: Je | L | ru , Drx ) ; , _ LE ‘ * . « Dre : V'et « ” Q : - Ê : à 0 : af | d . + we br È End : . i F* x | « . M A mn AA L LE" »ù J r ÿs 4 : v à * 3 L Le L E1 ni - Eu Pa + CN . En ” * CR , 0 È er . + 14 vw = 0 « if « d PV" F u x] 1 ' v L es + LR 'eA œ@ )É Nr on F Caen ten ane à DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE! DES SCIENCES, L& “DE L'AGRICULTURE ET DES ARTS, DE LILLE. + ANNÉE 1851. LILLE, CHEZ HORS LES LIBRAIRES, Ruts je Rice . x. CHEZ DERACHE | RUE DU BOULOY, N° 47, Au fie 5 | Ron = | MEMOIRES SOCIÉTÉ NATIONALE DES SCIENCES, DE L'AGRICULTURE ET DES ARTS, BE EEFLEK. LILLE, IMP. DE L, DANEL, MEMOIRES SOCIÉTÉ NATIONALE DES SCIENCES, DE L'AGRICULTURE ET DES ARTS, de Lille. ANNÉE 1851. RSS FE { # &= Pons SCTA 1SAY os tal At LELLE. CHEZ TOUS LES LIBRAIRES. PARIS, CHEZ DERACHE, RUE DU BOULOY, N.° 17, AU i.r. 1852. … ) A ; ! 1: à \ Ê 5 à H D: 2h à ss EXPÉRIENCES ET OBSERVATIONS SUR LE RÉ DE LA GAMME, Par M. DELEZENNE, Membre résidant. Par des considérations qui seront exposées plus loin , j'ai eu lieu de soupconner que l'intervalle de l’ut au ré, dans la gamme naturelle, est d'un ton mineur {+ et non d'un ton majeur+, ou, en d'autres termes, que le ré de la gamme d'ut est la quinte grave du {a et non la quinte aiguë du so/. L'expérience est venue confirmer cette prévision. Elle a été faite avec le concours de M. et M.re Edouard Français, et de M. Jules Français. On a d’abord accordé un violoncelle à la satisfaction de tous ; mais, comme l’archet donne toujours des sons trop intenses pour des expériences délicates, on a vérifié ou perfectionné l'accord de la manière suivante: Du bout du doigt, on a fait légèrement vibrer Ja quatrième corde ut, dont l’un de nous chan- tait l'unisson ut, ut, ut. que jugeaient les trois autres auditeurs ; alors il chantait ut, mi, sol, sol, sol. , etce sol était immé- ‘ diatement comparé au sol à vide de la troisième corde. L’unisson étant exact, on en concluait que la troisième corde était bien à la quinte de la quatrième. On s’est assuré de la même manière que la seconde corde ré, sonnait exactement la quinte de la troisième. A cet effet, on chantait ut, at, à l'unisson de la troisième corde à vide, puis on chantait ut, mi, sol, et l'on comparaît ce dernier son à celui de la deuxième corde à vide. Enfin , on s'assurait de même que la chanterelle à vide était bien à la quinte aiguë de la seconde corde. 2) Voici, maintenant, comment à été faite l'expérience qui vérifie ma conjecture. On à chanté ut à l'octave aiguë de la quatrième corde; de cet u on est passé au ré, que l’on a de suite comparé au son à vide de la deuxième corde; ce dernier son s’est trouvé sensiblement plus aigu que le ré chanté. Chacun a répété l’expé- ricnce à son tour et à plusieurs reprises. Avant chaque essai on vérifiait l'accord du violoncelle, car l'expérience ne réussit plus quand l'accord s'est altéré par une cause quelconque. J'ai fait voir, en 1827, (1) que le {a de la gamme d’ut chantée est plus grave que celui donné par la chanterelle du violoncelle accordé par quintes. On a profité de la circonstance pour vérifier de nouveau ce fait important. On a chanté l’octave de l’ut, qua- trième corde à vide. Partant de cet ut, on a chanté avec tout le soin possible: ut, ré, mi, fa, sol, la, la, la... Ce la s’est trouvé un peu plus grave que celui de la chanterelle; en passant , on vérifiait, sur la troisième corde, le so/ chanté, et l’on recommençait pour peu que ces deux so/s ne fussent pas identiques. Ou bien encore, on descend la gamme en chantant : ut, si, la, la..…., et ce la est plus grave que celui de la chanterelle à vide. Ces expériences doivent être faites avec patience et attention sur des sons faibles excités du bout du doigt sur les cordes, et à un ou deux décimètres du sillet. Il faut soigneusement éviter d’exciter les sons par le milieu de la corde, car j'ai fait voir, en 1827, (V. N.) qu'on n'obtient aucun son distinct en poussant l’archet sur le milieu d’une corde (2;. (1) Quand j'aurai à renvoyer le lecteur à diverses notices, je désignerai par (V. N.) celle de 1827, sur Les valeurs numériques des notes de la gamme; par (P. FE.) celle de 1848, sur les principes fondamentaux de la musique, et par (C. V.) celle de 1850, sur la corde vibrante, (2) M. Duhamel, de l’Académie des sciences , a expliqué et varié ce fait dès qu’il en a eu connaissance S'il fait mouvoir dans le même sens deux archets agissant sur deux points à égales distances du milieu de la corde, il n’a aucun son; mais le son se produit net si les deux archets se meuvent en sens contraire. (3. Je rapporterai ici une autre expérience que nous avons faite et qui montre combien les cordes en boyau, si bien choisies qu'elles soient, sont impropres à donner des sons précis malgré toute l’ha- bilité de l’exécutant. L'accord du violoncelle étant vérifié, on pousse deux cordes voisines sur la touche, à l'aide d’une petite planchette (un crayon peut suffire) dont le bord est dirigé perpen- diculairement aux cordes. Pour certains points où l’on place la plancheite, l'accord de quinte subsiste, soit qu'on l'excite avec les doigts, soit qu'on se serve de l’archet. Pour certains autres points, l'accord écorche les oreilles tant il est défectueux. Pour l'obtenir alors, il faut incliner la planchette, ce qui met en vibra- tion deux cordes inégales. La différence des longueurs peut s'élever à plus d'un centimètre. Ce fait, et les autres causes d'erreurs que j'ai signalées dans mon opuscule sur la corde vibrante , prouve jusqu'a l'évidence qu':t est de toute impossibilité de faire des expériences précises sur les cordes en boyau d’un instrument quel- conque dès que le doigté intervient. Aussi, dans les expériences qui précédent on n’a jamais opéré que sur des cordes à vide. L'expérience faite sur le violoncelle et qui prouve que le ré quinte du so/ est plus aigu que le ré de la gamme naturelle d’ur, à été répétée avec MM. Bachy. La deuxième corde, le ré, variait souvent. Quand l'accord se maintenait, l'expérience réussissait. Quand l'expérience manquait, on reconnaissait que le ré avait baissé. L'expérience a été faite ensuite, avec bien plus de précision, sur mon sonomètre (C. V.). J'ai divisé la très-fine corde N° 3 d'un mètre juste de longueur, en deux parties 473,7 et 526,3 dans le rapport de 9 à 10. Je l'ai aussi divisée en deux parties 70,6 et 529,4 dans le rapport de 8 à 9, et opérant comme on l'a fait (C. V.) pour prouver que le mi de la gamme dut est + et non ï:» j'ai été convaincu que le ré? est trop aigu , tandis que le ré 4 est très-satisfaisant. On opère plus commodément avec deux curseurs qui divisent la corde en trois parties inversement { À ) proportionnelles aux nombres 1, ‘ et ?; ces parties sont 358,57 pour l'ut; 322,71 pour le ré 4 et 318,72 pour le ré +. Par cette méthode on a l'avantage d'opérer sur des sons plus aigus et de comparer immédiatement les deux ré à un même ut. L'expérience a élé faite et refaite vingt fois avec les diverses personnes que je vais citer en rapportant brièvement le jugement qu'elles ont porté. Chaque fois que M. Edouard Français, ou M. Jules Français, déclarait juste le ré comparé à l’ut, c'était le ré {? que je faisais entendre, et toujours le ré ? a été jugé trop aigu. Même résultat avec M. Cazeneuve. Après quelques essais infructueux, M. Charles Bachy, a trouvé trop aigu le ré? et bonle ré ©. L'expérience plusieurs fois reprise l’a fait persister dans ce jugement. Il a également trouvé trop aigu le mic — À et juste le mi — ‘: il en à été de même avec M. Cazeneuve, M. Danel a l'oreille fort délicate; il a bien voulu faire avec moi ies expériences de vérification. Le ré + lui a toujours paru trop aigu, même lorsque, par un faux avertissement, je le lui pré- sentais comme devant être juste. Le ré lui a paru quelquefois tant soit peu grave; la différence s'élève à peine à un dixième de comma. Au moment de faire les expériences suivantes, M. Danel a cru devoir m’avertir que depuis son enfance , les sons du piano _ze sont tellement incrustés dans son oreille, et ceux de son violon abandonné si bien effacés, qu'il craignait, malgré toute sa bonne volonté, de pencher plutôt vers l'intervalle ut, ré de son piano, que vers l'intervalle naturel. M. Danel sacrifie généreusement ses loisirs au progrès des études à l’Académie de musique dont il est l’un des plus zélés administrateurs. Il se charge même d'une classe de chant; par conséquent, il chante souvent pour guider les élèves, et si, alors, il n'intervient aucun instrument, la nature doitreprendreses droits : il doit chanter juste. Or, rien n'influence l'oreille dans les expériences sur mon sonomètre, et avec de la volonté on peut écarter le souvenir de l'intervalle trop aigu st rédu piano tempéré. Cette réflexion et le résultat des expé- (5) riences précédentes, m'ont fait insister auprès de M. Danel, pour qu'il cherchât de lui-même, sans ma participation, et par une série de tâtonnements, la position du curseur qui donne l’ut d'un côté de la corde et le ré de l’autre côté. Quand il était satisfait, il lisait le chiffre, invisible jusque là ; je vérifiais cette lecture, et alors seulement j'écrivais le nombre obtenu pour le ré de la gamme naturelle. Ensuite, je déplacçais le curseur au hasard, tantôt à droite, tantôt à gauche, et les tâtonnements recom- mençaient. Voici les nombres successivement obtenus par M. Danel opérant seul : 473,7 473,0 473,3 473,9 473,4 472,8 472,8 472,5 Chaque essai exige de 10 à 15 minutes d'attention soutenue sans distraction et dans le plus profond silence. Quand on en a fait trois ou quatre, l'oreille fatiguée perd quelque chose de sa sûreté et demande du repos. M. Danel se plaignait de cette fatigue tout en faisant le quatrième essai qui a donné 473,5. Cela suffit pour expliquer les anomalies que présentent les trois derniers nombres. Une autre circonstance très-grave est venue compro- mettre l'exactitude de ces trois derniers nombres. M. Julien Lefebvre, venant me visiter, s’est un peu mêlé aux opérations; on causait, M. Danel était distrait, il se hâtait.… : les nombres ont dû s’en ressentir. On a remis le travail à un autre jour; mais on a mis la circonstance à profit pour soumettre les deux ré au jugement de M. Julien Lefebvre. Il a jugé trop aigu le ré ? et bon le ré 22. M. Lefebvre a l'oreille exercée: il joue du violon. Les expériences reprises, sans distraction, par M. Danel, ont fourni les nombres suivants : (6) 473,4 473,3 473,4 473,8 473,6 478,4 473,5 478,5 D'après les causes de distraction qui ont troublé les trois der- niers essais de la première série, je dois évidemment écarter les trois derniers nombres de cette série. Les treize autres conduisent a l'équation 6 10002 EE ; 13 te æ ES Re = NT of d'où l'on tire x = 0°, 07316...., ce qui, ne laisse aucun doute sur la vraie valeur + du ré de la gamme chantée, bien que ce ré, dissonance d’ut, “fût d'une intonation plus difficile et moms sûre que la consonnance mé ou sol. Si l’on calcule avec le nombre 473,0, le plus défavorable des treize ci-dessus, on trouve un ré plus aigu de 22 centièmes de comma que le ré &. Si l'on veut RAR faire usage , sans exclusion, des seize expériences, on trouve un ré plus aigu de 12 centièmes de comma que le ré - Lt O2 > œ € Le) LE & 19 =) =7) 18,871999 1 [= | à | — . . : 9 | — | { I ES 39 ; © QI x . . . | wi Di . . . | 33,948709 16) 46,516261 || 43,030130 [2 | Q ©} es = Co = | Î © |o ais | 5 ‘ y ar | PESTE TEEN So Se PÉTEX LE S en œ | VALEURS 15,585867 11,299735 | 8,013604 | 3.727472 55,239022 | 28,353420 24,067288 20,781156 | 16,495024 13,208893 8,922761 37,834841 29,262577 25,976445 21,690313 18,104182 38.743998 34.457866 31,17173À 2 He XI = 2 26,885602 14 ) Toute note dont la valeur numérique est comprise entre { et 2 appartient à la première gamme montante, à la gamme qui commence par ut = 1 et finit par si = *. L'ut octave , ou 2, commence la seconde gamme montante et toute note dont la valeur est comprise entre 2 et 4, appartient à cette deuxième gamme montante. Par exemple, la note dont la valeur est 2 x + est un /a qui appartient à la deuxième gamme. Convenons de représenter cette note par 2{a, le chiffre 2 rappelant que la note la appartient à la deuxième gamme. Si une note appartient à la troisième gamme , à la quatrième, à la cinquième..., elle aura devant son nom le chiffre 3, ou 4, ou 5... Ainsi, 7ré indiquera un ré qui appartient à la septième gamme: ce sera une note plus aiguë que Tut, mais plus grave que Suf, car S8ut commence la huitième gamme montante. Il est inutile d'écrire le chiffre { vis à-vis le nom d’une note de la première gamme; ainsi, 1/a est la même chose que fa, et appartient à la première gamme : c'est une note plus aiguë que l’ut de départ, et plus grave que 2 ut qui commence la deuxième gamme. Les calculs d’acoustique musicale sont souvent longs et com- pliqués quand on veut les faire par les valeurs exprimées en fractions ordinaires. Ils sont, au contraire, rapides et d'une extrême facilité quand on se sert des valeurs exprimées en commas. En conséquence , nos calculs seront faits par logarithmes, c'est-à- dire sur les valeurs en commas des notes que nous aurons à combiner. Maintenant, je répète, dans le langage que nous venons d'adopter, ce que j'ai dit tout-à-l'heure : Toute note dont le logarithme est comprisentre 0 et 55,797682 appartient à la première gamme montante. Ce nombre 55,797682, ou 55 commas et ‘/:, est le logarithme de l'ut octave aiguë de l'ut zéro de départ. Il commence la deuxième gamme montante. Le nombre de commas de l'ut qui commence la troisième gamme est double de 55,797682 , c'est donc 111,595364 et toute note qui aura pour valeur en commas un nombre compris entre (15) 55,797682 et 111,595364, appartiendra de fait à la deuxième gamme. Pour conserver le souvenir de cette circonstance , nous ferons comme tout-à-l'heure , nous ferons précéder du chiffre 2 le nom de cette note. Formons le TABLEAU DES UT ci-dessous : 0,060000 ... ul. 59:191082 !.. 2; ul. AP SOS SCAN ES ul: 467,393047 ... 4 ut. LE LU FE C EN TE 278,988411 ... 6 ut. 334,786093 ... 7 ul. 390:583716 ... 18 vt. AA6,3944887:, . ! 9 ut. 502,179140 :... 10 ut. 557,97682% ... Al ut. ete. elc. On comprend de suite que toute note dont la valeur en commas est comprise entre 334,786093 et 390,583776 , par exemple, est plus aiguë que Tut et plus grave que 8ut ; cette note appartient donc à la septième gamme montante qui commence par 7ut. Si c'est un so/, on devra écrire 7so. Veut-on savcir maintenant quelle note est représentée par 190,928151 ? On voit tout d'abord , par le tableau des ut, que celte note appartient à la quatrième gamme montante , puisque sa valeur est comprise entre celle de 4ut et celle de 5ut Quelle qu'elle soit, il y en à une du même nom et à la même place dans chaque gamme, et partout elle est à la même distance au-dessus de l’ut qui commence la gamme où elle est. Si done on retranche fut où 167,393047 de 190,938151, on aura 23,53510% pour l'intervalle de l'ur de départ à la note cherchée dans la première gamme. Je cherche ce nombre parmi ceux de la table des valeurs; (16) je trouve 25,535105 vis-à-vis de mi double dièse, donc la note cherchée, commune à toutes les gammes , est mi* abaissé des deux commas, c’est mi’... Je sais, d’ailleurs, que Ja note cher- chée appartient à la quatrième gamme ; c'est donc, en définitive, A mis. On voit par ces détails qu'une note étant donnée par sa va leur, il faut retrancher celle de l’ut immédiatement inférieur chercher le reste dans la table des valeurs ; à côté on trouvera le nom de la note. En avant de ce nom on écrira le numéro de la gamme à laquelle la note appartient. On demande la valeur en commas, ou le logarithme acousti- que de la note 6 /a,,,*. A côté de la,,,, dans la table des valeurs, je trouve 29,262517; donc /a,,,* à pour valeur 31,262577. Il n'y a plus qu'à ajouter la valeur de Gut ou 278,988411, la somme 310,25088 sera la réponse. Avant de conclure qu'un résultat obtenu ne se trouve pas dans la TABLE DES VALEURS, on l’augmentera de 55,797682 et l'on cherchera la somme parmi les nombres’de la table qui dépassent 55,797682. Un résultat n’est qu'approché et n’est pas censé dans la table S'il y a une différence de plus d’une unité sur le troisième chiffre décimal. | x . Un musicien qui veut répondre à tout sans rien calculer serait à coup sûr fort embarrassé s’il avait à dire quelles sont eæacte- ment les notes successives par lesquelles on passe en partant d'ut et en s’élevant continuellement d’une sixte majeure. C'est l'affaire d'un instant pour le calculateur. On ajoute continuellement à elle-même la valeur 41,120972 de.la sixte majeure. Dans le ta- bleau suivant on n'a poussé l'opération, dans la première colonne , que jusqu'à dix. Ces nombres sont les valeurs des notes demandées. (17) Progression ascendante por intervalles successifs de sirte majeure : 41,120972 | la la S,241966 | 26444262 | 9 fe, fa 123,362916 | 11,767552 3 ré*, ré 164,483888 | 52,888524 3 sit, si* 205,604860 | 38,211814 4 sol“ Ja, 246,725832 | 23,535104 5 mi, fa 287,846804 | 8,858394 6 ut. ré 328,967776 | 49,979366 6 las. si 370,088748 | 35,302656. | 7fan sol® 411,209720 | 20.625046 | 6 ré, ia, On opère sur les nombres de la première colonne comme nous l'avons dit, et comme nous allons le faire pour un seul, le sep- tième, par exemple. J'en retranche la valeur de Gut , €t le reste 8,858394 , inscrit dans la deuxième colonne, est cherché dans la table des valeurs. On trouve .11,858396 vis-à-vis de ut. La note cherchée est donc ut *** abaissé de trois commas , c'est ut. Or, d’après le nombre 287,846804, cette note est comprise entre Gut et7ut. C'est donc Guts*.. comme on l'a écrit dans la troisième colonne. Les notes de cette colonne sont d’une exécution presque impos- sible, même en les ramenant dans Ja première gamme. J'ai mis dans une quatrième colonne les notes praticables qui approchent le plus des véritables descendues dans la première gamme. On arrive au contraire à des notes usitées et très simples pour réponse à la question suivante. Par quelles notes passe-t-on suc- 2 (18) cessivement en s'élevant d'un demi-ton au-dessus d’ut, puis d'un ton mineur au-dessus du résultat; puis d’un ton majeur au-des- sus du résultat ; puis d’une tierce mineure, d'une tierce majeure, d'une quarte, d’une quinte, d’une sixte mineure, d’une sixte majeure et enfin d’une septième? Les notes successives de la ré- ponse sont : ré, mi fa la ut 2fa Sut 3la 4fa 5mi Le jeune lecteur peu exercé fera bien d'exécuter les calculs qui conduisent à ces notes ; il sera alors en état de retrouver, aussi par le calcul, toutes les notes insérées dans le tableau suivant : Ca. { 19 a 94 8 Ad s "El L is 8 CAL PA ein 9 "Fagbl 9 sv] Y "ls £ #:[0S & 59 € «LL G «BJ € IS EI 8. £ HE 5 *ano{vu “aurrdos due 1994 sb! 9 » 1e} à v291 9 »TU] 9! 280$ 7 c) ol G 17 cu G ot} Ÿ 1€ç0s | 1 € "Is el qu È "oi g) IG sel ra a94 G ‘el 190$ ç be g € Fe à “aumb 2944 21 vs p | 108 € PQ “sc Pi 40 6 : CE ; 1] Y RTLLUE e 2ç {UT Ç ns | an 6 | afin "0S £| ee S | açttel "ous et) | 0," G Rp) ol | 0691 G SU G elS à VIS ss | #[0S 21108 b] vu o'[U £ i £ ÿ S 9 “aanofeur *2AnaUTUu “yaënb ; | 20121} 20121 8 6 ‘anoleur apuo9ses. : ep sJissanons sayynauoqur 40d ayunpuaosn uorssaaboug St & | el & MOT & 91 & at eL 2 AUS 900 1s ss 20 BI Ye] 2, [0S 1£1os DAT 1er °Eux Wu a 94 6 æ oI 97 “amour |, apuoses | "MOI EUSP (20) Jusqu'ici nous n’avops considéré que des gammes montantes. Les gammes descendantes se traitent à peu près de la même ma- nière; il y a seulement des précautions à prendre, une convention à faire, pour éviter la confusion. Parlons d’abord des ut successifs au-dessous de l’ut de départ. On les distinguera des ut-ascendants par un signe quelconque. Ce qu'il y a de plus simple c’est un trait, le signe — mis en avant. Ainsi, en descendant d’octave en octave, on écrira — 2 ut, — ut, — Aut, etc., et on prononcera : moins 2ut, moins 3ut, etc. Les valeurs numériques en commas restent également les mêmes, et l'on écrit — 55,797682 pour représenter — 2ut, c'est-à-dire l'ut qui commence la deuxième gamme descendante. On écrit de même — 111,595364 pour la valeur en commas de — Jut, de l'ut qui commence la troisième gamme descendante, et ainsi de suite. Les notes comprises entre les ut de ces gammes et les valeurs diverses des notes sont également précédées du signe — , toujours pour éviter la confusion. Proposons-nous de trouver la note dont la valeur en commas est — 195,837306. Le signe — m'annonce que la note appartient à l'une des gammes descendantes. Le chiffre — 195, compris entre les valeurs de — 4ut et — but, indique que la note cher- chée appartient à la quatrième gamme, celle qui, en descen- dant depuis l’ut de départ, commence par — 4 ut. Remarquons encore ici que la note à découvrir, quelle qu'elle soit, a sa pareille, je veux dire son homonyme, dans toutes les gammes montantes ou descendantes. Elle est dans la première gamme montante autant au-dessus de l’ut de départ qu'elle est, en montant, au-dessus de — 5ut dans la quatrième gamme des- cendante, Donc, pour avoir sa valeur dans la première gamme montante, il n’y a qu'à prendre la différence entre — 223,190728 pris dans le tableau des ut et — 195,837306. C'est — 27,353423 qui, dans la table des valeurs, répond à so! ;£. La note cherchée est donc — sol Le. On opère de même dans tous les cas pareils. Par conséquent, (21) pour trouver la note représentée par un nombre précédé du signe —, il faut retrancher ce nombre de celui immédiatement supérieur dans le tableau des ut. Le reste cherché dans la table des valeurs fera trouver la note qu’on précèdera du numéro de la gamme et du signe —. Proposons nous maintenant de trouver en commas la valeur de la note — 8ré**€, La valeur cherchée sera comprise entre celle — 390,583776 de — But et celle — 446,381458 de — Qut. Dans la première gamme montante le ré**t à pour valeur 19,053685. Or, ce ré*cc est autant au-dessus d'ut que — 8ré*® est, en montant, au-dessus de — Qut, ou de — 4%6,381458. Donc en diminuant — 446,381458 de 19,053685 on aura — 427,327773 pour la valeur de — 8ré**e. Après ce qui a été dit, il suffira d'un exemple sur les gammes descendantes. On demande quelles sont les notes successives qu’on obtient en descendant d’abord d’une tierce mineure au-dessous d'ut, puis d'une tierce majeure au-dessous du résultat, puis, et continuellement, d’une tierce mineure, d’une tierce majeure, etc. A la valeur de la tierce mineure on ajoute celle de la tierce ma- jeure, puis, au résultat, celle de la tierce mineure, etc. Les sommes successives forment la première colonne du tableau ci-dessous : — 14,676710 — 44,1420972. : — Ja _— 32,639552 — 23,158130 — fa — 47,316261 — 8,481421 sv véé — 65,279103 —_ 46.316261 Le di pis — 79,955812 — 31,639552 — 2 sol, — 97,918654 — 13,676710 — 9 mi, — 112,595364 — 54,797683 ST — 130,558206 — 36,834841 01. — 145,234916 — 92,158131 TN — 163,197758 — 4195289 — 3ré,. etc., etc., etc. (23) Les nombres de cette première colonne (qu'on peut prolonger indéfiniment), sont retranchés de ceux immédiatement plus élevés dans le tableau des ut. Les restes, formant la deuxième colonne, sont cherchés dans la table des valeurs, et à côté on trouve les noms des notes inscrits dans la troisième colonne. Il n’y a plus qu'à faire précéder ces noms du numéro de la gamme et du signe —. Il me reste à exposer les considérations de symétrie ct de régu- larité qui m'ont fait douter de la valeur © du ré de la gamme chantée. Je les donne avec défiance, sous toute réserve et pour ce qu'elles valent. Si on les désapprouve, elles conserveront, à mes yeux du moins, le mérite de m'avoir conduit par hasard à un résultat experimental de quelque utilité scientifique. En adoptant le ré ? on a ut ré mi FE NE la CHARTE Valeurs : Î Le 2 4 td e 45 2 8 4 3 2 3 8 Intervalles : — _ 2 en d'où il résulte que les deux tétracordes ut ré mi fa sol” ‘la 7 si ut ne sont pas égaux parce que l'intervalle ? de l’ut au ré est d'un comma plus élevé que l'intervalle correspondant 4 du so/ au /a, et que l'intervalle 2 du ré au mi est d’un comma plus grave que l'intervalle correspondant # du la au si. Les notes de cette gamme peuvent néanmoins être disposées en une suite de tierces (#3) exactes , alternativement majeures et mineures : fa la ut mi sol si ré. et fournissent cinq accords parfaits dont trois majeurs et deux mineurs. Avec le ré, tout est symétrique, les deux tétracordes sont égaux , et les notes ré fa la ut mi sol si présentent une suite de tierces alternativement mineures et ma- jeures. Cette gamme fournit également cinq accords parfaits. mais trois mineurs et deux majeurs. Avec le ré ? la gamme mineure relative n’est pas formée des notes de la gamme majeure; il faut, comme je l'ai dit (PF), qu'il y entre un ré #, tandis qu'avec ce dernier ré les deux gammes relatives, et la gamme relative du mode mixte de Blain ville, sont exactement composées des mêmes notes rangées seu lement dans un ordre diatonique différent, ce qui corrobore les idées de régularité et de simplicité qui m'ont séduit. Si l'on fait majeures les sixième et septième notes de la gamme montante du mode mixte de Blainville, on aura : mi fa sol la SPA IUI NZ TE" 2 mi F £ G 45 9" ce Valeurs : Re. + 3 del. 13 ge Pal Ft 4 3 2 3 8 24 64 4 16 9 10 9 10 9 16 Intervalles : — — — — —— gamme symétrique puisque les intervalles également éloignés du milieu sont égaux; par suite les deux tétracordes sont égaux, mais renversés l’un de l’autre. Cependant ces idées de symétrie sont en pleine contradiction avec la série des intervalles entre les notes successives de la (24) gamme mixte et de la gamme mineure ascendante ou descen- dante; c'est ce que prouvent les lignes ci-dessous : Jut 2ré 2mi n _. Notes: Mi fa sol la luterralles : — — — = += ee Le Notes : la si ut ré pi fa“ sol“ 2 Ja Intervailes : —_ - sa LL. TA ses 8 15 9 8 8 9 Notes : la si ut FRE M 1 ON EE VORMEE 2 la 9 16 10 9 16 9 10 Intervalles : = — —— a. = = ss 8 13 9 8 15 8 9 L'irrégularité est flagrante et fournit une objection contre mes idées de symétrie. Cette objection est peu sérieuse, car il fau- drait que tous les intervalles fussent égaux pour que la symétrie se conservat en disposant les notes de la gamme dans un ordre ou mode quelconque. Néanmoins, si cette objection ne s'était pas tardivement présentée, j'aurais peut-être écarté la pensée de consulter l'expérience pour apprécier la valeur de mon vague soupcon sur le ré +. De ce que les notes des gammes majeure, mineure et mixte relatives sont précisément les mêmes , il devient inutile de former le tableau des gammes en mode mineur et en mode mixte. L'une des trois toniques étant donnée , on trouve facilement les deux autres parce qu'ensemble elles forment deux tierces consé- cutives, comme ré, fa, la ; la, ut, mi; mi, sol, si. Dans ce qui va suivre, je ferai partout ré = et par suite ris à ré La tonique ut qui occupe le milieu est suivie de deux de ses consonnances : la tierce majeure mi et la quinte so. Cette toni- que wt est également précédée de deux de ses consonnances : la tierce mineure grave La et la quinte grave fa. Cette série symétrique de cinq notes ne présente qu'un frag- ment de la gamme d’ut, il lui manque deux sons pour compléter cette gamme. Pour découvrir ces deux sons j'essaie de prolonger de deux tierces la série ci-dessus ; cela me conduit à A MA MEU MT SONESRTeS ce qui introduit deux dissonances d'ut ; mais l’une, le #2, est la tierce majeure du so/, et l’autre, le ré°, la quinte; ce réf d’ailleurs consonne avec se dont il est la tierce mineure; mais ce re est trop aigu d'un comma pour.appartenir à la gamme d’ut. J'essaie alors de prolonger la série par la gauche, ce qui donne la série des sons : si, ré fa la ut mi sol. qui n'appartiennent pas tous à la gamme d’ut, ni même à la gamme de fa, car pour celle-ci le sol serait trop élevé d’un comma. D'ailleurs en prolongeant ainsi la série soit à droite soit à gau- che, on détruit la symétrie : la tonique ut n’est plus au milieu du groupe. Mais si la série n’est prolongée que d'un son à droite et d’un son à gauche, la tonique reste au milieu et j'ai les sons de la gamme , savoir : (2% ) ré fa la ut mi sol si. d'où il suit que : Une gamme en mode majeur ou mineur ou mixte est une suite de sons qu'on peut ranger en une série de tierces alternativement mineures et majeures. La tonique de la gamme majeure occupe le milieu de la série. I faut reculer d'un rang vers la gauche pour avoir la tonique de la gamme mineure et d'un rang vers la droite pour avoir la toni- que de la gamme en mode mixte. C'est ce recul qui trouble la symétrie dans les intervalles entre les notes successives de la gamme mineure et de la gamme mixte. Je reprends la série des tierces : OT CAR 2 TO CAN 0 D < u et je la prolonge indéfiniment vers la droite en suivant la marche tracée dans les exemples que j'ai donnés. Le trentième nombre de la série, par exemple, est 489,593265; j'en retranche le neuvième nombre du tableau des ut et je cher- che le reste 43,211809 dans la table des valeurs. Je trouve 40,211815 à côté du so!*; donc la note correspondante à 43,211815 est plus élevée de trois commas que sol**, elle est sol**c, Donc la trentième note de la série à droite de l’ut, est 9sol**, On trouve de la même manière toutes les notes de la série indéfinie. Maintenant, si je prends sept notes consécutives dans cette série, en commençant par deux notes formant une tierce i- neure, où dont les valeurs en commas diffèrent de 14,676710, elles appartiendront nécessairement à une gamme. Je prends, par exemple, entre la vingtième et la vingt-septième, les sept notes consécutives ramenées à la première gamme montante, ut::'e mise sol:-"€ SE re2tc fas:ecc Jastece [27 ) elles appartiennent à la gamme majeure de sit, à la gamme mineure relative de sol**® et à la gamme mixte relative de ré“*cc. Ces notes conserveront les rapports qui existent entr'elles, si on les abaisse de trois commas; elles deviennent alors ut, mis. sol Si ‘ré ‘fa la** ou si ut“, ré”. mi. fa” sol** an C'est la gamme de si* telle qu’on la retrouve dans le tableau des gammes, page 10. De cette série indéfiniment prolongée à droite de l’ut, on peut extraire toutes les gammes contenant des dièses. Maintenant, prolongeons la série à gauche de l’ut. Le trente- troisième nombre, par exemple, est — 536,909526. En le retran- chant de — 557,976822 pris dans le tableau des ut, il reste —91 ,067296. Or, vis-à-vis de soi, on trouve, dans le tableau des valeurs, le nombre 24,067288 ; donc la trente-troisième note à gauche de l'ut est un si double bémol abaissé de trois commas : c'est — 10 sisccc- Les sept notes comprises entre la douzième et la vingtième , par exemple, sont : Sole Sies Tôvces die Tape Ulec Mise qu'on peut élever d’un comma sans changer leurs relations ; on a ainsi : dl she 0 pére fa L'IEC cütie mi, c'est la gamme de fa, telle qu'on la retrouve dans le tableau des gammes. Cette série indéfime de notes à gauche de l’ut fournit toutes les gammes dans lesquelles il entre des bémols. Toutes les gammes majeures ou mineures ou mixtes, ont pour type la série ré. Ffausla aff -mIR Sols) Ce sont les notes usitées en uf majeur dans le chant à une seule voix, dans la mélodie. Pour l'harmonie, il faut y joindre leurs consonnances. Le tableau suivant contient ces consonnances et celles des mêmes notes diésées et bémolisées. Tierce Tierce Sixte Sixte Does, | mineure, | majeure. PATES A tape mineure. | majeure. Ê À 4 LE Léa 5 n 3 | 3 SR | | ut mi, mi fa sol but la, | la | ré fa | fa’, sok la us Lu nBle | mi sol | sol la si | 2ut js 2ut” | Ë fa la, | la si, 2ut 2ré, | 2ré sol si,° si Jut 2réc 2mi, ° | 2mi la 2ut | 2nt* 2ré 2mi 9fa 2fa', si 2réc | dré* 2mi 2fa’ 2sol 2sol° ut: mi | [LA fan sol: la la ré fa | fa”: sol* la* si | si mi’ sol*c | sol? la SI 2utc | 2ut: fa’ lac | la” si 2uL*c 2réc | 2ré® sol si | si 9ut* 2re? Ami | mi’. la” 2ut*e | 2ut°: 2ré* | 2mi° 2fas | fa*s Î si” | 9ré* | dé 2mix | 2fa* | 20f | 2501: Qut, |2mi, | 2mi, | 2fa, | 201, ai 2la,. ré, fa,° fa sol, la, | Siye | si, mi, | sol, sol. lac Si, dut, | dut fa, | la. Ja Slipe Jut, | AC, | 2rése so}, Si, si, 2ut, 2ré, | 2mi,, | 2mi, la, 9ut, 2ut 2r6, 2mi,° 9fac | 2fa si, 2ré, 2ré 2mi, 2fa 2s0l, | 2sol. (30) Que l'on prolonge la série des tierces aussi loin qu'on voudra à droite et à gauche de l’ut, on ne tombera jamais, à droite, que sur des notes affectées de dièses et élevées d’un nombre exact et entier de commas, et à gauche, que sur des notes affectées de bémols et abaissées d’un nombre entier de commas. On reconnaît ces commas à la seule inspection de la caractéristique des loga- rithmes, parce que j'ai pris pour base du système-le comma # puisé dans la gamme. Les valeurs des notes sont ainsi représen- tées, sans chiffres, par des signes connus, simples et intelligibles. On perdrait ces avantages et du temps, et°il faudrait un calcul ultérieur pour trouver ces commas, si l'on adoptait toute autre base pour système logarithmique. Sans doute, cette base est arbitraire; mais c’est pour cela même qu'il faut la choisir de ma- nière à abréger les calculs, et assez petite d’ailleurs pour qu'elle soit de l'ordre des petites différences qu'on veut apprécier. La base ! me semble remplir les conditions d’un bon choix, puis- qu'elle est appréciable à l'oreille et qu'elle entre dans presque tous les calculs. Elle a en outre cet avantage qu'avec deux chiffres décimaux on tient compte des centièmes de comma, ce qui est une approximation plus que suffisante dans la plupart des cas, tandis que pour arriver au même degré de précision il faudrait un nombre de chiffres décimaux d'autant plus grand que la base serait plus grande. Par exemple, dans-le système dont la base serait 2, il faudrait pousser les calculs jusqu’à six chiffres déci- maux pour tenir compte d’un centième de comma dont la valeur est alors représentée par 0,000017920. Il faudrait dix chiffres décimaux pour résoudre sans erreur les petits problèmes qui nous ont occupés. (31) EXAMEN DE LA THÉORIE MUSICALE DES GRECS. Par M. Alphonse HEEGMANX. Séance du 1.7 août 1851, L'hommage que M. Vincent venait de faire à la Société natio- pale de Lille de son bel ouvrage sur la musique des Grecs (1) a été l’occasion d’un retour à des idées que j'avais émises devant elle, il y a longtemps et d'une manière fort superficielle, sur l'appui que l'antique expérience de ce peuple pouvait prêter à la théorie moderne de la gamme. On m'engagea à les développer en m'aidant du travail de notre savant correspondant. Non seulement M. Vincent apportait de nouveaux matériaux à la discussion , mais il résumait avec une parfaite clarté et une remarquable finesse d'apereus, les notions fournies par les auteurs anciens. Enfin, au moyen d’un instrument ingénieux , reproduisant avec une extrême précision , et, en même temps avec une extrème facilité, les nuances délicates et variées de l’echelle ancienne, il donnait le moyen de juger du rôle de chaque corde dans la mélodie et dans l'harmonie. Les amateurs de musique ont, comme les savants, applaudi à l'œuvre de restauration entreprise par M. Vincent. Qui ne serait désireux, en effst, de voir revivre cet art tel que le comprenait un peuple éminemment doué du génie artistique, un peuple qui nous a laissé d'innombrables chefs-d'œuvre de sculpture et d’ar- chitecture, et qui doit avoir cultivé la musique avec plus de pré- dilection encore, à en juger par l'enthousiasme avec lequel ses auteurs en parlent, les prodiges qu'ils en racontent ; enfin, par (1) Notice et extraits des mauuscrits, ete, publiés par l'Institut, tome 16, Paris , imprimerie nationale , 1847. (32) l'importance que ses magistrats y attachaïent, et la place qu'ils lui réservaient dans l’enseignement public ? La! poésie et la musique furent d’abord inséparables. Le criti- que et le professeur qui oublieraient cette alliance intime, ne nous donneraient qu'une idée fausse de la poésie grecque. Les vers naissaient avec leur mélodie et leur accompagnement. Ils étaient mesurés parce que ceux-ci l'étaient eux-mêmes. Il n'en fautexcepter ni les tragédies d'Eschyle ou de Sophocle, ni l’Iliade ou l'Odyssée. La Iyre du poète n'était pas, comme aujourd'hui, une fiction, et les divisions de ses poèmes étaient de véritables chants. Parvenus seuls jusqu'à nous, comme un corps inanimé, ils peuvent encore paraître admirables à la simple lecture; mais nous ne devons pas oublier qu'ils étaient chantés, ni penser que les Grecs aient montré moins d'aptitude pour la musique que pour la poésie. Ils en avaient approfondi la théorie; car ils nous ônt laissé une douzaine de traités remplis, pour la plupart, de dé- tails techniques et de supputations sur les longueurs des cordes, mais défigurés par d'ignorants copistes, et rendus inintelligibles par la perte des productions musicales contemporaines, et par la différence totale, en apparence du moins, des idées des anciens et des nôtres sur les principes mêmes de l’art. C’est qu'entre les Grecs et nous, l'art avait eu sa métamorphose, sa révolution , amenée peut-être par le perfectionnement mécanique des ins- truments, peut-être aussi par l'invention d'une notation plus facile, permettant de multiplier les notes. A cette révolution, nous avons gagné les accords {que les Grecs soupconnaient à peine ou n’abordaient que timidement) et perdu les quarts de ton, sans même conserver de ceux-ci une idée assez nette pour imaginer l'usage qu'on pouvait faire d’intervalles aussi petits. Trouver le mot de cette espèce d’énigme n’est pas le moins piquant des pro- blèmes qui surgissent naturellement de l'étude du système ancien. Ce système, les Romains l'avaient emprunté des Grecs, avec leurs termes techniques conservés en langue grecque, et jusqu'à (83) leurs traités. Plus tard , cependant, quelques auteurs latins, en petit nombre, se sont occupés de cet art. Boèce et Martianus Ca- pella , que l’on cite quelquefois, sont du 5. siècle de notre ère. En Orient, ce système a duré autant que l'empire grec : les ouvrages de Georges Pachymère et de Manuel Bryenne sont du 13.° et du 14.° siècle. En Occident, la mémorable réforme de Gui Aretin, qui date du 11.° siècle, le plongeait dans l'oubli. avec tous les anciens traités. Disons, en peu de mots, ce qui a éte fait pour les en tirer. Dès 1499, on imprimait à Vicence, Martianus Capella , d'après un manuscrit que Vitalis disait avoir purgé de plus de 2000 fau tes.C'est une espèce d'encyclopédieintitulée De NuptiisPhilolog'æ et Mercurii, et dans laquelle se trouve un livre sur la musique. En 1547, le suisse Loricius, plus connu sous Je nom de Gla- réanus où Glaréan , après avoir donné ses soins à l'impression du traité de musique en même temps que des autres œuvres de Boèce, en composait lui-même un nouveau, intitulé Dodecachor- don, dans lequel il comparait les modes ou tropes anciens aux tons modernes. En 1557, J. Pena , professeur de mathématiques, à Paris, tra- duit l'introduction harmonique d'Euclide. Après lui viennent Zar- lino , auteur d’un ouvrage estimé, que les écrivains modernes citent encore , et Gogavino, traducteur d’Aristoxène , de Ptolé- mée et de plusieurs autres anciens. Mais Vincent Galilée, père du célèbre astronome, et l’antagoniste de Zarlino, a la gloire d’avoir publié les premiers échantillons du chant grec. Ce sont trois hymnes trouvés à la suite d’un traité manuscrit. Il les insère dans un dialogue écrit en italien et imprimé en 1581 à Florence (1. Cette découverte, précieuse pour l’histoire et pour la connaissance des règles de l’art ancien, ne doit pas être envisagée sous le rap- port du mérite de la composition. Nos neveux, dans deux mille ans, ne pourraient guère juger de notre musique de théâtre et de con- cert sur quelques lambeaux de notre chant d'église. En 1644, Boulliaud traduit en latin le traité de musique de (2) Dialogo della musica antica e moderna, Fiorenza 1581, page 97. 