent, par exemple, qu’une seule et même espèce pour la nature humaine , et cependant le noir de l'Afrique , le rouge de FAmé- rique, le jaune des Indes, le blanc de l'Europe, présentent des différences ou variétés profondes. M. Timbal-Lagrave répond qu’en effet il existe deux écoles parfaitement distinctes qui sont en lutte ouverte, sans avoir pu jusqu'ici se concilier. Quant à lui, il appartient à celle qui admet une espèce toutes les fois que les plantes (car il ne veut s'occuper que de botanique) se distinguent par des caractères bien prononcés dans les organes principaux , tels que les grai- nes , la fleur , etc. Ainsi, les Ærodium, qui font l’objet de son travail , ont été étudiés par lui dès 1837, et depuis cette époque 26 mars. 2 avril. 25 avril. 428 MÉMOIRES il les a toujours trouvés dans les Pyrénées, sans qu’il se soit manifesté le moindre changement dans leurs organes princi- paux; il croit donc devoir persister dans son opinion. L'ordre du jour indique la nomination d’un correspondant. Après le dépouillement du scrutin, M. le Prince de Polignac, capitaine d'artillerie, est proclamé membre correspondant de l'Académie, dans la section des Mathématiques pures. M. le Prince de Polignac écrit pour remercier l’Académie du titre de correspondant qui lui a été décerné. Il assiste d’ailleurs à la séance. MM. Durand et Blanc envoient une pompe de leur invention. MM. Vitry, Guibal, Brassinne et Daguin sont chargés d’exa- miner cette machine. M. Gabolde adresse à l’Académie de nouvelles recherches théoriques et expérimentales sur la résistance des fluides dans les cänaux. Ce travail estrenvoyé à l'examen de MM. Brassinne, Petit, du Mège, Laroque et Daguin. Appelé par l'ordre du travail, M. Guimac lit une note sur l'emploi de Peau comme organe de transmission et de modifi- cation de mouvement à de grandes distances. (Imprimé , page 361.) Après quelques observations de MM. Gascheau et Vitry, le Président, au nom de l’Académie, remercie M. Guibal de sa communication. M. Vert adresse à l’Académie un livre intitulé : Gersoniana ou l’Imitation de J.-C. — Renvoyé à l'examen de M. Astre. M. Jouglar, notaire, envoie une monographie de l’abbaye de Grand-Selve. — Renvoyé à M. du Mège. M. Trescazes, employé des douanes à Tarbes, adresse un Mémoire sur la production animale. — Renvoyé à M. Molinier. M. de Fleury annonce l'envoi de divers objets d'archéologie découverts à Rennes-les-Bains. — Renvoyé à M. Barry. M. Bouzigues, serrurier à Toulouse, présente à l'examen DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 429 de l’Académie un Cosmographe exécuté par lui d'après le système inventé par M. Burnouf. — Renvoyé à MM. Petit et Vitry. M. Martin Duclaux, en demandant une place de membre ordinaire ou de correspondant, et subsidiairement une des mé- dailles d'encouragement, envoie un aperçu sur l’état de l'urine et des crachats dans quelques maladies pulmonaires. — Ren- voyé à MM. Gaussail , Filhol et D. Bernard. M. Leyuerie adresse une note sur quelques découvertes d’os- sements fossiles faites par MM. Vieu et Abadie. M. Leymerie sera invité à faire un rapport sur ces découvertes. M. Espinasse , de Toulouse, envoic des clichés de son inven- tion. — Renvoyé à M. Vitry. M. Dutour, agent voyer en chef du département, commu- nique un fossile découvert dans la berge de l’Ariége, à Venerque. — Renvoyé à M. Noulet. M. Ccos , appelé par l’ordre du travail, lit un Mémoire inti- tulé : Révision comparative de l’Herbier et de l'Histoire abrégée des Pyrénées, de Lapeyrouse. (Imprimé , page 221.) M. DecaviGxe , appelé aussi par l’ordre du travail, commu- nique la troisième et dernière partie de son Mémoire sur la Satyre Ménippée. (Imprimé, page 341.) L'Académie recoit : Une communication sur la maladie de la vigne , par M. Des- soye, avec une lettre à l'appui. — Renvoyé à M. Clos. Un ouvrage intitulé : Suger et la Monarchie francaise, par M. Huguenin. — Renvoyé à MM. Barry, Astre et Dubor. M. Nourer adresse un rapport sur le fossile présenté à l’Aca- démic par M. Datour, agent voyer en chef du département. Il conclut à ce que des remerciments soient adressés à ce fonc- tionnaire. M. Hauez , désigné par l’ordre du travail, a commencé la lecture d’un Mémoire intitulé : Etude sur Andromaque. Après 30 avril. h 30 MÉMOIRES avoir cité, analysé et commenté les divers passages d'Homère qui se rapportent à Andromaque, mélant à ses appréciations personnelles les opinions des divers critiques pour s’appuyer de leur autorité, ou bien pour les réfuter, M. Hamel a conclu ainsi cette première partie de son travail : « En offrant dans Andromaque l'idéal de l'amour conjugal et maternel, Homère, par un instinct profond de la dignité hu- maine, à compris que certains détails trop réels terniraient la pureté de cet idéal et il les a supprimés. » Il est alors resté, pour faire ressortir le type ennobli de la mère et de l'épouse, le fond même de la société antique: d’un côté, la vie modeste et simple de la femme, occupée aux tra- vaux de son sexe dans le silence du toit domestique ; de l’autre, le triste délaissement de l'enfant et de la veuve, privés de leur protecteur. » M. Jouy communique en son nom et au nom de M. Lavocat, son collaborateur, une note ainsi concue : « Les faits de polydactylie (pluralité des doigts) chez le genre cheval sont assez rares et surtout assez importants au point de vue de l'anatomie philosophique , pour mériter d’être signalés à l'attention des savants. Un des plus curieux que nous puissions citer, est sans contredit celui que vient de nous offrir un mulet âgé d’un an, appartenant au propriétaire d’une ménagerie am- bulante qui, ces jours derniers , se trouvait à Toulouse. » En effet, l'animal dont il s’agit était fissipède ( à plusieurs doigts séparés) aux pieds antérieurs, particularité dont nous avons eu l'occasion d'observer un aatre exemple déjà consigné par nous dans les Mémoires de l’Académie impériale des Sciences, Inscriptions et Belles-Lettres de Toulouse. (Tome IE, 4° série, page 364 ; 1853.) Mais chez la mule que nous avons décrite, les deux doigts ( annulaire et medius) qui, ordinairement réunis, constituent, selon nous , le grand doigt des équidés , étaient parfaitement séparés l’un de l’autre au pied gauche, et simplement rapprochés au pied droit. Ici, au contraire, ces doigts sont parfaitement distinets aux deux pieds antérieurs, et DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. k31 leurs sabots ne ressemblent pas mal à des cornes frontales plus ou moins recourbées. » Quant aux doigts de notre monstre actuel, le pouce était re- présenté, comme à l'ordinaire, par la chätaigne, qui, nous croyons l'avoir prouvé , a réellement cette signification. L'index était resté rudimentaire; enfin, l’auriculaire apparaissait au- dehors sous la forme d’une corne recourbée en faucille. » Nous n'avons pas cru devoir laisser passer inaperçu ce nou- vel exemple de polydactylie chez le genre Equus, d'autant plus qu'il confirme, de la manière la plus éclatante, les vues que nous avons émises , il ÿ a cinq ans, au sujet du système digital des mammifères, si improprement appelés monodactyles (à un seul doigt ).» M. le Prince ne Poziexac donne communication d’un Mé- moire relatif à l'introduction dans l'analyse d’une nouvelle transcendante qui exprime l’entier d’un nombre quelconque x et qu'il désigne par le symbole Æ (+) ; cette transcendante s’ex- prime d’une manière remarquable au moyen d’une somme de sinus. L'auteur donne deux explications de ce nouveau calcul. Ce Mémoire est renvoyé au comité de librairie et d’im- pression. M. le Prince de Polignac prend de nouveau la parole pour lire le premier chapitre d’une série d’études qu’il a entreprise , sur le Faust de Goëthe. « Cette grande œuvre, dit-il, est vraiment nationale et par le fond et par la forme, puisque, d’une part, elle contient tout ce que le génie allemand a de profond , de tendre, de rêveur, de poétique ; et que, d’autre part, elle s’appuie sur une légende populaire. » Il ne faut pas oublier que Faust est une œuvre inachevée ; de là des lacunes qui jettent sur le tout une certaine obscurité. Aussi, en voulant reconstruire pierre à pierre cet immense édi- fice, on se fatigue, on s'épuise, et on finit par se dégoûter d’une tàche aussi aride. Mais lorsqu'on considère cette œuvre comme une puissante ébauche dont quelques parties sont à peine k 32 MÉMOIRES indiquées el d’autres au contraire sont achevées avec soin , alors il se dégage de tous ces détails confus un magnifique ensemble. » L'ouvrage de Goëthe se divise en trois périodes distinctes. Dans la première, Faust jeune, ou plutôt rajeuni, se jette à corps perdu dans les folles et douces passions de la jeunesse : il aime, il est aimé. » Dans la seconde, Faust a atteint l’âge mûr ; le génie de l’ar- üiste , la soif immodérée du beau remplace dans son cœur les émotions de l'amour ; son enthousiasme s'élève Jusqu'au délire. A la recherche d'Hélène, il plonge dans les ténèbres du passé , il s'enivre de souvenirs. > Dans la troisième période, Faust est vieux ; l’'ambitieux ap- paraît à la place de l'amant et de l'artiste. il veut posséder… la terre paraît trop étroite à son insatiable activité.… il refoule la mer et lui arrache des terres nouvelles. » M. de Polignac a ensuite analysé la première scène de Faust ; il a cité plusieurs passages traduits par lui en vers français. Cette première scène n’est qu’un long monologue qui est à lui seul une sorte de drame, et qui forme comme une magnifique exposition du poëme tout entier. M. Joly, en prenant la parole sur cette lecture, dit qu’il suffit de s'être occupé de la langue allemande pour savoir toutes les difficultés qu’a eues à éprouver l’auteur de ces études pour tra- duire Goëthe en vers francais ; il a dû lutter bien souvent contre l'original, et l’on doit reconnaître qu'il a victorieusement triomphé de ces difficultés en mettant parfaitement en relief le caractère de Faust, surtout celui de Marguerite, qu’on peut considérer comme l'un des types les plus vrais de la femme al- lemande. M. Brassinne dit à son tour qu'il a retrouvé dans le travail de M. de Polignac cette particularité qu'il avait remarquée dans Faust, à savoir que Goëthe s’est attaché à poétiser la femme du peuple. Il lui fait tenir presque toujours des conversations sim- ples, ou même triviales; mais il met en quelque sorte aux prises celle femme naïve, qui ne sait qu'aimer, avec l’homme puissamment intelligent et initié aux secrets de la science la DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 433 plus élevée. Cette opposition si dramatique paraît avoir échappé à Scheffer, dont le tableau représente Marguerite beaucoup trop endimanchée. Enfin, M. Ducos félicite M. de Polignac d’avoir dévoilé un nouveau talent dans ces études littéraires, qui renferment des vers très-heurcux. Tout en reconnaissant avec les préopinants, et avec l’auteur de ces études , combien ie Faust de Goëthe pré- sente de parties vraiment belles et originales, M. Ducos croit cependant devoir faire remarquer que le début dans lequel Mé- phistophélès se présente devant Dieu pour obtenir la permission de tenter Faust, est emprunté presque littéralement à ce passage du chap. E* da livre de Job : « 8. Et l'Eternel lui dit : N’as-tu point considéré mon servi- » teur Job qui n’a point d'égal sur la terre, cet homme intègre » et droit qui craint Dieu et qui se détourne du mal? » 9. Et Satan répondit à l'Eternel : Est-ce en vain que Job » craint Dieu ? » 10. Ne l’as-tu pas environné de biens de toutes parts? » 11. Mais étends maintenant la main et touche tout ce qui » lui appartient, et tu verras s’il ne te maudit pas en face. » 12. Et l'Eternel dit à Satan : Voilà, tout ce qui lui appar- » tient est en ton pouvoir... et Satan sortit de devant la face de » l'Eternel. » Après ces observations de M. Ducos, M. le Président accorde la parole à M. Perir pour un rapport sur le cosmographe de M. Bouzigues. La Commission , qui a examiné cet instrument, conclut à ce qu'il soit admis au concours pour les médailles d'encouragement , et que cette proposition soit transmise à la commission générale chargée de faire le classement de ces ré- compenses. M. Leymerie fait hommage à l’Académie d’un ouvrage inti- tulé: Considérations géognostiques sur les Echinodermes des Pyrénées. M. le colonel Greizes signale à l’Académie une horloge re- 7 mai. k3% MÉMOIRES marquable imaginée par un jeune berger de Lavelanet. L'Aca- démie charge MM. Petit, Vitry et Joly de se transporter sur les lieux afin d'examiner ce mécanisme, MM. Maybon et Baptiste adressent à l'Académie des dessins et des échantillons de parquets fabriqués mécaniquement dans leur établissement hydraulique. MM. les Secrétaires de la Société royale de Norwége à Chris- tiania, et de la Société des sciences morales et des lettres de Seine-et-Oise, envoient les publications de ces corps savants, et demandent l'échange des publications. — Ces propositions sont acceptées. M. Cros donne lecture du rapport sur le concours de l’année 1857. (Imprimé, page 359.) L'Académie avait mis au concours, pour sujet de prix, la question suivante : Faire connaître , à l’aide de bonnes des- criptions et de figures, les mousses et les lichens qui crois- sent duns un des départements sous-pyrénéens. Un seul Mémoire a été présenté. Ce travail a pour titre: Description et figures des mousses et des lichens du bassin de Bordeaux. M. le Président, rompant les trois cachets de l'enveloppe qui renfermait le nom de l’auteur, proclame M. Casimir Roume- guère , uaturaliste à Toulouse, lauréat du concours de 1857 et membre correspondant de l'Académie. M. LEYMERIE fait un rapport sur quelques nouvelles décou- vertes d’ossements fossiles , faites dans le bassin sous-pyrénéen ; il propose de décerner des médailles d'encouragement : 1° à M. Abadie, pharmacien au Fousseret, qui a été déjà cité avec éloges dans le concours de l’année dernière ; 2° à M. Vieu, con- ducteur des ponts et chaussées à Aurignac, qui parait pour la première fois dans l’arène du concours; 3° à M. Fontan, de Saint-Gaudens, qui a fait dans le terrain tertiaire de Valentine, des découvertes du plus haut intérêt, et notamment celle de restes de macrothéreum et celle d’une mâchoire de singe, la seconde trouvée jusqu’à ce jour dans le bassin. