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(ANCIENNE ACADÉMIE DANGERS)
Reconnue comme établissement d'utilité
publique, le 5 mai 1833.
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DE LA SOCIÉTÉ
d'Agriculture : Sciences et Arts
D'ANGERS:
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SERGE DE
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DE L'IMPRIMERIE DE L. PAVIE.
4831.
MÉMOIRES
DE
LA SOCHÉTÉ D’AGRICULTURE,
SCIENCES ET ARTS D'ANGERS.
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DE LA SOCIÉTÉ
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DE L'IMPRIMERIE DE L. PAVIE.
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INTRODUCTION HISTORIQUE
Aux Mémoires de La Société D' Agriculture, Griences
et Arts D Angers,
PAR M. BLORDIER-LANGLOIS.
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Ox eut de très-bonne heure ; en Anjou; du
goût pour les sciences et pour les beaux-arts.
Si l'on en veut chercher la cause , on la trou-
vera peut-être dans la fécondité’ du'sol, qui,
procurant abondamment et sans béaucoup de
peme, des moyens d'existence, laissait un
loisir, qu'employait à des travaux intellectuels
l'esprit, encore excité par un ciel doux et des
campagnes agréables. Les habitans de l’Anjou
aimaient le repos, quoiqu'une déplorable
fatalité l'ait souvent éloigné d'eux. Ils se
contentaient d'une médiocre fortune, ne
portaient que le moins long-temps qu'ils pou-
vaient le fardeau du commerce et des affaires,
et, dans cette modeste aisance qu'un poète
appelle médiocrité d'or, se faisaient un in-
4
térieur charmant, où presque toujours étaient
admis quelques membres. du clergé nombreux
de cette province, qui, sil y avait des sortes
de connaissances auxquelles il ne füt pas fa-
vorable, était d'ailleurs dépositaire d'un grand
nombre de celles: qu'on possédät alors, ou
qu'il füt d'usage de manifester.
À ces causes physiques et morales se joi-
snirent de bonne heure des causes d'un autre
ordre, et qui pouvaient n'être pas moins
puissantes. Nos comtes, dès le x.° siècle,
temps. où/les, seigneurs. mettaient leur, bon-
heur à..se! concentrer. dans leurs domaines ,,
furent appelés à, la, cour du /suzerain, comme
grands sénéehaux de la couronne ; Lothaire,
en considération des. services de Geoffroy.
Grise-Gonnelle, lui donna cette importante di-
gnité, pour lui .et ses, descendans, ‘et l'An-
jou dut nécessairement, se; ressentir, des, rap-
ports du.comte, et de.sa cour avec celle du
monarque: Quelque peu éclairée que fût
alors la cour de nos rois, c'était encore R:que
le génie répandait le plus de rayons; et les
grands officiers, tel: qu'était : le, sénéchal,
devaient en réfléter à leur retour quelques-
uns dans leurs propres états. Le moindre
véhicule, la moindre impulsion suffit au génie
vi
humain pour franchir des limites dont 1l est
toujours impatient, et pour décéler sa puissance,
Les communications devinrent beaucoup
plus nombreuses avec la capitale, lorsque,
après la confiscation des domaines dé Jean-
sans- "Terre, l'Anjou se vit un apanage des
princes ' de la famille royale.
Les troubles qui suivirent cette confiscation ,
ceux, bien plus violens encore, qu'amenèrent
les. prétentions, d'Edouard.JIT à la, succession
de . Charles-le-Bel, empêchèrent que les An-
gevins ne profitassent , aussi vite qu ls lau-
raient pu, de leur nouvel état . politique,
pour obtenir une Université formellement
constituée ; mais enfin , le royaume étant pa-
cifié par les soins de Charles-le- -Sage, Louis L.:',
duc d'Anjou, son frère, obtint cette ae
pour . Angers, l'an 1364. Il ne fut question
alors que. du droit canonique; . une autre
charte, octroyée l'an 1455, par Charles VIE
à Louis IIE, duc d'Anjou , son beau-frère,
y adjoignit à théologie, la médecine et les
arts.
A ceux qui ne verraient qu’une è hypothèses
qu'une induction hasardée, dans ce que nous
venons de dire du penchant qu'auraient eu,
à des époques reculées, les peuples de lAn-
vii} |
jou pour les sciences el l'instruction, nous
pourrions répondre par un état positif et in-
contestable. Sur la fin du x siècle, les
sciences et la littérature y brillaient de quelque
éclat. Saint Fuibert, évêque de Chartres,
envoya à Angers un nommé Bernard. pour
professer les sciences divines et humames, . et
ce Bernard porta le premier dans notre ville
le titre de Mañtre-Ecole. En 1096, Marbœuf,
Maëtre- Ecole, institua, dit Bourdigné , l'Uni-
versité d'Angers. Bourdigné se trompe ici,
comme il le fait souvent dans ses Ænnales ;
mais son assertion prouve au moins que, du
temps de Marbæuf, l'instruction florissait à An-
gers, et que, sil n'y eut pas une Université
avouée ‘par le monarque, il y en eut une de
fait, par l’état prospère de la culture dé toutes
les branches des connaissances humaines que
comportassent ces siècles, état auquel contribua
plus que personne Ulger, qui, avant d'être élu
évêque d'Angers, exerça la dignité de Maître-
Ecole, depuis 1113 jusqu'en 1124.
Un évènement arrivé en 1229 contribua à
rendre nos écoles plus florissantes encore. Sous
la mivorité de Si Louis, des:actes rigoureux,
exercés par dla régente contre les élèves::de
l'Université de Paris, ayant occasionné: leur
IX
dispersion, la renommée des écoles d'Angers
y attira un grand nombre de : professeurs
habiles et de disciples. Elles avaient en effet
tant de célébrité, que plusieurs villes et ab-
bayes, à des distances assez considérables, pos-
sédaient. à Angers des maisons, long-temps
depuis appelées collèges, où elles entretenaient
des élèves qui suivaient les cours de ces écoles.
Cette disposition première, ensuite l'institu--
tion de l'Université, devaient porter les hommes
à mettre en commun leurs lumières; c'en
était une conséquence nécessaire : des réunions
entretinrent donc à Angers cet amour du sa-
voir, cet exercice de l'esprit, bonheur qu'il
faut goûter pour y croire, vie morale dont
les charmes se sentent mieux qu'ils ne se
peignent.
: A Paris, des littérateurs et des savans, en-
traînés par les mêmes besoins, se rassem-
blaient pour y ‘satisfaire. Le cardinal. de
Richelieu, averti de ces réunions, n’y trouva
rien qui alarmât sa puissance, et fut sensible
à la gloire d'être le fondateur d’une société,
nouvelle alors en France : telles furent Îles
causes et l'origine de l’Académie française,
dont les lettres patentes furent expédiées en
x
1636; telles devaient être par la suite celles
de l'Académie d'Angers.
Il fut déhbéré en conseil de ville, le der-
nier jour de mai 1684, que l'on demanderait
au Roi des lettres patentes, pour la création
d'une Académie, et que l’on prierait l'abbé
Ménage, l’un des hommes les plus spirituels
et les plus instruits de son temps, d'appuyer
cette entreprise de ses conseils et de son crédit.
Nous ignorons quelle fut l'influence de Pabbé
Ménage dans cette affaire, mais voici la marche
que l’on suivit. M. Grandet (*) porta le placet
à Versalles, au comte d’Armagnac, gouver-
neur de lAnjou, pour quil le remit aux
mains du Roi. Ces. lettres furent. accordées
en juin 1685, et enregistrées au Parlement
le 7 septembre suivant. M. de Châteauneuf,
ministre et secrétaire-d'Etat, fit passer . à
M. Grandet, à Angers, là copie d'un ‘ordre
du Ror, adressé à M. Nointel, :intendant. de
la généralité de Tours, pour effectuer l'éta=
blissement de, PAcadémie. Ea.ville donna ;Îe
(*) Conseiller au présidial et échevin perpétuel du
corps. de ville. Il y avait encore à Angers un autre Gran-
det , peut-être frère de celui-ci , curé de S.te-Croix , puis
supérieur du Séminaire, et auteur de plusieurs Pere
phies pieuses.
x}
pavillon du jardin de son hôtel (*), pour tenir,
ses séances, pourvut à son ameublement , et
vota un fonds de 40 livres par an, pour ses
menues dépenses (**).
Les lettres de l'Académie furent enregistrées
au présidial d'Angers, le 15 juin 1686, et ce ne
fut qu'après, que l'Académie fut installée.
L'Académie se composa de trente, mem-
bres (**), y compris un chancelier, un di-
recteur et deux secrétaires perpétuels; elle
eut le Roi pour protecteur ; et son titre fut :
Académie royale d'Angers.
En 1760, l'Académie d'Angers désira d'aug-
menter le nombre de ses membres, et d’ob-
tenir un vice-protecteur, qui, plus près d'elle,
connût. plus aisément ses besoins, et fût son
(*) C'est ce pavillon massif, d'un seul étage, qui
fait, l'angle gauche de la rue nouvellement percée ,
pour aller de la place des Halles au-Jardin. des, Plantes.
(*) L'argent. était alors à! 27 livres le mare ; il est!
actuellement x 52; c’est. donc à peu-près. le double. ;
(***) Peut-être les lecteurs-iangeVins me seront-ils
pas-fâchés de voir ici les. premiers mémbres de cette
Académie, ; c'étaient.: MM. Arnauld, évêque d'Angers ;
Bechameil de Nointel, intendant) de: la Généralité de .
Tours ; d'Autichamp, lieutenant de Roi de la ville et du
château d'Angers ; le comte de!Sexrant, l'abbé Arnauld;
xi]
organe auprès du Roi; ce qui lui fut accordé.
Elle se composa, comme celle de Paris, de-
quarante membres, et changea son titre em
celui d'Æcadémie des- Sciences, Beélles-
Lettres. et Arts. Le Roi, pour cette fois
seulement, nomma wzce-protecteur un Ange-.
vin, M. le maréchal de Contades, et les dix
nouveaux membres (*), laissant à l’Académie
la faculté délire elle-même, par la suite, son
vice-protecteur et les successeurs de ces dix
membres.
l'abbé Ménage ; Arthaud, archidiacre d'Angers ; l'abbé
Pelletier ; Heard ; Gohin, premier président au présidiaf
d'Angers ; Duplessis de Gesté ; Bernier, médecin ; Char-
lot; Perchambault, conseiller ; Verdier , conseiller ;
Gourreau, conseiller; Deroye, docteur en droit; la
Sauvagère-Guinoiseau, conseiller ; Duplessis-Moreau ,
conseiller ; Grandet ; de Livonnière-Pocquet , conseiller ;
Martineau , avocat du Roi; de Princé Martineau ; Pétri-
neau , ex-président de la prévôté d'Angers ; du Trémblai-
Frein, conseiller; Delaunay, avocat au parlement de
Paris; Nivard , idem; de la Piquetière-Blouin ; sn ©
avocat à Angers; Brillet de Villate: :
(”) Ce furent : MM. de Crochard , de Quenneville, du
Fron, père de l'Orâtoire ; de la Jaillère ; Mélier du Vau;°
président au présidial ; Gueniveau, ingénieur en chef au
château de Saumur; Gode, marquis de Varennes ; Bo-
dard de Vaudesir, Walsh de Serrant ; Marcombe , lieu-
tenant-général du présidial.
xh]
Peu de temps après, le 24 février 1761,
sous le ministre Bertin, une Société royale
d'Agriculture fut établie dans la généralité
de Tours, par arrêté du conseil-d'état. Elle
fut composée de trois bureaux, à Tours, à
Angers et au Mans, qui correspondaient en-
tr'eux. Ainsi commença une S'oczété d'A gri-
culture, qui compta à Angers des membres
recommandables, et qui, par la combmaï-
on de ses travaux avec ceux des deux autres
bureaux, pouvait rendre à l’Anjou d'éminens
services, et être une très-intéressante annexe
de la première Académie. Mais, tout utile
qu’elle était, elle n’en subit pas moins le sort
de toutes les assemblées de ce ‘genre, dans
nos orages politiques. L'Académie et la Société
d'Agriculture n'’existaient plus en ‘1795.
Une loi du 18 août 1792 avait supprimé
toutes les congrégations séculières, chargées
de l’enseisnement public; le collège d'Angers
avait alors été fermé : notre ville manquait
de tout moyen d'instruction.
Nous voyons, il est vrai, en 1793, une
organisation provisoire d'écoles publiques, dé-
crétée par la convention pour le droit, la
médecine, les arts; un collège y .figure, où
M. Benaben, ci-devant professeur de mathé-
x1v
matiques au collège d'Angers, à le titre de
principal; mais il n'eut pas de collaborateurs,
et cet établissement mourut dès sa naissance.
Cependant les lumières acquises et le goût
inné qui porte à l'étude, ne s'éteignent pas
au gré de la politique des circonstances. A
Angers, où la révolution se fit sentir avec
une violence particulière, les sciences et les
‘beaux-arts s’imposèrent un silence nécessaire,
mais qu'ils rompirent aussitôt qu'ils le purent.
Les occasions ne tardèrent pas à se présenter.
Une institution large et éminemment philoso-
-phique (les écoles centrales) vint réjouir. la
France et surtout Angers. Plusieurs de: nos
concitoyens y occupèrent des chaires, et. .se
montrèrent tout-à-fait dignes de leurs fonctions.
L'on put voir alors une preuve frappante de
l'amour de nos concitoyens pour les sciences
et les beaux-arts, dans le zèle que déployèrent
à l’envi les maîtres et les élèves. Le v. com-
plémentaire an VI (21 septembre 1798),
jour de la première distribution des prix de
cette. école, fut pour Anpers un jour de ra-
vissement. Après les désolantes scènes dés an-
nées précédentes, c'était ane bien douce céré-
iñonie que celle où s'échappait enfin de tous
les cœurs, de tous les esprits, léxpression de
xv
cet amour, qu'un régune funeste y avait. com-
primé cinq années.
Les autorités constituées d'Angers firent,
le 10 germinal an vi (50 mars 1798), l'ouver-
ture de la bibliothèque publique, placée alors
dans la grande salle de l'évêché, bibliothèque
en partie formée des livres qu'avaient osé
dérober aux flammes du vandalisme des hom-
mes amis de l'étude.
. Un mois après, autre bienfait de cette heu-
reuse année : le Jardin des Plantes fut égale-
ment: ouvert au public. Qu'il nous soit per-
mis de reprendre d'un peu plus haut lhis-
toire de ce Jardin, Le 17 mars 1777, une
société de botanophiles créa et entretint à
ses frais un jardin, près du faubourg Bressi-
gny. Long-temps trop incomplet, et seulement
à l'usage de l'école de médecine, il acquit, en
lan vi, une bien plus grande importance,
par sa translation dans un lieu plus conve-
nable et plus étendu, par les secours quil
reçut du gouvernement , et par l'intérêt qu'y
portèrent des botanistes très-éclairés: Larevel-
lière-Lépeaux, qui y avait donné des leçons de
botanique, devenu membre du directoire,
contribua puissamment à sa prospérité. Ge
Jardin fut l'occasion d'une société, dont. 11
XY] ÿ
resta membre, et où l’on remarquait encore
Pilastre, savant agronome, et qui avait fait
en son nom J’acquisition , pour la société, de
l'emplacement nouveau; Leclerc, de Chalon-
nes, qui Joignait au goût de l’agriculture et
de la botanique, une sorte de passion pour la
littérature et les beaux-arts; Braux, biblio-
graphe et conservateur de la bibliothèque pu-
blique ; Merlet de la Boulaie, homme de
connaissances variées, instruit en histoire na-
turelle, et surtout dans la botanique, dont
il fut le premier professeur au Jardim des
Plantes. Ses élèves recueillirent en 1809, ses
herborisations ; et peut-être serait-ce une rai-
son pour le considérer comme le premier qui
ait traité de la Flore de notre département.
Enfin, et toujours dans l’an vi, une Wociété
libre d'Agriculture se forma à Angers, réveil
de celle que nous avons vue endormie depuis
1793; elle réunit dans ses attributions toutes
les branches de l'agriculture, l'imdustrie, les
routes, les canaux de navigation, la topo-
graphie du département de Maine et Loire ;
elle se composa de 40 membres.
Un musée de: tableaux, un cabinet d’his-
toire naturelle, le premier principalement créé
XVI}
par le directeur Larevellière-Lépeaux (*), et le
second , parles soins de M. Renou, professeur
d'histoire naturelle à l'Ecole PAT d'Angers;
un cabinet de physique, dont la conservation
fut confiée au professeur de physique et de
chimie à la même école, M. Héron, homme
aussi distingué par son urbanité, par la dou-
ceur de son caractère, que par son savoir,
furent ouverts au public, le 1.fnivose an IX
(22 décembre 1800) : Angers se voyait comblé
des faveurs de la science et’ des beaux-arts ;
rien n’y manquait plus à: l'homme: studieux.
* Et l'Académie ne sortait pas du tombeau
où elle était descendue en 1795, et la Société
d Agriculture n'avait recouvré qu’ une exis-
tence passagère.
Mais les Angevins 1 n’en avaient, pas une moin-
dre ardeur pour l'étude; nous en attestons les
excellens sujets qui, sortis. de l'Ecole Centrale
et du Lycée, brillèrent s1 nombreux dans les
corps: du génie , dans. la. jurisprudence, dans
la médecine, dans: la littérature, dans les arts.
(°) Le buste de M. Larevellière.vient d'être placé dans
FA musée d'Angers, et ce, buste ainsi qu’ unautre du célèbre
chimiste Proust, notre concitoyen À sont de nouveaux
bienfaits de notre ami le statuaire David, ?!! <°
xviü}
A défaut d'une académie dans leur ville natale;
l'Institut de France et d'autres sociétés savantes
de l'Europe shonorèrent de plusieurs de nos
Angevins, élèves de ces écoles. Nons n'osons
les citer, tout fiers que nous sommes de les
compter parmi nos concitoyens, parce qu'ils
font partie de notre Société. IL nous suffit
qu'ils lisent ces réflexions, et qu'ils Y voient
‘un témoignage de notre profonde estime.
Depuis long-temps;à Angers ; des savans, des
sens de letires, et des agronomes, aspiraient à
renouer les fils rompus de l’4cadémre et de, la
Société d'Agriculture. En 1827, plusieurs se
réunirent dans ce dessein. Elles n'avaient point
été légalement supprimées ; elles n'étaient que
tombées en désuétude par l'effet des circons-
tances. Des règlemens furent rédigés et soumis
à l'autorité locale, qui permit à la société
nouvelle de Sassembler provisoirement: C'est
de cette époque que ‘dâte effectivement l’exis-
tencs de la’ Société d'Agriculture ; Sciences.
et Arts ‘d'Angers, comme confondant en elle
les deux Sociétés de 1685 et de 1764:
Le Ministre donna son consentement à cette
société ; mais ce ‘corps né devait avoir d'exis-
fence incontestable et tout-à fait légale, et ses
membres ne pouvaient se réunir, que lorsqu'il
-
XIX
aurait été autorisé, et que ses statuts seraient
approuvés par le Roi. Une lettre du maire
d'Angers, en date du 1. juillet 1829, pré-
vient les membres de la Société que, pour
répondre à la demande que lui en avait faite
l'autorité supérieure, il avait confié la rédac-
tion d'un nouveau. règlement à une commis-
sion, dont les membres étaient choisis. parmi
les sociétaires:
Ce règlement fut envoyé au Ministre qui,
par un arrêté du 25 juin 1831, confirma
défimitivement la société.
Elle existe donc, comme continuation des
deux établissemens précédens, mais libre, sans
autre condition (*) que d’être, autant qu'il lui
sera possible, utile et agréable; sans autre
protecteur que sa fidélité à observer des lois
qu'elle s'est prescrites elle-même, et qu'elle a
rédigées de manière à prévenir tout trouble,
toute occasion de mésintelhgence , entre ses
membres, toute tentation de simmiscer en des
.(*) Allusion au protecteur qu'avait Kancienne Acadé-
mie auprès du souverain , et. aux conditions qu elle avait
acceptées de faire , à la première séance de chaque année,
an discours à la louange du roi et à l'honneur de. la pro-
xnce, FA J
XX
matières qui ne feraient que donner une diree-
tion fausse à ses pensées.
Son domaine est assez étendu pour qu’elle
n'ait pas à resretter ces sages réserves. Elle sait
les nombreux devoirs que lui impose le titre
de son institution, et n’en est point inquiète ,
puisque ces devoirs se bornent à établir une
louable émulation dans tout ce qui conduit à
l'amélioration de l’état social, à donner d’utiles
exemples, à mettre sur la voie de découvertes
dont puissent profiter les hommes. Aucun des
produits de l'intelligence , tendant à ajouter
quelque chose à leur bonheur ou à leur plaisir
n'est vu par elle. avec indifférence, L’agrono-
mie, l'étude de la nature, la science des eal-
culs, les créations des arts, les jeux de l'esprit
sont l’objet de son attention et de son estime.
Les fleurs d'agrément sont aussi un jeu de la
végétation, qu’elle n’a pas dédaigné d'encourager
par six prix, qu'elle à décernés dans sa séance
publique du 44 juillet 1831, après une exposi-
tion publique. Chaque année elle en décernera
à quelqu'un des objets de ses travaux.
Pour améliorer la culture de Farbre früitier ,
la Société ayant conçu l'idée d'en créer une
école, l'administration municipale veut bien la
EURE en lui accordant, pour Fly établir, Le
xx]
jardin du Musée et le terrain qui suit jusqu'au
boulevard des Lices. Ce sera un second jardin
public, que la solidité de ses résultats ne fera
pas fréquenter avec moins d’empressement sans
doute, que le Jardin botanique.
Un autre objet l'occupe sérieusement; c’est
une Statistique du département de Maine et
Loire, dont le prospectus paraîtra bientôt, et
à la confection de laquelle seront instamment
invités de coopérer non seulement les membres
titulaires et correspondans de la Société, mais
toute personne instruite et expérimentée dans
ces sortes de matières.
RÈGLEMENT
De la Société d'Agriculture, Sciences et
Arts d'Angers, arrété en séance du 5 dé-
cembre 1830.
D D
TITRE PREMIER.
Du Mode de composition de La Société.
ART. 1.°°
La Société d'Agriculture, Sciences et Arts
d'Angers, est formée par la réunion de mem-
xxi]
bres résidans, de membres honoraires, de.
membres associés et de membres correspon-
dans.
ART. 2.
Les membres résidans sont au nombre de
quatre-vingt, dont quinze devront être choisis,
autant que possible, dans les divers arrondis-
semens du département de Maine et Loire.
ART: D: er, £
Pour obtenir le rang de membre résidant, il
faut pouvoir présenter soit une production 1m-
primée, soit un ouvrage où un mémoire ma-
nuscrit, soit au moins une observation notable;
et, après un rapport fait par le comité de la
section dont le candidat devra faire partie, réu-
nir, au scrutin secret, les deux tiers des voix
des membres présens.
ART. 4.
Les membres associés, présentés suivant la
forme voulue par les membres résidans, mais
ne participant que poux moitié aux charges
communes, auront voix consultative, et en
outre des droits à êlre choisis pour membres
résidans, lorsqu'il y aura une place vacante,
sans que leurs droits cependant puissent faire
exclure les candidats encore étrangers à la So-
XXI}
ciété; de plus ils auront le droit de concours
pour les prix.
ART. D.
Les membres honoraires se composeront :
4.0-des membres résidans que l'âge ou les in-
firmités mettraient dans l'impossibilité d'assister
aux séances, et dont le nombre est illimité ;
2* des personnes honorables auxquelles la
Société juge convenable d'accorder ce titre ; et
quiy ‘sans être soumis aux charges de la Société,
ont le droit de séance, mais non de scrutin, et
dont le nombre ne pourra excéder dix.
ART. 6.
Les membres correspondans pouvant être en
nombre indéterminé, seront reçus sur la pré-
sentation d’un membre résidant, et à la majo—
rité relative des membres présens, après la
communication d’un mémoire ou d’un ouvrage
publié; et sils assistent aux séances, ils ne
pourront avoir que voix consultative.
TITRE DEUXIÈME.
Œomposition et Attribution du Bureau.
ART... 1:°;
Le bureau administratif est: composé d’un
Président, d’un Vice-Président, d’un Secrétaire-
Général, d'un Secrétaire et d’un Trésorier.
XXIV
ART. 2.
Tous les membres du bureau sont nommés
au scrutin secret, à la majorité absolue. Dans le
cas d’un scrutin non décisif, les trois membres
ayant réuni la majorité relative, seront ballotés
par un nouveau scrutin.
ART. 93.
Le Président reste en fonctions ; pendant un
an, et il n’est rééligible qu'après une année
d'intervalle. Les Secrétaires et le trésorier sont
élus pour deux ans, et pourront être réélus.
ART. 4.
Le Président ouvre et clôt les séances, an-
nonce successivement la nature des objets qui
doivent faire partie des travaux de la séance ;
régularise les délibérations, signe les procès-
verbaux, peut convoquer extraordinairement ,
signe toutes les lettres expédiées au nom de la
Société, et est remplacé au besoin dans toutes
ses fonctions par le Vice-Président.
ART. D.
Le Secrétaire-Général donne en séance
communication des objets de correspondance ,
lit les mémoires manuscrits envoyés à la Société,
dresse de concert avec le président le programme
XXV
des séances, rédige les procès-verbaux, sauf à
les soumettre, pour la rédaction, à l’accepta-
tion de la Société ; rédige la correspondance
contresignée par lui, fait les convocations con-
jointement avec le Secrétaire, fait les fonctions
d’archiviste, et donne aux membres de la So-
ciété, sur récépissé, la communication des
objets composant les archives.
ART. 6.
Le’ Président étant absent amsi que le Vice-
Président, le dernier des Présidens élus siè-
gera; et, en l’absence de celui-ci, le doyen
d'âge occupera le fauteuil. Un Président, cessant
ses fonctions dans le courant de l’année, le
Président nommé pour la même année ne cesse
point d'être éligible pour l’année suivante.
ART. 7.
Le bureau administratif est chargé des dé-
penses courantes, et soumet à la décision de la
Société les dépenses extraordinaires qu'il juge-
vait convenable de fixer, et prises toujours sur
les fonds d’annuité. —- Le Trésorier tient état
des recettes .et des, dépenses.
ART. 6.
La comptabilité est régularisée CE année,
avant les vacances, sur Fe du qu'en ‘pré
sente le Trésorier.
XXV]
TITRE TROISIÈME.
De La Mature des travaur de La Bociete et De 5es
Séances.
ART. À,
La Société s'occupe d’une manière ou géné-
rale ou spéciale de l’agriculture, en rattachant
autant que possible ses travaux au perfection-
nement de l’agronomie locale ; embrasse toutes
les branches des sciences physique et naturelle,
et celles de la littérature et des arts, en se ren-
fermant dans les attributions de son titre , et
excluant les matières politiques et religieuses.
ART. 2.
La Société tiendra dix séances ordinaires,
dont une chaque mois (excepté septembre et
octobre ), et en outre aura une séance géné-
rale annuelle. Cependant, si ses travaux l'exi-
gent, elle pourra se réunir extraordinairement.
ART. 3.
Les correspondans ont le droit de lecture
aux séances , après avoir prévenu le président.
Un étranger, présenté par un membre rési-
dent, au Président qui l’agrée, peut assister aux
séances, et y lire les mémoires qu'il aurait à
XXVi]
communiquer ou à soumettre à la Société,
après en avoir obtenu le consentement du bu-
reau administratif. -
ART. 4.
Toute observation ou mémoire écrit, lu ou
communiqué à la Société, est déposé dans ses
archives, pour être publié, si la Société le juge
convenable, sans préjudice du droit qu'a l'au-
teur de faire imprimer ses ouvrages.
ART. D.
Suivant les moyens qui sont à sa disposition,
la Société peut proposer des prix annuels, ayant
surtout pour objet l'intérêt du département de
Maine et Loire.
ART. 6.
Les membres de la Société s’engagent à cou-
vrir proportionnellement les dépenses que peu-
vent entraîner sa fondation et son entretien
annuel.
MÉMOIRES
DE LA SOCIÉTÉ
> gricufture, ÉS ciences cf Arts
D'ANGERS.
OLD 00SI 000000000000 06 006DeDIM0DOSD SSID IS GO DE0S
DES CHANGEMENS, :
PHYSIQUES ET cRmiQuEs QE
qu l'ÉPROUVENT LES) TRARES
DANS L OPÉRATION DE : L'ÉCOÂTAGE
ET, DES RÉSULTATS QUE PEUT EN TIRER -LÂ PRATIQUE
AGRICOLE (4); sid te nn is _e25ft:
Par M. DESVAUX, Directeur du Jardin de Butanique.
Agricultura prorima Sapientiæ.
Cicer.…
JA ER par la beauté Fe son “climat, par la
richesse de son sol, présente un si magnifique en-
semble, que le tableau en est bien fait pour encou-
(1) Cé Mémoire avait été préparé pour le Concours ouvert sur
ce sujet par une société scientifique.
se aide
rager ses bte à chérir Eu patrie , et à donner
leurs soins à la terre qui les vit naître , à la terre qui
doit les nourrir. Ces heureuses circonstances seront à
jamais pour cette belle contrée une source inépui-
sable de prospérité. Mais pour atteindre au plus haut
point de-bonheur qui l'attend, ‘elle doit trouver dans
l'agriculture améliorée , et perfectionnée même, au-
tant que possible , les causes les plus immédiates de
ses richesses; richesses que ne pourra lui enlever
l'instabilité-des-évènemrens “offerts torjours par un
commerce dans des contrées éloignées. Si la Chine,
avec ses méthodés empyriques let pêu éclairées sur ce
premier des arts, s, l'agriculture, est t parvenue à nourrir
près de céntomilhons d'habitans ; Sur une surface
dépassant à peine celle:de la Frante actuelle, que ne .
peut-on, pas, ESP spérer sous un. gouvernement; légal,
dans une région favorisée de toutes les ressources que
fournissent les stiencés pour éclairer les applications
utiles , et qui est bien loin encore de compter la moitié
de cette population! Chaque.association Savanté, ré-
pandue sur tous les points de la France, donnant
à tout ce qui l’environne un uüle élan, de tous ces
efforts réunis naîtra ,. n’en doutons pas, un chan-
gement manifeste: et déjà il est bien entrevu par ceux
qui sont habitués à voir , à réfléchir et à comparer.
Dès que chaque opération d’agriculture se trouvera
étudiée «et dirigée dans le meilleur esprit possible,
l'ensemble produira des résultats surpassant l'espé-
rance la mieux fondée; surtout si l’on veut moins
rabaisser, que le préjugé ne semble le faire, Ja pro-
fession si importante d'agriculteur. {ste 9°
2
(5)
Dans le nombre des travaux agricoles, PEcobuage
mérite d’autant plus de fixer l'attention des agronomes
que; dans presque toutesles contrées de la France ,par
l'impéritie des moyens employés pour la pratiquer,’
nous avons vu cette précieuse opération n'avoir qu’in-
complètement les résultats qu’elle devait produire.
:{Saris chercher à multiplier surabondämment nos
réflexions sur un'sujet qui ne peut comporter qu’un:
pett nombre de considérations , nous essaiérons ce
pendant de le traiter plus méthodiquement qu’on ne
l’a faitrjasqu’à présént ; en séparant chaque pärtié ]
afin de rendre plus appréciables les résultats que nous
voulons offrir ; mais surtoùt nous nous abstiendrons
d'aller emprunter aux livres des raisonnemens , lors-
que nousavons la nature sous les yeux et l'expérience
pour guide.
IGIABRE $.
14 “ÉTYMOLOGIE. DU de ere
sé Yo se ft 0 occupé de cette redire étymolo-
gique!, nôus l’eussions négligée ici ; mais comme elle
présentera peut-être des résultats curieux, nous allons
y consacrer quelques lignes avec d’autant plus de’
confiance; que ce manque de notions, dans ceuxquise
sont occupés del l’écobuage!, leur afait donner de:
cettepratique d’agriculture des'définitions'imexactes.
Personne: n’ignore quellé estlopération à laquelle :
on donne le nom d'écobuagé; sais peut-être n'est-il
pas à larconnaissance dé toutle mondé ‘que‘ce mot,
qui: présente quelques: liaisons avec des mots peu
(4)
usités de notre langue actuelle, a une origine vräi-
ment antique, et tire sa source de cette langue pri
rnitive de l'Euvope, le celtique, ou plutôt le scytique,
vers laquelle il faut remonter toutes les:fois qu'il s’agit
de rechercher la racine d’un mot, non-seulement
français, mais encore latin, grec, ou‘oriental. [l'est
vrai que par le celtique on ne doit pas entendre le
dialecte de tel ou tel canton de l’ancienne Gaule où
de l'Europe , comme l’ont prétendu beaucoup de sa-
vans, mais bien le fond de la langue de-ces divers
dialectes , qui semble être la véritable langue primi-
tive.,;: au moins relativement à nous.
Les mots ne présentent jamais que des ‘idées de
choses, ou des idées d’actions, et par-là ils onttoujours
une raison étymologique, soit directe, soit cri fl
rique.
Le mot écobuage, qui indique Paction er
de la terre en friche les arbustes ou sous-arbrisseaux
qui peuvent la couvrir ;.et qui n’emporte pas en même
temps, comme on l’a écrit, l’idée de mettre la terre
en culture ; ni d'y appliquer le feu, ‘peut: tirer son
nom de deux sources : du, celtique ou du latin;
toutes deux en.résultat revenant cependant à la même
chose.
Le mot latin scopula.( petit balai), ot être
l'origine de ce mot, et l'on serait dans le: cas de le
soupçonner.en se rappelant. que dans le midi dela’
France, parmi le vulgaire, on nomme encore écau-
bettes des plantes servant à.:faire des balais, stelles
que la chicorée, (cichorium: intybus ) ;: et: la chon-
drilla juncea, distinguée sous-le nom d’Ecoubette.
(5)
jaune; mots qui ne peuvent provenir que de sco-
pula , avec l’augmentatif e, si fréquent dans le midi,
et p changé en b, ce qui n’est pas moins ordinaire.
En ce sens l’écobuage serait l’action d’enlever les
végétaux suffrutescens , propres à faire des balais,
des terres qu’on défriche : telles sont les diverses
espèces de bruyères, de genêts, ete. Il nous paraît
cependant plus naturel. de chercher directement l’o-
rigine de ce mot dans une racine celtique scod (bâton,
morceau de bois}: qu’on voit figurer également dans
les langues orientales ( hébreu), parce qu’elles ont
la même origine que la langue scytique RER
dont elles sont des irradiations.
Le radical de scod est caud, coed (bois } d’où sont
venus Cofa, province ancienne, et la forêt de Fi/-
lers-Cotteret; coteret, fagot de bois; cauder , livre
dans l’origine composé de plusieurs planchettes de
bois, changé ensuite en code.
. Ecot-tire son origine du même mot, en ce que
dans l’antiquité on marquait sur un morceau de bois
(scod') sa dépense particulière; et de là cotser, co-
tisation, dit aussi autrefois az/le , toujours en raison
d'un morceau de bois encoche. Les lettres radicaïes
CO, voulant peut-être dire bois, forél, scod a pu
exprimer #rer dela forêt, extraire de la forét, et
l’on a dit scobuer, écobuer: et c’est exactement l’idée
que , dans leur langage agreste, ont conservé de. ce
mot tous les habitans des campagnes. Pour eux des
écobus sont toutes les petites broussailles et racines
enlevées des terres défrichées. Quelquefois, à la vé-
rité, leterrain a reçu le nom d’écobu; mais cela n’est
(6)
pas plus étonnant que de voir un instrument à défri-
cher retenir aussi le nom d’écobue (1). Enfin, le
mot écot, morceau de bois sortant hors de terre ; est
‘encore en usage, ét prouve l’origine que nous donnons
au nom écobuage ; toutes considérations prouvant que
da combustion ou incinération n’est pas le
dans l'écobuage.
La mise en culture dés terres en friche et cou-
vertes dé broussailles , résulte de trois opérations très-
distinctes : r.° l’écobuage ou l'enlèvement de toutes
parties végétales au moyen d’instrumens , où coupans
ou extirpateurs ; 2.° le brélis, s’opérant par l’action
du feu et ne s’arrêtant pas uniquement à la surface;
3.° le défrichement complet , et s’opérant par 1a houe,
Ha charrue ou tout autre moyen.
Qu'on ne croie pas nos recherches oiseuses; elles
deviennent indispensables pour fixer l’idée devant
être attachée à l'expression eécobuage , sur laquelle
les auteurs ne sont nullement d'accord, puisque les
uns regardent comme écobuer , ‘peler une terre en
friche; tandis que d’autres prétendent qu'ecobuer,
c’est faire brûler les broussailles qui la couvrent. Dans
cet état d'incertitude ;, nous nous en tiendrons à notre
résultat étymologique, et poùr nous écobuer sera
toute opération enlevant au sol les végétaux frutes-
cens ou suffrutescens , qui empêcheraient la mise en
culture d’une terre.
(2) En Anjou, toute terre qui se repose au-delà de l’usage reçu
(de troïs années une), est appelée écobu lorsqu'on la cultive ; qu'il
_y.ait ou non des broussailles à sa surface.
(7)
SS
DES CHANGEMENS PHYSIQUES QUÉPROUVENT LES
TERRES PAR L'ÉCOBUAGE,
D’après l'incertitude sur l’idée qu’on doit, attacher
au mot écobuage, dans les auteurs, même les plus
modernes , nous nous voyons dans l’obligation d'en-
visager l’opération générale du défrichement des terres
broussailleuses , et d'établir les diverses considérations
relatives à la mise en valeur de ces terres; et alors la
question de l’écobuage, vue dans tout son jour, en
deviendra mieux limitée, plus précise, plus intéres-
sante, mieux connue.
Tout végétal, pour croître, a besoin d’un milieu,
et quelque soit le milieu qui lui soit le plus propre,
il faut encore que les circonstances soient le plus fa-
vorables possible, pour qu’il puisse se développer
convenablement. Les uns, immergés complètement,
ne peuvent vivre que dans le sein des eaux, sans
communication avec la terre ; les autres, pour ainsi
dire isolés dans les airs, végètent dans un milieu uni-
forme ; mais le plus grand nombre exige des milieux
de diverses natures, et c’est surtout pour les plantes
appropriées à nos besoins que ce concours de di-
vers milieux est nécessaire. Tout l’art de l’agriculteur
consiste à trouver les circonstances les plus favorables
pour faciliter le développement des végétaux, qu'il a
intérêt de multiplier.
(8)
1.0 Etat des terres à broussailles, non cultivées.
Les terres, abandonnées à elles-mêmes, non-seu-
lement se tassent par leur propre poids, mais aussi
par l’action des pluies qui frappent leur surface; et
si les circonstances y appellent les animaux, surtout
les quadrupèdes , elles sont de plus en plus foulées
et endurcies. Cependant 1 est urie limite relative à
chaque espèce de terre, et qui reste la même dans tous
les temps, lorsque les circonstances se trouvent iden-
tiques, bien que chaque année, par l’effet des gelées,
les terres soient un peu allégies, et que par Pimbi-
bition des eaux, elles reprennent un léger degré de
porosité; cependant ces moyens d’allégement sont
bien peu de chose en comparaison du tassement
qui s'opère par les causes indiquées.
Les premiers végétaux qui se montrent sur un sol
nu et abandonné, sont les lichens crustacés, et par
la suite des temps les lichens foliacés et les mousses ;
à ces végétations succèdent quelques plantes, que
remplacent des arbustes par suite des siècles.
Sur les terres plus ou moims profondes, aban-
données ou délaissées par l’homme, croissent sou-
vent d’abondans herbages qui fournissent par leurs
altérations quelques débris se réduisant à la longue
en humus végétal. Si chaque année ces débris sont
abondans, après quelques siècles on y trouve des
terres noires et très- végétatives, connues sous Îles
noms de éerre de landes , terre de bruyères. Souvent
des végétaux ligneux tels que bruyères, ajoncs, ge-
nêts, cistes, galé, airelle, ont poussé simultané-
(9)
ment épars sur ces terres; ou quelquefois, lorsque le
terrain était favorable à leur développement, ils s’en
sont exclusivement emparé. Dans ce cas, la nature
des végétaux d’une terre en friche et leur stature in-
diquent à l'œil le moins exercé la bonté ou la stérilité
d’un sol. Dans les lieux humides ou marécageux, les
débris accumulés des végétaux qu'ils nourrissent,
composent à la longue des couches de tourbe plus
ou moins épaisses.
2» De L'enlivement des broussailles et de L'état des
terres.
Si lon ne fait que couper les végétaux frutescens
d’une terre abandonnée, .les graines non germées, et
quelquefois latentes depuis plusieurs années, ainsi
que le démontre l'expérience, donnent naissance à
des plantes herbacées ; des racines inaperçues et dont
les grands végétaux gênaient le développement, cou-
rent bientôt tout le sol de leurs nouvelles pousses;
mais si on laisse le tout dans cet état de choses, deux
à trois ans suffisent pour terminer leur règne : les
rejetons nombreux des végétaux ligneux, dont les
racines ont pu recevoir plus facilement les influences
atmosphériques, la terre étant mise à découvert, s’é-
lèvent rapidement et ne tardent pas à les étouffer.
Dès-lors le travail qu’on a fait ne change en rien
l'état de la terre, et c’est le.cas dans lequel se trouvent,
après des siècles, les bois taillis qu’on coupe tous
les sept à neuf ans. Pour opérer un changement plus
marqué et plus constant , si l’on veut que les terres
(10)
soient appropriées aux grandes ou petites cultures
(champs et jardins }, il est nécessaire de faire un
enlèvement plus complet des végétaux ligneux que
celui d’une simple coupe ; et c’est ce qu’on obtient
en bouleversant pour ainsi dire le terrain et détruisant
toutes les racines, ou les extirpant, soit par la main
des hommes, ce qui est le plus fatigant, le plus long
et le plus dispendieux ; ‘soit avec le secours des ani-
maux , ce qui est le plus économique : surtout si l’on
a soin d'employer les nouvelles charrues, si simples
et d'un emploi si facile; c’est là ce qui constitue vé-
ritablement l’écobuage.
3. Du remuement des terres et De son effet.
Quel que soit le moyen qu’on ait employé pour
labourer une terre et la mettre en valeur (et ici notre
‘objet n’est pas de traiter de ces moyens}, il en ré-
sulte que toutes les circonstances deviennent plus fa-
vorables à la végétation, parce qu'il est bien prouvé
que les labours rendent les terres plus meubles et par-
là plus poreuses,
Comme il faut aux racines des plantes qui, pour
leur développement exigent deux milieux différens,
de la chaleur et de l'humidité, il en résulte que par
l'effet de la plus grande porosité de la terre, l'air
circule entre toutes ses molécules et par-là se rap-
‘proche des racines ; et que d’un autre côté, non-seu-
lement par suite de la dénudation du sol, mais aussi
par l’allégement des molécules, l’eau pénètre toute
la masse de la terre ameublie, et y circule facilement,
ainsi que la chaleur.
(M)
. Ce qu’oh aurait peiné à croire , si l'expérience n’é-
tait I pour le prouver, c’est que les terres rendues
poreuses sont cependant plus propres à conserver
leur humidité, et c’est sur cette observation que re-
pose l'avantage des petits labours superficiels pen-
dant l'été. Cette porosité empêche la transmission des
molécules aqueuses ; dès-lors les terres défrichées ou
labourées sont dans un état plus fdvorable pour faire
Parcourir toutes les phases de la végétation acx plantes
qu’on pourra leur confier.
La nature des terres influe spécialement sur les
résultats de leur remuement. Quelques-unes, telles que
les terres réellement sablonneuses, c’est-à-dire, com-
posées essentiellement de quarz arénace’, ne changent
pour ainsi dire point, étant toujours poreuses : par
la solidité de leurs molécules n'étant pas propres à
se tasser : aussi leur exploitation est-elle plus facile
que celle de toute autre espèce de terre labourable.
Les terres tourbeuses et les 2umus végétaux ou
terres de bruyères, ont aussi une grande porosité ;
et si on les divise par les travaux de la culture, c’est
moins dans le but d'augmenter leur porosité, que dans
celui de les travailler plus aisément.
D’autres sols, comme les {erres argileuses , natu-
rellement compactes, ont essentiellement besoin d’un
long travail pour être rendues meubles et poreuses;
aussi.est-ce à tort; ainsi que nous l'avons vu dans
‘ce département, qu’on cherche à les débarrasser des
pierres d’un petit volume qui s’y trouvent ; ces pierres
concourant à leur qualité végétative. Très-favorables
à l'absorption de l’humidité qui les rend alors froides
(2)
et compacies, et par-là impropres à la végétation,
les terres argileuses ne peuvent que par des en-
grais et de longs amendemens, récompenser des soins
qu'elles ont exigés. Mais alors, si les produits n’en
sont pas toujours les plus estimés (1), elles sont les
plus propres à fournir d’abondantes récoltes.
Les £erres calcaires sont un peu poreuses, beau-
coup plus faciles à ameublir que les terres argileuses,
et se trouvent peut-être celles dont en général la
culture est Ja plus productive et la plus assurée ,
année commune.
Nous ne tenons point compte ici des terres vol-
caniques, très-chaudes par l’effet de leur couleug noire
ou brune, légères en général et faciles à mettre en
culture, lorsque les laves en ont été divisées par l’ac-
tion du temps.
EMPLOI DU PRODUIT DE L'ÉCOBUAGE.
Presque toujours les débris enlevés à Ia surface des
terres écobuées , ou la surface des terres elles-mêmes,
éprouvent une opération quilesdénature. Quelquefois
on fait brûler à la surface du terrain tous les végétaux
(x) En général et d’après nos propres observations, les céréales
donnent une farine moins blanche dans les térres argileuses; les
pommes de terre y donnent moins de fécule; les pois, les hari-
cots et toutes les plantes de la famille des légumineuses y sont :
moins savoureuses; les citrouilles et les melons y ont moins
de sucre.
(13)
qu'il a produits, surtout lorsqu'ils ne sont qu’ ’en petite
quantité; ou bien lorsqu'ils n’ont que très-peu de
valeur. D’autres fois on ne soumet à la combustion que
les racines, plus ou moïns entremélées de terre 7 après
les avoir convenablement laissées sécher , et les ayant
réunies en monceaux plus ou moins gros auxquels on,
met le feu vers la fin de l'été; ou bien, et ce qui
est préférable, on n’y applique le feu qu'après en
avoir construit des sortes de fours dans lesquels lac-
tion de la chaleur est mieux dirigée et plus intense.’
Dans quelques lieux on s’est [CES trouvé, d’après
notre conseil, de laisser sécher la terre et toutes les
racmes soulevées, et de les répandre à la surface
du sol, et de labourer sans Îles enlever, les laissant
peu à peu pourrir en place. |
Un autre moyen et qui nous a réussi, essentiellé-
ment dans les £erres fortes (terres argiléuses }, a été
d’enterrer, au-dessous du point que peut attemdre
ordinairement le soc de la charrue, ou coutre, les
branchages ou jeunes tiges, disposés en faisceaux tels
qu'en peuvent embrasser les deux mains, et qui LUS
sont deux à trois ans avant d’être réduits en frag-
mens: l'effet en a été très-marqué.
L'emploi du genêt (spartium scoparium ), dans
des vignes fatiguées et situées dans les terrains argi-
Jeux, a eu un succès remarquable. Voici comme y a
procédé, dans le département de Maime et Loire,
M. Millet, propriétaire : entre chaque ligne de “vigne
il a fait tracer une tranchée de. huit à ‘dix. pouces,
(270 milli.}, sans s’occupersi l'on coupait quelques
chevelus ; on a placé dans cette tranchée, en les im-
(14)
Briquant, de grosses poignées de genêt. (ou bruyère,
si l’on veut) , et l'on.a recouvert le-tout au moyen,
de Ja terre extraite de la tranchée suivante.
Pour employer avantageusement les bruyères, les:
genêts, les cistes , les airelles (1), surtout si le sol a
une profondeur convenable, il faut les déposer. non
loin de là. Dès que par un temps favorable, la-charrue
a pu soulever la surface. du sol, et mettre, à l'air les,
racines dont un été suffit pour détruire la, propriété
végétative , à l'automne Ja terre, peut être labourée
de nouveau, et prépar: ée à receyoir des navets ou des
choux; ou. a au printemps. des navettes ( bras—.
0772 campestris) ou des pommes de terre. L'année,
suivante , et ayant réservé la coupe des écobus dans,
un coin du champ exploïñé, on peut, au moyen même,
d’enfans, les placer par poignées à. la suite.les unes
des autres, au fond de. sillons très-profonds ; dont,
l’ensemble formera des planches de:terre à la sur-
face desquelles . on peut opérer les semis : surtoutde,
lin dans les terres fortes. Ce moyen revient au SUr-;
plus à l'enfouissement du lupin, du pastel, de la re,
nouée sarrazin, .qui.a lieu dans quelques contrées de.
VEurope, lorsque ces plantes, sont encore, en fleur.
Comme les bonnes terres à écobuer, ont ! toujours
assez de racines entremêlées. ayec elles , On, ne; doit,
adopter, ce procédé ‘que dans les. lerres. maigres Ou)
peu végétatives ; et réserver Pour: les terres en eu.
(2) Les ajoncs (alex europæus et nanus ) , par là difhculté de
les maintenir Sous un petit volume, sans les broyer ) ne se prêtent
pañ älcette opération ; éi‘le sol surtout n’a pas une cértaine pré)
fondeur, sonopat 93} > + *:C RO : 20 La
(15)
ture depuis longtemps, les branchages fournis, en
les employant à la manière dont nous venons de l’in-
diquer , et spécialement dans les terres argileuses
nommées vulgairement #rres fortes, Lerres grasses
ou £erres lises. Cette opération doit être surveillée,
pour qu'elle réussisse bien et n’entrave ne les cul:
tures suivantes.
Dans l'intérêt de l’agriculture, qu'il nous soit en-
core. permis de présenter un procédé pour adapter
les produits de l’écobuage à la culture, mais d’après
une autre méthode. Ce procédé, qui nous a parfaite-
ment réussi, mais qui est un peu plus dispendieux ,
ne peut s'appliquer à une grande surface, mais il à
l'avantage de donner immédiatement un produit avan-
tageux. Au mois de décembre ou janvier, cé que lon
nomme la morte saison, temps où, les ouvriers sont
à meilleur marché, ayant fait dégager le terrain que
nous supposons médiocrement fourni de petits végé-
taux ligneux, on fait faire une tranchée de deux pieds
de large (650 millimètres }, sur huit à douze pouces
(271 à 298 mil. ) de profondeur, dans laquelle on
fait renverser cmq à six pouces ( 135 à 162 milli.)
des terres et racines de la surface qui commence la
seconde tranchée. Sur cette couche on fait semer des
fèves de marais ( faba major, ou nana ou minor),
et l’on recouvre avec le fond de la même tranchée,
en procédant ainsi jusqu'à la fin. En défrichant bien
plus tard, nous avons aussi fait semer des pommes
de térré, en opérant de là même manière. Par ce
moyen l’écobuage est plus productif, et l'ameuble-
ment de la terre pour les cultures suivantes, bien
( 16)
plus complet; mais il faut avoir soin d'enlever hors
du terrain les plus grosses racines et les souches.
SSRES
DES EFFETS PHYSIQUES DU BRULIS ET DE SES
PRODUITS SUR LES TERRES.
Sœpe etiam incendere profuit agros (x).
Le brélis et l'écobuage sont confondus mal-à-pro-
pos sous le nom d’écobuage, par un grand nombre
d'agriculteurs; mais, ainsi que nous l'avons observé,
ces deux. opérations agricoles doivent être bien dis-
tinguées, ayant deux objets divers.
Sans la connaissance de la nature des terres , 1l
est impossible d’être agriculteur éclairé; et sans cette
même connaissance, on ne peut juger ni des espèces
d'engrais, ni des sortes d’amendemens propres à
chaque terre, et moins encore des quantités relatives
de ces derniers qu’elles sont susceptibles d’exiger.
S'il est vrai que les amendemens soient même plus
avantageux que les engrais , il n’est pas moins vrai de
dire que pour en avoir méconnu la théorie, nous
avons vu de bonnes terres.apauvries et dans lesquelles
alors il fallait augmenter la. quantité d’engrais au-delà
de ce qu'elles exigeaient auparavant.
(a) Virgilius, Georg. I:, vers 84.:« Par ce moyen, le feu cuira
» une partie de la superficie de la terre, et l’eau fera pénétrer les
» cendres dans le fond, qui lui serviront d’autant d’amendement.
Orivrer De Serre, Trait. d'Agri., liv.1t, ch: 1.
(17)
Ce que nous établissons ici en thèse générale, pour
les engrais et les amendemens, est d’autant plus ap-
plicable aux résultats de l’écobuage et du brélis, que
leurs effets se composent de ces deux moyens d’aug-
menter la valeur des terres, c’est-à-dire , d'engrais
et d’amendemens.
Si l’on ne connaît pas la nature des terres sur les-
quelles on opère le brélis, il est impossible d'obtenir
un résultat rationnel; et c’est aussi pour bien faire
comprendre les effets des produits de cette opération,
que nous sommes obligés de les examiner dans leurs
rapports avec les diverses sortes de terres principales
qui se trouvent soumises à la culture.
Nous devons donc supposer qu’on connaït ou peut
connaître, par les moyens simples d’analyse, la com-
position et les caractères des terres calcaire, argi-
leuse, siliceuse et humeuse ( humus vegetal), qui
sont en général les espèces dominantes dans toutes
les cultures de la France; et celles auxquelles toute
terre végétale peut être rapportée, quels que soient
les mélanges qu’elles puissent offrir, en plus ou en
moins , de chacun de leurs principes constituans. On
rencontre rarement des terres uniquement composées
soit de sable, soit de craie, soit de gypse, soit d’a-
lumine , soit d’humus.
4.0 Du brûlis sur Les terres calcaires, on à base D'oride
de calcinnr.
En général; les terres calcaires sont suffisamment
poreuses , et les engrais léur sont mieux appropriés
2.
(18)
que les amendemens, à moins que ce ne soit des ad-
ditions d'argile; le plâtre ou la chaux, dont l'effet
est plus prompt sur elles, ne leur est peut-être pas
aussi avantageux à la longue.
En brûlant les pelouses et racines enlevées ayec
la terre et desséchées, on détruit toutes les parties
végétales qui eussent augmenté la porosilé du sol.et
fourni une grande quantité d'acide carbonique ; en
se décomposant peu à peu; et on les réduit à une très-
petite quantité de cendres et de sels, qui sont bien
loin de compenser les pertes opérées par la combustion.
D'un autre côté, par l’action du feu, qui s’entretient
souvent plusieurs jours au milieu des amas de moîttes
de terre séchées et entremêlées de débris de végé-
taux, on agit sur un grand nombre de molécules cal-
caires qui, étant réduites à l’état de chaux, forment
un amendement, augmentant la qualité végétative de
la terre par la propriété que cette chaux a d'attirer
l'humidité de l’air, l’acide carbonique , et aussi par
la faculté qu’elle a de donner un peu moins de po-
rosité à la terre, en s’mterposant, au moyen de ses
molécules devenues comme impalpables , entre les
molécules les plus grossières de la terre cultivable.
Tout en proscrivant pour engrais ou amendemens,
dans le cas présent, la réduction en cendres des pro-
duits des terres calcaires écobuées, nous engageons,
si Jon persiste à adopter cette pratique agricole, à
faire l'opération sur les mottes-sèches, quand bien
même le terrain serait très-ferrugineux , ce qui arrive
quelquefois; il n’en éprouverait que des avantages.
On a nié l’action du feu sur ces sortes. de terres,
(19)
pendant le brélis méthodique ; mais l’on n’a pas fait
attention 1ci que le feu agit sur de très-petites molé-
cules qu’il a bientôt attaquées, tandis que dans les
fours à chaux on ne le fait agir que sur de grosses
masses. Mais au surplus, l’expérience n’est pas équi-
voque, puisque lesemplacemens à brülis conservent
pendant plus d'années leur force végétative. que les
parties environnantes ; bien qu’on en ait enlevé soi-
gneusement les cendres ou résidus pour les répan-
dre sur le. sol.
2, Du brûlis sur Les terres argileuses ou à base
d'oride d'aluminium.
De toutes les terres dont les produits de l’écobuage
sont employés en brélis, pour amendement, il n’en
est aucune pour laquelle cette opération soit aussi
avantageuse que pour les terres argileuses; et aucune
ne le demande pour ainsi dire plus exclusivement.
Un des grands défauts de ces terres est de manquer
de porosité et de céder trop facilement leur humidité
par l'effet de leur trop grande compacité, qualités
indiquant bien facilement les moyens de changer leurs
propriétés .. et. de les améliorer à à l'avantage de Ja-
griculture.
Lorsqu’on opère la combnstion des amas de mottes
de terre entremélées de débris de végétaux, on dé-
truit, bien ; il est vrai, la presque totaliié des prm-
cipes végétalfs. que présentent les racines des: herbes
ek,arbrisseaux ; ou ces corps eux-mêmes ;, mais l’ac-
tion du. feu én une grande portes des a male us
(20 )
argileuses de ces amas à une dureté telle qu’elles
ne sont plus propres à absorber l'humidité, et qu’a-
lors elles ne s’incorporent point intimement aux autres
molécules qui, par l'humidité, deviennent grasses et
compactes : alors les premières s’interposant, donnent
de la porosité et de la légèreté à la terre, et font enfin
l'effet remarquable que nous avons vu produire, en
conseillant d’ajouter du sable pur à certaines terres
grasses ou très-argileuses , qui, par-là, de stériles
qu’elles étaient, sont devenues d’excellentes terres
arables, ou d’exclusives qu’elles étaient à certames
sortes de cultures, propres à recevoir de nouvelles
espèces de végétaux.
On sait que tous les débris de tuiles, de briques,
de pots, sont bien appropriés à ces sortes de terres
grasses. Par cette addition ou celle de sable, on est
assuré de rendre plus propres à la végétation les
terres argileuses écobuées, qu’en employant le pro-
cédé assez circonscrit du bréls, quand bien même
encore on enfouirait les branchages d’après la mé-
thode indiquée plus haut.
3.° Du brûlis sur Les terres siliceuses, sous forme
granulaire, ou sable à base D'oride De silicium.
Les sables forment une sorte de terrain dans lequel
la combustion des produits de l’écobuage ne peut
avoir aucun résultat désirable, puisque l’action du
feu n’agit en nulle manière sur les particules siliceuses,
et qu’elle détruit complètement et réduit à presque
rien tous les débris des végétaux, tandis qu'a la
longue, l'humidité, aidée par la chaleur, suffirait
(21)
pour compléter leur destruction, et que les plantes
qu’on y cultiverait profiteraient des principes qui
s'en dégagent , qui tous seraient employés à l’acte de
la végétation, et d’une manière plus prolongée et plus
utile que ne pourrai le faire le produit de l’incinéra-
tion de mille parties et plus de ces mêmes débris de
végétaux. Nous savons bien que les légers débris
de charbon, échappés à l’incimération, attirent l’hu-
midité de l’air ; mais leur quantité restante, comparée
à la masse de terre qu'ils accompagnent, est, pour
ainsi dire, comme nulle.
4. Du brûlis sur Les terres humeuses où composées
d'humus végétal.
S'il est une sorte de terre sur laquelle il faille se
dispenser entièrement d'employer la combustion pour
approprier les produits de l’écobuage, c’est la terre
que nous signalons ici sous le nom d’humeuse, et
dont les variétés les plus remarquables sont la #erre
de bruyère ou de lande, les terres tourbeuses, et
l’'humus végétal, soit des forêts, soit de tout autre
lieu. Les terres de landes, composées d’une très-
grande quantité de débris de végétaux, sont presque
complètement réductibles en cendres; et par-là , bien
loin de les améliorer, on les réduirait à presque
rien. et à la stérilité, ne laissant qu’un peu de cendre
mêlée de sable ou d’un peu deterre.
Combien. de.fois-n’avons-nous pas reproché à des.
écobueurs, dans des landes, de détruire par le brülis;
presque: tous. les avantages de leurs travaux de dé--
(22)
frichement, en soumettant les trois à quatre pouces
de terre vraiment végétative , qu'ils avaïent enlevés à
la surface d’un sol mgrat, à action du feu! On ob-
tenait pour résultat quelques poignées de térré et
quelques parcelles de substances salines d’un avan-
tage éphémère , tandis qu'en mêlant cetté superficie
composée d’humus, avec la couché inférieure, ils
auraient eu de quoi obtenir, pendant plusieurs an-
nées, une végétation brillante et lucrative, en céréales
ou autres plantes plus où moins appropriéées à la
nature du terraim, et en adoptant un assolement
méthodique.
Dans les térrés à Awmus, nous devons faire une
espèce distincte des térres composées exclusivement
de débris de plantes, mais toujours plus on moins
inondés ; d’où résulte une sorte d’humus végétal
particulier, nommé /ourbe, où terres tourbeuses.
Lorsqu'on veut rendre ces terres fertiles, on éstobligé
d’en réduire la partie superficielle en cendrée, mais
alors on en détruit complètement une portion plus
ou moins grande ; ce qui en abaisse la surface déjà
basse et très-souvent du niveau de l’eau, si Von n’a
eu le som de pratiquer des canaux d’écoulément et
de déssèchement. Nous ne proposons le brélis dans
ces sortes de terres que comme dernière ressource :
Ta chaux , les terres de transport, les gravièrs même,
dévant être employés de préférence. Cependant on
peut soumettre au brülrs la croûte tourbeuse éntrez
mêlée de TaCines , pour s'en’ débarrasser” Mais ce
léger produit seul serait insuffisant pour rendre ces
ierres productives. Il faut employer tous les’ amen:£
(23)
demens possibles aux circonstances locales; et ainsi
par des additions de matériaux de transport, nous
avons vu d'immenses surfaces de marais spongieux
changés en belles et excellentes prairies, sans lin-
termédiaire du bris.
SSSSS-
DÉS EFFETS CHIMIQUES DE L'ÉCOBUAGE ET DU
BRULIS SUR LES TERRES.
On doit bien se pénétrer de l'idée que pour nous
l'écobuage n'est que l’action de dégager le sol d’un
terrain inculté des végétaux qui le couvrent, et
non l’action de brûler ces mêmes végétaux, d’après
les recherches faites au commencement de ce mé-
moire; c’est pourquoi nous considérerons les effets
chimiques de l’écobuage, isolément du brélis, et
dans ses résultats propres, et dans les résultats de
l'emploi des produits de lécobuagé sur Pacte de
la végétation ; tandis que dans le paragraphe précé-
dent, nous avons considéré les effets physiques de
ces deux ‘opérations sur le terrain même qui én
était l’objet.
A0) Hésultats propres et directs de l'écobuage.
La végétation des plantes auxquelles l'agriculture
donne ses soins, ayant besoin du concours de l'air,
de l'humidité , de la chaleur, de la lumiere et de
l'électricité, pour se. trouver dans les conditions les
plus favorables, rien ne facilite plus l’action de ces
(24 )
agens réunis que les premiers travaux faits pour
dégager une terre inculte des végétaux inutiles qui
la couvrent. L'air se promène à sa surface, s’insinue
dans ses pores; l'humidité peut mieux y arriver par
tous les points, et avec elle entraîner les effluves
électriques qui manquent toujours dans les terres
desséchées, ce principe étant soustrait par les va-
peurs qui s'élèvent de la terre. En joignant:à cela
la libre action de la chaleur, qui n’est pas arrêtée
par les nombreux branchages, on voit que la terre
se trouve dans des circonstances tout-à-fait diffé-
rentes. Les débris de végétaux tombés à sa sur-
face , les nombreuses racines soit vivantes , soit dé-
composées, existant entremêlées à la terre, viennent
ajouter aux conditions les plus favorables, dans le
but qu'on veut atteindre en travaillant à écobuer
les terres; conditions qui sont d'autant plus amé-
lorées encore, que. l’ameublissement du sol aura
été mieux fait et dans des temps plus convenables,
soit avec la houe, soit avec la charrue. Cetté. der-
nière opération, praticable dans tous. les temps,
dans les terres légères, ne peut être commencée
avantageusement dans les terres fortes ou argileuses
qu'après les pluies.
2, Résultats chimiques De L'emploi des éobus en
nature dans Les terres dDéfrichées.
Les genêts, les bruyères et autres végétaux de peu
de valeur , et leurs racines se trouvant brisés et mê-
lés à travers les terres défrichées et nouvellement
(25 )
ameublies, deviennent non-seulement un bon moyen
d'augmentation de division, dans les terres grasses sur-
tout; mais encore ces débris fournissent abondam-
ment les principes propres à la végétation, en lui
livrant une énorme quantité de gaz acide carbonique
qu'ils dégagent ; et quand, dans les endroiis un peu
humides, 1l y aurait production de gaz hydrogène, 1l
serait toujours chargé de carbone, et à l'état de gaz
hydrogène percarboné, susceptible d'être décomposé
par l'acte de la végétation, et d’être réduit à l’état
simple de gaz hydrogène.
Mais une autre propriété des débris des végétaux,
outre celle de multiplier la porosité du terrain, c’est
d'entretenir l'humidité, parce que les substances végé-
tales sont très-hygrométriques, et conservent cette
propriété tant qu’elles existent à l’état de végétal
en décomposition. Cette humidité est d’autant plus
importante qu'elle se charge de gaz acide carbo-
nique, résultat de la décomposition des débris végé-
taux, et l'empêche de s'élever à la surface de la
terre et d'être entrainé par le courant des vents.
Si notre but était ici de développer la théorie chi-
mique de cette décomposition , nous verrions qu’au-
cune parie, aucune molécule n'est perdue; tout
est employé à l'avantage des végétaux vivant à la
surface du sol. Ces végétaux en débris auront un
résultat d'autant plus important qu'ils seront en
plus grande quantité à travers les terres défrichées.
Mais ils ne doivent pas être enfouis trop profon-
dément, parce qu’alors, au lieu de céder du gaz
acide. carbonique, ils ne font qu'extraire l’oxigène
(26 )
de l'eau ; se réduisent en carbone indécomposable, ét
alors bien moins avantageux au but qu’on se pro-
posé.
Les genêts ont une durée de trois à quatre ans,
dans une terre argileuse. Les ajoncs, les cistes et
les bruyères ne sont souvent pas entièrement dé-
composés après la cmquième année. Les terres cal-
caires ét les terres sablonneuses décomposent bien
moins promptement encore les débris de végétaux.
3. Resultats chimiques de l'emploi des écobus por
La combustion.
Nous avons vu, dans le paragraphe quatrième,
les inconvéniens et les avantages, pour les diverses
terres, de lapplication du feu sur les écobus et
sur là terre; ici nous allons déterminer les résultats
chimiques de cette action.
Déjà nous avons vu que toutes les foïs que le
feu agissait sur les portions végétales , il lés anéan-
üssait. Îl est vrai que la masse de gaz acide carbo-
nique créé par la combustion, ét la vapeur chargée
de particules carbonées né sont pas perdues pour la
nature, et que ces principes vont plus on moins
loin $’approprier à la végétation , mais ils sont per-
dus pour le lieu qui les a fournis. Le ligneux, la
fécule, les gommes, le sucre, le tanin, lés résines,
les gommes-résinés, les huilés, lés aromités où es-
sénces, les eaux dé végétation; tous ces produits
immédiats, entrant dans la composition des végé-
taux, et propres, par leurs modifications et dé-
(27 )
compositions spontanées, à fournir le carbone, ce
principe essentiel à la végétition; tous sont détruits,
enlevés, dispersés au loin, et il ne reste à leur place
que quelques parcelles de carbonate de potasse, du
nitrate dé potasse et quelques sulfates, mais le tout
en si petile quantité, comparée à la masse végétale
mise en combustion, que c’èst une perte réelle pour
lagriculteur; tandis que l'effet direct du résultat n’a
qu'une bien faible influence sur la végétation des
plantes ‘que l’on confie ensuite à la terre préparée
ainsi. Si l’on à opéré sur dés terres argileuses ou
calcaires, il est vrai que cet inconvénient est un
peu compensé par l’état avantageux dans lequel a
été laissée une partie de molécules terreuses (voyez
SSSS, n.° 1, 2), à raison des propriétés physiques
nouvelles qu’elle à ‘acquise; mais il est si facile
très-souvent de suppléer à ces résultats, par des
amendemens appropriés, qu’en-principe la combus-
tion du végétal est toujours une perte dans les tra-
väux°de défrichément.
On'a beaucoup vanté les brélis, usités en Ca-
talogne, depuis un temps immémortal (r), ‘ét ap-
pliqués sans distinction à ‘toute espèce de terre;
mais comme l'on y procède par l'intermédiaire dé
branchages äpportés d’ailleurs, ét qu’on recommence
l'opération ‘chaque année, ou au moins tous les
deux ou trois ans, il en résulté qué l’incinération
de cés branchages, joints à l’action du feu sur le
‘(G) Voyéz, sûr l'Écobuage : journal d'Agriculture ‘des Payse
Bas. Février 1928. Ÿ' 1
(28 )
calcaire ou l'argile entrant comme partie consti-
tuante de presque toute terre arable, donne en
même iemps un engrais et un amendement, mais
dont les avantages réels ne pourraient balancer la
moindre des méthodes rationnelles d'agriculture, si
on l’appliquait comparativement à ces mêmes terres.
Quels que soient donc les avantages publiés sur les
Jormiges (1) ( fourmillières } embrâsées, méthode
usitée le long de la mer, entre Barcelone et Tarra-
gone, nous maintenons que c’est une mode vicieuse
et! qui n’est bonne que dans le cas où l’on ne
pourrait en employer aucune autre.
SSSSSS-
DE LA DIRECTION QUE LA PRATIQUE DU
BRULIS PEUT TIRER DES CONSIDÉRATIONS
PRÉCÉDENTES.
Ce paragraphe, par sa nature, sera naturellement
court, puisqu'il ne doit être qu’un résumé succinct
de tont ce qui a été traité dans le travail qui vient
d'être présenté, et dans le cours duquel nous avons
discuté les avantages et les imconvéniens de chaque
méthode , de chaque pratique particulière.
12 L'écobuage est la destruction complète de tous
les végétaux ligneux et plus ou moins gros, crois-
sant dans des terres abandonnées et en friche, de
(1) Nom donné par allusion de la forme de chaque monceau du
brâlis.
(29)
quelque manière que puisse s’en faire l'extraction,
c'est-à-dire, par le travail de l’homme, seul, ou avec
le secours d’animaux domestiques.
2. Le plus avantageux et le plus complet sera celui
opéré par main d'homme, et surtout tel que nous
Vavons fait exécuter. ( Voyez SSS, vers la fin.)
3e L'ecobuage est complètement nuisible dans
toute terre qui manque de profondeur , et il vaut
mieux avoir une vaste lande , propre au parcours
des brebis, des chèvres, des mulets et bœufs, que
de faire les dépenses d’écobuer et défricher un sol
qui aurait moins de sept à huit pouces de terre
meuble, ou susceptible de le devenir.
4. Dans les terres éminemment composées de dé-
bris de végétaux et connues sous le nom d’humus
végétal, et vulgairement sous les noms de /erre de
lande, terre notre, terre de bruyère, de tourbe,
terre de marais, terre d’étang, eic.; l'écobuage, ou
enlèvement des végétaux vivans , tant sous le rapport
des rameaux que sous celui des racines , peut être fait
complètement , sans qu’il en résulte un notable in-
convénient, parce que ces sortes de terres sont natu-
rellement assez légères et qu’elles sont essentiellement
formées de parties végétales propres à se décomposer
de plus en plus, et à fouruir en abondance les prin-
cipes essentiels à la végétation.
5. Dans les terres calcaires (vulgairement ferres
franches), les terres siliceuses ou sables, et argileuses
( vulgairement #erres fortes, bornais, glaises, etc.),
les produits de l’écobuage doivent être employés tout
à leur avantage : surtout dans celles dont la profon-
deur est médiocre et qui sont peu végétatives.
( 30 )
Dans les terres argileuses, les fragmens des yégé-
taux, soit les racines, soit les branchages (1), doivent
y être plus spécialement appropriés, et surtout d’a-
près les méthodes indiquées $$$. L’addition de l'ajonc
peut même y être faite, mais après qu'il a été trituré
par les pieds des animaux, étant exposé sur les che-
mins très-fréquentés, aimsi que cela a lieu dans quel-
ques endroits du haut Poitou ( département de la
Vienne }) et de l’Anjou; ce qui s'appelle dans cette
dernière contrée farre de la ruce.
6.° La combustion du produit de l’écobuage où le
brûlis ne peut qu'être nuisible dans les terres sili-
ceuses et humeuses, ou terres de landes : et ce pro-
cédé ne doit jamais être appliqué à ces sortes de
terres, parce que le feu en détruit ou la presque
totalité, ou la seule portion propre à en entretenir
et activer la végétation. Si dans les marais tour-
beux et défrichés, on peut employer le bris, ce
n’est que pour la portion la plus superficielle, en-
tremêlée naturellement de trop de racines, pour que
le travail de mise en valeur soit prompt et facile.
(Voyez SSSS, N°5 3, 4.)
7.2 Lorsqu'une terre est éminemment calcaire ou
argileuse , alors le brélis peut être employé avec
quelque avantage sur les mottes de terre entremêlées
de racines nombreuses , après avoir été préalable-
l
(1) On doit bien comprendre que toute partie végétale un peu
grosse et qui approche plus ou moins de la grosseur d’un bâton mé-
diocre , soit racine, soit branche, doit être enlevée, pour ne pas
trop entrayer les opérations de la culture,
(31)
ment desséchées par l’action de la chaleur de l'été,
et disposées méthodiquement en monceaux plus ou
moins gros. Mais cette opération, si elle n’est pas
dirigée pour réduire le plus grand nombre possible
de molécules calcaires à l'état de chaux, ou durar
la plus grande quantité possible de molécules argi-
leuses, devient nuisible à l'amélioration qu’on se
propose; et dans ce cas, le procédé d'abandonner
les végétaux enfouis, à la décomposition sponta-
née, est et la plus utile méthode, et la seule sus-
ceptible d’être généralisée dans les opérations de la
meilleure culture possible. ( Voyez SSS$ , N°, 1,2;
SSSSS, N° 3.)
Dans une matière aussi importante que l’agricul-
ture, rien n’est aussi nuisible que les longues dis-
cussions et les longs détails. Ils font surtout perdre
de vue les objets principaux et emploient inutile-
ment le temps précieux de ceux qui veulent consulter
les ouvrages propres à leur communiquer des idées
ps “le application. Qu'on ne soit donc pas étonné
pour, éviter cet inconvénient, nous ayons donné
à ni matière que nous venons de traiter le moins
de développement possible , tout en n’omettant rien
d'important sur un sujet susceptible de fournir de
longues discnssions, de présenter de longues varié-
tés de pratique d'exécution; mais une plus grande
extension n’eût rien ajouté aux faits principaux,
aux:faits seuls essentiels, et aux considérations par-
ticulières dont se compose le travail que nous pré-
senions.
(32)
QUELQUES OBSERVATIONS
SUR
LA CULTURE EN PÉPINIÈRES DU PRUNIER SAUVA-
GEON APPELÉ DAMAS NOIR (1);
Par M. LEBRETON aîné, Pépimiériste à Angers.
IL est bien reconnu que le premier besoin du pé-
- pimériste est de faire un bon choix de ses plants;
car il est beaucoup de variétés appartenant au même
genre qui ne réunissent pas de semblables qualités :
tel serait par exemple celui du prunier; et en ne
parlant que des variétés de cet arbre propre à servir
de sauvageon, le damas noir mérite, sous ce rap-
port, la plus grande considération.
Cet arbre, de première nécessité par l'avantage
qu'il possède d’être propre à recevoir, par l’é-
cusson, toutes les variétés de pêchers, abricotiers,
pruniers , amandiers , etc., doit fixer toute l’attention
du cultivateur ; nous ajoutons que beaucoup d’autres
variétés de pruniers, d’une nature plus sauvage, ne
présentant pas les mêmes qualités, devraient être re-
jetées, comme impropres à la plantation d’une pé-
(1) Nommé aussi Prunier de S.t-Julien, et plus souvent encore
Prunier d'Amarnoir , dans le département de Maine et Loire.
(35)
pinière ; car il est bien reconnu que le prunier damas
noir est le seul qui, dans cette circonstance, puisse
devenir profitable au pépimiériste.
C’est ordinairement par rejetons et par boutures
qu’on se procure cette variété. De semis, elle est
sujette à dégénérér, en se rapprochant plus ou moims
du prunier de haie; ce moyen, en outre, deman—
derait beaucoup de temps; mais celui qu’on doit pré-
férer, comme étant le plus certain de bien conserver
cette variété, est d'en faire des boutures. Bien que
les rejetons soient également propres à faire de bons
sujets, on peut néanmoins commettre quelques mé-
prises en les arrachant, si l’on n’a la certitude qu'ils
ne sont pas réunis à d’autres espèces.
Si le pranier damas noir, considéré comme sauva-
geon, présente au pépiniériste de grands avantages
pour la multiplication de ses greffes, d’un auire côté
il faut considérer les pertes considérables qu'il lui fait
éprouver par sa délicatesse à supporter le froid de
quelques hivers.
Lorsque le thermomètre de Réaumur descend à
huit ou dix degrés au-dessous de zéro , on a lieu de
craindre pour les plantations de damas noir , et par-
tieulièrement pour celles qui ont atteint leur seconde
année ; et il n’est pas possible de les garantir de cette
malheureuse attaque. Il en est de même à l'égard de
beaucoup d’espèces d’arbres et d’arbrisseaux , parti-
culièrement de celles qui ont les fenilles persistantes.
Mais revenons au damas noir, arbre qui, dans sa
jeunesse et sous notre climat, craint les fortes gelées.
Nous avons été à portée de voir des plantations de
à:
( 54)
ce prunier, presque totalement perdues, particulié-
rement celles qui se trouvaient être placées dans des
endroits bas et par. conséquent sujets à trop d’humi-
dité: aussi doit-on établir cette espèce d’arbres dans
la partie de la pépinière qui offre le plus d’abnis et
le terrain le moins humide. "
Si les plantations de damas noir sont totalement
gelées, c’est un mal irréparable; mais si elles n’ont
été que saisies par un air glacial, il peut y avoir du
remède. Ce remède consiste à bien saisir le moment
de la taille des jeunes arbres, qu’en pareil cas on
ne devra faire qu’à l’époque où ils entreront en sève;
et en thèse générale on pourrait dire que lorsqu'un
hiver a été rigoureux, que l'œil du pépmiériste a
reconnu l'effet des gelées sur ses plantations, il est
nécessaire de n’en faire la taille qu’à l'approche du
mois de mal.
Dans le mois de janvier 1829, les arbres ont beau-
coup souffert du froid , entr’autres les sauvageons de
damas noir portant trois à quatre ans de pépinière.
Ayant déjà été dupe de trop de précocité à faire le
travail de la taille, je me décidai à attendre le mo-
ment du mouvement de la sève, qui devait être plus
tardif, à raison de l’hiver rigoureux que nous venions
d’éprouver ; je ne fis ce travail que vers la fn d'avril.
Les arbres qui éprouvèrent cette taille tardive pous-
sèrent peu , mais assez pour laisser apercevoir que
s'ils avaient été taillés pluiôt , il en eût péri une
grande quantité. À
Un arbre attaqué de la gelée peut se régénérer
par son écorce : cette enveloppe, quoique la plus
(55)
exposée aux différentes actions de l'air, paraîtrait
néanmoins être la partie qui souffre le moins de ses
atteintes. Après une forte gelée de neuf à dix degrés,
et surtout lorsqu’elle aura été accompagnée de ver-
glas, si quinze jours après le dégel et à la suite des
pluies qui le suivent ordmairement on visite les plan-
tations, afin de reconnaître les effets du froid, on
aura de la peine à se convaincre que les arbres qui
les composent ont pu en être atteimts; car ce n’est
bien que vers le printemps , lorsque la sève se trouve
être en activité, que l’on peut voir clairement et re-
‘connaître les arbres qui ont été attaqués de la gelée,
par les traces qu’elle laisse 2n{érieurement: à Vexté-
rieur on ne voit rien encore, car il existe un principe
de vie dans l’écorce qui peut occasionner pendant
quelque temps l'illusion.
En résumé, je crois qu’il est plus convenable de
pratiquer la taille des arbres qui ont souffert de la
gelée, à l’époque de l’année où la végétation est
prononcée, bien que dans des temps antérieurs :
dans cétte circonstance, un arbre taillé trop tôt souf-
frira, et même finira par succomber par suite de
cette seconde attaque. En effet, en supprimant trop
tôt ses rameaux, comment pourra-t-il recevoir er
assez grande quantité linfluence atmosphérique qui
lui est nécessaire pour son rétablissement , et qu'il ob-
tient particulièrement par la présence de ses feuilles ?
( 56 }
mm
NOTICE
SUR UNE VARIÉTÉ DE CERISE TARDIVE;
Par M. MILLET,
Secrétaire général de la société d’Agr., Sciences et Arts d'Angers,
CERISE DE SPA. ( Fruitier de Maine et Loire,
cerises, pl. 1:(*) ).
Fruit ovale, se rapprochant un peu de la forme
et de la grosseur du bigarreau commun; d'un rouge
(*) La société d'Agriculture , Sciences et Arts d'Angers,
ayant décidé qu’elle s’occupera ; indépendamment, de ses autres
travaux, d’un ouyrage spécial sur les différentes variétés de fruits
cultivés dans le département de Maïne et TLoïre',' ainsi.que sur
ceux qu’on pourrait y introduire; invite les personnes qui peuvent
s'intéresser au succès de cette entreprise à lui communiquer toutes
les observations qu’elles ont été à même de faire sur cette partie
trop négligée de l’horticulture, aïnsi que les fruits eux-mêmes,
avec les noms sous lesquels ils sont connus , afin de pouvoir les
peindre de grandeur naturelle, et en fixer la nomenclature d’une
manière positive, pour les réunir ensuite dans un atlas particulier,
sous le titre de Fruitier de Maine et Loire; cet ouvrage, qui ren-
ferme déjà beaucoup de variétés nouvelles ou seulement intéres-
santes, se rattachera en outre à l’école d’arbres fruîtiers que la
société va créer pour le département de Maine et Loire.
Tous les renseignemens , ainsi que les fruits dont on voudra bien
faire part à la société, devront lui être adressés au Jardin des
Plantes, ou à M. Millet, secrétaire général de ladite société, rua
Saint-Blaise, à Angers.
(37)
pâle; qui passe au rouge vif en murissant; pédoncule
long de dix-huit à vingt-quatre lignes, placé dans
une cavité. Feuilles de deux formes différentes : celles
qui poussent sur l’ancien bois sont ovales, acumi-
nées, régulièrement dentées et à long pétiole, ce qui
indiquerait assez qu’elles appartiennent à un cerisier
aigre, tandis que les feuilles qui naissent avec le bois
de l’année, et qui sont lancéolées , irrégulièrement
dentées , à pétiole court, ct pres du double plus
grandes que les précédentes, paraîtraient provenir
d’un cerisier doux.
Cette disparité qu’on rencontre dans les feuilles et
qu’on remarque aussi dans les fruits, puisque ce
dernier, rempli d’une eau abondante, acide, sem-
blerait plutôt par sa forme , sa couleur et par la
longueur du pédoncule, indiquer une cerise douce ;
ceïte disparité, dis-je, étant propre à induire en
erreur si l’on ne considérait pas l’ensemble des ca-
ractères que présente cette variété , j'ai dû la signaler
comme une particularité qui lui est propre.
Cette cerise que je crois inédite a été apportée de
Montmorency à Angers, sous le nom de Cerise de
Spa. Elle est cultivée à la préfecture ainsi que chez
MM. Leroi et Lebreton, pépimiéristes, et mérite
d’être répandue par rapport, surtout, à l’époque tar-
dive à laquelle elle mürit ses fruits, qu’on ne peut
cueillir avant la mi-juillet: époque qu'il est même
essentiel de reculer , si l’on veut avoir des cerises
moins acides.
( 58 )
CULTURE
de lVOguon-Patate,
PAR M. DESVAUX.
AYANT depuis quatre années cultivé une variété
d’ognon, introduite dans le commerce sous le nom
d’'Ognon-Patate, ou Ognon sous terre, dont on
ignore l’origine , et qui est encore très-peu connue;
nous indiquerons en peu de mots ses avantages et
son mode de culture.
L'Ognon-Patate, qu’on a pu voir à l'exposition
horticulturale d'Angers, du 3 juin 1831, ne monte
jamais en graine; car, sur plusieurs planches de
cette variété, nous n'avons pu en voir que deux
pieds monter à fleur, depuis que nous le cultivons.
Il est en maturité dès la fin de mai, c’est-à-dire
presque deux mois plutôt que l'autre; et dans les
greniers 1l ne commence à pousser que trois semaines
après l’ognon ordinaire, ce qui en prolonge l’usage
-dans un temps où, avec les autres variétés cultivées ,
l'on manque alors de ce légume.
IL est des années où l’ognon commun réussit in-
complètement, soit par défaut de bonnes graines,
soit par la sécheresse ou autre cause. Avec l’'Ognon-
Patale on ne peut jamais en être privé, en suivant
(59)
le procédé qui nous a réussi et que nous allons
faire connaître.
À la mi-février on doit placer en ierre, dans des
planches et séparément, tous les petits cayeux: ce
sont eux qui fourniront les beaux et gros Ognons-
Pätates. À la même époque on plante les plas gros,
en les recouvrant légèrement, maïs on les plante
en moindre quantité que les cayeux. Les gros bul-
bes sont déstinés à fournir du plant pour l’année
suivanté, chaque ognon, d’après sa grosseur, don-
nant dé cinq à quinze cayeux, et en outre un où
deux gros ognons. Les cayeux sont mürs les pre-
miers et doivent être recueillis dès que la fanne
commerice à se former, afin de pouvoir regarnir
d’an peu de terre les cavités qu'ils ont fescdoe en
en s’élévant du milieu de l’ognon dont ils sont sortis,
et nourrir les ognons restans déstinés à former du
gros plant ou de gros ognons à manger.
On doit procéder à cette récolte des cayéux, afin
d'éviter que par les pluies de juin ils ne s’échauf-
fent, comme on le dit vulgairement, c’est-à-dire ,
afin que le petit champignon nommé sc/erotium
semen, ne se propage de manière à altérer toute
une planche, comme l'expérience nous l’a appris,
et comme cela peut arrivér souvent par défaut de
surveillance à cet égard (r).
oo
{1) Dans l’almanach du bon Jardinier, pour 1830, on indique
de cultiver cet ognon à 12 et 15 pouces de distance; de Je butter
très-légèrement une première fois, et davantage à la seconde , et
qu’alors à la récolte il présente une massé de cayeux et d'ognons.
( 40 )
Nous dirons, en attendant que nous traitions
des végétaux acotylédons nuisibles auxcultures, que.
dès que les feuilles d'ognon, ciboule, ail, etc:, jau-
nissent avant le temps ordinaire de leur maturité,
il faut s'empresser de les cueillir, afin d’éviter la
propagation rapide du sc/eroliun qui les détruit,
en formant comme une pulpe fétide de toute la
parüe solide de ces diverses plantes bulbeuses.
Nous avons observé que pour s’entretenir d’o-
gnon et de cayeux d’ognon, il fallait toujours plan-
ter un quart de gros Ognons-Patates, et. trois
quarts de cayeux; c’est-à-dire que, si la consom-
mation d’une maison était de trois planches d’o-
gnons, une planche ou seulement deux tiers. de
planche suffiraient pour se pourvoir de plant néces-
saire pour l’année suivante. Si par hasard quelques
ognons de cette espèce montaient à graine, il fau-
drait les enlever soigneusement, afin de ne pas
altérer la souche de cette variété curieuse et impor-
tante.
————_—_—————"—
DESCRIPTION
D’'UNE NOUVELLE VARIÉTÉ DE ROSIER, PROVENUE
D'UNE GRAINE DE ROSIER THÉ ORDINAIRE.
FLEURS grandes (3 pouces de diamètre ); pleines ;
d'un blanc éclatant, avec la base des pétales légère-
ment lavées de jaune tendre; solitaires ou réunies par
(41)
deux ou par trois à l'extrémité des rameaux , qui sont
effilés, à écorce d’un beau vert, comme celle qui
recouvre le vieux bois; cmq à sept folioles ovales-
oblongues , d’un vert tendre ; .ovaire pelit, ovale,
presque nu ; sépales réfléchis ; aiguillons rares, forts,
d’un rouge brun.
Cette variété bien remarquable , qui est remontante
et d’une odeur agréable, mérite, par les agrémens
qu'elle présente, de fixer l’aitention des amateurs de
belles fleurs. Elle ne se trouve encore que chez M. Ma-
réchal ; jardinier à la Croix-Montaillé, qui l’a ob-
tenue d’une graine de rosier thé ordinaire; et à la-
quelle les jardiniers d'Angers ont donné le nom de
Rose Marechal.
NOTE
Sur une Description mécanique de La Chaînette,
PAR M. BOBILLIER ;
* CHEF DES ÉTUDES À L'ÉCOLE ROYALE DES ARTS D ANGERS.
LA chaïînette ou la courbe qu'affecte un fil flexible et
inextensible, quand il est suspendu par ses extrémités
à deux points fxes, est une des lignes que l’on a le plus
fréquemment occasion d'employer dans les arts; elle
joue en effet un rôle remarquable dans diverses applica-
tons importantes des sciences mathématiques, et en-
( 42 )
{r'autres, dans la coupe des pierres et dans la construc-
tion des ponts établis sur des chaînes tendues d’une rive
à l'autre; on en voit un fort bel exemple au dôme du
Panthéon de Paris, dont l’une des voûtes a la forme
d'une chaïînette renversée; aussi les géomètres l'ont-ils
examinée avec un soin tout particulier, et ses propriétés
sont-elles exposées avec détail dans tous les traites de
mécanique rationnelle et industrielle.
Toutefois, il n'existe pas de moyen commode pour
tracer la chaînette avec précision ; le procédé qui paraît
le plus répandu, se déduit immédiatement de son équa-
tion ramenée à la forme la plus simple,
x
x
T
r
BE à He r
PN2
Dans laquelle la lettre e désigne la base des logarithmes
népériens; x et y, les coordonnées d'un point quel-
conque de la courbe rapportée à la verticale qui la
divise en parties égales et à l'horizontale, non trans-
verse, distante du point le plus bas d'une quantité égale
à son rayon de courbure r; il consiste à construire, à
l'aide des tables, les deux logarithmiques égales et de
sens contraires ,
x — x
ÿ sé ,) pre ,
À Sci ensuite leurs ceprditns dans le rapport de
1:r,.enfin, à prendre, après cétte réduction, des
moyeunes arithmétiques entre les ordonnées qui corres-
pondent à une même abscisse.
(45 )
À ce procédé laborieux, nous proposons de substi-
tuer le suivant :
Tracéz une parabole mon, dont la distance du
foyer f au sommet o soit égale au rayon de cour-
bure x de l'élément le plus bas de la chaïnette que
vous voulez décrire ; faites ensuite rouler, sans glisse-
ment, celte parabole sur l'une de ses tangentes 0x;
dans ce mouvement le foyer ? engendrera la chaï-
nette cherchée. (Noy. p. 4, fig. 2.)
Supposons que la parabole, ayant pris la position
mon, touche en k la directrice ox, en sorte que
ok — arc ok; soient &æ , B les coordonnées du
point k par rapport au grand axe o'y et à la tan-
gente ox’; nous aurons 8 — 4r «, et, à raison
des propriétés connues du foyer {’,
PÉAS Sr MreReRte
kr …
tang. T’kx = — ang. ko = — su
’
Mais si l’on fait rouler infiniment peu la parabole,
le foyer f” décrira, autour du point de contact k,
un petit arc circulaire, et par conséquent la normale
de sa trajectoire sera f’k: en appelant donc x, y
les coordonnées courantes du foyer f” relativement
aux axes rectangulaires ox et oy, on aura aussi les
équations
4
pe
hair F Re
( 44)
Qui, comparées aux précédentes , fourniront
FT RME ur dr
Ka og =
Eliminant présentement la variable 2 entre ces der-
2
nières, et supprimant le facteur Wi + com-
mun aux deux membres, il viendra
ef V L + ME
Y ad dx’ 7
C'est l'équation différenticile de la courbe décrite par
le foyer £
Séparant les variables, et, observant que les x et
les y croissant en même temps, leurs différentielles
dx et dy doivent être affectées du même signe, on.
trouve
dy dx
YF — r° r
Dont l'intégrale est
IE A 4 x
log. (y3+ Vy = 5) + const. =:
Or, l'on doit avoir à la fois x —o et y —r; donc
con$t, — — log. x et par ee
VA TE
log. (LE 5 — ] À,
T
D'où l’on üre aisément
x x
Le ra os NE Et
RE ee LE LA
k T
(45)
Ajoutant ces équations pour faire disparaître le radi-
cal, l’on a celle-ci:
x x
stef 0 SLT.
= vel e € | A
Qui appartient, comme on l'a annoncé, à une chaï-
nette dont le rayon de courbure de l'élément le plus
Bas Eli.
On peut au surplus éviter le roulement de la pa-
rabole; il suffit pour cela de prendre, à partir du
Ste O. dés AJCS ON, 12, du Mao jee qurcis =
assez petits pour que l’on puisse les confondre avec
leurs cordes, et de les porter sur la tangente ox en
ET EME EE A .; puis, des poinis o,
1,2, 3, 4, see aVec des rayons. égaux /aux
distances fon frieton É34l ss sde on décrit autant
de petits ares de cercle qui toucheront tous la chat-
nette; l'enveloppe de tous ces petits arcs pourra donc,
sans erreur sensible, être prise pour cette coutbe.
SUR LE FER ARSÉNICAL
OU MISPICKEL,
DÉCOUVERT A ANGERS , PAR M. MILLET ; EN 1930,
ET
Sur celui de Saint-Pierre Montlimart;
Analyse de ces deux Mines , par P. LEBRETON, pharmacien.