3 (34) Théon de Smyrne, avec une partie de ses œuvres mathématiques. En 1650, le père Kircher, savant universel, qu'on est certain de trouver sur sa route dans toute recherche de nature à piquer la curiosité, donne à Rome, sous le titre de Musurgia universalis, deux volumes in-folio, dans lesquels il traite successivement de toutes les parties de l'art. L'auteur, qui ne paraît pas avoir eu connaissance de la découverte de Vincent Galilée, raconte com- ment, visitant un jour la riche bibliothèque du couvent de Saint- Sauveur, près de Messine, en Sicile, il avait remarqué, parmiles manuscrits grecs, un fragment d'ode, le commencement de la première pythique de Pindare, dont chaque vers était surmonté d’une rangée de caractères singuliers, qui, rapprochés du tableau des notes musicales d'Alypius, lui firent reconnaître un véritable chant, avec accompagnement de lyre ou de cithare, et tel peut- être qu'il avait été composé par Pindare lui-même. Kircher joint le fragment et le tableau d’Alypius à son exposé du système musi- cal des Grecs. Deux ans après la publication de cet ouvrage, Mare Meibo- mius, autre savant allemand, fait paraître à Amsterdam une édition de sept auteurs grecs : Alypius, Aristoxène, Euclide, Ni- comaque, Gaudentius, Bacchius l’ancien et Aristide Quintilien ; le tout accompagné d'une version latine. La reine Christine de Suède, à qui le livre était dédié, attire l'auteur en Suède. Mais il ne tarde pas à la quitter, furieux de ce qu'elle l'a rendu la risée de toute sa cour, en l’engageant malicieusement à exécuter devant elle quelques morceaux de cette ancienne musique, dont son im- mense travail facilitait l'étude. Ce malencontreux essai le fit sans doute renoncer à la publication de quelques autres manuscrits grecs, dont il s'était engagé à donner une version latine. Le géomètre anglais Wallis contribue, à son tour, aux progrès de la science, en publiant Ptolémée et Manuel Bryenne. A ces versions et ces premiers commentaires latins, succèdent les dissertations françaises de Burette à l’Académie des inserip- tions et belles-lettres, et une traduction (très-soigneusement et (35 ) très-savamment annotée) d'un dialogue de Plutarque sur la mu- sique, document précieux , surtout en ce: qu'il a trait à l'histoire de cet art, et qu'il combleplusieurs lacunes laissées par les écri- vains dogmatiques ; puis, d’autres ouvrages plus connus des mu- siciens : lé Dictionnaire de musique deJ.-J. Rousseau, l'Essai sur la musique de Laborde; j'ajouterai Ie Voyage du jeune Anacharsis en Grèce, qui est dans toutes les bibliothèques. Mais ces ouvrages sont encore très-Incomplets. Ainsi, par exemple, Rousseau ; un dé ceux qui ont fait le plus pour vulgariser la connaissance du système grec, fait voir ({) en ne donnant, de la notation, que le seul trope lydien, qu'il désespère d'en pouvoir expliquer le: méca- nisme. Il adopte, d'ailleurs, l'opinion de Burette ;'qui avait dit : « ILest étonnant que les anciens, avec’tant d'esprit et dans le » cours de tant de siècles pendant lesquels ils ont cultivé la mu- » sique, n'aient point imagmé quelque voie plus commode et » plus abrégée d'écrire les sons, que celle qui emplovait pour » cela 1620 notes. » Vi : Barthélémi (2), faisant la critique de-ce passage de Burette, réduit à 990 les 1620 notes de celui-ci. C'était bien assez pour éloigner les amateurs; mais Laborde,; dans son avant-propos , reprend vivement Barthélémi, pour avoir contesté le nombre de 1620 notes. Une pareille exagération de la part d'hommes aussi compétents , et qui avaient sous les yeux les tableaux d'Alypius , est inexplicable; car, ne comptant eux-mêmes qu’une soixantaine de caractères différents pour les voix , et autant pour les ins- truments, rien ne les autorisait à en multiplier le nombre en raison de leur répétition dans les différents tropes et les différents genres. Le rôle multiple des notes grecques se retrouve dans notre système musical, où, par exemple , le mé, troisième note du ton de da , est marqué du même signe que le mt, deuxième note du (2) Dictionnaire de musique, au mot notes, (2) Lettre sur [a musique, et Voyage d'Anacharsis, notes sûr le chap. s9, ( 86 ton de ré, etc., sans que ces différentes combinaisons effraient personne. Il est vrai que l'emploi des notes grecques exige une clef, que M. Vincent a trouvée le premier. A la suite des auteurs que je viens de citer, arrivent C. Kalk- brenner (1), le père du compositeur ; Villoteau (2), le musicien de l'expédition d'Egypte; enfin, plusieurs contemporains, qui ont élucidé quelques points de l'histoire musicale , mais dont les ouvrages n'ont pas l'importance des dissertations données sous forme de notes, par M Vincent, à la suite de sa traduction des manuscrits grecs dont j'ai dit que Méibomius avait promis une version latine. Ces manuscrits consistent en deux traités anonymes qui se suivent et une introduction à l’art musical par Baechius l'ancien. Le livre de M. Vincent comprend, en outre, comme pièces justificatives , la traduction (quelquefois accompagnée du texte) de nombreux extraits d'auteurs qu’il serait fort difficile de rassembler : entre autres, des fragments de Pléthon, et d'un auteur qui n'est désigné que par le nom de l’Hagiopolite ; d’un extrait du Traité des Songes, de Synésius ; d’un opuscule de Pé- diasimus ; du commentaire de Psellus sur le Timée de Platon (texte seul); d’autres opuscules de Psellus (texte et traduction); des cestes de Jules l’Africain, où se trouvent des talismans et des recettes magiques, dans la composition desquels entraient des notes de musique, etc. ; enfin, du texte revu et annoté d’un auteur inédit, George Pachymère, que des sommaires placés en tête des chapitres font regretter de ne pas voir accompagné de sa tra- duction. Le traducteur était arrêté par la grosseur du volume imprimé aux frais de l’Académie des Inscriptions, dont cet ou- vrage lui ouvrait les portes : car, jusque là, M. Vincent était plus connu comme géomètre, par ses ouvrages classiques, que comme belléniste. La science des nombres ne lui a, du reste, pas été se (1) Histoire de la musique, Paris, 1804, (2) Recherches sur l'analogie de la musique, ete, Paris, 1807. ( 27 inutile ici. Toute personne qui n'y serait pas versée risquerait de se perdre au milieu des calculs nombreux et quelquefois assez com- pliqués que renferment les traités de musique grecque. C'est que l'art de l'accordeur y est enseigné au moins autant que l'art du chanteur. Leurs auteurs sont tous, ou presque tous, géomètres, et une partie des termes techniques qu'ils emploient se retrouvent dans les éléments d'Euclide. Le nom de Pythagore figurait dans les origines de la musique, comme dans celles de la géométrie, de l’arithmétique et de l'astronomie , qui constituaient avec elle le. corps de doctrine appelé les quatre sciences mathématiques. C'est ce que nous apprennent les anciens, et, en particulier , Platon, dans un passage rapporté par Pachymère. L'ouvrage de M. Vincent forme donc un gros volume rempli de science et d’érudition, auquel le présent opuscule ne peut nulle- ment ressembler. Étranger à la science philologique , je n’en reconnais pas moins tout ce qu'il y a d'utile et souvent de pénible, dans la discussion de la valeur des termes ou dans la révision des textes, cette torture infligée à nos Saumaises par la négligence des copistes. On se doute bien que ceux-ci ont souvent confondu entre elles les notes de musique représentées par des lettres tantôt droites , tantôt couchées, renversées, tronquées, barrées ou accentuées ; qu'ils ont aussi confondu les termes techniques dont la signi- fication leur échappait, ou bien, qu'ils les ont remplacés par les expressions usuelles qui s'en rapprochaiïent le plus. On sait que dans un manuscrit qui se trouve aujourd'hui à la Bibliothèque nationale , 1ls ont entremêlé les vers d’un des fragments antiques, et, avec les vers, les phrases musicales ; alternant celles de la fin avec celles du commencement , et cela, afin de mettre en une seule colonne ce qu'un manuscrit plus ancien présentait en deux. M. Vincent , dans le cours de son travail, a remarqué un trait d'ineptie non moins singulier. Je ne puis résister au désir de le rapporter ici : « À partir du paragraphe XIE, dit-il , à propos du deuxième ( 385) traité anonyme (4), la confusion règne dans les manuserits : notes vocales , notes instrumentales ; syllabes de solmisation, nonis des cordes et des tétracordes ; valeurs numériques ; ete., tout se trouve , pêle-mêle, jeté par fragments plus où moins complets au milieu du discours. Je ne pourrais ; sans entrer dans une foule de détails fastidieux, rendre raison duminutieux travail qu'a exigé la restitution de cette partie du texte, de celle des premiers feuillets, ainsi que la reproduction: des tableaux. Je ferai remarquer seulement , que la cause princi- pale de la confusion qui règne ici, consiste , comme on le reconnaitra aisément, en ce que les divers tableaux donnés par l'auteur auront dû être transportés d'un manuscrit de large format sur un autre plus étroit, qui lui-même aura servi de type. Or, dans le premier manuscrit, les notes vocales et les notes instrumentales étaient disposées régulièrement l’une sur l’autre, et deux par deux , avec leurs syllabes de solmisation , leurs valeurs acoustiques, ete. Pour transerire cet ensemble sur un manuscrit plus étroit, sans détruire la correspondance des diverses espèces de signes, il fallait évidemment faire une ou plusieurs coupures verticales sur l’ensemble ; et, au lieu de cela, qu'a fait le copiste? Il a traité le tout comme il eût fait d’un discours continu , réduisant en une même série, notes vocales, notes instrumentales, signes numériques , ete. » Après le travail de l'éditeur , vient le travail du commentateur. Les auteurs s'expliquent les uns par les’ autres. M. Vincent fait cette comparaison dans des notes fort courtes, au bas des pages : puis, dans des notes supplémentaires de quelque étendue, qui sont de véritables dissertations, dont l’érudition de bon aloi est rendue intelligible pour tous, mais où l’auteur se place cons- tamment au point de vue des Grecs plutôt qu'au nôtre, afin, sans doute, de ne pas céder, sans le vouloir , à des idées préconcues. (1) Page 173. (39) Cette marche didactique convenait à un travail aussi complet que le sien. Pour moi, qui ne prétends faire qu'une revue très- sommaire, je chercherai dans le système grec ce que l'on nous apprend à voir dans Je nôtre ; j'habillerai, si je puis m'exprimer ainsi, l'ancienne musique à la moderne , afin d'en rendre plus évidentes les différences réellement caractéristiques. Enfin, j'ex- poserai les difficultés qui m'’arrêtaient le plus dans cette compa- raison , et sur lesquelles la connaissance des travaux de M. Vin- cent me permet d'émettre aujourd'hui une opinion moins dubi- tative. Tout. le monde sait que notre gamme se compose de sept inter- valles ou de huit notes. dont les extrêmes , entendues simultané- ment, forment la consonnance d'octave , bien connue de l'oreille ; que, partant du son appelé ut ou do, et allant de grave à l'aigu, cette gamme se solfie : do, ré, mi, fa, sol, la, si, do; que ce second do, qui finit la gamme, en commence une autre semblable, à la seule différence qu’elle est plus aiguë; que cette seconde gamme est suivie d’une troisième à l'aigu , et ainsi de suite, dans toute l’étendue de l'échelle musicale, dont l'octave se trouve être ainsi l'élément constitutif. On sait encore généralement que le huitième son, ou l'octave aiguë du premier , en est le premier harmonique, et qu'il s'obtient comme son principal, lui-même, en ne faisant vibrer que la moitié de la corde qui rend le son grave ; enfin, que cette corde moitié moins longue, exécute un nombre double de vibrations dans le même temps, et que c'est à la simplicité du rapport des deux nombres de vibrations qu'est dû le sentiment de la consonnance. Au lieu de composer leur gamme de huit notes, ou de sept inter- valles par octave, les Grecs la composaient de quatre notes, ou trois intervalles , dans l’espace d’une quarte, autre espèce de conson- nance, produite par des longueurs de corde dans le rapport de 3 à 4ou des nombres de vibrations dans le rapport contraire. Ces quatre notes, dont l’ensemble était appelé tétracorde, se solfiaient ta, t6, té, ta, del’aigu au grave, ou fa, té, t6, ta, du grave à l’aigu; mais l'ordre descendant est celui dans lequel tous les traités les rangent. 40 ) Elles se répétaient, comme nos huit , dans toute l'étendue de l’échelle parcourue par le chant, à l'exception de deux cordes, auxquelles on donnait les noms de mèse et de proslambanomène, dont le premier signifie moyenne , et le second ajoutée ou mise au devant. Celles-ci se solfiaient té. Il y avait aussi cette différence entre les tétracordes grecs et nos gammes d'une octave, que les premiers ne se soudaient tous bout à bout , comme font nos octaves, que dans une disposition appelée petit système, ou système des tétracordes conjoints (c'est- à-dire réunis par une note commune) où ces tétracordes étaient au nombre de 3. Dans une autre disposition appelée grand sys- tème, ou système des tétracordes disjoints , lequel en comptait ordinairement 4, ils étaient, malgré leur nom, alternativement réunis bout à bout , et séparés par l'intervalle d’un ton, afin que les notes du 3.° tétracorde fussent respectivement à l’octave de celles du 1.%, et celles du 4.° à l’octave de celles du 2°. Quant à la proslambanomène, on la plaçait en-dehors des tétracordes , à un ton de distance du plus grave. Ainsi, dans cette disposition, l'ensemble des quatre tétracordes formait une double octave, dont la mèse occupait le milieu (1). (1) Voici le détail des cordes de ces deux systèmes : 1.0 Petit système. s,° Grand système ou système parfait. Nète des conjointes , Nète ve des hyperboloï Paranète, id,, Paranète Jpe He ER ue Trite, ou adjointes. ; à: Mèse, Fete NE ‘ ME Es Paranète } des conjointes. Lichanos ou indicatrice ,} ; ; Trite, ‘} Parhypate, des moyennes. Paramèse . Hypate. Mise, Indicatrice , ) le] Indicatrice, | Parbypate , \ DPI Parhypate, des moyennes. Hypate. \ ou fondamentales. Hypate, Indicatrice , Parbypate, Hypate, Proslambanomène, des hypates ou fondamentales, Proslambauomène, (M Le grand système n'était donc, en réalité, que la décomposition de l'échelle en octaves , comme chez nous : seulement, les anciens subdivisaient l'octave en 2 quartes séparées par l'intervalle d’un ton, ou la série de 8 notes en 2 séries de 4. Et, de fait , lorsque nous solfions notre gamme majeure , nous sentons bien que cette série de 8 notes se divise assez naturellement en deux portions semblables. Nous remarquons, de plus, que le chant admet sur la 4.° note (en montant comme en descendant) une espèce de demi- repos , annonçant un repos plus parfait sur la 8.° note (1). Nous (r) La similitude des deux tétracordes , do ré mi fa et sol la si do de notre gamme majeure n'est pas rigoureuse, du moins, si l’on s’en tient aux valeurs acoustiques généralement admises; j'entends celles qui résultent, comme je l'ai déjà dit, de l'assemblage des trois accords parfaits du ton principal, do, et de ses deux relatifs, sulet fa ; ou, ce qui revient au même, de la série suivante : fa La do mi sol si re. Eu effet, prenant 5/4 pour la mesure des tierces majeures, et 6/5 pour celle des tierces mineures de cette série, l’octave étant égale à »/r, on trouve que l'in- tervalle de do à ré est de 9/8, ou d’un ton majeur, et l'intervalle de ré à mi de 10/9, ou d’un ton mineur; tandis que les intervalles correspondants du second tétracorde , c’est-à-dire, ceux de so! à la et de La à si, suivent l'ordre inverse, le ton mineur y précédant le tou majeur: mais que les tétracordes mi fa sol La et si do ré mi de la même gamme sont parfaitement semblables, comme ils l’étaient dans le système grec. On trouve, en outre, que les eonsonnances altérées de la gamme ainsi définie sont la quinte ré la et la tierce mineure ré fa, toutes denx affaiblies d’un comma de 81/80. D'Alembert, aprèsavoir admis cette gamme comme la conséquence de la relation intime du tou principal avec les tons de la dominante et de la sous-dominante (S 38 de ses éléments de musique) la modifie ensuite ($ 55 et r07) pour l'accom- moder aux règles de la basse fondamentale, qu’il expose d'après le système de Rameau. Partant de ce principe ($ 36 et 37) que la basse fondamentale ne peut marcher diatoniquement , ou par degrés conjoints, lorsqu’elle porte des accords parfaits, surtout des accords parfaits majeurs, et cherchant à faire entrer les notes de la gamme majeure ascendante dans une suite d'accords parfaits, il ne peut y parvenir en n’employaut que ceux de do, de so! et de fa. La marche de son harmonie l’oblige d'y joindre l'accord de ré (qu'il fait mineur et qu'il place sous le a) et , de plus, de dédoubler le sc/ de la méme gamme, pour l'accompagner de deux accords différents, de cette manière : Dessus, do ré mi fa sol, sol la si do; Basse fondamentale, do sol do fa do, sol ré soi do, (4) pouvons donc, jusqu'à un certain point , nous expliquer comment, en décomposant l'échelle parcourue par le chant, les anciens sont arrivés à l'intervalle de quarte. Là, n’est pas la difficulté , mais bien dans leurs différentes manières de subdiviser cette quarte. Il yen avait trois principales, qui constituaient ce que l’on appelait les genres, savoir : le diatonique, le chromatique et l'enharmonique. Le genre diatonique voulait (c'est du moins sa définition ordi- naire) un demi-ton au grave et deux tons successifs à l'aigu. 11 donne à la gamme descendante , la même basse, prise à rebours, et lui fait porter , comme ici, des accords parfaits, majeurs ou mineurs suivant la nature des tierces fournies par la gamme à laquelle ils servent d'accompagnement. De ce que le ré remplace le fa , comme basse fondamentale du /a, d’Alembert conclut que celui-ci doit monter d’un comma, c’est-à-dire doit faire une quinte exacte sur ce ré; et il trouve la confirmation de cette opinion dans une harmonie plus complète, ou dans l’emploi d'accords dissonants. L'introduction des dissonances dans l’harmonie a pour objet, nou-seulement d'éviter une cadence ou un repos ; ou d'éloigner l'idée d’un changement de ton, lorsque le repos est attendu sur un autre accord parfait que celui de la tonique, mais encore de lier, par une ou plusieurs notes prolongées on anticipées, deux accords dont la succession ; sans préparation , serait dure ou désagréable. D’Alembert profite de cette ressource, pour débarrasser la gamme ascendante de son s0/ surabondant , eu même temps que pour éloiguer les modulations de fa et de ré. Voici sa nouvelle marche Rabbi us où sont employés 3 accords dissonants, chiffrés d’un 6 ou d’un 7, suivant que la dissonance y fait une sixte ou une septième sur la basse fondamentale : Dessus, do ré mi la sol la spi do; Basse fondamentale, do sol do fa do sr oi do. 6 La première dissonance, le ré de l'accord fa , écarte la modulation en fa. Le ll do, regardé comme dissonance dans l'accord re, lie cet accord à celui qm le précède , en même temps qu’il éloigne toute idée de modulation en ré. Enfin, la dernière dissonance, fa, a moins pour but d'éviter la modulation en sol, que , P , de compléter l'accord so ou sol si ré fa, appelé dominant, et qui jouit de la propriété d'appeler avec beaucoup de force l'accord parfait do mi sul, c’est-à-dire d'opérer la cadence parfaite que l'oreille attend à la fin du chant, Passant à la gamme descendante , d’Alembert ou plutôt Rameau , module for- mellement eu sol, remplacant hr l'accompagnement du {a, le fah par un fa* : lequel descend ensuite sur le fa; de l'accord dominant, dont le sol et le fa de cette gamme sont successivement accompagnés. La raison que D'Alembert fait valoir pour hausser le la, n'est pas sans réplique, (43) D'après cette définition, le genre diatonique, dans le grand sys- tème des Grecs , revenait exactement à notre gamme majeure, puisqu’en en rangeant les notes du grave à l'aigu à partir de la proslambanomène , on forme une série de cordes, que, d’après les intervalles qui les séparent , ôn peut rendre comme il suit, en notes modernes , la, si, do, ré, mi, fa,ssol, la, si, do, ré, mi, fa, sol, la ; puisque le fa qui se trouve entre le La et le ré, dans le même accord , et qui fait, comme Je /a ; une consonnance affaiblie sur ce ré, peut cependant rester tel qu'il est ; qu'enfin , si le changement du /a rectifie la quinte ré Ja , il altère les tierces la fa et la du, On demandera sans doute pourquoi, au lieu de hausser le Za d'un comma, d’Alembert n’a pas plutôt songé à baisser le ré de cétte quantité. ce qui eñt donné à son accordré fa la une entière justesse. C’est que le ré a lui-même, pour accompagnement, l'accord dominant so/ si ré ou sol si ré fa dans la cadence finale (ou le passage de ré à do) de la gamme descendante, Ré, par la raison déjà allé- guée, devait faire une quinte exacte avec so/ et, par conséquent , un ton majeur avec do. Je suis loin de prétendre que la basse fondamentale soit sans utilité pour expli- quer la génération de la gamme ; mais elle ne doit pas contrarier les indications de l'oreille ; et il me semble hors de doute qu’en chantant sans accompagnement la gamme ascendante ; comme la gamme descendante, le Za ne s'appuie pas sur le ré, mais bien sur le fa ou sur le do aigu ; je veux dire que c’est le souvenir ou le sentiment intime de ces deux dernières notes qui donne la conscience de la justesse du Ja, et qu'il en est de même du lab de la gamme mineure de do, gamme dont la Ja basse fondamentale embarrasse beaucoup l’auteur et le promoteur de ce système, Je crois done, sinon factices, du moins trop absolues , les règles harmoniques qu'ils se sont imposées. Est-il bien vrai, par exemple, que le ré soit la basse fondamentale, c’est-à-dire la note prépondérante de l'accord r#7 placé sous le Za , lorsque cet accord est composé des mêmes notes que l'accord faë placé sous le fa ? Ne peut-on pas croire qu'ici encore ; le ré\n'est qu’une dissenance ajoutée à l'accord parfait fa La do? Que’seulement , au lieu de faire immédiatement sa résolution, il se prolonge , en même temps que le fa dans l'accord dominant so27 qui précède l’accord final. Cet accord dominant peut succéder à l’accord païfait de fa sans l'intervention du ré; ce qui justifie suffisamment la marche diatonique de la basse. Est-il bien rationel de faireconcourir-un fa à la génération des notes naturelles, et cefa : est-il bien nécessaire à l'accompagnement de la gamme descendante ? Le si et le la de cette gamme ne peuvent-ils être successivement accompagnés par l’accord de neuvième dominante so/ si re fa la, ou par l'accord de septième de (4) à supposer qu'on parte du la : car la série pourrait tout aussi bien commencer par d'autres degrés de notre échelle, à la condition de conserver ses intervalles , tons et demi-tons, dans le même ordre. Le second genre, ou le chromatique, avait au grave deux demi- tons successifs , et à l'aigu un trihémiton, intervalle que nous appelons aujourd'hui tierce mineure , le regardant comme une consonnance , et n'en faisant ordinairement un intervalle simple que dans notre nouvelle manière de chanter la gamme mineure. ee sensible si ré fa La, formé comine d'Alembert en convient (8 116 note dd}, des notes si ré de l’accord dominant , et des notes fa la de l'accord de la sous-domi. nante ? Avec cel accompagnement , le /a conserverait son ancienne valeur. On pourrait encore imaginer d’autres accompagnements pour cette même note, En général , la gamme se prête à une foule de marches harmoniques différentes. Les solféges et les méthodes d'instruments à cordes en offrent de nombreux exemples, où se rencontrent parfois des modulations de nature à faire dévier l'oreille du diapason primitif des notes ainsi accompagnées. Non-seulement, la marche seule du chant peut amener un changement de ton, sans changement de gamme , comme le prouvent les différents tons de l’église, mais cette tonalité artificielle peut encore résulter de la manière de scinder la gamme, tout en conservant l’ordre diatonique de ses notes. Ainsi, lorsqu'on la partage , de do à do, en deux moitiés, chacune de quatre notes, séparées par un dsmi-repos entre le fa et le sol, la première moitié ascendante, do ré mi fa, semble moduler en fa , tandis que la seconde moitié ramène le ton de do. De son côté , la première moitié descendante, do si la so!, admet assez naturellement une modulation en so/, mais moins fortement sentie. d’Alembert évite la première par sa manière de placer le repos, sur la 5.€ note au lieu de la 4.e; mais il ne fait rien pour écarter la modulation en s0/ qu'il croit inhérente à la partie supérieure de la gamme. C’est ce qui le décide à changer l’ordre de ses tons majeurs et mineurs. Abstraction faite de la minime différence de ces deux espèces de tons, les deux tétracordes, do ré mi fa et sol la si do peuvent, comme les tétracordes grecs, ri fa sol la et si do ré mi paraître semblables ou composés des notes homologues de deux gammes appartenant à des tons différeuts; mais le changement de mode bémolisant le mietle la, qui n'y occupent pas le même rang , fait évanouir la similitude. Au surplus , je crois que d’Alembert porte trop exclusivement son attention sur l'ordre diatonique des notes. Les accords arpégés ont aussi quelque importance , et surtout le passage sans intermédiaire de la tonique ou de sa réplique aux autres notes de la gamme, et le retour de celles-ci aux premières, dont le souvenir ne doit pas se perdre: nouveau motif pour rejeter la valeur numérique que d’Alembert veut donner au /a, Je dirai, pour terminer, qu'il n’introduit pas cette valeur dans Ja gamme grecqne, exempte, suivant lui, du défaut de la nôtre, par sa forme seule. Ps ) Ce genre présente donc, en supposant toujours qu'on parte du la, cette autre série de sons : ‘ , : ; } À s la, si, do, ré’, mi, fa, so , la, si, do, ré”, mi, fa, s0P , la : Enfin, le genre enharmonique avait, au grave, deux quarts de ton, et, à l’aigu, un intervalle appelé diton, celui de notre tierce majeure , dont nous faisons encore une consonnance et jamais un intervalle simple. Par suite de cette nouvelle division de la quarte, les séries précédentes se trouvent remplacées par la suivante : lu, si, sè+, do, mi, mi, fa, la, sè, si+, do, mi, mi+, fa, la: où les sons représentés par si + et mi + partagent en deux par- ties égales, ou à peu près égales, les demi-tons de si à do, el de mi à fa. Les genres offraient , en outre, plusieurs nuances où espèces distinctes, suivant que l’on renforçait ou affaiblissait les intervalles, sans en changer la nature, c'est-à-dire, par exemple, sans changer les tons en demi-tons, etc., et sans changer les limites du tetra- corde, qui formaient toujours une quarte exacte. Nous en verrons plus loin le détail. Toute la musique des Grecs venait de l'Asie mineure et de la Thrace, suivant Strabon. C’est de l'Asie qu'ils tenaient la plupart de leurs instruments, et les noms de leurs différents tons ou har- monies. Leurs flûtes et leurs trompettes étaient originaires de Phrygie , et pendant fort longtemps, l'ile de Lesbos, voisine de l’Asie mineure, avait eu le privilége de leur fournir leurs joueurs de lyre ou de cithare. Ce dernier instrument, qui avait reçu le nom d'asiade, s'était d'abord fabriqué, dit-on, dans la ville d’Asia en Lydie. Enfin, Pythagore, qui donna aux Grecs les premières notions des proportions harmoniques, était de Samos, ou y avait été élevé. Les Egyptiens, un des peuples les plus anciennement civilisés, doivent aussi figurer au nombre de leurs instituteurs, surtout en ce (46) qui touche à la philosophie et aux sciences physiques. Pythagore avait voyagé en Egypte, et, de même que les Egyptiens, il,ne reconnaissait, pour bases de la gamme, que les seules consonnances d’octave, de quinte et de quarte. : ? L'octave, mesurée par des longueurs de cordes en proportion double ou de 4 à 2, et la quinte , en proportion hémiole ou de.2 à 3, avaient dû s'offrir d'elles-mêmes aux premiers observateurs. La quarte, qui n’est que le renversement de la quinte , ou ce:qui reste de l’octave lorsqu'on en retranche celle-ci, avait eu dès- lors. pour mesure, la proportion épitrite , ou de 3 à 4. Les mo- dernes mettent d'habitude ces proportions sous la forme de sim- ples fractions. [ls en font 2/1, 3/2, 4/3, quantités qu'il faut bien se garder de prendre pour des parties d'une commune mesure, et croire susceptibles de se combiner par addition et soustraction. L'expression d'un intervalle composé de la somme ou de la diffé- rence de deux autres s'obtient, non par l'addition ou la sous- traction, mais par la multiplication ou la division des deux fractions qui expriment les intervalles composants. La raison de cette règle est évidente pour les personnes habituées au calcul. Les proportions de nos autres consonnances , les tierces ma- jeures et mineures, moins faciles à observer, n'ont été exactement mesurées que longtemps après. L'habitude de ne voir qu'une suite de quintes ou de quartes dans les sons de la gamme était telle, que, lorsqu'on s’apercut que leur combinaison produisait des tierces majeures trop fortes et des tierces mineures trop faibles, et qu'on voulut corriger celles-ci en leur donnant les proportions plus consonnantes 4 à 5 au lieu de 64 à 81, et de 5 à 6 au lieu de 27 à 32, on continua de les ranger au nombre des dissonances, tout en reconnaissant un certain agrément, non-seulement dans l'audition alternative. mais encore dans l'audition simultanée, des deux sons liés par l’un ou l’autre de ces intervalles, qui entraient déjà dans les accompagnements ou la symphonie. Les tierces n'ont pris rang parmi les consonnances qu'à l'époque beaucoup moins éloignée de nous, où la considération de l'accord ( #7) parfait, composé de toutes les consonnances ; est Yenue changer la face de la musique. Mais, dans l'origine, il est indubitable que les instruments ne se sont accordés que par quintes et par octaves., ou ;si l'on veut, par quintes et par quartes : d’où il résulte qu'on a dû exprimer tous les intervalles de la gamme primitive par des puissances de 2 et de 3, ou, par des termes de la progression double et de la progression triple. C'est la marche que les Chinois ont d'abord suivie , de leur côté, comme les Egyptiens du leur. Six quintes ou six quartes successives donnèrent donc les 7 notes de la gamme, sé, mi, la, ré, sol, do, fa, ou, si l'on veut, m4, la, ré, sol, do, {a, si, en les appliquant à la gamme de fa au lieu de la gamme de do. Ces notes remplacées par leurs répliques, de manière à tenir dans l'intervalle d’une octave , formèrent l’an- tique heptacorde, composé de deux tetracordes conjoints. Les 3 intervalles dont se composait chacun de ces tétracordes , avaient conséquemment pour mesure , en Jes rangeant de l’aigu au grave, les fractions ou rapports 9,8, 9/8 et 256/243. C'est la nuance de diatonique qu'on a appelée depuis diatonique ditonié. Les deux premiers intervalles, dans la proportion nommtce épogdoade par les Grecs, sont pour nous des tons majeurs. Le 3.me est un demi-ton de l'espèce appelée Zimma. (Nous dirons en passant , que le ton majeur pouvant être exprimé par 243/216, aussi bien que par 9,8, tandis que le limma l'était par 256,243, les Pythagoriciens désignaient quelquefois approximativement ces deux intervalles, comparés entre eux , par les nombres 27 et 13, différences de ces trois autresnombres 216, 243 et 256, qui sontles valeurs acoustiques de trois sons séparés par ces deux intervalles). Il fallait encore un ton majeur pour compléter l'octave. En effet, le produit , les unes par les autres, de 5 fractions égalesa 98, et de deux fractions égales à 256,243 , donne 2, qui est la valeur de l’octave. Ce complément nécessita l'addition d'une 8.° corde, ou lé changement de l’heptacorde en octocorde. | Les sept cordes primitives portèrent les noms suivants : (48. la nète des conjointes, que je représenterai par un ré la paranète, idem... :.. 7.200088 ut ou do lautrite ‘Hem: URI NE VAR si la mèse ou moyenne............. la l’hypermése, appelée depuis diatonos et Échahos" 2e RON RE NNT sol la-pérhigpale ROOMS fa l'Aypate.! 25. ORERRANN EIRE Te mi La 8.° corde s'ajouta quelquefois au grave et répondit, par suite, à un ré. Elle prenait, dans ce cas, le nom de pros/ambanomène , (1! comme celle qui, plus tard, fut placée une quarte plus bas, et pouvait, ainsi que la nète, servir très-naturellemeut de tonique à l’octocorde, qui répondait à notre gamme mineure descendante de ré, avec la septième mineure. D'autres fois. la 8.€ corde s’ajouta à l'aigu , ou plutôt s'intercala , sous le nom de paramèse à un ton majeur au-dessus de la mèse, sur le si%, en faisant remonter d'un ton les trois premières cordes, qui devinrent : la nète des disjointes............. mi la puranotes Cid fe eus fre la trite 1 PEN PAC REONEE ut où do En ce cas, on avait les notes du ton de a mineur ou d’ut majeur. Ce dernier octocorde est celui dont Platon et Aristote se servaient pour expliquer les principes de la musique. Suivant Nicomaque l'invention de l'octocorde remonterait à Pythagore. “On fit d’abord une espèce de mystère de la formation de la gamme et de ses proportions numériques. À chaque son de l'Hep- tacorde furent attachés un jour de la semaine, une planète, un ciel différent : car on comptait sept planètes , et il y avait un ciel pour chacune. Cette doctrine mystérieuse venait des Égyptiens. En attendant les lois plus certaines de Képler, Pythagore, comme les Egyptiens, établissait des proportions harmoniques entre les distances ou les grandeurs des orbites de ces astres, entre les du- rées de leurs révolutions, etc. Les philosophes adoptèrent avec a PR Re (1) On l’a appelée ensuite diapemptos. ( 49 empréssement un système qui leur épargnait l'ennui des obser- vations laborieuses et patientes de l’astronome (1). Mais ils varie- rent singulièrement dans l'application de la théorie, c’est-à-dire dans le choix ou la combinaison des intervalles harmoniques. Ils se persuadèrent de bonne heure que les astres ne pouvaient opé- rer leurs mouvements dans leurs sphères respectives, sans faire entendre une sorte de musique céleste (2) participant de l'harmonie de leurs proportions. Les astres les plus lents dans leur course devaient produire les sons les plus graves, et les astres les plus rapides, les sons les plus aigus. Les proportions qui flattent l'œil devaient aussi être harmoniques, comme les sons agréables à l'oreille. Ils voyaient, en un mot, dans ces proportions, quelque chose de magique et de divin (3). La vertu des nombres expliquait tout. C’est ainsi que, dès les temps les plus reculés, les Chinois trouvaient dans les Æoa, ou les trigrammes de Fou-hi et les hexagrammes de Chen-noung, la progression double et la triple, la formation de la gamme et celle de l’univers entier. Une telle coïncidence est remarquable et peut faire soupconner une com- munauté d'origine. Ces mêmes idées mystiques abondent dans le Timée de Platon, dont M. Henri Martin et M. Vincent expliquent le diagramme mu- sical au moyen de deux formules algébriques , desquelles ils tirent une série de nombres composés de puissances de 2 et de 3. On sait que Platon avait suivi les cours des pythagoriciens Théo dore de Cyrène et Archytas de Tarente, et que, de plus, il avait visité l'Egypte. A côté de la philosophie, la magie abusait de ces prétendus rapports. Le mot enchantement dérivé de chant, les talismans de Jules l’Africain, dont j'ai déjà parlé, sont des vestiges de l'in- (1) Macrobe, Songe de Scipion, liv. a. Ch. 3. (2) Pline, liv. 2. Chapitre 20. Plutarque, dialogue sur la musique et traité de la création de l'âme. Ptolémée, ete.— Platon attachait une sirène à chaque monde. République, liv. 10. (3) Les Pythagoriciens juraient , dit-on, par le sacré quaternaire, qui passait pour la elef de la musique. 4 ( 50 ) fluence que les magiciens attribuaient à la musique, comme aux conjonctions des planètes. Le musicien Thalétas avait été appelé à Lacédémone pour en éloigner, par la vertu de son art, une maladie pestilentielle. Dans des temps moins reculés, les médecins guérissaient encore la sciatique par des chants composés dans le mode phrygien ou l'harmonie phrygienne {1}. Mas revenons aux proportions harmoniques. On pourrait croire que Platon et les Pythagoriciens exprimaient les valeurs des sons par les longueurs des cordes, c’est-à-dire par des nombres croissant de l'aigu au grave, ais ils font habituellement l'in- verse, désignant à peu près comme nous, sinon le nombre des vibrations, du moins la vitesse d’un certain ébranlement transmis à l'air par le corps sonore. Aristote dit même au sujet des conson- nances, suivant la traduction de M. Henri Martin : « Les impul- » sions imprimées à l'air par le son le plus aigu, ont lieu en plus » grand nombre dans le même temps... mais la dernière impul- » sion du son le plus aigu arrive à l'oreille en même temps que \ » la dernière du son le plus grave. » (2) Du reste, il ne paraît pas que les premiers Pythagoriciens , ni Platon se soient occupés sérieusement d'autre chose que du genre diatonique. Comme les Chinois l'avaient fait depuis longtemps, les Grecs ont, sans aucun doute , essayé de prolonger la série des 6 quartes ou des six quintes déterminant les notes de leur gamme , et sont entrés par là dans la voie de nos diéses et de nos bémols. En continuant la série fa ,ut, sol, ré, la, mi, si, ils rencontraient un fa%, puis un 4%. Ilest présumable que ces deux sons leur ont donné la première idée du genre chromatique expliqué et mesuré ensuite d'une autre manière, La note fa# {ou solb) s’appela en particulier chromatiké. (1) Théophrate dans Athénée , page 624. (3) Etudes sur le Timée de Platon, tome r , page 383, note 23, par M. Henri Martin , qui eite Aristote ; Péri Acouston. { 51 } Le diatonique ditonié, gamme des premiers Pythagoriciens , qui la basaient sur la progression double et la progression triple, a eu long-temps la préférence, et elle s'est conservée concurrent- ment avec toutes les espèces de diatonique imaginées depuis. Archytas de Tarente paraît être le premier qui soit sorti des tons majeurs et des limma. Dans l'expression numérique de ses intervalles, il ne se contente pas des ressources que lui offrent les puissances du nombre 5, ou seules ou combinées avec celles des nombres 2 et 3. Il a recours au nombre 7, qu'il fait entrer dans les trois genres. Car il admet les trois genres employés par les musiciens de son temps : le diatonique, le chromatique ct l’enharmonique. Il donne à tous les trois un intervalle commun, le plus grave du tétracorde , dont il fait, non un demi-ton, ni un quart de ton, mais plutôt un tiers de ton, puisque l'intervalle en question est mesuré par 28/27, ainsi que nous l'apprend Ptolé- mée ; car le traité d’Archytas n'est pas venu jusqu'à nous. Archytas arriva probablement à cette espèce de diésis [on ap- pelait alors ainsi non seulement le quart ou le tiers de ton, mais encore le limma) en renfermant la quinte entre les nombres 36 et 24, auxquels les Pythagoriciens reconnaissaient des vertus surna- turelles et mystérieuses (1). Il représenta done les 4 notes d'un tétracorde diatonique, supposées rangées de l'aiqu au grave, et la première du tétracorde disjoint placé à la suite du premier, par 36, 32, 28, 27 et 24. (1) Les Pythagoriciens avaient remarqué, entre autres propriétés du nombre 36, qu'il est le premier qui soit à la fois un triangle et un carré : le triangle de 8, c’est-à-dire la somme des nombres entiers de 1 8, ou des quatre premiers pairs et des quatre premiers impairs ; le carré de 6, regardé lui-même comme un nom- bre parfait, parce qu'il est égal à la somme de ses facteurs 1,2, 33; qu'il est en mêmetemps un triang'e , puisqu'il équivaut à la somme des trois premiers nombres ; enfin, qu'il se reproduit dans le dernier chiffre de toutes ses puissances. Plutarque assure, dans son traité d'Isis et d'Osiris , de même que dans celui de la création de l'âme, que le nombre 36 était le sacré quaternaire des Pytha- goriciens , qui lui donnaient aussi le nom de Monde. Le nombre 24, de son côté, était le produit des quatre premiers nombres r, 2, 3, 4; etc. (52) Îl avait ainsi des nombres peu élevés pour exprimer les rapports des intervalles, et il est présumable qu'il ne mesurait pas ses cordes mécaniquement, mais les accordait par le seul secours des consonnances. En effet, le rapport de la première corde à la 5€, cest à-dire de 36 à 24, était bien égal à celui de la quinte, ou de 3 à 2; et le rapport de la première à la 4.