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 535 Ces propositions sont renvoyées à la commission générale chargée du classement des médailles d'encouragement. M. Virry propose aussi de renvoyer à la même Commission la demande d’une médaille pour les échantillons de clichés pré- sentés par M. Espinasse, et qui ont été examinés avec intérêt. M. Hawes fait un rapport sur une traduction de l'OEdipe à Colone de Sophocle, par M. Richaud. À la suite de plusieurs citations et de développements très-étendus , il fait remarquer qu'il est impossible de traduire exactement en vers francais les autcurs anciens; que cependant M. Richaud s’est rapproché de son modèle autant qu'il était permis de le faire, et que cette tra- duction en vers est encore l’une des meilleures qu’il connaisse. M. Hamel propose en conséquence d'adresser des remerciments à M. Richaud. Ces conclusions sont adoptées par l’Académie. M. Roumeguère écrit à l'Académie pour la remercier de la décision qui lui a décerné le prix de l'année 1857 avec le titre de membre correspondant. M. Joy donne connaissance d’une lettre qui lui a été adres- sée par M. Pietro Bubani, et par laquelle ce naturaliste assure que dès 1838, il s’est occupé d’une revue de l'Herbier de La- peyrouse. L'annonce d’un travail semblable, communiqué à l’Académie par M. Clos, le met dans la nécessité de prendre date, afin d'établir que ses déterminations sont le fruit de ses études personnelles et qu’elles lui appartiennent en propre. M. Clos, prenant la parole à l’occasion de cette communica- tion , déclare qu’en entreprenant la révision de l'Herbier de La- peyrouse, il n'avait aucune connaissance du travail de M. Bu- bani, qui n’a laissé dans l'Herbier aucune remarque, aucune rectilication d'étiquettes. Ayant entendu parler récemment des réclamations de M. Bubani à cet égard, M. Clos lui a fait offrir de comparer leurs travaux respectifs, lui proposant même, là où leurs déterminations se trouveraient semblables , de recon- naître les titres de M. Bubani à la priorité de ces rectifications. M. Clos ajoute que si le travail de M. Bubani est terminé, cet 14 mai. &36 MÉMOIRES infatigable botaniste aurait pu, Sil l'avait voulu, s'assurer encore la priorité en le faisant imprimer immédiatement , le manuscrit de M. Clos devant être soumis , avant l'impression , au comité de librairie de l'Académie. La pubiication récente de travaux sur la Flore de France, montre que les botanistes ne sont nullement fixés sur la nature d’un assez grand nombre d'espèces de Lapeyrouse ; c’est ce qui a déterminé M. Clos , dé- positaire de l'Herbier de ce savant, à combler , du moins en partie et autant qu’il était en lui , cette lacune. Du reste , il pa- raît ressortir de la lettre ce M. Bubani , que ce botaniste se pro- pose de fondre les observations critiques faites par lui sur l'Herbier Lapeyrouse dans sa Flore générale des Pyrénées , pour laquelle il ramasse depuis longtemps des matériaux ; et s’il en est ainsi, son travail et celui de M. Clos seront tout différents. M. Mouer lit un rapport sur un Mémoire manuscrit adressé à l'Académie par M. Trescazes, employé des douanes à Tar- bes. Ce Mémoire a pour titre : De la production animale , ou étude des causes générales du renchérissement des objets de consommation au point de vue particulier de la surélévation du prix de la viande de boucherie. Le rapporteur conclut à ce que ce travail soit renvoyé à la Commission générale chargée du classement définitif des médailles d'encouragement. Le même renvoi a été ordonné, relativement : 4° Au Mémoire présenté par M. Hippolyte Gabolde, intitulé : Etudes pratiques sur la navigation des canaux , et particu- lièrement sur celle des canaux du Midi. — Rapporteur , M. Petit. 20 A la Monographie de l’abbaye de Grand-Selve , par M. Jouglar. — Rapporteur, M. du Mège. M. Asrre donne lecture d’un rapport favorable sur un ou- vrage de M. Vert, intitulé: Gersoniana ou l’Imitation de Jé- sus-Christ. Le rapporteur exprime le désir que l’Académie encourage par un suffrage sympathique les efforts qui ont été tentés et la noble pensée qui a dicté les travaux de M. Vert. M. Astre es- DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. L37 père que l’Académie se plaira à féliciter notre concitoyen pour la manière dont il a mené à fin l’entreprise qu'il s'était imposée et qu'il a poursuivie jusqu’au bout avec satisfaction pour lui- même, avec plaisir pour tous. Ces conclusions sont adoptées. M. Timpar-Lacrave appelle l'attention de l'Académie sur deux plantes rares de la Flore de Toulouse : les Ranunculus ophioglossifolius (Nill. } et Carex vesicaria (L.), qu'il a rencontrées en abondance au bois de La Ramet , le 14 mai 1857, dans une herborisation faite en compagnie de MM. Bosquet et Baillet. Le Ranunculus ophioglossifolius , dit M. Timbal-Lagrave, n'est pas une plante nouvelle pour la Flore de Toulouse; mais elle a été toujours rencontrée en petite quantité dans les trois localités où elle a été signalée par MM. Lagrèze-Fossat, Noulet et Arrondeau. 1l est même des années où elle disparaît com- plétement , tandis que cette année nous l'avons observée dans plusieurs endroits et à des points éloignés les uns des autres. Le Carex vesicaria L. a été trouvé par M. Noulet, à Lé- guevin , localité assez éloignée de Toulouse, et sur les bords du Touch, par M. Arrondeau; ce dernier botaniste n’en avait trouvé qu’une {ouffe qui disparut l’année suivante avec les crues du Touch. Cette plante a été trouvée en abondance dans un fossé der- rière le Marquisat , ainsi que le Carex riparia Curt. , palu- dosa Good , avec lesquels on l’a sans doute confondue. Ce ruis- seau aboutit au Touch, en amont et non loin de la localité où M. Arrondeau avait fait primitivement sa découverte. M. Lavocar communique à l’Académie , au nom de M. Joly et au sien , la note suivante sur la coalescence du métacar- pien ou mélalarsien du pouce avec la première phalange de ce même doigt. « Dans nos études d'anatomie philosophique sur la main et le pied de l’homme et sur les extrémités des mammifères rame- nées au type pentadactyle , nous avons établi en principe que pour les phalanges de chaque doigt, le nombre trois est le type 9° S.—TOME I, 29 20 mar. L38 MÉMOIRES général chez les mammifères. Nous avons aussi cherché à prou- ver que l'exception présentée par le pouce n'est qu'apparente. » Si quelques doutes ont pu s'élever au sujet de cette double détermination , ils seraient entièrement dissipés par le fait dé- cisif que nous avons l'honneur de soumettre à l'Académie. Nous venons de rencontrer la confirmation évidente de notre ma- nière de voir , en examinant les extrémités postérieures d’un chien adulte, ayant le pouce complétement développé. Aux deux pieds de cet animal, entre les deux pièces tarsiennes propres au pouce, et les deux dernières phalanges de ce même doigt , on voit deux pièces osseuses distinctes , conoïdes , con- tiguës par leur sommet , et longues chacune d'environ 2 centi- mètres ; la base élargie de l'os supérieur s'articule, comme d'ordinaire, avec le pemptotarse , ou 3° cunéiforme , et celle de l'os inférieur avec la 2° phalange. » Ce fait démontre donc, d’une manière incontestable , que la pièce osseuse généralement appelée métacarpien où méla- tarsien, chez l'homme et les autres mammifères, est réellement constituée par le métacarpien ou métatarsien et aussi par la pre- mière phalange. » M. Arnaud adresse un échantillon de parquet de sa fabrica- tion. — Renvoyé à l'examen de M. Vitry. M. LaroQuE , appelé par l’ordre du jour, demande le renvoi de son tour de lecture, le travail qu'il destine à l’Académie n'étant pas terminé; toutefois, il donne communication d’une note relative à un nouveau moyen de préparer le chlore. Au nom de la section de médecine , M. Gaussaiz présente la question suivante pour le concours de l’année 1860 : « Faire connaître les résultats positifs dont les expériences » physiologiques ont enrichi la médecine clinique, depuis le » commencement du xix° siècle. » Cette question est adoptée par l'Académie. M. Barry fait un rapport sur les objets d'archéologie adressés à l'Académie par M. de Fleury. Il propose le renvoi à la Com- DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 439 mission générale des prix d'encouragement , et l’Académie adopte cette proposition. M. Mouns lit , au nom de M. Filhol, un rapport sur le Mé- moire de M. Martin-Duclaux , relatif à l’état de l'urine et des crachats dans quelques maladies pulmonaires. — Le renvoi à la Commission des médailles d'encouragement est ordonné. M. Barry fait un rapport sur l'ouvrage de M. Huguenin, intitulé : Suger et la monarchie francaise. M conclut à ce que le titre de correspondant soit accordé à l’auteur. L'Académie prend cette proposition en considération, et décide qu'il sera procédé au scrutin dans la prochaine séance et sur billet de convocation motivé. M. le Prince pe PoriGxac annonce qu'il présentera, dans une séance prochaine, un Mémoire détaillé sur un projet de nou- velle machine à vapeur sans chaudière ; la production de la vapeur serait obtenue par l'injection d’une quantité convenable d'eau sur un ou plusieurs cylindres en cuivre élevés à une haute température. M. de Polignac fait remarquer que les ex- périences décrites par M. Seguin aîné , dans un Mémoire récent relatif à une nouvelle machine à vapeur surchauffée , sont, par un hasard fort heureux , très-concluantes en faveur de son sys- tème , qui, d’ailleurs , diffère essentiellement en principe de celui de M. Seguin. Sans entrer dans aucun détail, on voit tout de suite que toute l’eau employée se trouvant réduite en vapeur , il y aura économie considérable de combustible , de poids et d'emplace- ment. M. de Polignac obtient ensuite la parole pour continuer la lecture de ses études sur le Faust de Goëthe. Il analyse la deuxième scène du second acte , et celle qui se passe à la porte dela ville. Onest frappé de la vigueur et de la vérité que Goëthe a mises à peindre cette scène populaire, qui n’est pas un hors- d'œuvre , mais qui sert habilement de cadre à la grande figure de Faust. La haute personnalité du docteur se détache nettement 28 mai. k40 MÉMOIRES sur ce fond quelquefois trivial, mais dont la couleur vive et chaude rappelle ies Xermesses de Rubens et de Téniers. Le poëte allemand nous ramène ensuite dans la cellule de Faust , où Méphistophélès lui apparaît galamment vêtu, et lui conseille d'abandonner ses livres et de venir tâter un peu de la vie. Mais Faust ne peut encore secouer son profond dégoût pour les choses humaines ; il se plaint amèrement de la vanité de nos souhaits ; il gémit de ce que tout nous répète cette terrible pa- role : I! faut s'abstenir !!T et bientôt il se répand en impré- cations contre la nature entière. Ce morceau , dont l’auteur a donné une idée par sa traduc- tion en vers français, est, dans l'original, d’une saisissante beauté. MM. Ducos, Joly et quelques autres Membres félicitent M. de Polignac sur la manière heureuse dont il a triomphé des diffi- cultés de la traduction , et l’invitent à continuer ses intéressan- tes études. M. GascHeau communique une Note sur le mouvement d’un point