ce me < 2 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'AGRICULTURE, SCIENCES ET ARTS D’ANGERS (ANCIENNE ACADÉMIE D’ANGERS) NOUVELLE PÉRIODE TOME VINGT-SIXIÈME. — 19884 —— — 0 AFF -IO ——— ANGERS IMPRIMERIE LACHÈSE ET DOLBEAU 4, Chaussée Saint-Pierre, # 1885 me + oo MÉMOIRES De la Société Nationale D’ANGERS (ANCIENNE ACADÉMIE D'ANGERS) 1 ET DOLBE a Le a © < Fa = [1 El — LA MP NGERS, 1 " / DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE 3 © DAGRICULTURE, SCIENCES ET iNS D’ANGERS (ANCIENNE ACADÉMIE D'ANGERS) L NOUVELLE PÉRIODE TOME VINGT-SIXIÈME. — 4S8S4 ANGERS IMPRIMERIE LACHÈSE ET DOLBEAU 4, Chaussée Saint-Pierre, 4 dd nd LE D' LACHÈSE PRÉSIDENT DE LA SOCIÉTÉ D'AGRICULTURE, SCIENCES ET ARTS D'ANGERS. MESSIEURS, L'année qui vient de s’écouler a été attristée par une perte que nous avons tous vivement senlie. Notre pré- sident honoraire le Dr A. Lachèse a quitté celte terre au mois d'août dernier. Des circonstances indépen- dantes de ma volonté ne m'ont pas permis de vous entretenir plus tôt de cette vie si bien remplie par des travaux de toute sorte. C’est ce que je viens faire ‘au- jourd'hui, puissé-je remplir votre trop longue attente d’une manière digne de celui que nous regreltons. Ambroise-Adolphe Lachèse, fils du Dr Grégoire Lachèse et de Marie-Cécile Boudet, est né à Paris le 23 brumaire an IX (13 novembre 1800). Il fit ses études au collège royal d'Angers et dès le 31 août 1816, n'ayant pas encore accompli sa seizième année, il sor- tait de cet établissement avec le certificat de philosophie et de sciences. Le choix d’une carrière, qui cause à tant de jeunes gens de si grandes difficultés, ne paraît SOC. D’AG. 1 SE gere pas l’avoir embarrassé un seul instant. Son choix était fait d'avance. Fils d’un médecin et sorti d’une famille qui en comptait déjà plusieurs, Adolphe Lachèse em- brassa sans hésitation l'honorable carrière paternelle, et dès le mois d'octobre 1816, il suivait les cours de l'École de Médecine d'Angers, qu’il quitta deux ans après pour se rendre à Paris. En 1893, il recevait le diplôme de docteur et venait s'établir à Angers. La Société de Médecine de cette ville l’accueillait parmi ses membres dès le mois de mai 4824. Trois ans plus tard notre jeune docteur était nommé par Mgr de Frays- sinous, professeur-adjoint à l’École de Médecine d'Angers, attaché au cours de clinique, médecine légale et hygiène. En 1837, M. À. Lachèse était de nouveau chargé des mêmes cours par décision ministé- rielle. Il s’occupa du reste toute sa vie avec une grande assiduité de l'hygiène publique. Le 26 janvier 1898, un arrêté préfectoral le nommait membre du comité de vaccine, fonctions qu’il a exercées dès l’âge de 28 ans et qu’il a conservées presque jus- qu’à la fin de sa carrière. En 18387 il était, sur la demande de ses confrères, appelé à faire partie du comité de salubrité publique, et il exerça pendant de longues années les fonctions de secrétaire de ce comité". Obligé par l’âge et les fatigues de s’en démettre en 1879, il reçut à cette occasion de la part de ses collègues les plus chaleureux remerciements. Ses travaux, ses longs 1 Les rapports, auxquels ont donné lieu les questions sou- mises au conseil d'hygiène et de salubrité publique de 1849 à 1866, ont été publiés et forment un volume qui permet d’appré- cier l'importance el la variété de ces questions diversés. EURE EUR et honorables services au conseil d'hygiène publique ét de salubrité furent récompensés le 11 janvier 1881 par une médaille de bronze, décernée par le ministère de l’agriculture et du commerce. M. Lachèse donnait en outre ses soins à diverses catégories de malades. Au mois d'août 1831 il était nommé médecin de l’hôpital St-Nicolas, qui servait alors de succursale pour les militaires. Il devait en 1870-71, au milieu de bien tristes circonstances, assis- _ter encore les militaires malades et blessés à l’ambu- lance de la gare d'Angers. En 1836, il était nommé, par arrêté préfectoral, médecin-adjoint des prisons, alors établies au château d'Angers. Il s’occupait aussi des aliénés et en 1837 il était chargé par l’administra- tion du dépôt provisoire de St-Nicolas. Un fait entre tous honore surtout la carrière médicale de M. A. Lachèse. En 1832, tandis que le choléra sévissait dans toute son intensité, M. Lachèse, marié et père de famille, se rendit à Paris dans le but d’étu- dier auprès des maîtres de la science le terrible fléau et les moyens de le guérir et revint faire profiter ses confrères el ses concitoyens de l’expérience qu’il avait acquise dans les hôpitaux de la capitale, pour les soins à donner aux cholériques‘. Cet acte courageuxest cons- taté par une lettre de remerciement adressée à M. La- chèse par M. Joubert-Bonnaire, alors maire d'Angers, du 18 avril 1832. Elle doit rester dans les archives de ! Ses observations furent consignées dans une lettre adressée au maire d'Angers et publiée dans le Journal de Maine-et-Loire du 30 avril 1832. Nes la famille comme un témoignage authentique de la valeur morale de l’homme à laquelle elle s’adressait ; ce fut, je crois, sa seule récompense. Peu d’années après, au mois de décembre 1837, M. Lachèse dut se démettre de ses fonctions de profes- seur à l’École de Médecine. Tout en conservant le goût des études médicales, auxquelles il revenait toujours avec HEURE il embrassait une nouvelle carrière et se mettait à la tête d’une importante imprimerie. Il nous apparaît alors sous un nouveau jour. Ce n’est plus le médecin que nous avons devant nous, mais le lettré, l’érudit qui vient prêter son concours aux auteurs et devient éditeur de grands ouvrages. M. Lachèse a fait sortir de ses presses d'importantes publications Il m'est impossible de tout citer ; je mentionnerai seulement les Annales de Bourdigné et les OEuvres du Roi René, documents si intéressants pour l’histoire d'Anjou, publiés sous les auspices de M. le comte de Quatrebarbes, L’Anjou et ses monuments, de M. Godard- Faultrier, Angers pittoresque, de M. Eliacin Lachése, les Souvenirs pittoresques de l'Exposition de 1839, avec dessins de M. [Hawke, le Mouvement provincial, de M. Bougler, l'Histoire du diocèse d'Angers, de l’abbé Tresvaux, la Flore du centre de la France, de M. Boreau, les Archives d'Anjou, de M. Marchegay, Les Cartulaires angevins, de M. d’Espinay, etc’. 1 M. Lachèse a dirigé et publié pendant plusieurs années, la Revue d'Anjou ; il a imprimé. aussi les Mémoires de diverses sociétés savantes. De plus les éditeurs de Paris lui ont confié différents travaux, tels que la réimpression du Moniteur de 1789, les Œuvres complètes de St Jean Chrysostôme, l'Histoire L'EAU L'imprimeur, lorsqu'il comprend son rôle comme le faisait M. Lachèse, devient l’ami et le collaborateur de l’auteur ; l’œuvre imprimée leur est en quelque sortie commune et maint auteur s’est souvent bien trouvé d’avoir suivi les conseils de son imprimeur. La situation que M. Lachèse conquit promptement dans l'imprimerie lui valut les suffrages des commer- çants pour une place de juge au tribunal de commerce. Il conserva pendant plusieurs années ces délicates fonc- tions dont il s’acquittait au milieu de ses multiples occupations avec la conscience scrupuleuse qu’il appor- tait à tout ce qu’il faisait. Mais ce n’était pas encore assez pour l’activité intel- lectuelle de M. Lachése. Il trouva le temps de composer et de publier de nombreux travaux d’une nature très variée, qui montrent combien son esprit élait apte aux éludes les plus diverses. Sa thèse du 10 juillet 1823, sur la Duplicité monstrueuse par inclusion, présentée à la Faculté de Paris, traite de l’un des sujets les plus obscurs, mais aussi les plus curieux de la physiologie". Je serais peu compétent pour en rendre compte ; je me permettrai de dire cependant que la méthode de M. Lachèse m'a paru excellente. Il commence par constater les faits et en tire ensuite les conséquences, sans faire d’hypothèses gratuites et en éliminant tout ce qui ne Jui paraît pas suffisamment prouvé. Les lois des écrivains sacrés et ecclésiastiques, par D. Cellier, les Œuvres de Madame Swetchine, l'Histoire de l’Église de l'abbé Darras, etc. 1 Cette thèse et les plus importants travaux de M. A. Lachèse, ont été réunis en un volume publié par l'imprimerie Lachèse. Angers, 1874. : EME 2e de l'esprit humain sont unes, et en histoire comme en archéologie c'est la seule manière d’arriver à la vérité. N’en est-il pas de même dans les sciences médicales et naturelles ? M. Lachèse était encore un jeune médecin quand il fit en 1828 une communication à l’Académie de Méde- cine sur les Fractures de l'os coxal. Gette communica- tion obtint les honneurs d’un rapport fort élogieux pour son auteur. Le Dr A. Lachèse avait prêté son concours comme médecin non-seulement à l’administration, mais à la justice. Ce fut pour lui l’occasion d’études médico-légales dont il a constaté les résultats dans plusieurs mémoires. Celui qui a pour objet le Mode d'action de lPacide arst- nieux sur l’économie et la dose à laquelle ce poison peut donner la mort, fut publié dans les Annales d'hygiène et obtint de la rédaction de ce recueil une mention honorable avec une médaille de cent francs. Je puis dire qu’il dévoile chez son auteur de rares qualités comme médecin-légiste et je souhaite à tous les juges d'instruction un collaborateur aussi consciencieux et d’un esprit aussi pénétrant que l’était M. Lachèse. Son travail peut servir de guide aux magistrats et aux méde- cins-légistes dans les matières d’empoisonnement par l'arsenic. Au même ordre d'idées se rattachent ses Observations et expériences sur les plaies produites par des coups de fusil. Pour apprécier les effets des coups tirés à courte portée, il fit de fort curieuses expériences et arriva à des résultats d’une étonnante précision. Ce furent aussi des affaires criminelles qui lui inspirérent un travail L'ART REAE sur les vivisections. L'affaire Lapomeraye lui rappe- lait l'affaire Castain, qui s’était passée dans sa jeunesse et l'affaire Bocarmé, autre empoisonnement plus récent, qui eut tant de retentissement en Belgique et en France il y a quelques années *. Le Dr Lachèse se déclare dans ce travail partisan des vivisections, au grand scandale de la Société protectrice dés animaux. J'avoue pour ma part que, sil faut s’incliner devant l’autorité des physiologistes qui les déclarent indispensables pour les progrès de la science, je voudrais à tout le moins que l’on pt interdire les cruautés inutiles dont on ne se fait pas faute dans les laboratoires. Mais je reviens à mon sujet. Une brochure de M. Lachèse dans le genre médico- légal et historique à la fois m’a surtout frappé et paru fort remarquable. Je veux parler des Observations médico-légales sur la mort du colonel Beaurepaire”. D’après la légende révolutionnaire, Beaurepaire ne voulant pas se rendre s’est brülé la cervelle d’une façon théâtrale, en pleine séance du conseil, en pré- sence des municipaux de Verdun. Lamartine lui a même mis dans la bouche un discours sublime de patriotisme, entièrement éclos de la cervelle du poète’. M. Lachèse, en analysant les documents authentiques, les pièces de l'enquête, bien imparfaite cependant, qui 1 Mémoires de la Société d'agriculture, ‘sciences et arts, année 1865, p. 95. Des vivisections, à propos de trois affaires eriminelles. ?Mémoires de la Société d'agriculture, sciences et arts, année 1860, p. 39. 8 Histoire des Girondins. Lee 7 IS \ fut faite alors, a démontré d’une manière péremptoire que Beaurepaire ne s’est pas brûlé la cervelle en pleine assemblée. Il est mort la nuit, seul, dans la chambre qu’il occupait à la maison de ville, assassiné suivant toute probabilité. Cette version, plus simple et plus vraisem- blable, n’enlève rien au patriotisme du commandant angevin, car il estmort victime de sa ferme résolution de ne pas se rendre; mais elle détruit le caractère théâtral que les passions du temps avaient donné à cet événe- ment. J'ai parlé du concours prêté par M. Lachèse à l’admimistration en qualité de médecin de l'hôpital militaire ; il fut en outre chargé en 1898 et années suivantes d'assister comme médecin civil aux opérations du conseil de révision. Nous devons à la participation de notre docteur à ces opérations une fort intéressante brochure de statistique médicale. M. Lachèse relève les différentes infirmités qui entraînent l’exemption du service militaire, arrondissement par arrondissement, et cherche à expliquer pourquoi:telle région renferme plus de sourds, d’aveugles ou de boiteux que telle autre. La cause de ces variations dans la répartition des infirmités humaines est souvent difficile à pénétrer. Mais le travail de M. Lachèse n’en montre pas moins un esprit doué d’une singulière faculté de rapproche- ment et de comparaison’. Cette étude remarquable obtint de l’Académie des sciences, à la séance du 30 janvicr 1854, une médaille d'encouragement, et ! Résumé statistique et médical des opérations du conseil de révision. | PR EE M. Élie de Beaumont annonçait à M. Lachèse cette bonne nouvelle dans les termes les plus élogieux. M. Vallon, préfet de Maine-et-Loire, adressait aussi les plus chaleureux remerciements à l’auteur sur son travail, au point de vue de son importance administra- tive ‘. Il ne m'appartient pas d'apprécier le mérite de M. Lachèse comme médecin, mais je puis me permettre de parler de l’écrivain. La lecture de ses œuvres médi- cales et médico-légales révèle les plus heureuses facultés intellectuelles. M. Lachëse approfondissait les questions avec conscience, ne laissait dans l’ombre aucun détail et ne quittait son sujet qu'après avoir épuisé -tous les moyens de parvenir à la connaissance de la vérité. Son style est net, ferme, précis sans sécheresse, comme celui de tout écrivain maître de son sujet; sa précision n'exclut pas l'élégance et garde tou- jours la forme littéraire. M. Lachèse excellait surtout dans les récits anecdo- tiques et biographiques; il racontait avec simplicité, bonhomie, esprit, et son récit était toujours attachant, soit qu’il rappelât de gais souvenirs, soit qu'il retraçât la vie d’un ami que la mort venait de lui enlever. Souvent les deux notes se mélaient, car dans la vie humaine le bonheur et la tristesse se mêlent souvent aussi; le souvenir des biens perdus ne fait-il pas à la fois et la joie et le malheur de l’heure présente ? C'est ainsi que M. Lachèse nous a rappelé l’arrivée des prisonniers de guerre atteints du typhus, à Angers, Lettre du 4 août 1856. Re OR en 4814 !, vieux souvenir de jeunesse qui l'avait vive- ment frappé. Il faut en rapprocher ses Souvenirs de l'ambulance de la gare d'Angers pendant la querre de 1870-71 °, deux époques qui se ressemblent par nos malheurs nationaux. Le Dernier passage du général Charette à Angers est un récit recueilli de la bouche même du Dr Grégoire Lachèse, son père, qui assista le chirurgien Lachèse, son cousin, pour le pansement du général vendéen, prisonnier et blessé”. Rien de plus authentique que cet épisode de la fin des guerres de la Vendée. j La biographie du D° Ménière, médecin en chef de l'Institution des sourds-muets à Paris, est fort atta- chante. Le grand mérite du célèbre médecin ne pou- vail mieux être apprécié que par son ami et compa- triote fort compétent pour rendre compte de l’œuvre du médecin, et qui tout en retraçant la vie du savant, laisse échapper les regrets dont son cœur d’ami était plein *. M. Ménière était lui-même lié avec deux hommes d’une célébrité bien différente avec lesquels il mit M. Lachèse en rapport: Orfila et Jules Janin. Le premier vint à Angers comme président d’un jury médical et prit ensuite une part fort importante à la décision d’un 1 Mémoires de la Société d'agriculture, sciences et arts, année 1872,p. 240. Typhus des prisonniers de guerre à Angers en 181%. 2 Mémoires de la Société d'agriculture, sciences el arts, année 1872, p. 40. 5 Idem , année 1861, p. 216. * La notice de M. Lachèse sur le D' Ménière fut appréciée de la manière la plus flatteuse dans une lettre de M. Rouland, alors ministre de l'instruction publique (4 fév. 1863). A ‘2e procès criminel dont M. Lachèse nous a retracé les émouvantes péripéties ‘. Le second, attiré à Angers avec John Lemoine, rédacteur en chef du Journal des Débats, par le voyage du prince-président, en 1849, reçut l'hospitalité chez le Dr Lachèse, père. Des rela- tions d'amitié s’établirent entre ces hommes d'esprit faits pour se comprendre et M. Lachèse nous en a relracé un charmant récit. L'histoire d’une certaine table d’ardoise, autour de laquelle se rassemblaient au nombre de trois ou quatre ces nouveaux chevaliers de la table ronde, pour jouer aux dominos, est pleine de charme et d’Aumour *. Les articles nécrologiques de M. Lachèse, publiés dans les Mémoires de notre Société, attestent la grande variété de ses connaissances et l’heureuse facilité d’assimilation dont il était doué; grâce à cette pré- cieuse faculté il savait se rendre compte des œuvres les plus diverses. Qu'il raconte la vie de M. Élie Janvier de la Motte, homme politique et diplomate, ou celle de M. Vallon, professeur d’hippologie à l'École de cava- lerie de Saumur; qu’il nous parle de M. Frédéric Parage-Farran, grand agronome, ou de M. André Leroy, créateur des plus belles pépinières de France et peut-être du monde entier, M. Lachèse reste toujours le même. Son cœur guide sa plume; mais son esprit fin et pénétrant a vite saisi le caractère de l’homme ! Orfila et les Angevins. — Ce procès a été le point de départ des recherches de M. Lachèse sur l'acide arsenieux. ? Jules Janin et les Angevins. Mémoires de la Société d'agri- cullure, année 1874, p. 245. HO A et le photographie en quelques trails bien tracés ‘. M. Lachèse rendit compte aussi dans nos Mémoires du brillant concours régional d'Angers en 1862. Il s’inté- ressait vivement aux progrès de l’agriculture et de l’horticulture en Anjou, et avait été appelé par l’admi- nistralion municipale, en qualité de président de notre Société, à faire partie du comité. d'organisation du concours *. Son amour des lettres, qui n’était pas moins vif, lui a inspiré un charmant compte rendu de la traduction des Œuvres d'Horace, par M. le D' Grille. Ce compte rendu se termine par une spirituelle condamnation prononcée contre l’auteur, qui feignait qu'Horace lui- même, mécontent de son traducteur, voulait obliger à mettre son œuvre en petits cornets *. M. le Dr Grille a eu le bon esprit d’obéir aux injonctions du président, organe autorisé de tous les membres de notre Société. Le public en a été ravi, et quant à Horace, il ne s’en est jamais plaint. Ce ne fut pas le seul compte rendu littéraire de notre président, à l’une des séances de 1858, M Lachèse avait présenté un rapport sur un poème inédit du xve siècle, découvert par M. Lemarchand, à la biblio thèque d'Angers. M. Lachèse n’était étranger à aucun genre d'étude et savait s'intéresser à toules les décou- vertes angevines”. Celle de M. Lemarchand lui fournit 1 Mémoires de la Société d'agriculture, sciences et arts, année 1864, p. 153; année 1869, p. 247 ; année 1874, p. 2%; année 1875, p. 117. 2? Idem, année 1862, p. 147. 3 Idem, année 1874, p. 146. * Idem, année 1858, tom. 1, p. 126. SANTE es l’occasion d’ingénieux rapprochements entre le poème du xve siécle et le Mérite des Femmes, de Legouvé. Avec le grand amour du travail dont il était doué, M. Lachèse devait apporter son concours à de nom- breuses sociétés savantes. Au mois de juin 1839, il était nommé membre de la Société académique de la Loire- Inférieure ; en novembre 1837, il devenait membre de la Société industrielle d'Angers ; un mois plus tard il était nommé associé correspondant de la Société médi- cale de Tours ; le 8 décembre 1837 il était admis à notre Société d'agriculture, sciences et arts ‘, et le 2 février 1857, il entrait à la Société linnéenne d’Angers. Enfin, au mois de novembre 1863 il devenait membre corres- pondant de la Société médicale de Besançon. M. Lachèse prenait une part active aux travaux de ces diverses sociétés et plusieurs des mémoires dont j'ai parlé déjà figurent dans leurs recueils et tout spécialement dans les nôtres. Parmi ses occupations si multiples, M. Lachèse trouvait du temps à consacrer à nos réunions auxquelles il était fort assidu, et se dévoua avec le plus grand zèle aux intérêts de la Société d'agriculture, sciences et arts. Il en fut nommé président le 18 décembre 1861, après en avoir été d’abord secrétaire. Son discours d’installa- tion, plein de tact et de verve, annonçait l'intention de donner à la Société une nouvelle impulsion ; il faisait appel à de chers souvenirs de famille et d'amitié, M: le Dr Grégoire Lachèse et M. Pavie père ayant été 1 Le diplôme de M. Lachèse est en date du 18 janvier 1840 ; mais il était déjà membre de la Société depuis trois ans quand ce diplôme lui fut délivré. RE 7 RE au nombre des fondateurs. Permettez-moi d’insister un peu sur la présidence de M. Lachèse ; c’est la partie de mon sujet qui doit nous intéresser le plus spéciale- ment. M. Sorin avait exercé les fonctions de président pendant plusieurs années, il était difficile de prendre la place d’un littérateur aussi distingué; sa retraite laissait la Société découragée, et le triste mot de disso- lution s'était déjà fait entendre, M. Lachèse sut donner à nos réunions une vie nou- velle. À maintes fois différentes il fit appel aux plus orands noms de la litiérature et sut attirer à nos séances les hommes les plus éminents; avec leur concours elles brillèrent d’un vif éclat. Le 28 juillet 1862 M. Villemain présidait la séance; M. Lachèse évoqua devant lui les grands souvenirs des cours de la Sorbonne de 1828, alors que les Guizot, les Cousin, les Villemain y attiraient toute la jeunesse française. Il sut flatter le maître avec adresse et bon goût. Quelques mois plus tard, à une séance présidée par M. Bourlon de Rouvre, préfet du département, M. La- chèse rappela les origines de notre Société, fille de l’ancienne Académie d'Angers. Il avait raison, car il est toujours bon de faire souvenir de cette origine, que l’on a trop oubliée depuis. Au commencement de 1866, le comte de Quatre- barbes assistait à plusieurs de nos séances et racontait avec celte parole loyale et franche que l’on était toujours heureux d’entendre, les événements du siège d’Ancône; M. Lachèse lui répondait quelques mots empreints . d’une sincère émolion. lee LORS D’autres séances furent présidées par notre véné- rable évêque, Msr Angebault, ou par M. le comte de Falloux, qui venait souvent alors nous prèter son gracieux. et bienveillant concours. L'une des séances les plus brillantes de cette époque fut celle du 26 juin 1867, présidée par M. Beulé, secrétaire perpétuel de l’Académie des Beaux-Arts. M. Godard-Faultrier lut à celte séance une dissertation sur un vase carthaginois. C’était un invit jeté habile- ment au savant académicien qui charma l’assemblée par le récit fort attachant de son voyage à Carthage. La même année notre président prit une part des plus actives, avec M. Godard et toute la Société, aux justes réclamations adressées au gouvernement pour la conservation des statues de Fontevrault, imprudem- ment promises à la reine d'Angleterre. MM. Segris, Louvet, de Las Cases, députés de Maine-et-Loire, s’uni- rent à MM. Dufaure, Vitetet Berryer, pour réclamer la ‘conservation des précieuses statues sur le sol angevin. Leurs lettres furent lues en séance et ces éminents personnages voulurent bien accepter le titre de membres de notre Société. M. le comte de Falloux, présent à la séance, joignit ses efforts aux nôtres. Les statues res- térent en France. Ce grand zèle que M. Lachèse déploya pour la conservation des statues de Fontevrault, il eut plus d’une occasion de le montrer encore, mais souvent avec moins de succès. Malgré ses efforts et ceux de M. Godard, la tour dite des Druides, ancien monument civil du xue siècle, fut détruite; mais la tour St-Aubin et les greniers St-Jean ont été sauvés. On nous fait espérer que ceux-ci vont devenir prochai- Leu de nement une annexe du Musée St-Jean et recevoir les objets qui viennent journellement enrichir l’admirable collection due aux longs travaux de M. Godard- Faultrier. ‘ Le 41 mars 1870, M. le préfet Poriquetl présidait la séance où fut couronné M. Benion, qui avait obtenu le prix du Conseil général pour un Mémoire sur le cheval. Ce fut encore une brillante séance organisée par M. Lachése. Quelques jours plus tard on apprenait la mort de M. Villemain et à la séance du 7 mai 1870, notre prési- dent rappelait avec des paroles émues le souvenir du voyage de M. Villemain à Angers. Lors de la mort de M. Berryer, en 1868, il avait aussi entretenu la Sôciété des derniers moments du grand orateur et du concours que celui-ci nous avait prêté. M. Lachèse savait toujours dans ces circonstances pénibles trouver dans son cœur des paroles touchantes d'adieu à adresser à ceux qui ne sont plus. À l’une des séances de cette même année, un palmarés de 1821 tomba sous la main de notre président ; il nous entretint des élèves de ce temps, dont quelques-uns devinrent plus tard des personnages connus et même célèbres ; mais que de vides déjà parmi les lauréats de 1821! Survint la terrible guerre de 1870-71. Nos séances furent forcément suspendues, tandis que M. Lachèse portait ses soins aux blessés et aux malades de l’ambu- lance de la gare d'Angers. Après nos désastres, 1l y eut un moment d’élan; on voulut reprendre courage et réagir contre l’affaissement général des esprits et des cœurs. M. Lachèse sut organiser encore quelques bril - LASER lantes séances. À celle du 26 juillet 1871, assistait * M. Paul Flandrin, frère du grand peintre, et lui-même artiste de valeur. Au mois de janvier suivant, une de nos séances attirait un grand nombre d'invités. M. le comte de Falloux présidait, et M. Daillière nous lut plusieurs actes de sa Jeanne d’Arc. Au lendemain de nos malheurs, le moment était heureusement choisi pour évoquer les grands et tristes souvenirs de la mar- tyre de Domrémy. Les beaux vers de M. Daillière eurent tout le succès qu’ils méritent et excitèrent l’enthou- siasme des assistants. Ce n’était pas, cependant, la première fois que la Société avait le bonheur d’entendre des vers de ce poète qui sait si bien allier la grâce à la finesse dans les pièces légères, et possède à la fois les qualités les plus élevées du style tragique. À une autre séance tenue trois mois seulement après celle-ci, Mgr Freppel nous fit l'honneur de nous pré- sider. M. Lachèse lut son article sur l’ambulance de la gare d'Angers; M. de Falloux prononça l'éloge du comte de Quatrebarbes, et nous tint sous le charme de sa parole sympathique. Msr Freppel nous entretint de ses vastes projets de réorganisation de l’Université catho- lique d'Angers. Nous admirâmes les idées si élevées du prélat, exprimées avec toute sa puissante éloquence*. Mais pour Mer Freppel, penser c’est vouloir, et vouloir c’est agir ; ce qui n’était alors qu'un projet devait en peu de temps devenir une réalité. 1 Déjà aux séances des 13 et 15 novembre 1868, M. Daillière avait lu plusieurs pièces de vers et des fragments de Jeanne d'Arc. ? Séance du 13 mars 1872. SOC. D'AG. 19 RAR CES Cette même année, M. Lachèse, voyant sa santé s’affaiblir, et sous l'influence d’un scrupule exagéré qui lui faisait craindre de ne pas bien remplir ses fonc- tions, voulut quitter la présidence ; les chaudes sollici- tations des membres dont M. Pavie fut l'organe ému, le décidèrent à rester. Pendant plusieurs années encore, M. Lachèse nous montra qu’il n’avait rien perdu de ses facultés, et dirigea nos travaux comme par le passé. Il lut à nos réunions plusieurs de ses intéressantes notices dont j'ai déjà parlé. Mais en 1878 de cruels chagrins de famille vinrent frapper M. Lachèse. Sous le coup de douloureuses émotions, trop souvent répétées, il ne voulut plus conserver la présidence, malgré les plus vives instances des membres de la Société. Le 20 janvier 1879 il nous adressa de touchants adieux et abandonna définitivement ce poste qu’il avait si bien rempli pendant dix-sept ans. Cette décision nous laissa de vifs regrets. M. Lachèse savait, en effet, apporter à nos réunions un charme tout particulier. Non seulement il possédait l’art d'organiser les brillantes séances d’apparat qui ont donné sous sa direction tant d'éclat à notre Société, mais les séances ordinaires présentaient un vif intérêt. Il est d’usage, après la lecture du procès-verbal, d’ou- vrir la séance par un compte rendu des communica- tions officielles fait par le président, M. Lachèse avait transformé ces communications du bureau, de leur nature un peu arides, en une agréable causerie. Il nous entretenait de mille anecdotes diverses que son heu- reuse mémoire avait conservées, et l’on écoutait avec un vif plaisir ces récits faits avec une bonhomie de RTE QU bon goût qui n’excluait pas la finesse. Souvent il nous parlait des hommes célèbres qu'il avait connus; ses relations si étendues lui fournissaient d’inépuisables sujets de conversation toujours intéressants ; plusieurs des biographies qui figurent dans nos Mémoires n’ont été que le résumé des charmantes causeries qui avaient animé nos réunions; il y avait beaucoup à apprendre en l’écoutant. Il dirigeait nos séances avec une urbanité parfaite, et lorsqu'il croyait devoir intervenir dans les discussions, ses observations, toujours courtoises, étaient marquées au coin d’un rare bon sens, qualité mère et maîtresse de toutes les autres. Nous avons retenu M. Lachèse en quelque sorte malgré lui pendant plusieurs années ; on ne pouvait se résigner à le voir quitter le fauteuil de la présidence. Lorsque l'heure fatale a sonné, ses collégues, qui étaient pour lui comme une seconde famille, l’ont sincè- rement pleuré. Qui, du reste, ne leût regretté? Homme de devoir et de dévouement, M. Lachèse était toujours prêt à répondre à l’appel lorsqu'il y avait des services à rendre, un labeur à accomplir. Cet homme de bien ne pouvait faire qu’une fin chrétienne, conforme aux idées qu'il a toujours professées. En lui, nous avons perdu un président zélé, un homme d’esprit, un homme de cœur. G. D’ESPINAY. SUBSTRUCTIONS DU XI° AU XII® SIÈCLE Près de la place Saint-Pierre, à Saumur L'administration municipale de Saumur, par suite d’un projet de voirie, dont nous n’avons à apprécier ici ni l’utilité, ni la valeur esthétique, a fait démolir une partie d’un îlot de maisons situé entre la nouvelle rue Dacier, celle du Petit-Maure et la place Saint-Pierre, au pied et à l’origine de la rampe montant au Chä- teau. Cette démolition a mis à jour des substructions d’une belle conservation et d’un intérêt archéologique et his- torique important, au point de vue de l’histoire de Saumur. Sous une partie des maisons démolies, et notamment sous la maison où Bodin et la tradition avaient fait naître Mme Dacier, on a retrouvé, servant de caves à ces maisons, les restes d’un ensemble remarquable de constructions en sous-sol, se composant, d’après les vesliges reconnus, de six travées de voûtes en pierre de taille de tuffeau, formant une double rangée, séparée l’une de l’autre, suivant l’axe longitudinal, orienté de 4 l'ouest à l’est par des piliers et colonnes isolées qui recevaient dans les deux sens les arcs doubleaux sup- portant ces voûtes, lesquelles s’appuyaient par les quatre côtés, sur des murs d’une très bonne et très belle construction, parementés à l’intérieur en pierre de tuffeau également. . Chacune de ces voûtes était divisée en quatre valves supportées, à leur tour, par deux arcs diagonaux en plein cintre se croisant simplement au sommet, sans addition de clef centrale ni de pendentif, et partant des tailloirs des chapiteaux des colonnes isolées d’un côté ; de l’autre, de ceux des demi-colonnes ou piliers engagés dans les murs latéraux. Un seul des piliers ou demi-colonnes, engagés dans les murs, était réguliére- ment taillé et de forme cylindrique ; les autres étaient épanelés, mais régulièrement et avec soin. La taille des panneaux droits était faite au marteau taillant, par recoupes régulières, parallèles à une ligne diagonale à 45° d’un carré ayant pour côté la hauteur de la pierre; celle des colonnes, en entailles parallèles à l’axe; celle des épanelages, en tailles perpendiculaires à l'arrêle. Les lits de pose et les joints remplis d’un excellent mortier de chaux et gros sable de Loire, avaient une épaisseur de deux centimètres et élaient partout d’une régularité absolue. Les dimensions des pierres étaient de moyenne gros- seur, mais par assises régulières, se découpant bien alternativement comme joints, de Um,29 à Om,36 de longueur et de 0n,24 et 0,26 de hauteur. Les socles des piliers et colonnes, ainsi que les encor- 1 ANRT A bellements en pierre de taille tenant lieu de chapiteaux, étaient d’un appareil beaucoup plus important, formés d’un seul bloc, et correspondant à ce que nous appelons aujourd’hui pierre de commande. Enfin, comme point de comparaison pouvant fixer l’âge et l’origine de ces intéressantes constructions, dont ses deux dernières voûtes, côté de la place Saint- Pierre, encore existantes et à peu près intactes lorsque nous avons pu les visiter, les matériaux, l'appareil, la taille et la pose étaient identiquement les mêmes que ceux de l’abside terminale du chœur de l’église Saint- Pierre dont. la date, fin du x1° siècle, n’est pas dou- teuse. D’après les renseignements pris sur les lieux, par nous-même et près des ouvriers ayant concouru à la démolition et surtout ceux que m’a donnés M. Roffay, ex-architecte de la ville de Saumur, l’ensemble de toutes ces substructions pouvait être un rectangle d’en- viron 26 mètres de longueur de l’est à l’ouest, sur 10 mètres de largeur, épaisseur des murs comprise. Ces dimensions assez restreintes sont exclusives de l’idée émise par plusieurs personnes, que ces substruc- tions pouvaient être l'étage inférieur des halles de la place Saint-Pierre, dont les dimensions et l'importance devaient être bien autrement considérables, d’après le récit que fait le sire de Joinville des fêtes et banquet donnés és hales de Saumur par le roi saint Louis, en 1941. Antérieurement à cette époque et jusqu’à la. fin du x1° siècle, la désignation de halle implique bien plutôt l’idée-de réunion de marchands près, autour et sous les DO CE abris et portiques des grands édifices religieux, que l’idée de locaux spéciaux abritant marchands et mar- chandises. Nos constructions, datant du x1e siècle ou commence- ment du xue, n'ont donc pu être établies pour un édi- fice qui n'existait pas encore dans les coutumes du temps. À quel édifice important appartenaient-elles? Eiles ont la forme et la disposition de beaucoup de cryptes. Il est à noter que la construction de la plupart des églises à cette époque a toujours commencé par la crypte, le tombeau, sur et autour desquels se sont éle- vées toutes les autres parties de l’édifice. Leur cons- truction soignée, dont nous avons exprès si minutieu- sement décrit tous les détails, ne permettrait-elle pas d’en rattacher l’origine à celle de cette première église de Saint-Pierre qui fut brûlée en 1067 par le comte de Poitou, Guy, après la prise de Saumur ‘? Pour nous, il est évident que jamais semblable cons- truction n’a pu appartenir, à cette date, à un édifice privé, et qu’elle n’a pu être établie à cette époque que pour faire partie d’un ensemble destiné à un usage ou . au service d’un ordre élevé. JoLy-LETERME. 1 G. d'Espinay. Nofices archéologiques. 1878. NOTES ARCHÉOLOGIQUES Monsieur le Président, J'ai l'honneur de vous faire parvenir les notes que vous avez bien voulu me demander. I Vers le 15 décembre 1883, M. Delcour, entrepreneur de terrassements, qui a déjà rendu tant de services au Musée Saint-Jean, me prévenait que ses ouvriers . venaient de mettre à jour, rue Hoche, 15, à 1n,10 de profondeur, une mosaïque. J’ai fait découvrir ce dallage, qui remplissait une salle de 8m,50 de long, sur 2m de large ; fermée par un seuil, dont un des piliers subsistait, et bordée d’un seul côté par un mur écroulé. Sur le sol, un lit de cendres renfermant des tuiles à rebord, des carreaux en pierre oolithique, semblables à ceux {TOuvÉSs aux Châteliers, et queues morceaux de fresque rouges et noirs. Sous l'influence de l'incendie, la mosaïque avait subi les mêmes torsions que celle trouvée place du Rallie- ment. Grossièrement exécuté, ce travail d'époque tout à Mons fait barbare, présente une particularité assez curieuse. Sur un lit de béton peu solide, on a jeté, pêle-mêle, les cubes isolés et les fragments d’une mosaïque romaine, à dessin noir et blanc. Le tout, noyé dans de mauvaise chaux, a été à peine aplani. Les fragments romains, réunis par un excellent ciment, sont encore très résistants, alors que le reste s’écroulait au moindre choc ; à peine ai-je pu en garder quelques fragments pour le Musée. Comme exécution, nous sommes déjà bien loin du fragment recueilli à Savennières, où l’on voit trace de dessin ; tandis qu'ici, les taches noires sont simple- ment dues au hasard, sans nulle intention décorative. Nul débris intéressant n’a signalé ces fouilles, sauf quelques fragments de poterie samienne, décorés de feuillages, et deux estampilles de potier, aux noms de LVPPA.F. et MARCIONI. Il M. l’Agent-Voyer en chef du département, en me remettant pour le Musée Saint-Jean un fragment de boucle mérovingienne, m’avertissait que les travaux de la route de Saint-Rémy-la-Varenne à Blaison, au-dessus du village de Chauvigné, avaient mis à jour, dans un champ rempli de sépultures, diverses tombes. J'ai trouvé deux cercueils en pierre et un en ardoise, tous orientés. Un seul présentait un certain intérêt ; long de LL 060 9 mètres, large de 60 centimètres à la tête, et de 35 cen- timètres aux pieds, il renfermait deux squelettes et quatre crânes. Au milieu, un squelette entier couché sur le dos, les côtes entiérement brisées par le squelette placé à gauche, couché sur le ventre ; à droite, un crâne énorme, forçant les deux premiers, entre les jambes des squelettes ; au pied du cercueil, un crâne et quelques débris de colonne vertébrale. Les terres qui remplissaient le cercueil, soigneuse- ment tamisées, ne m'ont donné qu’un petit bouton de bronze, très oxydé ; à quelques pas du cercueil se trou- vait la boucle de bronze. Veuillez agréer, etc. A. MICHEL, Conservateur adjoint du Musée Saint-Jean. Angers, 15 janvier 1884. DE L'EMPLOI DU SEL EN AGRICULTURE Chaque année, diverses sociétés d'agriculture font parvenir au gouvernement des vœux réclamant la liberté du commerce du sel dénaturé. Chaque année également le gouvernement classe ces vœux dans quelque dossier bien étiqueté, et l’agriculture attend sous l’orme qu’il soit donné satisfaction à cette demande, sérieuse comme tant d’autres, auxquelles il n’est jamais fait droit. Peut-être les publicistes et les sociétés agricoles ont- elles exagéré l'utilité du sel en agriculture ; peut-être ont-elles trop voulu démontrer ; peut-être ont-elles - effrayé les agents de la gabelle et fait craindre à l'État de voir disparaître une source importante de ses reve- nus. Il s’agit d'examiner, non pas si les moyens de déna- turation du sel sont ou non efficaces, et si de ce chef l'État peut craindre les effets d’une falsification qu’il ne pourrait poursuivre. Il existe des procédés de déna- turation sérieux et si bien compris, que de ce côté la fraude n’est pas possible. Mais il s’agit de voir si l’agri- culture est un grand consommateur de sel marin, et si — JS les finances de l’État ressentiront les effets de la liberté réclamée. Nous ne le pensons pas. Nous allons examiner si l’agriculture peut employer sans réserve, sans étude, sans précaution aucune le sel marin, non seulement pour la nourriture des bestiaux, mais encore, mais surtout pour l'amendement des terres. Considérons d’abord l’emploi du sel dans la nourri- ture des bestiaux. Ici la nécessité de son usage et les résultats qui en découlent sont incontestables. Le sel marin et d’autres sels s’éliminant sans cesse par les reins doivent être sans cesse absorbés. Nous excrétons chaque jour par les urines de 4 à 8 grammes de sel marin; nous en absorbons 1/2 gramme par la nourriture et les boissons et nous additionnons nos aliments de 6 à 12 grammes de ce sel. Il résulte des expériences de Boussingault que l’addi- tion de sel marin à la nourriture des animaux aug- mente leur appétit et rend leur engraissement plus rapide sans qu’ils gagnent pour cela davantage pour une même quantité d'aliments, comme plusieurs l'avaient cru. Le sel marin entre dans la composition même des tissus (comme aussi le chlorure de potassium et les phosphates) ; il en existe dans le plasma sanguin et musculaire, y jouant un rôle très important. La nécessité de l’addition du sel marin à nos aliments Mer de s’explique quand on sait que ceux-ci contiennent une quantité relativement plus considérable de sel de potassium que de sel de sodium, tandis que c’est l’in- verse qui a lieu dans le serum du sang. Nous n’insistons pas davantage et nous ne pouvons entrer dans de plus longs détails, sans sortir de l’objet de ce simple rapport. Cette nécessité du sel pour l’alimentation générale des herbivores et des carnivores est telle, que pendant le siège de Metz nos soldats ont éprouvé des souffrances intolérables par suite de la privation de cet aliment indispensable à la vie. Dans bien des fermes on a l'habitude de disposer à côté des mangeoires des bœufs des blocs de sel gemme, que les animaux viennent lécher avec_une satisfaction non équivoque. En Suisse, les pâtres rappellent leurs troupeaux disséminés dans la montagne en jetant sur la prairie du sel marin en poudre ! Voilà deux excellentes démonstrations ! Il Mais nos conclusions sont bien différentes quand il s’agit de l'emploi du sel pour l'amendement des terres. Les agronomes ne sont pas fixés encore sur l'utilité du sel comme engrais; son emploi a été tour à tour préconisé et décrié. Aussi une opinion nette est-elle bien difficile à éta- blir à cet égard. M. Péligot a montré que la soude était beaucoup plus rare dans l’organisation végétale qu’on ne le sup- : = A) — posait autrefois; le chlore n’y est pas non plus très abondant. | D'un autre côté, il a été prouvé que toutes les substances qui se rencontrent dans les cendres des végétaux n’ont pas une importance capitale pour leur développement. | Il est très vraisemblable que le sel, qui se rencontre dans certaines plantes, et notamment dans les bette- raves, n’a aucune utilité pour leur développement. Péligot pense que le sel est décidément nuisible à la végétation, et il attribue la répugnance qu’ont certains cultivateurs à employer les liquides des vidanges, aux mauvais effets que produit le sel qu’elles renferment habituellement. Le savant chimiste du Conservatoire a montré par exemple que des haricots semés sur une terre salée ne se sont pas développés, tandis que dans une terre nor- male ils ont donné une récolte convenable. Il a également prouvé que le sel ne favorise pas la formation des azotates. D’après lui, la nitrification est intimement liée aux phénomènes de putréfaction et de fermentation qui accompagnent la destruction sponia- née des matières organiques. Or, le corps antiseptique par excellence est le sel marin. Les mérites du sel marin en agriculture sont donc très discutables. Cependant on ne peut nier que ce sel puisse main- tenir dans le sol une humidité convenable, faciliter la dissolution de quelques principes fertilisants, débar- rasser la terre de certains insectes tels que les che- nilles et les limaces; retarder la décomposition de RAY EU certains engrais ; ce qui expliquerait pourquoi les ‘Anglais ajoutent au guano qu’ils emploient une assez grande dose de sel marin. III La science moderne a donc modifié considérablement à cet égard les errements des Anciens. Les anciens expé- rimentateurs, des publicistes distingués, depuis Bacon jusqu’à John Sinclair et Humphry Davy, avaient consi- déré le sel comme utile à la végétation. En Allemagne, l'opinion des écrivains agricoles a été aussi favorable à son emploi. Thaer, Scherck, Schwertz, Liebig, Kauff- mann avaient fait connaître et admeltre qu’il augmen- tait d’une manière sensible les forces productrices du sol. En France, Condillac, Mirabeau, Sylvestre, Tessier, Bosc, de Girardin ont insisté pour que son emploi comme engrais se popularise. Aujourd’hui il est prouvé que, même sur les céréales et les légumineuses, le sel n’a d’action que dans cer- tains cas et dans certaines limites. La science moderne a prouvé, en effet, que la quan- tité de soude contenue dans les plantes était très faible, que le chlore y existait rarement, que presque toutes les terres renferment assez de soude pour suffire à la végétation, et que l’eau de pluie en renfermait assez pour suffire à tous les besoins. La science a ainsi con- . firmé et développé cette phrase de l'Évangile de saint Luc : Le sel ne sera propre ni pour la terre ni pour le fumier. Ve ET Ïl n’y a donc aucune espérance à retirer de la liberté du commerce du sel marin, en vue de l’amendement des terres, et les Chambres législatives en réduisant l'impôt sur le sel marin, ne doivent avoir en vue que son emploi dans la nourriture des hommes et des bes- tiaux. L’engouement qui, à plusieurs reprises, a eu lieu dans notre pays, a engagé et pourrait encore engager beaucoup de cultivateurs à couvrir ‘de sel les terres qu’ils exploitent. Cette application faite sans mesure, serait suivie de grandes déceptions et stériliserait la terre comme autrefois les £erres de Sichem. Disons cependant que l’emploi du sel à petites doses peut être essayé, comparativement, par la méthode expérimentale dont nous vous avons déjà parlé dans les Mémoires de notre Société. Mais il est certain qu’une dose trop forte diminue et suspend même l’action vitale des plantes, et que les végétaux croissent très difficilement quand le chlorure de sodium excède 4 à 2 0/, de la couche arable. À petite dose, son emploi est encore à étudier surtout dans les sols qui n’en contiennent presque pas ; il sera plus utile aux plantes dans les sols et les climats humides que sur les terres et dans les contrées sèches. La réussite ou l’insuccès dépendront et du climat et de la fertilité de la terre, de l’espèce des végétaux cultivés, de la confi- guration du sol et de sa position géographique par rapport à la mer. En somme, il serait imprudent dans toute première espérance de dépasser la dose de 195 kilogrammes par hectare. Il conviendra d’essayer comparativement sur LE PTE NE la moitié seulement du sol sur lequel on expérimen- tera. Sous le bénéfice de ces observations, nous croyons que l’on peut approuver hautement les vœux formulés par beaucoup de sociétés agricoles en vue d’obtenir la liberté du commerce du sel dénaturé. C’est une entrave de plus à faire disparaître de notre législation surchargée. Les multiples formalités en vue de prévenir et de réprimer la fraude, n’ont plus de raison d’être grâce aux procédés de dénaturation qui rendent toute régé- nération du sel ruineuse, facile à découvrir et par conséquent impossible. _ L'agriculture obtiendra-t-elle jamais la réalisation de ce léger dégrèvement qu’elle réclame ? Nous en dou- tons, car toujours elle est et sera sacrifiée. Une circulaire ministérielle du ? juin 1882, basée sur ces garanties nouvelles, a facilité l'achat du sel par les tanneurs et affranchi ces livraisons de formalités diverses, notamment du plombage si onéreux des con- tributions ! Or, l’agriculture est la première de nos industries, elle est la base de toutes les autres; de sa vie, de sa richesse dépendent le succès et la fortune de toutes les autres industries du pays, puisqu'elle repré- sente vingt millions de consommateurs et de clients. Elle mérite donc d’être favorisée à plus juste titre, et chaque jour ses charges augmentent. Quand donc un régime intelligent comprendra-t-1 qu’il est temps que cet état de choses soit complètement transformé ? Nous proposons done à la Société d'agriculture, sciences el arts d'Angers, de formuler les vœux sui- SOC. D’AG. 3 —— vants et de les faire parvenir au Ministère de l’Agricul- ture : Considérant qu’il est d’une extrême utilité pour l’agriculture de donner la plus grande extension à la consommation du sel pour la nourriture des animaux, et, dans une plus faible mesure, pour le mélanger aux engrais ; que les mulliples formalités, en vue de préve- nir et de réprimer la fraude, n’ont plus de raison d’être . grâce aux procédés de dénaturation qui rendent toute régénération du sel ruineuse, facile à découvrir et par conséquent impossible ; Que d’autre part, une circulaire ministérielle du 9 juin 4889, basée sur ces garanties nouvelles, a facilité l'achat du sel pour les tanneurs et affranchi ces livrai- sons de certaines formalités, notamment du plombage si onéreux de l’administration des contributions ; Que la première de nos industries, c’est-à-dire l’in- dustrie agricole, si accablée aujourd’hui par les impor- tations étrangères, les impôts, la cherté de la main- d'œuvre ei les difficultés qu’elle éprouve d'acheter dans de bonnes conditions les engrais qui lui font défaut, mérite d’être favorisée à plus juste titre et par tous les moyens possibles ; La Société d'agriculture, sciences et arts d'Angers, émet le vœu que le commerce du sel dénaturé et destiné à l’agriculture soit absolument libre. G. DE CAPOL. TABLEAUX ANALYTIQUES DE’ LA FLORE D'ANGERS Classe IL. — Gamopétales. Corolle d’une seule pièce. Sous-classe I. — Périgynes. Ovaire infère. Étamines sur un seul rang. | Ordres. Familles. Étamines libres et insérées sur la corolle. Feuilles opposées, sans stipules foliaires. LoNICÉRINÉES. 4 ou 5 étam. bipartites, imitant 8 ou 10 étam. Adoxées. 5 étamines non bipartites. Fruit en baie. Caprifoliacées. Fruit en achaine. Dipsacées. 4 à 3 étamines. Fruit à 3 loges dont 2 sté- riles. Valérianées. Feuilles opposées avec stipules foliaires, sem- blant verticillées. CorréiNéEs. Rubiacées. Étamines synanthérées ou non fixées sur la co- rolle ; stigmate accompagné de poils collec- teurs. Périsperme charnu. Capsule polysperme. CAMPANULINÉES. Fleurs irrégulières. Filets des étam. soudés. Lobéliatées. Fleurs régulières. Filets libres. Campanulacées. Périsperme nul. Fruit en achaïne. ASTÉROIDÉES. Fleurs pourvues de corolle. Composées. Fleurs apétales, unisexuées. Ambrosiacées. Étamines 5, soudées par leurs filets en trois fais- ceaux. Plantes à vyrilles. Cucurbitacées. bi Fam. (43). Adoxées. : 200. Anoxa. A. Moschatellina L. Rhizôme blanc, écailleux. Feuilles 2-3 séquées ; fleurs verdâtres un peu musquées. Lieux frais. AR. Fam. (44). Caprifoliacées. 203. Lonicera. Corolle tubuleuse, à limbe bilabié ; style fikforme. 202. Vigurnum. Feuilles entières ou lobées. Fruit monosperme. 201. Sameucus. Feuilles pinnatiséquées. Fruit à 3-9 graines. 201. SAMBUCUS. S, Ebulus L. Plante herbacée à stipules foliacées ; cyme à 3 rameaux principaux. Champs. C. S. nigra L. Arbrisseau. Stipules rudimentaires ou nulles ; cyme à 5 rameaux. Bois, haies. C. 202. VIBURNUM. V. Lantana L. Feuilles tomenteuses, dentées ; baies rouges, puis noires. Bois calc. AC. V. Opulus L. Feuilles lobées ; baies rouges. Bois frais. AC. 9203. LONICERA. L. Periclymenum L. Tige volubile ; fleurs en têtes terminales. CC. L. Xylosteum L. Arbrisseau dressé; pédoncules axil- laires biflores. Calc. R. Fam. (45). Dipsacées. 204. Dipsacus. Réceptacle commun hérissé de pail- lettes épineuses. Tige munie d’aiguillons. A 206: ScasiosA. Réceptacle à paillettes non épineuses. -205. KnauTiA. Paillettes remplacées par des poils. 204. Dipsacus. D. silvestris Mill. Feuilles connées, incisées-dentées ; folioles de l’involucre très lonques aiguillonnées. CC. D. pilosus L. Feuilles à 3 segments inégaux, les laté- raux en forme d’oreillette. Lieux frais. AR. 205. KnaurTIA. K. arvensis Coult. Galice terminé par 6 arêtes ou plus ; involucelle pédicellé, comprimé. C. 206. ScagrosA. Calice terminé par 5 arêtes. S, succisa L. Corolle peu irrég. à 4 divis. Feuilles entières ; involucelle herbacé. Bois. CC. S, Columbaria L. Corolle à 5 lobes très inégaux. Feuilles de la tige pinnatiséquées. Involucelle scarieux. Sables. AC. Car. var. Direction des rameaux, longueur des soies du calice. Fam. (46). Valérianées. 207. VALERIANA. %. Fruit à aigretie plumeuse. 208. VALERIANELLA. ©. Fruit couronné par les dents du calice. 207. VALERIANA. V. dioïca L. Fleurs dioiques ; feuilles radicales indi- vises. Prés humides. R. V. officinalis L. Feuilles radicales pinnatifides. C. 208. VALERIANELLA. A. Loges stériles du fruit contiguës et plus grandes que la loge fertile. V. Auricula DG. Limbe du calice obliquement tron- qué et imitant une dent très sat/lante sur le fruit. C. Var. rimosa Bast. Fruit muni de 2 ou 4 petites dents latérales sur les côtés de la grande. no — V. ohtoria Mœnch. Fruit court comprimé, lenticu- laire. CC. V. carinata Lois. Fruit oblong, tétragone, creusé en nacelle sur une face. C. B. Loges stériles non contiguës et très petites. V. hamata Bast. Limbe du calice réguler en cou- ronne membraneuse à 6 dents crochues. AR. V. eriocarpa Desv. Couronne large et complète, mais obliquement tronquée. AR. Calc. Y. Morisont DC. Limhe du calice étroit, en forme de dent aiguë. R. Fam. (47). Rubiacées. 212. SHErARDIA. Calice à 6 dents profondes, persis- tantes sur le fruit. 913. CRUCIANELLA. Fleurs en épis ; involucre imi- tant un calice à 2 divisions. 209. Rugra. Fruit en baie. 910. Gazru». Corolle rotacée ou à tube court. 211. AsPERuLA. Corolle campanulée à tube assez long. 909. RuglA. R. peregrina L. Tige très scabre ; feuilles CU neuses à bords spinuleux. C. 210. GaLIuM. À. Feuilles trinerviées et toutes quaternées. G. Cruciata Scop. Fleurs axillaires, jaunes ; pédon- cules fructifères recourbés. CC. B. Feuilles uninerviées, verticillées par 5 ou plus. a. Feuilles obtuses, non mucronées. G. debile Desv. Pédoncules fructifères très courts, ascendants, feuilles linéaires #rès étroites ; corolle rosée en dehors. Bord des étangs. R. LRO G. palustre. L. Pédoncules fructiféres déjetés ; feuilles linéaires-elliptiques. C. Var. elongatum Presl. Plante robuste ; pédicelles fructifères étalés à angle droit ; fruit nettement chagriné. Var. rupicola Desm. Plante appliquée sur le sol ou pendante le long des rochers. b. Feuilles aiguës ou mucronées. + Tige glabre ou pubescente, mais lisse. G. verum L. Fleurs jaunes ; feuilles linéaires verti- cillées par 6 à 12. C. (Les hybrides de cette espèce, assez nombreux, se reconnaissent à leurs fleurs pâles). G. saxatile L. Feuilles verticillées par 4 à 6; fruit tuberculeux ; fleurs en bouquets serrés. Rochers. C. G. silvestre Poll. Corolle à divisions aiguës, mais non cuspidées ; plante grêle. AR. Var. lœve Thuil. Feuilles lisses sur les bords. G. Mollugo L. Corolle à divisions cuspidées. Var. elatum Thuill. Fleurs petites d'un blanc sale en inflorescence très ample à rameaux étalés. Feuilles minces veinées. Var. erectum Huds. Inflorescence pyramidale, feuilles épaisses à 4 seule nervure saillante. +} Tige bordée d'’aiguillons acerochants. G. uliginosum L. Fleurs d’un beau blanc ;: fruit tuberculeux ; plante des marais. # AC. G. anglhicum Muds. Fruit glabre, un peu chagriné ; inflorescence terminale, multiflore. AR. Calc. Var. tenuicaule Jord. Rameaux de l'inflorescence, longs et presque capillaires. G. tricorne With. Pédoncule plus court que les feuilles, portant 1-3 pédicelles recourbés. AC. G. Aparine L. Tige renflée et Aérissée aux nœuds, fruit ordt. hérissé. CC. G. spurium L. Fruit glabre, chagriné. R. — il) 211. ASPERULA, A. arvensis L. Fleurs bleues, en têtes entourées d’un involucre à folioles ciliées. ©. AR. Calc. A. odorata L. Fruits Aérissés ; feuilles oblonques. Plante sèche odorante. Bois. R. A. gahoides M. B. Corolle blanche ; feuilles par 6-8 ; tige redressée. RR. A. cynanchica L. Corolle rosée ; feuilles quaternées ; plante diffuse. AC. Calc. 212. SHERARDIA. S. arvensis L. Fleurs lilas, dans un involucre à folioles soudées à la base. C. 213. CRUCIANELLA. C. angustifoha L. Fleurs jaunâtres sur 4 rangs. Tige droite, grêle. Lieux arides. R. Fam. (48). Lobéliacées. 914. LoBELIA. L. urens L. Fleurs bleues en grappes terminales. Plante très caustique. Landes. C. Fam. (49). Campanulacées. 215. JAsionE. Anthères soudées à la base. Stigmates courts. 216. Payreuma. Corolle à 5 divisions Zinéaires, pro- fondes. 219. Specuraria. Corolle rotacée. Ovaire prisma- tique. 217. WALHENBERGIA. Capsule à 3 valves. 218. CAMPANULA. Capsule s’ouvrant par des pores. ni — | 215. JASIONE. J. montana L. Fleurs bleues en ombelle simple simu- lant un capitule. Capsule s’ouvrant par 2 valves. CC, 916. PHYTEUMA. P. spicatum L. Fleurs blanc-jaunâtre, en épi oblong- cylindracé ; bractées linéaires; calice glabre; feuil. radi- cales cordiformes. AC. Bois. P. orbiculare. L. Fleurs bleues en capitule ovoïde ; bractées ovales ; calice cilié. RR. Calc. 217. WALHENBERGIA. W. hederacea Reich. Plante très grêle, à feuil. pétio- lées, anguleuses. Fleurs bleues solitaires. AR. Lieux frais. 218. CAMPANULA. C. glomerata L. Fleurs sessiles, en tête terminale. Calice à divisions linéaires. AR. Calc. C. Erinus L. Corolle très petite (5 à 6 millim.), presque tubuleuse. Fleurs solitaires. ©. RR. Calc. C. Trachelium L. Galice plus ou moins Aérissé ; cap- sule penchée s'ouvrant vers la base. C. C. persinfolia L. Souche vivace, rameuse et ram- pante ; grappe simple et pauciflore. R. Calc. C. Rapunculus L. Racine ren/lée, fusiforme ; grappe à rameaux courts. CC. C. patula L. Grappe à rameaux allongés et divari- qués ; bractéoles situées au-dessus du milieu des pédon- cules latéraux. AR. 219. SPECULARIA. S. Speculum DC. Corolle grande égalant le calice et la longueur de l'ovaire. Moissons. C. 7) S. hybrida DC. Calice plus long que la corolle et moitié plus court que l’ovaire. Calc. R. Fam. (50). Composées. Are série. Radiées. Fleurs de la circonférence ligulées, à 3 dents (demi-fleurons), les autres régulières tubuleuses ({ewrons). A. Achaines munis d’aigrettes de poils. 993. ERIGERON. Achaines comprimés ; demi-fleurons blancs ou rougeûtres. 299. TussiLaGo. Demi-fleurons étroits sur plusieurs rangs ; fleurs naissant avant les feuilles sur une hampe écailleuse. 240. Doronicum. Involucre à folioles égales, sur 9 rangs ; achaines de la circonférence sans aigrette. 941. Senecio. Involucre à folioles sur 2 rangs ine- gaux. , 295. Sozinaco. Demi-fleurons peu nombreux (2 à 8). 998. InuLA. Anthères munies d’appendices basilaires. B. Achaines tous dépourvus d’aigrette. - 999. Binens. Achaines surmontés de 2 à 5 arêtes épi- neuses ; feuilles opposées. 994. Bezis. Hampe nue et radicale à 1 seul capi- tule. 941 bis. CALENDULA. Achaines irréquüers courbés. 935. CHRYSANTHEMUM. Demi-fleurons jaunes. 931. AcILLeA. Capitules petits en corymbe serre. 930. Anraemis. Réceptacle garni de paulleltes. 933. MarricariA. Réceptacle conique et creux. 234. PyreTHRUM. Capitules en corymbe lâche. Feuilles très découpées. S 232. LEUCANTHEMUM. Capitules solitaires. no 2e série. Flosculeuses. Capitules formés exclusivement de fleurons. A. Folioles externes de l’involucre profondément découpées. 249. CarciNa. Folioles internes de l’involucre rayon- nantes et jaunes-scarieuses. 949. SryBum. Achaines à aigrette érès développée ; graines à hile basilaire ; fleurons tous égaux herma- phrodites. 246. CENTAUREA. Folioles de l’involucre non folia- cées. 247. CENTROPHYLLUM. Fleurs jaunes. B. Folioles de l’involucre entières. a. Achaines surmontés d’une aigrette de poils. + Réceptacle hérissé de soies. 245. Crrsium. Poils de l’aigrette p/umeux. 244, Carpuus. Feuilles et involucre épineux. 250. Lappa. Folioles de l’involucre accrochantes en bameçon. 948. SERRATULA. Aigrette à soies inégales. +t Réceptacle garni d'écailles tronquées formant des alvéoles. 243. OnoPorpum. Involucre épineux. ti Réceptacle sans alvéoles ni soies (quelquefois muni de paillettes vers la circonférence). 999. EuparToriuM. Feuilles opposées, à 3-5 segments. 991. PerTasiTes. Capitules en grappe sur une tige écailleuse naissant avant les feuilles. 939. Firaco. Capitules pointus, à involucre pyra- midal. 938. GnaPHALIUM. Folioles de l’involucre scarieuses, colorées. 296. Linosyris. Feuilles Znéaires entières. 228. InuLa. Involucre à folioles émbriquées sur plu- sieurs rangs. 241. Senecio. Folioles sur À rang, avec quelques petiles accessoires. Pete b. Achaïnes nus ou surmontés de quelques arètes, ou d'une mem- brane. 251. XERANTHEMUM. Fleurs purpurines. Folioles in- ternes de l’inv., colorées. 299. Binens. Fleurs jaunes. Feuilles opposées. 227. Micropus. Capitules sessiles, axillaires, enve- loppés de duvet. 937. TANACETUM. Capitules d’un beau jaune en co- rymbe. 236. ArTeMISIA. Capitules petits en épis ou en grappes serrées. 3e série. Semi-flosculeuses. Fleurs toutes ligulées. A. Achaines sans aigrette de poils. 954. CicaoriuM. Fleurs bleues ; achaines membra- neuz. | 252. Lapsana. Tige feuillée. Achaines non bordés. 253. ARNOSERIS. Achaines couronnés par un rebord pentagonal. B. Aigrette à poils rameux ou plumeux (au moins au centre du capitule). 955. Hyrocaœæris. Réceptacle garni de parllettes. 262. HELMINTHIA. Involucre entouré de 5 bractées foliacées. 256. TariNCIA. Achaines démorphes ; ceux du bord portant une simple couronne membraneuse. 259. TRAGOPOGON. Involucre à 8 ou 10 folioles sur 1 seul rang. 261. Picris. Aigrette caduque soudée en anneau à la base ; involucre caliculé. 257. LEONTODON. Barbes des poils de l’aigrette non entrecroisées. 258. PoposPermum. Achaines prolongés à la base en un pied creux. Feuilles pinnatifides. ER LES 260. ScorzoNERA. Feuilles simples. C. Aigrette à poils simples ou denticulés. a. Achaïines (au moins ceux du centre) atténués en col grêle. (Aigrette pédicellée.) 265. TaraxacuM. Capitule solitaire au sommet d’une hampe nue. | 263. LacTuca. Achaines très comprimés. 264. CHONDRILLA. Achaines surmontés de 5 dents entre lesquelles s’élève l’aigrette plurisériée. 266. BarkHAUSIA. Involucre à folioles nombreuses. b. Achaines peu ou point amincis (aigrette sessile)- 268. Soncaus. Achaines très comprimés. 267. CRrepis. Aigrette à poils mous et d’un beau blanc, sur plusieurs rangs. 269. Hreracium. Réceptacle garni d’alvéoles. . 270. AnpryaLa. Réceptacle garni de soies. ©. Première sous-famille : TuBuLIFLORES. Fleurs (au moins celles du capitule) régulières, tubuleuses (eu- rons). I. Corymbiféres. — Style non renflé au-dessous de ses branches. 220. EuparorIum. E. cannabinum L. Capitules rougeâtres en corymbe composé, terminal. Bord des eaux. CC. 291. PErasires. P. vulgaris Desf. Capitules rougeâtres. Feuilles très amples, cordées, denticulées. R. 222. TussiLAGco. T. Farfara L. Capitules jaunes, solitaires. C. 293. ERIGERON. E. acris L. Demi-fleurons violacés. Var. serotinus. Aigrette roussâtre. Corymbe terminal simple. Re E. canadensis L. Capitules blanc-jaunâtre, en inflo- rescence pyramidale très fournie. 294. BELis. B, perennis L. Réceptacle accrescent conique. CC. 225. SOLIDAGO. S. Virga aurea L. Capitules en grappes souvent uni- latérales. Bois. C. 296. Linosyris. L, vulgaris. Cass. Capitules jaunes en corymbe ter- mina]. RR. 997. Mrcropus. M. erectus L. Plante tomenteuse. Anthères pourvues d’appendices basilaires. KR. Calc. 2928. INuLA. À. Aigrette simple. . a. Fleurs de la circonférence longuement ligulées. I. Helenium L. Capitules érès gros ; achaines subté- tragones ; folioles externes de l’involucre oblongues obtuses. AR. I. salicina L. Feuilles coriaces, glabres ou parsemées de quelques poils rudes. Achaines glabres. Calc. AR. I. britannica L. Plante velue. Bord des eaux. €. b. Fleurs de la circonférence à peine ligulées. Plantes fétides. I. Conyza DC. Achaines éronqués, munis de côtes. %. C. 1. graveolens Desf. Achaines contractés en col au- dessous de laigrette. ©. Sables. AR. B. Aigrette double, l’externe en forme de couronne courte. ‘TI. Pulicaria L. Demi-fleurons très petits ; couronne de l’aigrette laciniée. ©. CC. I. dysenterica L. Demi-fleurons allongés ; couronne de l’aigrette crénelée. z. CC. SOVET 299. BIDENS. B. tripartita L. Achaines à 2-3 arêtes; feuilles sou- vent tripartites. CC. ® B. cernua L. Achaines à 3-5 arêtes ; capitule penché aprés la floraison. AC. 930. ANTHEMIS. SEcT. I. Ormenis. — Achaines munis de 3 côtes sur la face interne, striés sur l’autre. A. mixta L. Demi-fleurons jaunes à la base. Tige diffuse. ©. Sables. AC. A. nobilis L. Plante vivace à odeur suave ; paillettes obtuses. C. SECT. Il. Euanthemis. Achaines munis de côtes tout autour. A. arvensis L. Paillettes du réceptacle brusquement cuspidées, égalant presque les fleurs. Champs. AC. A. Cotula L. Paillettes subulées ; plante fétide. C. 231. ACHILLEA. A. Millefolium 1. Feuilles bipinnatiséquées ; achaines comprimés, sans côtes ; 4-5 demi-fleurons souvent ro- sés. CC. Var. polyphylla. Plante moitié plus grêle dans toutes ses parties. A. Ptarmica L. Feuil. dentées. 8-12 demi-fleurons blancs. Bord des eaux. C. 932. LEUCANTHEMUM. L. vulgare Lam. Feuil. crénelé-dentées. Prés. CC. 933. MATRICARIA. M. Chamomilla L. Achaines lisses sur le dos, à 5 côtes sur la face interne. Plante aromatique. ©. CC. 934. PYRETHRUM. SECT. I. Pseudo-Chamomilla. Achaïnes à 3 côtes sur la face interne. P. inodorum Sm. Segments des feuilles linéaires. Plante diffuse, très rameuse et peu odorante. CC. DE ss SECT. Il. Ewpyrethrum. — Achaïnes munis de côtes tout autour. P. corymbosum Willd. Feuil. caulinaires sessiles. Tige droite peu rameuse ; presque inodore. Coteaux arides. RR. P. Parthenium Sm. Plante rameuse, pubescente, à odeur forte. C. 235. CHRYSANTHEMUM. C. segetum L. Achaines dimorphes, ceux de la cir- conférence triquêtres à 2 ailes, les autres cylindriques à 10 côtes. AR. 236. ARTEMISIA. A. campestris L. Involucre glabre ; feuilles à seg- ments linéaires, tige presque ligneuse, diffuse. AC. Sables. A. vulgaris L. Involucre tomenteux. Tige dressée. C. 237. TANACETUM. T. vulgare L. Achaines anguleux, terminés par une couronne membraneuse. Plante glabre, dressée, aro- matique. Bords de la Loire. AC. 238. GNAPHALIUM. G. silvaticum L. Aigrette à soies soudées en anneau ; capitules en grappe spiciforme, effilée et feuillée. x. Bois. R. G. uliginosum L. Capitules en têtes entremélés de feuilles. Involucre brunâtre. Lieux humides. C. G. luteo-album L. Involucre jaune pâle. Sables. C. 239. FiLaGo. A. Involucre à folioles cuspidées; capitules par 8 à 10 ou plus. F. spathulata Pres]. Capilules à 5 angles aigus ; inflo- rescence munie de 3 à 4 feuilles bractéales sai/lantes. Calc. R. Non) ee F. germanica L. Gapitules entourés d’un tomentum abondant. C. Var. canescens Jord. Involucre pâle ; plante à tomentum blanc. Var. lutescens Jord. Involucre à points rougeâtres ; plante jau- nâtre à fouilles obtuses. B. Involucre à folioles non cuspidées ; capitules réunis par 3 à 7. F. gallica L. Achaines extérieurs ren/fermés dans les folioles de l’involucre, roulées et soudées à leur bord interne. Feuilles subulées dépassant les inflores- cences. C. F. montana L. Capitules à 5 angles aigus ; feuilles étroites et serrées contre la tige. C. F. arvensis L. Capitules à 8 côtes effacées ; feuilles lâches et élargies. C. 240. DoroNicu. D. plantagineum L. Souche tuberculeuse. Feuilles infér. pétiolées, les supér. sessiles, amplexicaules. AR. 241. SENECIO. A. Involuere cylindrique. Demi-fleurons courts ou nuls. ©). S. vulgaris L. Fleurons fous tubuleux ; folioles de linvol. à pointe noirâtre. CC. S. silvaticus L. Achaines pubescents ; feuilles un peu aranéeuses en dessous. G. Bois. S. viscosus L. Achaines glabres ; feuilles glandu- leuses, fétides, écailles accessoires de l’invol. atteignant son tiers. AR. B. Involucre hémisphérique. Demi-fleurons allongés. #Z. S. erucifohius L. Achaines pubescents, scabres ; souche rampante. Écailles accessoires de l’invol. attei- gnant son milieu. AC. Calc. S. Jacobæa L. Lobes des feuilles tous linéaires inci- sés. CC. SOC. D’AG. & PE S. aquaticus Huds. Lobe terminal des feuilles, trés . ample. C. Var. erraticus. Feuilles radicales en rosette étalée. 