°, comme de la 2.° à la 5.° était celui de la quarte. Il laissait ainsi un ton majeur entre la première et la deuxième, comme entre la 4.° et la 5.°. Il restait à accorder la 3.°, à laquelle il assignait le nombre 28. Or, il est visible qu'elle devait faire respectivement, avec la 2. et la 5.°, les espèces de consonnances obscures, 8/7 et 7/6, rejetées de notre gamme , comme de notre accord parfait, mais qu'on peut faire entendre au moyen de sons harmoniques tirés de la basse, du violon et dela plupart des instruments à vent. Ce sont les in- tervalles du 6.° son harmonique au 7.°, qui n'est autre que la triple octave du son fondamental , et au 5.°, qui est la double oc- tave de sa quinte. Par ce mode d'accord, le second intervalle diatonique, qualifié ton comme le premier, l'excédait d'environ 5 4 de comma ordinaire, bien que les différences arithmétiques de 36 à 32 et de 32 à 28 soient égales; c'est qu'il ne faut envi- sager que la proportion géométrique de ces nombres. De même, le 3.° intervalle, qui,à en juger par les différences arithmétiques, ne serait que le quart de chacun des deux autres, vaut un peu moins que le tiers du premier. Faisant servir sa 3° corde aux trois genres, Archytas n'avait plus à s'occuper que de la 22 dans les deux derniers genres. Il la mit à un ton majeur de la 4°, pour le chromatique, comme il l'avait mise à un ton majeur de la 1'e dans le diawonique : De sorte qu’elle valut numériquement 30 3/8, faisant avec la 3e un intervalle de 243/224, environ 2/3 de ton. Enfin, dans le genre enharmonique, il la rattacha à la {°° par l'intervalle d'une tierce majeure exacte.5,4, que l'oreille apprécie facilement, et qui passait pour incomposé ou indivisible, et non pour composé de deux tons successifs, comme ceux du diatonique. ( 53 ) La 2 corde valut done ici 28 4/5, faisant avec la 3° un inter- valle de 36/35 (1) ou d'un peu plus d’un quart de ton moyen : avec la 4°, un demi-ton majeur, 16/15 ; enfin, avec la 5°, une tierce mineure 6/5. Si l’on compare cette 2° de l'enharmonique avec la 2° du dia- tonique , on trouvera entr'elles l’espace d'un ton mineur 10/9. [ne faut pas croire au surplus, que ces chiffres fussent indiqués de préférence à tous autres, par la pratique. Il n'y avait, sans doute, sous la théorie d’Archytas que des essais prouvant, d’une part, l'agrément de la tierce majeure de 574 dans l'enharmonique, où, comme je viens de le dire, cet intervalle était incomposé, et d'autre part , la possibilité de diviser en deux intervalles per- ceptibles, et approximativement égaux à 173 et {74 de ton , l'in- tervalle que nous appelons aujourd'hui semi-ton majeur , qu'il obtenait en retranchant la tierce majeure de la quarte. Il aurait pu, sans offenser l'oreille, remplacer son tiers de ton 28/27, par notre semi-ton mineur 25/24, son intervalle de 243224 par notre semi-ton maxime, 27/25, et son quart de ton 36735, par l'intervalle que nous appelons aujourd'hui quart de ton enharmonique, bien que nous n’en fassions pas usage dans la musique pratique, et qui est mesuré par 128125. Aristoxène, disciple d’Aristote et contemporain d'Alexandre Je Grand, abandonna tout-à-fait les proportions géométriques. Em- brassant le parti des praticiens, et ne prenant pour guide que l'oreille , il devint le chef d’une école célèbre, qui fit une rude guerre aux Pythagoriciens, c’est-à-dire aux physiciens. Il remplaça les trois genres d’Archytas, par les six nuances suivantes exprimées en tons et parties aliquotes du ton; savoir : (1) Les Pythagoriciens donnaient au nombre 35 , le nom d’AHarmonie , parce qu'il était égal à la somme des nombres 6, 8, get 12, par lesquels on pouvait représenter les cordes principales, ou l’hypate , la mèse , la paramèse el la nète (des disjointes). C'était aussi la somme du premier cube pair,8, et du premier cube impair, 27. Ces propriétés qui rendaient ce nombre familier aux Pythagoriciens , comme le nombre 36 , sont peut-être, en partie, cause du choix d'Archytas pour l'expression numérique de l'intervalle ci-dessus, (54) deux nuances de diatonique, trois de chromatique, et une seule d'enharmonique : 1° Le diatonique dur, où le tétracorde présente, de l'aigu au grave, À ton, { ton, 172 lon; à 2e Le diatonique mou, 574 de ton, 3% et 172; de sorte que le premier intervalle égalait la somme des deux autres : 3° Le chromatique dur, 32, 172, 172 ; 4° Le chromatique moyen ou hemiolien, 7/4, 38, 38 ; 5° Le chromatique mou, 11/6 de ton, 13, 173 ; 6° L'enharmonique 2 tons, 174 de ton, 174 de ton. Dans chacune des 4 dernières nuances , les deux peuts inter- valles étaient égaux entre eux,et leur somme, ou cequ'on appelait le pycnum, valait selon la nuance, 1 ton, 34 de ton, 273 de ton, ou 172 ton. Pour satisfaire aux différentes divisions de son tétracorde, et donner à chaque intervalle au nombre entier des mêmes parties aliquotes du ton, il divisait celui-ci en 24 parties, dont chacune, dès lors, valait à peu près le tiers du comma ordinaire. Mais cette précision n'est qu'apparente. Il y a loin de la sensibilité de l'oreille dans l'exécution d'un morceau de musique, à sa sensibi- lité dans des expériences faites avec lenteur et précaution, cir- constances dans lesquelles, ainsi que l’a fait voir M. Delezenne, dans son dernier mémoire (4), un tiers de comma peut être perçu. D'ailleurs, les praticiens ne se donnaient pas la peine de mesurer avec tant d’exactitude les degrés de leurs gammes ; et les divisions d'Aristoxène montrent suffisamment qu'il ne faisait pas usage du sonomètre (2. (1) Mémoires de la Société nationale des Sciences de Lille, année 1850. (2) M. Vincent donne , page 259, et sous le titre de Canon harmonique, la traduction d’un manuscrit grec expliquant la construction et l'usage d’un sono- mètre fabriqué dans le but de faciliter aux exécutants , l'accord de leurs instru - ments. Ce sonomètre consiste en une caisse de bois montée d’une corile tendue entre deux sillets, et divisée par un chevalet mobile glissant le long d'une échelle sraduée suivant les trois genres et accompagnée de lettres de renvei. Ce manuscrit faisant mention des tropes, est postérieur, de beaucoup, «tu temps d'Aristoxèue. Voir aussi, page 476, la description del'Hélicon, (55 ) Prenant donc les mesures ci-dessus comme de simples approxi- mations, nous pourrons comparer le diatonique dur à notre gam- me ordinaire, le diatonique mou à cette suite d'intervalles, 1257108, 2725, 16715 donnés par la seule combinaison de nos consonnances, et dont le premier ne surpasse la somme des deux autres que d'environ 173 de comma; le chromatique dur à la suc- cession de demi-tons tempérés ; le chromatique mou à la succes- sion de demi-tons mineurs. L'autorité d’Aristoxène paraît avoir été fort grande. Au bout de 3 siècles, Vitruve le cite encore exclusivement. Cependant Aristoxène n'est suivi, dans sa division du ton en parties aliquotes, que par un petit nombre d'auteurs. Cette division ne saurait en effet, satisfaire les musiciens qui ont quelque peu réfléchi à la nature des intervalles musicaux. J.-J. Rousseau répond à ceux qui la disent toute simple et toute naturelle, qu'ils seront conduits à des quantités incommensurables, en voulant diviser également un intervalle mesuré par le rapport de deux nombres premiers entr'eux : car la moitié exige une extraction de racine carrée ; le tiers une extraction de racine cubique , etc. Et comment l'oreille apprécierait-elle le rapport de deux nombres de vibrations qui n'ont entr'eux aucune commune mesure ? J'ajouterai que les par- ties aliquotes qui rempliraient exactement la quartene pourraient mesurer exactement ni la quinte ni l'octave, et réciproquement. Mais si l'usage des parties aliquotes ne peut se justifier dans les mesures rigoureuses , il est fort commode dans les approxima- tions. Après Aristoxène, l'étude de la musique théorique se concentre dans la fameuse école grecque d'Alexandrie, à laquelle les sciences mathématiques doivent une grande partie de leurs progrès. Eratosthène, connu surtout comme astronome et comme histo- rien, et postérieur d’un siècle à Aristoxène, revient, en mu- sique, aux mesures géométriques ; il conserve l’ancien diatoni- que composé de deux tons majeurs et d'un limma ; mais il a pour (56 ) les deux autres genres, des chiffres qui n'indiquent plus un accord par consonnances. Considérant ses cordes sous le rapport de leurs longueurs, il les mesure mécaniquement comme il suit, de l’aigu au grave : Genre chromatique, 30, 36, 38, 40; Genre enharmonique, 30, 38, 39, 40. Le pycnum du premier était de la valeur de notre ton mineur 10 9; celui du second, d'un demi-ton de 20/19. On ne doit voir dans les trois nombres, 38, 39, 40, croissant en progression arithmétique,qu'une manière empirique d'exprimer la division de ce pycnum en parties égales ou à peu près égales. Didyme se rapproche de nos gammes modernes dans les deux premiers genres, qu'il compose ainsi : ; Diatonique, 9/8, 10/9, 1615 ; ou d’après les longueurs des cordes , 24, 27, 30, 32 ; il l’approprie ainsi au ton de la, qui a sa tierce, sa quarte, sa quinte et sa sixte exactes dans le grand système Chromatique, 6/5, 25/24, 16/15 ; longueurs, 24, 28 4/5, 30, 32. La 3° corde et la 2° font avec la 1"°, les consonnances de lierces majeure et mineure. | On voit figurer comme intervalles diatoniques, le ton mineur et le semi-ton majeur, et comme intervalle chromatique , le semi-ton mineur. Il partage ensuite empiriquement le semi-ton majeur en deux parties approximativement égales, pour le genre enharmonique, en assignant à celui-ci les nombres suivants, comme longueurs de ses cordes : 24, 30, 31, 32. Enfin Ptolémée, après avoir examiné les principales divisions du tétracorde essayées jusqu'à Jui, c'est-à-dire jusqu'au second siècle de l'ère chrétienne, approuve cinq nuances de diatonique , 2 de chromatique et 2 d'enharmonique, savoir : {1° Le diatonique égal; longueurs de cordes, 9, 10, 44, 12. (57) ul est difficile de croire que cette gamme ait réellement été mise en pratique). 2° Le diatonique dur ou syntonique, mesuré toujours de l'aigu au grave, par les intervalles 10/9, 9/8, 16/15, ou par les vitesses des vibrations 20, 18, 16, 15 ; {c'est la gamme la plus générale-. ment admise actuellement) Ptolémée y renverse l'ordre des tons de Didyme, probablement pour rendre plus consonnant l'intervalle de la 2° corde à la 4°; ce qui rectifie l'accord do mi sol. 3° Le diatonique ditonié, ou de Pythagore ; 4° Le diatonique tonié, ou d’Archytas, dont j'ai dit que le 4° ton valait 9 8, de même que dans la nuance précédente : 5° Le diatonique mou , dont le 4% intervalle est de 8/7, ct les suivants 10/9 et 21/20 ; 6° Le chromatique dur, dont le 1° intervalle est porté à 76 ; vitesses, 28, 24; 22, 21 ; 7° Le chromatique mou, dont le £® intervalle est porté à 6 5 ; vitesses, 36, 30, 28, 27 ; 8° {nuance d'enharmonique , intervalles, 5/4, 24/23, 46/45: vitesses, 60, 48, 46, 45 ; 90 2e nuance d'enharmonique ; 5/4, 22/21, 56/55. On remarquera qu'au rebours de ce que faisait Didyme, pour le chromatique, et Archytas, pour l’enharmonique , Ptolémée place le plus petit des deux intervalles du pyenum au grave ; tandis qu'Aristoxène les supposait tous deux égaux. En général, les nombres représentant les longueurs des cordes ou les vitesses des vibrations ne sont qu'approximatifs, dans l'idée même des auteurs. [ls n'ont voulu qu'exprimer par les différences de ces nombres, des parties aliquotes mesurées plus ou moins grossièrement dans la pratique. Ceci n'est pas une simple pré- somption : la preuve en est dans la conversion que Ptolémée fait des parties aliquotes d’Aristoxène en mesures plus rationnelles. Ainsi, au lieu des mesures exprimées plus haut en 24.° de ton, il donne : 58) Au diatonique dur d'Aristoxène, les ne 30, 34, 38, 40 ; Au chromatique dur du même , sise 00, Oo AU A l’enharmonique id. A ne Le IN Or les différences de ces nombres expriment bien, d'une ma- nière approximative, des quarts-de-ton , à raison de 10 pour un intervalle de quarte. Faisant abstraction des différentes nuances dans lesquelles , par le raffinement d'Aristoxène et de ses successeurs, les trois genres anciens s'étaient divisés, je reviens aux trois gammes mo- dernes , l’une naturelle, les deux autres accidentées, que j'ai prises pour types de ces trois genres, dans le grand système : se si, do, ré, mi, fa, sol, la, etc. i, do, ré ,mi, fu, sob, la, etc. F “ si+, do, mi, mi+,fa, la, ete. J'ai prévenu que ces séries, que je faisais partir de /«, pouvaient egalement partir de toute autre note, par exemple de si, de s5, etc., dès qu'on y conservait les tons, demi-tons, etc., dans le même ordre.Chaquesystème de tétracordes constituait une échelle se solfiant toujours de même, mais se déplacant tout entière du grave à l’aigu, en prenant pour points de départ les dif- ferents degrés d'une autre échelle supposée fixe. Ces degrés , appelés fropes, au nombre de 15, à l'époque du plus grand développement de l'échelle , formaient une suite de demi-tons , et leur réunion, une neuvième majeure !{). En un mot, sauf la solmisation , qui ne variait pas en passant d'un trope à l’autre, les différents genres s'appliquaient à chacun de ceux-ci, comme nos modes majeur et mineur s’appli- quent aux différents tons de notre échelle. Mais la comparaison des genres anciens et des modes modernes ne se soutient pas, même lorsqu'on néglige le genre enharmonique , dont les inter- {1) Voici l'ordre de ces tropes de l’aigu au grave : Hyper-Lydien, Hyper. £olien , Hyper-Phrygien, Hyper-Tastien ou Hyper-lonien , Hyper-Dorien , Ly- dien, Eolien , Phrygien , fastien ou Jonien , Dorien, Hypo-Lydien. Hypo-£olien. Hyÿpo-Phrygien, Hypo-lastien on Hypo-Jonien , Hypo Dorien. On verra, plus loin, que le mot trope était déja connu en musique du temps d'Aristoxène ; mais qu'il n'avait pas la même signification. (54 ) valles ne se retrouvent pas chez nous. Ainsi , en passant du mode majeur au mode mineur d'ut ou do, nous bémolisons le mi et le la, c’est-à-dire la médiante et la sous-médiante du ton, chan- geant , par là, en tierces mineures, les tierces majeures de la tonique et de la sous-dominante. Dans le système grec, en pas- sant du genre diatonique au chromatique, avec une gamme sem- blable, on abaissait ou bémolisait le ré et le so/, qui ne faisaient au grave, que des tierces mineures ; et celles-ci, par suite, deve- naient des tierces diminuées. [l ne paraît pas, d’ailleurs, lors- qu'on parcourt les notes du genre chromatique , que ce genre ait, plus que le diatonique, le caractère de notre mode mineur. Nous devons donc chercher ailleurs la variété des modes. Elle ne pouvait avoir échappé aux Grecs, dont les continuels essais les avaient conduits à tant de divisions différentes du tétracorde. Nous la trouvons dans un emploi différent de la seule gamme diatonique , comme cela se pratique pour les tons du plain chant. Effectivement , des 4 fragments anciens , qui sont tous dans le genre diatonique , plusieurs ont le caractère du mode mineur bien prononce. M. Vincent restitue le nom de /ropes aux degrés de l'échelle fixe , que Glaréan avait appelés modes sans aucun motif ; ce en quoi il à été suivi par tous les auteurs, même par J.-T. Rousseau, qui , tout en se plaignant de la confusion qui en résultait, n'avait pas su s'affranchir de cet usage (1). M. Vincent pense que, réser- vant le mot /rope pour des échelles semblables les unes aux autres, à part leur degré d'acuité, comme nos tons modernes (2), ils dé- (1) Dictionnaire de musique su mot syntonolydien. (2) I y a malheureusement, dah; la partie technique de notre musiqte, une extrême disette d'expressions propres. d’où résulte souvent une extrême confusion dans le discours, Ainsi, le mot ton désigne, tantôt un certain intervalle, celui de do a re, de ré à mi, cte.; tantôt le degré d’acuité d’un sou , on le degré d'acuité d'une gamme ; Lantôt Ja disposition de cette gaume relativement à la place qu'y occupe la tonique. Une semblable confusion se retrouve dans les expre sions tech- niques des Grecs. Voir Euelide, page ro de Meih ( 60 ) signaient plus particulièrement par le mot on, comme par l'ex- pression ancienne d’harmonies, les différentes formes de l’octave, ou les différentes combinaisons d'intervalles que peuvent produire 7 degrés successifs d’une même échelle musicale, et principale- ment d'une échelle diatonique ; que c’étaient là autant de gam- mes différentes, relativement aux notes extrèmes prises pour to- niques ; .qu'il faut y rapporter, non seulement les 7 tons de Ptolémée , mais encore les plus anciennes harmonies, distinguées en Lydienne, Phrygienne , Dorienne , etc., comme les tropes qui leur ont succédé. Les explications que les auteurs donnent sur les 7 tons ou les 7 formes d’octave de l'échelle diatonique, et les exemples de la marche du chant dans les fragments antiques ne laissent pas de doute sur l’usage multiple que les Grecs faisaient d’une même gamme dans différents tons. Le plain chant, dont l’origine re- monte au système grec, en est encore une preuve. En musique, comme en beaucoup d’autres choses, l’église nous a conservé la trace des usages antiques. Il résulte de ces observations, que la dominante , et les autres notes essentielles du ton, n'étaient pas aussi caractérisées, n'avaient pas la même importance chez les Grecs que chez nous. Ces tons, en plus grand nombre que nos modes , leur en tenaient lieu, et pourraient s'appeler modes , en étendant la signification de ce mot. L'echelle diatonique des Grecs présentait, en effet : 1.° Le mode majeur dans sa perfection, lorsque le chant, après avoir parcouru les diverses cordes du grand système, se terminait sur celle que j'ai représentée par ut ou do, c’est-à-dire la parhypate des hypates ou fondamentales ; 2.9 Le mode mineur, lorsque le chant s’arrêtait sur le 4, c'est-à-dire sur la mèse ou la proslambanomène auquel cas la gamme mineure avait sa septième mineure, comme , naguère en- core , il était d'usage de la chanter en descendant. La même échelle offrait de plus, suivant la place occupée par la note du repos parfait, 5 autres espèces de modes que nous re- gardons comme plus ou moins défectueux ; entr'autres, le ton de (161 ) mi, que Blainville voulait faire entrer dans la musique moderne sous le nom de mode mixte. Il est vraisemblable que les défauts de ces 5 derniers tons ou modes étaient, le plus souvent, atténués ou dissimulés par l’omis- sion des cordes étrangères à la véritable gamme majeure ou mineure, aux accords caractéristiques du ton. C'est effectivement ce que l'on remarque dans plusieurs des fragments antiques. Si l'on faisait entendre ces notes, c'était comme notes de passage, et l'impression en était effacée lorsqu'on arrivait à la fin du chant. Les Grecs trouvaient, comme nous , que les notes de la gamme diatonique n'étaient pas également propres au rôle de toniques : mais ce qui surprendra, c'est la préférence qu'ils donnaient au ton de a, sur le ton de do, ou, suivant leur manière de s'exprimer, à la mèse sur la parhypate des hypates , et par conséquent , au mode mineur sur le mode majeur On pouvait déjà présumer que le changement de genre n'avait pas pour but de déplacer la tonique. 11 devait donc sembler plus naturel de chercher cette tonique parmi les cordes stables ou communes aux trois genres , et même parmi les cordes communes aux deux systèmes , que parmi les cordes variables. Au nombre des premières étaient la mèse et la proslambanomène, que j'ai appelées a; les autres répondaient à mi et à si. En outre, les extrémités du grand système étaient les octaves de la mèse. Enfin. dans la solmisation, ainsi que je l'ai déjà fait observer, on donnait un nom exceptionnel à la mèse et à la proslambanomène. Toutes ces remarques étaient autant d'indices qui pouvaient faire soup- conner la préférence donnée par les anciens au ton de la mèse. Mais M. Vincent a trouvé, à ce sujet, un passage décisif dans Manuel Bryenne : « La mélodie est parfaite, dit ce dernier, lorsqu'en partant de » la mèse , elle parcourt tous les sons de l’échelle pour venir finir » sur la mèse. » Mais la gamme mineure de La, lorsqu'on fait le so/ bécarre, est (62) plus naturelle en descendant qu'en montant : aussi, voyons-nous l’ordre descendant adopté par tous les traités anciens, tandis que les modernes commencent par la gamme ascendante. La corde appelée trête portait ce nom parce qu'elle était la 3.° du tétra- corde, en descendant. Les lettres grecques employées comme no- tes de musique , se rangeaient aussi de l’aigu au grave (1). Le passage cité de Bryenne ne distingue pas entre le petit et le grand système. [l faut, sans doute, l'appliquer au second, qu'on peut regarder comme Je plus parfait, et auquel Ptolémée donne effectivement cette qualification. Le premier, outre son infériorité sous le rapport du nombre des cordes, était composé de deux par- lies hétérogènes. La partie inférieure avait pour tonique naturelle la dominante naturelle de la partie supérieure, ou sa réplique. Il présentait cette suite de 11 sons, dans le genre diatonique : ré, do, si, la, sol, fa, mi, ré, do, sig, lu. Les 8 derniers, du {a au la, appartiennent à la gamme de {a mi- neur ou de do majeur, et les 8 ou 9 premiers à la gamme de ré mineur ou de fa majeur.C'est donc le ton sous-dominant dela par- ie inférieure du système. Toutefois, la série entière des 11 sons peut passer pour appartenir au ton de /a, comme les 15 sons du grand système : seulement, la partie aiguë du premier ayant sa seconde, si, mineure, rappelle le mode mixte de Blainville, qui n'est, au fond , qu'une variété du mode mineur. Cette anomalie , de la réunion d’un sig à la basse et d’un si” dans le dessus de la même gamme, provenait du choix que les Grecs avaient fait de la quarte, au lieu de l’octave, pour élément de leur échelle. Un 4.° tétracorde conjoint , en eùt encore com- pliqué la tonalité. L'addition de ce tétracorde, appelé des hyperbo- loides, suraiguës ou adjointes, dut rendre plus évidente la (1) Un renversement moins facile à expliquer est celui qui consiste dans le lieu, la place relative assignée originairement aux notes aiguës et aux notes graves. Le mot nète appliqué à la note aiguë, voulait dire que c’était l’inférieure. La note grave s'appelait kypule, c'est-à-dire supérieure. Faut-il appliquer ces expressions aux chevilles, d'autant plus élevées sur la base de la eithare, que les cordes étaient plus longues ? (63) nécessité de la disposition jar octaves où par tétracordes alterna- tivement conjoints et disjoints. Cependant le petit système ne fut pas complètement abandonné , puisqu'il se retrouve, non seule- ment dans l’un des fragments antiques, mais encore dans le plain chant, où, comme on sait, la proslambanomene et la mèse deve- nues fixes, de mobiles qu'elles étaient, se sont appelées {«, et le degré supérieur, appelé si, à continué d'être bécarre où bémol. C'est la seule note accidentée du plain chant. Le petit et le grand système avaient, du reste, été précédés par l'heptacorde et l’octocorde , qui, dans l’origine , composaient toute l'échelle, ainsi que nous le verrons plus loin. La trite du premier , et la paramèse du second , donnent également l'idée du sie et du sif. Ce qui surprendra peut-être, c'est qu'aucun des 4 fragments antiques n’est dans le ton de la mèse. Si nous continuons , pour plus de clarté, à lui donner le nom de la, les deux premiers fragments, c’est-à dire, les hymnes à Calliope et à Apollon , commenceront et finiront par un mi, ce qui, au premier coup- d'œil, pourrait faire croire qu'ils sont en mi mineur : mais le ton , ou du moins le principal, est plutôt celui de do majeur. Le second surtout paraît finir sur la médiante. La tonique sous-entendue était peut-être dans l'accompagnement, qui ne se trouve pas noté sur le manuscrit. Le3.‘fragment, l'hymne à Ne- mésis , s'arrête au milieu d’une phrase musicale. Il commence par un La, mais qui n’est évidemment qu'une note de passage, une appoggiatura ; le morceau est dans Île ton de so! majeur. Enfin, le quatrième fragment , ou l'ode de Pindare, est écrit pour le petit système , dont je viens de dire que la partie supérieure était dans le ton de la sous- dominante de la partie inférieure- Cette partie inférieure offrait un sig, et la partie supérieure un si; lors que la mèse est un /a. Mais ici, le compositeur n'a fait usage que de la partie supérieure, et le ton du morceau , au lieu d'être en ré mineur ou en fa majeur est en so/ mineur bien caractérise. Tous les auteurs anciens conviennent que le plus naturel des 3 (64) genres était le diatonique (1). Les deux autres constituaient des gammes plus ou moins tourmentées, propres à certains effets , mais d'un usage plus restreint. Boèce nous à conservé un jugement des rois et des éphores de Sparte, qui, si le texte n'en est pas supposé , inflige une réprimande publique au poëte Timothée , non-seulement pour l'inconvenance d’avoir mis en scène Sémélé, dans les douleurs de l’enfantement, mais encore pour avoir fait usage du genre chromatique. Le même jugement ordonne le re- tranchement des 4 cordes ajoutées, par Timothée, à la cithare. Suivant un historien du nom d'Artémon, ce jugement aurait été réformé par les juges eux-mêmes , et Timothée renvoyé absous, parce qu'on aurait reconnu que ces cordes existaient déjà. sur un instrument antique. L'une et l’autre version prouvent le peu d’em- ploi du genre chromatique, puisque Timothée était contemporam de Philippe de Macédoine, et qu'à cette époque, depuis longtemps, la musique était en grand honneur chez les Grecs, et même à Sparte, où des prix étaient institués pour cet art, aux jeux Carniens. Plutarque assure que la cithare, dont l'invention est antérieure à la tragédie, a , dès son origine, fait usage du genre chromatique: mais que, cependant, ce genre avait toujours été exelu de la tra- sédie, et qu'il l'était même encore de son temps (2) Passant aux autres genres de poésie, il cite parmi les poètes qui ont négligé le genre chromatique , Tirtée, Trasylle et une foule d'au- tres ; et il ajoute qu'il faut bien se garder de conclure qu'ils ne le connaissaient pas. Certains auteurs le donnent comme tendre et mélancolique, comme le plus doux des trois, et en même temps comme le plus propre à exprimer la douleur. Vitruve dit qu'il se distingue par sa délicatesse et sa douceur. Macrobe , de son côté, prétend qu'il était décrié à cause de son extrême mollesse ; ce qui avait conduit Platon à assigner à l'harmonie des sphères, le genre (1) Aristoxène dit que c’est le plus ancien des trois genres ; celui que l’homme, dans l'état de nature, rencontre le premier. (2) Plutarque dit ailleurs qu'Agathon avait été blâmé pour l'avoir essayé dans sa tragédie des Mysiens. ( 65 ) diatonique. Son nom peut signifier qu'il est une nuance {1}, une altération de celui-ci, Cette altération différait de nos diéses ou bémols accidentels , en ce qu’elle était permanente, continuée pen- dant la durée du morceau. Y verrons-nous l'introduction de bémols dans certains accords dissonants,sans changement de mode,ou celle de dièses nécessaires à la réunion des deux modes ? Peut-être, l'une comme l'autre , suivant le choix de la tonique et la marche du chant. En descendant du {a au la, ou de la mèse à la proslambanomène du grand ou du petit système, on a la médiante-mineure do, après la médiante majeure, do*, comme la sous-médiante mineure fa, après lä sous-médiante majeure fax. Cependant, la gamme semble, jusqu’à un certain point, avoir conservé tous ses degrés, malgre l’absence de la sensible et de la sous-dominante. L'impression finale est celle du ton de {a mineur. Ainsi, le mode ne change pas lorsqu'on passe du genre diatonique au chromatique, non plus que lorsqu'on amène le repos sur do. Dans ce cas , le mode reste ma- jeur, et les deux sons chromatiques deviennent ré et so. Ces deux mêmes sons peuvent encore servir de dominante et de tonique au ton desoŸ ou fax mineur, etc. Malheureusement, la perte totale des morceaux du genre chromatique nous empêche de parler de son usage avec certitude. Quoi qu'il en soit, il ne parait pas impossible de se rendre compte d’une manière satisfaisante, par quelques essais pratiques, de l'emploi de ce genre. Mais que penser de l'enharmonique, qui n'a son analogue, chez nous, que de nom :; ce que nous appe- lons passage enharmonique, n'étant que le passage fictif d'un son au même son représenté par une autre note (2}, tandis que. chez les Grecs, les deux sons différaient réellement. {3) Son indicatrice appelée simplement chromatiké semblait former une nuance a u-dessous du diatonos. (2) La confusion des deux sons a lieu, non-seulement sur les instruments à sons fixes , meis encore sur les instruments à archet, tels que le violon. En écoutant d'habiles artistes , j'ai bien souvent remarqné qu'ils faisaient la transition eubar_ wmonique sans déplacer le doigt. = 9 ( 66 ) L'enharmonique des anciens n’est donc pas plus compréhensible pour nous , que le système de musique le plus répandu chez les Arabes et quelques autres peuples orientaux : celui qui divise la gamme en 17 intervalles égaux ou sensiblement égaux (1), valant. dès-lors, à peu près un tiers de ton, chacun. Mais laissons là cette autre énigme, et revenons aux quarts de ton des Grecs. Serait-il vrai qu'une plus exquise délicatesse d'organes rendit, pour eux, non-seulement perceptibles, mais encore mélodieux, des intervalles que nous regardons comme presqu'insaisissables? Ou bien, ne devons-nous voir dans l'introduction de ces nouvelles cordes qu’une aberration due à de fausses théories dont les siècles suivants ont fait justice ? (1) Outre la division en 17 intervalles,ou les 17 {abagah, les mêmes peuples ont la division diatonique , ou les 7 bordah, la division en 12 demi-tons, ou les 12 magâm; puis, une division en #4 quarts-de-ton ou choab.Mais la division en 17 in- tervalles est la plus généralement suivie.On peut présumer qu’elle à été tirée de la gamme de Pythagore, composée de 5 tons majeurs et de deux /imma, en divisant chaque ton majeur en trois parties, par un bémol et un dièse distingués l’un de l'autre, Si le dièse et le bémol représentent une élévation ou un abaäissement dans la proportion de 2% à #4 , la 3.< partie du ton, c'est-à-dire la partie centrale se trouvera être de 648/629, c’est-à-dire peu différente des deux autres. Toutefois, ce n'est pas ainsi que les auteurs expliquent la formation de cette gamme: Elle tirerait , suivant enx , sou origine , d’une suite de quintes, comme la gamme diatonique, et la série des 12 demi-tons. Nous avons déjà vu que 6 quintes succes- sives et exactes produisaient la gamme de Pythagore, lorsqu'on ramenait les sons dans l'intervalle d’une octave, en les remplacant par leurs répliques; ce que l'on regarde toujours comme permis. Cinq quintes nouvelles, partageant chaque ton en deux parties, un limma et un apotome , amènent finalement la décompo- sition de l’octave en 14 intervalles, savoir: sept limma et 5 apotome, qui diffèrent fort peu des limma. Encore cinq quintes , pour intercaler un son nouveau dans chaque apotome , et l’on aura enfin la division de l'octave en 15 intervalles, 13 limma, et 5 commas de Pythagore, qui ne sont guères! que des quarts de dimma. Eu les négligeant, ou les répartissant sur les 12 autres intervalles-on a les 12 magäm, Mais les Arabes ont imaginé de les conserver, en les agrandissant aux dépens des 13 premiers, au moyen d'une espècede tempérament, dent on peut juger, par l'examen de ceux de leurs instruments à cordes, qui sont munis de manches gradués, à la façon de nos guitares. Il en résulte une gamme fort discordante pour les oreilles européennes. ( 67 Les théories acoustiques appliquées à la gamme sont sujettes à de graves difficultés, qui ont donné naissance à beaucoup de paradoxes, de systèmes impraticables. Ainsi, Plutarque tout en convenant du plaisir que cause l'au- dition de l’octave de la quarte, en fait une dissonance, unique- ment parce que le rapport 8/3, qui l'exprime , s'éloigne, par sa forme , de ceux des cinq intervalles. qu'il admet comme conson- nants, savoir : 2/1, 3/1, 4/1, 3/2, 4/3. Ainsi, naguère, on hasar- dait cette opinion, que notre oreille pourrait bien avoir été pêr- vertie par l'éducation, et notre gamme diatonique avoir remplacé une gamme plus naturelle, composée de sons harmoniques | appartenant à un même son fondamental, et pris entre les limites d'une même octave. Îl est certain que, dans ces conditions , on pourrait à son choix, trouver, dans l’octave, 6, 7, 8 sons harmo- niques, où davantage , tirés d'une même corde ou d'une même colonne d'air vibrant dans un tuyau.f en résulterait, pour repré- senter les vibrations, des séries des nombres entiers, de 6 à 12, de à 14, de 8 à 16, etc. C’est la combinaison de 8 à 16 que l’on préférait.Elle peut être fort simple à l'œil ; mais l'oreille ne saurait reconnaître une gamme dans une pareille suite de sons (1). La preuve enestdans la facilité même qu’on a deles produire sur les instrumensles plus répandus. Si cetteprétendue gamme pouvait être le fondement de la musique, il y a longtemps quetousles peuples l'eussent adoptée,au lieu de la rejeter, comme de commun accord. en nen en mme (1) Les mêmes raisons qui ont fait proposer l'addition d’une 8.8 note à la gamme, wilitaient pour l'addition d'un son à l'accord parfait : le son 7, après les sons 4, 5, 6 ou do mi sol, et avant le son 8, qui est la réplique du premier, ou de do. Or, c'est une réforme qu’on n’a pas cru pouvoir demander. Au surplus, Je ferai remarquer que l'accord parfait mineur do, mmi,, sb, do, regardé comme moins naturel que le majeur, est justement celui dont les valeurs acoustiques suivent la gradation la plus parfaite; car on peut prendre pour les valeurs de ses 4 sons, les fractions 1/6, 1/5, 1/4, 1/3, (fractions qu'ilfaut se garder de confondre avec celles qui représentent des intervalles), Si, au lieu des valeurs acoustiques ; on considère les longueurs des cordes, on trouve les nombres 6, 5, 4, 3, qui offrent de même une progression fort régulière, 68 Chacun sait que le cor et quelques instruments à vent rendent des sons qu'il faut modifier avec la main ou les lèvres. On se serait bientôt lassé de prendre cette peine, si la nature même de la gam- me n'obligeait le musicien à chercher d’autres sons. La gamme à huit intervalles n'a jamais été admise. Mais le genre enharmonique à été pratiqué plus ou moins pendant des siecles. Le théoricien et le praticien, qui se faisaient il y a 2,000 ans et plus, une guerre aussi acharnée que de nos jours, s’accor- daient pour l’admettre. Tous les auteurs en parlent ; aucun ne le rejette. Il ne faut done pas le traiter avec trop de mépris. Pour étudier ce genre, et, avec ce genre, toutes les nuances ou variétés des deux autres, M. Vincent, aidé de M. Bottée de Toulmon, à imaginé et fait exécuter par M. Roller, un instrument aussi commode qu'exact et sûr. C’est une espèce de petit piano ou clavecin d’une étendue de deux octaves {celle du grand système) et muni de deux claviers superposés, de quinze touches chacun. Le premier clavier répond au genre pris pour terme de com paraison ; M. Vincent à choisi le diatonique des Pythagoriciens ou diatonique ditonié, facile à accorder par quintes. Le second clavier est pour les genres ou les nuances qu'on veut lui comparer. Les cordes de ce second clavier sont accordées d'abord à l'unisson des cordes du premier, chacune à chacune ; puismontées à leur ton par allongement ou raccourcissement, sans changement de tension, au moyen de curseurs , espèces de petits étaux métalliques qui peuvent à volonté, serrer la corde, ou glis- ser avec facilité dans des coulisses graduées pour mesurer l’allon- gement ou le raccourcissement. Les degrés de cette graduation sont calculés de manière à correspondre à des intervalles d’un 10+ de ton moyen ou d’un 60° d'octave. Ils vont par conséquent en diminuant de longueur sur l'échelle de graduation, de l'extrémité de la corde vers le sillet. Mais la diminution n’est pas très-sensible dans les limites de la marche du curseur , dont les bords portent une autre graduation plus petite, au moven de laquelle on mesure ( 69) des intervalles de beaucoup inférieurs à ces dixièmes de ton, déja moindres eux-mêmes que le comma ordinaire. La simplicité et la perfection de ce mécanisme permettent d'ac- corder en très-peu de temps l'instrument suivant tous les genres anciens et même toutes les nuances de ces genres. Il n'a fallu pour cela, que réduire en dixièmes de ton moyen, les mesures trés-précises que les auteurs grecs nous ont données des parties de leur tétracorde. En voyant le petit clavecin de M. Vincent, je me suis demandé si cette invention ne pourrait pas s'appliquer aux pianos ordinaires, et donner aux exécutants la facilité de les accorder eux-mêmes, suivant le tempérament jugé le plus favorable à l'harmonie. Il suffirait pour cela, d'accorder préalablement, sinon toutes les cordes à l'unisson, du moins à l'unisson par catégories liées en- tr'elles au moyen de consonnances exactes, l'octave par exemple, ou la quinte et la quarte alternées, etc., et de monter ensuite les cordes à leur ton définitif, en faisant glisser les curseurs depuis le zéro de l'échelle jusqu'au point marqué à l'avance. Ces cur- seurs serreraient toutes les cordes qui répondent à une même touche. M. Vincent a