libre ou assujetti à une surface donnée, dans le cas où ce mouvement est curviligne et uniforme. M. Molins félicite M. Gascheau d’avoir traité une question aussi intéressante, tant sous le rapport analytique que sous celui de l'application ; il invite l’auteur à continuer ses recher- ches, notamment dans le cas où la trajectoire est elliptique. L'ordre du jour indique la nomination à une place de cor- respondant. M. Huguenin, professeur au lycée impérial de Metz, obtient la majorité des suffrages et est proclamé associé correspondant dans la classe des Inscriptions et Belles-Lettres. M. ou Mëce annonce la découverte faite, dans les environs de l'Isle en-Dodon , d’un autel votif consacré à Hercule, monu- ment inédit et sur lequel il doit offrir à l’Académie une note détaillée. Il prend, dès à présent, date pour l'indication et la description de ce monument antique. M. le Prince pe PoriGnac présente à l'Académie deux appli- DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. L41 cations de son calcul nouveau sur les entiers des nombres. Dans la première application , l’auteur met en équation une question de la théorie des nombres; équation qui, par la nature du sujet, semblait difficile à poser. Dans la seconde application, M. de Polignac établit une relation entre une certaine somme d'entiers et une somme correspondante de sinus. En réponse à unc remarque de M. Gascheau , M. de Polignac fait observer que la somme de sinus qui représente la valeur æ—E (x) est finie dans le cas où x est rationnel. M. le Président communique à l’Académie le résultat des travaux de la Commission chargée d'opérer le classement des candidats aux médailles d'encouragement. Après discussion , l’Académie adopte définitivement le clas- sement suivant : CLASSE DES SCIENCES. Médailles de vermeil. M. Gabolde (Hippolyte), membre de plusieurs sociétés sa- vantes , à Toulouse, pour des études pratiques sur la naviga- tion des canaux, et notamment pour ses recherches expéri- mentales sur la résistance des fluides. M. Galinié (Bertrand }, entrepreneur à Toulouse, pour l’in- vention de moyens mécaniques propres à tailler la brique. M. Abadie, pharmacien au Fousseret, pour ses découvertes de fossiles. MM. Maybon et Baptiste, menuisiers-mécaniciens à Toulouse, pour leur machine à faire des tenons et des mortaises, et pour leurs ouvrages de menuiserie à la mécanique. Médaille d'argent. M. Vieu, conducteur des ponts et chaussées à Aurignac, pour ses découvertes d’ossements fossiles ( avec éloges ). M. Bouzigues { Jean), serrurier à Toulouse, pour la bonne exécution du cosmographe inventé par M. Burnouf. M. Espinasse, de Toulouse, pour la fabrication de clichés pour la typographie. 4 juin. Séance publique du 7 juin. kh2 MÉMOIRES M. Cunq, employé des chemins de fer du Midi à Bordeaux , pour l'invention d’une machine à calculer. M. Lago, professeur au Lycée impérial d’Auch, pour ses reliefs de géométrie descriptive. Médaille de bronze. M. Martin-Duclaux , médecin des épidémies à Saint-Julia , pour son Mémoire sur l’état de l'urine et des crachats dans quelques maladies pulmonaires. CLASSE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES, Médaille de vermeil. M. Jouglar, notaire à Bouillac, pour sa monographie de l'abbaye de Grand-Selve. Médaille d'argent. M. Trescaze ( Aimé), employé des douanes à Tarbes, pour son Mémoire sur la production animale ; M. de Fleury, à Toulouse, pour la découverte d'objets d’ar- chéologie à Rennes-les-Bains. L'Administration du canal du Midi fait hommage à l’Aca- démie d’une statuette de Riquet. L'Académie décide que des remerciments seront adressés à l'Administration du canal du Midi, et que la statue sera placée dans la salle des séances. M. Mons dépose sur le bureau un Mémoire de M. Forestier, professeur au Lycée de Toulouse, et intitulé : Discussion des surfaces du deuxième degré. — Renvoyé à l'examen de M. Molins. IL est donné communication des divers Discours , Rapports, Notices , etc. , qui seront lus en séance publique. M. le premier Président et M. le Préfet de la Haute-Garonne honorent la réunion de leur présence. M. Fiuor ouvre la séance par un discours dans lequel il DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. kk3 examine l'influence que les études scientifiques exercent sur le caractère de l’homme. (Imprimé, page 370. ) M. Cros donne lecture du rapport sur le Mémoire qui a ob- tenu le prix de l’année. (Imprimé, page 379. } M. ou Me lit une notice nécrologique sur M. Belhomme. (Imprimé, page 401.) M. BrassiNnE présente le rapport sur le concours ouvert pour les médailles d'encouragement décernées par l’Académie dans la classe des Sciences. (Imprimé , page 387.) M. Barry fait un rapport analogue en ce qui concerne la classe des Inscriptions et Belles-Lettres. (Imprimé, p. 396. ) M. le Prince pe PoriGxac communique une partie de ses études sur le Faust de Goëthe. Après ces dernières lectures, les lauréats sont successivement appelés et reçoivent les médailles qui leur ont été accordées. M. le Secrétaire perpétuel donne lecture du programme des questions et des prix proposés pour les années 1858, 1859 et 1860. ; L'ordre du jour indique le renouvellement annuel des mem- bres du Bureau pour l’année 1858. Le scrutin dépouillé a donné successivement les résultats suivants : President, M. Filhol; Directeur, M. Molins; Secrétaire, M. Molinier. M. RouueGuëre lit une note sur les figures de la Flore des Pyrénées, éditées de 1795 à 1801, et sur les planches 4% et 46 qui manquent aux exemplaires publiés, et dont il a retrouvé à Toulouse l'entière édition. ( Imprimé, page 411.) M. Joly fait l'éloge de la beauté de la gravure et de la vérité du coloris qui distinguent les figures déposées sur le bureau ; il propose de féliciter M. Roumeguère au sujet de son intéres- sante découverte et de son offre désintéressée. — Ces proposi- tions sont adoptées. 11 juin. 48 juin. kil MÉMOIRES M. Barry prend la parole pour informer l’Académie que l'inscription tumulaire de Hiraclius, dent l'authenticité avait été contestée dans une des dernières séances, a été découverte, en 1831, au cimetière de Terre-Cabade , entre l’église Saint- Aubin et le canal du Midi , et donnée au Musée par M. Ducos, médecin à Toulouse. Ainsi s'évanouissent complétement les doutes qui s'étaient manifestés à ce sujet. M. le Recteur de l’Académie de Toulouse invite l’Académie des Sciences à adresser à M. le Ministre de l'instruction publi- que, outre son Recueil périodique , les résultats de recherches nouvelles faites par ses Membres, et ayant pour objet d'élu- cider les nombreuses variétés d’antiquités provinciales , insti- tutions , coutumes , littérature, manuscrits. M. Jocy communique une lettre de M. le colonel Gleizes, re- lative au pâtre de Leseuns, inventeur de l'horloge qui a été exa- minée par une Commission de l’Académie. M. Morws soumet à l’Académie, au nom de M. Sancery, professeur au Lycée de Toulouse , un Mémoire sur l'intégration des équations différentielles. — Renvoyé à M. Brassinne. M. Mons, appelé par l'ordre du travail, lit un Mémoire sur la recherche d’une fonction rationnelle et entière de l'in- connu, qui satisfasse à l'équation différentielle qu'il pose et qui rentre dans celle dont M. Liouville a déterminé l'intégrale dans le Mémoire inséré au 21° cahier du Journal de l'Ecole polytechnique. En prenant la parole sur cette communication, M. Gascheau dit qu'il a suivi avec toute l'attention possible la lecture de M. Molins, mais que des questions aussi ardues ne peuvent pas être suffisamment étudiées à une simple audition, et qu'il sera heureux de pouvoir examiner ce travail lorsque l’impres- sion en sera faite dans le Recueil de l’Académie. A priori, il considère comme très-remarquable le résultat auquel est arrivé M. Molins, en trouvant des symptômes pro- pres à faire connaître si une équation différentielle doit amener DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 445 à des fonctions algébriques ou à des fonctions transcendantes , car souvent une équation différentielle qui paraît très-simple, peut conduire à des valeurs très-compliquées. MM. Brassinne et de Polignac prennent également la parole et engagent M. Molins à poursuivre des recherches qu’ils con- sidèrent comme très-intéressantes. M. le Prince pe PoriGnac présente un Mémoire relatif à une machine à vapeur de son invention, et dont le principe con- siste à produire la vapeur par l'introduction d’eau froide dans un ou plusieurs cylindres fortement chauffés. Il fait ressortir les avantages du système qu’il propose ; avantages qu’on peut résumer ainsi : grande production de vapeur dans un temps très-court; mise en train très-rapide ; notable écono- mie de combustible, de poids et d'espace. Mais la possibilité de la nouvelle machine repose sur les faits suivants qui résul- tent de plusieurs expériences de M. Seguin , entreprises à propos de sa nouvelle machine à vapeur surchauffée : 1° Si on fait passer de la vapeur dans un tube chauffé fortement, elle prend presque immédiatement la chaleur ambiante, et par suite la tension qui y correspond; 2° l'état globulaire varie avec la pression et dans le même sens qu’elle; 3° si on injecte une quantité convenable d'eau dans un cylindre fortement chauffé par un foyer, le métal reprend de suite la chaleur absorbée par la vaporisation de l’eau. M. Laroque présente quelques observations relatives au prin- cipe de la machine de M. Seguin, et à l’état globulaire des corps. M. de Polignac remarque que les faits qu'il a cités sont main- tenant rentrés dans le domaine de la pratique, grace aux ex- périences de M. Seguin; il ajoute que cependant il a entrepris une série d'expériences pour corroborer et surtout pour préciser celles qui ont été faites. Cette lecture donne lieu à une discussion, dans laquelle MM. Guibal , Laroque, Brassinne et Vitry prennent successive- ment la parole; la suite de cette discussion est renvoyée jusqu’à la communication de la seconde partie, dans, laquelle M. de 25 juin. &46G MÉMOIRES Polignac doit donner la description détaillée de l'appareil et des expériences qu'il a faites. A l'occasion de l’état sphéroïdal de la vapeur dont il est ques- tion dans la communication de M. de Polignac, M. Joly an- nonce qu'il a répété avec succès, dans une des forges de l’Ariége, les expériences de M. Boutigny. Ainsi, il a pu, sur de la fonte de fer en fusion, poser successivement les doigts comme sur les touches d’un piano, et même les enfoncer jusqu’à la seconde phalange sans brûlure et sans accident ; toutefois, la peau s’é- tait, en quelque sorte, parcheminée , et avant de répéter l’ex- périence , il dut attendre que la transpiration cutanée fût rétablie. M. le Prince de Polignac soumet encore à l’Académie une modification dans la construction des machines à vapeur or- dinaires ; Il propose de remplacer la tige du piston par un triangle à base circulaire, oscillant autour de son sommet. Le cylindre à vapeur se trouve alors remplacé par une portion d’anneau circulaire. Les avantages de cette machine consistent dans la suppression du balancier ou des glissières destinées à guider la tige; on Giminue ainsi le frottement et le nombre des pièces nécessaires à la transmission du mouvement. M. Brassinne pense que cette modification pourrait être heu- reuse , et qu'il est à désirer qu'elle soit étudiée. M. le Président, au nom de l’Académie, remercie l’auteur de ces deux intéressantes communications. M. Mounws fait un rapport sur un Mémoire de M. Forestié, intitulé : Discussion des surfaces du deuxième degré. —M propose d'adresser des remerciments à l’auteur pour son inté- ressante communication. — Ces conclusions sont adoptées. M. AsTre , appelé par l’ordre du travail, lit la seconde par- tie de son Mémoire , intitulé : Considérations historiques sur l'épiscopat toulousain. Dans la première partie de ce travail, imprimée dans le 6° vo- lume , quatrième série des Mémoires de l’Académie, M. Astre avait examiné quelles causes générales ou particulières avaient DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. h4T empêché , jusqu'au xn° siècle , l'évêque de Toulouse de pren- dre dans la cité une position politique dominante et plus éle- vée ; et il avait appuyé ses considérations sur les faits histori- ques, sur les chartes, enfin sur l’organisation municipale de la cité toulousaine. Continuant cet examen et passant au xm° siècle, M. Astre , après avoir rappelé en peu de mots la cause de la terrible guerre des Albigeois, dit quel fut à cette époque le caractère , comme le rôle de l’évêque Foulques , qui, avant d’être un per- sécuteur fanatique et furieux , avait été un poëte troubadour et vagabond peu orthodoxe , mais ayant mérité d’être célébré par Dante et d'être