241 bis. CALENDULA. C. arvensis L. Fleurons la plupart stériles, à style un peu renflé. Odeur forte. G. Vignes. IX. Cynarocéphales. — Style renflé en nœud au-dessous des branches. 249. SILyBu». S. Marianum Gœrtn. Elam. à filets soudés pubes- cents. Feuilles grandes, épineuses, maculées de blanc. AR. 243. ONoPoRDUM. O. Acanthium L. Achaines subtétragones, compri- més, rugueux. Tige ailée-épineuse. C. 244. CARDUUS. C. nutans L. Capitules solitaires, subglobuleux, au sommet a’un long pédoncule tomenteux, non épineux. Involucre à folioles extér. réfractées. C. C. pycnocephalus DC. Capitules par 2 à 3 sur des pédoncules sans épines vers le sommet ; involucre à épines arquées. AC. C. tenuiflorus Sm. Capitules réunis au sommet de : pédoncules épineux ; involucre à épines droites. CC. 245. CIRSIUM. A Face supér. des feuilles couverte de petites épines couchées. C. eriophorum Scop. Tige non ailée ; folioles de l’in- volucre dilatées et brusquement cuspidées. AR. Calc. C. lanceolatum Scop. Tige ailée-épineuse. CC. B. Face supér. des feuilles glabre ou couverte de poils, mais non d’épines. C. palustre Scop. Tige alée-épineuse dans toute sa longueur. Marais. C. PASSE UE C. oleraceum All. Fleurs jaunâtres. Capitules entou- rés de larges bractées. AR. Lieux humides. {C. palustri-oleraceum). Bractées étroites ; fleurs un peu rosées. C. arvense Lam. Capitules nombreux, terminaux, unisexuels ; tige très rameuse. Champs. CC. C. acaule AN. Tige nulle ou très courte. Feuilles glabres en dessus, un peu velues en dessous. C. C. bulbosum DC. Racine à fibres érès renflées ; feuilles radicales pinnatiséquées. AR. Calc. C. anglicum Lam. Feuilles pinnalilobées. G. Prés. 246. CENTAUREA. C. Calcitrapa L. Involucre épineux ; fleurs roses. C. C. Cyanus L. Fleurs bleues ; plante © ou ©. CC. C. Scabiosa L. Aigrette roussâtre, égalant les achaines ; hile barbu. Folioles de l’involucre à bordure noire. AC. Calc. C. nigra L. Achaines à aigrette courte; pas de fleurs rayonnantes au contour du capitule; involucre brun- foncé. Var. obscura Jord. Fleurs extérieures stériles rayonnantes. Var. consimilis Bor. Involucre pâle ou grisâtre. Var. decipiens Thuil. Appendices des écailles de l’involucre étalés ou réfléchis. C. Jacea L. Achaines sans aigrette. Fleurs de la cir- conférence rayonnantes et stériles. Var. pratensis Thuil. Pédoncules fortement renflés et anguleux au sommet. Folioles infér. de l'involucre régulièrement cilié-pectinées. Involucre gros et brun-foncé. Var. serotina Bor. Involucre médiocre et pâle. Floraison tardive. Folioles régul. pectinées. 247. CENTROPHYLLUM. C. lanatum DC. Achaine rugueux jaune taché de noir. Feuilles visqueuses odorantes. Calc. AC. TN et 248. SERRATULA. S. tinctoria L. Aigrette à poils inégaux, plurisériés. Capitules purpurins en corymbe terminal. Bois. C. 249. CARLINA. C. vulgaris L. Capitules solitaires ; achaines sans côtes ; poils de l’aigrette unisériés, soudés en faisceaux. AC. Calc. 250. Lappa. L. minor DC. Capitules espacés le long des rameaux ; folioles internes de l’invol. violacées. CC. L.. major DG. Capitules en grappe terminale corym- bitorme. R. 251. XERANTHEMUM. X. cylindraceum Sm. Aigrette formée de 6 à 8 écailles ; paillettes du réceptacle tripartites. Calc. R. 2e sous-famille. LiGuLIFLORES. Capitules formés exclusi- vement de fleurs irrégulières, ligulées, à 5 dents, hermaphrodites. III. Chicoracées. 252. LapsANA. L. communis L. Invol. à 8-10 fol. sur À rang, avec - quelques petites accessoires. CC. 253. ARNOSERIS. A. pusilla Gœrtn. Invol. à fol. nombreuses ; tige et pédoncule insensiblement dilatés. C. 254. CICHORIUM. C. Intybus L. Invol. à folioles sur 2 rangs. Achaines tétragones, comprimés. C. 955. HYPOcHÆRIS. H. maculata L. Tige portant 1-2 feuilles, velue, he- ns — rissée ; poils de l’aigrette {ous plumeux, sur 1 rang. KR. Calc. H. radicata L. Achaines tous atténués en bec; fo- lioles de l’invol. plus courtes que les fleurs ; feuilles hispides. CC. H. glabra L. Folioles de l’invol. égalant les fleurs. C. 256. THRINCIA. T. hirta Roth. Feuilles radicales, plus ou moins his- pides; capitules solitaires terminaux. C. 257. LEONTODON. L. autumnalis L. Poils de l’aigrette {ous plumeux, sur À seul rang. Tige ordt. rameuse. C. L. hispidus L. Poils sur 2 rangs, les externes denti- culés. AR. Calc. 958. PoDosPERMUM. P. laciniatum DC. Folioles de l’invol. réfléchies après la floraison. R. Calc. 259. TRAGOPOGON. T. major Jacq. Pédoncules fortement renflés sous le capitule. AR. Calc. T. pratensis L. Involucre à 6-8 folioles égalant envi- ron les fleurons. Tube des anthères brun-foncé au som- met. C. Var. orientalis L. Tube des anthères doré dans toute sa longueur. Fleurs plus grandes dépassant l’involucre. 260. SCORZONERA. S. plantaginea Schl. Aigrette sessile. CC. 261. Prcris. P. hieracioides L. Achaines ridés transversalemert et amincis. Plante hispide. C. Lit pe 262. HELMINTHIA. H. echioides Gœrtn. Achaines à long bec; plante hé- rissée, spinescente, AR. 263. Lacruca. L. perennis L. Fleurs violettes. Plante glaucescente. Calc. AR. L. viminea Link. Feuilles décurrentes. Tige à nom- breux rameaux étalés. Calc. RR. L. saligna L.. Feuilles de la tige Znéaires, entières. C. L. murals Fries. Involucre à 5 foholes et 5 fleurs dans le capitule. AR. L. virosa L. Achaine glabre, pourpre-noir. C. L. Scariola L. Achaine brun ou gris, hérissé au sommet. C. 264. CHONDRILLA. : C. juncea X.. Capitules par 2-3 tout le long des ra- meaux effilés et presque nus. Calc. AC. 269. TARAXACUM. T. dens leonis Desf. Feuilles toutes radicales, pinna- tifides. CC. Var. palustre DC. Folioles de l’invol. toutes dressées. Car. var. Couleur et aspérités de l’achaine, découpures des feuilles. 266. BARKHAUSIA. B. setosa DC. Involucre chargé de poils raides, jau- nâtres et étalés. AR. B. fætida DC. Aigrettes de la circonférence presque sessules ; capitules d’abord penchés. AC. B. taraxacifolia DC. Capitules dressés en corymbe irrégul. CC. Dot 267. CREPIS. C. pulchra L. Invol. érès glabre ; poils glanduleux sur les feuilles et à la base de la tige. Calc. AR, C. biennis L. Folioles de l’invol. velues à l’inté- rieur. RR. C. Nicæensis Balb. Folioles externes de l’invol. ééa- lées. Stigmate brun. R. C. virens L Stigmate jaune. Var. agrestis. Stigmate brunâtre; invol. plus hérissé de longs poils noirs. : 268. SoNcHUs. A. Souche vivace pourvue de stolons. S. maritimus L. Pédoncule et invol. glabres. RR. S. arvensis L. Pédoncules et invol. glanduleux C. B. Plante © ou Æ sans stolons. S. palustris “ L. Achaines #ronqués, prismatiques- quadranqulaires. %. RR. S. oleraceus L. Achaines à côtes rédées transversale- ment. ©. CC. Var. lacerus. Feuil. très découpées à lobes presque égaux. S. asper Nill. Feuilles piquantes à oreillettes arron- dies. © CC. 269. HIERACIUM. A. Tige droite, sans stolons. Poils de l’aigrette raides et inégaux. a. Bourgeons naissant à l'automne et formant encore des rosettes vertes au moment de la floraison. H. murorum L. Tige nue ou portant 1-2 feuilles ; style jaunâtre. C. H. vulgatum Fries. Styles fauves ou livides. C. b. Bourgeons naissant au printemps et fanés à la floraison. H. umbellatum Fries. Folioles extér. de l’invol. réflé- ches ; styles jaunes. C. H. boreale Fr. Styles bruns ou fuligineux. C. Mo ReR B. Plante stolonifère ; aigrette à poils fins, égaux. H. Auricula L. Feuilles non tomenteuses en dessous. Hampe ordt. pluriflore. C. | H. Pelleterianum DC. Invol. à longs poils blancs. KR. H. Pilosella. Invol. à poils raides et noirs ou nuls. Var. incanum. Invol. à poils courts soyeux. 270. ANDRYALA. A. integrifolia L. Plante à duvet blanc-jaunâtre. AC. Fam. (51). Ambrosiacées. 971. XANTHIUM. X. Strumarium L. Pointes du fruit droites et co- niques. R. X. macrocarpum DC. Pointes du fruit courbées en dedans. AC. Bords de la Loire. Fam. (52). Cucurbitacées. 272. Bryonra. B. dioica Jacq. Racine napiforme. Fleurs dioïques en corymbes. Baies rouges. CC. Sous-classe II. — 1sogynes. Étamines toutes ou les internes opposées aux lobes de la corolle. Ordres. Familles. Fleurs diplostémones. ÉRICOIDÉES. Ovaire adhérent. Feuilles vertes, décidues. Vaceiniées. Ovaire libre. Feuilles vertes, persistantes. Ericacées. Plante humicole, sans chlorophylle. Monotropacées. Fleurs isostémones. PRIMULINÉES. Fruit en capsule polysperme. : Primulacées. Fruit en achaine. Plumbaginées. LMP, ER Fam. (53). Vacciniées. 273. VACCINIUM. V. Myrtillus L. Rameaux anguleux ; fl. penchées, solitaires ; baies noires. Bois. R. Fam. (54). Éricacées. Sous-arbrisseaux à feuilles persistantes des landes et des bois. 276. DaBæcra. Corolle caduque ; feuilles élargies, alternes. 275. Erica. Capsule loculicide. Calice court, sans bractées. Feuil. verticillées. 274. CALLUNA. Capsule septifrage. Calice dépassant la corolle. Feuilles opposées, imbriquées. 274. CALLUNA. C. vuigaris Salisb. Fleur munie de 6 bractées. CC. 279. Erica. E. vagans L. Étamines saillantes. R. E. scoparia L. Fleurs petites, verdâtres ; calice éga- lant la moitié de la corolle quadrifide. C. E. cinerea L. Feuilles et calice glabres. CC. E. tetralix L. Anthères munies de 2 arêtes larges et dentelées. Grappe courte. C. E. ciliaris L. Style très saillant. AC. 276. DABŒCIA. D. pohfola Don. Feuilles tomenteuses en dessous. RR. Fam. (55). Monotropacées. 277. HYPoPiTys. H. europæa Scop. Feuilles ovales, dressées, translu- cides ; fleurs en grappe terminale ; pétales éperonnés. Bois. AR. Es SÉRe Fam. (56). Primulacées. A. Feuilles toutes radicales. 280. ANDROSACE. Tube de la corolle ovoïde, à gorge munie de 5 écailles. ©. 279. PrimuLa. Corolle à gorge non resserrée. B. Tiges allongées et feuillées. 278. HoTTOnIA. Plante submergée, à feuilles pinnati- séquées. ; 283. CENTUNCULUS. Fleurs à 4 divisions. 284. SamoLus. Feuilles alternes ; ovaire semi-adhé- rent. Fleurs blanches. 281. LysimacurA. F1. jaunes ; capsule valvaire. 282. ANAGALLIS. Fruit en pyxide. 278. HoTTONIA. H. palustris L. Fleurs verticillées, rosées, à gorge jaune. C. 279. PRIMULA. P. officinalis Jacq. Corolle à limbe concave, calice renflé, à divisions courtes, presque obtuses. CC. P, grandiflora Lam. Pédicelles radicaux ; corolle à gorge plssée et maculée d’orangé. CC. (P. officinali-grandiflora. Intermédiaire entre les précéd.) P. elatior Jacq. Pédicelles penchés au sommet d’un pédoncule commun. KR. 280. ANDROSACE. À. mazxima L. Corolle rougeâtre, plus courte que le calice. Graines très grosses et velues. Calc. R. 281. LyYSIMACHIA, L. vulgaris L. Tige dressée, pubescente ; fleurs en infloresc. terminale. CC. FRA": JEU L. Nummularia L. Calice à divis. cordiformes- ovales ; feuilles obtuses orbiculaires. CC. L. nemorum L. Feuilles ovales aiguës. Tourbières. RE. 982. ANAGALLIS. A. tenella L. Corolle campanulée, rose veinée, moitié plus longue que le calice; feuilles suborbiculaires. Tourbières. AC. À. arvensis L. Corolle rouge. À. cœærulea L. Corolle bleue. (On trouve des formes hybrides à corolles variées ou bistrées). 983. CENTUNCULUS. C. minimus L. Feuilles infér. opposées, les auires alternes. AC. 284. SAMOLUS. S. Valerandi L. Feuilles glauques ; pédicelles munis au milieu d’une petite bractée. Marais. C. Fam. (57). Plombaginées. 285. ARMERIA. A. plantaginea Willd. Pédoncules radicaux très longs et nus; fleurs en capitules; calice à dents subulées, scarieuses. Sables. AC. Sous-classe III. — Hypogynes. Ovaire libre. Étamines alternes avec les lobes de la corolle. : Ordres. Familles. Corolle régulière (ou peu irrég. à 5 étam.) Étam. 2. Préfloraison valvaire. Dranpres. Oléacées. Étam. 4-5. Préflor. imbriquée ou tordue. Fruit drupacé à 4 noyaux. Ilicinées- Fruit sec ou baie polysperme. Rene 0 à Le Corolle scarieuse et persistante. Plantaginées. Corolle décidue et non scarieuse. Tige volubile. CONVOLVULINÉES. Plante verte. Convolvulacées. Plante parasite sans chlorophylle. Cuscutacées. Tige non volubile. Carpelles ouverts ou libres (ovaire 4 locul.) CONTORTÉES. Carpelles soudés en capsule. Gentianacées. Follicules. Anthères soudées. Asclépiadées. Follicules. Anthères libres. Apocynées. Carpelles fermés et soudés (ovaire à 2 loges ou plus). TUBIFLORES. Fruit polysperme. Embryon courbé. Solanacées. Fruit polysperme. Embryon droit. Verbascées. Fruit à 4 graines. Borraginées. Corolle irrégulière, 2 ou 4 étamines. Fruit à 4 graines. LABIATIFLORES. Style gynobasique. Labiées. Style terminal. Verbénacées. Capsule polysperme. PERSONÉES. 2 étamines. Lentibulariées. 4 étam., plante sans chlorophylle. Orobanchacées. 4 étam., plante verte. Scrophulariacées. Fruit monosperme, indéhiscent. , Globulariées. Fam. (58). Oléacées. 286. FRAXINUS. Fleurs nues. Samare. 287. Licusrrum. Calice et corolle. Baie. 286. FRAxINUS. F. excelsior L. Arbre à feuilles imparipennées. Poly- game. CC. Car. var. Forme de la samare, couleur des bourgeons. 287. LIGusTRUM. L. vulqare L. Arbrisseau à fleurs blanches odo- rantes ; feuilles entières. CC. GG le Fam. (59). Ilicinées. 288. ILEx. I. aquifolium L. Arbrisseau dioïque par avort. Feuilles coriaces, épineuses, persistantes. Drupe rouge, CC. Fam. (60). Asclépiadées. 289. VINCETOXICUM. V. officinale Mæœnch. Filets des étam. soudés à une couronne à lobes arrondis. Follicule lisse. AC. Var. laxum Bartl. Calice moitié plus court que le tube de la corolle à divis. réfléchies. Fam. (61). Apocynées. 290. Vinca. V. minor L. Feuilles elliptiques, glabres. CC. Bois. V. major L. Feuilles et sépales ciliés au bord. Subspont. Fam. (62). Gentianées. A. Feuilles toutes opposées. Corolle glabre. 294. Cazora. 6 à 8 étamines. 292. Cicenpra. Fleur à 4 divis. Plante très grêle. 293. GENTIANA. Fleur bleue ou violacée. 291. Eryrar&aA. Fleur rouge (parfois blanche). B. Feuilles ordt. alternes ; corolle ciliée. Plautes aquat. 296. LImNANTHEMUM. Fleurs jaunes. 295. MENYANTHES. Fleurs rosées; feuilles trifoliées. 991, ERYTHRÆA. E. Centaurium Pers. Fleurs subsessiles, toutes munies de bractées; corolle à lobes obtus. Feuil. radicales en rosette. CCG. ÉMNpoRur E. pulchella Fries. F1. latérales ordt. sans brac- tées. AC. 292. CICENDIA. C. pusilla Gris. Calice 4-partit. ; tige très rameuse, divariquée. Fleurs roses ou jaune pâle. AC. C. fihformis Delarbre. Calice 4-fide. Corolle jaune à tube renflé. AC. 293. GENTIANA. G. germanica Willd. Corolle à gorge ciliée-écail- leuse. ©. RR. Calc. G. Pneumonanthe L. F1. bleues. z;. Landes. AC. 294. CHLORA. C. perfoliata L. Calice divisé jusqu’à la base ; feuilles nettement connées. Calc. C. C. imperfoliata L. Calice divisé aux 3/4 RR. Marais. 295. MENYANTHES. M. trifoliata L. Rhizôme traçant ; fleurs en grappes axillaires. Marais. AC. 296. LIMNANTHEMUM. L. nymphoides Hoffm. Plante flottante à feuil. orbi- culaires cordées. FI. en faisceaux. AC. Fam. (63). Convolvulacées. 297. CONYOLVULUS. Sec. I. Calystegia. — Bractées recouvrant le calice. C. sepium L. Corolle grande blanche, rarement rosée. CC. Secr. Il. Euconvolvulus. — Bractées petites, loin de la fleur. C. arvensis L. Corolle médiocre, rosée. CC. EE pa re Fam. (64) Cuscutacées. 298. CuscuTA. Stigmates allongés ; fruit en pyxide. 299. Grammica. Stigmates capités; capsule irrégul. déhiscente. 298. CuscurTaA. C. Epilnum Weïhe. Corolle wrcéolée, à limbe petit. Capsule à 2 loges imparfaites. Champs de lin. R. C. minor DC. Gorge de la corolle fermée par des écailles conniventes ; siyles plus longs que l'ovaire. Stigmates rouges. C. Var. trifolii. Stigmates rapprochés et inclus. C. major DC. Styles plus courts que l’ovaire. Para- sile des Urticées. AR. 299. GRAMMICA. G. racemosa Engelm. Fleurs pédicellées, en cymes corymbiformes. Parasite de la luzerne. AC. Fam. (65). Solanacées. A. Fruit en baie. 302. Arropa. Corolle campanulée : anthères écar- tées. 301. Paysais. Calice accrescent vésiculeux. 900. SoLaNuM. Anthères s’ouvrant par des pores. B. Fruit sec, déhiscent. 304. Hyoscyamus. Pyxide. Calice accrescent. 303. DarTura. Capsule à 4 valves, Calice ruptile. 900. SOLANUM. S. Dulcamara L. Tige ligneuse, sarmenteuse. CC. . Var villosissimum. Plante très tomenteuse. OV AE S. nigrum L. Fleurs pâles en fausses ombelles. Baies vertes puis noires. ©. CC. Var. villosum Lam. Plante velue, grisâtre. Var. miniatum Bernh. Baies rouges. Var. ochroleucum Bast. Baies jaunes ou verdâtres. 301. Paysauis. P. Alkekengi L. Souche traçante. Fleurs solitaires, blanchâtres. Baie rouge rentermée dans le calice. R. Vignes. 302. ATROPA. A. Belladona L. * Tige rameuse, robuste. Fleurs pourpres veinées de brun. Baies noires. RR. 303. DATuRA. D. Stramonium L. Corolle très longue, blanche, plis- sée. Capsule épineuse. Décombres. AC. D. Tatula L. Tige et corolle violacées. R. 304. Hyoscyamus. A. niger L. Plante visqueuse, fétide. Corolle jaunâtre à veines brunes. AR. Décombres. Fam. (66). Verbascées. 309. VERBASCUM. A. Étamines inégales, 2 infér. presque glabres, et les 3 supé- rieures à filets hérissés de poils blancs. a. Feuilles caulinaires décurrentes dans toute la longueur de l’'entrenœud. V. Thapsus L. Corolle concave, jaune pâle, peñte ; stigmate capité. G. Sables. V. thapsiforme Schrad. Corolle large, plane; anthères et stigmate longuement décurrents. C. b. Feuilles semi-décurrentes. V. phlomoides L. Anthères et stigmate décurrents. AC. Var. australe Schrad. Tomentum blanchâtre. Var. nemorosum Schrad. Feuil. infér. à long pétiole. D A - B. Étam. égales, à filets tous couverts de poils blancs ; anthères toutes réniformes. Feuil. jamais décurrentes. V. pulvinatum Thuil. Feuil. un peu crénelées, les supér. embrassantes, avec duvet abondant el caduc sur les 2 faces. C. Var. floccosum W. K. Feuil. entières et atténuées. V. Lychnitis L. Feuil. vertes et presque glabres en dessus. AC. Var. album Mill. Fleurs blanches. C. Étamines à poils violets. a. Anthères toutes égales. Capsule ovoïde. V. nigrum L. Feuil. radicales pétiolées et cordées. AR. b. Anthères inégales. Capsule globuleuse. V. Blattaria L. Pédicelles étalés, 2 fois plus longs que le calice. Feuilles gabres, les supér. non décur- rentes. CC. V. virgatum With. Feuil. glanduleuses. AR. (Nombreuses hybrides à capsule stérie. Les deux espèces qui chez nous se croisent le plus souvent, V. nigrum et Blattaria, commu- niquent à leurs produits des étamines à filets violets). Fam. (67). Borraginées. A. Gorge de la corolle sans écailles. 308. Eciu». Corolle irrégulière à étam. sallantes. 313. Puzmonarra. Calice tubuleux à 5 lobes. 306. HELIoTROPIUM. Achaines soudés à la colonne centrale. Corolle à 5 petites dents alternant avec les lobes. 312. LiTHospErMuM. Achaines libres. B. Gorge de la corolle garnie d’écailles qui souvent la ferment. a. Achaïnes lisses ou un peu rugueux. 309. SymPayTum. Corolle tubuleuse, à écailles subu- lées. SOC. D'AG. : 5 MGR 311. Lxcopsis. Tube de la corolle coudé. 307. BorraGo. Corolle à tube éres court. 314. Myosoris. Achaines Zsses. Écailles entières. 310. AncausA. Achaines rugueux. Écailles laciniées. b. Achaiïnes hérissés sur la face dorsale. 315. Ecxinospermum. Face dorsale hérissée sur le bord. 816. CynocLossum. Face dorsale toute hérissée. 306. HELIOTROPIUM. H. Europæum L. FI. blanchâtres, en cymes scor- pioïdes sans bractées. C. Champs. 307. BORRAGO. B. officinals L. F1. bleues, à anthères noires. C. ©. 308. EcHIu». E. vulgare L. Fleurs subbilabiées en longue inflo- rescence feuillée. CC. 309. SYMPHYTUM. S. officinale L. F1. blanchâtres en cymes nues à 2 branches. z. CC. 310. ANCHUSA. A. Italica Retz. Fleurs bleues en cymes feuillées. AR. Calc. z. 311. Lycopsis. L. arvensis L. Fleurs petites, à calice plus court que le tube de la corolle. ©. C. 312. LITHOSPERMUM. L. purpureo-cœruleum L. Corolle grande, d’un beau bleu ; tiges dèmorphes. Calc. R. L. officinale L. Achaines blancs, lisses ; feuilles ner- viées ; tige rameuse, dure el vivace. AC. L. arvense L. Achaines gris tuberculeux. ©. CC. PR GT 313. PULMONARIA. P. saccharata Mill. Feuil. radicales ovales, subite- ment rétrécres en pétiole ailé. R. Calc. P. ovalis Bast. Carpelles pubescents. Feuilles à villo- sité molle au toucher. R. P. tuberosa Schranck. Feuil. radicales lancéolées. C. Var. longifolia Bast. Feuil. longuement accrescentes. 314. MyosorTis. A. Calice à poils tous apprimés. a. Corolle à limbe plan. Pédicelles plus longs que le calice. M. palustris L. Style allongé ; tige anguleuse. CC. Var. repens Koch. Tige rampante. Var. strigulosa Reich. Tige à poils nuls ou apprimés. M. lingulata Lehm. Style presque nul. @). AC. b. Corolle à limbe concave. Pédicelles courts. M. sicula Guss. Tige courte à rameaux divergents. AR. | B. Calice à poils étalés. a. Corolle à limbe plan, élargi. M. silvatica Hoffm. Pédicelles à poils étalés après la floraison. R. b. Corolle à limbe concave petit. M. versicolor Pers. F1. jaunes, puis bleues. CC. M. stricta Link. Pédicelles fructifères très courts dressés, couverts de poils éfalés. R. M. hispida Schl. Calice ouvert, égalant son pédi- celle. CC. / M. intermedia Link. Pédicelle 2 fois plus long que le calice. CC. 315. ECHINOSPERMUM. E. Lappula Lehm. Fleurs en cyme terminale feuil- lée. R. Calc. Pan eu 316. CYNOGLOSSUM. C. officinale L. FI. rougeâtres ; achaines plans ; duvet des feuilles fin et appliqué. AC. C. pictum Lamk. F1. bleues veinées. Poils des feuilles étalés. AR. Calc. Fam. (68). Plantaginées. 318. PLANTAGo. F1. hermaphr. Fruit en pyxide. 317. LiTTORELLA. FI. monoïques. Achaine monos- perme. 317. LITTORELLA. L. lacustris L. Petite plante aquatique, à rhizome souterrain, et feuil. raides linéaires. 2 fleurs femelles sessiles à la base du pédoncule des fl. mâles. Étangs. AR. 318. PLANTAGO. A. Feuil. opposées sur une tige distincte. P. arenaria W. K. Plante pubescente glanduleuse. @. AC. B. Feuil. toutes radicales. a. Corolle à tube velu. Feuil. linéaires ou découpées. P. carinata Schrad. Anthères jaunes ; feuilles en- tières. %. C. P. coronopus L. Feuil. pinnatipartites. © ou ©. CC. 6. Corolle à tube glabre. Feuilles ent'ères à limbe élargi. P. lanceolata L. Feuil. /ancéolées.. Pédoncule très anguleux ; épi court ; fruit à 2 graines. CC. P. media S Feuilles à court pétiole. Épi court ; 4-8 graines. C. Calc. P. major L. Épi très allongé ; 816 graines. CC. Var. intermedia. Hampes étalé-arquées. EURE Fam. (69). Labiées. Plantes ordinairement aromatiques, à feuilles opposées. À. Corolle campanulée à lobes presque égaux. (Menthoïdées.) 319. MENTHA. 4 étam. fertiles. Achaines arrondis. 320. Lycopus. 2 étam. fertiles. Achaines bordés. B. Corolle labiée, à lèvre supérieure presque nulle. (Ajugoïdées.) 337. AgucA. Lévre supér. très courte, bilobée, l'infér. à 3 lobes. 338. Teucrium. Lèvre supér. à 2 divisions déjetées et semblant appartenir à l’inférieure. C. Corolle nettement bilabiée. a. 2 étamines fertiles. (Salviées.) 321. SALvIA. Anthères inégales séparées par un long connectif. b. & étamines fertiles. + Étamines exsertes, à filets droits, divergents. (Thymoïdées.) 323. Taymus. Calice bilabié, fleurs en têtes. 322. OriGANuM. Calice à 5 dents presque égales. +f Étamines conniventes, à filets arqués. (Mélissées.) 395. Czinoponium. F1. serrées en verticilles munis de bractées nombreuses. 324. CALAMINTHA. Glomérules de fleurs lâches et sans involucre. +f+ Étamines à filets rapprochés et parallèles sous la lèvre supér. de la corolle. (Lamioïdées.) * Calice bilabié, fermé à maturité par le rapprochement des 2 lèvres. 335. ScuTELLARIA. Lèvre supér. du calice entière et bossue. 336. BRuNELLA. Calice à lèvre supér. plane et tri- dentée. * * Calice rarement bilabié, et alors ouvert. 326. NEPETA. Étam. latérales plus courtes que les médianes. —. 170 — 332. MarRuBIUM. Étam. incluses dans le tube de la corolle. 327. MeurTris. Calice membraneux, ample, subbr- labié. 334. LeonuRus. Achaines barbus et tronqués. 328. LamruM. Achaines tronqués et glabres. 331. BerTonica. Anthères à loges parallèles. 330. Sracuvys. Étam. rejetées sur les côtés hors de la corolle après l'émission du pollen. 329. GaLeopsis. Gorge de la corolle présentant 2 päs terminés en dents de chaque côté du lobe médian de la lèvre infér. 333. BALLOTA. Denis du calice larges et pliées longi- tudinalement. 319. MENTHA. A. Calice fructifère à gorge nue. a. Feuil. subsessiles. Fleurs en épi terminal cylindrique. M. rotundifolia L. Bractées ovales-lancéolées ; feuil. très obtuses, crénelées, crispées et laineuses. CC. M. silvestris L. Feuilles {omenteuses-blanches en des- sous. AR. M. viridis L. Plante peu velue, aromatique. R. 6. Feuilles pétiolées. Tige terminée par une tête de fleurs ou un épi court. M. aquatica L. Odeur forte ; bractées et calice velus. CC. (M. citrata. Hybride à odeur suave, bractées et calice glabres.) c. Feuilles pétiolées. Tige terminée par de petites feuilles florales sans fleurs axillaires. M. arvensis L. Calice fructifère court, à dents courtes ; feuilles supér. presque égales aux infér. C. M. sativa L. Pédicelles hérissés de poils réfléchis. C. (M. rubra, Hybride aromatique, presque glabre.) A — B. Calice fructifère velu à la gorge. M. Pulegium L, Tige couchée radicante ; feuilles obtuses à court pétiole. CC. 320. Lycopus. L. europœæus L. F1. blanches, ponctuées de rouge ; feuilles à dents aiguës et profondes. C. 821. SALVIA. S. Sclarea L. Denis. du calice spinescentes ; bractées membraneuses, très amples. KR. S. Verbenaca L. Corolle petite, rougeâtre ; stigmates presque égaux. R. S. pratensis L. Corolle grande, bleue; style sail- lant. C. 322. ORIGANUM. O. vulgare L. Épis de fleurs réunis en corymbes terminaux. CC. Var. prismaticum Gaud. Épillets tétragones, allongés. Var. virens Link. Stigmates très divergents et défléchis. | 923. THYMUS. T. Serpyllum L. Fleurs en têtes serrées ; tige foule velue ; feuilles atténuées. CC. Var. chamædrys Fr. Tige velue sur 2-4 lignes ; inflorescence plus lâche. 324. CALAMINTHA. A. Pédonceules simples. Calice gibbeux à la base. C. Acinos Gaud. 2-3 fleurs à l’aisselle de chaque bractée. ©. Calc. C. B. Fleurs en glomérules pédonculés. PI. vivace. C. Nepeta Bth. Calice court, à dents brièvement ciliées, peu inégales ; poils de la gorge faisant saillie entre les dents ; achaines ovoides. R. C. officinalis Mœnch. Calice tubuleux, à dents très inégales bordées de cils étalés. C. Var. menthæfolia Host. Calice plus élargi; corolle plus courte. Fleurs dépassées par les bractées. JOUER 9329. CLINOPODIUM. C. vulgare L. Connectif des anthéres épais. CC. 326. NEPETA. N. Cataria L. Herbe robuste, droite, pubescente. Fleurs blanches en glomérules serrés. Calc. AR. N. Glechoma Benth. Anthères rapprochées en forme de croix. Tige couchée, radicante ; feuil. réniformes ; fleurs bleuâtres en cymes pauciflores. CC. 927. MELITTIS. M. Melissophyllum L. FI. très grandes, par 2-3: corolle blanche tachée de rouge. Bois. AC. 328. LAMIuM. SECT. Galeobdolon. — F1. jaunes ; anthères glabres. L. luteum Huds. Tiges dimorphes. AC. Bois. SECT. Il. Lamiotypus. — Anthères barbues. Gorge de la corolle insensiblement dilatée. Vivaces. L. album L. Tube de la corolle munie d’un anneau de poils érès oblique ; fleurs blanches. AR. L. maculatum. Anneau de poils transversal ; fleurs rouges. AC. SECT. III. Lamiopsis. — Anthères barbues ; gorge de la corolle brus- quement dilatée. ©). L. purpureum L. Gorge de la corolle munie d’un anneau de pouls ; feuilles crénelé-dentées. CC. L. hybridum Nil. Feuilles toutes pétiolées, inci- sées. C. L. amplexicaule L. Feuil. supér. sessiles. Dents du calice conniventes. Corolle à tube très long et sail- lant. C. 929. GALEOPSIS. G. Tetrahit L. Tige renflée sous les nœuds, hérissée de poils piquants. C. Var. pubescens Bor. Tube de la corolle taché de brun bt 2 fois plus long que le calice. LES a G. Ladanum L. Corolle rose; feuilles éfrostes, peu dentées ; bractée dépassant le calice. U. G. dubia Leers. Bractées courtes ; fleurs jaunâtres. AC. 390. STACHYS, A. Glomérules multiflores ; bractées égalant presque les calices. S. germanica L. Calice et bractées couverts de longs poils soyeux. Calc. AC. S. alpina L. * Calice glanduleux , à dents ovales obtuses mucronées. RR. Bois. B. Glomérules pauciflores. Bractéoles très petites. a. Corolle rouge, tachée de blanc à la gorge. Vivaces. S, silvatica L. Feuilles toutes lonquement pétiolées jusqu'aux florales exclus. ; tige glanduleuse au som- met. CC. S. palustris L. Feuil. subsessiles. Lieux humides. C. (S. ambiqua. Hybride des précédentes, présente des caractères in- termédiaires.) b. Corolle rougeâtre ponctuée de pourpre. ©). S. arvensis L. Feuil. ovales, obtuses, les florales à pointe épineuse. C. c. Corolle blanc-jaunûâtre. S. recta L. Feuilles pubescentes, à court pétiole ; tube de la corolle à anneau de poils oblique. Souche dure. AC. Calc. S, annua L. Dents du calice étroites et velues jus- qu’au sommet de l’épine. ©. C. 391. BETONICA. B. officinalis L. Tige droite, presque nue, infloresc. terminale cylindrique, interrompue. CC. Bois. 332. MARRUBIUM. M. vulgare L. Feuil. pétiolées, orbiculaires-créne- — 14 — lées, tomenteuses. Fleurs petites, blanches, en têtes compactes. C. 993. BALLOTA. B. fœtida Lam. Fleurs rouges en glomérules pédon- culés. CC. 334. LEONURUS. L. Cardiaca L. Feuilles infér., cordiformes, palma- hpartites. Tube de-:la corolle muni d’un anneau de poils. FI. roses. AR. L. Marrubiastrum L. Feuil. infér. crénelées. Fleurs blanches. R. 339. SCUTELLARIA. S. minor L. Corolle rose, petite (de moins d’un cen- tim.), à tube droit. Calice hérissé. AC. S. galericulata L. Feuilles crénelé-dentées tout autour du limbe. Calice ordt. glabre. C S. hastifolia L. Feuilles hastées. Calice glanduleux. AC. 3306. BRUNELLA. B. vulgaris L. Filet des étam. longues muni d’une pointe droite. F1. violettes. CC. Var. alba. FI. blanc-jaunâtres ; pointe des étam. courbée. Var. grandifiora. F1. très grandes ; étamines munies d’un simple tubercule. 997. AJUGA. À. Chamæpitys Schreb. Fleurs jaunes ; feuil. sripar- tites. Plante droite à odeur résineuse. C. Cale. ©. A. genevensis L. Tige velue sur les 4 faces ; stolons souterrains. Feuil. radicales détruites à là floraison. AR. Calc. À, reptans L. Plante à rejets radicants. CC. 398. TEUCRIUM. T. Scorodonia L. Dent supér. du calice dépassant Er beaucoup les 4 autres et simulant une lèvre distincte. ‘CC. T. montanum L. Fleurs jaunâtres, en glomérules terminaux. Feuilles érès entières. R. Calc. T. Botrys L. Feuil. pinnatipartites, toutes pétiolées. R. Calc. ©. | T. Scordium L. Herbe vivace à feuil. sessiles. AC. T. Chamædrys L. Souche ligneuse ; feuilles atténuées en court pétiole. AR. Calc. Fam. (70). Verbénacées. 339. VERBENA. V. officinalis. Herbe à feuilles opposées pinnatifides. Fleurs petites en épis terminaux. CC. Fam. (71). Globulariées. 940. GLOBULARIA. G. vulgaris L. Fleurs bleues en capitules, entremé- lées de paillettes et entourées d’un involucre polyphylle. AR. Calc. Fam. (72). Lentibulariées. 341. PinqurcuzA. Feuilles aériennes, entières, en ro- setie. 349. UrriCuLARIA. Feuil. submergées, multiséquées, vésiculeuses. 341. PINGuICULA. Herbes des tourbières, à pédoncules radicaux uniflores. P. vulgaris L. Fleur bleue. Pédoncule glabre ou peu glanduleux. RR. | Li pre P. lusitanica L. Fleur blanc-rosé ; pédoncule velu. AR. 342. UTRICULARIA. U. minor. L. Corolle petite, jaune pâle, à éperon obtus érès court. R. U. vulgaris L. Anthères soudées ; lèvre supér. de la corolle égalant le palais. C. U. neglecta Lehm. Lèvre supér. de la corolle une fois plus longue que le palais. AR. Fam. (73). Scrophulariacées. A. Corolle rotacée. 93992. VERONICA. Corolle à 4 divisions inégales. Cap- sule à 2 loges. 300. SIBTHORPIA. Feuilles orbiculaires, crénelées. 349. LIMosELLA. Plante acaules, à rhizômes souter- rains. B. Corolle tubuleuse ou campanulée. a. Calice tubuleux à 5 divisions. 343. Linarta. Corolle à long éperon basilaire. 344. ANTIRRHINUM. Corolle bossue à la base. 9495. SCROPHULARIA. 4 étamines avec le rudiment d'une cinquième en forme d’écaille ; anthères wnilocu - laires. 201. DiciTauis. Feuilles alternes. Fleurs en longue grappe terminale. 348. LINDERNIA. 4 étam. fertiles. Pédoncules plus longs que les feuilles florales. 347. ILYSANTHES. Galice sans bractées. ©. 346. GRATIOLA. Souche traçante. b. Calice tubuleux à 4 dents. Anthères mucronées. PART RER 358. MeLAMPyRUM. Capsule à 2 ou 4 graines. Lèvre ‘supér. de la corolle à bords roulés en dehors. 355. Eupurasia. Lèvre infér. de la corolle à 3 lobes émarqinés. 353. BaRTsIA. Plante visqueuse, à feuil. supérieures alternes. 354. Oponrires. Bractées supérieures entières. c. Calice renflé-ventru. Anthères mutiques. 3856. RaianTaus. Feuilles entières. Fleurs jaunes. 357. PenicuLaRis. Feuilles pinnatifides. Fleurs roses. 8343. LiNARIA. A. Feuilles pétiolées à limbe élargi. L. Cymbalaria Mill. Feuilles palminer viées, orbicu- laires-cordées, à long pétiole. Plante glabre, pendante. C. Sur les vieux murs. L. Elatine Desf. Feuilles supér. ovales-hastées. C.. L. spuria Mill. Pédicelles très velus. AC. B. Feuilles sessiles à limbe étroit. L. minor Desf. Fleurs /onquement pédicellées ; gorge de la corolle entr’ouverte par un si//on du palais. Plante glanduleuse très rameuse, dressée. ©. G. Var. prætermissa Del. Gorge de la corolle fermée. Plante ordinai- rement glabre. L. Pelliceriana Mill. Fleurs rouge foncé, à éperon. très long et aigu. Graine bordée de cils. Sables. R. L. supina Desf. Plante couchée et glauque. AR. L. striata DC. Graines anguleuses non bordées. Pédi- celles glabres ; fleurs assez grandes, blanches, striées de violet. Feuil. infér. verticillées par 3 à 4. C. L. vulgaris Mœnch. Plante vivace à grandes fleurs jaunes ; feuilles toutes alternes. CC. ie L. arvensis Pesf. Fleurs bleues striées, à éperon courbé. RR. Sables. L. simplex DC. Corolle jaune, à éperon droit. RR. 344. ANTIRRHINUM. À. orontium L. Plante à fleurs purpurines. ©. C. 345. SCROPHULARIA. S. canina L. Feuilles pinnatiséquées. Tige peu ou point anguleuse. Fleurs tachées de blanc. Lieux arides. R. S. nodosa L. Feuilles aiquës, à dents plus prononcées vers la base du limbe. Calice étroitement bordé. C. S. aquatica L. Calice bordé d’une large membrane. CC. 346. GRATIOLA. G. officinalis L. Corolle grande subbilabiée à 2 an- thères pendantes ; feuilles denticulées à 3 nervures. C. 947. ILYSANTHES. 1. gratioloides Benth. Feuil. obscurément dentées. Corolle ouverte, médiocre. AC. Bord des rivières. 348. LINDERNIA. L. pyxidaria All. Corolle fermée, rudimentaire. K. 949. LIMOSELLA. : L. aquatica L. Pédicelles radicaux ; fleurs rosées. Petite plante gazonnante du bord des eaux. AC. 390. SIBTHORPIA. S. europæa L. Plante grêle, velue et radicante des lieux couverts. Fleurs jaunes. RR. 301. DIGITALIS. D. purpurea L. Plante robuste, droite, pubescente. Corolle grande, tubuleuse-ventrue, tachée intérieure- ment. C. 5, qe 852. VERONICA. A. Inflorescence terminale ; fleurs solitaires à l’aisselle de vraies feuilles. Pédicelles fructifères recourbés. Plantes étalées. ©. V. hederæfolia L. Calice à divisions cordées ; cap- sule à 4 lobes ; feuilles à 8-5 ou 7 lobes. CC. V. persica Poir. Pédoncules supérieurs dépassant les feuilles. Capsule comprimée peu velue. Fleurs grandes bleues veinées. AC. V. agrestis L. Fleurs blanchâtres. CC. V. polita Fries. Fleurs bleues veinées. CC. B. Inflorescence terminale ; fleurs à l’aisselle de bractées plus pe- tites que les feuilles. Pédicelles fructifères droits. a. Tube de la corolle très court. Style court. + Tige glanduleuse ; feuilles pubescentes. ©. * Pédoncules fructifères égalant la feuille ou plus longs. V. acinifolia L. Feuilles entières ou faiblement cré- nelées. Graines plan-convexes. C. V. triphyllos L. Feuilles palmatiséquées : graines concave-convexes noires. AR. V. præcox All. Feuil. irréguliérement incisées ; graines jaunes. R. * * Pédoncules fructifères bien plus courts que la feuille. V. verna * L. Feuilles pinnatipartites. RR. V. arvensis L. Feuilles dentées. CC. +t Tige vivace radicante non glanduleuse. Feuil. glabres, V. serpyllifolia L. F1. blanc-bleuâtres, veinées. CC. b. Corolle tubuleuse subbilabiée. Style 3-4 fois plus long que la capsule. Fleurs en épi serré. V. spicata L. Galice à divis. subobtuses. RR. Landes. C. Inflorescences latérales. a. Calice à 5 divis., la supér. très courte. V. Teucrium L. Calice et capsule velus. Cale. AR. Var. Bastardi Bor. Plante diffuse, grisâtre. V. prostrata L. Tige étalée-couchée. RR. b. Calice à 4 divisions. 1 Pédicelles dressés, plus courts que le calice. V. officinals L. F1. bleu-pâle en grappes serrées. Capsule triangulaire. Plante radicante toute velue. C. Bois. Ft Pédicelles plus longs que le calice. * Grappes de fleurs alternes. V. scutellata L. Feuilles linéaires, sessiles. C. Bord des eaux. Var. pubescens Koch. Plante velue. V. montana L. Feuil. à limbe arrondi. R. Bois. * * Grappes opposées. Calice égalant la capsule. V. Chamædrys L. Tige munie de 2 lignes de pouls opposées et non fistuleuse. Lieux secs. CC. V. Beccabunga IL. Feuilles péñolées, elliptiqués, obtuses. Fossés, CG. V. Anagalls L. Feuilles lancéolées. Fossés. CC. Var. anagalloïdes Guss. Inflorescence glanduleuse. 993. BARTSIA. B. viscosa Benth. F1. jaunes subsessiles en long épi interrompu. Champs. AC. 304. ODONTITES. O. rubra Pers. F1. rouges, à lèvres ouvertes et style saillant avant la floraison. CG. Pelouses. Var. serotina Reich. Rameaux étalés. O. Jaubertiana Bor. Corolle jaunâtre à lèvres conni- ventes. Moissons. Calc. R. 999. EUPHRASIA, E, officinalis L. Sommités glanduleuses. Graines ovoïdes grisâtres. C. E. nemorosa Pers. Feuilles et bractées à dents supé- rieures cuspidées. Graines fusiformes. ÇC. RP RER 306. RHINANTHUS. R. Crista galli L. Fleurs subsessiles, axillaires et ter- minales. Feuilles opposées, dentées. Prairies. CC. Var. hirsuta Lam. Calice velu. Moissons. Var. major Ehr. Dents du calice écartées. Tube de la corolle courbé. Var. minor Ehr. Plus grêle, à bractées vertes. 807. PEDICULARIS. P. silvatica L. Tiges nombreuses, les latérales éfalées en cercle ; calice velu aux bords. CC. Pelouses. P. palustris L. Tige droite. Calice plus court que la capsule, à 2 lobes incisés. AR. Tourbières. 308. MELAMPYRUM. M. arvense L. Calice atteignant le sommet du tube de la corolle. Bractées rouges, pinnatifides. Fleurs en épis serrés cylindriques. C. Moissons. M. cristatum L. Épi serré, quadrangulaire. Bractées cordiformes. AR. Calc. M. pratense L. Fleurs disposées par paires, en inflo- rescence lâche, unilatérale. CC. Bois. Fam. (74). Orobanchacées. A. Bractées allongées, aiguës, mMembraneuses. 359. OROBANGHE. Calice à À seule bractée, formé de 2 divisions latérales profondes. 960. PHeLIPœŒA. Calice campanulé, muni d’une brac- tée et de 2 bractéoles. B. Bractées arrondies, obtuses et charnues. 991. LATHRÆA. Calice campanulé, à 4 divis. 909. OROBANCHE. A. Stigmate jaune. a. Etam. insérées à la base de la corolle. _O. Rapum Thuil. Filets des étam. érès glabres à la base. C. Sur les genêts et ajoncs. SOC. D'AG. 6 rose O. cruenta Bert. Corolle jaune à gorge rouge-brun. C. Sur les légumineuses. Calc. Var. ulicis Desm. Étam. insérées un peu au-dessus du fond de la corolle. b. Étam. insérées au-dessus dutiers du tube. O. hederæ Nauch. Corolle veinée de violet. C. B. Stigmate rouge-brun. Odeur de girofle. a. Étam. insérées à la base de la corolle. O. galü Dub. Filets des étam. érès velus. AR. O. epithymum DC. Filets peu velus. R. b. Étam. insérées vers le tiers du tube. O. teucru Schultz. Filets des étam. velus à la base, lèvre supér. de la corolle à peine émarginée. RR. .G Stigmate violacé. Etam. insérées vers le milieu du tube. O. picridis Schuliz. Étam. à filets très velus. R. O. amethystea Thuil. Corolle brusquement coudée. .Bractées longuement sail{antes. AR. Sur l’Eryngium. O. minor Sutt. Corolle arquée. AC. 260. PHELIPŒA. P. arenaria Mey. Stigmate jaune. Anthères laineuses. Fleurs parpurines. R. Sur Arlemisia campestris. P. cœærulea Mey. Corolle éubuleuse à lobes aigus. Sur Achillea Millefolium. RK. P. ramosa Mey. Tige rameuse. RR. 361. LATHR#A. L. squamaria L. Fleurs pâles, peu saillantes, en épi penché. Calice velu. R. L. Clandestina L. Corolle violette, très grande. Cap- sule à 4 ou 5 graines. AC. LT Is Classe III. — Apétales. $ N Ordres. Familles. Fleurs jamais réunies en chaton. Albumen entouré par l'embryon. CYCLOSPERMÉES. Périanthe scarieux. Amarantaeées. Périanthe herbacé ou charnu. Salsolacées. Albumen placé à côté de l’embryon droit. Polygonées. Albumen aul ou renfermant l'embryon. Ovaire libre. Étamines périgynes en nombre double des divis. du périanthe. Dapxnoées. Thyméléacées. Étam. hypogynes, souv. oppositisépales. Fruit se séparant en 2 ou 3 coques. Euphorbiacées. Fruit subdivisé en 4 coques. Callitrichinées. Fruit indéhiscent et monosperme. Périanthe nul ; feuil. verticillées. Cératophyllées. Périanthe ; feuil. avec stipules. URTIcINÉES. Fleurs hermaphrodites. Ulmacées. F1. diclines ; périanthes dimorphes. Cannabinées. FI. diclines; périanthes conformes. Urticacées. Ovaire adhérent. Ovaire uniloculaire. SANTALINÉES. Feuilles opposées. Epiphytes. Dioïques. Loranthacées. Feuilles alternes. Fleurs hermaph. Santalacées. Ovaire pluriloculaire. ASARINÉES. Aristolochiacées. Fleurs mâles réunies en chatons. AMENTACÉES. Fleurs dioïques. Graines soyeuses. Salicinées. Monoïques. F1. femelles en chatons. Betulacées. Monoïques. F1. femelles dans une cupule. Quercinées. Fam. (57). Amarantacées. 362. AmaranTus. Feuil. pétiolées à limbe élargi. F1. à l’aisselle de bractées scarieuses, 363. PoLycxEmuM. Feuil. linéaires, sessiles. M TE 362. AMARANTUS. A. Fruit en pyxide. Tiges dressées. A. retroflezus L. Fleurs à 5 divisions. Bractées raides, dépassant le calice. C. A. silvestris Desf. Fleurs à 3 divis. Tige glabre. CC. B. Fruit indéhiscent. Tiges diffuses. F1. à 3 divis. À. viridis Moq. T. Tige glabre. C. A. deflexus L. Tige velue au sommet. AC. 963. POLYCNEMUM. P. arvense L. Etam. à filets soudés à la base. R. Var. majus. Bractées dépas. le calice. Fam. (58). Salsolacées. 364. Cnenopopium. Fleurs hermaphr. à périanthes conformes. 365. ATRIPLEX. Fleurs diclines à périanthes di- morphes, les femelles souvent réduites à 2 bractées opposées et accrescentes. 364. CHENOPODIUM. SEcT. I. Euchenopodium. — Graines lenticulaires, horizontales dans la fleur. A. Feuilles entières. C. polyspermum L. Périanthe éfalé laissant voir le fruit. CC. C. Vulvaria L. Plante étalée à odeur très fétide. C. B. Feuilles sinuées ou incisées. a. Graines luisantes, presque lisses. Inflorescences pyramidales. C. album L. Fleurs en grappes ramifiées, terminales. Graine à bord presque aigu. CC. Type très polymorphe, à feuilles pulvérulentes ou vertes, à glo- mérules de fleurs en grappes compactes ou lâches. C. urbicum L. Grappes peu ramifiées, dressées contre la tige. Graine à bord obtus. AR. M Qt -b. Graines ternes, ponctuées. Inflorescences divariquées. C. murale L. Feuilles à dents nombreuses, peu pro- fondes. CC. C. hyvridum L. Feuilles de 5 à 9 lobes profonds. C. G. Feuilles trilobées. C. opulifolium Schrad. Feuilles courtes, à lobes presque égaux ; graines luisantes. R. C. ficifolium Sm. Graines opaques. RR. SECT. II. Blitum. — Graines toutes ou la plupart verticales, lisses, luisantes. C. bonus Henricus L. Styles longs ; feuilles ondulées aux bords, souche épaisse et vivace. AR. C. glaucum L. Feuilles g/auques, farineuses en des- sous. Graines à bord aigu. C. C. rubrum L. Feuilles charnues, luisantes, souvent rougeâtres. C. 369. ATRIPLEX. A. patula L. Feuilles toutes atténuées, cunéiformes à la base. C. A. hastata L. Feuilles infér. hastées. CC. Types polymorphes, à graines lisses ou opaques, tiges droites ou couchées. Fam. (59). Polygonacées. 366. RuMEx. Périanthe à 6 divis. Stigmates multi- fides. 367. Pozyconum. Périanthe à 5 divisions. Stigmates capités. 366. RUMEX. SEct. I. Lapathum. — Fleurs hermaphrodites. Feuilles non hastées. Styles libres. A. Valves extérieures du périanthe fructifère beaucoup plus longues que larges. a. Dentées sur les bords. R. obtusifolius L. Faux verticilles de fleurs presque etat tes tous dépourvus de feuilles bractéales. Granules des valves inégalement développés. C. Var. pratensis. Feuilles aiguës, même les inférieures. R. maritimus L. Feuilles atténuées en pétiole. Bord des eaux. AR. | R. pulcher L. Tige tortueuse Feuilles panduriformes. C. b. Valves entières. R. conglomeratus Murr. Valves toutes munies d’un granule. Verticilles presque tous munis d’une brac- iée. C. R. nemorosus L. Verticilles espacés et nus. C. à rameaux divariqués. B. Valves presque aussi larges que longues. R. crispus L. Valves suborbiculaires, à granules né- gaux. CC. R. Hydrolapathum Muds. Valves triangulaires. Plante aquatique. C. SECT. II. Acetosa. — Fleurs dioïques. Feuilles hastées à saveur acide. Styles soudés aux angles de l’ovaire. R. Acetosa L. Valves intérieures du périanthe accres- centes, mais non adhérentes au fruit, les extérieures réfléchies. CC. R. Acetosella L. Valves plus courtes que le fruit et dépourvues de granule. CC. 367. POLYGONUM. A. Tige non volubile. a. Fleurs en épis ; styles distincts. P. amphibium L. Souche vivace, traçante. Étamines longuement saillantes. C. P. lapathifolium L. Achaines tous semblables et biconcaves. C. P. Persicaria L. Épi compacte. CC. Me TE P. Hydropiper L. Achaines fernes. Périanthe ponc- tué-glanduleux. Plante à saveur poivrée. CC. P. mite Schr. Tige droite à feuilles larges. Achaine long de 3mm, CC. P. minus Huds. Tige diffuse, feuilles linéaires. Achaine long de 2mm à peine. b. Fleurs solitaires ou peu nombreuses à l’aisselle des feuilles. P. aviculare XL... Tige diffuse et feuillée presque jus- qu’au sommet. Achaines striés en longueur. CC. Var. rurivaqum Jord. Tige dressée. P. Bellardi Al. Rameaux dressés et nus au som- met. R. B. Tige volubile. P. Convoivulus L. Tige anguleuse. Fruits non lu- sants, striés. CC. P. dumetorum L. Périanthe fructifère, glabre, à ca- rène ailée membraneuse. CC. Fam. (78). Thyméléacées. 868. TaymELÆA. Herbe à fruit sec ©. 369. DAPHNE. Sous-arbrisseau à feuilles persistantes. Baie. 368. THYMELÆA. T. Passerina L. Fleurs très petites, sessiles, axillaires, AC. Calc. 309. DAPHNE. D. Laureola L. Fleurs odorantes, jaunâtres, en grappes axillaires penchées. C. Fam. (79). Euphorbiacées. 370. EupHorgia. FI. monoïques. Latex laiteux. 371. MercurIALIS. Dioïques. Suc aqueux. DE MoN 370. EuPHORBIA. A. Glandes du périanthe arrondies. ; E. helioscopia L. Graines ponctuées réticulées. Cap- sule lisse. CC. E. Gerardiana Jacq. Ombelle terminale à rayons très nombreux ; capsule lisse ou très finement chagri- née. R. E. dulcis L. Feuilles rétrécies en pétiole. Glandes d’un _rouge-foncé. Souche #raçante. AR. Bois. E. pilosa L. Feuilles adultes, pubescentes sur les deux faces. AR. E. hyberna L. Feuilles très entières et longues de 5-6 cent. Bois. E. verrucosa L, Souche vivace, dure ; pas de rameaux florifères (ou 1-2) au-dessous de l’ombelle. R. E. platyphyllos L. Graines d’un gris métallique. Om- belle souvent à 5 rayons. C. E. stricta L. Graines d’un brun rougeâtre. C. B. Glandes du périanthe échancrées en croissant. a. Graines rugueuses ou ponctuées. ©) ou @) E. Lathyris L. Feuilles opposées, sur 4 rangs régu- liers. AC. E. exiqua L.. Feuilles linéaires. C. E. falcata L. Glandes à cornes courtes ; feuilles ses- siles, aiquës. Calc. R. E. Peplus L. Coques de la capsule à 2 carènes sur le dos. CC. b. Graines lisses. Plantes vivaces. E. amygdaloides L. Feuilles élargies; bractées cube orbiculaires soudées par 2 à leur base. CC. E. Cyparissias L. Feuilles Ænéaires, très rappro- chées. CC. 89 E. Esula L. Feuilles lancéolées. Rameaux florifères ‘au-dessous de lombelle. C. 371. MERCURIALIS. M. perennis L. Souche vivacé rampante ; tige es feuilles rudes. AR. Bois. M. annua L. Fleurs femelles presque sessiles. CC. Fam. (80). Callitrichinées. 372. CALLITRICHE. Périanthe remplacé par 2 bractées membraneuses. C. aquatica Huds. Fleurs axillaires, hermaphr. ou diclines, 1-2 étam., 2 styles. CC. Plante amphibie et polymorphe. Feuilles linéaires ou obovales ; fleurs sessiles ou pédonculées ; bractées caduques ou persistantes, droites ou arquées, parfois à pointe recourbée ; styles caducs ou persistants, réfléchis ; fruit à coques ailées ou lisses sur le dos. Fam. (81). Cératophyllées. 373. CERATOPHYLLUM. C. demersum L. Fruit muni de 2 épines réfléchies. CC. C. submersum L. Feuilles à segments sétacés, à peine dentelés. RR. Fam. (82). Ulmacées. 374. ULuus. Arbres à écorce souvent subéreuse ; feuilles distiques. Samare. U. effusa Willd. Fruits cihiés et longuement pédoncu- lés ; 8 étam. R. U. campestris L. Graine située au sommet 2). fruit ; 4-5 étam. CC. U. montana Sm. 5-6 étamines. C. "90e Fam. (83). Cannabinées. 379. HuMULUS. H. Lupulus L. Tiges rudes, volubiles. F1. mâles en grappes rameuses, les femelles en cône. C. Fam. (84). Urticacées. Étamines repliées, puis s’étalant avec élasticité. 376. UrTicA. Feuilles opposées. Poils piquants. 977. PARIETARIA. Feuilles alternes. Fleurs polygames. 376. URTICA. U. dioica L. Vivace et dioïque. Toutes les fleurs en grappes rameuses. CC. U. pilulifera L. Fleurs mâles en grappes rameuses, les femelles en têtes globuleuses. R. U. urens L. Fleurs toutes en grappes simples. CC. 371. PARIETARIA. P. of ficinahs L. Périanthe tubuleux à 4 divis. CC. Var. erecta. Tiges dressées, ordinairement simples; feuilles lon- guement rétrécies. Fam. (85). Loranthacées. 318. VISCUM, V. album L. 4 anthères sessiles soudées au périanthe. Baie blanche à 1 seule graine. Sous-arbrisseau dioïque, à feuilles persistantes, parasite sur les arbres. CC. Fam. (86). Santalacées. 279. THESIUM. T. humifusum DC. Périanthe hypocratériforme, blanchôtre intérieurement. Fruit sec monosperme. Plante diffuse, à feuilles linéaires. Semi-parasite. C. — | — Fam. (87). Aristolochiacées. 380. ARISTOLOCHIA. A. Clematitis L. Périanthe monophylle, jaune, obli- quement tronqué en languette unilatérale. Étam. 6, à anthères sessiles et soudées au style. C. Fam. (88). Quercinées. A. Fleurs mâles en chatons globuleux. 381. Facus. Fruit à 3 angles aigus. B. Fleurs mâles en chatons filiformes interrompus. Cupule ligneuse. 382. CASTANEA. Cupule à épines vulnérantes, val- vaire. 383. Quercus. Fruit cylindracé, cupule écailleuse, indivise. CG. Fleurs mâles en chatons cylindriques compactes. Cupule foliacée. , 384. CoryLus. Fleurs femelles dans un bourgeon écailleux. Cupule tubuleuse. 380. Carpinus. Fleurs femelles libres en grappes. Cupule unilatérale. 381. FaGus. F. silvatica L. Feuilles ondulées, ciliées-soyeuses au bord. CC. 382. CASTANEA. C. vulgaris Lam. Feuilles grandes, dentées-cuspidées. Fleurs naissant après les feuilles. CC. 383. QUERCUS. Q. Cerris L. Cupule à écailles recourbées en dehors. R. Q. Toza Bosc. Feuilles adultes tomenteuses en des- sous, et garnies en dessus de poils étoilés. C. 009 Q. pubescens Wild. Feuilles adultes pubescentes en dessous. AR. Q. sessihflora Sm. Pédoncules fructiféres égalant à peine les pétioles. C. Q. -pedunculata Ehr. Pédoncules fructifères très longs. CC. 384. CORYLUS. C. Avellana L. Péricarpe ligneux. CC. 389. CARPINUS. C. Betulus L. Feuilles plissées. C. Fam. (89). Betulacées. 386. ALNUS. Chatons femelles ovoïdes, dressés, en grappes. 387. BETuLA. Chatons femelles cylindriques, soli- taires et pendants. 380. ALNUS. À. glutinosa Gærtn. Écailles fructifères, ligneuses, persistantes. CC. 387. BETULA. :B. alba L. Écailles fructifères, membraneuses, ca- duques. CC. Var. pubescens Spach. Jeunes rameaux pubescents. | Fam. (90). Salicinées. 388. SaLix. 2-3 étam. Écailles des chatons entières. 389. Popuus. 8 étam. ou plus. Disque complet cupu- liforme. 288. SALIX. A. Chatons mâles longuement pédonculés ; les femelles à écailles concolores. Capsule glabre. a. 2 étamines. Écailles des chatons femelles tombant à la matu- rité des capsules. S. alba:L. Capsule subsessile, à pédicelle égalant à Se qe peine la glande. Feuilles blanches soyeuses en dessous. Stipules lancéolées. CC. Var. vitellina. Écorce jaune. Feuilles peu soyeuses. S. fragilis L. Capsule pédicellée. Feuilles presque glabres. C. b. 3 étamines. Écailles des chatons femelles persistantes. S. triandra L. Feuilles glabres luisantes. C. B. Chatons mâles sessiles ou subsessiles ; les femelles à écailles discolores, brunes au sommet. Capsule pubescente. a. Anthères rouges. Feuilles adultes glabres ou glabrescentes. S. purpurea L. Filets des étam. soudés dans toute leur longueur, et simulant une étamine unique. Style presque nul. AR. Var. Helix. Rameaux effilés, feuilles très étroites. S. rubra Huds. Filets des étamines soudés jusqu’au milieu. R. b. Anthères jaunes. Feuilles pubescentes. S. viminalis L. Ovaire sessile ou à pédicelle plus court que la glande. Stipules petites. CC. S. repens L. Sous-arbrisseau de 2-6 décim. à | souche traçanle. AR. Tourbières. S. cinerea L. Feuilles à pointe droite. Bourgeons pubescents-blanchätres. CC. S. capræa L. Feuilles amples ovales- suborbicu- laires. R. S. aurita L. Stipules assez grandes. C. Formes hybrides, intermédiaires entre les précédentes : S. undulata (viminali-triandra). Caract. de S. triandra avec 2 éta- mines, feuilles et capsule souvent velues. S. Smithiana (viminali-cinerea). Caract. de S. viminalis, avec cap- sule un peu pédicellée et feuilles plus larges. 389. FopuLus. A. Écailles des chatons velues. 8 étam. P. Tremula L. Kcailles laciniées. Feuilles sinuées, glabres sur les 2 faces. CC. Bois. Var. vilosa. Feuil. pubescentes soyeuses, LE ppt P. alba L. Écailles dentées. Feuilles blanches-tomen- teuses en dessous, celles des rejets palmatilobées. CC. P. canescens (albo-tremula). Intermédiaire entre les précéd. Jeunes feuilles blanches-grisâtres, celles des rejets non lobées. B. Écailles des chatons et jeunes pousses glabres. Étamines nom- breuses. P. fastigiata Poir. Rameaux dressés. CC. P. nigra L. Feuilles toujours glabres. CC. P. virginiana Desf. Feuilles jeunes pubescentes. CC. SOUS-EMBRANCHEMENT II. — MONOCOTYLÉDONES. Ordres. Familles. Étam. soudées au pistil. Pollen agglutiné. Gynanprées. Orchidées. Étamines libres. Albumen charnu. Périanthe pétaloïde. LrrroIDÉEs. Ovaire infère. Fleurs diclines. Fruit en baie. Dioscoréacées. Fleurs hermaphr. 3 étamines. Iridées. Fleurs hermaphr. 6 étamines. Amaryllidées. Ovaire supér. et libre. Style simple. Fruit charnu. Asparaginées. Style simple. Fruit capsulaire. Liliacées. 3 styles. Colchicacées. Albumen féculent. Périanthe sépaloïde. Joncinées. Joncacées. Albumen féculent. Périanthe glumacé. GLumAcÉEs. Chaume sans nœud, gaine entière triangu- laire. Cypéracées. Chaume noueux, cylindrique ; gaine fendue. (Graminées. Albumen féculent. Fleurs souvent nues en spadice. AROIDÉES. Périanthe nul. Pas de spathe. Fruit sec. Typhacées. Périanthe nul. Spathe. Fruit en baie. Aracées. Périanthe à 6 divisions. Feuilles et spathe linéaires. Acoroîdées. Albumen nul. Plantes aquatiques. FLUVIALES. Périanthe nul ou herbacé. Embryon droit. Carpelles soudés. Périanthe nul. Fleurs diclines, les mâles à 1 étam. MCE nn — Thalle lenticulaire. 1 style. Lemnacées. Tige rameuse et feuillée. 2-3 styles. Naïadées. Périanthe à 6 divis. régul. Fl hermaphr. Juncaginées. Embryon courbé. Plusieurs carpelles libres. Potamées. Périanthe pétaloïde. Ovaire supère. F1. hermaphr. ou monoïques. Embryon droit. .Butomées. Embryon plié. Alismacées. Ovaire infère. Fleurs dioïques. Hydrocharideés. Fam. (91). Orchidées. Fleurs irrégulières, avec une division plus grande que les autres, ordinairement déjetée (Labelle). A. Labelle prolongé en éperon parfois court. 396. Limonorum. Rhizôme. Feuilles colorées, écail- leuses. 304. PLaTanTHERA. Labelle indivis. Pas de bursi- cule. 399. LorocLossum. Lobes du labelle en spirale dans le bouton. 393. Orcuis. Bursicule ordinairement biloculaire. B. Labelle sans éperon. a. Racine formée per 2-4 bulbes ou corps tubéroïdes. 401. Liparis. Labelle occupant le sommet de la fleur. 400. SPIRANTHES. Fleurs en épi sprralé. 391. Aceras. Ovaire contourné. Labelle à 4 lobes linéaires. 390. Serapias. Divisions du périanthe conniventes en casque. 395. Oparys. Divisions du périanthe toutes étalées. d. Fibres radicales très nombreuses. 397. CEPHALANTHERA. Ovaire sessile un peu con- tourné. 398. Epipacris. Pédoncule seul tordu. = D 399. NeoTTiA. Labelle bifide. 390. SERAPIAS. S. cordigera * L. Lobe moyen de labelle cordiforme. RR. 991. ACERAS. A. Anthropophora * R. Br. Labelle muni à la base de 2 petites bosses à peine saillantes. RR. 292. LorocLossum L. hircinum Rich. Plante à odeur de boue, robuste. C. 393. ORCHIS. A. Divis. extérieures du périanthe conniventes en casque. a, Tubercules entiers ; éperon distinct. T Labelle à 3 lobes, le médian entier. O. coriophora L. Fleurs à odeur de punaise. C. T1 Labelle à lobe médian échancré (comme 4 lobes). O. ustulata L. Fleurs notrâtres au sommet de l’épi. C. ‘O. Morio L. Fleurs rayées de vert. tt Labelle à lobe médian échancré, avec une petite dent au milieu de l’échancrure. O. Simia Lam. Lobes du labelle très étroits. AC. Calc. O. purpurea Huds. Casque brun; lobes moyens du labelle élargis. AR. Calc. (O0. Simio-purpurea. Intermédiaire entre les précéd.) b. Tubercules palmés ; éperon très court. O. viridis AI. Fleurs verdâtres. AC. B. Divisions extérieures du périanthe étalées. a. Fleurs rayées ou piquetées de couleurs différentes. O. sambucina L. Fleurs jaundtres. Tubercules à peine palmés. RR. O. maculata L. Fleurs b/anc-lilas ; labelle presque plane. C. , * O. latifolia L. Fleurs purpurines. Feuilles tachées, étalées. AC. Var. incarnata. Feuilles étroites dressées, sans taches. MaQ b. Fleurs non mouchetées. T Tubercules palmés. O. Conopsea L. Éperon 2 fois plus long que l'o- vaire. C. O. odoratissima L. Odeur suave de vanille. RK. +f Tubercules entiers, arrondis. O. pyramidalis L. Éperon aigu-filiforme, épi court, conique et serré. Bursicule unéloculaire. R. Calc. O. mascula L. Bractées à 1 seule nervure. CC. O. laxifiora Lam. Divisions extérieures du périanthe déjetées. Fleurs rouge foncé. CC. Les formes hybrides de cette espèce s’en distinguent par les divi- sions du périanthe non déjetées. O. palustris. Épi plus serré. Divis. du pér. dressées. O. alata (morio-laxiflora). Fleurs bistrées. Divis. du pér. étalées. 394. PLATANTHERA. P. bifolia Rich. Anthères à lobes parallèles. 2 feuilles à la base de la tige. AC. P. montana Schm. 4 feuilles à la base de la tige. Éperon un peu renflé en massue. AC. 295. OPHRYS.. A. Divis. du périanthe verdâtres. Labelle sans appendice. O. aranifera Huds. Labelle entier ou un peu émar- giné, brun-velouté avec 2-4 raies glabres plus claires. C. O. fusca Link. Labelle à 4 lobes presque éqaux. RR. O. muscifera Huds. Labelle à ‘lobes latéraux plus courts que les médians, rouge sombre avec une tache bleue. R. Calc. B. Divis. du périanthe roses ou blanches. Labelle terminé par un appendice. O. apifera Huds. Labelle /obé, à appendice courbé en dessous. AC. Calc. O. Arachnites " Hoffm. Appendice courbé en dessus. RR. SOC. D’AG. x | OS 396. LImoporum. L. abortivum Sw. Plante robuste toute teintée de violet. RR. Calc. 397. CEPHALANTHERA. Plantes des bois calcaires. C. rubra Rich. Ovaire pubescent-glanduleux ; fleurs roses. RR. C. Xiphophyllum Reich. Feuilles lancéolées, étroites, bractées membraneuses, plus courtes que l'ovaire. FI. d’un blanc pur. R. C. grandiflora Bab. Périanthe à divis. toutes obtuses. RR. | - 398. EPIPACTIS. E. palustris Crantz. Fleurs pendantes en grappes lâches. Marais. C. E. latifolia Al. Labelle plus court que les divis. latérales externes du périanthe. AR. Var. atrorubens Sch. Fleurs petites, pourpres. Var. microphylla Sw. Feuilles toutes plus courtes que les entre- nœuds. 399. NEOTTIA. N. Nidus avis Rich. Plante jaunûâtre, humicole. KR. Bois. N. ovata Rich. Plante à 2 larges feuilles vertes oppo- sées. AC. 400. SPIRANTHES. S. æstivalis Rich. Feuilles portées par la tige. AR. S. autumnalhs Rich. Feuilles en bourgeon latéral. C. Pelouses. 401. Lriparis. L. Læselü Rich. Tige triquêtre. Tourbières. RR. 0) Fam. (92). Dioscoréacées. 402. Tamus. T. communis L. Tige volubile. Feuilles cordiformes à nervures ramifiées. CC. Fam. (93). Iridées. 403. Iris. Stigmates pétaloïdes. 404. GLaniozus. Périanthe un peu irrégulier. 403. Iris. 1. Pseudacorus L. Fleurs jaunes, tachées à l’onglet. Marais. CC. Var. Bastardi Bor. Fleurs pâles, seulement striées. I. fœtidissima L. Fleurs bleuâtres. C. Haies. 404. GLADIOLUS. G. Illyricus Koch. Fleurs en grappe pauciflore, uni- latérale ; feuilles très étroites. Landes. R. G. segetum Gawl. Grappe flexueuse, déistique ; graines non ailées. R. Var. Guepini Koch. Forme appauvrie, stérile, à étam. inégales. Fam. (94). Amaryllidées. 405. Narcissus. Périanthe muni d’une couronne cu- puliforme. 406. GALANTHUS. Périanthe à divis. inégales, les externes échancrées. 405. NARCISSUS. . N. Pseudo-Narcissus L. Fleurs jaunes. AR. Var. minor. Fleurs moitié plus petites. Précoce. N. poeticus L. Fleurs blanches, soltairés ; couronne bordée de rouge. R. N. biflorus L. Hampe de 1 à 3 fleurs. R. — 100 —- 406. GALANTHUS. G. nivahs L. F]. blanche pendante, rayée de vert. AR. Fam. (95). Asparagées. 410. Ruscus. Sous-arbrisseau dioïque, à rameaux aplatis et piquants. 407. AsparaGus. Plante dioigue. Feuilles réduites à des écailles. M1. Paris. 4 feuilles verticillées au-dessous de la fleur solitaire. | 409. ConvaLLariA. Feuilles toutes radicales. Fleurs en grappe terminale. 408. PocyconaTum. Étam. insérées sur le périanthe au milieu de sa hauteur. 407. ASPARAGUS. A. officinahs L. Tiges terminées par des rameaux filiformes en faisceaux imitant des feuilles. AC. 408. PoLyGoNATUM. P. vulgare Desf. Étam. à filets g/abres. Tige angu- leuse. Bois calc. KR. P. multiflorum Desf. Fleurs grêles contractées au milieu. C. P. intermedium Bor. (Hybride des précédents ?} a les grosses fleurs du premier et les autres caractères du second. 409. CONVALLARIA. C. maialis L. Fleurs blanches à odeur suave. Bois. AC. Ô 410. Ruscus. R. aculeatus L. Fleurs petites à 3 étam., naissant au milieu des cladodes. CC, — 101 — 411. Paris. P. quadrifolia L. 8 étamines. Ovaire à 4 loges. RR. | Fam. (96). Liliacées. A. Souche bulbeuse. 418. Muscari. Périanthe wrcéolé à divisions soudées. 413. FriTizLarIA. Fleur régulièrement tachée comme un damier, avec fossettes nectariféres. 12. Tuzipa. Stigmate sessile. Capsule à loges très polyspermes. 423. ALcium. Inflorescence renfermée dans une spathe. 491. GAGEa. Anthères fixées au filet par leur base. Fleurs d’un beau jaune. 422. ORNITHOGALUM. Filets des étamines aplatis. 420. Scia. Étamines insérées à la base du pé- rianthe. 419. Enpymion. Fleurs pendantes. B. Souche fibreuse ou tuberculeuse. 417. NarTHECIUM. Fleurs jaunes. Étam. à filets velus sur toute leur lonqueur. 414. AspnopeLus. Filets des étam. dilatés à la base et couvrant l'ovaire comme une voäte. 415. PHALaNGIUM. Filets g/abres. Fleurs d’un blanc pur. 416. Smmeruis. Fleurs violacées en dehors. M2 Turrpa. | T. silvestris L. Périanthe à divisions 2négales, les internes /arges. AR. T. australis Link. Fleur petite, rougeâtre en dehors. RR. > 1409 — M3. FRITILLARIA. F. Meleagris L. Fleur solitaire, violette, pendante. C. 414. ASPHODELUS. A. ramosus L. Fleurs blanches avec lignes foncées, en longue grappe terminale. Souche tuberculeuse. AC. 415. PHALANGIUM. P. Liliago Schreb. Périanthe rétréci en tube à la base. KR. MG. SIMETHIS. S. bicolor Kunth. Feuilles planes égalant presque la tige. Landes. AC. 417. NARTHECIUM. N. ossifragum Muds. Souche traçante écailleuse. Feuilles courtes, ensiformes. RR. Marais. 248. Muscat. M. comosum Mill. Grappe devenant très longue, ter- minée par des fleurs stériles nombreuses et seules colo- rées en bleu. CC. M. racemosum Mill. Feuilles étroites, semi-cylin- driques, finement canaliculées. Fleurs à odeur de prune. C. Var. neglectum Guss. Plus robuste, à feuil. moins étroites. M. botryoides. Mill. Pédicelles fructifères recourbés. RR. M. Lelievrei Bor. Fleurs à légère odeur de vio- letie. R. 419, ENDyMI0N. E. nutans Dum. Fleurs munies de 2 bractées, à odeur de jacinthe. CC. 420. ScILLA. S. autumnalis L. Feuil. linéaires trés étroites, parais- sant aprés la floraison à l’automne. CC. — 103 — S. bifolia L. Feuil. élargies égalant la tige au mo- ment de la floraison vernale. R. 491. GAGEA. G. stenopetala Reich. Pédoncules glabres. RR. G. arvensis Schuliz. Pédoncule de 1 à 7 fleurs ; divis. du périanthe aiguës. AR. Champs. G. Bohemica Sch. Fleur ordinairement solitaire. R. Rochers. Var. saxatilis. Divis. du périanthe linéaires. 492. ORNITHOGALUM. A. Fleurs en grappe allongée. O. pyrenaicum L. Fleurs jaunâtres. AC. B. Fleurs blanches en corymbe. O. divergens Bor. Pédicelles fructifères déjetés. AC. O. umbellatum L. Feuilles étalées. C. Var. angustifolium Bor. Feuilles plus étroites, d'abord dressées. 423. ALLIUM. A. Ombelles sans bulbilles. A. ursinum L. Tige anguleuse ; feuilles elliptiques ; fleurs d’un blanc pur en ombelle plane. AR. Lieux frais. A. sphærocephalum L. Fleurs d’un beau rouge ; 3 étamines à filets érifides. AC. Var. approrimatum G. G. Feuilles à peine sillonnées et seulement au sommet. A. paniculatum L. Pédicelles lâches très inégaux. AC. B. Ombelles avec bulbilles seules ou mêlées aux fleurs. À. vineale L. Spathe courte ; 3 élam. à filets érifides. CC. A. oleraceum L. Spathe à 2 valves. C. Var. complanatum. Feuilles presque planes, non canaliculées. — 104 — Fam. (97). Colchicacées. 424%. COLCHICUM. C. autumnale L. Fleurs violettes naissant avant les feuilles. AC. Prairies. Fam. (98). Joncacées. 425. Juncus. Capsule à 3 loges polyspermes. Feuilles glabres. 426. LuzuLa. Capsule unilocul. à 3 graines. 425. Juncus. A. Plante sans feuilles vertes. Inflorescence latérale. J. glaucus Ehr. Tige glauque, tenace, à moelle énter- rompue. CC. J. effusus L. Inflorescence lâche ; style naissant d’une fossette.. CC. J. conglomeratus L. Tige un peu striée au sommet. CC. B. Des feuilles vertes. Inflorescence terminale. a. Feuilles sétacées, canaliculées ou planes. + Feuilles toutes radicales. J. squarrosus L. Feuilles très nombreuses en rosette étalée. Souche dure, vivace. R. Tourbières. J. capitatus Weïg. Plante grêle. Fleurs en capi- tules. ©. AR. +1 Tige plus ou moins feuillée. * Fleurs sessiles en petits capitules. J. uhginosus Mey. Périanthe plus court que la cap- sule. AC. | J. pygmœus Th. Capsule trigone et pointue. AC. J. hybridus Brot. Divisions du périanthe inégales. AR. — 105 — ** Fleurs solitaires en panicule. _ d. bufonius L. Périanthe dépassant beaucoup la cap- sule. CC. J. Tenageia L. Inflorescence lâche et étalée ; Lige cylindrique. ©. CG. J. compressus Jacq. Capsule arrondie dépassant le périanthe. C. J. Gerardi Lois. Tige élancée, moins comprimée. RR. b. Feuilles cylindriques ou comprimées, noueuses. J. obtusifiorus Ehr. Divisions du périanthe toutes obtuses non mucronées; plante d’un blanc verdätre dans toutes ses parties. R. J. heterophyllus Dufour. Plante glauque à feuilles dimorphes, les plus minces à peine articulées. RR. J. acutiflorus Ehr. Divisions du périanthe éinégales, à pointe recourbée. C. J. anceps Lah. Feuilles {rès comprimées, fleurs pe- tites en panicule dressée. Tige droite. AR. J. lamprocarpus Ehr. Panicule divariquée. C. 426. LuzuLa. A. Fleurs isolées sur chaque rameau de la panicule. L. Forsteri DC. Rameaux de la panicule dressés ; cap- sule aiguë. C. Bois. L. pilosa Willd. Capsule obtuse apiculée. C. B. Fleurs en faisceaux compactes. L. maxima DG. Faisceaux de 2 à 9 fleurs, disposés en panicule trés ample. L. campestris DC. Faisceaux de 6 à 15 fleurs. Graines munies d’un appendice. CC. Var. multiflora. Souche sans stolons ; tiges élancéee. — 106 — Fam. (99). Cypéracées. Plantes des marais à feuilles tristiques. A. Épillets à écailles distiques. 