LES travaux qui ont été exécutés tout récemment
pour donner au boulevard du Jardin des Plantes la
( 46 )
pente qu'il a maintemant, ont nécessité des fouilles
dans les terrains situés à la partie nord-est d'Angers,
nommée Place du Pélican; il est inutile de vous dé-
crire une localité que vous connaissez tous; il suffira
de vous dire que ce filon métallique est engagé dans
l'immense couche de phyllade qui sert de base à notre
cité. Le premier soin de M. Millet a été d’en étudier
les caractères physiques : ses recherches n’ont point
été infructueuses; car, même avant d’en connaître l’a-
nalyse , il est parvenu à lui faire occuper sa véritable
place dans la méthode d'Haüy, et à lui donner le nom
qui lui est propre, de Fer Arsenical où Mispickel,
compacte massif. Un seul des caractères minéralo-
giques restait à connaître : le caractère chimique ;
M. Millet a bien voulu me confier cette tâche.
Avant de rendre compte de mon travail, je crois
nécessaire d'exposer que le minerai auquel cette es-
pèce se rapporte a été analysé par des savans : MM.
Chevreul, Stromeyer et Lampadius.
Je dois dire , en outre , que quand on analyse un
corps et qu'il peut cristalliser, on emploie de pré-
férence ce corps sous cette dermière forme, comme
pouvant donner des résultats plus certains ; n’ayant
ici que la variété compacte la plus susceptible de mé-
langes , les nombres proportionnels de mon analyse
doivent nécessairement présenter des différences avec
ceux déjà connus.
Les substances auxquelles ce minerai se trouve or-
dinairement associé , sont le plomb sulfuré, le cuivre
pyriteux , la chaux carbonatée , l'étain oxidé ; l’anti-
moine sulfuré capillaire l'accompagne quelquefois ; il
( 47)
existe aussi une variété de mélange qui porte le nom
de fer arsenical argentifère (1); tous ces corps ont été
de ma part l’objet de recherches scrupuleuses.
Notre minerai présenté au feu du chalumeau, dé-
gage une fumée épaisse accompagnée d’une forte odeur
arsénicale ; puis, en continuant le feu , il se réduit
en un grain métallique cassant et attirable à Faimant.
Une portion, réduite en poudre impalpable, fut in-
troduite dans un creuset surmonté d’un tube propre
à recueillir les produits volatils qui pourraient se dé-
gager pendant la calcmation; on ajouta par degrés
des charbons sous le creuset. D’abord :ïl s’éleva des
vapeurs d’un blanc jaunâtre, qui vinrent se condenser
sur la paroi intérieure du tube; peu à peu on aug-
menta le feu; deux ponces environ au-dessus du
creuset , il se forma une tache annulaire d'un gris
d'acier , ayant l'éclat métallique. On donna ensuite
un coup de feu violent qui fut soutenu pendant une
heure; l'appareil étant refroidi, on examina le tube
dont l'intérieur était comme nous l'avons dit plus
haut, tapissé d’une poudre jaune cristalline ; cette
poudre fut détachée, ainsi que l’anneau métallique ,
pour l’examiner.
1.9 La poudre jaune fut mélangée avec du charbom
et de la potasse pure ; le tout fut introduit dans an
tube dont l'extrémité fut tirée à la lampe; on le placa
sur des charbons ardens. Retiré du feu et refroïdx,
ce tube présentait dans son intérieur deux couches
(x) J'ai recherché, mais vainement, dans ce sulfure, la présence
de l'or. 1 |
(48)
bien distinctes ; celle qui occupait la base était d’une
couleur noire ; cette substance mise en contact avec
deux gouttes d’eau acidulée , exhalait de l'hydrogène
dlfné:
2. La couche supérieure était composée de pail-
leties brillantes, ayant l’aspect et l’éclat métallique ;
elles furent dissoutes dans l'acide nitrique faible’;
cette dissolution précipitait en vert, par le sulfate de
cuivre, et en jaune, par l'hydrogène sulfuré.
3. L'anneau métallique , qui s'était formé dans le
tube où était la poudre jaune, fut pulvérisé et: dis-
sous dans l’acide nitrique étendu; ce liquide donnait ,
avec les réactifs, des précipités semblables à ceux
déjà obtenus; en ajoutant une plus grande quantité
d’acide nitrique pur , on obtint un précipité rouge
de brique avec le nttrat d'argent.
Les trois expériences précédentes ‘prouvent évi-
demment que la portion du minerai qui a été vola-
ülisée, se composait de soufre etd’arsenic.
Voyons maintenant ce que contenait le creuset. Ce
vase renfermait une poudre d’un rouge-brun , qui
fut divisée en deux portions.
La première fut traitée par l’acide nitrique con-
centré; exposée à l’action du calorique, elle fut ra-
prochée pour en chasser l'excès d’acide ; c’est après
l'avoir étendue d’eau et additionnée d’une solution de
sulfate de potasse ; sans qu'il y eût de précipité; c’est
après avoir essayé vainement à: la fare cristalliser ;
c’est après Y avoir ajouté successivement et sur
différentes porüons, de l’oxalate d’ammoniaque , .de
l'acide sulfurique et de l’acide hydrochlorique ;-enfin
( 49 )
c’est après y avoir plongé une lame de fer bien dé-
capée, que je me suis assuré que le plomb ;da chaux ,
l'argent et le cuivre ne faisaient point partie de cette
dissolution.
La seconde portion de poudre qui était restée dans
le creuset, fut soumise à l’action de l'acide sulfurique
étendu ; je désigne cette solution par À. Ce qui avait
résisté fut repris par l'acide hydrochlorique concentré
et bouillant : celle-ci je l'indique par B. Il resta un
résidu très-blanc, insoluble dans les acides puissans.
Ce résidu fut lavé et fondu avec le double de son
poids de potasse pure, dans un creuset d'argent ; il
donna naissance à un verre de liquescent, qui se prit
en gelée par la concentration , après avoir été dissous
et saturé d'acide hydrochlorique.
La liqueur À précipitait en noir par la teinture de
noix de gale, et en bleu par: l’hyÿdro-ferro-cyanate
de potasse.
Le liquide B ne précipitait pas l'hydrochlorate d'or;
et après lavoir concentré et y avoir ajouté de d’eau,
. al n’y eut aucun changement. :
Toutes ces expériences préliminaires ndiquent.assez
la présence du fer, de la silice ,: et l'absence de Pétain
et de l’antimoine.
Muni de ces renseignemens et. me; croyant pd
samment éclairé sur 5 composition | de ce minérai,
j'ai cherché à isoler chaque-substance et'à déterminer
leur poids respectif. ,
Parmuiles procédés qu’on donne et, dont j'ai fait
-usage ; J'ai remarqué. qu'il. était très-difficile de sé-
-parer-exactement le fer de l’arsenic,, lorsqu'ils étaient
À
( 50 )
dans une même dissolution : aussi ai-je pris une autre
marche, et au lieu de me servir d’équivalens , suis-je
presque M5 revenu à agir directement sur le
minerai même.
Je séparai d’abord le mineraï de sa gangue, le plus
qu'il me fut possible ; ; je le réduisis en poudre impal-
pable et j'en pesai 100 parties qui furent calcmées
fortement , pendant deux heures, pour en chasser le
soufre et l’arsenic. Ce qui restait dans le creuset pe-
sait 53,45; je le fis dissoudre dans l'acide hydro-
chlorique ; et il resta un résidu insoluble, du poids
de 3,43, ayant les caractères de la silice.
La liqueur contenant le fer fut concentrée, puis
précipitée par l'ammoniaque en léger excès. L'oxide de
fer, lavé et calciné , pesait 50; or, d’après les pro-
portions données par M. Berzélius, 100 de per-
oxide de fer représentent 60,19; donc 5o équivalent
à 34,60.
Une nouvelle quantité du mmeraiï, également de
100 parties , fut attaquée par l’acide hydrochloro-
nitrique très-étendu; on enleva de la liqueur une
substance floconneuse d’un jaune verdâtre ; lavée,
desséchée, elle pesait. 11,20; ce dernier corps était
du soufre.
Des essais’ préliminaires m’avaient appris que le
véhicule au milieu duquel nageait le soufre , devait
aussi contenir de l’acide sulfurique et même de l’acide
arsenique provenant de l’action de l’acide nitrique
sur ce dernier et sur l’arsenic. Pour isoler le premier,
je sâturai le liquide hydrochloro-nitrique par l’am-
moniaque caustique ; je filtrai, et ajoutant de l’hy-
(51)
drochlorate de barite, j’eus un précipité de sulfate de
la même base, qui fut mis en digestion dans l’acide
nirique, pour dissoudre l’arséniate de barite qui l’ac-
compagnait ; il pesait 97,60, qui représentent 13,47
de soufre , lorsque d’une part, d’après les pro-
portionnels de M. Berzélius , r00 d'acide neutralisent
191,39 de barite, et que d’un autre 40,14 de soufre
exigent 59,60 d’oxigène, pour se constituer acide
sulfurique. De la réunion de 11,20 et de 13,47,
résulte 24,67 de soufre.
Connaissant les proportions du fer, du soufre et
de la silice , il était facile d'indiquer le poids de l'ar-
senic par une simple soustraction; mais alors mon
travail n’aurait eu de rigoureux que l'apparence,
parce que la perte que je devais avoir aurait fait partie
du poids de l’arsenic ; il était donc indispensa bled’en
déterminer la quantité.
Je passe au mode que j'ai employé, pour avoir les
proportions de ce dernier.
Dix parties de minerai furent mélangées, au 10.°
de leur poids, de charbon pulvérisé, et au 20.° d’hy-
drate de potassium. On introduisit cette poudre dans
un tube fermé à l’une de ses extrémités : l’autre fut
tirée à la lampe. Ce tube avaït été enduit préalablement
d’un lut conseillé par Bostock ; on exposa le tube sur
les charbons ardens , on chauffa convenablement ;
l'appareil refroidi et rompu, on enleva l’arsenic qui
occupait la partie supérieure ; on prit note du poids.
Cette opération fut réitérée trois fois; on eut pour
terme fe 3,54 ou 35,40 pour 100.
* Pour s'assurer de l'exactitude de ce procédé, :
( 52 )
interrogea le résidu resté dans le tube; une fois seule
ment l'hydrogène sulfuré rendit sensibles des atômes
d’arsenic, équivalens à des millièmes.
On voit donc que 100 parties du minerai décou-
vert par M. Millet, se composent de
der 2 VA. 34,60
arsenic.s. :45-.35,40
soufre . . . . . 24,67
SICe- 2 PEUR D. AD
Ce minerai qui vient enrichir la collection mné-
ralogique de noire département , n’est pas le seul de
cette espèce que nous possédions ; il existe à Saint-
Pierre-Montlimart , arrondissement de Beaupreau ,
des mines de mispickel connues depuis bien des an-
nées ; mon intention est de vous en parler dans cette
note.
Pour ne point fixer ici plus long-temps l'attention
sur un sujet aussi sérieux qu’une analyse, je dirai
que la méthode analytique que j'ai exposée ci-dessus,
a été appliquée au mispickel de Monilimart , et que
j'ai eu les résultats suivans ;
ICRA. us OR
ATSERIE:) .. pe 41,77
08 , 10
En comparant ces deux mines, quant aux pro-
portions des composans, on voit que le mispickel
d'Angers contient 5,12 de soufre, 2,17 de silice
interposée en plus, et 1,24 de fer en moins que
celui de Montilimart ; c’est peut-être à cette différence
qu’on doit rapporter l'aspect plus blanc qu’on re-
( 53 )
marque généralement dans le mispickel d'Angers; du
reste, ces deux mines se rapprochent beaucoup de
celles de Freiberg, analysées par MM. Chevreul et
Stromeyier ; elles n’en diffèrent que de quelques par-
ties; aussi je les regarde, d’après ces savans, comme
composées d’un atôme de quadri-sulfure de fer, et
d’un atôme de bi-arsenicure de fer.
Les mines de Montlimart jouissent d’une certaine
célébrité, elles passent pour contenir de l'argent ;
plusieurs fois j'ai eu occasion d'examiner le minerat
qui en provient , .et toujours l’idée dominante des per-
sonnes qui me le présentaient était qu’elles soupçon-
naient l’existence de ce métal.
Ayant parcouru mes notes pendant le cours de
cette analyse, voici ce que j'ai trouvé à cet égard.
En 1818, un orfèvre de cette ville me remit un
minerai qu'il tenait d’un propriétaire des environs ;
on l'avait assuré que c'était une mine d'argent, très-
riche : il ne s'agissait rien moins que de 40 à 5o pour
cent d'argent ; c'était un trésor. Déjà ce bijoutier ,
qui d’ailleurs avait des connaissances en docimasie,
avait fait plusieurs essais et n'avait rien découvert.
Doutant de ses moyens , il me pria de rechercher le
plomb et l'argent ; j'examinai et ne fus pas plus heu-
reux que lui; je trouvai seulement du fer, parce que
mes recherches s'étaient bornées aux deux métaux in-
diqués ci-dessus ; mais depuis, j'ai rencontré de l’ar-
senic et du soufre dans un échantillon qui me restait.
* Les personnes qui s'occupent de toute autre chose
que d'Histoire naturelle, ne sont pas les seules de
ceite opinion. Parmi celles qui réunissent les miné-
(54)
raux de notre département, il en est: quelques-unes
qui d’après d’anciennes traditions, d’autres par ana-
logie et avec assez de raison , pensent que le minerai
de Montiimart est argenüfère. Je suis loin de trouver
à redire sur la manière de voir des premiers, au con-
traire, cela peut avoir un but d'utilité; c’est avec des
idées analogues, c’est en voyant de l'or dans les mi-
néraux de couleurs jaunes, et de l'argent dans ceux qui
sont blancs, que les sectaires de la philosophie her-
métique soumirent les métaux à des épreuves multi-
phées, pour leur faire restituer ce qu'ils ne contenaient
pas; en effet, ils ne trouvèrent le plus souvent, n1or,
ni argent, mais ils firent des découvertes précieuses
dont nous recueillons aujourd’hui les fruits.
Il n’entre point dans mon sujet de chercher à con-
naître ou à interpréter quels ont été les motifs qui,
à des époques très-éloignées de nous, ont pu déter-
miner les fouilles ou excurations faites à S.t-Pierre
Montlimart : cela peut faire le sujet d’un article de
Statistique; mais j’observerai à ceux qui cultivent les
sciences naturelles , que souvent les anciennes tradi-
tions n’ont de mérite que leur antiquité; qu'il est plus
convenable de s’en rapporter aux faits de l'analyse;
que nous devons considérer le mispickel d'Angers et
de Montlimart comme du fer arsenical , ne conte-
nant pas un atôme d’argent, jusqu’à ce que l'examen
de nouveaux échantillons vienne déposer du contraire.
J'ai pensé, et c’est le but de ce travail, qu'il n’é-
tait pas inutile de faire cesser l'incertitude qui existe
même encore aujourd'hui sur le mispickel , afin de
le mettre à la place qui lui convient.
(55)
DESCRIPTION
D'UNE NOUVELLE ESPÈCE DE CRUSTACÉ,
L'Sippolute de Desmarets ;
rar M. MILLET, secRÉTAIRE - GÉNÉRAL DE LA SOCIÉTÉ
: D'AGRICULTURE ; SCIENCES ET ARTS DANGERS, ET MEMBRE
DE PLUSIEURS AUTRES SOCLÉTÉS SAVANTES,
LE genre Hippolyte de Leach, adopté par M. Des-
marets, dans ses Considérations générales sur la classe
des Crustacés, et compris dans la famille des ma-
croures, division dés salicoques, ne renfermait, avant
la découverte du, crustacé que nous allons décrire,
que des espèces marines: Nous pourrions même
étendre cette observation à la section entière à laquelle
il appartient; car le Symethus fluviatihs de Rañ-
nesque , signalé dans son Précis de découvertes et
de travaux somiologiques (publié en 1814), avait
fait naître dans l'esprit de quelques naturalistes plus
que_des doutes à ce sujet : si l’on fait attention sur-
tout à cette note de. .M.. Desmarets ,, consignée
dans l’ouvrage précité, qui est ainsi conçue ::« On
ne connaît aucun crustacé macroure de ‘li’ division
des salicoques, vivant dans les éaux douces’; ét au:
cun: qui présente les caractères que nous: venons de
rapporter.» (Desm. pag. 216.) Cependant l'espèce
parfaitement caractérisée dont noris nous occupons;
(56 )
et que nous dédions à M. Desmareis, auquel nous
l'avons déja communiquée , ne doit plus laisser de
doute à cet égard, Fayant observée nous-mêmes dans
les différentes rivières du département de Maine et
Loire, où elle vit, réunie ordinairement en société
au milieu des herbes aquatiques.
C’est donc un fait intéressant, nous dirions presque
nouveau, d’avoir rencontré dans l’eau douce un crus-
tacé de la section des salicoques, auquel nous pour-
rons par la suite joindre deux autres espèces de la
même section , peut-être de genre différens , que nous
avons prises dans la rivière d'Erdre, mais dont quel-
ques parties absentes nous ont été les moyens d’en
faire, quant à présent; la description ; cependant le
rostre ‘de ‘chacune d’elles étant bien conservé, fait
assez voir que ces deux crustacés doivent former, l’un
el l'autre ,-une espèce distmcte de celle que nous al-
lons faire connaître et dont voici la description :
Hrppozvre ne Deswarers, Hyppotyte Desmarestu, Nob.
(PL, fig. A4, a,b.)
Rosrre droit, comprimé, comme lancéolé , serrulé en-
dessus et en-dessous (25 à 30 dents fines en-dessus, 7
à 8 en-dessous ) , dépassant les écailles des antennes ex-
térieures ; qui sont plus longues que le: corps ; filets ‘des
antennes intermédiaires moiïtié moins Jongs que les an-
tennes extérieures ; corps transparent hyalin , long de 12
à. 45 lignes,.0,027 à 0,037. tres: MR
Corps transparent hyalin, couvert ; ainsi que les
écailles oulames natatoires.de la queue } de très:petits
. points verts, quelquefois rougeâtres ; qu’on ne dis-
(57)
tingue bien qu’à la loupe ; abdomen composé de six
anneaux inégaux, arqué vers le troisième article et
terminé par cmgq écailles natatoires, dont les quatre
extérieures sont courbées, frangées à leur extrémité
et plus larges que l'intermédiaire qui est droite, plus
courte que les autres et terminée par plusieurs petites
épines , comme réunies; quatre petites epénes sur la
partie antérieure du test, une à droite et l’autre à
gauche de chaque œil; yeux noirâtres, mais leur pé-
dicule de la couleur du corps ; antennes blanchâtres,
ainsi que les pieds ; les pinces des pieds antérieurs
petits, et le dernier article des pieds-mâchoires exté-
rieurs terminé par un faisceau de poils.
Les œufs qu’on observe en automne, sont ellip-
tiques , d’un sixième de ligne de diamètre; une femelle
que nous examinâmes était garnie de deux cents œufs
ou plus.
Cette espèce, dont on se procure facilement des
individus , en visitant les Aerbrers amenés par le filet
du pêcheur, habite les eaux de la Mayenne, de la
Sarthe, du Loir, du Thouet et du Layon.
| DESCRIPTION
DELA CHENILLE DU BOMBIX HERMINE»,
Par M. COURTILLER, de Saumrr,
Membre titulaire, non résident.
LE Bombix hermine que Fabricus réunit au inula
ou queue fourchue; a été, néanmoins , regardé assez
(58 )
généralement comme devant former une espèce dis:
tincte de ce dernier, malgré les caractères peu tran-
chés qui séparent ces deux espèces dans l’état parfait.
Tout en adoptant cette distinction , que nous
croyons fondée, nous pensons devoir la motiver plu-
tôt par des caractères fournis de leurs larves que par
ceux que peut donner le dernier état de ces bombix :
les caracières qui doivent servir à séparer ces deux
espèces étant peu prononcés dans ces lépidoptères
transformés en papillons, tandis qu'ils sont tout-à fait
remarquables et distincts dans leurs larves. Ainsi, en
décrivant la chenille du bombix hermine , celle du
vinula étant déja connue ( Voy. Godart, noct.tom.7r,
pag. 160.), et en produisant ici la figure de Fune et
de l’autre de ces chenilles, nous pensons lever ainsi
toute incertitude à l'égard de ces deux espèces d’in-
sectes.
CHENILLE DU BOMBIX HERMINE, Bombix erminea ,
Godart.
(PI. 1, fig. 2.)
. Tête d’un brun-noir, rétractile sous le premier
anneau, qui n’est pas de couleur cramoisie à son bord.
antérieur. Corps d’un vert tendre ; une large bande
de couleur lilas qui part de la tête et couvre tout le
dessus du corps, se rétrécit sur le troisième anneau,
qui est relevé en bosse, se dilate ensuite en losange,
dont le plus grand diamètre se trouve placé sur le
seplième anneau : cette bande de couleur lilas se ré-—
trécit encore entre les 10.e et r1.e anneaux, et forme
un second losange, mais plus petit, qui se termine
=
(59)
à l'extrémité du corps. Du milieu du premier losange
part un petit trait lilas qui descend jusque sur les
pattes membraneuses , derrière lequel on voit une
large bande blanche qui occupe, sur le côté du
corps, le reste du: septième anneau. Les stigmates
sont noirs; les pattes membraneuses, vertes; les pattes
écailleuses , jaunâtres; et la queue, qui est double
comme celle du vinula, est couverte de points sail-
lans noirs, qui rendent cette partie aspérulée.
On rencontre au mois de juin cette chenille sur
le peuplier dont elle mange les feuilles.
CHENILLE DU BOMBIX QUEUE FOURCHUE ow VINUIA ,
Bombix vinula, Godart.
(PL 4, fig. 3.)
EE —————… — — —…—…—… … …—…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"….…"…—"…"_"."—"_"—".—"———"——"—…""— —…———"———"——
SUR LE MELON DÉLICIEUX
(Cucumis deliciosus ). Planche 1I.
Par A. Desvaur.
L'ESPÈCE de Melon que nous voulons faire con-
naître , est pour ainsi dire perdue dans la science,
puisque les botanistes , tels que Roëmer , Sprengel,
De Candolle ,qui viennent de faire des recensemens
généraux des plantes, ou ne l’ont pas connue, ou
l'ont si légèrement indiquée, qu’on la voit trois fois
signalée dans le même ouvrage, et sous des noms
( 60 )
différens (1). Ayant cultivé celte espèce à diverses
époques dans le Jardin botanique d'Angers, nous
avons pu suivre ses modifications et la reconnaître
dans les notes vagues ou irès-courtes données par
les auteurs. Willdenow, en 1805, dans son Species
(vol. 4, p.614), avait publié sous les noms de Cu-
cumis pubescens et Cucurnis maculatus les deux
variétés de cette espèce, sans mdication du lieu où
existaient ces plantes, cultivées alors au Jardin de
Berlin. En r806, Roth, dans le 3.° volume de ses
Catalecta (p. 327), a publié une courte descrip-
tion d’un Cucumis deliciosus, comme cultivé en
Espagne, et sans autre indication d’origme; enfm,
sous le nom inédit de Cucumis osmocarpon , nous
avons reçu cette même espèce de notre estimable
ami le docteur Williams Hamilton, qui lui-même la
tenait de la province de Carthagène, en Amérique,
où elle est cultivée et irès-estimée sous le nom de
Meloncito del olor.
Cette espèce a les fruits rarement du volume d’un
œuf d’oie et plus habituellement d’un œuf de dinde,
avec une forme -elliptique plutôt qu’ovoide. Son
odeur est des plus suaves, et cependant sa saveur
ne nous à pas paru répondre au parfum qu'elle ré-
pand : ce qu’on peut seulement attribuer à la dif-
férence du climat. Chaque pied donne un assez grand
nombre de fruits, puisque nous en avons eu jus-
qu'à vingt sur la variété la plus tachée.
(1) Prodromus vegetabiliunm. De Candolle, vol. 3, p. 300, 301;
302.
( 61 )
Si, dans notre opinion particulière sur l'espèce en
botanique, on nous demandait ce que nous pen-
sons de ce melon, peut-être, malgré ses caractères
bien prononcés, en aurions-nous une toute auire
que celle que nous allons adopter; mais si nous vou-
lons marcher avec la science, dans son état actuel,
nous reconnaîtrons le Cucumis deliciosus, comme une
espèce toute aussi distincte que les Cucumis Melo,
C. Dudaim , C. Chate ou toute autre, adoptée par
les botanistes.
En comparant les proportions générales des par-
ües , soit fleurs, soit feuilles , de l'espèce qui nous oc-
cupe, avec celles des parties du melon ordinaire, nous
ne voyons véritablement que des dimensions moin-
dres, mais bien plus disproportionnées surtout par
rapport aux fruits. Les feuilles sont seulement plus
arrondies et à lobes comme effacés. C’est dans le
fruit que se trouve surtout le caractère distinctif de
l'espèce. L’écorce est très-mince, unie, sans sillon,
et couverte de poils très-courts et nombreux, presque
comme dans les pêches.
CUCUMIS deliciosus , caule hirto decumbente: .
foliis scabris basi cordatis , rotundato-obtusis, ob-
tusè 5-7-lobatis, erectè dentatis ; fruclibus sub-
ellipticis , tenuiter pubescentibus, cortice lœvi.
C. deliciosus A. pubescens (Cucumis pubescens
W. C. deliciosus Roth, Dec., W., C. osmocarpon
Ham. ined. Meloncito del olor hispan.), fructibus
pubescentibus, maturatione immaculatis, flavescen-
tbus (Voyez PI. IL. ).
C. deliciosus B. puberulus ( Cucumis maculatus
(62)
W. De C.), fructibus pubescentibus maturatione
subalbescentibus , cortice pallidè viridimaculato.
Crescit n Americä æquinoxiali in provinciä
Carthagenæ. Annua.
MONOIQUE, ANNUEL. |
TIGES tombantes, hérissées,
à poils recourbés; obscurément
à cinq'angles obtus et vrillés à
côté de la base du pétiole.
FEUILLES commearrondies,
cordiformes à la base, dentées :
à dents courtes, dressées , éloi-
gnées. .
FLEURS groupées à l’aisselle
desfeuilles à pédoncules courts;
calice campanulé , adhérent à 5
dents subulées; corolle campa-
nulée à 5 lobes arrondis avec une
pointe courte au sommet; fleurs
pistilifères à étamines avortées ,
courtes, libres, placées au mi-
lieu de troïs à quatre fleurs sté-
riles: séyle court à troïs stigma-
tes; fleurs staminiféres à trois
étamines distinctes, à anthères
conniventes sinueuses, et oyaire
ayorté.
FRUIT globuloïde ou ellip-
tique (2-3 pouces de long),
poilu; à poils courts, écorce
lisse,très-mince, à dix ligneslon-
gitudinales formées de taches
successives : disparaïissant à la
maturité ; de la variété A passant
MONOICA, ANNU 24.
CAULES decumbentes, ob-
soletè 5-goni, hirii cirrhosi; pi-
lis adsperis, pellucidis , subre-
Érorsis.
FOLTIA. subrotundata, bast
cordata , dentata.
FLORES fasciculati atilla-
res ; calix adhœærens campañula -
tus 5-dentatus : dentibus subu=
latis; flore fertili unico, cum
sierilibus mixto; stylus brevis;
Stigmata 3. Corolla campanu-
lata, lobata : lobis obtusis'mu-
cronulatis ; flores steriles #rian-
theris, staminibus corollæ inser-
äs ; antheræ s14atæ conniven-
tes.
FRUCTUS. odoratus:; "glo-
bosus aut ellipticus , pube: tenu
obductus.: junior wviridis , macu-
| lis wiridioribus, decem seriaibus,
longitudinaliter pictus ; adultus
lutescens ‘absque ullis’ maculis
(in yarietate A}, aut sibalbes-
œens, maculis viridibus varie- | au jaune; ou taches très-multi-
gatus, in varietate B. pliées et comme confuses, res-
tent visibles à la maturité sur
un fond pâle, comme dans la
variété B.
Les observations présentées dans cette note feront
connaitre avec cerlüitude, une plante placée sous trois
noms différens et comme formant trois espèces de
plantes distinctes dans le Synopsis Plantarum de
M. De Candolle (en 1829), et dont on ne connaissait
pas la patrie. Indiquée jusqu’à présent, d’une manière
vague, celte espèce doit maintenant prendre rang
sans difficulté dans l’énumération des espèces bota-
niques. Nous avons fait figurer la variété A : la
variété B ayant la même forme et le même volume.
NOTICE
Sur une nouvelle espèce du genre Taymera. Planche vr.
Par M. DESVAUX.
IL paraîtrait que le Thymus cephalotus, publié
sous ce nom par Linné, n’a été connu par ce célèbre
botaniste, que sur les figures données par Barrelier,
et dont Boccone a fait une copie pour son Museo di
piante rare della Sicilia. Depuis ce temps , les au-
teurs, qui sur la foi de ces premiers écrivains ont
parlé de cette plante, n’ont fait que copier les in-
dications données avant eux et laissé subsister l'erreur
(64)
introduite par Linné, qui rapporte au genre 7hyrmus
une plante qui lui est complètement étrangère.
Ayant obtenu d’Espagne un végétal qui se rap-
porte entièrement aux planches , à la vérité un peu
grossières , citées pour le Thymus cephalotus, par
tous les auteurs, nous avons reconnu qu’au lieu d'être
un Thym, c’est une quatrième espèce du genre Zhym-
bra, et d'autant plus facile à signaler pour nous,
que nous avons les autres espèces sous les yeux.
Poiret paraît être le premier botaniste qui ait décrit
méthodiquement cette plante ( Enc. 7, p.650), mais
sans en avoir vérifié les caractères génériques ;'et hors
cela, toute la description qu'il donne convient par-
faitement à notre espèce.
On sait que dans le genre Thymbra, le caractère
est d’avoir les Peurs placées dans laisselle de vastes
. bractées, plus ou moins colorées, et un calice à deux
divisions, dont une très-large, à trois pointes irès-
courtes et conniventes, et l’autre à ‘deux longues:
dents subulées.
THvMBRA cephalota. (Thymus lusitanicus cephalo-
dos squamis capitulorum amplioribus , Tourn. Inst.
196. Tragoriganum dictamni capite hispanicum ,
Barr. [con. 788. Bocc. Mus, t. 43. Thymus cepha-
lotus, 1. Sp. plant. p. 826); ‘caulis Zgnosus, bast
ramosus ;.xann elongati adcendentes ; purpuruscen-
tes, pruinoso-albescentes ; ramuli avllares densè
Jfoliati, numerost, breves ; folia petiolata integer-
rima, oblonga, sub-elliptica, subquadrilinearia
supra viridi-lutescentibus subtüs pallidis obscurè
pruinosis marginibus involutis ; flores terminales,
LA
( 65 )
éapitato-spicatæ , bracteatæ , axillares, conspicuæ
pedicellatæ ; corolla elongato-tubulosa , calice duplo
longiora , pubescente-glandulosa ; stamina subin-
clusa; calyx striatus , tubulosus , margine ciliatus,
basi subpilosus ; labiæ subæquales , superior lata
apice obscurè tridentata : dentibus conniventibus ,
inferior bifida : lacinici subulatis margine ciliatis:
bracteæ enferiores, foliiformes, latæ, subviridæ,
aliæ lato-ovatæ , membranaceæ, nervosæ , acumi-
natæ , subadpressè imbricatæ.
Nous terminerons en rappelant que Tournefont,
qui avait beaucoup exploré l'Espagne, sous le rap-
port botanique , a cité trois variétés dans son Thy-
mus lusilanicus cephalotos (1), et que dès-lors il reste
quelque observation à faire sur l’une ou l’autre de
ces variétés. Peut-être même deux seraient-elles du
genre 7hymus ei l’autre notre Zhymbra. Dans ce cas
il y aurait aussi un 7hymus cephalotus ; et alors
Vahl , quiordimairement est exact, citerait avec raison,
(Symbolæ botanicæ, 3. p. 77.) une plante de ce nom.
Quant à notre plante, c’est celle que Tournefort a qua-
lifiée par : Squamis capitulorum amplioribus.
Nous pensons que le Thymus capitatus du profes-
seur Lagasca peut être une des plantes de Tournefort,
mais il est très-différent de notre 7hymbra cephalota.
C’est aux botanistes espagnols qu'il appartient de lever
nos doutes à cet égard, s'ils veulent étudier plus ra-
üonnellement qu'ils ne l’ont fait jusqu’à ce jour, la riche
et curieuse série de végétaux dont ils sont environnés.
(1) 120 Squamis capitulorum amphariais ; 2.% capitulo majori :
3:° capitulo minor.
e
),
( 66 )
RAPPORT
Sur des observations présentées par M. HOSSARD,
à la Société d'Agriculture, Sciences et Arts d’An-
gers, sur quelques cas de difformites ;
Par M. BILLARD, D. M,
Membre de la Société d'Agriculture, Sciences et Arts: d'Angers,
et de plusieurs autres Sociétés savantes (1).
+ L'ORTHOPÉDIE ou l’art de corriger les difformités du
corps, chez les enfans, est une des plus heureuses
découvertes de la mécanique chirurgicale ; cet art fut
long-temps oublié dans une petite ville de Suisse
où son inventeur le cultivait modestement. Mais la
France, l'Angleterre et l'Allemagne ont enfin mis
ses bienfaits à contribution, et nous devons nous fé-
lciter de voir dans notre ville se maintenir avec succès
un établissement de cette nature.
Toutefois, les moyens que l’on emploie pour cor-
riger les déviations des formes naturelles du corps,
se sentent encore de l'enfance de ces méthodes, et
(1) Nota. L'ouvrage de M. Hossard, par l'importance des choses
qu’il renferme, méritait sans doute de trouver une place dans les
Mémoires de la Société; mais les développemens nombreux aux-
quels l’auteur à ététobligé de se divrer pour l’intelligence:de) son
sujet-rendant-ce-travail- trop volumineux pour pouvoir y être in-
sété dans’ son entier ,. la Société a-décidé que le rapportplussuc-
cinct qui en a été fait par M. Billard, serait admis à le-remplacer:
(67 )
c’ést probablement au défaut de perfectionnement des
machines et de leur application, qu'il faut attribuer
leur insuffisance ou leurs dangers dans quelques
cas.
Mais comme la main des hommes perfectionne avec
le temps tout ce qu’elle touche, loin de rejeter des
moyens en faveur desquels plaidént déjà de brillans
succès, nous devons accueillir toutes les communi-
cations qui nous sont faites au sujet dé l’orthopédie,
afin de concourir, par nos encoüragemens et le reflet
des lumières de la médecine et de la physiologie, au
perfectionnement d'un art encore naissant, et dont
lhamanité peut attendre les plus grands services.
C’est donc avec un véritable intérêt que nous avons
analysé le travail de M. Hossard, dont nous allons
essayer de faire ressortir les points esséntiels.
Cé travail renferme deux obsérvations principales.
La première à pour sujet un redressement de péeds-
bots. Ces pieds offraient une luxation complète des
os du tarse. Le pied se trouvait contourné de ma-
nière à ce que sa pointe füt dirigée vers la partie
imterne de la jambe. Deux mois ont suffi pour ra-
mener les os à leur place respective. On à eu recours
à des manipulations répétées deux fois le jour , puis
à l'application d’un appareil modifié de celui de Venel
et de Jacquard , et qui, à l’aide dés seules courbures
données à une tige en fer adaptée à une semelle de
bois , ramène le pied en-déhors en même temps qu'il
en relève la pointe. C'est par ce moyen que M: Hos-
sard a guéri plus de trente individus affectés dé la’ -
même difformité.
( 68)
La seconde observation a pour objet une jeune
personne de 16 ans, d’un tempérament sanguin.
La colonne vertébrale offrait deux, courbures bilaté-
rales; la première cervico-dorsale , et la seconde lom-
baire, formaient des arcs de cercle mesurés par une
flèche de ,7 à 9 lignes. Cette malade a subi six mois
* et demi de traitement, pendant lesquels elle a grandi
de plus d’un pouce. Elle est sortie très-bien guérie.
Quant à l'appareil auquel M. Hossard a eu. re-
cours, il en fait un mystère, parce qu’il en est l’in-
venteur, et que c’est à son perfectionnement qu’il
doit les résultats heureux qu'il obtient ; 1l s’est borné
à dire qu'il n’emploie d'extension que ce qu'il en faut
pour faciliter la souplesse de la colonne vertébrale,
par un léger allongement des cartilages et des liga-
mens intervertébraux. Ni lits ni béquilles ne sont
employés pendant le jour : les malades continuent
de se livrer à leurs exercices accoutumés. Une cour-
roie attachée à un busque suffit pour pencher la ma-
lade dans un sens opposé à la courbure inférieure.
Telles sont les seules révélations de M. Hossard sur
sa méthode. |
Lorsque nous songeons que les contestations qui
s'élèvent aujourd’hui au sujet de l’orthopédie ne roulent
que sur l’insuffisance , l'imperfection ou la forme
nuisible des appareils, on doit regretter que M: Hos-
sard ne puisse divulguer le sien qu’au préjudice de
ses intérêts;.car ici nous né pouvons entrer dans au-
cune discussion sur ses moyens, ni les juger par
comparaison avec ceux que les orthopédistes ont déjà
livrés au domaine public. Toutefois il est de notre
(69 )
devoir de proclamer ici le résultat heureux de cette
méthode; c’est du moins ce que nous pouvons avan-
cer d’après les faits allégués par l’auteur des obser--
vations, puisqu'il ne compte qu’une rechute sur 40
guérisons.
Aïnsi des faits nombreux viennent à l'appui de la
méthode que M. Hossard aime à suivre de préférence
à l'extension continue, contre laquelle il s'élève avec
d'autant {plus de raison, qu'il est souvent consulté
pour dés jeunes personnes qui, après avoir élé sou-
mises à cétte méthode, viennent trop tard réclamer
ses soins.
Telle’ est l'analyse da travail de M. Hossard. Ses
efforts sont dignes d'éloges, puisqu'ils tendent au
bonheur’ des hommes.
De V'Idéal
DANS LES SCIENCES , LES LETTRES ET LES ARTS 5
DISCOURS
Prononcé dans la séance du 14 juillet 1831,
Par M. BLORDIER-LANGLOIS.
+ IL est un Idéal attaché à tout ,_et qui en est comme
Pauréole ;: un Idéal où l’âme humaine ‘aime à se ré-
pandre , où elle trouve une source de méditations et
de délices. C’est cetté poésie que Mme de Staël voit
partout, qu’elle essaie # chaque page de peindre
cômime elle la’ sent etiqui marque ses ouvrages au
(70 )
coin d’une originalité, d’une profondeur, d’une,sen-
sibilité qui font d’elle une des illustrations de notre
siècle.
Si, dans une statue, le vulgaire ne voit que l’imi-
tation d’un être qui vécut; si, dans un tableau bien
fait, 1l est assez heureux pour ne pas prendre le.
change sur les objets les plus reconnaissables; si les
sons de la plus donce mélodie ne sont pour lui qu’un
bruit un peu plus flatteur que ceux qui frappent.or-
dinaïrement ses oreilles ; combien l’homme que la
nature a plus favorisé, celui à qui l'éducation a donné
de nouveaux sens, ne voit-il pas de propriétés mys-
térieuses et cependant d’un effet irrésistible à cette
statue, à ce tableau, à cette mélodie? Avec quelle
indifférence des hommes qui n’ont .que des yeux pas-
saient devant le groupe de Laocoon, tandis que d’au-
tres, entièrement sous le charme de l’Idéal, restaient ,
en présence de ce groupe, absorbés dans une ad-
miration mélancolique et délicieuse !
C'est à l’Idéal que l’on doit assigner ces systèmes
rique qui n’offrent , pour la plupart , que la
d'ingénieuses personnifications, ét vénérables. par un
pr à religieux. Un voile trop épais, dira-t-on, est
étendu sur ces fables ; et les ténèbres de leur origme
ouvrent un champ irop vaste aux conjectures.:. ; mais
ces fables existent, elles ne peuvent. être, prises à la
lettre, et leur antiquité dépose, de ce que peut l'Idéal
sur les imaginations, plus elles sont. jeunes, et} par
conséquent vraies. ÀÂu reste, 1l semble démontré que
les fables antiques ne.sont ; comme je viens de l’avan-
(71)
cer, que l’Idéal de la nature. C'était le sentiment de
Boileau qui dit à leur sujet :
Tout prend un corps, une âme, un esprit, un visage.
C'était encore celui de Delille, comme on le voit
dans des vers charmans de son poëme de l'Imagi-
nation, dont voici quelques-uns :
C'étaient des fictions, mais non) pas des chimères,
Chaque, être, en dépouillant ses :traits imaginaires,
Reste dans la nature et dans.la yérité.
Cette considération de l’Idéal nous semble si res-
pectable , que nous pardonnerions presque à Marcel
ce mot que l’on a si souvent tourné en raillerie : « Que
de choses dans un menuet! » Tant de gens ne voient
rien dans les plus grandes choses ! Heureux Marcel,
pour qui un menuet était ua si riche spectacle ! Qui
sait si rien existe en effet, que ce qui existe dans notre
âme ?
Ce n'est point ici seulement un thême académique,
un paradoxe que je m’avise de traiter, Messieurs, en
débutant avec vous. Il eût été vraiment malheureux
d'occuper d'un vain fantôme, d’une chimère, des es-
prits aussi solides , aussi justes que les vôtres. Je
savais que je trouverais en vons-mêmes de quoi me
confirmer dans ma pensée ; ce n’était point une pure
abstraction. C’est par cette sensibilité pour ce que
j'appelle l’Idéal, que nous voyons plusieurs d’entre
vous briller d’un vif éclat. L'art de guérir comporte-
t-il essentiellement cette méditation profonde, cette
étude de l’état moral de l’homme, cette élévation de
pensée qui font du médecin une. sorle de divinité pro-
(72)
tectrice ? Non, Messieurs: et les disciples d'Hippocrate
qui font partie de cette association ont su franchir
les bornes positives de la science , pour s'élever, avec
la liberté du génie, à ces hautes considérations, qui,
dans l'antiquité , rendirent Hippocrate si célèbre et si
révéré, et ce nom n’est point venu sous ma plume
uniquement pour former une vaine périphrase. La
science des lois ; l’art de la parole ont leur routécom-
mune ; mais ce n’est point en s’y tenant, que des
magistrats, que des légistes qui siègent parmi vous,
ont atteint la hauteur où on les admire. Les sciences
naturelles s’honoreraïent-elles, comme elles ont droit
de le faire, de leurs adeptes ici présens , si ces adeptes
avaient toujours résisté au génie de l'innovation, qui
souvent est celui des découvertes ? Les antiquaires dont
s’honore celte société pénétreraient -ils avec succes
dans l’obscurité des âges, sans ces clartés qu’eux seuls
y aperçoivent briller ? clartés qui firent retrouver
au voyageur Lechevalier la topographie de l'antique
Troade , à Châteaubriand la place où fut Lacédémone,
a Montesquieu les titres qu'avait perdus le genre hu-
main ,-et qu'il lui rendit dans son Esprit des Lois ;
clartés à la lueur desquelles Marchangy peignit sa
Gaule poétique, et Victor Hugo son étonnant ou-
vrage de Notre-Dame de Paris (1).
Je vous laisse, Messieurs, considérer vous-mêmes
ce que Sont amitié, l'amour, le patriotisme, quand
(1) Nous ne mettons point ces auteurs sur la même ligne,
nou ne voulons parler que de ce que nous ayons vu dans leurs
#rages qui se rapporte à notre sujet.
(75)
ces passions ont atteint l'Idéal ; de quel’ éclat ‘elles
brillent alors , et combien, dans leaf état positif, elles
s'offrent froides et décolorées.
Ta section d’agriculture, dans cette société, pour-
rait sembler un double emploi, par rapport à la
section de même nature; dans la Société Indastrielle
de cette ville, si vous n’aviez l'intention, Messieurs ,
d'élever vos spéculations au-dessus des besoins ordi-
maires’, et'si vous n’ajoutiez à vos travaux dans cette
parie l’Idéal qui doit leur donner un autre caractère.
C'est dans ce sens'que l’on entendra vos encourage-
mens à l’horticulture. Quoi de plus charmant que cette
sollicitude pour l'empire de Flore; et quel champ vous
ouvrez aux formes les plus gracieuses , aux images les
plus riantes ! Les fleurs sont la poésie-de la végé-
tation.
L'histoire, Mood est le récit des faits ; mais qui
pénétrera dans les pensées, qui sondera les intentions
secrètes ; qui imterprétera les motifs, si ce n’est la fa-
-culté devineresse à laquelle on ne parvient que par
une sorte d’exaltation produite par l’Idéal des faits,
par l’Idéal des personnages ; qui nous identifie à nos
héros, qui nous fait agir en eux , et réveiller des pas-
sions endormies depuis des ‘siècles au fond des tom-
beaux ? A laide d’une grande instruction , mais aussi
d’une imagination reproductrice , le passé reparaît
sur la scène du présent, tout palpitant de naturel
‘et de vie; mais une vaste instruction ; ‘déniuée de ce
pouvoir créatéur, dispose de froids mannequins; leur
imprime une | attitude invariable ; ébauche quelques
traits superficiels de l'existence; et fait mouvoir les
(74)
morts de ce mouvement galyanique: qui fait peur ou
pitié aux véritables lecteurs. Il me serait plus facile
de vous citer des historiens de cette dernière classe,
de ceux qui.ont exhumé des cadayres, que de,vous
en offrir qui en aient ressuscité ; mais il-existe de,ces
derniers, votre mémoire vous les rappellera , je n’a
pas besoin de vous en présenter le modeste tableau.
Notre école ancienne n’y fut pas heureuse; et Vol-
taire , qui, dit-on , répandit tant de vie dans ses
histoires, Voltaire ; dont l’imagination était si puis-
sante , la subordonna trop à ses intentions satiriques.
Si ses histoires plaisent ; cé n’est point du charme de
l'illusion, Elles occupent et divertissent Pesprit, mais
elles ne ravissent point, elles ne transportent point
Tâ âme. Voltaire est toujours dans la société de ses per-
sonnages, il les inspire , il les meut, il les égare pour
le soutien d’une cause qu'il a pale et pour la-
quelle, loin d'appeler l’Idéal, iln’a pas trop de tous
ses moyens de calcul et d’arrangement. Un roman-
cier, que vous connaissez tous, me semble en pre-
_ mière ligne dans cet Idéal de l’histoire, qui , selon
moi, estila véritable histoire. Jamais .on n’a repro-
duit avéc plus de vérité les hommes et les faits; jamais
on,n’a fait une illusion plus complète. Heureux si.ce
grand écrivain , descendant de l’Idéal pour traiter un
sujet. qui.en.eñt.été le triomphe, .n’eût pas déshonoré
sa plumeïen, pensant déshonorer un grand homme!
Ce que, nous disons des historiens, nous devons
l'entendre.,. à plus forte raison, des traducteurs. Le
traductenr, doit être l'écrivain original lui-même; il.a
ses affections, ses haïnes; il a yécu à la cour, ou
(75)
loin de la cour; il'fut favorisé de ceux dont äl traite,
ou ceux-ci ne lui furent connus ni par des bienfaits,
ni par des offenses, nec beneficio ; nec injurid cognili.
Il était Oyide à Rome, quand Ovide écrivait ses Poé-
sies d'Amour; il était Ovide, sur les bords du Pont-
Euxin, quand. Ovide écrivait ses, touchantes mais
pusillanimes lamentations ; il eut le malheur le plus
poignant que puisse éprouver un poëte, celui de
vivre au, milieu de gens qui ne peuvent l'entendre.
Non intelligor illis! Et, pour cela, vous concevez
qu'il n’y,a que la puissance de l’Idéal. Je vous en
atteste, vous, Messieurs, que yoire goût ou vos fonc-
tions (portent à traduire; je vous. atteste de dire de
quoi vous fütes le plus contens, ou des traductions
que vous dûtes à votre savoir , ou de celtes que créè-
rent, votre illusion et votre enthousiasme. Ainsi ,
Messieurs, conyenons qu’une vraie traduction est une
œuvre de génie, et.qu'il est infiniment plus difficile
de traduire consciencieusement uné page, que d’en
écrire vingt sous sa propre inspiration,
C’est ce dont.se doutaient bien peu ceux qui, dans
les siècles passés ( j'en excepte Amiot },,.se livrèrent
au métier.de traduire, Ils rendaient.le.sens des mots,
maïs l'esprit , mais l’âme des mots ; que devenaient-ils
sous leur. plume de plomb? Le manœuvre poursuit
sa besogne, sans sortir én idée de la poudre de sa
bibliothèque; il la poursuit, comme letisserandalonge
sa toile sur son métier; et, quand il a suivi tout en
sueur, tout haletant, son original ;.le malheureux
se jette en d’autres angoisses; il glose; il commente,
il met ses livres et sa mémoire à la torture, pour
(76)
parler de tout à propos de rien ; il mvoque toutes fes.
langues au secours de la sienne qui lui manque, vé
ritable Babel, où l'on ne s'entend plus, pas même
celui qui en fat l'architecte! ridicule ; auquel porta
d’heureux coups l’ingénieux commentaire de Watha-
nasius, comme on dit que l'excellente plaisanterie de
Cervantès mit fin aux merveilleux romans de Cheva-
lérie. |
Le triomphe de l’Idéal est le Théâtre. C’est , aussi
bien que dans l’Histoire, que l'évocation doit être par-
faite ; ét comment l'opérer ; si ce n’est par une étude
approfondie de ses héros , si ce n’est par cette grâce
qu'ilest rare qu’on n’obtienne pas, si on l'appelle avec
ferveur ; cette grâce dé pénétrer dans tous leurs se
crets ; dans toutes leürs passions? Mais il faut vouloir
de bonne foi être instruit de toutes ces choses ‘il faut
ensuite ; dans ses ouvrages, ne mettre du sien que
le moins possible: Après avoir créé ses personnages,
l'auteur doit les laisser agir avec une entière liberté.
Molière est peut-être le seal de nos écrivains qui ait
rempli cette condition du véritable drame. Corneille
et-Racine ne l'ont pis fait toujours, et Voltaire,
beaucoup moins qu'eux. Voltaire avait un esprit trop
inquiet, pour ne passe glisser à chaque instant der-
rière ses personnages ; c’est son ‘défaut. Onle lui a
pardonné:en faveur de sa philosophie; maïs, en lisant
sont Théâtre , on se rappelle trop souvent cette ob-
servation d'Horace : non érat'his locus. en
*1Mais que diraï-je, Messieurs , de notre Théâtre
moderne ? Si l'on pouvait écrire d'inspiration sans
sortir des affaires , des distractions du monde et du
(745)
toarbillon des plaisirs; si l’esprit pouvait hanter en
même temps les vivans et les morts, si l’on pouvait
tenir auprès de soi à la tribune politique, à la table
des banquets , au sein des bals et des routs lé spectre
des temps passés que l’on veut produire sur la scène;
à la bonne heure ! Mais ce miracle est impossible:
On n’acquiert le grand art du Théâtre qu’au sein de
la méditation et du recueillement : aussi trouve-t-on
bien plus aisé de diviser en scènes quelques chapitres
d’une histoire ou d’un roman, et même, pour s’é-
pargner l'embarras du choix , de partager en périodes
scéniques tout un roman , toute une histoire.
On a voulu faire au Théâtre l'essai d’une sorte
d'Idéal, mais nous n’avons vu , dans ces déplorables
tentatives , qu’une invasion ennemie , qu’une charge
imposée par l'étranger, contre laquelle se sont ré-
voliés le goût et la fierté nationale ; qu’une intrusion
ridicule ; qui venait contrarier toutes nos affections,
tous nos souvenirs. Certes, si j'étais anglais, j’ado-
rerais Shakespear ; si j'étais allemand , je resterais
éveillé aux pièces de.Shiller et de Goëthe, et j'aurais
apparemment de bonnes raisons pour cela ; mais,
français, j'aimerais mieux me vouer au dur Lemierre,
à l'obscur et prolixe Ducis, qui surent allier à leur
manière l'enthousiasme aux convenances, que d’é-
crire Cromwell, et de faire scandale sur la scène avec
Hernani, Christine et Henri I. .
. Me permetirez-vous, Messieurs, de poursuivre
une série déjà trop longue de réflexions qui ne vous
apprennent rien ? Me pardonnerez-vous surtout celles
que je vais encore hasarder sur une matière que.je
(78)
connais à peine , vous dont plusieurs en ont une cot:
naissance approfondie ?
Un art, qui se trouvé d’autant plus dû domaine
de l’Idéal, qu'il approche lé plus dé la vérité; an
art dont les effets sont un des plus doux comme
dés plus inexplicables mystères de l’organisation de
tout être vivant, et surtout de la nôtre , la musique
est encore un de ceux d’où cet Idéal est générale
ment disparu, remplacé par un luxe qui éblouit,
qui surprend, qui pique la curiosité, sans rien dire
à l'âme. Rien ne semble plus vide dé pathétique et
d'Idéal que le plus grand nombré de nos opéras
modernes. Il ÿ à plus d’Idéal dans les deux comé-
dies charmantés de Beaumarchais, telles qu’elles sor-
tirent dé ses mains, que dañs tout lé laborieux clin-
quant dont les ont surchargées Mozart et Rossini.
Et, à part les difficultés vaincues, l’admiration qué
produisent chez les adeptes, les Wéber, les Rossini,
les Mozart, vaudra-t-elle jamais les touchantes sen-
sations, lés douleurs délicieuses, lé bien-être inex-
primable que faisaient naître en noûs les inspira
tions du dernier siècle ? Les premiers ont tué l’Idéal
par leur sciencé; nous l’avons pérdu sans compen-
sation: Nous avons le superflu, pour me servir
d’une expression de Beaumaréhais, sans posséder le
nécessaire. Ils sônt d'autant plus coupables que,
sans nous charmer, ils ont dissipé lé charme que
nous trouvions aux productions de leurs devanciers ;
qu'ils sont parvenus à nous faire trouver trop sim-
ples des ouvrages dont le prestige fit notre bon-
heur auirefois, ét! vit encore dans nos souvenirs.
(79)
Sans contredit, il faut de fortes têtes pour combi-
ner tant d'accords, et mettre en mouvément tant
d’autémätes à instrumens el à voix; mais que nous
importe la tête d’an harmomiste, à nous qui ne
voulons qu’un cœur qui sympathise avec le nôtre,
qu'un esprit qui nous fasse, sans trop d'ere
partager ses ravissemens ?
L’Idéal dans les sciences et dans les arts en est
la partie entraînante; c’est lui qui enfante les mi-
racles, qui porte aux plus grands sacrifices, et
pour quoi lon est heureux de hasarder son repos
et sa vie; c’est lui qui transporte Volney parmi
les ruimes d'Héliopolis ét de Palmyre, Châteaubriand
dans les déserts du Nouveau-Monde, dans la Grèce
et dans la Palestine, théâtre jadis de tänt de gloire
et de prodiges; nos savans de l'expédition d'Egypte
aux tombeaux éternels des Pharaons et aux gigan-
tésques monumens de la Thébaïde; Byron sur un
sob qu’avaient foulé les Miltiade et les Léonidas ;
c’est l'déal qui fait de ce jeuné poète un des plus
sublimes que l’oni ait admirés dépuis Homère.
Mais, objectera-t-on, cet idéal, qui conduit à
de si grandes choses, cet Idéal égare. -- Il égare!
eh! qui le sait? le Dieu seul qui apprécié nos
aventureux travaux. Cet Idéal inspire à Descartes
ses tourbillons, à Newton sa puissance attractive,
à Bernardin de Saint-Pierre ses Æarmonies ét son
Système des Marées; Buffon, sur les aïles de FI-
déal emporté jusqu’à l'aurore des ternps , west plus
maître de résister au démo qui prétend lui ré-
véler la création des Hot et Buffon assigne à
( 30 )
là nature ses Epoques. Sublimés égaremens! si.ce
sont des égaremens; .car qui sait ce qu'est la vé-
rité?.….… Témérités, mais qui attestent seules, les
hautes facultés de l’homme et sa céleste origine !
Sans le feu de l'audace il n’est point de génie.
(CozarDeu , les Hommes.)
Répondons encore à une objection, et nous fini-
rons par-la. L'Idéal conduit à une sorte d’arbitraire
favorable aux écoles modernes de littérature et d'arts.
À Dieu ne plaise que nous reculions devant les
conséquences du principe que nous traitons, que
nous concevions des limites au génie , lorsque nous
réclamons son indépendance! Non, Messieurs. Qu’à
ses risques et périls l'homme de talent peigne, et
l'âme et l'esprit, et tout le moral de ses sujets ,
doués ou non de la vie vulgaire ; qu'il prête aux
fleuves, aux montagnes, aux mers, aux abîmes toute
leur poésie, toute leur éloquence ; aux monumens
le récit de leur jeunesse, de leur virilité, de leur
mort; qu'il n’y aif point de secrets pour lui dans
les hommes et dans les choses; que notre David,
s’écartant des routes ordinaires , et peu soucieux des
formes extérieures, quelque parfaites qu'il les fasse,
soit surtout le statuaire de l'âme, de l'esprit et-du
cœur; que Lamartine révèle des affections religieuses
en une poésie neuve et pleme de richesses et de
charmes; que Hugo, doué de .plus de mouvement
et de vie, fécond jusqu’à l'excès, innovaleur jus-
qu’à la témérité, mais observateur à qui rien :n’é-
chappe, laisse son lecteur encore moins choqué de
(81)
quelques grotesques, que ravi de mille beautés; ap-
plaudissons à ces travaux, qui doivent donner au
XIX.e siècle un caractère distinctif, une physionomie
propre. Honorons nos illustres morts, mais quel-
qu’étonnés que nous soyons de certaines créations
contemporaines, étudions-les, jugeons-les sans hu-
meur, et attendons. Soyons touchés de ces efforts,
s’il nous est prouvé qu’ils soient consciencieux. Nos
prédécesseurs se sont créé une gloire; voyons quelle
gloire nous nous créons à notre tour. Soyons nous,
mais sans jeter sur nos devanciers un œil dédaigneux
qui nous serait d’un fâcheux présage. À quelle condi-
tion une renommée durable attend-elle nos œuvres
nouvelles ? À la condition que la majorité les ac-
cueille , et que les autenrs s’approuvent eux-mêmes,
quand ils se seront considérés et jugés de sang-
froid. Le désir de bien faire à ses aberrations : mais
vient le temps où nous les reconnaissons, où nous re-
tournons sur nos pas, où nous nous faisons justice
à nous-mêmes. Voilà les lois auxquelles l’Idéal ne
refusera pas de se soumettre. La force des choses
entraîne et corrige, et rien n’est mieux corrigé que
ce qui l’est par le génie qui erra.
Peut-être, Messieurs, mes jugemens ne trouve-
ront pas d’écho dans chacun de vous. Je l'ai craint,
ét cependant je n’ai pas hésité à les mettre au jour:
cette liberté littéraire me semble l'âme d’une Société
telle que la vôtre. Celui qui se trompe peut avoir
au moins le mérite de provoquer des notions plus
vraies et des doctrines plus justes. Je n’ai.rien dit
que je ne l’aie pensé, et voila mon excuse. Je suis
6
(82)
prêt à rendre hommage, à qresngee aura rectifié
mes..opinions.
MÉMOIRE
Relatif. à une quantité considérable de Médailles qauloises ,
trouvées vers le milieu du mois d'octobre 1898 , dans un
champ près du pont de la Chaloire ; à la porte de la ville
d'Angers (1) ;
Par M. GRILLE,
Bibliothécaire de la ville d'Angers et Conservateur des antiquités de
Maine et Loire.
LA découverte d’une grande quantité de Médailles
gauloises , qui a eu lieu vers le milieu d’octobre 1828,
dans un champ, à la porte d'Angers, estun évène-
ment qui doit d'autant plus intéresser ceux qui s’oé;
cupent de nos origines et de la numismatique.du
département , que ces pièces trouvées sont la monnaie
des premiers habitans de notre territoire, et que jusqu’à
ce moment elles pouvaient être regardées commeassez
rares dans nos cabinets. Comme cette découverte. est
encore récente , que beaucoup de ses résultats. de-
meurent ignorés, je vais dans l’intérêt des amateurs.
et pour répondre en même temps à l'honorable appel
que la Société a bien voulu me faire, je vais , dis-je,
1 STIS
(1) Ce mémoire rédigé sur la demande de l'Administration mu-
nicipale, a ensuite été adressé à l'Académie royale des Inscrip-
tions et Belles-Lettrés ; qui en à rendu He Fe sa séance du
16: juillet, 18304 f À
( 85 )
exposer ici Ce Que J'ai vu par moi-même et cé que
j'ai pu recueillir de notions au sujet de toutes ces
Médailles.
Je parlerai d’abord du lieu où elles gisaient , de
leur nombre, de leur composition métallique et de
leur exécution sous le rapport de l’art. Leur module,
leur origine, la variété et l'explication de leurs types
et de leurs figures , viendront ensuite, et me condui-
ront naturellement à émettre quelques conjectures sur
l'endroit même où ce trésor a été trouvé.
Lieu où gisaïent les Médailles.
1.0 Par rapport au lieu où gisaient les Médailles :
ce lieu , comme on se le rappelle, est un champ joi-
gnant la ferme et le pont de la Chaloire et dont
l'exposition est au sud-ouest. Rien de bien notable
jusques-là ne distinguait ce petit com de terre : il
fallait pour lui valoir un peu de célébrité que le pro-
priétaire actuel se mit en frais de le fouiller et d'y
creuser un réservoir. Les travaux exécutés dans la
partie supérieure du champ, à l’angle renirant d’un
mur de clôture, ne présentèrent rien d’abord qui dût
attirer les regards ; mais quelle ne fut pas bientôt
la surprise de ceux qui y étaient employés, quand,
débarrassés des déblais enlevés à la surface du sol et
arrivés à une profondeur d'environ 5 pieds, ils aper-
çurent dans le point milieu du réservoir une espèce
de puisard rempli de terre glaise, et, dans cette terre,
d’une couleur verdâtre et à moitié saturée d’eau, une
masse considérable de pièces de métal coagulées en-
semble et tellement oxidées qu’à la première vue elles
( 84)
n’offraient , pour ainsi dire, aucune espèce d’em—
preinte.
Peu familiarisé avec ce genre de monnaie , le pro-
priétaire ne vit en elle qu’une vile matière , sans forme,
sans dessin, qu'il pût-expliquer ; aussi se contenta-t-1l,
dans ce prenuer moment, de prélever sur cette masse
énorme, une fraction de quelques centaines de pièces
qu’il emporta chez lui comme échantillon et pour dis-
tribuer à ses amis; après quoi le puisard fut livré aux
ouvriers et aux Curieux, pour en user et s’y appro-
visionner tout à leur aise. L'affluence fut grande,
comme on le pense bien; pareille découverte à la
porte d’une ville d’un certain ordre ne manque point
son effet, surtout quand il est question de pièces rares,
qui ont traversé les siècles, et que, pour les voir et
se les procurer, il ne s’agit, en quelque sorte, que
d’un simple signe à des ouvriers et d’un léger pour-
boire.
Quantité de Pièces trouvées.
Passons maintenant à la quantité présumée de ces
pièces : le terme d’immense , dont je me suis déjà
servi, ne dit rien de trop. Les petites, je le répète,
étaient là par milliers (1). Aucun doute qu’elles n’y
(1) Jamais pareille quantité de pièces n'avait été découverte,
que je sache, dans le département. On pouvait bien citer , jusques
là, les médailles romaines d’argent au nombretde {00 , à peu près,
et toutes à fleur de coin, trouvées il y aune quinzaine d’années aux
environs d’Ingrandes ; on pouvait citer encore la précieuse décou-
verte de plus de 150 médailles d’or, faite à la butte des Moulins,
près le château de Saumur, en 1825; et parmi ces médailles, 2%
Barc-Antoine, fils, qui d’abord-acheté cinquante francs, et re-
(5)
atent été jetées à dessem. Ce puits était une cache,
et ces pièces, dans le temps où elles ont été enfouies,
représentaient un trésor réel. Cela est d'autant plus
évident qu'à l'époque de leur fabrication , qui est
celle du premier et du second âge de la Gaule, on
ne connaissait point en ce pays d'autre monnaie que
celle de cuivre, de potin et de bas argent. L'or, comme
signe représentatif, y étail au moins fort rare et à
bas titre.
Composition métallique de ces Pièces.
Quant à la composition métallique de toutes ces
pièces, 1lest à remarquer qu’à l’exception d’une seule
qui. est en e/ectrum et du module de quinaire , le
cuivre sert de base à la majeure partie d’entr’elles, et
s’y.combine plus ou moins avec le plomb et l’étain ;
mais il y a cette différence des petites aux grandes,
que, dans celles-ci, le cuivre domine et se montre
irès-apparent , tandis qu'il entre à peine par petites
portions dans les quinaires, en qui, d’ailleurs, la cou-
leur semble indiquer la présence d’un peu d'argent.
Module.
Outre la petite médaille d’electrum relatée ci-dessus,
nous avons deux et même trois modules à signaler
—"
vendu ensuite à M. Rollin, marchand'de médailles au Palais-Royal,
à Paris, la somme de millé francs, est passé'de là, au cabinet
de M. le prince de Talleyrand, où il manquait, et où il a été
pa le triple; on pouvait citer enfin les 12 à 1500 médailles
romaines du Bas-Empire, de moyén et pétit bronze, découvertes
par la charrue en 1826, dans une métairie de S.t-Maïtin de Beau-
preäu; mais tout cela, eu égard au nombre, n’approche point du:
trésor de la Chaloire, et doit être HE pour rien.
( 86 )
dans les médailles. trouvées : le moyen bronze , le
petit et le quinaire. Le premier , extrêmement rare,
puisque je n’ai rencontré qu’une seule médaille qui s’y
rapporte ; le second se comptant par centaines , et le
troisième par milliers (1).
Dessin et fabrication sous le rapport de l'art.
Rien de plus rude et de plus grossier , sous le rap-
ort de l’art, que toutes ces médailles. Les figures
qu'elles représentent sont tellement barbares, qu’à
l'exception de celles indiquées sous les numéros 3
et 4, c’est à grand’peime qu’on parvient à les déter-
miner..….. De simples enfans , abandonnés au seul ms:
tinct de leur âge, produiraient quelque chose de moïns
ridicule peut-être. C’est en fait de dessin ; l'absence de
ioute règle, de toute convenance et de toute pro-
portion.
Pour ce qui a trait à la fabrication : les grandes
sont évidemment coulées; l’appendice qui dépasse le
cordon dans la plupart d’entr’elles , et la bavure du
métal lindiquent assez. Les petites, exemptes de ce
défaut, paraissent avoir été frappées au marteau , et
je les crois, par cela même, d’un âge un peu plus
rapproché (2).
().,Ces petites médailles ,, si abondantes ici , sont un «module
que je ne me rappelle pas avoir ya nirencontré nulle part. Bout-
teroue, Montfaucon, Martin, Grosson, Caylus, Pellerin, Gri-
vaud de la Yincelle, Mionnet., men citent et n’en ont fait graver
aucunes... IL serait curieux d'apprendre que ces médailles fussent
véritablement inédit es. à ) rt
(2) On fixe trois époques pour la fabrication des Médailles gau-
loises.
(87)
Origine et A ntiquite.
Nulle difficulté sur leur origine , dont il nous reste
à parler. Elles sont bien gauloises, et des deux âges
les plus éloignés, comme nous Pavons dit. Leur fa:
brique plus ou moins grossière ; leur manque de lé-
gendes , et leurs types symboliques et monstrueux
sont là pour nous le prouver.
Types et F Iœures.
Reste à voir .à présent quels sont sur ces mêmes
pièces, les images chimériques et:les symboles ‘qui
Dans la première, c’est-à-dire à partir des temps les 'plns re-
culés jusqu’à la prise de Rome, l’an 387 ayant J. C., la monnaie
gauloise composée d’un mauvais potin et coulée, est marquée au
coïn de la barbarie la plus complète.
Dans la deuxième précédant la conquête, les pièces frappées
généralement au. martéau et d’un métal,plus pur, présentent aussi
relativement au dessin, un peu plus de correction, ét semblent,
pour les têtes surtout, une faible copie des Médailles STECUES, «+.»
L'émission de la monnaie d’argent et d’or date de la fin de cette
deuxième époque ;: mais le dessin !de cette monnaie répond à son
titre et est également très-inférieur ; témoin notre petite Mé-
daille décrite sous le numéro premier.
Dans la troisième, c’est-à-dire après la réduction de la Gaule
en province romaine , la morinaie gauloise, par une sage Poli-
tique, du vainqueur ;: ‘continuant à ayoir cours, prend sous ces
nouveaux maîtres un certain degré. de correction qui l’éloigne
de plus en plus de la barbarie. Dés légendes grécques et, latines
l'enrichissent, et le nom des villes à qui le, privilège de se, gou-
verner par elles mêmes était laissé, s y montre,en toutes lettres.
Cette observation s'applique aux Médailles Autonomes de notre
cité. Lies mots ‘d'Andec. et d’Andecab. y sont joints à l’em-
preinte, d'un ‘cavalier où d’un cheval Jibre : signe non équivoque
des immunités et des franchises dont’elle jouissait.
( 88 )
appartiennent aux usages, aux arts et à la croyance
de ce peuple.
D'abord, commençant par la petite Médaille d’or,
ou pour mieux dire d’electrum , cotée Ne 1.7 (pour
ce N° et les suivans ,-voy. pl. 3), .et dont il est fait
mention ci-dessus ; jecrois y voir d’un côté une ‘tête
de profil, casquée et tournée à gauche; et, au revers,
un cheval informe au galop , disposé de la même
manière.
Passant ensuite à l’unique exemplaire de potin qui
se soit présenté à moi du module de moyen bronze,
et qui figure sous le N° 2, on distingue parfaite-
ment d’un côté, un aigle éployé, et de l’autre, une
nef équipée de son mât, avec flamme ou pavillon ,
si je ne me trompe , emblème manifeste d’un peuple
commerçant et possesseur de nombreuses colonies au-
delà des mers.
Eu égard, en troisième lieu , à la deuxième gran-
deur ; voict les différentes variétés de types et. de
symboles que j'y ai signalés. at À Te
1.2 N.e,3. Tête humaine. tournée à droite 1 sans
barbe et de profil, avec chevelure bouffante tom-
bant à la hauteur des épaules, et enveloppée d’une
espèce de torsade ou réseau. 07. s0HÉVOTe LE
REVERS. Aigle éployé, regardant. à gauche:
( Cuivre.) L AMSRRAI
Le dessin de cette Médaille et de la suivante ; sans
être ce qu'on peut appeler correct, ne laisse pas d'être
plus satisfaisant que celui de toutes les autres pièces,
trouvées au même endroit ; le métal semble en êtreréga-
lement beaucoup plus doux , ce qui indique.une époque
de fabrication moins éloignée.
(89)
Les exemplaires de ce type ne sont pas communs ;
j'en pourrais citer à peine deux ou trois ;! indépen-
damment du présent.
2° No 4. Autre tête tournée à droite, et pareil-
lement ornée de tresses.
REVERS. Aigle debout, battant de l’aile et la tête
inclinée vers le sol, où il semble apercevoir et vou-
loir becqueter quelque chose. ( Cuivre.)
Variété unique, à ma connaissance.
3. N.e 5. Autre tête d’où partent des espèces de
rayons arrondis par le haut, tournée à gauche.
REVERS. Cheval au galop, grossièrement.dessiné.
(Poun.)
Une Médaille exactement semblable à la présente; ‘tant
pour la figure que pour le revers, a été découverte au
commencement de ce siècle à Bratus Pantium, près de
Beauvais, et se trouve décrite dans une dissertation sur
les camps romains de la Somme, publiée par, Mons. le
Comte d’'Allonville , à Clermont-Ferrand , format in-4.o,,
1828. ( Voyez pages 163 et 182 de cet ouvrage. } :
La nôtre est la seule de ce type qui ait été dé-
couverte dans le puisard de la Chaloire.
4e N.° 6. Tête casquée et de Du me du. dessin
le plus barbare , à droite.
REVERS. Un animal à long cou, au corps effilé
et à courtes pattes, ayant une longue queue -recour-
bée sur le dos, tourné à gauche. Type également
unique. ( Cette Médaille est en potin, et a la cou-
leur du plomb.)
5.0 N.e 7. Tête nue d’un fort relief et du cessin
( 90 )
le plus barbare ;-disposée dans le même sens que
celle qui précède (1):
REVERS. Sorte d’animal fabuleux: ayant la tête!
l’encolure et,le ‘corps d’un cheval, la queue d’un
lion , les jambes ou pour mieux dire les pattes d’un
oiseau de proie (l'aigle, je suppose ), avec de longues
serres et. repliées sous lui; caractères symboliques
qui, pris en détail, se rapportent précisément aux
animaux que la Gaule nourrissait, et dont l’image,
comme attribut de sa force, de son activité, de son
indépendance et de son courage, flottait sur ses en-
seignes guerrières et convenait parfaitement à sa
monnaie.
Cette médaille, la plus curieuse, sans contredit, du
puisard'de la Chaloire ; est aussi celle dont le type s' * est.
trouvé le plas multiplié. ( Elle:ést en potin. y
6. Numéro 8. Même tête et même revers ; sinon
qu'ici la tête de l'animal, au heu d'être celle du
cheval , représente sidubiéeilt celle de l'Urus où
du BON ( Potin. )
7 Numéro 9. Même iête encore et même ani-
mal; mais ce dernier tourné en sens inverse des
numéros 7 et 8, c’est-à-dire à gauche. Com.)
Commune.
8.° Numéro ro. Tête coiffée d’une espèce de casque.
à droite.
(1) Outre le relief dont il s’agit ici, il est à noter que toutes
ces, Médailles de deuxième grandeur, sont légèrement bombées
du côté de la tête, et tant soit peu concaves à l’opposite ; les
quinaires au contraire, ont proportionnellement beaucoup. moins
dereñef et sont ornées d'un grénetis qui manque aux premières.
(9)
Revers. Même animal chimérique à tête de Prison,
tourné à gauche. ( Potin.)
9. Numéros 11 et.12, Même tête,
Revers. Objet imdéterminé. ( Potin.)
Ces deux médailles couvertes d’une belle patine et
qui ont l'aspect du plomb, sont rares dans la collection.
10.0 Numéro 13. Même tête casquée, informe et
de profil ;. ou encore, peut-être bien , un ours ou un.
autre animal accroupi, tourné à droite, que je ne
puis bien déterminer.
REVERS. Espèce de nœud mystique. (Cwivre.)
Unique.
Voir pour ma double interprétation du premier: côté
de cette médaille, le dessin que j'en ai fait, et qui
figure, sous le même numéro, au tableau général des
types joints au présent mémoire.
11.2 Numéro 14. Tête à gauche, si je ne me irompe.
REVERS. Cheval à droite au galop, fort mal des-
simé, avec une’ queue de lion. (Potin.) Rare.
12.0 Numéro 15. Cheval à droite, au galop.
REVERS. Indéchiffrable.
L'empreinte de ce revers, quoique bien conservée, offre
des caractères tellement confus , tellement indécis et obli-
térés, qu'il m'a semblé impossible de là déterminer... Je
n'ai pas connaissance d'ailleurs que, dans toute se masse
des pièces trouvées, il se soit rencontré un second type
semblable à celui-ci. (Potin , superbe patine...
Arrivés à la troisième grandeur , et continuant dé
suivre la série de nos numéros, nous avons à dé-
crire plusieurs types et figures qui ne s'offrent point
dans les métaux et les modules. qui sortent de nous
occuper.
(9 )
n° Numéro 16. Tête barbare, vue de face, avec
sourcils épais, moustaches et pommettés proéminentes.
REVERS. Le Sus gallicus, et au-dessous ;'une es-
pèce d’arche. (*Bas-argent.) Type sans nombre.
29 Ne 17: Même Médaille, mieux marquée pour
le révers. (Bas-argent.)
3.0 N° 18. Même tête et même animal, mais
celui-ci franchissant à la course l’e espèce d’arche dé-
signée ‘ci-dessus. ( Bas-argent.”)
4 N° 19. Tête de profil à droite, et ornée d’une
sorte de diadême.
REVERS. Le Sus gallicus. ( Bas-argent. )
Elle est la seule pièce, parmi des milliers de qui-
naïres , où j'aie vu la tête dans cette position.
® Ne 20. Même tête, tournée à gauche. ?
se Le Sus es ( Bas-argent. ) Exces-
sivement commune.
6° N° 21. Même Médaille.
SANT Mieux marqué, (Bas-argent.)
Ne 2. La même tête, à gauche.
Ron Tête d’hippogriphe on de griffon. 2
Variété unique | et, hrès-remarquable entre toutes nos
Médailles de 3.2 grandeur. Je pars 101 , bien entendu ,
de la supposition que mes yeux ne me trompent pas ;
que cette figure symbolique . . telle. que je la vois existe
bien , est bien « contenue réellement dans notre empreinte :
je suis d'autant plus disposé ? à la faire entrer dans le sys-
tême monétaire de l’ancienne Gaule, que nous trouvons
dans le module de noyenne grandeur , un animal dont
la mystique composition offre à peu près les mêmes em-
blèêmes , et que’, Sur ce point encore , nos aïeux se ren-
contreraient avec les peuples les plus PR Plusieurs
(93)
villes grecques en effet ont un griffon sur leurs Médailles ;
il était consacré par elles au soleil ; et, chez les Egyp-
tiens, ce signe hiéroglyphique était à la fois l'image de
la force , de la vigilance et de la valeur.
8.e N:° 23 et dernier. Sorte de palmier ou de ca-
ducée, accompagné de deux espèces de nœuds en
forme d'S.
REVERS. Double semi-zône concentrique , cou-
ronnée de rayons en zig-zag, le tout formé et par-
semé de perles. ( Bas-argent.)
L'S , fréquemment employé sur les Médailles et les
mn gaulois a représentait ; à ce qu' on croit, sui-
vant sa configuration , le croissant et le déclin de la lune.
Les types des quinaires, pour être moins variés,
comme on vient de le voir, n’en sont pas moins en
rapport avec les usages et la religion du peuple dont
nous parlons. Les têtes humaines, tant de face que
de profil, qui sy montrent en très-grand nombre,
me paraissent être en effet un hommage rendu par
Jui au soleil et à la lune, ou, pour mieux dire, au
dieu de la nature que le Gaulois adorait par-dessus
tout, et que ces astres représentaient à ses yeux ; à
moius qu’on n’aime mieux voir dans ces figures les
images des rois ou des chefs des cités gauloises (1).
Le sanglier, Sus gallicus, si fréquemment em-
ployé dans les types monétaires des Celtes, était,
(1) L’assertion de Grivaud de la Vincelle, sur la rareté des têtes
vues de face dans les Médailles gauloises, se trouve ici pleine-
ment démentie par le fait:, oir: Antiquités Gauloises et; Ro-
maines , recueillies dans les jardins du Eucembourz en 1807 ;
in-4.o, page 182,
(94)
j'imagine aussi, un signe sacré qui leur rappelait et
leurs forêts mystérieuses, et leurs chasses , et leurs
expéditions belliqueuses , et leurs sanglans sacrifices.
Cet animal ne figurait pas seulement sur leurs mon-
naies ; suspendu à leurs bannières, on le voyait aussi
précéder leurs cohortes guerrières , et présageant à
leurs yeux la victoire.
Telles sont les figures que j'ai pu reconnattre et
déterminer parmi la quantité immense de pièces qui
sont passées sous mes yeux.
Bracelet ou Armille en bronze ; et Fragment de
poterié.
Parvenu à la fin de la description ou interpré-
tation de nos Médailles et de leurs types, je ne dois
point négliger de faire mention d’un Bracelet en
bronze, et de quelques fragmens de poterie retirés
du même puisard, et que j'ai acquis pour mon ca-
binet particulier, du propriétaire de la Chaloire.
Ce bracelet, anneau ou armille, comme on voudra
l'appeler ( voy. pl. 4, £. 1.), semble, par sa pe-
titesse , avoir été à l’usage d’une femme , et se rap-
proche, pour la forme, de ceux que portaient les
Grecs et les Romains. Sa largeur est d’environ
3 lignes ; 1l est orné d’un grénetis renfermant un
triple rang de filets dentelés, et sa conservation du
reste est assez belle (1).
(1) Les Gaulois, d’après le témoignage de Diodore de Sicile
(liv. 5), faisaient entrer les bracelets dans leur parure, et leurs
femmes en portaient d’or.
(9%)
Pour larpoterie, qui est d’une pâte grise commune,
aveé uné couverte brane ; c’est un ouvrage fait à
la roue, et qui ressemble absolument, et pour la
pâte et pour la forme, aux poteries romaines vul-
gaires que l’on découvre tous les jours soit dans nos
thermes , soit dans les environs de l’'amphithéâtre,
soit dans les #erres noires (1); je n’y vois de diffé-
rence que la localité.
Réflexions et conjectures sur ce trésor et sur l’en-
droit où il était dépose.
Que penser de cette découverte à présent? ..….…
Pourquoi ces médailles en si grand nombre enfouies
dans un champ isolé, où nul monument, nulle trace
d'habitation gauloise , nulle antiquité ne se ren-
contrent ?
J'interroge les alentours, je consulte les noms,
la tradition, les personnes, et rien ne me répond...
Il y a bien là, pourtant, dans le voisinage, un terire
qui donne à songer : ce tertre s’appelle la Motte...
Mais ce n’est qu’un nom ; et un nom tout seul, après
tout, est quelque chose de trop vague pour s'y
arrêter.
(1) Les champs des Terres-Noires, situés au sud de la ville
d'Angers, un peu en-deçà des champs de S.t- Martin, sont une
mine très-abondante pour l'amateur d’antiquités. Indépendam-
ment d’une assez grande quantité de Médailles impériales de tous
les modules , et d’un beau médaillon en bronze, de Marc-Au-
rèle, qui y ont été trouvés, je. possède dans mon cabinet un
vase de verre antique , une urne cinéraire en terre rouge et
un lacrimatoire qui en proviennent également,
( 96 )
Demeurons-en donc là de nos conjectures, pour
le moment... L'important, ce sont nos. Médailles;
ce sont les types, les variétés qu’elles présentent et
que nous avons signalés. Peut-être , avec le temps,
ce que nous en disons servira-t-1l à jeter quelque j Joue
sur cet endroit , à y provoquer des fouilles... Tout
se lie dans ces recherches ; un point mène à és
et c’est par le fil de l’analogie, souventes fois, que
l’on arrive à d’heureuses découvertes !
FT
Lrlh.ole Cor renber a Ninle.
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Cucururs delicioous
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PA TSX
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PL 4.
LTith. del Goypoerlier LNerles.
TABLE DES MATIÈRES.
è = Page.
Inrropucrion historique aux Mémoires de la Société
d'Agriculture , Sciences et Arts d'Angers. ........ L
Règlement constitutif de la Société........,....... - ‘xxj
Agriculture.
Des changemens physiques et chimiques qu'éprouvent
les terres dans l’opération de l’Æcobuage et des résul-
tats que peut en retirer la pratique agricole, par
M. DEsvaAUX..../4...4.......esseereetes #
. Quelques observations sur la culture en pépinières du
prunier sauvageon appelé Damas noir, par M. Le-
BRETON aîné , pépiniériste......:........,.....e 32
Notice sur une variété de cerise Ne inédite ;-par
M. NÉE D Rte D au Une. 36
Culture de l'Ognon- Patate , par M. Desvaux....... 38
Description d’une nouvelle variété de rosier. ......... . 49
_Scrences. US
Note sur une description mécanique de la Chaïnette,
par M. Diane MED PA LP POI TERRE 4
- Analyse du fer arsenical d'Angers et deS.t-Pierre-Mont- .
‘Hmart, par M. _LesreToN, pharmacien.......... 45 :
Description d’une nouvelle espèce de crustacé, par et
DES VITRE Are aol ele sie rare ele eine «64e sale 55
Description de la chenille du Bombix hermine, par
ME CODRMILLER 0 -. eee see te deetagenisess ce 0 57
‘Observations sur le Melon délicieux ( Cucumis delicio- à
sus), par M. DesVaux. lens .e eee se - 59
Descriptiôn et observations sur une nouvelle espèce du
genre Thymbra, par M. Desvaux................ + 63
… Rapport de M. Brrrar», relatif à un mémoire de
M. Hossard sur quelques cas de difformité.. ...... . 66
Lettres ét Arts.
Discours sur l’Idéa], par M. BLORDIER.. cc 69
- Mémoire relatif à à des médailles gauloises , trouvées za
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DE L'IMPRIMERIE DE L. PAVIZ.
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1832.
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(97)
SUR LA GREFFE DE LA VIGNE,
PAR M. BOURGOUIN ({).
LA greffe de la vigne est bien connue: mais les
heureux effets qu’elle produit, les résultats avanta-
geux qu’on en peut obtenir, voilà ce qui n’est pas
apprécié dans notre pays vignoble comme il méri-
terait de l'être. C’est pourtant le moyen le plus sûr
et le plus prompt de rajeunir une vieille vigne, d’en
prolonger la durée. C’est par les effets de la greffe
qu ’on peut, presque sans perte de temps, tr ansfor-
mer une vigne blanche d'un mauvais cépage en une
bonne vigne rouge, et réciproquement; enfin, chan-
ger en tout ou en partie l'essence d’un vignoble,
avec la certitude de ne perdre qu’une seule récolte
et même qu’une partie d’une récolte, puisqu’un grand
nombre de greffes porte du fruit dès la première an-
née. De plus, il est bien constaté que l'influence de
la greffe sur la qualité du fruit est presque toujours
avantageuse. Quelques agronomes très-mstruits vont
même plus loin : ils pensent que la greffe offre une
voie pour affranchir la vigne de ces mauvais goûts
de terroir qui infectent les vins de tant de contrées,
(1) Lu à la séance du 3 mai 1832.
A)
(9%)
et que ce pourrait être aussi un moyen d’acclimater
les espèces tirées des contrées méridionales (1).
Si des expériences bien faites venaient confirmer
cette dernière opinion , on serait fondé à espérer de
voir un jour prospérer dans nos contrées ces cé-
pages renommés dont on n’a pu jusqu’à présent en-
richir d’autres pays, parce que leur qualité a promp-
tement dégénéré toutes les fois qu’on les a transportés
dans un climat moins favorisé par la chaleur.
Tels sont les principaux avantages de la greffe.
Plusieurs cantons du Midi et de l'Est comprennent
parfaitement ces avantages, et l'usage de la greffe
Y est-généralement adopté. Nous savons même que
depuis quelques années il s’est introduit dans le haut
Anjou, et parüculèrement aux environs de Sau-
mur (2). Ilest probable qu’une pratique aussi avan-
iageuse se répandrà bientôt aux alentours d'Angers.
C’est dans l'intention de l’encourager que j'ai re-
cuelll les faits suivans qui sont le résultat d’un essai
fat avec soin sur ma prepriété , et dont j'ai lieu
d’être plemement satisfait.
Avant d'entrer dans le détail d’une expérience qui
me paraît eoncluante, qu’il me soit permus de dire
(x) On :trouve cette idée. dans -l’excellent, ouyrage de M. Le
Noir, surila culture de la vigne, page 89. Paris, in-8.®, 1829:
(2) Les vignerons -greffeurs dont.je me suis, servi étaient des
environs de Saumur.. Ils m’ont certifié que depuis quelques an-
nées, dans leur pays, le mode de greffer sur racine était em-
ployé par beaucoup de propriétaires jaloux d'améliorer l’essence
de leurs vignes, ou d’en changer les mauvais cépages.
(99 )
un mot des différentes espèces de greffes qu’on peut
pratiquer sur la vigne.
La greffe au-dessus du sol est sans contredit la
greffe par excellence: c’est elle seule qui peut nous
faire apprécié” avec exactitude le degré d'influence
que le sujet reçoit de l'insertion du rameau. Mais
cette greffe est difficile à la reprise, et quoiqne pra-
tiquée généralement chez les anciens, les modernes
Pont presqu'abandonnée pour la greffe en terre
dont le succès est assuré: C’est’ donc de la greffe
sous lé sol que je vais m'ôtéipéer:
Il -y à deux manières de greffer en terre. L'une
consiste à greffer en fente sur le jeune bois où
aventin, qu’on couche ensuile en terre las que le
cep en forme de provin. Cêtte greffe réussit très
bien; mais opération est plus délicate et plus longue
qué/la greffe sur racine que je conseille, que j'ai em-
plôyée avec succès, el qui est aujourd'hui pratiquée
de préférence à toute autre dans un grand nombre
de vignobles. {1 n’y a qu’une circonstance où il sem-
blerait indispensable de recourir à la greffe sur le
jeune bois, c’est lorsqu'il s’agit de regarhir par le
provignage des places vides:
Voici au surplus le détail de l'expérience que j'ai
faite chez’ moi. Désirant constater les effets de la
greffe sur racine, je m’adressat à trois habiles vi-
gnerons-greffears qui se rendirent sur ma propriété
située à une licue d'Angers, dans la commune de
Sainte-Gemmes. Je leur désignaiun demi-quartier
environ de vieille vigne blanche que j'avais !ré-
solu de transformer en vigne rouge. J'avais choisi
( 400 )
la portion la plus basse et la, moins favorable, de
mon enclos, par deux motifs: le premier, afin
d’avoir moins.de regret.en cas de non réussite ; ! le
second, pour m’assurér, en cas de succès , que cette
opération |.pouvait réussir dans -les. expositions les
moins favorables.
Ce fut vers le milieu d’avril 1830 ;. lorsque le tra-
vail.de la sève était en pleine activité, que mes gref-
feurs se rendirent.sur le terrain. Le travail-se fit en
ma présence de la, manière suivante : on déchaussait
les ceps avec une houe jusqu’au collet des racmes.
Arrivé à on choisissat, le plus près possible des
racines, un. eüdroit uni et sain pour scier le cep ;
après, quoi.la-partie sciée était égalisée avec un cou-
teau;bien tranchant. Le cep était ensuite fendu par
le milieu au moyen du tranchant d’une forte .ser-
petite et d’un marteau, .Un coin se.glissait au centre
de la fente pour la temir ouverte, tandis qu’on pla-
çait une greffe de chaque côté. Le coin enlevé, on
posait entre les deux greffes, sur le milieu de la
fente..et, pour la fermer , un petit morceau aminci
de bois de vigne ; et le mréflinte avec sa houe, re-
couvrait le tout de terre, de manière à res) une
petite butte tout autour du cep , .ne.laissant sortir
les greffes que de; deux yeux. Il'est à. remarquer
qu’on ne.se sert ici m1 de ligature , ni de cire pré-
parée; ce qui simplifie, et abrège beaucoup le tra-
vail. Quand le ceptest de grosseur ordinaire, la
tente se referme naturellement sur les greffes et les
Bent assez serrées pour . n’avoir à redoutér aucune
avarie. Ce n’est que lorsque vous vous. adressez! à
( 104 )
un cep nouvellement provigné ou trop faible de
bois, qu’on à recours à la ligature! Pour opérer
avec célérité , il 'faut'avoir plusieurs greffeurs, dont
Vüns’occupe uniquement à tailler les greffes et à
les ranger au fur'et à mesure dans un vase”où il
y à de l’eau en suffisante quantité pour que le bec
des greffes y puisse plonger. La greffe 'se prend or-
dinairernent partie sur du bois de Fannée, partie
sur'du' bois de: l’innée précédente. Je dis’ ordinai-
rement , ‘car quelques personnes n’employent que
du bois dé l’aännéé’et réussissent également. La greffe
&e taille comme à l'ordinaire; le bec de flûte doit
commencer immédiatement au-dessous du nœud par
lequel le ‘bois de l’année tient à celui de deux'ans.
C'est en taillant la vigne qu’on fait sa provision de
greffes. On en’ forme “ee bottes qu’on conserve au
frais soit dans une cave, soit enfoncées de quel-
ques! pouces en'terre, à l'exposition du nord ; ‘et
cela jusqu’au moment de s’en servir.
Voilà toute: l'opération ; elle est très-facile et d'un
succès cértain, Il'convient de choisir un béau temps.
S'il pleuvait pendant où immédiatement après l'opé-
ration, la reprise des greffes serait’moins ‘assurée.
Iline resteplus d'autre précaution à preridré que
de ne point déranger; ‘pendant la première année,
la petite ‘butte deterre’élevée autour dé chaque cep,
si ce n'est pour la purger destmauvaises herbes. C’est
dans cette butte de terre que la grefle_ émet elle-
même, des racines. -qui, concourent ainsi, avec _celles
du. cep. à imprimer, ce développement PER qui
nous.chärme et nous étonne:
( 102 )
Sur sept. cents ceps.que j'ai fait greffer, huit, seu-
lement n'ont pas réussi. Les autres ont poussé avec
vigueur, excepté, quelques-uns dont; les, bourgeons
ne se.sont développés qu'àa.la;sèye d'août et.du prin-
temps.suivant. Une centaine environ,,m’ont, donné
dès la même, année, des, grappes, qui.sont |arrivées
à maturité. Mais, c’est l’année suivante , 1831, que
j'ai été dédommagé de mes soins. Ma, vigne, greffée
s’est chargée de belles grappes, et ma récolte! a été
comparativement bien, plus forte que dans mes,autres
vignes. J'ai obtenu bien. près d'une .demi-barrique
de: vin rouge_dont la.-qualité promel d’égaler, les
meilleurs.crus d'Anjou (uhomatcibèn
Un. résultat aussi posilif et. aussi sâtiéfaisdois ne
me donne-t-il pas le droit de conclure que la greffe
de la,vigne sur, racine offre des avantages iticon-
testables, et. qu'elle mérite. d’être encouragée dans
notre pays, Je puis déjà; citer, un,propriétaire,de
notre ville (M: Bigot marchand, tailleur.) qui-a
fait: subir : à sa:vigne. blanche; la même. opération ,
el.qui a réussi aussi complètement; que::met:6.