placé par lui dans les gloires de son paradis. M. Astre se demande quels durent être les mobiles de la con- duite de cet évêque envers les Toulousains. Il trouve que si Foulques sut, au milieu des désordres, parvenir à être riche, il n’augmenta poinc pourtant son pouvoir politique, qu'il vit plutôt diminuer. Après Foulques , Raymond de Felgar, mêlé aux grandes af- faires, aux négociations de son temps, ne fut pas plus heureux, sous le rapport de l'influence politique, que ne l'avait été son prédécesseur. Enfin, la réunion du comté à la couronne abaissa tous les pouvoirs locaux sous la puissance royale , qui voulut régner , gouverner et juger seule , ainsi que le témoignent les édits , les lettres patentes du roi , lors de l'établissement du se- cond Parlement de France , etc. En résumant son travail , M. Astre conclut que malgré des contestations et des empiétements respectifs portant sur les ap- plications et non sur le droit en lui-même réglé par les coutumes ou par le droit canonique , la séparation des pouvoirs politi- ques , civils, Judiciaires et religieux fut toujours profondément marquée à Toulouse. Il trouve dans cet état de choses incontes- table , des raisons nouvelles pour admirer davantage l’ancienne organisation de la cité toulousaine. M. du Mège prend la parole pour applaudir au travail qui vient d'être lu , et dans lequel l’auteur a prouvé qu’au lieu de se borner à établir la date des principaux événements, il savait 2 juillet. hhS MÉMOIRES envisager les faits historiques au point de vue synthétique et en tirer des conséquences rationnelles et philosophiques. M Hamel applaudit aussi à la manière heureuse avec la- quelle M. Astre a donné la traduction rimée de la partie du poëme de Dante, dans laquelle il est question de l’évêque Foul- ques. M. Sauvage , tout en étant d'accord avec M. Astre sur le fond, relativement à l'établissement de l’Inquisition à Toulouse, dé- sirerait que la forme fût un peu atténuée en ce qui concerne les Dominicains. M. Astre remercie MM. du Mège et Hamel à l’occasion de l’assentiment qu'ils ont donné à son travail. Quant à l’observa- tion de M. Sauvage, il fait remarquer qu’à côté du blâme rela- tif à l’Inquisition , il a placé l’éloge des Dominicains comme Frères précheurs. La discussion étant close, M. le Président accorde la parole à M. Penir, pour la lecture du rapport de la Commission qui s'est transportée au village de Lescuns, afin d'examiner l’hor- loge astronomique construite par le jeune Paban. M. Joly complète ce rapport par la lecture de quelques obser- vations sur ce jeune homme , considéré au point de vue phy- siologique. M. Lavocar fait hommage à l’Académie d’une statuette du général Compans. L'Académie accepte avec reconnaissance ce don , qui lui rap- pelle lune des illustrations militaires de nos contrées, et adresse, par l'organe de son Président, des remerciments à M. Lavocat. M. Nouzer , appelé par son tour de lecture, communique à l'Académie une note sur une mandibule de Aastodonte à dents étroites , de cet animal fossile que l’on suppose avoir été muni d’une trompe comme les éléphants actuellement vivants, et que les premiers naturalistes qui le connurent appelèrent animal de simorre. (A imprimer. ) DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. kh9 M. Sauvace , appelé aussi par l’ordre du tableau , communi- que un Mémoire ayant pour titre : Nouvelle explication d'un passage de l'art poétique d’ Horace. L'objet de cette dissertation est de montrer que jusqu’à pré- sent on a mal entendu et mal traduit les deux derniers mots du vers où l’auteur indique ainsi les trois principales préoccupa- tions de l’âge viril : Quærit opes et amicitias , inservit honori. Pour mieux établir le nouveau sens qu'il propose, M. Sau- vage discute d’abord celui des deux premiers , opes et amici- dias , lequel , après avoir donné lieu aussi à quelques incerti- tudes , est aujourd'hui parfaitement fixe et convenu. De l’in- tention de ces deux premiers mots, dont l’un se traduit par fortune , et l’autre par amitié politique , auteur du Mémoire tire la conséquence que les deux derniers, iaservit honort , complètent la pensée philosophique d'Horace, en signifiant, non pas que l'homme fait aspire aux honneurs, ce qui était, à Rome surtout, non-seulement légitime, mais honorable et même obligatoire , mais que, pour mieux arriver à cette fin, et après avoir d'abord pourvu à sa fortune, et s'être ménagé l'appui d’un parti, il se met à la suite et au service d’un grand personnage, autrement dit d'une grande position politique , dont il seconde et favorise l'ambition. M. Sauvage appuie cette explication de considérations em- pruntées à la valeur littérale des deux mots qu’il examine , à l'étude des mœurs politiques des Romains, et enfin, à l’une des données les plus importantes de l’art dramatique. Le point de départ de la discussion à laquelle il donne de longs développe- ments, c'est qu'Horace , dans la description qu'il a faite des quatre âges de la vie, n’a dü présenter , placé qu'il était au point de vue du théâtre , que le mauvais côté du tableau , c’est- à-dire les défauts , les ridicules et les passions qui sont justicia- bles de la comédie et qu’elle corrige par le ridicule ou l’odieux dont elle les couvre ; que par conséquent, dans la peinture par- ticulière qu'il a tracée de l’âge viril, il n’attribue à cette période 9 juillet. R50 MÉMOIRES de la vie, où l’homme cependant a presque toujours mis une qualité à la place d’un défaut, que les plus tristes préoccupa- tions , le soin et le souci de la fortune , le goût et le besoin des intrigues et des coteries politiques, enfin toutes les abnégations de l’amour-propre , tous les dévouements et toutes les servitu- des du second rôle, au profit d’une position plus haute et d’une ambition plus grande que la sienne. M. Casimir Roumeguère, membre correspondant , lit une notice sur l’histoire du commerce de Toulouse, dont il s’est occupé pendant plusieurs années. ( À imprimer. } Les travaux qui viennent d’être mentionnés ont été l’objet de diverses observations de la part de plusieurs Membres de l’Académie. M. C4 , désigné par l’ordre du travail, communique un Mémoire ayant pour titre : Quelques aperçus historiques sur les Etats du Languedoc. Ce travail a pour objet de rechercher les causes qui donnèrent une si grande et si durable influence à cette assemblée, dont les attributions participaient à la fois de l’ordre politique et de l'ordre administratif. La composition même des Etats, si l’on tient suffisamment compte des idées et des mœurs du temps, explique la confiance et le respect de la population pour un corps mixte dont les élé- ments héréditaires et électifs offraient des garanties à tous les intérêts; cette combinaison donnait, sous des conditions pru- dentes de stabilité, une prépondérance incontestable à la bour- geoisie, dont l’importance sociale prenait de l'extension à mesure que s’affaiblissait l'ascendant politique et moral de la puissance féodale. Le tiers état, par sa double représentation, balançait avec avantage l'influence des deux premiers ordres. L'auteur du Mémoire établit enfin, contrairement à l'opinion de quelques historiens , que, dans les délibérations des assem- blées générales, le vote avait lieu par tête et non par ordre, DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 451 système essentiellement favorable à celui des trois éléments qui avait, relativement aux autres , la majorité numérique. La puissance morale des Etats généraux avait des racines pro- fondes dans une province dont ils étaient les fidèles et dévoués représentants. Jaloux de ses immunités et de ses franchises, dont les origines remontaient à des temps antérieurs à la fon- dation de la monarchie, ils les avaient défendues avec persis- tance et énergie contre les régimes divers , contre les entreprises de la force et les empiétements des pouvoirs rivaux. Le consentement à la levée des subsides était l’un des élé- ments essentiels de ces libertés provinciales, et des serments so- lennels en sanctionnèrent l'existence, lors de la réunion du comté de Toulouse à la couronne. Mais la foi jurée ne fut pas toujours une sauvegarde du droit ; l'empire de la force, le prestige de la victoire , l'entraînement des esprits , l'irrésistible courant des idées qui favorisaient l'accroissement de l'autorité royale; en haine du régime féodal, frappèrent bien souvent d'impuissance les efforts généreux, les résistances légales des Etats de la province. On se soumettait, mais on n’abdiquait pas. Sous des formes de déférence et de respect, vivait dans les cœurs le sentiment de l'injustice, et les doléances exprimées , tantôt avec l'humble langage de la soumission , tantôt avec l’ac- cent animé d’un caractère ferme et indépendant , traduisaient d'énergiques protestations en faveur du droit méconnu et du pacte violé. édit de Béziers (1632) porta une profonde atteinte à la puissance des Etats du Languedoc. Quelles étaient, à ce mo- ment, leurs attributions? Que furent-elles depuis cette épo- que? C'est ce que recherchera l’auteur dans la deuxième partie de son Mémoire, qu’il communiquera plus tard à l’Académie. L'ordre du jour indique deux nominations d’associés hono- raires qui doivent remplacer MM. Thénard et de Salvandi, dé- cédés. Ont été élus, au scrutin secret, MM. Flourens et Lafer- rière, membres de l'Institut de Paris. Ces deux honorables candidats sont immédiatement proclamés associés honoraires de l'Académie par M. le Président : M. Flourens en remplacement 16 juillet. 452 . MÉMOIRES de M. Thénard, et M. Laferrière en remplacement de M. de Salvandi. M. Gaussaiz, ayant obtenu la parole, annonce qu'il continue ses recherches sur François Bayle, médecin et philosophe de Toulouse au xvne siècle. Il rappelle qu’une première étude qu'il a communiquée à l’Académie, avait pour objet l'examen de trois dissertations médicales, composées par Bayle à l’occasion d’un concours pour une chaire vacante à notre ancienne Fa- culté de Médecine de Toulouse. M. Gaussail a déjà présenté à l’Académie sur ce sujet deux Mémoires , l’un servant d'introduction , et l’autre consacré à la première dissertation de Bayle. Il aborde aujourd'hui la se- conde dissertation de cet auteur. Cette seconde dissertation a pour titre : Des sympathies des diverses parties du corps avec l'utérus. Elle présente natu- rellement deux divisions : une première consacrée aux géné- ralités , une seconde aux spécialités qui concernent le sujet. M. Gaussail analyse la première de ces deux parties du Mé- moire de F. Bayle. Il suit l’auteur dans son préambule , dans son plan , dans la définition qu'il donne de la sympathie , dans les développements dont les phénomènes sympathiques, envisa- gés au double point de vue de la pathologie et de la thérapeuti- que, sont l’objet dans l'intérêt qu'il analyse. Il reproduit en substance ou par des citations textuelles , ce que dit Bayle des quatre causes par lui assignées aux phénomènes sympathiques, à savoir : l’analogie de structure, l’analogie de fonctions , le voisinage des parties , la communauté des vaisseaux. D’autres communications devant occuper les instants de l’A- cadémie dans cette même séance, M. Gaussail remet à un autre jour la lecture des appréciations qui formeront le complément de son travail. Cette lecture est suivie de quelques observations. On remer- cie M. Gaussail de cette communication, dont on entendra la suite avec intérêt; ct on fait, à son occasion , remarquer com- bien les études sur les anciens trayaux scientifiques peuvent DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 453 offrir de l'utilité , en vulgarisant des documents souvent pré- cieux , renfermés dans des livres qui ne sont pas toujours à la portée de beaucoup de lecteurs. M. RoumEGuËRE, continuant ses études sur les lichens de no- tre contrée , lit la description d’une nouvelle espèce d'Usnéa. Les usnées des auteurs ont été rapportées à une seule espèce , type dont la dégénérescence ou le développement anormal a favorisé la distinction des formes ou variétés reconnues; cette opinion a été fortifiée par les observations des lichénographes contemporains qui ont admis des thèques et des spores, généra- lement semblables dans le type et les variétés. Pour certains, le type est l'Usnéa barbata Ach.; pour M. Roumeguère ce type est l'Usnéa florida Ach. La forme saxicole de ce dernier type n'avait jamais été vue en fructification, conséquemment elle était mal connue. M. Roumeguère ayant reçu de divers botanis- tes du Midi et ayant recueilli lui-même à Toulouse la plante avec ses apothécies , a pu vérifier l'appareil reproducteur , et a reconnu dans les thèques et les spores des caractères différen- tiels suffisants