427. Cyrerus. Épillets comprimés, multiflores. Süg- mates glabres. 498. Scnœnus. Épillets de 5 à 9 fleurs, dont la moi- tié stériles à la base. B. Epillets à écailles imbriquées sur plusieurs rangs. a. Fleurs hermaphrodites. + Épillets pauciflores, à écailles infér. très petites, stériles. 429. RayncrosporA. Style renflé à la base, fruit en- iouré de sotes. 430. CLanrum. Épicarpe crustacé fragile se séparant de l’amande. + Épillets multiflores, à écailles égales ou diminuant de la base au sommet. 433. Er1oP#ORUM. Fruit entouré de longues houppes soyeuses. 431. HELEocHARIS. Base du style renflée et persis- sante. 432. Scrrpus. Style filiforme. b. Fleurs unisexuelles. 434. CARExX. Achaine renfermé dans une enveloppe close (utricule). . 497. CYPERUS. C. longus L. Souche rampante ; tige robuste. C. C. fuscus L. Épillets bruns ; 3 stigmates. ©. C. C. flavescens L. Épillets jaunâtres ; 2 stigm. ©. AC. 428. ScHŒNUS. S. nigricans L. Épillets noirâtres. AR. — 107 — 429. RHYNCHOSPORA. _R. fusca R. Sch. Souche fraçante. Épillets bruns, . longuement dépassés par les bractées. R. R. alba Nalh. Épillets blanchâtres. AR. 430. CLADIUM. C. Mariscus R. Br. Feuilles coupantes. Inflorescence trés ample, corymbiforme. AR. 431. HELEOCHARIS. H. acicularis R. Br. Tige anguleuse, presque capil- laire; achaine strié-ridé. Soies hypogynes nulles ou caduques. C. _ H. ovata R. Br. Plante annuelle, grêle ; épillet ovoide à écailles obtuses. R. H. multicaulis Dietr. 3 stigmates ; souche cespiteuse ; achaine brun-trigone à angles aigus. AC. H. palustris R. Br. Épillet à 2 écailles infér. stériles vertes, n’embrassant chacune que la moitié de sa base. CC. H. uniglumis Reich. Une seule écaille stérile sca- rieuse et embrassant toute la base de l’épillet. R. 432. SCIRPUS. A. Épi solitaire et terminal. S. fluitans L. Tige feuwllée, rameuse, couchée ou flottante. AC. S. cæspitosus L. Une seule feuille très courte à la base de la tige. RR. S. pauciflorus Ligh. Souche émettant des rhizômes. R. B. neue re pseudolatérale (rarement réduite à un seul épi). S. Rothit Hoppe. Tige triquètre, RR. * — 108 — S. lacustris. Tige élevée ; épis pédonculés. CC. Var. glaucus Sm. Tiges plus courtes, glauques. S. setaceus L. Tige fiiforme, portant le glomérule d’épis près de son sommet. C. S. supinus “ L. Achaine strié en longueur RR. C. Inflorescence terminale formée de plusieurs épis. S. Michelianus L. Tiges étalées ; épillets réunis en capitules compactes. ©. AR. | S. maritimus L. Épis réunis en ombelle simple. AC. S. silvaticus L. Épis en panicule rameuse. AR. S. compressus L. Épis composés, distiques. RR. 433. ERIoPHORUM. E. vaginatum L. Épi solitaire et terminal. RR. E. gracile Koch. Pédoncules tomenteux. R. E. latifohum Hop. Pédoncules scabres. C. E. angustifolium Roth. Pédoncules lisses. AC. 434. CAREX. Secr. I. Psyllophora. — Épi simple, solitaire et terminal. C. pulicaris L. Épi androgyne, mâle au sommet. AC. SECT. Il. Vignea. — Plusieurs épillets, tous ou la plupart andro- gynes (rarement tous unisexuels, et alors les supérieurs sont femelles). 2 stigmates. A. Souche cespiteuse, courte. a. Épillets mâles au sommet. C. paniculata L. Écailles membraneuses-blanchâtres aux bords, égalant l’utricüle. Épis nombreux paniculés. AR. C. vulpina L. Tige robuste, à faces concaves ; épillets inférieurs composés. C. Var. nemorosa. Épi interrompu accompagné de longues bractées. C. muricata 1. Tige scabre seulement au sommet. C. Var. divulsa. Epi interrompu. — 109 — b. Épillets femelles au sommet. . C. remota L. Épillets infér. érès écartés et munis de longues bractées foliacées qui dépassent la tige. C. C. leporina L. Utricule bordé d’une membrane large, denticulée. C. C. stellulata Good. Utricules divergents en étoile. AC. C. canescens L. Épillets d’un vert blanchâtre. B. Souche longuement tracante. C. disticha Muds. Épillets tous uniseruels, ceux du milieu seuls mâles. C. C. arenaria L. Épillets androgynes, mâles au som- met ; bordure de l’utricule très large. RR. C. ligerica 3. Gay. 6 à 20 épillets. Utricules bor- dés. R. C. Schreberi Schr. Tige grêle portant 5 à 6 épillets. SECT. III. Eucarez. — Épis unisexuels, les supérieurs mâles. A. 2 stigmates. C. acuta L. 2-3 épis mâles ; bractées infér. dépas- sant la tige. CC. | C. Goodenowii J. Gay. Tiges grêles à peine de la longueur des feuilles. R. C. stricta Good. Épis femelles souvent mâles au sommet. ÀR. B. 3 stigmates. a. Utricules pubescents ou hérissés sur toute leur surface. + Épi mâle solitaire. * Bractées ne formant pas de gaine tubuleuse. C. tomentosa L. Souche rampante ; épis oblongs. AR. C.. pilulifera L. Épis arrondis faisant fléchir la tige. C. — 110 — * * Bractée inférieure engainante. C. humilis Leyss. Bractées membraneuses et tron- quées. Coteaux calc. PR. C. præcox Jacq. Souche stolonifère ; achaine dilaté au sommet en cupule d’où naît le style. C. C. polyrrhiza Wall. Feuilles planes. RR. C. Halleriana Ass. Écailles de l’épi mâle bordées de blanc. R. tt Plusieurs épis mâles. C. filiformis L. Épis femelles presque tous sessiles ; feuilles g{abres, très étroites, canaliculées ou enroulées. RR. C. hirla L. Bractée inférieure longuement engai- nante C. 6. Utricules glabres (ou à peine hérissés sur les angles). + Utricules à bec tronqué souvent court ou nul. * 2-3 épis femelles droits ou un peu penchés. C. glauca Scop. Plusieurs épis mâles. He glauques. CC. C. panicea L. Souche fracante ; utricules non lui- sanis. C. C. pallescens L. Épis femelles ovoides. AR. * 3 à 1 épis femelles longs et pendants. C. mazxima Scop. Épis femelles compactes longs de plus d'un décim. R. C. strigosa Good. Utricule à bec assez long tronqué. tt Utricules à bec bifide souvent allongé. * Épi mâle solitaire ; bractée infér. engainante. C. depauperata Good. Épis femelles de 3 à 6 wtri- cules renflés. R. — 111 — C. flava L. Bractées réfractées ou étalées ; utricule à bec recourbé. AR. Var: lepidocarpa. Utricule à bec droit, un peu courbé à la fin. Var. Œderi. Utricule à bec court et droit. C. Pseudocyperus L. Utricules réfléchis à la matu- rité. AC. C. silvatica Huds. 4-5 épis femelles, fous pendants à la maturité. C. C. lævigata Sm. Épi femelle inférieur étalé ou pen- ché ; ligule allongée. AC. C. punctata Gaud. Utricule à bec glabre sur les bords, à faces ponctuées. Épis femelles verdätres. RR. C. fulva DC. Écailles non mucronées. AC. (C. flavo-fulva. Stérile à utricules jaunâtres plus gros : tige scabre.) C. distans L. Épis jaunâtres. Utricules plurinerviés. AR. C. binervis Sm. Épis bruns ; utricules comprimés à 2 côtes. R. ** Plusieurs épis mâles ; bractées non engainantes. O. Épis mâles noirâtres; utricules non vésiculeux. C. nutans Host. 1-2 épis mâles ; tige à peine scabre au sommet. RR. C. riparia Curt. Écailles des épis mâles toutes aris- tées. C. C. paludosa Good. Utricules comprimés. C. Var. Kochiana DC. Ecailles des épis femelles longuement aristées. 00. Épis mâles jaunâtres, utricules vésiculeux. C. vesicaria L. Tige à angles rudes ; utricules co- niques. C. C. ampullacea Good. Feuilles canaliculées et glauces- centes. R. — 112 — Fam. (100). Graminées. Fleurs renfermées entre deux écailles (g/umelles), solitaires ou réunies plusieurs dans un même épillet entouré à sa base par deux écailles (glumes) rarement réduites à une ou nulles. 10 Epillets sessiles ou à pédicelles très courts et non rameux. A. Inflorescence à axe principal très court ou nul. a. Épillets multiflores en capitule. 444. EcxiNaRIA. Glumelle hérissée de 5 à 7 épines. b. Epillets uniflores en épis digités. 449. ANDROPOGON. Épillets très velus et géminés, V'un hermaphr. sessile, l’autre mâle ou stérile et pédicellé. 439. Diciraria. ©. Épillets sur 2 rangs et compri- més par le dos. 448. Cxnonon. Épillets comprimés par le côté. B. Inflorescence à rachis ou axe principal ose (Épi.) a. Épillets unilatéraux et uniflores. 475. Narpus. Glumes nulles ; rachis creusé pour re- cevoir les épillets. 1 seu stigmate. 448. Migora. Épillets roses en épi filiforme. b. Épillets distiques. / T Uniflores et disposés par 3 sur chaque dent du rachis. 481. Horpeun. Épillets latéraux mâles ou stériles. tt Multiflores et solitaires sur chaque dent. 477. GAUDINIA. Glumelle infér. portant sur le dos une arête genouillée. 4178. Lozrum. Épillets latéraux à 1 seule glume el tournant leur côté vers le rachis. 476. Narpurus. Glume à 4 ou 3 nervures : ovaire glabre au sommet. 479. Bracaypopium. Glumes inégales. Épillets un _ pédicellés. A80. Acropyrum. Glumes presque égales, — 113 — 20 Épillets à pédicelles distincts et rameux. Inflorescence en pani- cule étalée ou cylindrique. A. Épillets renfermant une seule fleur fertile, parfois accompa- gnée de fleurs neutres. a. Glumes nulles. 435 LeErsiA. Glumelles soudées et ciliées. Plante robuste. 449. CoceAnTaus. Pédicelle articulé et hérissé. b. Glumes très inégales, l’infér. rudimentaire ou nulle. ZA. Tracus. Glume supér. toute hérissée de poils crochus. Glumelles membraneuses. 440. SerarrA. Épillets entourés de sotes raides à la base. 438. Panicum. Glume supér. mucronée-aristée. ce. 2 glumes, l’infér. bien développée. + Stigmates longs sortant au sommet de la fleur qui ne s'étale pas pendant la floraison. 437. ANTHOXANTHUM. Glumes éinégales, l’inférieure moitié plus courte. Fleur fertile accompagnée de 2 sté- riles réduites à 2 glumelles aristées et velues plus longues qu’elle-même. 436. Paacaris Fleur fertile accompagnée de 2 bare courtes. Panicule /âche. 446. ALopEcuRus. Glumes soudées inférieurement. Une seule glumelle. 447, Pateum. Glumes acuminées, plus longues que la fleur. 445. Crypsis. Glumes un peu inégales. Achaine. ff Stigmates courts sortant à la base de l'épillet ; glumes étalées pendant la floraison. * Glumelles devenant coriaces et enserrant le fruit. 454, Sripa. Glumelle infér. à très longue arête 1or- due et plumeuse. 458. Micium. Glumelle infér. mutique. SOC. D’AG. 8 — 114 — ** Glumelles membraneuses. 451. CALAMAGROSTIS. Fleur entourée de longs poils. 452. Gasrripium. Glumes ventrues à la base et 3 fois plus lonques que les glumelles. 450. Acrosris. Glumes carénées. 459. Mecica. Fleurs stériles formant un petit bour- geon claviforme au centre de la fertile. B. Épillets renfermant une fleur fertile accompagnée d’une fleur mâle. 457. Hozcus. Fleur mâle supérieure. Ovaire glabre. 458. ARRHENATHERUM. Fleur mâle à arête tordue infé- rieurement. C. Épillets renfermant au moins 2 fleurs fertiles. a. Glumes plus courtes que les fleurs. 466. Cynosurus. Épillets fertiles entremêlés de brac- tées pectinées. Panicule contractée unilatérale. 474. Briza. Glumelle inférieure suborbiculaire cor- dée. 464. ParacmiTEes. Fleurs entourées à la base de /ongs poils soyeux. 465. Dacryuis. Épillets en faisceaux compacts unila- téraux. 468. Bromus. Stigmates insérés sur le dos de l'ovaire velu au sommet. 469. Fesruca. Fruit canaliculé sur la face interne. Glumelle inférieure souvent aristée. 410. Morin. Gaine de la feuille inférieure recou- vrant les nœuds et les gaines de toutes les feuilles supé- rieures. 472. CaraBrosa. Épillets à 2 fleurs. 411. GLycerIA. Glumelle inférieure obtuse ou tron- quée. — 115 — 473. Poa. Glumelle inférieure carénée. - b. Glumes égalant ou dépassant les fleurs. + Glumelle infér. sans arête ou à arête terminale. 463. KæLEr1A. Panicule spic:forme. 467. DanrTHoniA. Glumes multinerviées ; épillets mul- tiflores. 456. Arrorsis. Épillets biflores à glumes carénées. jt Glumelle infér. portant une arête sur le dos. 461. AvENA. Ovaire velu au sommet. 460. VENTENATA. Glumes multinervices. 455. Aira. Épillets biflores ; fruit canaliculé. 462. TRISETUM. Glumes inégales. 435. LEERSIA. L. oryzoides Sw. Épillets comprimés, souvent ren- fermés dans la gaîne de la feuil. supér. et fertiles, rarement en panicule exserte étalée et alors stériles. AC. Bord des eaux. 436. PHALARIS. P. arundinacea L. Souche traçante, tige robuste à feuilles larges et scabres. C. Bord des eaux. 437. ANTHOXANTHUM. A. odoratum L. Plante sèche odorante, vivace. CC. Var. Puelii Lecoq. Plante rameuse dès la base, ©. C. 438. PANICUM. P. Crus galli L. Panicule digitée formée d’épis uni- latéraux. C. Bord des eaux. 439. DIGITARIA. D. sanguinalis Scop. Feuilles et gaînes velues ; épis oblongs. C. Var. ciliaris. Épillets bordés de cils. D. filiformis Kœl. Tiges étalées. Épillets ovales. AR. — 116 — 440. SETARIA. S. verticillata P. B. Panicule accrochante à aiguillons dirigés en bas. CC. S. viridis. P. B. Glume supér. à 5 nerv. égalant la fleur. C. S. glauca P. B. Soies jaunes ; glumelles élégamment ridées. AR. 441. TRAGUS. T. racemosus Hall. Épillets plan-convexes. RR. 442. ANDROPOGON. A. Ischæmum L. Glumes rouges, striées. R. 443. CyNopon. C. Dactylon Rich. Rhizômes allongés. CC. 444. ECHINARIA. E. capitata Desf. Fruit subglobuleux pubescent au sommet. RR. 445. Crypsis. C. alopecuroides Schrad. Panicule cylindrique, dé- passant les feuilles. AR. C. schænoides Lam. Panicule ovale entourée par 2 feuilles. RR. 446. ALOPECURUS. A. bulbosus L. Tige renflée à la base en forme de bulbe. AR. A. agrestis L. Panicule presque glabre. ©. CC. A. geniculatus L. Tige couchée, radicante à la base ; glumes soudées seulement à la base. C. Var. fulvus Sm. Arête dépassant peu ou pas les fleurs. À. pratensis L. Gaîne de la feuil. supér. sensiblement renflée en son milieu. C. »” ct er. — 117 — 447. PHALEUM. P. Bæhmert Wibel. Glume 2nsensiblement acuminée ; fleur accompagnée d’un pédicelle stérile. AR. Calc. P. pratense L. Glume tronquée-aristée. C. Var. nodosum L. Tige renflée en bulbe à la base. 448. MiBora. M. minima Desv. Tiges grêles en touffes serrées. UC. 449. COLEANTHUS. C. subtilis Seid. Très petite plante étalée sur la vase du bord des étangs. RR. 450. AGRoSTIs. A. Arêtes courtes ou nulles. Plantes vivaces. A. aiba L. Feuilles toutes planes ; fleurs souvent mutiques. CC. Var. vulgaris. Ligule courte tronquée. A. glaucma Bast. 2 glumelles distinctes ; ligule courte. tronquée. RR. Landes. A. canina L. Glumelle #ronquée-denticulée au som- met. AC. A. setacea Curt. Glumelle terminée par 2 petites soies. Tiges droites en touffes. R. B. Arêtes 3 ou 4 fois plus longues que les glumes. ©. A. Spica venti L. Panicule ample-étalée. UC. A. interrupta L. Anthères ovales. R. 451. CALAMAGROSTIS. C. Epigeios Roth. Souche traçante ; arête insérée sur le dos de la glumelle. AC. C. lanceolata * Roth. Arête très fine dans une échan- crure de la glumelle. RR. 452. GASTRIDIUM. G. lendigerum Gaud. Glumelles tronquées- dentées. C. — 118 — 453. Mizrun. M. effusum L. Souche traçante ; tige glabre élancée. Bois. AC. 454. STrpA. S. pennata L. Arête plumeuse longue de 15 à 20 cen- - tim. RR. 455. AIRA. SECT. I. Corynephorus. — Arête de la glumelle articulée, claviforme et barbue dans sa partie moyenne. A. canescens L. Tiges courtes et nombreuses fascicu- lées ; épillets luisants argentés. AR. Sables. SECT. II. Deschampsia. — Glumelle infér. tronquée, à 3-5 dents iTTége au sommet. PI. vivaces. À. cæsptiosa L. Arête courte et presque droite ; tiges robustes nombreuses en touffe serrée. C. A. flexuosa L. Ligule courte tronquée ; fleur supér. subsessile. C. Vàr. Legei Bor. Épillets pâles non violacés ; ligule oblongue. A. uhiginosa Weïhe. Ligule longue atténuée ; fleur supér. de l’épillet à pédicelle égalant la moitié de sa longueur. R. Secr. III. Euaira. — Glumelle infér. bifide. ©. A. caryophyllea L. Panicule diffuse, étalée après la floraison. C. A. præcox L. Panicule à rameaux courts et dres- sés. C. 456. ATROPSIS. : A. agrostidea DC. Glumelle infér. large à 3 dents. Épillets violacés. R. Bord des eaux. 457. Hozcus. H. lanatus L. Arête dépassant peu ou point les glumes ; gaîne des feuilles érès velue. CC. 4. molhs L. Souche traçante. ©. — 119 — 458. ARRHENATHERUM. A. elatius P. B. Épillets luisants en panicule étalée. CC. Var. bulbosum. Tige renflée en bulbes superposés, à nœuds pubes- ae 459. Meuica. M. uniflora Retz. Glumelle infér. glabre. Panicule unilatérale, très lâche. C. Bois. M. ciliata L. Glamelle bordée de longs poils blancs. AC. A60. VENTENATA, V. avenacea Kœl. Épillets fusiformes, dressés, à longue arête. RR. Bords de la Loire, 461. AVENA. SECT. I. Euavena. — Épillets pendants ; glumes à 1-9 nervures. A. Ludoviciana Dur. Panicule unilatérale. RK. A. fatua L. Axe de l’épillet velu dans toute sa lon- queur. C. Secr. II. Avenastrum. — Épillets dressés, glumes à 1-3 nervures. A. pubescens L. Feuilles infér. planes et pubes- centes. R. A. sulcata Gay. Feuil. radicales pliées ; glumelles terminées par 2-3 lanières. KR. A. pratensis L. Feuil. radicales enroulées ; glumelles bifides, R. , 462. TRISETUM. T. flavescens P. B. Épillets courts jaunâtres, à rachis poilu. C. 463. KŒLERIA. K. cristata Pers. Souche recouverte par les gaînes desséchées des feuilles précédentes. R. Calc. 464 PHRAGMITES. P. communis Trin. Rhizôme traçant, tiges robustes — 120 — de À à 2 mètres. Panicales violacées. C. Bord des eaux. 465. DacrTyLis. D. glomerata L. Épillets arqués, concaves. Gaînes comprimées. CC. Var. hispanica Roth. Feuilles radicales persistantes et gazon- nantes au moment de la floraison. Glumelle infér. échancrée. Calc. 466. CyNosurus. C. cristatus L. Panicule spiciforme unilatérale. C. 467. DANTHONIA. D. decumbens DC. Tiges étalées se redressant pour fleurir. C. 468. Bromus. A. Glumes presque égales, la supér. à 7-9 nervures. Épillets élar- gis au milieu et rétrécis au sommet. ©. a. Glumelles presque égales. B. secalinus L. Fleurs de l’épillet contractées-cyhn- driques à la maturité et ne se recouvrant plus par les bords. AC. B. arvensis L. Épillets linéaires-lancéolés, toujours glabres. C. b. Glumelle supér. plus courte que l’inférieure. B. mollis L. Épillets pubescents CC. B. racemosus L. Glumelle infér. à nervures peu pro- noncées. C. Var. commutatus. Panicule non contractée après la floraison. B. Glumes inégales, la supér. à 3 nervures. a. Epillets lancéolés à arête courte. Plantes vivaces. B. erectus Huds. Panicule droite. AC. Calc. B. asper L. Feuilles et gaînes rudes pubescentes. Bois. AR. b. Épillets cunéiformes, longuement aristés. (©). B. tectorum L. Panicule serrée unilatérale, à rameaux à peine scabres ; glumelle égalant son arête. AC. — 121 — B. madritensis L. Panicule serrée ; arête droite puis ‘étalée ; épillets violacés ne dépassant pas 2-3 centim. AR. B. sterilis L. Panicule très lâche étalée. Tige glabre. CC. B. maximus Desf. Panicule resserrée après la florai- son. AR. 469. FESTuCA. Secr. I. Eufestuca. — Plantes vivaces. Glumelle infér. arrondie sur le dos. A. Feuilles toutes planes. F. gigantea Nill. Arête égalant le double de la lon- gueur de la glumelle. Feuilles /arges. Bois. R. F. arundinacea Schreb. Épillets de 4-5 fleurs, dispo- sées par 4 & 15 sur chaque rameau de la panicule. Souche un peu traçante. R. F. pratensis Huds. Épillets de 5 à 10 fleurs. C. B. Feuilles radicales enroulées, les supér. élargies, planes. F. heterophylla Lam. Souche cespiteuse. KR. F. rubra L. Souche traçante. C. C. Feuilles toutes enroulées ou sétacées. F. ovina L. Feuilles capillaires, enroulées-cylin- driques et scabres. C. Var. tenuifolia. Fleurs mutiques en panicule pauciflore et toujours contractée. k F. duriuscula L. Feuilles carénées un peu enroulées et lisses. CC. Var. glauca. Plante glauque. SEcr. II. Vulpia. — Arête plus longue que les fleurs. Pédicelles renflés de la base au sommet. ©). F. ciiata Pers. Glamelles bordées de longs cüls blancs. AR. Calc. F. uniglumis Sol. Glume infér. presque nulle ou 8 à 19 fois plus courte que la supér. aristée. R. Sables. mo un F. sciuroides Roth. Glume infér. égalant la moitié de la supér. CC. Var. pseudomyuros. Panicule allongée et rapprochée de la feuille supér. Glume infér. égalant le tiers de la supér. Secr. III. Scleropoa. — Panicule raide à rameaux courts et épais. F. rigida Kunth. Petite plante de 1 à 2 décim. C. 470. MoziniA. M. cærulla Mœnch. Épillets petits, souvent violets, en panicule dressée. Bois humides. C. 471. GLYCERIA. G. spectabilis M. K. Tige dressée ; épillets courts en panicule étalée en tous sens. C. G. fluitans R. Br. Épillets allongés en panicule étroite unilatérale. CC. Var. plicata Fr. Panicule pyramidale plus fournie. 472. CATABROSA. C. aquatica P. B. Épilléts petits en panicule très rameuse, dressée puis étalée. AR. 473. Poa. SECT. I. Eragrostis. — Glumelle infér. caduque, la supér. entière, persistant seule après la floraison. P. megastachya Kœl. Épillets de 15 à 20 fleurs obtuses. AC. P. pilosa L. Rameaux de la panicule verticillés par 4 à 5. C. SECT. II. Eupoa. — Glumelle supér. émarginée ; l’infér. garnie à sa base sur la carène et souvent aux bords de poils soyeux. A. Ligule supér. ovale ou oblongue. Souche cespiteuse. P. bulbosa L. Tige renflée en bulbe. Fleurs souvent vivipares. C. ( P. annua L. Panicule à rameaux solitaires ou gémi- nés. ©. CC. P. serotina Ehr. Glumelle infér. à nervures latérales peu saillantes et glabres. RR. — 123 — P. trivialis L. Glumelle à 5 nervures saillantes. Gaine des feuilles rude. CC. B. Ligule courte et tronquée. P. nemorals L. Souche cespiteuse non traçante. CC. P. compressa L. Glumelle infér. à nervures latérales indistinctes et glabres. AC. P. pratensis L. Glumelle infér. à 5 nervures sail- lantes, velues ou pubérulentes. C. Var. anceps. Tige comprimée. Var. angustifolia. Feuil. radic. étroites enroulées. 474. Briza. B. media L. Ligule #onquée. Vivace. CC. Prés. B. minor L. Caryopse suborbiculaire. ©. C. Champs. 475. NarDus. à N. stricta L. Touffes entourées par les gaines persis- tantes des anciennes feuilles. AR. Landes. 476. NARDURUS. N. tenuiflorus Bois. Épi unilatéral ; glume infér. uninerviée. AR. N. Poa Boiss. Glumes presque égales trinerviées. C. Var. tenuiculus. F1. aristées. 477. GAUDINIA. G. fragils P.B. Rachis de l’épi articulé-fragile. C. 478. Lorrun. L. perenne L. Fleurs /ancéolées. Plante ordt. vivace et alors munie de touffes de feuilles radicales. CC. Var. ltalicum. Feuil. radic. enroulées. Fleurs aristées. Var. rigidum. ©). Épillets pauciflores. Glume obtuse. Var. multifiorum. Q©). Épillets multiflores, aristés. L. temulentum L. Fleurs ovales-oblongues, renflées à maturité. AC. Var. linicola. Épi court. Champs de lin. Var. arvense. Arête nulle ou fine flexueuse. CR CURE 479. BRACHYPODIUM. B. pinnatum P. B. Souche téraçante ; gaines des feuilles ordt. glabres. Arête courte. AC. Calc. B. silvaticum P. B. Gaïnes des feuilles velues. C. 480. AGROPYRUM. A. caninum R. S. Souche cespiteuse; arêtes plus longues que les fleurs. C. À. repens L. Souche traçante. Var. pungens. Nervures de la feuille épaisses et contigués. Var. campestre. Glumelle infér. obtuse ou mucronée. 481. HoRDEUM. H. murinum L. Glumes ciiées. Feuilles g/abres. CC. H. secalinum Schreb. Gaïne des feuil. infér. velue. C. Fam. (101). Typhacées. 482. Tvpxa. Épis cylindriques. Fruits soyeux. 483. SPARGANIUM. Capitules globuleux. Fruits écail- leux. 482. TyPHA. T. angustifolia L. Épis mâle et femelle déstants. Stigmate linéaire. AC. T. latifolia L. Axe de l’épi femelle dépourvu de soies. C. Car. var. Glaucescence et largeur des feuilles. 483. SPARGANIUM. S. ramosum Huds. Inflorescence à rameaux secon- daires allongés. C. S. simplex Huds. Feuil. riquètres à la base ; stigmate linéaire. AC. S. minimum Fr. Plante grêle, submergée. RR. Fam. (102). Aracées. 484. ARUM. A. Ttalicum Mill. Spadice jaunâtre à partie renflée — 125 — aussi longue que la partie amincie qui la supporte. CC. A. maculatum L. Spadice et spathe plus ou moins tachés de violet. C. Fam. (103). Acoroïdées. 485. ACORUS. A. Calamus L. Rhizôme aromatique. R. (Spont ?) Fam. (104). Lemnacées. 486. LEMNA. Secr. I. Eulemna. — Fronde à une ou plusieurs fibres radicales. L. trisulca L. Frondes submergées, groupées, trans- lucides. C. L. polyrrhiza L. Plusieurs fibres radicales ; fronde rougeâtre en dessous. AC. L. gibba L. Fronde ren/flée-spongieuse en dessous. C. L. minor L. Fronde aplanie sur les deux faces. CC. Sec. II. Wolffia. — Fronde sans fibre radicale. L. arrhiza L. Fronde trés petite, subglobuleuse. R. Fam. (105). Naïadées. 487. Nalas. N. major Roth. Fleurs dioïques, solitaires. Anthère à 4 loges. C. N. minor All. Monoïque. Feuilles linéaires à gaine denticulée. AR. Fam. (106). Potamées. 488. ZANNICHELLIA. Fleurs solitaires ou géminées, monoïques. À étam. 489. PoramoGeron. Fleurs groupées, hermaphr., 4 étam. — 126 — 488. ZANNICHELLIA. Z. palustris Wild. Étam. longues, anthères à 4 loges. K. Z. repens Bonng. Anthères à 2 loges. C. 489. POTAMOGETON. SECT. I. Coleophyllum. — Base des feuil. enroulée en longue gaîne. P. pectinatus L. Feuilles linéaires fistuleuses. AR. SECT. IL. Enanthiophyllum. — Feuilles toutes opposées. P. densus L. Feuilles rapprochées, ovales. AC. Var. serratus. Feuilles oblongues, espacées. SECr. III. Eupotamogeton. — Feuil. (toutes ou en partie) alternes. A. Feuilles sessiles ou seulement atténuées. a. Feuilles exactement linéaires, non crispées. P. acutifolius Link. Tige comprimée-ailée. AR. P. tuberculatus Ten. Carpelles à dos crénelé, et munis d’une dent sur l’autre face. R. P. pusillus L. Feuilles larges d’un millim. AC. Var. Berchtoldi. Feuil. larges d'environ 2 millim. b. Feuilles élargies et souvent crispées. P. perfoliatus L. Feuilles amplexicaules paraissant perfoliées. AC. P. crispus L. Carpelles acuminés en long bec; feuil. étroites fortement crispées. C. P. lucens L. Feuil. larges de plus d’un centim., lui- santes, C. B. Feuilles (au moins les supér.) à pétiole distinct. P. heterophyllus DC. Feuil. infér. sessi/es. AR. P. plantagineus Ducros. Toutes les feuilles submer- gées et membraneuses translucides. KR. P. polygonifolius Pourr. Épi grêle, mais serré ; car- pelles rougissant à la fin. AR. P. natans L. Épi épais, inégal. CC. Var. fluitans. Feuilles supér. atténuées aux deux bouts. — 127 — Fam. (107). Joncaginées. 490. TRIGLOCHIN. T. palustre L. Fleurs petites, verdâtres, en longue grappe effilée spiciforme. R. Tourbières. Fam. (108). Butomées. 491. BuTomus. B. umbellatus L. Fleurs roses en inflorescence om- belliforme terminale. CG. Marais. Fam. (109). Alismacées. 492. AuismA. F1. hermaphr. à 6 étamines. 493. SacrrTaRIA. Fl. monoïques. Étam. nombreuses. 492. ALISMA. Secr. I. Eualisma. — Carpelles nombreux, monospermes et libres. A. Plantago L. Carpelles comprimés et contiqus par les côtés, verticillés en tête triédrique ; fleurs pe- tites. C. Var. lanceolatum. Feuil. étroites non cordées à la base. A. natans L. Carpelles 6-15 en cercle; feuil. supér. flottantes à limbe elliptique. C. A. ranunculoides. L. Carpelles nombreux, en têle globuleuse. AR. Var. repens Cav. Tiges latérales couchées, radicantes et florifères. SECt. Il. Damasonium. — Carpelles 6-8, dispermes et soudés à la base. A. Damasonium L. Fleurs en 1 ou plusieurs verti- cilles. C. 493. SAGITTARIA. S. sagithfolia L. Feuilles à limbe sagitté. (Rarement sans limbe dans les formes submergées.) — 128 — Fam. (110). Hydrocharidées. 494. HeLopEA. Feuilles verticillées par 3 (rart. 2-4). 495. SrraTioTEs. Feuilles submergées, en rosette 1m- “briquée. ù 496. HyprocHaris. Feuil. pétiolées, à limbe étalé sur l’eau. 49%. HELODEA. E. canadensis Mich. Feuilles ovales, sessiles, uniner- viées ; tube du périanthe de longueur variable suivant la profondeur de l’eau. C. 495. STRATIOTES. S. aloides L. Feuilles ensiformes épineuses. R. 496. HypROCHARIS. H. Morsus ranæ L. Périanthe à 8 divis. extérieures herbacées et 3 intér. pétaloïdes. C. DEUXIÈME EMBRANCHEMENT. - GYMNOSPERMES Carpelles ouverts, réduits à des écailles sans stig- mate, réunis en cône et portant les ovules sur leur face interne ; pollen pluricellulaire germant directement sur l’ovule. Fam. (111). Conifères. 497. JUNIPERUS. J, communis L. Feuilles aciculées, piquantes. Cônes globuleux devenant noirs. C. Bois. OBSERVATION. — Les espèces marquées d’un astérisque * indiquées ou trouvées autrefois en Anjou n’y ont pas été revues depuis long- temps. A constater de nouveau. Abbé Hy. COUTUMES ET INSTITUTIONS DE L’'ANJOU ET DU MAINE PAR M. BEAUTEMPS-BEAUPRÉ La première condition nécessaire des études histo- riques c’est la connaissance des sources. Mais trop souvent des textes fautifs et inexacts ont seuls élé mis aux mains des érudits; que d'erreurs eussent été évitées, que de systèmes factices ne reposant que sur de mauvaises lectures des documents historiques n’eussent jamais vu le jour, si les auteurs avaient pos- . sédé des textes exacts! Le point de départ de toute recherche sérieuse est donc la possession d’un bon texte. À notre époque cette vérité a élé comprise et de nombreuses publications de documents historiques ont paru depuis cinquante ans, spécialement en ce qui con- cerne l’histoire du droit. La Loë Salique de Pardessus, les Formules de l'époque franque de M. E. de Rozière, le Polyptique d’Irminon et le Cartulaire de Saint-Père de Chartres de Guérard, les Établissements de Saint- SOC. D’AG. 9 — 130 — Louis de M. P. Viollet, en cours de publication, les Cou- tumes de 'Échiquier de Normandie, celles de Bour- gogne, celles de Picardie de M. Marnier, le vieux coutumier poitevin et les coutumes de Vermandois de M. Beautemps-Beaupré et bien d’autres documents du même genre, publiés de nos jours, sont des textes indis- pensables pour quiconque veut étudier sérieusement l’histoire du droit. Malheureusement en France il n’est pas donné à tous de pouvoir fouiller nos vieux documents. La centralisa- ion que l’Europe nous envie, dit-on, a réuni en un lieu unique les richesses historiques de la France entière. Voulez-vous connaître l’histoire de votre pro- vince, de votre ville, de votre village et même du plus modeste domaine, vous serez bien heureux si vous trouvez en province quelque document à votre portée. Vous cherchez un aveu rendu il y a trois cents ans pour une rente de deux sous ou le quart d’un chapon à un châtelain de village par le possesseur du plus pauvre des manoirs où ne veut plus se loger un fermier d'aujourd'hui, allez le chercher à Paris; les pièces de cette nature font partie des archives de la Chambre des comples, réunies aux archives de France. Vous voulez étudier les dispositions de nos anciennes coutumes, allez faire vos recherches dans la capitale intellectuelle du monde, nos bibliothèques possèdent rarement les manuscrits des coutumes provinciales, Nous sommes en province les déshérités de la science ; quand on ne peut habiter Paris il faut à peu près renoncer à l'étude des sources historiques même locales et en faire son deuil. Toute lumière émane de Paris. L’Anjou a subi — 131 — cette loi comme les autres contrées ; c’est à Paris qu’on trouve la plupart des documents qui nous concernent, ceux toutefois que les Anglais ont daigné ne pas nous enlever. Bienheureux sommes-nous quand nos cartu- laires et nos chroniques ne sont pas allés au delà de la Manche enrichir le British Museum ou la bibliothèque de quelque puissant lord. L’Anjou a été le siège d’une université fameuse où étude du droit a fleuri pendant plusieurs siècles. Sa coutume dès le xrr1e siècle a été l’objet de commentaires nombreux et d’études approfondies; elle a servi de lype au rédacteur des Établissements de Saint-Louis. Cependant nous ne possédons à Angers que deux ma- nuscrits de la rédaction du xv° siècle, faite par. les ordres du roi René’. Les manuscrits plus anciens sont à Paris, à Rome, à Londres, en Allemagne. Nous wavons même pas celui de Claude Liger, magistrat _angevin et le premier commentateur du droit de notre province. M. Beautemps-Beaupré, vice-président au tribunal de la Seine, a entrepris la publication des textes de nos anciennes coutumes antérieures au xvie siècle. Il a laissé de côté avec raison la rédaction de 1508, souvent imprimée et qui se trouve dans le Coutumier de Richebourg ?. Il nous donne douze textes la plupart inédits, sauf celui de la coutume de 1463 qui a eu plusieurs éditions, mais dont il reste fort peu ? Bibliothèque de la ville d'Angers. ? La Cour d'appel possède un beau manuscrit de la rédaction officielle de 1508. C’est la copie authentique déposée au greffe de la sénéchaussée et portant la signature des commissaires du Parlement et du greffier de la sénéchaussée. — 132 — d'exemplaires. Nous pourrons donc, grâce à cette publi- cation, connaître enfin l’histoire du droit en Anjou, depuis le xrrr° siècle jusqu’à l’abolition des coutumes. Le premier texte que nous donne M. Beautemps- Beaupré' a été publié déjà en 1853, par M. Marnier, bibliothécaire de l’ordre des avocats à la Cour de Paris, d’après un manuscrit de la Bibliothèque nationale *. Ce texte, que M. Marnier considérait comme pouvant tenir lieu de supplément ou de suite aux Établissements de Saint-Louis, est intitulé : Compilatio de usibus et con- suetudinibus Andegaviæ ; maïs le titre seul est en latin, le texte est écrit en vieux français du xim° siècle. Il comprend 113 articles seulement ; c’est le moins long de tous les documents angevins du même genre que nous possédions. Il serait intéressant de savoir à quelle époque il a été rédigé. M. Lafferrière considérait la Compilatio comme la plus ancienne coutume d’Anjou connue et pensait qu’elle avait servi de type au rédac- teur des Établissements de Saint-Louis, qui a emprunté une grande partie de son livre aux coutumes d'Anjou *. Mais l'opinion de Lafferrière a été refutée par M. Beau- temps-Beaupré et par M. Viollet. Ce dernier pense même que la Compilatio est bien postérieure à la rédaction des Établissements *. M. Beautemps-Beaupré, sans se prononcer d’une manière aussi formelle, . 1 Tome Ier, p. 43 et suiv. texte A. ? Supplém. franç., n°5 254-29. Ce texte des Usages d'Anjou fait suite à l’une des rédactions des Établissements de Saint- Louis. 3 Hist. du droit français, t. VI, p. 132, 134. # Les Sources des Établissements de Saint-Louis, par M. P. Viollet, p. 38. — 132 — , déclare qu’il est impossible de fixer l’époque de sa rédaction. Pour ma part, je suis porté à croire ce texte fort ancien. Il y est fait mention non seulement des Usages d'Anjou, de Saumur et du Maine, mais aussi de ceux de Touraine, de Poitou, de Loudunais ; ce qui nous reporte à une époque où ces provinces élaient sou- mises à la même juridiction et obéissaient aux mêmes usages. Il faut remarquer en outre qu’il y est fait à chaque instant mention des droits du Roi et même de ceux de la Reine, de la cour du roi, de lost du roi, de la saisine du roi, de la main du roi, du commandement du roi, etc., tandis qu’il n’y est pas fait la moindre allusion au duc ou au comte d'Anjou. Les barons ange- vins à cette époque relevaient directement de la Cou- ronne. J'en conclus que la Compilatio doit avoir été rédigée en un temps où l’Anjou et les provinces voI- sines faisaient partie du domaine royal. Ceci nous reporterait à la première moitié du x siècle ; à une date antérieure à 1246, époque de la cession de l’Anjou en apanage par saint Louis à son frère Charles. Les rédactions postérieures à la cession de l’Anjou en apa- nage distinguent au contraire entre le roi et le duc ou comte d'Anjou. Nous lisons en effet dans la rédaction de 1411 : « Pour la seconde nous traiterons des cas desquelz le prince, videlicet le duc d'Anjou et comte du Maine, est préalable sur les subgetz de ses vassaux, etc. » « … Semblablement l'exécution des sentences, juge- ments ou appointemens donnez et prononcez en la court du prince que les livres coustumes anciennement — 134 — escriptz appellent la court du Roy, pour ce que ledit duché et conté estoient anciennement quant ses esta- blissemens furent faiz ès-mains du Roy nostre sire, et la congnoissance de ce appartient aux juges et officiers du prince seulx pour le tout‘. » Je remarque aussi la brièveté de la Compilatio. Or il est à remarquer que plus le texte des coutumes est récent et plus il s’allonge et se grossit, grâce aux gloses et aux décisions judiciaires que l’on y insère successi- vement. Si l’on croit ne pas pouvoir faire remonter aussi haut la rédaction de notre document, il faudrait la faire descendre jusqu’au xive siècle, à l’époque de la seconde réunion de l’Anjou à la Couronne sous les Valois. Mais cette opinion ne me paraît guëre accep- table, car alors l'étude du droit avait pris en Anjou une trop grande importance pour qu’un praticien pût se contenter d’un aussi mince abrégé de la coutume ; tous les textes du x1ve siècle présentent au contraire un tout autre développement que la Compilatio. L'emploi du duel judiciaire auquel il est fait de fréquentes allu- sions dans ce document, est encore une présomption en faveur de son ancienneté. On sait que le duel judiciaire a.êté aboli dans toute l'étendue du domaine royal par une ordonnance du roi de l’année 1960, qui figure dans les Établissements de Saint-Louis. M. Viollet a démon- tré d’autre part que la Compilatio n’est pas le texte qui a servi de type au rédacteur des Établissements. Celui- ci a travaillé sur un texte plus complet. Il me semble donc que cette Compilaho n’est, qu’un premier embryon ‘ Beautemps-Beaupré, t. Ier, p. 402, 408. — 135 — de la coutume d’Anjou, développé postérieurement par les praticiens. Toutefois le texte a été transcrit à une époque postérieure à la rédaction des Établissements, puisqu'il se trouve dans un même manuscrit à la suite de ce document ; mais il peut être la copie d’un texle plus ancien‘. | En ce qui concerne les Établissements de Saint- Louis, M. Beautemps-Beaupré pense, comme M. Viollet, que cet ouvrage n’est qu’une compilation, une œuvre privée, et non une ordonnance royale, compilation dont une grande parlie a élé extraite des anciennes cou- tumes d'Anjou et du Maine; mais qu’il est impossible de fixer l’époque à laquelle a été rédigée cette première coutume d’Anjou *. Le second texte publié par M. Beautemps-Beaupré est ainsi intitulé : Ce sunt les coustumes d'Anyou et dou Maigne*. Il reproduit deux manuscrits, l’un de la bibliothèque de l’Arsenal, qui d’après le caractère de l'écriture remonte au xive siècle ou même aux der- nières années du xtme, l’autre de la Bibliothèque ‘ M. Viollet dans son troisième volume des Établissements de Saint-Louis, émet l'opinion suivante : la Compilatio serait posté- rieure à 1313, parce que l'art. 55 de cette coutume renferme une disposition sur les créances dues aux Juifs par les chré- tiens, qui semble empruntée à une ordonnance royale du 28 juillet 1315. Mais cette disposition pourrait peut-être avoir été empruntée à une autre ordonnance plus ancienne de l'année 1234. La question reste donc douteuse. 2 Tome Ier, p. 40. — M. Viollet, dans son troisième volume des Élablissements de Saint-Louis, nous donne cette première coutume d'Anjou reconstituée. 8 Tome Ie", p. 62 et suiv., texte B. — 136 — nationale, de la fin du xive siècle‘. Ce dernier manus- crit a appartenu à Brodeau, dont le nom est écrit deux fois sur une feuille de garde. Il est antérieur à 1391, car il ne fait aucune mention des changements opérés dans la coutume d'Anjou à cette époque. Le texte tel que le publie M. Beautemps-Beaupré comprend cent soixante-dix-sept articles beaucoup plus longs que ceux de la Compilatio. Tandis que celle-ci n’occupe que dix- neuf pages de l’édition de M. Beautemps-Beaupré, le second texte en emploie cent quatorze. Il est donc beau- coup plus complet et atteste de la part du rédacteur des études juridiques plus sérieuses et plus appro- fondies. Suivent les Coustumes qlosées d'Anjou et du Maine”, publiées d’après un manuscrit de la Bibliothèque natio- _nale, d’une écriture de la fin du xive siècle ou du commencement du xve,:exécuté suivant M. Beau- temps-Beaupré entre les années 1391 et 1411°. La première de ces deux dates est celle de modifications importantes apportées par les Grands jours d'Anjou et du Maine à la procédure civile le 30 octobre 1391 ; la seconde est celle d’une rédaction officielle des coutumes qui figure aussi dans la vaste publication de notre auteur. Le texte commence par ces mots : C& com- mencent les coustumes glosées d'Anjou et du Maine. I] ? Bibl. de l’Arsenal, jurispr., n° 427. — Bibl. nat., fonds franc. 5359. ? Beautemps-Beaupré, t. I, p. 177 et suiv., texte C. # Bibl. nat., fonds franç., n° 18,922; anc. fonds Saint-Germain, Harlay, n° 424. — 137 — comprend cent soixante-six articles, presque tous - accompagnés d’une glose ou commentaire, quelquefois assez long et occupe dans l’édition de M. Beautemps- Beaupré cent soixante-quinze pages. Le travail des jurisconsultes angevins était donc incessant et l’on voit par ce document que la coutume d’Anjou était l’objet de leurs constantes préoccupations et qu’ils s’efforçaient de l’enrichir tant avec les décisions rendues par les tribunaux de l’époque qu’à l’aide des recherches qu'ils pouvaient faire sur le droit romain et le droit cano- . nique. Nous sommes loin déjà de la rédaction si courte et si sèche de la Compilatio de usibus Ande- gaviæ. Le texte D est beaucoup plus court. M. Beautemps- Beaupré l’a publié’ d’après deux documents anciens, lun qui appartient aux archives de France ?, et l’autre qui se trouve à la suite du manuscrit des coutumes glosées ci-dessus cité. Le premier est intitulé : Correc- cions de coustumes et usaiges d’Anjou et du Maine, et commence ainsi : « Cy après s’ensuyvent les correccions faictes ès Grans jours d'Anjou, du Maine et de Loudunoys, tenuz à Angiers l’an de grâce mil CCCIIIF® et onze, des stilles et observances, etc. » Ces corrections comprenant vingt-sept articles ont été faites de l’avis et consentement unanime des prélats et autres gens d'église, nobles, avocats, procureurs, bourgeois et autres assistants aux Grands jours. Le 1 Tom. Ier, p. 357 et suiv. ? Archives nat., P. 13341, fo 17 et suiv.; P. 1334?, f° 20 et suiv. : des second document ne comprend que vingt-deux articles ; il commence par un intitulé à peu près semblable au précédent et porte la même date. Ces intitulés sont curieux à lire, car ils nous montrent comment et par qui s’exerçait alors le pouvoir législatif. Les Grands jours avaient pour objet la réformation des abus. On y réformait en appel les causes mal jugées par les juri- dictions inférieures, lorsque par leur importance elles rentraient dans la compétence de l’assemblée des Grands Jours. On y réformait aussi les coutumes et usages locaux. C’était un parlement au petit pied, composé des prélats, abbés, nobles ou possesseurs de ficfs ayant droit de justice, praticiens sachant le droit et même des bourgeois notables. On ne saurait nier que des assem- blées ainsi composées présentassent des garanties sé- rieuses de capacité et d’impartialité. Il ne faut pas croire en effet que les coutumes res- tassent stationnaires ; car nous voyons pendant le cours du xive siècle plusieurs réformations successives de celle d'Anjou. Peu d’années après la réformation de 1391 dont nous venons de parler, il en intervenait une nouvelle. Le cinquième texte que donne M. Beautemps-Beau- pré ‘ commence en effet par ces mots : « Ce sont les coustumes et stiles observez et gardez ès pays d'Anjou et de Maine, faiz aux Grans jours d’Anjou par les gens du Conseil desdiz pays en l’an mil Ile et onze. Les- quelles se divisent par seize parties ainsi que sera déclairé cy-après au long. » Ce texte publié d’après un ! Tom. Ier, p. 375 et suiv., texte E. NE | RC manuscrit de la Cour de cassation‘, est une coutume : d'Anjou complète, divisée en seize parties et compre- nant trois cent cinquante articles. Il n’emploie pas moins de deux cent vingt-deux pages dans l'édition de M. Beautemps-Beaupré. On peut le considérer comme constituant la première rédaction officielle de la cou- tume d'Anjou. Toutefois le manuscrit est plus récent que la réforme de 1411, car on y trouve quelques déci- sions postérieures à cette date. À cette même réforme se référent deux autres ma- nuscrits, l’un de la bibliothèque du Vatican, l’autre de la bibliothèque de Tours, DÉSERT de l’abbaye de Marmoutier *. La rédaction du manuscrit ottobonien du Vatican se place vers 1440, d'après M. Beautemps-Beaupré. On y cite en effet une décision de 1436 et d’autre part il renferme le texte doni le roi René a ordonné la réfor- mation en 1458. Ce manuscrit porte pour titre : « Cy sont les coustumes d'Anjou et du Maine et aultres stilles et usages de court laye. » Il contient de nom- breux extraits du Grand Coustumier de France. M. Beau- temps-Beaupré n’a reproduit que les passages qui con- cernent la coutume d’Anjou et a laissé de côté avec raison ce qui lui est étranger. La partie publiée du document n’en renferme pas moins soixante-dix neuf pages dans cette édition. L’auteur y a joint des for- 1 M. Beautemps-Beaupré pense qu'il provient de l’ancienne bibliothèque des avocats du Parlement de Paris. 2 Bibl. de Tours, n° 674 ; olim Marmoutier, n° 460. — Vatican ms. ottobonien, 2962. — 140 — mules d'hommage lige et d'hommage simple extraites du manuscrit de Tours’. La Bibliothèque nationale possède un manuscrit fort curieux pour l’histoire du droit en Anjou. C’est une coutume rédigée par Claude Liger, jurisconsulte angevin du xve siècle *. L'origine en est attestée par le passage suivant de Chopin : « Nobis et alter est præ manibus earum consuetudinum liber privalim exara- tus, anno 1437 a Ligerio andensi tum suppræfecto ; quem nobis utendum codicem dedit Joh. Louetus a paterna bibliotheca receptum, Clem. Loueti regii nuper Andium propræloris. Libri titulus est : ce sont les cous- tumes d'Anjou et du Maine intitulées selon les, rubriches de code. » Chopin et Claude-Gabriel Pocquet de Livonnière ont souvent cité l’ouvrage de Liger qui n’est pas une simple couture. mais un véritable ouvrage de droit, une codi- fication faite suivant l’ordre adopté dans le droit romain. C’est un travail scientifique qui nous fait con- naître quelle était alors la méthode d’enseignement du droit usitée dans l’Université d'Angers. Qu’à ce sujet il nous soit permis de rappeler les travaux si savants et si solides de notre regretté collègue M. de Lens, sur l’ancienne Université d'Angers et sur les professeurs de ce célèbre établissement‘. Il s'était très spécialement 1 Beautemps-Beaupré, tome IV, p. 44-121 ; texte K. ? Biblioth. nat., fonds franc., n° 11,865 ; anc. suppl. franc., n° 458. 3 Facultés, collèges, et professeurs de l'Université d'Angers, du XVe siècle à la Révolution française, par L. de Lens, inspecteur honoraire d’Académie, ouvrage publié dans la Revue d'Anjou, année 1875 et suiv. — 141 — occupé de Claude Liger et lui a consacré quelques pages fort intéressantes. L'ouvrage de Liger n’avait jamais été imprimé jusqu’à ce jour. Il en a jadis existé deux exemplaires, l’un qui a appartenu à Pocquet de Livonnière et l’autre au chancelier d’Aguesseau. Celui que possède aujourd'hui la Bibliothèque nationale est une copie renfermant quelques lacunes. C’est cette copie fort heureusement conservée qui fait l’objet de la présente publication ‘. Elle est fort considérable, car elle ne comprend pas moins de 1553 articles et remplit le second volume en entier de l’édition de M. Beau- temps-Beaupré, de 563 pages. Notre auteur, dans un passage qui montre avec quel soin il travaille ses pu- blications, complète une lacune que présente Le manus- crit de la Bibliothèque nationale, avec des notes empruntées à un manuscrit de la bibliothèque d’An- gers, ayant appartenu à Claude Pocquet de Livon- nière et que celui-ci déclare avoir prises dans Liger. Les deux documents suivants sont des styles ou traités de procédure. L’un est extrait du manuscrit de la Cour de cassation déjà cité et paraît avoir été rédigé entre les années 1437 et 1458, il ést inédit et ne paraît pas avoir été connu des réformateurs de la coutume en 1463. Il comprend cent neuf articles, suivis de for- mules de foi et hommage à rendre par un vassal à son suzerain : « Vous congnoissez estre homme de foy simple à monseigneur qui cy est, au regard de telle sa terre, ou de tel son chastel, pour raison de telles choses, et luy 1 Tome Il, texte F. — 142 — promectez par la foy et serment de vostre corps que d’ores en avant foy et loyaulté vous luy gar- derez, etc. !. » Le second style publié pas M. Beautemps-Beaupré est extrait d'un manuscrit du British Museum”°; il a appartenu à Pocquet de Livonnière qui l’a annoté de sa main. M. Beautemps-Beaupré pense que ce document a une origine officielle et n’est pas l’œuvre privée d’un praticien. Il se trouvait en effet, d’après une note de Pocquet de Livonniére, à la suite de l'original de la coutume de 1463 et comme en faisant partie. Il com- mence ainsi : « S’ensuyvent les usaiges et stilles du pais d'Anjou. » Il se divise en trente chapitres, com- prenant cent soixante-un articles. C’est un vrai code de procédure remontant au xve siècle. Il paraît avoir fait quelques emprunts au Style du Parlement et au Grand Coustumier de France. Le troisième volume de la vaste publication de M. Beautemps-Beaupré est presque en entier consacré à la reproduction de la coutume d’Anjou réformée sous le roi René et par ses ordres. Le texte même de cette coutume est considérable ; il est divisé en seize parties. et comprend quatre cent un articles faisant en tout trois cent quarante-une pages ; c'est un véritable code civil “. M. Beautemps-Beaupré a fait précéder ce texte d’une fort intéressante introduction. Il résulte des recherches de notre savant auteur que le manuscrit original de 1 Beautemps-Beaupré, tom. III, texte G. 2 British Museum, Harl. 4413. Tome III, p. 69 et suiv., texte H. * Tome III, texte I. — 143 — cette réforme faisait partie des archives de la Chambre des comples d’Anjou transportées à Paris par ordre de Charles VIIL. Ce précieux manuscrit ne se retrouve plus aujourd’hui ; M. Beautemps-Beaupré croit.qu’il a disparu dans un incendie en 1737. Fort heureusement il en existe plusieurs copies manuscrites et quelques éditions imprimées. La bibliothèque d’Angers possède deux manuscrits de cette coutume, dont l’un a été annoté par Pocquet de Livonnière. Deux autres ma- nuscrits de la même coutume sont au British Museum; la Bibliothèque nationale en possède un et la biblio- thèque de Halle, un autre; ce dernier provient de P. Pithou ?. Quant aux exemplaires imprimés ils sont au nombre de sept appartenant à divers amateurs et savants. L’un d’eux provient de la bibliothèque de M. Chedeau de Saumur, un autre appartient à M. E. de Rozière, sénateur et membre de l’Institut. M. Beau- temps-Beaupré mentionne aussi divers autres manus- crits qui ont disparu et notamment celui de Claude Ménard qu'avait consulté et collationné Pocquet de Livonnière. Notre auteur précise la dale de la rédaction de la coutume réformée d'Anjou. Elle est du mois de janvier 1469 (ancien style), ce qui correspond au mois de janvier 1463 de notre manière actuelle de compler les années*. C’est par erreur que quelques écrivains ‘ Bibl. de la ville d'Angers ; ms. 333 et 334. 2 British Museum ; ms. Harleian, 4413 ; additional, ms. 23,969. — Bibl. nat., fonds franç., nouv. acq. 4172. — Bibl. de Halle, * cod. Pon. hist. 31, in-8° (Beautemps-Beaupré, tom. IT, p. 115- 128). 3 Beautemps-Beaupré, tom. III, p. 150-151, — 144 — avaient pensé que la date de 1462 était ramenée au style nouveau ; il n’en est rien. La savante introduction que M. Beautemps-Beaupré a mise en tête de cette rédaction de la coutume est com- plétée par des pièces fort curieuses qu’il a trouvées aux archives de France et qu’il publie aujourd’hui ’, ce sont : Des lettres patentes de René, roi de Sicile et de Jéru- salem, duc d'Anjou, du 6 octobre 1468, par lesquelles il institue la commission chargée de réformer les cou- tumes du pays d'Anjou”; Une lettre de: René au sénéchal d'Anjou, touchant la réformation des coutumes, usages et sliles du pays d'Anjou du 21 février 1459 (vieux style) °. On voit dans ce document que le roi René tenait à ce qu’on lui remît un beau volume de la nouvelle coutume : « Et incontinent que ledit livre sera fait grosse en parchemin en beau volume relyé et couvert d’un veloux cramoisy, à beaux cloux bien dorés le nous envoyez par deça pour le recevoir et auctoriser, comme il appartient. » René entrait dans tous les détails, car on voit parmi les pièces un devis du 27 août 1462, relatif à « l’ou- vrage de menuyserie qui est à faire au palais d'Angers pour tenir les Grands jours *. » Suit une convocation pour les Grands jours adressée 1 Tom. III, p. 155 et suiv. ? Arch. nat. P. 13347, fo 13, Vo. 8 Arch. nat. P. 13347, fo 105, Vo. k Arch. nat. P. 13345, f° 4, Ro. — 145 — à l’abbé de la Boessière. On peut induire de cette pièce que les autres convocations étaient rédigées à peu près dans les mêmes termes". Puis viennent les lettres patentes de confirmation desdites coutumes de janvier 1462 (vieux style), d’après un manuscrit du British Museum”. Toutes ces pièces sont fort intéressantes pour l’his- toire d'Anjou, parce qu’elles nous montrent comment il a été procédé à la réforme de la coutume et par quelles personnes. D’autres pièces enfin publiées par M. Beautemps- Beaupré sont aussi fort curieuses à un autre point de vue, Je veux parler de la question financière. L’escar- celle du bon roi n’était guère bien garnie, car on voit que pour faire face aux dépenses causées par la tenue des Grands jours, il comptait sur un droit de rachat dû par Mme de Ternay et non encore payé. L’épargne du roi de Sicile était vide et au Meu de faire fonds sur ses économies, il devait attendre des recouvrements pour solder des dépenses urgentes. Ce n’est pas d’aujour- d’hui que les gouvernements escomptent j’avenir. Le document suivant a pour titre : « Ce sont les cous- « tumes et usaiges des pays d'Anjou et du Maine en « briève compilation mises, divisées en vingt parties « principales par aucuns juges et conseillers desdits « pays *. » Bien que l’auteur lui donne le titre de briéve 1 D. Housseau, tom. IX, n° 3989; arch. de l’abbaye de la Boessière. ? British Museum, ms. Harl. 4413. Copie de l'écriture de Claude-Gabriel Pocquet de Livonnière. 3 Tome IV, p. 125 et suiv., texte L. SOC. D’AG. 10 — 146 — compilation, cette rédaction n’en comprend pas moins quatre cent soixante-neuf articles en deux cent douze pages, sans compter quatorze pages de supplément, dont les articles ne sont pas numérotés. M. Beautemps- Beaupré la reproduit d’après deux manuscrits français, l’un de la Bibliothèque nationale, l’autre de celle de Arsenal *. Ce texte a été rédigé postérieurement à la réforma- tion de 1462. Ce qui le prouve, c’est d’abord le titre de duc donné au souverain féodal de Anjou; or, ce fief n’a été érigé en duché qu’en 1460 ; c’est qu’en second lieu on y cite plusieurs fois la coutume corrigée, c’est- à-dire celle de 1463. On y voit aussi que le rédacteur a fait des emprunts au Grand Coustumier, au Livre de Parlement et à d'anciennes notes dont les praticiens enrichissaient leurs manuscrits. Le livre en question est donc un ouvrage de droit, un commentaire abrégé et non une rédaction officielle de la Coutume. Il paraît avoir été connu par Du Pineau qui lui a emprunté quelques citations. Détail curieux : l’un des anciens possesseurs du manuscrit de l’Arsenal a laissé sur une feuille de garde le quatrain suivant empreint du sel gaulois si cher aux vieux écrivains français : Bonne terre mauvais chemin, Bon avocat mauvais voisin, Bonne chèvre mauvaise bête, Bonne femme mauvaise tête. Le douzième et dernier texte est un style qui porte 1 Bibl. nat., fonds franc., n° 25,240. — Bibl. de l’Arsenal, jurispr. franç., 1272. — 147 — pour titre : « Les stilles et usages de procéder en la « court laye ès pays d'Anjou et de Maine nouvellement € corrigez par l'ordonnance des troys estats desditz « pays, lesquelz ont été publiez ès principaulz sièges « el juridictions desditz pais et commandé estre gardez «et observez selon leur forme et teneur » ‘. C’est donc un code de procédure officiel, de la fin du xve siècle, que M. Beautemps-Beaupré reproduit d’après plusieurs éditions anciennes. Mais 1l n’en reste aucun manuscrit ; il comprend deux cent trente-huit articles, puis un appendice relatant les ordonnances sur les droits de sceaux et escriptures, les règlements sur la manière de procéder des notaires avec la formule de serment de ces officiers, et les règlements sur les greffes du pays d'Anjou. En un mot tout ce qui touche à la procédure et au détail des devoirs des officiers de justice s’v trouve relaté de la maniére la plus compléte. M. Beautemps-Beaupré termine sa vaste publication par un recueil de notas qu’il a relevés sur les divers livres ou manuscrits qu'il a dû consulter *. Ces notes écrites par les vieux praticiens sont précieuses; elles nous montrent à côté de la loi son application journa- lière ; ce sont en effet des observations et des commen- taires des décisions judiciaires qui avaient frappé l'attention de l’avocat ou du procureur, possesseur du manuscrit ou du volume, et qu’il avait notés à la marge de son livre. À cette époque les grands recueils de jurisprudence n’existaient pas encore, les recueils 1 Tome IV. texte M. ? Tom. IV, p. 507 et suiv., texte N. — 148 — privés en tenaient lieu et se transmettaient de main en main. Ils servaient plus tard lorsqu'arrivaient les Grands jours à modifier et à compléter les rédactions officielles de la Coutume. L'auteur a fait précéder chacun des nombreux textes qu’il publie d’une notice spéciale qui fait connaître l'historique de chaque manuscrit, l’époque de sa rédac- tion, les circonstances qui l'ont accompagnée, nous met au courant de tout ce qui le concerne et fait apprécier exactement sa portée et son autorité. Une table alphabétique de toutes les matières permet au lecteur de se reporter au volume et au texte qu'il désire consulter. C’est le complément nécessaire d’une aussi importante publication M. Beautemps:Beaupré traite incidemment à propos du manuscrit de Claude Liger, mais d’une manière fort complète et fort intéressante, des diverses juridic- tions de l’Anjou ‘ ; elles étaient nombreuses. Ce sont : Le lieutenant général du sénéchai d'Anjou et son commis, à Angers; Le juge d'Anjou et son lieutenant ; L'avocat du Roi et son substitut ; Le procureur du Roi au pays d'Anjou et son substitut’; Le juge de la Prévôté d'Angers et son lieutenant; Les élus d'Angers, au nombre de deux; Le receveur des tailles et aides en l’élection d'Angers ; Le juge des eaux et forêts; Le sénéchal des cens d'Anjou; Le receveur ordinaire d'Anjou. Tom. Il, p. 9 et suiv. — 149 — Il y avait aussi des lieutenants du sénéchal d'Anjou au Mans, à Saumur, à Baugé. Le sénéchal était un haut et puissant seigneur à la fois chef militaire et chef judiciaire dont l'office fut longtemps héréditaire ; aussi, Guillaume Le Breton, disait-il dans sa Philippide, que Guillaume des Roches était plutôt comte que sénéchal d'Anjou. Le sénéchal était le vrai représentant du comte ou du roi et rendait la justice en son nom dans tous les cas où le chef féodal de la province aurait dû la rendre lui-même. Il était à sa place le président né de la Cour des barons. Mais ses fonctions furent démembrées et ses lieutenants, bommes de robe longue, prirent sa place et jugérent en son lieu dans îes divers sièges des juridictions. Il y avait au-dessous de lui un baïlli d’Anjou dont M. Beautemps-Beaupré n’a pas trouvé de traces après la première moitié du xrrre siècle. Puis venait le prévôt, juge inférieur quant à l’impor- tance des affaires et à la qualité des personnes. Il con- naissait, en effet, dans la ville et quinte d'Angers des actions réelles et personnelles qui ne concernaient ni les nobles, ni les gens d'église. Les matières féodales et les actions concernant les nobles étaient réservées au sénéchal ; celles des gens d’église, à l’officialité. Nous trouvons le præpositus andegavensis dans les formules de Mabillon dès le vie siècle. Le prévôt me semble avoir été le lieutenant du vicomte et l'avoir remplacé dans nos contrées, tandis que le sénéchal était plus spécialement celui du comte. Le vicomte des Assises de Jérusalem présidait la Cour des bourgeois. A Paris il yavait la vicomté et la prévôté qui semblent s’être con- — 150 — fondues ensemble. Les vicomtes normands étaient les chefs d’une juridiction inférieure comprenant une subdivision du bailliage. Il semble donc y avoir eu dans l'origine une grande analogie entre les fonctions du vicomte et celles du prévôt en ce qui concerne la justice. Le principal magistrat de l’ordre purement judiciaire dans notre province était au xv® siècle le juge ordinaire d'Anjou ; c’est lui qui tient l’assise ; les autres magis- traits ne la tiennent qu’à son défaut. M. Beautemps- Beaupré n’a trouvé aucun document sur l’origine de ses fonctions dont la plus ancienne mention est de 1378 et qui ne paraissent pas remonter beaucoup plus hant, d’après notre savant auteur. Je suis porté à y voir un démembrement de la juridiction du sénéchal accablé par le poids des affaires dont il était jadis chargé. Getle juridiction du juge d’Anjou devait dispa- raître à une époque ultérieure. Les juridictions se trouvêrent réduites alors à la sénéchaussée et à la prévôté ; mais Pinstitution des cas présidiaux devait au xvie siècle modifier de nouveau le système des compé- tences judiciaires. D'après le règlement de procédure qui suivit la réfor- mation de la Coutume en 146%, on voit que le juge ordinaire d'Anjou ne doit connaître d’aucunes actions réelles et personnelles hors les assises, sans commission (à moins qu’il ne soit pris pour arbitre par les parties elles-mêmes), sauf celles des marchands forains dont il peut connaître d’heure en heure ! ‘ Tom. IV, texte M. Art. 4. : — 151 — Le lieutenant du sénéchal connaissait de jour en jour de toutes actions personnelles de 20 livres et au- dessous et de tous crimes. Au-dessus de ce taux il ne pouvait connaître des actions personnelles sans com- mission, sauf à l'égard des forains, comme le juge ordinaire. Il ne pouvait connaître d’aucunes actions réelles sans commission (art. 5). Quant au juge de la prévôté il connaissait en la ville et quinte d’Angers de toutes actions réelles et per- sonnelles, sauf des crimes et des causes touchant les gens d'église ou nobles, sur lesquels il n'avait aucune juridiction (art. 6). C'était le chef de la justice bour- geoise, comme le vicomte de Jérusalem. La nomination du juge d’Anjou était faite avec le plus grand soin. M. Beautemps-Beaupré a publié toutes les pièces relatives à la nomination d’un juge d'Anjou au temps du roi René, pièces qui se trouvent aux Archives de France ‘. Il en résulte qu’on assemblait le conseil du duc et qu’on prenait l’avis des gens d'église, nobles, bourgeois et gens de justice, qui venaient s’y adjoindre pour délibérer sur cette impor- tante nomination; chacun disait librement son avis *. On voit par là que le régime de l'arbitraire ne régnait pas encore en Anjou et que les plus sérieuses garanties étaient apportées à la nomination du juge. La liste des notables qui durent y participer en 1453 peut être intéressante pour cerlaines familles de la vieille ma- gistralure angevine. 