Ainsi, “pour résumer en peu dé: mois: les avans
tages de Ja, greffe, sur racine, nous, dirons. qu ‘ele
régénère .une ; vieille «vigne -et; -q'elléceni: prolonge
la durée; qu’elle offre.un moyen-sûviet; faciles pour
irier ,, choisir, et, remplacer les-mauvaiscépages. qui
se rencontrent dans. presque. tous: lessvignobles, ;
j £ } ob gite. 9449921
(1) Ce YEButdé GLEHE détruire lassertion de M. Ten de
Berneaud qui prétend (dans son Manuel’du Vigneron, qu'on dôit
éviter de croiser le blanc avec le:rouge;: pagéa4ostParis, 1827.
( 105 )
qui abondent dans quelques-uns; qu’elle sert enfin
à changer en totalité ou en partie l'essence d’une
vigne, et tout cela sans courir d'autre risque que
celui de perdre une partie d’une récolte.
Je termmerar cette notice en disant un mot de
l’étonnement d’un de mes voisms de campagne, bon
vigneron lui-même, mais vigneron routinier. Il se
moqua presque de moi lorsque je km fis part de
l'essai que je voulais tenter. Je ne tardai pas à
prendre ma revanche. Vers le milieu de septembre
dernier, j'allai trouver ce voisin, et sans le pré-
venir, je le conduisis droit à ma vigne greffée, qui,
de vigne blanche, se trouvait transformée en vigne
rouge. Il me serait difficile de peindre toute la sur-
prise et le: plaisir de ce brave homme, lorsqu'il
aperçut, en place des vieux céps mousseux de
l'année précédente, une jeune vigne rouge vigou-
reusement élancée autour de ses échälas , et! ok
chaque cep pliait sous le poids de sept à huit belles
grappes bien fournies et du plus beau cramoisi.
Son étonnement fut si grand qu’il me régarda pen-
dant cinq minutes sans parler. Tout son regret, me
dit-il enfin; était de n’avoir pas connu ; trente ans
plutôt ; un procédé aussi avantageux.
(404 )
ERREUR
DES AGRICULTEURS ET DES BOTANISTES
Le @eff des Abussiis (1),
PAR M. DESVAUX.
DEpuIs long-temps nous avions soupçonné que,
relativement au TEFF d'Abyssinie, il existait une
erreur qui-se.propageait et, dans, les ouvrages d’a-
griculture et dans ceux de botanique. Ce. n’est
qu'après avoir fait, en dernier lieu, une: révision
de la : famille .des Graminées , . de cette famille de
plante si intéressante pour l’homme, que nous avons
découvert l'erreur que nous allons, signaler.
Depuis un temps indéterminé, les Abyssins eul=
tivent, comme plante. céréale,. une éspèce qu'ils
nomment, 7e/f. (2). Réussissant dans toutes: sortes
de terrains, le Zeff,sert à faire une grande parte
du pain d’une population estimée à plus d’un mil-
lion et demi. Bien que le froment soit cultivé en
Abyssinie, son usage est plus particulièrement des-
ds
(:) Lu à la séance du 19 novembre 183r.
(2) Qu'on trouve écrit Tef, Tif; mais dont la véritable pr'o-
nonciation est Teff, mot qui doit ayoir la même racine que le
Typha des Grecs.
( 105 )
né à lopulence, malgré que le riche fasse aussi
usage du pam de 7e/ff.
Dans tous les ouvrages de botanique et d’agri-
culture, on a cité pour être le Ze/f, une plante
du genre Paturin (Poa), et bien connue dans la
science sous le nom de Poa abyssinica. Mais
nous croyons pouvoir être en droit d'assurer que
ce Poa, par la ténuité de sa graine et par tout ce
qu'on a dit du Teff, que les fruits ou caryopses
du Paturin d’Abyssinie enfin n’ont jamais pu être
l’objet d’une culture comme céréale, et que le Teff
dont a parlé Bruce, n’est point ce Poa, maïs un
véritable Panicum.
Le voyageur Bruce, qui a résidé plusieurs an-
nées en Abyssinie, n’était pas botaniste, cependant
ce qu'il dit du Teff dans sa relation, et la figure
qui accompagne sa narration, démontrera, si l’on
veut bien y réfléchir, que tout ce qu’il en dit est
étranger au Poa abyssinica. « La plante, rap-
» porte-t-il, se compose de feuilles minces, du mi-
» lieu desquelles sort.un tuyau d'environ 28 pouces;
» qui se divise, à huit pouces environ du sommet,
» en\petites branches... Les fleurs sont eramoiï-
» sics..s Les graines sont renfermées dans une
» ‘enveloppe consistant en, deux feuilles creuses en
». forme conique, lesquelles ; en, se joignant, font
» UNE. COSSE conique et très —pointue. Les: grams
»!:sont :oblongs ; et gros ‘au plus comme une tête
d’épingle. »
Dans cette description imparfaite; sans doute; et
dans la figure qui s’y trouve jointe et que: nous
ÿ
( 106 )
pensons avoir été faite sur les lieux, il est impos-
sible de méconnaïître un Panicum ; toute grossière
que soit la figure, toute incomplète que soit la
description du Teff, et rien n’y convient au Poa
abyssinica.
Le premier botaniste qui a publié le, Poa abys-
sinicarest Aïton ; et Jacquin en a donné une figure.
Depuis ce temps, agriculteurs et botanistes ont cité
le Teff comme étant-ce Poa. Cette plante a dû être
communiquée au jardin de Kew, par Bruce lui-
même; comment n'est-ce pas le 7eff ?
IL faut se rappeler que Bruce dit expressément dans
sa relation, qu'il y a eu une grandeconfusion de
faite dans les graines rapportées de:son'voyage ,
par la faute-de celui auquel il'avait confié le détail
de l'arrangement de ces graines ; et il se justifie
par-A de plusieurs erreurs qu'on luiavait attribuées.
C'est probablement par cette ‘cause que le Poa
abyssinica.est parvenu à usurper üne réputation
qu'il'ne méritait nullement. Les preuves de cette
méprise sont si évidentes pour nous, que ‘nous
ne les ferons pas ressortir par de plus longs détails.
Mais’ nous dira-t-on, quel est le véritable 7e/f ?
c’est ce que nous allons essayer de chercher.
Dans les Hlustrations des Genres, par Lamarck';
2.° 903 , nous trouvons un Paricum coloratum
bien connu des botanistes ; maïs il lui est associé
uné variété B, à chaume ‘plus ‘élevé, qui est indi-
quée comme provenant d’Abyssinie , et l’on sait que
Bruce seul ; vers cette époque , ‘nous a procuré des
grames'de cette contrée , et qu'il'en envoya à Paris
( 107 )
du.tempstoù écrivain le savant, professeur Lamarck.
Nous,croyons même posséder un échantillon authen-
tique. de cette plante. Bien. que Lamarck ait rapporté
plus :tard, la plante d’Abyssinie à son, Panicum
læve.. elle ! en. est . essentiellement. distincte ;! aussi
l’ayons-nou$ décrite sous le! nom de Panicum T eff.
Il.est probable.qu’on a confondu ce Panic avec
ce.qu'on nomme, //erbe, de Guinée, qui. est une
plante de:.ce genre.et sur laquelle il règne de la
confusion dans les auteurs. IL'est à présumer que
notre, plante. renire dans la série des modifications
désignées sousile nom général, d’Æerbe dé, Guinée ;
Brucedit même qu'il.y a plusieurs variétés de Zeff,
dont. les unes font du, pain plus. blanc. .que les
auires. Bruce me dit,pas.si.sa plante ;est -vivace ou
anuuelle MAIS NOUS .SOMmMES peisuadé qu’elle: est
vivace, ainsi que toutes-celles.qu’on a-nommées herbe
de.Guinée (_Panicum polygamumSw., jumentorum
Pers.) On peut. voir dans noire, travail surles
graminées, n.° 157 ; la description du Panic Teff.(x).
:SUR L'ENGEUMEN:
PROPRE A PRÉPARER LES ARBRES DESTINÉS À UN
VOYAGE DE LONG COURS" (>),
Far N. E. LÉBRETON mue, Fépiniériste à Angers.
28
AE opération de détail d’horticulture, qui n’est
ps anis doute une chose nouvelle, puisqu’ ‘êlle a été
4
» G) Voyez dans ce volume : 'OReedane sur les Graminées
2%) Lu à la Séance du 5 Avril 1832.
(. 108 )
pratiquée depuis plus de quarante ans à Paris, mais
qui semble oubliée dans les ouvrages où lon doit
naturellement supposer qu’elle serait mdiquée , est
celle de préparer d’une manière particulière les raci-
nes des végétaux ligneux destinés à un long voyage
ou à être envoyés au-delà des mers , afin de préser-
ver lesracines de la dessication , ce qui naturellement
a lieu après une longue extraction hors de térre.
Un procédé qui m'a toujours réussi et qui sous
les yeux de M. Merlet, directeur du ‘jardin de‘botaz
tanique , a été pratiqué par mon père sur un! millier
de pieds d'arbres fruitiers expédiés ’il‘ÿ à trente ans
environ ; à Philadelphie ; ét dont quelques pied$ don-
nèrentmême des fruits l’année de leur plantation en
Amérique , mérite d’être recommandé. Il consiste à
immerger les racines dés arbres qu’on veut préparer,
dans un mélange de moitié fiente récente dé bœuf où
vache et moitié terre fortement argilleuse où ‘argile
leuse::s’il est possible : le tout tenu à consistance de
bouillie. Ayant laissé sécher à demi la première couche
dont se-couvrent les racines par l’effet-de leur im-
mersion , onles{plonge successivément et avec la
même précaution, jusqu’à ce que l’enduit ait à-peu-
près d’une à deux lignes d'épaisseur (1 millimètre
et demi à 2 millimètres): en prenant la précaution
que les divisions des racines ne s’agglomèrent pas
en masses après chaque, préparation, Lorsque
l'englumen est bien fixé et presque sec, on entoure
les racines , la tige et les branches principales , d’une
couche de mousse sèche , de trois à sept lignes ( 5 à
15 millimètres) d'épaisseur, qu'on retient par de très-
( 109 )
mince ficelle tournée en spirale. Les arbres doivent
être, couchés ensuite dans des caisses de longueur
convenable, traversées par des barres solidement
établies , pour y fixer les tiges au moyen de ficelle,
et l’on remplit tous les interstices de mousse, de
manière à ce qu'il n’y ait aucun vacillement. Les
arbres à feuilles persistantes ou dont la végétation
n’est pas interrompue, doivent être préparés de
même , mais en trouant les caisses pour y laisser
circuler l’air. Si l’on est obligé de supprimer quelques
branches, on recouvre l’entaille par un peu de mastie
à greffer, tenu liquide à basse température et com-
posé de parties égales de cire jaune , soufre, résine,
poix noire et cinq de poix. Ces précautions prises,
les arbres peuvent supporter plusieurs mois étant
disposés ainsi, et pousser avec la même vigueur
que s'ils sortaient des pépinières.
DES STALACTITES SOUTERRAINES
OÙ
PRÉTENDUES FULGORITES ( Planche V. Fig. 1 et 2),
PAR M. DESVAUX (1).
IL est à regretter que les sciences soient souvent
moins riches de faits qu’encombrées pour ainsi dire
de notions erronées, et nos travaux les plus ordi-
GP
(:) Lu à la séance du 22 décembre 1831.
( 110 )
naïres se réduisent à rectifiér les érréurs dé no
devanciers , en préparant peut-être de nouvelles
erreurs à relever, pour ceux qui doivent hériter
de nous.
Avant de savor que les corps dont nous allons
parler, eussent été signalés par un nom particulier,
celui de Fulgorite, nous les avions étudiés en place,
et nous étions loin d'imaginer qu’on pût leur sup-
poser une origine ignée.
En 1823, cherchant des espèces végétales, au
milieu d’une très-vaste sablonnière (quartz arénacé),
dans l’arrondissement de Saumur, nous remarquâmes
un assez grand nombre de corps d’une configura-
tion allongée presque régulièrement coniques, et dont
nous pûmes à diverses fois réunir un assez grand
nombre d'échantillons , pour en orner nos collec-
tions et en faire envoi aux miméralogistes. Cette
localité, au voisinage d’un bois, près du chemin
de Saumur à Loudun , à quelques pas du lieu
nommé la Belle-Étoile, présente un sable quarizeux,
mêlé de beaucoup de fer oxidé et de calcaire, au
milieu duquel sont placés verticalement et sous la
forme de cônes allongés et renversés et plus rare-
ment sous celle de longs cylindres (voy. pl. V,
fig. 2 ), les corps dont nous nous occupons.
On avait déjà observé ces modifications minérales ,
puisque nous trouvons dans la science une théorie
sur leur formation, déduite du ‘fait suivant. On a
remarqué qu’une. forte décharge électrique, dirigée
sur une masse sablonneuse, déterminait la formation
d’un pett cône , composé par l’agglomération des
( 111 )
portions witrifiées par l'action de l'électricité. De
ce fait on en a conclu la formation des corps que
nous étudions, et delà aussi le nom de Fulgorie ,
qui leur a été imposé.
Nous ne nous arrêterons pas à réfuter une sem-
blable théorie , elle ne peut se soutenir dès qu’on
étudie les choses dans le lieu où la nature nous
les a offertes.
Une erreur assez généralement adoptée , c’est que
la nature minérale est maintenant inerte ; qu’elle
morganise plus rien, si l’on en excepte les corps
concrétionnaires calcaires; et cependant Spallanzzani
a prouvé que des grès se formaient journellement
près de Messine ; un minéralogiste français à dé-
montré l'accroissement journalier dans certaines cir-
constances , des cristaux de roche ( quartz hyalin
prismé ) ; nous avons vu se former sous nos yeux
les Pouddings ferrugineux connus sous le nom de
Grison . dans le département de la Vienne; et
l’on peut enfin croire avec les mineurs , que dans
certaines circonstances , les minérais dans les mines
accroissent leur volume. D’après ces considérations,
et d’après l’étude des localités et la position des
prétendues Fulgorites ; mous ne pouvons les
considérer que comme des Séa/actites hypogées,
c’est-à-dire formées au milieu du sable : chose
assez nouvelle et assez curieuse, au moins nous
le pensons ainsi, pour fixer un instant l'attention
du physicien et du minéralogiste.
Ce n’est pas l’existence d’une stalactite , même
souterraine | qui dans le cas présent est remarqua-
( 112 )
ble, c’est la nature. siliceuse de ce corps: son
essence tenant du silex pyromaque jaune par sa
pâte et du jaspe jaune uni par son opacité.
Les Stalactites de silex n’étaient pas une nouveauté
pour nous; sans parler des Stalagmites siliceuses
du Geïsser , des Calcédoines des montagnes: volca-
niques d'Auvergne et -de l'Hyalite , nous pouvons
mettre en opposition à nos Stalactites hypogées ; des
Stalactites de silex, de six «pouces de long (42 c.
42 milli. } extraites par nous de la voûte d’une
grotte de calcaire juranique ou ammonéen , dans
le département de la Vienne, existant dans les
collections minéralogiques dont nous avons fait
hommage à la ville d'Angers.
Nos Stalacütes hypogées étaient en trop grand
nombre dans le même lieu et de formes assez variées,
pour éloigner toute idée qu’elles aient été le produit
de la foudre. Ce qui nous fait pencher à croire
qu’elles sont le résultat d’une action combinée de
la concrétion et de la cristallisation confuse des
molécules, c’est que dans le même lieu et dans la
même position, on trouvait une grande quantité
de corps de formes variées approchant de ce qu’on
nomme Aognons en minéralogie , et de même
nature absolument que nos Stalactites.
La formation du véritable Grès lustré au milieu
des sables, comme la formation des grès ordinaires ,
prouve que la nature a les moyens de tenir en
dissolution les molécules siliceuses ; les eaux du
Geïsser nous le prouvent encore , mais l'humidité
seule nc pourrait pas procurer le même résultat :
(113 )
et cependant nos Stalactites ne nous semblent pas
avoir une autre cause de formation. Ainsi ; Bien que
nous ne puissions expliquer comment agit le mens-
true employé par la nature, nous pensons que les
prétendues Fulgorites sont produites au moyen de
l'humidité, au milieu du terrain qui les renferme,
et que le principe métallique ( le fer } qui les
accompagne, aide au rapprochement des molécules
siiccuses par la propriété plus spéciale qu'a l’oxide
de fer d’être soluble. Si: l'on voulait nier que les
corps qui nous occupent ici, fussent des Stalactites,
on pourrait s'assurer du contraire, en observant
surtout deux de celles que nous possédons figurées
(pl. VE), et sur une des extrémités desquelles on
voit les traces d’un canal qui passait par leur centre ;
et par leur axe qui est d’une substance moins com-
pacte que la partie extérieure ; enfin au sommet
de celle qui.est figurée (f.1.), on remarque des
bourrelets (fig. 1, a.) qui n'ont pu être formés
que par des molécules tenues en suspension dans
un liquide, et non en fusion par le feu de la foudre.
Dans la Stalactite cylindrique (p. VI. £. 2), qui était
double en longueur de ce que donne la figure,
existe un tronc très-ténu au centré, qui indique
les rapports de formation de cette dernière avec
les Stalactites hypogées les plus ordinaires, qui ont,
dans le lieu où nous les avons observées , de 7 à 10
pouces de long (5 à 21 mill.), et presque tou.
jours les indices d’un canal central, plus ou moins
prononcé.
Des morceaux amorphes , de même nature que nos
8
( 114 )
Stalactites hypogées, ‘avaient dans le même lieu, une
position si analogue , que nous restons persuadés
de l'identité de leur origine. Il n’y a qu’une seule
difficulté : est-ce depuis que les eaux de la mer
ont quitté le sol, ou lorsque le sol, était couvert
de ces eaux, que nos Stalactites ont été formées ?
nous penchons à croire qu’elles se sont formées dans
la période qui a suivi l'écoulement des eaux de la
mer; ne supposant pas; après tout examen des loca-
lités, qu'il en puisse être autrement.
RAPPORT
SUR UNE NOTE DE M. DESVAUX ;
AYANT POUR TITRE |
Des Stalactites souterraines on prétendues fulgorites,
Par MM. CHÉRON, PILATTE tr FOURIER (1).
M. Desvaux fait observer d’abord que des corps
siliceux semblables à-ceux qu’il a trouvés dans l'âr-
(1) La Société, après ayoir entendu le rapport de la Commis:
sion, à décidé qu'il serait imprimé à la suite de l’article de M.
Desyaux.
(Note des Rédacteurs.)
(115 )
rondissement de Saumur, près du lieu appelé /a
Belle-Etoile, ont déjà provoqué l'attention de quel-
ques minéralogistes qui les ont regardés comme pro-
duits par l'électricité, s’appnyant sur celte remarque,
que si l’on fait passer une forte décharge électrique
dans une masse de sable, il en résulte une agglomé-
ration des parties siliceuses, qui se présente sous Ja
forme d’un cône. L'objet de la note qui nous occupe
est de faire voir que ce mode de formation d'où est
dérivé le nom de fufgorite, ne sauraït être admis; et
que les corps en question sont de véritables stalac-
ttes qui, en raison de leur position, peuvent être
distinguées par l’épithète d’hypogées ou de souter-
raines.
Les motifs sur lesquels cette opinion est établie,
sont céux-ci : d’abord le grand nombre de corps
semblables réunis sur le même point, leurs formes
variées et les masses tuberculeuses de même nature
trouvées auprès et dans Ja mème position, circons-
tances qui doivent exclure toute idée d'une origine
ignée telle que celle attribuée à ces corps; puis, en-
suite, pour justifier l'hypothèse de leur formation
par la voie humide, diverses observations qui proa-
vent que certaines masses minérales se forment en-
core journellement, et que parmi elles il s’en trouve
même de siliceuses. Deux des observations rappor-
tées par M: Desvaux, la formation du grzson (grès
à ciment argilo-ferrugineux) .. et une stalactite sili-
ceuse recueillie dans une grotte du calcaire secon-
daire, lui appartiennent : les autres faits ont été
observés par divers géologues ; ‘ils consistent dans
( 116 )
les concrétions siliceuses que produisent les eaux des
Geysers; les enduits calcédonieux que présentent quel-
ques roches volcaniques; les grès dont Spallanzzani
et Saussure font mention; enfin, l’observation d’un
minéralogiste français qui aurait démontré -que dans
certaines circonstances les cristaux de quartz hyalin
peuvent croître.
Il devient nécessaire d'indiquer les principales con-
sidérations qui ont déterminé Ja commission dans le
jugement qu’elle a porté du travail de M. Desvaux ;
Je m’acquitterai de cette obligation aussi succincte
ment qu'il me sera possible -de le faire.
L'action destructive et dissolvante. des eaux, ét
dans des cas plus restreints, leur puissance régéné-
ratrice sont admises depuis long-temps par des géo-
logues. L'illustre Saussure, cet-observateur si exact
et,si consciencieux,, s'exprime ainsi à l'égard duigrès
moderne que M. Desvaux cite pour exemple d’après
le témoignage de Spallanzzani: «J'ai vu, dit-il, au
bord de, la mer, sur le phare.de Messine , auprès
du gouffre de Carybde, des sables qui sout mobiles
au moment où les flots les amoncèlent sur les bords;
mais qui, par le moyen du sol calcaire que,la mer
yinfiltre, se durcissent graduellement au point de
servir; de pierres. meulières., On :ne. cesse de lever
, des pierres sur les bords sans qu'elles s’épuisent ,
ni, que. le rivage, s’abaissé ; les: vagues rejettent du
sable. dans Le. vides, et-en pen d'années ‘ce sable
s’agglutine si bien , qu'on-ne peut plas distinguer
les pierres deformation nouvelle d'avec celles-qui
sont plus anciennes. { Saussure ;, $: 306.) » Les
( 117 )
tufs, les stalactites et stalagmites, les pyrites glo-
buleuses, les minérais de fer limoneux, diverses
roches des terrams de transport et plusieurs pro-
duits volcaniques, se forment de même presque
journellement sous nos yeux. Les eaux des pluies,
après avoir pénétré dans le sein de la terre, en res-
sortent chargées dé diverses substances minérales qui
se trouvent ou suspendues dans le fluide, ou dis-
soutes par lui, soit directement , soit indirectement,
au moyen d’agens tels que l'acide carbonique, etc. ;
ces eaux vont déposer sur certains points les subs-
tances qu’elles ont ainsi enlevées, et, de la sorte,
se forment continuellement de nouveaux minéraux
et même de nouveaux. terrains. Les géologues ont
également observé que des substances que nous ne
parvenons à attaquer dans nos laboratoires qu’en
employant un feu violent et les réactifs les plus
énergiques, n’échappent point à l’action continue
et prolongée des agens que la nature met'en œuvre:
Sans parler des faits qui se rattachent aux phéno-
mènes volcaniques, tels: que ces fontaines des Gey-
sers en Islande, lesquelles situées dans un pays plat
et à douze lieues de la côte, lancent par intervalle
dans les airs des jets de 50 mètres de hauteur d’une
eau bouillante, hmpide, et pourtant chargée de si-
lice ; beaucoup d’autres observations ne permettent
pas de douter que des concrélions siliceuses peuvent
se former et se forment même actuellement. Ainsi,
par exemple, on a rencontré des rosettes dé cristaux
de quariz sur un bois fossile peu altéré, et qui étais
plutôt un bois à demi pourri qu’un véritable Zi-
( 118 )
gnile (x). On a cité encore un fait plus extraordi-
maire, c’est un silex trouvé en 1812 en béchant un
jardin, lequel silex renfermait une vingtaine de
pièces d'argent dont la plus ancienne n’était que du
16. siècle.
On voit donc que la manière dont M. Desvaux
explique la formation des corps qu’il signale à l’at-
tention des minéralogistes, n’est nullement en op-
position avec les faits observés et les idées généra-
lement. admises.
Bien plus, dans beaucoup de carrières de grès on
observe que les limites des parties solides ont des
formes arrondies et tuberculeuses comme celles des
concrétions ou des filirations, ce qui donne à penser
qu’elles sont dues à des dissolutions chargées de ma-
tière. calcaire ou siliceuse qui, ayant pénétré dans la
masse, en auront agglutiné certaines parties: dans
cette hypothèse, la: formation de concrétions de
même nature que la substance minérale tenue en dis-
solution, s'explique bien facilement. On conçoit, en
effet, qu’un léger accident: tel qu’un corps étranger
enfoui dans le sable, aura pu déterminer le fluide à
se porter. de préférence vers certains points, et qu’en
abandonnant la substance qu'il tenait en dissolution,
il aura recouvert d’un enduit calcédonieux, si cette
substance était de l'acide silicique, le corps qui lui
(2) Les collections du Muséum d'Histoire Naturelle d’Angers
en possèdent de très-beaaux morceaux donnés par M. Desvaux,
qui offrent cette particularité.
(Note des Rédacteurs.)
(119)
servait de guide; ou bien, qu'il aura donné nais-
sance à des corps concrétionnés, entièrement nou-
veaux, par son séjour dans différentes cavités.
D'un autre côté, l’action de là foudre relativement
à la production des substances minérales, paraît
tout-à-fait nulle; et quant aux modifications qu'elle
peut leur faire éprouver, tout annonce qu’elle est de:
peu d'importance. On ne connaît qu’un effet remar-
quable exercé par le fluide électrique sûr les masses
minérales situées à la surface du globe; il consiste
dans les iraces de fusion que l'on remarque par-
fois sûr les roches que la foudre a frappées, et
qui présentent alors quelques bulles vitreuses. Les
naturalistes qui ont parcouru les lieux où ce genre
de phénomènes est le plus fréquent, Saussure, Ra-
mond, M. de Hümboldt, ne signalent pas d’autres
changemens que l'on puisse raisonnablement y rat- |
tacher.
A l'égard de l’époque à laquelle les concrétions en
question ont pu se former, M. Desvaux croit que
c’est pendant la périodé qui à suivi l'écoulement du
fluide dañs lequel le sable s’est déposé : cette opi-
ion semble en effet une conséquence rigoureuse du
mode de formation d’ailleurs probable qu'il a admis.
On pourrait peut-être, à ce sujet, reprocher à l’au-
teur de la noté d’avoir été trop sobre de détails sur
les circonstances géologiques du gîte; car ces no-
tions sont toujours importantes lorsque l’on cherche
à fixer, même approximativement, la place qu'un
miméral doit occuper sous le rapport de l’âge.
En résumé, l'hypothèse que l’agglomération des
( 120 )
molécules siliceuses dans le cas signalé ici serait le
résultat de l’action du fluide électrique, est si peu
probable; et, au contraire, celle qui attribue cet
effet à l’action des eaux est tellement d’accord avec
la marche ordimaire de la nature, qu’une discussion
destinée en partie à faire ressortir le peu de vrai-
semblance de la première supposition et la possi-
bilité que des corps semblables à ceux qui sont
décrits puissent encore se former dans les circons-
tances actuelles, ne saurait par cela même présenter
qu'un intérêt secondaire. IL ne s’agit point en ef-
fet, dans la note de M. Desvaux, d’éclaircir une de
ces questions sur lesquelles les géologues sont en-
core partagés et dont la solution importe au progrès
de la science, mais seulement d’observations qui se rat-
tachent à des effets connus, et qui viennent, pour amsi
dire, se fondre dans la série des faits déjà constatés.
Toutefois, Messieurs, si ce travail nous a paru d’une
médiocre importance, considéré uniquement sous le
point de vue géologique; comme objet de rensei-
gnement, nous pensons qu'il peut avoir quelque
utilité. C'est, au reste, le jugement que l’auteur
semble en avoir porté lui-même : tout annonce que
son but principal a été de réunir des indications pré-
cises sur des minéraux qui figurent déjà dans quel-
ques collections ; et 1l faut convenir que ces détails
peuyent être désirés par les personnes qui s'occupent
de minéralogie. Cette considération paraît suffisante
pour motiver les conclusions de votre commission
qui croit devoir vous proposer d'insérer dans les Mé-
moires que vous. publiez, la note que vous avez ren-
(121)
voyée à son examen; elle est d’ailleurs peu étendue,
et il ne serait pas impossible que des discussions ul-
térieures ne vinssent ajouter à l'intérêt qu’elle pré-
sente actuellement.
Le Rapporteur de la. Commission :
h Y. CHÉRON.
NOTICE BIOGRAPHIQUE
1 Sur Billard ,
Par M. Gréc. LACHÈSE , Professeur à l'Ecole de Médecine d’An-
gers (1).
L'HOMME qui dans sa jeunesse a eu l'avantage de
consacrer à son pays les productions de ses travaux;
qui, dans l’âge mûr , a donné des fruits utiles à
ses’concitoyens; qui, dans sa vieillesse, a su se faire
remarquer par la sagesse de ses réflexions ; cet
homme, quand il succombe sous le poids des années,
mérite des honneurs, et l’on doit des éloges à sa
mémoire : mais il a été soumis aux lois qui veillent
à la succession des êtres, et les larmes de l’estime
et de là reconnaissance qu'il fait répandre n’ont
rien d’amer, car la mort n’a eu pour lui aucune
en nmes
(4), Lu à laséance du 8 mars 1832.
(12)
rigueur. Lorsqu’au contraire nous voyons celui qui
donnait de grandes-espérances fondées sur de nôm-
breux succès , être enlevé dès le commencement de
sa carrière, et descendre, presque vivant encore,
dans le tombeau ; lorsqu'on a pu l’observer for-
mant , les yeux à moitié déjà fermés, des projets
pour l’avancement de la science et le bonheur de
son pays, c’est alors que les regrets sont pénibles
et que Îles larmes sont douloureuses... Tels sont
les sentimens dont la perte: &e Billard nous a pé-
nétrés. ji
Ce Savant précoce, naquit à Pellouailles , près
Angers , le 16 juin 1800, de Charles-André-Re-
né Billard et de Jeanne Blanchouin. Il commença
ses études, en 1810, à Laval, patrie d'Ambroise
Paré, et les continua au lycée d'Angers, de 1813
à 1819. Au mois de novembre de cette dernière
année , il devint Etudiant en médecine à l'Ecole
secondaire de, cette. ville , où ïl est resté pen-
dant cinq années, dont deux en qualité d’externe et
trois comme interne: Les talens qui dépendent de
la prompütude de la «pensée, de l'imagination et
de la mémoire se firent promptement remarquer
chez lui; il sut les allier à la méditation:et à la
profondeur qui ordinairement ne se font apercevoir
qu'au moment où les idées qui se sont succédées
avec plus ou moins de: rapidité doivent être classées
avec lenteur et méthode. Jamais élève ne fut plus
exact à bien remplir ses différens services; il étudia,
enmême-temps, l'anatomie proprement dite, et l’ana-
tomie pathologique ,..sans: perdre: un: seul! moment.
(123).
Fort de ce savoir, sans lequel il n’y a pas de vé-
ritable médecin, il partit pour aller smivre les cours
de la Faculté de Paris, en septembre 1824. Demeu-
rant, pour ainsi dire, au miliew des grands maitres ,
on le vit remporter, dans de brillans et nombreux
concours, l'internat de la Pitié, sous le célèbre
Béclard , puis celui des Enfans trouvés, sous Ba-
ron; plus tard, ilentra à la maison de santé
de Dubois. Ces cliniques si importantes donnèrent
mille occasions de mettre Billard en évidence, et
l'Ecole de Paris le plaça au rang des plus remarqua-
bles de ses disciples. Dans ces dispositions si favo-
rables, il voulut suivre le conseil d’Hippocrate, qui
recommande les voyages aux jeunes médecins, et il
alla, en 1828, visiter les principales villes du midi
de la France ; Genève , où il obsenva des établis-
semens sanitaires, de la plus haute. philantropie,
que l’on présente comme modèles ; la, Suisse dans
ses détails, l'Angleterre et l'Écosse dans: leurs ins-
ütutions:
Billard était doué de ces moyens rares qui per-
mettent. à celui. qui les possède de briller. par
V'éloquence: du barreau, par le génie qui: fait le
guerrier, ou par l'observation qui formele: médecin:
Il préféra celte: dernière profession, tout: ingrate
qu’elle est, peut-être, parce que c’est celle qui
exige le: plus -un sens droit et l'amour constant: de
l'humanité: Personne n’était plus:propre à l'enseigne:
ment médical, et cependant il ne voulut. pas:s'y livrer.
Nous l'avons tous vu refuser des: chaïres qu'il devait
honorer, et jamais nous n'avons pu comprendre
( 124 )
pourquoi il ne se rendait pas à nos pressantes invi-
tations. Ce qu'il a fait ici dans ce sens, il l'avait
résolu’ à l'égard de la Capitale, où les vœux du
célèbre Orfila le ‘voulaient fixer. Il faut que les
causes particulières de cet éloignement du profes-
sorat aient été bien puissantes, car il ne pouvait être
arrêté à l'aspect des difficultés qu'offre une chaire,
tout enreconnaïssant que rien n’exige plus de talens
et de travaux ; de patience et d'activité. Il n’avait pas
tremblé, en effet, en se présentant pour répondre
à toutes les questions qu'il est possible de faire sur
une science aussi étendue que la médecine , où il
étonna, dans sept ou huit séances publiques , les
auditeurs et les professeurs ; par la rapidité, l’abon-
dance et la facilité de sa diction.
- À peine de retour dans notre ville, au mois de
mars 1828, notre jeune confrère devint le praticien
le plus recherché, le consultant le plus demandé
et le sociétaire le plus laborieux : chaque famille
voulut prendre les avis de celui qu’elle avait cons-
tamment entendu vanter par ses professeurs , de celui
qui s’était fait précéder d'ouvrages couronnés et de
nombreux Mémoires académiques, de celui qui/se
présentait avec un air gracieux , un empressement
que n’excitait ni l'amour du lucre ; ni la plus légère
nuance de vanité.
En effet, Billard était déjà célèbre , et il n’avait
pas atteint sa 28.° année : ses Mémoires sur la mem-
brane gasiro-intestinale, entièrement composés à
Angérs pendant son internat, étaient couronnés par
YAthénée avant son arrivée dans la Capitale. Il leur
( 125 )
a donné: beaucoup d'extension quand 1l les a publiés
en 1825. C'est anssi en 1825 qu'il traduisit la chi-
mie atomistique de Thomson. En 1828; il fit pa-
raître son ouvrage sur les maladies des enfans,
ouvrage qui a beaucoup contribué à le faire pr omp-
tement rechercher ,::car les:mères ne voyent rien
au-dessus de l'espoir de calmer les maux de leurs
chers nourrissons ; et les pères les plus stoïques sont
promptement inquiétés, quand les êtres, encore fai-
bles, qui semblent devoir prolonger leur existence
propre, n’ont plus la gaîté, le sourire, les habi-
tudes qui faisaient le charme et le délassement de
leur vie. Rosen, médecin suédois, si connu par son
traité sur les convulsions de l'enfance, si sage dans
ses avis pour les prévenir, a été presqu'oublié lors-
que Billard a paru sur,la scène médicale, parce
qu’en traitant la même hygiène, il l’a rendue plus
riche de citations et de découvertes modernes. - En
1830 ,:1l put, malgré sa pénible clientelle, donner
sa traduction de Lawrence, sur les maladies des
yeux. Nous ne parlerons pas d’un grand nombre
de Mémoires qu'il a fait publier, à différentes épo-
ques, dans les archives médicales , et qui tous portent
le cachet de l'observation qui a toujours, distingué
notre honorable sociétaire. -- Ces œuvres de Bil-
lard , pour être bien connues des personnes étran-
gères à l’étude de la médecine, méritant d’être ana-
lysées, elles ne le seront pas-par nous : nous en
laissons le soin à un de mos confrères qui con-
naissait «parfaitement celui que nous cherchons à
esquisser aujourd'hui, et. dont la plume facile peut
( 126 )
mieux rendre les traits; bornons-nous à regrelter
cet ami des sciences, à reconnaître le vide qu'il
laisse, et à apprécier combien nous avions à espé-
rer de songémie et de son zèle, en attendant la
séance solennelle de la Société de Médecine, dans
laquelle le docteur Mirault nous dira à quels titres
Billard avait acquis sa gloire médicale.
Quiconque aura lu les ouvrages de Perou, ce sa-
vant qui a le plus contribué. à l'avantage et aux dé-
couvertes scientifiques qui sont résultés du voyage
du géographe et da naturaliste, parti du Hâvre le 19
octobre 1800, se 'sentira le besoin de comparer Bil-
lard à ce médecin naturaliste. L'un et l’autre avaient
une) activité bienfaisante qui les rendait nécessaires
partout où ils se trouvaient. Tous deux parlaient lan-
glais, l'espagnol , l'italien, le grec , le latin avec
facilité, et tous deux'étaient peintres fidèles de ce
qu'ils avaient vu: Perou a enrichi le Muséum de Pa-
ris de ses dessinset tableaux représentant les natu-
rels de! la: Nouvelle-Hollande, de Timor, etc, et
Billard a produit par son léger pinceau une foule
d’objets gracieux. Le voyageur aux terres de Dié-
men, etcelui qui avait bien observé la Grande-
Bretagne , avaient une vaste érudition , de la viva-
cité dans: l'esprit, de la chaleur dans le caractère;
une grande franchise ; leurs affections étaient so-
lides et durables : aussi, quoiqu’ils eussent de grands
talens , ils: ont eu‘beaucoup d'amis: L’un et l’autre se
hâtèrent trop de vivre, en consacrant les jours et les
nuits à l’étude’et à faire des expériences ; tous deux
consumés par une langueur mortelle, sentaient leurs
{ 127 )
forces diminuer! en fortifiant leur philosophie. L'un
et l'autre ontusé l'enveloppe qui renfermait leur gé:
nie: Perou étant à peine âgé de 35 ans , et Bil-
lard n’atteignant pas encore sa 32. année.
Peut-on calculer ce qu’auratent pn produire des
hommes aussi actifs , aussi lummeux, aussi profon-
dément observateurs ,; si la mort ne les eût pas ar-
rêtés dès le début de leur carrière !
QUELQUES RÉFLEXIONS
Sur l'Histoire et sur Les principaux jistortens des
dDifferens siècles ,
Par M: BLORDIER - LANGLOIS (1).
Le plus uule, le plus intéressant ouvrage de l'es-
prit humain, à mon avis, ce serait l'histoire, si,
comme un miroir fidèle, elle représentait les hommes
et les choses; mais où trouver l’homme sans, pas-
sion, sans prédilection , exempt de haime, de fai-
He d'intérêt, auquel il serait donné de tenir le
burin de l'histoire ? Quel mortel n’a pas son prisme
à travers lequel il verra les objets, l'étude spéciale
à laquelle sa vocation l’entraîne, la disposition à de
certains systèmes .qui fait une des fragilités de son
(4) Lu à Ja séance ldu 8 décembre 18514
( 128 )
intelligence ?. 11 faudrait un ange, pour cette tâche
merveilleuse, et je ne dis pas encore assez, pour
peu que les anges tiennent de la nature humaine.
De cette imsurmontable difficulté. découlent tant de
jugeméns contradictoires sur les mêmes évènemens,
sur les mêmes personnes; tant de récits étonnam-
ment divers sur des faits que l’on est convenu: de
regarder comme ;les plus importans de l’histoire.
Quelques critiques ont recueilli ces déplorables di-
vergences, et le nombre en est si grand, que d’ex-
cellens esprits se sont laissé emporter à prononcer
ce mot sévère, que l’histoire n’est rien autre chose
qu’une fable accréditée. 1] n’est pas de tyran qui
n'ait trouvé ses apologistes : Phalaris lui-même se
vit louer, à son grand étonnement sans doute; et
j'ai oublié, sans le regretter, de vil écrivain qui se
déshonora pour honorer le monstre d’Agrigente ;
mais nous n'avons pas oublié quels écrivains pla-
cèrent Auguste au rang des dieux, malgré les fu-
reurs de son triumvirat; nous avons lu dans Vel-
léius Paterculns l'éloge de Tibère et de son digne
ministre ; nous savons que le moraliste Sénèque
loua Claude, qu'il placa ensuite”dans les cieux sous
la forme d’une citrouille; nous savons que le ré-
publicain auteur de la Pharsale consacra dans son
poëme des vers à Néron, qui, pour prix de sa..
faiblesse, lui ordonna par la suite de mourir; .Æ
PésG le auteur des /ns{ulions oratoires, que le
chantre de la Thébaïde ont prodigué la louange à
Domitien; que Martial a -prostitué quatre-vingts de
ses petites pièces au même tyran; et qu'il répéta
(129 )
les mêmes flatteries pour Trajan, auquel elles étaient
une injure, chantant ainsi la plus vile palinodie
contre celui que naguère il avait encensé comme
un dieu. Le respectable Thomas, dans son: Essai
sur les éloges, ne peut, à ce sujet, se défendre de
ce cri d'indignation : « Quel est l’esclave étalé dans
un marché pour être vendu, qui inspire autant de
mépris et de pitié qu’un tel écrivain, qui, cepen-
dant, à la honte de son siècle et de Rome, eut
de la réputation? » Quels assassinats n’ont pas été
incriminés et défendus au tribunal de l’histoire! Ne
sortons point de nos annales. Jean-sans-peur, duc
de Bourgogne, meurtrier de Louis d'Orléans, trouve
un défenseur dans le docteur Jean Petit: assassiné
à son tour à Montereau, tout concourait à char-
ger le dauphin de ce crime, mais celui-ci ne man-
qua pas de plumes qui rejetèrent le malheur de
l'évènement sur l’initiaive qu’aurait prise le duc de
Bourgogne contre le Dauphin : et l’on veut bien
regarder ces grands procès comme indécis. Un au-
tre, avant ces temps, est encore à peu près resté
comme un des problèmes historiques, je veux par-
ler de celui des Templiers, par les efforts réci-
proques des écrivains dévoués à Philippe-le-Bel ,
et de ceux qui se firent les vengeurs de cet ordre
malheureux. La Saint-Barthélemy n'a-t-elle pas eu
ses Caveyrac anciens ét même très-modernes ? Le
sang versé à de certaines époques de notre révolu-
tion n’a-t-1l pas eu ses approbateurs.? Je. m'’arrête.
On sait combien de choses sont demeurées problé-
maliques dans notre histoire, depuis presque un
9 :
( 150 )
demi-siècle, malgré les innombrables publications
par lesquelles on a tâché de les éclairair, ou plu
tôt à cause de cette abondance, telle, qu’on pour-
rait dire des historiens de nos jours, ce que Lucien
disait de ceux qui pullulèrent à Rome de la plus
étrange manière, de son temps, à l'occasion de la
défaite d’Arminius et des triomphes des armées ro-
maines contre les Barbares. Lucien compare cette
épidémie à la fièvre chaude qui s'empara des Abdé-
ritains après une représentation de 7 Ændromède
d'Euripide. Si l’on me trouvait trop hardi, que l’on
veuille bien me dire quel est le point que tant de
lamières sont parvenues à éclairer.
De cette disposition de l'esprit humain, si peu
favorable au iravail de l’histoire, ont résulté des
règles sans nombre pour l’apprendre ou pour lé-
crire, espèces d’enseignes où les écrivams ont eu
du moins la bonne foi de prévenir sur la couleur
qu'ils se proposaient de donner à leurs composi-
tions historiques ; où l’on voit que Volney renver-
sera tous les fondemens donnés jusqu'ici à l’origme
des peuples, que Condillac insistera sur les rapports
diplomatiques des nations, que Saint-Réal fera con-
sister tout l’mtérêt de l’histoire dans des anecdotes,
et Voltaire dans un système d'irréligion, de scep-
ticisme et de satire. Un écrivain, le plus spirituel
peut-être de l'antiquité, est celui qui nous offre
les plus judicieuses réflexions sur la manière de
traiter l’histoire, genre où il eut la prudence de
ne pas s'exercer, se méfiant de son humeur caus-
tique.et railleuse : cet écrivain c’est Lucien, dont
nous venons de parler.
( 131 )
Les premières annales furent écrites en vers; elles
le furent dans l'Orient, le berceau de l'allégorie et
de la métaphore : de là ce tissu de vérités, de fic-
tions et de merveilleux qui les composent. Il n’était
point d’ailleurs inutile d’attacher, par des noeuds
surnaturels, des peuples naguère nomades, et pour
qui l’état social était un état circonscrit et gênant.
Ces annales furent des poëmes, pour que la mé-
moire les rent plus aisément. On les chantait dans
les occasions solennelles; mais la mémoire est fail:
lible, et l'esprit inventif, et c'était une carrière ou-
verte où de nouveaux mensonges venaient naturel-
lement se joindre aux premiers.
Les historiens qui suivirent cette période ne se
prémunirent pas assez contre ces fictions , soit qu'ils
y crussent un peu, soit qu'il leur en coûtât de dé-
senchanter entièrement leurs lecteurs : ainsi nous
voyons encore des fables amuser des peuples qui
n'étaient plus dans leur berceau. ( À quel âge d’ail-
leurs ne nons laissons-nous pas amuser par des
fables ? » Celles de l'Orient, de l'Egypte, de la
Grèce, de Rome, vous sont connues. Il n’y eut pas
de contrée qui n’eût son merveilleux, et notre ville
ne fut pas exemple de commencer comme les autres.
Angers, qui s'appelait alors Egada, fut fondée par
des philosophes, des savans, dans une partie d’une
vaste forêt où l’on avait remarqué que se plaisaient
surtout une multitude d’oiseaux au chant le plas mé-
lodieux, origine que j'ai du plaisir à rappeler au
sem d’une Académie angevine. Cela se passait peu
de siècles après le délüge, sous ur roi nommé Sar-
( 132 )
ron. Mais, comme la culture des sciences ét des
beaux-arts n’est pas toujours compatible avec des
soins vulgaires, Egada tombait en rumes, sans une
colonie de Troyens; (où ne irouve-t-on pas des
Froyens dans les annales des peuples de FOccident?)
ces Troyens donc réparèrent Egada, et se mêlèrent
au-peuple de Sarron, etc.
Mais l’histoire s’épure de plus en plus; et, si
l’on admet encore quelques-unes de ces sources men-
songères, c’est avec défiance, c’est avec des formules
du doute, c’est en multipliant des autorités sur les-
quelles on se repose du fardeau trop pesant d'une
croyance que l’on ne partage pas.
Hérodote fut dans ce cas. Mais que de-reproches
n’a-t-on pas adressés à l’écrivain consciencieux dont la
Grèce-ne cessa pas d’être idolâtre ? Pourquoi tant
de sévérité ? Hérodote consacre une partie de sa
vie à parcourir les lieux dont il se propose d'écrire
l'histoire ; il n’est pas de fatigues qu'il ne brave pour
s’instruire afin d’instruire les autres ; il recueille tout
ce qui s'offre à son avide curiosité, assuré d’être,
_avec ce précieux butin, bien venu de la plus curieuse
nation du monde ; il emploie d’autres années à médi-
ter sur ses abondans matériaux, à les ordonner ,
à les enchâsser dans l'or de son harmonieux lan-
gage ; sans doute il rejette plus d’un des renseigne-
mens qu’on lui fournit dans ses voyages; ce qu'il
en adopte de trop difüale à croire, il le produit avec
hésitation ; il va même, dans son scrupule, jus-
qu'a n’oser affirmer, les jugeant invraisemblables ,
des assertions qui depuis ont été reconnues pour
( 135 )
des vérités ; que pouvait-on désirer de mieux ? Aurait-
on préféré que les traces de la première existence des
peuples n’eussent pas trouvé de place dans le livre
d’Hérodote ? Quelles qu’elles soient , qui de nous
voudrait qu'Hérodote les eût anéanties ? Enfin un
ouvrage sort de ses mains, chef d'œuvre de’ grâces
et de simplicité; et la Grèce entière , à ces solen-
mités dont le nom fait tressaillir encore toute âme
sensible, à ces jeux qui firent palpiter tant de cœurs
généreux , applaudit avec ivresse son historien , et
donne à chacun des livres qui composent son ouvrage
le nom d’une dés neuf Muses.
Ctésias , historien grec, signala beaucoup:d’erreurs
dans Hérodote, et lui-même en commit de plus
graves encore: tel est l'esprit humain, que Luther
compare à un: homme ivre: à cheval: « Relevez-le
d'un côté, dit-il, et il retombe. de l’autre. »
Hérodote ‘avait payé son tribut de complaisance
à la curiosité des Grecs, ou de crédulité à la fai-
blesse humaine ; deux historiens, qui vinrent après
Ii, s’affranchirent de ce double tribut , sans en
être moins chers à: leurs lecteurs ; vous nommez
Thucydide et Xénophon..La gravité de leur carac-
ière, les temps plus rapprochés qu'ils avaient à
faire connaïtre , le désespoir peut-être d’aiteindre
aux charmes de narration de-leur prédécesseur’,
leur fit suivre une autre route: tous deux, de génies
divers, mais tous deux, concis et sévères dans leurs
récits, ennemis de ious détails étrangers: philoso-
phes tous deux, l’un disciple d'Anaxagore et l’autre
de Socrate, mais l’un plus vigoureux , plus exclu-
( 154 )
sivement historien, l’autre plus moraliste , + plus
fleuri; tous deux exilés par leurs concitoyens, pour
avoir un moment cessé d’être heureux à la guerre,
mais emportant dans leur retraite une ame libre de
ressentiment, d’amertume ; y rédigeant avec calme
leurs souvenirs et les fruits de leurs études, et se
consolant de ne plus servir leur patrie deleur épée,
en travaillant à la servir de leur plume. Thucydide ,
arrêté trop tôt dans sa carrière , laissa incomplète
la tâche qu'il s'était prescrite, la Guerre du Pélo-
ponèse, guerre où la Grèce , dont l'union avait été
si fatale aux Mèdes, se déchirait de ses propres
mains , ct préparait , pour l'avenir , une proie aux
barbares. Xénophon à Scyllonte, acheva l'ouvrage
de Thucydide, finit cette lutte de 28°ans par la
prise d'Athènes et la tyrannie des Trente. Athènes
subjuguée par Lacédémone !.. déplorable spectacle !…
démence qui confond l'esprit humain !..... alliance
inconcevable d'idées !
Xénophon vécut assez pour multiplier ses titres
à l'immortalité. Ses Æelléniques comprennent depuis
la:2r.° année de la guerre du: Péloponèse jusqu’à
la bataille de Manünée : c'était encore une cata-
strophe imposée à sa plume ; celle d’an grand homme
expirant sur ses propres trophees ,. pour me servir
de lexpression d’un grand orateur ; la’ catastrophe
d’un homme qui valait à lui seul toute la Grèce.
Epaminondas, héros presque idéal par la perfec-
tion de ses talens ét de ses vertus , expire vainqueur
à Mantinée, éteignant par sa mort une petite répu-
blique, qui n’a que par lui quelques momens d'éclat
( 135 )
dans l'histoire ; mais ne vous attendez pas à tout
ce pathétique , à ces lieux communs dont les mo-
dernes eussent accompagné ces évènemens; Xéno-
phon les raconte; 1l se contente du sublime de la
vérité.
En ces deux historiens commence le second, ou,
si vous le voulez, le troisième âge de l'histoire ;
une narration exacte et sans ornement. Hérodote
avait fait presque un poëme; c'était comme une
perfection des premières annales : Thucydide et
Xénophon créèrent la véritable histoire antique.
On a blâmé la sécheresse de Thucydide: Cicéron
Jui fait le singulier reproche qu'il n’est d'aucune
ressource pour les rhéteurs; Démosthènes transcrit
huit fois Thucydide , le texte sous les yeux, et une
fois de mémoire : décidez entre ces deux jugemens,
ou plutôt souvenez-vous de ce que disait Jean-Jac-
ques , que Cicéron était un avocat , el Démosthènes
un orateur. Thucydide fut surnommé le Phydias de
Yhistoire, et Xénophon l'abeille attique, par ces
Grecs qui se connaissaient apparemment en grec et
en génie.
Ce fut un peuple prodigieux que ce peuple grec!
lui seul de tous les peuples semble n'avoir point
d’aurore; lni seul, à son berceau, brille d’une lu-
mière éblouissanie. Il n'en est pas ainsi du peuple
romain. Il était dans sa destinée, disent les poëtes|,
de gouverner le monde : regere imperio populos;
les lettres et les arts ne devaient y naître que bien
tard, ou devaient être pour lui des inspirations étran-
gères. L'histoire n’y eut que d’obseurs et, barbares
( 136 )
commencemens, et ce fut un grec qui, à Rome,
ouvrit celte belle carrière.
Polybe! quel nom réveille le nom de ce grand
écrivain! Mégalopolis, qu'Epaminondas fonda, le vit
naître; un des chefs de la Ligue Achéenne, Lycortas,
fut son père; il fut, dans son jeune âge, le dis-
ciple et l’ami de Philopæmen. Les malheurs de la
Grèce l'appelant à Rome, où il resta en Ôtage, son
caractère et son génie lui firent un ami de Scipion
Emilien, le vainqueur de Carthage et de Numance;
il partagea l'intimité de ce grand homme avec Lélius
et Térence.
Polybe choisit pour sujet le temps qui s’écoula
depuis la 2° guerre panique jusqu’à la destruction
de la monarchie macédonienne. ( période de-53 ans).
Il'iraite de toutes les nations alors connues ; mais,
avéc une complaisance spéciale, de Rome, qu'il adop-
tait pour patrie, sans néanmoins abjurer sa patrie
naturelle. Il s'applique, avec la vaste portée de son
génie, avec sa: philosophie puisée aux meilleures
sources, à faire connaître dans ses détails, un em-
pire dont il admire la gloire, sans dédaigner la
Grèce, qui touche. à sa ruine totale. Quoiïqu’habile
dans la langue des vainqueurs, il écrit dans celle
des vaincus, hommage qu'il aime à rendre aux dieux
où. il: vit le jour, et où reposent les cendres de ses
pères; il écrit une histoire qui va exciter l’émulation
des romains, et servir de modèle à Tite-Live (1).
(1) De quarartte livres qui la composaient, il ne reste que les cing
premiers; les douze suivans, qui ne sont qu’en sommaires, son
attribués à Caton le censeur, à
( 137 )
Le temps a dévoré la plus grande partie de cet ou-
vrage.
La littérature et les beaux-arts vont passer en
Italie; les Romains vont se donner pour maîtres dans
les arts de l'esprit, les peuples qu'ils ont soumis par
ceux de la guerre; la fierté romaine va s’incliner de-
vant des charmes de la Grèce. Est-ce à ces charmes
qu'il faut assigner la décadence romaine? Je suis
loin de le croire , malgré des autorités imposantes.
L'oracle regere imperio populos est tout de Virgile ;
c'est, comme tant d’autres, un oracle après lévè-
nement. Rome pouvait être en même temps et puis-
sante et éclairée. En vain le plus séduisant des So-
phistes, dans une célèbre prosopopée s'écrie-t-il :
« Quelle splendeur funeste a succédé à la simplicité
romaine! quel langage étranger! quelles sont ces
mœurs efféminées ?....….. Romains, hâtez-vous de
renverser ces amphithéâtres ; brisez ces marbres,
brûüléz ces tableaux, chassez ces esclaves qui vous
Subjuguent , et dont les funestes arts vous corrom-
pent..., etc: » (1) Phrases plus sonores que vraies,
paradoxe: harmonieux que dément l'histoire. d’un
grand, nombre de nations. C'est bien à d’autres
causes qu'aux lettres qu’il faut s’en prendre du dé-
sordre des guerres civiles de Rome. Marius était un
homme sans culture ; Sylla dut à son ambition seule
les fureurs de, sa magistrature, et non à des talens
acquis dans les trop courts instans d’une jeunesse
(1) J.-J. Rousseau, discours sur cette question : #2 le rétablis-
serment des sciences, eëc.
( 138 )
calme et studieuse. César, passant le Rubicone, n’é-
tait point le César des Commentaires, mais bien le
ciloyen révolté, qui, traversant une bourgade des
Alpes, disait ce mot célèbre : « J'aimerais mieux
être ici le premier que le second à Rome. » Quand
-Octave quittait si précipitamment ses maîtres d’Apol-
lonie, pour se porter héritier de son grand-oncle,
et prendre en main les rênes de l'état, que sa mort
laissait flottantes, étaient-ce donc ces arts qu'il dé-
laissait en Grèce, ou l’ardeur prématurée de com-
mander, qui le faisait voler à Rome? Rome tom-
ba, parce que les états ont le destin des individus;
parce que les sentimens nobles et grands s’épuisent
et font place à des affections sensuelles et désordon-
nées; parce que l’égoïsme vient avec la ‘vieillesse
chez les nations, comme chez les particuliers, et que
l’égoisme est le poison destructeur de toute éléva-
tion, de touic veriu.
Je demande pardon de cette digression; il doit
être accordé au sentiment qu'éprouve naturellement
un Français à l’idée seule de cette incompatibäité des
beaux-arts et de la gloire. La France a prouvé, et
prouvera long-temps encore, j'espère, la vanité de-
ce paradoxe.
Je passe à regret et Salluste, qui me semble n’a-
voir copié personne, et César, qui peut-être eut
en vue Thucydide, en écrivant ses campagnes. Je
voudrais me livrer à quelques réflexions sur ces deux
historiens recommandables, mais ce discours ne de-
vait être qu’un coup-d’œil, et malgré moi je le vois
s'étendre.
( 139 )
J'arrive à Tite-Live, qui raconta en un style si
nombreux et si pur les commencemens et les pro-
grès de Rome; qui traversa, avec la franchise d’une
âme indépendante et grande, la période calamiteuse
où expira la république; qui, sous l'empire d'Au-
guste, célébra les hommes qu'il croyait être les vrais
amis de la patrie et les défenseurs de sa hberté mou-
rante; à Tite-Live, dont le beau caractère, empreint
parlout dans son ouvrage, devait inspirer noire
Pierre Corneille, et imposer au cauteleux Auguste,
qai, pour toute vengeance, l’appelait £ pompeïen.
Mais Polybe avait donné à Tite-Live l'exemple
d'une histoire philosophique, que Tite-Live ne sui-
vit pas. Îl fut souvent un conteur superstitieux et
crédule. Comme Hérodote, il critiqua peu ses maté-
riaux. Des imvraisemblances, dont son esprit supé-
rieur aurait dû se révolter, prirent place, dans son
livre, à côté des faits les plus authentiques et les
plus glorienx, et... Mais j'en rends grâces à Tite-
Live. Assez d’autres ont pris soin d'éplucher son
histoire et de s’égayer de ses rêveries. S'il n’y avait
pas donné un si libre accès aux merveilles du vieux
temps de sa patrie, nous n’aurions pas aussi bien
connu Rome. L'histoire d'un peuple ne doit pas se
détacher de celle de ses préjugés, de ses faiblesses
eh de ses erreurs.
Un historien devait naître, armé de tout le dé-
dain des mots et des choses inutiles, de toute la
puissance d’une inflexible raison, de tout le mépris
qu'inspire poar l'homme une étnde approfondie de
l'homme, de toute l'indignation de la vertu pous-
( 140 )
sée à bout. Tacite..… Plus d'erreurs vulgares, plus
de concessions à la faiblesse humaine, plus de ce
style plein et cadencé, qui décèle moins une âme
noblement occupée, qu’un esprit ingénieux et maître
de lui; plus de fleurs, à moins qu’elles ne naissent
d’elles-mêmes du sujet. Ce ne sont pas des cou-
ronnes, mais des palmes qu’il présente à la vertu
persécutée; ce ne sont pas de verbeux reproches,
mais ün fer brülant qu'il applique aux délateurs,
aux tyrans, aux bourreaux. Son style est quelque-
fois coupé comme les sanglois, son expression pro-
fonde et brève comme la colère; obscure et sombre
comme le trouble dont il ne peut toujours se dé-
fendre. Honneur au prince sous qui parurent Îles
ouvrages de Tacite; qui ne craignit pas la manifes-
tation de ses fortes pensées, et qui, loin de se mon-
trer solidaire avec ses monstrucüx prédécesseurs ,
abandonna leurs vies au ressentiment des peuples,
et aux méditations des tyrans à venir (1).
Tacite était un sublime modèle, mais ce modèle
était décourageant , il ne fut que très-imparfaitement
imité. J.-J. Rousseau, chez nous, voulut étudier
sa manière, mais cela ne s'étudie pas: Il avait peut-
être un peu -de l'humeur de Tacite, maïs il n’en eut
ni la concision ni le trait. D’Alembert fit les mêmes
études ; à force d’art il réussit un peu mieux qüe
Rousseau, mais quoi de plus opposés que le’ froid
(1) Rarâ temporum felicitate ubi sentire quæ velis, et quæ sers
tias, dicere liceat. Tac. hist,
(141)
ei fin d'Alembert et le peintre de Tibère et de Né-
ron, de Traséa et de Soranus!
L'histoire, comme nous venons de le voir, n’est
jusqu'ici qu'une narration des évènemens. Peu de
critique, peu de philosophie, peu de notions étran-
gères aux faits, peu de réflexions morales. Xéno-
phon, dans sa Cyropédie, pouvait donner naissance
à un nouveau genre historique; il ne s’en souvint
plus lui-même dans ses autres ouvrages. Polybe eût
pu introduire l’histoire philosophique, et ce n’ent
pas de suite. Tacite avait fait faire des pas immenses
à l’art historique, dans la peinture des mœurs et
des caractères ; il n’eut pas d’imitateurs. J’omets des
écrivains, qui ne furent pas sans mérite, mais qui
firent plutôt reculer qu'avancer l’histoire. Je me
traîne à travers le Bas-Empire, où je ne vois que
des historiens dignes de leurs siècles, siècles de re-
présailles et d’horreurs, siècles où l'univers, long-
temps opprimé, se repliait avec rage sur ses op-
presseurs, désormais incapables de se défendre ;
siècles où la barbarie, luttant contre une civilisa-
tion usée, devait bouleverser le monde pour le re-
vivifier ; siècles enfin où l'historien, sous la dictée
de la bassesse et de la peur, excusait les vaincus
en prodigaant l’hyperbole aux mœurs et aux formes
des vainqueurs (1). Mais que pouvait l’histoire en
des contrées où les souverains troublaient à plaisir
(1) On trouve dans Jornandès, his£. des Goths, que les Huns
étaient enfans de femmes et de démons.
(14 )
leur empiré par des disputes théologiques, quand
l'ennemi rugissait à leurs frontières, et qu'ils fomen-
taient d’absurdes querelles de cour, lorque lunion
la plus compacte eût à peme suffi contre les efforts
des Huns et des Vandales ?
Tout subissait une révolution politique et morale;
les lettres éperdnes n’avaient plus d’asile. Les Gaules,
trop fidèles aux traditions orales usitées par leurs
terribles druides, n’avaient point profité, autant
qu’elles l’auraient dû, des écoles romaines si floris-
santes à Lyon, à Bordeaux, à Autun; et, tandis
que Rome voyait ses enfans d’au-delà des Alpes y
puiser des connaissances dignes de la métropole, les
imdigènes restaient en général dans une complète im-
différence pour les travaux de l'esprit.
Cependant le christianisme pénètre dans les Gaules.
Des retraïtes s’onvrent de toutes parts au dégoût du
monde, à la faiblesse, à la piété, retraites déli-
cieuses en ces temps d’agitation et de crimes; oasis
de concorde et de régularité, dans ces déserts de
haine et d’anarchie. Une multitude de disciples de
Saint Benoît, différens de constitutions et d’habit,
peuvent, sans trouble, tant est grand alors l’em-
pire de la religion, partager leurs tranquilles mo-
mens entre la prière, l'étude et le travail des mains.
Un génie, favorable aux sciences et aux lettres, leur
suggère de sauver de la destruction du temps et des
barbares ce qui leur échappa des œuvres de Pant-
quité; les manuscrits se multiplient ; ils enrichissent
les cloîtres, et répandent quelque instruction dans
le monde. Nous ne pouvons refuser une vive re-
(145 )
connaissance aux laborieux solitaires, qui réchauf-
faient dans leur sem des germes de civilisation et
de lumières dont devait sortir une société nouvelle.
À force de s'exercer sur le génie des autres, on
se sentit, dans les cloîtres, la vocation d'écrire sous
son inspiration propre. Etonnons-nous seulement,
qu'après avoir multiplié d’excellens modèles, les
moines composassent de si difformes, de si malheu-
reux ouvrages. Félicitons-nous, d’autre part, que,
sans redouter une comparaison désavantageuse, et
dédaignant les formes grecques et latines, ils se
soient fait une physionomie particulière, se soient
peints avec une vérité sans réserve, et nous aient
montré leurs siècles tels qu'ils furent (1). L'histoire
des fondateurs d’ordres, les chroniques des abbayes,
les légendes des saints, sont des sources inestimables
pour l’archéophile. Par elles il vit dans les siècles
passés , il habite avec les solitaires, 1l assiste à leurs
exercices consolateurs ; il entenil les successeurs de
Mérovée et de Louisle-Débonnaire s’exterminer dans
les partages de la monarchie, autour de ces mo-
nastères, moins défendus encore par leurs murs et
(:) Le chancelier de J'Hpital prenait plus de plaisir à la sim:
plicité de ces anciennes annales qu’à l’éloquence magnifique des
grecs peu véridiques.
Nec minis oblector francorum annalia regum
Scripta legens, ullo sine fuco prorsus ‘et arte,
Quûm quæ magrificè græcis conscripta leguntur
Historiis @grè speciem retinentia “vert.
(Ep. 3.° ad card. Tur.}
( 144 )
par leurs créneaux, que par le respect des choses
saintes et la crainte des châtimens éternels.
Mais ces asiles allaient être profanés; les nou-
veaux manuscrits subir en grande parte le sort
qu’avaiént éprouvé les premiers de la part des Goths
et des Vandales ; les temples élevés à grands frais,
être la proie des flammes; les restes vénérés des
Saints abandonnés aux vents ou précipités dans les
eaux : les colonies de Saint Benoit errer désolées,
et les peuples aux aboiïs ajouter douloureusement à
leurs prières cette touchante invocation: « à furore
Normannorum libera nos, Domine. »
Ces épouvantables Normands, qui parurent des le
temps de Charlemagne, et ne cessèrent leurs ravages
que plus d'un siècle après, sous le règne de Charles-
le-Simple, accablèrent surtout notre provmce; et
l’on voit encore à Angers un monument de leurs fu-
reurs. Alors l’Anjou fixa particulièrement les regards
du souverain : deux comtes, l’un résidant à Sé-
ronne (1), comte d'Anjou d'Ouire-Maine, l’autre
à Angers, comie d'Anjou en-decà, furent chargés
de combiner leurs forces, et de s'entendre contre
les normands. Ingelger, ce guerrier cher à la gloire
et aux belles, ce héros de courage militaire, de re-
connaissance et de loyauté, fat #nvesi de l'Anjou
en-deçà ; Robert-le-Fort, l'effroi des normands,
le sauveur de Paris, et qui, par ses exploits, mé-
rila le titre nouveau de duc de France, et fut la
1) Actuellement Châteauneuf,
( 145 )
southe! de la 3.° race de nos rois, fut investi de l’An-
jou au-delà.
Ici commencent, à proprement parler, nos annales
et celles de plusieurs autres provinces.
On sait que, peu de temps après Ingelger, et par
suite de la concession des provinces à üire hérédi-
taire, s'établit en France une organisation politique
bientôt fameuse dans notre Lisioiee de France, je
veux, dire le régime féodal, alliance des seigneurs
pour le maintien de leur pouvoir, mais fédération
différente de toute autre dont l’histoire fit mention,
par sa gradation descendante du monarque suzerain
à ses grands vassaux, de ceux-ci à d’autres seigneurs
d’un ordre secondaire , dont à leur tour ils deve-
naient suzerains, et cela successivement jusqu’au
simple châtelain, qui n'avait pas de vassaux, mais
seulement des sujets ou des serfs; système qui pou-
vait accommoder chaque possesseur de fiefs, mais
qui, dans un grand danger, laissait la monarchie
sans défense, malgré l’héroïsme de la noblesse de cette
époque; témoins les journées de Créci, d'Azincourt
et de Poitiers, mais système enfin qui, tout peu
philosophique qu'il était, sauva peut-être la société
française, dans ces temps de passion et de barbarie.
Du moins est-ce pour l'avoir considéré sous ce rap-
port, que Montesquieu en fait l'éloge que nous li-
sons dans son Esprit des Lois (1). Au resle ces mille
puissances, pour la plupart ombrageuses, igno-
(1) Liv, xx, chap, 1er
1Q
( 146 )
rantes et cruelles, étaient peu favorables à la fran-
chise historique : aussi quelles furent les annales et
les chroniques de cet âge!
Le sentiment de leur indépendance, et le respect
que se portaient les feudataires à eux-mêmes, leur
fit inventer l’ordre militaire et presque sacré de la
‘chevalerie. L'absence de tout spectacle où l'esprit
fût pour quelque chose fit tourner à spectacle les
cérémonies de l’accolade. On institua ensuite des
jeux, bien faiblement imités de ceux de la Grèce;
ce furent les tournois. L'ancienne vénération des
‘Gaulois pour les femmes se réveila dans toute sa
orce et avec les formes les plus armables dans cés
solennités (1, où le chevalier prodiguait pour leur
plaire ses grâces, sa fortune et quelquefois son
sang. |
La féodalité, avec le temps encoré, vit naître
une profession inconnue jusqu'alors, à moms qu'on
y trouve quelque rapport avec les rhapsodes des
premiers siècles de la Grèce littéraire : ce sont ces
poètes chanteurs que l’on nomma Troubadours et
Trouvères. Les seigneurs, Tes dames surtout s’en-
nuyant de leur sombre puissance, donnèrent entrée
dans leurs donjons à ces poètes errans, ‘qui y in-
troduisirent les plaisirs et l'amour. Les châtelains se
déridaient parfois, et parfois aussi montraient la
griffe (qu’on me passe ce mot qui tombé sous ma
(1) Oui, dans ces-solennités; mais, dans l’intérieur-de-Jeurs
maisons, les femmes étaient souvent traitées ayec une dureté et
une brutalité tout-à-fait barbares.
( 147 )
plume). De trop aimables chanteurs éprouverent
qu'on ne peut pas être toujours
Fort bien avec les femmes,
Bien avec les maris.
De tragiques aventures signalent la vie de quelques
troubadours. Rien de plus instructif d’ailleurs, par
rapport aux mœurs et même à l’histoire du temps,
que les ouvrages de ces poetcs du nord et du midi
de la France.
Enfin paraît Froissard. Les dames et les cheva-
liers ont trouvé leur historien; il est en outre un
de leurs poètes les plus chéris. De la plume il passe
à la lyre; il chante l'amour et raconte les faits
d'armes; et le plus fleuri, le plus gracieux des chro-
niqueurs va consacrer ses veilles à nous reproduire
une des plus désastreuses périodes de notre his-
toire (1).
Monsirelet, le continuateur de Froissard, moins
animé, moins pittoresque, mais plus ami de la
France, nous expose les funestes suites de la dé-
mence de Charles VI, et les miracles de cet être
humain et fantastique, illusoire et positif, incon-
cevable enfant de l’exaltation mystique et de l'amour
de la patrie; de cette Jeanne d'Arc, si indignement
traitée de son vivant par ses ennemis et par son ro1,
et, après sa mort, soit par le lourd pédantisme d’un
poète, soit par le spirituel cynisme d’un autre; de
QG) De 1326 à 1e depuis Philippe - -le- Bel jusqu'à Char
les vrs
( 148 )
cette Jeanne d'Arc, ‘qui dit d'elle si heuréusement
dans une tragédie nouvelle :
Jeune et faible instrument de la faveur céleste,
Je marchais, je parlais... Dieu seul à fait le reste.
C’est dans ce siècle que nous voyons le chef d’une
nouvelle espèce de productions historiques, moins
grave, moins rigoureuse que l’histoire, mais plus
communicative, plus confidentielle, d'un plus facile
accès pour une foule de détails qu’elle rejetterait ,
et qui peint beaucoup mieux les âges et les hommes,
je parle des Hénorres, et de Philippe de Commines,
qui seul conserva la faveur de Louis XI sans deve-
nir crimmel ni bas, et qui nous révéla lâme de ce
monarque rusé, superstitieux et cruel.
Comment, avec de si bons modeles, Bourdigné,
notre annalisie, qui pouvait enfin considérer de haut
l'histoire féconde et variée de l'Anjou; qui, instruit
par les égaremens de ses devanciers, devait se tenir
averti de ne pas donner dans leurs folles visions,
Pourdigné, au XVI: siècle, bien des années fps
Commines, plus d’un siècle après Froissard,
temps de la renaissance des lettres, au milieu des
écrivains spirituels qui font du siècle de François 1.7
un de nos siècles hitéraires, ne nous donna-i-il
qu’une pitoyable compilation des chroniques et des
légendes les moms dignes de foi? Ceux qui auront
eu la patience de lé lire attesteront combien de contes
puérils_et absurdes il offre à chaque page, et de la
meilleure foi du monde. Ici c’est le miracle, d'une
hostie qui se change en serpent; là un comte, ex-
(149 )
pirant frappé à la tête et aux flancs par l'ombre de
Saint Maur; là un enfant naissant, qui supplée à
la distraction de son parram, en répondant lui-
même Amen au prêtre qui le baptise; tantôt c’est
une journée qui en dure trois, pour donner à Char-
lemagne le temps de venger, d’une manière plus
éclatante, la défaite de son neveu Roland à Ron-
cevaux ; tantôt c’est la châsse de Saint Germain qui;
dans l'église d'Auxerre, reconduit d'elle-même, et
avec une politesse tount-à-fait touchante, celle de
Saint Martin de Tours, etc.: voilà ce qui fourmillé
dans Bourdigné:
La manière dont Philippe de Commines avait traité
l'histoire eut de nombreux imitateurs. On jugea fa-
cile le genre des Mémoires, parce qu'il était naturel
et sans apprêt. Les temps de troubles et d’anarchie
voient surtout'abonder ces sortes d’écrits, alors que
chacun croit avoir été ou.être-une puissance, et de-
voir au monde le secret de ses vues et de ses pensées,
dont se passerait volontiers le monde : j'en atteste
les mille et un Mémoires que naguère châque jour
voyait éclore, et que l’on commence d'apprécier ce
qu'ils valent,
Dans cet océan, un petit nombre surnagent. On
aura remarqué d’Aubigné qui, pendant la ligue, a
tenu la plume avec passion , avec rudesse, mais avec
vérité, historien d’un parti qui fut presque toujours
malheureux, et avec lequel on voulut en finir,
comme on sait, par une épouvantable catastrophe.
Une guerre civile ridicule et sanglante, une guerre
digné d’être chantée en vers burlesques, comme dit.
(450 )
Voltaire, donna naissance à un écrivain aussi bizarre
qu’elle, le cardinal de Retz, prélat remuant plutôt
qu’ambitieux, homme souveraimement doué d'esprit
et de présence d'esprit, factieux populaire qui mé-
prisait le peuple, frondeur de la cour dont il con-
voitait les faveurs, espèce d’enfant qui brise et dé-
compose, moins dans des intentions philosophiques
et d'analyse, que pour voir ce qu’il en adviendra. Le
cardinal de Retz met son lecteur dans une entière
confidence de ses erreurs, de ses étourderies, de ses
vices, non, comme Rousseau, pour prouver que le
monde lui doit des statues, mais pour expliquer, en
fanfaron, la justice que lui rendirent, en l'oubliant,
et la cour et les gens honnêtes.
Pour les raisons que je viens de dire, les temps
où nous vivons devaient voir naître bien des Mé-
moires. Îls abondent en effet, presque tous dégoû-
tans d’indiscrétion , de récrimination, de partialité,
de cynisme. Des hommes de letires d’une rare ha-
bileté, sans doute, ressuscitent les hommes d'état
les plus vils, les courtisannes les plus ignorantes et
les plus frivoles, pour leur mettre une plume à la
main, et leur souffler l’art d'écrire les scandales ‘de
leur vie : spéculations politiques ou de librairie , mais
qui décèlent à un haut degré le talent. de revêtir
ioutes les formes, de jouer ious les personnages;
talent , fruit et moyen des révolutions.
Sauvons-nous de cette misérable cohue de libelles
ou de niaiseries, et nous.réfugions dans les Mémoires
que nous donna, 1l y a quelques années, le comte
de Ségur. Lisons et relisons l'ouvrage charmant d’un
( 151 )
homme qui vécut au sein des cours sans en êlre
ébloui, qui jugea les grandeurs en sage, sut être
et grand seigneur et simple parüculier, ne déclama
contre aucune des conditions sociales, fut philo
sophe sans jamais l’affecter, ami du plaisir sans en
abuser jamais, se consola au sein de la littérature
et des beaux-arts de sa fortune et de ses honneurs
évanouis , fut par son caractère un des hommes les
plus heureux de son temps, et nous laissa, dans ses
ouvrages, un, moyen assuré de l'être, autant du
moins que dure leur lecture.
Revenons à l'histoire. Elle devait prendre un ca-
ractère tout-à-fait différent, en nos siècles où les
progrès dans les sciences naturelles, politiques, éco-
nomiques agrandissaient si prodigieusement le cercle
des idées, et où les écrivains se trouvaient si impé-
rieusement lancés dans la carrière des digressions :
de là un genre nouveau, dans lequel nous avons des
ouvrages d’une haute importance. Malgré la nuance
de système qu’on remarque en quelques-uns, qui de
nous n’a pas admiré les travaux des Thierry, des Gui-
zot, des Châteaubriand, des Sismondi?
Les siècles passés sont du domaine des recherches,
des conjectures, de Ja critique; mais. en est-il abso—
lament de même de l'histoire contemporaine ? Je ne
le crois pas. J’expose ici mon .opinion avec fran-
chise. Pourquoi dans l’histoire contemporaine ne pas
conserver cette simplicité, surtout cette désappro-
priation que nous aimons chez les anciens, et dans.
les bonnes annales du moyen.âge?. Notre devoir. est
d'être comme ceux des peintres fidèles des évène-
(152)
mens et des personnes. Que nos récits exercent un
jour des plumes philosophiques, à la bonne heure;
ne dérobons pas aux siècles à venir une faculié qu'il
nous est donné d’exercer sur les temps qui nous ont
précédés. Ils sont à nous, ceux-ci; permis à nous
de les interpréter selon notre intelligence, notre
imagination et nos lumières. Laïssons à nos neveux
de nous interpréter à leur tour. Ce que nous met-
trions d’étranger à la vérité ne ferait qu’offusquer
la vérité. Notre histoire, tout acteurs que nous y
sommes, et même parce que nous y sommes ac
teurs, ne nous appartient point; elle appartiendra à
la postérité; qu’elle en fasse un jour à son plaisir:
comme nous faisons de celle de la Grèce et de
Rome.
Mais gardons-nous, envers les anciens, d’un es-
prit de prévention et de satire; donnons cet exemple
à nos neveux, qui nous jugeront. Comme nous
voyons de loi les objets, nous y apercevons des
formes, des rapports qui durent échapper aux ‘écri-
väins du temps. Nous sommes à un point de vue
qui leur manquait; mais de ce point de vue ne nous
créons pas des chimères: Expliquons, maïs soyons
sobres du ‘blâme: Les siècles ne peuvent anticiper
sur les Sièclés. Ne tümbons pas dans de risibles ana-
chronismes. Si nous rencontrons des erreurs, ne les
reprôchons pas à des temps dont cès'erreurs étaient
insépärables.
‘TE serait bien temps que je cessassé} et mon cœur
me sollicité de demander encore quelques minutes
d’indulgence.
(155)
Les autres provinces de France ont pour la plu-
part d’estimables, et quelques-unes de belles his-
toires; et notre Anjon, si digne d’être connu, ne
trouve dans le moyen âge que d’absurdes compila-
teurs, et dans des temps moins éloignés, que Jean
de Bourdigné, et Jean Hiret, historiens de même
force.
L'abbé Ménage, au XVII. siècle, écrivit un ou-
vrage, savant, je veux bien en convenir, mais éton-
namment indigeste et confus; c’est l’Æzsoire de Sable.
Ce livre, que Ménage aimait d’un amour propor-
tionné sans doute à ce qu’il lui avait coûté de peines
à enfanter; précieux, d'accord, pour les familles
d'Anjou curieuses de leur généalogie (et c'est son
grand mérite), n’offre d’ailleurs que des notes éparses
qui, tout intéressantes qu’elles sont, ne constituent
point une histoire d'Anjou.
Qu'est-ce que l'ouvrage intitulé, je sais à peine
pourquoi, Le Mont-Glonne , par l'abbé Robin ?
je suis vraiment embarrassé pour répondre à cette
question. C’est un des livres les plus diffus, les plus
désordonnés qu’on ait faits; plein de choses, mais
amassées pêle-mêle. Si jamais écrivain se peignit
dans ses œuvres, c'est l'abbé Robin. Spirituel, rail-
leur, ennemi de toute gêne, son expression est sou-
vent aussi heureuse que celle de Montaigne. Il a
écrit comme il vivait, sans soins, sans art, sans
préméditation. On trouve dans son livre d’atiles
découvertes, de spécieuses! conjectures; il est des
premiers qui aient attiré l'attention sur plusieurs
monumens d'Anjou, sur les camps romains de Ché-
( 154)
nehutie et de Frémur; on a de lui une dissertation
savante et systématique sur l’église de Saint Pierre
d'Angers, dont 1l était curé; mais enfin cela n’est
pas l’ombre d’une histoire d'Anjou.
Un homme d'esprit et de talent, M. l’abbé Ran-
geard, qui fut député du clergé de notre province
aux Etats-Généraux, consacra de longues années
de sa vie à étudier notre histoire, et en a rédigé
une partie; je le vois dans les citations de Bodin.
Il a dû mettre une saine critique dans son ouvrage ;
jen ai pour garans des amnotatiofs très-judicieuses
qu'il a faites en plusieurs endroits d’un Bourdigné
qne j'ai eu entre les mains ; mais cet ouvrage n’est pas
publié; et, quand il le serait, je ne crois pas que
cela fût encore une histoire d'Anjou.
Bodin nous à laissé des Recherches: mais ce n’est
point une histoire comme Angers mériterait d’en
posséder une. Ce sont des essais, et Bodin en fait
l’aveu. Ils épargneront des peines aax écrivains à
venir. S'il avait vécu plus long-temps, il eût fondu
ses deux ouvrages du Haut et du Bas-Anjou; il
eût fait disparaïre ses chapitres; il n’eût plus,
comme 1l fait sans cesse, interrompu ses récits par
des digressions d’antiquité. Le livre de Bodin laisse
bien des faits à désirer ; il manque d'ordre. Si.en-
core il y avait une table synthétique, à l'aide de
laquelle on pât coordonner les objets, et les trou-
ver aisément ! Faute de cetie table, je connais des
esprits impatiens qui, plus d’une fois, ont fermé
le livre, avant d’avoir trouvé ce qu’ils cherchaient
avec trop de-fatigues.
( 155)
Et voilà quels historiens étaient réservés, dans le
moyen âge, à la renaissance et de nos jours, à une
province, digne au moins autant qu'aucune autre
de France, d’une grande et sérieuse histoire ; qui
fut célèbre avant la conquête romame, si l’on en
croit les monumens celtiques dont son sol est cou-
vert; que sa position géographique et sa fertilité
rendirent très-importante aux Romains, témoins leurs
camps retranchés, leurs amphithéâtres, et tant d’au-
tres établissemens dont nous voyons encore des ves-
tiges; que nos premiers rois considérèrent comme
une des clefs de leur empire; que les normands si-
gnalèrent par tant de dévastations; qui, sous ses
princes ingelgériens, exerça une si grande puissance
hors de ses limites; qui, dans les démêlés de Jean-
sans-terre et de Philippe- Auguste fut le théâtre
d’une lutte si sanglante; qui donna des rois à Jé-
rusalem, et fonda une dynastie en Angleterre; qui,
par une fatalité déplorable, eut à souffrir de toutes
les guerres civiles; qui fut presque toujours trou-
blée (attrait aussi puissant pour les lecteurs que
matière favorable à l'écrivain ); qui devait être si
heureuse, et qui devrait bien l'être enfin, si les tré-
sors de la nature unis aux qualités du cœur étaient
des élémens suffisans de bonheur et de paix.
VARIANTE SUR POLYBE.
Ce grand écrivain était fils de Lycortas, un des
chefs de la Ligue Achéenne:; il était né à Mégalo-
(156 )
polis, en Arcadie, fondée par Epamimondas. Il vint
à Rome avec plusieurs autres Grecs, pour y servir
d'ôtage, garans de la fidélité des Grecs au nouveau
joug que la république romaine faisait peser sur eux.
Polybe s’attacha aux deux Scipions, Fabius et Emi-
lien, et ce fut surtout avec ce dernier qu'il con-
tracta une amitié étroite, en partage avec Lélius et
Térence. Mais Polybe, toujours amant de sa patrie,
ne la répudia jamais dans sa pensée. On voit en
Jui un Grec des temps heureux de cette contrée cé-
lèbre, amsi qu’un Romain témoin des faits merveil-
leux de la période où il écrivait. Ami du vainqueur
de Carthage et de Numance, 1l montra cette portée
d'intelligence, cette justesse d'observation, cette li
berté de penser qui devaient caractériser un homme
en qui se trouvaient réunis de si précieux élémens:
(457)
OBSERVATIONS
SUR LES GRAMINÉES,
ET
Description de Genres st Espèces nouvelles
DE CETTE FAMILLE,
PAR M. DESVAUX (1).
SL les circonstances ne s’y fussent opposées, nous
devions publier avec feu notre laborieux ami, Palis-
sot de Beauvois, un Species sur les graminées (2) :
famille de plante, peut-être, de toutes celles qui
composent le vaste ensemble des végétaux, la plus
importante pour l’homme. De nombreux matériaux
réunis à cet effet, nous eussent mis à même de com-
pléter la série des genres et des espèces, dans un
ordre nouveau et moins, arlifciel que celui de
l’Agrostographie de M. de Beauvois. Notre éloi-
gnement de la Capitale nous ôtant la possibilité d’ef-
fectuer ce projet, il ne nous reste qu’à jeter un der-
(1) Lu en novembre 1831.
(a) Voyez son Agrostographie dans l'Avertissement.
( 158 )
nier coup-d'œil sur les collections que nous avions
formées pour cet objet, afin d’en extraire ce qu'il
y a d’utile et de nouveau pour la science. Déjà dans
plusieurs ouvrages (1) nous avions décrit des genres
et des espèces nouvelles, pour cette nombreuse fa-
mille de plantes; mais, où ces objets ont été trop
brièvement décrits, ou ils ont été oubliés par ceux
qui ont entrepris des travaux généraux sur la science;
et dès-lors nous croyons dévoir offrir aux botanistes
agrostographes le travail présent, dans lequel sont
établis onze genres nouveaux et quatre-vingt-trois
espèces entièrement nouvelles ; et en, outre cinquante
et quelques espèces que l’auteur du Mémoire pré-
sent n'avait encore qu'indiquées par quelques notes
caractéristiques , jointes enfin à une série d’observa-
tions, tendant à placer dans leurs genres naturels,
des’ espèces qui avaient été mal coordonnées sous
ce rapport.
Dans ce qui va suivre, nous n’emploierons point
de classification particulière à tel où tel auteur, parce
qu'aucune de celles proposées ne remplit le but
qu’on peut désirer: en effet, quels que soient les
avantages particuliers à célles de Beauvois , Kunth,
Raspail, ces avantages ne sont pas assez prononcés
pour oublier celle employée par le respectable pa-
triarche de notre botanique, M. de Jussieu:
1. ZOYSIA macrantha (ZLoysia pangéns R. Brow.
Prod. p. 08, Excl. syn.); culmis sirictis, cæspi-
(1) Voyez: Encyclopédie méthodique, supplément, vol. 4, et
Prodromus floræ Indiæ occidentalis d'Hamilton.
( 159 )
tosis; folis lanceolatis ore barbato-ciliatis ; glamâ
barbatâ (nigrescente). Crescit in Nova-Hollandiä.
OxservaTIoN. La fleur de cette espèce est beaucoup plus grande
que celle de la suivante, ainsi que ses feuilles.
2. L. pungens Will. culmis strictis, cæspitosiss
foliis lmearibus involutis ore subnudis; glumä acutà
(flavescente}). Crescit in insulà Borboniæ.
3. ALOPECURUS a/fénis ; (Al. capensis? Thumb.);
culmo elato, (18- polli.) fliforme glabro , basi ge-
niculato; spicis densis oblongis Re et TT:
valvis ha basi Bee à dorso. cilats ; glu-
mellarum aristâ torüli. Habitat...
Ozs. Cette espèce, dont nous,ignorons l’origine, se rapproche
de PAL, agrestis, mais les fleurs sont plus petites; son épi plus
court, à fleurs plus pressées; la glume est à peine soudée vers
le bas et très-ciliée sur les bords.
4: PODOSAÆMUM capillare Desv. J. Bot. 1. p. 67.
(Trichochloa expansa De-C. exel. syn. Doi. Apgros-
tis rubicunda Bosc ined. Tosagris agrostidea P.
Beanv.)
P----B. (Trichochloa capillaris De C. SpA ca-
pillaris Lamk.)
Oss., L'étude de cette planté, dont M. De Beauvois avait pu
faire deux genres, nous a prouvé que les troïs espèces publiées
par M. De Candolle, sous les noms de Trichochloa expansa ,
capillaris et polypogon, ne sont que des modifications d’une
seule, que nous avions publiée dési810 ( Bult. soc. Phil.) sous le
nôm de Podosæmum capillare.
5. PASPALUM pedunculatum Tai: in Enc. suppl.
4. p- 315; culmo ramoso, ramis glabris nodis ;bar-
batis; foliis lanceolatis pubescentibus basi cordatis
ciliatis, vaginis laxis.puberulis ; spicis solitarns (Pol-
lic) apice ramulorum fasciculatis longèque pedun-
( 160 )
culatis: xhachi subfiliformi intùs. setosà ; floribus
subdicisformibus ,, mucronulatis, biserialibus glaäbris
(subminutis ).. Habitat in Carolina? ? et Guyana?
6. P. micranthum; culmis prostratis ramosis; fo-
his cordato-lanceolatis (semi-poll.) glaberrunis,
ligulà-obtusä ; spicis conjugatis; rhachi compressä
glabrâ ; floribus biserialibus ovatis acutis glabnis
striatis sessilibus. Crescit in msulà Borboniæ aut
Maariti. Confer ‘aspectu cum Cynodone.
7. P. digitarioïdes ; culmis erectis simplicibus ;
folus lanceolatis pubescentibus mucronatis (2-poll.) :
vaginis inferioribus densè pilosis; spicis (2-poll. }
subconjugatis; rhachi subcompressä, glabra; flori-
bus biserialibus ovous glabris .enervosis. Habitat in
Brasilio. ;
8. P: multicaule Desv. Le. p. 309 ; calmis fas-
ciculatis glabris ; : folis vaginisque laxè longèque
barbatis ; spicis conjugatis lmearibus: rectis glabris
(sub-2-poll.); rhachi sinuosâ tenui; floribus (mi-
nutis) suborbiculatis;biserialibus (flavescentibus ).
Habiiat in Brasilio.
9. P. céhatifolium Mich:'fl."bor. am. 1: p: 44.
(P. supinum Bosc. in Encyel. 5. p. 29); culmo
elato (ped.,.2-ped.): nodis glabris ; foluis latiuscu-
lis pilosis serrulatis longè ciiatis : vaginis quando-
cunque glabris; spicis 1-3 basi pilosis subvirgatis ;
rhachi filiformi; floribus biserialibus glabris (albes-
‘centibus) pedünculatis subdisciformibus. Crescit in
Carolinà!
Os, Cette espèce variant béaucoup, son caractère diagnos-
tique était imparfait dans les auieurs.
( 161 )
10, P. sinuosum; culmis erectis (3-ped.); fo-
lis Hinearibus ( ped. 2, lin. lat.) globris: vaginis
striatis, ore pilosis: spicis 3-4 (3 poll.) subdistan-
übus; floribus triserialibus ellipticis pedicellatis obs-
curè pubescentibus ; rhachi sinuatâ. Habitat in An-
ullis.
xs. Cette espècela quelques rapports ayec le P. glabrum ;
mais les fleurs sont beaucoup plus petites.
11. P. minuliflorum; culmis geniculatis ramosis
( biped.) dichotomis angulatis; foliis cordato-lan-
ceolatis elongatis aculis pubescentibus: vaginis ore
pilosis; spicis 1-2 distantibus basi pilosis subfal-
catis ( 3-poll. et ult.); rhachi tenui sinuatâ ; flo-
ribus triserialibus glabris, subdisciformibus. Habitat
in Brasilio.
12. P. spathaceum Desv. 1. c. p.314 ;, culmis
erectis (2-ped.) angulatis glabnis ;:folüis lanceolatis
acutis (15-6-poll. 5-6 lin. lat.) basi cordatis sub-
glabris ciliatis : vaginis margine ciliatis ore nudis ;
spicis solitariis (an constanter? ); rhachi subfilifor-
mi arcuatà ; floribus biserialibus elliptcis, rotundo-
oyals ,,breviter pedicellatis glabris, uninerviis. Ha-
bitat in, Guyana ?
Oxs. | C’est :à tort que CR a reporté cette FPT au P.
debile.
13. P. faeum; .éulmo recto _elato (2-ped.) gla-
bro sulcato; folis nervosis elongatis (ped.) latius-
culis (4 lin.) yaginisqne glaberrimis : ligulà scariosà
obtusâ ; spicis subternis ( flavescentibus ) glabris
(3-poll. ); floribus subdisciformibus irinervis gla-
bris biserialibus : rhachi complanata. Habitat.
II
( 162 )
14. P. gracile Desv. 1. c. p. 313; culmis cæspi-
tosis simplicibus ( ped. et semi-ped.) glabris : no-
dis pubescentibus ; folus linearibus glabris : vaginis
glabris ore pilosis; spicis (poll.) basi pilosis sub-
ternis remotis tenuibus glabris; rhachi filiformi sub-
sinuatÀ ; floribus biserialibus ( minuus) unmervosis
subsessilibus oblongis. Crescit in Antillis.
15. P. fortbundum; culmis cæspitosis simplici-
bus glabris (ped.); folis elongato-lanceolatis (4-
poll.) glabris nervosis: vaginis striatis ore pilosis ;
spicis subternis remotis (snb-2-poll. ); rhachi an-
gustà planà ; floribus triserialibus (mediocris) ellip-
üais glabris unmervüs, densè imbricatis. Habitat in
Anüllis ?