pour élever au rang d'espèce cette forme qui tranchait déjà avec les autres variétés, par sa couleur , ses di- mensions et son habitat exceptionnel sur les pierres ou les gra- viers. La nouvelle espèce a reçu le nom d’Usnéa saxicola. Roum. # M. le Prince DE Pouçxac lit à l’Académie la continuation de ses études sur le Faust de Goëthe. On félicite le lecteur d’avoir su exprimer dans des vers fran- çais , souvent remarquables par une élégante facilité, les par- ties versifées de l’œuvre du poëte de l'Allemagne. M. le Secrétaire communique à l'Académie une lettre de M. le Secrétaire de l’Académie royale de Christiania (Norwége), relative à l'échange des Mémoires des deux corps savants, et annonçant un prochain envoi. — Cette lettre est déposée aux archives. M. le Prince pe Porienac, ayant obtenu la parole, présente à l’Académie quelques observations au sujet d’une lettre qui lui 5° S. — TOME I. 30 23 juillet, 15% MÉMOIRES a été adressée par M. Fabre, professeur de physique au collége de Pamiers. Il fait remarquer que la machine à vapeur semi-rotative dont il est question dans cette lettre, n’a pas de rapport avec celle dont il a eu lui-même l'honneur d'entretenir l’Académie. Dans le système de M. Fabre, c’est une palette qui oscille dans une boîte fermée, autour d’un axe fixe, et la vapeur agit sur la palette de cet axe jusqu'à son extrémité, Dans le système de M. de Polignac, c’est un véritable piston qui oscille dans un cylindre. Seulement ce piston , au lieu d’être attaché à une tige rectiligne, est guidé par un triangle oscillant autour d’un point fixe, ce qui nécessite que le cylindre moteur ait la forme d’un anneau Circulaire. M. le Prince de Polignac, après avoir présenté ces obser- vations, met sous les yeux de l’Académie un dessin représen- tant une application de son système de machine à vapeur semi- oscillante avec locomotion. M. Gaussaiz , ayant obtenu la parole, continue la lecture d'un travail analytique sur un Mémoire de François Bayle , médecin à Toulouse au xvrr siècle, qu’il avait commencée à la précédente séance. IL présente d’abord un apercu rapide sur les sympathies phy- siologiques et morbides, Il établit qu'après avoir considéré pendant longtemps tous les organes et tous les tissus de l’éco- nomie comme pouvant être les points de départ et les aboutis- sants des phénomènes sympathiques , on a , de nos Jours, limité cette aptitude au tissu nerveux. Il mentionne les travaux qui ont le plus contribué à cette réforme et à ce progrès. Selon M. Gaussail, F. Bayle, pour définir la sympathie , s’est trop rigoureusement appuyé sur le sens étymologique du mot; c’est là ce qui l’a conduit à admettre deux conditions étio- logiques qui ne sont plus reçues aujourd’hui, savoir : le voi- sinage des parties et la communauté des vaisseaux. Dans les considérations exposées sur celle dernière cause , se trouvent quelques particularités dignes d'intérêt. M. Gaussail DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 455 les signale avec détails , et elles lui servent à démontrer que le médecin philosophe toulousain était parfaitement au courant de la science de son époque, et que même, à certains points de vue , il devance ses données ultérieures. Par un contraste inex- plicable cependant, il ne fait aucune mention de la circulation pulmonaire qui avait été annoncée et démontrée par plusieurs anatomistes dans la dernière moitié du xvi° siècle. La réfutation faite par F. Bayle de l’analogie de structure et de l’analogie des fonctions en tant que causes de sympathie , n'est pas aussi absolue qu’elle le paraît au premier abord. M. Gaussail s'attache à démontrer cette proposition , et dans sa pensée , les contradictions apparentes, les indécisions, les atté- nuations que l'on signale dans l'œuvre de Bayle, se rattachent sinon exclusivement, du moins d’une manière plus spéciale, à l'influence du système nerveux. M. Gaussail expose les notions que F. Bayle possédait sur l'anatomie et la physiologie de ce système, notions qu'il avait acquises par ses propres recherches, ainsi que le démontrent certains passages de sa dissertation. En terminant sa lecture, M. Gaussail convient que des énon- ciations formulées par F. Bayle à la doctrine moderne sur les sympathies, telle que l’ont établie les travaux et la classification de M. Brachet ( de Lyon) , il y a loin sans doute: mais, selon lui, en reconnaissant dans les généralités qu’il vient de résumer les prodromes, les premiers linéaments de ectte doctrine, on ne s'expose pas à dépasser les limites d’une interprélation légitime. M. BRassiNxE présente un rapport sur un travail adressé à l’Académie par M. Alboui, et qui est intitulé : Clef de comp- tabilité. Ce travail se compose d’un ensemble de tables utiles. Des remerciments seront adressés à son auteur. M. Brassinne fait un second rapport sur un Mémoire de M. Sancery, relatif au calcul intégral, adressé aussi à l'Académie. L'auteur du Mémoire a étudié, avec beaucoup de soin, les applications, à des exemples très-généraux, d'une méthode employée pour intégrer une équation différentielle du second 30 juillet. h56 MÉMOIRES ordre, homogène, par rapport aux variables et à leurs diffé- rentielles ; il démontre que cette classe d'équations du second ordre et d’un degré quelconque, comprend un grand nombre d'équations connues , traitées par Bernouilli, Euler, etc. Dans sa discussion approfondie, M. Sancery fait preuve de persévé- rance , de sagacité; il montre un esprit de recherche qui mérite d'être encouragé. L'Académie approuve le travail de M. San- cery, et elle engage ce jeune géomètre à poursuivre ses travaux dans une voie dans laquelle il a débuté avec succès. M. Laroque communique à l’Académie une partie d’un tra- vail qu'il a précédemment annoncé, relatif à l'écoulement des liquides. Cette partie a pour objet la pénétration des bulles d'air dans les liquides. Il donne une explication de ce phénomène fondé sur l’expé- rience , explication qui diffère essentiellement de celles propo- sées antérieurement. Il fait une application de sa théorie à la trompe d’eau, et il démontre que , dans cette machine soufflante, la pratique s’ac- corde avec la théorie pour constater qu’elle fournit le rendement le plus élevé. Il conclut de ses expériences qu’il est essentiel , si l'on veut que cette machine fonctionne utilement, que la dé- pression déterminée dans l’eau par le mouvement giratoire qui finit toujours par s'établir pendant l'écoulement , lorsque aucun obstacle ne lui est opposé, ne puisse se former dans le réservoir supérieur, ou du moins que cette dépression ne puisse descen- dre jusqu’à l’orilice supérieur de l’étranglion. M. Lavocat fait l'application à la saignée des phénomènes ex- posés par M. Laroque et y rattache l'explication des accidents qui suivent une compression subite. M. Dacun , appelé à fournir son tribut académique, lit un travail sur la grêle. Il commence par résumer rapidement les conditions du phé- nomène et les circonstances qui l’accompagnent : la forme, la grosseur , la structure des grêlons , l’aspect particulier des nuages à grêle, la marche du météore qui ravage successive- DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. h57 ment les différents points d’une bande étroite de terrain. Il rappelle les observations remarquables de M. Lecoq, qui, s'é- tant trouvé enveloppé par un nuage à grêle, a pu assister, pour ainsi dire , à la formation des grélons , et constater qu'ils n'oscillent pas entre deux courbes de nuages, comme le sup- posait Volta. 11 résume ensuite, en quelques mots, les théories données par Volta , Pelletier, M. Lecoq, M. Olmstet, et indique les principales objections qu'elles soulèvent. Il'entre ensuite dans le développement de l'explication qu'il propose : les nuages à grêle sont formés par la rencontre de deux vents opposés, l’un venant du nord, l’autre venant du sud. Ces nuages sont fortement électrisés. Le froid nécessaire à la congélation des particules d’eau , est dù , suivant l’idée heu- reuse de M. Tessan , à l'expansion du nuage, provoquée par la répulsion électrique des particules d’eau qui le composent. Ces particules glacées sont ensuite ballottées et soutenues dans le nuage par les tourbillons d'air qui résultent de la rencontre des deux vents contraires, et par les attractions et répulsions qu'elles éprouvent de la part des différentes parties du nuage, électrisées d’une manière inégale, ou même d’une manière con- traire. Quand lesgrêlons passent dans une partie où domine le vent chaud , ils se recouvrent d’une couche de glace transparente ; quand ils passent dans une partie très-froide , la vapeur se con- dense en forme de givre ou de glace opaque. M. Daguin ex- plique ensuite pourquoi la grêle est propre aux zones tempé- rées et pourquoi elle tombe particulièrement pendant l'été. La parole est accordée à M. pu MÈGe, qui communique à l’Académie la seconde partie de son Mémoire sur les objets an- tiques ou du moyen âge, découverts dans les fouilles opérées pour l'établissement du chemin de fer de Bordeaux à Cette. C'est surtout dans les lieux voisins de Narbonne, cette cé- lèbre colonie romaine qui donna son nom à l’une des plus ri- ches parties de la Gaule , que les découvertes devaient avoir le plus d'importance. L'auteur rapporte qu'on a trouvé des objets du plus haut intérêt qui ont accru les richesses archéologiques du beau Musée 458 MÉMOIRES de cette ville. Il signale particulièrement à l’Académie la statue d’un faune. Malheureusement , la partie inférieure de ce mo- nument n'a pas été retrouvée, et c’est sans doute une perte regrettable, car la statuaire antique a laissé peu de restes com- parables à celui-là dans le Midi de la France. Dans un autre ordre d'idées, le moyen âge a fourni aussi au Musée de Narbonne des documents qui concernent le passé de cette ville. Un juif, au nom duquel s'attache une célébrité méritée, Benjamin de Tudéla en Navarre, qui parcourut les synagogues de tous les pays pour en connaître l’état, parle de celle de Nar- bonne avec éloge, et dit, au sujet des études rabbiniques qui y florissaient : « que Narbonne était maîtresse pour la loi. » M. du Mège fait remarquer qu’en publiant, dans le huitième volume de la Société des antiquaires de France , les inscriptions hébraïques des synagogues de Narbonne, il a ajouté de nom- breux détails, jusqu'alors inconnus , à ceux que l’on possédait sur les juifs de la dispersion qui s'étaient fixés dans cette ville. Les autres inscriptions hébraïques qui y ont été découvertes, ou dans les lieux voisins , sont toutes sépulcrales. M. du Mège déclare qu'il doit une partie des copies qu’il possède de ces documents, à M. le commandant du génie Puig- gari, qui lui en a fait l'envoi, en les accompagnant de ses sa- vantes et précieuses remarques. Deux d’entre elles n'offrent que des fragments. L'un d'eux rappelle le souvenir d’une femme nommée ÆHawah, l'autre celui de la fille d’un rabbin nommé David. Une seconde inscription , acquise par l’auteur , est placée dans le Musée de Toulouse. Elle provient de la tombe d’un juif que l'épitaphe qualifie d’honorable , etqui se nommait David-V'ital Sylvah. Le tout finit par le souhait. Une troisième inscription mentionne un israélite mort deux jours après sa jeune épouse, vers la fin du soir. Il y est dit qu'il a suivi les traces funèbres de sa génisse. La quatrième consiste en un fragment qui ne contient pas le nom du défunt, et qui apprend seulement qu'il était le fils du xabbin David. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 459 Après avoir discuté grammaticalement les textes de ces di- verses inscriptions, en déclarant qu’il a consulté à leur sujet plusieurs savants versés dans la connaissance de la langue hé- braïque, M. du Mège présente à l’Académie des considérations sur l’état des femmes israélites après la dispersion, durant le moyen âge, et dans plusieurs parties de l'Europe. M. Barry entretient l’Académie des études sur la numisma- tique Ibérienne, dues à M. Boudard, secrétaire de la Société Archéologique de Béziers. Il fait l'éloge de ce remarquable travail. M. TitBaz-LAGRAVE communique à l’Académie une note ayant pour titre : De la Grappe bi-corymbifire dans le genre Tberis, considérée comme caractère spécifique. Après avoir tracé les caractères établis par les floristes mo- dernes pour distinguer les nombreuses espèces de ce genre, M. Timbal-Lagrave examine particulièrement l'Jberis bi-corym- bifera (Gren. et Godr.) qui a été fondé par les auteurs de la Flore de France et de Corse, sur des échantillons récoltés aux environs de Mende par feu Boivin. M. Timbal-Lagrave ayant trouvé à Toulouse un échantillon d'Iberis bi-corymbifère, le compare à la description donnée par MM. Grenier et Godron , et constate la parfaite identité de ces deux plantes ; mais il ne peut voir dans cette double grappe un caractère spécifique. Elle est due, selon lui, à un accident passager, causé par des influences météorologiques particu- lières. L’échantillon, placé sous les yeux de l'Académie, est certainement une plante annuelle qui doit être rapportée à l'Iberis pinnata plutôt qu'à l'amara L., comme le pensent les auteurs de l’Zberis bi-corymbifera. Les rameaux qui occupent le sommet de la tige ont une grappe simple, tandis que ceux du bas ont une double grappe parfaitement développée. Au moment où cet échantillon a été récolté, septembre 1856, la première grappe était desséchée, tandis que la seconde avait des fleurs épanouies et des silicules encore non müres. Le développement de ces nouvelles fleurs est dû, d'après 6 août, 460 MÉMOIRES M. Timbal, à des bourgeons latents qui n’ont pu se produire lors de la première floraison, et qui, recevant des sucs nou- veaux, S'épanouissent au centre de la grappe primitive. M. Jocy fait un rapport favorable sur un Mémoire de M®° Power, tendant à établir, contrairement à une opinion assez généralement répandue, que l'animal qui habite l’élégante coquille de l’Argonaute | Ærg'onaula argo) est réellement le constructeur de cette coquille. Le même académicien fait encore un rapport verbal sur di- vers Mémoires de M. Buzairies , concernant les abeilles. M. Joly termine son rapport par les conclusions suivantes : « En résumé, M. le docteur Buzairies nous semble parfai- tement au courant de la question qu’il a étudiée. Une seule la- cune nous a frappé dans son travail, c’est celle qui est relative à la parthénogénèse, admise comme un fait certain par les uns, niée absolument par les autres. Nous aurions voulu voir l’auteur apporter son contingent de preuves en faveur de l’une ou de l’autre de ces deux opinions. Pour dire notre pensée tout entière, nous aurions surtout désiré qu’au lieu de se borner à rapporter le plus souvent ce qu'ont écrit ses devanciers , il eût fait un plus grand nombre d'observations personnelles et tâché de résoudre quelques-uns des curieux problèmes que renferme encore l'histoire des mouches à miel. » Ces réserves faites, nous n’avons que des éloges à donner au travail de M. Buzairies. C’est un résumé fort clair et très- méthodique de tout ce qu’on sait de plus précis et de plus im- portant sur les abeilles et leur culture. La partie pratique sur- tout nous a paru digne d’éloges, et nous applaudirons de tout notre cœur au zèle intelligent que déploie l’honorable secré- taire du Comice agricole de Limoux , pour répandre de plus en plus dans nos campagnes une industrie jusqu’à présent beau- coup trop négligée. | » En conséquence, Messieurs , nous avons l'honneur de vous proposer , non-seulement de remercier l’auteur de ses très-in- téressantes communications, mais encore de l’engager à pour- suivre ses utiles (ravaux. » DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 461 A l’occasion de ce rapport , différents membres font observer que, depuis plusieurs années, M. Buzairies a fait de nom- breuses communications ; qu'il a déjà sollicité une place d’as- socié correspondant, et qu'il est temps de statuer sur cette de- mande. La proposition ayant été appuyée et prise en considéra- tion , l’Académie décide que le scrutin aura lieu dans la pro- chaine séance. L'ordre du jour indique une nomination d’associé corres- pondant. M. Buzairies, docteur en médecine à Limoux, ayant obtenu la majorité des suffrages , est proclamé correspondant dans la classe des Sciences , section d'Histoire naturelle. L'Académie procède à la nomination d’un correspondant dans la classe des Inscriptions et Belles-lettres. M. Boudard , secrétaire de la Société archéologique de Béziers , obtient la majorité des suffrages. M. Vrrry annonce que, dans un voyage qu’il a fait récem- ment dans la Catalogne et le Roussillon , il a relevé le plan de plusieurs monuments byzantins du xi° et du xn° siècle ; déjà MM. Taylor et Charles Nodier, dans leur magnifique ou- vrage intitulé : Voyage pittoresque dans l’ancienne France, ont donné de nombreux dessins de la plupart de ces monu- ments, mais les plans n’ont été ni relevés ni publiés. M. Vitry communiquera à l’Académie, l’année prochaine , le résultat de ses études sur ces intéressantes et belles constructions. Après la communication faite, par M. le Secrétaire , de la correspondance imprimée et manuscrite , la séance est levée et la session académique déclarée close. Le Secrétaire perpétuel, UrBax VITRY. 13 août, 20 août, 27 août. 462 MÉMOIRES SUJETS DE PRIX POUR LES ANNÉES 1858 , 1859 Er 1860. L’ACADÈMIE rappelle que le sujet du prix à accorder en 1858, est la question suivante : Recherches sur l'électricité atmosphérique. Observations. L'Académie, en posant la question dans ces termes généraux et en laissant ainsi un libre et vaste champ aux recherches, croit néanmoins utile d'attirer particulière- ment l'attention des concurrents sur les questions secondaires suivantes : 1° Discuter les observations desquelles on a déduit l'existence de l'électricité atmosphérique et les lois de sa tension ; 2° Déterminer , en s'appuyant sur l’expérience, les sources de l'électricité atmosphérique ; 3° Reconnaître si l'espèce d'électricité qui charge un nuage orageux exerce une influence sur sa constitution physique ; 4° Rechercher quel est le degré d'influence de l’état électri- que des nuages orageux sur la formation de la grêle ; 5° Etablir sur des documents authentiques la fréquence relative de la grêle dans les régions du bassin sous-pyrénéen , et rechercher les circonstances qui peuvent, dans ces mêmes régions , influer sur la répartition inégale de ce météore. Nota. Quelles que soient les questions traitées , l'Académie, dans l'appréciation des Mémoires qui lui seront présentés , tiendra compte surtout de la nouveauté et de la fécondité des observations personnelles ; elle attachera cependant une grande importance aux recherches relatives à la dernière question. Le prix sera une médaille d’or de la valeur de 500 fr. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. LG3 L'Académie propose pour sujet de prix de l’année 1859, la question suivante : Faire lhaistoire de lorganisation judiciaire , civile , criminelle et ecclésiastique dans le Languedoc et la Pro- vence , depuis la publication du Bréviaire d Alaric jusqu'à l'établissement fixe du Parlement de Toulouse, en 1444. Le prix sera une médaille d’or de la valeur de 500 fr. L'Académie propose pour sujet de prix de l’année 1860, la question suivante : Faire connaître les résultats positifs dont les expériences physiologiques ont enrichi la médecine clinique depuis le commencement du x1x° siècle. Le prix sera une médaille d’or de la valeur de 500 fr. L'Académie n’a point décerné le prix de 1856, dont le sujet était la question suivante : Rechercher quels sont, en dehors du latin, les éléments qui ont concouru à la formation de la langue romane. En conséquence, et conformément à l’art. 32 de ses règle- ments , l’Académie a décidé qu’elle accordera un prix extraor- dinaire à l’auteur d’un mémoire qui lui serait adressé avant le 1° janvier 1858. Ce prix extraordinaire sera une médaille d’or de 500 fr. Les savants de tous les pays sont invités à travailler sur les sujets proposés. Les membres résidants de l’Académie sont seuls exclus du concours. Les auteurs sont priés d'écrire en français ou en latin, et de faire remettre une copie bien lisible de leurs ouvrages. Ils écriront au bas une sentence ou devise ; la même sen- tence sera inscrite dans un billet séparé et cacheté, renfermant leur nom , leurs qualités et leur demeure. Ils adresseront les lettres et paquets, franc de port, à M. Urbain Vrrry, ex-Ingénieur-Architecte en chef de la ville, Secrétaire perpétuel de l’Académie, allée Louis-Napoléon , n° 3, AA MÉMOIRES ou les lui feront remettre par quelque personne domiciliée à Toulouse. Les Mémoires ne seront reçus que jusqu'au premier janvier de chacune des années pour lesquelles le concours est ouvert. Ce terme est de rigueur. Les Mémoires dont les auteurs se seront fait connaître avant le jugement de l’Académie, ne pourront être admis au concours. Les noms des lauréats seront proclamés en séance publi- que, le premier dimanche après la Pentecôte. Si les auteurs ne se présentent pas eux-mêmes, M. le Docteur Larrey , Trésorier perpétuel, ne délivrera le prix qu’au porteur d’une procuration de leur part. L'Académie, qui ne prescrit aucun système, déclare aussi qu'elle n’entend pas adopter tous les principes des ouvrages qu'elle couronnera. Dans sa Séance publique annuelle, l'Académie décernera aussi des prix d'encouragement , 1° aux personnes qui lui signaleront el lui adresseront des objets d’Antiquité (monnaies , médailles, sculp- tures , vases , armes , etc. ), et de Géologie (échantillons de roches et de minéraux , fossiles d'animaux , de végétaux , etc.) , ou qui lui en transmettront des descriptions détaillées , accompagnées de figures ; 2 Aux auteurs qui lui adresseront quelque dissertation , ou ob- servation. ou mémoire, importantsetinédits, sur un des sujets scien- tifiques ou littéraires qui font l’objet des travaux de l'Académie ; 3° Aux inventeurs qui soumeltront à son examen des machines ou des procédés nouveaux introduits dans l'industrie, et particuliè- rement dans l’industrie méridionale. Ces encouragements consisteront en médailles de bronze , d’ar- gent ou de vermeil, avec mention au procès-verbal, selon l'impor- lance scientifique des communications. Dans tous les cas ; les objets soumis à l'examen de l’Académie seront rendus aux auteurs ou in- venteurs , s'ils en manifestent le désir. Les communications devront être adressées, franco , à M. le Secrétaire perpétuel, avant le premier avril de chaque année. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 465 EE ——_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—__ —_—_—_—_—_—_—_—_ OUVRAGES IMPRIMÉS ADRESSÉS À L'ACADÉËMIE PENDANT L'ANNÉE 1856-1857. Sociétés Savantes. AGEN. — Recueil des travaux de la Société d'Agriculture , Sciences et Arts, t. vin, 1°° partie, 1856. In-8°. AMiENs. — Mémoires de la Société des Antiquaires de Picardie. Documents inédits concernant la province, t. ur, 1856. In-4°. Amiens. -— Bulletin de la Société des Antiquaires de Picardie, année 1856, n°3, 1857, n° 1. In-8°. AusterDamM. — Tijdschrift voor de Wis-en Natuurkundige We- tenschappen , uitgegeven door de r‘° Klasse. Deel I-V. In-8°. AmsTERDAM. — Commentationes 31% Classis, tom. 1, 1v, v, vi. In-4o. Ausrerpam. — Verhandelingen der Koninklijke Akademie van Wetenschappen. Deel I-IL. In-4°. AmsrTErDaM. — Verslagen en Mededeelingen der Koninklijke Akademie van Wetenschappen. Afdeeling Natuur- kunde. D. I-IV. In-8°. AmsTERDAM. — Letterkunde Deel. I. In-8°. AusrerDaM. — Verslagen over het Procédé van Suikerberei- ding, door middel van Losdsuiker. In-8°. Amsterpam. — Verslagen over de Lepra te Suriname. In-8°. AMSTERDAM. — Verhandelingen , 1 ke ko et institutus I, Il, et XP PART NTIR EN: ssl 9 — VepNI , VI VE — 3 — PIN k&G6G MÉMOIRES AnGers. — Bulletin de la Société industrielle, 27° année, 1856. In-8°, fig. ANGERS. — Pomologie de Maine-et-Loire , 4° livr. , 1856. In-8°, figures. ANGOULÈME. — Annales de la Société d'Agriculture, Arts et Commerce du département de la Charente, juillet et août, septembre et octobre 1856. In-8o. Anvers. — Annales de l’Académie d'Archéologie de Belgique, t. xun, 4e livre. ; t. xiv, 17° livr. In-8°, 1856. Besancon. — Bulletin de la Société de Médecine , n° 6 , année 1856. In-8°, 1857. Borpeaux. — Recueil des actes de l’Académie impériale des Sciences , Belles-Lettres et Arts, 1856, 1'° série. In-8°, figures. Borpeaux, — Bulletin de la Société philomatique, 1° et 2° n°. In-8°, 1857. Cazx. — Mémoires de l’Académie impériale des Sciences, Arts et Belles-Lettres. In-8°, 1856. Cracons. — Mémoires de la Société d'Agriculture, Commerce, Sciences et Arts de la Marne, année 1855-56. In-8°, 1857. Carisriania. — Kong oluf triggvesons saga forfattet paa latin, etc. In-$°, 1853. Cnrisrranra. — Beskrivelse over de nye Universitets-Bygninger. In-8°, 1852. CuisrianA. — Olaf den hellices saga ved snorre sturlasson. In-5°, 1853. Czermonr-Ferranp. — Annales scientifiques , littéraires et in- dustrielles de l'Auvergne, publiées par l'Académie des Sciences, Belles-Lettres et Arts. In-8°, 1856. Duon. — Mémoires de l’Académie impériale des Sciences, Arts et Belles-Lettres, 2° série , t. v, année 1856. In-8° avec atlas in-fol. DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES, 467 DraGurGnax. — Bulletin de la Société d'Etudes scientifiques et archéologiques , juillet 1856. In-8°. Dog. — Catalogue of stars the ecliptic observed ut Markrée, during the years, 14852, 53, 54, vol. nr, containing 15,018 stars. In-8°, 1854. Evreux. — Recueil des travaux de la Société libre d'Agricul- ture , Sciences , Arts et Belles-Lettres de l'Eure, 3° série, t. m1, année 1854. In-8°, 1856. Le Mans. — Mémoires de la Société d'Agriculture , Sciences et Arts de la Sarthe , 1° fascicule, 1855. In-8°. Le Maxs. — Bulletin de la Société d'Agriculture , Sciences et Arts de la Sarthe, xn° vol., et ximi° vol. 4% et 2° trim. In-8°. 