1 P. 13345, fo 67 et suiv. ? Tom. III, p. 56 et suiv. — 152 — M. Beautemps-Beaupré a fait précéder les textes qu’il a publiés d’une savante introduction dont je vais main- tenant dire quelques mots. Ce travail a pour objet d'expliquer certaines particularités de la Coutume d'Anjou et d’en faire connaître l’origine. L'auteur passe en revue successivement divers droits féodaux qui appartenaient aux seigneurs, d’après les différents textes des coutumes, et quelques dispositions spéciales du droit successoral de l’Anjou féodal. M. Beautemps-Beaupré constate que les coutumes de 1411 et de 1463 sont muettes sur l’ost et la chevauchée, ces anciens droits féodaux que le vassal devait à son seigneur et qui étaient la base même de la féodalité. Cela provient de ce qu’à l’époque de leur rédaction ces droits tombaient en désuétude avec les guerres privées, tandis que celui de garde pour les châteaux était encore en pleine vigueur. Un autre droit fort important et qui tenait aussi à l’essence de la féodalité était celui qu’avaient les sei- gneurs de s'opposer aux acquisitions faites par le clergé ou aux donations qu’il pouvait recevoir dans l'étendue de leur fief. La Coutume d’Anjou exigeait formellement l'autorisation du seigneur pour qu’une abbaye püt devenir propriélaire ; sans celte autorisa- lion elle pouvait être contrainte de vider ses mains dans l'an et jour, sous peine de saisie. On trouve souvent dans les chartes des autorisations générales d'acquérir données à telle ou telle abbaye ; on y trouve souvent aussi des ralifications pour les acquisitions déjà faites. Notre auteur donne certains détails intéressants sur les tailles ou plutôt les aides féodales, car la taille — 153 — dont parlent nos Coutumes n’a rien de commun avec la taille royale. Il s’agit du devoir qu’avaient les vas- saux d'aider de leur bourse leur seigneur dans trois cas spéciaux : lorsqu'il est fait chevalier, quand il marie sa fille et s’il fait des acquisitions en rentes ou en domaines ; ce dernier cas fut plus tard remplacé par celui où il était fait prisonnier en la querre du roy nostre stre. La taille féodale consistait à lever le double des cens et devoirs dus par les hommes coutumiers. Parmi les droits féodaux les uns n’appartiennent qu'aux seigneurs d’un rang élevé, tels que les barons et les châtelains, les autres au contraire appartiennent à tous les seigneurs et même à ceux qui n’ont que le droit de basse justice, appelé aussi justice foncière ou voière (vicaria). Dans la première catégorie se trouve le droit de mesure ; les châtelains et les barons ont seuls le droit d’avoir un étalon de mesure ; il n'appartient pas aux autres seigneurs, même aux hauts justiciers. Il en est de même du droit de Banvin; les barons et châtelains seuls pouvaient exercer le droit de ban, c’est-à-dire fixer un délai pendant lequel ils pouvaient vendre leur vin par préférence à leurs vassaux. Les comtes et barons avaient en leur terre la con- naissance des trois grands cas, meurtre, rapt et encis et le produit des amendes et confiscations prononcées contre les auteurs de ces crimes. M. Beautemps-Beau- pré pense que le mot encis qui désigne les violences commises contre une femme enceinte ayant entrainé la mort de l’enfant (enseco), a été par suite d’une confu- sion substitué dans les Coutumes au mot #ncendium, — 154 — qu’on trouve toujours dans les chartes. Cette explica - tion me semble non seulement ingénieuse mais trés probable. Le droit de confisquer les meubles de l’usurier appar- tenait aussi au baron. | Celui de prendre les abeilles qui se trouvent sans maître et à l’état sauvage appartient au contraire à tous les seigneurs hauts, movens ou bas justiciers. Le seigneur foncier a aussi droit à la succession des aubains et bâtards morts sans héritiers directs et légi- limes, tandis que d’après beaucoup d’autres coutumes ce droit était réservé aux seigneurs hauts-justiciers. Le droit de faire un étang sur son domaine apparte- nait aussi à tous les seigneurs angevins. Suivant nos usages tout seigneur foncier avait, même sans litre, le droit de moulin banal; c'était un droit inhérent au fief, mais seulement pour le moulin à moudre le blé, le moulin à foulon était réservé aux barons. Le droit de four banal était aussi un privilège commun à tous les seigneurs et dont jouissaient les simples justices foncières ou voières. Les droits de banalité consistaient en ce que les vassaux étaient tenus de moudre leur blé et de cuire leur pain au moulin et au four du seigneur. C'était un monopole industriel comme celui que l’État exerce aujourd’hui sur les allumettes chimiques, le tabac et les cartes à jouer. Notre auteur établit ces diverses distinctions entre les droits féodaux non seulement avec le texte des coutumes, mais avec de nombreux extraits de chartes antérieures à la rédaction de la Coutume, souvent de plusieurs siècles; ce qui permet sinon de remonter A5 — à l’origine même de ces droits divers du moins d’en constater la haute antiquité. L'influence de la féodalité ne se remarque pas seule- ment au sujet des droits fiscaux des seigneurs, elle se montre aussi sur des matières qui touchent de bien plus près au droit civil. Le bail ou garde des enfants nobles en est la preuve. Au mois de mai 1246, saint Louis fit une ordonnance à ce sujet à la suite d’une enquête constalant la déclaration de vingt-deux sei- gneurs de l’Anjou et du Maine. Aux termes de cette enquête et de l'ordonnance, la veuve d’un noble ou de tout autre possesseur de fief a en Anjou le bail de ses enfants et de leur terre ; si elle meurt, le plus proche du côté du père a le bail des biens paternels; celui du côté de la mère, le bail des biens maternels ; si le bail arrive à celui qui doit hériter de la terre, ce n’est pas lui qui prend la garde des enfants, mais le plus proche parent. On voit que notre Coutume était fidèle à la sage maxime qu’on trouve citée dans les Assses de Jérusalem : Ne deit mie garder l’aignel Qui en deit aveir la pel. Tout autre était le bail roturier. Si l’enfant roturier perd son père et sa mère, celui qui doit avoir le retour de la terre prend l'enfant jusqu’à ce qu’il soit en âge de pouvoir dire à qui il veut se confier, lui et sa terre. La Compilatio de usibus dit simplement que le fils du coutumier n’a pas de bail, mais qu’il peut aller trou- ver qui il voudra. Un autre droit né de la féodalité était celui qu'avait — 156 — le seigneur de consentir au mariage des filles et des veuves de ses vassaux. Lorsqu'une femme noble devient veuve eïle doit promettre à son seigneur, en lui don- nant des sûrelés à cet égard, qu’elle ne mariera pas sa fille sans son avis et sans celui du lignage du côté du père; s’il y a plusieurs prétendants, c’est le lignage qui choisit. Faute par la mère de se conformer à cette prescription elle est punie par la perte de ses meubles. Il importait au seigneur que le service du fief inférieur füt fait par un homme de lui agréé. | C’est surtout en matière de succession que l’influence féodale se fait sentir. Le droit &’aînesse a eu pour objet primitif d'empêcher la division du fief et d’en assurer le service. La baronnie ne se partage pas non plus que les dignités et nobiesses qui y sont attachées, comme le château, la justice et autres droits de baronnie, à moins que le père de son vivant n’ait fait des disposi- tions au profit de ses enfants puinés. S'il y a des biens en dehors de la baronnie, c’est sur ces biens que doivent être pris le bienfait des puinés mâles et les portions coutumières des filles. S'il n’y a que la baron- nie, il faudra bien les prendre sur la baronnie, mais les dignités et prérogatives demeureront sans partage à l'aîné. Les puiînés mâles et les filles ne sont point héri- tiers; les filles sont propriétaires de leur part sans qu’une disposition particulière à cet égard soit néces- saire ; les puinés mâles ont leur part en héritage lorsque le père a voulu qu’il en fût ainsi ou lorsque l'aîné, en l’absence de dispositions du père, a con- senti à la leur donner en propriété. Les puinés sont re Lt EE exclus des successions collatérales ; l’aîné mâle y prend les deux tiers et les filles ensemble, l’autre tiers. S'il n’y a que des filles l’aînée prend les deux tiers et laisse aux autres le troisième tiers. M. Beautemps-Beaupré paraît croire que dés le xIe siècle on considérait l’aîné comme le principal sinon comme le seul héritier de son père. Je crois qu’il y a une distinction à faire sur ce point entre l’ensemble de la succession et le fief pris en particulier en tant que domaine soumis à une règle spéciale. Le droit d’aînesse n’ayant d’autre but que d’assurer le service du fief, le domaine féodal devait rester indivisible et passer en entier à l’aîné; c’est par un adoucissement à cette règle primitive qu’on admit le parage et le tiers dévolu aux püuinés. D’après le parage la portion du fief partagée pour la jouissance entre les frères cadets’ était toujours censée au regard du seigneur dominant appartenir à l'aîné seul qui rendait hommage pour tous. Mais la même raison n'existait pas à l'égard de l’ensemble de la succession. S'il n’y avait qu’un fief l’ainé le prenait tout entier ; s’il y en avait plusieurs les cadets pou- vaient en recueillir leur part. Quant aux alleux et domaines roturiers ils se partageaient également. Le droit d’aînesse nobiliaire qui a pour objet d'assurer la grandeur de la famille ne date, je crois, que du xume siècle, et ne doit pas être confondu avec le droit d’aînesse féodale et militaire qui était la règle primi- tive. La Coutume d'Anjou reconnaît un droit d’aînesse en faveur de la fille aînée quand il n’y a que des filles ; elle a le même droit qu’aurait eu le fils aîné noble. — 158 — D’après les textes les plus anciens le droit d’aînesse entre sœurs n'existait que pour les baronnies; mais pour les vavasseries l’aînée n'avait qu’un hébergement et un chezé en préciput, le reste se partageait; d’autres texies paraissent même rejeter cette distinction. La question fut tranchée par une enquête de 1340, de laquelle il résulte que, d’après l'usage de Touraine, d'Anjou et du Maine, le droit d’aînesse existe en faveur de la fille aînée avec toutes ses conséquences, notam- ment l'attribution à l’ainée en cette qualité de toutes les échoites ou successions collatérales. M. Beautemps- Beaupré remarque toutefois avec raison que les exemples cités dans cette enquête ne sont pas très con- cluants. On prend en effet pour exemple les filles de Guillaume des Roches, qui possédait une fortune considérable composée de plusieurs puissantes baron- nies ; l’aînée eut une part plus étendue que sa cadette ; mais celle-ci eut encore d'importants domaines. Que serait-il arrivé si le père n’avait laissé qu’une baronnie ? Se serait-elle divisée ou non entre les sœurs? Quoi qu’il en soit, bon ou mauvais, l'exemple fut admis et la règle des droits d’ainesse posée en faveur des filles dans toutes les rédactions postérieures de la Coutume. La Coutume d'Anjou admettait enfin l'exclusion des filles de la succession paternelle pour cause d’incon- duite. Cette disposition empruntée au droit romain se remarque dans d’anciens documents remontant au xIe siècle. M. Beautemps-Beaupré a fait suivre son introduction de plusieurs chartes des xn° et xim° siècles qui servent à appuyer ses assertions et à en fournir la preuve. Ces — 159. — documents intéressants nous permettent de comprendre le droit par le fait et de remonter à l’origine des dispo- sitions coutumières. La publication de M. Beautemps-Beaupré est un tra- vail considérable qui a demandé près de vingt ans d’é- tudes et de recherches ‘. Il a fallu lire et collationner de nombreux manuscrits, les comparer entre eux, en noter les variantes, compulser des documents de toute sorte pour arriver à préciser la date de chaque rédac- tion de la Coutume, l’origine de chaque manuscrit. I a fallu fouiller archives et bibliothèques à Paris, à Londres, à Rome, en Allemagne, correspondre avec tous les archivistes d'Europe. L'auteur ne s’est point épargné, aussi le succès a-t-il élé complet et le bril- lant triomphe qu’il a obtenu à l’Institut en est un témoignage éclatant. Grâce à lui nous possédons la plus belle collection de textes coutumiers relatifs à notre province qui ait encore élé publiée. On ne saurait décerner trop d’éloges à ces vaillants pionniers de la science qui prenant pour eux le plus rude labeur fraient le chemin au milieu de mille difficultés et ne laissent plus à ceux qui viennent derrière eux que le facile plaisir de le parcourir. Nous pouvons dire, et . tout le monde sera de cet avis, que M. Beautemps- Beaupré a bien mérité de l’Anjou et de tous ceux qui prennent intérêt aux progrès de la science historique du droit français. G. D’ESPINAY. ! Les quatre volumes de M. Beautemps-Beaupré ne constituent que la première partie de son vaste ouvrage. Il nous fait espérer une seconde partie qui comprendra spécialement les chartes des comtes d'Anjou indépendants. CHRONIQUES SAUHUROISES La statue d'Alexandre Dumas à Paris, en 1883. — Le château de la Coutancière à Brain-sur-Allonnes, en 1699. L’érection de la statue d'Alexandre Dumas, qui vient d’avoir lieu dans la capitale, a réveillé des souvenirs dont plus d’un lecteur de ses œuvres recherche, en vain, la trace; les touristes surtout, parcourant le Haut-Anjou, se demandent ce qu’est devenu le chdteau de la Coutancière. Ce fleuron de la couronne monumentale du pays sau- murois a disparu dans le premier quart du dix-neu- vième siècle ; le marteau de la démolition s’est abattu sur les murailles de cette demeure privilégiée des comtes de Montsoreau, au xv° siècle ‘. Par la disparition de cel antique castel, l’histoire et l’archéologie sont privées, l’une et l’autre, d’un miroir reflétant les annales d’un passé auquel l’auteur des Trois Mousquetaires, du Vicomte de Bragelonne, de Dictionnaire historique de l’'Anjou, par M. Port. — 161 — Monte-Christo, etc., a emprunté l’un de ses romans les plus populaires : La Dame de Montsoreau ! Cette œuvre semi-historique et émouvante altirerail, aujourd’hui, sur le vieux manoir seigneurial plus d’un curieux, et le bourg de Brain, si animé, une fois seu- lement chaque année, par le retour de sa foire du 13 septembre, verrait journellement les voyageurs visiter la Coutancière et parcourir la route qui le tra- verse pour se rendre à la Fontaine légendaire de Saint- Maurille. Une statue du grand évêque décore maintenant les abords de cette fontaine‘, demeurée précieuse dans la contrée, parce que son eau est renommée comme propre à la guérison de certaines affections corporelles ; la tradition lui conserve cette vertu : elle montre l’em- preinte d’un pied du patron de la paroisse sur les dalles qui encadrent la fontaine. Il Ce ne sont pas l’histoire et l'archéologie seulement qui regrettent la Coutancière, l’art aussi partage ces regrets. Ce château était une sorte de mosaïque architectu- rale ; il présentait aux regards trois types d’architec- ture, correspondant à trois grands règnes, à savoirs: la Féodalité, l’avénement d'Henri IV, le règne de Louis XIIT, c’est-à-dire les xIve, xve, xvIe et xvIIe siècles. 1 C’est un don de M. E. Dumény, propriétaire à Brain, en 1879 ; elle a été érigée et bénite le 13 septembre, fête patronale, en présence de la population du bourg et des environs. SOC. D'’AG. Al — 162 — Commencée en 1806, la destruction de cette mosaïque monumentale n’était pas complète en 1814. | M. Bodin publiant, à cette date, ses Recherches sur Saumur et son arrondissement, écrivait ces lignes, t. Il, ch. xni : « Aujourd’hui les fossés sont en partie comblés, la « galerie et la chapelle démolies ; cependant, tel qu’il « est, il annonce encore l’ancienne habitation d’un « puissant seigneur. Il fut le théâtre des derniers « exploits de Bussy d’Amboise, gouverneur ou plutôt « tyran de l’Anjou. » De ce récit il résulte que la ruine de la Coutancière commença par les bâtiments les moins anciens ; elle fut consommée, en effet, en 1826, par la démolition du château féodal, modéle de l'architecture militaire au xIve siècle. Nous ne faisons pas grief au propriétaire de cette ruine, elle était dictée par des intérêts privés; du reste, le goût n’était pas né pour la conservation des monuments anciens : c’est Victor Hugo qui l’a déve- loppé et popularisé par son œuvre de Notre-Dame de Paris en 1831. II Nous allons relever dans son ensemble l’antique ma- noir, en suivant les données qui ressortent d’un plan en lavis dressé en 1699 ; nous avons étudié ce plan, en 1868, à la Bibliothèque nationale de Paris, collection Gai- gnières', pour la rédaction d’un rapport sur l’origine 1 Voir les eaux-fortes de M. Vidal pour l'illustration du Dic- tionnaire historique de M. Port. — 163 — de la justice de paix de Brain, 1791, devenue celle du canton de Saumur nord-est, 1802. Le résultat de cette étude a été reproduit dans l’Echo saumurois des 10 sep- tembre, 13 octobre 1868, Ler avril 1869*. La partie féodale du château de la Coutancière était assise de l’est à l’ouest dans sa longueur ; elle faisait face à la grande avenue aboutissant, à cette heure, à la mairie de Brain, au point de sa rencontre avec la route de la Loire à Vernoil, qui traverse ce bourg. Cette construction militaire était précédée d’une grosse tour à plate-forme entourée de créneaux ; les angles étaient flanqués de petites tours carrées : celte forteresse était destinée à l'habitation du seigneur en même temps qu’à la défense de son domaine. Quand la féodalité fut domptée par Louis XI et Riche- lieu, quand les mœurs de la noblesse se portérent vers la vie de famille avec des rapports de sociabilité entre voisins, les seigneurs accommodèrent leurs résidences à leurs nouveaux besoins. Le goût italien, importé par les Médicis, tendait du reste à modifier l'architecture, à améliorer la disposition des manoirs. ; Sous Henri IV, l’ornementation fut encore négligée dans les constructions nobiliaires ; le souvenir des luttes de la Ligue y maintenait un caractère simple, sévère, indiquant la nécessité de se garder des attaques du dehors. Dans ce but, la cour précédant le château féodal, déjà défendue par de larges fossés, cours d’eau, fut ren- ! Nous avons gardé mémoire des détails techniques que nous a donnés M. Joly-Leterme, architecte des monuments histo- riques, en 1868. — 164 — fermée au delà de ces fossés par un corps de logis, flanqué de deux tourelles couvertes d’une toiture en cône, à côté de la tour occidentale ; un pont-levis don- nait accès dans la cour du château. Arrive le règne de Louis XIIT, la grosse tour militaire fut surmontée d’un dôme couronné d’une lanterne en forme de colombier. Puis s’éleva, en retour d’équerre, la grande galerie, faisant suite à la chapelle, couverte d’une haute toiture que l’architecte Mansard modifiera un jour, pour les constructions de Louis XIV, en y pra- tiquant des appartements connus, à cause de lui, sous le nom de mansardes. Enfin, à la même époque, le châtelain fit bâtir un second logis, en avant et en retrait sur le pont-levis; ce logis avec ses dépendances, clos de murs, fut destiné à l’intendant du domaine, désigné jusqu’en 1789, dans de vieilles archives, par le litre de sénéchal. Dans le plan en lavis de 1699, on remarque les pierres taillées avec chanfrein faisant saillie dans les arêtiers, dans les encadrements des portes et fenêtres de ce logis : c’est un cachet particulier aux construc- tions du temps de Louis XIII. De l’antique Coutancière, il n’existe plus rien sur le sol ; et les transformations projetées par son proprié- taire ‘, quelles qu’elles soient, ne rappelleront jamais la dernière demeure des comtes de Montsoreau de 1699. Paul RaTours. 1 M. Gigault de Marconnay, descendant de son aïeul du même nom, acquéreur du domaine de la Coutancière sur M®° de Tour- zel en 1806. (Dictionnaire historique de l'Anjou, par M. Port.) AE LA D / Le L Ÿ LE CHANT ESPAGNOL Lorsque, dans le domaine de l’art ou de la science, une question digne d'intérêt se trouve soumise à la controverse, c’est un honneur pour les sociétés semblables à la nôtre, de pouvoir indiquer à tous la solution désirée. Un soin, conduisant à un résultat moins brillant, mais bien fait encore pour mériter un examen attentif, est celui qui nous fait rechercher les questions mêmes, et nous amêne à signaler les points sur lesquels devront se porter les études des artistes ou des savants. Dans ce cas, comme récemment l’abbé Paramel, on n’exploite pas la source, mais on l'indique à ceux qui viendront y puiser bientôt. En France, à Paris du moins, les théâtres chantants ne connaissent que deux langues, le français et l’ita- lien. Ces deux idiômes, qui ont chacun leurs partisans, se font des emprunts continuels et, en ce moment même, nous voyons l’Hérodiade, de Massenet, compo- siteur français, dite en français à Bruxelles par des acteurs presque tous Français, se produire, à Paris même, avec le langage italien. Dans les concerts, il en est presque de même. Pour- tant, à de rares intervalles, on a semblé comprendre — 166 — que certaines nations ponvaient bieu avoir aussi un langage digne de s’associer à la mélodie. Il ne manque à l'allemand, si riche en chefs-d’œuvre, qu’une occa- sion pour franchir le Rhin. Toutefois, plusieurs artistes, Roger, entr’autres, interprétant les mélodies rêveuses de Schubert, ont produit chez nous un effet qui ne s’oubliera pas. Souvent, à la fin des soirées, Christine Nilsson chantait en suédois une ou deux œuvres légères qui, dites avec ce talent, ne pouvaient manquer d'être applaudies par un auditoire déjà charmé. Dans un opéra-comique d’Auber, une jeune femme, à la veille d’un bal donné par le fameux Marco Spada, pense aux doux mots que vont lui adresser les seigneurs des con- trées diverses ; elle les entend par la pensée; un de ces compliments est en langue russe. Mais, nulle part nous n'avons vu l'attention plus marquée et l'effet plus sûrement produit, qu’à l’audition des fragments espa- gnols dits par Mme Viardot, la fille du grand chanteur Garcia, et par Mlle Naldi, des Italiens, devenue Mme Ja comtesse de Sparre. Faut-il s’en étonner ? Nous n’avons certes pas l’idée folle de chercher à déprécier les mérites mélodiques de la langue italienne, qui sert de base à tant de compositions de premier ordre et nous a doté nous-même de si délicieux souve- nirs. Ce serait, d’ailleurs, un vain effort. Dans le domaine musical, elle a conquis une influence plus que séculaire. Elle a envahi notre langage. Les mots alle- gro, andante, cantabile, presto, sont connus des per- sonnes même étrangères à la musique, et, depuis quelques années, elle a fait substituer l’insignifiante — 167 — syllabe do à cet ut qui, le premier dans l'hymne de Saint-Jean, vint révéler à Guy d’Arezzo le nom des sept notes de notre gamme. Mais, quels que soient ses avan- tages, une comparaison, sur quelques points au moins, est toujours permise. Or, pourvu que lon ait la moindre connaissance des langues italienne et espa- gnole, peut-on nier que celle-ci présente, surtout dans les chants exprimant un sentiment élevé, un nerf, une vigueur que ne possède pas à un si haut degré la pre- miére®? Ici, au lieu de ces syllabes tendres, harmo- nieuses sans doute, mais un peu monotones et, par suite, fatigantes parfois, les sons os, as, es, voient leur éclat doublé par l'intervention de la jofa, aspiration plutôt que syllabe, comme, dans la peinture, l'ombre fait ressortir les clairs. Voici pour l'oreille. Quant au caractère, il est bien difficile d’obtenir de l'italien l'accent héroïque. Sans nier en rien la grâce et la richesse de son langage, il semble que le genre bouffe, ce genre qui, grâces à Cimarosa, Ricci et Rossini, nous a donné tant d'œuvres célèbres, soit son domaine préféré et, presque, réservé. Mais, depuis que le néo- germanisme est venu modifier, par son influence, trans- former, pourrions-nous dire, la nature de nos compo- sitions et, par suite, le goût des auditeurs, qui parle aujourd'hui du genre bouffe ? Lablache serait-il certai- nement compris, et nos artistes les plus applaudis ne se irouveraient-ils pas étonnés pour le moins, s’il leur fallait dire demain le célèbre duo, Se fiato, du Mariage secret? Il est donc, ce semble, bien permis de recher- cher si, pour certains chants, on ne trouverait pas dans un idiôme ce qu’un autre semble n’offrir qu’imparfai- — 168 — tement. La richesse d’une mine d’or empêche-t-elle de sonder une mine voisine encore presque inexplorée et semblant promettre des richesses nouvelles ? Or, quel est notre vœu ? Il est, assurément, fort modeste et n'engage nulle- ment l’avenir, tout en le préparant peut-être. Nous ne demandons nullement que, dès demain, un théâtre espagnol s'élève, vivant tout d’abord de traductions, comme les Italiens lui en donnent l’exemple. Mais, les concerts sont là... Ne pourrait-on, dans leurs pro- grammes, donner une place aux chants dont nous nous occupons ? Ce n’est pas l’usage, dira-t-on! Puissant encourage- ment! Dans toutes nos villes, à Paris surtout, on est toujours prêt à redire ce vers bien connu : Il nous faut du nouveau, n’en füt-il plus au monde ! Doute-t-on que la nouveauté, ici, ne fût bien venue si elle nous était apportée par un second Garcia ou par quelque Nilsson castillane ? Nous savons de science certaine, qu'une souveraine connue par son amour éclairé des beaux-arts, la reine Isabelle IT, dont Paris regrette l'absence et espère le prompt retour, porle au projet qui nous occupe une faveur marquée. Elle peut, évidemment, aider beaucoup à la prompte réalisation de ce vœu. Le spirituel Scudo disait, en parlant de certains morceaux brillants de Rossini, tels que le trio de Papataci et le sextuor syllabique de la Cenerentola, qu’ils étaient faits avec de la mousse de Champagne et un rayon du soleil de Naples ! Pourquoi le soleil de — 169 — l’Andalousie n’aurait-il pas la même vertu et ne favori- serait-il pas l'inspiration de quelque Cimarosa, de quelque Méhul, de quelque Gluck, peut-être ? Mais, en attendant ces œuvres de l’avenir, ne serait-il pas inté- ressant d'entendre s’exprimer en leur langage natal, Figaro, Almaviva, Elvire, Don Juan et l’audacieuse Catarina des Diamants de la Couronne ? Non, cet intérêt serait faible, si l’on en croit quelques personnes pour lesquelles, de notre temps surtout, l'organe vocal n’est qu’un ensétrument. Comme on joue du violoncelle ou de la flûte, elles Jouent de la voix, sans se préoccuper assez de la netteté et du sens des paroles. Or, elles peuvent être habiles, applaudies même; mais, pour Garcia, Nourrit et Ponchard, elles ne chantent pas. Selon ces grands artistes, le chant est, avant tout, un déscours dont les syllabes, prolongées pour la plupart, forment, par leur ensemble, la mélo- die. Ils enseignent par suite, que, si la diction, constam- ment fidèle à l’idée ou au sentiment à exprimer, doit viser toujours la pensée ou le cœur, il faut, pour pre- mière condition, qu’une prononcialion claire et exacte indique nettement ce sentiment ou cette idée. Un audi- teur ne sachant pas votre langue, disait Ponchard, doit pouvoir sténographier d’une manière exacte chacune des syllabes prononcées, quoiqu'il n’en comprenne pas la signification. Chaque idiôme ayant, on le sait, un caractère différent, on devra, suivant le langage qu’on aura choisi (le sentiment musical restant le même) trouver une différence dans l'audition, l'audition seule, qui sera plus brillante, plus douce ou plus claire, selon qu’on chantera en espagnol, en italien ou en français. — 170 — Maintenant, Messieurs, vous connaissez notre pensée ; nous avons voulu vous la soumettre, espérant qu’elle obtiendrait votre adhésion. Nous nous bornons, vous le voyez, à demander une épreuve ! Que cette épreuve se produise, qu’elle se répète, qu’elle se propage et qu’un jour, les nobles accents des Espagnes puissent, chez nous, réaliser, mais ici, d’une manière favorable, glo- rieuse même, cet adage jeté aux méchants par La Fon- taine : é Laissez leur prendre un pied chez vous, Ils en auront bientôt pris quatre !. E. LACHÈSE. 1 Fable vire, livre II. ENSEIGNES ET DEVISES DES MAGASINS D’'ANGEERS Il n’est personne qui n’ait quelquefois pris plaisir à voir dans de vieilles gravures et en particulier dans de vieilles gravures allemandes, des rues tout encombrées d’enseignes parlantes. C’est d’abord le tableau de l’au- bergiste qui se balance au-dessus de la large porte d’entrée. À la devanture du barbier pendent de leur tige de fer le plat d’étain et le rasoir classiques. Le cabaret a sa pomme de pin, souvenir des fêtes de Bacchus. Voici la clef du serrurier, le fer-à-cheval du maréchal-ferrant, l’équerre du couvreur, la botte du cordonnier, le marteau du maçon. Ici, c’est un sabot .de bois terminé par un bec-de-cane; là, des ciseaux d’une grandeur merveilleuse, des lunettes énormes, des chapeaux à larges bords, des gants, des bas et des parapluies de toutes couleurs Il n’est pas nécessaire d’aller à Ulm ou à Nuremberg — 172 — pour trouver de ces vieilles choses, et la mode, même chez nous, n’en est pas encore passée. Tout ce luxe se rencontre dans nos faubourgs et dans les quartiers commerçants de notre ville. L’enseigne parlante pros- père, et j'imagine qu’elle n’est guère moins rare aujour- d’hui qu’autrefois. Elle a pour elle qu’elle est simple et claire, qu’elle n’exige pas une lecture qui, pour l’homme du peuple, est quelquefois pénible, et enfin qu’elle amuse les yeux. Nous la laisserons donc suivre sa destinée. La devise-enseigne * est moins heureuse, et nous voyons dans notre ville que son usage s’en va peu à peu. C’est que le commerce n’est plus ce qu’il était. La devise devient de jour en jour plus indifférente au marchand, parce qu’elle lui devient de moins en moins nécessaire. Autrefois, la boutique, quelque riche qu’elle füt à l’intérieur, ne montrait du côté de la rue qu’une extrême simplicité. L’entrée en était basse et sombre, comme nous pouvons en juger encore par quelques ruines qui sont restées debout dans les plus vieilles de nos rues. C’est à peine si le passant apercevait dans la boutique de l’orfèvre les reflets de quelque objet d’or ou d'argent. Le drapier vendait ses étoffes aux couleurs vives dans une chambre mal éclairée, et l’armurier cachait dans une antique armoire de chêne ses plus riches épées. Les marchands, comme tous les riches 1 Le sens précis des mots enseigne et devise n’étant pas bien déterminé, je me sers du mot enseigne-parlante pour désigner les objets tels que les plats, les équerres, les ciseaux, etc., et du mot enseigne-devise, ou simplement devise, pour désigner les inscriptions, telles que : à la Providence, au Myosotis, etc. — 173 — de ce temps-là, gardaient en effet leur luxe pour eux seuls, et c'était presque dans le secret que les belles choses d’alors passaient des magasins sombres de la rue Saint-Laud aux hôtels presque aussi sombres de la rue Saint-Martin ou de la Cité. Il n’en est plus ainsi dans notre siècle. Nous aimons aujourd'hui à prendre le public pour confident de ce que nous achetons, et le marchand de son côté, afin de mieux vendre, étale, tant qu’il le peut, sa marchandise à tous les yeux. Il sait en faire ressortir l’éclat avec un art infini, et jamais on n’a été si habile à donner aux moindres objets, par l’arrangement, un aspect qui flatte davantage. Le vendeur d'objets brillants, étoffes, armes, fleurs, orfèvrerie, livres, fourrures, meubles ou dra- perie, n’est pas seul à savoir composer savamment des spectacles attrayants avec les trésors qu'il expose. Le cordonnier, le chapelier , le tailleur, le coutelier, le fromagier même, arrivent à faire de leurs devantures de véritables œuvres d’art. L’épicier, jadis méprisé des poètes, montre dans ses étalages une imagination mer- veilleuse. Il arrange le sel, le sucre, le miel, la mé- lasse et les confitures en colonnades élégantes. Des conserves de légumes et de poissons d'Amérique enri- chissent ses architectures; et tout comme on rangait chez les anciens des boucliers au fronton des temples, il suspend, à la frise de sa devanture, des jambons, qu’il entremêle aussi lui de lauriers. On ne comprend pas ce que viendrait faire une devise au milieu de cet étalage éblouissant à la vue. Cela était à sa place à la porte de la boutique simple d’un bon marchand d'autrefois. Mais aujourd’hui, le passant ne — 174 — la regarde pas même; il a une autre chose à faire, à laquelle il suffit à peine, qui est d'admirer l’art de la décoration. D’autres motifs, ceux-là venus de la vanité humaine, nuisent aussi à la devise. On n’en rencontre presque plus dans les quartiers occupés par ce que l’on appelle le grand commerce ou le commerce en gros. Les mai- sons y ont seulement, sur la muraille extérieure et ordinairement au-dessus du porche, le nom du pro- priétaire et l’indication de la marchandise en carac- tères noirs. (est que ces établissements sont trop importants pour requérir l'attention du simple passant; ils n’ont pas à se préoccuper du public et ne font guère qu'approvisionner d’autres maisons dont ils sont connus. Or, le commerçant en détail, par un penchant qui nous est bien naturel, a récemment trouvé dans cet usage quelque chose de beau qu’il a voulu imiter. Il n’a pas fait tout d’abord décrocher sa devise; mais les grandes maisons n’en ont pas; et si par hasard la sienne tombe ou s’efface, il négligera de la rem- placer. S'il le fait, du moins il imaginera quelque chan- gement. Il avait mis jusqu'ici sur sa porte, à l’imitation de son père ou de son ancien patron : un tel, tapis- sier;, il mettra désormais : un tel, décorateur d’inté- rieurs d'appartements. S'il est drapier, il mettra : draperies; bonnetier, il mettra : laines et tricots. En fait, il a raison. Un fe/ drapier, était drapier, pas davan- tage; 1l vivait doucement en homme tranquille, causait au voisin et n’occupait personne de lui. Mais un £e, draperies, est bien un autre personnage; il a été con- seiller municipal; il sera ministre; ce n’est pas assez — 175 — dire : il l’est; à preuve, je vous citerai une loi que, pour sa part, il a faite. Ainsi, la devise baisse en estime aux yeux de tout le monde ; et, quand elle ne disparaît pas tout à fait, elle s’allère et perd son ancienne simplicité. Elle devient une réclame, ce qui est une vraie décadence. On lui fait grossir la voix pour mieux se faire entendre et attirer de plus loin l'attention du client. Vous voyez à présent partout : à la Grande Maison, à la Vente Universelle, à V'Entrepôt central des Calicots, aux Docks de la Cordon- nerie. Vous trouvez même : à l’Incendie. Vous ne tar- derez pas à rencontrer, si vous ne l’avez fait déjà : à la Faillite. Sans aller jusque-là, c’est une habitude prise que de vous promettre plus que l’on ne peut vous donner. Au lieu de meitre comme autrefois modeste- ment : au Gagne-Petit, on écrit : Tout pour rien. S'il y a deux opticiens dans une ville, l'ancien vous disait : Aux bonnes lunettes; le nouveau vous crie : Aux yeux de quinze ans. Il est done temps de recueillir ce qui nous reste; car le temps nous l'enlève insensiblement. Mais il ne faut pas s’en exagérer la valeur, et mous n’y trouverons pas de grands trésors. La plupart des devises de nos magasins ne remontent pas à une antiquité bien haute. J'ai fait moi-même l'expérience de ces illusions qui transportent des faits tout proches à des siècles de dis- tance. J'avais avisé un magasin qui portait pour inscrip- tion sur sa devanture : aux Quatre Nations. Je cherchai le sens de cette devise, et une illumination subite se fit dans mon esprit : « que serait-ce, m'écriai-je en moi- même, » immobile au milieu de la rue boueuse, » sinon — 176 — un vénérable souvenir de l’arrêt du Parlement d'Angers, qui, en 1538, le 7 septembre, divisa les étudiants de notre Université en quatre nations, alors que jusqu’à cette époque il y en avait eu six, qui étaient celles d'Anjou, de Maine, de Bretagne, d'Allemagne et de Nor- mandie?...… » J'en étais là, quand j’aperçus dans la boutique un homme âgé, qui était évidemment le maître de la maison. J’entrai pour lui faire confirmer ma découverte. Je n’espérais pas sans doute qu’il remontât à 1538, et eût assisté à la séance du Parlement. Mais ne pouvait-il en avoir conservé la tradition? On en voit bien d’autres en archéologie. J’entrai donc et je lui demandai si la devise de sa boutique était bien ancienne. « Ancienne”? un peu, me répond-il, car je l'ai fait mettre à mon arrivée ici. C'était un souvenir de la maison de Paris de laquelle je sortais. Elle avait la même enseigne, mais, en plus, quatre statues de femmes peintes et dorées. Hélas!.. Le commerce allait bien dans ce temps-là; aujourd’hui... » Il fit un geste et je vis que les vitres et les murailles étaient couvertes d’affreuses affiches avec ces mots : Liquidation forcée. Jé me retirai respectueusement et un peu triste; car la désolation du vieillard était touchante. Je n’avais plus à penser au Parlement de 1538, ni aux nations de l’Université d'Angers. . Si nos devises ne remontent pas très loin, elles ont en retour l’avantage d’être de notre temps et de prêter sur ce point à quelques observations, il est vrai, peu profondes; mais, vu le sujet, les philosophes me par- donneront. Il est avant tout remarquable que l’on y trouve rare- CS — 177 — ment l’expression de ces sentiments généraux, au moyen desquels il est ordinaire de s'adresser aux foules. Le patriotisme, par exemple, se manifeste à peine par quelques traits sur les devantures de nos magasins. C’est tout au plus si l’on pourrait citer la devise : à l’Alsacienne. Encore peut-on douter si cette inscription n'existait pas avant les malheurs qui nous ont rendu cette province particulièrement sympathique. En revanche, la politique ne se montre pas beaucoup davantage. On en rencontre à peine une ombre dans le pichet d’un mar- chand de vin d’un de nos faubourgs. Ce pichet est peint en rouge et il porte cette inscription en lettres aux couleurs nationales : à la Cruche tricolore. Cela est peu de chose, et vous voyez même qu'il ne s’agit pas là d’une de ces préférences ardentes pour un des régimes qui nous divisent, mais simplement d’une vague ten- dance libérale comme il en vient à certaines heures dans les cœurs généreux. Dieu fasse que cette absence d'images propres à rappeler nos querelles, passe pour un juste symbole de l'esprit de concorde qui anime, sinon tous, au moins la plupart de nos concitoyens! On ne voit pas non plus que le culte des grands hommes ait laissé grande trace sur les devantures de nos magasins. C’est à peine si l’on en peut citer quelques exemples. Je n’ai jamais pu savoir pourquoi le fameux Prince Eugène avait la gloire de protéger un magasin d’habits confectionnés à la façon de la Belle Jardiniêre ou du Pont-Neuf; mais j'ai pu acquérir la certitude que ni la bataille de Zentha, ni celles d’Oude- narde ou de Malplaquet ne sont pour rien dans cette * sorte d’apothéose. SOC. D’AG. 12 — 178 — Par une coïncidence au moins singulière, Jean-Bart a le même honneur dans un magasin de même mar- chandise. Mais ne croyez pas davantage que ce soit pour avoir brûlé au roi Guillaume III d'Angleterre, plus de quatre-vingts navires dans une seule campagne. Il est là, m’a-t-on dit, parce que tout le monde, dans ce pays, connaît le « gros Jean-Bart du Musée. » Aïnsi, c’est la corpulence énorme qu'a donnée David à sa statue et non ses exploits, qui l’ont rendu populaire. L'amour de la gloire militaire, si naturel, semble-t-il, au peuple français, paraîtrait, si l’on en jugeait par les devises, prêt à s’effacer chez nous. On ne rencontre plus à la porte des cafés destinés aux soldats ces légendes glorieusement gasconnes qui les attiraient autrefois. L’enseigne en est très simple ; au Petit Zouaye, au Bon Grenadier, au Rendez-vous de la Gar- nison, au Chasseur d'Afrique. Heureusement, nous avons la liberté de croire que, sur ce point, notre armée n’est sceplique qu’au cabaret. Enfin, la mythologie elle-même perd son prestige après vingt siècles, et c’est à peine si l’on découvre dans quelque auberge de faubourg ou de banlieue, quelque Bacchus à demi effacé assis trisitement sur son tonneau sous un bosquet de pampres fanés. Je ne regrette pas ces images banales d’une antiquité surannée; mais si l’on trouvait quelque chose à déplorer dans ces dehors d’une indifférence universelle, on en serait peut-être un peu consolé par les nombreuses devises de nos magasins qui expriment un sentiment religieux. Telles sont, par exemple : à la Providence, à Sainte-Marie, à Saint-Joseph, à Saint-Antoine, à Saint- — 179 — Maurice; et tant d’autres. À côté de celles-ci, quelques devises répètent innocemment ces allégories morales qui étaient venues à la mode au temps de la décadence du paganisme et que le christianisme n’a jamais repous- sées : à l’Espérance, à l’Avenir, à la Confiance. Outre ces expressions de sentiment religieux, qui nous sont communes, j'aime à le croire, avec la plupart des villes de France, la ville d'Angers peut se vanter d’ex- primer, dans quelques-unes de ses devises, un sen- timent qui, cette fois, lui est particulier et que l’on ne peut tourner qu’à sa louange. C’est l'amour de la musique que je veux dire. Les devises nous engagent à croire que le goût en fut très vif dans la première partie de ce siècle à Angers. Nous y lisons l'impression que firent sur nos pères les opéras les plus fameux. Le Domino noir, d’Auber, a donné son nom à l’un de nos plus respectables magasins. Le Prophète, de Meyerbeer, a fourni la devise d’une importante devanture. L'Enfant prodigue a pour origine un opéra d’Auber, et cela rend inutile de remonter pour l’expliquer jusqu’au dissi- pateur de la Bible, qui fut pourtant, j'imagine, consi- déré par les marchands de Ninive et de Babylone comme un excellent client. Les Angevins avaient jadis la répu- tation d’être des musiciens fanatiques ; ils l’ont peut- être encore. Les caricatures de la première moitié de ce siècle les représentent partant en masse pour Paris par la diligence, non pas comme à présent la veiile, mais l’avant-veille des grands concerts. Enfin, c'est aux environs d'Angers et à ce que l’on dit au château de Serrant, que Dupaty a placé la scène de son charmant — 180 — opéra des Voitures versées, pour lequel Boieldieu a fait de si jolie musique. Mais en général, nos devises-enseignes ont été ins- pirées par la simple fantaisie. C’est tout au plus si parfois la nature de la marchandise semble avoir eu quelque influence sur l’imagination du marchand. Je citerai, par exemple, les bijoutiers et les joailliers qui mettent volontiers de l’or et de l'argent, et de tout ce qui brille, dans leurs devises. On y trouvera : à la Montre d'argent, à la Montre d’or, et même, par une exagération d'éclat qui touche au mauvais goût : au Cadran-Soleil. Il est peut-être plus singulier d'observer que l’ima- gination de cette classe de marchands se porte avec une certaine préférence vers les sujets champêtres. C’est ainsi qu’on leur voit fréquemment pour enseignes : aux Épis d’or, à la Charrue d’or, à la Gerbe d’or, aux Bœufs d’or, sujets qui font penser aux fameuses scènes rus- tiques dont était sculpté, si l’on en croit Homére, le bouclier d'Achille. La raison en est sans doute en ce qu’une partie de ce que ces marchands vendent, va aux gens de la cam- pagne en quête de montres d'argent, de bagues de fian- cailles et de bijoux de noces. Ce contact fréquent entre ces deux races, d’occupations si différentes, a favorisé le penchant qui porte naturellement les marchands des villes à aimer au moins en idée la vie, les objets et les travaux de la campagne. Le coutelier, comme l’orfèvre, a le goût des métaux précieux. Mais il y a entre eux cette différence qu’il — 181 — n’est pas appelé d'ordinaire à les travailler. Pour trouver dans la réalité les lancettes d’or, les faucilles d’or, les ciseaux et les sécateurs d’or dont il orne en effigie la devanture de sa boutique, il faudrait aller jusqu’en Chine, dans ce céleste empire où le roi, dit-on, se fait chaque année, pendant quelques semaines, et laboureur et jardinier. Au reste, les gens qui manient à l’ordinaire les métaux précieux, ne sont pas les seuls à les aimer. On comprend qu’un marchand de couleurs ait mis à sa boutique : à la Palette d’or. Un passementier s’est épris de l’Épaulette d’or : si les grades de notre armée viennent quelquefois à l'élection, nous verrons un de ses.amis l’avoir peut-être. : Vous ne serez pas étonnés si, après l’or et l’argent, les fleurs nous fournissent quelques jolies devises. Il n’y a pour comprendre ce goût des Angevins qu’à jeter les yeux, au mois de mai, sur les magnifiques jardins qui entourent et décorent la ville. Notre population aime les fleurs; et les marchands ou plutôt les mar- chandes (car j'imagine qu'ici ce sont les femmes qui gouvernent), n’ont fait que suivre le penchant universel, en faisant rivaliser dans nos devises les noms des fleurs les plus riches et les plus aimables. Voici le mo- deste myosotis ou la douce pensée. Voilà le fier et un peu mondain camélia'; ici, c’est la rose rouge, ailleurs on a préféré la rose blanche; enfin, ici s'ouvre avec toutes ses feuilles l’opulent dahlia. Pour les étalages formés eux-mêmes de fleurs, l’imagination des mar- chandes a trouvé des merveilles. Il est certain qu’il est charmant d’écrire au-dessus d’un amas de fleurs encore — 182 — tout humides : à Abeille, ou encore à la Reine des fleurs, sans dire laquelle. On rencontre presque les mêmes délicatesses dans les devises qui font allusion à de petites scènes de genre comme celles-ci : à la Glaneuse, à la Fileuse, à la Brodeuse, à la Dormeuse. Prenez garde combien de finesse se cache quelquefois sous ces simples images. Non seulement la Glaneuse nous rappelle agréablement les moissons de l’automne; mais je ne sais si le mar- chand ingénieux n’a pas songé, en choisissant une telle devise, à cette économie minutieuse qui fait le bon marché et les honnêtes maisons. La Dormeuse, qui orne un magasin de lits et de sommiers élastiques, a évidemment pour intention d’éveiller en nous à l’oc- casion de ce mobilier tout moderne, l’idée d’un som- meil paisible et d’heureux rêves. | | Je laisse aux archéologues les enseignes qui rap- pellent le vieil Angers, telles que le Palais des Mar- chands, la Porte Chapelière, les Carmes, les Treilles, et jusque : à la Promenade, qui, placé sur le boulevard, près du faubourg Bressigny, fait souvenir du temps où l'emplacement de nos vieux remparts servait de pro- menade aux oisifs. Certaines maisons de commerce se contentent de mettre à leur devanture le nom d’une ville : à la Ville de Lyon, à la Ville de Tours, à la Ville de Craon, à la Ville de Nantes. La teinturerie lyonnaise rappelle avec quelle science on nuance les fleurs dans la patrie de l'excellent peintre de fleurs, Saint-Jean. Un coutelier, qui fabrique aussi des instruments de chirurgie, ajoute à son nom celui de la ville de Metz, en mémoire de la — 183 — perfection avec laquelle on travaille le fer dans les ate- liers de Lorraine. Très nombreuses aussi sont les succursales et les imitations parisiennes. Il est à remarquer que la plus populaire de toutes, à la Belle Jardinière, fait évidem- ment l'envie de son voisinage. On voit tout à côté, à la Belle Fermière, avec une magnifique peinture repré- sentant une femme dans le piquant costume des habi- tantes des environs d'Angers. Une autre maison imita- trice, mais celle-là très raffinée, a pris pour devise : à la Bonne Jardinière. On a voulu, j'imagine, faire entendre cette idée subtile que, aussi bien qu’en fait de vraie Jardinière, la bonne est, dans un jardin, préfé- rable à la belle : ainsi le magasin d'Anjou l’emporte sur le brillant magasin de Paris. Ces concurrences entre voisins sont fréquentes et se manifestent souvent très singulièrement. Un grand magasin porte cette devise : aux Mille et un Articles. Un plus petit, à côté, arbore au plus tôt : aux Dix mille et un Articles. Dans une autre rue, on trouve encore un contraste plus bizarre. Deux charcutiers sont vis-à-vis l’un de l'autre; l’un met : au Grand Saint-Antoine. L’allusion est heureuse, et l’on se souvient de la légende. Cepen- dant le voisin a-t-il été frappé de ce que la devise a d’un peu sévère? On le croirait, car il a donné à sa devanture un aspect beaucoup plus familier; il a mis simplement : aux Bons Amis. Après quoi, pour affrioler sans doute les gourmets davantage, il a ajouté sur une affiche habilement supplémentaire, qu’il vend aussi du vin. — 184 — Il est remarquable que les marchands de chaussures qui occupent dans le commerce angevin une place im- portante se distinguent par la variété de leurs devises. Il y montrent un goût pour l’histoire dont je ne vois pas la cause, à moins qu’il n’y ait quelque mystérieux rapports entre la fabrication de bonnes chaussures et la solidité des faits. Ce sera par exemple : à la Mule blanche, au Soulier Molière, au Talon Louis XV. La Reine Berthe doit sans doute à son éternelle réputation d’avoir eu de grands pieds le patronage d’une boutique de bottines élégantes. En outre, par un contraste sin- gulier, il n’y a rien qui paraisse avoir fait tant d’im- pression sur limagination des marchands de chaus- sures que les contes de Perrault. Ils y ont puisé à pleines mains, et cette muse enfantine les a plus d’une fois bien inspirés. L’un a choisi pour héros le Chat botté ; un autre a préféré le Petit Poucet, à cause des grandes bottes de l’Ogre; un troisième s'est laissé tenter par la gentille pantoufle de Cendrillon, Il est vrai que d’autres ont eu des inspirations diffé- rentes et plus spéciales à leur profession. L’un, par exemple, a pris pour devise : au Chevreuil ; on ne sait s’il a voulu relever par un nom plus rustique le vulgaire chevreau qui sert à sa marchandise, ou s’il a voulu faire entendre qu'il lui arrive parfois de façonner pour quelque pied particulièrement délicat des bottines de cette matière exceptionnellement souple et fine. Le Brodequin bleu cherche aussi à éveiller en nous l’idée d’une belle chaussure, mais cette fois, en nous flattant par le joli choix de la couleur. Enfin, nous trouvons aux Mille Galoches un secours contre la boue qui en- PRIT — 185 — combre nos rues l'hiver, grâce à la libéralité du bon Dieu et un peu à la tolérance de nos édiles. Au reste, je ne sais si nous le devons à notre climat, mais les magasins d'Angers offrent de grandes ressources contre le mauvais temps. Comme l’industrie des chaus- sures, celle des parapluies prospère. Mais ce progrès doit être d'une date assez récente, car beaucoup de boutiques dont l’apparence est nouvelle, ne portent au- cune devise. On trouve pourtant celle-ci destinée aux gens très prudents : à l’En-tout-Cas; et un autre ma- gasin s’est placé sous l’égide du célèbre Crusoë. C’est sans doute que ce solitaire étant toujours représenté dans ses portraits muni de son parapluie, on a, à la longue, tellement confondu le maître et le compagnon, que certaines gens ont affecté de prendre l’un pour l’autre, et se donnent l’innocent plaisir d’appeler leur parapluie un Robinson. Puisque, enfin, nous sommes descendus en un ter- rain si familier, vous me permettrez de faire une dernière remarque. C’est que l’on ne voit pas généra- lement d’enseignes-devises chez les confiseurs, ni chez les pâtissiers. Telle est, sans doute, la gourmandise humaine que l'attrait de la marchandise lui suffit. Il n’y a dans la ville qu’une exception, c’est un magasin qui se donne pour titre : « à l'Industrie suisse ». On y vend une variété de biscuits que l’on ne mange pas d'ordinaire à l'instant, mais que l’on emporte plutôt chez soi. Ils ont ainsi un caractère de provisions de ménage que les ouvrages plus légers du pâtissier et du confiseur n’ont pas. On conçoit donc que leur prove- nance importe, et l’on est bien aise de savoir que ces bis- — 186 — cuits appartiennent par leur tradition à la vraie Suisse, puisqu'elle a toujours passé pour maîtresse en matière de finesse de croûte, de délicatesse de beurre et de légèreté de pâte. Il ne me reste qu’à m’excuser envers vous, Mes- sieurs, de vous avoir apporté tant de choses que vous avez pu observer aussi bien que moi et dont la plupart sont si futiles. Vous pouvez être assurés qu’en vous les lisant, j’éprouve tous les sentiments de profonde mo- destie naturels en pareille occurrence. Je ne me sens pas même le mérite d’avoir ouvert une voie nouvelle. Je n’ignore pas que des esprits philosophiques et ingé- mieux ont fait plusieurs fois l'étude des enseignes. Celle des girouettes a été touchée par d’éminentes intelli- gences. C’est notre manière aujourd'hui de traiter l’histoire. Aussi, je ne désespère pas de voir bientôt paraître un tableau historique des quatre derniers siècles d’après les plaques de cherninée ; et, de plus, je suis persuadé que l’on en retirera de très grandes lumières. L.-M. RÉNUMÉ CLIMATOLOGIQUE Du 2° semestre de l’année 1883 ET OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES SUR TOUTE CETTE ANNÉE MESSIEURS, Les instruments météorologiques, installés au pen - sionnat Saint-Urbain, ont fonctionné très réguliérement ; et, nous avons aussi, le plus exactement possible, noté leurs indications, pendant toute l’année 1883. Un nouvel appareil est venu s’ajouter aux anciens; nous avons fait l’acquisition d’un thermométrographe, qui marque parfaitement les maxima et les minima. Malheureusement plusieurs instruments très impor- tants nous manquent encore, surtout un anémomètre et un actinomèêtre, mais leur prix élevé ne nous laisse même pas l'espoir de les acquérir un jour. Malgré ces lacunes regrettables notre petite station météorologique peut rendre quelques services, et c’est le seul but que nous nous sommes proposé en la fon- dant. Nos prévisions, indiquées le soir, pour le temps du lendemain, ont donné les mêmes proportions que l’année LAS FR — 188 — dernière, c’est-à-dire qre nous avons prédit juste environ cinq fois sur six. Ce résultat étonnant, relevé sur nos registres, nous fait désirer que des cadres climatologiques soient installés dans toutes les communes de France. Ces cadres coûteraient bien peu, et rendraient à l’agriculture des services immenses. L’exemple des Américains, dont nous vous avons parlé dans notre premier rapport, et notre propre expérience, prouvent que les indications qu’ils donnent sont rarement trompeuses. Nous allons maintenant, le plus rapidement possible, vous exposer les observations météorologiques du 2n° semestre de l’année 1885. Le mois de juillet s’ouvre par un orage très fort. Commencé le 2 vers trois heures du soir, cet orage se continue toute la nuit; à trois heures et à six heures du matin, le 3, deux coups de tonnerre épouvantables se font entendre, pourtant nous n’avons pas appris que la foudre soit tombée dans les environs. Nous avons recueilli, le 2 au soir, des grêlons qui avaient deux cen- timètres de diamètre. La moyenne barométrique de ce mois est 7o8mm,8. Les chaleurs n’ont pas été très fortes, la moyenne du maxima est 25°,1 et celle du minima 490,8. Le minima, placé à la surface du sol et non abrité, nous donne à peu près la même moyenne, ce qui se produit assez rarement. Le psychromèlre indique 10,9 comme moyenne différentielle. L’évapora- tion a été très active et semble être en contradiction avec le pluviomètre ; le total de l’eau évaporée est de 36mm,8 et la quantité d’eau tombée de 56mm, Ce mois a donc été assez humide, malgré l'indication de l’éva- poromètre. — 189 — L'activité de cet instrument est due au vent, quia été très fort pendant tout ce mois, il a constamment soufflé de l’ouest et du sud-ouest. Le mois des vacances comme on peul appeler le mois d’août, a été favorable à ceux qui ont pu en jouir. Le pluviomètre nous a donné seulement 2mm,4 d’eau ; c’est dire que ce mois tout entier a été trés beau. La moyenne baromètrique n’est pourtant pas très élevée, nous n'avons que 762mm4 ; mais le vent est presque tou- jours venu du nord. La chaleur diurne a été très forte : le maxima nous donne comme moyenne 31°,3 ; mais les nuits étaient assez froides, puisque la moyenne du minima est 70,6. Avec ces grandes chaleurs on com- prend que la vaporisation a été très active ; la somme de l’eau évaporée est 41"2. Le thermomètre, en plein air, nous donne, comme moyenne, 11°, chiffre bien plus élevé que celui du minima abrité. Il ne faut pas s'étonner de cette différence; la terre, en effet, échauffée pendant la journée cède, quand vient la nuit, une partie de sa chaleur au thermomètre placé sur le sol, tandis que l'instrument fixé sous l'abri, étant beaucoup plus élevé, prend la température des couches atmosphériques refroidies par le vent du nord. Si le mois d’août a été beau nous ne pouvons pas en dire autant du mois de septembre. La somme de l’eau indiquée au pluviomèêtre est de 75mm,8. Aussi l’évapo- ration a-t-elle été très faible; nous ne trouvons plus à l’évaporomètre que 16"",9 et la différence psychromé- trique est seulement de 0°,8. Les vents d'ouest ont dominé pendant ce mois. La température nocturne a encore baissé, et le minima sous l'abri, nous donne — 190 — 49,9 comme moyenne; le minima placé en plein air, marque aussi un refroidissement dans le sol; sa moyenne est 9,5. Pourtant la chaleur diurne est encore très forte puisque le maxima nous indique comme moyenne 28°,8. Les pressions atmosphériques ont été très basses, surtout au commencement et à la fin du mois, leur moyenne est 757mm, Le mois d'octobre nous donne une moyenne baro- métrique 760,2 qui, comme nous le constaterons plus loin, est celle de toute l’année. La température est plus basse que celle des mois précédents, nous notons 160 au maxima. Pendant ce mois, le minima non abrité, fournit une moyenne bien moins élevée que le thermo- mêtre couvert : nous trouvons 1408 pour le premier et 81 pour l’autre ; le sol est donc devenu beaucoup plus froid que les couches atmosphériques. La différence psychrométrique est de 1°,2 et la somme d’eau évaporée ne s'élève qu’à 15mm,4, Nous avons eu douze jours de pluie qui ont donné au pluviomètre 42mm9, Le sud- ouest el l’ouest nous ont envoyé le vent pendant presque tout ce mois ; quelques vents du nord, à la fin, ont amené une période de beau temps. En résumé, octobre a été un mois moyen sous tous les rapports. On pourrait appelerle mois de novembre de 1883 un mois de brouillards. Le ciel a été presque constamment couvert ; nous comptons 17 jours de pluie et 71mm9 au pluviomètre. Malgré cette quantité d’eau tombée, l’éva- poralion a été aussi rapide que dans le mois précédent, le psychromètre donne 1°,4 de différence et l’évaporo- mètre une somme de 16mm,2 d’eau réduite en vapeurs ; cela tient au vent, qui étant très fort, activait l’évapo- — 191 — ration. La température diurne s’abaïisse lentement, le maxima marque 11°,9 ; nous avons eu quelques gelées au milieu du mois, mais la chaleur revient bientôt et les minima nous indiquent, sous l'abri 6° et 3°,9 en plein air. La colonne mercurielle donne une moyenne de 760m,4. Le vent nous est venu du sud-ouest et du nord-ouest. On a remarqué des lueurs crépusculaires, pendant presque tout ce mois ; le 26 et le 27 surtout elles ont été magnifiques. Le mois de décembre nous donne la plus haute moyenne barométrique de toute l’année, nous trou- vons 766mm7, Aussi le pluviomètre r’a-1-il enregistré que 11mm6 d’eau pluviale. Un accident arrivé à l’éva- poromètre ne nous a pas permis de noter l’eau réduite en vapeurs, mais le psychromètre indique une atmos- phère assez humide puisque nous n’obtenons qu’un degré de différence entre les deux thermomètres. La température est très élevée, pour ce mois généralement bien froid; le maxima nous donne 7°2, le minima abrité 3°6, et le minima situé à la surface du sol 1°9 comme moyennes. Le vent dominant pendant ce mois est le vent du nord. Deux gelées assez fortes se sont produites ; le 7, le thermomètre est descendu à — 4° et le 8 à — 8°. Trois ou quatre jours épars dans le mois, ont vu le mercure s’abaisser à 1° ou 2 au-dessous de 0°. Telles sont, Messieurs, les observations indiquées par nos instruments, pendant les six derniers mois de l’an- née dernière. En terminant le résumé du 2° semestre de l’année 1882, nousexprimions le désir que l’annéenou- velle nous apportât autant de beaux jours que l’ancienne — 192 — nous en avait donné de mauvais. En jetant un coup d'œil rapide sur les faits météorologiques de l’année 1883, nous verrons si notre vœu s’est réalisé. Ces con- sidérations générales seront comprises plus facilement en les faisant précéder de tableaux donnantles moyennes, les différences et les sommes de toutes les observations inscrites sur nos registres. D. A ) aa a TU A à su nc on s (a AT SA HER MEP) FAN exe a »6" embrbojorcryna) SHOP) — 193 — 6°o7 &'oL 9‘0f L'99L of 8‘o0 | S‘oy | 6'o7 6‘og | G'oy | G'o6 oYT | 9'ecr G‘orr | 097 | 8‘o88 | £‘ole | T'o6c 09 og | 6‘o7 | 9'ol | 8'o8r 3091 | z‘09L | LSL | 7'c9L | 8'8CL 9‘ogy | Hog | g'o6 | S'ot— L‘ogg | G‘o7c | 8097 | £'00f 9fort | 6007 | %'o7 | L'or e‘ooc | 8‘99L | 6‘68L | 2'6EL quooaqlqueaog loop l'qmodes| “op |‘opme | ‘ump | TN | MAY | SRI ‘00 9‘00 g'oy | 8‘ol— %'oTy | 6‘oL T'og | Sos Y°T9L | G‘O9L “HA |‘HTAUef sssrssessres-"csonbri -gwmoiqoÂsd s5079419}1 rique SUES PUITUTN cersesrscesstee pTIXIN cesse 9tiQe CU ss" 91J9mOI0T -sonbupwuoyolisd 39 sanbiypuouioyr ‘sonbiupuwoung sapponsuout souuohouw sa AVETEVL. 13 SOC. 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La somme de l’eau tombée pendant l’année qui nous occupe, est de553mm, {andis qu’en 1889, le dernier semestre seul nous donnait 444mm, Malgré cette dimi- uution sensible de pluie, en consultant les résultats donnés par le psychromètre et l’évaporomètre, nous trouvons une année très humide ; la moyenne annuelle des différences psychrométriques est seulement de 10,3. La température a toujours été très élevée, même dans les mois que l’on est conveuu d’appeler froids, c’est-à- dire en janvier, février, novembre et décembre; la moyenne thermométrique de ces mois est toujours de plusieurs degrés au-dessus de Oo. £e baromètre a éprouvé peu de variations brusques dans son mouve- ment, aussi les orages ont-ils été rares. Au commen- cement de janvier, nous devons pourtant noter une baisse assez subite; en quelques jours, la colonne mercurielle est tombée de 776mm,5 à 734mm, mais cette dépression a été de courte durée. Les vents pluvieux, c’est-à-dire ceux qui viennent de l’ouest, du sud-ouest et du nord-ouest, ont régné pendant presque toute cette année, et c’est à cela, en partie, que nous attri- _buons l'humidité si considérable, constatée plus haut. Je ne puis, Messieurs, terminer ce résumé, sans vous dire un mot d’un phénomène assez extraordinaire, qui s’est produit cette année : je veux parler des lueurs crépusculaires. Vous avez tous remarqué dans les der- niers mois de 4883, cette coloration rouge du ciel qui se produisait soir el matin. Ces lueurs, parfois, étaient magnifiques, nous avons surtout noté celles des 26 et — 196 — 27 novembre. Pour expliquer ce phénomène, plusieurs opinions ont été émises, je me contenterai de vous les présenter, ne cherchant pas à trancher absolument, la queslion. Ces lueurs, d’après la première opinion, seraient des aurores boréales, se produisant, comme cela s’est vu quelquefois, à l’est et à l’ouest, au lieu du nord. Cette explication semble abandonnée, aujourd'hui, parce que nulle part, on n’a signalé de perturbations de l'aiguille aimantée. La deuxième opinion donne pour cause au phéno- mène la présence dans les hautes régions atmosphé- riques de cirrus nombreux, formés de paillettes cris- tallines de glace; la lumière, en se réfléchissant sur leur surface, et en se réfractant au travers de leurs couches transparentes, produisait ces teintes d’un rouge si éclatant. Quelques météorologistes croient que ces lueurs crépuseulaires sont dues à des nuages de poussières cosmiques répandues dans l’espace, nuages que la terre traversait en ce moment. Enfin les autres, et il est probable qu’ils sont dans le vrai, pensent que cette coloration du ciel doit son éclat extraordinaire à des gaz, des fumées et des cendres volcaniques qui seraient venus s'ajouter aux vapeurs normales de l'air. Ces différentes matières auraient été projetées dans l’atmosphère par la trop fameuse éruption du Krakatoa, les 26 et 27 août dernier ; éruption, qui a causé de si épouvantables ravages dans les îles de Java et de Sumatra, et trans- formé complètement le détroit de la Sonde. — 197 — Telles sont, Messieurs, les explications diverses des faits exceptionnels dont nous avons été les témoins. Quoi qu’il en soit, le phénomène était magnifique ; 1l commençait par une belle teinte jaune se montrant soit à l'Orient soit à l'Occident, puis le ciel se nuançait, et enfin atteignait, rapidement, un rouge intense. Mais ces lueurs, malgré tout leur éclat et toute leur beauté, nous ne devons pas désirer les revoir, l'humanité et le commerce paient trop cher un pareil spectacle. Abbé BoucHEr. CHRONIQUES SAUNURONES La Ferme de Vauzelles, à Brain-sur-Allonnes, en 1883. — Le Logis du sieur de Montsoreau, en 1559. La disparition du château de la Coutancière n’a pas privé la commune de Brain de tous les souvenirs qui rattachaient sa propre histoire à celle du comté de Montsoreau. Le touriste, l’archéologue y trouveront encore quelque petit édifice, épars sur son territoire, rappelant le séjour de ces grands seigneurs. Nous allons l'indiquer à ceux que ces souvenirs intéres- sent. En quittant le bourg, par la route de la Loire à Vernoil , pour se diriger vers la Breille, on aperçoit à mi-chemin, sur la droite, une colline d’un vert sombre, boisée qu’elle est par des pins du Maine. Du pied de cette colline surgit une tourelle, cou- ronnée d’un toit ardoisé. Au fur et à mesure qu’on s’en approche, l’œil reconnaît que la tourelle est contiguë — 199 — à un bâtiment, à peu près carré, composé d’un rez-de- chaussée et d’un étage. La toiture, à deux pentes, de ce bâtiment est presque égale en hauteur aux murailles qu’elle abrite. Non loin de cette première maison, il s’en trouve une autre dont la disposition intérieure accuse le caractère religieux d’une chapelle. L'ensemble de ces bâtiments principaux sert, au- jourd’hui, à l'exploitation d’une grande ferme dite de Vauzelles *. Il En 1553, l’usage de ces constructions était tout autre. Elles servaient de Logis au sieur Philippe de Chambes, fils cadet du comte Jean de Montsoreau, et à sa jeune femme, dame Marie de Châteaubriant, qui lui avait apporté en dot ce Logis avec ses dépen- dances, comme héritière de M. François de Château- briand, son oncle, grand doyen de Saint-Maurice d'Angers. La qualité de ce dernier personnage suffit pour expliquer l'édification d’une chapelle importante à côté d’un logis de proportions si modestes. Nonobstant le cadre réduit du Logis de Vauzelles, les époux Philippe de Montsoreau s’y intallèrent avec leur mesnaige. Est-il admissible, nous a-t-on dit, qu’un ménage de 1 Elle appartenait, il y a quarante ans environ, à M. le duc d’Escars, qui l’a vendue à M. Dumény-Louvet, avec les bois et les landes environnants. — 200 — si haute lignée ait pu s'installer dans ces bâtiments ? Des documents authentiques prouvent qu'il en fut ainsi ‘. III Pour en apprécier la réalité, il convient de se rendre compte des mœurs et des habitudes d’une partis de la noblesse au xvie siècle, celle dite campa- gnarde. Ces mœurs, ces habitudes, qui ne ressemblent guère à l’idée qu’on a généralement du noble féodal, cheva- leresque, haut-justicier, ont été retracées devant l’Aca- démie *, lors de la réception de M. Taine, appelé au fauteuil de feu M. Thiers. L’orateur a dit, d’après le marquis de Mirabeau qu'il cite : « La noblesse campagnarde d’autrefois dormait sur de vieux grabats, montait à cheval, se rassemblait à la saint Hubert, ne se quittait qu'après l’Octave de la saint Martin. « Elle menait une vie gaie et dure volontairement, coûtait peu de chose à l'État; elle lui produisait plus par sa résidence et son fumier, etc. » IV De cette première citation, il ressort que la noblesse campagnarde, dans ses jours de repos, s’occupait, sur . 1 Dictionnaire historique de l’Anjou, par M. Port. 2 Séance du 15 janvier 1880. » — 201 — son domaine, à la culture des terres arables, au boise- ment des terrains incultes , au dessèchement des val- luns marécageux, en y établissant des étangs. Celui qui longe la route de Brain à la Breille, en amont de la ferme de Vauzelles, dont il porte le nom, est un modèle des entreprises de ce genre. Par ces travaux divers, le propriétaire, d’un autre âge, préludait au développement de l’agriculture, à la reproduction du gibier, à la pisciculture, deux choses que le braconnage moderne s'applique à détruire. Il faut que la science cherche dans des parcs d’acclima- tation, dans des aquarium, les moyens de conserver en les reproduisant ces provisions nécessaires à l’ali- mentation, sans quoi les espèces finiraient par dispa- raitre. « Tel était, ajoute M. Taine, le vieux gentilhomme énergique, indépendant, porté par toutes les habitudes de son cœur vers les exercices, les rudesses et la liberté des camps et des champs, etc. » V Ces citations littéraires, véritable tableau de mœurs, nous montrent combien les goûts et les habitudes de la noblesse campagnarde d'autrefois différaient des exigences de notre époque pour le confortable d’un logis ; elles nous permettent d'adapter l’étroitesse de celui de Vauzelles aux besoins de ses habitants en 1553. Ils n’y recherchaient qu’un gîte ! FERRARI EE) — 202 — VI Si modeste qu’il fût, ce gîte a gardé le cachet de ses maîtres ; nous ne saurions mieux le représenter à nos lecteurs qu’en empruntant au Dictionnaire historique de l’Anjou les détails qu’il rapporte : « Le Logis conserve une jolie tourelle prismatique d'escalier à six pans; les degrés reposaient autrefois sur un énorme tore flanqué de têtes grossières, dont une seule existe encore; dans une accolade à chou-fleuri s’encadre la porte; au-dessus, deux petites fenêtres dans une accolade xvie siècle. « Vers la gauche, y attient une grande chapelle de deux travées, avec faux arceaux en ogive plaqués ; le portail surmonté d’une accolade fleuronnée; le fond de l'édifice s’éclaire d’une large fenêtre ogivale, et sur la droite d’une petite baie lréflée, etc. » Toutes ces choses, qui se voient à la ferme de Vau- zelles en 1883-84, méritent assurément la visite des amis de l’histoire et de l’archéologie; ils y trouveront en parallèle à l'antique castel de la Coutancière, que nous avons décrit, le Logis d’un gentilhomme campa- gnard. Gette vue leur permettra d’en déduire les cri- tiques et les éloges que l’on peut faire et donner à la puissance seigneuriale des comtes de Montisoreau, à la vie simple, active et laborieuse d’un descendant de cette maison. D'où nous tirons cette conclusion que, dans tous les temps, chaque société a eu sa part des défauts et des qualités inhérentes à la nature humaine. Paul RaATourIs. NOTICE Deux statuettes en bronze, provenant de l’ancien amphithéâtre d'Angers. — Un étalon de capa- cité en pierre. Puisque la seconde édition de l’Inventaire du Musée d’Antiquités d'Angers est achevée, et que plusieurs exemplaires viennent d’être adressés à M. le Ministre de l’Instruction publique, il me sera bien permis de profiter de cette circonstance pour attirer l’attention sur certains numéros qui n’ont été, jusqu’à ce jour, mentionnés que d’une façon sommaire. Ils se reférent à deux époques spéciales : l’une romaine, et l’autre romane. La ville d'Angers, dans la première époque, sans avoir, en matière de goût, obtenu la célébrité des anciennes cités méridionales de la Gaule, n’est pas, toutefois, de ce côté, complètement déshéritée ; 1l me serait aisé d'en fournir la preuve, mais à quoi bon, puisqu'on la trouvera vivante à la série des objets décrits par l’Inventaire ? PREMIÈRE STATUETTE Contentons-nous donc de parler d’abord d’une élé- gante statuette d’Apollon, inscrite sous le n° 1758, et DEV TR RATS. NE OR EE EM NN MES L 5 VRI DR AE UT Si CHE £ MAG CS Hé — 204 — qui a été découverte vers 1812, parmi les ruines de l’amphithéâtre dit de Grohan, à Angers. Cette figurine, haute de OmA1, fut donnée, à noire instigation, par M. Gaultier-Goupil, riche propriétaire, auquel un brocanteur en avait offert 500 francs. Elle est en bronze, avec belle patine, où se voient des traces de dorure. Prise successivement pour un hermaphrodite, un Antinoüs, un faune flüteur, on s'accorde aujourd’hui à y reconnaitre un Apollon, d'autant plus volontiers, qu'au témoignage de Claude Menard, l’amphithéâtre d'Angers (j'ignore, il est vrai, sur quelles données) aurait élé consacré à cette divinité. Notre statuette est d’un si beau style, que de fins connaisseurs l’ont qualifiée de bijou; le fait est qu’au Musée Borbonico de Naples, si riche en figurines, je n’ai rien vu de plus parfait. Assurément ce bel objet n’est point l’œuvre d’un artiste gaulois, j'ajouterai même d’un artiste romain; il fait bien plutôt songer à un travail où le souffle délicat de la Grèce se manifeste. Je disais tout à l’heure qu’on y voit des traces de dorure; or, personne n’ignore que les figurines dorées sont fort appréciées et rares, par cela seul que le bronze, et principalement le bronze doré, a tenté la cupidité des barbares de tous les temps; on peut voir, à ce sujet, une intéressante note de M. Héron de Villefosse, dans un des Bulletins de la Société des Antiquaires de France ‘. 