16. P. multiflorum; culmo elato (4-ped.}) nodis
glabris4 folus lanceolatis (5-poll. 5-lin. lat.) sub-
tomentoso-pilosis : vaginis striatis pubescentibus ,
margine ciliatis, ore barbatis; spicis 5-9 basi pi-
losis; rhachi capillari; floribus pedicellatis tri-qua-
driserialibus glabris uninervüs oblongis ( minutis ).
Crescit im Brasilio.
17. P. lanceæfolium ( P. heterophyllum Poir.
Enc. suppl. 4. p. 315, parviflorum Desv.‘herb. non
Roth.); culmis erectis cæspitosis (2-ped.) glabris :
nodis pubescentibus; foliis elongato-lanceolatis gla-
bris subglaucescentibus (5-8 “poil. 4-lin. lat. ); va-
gimis glabris ore pilosis; spicis 3-7 bas setosis ;
rhachi subcapillari; floribus pedicellauis iri-quadri-
serialibus (minuts) glabris oblongis uninervibus.
Habitat in Hispanioli.
Os. J'avais nommé cette plante P. LA ALES mais cenom;
(163)
qui devait être changé, à raison d’une espèce qui le porte égale-
ment, l’a été par M. Poiret sur une indication erronée : un échan-
tillon d’une autre espèce et à feuilles un peu différentes s’y trou-
vant réunie par mégarde,
18. P. melanospermum Vesv. 1. c. p. 315; cul-
mis elatis (2-ped. et nlt.), cæspitosis apice tri-
quetris glabris; folis asperis submarginatis elongatis
(10-poll. 4-5-lin } : vaginis laxis striatis ore pilosis ;
spicis 5-7. basi piloso-setosis subfalcatis; rhachi an-
gustà; floribus pedicellatis subquadriserialibus dis-
ciformibus subpilosiusculis ; glumellà fusco-nigrä.
Habitat in Guyanä.
19. P. milioïdeum Desv. 1. c. (P. miliare Spreng.
spec. 1. p.247); culmis elatis (sub-4-ped.) gla-
bris; folis planis elongats dein convolutis: vaginis
longissimis ‘striatis glabris, apice marginibus ore-
que barbatis; spicis 5-7 basi pilosis adscendenti-
bus, virgatis (8-10-poll.); rhachi filiformi flexuosä ;
floribus (pallescentibus) irregulariter biseriatis, su-
bremotis, glabris oblongis acutis. Habitat in insulà
Porto-Rici.
20. P. Commersoni: Lamk.
Ozs. On doit rapporter à cette espèce le P. Kora de Beau-
vois (Flor. Ow. 2. 85 — f. 2. En. syn.), qui est très-différent
du véritable P, Kora De même qu'au P. paniculatum L.'il faut
rapporter le P, striatum Pers., Roem. et l'Hæmisphæricum de
Poiret.
21. PASPALANTHIUM. Flores unilaterales, ad rha-
chin membranaceam disposili;, gluma depressa flac-
cida libera; glumella inclusa coriacea vacua ; ca-
ryopsis laxè corticatus,
P. stoloniferum ( Paspalum -- Bosc. purpureum
BR. Pav. racemosum Jacq- Milium latifolium Cav.)
(164)
Os. Cette plate, comme genre, est très-distincte des Pas-
pales, 1:° parce que sa glume n’est pas apprimée sur la. glu-
melle ; 2.0 parce que la glumelle est libre et plus couïte que
la glume; 3.0 parce que le rhachis est membraneux, et non co-
riace. Ce genre tient du ÆMilium par sa fleur, et du Paspalum
par son inflorescence. Le Paspalanthium est aussi naturel que le
Ceresia, autre genre qu’on doit adopter, ayant un caractère de
fleur en opposition avec les Paspalum et Paspalanthium : sa
glume est coriace et sa glumeille scarieuse.
22. CALAMAGROSTIS subspicata ; culmo fiiformi
(2-ped.) glabro; fois limearibus acutis subconvo-
lutis: vaginis striatis, ligulâ elongatà scariosâ ; pa-
niculâ subspicatâ contractä; glumis glabris acutis :
valvulis subæqualibus; glumellà : valvulà inferiori
medio aristatà, aristà rectà inclusâ, pilis valvæ ex-
terioris glumellæ subæquantibus.
Oss. Nous avons eu cette plante sous le nom de Deyeutia
subspicata, sans en connaïtre l’origine , bien que nous, la! soup-
çonnions de l'Amérique australe.
23. SPOROBULUS Lamarckir Desv. im Prod. Ind.
Ham. p. 4. (Agrosüs elongata Lamk. ill.
p- 157, nec sporobolus elongatus R. Brow., Agros-
Us us Sw. nec L. gramen pratense, etc. Sl.
hist. 1. t. 73 f. 1.); culmo erecto (3-ped.); pa-
get à CE et ultra) contracta spicæformi ; folis
vaginantibus paniculam æquantibus : ligulä vagina-
rum brévissima piloso-fimbriata. Habitat in Ame-
ricâ.
24. S. effusus; culmis erectis (sub- -ped.), su-
bramosis basi geniculatis, glabris; folüis linearibus
glabris : vaginis ore subnudis; paniculà elongatä,
effusâ, ramis semiverticillatis, ramulis divaricatis ca-
pilaribus ; floribus (minutis) apice ramulorum sub-
\
( 165 )
solitariüs ; glumä : valvulis inæqualibus, glumellis
duplo brevioribus, subacutis ; glumellà: coloratä :
valvulis æqualibus obtusis à cariopside hiantibus.
Crescit in Brasilio.
25. AGROSTIS /anigera; culmo erecio (2-ped.)
glabro; foliis distichis latiusculis acutis (3-lin. lat.)
subconvolutis supra basin piloso-lanatis subtus gla-
berrimis + vaginis striatis glabris ore barbatis; pa-
nicula :contracta spicata; glumâ muticâ : valvis acu-
tis subæqualibus, glumellâ inclusâ æquantibus ;
valvis glumellæ acutis integris. Habitat in Brasilio:
26. LEERSIA parviflora ( Leersia orizoïdes ? De-
lille); culmo glabro : nodis pubescentibus ; foliis
angustis asperis : ligulà:obtusâ oblongä; paniculà
subcontractâ, ramis simplicibus flexuosis ; floribus
(.3-antheris ? ) oblongis, sessilibus unolatere :ad-
pressis, subglabris rigidè ciliatis: Creseit in Ægyp-
tià. .
27. GRAMERIUM; spicæ unilaterales germinæ; flo-
res pedunculatæ ad rhachin filiformem positæ ; glu-
ma :: valvulis membranaceis acutis, densè lanatis
subæqualibus:medio glabris nervosis; glumella : val-
vulis muticis-coriaceis.
G. convolutum PI. Vn, . 1 ; culmis ( ped. } apice
pilosis, cæspitosis ,. basi subbulbosis ; folus linea-
ribus, plicato-convolutis glabris : vaginis hirsutis;
floribus: alternis elongatis ; rhackii glabrâ flexuosä.
Habitat in regno chilense.
Oss. Ce genre rapproché du .Digitaria, m’en.a pas la fleur avor-
tée, et s'éloigne du Paspalum-par son rhachis non dilaté et toutes:
ses fleurs pédicellées. Du reste il a 3 étamines et un stigmate bi-
ide gros et velu. ‘ !
( 166)
28. DIGITARIA platicaulis (Paspalum platicaulon
Lamk. Enc. 5. p. 34); culmis geniculatis compres-
sis : nodis pubescentibus ; foliis latiusculis lanceolatis
nervosis ciliatis : vaginis glabris ore ciliatis; spicis
2-3, tertio alterno; floribus alternis oblongis sub-
pubescentibus. Crescit in Hispaniolà et Porto-Rici.
29. D. setosa Desv. in Prod. fl. ind. occ. Ham.
p- 6. ( Digitaria horizontalis ? Spreng. nec W. );
culmo geniculato; folis vagmisque pilosis ; spicis
verticillato-paniculatis lmearibus ; rhachi sparsè pi-
losà : setis flore triplo longioribus; floribus elon-
gats acutis alternè pedicellatis. Habitat in Antillis.
30. D. obtusifolia ; culmo compresso geniculato
suberecto : nodis pubescentibus ; foluis lanceolatis
oblongis obtusis subpilosis ciliatis : vaginis ore nu-
dis; spicis duis ternive alternis; glumis (valvä in-
feriore apice barbatâ ) snbpubescentibus oblongis
acutis; glumellis : valva inferiore apice barbata. Cres-
cit in India oriental. A. D. barbatä differt.
31. D. barbulata; culmo geniculato; foliis sub-
ciliatis sparsè pilosis; vagimis remotè pilosis : pilis
horizontalibus ; spicis alternis tribus subvirgatis ;
rhachi subcomplanatä flexuosà ; floribus geminis, al-
tero pedicellato, acutis extus glabris; glumis mar-
gme interiori barbato. Habitat in insulà Borbo-
niæ.
32. D. mollissima ( Panicum mollissimum Hort.};
culmis elatis (2-ped.) geniculatis ; foliis vagimisque
tomentoso-pilosis ; spicis subquinis fasciculatis ; flo-
ribus pedicellatis acutis striatis pubescentibus. Ha-
bitat in Americà australi ?
( 167 )
33. D. fasciculata; culmis elatis (2-ped.) com-
pressis geniculatis ; foliis vaginisque glaberrimis ;
ligulà subnullä; spicis subfasciculato-verticillatis fili-
formibus; floribus alternis remotis obtusis. Habitat
im Brasilio.
34. D. borbonica; culmo ( ped. et ultr. ) radi-
cante geniculato ; foliis lanceolatis vaginisque hirto-
pilosis ; spicis fasciculatis subquaternis fliformibus :
rhachi complanatä ; floribus pedunculatis (minutis)
biserialibus ovatis acutis pubescentibus. Habitat in
insulà Borboniæ.
35. PHALARIS Aumilis; cæspitosa (uncialia); cul-
mis subnallis; foliis rigidis latiusculis brevibus ner-
vosis: vaginis dilatatis ;: spicis ovatis subsessilibus ;
glumis rigidis ciliatis, sub-oblongis. Habitat in
Oriente.
Os. Cette singulière espèce qui nous vient d’Ollivier, est an-
nuelle et ne peut être ramenée à aucune espèce connue; elle n’est
point bulbeuse.
36. CAMPULOA. Desv. J. bot.
Os. Ce genre que nous avions d’abord incorrectement nommé
Campulosus (Bult. Soc. Phil. 1810), a été successivement appelé
Monoceras (Ellis), Ctenium (Panzer), etles espèces placées aussi.
dans les genres Cynosurus, Chloris, Melica ; ce qui annonce la
nécessité de le conserver : il faudra y ramener la Melica digitata-
de Roxburg.
37. AIROPSIS menutæ Desv. J. bot. 1. p. 201.
(Aïra minuta L. non Lois. Aïra capillaris Lag.
Varied. de Cien. N° 19, p. 29).
Os. Notre plante est bien celle de Linné; elle est annuelle,
tandis que l’Æiropsis agrostidea ( Aira capillaris B. radicans Lag.…
nov. gen. p. 3) est une plante vivace et rampante, que nous-
avons observée dans beaucoup d’endroits de la France.
(168)
L’'Aira arundinacea de Linné ayant ses fleurs saillantes lors
de la glume, doit entrer dans le genre Poa, et non dans l_45-
ropsis, ainsi que nous |l'avions placé. Z’oyez n.0o 166,
38. À. glabra (Milium roseum? Spreng. Syst.
veg. 1. p. 251. Panicum glabrum? w. herb.);
culmis cæspitosis erectis (2-ped.) basi. subramosis
glabris; folis glaberrimis linearibus (4-5-poll. ) :
vaginis glabris, ligulâ brevissima fimbriatim pilosa ;
anieulà ramosissima demüum fastigiata, ramis ca
pillaribus divaricatis; floribus pedicellatis, pedicellis
capillaceis ; glumä : valvis subæqualibus glabris sub-
striatis ovatis obtusiusculis ; glumellà : valvulis ob-
tusis. Habitat in msula Borboniæ.
Oss. Nous croyons notre plante la même que celle de Wil-
Tedenow, maïs nous ne pouvons y saisir la teinte rose : dans
un échantillon les glumes sont violettes, et dans l’autre! elles
sont jaunâtres. Une altération de l'ovaire, que nous croyons due
à une sphérie et non au cas d’Ergot, le prolonge quelquefois
à son, sommet, en longue pointe noire.
39. TRIBOLIUM : panicula contracta; glama tri-
flora, valvis gibbosis acuminatis extùs rigidè hispi-
dis; glumella : valvulis obtusis dentatis, basi mar-
gine pilosis.
T. héspidum PI. VII, f. 2. ( Dactylis hispida
Thunb. Festuca melangaea Spreng. syst. veg. 1.
p. 352); culmis erectis (8-poll.) foliosis; folus li-
nearibus pubescentibus ciliatis : vaginâ subpilosa ore
ciliato-radiata; paniculà secunda .(uncialià ). Cres-
cit ad Capite Bonæ-Speiï. :
Os. Ce genre aurait plus de rapports avec l’Æierochloe ou
VEriachne, auprès desquels il doit être placé; qu'avec ceux aux-
quels on l'avait rapporté.
46. PRIONANTHIUM ; spica cylindrica; rhachis la-
(169 )
nata canaliculata; gluma biflora : valvis plicatis com-
pressis acutis, dorso incrassatis rigidè dentatis ;
glumella : valvulis hyalmis integris.
P. rigidum PI. Vi, f. 3; culmis geniculatis ads-
cendentibus (8-poll.), basi ramosis; foliis vagi-
nisque pubescentibus , linearibus; floribus glabris
sessilibus densè imbricatis. Crescit in India Orien-
tali.
Ozs. Ce genre ne présente de rapports bien naturels avec au-
cun de ceux qui nous sont connus.
41. MELICA pubescens ; culmis elatis (2-ped.)
cæspitosis; folis, vaginisque inferioribus , pubes-
centibus ; paniculâ coarctata densa cylindrica, spi-
culis ternis; glumis nervosis bifloris ; glumellis :
valvulà exteriori floris fertili ciliata. Colitur in hor-
tos botanicos sub nomine M. ciliatä.
42. M. ciliata L.; foliis vaginisque glabris; pa-
nicula subsecunda ; glumis bifloris.
Oss. Ces deux plantes que nous cultivons depuis plusieurs an-
nées sont très-distinctes, et la première est beaucoup plus ro-
buste, Dans le département de Maine et Loire nous trouvons
la vraie Helica ciliata.
43. SACCHARUM bruneum ; culmo elato erecto:
nodis pilosis ; foliis linearibus vaginisque glabris ore
pubescentibus; panicula patente, ramis remotis se-
mi-verticillatis basi pubescentibus ; glumä lanugine
breviori membranacea ; flore fertili: glumæ valvis
apice bifidis breviter aristatis; glumellæ nitidæ val-
vula inferiori coriacea apicè barbata, superiori ob-
tusa membranacea; flore staminifero triandro, val-
A solitaria membranace. Crescit in Indià orien-
tal.
( 470 )
Oss. Cette plante unie au Saccharum teneriffæ , sera peut-être
susceptible de former un genre distinct et qu'on pourrait dési-
gner sous le nom d’Eriolytrum, bien que dans celui-ci la glume
ne soit pas aristée : nos deux plantes sont triandres et ne peu-
vent être réunies à l’Erianthus : c’est la glumelle qui est aristée
dans ce dernier genre.
E. bruneum; glumella aristata, lanâ fucescenie,
nodis pubescentibus.
E. éeneriffæ; glumella mucronata, lana niveà
nodis. glabris.
44. HETEROCHLOA; spicata; rhachis articulata ;
flores dissimiles geminatæ ; flos sterilis abortiva pe-
dicellata acuta univalvata : pedunculo elongato,
dilatato margine barbato, basi nuda apice emargi-
nata; flos fertilis sessilis; gluma: valvula inferior
rigida acuta medio sulcata, superior membranacea ;
glumella : valvula inferior membranacea bifida medio
longè aristata : arista tortili, valvula superior mem-
branacea acuta.
H. Ælopecurus, pl. VII, f. 3; culmis cæspito-
sis acutis (2-ped.) subramosis filiformibus glabris;
folis linearibus margine serrulatis : vagmâ glaber-
rima : ligulà bifida fimbriata; spicis (2-poll.) so-
litariis teretibus ; floribus adpressis. Crescit in insula
Borboniæ.
Oss. Ce genre se rapproche de l'Elionurus plus que de tout
autre, mais en est bien distinct.
45. DiPLASANTHUM, spicatum; flores sessiles sub-
unilaterales alternæ, dissimiles ; glumæ : valvis in-
ferioribus cartilagineis mucronulatis; glumellæ mem-
branaceæ; flos sterilis bivalvata ; flos ferülis : glu-
mellâ inferiori basi aristatä.
(171)
D. lanosum Planche VII, f. r: caule elato ge-
niculatô glabro apice lanato; foliis linearibus sub-
asperis : vaginis ore nudis; spicis geminis peduncu-
latis; glumis obtusis mucronulatis tomentosis. Ha-
bitat in India oriental.
Oss. Si la conformité des glumes des fleurs fertiles et des
fleurs stériles n’établissait pas un caractère remarquable; ce genre
viendrait se placer dans l’Æeteropogon dont il doit se rappro-
cher, avec un port d'Zschæmum.
46. ANDROPOGON juncifolius Desv. in Prod. fl.
Ind. occ. Ham. p. 9; culmis cæspitosis (subped.),
apice dichotomis, nodis pubescentibus; foliüs gla-
berrimis lineari-subsetaceis supra convolutis : ligulà
lanceolata acuta ; spicis geminis basi spataceis (nn-
cialib.) spathâ brevioribus; rhachi dense lanosä; flo-
ribus sessilibus geminis glabris acutis : fertilibus
aristatis aristà tortili: sterilibus abortiviss Habitat
in insula St Cruce Antillarum.
Oss. Il nous semble que les espèces de ce genre dont la fleur
stérile est pédicellée, doivent former un groupe distinct de celles
dans lesquelles cette même fleur est sessile, comme dans l’es-
pèce que nous décrivons ici; et alors en laissant le nom d’An-
dropogon à ceux à fleur pédicellée, les autres pourraient être
nommés ÆEupogons, ou au moins il faut en faire une section.
47. À. Beloisir; (Andropogon f: 4,t. 23. Agrost.
de Beauv.); culmo elato apice dichotomo, nodis
glabris; foliis planis latiusculis glabris: ligula trun-
cata; spicis ( uncial. ) spathaceis geminis exsertis ;
spathâ mucronata, rhachi Janat4 ; floribus abortivis
pedicellatis , pedicello flabellato piloso; flore fertili
glabro, aristâ tortili elongata. Habitat...
Oss. Cette plante que j'avais communiquée à M. De Beau-
vois, et qu'il a figurée sans nom spécifique, me semble nou-
yelle,
(12)
48. À. densus Desv. 1. c. p. 8, (Andropogon
bicorne Lamk. nec L.); culmo elato ( 3-ped.}
apice dichotomo, nodis glabris; foliis asperis gla-
bris, vaginis ore marginibusque pilosis; spiculis
geminis densè fastigiato-paniculatis; rhachi lanata,
vaginis tenuibus acutis; floribus abortivis suboccul-
tis pedicellatis : pedunculo lineari fastigato longè-
que barbato ; floribus fertilibus longè aristatis.:
arista rectà flore sextuplo longiori. Habitat:in An-
üllis.
Os. Le véritable A. bicorne de Linné est du genre Æ#na-
therum.
49. À. ternarius Mich. ( A. virginicus Spreng.
spec. 1. p. 28 non L.).
Oss. Cette espèce est un véritable Andropogon,. tandis que
VA. wirginicus de Linnée est un Ænatherum , puisque ce célèbre
botaniste l’a décrit par Flosculis muticis.
50. À. ischæmum B barbinodus.
Oss. Cette variété a des proportions un peu plus petites que
Yespèce ordinaire et ses fleurs un peu plus éloignées les unes
des autres, et en outre l’ouverture de la gaine est bien plus
poilue.
51. À. fernartus; culmo elato ( 4-5-ped. )., no-
dis glabris ; foliis latiusculis elongatis glabris mar-
gine serrulatis : vagina ore nuda; panicula pyrami-
data, ramis verticillatis longitudinaliter. floriferis ;
floribus subremotis basi brevè pilosis ; flore sterili
acuto pedicellato : pedicello glabro elongato; flore.
fertili longo; glumä muricata acuta ; glumella : aris-
ta rectà. Habitat in India oriental.
Oss. Cette plante semble tenir le milieu entre les genres 47
dropogon et Rhaphis , et même ellé à plus de rapport ayec ce
dernier, s’il portait trois fleurs au-lieu de deux.
( 173 )
32. RHapuis Lour.; flores ternatæ basi annula-
tm barbatæ : intermedio fertili sessile aristato, la-
teralibus staminiferis pedicellatis , muticis. Panicu-
latus : ramis simplicibus.
Os. Pour éviter le rapprochement de sons, avec Rhaphia et
Rhaphis, nous avions adopté le nom äe Trianthium, maïs nous
IEESS, P D
pensons que le nom de Raphis doit être maintenu.
53. R. Gryllus (Andropogon Gryllus L. Polli-
nia Gryllus Spreng., Apluda Gryllus P. Beauv.
agr. PL. 23, f. 6).
54. R. arundinaceus ( Androp. arundinaceum
Willd.); panicula subcoarctata, nutante; folis (2-
ped., poll. lat.) glabris : vaginis glabris striatis ore
barbaüs, arista tortili flore longiorà : pedicellis. flo-
rum fertilium pilosis. Habitat in Guinea.
55. R. cœrulescens ; ( Holcus cœrulescens, Perrot.
voy. du Cap.; Frecinet. bot. p. 411, t. 27).
Os. Cette espèce est très-bien décrite par M. Perrotet.
56. R. aciculare ( Andropogon aciculare Retz.
Rhaphis trivialis Lour. , Centrophorum Chinense
Tri. ).
57. R. ortentalis: (Androp. Gryllus var, ww.
spec. ) « specimen habeo ex India orientale, quod
à gramine Europæa ( Andr. Gryllus), fois gla-
brioribus et panicula tantum diversum W. »
58. POLLINIA. fulfa; culmo elato apice ramoso
dichotomo glabro; folus margine asperis glabris.:
vaginis ore ciliatis; spicis simplicibus vagina folio—
rum. spathiforme subinclusis; rhachi sparsè pilosa;
flore sterili: pedicello complanato margine barba-
( 174 )
to, arista subrevis flore fertili, arista medio tortili
elongatä. Crescit in India orientali ?
Os. Cette espèce qui semblerait avoir quelques rapports avec
les P. brevifolia et fragilis, se rapporteraïit surtout plus à cette
dernière, d’après la courte note qu’en donne Brown sous le nom
d'Zndropogon fragile.
59. P. microstachya ( Andropogon microstachyns
Desv: in Prod. 1: c. p. 8); culmo elato (3-5-pea.)
compresso; folüs distichys latiusculis elongatis gla-
bris striatis rigidis margine rugosis : vaginistanci-
pitibus glabris, ligulà brevissima truncata unolatere
subpilosa ; paniculä divisa conferta ; spicis solita-
ris gracilibus (subpoll.), vaginula compressa apice
subulata, semi inclusis; rhacm pilosa;aristâ floris
sterili breve, floris fertili elongatä tortile. Crescit in
Anüllis.
60. ANATHERUM pedunculosum; culmo elato,
(2-ped.) glabro, apice ramoso fasciculato, ramis
longis basi vaginatis; foliis, vaginisque ore nudis,
glabris : ligula brevi subtruncatà; spicis (semi-poll.)
solitariis glabris términalibus; floribus appressis acu-
üs : sterilibus pedicello filiforme. Crescit in An-
tillis.
61. À. scoparium; culmo glabro elato ; fois
glabris subconvolutis retroflexis : ligula breve; pa-
nicula fastigiata, ramis spathaceis apice spiciferis ;
Spicis conjugatis: rhachi longissimè barbatä ; flori-
bus glabris ; flore sterili pedicello plano barbato.
Habitat in Africa. PP
Oxs. Plusieurs auteurs ont confondu cette plante avec ?Æna-
thertém bicorne > mais nous l’en croyons très-différenté par ses fleurs
(175)
bien plus rapprochées, doubles en grandeur et ses soies plus
longues.
62. À. arrgatum ( Andropogon virgatum Des. 1.
c. p.9 ); culmo elato (3-4-ped.) glabro; foliis gla-
bris subconvolutis rigidis ; vaginis ore nudis ; paniculâ
ramota élongato-virgata: ramis appressis ; spicis nu-
merosis solitaris spathaceis sub-mclusis; rhachi gla-
brâ ; floribus ( minutis ) appressis pedicelloque gla-
berrimis. Habitat im Antillis.
63. À. arginicum ( Androp. virginicum L. nec
Spreng. ); culmo glabro apice dichotomo ; foliis li-
nearibus; virgma ore nuda;. ramis remotis apice fer-
tilibus; spicis gemimis; rhachi divaricatä lanigera.
Habitat in Americà.
Oss. Cette espèce voisine de lespèceprécédente, l’est surtout en-
core plus de l’/ratherum bicorne , maïs ses épis ne sont.pas,en pa-
nicules.
64. ANTHISTIRIA glabrifola (Anth. ciliata Sw.
nec. L.); culmo elato glabro; foluis glabris angustis
margine serrulatis asperis ; ligulà scariosa brevissimè
obtusa; foliis floriseris basi spathaceis (invol. ) ore
longè ciliatis; glumis glabris. Habitat in Antillis.
65. SORGHUM pareiflorum Desv. in Prod. 1. c.
p-12; culmo elato stricto (3-ped.) glabro ; foliis su-
blatiusculis elongatis supra rugosis; vagimis ore nu-
dis ; ligulâ brevissima; paniculä elongata substricta
alternè semi-verticillata ; floribus sterilibus raris abor-
üvis muticis pedicellatis : fertilibus subremotis; glu-
mis adpressè pilosis linearibus; aristis subcontortis
glumellà longioribus. Habitat in Hispaniolà.
Oss. Cette espèce remarquable est bien plus près d'un Sorghum
(176)
que de tout autre genre, ayant avec cela le port de l’Ændropogen
avenaceus de Michaux , avec des proportions moitié moindres.
66. S. anomalum; culmo elato glabro; foliis gla-
bris margme aspersi : : vaginis ore ciliatis; paniculà
contracta, ramis APM adpressè floriseris ;
floribus basi piliferis pedicellatis, pedicellis basi ra-
diatim pilosis ; glamis glabris striatis ; glumellis flo
ris fertli dorso aristatis. Habitat in America cali
diori ?
Oss. Cette espèce s'éloigne un peu des autres espèces du genre,
par ses fleurs à pedicèles courts et articulaires, régulièrement dis-
posés le lüng des rameaux de la panicule.
67. TRIATHERA americana Desv. Bult. soc. phil.
1810. (Tri. juncea J. Beauv. agr. p: 39 t. 9 f. 4,
Atheropogon domingense Spreng. syst. veg.1, p.293),
culmis:.cæspitosis ramosis; folis glabris: linéaribus
subconvolutis :vaginis ore Dies spiculis unilatera-
libus mn aristà basi trifida.
Oss. En convenant que notre genre Æeferostega peut être réuni
au Dineba ou à lAtheropogon > nous ne croyons pas que le Zria-
thera puisse lui être adjoint, ainsi. que l’a fait Sprengel.
68. T. racemosa (Triæna racemosa Kunth in H.
et B. n:g8en.,1, p.178; t. 61. Atheropogon Triæ-
na Spr. L c.); culmis cæspitosis; foliis vaginique
sparsè pilosis ; spiculis remotis : aristà medio trifidà.
69: BIATHERIUM ; Spicæ fasciculatæ; flores sparsæ;
gluma uniflora : valvis acutis æqualibus; glumellarum
valvulis inferioribus aristatis : : rudimentum floris ste-
rili pedicellatum longissimè biaristatum.
B. foliosa. PI. VIT, f. 2 (Chloris foliosa W.:Sp. j.
p.924): culmis caespitosis, strictis subramosis ; fo
he distichis glabris lanceolatis (semi-unci. }: vaginis
(477 )
margine oreque pilosis; spicis 2-5 fastigiatis , alter-
nis; glumis ferè æqualibus subpellucidis, glumella
multo longioribus ; valvulis glumellæ lanceolatis :
exteriore longissimè aristatâ. Crescit nm Antillis.
Oss, Cette plante a un port qui l’éloigne du genre Chloris + ses
épillets ne,sont pas unilatéraux, elle est transitoire entre le Tria-
thera et le Chloris.
70. CHLORIS obtusifolia ; culmis glabris compres-
sis basi procumbentibus ; foliis glaberrimis latiuscu-
lis glaucescentibus linearibus obtusis: vaginis glabris
folio longioribus; spicis 5-7 umbellato-fosciculatis ;
glumis 2-floris subulatis ; flore superiore abortivo pe-
dicellato longiore; glumellis glabris : valvulis, infe-
riore longe aristatâ; arista, valvulà quintuplo lon-
giore. Crascit m Brasilio.
71. Ch: elata; culmo elato glabro; folis latiuscu-
lis subscabris acutis : vaginis glabris ore nudis, ligu-
la nulla; spicis pluribus (20) umbellato-fastigiatis
(4-5-poll. long.); spiculis, bifloris; glumä subula-
à, valva inferior glumella longiora ; glumella, val-
vula inferisre obovata dorso pilosa margine radiatin
barbata apice breviter aristata; arista (nigra ) glu-
mella longiore ; flore abortivo glabro aristato. Habi-
tat in Brasilio.
Os. Cette espèce est très-rapprochée de la (CAloris ciliata mais
très-différente cependant par son chaume plus robuste, ses épis
plus nombreux et ses épillets moins gros,
72: Ch: macrantha; culmo glabro geniculato (10-
poil. ) ; foliis Imearibus acutis asperis sparsè longè-
que pilosis : vaginis compressis glabris ore pilosis ;
spicis geminis, basi pilosiuseulis; spiculis: tnifloris
biserialibus ; gluma : valvis subæqualibus -subacutis
12
( 178 )
pellucidis glumella subæquantibus ; glumellis, valvulä
inferiore aristata ; aristà glumella quadruplo longio=
ra ; «flore féruli 4 as valvula inferior apice bifi-
dà. Crescit: An Arabia felice.
33. PrertuM Desv. j. bot. appl. 1, p: 76 flores ca-
piiaiæ Subuñilaterales ; involucrum basi. floriferum
pectinato-sectosum; gluma uniflora ; valvis hyalinis
subæqualibus aristato-setosis ; glumellà solida, ;val-
vula inferiori aristato-setosa, superiori acula, seta
longa.
P. elegans Desv. 1. c. radice te anmua ; folis
latiusculis glabris: ligula,scariosa elongata - :
spica subglobosa, ne barbata. Fe in Syrià.
Oss. Sice n’est pas le Cynosurus elegans de M. Desfontaines,
cette plante est certainement nowyelle-
74 ARTHROSTACHYS : spicé géminæ; rhachis ar-
ticulata :articulis subdilatatis oblongis concaviusculis
basi apicé et unoläteré barbatis : flores dissimiles ad-
pressæ altérna: géminatæ basi subpilosæ flos- exte-
rior pedicellata striata acuta staminifera subaristata :
pedicello complanato‘apicè émarginato; flos interior
pistilifer ; gluma inferior subcoriacea elongata plica-
ta; glumella : valtulainterior aristatä: arista Re
medio tortili.
À gracilis? PL. {x. f. >. Cülmo gracili (sub-2-ped.)
glabro’ foliüs linearibus acutis glabris.. ligulà .ore
longè pilosa; spicis 2. (2-poll. np 56 pedun-
culis basi piosis, Habitat. soul aiiloi : (Ho
Os. Cette plante a le port. de Ph rar ais SON! caractère
s'éné loigne beaucoup et prouve que les plañtes à. rachis articulé
nous croyons en outre que le Panicum selosum de Swartz est un
Pennisetum , et que la Setaria macrostachya de M. Kunth n’est que
le S. vulpiseta ;.etile Panicum macrochaetumi de Link sera! une de
nos trois espèces. Dans les trois espèces précédentes, il n’y en. a
qu’une à deux soies jaunätres et très-longues;: par fleur; et les lu-
mellés, par leur forme et leur grosseur, PRRAEEnnÊNE, en outre à
trois espèces.
90. S. granosa; culmo elato (3-ped. ) apice pu-
bescente-piloso: folüs lanceolatis glabris asperis basi
dorso subpilosis: vagimis subglabris apice margini-
busque breviter pilosis ; spicis (8-poll.) pyramidatis
elongatis sub-interruptis tongisetosis; rachi pilosa ;
ramis inferioribus subremotis. suboblongis ; floribus
(sabmaximis ) globulosis basi subunosetosis; glu-
mella punctato-striatulà. Habitat in Brasilio.
Oss. Cette espèce , voisine des trois précédentes par son port et sa
stature, à l’épi beaucoup moins fourni, les fleurs plus grossés et plus
arrondies comme dans la S. fenat, mais les soies ne sont ni Si
roïdes ni si âpres.
92. S. caudata (Panicum éaudiint A. Lamk.
Enc. 4, p. 746); culmo gracili (péd. et semiped. );
piloso : nodis glabris; foliis linearibus acutis brévi-
ier utrumque pilosis : vaginis ore marginibusque
pilosis;_ panicula spicata rariflora clongata (2-
poll. ) interrupta; rhachi pilosa ; ramis inferioribus.
_elongatis subdistantibus, rectis brevibus ; slumis
”subacutis oblongis Fe -strialis. Habitat in
Amertc rs | :
Ons. Cette espèce qe nous avions sous le faux nom de Panicume
setosum , nous fait croire qu’elle est d'Amérique. Elle a le port de la:
Setaria glauca et la couleur des épis de la veréicillata, mais n’en a
pas l’âpreté; son rachis est bien plus longuementvelu ; enfin,fce
west ni la Setaria helvola, ni la caudata.
( 184 )
92. S: interrupla; culmo elato (2-ped.) gracili,
glaberrimo, nodis subpilosis ; foliis linearibus lon-
gissimis ( pede. et ultrâ), angustis asperulis sub-
convolulis :vagimis glaberrimis ore breviter pilosis;
spicis bast interruptis elongatis ; rhachi brevissime
tomentosis; floribus subglobosis punctato-striatis ;
selis raris brevibus. Habitat in Brasilio.
Oss. Cette plante qui a le même port que la S. caudata, a les
fleurs plus grosses et les feuilles d’une longueur bien plus remar-
quable.
93. S. maritima (Panicum germanicum Bauh.
maritimum Lamk.)
Oss. Cette plante offre comme la S. ifalica ( millet des oiseaux }
deux variétés qui sont d’une stature moindre et à plus petits grains
que/l’italica.
94. P. sulcata (Panicum sulcatum Lamk. Enc. 4,
p- 746).
Oss. Cette espèce remarquable est certainement du genre Seza-
ria, maïs les soies sont rares et différentes du-Panicum brachyatum
de Poïret.
95. P. viscidula ; culmo geniculato filiforme ( sub-
ped-) succi viscosi repleto; foliis ovato-lanceolatis
acutis glabris sparsè pilosis; vaginis ore margini-
busque pilosis; panicula spicata subpyramidata, ra-
mis inferioribus remotis ; rhachi pubescente ; flori-
bus oblongis setosis, setis flore triplo longioribus;
glumellä punctato-striatä. Habitat in insula Mauritii.
Oss. Lorsque cette plante est fraîche, son chaume est rempli d’un
suc abondant claïr et visqueux.
96. S. pélifera ; culmo elato gracili (2-ped.) ge-
niculato , nodis glabris; foliis elongatis sublatius-
culis sparsè pilosis ciliatisque ; vaginis, apicè pilosis;
panicula subspicato-pyramidata; rhachi glabrä; ra-
( 185 )
mis distantibus elongatis ranifloris; floribus uni-
setosis acutiusculis (minutis) subunilateralibus ; glu-
mellis punctulato-rugulosis. Habitat in America.
Ons. Le Panicum gracile de R. Browne (Sefaria Brownii N.),
doit venir dans ce genre , de même que son P. paradorum (S. lon-
giflora N. ).
07. OPLISMENUS sefarius; (Panicum setarium
Lamk. hirtellum Mich. Orthopogon setarius C.
Spreng.)
Oss. Le genre Oplismenus ayant été établi.en 1807 et l'Ortho-
pogon en 1810, il est de toute justice que le nomimposé par M. De
Beauvois soit conservé. Nous pensons; après en avoir fait l'examen,
quele Panicum sylvaticum Lamk. Enc. 4, p. 743, doit être ratta-
ché à l'Oplismenus Burmanii ; plante que Lamarck ne connaissait
que d’après ce qu’en dit Retzius.
98. O. Crus-Galli Desv. fl. de l’'Anjou, p. 51.
(Panicum -- L. Echinochloa -- P. B. Orthopo-
gon -- Spreng. ).
Oxs. M. Beauvois avait eu tort de faire un genre particulier
de cette espèce et de ses affines : on ne peut les éloigner de
son genre Oplismenus , auquel les a joints avec raison M. Kunth.
09: O. muricatus; (Panicum hirtellum Walt. flor.
Car. p. 72 non L. P. muricatum Mich. non Lamk,
pungens Poiret. Orthopogon hispidum Spreng. ;
Panicum Walteri Pursh. F1. am. 1 , p.67. Setaria
muricata P. Beauv.).
Os. Dans ce groupe, c’est une des plus curieuses, et ce-
pendant elle ne semble être qu'une des modifications de l'O.
CTUS COTVI,
100. O. semialatus; ( Panicum semialatum R.
Brow. ).
Os. C’est l'espèce qui conserve le moins le port général du
genre par l'irrégularité de ses 2 ou 3 épis; mais cependant on
ne peut l’en éloïgner à raïson de Ja forme de ses plumes et glu-
melles.
101. O. abortipus; (.Andropogon squarrosum L.
Panicum -- .Lamk. P. abortivum R. Br. Orthopo-
gon obortivum Spreng. ).
Czs. Cette espèce est la dernière dégénérescence du: type
principal, du genre Oplismenus ; ‘elle ne porte .que trois à quatre
fleurs par épi et encore très-éloignées. les unes, des, autres ; ‘ce
qui plouve combien tous ces genres que nous distinguons sont,
relativement à la nature, artificiels et peu caractérisables.
10%. PANICOM Æymenachne ( Agrostis monos-
tachya Voir. Enc. suppl. 1, p. 256. Hymenachne
Myuros, B.. Beauv. agr. p.18, t. 10, f. 8).
Oss: C'est à-tort qu'on à confondu cette plante avec lÆgros-
is myuros qui est très-différente’ Sion fait attention ique la
glumelle est à peine coriacé, peut-être conservera-t-on le genre
Hymenachne.
103. P. Urochloa ( Urochloa panicoïdes P.
Beauv.l..c. p.53.t. 11. f. 1. Setaria pilifera Spr.
syst. veg. 4. suppl. p. 33); culmo graali glabro,
nodis sericeo—piloëis ; fohis Jatiusculis lanceolatis
acutis pilosis bast cordatis : vaginis hirsutis ore pi-
losis; spicis alternis' oppositisve subsessilibus. secun-
dis; rhachi smuosâ! complanata sparsè pilosa ::pilis
flore longioribus; floribus biserialibus oblongis acu-
tis ; gluma striata; glumella punctato- -Striatulà. Cres-
cit in insula: Mauritii.
Oss. Cette plante n'ayant pas été décrité, nous avons cru de-
voir la micux faire connaître ici. Elle ne peut être du génré
Setariaz (cé sont de longs poils qu’on:y.observe;et non des soies
raides; motifs qui font que la plante suivante n’est point aussi
du genre Setaria.
.… 104. P. pilosum SW, (P. distichum 44 Enc,
( 187 )
4x. Setaria disticha Kaïth, in nov. 5. et Sp.
EH. et B. 1. pue).
105. P. hamatum ; eulmo radicante gracii.(ped.)
subcompresso geniculato : nodis pubestentibus: fo-
lüs ovato-oblongis acutis , sparsè pilosis : vaginis
ore subnudis : ligula fimbriata ; spicis 3-5 remots ;
rhachi, subteriti; floribus pedunculatis sessilibusque
remotis secundis ; glumis valva inferiore setosà : setis
apicè hamatis. Crescit in Brasilio.
106. P. Novæ-Hollandiæ (Paractænum —— P.
Beauv. agrost: p. 47, t. 10, £. 6); culmis cæspitosis
(8-poll.) glabris; folis planiusculis vaginisque gla-
bris : ligula fimbriata; rhachi angulata apicè nuda acu-
tà ; spicis 3-5, bi-trifloris. Habitat in Nova-Hollandia.
Oss. Si, cette plante n’est pas le P. spinescens: de R. Brown
prod. p. 193, au moins elle doit en être très-rapprochée et de
la même section dans’ les ouvrages de ce savant.
107. P. cæspitosum SW.
Ors. Nous avons une plante que nous croyons celle de Swartz
et qui n’est pas le! P: prostratum detLiamarck; d'un autre côté,
notre espèce ne‘s'accorde pas entièrement avec la description
donnée, ayant les bords'de la gaîne ciliés et quelques poils à
l’ouverture, des cette gaine, à
108. P. Zanceæfolium:; culmo: ( pedale ) repente
geniculato apicè. pubescente : nodis glabris ;: folns
oblongis, ovatis (2-poll. poll. lat.), acutisglabris ;
vaginis pubescentibus ore subnudis ; spicis,_densè
subspicatim dispositis, inferioribus distantibus,; flo:
ribus unilateralibus subtriserialibus eblongis acutis ;
glumis.sstriatis ; glumellis lævibus.. Crescit in,locis
bumidis Brasil. : |
109. P. Bambusæfolium ; Par clato (5- 7- Hdi)
( 188 )
glabro; foliis lanceolatis basi cordalis acutis ( poil.
et ultr. lat.) glabris: vaginis marginis oreque ci=
liato-barbatis ; spicis numerosis pyramidatim dispo-
sis (2-poll.); rhachi sulcatâ; floribus biseriatis
unilateralibus subovatis obtusis ; glumellis punctatis:
Habitat in Brasilio.
110. P. subspicatum (P. poeforme Desv. in Enc:
suppl. 4. p. 284 non Willd. dioecum Spreng. 1.
P- 322); culmo subflaccido glabro ( sub--ped.
striato basi geniculato compresso, geniculis sub-
pilosis ; folüs elongatis (8-poll. 3-4-lin. lat.) basi
attenuatis nervosis subasperis : vaginis glabris ore
breviter pilosis ; paniculâ elongata subspicata, ra-
mis abbreviatis inferioribus ramosis paucifloris (5-
8-flor. ); rhachi subpubescente : partiale flexuosà ;
foribus subinflatis acutis; glomis substriatis ; glu-
mellis transversè undulatimque punctato -rogosis.
Habitat in America ?
Oss. Cette plante est bien différente de notre Poa melicoïdes
Cvoy« n.° 140), et a mal à propos été réunie avec elle par
Sprengel pour en faire une fausse espèce : son P. dioecum.
111. P. exfensum (P. prostratrum Deli. flor. Æg.
il. r. p. 51. excl. syn. Lamk.); culmis ramosis
diffusis subprosiratis extensis nodisque glabris; fo-
his cordato-lanceolatis acutis marginatis serrulatis
C1-2-poll. 3-4-Hin. lat.) basi longè ciliatis : vagi-
nis subinflatis ore marginisque ciliatis ; spicis 3-5
remotis ( semi-poll. ) subpetiolatis; rhachi glabra
sinuatà ; floribus biserialibus oblongis striatis gla-
bris ; glumellis lævibus. Habitat in Ægyptia infe-
\ori.
( 189 )
112. P. affine Desv. Enc. suppl. 4. p. 273 (P.
setigerum Pers. syn. 1. p. 81 nec Retz nec P.
Beauv.); culmis sulcatis compressis elatis (2-ped.),
nodis glabris ; folis glabris ( 3-lin. lat. ) elongatis :
vaginis ancipitiformibus glabris ore pilosis; ligula
nulla; spicis remotis (semi-poll. et ult.) basi pi-
losis ; rhachi setosâ; floribus triserialibus ; glumis
villosis ; glumellis glabris. Crescit in India orien-
tal.
113. P. palhdifolium; culmo snicitéte ( sub-
2-ped.) subramoso; nodis puberalis; folüs glabris
ovato-lanceolatis acutis pallidis, basi ciliatis corda-
ts: vaginis ‘ore nudis marginibus cihatis 3. spicis
unilateralibus alternis 7-9 ( pollic. }; rhachi sparsè
selosä, setis flore longioribus; floribus ablongis sub-
acutis; glumis glabris; glumellis punctulatis. Habi-
tat in America calidiori ?
114. P. orrescens Desv. in Poir. Enc. suppl. 4.
p. 278 (P. gracilentum? Poir. 1. c. p. 276); cul-
mo radicante geniculato ramoso ; nodis puberulis ;
folis glabris (1-3-poll.) acutis {3-lin. lat.) ; vagi-
nis ore nudis marginibus ciliato-pilosis; spicis ap-
pressis, paniculatis basi pilosiusculis ; rhachi si-
nuosà ; floribus alternis unilateralibus pedicellatis
baie acutis ; glumis glabris; glumelhis re Hu
pubescentibus. Habitat in Antillis.
‘Os. Ayant eu cette plante sous le! nom de Panic de la Sa-
vane et l'ayant 4u cultivée au jardin de Paris, j'ai quelque soup-
çon que c'est la même que M. Poiret a publiée de nouveau,
sous le nom de P. gracilenium.
115. P. Michauxrü Por. Enc. L c. p. ne CP.
Molle Mich. non Sw.)
( 190 )
Oùs. C'est À tort que Sprengei a confondu cette sé avec le
Panicum leucophæum,de Kunth. 1 ,
116: P. :unilaterale (Monachne ee P:
-Beauvagré p:l4guit: 104.09. exel:).; eulmis.cœæs-
pitosis apicè tomentosis subramosis nodis pubéscen-
übus;folis!subtoñentosis aus (6-lin. ) -elongalis
acutisz; vaginis tomentosis : | ligula sericeo-pilosa,;
spieis 5-7lunilateralibus}; rhachi tomentosa ; spiculis
subtriseriahbus subimbricaüs, pedicello apice incras:
sato; glumis adpresse ! villosis subædqüalibus mucro-
natis ; glumella acuminata 5 LR Habitat in Amc-
rica australi:, 2 5 eitélos os
117. : Bi monachnoïdes : culmo. elato Gub3pcd)
apiceztomentoso!, nodis pubescéntibüs ; folñs, glabris
ares nudis ; spicis. 921 6::subpyramidatim. ‘dis positis ;
floibus-biserialibus remotis ; glamis margine >sub-
pilosis, acutis. Habitat in Braëilio: +4 on! !
Ozs:; Les trois plantes précédentes! sont-très-voisirfés l’une de
l'autre ; et si le genre! Monachne doit être conservé, elles se-
raient ‘susceptibles de le former naturellement par l’ensemble de
Jeur pott'i ‘le seul” Saccharim repians ( Monackiie racemose P.
B:)) fe’ un! port différent, Notre fdernièrél espèce) a’ les fleurs! plus
petite que:le . ne 116, etulé:n.:1195,1les-a ss courtes et plus
grosses que, le même, Me 316. : TR L
1x8, :P, senegalense : culmo “ie Tamos0 be pie
geniculato:| modis, pubescentibus; foliis, glabris, lan-
ceolatis acutis obscur, eiliatis : vaginis .apicè.. ‘barba-
Us; paniculis . subspica us. secundis. basi.. barbatis ;
rhachi-complanata simuosa tenai: sparsè ‘pilosä® pilis
spicülis brévioribüs ;floribus * alternis _pedicellätis
subgeminis remolis oblongis subacutis; | glumis pu-
besrenbbes birtis: glumellis oblongt striaus. Hebi-
tat in Guinea, Se aque:
( 191 )
‘Oss: Cette espèce a le port du P. pyramidatunr.
119-P. magellanica Lamk. Enc. 4, p. 724.
Ozs. La plante qui,a été décrite, d'après nous sous,lé nom de P.
acutiflorum (Desy. Enc. suppl. #, p. 283) estla même que celle de
Lamarck , et a été omise par les auteurs qu ont t dernièrement fait
des ouvrages de botamiqué:
120. P. Airlicalycum Bosc. ined.°(Phalaris vil
losa Mich. Panicum erianthos Poir. Anthænantia
villosa P. Bcauv. ) +
Ozs. Tous ces synonimes appartiennent à la même je plante qu'on
ne peut éloi gner du genre Panicum et que Bosc avait fait connaitre
lerpremier.
121. P. férertutinst culs rainosis (3: poil: et pe)
filiformibus rectis pubescentibus ; ramis basi com-
pressis, nodis subpubescentibus ;, :folis linearibus
lanceolatis acutis (pollic.).vagmisque pubescenti-
bus ; paniculis pedunculatis «( poli.) pyramidatis
ramosis glabris ; floribus,( parvulis ); Shi pubes
centibus. Habitat in Carolina: ii
Oss. C'est de toutes: les ‘espèces celle qui nous paraît ayoir ee
fleurs les plus petites, et nous a été donnée avec un grand nombre
d'autres par M. Tinturier qui ‘seul et a pied, a parcouru l'Amérique
septentrionale dans tos les Fi cn amtéux _ toutesiles|bédutés
delamature. r ! “oriuisdou
122. P. Mere ME Sau Spseng: euditnosesdua
où Peu de plantes ont été sujettes à autant d'incertitude; ge
tait l_4ndropogon insulare de Linné; Haueur lanatum pour Rott-
boél. (Surin:t. 1 )} 1e Nardus AokrÿTora pour Rôlander; Je Pa-
nicum: leucophæun: de|M:Kunth} etl lenfin, avec Sxrartz: et Beau-
vois nous. le repardons comme: un nil &£Hilium., insulare . Desr,
villosurre Swr. nec Lamk. hirsutum P. Bcauv. D
ai
‘128, P. de B. Shbrum à folfs ‘gläucis
10h
GliN
glabri is ore pilosis. Mb
"Oss. Cette variété qui a les feuilles gages comme s Hpotee
| L 21
setrouve dans Jes Florides. QGAR «est 3 143} *
( 492 )
124. P. Dumus; culimo ramosisimo ; foluis planis
dinearibus acutis elongatis ( r-3-poll.) glaberrimis :
vaginis brevibus marginibus oreque pilosis; pani-
culis rarifloris ; floribus (mediocris) ovato-oblongis ;
glumis glabrisstriatis subæqualibus, :tertia breyissima;
glumellis lævibus. Habitat in America calidiori.
Os. Cette plante qui pourrait être le Panicum dichotomum de
Linné et qui n’est pas le P. nodiflorum, ne convient plus à notre
plante tel qu'en parle Srrengel.
125. P. pubescens B. longipilun.
Os. Cette variété est remarquable par la longueur des poils qui
couvrent toute, la gaine des, feuilles; tandis que celles-ci ne sont
pas moins pourvues de poils .que le P. pubescens (Lamk. Enc. 4,
p- 748), et cependant par ses autres parties telles que la fleur, on
ne peut trouver de différence spécifique ; dans l’une et dans l'autre,
les 'glumes sont veluestet la glumelle lisse.
126: P. aciculare Desv. in Enc. suppl. 4, rl
culmis dichotomis ramosissimis (8-poll.) genicu-
las, fastigiatis geniculisque pubescentibus ; foliis
convolutis acutis Sparsè subpilosis (poll. et ultr. ):
vagims pubescentibus ore breviter pilosis ; pani-
culis pluribus. paucifleris (3-7) terminalibus pedi-
cells puberulis; flortbus subglobosis ; glumis striatis
pubescentibus; glumellis HEURES Habitat in we |
orientali. |
127. P. chatifolium.(P..cihatum? El}; oh 4
mis cæspitosis (4-poll.): fastigiatis ; folüislineari-
lanceolatis acutis longissimè ciliatis subglabris (2-poll.
long. 2 lin. lat.); paniculis subsessilibus subpauci-
Îloris, ramulis barbatis; pedunculis elongatis sub-
puberulis ; floribus ovatis subpuberulis ; glumis stria-
is; glumellis lævibus. Habitat in Americâ boreali.
( 493 )
Oss. Dans sa plante Elliot dit les fleurs aiguës et les feuilles sub-
cordiformes ; ce qui les suppose bien plus larges que dans.notre es-
pèce. Elle peut être placée dans les panicules à peu ou à beaucoup
de fleurs : division peu sûre adoptée par Sprengel.
128. P. Portoricense; Desv. in Prod. FI. Ind.
occ. W. Ham. p. 11; culmis numerosis geniculatis
apicè divaricato-ramosis pubescentibus : nodis pu-
berufis; folus subremotis glabris elongato-lanceo-
latis (poll. et ultr.): vaginis marginibus pubes-
centibus, ore longè pilosis; paniculis terminalibus
sessilibus divaricatis paucifloris, pedicellis subglabris;
floribus obovatis; glumis nervosis pilosiusculis ; glu-
mellis lævibus. Habitat in Antillis.
129. P. oblongiflorum; culmis fiiformibus strie-
tis simplicibus glabris (ped. et ult.), basi genicu-
laüs; foliis linearibus acutis elongatis subconvolutis
glaberrimis : vaginis ore nudis; paniculis exertis : ra-
mis raris remotis (4-7); floribus alternis pedicel-
latis (violaceis) oblongis acutis; glumis nervosis;
glumellis nitidis. Habitat in Carolina.
Oss. Le port de cette plante, que nous devons à Bosc, est celux
de nos Poa , telle que la variété Poa nemorosa rariflora; et du reste
elle nous paraît très-distincte,
130. P. rgidifolium ( Agrosus rigidifolia Por.
Enc. suppl. 1 , p.257).
Os. Cette plante bien décrite, si ce n’est qu’elle a été mal placée
par M. Poiret, est un des plus remarquables Panics, par ses feuilles
comme épineuses au sommet, et roides et épaisses.
131. P. eriogonum (P. pubescens minor. Poir.
Enc. suppl. 4, p. 272); eulmis strictis, ramosis ,
iomentoso-pilosis: nodis verticillatim densè: pilosis ;
folüs lanccolatis (3-poll. et ult, 4-lin. lat.) densè
19
( 194 )
pilosis ciliatis: vaginis pilosissimis ore barbatis; pa-
niculis terminalibus subpaucifloris, subglabris; flo-
ribus (minutis) obovatis; glumis siriatis pubescen-
tibus; glumellis ( albis) lævibus. Habitat nm America
calidiori.
Oss. Cette plante très rapprochée du P. pubescens, se trouve ca-
ractérisée par ses rameaux dressés et non étalés; par ses fleurs plus
petites, et son mode de pubescence.
132. P. cordifolium ; culmo elato (sub-2-ped.),
geniculato subsimplici glabro: geniculis apicè pu-
berulis; foliis remotis (2-3) cordatis, lanceolatis
basi longè ciliatis: vaginis subpubescentibus margi-
nibus ciliato-pilosis; panicula pedunculata subpau-
ciflorâ; ramis erectis rarifloris; pedicellis glabris ;
floribus subpubescentibus striatis; glumellis lævibus.
Habitat in Americâ boreali.
Oss. Dés différences essentielles nous portent à croire que no-
tre plante n’est pas le P. keterophyllum de Bosc, ou ovale d'El-
liot.
133. P, ornatum Desx. in Prod. Ham. p. 11;
culmo elato (sub-3-ped.) pubescente: nodis. apicè
annulatim barbatis : foliis remotis ovato-cordatis
oblongis pubescentibus (trip. long. 8-lin. lat.) : va-
gimis hirto-pilosis; paniculis subsessilibus, pubes-
centibus paucifloris; floribus (submaximis) oblongis;
glumis pubescentibus nervosis; glamellis lævibus.
Habitat in Antillis.
Oss. M. Poiret, d’après une note placée dans nos collections ,
pense que cette plante est voisine de son P. Boscit, mais nous ne
croyons pas ce rapprochement convenable.
134. D. Airticaulum : culmo elato ( subtrip. ) mol-
liter piloso : nodis subglabris ; foliis Iævibus remotis
o ? &
( 195 )
elongato-Fanccolatis (6-poll. 5-lin. 1.) infra atte-
nuatis subtüs subpuberulis : vaginis hirsutis ore
barbatis; paniculis densè pubescentibus : ramis sub-
Simplicibus , ramulis 2-4 floris; floribus elongatis
(magnis); glumis striato-sulcatis puberulis bifloris
apicè barbatis inæqualibus : flore inferiori bivalve
slaminifero , glumellis herbaceis : flore fertili subpe-
dicellato, glumellis lævibus coriaceis. (Crescit in
Brasilio.
Os. Si l’on conserve le genre Ænthænantia, on devra y placer
cette espèce.
135. P. Séreptostachys Spreng. (Streptostachys
aspera Desv. J. Bot. hirsuta P.Beauv. Agr. EI. x,
Lars.)
Os. Cette espèce , dont nous avions fait un genre, étant observée
d’une manière plus complète, est en effet un Panic, dont les fleurs
éprouvent quelquefois une altération qui multiplie les valves de la
glume, avec une disposition qui donne au tout une courbureen ha-
ineçon.
136. P. T{inoniense; ceulmo elato (3-ped.) ra-
moso geniculato subscabro; foliis latis elongatis
(6-10-poll. long. 6in. lat.) glabris subasperis :
vaginis punctatis ‘hirtèpilosis, ore margmibusque
piloso-ciliatis ; paniculis terminalibus , ramis pubes-
centibus erectis subsimplicibus ; floribus ‘pedicellatis
ovalis acutiusculis; glumis lævibüus (bruneis ) substria:
us; glumellis reticulato-venosis. Habitat in America
boreali.
137. P. Sorgordeum Desv. L.'c. p. 10; culmo
elato ramoso (3-ped. et ult.) glabro; folus lanceo-
latis obliquis nervosis subiüs ienuissimè pubescen-
tibus, basi extrorsüs barbatis : vaginis -glabnis’ ore
( 196 )
marginibusque piloso-ciliaus ; paniculis subsessilibus
ramosis, ramis subpubescentibus; floribus ovato-
globosis nitidis ; valvula tertia glumæ nervosa mu-
cronatà ; valvulis subnervosis. Habitat in Hispaniolà
inque: Brasilio.
== B. villosum.
Os. Cette espèce voisine du P. glutinosum, a-les feuilles. très-
différentes de cette dernière qui ne les a ni striées ni tomenteuses;
du reste l’inflorescence est la même, mais non glutineuse, La va-
riété B. est à plus Jongs poils dans toutes les parties , et même dans
la panicule ; maïs du reste nous n’avons pu la distinguer.
138. P. Bambusoïdes Des. 1. c. ; culmo elato (6-
ped.) lignoso ramoso glabro , ramis divaricatis ; fo-
lis elongato-lanceolatis angustis nervosis glabris : va-
ginis infimis perennantibus strictis, superioribus gla-
bris marginibus oreque ciliatis ; paniculis sessilibus
ramoso-divaricatis , ramis angulatis paucifloris aspe-
ris; floribus glaberrimis (maximis) ; glumis striatis.
Crescit in Antillis.
Oss. Cette espèce compose un groupe assez naturel, étant réunie
aux deux précédentes et à la suivante,
130. P. Walther: Desv. nec Poiret nec Pursh ( P.
Jatifolium Mich. flor. Am. bor. r p. 49 nec L.); cul-
mo pubescente; foliis oblongis ovato-lanceolatis pu-
bescentibus nervosis: vaginis pilosis, basi circa no-
dum oreque barbatis; paniculis sessilibus paucifloris
pilosis ; floribus oblongis; glumis nervosis ; glumel-
lis subacutis lævibus, Habitat in Virgimiä.
Oss. Nous croyons.que Richard a confondu deux plantes sous le
nom de P. latifolium , en faisant le travail de la Flore de Michaux;
car M. Poiret, en décrivant sur nos collections son P. #altñeri, l'a
fait sur l'échantillon que nous croyons appartenir à son P. Boscis.
u reste; notre plante est de Michaux même,
( 197 )
140. P. Orizordes Sw. Flo. Ind. occ. 1 p. 162 (P.
melicoïdes Desv. Enc. suppl. 4. p. 233. diœcum
Spreng. 1.p. 322).
Os. Tout nous prouve que notre plante est celle de Swvartz, mais
il nous semble qu’elle doit être portée dans la, division des espèces
à épis en panicule. La variété P. orizoïdes minor, est plus petite
dans toutes ses parties et n’a qu’un pied et demi de haut.
141. P. petiolatum ; culmo repente geniculato ra-
moso (sub-biped.) molliter piloso : geniculis pubes-
centibus ; foliis petiolatis obliquis latè ovatis acumi-
natis (3-poll.) nervosis glabris subciliatis : vaginis
pubescentibus ore barbatis; paniculis pedunculatis
subsimplicibus : ramis angulatis basi villosis remo-
tifloris ; floribus (magnis) elongatis: glumis glabris
nervosis. Habitat in Brasilio.
Oss. Cette espèce a presque la fructification de la précédente.
140. P. Zœve Lamk. exel. var. B.
Oss. Il existe dans les ouvrages des botanistes une grande con-
fusion pour plusieurs espèces très-rapprochées de celle-ci. Lamarck
a eu tort de joindre à son P. Zæve, que nous avons du Brésil et des
Antilles, la plante d'Afrique nommée P. altissimum H. P. (P.
maximum Jacq.), et qui est une de celles données pour Æerbe de
Guinée.
143.P.nutans (Agrostis nutans Poir. Enc. suppl.:,
p: 255. Vilfa nutans P. Beauv. Agr. p. 16.)
Os. Il n’y a rien d'étonnant dans la méprise de M. Poiret, sux
cette plante dont les fleurs sont obliques vers leur pointe, et of-
frent par;leur allongement et leur petitesse, l’apparence de celle des
Agroslis.
144. P. cæspitosum Lamk. Enc. 4. p. 742. CE
diffusum Poir. Enc. suppl. 4. p. 280 exel. syn.)
*. Oss. Cette plante ne nous paraît pas être celle de Swartz, elle a
les chaumes dressés et point tombans.
145. P. patentissimum Desv. in Poir. Enc. suppl
( 198 )
4.p. 283. culmo elato ( 4-ped. etult.) glabro subge-
niculato : nodis turgidis glabris; folis latè lanceola-
ts cordatis elongatis ciliatis glabris nervosis : vaginis
striatis ore marginibusque pilosis ; panicula vasta di-
varicata glabra rariflorà ; floribus ( subminutis ) gla-
bris; glumis, valva tertia ciliatà : als glabris; glumel-
lis lævibus. Habitat in Hispaniolà (et non in novä
Hispania (1) ).
146. P. mullinerve Desy. in Enc. suppl. 4. p. 279
et confertum Desv. 1. c.; culmo elato (2-ped. et uli.)
glabro; folis latis elongatis basi cordatis attenuatisque
striaus glabris subasperis : vaginis , internode lon-
gioribus , glabris striatis ore barbatis ; paniculä exten-
sa ramosa : ramis basi nudis; floribus (minutis) gla-
bris subglobosis ; glumis subæqualibus bifloris : unä
stenili; glumellis lævibus. Crescit in Antillis.
Os. Ce sont deux individus d’ane même plante que nous avions
crus différens à raison de leur genre de développement de panicule.
Les espèces à deux fleurs ne nous semblent devoir faire qu’une sec-
tion de genres et non un genre.
147. P. repens L. (P. convolutum P. Beauv. in
Spreng.)
Oxs. Sprengel a adopté la plante de M. de Beauvais et a ramené
le P. repens an P. colorafum, ce qui établit deux erreurs : les indi-
vidus de la plante de 1a Guinée sont un peu plus élancés.
148. P. lanceæfotium ; culmo elato (3-5-ped.}
compresso ramoso glabro apice pubescente : nodis
extimis pubescentibus ; folis elongato-lanceolatissub-
glabris nervosis basi attenuatis margine pilosiusculis :
———— s sl, 0
(1) Saint-Domingue et non la Nouvelle-Espagne, comme l’a
dit M, Poiret,
( 199 )
vaginis villosis ore pilosis ; paniculis: pedunculis sub-
corymbosis, ramis pubescentibus apicè glabris flo-
riferis ; floribus (minuus) glabris: glamæ valvula ter-
lia minutà subscariosa, valvulis viridibus subner-
vosis; glumellis lævibus. Habitat in Brasilio.
149. P. Guineense Desv. im Poir. Enc. suppl. 4.
p- 279 (P.ovalifolium Poir. 1. c.); culmo prostrato,
radicante geniculato : nodis subglabris; foliis ovato-
oblongis acuminatis sparsè pilosis barbato-ciliatis:
vaginis hirto-pilosis ; paniculis capillaribns laxis gla-
berrimis paucifloris; floribus minutis oblongis. Ha-
bitat in Guinea.
Os. Le nom que nous avions adopté ne devait pas être changé:
à la vérité l’'Herbe de Guinée a reçu ce nom de Richard, mais elle
en avait reçu un autre antérieurement, et qui doit rester.
150. P. graciliscens Desv. 1. c. culmo suberecto
(ped.) glaberrimo; foliis ovato-lanceolatis subacu-
minatis (2-poll. 5-lin, lat. ) nervosis pubescentibus,
basi cordatis extüs villosis : vaginis pubescentibus ore
pilosis; paniculis elongatis subfasligiatis , ramis
longis apicè divisis; floribus (nigrescentibus) obo-
vatis glabris; glumis glabris nervosis; glumellis
puncticulato-reticulatis. Habitat in Carolinis.
151, P. sessilicaule Desv. in Ham. Prod. FI. ind.
occ. p. 11. (P. cayennense? Kant in N. gen. H.
B. 1, p- 103, excl. sy. Porr. Enc. suppl. 4, p.272,
n.° 14); culmis cæspitosis subnullis : nodis pubes-
centibus; folüs elongatis latiusculis (3-4-poll. 3-4-
lin. lat.) glabris subtùs nervo pilosis : vaginis pi-
losis; paniculis elongatis (subped.) subsessilibus :
pedunculo angulato rhachique hirtis, ramis numero—
( 200 )
sis lateralibus ; floribus (submagnis } ovatis oblique
acuminalis; glumis glabris substriatis; glumellis læ-
vibus. Habitat in Carolina ?
Oss. Cette plante n’est nullement.une variété du P. cayerurense ;
ainsi qu’on l’a avancé.
152. P. retrofractum Del. ined. (P. tremulum ?
Spreng., 1. p. 319); culmo erecto (sub-2-ped.)
siriato glabro; foliis elongatis latinsculis nervosis
(3-4-lin. lat.) subasperis : vaginis glabris striatis ore
nudis ; panicula laxa : ramis retroflexis divaricatis apice
floriferis; floribus oblongis acutis: glumis striatis
coloratis ; glumellis (bruneis) lævibus. Crescit in
America boreali.
Oss. Sprengel dit que les rameaux de la paxicule de sa plante sont
flexueux et.ses fleurs obtuses ; ce qué nous ne reconnaissons pas
dans la nôtre que nous tenons de M. Rafnaut de Lille.
153. P. hzrsutum Sw.
Oss. Cette plante omise parSprengel, est très-bien décrite par
Swartz, si on ajoute que les feuilles sont poilues en-dessous à la
partie inférieure et les fleurs aiguës : du reste elle a le port du P.
coloratum. Elle’est de S.t-Domingue.
154. P. Agrostidiforme Desv. in Prod. Ind. oc.
W. Ham. p. 10.
Oss. Cette plante, par l'effet d'un port remarquable , se trouve la
même que celle à laquelle Lamarck a donné ce nom, et qui croît
dans les Antilles comme au Brésil,
155. P. rariflorum Lamk. Enc. 4, p. 746 bis
(Aüra laxa Rich. act. Soc. hist. nat. Paris. r , p: 106,
Poa rariflora Rœm. Spreng. Orthoclada -- Beauv.)
Ozs. Cette plante beaucoup plus rapprochée du Panic que d’aucun
autre genre, a les feuilles véritablement pétiolées, ovales-lancéo-
lées acuminées, nerveuses et poilues; mais peut-être l’'Ortho-
clada deyra-t-il être adopté ?
( 201 )
156. P. polygamum Sw. Prod. p. 24. (P. læve
Lamk. Enc. 4, p. 740 excl. syn. P.— jamento-
rum Pers. Ench. 1, p. 83: Herbe de Guimée }).
Oss. Cette plante dont le diagnostique particulier est d'avoir ses
nœuds velus, a ‘été confondue sous le nom d’Herbe de Guinée,
avec plusieurs autres espèces.
157. P. Zeff. (P. coloratum B. Lamk. ill. n.° 903);
culmo.elato (3-ped.) glabro erecto cæspitoso ; fo-
lis elongatis nervosis glabris (4-lin. lat.) : vaginis
glabris apice margineque piloso-sericeis ; paniculà
subverticillata : ramis laxis, inferioribns basi pilosis ;
floribus (subviolaceis ) pedicellatis; glumis oblongis
submucronulatis; glumæ : valvulà tertia brevissima
subobtusa ; glumella (alba } transversè puncticulato-
striatà. Habitat in Abyssimiä.
158. P. atro-purpureum; culmo elato (3-ped.)
cæspitoso, glabro ; folis glabris lævibus elongatis
(3-lin. lat. ): vaginis glaberrimis ore sericeo-pilosis ;
paniculis elongatis subverticillatis glabris; glumis
bifloris (læte violaceis) subæqualibus acutiusculis :
flore staminifero sterili, pistilifero , glumellis lævi-
bus. Habitat.
Oss. Si le'genre Zsachne est adopté, malgré son rapport avec
le Panicum, et qu'ici les glumes sont acuminées au lieu d’être
obtuses, il faudra y placer cette espèce; mais nous pensons
qu’il vaudrait mieux en faire une section; et même encore elle
réunira bien des choses peu naturelles, telles que le P. racemo-
sum Spr. (Saccharum reptans Lamk.}) et les n.05 105, 115, 116,
117, 140 et 158 de notre travail ici.
159: ELYMUS distans ; culmo elato ( 3-ped. );
folüs glabris; spica subnutante basi imterrupta, ra-
mosa ; spiculis subternis : inferioribus elongatis ra-
( 202 )
mosis 3-5-spiculatis ; involucris asperis linearibus
aristatis flore sublongioribus ; glumis pubescentibus
aristâ triplo brevioribus ; glumellis adpressè pilosis.
Habitat...
Oss. Cette plante dont nous ne connaissons pas l’origine, ne
peut appartenir à aucune espèce connue, et a le port de l'Ely-
eus Tramnosus, mais est bien moins rameuse.
160. ENNEAPOGON Desvauxi P. Beauv. agr.
p- 82.1. 16.f. 11. ( En. gracile Desv. J. bot. suppl.
1. p. 70. excl. syn. Br.); culmis cæspitosis erectis
Cped.) fliformibus pubescentibus : nodis pilosis ;
folis linearibus supra pubescentibus convolutis : va-
ginis pubescentibus ; spicis cylindricis (poll. et ultr.
migrescentibus) ; glumis acutis subpuberulis; aristis
plumosis. Habitat in Manilià.
Oss. On à voulu réunir ce genre, que nous avons proposé,
au Pappophorum; mais il est si naturel que nous ne croyons
pas devoir adopter cette réunion, et en outre nous croyons notre
plante différente de celle de M. Brown. Nous l'avons décrite
ici, M. De Beauvyois n’en ayant donné que la figure, d’après nos
collections.
161. TRIODIA festucoïdes ( Panicum festucoïdes
Desv. Enc. suppl. 4. p. 283); culmis cæspitosis
elatis (3-ped.) glaberrimis crassis basi vaginiferis ;
folüs striatis latiusculis (ped. et ult. long. 4-5-lin.
lat.) nervosis lævibus glabris, nervo medio albo,
basi extùs semi-annulatim pilosis : vaginis glabris
nitidis ore breviter pilosis ; paniculâ ramosa fasti-
glata ; floribus pallidis; glumis sübtnifloris mucro-
nulatis dorso Jævibus; glumellis basi pilosiusculis :
valvalà inferiori brevissimè tridentatä. Crescit in
America boreali.
( 203 )
Ors. Ceité plante ne nous parait appartenir ni au Triodia
Greenii, ni au pallida, ni au cuprea. Nous soupçonnons qu'il
y a plusieurs espèces réunies par Sprengel dans cette dernière,
dont se rapproche le T. novæboracensis N. (Tricuspis — P. B.
agr. p. 77), par sa ligule poilue; tandis que la Triodia cœru-
lescens N. (Poa cœrulescens Mich. Tricuspis caroliniana P. Beauy.
1. c.t. 15. f. 10) forme encore une espèce particulière.
162. DANTHONIA Zhuarü ( Pentameris Thuari
P. B. L. c. p. 92. t. 18. f. 8. Avena antarcta ?
Thunb.); culmo elato (3-ped.) erecto glabro basi
subramoso ; foliis convolutis elongatis (ped. et ult.)
glabris . supra pilosis : vaginis ore barbatis ; pa-
niculis fastigiatis; glumis scariosis acutis “bifloris
flore Jongioribus ; glumellis (fucescentibus } hispi-
dis : inferioribus quadrisetosis medio aristatis, aristà
tortili. Habitat ad C. b. spa?
Oss. La phrase de T'hunberg : Panicula coarctata, calicibus 4-
floris , corolla bifida aristata, ne semble pas convenir à notre
plante, qui ne peut que former une division dans le genre Dan-
thonia, et n’avait pas encore été décrite.
163. KOELERA Æérla ; culmo erecio (10-poll.}
glabro filiformi annuo ; folüs linearibus flaccidis hir-
to-pilosis : vaginis apice margineque barbatis ; spicä
densa oblonga (10-lin.); rhachi pubescente ; spi-
culis bifloris pedicellatis ; glumis acutis subæquali-
bus hirto-pilosis glamellà æquantibus ; glumellis :
valvulà inferiori aspera aristata, arista erecta, val-
vula superiore hyalinä. Crescit in Hispaniâ orien-
tal.
Os. Cette plante s'éloigne des Æira par ses glumelles aristées,
et sa glume est plus prolongée que dans les autres espèces du
genre Koeleria : genre dans lequel ne doivent pas rester les es-
pèces non aristées, qui sont de véritables Paturins.
{ 204 )
164. TRISETUM sericeum ; culmo cæspitoso stricto
{ped. et ult.) glabro; foliis convolutis rigidis gla-
berrimis basi supra pilosis: vaginis striatis glabris
ore barbatis; panicula stricta subspicatä, rhachi sub-
pabescente; spiculis (semi-poll.) 5-6-floris; glnmis
glabris acutis glumellà longioribus margine pelluci-
dis ; glumellis argenteo-barbatis : inferiori dorso aris-
tatâ bifida, divisuris aristatis. Crescit in Brasilio.
Os. Cette espèce doit certainement faire un genre distinct de
l4vena , soit qu’on l'appelle Trisetum ou Trisetaria.
165. POA brachiata; (Panicum divaricatum Mich.
flor. Bor. Am. r. p. 50 non Lamk. Panicum de-
bile Poir. Enc. suppl. 4. p. 283).
Oss. Cette plante ayant deux à trois fleurs par épillet, est ur
véritable Poa, et pourrait être prise aussi pour une Festuca; et
aussi ne sommes-nous pas surpris que Richard père l'ait prise
pour un Panicum. Ce n’est point comme l’a cru Sprengel, le P.
hians d'Elliot: cette dernière espèce ayant la base des feuilles velue.
166. P. heteroclita; ( Aïra arundinacea L.).
Oss. Le port de cette plante est tel que, malgré la constance
de ses deux fleurs par épillet, à la vérité plus longues que la
glume, on ne peut s'empêcher de la placer dans les Paturins,,
dont elle a le port, plutôt que dans celui des Canches.
167. P. microstachya ; culmo elato (2-ped. et
ultr.) flexile glabro; folüs latiusculis subconvolutis
glaberrimis : vaginis striatis ore brevè densèque pi-
losis ;. panicula elongatä (ped. ) subverticillata, ra-
mis ascendentibus elongatis (6-poll. ) rhachique
glabris; spiculis 5-floris; glumâ valvis subæquali-
bus acutis carinâ serrulatis ; glumellà glabra apicè
subobtusa serrulata. Habitat in Africa ?
168, P. Senegalensis ; culmo elato (2-ped.); pa-
riculà (8-poll.) verticillata; ramis (2-poll.) sub-
ascendentibus basi longè pilosis; spiculis limearibus
7-floris ; floribus subremous; glumis minutis pellu-
cidis imæqualibus carinâ sublævibus ; glumellis ob-—
tusiusculis :carina serrulatis. Habitat in Africa.
Oss. Bien qu’en échantillon incomplet, cette plante ne nous
parait se rapporter à rien de déterminé dans les auteurs, et
s'il y a un Poa Senegalensis, cultivé au jardin de Paris, véri-
table Paturin que nous connaissons sous le nom de Festuca fusca
L., celaine doit pas empêcher notre espèce de porter le nom
que nous Jui imposons ici,
169. P. Brasiliensis Spreng. Syst. vég. 1. p. 342.
Ozs. La plante à laquelle nous avons appliqué ce nom se rap-
porte bien à la courte notion.qu’en a exposée Sprengel’; mais elle
a habituellement 20 fleurs par épillet, ce qui nous ferait penser
que ce n’est pas la sienne, lui en attribuant beaucoup moins :
si ce nombre peut être employé comme caractère. Le Poa hir-
suta de Michaux ne nous a jamais offert que trois fleurs ; bien
que Michaux lui en attribue jusqu’à cinq ; et c’est pourquoi nous
en avions fait d’abord un Poa arbuscula que Fraser avait pris
pour un, Panicum ( P. arboreum ).
170. P. Aypnoïdes Lamk.
-- --- À. capitata; pubescenlie spiculis ca-
pitaus. In Antillis.
-— --- B.laxa; spiculis laxis, pubescente.
Im Antillis.
—— —--'C: glabra; spiculis laxis, In Bra-
silo.
171. P. stelligera (P. aspera minor? Poir. Enc.
5. p. 88); culmis cæspitosis erectis ( sub-ped..) ;
foliis lincaribus sparsis longisque subpilosis :vagi-
nis pilosis ore barbañis; paniculis divaricatis,.ramis
basi longè anuulatim barbatis ; spiculis 8-10-floris
( 206 )
linearibus (minatis) complanats ; glumä : valvis sub-
aculis; glamellis obtusiusculis margine dentato-ci-
hatis. Crescit in Antilhs ?
172. P. Domingensis Pers. Ench. 1. p. 88; cul-
mo erecto elato (6-ped.) crasso; foliis linearibus
(2-ped. et ultr. 3-lin. lat.) rigidis striatis glaberri-
mis ore nudis; paniculà elongata (2-ped.) inter-
rupta; ramis fasciculatis sessilibus; spiculis lineari-
bus complanatis; floribus 13-15; glumis glumellis-
que subacutis. Habitat in Hispaniolà.
Ozs.. Cette grande espèce non encore décrite et oubliée par
Sprengel, représente en Amérique notre Poa aquatica.
173. P. alata; culmis cæspitosis erectis, basi sub-
ramosis (ped. et ultr.); folüs linearibus subconvo-
lutis pilosis (2-poll. et ult.): vaginis ore margini-
busque pilosis; paniculâ subspicata interrupta: ra-
mis sessiibus; spiculis subpinnatim dispositis basi
rhachique pilosis elongatis linearibus (6-8-lin.)
compressis sessilibus; glumis glumellisque carinâ
denticulatis. Habitat in Carolina ?
Oss. C'est avec doute que nous plaçons cette espèce dans les
Carolines, malgré une indication de l’herbier de Thuilier; ‘elle
a Je port des espèces des! Indes orientales.
174. P. subulata; paniculâ glaberrima elongata
{ ped.) contracta, ramis subverticillatis appressis ,
spiculis numerosis lineari-subulatis elongatis (6-lin.)
subcompressis 15-20-floris; glumis glumellisque ob-
tusiusculis glaberrimis. Habitat in Senegalia.
Oss. Bien que n'ayant pu observer que là panicule , cette plante
HOuS paraît nouvelle:
175. CALOTHECA Prézoides Desv. J: bot. appl. r.
p.71. Spreng: Syst. vég. 1. p. 348. ( C. elegçans
( 207)
P. Beauv. agr. t. 19. f. 7. Bromus brizoïdes Lamk.
ill. 1. p. 193. Calotheca poæformis Spreng. 1. c.).
Os. Nous rétablissons ici la synonimie pour un genre que
nous avons publié il y a déjà long-temps, et sur lequel on à
commis plusieurs erreurs de nomenclature, ainsi que pour le
suivant, dont Sprengel n’a plus fait qu’un genre factice, en ÿ in-
troduisant des espèces qui lui sont étrangères.
176. CHASCOLYTRUM erectum Desv. 1. €. p. 72.
( Briza erecta Lamk. L. c. p. 187. Festuca brizoïdes
Spreng. À. c. p. 353).
CH. subaristatum Desv. 1. c. (Briza subaristata
Lamk. L. c. Calotheca brizoïdea P. Beauv.agr. p. 86.
t 17. . 16. excl. syn. Festuca Commersoni
Spreng. 1. c.).
177. BRIZA dura; culmis cæspitosis erectis (sub-
ped.) fiiformibus; folüs lineari-lanceolatis acutis
( poll. et ult.) sparsè pilosis : vaginis, margimibus
oreque ciliatis; panicula pauciflora, ramis remotis
3-4-spiculiferis : spiculis, extimis solitarüs, subses:
silibus lævibus obcordatis; glumellis firmis, obtu-
siusculis, carinâ crassa scabra. Habitat in America
australi.
Oss. Cette plante, ainsi que la Briza capensis , ne peut pas
être éloignée du genre Briza, ayant plus de rapport avec lui
qu'avec le genre Poa.
178. B. flava; culmo filiformi ( ped. et ultr.}
basi geniculato glabro; folüs linearibus elongatis
vaginisque glaberrimis : ligula elongata scariosa; pa-
niculà densa ramis sessilibus; spiculis subovatis ;
glumä subaspera acuta ; glumellis apicè acutis mar-
gme hyalinis medio coloratis (rufis}. Habitat in
America australi.
( 208 )
Oss. Nous croyons cette espèce de Buenos-Ayres, d’après ies
plates avec lesquelles!elle se trouvait; ‘et du este elle ne peue
être ni un Poa, ni un des deux genres ci-dessus, bien que ses
épillets soïent plus pointus que ne le sont ceux de nos Priza d’Eu-
rope.
179. ÉLEUSINE barbata ; culmis cæspitosis erectis
bagi compressis glabris ( ped. etult.); foliis glaucis
tiusculis ( 4-6-poll.. 3-lin. lat.) mucronatis basi
Supra Sub-parsè pilosis : vaginis striatis glabris ore
nudis, marginibus subpilosis ; spicis paniculatis al-
ternis oppositis ( 4-poll.) ; spiculis basi subpilosis
breviter pedicellatis 3-5-floris lanceolatis: secundis
alternis remotis; glumis acutis carinâ denticulatis, val-
vulà imferiore breviori; glumellis subacutis, valvulà
inferiore subemarginatä margine piloso-fimbriata aris-
tata : aristâ valvulâ duplo longiori. Crescit in Brasilio.
Ors. Cette: espèce semblerait lier le genre ! Chloris au genre
ÆEleusine; maïs si l’on fait abstraction des espèces composant le
Dactyloctænium , elle est bien plus voisine du dernier; et d’ail-
leurs ses épillets allongés l’éloignent surtout du CAloris.
180. SCHISMUS fusciculatus P. Beauv. p. 74 (Pa-
nicum madritense Cav. ex Balb.); culmo erecto
elato ( biped. et ult.) glabro; folis glaucis longis
(ped..et ult.) Jatiusculis (3-4-lin. lat.) nervosis
subasperis : vaginis ore brevissimè sericeo-ciliatis ;
pauiculis (8-10-poll.) elongatis strictis ; spicis ( 4-
poll. long.) erectis; spiculis oblongis secundis sub:
remots subsessilibus; rhachi filiforme angulatä sub-
sinuosa; glumà (fusca) pellucida, valvis mæqualibus
submucronatis dorso asperis ; glumellis : valvulâ in-
feriori cordato-emarginata mucronato-aristatà. Ha-
bitat in America calidiore.
( 209 )
* Oxs. Cette plante qui n’a été ni décrite, ni caractérisée par
M. De Beauvois, et auquel nous l’ayions communiquée , rentre
parfaitement dans le Schismus , mais le port n’est pas celui du
Schismus emarpinatus.
181. DIPLACHNE néorescens ; ligula fimbriata pi-
losa; ramis rigidis, spiculis remotis; glumis glu-
mellisque aristatis. Habitat in America australi ?
Os. Nous ne signalons ici que ce qui peut différencier cette
espèce du D. fascicularis, dont cette espèce a entièrement le
port; mais Ja nôtre a les épillets plus gros, plus éloignés es
uns des autres, les arrêtes et les glumes et glumelles plus
grandes.
182. FESTUCA paradoxa; culmis cæspitosis elatis
C3-ped.) glabris; folis latiuscalis asperis (3-lin.
lat.) graminosis : vaginis ore nudis : panicula sub-
patula secunda subnutante; spiculis 4-5-floris:; glumä :
valvis mulicis sulcatis acutis'inæqualibus ; glumellis
acutiusculis lævibus. Habitat...
Os. Cette plante, vivace, qui a été cultivée au Jardin. bota-
nique, de. Paris, nous semblait avoir quelques rapports avec la
Festuca nutans ( Willd.), mais elle est dite Ælosculis 7LETVOSES »
ce que n'offre pas la nôtre, On serait tenté d’abord de la prendre
pour un Poa;: mais le port des épillets bien que mutiques,
est plutôt celui des Fétuques:
183. OLYRA ovata Desv. Prod. in F1. Ind. occ.
Ham. p. 7; culmo elato basi angulato pubescente ;
“olüis (8-poll..2-poll. lat.) ovato-oblongis nervosis
transversè reticulalis acuminatis :subpetiolatis . basi
subobliquis : vaginis nervosis. apicè auriculatis, su
perioribus pubescentibus ; floribus paniculatis : pa-
niculis terminalibus fertilibus, inferioribus stamini-
feris; glumis subacutis nervosis cinercis: glamellis
basi pilosis. Crescit in Gnvand. A
14
(210 )
184. O. cuneatkifolia ; culmo elato pubéscente ;
foliis obliquis basi truncatis nervosis (3-poll. long.
poll. et ult.) acutis breviter petiolatis : vaginis no-
disque subpubescentibus ; floribus paniculatis : supe-
rioribus ferlilibus paucis; glumis acuminatis elon-
gatis; glumellis pubescentibus ; floribus sterilibus
minusculis. Reperitur in Brasilio.
185. O. media; culmo pubescente; folüs obli-
quis nervosis lonceolatis acuminatis ( 8-poll. poll.
et ult. lat.) subglaucescentibus breviter acuminatis
basi pubescentibus : vaginis piloso-pubescentibus ;
floribus paniculatis superioribus fertilibus ; glumis
subcinereo-puberulis fongè acuminatis; glumellis læ-
vibus reticulatis (an desiccatione ? ). Crescit m Bra-
silo. |
186. O. obliqua ; culmo elato glabro : nodis sub-
uberulis ; folüis petiolatis nervosis basi obliquis
subtruncatis lanceolatis acutis (10-poll. 2-3-poll.
lat.) : vaginis striatis subpilosis apicè auriculatis ;
floribus paniculatis; paniculis laxis, superiore fertili;
glumis longè acaminatis subpilosis : flori sterili pel-
lucidis; glumellis nitidis. Habitat m Brasilio.
187. O. Brasiliensis ; culmo elato pubescente;
foliis breviter petiolatis nervosis glaberrimis basi
subobliquis longè acuminatis : vaginis subpubescen-
übus apicè auriculatis; floribus paniculatis fertihbus
numerosis ; glumis acuminatis; glumellis glaberri-
mis. Ex Brasilu.
Ozs. On pourrait confondre cette espèce avec l’Olyra pani-
culata de Svvartz ou le Zatifolia, maïs, elle est différente de l’une
et de l’autre; mais bien plus de la derniere, figurée par La-
zarck,
( 211 )
188. PHARUS Zancifoius Desv. Prod. 1. c. p. 48.
Oss. Cette plante est bien représentée par la f. 1. t, 769 des
illustrations de Lamarck, donnée pour le Ph. Zappulaceus ; tan-
dis que ce lappulaceus, donné par M. De Tussac, flore des
Antilles, est différent.
189. PH. ovalifolius Desv. 1. c.
Oss. Il ressemble au Zatifolius de Lamarck ill. f. 23 mais
cependant les fruits de notre espèce semblent bien plus longs
et sont velus seulement au sommet. Nous ne possédons pas
assez d'objéts de comparaison pour prononcer en définitive sur
nos deux espèces. :
190. NASTUS prodifer; culmo elato ramoso, ra-
mis sarmentosis, ramulis lateralibus proliferis ; fo-
lis elongato-lançeolatis acutis subpetiolatis striatis
subglaucescentibus glaberrimis (ramealibus r-2-poll.
long.) margine lævibus : vaginis marginibus oreque
pilosiusculis; paniculis lateralibus ; rhachi angulatä,
ramulis divaricats ; spiculis unifloris acutis rectis (2-
lin. PPT 2 pedicellatis ; glumis minutis acu-
tiusculis ; glumellis striatis acutis, valvulis acutis 4.
duis vacuis. Habitat in Brasilio.
191. N. bruneus ; culmo elato ramoso, ramis
geniculatis ; folüs elongatis lanceolatis striatis gla-
bris supra asperis, petiolatis : vaginis compressis gla-
bris apicè biauriculatis; paniculis terminalibus sub-
contractis ; spiculis unifloris oblongis reclis (4-in.) ;
glumis : valvis mucronato-aristatis minutis; glumel-
lis nitidis (bruneis) subobtusiusculis, valvulis 4.
duis vacuis: staminibus 3. Habitat in Brasilio.
(212)
TABLE DES GENRES.
Agrostis . . No RES. Monachne . . N.° 416.
Aïropsis . 57. Nastus 490.
Alopecurus . k 5. Ophiurimella. . UT:
Anatherum . 60. Oplismenus . : 97.
Andropogon. 46. Olyras 2. À die. ASS.
Antlusthiria. . . 64. Panicum. . 102 à 158
Arthrostachys . . 74. Paspalanthium . . 21.
Biatherium . 69. Paspalum. D
Briza : 477. Pennisetum . . TUE
Calamagrostis . 22. Phalaris . 35.
Calotheca . 475. Pharus SIeptAss:
Campuloa . . 36. Poa . .. 465 à 174.
Centrophorum :. 56. Podosemum. . . . 4.
Chascolytrum 176. Pollima . Re PRET
Chloris : 70. Prionanthium 20.
Danthonia 162. Pteriam . 2 78.
Diperium. £ 78. Rhaphis . : 52
Diplachne 181. Rhythachne. . y A2
Diplasanthum 45. Saccharum . 43.
Eleusine . 179. Schismus. . . . 180.
Elymus . ; 159: = "Setarra : 85.
Enneapogon. 160. Sorghum. 65.
Eriolythrum. 45. Sporobolus . . qi 25:
Eupogon. 47. Triathera.. . . 67.
Festuca . | 482. Trianthium . : . 25.
Gramerium . O7. Tribolum . 39
Heierochloa. H 42. Triodia . à 161.
Koelera . 465. Trisetum. 462.
Leersia . 26. Urochloa. ; 105.
Melica 44... ZLoysia 1.
Microchloa . 76.
(215)
on —————— À
NOTICE
SUR LA VINIFICATION,
PAR
M. DE BEAUREGARD.
LE département de Maine et Loire trouve dans
le produit de ses vins une des principales branches
de ses revenus. Il en exporte, chaque année,
pour plusieurs millions de francs. Cette source
de prospérité est trop importante pour ne pas
appeler l'attention de la Société d'Agriculture.
Elle doit se demander si les perfectionnemens ap-
portés par le progrès des sciences physiques dans
l’art de faire le vin, sont assez répandus dans notre
département. Nous ne le croyons pas. La plupart
des propriétaires suivent la méthode qu'ils ont re-
çue de leurs pères, et que ceux-ci tenaient de Jeurs
devanciers.
Nous n’entreprendrons pas de citer les nombreux
ouvrages qui ont été écrits sur celte matière, de si-
gnaler ce qui a été fait et ce qui est encore à faire;
une telle tâche exigerait des volumes et serait au—
dessus de nos forces. Nous nous bornerons à in-
diquer deux procédés qui nous paraissent les meil-
leurs dans l'état actuel de l’œnologie.
(214)
Nous nous occuperons d’abord de l'art de faire
le vin blanc; nous traiterons ensuite de la fabri-
cation du vin rouge.
$. DU VIN BLANC.
Pour bien comprendre les avantages des procédés
que nous allons décrire, il est nécessaire de rap-
peler quels sont les principes qui constituent le jus
de raisin appelé le Moët.
Ces principes sont le Sucre, la Fecule, le Mu-
cilage, VAlbumine, \e Gluten végétal, YExtrac-
tif, la Matière colorante, le Tannin, le Tartre,
l'Acide malique ei VEau.
Sous le rapport de la fermentation, on considère
le moût comme composé de trois substances prin-
cipales : le sucre, l’eau et le ferment. Cette der-
nière substance se compose particulièrement de l’al-
bumine et du gluten végétal.
Ces principes varient dans leurs proportions selon
Ja nature et la maturité du raisin. On obtient peu
de sucre du verjus, mais on y rencontre beaucoup
de mucilage, d’albumine, de gluten végétal et d’eau.
Ces principes sont convertis en matière sucrée, lors-
que, par la végétation et la chaleur, le fruit passe
à l'état de maturité. Dans les contrées méridionales,
la partie sucrée abonde; elle est en faible quantité
dans les pays froids.