obligeamment monté pour moi son instrument à l'enharmonique. Une seule audition suffit pour prouver la possibilité de distinguer les quarts de ton. Mais ilreste à voir st de pareils intervalles peuvent entrer dans une gamme, et en quelle qualité. Servaient-ils autrefois pour monter, comme par un glissement, de la note sensible à la tonique, par exemple , ou pour descendre de la sous-médiante mineure à la dominante, etc. ? Ou bien ces sons intermédiaires sont-ils tellement distincts, que le chant puisse s’y arrêter ? Peuvent-ils entrer dans les accords conson- nants ou dissonants ? Pouvaient-ils dans la musique grecque, s'adapter à toutes les formes d'octaves, c'est-à-dire à tous les tons de l'espèce de ceux du plain chant, comme nous savons qu'ils s'adaptaient à tous les tropes, ou les tons entendus à la manière 70 moderne? Pouvaient-ils, par exemple, porter la tonique ou servir de note finale ? Dans le peu de temps que j'ai pu donner à l'examen de l'ins- trument, j'ai fait les remarques suivantes que je hasarde ici en attendant qu'un examen plus attentif et plus mür amène la solu- tion des questions que je viens de poser I m'a paru que la gamme descendante de /a était à plus satisfaisante, sous ous les rapports. C'est toujours le mode mi- neur des deux premiers genres. Mais, au lieu de passer, comme dansle chromatique, dela médiante majeure ut#, à la mineure wfs, on passe d’une médiante déjà mineure, ufÿ, à une médiante affai- blie, d'un effet plus triste, avant de terminer par les notes sik la, communes aux trois genres. Peut-être l'oreille cherche-t-elle réel- lement dans cette médiante affaiblie, une nouvelle consonnance sur la tonique la: la tierce 7,6 d'Archytas. Au surplus, toute tierce mineure fort affaiblie produit cet effet, que j'appellerai lamentable, tout en concevant qu'on puisse désirer le faire revivre dans certaines situations pathétiques {1}. Les autres émplois du genre enharmonique ne sont pas aussi bien déterminés. Il m'a semblé que les gammes les moins discordantes étaient celles de mi en descendant, et celles d'ut et de fa en montant. Quant aux accords, ils me paraissaient en général d'un mau- vais effet. Cependant , on dit que M. Halévy ne désespère pas d'en tirer parti. Il a promis d'essayer le genre enharmonique dans quelques unes de ses compositions. Celle qu'il intitule Promethée a même déja été exécutée {mars 1849) au Conservatoire. Mais 1l ne m'a pas été donné de l'entendre. En résumé , la note qui divise le demi-ton en deux parties , ne doit pas être regardée comme un son étranger à la gamme, un son insaisissable au milieu d'une glissade de la voix. C’est une note distincte , sur laquelle le chant peut s'arrêter. L'audition _— (r) Voir ce qu'en dit M. Vincent , page 391, (HA) confirme le témoignage des anciens, et particulièrement ce passage d'Aristoxène cité par M. Vincent : « Nous évitons en chantant, de traîner la voix ; nous cherchons au contraire à bien poser chaque son. » D'un autre côté, Aristoxène fait la guerre aux musiciens de son temps qui s'efforçaient d'insérer, dans le chant, une mul- titude de quarts de ton.I dit positivement que la voix, quelqu'’effort qu'elle fasse, ne saurait entonner trois quarts de ton successifs. Dans un ouvrage aujourd’hui perdu , le même auteur attribuait à Olympe disciple de Marsyas, c'est-à-dire, faisait remonter au- delà du siège de Troie , l'invention du genre enharmonique. Mais Plutarque, qui, d'ailleurs, fait un grand cas de ce genre, assure que dans ces temps reculés, ilne consistait que dans la sup- pression des cordes par lesquelles les deux genres diatonique et chromatique , antérieurs au premier, différaient entr'eux. [l en apporte pour preuve, non-seulement les airs d'Olympe qui sub- sistaient de son temps, mais les trous dont étaient percées les ancienpes flutes, ou l’ancienne manière de jouer de cet instrument. Le genre enharmonique présentait donc une suite de sons de cette forme : La, si, do, mi, fa, la. était ainsi réduit à 5 degrés au lieu de7, et les intervalles do-mi et fa-la n'y passaient pas pour composés de deux tons majeurs, c’est-à-dire pour valoir 81/64, mais pour des intervalles simples ou incomposés, égaux à 574. Le chant semblait par la plus consonnant ou plus harmonieux , et le genre en avait pris son nom d'enharmonique Olympe l'avait d'abord em- ployé dans l'harmonie dorienne, puis dans l'harmonie phrygienne. On avait conservé de lui un cantique à Minerve dans ce dernier ton. L'enharmonique dense, c'est-à-dire celui où le demi-ton est divisé en deux intervalles, est d’une époque postérieure. La di/ vision , au rapport du même Plutarque, se fit sur les mèses (sans doute la mèse de l’heptacorde, en usage alors) et, s’il n'y a pas de faute dans le texte, elle n'aurait même été appliquée, dans les commencements, qu'à l'harmonie lydienne et à la phrygienne. On verra plus loin à quels tons ces harmonies répondent. (72) L'enharmonique, préféré au deux autres genres par les anciens, lorsque l'échelle était renfermée dans les limites d’une octave . avait, depuis lors, été délaissé, au point que du temps d’Aris- toxène ou d'Alexandre-le-Grand, très-peu de musiciens savaient en faire usage, et que du temps de Plutarque, c’est-à-dire dans le premier siècle de l'ère chrétienne, ils n'en avaient pas conservé la plus légère idée. Suivant le dernier auteur, qui, du reste, déplore l'abandon total où était tombé ce genre , ils en étaient venus à prétendre que le quart de ton nest pas appréciable à l'oreille; qu'il ne peut entrer dans la symphonie, comme le demi ton et les autres intervalles. Plutarque leur répond qu'en rai- sonnant ainsi, il faudrait rejeter tous les intervalles qui ne contiennent pas un nombre pair de quarts de ton : que dès lors il ne resterait plus de toutes les nuances de diatonique et de chromatique, que celles qu'on appelle syntoniques ou dures : et, en disant ces mots, il semble avoir en vue les divisions d’Aris- toxène. Les regrets de Plutarque ne sont qu'une preuve de plus, que déjà le genre enharmonique était complétement banni de la musique, de la musique pratique, s'entend, car il n'a jamais cessé de figurer dans les traites. Théon de Smyrne et Ptolémée, dans le I° siècie, confirment qu'on ne le pratiquait plus, ou presque plus. Manuel Bryenne, dans le XIV®, tout en conservant au genre enharmoniqué sa place or- dinaire, convient qu'il demande beaucoup de travail , et qu'on parvient difficilement à en acquérir l'usage. On doit même croire que cet auteur n’en parle plus que par tradition, sil est vrai que le philosophe ‘Asclépiodote, qui vivait dans le Ve siècle, ait inutilement placé et déplacé 220 chevalets, pour en retrouver les petits intervalles, ainsi que le prétend son biographe Damascius. Une autre preuve du délaissement de l’enharmonique , par les Grecs comme par les Romains, c'est que les /armonies ou tons du temps d'Ariloxène, comme les tropes qui leur ont succéde . procédaient par demi-tons, et non par quarts de ton, Je crois que (73) nous pouvons juger de ce qui avait amené cette succession de demi-tons chez les Grecs, par ce que nous voyons chez nous. Lorsque nous prenons les divers degrés de la gamme majeure ou mineure d’ut ou do pour toniques de nouvelles gammes majeures ou mineures, exactement semblables aux deux gammes primitives. nous obtenons des sons nouveaux , dont les uns, voisins des sons de la gamme majeure, se confondent avec eux dans la pratique , et dont les autres, voisins des milieux des tons entiers de cette même gamme, se prennent également pour ces milieux; de façon que l’octave se trouve finalement décomposée en demi-tons , c'est- à dire en douze intervalles, au lieu de 7. Nous marquons d'un dièze ou d’un bémol les cinq sons intercalés entre les notes de la gamme majeure, selon que nous les comparons à la note infe- rieure où à la note supérieure de celle-ci ; car l'idée du bémol nous est déja donnée par la gamme mineure elle-même. En passant du mode majeure de do au mode mineur de ce même ton, nous bémolisons le mi et le Z«, ou la médiante et la sous médiante: et l'abaissement représenté par cette espèce de bémol est mesure par la proportion de 25 à 24, différence de la tierce mineure à la tierce majeure.Le premier m® et le premier a? sont donc à 25724, - où un semi-ton mineur, de m4 et de /a4. D'un autre côté, la modulation de do majeur en mi majeur engendre un réæet un so} placés à l’égard des mêmes notes mi et la, à la distance d'un semi-ton majeur, 16715 ; d'où il résulte que les deux nouveaux sons diffèrent respectivement des précédents »+ et la, d'un quart de ton enharmonique , 128125. Je néglige les autres sons en- gendrés par des modulations plus détournées (1). Entre la et si, on trouve 1." un {ax, note sensible du ton de s. à 16/15 au-dessous du si: 2.° un «Ÿ sous-dominante du ton de fa ; a 135 128 (semi-ton moven) de ce si; 3.° un autre s® domi. nante du ton de m”, et médiante du ton de s0/ mineur. à 25/24 (r) On peut voir sur le mème sujet les mémoires de M. Delezenne, dans les travaux de la Société Nationale de Lille, années 1848 ct 1850, (74) du même si; de sorte qu'il y a respectivement du premier et du tror- sième son intermédiaire au second, les intervalles de 2048/2025, ou du comma mineur, et de 81/80, ou du comma ordinaire ; intervalles fort peu sensibles, sinon tout-à-fait insonsfIAES dans une exécution rapide. Entre do et ré, on trouve 1. un do*, médiante de /a majeur, à 27,25 au dessous de ré. Cet intervalle est notre semi-ton maxime, presque double du semi-ton mineur. On trouve 2.° un second do7, note sensible du ton de ré, et qui ne diffère pas du rep, sous-médiante du ton de fa, à 16/15 de ré; 3.°un autreré , médiante de la gamme mineure du s® obtenu précédemment par celle de so/; ce nouveau r# se plaçant à 25/24 duréz; de facon que, du premier et du troisième son intermédiaire au second, il y à respectivement un comma ordinaire, 81/80,et un quart de ton enharmonique, 128/125 , etc. "at De nouveaux sons viennent également se placer auprès des sons naturels. Ainsi le mi de la gamme de ré, n’est pas le même que celui de la gamme de do, ete. La multiplicité de ces sons voisins fatiguerait l'oreille, alors même qu'une perfection plus grande des instruments permettrait -de les rendre séparément avec exactitude. Tout nous porte done à les confondre ; ce qui peut se faire, soit en en choisissant un, et le conservant sans altération, pour les représenter tous, soit en les altérant tous, pour les réunir en un son nouveau, suivant le tempérament adopté. Chacun sait que l'accord des instruments à sons fixes est une opération fort délicate ; qu'il y a impossibilité absolue d'obtenir, pour tous les tons, des gammes conformes à la gamme naturelle : impossibilité d'échelonner les douze demi-tons de manière que les consonnances soient toutes exactes (1). La douzième quinte donne (1) Ceux qui pensent que les consonnances ne sont pas altérées dans le jeu du violon, oublient que cet instrument a quatre cordes, sol, ré, La, mi, qui ne peu- vent êlre accordées par quintes exactes , sans que les cordes extrêmes , so/, mi cessent de s’accorder entre elles. Rameau s'est assuré que, de son temps, les arlistes habiles tempéraient sur le violon et sur la viole oul’alto ( 75) un son un peu plus élevé que la septième octave du son d'ou l’on est parti. Le calcul fait voir que la différence est précisément égale au comma dit de Pythagore, 531441/524288, ou, ce qui revient au même, à deux commas ordinaires de 81/80, moins un comma mineur, ou de 2048/2025. D'un autre côté, trois tierces majeures n'atteignent pas l'octave ; il s’en faut d’un quart de ton enharmonique, 128/125 , équivalent à deux commas environ. Enfin, quatre tierces mineures excèdent cette octave d'un intervalle égal à 648/625 ou environ trois commas. On augmen- terait indéfiniment le nombre des consonnances, de part et d'autre, qu'on n’arriverait jamais à une coïncidence parfaite. Enfin , quatre quintes dépassent d'un comma, la double octave de la tierce majeure, comme trois quintes, l'octave de la sixte majeure, reuversement de la tierce mineure. Ce sont là d'mexorables propriétés des nombres, auxquelles l'art doit se plier, et dont, heureusement , il sait tirer avantage. L'octave ne souffre pas d'altération ; mais la quinte en admet de légères, et les tierces, de plus considérables, de même que l'o- reille juge moins aisément de l'exactitude de leur accord, et cela, sans doute, à cause de complication relative du rapport de leurs vibrations. Enfin la tolérance de l'oreille est plus grande à l'audition d'un morceau de musique qu'à l'audition isolée et prolongée de l'intervalle alteré. Basées sur de semblables observations, toutes les partitions où méthodes d'accord des instruments à sons fixes se ressemblent, en ce qu'elles supposent un premier accord par quintes et octaves, et qu'elles conservent à ces dernières leur en- tière justesse. Elles ne diffèrent que par la manière de répartir les trois différences ci-dessus entre les consonnances qui leur corres- pondent. | Quelques personnes s'efforcent d'arriver, jar des moyens qu'il serait superflu de détailler ici (1) au tempérament égal, ou à (x) Entre autres, la méthode de M. Scheibler , expliquée dans ne notice fort intéressante , de M. Vincent , sur la théorie des battements ; notice qui fait partie du tome 6 de la 3,° série des annales de physique et de chimie, (76 ) l'affaiblissement égal des quintes, et, conséquemment, à la par- faite uniformité des gammes des différents tons. Cette opération , supposée faiteavecune rigueur mathématique, réduit l’altération de chaque quinte au douzième du comma de Pythagore, ou à 4/11 envi- -ron du comma ordinaire, c'est-à-dire à un intervalle insensible, et l’altération des tierces majeures et mineures à 2/3 ou 3/4 de com- ma. Mais le plus grand nombre dés accordeurs, s'attachant plus particulièrement aux gammes ou aux accords parfaits de certains tons, qui doivent ce privilége à ce qu'ils sont plus naturels ou d’un plus grand usage que les autres, les conservent dans leur pureté originelle, et rejettent la plus forte partie des altérations sur les tons les plus chargés de dièses ou de bémols, où se trouvent, dès lors, des tierces altérées d'un comma ou davantage. Cette inéga- lité dans les altérations devient une source de variété pour le com- positeur, qui profite de l'impression qu'elles produisent, comme il profite de l'effet des dissonances pour amener et faire désirer d'autres accords, et pour varier son harmonie. Atravers les défauts de son exécution, le musicien qui chante où qui joue d’un instrument à sons libres, reconnaît que certains tons sont plus durs ou plus doux, plus brillants ou plus sombres, plus gais ou plus tristes, indépendamment du mode ou du diapa- son; et le compositeur ne choisit pas sans motif un ton que le nombre de ses hémols ou de ses dièses rend difficile, lorsqu'un changement insignifiant de diapason lui fournirait d'autres tons plus naturels. Ceux-ci probablement ne lui inspiraient pas les mêmes idées. Ces différences de caractère des tons sont généra- lement attribuées aux différentes altérations que leurs gammes subissent par la nécessité de réduire le nombre des cordes ou des sons. Quoi qu'il en soit , l'accord par quintes et octaves , plus sûre- ment que les modulations, conduit à la même division, puisque la déviation des quintes non tempérées a des limites fort étroites. Aussi, les Chinois, après avoir formé leur gamme diatonique par la succession de 6 quintes, en partant de la note que nous appe- 77 lons fa, sont-ils arrivés, comme nous , mais de temps immémo- mal, par la continuation de la série des quintes, aux 12 /« ou demi-tons de l'octave, du fa au mi, en montant. Îls avaient tout d’abord établi la proportion de la quinte à 3/2: cependant , leurs 42 Zu, rangés comme je viens de le dire, se trou- vent exprimés par la série suivante, connue aussi de temps im- mémorial, ou , si l'on veut , dès le temps de Hoang-ty : 81,76, 72, 68, 64, 60, 57, 54, 51, 48.45, 43. Ces nombres représentent les longueurs de leurs cordes ou de leurs tuyaux. Il en résulte que trois quintes sont affaiblies ; et deux , renfor- cées. Les quintes fa-do, do-sol, sol-ré, ré-la sont justes. La première quinte altérée est celle de /a-mr. Son affaiblisse- ment à eu vraisemblablement pour but de rendre plus consonnante la tierce do-mi du ton le plus usité; ce que font aussi beaucoup de nos accordeurs. Mais, d'un autre côté, la quinte mi-si est renfor- cée; de sorte que le demi-ton de si à do ou le passage de la sen- sible à la tonique de la gamme naturelle, reste à peu près égal au limma de la gamme de Pythagore, qui a dû faire également partie dela gamme chinoise primitive,etqui est plus petit que notre semi-ton majeur. Peut-être, en y regardant de près, trouverait- on que nos musiciens, en certaines occasions, sont portes à dimi- nuer cet intervalle, plutôt que celui de mi à fa, qui, chez les Chinois, est à peu près le même que chez nous. L'intervalle mé - mi se rapproche du demi-ton mineur et st -si3 du demi-ton moyen. Les Chinois modernes ignorent comment leurs ancêtres sont parvenus à la série ci-dessus ; mais, après beaucoup d'essais in- fructueux , ils ont trouvé qu'on pouvait la reproduire en partant de 81 (4° terme de la progression triple) et en cherchant les nom- bres entiers les plus voisins des nombres fractionnaires obtenus par un affaiblissement des quintes dans la proportion de 750 à 749. On sait qu'ils ont considérablement écrit sur la musique. Le vina, instrument indien dont l’origine remonte à une haute 18 | antiquité, divise aussi l'octave en 42 demi-tons. Les 12 notes des Indiens ne portent, comme les nôtres , que 7 noms , affectés plus particulièrement à la gamme diatonique. Les nombreux essais des Grecs ont dû presenter quelque chose d'analogue. Les modulations dans toute nuance de diatonique ou de chro- matique mesurée en nombres pairs de quarts de ton, conduisait à la décomposition de l'octave en 12 intervalles. Les mêmes mo- dulations dans le genre enharmonique en eussent multiplié lenom- bre. Il y a donc lieu de croire que ce genre était comme une su- perfétation , ou que , dans les modulations , la corde moyenne de son pyenum ne pouvait servir de tonique ou de corde stable. Les quinze tropes, dont les notes principales formaient ainsi une échelle fixe de demi-tons , donnent lieu aux questions suivantes : quel en était le diapason? Y avait-il un trope plus ancien que les autres, et qui parût en être le type, comme le ton d'ut est le modèle sur lequel nos autres tons se sont formés ? Quel a été, aux diverses époques de l’art, l'effet des modulations sur le nombre total des cordes ? Le même genre appliqué aux différents cropes offrait: rigoureusement les mêmes proportions; ou bien y avait-il, d’un trope à l’autre, de légères différences par suite de la confusion des cordes voisines, dans les instruments à sons fixes? Faut-il attribuer, en tout ou en partie, à ces imperceptibles diffe- rences, les differences de caractère que les anciens s’accordaient à reconnaître à leurs différents tons ? Peut-on, à ce dernier point de vue, établir une correspondance exacte entre les tons anciens et les tons modernes ? La question du diapason de la musique grecque se résout habi- tellement par la considération de l'étendue naturelle de la voix humaine, La note la plus basse du système ancien était la pros- lambanomène du trope hypodorien. Mais l'échelle mobile ayant été remplacée par une échelle fixe, comme le voulait la simplicité de la musique d'église, la proslambanomène, marquée de la lettre romaine À, ne désigna plus que cette seule note; et Gui d’Arezzo (179 | en fit le la, placé aujourd'hui entre la 1.'e et la 2. ligne de la portée armée d'une clef de fu. Il y ajouta une note , un so£, à un tou au-dessous. Méibomius prétend que les Grecs l'avaient déjà sous le nom d'Hypoproslambanomène ; mais qu'ils la négligeaient comme obseure ou manquant d'ampleur. Peut-être le diapason avait-il déjà monté au temps de Gui d’Arezzo , comme il a certai- pement monté depuis. Aujourd'hui les basses-tailles descendent jusqu’au fa, et même au-dessous du fa (4. La fixation de la gamme mineure À BCDEF G ou {a si ut ré mi fa sol $ur le trope hypodorien n'avait d'autre motif que la situation de ce trope au bas de l'échelle. Elle ne prouve nullement que le trope hypodorien ait été regardé comme le plus ancien , le plus naturel , ou le plus fréquemment employé. La seconde ques- tion reste entière. Les tropes avaient succédé aux harmonies. Malheureusement, nous avons,sur cette espèce de tons,des notions moins précises que sur les tropes, dont la définition est fort claire , mais quin'appar- tiennent pas aux beaux siècles de la Grèce, aux temps où la musi- que passait pour opérer des miracles. I paraît toutefois hors de doute que, de même que nos tons modernes , composés d'inter- alles semblables et semblablement disposés, relativement à la tonique, ne sont venus qu'après les tons de l'église, liés à une gamme diatonique commune, de même, dans les premiers temps de la musique grecque , une gamme fixe et simplement diatonique remplacait cette incrovable complication de 45 tropes,ayant chacun (5) Voir sur le même sujet l'ouvrage cité de M, Vincent , pages 143, 124, 230 et 331, On peut conclure aussi des chiffres rapportés par le même auteur dans sa notice sur les battements, que les diapasons de la plupart des orchestres de l'Europe ont monté d’un quart de ton , depuis l’époque, assez rapprochée de nous, où l’ut était donné par un tuyau d'orgue de 16 piedset répondait au, nombre appro- ximatif de 64 vibrations par seconde,comme à la série de ses doubles etsou:-loubles. Ce tuyau serait maintenant trop long de plus d’un demi-pied. Les expériences de M. Delezenne confirment ce mouvement ascensionnel du diapason. depuis. le commencement de ce siècle. Voir les mémoires de la Société nationale des Sciences de Lille, année 1848. page 19. { 80 ) une gamme propre, accordée suivant 3 genres différents, où même suivant 9 nuances différentes , et dont, malgré cela, d'après la manière dont nous savons que les anciens conduisaient leur mélodie, chaque degré pouvait à la rigueur servir de tonique. C'est la seule explication plausible de l'usage des modulations à une époque où l'extrême simplicité de mécanisme des instruments à cordes ne laisse pas supposer un changement d'accord dans un même morceau. Plutarque, après avoir dit que la science harmo- nique ne va pas jusqu'à commander au compositeur le choix des tons ou harmonies, ajoute que c'est à lui de voir s’il lui convient de commencer par le ton hypodorien, pour passer à l’hypo- pbrygien et au phrygien, et finir par le mixolydien et le dorien. Cet auteur blâme si souvent la multiplicité des notes, que, dans sa pensée, les modulations qu'il indique ne pouvaient être qu'une suite de tons à la manière du plain chant. Ilest présumable , toute- fois, que les Grecs n'ont pas passé brusquement de l’ancien sys- tème au nouveau; qu'ils ont eu recours d’abord à des modifications moins radicales, telles que le changement d'un tétracorde con joint en disjoint, on réciproquement, sans changement dans la relation des cordes de chacun d'eux; puis, mais longtemps après, à la ressource plus efficace du relâchement et de la tension des cordes, espèces de bémols et de dièses dont ils paraissent avoir usé sans règles bien constantes, pour le besoin de leurs modulations (1). J'adopte l'opimon de M. Vincent, que dans les premiers temps , les anciens réunissant leurs harmonies en une seule gamme , les prirent à la manière des tons du plain chant. Cette hypothèse , ainsi qu'il le fait fort bien observer , explique tou! naturellement le passage d'Horace qui a tant exercé la cri- tique : celui où le poète parle des sons de l'harmonie dorienne se (1) Pluterque parle en plusieurs endroits du relâchement et de la tension des cordes, Aristide Quintilien en nomme 3 espèces (l’éclysis, le spondiasme et l'échole) employées, mais rarement, par les anciens pour caractériser leurs harmo- aies. Celles-ci désignaient un intervalle de 3/4 ou de 5/4 de ton. (L8té, mariant à ceux de l'harmonie barbare ({),.c'est-à-dire, sans doute, aux notes homologues ou du même degré de l'harmonie Iydienne. Cet accompagnement à la tierce ne serait pas supportable, si toutes les tierces étaient majeures , au lieu d'appartenir à une gamme commune. Mais j'aurais de la peine à admettre la possi- bilité d'un renversement de l’ordre des harmonies du grave à l'aigu. Je sais bien que les noms de quelques-unes ont varié selon les temps et les lieux ; on en voit des exemples dans Aristoxène et dans Athénée (2). Je sais aussi que les noms donnés par Euclide aux différentes formes d’octave, et la notation qu'Aristide Quin- tilienapplique à certaines gammes enharmoniques hors d'usage (3), semblent supposer un renversement complet des tons. Mais, je crois que ces anomalies pourront s'expliquer, soit dans le sens indiqué par J.-J. Rousseau (4) soit d’une autre manière. Je ne vois (r) Horace, Epode, 9, vers 5. Quelques traducteurs ne voient dans ce pas- sage que le mélange des sons d’une cithare dorienue et d’une flûte phrygienne. 11 n'est pas le seul qui suppose des notions du contrepoint chez les anciens, M. Vin- cent , observant que le premier quatrain de l'ode de Pindare ne porte que des notes vocales , et le second, des notes instrumentales, a pensé que les dernières pourraient bien n’être que l’accompagnement des premières, et il a réalisé sa con- jecture, en arrangeant les deux parties suivant La notation moderne, ainsi qu’on peut le voir dans l'ouvrage cité, pages 155 et suivantes, On y trouvera encore (page, 254) la copie d’un manuscrit grec fort curieux , offrant une gamme diato- nique hypolydienne à exécuter sur la cithare , de la main droite, avec un accom- pagnement, destiné à la main gauche. (2) Aristoxène , page 39, et Athénée, liv. 14. (3) Eucl. int. harm, p. 14, Arist. Quint. p.22. (4) Dictionnaire de musique aux mols modes et genres. En accordant l’octocorde de do à do, suivant la gamme naturelle, que je sup- pose applicable au trope lydien, on a cette forme d’octave : do, Si, La, sol, fa, mi, ré, do. Mais, en modulant dans le trope phrygien , situé à un ton au-dessous du lydien, on bémolise le si et le mi, Or, la forme d’octave do msr lu sol, 1t, mi. re- do, revient à celle ci : ré, do, sig, la, sol, fa, mi, ré, prise dans la gamme naturelle, en partant d'une note située à un ton au-dessus,et non au-dessous du point de départ de la précédente gamme. Si celte explication est jugée suffisante, il faut en conclure que du temps d'Eu- clide, les harmonies avaient déjà la forme des tropes. 6 (82) pas quelle époque on pourrait assigner à un changement aussi radical dans les idées reçues. Plutarque , qui nous donne tant de détails sur l’histoire de la musique, ne parle d'aucun changement de ce genre. Or, l'ordre de ses harmonies est le même que celui des tropes d’Aristide Quintilien et d'Alypius. Plutarque avait sur- tout étudié Platon, qu'il cite souvent, en s’identifiant pour ainsi dire avec lui. Ainsi, dans un passage où il semble avoir pour but de commenter l'opinion de ce philosophe sur le caractère des différentes harmonies, il explique comment la /ydienne relächée ou détendue, c'est-à-dire bémolisée, s'éloigne de la ydienne, pro- prement dite, dans un sens contraire à la mixolydienne, et de manière à se rapprocher de l’éastienne; et il ajoute plus loin, que Platon excluait avec raison de sa république l'harmonie 4y- dienne comme trop aiguë, ce qui la rendait lamentable , tandis qu'il approuvait l'harmonie dorienue, distinguée par sa gravité. Dans un autre passage, il assure que les Argiens, à une époque sans doute reculée , punissaient d’une amende les musiciens qui faisaient usage du ton mixolydien on des tons voisins du mixo- lydien. La défense , vraie ou supposée, ne pouvait concerner que des tons aigus , et non des tons graves. S A ces preuves , on en pourrait ajouter d'autres tirées des auteurs anciens, et même d’Aristoxène et d'Euclide; mais Ptolémée (1) me semble trancher la question, quand il dit que des trois tons anciens, le lydien, le phrygien et le dorien, celui-ci était le plus grave. On verra, plus loin, comment je crois pouvoir faire corres- pondre les tons anciens et les tons modernes. La complication que l’on trouve dans les traités de musique disparaît complétement lorsqu'on interroge l’histoire. Celle-ci, bien qu'enveloppée souvent du voile de la fable, ne laisse pas d’avoir un intérêt scientifique. Pendant très-longtemps, les Grecs n’ont fait usage que d’un petit nombre de sons. L'instrument appelé Asiade n'avait eu, dans (1) Harmoniques , liv. 2 , page 131 , de Wallis. (8) l’origine, que 3 cordes, suivant Strabon. C'est une lyre à 3 cordes que Linus tenait d’Apollon, son père. La lyre, dite de Mercure en avait 4. Il est vrai qu'on peut prétendre, d’après l'autorité de Boëce, que ces instruments, ou du moins le dernier, ne suivaient pas le chant note pour note ; qu'ils n’en faisaient entendre que la basse ou les notes principales. Plus tard, le nombre de cordes fut porté de 4 à 7 ou 8, par l'invention de la cithare, du phorminx et de la chélys ou tortue, qui réalisèrent le double tétracorde conjoint ou disjoint. Ce perfectionnement, suivant les uns, appartenait aux temps mythologiques. Amphion avait ajouté 3 cordes aux 4 de la Iyre de Mercure, ou bien avait recu de Mercure lui-même la lyre à 7 cordes avec laquelle on le représentait bâtissant les murs de Thèbes. Orphée avait reçu , soit de Mercure soit d’Apollon , une cithare montée de 7 cordes, auxquelles il en avait même ajouté deux nouvelles. Suivant d’autres, il ne faudrait pas remonter si haut pour trou- ver l'origine de ces divers changements. Terpandre de Lesbos, dans des vers que l’on nous a conservés, dit que, prenant en aversion un chant qui ne roule que sur 4 sons, il va chanter de nouveaux hymnes sur le phorminx à 7 tons ou 7 cordes (f). Or, d’après les marbres de Paros, Terpandre vivait en 645 avant J.-C. C’est en cette année qu'il eut à se défendre d'une accusation devant le peuple de Lacédémone , ville où il avait fondé une école de musique. L'accusation portait, dit-on, sur l'addition d'une seule corde. Serait-ce la huitième , ou seulement la septième qu'il ajouta au ton dorien ? Quoi qu'il en soit, Pindare (2) nous apprend qu'il s'accompagne sur le phorminx à 7 cordes, et il met entre les mains d’Apollon un instrument auquel il donne également 7 cordes. Simonides, qui florissait en 480 avant J.-C., c'est-à-dire vers (1) Aristote dit qu'avec ses 7 cordes, Terpandre complétait l'octave, en sup- primant la trite. (3) 1.1° Isthmique; 2,° Pythique; 5.° Néméenne. (84) le même temps, serait, suivant Pline, l’auteur de l’addition de la huitième corde. Mais d’autres auteurs la font remonter jusqu’à Pythagore, dont la vie occupe le 6° siècle presqu’entier. La cithare à 7 ou 8 cordes fut le seul instrument des premiers Pythagori- ciens, et Platon, d'accord, en cela, avec les magistrats de Lacé- démone, les plus rigides gardiens des usages antiques , ne vou- lait pas qu'on y fit le moindre changement. Cependant, ce philo- sophe appartient à la première moitié du 4° siècle avant J.-C., époque où ce nombre de cordes avait, depuis longtemps, été dé- passé par les poètes-musiciens, surtout chez les Grecs de l'Asie mineure et de l'Archipel.Anacréon, qui florissait dans la première moitié du siècle précédent, et qui se servait habituellement d’un instrument appelé barbiton , inventé par Terpandre, parle, dans des vers cités par Athénée, d’un instrument monté de 20 cordes, auquel il donne le nom de magadis, On réduit, avec beaucoup de vraisemblance, ce nombre à 10, qu'un même chevalet, nommé magas, divisait au tiers de leur longueur, en deux parties à l’oc- tave l’une de l’autre; et on explique ainsi l'antiphonie, effet sem- blable à l'opposition des voix d'hommes et d'enfants ou de femmes, qui appartenait en propre à cet instrument, et qui ayait donné nais- sance à l'expression de magadiser pour signifier jouer à la ma- nière dumagadis , où à l’octave. On comprend que la disposition du chevalet permettait de pincer en même temps les deux parties de la corde; et que l'octave aiguë pouvait ne pas compter dans la mélodie (1). On cite encore des vers d'Ion, où il est question d’un instrument à 10 cordes, composé probablement de trois tétracor- des conjoints: ceux des conjointes, des moyennes et deshypates. Ion avait fait représenter sa première tragédie en 452 avant J,-C., et, par conséquent, au temps de la jeunesse de Socrate. Mélanip- pide , Cinésias et Phrynis, novateurs audacieux, qui vivaient à la même époque, n'ont pas employé plus de 12 cordes, de même (1) Aristote dit que l’octave était la seule consonnance avec laquelle il fût possible de magadiser. ( 85 ) que leur continuateur Timothée de Milet, contemporain de Platon et d'Aristote. On sait que ces musiciens excitèrent une grande ru- meur à Athènes, et qu'ils furent ridiculisés sur la scène par Aris- tophane et Phérécrate. On entrevoit dans les plaisanteries de ces auteurs comiques , expliquées par quelques lignes de Plutarque , que les 12 cordes de Mélanippide n'avaient fait que rendre la mu- sique plus lâche, en étendant l'échelle au grave, et cela, vraisem- blablement, en ajoutant à l’octocorde , le tétracorde des hypates, avec sa proslambanomène, mais sans dénaturer le caractère des anciennes harmonies, ou les différentes formes de l'octave; que Cinésias avait introduit quelques notes accidentées ; de telle sorte, que son instrument présentait les mêmes intervalles du côté des cordes aiguës que du côté des graves , et ressemblait, par là, à un bouclier qu'on peut tenir indifféremment par l’un ou par l’au- tre bout ; mais que Phrynis avait surtout abandonné la simplicité de forme des anciennes harmonies; qu’il n'en conservait plus les degrés tels qu’ils étaient, par exemple, dans l'hymne de la re doutable Pallas, et dans d’autres chants simples et connus de tous ; qu'il y faisait entrer des inflexions de voix, pour lesquelles on punirait l’écolier le plus novice, sans doute, les bémols ou les dièses demandés: par la modulation, mais que lui refusait l’an- cienne musique, simple eomme notre plain-chant. Il est présu- . mable que ces premières modifications aux anciennes harmonies se firent sans règles bien déterminées , ou, du moins, sans l’uni- formité qui se remarque dans les tropes. Phrynis s’étant présenté à Sparte avec un instrument à 9 cordes, l’Ephore Ecprépès le força, dit-on, d’en supprimer deux; lui laissant du reste le choix de celles d’en haut ou d’en bas (4). Ceux qui nous ont transmis ce fait, semblent vouloir dire que les deux premières cordes ajoutées par Phrynis n’étaient pas intercalées, mais mises au grave ou à l'aigu des anciennes , comme cela pou- vait être dans l’ennéacorde diatonique, dont l'invention était at- bue cette aventure à Timothée , Par erreur sans doute. ( 86 ) tribuée à Orphée. Phrynis y aurait ensuite ajouté 3 cordes, pour les dièses ou bémols de quelques tons principaux. Timothée fit de même, ou, si l’on veut, méla le chromatique avec le diatonique, comme le constate la condamnation qu'il en- courut, en esseyant, après Phrynis, de faire fléchir les règlements de Sparte. Il y porta, paraît-il, un instrument à 11 cordes, dont on le força de supprimer 4. Il est évident que c'est à ces musiciens, ou du moins aux trois premiers, que Platon fait allusion dans son dialogue sur la ré- publique (1), quand, par la bouche de Socrate, il se plaint des novateurs, qui pour moduler dans les différentes harmonies, veu- lent tirer des instruments à cordes, le même nombre de sons que donne la flûte, et se servent, à cet effet, d'instruments nouveaux : le trigone et le pectis. Le trigone était une espèce de harpe trian- gulaire d’origine syrienne. L'adoption de cette forme était motivée par une notable extension de l'échelle. On voit effectivement, sur quelques monuments antiques, une harpe triangulaire montée de 12 cordes. On n’a pas, que je sache, de donnée certaine sur le pectis, dont Sapho s'était servie la première, mais qui avait été sans doute considérablement perfectionné. Quant à la flûte, le nombre de ses sons avait été augmenté par Lasus d'Hermione. Socrate, où plutôt Platon, rejette l'instrument de Marsyas, avec le trigone et le pectis. Il n’admet dans sa ville, que la lyre et la cithare, présents d’Apollon, c’est-à-dire, des instruments , soit à 4, soit à 7 ou 8 cordes, et réserve à ses bergers , le syringe ou flûte de Pan; peut-être celle que Théocrite donne plus tard aux siens, et dont ils tirent 9 sons; peut-être la syringe à 6 ou 7 tuyaux des anciens monuments. Malgré l’anathème de Platon , renouvelé par Aristote, on vit se multiplier les instruments à cordes nombreuses, parmi lesquels on cite la sambuque, le simicon et l'épigonium. Ces deux derniers eurent jusqu'à 35 et 40 cordes, non sans doute, dans l’origine, car Epigonus d'Ambracie, inventeur du dernier, auquel il avait (r) Livre 3, ( 87 laissé son nom, avait précédé Aristoxène (4). Celui-ci, d'après le témoignage de Vitruve, renfermait les sons de la voix dans un intervalle de deux octaves, auquel répondaient 18 cordes, dont 8 sta- bles, et 10 qui variaientsuivantle genre. Les 8 cordes stables étaient la proslambanomène et les cordes extrêmes des5 tétracordes com- posant le grand et le petit système réunis. La plus notable extension de l'échelle est donc, relativement, assez récente, et elle fut sans grand profit pour la musique, si nous en croyons Plutarque. À l'exemple de Platon, Plutarque déplore la multiplicité des notes. Au temps où 1l vivait, c’est-à-dire à la fin du Ier siècle de l'ère chrétienneet au commencement du second, on con- servait encore dans les temples païens, d'anciens cantiques fort simples, que la tradition attribuait à Olympe et à Terpandre ; entre autres, un cantique à la mère des Dieux, qui n’employait que 3 no- tes, et dont, cependant, les compositeurs modernes ne pouvaient approcher , malgré le nombre de leurs cordes, et la diversité de leurs modulations. L'ode de Pindare, découverte par Kircher, ne roule que sur 6 notes , tant pour la voix que pour l'instrument d’ac- compagnement. Les autres fragments emploient 8 notes, et une 9.