1856. Limoces. — Bulletin de la Société archéologique et historique du Limousin, t. vi, 3° liv. In-8°. 1856. Limoces. — L’Agriculteur du Centre, t. vu, n° 5. In-8°.1856. Loxpres. — Philosophical Transactions of the royal Society of London for the year 1856, vol. 146, part. 1. In-#°. 1856. Loxpres. — Proceedings of the royal Society , t. vir et vu. In-8°. MENDE. — Bulletin de la Société d'Agriculture , Industrie , Sciences et Arts du département de la Lozère, t. vn, vin. 4856-57. In-8°, MErz. — Mémoires de l’Académie impériale, 38° année, 1855-56; 2° série, 1856. In-8°, fig. Mizax. — Memorie dell’ J. R. Istituto Lombardo di Scienze, Lettere ed Arti, volume quinto, sesto, 1856. In-4°, fig. Mizan. — Giornale dell J. R. Istituto Lombardo di Scienze, Lettere ed Arti e biblioteca Italiana , nuova serie, fascicoli dal 33 al 51 , 1855-56. In-4°. Mizax. — Atti della fondazione scientifica Cagnola, volume primo. 1856. In-8°. 468 MÉMOIRES MowrrecLier. — Publications de la Société Archéologique, n° 24, 1856. In-4°. Nimes. — Compte rendu des travaux de l’Académie du Gard , 29 août 1856. In-8°. Paris. — Comptes rendus hebdomadaires des séances de l’Aca- démie des Sciences de Paris, t. xziv et xzv. In-4°. 1857. Paris. — Bulletin de la Société des Antiquaires de France, 1857, 1°" trim. In-8°. Paris. — Extrait des procès-verbaux des séances de la Société philomatique, années 1853-54-55-56. In-8°. Perpienax. — Société agricole , scientifique et littéraire des Pyrénées-Orientales, x° vol. 1856. In-8°, fig. Porriers. — Mémoires de la Société des Antiquaires de l'Ouest, année 1855. In-8°, fig., 1856. Porriers. — Bulletin de la Société des Antiquaires de l'Ouest, année 1856. In-8°. SainT-ETiENNE. — Annales de la Société impériale d’Agricul- ture , Industrie, Sciences, Arts et Belles-Lettres du département de la Loire, t. 1°, 1°° liv. In-8°, 1857. Sanr-Ouer. — Bulletin de la Société des Antiquaires de la Morinie, année 1856. In-8°. TouLon. — Bulletin de la Société des Sciences , Belles-Lettres et Arts du département du Var, 24° année. 1856. In-8°. TouLocse. — Mémoires de la Société impériale archéologique du Midi de la France, t. vn, 3° livr., 3° série, 1857. In-k°, fig. TouLouse. — Journal d'Agriculture pratique et d'Economie rurale pour le Midi de la France, année 1857. In-8°. Toucouse. — Société d'Emulation et de Prévoyance des Phar- maciens de la Haute-Garonne. — Compte rendu des travaux de l’année 1856. In-8°, 1857. DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. k69 Tours. — Annales de la Société d'Agriculture , Sciences , Arts et Belles-Lettres du département d’Indre-et-Loire, ft. XXXIV, XXXV, XXXVI. In-8°, fig., 1856. Troyes. — Mémoires de la Société d'Agriculture, Sciences, Arts et Belles-Lettres du département de l'Aube, n°® 39, 40. In-8°, 1856. Tori. — Annali della R. Accademia d’Agricoltura, vol. mr, IV, v et vu. VERSAILLES. — Mémoires dé la Société des Sciences morales, des Lettres et des Arts de Seine-et-Oise , t. 1v. In-8°, fig., 1857. WasHiNGTox. — Smithsonian contributions to Knowledge, vol, vu. In-4, fig., 1856. Travaux des Membres résidants et correspon- dants de l'Académie. Bouparp. — Etudes sur la Numismatique ibérienne , 1° et 2° fascicule. Paris, 1857. In-4°, fig. Burnour, — Notice sur le cosmographe de M. Emile Burnouf. Toulouse. In-8°. Cawero (l'Abbé). — Sainte-Marie d'Auch. Atlas monographi- que de cette cathédrale, 6° livr. Auch , 1856. In-fe, fig. CaTaLax. — Sur la théorie des développées. Paris, 1837. In-%°, Camara. — Note sur quelques points de la théorie des séries. Paris, 1856. In-4°. CATALAN. — Note sur la sommation de certaines séries. Paris, In-8°. Cenac-Moxcaur. — Voyage archéologique et historique dans l’ancien royaume de Navarre. Paris , 1857. In-8o. 9° S,— TOME 1. 31 470 MÉMOIRES Genac-Moncaur. — Voyage archéologique et historique dans le pays Basque , le Labour et le Guipuscoa. Paris, 1857. In-8°. GEnac-Moxcaur. — Voyage archéologique et historique dans l’ancienne vicomté de Béarn. Paris, 1856. In-18, fig. CmauDruc DE Crazannes ( Baron). — Lettre à M. Hucher, du Mans , sur une médaille gauloise. In-8°, fig. Costes. — Mémoire sur le traitement de la fistule lacrymale. Bordeaux, 1856. In-8°. 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Larkey (Baron). — Rapport à la Société de Chirurgie, sur l'éléphantiasis du scrotum. Paris, 1856. In-4°, fig. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 471 Larrey (Baron). — De l’éthérisation sous le rapport de la res- ponsabilité médicale. Discours. Paris, 1857. In-8°. Larrey (Baron). — Inauguration de la statue de Bichat, le 16 juillet 1857, à la Faculté de Médecine de Paris. Discours. Paris, 1857. In-8°. Larter. — Note sur un humérus fossile d'oiseau , attribué à un très-grand palmipède de la section des longipen- nes. Paris, 1857. In-4°, fig. Larter. — Note sur un singe fossile qui se rattache au groupe des singes supérieurs. Paris, 1856. In-k°, fig. Le Cour. — Discours prononcé à la séance solennelle de la rentrée des Facultés, le 15 novembre 1856. Caen, 1856. In-8°. LEvYMERIE. — Considérations géognostiques sur les échinoder- mes des Pyrénées et des contrées annexes de cette chaîne de montagnes. Paris, 1856. In-8°. Mons. — De la surface développable passant par une courbe donnée quelconque , et qui par son développement transformerait cette courbe en un arc de cercle de rayon donné. Paris, 1856. In-4°. Mounier. — De la condition des débiteurs à Toulouse , d’après deux chartes de la fin du xur° siècle. Toulouse, 1857. In-8°. J.-B. Noucer. — Coquilles fossiles nouvelles des terrains d’eau douce du Sud-Ouest de la France. Paris, 1857. In-8°. Ouvrages divers. A. G. — Arithmétique pratique des moniteurs, ou Recueil de problèmes à l'usage des écoles secondaires. Toulouse, 1856. In-18. Brioz. — Les Funérailles de Béranger ( Stances nationales ). Toulouse , 1857. In-8°, fig. L72 MÉMOIRES Brioz. — Les Fastes de Toulouse (Trilogie nationale). Tou: louse, 1857. In-8°. Brocnox fils. — Essai sur l'histoire de la justice criminelle à Bordeaux pendant le moyen âge (du 12° au 16° siècle). Bordeaux , 1857. In-8°. F. Brüxnow. — Mémoire sur la Comète elliptique de de Vico. In-4°. Buxez. — Les Ruines de Pompéiopolis. Toulouse. In-4°. Van CaPreLLe. — De regibus et antiquitatibus Pergaruum. Cazac. — Considérations sur les Eaux de Bagnères-de-Luchon transportées. Toulouse, 1857. In-8o. Corecer (l'abbé). — Notice historique sur le culte de Saint- Médard. Amiens , 1856. In-8°. Deceror et LecreLzce. — Notice sur J. À. Houdon, de l’Institut (1741-1898 \. Versailles, 1856. In-8°. Des Mourins. — Esnandes et Beaumont du Périgord ; analyse comparative de deux églises fortifiées du xiv° siècle. Bordeaux , 1857. In-8°. Dessoye. — Les Soufreurs, la Vigne et l'Oïdium, ou examen critique, en 1857, des publications de MM. Marès, Vialles et Laforgue. Toulouse, 1857. In-32. DesprèTRE. — Analyse du Mémoire présenté au nom de M. Glæ- cener, sur un chronoscope nouveau. Paris, 1856. In-8°. E.-H. Exker. — Dissertatio anatomica inauguralis de cerebri et medullæ spinalis systemate vasorum capillari in statu sano et morboso. In-8°. GLosenEr. — Recherches sur la télégraphie électrique. Liége, 1853. In-8°, fig. Van per Heypex. — Notice rédigée d’après le nobiliaire de Bel- gique, sur la très-ancienne noble maison de Kerc- kove, dite Van der Varent. Anvers, 1856. In-8°, fig. DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. 473 Hocrius, — Consilio sapientis. Jorpax. — Nouveau Mémoire sur la question relative aux Ægilops triticoïdes et speltæformis. Paris, 1857. In-8°, fig. Kceix. — Notice sur les fourneaux économiques. Paris, 1856. In-8°, fig. KRAYENHOFF. — Précis historique des opérations géodésiques et astronomiques faites en Hollande. In-4°. Laxpois. — Exposé des causes de la colorisation des corps et des lois constantes qui régissent la reproduction des couleurs. Paris, 1857. In-8°, fig. Vax Lexxers. — Veris quædar cpitheta , etc. DE LoxGPériEer. — Rapport à l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, au nom de la Commission des Anti- quités de la France. Paris, 1856. In-4°. DE Maxora. — Réfutation de la base établie par Newton à la force de l'attraction universelle, etc. Barcelonne , 1856. In-8°. Paris. — Journal des Savants, année 1857. In-4o. Paris. — Annales de Chimie et de Physique, t. xzix et L. 1857. In-8°, fig. Paris. — Revue archéologique, 14° année. 1857. In-8°, fig. Paris. — Revue des Sociétés savantes de la France et de l’é- tranger, t. 1et 11. 1856-57. In-8°. Paris. — Bulletin du Comité de la Langue, de l'Histoire et des Arts de la France , t. 1. 1856. In-8°. Paris. — Archives des Missions scientifiques et littéraires, vol. v. 1856. In-8°. Paris. — Descriptions des machines et procédés consignés dans les brevets d'invention dont la durée est expirée, LXxXxV, LXXxVI 1856. In-4°, fig. 47h MÉMOIRES Paris. — Description des machines et procédés pour lesquels des brevets d'invention ont été pris sous le régime de la loi du 5 juillet 1844, t. xxx, xxiv. 1856. In-4°, fig. Paris. — Catalogue des brevets d’iavention pris du 1° janvier au 31 décembre 1855. In-8°. Paris. — Congrès scientifique de France, 22° session, tenue au Puy en septembre 1855. In-8°, fig., 1856. Paris. — Annuaire de l'Institut des provinces et des Congrès scientifiques , t. 1x. 1857. In-18, fig. Paris. — Journal de la Morale chrétienne, t. vi. 1856. In-8°. PonrTaumoxT. — Histoire mystéricuse du Château de Tourla- ville, près Cherbourg. Cherbourg. In-8°. Rauuin. — Distribution géologique des animaux vertébrés et des mollusques terrestres et fluviatiles fossiles de l’Aquitaine. Bordeaux , 1856. In-8°. Van Res. — Over de verdeeling van het Magnetismus in Ma- gneten. In-#°. SaintT-ANDRÉ. — Topographie médicale du département de la Haute-Garonne, contenant la description générale de toutes les communes , et la topographie plus parti- culière de celle de Toulouse. Toulouse , 1814. In-8°. SALLENAVE. — Réponse du docteur Sallenave, de Bordeaux, à M. Saurel, relativement au traité des maladies chro- niques dues à l'épuisement. Bordeaux, 1856. In-8°. SeLier. — Rapport sur les travaux du Congrès des délégués des Sociétés savantes de France. Châlons , 1857. In-8°. TouLouse. — Journal des Vétérinaires du Midi. 1857. In-8°. Tourouse. — Journal de Médecine et de Chirurgie. 1857. In-8°. Trescaze. — De la production animale et de la cherté des subsistances. Tarbes , 1857. In-12. DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES. 475 VaLLaRiNO. — Réflexions sur la crise financière qui se produit actuellement en Europe et particulièrement en France. Perpignan , 1857. In-8°. G. J. Verpam. — Bijdrage tot de Bescouwing der Lemniscaten. In-4°. Viérrinier. — Réformes des lois pénales appliquées aux en- fants. — Opinions produites sur ce sujet. Rouen , 1856. In-8°. De Wac. Prijsverhandeling over het bestaan , den aard en de behandeling van het natuurregt. Amsterdam , 1833. In-4°. #ilpäotg do salon lenae M den ésrplau ire 18552 Je 210) 0emet: rnb bainle er M" do gaie © ; ht + fdruih % la Monte chris à 1, PRE, int”, Pourienonr, 2" {fnioire mystérisust ‘du Clitega dt Toüs- FR Re Clréhodrg Chophoure Pa 5, Race se station polo des anibaux dort, mn dés DPI ENTIES lobrosinés dt. H NTAUTLL Pole. da “sttétes Mardi 7 TA66; Put Van Mimi: #24 Cat de vwdedling van het Hybéctiamae in à EL iqu) dani, ra Tépogrophie sidi L" dépatedant du K cu ts the, roatenat ts dractigrion téndraha tion Jes count, li topéaraplite {tte gertre cultes de colle de Toulonse. Tonunse, LE In.B, Sutra os hèn vait du uote “ir Sat LUEUR dv thocdiaux, à M: Fa celotitenrent au ral del jalarties cho wigocs dos h Mipibitnent. WTA ANSE pu SRE, es M npnbgi QUE dés IraN aux, Gt Loufrè des Coltrutd des Sagités sign du Ferme Een: 1 ER lo-àf: : te Cottbus dti à Fr Vérins Mis Ce sn br nur da fétirial. de: MIE Vel, de | LU rgIe a 1H57 19-4", K Pub. Da Pr ta prod she mdrile «4 ÿs tpehprie due: < A sabsiste nus, TAALERNT. Jo- tie S 477 TABLE DES MATIÈRES. Mathématiques pures. MM. Pages. BRASSINNE. — Théorème de calcul intégral...................... 187 Brassinxe. — Des termes qui complètent la formule générale de la mécanique analytique dans le cas du frottement...... 181, 423 Observations sur ce mémoire, par M. Molins (Bulletin).. 