Lorsque ces irois principes sont mélangés par
l'effet de la pression du raisin et forment une masse
(215)
suffisante, le ferment se porte sur la matière su-
crée, la décompose : le gaz acide carbonique s’ex-
hale, et l’alcohol se forme. Si la matere sucrée do-
mine, le ferment sera insuffisant pour Ja dissou-
dre, le vin restera doux et liquoreux : tels sont
les vins du Midi. Si, au contraire, le ferment est
en excès, il n’emploiera qu’une de ses parties à dé-
composer la matière sucrée, l’autre restera en dis-
solution dans Îe vin, lui donnera de l’âcreté, et,
plus tard, le conduira à aïgrir ou à graisser (1).
Il résulte de ces observations que la vinification
n’est parfaite qu’autant qu’une juste proportion existe
entre les trois principes qui composent le moût. La
rétablir lorsqu'elle est altérée, constitue l’art de faire-
Je vin. Pour obtenir la proportion convenable, il
faut ou augmenter la quantité de la matière sucrée,
ou diminuer celle du ferment.
Le premier moyen consiste à faire dissoudre du
sucre ou de la cassonnade dans le moût de raisin.
MM. Chaptal et Parmentier ont fait sur cette com-
binaison des essais qui ont élé couronnés de suc
cès; mais l'emploi de ces matières est tellement
dispendieux et accroît tellement le prix du vin, qu'il
n’est pas toujours avantageux d’en faire usage.
(1) On prévient cette dernière altération, dans les vins blancs,
en mettant 2 à 4 hectogrammes de tartrate de pot.sse (crême
de tartre) par barrique de vin, dans ceux qui sont sujets à cette
disposition , ou. bien en Jeur ajoutant le suc de 2 kilogrammes de
cormes vertes.
(Note de M, Desvaux };
(216 )
Par l'auire moyen on se borne à diminuer la
masse du ferment. Les expériences que Fabroni et
Lavoisier ont faites sur la baie du raisin, ont appris
que la parte sucrée est placée dans les cellules de
ce fruit et. constitue le jus proprement dit, tandis
que:le ferment se trouve dans les membranes qui
séparent les cellules dans lesquelles les liquides sont
déposés. Ces membranes, qui constituent la lie,
nagent d'abord dans le moût, puis forment un pré-
cipité par l'effet de leur pesanteur spécifique. En
séparant cette lie du.moût, avant que la fermenta-
lon ait été. déterminée, l’on parvient à diminuer
considérablement la masse du ferment et à rétablir
une juste proportion : tel est l'effet du procédé que
nous allons indiquer.
Usage de la pompe.
Au bas de la mar dun pressoir, on pratique un
bassin assez grand pour contenir tout le moût qui
peut être obtenu dans un jour : ainsi, dans le ‘cas
où le pressoir pourrait fournir douze barriques, le
bassin devra avoir une assez grande capacité pour
les recevoir. Une pompe soutenue par des colliers
est adaptée à ce bassin et descend jusqu'à quelques
pouces au-dessus du fond. Le vin découle de la mai
dans ce bassin pendant tout le cours de la journée;
il y séjourne toute la nuit dans un état complet de
repos. Ce laps de temps suffit pour que la lie se
précipite au fond. Le lendemain matin on fait pas-
ser le vin dans les tonneaux à l’aide de la pompe;
mais comme elle ne va pas jusqu’au fond, elle ne
( 217 )
peut amener la lie. Quand tout le vin est pompé,
l'on fait descendre dans le bassin un jouvrier qui,
avec-un baquet, retire la lie restée au fond. Cette
le n'est pas pure , elle est mélangée de parties li-
quides et forme une liqueur épaisse. Mise dans des
tonneaux, elle dépose, et l'on peut quelques mois
après, par le soutirage, en relirer une quantité de
vin égale à peu près à la moitié. Ce vin est très-
dur et très-âcre, tandis que celui provenu de la
pompe a une douceur et une légèreté qui en amé-
liore considérablement la qualité.
La quantité de lie ou plutôt de vin de rebut qu’on
doit séparer de la masse générale du moüt, conte-
nue dans le bassin , doit varier selon la maturité du
raisin. Si l’année a été froide et pluvieuse, comme
le ferment abondera, il faudra en séparer davan-
tage. Dans une année ordinaire, la proportion doit
être d’un douzième : ainsi, en admettant que le
bassin contienne douze barriques, une barrique se-
ra laissée pour vin de rebut. On conçoit qu’on peut
faire varier cette proportion, selon qu'on rapproche
plus ou moins du fond du bassin, l'extrémité im-
férieure de la pompe (1).
108p00frieh D Rp: e60muIE 0p, CS
(Gi) Un chimiste très-estimable, M. Sebille, a, dans un mé-
moire publié en 1830, indiqué un autre moyen d'extraire le fer-
ment. Il consiste à placer le moût dans des chaudières, et à
lécumer après lavoir amené à l'état d’ébullition par l’action du
feu. Ce procédé produit de bons résultats , mais il- présente,
dans son exécution, des difficultés qui le rendent impraticable à
Leancoup de propriétaires, La pompe est d’un usage plus simple
(28)
La nécessité de séparer la lie du moût, pour ob-
lenir un vin délicat, nous conduit à parler d’un
nouveau système de bondes dont l'usage s’est in-
troduit, depuis quelques années, dans notre dé-
partement. Ces bondes sont garnies de tubes de
verre destinés à laisser échapper le gaz acide car-
bonique. On a beaucoup discuté sur les avantages
et les inconvéniens de cet instrument. Nous pen-
sons que la bonde à tube sera nuisible si on la place
sur la barrique aussitôt que le moût est entonné,
parce qu’elle empêche l'expulsion de l'écume qui,
rentrant dans la masse, en altère la qualité; mais
elle sera utile si on l'emploie après la fermentation
qui dure ordinairement quatre ou cinq jours. Cette
première fermentation entraîne presque toute l’écu-
me au-dehors : c’est lorsqu'elle est terminée qu'il
faut faire usage de la bonde à tube qui offre l’avan-
tage de livrer passage au gaz acide carbonique, et
d'empêcher l'introduction de l'air atmosphérique.
M. Sebille, de Saumur, à, depuis peu, inventé une
bonde dont il à publié la description. Il la nomme
bonde hydraulique. Elle nous paraît bien préférable
à la bonde à tube. Mais nous pensons qu’elle ne
doit être employée qu'après que la fermentation
tumuliueuse est terminée.
ct moins dispendieux. Cette considération m’a déterminé à dé-
crire avec détail la manière de l’employer. J'ai sur ce point des
notions d’autant plus précises, que j'en fais usage depuis plus
de quinze ans.
(249 )
&$. DU VIN ROUGE.
Nous passons à l’art de faire le vin rouge. Nous
disons l'art, car le raisin abandonné à lui-même
iomberait en putréfaction. Ce n'est que par des
moyens artificiels qu'on obtient cette liqueur fer-
mentée appelée le vin (1).
* Inconvéniens du Brassage.
La méthode la plus ancienne et encore Ja plus
répandue, de fabriquer le vin rouge, dans les en-
virons de Saumur, consiste à jeter les grains de ra-
sin dans la cuve, à les remuer chaque jour jusqu'a
ce que la fermentation soit terminée, et alors on
fait passer le vm de la cuve dans les tonneaux,
Le but qu'on se propose en agitant la masse de
vendange est d'empêcher que les grains qui sur-
nagent et forment ce qu'on appelle le chapeau,
ne contractent de l'acidité par leur contact avec l'air
atmosphérique. Mais cette opération ne peut pré-
venir complètement l'effet que l'on redoute; les
grains, à peine refoulés dans le moût, remontent
à la surface, et l’acide acétique commence ase for-
mer. Aussi la plupart des vins rouges ont un prin-
D pe RE et ER Er RCE TS
(1) Les fruits sucrés en général, abandonnés à eux-mêmes ;
passent par les divers degrés désignés par les fermentations al-
coholique et acide; et nous avons la certitude qu'il se forme
souvent alors de l’éther acétique, ayant que l’ensemble passe à
état de putréfaction.
(Note de M. Desvaur ).
( 220 )
cipe d’acidité qui se développe quelquefois dans la
barrique et fait tourner le vin au vinaigre.
Le brassage quotidien présente un autre incon-
vénient plus grand encore, c'est de laisser évapo-
rer, avec la chaleur, la partie spiritueuse et l’arome
du. vin.
Exiter de brasser la vendange dans la cuve, du-
rant la fermentation, et cependant prévenir l’aces-
sence du chapeau, tel était le problême qui se pré-
sentait. On l’a résolu par nn appareil qui empêche
les grains de se porter à la surface du moût, en
maintenant constamment leur immersion. Cet ap-
pareil est la cuve à double fond que nous allons
décrire.
** De la Cuve à double fond.
Je suppose une cuve ayant la forme d’un cône
ironqué, et d’une capacité à contenir douze barriques
indépendamment du marc. ( Voyez PLANCHE X ).
À huit pouces au-dessous du jable, on cloue des
tasseaux qui servent à soutenir un fond parsemé de
trous de deux ou trois lignes de diamètre, et dis
tans l’un de l’autre d’nn pouce environ. On jette
dans la cuve les grains de raisin jusqu’à ce que la
masse soit parvenue à la hauteur des tasseaux. On
place sur ces tasseaux le fond troué qu'on fixe so-
lidement, puis on ferme la cuve par un couvercle
auquel on pratique un trou d’un pouce de dia-
mètre, pour laisser passage au gaz acide carbo-
nique qui doit se dégager. La fermentation ne tarde
pas-à s'établir, la masse de vendange tend alors à
( 221 )
se gonfler; mais comme le fond troué est fixé, de
manière à ne pouvoir être soulevé, les grains de
raisin sont contenus, le jus seul passe au travers
des trous et s'élève jusqu’au jable. Par ce moyen,
la vendange, constamment baignée dans le moût,
ne peut aigrir, la fermentation s’opère en vase
clos, et parcourt toutes ses périodes sans trouble.
Lorsqu'enfin le moût a passé à l’état yineux , et que
le moment est venu de le mettre dans les tonneaux,
la cuve est ouverte pour la première fois ; -elle ré-
pand alors un parfum qui ne se rencontre pas dans
les cuves soumises à un brassage journalier usité
d’après l’ancienne méthode.
***0 Du Foulage.
Ayant signalé les avantages de la cuve à double
fond, nous devons maintenant parler du foulage :
opération pratiquée avec succès en Bourgogne, dans
le Bordelais et dans tous les pays où l’art de faire
le vin est porté à un très-haut degré de perfec-
uon.
. La fermentation ne peut s'établir complètement
qu’autant que le grain de raisin a été brisé. Si,
au contraire, il.est encore dans toute son intégrité
lorsqu'il est jeté dans la cuve, il reste stationnaire,
le jus n’est point transformé. en alcohol, la partie
colorante n’est point extraite de la pellicule.
Dans son traité sur l’art de faire le vin, M. Chap-
tal recommande fortement le foulage. Il s’exprime
ainsi, page 80 : « Le raisin ne saurait éprouver
# de fermentation spiritueuse si, par une pression
((222))
» convenable, on n’en extrait pas le suc pour le
» soumettre à l’action des causes qui déterminent
» le mouvement de fermentation. {Il suit de cette
» vérité fondamentale, que non seulement on doit
» employer les moyens nécessaires pour fouler les
» raisins , MAIS que l'opération ne sera parfaite
» qu’autant que tous les grains le seront égale-
» ment. Sans cela, la fermentation ne saurait mar-
» cher d’une manière uniforme , le suc exprimé
» terminerait sa période de décomposition avant
» même que les grains qui ont échappé au foulage
>» eussent commencé la leur; ce qui, dès-lors, pré-
» senterait un tout dont les élémens ne seraient pas
» en rapport. Cependant, si on examine le pro-
» duit du foulage déposé dans la cuve, on se con-
» vaincra que la compression a toujours été im-
» parfaite : il suffit de réfléchir un instant sur les
» procédés grossiers employés pour fouler les raiï-
» sims, pour ne plus s'étonner de l’imperfection des
» mêmes résultats. »
Lorsque les avantages du foulage sont si évidens,
on est étonné qu’une opération de cette importance
soit presqu'ignorée dans le département de Maine
et Loire, pour la fabrication du vin rouge. Il est
vrai qu'en remuant chaque jour la masse de ven-
dange, on brise quelques grains, mais l'expérience
apprend qu'il en échappe plus des trois quarts (1). +
(1) C’est ce que constate encore l'expérience de l’une des, per-
sonnes chargées de communiquer ses réflexions sur le Mémoire
de M. De Beauregard, (Note de M: Desvaur ).
( 223 )
La cuve que nous avons décrite présente un moyen
très-facile d’opérer le foulage. Le double fond étant
posé sur des tasseaux, à quelques pouces au-des-
sous du jable de la cuve, forme une véritable mai.
On y jette les grains à mesure que les raisins ont
été égrappés. Un ouvrier placé sur la cuve, les foule
avec les pieds, puis soulevant de temps en temps
une des planches qui composent le double fond , il
_se procure une ouverture par laquelle il précipite
dans la cuve Ja vendange foulée. On n’a pas à crain-
dre que les pepms soient écrâsés sous les pieds de
l'oûvrier, la pellicule des raisins et toute la masse
de vendange offrent une force d'élasticité qui em-
pêche le broiement. C'est un fait que l’expérience
a constaté (1).
D Emploi du Thermomètre.
On sait que la fermentation ne s'établit facile-
ment qu'autant que le moût est à un état de dix
degrés de chaleur ( thermomètre de Réaumur }).
Si la température était au-dessous de ce point,
lorsqu'on récolte le raisin, il serait utile de ré-
chauffer la masse de vendange. Pour y parvenir,
(1) M. Sebille a inventé une cuve qu'il a nommée cuve à agi-
tation verticale. Il Jui donne la (préférence. N’ayant pas !été à
portée de suivre ,cet appareil dans sa marche et d’en:constater
les effets, je m’abstiens de le discuter. Je me borne à jaffirmer
que depuis long-temps je me sers de la cuve à fond troué, et
que chaque année je suis de plus en plus convaincu de ses bons
résultats,
(224)
on fait bouillir quelques seaux de moût; on les jette
dans la cuve lorsqu'elle est à moitié chargée, puis
on continue de Ja remplir. Ce foyer de chaleur,
placé au centre, détermine promptement la fermen-
tation.
Le moment de décuver dépend de la qualité qu’on
veut faire dominer dans le vin ; il varie selon le de-
gré de couleur et de vigueur qu’on veut obtenir.
Ces diverses qualités résultent d’une fermentation
plus :ou moins prolongée. Il est bien important,
par conséquent, de la suivre dans tous ses déve-
loppemens. Plusieurs moyens ‘ont été proposés; le
meilleur est le thermomètre: Pour l’introduire dans
la cuve, l’on pratique deux irous qui se correspon-
dent, l’un dans le couvercle, l’autre dans le double
fond. Par ces deux trous, on fait passer un tuyau
de fer-blanc, du calibre d’un canon de fusil. À
l’aide d’une ficelle, on descend un thermomètre dans
le tuyau, jusqu’au centre de la cuve. Tant qué la
fermentation tumultueuse se développe, le degré de
chaleur s'élève ; il s’abaisse quand elle rétrograde.
C’est alors qu'il faut décuver, parce que le ferment
ayant achevé de convertir la matière sucrée ou al-
cohol, rétroagirait sur les pepins, et donnerait de
l'âcreté au vin.
Nous venons d'exposer les moyens, d'améliorer le
vin blanc à l’aide de la pompe, et le: vin rouge par
l'emploi de la cuve à double fond: En indiquant ces
procédés, nous n’avons pas proposé de ces théories
vagues que les faits démentent trop souvent; mous
avons pour nous l'expérience de quinze années.
( 225 5
Nous employons ces procédés, nous les avons oh-
servés avec attention, nous avons travaillé à les per-
fectionner: C’est parce qu'ils sont encore peu con-
nus dans notre département, et que leur utilité nous
est démontrée , que nous avons cru devoir les pu-
blier et en recommander l'usage.
een 04 iQ Ho eme——
EXPLICATION DE LA PLANCHE X,
DESCRIPTION DE LA CUVE A DOUBLE FOND.
\
Fi. I.
1. Couvercle de la cuve.
2. Barre servant à maintenir le couvercle.
8. Trou destiné à donner passage au gaz acide car-
bonique.
4. Boucles qui retiennent la barre.
5. Verges de fer, dont l'extrémité inférieure tient
à la couette.
6. Couette sur laquelle la cuve repose.
Fic. II.
Description de la Cuve qui laisse voir l'intérieur.
7. Fond troué qui retient la vendange et laisse
passage au jus.
8. Tasseaux pour tenir le fond troué.
1)
( 226 )
9. Barres pour maïntenir:le fond troué.1Les,che-
villes dont elles sont surmontées contrebou-
tentau couvercle ; et:empêchent que le fond
troué ne soit soulevé ;par l'effort de la masse
de’ vendange qui:se gonfle lors de la fer-
mentation.
10. Tuyau de fer-blanc, dans lequel le thermo-
mètre est introduit.-Il-est percé d’un grand
nombre de trous, pour que le moût y en-
tre et baigne le thermomètre.
Litho, de Errnese de Soutos.&- Angers
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TABLE DES MATIÈRES.
Agriculture.
Sur la Greffe de la Vigne, par M. BourcouIn....
Erreur des Agriculteurs et des Botanistes, s le Feff
des Abyssins, par M. DEsvaAUXx..............:...
Sur l’Englumen propre à préparer les arbres destinés
à un voyage dé long cours, par N.-F. LesrETON
jeune, pépiniériste à Angers....................
Sciences. ;
Des Stalactites souterraines ou prétendues Fulgorites,
(planche V, fig. 1 et 2,) par M. Drsvaux......
Rapport sur une note de M. Desvaux, ayant pour
titre : Des Stalactites souterraines ou prétendues
\ Fulgorites, par MM. Cxerow, Przamre et Four-
MRÉPBRE S'en 2e scie cle 6 = 10;0'slefe eleielaie ele ».e 0e 0,0 Suis 0 Vie aie
Lettres el Arts.
| Notice biographique sur Billard, par M. Gréc. La-
‘
"
cmèse, professeur à l'Ecole de Médecine d'Angers.
Quelques Réflexions sur, l'Histoire et sur les princi-
., paux Historiens des différens siècles, par M. Bror-
DIER- LANGLOIS.........e.esvesseesssenere
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Page 97
1
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104
109
Nota. Les articles suivans étant pris sur une 5.° livraison,
nous reprenons les matières dans le même ordre.
Û x .
Agriculiure.
. Observations sur les Graminées, et Descriptions de
Genres et Espèces nouvelles de cette même Fa-
mille, par M. Desvaux..........-ecssee...
. Notice sur la Vinification, par M. DE BEAUREGARD-
157
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DE LA SOCIÉTÉ
d'Agriculture, Sciences et Arts
D’'ANGERS.
ANGERS,
DE L'IMPRIMERIE DE L. PAVIE.
1833.
| RSS
(227)
EU (ON Un Re En
DE LA BRUYÈRE
EMPLOYÉE DANS LES VIGNES COMME ENGRAIS,
PAR M. DE BEAUREGARD,.
Dans la plupart des cultures, les engrais sont
d'autant plus appréciés qu'ils fournissent des ré-
coltes plus abondantes. Ce principe ne peut être
admis dans toute sa généralité à l'égard de la vigne,
dont les produits sont estimés en raison composée
de leur qualité et de leur quantité. C'est sous ce
double rappait que nous examinerons quels sont
les engrais qui lui conviennent.
Les substances suscepübles d'être mélangées avec
le sol pour accroître sa fertilité, peuvent se diviser
en trois classes: engrais minéraux , engrais végé-
taux, engrais animaux.
Parmi les engrais minéraux, la chaux mérite
particulièrement de fixer l'attention. On l’emploie
avec succès sur la vigne; mais quel est son genre
d'action? La plupart des agronomes qui ont considéré
la chaux sous ses rapports chimiques , ont reconnu
que ce minéral n’agissait pas comme subsiance nu-
tritive , mais comme dissolvant. Son effet est .d’ache-
ver la décomposition des matières végétales que
content l’humus, de les rendre sayonneuses et assez
16
(228 )
solubles dans l’eau pour qu’elles puissent être ab-
sorbées par les fibres des racines et concourir à la
nutrition de la plante. On conçoit, d’après cela,
que la chaux , ne fournissant pas de nourriture par
elle-même , mais se bornant à dissoudre celle qu’elle
rencontre, finirait par épuiser le sol si elle était
constamment et uniquement employée. C’est, dit
Chaptal, moins un aliment qu’un assaisonnement
qui, dans la plante, excite l’organe de la diges-
tion (a).
Les engrais les plns nutritifs sont, sans contredit,
les engrais animaux ou végéto-animaux, tels que
les fumiers formés dans les étables ; mais ils altèrent
la qualité du vin. On lit dans la Maison Rustique de
l'abbé Rosier, que les vignes de Suresne produisaient
autrefois du vin qui était très estimé, mais qu’elles
ont été dénaturées par les boues et les fumiers de
Paris que l’on a répandus avec profusion sur leur sol.
Les engrais animaux et végéto-animaux présen-
tent un autre inconvénient : comme ils fournissent
une nourriture très-abondante , ils procurent à la
vigne un développement trop rapide , elle acquiert
une espèce d’obésité, son bois devient mou et spon-
gieux, et, après quelques années, on la voit dépérnr..
Nous passons aux engrais végétaux. Parmi les
(4) On pourrait objecter que la chaux est employée depuis plus
de 30 ans dans certains sols du département de Maine et Loire, sans
qu'on ail remarqué qu'ils soient devenus moins fertiles. Mais il faut
considérer qu’ordinairement:, avant d’en faire usage, on la mélange
soit avec des fumiers, soit avec des terres substantielles telles que
curures de fossés ou d'étangs,
( 229 )
plantes qui peuvent être enfouies pour amender la
terre , la bruyère doit être placée au premier rang.
Comme elle se décompose lentement, elle n’expose pas
le cep à être subitement privé de nourriture après
en avoir absorbé avec excès. Un second avantage
non moins appréciable , c’est qu’elle accroît l'abon-
dance du vin sans nuire à sa qualité. Lorsqu'elle
est employée convenablement, elle communique à
la vigne une force de végétation extraordinaire. Cet
effet est dû, en partie, à ce qu'elle divise la terre
et procure un passage tant aux racines qu’à l’humi-
dité. Mais la cause principale dé sa salutaire in-
fläencé doit être attribuée à ce que, en entrant en
férmentation, elle exhale beaucoup de gaz acide-
carbonique qui introduit dans les racines et les
vivifié.
On connait l'effet prodigieux de ce gaz sur les
végétaux : Humphry-Davy s'en est assuré par une ex-
périence très-remarquablé. Il remplit une cornue de
gaz acide-carbonique et en plaça ouverture sous un
gazon; en moins d'une semaine, l'effet était de-
venu sensible : l'herbe contrastait fortement avec
celle qui ne recevait aucune émanation de là cornue,
et végétait avec une force extraordinaire.
Afin de constater les effets des engrais végéto-
animaux et de la bruyère, j'ai entrepris des expé-
riences comparatives. Ayant planté un arpent de
Vigne, je l'ai divisé en deux parties: j'ai engraissé
là première avec du fumier d’étäble, pour l'autre je
nat employé qué la bruyère. Dans la partie fumée,
la vigne a d’abord végété avec une grande vigueur,
(230 )
puis, quelques années après, elle est devenue lan-
guissante, tandis que la portion qui n’avait recu
que la bruyère a présenté une végétation moins ra-
pide, mais qui s’est bien mieux soutenue.
Lorsque ma vigne a été en rapport, j'ai vendangé
séparément la partie fumée et celle amendée parla
bruyère: j'ai reconnu que le vin provenant de cette
dernière portion était d’une qualité. supérieure.
La bruyère peut être employée avec avantage dans
presque toutes les terres, quoique ses effets ne soient
pas toujours entièrement semblables. Si le sol est
argileux , elle le divise et accroît sa porosité, mais
elle, sera décomposée plus lentement , parce que,
recouverte d’une couche de terre plus compacte ,
elle est moins exposée à l’action destructive de l’eau,
de l'air et de la chaleur: aussi si on l'enfouissait à
une trop grande profondeur, plusieurs années pour-
raient s’écouler, avant qu’elle eût éprouvé une alté-
ration sensible. Lorsque le sol est léger ; la bruyère
est plus accessible aux influences extérieures , elle
entre plus.rapidement en fermentation et son action
est plus vive. Si. le sol était entièrement sablonneux
et dépourvu de substances nutritives,. cette plante
n’offrirait pas un aliment suffisant , elle devrait être
combinée avec, d’autres engrais.
Il nous reste à indiquer la manière da la bruyère
doit être employée. S’il s’agit de planter une vigne,
on pratique des rigoles de deux:pieds de profondeur
sur autant de largeur. On étend au fond une couche
de bruyère de six pouces, puis une couche de terre
de deux pouces d'épaisseur. On: place dessus le jeune
( 251 )
plant, on le couvre de deux pouces de terre sur
laquelle’ on répand encore une couche de bruyère
de la même épaisseur que la première, on ferme
ensuite la fosse avec de la terre.
Si lon veut faire usage de cet engrais sur une
vigne déjà plantée, on pratique entre les rangs des
ceps des rigoles , dans lesquelles on place la bruyère
que l’on recouvre de cinq ou six pouces de terre.
l'est bien important d'employer cette plante
lorsqu'elle est verte, afin qu’elle puisse entrer en fer-
mentation et fournir du gaz acide-carbonique. Si
elle était desséchée , elle ne présenterait plus que
des fibres ligueuses dépouillées des fluides aériformes
qui en font la vertu principale.
Plusieurs écrivains, et notamment M. Desvaux
dans un très-bon Mémoire sur l’écobuage, ont pro-
clamé ‘les heureux effets qu’on peut obtenir de
l'enfouissemeat des plantes pour fertiliser le sol ;
nous avons cru, qu'il n’était pas inutile de rapporter
à l'appui des principes qu'ils ont émis, les expé-
riences auxquelles nous nous sommes livrés. On ne
peut citer trop de faits pour engager les propriétaires
de vignes à employer les engrais végétaux et à leur
accorder la préférence qu'ils méritent.
La terre, s’épuise en. fournissant des récoltes ;
mais ordinairement une partie de.ses produits lui est
restituée et entretient sa fécondité : ainsi la paille et
le chaume qui sont sortis d’un champ, y rentrent
après avoir été convertis en fumier par les bestiaux
employés à sa culture. La vigne n’a pas les mêmes
ressources : elle produit sans trouver en elle-même
(282)
de quoi se renouveler, car je ne compte pour rien
le marc de vendange. Il faut qu’elle mette à contri-
bution les engrais qui étaient destinés aux céréales.
L'intérêt public demande qu'ils ne soient pas en-
levés à ceïte dernière culture, la plus importante
de toutes. On ne peut trop recommander l’emploi
de la bruyère. Si cette plante croît dans des lieux
peu éloignés de vos, vignes , ne négligez pas ce
trésor , 1l augmentera vos récoltes sans nuire à leur
qualité (1).
Depuis quelques années, l’usage de cet st
s’est introduit dans l'arrondissement de Saumur, il
a produit les plus heureux effets. Nous croyons de-
voir les publier pour contribuer à.sa propagation,
(1). Les deux principales espèces de Bruyères-qui-existent dans le
département de-Maine et Loire, sont: 4. -la Bruyère à balais,
Erica Scoparia, dont la tige a 3 ou 4 pouces, les rameaux sont
grêles et affilés, les fenilles étroites ét pointues, les fleurs ver-
dâtres , les, corales :camipanulées:; 2.0: la: Bruyère commune, Erica
vulgaris, qui s'élèye à 4 ou 2 pieds, et dont'les feuilles sont,op-
posées ef imbriquées, les fleurs situées aux aisselles des feuilles ; le
£alice double et eoloré à l'intérieur.
Cette dernière ‘doit être préférée à la Bruyère à ‘balais’, dont les
tiges sont plus grosses. plus ligneuses et moins fournies .de : fleurs
et de feuilles.
L’£rica ciliaris n'est abondante que dans quelques parties de
l'Ouest, et les Erica cénérexet tetralixine forment jamais de coupes
à elles seules, dans aucuné ‘partie du départément-de Maine etLoire:
( 233 )
D
RAPPORT
Sur La Œbarrue anglaise, dite de Bauleu,
(Planche xr.)
PAR M. DE BEAUREGARD.
LA charrue doit être considérée eomme le plus
important des instrumens d'agriculture. Sa perfection
ou ses défectuosités ont une influence considérable
sur la prospérité d’un peuple agricole. Si, tout en
produisant un bon labour, elle exige des forces
excessives pour être mise «en mouvement , la quan-
tité de bestiaux employés à son usage absorbe une
grande partie des produits ; si enfin, comme on
en trouve l'exemple dans plusieurs paÿs, elle pré-
sente la double imperfection d'exiger un fort tirage
et de ne remuer qu'imparfaitement la terre, le col-
tivateur obligé-à-des dépenses que couvrent à peme
les produits, tombe dans la misère.
Ces affligeantés conséquences étaient senties de-
puis-trop longtemps pour ne pas fixer l'attention
des agronomes. Ce désir d'amélioration qui s’est
porté sur toutes Les branches d'industrie, s’est aussi
occupé des instrumens d'agriculture. Des perfection-
nemens ont été apportés a la forme des charrues :
mais ils ont eu le sort de tant d'autres : appréciés
par des personnes éclairées, ils restent inconnus à la.
masse des cultivateurs qui devraient en faire usage...
(254)
Une de ces charrues perfectionnées a été intro-
duite, depuis peu, dans notre département : c’est
la charrue anglaise de Bayley (1). Notre Société,
dont le désir constant est de travailler à la propa-
gation des procédés utiles à l’agriculture, a nommé
une commission pour examiner cette charrue, et lui
faire un rapport. La commission m’a chargé de vous
exprimer l'opinion qu’elle s’est formée après l'exa-
men auquel elle s’est livrée.
La charrue anglaise dite de Bayley se compose
d'un soc, d’un sep, d’un versoir ; d'une flèche ; d’un
réqulateur , de deux mancherons et d’un coûtre. Nous
examinerons successivement chacune de ces parties.
Le soc présente la forme d’un triangle rectangle
dont l‘hypothénuse est longue d'environ 25 centi-
mètres. Cette dernière partie est tranchante et sert
à couper les racines qui se rencontrent dans lessillon.
Le sep est la partie qui forme la base sur laquelle
repose la charrue; sa position est horizontale. Le
soc est placé au bout et dans la même direction:
une semelle en fer, placée sous le sep empêche :sa
détérioration par le frottement.
La flèche: ou âge fait l'office d’un timon : l’une
de ses éxirémités tient au sep; cest à l’autre-ex-
irémité que l'attelageest attaché.
CL
(4) L'importation de cette charrue dans notre département'estidue
à M. le comte de Serrant qui en fait usage avec sun grand succés. Il
en à confié un modéle au sieur Baradès qui est parvenu à limiter
avec une précision qui ne laisse rien à désirer, au prix de 80 fr-
Celle de M. de Dombasle, prise à Roville, coûte 74 fr.
(235 )
Le: versoir ou l'oreille remplit la double fonction
de soulever la terre et de la renverser: Cette partie
si importante de la charrue à été l'objet de nom-
breux :essais ; la courbe qu’elle doit former a exercé
les’ calculs de plusieurs savans agronomes: M. Ar-
buthnot, dans son Journal de Physique ,‘a soutenu
que la cycloïde était la courbe qui convenait le mieux
au versoir pour opposer le moins de résistance à
la terre. Quelques géomètres ont proposé d’autres
inclinaisons: C’ette question a fixé l'attention d’un
homme célèbre qui, quoique placé à la tête d’une
nation puissante, n’a point dédaigné de s'occuper
du perfectionnement de la charrue, M: Jefferson,
président des Etats-Unis d'Amérique. Il a publié
sur ce sujet un Mémoire qui se trouve consigné
dans les Annales du Muséum d'Histoire ‘Naturelle
de Paris. Comme les idées qu'il présente sont celles
qui depuis ont été généralement adoptées , je crois
devoir en transcrire un passage.
& Le versoir d’une charrue, ditil, ne doit pas
» être seulement la continuation de l'aile du soc
» en commencant à son arrière-bord; mais encore
» il faut qu’elle:soit sur le même plan. Sa pre-
» mière fonction :est de recevoir horizontalement
» du soc la moïte de terre; de l’élever: à la hau-
» teur convenable pour être renversée, d’opposer
» dans sa marche le moins de résistance-possible’,
» et: par conséquent de n’exiger ‘que le menimum
» de la puissance motrice. Si-c’était là que se bor-
» nent ses fonctions, le coin offrirait sans doute la
forme la plus convenable pour la pratique, mais
Ÿ
(236 )
» il s’agil aussi. de renverser la motte. de terre :
» l’un des bords du versoir doit donc être sans élé-
» vallon, pour éviter une dépense.inutile de force:
» l’autre bord doit, au. contraire, aller en montant
» jusqu’à ce qu’il dépasse la perpendiculaire, afin
» que la motte de terre se renverse par son propre
» poids ; ét pour obtenir cet. effet: avec le moins de
» résistance possible, il faut que linclinaison du
» versoir augmente graduellement du moment qu'il
» à reçu larmotte de terre.et s'élève abliquement,
» jusqu’à ce! qu'il ait atteint et dépassé la ligne ver-
». ticale. »
C'est d’après les principes énoncés dans ce Mé-
moire qu'a été. détermimée la courbe du. versoir de
la charrue anglaise qui fait l’objet de notre rapport:
cette courbe est généralement reconnue pour la
meilleure:
Une qualité principale exigée dans la construction
d’une charrue est qu’elle puisse :prendre plus ou
moins de terre selon :la volonté du laboureur et
creuser un sillon ‘plus ou moins profond, c'est ee
qu'on nomme lenérure : elle dépend de Vinclinai-
son donnée au soc. D'après le système:des charrues
anciennes, on obtient cette inclinaison, soit enfai-
sant varier: par despieces:mobiles l'angle formé par
la jonction du :sepet de la flèche, soit en appuyant
sur les mancherons , soit enfin en avançani la flè-
che sur l’attelage.: Ces moyens accroissent la fatigue
et du laboureur et des animaux employés au/tirage.
La charrue de Bayley offre un procédé beaucoup
plus simple et plus avantageux. Une pièce de fer-
- ( 237 )
nommée régulateur est placée à l'extrémité de la
flèche. Cette pièce garnie de dents en forme de cré-
maillère procure la facilité de faire varier l'inclinaison
de la flèche et par suite du soc.
Le coûtre et les mancherons ne nous ont pas paru
devoir donner lieu à aucune observation.
L'avani-train, dont l’effet est d'ajouter au frotte-
ment et d’accroïtre le tirage, a été supprimé.
Toutes les pièces de la charrue de Bayley, à
l'exception de la flèche et des mancherons, sont en
fer. L'emploi de ce métal augmente la première dé-
pense, mais elle-donne une solidité qui, en résultat,
devient une économie.
L'examen que nous avons fait de la charrue an-
glaise de Bayley nous a convaincu qu'elle présente
à un haut degré le double avantage de ‘produire
un bon labour, en exigeant peu de forces pour
être mise en action.
Nous sommes bien Join de penser cependant que
cette charrue soit la seule bonne, la seule qui doive
être recherchée par les cultivateurs : plusieurs pays
font usage de charrues justement appréciées. On
conçoit, en effet , qu’en. s’occupant de. la compo-
sition d’un instrument soumis aux règles de la mé-
canique, les bons esprits ont dû se rencontrer dans
leurs calculs, s’accorder sur le primcipe et ne dif-
férer que dans les accessoires ; la chaprue Belge et
célle de Roville nous en offrent l’exemple.(r}.
(4) L'Ecole des Arts d'Angers exécute avec une grande perfection la
charrue de Roville et autres instrumens d’agriculture , dont on peut
voir les modèles dans les galeries de cette intéressante instituiion.
(238 ) |
Lorsque l’on considère les services que des instru-
mens aratoires ainsi perfectionnés peuvent rendre à
l'agriculture, on éprouve un sentiment pénible en
pensant qu'ils sont à peine connus dans notre dé:
partement. Le laboureur, assujetti à cet empire si
tyrannique de l'habitude, conserve avec ‘un respect
presque religieux d’antiques charrues qui remontant
à l'enfance de l’art, en présentent les imperfections.
Par l'effet de leur construction vicieuse, elles exigent
des attelages très-forts et ne produisent qu’un labour
défectueux: L'introduction des charrues perfection
nées serait un:bienfait pour le pays:
La charrue de Bayley nous paraît devoir prendre
rang parmi celles qui méritent particulièrement d’être
recommandées au choix des agriculteurs.
La commission émet le vœu que la société exprime
une opinion favorable à cette charrue ; et qu’elle in-
sère son opinion motivée dans ses publications, afin
de contribuer à la: propagation d’un instrument dont
notre département peut tirer de grands avantages.
Explication de la Planche XT.
À. Mancherons.
B. Perche, haie, ou dge , ou flèche.
C. Coûtre. :
D. Régulateur.
E. Sep, ou affur.
F. Oreille ou versoir. bérfniih
G. Soc:
(239)
ROSE PYGMÉE.
La rose pygmée est une variété singulière, dont le
caractère le plus saïllant est dans la petitesse de la
fleur : ayant un diamètre qui ne dépasse pas quatre
lignes. Cette fleur est en outre d’un rouge vif, pleine,
bien faite et parfaitement remontante.
La petitesse de cette fleur, état de chose assez re-
marquable d’ailleurs, lui a valu le nom de Rose
pygmée , qui lui a été imposé par M. Bizard, con-
seiller à la Cour royale d'Angers : nom qui lui
convient d'autant mieux qu'il exprime à lui seul et
la petitesse de la fleur, et la taille minime du rosier
qui la porte.
Cette nouvelle variété, à raison de son exiguité
générale, ne peut manquer d'attirer l'attention de
l'amateur : elle est comme un nain, parmi l'espèce
humaine , que l’on va voir par curiosité.
Elle a été obtenue d'une graine du Rosa indica mi-
nima , semée en 1828, par M. Bizard.
( 240 )
a —
MÉDAILLES
DÉCERNÉES PAR LA SOCIÉTÉ
POUR L'EXPOSITION HORTICULTURALE DU 21 sun 1832.
———
Si l'exposition horticulturale de 1832 avait quel-
que chose de moins remarquable que celle du 3
juin 1831, les évènemens politiques particuliers au
pays en ont été la cause la plus directe. Cependant
la Société a trouvé à faire l’appheation de deux mé-
dailles d'argent et de six médailles de bronze.
Le prix le plus important était, il n’y a'pas de
doute, celui relatif à l'introduction de végétaux nou-
veaux pour le département. Trois horticulteurs ont
été remarqués sous ce rapport, ce sont: MM. Ca-
thet, Leroy jeune et Lebreton jéune. Le pre-
mier a obtenu Ja 1." médaille d'argent; M. Leroy,
la 2. médaille d'argent, et M: Lebreïton, la seule
médaille de bronze accordée pour ce prix. Le nom-
bre des espèces introduites dans nos jardins ou dans
nos serres, par ces horticulteurs , justifie le juge
ment qu’en a porté le Jury d'exposition.
Un prix à la plus belle plante introduite devait
être encore l’objet du concours; M. Cachet, pour
le Nymphœa cœærulæa a obtenu la 1. médaille de
bronze, et M. Rousseau, la 2.°, pour la beauté
d’un Polygala cordata.
(241)
Trois prix de bonne culture ont été obtenus par
MM. Potard , Rousseau et Bidault, pour ia belle te-
nue des végétaux qu'ils ont exposés, et une médaille
de bronze leur a été donnée, d’après l’ordre où nous
venons de les nommer.
La Société, en décidant que des prix seraient ac-
cordés à l’horticulture , a eu l'intention d'y com-
prendre non-seulement les fleurs mais encore les
fruits; espérant plus tard diriger sa sollicitude sur
des cultures d’une“plus haute importance.
DESCRIPTION
DE DEUX NOUVELLES ESPÈCES DU GENRE ANODONTE,
PAR M. MILLET.
ANODONTE MINIME : 4nodonta minima ( Millet }.
( Voyez PI. XII, fig. 2.)
Coquille avale-oblongue, arrondie et rétrécie pos- :
térieurement , sub-rhomboïde antérieurement. Valves
épaisses , recouvertes d’un épiderme brun-noirâire,
marquées de stries rapprochées formant des sillons
à peine sensibles ; d’un lacté bleuâtre en dedans, avce
une large tache irrégulière livide, qui occupe presque
tout l’intérieur de la coquille. Lame cardinale plus
ou moins arquée et ondulée , terminée par un petit
( 242 )
sinus. Sommet et crochets fortement .excoriés ; im-
pressions musculaires assez profondes.
Longueur:des plus grands individus ; 2 pouces 6
à 8 lignes; diamètre 1 pouce 6 lignes.
Habite Jes ruisseaux qui se jettent dans l’Oudon
(arrondissement de Segré, Maine «et Loire }.
- Indépendamment des caractères bien tranchés qui
distinguent cette: espece de ses congénères, sa petite
taille et sa grande épaisseur seraient seules suffisantes
pour bien la caractériser. ?
À. OBLONGUE : Anodonta oblonga ( Millet ).
( Voyez PI. XIT, fig. 1°)
Coquille alongée, arrondie postérieurement, bi-an-
guleuse antérieurement ; valves minces, fragiles, re-.
couvertes d’un épiderme brun-livide, marquées de
petites côtes sur leurs parties supérieures et de sillons
espacés vers la partie inférieure (1); d’un blanc ar-
genté ou irisé en dedans, avec quelques taches livides.
Lame cardinale droite, terminée par un léger smus.
Crochets et sommet excoriés.
Longueur, 4 pouces; diamètre, 22 à 23 lignes.
Habite la Mayenne, en Reculée, etc.
Cette espèce a quelques rapports avec l'Ænodonta
sulcata de Lam. ‘qui habite les États-Unis, mais elle
m'a paru distincte.
(4) Ces sillons n'existent bien que sur les vieux individus. Ils pa-
raissent en dedans comme en dehors de la coquille.
(243 )
DESCRIPTION
ET FIGURE DU TRÈFLE A PETITE FEUILLE,
(Planche xur. )
PAR M. DESVAUX.
Li
NE possédant plus qu’un seul échantillon de cette
espèce de trèfle , publiée par nous en 1809, et crai-
guant de perdre ce seul type à notre disposition,
d’une espèce qui a été citée déjà plusieurs fois, mais ou
avec doute ou faussement, parce qu’on ne la con-
naïssait pas, nous allons en donner une description
succincte et une figure suffisante pour la reconnaître
dans quelque partie de la France qu’elle puisse se
trouver.
Trifoliunm microphyllum, voy. PI. XHH, ( Desv.
Jour. Bot. 2, p.316.) radice perenni ; caulibus plu-
rimis , subrectis, ramosis ; foliolis ovatis, substria-
tis , tenuê denticulatis , margine ciliato-pilosis ; petiolis
elongatis, vaginantibus , apicè stipulis lanceolatis ;
spicis suboblongis , villosis ; calicibus cylindricis ,
sparcé pilosis ; lacinicis barbato-pilosis. Habitat in
locis sylvaticis Pictavii.
RACINES vivaces.
TIGES presque droites, plusieuts ensemble, à ra-
meaux courts; longues de 9 à 10 pouces.
17
(24%)
FEUILLES à long pétiole, en gaine renflée, glabre.
à sommet terminé par deux stipules allongées, lan-
céolées ; entre lesquelles part le süpport des folioles ;
folioles de 3 à 4 lignes de long, ovales-oblongues,
striées:; tglabres, à bords pourvuside quelques-longs
poils.
FLEURS en épis solitaires ; calice cylindrique à
longs poils rares, à cinq divisions presque égales ,
longuement ciliées-barbues.
. plante, que nous-mavons jamais pu retrou-
, depuis trente-deux ans que nous l'avons re-
Le dans un bois taillis très-sec, près Poitiers,
et que nous avons cherchée inutilement à diverses
fois, a des rapports avec le Trifolium rubens d'un
côté et un peu avec le Trifolium alpestre , de l'autre.
Êlle diffère du premier par ses feuilles ovales.et pe-
tites, par son inflorescence et les poils qui le recou—
vrent ; elle a encofe moins de rapports avec le Trifo-
lium alpestre.
: DU QUARTZ AVENTURINÉ
ET DE SES GISSEMENS »
Dar M. Desoaur.
Nos recherches dans les auteurs ne nous ayant, Trier
appris sur le gissement “particulier du Quartz aven-
furiné, nous croyons devoir consigner nos observa-
(245)
tions à ‘cet égard : ayant étudié cette variété dans
divers lieux.
Lorsque nous publiâmes la minéralogie du dépar-
tement de la Vienne , en 1804 (1), nous avions ren-
contré dans beaucoup de lieux ce quartz si agréable
à l'œil lorsqu’ il'est poli, ‘et qui doït, nous pourrions
le dire, toute sa beauté à une sorte d’ahtération dans
sa texture; mais frop nouvellement initié dans la
science, nous n'avions songé qu’à collecter quelques
échantillons'et non à étudier l'origine de ce quartz.
Cette jolie variété, ayant toujours un aspect de cail-
loux roulés:, il n’y avait pas à douter qu’il n‘appartint
aux terrains de transport ; et il devait provenir d'an-
tant plus doin, que, dans les endroits où nous
Favons trouvé, il n'existait pas dé roches quartzeusés,
dont lé quartz aventuriné est véritablément un débris.
Il y a-trois observations à faire sur Île quartz
aventurmé : comment lefisté-t-il ‘dâns la nature ?
quelles sont: les causés dés’ caractèrés qu'il offre ?
et d'où provient-il ?
Dans de vastes étendues de terrains que noës avons
remarqués dans le départerfrenit de Ja Vienne, ét dans
divers ‘endroits de l'arrondissentent dé Saumur ,
terraïs résultant évidemment de transport } soit par
l'effet de rivières qui ont changé de cours, soit
par l'effet de l'abandon d'üne partie de l'étendue
de ce coûrs qui dut être bien plus considérable que
l'état actuel me le montre, ‘on trouvé mêlée au sol
et dans une épaisséër d'a mètre ét plus, une grande
(4) Travaux dé la Société d'Enttiation de Poitiers, pag. 74 à AT.
( 246 )
quantité de quartz roulés , dont un grand nombre,
surtout ceux qui avoisment le plus la surface du
terrain, sont plus ou moins colorés en rouge-brun.
Ces quartz roulés sont enveloppés: d’un, mélange
de terres de diverses natures , mais ordinairement
peu favorables à la culture , et. dites terres aigres
et terres de landes , chargées de fer. oxidé à: l’état
d'hydrate, et irès-souvent méêlées à des globules
ou rognons d’oxide terne de manganèse , ou terreux,
ou pulvérulent. Pour la situation du quartz aventu-
riné que nous avons étudié,en place, au moyen
des fossés dont on trouve souvent-ce térrain coupé,
nons nous sommes assuré quil devait sa teinte rouge
à l’oxide de fer; et.plus il était près de la surface
du sol.et plus il offrait une couleur'foncée. Les plus
beaux, les plus colorés de ces quartz, sont ceux
trouvés à la surface même du sol. Dans Ja partie
inférieure de. la couche de terrain de transport qui
le présente, le quartz aventuriné est incolore ou du
moins d’un blanc grisâtre , sans aucun indice. de .co-
Joration. re pt
D'après cette .«prémmière observation, il .est facile
de conclure quele quartz.aventuriné-doit son carac-
tère à Ja nature du.terrain dans. lequel il se trouve
mêlé ,.et-à la position qu'il occupe .dans ce terrain.
Sa texture, renfermant beaucoup d’étonnemens ou
d’interstices dans lesquels les, eaux chargées, d’oxide
de fer. pénètrent facilement , .ce,même. oxide, de
jaune qu’il était d’abord , passe, à raison, de la ténuité
de ses molécules répandues sur une grande surface,
à l’état d'oxide rouge, par l'effet de l’action con-
( 247 )
tinu de la lumière qui facilite une combinaison plus
grande d’oxigène.
Les terrains de transport qui couvrent les pays de
landes et renferment souvent nos quartz, sont les
débris d’un ancien sol sur lequel coulaient des eaux
arrivant des parties montueuses éloignées. Les eaux
se creusant peu à peu un hit plus bas, diminuant
dé volame , ont abandonné des débris de roches de
iransition et primitives, dans lesquelles le quartz
existe en plus ou moins grande quantité. Ces terrains
examinés dans l'état actuel des choses, deviennent
d’une formation inexplicable , si on ne suppose pas
ces changemens à la surface de la terre. Souvent le
cours des eaux est si éloigné du point où l’on ob-
serve les véritables indices d’un antique cours d’eau,
qu'il faut une répétition d'observations , pour ima-
giner que l’amas de quartz roulés qu’on a sous les
yeux ait été transporté par les eaux, tandis que sou-
vent tout le sol environnant est plus bas sur tous
les ponts, que celui qu’on étudie. Nos quartz aven-
turinés, quelle que soit leur position , auront toujours
été arrachés à des terrains du lom et plus élevés; et
en roulant par l'effort dés eaux, les angles de chaque
débris auront disparu, et sous la forme d’an glo-
bule irrégulier , ie quartz sera venu recevoir d’au-
ires influences que celles de sa création primitive.
Nous aurions à expliquer maintenant quelle est
la nature de structure du quartz aventuriné , et par
quelle. cause il offre ce grand nombre d’étonnemens ,
cause première de l’accident qui devra en faire une.
pierre demi-fine recherchée par le joaillier.
( 248 )
Il est certams quartz, mais en pelit nombre, dont
la cassure présente celle pour ainsi dire du sucre, et
qui semblerait par cela même être le produit d’une
cristallisation confuse , celui-ci serait irès-propre à
recevoir l'accident qui forme le quartz aventuriné,
cependant en l'étudiant attenlivement, nous croyons
qu'il n’a aucun rapport avec la formation du, quartz
aventuriné, et, pour le dire en un mot, nous pen-
sons que les éfonnemens de ce quartz sont dus à une
altération. produite par l’action de l'air , et peut-être
par le concours du froidiet du chaud alternatifs. On
sait que les joailliers, en exposant. à la chaleur, d’une
certaine manière, les quartz hyalins taillés, ou cristal
de roche, et les plongeant dans un liquide froid et, co-
loré, il s’y forme un très-grand nombre de. glacures,
gercures on étonnemens, comme on voudra les appeler,
ils se pénètrent de la couleur de manière à former ce
qu'on nomme des rubasses dans le commerce, pour
leur couleur rouge. Nous pensons donc que spontané-
ment les quartz roulés ont éprouvé unedilatation et un
retrait particulier, d’où sont nées les gercures, et que
ces. gercures | pénétrées de. fer oxidé, ont donné au
quartz, le plus vulgaire, tout le mérite qu’on attache
ou qu'on a,pu.allacher, surtout.autrefois, à ce qu'on
nommait ayenturine (quartz aventuriné). Cette pierre
était anciennement si recherchée que. l'art s’est ap-
pliqué à limiter; et nous osons assurer qu’à la du-
reté près, on est parvenu en cela à flatter l'œil plus
agréablement que la nature elle-même; si, l’on y joint
le travail du lapidaire, les aveninrines factices l'em-
portent en, cela sur les ayenturines naturelles que
nous ayons pu observer,
(249 )
SUR LA NAVIGATION DE LA LOIRE,
PAR M. DERBIEN,
Tngénicur en chef du département de Maine et Loire.
el
IL y a bien long-temps que l’on songe à rendre
la Loire constamment navigable.
Elle est flottable depuis Confolent (Haute-Loire )
jusqu’à la Voirie (Loire), sur une
Jongueur de. . . . . em eee 0 JU, 000 IMÉILOS:
Elle est navigable imparfaite-
ment depuis la Moirie jusqu’à l'O-
céan , sur une longueur de. . . . 763,937 mètres.
SiNAp line Mir ER mire te
Longueur tolale:moitse : 798,937 mètres.
a Er
Ou 200 lieues métriques de 4,000 mètres.
On s'occupe d'un canal latéral à la Loire, dans
la partie de ce fleuxe au-dessus d'Orléans.
Depuis Orléans } jusqu'à la mer, il y aurait avan
age à améliorer la navigation de la Loire, dans
son propre lit; ei je pense que depuis Orléans jus-
qu'à Nantes, un canal latéral devant coûter beaucoup
plus que les droits de navigation que l'on y perce+
vrait ne pourraient produire, ne serait exécutable
qu’au moyen des fonds de l'Etat, et que les cré-
dits annuels alloués pour la navigation intérieure du
Royaume, n'étant pas en proportion avec les be--
( 250 )
soins du service, l'exécution de ce canal serait en-
core indéfiniment ajournée.
En outre, cette exécution obligerait à enlever à
l'agriculture des terrains précieux, entre Orléans et
Nantes, tandis qu’une navigation établie dans le lit
même du fleuve, conquerrait sur ses deux rives des
sables qui ne tarderaient pas à devenir très-productifs.
Dans les temps les plus secs, il y a toujours dans
la Loire, entre Orléans et la mer, plus d’eau qu'il
n’en faudrait pour obtenir une navigation constante ;
mais la trop, grande largeur du lit, la mobilité des
sables que les moindres crues déplacent et transpor-
tent, forment des barres, dont la position varie
continuellement, et qui sont, dans la saison des
basses eaux, un obstacle à la navigation.
On a pensé qu’en rétrécissant le lit de la Loire , on
pourrait la rendre navigable, en tout temps; et pour
obtenir ce résultat, on commença, entre Nantes et
Paimbœuf, en 1755, l'exécution de digues submer-
sibles , qui fut bientôt abandonnée.
Ce système fut repris en 1825, et essayé en amont
du confluent de la Vienne dans la Loire, près du vil-
fige de Chouzé (Indre et Loire }; il n’a pas été con-
ünué.
El est bien évident que si lon pouvait, au moyen
de digues longitudinales , former un lit invariable à la
Loire, on'auräit résolu le problème de sa navigation
Constante ; mais 1l est également reconnu que l’exé-
cution de ce système coûterait plus que celle d’un ca-
nal latéral, et que conséquemment il doit être aban-
donné.
( 251 )
On a proposé de construire des digues transversales
perpendiculaires au cours de la Loire , au moyen des-
quelles on établirait, sur une des rives, un lit conve-
nable ; ou d’attacher ces digues à l’une et l’autre rives,
afin de former, au milieu du fleuve, un chenal suffi-
sant pour la navigation.
On emploie depuis long-temps ce système pour les
rivières torrentielles, qui coulent au pied des Alpes.
Mais, dans ce cas, il n’est question que de faire creu-
ser au torrent un lit constant, et il est nécessaire de
remarquer que le fond des vallées alpines , formé par
des alluvions successives , est généralement moins ré-
sistant que les rives presque toujours composées de
roches plus ou moins dures.
IL n’est pas question, dans les vallées alpmes, de
rendre navigables les rivières torrentielles ; le but que
l'on veut attemdre est de Zimiter les ravages de leurs
eaux, et de conquérir, sur le lit qu’elles occupent, la
plus grande étendue possible.
La vallée de la Loire ne ressemble en rien à celles
dont je viens de parler. Depuis Orléans jusqu’à Nan-
tes, la Loire coule généralement sur un fond qui pré-
sente plus de résistance que les rives.Celles-c1 sont com-
posées de terre végétale ou d’un sable fin que les eaux
entraînent avec la plus grande facilité. Le fond, au
contraire , est formé de roches plus ou moins dures,
de gravier plus ou moins gros, beaucoup plus résis—
tans que les bords.
Ïl résulte de ce que je viens de dire, que les bar-
rages transversaux que l'on éleverait , soit pour reje-
ter le chenal sur une rive, soit pour le fixer au miheu
( 252.)
dut, ne pourraient conduire à un résultat avanta-
geux, puisqu'ils n’empêcheraient pas les rives d'être:
dévorées , dans le sens de la longueur du fleuve, par
ses propres eaux qui irouveraient latéralement une
résistance beaucoup moins grande que dans le fond
du lit même, surtout au moment où elles s’éleveratent
au-dessus du plan supérieur des digues submersibles.
Ainsi , non-seulement, 1l faudrait établir le chenal
sur une des rives ou dans le milieu du fleuve,
mais il faudrait encore, au moyen de travaux, s’op-
poser à la corrosion de ces mêmes rives. Autant
vaudrait-il faire des digues longitudinales, pour en-
caisser le fleuve, et j'ai pensé, avec tout le monde,
que ce parti serait ir op coûteux pour être avanta-
geusement pratiqué.
Je ne parlerai pas de l'effet qui serait produit
par les digues attachées à chacune des rives, sur la
navigation transversale ; j'ai dit qu’un pareil système
me paraissait impraticable, mais s’il était mis à exé-
cution, que de plaintes ne s’éleverait-il pas de la
part des populations, riverames de la Loire qui ne
pourraient plus, d'une rive à l’autre, communiquer
facilement entr’elles!
L’essai fait à Chouzé, et dont j'ai parlé ci-avant,
ne prouve rien en faveur du système. Les épis sont
tous attachés à la même rive, et le chenal est porté
sur la rive gauche du fleuve dont le sol offre une
grande résistance. L'effet chèrement obtenu dans
celte localité exceptionnelle est cependant loin d'être
satisfaisant.
Je conclus de ce que j'ai dit plus Due
1. Que le système de digues transversales per-
pendiculaires au cours des eaux, n’est pas appli-
cable à la Loire dont les rives sont: généralement
moins résistantes que le fond du lit.
2.9 Que ce système n’améliorerait pas la naviga-
tion, dans la direction du fleuve, et serait nuisible à
sa navigation. transversale ;
3.° Que les digues submersibles proposées ne pour-
raient avoir d'effet utile, pour la navigation, qu’en
se liant à une défense des rives, combinaison qui
deviendrait aussi coûteuse que des digues longitu-
dinales.
Que faudrait-il donc faire, pour améliorer, dans
le lit même du fleuve, la navigation de la Loire ?
Je crois que l’on obtiendrait le résultat désiré en dé-
fendant, par des plantations, des enrochemens, etc., les
rives des îles et les bords du fleuve. C’est en les dé-
vorant, c’est en transportant çà et là les terres qui
les composent, que la Loire fait varier sans cesse
son propre hit, que la moindre crue de ses eaux
en, modifie la forme et la direction, et que le che-
nal de la veille n’est plus le même que celui du len-
demain.
Supposez que les bords soient rendus inaitaqua-
bles, que les îles soient défendues si.elles sont. uliles,
ou détruites si elles sont nuisibles, et bientôt les
sables mobiles qui. encombrent le lit de la, Loire,
repoussés jusqu'à la mer, ne seront plus un. obs-
tacle à la navigation.
D'un autre côté, encouragez les. plantations, sur
les rives du fleuve, suivant des alignemens déter-
(254)
minés , venez au secours des propriétaires qui vou-
dront rétrécir par des plantations , des enrochemens,
etc., son lit trop étendu, et vous obtiendrez, dans
un délai assez court, un bon résultat, à peu de
frais.
Mais, pour obtenir ce résultat , il faut créer une
police sévère, il faut des loix appropriées aux lo-
calités, et je regarde comme indispensable d’adop-
ter, dès aujourd’hui, pour la Loire, un système
uniforme et particulier qui, en favorisant la navi-
gation, étende et encourage les travaux qui ont
pour but de rétrécir, suivant. des limites détermi-
nées, le lit du fleuve.
Ce but ne saurait être atteint que par la créa-
üon d’une commission centrale analogue à celles
qui furent établies à Strasbourg, sous le nom de
Magistrat du Rhin, par décret du 27 octobre 1808,
et à Turin, sous celui de Magistrat du P6, par décret
du 2 février 18rr.
J'avais déjà émis la même opinion, en 1817,
dans une commission dont je faisais partie, et qui
avait pour objet de présenter un travail complet
sur la navigation de la Loire et des rivières y af-
fluentes.
Ce travail demandé par lettre de M. le Ministre
de l'Intérieur, du 8 février 1817, a été clos et ar-
rêté, à Angers, le 1.er septembre de la même
année, et envoyé à Paris quelques jours après.
Lorsque l’on sera parvenu à maintenir constam-
ment, dans toutes les saisons et dans les parties
les moms profondes du lit rétréci de la Loire, #»
( 255 )
tirant d'eau de un mètre (3 pieds), le problème
de sa navigation constante sera résolu ; Car, au moyen
de remorqueurs à la vapeur, on pourra naviguer ,
sur la Loire, quelle que soit la direction des vents.
Je suis persuadé que l’on arriverait à ce résul-
tait, au bout de quelques années ,en mettant à exé-
cution le système que je viens d'expliquer. Ce se-
rait un avantage immense pour le commerce, des
départemens traversés par la Loire, et principale -
ment pour les villes de Nanies , d'Angers, de Sau-
mur, de Tours, d'Orléans.et de Paris.
RECHERCHE
DU PLAN PRINCIPAL DES MOMENS
Par La @héorie
DE MAXIMIS ET DE MINIMIS,
PAR M. PENJON,
Professeur, Chevalier de la Légion-d’Honneur , Licencié ès-sciences,
-ete., etc. (4).
POUR rendre plus claire la solution de la ques-
tion que je me propose, je rappellerai i ici briève-
ment les définitions et les principes dont on se sert
continuellement en mécanique.
(1) L'intérêt de ce Mémoire sera de beaucoup augnienté , lorsqu'on
saura que M. Penjon,, ayeugle depuis l’âge de 18 mois, s’est élevé
( 256 )
On détermine un point quelconque de l'éspace,
par ses distances à trois plans rectangulaires qui se
rencontrent en un même point; ces distances se
nomment les coordonnées du point, les trois plans
sont les plans des coordonnées , leurs intersections
en sont les axes et leur point de rencontre en-est
l'origine.
Cela posé, pour déterminer le mouvement d’un
. système de corps; on a ‘entre les coordonnées de
ces corps, leurs différentielles et le temps, Six équa-
tions, dont trois sont relatives au moüvement de
translation du système, et les trois autres à son
mouvement de rotation autour d’un point fixe.
Nous considérerons ‘Senlemient ces trois dernières ,
et nous supposerons que l’origine est le point be
autour duquel se meut le système. Or, la force de
chaque corps étant, comme à l'ordinaire, le pro-
duit de sa masse par- a vitesse dont il est animé,
et le moment de \cette force ‘étant le produit de son
intensité par la perpendiculaire menée de l’origine
sur sa direction ; cé "moment ne sera autre chose
presque de lui-même et à traverstes obstacles apportés à son instruc-
tion, à la connaissance des hautes mathématiques , qu'il a professées
avéc distinction. La Frapée peut donc opposer à l'Angleterre un nou-
veau “Saunderson;, qui posséde ‘en outre ane instruction ‘tès-variée
dans les sciences naturelles et les lettres. Au reste, celui qui a dit:
« L'homme n’est pas fait pour mesurer des lignes et des angles;
» son âme est trop grande, son esprit trop vaste et sa vie Lrop
».Courte; pour l’employer à -de si petits objets, » me pont Être tn
esprit ordinaire et est bien aûü-dessus des-connaissances propres au
simple mathématiciens (Note du Coniité de Rédaction \:
(, 2297 4}
qu'une aire qu’on pourra projeter sur chacun des
plans coordonnés ; il en résultera donc trois sommes
de projections qui seront renfermées dans les in-
iégrales premières des équotions dont nous venons de
parler.
Mais il existe un quatrième plan qui est tel que,
si l’on projette chacune de ces trois sommes sur
ce nouveau plan, il en résultéra une somme plus
grande que si on les projetait sur tout autre. C'est ce
‘plan qu’on nomaïe le plan principal des momens.
Laplace, qui l’a découvert le premier, l’a trouvé
an moyen de ces deux conditions , savoir : S1 l’on
projette les ‘rois sonimes -dout nous avons parlé,
sur deux plans perpendiculaires à celui-ci, il en
résultéra deux sommes, dont chacune sera nulle ,
et fourniront par conséquent deux équations ‘au
moyen desquellés'on détérnnifiera la direction du plan
principal. C’est à peu ‘près de la même manjèrerque
M. Poisson y est parvenu. Mais, au lien d'employer
es” formules d'Euler pour la transformation des
coordonnées, 11 s'est'servi des moyens ordinaires
et des six équations de condition qui en sont a
Suite, équations dont il-a fait un usige remarquable
dans le caleul du mouvement de roiation. M: Poin-
Soi, par sa théorie des couples , à résolu le même
problème, en considérant le plan principal comme
étant celui du couple résultant de tots les’ édüples
du système. Sans’ employer ‘adcurié de ées ‘mé-
thodes , ‘j'y -suis parvenu per;la seule condition .que
les trois sommes de momens projetées sur ce plan
donnent une somme maximum. La solution que
( 258 )
celte condition m'a fournie, m'a paru si directe,
si claire, si courte, que j'ai cru qu'elle ne serait
pas indigne de vous être présentée.
Désignons par », la somme des projections des
momens sur l’un des trois plans coordonnés, sur
celui des yz, par. exemple. Désignons de même,
par #7, et par »//, les quantités analogues sur
les plans des xz et des y, et par a, b, c, les
angles que fait un plan quelconque avec ceux des
yz, +2, Zy Enfin, représentons par S la somme des
projections de », m”, m/”, sur le nouveau plan.
On a, comme on sait,
S— m7 cos a+ m° cos b 4m!" cos c (z).
On a de plus entre a, &, c, l'équation de condi-
ton :
cos?a+cos b+cos cc: (2).
Pour que S soit un maximum, il faut que la
différentielle en soit nulle, et par conséquent, en.fai-
_sant attention que &, à, c, sont les seules varia-
bles, il vient l m4
m da sina+m’ db sinb+ ml/dcsinc=0o (5).
Mais, à cause de l'équation (2), on a
da sin a cos a + d bsin bcos b + dc sin ccosc—o(4).
Multipliant l'équation (3) par cos a, et l'équation
(4) par æ, et les retranchant ensuite, . j'aurai
(m/ sin bcos a m sin bcos b) db + (ml! sinccos
a —- mn Sin CCos cC)dcZ=0o (5).
( 259 )
Mais, maintenant, les deux différentielles 4 4 et dc
étant entièrement arbitraires , il faudra qu'on ait
m’ cos a m cos b— 0, m°/ cos a—m cos c — 0, (6).
d'où l'on tire
ml cos a
LOS RES SE —
(7);
//
cos e= 7 (8).
712
Substituant dans l'équation (2), et chassant le dénomi-
uateur 72°, 1l vient
(m°+ mm?) cos" a—m* (9),
5 m
d'où cos a (10).
Vm +74? 4e ont
Mettant cette valeur de cos a dans celle de cos &et. de
cos c, il vient
/
cos b — …
V'(m°+m + mt/?)
Ë (x1).
Im
COS CE
V'(m°+ mme)
Si l'on substitue dans l'équation, (1) les valeurs. de
cos a, cos D, cos c;:0n aura ; toute réduction faite,
S= Vm +m'+mf (x).
18
( 260 })
Nous pourrions maintenant nous assurer que S est
un maximum, en en cherchant la différentielle seconde ;
mais, comme nous avons un autre moyen d'y parvenir
et qe ce calcul serait un peu long, nous ne nous y
arrêterons pas.
Concevons un nouveau plan et d alquue par S”
la somme des projections de 7, m7, m°/, sur ce plan.
Soit a?, &”, c?, les angles qu'il fait avec ceux des coor-
données, on aura-comme précédemment
S/—1m cos a/+ m7 cos b+ ml cos el (13).
Mais il sera facile de tirer des équations précédentes
m—S cos a, mS cos b, ml—=S cos c (14).
Mettant pour 2, ml, m1, leurs saleurs dans L équation
(25), il vient
S—S (cos ‘a cos alæcos b cos Hrnbé ccos cl)(15).
Où ,'cos a cos alle cos b'cos ble cos c cos c'est le
cos de l'angle que le plan nouvellement introduit fait
avec le plan principal des momens : si donc nous dési-
gnons cet angle par &, onaura
S7=S cos à.
Quand « sera nul, c'est-à-dire, . quand le plan dont
nous venons de parler coïncidera avec le plan principal,
on aura S=$/; lorsque + sera un: angle droit ,1c'est-
à-diré, pour tout plan perpendiculaire auplan principal,
on aura
S2—" Oj ”
(261 )
Ge qui démontre les deux conditions d'où sont partis
MM: Laplace et Poisson, pour trouver le plan princi-
pal des momens. Enfin pour toute autre valeur sde &:
S’sera plus petit ques et par conséquent S est ansmaxi-
mum. On peut aussi conclure ‘de:ce calcul :que lorsque
m, m/, m1, seront des constantes, le plan principal des
momens consérvera toujours la même direction quelque
soit le mouvement du système, et le moment principal
restera toujours invariable. ( Bien entendu qu'on ne
changera pas le centre des momens. )
Ainsi dans notre système planélaie, oùles corps ne
sont sollicités que par leur attraction mutuelle et par une
force dirigée vers le centre du soleil, centre qu'on peut
prendre pour origine, le plan principal des momens,ne
changera pas de direction et le moment principal restera
le même. Done, si l’on y rapporte les :corpsidece,sys-
ième, deux des trois quantités 72, m/, m1l, deviendront
nulles, :ce qui-rend.le calcul beaucoup: plus facile ebpar-
conséquent donne de l'importance àcette recherche. Au
reste, la direction du plan principal ne dépendant que
de cos a, cos b;:cos ©, on voit qu'elle ne varierait pas
si les quantités 7, m/, m1l, étaient de la forme 0, u%,
ul, L, uT. 11 étant des constantes’et9 une fonction
quelconque du temps. Quant au moment principal , il
serait proportionnel-à set par conséquent varierait avec
le temps : remarque qui, ce me semble, na point en-
core été faite. |
Pour compléter la théorie du plan principal, j'en vais
(262 )
chercher la position par rapport à un système quelcon-
que de forces, et en supposant que ce plan passe par
l'origine.
Onvoit, d'après les valeurs de cos a, cos b, cos €,
que l'équation de ce plan sera
m x mil y + mr 0.
Or, ou le système a une résultante, ou il se réduit à
deux forces égales parallèles et de sens contraire, ou il
peut être remplacé par deux forces inégales et dirigées
dans des plans différens, ee qui donne lieu à trois théo-
rêmées que nous allons démontrer d'une manière rigou-
reuse, quoique les deux premiers aient été regardés jus-
qu’à présent comme évidens, et qu'il ne paraisse pas
qu'on aït remarqué le troisième.
1° Si le système a une résultante R, le plan principal
renfermera cette résultante.
Soit z?, yl 21, les coordonnées de son point d’appli-
cation, X, Y, Z, ses composantes ; on aura
m 24 ml y + m'lz=0; (©)
ei les équation de la résultante seront
Tri Le) ;
J—H= Ta 7).
( 263 )
L'origine étant le centre des momens, l'équation d'un
plan qui passe par l'origine sera de la forme
Az+By+z—o.
Or, pour que ce plan renferme la résultante, il faut que
son équation soit satisfaite quelque soit z, lorsqu'on y
mettra pour x et pour y leurs valeurs tirées des équa-
ons de cette droite. Ces valeurs sont
Substituant daus l'équation du plan, il vient
(AX+BY+2Z) zæA m=Bm—=o.
Pour que cette équation ait lieu quelque soit z, il faut
qu'on ait
Br
On tire de la seconde À = }
| ml
substituant dans la première , on aura
B(mX+mY)+mLTo,
mais , d'après l'équation (x), on a
mm X te MINE ee MAL,
( 264 )
d'où BmlZ=mlZ
ml
TT Substituant dans la valeur de À, il vien-
72!
donc B=
dra À Le mettant pour À et B leurs valeurs dans
mi
l'équation du plan, on aura
mr+myt+mlzZo,
équation qui est la même que celle du plan principal,
quand on suppose que ce plan passe par l'origine. Donc
le plan qui contient la résultante-et le centre des momens
coïncide avec le plan principal.
2.° Si le système se réduit à deux forces égales paral-
lèles et de sens contraire, ce que M. Poinsot, appelle
un couple, le plan principal contiendra ce couple, ou
du moins lui sera parallèle, Désignons par R et R7les
deux forces; X, Y, Z, étant les composantes parallèles
aux axes pour la première, et X7, YZ Z7, étant celles
de la seconde. Si,, en ‘outre, nous représentons par
m, ul, m7, les quantités analogues à 7, m1, ml,
pour le système dont la résultanieest R;etpar ;, 254,
celles qui se rapportent à R?, il est facile de voir qu'on
a X1=—X, VI He Z,
mX+uY+urLTo, (a)
y X +3 Y +227. 4
Soit 47 + by 4 z 4e d— o l'équation d'un plan, on
( 265 )
verra par le théorème précédent que, pour qu'il passe
par la première droite, il faudra qu'on ait
Z+aX+6Y—o, (8)
a ul—bu+dTo. (c)
Pour qu'il passe par la seconde, on aara, outre l’é-
quation (2)
a /+6,+ do. (e)
Retranchant l'équation a de l'équation (c), et far-
sant attention que p.27 etui +
bm
mi
y2= m1, on aura a ml—bm —o; d'où a
Substituant dans l'équation (2) et faisant attention que
les équations (æ) ajoutées donnent
mX+mY+mlL=o, onentire à —
mettant cette valeur de 8 dans celle de a, il vient a— 7
Enfin substituant pour a et à leurs valeurs dans l'équa-
tion du plan, on trouve
m + my ml 24 mdr 0 ;
équation d’un plan parallèle au plan principal; et,
comme on peut prendre le centre des momens où l'on
voudra, en le prenant dans le plan du couple, le plan
( 266 )
principal et le dernier se confondront, ce qui démon-
re le principe d'où M. Poinsot est parti.
3.0 Supposons maintenant que le système ait deux ré-
sultantes non parallèles et irréductibles à une seule, on
pourra le considérer comme composé de deux systèmes
qui auront chacun leur plan principal. Cela posé, je dis
que le plan principal du système entier renfermera l’in-
tersection des plans principaux de ces systèmes partiels.
En effet, conservant toutes les notations du théorême
précédent, et observant seulement qu'on n’a plus X77
XF V7 V7 OT les équations des plans
principaux de ces deux systèmes seront
pa tuly Hz To,
] Up (d).
CO Pos mo V +) 0;
Mais, ces équations ayant lieu en même temps, elles
représenteront l'intersection de ces deux plans. Si on les
ajoute on trouve
mimytmlzo, .(e)
ce qui est l'équation du plan principal de tout le système.
Or, les valeurs de x, y, z, qui sausferont à la fois
aux équations (4), satisferont aussi à l'équation (e).
Donc cette intersection se trouve dans le plan principal.
( 267 )
Le Chevalier
DE LATOUR-LANDRY,
ET
QUELQUES RÉFLEXIONS SUR LE MOYEN AGE,
Par M. BLorpier-LANGLOIs.
NOUS nous plaisons à remonter , ou, pour parler
plusexactement , à descendre au moyen âge; non
qu'ilsoit aimable, mais parce qu'il pique éminem-
ment la curiosité, qu'il est libre d'imitation , qu’il est
lui; qu'il est sans aucun alliage. Cependant aurions-
nous raison de l'appeler le bon vieux temps , l'âge d’or
de la France ? Ce n’est pas assurément notre avis ; et;
sijamais la France eut un âge d’or , nous sommes bien
loin de penser que ée soit là qu'il faille le chercher.
On'connut le moyen âge, je ne puis en douter,
dans:les-siècles qui le suivirent ; et toujours, en le
peignant ;‘on lui prêta les couleurs du siècle où lon
vivait. Marotile connut , puisque nous lui devons une
édition du romande la Rose, et Marot est peut-être
celui qui lui donnale premier le nom si fameux du
bon vieux temps. 1
»Onconnaissait le moyen âge au siècle de Louis XIV;
on savaitau juste ce qu'étaient ces chevaliers et leurs
19
( 268 )
jeux sivantés, mais il fallait leur donner la nuance
du siècle. Attacher les descendans des preux à l’image
de leurs illustres maïs grossiers ancêtres ; il fallait em-
bellir la peinture qu’on en faisait, et déguiser la rus-
ticité des âges passés à l’élégance et à la politesse de Ja
cour du prince le plus te et le plus poli qui
eût gouverné la France. Tout dut subir la loi de plaire
au souverain. Racine y soumit son génie, même en
traitant des héros de la Grèce fabuleuse ; M:11e de Scu-
déry crut peindre les premiers temps de Rome dans
sa Clélie ; la Calprenède, la monarchie française à son
berceau dans son Pharamond: et c'était toujours la
cour de Louis XIV : conversations quintessenciées ,
analyses:sentimentales.,, amoureuses langueurs ;0des-
criptions interminables; que fronda Boileau dans: ses
satires et dans, ses ingénieux dialogues des. Héros de
roman, mais qui ne Béphdiéaient pas à ce-X VII ssiècle,
siècle factice qui fut tout l'ouvrage de Louis, XIV, siè-
cle de-cérémonial., de tendresse. et de: pédantisme;
siècle-de génie mais où tout fut incliné, excepté La
Fontame::aussi-qu’auraient dit les Clisson etles:Du-
guesclin:; dont les tournois étaient sirudesset; si!sou-
ventensanglantés ; de-ces élégans carrousels.dont tout
Fhéroïsme avait'pour programme les tendres wérs:.de
Quinault et les quatrains galans de Benserade ! T
L’enchantementcessar Louis XIWeut là doüleur. d'y
survivre lui-même. Le régent amenarle goût d’anpo-
sitif quine tournamnullement an° profit des {peintures
du moyen âge , et bien moins encore“aux-bonnes
mœurs de Ja: É alai Cette espèce-de saturnales de no-
ire histoireet de‘notre littérature ne se reproduira pas,
(269 )
je l'espère. On avait bien assez d’exploiter le présent,
sans se jeter aux siècles des guerres saintes ; le régent
et son ministre n’étaient pas hommes à soupirer trop
long- -temps pour leurs belles, comme on dit très-gra-
tuitement que tel fut l’usage au moyen âge; moins en-
core étaient-ils hommes à se plaire à la vie simple des
vieux châteaux , et aux joûtes périlleuses des paladins.
Si l’on emprunta quelque chose aux temps passés, ce
fut J'allégorie , gaze transparente que l’abhé:de V'oise-
non et Crébillon le. fils s’avisèrent: d'étendre sur. les
mœurs déplorables de leur temps.
Le XVIIL ‘siècle fit mieux que de Pa des ridicule-
ment le moyen âge; il l’étudia , ‘et ne nous laisse rien
à désirer sur ce sujet. Je ne parlerai pas des Sainte-
Palaie, des Millot, des, Legrand-d’Aussi, qui l’ont
ressuscité pour nous par, ee travaux sur les Trou-
badours et les Trouvères.
LeXIX..° siècle s’est jeté à corps perdu dansle moyen
âge. Je veux bien croire que son intention a été d'être
imitateur fidèle ; mais, si trop d'amour pour le siècle
de Eouis XIV fit composer des tableaux mexacts du
temps passé, trop de dédain, je dirai plus, trop de mé-
pris’ pour le nôtre, n’aurait-il pas entraîné quelques-
uns dé nos écrivains dans une érreur pareille ? faut-il
donc que toujours; la passion conduise notre plume,
et que nous ne: parliüns jamais des morts qu’en affec-
tion ou en haïne des vivans ! Nous ne ARADARONS, pas
de: ballades où l’on prétend-reproduire le moyen âge ;
ballades pieuses ; ballädés d'amour ; ballades de cheva-
lerie, ‘dans an stÿle qui voudrait être antique et qui
n’est que mais, et où l’on s’imagine , en nes albums
(270 )
couleur de rose et ornés de délicates vignettes, repré-
senter au naturel la tendresse . la courtoisie, la valeur
et surtout la piété de ce qu’on nomme le bon vieux
temps.
Un écrivain, des plus propres à nous en donner
une idée qu’on ne contestera pas , est le chevalier Lan-
dry de la Tour, Angevin qui vivait au XIV siècle (r),
dont Bodin ne dit que quelques mots dans la Biogra-
phie du Bas-Anjou , et dont un des ouvrages va être
quelques instans le sujet de notre examen. Je dois à
la Revue Britannique, avril 1831, une partie de ce
que je transmets ici; et, comme cette collection pé-
riodique s’applaudit des renseignemens qu’elle a ob-
tenus sur le vieux Landry de la Tour, à plus forte
raison devons-nous épronver quelque désir de voir
inséré dans nos mémoires un choix de ces renseigne-
mens.
Sans entrer dans aucun détail sur le chevalier de la
Tour , la Revue nous apprend qu’en 1380, il parut
(4) Quelque. peu ‘important ‘que! soit, dans!{cette. dissertation} le
chevaliér, de la Tour, comme rien n’est plus. naturel et, plus, excu-
sable que l’on soit de son pays et de son siècle, j'espère que per-
sonne ne trouvera déplacéé ici la note que j’emprunte à un savant
rapport qui fut fait de mon discoursà la Société. P
« Une famille respectable! d'Anjou , les Maïillé;; porte encore,lenom
de la Tour-Landry. Élle avait-droit de lever, bannière ; elle,est con-
nue comme! souche des marquis de Maillé de la Tour-Landry, ct
des comtes ‘de Maillé-Brézé; ét remonte à Hilduin/de Maïllé ,‘ dont
on retrouve le nom dans wne chaïte:de donation faite,à Aubert ; abbé
de Marmoutier, en 4087. Elle eut un chevalier du Temple: en 4417 ;
qui fut connu par ses exploits , et un autre chevalier qui, en 4418,
était maître d'lôtel de Charles VIL5
(21)
une traduction allemande de son livre , destiné à ser-
oir d'instruction à ses filles. Il yen eut nne traduc-
tion anglaise par Guillaume Caxton, en 1484, sous
ce titre : « Le chevalier de la Tour traduit du français
en notre langue maternelle, par moi W. Caxton;
imprimé à Westminster , le dernier jour du règne de
Richard IT, r vol. àx-fol. (1).
Une autre traduction anglaise se trouve parmi les
manuscrits de la bibliothèque harléienne, n.° 764,
sous un titre plus moderne, puisqu'il porte la date
du règne d’'Edouard VI; mais je trouve dans ce titre
ces mots : éprimé par Caxton. Si c’est le même ou-
vrage , pourquoi le rédacteur de l’article de la Revue
dit-il que, pour son travail, c’est de la traduction
manuscrite qu'il s’est servi, comme étant d’un style
plus ferme et plus pur, et mélé de gallicismes nom-
breux2 C'est, ajoute-t-il, un échantillon de la prose
anglaise à cette époque reculée, où les mœurs natio—
nales de la France et de l'Angleterre étaient à peu
près identiques. Ici, nouvel embarras. Que parle-t-
il de ces mœurs identiques de l'Angleterre et de la
France ? tout au plus cela convenait au siècle de
Caxton, où la France, depuis cinquante ans à peine,
était affranchie de toute influence anglaise. Je ne
croirais même à cette identité parfaite , que s’il s’a-
(4) Voici le titre exact de l'édition de Caxton , tiré de la Revue bri-
wannique; il est remarquable par l'ancienneté du langage et de l’or-
thographe. «The booke whiche the Knight of the Toure made to the
enseygnement and teching of his doughtres, translated oute of the
frencshh into our maternall énglishe tongue byme’ W.Caxton, the
first yere of the regne of kinge Richard thyrd.
(272)
gissait d’une traduction qui se rapportât au temps du
chevalier de la Tour, temps fameux:par les démêlés
des maisons de Montfort et de Blois pour le duché de
Bretagne ; époque désastreuse des triomphes de
l'Angleterre sur la France, à Créci et à Poitiers: C’est
alors , c’est dans cette luite longue et sanglante , que
les mœurs purent se mêler; mais, je le répète, cela
ne peut se dire exactement du règne de Richard IT,
(1484), n1 surtout de celui d'Edouard VI (1547).
Je pourrais donc conjecturer que le manuscrit de la
bibliothèque harléienne serait du XIV: siècle, et que
le titre seul, plus moderne, serait celui qu’y aurait
attaché la personne qui en aurait fait le dépôt, sous
le règne d’Edouard VI. Quoiqu'il en soit de ces obs-
curités, je dois trop à l’article de la Revue Britanni-
ue, pour y insister davantage.
Un exemplaire, én français je le pense, et
que je voudrais bien connaître, imprimé à Paris l'an
1514, par Guillaume Eustace, ix-fo/. en gothique, fut
jugé assez curieux pour que, dans la vente de la bi-
bliothèque Mackarthy, ii y a quelques années, il fût
vendu 615 francs:
Si la somme d'argent à laquelle fut Dérté un ou-
ei = en atteste le mérite, jé puis encore mentionner
1, quelle que soit la sécheresse de pareilles remar-
pe qu'un exemplaire de l’édition de Caxton a
été vendu à Londres 105 guinées , qui valaient, dans
le temps 2,630 francs, et qui en vaudraient actuelle-
ment 2,770.
Avant de passer à l'ouvrage. que..le chevalier com-
D°Sa pour l'instruction de ses filles, je nommerai ce-
(273 )
Jui dont la Revue ne dit rien ; et que Bodin se borne
àvciter *il'est intitulé le Guidon des Guerres ; et il se
trouve à ‘la fin du volume imprimé par Eustace en
1514.
- Le goût du moyen âge fut l’allégorie. Il est aisé
d’en trouver la cause dans l’état de sujétion où ‘les
peuples étaient tenus alors, et dans les mille abus
qu'ils avaient à supporter, mais qu'ils se sentaïent
aussi quelquefois disposés à fronder. Les drames m-
formes dé ces temps étaient presque tous des allégo-
ries ; beaucoup de petits poèmes, de fabliaux étatent
allégoriques; on connaît ce long et ennuyeux roman
de la Rose , qui occupa successivement la vie de deux
poètes du XIIL:siècle. Ce goût subsistait encore à
la fin du XV, et au commencement du XVI=Æ; nous
en avons des exemples dans plusieurs productions de
notre duc René ,'et dans des tableaux mouvans dont
Angers amusa François Le', lorsqu'il vint visiter cette
ville avec la reine Claude, fille de Louis XIL (1):
Eh bien! contre l'usage de son temps, on ne trouve
dans le livre’ de notre angevin ni allégorie, ni para-
bole, à moins que ce né soit comme citation , et pour
servir d'autorité à ses argumens. C'est la vie des chä-
teaux , telle qu'elle était en Anjou, et avec toute son
ingénuité.
Le chevalier Landry avait perdu une femme qu'il
aimait ; il va rêver un soir sous un grand arbre de
son jardin. Ses trois filles , qui s'étonnent de ne le
(4) F. Bourdigné et Dreux du Radier, Récréations historiques ;
1.1, p.270. | m4
. LC
pas voir revenir, vont au-devant de Jui. A leur aspect
son cœur paternel est.ému ; iksonge à la destinée in-
certaine et souvent malheureuse des femmes. « Que
deviendront mes filles ? quels conseils, quelle éduca-
tion leur donner, pour les prémunir contre. les dan-
gers qui les menacent ? » C'est ainsi que débute lou-
vrage. On, ne pouvait imaginer une introduction. plus
naturelle et plus. touchante. Mais aussi le secret-du
bon Landry de la Tour lui échappe, sur la chasteté,
sur la délicatesse prétendue de ces temps chevaleres=
ques. ÎLen savait, je pense , quelque chose: ete l’en
croirai plus que je n’en croirais Messieurs de Château-
briand et de Marchangy.
Landry va même jusqu’à ne pas dissimuler qu’il ne
valait pas/mieux, que. les autres gentilshommes ses
contemporains. «, (Jue l’on nous accordât ou. non,
dit-il, le don d’amoureuse merci, nous n’en répan-
dions,pas moins le bruit de nos succès, vrais ou sup-
posés; car nous n’avions ni honte ni crainte, et c’est
ainsi que nous déçûmes gentilles dames et damoiselles,
médisant d’elles sans pitié, d’où advinrent beaucoup
de diffâmes et. d’esclandres. » Et voilà le siècle des
Clisson, des ; Duguesclin, des Beaumanoir: et des
Mauni, si vénérables sur nos théâtres et dans. nos
modernes romans !
Or Landry. avait dans son château d'Anjou deux
prêtres, et, deux clercs; il les mit à l’œuvre , et les
employa à, recueillir dans tous les. manuscrits. de.sa
bibliothèque , les utiles exemples, les anecdotes, les
préceptes qu’il devait répandre dans son livre.
Rien n’était plus négligé ou du moins plus mal con:
(275)
duit que l'éducation des femmes. On leur apprenait
volontiers à lire ; mais, à écrire, les maris y trouvaient
trop de dangers. On leur interdisait même, autant
qu'on le pouvait, la lecture ; « car, dit Geoffroy ,
quels sont les ouvrages qui pourraient leur tomber
entre lès mains ? des enseignemens amoureux, des
romans immoranx , des fabliaux indécens , et d’au-
tres récits qui n’entretiennent que de lascivetés et de
vanités mondaines. » C'est dans ces ouvrages, dont
se plaint le chevalier de la Tour , mais auxquels on
me peut refuser beaucoup d'esprit et une invention
quelquefois charmante , que puisèrent ensuite Boc-
ace , la reine de Navarre, l’auteur du Moyen de
parvenir ; Rabelais et La Fontaine. Les religieuses ,
les moines, les prêtres séculiers en font surtout les
frais, et y sont peints comme se livrant à la débau-
che la plus raffinée.
On supposerait de la candeur ; et même de la piété
dans le siècle où vivait le chevalier de la Tour, aux
conseils qu’il donne à ses filles de beaucoup jeûner ;
jusqu’à ce qu’elles soient mariées, et d'écouter chaque
jour le plus de messes qu’elles pourront. Mais, quelle
scandaleuse conduite ne tenait-on pas à l’église’ et
c’est le chevalier de la Tour qui nous en instruit lui-
même. » Rien de moins édifiant. On y cause, on y
mange, on s’y donne des billets doux et des rendez-
vous amoureux... » Aussi Landry fait-il remarquer à
ses filles tout l’odieux de pareilles profanations ; AUSSI
montre-t-1l, pour les détourner de suivre de tels éxem-
ples , toute la sollicitade d’un père, qui n’était devenu
sage qu'après avoir subi toutes les épreuves de la fulie
(276)
Les maris étaient d’une iidulgence:tout-2-fait pré-
cieuse envers leurs femmes ; pour peu qu’il s’agit d'un
acte de dévotion. On lit dans /e chevalier de la Tour ,
que , lorsqu'une femme voulait former ou dénouer
une intrigue galante, elle prétextait un! pélerinage.
Dans ce cas, liberté tout entière. Elle partait seule,
ou accompagnée d’un chevalier, car: le sigisbéisme
était commun alors, et chaque femme avait un te-
nant que le mari tolérait d’autant plus volontiers ,
qu’il était lui-même. tenant ailleurs. Il eût été ridicule
qu’elle refusät les hommages d’un chevalier: Nous
apprenons tout cela de Geoffroi de la Tour. Ainsi
cet usage accommodant, dont les théâtres et les ro-
mans de mœurs ont fait de si graves reproches à des
temps plus rapprochés de nous , se sanctifie en quel-
que Sortie, en remontant à un âge si vénérable; peut-
être y verra-t-on aussi une des raisons non avouées,
qui le firent appeler le bon vieux temps.
La piété consistait dans des pratiques dévotes. Lan-
dry non-seulement ne trouvait rien de repréhensi-
ble dans cette alliance du vice et de la religion , il
admettait même, comme compensation , cet étonnant
amalgame, ‘et c’est le plus sérièusement du monde
qu’il raconte la légende suivante : « Une Dame,
allant à un: rendez-vous, se laissa tomber dans un
puits. Elle se noyait, lorsque deux anges la soule-
vérent hors du puits, parce que, deux fois la semaine,
elle avait mortifié sa chair en l'honneur de la Vierge. »
Telle était la doctrine des bonnes œuvres au XIV:
siècle. Moins d’un siècle après le chevalier de la
Tour, la vie de Louis XI nous offre des exemples
( 277 )
fameux. de ces compensations criminelles. L’on pour-
vait compter ses forfaits par ses’ fondations pieuses.
À deux lieues et demie d'Angers, sur larive droite de
la Loire, est la petite et jolie église de Béhuard ; dé-
diée à la Vierge, ex voto par lequel il espéra de son
intercession que Dieu lui pardonnerait de dépouiller
de l’Anjou le roi René, son oncle.
Landry, pour faire sentir à ses'filles l'inconvénient
d’être indiscrètes et légères dans le discours, leur ra-
conte ce petit incident de’ sa vie: « Un de mes amis
m'avait parlé d'une damoiselle noble et riche ; qu'il
me conseillait d'épouser. Mon père me conduisit chez
les parens de la damoiselle. Là on me ‘fit une grande
chère, etle père me laissa seul avec sa fille, pour
que nous nous étudiassions avec plus de liberté. »
» Il'advint que nous parlâmes des prisonniers dont
les anglais faisaient alors (1) bon nombre, et je lai
dis 5 En cas de guerre, Mademoiselle, il serait heu-
reux d'être votre captif. Certes, ce serait une geôle
plus plaisante que celle ‘où les Anglais enferment les
leurs (2). » A: quoi elle répondit, en me regardant :
«Il y a'tel que je voudrais bien avoir pour mon pri-
sonnier, et que je garderais comme je garde mon
propre corps. » Puis oubliant la décence et la mo-
destie, elle me pria de revenir souvent. Je m'émer-
veillais de cette manière d'agir , sachant qu’elle ne
m'avait jamais vu auparavant, et qu’elle n’ignorait
de «re rh dt sida 2 08 at vhs 2 is Pet ent sn iteerme tennis
(4) Règnes de Philippe-de- Valois et de Jean.
(2) Les rigueurs qu’exercent les Anglais contre les Français, comme
on le voit, datent de loin.
(278 )
pas qu'on devait nous, marier ensemble: ct, quand
nous fûmes partis, mon père me demanda ce que j'en
pensais, et je, lui repondis que, quoique son esprit
et sa fortune me convinssent, je ne voulais pas d'elle,
parce qu’elle était étourdie et légère en ses manières,
ce dont j'eus sujet de me réjouir plus tard, car il ne
se passa pas un an avant qu’elle eût donné des preuves
évidentes de son inconséquence. »
L'amour de la toilette était, dans les siècles passés,
et surtout dans celui dont nous parlons, une pas-
sion effrénée et ruineuse que l’on voulut réprimer
par des lois somptuaires qui toujours furent éludées.