° douteuse, qu'il faut peut-être remplacer par une des 8 premières. Tous ces fragments réunis sont renfermés dans l’espace d’une neuvième ou dixième, depuis le ré (nète conjointe du trope lydien) Jusqu'au second do en descendant, ou tout au plus jusqu’au sé (l'hypate des hypates du même trope). Horace (2), comme Pindare, parle d'instruments à 7 cordes, soit par cet esprit d'imitation de l'antiquité, qui est naturel aux poètes, soit que les Romains fussent en retard sur les Grecs, comme ceux-ci l'avaient été sur les peuples de Asie mineure Une simplicité proportionnée, et par conséquent plus grande que celle des cordes, existait dans les tons ou harmonies. Les Spartiates, les Mantinéens et les Palléniens, ne se ser- vaient que d’un seul ou d'un petit nombre de tons. (1) Kalkbrenner suppose que ces instruments avaient plusieurs cordes à l'unisson: ce qui n’est pas vraisemblable, (2) Harace, livre 3, ode q, à Mercure. | 88 ) Platon, dansle dialogue cité, énumère les harmonies employées, à Athènes, de son temps, ou, sil’on veut, de celui de son maitre Socrate, qu'il met en scène. Ce sont d’abord, la mixo- lydienne, la syntonolydienne et autres de cette catégorie. Il les rejette comme plaintives et indignes de l'homme. Puis, viennent l'iastienne et la lydienne relàchée ou bémolisée. Il les rejette aussi, l'une comme efféminée, l’autre comme propre aux chansons ba- chiques. Enfin, il ne reste plus, dit-il, que la dorienne et la phrygienne, qu’il admet, la première, à cause de son caractère religieux et grave ou tranquille, la seconde comme propre à exciter le courage guerrier. Mais il dit ailleurs (4) qu’il préfère l'harmonie dorienne, la plus pure et la seule véritablement grec- que: les autres, en effet, étaient évidemment d'origine asiatique. L'harmonie lydienne, proprement dite, devait se trouver dans la première catégorie, d’après le commentaire de Plutarque. Elle a peut-être disparu par la faute des copistes. La mixolydienne est connue. Elle se trouvait à un demi-ton au-dessus de la lydienne. Quant à la syntonolydienne, on n’en sait pas grand’chose, si ce n'est qu'elle diffère de la lydienne et de la mixolydienne, et que son nom signifie lydienne tendue ou très-tendue , par opposition, sans doute, à la lydienne relâchée. Il est naturel, dès-lors, de supposer qu'elle tenait la place de la mixolydienne aiguë d’Aris- toxène et d'Euclide, à un ton au-dessus de la lydienne. De cette façon, la mixolydienne, dont le nom signifie lydienne mixte, serait placée entre la lydienne ordinaire et la syntonolydienne.Peut-être, dans l'origine, la partie inférieure de sa gamme avait-elle appar- tenu en commun à cette dernière harmonie, comme le tétracorde des moyennes appartenait à l'heptacorde et à l’octocorde. Au-delà de ces harmonies, à l’aigu, se trouve encore l'hyper- mixolydienne d’Aristoxène et d'Euclide. On doit croire qu'elle est du nombre de celles que Platon indique sans les nommer. L'expression de lydienne relàchée ou détendue , employée par (1) Dialogue de Lachès. { 89 } Platon et Plutarque (1), est évidemment synonyme de celle de lydienne grave (ou bémolisée) d’Aristoxène et d'Euclide. Ils mettaient cette harmonie au-dessous de la lydienne, c’est- à-dire à la place du trope éolien. Les autres jusqu’à la dorienne ont conservé leurs noms. Trois des harmonies mentionnées par Platon, étaient beaucoup plus anciennes que toutes les autres. C’étaient la lydienne, la phrygienne et la dorienne, qui remontaient jusqu'aux temps fabu- leux. Suivant les Phrygiens, l'harmonie lydienne et la phrygienne avaient été inventées en même temps, soit par Hyagnis de Célène en Phrygie, que les marbres de Paros font vivre environ 1,500 ans avant J.-C. , soit par son fils Marsyas, et par Olympe, dis- ciple de ce dernier. Olympe s’était servi, disait-on, non-seulement de ces deux harmonies, mais encore de la dorienne. Du moins, les Grecs avaient conservé plusieurs airs composés dans ces trois tons primitifs par un Olympe que la plupart des auteurs prenaient pour le disciple de Marsyas. Les Lydiens, du reste, réclamaient l'invention de l'harmonie lydienne, et les Béotiens la disaient im- portée de Lydie à Thèbes, par Amphion, que la FAOnque d'Eu- sèbe place vers l'an 1429 avant J.-C. Quant à l'harmonie dorienne , on en faisait assez généralement honneur à Thamyris de Thrace, fils d’un autre musicien, du nom de Philammon , lequel n'avait pu, dès-lors, faire usage que des deux autres harmonies. Thamyris , suivant la chronique d'Eusèbe, florissait vers l'an 1246 avant J.-C. Les Lacédémoniens, de leur côté, s’attribuaient l'harmonie dorienne. Ils la croyaient inventée par leur législateur Lycurgue (21, beaucoup moins ancien que Thamyris. Les harmonies lydienne, phrygienne et dorienne, qui se succé- (1) Burette confond sans motif la lydienne relàchée, inventée par Damon, avec l'hypolydienne , dont Plutarque parle quelques lignes plus loin, et dont il attribue l'invention à Polymneste. (2) Plutarque, vie d'Agis. (90 ) daient à un ton de distanee, de l’aigu au grave , étaient encore les seules connues à l’époque de Terpandre, et même de celle de Sa- cadas d’Argos et de Polymneste de Colophon, moins de 600 ans avant J.-C. , au temps où le nombre des cordes n’était que de sept ou, tout au plus, de huit. On peut donc présumer que les toniques de ces trois harmonies faisaient partie de la gamme primitive diatonique que nous cher- chons; qu'elles appartenaient à l'octocorde en même temps qu'à l'heptacorde, et, par conséquent, au tétracorde des moyennes ; ce qui ferait de l'harmonie lydienne le ton de la mèse,que nous avons déjà rendu par un 4; de l'harmonie phrygienne , le ton de l’indi- catrice diatonique ou du so/; et de l'harmonie dorienne, le ton de la parhypate,ou du fa.Ainsi en considérant l'origine des harmonies au lieu de leur diapason , nous sommes conduits à appliquer les noms de notre gamme, comme ceux de l'échelle mobile des Grecs, au trope lydien, et nous devons en conclure que la gamme du ton lydien, transformée en échelle mobile pour les différents tropes, est redevenue fixe dans le système de Gui d'Arezzo, mais en s’ap- pliquant , cette fois, au ton hypodorien. La position quej'assigne aux anciennes harmonies sur la gamme primitive, concorde d'ailleurs, avec les détails que les auteurs nous ont laissés sur chacune d'elles. La dorienne , à cause du cas particulier qu'on en faisait dans toute la Grèce, conserva toujours sa forme simple et originelle. On continua de n'y employer que les notes ré, ut, sib, la, sol, fa, mi, après que l’échelle se fut augmentée du tétracorde des hypates. On y supprima même encore dans le chant , la nète conjointe ou le ré, du moins, jusqu'au temps de Terpandre , afin de ne pas sortir du registre des beaux sons de la voix. Les notes uf, si, la, sol, fa, mi, déterminent suffisamment le ton de fa. Ce ton était relativement grave et facile à entonner. Le mode en était majeur, et, par conséquent, majestueux et naturel , nullement tourmenté. C'est exactement l'idée qu'on s’en fait d'après Platon. Le ton de fa, avec le sb., a une forme d'octave pareille à celle du ton d'wt (91) avec le sig. J'aurais pu fairerépondre l'harmonie dorienne au ton dut, aussi bien qu'au ton de fa, si, déjà, je n'avais été conduit par l’analogie, à rendre la mèse de l'heptacorde et de l'octocorde par un /a. Le tétracorde des hypates, supprimé dans l'harmonie dorienne, reparaissait dans toutes les autres. On y descendait, sans doute, jusqu’à quelque note! principale du ton , afin de le mieux carac- tériser ; et, lorsqu'on n'avait à sa disposition qu'un heptacorde ou un octocorde, on en relàchait quelquefois les cordes graves afin d'y atteindre, comme, d’autres fois, par une tension plus grande des cordes aiguës, on passait la limite du tétracorde conjoint ou disjoint de cette gamme primitive. Quelques passages de Plu- tarque, sur les relâchements ou tensions extraordinaires néces- sitées par certaines harmonies , autorisent ces suppositions. Leton phrygien ou de so devait mieux s'accommoder du tétra- corde disjoint que du conjoint, ou du mode majeur que du mineur; car c'était le ton des trompettes, lesquelles faisaient naturellement entendre le sif et non le si , comme le remarque M. Vincent. Cepen- dant, nous avons vu quel'ode de Pindare était en so/mineur.Un peut présumer que le ton phrygien allait du ré au ré dans l'octocorde, comme le ton lydien ,du mi au mi. Une tension plus grande des cordes, et une différence de deux tons dans le haut,comparative- ment au dorien, pouvaient faire passer le lydien pour aigu chez les chanteurs; et cette acuité, Jointe au mode mineur,propre à ce ton, qui était celui d’une vieille complainte d'Olympe sur la mort de Python, autorisait Platon à l'appeler lamentable, et à l’exclure, par ce motif, de la République qu'il avait rêvée. Mais l'opinion de ce philosophe n’était pas partagée par les Asiatiques , ni même par les Grecs, puisqu'en général, ainsi que nous l'avons vu, ils terminaient de préférence leurs chants sur la mèse , ou dans le mode mineur. Le ton lydien, qui ne le cède en ancienneté à aucun autre, porte justement le nom du trope le plus souvent cité, du trope choisi, comme le serait le plus mâturel et le plus connu, pour les (92) phrases de chant données comme exemples dans les traités. Les quatre fragments antiques (dont la musique est probablement antérieure à l'invention des tropes) n'ont pas tous la même toni- que, mais leurs notes appartiennent toutes, soit au grand, soit au petit système du trope lydien. Je citerai encore un manuscrit grec, traduit par M. Vincent (page 254), et dans lequel les notes de l'échelle diatonique hypo- lydienne sont empruntées au trope lydien, et conservent leurs noms primitifs ; la parhypate du lydien (ou le fa) étant remplacée par la chromatique, ou indicatrice chromatique f[le fa). Enfin, le second auteur anonyme de la même collection, s'ex- prime ainsi: « L'harmonique se divise en 15 tropes, dont le pre- mier est le lydien. » Le rang qu'il lui assigne, entre les 15, ne peut s'entendre ni de l’aigu au grave, ni du grave à l’aigu. Il parait indiquer une espèce de prééminence anciennement reconnue, et justifiée par un emploi plus fréquent. Le même auteur dit, ailleurs, que l'étendue naturelle de la voix (1) est celle du trope lydien. Il est présumable que, pour ne pas excéder cette étendue de deux octaves,on retranchait habituellement les notes du haut ou du bas de l'échelle mobile des autres tropes, et qu'on ajoutaittmême celles qui pouvaient manquer à quelques-uns d’entre eux; de même que, sur les instruments à cordes , le nombre de celles-ci ne changeait pas, mais seulement leur accord. On attribue à Polymneste , dit Plutarque, l'invention de l'har- monie appelée aujourd'hui hypolydienne , c'est-à-dire, du ton de mi. I s’agit, sans doute, ici de Polymneste de Colophon, lequel florissait vers l’an 600 avant J.-C. Cependant, Platon ne fait pas entrer l'harmonie hypolydienne dans son énumération; ce qui peut donner à penser qu’elle est moins ancienne. D'ailleurs, Plu- tarque vient de dire que , du temps de Polymneste, on ne con- naissait encore que les trois harmonies primitives. Quoi qu'ilen soit, l'inventeur y avait, à ce qu'il paraît, beaucoup augmenté le relächement et la tension des cordes ; ce qui signifie probablement (1) Nous avons vu (page 87) que c'était celle de l'échelle d'Aristoxène. 98) que, sans dépasser le nombre ordinaire des cordes, il avait augmenté l'étendue de l'échelle de cette harmonie , en y suppri- mant quelques degrés. Suivant Georges Pachymère (1), le ton le plus ancien après les trois premiers serait le mixolydien, c'est-à-dire le ton de la trite conjointe, ou du s#. Quelques auteurs le disaient inventé par Sapho, qui vivait aussi vers l’an 600 avant J.-C. D’autres pré- tendent qu'on n'en fit pas usage avant Pythoclide, personnage connu pour avoir donné des lecons de musique à Socrate et à Périclès. L'échelle du mixolydien excédait, sans doute, la limite du tétracorde des conjointes, puisqu'on la disait fort aiguë. Elle allait peut-être jusqu’au /a, dominante de ce ton, en perdant une ou deux notes au grave. Plus tard, l'addition du tétracorde des hypates lui donna un sië dans le bas, en opposition avec le s&, ou la tonique placée dans le haut; ce qui dut faire un fort mauvais effet, qu'on s’empressa de corriger en baissant d'un demi-ton le sig du tétracorde des hypates , ou, ce qui revient au même, en supposant une disjonction entre ce tétracorde et celui des moyen- nes, du réau mi. Mais Lamprocle , trouvant cette disjonction irré- gulière ou inusitée, la changea de place. I la mit plus haut, dit Plu- tarque (c'est-à-dire à l’aigu du tétracorde des moyennes, ou entre le la et le si ) et l'échelle de la nouvelle harmonie mixolydienne » alla, comme qui dirait de la paramèse à l’hypate des hypates » ou du si; aigu au siä grave. Il est clair, par la raison énoncée plus haut, que l'échelle n’était pas limitée par la paramèse , qui n'est que la note la plus basse du tétracorde des disjointes. Plutarque ne prend son point de départ à la paramèse , que parce que c'était la tonique de ce ton réformé ,'qui répond, dès-lors , au mixolydien aigu d’Aristoxène et d'Euclide. Le mixolydien ordinaire ou grave, c’est-à-direle ton de si, s’employait dansla tragédie, avecle dorien, dont il était le relatif sous-dominant. Aristote (2) nous apprend, de plus , que ce mixolydien n’y était employé que dans les chœurs, parce qu'il était trop aigu pour le dialogue. (1) Ibidem , page 552. (s) Problèmes. Section 19, chap. 36, probl. 49. (94) Un poète antérieur, aussi, à Socrate, Pratinas, qui florissait vers l’an 500 avant J.-C. , parle, dans ses vers, de deux autres tons, l’iastien et l'éolien : » Ne suivez-pas, dit-il, un ton trop aigu, » un ton syntonique (il veut, sans doute, désigner le mixolydien , » ou lesyntonolydien, que je crois être le mixolydien aigu d’Aris- » toxène) ni un ton trop grave, tel que l'iastien; prenez l’éolien , » qui est intermédiaire, ou qui tient un juste milieu. Ce ton, » ajoute-t-il, convient aux jeunes gens avides de chansons. » Ce même ton, suivant Héraclide de Pont et Athénée, convenait aux peuples livrés aux plaisirs. On reconnaît ici le lydien relâché de Platon, c'est-à-dire, le lydien grave d’Aristoxène. L'iastien , qui figure dans l'énumération de Platon, répond au ton de so ou faë. Il exigeait probablement le tétracorde des dis- jointes, sans lequel il eût été hors d'harmonie ou manquant, à la fois, de dominante et de sous-dominante. Il passait,chez les uns, pour grâcieux ou pour efféminé. D'autres disaient qu'il y avait deux iastiens , d’un caractère fort différent. Héraclide de Pont prétend, de même, qu'on donnait le nom d’éolien à un ton fort différent du premier : au ton qui, depuis, a été appelé hypodorien. C'était « l’éolien aux sons graves » que le poète Lasus d'Hermione (1)}avait employé dans son hymne à Cérès et à Mélibée. Le caractère de ce ton, qui répond à do, tenait du dorien et de l’éolien. L'opinion de Platon , sur les caractères des différentes harmo- aies, est confirmée par celle des auteurs subséquents. Pour montrer à quel point la phrygienne était excitante et bachique, et la dorienne, grave et calme, Aristote raconte que Philoxène, ayant essayé de composer un dithyrambe dans cette dernière harmonie, avait dû y renoncer, et retourner à la phrygienne. Aristote ajoute que l'harmonie lydienne convenait surtout aux enfants; la do- rienne aux adolescents , et les harmonies relâchées ou bémolisées aux vieillards. (1) Lasus d'Hermione est cité comme l’auteur du plus ancien traité de musique écrit en Grec, Il appartient à la fin du VIe siècle avant J.-C. (95 ) Dans ses problèmes , il fait mention de deux nouvelles harmo- aies : l'hypophrygienne et l'hypodorienne, toutes deux trop graves pour les chœurs de la tragédie, mais, par la même raison, conve- nables aux scènes dialoguées. L’hypophrygienne, suivant lui, était propre à exprimer l'ardeur guerrière, à exciterle délire bachique. L'hypodorienne était majestueuse et calme, et appropriée surtout à la cithare. Elles ressemblaient donc respectivement à la phry- gienne et à la dorienne. Nous n'avons qu'une partie des ouvrages d’Aristoxène: peut- être en a-t-on retranché ce qui ne s’accordait plus avec les idées nouvelles introduites par l'invention des tropes.Mais, nous savons, par Euclide, qu'il comptait 13 harmonies échelonnées par demi- ton, depuis l'hypermixolydienne, ou l’ut aigu, jusqu'à l’hypo- dorienne ou l’ut grave. Celles qu'il appelait graves tenaient préci- sément la place de nos 5 bémols. Ainsi , il donnait à la lydienne relâchée le nom de lydienne grave, qui n’est qu’un synonyme. En descendant au-dessous de la dorienne, il répétait les noms des 5 dernières harmonies avec la préfixe kypo, qui annonçait un abais- sement d’une quarte, faisant de ces nouvelles harmonies les tons plagaux ou dominants des 5 anciennes. Il est probable qu'elles avaient, chacune à chacune, non-seulement une certaine ressem- blance de caractère, mais la même gamme sur l'octocorde ou la cithare à 8 cordes ; que, seulement, les cordes extrêmes y rem- plissaient le rôle de toniques au lieu de celui de dominantes. Il faut toutefois en excepter l'harmonie dorienne, qui n'avait pas tou- tes ses cordes, tandis que l’hypodorienne devait descendre jusque l'ut sa tonique. C’est peut-être parce qu’elle n’exigeait pas une grande tension des cordes de lacithare, qu’on la disait appropriée à cet instrument. À en juger par l'application que Vitruve en fait à la construction des théâtres, et à la disposition des vases destinés à y renforcer les sons, l'échelle d’Aristoxène, composée des deux mêmes sys- tèmes de tétracordes que l'échelle des tropes, n'était pas encore devenue mobile. Il semble, toutefois, résulter d’un passage de l’au- ("96 } teur grec, qu'il variait la tension de ses cordes au moyen d'un déplacement plus général que celui qui faisait la différence de ces deux systèmes. Il parle de deux tropes (1), l'un plus aigu, et l’au- tre plus grave, soit que les intervalles du tétracorde y fussent ren- versés, soit que les conjonctions ou les disjonctions y fussent dé placées d’un demi-ton. Peut-être s’en servait-il pour former une ou plusieurs gammes appropriées aux tons bémols (2). Je dis peut- être, car la définition de ces tropes est inintelligible dans la version de Méibomius ; ce que j’attribue à la mutilation ou à la corruption du texte. La théorie des harmonies ou des tons a duré quatre ou cinq siècles après Aristoxène. Euclide, (3) Plutarque, Lucien et Athénée y sont fidèles. Le mot tropes se trouve en passant dans Plutarque, mais, sans explication suffisante. Toutefois, l'expression de dénom- brement , employée à propos de ces tropes , peut faire supposer qu'il en comptait plus de deux. Il a dû vivre assez pour connaître cette nouvelle théorie. Au surplus, depuis longtemps, les harmonies étaient, devenues des tropes, au nom près, L'échelle s'était accrue d’une octave, et plus; le plain-chant était abandonné. Nous ne pouvons nous refu- ser à y voir un progrès, malgré les plaintes de cet écrivain sur les relâchements auxquels on avait soumis même les cordes qui con- tinuaient de s’appeler stables. En supposant que ces changements fussent récents, l’époque de Plutarque n'était pas encore celle de Ia décadence des arts. | (x) Aristoxène, livre 3, page 59, de Meib. (2) Par exemjle (pour le diatonique et le grand système), Ja gamme d6, sb lab , sol. fa, mib, reb , do, au lieu de do, si, la, sol, fa, mi, ré, do. (3) Euclide, l’auteur des éléments de géométrie, vivait sous le premier des Pto- lémées, vers l'an 300 avant J.-C. Proclus, son commentateur, lui attribue l'intro- duction harmonique, et le canon harmonique. Mais M. Vincent , remarquant de uotables différences théoriques dans ces deux ouvrages, pense que le premier, qui suit la doctrine d’Aristoxène, n’est pas l'œuvre d’Euclide le géomètre, Voir plus haut, page 81, note (4), ce qui est dit à propos des tons d'Euclide. Lucien et Athénée sont du %.° siècle de notre ère. PS ) Ptolémée, dans le IL.° siècle de l’ère chrétienne, ne trouvant pas de motif raisonnable à la succession de tons semblables, à un demi-ton de distance, en réduit le nombre à 7, qui diffèrent par la forme de l'octave. 11 leur donne des noms pris parmi les anciens, mais sans leur conserver leurs anciennes relations. Cepen- dant ; il se sert encore de l’échelle fixe d’Aristoxène, puisqu'il dit que les plus beaux sons de la voix se prennent vers le milieu du système parfait, entre l'hypate des moyennes (le mi) et la nète, ou plutôt la paranète des disjointes (le ré aigu). C'est sur les 7 cordes diatoniques de cet intervalle qu’il place ses 7 tons. Au reste, sa théorie n'a pas prévalu, du moins dans l'Occident. On lui a préferé celle des tropes , qui paraît remonter à la même époque, et que l'on trouve développée dans Aristide Quintilien, Alypius, etc. En traduisant en notes modernes les cordes principales des an- ciennes harmonies , je n’ai considéré que les formes d’octave com- parées à celles du plain chant. Il est présumable que c’est en grande partie à ces différences de formes et non à des différences impalpables comme celles des tons modernes (le degré d'acuité mis à part), que se rapportent les différences de caractère signalées par les anciens. Les tensions et relàchements , ajoutés aux an- ciennes harmonies, pour les transformer en tropes , avaient dù affaibli sinon anéantir ces différences. Il ne restait aux tropes que les commas additifs ou soustractifs attachés naturellement à cer- tains degrés de la gamme par l'effet des modulations (1. Mais nues non SN sb Le jnllobgs mur à migiférregut 036 fegyah sx ler (1) Les différences de caractère que nous observons dans les tons modernes paraissent tenir à l'impression d’un écart, plus ou moins grand, relativement aux degrés de la gamme naturelle, Nous ne cessons pas d’avoir celle-ci en vue, lorsque nous en solfions une autre, Mais nous pouvons la supposer fixe ou mobile, quant au diapason, 11 est certain qu'un abaissement des divers degrés de cette gamme, relativement à la tonique, rend le ton triste ou mélancolique. Cet effet est très-sensible dans le inode mineur. 11 l’est même , dans le mode majeur , lorsqu'on y bémolise la «8 et la 6° note 1 ton, L'effet contraire résulte des dièses où de la surélévation des degrés de la gamme. Celle-ci en devient dure. Une différence d'un demi-ton est palpable. Tout le monde connaît donc l’efiet des dièses ei des bémols. Une différence d’un seul comma , où d’un 8. de ion, LA À (98) leur effet ne devait pas ètre le mème chez les Grecs que chez nous. La préférence donnée à un ton, un mode, un instrument particu- lier, etc., peut déplacer ces commas. Je n’entreprendrai donc pas, à l'exemple de quelques auteurs , une comparaison qui me paraît impossible. Le système de notation des Grecs mérite, au point de vue de l'histoire, un examen sérieux. Aristide et Boëce en attribuent l'invention à Pythagore; mais , s’il faut en croire Héraclide de Pont, contemporain d’Aristote, Terpandre antérieur à Pythagore, aurait déjà noté la musique de ses propres poèmes et celle sur la quelle il chantait les poèmes d’Homère dans les jeux publics. Les notes de musique du temps de Terpandre commé de celui de Py- thagore, devaient être fort peu nombreuses , d’après ce que nous avons vu précédemment. Celles d'Alypius forment 70 paires, sa- voir: 70 notes pour les voix et 70, à l'unisson des premières, pour les instruments. La clef nécessaire pour retrouver, dans ces 70 peut encore , à la longue, affecter l’auditeur comme l’exécutant. Leur attention, en est, toutefois , distraite par d’autres sensations plus fortes. L’exécutant doit comparer, d’après notre système de notation, la gamme qu’il chante où qu’il joue, avec la gamme naturelle fixe, dont elle diffère par ses dièses où ses bémols. Il est donc préoccupé de ces différences d’un demi-ton, lorsque, par la superposition des deux toniques , il n'aurait à apprécier que des différences d’un comma. L’au- diteur, de son côté, a beaucoup de peine à faire abstraction du diapason. Le brillant qu'un ton doit à la rectitude de ses consonnances s’efface devant l'éclat des cordes jouées à vide sur le violon ou la basse, et l’altération des inter- valles, devant les imperfections d’une exécution ordinaire, 11 n’en était pas ainsi des harmonies. Toutefois , leur caractère distinctif ne tenait pas uniquement à la forme de l'octave. 11 se ressentait du degré d'acuité des cordes principales, dont le nombre, d'ailleurs, n'était pas le même dans toutes, et, enfin, de la nature des instruments auxquels ces harmonies étaient affectées. Ainsi les trompettes , qui n'étaient que dans un seul ton, le phrygien, contribuaient à lui donner le carac- tère guerrier qu'on luirecennaissait, Les anciens avaient aussi observé les différences de caractère de leurs genres et de leurs nuances. Voici ce qu’ils en disaient, d'une manière générale : « Les genres » les plus mous (c’est-à-dire, ceux dont les cordes variables étaient le plus relà- » chées, relativement aux cordes principales ou stables) resserrent l’Ame et l’éner- » vent : les plus durs (ceux dans lesquels les cordes variables étaient le plus tendues) la dilatent et l’excitent. » Voir les notes de M. Vincent, page 391 ; Ptolémée , liv. 141 chap, 12, page 30 ; et Georges Pachymère , chapitre 15. ( 99 paires , les diverses cordes des 15 tropes paraît avoir fait l'objet d’un enseignement verbal. Les livres n’en disent rien ou laissent supposer une espèce de mystère. De ces 70 paires, les 16 plus aiguës ne sont que la reproduc- tion avec la seule addition d’un accent aigu , de 16 autres paires appliquées aux sons plus graves d'une octave. Les 16 premières sont évidemment ajoutées après coup pour satisfaire à une exten- sion de l'échelle à l’aigu. Comme leur usage se déduit facilement de celui de leurs répliques, je n'en parlerai pas davantage, et dans la suite, je désignerai les 54 paires restantes par leur nu- méro d'ordre de l’aigu au grave (1). Meïbomius avait déjà remarqué que les 54 notes vocales se composaient de deux alphabets de 24 lettres, dont le premier était conservé intact , et le second altéré de différentes manières, mais rangés tous deux dans leur ordre naturel, et deplus, à l’aigu ou avant ces deux alphabets, des six dernières lettres d’un troisième alphabet , dénaturé d’une autre façon. Meïbomius avait aussi remarqué la disposition des notes instrumentales par groupes de trois, offrant successivement la même lettre tournée en trois sens différents. Cette notation a exercé la sagacité de M. Vincent, qui pré sente sous une forme piquante ses observations , et des règles au moyen desquelles on peut trouver dans la série des 54 notes vocales et de leurs 16 répliques, toutes les cordes des 45 tropes, suivant les trois genres et les deux systèmes. En voici le résumé : M. Vincent commence par faire remarquer que la série des 54 notes vocales ne diffère pas de celle qu'Aristide Quintilien ap- plique à une ancienne échelle pythagoricienne en dièsis. Il fait voir ensuite : {-° que l'intervalle de la quarte, ou de deux cordes de même ordre dans deux tétracordes conjoints, répond à 9 diésis, ou va de la 1.'e lettre à la 10.6, de la 2.e à Ja 11,2, etc. ; 2.0 que la quinte répond à 12 diésis, l'octave à 21, et le ton de disjonc- tion des tétracordes à 3. Ces nombres 3, 9, 12 et 21 étant tous ———_—————— (x) Voir le tableau final , où ces 54 paires de notes sont rangées par ordre. 100 multiples de 3 , il était naturel de grouper les dièsis 3 à 3. C'est ce qu'il a fait ; mais il restait à en tirer une série de demi-tons, puisque c’est par demi-tons que les tropes sont échelonnés. Il y parvient au moyen d'exclusions qui rappellent celles du crible imaginé par Eratosthène pour la recherche des nombres pre- miers. Dans chaque groupe de 3 lettres, il supprime d’abord celle du milieu, c’est-à-dire les N.°5 2, 5, 8, 11, 14, etc. Ensuite, ïl supprime le N.° 10 placé à une quarte du N.° 1, le N.° 22 à une quinte du N.° 19, le N.° 31 à une quarte du N.° 22, le N.° 40 à une quarte du N.° 31, et le N.° 52 à une quinte du N.° 40. Après ces exclusions , 1l lui reste pour former la série des demi-tons : 1304, 6, 7,9,49,M3,15%16,-18. 19,919 092 27, etc. C'est dans cette série qu'il faut prendre les cordes stables des tétracordes , à commencer par la nète des conjointes du trope hyperphrygien, et en allant de l’aigu au grave. Le N.° 51 s’ap- plique en conséquence à la proslambonomène du trope hypodo- rien, ou à la note la plus basse. Ainsi les 3 derniers diésis n'a- vaient pas d'emploi , si ce n’est peut-être pour les hypoproslam- banomènes. Il reste à déterminer les deux cordes moyennes ou variables de chaque tétracorde. C’est à quoi M. Vincent parvient au moyen des règles suivantes : la 3.2 corde dans les trois genres est, sans excep- tion, à un diésis de la 4.°. La 2.° corde n’est toujours à un diésis de la 3.° que dans le genre enharmonique. Dans le chromatique, elle est seulement la plus aiguë du groupe auquel appartient la 3€, laquelle, d’après la règle précédente, ne peut être que la plus grave ou la moyenne. Lorsque , par suite , la 2. corde et la 3.° se suivent alphabétiquement dans le chromatique comme elles le font dans l'enharmonique, on distingue la 1." dans le premier de ces deux genres par un accent aigu, qui sert d’ailleurs à distin- guer la corde chromatique de celle du trope inférieur. Enfin , dans le genre diatonique , la seconde corde se prend (401) dans l'échelle des demi-tons à 3 demi-tons au-dessus de Ja 4.° Après avoir ainsi donné la clef de la notation musicale des Grecs, M. Vincent s'attache à en expliquer le sens. « En premier » lieu, dit-il (1), il faut observer que la notation dite de Pytha- » gore ne saurait être l'œuvre de ce philesophe, du moins sous » la forme où nous la connaissons dans les tables d’Alypius. De » cela, il y a plusieurs raisons à donner : d'abord, que le sys- » tème musical n'avait de son temps qu'une étendue très-bornée, » puisque c'est à lui qu’on doit la transformation de l’heptacorde » en octocorde ; et il ne paraît pas que du temps d'Aristote, à » en juger par ses problèmes, le système se füt beaucoup étendu, » etc. — En second lieu, ni Aristoxène, ni Euclide, ni Nico- » maque, ni Théon de Smyrne, ni Ptolémée, ni Plutarque ne » font la moindre allusion à la notation qui nous occupe. C'est » dans Aristide Quintilien, Gaudence, Bacchius, Porphyre, » tous auteurs beaucoup plus modernes, qu'il commence à en » être fait mention ; et Aristide Quintilien , en l'exposant , a soin » de dire qu'elle remplace une notation plus ancienne disposée » par moitiés et par quarts-de-ton. M. Vincent rattache la notation instrumentale aux signes cé lestes des cabalistes par de curieux rapprochements. — Je ne les reproduirai pas ici, mais je hasarderai quelques nouvelles re- marques sur certaines particularités de l’une et de l’autre nota- tion qui me semblent autant d'indices pour en retrouver les ori. gines. L'instrumentale , où les lettres sont sans ordre apparent et trois fois moins nombreuses que dans la vocale, pourrait bien avoir précédé celle-ci, et conservé tout ou partie des signes primitifs. Des trois positions que chaque lettre y affecte, c'est, pour l'or- dinaire, la 3.° (celle qui désigne le son le plus grave) qui est droite. Or, en regardant la troisième note de chaque groupe comme la note naturelle, et les deux premières comme les notes diésées {1} Page 136. (109) ou tendues , on trouve que la série de ces notes naturelles , c’est a-dire celle des N.°5 3,-6, 9,:49:,145 ,:18 1911094 etc} répond à l'échelle diatonique mi, ré, ut, si, la, sol, fax, mi, etc., qui appartient au ton majeur de so/, ou au ton mineur de mi. Cependant elle ne se confond pas exactement avec l'échelle dia- tonique du trope hypolydien, où le demi-ton est d’un diésis au lieu de trois, et qui d’ailleurs n'a rien qui justifie une préférence de ce genre. Quelle est donc la sigmfication du choix de l’échelle ci- dessus ? Serait-ce la première harmonie phrygienne, affectée spé- cialement aux instruments à vent? La manière dont les flûtes étaient percées, même dans les derniers temps de la musique grecque, ne les appropriait qu'à un certain nombre de tropes, ceux peut-être dont elles pouvaient rendre les notes principales, qui se confondaient, pour la plupart, avec les notes de l’harmo- nie phrygienne. « L’harmonie phrygienne, dit le premier ano- nyme de M, Vincent (1), a la prééminence, principalement pour les instruments à vent ; témoins les premiers inventeurs, Mar- » syas, Hyagnis, Olympe, qui étaient tous phrygiens..….. Les joueurs de flûte font usage des 7 tropes suivants : l’hyperéo- » lien, l'hyperiastien , l’hypolydien, le lydien, le phrygien, » liastien, l'hypophrygien. » On remarquera que les nètes des conjointes de ces 7 tropes, {c’est-à-dire les premières notes du pe- tit système, puisqu'elles se prenaient toujours de l'aigu au grave), forment précisément l'échelle diatonique ci-dessus. Au surplus, quelle que soit l’origine de celle-ci , si on en partage les tons en- tiers en deux demi-tons, et qu’on représente les sons intermé- diaires 1er ÿ mi, Péri AT, 1ebBee parles N° 4, 1, LABS 1h 128: etes (r) Page 13. (103) qui suivent immédiatement ceux qui servent à désigner mw, re, si, la, fa*,etc., on aura, par l'intercalation de cette série dans la précé- dente , l'échelle fixe des demi-tons , sAVOIr : 3, 4, 6, 7, 9,12, 13, 15, 16, 18, 21,22, 24, etc. répondant à mi, ma, ré, ré, ut, etc. Ce mode de formation explique pourquoi certains demi-tons renferment 3 diésis, d’autres 2, d’autres un seul, et pourquoi la mesure de 9 diésis pour la quarte et 12 pour la quinte y souffre des exceptions, de même que dans les tropes hypoiastien et hy- perphrygien , où la mèse n'est pas à 9 diésis de la nète des con- jointes , ni à 12 diésis de l'indicatrice diatonique des fondamen- tales , tandis qu'il y a toujours 21 diésis pour l'intervalle de ces deux dernières cordes. Le système de notation d’Aristide Quintilien et d’Alypius est évidemment formé de pièces disparates , dont quelques-unes peuvent avoir une certaine antiquité. La série des demi-tons pa- raît relativement moderne , puisqu'elle est greffée tant bien que mal sur une échelle en diésis, qu'on n’a sans doute laissé sub- sister que parce qu'elle avait de profondes racines dans les habi- tudes. Quant à cette dernière , elle pourrait bien remonter jusqu'a Archytas de Tarente. La mesure de 9 diésis pour la quarte, celle de 12 diésis pour la quinte , et surtout la communauté d'un in- tervalle d'un seul diésis pour les trois genres, ont une analogie frappante avec ses divisions harmoniques. Un se rappelle que ce philosophe supposait stables ou communes aux trois genres , la 1.1, Ja 3.° et la 4.° cordes de ses tétracordes, et qu'il exprimait par les nombres suivants, ces 3 cordes prises dans un premier tétracorde , et la première du tétracorde disjoint placé au grave du premier : 36, 28, 27, 24. Or, les différences arithmétiques 8, 9, et 12 { 104) du premier nombre aux trois derniers représentent approximati- vement des intervalles de 8, 9 et 12 unités qu'on a dù appeler diésis. Il est donc possible qu'Archyias , dont le traité de musique est aujourd'hui perdu, mais existait encore au temps de Ptolémée, et sans doute aussi d’Aristide Quintilien , ait lui-même noté, pour la voix, les trois derniers sons dont je viens de parler par la 8e, la 96 et la 12.6 lettres après celle qu'il appliquait au premier son. Ces particularités paraissent même caractéristiques. Les divisions du tétracorde du temps de Pythagore ne présentent rien d'ana- logue , et une notation imaginée du temps d’Aristoxène ou d’'Eu- clide eût sans doute offert 10 lettres au lieu de 9 , par intervalle de quarte , puisque cet intervalle était alors ordinairement partagé en 10 quarts de (on. M. Vincent, expliquant un passage altéré de l’un des auteurs grecs qu'il traduit (1), dit que l’on divisait habituellement les voix : 1.° en kyperboloïdes ou très-aiguës , qui n’employaient que les 16 notes accentuées, ajoutées à la notation ; 2.°, en voix nétoïdes ou aiguës , qui s’étendaient à peu près entre nos diésis 1 et 13; 3.° en voix mésoïdes où moyennes , entre les diésis 15 et 24; et 4.° en voix hypatoïdes ou graves , entre les diésis 24 et 39. Avant l'addition des notes accentuées ou des voix hyperbo- loïdes , l’échelle musicale se terminait donc au fa, à l’aigu, ou à la dominante duton mixolydien. Cette note paraît avoir existé du temps d’Archytas et même avoir été dépassée par Phrynis et les autres novateurs. Mais le premier essai de nota- tion vocale doit être antérieur à l'addition des 6 lettres du 3.° al- phabet. L’échelle allait peut-être alors de l'alpha à l’oméga , ou bien de l’oméga renversé à l'oméga droit, afin de comprendre, par une lettre de plus, le nombre rond de 24 diésis au lieu de 23. Ces limites, ou le ré aigu et le do grave, sont sans doute aussi celles de l'ennéacorde antique, comme celles des voix ee ee (1) Page 1ar et uote EF. é 6" Me / (105) nétoïdes et mésoïdes réunies, comme, plus tard, celles de la mèse dans les 15 tropes. Les Grecs avaient des signes pour représenter, non seulement les sons, mais encore les divisions du temps, les pauses, demi- pauses, soupirs , demi-soupirs, etc. On trouve, pour la première fois, ces signes dans l’un des anonymes (1). Les syllabes longues ou brèves des vers grecs indiquaient d’ailleurs naturellement la durée des notes. Les pieds étaient les mesures, complétées quel- quefois par des silences, et divisées en temps battus et levés. Je n'en dirai pas davantage sur cette partie de la musique, qui sort du cadre que je me suis donné (2). Je croirai avoir assez fait, dans la mesure de mes forces, si les discussions très-élémentaires dans lesquelles je suis entré peuvent éclaircir quelques points d'histoire relatifs à la formation comme à l'usage de la gamme et servir à établir, ainsi que je me l'étais proposé autrefois (3), la légitimité de notre division de l’octave en 7 et en 12 intervalles, et la préfé- rence due aux combinaisons des consonnances , comme bases des valeurs acoustiques de nos notes naturelles ou accidentées. (1) Page 48. (2) On peut consulter, au sujet du rhythme et du mètre, l'ouvrage souvent cité de M. Vincent, ainsi que son analyse du traité de Saint-Augustin sur la musi- que, mémoire Ju à l’Acadamie des Inscriptions et belles lettres, le 19 janvier 1849 , et inséré dans le journal général de l'instruction publique (28 février et 3 mars 1849.) Je crois opportun de rappeler à ceux de nos amateurs de musique que leurs goûts portent à l'étude des principes ou de l’histoire de cet art, que le pre- mier travail de M. Vincent, est à la disposition du bibliothécaire de la ville, comme tous les livres de la bibliothèque particulière de la Société nationale. Depuis la lecture du présent mémoire, j'ai appris que M. Vincent, à qui revient de droit cette tâche, s’occupait d’une traduction francaise d'Aristide Quintilien, Il est à désirer que cette traduction soit suivie de celle des autres auteurs rassemblés par Méibomius , dont l4 version latine est devenue si rare qu’on ne la trouve plus que dans un petit nombre de bibliothèques publiques. (3) Dans un rapport lu en novembre 1626. ( 406 } ERRATA. Page"T1, ligne 31, après en usage alors, ajoutez : et peut-être aussi la paramèse, dont on faisait quelquefois la 3.