1 Deuxième trimestre de 1883, page 120. MP TNT EE Notre statuette, dont malheureusement la jambe gauche et l’un des bras sont brisés, avait, sous le pied droit, un rivet indiquant qu’elle dut faire partie de certains ornements de grillage, en avant, sans doute, de l’une des places du podium de l’amphithéâtre de Grohan. Évidemment ce bronze fut, pour notre pro- vince, une importation des belles contrées artistiques du Midi. Quoi qu’il en soit, sa présence à notre amphithéâtre semble indiquer le bon goût des vieux Andegaves, aux beaux jours de l’époque romaine. DEUXIÈME STATUETTE Je n’en puis dire autant de leur délicatesse artis- tique vers la fin de l’Empire; en effet, une autre sta- tuelte (bronze) qui fut trouvée dans le même amphi- théâtre en l’année 1881, est assez loin d’avoir les mêmes qualités de style. Un moulage en plâtre, classé sous le n° 1758 A, existe à notre Musée d'Angers. On croit que cette seconde figurine, dont M. de Moulin possède l'original, représente une danseuse ; la pose de son pied rappelle le : Nunc pede hbero pulsanda tellus d'Horace; c’est une séatuette d'applique où plusieurs veulent voir une Victoire; je n’y contredis pas. Ces deux figurines, qui ont certainement servi à la décoration de certaines parties de l’amphithéâtre de Grohan, attestent deux époques différentes, l’une des beaux temps de l’Empire, l’autre du commencement de la décadence. Au point de vue du style, plus de deux siècles les séparent; je sais qu’il est possible de soutenir — 206 — que, malgré leur inégale valeur artistique, elles peuvent être du même temps; toutefois, je penche à croire, et je le répête à dessein, qu’elles doivent, par leur aspect, appartenir à des dates éloignées l’une de l’autre, car s’il est vrai que chaque artiste, digne de ce nom, ait son talent particulier, il ne l’est pas moins que chaque siècle a son génie propre, sa physionomie spéciale ; dis- tinguer le style des époques et celui des écoles, tel est le difficile; c’est affaire de coup d'œil et d'habitude; aussi ne me serais-je pas prononcé avec cette assurance, si mon sentiment n'avait été contrôlé par de plus com- pétents. Notre conjecture établirait donc que l’amphithéâtre d'Angers aurait été en usage durant deux ou trois siècles, ce qui devient d’autant plus probable que d’autres édifices, du même genre, ont attesté de sécu- laires services. ÉTALON DE CAPACITÉ EN PIERRE Passons maintenant à un autre ordre de monuments, je veux dire à un objet de forme assez insolite (n° 2274 A). Large de 076 à 0m77, dans son plus grand diamètre, il est décrit au Musée d’Antiquités comme suit : « x1r° siècle, calcaire dur, cuvette centrale ronde, envi- « ronnée de quatre plus petites cuvettes ovales; le tout « en forme de ce que l’on appelle ordinairement croix à « branches égales; les quatre petites cuvettes corres- « pondent, chacune, par un trou avec la grande qui, « elle-même, débouche au dehors par un bief. » Cet objet fut trouvé, en juillet 1880, à Angers, et — 207 — remis au Musée par M. A. Michel, notre conservaleur- adjoint. Ce bassin, pris d’abord pour un bénitier, puis pour des fonts baptismaux, pourrait bien être tout simple- ment une mesure de capacité, analogue à celle signalée dans le Bulletin de la Société des Antiquaires de France, année 1875, où on lit à la page 46 : « Au commencement de la troisième race, nous « trouvons que l’éfalon de la mine de Paris, qui était « de pierre, se gardait dans la chapelle de Saint-Leufroi, « joignant le parloir aux bourgeois, et que c’était à cel « original qu’il fallait recourir pour ajuster celte mesure: « ad minam lapideam que est in capella sancti Leufredi « referetur,. et illi adæquabitur. » Bref, le petit monument en question du Musée d’An- gers, est-il un étalon de capacité? (Noir dessins du docteur H. Godard, dans le compte-rendu de la session.) Volontiers, je penche de ce côté et m’arrête à cette idée, jusqu’à plus ample lumière; et pourtant je suis intrigué par son plan en croix à branches égales, par son bassin central que dominent ses quatre petites cuvetles qui semblent si bien répondre au symbolisme des quatre sources de l’Éden, en même temps qu’à certain lexle des cérémonies du samedi saint : Et in quatuor flumi- nibus, etc., etc. Tout cela m'intrigue, je le répète, mais ne résout pas la question. C’est égal, il s’est vu tant de monuments qualifiés de religieux, qui sont tombés de ces hauteurs, dans le domaine des choses ordinaires de la vie com- mune (la cuisine monastique à Fontevrault, par exemple), que je me sens porté à ne plus hésiter à voir dans notre — 208 — petit bassin, un objet civil, ce qui, du reste, ne nuit point à sa rareté. À d’autres d’achever la conclusion; espérant, en outre, que nos deux statuettes d’Apolon et de la Victoire de l’époque romaine, comme aussi notre étalon de l’époque romane, mettront quelques personnes en goût de parcourir notre Inventaire et de visiter le Musée d'Antiquités d'Angers, qui ne renferme pas moins de trois mille objets classés : bonne moisson recueillie pendant plus de quarante ans, que l’on doit à la solli- citude de nos diverses administrations municipales, mais surtout au désintéressement de nos concitoyens ; ce qui nous à fait dire que le vrai fondateur du Musée d’Antiquités d'Angers, c'est tout le monde. V. GoDARD-FAULTRIER, Directeur du Musée d'Antiquités d'Angers, Officier de l’Instruction publique, correspondant. Nora. — Cette Notice, approuvée, d’abord, par la Société d'agriculture, sciences et arts d'Angers, a été lue à la Sor- bonne, en avril 1884 et admise à l'impression où elle figure, ayec une planche de dessins du D: H. Godard, dans les publi- cations du Ministère de l’Instruction publique. (Beaux-Arts, 8° session, page 298.) me RS mn — FRANÇOIS BERNIER DOCUMENTS INÉDITS SUR SON SÉJOUR DANS L'INDE La découverte du Cap de Bonne-Espérance avait été une véritable révolution. L’Orient, plein de mystères et de richesses , l'Orient, d’où venaient les parfums et les épices, les soieries et les pierres précieuses, l'Inde et la Chine surtout, exercaient une véritable fascination sur les imaginations vives et curieuses de nos ancêtres. Trouver une voie plus directe que celle des caravanes, qui traversait la Perse, pour atteindre ces contrées pri- vilégiées, avait été le but d’une foule d’esprits aven- tureux et le problème du moyen-âge. Le problème avait été résolu et les puissances maritimes prirent, les unes après les autres, la route que Vasco de Gama venait de révéler. Toutes s’y rencontrèrent et entrèrent bientôt en lutte les unes avec les autres. La France est la puissance maritime qui parut la der- nière aux Indes, et cependant elle y a joué un rôle considérable. Henri IV et Richelieu avaient jeté les yeux du côté de l’Extrême-Orient; ils pensaient avec raison que notre pays ne devait pas rester étranger aux événements qui s’accomplissaient hors de l’Europe. SOC. D’AG. 14 — 210 — Leur politique ne consistait pas seulement à garder nos frontières, elle avait des vues plus larges. Henri IV avait été frappé des bénéfices que les Hollandais retiraient de leur négoce en Asie, et, sur son iniliative, une Com— pagnie des Indes avait été instituée en 1604. Richelieu était dans les mêmes idées, et, en 1642, nous prenons possession de Madagascar et nous fondons plusieurs éta” blissements sur la côte occidentale. En prenant pied sur la grande île africaine, nous voulions, avant tout, nous assurer d’une station sur la route de l’Inde, et nous suivions les mêmes errements que les Portugais, les Hollandais et les Anglais. En 1664, Colbert fondait la fameuse Compagnie des Indes, qu’il considérait comme une œuvre nationale, et dont il attendait de nombreux résultats. Rien n’avait été négligé. Des émissaires avaient été envoyés en Perse. Louis XIV avait écrit au Grand-Mogol afin d'obtenir de lui qu’il fit bon accueil aux Français, et de nouvelles expéditions avaient lieu. À chaque instant l’on donnait l’ordre d’armer quelque navire. Madagascar n’avait plus qu’une importance secondaire; l’Inde était le lieu que l’on proposait avant tout. Aussi dans le courant de 1669, lun des deux directeurs de la Compagnie, Caron, quit- tait l'établissement de Fort-Dauphin avec le vaisseau le Saint-Jean-Baptiste et un houcre', et arrivait, au com- mencement de 1668, à Surate, où il fondait la première factorerie française dans l’Inde. L'autre directeur, de Faye, ne tarda pas à le rejoindre. Surate était alors la ville la plus importante de la 1 Espèce de bâtiment à fond plat. — 211 — côte occidentale de l’Inde. C’était le grand centre com- mercial, le débouché de l’empire Mogol. Les Hollandais et les Anglais y possédaient des comptoirs depuis trois quarts de siècle. En 1639, des Capucinsfrançais ‘y avaient fondé un couvent, dont relevaient de nombreuses mis- sions. À Surate, des gens de toute nation, Persans. Turcs, Arabes, Juifs, Arméniens, Banians, Maures et Gentils affluaient attirés par le riche négoce que l’on pouvait y faire. L’on y parlait toutes les langues et l’on y voyait les costumes les plus disparates. Les vaisseaux se pressaient dans son port. Les principales branches de commerce étaient les perles, les diamants, l’ambre, le muse, l'or, les soieries, les étoffes, les épices et l’in- digo. Surate, avec son enceinte, épaisse de douze pieds, percée de nombreuses portes et flanquée de grosses tours, ses maisons, dont un grand nombre avaient des terrasses transformées en jardins, devait naturellement exciter l'admiration des Européens. Au moment où nous arrivions dans l’Inde, l’empire du Grand-Mogol était à son apogée. Aureng-Zeyb était monté sur le trône en 1659. Sa puissance et ses richesses étaient proverbiales dans tout l'Orient. Il commandait à quarante ou cinquante royaumes, et l’on estimait ses revenus à près d’un milliard. Tavernier nous décrit longuement le faste et le luxe qui étaien! déployés à sa cour. Dans toute l'Asie, l’on parlait de - son trésor de pierres précieuses, de son palais qui avait quatre lieues de tour, de son trône resplendissant d’or 1 Les capucins de Surate appartenaient à la province religieuse de Touraine. — 212 — et d'argent, de ses écuries où étaient entretenus de nom- breux chevaux que l’on nourrissait, disait-on , avec des galettes faites de beurre et de froment. Au xviie siècle, la situation des Européens dans l’Ex- trême-Orient n’avait rien de semblable avec celle qu’ils possèdent aujourd'hui. La manière dont se faisait le commerce dans l'Inde les plaçait forcément dans la dépendance des indigènes. Les étoffes lissées formaient objet d’un trafic considérable. Lorsqu'il s’agissait d'acheter un certain nombre de pièces, le marchand européen avait recours aux Banians, qui lui servaient d’intermédiaires avec les tisserands. L’on agissait de même dans toutes les autres transactions, et l’on ne traitait jamais directement avec le producteur. Au début de leurs expéditions dans l'Inde, les Euro- péens ne songeaient pas à y fonder des colonies, et encore moins prétendaient-1ls à la domination du pays. Ils ne cherchaient qu’à faire du trafic et, dans ce but, ils demandaient l'autorisation d’avoir des factoreries, c’est-à-dire des comptoirs où leurs négociants fixaient leur résidence et étaient à même d'entretenir des rela- tions suivies avec les indigènes. Quelquefois ils parve- naient à se faire concéder une aldée par le prince sur le territoire duquel ils avaient une factorerie. Une aldée consistait en un village et une certaine quantité de terres que l’on faisait cultiver par les Indiens, afin de se procurer plus facilement les produits propres à l’ex- portation. Telle avait été la manière d'agir des Hollan- dais et des Anglais, telle était celle que nous nous pro- posions de suivre en arrivant à Surate. L'entreprise que nous poursuivions était loin d’être AO facile. Il s'agissait de fonder une factorerie dans une ville où nous avions à redouter la jalousie des Hollan- dais et des Anglais, de ne pas éveiller les méfiances des indigènes, de se concilier les sympathies de la cour de Delhy, dont dépendait Surate, et en même temps d'ouvrir de nouveaux débouchés à notre commerce et à notre industrie, et de créer des relations dans l’intérieur du pays. L'un des deux directeurs de la factorerie, Caron, connaissait les affaires du Æaut-Orient, puisqu'il était resté pendant vingt-deux ans au service de la Com- pagnie hollandaise. Malheureusement son caractère hautain et personnel n'avait pas tardé à jeter la divi- sion parmi les Français. Il négligeait de consulter son conseil et de se renseigner près du supérieur des Capu- cins de Surate, le P. Ambroise de Preuilly, ainsi que Colbert le lui avait recommandé. Caron prétendait tout savoir, et son orgueil lui défendait d'écouter qui que ce soit. Une seule fois, nous le voyons se départir de cette ligne de conduite, lorsqu'il s’adressa à notre compatriote, François Bernier. Bernier naquit en 4620, à Joué, dans les environs de Chemillé. En 1649, nous le voyons suivre, à Paris, les cours de Gassendi, en compagnie de Chapelle, Molière, Hesnault et Cyrano de Bergerac. De 1647 à 1690, il prélude, par une longue course à travers l'Europe, à l’entreprise qui devait plus tard illustrer son nom, et visite la Pologne, l’Allemagne et l'Italie. De retour en France, Bernier étudie la médecine et se fait recevoir docteur à la Faculté de Montpellier, en 1652. En 1656, il s'embarque pour l'Orient. Bernier visita d’abord la Palestine et séjourna plus d’un an en Égypte, où il fut — 214 — malade de la peste. Forcé de renoncer à son projet de pénétrer dans l’intérieur de l'Afrique, en passant par l’Abyssinie, il se rendit à Surate. L’Inde était alors ravagée par la guerre civile. Les quatre fils du dernier Mogol se disputaient le trône, le troisième, Aureng-Zeyb, finit par l'emporter. Désireux de rester plusieurs années dans le pays, Bernier se fit attacher à sa cour en qua- lité de médecin. L’amitié particulière qu'il contracta avec le vizir, Danechmend, lui permit de visiter, de 1664 à 1665, le royaume de Cachemyr; il fut ainsi le premier Européen à explorer ce pays mystérieux. En 1668, Bernier avait quitté la cour du Grand-Mogol et se trouvait à Surate, où il attendait l’occasion pour s’'embarquer et revenir en Europe. À ce moment Caron arrivait, et, avec son esprit perspicace, il vit de suite quels avantages il pourrait recueillir en se mettant en rapport avec notre compatriote qui était au courant, mieux que personne, des intrigues des cours de l’Inde et de la conduite que nous devions y tenir si nous vou- lions réussir. Caron ne cessait de le questionner dans les entretiens qu’il avait avec lui, et Bernier s’efforçait de le satisfaire en lui donnant de nombreux renseigne- ments sur les pays qu’il avait visités et sur les person- nages qu’il avait connus, et il se décida même, sur la demande de Caron, à écrire un rapport, qu’il intitula : « Mémoire sur l'établissement du commerce dans les Indes. » Ce mémoire est accompagné d’une lettre adressée aux directeurs de la Compagnie des Indes chargés de diriger la factorerie de Surate *. 1 Les originaux de ces deux documents se trouvent aux Archives des colonies. — 215 — MÉMOIRE SUR L'ÉTABLISSEMENT DU COMMERCE DANS LES INDES « Me doutant, avec quelque fondement, que sil ya quelque chose que nos ennemis aient fait entendre à la cour, c’est que les Français appartiennent à un roi qui est très puissant, que c’est une nation guerrière, impé- rieuse et turbulente, il me semble qu’il serait bon, dans le commencement, de lâcher d’ôter tout sujet à Aureng-Zeyb et aux ministres d'appréhender qu'ils ne deviennent un jour trop puissants dans ces quartiers. Car l’on se souvient très bien à la cour de ce qu’ont été autrefois les Portugais. L’on a déjà beaucoup de jalousie de la puissance des Hollandais, en voyant qu’ils tiennent, comme à leur porte, toutes ces forteresses de Ceylan, de Palicatte et de Cochin, qu’ils vendent leurs épices et leur cuivre à un prix excessif, plus grand que ne firent jamais les Portugais, qu’ils se sont fait rendre justice par force, menaçant et prenant les vaisseaux de Moka qui portent les âges ou pêlerins à La Mecque, et en reviennent chargés de riches marchandises. L’on voit qu'ils tâchent de ruiner, par toutes sortes d'artifices, le trafic des gens du pays. Ce qu’élant ainsi, il suffira, à mon avis, de parler médiocrement de la puissance el de la grandeur de notre roi, nous contentani de dire simplement que c’est un des grands du Frangistan, sans affecter si fort de dire qu’il soit beaucoup plus grand que celui d'Angleterre, de Portugal, de Hollande et de Dannemarck. Car ils ne connaissent que ceux-là, ils apprendront assez, Dieu aidant, avec le temps, ce que — 216 — s’enestet il n’est pas encore temps, il me semble encore, de discourir à ce sujet. Peut-être même faut-il nier que notre roi ait part dans la Compagnie. « Il me semble encore qu’il serait à propos de ne paraître que médiocre dans l’ambassade de Delhy, et qu’ainsi il suffit que M. Caron seulement ou M. de Faye y allassent. L’un ou l’autre demeurerait ici pour régler tous ces nouveaux venus et mettre ordre à la désunion qui ne manquera pas, comme je le vois déjà assez, et qu’il irait faire l'ambassade de Perse en même temps que celle de l’Industan, ce qui pourrait ôter tout sujet de jalousie au roi de Perse. Quoiqu'il fût à souhaiter que ce fût un Français qui allât pour ambassadeur à Delhy, je ne laisse pas de croire qu’il ne fut plus à propos que ce füt M. Caron‘ qui y allät, non pas certes que je doute aucunement de la capacité de M. de Faye, mais parce qu'il n’y trouverait peut-être pas toute la satisfaction qu’on se pourrait imaginer. Cette cour ici, est toute autre que celle de Perse, où l’on affecte par politique et pour les intérêts de l’État, de faire honneur aux Francs. Puis enfin, il est besoin ici d’un si grand flegme, qu’à peine le saurait-on croire. Je crois même que douze ou quinze personnes, de gens bien faits, bien posés et de bonne intelligence suffiraient. Les Hollan- dais, dans leur dernière ambassade, n’en avaient pas la moitié. Un palleky, deux beaux carrosses, quelques beaux chevaux pourraient assez, me semble, suffire, sans affecter de même tant de cette racaille de valets de ce pays-ci, puisque ce n’est point cela du tout ce qui 1 Caron n'était pas Francais, il était originaire de Bruxelles. — 217 — fait paraître qui nous sommes. Il n’y aura point de mal que tout sente le marchand et l'étranger nouveau venu, qui n’a pas toutes ses commodités. « Ge qu’il faut affecter, c’est d’avoir un beau et riche présent. N'oubliez pas d’en faire part à Saferkan, le vizir. La réussite des affaires dépend principalement de lui, ainsi que la forme, la teneur en dépêches de tous ces firmans différents, qui sont nécessaires pour l'établissement des feturies. Les lettres de recomman- dation qu’il pourra écrire aux gouverneurs de province, vous seront d’un grand secours. Si même l’on avait quelque chose de galant pour présenter à son fils, Namdarkan, et à sa femme, cela ne pourrait que beau- coup servir. Ce jeune Omrah est fort serviable et ne hait pas les Français. Sa femme est une des plus puis- santes, impérieuses et intrigueuses dames de la cour. N'oubliez pas aussi de gagner par promesses et par présents quelques-uns de ses premiers officiers. On ne saurait croire combien ces gens-là peuvent servir pour faire metire dans les firmans ce qui est nécessaire, et faire avancer et dépêcher les affaires. Il y a un nommé Mullahsalle, dans sa maison, qui a beaucoup de pouvoir et est assez affectionné aux Français. Du moins était-il grand ami du défunt Père Buzée, Jésuite, et le servait beaucoup. Mais je ne crois pas que ce soit assez. C’est de quoi il faut bien et adroitement s’enquêter. « J'ai vu M. Adrican, commandant de Sourate, ambas- sadeur des Hollandais, qui se trouvait assez embarrassé pour s'être voulu servir de l’autre Omrah et non du vizir. Il pensait faire avancer ses affaires, qui, au con- traire, reculaient et traînaient en longueur. Ces Omrahs — 218 — ont de grandes jalousies les uns contre les autres, de sorte que je croirais qu’il serait quasi le meilleur de s’en tenir à Jaferkan et à sa maison. Néanmoins, si l’on jugeait que Jaferkan n’agit pas de bon pied, on en emploierait quelque autre. Je vous dirai qu’il y en a un qui s’appelle Dinanetkan, dont le fils Restamkan, notre grand ami, parle le portugais et le latin. Lequel est trés puissant auprès du roi, très serviable, grand ami des Français et homme à dire quelque chose en secret au roi. Plut à Dieu qu’on ne füt pas obligé, dans notre affaire, de s'adresser au vizir, mais c’est une affaire publique. Je ne conseillerais pas de s’adresser à d’autres qu’à Dinanetkan. Je vous dirai encore qu’il y a encore Danechmendkan, qui est très puissant auprès du roi pour lui parler quand bon lui semble et pour être comme son maître et docteur et conseiller. Mais ils ne sont pas irop amis ensemble, Jaferkan et lui, parce que Danechmendkan le porte très haut, étant le savant de l'Inde, et qu’il est ennemi mortel de cet autre docteur Mullah-Salle, de Jaferkan. D’ailleurs faisant le grand Mahométan, je l'ai toujours vu appréhender de se mettre dans les affaires des Frangis. Néanmoins, comme je l'ai servi tant d'années el que je sais-qu’il me con- sidère beaucoup, et que je lui ai promis comme à Dinanetkan de lui envoyer des livres et des étoffes du Frangistan, certainement à ma considération, il pourrait faire beaucoup, mais c’est une affaire qu’on devrait traiter avec grande prudence, en secret, à cause de celte jalousie que j'ai dit. Il me semble qu’on ne le devrait point employer qu’à l'extrémité, et si l’on voyait que Jaferkan voulûüt excessivement traîner les affaires en — 219 — longueur. En tout cas, il n’y aurait pas de mal de lui faire quelque petit présent comme de ma part et comme base qu’on m'aurait envoyé d'Europe, dans la croyance qu’on en a eu que c'était pour lui et que je lui avais donné. Car c’est une personne que je prétends bien entretenir et me servir au besoin pour les affaires de la Compagnie. Or, je croirais surtout nécessaire de faire bien entendre à Jaferkan et avec adresse, le vrai motif qu'ont eu les Français de faire cette Compagnie et de venir aux Indes, afin de leur pouvoir ôter, comme j'ai dit, tout mauvais soupçon. et de leur faire bien com- prendre que c’est pour le bien de lIndostan, tâächant bien de leur faire comprendre que de tous les Frangis, les plus industrieux et les plus grands ouvriers sont les Français; que c’est en France que se vendent presque toutes les marchandises des pays étrangers pour y être mis en œuvre, que la France est comme.le Karkané général du Frangistan et comme le magasin où se viennent fournir de manufactures toutes les nations de ce côlé-là. Qu'ils ont, par conséquent, besoin de mar- _chandises de toute sorte, qu’ils sont obligés d’en aller chercher dans les pays étrangers, comme dans l'Italie et le royaume de Kandeker, au grand seigneur et autres, qui se vendent là bien plus cher que dans l’Indostan; qu’ils sont obligés de prendre quantité de celles que les Anglais et Hollandais apportent des Indes et les achètent trés cher, au prix qu’ils veulent. Pour ces raisons, les marchands de France assemblés sont allés prier leur roi de souffrir qu’ils fissent une Compagnie comme les Anglais et les Hollandais, pour venir eux-mêmes aux Indes y trafiquer, y apporter leur écarlate et autres — 220 — marchandises, et en rapporter celles que les Hollandais en rapportent, et les viennent vendre successivement chez les marchands Français, considérant que les Hol- landais et les Anglais feront peut-être par jalousie leur possible pour empêcher leur dessein, parce qu’ils voient qu'ils n’apporteront plus tant de marchandises de l’In- dostan en France et qu’ils craignent d’être obligés de les acheter dans les Indes plus cher qu’ils n’avaient accoutumé, ont prié le roi de France, leur maître, de les assister dans cette entreprise. C’est pour cela qu’il a écrit en leur faveur au roi de l’Indostan, en sachant que les rois considèrent toujours leurs lettres et les prières les uns des autres, il leur a fait espérer que Aureng-Zeyb les recevrait dans son royaume, les pro- tégerait particulièrement et leur accorderait les mêmes privilèges qu'aux Hollandais et Anglais. Afin de les encourager*-davantage dans celte entreprise, il leur a concédé de grands privilèges sur toutes les marchan- dises de son royaume, et parce qu’ils ne savent pas encore les coutumes du pays, il a attiré pour leur ser- vice de tous côtés, par sa bienveillance et honorables présents, quantité de personnes qui avaient déjà été aux Indes, et que surtout il leur a donné pour les conduire et les diriger, le sieur Caron dont il connaissait la pru- dence, la probité, sachant la bonne renommée qu’il s’est acquise dans ces quartiers et dans le négoce et dans les charges honorables qu’il y a exercées pendant prés de trente ans. « Ce sont là des choses si considérables de bien faire entendre à la cour que je les ai écrites à Nana- bedanchneéndkan afin de prévenir l'esprit du roi, je ne — 291 — fais point de doute qu’il n’ait montré ma lettre au roi, mais ce sont choses qu’on ne saurait trop inculquer, et surtout à Jaferkan. C’est pourquoi je les ai rap- portées « Pour ce qui est de l'affaire de Huges, qui vint, ilya quelques années, faire cette belle affaire de Moka, si l’on venait à en parler, je serais d'avis de dissimuler là- dessus adroïtement tant qu’on pourrait, et puis si l’on pressait, de dire qu’il n’est pas Français, mais Hollan- dais, et si l’on juge à propos, que les Français n’avaient jamais été aux Indes, et qu’il fallait croire qu’il les eût trompés en leur faisant croire qu’il allait aux Canaries ou en quelques îles. Ce sont des choses que j'ai déjà dit, parce que cette affaire m’est passée par les mains. J'ai fait tout connaître à M. Caron, je sauvais l’honneur de ma nation. Pour moi, je ne serais pas d’avis que cet homme-là vint du moins sitôt dans l’Indostan. Nos envieux pourraient bien trouver prétexte là-dessous pour nous rendre odieux, de nous vouloir faire passer pour pirates, nous voyant appuyer un homme qui passe ici pour pirate et pour pirate de Moka, qui est le pis de tous. Tous les Mahométans étaient très jaloux de ces vais- sceaux qui portent leurs agis ou pèlerins à La Mecque. « Pour ce qui est de l’aflaire du nommé Beber et de la Boulaye, quoique ce soit un assassinat qu’il faut écrire en lettres rouges, pour en témoigner quelque jour nos sentiments en temps et lieu, néanmoins pour le présent, je serais d’avis qu’on n’en parlât pas du tout, et que même on désapprouvât fort en général toute leur con- duite de gens qui ne savaient pas bien les choses, qui étaient trop jeunes et outrepassaient les ordres qu’on 12 — 222 — leur avait donnés, quoique en effet ce soit peut-être le contraire. Pour ce qui est des 25,000 roupies qu’on lui:a données, tant pour son sang que pour ses hardes, je serais d’avis qu’on n’en parlât point du tout. Ce serait une chose trop basse que de les vouloir rendre, et ce serait aussi trop autoriser cet assassinat. La grandeur du présent qu’on fera pourra suppléer à tout. Du reste, il faudra dissimuler adroitement et s’en tenir toujours à dire en général qu'ils se sont mal conduits. Ce sera par après à la prudence de nos vues, les chefs à juger de cela lorsqu'ils se seront enquêtés comment toutes les choses se sont passées. « Pour ce qui est de la lettre du roi, on pourra toujours témoigner qu’on souhaiterait fort de la donner en main propre. Néanmoins je ne crois pas qu’il se faille obstiner là dessus, d’autant plus que c’est une chose que je n’ai vu concéder qu'à l'ambassadeur de Perse, et encore à toute peine. Je croirais bien plutôt qu’on se devrait arrêter à l'intention de notre monarque, qui n’envoie des lettres que pour aider les affaires de la Compagnie et non pas pour les détruire. Ce qui pourrait arriver, si on voulait trop opiniâtrer sur une pointe d'honneur. « Pour ce qui est du salam, ils n’empêcheront point qu’on le fasse en entrant ou en sortant devant le roi et à notre mode. Néanmoins, si après avoir déjà reçu ce sera- pah ou veste, l’on s’en venait comme c’est la coutume de faire le salam à l’Indien, mettant la main trois fois sur la tête et s’abaissant jusqu’à terre, je ne vois pas d’in- convénient de le faire, d'autant plus que je n’ai aussi jamais vu aucun ambassadeur quine l'ait fait, si ce n’est celui de Perse qui ne vint pas pour son intérêt comme — 223 — nous, mais seulement par honneur. D'ailleurs il est Mahométan, et par conséquent plus considéré que nous qui sommes chrétiens par la grâce de Dieu. « J'ajouterai ici que M Adrican, pour n’avoir pas voulu faire donner quelque chose aux premiers portiers avant que d'entrer, se trouvait fort maltraité en entrant au chä- teau, On ne saurait croire combien cette racaille de gens est insolente et capable de faire affront, au lieu que si on les sait contenter adroitement, ils servent, ils font faire place et vous font honneur. «Il y a encore une autre sorte de canalle qu’il ne faut pas mécontenter, ce sont les Paydas, qui viennent demander ainam, en raison du serapah que le roi fait donner. Ils sont aussi capables de faire des plaisirs plus qu'on ne croirait. Ce sont là de petites choses, mais il ne faut pourtant pas les négliger. Joferkan pourrait bien, outre quelques serapahs, faire queiques présents de chevaux. De lui, l’on n’oserait rien refuser. Cepen- dant il faudra éviter avec adresse ce présent, tant qu’on pourra, surtout des autres Omrahs, car il faut se souvenir que tous ne donnent rien qu’en espérant du triple. «J'oubliais de dire que si Ranchnara-Beigum est en- core dans la grande faveur, il serait peut-être à propos de lui faire quelque présent ; mais c’est une chose dont il se faudrait enquêter, car je crois la chose quasi- superflue. « J’oubliais encore une chose que je devais dire dés le commencement. En partant d'ici, 1l serait à propos de prendre des lettres ici du vizir de Jaferkan et en même temps des gouverneurs, s'ils en offraient volontiers, — 224 — comme ils ne manqueraient pas pour se faire valoir et dans l'espérance qu’ils ont qu’on les saura reconnaître. Il faut toujours se souvenir de ne faire fond que sur Jaferkan. « Lorsqu'on arrivera à Agra , qui est à six journées de Delhy, il faudra dépêcher devant quelques hommes d’esprit avec un truchement qui aillent trouver Jaferkan, l’avertir de la venue de l’ambassadeur et le supplier de sa part de lui faire trouver une maison. S'il en donne une, à la bonne heure; s’il traîne l'affaire en longueur, comme il fit à M. Adrican, prendre doucement patience, en chercher une à louer et néanmoins ne la prendre _ point qu’on ne l'ait averti, ainsi que le cotonal du quar- tier. Faire tout apporter de Sourate pour la garnir à la façon du pays. Celle de Mirza Sulkarnim fut celle qu’on donna aux ambassadeurs d’Éthiopie. Ajoutons encore en général que montrer de la chicheté dans cette occa- sion serait se vouloir rendre méprisable. Il ne faut pourtant pas se jeter dans l'excès, car il faut toujours se souvenir qu’on est des marchands et non pas des ambassadeurs de Perse qui, comme je l’ai déjà dit, ne viennent ici que pour l’honneur et pour paraître. « Ajoutons encore que je ne vois rien de si important dans cette affaire pour la bien faire recevoir, pour bien faire entendre ses sentiments et se tirer de mille petits inconvénients qui arriveront sans doute, qu’un bon et fidèle iruchement, bien entendu et bien expert des façons de faire du pays et des cours. Il n’y a diligence qu’on ne puisse faire pour en trouver quelque bon. Car il ne sera pas seulement nécessaire dans Delhy, mais dans l’ambassade qu’il faudra faire à Golconde, et près de ces gouverneurs où l’on établira des féturies comme Patna, le Bengale, Mazulipatam, Aurengabad. «Au service du sultan, il y a un nommé Jean-Baptiste Chomber, de parents Français, natif d'Alep, élevé aux écoles en France et en Iialie, et dans la marchandise à Alep. Je ne connais pas de langue qu’il ne sache par- faitement et lire etécrire. Je sais qu’il sera très content d’entrer dans le service de la Compagnie. On lui pour- rait écrire et faire des propositions. Une chose serait à prendre garde; lui tenir un peu la bride sur le cou, lui faire bien adroitement entendre qu’il ne faut pas prétendre être le maïître. Du reste, je le crois très capable de servir en tout. QIl y a aussi dans Agra le fils d’un Français nommé signor Jokomo, bien paisible et honnête homme qui lit et écrit, parle et entend parfaitement bien le Persien, l’Indien et le Portugais. Mais il est un peu timide, et à mon avis un peu têtu et lent. Néanmoins, qui le saurait prendre de sorte, je crois qu’on en pourrait tirer de bons services et qu’il serait homme (il est à présent pauvre) de se capliver à prendre parti pour la Com- pagnie. Q Il y a aussi dans Delhy, M. Saint-Jacques, Français nalif de La Palisse, notre bon ami, médecin du roi à gages, fort honorable. Il est marié à Delhy, mais sa femme dégoütée, s’est faite More cette année pour se passer de lui. C’est un homme qui a de grandes intrigues et qui entend fort bien le cours des affaires du Derbar. Il peut donner beaucoup d'intelligence et servir pour faire acheminer et hâter les affaires. Il aime l'honneur et ne hait pas les présents. Nonobstant, il me semble SOC. D’AG. 15 — 226 — qu'il n’est pas homme à négliger, non-seulement pour le présent, mais pour l'avenir. Car il faut savoir qu’il surviendra toujours quelque embarras dans les pro- vinces. C’est ce que je sais par l’expérience que j'ai des affaires des Hollandais, où j'ai souvent été employé. Aussi il faudra toujours, ou du moins au commencement, avoir un homme en cour avec lequel l’on ait correspon- dance pour tenir main aux affaires, afin de n’être pas obligé d'envoyer des hommes exprès qu’on voudra tou- jours manger quand on les verra. « Quoique les firmans qu’on pourra obtenir du roi et emporter soient en bonne forme, néanmoins dans les provinces, lorsqu'il s’agira de l’exécution, les gouver- neurs et les officiers qui veulent manger trouveront toujours quelques anicroches; aussi c’est pour cela que J'ai toujours entendu dire aux chefs les plus intel- ligents des Hollandais que la grande difficulté du négoce de l'Inde ne réside pas dans la vente ni dans l'achat des marchandises, des esprits médiocres s’y rendent bientôt maîtres; mais bien savoir se garantir des avanies des gouverneurs de province et de leurs fourbes, flegmatiques et affamés d'officiers; je dis flegmatiques, car je les vois agir. Vous ne diriez pas qu'ils y touchassent, tant vous les voyez aller posément, aussi n'y a-t il ni Turcs, ni Juifs qui vous sachent mieux faire venir à leur point. De sorte que ce n’est pas sans raison que les Portugais disent de ces gens-cy : Non que voisin Palabre. « J’oubliais encore à dire que, dans ces chemins, il faut prendre garde à une chose, qu’il ne se joigne une infinité de charreties chargées de marchandises qu’on — 227 — veut faire passer et entrer dans Agra et Delhy sans rien payer, à l'ombre de M. l'ambassadeur. S'en défaire du moins de la plus grande part et doucement et sans grand bruit, ce serait le meilleur. Au reste, donner des intel- ligences plus particulières sur ce qui peut arriver. C’est ce que je vois difficile, parce que cela dépend de la diversité des affaires qu’il est impossible de prévoir. C’est pourquoi, je me contenterai seulement de dire en général qu’il sera absolument nécessaire de faire bonne el ample provision de prudence, de patience, ne s’ima- ginant pas qu’on aille avoir affaire à des gens sans esprit ou qui soient fort civilisés à notre façon, et affectent si fort de nous faire de l'honneur ou qui se soucient de beaucoup, mais bien se représenter qu’ils sont maho- mélans et non chrétiens, et par conséquent nous haïssent autant que nous les haïssons et nous voudraient voir bien loin de leurs yeux, n’était que ce leur est un mal nécessaire que d’avoir des Frangis, et que nous leur fassions entrer l’or et l'argent dans leur pays. Il faut s’imaginer encore qu’étant mahométans, ils n’oseraient nous faire beaucoup d'honneur, quand même ils le voudraient, de peur qu’on les méprisât ou soupçonnât eux-mêmes, Ainsi, il nous faut doucement de l'honneur qu'ils nous font sans montrer de déplaisir, nous con- tentant de dire en nous-mêmes ce que M. Adrican, ambassadeur des Hollandais, m’a dit beaucoup de fois en confidence : « Jamais plus, monsieur Bernier, jamais plus d’ambassadeur au Grand-Mogol. » Ce sont de mauvais pas dont il faut se tirer avec prudence et patience, faute de mieux qu'on peut tirer d'eux une parte de ce qu’on prétend, et du reste se consoler et dire toujours qu’on est très satisfait. = 2e « Il faudra, à la vérité, presser l’expédition de ces affaires, mais ne pas s’impatienter si fort, et c’est prin- cipalement sur cette expédition d’affaires qu’il faudra de diligence, de patience, du phlegme, et vaincre notre humeur française. Comme ces gens-là sont froids, il n’y a lieu au monde où les affaires aillent si lentement, outre qu'ils croient qu’il y va de leur honneur et de leur grandeur de tenir longtemps les ambassadeurs à la cour, comme si le roi et les grands étaient toujours occupés dans les plus grandes affaires. Ils croient qu'avec le temps ils découvriront toujours mieux l’hu- meur el les desseins. Puis enfin, on dirait qu’ils affec- teraient de mépriser les étrangers pour imprimer dans le cœur de leurs sujets une idée de leur grandeur propre. Enfin, ils s’élonnent de voir devant leurs yeux des gens qui sont venus du bout du monde pour trouver leur roi. Cependant il n’est fait quasi pas de cas. Patience donc encore un coup, prudence, diligence et phlegme, et puis grandissime respect et honneur à M. l'ambassadeur, les uns et les autres grande union et grand secret, et tout ira bien avec l’aide de Dieu. «Avant que nos Messieurs partent de Delhy, il ne faudra pas manquer de prendre de Jaferkan une lettre de recommandation pour l’ambassadeur du Mogol, qui sera à Golconde. C’est une chose très nécessaire. Car c’est un démon et un avare vilain qui veut, pour son intérêt, que toutes ces affaires passent entre ses mains. Il fait à la cour ce qu’il veut sans que qui que ce soit lui ose rien dire. Dieu garde qu’il vint à être contre nous. Quand nos messieurs seront de retour à Agra, ils pourront savoir exactement quel trafic s’y fait. Cependant je leur transcrirai ce que j'ai écrit dans le EN) Oh 2 ji an U journal de mon voyage. Les Hollandais ont dans Agra une féturie. Autrefois, ils y trouvaient leur compte dans l’écarlate, les miroirs grands et peuits, les den- telles simples et celles d’or et d'argent et dans la quin- caillerie, comme aussi dans l’indigo, qui se recueille autour et principalement à Biane, à deux journées d’Agra, où ils ont une maison pour cela. Ils vont une fois l’année, dans la moisson, comme encore dans toutes ces toiles qu’ils tirent tant de Gélalpour que de Laknau, à sept ou huit journées d’Agra, où ils ont aussi une maison. Ils y envoient quelquefois de leurs gens une fois l’année. Mais à présent, je ne sais si c’est à cause que les Arméniens font ce même trafic, ou parce qu’il y a si loin de là à Souratte, où il faut que tout se trans- porte, ou parce qu'il arrive toujours que, si quelque désordre dans leur caravane, la faisant venir à cause du beau et court chemin du côté d’Amandabal, et faisant passer par dessus toutes ces terres des rajahs, tant il y a qu'ils se plaignent à présent fort qu’il n’y a pas grand profit. Néanmoins ils n’abandonneront pas, je crois, celte féturie, comme ont fait les Anglais, quand cela ne serait qu’à raison de leurs épiceries, qu’ils vendent trés bien et pour avoir là des gens proches de la cour, qui veillent à leurs affaires, se pouvant faire qu’il arrive toujours quelque embarras dans quelqu’une de leurs féturies à cause de la tyrannie des gouverneurs et de leurs affamés d'officiers. « De tout ceci, on pourra juger s’il serait à propos d'établir là une féturie. Pour moi, je ne crois pas, d’autant plus que si l’on a besoin d’indigo, l’on en trouve toujours dans Souratte, ou bien l’on pourra faire — 230 — comme les Arméniens et comme ont fait quelquefois les Anglais, d'envoyer de là à la féturie de Souratte une ou deux personnes pour le temps de la récolte. « Nos messieurs pourront encore en Agra se séparer pour gagner du temps et faire deux bandes, dont l’une serait destinée pour le Bengale et l’autre pour l’am- bassadeur de Golconde, et ensuite pour l'établissement d’une féturie dans Mazulipatam. Quand ils seront venus à Bremapour, à dix à douze journées d'ici, ils pourront prendre le chemin de Patri, laissant Aurengabad à droite, parce qu’en passant par Aurengabad, ils seraient peut-être obligés d’aller voir Sultan Maazum, le frère du roi, qui est gouverneur du pays, ce qui ne se peut honnêtement sans faire quelque présent. « Quand ils seront proche de Golconde, -ils pourront envoyer aussi un homme droit au dabir Seid Mousafer, qui est comme Jaferkan dans Delhy, et le supplier de donner une maison pour l'ambassadeur. Pour conduire cette affaire avec intelligence, il me semble qu’il est bon de savoir que le gouverneur de cette cour de Golconde est à présent fort mauvais. Le roi ne sort jamais de la forteresse et ne se laisse voir quasi à personne, et semble avoir abandonné le gouvernement. L’on n’y voit qu’in- justices et confusions. C’est pourquoi il sera bien besoin de prudence, aussi bien qu’à Delhy. Je crois que les Hollandais, qui ont là leur féturie depuis sept ou huit ans, s’ils entreprenaient contre nous, seraient capables d’embarrasser les affaires et les faire traîner en lon- oueur aussi bien que dans Delhy. Néanmoins, si laf- faire est conduite avec adresse, elle ne peut que réussir, d’autant plus que je sais que le Dabir hait à mort les — 231 — Hollandais à cause des menaces qu’ils ont fait ces der- nières années à raison de ce vaisseau anglais qu'ils voulaient prendre dans le port de Mazulipatam. Le gou- verneur fit assiéger leurs féturies, les menaçant que, s’ils le prenaient, il mettrait le feu dans leurs féluries et les tuerait tous. Depuis ils n’ont jamais voulu signer qu'ils ne prendraient point les vaisseaux dans le port. « Je croirais donc, pour bien faire, que surtout il fau- drait là, comme dans Delhy, bien prévenir l'esprit du Dabir, lui faisant bien comprendre quel est le motif qui a porté les Français à venir aux Indes, et lui bien déduire toutes ces raisons ci-dessus écrites, les lui pré- senter écrites dans un papier, afin qu’il les pût mieux goûter et en informer le roi. C’est me semble le vrai moyen de rompre le cou à tout ce que nos envieux auraient pu faire entendre, Il y a deux personnes bien capables d'être les médiateurs et qui ne manqueront pas de s’offrir à l'être. L’une s’appelle Hoknazar, Persien, Arménien de caste, lequel s’est fait là mahométan, mais pourtant aime toujours les Arméniens. Il a grand accès auprès du Dabir, et même auprès du roi. Cest un grand seigneur, mais garde que par intérêt il ne soit d'accord avec les Hollandais. Cependant je sais que, quoi qu’il leur fasse bonne mine, il ne les aime pas. L'autre est l'ambassadeur du Mogol, il est comme un petit roi. Mais c’est un homme extrêmement intéressé. Au cas où on voulüt se servir de Hoknazar, et il n’y aurait pas d'inconvénient parce qu’il est de la maison du roi, il faudrait bien se garder de lui abandonner toute l'affaire entre les mains. Il faudra toujours, quand on ira vers le Dabir, un interprète, et ne pas permettre qu’il aille — 232 — devant le roi, seulement le prier comme ami de bien représenter nos motifs au Dabir en particulier, et de faire avancer et dépêcher nos affaires. Si l’on veut se servir de l’ambassadeur du Mogol, il faudra aussi se donner de garde de lui abandonner l'affaire. Le Dabir aurait toujours de la jalousie s’il croyait qu'il s’en mêlât; et puis, comme je l’ai dit, c’est un homme qui, par intérêt, est capable de tout faire. Il faut donc avoir la prudence de l’avoir pour ami, quand ce ne serait que pour l’empêcher de nous nuire. « En cas qu’on vit que le Dabir n’agit pas de bon pied et que l'affaire trainât en longueur, il y a un grand remède. C’est d'aller droit à Neizamkan, général de l’armée, lui faire entendre par écrit nos motifs et le supplier de nous favoriser contre la brigue de nos enne- mis. C’est un homme très puissant, très affectionné au bien de l’État, qui ne se soucie pas du Dabir ni de qui que ce soit, et qui va parler au roi quand bon lui semble. En tous cas, il ne faudra pas sortir de Golconde sans l'aller voir et lui faire quelque petit présent. « La féturie des Hollandais est une des meilleures de tout l’Indostan, tant à raison de cette grande quantité de toiles et gros chite qui s’achètent à bon marché là, autour, et se transportent à Mazulipalam et puis à raison que c’est le rendez-vous de tous les diamants. Néanmoins, je ne crois pas que l’on se doive presser d’y établir une féturie parce que cette féturie suppose des féturies au Japon, au Tunquin et autres. « J’oubliais à dire que le chef de cette féturie qui s’ap- pelle Niendole est celui-là même qui l’a fondée par son esprit et les intrigues d’un nommé le Narzou le couratier; — 233 — il est fort de mes amis, mais je ne crois pas qu’il applique son esprit à vous servir. Îl vous sera facile d'établir la féturie de Mazulipatam. Tout le monde en sera ravi d'autant plus que les Hollandais sont assez haïs. Il n’y aura qu’à capturer un peu les bonnes grâces du gouverneur par quelque honnête présent el l’entretenir de grandes espérances. « Nous avons là un Junet, marchand français qui depuis sept ou huit ans trafique à la faveur des Anglais. Il est extraordinairement versé dans le trafic du pays, a le cœur bien français, il peut vous servir. Nous avons jeté ensemble l'œil sur une maison qui était celle des Danois, il promet monts et merveilles, « qu’ils viennent » me disait-il « dans de vos vaisseaux, qu’ils viennent et je fais fort d’avoir tout le fret nécessaire pour la Perse et Moka. Car les marchands vous attendent et haïssent les Hollandais. » « Au regard de vos Messieurs, qui prendront le chemin du Bengalle, ils sauront que les carosses ne servent point dans le Bengalle. L’on ne se sert là que de palanquins. L'on ne se sert de carosses que depuis Agra jusqu’à Patna. Si l’on s’embarque sur le Gange, je proposerais de laisser les carosses à Agra, de réserver un palanquin au chef de l'ambassade et les gens de sa suite en charrettes qu’on couvrirait de toile rouge. « Pour ce qui est de Patna, voici quelque chose de ce que j'ai écrit dans mon journal qui servira toujours d'instruction, Patna est fort considérable, considérable est aussi la quantité de salpêtre que l’on retire. Les Hollandais et les Anglais ont des féturies non pas dans la ville, mais à sept ou huit lieues, où ils préparent le Era salpêtre pour le descendre sur ie Gange. Il ne faut pas néanmoins qu’il soit à propos d'établir là silôt une féturie. Nous aurons toujours le moyen de faire venir du salpêtre à Kassimbazar. C’est là où il faudrait tout d’abord établir votre première féturie. Le gouverneur est fort disposé en notre faveur et nous a fait bon accueil quand nous l’avons vu. Il hait les Hollandais et vous demande. Kassimbazar est bien situé, c’est le rendez- vous de toutes les soieries et autres marchandises, un petit canal permet aux petits bateaux de remonter dans l'intérieur du pays. Il faut bâtir là votre première féturie. « Je dirai un petit mot pour avis, il faut que ceux qui iront à Kassimbazar se résolvent dans le commencement à être mal logés, ils ne trouveront pas là des logis à buer comme à Souratte. Il faudra d’abord, du moins après les pluies, se mettre à relever des murs avec des cou- vertures de paille comme on! fait dans le commencement les Hollandais et les Anglais. Se bien garder du feu. Andare attenso con as mongoles surtout; il s’est réfugié dans le Bengalle une si grande quantité de Portugais qui s’y sont ruinés que les femmes accablent le monde, parce qu’il n’y a pas Hollandais ou Anglais qui n’aient les siennes , ils se trouvent bien attrapé, car outre qu'ils perdent leurs âmes, ils perdent encore leurs biens ou leurs corps, et avec cela si outre qu'ils sont incon- tinents, ils se mettent à boire de l’arak, ils deviennent à la fois pourris du mal de l'Inde et tout tremblants. « Il faut faire bonne provision de vin d’Espagne contre le mauvais air, et avec cela un fort médicament, « François BERNIER. » — 235 — Lettre à MM. de Faye et Caron. « MESSIEURS, « J'ai eu beaucoup de peine à me résoudre à vous écrire ces lignes parce que je sais qu’ilne m’appartient pas de prétendre de donner des conseils à de si grands hommes. Messieurs les directeurs de Paris m’ont voulu honorer d’une de leurs lettres. Je prendrai donc la hardiesse de vous dire que voyant les discordes qui sont déjà arrivées et prévoyant assez que dans ces commen- cements, il est comme impossible qu'il n’en arrive encore quelques autres. « Tout cela néanmoins ne sera rien et ne portera aucun préjudice notable pourvu que vous autres Messieurs, qui, avec Monsicur de Mondevergue, êles comme les principales colonnes de tout le bâtiment, demeuriez inébranlables dans une intelligence et une correspon- dance parfaite sans laquelle il est impossible que ce grand ouvrage, que vous entreprenez, puisse réussir. Vous souvenant pour cela qu’il n’y a pas si mauvaise cause qui ne trouve toujours assez de raisons vraisem- blables pour l’appuyer et que si par vos avis discordants, les choses ne réussissaient pas comme on l’espére, on n'irait pas se rompre la tête, lequel des deux aurait raison de son côté, mais que l’on vous blâmerait tous deux comme n'ayant pas assez de prudence de s'être peu accommodés parfaitement ensemble. Ainsi il me semble, Messieurs, qu’il serait bon de prendre comme un prin- cipe l’un et l’autre, que nous ne sommes point si clairs, voyant en toul que notre compagnon ne puisse encore — 236 — voir plus ou du moins aussi clair que vous el quand l’on voira qu’il ne peut pas faire venir l’autre à son point, il ne devra point pour cela opiniâtrer sur son sentiment quoiqu'il le voit raisonnable, mais bien relâcher comme de son droit et déferer au sentiment de l’autre et faisant de nécessité vertu, tacher d’acheminer et de faire ainsi les choses pour cette même voie. Cela ne dit pourtant pas que je pense empêcher que dans l’apparence, l’on ne prenne pas le parti que l’autre désapprouvera. C’est une petite tromperie qui est absolument nécessaire pour découvrir les choses au vrai, pour y pouvoir appor-- ter les remèdes les plus raisonnables et pouvoir mieux ranger toute voire jeunesse à la raison et à l’union pourvu que dans le cœur l’on soit parfaitement d’accord. En sorte que si l’on voit que pour tout le bien publie, il soit nécessaire de dissimuler, de donner de bonnes paroles, de faire même de belles promesses, l’on sera même d’accord de cette dissimulation et de ces bonnes paroles, ne parlant jamais, ni n’écrivant jamais que de concert et d’un commun accord en France ou à Mada- gascar. Il faut aussi se souvenir qu’une bonne parole qu’on peut faire donner par ces Messieurs de Paris et de Madagascar peut remédier à tout. L’on trouvera aussi moyen par ici de séparer adroitement dans divers comptoirs, ceux-là dont on verra que l'esprit a quelque antipathie, si l’on remarque qu’ils sont capables de bien servir la compagnie. L’on s’en défera adroitement si l’on voit qu’ils sont incapables. « J'espère bien déjà, qui a raison de cette dis- pute de Cochin, M. de Faye et M. Caron, tomberont facilement d'accord et il ne s’écrira rien en France nr qui peut faire conjecturer que nos deux chefs fussent déjà de sentiments différents, cela n'étant capable que de troubler et de refroidir les affaires. Pour moi, je crois cela principalement dans ces commencements si importants que quand même je verrais qu’un chef, mon compagnon aurait quelque chose qui ne fàL pas approu- vé de tout le monde, je ne ferais de doute qu’il n'eüt des raisons prévalantes, non point parce qu'il fût homme expérimenté, qui ne peut agir qu'avec une grande prudence et sûr dans les choses publiques (ce qui paraît le plus juste ne l’est quelquefois pas), mais simplement parce qu’il est chefet qu’il a été cru capable de commander. Il est indubitable qu’ilfaut ici obéir aux chefs et pour ainsi dire aveuglément et que ceux-là doivent être les plus sages qui auront Pespril d’obéir plus aveuglément, si l’on ne veut pas que tout aille en désordre. Par conséquent, je me persuaderais que celui sur lequel on se doit reposer et à la prudence duquel Von se doit rapporter saurait remédier à tout avec le temps. De plus pour ce qui est de ces différends de M. Beber et du Révérend Père, il est à espérer de la prudence de M. de Faye, qui saura bien tout adoucir. Du reste Messieurs m’excuseront de tenir un peu leur gra- vilé et de se faire rendre un très grand respect afin que ceux qu’on enverra comme chefs dans les comptoirs sachent aussi à proportion se faire respecter, faisant connaîttre à leurs jeunesses que ce n’est pas par superbe que l’on prétend cela, mais par nécessité. Est-ce que les gens du pays auraient du respect pour nous, ce qui est absolument nécessaire s'ils voyaient que nos gens n’en ont pas pour nous ? Est-ce que l’on nous = 998 obéira si l’on ne nous honore pas? Est-ce qu’on obéira à un chef de peu d’esprit qui viendra dans une féturie par faveur ou autrement comme il est quasi impossible que cela n’arrive pas quelquefois, si tout ce monde West pas prévenu qu'il faut honorer et considérer les chefs quelqu’ils soient? C’est à mon avis, un des points les plus considérables que je sache. C’est principalement par ce défaut que se sont perdus les Portugais et les Danois, que se vont perdant les Anglais et que se con- servent les Hollandais. Or, je ne trouve point que le respect soit une chose impossible d'imprimer dans l’es- prit des Français. C'est une nation qui est comme un bois dont on peut faire toutes sortes d'ouvrages. Qui eût jamais cru qu’ils fussent venus à ce point de sagesse où la prudence de notre monarque les a portés? Tout dépendra des bons ouvriers ? Au regard de cette affaire, on aura soin de leur fermer la bouche en leur payant bien ce qu’on leur devra. Le nécessaire ne leur man- quera jamais, qu’on tente premiérement de les avoir par la douceur, les piquant de gens raisonnables et de gens d'honneur, leur montrant d’un côté l'utilité et le chemin de leur avancement et de l’autre le châtiment assuré et le déshonneur. On verra bientôt ce que sont les Français, qu’ils sont capables de tout et qu’ils pren- dront bientôt autant de phlegme et de paresse qu’il en faut pour ce pays pour s’y bien gouverner. Je dirais encore qu’il est très nécessaire de bien faire comprendre l'importance de tenir le secret en ce qui se fait dans la féturie et surtout au respect des choses qui se traitent dans le conseil, mais c’est une chose qui parle d’elle- même. — 239 — « Je dirai encore que c’est un des points qui donne un grand avantage aux Hollandais et les a fait réussir dans tant de choses qui m’ont surpris etque quelques secrets que nous pouvons être, il sera bien difficile que nous léur cachions ce que nous dirons ct entreprendrons de plus secret. D'où vient qu’il faudra avoir surtout l'œil sur les Benjanes et sur les serviteurs de la maison, comme encore sur les Patemares qu’on enverra d’une féturie dans une autre, quoique ce soient gens fidèles et attachés pour leurs intérêts particuliers au service de la féturie, je sais pourquoi j'en parle; je sais les tours que se jouent encore là dessus les Hollandais, les Anglais, mais ajoutons encore ceci au regard des Hollandais que je crois que Messieurs trouveront à propos de recom- mander à leurs jeunesses de se tenir dans les termes de l'honnêteté et de civilité, même les Anglais. Les paroles de mépris et de menace ne sont quasi jamais qu’à contre-temps, témoignent l'esprit faible, ne font -qu’aigrir les choses et ne peuvent être que de mauvaise conséquence pour le présent et pour ce qui peut arriver. Il faut ni les louer, niles mépriser, ni les fréquenter trop, veiller sur eux, comme ils ne manqueront pas de faire sur nous. Faire doucement et sans bruit nos affaires chacun de son côté sera à mon avis le chemin le plus court et le plus sûr, non seulement comme j'ai dit pour l’état présent, mais encore pour ce qui peut arriver dans la suite du temps. Laissons là pour le pré- sent la ronquerie aux Portugais des Indes. Encore que je les connaisse assez bien et que je sois assuré qu'on saura bientôt que ni leurs mœurs, ni leurs gouverne- ments ne valent pas l’eau qu’ils boivent et qu’ils ne sont — 240 — quasi chrétiens que de nom, il me semble pourtant qu’il est fort important pour ce qui peut aussi arriver avec le temps de tenir correspondance avec eux, les considé- rant comme catholiques et de même région, les aidant même et les appuyant dans ces ports de mer où ils sont misérables et abandonnés par un juste jugement de Dieu qui a voulu les châtier de leur superbe et de leurs autres vices, autant que le pourra permettre l'intérêt de la compagnie, et du reste afin dene l’avancer jamais trop avant, ne les tirer jamais de ces grandes espérances qu'ils ont que nous devons les relever. S’en rapporter à tout ce que font là bas ces roys qui s’entre entendent et savent leurs intérêts et ce qu'ils ont à faire pour le bien de la chretienté. « Je supplierai M. Caron, d’envoyer la présente à M. de Faye, afin qu’il puisse connaittre et fasse aussi s’il lui plaît connaittre à M. de Mondevergne. Si je ne suis pas capable de contribuer à l’avancement de leur ou- vrage, ce n’est du moins pasmanque de bonne volonté. Suppliant outre cela M. de Faye, que quand il sera ici arrivé, il prenne la peine de voir quelques petits mémoires que j'ai laissés entre les mains de M. Caron, à propos des ambassades ou établissements des féturies de Delhy, Bengale, Golconde et Mazulipatam, espérant qu’il prendra le tout en bonne part, et que cela lui fera toujours connaïittre davantage l’inclination que j'ai eue de servir ma patrye et la compagnie. Je suis parti- culièrement Monsieur de Faye et Monsieur Caron, votre très humble et très obéissant serviteur. « FRANÇOIS BERNIER. » « À Souratte, ec 10 mars 1668 » — 241 — Ce mémoire et cette lettre furent envoyés à Colbert, qui les lut attentivement et la note suivante indique l'intérêt qu’il prit à celte lecture. Gette note est écrite de la main de Colbert et porte sa signature. Elle se trouve en marge de la première page du mémoire. Nous croyons devoir la reproduire comme étant le plus bel éloge que l’on puisse faire de notre compatriote : « J'ai lu ce mémoire en entier et l'ai trouvé d’un très bon sens et plein de bonnes et utiles instructions pour l'établissement du commerce dans les Indes. « Particulièrement sur la conduite que les directeurs doivent garder entre eux qui consiste en l'union, respect à leur égard par les subalternes. Parler modestement de la puissance du roi; faire une dépense honnête, sans excès ni retenue. Paraître entrer comme bons mar- chands, protégés par leur roi. Les ambassades et présents réglés sur ce pied. Sagesse, grande patience et surtout l'union entre tous les chefs et les membres qui servent sur les lieux. « Inspirer cette maxime dans tous les esprits. « La conduite à tenir dans les cours du Mogol et de Golconde est très bien réglée. «Les marchandises que l’on doit porter et tirer de ces pays là et les faituries que l’on doit établir y sont aussi très bien déduits. « COLBERT. » Inutile de parler des dernières années de Bernier qui mourut en 1658. Elles nous sont trop connues ainsi que ses œuvres, principalement son Histoire de la dernière SOC. D’AG. 16 — 242 — révolution du Grand-Mogol et ses Voyages. En publiant son mémoire sur l'élablissement du commerce dans les Indes, et la lettre qu’il adressa aux directeurs de Faye et Caron, nous publions des documents encore inédits qui sont bien de nature à intéresser le public Angevin. Dans le monde géographique, Bernier est l’un des noms les plus illustres; sa gloire suffit pour illustrer l’Anjou. Aussi notre province doit-elle s’enorgueillir de le compter au nombre de ses enfants. H. CASTONNET DES FOSSES. LE GÉNÉRAL PREVOST Il y a quelques mois, je recevais une lettre de M. l'abbé Ravain, alors notre Secrétaire général, qui m’apprenait que, sur la proposition de M. Léon Cosnier, la Société m'avait fait l'honneur de me choisir pour rédiger une Notice sur la vie et les travaux du général Prévost. Je ne tardai pas à me meltre en quête de renseigne- ments auprès de M. Guillaume Bodinier, notre Secré- taire général actuel, qui, sans nous faire oublier l’heu- reuse direction dont M. l’abbé Ravain s’est, aux regrets de tous, volontairement démis, nous en assure une nou- velle, non moins intelligente et régulière. Grâce à son intervention, je fus donc mis en rapport avec le gendre et cousin du général Prévost, c’est-à-dire avec M. Bonneau-Lavaranne, fils d’un avocat dont le souvenir est encore vivant à Angers. Je ne pouvais tomber en meilleures mains et en mains plus amies, car, en m’adressant diverses notes, il voulait bien m'écrire : « Je me souviens, M. Godard, « parfaitement des relations qui existaient entre vous PRO ee « et mon père; je vous prie d’en être assuré et de « m'accorder, par suite de ce souvenir, votre bienveil- « lance, etc., etc. » J’entre dans tous ces détails, trop intimes, peut-être, à vos yeux, Messieurs, mais trés doux pour moi, afin d'établir que le général n’était point de connaissance étrangère à l’Anjou, surtout depuis le mariage de sa fille. Que si M. Prévost se rattache à notre pays par divers liens affectueux, il s’y rattache également par ses emplois successifs à Saumur et à Angers, par ses utiles services à la Commission des bâtiments civils, où j'ai appris à connaître son rare savoir, enfin, par ses Notices subs- tantielles que votre Société était avide d'écouter et avait hâte de publier. Avide d'écouter! Mon Dieu! Mes- sieurs, combien en reste-t-il, parmi vous, qui en aient entendu la lecture? Il y a pourtant à peine quinze ans de çà : Grande œvi spatium! Remontant donc en arrière, vous trouverez, dans vos procès-verbaux et Mémoires, plusieurs articles et com- munications d’un réel intérêt provenant de cet auteur ; mais, avant de nous livrer, si brièvement que ce soit, à leur examen, il ne sera pas hors de propos de jeter un coup d’œil sur l’ensemble des étapes effectuées par le général, pendant sa carrière militaire, étapes d’ailleurs, qui peuvent être considérées comme se rapportant, fort bien, à ses goûts historiques, car, avec lui, l’archéo- logie ne fut jamais une étude vaine et stérile; il la fit servir, en effet, à l’enseignement de la stratégie, abso- lument comme un autre membre de notre Société s’en empare, pour l’introduire avec un grand charme de — 245 — vérité et de bon goût, dans l'étude et la forme des objets du culte. Et disons-le, de suite, par ce côté pratique, l’archéo- logie s’est utilement insinuée dans le domaine de l’art, de l’industrie et même de la science militaire; nous le verrons, bientôt, en analysant quelques travaux du général. Autre remarque! Des étapes qu’il a parcourues, il en est plusieurs qui n’ont pu manquer de faire naître, en lui, le goût de l'archéologie. Les anciens disaient : Facit indignatio versum; au même titre on peut dire que l'aspect des ruines fait l’archéologue. Les premières qu’il rencontra, nombreuses et saisissantes, furent en Algérie; pouvait-il demeurer froid devant leur charme poétique? pas plus assurément que devant les combats contre l’agitateur Bou-Maza, combats auxquels il prit noblement part. Et Rome, celte autre grande étape, pouvait-elle le laisser indifférent à la vue de ces grands débris qui se nomment :le Colysée, le Forum, elc., elc.? Aussi, comme beaucoup d’autres officiers, il en revint archéologue; il fit mieux; s’étant signalé par sa vigueur, à l'assaut des bastions VIT et XXIX, pendant le siège de 1849, il y conquit la croix d'honneur; il avait le rang de capitaine. Vers 1864, il fut nommé chef de bataillon du génie, et ce grade vint le trouver alors qu’il résidait à Saumur. C’est maintenant que M. Prévost nous appartient en propre. Dans l’année 1862 il assiste, en cette ville, au Congrès archéologique tenu par la Société Française, sous la direction de M. de Caumont. Il y donna, de vive voix, d’intéressants détails sur l’origine du château, si leste- ment campé, rive gauche de la Loire, au-dessus de la coquette petite cité. Il y présida l’une des séances du 6 juin; mais ce qui le fit le plus remarquer — M. d’Espinay se le rappelle, sans doute. — ce fut une Note sur les murs vitrifiés. M. Prévost était là, tout à fait dans sa spécialité. Citons-en quelques passages : « Parmi les anciens édifices militaires. il en est, « dit-1], dont la construction est restée, jusqu’à ce jour, « un problème, une énigme, nous voulons parler des « murs vitrifiés; on les trouve en Écosse, où ils for- « maient des châteaux entiers, et dans quelques départie- «ments de l'Ouest de la France; notamment, dans « l'Orne, au vieux. manoir de la Courbe, près d'Ar- « gentan; dans les Côtes-du-Nord, à Peran, et dans la « Mayenne, à Sainte-Suzanne, etc., etc. » Puis, M. Prévost passe en revue toutes les conjectures qui ont été émises à ce sujet. Et en ce qui concerne la cause de la vitrification des murs de Sainte-Suzanne, il s'arrête à y voir le résultat d’incendies redoublés sur quelque point d’une brèche, pendant un siège. « Cette défense des brèches par le feu, ajoute-t-il!, « est fréquente à toutes les époques de l’histoire; elle « est, de nos Jours, recommandée dans les ouvrages « classiques sur l’art des sièges. » Il avance, en outre, que la vitrification de la muraille de Sainte-Suzanne a pu s’opérer vers l’époque du siège de 1424, par l’Anglais Salisbury. 