IL n’était pas rare que l’on vit des robes et des ha-
bits de 4 à,500 francs de notre monnaie actuelle.
À défaut d’autres plaisirs, .e’en était un qu’elles se
donnaient libéralement, et sans doute au grand mé-
contentement de; leurs maris qui, d’ailleurs, pre-
naient leur revanche dans Jes tournois, dont la
magnificence est connue, s’il n’est pas de même in-
contestable que les, chevaliers s'y montrassent aussi
courtois que le disent les romans. Landry raconte,
au sujet de, ce luxe, une légende que je vais ra-.
conter à mon tour, en l’abrégeant.
« Une dame venait de mourir; son. âme monta
au ciel. Devant le Juge suprême, S.t-Michel.et le
diable se disputèrent sa possession. Le diable tenait
une balance, dans l’un des plateaux de laquelle il
avait déposé l’âme de la dame, avec toutes ses
bonnes actions; dans l’autre plateau se trouvaient
les mauvaises. » Vous voyez bien, dit Satan, mes-
sire Michel, que cette femme est à moi. Elle avait
( 279 )
dix robes de couleur différente et autant de jupons;
et vous n’ignorez pas qu’une seule de ces robes bro-
dées avec magnificence auraït pu nourrir et soute-
nir vingt à trente pauvres qui sont morts de besoin
et de froid.» Le démon, én'disant cela, entassa
toutes les parures de la dime dans le plateau des
mauvaises actions. St-Michel fit entrer dans celui
des bonnes plusieurs actes de charité, jeûnes ; mor-
tifications et loyaux dévouemens, qui établirent l’é-
quilibre; mais le diable alla chercher à son tour
un paquet de bagues, de brasselets, decolliers, de
boucles d’oreilles qu’elle avait acceptés de'ses galans;.…
alors le plateau des mauvaises actions l'emporta ; sa-
*an:saisit la dame, ses habits, ses bijoux et toute sa
braverie, et les jeta ensemble dans le grand puits dé
Venfer. »
Cette légende n’est pas piquante ; je dois l'avouer :
elle est peu en accord avec l'ingénieuse ‘et féconde
imagination du XIX : siècle; cependant je ne demande
point grâce pour elle. J’ai quelque espoir que le lec-
teur sé reportant en idée à l’époque où elle fut écrite,
ce qu'il faut toujours faire quand il s’agit de juger
les œuvres de l'esprit humain, il la trouvera curieuse}
parce qu’elle est authentique, ‘et qu’elle est unere-
De fidèle de la simplicité, sinon dela vertu
dû moyen âge. ,
Cependant les‘maris perdaient apétqgelos pailence
avec leurs femmes , ils les battaient "1 était-ce encore
le bonvieuxtemps ? ou ils les punissaient d'une ma-
nière' que. nous ‘trouverions : aujourd'hôi infiniment
trop plébéiénne.» J'aïrvu, dit Landry, une dame de
( 280 )
très-mauvaise, hbumeur,.et qui contrariait à. chaque
instant son mari devant les étrangers. C'était un.che-
valier, vaillant, et très-honoré. Un jour ,, mécontent
de la conduite de sa. femme, il.Ini asséna un: coup
de.poing , et la jetalpar, terre ; puis; la foulant'aux
pieds, ..et déchirant: son. visage avec l'éperon 'qni ar
mait, ses bottes, 1l la défigura tellement que , jusqu'à
sa mort,.elle n’osa plus, se:montrér, tant elle! était
honteuse:» Non-seulement La: Tourne blâme point
le chevalier brutal, mas! encoreil parle. de lui, comme
on voit, avec élogel;-au.commenceméntide son récit,
et ne désavoue pas.) à la fin , la manière honorable
dont il en ,a-parlé. » sestéler é0fe
». Une. autre dame, dit le chevalier de la Tour;
n'ayant pas voulu.mangér avec son mari: celui-ci la
contraignit de manger en sa présence avec le gardien
des pourceaux. »
Tout simples que sont ces détails, ou plutôt parce
qu'ils sont,simples et. qu'ils sont authentiques ;.qué
ne, puis-je ici les multiplier ! Tous.ces petits tableaux
de mœufs . doivent. avoir ‘autant rapport. à Angers;
où le gentilhomme sans doute habitait quelquefois,
qu'aux lieux où. sa térre était située : que.de documens
nous aurions sur, cette ville; objet spéciäl-de notre
amour et/de. nos études, si; l'ouvrage tout ‘entier :du
chevalier de la Tour était à notre disposition! mais
enfin, par le peu que j'ai recueilli, noussavons qu'en
Anjou les gens de qualité battaient leurs fémmes pour
les rendre meilleures; qu'ils les faisaient.manger a
la cuisine, avec:le dernier de leurs gens, pour.leur
apprendre à appréciér l'honneur qu'ils leur faisaient
( 281 )
de les admettre à leur table; nous savons que nos
églises, que notre cathédrale fut probablement le
théâtre de plus d’un scandale ; que telle chapelle, où
de nos jours on ne va que pieusement en pélérinage,
s’il est dans notre croyance d'y aller, fut souvent un
lieu de rendez-vous coupable , de sacrilége et d’abus
de confiance; nous savons enfin si ces siècles vantés
ont de quoi faire rougir d’autres siècles qu’on a cru
jusqu’ici leur “ri avec tant de désavantage ;
nous savons.
Maïs, si je Fe quelque puissance à.mes paro-
les, je me reprocherais de désenchanter mes lecteurs
des brillantes fictions de nos écrivains à créations in:
génieuses plutôt qu'à souvenirs fidèles. Je le, sais
Cest quelque chose encor que de faire un beau rève.
LES , ê 1imè
j'aime plus qu'un autré, peut-être, ces chimères
aimables ; plus d’une fois j'ai senti qu’
à nos FRS réels c’est une utile trève ;
mais Ja vérité a son:prix aussi : j'ai cru devoir la dé-
fendre contre de doux, d’innocens , d'officieux men:
songes, mais enfim contre des mensonges.
(282 )
ZE
SOUVENIRS ATLANTIQUES,
DE
M. TH. PAVIE.
APRÈS avoir entretenu la société du premier, peut-
être, de nos auteurs Angevins, dans l’ordre chrono-
logique ; qu’elle me permette de lui signaler un
autre auteur qui, peut-être aussi, est le dernier dans
le même ordre. Un de nos jeunes concitoyens, em-
porté par un imsurmontable désir de voir et de s’ins-
iruire, parcourt , il y a environ deux ans, le Canada
et les Etats-Unis : il en avait 17 alors. On pouvait
ne lui supposer qu’une impatience enfantine de sortir
du lieu qui l’avait vu naître; on ne s'était point
aperçu qu’il préludât àce voyage: par les études
d'usage en pareil cas; lui-même n’avait point songé
à tout le résultat que pouvaient avoir-ses courses ; al
revint sans matériaux pour les décrire. L'idée senle
lui eût été insupportable de se faire lire sur des con-
trées célèbres où l’avaient précédé tant de voyageurs
illustres. Mais des sollicitations réitérées ont vamcu
sa modestie, et une mémoire étonnante a’suppléé à
ce dont il ne s'était pas pourvu. Il rédige donc à
mesure qu’on l’imprime ; l'ouvrage se fait sans ma-
auscrit complet et revu dans son ensemble; et pour-
(285)
tantil'offre une unité parfaite de conception et d’es-
prit; on n’y remarque aucune de ces solutions de
continuité, aucun de ces refroidissemens que pou-
vait produire une semblable manière de composer.
L'auteur est encore avec les personnes qu'il peint ; il
a devant les yeux encore les lieux qu'il décrit, tant
son imagination et sa mémoire s'accordent heureu-
sement à le servir! Il est un grand nombre de ses
pages que ne désavoueraient pas les Châteanbriand,
Jes Bernardin de Saint-Pierre , les Cooper : et cet
ouvrage, à peine at-on pu obtenir qu'il fût tiré à
vingt exemplaires. Son titre est : Souvenirs Atlanti-
ques ou Voyage au Canada et aux Etats-Unis , 1 vol.
in-8° de 550 pages, petit romam. Je ne sais quelle
sera la destinée de cette importante improvisation ;
mais la notice que j'en donne ne peut être déplacée
dans ces mémoires, si on lui fait l'honneur de l'y
admettre; je fais au reste des vœux bien sincères
pour qu’on ne soit pas réduit à y apprendre son
existence, et pour qu'une. édition fasse jouir le pu-
blic du bel ouvrage de M. Théodore Paie.
N. B. Depuis cette lecture ,, M. L.Pavie, imprimeur-libraire à An-
gers, a été sollicité par des gens de lettres.et des artistes d’une haute
célébrité, amis de son fils, de publier réellement cet ouvrage. IL pa-
raîtra bientôt en 2 vol. én-8.o, avec augmentations, corrections et
changemens sur l'édition de famille dont nous avons parlé plus haut.
Depuis cette lecture encore, M. Théodore Pavie, irrésistiblement
entraîné par son amour. des voyages, s’est arraché, pour la seconde
fois , à l'amour des siens, qui auraient cxaint d'arrêter l'essor d’une
vocation frappante et vraiment du plus favorable augure : Ses Souve-
nirs océaniques nous autorisent à user de cette dernière expression’
Les voyageurs que l’on renomme ne sesont pas annoncés autrement ”
20
(284)
ét ce n’est que par cette soif ardente des’instruire qu’on ! devient
digne d’instruire les autres.
M..Th. Pavie.est.parti pour Buénos-Ayres, avec l'intention: de vi-
siter les différens Etats de l'Amérique méridionale. Il remplira sa
destinée, il reviendra chargé de dépouilles opimes qui n’auront coûté
de pleurs à personne. Les conquêtes deM. Th! Pavie seront des
cahiers rédigés dans quelques cabanes, nids d'aigles assis sur’ quel-
ques crêtes des Andes, loin de toute civilisation , et en présence
seulement de la puissante et merveilleuse nature , qui de toutes parts
déploïera son immense horizon à sés yeux:
NOUVELRLES RÉFLBNIONS
Servant de supplément à celles qui précèdent
et De réponse au Rapport qui eu fut: fait à
La, Societe.
Je n’avais point entrepris de traiter spécialement
du moyen âge, dans mes premières reflexions qui
précèdent ma notice sur le chevalier de là Tour
Landry. C'était une introduction assez naturelle,
mais où, tâchant de-ne rien‘ dire qui ne füt vrai, je
pouvais bien laisser à dire une foule de choses qui,
au reste, et sur cela nous ne sommes pas d'accord
messieurs, de la commission et moi, n’auraient pas
conduit à une autre conclusion que celles que l’on a
pu ürer de mes réflexions premières.
J'aurais pu faire formellement le procès du moyen
âge, mais ce n'a point été ma prétention. J'ai dit
qu'il fut ce qu'il devait être; qu’il le fut aussi long-
( 285)
temps que le voulurent le mouvement spontané des
esprits, les communications fortuites des peuples, les
grandes infortunes qui confondent'et sensibilisent les
individus, des connaissances muries par l’expérience
et la réflexion, enfin une sorte de fatalité qui s’umit
à la prudence humaine dans les révolutions politiques
et morales des états.
Le moyen âge, je lai déja dit, pique éminemment
la curiosité ; je l'aime, je m’y complais. Je me sen-
Urais tout comme un autre, sinon le talent, du moins
le désir de broder sur sa civilisation, ses préjugés!
sa crédulité souvent si touchante ; ce n’est point sans
untrès-vif plaisir que j'ai lu les ouvrages où l'imagi-
nation, plus que la vérité s’est exercée sur cet âge;
mais cette vérité doit rentrer dans ses droïts, quand
il s’agit d'écrire l’histoire. « Un historien; dit le: ju-
dicieux et sévère : Robertson , doit s'abstenir de faire
des incursions dans le vaste pays de l'imagination ‘et
des conjectures. Parler des faits réels, et en expliquer
les véritables causes et les eflets:, telle est sa fonction
unique. » M. le rapporteur de la commission con
firme l'historien de l’Ecosse , etje suis complètement
de son avis , quand il dit : « Pour l'homme sage, si
les illusions ont parfois des charmes, il n’y a, en défi-
nilive, que la vérité «à laquelle ‘il-consacre!son culte,
parce que-c'est à elle seulé qu'il reconnait un véritable
prix. » . fit Ii
Nous sommes d’ LEE Si je m’ai pas dit toute là
vérité sur lé move âge ; et je ne pouvais même en
avoir la pensée, à propos d’un ‘écrivain dont, par
malheur, j'avais si peu de choses à dire, ‘du moins je
( 236 )
crois avoir dit la vérité. J’en ai attesté l’ouvrage au-
thentique et contemporain du chevalier: j'ai invoqué
l'autorité des trouvères et des troubadours. Je pouvais
appeler à mon aide des chroniques et des cartulaires
curienx, qui, sur l’article des mœurs, auraient «mis
ce siècle dans un tel état de nudité, que je me fausse
arrêté plus d’une fois dans mon récit, de peur d’of-
fenser une société aussi polie que celle-ci.
Les mœurs des chevaliers sont souvent présentées
sous de favorables couleurs par les modernes et dans
les ouvrages contemporains; chez les modernes, par
l'illusion de l'éloignement : ajor é longinquo; chez
les contemporains, par la flatterie qui s’attacha tou-
jours à la puissance. Mais, s'ilnous est permis de
rappeler quelques grands coupables (j’en prends au
hasard ; dans une multitude d’autres };: c’étaient: des
chevaliers que ce François Ie, duc de Bretagne et
ses cruels suppôts, qui firent’si longuement souffrir,
si inhumainement-périr le malheureux Gilles de Bre-
tagne (1450); c'était un chevalier que cet abominable
maréchal de Retz , qui fut, pour des forfaits inouis,
publiquement exécuté à Nantes, et dont on a fait
le conte populaire de Barbe Bleue (1440); c'était un
chevalier. que ce duc de Bourgogne, Jean-sans-
Peur, qui fit assassiner à Paris le duc d'Orléans,
frère de Charles VI (1407); c'était un chevalierque
ce Pierre de Craon, l'assassin d'Olivier de Clisson
(1391); que ce Jean-sans-Terre, qui tua de sa pro-
. pre main , à Rouen, son neveu Arthur (1202); que
ce connétable félon qui va porter ses talens et ses
armes à Charles-Quint contre-sa patrie (1523).
( 287 )
Je pourrais opposer moi-même à ces odieux exems-
ples un assez grand nombre d’autres de chevaliers
dignes d’une haute estime ; et qu’en conclurait-on ?
qu'il n’y avait pas dans la chevalerie cette puissance
d’épurer les mœurs, que lui prêtent messieurs de la
commission, et que, loin que ces siècles barbares
montrassent une tendance sensible vers une amélio-
ration sociale, nous les voyons dans une oscillation
continuelle jusqu’à la renaissance.
Les tournois, le plus souvent, je le sais, étaient nn
hommage aux dames. On n’y était admis qu'après
qu’elles avaient visité, dans une galerie, les boucliers
des preux inscrits pour combattre, afin de toucher
celui dont le maître pouvait les avoir offensées, et
qui, par ce fait seul , était exclus du tournoi; je
sais que les chevaliers portaient ordinairement quel-
que tissu, quelque écharpe aux couleurs de leurs
dames, façonné, présenté par elles ; que l'on a vu
ces insignes lacérés, emportés dans l’ardeur de la
mêlée , être soudain remplacés par une pièce du vé-
tement des dames spectatrices du combat , et a tant
dereprises, qu’elles finissaient par se trouver quelque-
fois dans un état de dénuement dont on aurait ri,
si la galanterie n’avait pas ennobli toutes ces amou-
reuses extravagances , et si le peuple eût pu ne pas
trouver admirable tout ce qui lui venait de si haut.
Je sais que des dames souvent étaient juges du tour-
noi; que presque toujours elles y décernaient les
prix , et qu’un tournoi ne se terminait pas sans qu’on
y donnät le coup des dames.
Mais cette urbanité française dont on voudrait
( 288 )
trouver exclusivement l’origine, dans-les jeux cheva-
leresques,, je la vois, par rapport au culte des dames,
dès les premiers, temps de notre histoire. Les tour
nois y donnèrent de fréquentes, de brillantes occa-
sions; mais, avant même l'occupation romaine, les
Gaulois étaient renommés par leur respect pour les
femmes. Leurs druidesses, leurs vellédas ,. leurs
dryades n'étaient que des créations de leur déférence
extrême pour un sexe.avec lequel ils croyaient avoir
Beaucoup plus à gagner en lui accordant tout, qu’en
le tenant dans l'esclavage. Cette divinitation des
druidesses n’était que l’ascendant qu'elles exerçaient
sur les hommes; et c'était, d'elles que les Gaulois
pouvaient dire justement :
Notre crédulité fait toute leur science.
Dans les temps fabuleux de ces temps déja si né-
buleux eux-mêmes > Nous voyons des êtres surnalu-
rels qui attestent encore une plus haute antiquité de
l'empire des femmes sur les hommes : ce sont ces
fées toute-puissantes qui jouent un rôle si attachant
dans notre bibliothèque bleue , et que des lecteurs
à barbe grise se surprennent lisant avec quelque
plaisir. Vousle savez, messieurs, La Fontaine à dit :
Si Peau d’Ane m'était conté
J'y prendrais un plaisir extrême,
Mais ces tournois que nous venons de: voir du
beau côté , considérons-les actuellement sous un
autre aspect. Voyons avec quelsom:, se méfiant des
sermens prononcés à la cérémonie de l’accolade, on
pourvoit à ce qu'il n'arrive pas de trop graves désor-
( 289 )
dres; déclaration sur les livres saints que l’art magique
n’est pour rien dans les moyens de vaincre ; visite
scrupuleuse des armes, pour s'assurer qu’on en à,
aux termes des réglemens, émoussé l’estoc et la taille
(la pointe et le tranchant) ; et les sergens d'armes ,
et les juges du camp, et les rois de lemprise,
estimer les coups, terminer les différens et mettre le
holà. Voyons combien les irascibles paladins sont
prompis à prendre la chose au sérieux, et à tourner
en combats sanglans ce qui ne devait être qu'un exer-
cice d'adresse et de galanterie. Souvent c'était trop
peu pour une bataille, mais beaucoup trop pour un
divertissement : c’est le jugement que l’on porta d'un
tournoi donné à Châlons en 1274. Dans un autre
donné à Nuits en Bourgogne, en 1240, soixante-dix
chevaliers étaient péris ou par le fer ou étouffés.
L'église se prononça vivement contre ces jeux .pré-
tendus, et ce fut en vain. En vain il y eut anathême
contre les chevaliers tournoyans, et menace des
peines de l'enfer pour ceux qui mourraient les armes
à la main. On.y fit intervenir la puissance même
des légendes miraculeuses. On lit dans l'historien
Mathieu Pâris, qu’en 1227, un nommé Roger de
Troéni apparut à.son frère, et lui déclara qu'il était
malheureux pour l'éternité dans l’autre monde, parce
qu'il avait trop aimé les tournois. » /@ !/,&æœ mihi.!
quare unquam. tornamenta exercui ; eë ea tanto studio
dilexi! Mais tout était inutile. IL fallut lasmort d'un
roi de France, pour qu'enfin on cessät de se ruiner
et de hasarder sa vie dans les tournois.
:: La chevalerie en elle:même-était une institution
(290 )
respectable; an milieu de la plus profonde ignorance
et des passions les plus effrénées , elle devait n’être
pas tout-à-fait sans mfluence sur l’ordre social. Les
chevaliers mêlaient la religion à la cérémonie de l’ac-
colade; il y avait la veillée des armes, que lon pas-
sait à prier et à étudier les lois de l’ordre où l’on
allait entrer; à se plonger dans un bain et à revêtir
successivement plusieurs robes emblématiques: on
communiait, avant de présenter son talon gauche à
l'éperon d’or, et sa nuque aux trois mystérieux coups
de plat d'épée; cela m'a toujours enchanté, j'en fais
l'aveu. On jurait Dieu et les dames : honneur encore
à la chevalerie ?
Les chevaliers errans dont M. le rapporteur de la
commission semble ne pas douter, je les admets sans
examen, combien qu'il y en ait d’apocryphes, s'ils
ne le sont pas tous; et si le roman célèbre de Cer-
vantès offusque un peu le prisme à travers lequel
J'aime à voir ces jolies extravagances. Les plaisante-
ries délicieuses de l’Arioste (termes de M. le rappor-
teur) lui rendent toute sa clarté, iont son prestige ;
et j'en veux à l'historien trop positif, qui m’arrache
à ces aimables rêveries.
Mais que devenait Ja piété si fervente dont avaient
été animés ces chevaliers, au jour de leur accolade!,
que devenait-elle , lorsqu'un fougueux point d’hon-
neur, où la soif de la vengeance, ou la rapacité, leur
faisait tirer l'épée on brandir la lance? Lorsqu’em-
portés par l'ambition ou une folle gloire, ils pas-
saient lour-à-tour du camp de Jean de Montfort
dans celui de Charles de Blois; de ceuxd’Edouard IIE
(291 )
dans ceux de Philippe de Valois: des couleurs de
Bourgogne à celles d'Armagnac; des drapeaux de
Bedford à ceux de Charles VII? Quand enfin, sur
tous les points de la France, les sombres manoirs
de ces preux, plutôt semblables à l’antre de bêtes
féroces, comme le remarque M. le Rapporteur lui-
même, les voyaient s’élancer sur l'infortuné voyageur,
comme celles-ci sur leur proie.
On aime à distinguer dans cet âge des hommes qui
méritèrent d’en être considérés comme les héros. Les
Mauny, les Beaumanoir, les Duguesclin , les Clisson,
les Dunois, et celui qui fut le dernier, ce chevalier
sans peur et sans reproche, sont à nos yeux la
gloire de la France; nous voyons en eux la rudesse
de leurs temps, mais aussi la générosité , le dévoue-
ment, la valeur qui les auraient rendus illustres chez
quelque nation, dans quelques siècles qu’ils eussent
vécu. Grandes ames, vous êtes à jamais l'honneur de
votre patrie! vous lui obtenez grâce pour tant de
troubles, tant de déraison qui souillent ses annales ;
on s’en repose sur vos exploits, sur vos immenses
services: et l’on n’oserait envier à ces époques de ca-
lamité et de barbarie l'illustre compensation qui, par
vous, lui était réservée. Je n’ai parlé de ces hommes
vénérables que pour opposer leurs gigantesques faits
d'armes dans les tournois aux galantes et puériles
pantémimes dont leurs descendans amusèrent les
dames du siècle romanesque de Louis XIV.
On pourra regarder les croisades comme la par-
tie brillante du moyen âge, mais quelles expéditions,
-grand Dieu ! vous les connaissez, vous savez leurs
(292)
fureurs; vous savez quel vertige insensé dépeupla
pendant presque de deux siècles l'Occident , pour en
précipiter’ les peuples dans les déserts, de PAsie-
Mineure et:de da Syrie ; vous savez ce que produi-
sit et l'incapacité des chefs, et l’immoralité des
guérriers et. la mésintelligence de tous contre la
bravoure , l'mtelligence , la générosité des orien-
aux, stupéfaits de voir dans de si scandaleux. sol-
dats , des soldats de la Foi, des championsdu «chris-
tianisme. Le Tasse a illustré la croisade de Bouillon ;
Walter-Scott celle de Richard-Cœur-de-Lion; Join-
ville nous a, dans la simplicité de son style et de
sespensées,, rendu vénérable et touchant le récit
de celle de S.t-Louis. Si ces expéditions -absurdes
et sanglantes furent, comme je le crois au reste ,
utiles à la civilisation de l’Europe ; si «elles
acheminèrent à Vaffranchissement des peuples, si
elles donnèrent un mouvement favorable au génie,
et quelques inspirations aux poètes de celtemps , 1l
fallait que la civilisation , les-mœurs , l’état social , le
génie et les lumières des XII et XEILe siècles fussent
dans un état bien déplorable.
Le moyen âge s'instruisit : nous lesavons, l'esprit
humain n'est pas stationnaire de sa nature, mais
quels misérables fruits produisit cette instruction mal
reçue et mal dirigée ! L'étude du droit s’introduisit
en France, dit M. le Rapporteur ; quelle révolution
heureuse y t-elle ? Les jugemens de Dieu n’en sub-
sistèrent-ils pas moins jusque bien avant dans le XVI:
siècle ? n’en est-il pas moins vrai que le fougueux
accusé , cité devant le pauvre docteur ès-lois, le pre-
( 295)
nait à pare , et l'appelait en champ clos, s'il
n'était pas content de son arrêt,
Messieurs de la commission supposent que j'ai
douté de la croyance des peuples quis’abandonnaient
aux superstitions que j'ai dites dans ma notice; non,
assurément; ct, sije me suis mal expliqué, je dé-
clare ici que la Foi fut-essentiellement la vertu de nos
pères. Dans des temps où la civilisatiou était si dé-
fectueuse ‘où l’on manquait si universellement de dé-
licatesse et de goût, où la plus honteuse corruption
n'avait pas épargné même un. ordre que ses fonc—
Uons sacrées devaient prémunir contre ses invasions ,
on ne jugeait point l'abus des jouissances des sens
incompatible avec une piété sincère. On croyait. On
passait du crime à un repentir humble ct vrai. Notre
histoire d'Anjou nous en fournit des exemples frap-
pans dans la personne de Foulques Nerra et de
Geoffroi Martel. Après les fureurs qui accompagnè-
rent la prise de Jérusalem ; on vit Godefroi de Bouil-
lon et.ses croisés seconvrir de cendre, gémir, pleurer,
aller pieds nus et la corde au cou au Saint Sépul-
cre ; demander à Dieu le pardon des forfaits dont ils
venaient de se rendre coupables; et l’on eût peut-
être fait pis encore sans la croyance. Quelle imdé-
chiffrable énigme c’est que l'âme humaine !
Il est digne du philosophe , dit M. le Rapporteur ,
d’observer les efforts que firent les Français du moyen
âge, pour se dégager des liens de la.barbarie qui les
pressait de toutes paris. fl le serait au moins autant
de méditer sur cet ingénieux réseau de tyrannie qu’on
appela régime féodal : sur la constante application
(294 )
de la monarchie à en briser les mailles les unes après
les autres, pour son avantage privé ;.et sur l’art avec”
lequel l’église étendit sans relâche ses richesses, ses
privilèges et sa puissance.
Messieurs de la commission auraient désiré que
j'eusse trouvé sur le chevalier de la Tour Landry
quelque chose de plus que ne m'a fourni la Revue
Britannique : Dieu sait si je ne l'aurais pas voulu
moi-même beaucoup plus encore. Fidèle à l’engage-
ment que prend implicitement tout membre d’une
société, de concourir, selon ses moyens, aux travaux
de celte société, je me suis emparé d’un article qui,
peut-être, sans moi, fût resté enfoui dans la poudre
des archives d’un salon de lecture. Je n’avais rien de
mieux à vous offrir sur le chevalier de la Tour, et
je me dis, comme La Fontaine :
… Je l’essaie , un plus savant le fasse.
La commission me conseillait une petite suppres-
sion à un passage du livre du chevalier , où elle avait
vu un peu trop de frauc parler, et qui me fit froncer
le sourcil à moi-même, quand je le lus devant vous.
Cette suppression nécessaire ne prouve pas en faveur
du moyen âge; je l'ai faite.
Je n’ai rien au reste à rétracter; j'aurais fait un
gros livre, que je l’eusse fait dans le même esprit :
puissé-je vous avoir donné de suffisantes raisons de:
ma persévérance.
(295 )
SUR LE COURS
D’ANTIQUATÉ MONUMENTALE ,
Par SN. De Caumont.
—————
L'usage étant de ne faire de rapports que sur les
ouvrages. dont les auteurs sollicitent le jugement de
Ja société, nous satisfaisons avec plaisir au désir ma-
nifesté par M. de Caumont , en rendant un compte
succinct de l’intéressant travail dont il a publié de-
puis peu la première partie (1).
Dans un volume peu étendu , et accompagné d’un
atlas très-important et très-curienx , M. de Caumont
a su rendre simple et facile l'étude des antiquités de
l'ère celtique. Au moyen des nombreux et rares ou-
vrages dont il s’est entouré ; ou qui ont élé mis à sa
disposition, et en ajoutant ses propres recherches, il
a donné sur cette matière le traité le plus complet et
le plus méthodique qu’il ait été possible de concevoir.
Par l'effet d’une classification simple et naturelle,
l'histoire , autant que possible, de tous les genres de
monumens celtiques, vient se présenter à la médita-
tion du lecteur. On doit savoir le plus grand gré à
(4) À Paris, chez Lance, rue Croix-des-Petits Champs, n.o 50.
(2%)
auteur de nous initier sans la moindre difficulté , à
tous les travaux d’un siècle et plus, des érudits qui
l'ont précédé. On trouve dans le cours d’Antiquité
monumentale tout ce qu’il est possible de savoir sur
cette matière si peu étudiée autrefois, mais si inté-
ressante pour l’histoire de notre civilisation’; et âvec
une bonne foi remarquable on y trouve jusqu’à l’a-
vœu de linutilité-des recherches sur certains points
encore obscurs, ce qui doit donner la plus grande
confiance sur le reste des considérations de cet ou-
vrage , dont la suite ne peut être que très-vivement
désirée. Elle sera relative aux antiquités romaines ; et
une dernière partie aura pour obiet l'étude des mo-
numens du moyen âge
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TABLE DES MATIÈRES.
Agriculture.
DE la Bruyère employée dans les vignes comme engrais ,
par M. DE BEAUREGARD. . . . . .. . . . ... ......
Rapport sur la Charrue anglaise , dite de Bayÿley, par
M. De BEAUREGARD. . . . . . . .. A SR PS EMA
Rose Pigmée. . :....:............4.
“Rapport sur les Médailles décernées par la Société peur
_! l'exposition horticulturale du 24 juin 4832. . . . . . ..
Histoire Naturelle.
par M UMEEEr.: ele. enr ere
Description du Trèfle à petite feuille, par M. Drsvaux. .
Du Quartz aventuriné et de ses Dane par M. Desvaux.
Sur la Navigation de la Loire, par M. DerniEN , ingénieur :
en chef du département de Maine et Loire. . . . . . ..
Recherche du Plan principal des Momens par la théorie
Page 21
240
. Description de deux nouvelles espèces du genre Anodonte,
Boieneeà physiques et mathématiques. ;
de Maximis et de Minimis, par M. PENION , pro- .
ERREUR: CE 1 MUC Ra ete - ape tee ju.
Littérature.
s
(*) Le Chevalier de Zatour-Landry et Réflexions sur le
moyen âge, par M. BLorpiEr-LANGLois. . . . . . . ...
M. BcorpiER-LANGLoIs. . ... . ... ... :... . ...
267
‘| Souvenirs Atlantiques , de M. Théodore Pavie , par :
4 Nouvelles Réflexions servant de supplément à celles- ci, F,
par le même.” ..... DORA NT MR .
.….....
| Cours Antiquité oncle, de M. De Caumont. . .
249
*
_[ nn enrERReRE FE D |
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Li nn. Rs
_ ÎLE annees _
à 4.9 et Dernière Livraison du 1°! Volume.
ANGERS,
* DE L'IMPRIMERIE DE L. PAVIE.
1834.
CRE :
CNRS
EEE
TABLE DES MATIÈRES.
Agriculture.
i
RarporT du jai sur l'exposition hoiticulturale des 6, 7.
‘Des différens âges du Goût € en Sn ne par M. Boris
. Lancrois. . . . DE ONE
* Supplément au même HUes par le méme. . :
étiS juin 18305-40450. 102 . Page 197
Nouvelle variété du Camellia , oe de graine par
M. CacHer , Jardinier-Fleuriste. . . . . . 300
. Description d’une nouvelle variété de Poire, ee "M $ à
MILLET , . . . 304
Mémoire sur les Fromens nes en en ou ou on É
pes peut y cultiver, par ‘M. Desvaux . . 302
_i De l’usage_de Chlorure de Sodium , dans le | cas Si Mé- Sr
téorisme ; par M. LAUNAY—JouBERT. 392 ù
Sur les Moyens de guérir les animaux domestiques de la Ë CSS
Météorisation ou Enflure , par M. DE BEAuvoys . : 393
Sur les Moyens d'utiliser les eo . par M. DE BEAU-
| voys - 395
Méthode-Pratique on. ér la Digne, 5x . Dies . 4
Sciences. î
Examen chimique d'une Arragonite servant de marné, , *
trouvée dans le en de la Vienne; par M. P° "ENT
LEBRETON. . . . 2 A 11898 0
Sur la découverte faite ne ML eos ne Terre ; he
à Porcelaine , dans le département de Maine et Loire; 4
! pa M DESVAUS er APR EAU 0 ee 406 |
Lettres et Arts.
Rapport d’une {Commission sur un Tableau‘de tue) |
M. BLAN. . : . / Die NA 410
© Sür quelques ne de lAnoa, de “M. Do , %
LANGLOIS. : . . . NACRE 0. 49370
( 297 )
RAPPORT DU JURY
SUR L'EXPOSITION HORTICULTURALE
des 6,7 et 8 juin 1833.
La Société d'Agriculture, Sciences et Arts d’An-
gers n’a qu'à se louer du résultat de sa «sollici-
tude pour l’encouragement de l’horticuliure, dans
ce département. On voit en effet que les dual
teurs qui, les années précédentes, avaient paru
aux, expositions avec désavantage, prennent dé plus
en plus un rang élevé parmi les horticulteurs.
Si les nouvelles dispositions , prises pour placer
les plantes exposées, ont été peu favorables au coup-
d'œil d'ensemble, au moins la fraicheur et l'éclat
des fleurs ont été ménagés, et le véritable ama-
teur a pu jouir de toute la beauté de Jeur inflo-
rescence.
La, Société avait arrêté quil “sérait donné un
Prix aux plus belles variétés horticulturales | obte-
nues par les cultivateurs, et avait prévenu les CONCUr-
rens que le Jury se transporterait , d’après leur de-
mande, au milieu de leurs jardins, , pour. examiner
21
( 298 )
les objets qui n'étaient pas suscepübles de dépla-
cement. Un seul s’est présenté, M. Guérn ; et, bien
que le Jury n'ait point eu de terme de comparai-
son, cependant fl, a! Œensé que le; nombre des
nouveautés obtenues dans le genre Rosier, par
M. Guérin, méritait une Médaille d’argent, et
que c'était donner en outre un témoignage public
d'encouragement à un horticulteur distingué, connu
depuis long-temps par de très belles espèces de
roses , déjà multipliées dans les jardins des curieux.
Le Jury a remarqué la Âose hybride sondeur, à
pétales violets en dehors et panachés intérieurement;
la Nouvelle, panachée., à pétales rouge-vif, panachés
de. blanc-rosé ; la, Dremont , blanche lavée de jaune
et de rose au centre » ,provenue de la Rose Thé
jaune ; ; la Six-Juin., rose remontanie ; le Triomphe
de. Guérin ; la Cramoisie- T' Re la Belle de
Fournas ; le: Thé-Bisson à odeur d’aniselte : il
phigénie et cplosieurs autres moins importantes ,
touies proyenues de semis que poursuit laborieu-
sement M. Guérin, depuis plus de vingt années.
Pour le Prix relatif aux collections les plus nom-
breuses, et .les plus variées , présentées à l'éxposi-
tion, le Jury n’a point eu à balancer : M. "Cacuer
a mérité tous les suffrages , ayant offert une foule
de végétaux rares et qui n'existent encore que dans
quelques grandes collections de Paris, d’Anglétèrre
ou de da Belgique. ea
a plus, belle plante de MÉre appartenait
encore à M. Cachet, c'était la Sérelitzia imperia-
lis ; ausfi, a- -t-elle HA une Médaille de bronze.
(299 )
MM. Beser, Porarp, Binrauzr ont également
obtenu, chacun , une Médaille de bronze, pour la
beauté de l’ensemble des végétaux qu’ils ont ex-
posés, et la belle. tenue, et belle végétation de
leurs sujets.
M. Rousseau a obtenu une Médaille, d’argent ,
pour ses Cédratiers nouveaux , provenant de ses
semis, et pour les belles plantes de son exposi-
tion. |
M. Gousauzr , pour ses Roses Thé- Isidore, et
Noisette-Goubault, a eu un Accessit.
MM. Auem pe NERBONNE , Ozrivier |, Oxxivier
(Gaspard), ont mérité chacun une mention hono-
rable , pour les objets qu’ils ont mis en exposition.
Les Membres du Jury :
BIZARD, BOURGOUIN , DELAAGE,
DESVAUX, MILLET- QUE
rat
e db au [+6 Dgsvaux , «Rapporteur:
( 300 )
NOUVELLE
VARIÉTÉ DE CAMELLIA,
Obtenue de graine par M. Cacrer, Jardinier-Fleuriste ,
Membre de la Société d'Agriculture , Sciences et Arts
d'Angers.
CAMELLIA APPOLLINA.
Fleur grande (8 centimètres de diamètre), à pétales
d’un rose tendre uniforme , arrondis et entiers :
ceux du centre comme tourmentés ou chiffonnés,
sans mélanges d’étamines. Ecailles calicinales d’un
vert tendre, légèrement velues. Feuilles larges,
comme cordiformes.
Cette variété , remarquable par la beauté de sa
fleur , ainsi que par le buisson vigoureux et fourni
qui la porte, se rapproche, par sa couleur seule-
ment, du Camellia Rosæ-flora, quoique d’un rose
plus tendre. En outre, ses pétales entiers, amsi
que la forme de sa fleur, qui est à peu prés celle
du Camellia conchiflora , sufliront pour l'en faire
distinguer. En un mot, c’est une belle espèce jar-
dinière que les amateurs ne manqueront pas de
( 301 )
se procurer , et qui vient augmenter la série des
variétés de ce genre, si remarquable par son feuil-
lage et ses fleurs, et dont notre collègue possède
plus de cent cinquante modifications, au nombre
desquelles on peut ranger le Camellia reticulata ,
qui a fleuri pour la première fois, vers la mi-mars
dernière , ainsi qu’une autre variété qu’a obtenue
M. Cachet de ses semis : le Camellia Punicæ-flora.
DESCRIPTION
D'UNE NOUVELLE VARIÉTÉ DE POIRE ,
( Planche xiv. )
Dar A. Millet.
Pome Monceau : fruit gros, allongé, de 7 cen-
timétres de diamètre (2 pouces 6 à 7 lignes) et
9 centimètres de hauteur (3 pouces 4 à 5 lignes),
ventru, irrégulier et comme bosselé dans sa pé-
riphérie ; peau d’un beau vert tendre; ‘qui passe
au jaune-citron, à l’époque de la maturité, qui
arrive ordinairement en février et mars. On remarque
aussi quelques marbrures d’un gris roussâtre, et
quelques points légers de la même couleur. Œil
moyen, légèrement enfoncé. Queue courte (6.à 7
lignes ), placée quelquefois sur le côté. Le bois,
( 302 )
les boutons et les feuilles de cette nouvelle variété
ont les plus grands rapports avec le bois , les bou-
tons et les feuilles du Doyenné-Blanc où poire de
neige.
Chäir blañche ) nOù pierreuse, fondanté, rém-
plie d’une eau trés légèrement acérbe et néan-
moins fort agréable ; en ün mot, c’est un fruit
excellent’ bo Ele en BdtrE par son époque
tardive de maturité.
Celte nouvelle variété de poire, provenue d’un
pépin de Doÿenné-blanc,, à été obtenue par M. Mo-
riceau , jardinier à Angers. Depuis deux années
qu’elle donne des fruits, elle a pu étre parfaite-
ment jugée : aussi les pépiniéristes d'Angers l’ont-ils
multipliée de manière à pouvoir répondre conve-
nablement aux demandes qui ne peuvent manquer de
leur être faites par les amateutS de beaux et bons
fruits.
MÉMOIRE SUR LES FROMENS
Cultivés (en France ow qu'onpeut y cultiver ; avec: des
observations sur..lés avantages oules inconyéniens
particuliers à chaque. “a :
eo du Jardin de Botanique: d'Angers.
r :
DRE TPS A CUS ". Î
Ainsi que par Je passé, il n’est plus permis de
croire que toute la science relative aux végétaux se
( 303 )
réduit à s'arrêter à l'étude des especes , telles qu’elles
sont fixées par Les lois adoptées par les botanistes.
L'importance des varietés jet surtout, des variétés
objet des, soins des, agriculteurs, est toute autre
pour.la société, que celle qui se rattache à une
Algue, à un Lichen, ou; à, une, Mousse. venant
grossir nos catalogues systématiques. Il ;est certain
que depuis que nous cherchons.à. étudier les plantes
dans. leurs rapports avec les intérêts sociaux, tout
nous prouve que les: variétés, obtenues par les ef-
forts soutenus de l’industrie agricole, doivent être
étudiées ayec plus de soin.,.et appréciées ayee plus
d’exactitude qu’on ne. l’a fait jusqu'à. çe. jour:
Lorsqu'il est question d’une espèce végétale qui;
telle qu'est le froment, sert. de base à la nourriture
d’une, population, d’un chiffre trés. élevé. il, est
permis. d'en parler ayec quelque détail ; et c'est
ce..qui nous a engagagé . dans tune exposition un
peu .plus développée peut-être!, que ne: semblait
l'exiger le simple titre de Mémoire sur les Fr
mens. :
La préférence qu'a-obtenue le froment en Eur ape: ;
dans une gxande partie de l'Asie ; dans une portion
de. l'Afrique ; dans l'Amérique du Nord ,et, dans
beaucoup de points de l’Océanie, bien que,le pro-
duit des communications avec l’Europe , n’est, point
la suite d’une opiniâtre ou aveugle prédilection.
En effet, qu'on veuille comparer nos bonnes va-
riétés de foret avec les variétés de riz’ de l'A-
sie, que nous avons signalées dans un travail spécial ; à
qu’on l’oppose aux trente variétés et plus de mais de
( 304 )
PAmérique , que nous avons cultivées ; qu’on l’étudie
comparativement avec tous les sorgho dont se nour-
rissent les nègres, en Afrique ; ou enfin qu’on pré-
sente toute autre espèce végétale fournissant une fa-
rine nutritive , et l’on verra que, toute prévention
mise de côté, aucune de ces espèces ne possède les
qualités salubres, nutritives et agréables, au même
point que le froment.
Parvenus à réunir plus de variétés de froment que
personne ne l'avait fait probablement jusqu’à ce jour,
notre travail pourra peut“être sé trouver de quelque
intérêt, puisque nous avons pu comparer jusqu’à 175
modifications de! cette céréale , provenant dé toutes
les régions de la terre où le froment s’est répandu.
Par ce moyen, il nous a été facile de prendre une
idée assez complète de tout ce qui a rapport aux
divers fromens, et d'offrir une masse de matériaux
qui puisse servir de base à des travaux plus com-
plets, si l’on veut donner suite à ceux que nous of-
frons en ce moment. C’est dans l’intention: de‘les
voir compléter nos recherches, que nous avons dis-
tribuë différentes collections de froment, en rapport
de nomenclature avec ce Mémoire (1) , afin de servir
de point de comparaison avec ce que nous n’aurions
pu observer.
Notre travail se trouvera naturellement partagé
(4) Afin de parvenir à ce, but , j'ai envoyé ‘une collection des es-
pèces que j'ai pu conserver et multiplier: à la Société centrale d’A-
griculture, à l'Ecole normale de Grignon, et au Jardin des Plantes
de” Paris.
( 305)
en diverses parties, qui toutes suppléeront à ce qu’il
serait impossible de trouver dans les ouvrages où il est
traité jusqu’à ce jour du froment. Nous exposerons :
1.° des recherches d’étymologie, au moins curieuses
et nouvelles, si elles ne sont pas utiles à l’agri-
culture ; 2.° le précis des principaux travaux faits
jusqu’à ce jour, sur les fromens , afin de rendre à
chacun la justice qui lui est due, et qu’on puisse
reconnaître la portion nouvelle qui peut nous être
attribuée ; 3.° des recherches sur l’espèce considé-
rée par rapport au froment ; 4° le tableau métho-
dique des modifications que nous avons reconnues ,
et dans lequel il est possible de classer toutes celles
qu'on pourra observer ; 5.° des remarques sur les
modifications de froment les plus importantes , et
par conséquent les plus utiles à connaître ; 6.° enfin
des observations sur les fromens blancs.
&. 1. Recherches sur le nom de Froment.
Le nom imposé au froment par les Romains était
celui de Triticum , conservé par les botanistes; mais
ce mot s’appliquait plutôt à la plante qu’au grain,
lequel recevait divers noms selon ses variétés, tels
que far, ador, siligo , etc. À raison de ce que pour
avoir le grain on frappait , on battait, on broyait
la paille, de éritus ils firent triticum , ou le battu;
tandis que le grain prenait le nom de froment, fru-
mentum. Ce dernier nom qui tient à la plus haute
antiquité, existait sous une forme plus simple chez
( 306 )
les Hébreux; ear c’est Le: bar des anciens Orientaux:
dans les langues antiques de l'Oriént, bar qui dési-
gna notre froment avait d’abord signifié nourriture,
et est probablement la racine ‘du bromos des Grecs.
La portion de ces Scytes excurseurs , dans la haute
antiquité , qui se propagea de proche en proche jus-
que dans la Gaule, ou la Celtique, y apporta cette
racine bar, que les Gaulois appliquérent laux gâ-
teaux ou pains sans levain, dont les habitans se nour-
rissaient habituellement.
Le nom de bière ; brasserie , et tous leurs dérivés,
ont bar pour générateur. On a dit bar ou bière pour
la liqueur de froment fermenié, :qui était le hracium
brasgia de la basse latinité, et plus tard hrace, brage.
Para, ou lait de beurre , et barate, instrument à
faire le beurre, ont la même origine : le beurre. était
une pâte que dans l’antiquité on assimila à la pâte
des fromens, qu’on mangeait alors sous cette forme et
non sous la forme des pains actuels (1).
Dans la langue osque , ou des Romains primitifs,
qui étaient Scytes aussi d’après nous, la prononcia-
tion se trouva plus rude, et le bara fut changé en
far , qui s’est conservé jusqu’à nos jours, pour dé-
signer le froment épéautre et le froment locular:
Le pyros (‘puros ) des Grecs, autre ramification
des Scytes antiques , ne nous semble que la modi-
fication de la même racine ; les labiales Bet P sé
(1) La polenta des Italiens, les gaudes du Midi, les graux de
l’ouest de:la Franee!, sont un reste de:cet usage,
( 307 )
changeant très souvent , et les voyelles. a ; e, à
n’éprouvant pas moins de changemens entr’elles,
soit parmi le vulgaire, soit dans les idiômes ac-
tuels mêmes. La désinence a , celle de os ( pyr-0s),
ne peut empêcher de reconnaître une racine dans
les langues : ces sortes de terminaisons n'étant que
des euphonies locales.
Du mot fur, provenant de bar , les ialiens firent
plus tard fourmento, et les Français fowrment, frou-
ment, et enfin froment. Cette racine secondaire far
fut la souche de tous les noms qui se rattachent à
fruit , sorti de fructus.
Les Bas-Bretons, derniers vestiges des Celtes de
l'antique Gaule , ont dit ffeur pour gerbe de froment
ou de tout autre blé; et c’est ce mot qui est, d’après
nous, la véritable transition entre le far des Romains
etle ffurment des Bas-Bretons, devenu froment pour
le reste des Français. Maïs c’est assez nous arrêter
sur des recherches de cette nature, qu'il serait très
possible d’étendre, sans même répéter ce qui a été
dit ‘par beaucoup d’autres avec plus d’assurance
que de jugement.
$. 2. Précis des principaux travaux faits pour la
distinction des Fromens.
Les notions répandues dans Théophraste, Pline,
et surtout dans Columelle , nous prouvent que les
anciens distinguaient au moins une douzaine de fro-
mens. Mais ils sont désignés si superficiellement,
( 308 )
et pourraient être si difficilement rapportés à l’une
ou l’autre de nos variétés actuelles , qu’on ne sau-
rait en résultat rien préciser à leur égard.
Dans ce qui suivra, nous ne parlerons point en
particulier des sept espèces de fromens cultivés,
admises par Linné: bien connues de tous les bo-
tanistes , et adoptées presque exclusivement par eux
tous jusqu’à ce jour. Mais il est positif que les recher-
ches véritablement exactes sur les modifications de
fromens cultivés surtout en France, ne datent que
de 1784 , et furent faites par le savant agronome
Tessier. Jusqu'à ce moment, ces recherches, éta-
blies alors avec beaucoup de soin, ont servi de
base à presque tout ce qu’on a dit des fromens en
France ; ou même elles ont été copiées sans excep-
tion par ceux qui ont parlé de ce genre de.céréales,
sous les rapports agricoles. Le savant auteur de ces
recherches, en reproduisant en 1822 son travail,
dans le Cours complet d'Agriculture (16 vol. in-8.°),
ne lui a donné aucune autre extension ; ne lui a
fait éprouver aucun changement , malgré l'intervalle
de trente-huit années. D’après cela, nous prendrons
comme terme de comparaison et point de départ,
ce travail important qui avait un mérite bien es-
sentiel , celui d’avoir groupé à peu près toutes
les espèces agricoles de froment connues alors
dans les collections faites de ce genre de végé-
taux.
Il ne faut pas s’imaginer que les espèces ou races
de froment reconnues par le savant Tessier, eussent
toutes le même degré d'importance de caractères de
( 309 )
classification ; en effet, au milieu de la série qu'il
a établie, et dont la plus grande partie ne se com-
pose encore pour les botanistes que de variétés,
on trouve des espèces botaniques , telles que le
n.° 23, qui est le Triticum durum de Desfontaines;
le Triticum polonicum de Linné , qui forme le n.° 22.
Le Triticum compositum du même savant Linné,
est le n.° 20 des espèces de M. Tessier. Les n.° 27,
où Triticum Spelta ; 28, ou Triticum Far de Mazzu-
cato ; et le n.° 29, ou Triticum monococcum ; sont
encore des espèces reconnues par la plupart des
auteurs. Mais il reste aprés cela vingt-quatre mo-
difications qui se trouvent placées sur la même ligne,
et qui ne sont cependant , suivant beaucoup de bo-
tanistes, que des variétés d’une seule espéce : le
© Triticum sativum de Lamarque , ou Triticum vulqare
de Villars. D’après d’autres botanistes, elles doivent
se ranger dans deux espèces particulières : le Triti-
cum hybernum , où les fromens sans barbes ; et le
Triticum æstivum, ou les fromens pourvus de barbes.
Lorsque l’empirisme dominera moins la science,
obligés de ne reconnaître qu’un seul froment , la né-
cessité nous forcera cependant d'admettre un certain
nombre de races principales ; et, au lieu d’être retenu,
comme nous-même l'avons été, on reconnaitra vingt
souches secondaires, au lieu de dix que nous avons
proposées, et dans lesquelles seront distribuées toutes
les modifications qu’il sera nécessaire d'indiquer.
Voir le Tableau ci-joint.
( 310 )
En donnant pourun des caractères ,:fige pleine ,
à certaines espèces , il faut entendre que c’est seu-
lement le sommet du.chaume, ou tige , qui est
rempli d’une moelle blanche : ce qui donne à ces
espèces plus de force pour résister! aux vents et aux
orages. |
Les cinquante-deux modifications , en tout, indi-
quées par Tessier, tant comme variétés du n.o 1.
au n.e 29, que comme sous-variétés, ont toutes été
examinées par lui, et la plupart ont été cultivées
en grand'et comparativement; mais l’étude faite de
ces espèces agricoles démontrera qu’il y a un peu
de confusion dans la classification de ce savant agro-
nome : les caractères distinctifs n'ayant pas été tous
établis neitement, etes espèces les mieux carac-
térisées ayant été mises sur la même ligne. que des
modifications du -deuxième. et. du troisième ordre.
Ce tableau des espèces reconnues par M. Tessier,
est bien loin d'offrir le cadre de toutes les. varié-
tés notables qui nous ont passé sous les yeux.,et
n’est pas en, harmonie :ayec la science du, botaniste ;
aussi, .des observateurs ayant enlreyu que ce ira-
vail ne ,satisfaisait pas aux besoins de la science,
et, croyant-en même temps que les sepi espéces adop-
tées. par Linné (1), ne pouvaient renfermer toutes les
modificaiions connues, ont établi plusieurs espôces,
dont,nous donnerons successivement les indications.
41
(4) Triticum æstioum, hybernum , compositum, turgidum,
polonicum , Spelta, et monococum.
(3H )
Le professeur espagnol Lagasca , dans un opus-
cule qui ne nous est pas parvenu ; Hoste, dans
ses quatre volumes (1#-fol. ) des Graminées d’Al-
lemagne ; Barelle (1) et: Mazzucato (2), dans leurs
monographies des Fromens cultivés, et Seringe (3),
actuellement professeur de ‘botanique à Lyon , ont
donné des observations qui-ont plus ou moins ajouté
au travail qui tendrait à mettre en accord la bota-
nique avec l’agriculture, sans que l’opinion se soit
encore prononcée pour adopter les uns ou les autres
de ces travaux.
Barelle, outre les sept espèces linnéennes , avait
établi les Triticum candidissimum , cœrulescens ,
creticum et farrum ; et dans quatre planches à figures
médiocres , avait fait connaître toutes les espèces
dont il avait traité. Mazzucato reprenant, en 1812,
son propre travail de 1807 , publié dans les Ephé-
_mérides de Brugnatelli; et faisant usage de ceux
de ses compatriotes, Barelle et Arduini , dont le
dernier avait réuni un grand nombre de variétés
dans le Jardin botanique de Padoue; Mazzucato
parvint à donner une dissertation qui mérite de
fixer l'attention de ceux qui veulent s'occuper de
l'étude des Fromens , parce qu'il semble se rap-
procher plus que tout autre des besoins de la science,
bien qu’il soit imparfait sous plusieurs rapports. Afin
(4) Monographia frumentorum.
(2) Triticorum definitiones. 1812.
(3) Mélanges de Botanique, À vol. Genève.
(312)
qu’on puisse en juger; nous allons présenter aussi,
sous forme de tableau, les espéces adoptées par ce
Botanisté, ce qui en simplifiera l'exposition, -en
même temps que le nom abrégé de chaque auteur
indiquera , à la fin du nom spécifique, celui qui
en a établi la distinction: Ghacune des.18 espèces
renferme , dans le travail de Mazzucato ; plus ou
moins de variétés.
Des espèces de Froment d'aprés Mazzucaro.
(315)
rubrum.
| 4 æsnivum. L. ... : ... À trimestre.
| id. rubrum.
| 2 canninissimum. Bar. . aristis nigris.
| aristis coarctalis.
aristis nigricantibus.
villosum , spicé pendulé.
id. aristis nigricantibus.
id. spicä albd.
3 COŒERULEUM. Mar.
aristis nigricantibus.
Lamarkeum.
compositum.
cæruleum.
4 Barerxe. Maz . . , .
o Lawarkeum. Maz. .
6 Harrerranum. Maz.
aristis nigris.
7 cowrosiruw. L. . : : ? spicé glabrd.
cœrulescens.
8 Tezvesium. Maz . . . :aristis nigricantibus.
| spicä albé.
À aristis migris.
10 nirsurun. Ard. |
9 rureinum. L. .'...
A grain sortant des balles ; balles
TT n, RER D EE OS
aristées
j | velues. glabres.
spicé rubré.
41 avsernums L: ::. : : À! granis albis.
: érimestre!rubrd.
| spicé albd.
| spicd aristatä.
glabres.
12 Persooniuw. Maz. . .
sans arêtes.
15 manerri. Maz.
velues. 14 Wircognowium. Maz.
= 45 rarrom: Bar. -. .—muticum: ——
22.046 Srerras: EL: 1h susuibne-ss ist (EN
. . » 17 monococcux. L.
(4
aristées,
ans les ball. ; ball.
.. . . 48 Dunaveuium. Maz. (1)
(2) Les abréviations qui suivent les noms des fromens sont les premiéres lettres
es noms de LINNÉ , BARELLE, MAZZUCATO, ARDUINI. 22
(314)
En supposant que ce travail fût de nature à être
adopté et par les botanistes et par les agriculteurs,
les - quarante - trois modifications étudiées par le
professeur italien, sont bien loin de représenter
ioutes celles qu’on peut observer, et même les plus
importantes de celles existant seulement en France.
Sous un autre point de vue, ce travail repose sur
des bases peu rationnelles : des choses qui s’y trou-
vent étant peu convenablement rapprochées ou éloi-
gnées. Dans un premier travail , Mazzucato avait
du son Triticum Barelle par le nom de omen-
tosum: le Triticum polonicum est icule Triticum
Lamarkeum ; V'alexandrinum a été changé en Hal-
lerianum ;.\e creticum en Persoonium ; l'egyptiacum
en Manetti, et l’anglicum en Haldeno ee
Le naturaliste suisse, Seringe , dans son travail
sur les Fromens:, s’est peu écarté de la marche
suivie par les botanistes actuels. Sous le nom de
triticum sativum , il réunit les fromens sans barbe
et avec barbe, ouifriticum hybernum ei æstivum de
Linné ; il adopte: le ériticum. durum de:M: Desfon-
taines ; ‘il change le érificum farrum de Barrelle en
triticum amyleum. Au nombre des huit espèces qu a!
reconnaît (1) se trouve une modification donnée
comme nouvelle et comme espèce botanique : son
Triticum venulosum , venant d'Egypte.
(1) Triticum sativum , turgidum , durum; polonicum, Spelta;
amyleum , monococcum et venulosum. Ce dernier ne nous est,
pas connu avec certitude, mais paraît être cependant une de nos
variétés de froment amidonnier.
(315)
Le travail de Seringe a le mérite d’avoir classé
un assez grand nombre de variétés, dans les huit
espèces qu'il reconnaît
Tel est l’état actuel de la science ou agricole oÿ
botanique, relativement au froment. Voyons s’il n’est
pas possible d’arriver à quelque chose de plus com-
plet pour la botanique et l’agriculture.
$. 3. Recherches sur l'espèce du genre Froment.
De l’exposé qui vient d’être fait, on voit qu'il n’y
a presque aucun accord entre l’agronome et le bota-
niste, lorsqu'ils traitent du froment comme espèce,
et que le premier regarde presque toujours comme
espèce ce que le botaniste ne reconnaît que comme
variété ou même sous-variété : aussi ; suivant qu’on
envisage la chose, le nombre des espèces adoptées
est:ou trop vestreint.ou trop grand. Il est trop grand,
dès que nous pourrons prouver que;le friticum com-
positum ,;: ou blé de miracle , n’est pas une ‘espèce
fixe, ou est composée: de plusieurs espèces ; que le
tmticum durum vient se joindre au ériticum : æstivoum,
ou froment barbu , par l'intermédiaire de plusieurs
variétés. Cependant ; ;si la botanique doit. être! mise
en laccord! avec, l’agronomie , il est, indispensable,
d'adopter dans les'fromens , des bases de classifica-
tion autres que celles! employées jusqu'icr par Les.
deux:sciences. Si nous ne pouvons conserver iouies
les:-espèces agricoles comme.espèces., si-les espèces:
liñnnéennes, ni celles de:Seringe ;«né| satisfont, au
bésoin. de l'agriculture. ni dela botanique ; d’un
(316)
autre côté, nous ne pouvons recevoir toutes Îles
espèces nominales du botaniste italien, Mazzucaio.
: Il n’y a que ceux qui ont abordé sans préoccu-
pation l'étude des végétaux, qui peuvent s’aperce-
voir. combien la nature se joue de nos classifications ;
de nos doctorales décisions ; qui entrevoient. toute
l'insuffisance de nos recherches pour fixer la ligne
de démarcation entre l’espèce et les variétés. Ce-
pendant il est indispensable d’établir des groupes ,
afin de faciliter les travaux et de guider dans l’é-
tude.
Lorsqu'on réfléchira que l’adoption dans les cul-
tures de ‘telle ou telle variété, espèce , ou modifi-
cation de froment, peut augmenter ou diminuer de
plusieurs millions, pour chaque année, la valeur
des récoltes en France ; on verra qu’iln’est point
indifférent de pouvoir s'entendre sur le signalement
des fromens soumis à la culture ; qu’il n’est point
indifférent de poser des ‘bases rationnelles pour
en classer toutes les variétés agricoles. C’esten ce
sens que nous croyons d’une haute importance tout
travail qui tendra ‘à éclaircir la confusion existant
encore sur cette matière.
Si l’objet du botaniste est de fournir les moyens
de: classification pour chaque chose, celuide:l’a-
griculteur doit être d'apprécier chaque production
d’après les temps, les lieux, les'circonstances. Telle
modification de froment est plus propre à telou tel
terrain , à telle exposition , etc. ; mais pour parvenir
à ce but, il faut pouvoir s'entendre, et jusqu’à
présent la chose est devenue comme impossible : dix
(317)
fromens très différens nous sont arrivés sous le même
nom, etplus souvent encore des fromens complétement
semblables ont recu des noms très variés. Ne serait-
il pas possible de ramener à des noms convenus ou
déjà adoptés , cette nomenclature interminable,
que l’arbitraire , faute de moyens rationnels connus,
a mise en usage? Pour cela il faut s’occuper sérieu-
sement de la théorie de l’espèce dans les céréales.
Il s'élève deux questions : Les modifications obser-
vées par les agriculteurs sont-elles des espèces ?
toutes Les espèces établies par les botanistes doivent-
elles être considérées comme telles?
Nous ne pourrons être de l’opinion du savant
Tessier, et quelle que soit l'autorité d’un nom si re-
commandable dans l’agronomie , vingt années d’ex-
périences faites sur l'espèce en botanique et en agri-
culture, nous ont forcé d’avoir une persuasion
différente de la sienne. M. Tessier établit la constance
des espèces agricoles, et nous, ici, nous venons pro-
fesser une opinion toute contraire. Si l’agronome
francais a voulu dire qu’une espèce cultivée en grand,
dans le même lieu et dans les mêmes circonstances,
n’a pas totalement changé pendant une succéssion
de trente années de culture, cela peut être vrai,
vu d’une manière générale, mais non d’une ma-
mère absolue.Dans ce cas, il faut seulement dire que
les modifications de formes qui ont eu lieu, n’ont pas
été observées , et qu’elles n'étaient pas en assez grand’
nombre pour avoir été remarquées dans une grande
culture. Nos expériences, au surplus, sont posilives
et d’un résultat tout opposé. Nous dirons. même-que
(318)
quelque soin qu’on, apporte dans le choix des se-
mences employées en grand , on verra toujours naître
quelques épis barbus dans les fromens sans barbe et
réciproquement (1) ; des fromens glabres dans les
fromens velus et réciproquement encore ; des fromens
blanchâtres dans des fromens rouges ; des épis serrés
qu.milieu d’une espèce à épis allongés et. épilets
éloignés : toutes différences qui n’ont pu nous échap-
per. Mais il faut dire aussi que plusieurs des dis-
semblances formant des variétés , ne prennent un
caractère trés prononcé que dans quelques individus
de ces premières modifications , tandis que d’autres
retournent à la souche dont elles étaient sorties.
Ainsi les espèces, surtout en agriculture, ne sont
nullement fixes, et nous avons l'expérience pour
nous, et bien plus celle de diriger à volonté la
nature, pour former telle ou telle variété, suivant les
moyens que l’étude de chaque genre de végétal four-
nit pour cela. Nous avons pu même établir quelques
règles pour arriver à nous former une théorie de for-
mation des espèces : 1.° les modifications ou variétés,
dans le plus grand nombre des cas, n’ont pas lieu
brusquement, mais par des nuances souvent très
légères et qui échappent aux observations superfi-
(4) Quelquefois les fromens sans barbe ne la reprennent que gra—
duellement , ainsi que l’a observé un agronome recommandable ,
M. Bujault de Melle; et Yon'voit la partie supérieure prendre seule
des barbes , ou bien. la totalité de l'épi a des: barbes d’une moyenne
longueur ; d’autres fois un épi très barbu se montre au milieu d’épis
sans barbe , bien que toutes les précautions pour éviter l'erreur à
cet! égard! aient été prises:
(319)
cielles ; 2.°les dispositions à la variation existent dans
l’organisation de la graine, et sont entièrement in-
dépendantes du sol , de l’exposition, etc. ; 8.° l’ac-
tion continue d’un genre d'exposition, au moyen
duquel un végétal est fortement frappé de l’action
de la lumière, ou placé dans des conditions qui ne
lui sont pas ordinaires, lui imprime des propriétés
nouvelles, qui se transmettent et deviennent constitu-
tives pour un certain espace de temps; 4.° une espèce
ou variété varie d’autant moins qu’on l’a cultivée de-
puis long-temps , et qu’on a eu soin de toujours la
renouveler avec les graines des individus ayant tous
les caractères des modifications que l’on veut pro-
pager.
Ce n’est pas à notre témoignage que nous en ap-
pelons pour faire reconnaître ces vérités, c’est à la
nature , c’est à l'expérience , lorsqu'on apportera
une attention convenable dans les observations. Si,
avec quelques variétés réunies de haricots, nous
sommes parvenus à obtenir plus d’un millier de va-
riétés bien distinctes, sans compter le grand nombre
de celles que nous avons été obligé de négliger,
nous avons la certitude qu’en appliquant les mêmes
soins aux fromens , on parviendrait à suivre la dégé-
nérescence d’une modification à une autre, ou à créer
de nouvelles modifications, comme l’expérience nous
l'a prouvé pour tous les végétaux que nous avons
étudiés sous ce point de vue.
En convenant avec nous que les fromens cultivés
ne sont pas des espèces telles que les naturalistes
caractérisent ce genre d’abstraction des êtres, on
(320)
demandera peut-être quelle opinion on doit se faire
des espèces annuelles de froment reconnues par les
botanistes? Nous; allons répondre à cette question,
qui est peut-être moins importante en réalité, qu’à
raison des préjugés qu’attaquera la solution que nous
allons en donner.
C’est une question qui a souvent été agitée, de
savoir si le froment que nous cultivons se trouvait
spontanément dans quelque partie de la terre. Notre
opinion particuliére est de penser que cela est impos-
sible, pas plus que de trouver une prune de reine-
claude ou une poire de bon-chrétien dans les forêts.
Le voyageur Heintzelmann dit bien avoir trouvé le
triticum æstioum de Linné , ou froment barbu, dans
les campagnes incultes des Baschirs, dans la partie
montueuse de la Tauride, entre Carassubazare et
Allmetschet ; mais qui nous dira , si le fait est réel s
que ce ne soit pas les vestiges des communications
de la Grèce ancienne avec la Tauride, que l’on sait
avoir été fréquentes? Nous croyons même que le
froment est une espèce créée par l’homme, et sor-
tie d’une race agreste, et qu’elle est aussi éloi-
gnée de son type que la brebis l’est du mouflon ou
de l’argali dont elle sort. S'il se rencontre une es-
pèce sauvage, ayant des caractères analogues au
triticum Spelta , ce sera probablement plutôt d’elle
que du ériticum œstivum , que seront sorties nos
espèces actuelles. L’Epéautre ( 7rit. Spelta), est en
effet plus rustique que les autres espèces , et se rap-
proche beaucoup de quelque modification du froment
rempant, dont on a fait aussi diverses espèces nomi-
nales.
(321)
Le professeur de botanique Latapie ; à Bordeaux ,
avançait , d’après des expériences qu'il aurait faites,
que le froment provenait de l’œgylops ovata, qui est
annuel, et si commun en Sicile qu’on en vend les épis
grillés pour les manger, comme ailleurs on mange le
mais grillé. Mais les travaux de Latapie, dont les
résultats ne répugneraient point à notre croyance,
d’après ceux aussi extraordinaires que nous avons
obtenus dans d’autres genres, ne sont précisés dans
aucun ouvrage particulier, et auraient mérité d’être
connus ; nous ne pourrons donc les apporter ici que
comme présomption favorable , pour faire penser
que les espèces du froment actuel sont dues à l’in-
dustrie de l’homme.
La différence qu’on remarque entre tous les fro-
mens n’est très souvent que la différence de variété
à variété , reconnue pour d’autres végétaux. Aussi la
propriété de quitter ou de ne pas quitter facilement
les balles, n'est-elle pas de l'importance qu’on
pourrait le croire au premier aperçu , en voyant
les orges présenter cette même particularité pour ce
qu’on nomme les orges mondés , et ainsi que le font
encore quelques avoines. Les barbes persistantes ou
non, ou manquant entièrement, ne sont que des
modifications de variété. La présence ou l’absence
de poils sur les glumes est dans le même cas. Les
épis rameux ou simples ; la forme , la couleur du
grain; celles des glumes , n’offrent toujours que des
caractères de variété. La couleur, glauque ou bleuâtre
des feuilles n’est qu’un caractère de variété, ainsi
que nous l’avons prouvé il y a très, long-temps.
(32)
S'il y avait une espèce à reconnaître dans les 70—
mens, ce serait peut-être le 7riticum monococcum ;
mais la couleur très verte de la feuille cesse d’être
caractéristique lorsqu'il est en maturité , et si on le
compare surtout à quelques variétés de froment qui
sont voisines de celle-ci. Nous conclurons de là,
malgré l’autorité des botanistes, qu’il n’y a qu’une
seule espèce dans tous les fromens.
Si l’on voulait réfléchir comment ont pu se mo-
difier graduellement les fromens, nous prendrions
pour point de départ le plus naturel, l’Epéauire ( Tri-
ticum Spelta), que Michaux père paraît avoir trouvé
sauvage en Perse , sur une montagne, à quatre
journées au nord de Hamadan. De cette espéce il
y à un passage au Froment plat, par l'intermédiaire
du Froment amidonnier ; du froment plat aux autres
modifications , il est plusieurs points de contact, ou
des passages très naturels , que nous prouverions
d’une manière irrécusable , si nous avions entrepris
d'établir la filiation de toutes les modifications exis-
tantes. Le Froment de miracle(Triticum ceompositum),
n’est qu’un Triticum turgidum rameux; et le froment
renflé, lorsqu'il perd ses poils, ne peut ètre séparé
du froment plat.
Le Froment de Pologne est l'espèce ou race qui
nous a offert le plus de difficultés pour saisir ses
points de contact avec les autres fromens ; et si nous
Re prenions pas un soin particulier pour faire Îles
semis et les récoltes de tous nos objets d'expérience ,
il nous eût été impossible de constater avec certitude
ces rapports. Nous n'avons possédé primitivement que
(523 (
l'espèce à longs épis et longue barbe : elle nous a
fourni des individus à épis courts et plus pressés ,
qui, serrés eux-mêmes, nous ont donné une variété à
épi très court d’où est sortie une variété sans barbes.
La variété à barbes courtes a fourni une variété à
barbes noires, et celle-ci a enfin donné un froment
à glumes, à la vérité un peu plus longues que le
froment dur ( Triticum durum , Desf. ), mais ne pou-
vant être séparé du froment amidonnier , à barbes
noires , si son grain ne se füt pas dégagé très facile-
ment de la balle.
Ce sont de semblables observations qui , répétées
sur une longue série de végétaux, ont seules pu nous
donner des idées sur l’espèce en histoire naturelle,
autre qu’on en a ordinairement. C’est ce qui ne
nous persuade pas seulement , mais nous prouve
sans aucun doute , qu’il n'y a qu’une seule espèce
de froment dans le froment cultivé.
Si Les espèces de froment des agriculteurs ; si celles
des botanistes , d’après nos réflexions précédentes ,
ne sont que des variétés, on demandera comment
nous pourrons faire des groupemens. Nous agirons
comme les botanistes eux-mêmes dans quelques cas.
Par exemple, la nature n’a fait que trois classes de
végétaux, et la science a distribué la deuxième en
trois classes et la dernière en onze autres classes.
Nous formerons donc des groupes de variétés, sous
le nom d’espèces ; et nous y rattacherons des variétés,
des sous-variétés de deuxième et de troisième ordre.
Les botanistes nous accorderont sans peine que les
espèces de froment des agriculteurs ne sont que des
( 324 )
variétés, mais ils voudront maintenir les espèces adop-
tées dans leurs ouvrages. Cependant déjà ils ont cédé
pour les Triticum hybernum et œstioum , ou froment
barbu et non barbu, qu’ils ont réunis dans une seule
espèce. Le Triticum compositum n’est certainement
qu'une monstruosité obtenue par la culture, et qui
dégénère assez facilement. Le Triticum durum se
perd au milieu de certaines variétés du Triticum
æstivum ou barbu , ayant l’épi un peu comprimé :
notre Triticum compressum. Le Triticum turgidum
n’est vraiment qu’une variété bien facile à réunir au
Triticum œstivum, lorsque ses glumes passent à
l’état glabre : comme cela est d’observation pour
nous. Enfin le Triticum Spelta avec arête, est bien
facile à confondre avec certaines variétés du Triticum
œstivum, qui sont cultivées en Italie , mais dont le
grain se détache facilement des glumes. Dès-lors , si
nous semblons adopter des espèces principales, c’est
moins dans l’opinion que ce sont des espèces, telles
que les concoivent encore les botanistes, qu’à raison
de la commodité pour la distribution et la classifica-
üon de ioutes les formes de froment qu'a obtenues
l’agriculture.
Dans le tableau que nous, allons donner de toutes
les modifications de fromeni qui nous ont passé sous
les yeux, et que nous avons étudiées et. comparées
sous plusieurs points de vue, nous signalerons avec
d'autant plus de soin les variétés et même.les va-
rictés de plusieurs sous-variétés , que par. ce-moyen
il sera possible d’y ramener la presque totalité des
formes existantes ; et s’il en est, comme il n’y a pas
(35)
de doute, qui nous soient échappées, il sera facile
de les placer avec les espèces dont elles pourront
se rapprocher le plus.
Ayant étudié dans les diverses contrées de la France
les espèces de froment qu’on y cultive en grand ,
ou celles qui sont mêlées avec elles , sans que le vul-
gaire les ait remarquées , nous en pourrons d'autant
mieux constater soigneusement les formes existantes :
surtout ayant pu utiliser encore la bienveillance des
établissemens publics; tels que le Jardin de Botanique
de Paris, la ferme-modèle de Grignon, ete.-Notre
correspondance nous a fourni les moyens de donner
une plus grande extension à notre travail actuel,
que ne l'avait l’Exposé sur les Fromens , livré déjà
à la publication par un ouvrage populaire (1). C’est
en nous entourant de tous les moyens possibles, que
nous avons pu former un tableau plus étendu et plus
complet que jusqu'ici n’en a offert aucun ouvrage
d'agriculture. En utilisant les travaux de ceux qui
nous ont devancé, nous n’aurons pas l’injustice d’ou-
blier , ainsi que cela ne se fait que trop souvent,
les hommes qui nous ont préparé les voies par leurs
laborieuses élucubrations.
En réalité, si nous tenions à reconnaître abso-
lument des espèces de froment, dans le sens des
botanistes de l’époque actuelle , nous ne pourrions
reconnaître tout au plus que trois souches : le Tri-
(4) Dans l'ouvrage intitulé : Précis d'un Cours d'Agriculture,
ou Znstitutions agricoles , 2.e édition, pag. 95 à 408.
( 326 )
ticum sativum , le Triticum monococcum , et le Tri-
ticum \Spelta. Tout en convenant de leurs différences
actuelles, nous pensons qu’elles ont. pu provenir
d’une espèce primitive , maïs dont les modifications
transitoires ne se retrouvent plus. |
Si, dans les deux dernières des espèces que nous
avons cru adopter, il y a beaucoup plus de variétés
que dans les premières, c’est qu’elles ont toujours
possédé des qualités supérieures , soit sous le rap-
port du grain, soit pour la facilité de quitter les
glumes ou balles. De là des soins que leur ont donnés
plus particulièrement les agriculteurs; soit pour.les
multiplier, soit pour en propager les variétés ; et
de là leur culture plus générale que Îles autres es-
pèces : restreintes à quelques contrées et dans quel-
ques circonstances de localité.
$&. 4. Des espèces de Fromens qu’on peut reconnaître
pour. l'utilité de la science de l’agriculteur et du
botaniste.
En croyant qu'il n’y aurait rigoureusement À re-
connaître qu’une ou deux espèces; trois au, plus de
froment, nous senions qu'il faut pour l’usage en
établir un plus grand nombre que ne. l'ont fait les,
botanistes ; 5. Mais aussi un bien moindre que ne le
font les ner pour lesquels toute, variété fixée
est une espèce. C’est entre ces deux extrêmes que
nous tâcherons de trouver une moyÿenne qui satis-
fasse aux besoins de la Botanique et de PAgri-
culture.
(327)
Pour ce qui est des espèces dites froment de trois
mois , et dont il y en a beaucoup qui varient sui-
vant les contrées, ce sont des races un peu plus
ou un peu moins précoces. Ayant fait des semis au
8 octobre , au 4 novembre, au 8 décembre , au 12
décembre, au 28 janvier et au 18 avril, dans une
même localité, il n’y a eu de différences bien réelles
que pour. les espèces semées en avril, dont les unes
ont monté plus tard et les autres n’ont monté en
épi que l’année suivante.
Lorsqu'on veut avoir l’ensemble des caractères
d’une espèce de froment où d’une variété, il est
indispensable qu’elle soit en parfaite maturité, car
sans cela on ne voit ni la couleur de lépi ni
celle des balles ( la glume ou le calice des bota-
nistes ), et la forme et la couleur du grain n’est
point appréciable. La direction même des barbes ne
peut être aperçue que lorsque l’épi est mür; car
dans quelques variétés , de dressées qu’elles étaient
en vert, elles sont divergentes lors de la maturité.
D’autres modifications des fromens n’ont les barbes
caduques qu’à la parfaite maturité.
&. Fromens à grains restant renfermés dans les
balles.
I. FROMENT Exeran ( Triticum monococcum ) ;
épi tres comprimé , à deux rangs opposés de grains
très rapprochés ; un seul grain par étage; glumes
presque à trois dents aiguës ; barbes verticales mé-
diocrement allongées, et une seule par étage de grain
(328)
toute la plante d’un vert d’herbe ; gram pelt,
aplati, dur, sans sillon, comme trigone et plus
large vers le milieu.
C’est l'espèce qu’on nomme Petit Epeautre, In-
grain , où Engrain , dans diverses parties de la
France. C’est le froment locular de beaucoup d’au-
teurs , et le n.° 29 de Tessier.
1. F. Excran veru ( Triticum monococcum pubes-
cens ); glumes couvertes de poils, à deux pointes
aiguës et blanches à la maturité.
Cetie variété est élevée ; et tardive, si on la com-
pare à tous les autres fromens engrains. Elle à une
sous-variété à ‘slume jaune-brunâtre.
2. F. Enerain rarre ( Triticum monococcum fu-
cescens ) ; glumes glabres’; jaune-brunâtre; épis un
peu pus petits, ainsi que le chaume, que dans le
premier ; barbes très fragiles.
Nous l’ävons recu sous le nom d’Engrain brun et
de Petit Epeautre.
3. F. Encraix e1aAnc ( Triticum monococcum minus.
H. Par. ; T:monococcum, À De C: fl. fr. ). Carac-
ières du précédent , mais les glumes blanches ‘et la
tige plus courte ; sa maturité plus prompte de quinze
jours , le distingue très bien.
Nous l’avons recu sous les noms d’Epeautre du
Cap , d'Engrain , d'Epeautre d'automne du Cap.
C’est le froment locular lisse de la Flore Francaise.
Il prend quelquefois aux balles une teinte jaunâtre ,
et forme älors une sous-variété ( froment engrain
jaunâtre ), qui sont le nom de Petit monococcum et
d’Epeautre du Cap , se distingue en outre par son
(329 )
chaumé très court et sa précocité. Bien qu'ayant
été semé le 28 janvier , il a été en maturité dix
jours plutôt que l’autre qui avait été semé le 8 oc-
tobre. £
IT. FROMENT raux-Excra ( Triticum unibarbe) ;
épi très comprimé, à deux rangs et à grains très
rapprochés ; glumes à deux grains par étage ; une
seule barbe très longue, l’autre nulle et très courte ;
balles obtuses , échancrées ; toute la plante d’un vert
bleuâtre.
1. F. raux-Encrain Banc ( Triticum unibarbe al-
bum ); épis blancs à glumes lisses.
Il est probable que cette espèce, parfaitement
distincte, est confondue avec l’Engrain dont elle a
le port et les dimensions ; cependant elle est un peu
plus forte que les variétés de l’Engrain ; pour le
chaume, mais bien moins que les variétés de l’es-
pêce suivante. EN
. Elle semble former un passage entre l’espèce pré-
cédente et la suivante, et confirme nos vues sur
l’unité d'espèce dans le froment.
III. FROMENT Epvraume ( Triticum Spelta ; Tri-
ticum Arduini, Mazz. ); glumes à trois fleurs , dont
deux seules fertiles, presque: tronquées, à courte
épine ou pointe ; #lumelle aiguë ; épis trés allongés,
très espacés , fragiles ; barbes dressées , lorsqu’elles
existent.
_ C’est l'Epéautre , la Grande Epéautre , V'Epéautre,
la Speoüta du midi de la France; du Poutre ou de
la Poutre, dans la Haute-Vienne , et’le “Blé, chez:
les Belges. ) SRTACOA AMAUAGAAL EE |
23
(:330:)
Le grain de toutes les Epéauires, est allongé, a
trois côtes ou angles fortement prononcés et, por-
tant, en devant un sillon profond:; il.est ordinaire-
ment dur et à cassure peu farineuse.
I. Epéautres à barbes.
"1: F° Erraurre sac ( Tréticum Spelta alba ; Tri-
ticum Spelta Mazz. ); glumes blanches, glabres ;
barbes médiocres: do’ es
2. F. ErrauTre ROUGEATRE ( Triticum Spelta rubes-
cens ); glumes glabres , blanc-rosätre.
Cest le froment Epéautre barbu, n°27, de
Tessier. site
3. F. Erraurse oRpNARE ( Triticum Spelta ‘vul-
gare ); glumes glabres , jaune-blanchâtre. |
A. F. ErEAUTRE nomATre ( Triticum Spella nigres-
cens ); glumés gris-noirâtre où noirâtres , trés! pul-
vérulentes et très pubescentes.
C'est le! blé rouge barbu de Barelle , de quelques
collections. snfté ”
5. F. Epraurre vecu ( Triticum Spelta hirsutum ”
glumes blanc-jaunâtre , pubescentes.
Toutes ces modifications se ressemblent àT ie _E
pour 14 longueur des barbes.
IL. Epéautres sans barbes. , 5024 ai
_6.,F. Erraume crisamre, (: Triticum. Spelta. 1 muti-
cum ); glumes blanc-jaunâtre ou SE Es ai
gérement;velues. je
7. F. EPEAUTRE ROSATRE ( Triticum Spelta. rOsea ; à
(381 )
Trit. Spelta muticum Bar.; Trit. Duhamelium Bar. ) :
glumes glabres, DS DES
C’est le farro rosso et le Spelta rossa des Italiens 3
le froment Epéautre, n.° 26, de Tessier.
8. F. EpraAuTRE BLANC sans pare ( Trüticum Spelta
albida ); glumes blanches, couvertes d’une abondante
poussière glauque.
9. F. Erraurre roux-veLu ( Trificum Spelta pubes-
cens ) ; glumes roussâtres, un peu velues.
Sous le nom d'Épéautre sans barbes et dE péautre
barbu , on confond les neuf variétés que nous indi-
quons ici, ainsi probablement que plusieurs autres
qui existent peut-être encore et qu né nous sont
pas, connues.
IV. FROMENT ammonvren ( Trofiqum farrum
Bar. ; Zritic. dicoccon Schreb. ; Tritic. cienfugos Lag.;
Trib. amyleum Sering.; Zea-dicoccon et far des an-
ciens }; glumes couvertes d’abord d’une poudre
glauque; deux des trois fleurs fertiles ; épi trés
comprimé , serré barbes dressées, lorsqu’ élles exis-
tent. à ce
C'est l’Epéautre serrée de la Flore png on et
le ‘Spilta magyiore , Farro , Alqa et Orzuola “des
Italiens. Mean ee pr
Sert
Dore Bree
CAT AMIDONNIER SANS. BARBE La 7 riticum farrum muli=
cum Bar. ; Triticum amyleum BP, Ser. ): : entiérement
dépourvu de barbes.
JD ' IEAUE
(332)
II. Avec barbes.
2. K. ammonnier BLANC. ( Tréticum farrum album.
Nos.; Triticum cienfugos Lag.; Tritic. amyleum A.
Ser.); balles blanches, lisses, avec poussières glau-
ques et une pointe recourbée.
C’est la plus petite des variétés de cette espèce,
sous le rapport des épis. Elle est mûre la premiére,
parmi toutes les variétés de froment qui nous sont
connues. Elle porte les noms d’Æwidonnier blanc ,
Epéautre serrée , Fpéautre blanche aristée, Epéautre
du Cap, Epéautre du Cap d'Automne, Epéautre de
Mars , grand Monoccocum, Blé amyleum.
Il est susceptible de présenter des teintes blanchà-
tres ou jaunâtres peu appréciables.
3. F. ammonnrer roux ( Triticum. farrum rufum
Nos. ); épi roussissant, glabre, passant quelquefois
au brunâtre.
Cette espèce ou variété est plus élevée et a les épis
plus gros que la précédente, mais moins que la sui-
vante, dont elle a le port et la couleur.
4. F. ammonnier ÉLEVÉ ( Triticum farrum major ;
Triticum Bauhini Lag.);. épis roussätres, glabres,
gros , passant au rougeâtre.
Ainsi que la précédente, cette variété est trés
distincte et bien fixe. Depuis douze années que
nous la cultivons , elle s’est bien maintenue.
Il nous semblerait que le Triticum venulosum du
professeur Seringe, qu’il dit provenir de l'Egypte,
aurait des rapports avec cette variété, si ce n’est
(335)
la même : d'autant plus qu’elle est dite appartenir
à cette section des fromens : c’est-à-dire de ceux
dans lesquels la glume ou balle persiste sur le
grain et l'enveloppe même après le battage.
5. F. amimonnier DE TARrARIE (Tréticum farrum
tartaricum ); épi jaunâtre ou blanc-jaunâtre , à
glumes dont la pointe est trés courbe et, très aiguë.
Le Blé de Tartarie est resté de stature plus pe-
tite que toutes les variétés précédentes, tout en
conservant ses épis aussi gros; mais ces épis ont
eu une tendance à redevenir plus compactes qu’ils
ne le sont ordinairement. Jamais nous n'avons, vu
parfaitement réussir ce froment, bien. que. placé
dans toutes les circonstances des autres fromens
amidonniers. Le grain est glacé, gros, long et très
velu au sommet et comme cylindracé. x
6. F. amnonner veLu ( Triticum farrum villosum ;
Triticum amyleum C. Sering. ); épis gros, blancs,
à glumes velues. |
7. F. ammonnier pARBE-NOmE. ( Zréticum farrum
nigrescens; Triticum atratum? Most. ; amyyleum D.
Sering.) 11 ressemble en tout’au précédent, seu-
lement il a les poils brunissans et les barbes noires
ou noirâtres.
Ces deux espèces ou variétés , qui. passent sou-
vent de l’une à l’autre, ‘établissent un passage si
naturel entre le froment amidonnier et le froment
comprimé où le froment d'Afrique, qu “il n y a que
la différence existant entre Porge ordinaire et Porge
nue. LPRRGTE PRE é-ted)
8. F. ammonnier RAMEUx.:( Tréticumi farrumiramo-
sum; Triticum amyleum E. Sering.)
( 554 )
Cetté variété, que, nous. indiquons ; d’après, le
professeur de botanique à Lyon, ne nous est pas
connue.
&. 2. Fromens à.glumes non persistantes sur le grain,
mais très, libres et très. longues (1).
V. FROMENT de Porocxe ( Triticum poloni-
cüm L.; Triticum Lamarkeum Mazz.); glumes al-
longéés, grandes, foliacées , écartées du grain, d’un
blanc jaunâtre , glabres ou velues: axe des épis à
dents trés poilues; grains très longs.
Cest le Ble de Pologne , le Froment de Pologne ,
le Seigle de l'Ukraine, Seigle de Pologne de beau-
Coup d’agronomes. É grain est un peu dur, ou
glacé, long et gros.
C2
54: Suns barbes:
va F. je cs SANS BARBE (Heures polonie
cum mutieum N° )..
:Epi pressé court, 158
di est..sorti. de laivariété n°5.
paie La ee Parbes.
pl É: DE Poroëne | A Toner BARBE ( Tritioun | po-
lonicum barbatum de épis lâches, penchés, à longues
barbes ; Pois, peu apparens sur lès balles.
(4) C'est-à-dire ne s’appuyant point sur le grain , comme dans.
lesvespèces\dn troisième Paragraphe. : / 10 : 5
(835 )
C'est la variété la plus répandue ‘et ‘la plus cul-
tivée. |
3.1F 5e Porocre ver ( Triticum poloricun: vil-
losüm ).
Il ressemble au précédent , seulement Isesglumes
sant beaucoüp plus velues. to
4. F. pe Poroene A COURTES BARBES ( Trèticum
polonicum breve-barbd ); ‘pis lâches “et barbes
courtes.
5. F. pe Porocne compacte ( Triticum poloni-
cum compactui ) ; ‘épis présque dressés, compactes,
à barbes médiocres.
Nous l'avons recu sous Îles DOmMS "de Blé de
Mogador , Bié de Surinam Blé d' Egypte.
ïl ÿ à une sous-variété à épis courts et “dressés.
6. F. ne Poroëne À BARBE! NOIRE, (Lritioum por
* nicum nigro-barbatum |.
916 rattache à la variété phcere” Séuéhent
ses 'barbes Sont noires.
7. F. DE PoLoGNE RAMEUX ( VF ébieun “polonico-
Féjbridhn Barelte. Mon0g Fra. t. 2, fe 8. ‘4 épis
se en rameaux . |
"Cette € espèce a ün épi. rameux ; md 'e nous ne la
pos Sédons point, pas plus que, celle qui est cou-
“Verte ‘de! beaucoup plus de prüuine ‘sur son feuil-
lage que les variétés ordinaires, et que pour. “cela
on à “nommée | ritioe cum polonico - Cœruleum : sorte
de modification q qui nous étonne d'autant moiné que
toute graminée ‘esl buscephible ’de se ‘présenter verte
je recouverte d’une poussa blane-bleuitre lus ou
MOiRS ‘dbondanté , Comme on le voit dans plusieurs
(336 )
fromens, et notamment. dans, celui nommé froment
bleu. D’après cela, le froment de Pologne présente,
au moins, jusqu’à ce moment , dix. formes distinc-
tes, en y comprenant celle qui tend à la ratta-
cher au .froment, d'Afrique, et, dont nous avons
parlé au troisième paragraphe de ce Mémoire.
6.13. Fromens à glumes non persistantes sur le-grain,
mais s'y appliquant exactement.
VI. FROMENT p’Arrique ( Zriticum durum Desf. ;
Tritioun gallicum Arduini; Triticum tomentosum
Barelle; Zriticum Barelle Mazzucato; Triticum mazxi-
mum Tournon., Klore de Toulouse ) ; glumes velues
ou presque glabres, à quatre fleurs, mais deux
sont toujours stériles ; l’épi est comprimé, pendant,
l'axe de l’épi à articulations trés, poilues : chaume
plein au sommet; barbes droites ; grain allongé,
corné, presque anguleux et grisâtre, et très .dur :
quelquefois jaunâtre.
Cette espèce , par son port, _se rattache sans
aucun doute au froment renflé. |
1. F. D'AFRIQUE BLANCHATRE ( Triticum durum.com-
mune; Tritic. durum À Sering. ; Zrütic. trevesium
Mazzuc.) ; épis à glumes blanc-roussätre ; , poils blan-
châtres. CORTE
C’est le Froment de Barbarie , le Blé de Barba-
ie, le Blé corné, et le froment n.° 23 de, Tessier,
2. F. n’ArriQue nomarne ( Zritècum durum nigres-
cens. LI
Il ne diffère du précédent. que par ses poils. des
(337 )
glumes brun-noirâtre et ses barbes également noi-
râtres. Nous l’ayons recu sous le nom de Blé. bleu
conique et Blé poulard,bleu ; Froment. à barbes et
à balles violettes. Ce dernier a le grain plus, petit
et le même port, et se propage bien ( Zriticum
durum. medium ).
8. F. ne Tawçearocx ( Zriticum durum Tangaro-
cence ) ;. glumes légèrement velues, plus on moins
colorées. en noirâtre , ainsi que les barbes.
Cest encore le froment. du. Bengal , d’après des
envois que nous ayons reçus.
4.:F. ne Tancarock, 81anc ( Zriticum durum. al-
bescens. ).
Cette, variété diffère peu de la précédente, si ce
n’est, qu’elle est blanchâtre, très couverte de pruine
glauque, au lieu d’être velue. Elle forme un :pas-
sage très naturel avec l’espèce suivante par plusieurs
de, ses, variétés. Son grain.est gros et jaunâtre.
5. F. n’Arrique saunamre ( 7riticum, durum mon-
golicum) ; épis à barbes et balles jaunâtres ; balles
très peu parsemées de poils, à pointe courte pres-
que obtuse ; axe de l’épi à très longs poils ; grain
dur.
Cette variété, qui est remarquable, a toujours
mal. réussi. Peut-être veut-elle des terres sablon-
neuses,, et.nous..ne. l'avons. cultivée! que dans des
terres argileuses.. Elle est. cultivée dans la Manaplie
chinoise.
VNIL:FROMENT pxar.(, Zriticum. complanatum ;
Dour cerilern Mazz. ); glumes plabres ,.à,trois
ou quatre fleurs, dont deux fertiles ; épis aplatis
( 338 )
penchés , à axe souvent très poilu; babes longues,
droites, lorsqu'elles ‘existent ; grains 6blongs ‘où
'éourts, quittant quelquefois AH GeribAt lés slumes.
La tigé où chaume ét rémplie de “moëlle à la
partie supérieure. .