° corde du même mstrument. Page TT, ligne i5, au lieu de ce que font aussi, lisez : ce qu'ont aussi en vue. Page M, ligne 17, après le ton des trompettes, ajoutez la note : Le mode majeur paraît également convenable à l'harmonie phrygienne, dans le genre enharmonique. Il est présumable que la tierce majeure si-so/ lui servait de diton, comme la tierce majeure /a fa, à l'enharmonique lydien, et que le demi- ton do-si du tétracorde disjoint était commun aux deux gammes; ce qui fait que Plutarque, à propos de la division du demi-ton, ne mentionne que les harmonies lydienne et phrygienne, bien que les premiers essais d’enharmoni- que eussent été faits dans la dorienne, Ici, probablement , le demi-ton do-si était remplacé par le demi-ton sik la, qui tenait immédiatement à la mèse, et que nous savons avoir été incomposé dans l’origine. Le même auteur nous apprend que le lichanos (le sol) était supprimé dans l’enharmonique derien, où le diton se prenait de la mèse (la) à la parhypate (fa); enfin qu'Olympe conduisait sou- vent sa mélodie sur cette dernière note, quand il jouait dans le ton dorien ; ce qui ne doit pas surprendre, si, comme je le pense, elle en était la tonique. Page 96 , ligne 13, après en passant dans Plutarque , ajoutez la note: Dialogue sur la musique. Dans le passage suivant de sa dissertation sur l’inscrip- tion Er du Temple de Delphes, Plutarque semble désigner plus particulièrement les 15 tropes , partagés, comme on sait, en 3 groupes ; les 5 moyens, les 5 graves, les 5 aigus : «, Sans parler, . . . . . des $ premiers fons, modes (tropes) où harmonies, » comme on voudra les appeler, qui varient plus cu moins du grave à l’aigu, » suivant que les cordes sont plus ou moins tendues, tandis que les autres sont » graves ou aiguës, etc.» (Traduction de Ricard.) On peut croire que Plutarque avait également en vue la nouvelle théorie des tropes lorsqu'il emploie le mot mèses au pluriel pour désigner la place du demi- ton partagé, dans le genre enharmonique, depuis l'époque d'Olympe, Chaque trope avait , en effet , sa mèse propre. TABLEAU DES NOTES DE MUSIQUE. = 4-—— N° Notes Notes N° Notes Notes N° Notes Notes d'ordre Voc. 1nst d'ordre. Voc. [nt dordre. Voc Inst 19 NhRhkxkPiimEtw zh ant es ne x Ni: 2 ni ï CR ENS - M see M ù COTE RENE 4 X À 29 T1 J ABLE. 24 UE 53... Die Mt NI D, 2 |: On ORNE CT en eh / 26 = TS TA cr SES N 27 © F 45 Q DO D |: X° ul 4. u Dm MN + 0 4 12 Z sg 0 NEA 48 3° D > 3: NI di). OV 52 R- LA | 41 +» I « 1 : P À E, ee # = + , or A RS, _ is RSR | À En re) L.Dmel, Elle (107) CHIMIE. SUR LA PRODUCTION DIRECTE DES HYDRACIDES , À L'AIDE DES CORPS POREUX. Par M. Bin CoRENWINDER, membre résidant. Lorsque Doebereiner fit connaître la propriété remarquable du platine divisé de provoquer des actions chimiques, il fut facile de prévoir qu'il y avait dans ce fait curieux le germe de nom- breuses découvertes intéressantes, soit par leur portée scienti fique , soit par leur application possible à l'industrie, souvent par la lumière qu’elles apportent dans la théorie des phénomènes paturels. Tousleschimistes connaissent lesexpériences que fit M.Kuhlmann, avec du platine divisé ou en éponge , expériences par lesquelles il expliqua d’une manière satisfaisante les circonstances de la nitri- fication. On se souvient que , entre autres actions importantes , ilsignala la formation de l'acide azotique avec l'oxigène et l'ammo- niaque, et réciproquement celle de l'ammoniaque avec l'hy- drogène et le bi-oxide d'azote ou l'acide hypoazotique. Le but de ce mémoire est de faire connaître les résultats de quelques expériences nouvelles que j'ai faites à l'aide des corps poreux. Je suis parvenu, par leur intermédiaire, à combiner directement l'hydrogène avec différents métalloïdes , tels que l'iode , le brome, le soufre et le selenium qui ne se combinent pas avec lui, par l’action seule de la chaleur. Lorsque les circons- tances le permettaient, j'ai fait usage de mousse de platine ; dans le cas où ce corps aurait éte altéré par le métalloïde { 108 ; employé, j'ai remplacé la mousse de platine par des fragments de pierre ponce calcinée. En opérant de cette manière , j'ai pu produire directement les hydracides minéraux suivants : Avec l'éponge de platine, les acides lodhydrique , Bromhydrique ; Avec la ponce , les acides Sulfhydrique , Selenhydrique. J'ai essayé encore un grand nombre d'autres expérienees. Les résultats obtenus n'ont été ni assez intéressants, ni assez inattendus pour qu'il soit utile de les rapporter. Je signalerai cependant ce fait, que le phosphore et l'hydrogène n'ont pas d'action l’un sur l'autre lorsqu'on les fait passer dans un tube contenant de la ponce chauffée graduellement jusqu’au rouge. Si l’on se rappelle que M. Kuhlmann à constaté que l'azote et l’hy- drogène sont également dépourvus d'action réciproque: dans les mêmes circonstances , on aura un nouvel exemple des analogies nombreuses que présentent le phosphore et l'azote dans leurs relations avec les autres corps. Acide iodhydrique. Jusqu'à présent l'iode et l'hydrogène n'ont pas été combinés directement, même en faisant passer simultanément ces deux corps à travers un tube de porcelaine chauffé au rouge ; mais si l'on fait absorber de la vapeur d'iode par de l'éponge de platine, et si l’on soumet ensuite cette éponge à l’action d’un courant d'hydrogène sec dans un tube de verre chauffé modérément , il ya production à l'instant même d'épaisses vapeurs d'acide iodhy- drique, mélangées d'hydrogène en excès En opérant ainsi, l’action est nécessairement limitée, et une grande quantité d'iode non altéré est entraînée par l'hydrogène; aussi, vaut-il mieux porter successivement la vapeur d'iode'en ( 409 |) contact avec la mousse de platine, et pour y parvenir, je me sers de l'appareil suivant : 1 APE LE D Je fais arriver lentement un courant d'hydrogène taré et desséché par le tube T, qui s'enfonce de un décimètre environ dans le tube principal. Dans celui-ci , de A en B, je place quel- ques fragments d'amiante , de B en C de l'iode, de C en D de la mousse de platine récemment calcinée. L'appareil étant plein d'hydrogène, je porte le platine à une température de 3 à 400°, et je provoque , avec une faible chaleur, une production très-lente de vapeur d'iode , de manière qu'il en échappe peu et point même à l’action de la combinaison. On peut adapter à cet appareil une première éprouvelte contenant un peu de sulfure de carbone , qui retient fort bien l’iode entrainé , puis un ou deux flacons contenant de l’eau distillée pour absorber l'acide iodhydrique formé. On obtient ainsi, en peu de temps, une dissolution de cet acide, qu’il suffit de porter à l’ébullition pour la débarrasser du peu de sulfure de carbone entrainé par le courant d'hydrogène. Cette dissolution est alors d’une pureté parfaite , ainsi que je m'en suis assuré par toutes les réactions nécessaires. Acide bromhydrique. On sait que M. Balard a combiné directement le brome et l'hy- drogène en faisant passer simultanément ces deux corps dans un tube de porcelaine chauffé au rouge. Dans ces conditions l’action est nécessairement limitée , j'ai pu la rendre complète en utilisant l'éponge de platine et produire de l'acide bromhydrique parfai- tement pur. Pour faire cette expérience, je prends un tube de verre rempli de mousse de platine et j'y adapte, à une même extrémité, une petite cornue contenant du brome et un appareil produisant de i hydrogène sec. La cornue est placée dans un bain d'eau chauffée (440) modérément, et le tube est entretenu à une température rouge sombre. En opérant avec soin, on peut transformer tout le brome en acide bromhydriqne, qu'il est facile de recueillir dans l’eau. Acide sulfhydriquz. En faisant traverser par du soufre en vapeur et de l'hydrogène sec un tube de verre contenant des fragments de pierre ponce chauffés à 400° environ, il se produit de l'acide sulfhydrique en abondance. La disposition d'appareil est la même que pour pré- parer l'acide iodhydrique. Il est inutile de faire observer que le soufre est mis de B en C et la ponce de C en D. Acide selenhydrique. La facilité avec laquelle le soufre et l'hydrogène se combinent sous l'influence de la ponce, me fit prévoir qu'il en serait de même de l'hydrogène et du selénium. En opérant dans les mêmes conditions, on obtient l'acide selenhydrique, reconnaissable à son odeur caractéristique, à son action désagréable sur les membranes du nez, en un mot à tous ses caractères bien distincts. Ces expériences démontrent d'une manière synthétique la composition des acides iodhydrique, sulfhydrique , selenhy- drique. On n'avait certainement aucun doute sur la nature des éléments qui forment ces hydracides; l'analyse nous avait suffi- samment éclairés à cet égard. Mais il est évident que l'intérêt de la science s'accroît quand les preuves sont multipliées et quand les deux méthodes d'investigation, l'analyse et la synthèse, con- duisent l'observateur à la découverte de la vérité. L'usage des corps poreux dans les réactions chimiques est di- gne de fixer l'attention ; il y a dans ces corps une force puissante, peu dispendieuse, qui permet souvent d'atténuer l'action du ca- lorique ; qui d'autrefois , facilite des combinaisons qu'un excès de calorique détruirait. Cette force est destinée sans doute à s’intro- duire un jour dans les procédés de nos arts et de nos industries. KL ) NOTE SUR LA GERMINATION. (Par M. B. CoRENwINDER , membre résidant.) Depuis longtemps on sait que pendant la germination, il se développe dans la graine, et en particulier dans celle des céréales, un acide organique sur la nature duquel les chimistes ne sont pas d'accord. Les uns considèrent cet acide comme de l'acide acétique ; d’au- tres, comme de l'acide lactique. Ainsi, M. Boussingault dit en parlant du phénomène de la ger- mination dans son excellent Traité d'Economie rurale, tome I[.®", page 37 : « Il est douteux que les actions chimiques de la germination soient aussi simples que le pensait de Saussure. On sait que pendant l'accomplissement de ce phénomène, il y a production d'un acide organique que M. Becquerel considère comme de l'acide acétique, bien qu'il soit plus probable que ce soit de » l'acide lactique.» Cette incertitude sur un sujet aussi important, me donna le désir de recourir à l'analyse pour résoudre la question. J'avais, du reste, le pressentiment qu'en constatant la nature de cet acide, j'arriverais facilement à découvrir le rôle qui lui est assigné et la fonction qu'il exerce dans le phénomène de la germination. On verra, par les expériences que je vais rapporter, que très-pro- bablement je n’ai pas été trompé dans mon attente. J'ai voulu m'assurer d’abord si cette formation d'acide a lieu dans les conditions normales. Pour cela j'ai fait germer des grains de blé dans un jardin, et j'ai vu que le périsperme ramolli présente alors une acidité prononcée aussi bien que lorsque le développe- Sr wr E > (112) ment du germe a lieu dans du sable pur ou sur une assiette hu- mectée avec de l'eau distillée. Je fis germer ensuite environ la contenance d'un litre de blé dans une grande caisse contenant du sable pur. Je laissai les tigelles se développer jusqu'au moment où le grain commençait à se ramollir. A cette époque, j'arrachai les jeunes tiges avec leurs graines. Celles-ci furent broyées dans un mortier, et la par- tie soluble fat séparée par un lavage et une filtration. J'obtins ainsi un liquide limpide, clair, acide que jeconcentrai ra- pidement jusqu'en consistance épaisse. L’addition de l'alcool déter- mina dans cet extrait un précipité très abondant d'une matière cohérente, élastique, présentant toutes les propriétés du gluten et mélangée d’un peu d’amidon, de matière extractive, etc. Le gluten se trouvait donc contenu dans la partie soluble de la graine en germination, La dissolution alcoolique ayant été séparée par la filtration, je la fis bouillir sans perdre de temps pour chasser l'alcool et con- centrer le liquide jusqu'à l’état sirupeux. J'obtins ainsi un pro- duit acide qui fut saturé par du carbonate de soude et desséché. Ce dernier résidu, traité par l’acide sulfurique étendu, me four- nit un dégagement prononcé d'acide acétique. En opérant dans appareil distillatoire , il me fut facile d'en recueillir une certaine quantité et de constater sa présence d'une manière irrécusable. En raison de ces résultats, il ne me paraît pas hasardeux d'ad- mettre que l'acide acétique (ce dissolvant par excellence du glu- ten) se produit pendant la germination pour dissoudre ce prin- cipe immédiat et le rendre, par ce moyen, capable de contribuer à la nutrition de l'embryon. J'ignore si, jusqu’à ce jour, on s'est préoccupé du rôle que joue le gluten dans cette circonstance, il me semble que l'attention n'avait pas encore été appelée sur ce sujet. On se rend compte maintenant du dégagement d'acide carbo- nique qui a lieu lors de la germination. Cet acide se produit im- dubitablement pendant la transformation d'une partie de l'ami- (113) don en acide acétique Si ce n'est pas la l'unique source de pro- duction d'acide carbonique, c'est au moins la seule qui se justilie d'une manière satisfaisante. On s'explique aussi pourquoi il faut le contact de l’air pour que le développement de l'embryon puisse avoir lieu , l'oxigène étant indispensable pour produire de l'acide acétique. = J'ai constaté que si on expose des graines en germination à l'influence des vapeurs ammoniacales, celles-ci non seulement suspendent l'accroissement , mais attaquent en peu de temps les jeunes tigelles qui se desséchent et meurent. Ne faut-il pas ad- mettre que cet effet est dû à ce que l'ammoniaque saturant l'acide acétique , les fonctions du gluten sont par cela même annihilées ? On s'explique par là un fait bien connu des cultivateurs, c'est que certains engrais liquides sont souvent nuisibles à de jeunes plantes au commencement de leur développement. En résumé {.o les circonstances de la germination ne consistent pas seulement comme on l'enseigne exclusivement aujourd'hui dans le fait de la transformation de l’amidon en sucre, mais le gluten qui coexiste dans le périsperme des graminées, est aussi destiné à jouer un rôle dans cette importante fonction; 2.0 Le gluten n'étant pas soluble dans l’eau seule, la nature forme de l'acide acétique aux dépens d'une portion de l’amidon, afin que cette dissolution puisse avoir lieu. Alors le gluten est rendu assimilable et peut contribuer à l'accroissement de l’em- bryon. 1147 ESSAI DE GÉOLOGIE PRATIQUE Nur la Flandre française, Par M. Meucx, Membre résidant. (Suite) (x) DEUXIÈME PARTIE. CONSTITUTION PHYSIQUE DE LA FLANDRE. — DESCRIPTION TOPOGRAPHIQUE. $ LE Situation et étendue. La Flandre française , dont les limites coïncident à peu de chose près avec celles des quatre arrondissements de Dunkerque , Haze- brouck , Lille et Douai , est comprise entre les 50.° degré 15 mi- autes 30 secondes , et 51.° degré 6 minutes de latitude ; et entre les 0 degré 46 minutes à l’ouest et 1 degré 1 minute 30 secondes de longitude à l’est du méridien de l'observatoire de Paris. Ses limites sont : au nord, la mer du Nord et la Belgique; à l'est, l'arrondissement de Valenciennes ; au sud, celui de Cam- . brai, et à l'ouest, le département du Pas-de-Calais. Sa plus grande longueur est de 11 myriamètres 8 kilomètres du nord-ouest au sud-est, entre les bords de la mer à Gravelines et l'extrémité orientale de l'arrondissement de Douai, près du village d'Erre ; et sa plus grande largeur est de 38 kilomètres, du sud-ouest au nord-est, entre La Bassée et le point où le canal de Roubaix coupe la frontière de Belgique. Le département du Nord se rétrécit beaucoup au contact des arrondissements de Lille et d'Hazebrouck. A Armentières il ne forme plus qu'une bande étroite de 6 kilo- mètres interposée entre la Belgique et le département du Pas-de- Calais. (x) Voir le volume précédent, page 119. (115 ) La superficie totale de la Flandre est de 276,125 hectares , où de 27 myriamètres carrés 61 kilomètres carrés 25 centièmes. Cette superficie se subdivise ainsi qu'il suit : Arrondissement de Dunkerque... 72,160 hectares — d'Hazebrouck. .. 69,320 —_ de Lille...... . 87,439 — de Douai....... 47,206 Total égal... 276,125 SIT. Configuration du sol. Le sol de la Flandre est en général très-plat et très-peu acci- denté. Ce sont presque toujours de vastes plaines où l'œil n'aper- çoit que de rares élévations qui se rattachent aux terrains envi- ronnants par des pentes presqu’insensibles. Les monticules dépen- dant de la chaîne de Cassel sont les seuls qui puissent être men- tionnés comme présentant un relief qui les distingue nettement du pays plat situé à leur base. Leur plus grande hauteur est de 158 mètres au-dessus du niveau de la mer. Il y a aussi Mons-en- Pévèle, dans l'arrondissement de Lille, dont la cote est de 107 mètrés (1). À part ces quelques éminences qui toutes affectent la forme de mamelons arrondis, la contrée que nous décrivons est d'une uniformité presque constante. Il n'y a donc presque jamais de différences considérables de niveau à de courts intervalles. Mais si l’on compare deux localités séparées par une grande dis- tance, on trouve souvent des variations notables dans leurs hau- teurs respectives ; seulement ces variations ne dépassent jamais une certaine limite. Ainsi à lexception des sommets que nous avons désignés plus haut et de plusieurs autres petites collines, telles que celles de Faumont, Lewarde, Erchin, Bugnicourt , etc., (1) Nous aurons occasion d'employer souvent l’expression de cote. On dit qu'un point est à la cote 50, à la cote 100, etc, , quand il est situé à 50, à 100 mètres au-dessus du niveau de l'Océan, (116 dans l'arrondissement de Douai; de Wervick, Halluin, Linselles, Bondues, Faches, Bourghelles , Bachy, Genech, Attiches, Mon- chaux, etc., dans l'arrondissement de Lille ; de Watten dans l’ar- rondissement de Dunkerque, et de quelques éminences aux envi- rons de Bailleul et d'Hazebrouck, dont les cotes sont comprises entre 55 et 90 mètres, le sol ne s'élève jamais au-delà de 45 à 50 mètres, le niveau de la mer étant pris pour zéro. Suivons par exemple la route nationale N.° 17, de Douai à Lille et Menin, dont la longueur est de 51 kilomètres, nous trouvons successivement les cotes suivantes : DA DU de à murs et ae 28 m ITS nine, A 19 Mn CUVE. un ec con a nee 40 . HÉNMONES ur sn Ur Re 62 PPAROR datste brune Aie Réne U DES EN 54 BONE MATE sn be ee dope 39 Près la bascule de Pont-à-Marcq. ... 40 Hameau d'Ennetières. ............ 37 Hauteur de Faches,. 4... 5 ÿ | TOR ane ae Pas der dede md 19 Faubourg de La Magdeleme........ O1 + Pont de Marcq." On. Vue" NASA Bone uen nec see RTS AA Mont de Bondues, 7, "om 2 52 RONDS RE ONE PA a Ruisseau entre Roncq et Halluin. .... 18 Halluin, er ee TENUE à 28 Frontière de Belgique. ............ 16 Le long dela route départementale N.° 14 de Lille à Roubaix et à Tourcoing qui a 17,800 mètres de longueur, nous avons : Sur la hauteur de Fives.... ....... _ 39 m. A Mons-en-Barœul............ HE! Au Pont-du-Breucq...... RAT 21 ADI AR cle tes re ne ST D: 92 117 Sur la bauteur du Créchet......... 45 AtRouDaeA ie, MEET (AAC 27 A la rencontre du chemin de fer... .. 34 AReurconE 2 UE ee at Suivons encore la route nationale N.° 41 de Bruxelles à St.-Pol dont le développement dans le département du Nord est de 40 ki- lomètres 557 mètres, depuis la frontière près Baisieux jusqu'a La Bassée. On trouve : Frontière de Belgique. ............ 36 m. Entre Baisieux et le hameau de Sin... 36 MOhérens ee. Re Un Sp 32 Au Pont-à-Tressin. ..........,.... a7 Près du pavé de Sainghin.......... 34 AHellemmess his Me cols idées 30 Phradé Lille: Si ess 19,7 20 De Lille à Haubourdin. .. .......... Lu 29 23 ù A Hub der cat EL te 21 Près du pavé de Santes............ 25 A'Fournes:2 hide mb 44 Mere tbe a angers. 36 Au Mont du Tertre. . 52.121. :,,,.: 30 AtararRasséessen nt alias de 26 De Lille au Pont-Rouge (route départementale N.° 2 de Lille à Ypres), sur 15,445 mètres de longueur, les cotes du terrain sont comprises entre 47 et 23 mètres. Sur la route nationale N.° 25 entre la commune des Moulins et la limite du département du Pas- de-Calais près de Carvin, dans un parcours de 15,000 mètres, les cotes de nivellement varient seulement de 25 à 35 mètres, si l’on excepte la hauteur de Seclin {cote 42) et celle de Faches ‘cote 52). Enfin si l'on parcourt la ligne du chemin de fer de Dunkerque (118) à Lille qui a plus de 20 lieues d’étendue, nous trouvons les cotes de nivellement qui suivent : De Dunkerque à Coudekerque. ..... 23 De Coudekerque à Bergues, ........ 0,5 Ruisseau en face de Socx........... 11 Bissezéelen MARNE CRE IE 29 Rivière de Yser Pan. DE RO 4e 13 FranehéeiATRBRE SU OUR 8 1180 Peôné Bétque vite 20 ag re 71182 Station de Cassel. ........ PA AAA V4 Al Péene) Becquet tee à 0h . 35 Tranchée d'Hondeghem............ 49,7 Bone Bécque:.…. Hunt ai Sue 28 Route départementale N.° 9 de Saint- Omer à Bailleul..44..,5.600. 804 A Station d'Hazebrouck.............. 32 Plaine de la Lys d'Hazebrouck à Pé- POCHES En PR vestes . 17 à 20 m. PÉPORPHISS SAS D MR PANIERS en 33 Route de Lille à Ypres........ .:.. 90 Route de Lille à Menin. ........... 26 Route de Lille à Roubaix... ....... 19 On voit, par les exemples que nous venons de citer, que le sol de la partie du département dont nous nous occupons , présente des inégalités très-peu sensibles. Toutefois une observation attentive de la topographie de la contrée conduit à y distinguer trois régions principales ; 1.° le bas pays, qui comprend certaines vallées dont le sol est d’une uniformité complète et s'élève rarement à plus de 20 à 25 mètres au-dessus des eaux de la mer ; 2.° Le pays de plaines qui, bien qu'horizontal si on le considère dans son ensemble, forme cependant de légères ondulations qui atteignent quelquefois les niveaux de 45 et 50 mètres; 3.° enfin le pays de collines, qui lui- même, peut être subdivisé en deux parties dont l’une renferme- raitles éminences limitées à la hauteur de 80 à 90 mètres, et l’autre 119 les monticules qui dépassent 1400 mètres. Cette troisième région occupe dans les quatre arrondissements de Dunkerque, Haze- brouck, Lille et Douai, une étendue d'environ 14,920 hectares. Il est à remarquer que dans les pays de plaines comme le nôtre, les plus légers mouvements du sol qui ailleurs n'auraient aucune signification géologique, indiquent presque toujours une modifi- cation dans la nature du terrain ; nous en verrons par la suite une foule d'exemples. Aussi était-il important d'étudier minutieuse- ment la constitution physique du pays pour faire ressortir la liaison intime qui existe entre sa structure géologique et le relief de sa surface. Rivières. La Flandre est traversée par plusieurs rivières dont les unes se jettent directement dans la mer et les autres vont rejoindre l'Escaut sur sa rive gauche; les premières sont l’Aa et l'Yser ; les secondes , la Lys, la Scarpe et la Sensée. L’Aa prend sa source près du village de Bourthes (Pas-de-Calais, passe à Saint-Omer et cotoie le département du Nord depuis Saint- Momelin (cote 10) jusqu'à Gravelines et la mer. La rivière de la Colme n’est autre qu'un bras del Aa qui s’en sépare à Watten en se dirigeant sur Dunkerque par le hameau de Cappenansfort dépendant de la commune de Brouckerque. La vallée de l'Aa commence à devenir tourbeuse à une lieue environ en amont de Saint-Omer, près de Blandecques. L'Yser qui prend naissance dans la commune de Rubrouck {arrondissement d'Hazebrouck), à la cote 34, coule d'abord vers le Nord jusqu'à Bollezèele, puis se contourne vers l’est et entre en Belgique entre Oost-Cappel et Houtkerque (cote 15). Elle reçoit les eaux de plusieurs ruisseaux dont les principaux sont : sur sa rive droite, la Peene-Becque, la Sole-Becque, le ruisseau d'Her- zeele, l'Ey-Becque; et sur la rive gauche, la Zimine-Becque. La Peene tourne autour du Mont-Cassel au pied duquel elle prend sa source, et va se jeter dans l'Yser entre Wormhoudt et Wilder. ; La Sole naît près du village d'Oudezeele et vient se joindre à l'Yser entre Wilder et Bambecque. 120 La becque d'Herzeele est formée par la réunion de plusieurs ,etitsruisseaux qui sortent du terrain sableux ct caillouteux dont sa colline qui porte le bois du Temple (communes de Winnezeele et de Steenvoorde) est recouverte. Ces ruisseaux coulent sur la terre glaise, à partir de Winnezeele jusqu'à leur confluent dans l'Yser qui a lieu entre Bambecque et la frontière belge. L'Ey-Becque sépare la Belgique du département du Nord sur une partie de son cours. Ce courant, dont la source se trouve à la base du Mont-des-Récollets, traverse Steenvoordeet gagne la fron tière belge à 4 ou 5 kilomètres au nord de ce bourg. . La Zimine-Becque commence un peu au sud de Rexpoëde et n'a guère que » à 6 kilomètres détendue jusqu’à sa rencontre avec l'Yser. La Lys, qui prend sa source à Lisbourg (Pas-de-Calais) entre dans notre département à Thiennes {cote 23) et en sort à Menin {cote 12). Son développement est de 61,000 mètres entre ces deux points. Elle sépare l'arrondissement d’'Hazebrouck du Pas-de- Calais au sud, et l'arrondissement de Lille de la Belgique au nord. Cette rivière coule au centre d’une vaste plaine qui se res- serre vers le nord-est, à partir d'Armentières. Ses principaux affluents sont : la Bourre sur sa rive gauche et la Deüle sur sa rive droite. La rivière de la Bourre à sa source entre Staple et Wallon- Cappel (à la cote 24) et pénètre dans la grande plaine de la Lys, près de Borre {cote 23. Elle se grossit par la rencontre de plu- sieurs petits courants et est canalisée entre l'écluse du Grand- Dam et son confluent dans la Lys à Merville. | La Deüle prend sa source dans le Pas-de-Calais, un peu au- dessus de Carency, passe à Lens et devient navigable depuis Courrières. Elle entre dans le département du Nord près de Bauvin {cote 23° et se jette dans la Lys à Delémont (côte 14, entre Bauvin et Lille. La Deüûle sépare le plateau crayeux qui domine sa rive droite des sables tertiaires déposés sur sa rive zauche. | (121. A Marquette, la Deùle reçoit les eaux de la Marque qui s'e- chappent des flancs de la colline de Mons-en-Pévèle , coupent le terrain de craie du sud au nord de Péronne à Tressin et s'en- gagent dans la Plaine de Forest dont elles sortent au hameau de VEmpenpont pour se rendre à leur confluent en serpentant au nord des éminences de Mons-en-Barœul, de Fives et de La Mag- deleine. La Marque porte bateaux entre l'Emponpont et Mar- quette. La Scarpe, qui prend naissance entre les villages de Penin et Tinques (Pas-de-Calais) et qui passe à Arras, paraît dans le nord près de Courchelettes (cote 28) au sud de Douai, et débouche dans l'Escaut , à Mortagne {cote 9), après avoir traversé le dépar- tement du sud-ouest au nord-est avec un développement de 53,235 mètres. Elle coule sur la craie de Courchelettes jusqu'au- delà de Douai, puis sur les sables tertiaires jusqu'à la frontière belge. Quelques petits ruisseaux , tels que ceux de l'Escrébieux , de Coutiches, de l'Hôpital et de l'Elnon, situés sur sa rive gauche, lui apportent le tribut de leurs eaux. La Sensée, qui vient des environs de Bapaume, pénètre dans le nord , près de Lécluse (à la cote 40) et rencontre l'Escaut à Bou- chain (à la cote 36). Elle est dirigée de l'ouest à l'est dans le département et limite au sud l’arrondissement de Douai. Toutes les rivières que nous venons de nommer sont canalisées, à l'exception de l'Iser et de ses affluents. La ligne de partage des eaux qui convergent d'un côté vers la mer ct de l'autre vers l’Escaut traverse les territoires de Renes- cure, Ebblinghem, Staple, Hondeghem , St.-Sylvestre-Cappel , Eecke , Flêtre ÿGodewaersvelde , Boeschèpe, St.-Jans-Cappel et Bailleul (arrondissement d'Hazebrouck. Les points les plus élevés de cette ligne de partage, sont : Le Ravensberg , à la cote...........:...... RASE lus Le signal du Mont-Noir....................... 131 Le Moulin de Boeschêpe. . ....... LAN DE LS 137 LeMontdés Chats 2 Ammnn, URSS. M: 158 Le sommet du Mont-de-Sable ‘commune de Flêtre,. 73 ( 1422 ) Son niveau moyen descend ensuite à 60 mètres environ depuis la commune d'Eecke jusqu'à la limite du département, près de Renescure. La forme générale de cette ligne est celle de denx droites d’iné- gales longueurs formant entre elles un angle obtus près de Boes- chèpe et dont la plus longue est dirigée à l'ouest-sud-ouest, tandis que l’autre incline vers le sud-est. Sur le versant septentrional , toutes les eaux recueillies dans les différentes vallées, à l'exception de celles de l’Aa et de quelques petits ruisseaux qui ont leur origine près du Mont des Chats, se réunissent dans la vallée de l'Yser , laquelle est sensiblement parallèle à la direction principale de la ligne de partage. Sur le versant méridional, les eaux vont se déverser dans l’Escaut, soit directement comme celles de l'Espierre , soit indirectement par les vallées de la Lys, de la Scarpe et de la Sensée. Ce qui précède fait voir combien il serait inexact de juger de la pente générale du sol d'après la direction des cours d’eau qui l’arrosent. En effet, le Mont Cassel {cote 157), le Ravensberg ‘cote 67), Watten {cote 72), sont situés au nord de la ligne de partage que nous avons définie. C'est une faute qui a été bien souvent commise par les géographes, de confondre les lignes de faite avec celles de partage des caux; car il existe beaucoup de cas où ces lignes ne coïncident pas. La rivière de la Marque qui traverse la crête formée par la craie entre Haubourdin et l'extré- mité est du canton de Cysoing, offre encore un exemple d’un cours d'eau dont la direction n’a aucun rapport avec le relief du sol. Les points culminants de Wervick {cote 61 }, Halluin (cote 69) et Bondues | côte 57) se trouvent aussi en-dehors de la ligne qui sépare les eaux de la vallée de l'Escaut de celles qui se rendent dans la vallée secondaire de la Lys. En effet , si on considère d’un côté l'Escaut et la Scarpe , de l’autre la Lys avec ses affluents, Ja ligne de partage passe à Risquons-Tout, Tourcoing, Mouveaux , se contourne ensuite vers le sud-est, et après avoir traversé le chemin de fer de Lille à la frontière belge , à la tranchée des Ogiers et les communes de Croix, Hem, Sailly, Toufflers et Willems, pénètre en Belgique, puis rentre en France et passe successivement dans les communes de Bachy , Genech , Nomain , Auchy, Bersée, Mons-en-Pévèle et Ostricourt. Cette ligne a la forme d’une grande S dont les points les plus élevés sont : Mons-en-Pévèle , à la cote..... 94" Bach y UE A. MONET SUR 72 MOUVEAUINE CAEN RS ANAUER 55 La frontière belge de Wannehain à Maulde forme à peu près la séparation entre le bassin de l'Escaut proprement dit et le bassin de la Scarpe. Enfin les bassins de la Senséé et de la Scarpe sont situés de part et d’autre d’une ligne de partage qui passe par : Éétrées. 2500 RUE LR cote 60 Bugnicourt............ EAU 8 Fenans RR R ee 94 Villers-au-Tertre . :.......... 80 Emerchicourt............... 67 EtAbSCon Re dl: EU 64 et qui laisse au nord de Bugnicourt quelques sommets sableux _ portant les cotes 83 , 88 et 90. Il reste peu de mots à ajouter pour circonscrire complétement . les bassins de 3.° et de 4.° ordre dans ie circulent la Detüle et la Marque. Sur la rive gauche , le bassin de la Deüle est limité par une ligne sinueuse dirigée à peu près du sud au nord et traversant les communes de La Bassée (cote 30), Salomé, Marquillies, Wicres, Sainghin, Wavrin, Fournes {cote 44), Beaucamps, Erquinghem, Escobecques (44), Hallennes-lez-Haubourdin , Englos , Ennetières (48), Capinghem, Lomme (45), Lompret (33), Verlinghem (24), Frelinghien (21), et Deùlemont. Sur la rive droite , il est fermé d'un côté par une courbe s'éle- vant de Deñlémont à Linselles ! cote 59), au mont de Bondues (57, et descendant à Bondues 44) et à Marquette: de l'autre par (19% ) une ligne ondulée traversant les communes de La Magdeleine (33), Fives (45 et 26), Hellemmes (30), Lezennes (45), Lesquin, Ron chin (57), Faches, Vendeville, Avelin (45), Templemars, Seclin (44), Attiches (59), La Neuville-en-Phalempin, Wahagnies (66), Thumeries et Ostricourt. Enfin le bassin de la Marque se trouve compris entre la ligne qui vient d'être délinie d'Ostricourt à Marquette et celle qui sépare la Scarpe et l'Escaut du bassin de la Lys depuis Ostricourt jusqu’à Mouveaux , laquelle doit être prolongée de Mouveaux au mont de Bondues où elle rejoint celle qui ferme le bassin de la Deùle de ce mont à Marquette. Tel est en résumé le système hydrographique de la Flandre. La côte qui s'étend de Mouveaux au mont de Bondues est assez remarquable. Au nord de cette côte se trouve le bassin de la Lys, au sud celui de la Marque , à l'ouest celui de la Deüle et à l’est celui de l'Escaut. La configuration du sol étant en relation intime avec sa consti- tution géologique, nous allons compléter les notions topogra- phiques qui précèdent en faisant connaître la nature et la disposi- tion des différentes roches qui composent l'écorce du pays. TROISIÈME PARTELE. CONSTITUTION GÉOLOGIQUE. —— CLASSIFICATION ET DESCRIPTION DES TERRAINS. Classification des terrains. Le département du Nord ne renferme aucune roche primitive ou cristalline dont l'origine soit due à une action ignée. On n'y rencontre que des couches sédimentaires dont le dépôt a eu lieu au sein des eaux. Ces couches appartiennent à deux classes de terrains qui se distinguent essentiellement par leur aspect, par leur composition et par leur ancienneté relative. Ainsi, tandis qu’au sud-est, dans l’arrondissement d'Avesnes, la surface du sol est en grande partie formée par les calcaires et les schistes du ter- rain dévonien qui succède au_système ardoisier et prélude à Ja formation houillère , on ne voit affleurer dans les autres arron- dissements que des terrains crétacés et tertiaires qui eux-mêmes sont souvent recouverts par des alluvions anciennes et modernes. La craie disparait même complétement vers le nord-ouest , au-delà de la rivière de la Deûle, où n'existe plus qu’une masse puissante d'argile plastique qui communique au sol une grande humidité. C'est surtout à cette partie du département comprise entre la Deûle et la mer que s'applique le nom de Flandre (pays de flaques d’eau. La série des terrains de sédiment qui constituent le sol du (1% département est donc loin d'être complète relativement aux nom- breux et puissants dépôts qui se sont formés à la surface du globe. Ainsi toutes les formations comprises entre le terrain houiller et le terrain crétacé connues sous les noms de nouveau grès rouge, zechstein (calcaire magnésien, magnesian limestone des Anglais), grès des Vosges, grès bigarré, muschelkalk , marnes trisées , lias, formation oolitique jurassique , manquent entièrement dans le Nord ; la partie supérieure du terrain de craie ou le système de Maestricht qui correspond au calcaire pisolithique du bassin de Paris y manque également ; enfin l'étage gypseux et celui des meulières n'y sont pas représentés, on du moins n'ai-je reconnu aucune trace de leur existence. Le tableau ci-après (page 128) résume la série des terrains indi- qués sur la carte. J'ai adopté la classification de M. le professeur Dumont, à cause de la connexité qui existe entre la constitution géologique de la Belgique et celle du département du Nord. Observations préalables. — Dans les contrées montagneuses on fait quelquefois plusieurs lieues sans rencontrer autre chose que la roche nue qui constitue, le sous-sol en profondeur. Dans les pays de plaines comme le nôtre, au contraire, il est bien rare que les divers étages des terrains crétacé-ets tertiaire ne soient pas recouverts d'une couche plus ou moins épaisse de limon. Et en effet, les mouvements du sol étant très-peu prononcés. il en résulte que le limon qui se trouve au sommet de l'échelle géolo- gique peut recouvrir des étendues considérables. Cependant, comme les ondulations du terrain, bien que légères , sont dues ordinairement à la roche inférieure (Salomé, Fournes , Fives), il était intéressant de faire connaître la nature de cette roche, non-seulement par les coupes , mais aussi par la carte elle-même. Pour cela nous n'avons pes cru pouvoir mieux faire que d'adopter une notation particulière consistant en un pointillé de la couleur du terrain superficiel placé sur la teinte correspondante à la roche sous-jacente. Cette notation permet de voir le sous-sol comme à (127) travers la couche habituellement peu épaisse de formation plus récente qui le recouvre. . Il me reste à faire une dernière observation avant de passer à | la description des terrains. La limitation des étages géologiques | ne peut avoir lieu aussi facilement dans un pays de plaines que dans des régions accidentées où l’on observe à des intervalles rap- prochés des variations très-considérables dans le niveau du sol. Dans ces régions , en effet, les lignes de séparation entre les ter- rains superposés qui coïneident souvent avec le pied des collines , sont bien nettes, bien tranchées, tandis qu'il ML 2: x mont. Ye Crétacée. ( Partie infér. \ 42° Marnes et calcaires de coret Ls: Systèmes | neux (dièyes), marne glau- | Vert pâle. (Cr. M). M. ( conifère avec silex roulés | re j {tourtia.} | Secondaire. | Terrain 13. Grès, schistes et couches } mar houiller. | de houille. Brun sépia. (H). j l 34 | PA. Carboni- / Calcaire car- 157 fère. bonifère (sys- | tème calca - > 14. Calcaire bleu. | Bleu indigo. (C) DEV 74 reux sup." de E= \M. Dumont.) à" ad 139 Î (- 125 ) ESC CHAPITRE LI. Formation carhozîifere. $ 1. — Culcaire carborafére. at sen) à *®%» de EU V.) * Le calcaire carbonifère { calcaire de visé, calcaire de Tourasi " &à 8 montain limestone des TE système calcareux supérieur dé “et : 1% M. Dumont), est un carbonate de chaux d'un bleu plus ou \ À moins foncé qu'on exploite en Belgique et dans la partie sud-est du département du Nord comme pierre de construction , pierre à marbre ou pierre à chaux. Îl est plus ou moins pur et fournit des chaux de diverses qualités suivant la proportion d'argile qu'il renferme en mélange. Celui qui donne de la chaux hydraulique a une texture schisteuse, un aspect mat, et laisse dans l'acide mu- riatique jusqu'à 25 p. ‘, de résidu insoluble. Ce terrain n'af fleure, dans le DU: A du Nord que dans l'arrondisse- Dee, d'Avesnes, où il forme une série de bandes dirigées de l'est un peu “Test un peu nord à l'ouest. n peu sud. Il doit cette disposition -s crie à une action de plissement ou de froncement qui s’est exercée du À; HI sud au nord à une certaine époque et dont l'effet a été de pro duire des rides profondes dans tout le niassif. Les eaux ayant en- “#47 suite nivelé le terrain, ont détruit le dessus de certains plis et Ù y fait disparaître les couches qui masquaient les plus anciennes, de k sorte. que-celles-ci ont été découvertes dans la convexité des rides, _ tandis que les plus modernes.sont restées visibles dans les parties concaves. On explique ainsi les bandes successives formées par les : schistes inféri rs au calcaire, par ce calcaire et parle terrain Thouiller qui lui succède. 9 + PSE SE Re nie ébamnemset _—_—— Sms malins RÉAEERARS (130) En Ju de l'arrondissement d'Avesnes, l'affleurement de | calcairé le plus rapproché de nous se trouve en Belgique, à Tour- nai. À partir de ce point, le calcaire s'enfonce sous le sol du dépar- tement du Nord pour reparaître plus à l'ouest dans les environs de Marquise, vers la pointe occidentale du département du Pas- de-Calais. Voici les profondeurs auxquelles il a été reconnu par sondages en différents points des arrondissements de Lille et de Douai : | PAT D Différence ou profon- | P eur He MA D au 4 5 T4 Cotes. d lcaire. niveau de la mer. : Ver lé À Flines.. . . ... 7m » — 163% 66 — 146" 66 k, s'en pri AtOrehies:.. 20. 202. = NMAT Ali OR UE | A Templeuve, chez | ? M. Demesmay. . . 38 » — 124 » — 80 » | À Lys-lez-Lannoy. . 95 » — 83 o — 58 »° | A Lille, (Hôpital -Mili- | taire) . . .. 19 0 122" 769" 70" DOS | A Wazemmes, ue | M." Lefranc. ./.