1 Page 82 du volume du Congrès. — 247 — Telle était, sur ces énigmatiques fortifications vitri- fiées, la conjecture de l’auteur en 1862. . Plus tard, la réflexion modifiant ses idées, il croit bien s’être trompé en admettant l'hypothèse de la vitri- fication par voie de destruction, c’est son terme; et il déclare pencher du côté de l'hypothèse par vote de cons- truction, c’est également son terme qu’il explique, mais non sans le faire précéder de ce petit préambule histo- ripue : « Les ruines des forteresses dont les murailles ont « été soumises à l’action d'un feu violent, furent décrites « pour la première fois en 1777. « Les savants ont généralement essayé de les expli- « quer par des procédés de construction plus ou moins « ingénieux. « De nos jours, l’idée est venue de les considérer « comme les résultats d’une destruction opérée, soil « volontairement, soit involontairement. « En 1861, M. du Peiroux adoptait cette solution « pour les murs de Sainte-Suzanne. Nous regardions « nous-même alors la chose comme possible, et nous « faisions un rapport dans ce sens, au Congrès de « Saumur, en 1862... « La brochure que nous avons publiée en 1863 (con- « tinue-t-il), indique un moyen infaillible de construire des murailles à l’aide du feu; c’est assez dire que nous rejetons maintenant l’explication contraire. » Puis M. Prévost entre, à ce sujet, dans des détails curieux et techniques, auxquels nous renvoyons, et que vous trouverez, Messieurs, au Répertowre archéologique de l! Anj u, année 1866. 2 A — 248 — L’auteur termine ainsi sa dissertation : « Pour le « moment, nous regardons l’époque de ces vitrifications « comme voisine de celle de la conquête des Gaules. » Cest loin, il faut en convenir, de l’époque du siège de Sainte-Suzanne par l’Anglais Salisbury! À raison de ces curieux murs vitrifiés, vous ne trou- verez pas, je l'espère, Messieurs, que nous nous soyons trop altardé à vous en donner l'analyse, d’après M. Prévost. C’est d’ailleurs, à notre sens, le. meilleur moyen de vous faire connaître sa manière d'interpréter les monuments, d’en discuter l’origine, avec cette bonne foi militaire qu'ailleurs on ne trouve pas toujours au même degré. Savoir aimer la vérité pour elle-même, au point de brüler ce qu’on adorait, ef vice vers, c’est d’un homme d'esprit, et mieux encore, d’un honnête homme. Je ne m’appesantirai pas désormais sur d’autres tra- vaux du même écrivain, la plupart éclos en Anjou, et plusieurs publiés dans vos Mémoires, mais je resterais au-dessous de ma tâche si je ne les résumais sommaire- ment dans un ordre chronologique. Voici les principaux, dont la connaissance ne fera point défaut à nos bibliophiles : 1° Notice sur Orléansville et sur les antiquités y trouvées. — Paris, librairie archéologique de Leleux, 1848 ; 20 Recherches sur le blocus d’Alésia. — Mémoire en faveur d’Alise. — Paris, Leleux, 1848 : 3° Mémoire sur les anciennes constructions militaires connues sous le nom de murs vitrifiés. — Saumur, imp. de P. Godet, 1863; — 249 — 4 Notice sur les Arvü, peuple qaulois mentionné par Ptolémée. — Saumur, imp. Godet, 1864; 59 Dissertation sur le pont construit par César pour passer le Rhin. — (Guerre des Gaules, liv. IV, chap. xvn1); 6° Notice sur les murs gaulois de Cinais (Indre-et- Loire). — Angers, Lachèse et Dolbeau; T° Notice sur une peinture murale d'une salle du xiIe siècle, à lPhôpital Saint-Jean d'Angers (salle aujourd’hui détruite). — Extr. des Mémorres de la Soc. imp. d’agr., sc. et arts d'Angers, 1867 ; 80 Dissertation sur les forts vitrifiés en Écosse, en France, en Allemagne. — Angers, Lachèse et Dolbeau, 1867 ; 90 Conférence sur le rôle de la fort fication passagère dans les combats. -- Libr. militaire Dumaine, 1869. 10° Conférence sur l'emploi des chemins de fer à la querre et sur la télégraphie militaire. — Dumaine, 1867 ; Alo Études historiques sur l'attaque et la défense des places. — Dumaine, 1869; 120 Les forteresses françaises ne la querre de 1870-71. — Dumaine; 13° Cours de fortification professé à l’École supé- rieure de la querre, publié par JE soins du Ministre de la guerre. Ce résumé bibliographique, quelque incomplet qu’il soit, suffit à nous prouver l’unité de vie du général. Ses études les plus variées convergeaient, à peu prés toutes, vers un but unique : l’art du soldat. C’est le moyen de réussir, aussi ne s’étonna-t-on pas de son avancement, après la guerre de 1870-71, à laquelle il prit part au premier rang de ceux qui furent en droit de dire : — 250 — Quæque miserrima.….… Et quorum pars..…. Il eut, en effet, le périlleux honneur d’être prisonnier de guerre, à la suite de de la capitulation de Metz; et ce, après s'être bravement signalé à la bataille de Rezonville et aux combats de Servigny. Rendu à la liberté, en usa-t-il? Oui, pour agir; non pour se reposer. Le repos, jamais! Trois mots d'em- prunt à un éloquent ami. M. Prévost, sans quitter l’épée, reprend donc la plume et compose son Mémoire sur les forteresses fran- çaises, pendant la querre de 1870-71, guerre chaude encore sous ses pas. En qualité de chef d'état-major du génie de l’armée près Paris, on l’attache aux opérations devant Auteuil et le Point-du-Jour. Quelque temps après (1873) il est promu colonel et nommé directeur des fortifications au Mans. Plus tard (1875) il est appelé aux fonctions de directeur des travaux de défense de Paris (côté nord). Quelle vie bien remplie! Pas encore suffisamment, à son gré. Son érudition appréciée, sa parole facile et courtoise le désignérent pour l’enseignement de la forlification à l'école supé- rieure de querre (1877) et lui valurent le grade de général de brigade, les palmes d’officier de l'instruction publique et la croix de commandeur vers 1880. Long- temps auparavant, il avait été nommé chevalier (1849), officier (1868); et pendant qu’il résidait en Anjou, che- valier de l’ordre de Saint-Grégoire-le-Grand. Mis à la retraite vers 188, ses loisirs furent encore des labeurs jusqu’à ce qu’il s’éteignit, en avril 1883, à — 251 — Versailles, entouré de la Religion, de ses proches el d'amis dévoués. Il fut déposé dans un caveau provisoire, en attendant sa translation dans la Mayenne. Assistérent à ses obsèques un grand nombre d’offi- ciers supérieurs, en présence desquels le général Ansous laissa tomber sur le cercueil ces paroles de cœur : « La « mort ne l’a pas surpris, il l’a sentie approcher en « chrétien, en soldat, sans défaillance, avec le seul « regret de l’affliction que son départ allait laisser dans « cette famille qu’il chérissait. « Puissent nos respectueuses sympathies y apporter « quelque adoucissement et soutenir, dans sa cruelle « épreuve, la compagne, qui lui fut si généreusement, « si courageusement dévouée jusqu’à sa dernière heure. « Et maintenant, mon vieil ami, mon vieux cama- « rade, puisse Dieu te garder en paix! » Qu’ajouter à de si nobles et si touchantes paroles? a dit un journal. Et nous aussi, en finissant, nous ne pouvons mieux faire que de nous associer aux mêmes regrets et aux mêmes espérances. _ V. GopARD-FAULTRIER. ter décembre 1884. 0 ET me SAINT-HICHEL DU TERTRE D’ANGERS ! CHAPITRE XVII LA PAROISSE RELIGIEUSE ET L'ABBAYE SAINT-SERGE Les agitations du xvIe siècle et ses grandes guerres nous ont fait oublier la paroisse religieuse. Elle se trouvait alors ailleurs qu’à l’église. On la rencontrait dans la rue le mousquet sur l'épaule, le poignard au poing, combattant pour vivre sans repos ni trêve, les jours succédant aux jours sans changements apparents. Cette sanglante période n'eut de fin qu'au jour de l’absolution du roi. Et encore la confiance ne fut com- 1 Voir les Mémoires de la Société (1877-1878), page 97; (1879), page 179; (1880), page 233 ; (1881), page 328; (1882), page ##l; (1883), page 313. — 253 — plète que quand on eut rencontré, mêlée aux foules religieuses, cette franche figure du roi Bourbon ; quand marié à Marie de Médicis il nous eut assuré une suc- cession ; quand par sa politique et par ses armes il eut rendu à la France sa prépondérance dans le monde. Ce fut alors et alors seulement que rentrée dans son église la paroisse put songer à ses intérêts religieux. Quelle n’était pas alors l'importance de ces intérêts? Tout était à organiser dans son intérieur. À ses origines d'indépendance, en effet. au lendemain de la commune de Louis XI elle ressemblait aux esclaves affranchis. Elle avait à pourvoir à ses premiers besoins. Ses maîtres d'hier, ses curés primitifs gardaient la fortune et lui léguaient la misère, laissant aux chrétiens d'alors, pauvres eux-mêmes, le soin de pourvoir aux besoins du culle et aussi celui d’abriter et de faire vivre leur vicaire perpétuel. Ce fut généreusement et avec empressement que, pour ces deux objets, on lui apporta son obole. Le nombre des offrandes fut si grand que le pauvre pasteur, pour payer sa dette de reconnaissance, fut obligé de multiplier ses aides et bientôt huit prêtres suffirent à peine pour satisfaire aux engagements contractés. Mais dans les anxiétés de la lutte, des titres de fondations s'étaient amoncelés sans ordre suffisant et les échéances en étaient mal réglées. Les suzerains d’autre part réclamaient des dote et leurs exigences prescrivaient un contrôle. Tel était, à la paix religieuse, le double programme qui s’imposait el que nous avons à dérouler. Le commencement du xvie siècle est assurément — 254 — l’une des belles époques de l’histoire de l’Église. Toutefois si après la peine les catholiques jouissaient de leur triomphe, notre clergé n’en subissait pas moins dans sa discipline la regrettable influence du passé. Les séminaires faisaient défaut pour la formation des clercs et l'harmonie ne régnait pas toujours dans la hiérarchie. Naturellement d’ailleurs le clergé reproduisait la société qui l'avait formé. La noblesse, la bourgeoisie et le tiers s’y retrouvaient en contact. Les grands seigneurs étaient évêques ou abbés, les bourgeois, prieurs, doyens ou chanoines , et le clergé paroissial se recrutait chez les manants des villes et des campagnes. On acceptait cet état sans récrimination et sans jalousie. Mais les jours et les années n’en imposaient pas moins des modifications inhérentes à toute société, de là des luttes et des déchirements. Le diocèse d'Angers avait toujours pour le gouverner l’évêque Mirond, uc hoix de Henri IT. Dans son long épiscopat ses querelles avec ses chanoines firent sa grande célébrité. Au temps où nous sommes les tribunaux et la ville entière se mêlaient au débat dans une question aussi populaire qu'émouvante. Un vieil usage voulait que la procession de la Fête- Dieu passât par le chœur du Ronceray pour y faire station. Miron qui voyait dans cet acte une violation de la règle de clôture entreprit de le défendre. Cette arbitraire volonté qui contrariait un usage immémorial révolta tout Angers. Chanoiïines, maire, présidial firent entendre de vaines réclamations. In- flexible toujours l’évêque fortifia la clôture et frappa d’excommunicalion tout contrevenant. Mais la résistance — 255 — grandit aussi dans la même proportion. Sur l’ordre du lieutenant général un peloton armé de haches et de léviers de fer dut précéder la procession. Il eut raison des obstacles. Le cortège comme d’usage pénétra dans le chœur et satisfit au programme accoutumé. Une sentence du Parlement frappant d’abus l’ordonnance épiscopale eut la prétention de lever la peine d’excom- munication. Miron fut effrayé de tant d'opposition et sous cette impression il eut la sagesse de se démettre. Il avait près de lui le riche abbé de Saint-Nicolas que nous venons de rencontrer l’épée à la main conduisant nos curés à la garde des remparts. Il lui proposa contre son évêché l'échange d’une portion des grandes abbayes dont celui-ci avait la commande. Fouquet de la Varennes accepta et devint évêque d'Angers. Ces marchés qui ne sont plus de notre temps étaient alors trouvés naturels. Si les aptitudes judiciaires et les allures martiales de notre jeune prélat ne pouvaient nous révèler ses vertus sacerdotales, ses trente ans d’âge nous promettaient au moins une longue administration et cinq années seulement nous furent données. Ce temps fut court, bien court, car il n’est pas dans l’histoire du diocèse d'Angers d'années plus fructueuses que celles de cet épiscopat, Miron qui nous l'avait tant fait désirer prit à tâche de nous le faire regretter. Il revint sur son siège rap- portant une irritation toujours croissante. Nommé à l’archevêché de Lyon en 1698, il allait encore nous quitter quand la mort le surprit avant son départ. Entre l’évêque et le curé il existait pour notre paroïsse un pouvoir intermédiaire qui avail le privilège — 256 — toujours respectable de la paternité, c’était celui de l’abbé Saint-Serge. En effet quelque indépendance qu’on eùt donné à la paroisse , quelque droit qu’elle eût acquis de s’admi- nistrer, on ne pouvait méconnaître que l’abbaye l'avait créée, qu’elle avait bâti son église, que bien long- temps elle l’avait régie et gouvernée. Or si, dans la suite, l’institution communale s’était produits et avait modifié cet ordre de choses, l’abbaye n’en devait pas” moins conserver des droits fort légitimes de suzerai- nelé. t Ces droits en effet n’avaient jamais cessé de s'affirmer : 40 Dans la présentation du curé par l’abbé de Saint- Serge ; 20 Dans l’occupation de l’église paroissiale par l'ab- baye au jour de la fête patronale ; 8° Dans un privilège d’escorte aux processions exté- rieures de l’abbaye. Mais que n’use pas le temps dans le monde mobile que nous traversons ? À notre paroisse toujours gran- dissante, le joug devenait pesant d’autant que l’abbaye à son déclin d'influence tendait facilement à l’exagérer. Cet antagonisme incessant et progressif eut enfin son inévitable manifestation dans un procës mémorable dont toutes les pièces sont conservées‘. Ce conflit qui n'avait rien alors d’odieux n’en fut pas moins pénible et laborieux. Il a pour nous l’incontestable avantage 1 Archives départementales, série G, n° 1742. Procédure ter- minée par une transaction entre les religieux et l'abbé de _ Saint-Serge et le curé de Saint-Michel du Tertre. ï — 257 — de définir un droit et de nous dépendre des mœurs . parfaitement oubliées. L'introduction de l’affaire devant le présidial, men- tionnée au registre du greffe, est du 6 avril 1607. Les demandeurs sont représentés par frère Jehan Vi- nide, prieur claustral, frère Leroyer, sacristain, Jacques Pelletier, procureur. Les dits religieux, assistés de Mathieu Froger leur avocat procureur, exposent : « Qu'ils sont curés primitifs de la dite cure de Saint- Michel du Tertre, laquelle est à la présentation du dit abbé et que pour marque de cette supériorité ils sont, certains jours de l’an, tenus faire le service en l’église Saint-Michel ; et le dit abbé prend aux quatre bonnes fêtes de l’an et le jour Saint-Michel les deux parts des offrandes et oblations ; et entre autres que le jour de Pâsques Fleuries, ils vont processionnellement en la dite église Saint-Michel du Tertre; et, toutes autres fois qu’ils y vont, le vicaire perpétuel d’ycelle revêtu de son surplis doit aller au-devant d’eux avec la croix et la bannière jusque hors la porte de la ville, les accompa- gner jusque en la dite église; et après l’adoration de la croix leur doit à déjeuner tant à eux qu’à leurs offi- ciants qui les suivent à la procession. « Le dit vicaire perpétuel revêtu de son surplis est tenu de les reconduire jusque hors les portes de la ville. Et s'ils s’en retournent chantant, doivent être accom- pagnés de la croix et de la bannière jusqu’en la dite abbaye pour raison de quoi aussi ceux qui portent les dites croix et bannières ont vingt pots de vin et deux pains blancs qui leur sont fournis par les demandeurs. D'ailleurs que le dit le vicaire perpétuel avec cinq de SOC. D’AG. 17 — 258 — ses chapelains revêtus comme dessus et aussi la croix et la bannière doit assister les dits religieux aux pro-. cessions qui se font le jour Saint-Marc et aux Rogations et les doit venir prendre hors la porte de la ville. Le jour Saint-Michel les doit prendre et reconduire et donner à diner à eux et à leurs officiants. » Le curé Moreau défendeur comparut en personne, assisté de M° Etienne Dumesnil, ancien maire, avocat procureur. Il dit «que si aux jours de Pasques Fleuries, de Saint- Marc, des Rogations et de Saint-Michel, les précédents curés ont donné à déjeuner aux demandeurs, ce n’a été que par honnête courtoisie et volonté et non qu’ils en fussent obligés de telle façon qu’ils puissent y être contraints par rigueur de justice. « Sa maison d’ailleurs est trop pelite et au jour de Pasques Fleuries souvent requise par d’illustres person- nages. Tel on le vit en 1598 quand le roi Henri IV suivit la procession. » Les offrandes et les oblations lui sont dues sans par- tage aucun. Ces réserves faites il consent à se prêter au cérémo- nial exigé. Le ministère public conclut en admission des plaintes des demandeurs à la réserve du déjeuner au jour de Pâques Fleuries. Le curé le devrait échanger contre une pièce de cinquante sous. Devant les juridictions locales dix-sept années s’écoulèrent et en novembre 1624 la cause était déférée au Parlement où elle demeura trente ans. Fatiguées - d’aussi longs débats les parties consentirent alors à y RER — 259 — régler amiablement leurs différends dans une transac- tion que nous reproduisons : « Entre les Religieux prieur et Commend de l’abbaye Saint-Serge et Saint-Bach-lès-Angers, curés primitifs de la paroisse Saint-Michel du Tertre de la dite ville d’An- gers demandeurs aux fins de la demande par eux portée à la Cour le dixième jour de novembre 1624 tendant à ce que la transaction faite entre les dits religieux et le défendeur par devant Boumier notaire royal à Angers le 20 juin 1654 soit homologuée et exécutée de point en point d’une part. « Et messire Frençois Bonichon prestre, vicaire per- pétuel de la dite paroisse Saint-Michel du Tertre dé- fendeur d’autre part. «Après que M. François Lanier, procureur des deman- deurs, a persisté en l’homologation par lui requise et que M. Dumesnil, procureur du défendeur, a consenti à la dite homologation de la dite transaction de laquelle la teneur s’en suit : « À tous ceux qui les présentes verront Louis de Rohan, prince de Guemenée, pair de France, seigneur du Verger et sénéchal d'Anjou salut, savoir faisons que par devant Jacques Boumier, notaire royal à Angers, « Furent présents : « Pour les Religieux prieur et Commend de l’abbaye Saint-Serge et Saint-Bach-lès-Angers curés primiufs de la paroisse Saint-Michel du Tertre de cette ville en la personne de : « Dom Marc Vinard, prieur. « Dom Laurent Chauvin, sous-prieur. « Dom Hyacinthe Eveillard, dom François Lassuche, — 260 — etc. profès de la dite abbaye y demeurant d’une part : « Et vénérable et discret messire François Bonichon prêtre, vicaire perpétuel de la paroisse Saint-Michel y demeurant d’autre part, « Lesquels pour terminer le procès pendant entre les dites parties par devant nos Seigneurs du Parlement de Paris, «Afin d’être maintenus au droit qu’ils possèdent comme curés primitifs de la dite église Saint-Michel, et pour voir dire que le dit sieur Bonichon serait tenu de les accompagner aux processions des jours Saint-Marc et des Rogations dont il se serait dispensé depuis plusieurs années ; et d'aller au devant d’eux avec la croix lorsque les dits prieur et religieux iront en la dite église au jour et vigile de Saint-Michel, dimanche des Rameaux et lundi des Rogations, conformément à l’usage. « Ont sous le bon plaisir de nos seigneurs du Parle- ment pacifié, transigé par l'arbitrage de M. Lanier, premier président au siège présidial, Eveillard, pré- sident à la prévoté. « Le sieur Bonichon sera tenu, promet et s’oblige d’aller les jours Saint-Marc, lundi, mardi et mercredi des Rogations, jusque dans l’église Saint-Serge. Si les religieux n'étaient prêts de partir, pourra Île dit sieur Bonichon ou autre tenant sa place s'asseoir dansle chœur en la première chaise basse du côté droit, ou dans telle autre que bon lui semblera demeurer; le porte bannière dans la nef. La croix se placera au devant de l'autel de l’Assomption. « Au retour de la dite procession, lorsqu’on arrivera à la barrière du portail Saint-Michel par le dehors de la fun 7: MALE ville, le dit sieur Bonichon avec la croix et la bannière quittera la procession des dits religieux pour rentrer en ville et conduira ses paroissiens en la dite église Saint- Michel. « Au retonr de la procession qui se fait l’un des jours des Rogations à Saint-Maurice, le dit sieur Bonichon quittera au-devant du portail Saint-Michel, étant au préalable croix et bannières arrêtées, et s’élant tournés vers les dits religieux attendront qu’ils soient passés. « Au jour et vigile Saint-Michel et dimanche des Ra- meaux, en marche les croix et les bannières de Saint- Michel et de Saint-Samson, marcheront Saint-Michel à droite, Saint-Samson à gauche, sur une même ligne, au devant des croix et étendards de l’abbaye. Les curés de Saint-Michel et Saint-Samson, aux côtés du prieur. Après la procession le dit sieur Bonichon recevra comme rétribution quatre sous, deux petits pains etune pinte de vin que les dits religieux lui fourniront. « Le sieur Bonichon aura toutes les oblations de son église sauf le jour Saint-Michel où il recevra seulement douze deniers. » Nous avons assisté à la fondation de notre paroisse. Nous en avons suivi les développements et constaté les progrès. Nous savons qu’à son origine notre église bâtie à distance de la ville n’avait autour d'elle qu'un petit nombre de maisons dont les habitants vivaient des - ressources de l’abbaye. Nous savons encore que plus tard, en dehors de la porte Girard, le faubourg s'était allongé dans la direc- tion du chemin de Paris et était devenu les rues des Poëliers et Saint-Michel ; que l’industrie des ardoisières — 262 — avait fait le faubourg Saint-Michel ; qu’enfin les Halles, la Mairie et le Présidial avaient fini par peupler la partie urbaine de la paroisse. Cette église, que le mur de saint Louis d’abord, l'Hôtel-de-Ville ensuite, sont venus comprimer, ne pouvait manquer de correspondre à sa modeste origine. Elle avait au reste, dans son humble construction, le sort commun des églises paroissiales de notre ville, la Trinité seule exceptée. Si l’on veut bien encore consi- dérer au milieu de notre jardin des Plantes, l’église Saint-Samson, sœur d’origine de Saint-Michel du Tertre, si encore par la pensée on veut y donner les annexes dont nous allons parler, nous aurons l’idée de notre église. Toute humble qu’elle était ik suffit longtemps à sa faible population. Mais aux xve et xvie siècles, celle-ci grandit rapidement. En 1554, à l’origine de nos registres de baptèmes, quarante naissances annuelles nous font supposer une population de 2,500 habitants. En 70 ans elle avait plus que doublé et au xvim° siècle 200 nais- sances font évaluer 10,000 âmes de population. Adossé à l’Hôtel-de-Ville le presbytère avait devant: lui le cimetière qu’on traversait par deux rampes abruptes pour arriver aux deux portes de l’église. Ge champ des morts que les foules religieuses envahis- saient avec tant de piété le dimanche des Rameaux était encore banal au commencement du xvn° siècle. Une requête des paroissiens du 24 avril 1603 eut alors l’heureuse chance de mettre un terme à pareil abus. Un mur de petite élévation avec barrières aux deux extrémités, put enfin protéger le sol sacré et le défendre — 263 — contre les empiétements d’une incessante circulation à la porte de la ville‘. Le chœur alors se reconstruisait à l’angle du mur de la ville. Cet angle de mur et les soubassements de ce chœur se voient encore et se distinguent d’une façon indiscu- table dans la maison Fairé. Cette construction du chœur avait été, paraît-il, mal- comprise, car Louvet nous informe que « en octobre 1620, M. Busson, avocat à Angers, a comme procureur de Fabrice de l’église Saint-Michel du Tertre de cette ville d'Angers, faict faire un vitral à la voûte de dessus le grand autel de la dite église pour donner du jour et clareté tant au dit grand autel qu’à des chaises d’un chœur qu’il a fait faire en la dite église pour y mettre les prestres afin d’y célébrer le service divin”. » L'église ainsi augmentée élaitencore insuffisante pour une population grandissant toujours. Des chapelles an- nexes étaient donc désirables ; c'était le temps d’ailleurs des chapelles seigneuriales fréquentes alors dans nos églises de campagne: Notre paroisse, elle aussi, avait ses seigneurs dans ces familles municipales qui de géné- ration en génération se transmettaient avec tant de cons- tance une illustration si éclatante. Nous allons les ren- contrer encore dans leur modeste église, couronnant leur sanctuaire des monuments de leur piété et glori- fiant ainsi les noms déjà si populaires des Lanier, des Ayrault et des Louet. La première de ces chapelles fut celle des Lanier. 1 Archives municipales. 2 Journal de Louvet, Revue d'Anjou, 1835, p. 147. — 264 — « Le mardi 12 avril 1617, nousdit Louvet, M. François Lanier, sieur de Sainte-Gemmes, conseiller du roi, lieutenant général de M. le Sénéchal d'Anjou au siège présidial d'Angers, a, en sa présence, fait mettre la première pierre d’une chapelle, qu’il a fait construire et bâtir en l’église Saint-Michel du Tertre de cette ville, entre la muraille de la dite ville d'Angers et la porte de la dite église, proche et joignant la sacristie de la dite église qu’il a fait croistre par M. Lanier, son fils’. » Cette chapelle est encore intacte ; c’est une décharge de la maison Fairé. La chapelle de M. Ayrault ne se fit pas attendre. Sa dignité de président lui imposait l'obligation dans son église d’une place équivalente à celle du lieutenant général. La popularité d’ailleurs dont il jouissait ne lui en laissa pas faire les frais. Les paroissiens lui firent spontanément l'hommage de cette construction. Louvet nous le raconte ainsi : « Le samedi 22e jour de février 14620, M. Ayrault, président au siège présidial d'Angers, a mis la première pierre dans le fondement d’une chapelle que les paroïs- siens de la paroisse Saint-Michel du Tertre, ont fait bâtir au-devant de la porte ancienne de l’entrée de l’église, au-dessus et joignant la chapelle que M. Fran- çois Lanier, lieutenant général, a fait bâtir et construire proche la sacristie*. » Les Louet se firent attendre vingt-cinq ans pour 1 Journal de Louvet, Revue d'Anjou, 1855. 2 Journal de Louvel, Revue d'Anjou, 1856, p. 3. — 265 — l'édification de leur chapelle. Nos archives nous infor- ment que le 25 décembre 1644, Jean Camus, maître tailleur de pierre et architecte, signait un marché pour cette construction qu’il établit du même côté de l’église, mais séparée des précédentes et avec accès sur la nef. L'église Saint-Michel enrichissait en outre son mobi- lier d’une croix et d’un orgue. Nos archives nous apprennent également que d’après marché du 29 avril 1618, passé avec le célèbre artiste Roland Lagoux, orfèvre, celui-ci s’engageait envers la paroisse, dans la personne de son marguillier en exer- cice : « à fournir une croix dans laquelle sera l’image de Notre-Seigneur en la forme accoutumée, attaché et couronné d’épines et outre seront dans ladite croix, les figures ci-après relevées en bosse et ciselées, savoir du côté du crucifix une lune et un soleil, au milieu une splendeur. » Le 3 novembre 1634, en assemblée de paroisse du jour, mandat était donné au curé et à trois paroïssiens « pour traiter avec Paul Maillard de la façon des orgues, » conformément à la clause du testament de Mme de Char- nière, qui donnait 800 livres pour cet objet. Ces améliorations à l’église et au cimetière n'étaient pas le seul souci du moment. Les registres de l’état-civil dans les paroisses étaient encore fort incomplets. Les ordonnances de François [er et de Henri IT, les prescriptions synodales des évêques du temps, avaient eu pour unique résultat de créer en notre paroisse, en l’année 1554, un premier registre de baptêmes. Mais ce registre restait spécial aux seules naissances sans y mentionner jamais les sépultures et — 266 — les mariages, qui restaient complétement ignorés. Pareille lacune devait disparaître sous un gouver- nement régulier el c’est en effet ce qui se produisit. En 1604 un registre de sépultures fut inauguré sous ce titre : « Papiers et registres de sépultures faites et célébrées en l’église parochiale de Saint-Michel du Tertre d’An- gers, fait et commencé le 7e jour de février 1604: » Le premier registre de mariages ne parut qu’en 1618, sous cette Inscription : « Papiers et registres de noces et fiançailles faites et célébrées en l’église parochiale de Saint-Michel du Tertre d'Angers, fait et commencé le 7e jour de janvier 1618 par moi curé du dit lieu, soussigné, Croux ?. » Le sérieux désordre élail dans un vice d'organisation du culte, et dans un service mal réglé des fondations. Les guerres avaient surpris nos paroisses aux débuts de leur épanouissement et les avaient détournées de l'objet principal de leur sollicitude. C'était pour y remédier qu’à son synode de la Saint-Luc 1606, l’évêque Miron avait rendu l’ordonnance suivante : « Enjoignons à tout curé d’avertir les procureurs de Fabrice de leur paroisse de faire bon et fidèle inven- taire de tous les titres et enseignements concernant les Fabrices, et des joyaux et reliques, et ornements. et autres meubles appartenant aux dites églises. Lesquels inventaires et registres ils seront tenus nous repré- sentier aux visitations à peine de 10 livres d'amende. » 1 Archives municipales, GG, 137. 2 Archives municipales, GG, 137. — 267 — Plus qu'aucune autre, en raison de son rapide accrois- sement, notre paroisse avait motif pour céder aux injonc- tions épiscopales, c’est ce que comprit le curé Moreau. En assemblée de paroisse du 15 novembre 1609, il expose qu'il existe aux archives de la Fabrique un grand nombre de titres de fondations plus ou moins ignorées, dont les services sont mal réglés ; qu’il im— porte d’étudier ces titres, d’en déterminer la valeur et d'en prescrire l’exécution. On se rendit sans peine à d'aussi graves raisons, el après délibérations, on arrêta les conclusions suivantes : « Le dimanche 15e jour de novembre 1609. En l’as- semblée des paroissiens de Saint-Michel du Tertre d'Angers, pour ce que M. Paul Moreau, curé, a remon- tré que les fondations de l’église du dit Saint-Michel et les noms de ceux, à l’intention desquels elles se doivent faire, étant fort incertains pour n’en avoir jamais dressé un tableau journal, a esté conclu pour les causes sus- dites : « 4° Qu'il sera dressé un tableau escript sur parche- min enchassé en bois contenant les services divins de chacun des jours de la semaine, noms des fondateurs et sommes destinées à cet effet. « 2 Qu'il sera en outre arrêté un réglement déter- minant les devoirs précis de tous les fonctionnaires ecclésiastiques. » Ceci se passait en novembre 1609 et le curé Moreau, promoteur d’aussi graves projets, mourait en janvier 1610. L’exécution en incombait donc toute entière à son successeur qui avait en outre à se défendre dans le — 268 — procès intenté par l’abbaye Saint-Serge. Ce successeur, le jeune curé Croux, était à la hauteur de pareille mission. 1 D’nne activité dévorante et d’un grand tact Pierre Croux nous arrivait aux premiers mois de l’année 1610, précédé déjà d’une grande réputation ; licencié en théo- logie, docteur en 1614, il possédait un talent de parole des plus appréciés. C’est ainsi qu’à peine installé il fut désigné pour prononcer dans notre église cathédrale l'éloge funébre du roi Henri IV, devant le clergé ange- vin, le gouverneur, le présidial et le corps de ville. Ce sera lui encore qu’on retrouvera devant pareil auditoire prononçant l’oraison funèbre de l’évêque Fouquet de la Varennes, et le panégyrique de sainte Thérèse aux fêtes de sa canonisation. Dresser le bilan de la paroisse, réglementer ses services n’était rien moins que d’en formuler la cons- titution. La mesure était grave ; aussi en homme pru- dent et réservé notre jeune curé sentit le besoin de s’entourer de paroissiens faisant autorité en sagesse el en science juridique pour l'étude des titres constituant la fortune paroissiale. Une Commission fût désignée, composée de : MM. Croux, curé de la paroisse. Pierre Ayrault, président du présidial. René Gohier, ancien conseiller, capitaine de la paroisse. Etienne Dumesnil, ancien maire, avocat de la paroïsse dans le procès de l’abbaye. Claude Dupont, avocat. ; Pierre Busson, procureur de fabrique. — 269 — Le président Ayrault, fut choisi pour rapporteur de celle commission. Sa piété tout autant que sa grande valeur administrative le recommandaient pour pareilles fonctions. Son rapport est un in-folio manuscrit, sur parchemin, rédigé avec le plus grand soin. De la provenance du cabinet Grille, il est déposé à la bibliothèque de la ville sous le n° 699, et porte cet intitulé : « État exact des prières fondées en l’église Saint- Michel-du-Tertre d'Angers. » Aucune autre paroisse que je sache ne possède pareil document. Il comporte pour cette double raison, l'intérêt le plus grave. Conformément aux conclusions de l’assemblée de paroisse il contient deux chapitres, un inventaire de litres et un code d'instructions. Ces deux chapitres sont eux-mêmes précédés de l’ex- posé suivant : « Nous, « Pierre Croux, prestre, licencié en théologie, curé de l’église Saint-Michel-du-Tertre d'Angers. « Pierre Ayrault, conseiller du- roi, président au siège présidial du dit lieu. « René Gohier, aussi conseiller au dit siège. « Etienne Dumesnil, ci-devant maire de la Ville et avocat au dit siège. « Claude Dupas, aussi avocat au dit lieu et Pierre Busson. « Tous demeurant en la dite paroisse, commis et députés par les paroissiens, manans et habitants d'icelle, par conclusion du 8° jour d’avril 1618. — 270 — «Après nous estre assemblés plusieurs fois et vaqué par diverses séances à la visitation des contrats et testaments, contenant les dons, legs et fondations faites en la dite Église, comptes des procureurs de Fabrice, réglements et conclusions faits en divers temps aux assemblées de la dite paroisse ; titres et renseignements concernant les droits et charges de la dite église et Fabrice, avons ; « En présence de Messire Pierre Viaud, prestre, sacriste, député des autres prestres, chapelains de la dite église et paroisse, « Conclu et arresté ce que s’en suit pour être gardé et observé à la demande et sous le bon plaisir de M. le vénérand évêque d’Angers, en ce qui concerne le service divin. » Les services religieux, objet des premiers chapitres, sont présentés jour par jour, dans l’ordre des mois, des fêtes mobiles, et des semaines. Ils sont annuels, mensuels, hebdomadaires ou jour- naliers. Toute sèche et aride que soit cette longue descrip- tion elle a pourtant son intérêt, j'allais dire son attrait. Elle nous peint d’une façon saisissante la société du temps, simple dans sa foi, mais soucieuse des intérêts d’une autre vie. Le culte des morts, l’aspiration d’une éternité de bonheur, l'efficacité de la prière met en rapport constant les âmes des vivants avec celles de ceux qui ne sont plus, que ceux-ci soient supposés heu- reux au ciel ou affligés dans un séjour de réparation. C’est toute la raison des fondations, la mise en pratique du plus consolant des dogmes chréliens, l’union au — 271 — sanctuaire paroissial des Églises militante, souffrante et triomphante. Le sanctuaire qui reçoit aujourd’hui les supplications des vivants az: t hier les prières de ceux qui ne sont plus. Ces chers défunts n’avaient à vrai dire quitté ni l’autel ni la famille. Ils reposaient au pied de l’église et les habitations de leurs parents et de leurs amis les entouraient. C’est à travers les tombeaux que ceux-ci atteignaient cette église qui naguère les voyait réunis. Comment alors oublier les morts? Les fondations deve- naient un besoin du cœur, et par elles la famille s’éter- nisait. C'était le luxe du temps, comme aujourd’hui les pompeuses obsèques, les fastueuses couronnes, les imposants tombeaux. Présentement les morts nous quittent, ils s’en vont au loin ct reposent séparés des vivants, à l’écart de l’église. La tristesse des tombeaux ne fait plus obstacle aux Jouissances de la vie, mais les défunts sont oubliés et les fondations n’ont plus d’objet. Ne craignons pas de jeter un coup d’œil rapide sur les titres du président Ayrault, il en découlera des jouissances pour le cœur. Par testament du 15 novembre 1505, Guillaume Delachaussée, curé de la paroisse, lègue une rente de 40 livres pour la messe matutinale des dimanches (5 heures en été, 6 heures en hiver). Pierre Cador, son successeur, mort en 1514, veut une messe basse au premier jour de chaque mois. Olivier Lamy, demande par semaine un Subvenite sur sa tombe (22 avril 1527). — 272 — En 1522 moyennant trente sous de rente sur sa maison, Jean Mirleau fonde le pardon de 6 heures (lAngelus du soir). Jeanne Barbot, l’épouse du juge Jean Binel, fonde un salut au jour de l’Annonciation. Pour cette fin elle cons- titue rente-de 3 L. 2s. 6 d. Par contrat du 10 juin 1537, Anne Bouvet, lègue 100 livres par année et demande à la vigile du Sacre et au lendemain de l’octave une procession solennelle du Saint-Sacrement autour du cimetière. L'année suivante la mème Anne Bouvet, offre un poële à la condition que la procession ira faire station à l'église de l’Aumonerie, aujourd’hui Notre-Dame. Jean Traisnault, pour une rente de 7 livres, fonde une messe basse tous les mercredis. Pierre Goureau, fonde lui aussi pour tous les jeudis de l’année une messe du Saint-Sacrement. Guillaume Lerat, institue à sa chapelle deux messes par semaine. Les enfants de Jean Haran, sur le vœu de leur pére, en son vivant conseiller du roi, et receveur des décimes, fonde le feu Saint-Jean à la vigile de la fête. L'on part processionnellement sur les cinq heures du soir, du chœur de l’église, après qu’on y a chanté un répons. On descend dans la rue par le degré chantant les trois hymnes de ja fête, ensuite le Benedictus. Pendant ce temps le célébrant étant chappé met le feu dans le bois préparé au bas du cimetière ; après quoi on s’en retourne au chœur par la grande porte de l’église chantant l’hymne Te Deum laudamus. Étant fini au chœur le célébrant dit l’oraison pour — 273 — laquelle feu M. Haran, délivra à Me Tessonnier 150 livres de principal qui produiront 7 livres 1/2. La prison se trouvait sur le territoire paroissial de Saint-Michel du Tertre. Le curé Moreau, obtint un arrêt du Parlement, le dispensant du service religieux de cet établissement à la condition pourtant de donner par an Six Sermons : Le premier dimanche de Carême. Le mercredi de la Semaine sainte. Le jeudi octave del Ascension. Trois jours avant la fête de l’Assomption. Trois jours devant la fête de la Toussaint. Trois jours devant la fête de Noël. Pierre Gharbonneau, lègue une rente de 12 livres pour les honoraires de ces sermons, 2 livres par sermon. Perrine Pichard, lègue 4,200 livres de principal auxquelles on ajoute 320 livres, puis encore 400 pour l'entretien d’un enfant pauvre pour servir à la fonction de choreau pour répondre les messes basses et chanter les répons. Je m’arrête dans ce récit après avoir constaté toutefois : Que une messe basse est tarifiée à quatre sous; Une messe chantée huit sous ; Un sermon quarante sous. Le deuxième chapitre a pour objet le service de l’église et celui de la Fabrique. L'église a pour la desservir outre le curé : Les Chapelains ; Le Sacristain ; Le Foussier ; SOC. D’AG. 18 Chapelains. « Le curé et huit prestres chapelains habitués en la dite église, dit M. Ayrault, y célébreront le divin service tant messes, vêpres et office du matin, et généralement tous autres suffrages, prières et oraisons au désir du Fondateur et conformément au présent réglement. « Les dits prestres chapelains résideront en la dite paroisse, et y en aura pour le moins quatre demeurant en la ville (dans les murs), et à faute qu’ils feront seront privés des distributions et gaignages. « Ils ont l'obligation de servir scrupuleusement les fondations à peine d'amende. ; « Ils ne diront jamais deux messes à la fois. « Ils s’habilleront au vestiaire et laisseront les orne- ments à la disposition du sacrisie. « Ils administreront les sacrements aux paroissiens lorsqu'ils en seront requis ou commandés par le curé et visiteront les malades pour les consoler et assister. Ils devront être deux au moins pour administrer l’Ex- trême-Onction. « Après le décès, l’un d’eux, s’il est requis, veillera et assistera le corps du décédé jusqu'à la sépulture moyennant salaire raisonnable qui ne pourra excéder huit sous pour la nuit et six sous pour le jour. « Celui desdits prestres habitués en la dite église qui ne sera venu à Matines devant la fin du psaume Venite exultemus, el aux vêpres ordinaires qui se disent cha- eun jour, vêpres et vigiles des morts, devant la fin du premier psaume el à la messe devant la fin du premier — 275 — Kyrie sera piqué et privé de son salaire fors en cas de maladie ou autrement employé aux nécessités de la paroisse dont il sera légitimement excusé par le curé. Pour chacun défaut paieront chacun douze deniers qui seront déduits sur les gaignages du défaillant. .« Le profit du piquet accroistra aux prêtres habitués en la dite église qui auront assisté fors la tierce par- tie de tous les dits piquets qui demeurera au profit de la Fabrice. « Sera chacun an, aux fêtes de Saint Jean-Baptiste et de Noël, payé par moitié par les procureurs de Fabrice, lors en charge de recette, aux curés, prestres et chape- lains habitués susdits la somme à laquelle reviennent les produits à eux attribués par le présent règlement. « Sauf néanmoins à demander réduction des services et messes dont les fondations ne sont pas suffisantes. Sacriste. « Le curé et les paroissiens commettront un prestre pour administrer la sacristie, ou la bailleront pour trois ou cinq ans. Lequel prestre ne pourra être vicaire ni du nombre des huit prestres ou chapelains habitués en la dite église. | « Auquel seront baïllés les reliques et joyaux, croix, calices et plateaux, custodes, chopineaux, encensoires, chandeliers et bénitiers d'argent, chapes, chasubles, dalmatiques, ciels, rideaux et paravants d’autels, aubes, amicts, napes et autres linges, livres de chant, missels et manuels et autres livres et généralement tous les — 276 — ornements et meubles de la dite église, tant sacrés que autres, qui s’en chargera sur l’invilation qui sera faite de les garder et conserver et de les représenter, lors- qu'il sortira de charge et de ce faire baïllera caution. Lequel prestre fera sa demeure en la dite ville et le plus près de l’église que faire se pourra. Sera tous les jours en l’église revêtu à tout le moins de surplis et y demeurera sans en sortir que le dernier service ne soit entièrement dict. S'il plaît au curé pourra administrer les saints sacrements. « Baillera et fournira de feu, pain, vin, eau et autres choses nécessaires. « Fera balayer l’église, essuyer et nétoyer la poussière de dessus les autels, chaises, bancs et bancelles.. Sera tenu de faire tendre la tapisserie de l’église aux fêtes de Pasques-Fleuries et grandes Pasques. Fera distribuer le pain béni par toule l’église, fera sonner les cloches pour la célébration du service divin suivant le présent règlement et au désir des fondations et lorsqu'il arrivera des orages el tonnères. « Portera ou fera porter par un prêtre la croix revêtu d’aube ou de surplis à toutes les processions de la paroisse, à peine de cinq sous par chacune fois qu’il y manquera. « Fournira de cordes pour sonner. « Entretiendra d’huile la lampe au-devant du grand autel. Fe « Arborera et revêtira de verdure la grande croix du cimetière le dimanche des Rameaux. « Sera tenu d’allumer et d’éteindre le luminaire, et de faire chasser les chiens de l’église. STATE A « Il percevra un quart de vin et diverses immunités aux enterrements. « En plus pour ses gages et salaires six vingt livres par an, en deux termes de quatre-vingt-dix livres. Les . confrères lui devront en outre trente livres. » Foussier. Le foussier est chargé du cimetière et du transport des corps pour leur sépulture, c’est en outre l’aide- sacristain. « Le foussier, dit M. Ayrault, sera eslu et commis par les paroissiens. « Il obéira au curé et procureur de Fabrice pour ce qu’ils lui commanderont pour le service divin et dévo- tions de l’église et à cette fin se tiendra près du dict pro- cureur de Fabrice aux dimanche et fêtes. « Il baleyra etnetoyera l’église une fois le mois, aidera de sa personne le sacriste dans tous ses grands travaux notamment aux fêtes de Pasques, de l’Ascension, de la Pentecôte ; chassera de l’église les gueux quiy vont mendier et aydera audict sacriste à chasser les chiens de l’église les jours de dimanches et de fêtes. « Son tarif des fosses sera douze sous les grandes, six sous les fosses d'enfant, vingt sous pour les fosses dans l’église, trente sous pour les recarler. « Il aura trente-deux sous pour porter les corps de leur domicile au cimetière, quarante sous pour ceux enterrés dans l’église, » — 278 — Fabrique. Ces régles établies pour le culte et la sacristie, M. Ayrault passe à la fabrique. « Et d'autant, dit-il, que l'église et Fabrice appartient aux paroissiens, les biens d’icelle seront comme par le passé régis par deux mar- guilliers ou procureurs de Fabrice qui seront eslus comme aussi un procureur pour chaque confrairie de ‘Saint-Sébastien, Saint-Marcoul et des Trépassés. « Lesquels procureurs tant de Fabrice que des dictes confrairies seront chacun deux ans en la charge, et celui des dicts procureurs de Fabrice qui sera eslu en la première année fera les recettes et mise de la Fabrice et pour les autres droits et affaires les feront conjoin- tement suivant les conclusions faicles en assemblée des dicts paroissiens le 28 décembre 1603. « Les dits procureurs dedans six mois après leur exer- cice fini rendront compte de leur charge et où ils en feront refus au délai, seront si besoin est poursuivis en justice par leurs successeurs immédiats. « Lesquels à faute de ce faire demeurent responsables. « Le curé avec les paroissiens pourvoiront à l’avenir aux places des huit prestres qui ont accoutumé de ser- vir en la dite église, vacation ou démission advenanl; « À celle d’un sacriste qui ne pourra être un des dits prestres. « Sansque aucuns prestres se puissent introduire en la dite église ni être admis à participer aux gaignages encore qu'il soit pourvu de prestrimanies ou cha- 10 pellenies, s’il n’a été reçu par les dicts curé et parois- siens en plaine assemblée. « Lesquels prestres lorsqu'ils seront reçus feront le serment entre les mains du curé, de faire leur devoir à l'édification des paroïssiens, de garder étroitement les décrets et ordonnances du concile provincial de Tours de 1583, et les statuts synodaux des évêques d'Angers, et tout ce qui concerne le présent réglement ; autrement le curé et paroissiens pourront leur enjoindre de se retirer. « À la diligence des marguilliers, il sera fait inventaire du mobilier dont le sacriste sera tenu de se charger et aussi des titres qui se renfermeront dans une armoire à trois clefs dont l’une au curé, une au procureur de Fabrice , la troisième à un notable paroissien désigné en assemblée. » Notaire Royal. « Ïl sera choisi et eslu par les paroissiens un notaire royal de ceste ville pour recevoir et escrire les délibé- rations et conclusions faites en assemblées des dicts paroissiens ; « Pour recevoir et passer les contrats et quittances qui seront faits à la diligence du procureur de Fabrice pour les affaires d’icelle et en délivrer copie au dict pro- cureur. Et s’il y a procuration des dits paroissiens pour plaider hors ceste ville, en délivrer grosse. Le tout sans que le dit notaire en puisse rien prétendre ni demander aux dits paroissiens ni procureur de Fabrice ; au moyen — 280 — de ce que de préférence à tous autres il recevra et passera tous les contrats tant d’amortissements que constilutions de rentes qui seront faits au profit de la Fabrice dont il se fera payer par les parties. « Que les anciens titres serontrenouvelés. Commeaussi suivant conclusion des paroissiens du 8 avril 1618, seront par les procureurs de Fabrice poursuivis les héritiers de ceux qui ont fait des fondations en la dite église Saint-Michel, reconnaître et assigner fonds suffi- sants pour l’entretennement des dictes fondations. « Qu’à l'avenir ne sera accepté aucun legs pour fonda- tion de services divins, sinon qu’avec condition qu’outre le salaire des curé et chapelains, il en donnera pour le moins la cinquième partie à la Fabrice, et qu’encore il y ait faculté d’amortir la rente léguée au denier vingt. « Les héritiers de ceux qui seront ensépulturés en l’église paieront à la Fabrice soixante sous. Les places des bancs et sièges seront vacans par le décès des titulaires. « Vacation advenant les dites places et bancs seront baillées à autres paroissiens. « Ne sera fait concession de bancs en la dite église en lieux où il n’y en a point eu ci-devant, ni apposé aucunes tombes , ni tableaux d’effigie ou épitaphes contre les murs sans l’avis et consentement des curés ou paroissiens. » — 281 — CHAPITRE XVIII L’ORATOIRE A ANGERS Tant vénérés que soient nos sanctuaires paroissiaux au commencement du xvrre siècle, ils étaient trop étroits pour absorber la sève religieuse qui se produisait alors. Elle débordait auprès d’eux dans des fondations offrant les plus séduisantes promesses. Sous le court épiscopat de Fouquet de la Varennes, trois couvents viennent s'implanter sur notre sol parois- sial de Saint-Michel du Tertre : Les Minimes, les Ursu- lines et les Oratoriens. Les Minimes ont disparu balayés par le flot révolutionnaire. Les Ursulines et l’Oratoire plus vivaces et plus en harmonie avec les mœurs de notre temps ont survécu. Les Ermites de Saint-François, dits Minimes, eurent pour fondateur saint François de Paule, originaire de la ville de Paule en Calabre, qui vivait au xve siècle. Ils furent approuvés par le pape Paul IF, et autorisés en France par lettres patentes du roi en date du 18 juin 4614. Le 15 octobre de cette même année ils nous arrivaient et s’établissaient provisoirement « dans une maisonnette de closerie donnée par Jacques Liquet ‘. » Ce premier établissement fut bien vite remplacé par un second qui fut définitif. 1 Archives municipales. — 282 — « En mars 1615, nous dit Louvet, les bons pères religieux Minimes ont, en vertu du pouvoir à eux donné par le roy, consentement de MM. l’évêque d’Angers, maire et eschevins, faict accomoder un logis qu’ils ont acquis de deffunt M. Gauthier, vivant contrôleur des traictes, accompaigné d’un bon jardin, joignant les jardins du lieu du Busson, abuttant au pré d’Alle- magne, d'autre bout au grand chemin du Busson, et d’aultre côté au logis et vigne d’ung nommé Fleuriot ouvrier de la Monnoie, pour eux y loger jusques au nombre de six religieux comme aussi ils ont faict faire une petite chapelle, le tout en attendant leur église et couvent à bastir ‘. » La première pierre de cette église, bâtie, au dire de Louvet, dans une grande pièce de terre, qui était en vigne, fut solennellement posée et bénie le 24 avril 1617 par l’évêque Fouquet de la Varennes en présence du lieutenant général Lasnier. Église et couvent étaient terminés en 1623, couvrant la partie basse du jardin du Mail et s’étendant vers les nouveaux tribunaux. Aprés le xve siècle les contemplatifs et les mendiants ne répondaient qu'imparfaitement aux aspirations des peuples. L’abnégation et la charité avaient seules fa- veur. Instruire la jeunesse, former le cœur et l'esprit des enfants, soulager les pauvres dans les asiles de la misère, tel sera le champ d’action des Charles Borromée et des Philippe de Néri, des de Sourdis et des Bérulle, des Vincent de Paul et des Ollier. 1 Journal de Louvet, Revue d'Anjou, 1855, t-II, p. 143. — 283 — A Vincent de Paul le soin des corps, à tous les autres la culture de l'esprit. Les Ursulines et l’Oratoire, corps enseignants tous les deux, l’un aux filles, l’autre aux garçons, eurent la même origine et la même date de créalion. Ils nous arrivèrent dans le même temps et s’implantérent côte à côte sur notre paroisse Saint- Michel. Les Ursulines eurent pour fondateur saint Charles Borromée. La bulle de création par le papé Grégoire XIII est du 14 décembre 1572. Introduites en France par le cardinal de Sourdis, archevêque de Bordeaux, elles y furent autorisées par lettres patentes du roi données à Bordeaux en décembre 1615. Ces lettres leur permettent de s'établir à Poitiers, à Angers, à Périgueux, à Laval, à la Flèche. Elles peuvent acquérir et posséder en main morte à charge de bailler de vingt ans en vingt ans un marc d’or. La supérieure générale sœur François de la Groix, le 9 décembre 1617, requit l’enregistrement de ces titres au greffe civil du présidial d'Angers et obtint l'agrément du lieutenant général, du maire et de l’évêque. Toutes ces formalités remplies la colonie composée de six religieuses et de leur aumônier s’achemina de Bordeaux vers Angers en avril 1618. Elle voyageait à petites journées comme on le pouvait quand les routes et les services publics faisaient défaut. « L’aumônier, nous dit Louvet, venait de cheval et les religieuses étaient en un carosse attelé de quatre paires de chevaux. » Elles arrivèrent le samedi 19 mai 1618 sur le soir et — 284 — x furent recueillies au logis de la Bouvraye proche la rue Saint-Nicolas *. « Puis au 1€r jour de juin les dittes religieuses, nous dit Louvet, ont été amenées et établies par M. Fouquet de la Varennes, évêque d'Angers, M. le lieutenant général et M. le Maire au logis de Puy-Gaillard, sis en la rue Lyonnaise que les dittes religieuses ont acquis pour la somme de 900 à 1,000 livres. Le jeudi 24 jan- vier 1619, la*mère de la Croix elle-même ouvrit ses classes au nombre de quatre pour ies demoiselles, les filles de bourgeois, les filles d'artisans et les pauvres. » Victime de la jalousie de l’abbesse du Ronceray, au dire de Louvet, elle fut contrainte d'abandonner sa maison située sur le fief de l’abbaye, et d'acquérir d'Heliant de la Barre le logis de la Planchette de la Vincendière, « près et joignant le Collège neuf et une rue neuve prés des jardins du couvent des Cordeliers et autres logis qu’elles ont pareillement achetés ?. » En juin 1620 elles reçurent en ce nouveau local Ja visite du cardinal de Sourdis qui leur dit la messe et les prêcha le dimanche 98 juin. En 1637 la ville leur concéda pour y bâtir leur église, la rue indiquée à la condition qu’au-devant de cette église elles laisseraient libre un espace de vingt pieds de large pour continuer une rue projetée devant se rendre au palais *. | Les Ursulines prospérèrent rapidement. On les trouve 1 Journal de Louvet, Revue d'Anjou, 1855. t. II, p. 276-277. ? Journal de Louvet, Revue de l’Anjou, 1855, t. I. p. 287. 3 Archives municipales. — 285 — à la fin du siècle en possession du champ Glastin devant 1 s Minimes; à Morannes, du moulin de Pendu, des terres de la Guyonnière, Cutesson, Colombeau, le Gennetay, la Boierie, la Brocherie ‘. Les pères de l’Oratoire ont occupé une grande place à Angers. Grands éducateurs de la jeunesse leur collège acquit à juste titre dans l'Ouest la plus légitime célébrité. L'Université leur doit ses dernières illustrations, la paroisse Saint-Michel, plusieurs de ses curés, celle de Notre-Dame, son église paroissiale. Si l’Oratoire a eu pour premier père saint Philippe de Neri, elle en a un second en France dans le cardi- nal de Bérulle. C’est lui qui la façonna au génie fran- çais au point qu’on disait après lui que c'était la plus française des Congrégations. Saint François de Sales, avec l'autorité de son nom, ajoute qu'il n’y a rien de plus saint et de plus utile à l'Église. Saint Vinceni de Paul a pour Bérulle la plus sincère vénération. Bossuet, dans son oraison funèbre du père Bourgoing, céfinit ainsi l’Oratoire : « L'amour immense du pére de Bérulle pour l'Église lui imposa le dessin de former une Compagnie à laquelle il n’a voulu donner d’autre esprit que l’esprit même de l'Église, ni d'autres règles que ses canons, ni d’autres supérieurs que ses évêques, ni d’autres biens que la charité, ni d’autres vœux solennels que ceux du baptême et du sacerdoce, là une sainte liberté fait un certain engagement. On obéit sans dépendre, on gouverne sans ? Dictionnaire historique. — 286 — commander ; toute l’autorité est dans la douceur, et le respect s’entrelient sans le secours de la crainte. La charité, qui bannit la crainte, opère un si grand miracle et sans autre joug qu’elle-même, elle sait non seulement capliver mais encore anéanlir la volonté propre. » Telle était la constitution de l’Oratoire. Avec elle point d'engagement, point de vœux, point de clôture, point de règles monastiques. Former des prêtres dans l'esprit de l’Église, sous la direction des évêques, était son unique but. C’était dans ces idées, que le 11 no- vembre 1611, accompagné de cinq de ses amis : Brice, Gibieuf, Bourgoing, Condren, Métezeau, le père de Bérulle, âgé seulement de 36 ans, mais déjà célébre par ses œuvres, fondait l’Oratoire. La science théologique et la piété c’étaient tous les avantages, toute la fortune des fondateurs « appliqués à remplir avec toute la perfection possible les devoirs de la vie sacerdotale*. » En ces temps, comme de nos jours, dans l’éducation cléricale les lettres devaient précéder la théologie. (était donc par la fondation de collèges qu’il conve- nait de débuter. Ce premier acte de leur plan répondit si bien aux besoins de l’époque que maîtres et élèves accoururent se ranger sous la direction du père de Bérulle. C'était à l’envi que sur toute la surface du royaume, au Nord comme au Sud, à l'Est comme à l'Ouest, surgissaient et prospéraient des collèges. Un succès si rapide, si com- plet dépassait toute espérance. Il obliga Bérulle à ! Bulle de fondation. — 287 — limiter son action et à laisser à d’autres la fondation des Séminaires. Ce fut la mission d’Ollier, et Saint- Sulpice compléta l’Oratoire. Dans ce nouvel ordre d'idées, l’occupation d'Angers ne pouvait manquer d’exciter les convoitises des Ora- toriens. Mais l’entreprise était difficile, téméraire peut- être, car à Angers l’Université avait le monopole de l’enseignement et l’Oratoire allait lui en demander le partage. Le sacrifice était dur. L’Oratoire, en effet, ne faisait que naître, séduisant de promesses sans doute; mais c'était l’avenir avec toutes ses incertitudes. L'Université, au contraire, c’était le passé avec toutes ses gloires et ses souvenirs. Pour qui a réussi dans sa fortune, les vicilles méthodes ont leur séduction et les nouveautés provoquent des défiances. Dans ces conditions un intermédiaire puis- sant devient indispensable. L’Oratoire eut l’heureuse chance de le rencontrer; ce fut la reine Marie de Médicis. La régente, au temps de sa puissance, avait connu Bérulle et son Carmel et l’Oratoire. Elle avait reçu ses premières confidences, encouragé ses efforis, assisté à ses premiers succès. Bérulle est encore son conseil, l'arbitre de ses débats entre elle et son fils. Elle a constaté d’ailleurs la faiblesse et la décroissance des collèges d'Angers. Elle sait qu’en faisant la fortune de l’Oratoire elle sert aussi les intérêts des Angevins, de leur ville, de leur province et même ceux de l’Uni- versité. Marie de Médicis a conçu son plan. Elle veut oralifier les Oratoriens de l'hôtel de Lancreau pour leur habitation, de l’église de lAumônerie pour leur ser- — 288 — vice religieux, du Collège d'Anjou pour leur œuvre de jeunesse ; mais tous ces lieux sont occupés et pour en éloigner les habitants il faut heurter des intérête, cho- quer des amours-propres. L’hôtel de Lancreau, tout le premier, c’est le palais de la reine, le siège de son gouvernement. Approprié, res- tauré à grands frais pour cet objet notre municipalité, par tradition monarchique et par délicate attention, en a fait hommage à sa souveraine. Ce vieil hôtel des Lérat était spacieux, confortable avec des dépendances, de grands jardins retirés, silen- cieux ; mais il n’avait rien d’aristocratique. (était un orand hôtel bourgeois de forme et de quartier. On y. pénétrait par une cour commune au travers de j’Au- mônerie Saint-Michel. Cette cour décorée du titre fas- tueux de cour du roi est présentement la petite rue Flore, alors close et fermée. Cette modeste habitation, en harmonie avec les goûts simples du Béarnais, ne convenait plus à sa veuve élevée dans les palais de Florence. Au contraire, par son style et son élégance, le logis Barrault lui rappelait l'Italie. Si ses jardins étaient étroits ils étaient limitrophes des profonds ombrages de Toussaint et de Saint-Aubin qui leur laissaient l'illusion de l'infini. Autant l'hôtel de Lancreau était plébien dans son quartier, autant le logis Barrault était aristocratique dans son voisinage. La Cité, Saint-Aubin, Toussaint, Saint-Martin le circonvenaient. Notre municipalité, pour toutes ces raisons, peu flattée sans doute du caprice de sa souveraine, se rendit pourtant à ses désirs et lui donna le logis Barrault. cn vd À Fes AE 7 da MA 4": — 289 — Quel que fût pour Marie de Médicis l'attrait de cette habitation, elle voulait sortir de l'hôtel de Lancreau pour le livrer aux Oratoriens. Dés le 15 novembre en effet, ses préférences à peine indiquées, elle rassemblait le corps de ville pour lui proposer l’accueil à Angers, d'une colonie de l’Oratoire. La demande accordée, elle s’empressait de solliciter du gouvernement de son fils, des lettres patentes qui furent délivrées le 22 février 1690 *. On négociait pendant ce temps l’achat même du logis de Lancreau. Le nom de Lesrat avait disparu à Angers et pourtant leur hôtel n’était point sorti de la possession des héritiers directs de la famille par les femmes. Françoise Lesrat, qui l’avait eu de son père Guy Lesrat, avait épousé Charles Harrouis, président du présidial de Nantes. De ce mariage était née Françoise Harrouis veuve alors de Bernard de la Jumellière. Ce fut cette dame qui reçut les ouvertures des pères de l’Oratoire *. Ces ouvertures promettant un résullat, ceux-ci, à la date du 14 avril, saisirent le corps de ville « pour le supplier avoir agréable Pachat qu'ils ont fait de la maison de Lancreau ou la roine étoit logée *. » Toutes formalités remplies, le père Mathurin Dugué au 30 octobre même année, put au nom de l'Oratoire signer l'acte d'acquisition de l'hôtel de Lancreau et de ses dépendances “. Cette première acquisition se devait compléter par 1 Péan de la Tuillerie, p. 361, 362, 363. ? Péan de la Tuillerie, p. 365. 