Bien que cette espèce soit une dés mièux tran-
chées , surtout dans Te midi de l'Europe, elle est
peu connue. Elle a des points de contact avec plu-
sieurs des ‘éspèces précédentés et avec les’suivantes.
Par les deux premières variétés Pärbues , elle se
rattache aux grandes variétés de froment ahidonrier ;
par plusieurs autres/ elle se rattache d’un côté au
froment d'Afrique, par le froment de Tanÿarok,
qui a comme elle le grain dur; ét d’un autre côté,
par la variété non barbue entr’ MR élle'se jattadhe
au froment d'Eté ( Triticurn Bo yo | au moyen
d’un gram moins allongé, plus arrondi et Souvénit
tendre et très farineux. Plusieurs de ses vafietés stit
Signalées par le nom de Blé de Providence. Ee Tri-
“ticum ‘cœrulet. de Mazzucato fentré ‘dans cette” és-
pète , “comme variété. . A
[. Won pourvus E HE sb
1 18 »
î ED SforxeT HD
IST 728 : 310 15
og Fiopcèt sas sr ( Tréficinn Compressièn in
“herbe épi blané-jéurâtré ‘glümis" renflées®"raü-
cronées., À pointé digué :l grain court? vo SF
geûtre et tendre. cisho
< SE trouve” miète a ee, de ta ue “.
Frânte : 914pI0 come + so list
EC plstreit !
( 359 )
IT. Avec des barbes.
2. F.p»rar ecanc ( Triticum compression album N.;
Triticum candissimum ? Barelle ); épis blancs ; pointe
de la glume allongée, peu courbée ; grain allongé ,
translucide, anguleux, grisâtre, quittant quelquefois
avec assez de difficulté les glumes.
Ce froment établit un passage très naturel entre
les grosses variétés de fromént amidonnier ‘et le
froment plat , se dégageant de ses balles avec quel-
que difficulté: Comme cetté belle variété est cultivée
dans beaucoup ‘de ‘parties de l’Europe , elle offre
plusieurs sous-variétés dans lesquelles on remarque
les pointes des glumes plus ou moins allongtes ,
plus ‘ou moins courbées: C’est le Blé de Providence
de Téssier, n.° 16. Les barbes tombent quelquefois
avec la plus grande facilité à maturité ; et c’est une
disposition qui se soutient, comme nous l’avons vu
dans un seigle qui a cette même propriété d’avoir
les barbes caduques. Quelquefois ses da i ont une
teinte jaunûtre.
8. F. »car À crocwer ( Jriticum CARRIER has-
tatum N.)..
«C'est le froment précédent, mais d’une momdre
proportion dans toutes ses parties, et ayant la pointé
dela glümettrés recourbée. Nous l'avons recu sous le
nom de 7ritioum spumosum(spinosum? ). Mais si Von
en excepte sa”stature, qui est toujours moindre que
éelle de la variété préeéaéritel son Caractère des
glüumes est peu de chose, ayañt vu varier” ce caraëz
iéresdans le froment Le pu à et autres. d'
\
( 340 )
Le froment plat blanc et le plat. à crochet, sont
susceptibles de donner des sous-variétés à épis rouges
ou roussâtres, voisins de ceux de la variété suivante.
4. EF. p1ar roux ( Trticum compressum rufescens ;
Tritic. hordeiformis Host.; Triticum cœruleum A
Mazz.; Tritic. platystachys Lag.; Tritic. durum B
Sering.); glumes très. glauques avant la maturité,
à pointe courte ; grain jaunâtre , oblong, se déga-
geant difficilement des glumes.
‘IL est souvent indiqué comme Blé de Providence ;
c’est le n.° 13 de Tessier, et.il est connu sous les
noms de. Goudpe dans: les départémens de l’ouest,
et confondu avec le froment renflé dans le dépar-
tement de.Maine et Loire: c’est aussi l’Ævbron rouge.
Souyentil perd très facilement ses barbes.Nous avons
obtenu, une sous-variété qui est plus élevée et d’un
port semblable à celui du froment. d’Hubérnac:
Voyez n.° 7.
5.F. PLAT A BARBES CADUQUES ( Triticum compressum
denudans N.).
Il ressemble au précédent, mais la pointe des
balles est plus allongée. On peut facilement les con-
fondre ensemble , si celui-ci ne se dégageait.très
facilement de'ses barbes. Son: grain est tendres mais
il a glacé.
6. F. par rouce ( 7° réticum compressum. rubrum)
épis etbarbes très rouges; grain rougeâtre:
Cette espèce, du midi de la France,-doit son in-
tensité. de couleur à l’action, de: la lumiére; etlest
confondue sous le nom de Blé poulard-avec. les 'suï-
vans. C’est le, n.° 21 de Tessier; c’est le Blé rouge;
la Pénatielle rouge à Montpellier.
(341)
7. F. PLAT pourarD ( Zriticum compressum. vul-
gare) ; épis à barbes médiocres ; glumes blanchâtres,
renflées , à pointe médiocre ; grain rougeâtre , court ;
il est devenu dur.
C’est le Blé poulard ou Poulard blane du midi ;
froment à tige pleine.
Sous le nom de froment d'Hubernac, nous avons
une race de cette variété, qui est remarquable par
la vigueur de sa végétation et la beauté de ses épis
à barbes fragiles. Il y a aussi une autre sous-variété
dont les épis sont à grains très pressés.
8. F. P1aT À Barge NOIRE ( Zrificum compressum
nigrescens ); épi blanc-jaunâtre et barbes noires ;
grain jaune-rougeûire.
C’est une variété qui se trouve mêlée aux deux
précédentes dans les cultures en grand, et qui est
commune dans le midi de la France.
9. F. pLar céanr ( Zriticum compressum gigan-
teum ); épi roussâtre à pruine blanche abondante ;
glumes à pointe aiguë; grain gros, court, gibbeux,
grisâtre.
Cette belle variété est véritablement l'intermédiaire
entre le Froment renflé et le Froment plat. La forme
de l’épi est celle du Froment plat, et celle du grain
est absolument , pour toutes les dimensions, celle
du Froment renflé. Si les glumes étaient pubes-
centes, on aurait de. la peine à la séparer en: effet du
Triticum turgidum, au milieu duquel elle se trouve:
Dans le département de Maine et Loire, ce froment.
partage le nom vulgaire de Gouâpe, et y recoit aussi
celui d’Æubron rouge.
( 342)
10..F.»0ar D’Écvere ( Jrééicum compressum ægyp-
tiacum); épi rougeâtre, rapproché dé la forme té-
tragonale; glumes très glauques ; grain petit, allon-
gé, rougeûtre , dur.
Ce froment est une variété parfaitement distincte ,
mais d’une petite stature; ayant en outre le grain
petit et de mauvaise qualité. Nous l’avons recu sous
le nom de Blé rouge d'Egypte. Bien que ce froment
n'ait pas ses épis régulièrement déprimés sur deux
côtés opposés ; cependant il ne peut être séparé du
Froment plat, comme variété.
11. F. p1ar ne Xérës( Jrilicum compressum his-
panicum ); épis épais , blanchâtres , pulvérulens ;
épilets à quatre fleurs, dont deux sont stériles ;
glume à pointe aiguë, peu allongée’; grains jau-
nôtres , durs, gros , allongés. |
Cette variété ailes épis un peu comme tétragones,
et semble: former, de même que la précédente, le
passage au Froment barbu où Triticum æœstivum.
Elle nous a! été envoyée sous les: noms de! Froment
de Xérès et de Froment d'Andalousie. Si lé ram
était: tendres, ce serait: une très’ belle, trés bonne et
très: sediotité espèce ,réussissant parfaitement bien
en: France.
12. F. rtamérhLé ( Zriticun compréssum NE
sum; Triticum fastuosum"Vag. ) ; épis blanchâtres,
compactes‘, à poussière glauque abondante; bärbes
très longues’, ‘étalées’; grain blaric-jaunâtré, MbbE )
gros; un ‘peu:translucide où demictransiarent:
Nous: l’avons eu sous lés noms! de Zwiticum fas:
tuosum et de Froment de Tangaroch; is it ést très
différent de ce dernier.
(343)
13. F: rcar RAMEux ( Jritècum compressum,ramo-
sum; Tritic. compositum B. aspica glabre Mazz.; Triti-
cum compositum L? ); épi blanchätre; épilets glabres,
rameuxs axe très velu ; grain jaunâtre.
On ne peut éloigner cette, variété du Froment plat,
mais elle est confondue souvent avec une variété ra-
meuse du Æroment barbu, dont nous parlerons plus
loin. Nous layons recu sous le nom. de Gros Blé
Pétaniel. I présente une sous-variété à barbes noires.
VIN. FROMENT rexrié ( Zriticum turgidum L. ;
Trit. satioum turgidum Viamk.); épi carré, compacte,
courbé, à barbes dressées; quatre fleurs dont deux
stériles. ; glumes renflées, ordinairement très velues,
à pointe plus ou moins allongée; grains gros , ren-
flés , comme bosselés au dos ; paille pleine au haut.
I. Sans barbes.
1. F. RENFLÉ sans parse ( Zréticum turgidum im-
berbe ); épi tétragone, couvert de poils grisâtres.
Il reprend très facilement ses barbes ;, du reste,
il a toute la vigueur et les. autres qualités de la va-
riété barbue , avec laquelle il se trouve mêlé : ce-
pendant on l’a remarqué, puisqu'on le nomme
ni à sans barbe et Gros Blé sans barbe.
lo Hs sd des barbes.
Fc LE. sr BLANC ( Triticum tr gidum album, ;:
Triticumiturgidum. À Sering:;. Triticwn. turgidum B
Mäzz.) ; épi blanc, barbes blanches:
(344)
C'est le n.° 19 de Tessier, où Pétamel blank >
qu’on trouve mêlé au suivant, dans les cultures ‘en
grand de cette variété.
3. F. renrzé Péranierxe ( riticum turgidum ru-
fum; Triticum turgidum Li. ); épi gros, roux ;
glumes roussâtres, à pointes très courtes et presque
droites (1).
Cette variété, trés remarquable, a été signalée
par beaucoup de noms qui lui sont communs avec
les variétés qui suivent. C’est le Blé Pétanielle du
midi de la France; la Godele du département du
Rhône ; la Gouäpe (2), l’'Obron ou l’Aubron ; le Blé
à six carres, et quelquefois le Blé Poulard, de
Maine et Loire; c’est enfin le n.° 18 de Tessier,
et qui rentre facilement dans la variété suivante.
4. F. RENFLÉ BARBE-NOIRE ( Zrificum turgidum ni-
gro-barbatum ). é
Ce n’est que la variété précédente avec des barbes
plus ou moins noires , et qui perd assez facilement
ce caractère. Cést le Gros Blé noir de quelques
parties de la France.
5. F. renrié cris ( Zréficum turgidum cinereum ;
Tritic. turgidum E Sering. ).
(4) Nous en avons cependant rencontré une variété à très grande
pointe; ce qui nous a prouvé outre: d’autres observations à cet
égard, que ce caractère n'avait qu’une très légère importance.
(2) Ce mot qui veut dire faucille, dans l’ancien gaulois ou cel-
tique , est très bien appliqué à ce froment, dont la disposition des
épis est d’être toujours courbée ou’ penchée: On prononce! gousa
guap , gouäpe, goîne, CEE gloise,,.groi,, mais! plus habituel-
lement gouape.
( 345 )
Si ce n’est la pubescence , qui au lieu d’être
blanche ou rousse est cendrée ou gris-foncé , cette
variété ressemble en général aux précédentes , et en
porte souvent les noms.
C’est le Froment velouté , le Ble de Souris ; c’est
encore le Froment de la Mecque , le Froment d hiver
de Dantzick, le Froment turquet, et enfin le Blé géant
de S1°-Hélène, qui semble avoir une végétation un .
peu plus forte, mais qui ne diffère essentiellement en
rien du Froment renflé gris.
Comme la partie herbacte du Æroment renflé gris
semble un peu plus couverte de poussière glauque
que les espèces ordinaires ou Fromens d’été ; on lui
a donné le nom de Blé bleu conique ou de. Poulard
bleu.
Le Froment gros turquet ne nous a .pas semblé
pouvoir être distingué Il a un peu moins de poils
sur les glumes , mais ce caractère est variable pour
son intensité. Le Froment d’hiver de Dantzick est un
peu moins haut que ceux de la Mecque et de S.'-
Hélène, cependant il a encore près de 180 centi-
mètres ( 5 pieds ): les deux autres ‘atteignant jus-
qu’à 2 mètres ( 6 pieds ).
6. F:rexrcé RAMEUx ( 7réticum turgidum ramosum ;
Triticum compositum L. ); glumes rousses ou cen-
dréés ; épis rameux; grains rougeâires!
C’est très anciennement le Blé de miracle ;" c’est le
Blé'de Smyrne , le Blé d'Egypte: W est: clé dans!
quelques lieux du département de Maine ee Loire
sous le nom de Blé à mailloches\, et particulière
ment dans l'arrondissement de Doupien
24
( 346)
Le savant Tessier a réuni ce Froment, dans son
n.° 20, avec la. variété n.° 10 de notre septième
espèce; mais ce n’était véritablement qu’une réu-
nion empyrique. Cette disposition rameuse n’est au
surplus qu'une qualité acquise et qu’on maintient
en semant ces modifications rameuses dans de bonnes
terres. Nous avons vu toutes les espèces de graminées
à épis , y compris le froment, devenir rameuses dans
une terre où la végétation était riche soit par la na-
ture ou la qualité de la terre, soit par une hu-
midité abondante.
7. F. RENFLÉ RAMEUX BLANC (. Tréticum ramosum al-
bum }; épis rameux ; glumes grisâtres; grain blanc-
jaunûtre.
On donne aussi à ce Froment les noms de Blé
de Smyrne, Blé d'Egypte, Blé de miracle: C’est le
Froment à tiges pleines ; préconisé avec raison par
le baron lieutenant-général Dessaix, dans le Journal
de l’Académie d’Industrie , tome 2, p. 157 ; d’après
la comparaison que j'en ai faite, sur la communi-
cation obligeante qu’a bien voulu me faire ce pro-
priétaire. de Fernex.
8. F. RENFLÉ RAMEUX BARBE-NOIRE ( Tréficum turgi-
dumramosum nigrescens ; Triticum compositum ‘A ?
Mazz. ).
Cette variété se trouve mélée à la précédente, et
nous. doutons beaucoup. que ce soit celle indiquée
par Seringe et Mazzucato, qui ont probablement con-
fondu entr’elles trois variétés remarquables : nous les
indiquons. chacune.à leur place dans le, travail pré-
senti. SD 4
(347)
Les trois variétés 6, 7 et 8 présentent ordinai-
rement des graines tendres, mais nous les avons vues
passer aussi à l’état de blé dur.
IX. FROMENT sareu ( Zriticum æstioum L., sati-
oum Vill.) ; épis ordinairement dressés, imbriqués et
comme tétragones ; glumes glabres ou très légèrement
poilues ; grains variables, mais toujours courts ou
oblongs , sans être bossus; tige ordinairement creuse
vers le haut.
Après le Froment sans barbe, cette espèce fournit
le plus de variétés, ce qui est probablement dû à ce
qu’elle est plus cultivée que toute autre en Europe,
à raison de cé que ses grains sont plus généralement
d’une qualité supérieure : s’ils n’ont pas le volume
remarquable du Froment renflé, par exemple.
I. Arétes dressées , épis glabres.
1. F. sareu DE LA Cuve ( Zriticum salivum si-
nense ); épi grêle, court, blanc-jaunâtre , à barbes
courtes ; balles à une seule pointe un peu allongée ;
grain petit, court, grisatre , dur.
Cette variété à toujours mal réussi; est d’une pe-
tie stature, bien que cultivée dans les mêmes circon-
stances que les cent soixante-quinze que nous avons
mises en expérience.
2. F. san À peur ( Zréticum sativum semi-bar-
batum ; toutes les barbes irès courtes.
Cette variété se rencontre souvent : c’est celle
qui fait la transition entre les variétés sans barbes,
ainsi que nous l'avons constaté : aussi est-elle diffi-
cile à fixer.
(348)
3. F. paru pe SICILE ( Zreticum sativum siculum ;
Trit. condidissimum ? Mazz.); épis blanchâtres: ou
blanc-jaunâtre ; glumes allongées:, à une dent longue
aiguë ; barbes longues ; tige pleine vers le haut.
Cette variété qui porte les noms de Blé barbu
de Sicile, Blé treminia, est d’une petite stature,
et nous semblerait lier le froment barbu au froment
plat; surtout en la comparant à la petite race du
froment plat d'Esypte.
Il. Arétes écartées | épis glabres.
4. F. sareu DE Toscane ( Zriticum sativum etrus-
cum ; Tritic. ciliare Hort. Lugd. ); épis blanchi-
tres, lâches; glumes à très longue pointe (plus
longue ordinairement qu’elles ); grain petit, long,
grisâtre , dur. :
Cette variété. très remarquable présente: deux
sous-variétés qui peuvent être signalées facilement: la
première a les épis avec une teinte grise (. Zriticum
sativum etruscum griseum ); nous l'avons eue cepen-
dant sous le nom de Zriticum horminum album Hort.
Lugd.; et Zriticum cochleare. La seconde, au lieu
d’être blanchâtre ou rosâtre , est jaunâtre ( 7ritic.
satioum etruscum lutescens ); mais du reste leur res-
semble entièrement. Toutes se trouvent mélées en-
semble , et sont cultivée dans plusieurs parties de
l'Italie.
5. F,.Bareu À cHaprAU(7riticum satioum spartheum);
épis blanchâtres ; épilets un peu pressés ; glumes à
longues arêtes.
(349)
Cette variété donnée sous le nom de #roment de
Toscane , est moins élevée que la précédente, mais
du reste elle s’en rapproche beaucoup , en formant
cependant une race distincte qui s’est soutenue de-
puis dix années d’observations. Elle présente une
sous-variété ( Zriticum sativum spartheum rufum ),
dont les grains sont entièrement les mêmes, mais
les épis un peu rougeûtres.
6. F. sarsu DE Toscane ÉLEVÉ ( Zriticum sativum
etruscum robustior ); épis blanchâtres, à épilets un
peu pressés ; glumes à longues arêtes.
Par son grain, cette variété se rapporte bien aux
précédentes, mais ce grain est plus gros , la tige
un peu plus élevée, et les épis plus nourris et
plus gros. Il se rapproche du n.° 9, mais son grain
est moins gros. Les n.® 4, 5 et 6 forment une race
bien distincte, et qui paraît être exclusivement
particuliére à l’Italie.
7. F. sansu mremois (1) ( Triticum sativum tri-
mestre ); épis lâches, gréles, blanchâtres ; barbes
moyennes ; glumes à très longue pointe ; grain pe-
tit, allongé ; chaume peu élevé.
C’est le Petit Froment blanc barbu, le Froment
de trois mois , de l’arrondissement de Beaupreau.
8. F. sareu Hérisson ( 7riticum sativum herinaceum ;
Tritic. herinaceum Horn. ); épis épais, roussätres ;
glumes presque luisantes , longuement mucronées ;
arètes robustes, trés écartées ; grain gros et grisâtre.
(1) Pour de trois mois : c’est une contraction généralement en
usage chez le vulgaire.
( 350 )
Cette variété , cultivée dans le midi de la France,
est très belle, très robuste, et mérite d’être coté
vée de préférence à beaucoup d’autres. Elle est
voisine de la suivante, mais plus forte dans toutes
ses parties.
9. F. PARBU BLANCHATRE ( Triticum satioum vul-
gare) ; épi médiocrement dense, blanchâtre ; glumes
à pointe très allongée ; grain gros, renflé, Le
tendre ou dur.
C’est le froment n.° 9 de Tessier; le Froment ES
de beaucoup de départemens de " France ; le Fro-
ment à barbes divergentes du Dictionnaire des Sciences
naturelles. Dans le département de Maine et Loire il
est connu sous les noms de Blé joanet , Blé barbu,
Froment gris à barbe, de Froment breton blanc , et
de Barbichon.
Sous le nom de Froment fin rouge et Blé rouge,
on cultive dans le midi une sous-variété dont le
grain a une temte rougeûtre, et dont l’épi est le
même que celui du froment barbu blanchâtre ( 7ri-
ticum sativum vulqare rubrum), et qui peut, comme
le précédent , présenter des épis à teinte blanchätre,
d’autres à teinte jaune, et enfin d’autres à teinte
brunâtre : c’est ce dernier que nous avons vu dé-
signé sous le nom de Froment mulâtre. L'un et l’au-
tre appartiennent au froment barbu blanchâtre:
Sous le nom de Blé mouret, nous avons reçu-une
sous-variété qui est plus tardive de huit à dix-jours
pour la maturité : qui du reste se rapporte au Fro-
ment barbu blanchätre , et donne un grain tendre,
de bonne qualité. Le Froment du Piémont, qui est
(351 )
tendre et glacé, est encore le Froment barbu blan-
châtre. Sous le nom de Froment de Russie ; nous
avons eu une variété de la Bessarabie , qui est plus
petite et qui ressemble beaucoup à celui que nous
avons eu sous le nom de Blé du Caucase ; maïs le
grain de ce dernier est plus gros, bien que la paille
en soit un peu plus courte.
Le Blé de Smyrne de quelques collections a le
grain un peu plus petit que le Blé du Caucase,
mais du reste c’est le mème.
10. F. sarru nouGe ( Triticum sativum rubescens).
IL a tous tous les caractères du précédent , seu-
lement il a l’épi rougeûtre et est d'une stature un peu
plus petite.
C’est dans le PE: de Maine et Loire le
Froment breton , le Petit Froment breton, le Blé
rouge , le Blé rouge barbu ; le: Froment à six carres,
le. Petit barbichon , et souvent le Froment gris à
barbes ; c’est le n.° 10 de Tessier. Avec le froment
sans barbes d’Alsace , il partage les noms de fro-
ment rouge et de froment breton, dans le dépar-
tement de Maine et Loire.
11. F. sarëu pu, Car (Zriticum sativum capense) ;
épis allongés( gros), blanchâtres ; glumes à pointes
médiocres ; grain gros, jaune, tendre ; feuillage ,
lorsqu'il est vert , étant trés couvert de pruine
bleuâtre.
Cest une variété RU ». uh peu moins hâtive
que nos variétés, mais réussissant parfaitement; !
042. F. sareu Piorer (| Zriticun.sativum pictetia-
num.) ; ressemble: beaucoup auw-froment barbu: du
(352)
Cap , par les glumes et par le grain; mais il est
moins robuste, moins élevé. Il réussit très bien. Il
a un peu varié pour la couleur du grain, qui est
moins jaune depuis qu’il est cultivé dans nos jardins.
13. F. sareu pe Napzes ( 7riticum sativum nea-
politanum) ; épis blanchâtres ; glumes à pointe al-
longée ; grain grisâtre ou brunâtre , un peu allongé ,
demi-dur.
Cette variété robuste, à épis peu allongés , a ‘un
trés beau grain et réussit bien.
14.F. »arBu éRos-Tremois ( 7riticum satioum brigan-
tiacum) ; épis blanchâtres , gros, allongés ; épilets
écartés ; glumes à pointe médiocre ; grain petit,
allongé, tendre, grisâtre.
Cette variété que nous avons reçue de Briancon,
sous le nom deFroment de Mars, est bien dis-
tincte du Froment barbu tremois.
15. F. sareU TREmois nain ( Zréticum sativum tri-
mestre nanum ) ; épis blanchâtres, petits; chaume
trés court; grains petits, oblongs.
Sous le nom de Blé de Mars blanc barbu, nous
avons eu cette variété, moins robuste de beaucoup
que la précédente. Elle paraît donner facilement une
variété sans barbes ; qui sera établie plus loin
16. F:BarBu compacte ( Zritioum sativum compac-
tum ; Triticum compactém Host. ) ; épis blanc-jau-
nâtre, courts , imbriqués de très près; glumes’à
pointe aiguë ; ‘raide , longue ; grain petit ;°rou-
geâtre | arrondi. |
Nous avons recu; sous le nom de Blé hérisson,
cette variété, et sous celui de Froment de Tenga-
( 353 )
rock , Froment d'Alsace et de Triticum fastuosum ,
cependant on peut distinguer quatre sous-variétés :
1° Froment barbu compacte à grain grisâtre.
2.° Froment barbu compacte à grain jaunâtre.
3.° Froment barbu compacte à épis bruns. C’est
une variété du n.° 2.
4.° Froment barbu compacte hérisson. Il a les
épis ou jaunes ou bruns.
III. Fromens à épis velus.
17. F. sarpu BLANC veLu ( Triticum sativum album
villosum ) ; épis blanchâtres ; glumes pubescentes ;
grain gros et long.
Cette belle variété, qui est souvent mélée au
° 9 dont elle provient, est assez robuste et mé-
rite uve culture particulière : son grain étant beau
et tendre. Elle est plus vigoureuse que la variété
dont elle sort.
18. F. sareu ROUGE vELu ( 7riticum: sativum ru-
brum villosum ).
Il a les épis rougeâtres, du reste il En er es au
précédent et se trouve mêlé au n.° 10, dont il est
une variété. Sa ‘stature est plus petite que celle du
n.° 17, et dans les rapports de celles du n.° 9 au
n.° 10.
19. F. sargu rose ( Zriticum satioum FRE
rium ).
IL se rapproche beaucoup du n.°16, mais. le Hlus
grand nombre de ses barbes sont Locle: à I HE
quésses glumes, sont -blanches;et :velues. :Il estiro-
25
(354)
buste et se trouve mêlé à un froment donné sous
le nom de Froment: du Nord , qui est trés voisin
du n.° 9.
20: Æ. »arBu TrREmOIS VELU ( 7rèticum sativum tri-
mestre villosum ); épis allongés , grêles , lâches,
blanchâtres ; grains petits.
Cette variété est mêlée au Froment barbu tre-
mois , n.° 7, et en a toutes.les propriétés et tous les
caractères , à la pubescence près des glumes.
X. FROMENT sans, sarge .( Zyiticum imberbe ;
Triticum hybernum L. ; Triticum sativum imberbe
Alior. ); «toutes. les glumes privées de barbes, ou
n'ayant que des pointes très courtes.
Avec l’espèce précédente c’est le froment le plus
généralement cultivé et celui qui offre.le plus grand
nombre de variétés déterminées. Cependant ce fro-
ment est moins cultivé proportionnellement que:le
froment-barbu. Cette espèce. tend toujours à re-
prendre ses barbes, et dans les jardms de, bota-
nique-toutes ses variétés sont confondues sous le nom
de Triticum hybernum , ou de Triticum satioum mu-
ticum ow-imber be.
> 12 Epis ;velus rouges.
1. F. sans BARBE DE CRÈTE 9AUNE ( Tréticum imberbe
créticum luteum); épis Tâches, allongés ,, rougeâtres ;
tige élevée ; grain court, gros, jaunâtre , tendre:
19: F.-sAns BARBÉ DE CRÈTE ROUGE ; Trticum imberbe
creticum* rufescens !).
Il a les mêmes caractères et la même végétation
(355)
que le n° 1*, mais il a un grain tendre à la vé-
rité, mais brun-rougeûtre.
: 8. F.'sans BARBE crAND-vELu (: rüticum imberbe vil-
losum elatior); épis allongés , rouges ; chaume élevé ;
grain rougeâtre, allongé.
C’est la plus grande variété de toute cette série :
elle ‘existe dans les moissons du département de
Maine et Loire. 9:
2. EL sans pAfeE DE Kœzer ( 7riticum imberbe Kœ-
leri); épis allongés, rougeâtres ;: chaume court ;
grain gros , jaune-blanchâtre:
Cette variété est différente du n.° 1., bien que son
grain s’en approche un peu. Nous l'avons eu sous
lesnom de Froment Kæler ; mais ‘sous ce nom l’on
renferme ‘ordinairement ‘toutes les variétés velues du
* Friticum hybernum : M fournit facilement ‘uné sous-
vañiété à grain plus rouge\que jaune.
5. F. sas BARBE PETIT-VELU ( Triticum inbele vil-
losuni minor) ; épis: minces, allongés ,: très rouge-
brun; Chaume plus petit ‘que dans lé n°3; grain
aussi ‘plus ‘petit ;: mais: du reste rapprochant par
le! à 08 RS
ain Epis. Le blancs.
6. F:-sANS BARBE :GRAND-BLANC ( Tr riticum “imBebbe
villosum major:);. épis: blanchâtres , nn tige
élevée ; grain jaune-rougeâtre;-allongé.s! op insu
ses l'avons-obtenu-du n: 3::L’une-et l'autre de
ces deux variétés sont sorties du Froment de. 942
Lüud. ,On:: 1e nomme dans le: nai -deëla
Vienne. -Eronient Dleñe:e à disiisr-euoe om eco: Jp
( 356 )
7. F. sans BARBE BLANC VELU ( Jriticum imberbe vil-
losum album medium ).
Cette variété est moins élevée que le n.° 6 et a
le grain un peu jaune-rougeâtre , aussi beau; l’épi
est un peu compacte.
8. F. sans pare eros-Kaærer ( Triticum imberbe
Kœleri major ); épis très longs, médiocrement ve-
lus; grains rougeûtres.
n est à peu près de la taille du n.° 7;ila les épis
plus longs. Dans le département de Dsiiné et Loire
il est mêlé au froment de S.t-Laud.
9. F. sans BARSE veLu DE CRÈTE ( 7riticum imberbe
villosum creticum ); épis assez grêles , lâches; hau-
teur moyenne; grain jaunâtre, petit, arrondi, tendre.
C’est une espèce excellente, mais qui a glacé à
la culture dans les jardins. On l’a donné encore
sous le nom de Blé de Bohéme. Ge doit être le n.° 7
de Tessier.
10. F. ve nue ( Zriticum imberbe densum ).
Cette variété a le même grain que la précédente,
c’est-à-dire , tendre et jaune; mais ses épis sont plus
gros et plus à épilets pressés. En outre; il est le
plus hôtif de tous ceux que nous avons cultivés :
en 1833, il était muür le 1.* juillet.
11. F. pe mue rouce ( Zriticum imberbe den-
sum rubrum ). Il a les mêmes caractères absolu-
ment que le précédent, si ce n’est que le grain
est rougeûtre. Cultivé en plein champ , il est’très
beau. à
Sous le nom de Blé de haie tardif , nous indi-
querons une sous-variété à grains aussi rougeâtres ,
(357 )
mais qui est plus de trois semaines en retard sur
Pautre, et qui a médiocrement réussi.
12. F. avczais veu ( Zriticum imberbe villosum
anglicum ).
Le grain, un peu plus petit et rougeûtre de cette
variété, le rapproche du Blé de haie rouge tardif,
et comme lui il est très tardif; mais ses épis sont
moins gros et moins pressés. [l est provenu du Fro-
ment blé-anglais rouge.
13. F. sceu veuu ( Zriticum imberbe cæsium ).
Ce froment, sorti du Æroment bleu, a les épis
allongés, médiocrement velus, et le grain rouge.
Ses feuilles sont couvertes d’une pruine blanc-bleuä-
tre, plus abondante que dans les autres fromens :
ce qui lui a valu le nom de froment bleu.
III. Epis glabres compactes.
14. F. carré ( Zriticum imberbe compactum ; Tri-
ticum creticum Mazz.; Triticum persoonium À .Mazz.);
épis rougeâtres très courts, à épilets très pressés ;
grains rougeâtres.
Il a porté les noms de Froment de Candie et de
Froment de Sicile.
Il tend souvent à donner des épis allongés, et
souvent les épis sont un peu barbus au som-
met.
15. F. carré DE mars ( Trificum imberbe compac-
tum trimestre).
Cette variété, qui est nommée Blé de Mars carré,
a les mêmes caractères que la précédente ; seule-
( 358 )
ment ses épis sont blanchätres , et son chaume moins
élevé. Le grain est petit et tendre; il donne.un
grain dur dans les terres argileuses.
IV. Epis glabres allongés , blanchâtres ou blancs ;
grains jaunes.
16. F. sans BARBE DE TALAVERA ( riticum imberbe
lutescens ); épis blancs, allongés, serrés ; grains
tendres, d’un blanc jaune-clair.
Cette précieuse espèce est connue sous le. nom
de Froment blanc, dans le département de la Vienne;
et connue encore sous les noms de Froment de Ta-
lavera et de Blé anglais: Elle est un peu tardive ;
sa stature est moyenne.
Il a donné une sous-variété rougeâtre. Le Blé
blanc de Hongrie ne paraît pas différer du Tala-
vera. 1] donne des épis rouges, aussi à grain
rouge.
17. F: sans sarse Touzerre ( Triticum imberbe
Touzella); épis blanchâtres très allongés ; grain
jaunètre clair, allongé.
C’est le Petit: blanc de M. Bujault, agriculteur
distingué du département des Deux-Sèvres, puis-
qu’il nous dit que ce froment n’est ni notre n.° 16,
ni le n° 18 (1); c’est le Froment à grain de
riz.
(4) Cependant comme il nous dit que son gros blanc et son gros
Blanc-Zéé , sont l’un et autre d’un blanc de lait, nous aurions
besoin de constater ce fait sur des échantillons, n’ayant pas encore
vu de fromens auxquels nous puissions appliquer l'expression de
blanc de lait.
( 359 )
Le grain de cette espèce est plus allongé que
celui de la précédente, et du reste, a la même
qualité. C’est la véritable Zouzelle du Midi; se-
mée tard (28 février), elle a été à chaume peu
élevé, mais elle a été plutôt en maturité que le
n° 16, semé au 8 octobre.
18. F. sans marge 81Anc p'Onessa ( Zriticum im-
berbe bessarabica ) ; épis blancs, gros, allongés,
pressés; glumes de tous les épilets allongées et
presque en courtes barbes ; grains gros, allongés,
presque. blanc-jaunûtre.
Par le grain, qui est plus gros que dans la
Touzelle et point gibbeux, comme dans le Blanc-
Zéé, cette variété semble bien distincte , et a pro-
bablement été introduite dans la Bessarabie et la
Tauride , de variétés provenant peut-être de l’Es-
pagne ou de la Flandre.
19. F. sans Barse BLanc-Zéé ( Triticum imberbe
grossum ).
Cette variété a une végétation démontrant un peu
plus de vigueur que les n° 16 et 17. Le graim
est.court, arrondi, comme dans le n.° 17.
C'est le Blé blanc de Flandre ou Simplement le
Blé blanc et le Blanc-Zéé. Nous pensons que c’est
le Gros blanc de M.:Bujault. IL donne une sous-
variété dont le grain est rougeâtre et qui peut , de
son côté ,- rivaliser avec les bons blés rouges.
Comme toutes nos expériences sont surveillées
essentiellement par nous, pour les semis et les ré-
coltes, nous sommes assurés qu'il n’y a ‘aucunes
de ces erreurs trop communes dans les jardins de
( 360 )
botanique, qui peuvent en imposer sur les modi-
fications réelles des végétaux. Au surplus , dans
toutes les expériences relatives au froment, on peut
être assuré que , si l’on n’a pas soin de surveiller
les semences , les meilleures espèces seront, en
quelques années, complètement dégénérées: soit sous
le rapport du volume et de la forme des grains,
soit sous celui des épis ou du chaume, par les va-
riétés qui se forment et se multiplient impercepti-
blement. C’est ainsi que dans le Blanc-Zéé nous
avons pu trouver jusqu’à quatre variétés parfaite-
ment distinctes : le glacé est plus court et plus
renflé que l’espèce ordinaire ; le tendre a donné
des grains qui sont plus petits ou plus longs, comme
ceux des n.* 16 et 17.
Nous pensons que le froment décrit dans le Jowr-
nal de l’Académie de l'Industrie (vol. 2, p. 32),
appartient à cette division, d’après ce qu’on en
rapporte et qu'on décrit ainsi : « Froment blanc
» d'hiver à fleurs rougeûtres ( Triticum candidum ) ;
» fleurs rougeûtres ; épilets sexflores, renflés, gla-
» bres, mutiques , imbriqués, d’un blanc luisant,
» tirant sur le roux; valves de la spathelle diver-
» gentes; graines blanches , farineuses intérieure-
» ment.» On le met au-dessus de toutes les cé-
réales connues , par la beauté de son grain, la
finesse de sa farine, l’excellence de sa saveur ; tel
en parle au moins le secrétaire de l’Académie de
l'Industrie, M. Leroy de Bacres, duquel nous en
espérions la communication, si notre demande eût
été accueillie.
(361)
V. Epis blancs, sans poils, grains rougeûtres.
20. F. saxs gare DE Norman ( Zriticum im-
berbe elatior ) ; épi serré; chaume très robuste, élévé ;
grains longs , gros , comme bossus, tendres.
Nous l’avons eu sous le nom de Gros froment de
Normandie, sous lequel il est connu , de même
que sous celui de Gros blé. Ses feuilles sont très
larges, d’un vert foncé; la paille forte. Le Fro-
ment de Rével nous a paru très voisin de celui-ci,
mais un peu moins haut, de même que le Froment
rouge du département de la Vienne.
21. F. sans BARBE mars-NaIN ( Triticum imberbe
nanum ); chaume trés petit; épis assez gros et
pressés ; grain gros, rougeâtre, tendre.
Nous avons eu cette variété remarquable sous
le nom de Blé de Mars blanc sans barbe.
22. F. sans BarsE cros-crAiN ( Triticum imberbe
gibbosum ).
Cette variété, cultivée sous le nom de Froment
rouge, dans quelques parties du département de
Maine et Loire, a le grain comme le n° 20, et
aussi beau, mais le chaume s’élève bien moins.
28. F. sans sarse s.t-Laup ( Triticum imberbe an-
degavense ); il a la taille du précédent et le grain
un peu moins gros, et du reste les mêmes quali-
tés; l’épi est assez court, compacte, blanchätre.
C’est quelquefois le Froment gris, et le plus or-
dinairement le Froment de S.'-Laud du département
de Maine et Loire. Il n’y a pas de doute, d’après
(362)
une comparaison faite attentivement, que le Æro-
ment de S.t-Nuzaire (département de la Loire-In-
férieure ), ne soit la même chose.
24. F. sans BargE cris ( Triticum imberbe subla-
num) ; épis allongés , lâches, blanchâtres ou blanc-
grisätre ; grains gros et tendres.
Cest le Blé bricart de plusieurs départemens
de l’ouest; le Froment la trique de Cholet; le Fro-
ment raze de S.t-Florent ; le Froment raque de quel-
ques cantons de l’ouest de Maine et Loire.
25. F. sans Barse DE Ferceveere ( Tréticum im-
berbe germanicum ); épis très allongés, blancs , à
étages nombreux et écartés; grains longs et moyens,
tendres ou durs; chaume élevé.
26. F. sceu sans sarse ( Tréticum ahser be cœru-
leum ); épis allongés, blancs, à étages un peu écar-
tés ; chäume élevé ; grains un peu allongés, gros.
Toutes les parties vertes sont très bleuâtres, par
une pruine abondante , ce qui lui a valu le nom
de froment bleu.
27. F. sans BARBE DE mans ( Triticum site tri-
mestre ); épis gros, pressé, blanc; grains moyens:
Cette variété, que nous avons recue sous le même
nom de Blé de Mars ou de Blé de Mars ordinaire;
et de Froment de Mars sans barbe , et assez difficile
à distinguer des n.® 21 et 22. Son grain avbeau-
coup grossi dans les terres de Maine et Loire.
28. F. sans BARBE DF MARSELAGE ( 7rétécum imberbe
vernale ). ÿ!
Ce froment a le grain un peu plus clair que le
précédent et lui ressemble beaucoup: On le nomme
( 363 )
Blé de marselage (de mars), dans diverses parties
de la France. |
29. F. sans sar8e Picrer ( Triticum imberbe pic-
tetianum ); à épis blancs, gros, pressés; grain un
peu allongé, tendre.
Il se distingue assez difficilement, et cependant
il nous paraît une race particulière qui a müri dix
jours plus tard que les autres variétés de ce groupe:
c’est le froment Pictet des agronomes modernes.
80. F. sans sAR8E RÉvEL n’aiver ( Triticum imberbe
Reveli hybernum ) ; épis très blancs , longs, serrés;
grains gros et comme bossus.
C’est le froment de Rével d'hiver des collec-
tions.
31. EF. sans sARBE onRDINAIRE ( Triticum imberbe
vulqgare ).
Sous le nom de froment d’hiver, nous avons
recu du Jardin des Plantes de Paris, une variété
qui a très bien réussi, et dont les épis sont d’un
beau blanc; le grain très beau; et de la Ferme
modéle de Grignon, un froment d'hiver ordinaire,
qui, dans les mêmes conditions, la semence étant
belle , a mal réussi, et dont le grain semble quit-
ter difficilement la balle, et mürit au moins quinze
jours plus tard que les autres.
Le froment rouge des environs de Loudun (dé-
partement de la Vienne ) se rapporte au froment
sans barbe ordinaire.
(364 )
VI. Epis glabres , allongés, grisâtres ou rougeûtres ;
grains rougeûtres.
32. F. sANs BARBE DE MARS cms ( Triticum imberbe
trimestre griseum ); épis grisätres, allongés, mé-
diocrement pressés ; chaume petit (plus que dans
toutes les variétés suivantes ); grain moyen, ob-
long.
C’est une variété distincte des autres fromens de
mars, sorti du n.° 27, mais à chaume plus petit.
33. F. sans BARBE mars-ÉLEvÉ ( Triticum imberbe
trimestre elatior); épis grisâtres, grain gros, oblong.
Ce froment que nous avons eu sous le nom de
Blé de Mars rouge sans barbe , est plus grand que
le précédent, et a bien réussi: semé à la vérité
dès le 28 janvier.
34. F. sans sarse pu Caucase ( Triticum imberbe
caucasicum ) ; épis longs , trés rouges , à étages éloi-
gnés ; grains allongés, gros.
Il a tous les caractères qu’on attribuait au Fro-
ment de Rambouillet.
35. F. sans Barse DE Honene ( Troticum imberbe
hungaricum ; Triticum hyberneum À. Mazz.
Si ce n’est qu'il est plus grand que le précé-
dent, ce froment lui ressemble beaucoup par la
couleur de l’épi et la forme et couleur du grain:
seulement les épis semblent plus atténués au: som-
met. Comme le précédent , il donne des épis ve-
lus et passe à la couleur grisâtre et de là à la cou-
leur blanchâtre : donné sous le nom de froment
(365)
blanc de Hongrie, où il a dégénéré, le grain étant
rouge; ou bien c’est un nom faux.
36. F. sans BaRBE criré ( Zriticum imberbe ru-
fescens ) ; épis grisâtres, tirant sur le roux, gros,
pressés ; grains gros, comme bossus.
Il est cultivé, dans l’arrondissement de Beaupreau,
sous le nom de Petit froment grillé, et Froment
grillé , petit rouge, petit Breton sans barbe.
37. F. sans marge D’Arsace ( Triticum imberbe
alsaticum); épis rougeâtres, courts, pressés; grain
moyen , oblong.
C’est l’une des variétés de cette série les plus
répandues en France, et qui a aussi reçu le plus
grand nombre de dénominations. C’était le Blé an-
glais, n.* 9, de Tessier, connu depuis sous les
noms de Blé Lammas, Blé chichot, Blé d’'Arden-
nes, Froment rasé, Froment rouge, Blé triquet rouge,
Froment mousse.
38. F. sans 8ARBE GRAND-ROUGE ( Triticum imberbe
Bujaultii) ; épis rouges, courts ; grains gros , ar-
rondis, rouges.
Ce froment , très rapproché du précédent, a
cependant une plus belle végétation et est bien plus
élevé.
39. F. sans BarBe PeTIT-ROUGE ( Triticum imberbe
subrotundum ) ; épis rouges, courts ; grains gros,
courts, arrondis, rouges.
—Getté variété est venue au moins aussi grande
que la précédente, bien qu’annoncée |plus ‘petite
que le n.° 38. Toutes deux nous ontparu très dis-
tinctes des n.® 36 et37, avec lesquels elles ont beau-
coup de rapports.
( 366 )
Dans les jardins, les, épis des fromens qu’on y
cultive, acquièrent une moins belle couleur que dans
les champs, par l’effet d’une lumière. plus brisée, et
aussi parce qu’on est souvent obligé. de les cou-
vrir de grosses toiles, lors de la maturité pour
les préserver du ravagé des oiseaux.
$. 5. Fineiaus générales Sur les. Fromens et sur le:
mérite des FRE espèces :ou variétés Riprées à
la culture ; ou qu'on peutcultiver.
Nous :croyons avoir !constäté, par une obserya-
tion continue , que des fromens sans barbe., étudiés
comparativement avec.les espèces .les. plus rappro-
chées qui en sont pourvues, ont le grain généra-
lement plus gros, mieux nourri;.-mais ils ont J’in-
conyénient d’être ae sujets à être attagaés par les
oiseaux , que les fromens barbus : les. barbes. de
ces derniers-.les éloignant jusqu’à un certain point.
Il ne faut pas croire. que. toute-variété de. fro-
ment convient à toute espèce de sol.et. à, tout!cli-
mat; et c'est: par les.essais seuls; qu’on .peut.'ac-
quérir. des connaissances -positives. à,.cet. égard:
aussi, en agriculture , il y a une science de localité:
Une autre observation , et.qui. n’est-pas, nouvelle ,
c’est. .que: les, fromens, de.mars, c’est-à-dire, semés
en février ou en mars, ont la paillé:moins haute.
les épis moins fournis, le-grain plus pétit, et four-
nissent -proportionnellement plus de: son:que des
fromens d’hiver. On pourrait ajouter .qu’ilssont-un
peu plutôt en maturité, ce qui ‘semblerait une
( 367 )
contradiction , si l’on ne savait que les racines,
n’äyant pas eu le temps de pénétrer aussi avant en
terre que celles des fromens d’hiver, fourmissent
moins à une végétation prolongée. Les fromens qui
mürissent le plus promptement sont les plus favo-
rables pour obtenir des blés de mars ; en même
temps que leur paille ‘est préférable pour la nour-
ritüre des ‘animaux domestiques auxquels on la
donne.
Le très savant Tessier avait déjà vérifié que les
fromens pouvaient germer après deux et trois an-
nées de récolte, ce que nous avons aussi cons-
taté ; mais avec l’observation que certaines espèces
conservaient plus long-témps leur propriété ger-
minative. Ayant voulu , en 1831, remonter à l’o-
rigine de quelqües fromens que nous possédions
dès 1824, au Jardin botanique d’Angers, et vé-
rifier quelques confusions faites dans la récolte des
fromens que noûs avions réunis, nous avons fait
lever , au mois de mars, des grains qui dataient
de la récolte de 1825 : à la vérité, quelques va-
riétés semées en octobre 1830 et mars 1831, ont
pourri en terre au lieu de germer. On a eu tort
de dire dès-lors, que le froment ne pouvait être
semé après deux années; ce n’est que vers la cin-
quième ou sixième année qu'il perd la propriété
de gérer! Les ‘espèces qui restent enveloppées
dans leurs balles, telles que le Froment épéautre,
le Froment- amidonnier ; -eicconservent le plus
leur. propriété germinative : l’action de l’oxigène, de
V’air étant moins médiate. Parsune! infusion. dans
( 368 )
l’acide hydrochlorique , étendu d’eau, on peut leur
rendre la propriété germinative ; mais c’est un pro-
cédé plutôt curieux et bon pour les jardins de bo-
tanique , que d'application pour les cultures en
grand.
Toutes les variétés sont susceptibles de passer à
l’état de blé tendre, et les blés tendres à l’état de
blé dur. Nous avons des expériences qui nous ont
prouvé que cet état ne s'établit que par transition
insensible , et que la qualité acquise. peut se con-
server assez long-temps. Dans les pays froids et
humides , les fromens sont durs ou glacifs (1); et les
variétés tendres ou à cassure blanche, tendent à dé-
générer et à devenir dures. Les terrains argileux
et les fonds humides conservent. ou entretiennent
celte qualité ou même la font naître. Les terrains
sablonneux ou calcaires , et trés chauds, sont plus
propres à conserver les blés tendres ou même à les
créer, pour ainsi dire ; et toutes les fois qu’on vou-
dra obtenir une modification, sous ce rapport, il
faudra toujours en renouveler la semence de temps
à autre, ou la soumettre long-temps à des circons-
tances qui, par l'effet du sol ou de l'exposition, en
modifient les qualités, telles qu’on cherche à les
avoir: Il n’y a pas de doute que si. le pain :pro-
venant des Dlés glacifs ou. durs , est moins blanc et
plus lourd, il_est plus nourrissant et plus sayou-
reux, et durcit moins promptement : toutes ,obser-
(1) Voyez les observations qui suivent ce travail, et relatives aux
blés durstet aux blés tendres.
( 369 )
vations que nous avons constatées par des expé-
riences comparatives.
Si les fromens durs semblent plus répandus dans
le midi de l’Europe que dans le nord, c’est que
là il y a plus d’incurie sur la qualité des espèces
de céréales livrées à la culture, que dans les contrées
où la nature semble s’opposer aux efforts de l’indus-
trie agricole. Dans les contrées du nord l'esprit de
l’homme se raidit contre la nature, et obtient sou-
vent plus qu’on ne le fait dans les climats où tout
est presque abandonné aux influences d’un sol sou-
mis aux plus heureuses expositions solaires.
Le Froment-Epéautre ( Triticum Spelta ) et toutes
ses variétés ont le désavantage d’avoir des- épis très
cassans et de rester enveloppés dans leurs balles.
Cette dernière qualité oblige de leur faire subir
deux moutures , dont une préliminaire, avec écar-
tement des meules et un ventilateur, afin de sé-
parer les balles. La qualité de la farine dépend de
celle du grain , qui est susceptible d’être blé
tendre ou blé dur, et aussi bonne que dans les au-
tres fromens, sans exception. L’inconvénient que nous
avons indiqué pour la mouture fait abandonner , né-
gliger l’Epéautre, si ce n’est dans les contrées froides
ou montagneuses, comme dans la Savoie, dans la
Suisse et dans quelques départemens de la France
(les départemens du Mont-d’Or et du Cantal }) , où
elles résistent mieux aux froids que les autres fro-
mens, et mürissent aussi plus promptement. Nous
avons trouvé dans le département de Maine et Loire
20 à 25 jours de différence de précocité, pour cette
26
(370 )
espèce : bien que nous en ayons semé en octobre,
novembre. et janvier. On s’apercoit d'autant mieux
que le Froment-Epéautre est plus robuste, que pen-
dant les froids de l'hiver il reste vert et les feuilles
dressées, tandis que les autres fromens sont souf-
frans et leurs feuilles jaunâtres et tombantes, lors
des gelées et des neiges.
L'Engrain ( Triticum monococcum ) , la plus petite
espèce de toutes les espèces de froment, partage
une partie des propriétés de l’Epéautre ; mais comme
il rapporte très peu, et que son grain est dur, il
ne peut être un bon objet de culture que pour faire
des coupes printannières, pour vert à nourrir les ani-
maux domestiques , et pour les lieux montagneux où
l’avoine a de la peine même à réussir.
Le Froment faux-engrain est plus productif que
PEngrain , mais il nous a paru moins bien LL
à l'impression du froid.
Si le Froment - amidonier ( Triticum farrum )
n'avait pas le désavantage de rester enveloppé de
ses balles, il y a plusieurs de ses variétés qui sont
aussi productives que les fromens les plus cultivés;
mais la double manipulation qu'il exige, comme
l’'Epéautre, pour être réduite en bonne farine, ne
peut jamais balancer la beauté du grain de certaines
variétés. Au reste, bien que l’on cultive plusieurs de
ses variétés dans d’assez vastes contrées , elles ont été
trop peu étudiées pour qu’on puisse rien dire d’im-
portant à leur égard, et ne peuvent avoir au surplus
des qualités qui ne puissent se retrouver dans les
autres fromens faciles à dégager des balles.
—_
É (371)
Le Froment faux engrain a les qualités de lEn-
grain , il est seulement un peu plus robuste pour
la stature. Ï
Le Froment de Pologne , cultivé souvent sous le
nom de Seigle de Pologne et de Seigle de l'Ukraine,
des lieux où il est le plus cultivé, est une espèce
remarquable pour la beauté de son grain, et la
grosseur de ce grain , si on le compare au seigle,
mais qui est inférieure au froment de bonne qualité.
Sa végétation vigoureuse et son ample feuillage con-
courent à effriter beaucoup la terre. La paille est
trop grosse pour fourrages ; cependant il vaudrait
mieux le cultiver que le seigle, s’il venait bien,
ce dont je n’ai pas l’expérience et ce dont je doute,
dans les terres dites terres à seigle. On ne trouve
rien dans les ouvrages sur la qualité des farines de
cette espèce, tant on a apporté jusqu'ici d’indiffé-
rence sur ce qui est relatif aux choses qui sont ce-
pendant pour nous de première nécessité ; mais nous
tenons de M. le lieutenant-général comte Dessaix,
propriétaire de Fernex, que le pain fait avec ce fro-
ment est très bon, par l’expérience qu’il en a par-
devers lui.
Quels que soient les éloges qu’on ait pu donner
à quelques variétés du Froment d'Afrique, dont
plusieurs sont cultivées en grand, en Barbarie , en
Sicile, en Tartarie; quels que soient les avantages
qui leur soient particuliers , ils ne l’emportent en
aucune manière sur plusieurs des fromens cultivés
dans la Belgique , la France et l'Angleterre ; ainsi,
à moins qu’on obtienne un froment de Tangarock
(372)
à grain tendre, nous ne pensons pas qu’il puisse
mériter, au moins d’après nous, tous les éloges qu’on
lui a prodigués , si ce n’est peut-être par la quantité
du produit ; car pour la qualité de ce produit il
est inférieur , bien que le grain soit gros et jau-
nâtre. Nous avons vu le froment d'Afrique à grain
tendre, mais il ne s’est pas soutenu et est devenu
de nouveau très corné et très dur.
Le Froment plat , c’est-h-dire à épi comprimé de
deux côtés , est l’espèce qui fournit, avec le Froment
barbu et le Froment sans barbe, les meilleures et
les plus belles variétés. La végétation en est plus
vigoureuse. Comme il a le chaume plein de moelle,
vers le sommet, il se brise moins par l’action des
vents lorsqu'il est en épis et par le poids de l’eau
lorsqu'il vient des pluies. A la vérité, il demande
généralement des terres végétatives et profondes.
Dans les terres arides il réussit mal, comparé à
certaines variétés que nous indiquerons et qui don-
nent de très bons produits dans les terres peu riches.
Le Froment plat sans barbe est une espèce d’une
qualité supérieure ; il existe au milieu des moissons,
dans la Provence.
N'ayant vu que des variétés de fromens durs dans
le Froment plat blanc, n.° 3 , malgré l'abondance de
ses produits, dans les bonnes terres , nous ne pou-
vons le classer que dans les qualités inférieures ;
mais nous sommes persuadé qu'avec quelque atten-
tion on obtiendrait une variété à grains tendres, que
nous aurions observée dans les cultures en grand,
comme nous l’avons vu pour des variétés suivantes.
/
(375 )
Les meilleures variétés de froment plat sont celles
qué nous avons indiquées sous les noms de roux,n.°4,
rouge , n.° 6, de Poulard , n.° 7; le grain en est gros
et nourri, les tiges fortes. Il réussit surtout dans les
bonnes terres du midi , qui paraît lui être plus fa-
vorable que le nord : joint à ce qu’il mûrit un peu
plus tard que les autres variétés de fromens.
Le Froment plat étalé, n.° 12, est remarquable
par la beauté de son grain, et mériterait d’être cul-
tivé en grand. La couleur de ce grain est le jau-
nâtre, de même que dans le Froment plat rameux.
Il faut à ce dernier un terrain riche de végétation ;
autrement 1l réussit mal, et en outre il tend ordi-
nairement à rentrer dans le Froment étalé ou dans
une variété analogue : ce qui au reste n’est pas un
inconvénient, puisque dans les espèces rameuses il y
a toujours quelques grains avortés dans tous les épis.
Par les variétés n.” 4 à 7 de cette espèce, on trouve
un passage très appréciable avec le Froment renflé,
par l'intermédiaire de la première variété que nous
avons indiquée dans le Froment renflé, et qui pou-
vait aussi bien rentrer dans le Froment plat que dans
le Froment renflé, si elle n’eùt pas eu le grain, la
grandeur et la pubescence approchant de la dernière
espèce.
Le Froment renflé, qu’on peut réduire , d’après ce
qui nous est connu, à trois races ou variétés fixées :
le Planc ou Pétianelle blanche, le Pétaniel roux et
le gris ; mérite d’être plus répandu.
Ce froment est le plus vigoureux de tous; celui qui -
exige les meilleures terres et qui rapporte le plus:
(374)
aussi convient-il beaucoup après les défrichemens.
Comme son grain est souvent dur, jusqu’à ce qu’on
n’ait que des variétés tendres, il aura de la défaveur
pour la qualité de ses produits. Sa paille très grosse
et très dure est rejetée des animaux, ou demande-
rait une manipulation particulière pour être d’une
facile consommation dans l’entretien des animaux
domestiques. Son grain très beau à la vérité, trés
lourd, donne beaucoup de farine, mais rude et
fournissant une pâte brune, et de là peu favorable
pour faire de trés beau pain. Malgré tout, nous ne
saurions trop recommander ce froment , parce qu'il
jouit de propriétés assez remarquables. Cette an-
née 1833, il a parfaitement réussi dans les lieux
où il a été cultivé dans le département de Maine
et Loire, comparativement avec le froment de S.t-
Laud, qui a moins bien réussi. Sa végétation a ré-
sisté à l'intensité de la chaleur; son grain est très
nourri : seulement il mürit huit à dix jours plus tard,
ce qui n’est point un inconvénient dans l’ouest ni le
midi de la France. Il rapporte encore mieux que
plusieurs bonnes variétés dans les terres médiocres.
Il pèse à la vérité moins que les bons fromens bar-
bus , à mesure semblable. Dans le département des
Deux-Sèvres , il vaut jusqu’à trois francs de moins
par hectolitre que les bons fromens.
Comme il est de principe qu’on ne peut prendre
trop de soin pour se procurer des semences pro-
venues de pieds vigoureux, parce que la puissance
de végétation se soutient pendant plusieurs années,
le Blé géant de S.-Hélène peut être cultivé de pré-
( 375 )
férence ; mais il faudrait en obtenir un blé tendre.
Voici une expérience faite sur deux litres de cette
sous-yariété, dont nous devons la communieation à
J’obligeance de M. Lofficial, membre de la Société
d'Agriculture , Sciences et Arts d'Angers, et du
Conseil-général du département. Le froment de S.i®-
Hélène, semé au milieu de décembre 1832, com-
mune du Vieil-Baugé, dans un terrain de moyenne
qualité et non fumé , s’est élevé | malgré la tempé-
rature défavorable aux céréales, à plus de 15 déci-
mètres, 125 millim. (5 pieds), et fournissait de deux
à dix tiges par grain. Au mois de mars, le semis pa-
raissant trop épais, on en a enlevé les deux tiers.
Repiqué en rayons, à 15 centimétres ( 6 pouces )
de distance en tous sens, il a un peu moins talé,
mais sa végétation a été plus belle, et il a donné
des épis plus gros, plus égaux. Chaque épi con-
tenait de 60 à 80 grains. Pris au moment de la ré-
colte , un épi entier pesait 7 grammes, et les 72 grains
qu’il contenait, mis à part et pesés, n'avaient perdu
que quelques centigrammes.
Comme il s’est trouvé du mélange de quelqu’auire
froment dans les deux litres semés, il est probable
«qu'ils eussent produit plus de 80 litres : produit
qui a cependant été le résultat de l'expérience,
bien que vingt litres appartinssent à une autre Va-
riélé.
Le Froment renflé est de toutes les espèces ou
variétés celle dont le produit est le plus abondant,
et aprés elle nous placons les bonnes variétés ;du
Froment plat ou Blé de Providence.
(376)
Le Froment renflé rameux ou Blé de miracle, s'il
est cultivé dans de bonnes terres, rapporte beaucoup.
La qualité de son grain est supérieure à celles des
autres variétés de cette espèce ;. car il est presque
tendre et donne une farine blanche, dans la variété
à grain jaunâtre , que nous avons recue de divers en-
droits. La variété connue dans l’arrondissement de
Beaupreau ( département de Maine et Loire), sous le
nom de Êlé à mailloche, est très bonne et recherchée,
étant à grain tendre, mais rougeâtre : aussi est-il
pour nous la meilleure de toutes celles du froment
renflé.
Le Froment barbu de Sicile, n° 3, a l'avantage
d’avoir une paille pleine au sommet , pour résister à
la force des orages ; mais son grain est assez ordi-
nairement dur. Cependant comme il est tendre dans
certains individus , on pourrait, en le surveillant sous
-ce point de vue, obtenir une variété très fixe ) qui
rivaliserait avec les autres variétés du froment barbu;
et l’emporterait même sous le rapport de la qualité
nourrisante de sa paille très petite , facile à broyer
par les animaux domestiques qui en seraient nourris.
Le Froment barbu de Toscane , n° 4, etle Fro-
ment barbu à chapeaux, qu’on sème très épais, en
mars, dans les terres les plus médiocres, aux en-
virons de Florence et de Pise (1), pour en avoir cette
belle paille propre à tisser les chapeaux d'Italie, du
Caen ER EE EEE SOU Ce BR CE UERN EU RER CRUE PP AL TO
(4) En Suisse au contraire, on sème clair pour avoir de grosse
paille , qu’à la vérité on fend, au lieu de l’employer entière comme
en Italie.
(371)
prix de cinq et six cents francs, sont d’une sta-
ture moyenne, et fournissent peu, à raison de la pe-
titesse de l’épi et de celle du grain. Aussi, par la
qualité de ce grain qui est dur, ce froment n’est:l
recommandable que pour sa paille et pour en obte-
nir la Paille d'Italie, dont la qualité a été acquise
aux dépens du grain , en semant épais, et en mars:
ce qui lui a imprimé une disposition telle qu’elle
est comme fixée, et qu'il faudrait un très long laps
de temps , pour amener une autre espèce à cet état
désiré. En Suisse, par une singularité opposée, on
se sert des pailles de très grands fromens, pour le
même objet.
Le Froment barbu tremois, n.° 7, ou Blé tremois,
cultivé dans l’ouest de la France, est constam-
meni d’une assez petite stature , et à grain petit;
mais comme il est hâtif, il a l'avantage de pouvoir
être semé même au commencement d'avril , et de
rapporter plus qu’une meilleure variété semée dans
le même temps. On peut dire que c’est une espéce .
agricole toute faite, et qu’on a plus d’avantage à
s’en servir que de celles qui n’ont pas l'habitude
de parcourir toutes les périodes de leur végétation,
dans un très court laps de temps.
Le Froment barbu blanchätre, n.° 9, a été l’un
des plus universellement cultivés en France, il n’y
a encore qu’un petit nombre d’années ; c’était le seul
connu dans l’ouest de ce royaume. Dans le dépar-
tement de Maine et Loire , les fermiers disent qu’il
résiste mieux à la gelée dans les terres humides et
courtes, qui semblent les plus impressionnables aux
(378)
premiers et aux derniers froids, par la facilité avec
laquelle elles se soulèvent et se laissent aller aux
premiers rayons du soleil : terrains que les colons
nomment terres brécheuses. Un certain nombre de
cultivateurs tiennent encore à cette variété, bien
qu’elle donne généralement moins que les espèces
introduites dans ce département, depuis une quin-
zaine d'années. Les épis en sont bien fournis et non
susceptibles de se briser au battage ; le grain est beau
et se dégage facilement des balles ou glumes ; la paille
reste plus garnie de feuilles , elle est moins dure que
celle de beaucoup d’autres espèces, et par cela plus
propre à la nourriture des animaux domestiques :
toutes qualités qui protègent encore cette espèce
dans une grande partie de l’ancien Anjou et sur-
tout dans l’arrondissement de Saumur, où cette
variété de froment paraît convenir dans beaucoup
de terres légères, de nature calcareo-argileuses (1).
Au surplus, son mérite nous semble un peu fondé
sur des habitudes de pays; car dans certains endroits
on le préfère , comme rapportant plus et mieux , à
certaines variétés qui lui sont supérieures de toutes
manières : tant les habitudes prévalent long-temps
sur Îles améliorations les plus avantageuses.
Le Froment barbu rouge , n.° 10, est assez es-
.
(4) Une partie de ces observations nous ont été communiquées
par notre collègue M. Gontard fils, agriculteur recommandable, et
au père duquel on doit la précieuse introduction de la chaux comme
amendement dans l’agriculture du département de Maine et Loire,
depuis 1788.
(379 )
timé dans plusieurs parties du département de Maine
et Loire, pour la qualité de son grain, celle de la
paille et pour son produit. Il paraît convenir sur-
tout dans les terres à seigle, qui sont généralement
des terres maigres ou peu végétatives. Dans beau-
coup d’endroits de ce département on tient à en
conserver la culture, pour ses avantages connus,
bien qu'il y ait des espèces d’un meilleur rapport.
Dans le département des Hautes-Alpes, sous Le sim-
ple nom de FÆroment on cultive cette variété, mêlée
souvent au barbu blanchätre. Au surplus , lune et
l’autre de ces variétés sont susceptibles de passer
très facilement à une sous-variété, à épis plus min-
ces et à grain plus allongé; de donner des épis pu-
bescens ou couverts de poils courts ; et eufin d’offrir
une couleur rouge très pâle, blanchâtre, jaune et
brunâtre : toutes modifications qu’on peut perpétuer,
en ayant le soin d’enlever, chaque fois qu’il s’en
présente, les modifications étrangères à celles qu’on
veut fixer. Comme toutes les autres variétés , il peut
perdre ses barbes et passer au Æroment sans barbe.
La farine fournie par le Froment barbu rouge, à
moins de qualité que celle du Froment barbu blan-
châtre, et on lui reproche aussi d’avoir les épis fra-
giles sous le fléau ou sous le rouleau.
Le Froment barbu Pictet, n° 12, est une trés
bonne espèce à introduire, ainsi que le Froment
barbu du Cap, n.° 11 : l’un et l’autre ayant un grain
susceptible de donner, dans les terres convenables,
des farines de première qualité.
Le grain du Froment barbu de Naples est tel
( 380 )
que nous ne douions pas de sa bonne qualité,
dans les grandes cultures. Nous n’avons pu l’appré-
cier que dans ses produits dans nos jardins de bo-
tanique ; moyen peu propre à juger de toutes les
qualités des céréales.
N'ayant pas vu en grand la culture du Froment
barbu compacte, nous ne pouvons nous prononcer
sur ses qualités ; si ce n’est qu'il a toujours très
bien réussi dans nos semis, tandis que beaucoup
d’autres variétés ont eu une végétation languissante,
bien que placées dans les mêmes circonstances.
Le Froment sans barbe est assez nombreux en va-
riétés, mais il n’est pas facile de les distinguer. A
Vextérieur les épis sont blancs ou rougeâtres, velus
ou glabres , pressés ou lâches ; les grains sont ou
grisâtres , ou jaunes, ou blanchâtres, ou rongeâtres.
Le Froment sans barbe de Crète jaune, n° 1°,
qui a glacé dans nos jardins, est une espèce très
bonne à cultiver, et au nombre des plus impor
tantes : son produit nous ayant toujours paru ex-
cellent. Le grain de la variété rouge est moins bon.
Le Froment sans barbe grand velu , n.° 3, mérite
d’être cultivé par la beauté de la végétation ; il ne
peut sous ce rapport être confondu avec aucune autre
espèce à épis velus.
Le Froment blé de haie, n.° 10, vu sa maturité
prompte et les qualités de son grain, ne saurait trop
être recommandé, surtout pour les pays septentrio-
naux. Nous ne connaissons rien qui lui soit supérieur
dans les fromens, ni pour le produit ni pour la
qualité.
(581)
Le Froment sans barbe de Talavera, n° 16, a
toutes les qualités des fromens velus à grain blanc-
jaunâtre. Cultivé dans des terres de moyenne qualité,
il a rapporté en 1832, année si favorable aux cé-
réales , plus qu'aucune des bonnes variétés cultivées
dans le département de Maine et Loire, d’après des
essais constatés par un des membres du Conseil-
général , M. Lofficial : ce qui doit encourager cette
variété qui fournit un pain de la plus éclatante blan-
cheur, comme toutes les variétés à grain analogue.
En 1833 il a donné près de moitié plus que le fro-
ment de S.t-Laud, n.° 23.
La réputation de la Touzelle des Provençaux,
n.° 17, est faite ; et ce froment partage sans nulle
différence toutes les qualités du précédent, dont il
est peut-être sorti.
Le Froment blanc d'Odessa est encore une des va-
riétés supérieures, qu’on ne peut trop recommander ;
et qui, d’après des essais faits à Grignon , réussit
presque aussi bien semé au printemps qu'en au-
tomne.
Le Froment sans barbe Blanc-Zéé, n.° 19, est
comme les trois précédens, une variété supérieure
pour la qualité des produits ; et dont, outre les
autres caractères , le grain se distingue par sa
grosseur et sa sorte de gibbosité. Dans les terres
trop argileuses et dans les terres trop humides, le
grain perd sa belle couleur blanc-jaunâtre pour pas-
ser comme au blanc-rougeâtre; mais il reprend bien-
tôt son premier aspect dans les terres convenables
aux fromens tendres. Le Blanc-Zéé réussit surtout
(382 )
dans les terres riches , telles que les défrichemens
des marais et les terres un peu fraîches ; et pour en
obtenir des produits abondans , il ne peut être cul-
tivé que de cette maniére.
Toutes les variétés dont nous allons parler main-
tenant, auront le grain grisâtre ou rougeâtre et non
jaunâtre ou blanc-jaunâtre. Cependant il y en a un
grand nombre qui offrent de très précieuses qualités,
et ce sont même les bonnes variétés de cette série qui
sont le plus répandues dans les cultures.
Le Froment sans barbe de Normandie , n.° 20 , est
de tous les fromens à épi blanc, celui qui s’élève le
plus dass tous ceux que nous avons été à même d’ob-
server ; c’est ce qui fait que sa paille est très grosse
et un peu désavantageuse par cette raison. Ce fro-
ment, cultivé avec soin dans le département des
Deux-Sèvres , par un agronome éclairé, M. Bujault
de Melle, bien connu, exige des terres fortes | pro-
fondes et un peu fraiches. Il est d’un très bon pro-
duit ; et si M. Bujault, qui l’a désigné sous le nom
de Gros Blé de Normandie , Va abandonné, c’est à
raison de ce que les terres dans lesquelles il pouvait
le metire, ne convenaient pas à sa vigoureuse végéta-
tion : toutes observations que nous devons à l’obli-
geance du cultivateur que nous venons de citer.
Le Froment sans barbe Mars-nain, n° 21, doit
parfaitement convenir aux terres légères , et il mérite
d’être cultivé de préférence aux autres variétés dites
de Mars : son produit nous ayant paru supérieur à
celui des autres Fromens de Mars ou de trois mois,
que nous avons pu lui comparer.
( 383 )
Le Æroment sans barbe gros-grain, n.° 22, mé-
riterait d’être plus connu; et comme son grain est
aussi gros que celui de Normandie et sa paille moins
grosse , peut-être est-il préférable à ce dernier.
Le Froment sens barbe S.'-Laud , n.° 23, qui nous
semble la variété à épis blancs du Froment Lammas ,
doit la réputation qu’il a acquise au loin , aux bonnes
terres dans lesquelles il végète et dans lesquelles est
parfaitement bien nourri son grain. Les personnes
qui le retirent du département de Maine et Loire,
éprouvent le besoin de renouveller la semence au
moins la troisième année, parce que dans les petites
terres il finit par perdre la vigueur qu'il acquiert
dans les terres de vallées et dans les meilleurs sols de
l’ancien Anjou. Ce froment réussit beaucoup mieux
dans les terres légères, profondes , sablonneuses et
bien amendées que dans les terres argileuses, où il
offre du désavantage comparé avec le Blé renflé ,
ainsi que nous l’avons déjà dit. k
Le Froment sans barbe gris, n.0 24, a été l’un des
plus anciennement cultivé en grand, dans les fro-
mens sans barbe ; et bien que le grain en soit sou-
vent d’une bonne qualité, on s’en était lassé, à raison
de ce que ses épis à épilets écartés finissaient dans
beaucoup de terres végétatives , par ne rien donner:
surtout dans des terres où l’on surveillait peu les
semences.
Le Froment sans barbe de Fellenberg ; n.° 25, qui
se rapproche un peu du précédent par la forme gé-
nérale de son épi, est une très belle espèce, remar-
quable par la longueur de ses épis et la hauteur de
( 384 )
ses tiges, mais qu'on ne doit confier qu’à de très
bonnes terres ou à des terres nouvellement défri-
chées. Il abandonne facilement ses glumes ou balles.
Le Froment bleu sans barbe, n° 26, est une espèce
vigoureuse qui produit beaucoup et s’égrène fa-
cilement. Mais, d’après les observations de M. Bu-
jault, on doit le couper avant qu’il soit séché sur
pied , afin d'éviter la perte qui résulterait par la faci-
lité du grain à sortir des glumes. Bien que la qualité
de son grain ne soit pas la même que celle de plu-
sieurs des espèces à grains roügeâtres que nous ci-
tons, cependant il y a de l’avantage à le semer,
d’après des essais faits comparativement : donnant
beaucoup de grain, et ses épis pouvant atteindre
jusqu’à 15 à 17 centimètres ( 6 pouces et plus ). Il
exige une bonne terre, des engrais et un sol frais :
autrement son grain broue , c’est-à-dire est ridé et à
demi-rempli. Pourvu qu’il y ait bon fonds de terre,
M. Bujault nous dit, dans ses notes manuscrites,
que ce froment n’exige pas une nature de terre ex-
clusive , et par conséquent que les sables, les cal-
caires ou les argiles peuvent lui convenir.
Le Froment sans barbe de Mars, n.° 27, ayant eu
dans les mêmes circonstances que les autres fromens
de trois mois , dont nous avons parlé, une très belle
végétation et un produit remarquable , doit être em-
ployé, surtout dans les bonnes terres, de préférence
à toutes celles qui portent le nom de Blé de trois
mois où tremois. Nous supposons que le Æroment
de marselage , que nous connaissons peu, est une
variété de froment de mars, qui réussit au surplus
(385)
aussi bien que lui, d’après ce que nous avons pu
en voir. Il nous à fourni un Blé blanc, mais qui a
mal réussi, même dans les circonstances les plus fa-
vorables , bien qu’il soit très vigoureux par le
chaume. Le Froment marselage ne sort pas très fa-
cilement de ses glumes et varie souvent, en donnant
des épis grisâires ou des épis barbus.
Le Froment sans barbe Pictet, n.° 29, paraît
une bonne espèce. Nous ne connaissons pas assez
ses avantages agricoles, pour ne l’avoir jamais vu
en grande culture. Ses grains ne se détachent pas fa-
cilement de ses glumes.
Le Froment sans barbe ER a n.° 30,
ne quitte pas facilement ses glumes ; il est tardif de
huit jours pour la maturité moyenne des variétés
que nous avons cultivées ; et dès-lors ne doit pas
ètre adopté dans les parties du nord de la France.
Il parait une espèce productive, ayant un très beau
grain , lorsqu'on tient à la grosseur du froment.
Les Fromens sans barbe de Mars gris et élevé,
n® 32 et 33, sont préférables à tous les blés que
nous avons indiqués jusqu'ici pour leur produit, et
ils nous ont fourni une bonne observation; c’est que
les irés petits grains sortis d’une variété à gros grain,
reprennent le volume du grain de l’espèce dont
ils sont sortis, si on les cultive dans de bonnes
terres.
Bien que les Fromens sans barbe du Caucase et
de Hongrie , n.” 34 à 35, puissent être, dans la
contrée d’où ils sortent , des espèces estimées ; ils
ont l'inconvénient d’avoir des grains qui se déga-
27
( 386 )
gent difficilement de leur glume et les épis trés cas-
sans : inconvénient, au surplus, commun à toutes
les espèces ou variétés à épis trés rouges.
Le Froment sans barbe grillé, n° 36, vu qu'il
est d’une végétation peu vigoureuse, était plus ré-
pandu qu’il ne l’est actuellement, pour les terres à
seigle et les mauvaises terres où il rapportait pro-
portionnellement plus que les bonnes espèces. La
variété à barbe ou Petit Froment breton ou Fro-
ment à six carres , lui est préférée. C’est le n.° 10
du Froment barbu.
Le Froment sans barbe d'Alsace, sous le nom de
Lammas, a été beaucoup vanté et méritait de l’être;
cependant nous avons cité plus de vingt variétés
qui lui sont bien supérieures. On lui reproche d’être
à épis trop cassans sous le fléau , et de quitter as-
sez difficilement ses glumes. Très cultivé autrefois
dans Maine et Loire , bien qu’il brime peu il est né-
gligé: il est plus rustique.
Le Froment Grand-rouge, qui s'élève jusque plus
de 180 centimètres (5 pieds 172); talle tard, mais
talle très bien. Il est un peu tardif, mais il monte
rapidement. La balle tient à l'axe, mais le grain
sort bien. Il préfère les terres fortes et fraîches,
et donne régulièrement 36 hectolitres par hectare,
d’après les observations de M. Bujault.
Le Froment Petit-rouge nous semble d’autant meil-
leur qu'il a réussi l’un des mieux, dans le grand
nombre de ceux que nous avons eus sous les yeux.
IL a égalé même le Grand-rouge en hauteur. M. Bu-
jault le regarde comme une variété précieuse, qui
( 387 )
vient itrès bien dans les terres très légères , et à
laquelle il a imposé, ainsi que pour le précédent,
la dénomination que nous adoptons. Le grain est très
beau et en première qualité, dans les blés à grain
rouge. Comme tous les précédens , il donne des
individus à épis blancs et à épis barbus.
$. 6. Observations sur les Fromens blancs.
Il n’est point à mettre en doute que bien des
qualités, lorsqu'elles dépassent la condition de cer-
taines limites , ne se changent en imperfections ; c’est
ainsi que malgré la supériorité des Fromens blanss,
c’est-à-dire à écorce jaune-blanchôtre, nous les
avons vus en butie à des reproches. Etonnés de ce
fait, mous ayons dû rechercher quelle pouvait être
la cause d’une dépréciation quime nous paraissait ni
méritée ni naturelle.
On doit se rappeler que dans l’usage ordinaire,
parmi les agriculteurs , les fromens sont classés,
abstraction faite de leur espèce ou variété, en Fro-
mens tendres ,- c'est-à-dire faciles à rompre avec la
dent, et offrant une cassure irès blanche, matie et
grenue; et en fromens durs. Ces derniers, dits
encore Fromens glacés, glacifs ou à glia, Fromens
gris, se laissent couper difficilement sous la dent
et présentent une fracture grisâtre, à surface très
unie et demi-transparente , sur tous ses points,
presque de même que la corne. Ces derniers fro-
mens sont généralement peu.estimés des boulangers,
à raison de ce qu'ils donnent moins de fleur de fa-
( 388 )
rine. Ils fournissent un pain, nourrissant à la vé-
rité, mais lourd et grisâtre : la pâte, ayant plus de
difficulté à lever, le pain qui en résulte est plus
déprimé.
Les Fromens tendres se distinguent en deux sé-
ries : les Fromens rouges ou rougeûtres , et les Fro-
mens blancs ou d’un blanc-jaunâtre. Les premiers
sont les plus universellement répandus, et donnent
en général, de belle farine et de beau pain; mais
les seconds, tels que le Talavera, la Touzelle, le
Blanc-Zéé, et plusieurs autres, passent avec raison,
pour être supérieurs pour la qualité de leurs farines.
Cependant il est certain que des boulangers ont
jeté de la défaveur dans certains cas sur les pro-
duits des fromens blancs. Ils les'ont accusés de faire
une pâte trop courte et moins liée que celle des
Fromens rouges, tandis qu'ailleurs on s’en louait.
Voulant connaître pourquoi, dans un même dépar-
tement , celui de Maine et Loire, on pouvait porter
un jugement aussi opposé, nous avons étudié le
Froment blanc de deux arrondissemens différens.
Ayant constaté que c'était le même, nous avons ce-
pendant remarqué que celui de l’arrondissement de
Segré, dont on se plaignait, avait toute la supé-
riorité des Fromens blancs tendres; tandis que ce- :
lui de l'arrondissement de Baugé renfermait un cer-
tain nombre de grains qlacifs.
Comme nous avons éprouvé, par les moyens ana-
lytiques ordinaires , que les Fromens glacés renfer-
fermaient plus de gluten que les Fromens tendres ;
nous avons dû en conclure que la présence des
( 389 )
grains glacifs donnait à la farine la qualité de duc-
tilité qu’on recherche, à la pâte qui en provenait:
qualité qui manquait au Froment blanc de l’arron-
dissement de Segré, dans lequel nous n’avons pu
trouver un seul grain glacé.
Puisqu'il est prouvé que la présence du gluten
est nécessaire pour faire une pâte liée et un pain
savoureux , il est facile de suppléer à ce manque
de l’un des principes du pain, en y faisant les ad-
ditions convenables..
Nous ne sommes pas persuadés que le gluten
n’éprouve , dans la panification ni dans la digestion,
aucune altération, ainsi qu’on l’a avancé; mais ce
qu’on ne peut lui refuser, c’est d’absorber trois fois
son poids d’eau ; c’est de concourir à faire une pâte
liée, et à déterminer la formation des yeux dans
le pain, par la vapeur qu'il laisse échapper, dés
que la température atteint 55° ; tandis que l’eau ne
s’unit et se combine à la fécule qu’à un degré plus
élevé. D’après ces propriétés, ou bien l’on ajoutera
de la gélatine animale à la fécule du Froment ten-
dre, ainsi qu’on l’a fait pour opérer la bonne pa-
nification de la fécule de Pomme de terre (1); ou
bien on y ajoutera une petite quantité de froment
(4) On peut opérer la panifcation de la fécule de pomme de
terre d’après le procédé de M. Ganal : on fait une sorte de colle
par un mélange de! 40 kilog. de fécule et 20 kilom. d’eau ; le
mélange bien fait, on ajoute 40 kilog. de fécule et 10 kilog. de
farine de froment et 25 centièmes de parties sucrées ; ensuite le
levain- et la cuisson se font à l'ordinaire:
( 390 )
glacé : telle qu’un dixième où moins même , sui-
vant les degrés convenables et relatifs à la nature
des blés mélangés.
Les proportions les plus favorables dans du pain
de première qualité, ont été :
Féeules 4080 00 RE)
Gluten. . . . . 17.
au: ou en 33.
Torarz. . . 100.
Et il paraît que tout pain qui se rapprochera le plus
de ces proportions , sera le meilleur. D’aprés cela,
il est naturel de fournir un peu de gluten aux
fromens qui n’en offriraient pas une proportion suf-
fisante, tel que le froment qui a été lobjet de ces
observations.
Dans beaucoup de parties de l’Europe, à la
vérité les moins avancées en civilisation, on préfère
les Blés durs aux Blés tendrés ; et nous devons
convenir que pour celui qui ne peut pas avoir du
pain frais, tous les jours , le pain fait avec du fro-
ment pglacif; est moins blanc, à la vérité, mais
plus agréable au goût, ne durcit pas aussi promp-
tement et paraît mieux nourrir; ou au moins il est
incontestable que la digestion s’en fait moins promp-
tement. Aussi, pour lui procurer cette qualité de
fraicheur, met-on quelquefois du seigle avec le fro-
ment.
Les Fromens durs ne donnent que 70 parties
de pain sur 106 parties de farine brute ; tandis
( 391 )
que les Fromens blancs et tendres donnent jusqu’à
90 parties sur 100 : ce qu’il est très bon de faire
connaître, pour indiquer de suite l’avantage des
Fromens tendres, et surtout des Fromens blancs.
Ces remarques qui, pour la plupart, nous sem-
blent faites, pour la premiére fois, d’après ce que
nous avons pu connaître de tout ce qui a été dit
sur les Fromens ; méritent d’autant plus d’être prises
en considération, qu’elles pourront recevoir d’utiles
applications , par des mélanges mieux appropriés et
plus rationnels qu'on ne paraît l'avoir fait jusqu’à
ce jour.
( 392 )
DE L'USAGE
DU CHLORURE DE SODIUM, DANS LE CAS DE
MÉTÉORISME ;
Par SX. Launay-Foubert.
Ex examinant divers ouvrages relatifs au chlore
et à ses composés, je rencontrai, l’année derniére,
dans le Journal des Connaissances usuelles de 1832,
une note sur l’emploi avantageux du chlorure de
sodium , contre le météorisme dont les bœufs se
trouvaient atteints, par suite de l’usage , comme
aliment, des résidus de betteraves , dans une ma-
nufacture de sucre.
Je me proposai d’essayer si ce remède ne pour-
rait pas également réussir dans les cas de météo-
risme par le trèfle.
Je donnai à un fermier de la commune de la
Membrolle, une fiole de chlorure de sodium de
Labaraque ; et lui indiquai le moyen de s’en ser-
vir. Il se présenta bientôt une occasion : il admi-
nistra le chlorure à la dose de trois cuillerées
pour un litre d’eau, et après une demi-heure, le
mal avait disparu.
Cette expérience constate un fait, qui ne pour-
( 393 )
rait avoir d'importance, qu’autant que les moyens
employés antérieurement ne seraient pas plus faciles.
Nous supposons que le chlore gazeux, augmen-
tant de volume au fur et à mesure de son déga-
gement , pénètre dans la première capacité de
l'appareil digestif ; qu’il se précipite dans les se-
condes voies , et ainsi de suite, jusqu’à ce qu’il soit
rendu au siège de formation du gaz météorique
qu’il neutralise alors, comme il le ferait à l’air libre,
dès le premier contact.
SUR LES MOYENS
DE
GUÉRIR FACILEMENT LES ANIMAUX DOMESTIQUES
De la Météorisation ou Enflure,
Dar A. de Beauvoys,
- Membre ütulaire’ non résidant, Chirurgien à Seiches.
La médecine véiérinaire reconnaît, comme la mé-
decine ; deux sortes de tympanites : l’une acciden-
telle, sans fièvre ni lésion organique ; l’autre,
toujours accompagnée d’inflammation de l'appareil
digestif et de fièvre. Mais le cas le plus ordinaire
(394 )
pour les animaux domestiques ruminans, est la
première. Plus rare chez le cheval, la météorisation
paraît y avoir son siège dans le gros intestin.
Pour combattre les accidens de la météorisation,
lon a recours ordinairement aux excitans , tels que
les spiritueux , les substances aromatiques , les car-
minatifs , la suie, le sel, l’absinthe et surtout les
préparations ammoniacales ou ammoniac liquide.
Le chlore réussit trés bien encore, mais nous ve-
nons constater ici, par des faits, que l’hydroclo-
rate d’ammoniac ou sel ammoniac n’a pas moins
de succès, dans le même cas.
Divers moyens ayant échoué, pour dissiper une
tympanite très intense, déterminée par la luzerne,
chez une vache d’un propriétaire de mon voisi-
nage , je fus instruit de l'embarras dans lequel on
se trouvait. Je me rappelai alors que, dans un ou-
vrage très vulgaire, mais méritant peu de confiance,
l’Almanach de Liège, on recommandait, dans sem-
blable cas, le sel ammoniac ; j'en prescrivis, à tout
évènement, en solution dans une verrée d’eau, la
valeur de 8 grammes (2 gros). On fut surpris de
la promptitude de l’effet et de la guérison rapide
de l’animal. Trente minutes après l’eau chargée du
sel, avalée, on pouvait pincer la peau, et trois
quarts d’heure au plus ensuite, le météorisme n’exis-
tait plus.
Depuis lors, dans un cas de tympanite, chez
une femme, mais par des causes maladives: assez
graves, j’essayai la même médication, tout autre
moyen ayant été infructueux; et en employant l’hy-
( 395 )
drochlorate d’ammoniac, à la dose de 4 grammes, à
deux fois ( 1 gros): j'obtins un heureux résultat,
qui m’étonna, et que je consignerai dans une autre
observation plus précisée.
SUR LES MOYENS
D'UTILISER LES TUBERCULES DES ORCHIDÉES,
Por M. de Beauvoys, :
Ménibre titulaire non résidant, Chirurgien à Seiches.
Les Orchis et plusieurs Ophrys, dont une série
d’espèces est connue vulgairement sous le nom de
Pentecôtes, portent des tubercules qui, préparés
convenablement , peuvent suppléer le Salep de l'O-
rient, fourni par des plantes de la même famille
et des mêmes genres. Ce fait bien connu a cepen-
dant besoin d’être vulgarisé, et pour cela il faut
indiquer le procédé simple pour réduire nos orchi-
dées indigènes en salep.
Les Orchis Morio, des coteaux ; méle , tachée ,
des bois; celle à large feuille, des prairies, etc.,
et l’Ophrys araignée , sont les orchidées les plus
* généralement répandues et celles qu’on peut récol-
( 396 )
ter le plus facilement. Toutes sont à racines en-
fouies à un décimètre (3 à 4 pouces ) en terre.
Une bécheite peut les en soustraire, lorsque la
fleur commence à se développer, parce que dans
ce temps l’un des deux tubercules n’est pas encore
entièrement dépéri et ridé. Lorsque la récolte est
faite, on monde les tubercules, dont les uns sont
sphériques et les autres à forme de main ; on les
lave complètement avec frottement, et l’on en fait
alors des sortes de chapeleis, en les enfilant en plus
ou moins grand nombre , avec une aiguille et du fil.
Ces chapelets sont plongés dans l’eau bouillante,
pendant l’espace de quatre à six minutes , suivant la
quantité d’eau ou celle des tubercules. Alors on
retire les chapelets et on les expose bien à l’air ou
au soleil ; et dans l’espace de 15 à 20 jours, ces
tubercules sont bien secs : en perdant toutefois les
deux tiers de leur poids primitif.
Lorsqu'on veut s’en servir, on peut les piler
grossièrement, et ensuiie ils fondent et forment avec
l’eau une sorte de gélatine, par l’effet d’une ébulli-
tion soutenue. Il en faut 12 grammes ou 3 gros
avec 5 décilitres d’eau (une chopine ) ou de lait,
pour faire , à volonté, une sorte de potage, si on
ajoute sel et beurre au bouillon; ou bien avec le
lait une bouillie, en y ajoutant du sucre. Ce salep
indigène, comme le salep exotique, est trés sain,
très nutritif et d’une facile préparation.
Nous savons bien qu’en suivant nos indications, on:
aura bientôt épuisé la source du salep : les orchi-
dées ne se multipliant beaucoup que par l'effet :
( 397 )
d’un trés long temps; mais enfin on en aura utilisé
une quantité très considérable , avant de les voir
diminuer sensiblement, et l’on ne fera que soula-
ger les prairies où elles sont inutiles ; les bois et
les coteaux, où elles abondent , n’en perdront rien
que quelques fleurs de moins.
Une seule personne peut, dans un seul jour,
et cela dans un grand nombre de localités, récol-
ter 3 kilogrammes de tubercules, pouvant fournir
un kilogramme de salep. Et comme cette substance
vaut 8 francs le kilogramme dans le commerce, ce
salep indigène doit au moins avoir moitié de cette
valeur. On peut faire faire cette récolte par des
bergers, et le produit, n’en fütil que pour sa
propre consommalion , serait un avantage , surtout
étant tiré d’une chose qui est sans valeur pour nous
maintenant.
( 398 )
EXAMEN CHIMIQUE
D'UNE ARRAGONITE SERVANT DE MARNE,
TROUVÉE
Dans le département de la Vienne ;
Dar M. Ÿ. Tebreton,
Membre de la Société de Médecine d'Angers , du Conseil de Salu-
brité de la même ville, Membre correspondant de la Société de
Pharmacie , et ide celle des Sciences physiques, chimiques et Arts
industriels de Paris, Membre honoraire de la Société des Phar-
maciens de l'Allemagne septentrionale.
Daxs une de ses excursions fréquentes, toujours
entreprises dans un but d'utilité, M. Desvaux, pro-
fesseur-directeur du Jardin de Botanique d’Angers,
trouva un calcaire qui fixa son attention. Sur le
désir que je lui témoignai d’en faire un examen
particulier , il m’en remit une certaine quantité, et
eut la complaisance d’y joindre une note détaillée
sur son gisement et sur les caractères qui lui sont
propres.
Voici ses expressions : « Dans la commune de
» Gencay, département de la Vienne, il existe
» une vaste étendue dont le sous-sol est de terrain
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
( 399 )
sédimentaire, composé d’argiles et de marnes ;
mais la marne y est de nature bien plus calcaire
qu’argileuse. C’est au milieu de cette formation
marneuse que se trouveni des masses plus ou
moins volumineuses, du diamètre de 2 à 5 dé-
cimètres ; irrégulières à leur surface et mélangées
de marne ou d'argile, sur différens points. Ces
masses sont d'apparence fibreuse, et avaient fixé
aussi l’attention de M. Mauduyt, correspondant
de la Société d'Agriculture d'Angers, à laquelle
il a même communiqué un travail sur les marnes
de cette localité. Ces masses dures sont suscep-
tibles de se déliter à l'air, à la manière des
marnes , et sont appropriées de la même manière ;
mais leur aspect intérieur ne rappelle l’idée d’au-
cune modification de calcaire , et pourrait faire
soupçonner que ce serait une variété de strontiane
sulfatée ou plutôt carbonatée : l’effervescence avec
les acides n'étant pas douteuse. Ces masses fi-
breuses sont toujours plus ou moins rayonnantes ,
souvent en fibres courtes ; mais le plus ordinai-
rement à fibres très prolongées, formant une sorte
de pierre blanchâtre, cassant facilement , un peu
plus dure que le calcaire spathique ou hyalin, sans
aucune translucidité. Cette substance ne peut être
rapprochée de lArragonite fibreuse conjointe par
ces caractères empiriques, qui quelquefois sont
d’un assez heureux usage dans le premier coup-
d'œil qu’on jette:sur un minéral. Cette arragonite ,
par son gisement au milieu des marnes ; par son
aspect autre que celui des calcaires , et notam-
( 400 )
ment du calcaire fibreux conjoint , et rappelant
» l’idée de certains gypses: différent des diverses
» modifications d’arragonite, méritait un examen par-
» ticulier. D’après l’examen suivant il résulte que
» c’est une nouvelle variété d’arragonite, remar-
» quable par son entière opacité, tandis que dans
» les arragonites fibreuses radiées il existe toujours
» un certain degré de translucidité. Il est vrai que
» dans quelques masses d’arragonite fibreuse , l’on
» avait déjà remarqué que leur translucidité dispa-
» raissait dans certaines parties , et alors ces portions
» d’un blanc mat offraient l'aspect terreux ; tandis
» que dans la variété que nous signalons , le blanc
» mat terne existe dans toute la masse, même au
» moment où les masses sont extraites de leur gise-
» ment qui est ordinairement à 2 ou 5 mètres au-
» dessous de la surface du sol. Nous la désignerons
» sous le nom d’Ærragonite fibreuse terne. »
Un petit fragment de ce minéral, exposé un ins-
tant au feu du chalumeau, ne décrépite pas ; néan-
moins il survient un écartement dans les cristaux,
qui alors se divisent facilement entre les doigts.