425 BRAssiNxE. — Sur quelques points de la théorie des équations diffé- rentielles linéaires. ...... HAE ee CS HO GORE Le EL | Observations sur ce mémoire , par MM. Gascheau et Petit LT DETOS EC ASP SE PR OP Pr tre. AR BRAssinne. — Sur quelques formules très-générales concernant la théorie des nombres premiers, par M. le prince de Polignac (Rapport de M. Brassinne )..... sci... ee se + es 00. « °4419 Forestier. — Discussion des surfaces du deuxième degré... 442, 446 GascnEeau. — Note sur le mouvement d’un point libre ou assujetti à une surface donnée, dans le cas où ce mouvement est curvi- Henetét umo. 2... pe 0eme ee Observations sur ce mémoire ( Bulletin)............... 440 Mozins. — Recherche d’une fonction rationnelle et entière de l’in- connue qui satisfasse à l'équation différentielle qu'il pose... 444 Observations sur ce travail ( Bulletin)................. 444 Mozins. — Hommage d'un mémoire de mathématiques dont il est l’auteur ; il dépose un travail de M. Sornin et un autre de M. le prince de Polignac.............. 416, 417, 421, 422 Pozicxac (Prince de). — Sur quelques formules très- générales qui se présentent dans la théorie des nombres premiers. ...... 308 Pozixac ( Prince de). — Deux applications de son calcul nouveau sur les entiers des nombres....................... …... 440 Poziexac (Prince de).— Introduction dans l'analyse d’une nouvelle transcendante. ....osnsecssecp ie so ee ee cree QUE k78 TABLE DES MATIÈRES. MM. Pages. Sancerv. — Sur l'intégration des équations différentielles... 444, 455 Sornix. — Usage de la méthode des approximations successives pour la résolution de toutes les équations algébriques ou transcendantes {het A9. r6 JT PAT AW. 000 26 Mathématiques appliquées. Azpour. — Clef de comptabilité.............................. 455 Arnaun. — Echantillons de parquets................ soososc.os 430 BouziGues. — Fabrication du cosmographe inventé par M. Bur- DONS ee dire das donnee Gwlares 0e Pt see, UD NO LES Brassinne. — Rapport de la Commission des médailles d’encoura- gement ( classe des Sciences). ..........0..e........ 307 Durann et BLanc. — Nouveau système de pompe................ 428 Espinasse. — Clichés pour la typographie............ 429, 455, 441 Gasozne. — Etudes pratiques sur la navigation des canaux, et par- ticulièrement sur celle des canaux du Midi...... 428, 436, 441 Guisaz. — De l'emploi de l’eau comme organe de transmission et de modification de mouvement à de grandes distances........ 361 Observations sur ce mémoire ( Bulletin)............... 428 Le Pexnec. — Sur l’ajutage divergent de Venturi........... 416, 420 Mavson er Baprisre. — Menuiserie à la mécanique ; échantillons de parquets......... ALIAS CT CEE Letter. 20 A19-, 454544 Papa. — Horloge astronomique................... . A34, 444, 448 Pozicxac (Prince de). — Nouvelle machine à vapeur sans chau- DÉrOS-e--cecacrep creer ee pree ee acer eco On Observations sur ce travail ( Bulletin)................. 445 Pozicnac (Prince de). — Modifications dans la construction des machines à vapeur.........ss....sosessssosessseee .. 446 Observations sur ce mémoire (Bulletin)........... 446, 455 Trescaze. — De la production animale............... 428, 456, 412 Physique et Astronomie. Banruéceuy. — Observations sur la grêle...................... 421 DaGuin. — Sur la grêle........................... Se SAS Laroque. — Pénétration des bulles d’air dans les liquides........ 456 TABLE DES MATIÈRES. 4k79 Chimie. MM. Pages. Couseras. — Du procédé ou de l'appareil de Mitschelrich pour reconnaître la présence du phosphore dans les cas d’empoi- sonnement par les allumettes chimiques, comparé à l'appareil de Marsch pour la découverte de l’arsenic, dans les analyses de chimie légale... .......eesssmaessessee eee ser ee Observations sur ce mémoire (Bulletin)............... Fiznoz. — Rapport sur l'Exposition universelle de Paris en 1855. Industries diverses dont les progrès sont liés à ceux de la chimie et de la physique...................... 53, 420, Observations sur ce travail (Bulletin)................. À Laroque. — Sur une nouvelle méthode pour la préparation du CHlOrE se SSSR SORA DRE ENS 567, Histoire naturelle. ABAD1z — Découverte d’ossements fossiles............ 429, 434, BuzarRiEs. — Mémoires sur l’apiculture....... HoCSD TOO TBE Ton Czos. — Révision comparative de l’herbier et de l’histoire abrégée des Pyrénées, de Lapeyrouse. ..................... 224, Observations sur ce travail (Bulletin)................. CLos. — Rapport sur le concours de 1857........ HSpCÈGo0c000 DE RESDITILAUCONCOULS EC ecrire Sn see elles Dessoye. — De la maladie de la vigne..................... Hosts Durour. — Découverte de fossiles. ............sssesosssss.ese FoxTax. — Idemsnnidenis, scene sara. Jouy. — Lettres sur l'anatomie et la physiologie comparées....... Joy. — Considérations générales sur la vie physique et sur ses Dimepales ManifestatiUns 24e eee net me comes ls Joy. — Sur un cas de parthénogénèse observé sur des abeilles et AUTOSNSEC tes Eee -checelepcer re cor ie Joy et Lavocar. — Faits de polydactylie (pluralité des doigts)... Lavocar et Jozy.— Note sur la coalescence du métacarpien du pouce avec la première phalange de ce même doigt....... Lavocar. — Note tératologique sur un agneau double, autositaire, de la famille des sycéphaliens, genre Iniops.......... M, 335 425 AA PS [= [=] > à O1 9 CQInI O1 19 n © ot > à à Qt 19 Æ © PS 19 er] 437 119 480 TABLE DES MATIÈRES. MM. Leyueri£, — Considérations géognostiques sur les échinodermes des Pyrénées... ERA CR ET Nouzer.— Notice sur une mandibule de mastodonte à dents étroites. Me Power. — Note sur le poulpe de l'Argonauta Argo........ RouuecuÈre. — Note sur les figures de la Flore des Pyrénées, et sur deux planches nouvellement découvertes, appartenant à CELIOUNTAR PRE ee ie esters ele ste cer Lecce ONSenvValOons Sur ICO MOLEn EEE cer Tee Ces ROUMEGUÈRE. — Sur une nouvelle espèce d'Usnea. .....,........ Timsau-LaGrave, — Mémoire sur les Erodium pætreum (Wild. ).… Observations sur ce mémoire ( Bulletins }.........,.... Timsaz-Lagrave.— Note sur le Ranunculus ophioglossifolius (Wild... Tosa-Lacrave. — De la grappe by-corymbifère dans le genre Iberis, considérée comme caractère spécifique. .......... Vieu. — Découverte d’ossements fossiles. ......,..... 429, 434, Médecine et Chirurgie. Gaussaiz. — Recherches sur François Bayle, médecin et philoso- phefdesloulousehauxvriesiècle Peer e Le. -e400, Marri-Ducraux. — Mémoire sur l’état de l'urine et des crachats dans quelques maladies pulmonaires. ......... 429, 459, SAINT-ANDRÉ. — Topographie médicale de la Haute-Garonne... ... Inscriptions et Belles-Lettres. ASTRE. — Considérations historiques sur l’épiscopat toulousain... Observations sur ce mémoire (Bulletin )............... Barry. — Rapport de la Commission des médailles d’encourage- ment (classe des Inscriptions et Belles-Lettres)........... Barry. — Note sur les eaux thermales de Lez à l’époque romaine. . Barry. — Note sur une inscription inédite récemment découverte af Toulouse MSN ERRE RER P RER EEE RU LL COLLE Te Observations sur ce travail................. 424, 495, BarTHÉLEMY. — Histoire des établissements monastiques du Rous- Bouparp. — Etudes sur la numismatique ibérienne...:,....,..,. Pages. 433 448 460 41 445 453 427 427 437 459 A 412 419 TABLE DES MATIÈRES. h81 MM. Pages. Caze. — Quelques aperçus historiques sur les Etats du Languedoc. 450 Corgcer (l'abbé). — Propose d'insérer dans la Revue de l'Art chré- tien les travaux de l’Académie concernant l'archéologie sacrée. 424 Deraviene.— La Satyre Ménippée. Etude historique et littéraire. 341, 429 Ducos. — Note sur Guillaume de Puylaurens.............. 163, 425 Ducos. — Agrafe de baudrier découverte à Clermont............ 417 Du Mèce. — Note sur les objets antiques ou du moyen âge, décou- verts pendant les fouilles opérées pour l'établissement d’un chemin de fer de Bordeaux jusqu’à la Méditerranée. 37, 421, 457 Du Mice. — Découverte à l’Isle-en-Dodon d’un autel votif consacré ATHELCULE Es oies misles ste = ee en ins ese sleteles 14 Du Mèce. — Notice historique sur M. Belhomme, membre résidant. 401 Fnoz.— Discours d'ouverture de la séance publique du 7 juin 1857. 370 Fieury (DE). — Découverte d'objets d'archéologie à Rennes-les- Bains... ...... SEE ES Dee ECC ... 428, 458, 442 GariEex-Arnouzr.— Note sur les commencements de l’Université de Toulouse et sur une pièce relative à ces premiers temps. 202, 422 Observations sur ce mémoire (Bulletin)...... Looséenc 422 GLe1zes. — Découverte d’une nécropole à Cazères............... 414 GrarT. — Découverte de médailles antiques..................... 420 Hauez. — Etude sur Andromaque............,.......... sc... 429 Huevexix. — Suger et la monarchie française... .... sue... 429, 439 Jouécar. — Monographie de l’abbaye de Grand-Selve... 428, 456, 442 PerroT. — Polythéisme des Egyptiens............... ecole 441 Poziexac (Prince de). — Etudes sur le Faust de Goëthe. 451, 439, 458 Observations sur ce travail (Bulletin)............. 432, 440 Ricuaun. — Œdipe à Colone de Sophocle. Traduction en vers..... 455 Rouweçuère. — Notice sur l’histoire du commerce de Toulouse... 450 SAUVAGE. — Nouvelle explication d’un passage de l’Art poétique d'Horace...... di -cech-beneepe che tne rec -tecle er 44) Vert. — Gersoniana ou l’Imitation de Jésus-Christ......... 428, 456 Virry.— Rapport de la Commission départementale de la Haute- Garonne, sur l'Exposition universelle de Paris en 4855. — SECLION ESC DEAUX=ATÉS à /e e= se ce cetcels els s =» - 20 104 A2 SLA) Vitry. — Plans de divers monuments byzantins des x1° et xn° siécles- 20": Mie cage cdsate 1e Pb Jade comes ces 401 h82 TABLE DES MATIÈRES. Objets divers. Pages. Élections annuelles. .........s.ssossosssssssvesesecieoee 443 Envois de publications. ....................s...s..sso.ssese AAA Etat des Memtres de l’Académie au At janvier 1857............. ii] Décès de MM. le comte de Salvandi et Belhomme............... 416 M. Delavigne s'excuse de ne pouvoir faire l’éloge de M. Fortoul... 416 Démission de M. Sornin, associé résidant. .....e.s..e.se.e...ee 414 Désignation d’Académiciens pour faire l’éloge des Membres AÉCÉ TRS As cms où Lens mecs eMPE co c-cape ce LE Dépôt d'un paquet cacheté, par M. D. Bernard................. 416 Dépôt sur le bureau, par M. Gaussail, du rapport du Jury interna- tional sur l'Exposition universelle de 1855............... 424 M. du Mège demande le renvoi de sa lecture................... 42 Lettre de MM. les Secrétaires du Congrès scientifique de France... 422 1 Mémoire présenté au Conçours................o..sss.s.e...ee 15 Nomination de MM. Flourens et Laferrière, en qualité d’Associés Lee ae a cs gr on On nt NP ER Nomination de MM. Sornin, le Prince de Polignac, Huguenin . . ? o . Oo ? Roumeguère , Buzairies et Boudard , en qualité de Corres- g ; , I pondants. she tir es 0 AZ; 428, 454, 440, 461 Ouvrages imprimés adressés à l’Académie pendant l’année 1856-57. 465 Proposition de nommer Correspondant M. le Prince de Polignac.. 426 Publications de VInstitut de Milan , de la Sociélé royale de Norwége, et de la Société des Sciencés de Seine-et-Oise. 454, 453 Réception de Mémoires de l'Académie par M. le Ministre. ....... 416 M. le Recteur invite l'Académie à communiquer certains travaux à S. Exe. M. le Ministre de l’Instruction publique........... 444 Récolement du médailler de l’Académie... ....:....... eee AG Remerciments de MM. Paque, le Prince de Polignac et Roume- PAT CUENEOP RESTE PORTER UE SSSR CPE Séance publique. . .........s.ssssss.soso.osessesssse.e 442, 445 Statuettes de Riquet et du général Compans , offertes par l’admi- nistration du Canal du Midi et par M. Lavocat........ 442, 448 Sujets de prix proposés pour les années 1858-59-60........ 458, 462 FIN DE LA TABLE DES MATIÈRES. RAR RER FN NC RROES r: ee. \ et LU dati ij Ainsipis dé pli nes (ru TOTALE) ta A0: pete MITE te 4 dur "ke Nvirae DATOUME DA TOILE É Praonr) "4 a à D | he je aptae M MR à: deu ont 4! un» À un ele TN Et plie LL do ce RG Arte LATE ‘4 Mois +) Da RUE 4 LUN TM CH Far "rail je ee AE) D EN MR | Eu HUE | HA N'9 NZ) #0 At TAN fi LA PF À 4 ke f pr EL w EUX TR RENE fo DäFee! bi | 4 Lu ANT NL doi DA VAL hi ‘4 | CT CLP HE 46 PAP EL NTM EE TR | 1 » st 4 pre + ie (13 NL NO AP NAGE ram "le OA GENE AN IS Lau De te: ef CN OR RP A , Lie = i ni Le ît, ne LV À or #1 ! Vus in a vAts fe i " La A fit toi A À vie, 1! iQ At ke à ‘4 FF it. ip NET tr À POS AA furet 1} M { Au sû ju Î NE vu RIT EN Al } er si PT 8 Î A "r (het 1} = y L { (ur f Li à ; ARTE Le é (} Vie Î 04 ‘ ra A ; ' À L ; | dant l * ‘ PALETTE EE | . à j ‘ tt | PTIL TE 4 itéc (sig Pr AT OUT vont L q : Je, A. 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