5 Journal de Louvet, Revue d'Anjou, 1855, t. IE, p. 8. # Péan de la Tuillerie, p. 365. SOC. D'AG. 19 — 299 — celle de l’Aumônerie Saint-Michel qui occupait dans la cour du roi, l’espace compris entre la rue Saint-Michel et l’hôtel de Lancreau. Propriété de l’hospice Saint-Jean depuis 1602, l’au- mônerie restait sans emploi depuis cette époque, c’élait une condition favorable pour en négocier la cession, qui s’opéra, en effet, d’une façon régulière, le 23 dé— cembre 1620. Le traité stipule que moyennant cinquante cinq livres de rente annuelle et un sermon par semaine aux pau-- vres de l'hôpital, les pères de l’Oratoire aemeurent appropriés des église, salles, chambres, appentis, jardins et dépendances constituant l’'Aumônerie Saint-Michel *. À cetle date déjà nous trouvons les religieux de l’Oratoire dotés de l’église, paroisse et fief de Saint- Alman, portion de la commune actuelle de Saint-Jean - des-Mauvrets *. Si l'hôtel de Lancreau, fraichement restauré, était dans le meilleur état d'habitation, l'Aumônerie était en revanche dans le délabrement le plus complet. L'église, enfouie dans le sol, se trouvait dans un état désespérant d'humidité. Construite au bas du clos de vigne de Saint-Maurille, elle en avait reçu tous les égoûts et détritus que les eaux pluviales avaient pu charrier. Il en résultait autour des murs une surélévation du sol qui lui donnait l’aspect d'une cave. Sa construction ne permettant pas d’ailleurs d’élévation du carrelage, il ne restait de remède possible à l’assainissement que la UArchives municipales, B 65, fol. 130. ? Dict. historique. — 291 — reprise du niveau primitif en enlevant les terres rap- portées depuis. Ce fut en effet ce qui se produisit. Louvet nous informe que « le jeudi 4e° avril 1699, les pères de l'Oratoire ont fait abattre le grand autel et deux autres autels qui estoient en la chapelle de l’Au- mônerie Saint-Michel ; fait faire des housteaulx pour y donner du jour, fait refaire les vitraux tout à neuf, rehaussé la ditte chapelle des terres qu’ils ont fait tirer autour d’icelle pour la rendre sèche ; fait reblan- chir, revestir tout à neuf, et comme aussi ils ont fait bastir tout à neuf une sacristie au costé et derrière le dict graud autel de la ditte chapelle, qui estoit nommée hôpital Saint-Michel, qui a esté fondée et faict bastir par deffint révérend père en Dieu Jehan du Bois, évêque de Dol en Bretaigne, pour y loger treize pauvres qui fust en l'an 1339, et a esté enterré dans la dite chapelle près du dict grand autel. » Les travaux de restauration se prolongèrent près de deux ans. Ce ne fut qu'aux premiers jours de fé- vrier 1623 que les pères de l’Oratoire purent prendre possession de leur église. Elle se fit avec solennité. « Le dimanche 12 février 1623, les pères de l’Oratoire ont esté eslablis en la chapelle et l’église de l’aumônerie el hôpital de Saint-Michel près le palais royal de ceste ville d'Angers, par M. Miron, évesque d'Angers, lequel a officié et dict la grande messe à diacre et sous diacre laquelle a esté chantée et répondue en musique par MM. de la psallette de l'Église d'Angers, où ils ont esté mis sur la porte de l’entrée de la ditte chapelle et l’évangile estant dict, M. Caspéan, évesque de Nantes, — 292 — a dict le sermon qui a duré près de deux heures, lequel a traicté dignement de l’ordre de la prêtrise ; où ont assisté MM. de la justice et grand nombre de peuple qui ont été grandement édifiés du dict sieur évesque de Nantes et à l’après dinée du dict jour, les dicts pères de l'Oratoire , au nombre de huit prestres, ont chanté vespres en la ditte église où y avoit grand nombre de peuple, laquelle église les dits pères ont fait hausser d’une grande hauteur, reblanchir et réparer. » Cette inauguration d'église complétait l’installation des Oratoriens à Angers. Ils allaient pouvoir prier en commun, vaquer librement à leurs dévotions, grouper en outre des fidèles autour d’eux, établir un courant d'assistance par l'attrait de leurs cérémonies et le charme de leur prédication. On arrivait au Carême. L'occasion fut saisie avec empressement et le père de Bérulle vint lui-même en prêcher la station. Ouverte le 5 mars, elle se termina le Vendredi-Saint 14 avril. Ce dernier jour, l’évêque Miron Lint à rehausser par sa présence l'éclat de cette clôture. « Le dit évêqne, nous dit Louvet, a oui le sermon de la Passion prêché par un père du dict Oratoire, nommé le père Bérulle. » Ils introduisirent l’année suivante 1624 Ia dévotion des quarante heures, enrichie par le pape, sur leur sollicitation, de nombreuses indulgences. L’évêque d'Angers n’était pas le seul prélat convié à leurs cérémonies. Le 26 décembre 1693, l’évêque de Chartres y vint prêcher. NT Qu Le 22 décembre 1625, l’évêque de Nantes, qui avait déjà paru au jour de l'inauguration; s’y présenta de nouveau pour y faire une ordination. Si les dévotions populaires tombaient dans le domaine de l’Oratoire, personne n’ignorait que l’éducation de la jeunesse ne fùt son œuvre spéciale, son unique am- bition. L'occasion d’ailleurs ne pouvait être plus. favorable. Nos collèges affaiblis et déserts réclamaient une autre direction. Nous étions àux jours de la transformation de notre langue, aux jours de Malherbe, de Balzac, de Descartes. Engourdie dans sa vieillesse, l’Université d'Angers semblait ignorer ce merveilleux développement. Aussi la jeunesse ne pouvant rencontrer dans ses méthodes les séductions du temps, abandonnait son enseignement et s’en allait au loin. La ville d'Angers possédait alors plusieurs collèges. Le plus important était le collège d'Anjou, appartenant à la nation d'Anjou, aujourd’hui la mairie, limitrophe du jardin de l’Oratoire. Si, par ses subventions, la municipalité y exerçait un droit de patronage, il n’en élait pas moins dépendant de l’Université qui le faisait gérer par un personnel de son choix approprié lui- même, par concession spéciale, de la direction et des revenus. Ge collège était le seul qui pût convenir à l’Oratoire, mais pour le lui concéder il importait de le rendre libre en désintéressant de bon accord les anciens concessionnaires. Telles étaient les difficuliés de situa- — 294 — tion que Marie de Médicis, avec toute l’autorité de son caractère, déduit éloquemment dans sa lettre au corps de ville en date du 10 février 1624 ainsi conçue : « De par la reine mère du roy, gouvernante du pays et duchez d'Anjou. « Chers et bien aimez, étant informée du désir que beaucoup des habitants de la ville et de la province affectionnés au bien publie ont de voir fleurir l'Université d'Angers par le rétablissement de l’exercice des bonnes lettres dans les collèges, lesquels depuis longtemps, par négligence ou autrement, sont demeurés inutiles et infructueux aux habitants qui sont contraints de recher- cher au loin et à grands frais l'instruction de leurs enfants ; nous avons estimé qu’on ne peut mieux salis- faire aux vœux des parents, et réparer plus avanta- geusement des défauts si nuisibles qu’en commettant la conduite, instruêtion et direction de l’un de vos collèges aux pères de l’Oratoire, lesquels estant déjà établis au contentement de tous les ordres de la ville, adjouteront volontiers aux bons exemples qu’ils donnent par leurs actions à un chacun le soin et la peine qu’ils prendront d’instruire la jeunesse, se soumettant aux lois de l’Université. € Mais afin de ne se détourner pour les exercice spi- rituels auxquels leur profession les oblige, Nous jugeons à propos que vous leur donniez le collège le plus pro- che de leur maison, en dédommageant ceux qui y sont maintenant; à quoi nous nous assurons que vous pré- terez d'autant plus facilement vos consentements que c’est le bien du pays, pour l'honneur de la ville et pour — 295 — la commodité des habitants qui vous seront toujours en particulière recommandation. Prions Dieu qu'il vous tienne en sa sainte et digne garde. « Escript à Paris le 10€ jour de février 1624. «Signé : MARIE. » Le pouvoir royal, qui n'avait encore rien perdu de son prestige, pesait assurément de toute son influence dans l'avis donné. On ne pouvait pourtant contesier la force des arguments de la souveraine moins encore suspecter son dévouement quand à Juilly et dans leurs autres collèges, les Oratoriens révélaient déjà les plus merveilleuses aptitudes pédagogiques. On ne pouvait en outre d’après ces considérations, s’é- tonner de l’empressement du maire GabrielJouet à réunir son conseil, pour lui communiquer la lettre de la reine, jui demander son avis et provoquer la délibération qui en découlait. La réunion s’opéra le 24 février el prit les conclusions suivantes : « Le vendredi 24e jour de février 1624. Au conseil tenu en l'hôtel et maison commune de la ville et mairie d'Angers, ou estoient présents MM. le maire Gabriel Jouet ; « Les échevins Prévost, Hamelin et Hubert, les con- seillers Ayrault, Baudrie, Ménage, Bonvoisin, Cupif, Nepveu ; « Dumesnil, avocat du roy; « Froger, procureur de ville. « Sur la représentation faite par M. le maire d’une — 296 — lettre de la reine mère du roy, gouvernante de cette province, escriple à cette compagnie en date du dixième de ce présent mois, par laquelle la dite majesté désire que l’on donne aux pères de l’Oratoire de cette ville le collège le plus proche de leur maison pour y instruire la jeunesse, en dédommageant ceux qui y sont mainte- nant et se soumettant aux lois de l’Université. « Lecture faite d’icelle et les opinions prises a esté conclu qu’il sera fait de la part de cette compagnie à sa ditte Majesté très humbles remerciements de l'affection qu’elle a au bien commun des habitants de cette ville et du soin qu’il lui plaît prendre de l'entretien de l’exer- cice des lettres et de l’instruction de la jeunesse et collège de l’Université de cette ville, avec assurance des volontés et intentions des habitants de cette Compagnie à l'exécution de ses commandements. Ce que M. le Maire et MM. les eschevins sont priés de faire à M. le commandant de la Porte, gouverneur de cette ville et château, et que l'entretien du dict exercice dépendant de la direction de MM. les recteur, directeurs, régents et suppôts de la dite Université, il est besoin de le représenter à la volonté de sa ditte Majesté, et voir Jes dicts pères de l’Oratoire et savoir leur intention sur la susditte proposition. Ce que les dits maire et esche- vins ont été priés de faire et que la ditte lettre soit insérée en suite de la présente pour y avoir recours. » Le Corps de ville se rendait aux désirs de sa souve- raine , la remerciait même de sa sollicitude pour ses intérêts, mais la renvoyait aux recteur, docteurs régents et suppôts de l’Université pour le réglement des inté- rêts qui en découlaient. Ces intérêts d’ailleurs étaient — 297 — complexes puisqu'il y avait à résilier un contrat en cours, concédé à des tiers, les principal et régents du collège d'Anjou. Ge principal qui était messire Claude Maudet, avait à sa charge un personnel de maîtres et un mobilier scolaire. Le congé des maitres, l’enlèvement des meubles comportaient un dommage qui fut évalué 2,400 livres à la charge de la ville. Ces intérêts réglés, la Nation d'Anjou, en date du 21 avril, prit des conclusions définitives qui permirent d’en terminer et de rédiger le contrat suivant dressé par Deille, notaire royal au Pilori, en date du 18 mai 1624. Contrat faict par MM. de l'Université d'Angers avec MM. les prestres de l’Oratoire du nom de Jésus, pour instruire et enseigner la jeunesse d'Anjou dans le Col- lège d'Anjou, nommé le Collège neuf. « Le 18° jour de mai 1624, il a esté faict en la ville d'Angers ung contrat et traicté entre MM. les depputez de la Nation d'Anjou en l’Université au dict Angers, Savoir : « MM. Estienne Heard, conseiller à la prévosté, procu- reur de la ditte Nation; « François Boylesve, sieur de la Bourdinière,. maistre-écolle en la ditte Université et cha- noine en la ditte église d'Angers; « François Davy, sieur d’Argentay, docteur doyen en droit en la ditte Université ; « François Blouin, Arnault Saman, avocats deppu- tez, d’une part. — 298 — « Les pères de l’Oratoire, demeurant en ceste dilte ville, rue Saint-Michel ; « Claude de Maudet, principal du collège d'Anjou, alias le Collège neuf, pour suivant l'intention du roy notre sire, la royne sa mère, MM. les gouverneurs, officiers de la justice, que de la ditte Université et Nation; « Establir les dicts pères de l’Oratoire audict collège pour l'instruction de la jeunesse et bien du publicq et aussi pour dédommager le dict de Maudet cy-davant estably principal au dict Collège par contrat passé par Deille notaire, par lequel traité est accordé au dict Maudet, la somme de 2,400 livres pour tous dommages et intérêts qu'il pourroit prétendre, à cause de l’évic- tion du sus dict contrat, muniement et fournissement qu’il auroit faict pour l'exercice du dict collège et repa- rations, au moyen de laquelle somme le dict de Maudet, principal, se demettra- et promet demettre au nom des dicts pères de l’Oratoire au droit qu’a le dit principal au dict collège en vertu de son dict contrat et de toute disposition d’yceluy pour en faire par les dicts pères de l’Oratoire tout et suivant et au désir de la fondation et statuts dudict collège, à condition que le dict principal pourra emporter ses meubles et provisions aussitôt . -qu'il aura reçu la ditte somme et exécuté le dit désis- tement et remise sans rechercher contre lui d’aulcunes réparations ni charges du passé, comme plus au long est contenu par le dict contract, passé par ledict Deille, notaire royal au dict Angers, demeurant au Pylory. » « Ce dict jour 18e jour de mai 1624. » — 299 — Cette concession du collège d’Anjou était le complé- ment du projet de la reine, le couronnement de son œuvre qu'on admire dans sa conception ct plus encore dans son exécution. Ce fait accompli, rien de plus pressé pour les pères de l’Oratoire que de prendre possession de leur collège et d’en ouvrir les classes. Mais là encore régnait le désordre signalé depuis longues années par nos archives. Il fallut plusieurs mois pour opérer les plus urgentes réparations. Des affiches enfin sur les murs publics annoncérent l'ouverture solennelle du collège pour le à novembre 1624. Toutes les sommités angevines s’y virent réunies, évêque, gouverneur, lieutenant général, maire, con- seillers de ville et du présidial, juges consuls et avocats, Entouré de ses professeurs et de ses régents, le père Icard recevait ses invités et présidait la solennité. Dans un discours fort applaudi il exposa l’esprit et le but de sa congrégation et ses plans d’étude pour en obtenir le succés. Les promesses et les espérances ne tardérent pas à se réaliser. Deux années ne s'étaient pas écoulées que le corps de ville adressait aux pères de l’Oratoire toute sa satisfaction et leur assurait en témoignage une rente annuelle de mille livres sur les revenus de la Cloison. Le collège d'Angers apportait ainsi à l’Oraioire sa part de collaboration et de succès que Rome voulut récompenser. Le pape Urbain VIIL, triomphant de la modestie du Père de Bérulle, le gratifia d’un chapeau de cardinal. — 300 — Ce fut un éclair de jouissance. Les jours heureux furent courts comme toujours; Bérulle mourut dans toute sa gloire, après deux ans de pourpre romaine, âgé seulement de 53 ans. Le 29 octobre 1629, ses fils d'Angers célébraient son service funèbre dans leur église toute tendue de deuil. La ville entière s’associait à leur douleur. L’official de l’église d'Angers célébrait la messe, un père Carme prononçait l’éloge funébre. L. RONDEAU. BE LA REPRÉSENTATION OFFICIELLE ET LÉGALE DE L'AGRICULTURE Le mercredi 23 janvier dernier, le Conseil supérieur de l'Agriculture, réuni sous la présidence de M. Meline, ministre de l’Agriculture, a terminé l’examen du Projet de loi relatif aux Chambres consultatives d'Agriculture. Les principales dispositions de ce Projet, adopté en principe, sont : Il sera créé, dans chaque canton, une Chambre con- sultative d'Agriculture, composée de deléqués nommés par le Conseil municipal de chaque commune, à raison d'un déléqué par commune. Chaque Chambre cantonale d'Agriculture nommera deux déléqués, qui formeront la Chambre consultative d'arrondissement. — 302 — La représentation officielle et légale de l’Agriculture est en effet devenue indispensable : l’Industrie et le Commerce ont déjà leurs représentants élus, dont les avis ont une grande action sur les Pouvoirs publics. L’Agriculture, la plus indispensable, la plus nationale, la plus grande de nos industries, réclame le même avantage, c’est-à-dire sa représentation légale et offi- cielle. Une loi de 1851 avait organisé, d’une façon assez complète et libérale, cette représentation. Les Chambres d'agriculture étaient élues par les membres des Comices agricoles, c’est-à-dire par des agriculteurs. Cette loi n’a pas vécu ; un décret de 1852 a nommé le Préfet grand électeur des Chambres agricoles. Les intéressés (les agri- culteurs) ont été déclarés déchus de leurs droits: la politique faisait son œuvre. C'est ce système, sous une autre forme non moins étonnante, que vient d’adopter le Conseil supérieur de l'Agriculture. Les conseillers municipaux étantactuellement, presque généralement, acquis à la politique républicaine, comme ils pourront l'être. un jour, à toute autre politique, ont paru au gouvernement avoir les connaissances agricoles voulues pour devenir subitement et par une véritable grâce d’État, les électeurs naturels et entendus des représentants de l’Agriculture. On pense à moi pour une place, dit Figaro, mais, par — 303 — malheur, jy étais propre. Il fallait un calculateur, ce fut un danseur qui l’obtint. II Nous venons protester contre le Projet de loi du gou- vernement, parce que ses dispositions présentent, pour les intérêts agricoles et moraux du pays, des consé- quences fatalement désastreuses. Elles nous conduisent dans une voie dangereuse : celle où toutes les libertés se livrent à l’État ; où toutes les iniliatives auront bientôt besoin du baptême de la politique; c’est l’envahissement lent mais certain du Socialisme d'État. Le suffrage universel doit-il nous conduire à cette suprême erreur, pour le plus grand bien des besogneux qui en vivent ? La composition nouvelle du corps électoral, choisi par le gouvernement, étant malheureusement exclusivement politique, ne peut incontestablement répondre aux espérances de l’Agriculture. Or, il ne faut pas se le dis- simuler, l’Agriculture française subit en ce moment une crise dont on peut prévoir la fin désastreuse, si des défenseurs compétents, énergiques, et, disons-le, libres de toute attache officielle, viennent protester contre des théories cosmopolites, dont le libre-échange est une des manifestations les plus dangereuses. La liberté des échanges agricoles est dans le programme d’un système d'économie politique, dont les adeptes sont aujourd’hui au pouvoir; pouvons-nous metlre nos intérêts agricoles entre les mains de conseils élus, plus ou moins, sous — 304 — l'influence de sentiments politiques ? Ces intérêts im- menses, liés intimement à ceux de l’industrie, peuvent- ils (aujourd’hui et dans l'avenir) être jamais subordonnés aux convenances des partis si nombreux qui déchirent notre malheureuse Patrie ? Poser la question, c’est la résoudre. Peut-on confier les intérêls agricoles si importants, à des Chambres aussi minuscules que des Chambres cantonales, circonscription trop restreinte pour produire assez d'hommes d'initiative, capables de donner aux dites Chambres nne activité salutaire ? Nous ne le pen- sons pas. Déjà, les Comices agricoles qui rayonnent sur tout un arrondissement, n'arrivent qu’à grand’peine à réunir les membres de leur bureau au complet. Que feront donc ces Chambres cantonales ? pourront-elles agir plus correctement, plus heureusement, plus efficacement que, par exemple, les commissions vicinales, les com- missions de statistique et les commissions scolaires qui, dans la plupart des cantons, ne se réunissent jamais? Cette critique étant faite des principales dispositions de la loi, nous voyons avec satisfaction que le Préfet cessé d’être le grand électeur des Chambres d’Agricul- ture! C’est un progrès. Depuis longtemps, du reste, les fonctions d'administrateur des affaires départemen- tales devraient être retirées au Préfet, dans son propre intérêt d’abord et aussi dans ceux du gouvernement, des départements ei de la prospérité générale. Ses fonctions de commissaire général devraient, seules, lui être conservées soigneusement : comme administrateur son rôle esi toujours nuisible. Ses fonctions, essen - — 305 — tiellement mobiles, le jettent trop fréquemment dans un inconnu nouveau, où toutes ses connaissances ac- quises tournent souvent contre lui : il convenait au nord, on le place au midi; il était dans un centre agricole, on l'amène dans un centre industriel. Nos préfets ne peuvent . prendre racine, ne voient leur place que comme un échelon pour leur ambition; certains qu’ils ne sont que dans un lieu de passage, ils ne sont pas excilés à pré- parer des établissements, dont le succès ne leur sera point attribué et dont l'éclat ne leur appartiendra pas. Ne pouvant donc parvenir à se localiser, ils ne peuvent s'identifier avec les intérêts agricoles d’un département. Îls arrivent; un caprice du pouvoir les transporte bien loin, et tout est à recommencer. Ils connaissent de l'Agriculture ce qu’en savent les tribus nomades. III Aprés avoir blâmé les défauts du projet de loi, il est nécessaire d'examiner et d'étudier ce qu’il convient de faire. Si en 4860, en 1871 et en 1881 l'Agriculture avait été légalement, librementet intelligemment représentée, le libre-échange battu en brèche par ses délégués, aurait, trés probablement, amené son pavillon; les intérêts des classes agricoles n’auraient pas été mécon- nus en 4860, sacrifiés en 1871, et enfin trahis en 1881 par les Industriels qui, aujourd’hui, subissent le contre- coup de leur parjure. Il est donc nécessaire, pour éviter le retour de pareilles mésaventures, d'étudier à fond SOC. D’AG. 20 — 306 — la loi nouvelle, d'examiner ce qu’elle promet et si les garanties qu’elle présente, laisseront aux représentants füturs de l'Agriculture, leur initiative et surtout leur liberté. Nous remarquerons bien vite que les dispositions de cette loi, détruisent celles de la loi du 20 mars 1881. Par cette dernière loi, les comices formaient la base de la représentation et conctituaient le corps électoral au premier degré. Au chef-lieu de chaque département, il était établi une Chambre d'agriculture, et enfin à Paris, un Con- seil général de l’Agriculture. Les Comices et associations agricoles se recrutaient librement, parmi les propriétaires, fermiers, colons et leurs enfants âgés de 21 ans, domiciliés ou ayant leurs propriétés dans la circonscription du canton. La Chambre départementale se composait de membres élus par les Comices, en nombre égal à celui des can- tons du département. Le Conseil général se composait de membres élus par les Chambres départementales d'Agriculture, chacune de ces Chambre élisant un membre pour la représenter; enfin, le Conseil général pouvait s’adjoindre, par voie d'élection, dix membres supplémentaires en plus. Cette disposition permettait de faire une place à des savants et à des spécialistes agricoles, qui n'auraient pas été _élus dans les départements. Le Projet actuel est tout différent: nous en avons cilé la teneur. Ce projet n’institue aucune Chambre au chef-lieu du département, et aucun Conseil central à Paris. Cest certainement de la mauvaise décentra- — 307 — lisation. C’est l'isolement des forces vives de l’Agri- culture, c’est leur éparpillement. C’est les réduire à l'impuissance, si leurs efforts isolés ne sont pas con- centrés dans la puissance plus active d’un Conseil supérieur et central, résidant auprès des Pouvoirs publics. C’est, pour la province, une nouvelle invasion de la politique. dans des associations qui n’en ont que faire. C’est presque la création de nouveaux fonctionnaires, non salariés, il est vrai, mis, en quelque sorte, dans l'obligation de servir toutes les évolutions politiques du gouvernement, condamnés à l'indifférence et à la len- teur administralives, et à une obéissance aveugle et servile à la masse inconsciente et inintelligente de leurs électeurs. Dans une question aussi grave que celle de la défense des intérêts agricoles du pays, intérêts liés si intimement à la politique intérieure par l'alimentation des popu- lations, les irrigations, les déboisements, la création des chemins vicinaux, les épidémies ; à la politique exté- rieure par le libre échange, l'alimentation du pays pendant la guerre, la police sanitaire internationale, il faut, au contraire, que la liberté de réunion et d’asso- ciation avec tous ses avantages pratiques et sociaux soit pleine et entière. Les intéressés, seuls, dégagés de la torpeur et de l'inertie du fonctionnarisme, doivent discuter la valeur de leurs candidats et s'entendre librement sur le pro- gramme à poser et sur les moyens de défense et d’at- laque. Quel besoin le gouvernement éprouve-t-il d'innover — 308 — en pareille matière ? Les commerçants et les industriels ne sont pas des idéologues, et, pendant plusieurs siècles, ils ont eu recours à l'élection pour la désignation de leurs juges spéciaux. Au commencement de ce siécle, une autre juridiction industrielle a été admise par la loi : celle des Conseils des Prud'hommes, qui statuent sur les contestations entre fabricants et ouvriers. Le mode d'élection, la composition du corps électoral, les conditions d'éligibilité ont varié souvent ; mais, le principe n’a pas varié : c’est loujours le bre choëx des commerçants, des fabricants et des ouvriers qui a dési- gné les juges du commerce et de l’industrie. Ce n’est pas par amour de la théorie, qu’on a procédé de cette façon. Les commerçants, sentant mieux que personne les besoins du commerce, se sont donné une législation qui, bien que défectueuse et arriérée à cer- tains égards, est de beaucoup supérieure à la législation purement civile, par la simplicité des formes, par le respect de l'intention des parties et par une plus grande conformité avec les besoins des temps actuels. Hier, il est vrai, la Révolution est arrivée, brisant l’œuvre du passé, détruisant ce qu’il y avait d’excellent dans l'institution des notables commerçants choisissant, avec intelligence et'non à l’aveugle, leurs magistrats et leurs juges consulaires. Devons-nous l'accompagner dans cette aventure ? Abandonné en matière commerciale, ce systême d'élection pourrait-il avoir quelque chance d’être admis pour l'Agriculture ? Pouvons-nous espérer la solution que nous cherchons, dans la création de notables agricoles, seuls électeurs de la Chambre dépar- tementale ? Les idées du jour nous semblent contraires — 309 — à cette mesure qui, du reste, soulèverait dans chaque commune bien des antagonismes et bien des jalousies. Nous croyons cependant que (la création des notables commerçants a produit de si excellents résultats)! l’on pourrait prendre dans l'institution des tribunaux de commerce la base de leur organisation : le libre choix des intéressés, ceux-ci choisis parmi les plus compétents et les plus honorables. Nous allons développer cette idée en quelques mots. IV Il est évidemment indispensable que les Chambres d'Agriculture, qu’elles soient cantonales ou départe- mentales, aient la plus grande autorité possible auprès du Parlement ; s’il n’en était pas ainsi, si les décisions de ces Chambres étaient lettre morte, il serait inutile de les créer. Il s’agit donc d’examiner si ces Chambres tireront leur autorité de la compétence ou du nombre de leurs électeurs. Si le nombre doit intervenir comme facteur principal, le corps électoral doit, alors, être étendu sans restriction aucune, tout en maintenant, si on le veut, que les élé- ments de ce corps électoral resteront strictement agricoles. On pourrait et devrait y comprendre les charrons, les maréchaux, les bourreliers, les marchands d'engrais, tous les salariés, tous les ouvriers agricoles, domestiques et journaliers. Si, au contraire, la puissance et la force des Chambres — 310 — d'Agriculture, leur autorité morale devant les Pouvoirs publics, doivent être en raison directe de la compétence du corps électoral qui les élira, il n’y a pas nécessité de modifier la loi du 20 mars 1851 qui désigne comme électeurs les membres des Comices agricoles. La porte de ces Comices est ouverte à tous ceux qui ont quelque souci des intérêts agricoles, et c’est se payer de mots que de dire, que les Comices faisant payer annuellement une légère cotisation, obligent par cela même les électeurs à acheter leur vote. Ceux qui s’éloi- gnent actuellement de ces Comices, seront également indifférents devant l’urne électorale. Il n’y a donc pas à s’en préocccuper autrement. On a critiqué la loi de 1851, en disant qu’elle était contraire à la liberté des Comices, en ce sens qu'elle les obligeait (art. 2) à accepter dans leur sein des personnes indignes, et qu’elle leur interdisait d'admettre des per- sonnes qui, sans être propriétaires, fermiers ou colons dans leur circonscription, pourraient néanmoins leur prêter un utile concours. L’objection ne porte pas, ou du moius ne porte plus, car, aujourd’hui, tous les Comices statuent librement sur l'admission de tous les membres qui se présentent, d’après des dispositions introduites dans leurs réglements particuliers. Et, comme Particle 2 de la loi de 1851 ne porte aucune atteinte aux dits réglements, actuellement en vigueur dans ces comices, un retour à la loi de 1851 ne modiferait en rien cette excellente situation. Il résulte de ces faits que, non seulement nous demandons que les Comices agricoles servent, comme en 1851, de base électorale, mais encore nous réclamons — 311 — que les Sociétés d’Agriculture, les Associations agricoles, les Syndicats d'agriculteurs ét les Institutions agricoles, reconnues d'utilité publique, aient leurs membres électeurs, de droit, pour la constitution des Chambres départementales. C’est élargir et étendre la base élec- torale ; c’est l’addition des capacités. Les agriculteurs qui ne veulent pas figurer dans ces divers groupes, dans lesquels leurs intérêts sont constamment étudiés, auraient mauvaise grâce de revendiquer, au moment des élections, quel qu’en soit le mode, le droit de voter pour des candidats aux travaux desquels ils n’ont pris aucune part, ni aucun intérêt. Ces Comices, ces Sociétés d'Agriculture, reconnus par l’État, ayant le droit de diriger des enquêtes, de pro- voquer des dépositions et des études; ce sera là un moyen excellent de faire intervenir, sans danger, la puissance du nombre, c’est-à-dire le suffrage universel restreint, bien entendu, aux cultivateurs et aux intéressés. Que faut-il de plus ? Cette loi de 1851, remise en vigueur, avec les modi- fications que nous proposons, secouera la torpeur des classes agricoles et stimulera l'indifférence des campa- gnards. C'est une loide liberté et de décentralisation qui provoquera le groupement spontané des intéressés in- telligents, et laissera de côté les « abstentionnistes » qui, par tempérament, vivent dans un engourdissement regrettable et coupable. Le titre d’électeur serait, ainsi, un stimulant qui aidera au recrutement des Sociétaires des Comices et des Sociétés d'Agriculture ; d’où il résultera de nou- velles ressources pour les encouragements à donner à — 312 — Agriculture. Aïnsi vivraient, fortement constitués, les Comices et Les Sociétés d'Agriculture dont les travaux ont toujours marqué la voie du progrès, et dont les membres sont, à coup sûr, les seuls capables d’appré- cier le mérite d'hommes assez capables, assez compé- tents et seuls dignes d’être à la fois à l'attaque et à la défense, pour sauvegarder les intérêts agricoles attaqués sans cesse, el toujours battus depuis 1860. Que la base électorale soit, au contraire, composée des Conseillers municipaux, ou de tous les Agriculteurs du canton, c’est, dans les deux cas, le recours au suffrage universel dont, disait encore récemment à la Chambre le Pré- sident du Conseil des ministres, on peut se servir & la rigueur pour flalter les passions populaires, mais qui nest qu'un instrument fort rudimentaire et grossier. Il faut donc, comme base électorale, des électeurs capables et dont les connaissances soient au-dessus de celles de l’homme dont l'intelligence est demeurée inculte : il est, pour l’esprit comme pour le corps, une habitude d’agir, une véritable pratique qui ne s’acquiert qu’à la suite d’un long exercice. L’Agriculture étant à la fois métier, art et science, les électeurs ainsi désignés, comme aussi les représentants à élire, ne peuvent être indifféremment choisis : il y va du salut de l’Agri- culture, c’est-à-dire de 25 millions de citoyens qui vivent de la terre : tous les hommes de bonne foi le recon- naissent, et admettront nos conclusions. — 313 — V Cette question de la représentation officielle et légale de l'Agriculture a déjà préoccupé, depuis longtemps, le monde agricole. Il y a, disons le bien vite, unanimité pour le rejet du Projet du Conseil supérieur de l'Agriculture. On réclame partout, purement et simplement le retour à la loi de 14851 dans laquelle il y a deux parties bien distinctes : 4° la constitution des Chambres consultatives départementales, et celle d’un Conseil supérieur de l’Agriculture (titre II, et titre IT) est partout réclamée ; 20 l'attribution aux Comices seuls (titre 1) de l'élection des Chambres consultatives a rencontré quelques objec- tions. On a proposé les modifications suivantes : À. — Admettre la loi de 4854, et accepter, comme base de la représentation, un corps électoral comprenant tous les éléments agricoles et rien que les éléments agricoles, sans distinction aucune. B. — Admettre la loi de 1851, et faire reposer l’élec- torat agricole sur un certain cens. C. — Emprunter les termes mêmes de l’article 2 ($ 1 de la loi de 1851) comme base électorale ; c’est-à- dire admettre comme électeurs du 1er degré, tous ceux que la loi du 20 mars 1851 déclare aptes à faire partie des Comices : « Ont le droit de faire partie des Comices en se conformant aux réglements, les propriétaires, fermiers, colons ou leurs enfants, domiciliés ou ayant leurs propriétés dans la circonscription du Comice. x Nous faisons remarquer, de suite, que cette propo- NAN sition dernière, soumise à la Société des Agriculteurs de France, a été acceptée par la Commission de cette Sociélé, dans le cas où le retour à la loi de 1851 ne serait pas admis par la Chambre des députés. Nous allons examiner successivement ces quelques propositions. VI À. — M. Marc de Haut, auteur de la premiére pro- position, prend comme base un corps électoral, com- prenant tous les intérêts agricoles et rien que les intérêts agricoles. Il trouve que la loi de 1851 a choisi une base trop étroite et trop exclusive. Il prétend que pour obtenir l'attribution d’un privi- lège électoral, il faut un corps électoral largement étendu et composé d’éléments exclusivement agricoles. Il craint que la Chambre n’accepte pas une représen- tation de l’agriculture, formée par un corps électoral plus restreint que celui qu’il propose. Poursuivant son plan de réforme, il ne veut pas de Chambres dépar- tementales, afin d'éviter tout confit avec le Conseil général. Il propose une Chambre régionale dont la cir- conscription cadrerait avec celle des 12 concours régio- naux. À Paris, existerait un Conseil supérieur composé. de 24 membres élus par les Chambres régionales. Nous ne sommes pas de son avis; nous refusons à l’ensemble des cultivateurs l’intelligeuce et les capacités voulues, pour choisir, efficacement et sérieusement, leurs élus ; la seconde partie de ce projet est une inno- _Vation trop considérable. Les Chambres régionales — 315 — manqueraient d’homogénéité, et comprendraient des intérêts agricoles trop différents, souvent même trop . opposés, pour réaliser une entente commune, indis- pensable pour la lutte. Un conseil de 24 membres, d’autre part, n’est pas suffisant pour représenter l’en- semble de l’Agriculture auprès des Pouvoirs publics. B. — Un autre système proposé par M. Lequeux, est le suivant : Le corps électoral se composera de tous les pro- priétaires de propriétés non bâlies, payant une certaine somme d'impôt foncier (10 ou 15 francs par exemple) ainsi que de tous les fermiers et cultivateurs exploitant un certain nombre d'hectares, à fixer ultérieurement. Le corps électoral serait ainsi élargi par rapport aux Comices, mais restreint par des conditions d'impôt ou d’étendue de culture. On adjoindrait au corps électoral, ainsi constitué, des professeurs d’Agriculture. On le voit, cette solution établit un corps électoral aussi étendu que possible, et n’admet que des personnes sérieusement intéressées à la prospérité agricole. La proposition de M. Lequeux se trouve, du reste, ainsi formulée : _ 4° Les Chambres consultatives d'Agriculture sont désormais nommées, à l'élection, et dans chaque commune. % La constitution du corps électoral appelé à les former, aura pour base fondamentale le paiement d'une contribution foncière sur propriétés non bâties, et, pour les fermiers et métayers, la justification d'un bail. Nous reconnaissons que ce système est préférable à celui de M. Marc de Haut; malheureusement, des — 316 — difficultés se présentent pour sa réalisation. Le chiffre du cens à déterminer est très difficile à établir, sans provoquer des jalousies et des antagonismes de la part des éliminés, au milieu de populations chez lesquelles des idées d’égalité ont pénétré. N'oublions pas que la révolution de 1848 s’est faite, en partie, contre le système électoral basé sur le cens. VII En somme, ces deux projets ont un point commun : ils réclament le retour à la loi de 1851, mais en prenant, comme base de la représentation, un corps électoral comprenant des intérêts purement agricoles, mais différemment pesés et appréciés. Le premier projet généralise le vote des agriculteurs, comme on vient, malheureusement , dé généraliser le vote des com- merçants. Le second le restreint, en s'appuyant (c’est un défaut), sur une base, qui, jugée par la révolution politique de 1848, ne nous paraît pas d’une réalisation facile. | / Le premier projet, comme celui du Gouvernement, nous paraît aussi défectueux que dangereux. Nous ne pouvons accepter que comme « dernière ressource » sa base électorale. Tous deux nous conduisent dans une voie pleine de périls : la marche en avant vers une nou- velle application du suffrage universel, base incons- ciente des institutions républicaines ; suffrage universel, qui sous toutes les formes qu’il puisse agir, nous a conduits et nous conduira toujours à des déceptions, à — 317 — des imbécillités et à des désastres. Gardons-nous de solliciter son intervention dans une lutte sérieuse d’où dépend la fortune agricole, et par contre-coup, indus- trielle de la France. VIII Ce qui est plus en rapport avec la saine logique des choses et des faits, avec l'appréciation du vrai, c’est l'institution d’un corps électoral restreint et composé, librement, par des intéressés intelligents et par des capacités. C’est, en un mot, le retour à la loi de 1851, étendue aux Sociétés d'Agriculture, aux Associations et Syndi- cats agricoles, à la condition que ces Sociétés diverses soient reconnues d'utilité publique par l’État. Les Comices de 1851 relèvent de l’iniliative privée : . greffer sur ces Comices un corps officiel de représen- tation, c’est amener le législateur à mettre la main sur eux pour les réglementer. La loi de 1851 l'avait tenté ; c’est celte organisation qui a prêté le flanc aux attaques faites à celte loi, et c’est sous le prétexte de rendre aux Comices toute leur liberté, que le législateur de 1852 a détruit l’œuvre de 1851. Trop agrandir la base du corps électoral (comme le veulent MM. Marc de Haut et Lequeux) c’est s’exposer à le voir se laisser dominer par des idées et des préoccupations politiques. Dans ces deux cas, les assemblées législatives seraient-elles dis- posées à laisser se constituer, à côté d’elles, un conseil supérieur d'Agriculture comme aussi un Conseil supé- — 318 — rieur du Commerce, émanant d’un corps électoral plus nombreux que celui qui nomme le Sénat, presqu’aussi étendu que celui qui nomme le Corps législatif? Nous ne le pensons pas ; et, en effet, le projet de loi du gouvernement qui, en somme, prend comme base électorale le suffrage universel (puisque c’est ce dernier qui nomme les Conseillers municipaux) s'arrête dans son plan de réorganisation à la « Chambre cantonale » sans oser pousser jusqu’à la Chambre départementale et à plus forte raison jusqu’au Conseil supérieur d’Agri- culture. IX Nous résumons comme il suit les observations qui précèdent : 40 Considérant que l’autorité des Chambres d’Agri- culture dépend de la compétence des électeurs el non de leur nombre ; 20 Que les membres des Comices agricoles, des Sociétés d'Agriculture, des Associations agricoles, des Syndicats d'agriculture, ont les connaissances et les aptitudes voulues pour juger et connaître des choses agricoles ; que les portes de ces Sociétés sont ouvertes à tous ; 30 Que l’incompétence des Conseils municipaux, en matière agricole, est manifeste ; que ces Conseils jouent, de plus en plus, un rôle politique, quoique la loi le leur interdise ; 49 Qu'il est nécessaire d'obtenir du gouvernement la constitution de Chambres déparlementales et d’un — 319 — Conseil supérieur de l'Agriculture, mis seul et direc- tement en rapport avec les Pouvoirs publics ; 5° Qu’élargir la base électorale, c’est s’exposer à la voir se laisser dominer par les idées et les préoccupations politiques ; 6° Que, vu la nécesité de l’application de notre con- sidérant quatrième, choisir comme base électorale les Conseils municipaux, c’est-à-dire en définitive le suf- frage universel, ce serait provoquer des conflits avec les Assemblées législatives, et empêcher le gouverne- ment de donner à l'Agriculture l’organisation indispen- sable réclamée par cet article 4. La Société d'Agriculture, belles-lettres, arts et sciences d'Angers réclame : A. — Le retour à la loi de 1851, quant à la consti- tution des Chambres d'Agriculture départementales et du Conseil supérieur d'Agriculture. B. — Elle demande comme base électorale : Les Comices, les Sociétés d'Agriculture et toutes les associa- tions ou syndicats d'agriculteurs, reconnus d’utilité publique par l'État. C. — Elle repousse le projet de loi, examiné le 93 janvier dernier par le Conseil supérieur de lAgri- culture. Si ces vœux ne sont pas acceptés, elle se rallie au projet de loi élaboré par la Société des Agriculteurs de France, qui acceptant l’article 2, $ 1 de la loi de 1851, ainsi CONÇU : Ont le droit de faire partie des Comices en se con- formant au réglement, les propriétaires, les fermiers, — 320 — colons ou leurs enfants, domiciliés ou ayant leurs pro- priétés dans la circonscription du Comice, accepte comme électeurs des Chambres départementales tous ceux que la loi de 1851 reconnaissait aptes à faire partie des Comices agricoles. GUSTAVE DE CAPOL. REPRÉSENTATION OFFICIELLE ET LÉGALE RE A CE EE DUT DEEE Messieurs, ü La Commission que vous avez nommée dans votre séance du 4 mardi de juin, pour étudier le rapport de notre savant et compétent collègue M. de Capol, sur la représentation légale de l’Agriculture, a l'honneur de vous soumettre le résultat de ses délibérations. Vous n’ignorez pas, Messieurs, que le Conseil supé- rieur de l’Agriculture, c’est-à-dire aujourd’hui les personnages qui ont reçu du Ministre mandat de repré- senter les intérêts agricoles, a arrêté au mois de jan- vier dernier les grandes lignes d’un projet de loi tendant à organiser la représentation légale de l’agri- SOC. D'AG. . JA — 322 — culture. Ce projet, accepté en principe par le Ministre, décide la création dans chaque canton d’une chambre consullative d'agriculture composée de délégués nom- més par les Conseils municipaux, à raison d’un délégué par commune. Chaque chambre cantonale d’agricul- ture nomme à son tour deux délégués pour composer la chambre consultative d’agricalture de l’arrondisse- ment. Les délégués de l’une et de l'autre chambre doivent être choisis parmi les agriculteurs, arboricul- teurs, jardiniers, maraîchers, propriétaires ou usufrui- tiers d’un fonds rural, directeurs d’établissements agricoles, professeurs d’agriculture, de chimie agricole, vétérinaires et autres personnes à compétence spéciale résidant dans le canton. Les chambres consultatives sont appelées à éclairer le Gouvernement en lui transmettant leur avis sur toutes les questions intéressant l’agriculture, Le principe de cette création est excellent, et depuis trop longtemps l’agriculture réclame une représenta- tion vraie de ses intérêts à l’instar de celles que possé- dent déjà le commerce et les arts et manufactures, pour qu’elle ne se montre pas reconnaissante à M. le Ministre d’avoir enfin daigné prêter l'oreille à ses trop justes doléances ; mais toutes les Sociétés d’agriculture, sans exception, je crois, protestent contre la composition projetée du corps électoral agricole. Les Conseils muni- cipaux ne paraissent en effet posséder aucune compé- tence spéciale en matière agricole. Leur remettre l’élec- tion des délégués de l’agriculture, c’est fatalement mêler la politique à une question purement nationale d’où elle doit être absolument exclue; enfin, c’est mettre, en — 323 — quelque sorte, l’agriculture hors la loi en lui refusant le droit de nommer elle-même ses délégués, alors que le commerce est appelé à nommer directement et exclusi- vement les siens. Beaucoup de Sociétés agricoles ont en outre remar- qué que, bornée à des chambres consultatives de canton et d'arrondissement, la représentation de l’agri- culture était insuffisante, Elles demandent comme complément indispensable de l’organisation projetée une chambre consultative de département et surtout un comité consultatif central élu qui remplacera très avantageusement le conseil supérieur actuel et fera parvenir jusqu’au ministre, avec pleine autorité, les vœux et les avis de l’agriculture française. Si telle doit être l’organisation des corps représen- tant l’agriculture, on peut dire que la loi projetée n’est pas à faire, elle a été faite et porte dans l'immense arsenal de nos lois la date du 20 mars 1851. Cette loi s’occupait, en trois titres différents et en vingt-huit articles, des comices agricoles — des chambres d’agri- culture — et du conseil général (24 est central) de lagriculture. Aussi les Sociétés d’agriculture réclament-elles, en grand nombre, le .retour pur et simple à la loi de 1851, sauf en un point. Tel est notamment le vœu émis par la Société nationale des agriculteurs de France, en février dernier. Je dis sauf en un point et il faut que je le signale, car notre confrère, M. de Capol, maintient ce point dans son vœu en proposant cependant à la loi de 1851 cer- taines modifications, et il ne se rallie que subsidiaire- — 324 — ment à l'opinion de la Société des agriculteurs de France D’après la loi de 1851, les membres des comices agricoles nommaient les chambres consultatives d’agri- culture ; M. de Capol vous propose d’exprimer le vœu que dans la nouvelle loi il en soit encore ainsi. Nous nous demandons s’il serait bien prudent, sur cette question capitale, de nous séparer de la Société des agriculteurs de France ? En éparpillant leurs forces dans l’expression de vœux différents, en se divisant au lieu de marcher d'accord, les Sociétés d’agriculture ne favoriseraient-elles pas le projet du gouvernement qui déjà n’aura pour lui que trop d’appoints? Ce n’est qu’une question de tactique, mais qui ne nous semble point à dédaigner. Il faut, en outre, que vous sachiez que la Société des agriculteurs de France avait songé d’abord, comme le législateur de 1851, à confier aux comices agricoles le mandat de choisir les délégués de l’agriculture ; après mûr examen, elle y a résolument renoncé. — Serait-il sage de maintenir une disposition rejetée délibérément par les membres d’une Société dont personne ne peut contester la haute compétence et le dévouement à l’agriculture ? Enfin, n'est-ce pas à juste titre que l'élection des représentants de l’agriculture par les comices agricoles a été repoussée! Nous le croirions, pour notre part, en faisant remarquer, après tant d’autres, d’abord que les comices agricoles sont des associations subventionnées par le Gouvernement. Or, que peuvent faire des élec- RTC chat teurs subventionnés, quand on nommera ceux qui sont appelés à combattre la politique économique du gou- vernement si elle est contraire aux imtérêts de l’agri- culture ? Les comices seront indépendants quand même, je le crois, mais leur indépendance leur coûtera cher, s'ils votent mal : et s’ils votent selon leur cons- cience, en votant pour un candidat agréable à l’admi- nistration, leur indépendance sera suspecte; or, la femme de César ne doil pas être soupçonnée aux champs plus qu’à la ville. Enfin il faut ajouter que les comices agricoles ne se composent pas seulement d’agriculteurs, mais de toute personne qui, intéressée ou se disant intéressée à la prospérité de l’agriculture ,. paie une légère coti- sation pour avoir droit d’être membre d’un comice agricole. Notaires, médecins, avocats, huissiers , commissaires-priseurs, cabaretiers, entrepreneurs de constructions, etc., peuvent en faire partie; or s’il est un principe qu'il faut défendre avec énergie et ne point laisser entamer, sous peine de voir les Conseils municipaux passer par la brèche, c’est que seuls les agriculteurs doivent nommer les représentants de l’agriculture. Si ce principe est inscrit dans la loi, tout le reste viendra par surcroît : aux agriculteurs on joindra les professeurs de chimie agricole, les vétéri- naires, les directeurs de ferme-école, et tous ceux dont - le projet fait des éligibles ; car le législateur ne peut manquer de se dire : comment! ce sont des éligibles! mais il faut nécessairement en faire des électeurs! En conséquence, nous vous proposerions d'émettre — 326 — un vœu différent de celui de M. de Capol, un peu longuement formulé, et de le rédiger en ces termes : « Attendu que les chambres consultatives des arts et manufactures et de commerce sont nommées exclusi- vement par des commerçanis, et que le bon sens, la logique et le principe de l'égalité de tous devant la loi veulent que les chambres consultatives de l’agricul- ture soient également nommées par les agriculteurs; « Attendu que les Conseils municipaux n’ont trop sou- vent aucune compétence en maliére agricole, et que remettre aux Conseils municipaux, corps politiques, la nomination des représentants de l’agriculture, ce serait faire de cette nomination une question et une élection politiques ; « Attendu, en outre, qu’au-dessus des chambres con- sultatives et pour centraliser leur action et leurs vœux, la création d’un conseil supérieur élu par les chambres consuliatives, est le complément indispen- sable de toute représentation légale sérieuse de l’a- griculture ; « La Société d’agriculture, sciences et arts d'Angers, adhère pleinement au vœu exprimé, le 20 février 1884, par la Société des Agriculteurs de France, tendant 1° au retour à la loi du 20 mai 1851, sauf en ce point qu’aux comices agricoles appelés par ladite loi à nommer les chambres consultatives d'agriculture , on substitue- rait les propriétaires de propriétés non bâties , les fermiers, colons et leurs enfants âgés de vingt et un ans, domiciliés ou ayant leurs propriétés dans la cir- conscription du canton (auxquels pourraient être — 327 — ajoutés ceux que le projet du Conseil supérieur de l’agriculture propose de rendre éligibles) ; « 2° Au maintien, conformément à la loi de 4851, du Conseil central de l’agriculture , dont les membres seraient nommés par les chambres consultalives de département. » F. Lucas, Rapporteur. INVENTAIRE DU MUSÉE D'ANTIQUITÉS SAINT-JEAN Par M. GODARD-FAULTRIER. Messieurs , Vous avez bien voulu me charger de vous rendre compte de l’Inventaire du Musée Saint-Jean. Vous me pardonnerez de le faire en quelques lignes, car l’éloge de cet excellent ouvrage n’est plus à faire et chacun sait qu'il a toutes les qualités qu’on exige de pareils travaux. Grâce à lui, il n’est aucun problème archéolo- gique dans la collection Saint-Jean qui ne s’éclaircisse et tel objet, qui semblait presque insignifiant, prend, à la lecture de la notice qui le concerne, une importance inattendue. Il a surtout de l’intérêt pour nous autres Angevins, car la plupart des richesses que le musée renferme viennent de l’Anjou. Sans remonter jusqu'aux témps où nos ancêtres avaient seulement des pierres taillées pour ustensiles et pour armes, les débris provenant de l'emplacement des temples, des arcs, des bains, des villas, des amphi- théâtres qui ornaient autrefois notre ville nous y offrent — 329 — de curieux renseignements sur la vie angevine à l’époque gallo-romaine. Voici des inscriptions qui exercent la sagacité de nos savants ; voici des tombes qui, par lesnoms qui y sont inscrits, témoignent de la variété des races qui habitaient notre sol, Gaulois, Romains, esclaves étrangers et barbares. Le Moyen-Age s'ouvre par une charte curieuse, datée de ce palais d’Aix-la-Chapelle, où Charlemagne avait mêlé son goût germain aux splen- deurs byzantines et romaines. De lourdes croix ornées de pierreries, de belles crosses épiscopales émaillées, des coffrets ouvragés, des reliquaires en cuivre repoussé montrent le goût qu’avaient nos pères pour le bel art de l’orfévrerie. Parmi les objets de ce genre, un magni- fique oliphant d'ivoire, sculpté dans un temps reculé par des mains orientales, rappelle à l’histoire les exploits de Roland, les chasses de Charlemagne et par-dessus tout les prouesses des Croisades. La partie moderne du Musée Saint-Jean est moins riche que celle du Moyen-Age. Cependant combien on y trouve d’objets faits pour plaire aux gens ou tout au moins -pour flatter cette curiosité à chercher, à con- naître la vie de nos pères! De nombreuses médailles, des gravures sans nombre, des ustensiles de ménage, des restes de nos vieilles maisons sculptées, des portraits, des dessins, des livres, des débris de nos anciennes industries, des outils de nos vieux métiers, des monnaies et des poids de toute sorte remplissent les vitrines, pendent au mur, se pressent autour des colonnes ou s’étalent sur des meubles de la Renaissance, qui sont eux-mêmes des œuvres d'art. Il est vrai que certains objets, qui ne sont pas des — 330 — moins précieux, sont étrangers à l’Anjou, et, que s’ils pouvaient parler, ils répéteraient le mot fameux du doge de Venise à Paris : « Ce qui m'étonne ici le plus, c’est de m'y voir. » Tel est le cas d’une charmante petite sphère astronomique avec les figures des constellations des- sinées à la pointe : elle serait assurément mieux chez elle à Venise, à Rome ou à Milan. Mais quelque fin amateur laura jadis apportée d'Italie. Car le goût de l'astronomie était plus répandu chez nos pères que chez nous, et tout lettré avait sa sphère dans sa biblio- thèque. Nos viirines renferment aussi quelques objets singuliers et qui viennent de contrées bien éloignées de l’Anjou. On y trouve jusqu’à des ustensiles mexicains, des dessins chinois et une de ces planchettes marquées de signes arabes, avec lesquelles on apprend à lire, dans les écoles, aux jeunes Africains. Cette variété d’objets ne nuit en rien aux trésors qui viennent de l’Anjou; cependant elle n’a pas, dit-on, l'agrément de tout le monde. Mais nous dirons à ces difficiles, aussi malheureux sans doule que les délicats que plaint La Fontaine : « Prenez patience. La place manque pour le moment; un jour, on fera mieux et davantage. Au reste, si ce mélange un peu confus, n#usle reconnaissons, fatigue légèrement l'esprit, M. Giftard vous a préparé le remède. Levez les yeux vers les chefs- d'œuvre de la sculpture dont il a rassemblé ici les modèles. La Vénus de Milo vous apparaîtra dans sa divinité éternelle comme celle d'Homère. Le Moïse de Jules II vous offrira le spectacle d’une grandeur diffé- rente de celle de l’art grec, mais non moins frappante. Enfin, si cet art vous paraît trop sévère, vous ne résis- — 331 — terez pas aux Frises du Parthénon, à la Diane de Poi- tiers, à la sainte Cécile de notre David, au groupe des Grâces de Germain Pilon. La contemplation de ces merveilles répandra dans votre esprit une lumière pure et tranquille, et, tout partisan que vous serez de faire une place dominante aux objets angevins et pure- ment archéologiques, vous approuverez du moins la présence de ces divinités bienfaisantes. » Heureuses, Messieurs, les villes qui trouvent des hommes dévoués pour s'occuper de les embellir. Les Grecs croyaient que la vue publique des belles œuvres propageait dans un peuple la religion, la morale et l'esprit de concorde. Phidias avait ajouté, disait-on, chez eux, à la religion par son Jupiter Olympien. L'œuvre de M. Godard ajoutera sans doute au goût déjà si vif chez nous pour la science du passé et nous ne serons démentis par personne en apportant ici à M. Godard comme à tous ceux qui l’ont aidé dans son œuvre, le témoignage de la reconnaissance et de l'admiration de leurs concitoyens. Lorr-MoNGAZON. BIBLIOGRAPHIE Étude sur la vie privée au XV siècle, en Anjou Par M. Anpré Jouserr, membre titulaire !. Par ce temps d’investigations et de recherches histo- riques, c’est une bonne fortune pour un auteur d’avoir quelque chose d’inédit à offrir à ses lecteurs. Nous aimons à notre époque l’histoire par le menu ; nous ne nous contentons plus des considérations philosophiques, des grandes lignes de l’histoire qui ne permettent pas toujours à leurs auteurs de pénétrer jusqu'aux détails curieux, jusqu'aux anecdotes intimes de la vie de nos pères, de saisir sur le vif l’existence de ces générations passées et d’en dégager cette vérité, ce réalisme histo- rique qui est un besoin qui s’impose de plus en plus. Alexis de Tocqueville et plus récemment M. Taine ont tracé, dans des pages admirables, les tableaux de l’ancien régime se transformant aux approches de la Révolution. Ces tableaux, traités de main de maître, d’après d'importantes et consciencieuses recherches 1 1 vol. in-8°. Angers, Germain et G. Grassin, 1884. — 333 — faites aux sources mêmes de l’histoire, dans les archi- ves publiques et privées, dans les mémoires et gazettes du temps, ont ouvert la voie à de nombreuses publica- tions qui, restreignant leur cadre, jettent un jour tout nouveau sur le sujet choisi. Qu’il me suffise de vous rappeler, pour n’en citer que quelques unes, les intéres- santes études de M. Albert Babeau sur la Ville et le Village sous l’ancien régime; — de M. le baron de Calonne sur la Vie agricole en Picardie : — de M. Edmond Biré sur La légende des Girondins où des notes sans réplique et de nombreuses pièces justifica- tives attestent à la fois la vérité historique et Le prodi- gieux travail de l’auteur. Laissez-moi vous rappeler encore comme appartenant spécialement à l’Anjou les Souvenirs d'un nonagénaire, de ce vieux Besnard qui écrivait à la fin de sa vie, si longue et si tourmentée, des mémoires qu’il ne croyait certainement pas destinés aux honneurs de la publicité, mais qui cependant, au milieu de choses futiles et oiseuses, contiennent sur la vie au xvirr° siècle de curieux et instructifs renseigne- ments si bien mis en lumière par les notes critiques de son savant éditeur. Le beau volume que vient de publier notre collègue, M. André Joubert: Étude sur la vie privée, au XVe siècle, en Anjou, présente ce genre d'intérêt. L'ouvrage comprend trois parties : Dans la première partie, M. André Joubert nous donne les comptes inédits de Guillaume Tual, clerc, receveur des seigneuries possédées en Anjou par haut et puissant seigneur messire Jean Bourré, l'ami et le favori de Louis XI. Ce manuscrit a été libéralement mis à —. 9334 — la disposition de l’auteur par son heureux possesseur, le grand bibliophile angevin, M. le marquis de Villoutreys. Ces comptes qui ne comprennent qu’une période de trois années (1463-66) mentionnent les recettes et dépenses de la terre des Aillières, de Vaulx, de la Roche de Bonnaiseau, du Plessays d'Avant et du Couldray. Il n’est pas parlé dans ces comptes de la somptueuse demeure à laquelle Jean Bourré donna son nom, du Plessis-Bourré, qu’il avait acheté par acte du 26 novem- bre 1462 de Charles de Sainte-Maure et dont il ne prit possession qu’en 1465, presque au moment où cessent les comptes de Guillaume Tual; le château de Jarzé ne fut acheté par Bourré qu’en 1473. Il serait curieux de se livrer à quelques comparaisons sur les prix de ce temps et sur ceux d'aujourd'hui, en tenant compte de la valeur de l’argent à cette époque et de celle qu’il a aujourd’hui: si les métairies alors rapportaient peu, la main d'œuvre était à bas prix. Je lis à la page 74 que le fermier des Aillières vendit à Guillaume Tual « pour la somme de XX solz ung bou- « vart, prisé quarante solz et dont la moitié lui compé- « tait » ; voilà pour les recettes, Voici pour les dépenses‘: « Pour avoir faict deschau- « cer, tailler, ficher, lier et becher dix quartiers de « vignes à Vaulx, qui sont en la main de Monsieur, à ses « despens de pain et de vin, fors pour ficher, que ce « dict receveur bailla à faire à convenant, en l’an 1464, «en ce comprins ung pot de beurre de vingt livres, 1 Page 96. — 335 — « pain blanc et harans, une gerbe et demie de ousier, « achaptée pour lier les dictes vignes, en ce comprins « la despence du receveur, comprins aussi la journée de « ung homme qui vacqua, par ung jour, à porter la « perche du boys à la maison pour faire du cercle, pour RE AO RIT 0 0100 © VIFlivress > Les vendanges des vignes des domaines de Vaulx, des Aillières et de la Roche-Bonnaiseau coûtaient 4 liv., 7 sols, 6 deniers ‘. La seconde partie de l'ouvrage comprend la vie hors du logis et la vie en famille d’après les archives ange- vines et les manuscrits de la bibliothèque nationale. Enfin, la troisième et dernière partie est réservée aux pièces justificatives et à l’appendice. Ici encore des documents, inédits pour la plupart, viennent éclairer plus d’un point obscur de la biographie de Jean Bourré, compléter la généalogie de sa famille et des personnages qui se trouvent mêlés à la vie du minisire de Louis XI; des détails sur les mœurs du temps, sur les costumes de la cour et des vilains, la des- cription du vieux château et de peintures murales à sujets et dictons humoristiques font revivre à nos yeux les contemporains de Bourré ; des renseignements sur les vieilles rues d'Angers et de Châteaugontier captivent le lecteur qui aime l’histoire et Anjou. Nous n’avons plus à souhaiter la bienvenue à l’œu- vre de M. André Joubert. En quelques semaines, la première édition était épuisée et nous ne doutons pas 1 Page 94. — 336 — qu'il en soit de même de celle qui est en ce moment en préparation. Nouvelles, voyages, études archéologiques, monogra- phies, la liste est déjà longue des travaux littéraires et historiques de M. A. Joubert. L'étude sur la vie privée, au XV siècle, en Anjou, a une place d'honneur marquée dans cette liste. Je n’ai pas la prétention d’avoir analysé cette œuvre importante, il me suffit de vous l'avoir fait connaître et vous la lirez, j’en suis sûr, avec le plus vif intérêt. G. Bopninier. VŒU EN FAVEUR DE L'AGRICULTURE M. le marquis de Dampierre, président de la Société des agriculteurs de France, disait dans une des der- nières réunions de cette Société : « Arrière toutes les questions d’école : nous com- « battons pour la vie; et, c’est faire injure aux plus « illustres économistes du passé que de leur attribuer « des doctrines, qu’ils seraient les premiers à modifier, « en présence des faits inattendus qui se manifestent « d’un bout du monde à l’autre! « Les causes du malaise et de l'inquiétude de l’agri- « culture sont : l’exagération de notre budget des « dépenses ; l'emploi mal équilibré de nos impôts; « des traités de commerce désastreux; un mauvais « régime douanier; l'inégalité du traitement de l’agri- culture, partout et toujours, aussi bien devant l'impôt que devant la douane; les délais apportés à l’utili - sation des eaux, qui relèverait de la ruine nos dépar- ( tements méridionaux, des confins de la Méditerranée au golfe de Gascogne. SOC. D’AG. 22 A RAR À & A — 338 — « Tout cela, combiné avec un ensemble de circons- « tances économiques déplorables; des excès de pro- « duction, et de production à vil prix en certaines con- « trées; le bon marché, la rapidité des transports à « l'étranger et des tarifs de faveur pour les produits € étrangers venant faire concurrence aux produits na- « tionaux; des mesures de toute sorte qui favorisent « l’émigration des ouvriers de l’agriculture dans les « villes ; l’absence d'établissements de crédit : l'absence de toute représentation légale de l’agriculture; tout cela, constitue une situation ruineuse, c’est-à-dire into- lérable, pour l’industrie nourricière de la France. » C’est dans cet ordre d’idées, que la commission que vous avez nommée, et composée de MM. Bodinier, Huault-Dupuy et de Capol, a étudié la question et formulé des vœux, que nous avons à soumettre à votre appréciation. & Æ A Il s’est trouvé, en 1860, des réformateurs plus auda- cieux que réfléchis, plus théoriciens que praticiens, plus entêtés que perspicaces, plus avides de popularité que soucieux de la fortune publique, qui n’ont pas craint d’attacher leur nom à un bouleversement écono- mique, aussi pernicieux pour l’agriculture que les ravages du phylloxéra. Aussi peu circonspects, aussi peu clairvoyants que les hommes « au cœur léger » qui nous ont conduits à Sedan, ils ont préparé —de sang-froid —le Sedan éco- nomique auquel nous conviait, brutalement, il y a dix ans, le prince Frédéric-Charles de Prusse. — 339 — Ils n’ont vu, dans cette question, que la possibilité de donner la vie à bon marché, aux ouvriers de l’industrie, et n’ont pas hésité, aussi bien en 1860 qu’en 1881, à sacrifier la plus grande de nos industries : l’industrie agricole. Sans nous préparer à la guerre des intérêts, par de sages réformes économiques à l’intérieur, ils nous ont conduits à une lutte inégale contre des étrangers qui possèdent un sol d’une richesse presque inépuisable, la main-d'œuvre à bas prix, des impôts moins écrasanis, des terres nombreuses, d’une valeur que l’Europe et surtout la France ne connaissent plus depuis plusieurs siècles ! Nous devions succomber, et chaque année les dé- sastres s'accumulent! Les preuves en sont nombreuses. IT L’Agriculture française, accomplissant son évolution, marchait vers les perfectionnements que le progrès des sciences amène dans toutes les industries, lorsque l’An- gleterre est venue proposer au monde industriel la liberté des échanges. — La France à eu le malheur de se laisser prendre aux sentimentalités de l’école libre- échangiste; elle accepta une lutte disproportionnée avec l'Angleterre qui avait, de longue date, échafaudé sa grandeur commerciale et agricole, sur des lois et des mesures de protection. Les traités de 1860 éclatérent comme un coup de foudre, sans une marche graduelle vers le principe du libre commerce : fruits d’une con- — 340 — vention née d’un caprice, ils furent réalisés comme un caprice. Les négociateurs de 1860 firent de l’économie cosmo- polite, et non de l’économie politique; — arrêtés par l'énergie des industriels, qui obtinrent une protection plus ou moins efficace, ils sacrifiérent entièrement le patrimoine agricole acquis par les labeurs de plusieurs générations de cultivateurs, qui n’eurent ni la hardiesse ni l'intelligence voulues pour protester. L'idée de Patrie disparut; on n’envisagea que celle d’Humanité, oubliant que des conditions nouvelles dans la vie des peuples, pouvaient nous mettre en face de la supériorité économique et territoriale d’une nation agricole. On commit l’imprudence de vouloir appliquer, à un pays de propriété démocratique, ce que Robert Peel avait imaginé pour un pays de propriété aristocratique. C’était oublier que les trois quarts du territoire fran- çais sont exploités par de petits propriétaires qui, pos- sesseurs de 3 à 10 hectares, cultivent eux-mêmes leurs terres; et, d’une façon déloyale, c'était leur réclamer les mêmes sacrifices que ceux acceptés par l’aristo- cratie anglaise. Les riches propriétaires anglais n’avaient consenti à diminuer leurs baux, que pour donner la vie à meilleur marché aux ouvriers de l’industrie, dans laquelle, du reste — c’était pour eux une compen- sation — ils avaient leur fortune engagée. Néanmoins de 1860 à 1870, l'Agriculture française soutint, énergiquement, la lutte contre l'Angleterre et l'Allemagne. Un mouvement industriel considérable eut lieu entre ces deux époques; l’industrie prospérait; des — 341 — fortunes se déplacèrent; les chemins de fer répandaient partout l’activité ; et, siles agriculteurs ont, par suite des traités de commerce, payé plus cher les objets fabriqués, ils en ont été dédommagés par une demande plus forte et une élévation des prix de leurs propres produits. Cette prospérité passagère, qui pour l'Agriculture fut, et sera toujours un plus grand mal qu’une pauvreté -constante, ne fut, en aucune façon, due aux prétendus bienfaits du libre-échange. La ruine de l'Agriculture française allait, néanmoins, bientôt commencer avec la dépréciation de notre indus- trie manufacturière, privée par la concurrence étran- gère de notre marché intérieur. Nos cultivateurs allaient, cependant, tenter un dernier et vigoureux effort, conti- nuer leurs améliorations et leurs perfectionnements par la culture intensive, au moyen de procédés scientifiques caractérisés par l’emploi des engrais chimiques exté- rieurs à la ferme, lorsque, voici venir l'Amérique, les Indes, l'Australie, producteurs considérables de blé, de viande, de läines dans des conditions exceptionnelles de bon marché. Ce fut le signal de la détresse, de la ruine, de la déca- dence de notre industrie agricole, mise, de suite, aux abois devant la concurrence de ces rivales inattendues, que n’avaient pas prévues les négociateurs imprudents de 1860. Les pays étrangers sont tous également atteints, par cette invasion des produits agricoles. Mais l’Allemagne et l'Italie ont compris de suite, que cette extrême liberté commerciale pouvait avoir, comme conséquence, la ser- vitude et la ruine nationales, que la protection de — 342 — l'Agriculture n’était pas une politique de réaction, mais