Une certaine quantité de ce minéral bien porphy-
risée a été soumise à l’action de l’acide hydrochlo-
rique qui ne l’a pas dissoute entiérement. IL y eut
une vive effervescence due au dégagement du gaz
acide carbonique ; on jeta le tout sur le filtre ; la
portion insoluble résista à l’acide sulfurique bouillant;
mais fondue dans la potasse et dissoute dans l’eau,
elle se prit en gelée. Après avoir saturé et évaporé
la liqueur, elle présenta tous les caractères de la
silice.
VV
èa
( 401 )
Je soumis la liqueur à l’action du réactif. L’infu-
sion de noix de galle , l’hydrocyanate de potasse,
indiquèrent la présence du fer : la premiére en don-
nant un précipité d’un brun-clair, qui passe au bleu-
violacé par son agitation à l'air; le second par un
précipité d’un vert-bleuâtre-clair peu prononcé.
Pour s'assurer du degré d’oxidation du fer , on fit
dissoudre uné certaine quantité de ce minéral dans
l’acide hydrochlorique faible ; la liqueur fut étendue
d’eau privée d'air, et l’ammoniaque donna un pré-
cipité blanc, qui, agité dans l’air , prit une légère
teinte de rouille. Cet oxide présenta, surtout avec
l'infusion de noix de galle, le caractère propre aux
sels de protoxide de fer. L’oxalate d’ammoniaque
précipita abondamment.
Nous dirons aussi que l’on s’occupa spécialement
de la recherche de l’alumine, en précipitant l’oxide
de fer par l’ammoniaque et le traitant par la potasse ;
sa présence ne fut pas reconnue.
Une autre portion de la liqueur fut précipitée par
le sous-carbonate d'ammoniaque. Le précipité con-
verti en nitrate, et évaporé , fut dissous presque en-
tièrement par l’alcohol concentré. Evaporé à siccité et
repris à l’eau distillée, il ne donna aucun in-
dice de magnésie, ce qui n'avait pas été dissous
par l’alcohol fut de nouveau ajouté à ce véhicule.
On enflamma le mélange, alors l’alcohol brüla avec
une flamme purpurine, indice certain de la pré-
sence de la strontiane ou oxide de strontium.
Je passe au mode que j’ai employé pour isoler ces
divers principes et en déterminer les proportions.
(402)
Cent parties de ce calcaire furent porphyrisées,, et
calcinées dans un creuset de platine, pendant plu-
sieurs heures, pour en dégager l’acide carbonique.
La différence de poids donna 40 parties présumées
d’acide carbonique. Pour s’assurer si une portion
d’eau ne concourait pas à former ce poids , on dis-
posa un appareil convenable, pour dégager et faire
passer le gaz dans l’eau de baryte. On introduisit
dans l’appareil la même quantité de pierre porphy-
risée , et l’on dégagea le gaz par l’action de l’acide
hydrochlorique, étendu convenablement et aidé du
colorique. Lorsqu'il n’y eut plus aucune efferves-
cence, et quelques heures après, on déluta ; le car-
bonate de baryte. fut recu sur un filtre et desséché :
son poids était de 174,722, d’où acide carbonique
39,033. Le carbonate de baryte étant formé de :
base, 77,6.
acide, 22,34.
174,722 x 22,34
100
nique. On voit, d’après cette opération, qu'il y a eu
un dégagement d’eau par la calcination, car nous
avons eu d’abord 40: nombre qui excède 39,033
de 0,967, et qui provient évidemment de l’eau éva-
porée. Nous reviendrons sur ce point.
Je traitai de nouveau 100 parties du même mi-
néral par l’acide hydrochlorique ; la liqueur ayant
été convenablement étendue et filtrée , il resta sur
le filtre une portion insoluble qui, bien lavée et
calcinée, pesait 8 : c'était de la silice.
On aura — 39,033 d'acide carbo-
( 405 )
: J'ajoutai un léger excès d’ammoniaque à la liqueur,
pour en séparer l’oxide de fer, qui fut reçu sur un
filtre et desséché. Dans cet état il était insensible au
barreau d’aimant; mais chauffé convenablement, 1l
perdit de son poids ; prit une couleur rougeâtre, et
devint magnétique. Son poids sur 100, fut représenté
par la fraction 0,50 qui représente elle-même 0,127
d’hydrate d’oxide de fer. En supposant l’hydrate
79,618 d’oxide ,
de fer composé de 20,382 d'eau , on aura
20,382 x 0,50
79,618
La liqueur , de laquelle on avait séparé cet oxide,
contenait encore les hydrochlorures de chaux et de
strontiane; ils furent précipités par le carbonate d’am-
moniaque en excés (1). Les carbonates étant séparés,
furent convertis en nitrates et évaporés à siccité. Le
nitrate de strontiane n'étant pas sensiblement so-
luble dans l’alcohol très concentré, j'employai ce vé-
hicule pour le séparer du nitrate de chaux. Je filtrai:
ayant ainsi isolé le nitrate de strontiane , je le traitai
par l’acide sulfurique ; je calcinai fortement dans'un
creuset de platine, pour séparer l’excès d’oxide;' et le
poids de ce sulfate fui représenté par 1,66, d’où
strontiane 0,94, qui d’aprés la composition du, carbo-
70,05 strontiane,
nate de strontiane ainsi déterminée ù
e i insi L ermi 29.94 acide ,
= 0,127 d’hydrate de fer.
EE" —
(4) On fit évaporer la liqueur et calciner dans un creuset de
platine, pour s'assurer si la précipitation avait été exacte.
( 404 )
exige 0,401 d’acide carbonique, d’où l’on a 1,341
û 100 x 0,94
carbonate de strontiane , car 35,0% — = 1,341
carbonate de strontiane.
L’alcohoi , contenant le nitrate de chaux, fut aussi
évaporé et décomposé par un excés d’acide sulfu-
rique , et l’on calcina long-temps. Le nouveau sul-
fate fut représenté en poids par 85,493, d’où chaux
47,938 , qui d’après la composition du carbonate de
nue
chaux a an exige 38,622 d’oxide carboni-
43,61 x 49,938
que, car SON 36,622 et donne 88,560
de carbonate de chaux.
Reste maintenant à déterminer , autant que pos-
sible, la quantité d’eau et d’acide carbonique ob-
tenue par la calcination. En comparant le résultat
de cette combinaison avec les proportions d’acide
carbonique exigées par la chaux et la strontiane, L'ée
se constituer carbonate :
1.° Nous avons eu 40, d’acide carbonique pré-
sumé ; |
2.° 174,722 carbonate de baryte, d’où 39,33 acide
carbonique , quanüté moindre que la premiére ;
3.0 88,560 de carbonate de chaux ne donnent que 38,622
4.° 1,841 carbonate de strontiane ne donnent que 1,401
Ce qui en résultat représente une quantité de 39,023
nombre qui est moindre que le précédent, de 0,010.
Ayant déterminé plusieurs fois la base du carbonate ;
et le résultat étant le même à quelques centiémes
(405 )
près , je crois qu'il est plus exact d'adopter ce
nombre comme le véritable ; nous aurons alors
40,000 — 39,023 = 0,977 eau de cristallisation.
Il résulte de ce travail que ce minéral se com-
pose de :
Carbonate de chaux. . . . . 88.560
Carbonate de strontiane . . . 1,341
Hydrate de protoxide de fer. . 0,127
Eau de cristallisation. . . . . 0,977
STI Es NORME 8,000
PERTE LA. don (ei MAT Sr 0,995
100,000
Cette variété de l’arragonite, par sa composition,
a beaucoup de rapport avec l’arragonite proprement
dite ; cependant elle en diffère en ce qu’elle ,con-
tient de la silice en proportion très remarquable,
vu les circonstances dans lesquelles elle se rencontre.
( 406 )
: SUR LA DÉCOUVERTE
D'UNE TERRE A PORCELAINE,
Dans le département de Maine et Loire.
Au nombre des objets de minéralogie envoyés
du canton de Vihiers à la Société d'Agriculture ,
Sciences et Arts d'Angers, par M. Bourgeois pére,
vieillard respectable de plus de 80 ans, se trou-
vait une terre intitulée Zerre de Cossé, soupçonnée
terre calcaire par celui qui faisait l’envoi : le but
de la communication étant d’obtenir des moyens
de constater le calcaire pour en tirer avantage pour
l’agriculture. Cette terre soupconnée, à l'inspection,
être du Kaolin, par M. Desvaux, et paraissant étre
en assez ue quantité, devait a ten fixer
l'attention de la Société : M. Desvaux, qui s’est oc-
cupé de la minéralogie de Maine et Loire, n’ayant
jusqu'ici rencontré que de trés légers indices de
Felspath compacte ou Pétrosilex, passé à l’état de
kaolin ou terre à porcelaine. D’après cela, il était
important de fixer son opinion sur un fait qui peut
avoir d’heureux résultats sur notre département ; et
Rour acquérir une conviction plus intime sur la
( 407 )
nature de la terre de Cossé, M. Lebreton, connu
par ses travaux distingués sur l’analyse chimique ,
fut prié d'étudier cette substance ; et voici le résultat
obtenu :
Analyse du Kaolin de Cossé par M. Lebreton.
Oxide de silicium. . . . ‘70,94.
Oxide d'aluminium . . . 20,92.
Oxide defer . . . : . 2,50.
Oxide de calcium. . : . 1,50.
Perte. . Lau QE on fe ovtite
. 100,00
Si l'on compare cette analyse avec celles de sub-
stances analogues, qui ont été faites par deux cé—
lèbres chimistes, on verra bien que notre terre de
Cossé est absolument de la même nature :
Analyse d'un Kaolin, D'un autre, par
par Vauquelin , Rose ,
Sihce 0 OUAIS 105 1 A
Aline. 1: 19,86 + NO -int de O2
PERMET 0, du crie LR 0 38:
Chaux . . . LP DR EME Er 0
Perte) 4 : A,34 pie ve 4,67...
RE RUN G 78 ur ARE 0
100,00 : : : : : 100,00
Puisque l’oxide de silicium est le principe domi-
nant dans notre terre de Cossé, comme des kaolins
( 408 )
ci-dessus , il ne reste plus de doute à cet égard ; seu-
lement il faudra constater si la quantité existante est
susceptible d’exploitation. En attendant. que la lo-
calité soit explorée avec soin (1), nous donnerons
les détails qui nous ont été transmis par M. Bour-
geois. : ;
« Entre les deux points les plus élevés du coteau
» des Gardes (Za Salle de Vihiers et les Gardes Ds
» sur la’ partie la plus affaissée , est situé le bourg
» de Cossé, qu’en hiver le soleil éclaire rarement.
» C’est dans la commune dont Cossé est chef-lieu,
» que se trouve la ferre de Cossé ; sur la métairie
» de la Tomancerie. La couche principale de la terre
» est à 2 mètres de profondeur, à en juger par
«> l’espèce de carrière ou cavité, servant aujour-
» d’hui d’abreuvoir. L’épaisseur de la terre blan-
» ché est, sur ce point, d’un mëètre au moins. La
direction de la masse serait au sud-ouest, si l’on
> en peut juger par un affleurement de cette même
» terre, se faisant apercevoir , et qui annonce cer-
tainement une liaison entre le premier point in-
» diqué et cet affleurement, et aussi avec une masse
» encore au-delà, dans la même direction, dans
‘laquelle on observe les mêmes caractéres.
» D’autres propriétés voisines de la Tomancerie
» promettent d'offrir la même terre, si l’on en juge
» d’après quelques apercus premiers. »
VU
[2
Ÿ
4
EN 5 NP af m5 NN SON
(1) Le peu de sécurité dans laquelle se -tronve la contrée où
existe ce kaolin, a suspendu les recherches d'exploration que s’est
proposées la Société d'Agriculture, ; Sciences et Arts d'Angers.
( 409)
L'existence de notre terre à porcelaine en masse
assez remarquable, n’est donc plus douteuse ; mais
il restera à savoir si elle sera suffisante pour com-
porter une exploitation suivie ; si elle sera géné-
ralement assez pure pour faire une porcelaine d’une
belle qualité. La nature du sol de Maine et
Loire, tel qu’il nous est connu , ne répugne point
à voir fondé un espoir de succès, puisque nous
avons rencontré de très grandes masses de Pétrosilex
et d'Eurtes dans ce département, et qu’assez géné-
ralement on trouve du Kaolin dans les terrains de
transition.
DESVAUX,
Rapporteur,
( 410 )
TABLEAU DE LECTURE ,
Por M. Blain,
Chef d’Institution à Angers , et Membre de la Société d'Agriculture,
Sciences et Arts de cette ville.
Cer ingénieux travail se compose de deux parties:
1.° d’une synopsie des élémens phoniques et des
articulations simples ; 2.° d’un syllabaire divisé en
cinq exercices. Nous ne pouvons, sans risquer de
compromettre les intérêts de l’auteur , entrer dans
des détails sur son ouvrage; nous nous bornerons
à insérer ici le jugement de la Commission qui
fut chargée de l’examiner.
« Ce Tableau nous a paru bien conçu; le cadre
» en est simple et la distribution méthodique : nous
» croyons que son emploi dans les classes de lec-
» ture abrégera le temps des premières études, si
» pénible pour l’enfance, que l’empyrisme a pres-
» que toujours égarée dans cette importante période
» de sa vie intellectuelle. »
(4)
ane dou
POUR GREFFER LA VIGNE,
Por A. Le Général Delaage, Baron de Saint-Cur.
La greffe de la vigne est faite avec des succès
constans dans tout le midi de la France et dans le
Saumurois. Les vignerons angevins ne la connaissant
pas ou la négligeant, je crois devoir appeler toute
l’aitention des propriétaires de vignobles sur ce tra-
vail qui doit apporter des changemens avantageux
dans la culture de la vigne, et surtout beaucoup
d'augmentation dans ses produits. En outre, on sait
que les fruits gagnent beaucoup de saveur sur les
arbres greffés; saveur qui augmente même par la
multiplication des greffes.
Jai pris dans plusieurs ouvrages, et notamment
dans le Manuel des Vignerons, ce que j'ai jugé
utile : en y ajoutant, avec les détails qui m'ont paru
convénables , les moyens d’assurer la réussite de ce
procédé, d’après ma propre expérience.
Nous voyons que les nouvelles habitudes des con-
sommateurs aisés les rendent tributaires des vignobles
(412)
rouges , tandis qu’ils délaissent nos vins blancs, ex-
cepté ceux de dessert.
Nos vins blancs ne se gardant pas en barriques,
nous sommes forcés de nous en défaire souvent à
vil prix, dans l’année de leur récolte; les vins rouges,
au contraire, acquièrent en vieillissant une qualité
qui dédommage bien au-delf du coût de leur con-
sommation. Le propriétaire qui les garde fait une
spéculation sûre dans les années , assez rares à la vé-
rité, où ces derniers réunissent la quantité à la bonté :
aussi avons-nous vu leur prix augmenter de cent pour
cent, d’une année à l’autre.
Il est donc du plus grand intérêt de changer la
couleur des vins de qualités inférieures que nous
récoltons ; et c’est par la greffe que nous parvien-
drons à obtenir cet heureux résultat.
Pénétré de ces vérités, j'avais essayé les greffes
sur la vigne , de bien des façons, depuis quinze ans ;
et même javais fait pratiquer celles indiquées dans
le Manuel des Vignerons , par des jardiniers qui
manquent peu de.greffes d’arbres ou de rosiers: je
n’en réussissais pas-une sur vingt; j'y avais renoncé.
Après bien des recherches , et me rappelant com-
ment j'avais vu opérer dans le Midi, j'ai fait greffer
devant moi MM: Pillet, vignerons près Saumur: (leur
adresse est connue dans de grands vignobles qu’ils
ont changés de couleur, ou rajeunis ). Jai travaillé
avec eux ; ils ont accueilli quelques observations ;
et je me suis convaincu que leur méthode.est sûre.
Ils prouvent, par quarante ans de travaux, qu’ils
réussissent plus de dix-neuf greffes sur vingt: on
/
{
(45)
peut s’en assurer dans mon vignoble , où ils en ont
fait environ trois mille.
J'ai écrit leurs lecons sous leur dictée ( et la
main à l’œuvre ), avec tous les détails d’une exacti-
tude assez minutieuse pour guider les vignerons
dans leur travail le plus important. Ce travail leur
offre la certitude de rajeunir les vignes usées, de
remplacer par de bonnes espèces les mauvais cé-
pages , de récolter quantité de bon vin rouge sur
les vieux plants de vigne blanche qui ne produisaient
rien, de renouveler ceux dont les gelées , la bruine
ou la sécheresse ont altéré la souche ; tout en con-
servant à leurs vins le goût que donnent les vieilles
vignes, les greffes le pompant des racines qui les
nourrissent les premières années de leur pose.
J'ai bu du vin rouge provenant de greffes de deux
ans sur de vieux plants de vigne blanche, au Plessis-
Grammoire ; il avait un bouquet agréable et une
qualité très supérieure au vin blanc du même crû.
On peut juger, d’après cela, que la greffe est un
moyen bien plus prompt et plus économique pour
remplacer les mauvais ceps, que l’ancien usage de
mettre de jeunes plants, qui ne sont en rapport
qu'après dix à douze ans de soins, et dont les fruits,
pendant plusieurs récoltes, ont ce goût de jeunes
vignes, qui altère celui des vieux ceps ; et que les
marchands savent bien distinguer , si le propriétaire
n’a pas l'attention de les vendanger à part.
Dans nos vignobles , les mauvais ceps sont dans
la proportion de dix au moins sur mille. Par leurs
fortes racines , par leurs longs rameaux, ils nuisent
(414)
à la croissance des ceps de bonnes espèces , tou-
jours moins vigoureux : par la greffe, vous for-
cerez ces parasites à devenir productifs.
Chaque année quelques ceps dépérissant, il faut se
hâter de les renouveler par la greffe ; leurs racines
sont encore vertes, quand la souche paraît morte
hors de terre.
Les soins prescrits pour la culture des greffes sont
à-peu-près les mêmes que ceux apportés aux jeunes
planis ; seulement il faut que les vignerons sachent
distinguer et arracher avec précaution les pousses
qui partent des vieilles racines , afin de fournir plus
de sève aux bourgeons des greffes.
Dès la seconde année, les greffes donnent demi-
récolte ; on taille à vin le bois des plus fortes, etony
place des soutiens, comme aux autres vignes rouges.
Le produit de la troisième année rembourse toutes
les dépenses , et les ceps, ainsi rajeunis, puisent une
nouvelle vie dans les racines qui partent du collet
des greffes.
Au premier coup-d’œil, on juge que la greffe sur
la vigne est aussi facile à opérer que celle sur les
autres arbres ou arbustes; mais, en examinant avec
attention le tronc d’un cep coupé, on reconnaitra
que la nature a donné à cet arbuste des conduits bien
différents pour sa sève : il n’a pas d’écorce vivace,
et la sève flue à plein bois.
Ce fait constaté, il a fallu étudier la taille, la
pose des greffes, et profiter de cette prodigieuse
quantité de pleurs pour assurer, leurs reprises sur
les vieux ceps.
(415)
Deux planches expliqueront au greffeur les détails
ci-après, que la pratique m'a démonirés indipen-
sables pour l’entier succès de cette espêce d’enture.
l.o Les sarmens destinés à servir de greffes doi-
vent avoir deux pieds de long, dont deux ou trois
pouces du bois d’un an, et le surplus du bois de
l’année ; en outre , être coupés de manière à ce qu'ils
forment le plus possible la perpendiculaire avec le
crochet ou crossette. Il faut aussi que le bois soit
bien assaisonné ou aoûté , très vigoureux , noué
court, et que les yeux soient bien prononcés. ( Voyez
A.P1.15.°)
On coupe les sarmens après la chute des pampres.
Pour les conserver, il faut les metire dans un endroit
frais et à couvert des injures de l’air , les vieux bois
près de terre, les arroser une fois par semaine;
surtout ne pas les mettre dans la terre ( comme le
Manuel l’indique ) : ce qui rend l'écorce du vieux
bois trop tendre et facile à se lever quand on les
taille.
J’ai réussi nombre de greffes, en plaçant dans le
mois de mars des sarmens coupés le même jour :
il ne faut toutefois employer ce moyen que dans le
cas où l’on manquerait de sarmens vieux coupés ;
il serait même mauvais, si le bois avait été al-
iéré par de fortes gelées ou par des grélons.
IL faut éviter de greffer pendant les jours où il
tombe de la pluie ; si elle frappait sur l’ente avant
qu’elle fût couverte de terre, elle pourrait empé-
cher la s oudure de la greffe. sur la coupe des ceps.
( J'ai voulu braver cet invonvénient, j'ai eu lieu de
m'en repentir. )
(416)
2.0 Pour préparer les greffes , choisissez les brins
qui réunissent le mieux les qualités prescrites à l’ar-
ticle précédent ; surtout prenez garde que l'écorce
du bois ne soit ridée : ce qui arrive quand les
sarmens ont séché pour avoir été ramassés trop tard
aprés la taille, ou bien quand ils sont réunis en trop
grande quantité, dans un lieu où ils ont été mal
soignés.
On réduit leur longueur à 9 à 10 pouces, non
compris le bois d’un an: c’est ce vieux bois que
l’on taille en forme de coin , et non en bec de flûte,
comme le Manuel le dit. ( Voyez B. PI. 15°)
On doit avoir attention que les épaules soient très
prononcées et coupées en vive-arète, que cette
coupe commence à un pouce du nœud de jonction
du jeune et du vieux bois; observer que la coupe
du côté le plus mince soit plus courte , afin que la
greffe soit rentrante sur le centre du cep : l’habitude
fera juger de quel côté on doit l’entailler pour ob-
tenir cet important résultat.
3. Otez la terre jusqu’à la naissance des racines,
sciez avec l’égohine le pied du cep au-dessus du nœud
le plus bas, ou près du second nœud, si l’on croit
ne pas trouver assez de bois pour ouvrir la fente
sans séparer la racine. (Voyez C. PL 15°):
J'ai essayé, dans de mauvais ceps dont la souche
était gätée , de placer des greffes sur les racines ;
je n’ai pas bien réussi, cependant MM. Pillet le
font quelquefois avec succés.
Soutenez la tête du cep avec la main gauche ,
et achevez le sciage avec un couteau ou serpelte,
(#17)
afin d'éviter de déchirer la jeune écorce ; puis ra-
fraîchissez cette coupe avec le couteau, pour la
rendre très unie. (PI. 16, fig. 4.)
4° On fend le pied de vigne avec la serpe
(Voy. PI. 16, fig. 5.), pour placer les greffes sur
la partie la plus vive, en suivant les lignes des
veines , Ou rayons médullaires, qui paraissent les
meilleurs conducteurs de la sève ; ils se trouvent
au-dessus des plus fortes racines : évitant surtout
les échancrures et tous les endroits endommagés
par une cause quelconque. ( Voyez D. PI. 15°)
On enfonce la serpe avec le marteau (PI. 16°,
fig. 6), dans les forts ceps, mais on fend les
jeunes avec la couteau (PI. 16.°, fig. 4.), pressé
par la paume de la main.
5° Un ciseau en fer (PI. 16, fig. 7), ou le
diable à revers des jardiniers ( PI. 16°, fig. 8),
sert à ouvrir les lèvres de la fente ; on l'enfonce
avec le marteau, dans la longueur d’un pouce ou
plus, suivant la force du cep , l’atlirant ou le
poussant légèrement , d’après le plus ou moins de
résistance que l’on éprouve à l'introduction des
greffes. (Voyez E. PI. 15.)
6.° Passez la pointe du couteau dans la longueur
de la fente; vous coupez ainsi les fils ou brides
qui s’y trouvent : ‘ils seraient un obstacle à l’en-
trée des greffes ; et vous évitez par là de déchirer
l'écorce dont lPunion avec des greffes est le plus
sûr garant de la reprise.
7° Placez les greffes de manière à faire rejoin-
dre leur écorce extérieure avec celle du pied de
29
( 418 )
vigne , et fixez-les si bien entre les lèvres de la
fente, qu'il ne paraisse aucun jour entre leurs épaules
et les bords de la coupe , lorsque vous retirerez
le ciseau qui a servi pour l'ouvrir. (Voyez F. PI.
15.e.)
Comme il reste un peu de vide dans la fente
entre les greffes , si la pluie ou la terre y péné-
traient, la soudure se ferait mal , la sève y flue-
rait en pure perte, et la moisissure ferait périr la
souche. Ayez donc soin de couvrir ce vide avec un
des petits coupeaux obtenus en rafraîchissant la
coupe, que vous fixez avec un peu de terre.
Je préfère mettre sur le coupeau de la terre
glaise mêlée de fiente de vache humide ; qu’on
nomme onguent de S.t-Fiacre : c’est un peu plus
long, mais c’ést plus sûr.
En général , les vieux ceps sont assez forts pour
retenir les greffes ; mais vous êtes obligés de lier
avec un osier ou plomb la coupe des jeunes plan-
tes qui n’ont pas un pouce de diamètre , ou les
vieux ceps qui se trouvent endommagés dans quelque
partie de leur tronc, afin de rapprocher les lèvres
de la fente sur les greffes.
Evitez que la fente soit trop longue ; elle ne
doit être que d’un pouce. Il vaut mieux être forcé
de frapper avec le marteau sur le vieux bois de
la crossette pour la faire entrer, que de trop en-
foncer le ciseau : il écarterait les lèvres qui se
fermeraient difficilement, si on oubliait de les lier
avec un osier.
8° Si les ceps sont trop couchés, on les re-
(419)
dresse en mettant dessous une pierre ou une motte ;
le sciage alors est plus facile. Souvent leurs pieds
sont tellement contrefaits, que l’on ést forcé de
corriger la taille des greffes , afin de les poser per-
pendiculairement sur la coupe du cep, et que
leurs épaules portent carrément sur la fente. Le
moindre vide empêcherait leur soudure, qui d’ail-
leurs s'opère si promptement, qu’un homme né pour-
rait arracher les greffes après le flux de la sève,
à moins de les renverser en dehors de la coupe.
Beaucoup de vieux ceps étant mutilés en terre
par la pomte des pics, il faut placer les greffes
sur les parties restées saines. On peut les fendre
en trois ou en quatre, sans être forcé de suivre
une ligne droite ; mais il faut lier les lèvres des
fentes.
9. Si un cep est tellement couché qu’on ne
puisse y placer les greffes carrément, on doit en
Ôter la moelle , et rapprocher leurs becs , en les
ployant suivant le rond du tronc.
Quelque difficulté que la difformité des ceps pré-
sente, il faut observer que les écorces extérieures
des greffes soient plutôt rentrantes que saillantes
sur les bords de la fente. ( Voyez PI. 15°)
Le greffeur doit avoir beaucoup de greffes tail-
lées à l’avance, pour qu’il puisse choisir celles qui
conviennent mieux , suivant la forme du cep.
Quand on greffe de la vigne rouge sur de la
‘blanche, il faut supprimer la moitié des ceps
blancs : la vigne rouge exigeant plus d'espace pour
sa culture, et pour la maturité de ses fruits:
(420 )
Les greffes postes, on doit les entourer de cinq
à six pouces de terre rendue maniable, que l’on
dispose en forme de taupinière ou de cône renversé
avec l’instrument ( PI. 16, fig. 2.) ; de manière à ne
laisser découverts que les deux yeux supérieurs qui
attireront la sève.
Cette motte a le double avantage de soutenir les
greffes et de provoquer la naissance des chevelus,
qui doivent partir du nœud de jonction du jeune
et du vieux bois; c’est par ce chevelu que les
greffes prennent une telle vigueur qu’elles se nour-
riraient seules, si le cep qui les porte venait à périr.
J'ai éprouvé, à mes dépens, combien il faut se
montrer sévère sur le choix des sarmens destinés
à fournir les greffes : ils doivent être pris de pré-
férence dans de jeunes ceps.
N'en ayant pas assez de coupés chez moi, j'en
fis venir de Saumur plusieurs bottes, dans un temps
de hâle; une sans doute avait été desséchée par
le vent, ses brins ont ridé sur l’enture. J’en ai
perdu beaucoup, tandis que les mêmes greffeurs
n’en ont pas manqué 10 sur 2,009 : ils avaient
employé les brins de vigne que je leur avais fournis
ou qu'ils avaient apportés avec soin. Il est vrai de dire
que l’extrême sécheresse du printemps les a privés de
la majeure partie de la sève des ceps, qui aurait
dû les faire reverdir. |
Je recommande de choisir et de soigner les sar-
mens , comme je l’ai dit en commençant; ou si
Von est forcé d’en faire venir d’un peu loin, de
veiller à ce. que leur transport ait lieu peu de
(44)
jours aprés leur coupe. À leur réception, on les
divise par petites bottes de 25 à 30 brins, afin
que l’humidité les entretienne frais dans l’endroit où
l’on veut les déposer.
Enfin, lorsque les greffes sont poussées, vous
rabattez, dans le fond du rang, la terre du sillon
ou du déchaux , à la hauteur des bourgeons pous-
sés, pour préserver les racines des trop vifs rayons
du soleil.
. Nota. Il serait à désirer que la Société encourageût.
des vignerons , par quelques primes, pour qu’ils ap-
prissent cette sorte de greffe ; j'offre de leur livrer
dans mon vignoble des ceps, sur lesquels je ferai di-
riger leurs essais, dans le mois de mars prochain.
Les journées du greffeur sont très lucratives. On
paie deux sous par cep susceptible de recevoir une,
deux ou trois greffes, selon sa grosseur. J'ai vu,
dans un jour de mars, greffer soixante à soixante-
dix ceps: ce qui porte le prix des journées à 6 ou
7 francs , depuis le 20 février jusqu’au mois de juin.
La concurrence que la Société exciterait rendrait
donc un grand service à notre pays, en faisant di-
minuer de beaucoup le prix de ce procédé.
Je dis qu’il faut défendre de greffer par le mau-
vais temps, surtout pendant la pluie : l’ouvrier uti-
lisera ce repos en taillant les greffes, qui peuvent
se garder bonnes pendant 8 ou dix jours, pourvu
que leurs vieux bois trempent dans l’eau.
(422)
Cette opération sera bien plus prompte si on
emploie une femme pour tailler les greffes ; avec
un peu d'usage ; elle réussirait à en préparer par
jour plus qu’un homme ne saurait en placer. Un
enfant de dix ans mettra sur les coupes l’onguent
de S.t-Fiacre avec un pinceau ; il peut également
ameublir la terre avec la binefte, ou la tranche plate,
et élever les mottes de terre pour soutenir les greffes.
Je ne doute pas qu’un homme avec ses deux aides,
et après quelque temps de pratique , ne puisse enter
au moins cent ceps dans Sa journée.
Le greffeur porte ses outils dans un baquet à ven-
dange, dans lequel il entretient trois à quatre pouces
d’eau pour tenir les crossettes fraiches ; il peut aussi
y placer le pot dans lequel sera l’onguent de S.t-
Fiacre ; sil n’a pas un enfant pour le porter.
Nous parviendrons , je l’espère, à poser les greffes
avec plus de promptitude. Dans le Bordelais on ne
paye que 4 francs par cent, ét cependant elles sont
garanties. Le Manuel dit même qu’un homme peut
greffer deux cents ceps de vigne par jour : C’est un
puissant motif d’émulation pour nos élèves (1).
(1) Les figures de la PI. 45 sont réduites de la moitié de leur gran-
deur naturelle.
La fig. 2, PI. 46, est faite sur une échelle d’une ligne 174 par
pouce ; les autres figures de la même Planche sont réduites de moi-
tié de leur grandeur naturelle.
(423)
SUR QUELQUES ÉCRIVAINS
DE L'ANJOU,
Par M. Blordter-Langlois.
JE commence par un de nos anciens souverains,
homme d'imagination , homme sensible bien plutôt
qu'homme de génie. Esprit léger, ame compatis-
sante et superficielle, il ressentait vivement les dis-
grâces de sa destinée, mais sans lui garder ran-
cune. Sa facilité, non sa philosophie, le prémunit
contre d'innombrables adversités qui auraient ac-
cablé un stoïcien même. Faible roseau, il ployait aux
fureurs des tempêtes. Toujours la victime du sort,
les beaux-arts lui tenaient lieu de ces fleurs dont
les Anciens avaient coûtume de parer les victimes
de leurs sacrifices.
- Les ouvrages de René sont de l’espèce la plus
pâle , la moins attachante , l’allégorie ; mais c’était
le goût du moyen âge. Les titres seuls feraient bäiller
aujourd’hui; ce sont: Doulce mercy, Mortifiement de
vaine plaisance , Les amours du berger et de la ber-
gère.
René fut un peintre habile, si l’on en croit M. de
Villeneuve, qui se fonde sur d’anciens témoignages ;
car très peu de tableaux de ce prince existent ac-
(424)
tuellement. Il avait recu , dit-on, des lecons de
Jean de Bruges; il devait connaître Bramante et
Léonard de Vinci, ses contemporains : je me sou-
viens du tableau qu’il avait composé pour son tom-
beau ; c'était assez bien fait pour un ouvrage de
souverain.
René fut poète. Il ne put ignorer que Pétrarque
eût écrit, et il ne tenta pas même d’imiter la douce
et spirituelle galanterie de ce poète. Il sut, on ne
peut en douter, qu'il existait en Italie, un poème
intitulé la Divina Comedia; mais le Dante n’était
pas à sa portée.
Au reste, félicitons René de cette résignation
qui lui fitchercher dans les arts un refuge contre les
tribulations de sa vie. Tout ce qui console est res-
pectable, surtout si l’on y met le choix que le bon
sens et le bon goût approuvent. Quelle énorme
différence entre les délassemens de René et ceux
d’un Antiochus, roi de Syrie, qui charmait les soins
de la royauté en faisant jouer des marionnettes :
d’un Æropus, roi de Macédoine, qui occupait ses
loisirs à faire des lanternes, et de ce duc de Mos-
covie, qui se délectait à sonner des cloches! A la
fin du siècle dernier, un prince célèbre faisait d’as-
sez méchans vers et jouait de la flûte ; mais ce
prince savait gouverner ses états qu’il avait doublés
par la conquête. Peut-être, avec un peu moins de
dévouement aux beaux-arts, René eût maintenu sur
sa tête quelques couronnes de plus : mais que font
les couronnes au bonheur de la vie ?
Le moyen âge allait finir, que René ne s’en dou-
( 425 )
lait pas; l'imprimerie allait ouvrir le champ le plus
vaste à l'esprit humain, qu’il en était encore à
rêver la résurrection des troubadours et le rétablis-
sement des Cours d'Amour.
Un autre Angevin se présente au commencement
de la période nouvelle, celle de la renaissance
des lettres et des beaux-arts en France ; c’est Joa-
chim Dubellay. Il naquit à Liré, l'an 1524. Il
écrivit trés jeune, et Francois 1.‘ remarqua la
douceur et lélégance de ses vers. Après la mort
de ce prince, il fut attiré à Rome par le cardinal
Dubellay , son parent, et il y demeura trois ans.
Desservi auprès du cardinal pour quelques torts de
conduite, il revint à Paris , tellement affecté de cette
tracasserie, qu’il mourut d’apoplexie, en 1560 , âgé
seulement de 86 ans.
Dubellay s’attribue l'introduction du sonnet en
France; Pasquier , dans ses Recherches, ne le lui
conteste pas : ainsi c’est à notre Anjou que la poé-
sie française est redevable d’une sorte de poëme
dont les Italiens faisaient un fréquent usage; ei
cette gloire, nous la devons d’autant moins dédai-
gner, que , jusqu’à la fin du XVII: siècle, les
sonnets furent la passion de nos écrivains : vous Sa-
vez, messieurs, que Boileau disait :
Un sonnet sans défaut, vaut seul un long poème.
Nous lisons, en tête des œuvres de Dubellay,
un traité de l’{ustration de la langue française,
où les principes littéraires sont le fruit d’une étude
approfondie des Anciens , et par conséquent raisonna-
(4%)
bles et sûrs. C'était un mérite assez ordinaire alors
chez les écrivains , que cette connaissance. des
sources grecques et latines. Si l’on s’occupait de
traductions, c'était surtout pour apprendre à ma-
nier sa propre langue, pour en rechercher. toutes
les ressources; et c’est dans cet esprit que Du-
bellay traduisit le 1v. et le vi.‘ chant de l’Enéide,
quoiqu’il regardât les poètes comme intraduisibles;
et cette opinion est vraie. Une traduction peut être
plus où moins élégante, plus ou moins exacte,
mais elle ne tiendra jamais lieu du texte.
La langue de Dubellay n’est nullement pour nous
en accord avec la langue majestueuse et sonore de
Virgile; ce n’est pas sa faute. Il parlait sans doute
aussi bien qu’on le püt faire de son temps; mais,
dans ceux qui suivirent , les traductions du xvr.°
siècle semblèrent être des parodies. On a dit que
Scarron ayait inventé le genre burlesque ; mais
Scarron le trouva presque dans ces traductions.
Dubellay chérissait Anjou ; cette belle, province
est souvent le sujet de ses vers:
.-. Tant que ma lyre
: Voudra les chansons élire ,
Que je lui commanderai,
Mon Anjou je chanterai ,
dit-il, dans une pièce qu’il lui a consacrée tout en-
tière.
Dubellay sentit le désagrément de ces rimes mas-
culines ou féminines qui, dans les poésies de son
temps, se rencontrent sans rimer entr’elles ; et, s’il
ne fut pas tout-à-fait exempt de cette négligence,
(427)
il l’évita souvent. Une de ses plus jolies piéces, son
Adieu aux Muses, traduite de Buchanan , n'offre
pas une seule succession vicieuse de rimes.
Pendant son séjour à Rome, Dubellay , capable
de lire sur les débris de cette antique capitale du
monde son génie , sa gloire et ses revers, les dé-
crivit en poète aussi-bien qu’en homme instruit. Ses
vers ne sont point indignes du sujet. Combien cet
ouvrage est supérieur aux frivoles conceptions de
la plupart des auteurs ses contemporains , à ces jeux
insipides si communs au xvr.° siècle, et qui furent
trop imités par les Dorats du xvrrr.*!
Dubellay mourut peu de temps après Henri Il ;
mais il assista au tournoi qui coûta la vie à ce
prince. Il chanta l’hymen de Marguerite, fille de
Henri, avec Philibert de Savoie; c'était cet hy-
men et celui d’Elisabeth de France que Henri cé-
lébrait dans ce tournoi funeste : Dubellay écrivit
sur cet évènement une longue et belle pièce de
vers latins qu’il traduisit en vers français.
Je le répète, Joachim Dubellay, qui fut une des
gloires du xvr.® siècle, est l'honneur aussi de notre
littérature. Ses vers respirent la décence, la sen-
sibilité, le bon goût. Il ne se fit pas un ridicule
métier de son ‘art, comme la plupart des poètes
qui fourmillaient de son temps. S'il influa sur les
auteurs d’un autre âge, s’il contribua à épurer la
poésie française , s’il prévint quelques-uns de ses
perfectionnemens ultérieurs ; si ses stances à son
ami Macrin ont: donné à: Malherbe quelque ‘idée
de celles à Duperrier, ce que je croirais volon-
(428 )
tiers, à cause de plusieurs rapports que je trouve
entre ces deux pièces ; si Malherbe a concu, d’a-
près quelques-uns des poèmes nobles de Dubellay,
celui des Ruines de Rome, par exemple, l’idée du
genre de poésie qui fit dire à Boileau de lui:
Enfin Malherbe vint...
combien ne devons-nous pas nous féliciter de le
compter parmi nos compatriotes |
En même temps que l’aimable Joachim Dubel-
lay, vivait et écrivait le sévère et docte Jean Bodin;
il naquit à Angers, en 1529.
Bodin étudia la jurisprudence à Toulouse, devint
un des plus profonds légistes de son temps, se fit
recevoir avocat à Paris, et fut remarqué de Henri III,
qui se plaisait dans sa conversation. Le duc d’A-
lençcon , frère du roi, l’attacha à sa personne
comme conseiller, dans les voyages qu'il fit en
Angleterre et aux Pays-Bas. Bodin finit par s’éta-
blir à Laon, y exerça les fonctions de procureur
du Roi, et mourut l’an 1596, âgé de 67 ans.
On trouvera dans les biographies la liste com-
plète des ouvrages de Bodin; mon intention est
de n’examiner ici que quelques-uns des plus im-
portans.
La Démonomanie des sorciers est un monument
de la crédulité de l’auteur et de celle du temps où
il vécut, mais un monument curieux comme ou-
vrage de mœurs, comme résumé de tout ce qu’on:
lit dans l'antiquité sur les démons et sur leurs agens,
( 429 )
ici-bas ; c’est un répertoire à l'usage des inquisi-
teurs, à l’usage des magistrats auxquels il pourrait
advenir d’être chargés de pareilles affaires ; un livre
écrit de conscience, pour susciter une guerre à mort
à ceux qui se croient de la puissance par les dé-
mons. Avant de lire {a Démonomanie , j'avais pensé
qu'un homme aussi grave que Bodin n’avait en-
trepris de traiter un pareil sujet que pour en dé-
montrer l’absurdité ; j'étais dans une grande erreur.
J'ai lu ce livre, et je me suis instruit que Bodin puisa
sa croyance dans une érudition aveugle et irréflé-
chie. Le savoir conduit à l’aveu d’un être suprême;
mais comment conduirait-il à de honteuses super-
stitions’ On rencontre fréquemment , il est vrai,
chez les Anciens, la doctrine des démons et des
spectres, mais il faut peser et non pas compter les
autorités ; il faut se donner la peine de critiquer
un peu ses lectures, se souvenir que le merveil-
leux est la passion innée des hommes ; surtout il ne
faut pas s'appuyer sur des poètes, dans des questions
si sérieuses. Théocrite et Virgile ne se sont pas
doutés, vraisemblablement, que l’on fonderait jamais
les plus épouvantables sentences sur quelques-uns de
leurs vers, qui, pour eux, n’avaient été qu’un jeu.
Bodin prend tellement la chose au sérieux que,
non content des büchers nombreux allumés pour
les sorciers de son temps, il gourmande encore la
mollesse de certains magistrats. Voici ce que je
lis au chap. 1. du liv. 1v.: « D’autant que les pro-
» cureurs du Roi sont souvent plus négligens en
» leur charge que les juges, il est expédient que
( 430)
» chacun soit recu accusatewr. en cecrime | sans $’ar-
» rêter s’il va de l'intérêt. particulier ou non.»
Tous les moyens tentés anciennement et encore
de nos jours auprès des ignorans et des, têtes. faibles,
se trouvent dans la Démonomanie ; sous ce rap-
port, c’est un livre que je verrais -avec peine entre
les mains de certains lecteurs. Les cas de nœud de
l’aiguillette, de voyages dans l’air sur un manche
.à balai, etc., faisaient retentir chaque jour les tri-
bunaux, du témps de Bodin. Les malheureux
-avouaient tout, sans doute dans les souffrances de
la torture, et Bodin expédiait ces affaires conseien-
cieusement et pour la plus grande gloire, de la
Pharmaceutrée de Théocrite. Je lis au chap. un. du
liv. u. l’invocation qu’il appelle Gastromantie, «qui
se faisait, dit-il, par vaisseaux de verre ronds,
pleins d’eau, et où l’on voyait les réponses par
-marques et par signes.» Voilà cette divination par
la caraffe, que nous savons employée de nos jours,
mais pour laquelle on se garde bien de brûler per-
sonne.
Pendant qu'on imprimait /a Démonomanie , un
médecin ,'nommé de Wier, publia ‘un ouvrage où
l’art de la sorcellerie ‘était traité de chimère, et où
l’on appelait l’indulgence sur les pauvres esprits qui
prétendaient le posséder ; Bodin suspendit l’impres-
sion de son livre jusqu'à ce qu’il eût raison de
Wier. Il tenta de le réfuter, et toujours par des
textes anciens. D'abord il l’accuse d’être unsor-
cier : telle était la polémique du XVI.e siècle ; et
sa preuve, c’est la manière respectueuse dont l’a-
(431)
vocat des prétendus sorciers parle de Corneille
Agrippa, fameux par sa philosophie occulte. Puis
vient l’étalage de la plus diffuse érudition; de
Vhébreu, du grec, du latin : il fait feu de toutes
ses batteries contre Wier, qui peut-être riait de
ses doctes folies. Au reste, cette réponse de Bodin
est pleine de chaleur et de dialectique ; la péro-
raison est remarquable par une onction religieuse
dont on s’étonne de la part d’un homme qui, dans
un entretien sur les religions, fait justement dou-
ter de son orthodoxie.
L'auteur des Recherches sur l’Anjou pense que
Volney pourrait avoir emprunté l’idée de ses Ruines
de l’heptaplomeron de Bodin ; tout au plus Vol-
ney y aurait puisé l'inspiration de son chapitre de
l'Origine et filiation des idées religieuses : les deux
ouvrages, au reste, ne sont pas comparables. Bo-
din et Volney furent , sur cette matière, des francs-
penseurs, voilà une de leurs analogies ; Bodin est
auteur d’un bon ouvrage sur la Manière d'étudier
l’histoire, voilà une autre conformité avec Volney;
tous deux enfin furent chargés des intérêts d’une
province dans une assemblée de la nation, et tous
deux s’y montirèrent les défenseurs des libertés du
peuple et les ennemis de la tyrannie.
Le plus beau titre de Bodin à la renommée, si
son premier n'est pas la fermeté qu'il déploya aux
Etats de 1576, c’est son livre de la République.
L’art d'analyser les gouvernemens, d’en apprécier
les ressorts, d’en prévoir les progrès et la chute,
s’est, dit-on, perfectionné de nos jours; le grand
(432)
mérite du livre de Bodin est l’érudition ; il y en
a jusqu’à l’abus, selon ‘la coutume d'alors. Nos
écrivains d’aujourd’hui diraient qu’on ne savait pas
faire un livre ; qu’on n’avait pas l’heureuse adresse
de délayer un peu de savoir en beaucoup de phrases
fines et Hiarmonieuses. Les auteurs du siècle de Bodin
sont en effet des abîmes de science. Un écrivain
moderne doit éprouver , à la lecture de pareilles
compilations, la sensation de certain sybarite qui
suait en voyant scier du marbre ou fendre des chênes.
Les principes de Bodin, dans sa République, sont
justes; sa morale est d’un honnête homme; il puise
tout dans les autorités les plus respectables ; il ma-
nifeste une ame généreuse et indépendante; la po-
litique de Machiavel lui est odieuse. Tous les gou-
vernemens , le gouvernement tyrannique excepté,
lui présentent des raisons de prospérité et de dé-
cadence ; il en indique les moyens conservateurs
et curatifs , mais en avouant l'insuffisance des re-
mèdes dans de certains cas, et la nécessité alors
d’une régénération radicale.
L'Esprit des lois de Montesquieu aurait été, selon
l’auteur des Recherches, une inspiration de la Re-
publique de Bodin. Tant mieux, certainemeni, pour
ce dernier. Une inspiration de cette importance lui
ferait plus d'honneur que tous ses livres. Au moins,
dit-on encore, Montesquieu aurait pris dans Bodin
l'influence du climat sur le caractère des peuples :
mais , de bonne foi, Montesquieu n’aurait - il pu
imaginer cela sans Bodin ?
On est fâché de retrouver toute la superstition de
(433 )
de Bodin dans son livre de la République. Le chap.n
du livre 1v est rempli des absurdités de l’astrolo-
gie , de l’effet des corps célestes sur les destinées des
états et des hommes; des années fatales, des nom-
bres, .etc. Ce chapitre est étonnant de savoir et de
crédulité.
La République de Bodin, justement célèbre, quoi
que nous nous soyons permis d’en dire, et dont on
peut tirer beaucoup de lumières, si l’on n’a pas trop
de répugnance pour les livres ennuyeux, fut traduite
en anglais et enseignée publiquement dans les écoles
d'Angleterre. Bodin la traduisit lui-même en latin,
et elle acquit une renommée européenne. Le pré-
sident De Thou reproche à l’auteur de ne pas s'être
défendu , à ce sujet, de cette vanité, défaut i#nato
genti, dit le savant historien ; ce que Ménage inter-
prête par «naturel aux Angevins. » Ménage se con-
naissait en vanité ; mais Bayle, plus indulgent pour
nous que Ménage, traduit l’expression de De Thou
par «naturel aux Francais. »
Avant de mourir, Bodin recommanda de brüler
quelques manuscrits où il se donnait des libertés sur
la politique et la religion. Un d’eux a échappé à cet
arrêt, c’est l’Heptaploméron , dont j'ai déjà parlé,
mais qui n’a pas été imprimé. L'évêque d’Avranches
Va réfuté dans son ouvrage De la Démonstration
évangélique. |
Passons à Ménage ; il naquit à Angers, quelques
années avant la mort de Jean Bodin. Sa réputation
fut grande. Comme Bodin il subit les influences de
son siècle, mais les mœurs n’étaient plus les mêmes.
30
(434)
C'était bien encore le temps d’une érudition exces-
sive; il montra le plus vif penchant pour les re-
cherches , il fut, malgré son apparente frivolité, un
des plus savans hommes de son siècle ; et cette fri-
volité, -pédantesque et maniérée, c’est à son siècle
qu’il la dut , et aux sociétés dans lesquelles il passait
sa vie. L’oracle des précieuses de son temps, coupable
sans doute de la préciosité de quelques-unes , il
sema le monde galant et littéraire de petits vers qui
firent grand bruit, et échaufférent la bile de l’au-
teur des Femmes savantes. Mais comment , à moins
d’avoir le génie de Molière, deviner que la ville et
la cour (comme on disait alors), qui admiraïent en-
core Voiture, n’auraient pas au moins pour l'abbé
Ménage de l’indulgence ?
Qui Bavium non odit amet tua carmina , Mævi.
Mais enfin le nom de Ménage ne périra point,
grâce à son utile compilation qu’il a intitulée Hés-
toire de Sablé, grâce à son Dictionnaire étymologique
où sont, parmi des futilités, de curieux articles ; à
ses Remarques sur la langue française, ouvrage qui,
avec celui de Vaugelas, son contemporain, fournit
des documens sur l’histoire de notre langue ; grâce
à de fort bonnes poésies italiennes , et à quelques
vers francais d’assez bon goût, entre lesquels il faut
distinguer la Requeste des Dictionnaires , plaisanterie
souvent spirituelle , dont on lui garda rancune , et
qui fut cause qu’il n’entra pas à l’Académie française.
L'époque dont il s’agit ici est une époque hono-
( 435)
able dans notre littérature angevine ; elle attsste la
solidité de nos esprits. Presque au temps de Ménage
vivait Claude Ménard, dont toute la vie fut passion-
nément employée à débrouiller notre histoire, et
dont l’ouvrage le plus important est encore inédit.
Vers le même temps, de laborieux jurisconsultes con-
sacraient leurs veilles à commenter les coutumes et
les lois. Leur existence fut utile, ce qui vaut mieux
que brillante. On a, sur la foi de certain adage
latin, reproché de la mollesse aux habitans de l’An-
jou; cependant le beau climat de cette province n’é-
nervait point la constance de ces légistes érudits.
Peut-être était-ce à l’ombre de nos bois, au mur-
mure de nos ruisseaux, aux bords délicieux de notre
fleuve que Chopin, Grimaudet, Dupineau , Pierre
Ayrault, les deux Pocquet de Livonnière méditaient
les sérieux ouvrages qui les ont rendus les flam-
beaux de la jurisprudeuce.
Il faut descendre jusqu’à la fin du xvur.° siècle et
dans celui-ci pour trouver quelques Angevins célèbres
dans les sciences , les lettres et les arts. Alors se
présente un exemple remarquable de l'influence des
circonstances et des objets extérieurs sur l’imagina-
üon et le génie des habitans de l’Anjou. Volney,
qui, dans le cercle étroit de ses amis et de ses rela-
tions , n’eût été qu'un penseur ordinaire, qu’un
homme de sens et de savoir, s’avise de voyager,
et le point vers lequel il se dirige est la Syrie et
l'Egypte. De là le besoin de la langue arabe , la-
quelle langue ouvre à ses méditations une carrière
immense vers l’origine des peuples, leur civilisa-
( 436 )
“üon, leurs lumières. Bientôt, dans cette archéologie
“intellectuelle et conjecturale , nous verrons Volney
prendre un essor qu’il ne sera plus maître de mo-
dérer. Ses études le méneront à scruter les cultes
religieux du monde et leur filiation : ce deviendra
occupation de toute sa vie, son idée fixe, erreur ou
révélation d’une étude consciencieuse, mais non sys-
tème froidement emprunté de l’Heptaploméron de
Bodin , que Volney peut-être ne connaissait pas.
Je n’entrerai dans aucun détail sur l’ouvrage des
Ruines. Il eut beaucoup de vogue dans un temps
où l’anti-catholicisme devait prendre la couleur des
circonstances , qui étaient graves; où il devait être
sérieux , après l’impiété moqueuse de Voltaire.
Ce qui fonda la renommée de Volney mieux qu’au-
cun autre de ses ouvrages, c’est son Voyage en Sy-
rie. Les systèmes anti-religieux se suivent et s’ef-
facent les uns les autres; jamais écrivain voyageur
ne rendra inutile le voyage de Volney. Il subit,
comme on sait, l'honorable épreuve de notre ex-
pédition d'Egypte : y a-t-il bien des écrivains à qui
cette épreuve n’eût pas été fâcheuse ? L'ouvrage de
Volney fut trouvé d’une parfaite exactitude. Tout y
est, en outre , enchaîné de la manière la plus heu-
reuse : philosophie, histoire naturelle, physique,
érudition, topographie. Les autres livres de vo
périraient que celui-ci subsisterait.
Mais ce qui ne périra pas non plus, c’est cetle ar-
deur d’un génie éclairé des langues de l’orient , qui
fit voir tant de découvertes à faire , tant de notions
vitales à retirer du tombeau des siècles, dans cette
(437 )
partie du globe ; et qui lui fit faire de si constans:
efforts, de si louables sacrifices, pour favoriser ce-
nouveau genre d'étude.
Volney encore méritera l’éloge de la postérité.
pour des Discours sur l'histoire, prononcés à la pre-.
miére école normale qui s’ouvrit en l’an u1; discours.
qui peut-être ont fait naître l’idée d’un enseignement.
beaucoup plus large et plus approfondi de l’histoire ;
qui ont porté , sinon la lumière , du moins une cri-
tique puissante dans des siècles que n'avaient point
connus les Hérodote et les Diodore de Sicile ; dis-
cours enfin qui, s'ils ne nous ont pas encore ré-
vélé des vérités , nous ont conduits, jusqu’à ce mo-
ment, de probabilités en probabilités, en des ténèbres.
visibles qui ne messiéent point à l’origine du monde
civilisé. Nous avons tous entendu, je pense, les sa-
vantes inductions d’un jeune professeur que nous
nous honorons de posséder dans cette Société, et
nous avons pu juger si ses lecons inspirées par les
modernes. écoles historiques, et auxquelles les dis-
cours de Volney n’ont peut-être pas été inutiles ; si
ses lecons, dis-je, ne nous ont pas paru plus fécondes
que les documens des Millot et des Lenglet Du-
fresnoy.
Lorsque je parle de l’histoire et de ses systèmes ,
je laisse à l'écart, et dans une respectueuse excep-
tion , le discours de Bossuet, ce tableau rapide où
tous les faits sont subordonnés à une Providence »
où toutes les révolutions sont une conséquence des.
invariables décrets de Dieu, où une phrase peint:
une longue durée, où un mot peint un personnage ,.
( 438 )
un évènement ; où plane un esprit d'inspiration pour
ainsi dire surnaturel. Ce discours est au-dessus de-
la critique et en dehors de quelques autres récits
que ce soit. Le lecteur de Bossuet, entrainé par tant
de beauté, n’a pas même le temps de penser qu’il
pourrait être à l’univers d’autre origine que celle
consignée dans la Genèse , et une autre chronologie
que celle des livres saints.
Volney, voyageant aux Etats-Unis, n’aurait pu
être aussi attachant que Volney en Syrie et en Egypte;
la cause en est dans le prestige nécessairement attaché
aux lieux jadis illustres.On aime d’un amour religieux
les pays signalés par les grands écrivains ; on aime
à visiter avec Moïse, avec Homère, avec Hérodote,
le berceau des nations autrefois florissantes et qui
n’existent plus. Rien de cela n’attendait Volney dans
son second voyage. Au reste, ce qu'il en a rédigé
instruit, intéresse. La liberté a des prestiges aussi,
et mieux que des prestiges. La jeune Amérique à son
tour aura été, pour les siècles à venir, la terre de
l’héroïsme et des miracles; et cet oracle est si sûr
que l’on peut d'avance s'inspirer à cette renommée
future.
C’est ainsi qu’elle attira , il y a peu d’années,
M. Théodore Pavie. Deux volumes de Souvenirs
atlantiques ont été le fruit de ce voyage fait d’en-
thousiasme , à 18 ans , dans les Etats-Unis et le Ca-
nada; c’est un semblable aitrait qui l’emporte encore
en ce moment dans les nouvelles républiques de PA-
mérique du sud, et qui nous promet des observations
marquées au coin d’une expérience plus müre et
d’études plus suivies.
(439 )
Un contemporain de Volney, Jean-Baptiste Le-
clere, homme d’un honorable caractère , d’un pa-
triotisme à l'épreuve , d’un savoir étendu et varié,
mais surtout d’une imagination mélancolique et fleu-
rie, se partagea long-temps entre les affaires publi-
ques et la culture des lettres et des beaux-arts. Je
ne connais pas ce qu'il écrivit en politique , je sais
seulement qu’à l'ombre de ses saules, et au mur-
mure de la Loire qui baïgnaïit ses prairies, il écrivait
des idylles dans le genre de Gessnér, et des chansons
dont il faisait la musique. Invariable dans sa philo-
sophie, comme René l’avait été dans son insouciance,
il tempérait, pendant la révolution, les inévitables
émotions de son ame, par de douces créations de son
cœur, et, pour parler encore le langage de la Mytho-
logie , se réfugiait dans le sein des Muses contre les
discordes civiles. Obligé de quitter la France , après
la chute de Napoléon, ses douces rêveries le sui-
virent dans son exil; il y composa une épopée en
prose , Eponine et Sabinus, ouvrage un peu faible,
dont la fable est trop scrupuleusement imitée de
tous les poèmes épiques connus, et dont le #er-
veilleux, emprunté de la mythologie des Celtes, n’est
point assez attachant. De retour dans sa terre de Cha-
lonnes, Leclerc, constant dans ses goûts, se livra
exclusivement aux charmes de la nature ; il cultiva
ses champs et rassembla , dit-on, les matériaux d’une
histoire de la musique.
On s’étonnera que je ne dise rien de J.-F. Bodin,
l’auteur des Recherches sur le haut et bas Anjou. Je
prie d'observer qu'il ne s’agit point ici d’une biogra-
(440 )
phie complète de nos écrivains ; j’en ai voulu seu-
lement présenter quelques-uns dont les talens se fis-
sent remarquer par un caractère particulier, et qui
contrastassent entr’eux d’une manière un peu tran-
chante ; et l’auteur des Recherches, sous ce double
rapport, n'avait rien qui le fit entrer dans mon cadre.
Personne , au reste, ne rend plus de justice à ses
intéressans Essais , à l'esprit d'indépendance et de
justice dans lequel il les rédigea , aux lumières enfin
qu’il a le premier offertes aux Angevins, réduits avant
lui à des dissertations détachées ou à de misérables
chroniques. L'ouvrage de Bodin fut accueilli comme
il méritait de l'être; mais il appelle une autre his-
toire , et je ne le dis qu’aprés lui.
Une belle partie de notre histoire littéraire c’est
celle qui traitera de son état présent. 11 est peu de
branches des travaux de l’esprit qui ne présentent un
grand nombre d’Angevins estimables ou célébres. La
littérature légèré ou principalement d’imagination
sera la seule qui semblera pâle dans cet honorable
tableau; on en dira la raison. Ce sera la partie faible,
et l’on s’en montrera d’autant plus surpris que nous
habitons un pays qui offre assez de sympathie avec
une imagination riante et fleurie. Mais combien la
littérature sérieuse, combien la jurisprudence, la mé-
decine , la politique , le publicisme , la critique, la
Statuaire , la peinture ne comptent-elles pas d’An-
gevins distingués ! Trop faible, sans doute, pour une
semblable tâche , si je la tente un jour, ce sera fort
au moins de mon amour pour le lieu qui m’a vu nat-
tre, et des sentimens que m'inspirent les succès de
mes compatriotes.
DES DIFFÉRENS AGES DU GOUT
EN FRANCE,
Por M. Blordier-Langlois.
Le beau n’est point arbitraire ; il existe de lui-
même , d’une manière absolue dans la nature, dans
les arts et dans les travaux de l'esprit. Mais le
goût destiné à le percevoir n’est point aussi absolu ,
aussi indépendant. L'état politique et social d’un
individu, ses dispositions morales sont un prisme
inévitable à travers lequel il verrra les objets, ou un
voile qui lui en dérobera les beautés. Il faut que
l'ame soit prédisposée à apprécier ce qui l’envi-
ronne. Opprimée et souffrante, elle ne sentira rien
que son oppression et sa douleur. Il faut qu’il y
ait quelque sympathie entre elle et les choses qui
l’affectent, pour qu’elle y trouve du charme ou
de la consolation ; pour qu’elle se les assimile en
quelque sorte.
Pour la perception des beautés intellectuelles, 1l
faut davantage encore. Il faut un peu plus de réflexion,
plus de disposition à comparer les idées avant d’en
porter un jugement, quelque habitude, de la vie
( 442 )
morale, un peu de cette insiruction qui guide
l'intelligence et intéresse l’amour-propre ; il faut
enfin (et c’est ici le cas des peuples civilisés à
l'excès) un esprit qui résiste à la satiété, à l’a-
mour de l’innovation et des systèmes, et qui, dans
les anxiétés auxquelles nous sommes tous sujets,
sache se munir contre sa propre raison de la rai-
son universelle.
J'ai cru, Messieurs, que ces réflexions préli-
minaires trouveraient leur application dans le ta-
bleau rapide que je vais vous présenter des va-
riations du goût en France; il était utile que je
commencasse par Îà, si je ne voulais pas accor-
der que le goût ne soit qu’une faculté probléma-
tique, opinion qui n’est pas du tout la mienne,
et dont je désavoue pleinement les conséquences.
Après l’invasion des Francs, le goût des études
romaines fit place à celui des études qu’imposait
la religion nouvelle : les monastères se multipliè-
rent, autant pour servir d’asiles, dans le conflit
des barbares conquérans et des peuples conquis,
que pour pratiquer avec plus de recueillement la
Foi chrétienne. Les livres saints, des autorités mal
comprises ou mal eritiquées, la fabrication et la
lecture de légendes plus nuisibles qu’utiles, assu-
rément : telles étaient, en général, les occupations
de l'esprit. C’est bien à juste titre que nous pou-
vons donner à cet état le nom de barbare, mais
il était, pour les hommes de ce siècle, le seul état
qui püt être ; et c’est en se transportant en idée à
ces siècles qu'il faut les juger, non en les compa-
(443)
rant à d’autres. Des moines nous conservérent d’an-
tiques manuscrits en les transcrivant : c'était un
moyen de profit et légitime et honorable. D’autres
moines raturérent le vélin dépositaire d’un chef-
d'œuvre de l'antiquité, pour y substituer la règle
de leur ordre ou la vie de leur saint fondateur :
c'était nécessité, ignorance probablement; mais dans
l’un ou dans l’autre cas, ces moines sont à plain-
dre plus qu’à blâmer. Je ne serais pas surpris que
la vie merveilleuse de S.i-Benoît ou de S.t-Martin
couvrit quelque part ce que nous regretions au-
jourd’hui de Tite-Live ou de Tacite; et tout en
convenant qu’il n’y a pas compensation, je n’en
concluerais rien, sinon que ces moines n'étaient pas
dans une disposition morale ou sociale à goûter et
Tite-Live et Tacite. Le goût chez eux ne pouvait
aller plus loin; le fil des traditions antiques était
coupé. Comment eussent-ils été sensibles aux jouis-
sances de l'esprit, eux dont le travail des mains
était une obligation essentielle, dont la règle, par.
ses minutieuses prescriptions, absorbait le peu de
temps qui leur restait, et qui vivaient dans un
état perpétuel de crainte; ce que prouvaient les
moyens de défense dont alors étaient entourés leurs
monastères?
Les Sarrasins d’Espagne qui, au VIIL.* siècle, se
répandirent en France, pouvaient y faire naître le
goût des sciences et des beaux-arts ; Charles-Martel
les extermina prés de Poitiers, et tout le fruit de
cette expédition fameuse fut l’affermissement de sa
puissance , à moins que la postérité de quelques
(444)
Maures échappés au carnage de Poitiers, et réfu—
giés au midi de la France , ne fût l’origine nébu-
leuse de ces troubadours qui illustrèrent ces mêmes
contrées aux XIe, XIIe et XIIL.e siècles : origine
dont je ne sache pas qu'aucun critique ait eu
l’idée.
Un homme, tel que l’histoire en présente: peu
dans ses annales, Charlemagne pouvait faire une:
révolution immense dans l’esprit et le goût humain.
Au sein de la plus profonde barbarie, il se lève
comme un astre capable de ranimer et d'éclairer
les peuples. Il aime les sciences, il en cultive quel-
ques-unes , il appelle auprès de lui les hommes.
les plus instruits de son temps, il en forme un
conseil académique qui ne le quitte point, des:
écoles s’instituent dans iout son vaste empire ;
les continuels voyages de Charlemagne ne laissent
aucune de ces écoles sans inspection, sans encou-
ragement, sans récompense : mais tout était à faire
pour Charlemagne. Des peuples intraitables s’obsti-
naient à ne pas reconnaître son autorité, et mal-
heureusement , il était aussi opiniâtre qu'eux. Il
fallait imposer aux partisans d’une dynastie déchue,
et consolider la sienne par des moyens politiques:
et militaires peu compatibles avec les sciences et:
les arts, qui nous occupent en ce moment.
Les arts d'imagination auraient pris un essor re--
marquable sous l'influence d’un homme de génie-
et de tête en relation avec un autre homme éga-:
lement puissant, le calife Aaroun-al-Raschid. On.
sait qu’ils s’estimaient l’un l’autre ; le souverain de:
( 445 )
YOrient avait envoyé au souverain de l’Occident
une clef de l’église du S.t-Sépulcre, comme pour
remettre à sa discrétion la visite des lieux saints;
on sait qu’il lui fit présent de la première horloge
qui parut en France. Le goût allait sortir du som-
meil où il était plongé depuis l'extinction du gé-
nie grec et romain.
Mais, par une fatalité assez ordinaire, la posté-
rité du grand homme dégénéra avec une déplorable
rapidité. Le fils de Charlemagne ne put porter le
fardeau de son empire. Des troubles domestiques
démolirent piéce à pièce le superbe édifice de ci-
vilisation que nous voyions s'élever tout-à-l’heure ;
et, pour comble d’infortune, des hordes toujours
renaissantes de barbares fondirent , du nord de l’Eu-
rope, sur la monarchie de Charlemagne. Les mo-
nastéres furent détruits, les bibliothèques incendiées,
et les peuples au désespoir oubliérent bientôt ces
occupations intellectuelles dont ils avaient vu la
brillante aurore.
Les Normands cessèrent leurs dévastations; mais
la féodalité dont elles avaient été l'occasion vint
couvrir de son réseau fatal les peuples déjà aux
abois. Jamais l'ignorance ne régna plus complète-
ment qu'à partir de celte époque. Peut-être que
ce grand système politique sauva la société de son
entière dissolution ; mais quels étaient donc les maux
que de pareils remèdes nécessitaient ! Que pouvaient,
pour les sciences et les beaux-arts, ces mille sou-
verains si occupés à exercer leur pouvoir, et à se
défendre les uns des autres? Que pouvaient les
( 446 )
peuples au sein du plus dur esclavage Les mo-
nastéres eux-mêmes avaient goûté la séduction de
la puissance. Presque aussi ignorans que les sei-
gneurs laïcs , les seigneurs cloîtrés , oublieux des rè-
gles de leur ordre, partageaient les plaisirs des gens
‘du siécle, et faisaient leur étude d'augmenter leurs
richesses par des moyens coupables. Les plus sages
écrivains de nos temps en font foi, et l’on peut
bre ce qu’en dit l’abbé de Feury dans ses discours
sur l'Histoire Ecclésiastique. J’ai recueilli des do-
nations de ces siècles, qui ne confirment que trop
cette honteuse cupidité.
C’en étaït fait pour long-iemps des sciences et
des arts ; en France, sans les croisades. Les croi-
sades , que les écrivains philosophes ont frappées
d’anathémes, non sans quelque raison, donnérent
cependant aux esprits un mouvement qui tourna
très heureusement à leur avantage. Les individus
cessèrent d’être isolés et stagnans ( je ne puis ap-
peler société leur agglomération captive ). Les liens
d’une dépendance abrutissante se relächèrent ; les
passions recouvrèrent une partie de leur ressort et
de leur énergie ; le monde s’agrandit pour elles ;
le peu de lumières éparses dans l’Europe entrèrent
en communication ; l’Orient fermé pour nous de-
puis le siècle de Charlemagne et du calife Aaroun,
ouvrit aux peuples de l’Occident quelques-uns de
ses trésors ; le nouvel empire latin reçut les tra-
ditions de l’empire grec; l'Egypte révéla celles des
Ptolëmées, et la Syrie celles des califes de Bagdad.
L'architecture s'enrichit du style sarrasin si aérien,
( 447 )
si élégant. Pour élever dans les airs ces étonnantes
basiliques , quelles connaissances il fallut acquérir
dans les sciences exactes !
Les: troubadours sont aussi de ce temps. Ils ex-
citérent les seigneurs à prendre la croix, ils chan-
térent leur bravoure, ils censurèrent leur conduite.
Leur langage naïf et fleuri se prétait aux douces
peintures ; l'amour résonna sur leur lyre ; ils ai-
mérent , ils furent aimés. Des souverains se firent
honneur d’être agrégés à la gaie Science , et un des
plus puissans rois du moyen âge fut un de ses plus
célèbres troubadours, je veux dire Richard Cœur-
de-Lion.
Les troubadours eurent la gloire de fonder en
quelque sorte la littérature italienne ; ils inspirèrent
Pétrarque et Boccace, et nous, nous laissâmes s’é-
teindre l’influence de cette précieuse période du
génie français. Les Italiens commencérent d’être
célèbres par eux dès le XIIL.e siècle, tandis que
les Français ne commencèrent à montrer quelque
goût, quelque talent qu’à la fin du XVI.
Le midi de la France eut au nord ses imita-
teurs ; les trouvères, moins doucereux, moins re-
dondans que les troubadours, répandirent avec pro-
fusion le sel de leurs contes joyeux et de leurs sa-
tires. Ce furent le fléau des nobles et des gens
d'église ; et, si l’on fait la part de l’exagération,
dont sont rarement exempts les jugemens de la
classe inférieure à l'égard des classes plus élevées ;
on ne peut disconvenir d’ailleurs, que les fabliaux
picards comme les sirventes languedociens ne soient.
de très curieux monumens du moyen âge.
(448)
Honneur donc aux XII.e et XIIL.° siècles où fleu-
rirent les troubadours et les trouvères! C’est d’eux
que nous pouvons dater la naissance du goût fran-
çais, de ce goût varié des chants héroïques, des
récits d'amour et de la satire. Rien n’était plus
analogue au caractère que nous avons développé
depuis : ce devait continuer, et nous aurions mar-
ché de front avec l'Italie ; et nous aurions aussi-
tôt qu’elle compté nos Dante, nos Pétrarque, nos
Boccace, nos Trissin, etc.
Des dissentions sanglantes, dira-t-on, arrétérent no-
tre essor ; la succession de Charles-le-Bel, la démence
de Charles VI et les fureurs d'Isabelle de Bavière
entraverent la marche du génie; mais l'Italie était-
elle bien plus tranquille ? Les longues querelles de
l'Empire et de l'Eglise , et les rivalités toujours re-
naissantes de ses nombreuses et turbulentes répu-
bliques laissaient-elles donc plus de loisir au goût
pour se former ? Chez les Italiens le génie des beaux-
arts s’enflammait au feu des combats; chez nous il
se laissait aller au découragement. Nos populeuses
et inquiètes écoles se consumaient dans la polémique
d’une théologie sophistique et subtile, toujours prêtes
d’ailleurs à se mêler à l’administration temporelle ,
et à se faire craindre des gouvernemens. L'histoire
du moyen âge abonde , comme vous le savez , en dé-
tails sur leurs séditions quelquefois très meurtrières.
Si le goût français n’avançait pas d’une manière
sensible, cependant les circonstances lui devenaient
de jour en jour plus favorables. Les démélés de Lu-
ther et d’autres sectaires avec la cour de Rome exci-
(449)
taient les esprits. Mais la langue nationale ne se
formait pas. De précieux chroniqueurs lui avaient ,
il est vrai, confié le fruit de leurs veilles, et
nous les entendons fort bien ; mais la poésie mar-
chait à pas lents, et notre langue se prétait mal
encore aux nobles pensées. Marot , qui excella à
l’époque la plus avancée de ces temps, Marot, très
aimable dans quelques madrigaux et dans quelques
contes , n'est plus supportable lorsqu'il veut traiter
d'objets héroïqués ou sérieux.
L’imprimerie, inventée au milieu du xv.° siécle ÿ
devait produire une révolution dans les esprits ; elle
leur donna une direction qui ne fui point favorable
à imagination. Une innombrable quantité de com-
mentateurs, de scoliastes affluèrent, pour publier
des éditions exactes des manuscrits antiques, qu’a-
vait altérés l'ignorance ou la distraction des co-
pistes. Loin de moi de ne pas apprécier ces laborieux
critiques ! Il y aurait trop d’ingratitude. Combien
d'écrivains de nos jours, fiers de leur sagacité,
mauraient pas rectifié, purgé , expliqué vingt pages
de ces manuscrits qui, pour la plupart , étaieni dans
une inextricable confusion ! Combien, sans les citer,
se font honneur des travaux de ces infatigables aris-
tarques ! Mais enfin l’érudition gagna seule d’abord
à la découverte de l'imprimerie ; et delà au pédan-
üsme il n’y avait qu’un pas. Il était assez naturel
que des reclus, enfoncés dans la poudre des biblio-
thèques, la secouassent quelquefois pour annoncer
au monde, avec une ridicule emphase, les résultats de
leurs veilles. Etrangers à la société, dédaigneux de
31
( 450 )
la politesse qui commençait à s’y introduire, àl
n’était point étonnant que les Muret, les Scaliger,
les Scioppius, abimes d’érudition, comme ils se nom-
maient eux-mêmes, divertissent ou scandalisassent
le public de leurs violentes et savantes disputes.
Un autre inconvénient, qui d’ailleurs annonçait
quelques progrès dans le goût français, ce fut l’imi-
tation, la traduction des chefs - d'œuvre antiques ;
que ces essais furent d’abord malheureux ! N’é-
tait-il pas inconcevable que des écrivains , qui pou-
vaient connaître parfaitement les Sophocle , les
Euripide, fussent si mal inspirés par eux! et que
les faits, brillans sinon solides, de Charles VIIT,
de Louis XII et de François 1.*, ne tirassent pas le
génie français de sa torpeur ! Sous ces règnes , nous
avions eu des communications fréquentes avec l’Italie
qui possédait /& Mandragore de Machiavel , la 50-
phonisbe du Trissin, l'Italie délivrée du même poète
et les délicieuses folies de l’Arioste. Je ne parle pas
du Tasse qui n’écrivait pas encore, mais qui, peu
de temps après, se plaçait entre Homère et Virgile,
quand Ronsard enfantait son poème aujourd’hui si
complètement oublié de la Franciade.
Rien ne profitait au génie français ; et, lorsque tout
concourait à l’émanciper , il se débattait encore dans
ses langes. L'imitation ne valut à Ronsard que ses
mots burlesquement composés du grec et du laun,
et à Baïf que ses infructueuses tentatives des vers
scandés. En se tenant pour dit que la langue fran-
çaise manque de cette prosodie rigoureuse qui dis-
tingue les langues anciennes, que n’étudiaient-ils
(451)
le génie des Anciens? Notre littérature eût gagné un
siécle ; et des Malherbe, des Rotrou, des Corneille
eussent consolé leur patrie des déplorables règnes
des derniers Valois.
Ces grands hommes étaient réservés au temps de
Henri IV et de Richelieu. On ne traduisit plus, à
proprement parler, dans ces temps vraiment l’aurore
de notre littérature; on imita. Rotrou seul tint à l’an-
cien et au nouveau système, mais en homme supé-
rieur, eu homme digne que le grand Corneille l’a-
vouât pour son maître. Je ne dirai rien de Malherbe
que vous connaissez, rien de Corneille dont tous les
beaux vers vous sont familiers.
Enfin le magnifique siècle de Louis XIV s'ouvre,
et par ce même Corneille vieillissant , et par Mo-
liére , le comique le plus parfait que les temps aient
produit , et par l’auteur des Provinciales; la carrière
est ouverte. Racine y va faire entendre les plus har-
monieux accens que notre langue soit destinée à
produite. Il imite encore, mais comment ! Et que
diraient les Anciens s’ils savaient que l’on reprochât
à Racine de les avoir imités ainsi? Il imite, mais
de quelle inimitable manière ! Il imite, mais avec
quel puissant génie il invente aussi! À qui Racine
a-t-1l emprunté Mithridate, Britannicus, Athalie ?
Grand homme , dont le seul défaut est d’être trop
connu , et admiré depuis trop long-temps, tes anta-
gonistes, crois-moi, n’auront point à se plaindre
d’une pareille disgrâce.
Le siécle de Louis XIV eut sans doute ses taches ;
mais n'est-il pas ridicule de prétendre qu’un siècle
(452)
Jittéraire sôit parfait? Louis XIV lui imprima trop
peut-être de cette symétrie, de cette grandeur un
peu guindée qu’on Jui reproche; mais, quand ce
siécle eût pu deviner l’immoral laisser-aller de la Reé-
gence, y eût-il donc eu pour lui tant d’avantage à
l’adopter , au lieu.de sa marche décente et noble? Il
fut croyant et soumis; eût-il beaucoup gagné à an-
ticiper sur l'esprit hardi et innovateur de sages pré-
tendus qui ne s’entendaient pas entr’eux? Il fut fidéle
aux règles littéraires qu’avaient établies d’excellens
critiques de l’antiquité , sur des ouvrages qui depuis
deux et trois mille ans font l’admiration du monde;
eût-il mieux valu qu’il les secouât toutes, comme
nous le. voyons faire de nos jours, ei qu’il montrât,
cent cinquante ans plus tôt, le génie s’agitant dans
les angoisses d’une pénible agonie? Messieurs, vous
connaissez ce siècle qui porte le nom de Louis XIV;
je ne vous ferai point l’énumération trop aisée de ses
immortels écrivains ; quelle que soit votre opinion,
vous me permettrez d’énoncer ici la mienne: que ce
siècle fut l'apogée du génie français, et que de ce
sommet il ne pouvait plus que descendre.
Le siècle de Louis XV devait offrir, mais dans
des bornes raisonnables, plus de liberté que le
précédent; il n’a manqué qu’en partie à sa desti-
née. Cette liberté a produit des écrivains du pre-
mier ordre et qu’on lit avec ravissement; mais une
sorte d'inquiétude et de préoccupation marque leurs
ouvrages ; et l’on voit que, sil ne leur est pas
donné d’avoir des disciples et des imitateurs en lit-
térature, ils ne manqueront pas d’applicateurs de
( 453 )
leur doctrine ; on voit que leurs assertions auront
d’ardens approbateurs, et que leurs tètes puissantes
trouveront des bras forts et entreprenans.
Ils n'avaient rien laissé à dire; l’éducation phi-
losophique des Français était achevée; un autre
siècle voulut avoir aussi sa’ gloire : ce siècle,
messieurs, c’est le nôtre. Les libertés du XVIIL.*
ne lui convenaient pas ; il y avait entr’eux la ré-
volution de 1789: bientôt il y eut la restauration.
Revenir à Louis XIV, ce n’était plus possible, on
s'était trop naïvement exprimé à son sujet : on se
jeta dans des siècles et à des imitations sans const-
quence. On exploita le moyen âge, et avec quelle
fidélité ! On essaya de parler la langue de Thibaut
de Champagne et de Charles d'Orléans. Ce ne: fut
plus que chapelles gothiques , que dévots pélerins,
que tendres chevaliers, que doucereux ménestrels:
Des écrivains à riche imagination fournirent abon-
damment de textes à ces nouveaux troubadours.
On puisa à pleines mains dans le Génie du Christia-
nisme, dans la Gaule poétique et dans Tristan le
Voyageur.
Nous n'avons point de théâtres, à entendre nos
jeunes écrivains ; car sérieusement sont-ce des théà-
tres que ceux de Corneille, de Racine et de Vol-
taire ; écrivains , que l’on ne désigne plus , du moins
les deux derniers, que par leur ample perruque ? Il pa-
rut excellent d’en demander à Shakespear, à Lope de
Véga , à Goëthe et à Schiller. A la bonne heure !
Comme des écoliers qui secouent en étourdis le joug
‘salutaire de leurs maitres, il n’y eut plus d’Aristote, .
(454)
plus d’'Horace, plus de Quintilien : tout cela fut
enfoncé. Et vous savez, messieurs, ce que produit
ce mépris des règles, Ronsard, à son grand éton-
nement, se voit ressusciter, par les soins d’un cri-
tique digne assurément d’un plus honorable office;
on fouille dans la vie privée des rois, pour mettre
leurs faiblesses en lumière , las de n’avoir vu jus-
qu’à présent exposer sur la scène que des évène-
mens glorieux pour leur règne et pour la France.
On fait plus ; tant pis pour ceux sur qui cela tombe!
on leur attribue, sans scrupule, des faits évidem-
ment faux: un de ces auteurs les plus renommés
en fait l’aveu. Ce n’est plus de l’histoire, on en
convient, c’est une idée morale que l’on s'amuse à
développer aux yeux d’un public qui n’y voit que
des idées lihertines, et qui s’en arrange parfaite-
ment; car les auteurs font à la longue l’opinion de
leur siècle , s’il nest pas assez prononcé pour faire
la leur; et Dieu sait combien auront de comptes
à rendre aux âges à venir les écrivains du nôtre!
L’exemple gagne involontairement, et nous voyons
plus d’un bon esprit aujourd’hui , signant comme
les auires l’ostracisme d’un de nos génies passés,
dire, pour toute räison : « Je m’ennuie de toujours
l'entendre appeler un écrivain parfait. »
(455 )
SUPPLÉMENT A L'ARTICLE PRÉCÉDENT.
Jar trop à me louer de l’indulgente politesse de
la Commission chargée d'examiner ce dernier opus-
cule, pour ne pas lui tenir compte des observa-
tions par lesquelles elle termine son rapport. J’au-
rais dû, selon elle, ne pas dédaigner autant que
je l’ai fait, les chroniques et les annales qui nous
ont conservé curieusement les origines de notre
histoire. Elles sont nombreuses, je l’avoue ; elles sont
d’une inappréciable utilité pour ceux qui s’exercent
dans le genre historique ; mais quel goût spécial
manifestent les auteurs de ces compilations pesan-
tes? Que sont-ils au VI. siècle , qu’ils ne soient
encore huit siècles après? Quelle forme leur voit-on
adopter de siécle en siècle, qui annonce que le goût
soit pour rien dans leurs travaux, jusqu’à Froissard ?
Tout vénérables qu’ils sont, et quelque cas que je
fasse de ces monumens précieux, je n’en excepte
pas Villehardouin lui-même et Joinville, considérés
sous le point de vue général où j'ai envisagé mon
sujet.
Le Rapporteur de la Commission, dont la voca-
tion est bien certainement l’histoire, et qui l’accom-
plit dignement, s'étonne surtout que je n’aie pas
(456 )
remarqué Grégoire de Tours. Cet écrivain sera tou-
jours pour nous d’un trés grand prix. Je ne vais
aucun de ces défauts qui sont de son temps, mais
j'apprécie et la couleur qu'il sait donner à ses ta-
bleaux, et la clarté de ses récits, et la sagesse
de ses réflexions, et la modestie de ses prétentions.
Grégoire de Tours, vivant, comme il le -dit lui-
même, dans une des plus malheureuses périodes
de notre histoire, au sein de l'ignorance, de la
barbarie et de la guerre civile, ne constitue pas
le goût de son siècle; il n’en a recu l'influence ni
ne lui a imposé la sienne ; il était comme un Oasis
au milieu des déserts : c’est sur la foi même de Gré-
goire de Tours , juge incontestable de son âge , que
je fondai mon jugement sur cet âge, jugement que
la Commission a cependant trouvé sévère (1).
Je dirai la même chose des controversistes reli-
gieux, qui furent nombreux dans tous les temps,
mais dans lesquels on trouve peu empreint ce goût
qui fait l’objet de ma dissertation ; raisonnablement
étranger à ces graves matières , à moins que le
siècle ne les entraîne et ne les signe malgré eux de
son sceau.
Je passe à nos temps, et je rends un sincère
hommage à des écrivains dont je n’ai pas parlé,
parce que ce n’était pas le lieu. Dans la position
où je m'étais mis de chercher des caractères sail-
lans, pouvais-je hésiter à choisir cette moderne lit-
(4) Voyez Grég. de Tours , en sa préface.
(457)
térature qui prétend réellement donner sa couleur
au siècle , et marquer une ère nouvelle? Je n'ai
donc pu rendre à MM. Guizot, Thierry, Ville-
main, etc., la justice qu’en une autre circonstance je
leur aurais rendue avec enthousiasme. Ces messieurs
d’ailleurs ont écrit comme dans tous les temps où
Von écrit bien ; leur place est partout où l'élégance
est unie au savoir et l'imagination au bon sens.
M. de Châteaubriand n’est plus aujourd’hui qu’un
classique ; son école l’a laissé bien loin derrière
elle ; son école,
Triste objet . . ..
-. . Que méconnaïtrait l'œil même de son père.
Je regarde un peu M. de Lamartine comme
étant dans le cas de M. de Chäâteaubriand, par
rapport à la nouvelle école. Je reconnais la pro-
fondeur de sa pensée et de sa sensibilité, la force
de son expression; et, s’il se reproche quelque
obscurité dans sa métaphysique, quelque embarras
dans sa phrase , c’est surtout à la vue de tant de
prétendus imitateurs de son très beau talent, sur
le mérite desquels nous sommes , je crois, assez
d'accord, M. le Rapporteur et moi.
(458)
ERRATA.
Pag. 2, ligne 44, au lieu de surface, lisez : surface cultivée.
27, ligne 5, --- nitrate de potasse, lisez : carbonate de
soude.
56, ligne 43, --- été, lisez : ôté.
426, ligne 8, --- Pérou, lisez : Péron.
425, après N.° 3, ajoutez : N.° 4. Trou pour introduire le ther-
momètre.
Nota. Les Nos suivans, pour s’accorder avec les figures, doivent
être élevés d’une unité; celle des deux Planches 5 qui renferme
des graminées doit être numérotée 8.
( 459 )
TABLE DES MATIÈRES
Contenues dans le premier Volume.
Introduction historique aux Mémoires de la
Société d'Agriculture, Sciences et Arts d’An-
gers . . . . . . vV
Règlement constitutif " la Société. TEE]
AGRICULTURE,
Des changemens physiques et chimiques qu'é-
prouvent les terres dans l’opération de l’E-
cobuage et des résultats que peut en reti-
rer la pratique agricole , par M. Desvaux. 1
Quelques observations sur la culture en pépi-
nières du prunier sauvageon appelé Damas
noir, par M. Lesreron aîné, pépiniériste. 32
Notice sur une variété de cerise tardive ; iné-
dite, par M. Mnzer. . . £ 36
Ce de l’Ognon-Patate, par M. me 38
Description d’une nouvelle variété de rosier. 40
Sur la greffe de la Vigne, par M. Boureou. 97
Erreur des agriculteurs et des botanistes sur le
Teff des Abyssins, par M. Desvaux. . . 104
( 460 )
Sur l'Englumen propre à préparer les arbres
destinés à un voyage de long cours, par
Lerreron jeune, pépiniériste à Angers .
Notice sur la Finification , par M. ne Beaure-
GARD . L UNE
De la Bruyère col ae ds le vignes comme
engrais, par M. DE BEAUREGARD
Rapport sur la Charrue anglaise , dite de Bad
ley, par M. ne Beaurecarn 2 M
Fose Pigmée .
Rapport sur les Médailles du Dee par cr $o-
ctété pour l'exposition horticulturale du 21
Juin 1832 .
Rapport du Jury sur l’ net Ron oT es
rale des 6, 7 et 8 juin 1833. ï
Nouvelle Dares du Cameliia, obtenue de
graine par M. Cacuer, jardinier-fleuriste.
Description d'une nouvelle variété de Poire,
par M. Mnrer se
Mémoire sur les rbiceris bises en Front
ou qu'on peut y cultiver , par M. Desvaux.
De l'usage du Chlorure de sodium , dans le cas
de Météorisme, par M. Lauvay-Jouserr.
Sur les moyens de quérir facilement les animaux
domestiques de la Météorisation ou Ft
par M. De Beauvoys .
Sur les moyens d'utiliser les Orchidées par
M. De Brauvoys. À
Méthode-Pratique pour gra la En par
M. Deraace 2 ADR MEN TN :
Pages.
107
213
227
233
239
240
297
300:
301
302
392
393
395
A1 1:
(461)
SCIENCES.
Note sur une description mécanique de da
Chaînette, par M. Bosnxier.
Analyse du fer arsénical d'Angers et de S.t- t-
Pierre-Montlimart, par M. Lerrerow, phar-
macien £ . :
Description d'une Far espèce de Gear it
par M. Murer. ; POLE
Description de la chenille ur Ba hi nn x
par M. Courtircer Res
Observations sur le Melon délicieux dr
deliciosus }, par M. Desvaux. » &
Description et observations sur une nouvelle es-
pêce du genre Thymbra, par M. Desvaux.
Rapport de M. Burar , relatif à un mémoire
de M. Hossard sur 'e cas de diffor-
mile . LE 4 PNA Ê
Des Stalactites souterraines où PE Hoi
gorites ( planche F, fig. 1 et nn par
M. Desvaux.
Rapport sur une note # M. M apét
pour titre : Des Stalactites souterraines ou
prétendues Fulgorites, par MM. Cuerow,
Pirate ET F'OURRIER -
Observations sur les Cie iés iBécrene
tions de Genres et Espèces Fren de cette
même Famille, par M. Desvaux . ;
Description de deux nouvelles espèces du genre
Anodonte , par M. Muxer .
Pages,
66
109
114
157
241
( 462 )
Description du Trèfle à ae Fi > par
M. Desvaux. : ML à
Du Quartz aventurine et de ses gissemens ,
par M. Desvaux . ;
Sur la Navigation de la db. , par M. Dale
ingénieur en chef du département de Moi
et Loire.
Recherche du Plan MER &s abs. par
la théorie de Maximis et de Minimis , par
M. Pexox , professeur . pal,
Examen chimique d'une Arragonite servant de
Marne , trouvée dans le département de la
Vienne, par M. P. Lesrero.
Sur la découverte, faite par M. Boris)
d'une Terre à Porcelaine, dans le dé paihes
ment de Maine et Loire; par M. Desvaux.
LETTRES ET ARTS.
Discours sur l'Idéal , par M. Brorner-Lanezoïs
Mémoire relatif à des médailles qauloises,
trouvées près Angers , par M. Gruxe.
Notice biographique sur Billard, par M. Gréc.
LaACHESE, Ce à l'Ecole de Médecine
d’ ie : :
Quelques Réfexions sur d'Histoire \ et sur les
principaux Historiens des différens siècles.
par M. Bcorprer-LancLois . 3
Le Chevalier de Latour-Landry et Réfasions
sur le moyen dge , par M. BLorprer-LaneLois
Pagés,
243
244
. 240
255
3938
496
69
82
121
(463)
Souvenirs Atlantiques, de M. Théodore Pavie,
par M. BLorprer-LANGLOIS . eee (De
Nouvelles Réflexions servant de Te à
celles-ci, par le même . !
Sur le Cours d’'Antiquité RAM de
M. De Caumont . j
Rapport d'une Commission sur un T, rs de
Lecture de M. Blain.
Sur quelques Ecrivains de lAnjon > par "M.
BLorprer-LANGLois .
Des différens âges du Goût en FEU par
M. BLorprer-LaAxGLois.
Supplément au méme article, par 1e cine,
Pages.
282
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Lilho. de Ernest Le Seurd, Angers.
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AVIS.
Les Sociétés qui n'auraient pas envoyé en échange
leurs publications , et qui sembleraient par-là renon-
cer à la correspondance de la Société d’Agriculture,
‘Sciences et Arts d'Angers, sont prévenues qu’elles :
ne recevront point la suite de ses Mémoires, dont :
‘cette livraison termine le 1.® volume.
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