°., 19° 94 — ‘62% 40 — "14346 | À Loos (près le pavé | de l'Abbaye. . .. 21 op» — 51 » — 30 » | A À Lezennes, chez M. Éetébyre. NB nlio, = TRUE SA | À Wattignies. . : 7 35» E LE Pape PR ER ee ÿ yo h ASechn, Eee Te 35» SET — 50» [re A Camphin. . . .. Sn 1080 0 de | UT 2 g26 ‘ 8 ] Le rapprochement des résultats de ces sondages conduit à re- connaître que le calcaire bleu forme dans l'arrondissement de Lille une proéminence souterraine qui est indiquée par les coupes PE = — Mes ce | ‘ | | géologiques N.° 2,4, 5, 6, 7, et dont le faite dirigé de l'E.-S.-E. à l'O.-N.-0. passe sus Les coumnes de Dunes TEE | | Faches , etc. Cette ligne de faite elle-même incline vers l'ouest, _, . Ÿ | de sorte qué si le calcaire n'est pas inférrompu par quelqu'acti * (131) dent jusqu'à Marquise, il affecte entre ce point et Tournai la forme d'une espèce de longue selle, qui laisse au midi le prolon- gement du terrain houiller de Valenciennes et de Douai. Dans cet intervalle, la proéminence calcaire doit se rapprocher du bord septentrional du bassin houiller qui , d'Ostricourt et Oi- gnies, se prolonge probablement dans les environs de Béthune et de Lillers. En effet, au nord de ces points , le calcaire s'enfonce à à une assez grande profondeur et présente par suite, de ce côlé, un versant opposé à celui sur lequel le terrain houiller s'appuie. Ainsi, à Hazebrouck par exemple , où le sable tertiaire se trouve déjà à 80 mètres au-dessous de la mer, si l'on ajoute à cette pro- fondeur l'épaisseur de la formation sableuse et celle du terrain de craie qui, réunies , n'atteignent pas moins de 120 m., on arrive à ce résultat probable que la base de la craie n’existerait pas en ce point à à moins de 200 m. au- dessous dujimêème niv eau. Or, la surface a du terrain houiller se trouvant à la cote souterraine de 120 m. environ entre Douai et Vermelles, on peut en conclure que le faîte de la selle formée par le calcaire bleu longera la limite nord du terrain houiller du côté de Béthune et de Lillers, en se confondant pour ainsi dire avec cette limite, c'est-à-dire qu'une coupe faite du nord au sud , dans les environs d'Hazebrouck donnerait pour les niveaux relatifs du calcaire et du bassin houiller, une figure in- verse de celle qu’on obtient aux environs de Courrières et de Douai, où ce bassin, qui cotoie l'arrondissement de Lille, est do- miné par la crête calcaire mise en évidence par les sondages ci- dessus. Il est remarquable que le calcaire carbonifère a été nivelé au midi de Tournai, à peu près parallèlement au plan de ses couches. S'il en est de même dans le sens opposé, ce calcaire plongerait au nord de Lille comme _il plonge au_midi. Ce qui rend cette hypo- thèse probable, c’est que le faite calcaire dont il a été question plus haut, paraît correspondre au système de soulèvement qui s'est produit de l’est 18° sud , à l'ouest 18° nord , entre le dépôt de la craie et celui des sables tertiaires. \ | 432 | - ag Il — Terrain houiller. (297 Le terrain houiller qui est composé de couches de grès, de schistes et de houille, fait suite au calcaire carbonifère auquel il se lie par des passages insensibles. Voici comment s'expriment à ce sujet MM. Dufrénoy et Elie de Baumont (1). « Vers le nord , le terrain houiller est en appui d'une manière complètement évidente sur le terrain calcaire. On peut même ob- server la superposition au jour, près de la frontière de Belgique, et reconnaitre par quelle série de couches a lieu la jonction des deux terrains. Le passage qui existe près de Blaton annonce une liaison très-intime entre l’un et l’autre. A partir des anciens puits d'extraction ouverts sur la couche de houille, dite veine de Blaton, qui est la plus rapprochée de la limite jusqu'à la première carrière de calcaire bleu de Blaton, les schistes et les grés houillers sont, ainsi que le calcaire, en couches parallèles, toutes inclinées vers le midi, À mesure que l'on s'éloigne vers le nord , les couches de grès sont plus communes; elles semblent lier une formation à l’autre. Bientôt ce grès change de nature, il perd sensiblement sa texture grenue et prend l'aspect d'un quartz compacte; il est translucide sur les bords, d’un gris sale, à cassure inégale en grand , et très-esquilleuse en petit. C'est sans doute toujours un grès, une roche arénacée , mais le ciment n’en est plus visible. Plus loin, il devient effervescent, et l’on trouve ensuite une couche de calcaire gris siliceux , renfermant beaucoup d'eneri- mtes. Ce mode de passage et la série de couches par laquelle il s'opère ont beaucoup de rapport avec ce qui s'observe dans une position analogue aux environs de Liége, ainsi qu'on peut le voir dans l'excellent ouvrage de M. Dumont. » (x) Explication de la carte géologique de France, t. 1, p. 86%. « 133 ) Les mêmes faits ont été constatés par le sondage de Vred. En effet , après le tourtia qui finit à 434 mètres 50 , M. Degousée a noté comme suit les différentes couches traversées : Schistes et argiles schisteuses jusque 180 mètres avec quelques lits de phtanite ou de quartz compacte ; De 180 à {81 mètres, grès; De 181 à 184,83 grès, analogues aux précédents ; De 184,83 à 185,28, quartz grenu ; De 185,28 à 186,69, calcaires schisteux et calcaires compactes. Le sondage de Vred est donc placé exactement sur le bord sep- tentrional du bassin houiller. Le prolongement du terrain houiller de Valenciennes est resté pendant longtemps inconnu au-delà d'Aniche; on l’a découvert dans ces derniers temps à l’Escarpelle, près de Douai, à une pro fondeur de 160 mètres; puis, dans les communes d'Oignies, Dourges, Courcelles, Courrières, Harnes, Hénin-Liétard, An- nay, Lens, Loos et Vermelles, à environ 450 mètres au-dessous du sol. La carte géologique indique les limites souterraines de ce ter- rain depuis Marchiennes et Aniche jusque dans les environs de Carvin et de Lens. D'après les renseignements fournis par les sondages, la limite d serait alignée sur Vred, Anhiers , Ostricourt et Oignies ; la___ RARE IREC Hinel limite sud traversérait Douai et serait comprise entre Auberchi- court et Emerchicourt vers l’est, et entre Hénin-Liétard et Beau? mont vers l'ouest. Le terrain houiller forme donc dans l’arrondjs; sement de Douai une bande de 7 à 8 kilomètres de largeur dir, rigée de l'E. 25° S. à l'O. 25° N. laquelle passe sous les coï-?" munes d'Alnes, Marchiennes, Wandignies, Erre, Hornaing, Mar- chiennes-Campagne , Fenain , Somain, Aniche, Auberchicourt, Ecaillon, Bruille-les-Marchiennes, Viliers-Campeau , Rieulay ; Vred, Pecquencourt, Montigny, Masny, Lewarde, Guesnain à Dechy, Lallaing, Sin, Waziers, Anhiers, Raches, Douai, Roost- Warendin, Cuiney, Lauwin-Planque, Flers , Auby, Raimbeau court, et présente souterrainement une surface de 17,366 À PT: *, * ænt.i" -b*. sht “ +. (1%) hectares. Cet arrondissement embrasse la presque totalité des concessions d'Aniche et d’Azincourt, le quart environ de celle d’Anzin et la plus grande partie de celle de l'Escarpelle qui a été instituée par décret du 27 novembre 1850. Nous avons vu que le bassin houiller était supporté au nord par le calcaire bleu, et que les couches dont ilse compose plongeaient au sud sous une faible inclinaison. Mais plus on s'approche du bord méridional du bassin, plus ces couches sont accidentées. Elles se replient sur elles-mêmes en formant divers zigzags et viennent se relever rapidement contre les grès et schistes rouges du système de Burnot qui, en général, limitent le bassin dn côté du midi. Toutefois, le terrain houïller peut être aussi bordé au sud par le calcaire, ainsi que le prouve le forage d'Emerchicourt qui a constaté la présence de cette roche à 128 mètres 93 de la surface du sol. La profondeur à laquelle on rencontre le terrain houiller devient de plus en plus grande au fur et à mesure qu'on s'éloigne de la frontière belge en se dirigeant vers l'ouest. Cette profondeur parait atteindre son maximum à l'Escarpelle et diminuer senst- blement entre ce point et Béthune. Les résultats de quelques son- dages suffiront pour fixer les idées à cet égard : Profondeur du Profondeur terrain houilier Localites. Cotes. Mes Ron gc-lés PTT ARCAC EPA TON ENE à 35 — 144 — 4109 Corine LS RUES 30 — 148,29 — 118,29 pré L'Escarpelle. . . . . . . . 19 — 158,82 — 139,82 RASMES ed PNR CRETE 22 — 133,45 — 111,45 Me 6$ Marchiennes . . . . . .. 19 — 128,66 — 109,66 Warlaing. (AB #a/ us 19 — 117,89 — 98,89 FR 17 Auberchicourt. . . . . .. 50 — 142,66 — 92,66 Anzin (fosse du chaufour). 30 — 40,45 — 10,45 On ne connaît pas la puissance du terrain houiller ; du moins il nya ni fosse ni sondage qui ait traversé toute la série des couches qu'il renferme On est fonde à penser que cette puissance ! 135 est considérable; car la fosse du chaufour à Anzin, qui a 511 mètres de profondeur, à pénétré de 470 mètres 55 dans le terrain houiller, bien que n'étant pas sortie de la série des veines de houille grasse. J'ai donné dans le premier paragraphe de la première partie, quelques développements sur les recherches de houille qui ont été opérées vers l'ouest entre Douai et Béthune, et je n’entrerai pas dans de nouveaux détails sur cet objet. La pente souterraine qu'affecte le calcaire bleu au nord de Lille ne détruit pas la possibilité de l’existence d'un bassin houiller dans cette direction, bassin qui serait d’ailleurs complétement distinct de celui de Valenciennes. Le forage pratiqué à Halluin en 1837 dans le but de rechercher le charbon et qui s’est arrêté sur l'étage des dièves du terrain de craie à la profondeur de 427 mètres 45, aurait donc pu être poursuivi avec intérêt; car il n’existe aucun indice qui permette de déclarer à l'avance l'impossibilité de ren contrer la houille à Halluin. Ce sondage a été entrepris, paraît-il, d'après certaines traditions du pays qui attestaient la découverte de la houille en ce point vers la fin dusiècle dernier. On voit encore en effet, les traces d’un ancien puits; mais ce que rapporte la chronique, pouvant n'être basé sur aucun fait sérieux , n'est pas de nature à inspirer la moindre confiance. Quoi qu'il en soit, l'épaisseur considérable des terrains morts qui existent dans la par- tie occidentale de la Belgique et du département du Nord, dé- montre qu'il y a là une grande dépression qui fait suite au bas fond souterrain sur lequel la ville de Londres est bâtie; et s'il y existe des bassins houillers, ce qui n’est pas impossible, ceux-ci pourraient s’avancer vers le bord sud de cette dépression qui avoi- sine Lille, et se rattacher plus ou moins directement avec la vaste formation houillère qui affleure en Angleterre depuis le pays de Galles jusqu'en Ecosse. 136 CHAPITRE IT. Formation eréitacie. © I. — Système aachenien de M. Dumont. Arrivons à la description des terrains quisuccèdentimmédiatement au terrain houiller dans le département du Nord. Ils commencent par une formation fluviatile qui prélude au terrain crétacé, et que M. Dumont comprend dans son système aachenien !1) (d'aachen, Aix-Ja-Chapelle) lequel semble se rapporter par sa position et ses caractères , à quelque partie de la formation Wealdienne. Bien que ce terrain n’affleure en aucun point de Ja Flandre et ne soit par suitereprésenté sur notre carte par aucune teinte, il estnéces- saire d'en parler, parce qu'il existe souterrainement dans certaines localités et qu'il est le terme le plus bas de la série des terrains 0 (1 On Jit dans le rapport de M. Dumont sur la carte gévlogique de Belgique présenté à l’Académie de Bruxelles le 10 novembre 1849 : e Tandis que M. d'Archiae, considérant les systèmes infé:ieurs de noire terrain e crétacé au point de vue paléontologique, les rapporte au groupe de la craie » tufau, mes études m'y fout voir non seulement des dépôts contemporains du » grès vert, mais encore une formation plus ancienne, dout je fais le système n aachenien. On observe en effet, au-dessous du greensand, qui fait suite à » celui de Machéromenil, Saulce-aux-Bois et Novion-Porcien (département des » Ardennes), et que tous les géologistes rapportent au lower greeusand ét au » gault de l'Angleterre , on observe, dis-je, sous ce greensand, à Leuze, à » Beaumé et à la Folie-Not, près d'Aubenton, un dépôt argileux pyritifère à n végétaux fossiles , et à Wignchies, de l'argile, des sables jaunes à lignites. » du gravier et des cailloux, qui paraisseut avoir échappé aux investigations de » M. d'Archiac. Ce même système d'argile ligniteuse, de sable et de gravier, a » été rencontré sous le tourtia , en enfoncant les houillères d’Auzin, de Marly, s de Bernissart el de Bracquegnies ; on le voit en-dessous des glauconies infé- » rieures, dans les coupes que l’on a failes pour les remblais de la vallée de s Beaume, le long du chemin de fer de Mons à Manage, et dans les environs » d'Hautrage et de Beaudour, où les argiles qu'il contient sont l'objet d'exploi- » tations assez importantes. » 137 postérieurs à la formation houillère qu'on puisse observer dans le département. Il est composé de sables grossiers , de grès et d'ar- gile plastique avec lignites , et renferme aussi comme cas parti- cuber fort important au point de vue de l'industrie métallurgique, des minerais de fer géodiques qui font l'objet d'exploitations con- sidérables en Belgique et dans ta partie sud-est du département du Nord. Il se trouve à la surface du sol dans les communes de Glageon, Féron, Wignehies, Sars-Poteries, Rousies, Ferrière- ia-Petite (arrondissement d’Avesnes), et probablement dans plu- sieurs autres. On le rencontre aussi à Hautrage et aux environs de Tournai. Dans le village de Wignehies, à droite du chemin de Rocquigny, il existe une tranchée d'où l'on tire un gros sable jaune, gris, blanc ou noir, dont les grains sont de la grosseur d’une tête d'épingle. Ce sable renferme des espèces de poches de glaise grise dans laquelle sont empâtés des blocs de grès arrondis. Chez l’armurier en haut du village, on a fait un puits qui a tra- versé : ONDES PR. . 0 0 UM, 49 Argile avec cailloux.. , . . . .«. lARPANE PAD Glaisesableuse d'un vert foncé (gr eee 3 00 Glaise bleue charbonneuse avec pyrites. . 2 Sable jaune et gravier avec lignite. : . . 4 59 12 00 Cette coupe montre que le greensand est supérieur aux sables et aux argiles du système aachenien. Le même fait s’observe entre Féron et Fourmies, et dans la commune de Glageon, où le sable grossier se trouve à un niveau inférieur au greensand qui recouvre le plateau de Couplevoie. Il s’observe aussi à Sars-Poteries, où l'on trouve près du ruis- seau le sable jaune à gros grains, bien caractérisé, tandis que la (138) hauteur entre Dimechaux et Sars est couronnée par des sables blancs et des grès tertiaires alternant avec des couches de glaise bitumineuse et des cendres noires qui sont exploitées pour l'amendement des terres. À Ferrière-la-Grande, on emploie le même sable pour réparer les costières des hauts-fourneaux. L'argile grise réfractaire d'Hautrage, Villerot, Beaudour (Bel- gique), appartient aussi à ce terrain. Cette argile est souvent py- riteuse ; elle empâte des grès plus ou moins volumineux , et al- terne avec des couches d’un sable fin grisâtre à lignite. Le lignite a un aspect particulier et ressemble généralement à de la braise; les fragments de bois carbonisé qu’il renferme sont d'un brun noirâtre , à texture compacte , et se laissent facilement entamer par une lame de canif. A deux kilomètres et demi à l’est de Tournai , dans une an- cienne carrière, sur la rive droite de l’Escaut, le système aache- nien est représenté par des restes de végétaux fossiles ayant abso- lument le même aspect qu'à Hautrage, et par des argiles noires pyriteuses inférieures à un dépôt de cailloux roulés et de sable quartzeux à gros grains. C'est ce terrain qui est connu entre Denain et Valenciennes sous le nom de Torrent. C’est aussi à ce même système que se rattachent les glaises pyriteuses avec indices de lignite qu'on a trouvées à la sucrerie de Férin {canton de Douai-sud ) à 160 mètres de profondeur sous le tourtia du terrain crétacé. Enfin , les argiles noirâtres veinées de pyrites (terres noires des ouvriers) qu'on a rencontrées à Cysoing et à Willems dans la même position géologique, se rapportent encore au même terrain. On voit que cette formation repose tantôt sur le terrain houiller, comme à Denain et Anzin; tantôt sur le calcaire carbonifère, comme à Tournai, Sars-Poteries; tantôt enfin sur les roches du terrain dévonien, comme à Wignehies, Féron, etc. Elle a été déposée dans les dépressions qui existaient dans les terrains antérieurs et a formé ainsi des espèces de poches sans continuité ; ou bien ; la { 139 } partie supérieure du système ayant été détruite postérieurement au dépôt , il n’est plus resté que lesroches qui avaient primitive- ment rempli les cavités préexistantes. On conçoit d'après cela que l'épaisseur de ce terrain doit être très-variable. À Tournai, dans la carrière que j'ai visitée, il a 4 à 5 mètres de puissance; à Anzin, son épaisseur est de 18 mètres ; à Bracquegnies, au nord de Mons on l’a traversé sur 25 mètres de hauteur. CIE — Système hervien de M. Dumont. (Grès vert, greensand.) Le système hervien, qui. fait suite au précédent, n'affleure aussi qu’en certains points de l'arrondissement d'Avesnes où il recouvre les plateaux formés par les schistes et les calcaires anciens. Il est surtout développé en Belgique dans le pays de Herve, à l'est de Liége, et correspond, d'après M Dumont, au lower-green- sand, au gault et à l'upper greensand des Anglais. On peut l'observer en beaucoup de points de l'arrondissement d’Avesnes, et notamment entre les denx Helpes, aux environs de Marbarx , Boulogne, Sains, Glageon, Fourmies et Wignehies, où il est représenté par des sables plus ou moins argileux d'un vert foncé, que les eaux pluviales entraînent sur les pentes. A Marbaix , où il constitue la surface du sol sur une assez grande étendue, il est dominé par les coteaux marneux qui séparent les deux Helpes au sud de la route d’Avesnes à Maroilles. Ce terrain, qui n'a dans ces localités qu'une faible épaisseur, se trouve sur le prolongement du dépôt de sables verts qui acquiert une grande puissance dans le département des Ardennes, aux environs de Vouziers, et dont l'affleurement se dirige vers le département du Nord par Attigny, Novion, Aubenton et Hirson. A Wignehies, il est à découvert dans un chemin creux au nord de l’église, et renferme même en ce point un petit banc coquiller où abonde un genre particulier de cérite ou de turritelle. Le greensand proprement dit , c'est-à-dire le sable vert argi- leux , est supporté lui-même par une roche d'une nature particu- {140 | lière qui repose immédiatement sur le terrain ancien et qu'on peut observer aux environs de Berlaimont et de Bavay. Ainsi, dans les . carrières de pierre du Pont-du-Bois ouvertes dans la commune de Sassegnies sur la rive gauche de la Sambre et au bord de la forêt de Mormal, on voit au-dessus du calcaire des terrains horizonta- lement stratifiés qui frappent tout d’abord par la couleur ver- dâtre très prononcée d'une couche située vers le milieu de leur épaisseur. En procédant de bas en haut, on trouve : 1.° 6®,80 à 1." d'une roche dure cohérente consistant en une pâte argilo- calcaire blanchâtre, où sont disséminés des grains de sable vert et de limonite , et des silex roulés d'un jaune cire. On y trouve de nombreux fossiles et entr'autres des ammo- nites. Cette roche fait une vive effervescence avec les acides. 2.9 Q metre 50 d'argile marneuse tendre, de couleur jaune ou blanchâtre avec sable vert et limonite, moins fossilifère que la couche précédente. 3.0 1 mètre d'argile très-verte plus ou moins sableuse dans laquelle on ne voit plus de limonite et qui rappelle le greensand des environs de Marbaix, d'Avesnes , ete. On y rencontre de nom- breux fossiles parmi lesquels on distingue des ostréa de diverses espèces et des pecten. Ces coquilles dont quelques-unes sont très- minces et par suite très-fragiles , sont très-bien conservées. Le tout est recouvert par 2",50 environ de cailloux et de Himon. Plus au Nord, aux environs de Bavay, le même système repose aussi en stratilication discordante sur le terrain de transition. Seulement la nature des roches est variable d'un point à l'autre ; mais leur position relativement à l'étage des dièves du terrain de craie , et la présence du sable verfet des grains de limonite qui deviennent quelquefois assez fréquents pour donner lieu à un vé- ritable minerai, ne peuvent laisser de doute sur leur contempora- néité. Dans une grande carrière de pierre bleue appartenant à M. Malengraux, sur la rive droite de l'Hogneau, dans la commune de at D DE ÊT. pe D er tte. j ci ponte nn dt < 44 lat Se RE RS de d xt ee VE { 41) Bellignies et près de la chaussée de Bavay , le calcaire ancien est recouvert par une couche ferrugineuse d'un mètre environ d'épais- seur avec fragments de quartz ou de grès roulés à la partie infé- rieure sur laquelle se trouve assise une marne grise chloritée avec silex, qui n'est autre que notre tourtia. (t) La couche ferrugi- neuse consiste en un dépôt calcaire coquiller coloré par l'hydro- xide de fer et au milieu duquel on remarque des lentilles de sable vert et des veinules de minerai. Ce dépôt n’a pas de consistance ; mais il est traversé par des bancs durs de calcaire blanchâtre qui ont ici À à 2 décimètres d'épaisseur et qui sont connus à Ba- vay sous le nom de pierres des Sarrazins. Ces calcaires sont plus ou moins chargés de grains de limonite et passent à un minerai de fer qui est à la fois calcaire et siliceux. Celui qui a été découvert il y a quelques années par M. Crapay à la partie supérieure d'une carrière qu il exploite dans la même commune, est composé d'une multitude de petits fragments ferrugineux et calcaires disséminés dans une gangue argileuse et quartzeuse. On y distingue de petites facettes brillantes de carbonate de chaux et des cristaux de quartz qui forment des filets ou de petites géodes au milieu de la masse. J'en ai fait l'analyse au laboratoire de la raffinerie de sal- pêtre à Lille, et j'y ai trouvé : (1) Pour ne pas faire confusion , il est utile de donner iei une courte explica- tion sur le mot de tourtia. Dès 1836 , M. d’Archiac a donné le nom de poudingue nervien à la couche ferrugineuse des carrières du Pont-du-Bois, de Bellignies, qui existe aussi à Montignies-sur-Roc, à Tournai, etc.; mais il a presque aussitôt abandonné ce nom pour adopter celui de tourtia, que M. Dumont a conservé en appliquant le mot nervien au grand système marneux compris entre le greensand et la craie blanche. Toutefois, comme on est habitué dans le nord à désigner par le nom de /ourtia une roche toute différente de celle de Bellignies, qu’on rencontre à la base de l’étage nervien de M. Dumont, nous conserverons à ce mot le sens qu'on lui attribue généralement, en évitant de l'appliquer à la roche ferrugineuse de Bellignies. Ainsi, toutes les fois qu’il s'agira de tourtia, il est bien entendu que ce sera le tourira nervien et non le {ourtia hervien de'it nous parlerons, 142 Î Peroxide de fer, . . . . . . 0,485 Alumine libre. . . . . . . . 0,010 Carbonate de chaux. . . . . 0,220 Quartz et argile. . .. . . . 0,185 Eau.s: 12 Sr ror ma 0; 10) 1,060 Ce minerai doit être d'excellente qualité et donner de très-bonne fonte d'affinage. Il pourrait être mélangé en certaine proportion avec les minerais géodiques qui remplissent les fentes ou cavités du terrain de transition pour être fondu dans les hauts-fourneaux du bassin de la Sambre. L’amas coquiller et ferrugineux dont il est question renferme beaucoup de fossiles parmi lesquels on remarque une grande quantité de polypiers, des ostrea de diverses espèces, et surtout l'Ostrea carinata, des cardium , etc. Près du moulin d'Hergies, dans la carrière du sieur Luc qu est située comme les précédentes sur la rive droite du même ruis- seau , on observe sur le calcaire bleu une croûte de minerai plus ou moins épaisse au milieu d’un sable vert argileux recouvert par le terrain à cailloux de la période quaternaire. — Ce minerai a déjà été exploité par la société de Denain. Il est celluleux, ca- verneux , et a la plus grande analogie avec celui qui couronne le plateau de Quiévy-le-Petit, entre Maubeuge et Mons, lequel est aussi compris dans le greensand inférieur. Dans la commune de Hon-Hergies, près de la scierie de marbre de M. Lécuyer , en face du bois Verdiau, jai vu dans une fente existant dans le calcaire bleu dévonien, un sable jaune quart- zeux à gros grains et des glaises grises avec minerai de fer géodique appartenant au système aachenien, sous une argile verte, fossilifère et ferrugineuse dans laquelle on remarque encore des géodes de peroxide de fer hydraté qui pourraient correspondre au minerai d'Hergies et de Quiévy; puis vient une couche coquillière avec grains de quartz et de limonite, de 15 sidi. 6 “à 143. centimètres d'épaisseur, tout-à-fait semblable au dépôt de même nature signalé dans la carrière Malengraux; puis 0,"20 de glaise grise; puis une couche de minerai de fer granuliforme qui a environ 1" de puissance moyenne. Ce minerai ressemble complètement par ses caractères minéralogiques, à celui qu’on exploite à la base du greensand, dans l'arrondissement de Vouziers, département des Ardennes. Seulement les fossiles qu’on trouve aux environs de Bavay, ne sont pas tous les mêmes que ceux du pays de Vouziers, et c’est pourquoi les Paléontologistes ont considéré jusqu'ici le terrain dont nous parlons comme ayant été déposé à l'époque de la craie tufau. Mais la continuité de direction qu'affecte le sable vert, depuis le sud-est du département des Ardennes jusque dans le Nordet en Belgique, l'analogie frappante qu'on remarque entre les roches dont nous venons de donner la description et celles qui existent à la base du greensand inférieur dans les Ardennes et surtout l’antériorité du système ferrugineux de Bellignies et des carrières du Pont-du-Bois au greensand qui dans le dépar- tement du Nord est formé par les sables vertsinférieurs et l'argile du gauit réunis; tous ces faits ne peuvent permettre de douter que le système de Bellignies et le greensand des environs d'Avesnes n’appartiennent à la formation du grès vert infé- rieur (1). (1) M. Dumont s'exprime ainsi dans le rapport déjà cité sur la carte géolo- gique de la Belgique , page 15. DER some re CE D’après ce qui précède, on ne peut douter que le » système aachenien ne soit inférieur au grand système glauconieux, généra- » lement connu sous le nom de greensand; mais on pourrait croire, avec M. o d'Archiac, que le greensand francais et celui de la Belgique n’ont pas été » formés à la même époque, d'autant plus que, dans ce dernier , les fossiles » sont, suivant cet auteur, analogues à ceux de La craie tufau de France. {ans » le but d’éclaircir cette question. j'ai fait quelques recherches dont je signalerai » les principaux résullats: On peut aisément constater que la mer crétacée » était, vers les frontières de France et de Belgique , partagée en deux bassins » par des hauts fonds et des îlots, s'étendant de l'E. S. E. à l'OSN:L07, » reliant le massif primaire d’Avesues à celui du Bas-Boulonais, mais qui n’inter- (1#) Le système hervien comprend aussi la roche connue aux en- virons de Mons sous le nom de meule. Cette roche paraît cor- respondre aux grès de diverses couleurs qui forment l'étage du grès vert supérieur dans la partie occidentale du département des Ardennes et que M. Sauvage considère comme placés à la base de la gaize de Vouziers. C’est , en effet, un grès blanc parsemé de points verts, léger, sonore et fossilifère, dans lequel on dis- tingue des parties grisâtres exclusivement siliceuses qui présentent l’aspect d'un quartz compacte à cassure conchoïdale. Il renferme aussi des lits minces d'une substance très-blanche et très-fine qui happe fortement à la langue, et qui n’est autre que de la silice gélatineuse comme le fait voir l'analyse dont les résultats sont rapportés ci-après. Le grès lui-même possède cette propriété à un plus faible degré, ce qui autoriserait à penser que sa pâte était » rompait pas completement Ja continuité des eaux. Or, eu partant de Vouziers, » où se trouvaient des mers profondes, on voit, en axancant au vord, vers » les hauts fonds d’Avesnes, le greensand s'amineir progressivement et les » céphalopodes, encore si communs à Novion-Porcien, disparaitre peu à peu » jusque près de Berlaimont, entre Maubeuge et Landrecies, où l’on observe, » sur le calcaire anthraxifère des anciennes carrières du Pont-du-Bois, un dépôt » glauconieux renfermant à la fois des fossiles propres aux étages du greensaud » et de la craie tufau. Si l’on avance encore vers Maubeuge et Bavay, on ne » rencontre plus que les espèces caractéristiques du tourtia et des glauconies » inférieures de la Belgique, que M. d’Archiac regarde comme analogues à celles » qui caractérisent la craie tufau de France; d'où il semblerait que les animaux s da greensand vivaieut dans ce dernier pays, pendant que ceux de la craie tufau » vivaient en Belgique, À la vérité, on a cherché à expliquer ce fait en disant » que le dépôt glauconieux des carrières du Pont-du-Bois était un remaniement » du greensand à l'époque de la craie tufan. Sans me prononcer définitivement » sur cette question délicate, je ferai remarquer que l’explication ci-dessus me » paraît peu satisfaisante, parce que la partie supérieure du dépôt offre les » caractères du greeusand d'Avesnes et d'Hirson, qu’il renferme une grande » quantité de fossiles, tandis que le greensaud, d'où l’on doit supposer qu'ils » proviennent, en csl presque dépourvu, et parce qu'enfin ces fossiles sont » trop bien conservés pour que l'on puisse admettre qu’ils viennent de loin et » sient roulé..... 5 145 ) formée d’un mélange intime de cette silice blanche et de sable. En effet une analyse faite à Lille par M. Corenwinder a donné pour la composition de la meute : Eau. dal ape: 3, 5 Sable vert, HE et Rats quartzeux. . . AM, 7 Silice gélatineuse soluble dans la potasse EAU o4, 8 100, 0 Si l'on rapproche cette composition de celle de ja gaize de Vou ziers donnée par M. Sauvage (1) : Re A UNE 73e ALES 00 CA NRquiL 10 0) Bubleivert: . 1210 49 | 1,7 CHANSPRNNRNR MER de 36, 0 Sable quartzeux. . 17 | Silice gelatineuse soluble dans la potasse. . . 56, 0 100, 0 on ne peut méconnaître l'identité des deux roches et on est amené à conclure que la meule du pays de Mons, qui est com- prise entre les sables aacheniens et les marnes nerviennes | appartient comme la gaize de Vouziers, au greerisand supérieur. La composition du grès vert pourrait être mise à profit en agriculture. — En effet, si l’on se rappelle que les silicates alkalins sont indispensables au développement de certaines plantes telles que le froment , l’avoine, le seigle, l'orge, on comprendra que les terrains où ce grès vient affleurer au jour, pourraient être avantageusement amendés par des cendres de bois qui, comme on sait, sont très alkalines et qui sous l'influence de la chaleur DE MT TP RE RE ee SN (1) Statistique minéralogique et géologique dn département des Ardennes, page 35g. 10 ( 146 ) solaire, pourraient réagir sur la roche en dissolvant la silice qu'elle renferme et favoriser ainsi l'assimilation de cette substance par la plante. La meule acquiert une assez grande puissance (12%) à Strepy- Bracquegnies au nord-est de Mons où elle supporte le tourtia et les silex ou rabots du système nervien. Elle a été rencontrée aussi à Blaton et à Bernissart. Le système hervien ne s'étend pas beaucoup vers l'ouest au- delà de la frontière belge. Des puits de mines l'ont traversé dans les environs de Fresnes (arrondissement de Valenciennes); on a trouvé aussi sa base à Anzin, où l’on a conservé dans la collection faite par les soins de la Compagnie des mines , une grande am- monite toute imprégnée de grains de limonite qui caractérise parfaitement la couche inférieure des carrières du Pont-du-Bois: mais plus à l'Ouest il paraît cesser complètement, ou du moins je ne connais aucun puits ni forage qui l'ait rencontré. Il sem- blerait qu'il a été détruit dans la profondeur par les courants qui ont creusé le vaste bassin où la craie s’est déposée. $ IT. Système nervien de M. Dumont | marnes inférieures du terrain de craïe.) Il a été question, dans ce qui précède, de terrains qu'on ne rencontre qu'en profondeur sous le sol de la plus grande partie du département ou en différents points de la surface de l’arrondisse- ment d’Avesnes. Nous allons aborder maintenant la description des roches qui leur succèdent immédiatement et dont on peut voir les affleurements dans notre contrée. I] s'agit du terrain de craie pro- prement dit que M. Duniont subdivise en deux systèmes ; l'un in- férieur qu'il appelle système nervien, et l'autre supérieur auquel il donne le nom de système sénonien. Le système nervien commence par une couche peu épaisse de marne glauconifère avec silex roulés (tourtia des mineurs), à laquelle succède une série de marnes bleues, jaunes, grises, (141) blanches, plus ou moins argileuses ou calcaires (dièves, petits bancs, fortes toises, bleus) qui contiennent souvent vers leur partie supérieure des silex gris et noirs en lits minces ou en rognons et dans lesquelles sont assis les cuvelages des puits destinés à l'extraction de la houille. — Ces silex forment quelque- Ë fois des bancs assez puissants comme à Nimy-Maïzières , près de Mons, où ils sont connus sous le nom de rabots. Quelquefois aussi la silice est mélangée d’une forte proportion de calcaire et constitue alors ce que l'on appelle le fun aux environs de Lille. Lun Ce terrain affleure dans une partie des cantons de Cy song et de Uocr h2IE 4- Lannoy Tarrondissement de Lille), à Baisieux , _Chéreng, Gruson, Sanghin Bouvines, Cysoing et Wannehain, et s'enfonce au Id : nord , at sud et à l'ouest, en recouvrant le calcaire de Tournai . 74 d Ont il suit Les ME 57 Près du Petit-Baisieux, au midi de la route ae Lille à Tournai, il'existe une carrière exploitée à ciel ouvert, où l'on remarque la série suivante au-dessous de {" à 4 50 de limon : « Caicaire blanc grisàtre avec.silex gris. . 2" 30 Marne grise (diève) avec quelques grains de chlorite. 0 30 Calcaire. PUR Marne. » 30 Calcaire, » 10 Les veines marneuses sont d'un gris jaunâtre et se distinguent parfaitement des couches crayeuses qui sont plus blanches et qui sont seules exploitées pour la fabrication de la chaux. Il parait que le dernier banc de craie visible au fond de l'excavation a encore 1" de puissance et est superposé à une nouvelle veine de marne qui a {",50 de puissance et qui recouvre des dièves bleues. Les mêmes alternances de craie et de marne se montrent dans une carrière que l'on rencontre dans le bas du village de, Bou- _xines, à gauche de la route de Cysoing. On voit en effet sous 0®,30 de terre végétale : {| 148 Calcaire marneux grisâtre passant à la marne grise, avec rognons de silex gris et noir (hydraulique). . . . . . 0,60 Marne grise un peu jaunâtre. . . . . . . 0,60 Calcaire blanc grisâtre. . . . . . : . . . 1,50 Marne grise dans laquelle on Me des noyaux de pyrites décomposés . . 1,80 En haut du village, à droite de la même chaussée, on ren- contre une seconde carrière de pierre à chaux, où l'on remarque … encore les mêmes couches que dans les précédentes ; seulement ces-Cuehes-n“existent qu'au nord d'une faille dirigée de l'O. 18°. à l'E. 18°.S,-tandis-qu'au-sud..se. montrent. des. roches.des nature et d'âge différents: dont nous-parlerons plus loin. A Bouvines et à Sainghin, on exploite l'argile marneuse grise pour fabriquer des briquettes avec le menu charbon--Dans cette dernière localité, on voit la marne affleurer tout près du village, dans le chemin qui va directement au Pont-à-Tressin et dans celui qui conduit à Gruson et à Anstaing. A gauche de ce dernier se trouve une petite excavation de 4" % de profondeur, dont voici la coupe : | Lérre végétale", - © 4 .1: :+..02:60 AFS TBE AE Paie e. 0,30; Terrain Glaise rousse avec does FM US 0, 10 \ quaternaire. Argile marneuse gris-jaunâtre. . 0,50 Calcaire blanc-grisâtre. . . . . . 1,50 Marne grise { hydraulique. . . . 