une économie politique se gardant bien d’être cosmo- polite, et s’attachant avant tout aux intérêts nationaux et rien qu'aux intérêts nationaux! Si l'Angleterre ne suit pas ce retour à la protechon, ne ferme pas encore ses portes aux produits agricoles étrangers, c’est que son climat exceptionnel lui permet l'élevage des bestiaux, dans des conditions les plus heureuses de bon marché, grâce à ses pâturages permanents. Néanmoins, un cri de détresse a retenti d’une extré- mité à l’autre du Royaume-Uni, et les importations américaines de bestiaux vivants et de viandes conservées, vont bientôt réduire en poussière les dernières espé- rances des agriculteurs anglais. Les hommes remarquables qui président aux desti- nées de l’Allemagne et de l'Italie, ont compris qu’il fallait enfin se préoccuper du sort du peuple des cam- pagnes, et non pas exclusivement de donner satisfaction au peuple des villes, le maître le plus inconscient que l'on connaisse et le moins responsable qui soit de ses actes. | Il leur a paru évident que, pour mettre d’accord des intérêts contradictoires en apparence, mais, en fait, si intimement unis (de l'Agriculture et de l'Industrie), il fallait rendre la prospérité à l'Agriculture, en restituant l’aisance aux cultivateurs; en un mot, conserver à tout prix, notre marché intérieur agricole et rendre la propérité aux meilleurs clients de l’industrie natio- nalee! — Ils ont enfin reconnu et admis, comme un théorème, que s’il est désagréable pour l’ouvrier des villes de payer le pain un ou deux centimes plus HR pes cher, cela vaut mieux encore pour lui que de ne pou- voir gagner assez pour l’acheter à bon marché. Il est, en effet, nécessaire, avant tout, d'éviter le chô- mage et la diminution des salaires. III Or, il y a en France 38 millions d'individus, dont 48 millions s'appliquent directement à l'exploitation du sol, à titre de propriétaires, fermiers, métayers et colons, d'ouvriers et de domestiques, et dont 6 autres millions se livrent à des professions qui se rattachent intimement à l'Agriculture : charrons, maréchaux, mécaniciens agricoles, ouvriers de sucrerie, de distil- lerie, de meunerie. Vingt-quatre millions de Français, sur 38 millions, vivent donc de l’Agriculture, et nour- rissent l’ensemble de la communauté. Que deviendra la France si l’on ruine ceux qui la nourrissent, entretiennent sa vie industrielle et créent des produits éminemment échangeables? Il est inutile de nier la crise agricole; elle est éclatante, et elle est signalée par tous les Comices agricoles aux Pouvoirs publics : la propriété foncière est partout dépréciée. Les économistes de haute allure, tels que Quesnay et Léonce de Lavergne, ont mis en évidence que le gou- vernement et la nation ne doivent jamais perdre de vue que la terre est l'unique source des richesses, et que l'Agriculture a mission de les multipher. Litz, en 1849, disait déjà : La plus vaste partie du capital matériel d’une nation est placée dans le sol. En tous pays, la valeur des fonds de terres, des propriétés — 344 — bâties dans les campagnes et dans les villes, des atehers, des usines et des mines, se compose des deux tiers aux neuf dixièmes de toutes les valeurs que la nation pos- sède; on doit donc admettre en principe que tout ce qui augmente ou diminue la valeur de la propriété foncière, accroît ou diminue la masse des capitaux matériels de la nalion. En décidant donc la liberté des échanges des produits agricoles, sous le prétexte de faire cesser la détresse ouvrière, on a décrété la misère générale, en ruinant 24 millions de citoyens qui ont cessé d’avoir recours aux produits de notre industrie. S'il est vrai que pour faire cesser la détresse générale, il faut ramener la con- fiance dans les esprits, supprimer tout ce qui augmente artificiellement la difficulté de vivre, déjà trop grande pour le travailleur manuel, et régler nos rapports avec le reste du monde par un tarif douanier, assez libéral pour permettre à nos industriels de satisfaire le goût, actuellement universel, pour les marchandises à bon marché, il est non moins vrai qu’il fallait, avant tout, empêcher la ruine de 24 millions de cultivateurs, les plus sérieux clients de notre industrie. L'industrie agricole est-elle protégée ? Personne n’osera le prétendre. La protection accordée à l’agriculture est en effet vraiment dérisoire : 100 kil. de blé paient à leur entrée en France 0,60 c. 100 kil. de farine de blé paient 1 fr. 20. Le seigle, le maïs, l’orge, l’avoine ne paient rien. Pour un bœuf, on donne à la douane 15 fr.; pour une vache ou un taureau, 8 fr.; pour un veau, 1 fr. 50. — — 345 — Au prix rond de 20 fr. les 100 kil., le blé n’est donc protégé que dans la proportion de 3 °/, de sa valeur ; la farine, qui vaut de 28 à 30 fr., est protégée de 4°}. Un bœuf, qui se vend 880 fr., ne reçoit pas 2 °/, de sa valeur. , Il est de plus important de remarquer, que pendant que l’on se récrie contre les droits protecteurs que nous réclamons, ce bœuf, par exemple, grevé de 15 fr. à la frontière, paie encore avant de franchir les murs de la capitale (dont la municipalité s'inquiète tant de la vie à bon marché), la somme exorbitante de 55 fr. à l'octroi. Il en est de même d’une quantité considérable de produits alimentaires qui, à l’octroi des villes, sont — sans protestations bien éclatantes — frappés de droits d’octroi scandaleux. Il est dès lors tout naturel, qu’écrasés par les charges publiques qui vont toujours en croissant, et l'esprit frappé des anomalies que nous venons de citer, les Agriculteurs trouvent insuffisants le droit de 0,60 c. par quintal de blé, et ceux qui existent sur les bestiaux. Ils trouvent également injuste, d’être désignés aux populations, comme devant, sans profit pour leur travail, nourrir les industriels, les commer- çants, les rentiers et les travailleurs de la pensée, Ils protestent non sans raison, — et nous protestons avec eux. IV Comparativement à la protection accordée à l’In- dustrie, celle concédée à l'Agriculture est en dispro- portion criante. Pendant que la douane perçoit, pour protéger l’In- — 346 — dustrie près de 300 millions, en! 1882 (chiffres défi- nitifs), les céréales n’ont payé à la douane que 7 mil- lions 900,000 fr.; les chevaux, 600,000 fr. ; les bestiaux, 4 millions 700,000 fr., formant un total de 13 millions 210,000 fr. Les bienfaits du libre-échange, qui est inscrit comme principe dans nos lois douanières, n’existent et ne se font donc sentir qu’au détriment de l'Agriculture, qui seule en supporte les conséquences désastreuses. Le libre-échange n’est donc qu’un vain mot, pris d’une façon générale. L'Industrie seule est protégée et l'Agriculture subit le contre-coup de cette protection. La fonte, le fer, l’acier sont, à leur entrée en France, -taxés à un taux bien plus élevé que dans les pays voi- sins, plus qu'aux États-Unis, plus qu'en Russie même. . Le seul pays d'Europe qui taxe à la douane et aux octrois la houille, si justement appelée le pain de l’In- dustrie, c’est la France, et l'Agriculture perfecticnnée en consomme de plus en plus. L’Industrie agricole est donc sacrifiée et tous les produits dont elle se sert ont été surchargés de droits! Frédéric Bastiat disait : Si l’on ne peut donner aux agriculteurs des suppléments de prix au moyen de taxes (qu’ils paient eux-mêmes pour les deux tiers, puis- qu’ils forment les deux tiers des consommateurs), il ne faut pas du moins les forcer, au moyen d’autres taxes, de donner des suppléments de prix, aux maîtres de forges, aux manufacturiers, aux armaleurs, aux aclion- naires des mines. Liberté, justice, égalité pour tout le monde. — 347 — Toute la question est là ! Pour favoriser l'Industrie française, on frappe les produits industriels étrangers de droits de douane qui vont jusqu'à 30 et 40 c/, de leur valeur, parce que, dit-on, le prix de revient de nos fabriques est supérieur, de beaucoup, à celui de l’étranger — soit; mais lAgri- culture? eroit-on qu’un hectolitre de blé coûte moins à l'agriculteur français qu’à celui des États-Unis ? Il y a deux solutions qui s’imposent par suite d’une anomalie aussi criante : Abaisser l’exorbitante protec- tion des manufactures, qui enlèvent à la culture, par de plus gros salaires, tous les bras des campagnes, ou relever les droits d’entrée sur les produits agricoles étrangers, faire l'égalité devant la douane, devant l'impôt! Nous nous hâtons de dire que nous ne sommes pas partisans de la première mesure, parce qu’elle n’amé- liorerait, que faiblement, la situation de l'Agriculture, et qu’elle entraînerait la ruine de l’Industrie française, qui a besoin d’être protégée contre l’industrie prépon- dérante de l'Angleterre, et le bas prix de la main- d'œuvre de l'Industrie allemande. Nous n’admettons que la seconde solution. Des droits de 30, 40, 50 o/, protègent donc presque toutes les usines et les ateliers, contre l’entrée des produits similaires étrangers. Tout équilibre est rompu; l'égalité a disparu du Code français : le travail industriel est protégé; le travail agricole est abandonné à ses propres ressources — ressources bien épuisées, hélas! — La protection que nous réclamons est donc un simple retour à l'égalité, et l’abolition d’un privi- — 348 — lège ; car, en écoutant les doléances des industriels, plus éloquents et plus habiles que ne l’ont été les agricul- teurs, l'État a reconstitué des privilèges au profit de l'Industrie, au détriment des contribuables en général et des agriculteurs en particulier. Nous demandons que l’Agriculture jouisse des mêmes faveurs que celles accordées à l'Industrie. Ainsi protégée, l'Industrie a pu payer des salaires élevés à ses manœuvres, et l'Agriculture a dû, par un choc en retour, payer plus cher ses ouvriers pour éviter la dépopulation des campagnes. Il est temps, reconnaissons-le, qu’au xixe siècle, après des révolutions qui ont eu comme principe l’éga- lité de tous devant l'impôt, nous n’assistions pas au spectacle d’une inégalité aussi indiscutable, qui ruine la majorité des citoyens au profit de quelques-uns, et surtout au profit des pays étrangers , dans un but politique, et pour complaire aux idées de cosmopoli- tisme, qui sont dans l'esprit de novateurs un peu illu- minés, et certainement peu patriotes. Les cultivateurs sentent les droits actuels dérisoires; ils savent qu'il est inutile de réclamer la diminution des dépenses pour parvenir à celle de l'impôt, parce qu’ils n’ignorent plus que, depuis longtemps, on les paie de mots et qu’en somme l’état de nos finances ne le permet pas. Pour arriver aux dégrèvements, il faut s'arrêter dans les dépenses et depuis dix ans il ne s’agit, dans tous nos budgets, que de nouveaux centimes addi- tionnels, et de nouvelles augmentations de charges et de contributions. L'enquête de 1879 a évalué à 91 milliards 583 mil- 940 — lions 966,075 fr. la valeur vénale des propriétés non bâties imposables et leur revenu à 2 milliards 645 mil- lions 505.565 fr., revenu qui, depuis cinq ans, a baissé d’une façon démesurée. Ces 2 milliards 645 millions de revenus sont grevés de 706 millions de taxes annuelles, résultant de l'impôt foncier, de la contribution des portes et fenêtres, de la contribution personnelle mobilière, des prestalions, des droits d'enregistrement et de timbre. C’est un tiers du revenu agricole que perçoit l'État ! En est-il de même de la propriété immobilière urbaine et des autres exploitations? Assurément non ! La propriété immobilière urbaine, dont le revenu peut être évalué à 2 milliards, paie 340 millions d’im- pôts de toute sorte, soit 17 0/0 environ; la propriété mobilière, sur un revenu de 3,985 millions, paie 160 millions, soit 4 0/0 ; les taxes sur le commerce et l'industrie, dont le revenu s’élève à 2,740 millions, sont de 358 millions, soit 43 0/0. On voit quelle disproportion injuste et criante existe entre les charges qui pésent sur l’agriculture et celles dont sont grevées les autres propriétés et les autres exploitations. L'agriculture paie à l’État un tiers de son revenu. Et ce n’est pas tout ! Elle paie, comme tout le monde, les impôts de con- sommation, et jamais elle n’échappe à la taxe person- nelle et à l'impôt mobilier qui devraient être de par là loi, perçus d’une façon générale et obligatoire, et auxquels les ouvriers des grandes villes ne sont pas astreints complètement. — 350 — La libéralité des communes prend, en effet, souvent à sa charge la taxe personnelle des ouvriers et l'impôt des petits loyers ; il y a là une inégalité choquante au détriment des habitants des campagnes qui, par sur- croit, paient toujours la prestation inconnue dans les villes, et, plus que les habitants des villes, paient, dans la plus large mesure, l'impôt du sang ! L’énormité des droits de mutation frappe également plus particulié- rement l’agriculture. Quand l’agriculture, ainsi surmenée, aura disparu, à quelle bourse l'État ira-t-il demander les 706 millions que lui donne l’industrie agricole sur un revenu de 9,650 millions ? Nos hommes d’État devraient s’en préoccuper et relire attentivement, dans notre excellent fabuliste, la fable de la Poule aux œufs d’or ! Mais non, les idées de cosmopolitisme sont au pou- voir : la guerre à la grande propriété est à l’ordre du jour, et par contre-coup, les petits propriétaires pos- sesseurs des trois quarts du territoire de la France sont spoliés. Tout semble permis contre le droit des individus, sous le spécieux prétexte de donner satisfaction à la minorité des membres de la communauté, et pour sau- ver un principe | C’est contre ces tendances que nous venons protesler au nom de la justice et de l’agriculture ! V Si, rompant avec les idées erronées qui, depuis vingt-trois ans, provoquent la misère de l’agriculture, l'État décrétait les droits protecteurs, les droits com- — 351 — pensateurs que réclament toutes les Sociétés d’agricul- ture et tous les Gomices agricoles, nous n’hésitons pas à affirmer que le problème de la vie à bon marché trouverait, dans la prospérité agricole qui en résulterait, une partie de sa solution. Et d’abord , le Gouvernement veut-il réellement la vie à bon marché ? S'il en est ainsi, pourquoi a-t-on triplé (en 1871) l'impôt sur le café (de 50 à 156 fr.), c’est-à-dire de 150 0/0 de la valeur moyenne des cafés du Brésil? Le pétrole, la lumière du pauvre et celle du paysan, a été taxée de 300 0/0 de sa valeur intrinsèque ; nous n'avons cependant ni café, ni pétrole indigènes à pro- téger ! D’un autre côté, ni l'État, ni les Conseils généraux ne veulent mettre un frein à la marée montante des centimes additionnels : l'accessoire est devenu aujour- d’hui le principal. — Les droits d’octroi, établis par les municipalités, augmentent dans une proportion inquié- tante, sans que les plaintes des contribuables se mani- festent d’une façon bien intense contre la cherté qui en résulte pour la vie matérielle et les loyers ! Pourquoi le gouvernement si « ëmpressionnable » , quand il s’agit de la cherté du pain et de la viande, se préoccupe-t-il si peu de la cherté des boissons, provo- quée par les dépenses exagérées des municipalités , boissons dont la consommation, excessive et immorale, grève, hélas ! pour une part bien large, le budget de la famille de l’ouvrier. — Cependant les vins, les bières, sont. d’un usage indispensable pour soutenir les forces de l’ouvrier, et, comme « tous les alcools », d’un em- — 352 — ploi utile pour le bon fonctionnement du une universel ! À ce double titre, cette question devrait, il nous semble, l’intéresser. Mais non! Nos politiques à courte vue ne pensent qu’aux relations internationales, à la fraternité des peuples , au cosmopolitisme ; supprimant la patrie ils ne voient que le bonheur de l'humanité. — Pour des vues si étroites, l’industrie et l’agriculture sont des quantités presque négligea- bles : le commerce seul est à protéger, le commerce aidé de l’industrie, comme le disait maladroitement, hier encore, notre ministre du commerce. Combien sont plus vraies les idées de Litz, écono- miste allemand, sur le commerce : Le commerce doit être réglé suivant les besoins de l'agriculture et de l'industrie, et non l'agriculture et l’industrie suivant les intérêts du commerce. Le commerce ne s'inquiète que d'acquérir des valeurs par la voie des échanges, même aux dépens des agricul- teurs et des manufactures, aux dépens des forces pro- ductives, que dis-je? de lindépendance même de la nation. Après avoir fait argent de la dernière usine et du dernier morceau de terre, il s'embarquerait sur son navire et s'exporterait lui-même. Qui donc, malgré les efforts et les agissements du commerce a profité de la baisse survenue dernièrement sur les grains et les farines? Personne , car le consom- mateur paie aussi cher et le producteur, lui, est ruiné. Des événements tout récents ont prouvé que la ques- tion de la vie à bon marché n’était pas liée d’une — 353 — façon intime et absolue à la valeur des denrées agri- coles et notamment à celle du blé. Les municipalités n’ont jamais modifié l'importance de la taxe du pain, pour des écarts de trois à quatre francs entre des marchés successifs. — De nombreuses enquêtes ont prouvé qu'il n’existe aucune relation mathématique entre le prix du blé -et celui du pain; les municipalités n’ont pu rétablir l'équation et l'équilibre, qu’en mettant en usage un moyen qui n’est plus de notre époque, ni conforme au principe de la libre concurrence : la taxe du pain qui devrait être rayée de notre système écono- mique. — Le problème de la vie à bon marché, dont la solution est si vivement désirée, est donc d’un ordre économique qui est indépendant, dans une certaine mesure, du prix des denrées agricoles. Les termes et les données de ce problème sont donc, en partie, à chercher ailleurs. VI Les droits compensateurs que réclame l’agriculture sur les blés étrangers, ne feront pas augmenter le prix du pain d’une quantité proportionnelle à leur valeur. La meunerie, la boulangerie, les intermédiaires diminue- ront leurs bénéfices ; l’agriculture ne peut aller plus loin dans ses sacrifices : elle est acculée. En admettant même, que le pain augmente de la valeur de ces droits compensateurs, il ne faut pas oublier que l’industrie et l’agriculture se soutiennent l'une et l’autre : l’ouvrier des usines qui gagne ample- ment sa vie, n'hésite pas à payer un bon prix pour les SOC. D’AG. 23 Ta produits que lui offre le paysan qui, alors, vendant bien ses denrées, devient un bon client pour le fabri- cant et l’ouvrier ! C’est par le développement de la production agricole nationale, au prix de sacrifices momentanés, constants même au besoin, que nous pourrons relever l’agricul- ture, lui permettre de se perfectionner, de s’armer pour devenir l’égale des rivales inattendues, qui l’ont surprise en flagrant délit d'organisation. — Alors, nous marcherons, pas à pas, vers la vie à bon marché, sans compromettre la fortune de 25 millions de citoyens. — Toute nation qui veut rester libre et indépendante, doit savoir faire un sacrifice passager et supporter la priva- tion d’une richesse matérielle, pour acquérir des forces intellectuelles, morales et sociales; elle doit sacrifier des avantages présents pour s’assurer des avantages à venir, et, dans tous les cas, protéger le patrimoine de chacun de ses membres. — C’est son devoir principal ! Ce sacrifice pouvait paraître inopportun en 1860, devant la concurrence de l’Angleterre et de l’Alle- magne ; il n’en est plus de même aujourd’hui devant des concurrents inattendus el terribles. La solution de la vie à bon marché fera, de plus, un pas important, si les revenus perçus par la douane, et qui peuvent être considérés comme payés tout aussi bien par les producteurs étrangers que par la consom- mation intérieure, sont consacrés strictement, soit spécialement aux dégrèvements promis à l’agriculture, soit à alléger tous les contribuables par des diminutions équivalentes de charges de toute nature. Il en résulte- rait un profit évident et immédiat pour les cultiva- — 359 — teurs, et une égalité de traitement pour tout le monde, — profit qui n’est pas une quantité négligeable, puisque, selon toute prévision, la somme disponible sera, au moins, égale à 100 millions. Bien au contraire, avec le système actuel, il est suffi- samment démontré que les tentatives louables, faites pour amener la vie à bon marché, n’ont eu, par les effets du libre échange, comme seule et déplorable conséquence, que le draînage de la fortune publique au profit de l'étranger. VII Devant toutes ces considérations , les membres de votre commission ont cru devoir établir, comme il suit, les motifs principaux des revendications de l’agri- culture, et des vœux qu'ils vont vous proposer d'émettre : 4° Considérant que de nombreuses enquêtes, faites par le Gouvernement, la Société nationale d'agriculture, la Société des Agriculteurs de France, prouvent que dans les grandes exploitations, à culture intensive, employant les meilleures machines, possédant un grand capital, usant des engrais les plus spéciaux, où le culti- vateur fait travailler des aides payés aux taux des ouvriers industriels, le prix de revient minimum du blé a été reconnu être de 21 fr.; que dans la petite et moyenne culture, où le fermier travaille lui-même évaluant sa journée à une valeur dérisoire, ef épuise ses terres, ce même prix de revient est, notamment dans l’Anjou, d'environ 16 fr.; que c’est au-dessus de — 356 — ces prix, que commence le bénéfice que tout travailleur a le droit légitime de réclamer et que, depuis dix ans, la culture du blé ne laisse aucun bénéfice à la culture ; 2 Considérant qu’une concurrence loyale et profi- table aux deux parties, ne peut s’expliquer et s’établir qu'entre les habitants d’un même pays, c’est-à-dire dans un même milieu, dans les mêmes conditions sociales, financières et agricoles ; Que la concurrence entre des pays étrangers, dont les conditions de vie, de travail, d'impôt, de richesse sont toujours différentes, n’est pas équitable, et que dans de telles conditions la lutte est impossible, et devient anéreuse pour les faibles et les moins favorisés jusqu’à les ruiner ; Considérant que le budget de la France est de : 4,010,596,000 francs ; Celui des États-Unis : 1,585,000,000 francs ; Celui de l'Angleterre : 1,938,750,000 francs ; Celui de l'Allemagne : 2,334,000,000 francs. Que chaque Français paie, en moyenne : En impôts : 109 francs ; L’Anglais : 959 francs; L’Américain : 58 francs ; L’Allemand : 54 francs. Que la dette publique de chacun de ces pays est : Celle de la France : 30,997,000,000 francs ; Celle des États-Unis : 11,150,000,000 francs ; Celle de l’Angleterre : 19,386,000,000 francs ; Celle de l’Allemagne : 4,254,000,000 francs. — 397 — Qu’ainsi chaque Français doit : 859 francs; Chaque Anglais : 579 francs; Chaque Allemand : 99 francs ; Chaque Américain : 953 francs ; Qu’à une telle situation financière correspond, incon- testablement, une infériorité dans la lutte économique entre ces divers pays, et que cette situation économique peut conduire la France à la fin du xixe siècle, à une banqueroute aussi complète qu'à la fin du siècle dernier ; 3° Considérant que, tout au moins, les nations plus favorisées ne peuvent être autorisées à concurrencer nos produits, qu’en payant une part égale à nos charges, des contributions pareilles à celles que nous payons, c’est-à-dire en payant des droits compen- sateurs ; 4° Considérant que la science agronomique n’a pu trouver, jusqu’à présent, des produits pouvant rempla- cer Les céréales, qui sont la base de notre système cultu- ral, qui ont leur habitat parmi nous, et qu’il n’existe pas un seul canton, pas une seule ferme dans notre dépar- tement qui n'ait une portion de son sol où aucune autre plante que des céréales, et notamment du blé, puisse se cultiver ; et que conseiller à nos agriculteurs d'abandonner la culture du blé, c’est faire preuve d’ignorance, et introduire dans le débat un argument mensonger ; Considérant que la culture du blé et des autres céréales, est et sera toujours indispensable dans chaque ferme, pour l'obtention de la paille, base de nos — 358 — fumiers que les engrais chimiques ne peuvent rem- placer; 50 Considérant également que les laines, les textiles végétaux, les plantes oléagineuses sont engagés dans les traités de commerce, au détriment de l’agriculture française, qui, conséquemment, les fait entrer de moins en moins dans ses assolements, déjà privés de la ga- rance, et qui allait devoir abandonner la culture des betteraves, si des droits protecteurs, accordés à lin- dustrie sucrière, n'étaient venus sauver l’industrie agri- cole de la betterave, par contre-coup; 60 Considérant que sous le régime qui, actuellement, régit la loi sur les importations des céréales, il est prouvé, par la statistique, que, de 1879 à 1883 par exemple, avec des récoltes assez bonnes, dont la moyenne s’est élevée à 98 millions d’hectolitres, nous avons importé net (commerce spécial) 110 millions d’hectolitres de blé, alors que de 1827 — époque à laquelle l'administration des douanes commença à tenir compte des importations et des exportations — jusqu’en 1878, nous n’en avons importé que 90 mil- lions — c’est-à-dire que nous avons importé plus de blé et beaucoup plus, dans les cinq dernières années, que dans les cinquante-deux qui les ont précédées ; Que cette importation, prend chaque jour une impor- tance de plus en plus grande, parce que des pays producteurs, tels que l'Amérique et les Indes, étendent de plus en plus leur sole céréale, arrivant ainsi à une production colossale, dans un pays où la terre vaut encore 16 fr. l’hectare, où les émigrants sont exempts — 359 — d'impôts, et où la terre est assez riche d’engrais pour défier toutes nos combinaisons culturales ; Que l'importation de ces blés étrangers ne peut s'ex- pliquer, uniquement, par la nécessité de combler les vides de nos récoltes, en évitant ainsi la disette; mais qu’elle est le fait et le résultat d’une spéculation qui, pressurant la culture des États-Unis, vient déprécier en France les prix de nos récoltes, sans profit ni pour les uns ni pour les autres, mais pour le plus grand avan- tage d'un commerce qui n’a pas de nationalité et qui, seul, bénéficie des avantages du libre-échange, au détriment de l’industrie agricole: Commerce, qui par ses relations gouvernementales et officielles, ses accommodements, son internationalité, sa nature cosmopolite, sa puissance financière, l’action de son or sur la presse, de ses intrigues sur nos hommes d’État, se montre, ouvertement, dans toutes les villes et dans toutes les régions, le plus chaud et le seul puissant partisan des idées libre-échangistes, les propageant partout, n’ayant mi intérêt agricole, ni intérêt industriel à maintenir et à défendre ; indiffé- rent, par conséquent, à la prospérité réelle de la France ! Que, d’un autre côté, les perfectionnements de la navigation à vapeur, le percement des isthmes, de meilleurs aménagements des navires, tendent à dimi- nuer, sans cesse, le coût du transport entre le Nouveau- Monde, les Indes et l’Europe, et par conséquent tendent à aggraver chaque jour cette situation, par des impor- tations auxquelles il est temps d’opposer un frein salutaire ; | — 360 — 7° Considérant qu’il est contraire aux principes d'égalité inscrits dans toutes nos lois, de protéger le manufacturier plutôt que l’agriculteur, l’ouvrier des villes plus que celui des champs; que les industries françaises sont, en général, protégées par des droits allant de 10 à 60 0/0, tandis que l’industrie agricole n’est protégée que par des droits allant de 2 à 4 0/0 de la valeur de ses produits, et qu'il y a là une injus- tice flagrante; Que, conséquemment, l’industrie agricole paie plus cherles matières qu’elle emploie : les fers, les métaux, les houilles, ainsi que les transports, et qu’elle paie, de ce fait, un tribut à l’industrie protégée ; Que la protection accordée, avec raison, à l’industrie manufacturière, lui permet de payer un salaire plus élevé à ses ouvriers, et que, par contre-coup, l’industrie agricole suit ce mouvement, à peine de voir la dépo- pulation des campagnes lui enlever les quelques ouvriers qui lui restent, et qui la quitteront, augmen- tant encore l’encombrement si immoral des villes; que l’équilibre ne peut se rétablir qu’en soumettant l’agri- culture et l’industrie au même régime; 8° Considérant encore qu’une inégalité inexplicable existe, entre les charges de la propriété non bâtie imposable et les autres exploitations ; que la propriété immobilière urbaine paie 17 0/0 de son revenu ; que la propriété mobilière paie 4 0/0 ; que les taxes sur le commerce et l’industrie ne sont que de 13 0/0, tandis . que l’État perçoit le tiers du revenu agricole ; que cette situation ne peut durer, et qu’il est indispensable que l’État consacre les bénéfices que lui donnera la percep- — 361 — tion des droits compensateurs, à alléger la situation accablante de l’agriculture, cette grande sacrifiée ; 9 Considérant, en outre, que la production ani- male est la base de toute culture améliorante et ration- nelle ; que si la production végétale est impuissante à se soutenir d'elle-même, l’autre, au contraire, accroît d'année en année la fécondité du sol; 10° Considérant que si les importations des bestiaux ne sont pas actuellement dangereuses pour nos intérêts agricoles déjà bien compromis, elles le deviendront lorsque les aménagements des navires, la rapidité des transports, ou le perfectionnement des procédés de conservation des produits animaux, permeltront au commerce d'entreprendre sur une grande échelle Pim- portation des bestiaux vivants, ou des viandes conser- vées; et qu’il est prudent d’entrevoir déjà une telle éventualité qui serait la ruine complète et indiscutable de notre agriculture, et d'y parer de suite par des mesures sages et préventives; Que déjà, sous l'égide de cette liberté d'importation des animaux étrangers, on ne compte plus sur le sol français que 20 millions de têtes de moutons, au lieu de 38 millions en 1860, qu’il est entré, celte année, par exemple, 2,500,000 têtes de moutons allemands sur le marché de la Vilette; Que l'Amérique et le Canada ont importé en Angle- terre, cette année, 218,000 têtes de gros bétail, et 181,000 moutons, représentant réunis une somme de 170 millions de francs, plus 400 millions de francs de viandes mortes, fraîches ou salées et que nous sommes menacés de la même invasion ; — 362 — 110 Considérant que, si, par suite des mesures doua- nières inintelligentes qui nous régissent, nos cultivateurs (dans un pays essentiellement producteur de blé) étaient obligés de renoncer à cette culture, devenue trop oné- reuse pour eux, ce serait réserver la consommation de la France à la production étrangère, et ruiner la France à bref délai par le drainage de son numéraire. La pro- longation d’un tel régime entraïînerait, dans la suite, une hausse de prix des denrées agricoles, d'autant plus élevée, que le producteur étranger n'aurait plus à lutter contre la concurrence intérieure; d’où la vie fatalement plus chère ; 12 Considérant que siles droits qui seront perçus par la douane sur les denrées agricoles (et qui peuvent être considérés, comme un impôt payé tout aussi bien par les producteurs étrangers que par la consommation intérieure), étaient strictement consacrés au dégrève- ment des nombreuses charges et impôts qui accablent l'Agriculture française, cela permettrait à la culture ainsi soulagée, de réduire ses prix de revient, d’augmenter sa production par l’achat d'engrais et d’arriver ainsi à la seule solution de la vie à bon marché qui soit réelle- ment reconnue praticable ; — qu’en tout état de cause, ‘ les recettes faites à la frontière, réparties sur la masse des consommateurs, seraient pour eux une compensation ; 13 Considérant que le retour à l'échelle mobile por- terait au commerce les plus graves préjudices, parce que le commerce a besoin de sécurité, de fixité et de bases certaines pour ses opérations à longue haleine ; et que, conséquemment, l’application de ce système pourrait (en cas de disette et de famine), empêcher — 363 — l’approvisionnement, en temps voulu et opportun, de notre pays ; 149 Considérant que le Æbre-échange agricole prati- qué avec l'Amérique et les Indes, a eu comme effet immédiat l'obligation, pour le propriétaire, de diminuer la valeur de la rente de sa terre, c’est-à-dire ses fer- mages; que c’est pour éviter la diminution de la va- leur de l'outillage et du matériel industriels, c’est-à- dire de la propriété industrielle, que l’État ayant la main forcée en 1860, a établi des droits protecteurs importants pour toutes nos Industries nationales; que les populations ont accepté, sans protestation, le ren- chérissement qui en est résulté pour elles dans l'achat des choses nécessaires à la vie; que cette protection accordée à l’Industrie avait un but louable, politique et patriotique, et était justice accordée aux possesseurs anciens; que l’Industrie agricole demande à être traitée de même façon et pas autrement; Considérant que laisser déprécier la fortune foncière de la France au profit de sa fortune industrielle et des producteurs étrangers, est une injustice contraire à toute loi d'égalité et d'équité; Considérant que la diminution même d’un #ers, par exemple, de la valeur de la rente de la terre, eu égard à la production moyenne en Anjou de 16 hectolitres de blé à l’hectare, ne diminuerait que de 1 fr. 50 la valeur de l’hectolitre de blé, puisque nos terres dans l’Anjou s’afferment aujourd'hui de 70 à 80 fr., et qu’un pareil résultat ne peut être considéré comme pralique et sérieux, Car le pain ne diminuera pas de valeur pour une si faible réduction ; que cette diminution de valeur d’un — 364 — üers, des terres à blé, aurait son contre-coup sur la valeur des autres propriétés non bâties, jusqu’à dimi- nuer également d’un tiers la valeur vénale des propriétés non bâties imposables, estimée à 91 milliards 583 mil- lions 966,075 fr., —- c’est-à-dire de diminuer de 30 mil- liards la fortune publique. — Ce résultat est d’une conséquence logique et fatale, et déjà les terres où l’on cultive le lin, le chanvre, les graines oléagineuses, voient chaque année leur valeur diminuer, par suite des importations étrangères et de l’absence de tout droit protecteur sur les produits agricoles ; Considérant qu'un pareil résultat, amené par la liberté des échanges des produits agricoles, est en fait et en droit une véritable spoliation d’un patrimoine agri- cole que la France a créé, et fait fructifier, par son travail, pendant dix-huit siècles de labeurs pénibles et d'efforts coûteux; et que par contre le patrimoine industriel et le patrimoine mobilier ont été respectés et protégés par nos lois; Considérant donc que la Srébribte foncière est ainsi de toutes parts attaquée, La Société nationale d'Agriculture, Sciences et Arts d'Angers émet les vœux suivants : 4° Des droits compensateurs seront établis pour tous les produits agricoles qui ne sont pas compris dans les traités de commerce. Ces droits seront établis, comme suit : — 365 — Produits végétaux Blé, méteil, épeautre, 5 fr. par 100 kilog., au lieu de 0,60 c. Farine, 9 fr. par 100 kilog. Seigle, avoine, orge, maïs, 3 fr. par 100 kilog. Produits animaux Bœufs, 60 fr. par tête. Taureaux et vaches, 40 fr. par tête. Moutons, 9 fr. par tête. Porcs, 15 fr. par tête. Viande fraîche, 20 fr. les 100 kilog. Viande salée, 15 fr. les 100 kilog. Chevaux, 70 fr. par tête. % Les sommes perçues à la douane sur les produits agricoles sus-nommés, seront strictement réservées pour diminuer les impôts et les charges qui pèsent sur l'Agriculture, afin d’arriver ainsi insensiblement à diminuer le prix des denrées agricoles alimentaires, au moyen de la production nationale; 90 Tous les traités de commerce, qui peuvent être dénoncés, le seront dans les délais de rigueur; 4 À l'expiration de ces traités consentis et actuelle- ment en vigueur, des mesures de protection seront également prises à l'égard des produits agricoles qui, ‘tels que le chanvre, la laine, les lins, les graines oléa- — 366 — gineuses, ne paient pas de droit d'entrée et sont actuelle- ment vendus à des prix qui laissent en perte l’Agricul- ture. 90 Le retour au système de l'échelle mobile sera rayé de nos lois douanières. Pour la Commission : GUSTAVE DE CAPOL, Rapporteur. A JULIEN DAILLIÈRE ÉPITRE A la porte d'Angers, route nationale, Où l’on voit, éveillé dès l’aube matinale, Le paysan, chargé de légumes, de fruits, Vers la ville accourir pour vendre ses produits; S’élève une maison, de modeste structure, Dont une italienne entoure la toiture ; Annexée aux logis qui bordent le chemin, Elle jouit encor d’un précieux jardin S’ouvrant sur la campagne, et joignant à l’ombrage De féconds espaliers l’ineffable avantage. C’est le petit chez-soi que la muse a chanté, Un sûr abri l’hiver, frais asile, l’été, Il a sa basse-cour, son jet d’eau, sa voliére, Où babille d’oiseaux la troupe familière. Dirons-nous quelques mots de Louise et du chien, Double sécurité, gardienne et gardien ? Là, dans le célibat, vit un paisible maître, Aux studieux loisirs consacrant son bien-être ; Il donna sa jeunesse à de nobles travaux; Au déclin de ses jours, il a droit au repos. — 368 — Ce modique héritage, il le tient de son pére, Et c’est là, qu’élevé par la plus tendre mère, Il fut l’objet constant de ses soins délicats, Doux souvenir du cœur qui ne s’efface pas, Et rappelant au fils les jours de son enfance, Y demeure gravé par la reconnaissance. Des personnes de choix, quelques rares amis, Dans cet intérieur, tour à tour, sont admis ; Déjà sur leur déclin, passant la soixantaine, Et dont la mort commence à rétrécir la chaîne. Du lycée angevin élèves renommés, Is ont au palmarès vu leurs noms acclamés ; C’est là que des liens, formés dans la jeunesse, Et palpitants encor, raniment leur vieillesse. On y cause gaîment des chefs-d’œuvre de l’art, Mais c’est au dieu des vers qu’est la plus large part. N’en soyez pas surpris, nous sommes chez Daillière, Le poëte angevin dont notre ville est fière, Dont le nom glorieux, au Nord comme au Midi, Dans de brillants concours fut toujours applaudi. Allons le visiter dans son cher ermitage, C’est un homme d’esprit qui se double d’un sage. De sa demeure à peine a-t-on franchi le seuil, Qu’on est sûr d’y trouver un gracieux accueil. Entrons, à gauche, à droite, au salon, dans la salle, De bustes, de portraits, à nos regards s'étale Une collection intime, et, dans le choix, Ceux dont il a chanté la gloire et Les exploits ; D'abord André Chénier, cette tête hellénique, Front puissant qu'animait le souffle poétique. — 369 — C’est dans ce beau sujet, si plein d'émotion, Que son talent reçut sa consécration. Que de pleurs attendris à cette voix plaintive, Modulant les regrets de la jeune captive ! Quels tableaux saisissants, aux portes des cachots, À ce sinistre appel d’exécrables bourreaux ! Et du héros mourant dans son apothéose, Quel déchirant adieu!..…. J'avais là quelque chose! Par un auteur tragique, à notre antiquité Qu'un sujet émouvant parfois soit emprunté, Laissant grecs et romains, aux fastes de la France Notre barde angevin donne la préférence, Et le succès complet qui ravit l'Odéon Devait à l’'Ambigu suivre Napoléon. A nos troubles civils succède enfin l’empire ; De ce temps glorieux le poëte s’inspire. Le héros désormais, sur son trône affermi, Jouit de sa grandeur, sans craindre un ennemi. Il ne lui manque rien, au comble de l'ivresse, Que peut-il désirer ? Cependant la tristesse Au front impérial a creusé quelques plis ; De ses vœux il appelle un héritier, un fils, C’est la raison d’État qui dans son cœur domine. Le temps presse... il faudrait... comment à Joséphine Exposer sans pitié, dans un aveu brutal, Tout ce qu’a de poignant un devoir si fatal ? Le fera-t-1l lui-même, ou bien par émissaire ? Mais de cet abandon, devenu nécessaire, La malheureuse épouse a le pressentiment. Qui dira de son cœur l’affreux déchirement, SOC. D’AG. 94 — 370 — Sa résignation, sa vertu, sOn courage, Pour braver, sans murmure, un tel excès d’outrage, Ses larmes... dont l’eflet sur tous les spectateurs, Au milieu des bravos, s’est traduit par des pleurs De vos œuvres voilà les plus briliantes pages, Celles où votre nom reçut le plus d'hommages. De la croix ce triomphe a mérité l'honneur ; Pour vous, du président quel fut l’accent flatteur, Rappelez-vous ces mots d’une grâce parfaite : « Je viens de ma famille ici payer la dette. » Quel transport souleva la noble expression, Pour le prince et pour vous touchante ovation! Maintenant nous allons, dans votre galerie, De prix si variés parcourir la série. Quel est ce bronze d’art finement ciselé ? Le Penseur : Michel Ange, un jour, l’a modelé Pour un tombeau fameux qu’on admire à Florence; Du poëme de l’Aigle il est la récompense. Le poëte voulut, entrainé par son cœur, D’un cri reconnaissant saluer l’empereur ; De son sujet, dans l’ode, il a pris l’envergure, Le Gymnase en a fait un succès de lecture. Arrivons aux témoins de ses nombreux concours, Où, sans cesse luttant, vous triomphez toujours. Mais où d’abord s’adresse, en chantant, votre lyre ? Au prix de l’Institut, l’attrayant point de mire. Vous l'avez remporté deux fois, et vos travaux Vous ont fait distancer les plus dignes rivaux. La querre d'Orient, où l'élan poétique — 371 — S’élève à la hauteur du courage héroïque. Vous chantez nos Français, sous des feux meurtriers, De l’Alma franchissant les périlleux sentiers. Saint-Arnaud, Canrobert, Lourmel, chefs magnanimes, Vos exploits revivront, consacrés dans ces rimes. Le nom de Poitevin ', près des vôtres cité, Avec vous doit passer à la postérité. Le souvenir d’un siège à jamais mémorable, Des ennemis sans nombre, un hiver implacable, Sébastopol tombant, ont prouvé qu’aux combats, Pour vaincre, rien ne peut arrêter nos soldats. Ce premier prix ne fait qu’enflammer votre veine, Dans un nouveau sujet, image plus sereine, Vous esquissez les traits du grand saint Augustin, Cet évêque animé par le souffle divin. Dans sa jeunesse, errant de système en système, A la voix d’une mère inspirée et qu’il aime, Renonçant à jamais à son culte païen, Il se fait baptiser, donne aux pauvres son bien, Entre résolument dans la foi catholique, Devient prêtre, s’élève à l'évêché d’Afrique, Et, rétractant enfin les plus folles erreurs, L'Église le proclame un de ses grands docteurs. Triomphe solennel, en séance publique, Vous obtenez deux fois la palme académique, Que présageait pour vous un si brillant début. Oui, ces médailles d’or, grand prix que l’Institut 1 Un Angevin, monté le premier à l'assaut. — 372 — Décerne aux lauréats, applaudis dans ses fêtes, Sont comme une auréole au front de nos poëtes. Rivales de Paris, quelques grandes cités Ont voulu faire appel aux bonnes volontés, Et, par de vifs attraits, réveiller, dans la France, Des plus nobles assauts l’active concurrence. Toulouse est à leur tête, et l’éclat de son nom Des siècles écoulés porte la sanction. La muse, dont Paris proclamait l’excellence, Devait, aux Jeux Floraux, essayer sa puissance Dans deux sujets tirés de votre sol natal. . Commençons par David, le sculpteur sans rival. Avec quelle chaleur et quel accent lyrique, À grands traits dessinant cette vie artistique, De la salle d'honneur, ouverte à ses travaux, Vous avez fait, un jour, retentir les échos! Vous montrez ce talent qui grandit avec l’âge, Les obstacles domptés par l’ardeur du courage, Et la gloire plus tard couronnant ses efforts. Ici, vous évoquez les plus illustres morts, Et nos yeux sont ravis d’émouvantes images, Guerriers, savants, prélats, éminents personnages, Renaissant tout à coup dans ce vivant tableau, Où la plume magique est digne du ciseau. Dans un second sujet, Ô lamentable scène! La Loire est débordée, et son courant entraîne Des meubles, des débris, des langes, des berceaux, Dans les champs inondés roulant avec les flots ; Elle s’est engouffrée au sein de nos carrières, — 373 — Que d’ouvriers sans pain, de navrantes misères! La pitié s’est émue; et le chef de l’État, Sur cêtte nappe immense, à côté du prélat, Monte dans une barque. On soulage, on console, Et l’aumône s’ajoute à la douce parole, Pour soutenir des corps par la faim épuisés, Et rendre un peu de calme à tant de cœurs brisés. Vous avez obtenu du docte aréopage, D'un public attendri ratifiant l'hommage, Ces fleurs d’un si grand prix, cesfleurs tributs charmants, Dons de Clémence Isaure offerts à ses amants. Ami, cessez de vaincre ou je cesse d'écrire. Que vois-je encor ? D'où vient cette brillante lyre Qui scintille à nos, yeux? Du jury de Cambrai, Où d’un triple succès vous fütes honoré. Vous parlerai-je ici de vos Nids d’hérondelles, De ces charmants oiseaux à l’amitié fidèles? Quel poëme attachant, digne d’être écouté! Est-il plus doux appel à la fraternité? L'une d’elles a vu brisé par la tempête Ce nid, berceau d'amour qu’au printemps elle apprête; Cet abri cimenté, vrai chef-d'œuvre de l’art, Le rebâtira-t-elle? Il se fait déjà tard : Mais, voilà qu’un congrès s’assemble et délibère, Un asile est promis à cette pauvre mère. A tire-d’aile on voit venir des environs, Au secours du malheur, d’agiles escadrons, Des pattes et du bec on se met à l’ouvrage, Trois jours ont effacé les traces du ravage. — 374 — Or, pendant que se fait l’acte réparateur, Un moineau, fainéant, babillard et voleur, Que votre vers badin traite en socialiste, Contre le droit des gens, se glisse à l’improviste Dans un nid, il s’y case, Ô vain espoir! bientôt Contre lui l’on se rue, on lui donne l'assaut, Entendez-vous ces cris? On le plume, on le chasse, Et le larron finit par déserter la place. Apologue touchant, applicable aux humains! La Fontaine, au récit, aurait battu des mains. La ville de Cambrai vous sera toujours chère ; Au souvenir brillant du succès littéraire, Vient s’ajouter pour vous cet accueil amical Que fit au lauréat le noble cardinal, Lumière de l’Église, éminent en science, Régnier, fils de l’'Anjou, qu’illustre sa naissance, À récolter la gloire employant vos loisirs, Quelle succession d’ineffables plaisirs! . Votre muse nomade et d'humeur vagabonde, En récitant ses vers, aime à courir le monde. De châteaux en châteaux, tel le barde autrefois, De nos preux chevaliers redisait les exploits. Du Nord, vers le chef-lieu de Tarn et de Garonne Vous descendez, et l’or dans votre écrin foisonne En médailles d’honneur, car peut-on trop payer Les perles qu’en chantant sème un tel joaillier? Quel charme ont dans vos vers tous ces mots de l’enfance, Dits si naïvement, d’un ton plein d’innocence ! « La neige que nous peint un enfant de trois ans, Et la petite fille, au précoce bon sens, — 375 — Dans ses réflexions sur ses boucles d’oreilles, Ces contes ravissants sont autant de merveilles. » Mais l’émulation gagne au loin les cités, Et par l’amour du beau les esprits sont captés. Pour d’autres Jeux Floraux, une nouvelle arène ‘ S’ouvre à tous les pays, et toujours en haleine, Votre muse s’élance au concours général. Quel effet a produit sur le sol provençal Ce drame des Renards, un vrai poëme épique Où tant d'esprit se mêle au sens allégorique? Merveilleuse souplesse, où, dans tous vos essais, Vous marchez triomphant de succès en succès. Mais je m’essouffle enfin à célébrer vos gloires, Ami, n’êtes-vous pas fatigué de victoires? Non; mais changeant de ton, la muse des douleurs De la patrie en deuil redira les malheurs. IL vous faut emboucher la trompette guerrière, Chanter ce fier élan qui pousse à la frontière Tous ces jeunes héros prêts à braver la mort, Célébrer ce qu'ont fait, dans ce suprême effort, Partis de tous les rangs, les enfants de la France, Par le courage unis, au jour de la défense; Décernant à chacun, vivant, mort ou blessé, Cet hymne qu’au burin le poète a tracé. Dans le Cercle des Arts, on gardera mémoire De l'effet saisissant produit sur l’auditoire, Et je vois, complétant un si riche butin, Cette couronne offerte au félibre angevin. 1 A Forcalquier. — 376 — Ah! que notre patrie aux factions livrée, Puisse jouir enfin d’une paix assurée, Que le culte chrétien, renaissant au grand jour, D'un meilleur avenir consacre le retour, Du front de Jeanne d’Arc, éclatant de lumière, Le rayon passera sur le vôtre, ô Daillière! Un chef-d'œuvre de plus, au théâtre ajouté, Portera votre nom à l’immortalité! D: GRILLE. UN MÉDECIN GRIPPÉ ÉPITERE A un médecin de la campagne qui était venu me voir au début de la maladie et m'avait fait promettre, en partant, de lui donner de mes nouvelles. Au sortir de mon lit, j'accomplis ma promesse ; Et puisqu’à ma santé votre cœur s'intéresse, Du mal que j'ai souffert, déroulant le tableau, Je vais vous le tracer à grands coups de pinceau. Après votre départ, de ma vive souffrance J'ai senti par degrés monter la violence ; Mon pouls interrogé, montre en main, sous vos doigts, Rebondissait déjà quatre-vingt-douze fois, Mais bientôt, excité par la fièvre maudite De la centaine il a dépassé la limite. L’afflux impétueux du sang vers le cerveau À mon crâne brûlant semblait un lourd marteau, Et d’un cercle de fer sentant ma tête étreinte, Je laissais, malgré moi, s'échapper quelque plainte. Courbaturé, brisé par d’atroces douleurs, Vainement du repos j'implorais les douceurs ; — 378 — Le sommeil bienfaisant avait fui ma paupiëre, Et mes yeux fatigués redoutaient la lumière. Fléau cruel! voilà comment à mon foyer Tu frappais, m’annonçant le tribut à payer. Ma toux, séche d’abord, bientôt devint humide, Ajoutant ses accès au cortége morbide ; Qu’elle était déchirante! Oui, j'ai craint maintes fois, Par l'effort répété, de rompre les parois De ces frêles canaux, où le sang se marie Avec l’air épuré qui nous verse la vie. Des crachats sécrétés, le reflet jaunissant Se colorait parfois de nuances de sang; Mais mon souffle, ausculté par le tube acoustique, N’a jamais crépité dans l’écume bronchique. Deux fidèles amis, ensemble ou tour à tour, De leurs soins dévoués m’assistaient chaque jour, Et, prompts à me donner une entière assurance, D’un esprit inquiet ranimaïent l'espérance. J’en avais grand besoin, car, entre nous soit dit, Qui se tourmente plus qu’un médecin au lit? De son affection poursuivant l’analyse, Il n’a pas le sang-froid qu’exige l'expertise, Le plus léger symptôme est mal interprété, Et tout raisonnement cède à l’anxiété, S'il ne voit à son aide accourir un confrère Qui le tire d’erreur, le console et l’éclaire. J'avais peur : telle était de mon état moral La tendance fâcheuse. Ah! si, domptant le mal, 1 Les docteurs Mirault et Bigot. — 379 — La nature voulait qu’une sueur critique Vers la peau détournât l’engoûment pneumonique, Ce serait encore là le meilleur traitement, Et, pour favoriser cet heureux dénoûment, Du matin jusqu’au soir, du soir jusqu’à l’aurore, Un breuvage fumant, qu’un doux sirop colore, De ma toux convulsive apaisait les accès. Tisanes, potions, que lents sont vos effets ! Le pouls qui résistait, sous mon doigt qui l’explore, Du fluide sanguin accusait la pléthore. Si l’on m’ôtait du sang.…? Les vaisseaux dégagés Rendraient le jeu plus libre aux poumons dégorgés. _ Tel ne fut pas l’avis de mon conseil intime, Où l’art et l’amitié dirigeaient mon régime. Nous sommes avec vous en complet désaccord, Vous êtes faible, eh quoi ! vous affaiblir encor! Le malade prostré, que la souffrance énerve, A besoin de garder des forces en réserve, Pour redonner, après tant de jours de langueur, A son corps épuisé la force et la vigueur. La nature a ses droits, sage réparatrice, Laissons-la prudemment accomplir son service ; C’est un guide pour nous, respectons ses desseins , Le temps opère mieux que tous les médecins. Grippe, je te maudis ! Quel vent sur notre plage De ton germe apporta le funeste ravage ? Pourquoi donc, chaque hiver, sur notre humanité T'abattre, en la frappant de ton souffle empesté, Et, sans distinction, dans le vol qui t'emporte, Aller, de ville en ville, heurter à chaque porte? — 380 — Devais-tu du docteur, en suspendant l’état, Arrêter son courage, à l’heure du combat ? Quoi, me clouer au lit, quand de mon ministère J'aurais dû prodiguer le secours salutaire! Je prendrai ma revanche, et d’un sublime effort, Je saurai réparer l'injustice du sort. Hélas ! Il faut compter avec la maladie. Qui donc peut affirmer qu’un jour à sa patrie Il ne manquera pas ; qu’à l’heure du danger, À son poste il sera prêt à la protéger ? Mais me voilà debout, j'ai la poitrine libre, Je sens mes fonctions en parfait équilibre, L’appétit me revient, et du pouls consulté Le rythme harmonieux atteste la santé. Des maux que j’ai soufferts, il ne reste plus trace ; A la clinique allons reprendre notre place! S'il est bon qu’un docteur, par avance, ait goûté À tout médicament au Codex emprunté, Il est utile encor, qu’au cours de l'existence, Il juge la douleur par son expérience; Car, dès lors plus sensible et prompt à s’attendrir, Au malheur du prochain il saura compatir. Dr GRILLE. BOUrE DE CONTRE LE TABAC Du tabac je suis l’ennemi ; Quel médecin n’a pas gémi, Voyant, qu’en notre belle France, A pleine bouche et sans raison, On se sature d’un poison Aussi funeste à l’existence ? Dira-t-on, pour l’humanité, Qu'il est un garant de santé, Qu'il fait l'agrément de la vie, Qu'il donne au corps plus de vigueur, À notre teint plus de fraîcheur, Et qu’on y puise le génie ? Que nous lui devons nos progrés, Qu'il est le père des succès, Que, dans les arts et la science, En ce monde, rien ne se fait De beau, de grand et de parfait, Que par son heureuse influence ? Qu’on cite de charmants auteurs Parmi l'élite des fumeurs, — 382 — Qu'importe ! Est-ce qu’on s’imagine Qu'ils auraient chacun emprunté Cette éminente faculté À l'effet de la nicotine ? Si la pièce des Fourchambault, D’Augier porta le nom si haut, À Paris, sur le grand théâtre, Faut-il rapporter ces faveurs Au tabac seul, à ces vapeurs ( Dont il fut toujours idolâtre ? Ah! s’il n'avait reçu du ciel Certain mérite essentiel, Est-ce la pipe ou le cigare, Dont le poëte, un jour, s’éprit, Qui pouvait doter son esprit D’un talent d'écrire aussi rare ? Quoi! tant de chefs-d’œuvre divers, Qu’on admire dans l’univers, Seraient dus à cette coutume ? Et ces admirables tableaux, Où brillent de savants pinceaux, Dépendraient d’un fourneau qui fume ? Des sens quelle aberration ! Pour l’homme, étrange obsession! Quelle servitude indomptable! Esclave, il ne peut s’en passer, Pour vivre, il lui faut en user Autant que de pain, à sa table. — 383 — Quel est le maudit inventeur Qui, du sauvage imitateur, Fumant cette plante exolique, S’énivra du parfum nouveau ? Ce n’est pas le moindre fléau Que nous apporta l'Amérique. Sans compter celui de Vénus, Frappant tant d'hommes dissolus Du germe le plus délétère; C’est toi, Colomb, qui de ces maux Apportés par tes matelots, Empoisonnas notre hémisphère. On fume à tout âge et partout, C’est la perversion du goût Dans une mode universelle ; On fume du matin au soir, Chaque maison a son fumoir, Et le beau sexe aussi s’en mêle. Et les petits singent les grands : Voyez ce garçon de six ans Qui fume, képi sur l’oreille. A cet air crâne et résolu. Le maître se dit, confondu: Instruisez donc race pareille ! Mais le tabac est un trésor, Pour l’État quelle mine d’or! Avec elle il remplit sa caisse. Que si nos sens sont pervertis, — 384 — De nobles attributs flétris, Tant pis, dit-on, pour notre espèce | Ah! loin de nous l’affreux tabac, D'où vient la crampe d’estomac! En le privant de la salive Nécessaire à sa fonction, Il enlève à son action Toute la force digestive. Il se peut, ô mon cher lecteur, Que vous en soyez amateur, Et qu’en riant de ma satire, Vous vous disiez, à votre à-part : En nous décochant son brocard, Le vieux rimeur est en délire. Rappelez-vous, en débutant, Ce qu’eut pour vous de dégoütant L’essai de la maudite plante ; . Quand soudain, pris du mal de cœur, Vous rejetiez avec horreur Celle aujourd’hui qui vous enchante. Et vous vous êtes entêté, En recherchant la volupté, Vous voilà fort sur les principes ; Et vous triomphez, chaque fois Que vous nous prouvez vos exploits, Dans l’art de culotter les pipes. Fumer devient d’excellent ton. Sans pudeur et dans un salon, — 389 — On fume jusqu’au nez des femmes; Mais qu’elles ne s’en plaignent pas, Car les hommes sont, ici-bas, Ce que vous voulez bien, mesdames! De son souffle empester les gens, Voir se ternir l'émail des dents, Et, passant au milieu du monde, Dégager ses âcres senteurs, Que tous les habits des fumeurs, Après eux, laissent à la ronde ; Avoir toujours la pipe au bec, Avoir toujours le gosier sec, Qu'il faut sans cesse qu’on arrose; Ne pouvoir éteindre ses feux Qu’à force de spiritueux Dont il faudra tripler la dose ; Quel sort! Aussi tout grand fumeur Devient bientôt un grand buveur. L'homme s’abaisse et se dégrade, Par son vil penchant emporté, Il a perdu sa dignité, Ce n’est plus qu’un pauvre malade. L’alcoolisme l’envahit, Son corps vacille et dépérit, De l’âme s’éteint la lumière ; Combien, à l’hospice des fous, Vont terminer, sous les verroux, Vouée au mépris, leur carrière ? SOC. D’AG. 95 — 386 —. Pour le fumeur, il est un mal Qu’amèënera l'instant fatal, Par l’habitude invétérée. Il verra, spectacle hideux, Certain champignon cancéreux Corroder sa lèvre ulcérée. Il faudra se soumettre au fer; À ta langue un affreux cancer Apparaît. Ah! je t'en supplie, Ami, fumeras-tu toujours ? Arrête! Il y va de tes jours, Ne tiens-tu donc pas à la vie ? Que fait la supplication, Dans l’ardeur de la passion Qui vous excite et vous enivre ? Le fumeur, averti cent fois, Vous dit de sa tremblante voix : Sans le tabac je ne peux vivre ! Mais que dites-vous du priseur, Et que pensez-vous du chiqueur ? -— Pour eux mon dégoût est extrême. Sous quelque forme qu’il soit pris, Oui, le tabac, je le maudis, Lançant contre lui l’anathème. Dr GRILLE. PROCÉS-VERBAUX DES SÉANCES SÉANCE DU 15 JANVIER 1884. La séance est ouverte à sept heures trois quarts sous la présidence de M. d'Espinay, président. La lecture du procès-verbal est remise à la prochaine séance. ; M. le Président donne avis des démissions de MM. Ba- raudon et D' E. Bricard, membres titulaires. M. Georges Bricard, membre titulaire, allant habiter Paris, demande à devenir membre correspondant; cette demande est acceptée. M. Prosper Lemesle, architecte, ancien membre de la Société, est présenté par M. le Président comme membre titulaire, et admis séance tenante. É M. de Boury est présenté au nom de M. l'abbé Ravain pour être admis comme membre correspondant. M. Ravain est chargé du rapport. ’ » M. le Président donne communication d'une lettre-cireu- laire relative aux fouilles de Sanæay (Vienne). La Société, regrettant que son budget ne lui permette pas d'apporter son offrande, émet à l'unanimité le vœu de voir conserver les importantes découvertes archéologiques du P. de la Croix, et charge son Bureau de transmettre ce vœu à M. le Ministre de l'Instruction publique et des Beaux-Arts. M. le Président donne ensuite lecture d'une note de M. Michel, conservateur-adjoint au Musée d'archéologie, et relative : 1° à la découverte de fragments de mosaïque — 388 — romaine (rue Hoche, 15) ; 2° à la découverte de vestiges de * sépultures mérovingiennes dans les travaux de voirie exécutés sur la route de Saint-Rémy-la-Varenne à Ps au-dessus du village de Chauvigné. L'ordre du jour appelle ensuite la lecture de la note com- muniquée par M. Joly-Leterme, ancien architecte diocésain et membre correspondant, sur des Substructions du XI° au XIIe siècle, prés la place Saint-Pierre à Saumur. — M. le Pré- sident fait observer que l'avis émis par M. Joly-Leterme est en opposition avec celui de M. P. Ratouis. Adhuc sub judice lis est. M. le Président prend ensuite la parole pour donner lecture d'une Notice biographique sur M. le D' Adolphe Lachèse. Les membres de la famille, invités spécialement, assistent à la séance. Ce discours, dans lequel M. d'Espinay fait revivre l'homme de cœur et de talent que pleurent tous ceux qui l'ont connu, est écouté dans le plus grand recueillement. Président de la Société nationale d'agriculture, sciences et arts d'Angers pendant dix-sept années, le D' Ad. Lachèse avait donné un nouvel essor aux travaux et aux séances de notre Société en organisant de temps à autre des séances solennelles où l'on pouvait entendre des hommes tels que MM. Villemain, Beulé , de Falloux, de Quatrebarbes, Me Freppel, etc. = Au nom de la famille, M. Cosnier remercie M. le Président d'Espinay de l'éloge qu'il vient de prononcer. Les applau- dissements témoignent des sentiments des membres de la Société. A La parole est donnée à M. de Capol pour lire un mémoire sur l'Emploi du sel en agriculture. M. de Capol conclut : 1° que le sel, dans l'alimentation des bestiaux, est chose excellente et indispensable ; 2° que, comme engrais, il ne faut pas en abuser et qu’au delà de 125 kil. à l'hectare, le sel, loin de fertiliser la terre, la stérilise. M. l'abbé Hy approuve ces dernières conclusions de M. de Capol : « Les physiologistes, dit-il, s'accordent aujourd'hui à — 389 — exclure le sodium et le chlore de la liste des corps simples, au nombre de douze, constituant l'aliment complet des plantes. L'erreur des anciens observateurs vient de ce qu'ils ont attribué à l'ensemble des végétaux un régime exclusi- vement propre à quelques-uns. Sous ce rapport la soude peut se comparer à la chaux, à cette différence près que le nombre des espèces utiles calcicoles l'emporte de beaucoup sur celui des salicoles. Celles-ci limitées à la région maritime ne comptent guère que quatre ou cinq représentants isolés dans la flore de l'intérieur, tous dépourvus d'intérêt pour l'agriculture ; comme Sonchus maritimus, Zannichellia palustris, Triglochin maritimum et quelques Atriplicées. « On n’a longtemps cité parmi les plantes cultivées que le Dattier à qui les terres salées fussent décidément favorables ; il faut y joindre les Eucalyptus rostrata et robusta désignés récemment par M. Naudin pour restaurer la végétation forestière dans la région des schotts algériens. « En somme pour les cultures de notre pays, comme le fait justement remarquer M. de Capol, le sel marin ne peut être utile que physiquement, soit en retenant l'humidité dans le sol, soit en provoquant la solubilité des phosphates. » La lecture que M. Hy devait faire sur la Flore Angevine est remise à la prochaine séance. La Société est appelée, conformément au règlement, à pro- céder aux élections de son Bureau pour 1884, remises à la séance de ce jour. {Voir pour les résultats du scrutin l'extrait du procès-verbal de la séance de ce jour, publié à la fin du XXV° volume des Mémoires, année 1883). | La séance est levée à neuf heures et demie. Le Secrétaire-Général, G. BoDINIER. — 390 — SÉANCE DU 5 FÉVRIER 1884 La séance est ouverte à sept heures trois quarts ‘sous la présidence de M. d'Espinay, président. Les procès-verbaux des séances des 4 décembre 1883 et 15 janvier 1884 sont successivement lus et adoptés. . M. le Président dépose sur le bureau : 1° le règlement de l'Exposition (du 15 mai au 16 juin) qui aura lieu cette année à Brest à l'occasion du Concours régional; une Notice sur le Phylloxéra et les moyens de le combattre. ; M. le Président remercie M. le D’ Grille qui a bien voulu faire hommage à la Société et à chacun de ses membres du IIIe volume de sa traduction en vers des Comédies de Plaute. Sur le rapport de M. Ravain, est admis comme membre correspondant M. E. de Boury, auteur de notices paléonto- logiques publiées dans le Bulletin de la Société géologique de France et dans le Journal de Conchyliologie. M. le Secrétaire-Général présente comme candidats au titre de membre titulaire, M. Arthur du Chêne, archiviste paléographe à Baugé, et M. Georges Bordeaux, licencié en droit et manufacturier à Angers. M. Loir-Mongazon est nommé rapporteur. M. le Président donne lecture d’un nouveau chapitre des Chroniques Saumuroises de M. P. Ratouiïs, intitulé : Le Château de la Coutanciére à Brain-sur-Allonnes en 1699. M. Hy présente la deuxième partie de ses études sur la Flore d'Angers et entretient la Société des modifications qu'elle a subies à diverses époques. Si la culture intensive a fait disparaître beaucoup de plantes indigènes, par compen- sation plusieurs espèces exotiques se sont naturalisées au point de ne plus pouvoir se distinguer aujourd'hui de leurs congénères spontanées. Parmi les espèces, non constatées encore sur le territoire angevin, il indique les suivantes trouvées dans les herbori- sations de 1883 : NE MS me tes Rhacomütrium protensum Braun. Rochers de Chenillé- Changé. Anomodon attenuatus Hart. Rochers de Müûrs. Amblystegium radicale Sch. Landes de Seiches. Sphagnum molluscum Bruch. Landes de Seiches. Blyttia Lyell Nees. Trous bourbeux, à Juigné-sur-Loire. Fossombronia cœspiliformis Not. Beaucouzé. M. le président d'Espinay donne lecture de la première partie de son compte-rendu de l'ouvrage de M. Beautemps- Beaupré sur Les Coutumes et institutions de l'Anjou et du Maine. Enfin la séance est terminée par la lecture d'une commu- nication de M. le Secrétaire-Général relative à la Banquise de Saumur en 1768. C'est un Récit contemporain des funestes événements arrivés sur la Loire par le débordement des eaux et l’'amoncellement des glaces, suivi d'une naïve et touchante Comyplainte. La séance est levée à neuf heures trois quarts. Le Secrétaire-Général, G. BoDINIER. Réunion du Bureau. SÉANCE DU 23 FÉVRIER 1884 Une réunion des membres du Bureau a été tenue le 23 février 1884, à midi, chez M. le président d'Espinay. Étaient présents : MM. d'Espinay, Victor Pavie, André Meauzé, D' Maisonneuve, Rondeau et G. Bodinier. Absent ME: de Kernaëret, président du Comité de publication. Une lettre adressée à M. le Ministre de l’Instruction publique demandant le rétablissement de la subvention de 300 francs, a été signée par les membres du Bureau et remise à M. le Préfet pour être transmise au Ministre. Le compte financier est examiné ; les charges très lourdes du cabinet de lecture pendant les dernières années, l’aug- mentation des frais résultant de la publication du volume annuel des Mémoires ont entièrement absorbé le reliquat actif du budget. Des économies s'imposent pour l'avenir. Après discussion, le Bureau décide qu'une démarche sera faite auprès de MM. Lachèse et Dolbeau, imprimeurs de la Société, pour leur demander de vouloir bien réduire au minimum les frais d'impression de la feuille des Mémoires. Il est également décidé que, à la prochaine séance générale, M. le Président fera un rappel au règlement relatif à la publication des travaux qui ne doivent être remis à l'im- primeur qu'après avoir été admis à l'impression par décision du Bureau et du Comité de publication réunis et sur le visa du Secrétaire-Général. L'examen des mesures d'économie à prendre est renvoyé à une prochaine réunion. La séance est levée à une heure. Le Secrétaire-Général, G. Boninier. SÉANCE DU 4 MARS 1884 La séance est ouverte à sept heures trois quarts, sous la présidence de M. d'Espinay, président. Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté. Dans le dépouillement de la correspondance, M. le Pré- sident signale : 1° une circulaire de la Société d'agriculture de Boulogne-sur-Mer, relative à