1,50 4, 50 Ce même terrain est à découvert dans la tranchée du chemm qui monte à frusqg, — On voit au bas de cette tranchée une diève grise dans laquelle on enfonce facilement un bâton lorsqu'elle est mouillée; elle est recouverte par 3" de calcaire blanc crayeux. Le foreur de Gruson qui a fait beaucoup de puits dans le village … 149 et aux environs, dit qu'au-dessous de cette diève grise qui a 1w_ 50 d'épaisseur, on trouveencore une couche de craie de 1" à 2, puis 4" 50 de dièves grises , et un banc de craie. de 3 à 4m qui donne de l'eau € et qui recouvre üne terre grasse bleuâtre” Cette terre grasse n’est autre que l'argile marneuse connue géné- ralement sous le nom de diève. Il existait anciennement dans ce pays une fabrique de faïence qui , dit-on, employait comme ma- tière première les dièves grises dont nous venons de parler. - Le terrain marneux affleure aussi entre Cysoing et Bourghelles, où l'on rencontre plusieurs carrières à ciel ouvert, accompagnées de fours à chaux. Les bancs calcaires renferment des silex qui rappellent les fortes toises ; d’autres ont une teinte légè- rement bleuâtre (bleus). Enfin il se montre au jour près de Wannehain. Le petit ruisseau qui prend naissance à un demi kilo- mètre à l’ouest de ce village, sourd de la marne dans laquelle il est encaissé. À deux pas de cette source, sur la rive droite du ruisseau, ou voit les vestiges d'une ancienne carrière dont l’une des parois consiste en calcaire blanchâtre et l'autre en craie chloritée. La ligne de séparation entre ces deux roches, qui ne se trouvent évidemment ici au même niveau que par suite d'un acci- dent comme à Bouvines, semble dirigée N 30° E à S 30° O. — En entrant dans Wannehain, on rencontre plusieurs affleurements de marne qui dominent le ruisseau sur sa rive gauche. Dans l'mté- rieur du village, il y a aussi des sources qui prennent naissance dans la même roche. Si l’on sort de Wannehain par un chemin qui conduit à la frontière belge et qui est dirigé vers le sud-est, on voit encore dans les fossés des affleurements de marne sous un peu de terre glaisc caillouteuse. — Dans le bois à gauche de ce che- min, ilexiste d'anciens trous où l'on a extrait de l'argile mar: neuse pour faire des briquettes de houille, et d'après le dire d'uu ouvrier, cette argile alternait avec des bancs plus durs, comme à Baisieux , Sainghin, etc. 7 Les localités où affleure l'étage inférieur” du térrain de” craie © dans la Flandre française , sont donc très-circonscrites et limitées ë 294,1 mA ( 150 aux quelques communes que nous venons de désigner. -— On voit que ces affleurements sont toys siyés sur Ja rive droite de Ja Marque, à l'exception de celui de Sainghin. Ce terrain constitue aussi le sous-sol du plateau compris entre les différentes communes ci-dessus rappelées ; seulement il est caché par une couche plus ou moins épaisse de limon argileux. — Il est probable qu'il s'étend même à une certaine distance sur la rive gauche de la Marque : car à la fabrique de M. Droulers , sur Je territoire d'Ascq, dans l'angle formé par les routes de Tournai et de Saint-Amand, on a trouvé les dièves de couleur gris- bleuâtre à 10" au-dessous du sol. Ces 10 mètres comprenaient a partir de la surface : Ale in Le. à 0 SUP RN SPPSN Sable argileux avec ose ' ÉTAIE v EE Calcaire blanc craveux. cn 5.205) ion On a eu de l'eau à 8" de profondeur et son niveau s'est éleve de 2 mètres. En supprimant donc par la “pensée le limon superficiel, le terrain marneux occuperait da randissement de Lille un espace quasi elliptique allongé de l’est à l’ouest et traversé du sud au nord par les alluvions récentes de la Marque. Cet espace est limité par une ligne courbe passant par le village de Camphin, traver- sant la route de Tournai, près de Baisieux, et longeant cette route jusque près du village d'Ascq, puis cotoyant les plateaux de Eezennes et de Samghin et suivant les marais de la Marque Jusque-dans 1€ bas de Cysomg et de Wanneha-en laissant la | côte tertiaire de * Bourghelles au midi. —La contrée que nous venons de circonscrire est limitée au nord et au sud par les sables ter- CHoA£- tiaires, et à l'augst par la craie blanche sénonienne. Elle a environ —— 3,400 hectares d'étendue et comprend une partie des communes de Camphin, Wannehain, Bourghelles, Cysoing, Baisieux, Ché- reng, Gruson, Bouvines, Sainghin, Hu: Tressin_et Anstaing. Ce terrain par ses affleurements seuls n'occupe qu'une étendue de 500 hectares au plus. 151 Son niveau ne s'élève pas à plus de 48" au-dessus de la mer; car sur le plateau compris entre Baisieux et Cysoing, dont les points les plus élevés sont à la cote 53, il est recouvert par une couche d'argile de 4 à 5" au moins d'épaisseur. IL était important d'indiquer les limites souterraines du ter- rain qui nous occupe, afin qu'on füt renseigné exactement sur les points où il est possible de trouver avec le plus de facilité les couches calcaires et marneuses susceptibles de fournir soit des chaux hydrauliques, soit des amendements précieux pour la cul- ture. J'ai exposé précédemment (p.112 du v.précédent), les résultats des essais que j'ai faits sur des échantillons de calcaires marneux hydrauliques recueillis à Bouvines et à Sainghin ; ces résultats qui nt ft mis sous Jes, 1 yeux de plusieurs membres de la Société des L6 Ssrtodeo) ai à Sparaissent. touta-fait concluants et appellent des essais sur une plus grande échelle. Je rappellerai aussi qu’on a constaté la présence de l'acide phos- phorique dans les mêmes roches et qu'il serait intéressant au point de vue des progrès de l'agriculture d’expérimenter sur Îes terres la chaux provenant de la calcination des calcaires marneux des environs de Cysoing et de Bouvines. Enfin , il existe dans les mêmes localités des marnes qui restent sans emploi, et dont cependant on fait grand cas dans beaueoup de pays. On s’en sert avec succès en plusieurs points de l'arron- dissement d'Avesnes pour amender les terres trop argifeuses. Ja vu sur les bords de plusieurs carrières, près de Cysoing, des dé- bris de ces marnes jetés au milieu des déblais comme impropres à donner de la chaux. Elles s’étaient délitées à l'air et il suffisait de les toucher pour les voir se diviser en une foule de petits frag- ments. Rien n'empécherait qu'elles ne fussent utilisées immédiate- ment. Comme elles s'emploient à l’état brut, elles ne coûteraient pour ainsi dire que le transport et contribueraient certainement à améliorer les terrains argileux et à enrichir les récoltes. Le système nervien a été traversé par beaucoup de sondages aux environs de Lille, de Douai et de Valenciennes. Nous donne- dE (152) rons son épaisseur et la profondeur à laquelle il a été rencontré en divers lieux dans le paragraphe où il sera traité du système séno- nien, afin de faire saisir d'un mème coup-d’æœil la liaison qui existe entre les deux étages crétacés. Un forage pratiqué en 1838 à Tourcoing, au centre de la Petite- Place, pour recherche d'eau, a rencontré les bleus sous la craie blanche à 132" au-dessous du sol. Le forage d'Halluin à aussi traversé à 125" 85 de profondeur, 1% 60 d'une roche dure qui a été désignée par les explorateurs comme étant de la nature du grès et qui n’est autre très-proba- blement que le calcaire siliceux qui existe à la partie supérieure du système nervien. Chez M. Taffin-Peuvion , à à Lesquin, on a trouvé à à 10 de profondeur, sous 11" de craie Taig à silex; silex case | Ve 2 d'un calcaire 3m de craie sans silex. 1" de tun blanc, moins dur que le premier. 12" 10 de dièves. parsemé de grams verts compact et Le puits était parvenu à 33" de profondeur lorsque ces rensei- gnements m'ont été communiqués. On a rencontré l'eau à 22» au-dessous du sol: mais les sources étaient faibles et tarissaient en été. La fosse ouverte dans la commune d’Annappes, pour l'extrac- tion de la craie chloritée sénonienne qu'on emploie comme pierre de construction, a 18" de profondeur. Le sol des galeries est formé par un banc de calcaire chlorité tuberculeux {tun}, à texture serrée. Ce calcaire est intimement mélangé de silice qui lui com- munique une certaine dureté. — On pourrait peut-être s’en servir avec succès après calcination pour le chaulage des terres. Ce banc qui a 0" 60 d'épaisseur recouvre 2" de mafne grise, ® 60 de tun blanc, 0" 50 de marne avec silex ou cornws et la ele sh up fe 16 diève bleue. On trouve l’eau à 22" à la partie supérieure dés dièves. Cette coupe rappelle exactement les roches de Lesquin. Les puits de mines des environs de Valenciennes traversent en général au-dessous de la craie verte qui se trouve à la base dn système sénonien : Silex plus ou moins abondants au milieu de la craie 11111) PAST RRET PE UNSESS PER ST ST POOR et DIE 2 Me M un 51e 4 14 tag Diese Forte toise . sus 2.e bleu. UE 1 30 Petit banc ou forte toise. 1 50 3.° bleu. 4 50 Petit banc. rra0 4.° bleu. 1 80 Petit banc. . 2 LA 1 30 ES MIEURE AUME tr binuhé à 7 Éa0t AG LUTTE OA MP AET D 2 MTS RE TU RT QUE Terrain houiller. L'expression de forte toise s'applique habituellement à un cal- caire plus ou moins argileux dans lequel on remarque souvent des concrétions siliceuses d’un gris bleuâtre, qui se fondent dans la masse. — Ces parties bleuâtres ne sont autres que du silex mélangé intimement d'une petite quantité de calcaire. — En effet, pour peu que la couleur bleue se nuance de gris, une goutte d'acide muriatique y fait naître une légère effervescence qui n'a pas lieu sur les parties plus foncées. Ces roches renferment ordinairement quelques grains de chlorite qu’on distingue très-bien avec le se- cours de la loupe. Quelquefois la silice devient plus abondante vers le haut de l'étage et donne lieu à ce que l’on appelle à Mons le rabot. Ce rabot est exploité à ciel ouvert, comme pierre à paver, à 3 ou 4 kilomètres au nord de Mons, dans la commune de Nimy. où 1] forme des couches de 1",50 à 2 mètres, inclinées de 199 ("154 ) environ vers le sud et recouvertes par la craie chloritée du sys- tème sénonien. Le rabot de Nimy, quoique consistant presqu'exelusivement en silex, fait cependant un peu effervescence avec les acides; mais la quantité de carbonate de chaux qu'il renferme doit être bien minime. Du reste il est souvent à l’état de silex pur et renferme même quelquefois des géodes tapissées de beaux cristaux de quartz. à 4 On donne aussi le nom de rabots aux silex noirs disséminés dans EN 2% Ss.xJa marne blanche comme au Flenu de Mons et à Valenciennes. — Ceue roche existe en effet à la partie supérieure de l'étage nervien et est recouverte, de même que le rabot, par la craie sénonienne. Le rabot n’a pas d’ailleurs de caractères minéralogiques bien cons- tants. Je l'ai observé à Anzin , dans une ancienne carrière voisine de la route de Valenciennes à Fresnes, qui est aujourd'hui rem- blayée, et dont la parot présentait la coupe (fig. #). Dans cette carrière le terrain crétacé (e) se trouvait à 4 mètres de profondeur environ recouvert par les psammites et les argilites glauconifères du terrain tertiaire (b) et par le limon (a) consistant en une formation argilo-sableuse jaunâtre avec veines de sable pur. — La craie était visible à la partie inférieure de l'excavation et était relevée de 2 mètres vers le nord par une faille affectant aussi les couches tertiaires et dirigée de l'O., 15 à 20 degrés N., à l'E. 15 à 20 degrés S. On y remarque quelques fossiles et de petits nids de sable vert qui annoncent le passage au système sénonien. En certains points la craie se charge de silice et présenté un aspect particulier qui la fait presque ressembler à du marbre. Elle a en effet une cassure compacte ; elle est dure et porte des taches ou des veines de couleur jaunâtre qui sont dues au silex blond dont le calcaire est pénétré. Cette couche appartient à la partie supérieure du système nervien et représente les rabots qui affleurent le long de la côte d'Anzin, sur la rive gauche de l'Escaut. A Denain , les rabots affleurent comme au pied d'Anzin. À Trith-Saint-Léger et à Valenciennes on trouve les bleus sous l'alluvion. ” 1455) Ce système forme donc le fond de la vallée de l’Escaut entre Valenciennes et Denain ; il affleure aussi le long des ruisseaux de la Rhonelle, de l'Ecaillon et de la Selle, qui viennent se jeter dans l'Escaut sur sa rive droite. Les marnes d’Autreppe , village belge qui touche à la frontière, au nord-ouest de Bavay, sont comprises aussi dans le système nervien , qui s’avance jusque sur les bords de la Sambre où l'on voit près de Boussières le tourtia nervien, bien caractérisé, reposer en stratification discordante sur les bancs de calcaire bleu. j La marne est exploitée près de Berlaimont pour la fabrication des briquettes de houille. On en extrait dans les environs de Ques- noy et de Bavay pour le même usage et aussi pour amender les terres comme nous l'avons déjà dit. A Bellignies, le tourtia recouvre la formation ferrugineuse décrite précédemment dans le paragraphe consacré au système hervien. Les dièves où marnes existent aussi en certains points sur la rive droite de la Sambre. C'est ce terrain qui forme une partie du plateau compris entre les deux Helpes où il est superposé au greensand. On trouve fréquemment de la pyrite de fer cristallisée dans les dièves ; mais elle n’est pas exploitable. Des recherches assez actives faites il y a quelques années dans les environs de Marbaix sont demeurées sans résultats. Parmiles fossiles du système nervien, j'ai reconnu les suivants : Polypier, catillus , ammonite, hippurite, ptychodus polygyratus, terebratula globata, et plusieurs autres espèces ; anodonte, di- verses ostrea et entr'autres l'ostrea gregarea, pecten asper, car- dium , plagiostome , cucullæa, dent de squale. J'ai recueilli aussi dans les dièves et dans les bleus plusieurs autres fossiles de très petites dimensions qui n'ont pas été déter- minées, + CZar 156 $ IV. Système sénonien de M, Dumont. Le système sénonien consiste en une masse puissante de craie blanche mélangée de chlorite à sa base. On y rencontre des lits horizontaux ou des rognons de silex noir et des boules rayonnées de pyrite de fer souvent décomposée. Les deux étages du terrain de craie proprement dit sont donc parfaitement symétriques puisque chacun d'eux commence par une assise sableuse. La craie blanche affleure en plusieurs points des arrondisse- ments de Lille et de Douai, et bien que la plupart du temps elle soit couverte par une couche d'argile, la nudité du terrain, l'ab- sence de ces bouquets de bois qui font l’ornement des plaines sa- bleuses ou argileuses de la Flandre, suffit pour décéler sa pré- sence à une faible profondeur. — Les sols crayeux présentent en effet un aspect triste et froid. On y rencontre souvent de grands espaces privés d'eau et de végétation. Aussi la civilisation fuit-elle ces contrées ingrates qui n'offrent que de minces ressources à l'habitant des campagnes et ne paient pas assez largement les efforts du cultivateur. Nous verrons plus loin que lenombre d'habitants par kilomètre carré est bien moins considérable sur la craie que sur les terrains tertiaires et alluviens, et même, en examinant une carte topographique détaillée avec quelque attention, on peut recon- naitre facilement les pays érayeux par la rareté des villages, des hameaux , des cours d'eau, ete. La pureté de Ja graie qui n'est autre ordinairement que du carbonate de chaux presque sans mélange d’autres substances, el sa porosité, d'où dérive la pro- priété qu'elle possède de laisser filtrer les eaux pluviales, sont les principales causes de sa stérilité ; mais il arrive rarement, comme nous l'avons dit ci-dessus, que la craie nesoit pas recouverte, dans nos environs, par une couche plus ou moins épaisse de limon argileux, et c'est ce qui fait que le soln'a pas l'aridité de celui de la Champagne, où la craie nue existe presque toujours à la surface. Dans l'arrondissement de Lille , la craie ne se montre au jour { 45% ) que sur la rive droite de la Deüle, entre Bauvin et Lille. — On en C/z œr2— voit des affleurements dans les communes de Provin, Allennes- lez-Marais, Camphin-en-Caremb reti lin , Avelin Seclin, Noyelles, Templemars, Vendeville, Lesquin, Ronchin, Faches, Wattignies, Loos, Esquermes, Les Moulins et Hel- lemmes. Elle existe d’ailleurs à une faible profondeur dans les communes de Bauvin, Annœullin, Carvin, Herrin, Gondecourt et Chemy, et sur tout le plateau compris entre les marais de char Pedleiet qerlas Marqu : depuis la route de Lille à Tournai jusqu’ à une ligne brisée passant par les clochers de Seclin, Avelin et Ennevelin. La craie est à découvert dans toutes les tranchées du chemin de fer du Nord, ouvertes entre la gare de Fives et Seclin. On extrait même des moellons dans la tranchée de Faches , pour revêtir les contrefossés du chemin de fer, au-delà de Seclin, ou pour remplir les rigoles qui donnent écoulement aux eaux de part et d'autre de latvores 7 Vis-à -vis l'église de Fives , chez M. Desmedt-Wallaert , la craie + est à2 vitre sol. 11 en est de même à la fabrique de sucre de M. Liénard ;’où elle est recouverte par { mètre50 cent. * d'argile et par 0,50 à 0,60 de terre végétale. — On y a creusé un puits absorbant dans lequel on perd les eaux provenant du lavage de la betterave. -- Dans la propriété de M. Odelant, à Hellemmes, la craie existe à 6 mètres de la surface , sous les sables argileux du terrain tertiaire. —I1 y a 2 mètres d’eau au fond du puits qui a 10 mètres de profondeur. La coupe de ce puits est la suivante : esrouyéabtalesf Aa Lans ess 0" 60 nie CAE Le PR ANSE ENS APRES 2 50 Sable venharailenxe hi Ode 2 90 Cobra nul. Po ae RÉ & Profondeur du puits. . . . . . 10 » Chez M. Delobel , à l'extrémité du village d'Hellemmes , il y a à [| 158 3 mètres d'argile sur la craie. — Sur la route de Tournai , à 400 mètres environ des dernières maisons du même village, on monte. sensiblement et on voit la craie dans les fossés. Plus loin, au ca, haret du Bois-Blane , près du chemin qui conduit à Annappes on a trouvé, en faisant un puits, 1 m. 50 c. d'argile.et 1 m. 50c.. de terre glaise avec fragments de craie et quelques silex ayant. d'arriver à la craie.—Au Moulin-Saint-Sauveur, près de Lezennes, on trouve la craie à 4 m. environ de la surface, sous 1 m. d'argile et 3 m. de sable vert argileux.—A Lezennes, la craie existe à une profondeur de 2 m. à 2 m. 50 € Il y existe d'anciennes carrières souterraines qui, pendant longtemps , ont fourni des matériaux . pour la construction de la ville de Lille. (1) La carrière de moellons située sur le territoire de Ja commune (1)C'est dans ces vastes souterrains , qui n'ont pas moins de deux kilomètres carrés de développement et qui s'étendent sans discontinuité entre les villages de Lezennes et d'Hellemmes, qu'un restaurateur de Lille, le sieur Puy , s'est égaré en janvier 1848 et n’a été retrouvé que soixante-douze heures après sa disparution. Cet homme fait un grand commerce de chammpignons-gæil®tmitive dans la partie des carrières la plus rapprochée du village de Lezennes. — Il eut un jour l’imprudence de s'éloigner des galeries où il avait l'habitude de circuler, pour chercher de nouveaux emplacements propres à recevoir sa culture, Mais il fut bientôt désorienté, et après avoir marché longtemps il fut obligé de s'arrêter, faute de lumière, Nous fûmes chargé par le préfet d'alors, M. Desmousseaux de Givré, de diriger les recherches auxquelles on se livrait pour tâcher de découvrir le sieur Puy. On mit à notre disposition 115 hommes de la garnison, qui furent échelonnés suivant trois directions principales et qui, munis chacun d'une lumière, formaient autant de réverbères vivants éclairant les galeries jusqu'à une certaine distance et servant de repères aux diverses brigades de carriers et d'hommes de bonne volonté qui s’y rattachaient au moyen de ficelles. Nous n’oserions prétendre que ces dispositions déterminèrent la découverte du sieur Puy; mais elles eurent certainement pour effet de faciliter les explorations. Depuis cet événement, qui a mis en émoi toute la population, le sieur Puy a établi lui-même une clôture pour isoler ses couches de champignons des espaces inconnus qui les environnent. On n'exécute d’ailleurs aucunctravail d'exploitation dans ces carrières, qui sont abandonnées depuis longtemps et dont l’origine remonte à plusieurs siècles. Leur entrée devrait être fermée au moyen d’une porte, dont la clef resterait entre les mains du maire de la commune. afu que personne ne püt y pénétrer san: que l'autorité n’en fût avertie. ( 159 ) d'Annappes , entre la route de Tournai et le chemin de Lezennes à Sainghin, se trouve sur le prolongement de ces anciens souterrains avec lesquels elle communique indirectement par de vieux tra- vaux. — L'extraction a lieu par un puits {déjà cité page 153) à l'orifice duquel est établi un treuil muni d'une grande roue, que l’homme fait mouvoir par son poids. — On pénètre dans la car- rière par un deuxième puits où se trouve une échelle consistant en un simple montant vertical traversé par des échelons. On trouve a partir de la sürface, 4 m. d'argile à la partie inférieure de laquelle existent des cailloux empatés dans une glaise compacte, brune (alluvions anciennes), puis 2m. de sables argileux tertiaires semblables à ceux rencontrés à Hellemmes, puis le:massif de craie qui à 12 m. d'épaisseur, et qui, à sa base, se charge de chlorite sur 2 m. environ de hauteur. C'est ce banc de 2 m. qu'on exploite par piliers et galeries de 2 m. environ de largeur sur autant de bauteur. On laisse autant de pierre qu'on en prend. Du reste la largeur des galeries dépend du nombre de coupures que l’on ren- contre et qui obligent à soutenir le ciel au moyen d’étais en bois plantés dans la pierre. La plus grande partie des galeries est rem- “blayée avec les menus débris. Mais on ne fait ces remblais que. pour éviter d'extraire les matériaux encombrants qui résultent de l'exploitation. Le micraster coranguinum et le catillus-sont très- fréquents dans la gjaie chloritée. La même nature de craie s’observe à la surface du.sol, près de Wannebain, comme nous l'avons dit précédemment (page 150), et dans la carrière de Bouvines, située en haut du village. On voit dens cette dernière la craie blanche supportée par une craie chlo- ritée à divers degrés, qui est quelquefois assez dure. A la partie inférieure, la chlorite devient si abondante que la roche perd sa consistance et devient friable ; elle se distingue alors parfaitement de la masse crayeuse par sa couleur verte. — On jette la craie chloritée dans les déblais comme ne pouvant donner de chaux. Cependant comme le sable s'y trouve répandu en grains très-fins, on pourrait sans doute produire , en la calcinant, une certaine quantité de silice soluble dans les acides , et par suite employer 74/4 4 { 160 | avec succès, comme amendement , la chaux qui en proviendrait. Cette chaux introduirait en même temps dans le sol une notable proportion d'acide phosphorique que l'analyse chimique a fait dé- couvrir (1). — On ne trouve la craie chloritée que dans la partie de la carrière qui regarde la Marque. — Elle ne forme sans doute ici comme à Wannehain, qu'un nid au milieu des marnes du sys- tème nervien dont elle est séparée par une faille. — Du côté de la route on ne voit plus en effet que des dièves et des calcaires argi- leux (fig. 2). Cette faille ou fissure qui s'est produite postérieure- ment au dépôt crayeux , a eu pour résultat d'abaisser le système sénonien de manière à amener les roches chloritées qui se trouvent à sa base , au même niveau que les dièves de l'étage nervien. En suivant la route de Lille à Pont-à-Mareq on rencontre un premier affleurement de craie à 500% environ avant d'arriver au chemin de fer. Des deux côtés de la route, les champs sont jonchés de petits fragments de cette roche. Au pied de la hauteur de Faghes, la craie est couverte de 2" de terre végétale et d'argile, mais plus on s'élève et plus elle $e rapproche de la surface. — Elle affleure en, haut de la côte sur 200" environ , puis elle s'enfonce sous une faible couche d'argile pour se montrer encore sur le versant opposé. La craie ne reparaît plus ensuite qu’en descendant vers le hameau d’Antrœuille où on voit près de la route une carrière à ciel ouxert.el un four à chaux. Entre ce_ point et Faches la craie est cachée par 1 à 2" de limon. La craie affleure aussi entre Lesquin et Fretin, près de l'in- tersection du chemin qui relie ces deux communes avec celui de Seclin à Sainghin. On la voit encore à un demi kilomètre de Fretin en montant vers Péronne et près du château de M. De- lespaul où des terres très-marneuses bordent les marais de la Marque. (1) Voir les résultats de cette analyse page 109 du volume précédent. fe A7 € A tft 161 ) A Lesquin!” on trouve au-dessus de la craie : A en ,162 dt Terre végétale et argile jaune. . , . 1"50 Argile sableuse avec fragments de craie. 0,60 Argile jaune plus sableuse quela première ‘employée pour mortier) avec quelques fragments de craie. . Lt ge Ne HOfalshie, Mes cie A0 Entre Sainghin , Péronne et Lesquin, il y a sur la craie une couche d'argile de 5 à 6" au moins d'épaisseur. C'est surtout sur la route de Lille à Seclin que la craie pré- sente de nombreux affleurements. On commence à la rencontrer à 100 mètres environ au-delà du chemin de Thumesnil; elle affleure ensuite au hameau de l’Arbrisseau qui se trouve sur le _prolon- sement de l'éminence de Faches , puis entre Wattignies et Tem- plemars , dans la partie de la route la plus rapprochée du chemin de fer, et sur la hauteur qui domine Seclin. A Houplin, Noyelles, Wattignies, il y a 1"50 environ d'argile sur la craie. “ A Haubourdin, chez M. Tirlemont , filateur, on la trouve sous 2% de limon. ; Près du moulin d'Ennequin, dans la commune de Loos, il y a certains points où elle approche très-près du sol, comme au reste sur toute la lisière nord de la côte qui fait suite à celles de Faches et de l’Arbrisseau. D'Haubourdin à Lille, la craie est toujours recouverte par une certaine épaisseur d'argile qui varie de 3 à 5%, et on ne la voit affleurer que sur une petite étendue de terrain près de la filature de MM. Lepercq et Faucheur, à Wazemmes. Dans la partie sud de l'arrondissement de Lille, la craie se montre à la surface en quelques points, notamment dans le chemin de Camphin à Carnin, près de la grande route; entre Carnin et Allennes , dans une partie de cette dernière commune connue sous le nom de canton des Marlettes ; enfin tout près du village de Provin, sur une petite éminence traversée par le it TO anciennes. tr : ; , : 0 nt: PORTE Qu qui conduit à Carvin. A mi-route de Provin à Carvin, à °@e après avoir dépassé la limite du département du Nord, on ren- * contre ane carrière où la craie n'est recouverte que par une mince couche de terre végétale. On s'élève ensuite sur l'argile avant de descendre à Carvin où la craie existe à 5" de profondeur. Uneligne droite tirée de Camphin à Chemy et prolongée jusqu'à Gondecourt dessine assez bien la limite de la craie et des sables tertiaires. L'espace à peu près triangulaire qu'elle laisse à l'ouest doit être ajouté au grand plateau crayeux qui occupe le centre de l'arrondissement de Lille, au sud du chef-lieu du départe- ment, pour avoir la superficie totale de la craie dans cet arrondissement, abstraction faite du limon. On trouve que cette superficie. est à peu près de 12,400 hectares, les affleurements de la craie réunis n'ayant qu'une étendue de 906 hectares en- viron. Les communes dans lesquelles l'étage supérieur du terrain de craie afileure ou n'est recouvert que par une couche de limon argilo-sableux sont donc les suivantes : Lille, Wazemmes, Esquermes, Les Moulins, Fives, Hellesmes, Ann _Ascq, Lezennes, Ronchin, Lesquin, Faches, Loos, Haubourdin, Emmerin, Wattignies, Noyelles, Houplin, Seclin, Templemars , Vendeville, Avelin, Ennevelin, Fretin, Péronne, Sainghin-en-Mélantois, Gondecourt, Chemy, Camphin, Ca arnin, Herrin , À Allennes . , Annœullin, Provin et Bauvin. La craie forme dansT'ärrondissement de Lille, une ( crête dirigée de Faches à Haubourdin, c’est-à-dire de l'E. 18° S_àlO.18N. —Cette direction coïncide avec celle du soulèvement qui a produit la chaîne des Pyrénées et celle des Apennins, postérieurement au dépôt de la craie et antérieurement à celui du terrain tertiaire, et se trouve indiquée par plusieurs failles qu'on peut observer dans les carrières de craie. — Remarquons toutefois que ce sou- lèvement aurait pu ne pas laisser de traces à la surface du pla- teau craveux qui à été couvert à une certaine époque par des sables et des glaises tertiaires et dont le relief n'est dû qu'aux courants qui ont creusé les dernières vallées. ( 163 } Le point culminant de la craie, aux environs de Lille, est à la cote 57 entre Faches, Lesquin et Ronchin. Le terrain de craie présente aux environs de Douai, une dispo- sition toute différente de celle que nous lui avons reconnu dans l'arrondissement de Lille. D'abord son niveau est généralement plus élevé et s'élève jusqu'à 70 mètres au-dessus des eaux de la mer, entre Féchain ct Fressin. Ensuite il est dominé par les sables tertiaires quirecouÿrent ses sommets les plus élevés , contrairement à ce qui a heu aux environs de Lille où ces sables ne remplissent que les dépressions de la craie. Ici les couches sableuses qui reposaient sur les plateaux crayeux ont été com- plétement détruites ; Et au contraire elles sont restées en place en beaucoup de points. La craie n'affleure dans l'arrondissement de Douai qu'au midi des marais de la Scarpe où, d'après ce que nous venons de dire, elle doit occuper des niveaux moyens entre les plus hautes col- lines et les plaines les plus basses. En effet, elle se montre à la surface du sol sur la côte qui borde la Sensée, de Brunémont à Wasnes-au-Bac; sur la rive gauche du Riot des Glennes entre Monchecourt, Emerchicourt et Marcq; au pied des collines sableuses de Villers-au-Tertre et Erchin ; Sur le versant nord du plateau qui domine les villages d’Auberchicourt et Aniche; en descendant d’Abscon à Erre et Hornaing ; en plusieurs points de la côte compris entre Férin, Douai et Dechy ; puis sur la rive gauche de la Scarpe, dans-les. environs- d'Aubv, Flers et Es- querchin. Si l'on part de Douai et que. l’on suive la route de Cambrai : on remarque après avoir traversé le chemin de fer, quelques af- fleurements de craie en montant la côte, puis on arriveà la carrière de Lambres qui touche à la route et où la craie blanche, sans silex, est recouverte par une faible couche d'argile dont on a fait des briques. En prenant le chemin de Férin à droite, on voit encore la craie à 500" environ de la route. puis on marche sur le limon jusqu'au village où la craie reparait de nouveau. À Cantin, il y a 4" d'argile sur la craie qui passe au-dessous des ( 164 ) sables et grès tertiaires entre Cantin et Bugnicourt. Dans le bas de ce dernier village on en voit un nouvel affleurement sur léquel est ouverte une carrière de pierre à chaux dans l'angle formé par la grande route et le chemin de Bugnicourt à Brunémont. On parcourt ensuite un kilomètre environ sur un terrain plat et argileux, puis on rencontre de nouveau la craie à la surface du sol jusque dans le village d’Aubigny-au-Bac, où il y a aussi une carrière. guet D Dess Le chemin qui conduit à Marcq est crayeux jusque près de son intersection avec celui de Féchain à Fressain, où l'argile super- licielle a déja 1"50 d'épaisseur. Avant de descendre à Mareq, on traverse une tranchée de 4 à 5 mètres de profondeur dans laquelle on ne voit qu'une argile sableuse recouvrant un sable de moulage très-fin. Le village de Marcq est bâti sur la craie qui s'étend sur Ja rive gauche du ruisseau jusque près de Monchecourt où existait autrefois une carrière. À l'entrée de ce dernier village, le puits d’une briqueterie a atteint la craie à 4" de profondeur. On rencontre encore la craie au pied de la colline de Villers, jusque dans le bas du village d'Erchin. La même roche affleure dans toute la plaine d'Erchin jusque près du chemin de Lewarde à Auberchicourt, où se trouve un four à chaux près d'une car- rière ouverte dans un massif de craie blanche, dépourvue de silex. ? Entre Lewarde, Masny et Ecaillon, la craie est recouverte par 3 à 4" d'argile. Sur le plateau qui s'étend d'Emerchicourt à Abscon, elle se : trouve à une profondeur de 5 à 7" sous les sables argileux ter- tiaires qui sont eux-mêmes cachés par le limon. Ainsi près de la verrerie d’Aniche, on voit la craie dans une profonde excavyation sous 4" de terrain tertiaire et 3" de limon. Mais elle se rapproche de la surface en descendant à Aniche et à Auberchicourt, puis elles’enfonce de nouveau et on latrouve à 3 ou 4" du sol au milieu de ces villages. La carrière de M. Fiévet, de Masny, et celle md ! LIN ER") qui alimeñte le four à chaux d'Auberchicourt, sont placees sur l'affleurement qui longe le plateau. Si l’on se rend d'Abscon à Erre, la craie commence à affleurer vers la limite des deux arrondissement de Douaietde Valenciennes, et se poursuit sans interruption jusque dans le village d'Erre. On voit encore la craie dans le fond d'un petit ruisseau qui traverse le chemin de fer près de la station de Somain. Mais elle disparait entièrement le long du rail-way depuis ce point jusqu’à Douai. A Ja nouvelle fabrique de sucre de Dechy, près de la route de Douai à Bouchain, on l’a trouvée au-dessous de 5 à 6" de NX limon argilo-sableux. Il y à aussi à l'ouest et au nord-ouest de Douai, quelques affleurements qui touchent à la limite du départément du Pas- de-Calais. A moitié chemin de Courchelettes à Esçuerchin, on voit la craie à la surface sur la côte, puis elle disparait sous l'argile pour se montrer de nouveau dans la vallée d'Esquerchin. — Ce village est bâti tout entier sur la craie. Il v existe une carrière et un four à chaux. La craie finit à la chapelle d'Es- querchin , à l'angle formé par le chemin de Beaumont et celui de Noyelles-Godault. Ce dernier rencontre un nouvel affleurement le long de la côte de Beaumont. Enfin on voit encore la craie à la surface du sol, entre la route de Béthune et les villages de Courcelles, Flers et Auby. ñn Le terram de craie forme. donc-aux-environs de Douai un large 1139 |] plateau traversé par une suite d'ilots tertiaires, dispasédu nord au sud, de Montigny à Bugnicourt, et de l'ouest à l'est, d'Estrées à Fressain. Sa surface est d'environ 11,513 hectares, et se réduit à 2,669 si on considère seulement les points où la craie n'est pas recouverte de limon. — il traverse les communes d'Auchy, Flers, Lauwin-Planque, Esquerchin, Courchelettes, Lambres, Douai, Waziers, Sin, Férin, Gœulzin, Dechv, Gues- nain, Roucourt, Cantin, Bugnicourt, Aubigny-au-Bac, Fressin, Féchain , Marcq, Monchecourt, Erchin , Masny, Ecaillon, Auber- chicourt, Aniche, Somain, Fenain,. Erre et Ornaing. re 6 CAES neln es ( 166 ) Les sondages dont nous donnons ci-après les résultats font con- nailre en même temps les épaisseurs des deux étages crayeux (nervien et sénonien) et leurs profondeurs dans différentes loca- hités : HÔPITAL GÉNÉRAL DE LILLE. ® = % 2 & | Craie blanche très compacte....,... de 24m 5. )Craie avec silex (1)......-« etre de 9 70 SK = |Calcaire marneux grisatre , plus ou | um 5 moins dur, quelquefois mélangé de (de 49 » 2 grains lrès-fins de chlorite....... / 2 Marnes grises. (Dièves)............ . de 75 » E LDeSeTAUCONITÈLCS: +. .,...,.... de 87 » > [Marnes gris-jaunätre............... de 89 » | Tourtia ........ ...........,..... de 92 » Calcaire bleu. Epaisseur tolale...... 7. SECLIN. 44 A = £ | Craie DANCE 0... ue se... 06 1080 £ 2 |Craie avec silex. (Ceux-ci deviennent LE | de plus en plus fréquents au fur ee 5 » dr à mesure qu’on s'approfondit.).... Lun Pierre blanche et dure. (Tun blanc.) de 25 90 Calcaire chlorité siliceux tres- dur| ;, > ps é Qusert) : réeiiés si toh re (ee = JCalcaire dur, plus ou moins argileux. de 27 69 S (Fortes toises.).. } 2.7 4114. in. 412 2 Marne compacte verdàtre. (Diève) ..° de 33 84 3 JCalcaire grisätre, dur à percer.(Fortes) Se à: = : de 34 24 a talus). «5h. Jnedoss. 248 st CORDIBVE vont. Aceane remit Er PRE ‘ de 35 50 Calcaire verdâtre, assez facile à percer ) de 37 50 Diève verdätre....... ok achat de 38 50 Profondeur des couches. ee à 39 70 à 46 70 69 Epaisseur des couches. 15 ol SO NN -=ùn © © 70 » (1) Dans plusieurs des coupes que nous donnous et qui résultent de forages, Ja craie chloritée n'existe pas ou plutôt n'a pas été remarquée, Il arrive souvent dou fe. u'on la comprend dans la couche supérieure du système nervien qui est très-dur © désigne par le nom de fun. TECH EEE (167) Profondeur Épaisseur des couches. des couches TN 5 verdatre, Li - done, Mn A0 DE 4 où Argile marneuse verdätre. (Diève.) ..’ de 40 0% à 42 25 9 91 $ Pierre calcaire verdâtre , très dure.. de 42 25 à 45 95 3 70 : Dièves grises... ................... Je 45 95 à 50 49 4 54 3 (Petit gris. (Roche tres-homogène et Ê NE ë LEUR NAN A ee PNR" 5 86 2 Diève bleuàtre compacte Let s --. 40 56 35 à 56 87: 0 52 à ») Petit gris:.:.…. Joe L TE PAS no rÉ de 56 87 à 57 67 O0 80 £ Dièves grises très-compactes... . .. de 57 67 à 61 50 3 83 n {Dièves AVECDYLOSES RENE see de 61 50 à 62 50 14 Dièves compactes de diversescouleurs de 62 59 à 79 35 16 85 Pierre gris-bleuâtre , dure.......... de 79 35 à 81 » 1 65 Diève compacte grise, nuancce de) 3, 81 , à 81 70 170 ÉTERNEL 7: RONA Eee nest n late elees penis de 81 70 à 82 67 O0 97 Calcaire bleu. (ven pagei3e) : 51 77 Epaisseur (talent. 1. es . 8181 | F ORCHIES. Cie) 20 Aféu Fi LE a PT ET AP SERRES . de 57 50 à 87 35 929 85° 2 5 ) Craie avec silex pyromaque......... de 87 35 95 13 7 78 37 63 2 3 (Marnes ou faux bleus..........:... de 95 15 à 103 80 8 65 £ # jDièves....... SRE rent mere de 103 80 à 146 56 42 76 m = (Tourlia. ...,.......,...,.,..,..4 de 146 56 à 147 74 1 18 Calcaire bleu. » 57 41 Epaisseur totale np MEL ee ve «. 90 24 CCR TEMPLEUVE, Chez M. Demesmay. 47, 2: & z & (Craie pure....... SEE POP EE ne de 39 50-à 63 » 23 59 Ê FA N'GrMe avec silex"... :%...-,.,0.. de 63 Ma GG a 20e !, #2 (Craie chloritée. ................... de 66 »à 6726 1 20 mn 27 70 £ 5 (Marnes crayeuses.… ............... de 67 20à 101 » 233 80 SE DE TS RSS ANA PER AR ARE SRE de 101 nà123 » 922 » RREAUIOURMS EP UNE ON, EN Le de 123 ‘5 à 124 D "1 » Calcaire bleu. | 56 80 passeur (ntale. nn nee cou ise e .88 90 { 168 ) { = LINE FLINES. " HART Profondeur Epaisseur des couches. des couches | Craie blanche avec quelques silex) 7 À noirs à la partie supérieure... çde 4349 à 88 27/44 78 Système sénoniers . { Calcaires marneux plusou moins durs } Ar < \ AM eB Ex ODA M PR [de 88 27 à 104 93 16 66 Dièves ou marnes argileuses grises, cs blanches , verdatres , HEAR 2 Ave 10593 à 16266 57 73 ‘Marne glauconifère. (Tourtia. } | de 162 66 à 163 66 frêne Calcaire bleu. ? Système 75 39 [AË \ =", CCR EE Epaisseur total... 2% - Me e oVge « » ve 9e a à 120 17 » CRETE ce MARCHIENNES. { @ j ! Ë £ | Craie blanche sans silex............ de 25 66 à 57 32 31 66 # £ | Craie marneuse grise ..........,.. de 57 32 à 61 32 4.» A 35 66 £ z (Calcaire marneux avec silex... ..... de 61 32 à 73 49 12.17 £ > jMarnes. (Diéves.)............ ..... 0073 49 à 128 » 54 51 FE à lrourtia d'a RE EE ae OL OUR co... 0128 à 128 66 » 66 Argiles schisleuses et grès houillers. 67 34 ENAISSOUTÉDIAIG: rec ve Tee asser AUS Lot de ___L'ESCARPELLE. (&ia | 8 £ (Craie blanche... ............ .….. de 17 35 à 39 05 21 70 5 £ Q Craie grise... VSD AREA de 39 05 à 57 65 1860 * 1 5 40 30 2 a (Marne avec silex. .......... ASE de 57 65 à 70 15 12 50 £ % 4 Bléus, dièves et fortes toises........ de 70 15 à 157 72 87 57 # & (Tourtia ...... ssosebosemeseorosses U0 197 72 à 159 1210140 Terrain houiller. 101 47 passeur totale... 7: 0.4." AGO 141 77 { 169 ) COURRIÈRES (Pas-de-Calais..) Ca Ex 40 Profondeur Épaisseur des couches. des couches à «1 Craie blanche.:1121........,,..., de 52) à 50 » 44 80 £ £ \Craie avec silex noirs............. . de 50 » à 61 90 11 90 = 5 )Marne verdàtre , avec fragments de) (se trouvecomprise F£ | LUN Hp AAA .....( dans les 7 m. 10 quisuivent anse 56 70 . ei dur à battre au ciseau (1)} 4, 61 90à 69 » 4.10 S AlMOCTUNR)E 2 2 den Re ASIN A DS ARE # : | S È Peves de Pipersen REUAUr avec py de 69 à 146 82 77 82 ni 70 TNT TT INSEE sales nd Let \dc146 82à148 29 1 47 Schiste houiller. 86 39 Épaisseur totale...... MAG HOME MALE 143 09 FA j Le cs] ANNAY (Pas-de-Calais.) fs + 2 © PÉMOMESANS SIlOX Le, en ereeares. de 10 » à 39 » 929 » Z£ (Craie avec silex................... de 39 » à 49 » 10 » / 39 » L | pl L #3 É FRET EC e à (Fortes toises. .{ d/42.r ln. Ab: : de 49 54 53 n 4 » RE MAPIONSEER eee NN Clin 2, . de 53» à 59 » 6G » dE Dièves....... OT à ere he terne TORRENT CNE SU LS MONTOUT HA. ..........se.ssess..e ... de 182 »à 144 9 9 » Gres houiller. 95 » ÉDAISSenr ÉObAGL: se cet oo ve «ve 134 » : ne 2 7,7) RAISMES , près Vicoigne. Lois HE LCraieblanche..::................ de 60 05 à 67 15 7 10 26 jo vert etbonne pierre. (Craie chlo-) de 67 15) 12 8 € FH ANT RAA ET MIO TN { à 84 05, 0,70 16 90 | 420 24 » (1) Ce tun n'est autre qu'une craie siliceuse plus ou moius dure , dans laquelle on remarque quelques petits grains noirs de silicate de fer et des nids de chlorite. Elle est exactement semblable à l'échantillon qui provient du forage de Lesquin , lequel montre à la fois le calcaire siliceux et la craie chloritée qui lui est super- posée. Au-dessus de ce calcaire siliceux se uouve une roche verdâtre avec frag- ments de tun qui nous a semblé devoir ètre placée à la base de la craie blanche et assimilée à la craie chloritée de Lesquin qui empâle aussi des fragments de même nature, Profondeur Épaisseur ” des couches. des couches. e d Marne avec silex..........,e...... de 84 05à 96 50 12 45 & )Bleus , fortes toises, ctc........... de 96 50 à 112 35 15 85 LE pr TOO La OPA TA à DONC de 112 35 à 131 60 19 25 QU LU CORRE EEE PEEEE SE EEE sus - de 181 60. AM39 450 85 Terrain houiller. 49 40 Épaisseur (OHal8:. . 2... see ous + -va5 SU 80 PE VRED. ë. £ £ (Craie blanche........... ms. +... de 23 32 à 63 99 39 67 £ £ | Craie avec beaucoup de silex........ de 62 99 à 64 15 1 16 55 | Craie avec silex à la partie supérieure. de 64 15 à 87 19 23 04 63 87 j Calcaire marneux avec silex ....... de 8719à 98 66 11 47 £ £& \Marnes argileuses grisâtres. (Dièves.) de 98 66 à 123 89 25 23 2 # 4 Marnes ou dièves jaunes........... de 123 89 à 124 90 1 01 5 & |Dièves grises........... ee ON © dc 12% 90 à 132 99 8 09 . \Tourtia.......... .. ee CS cel . de13299 à 13% 50 1 51 Schistes et argiles schisteuses. a 47 31 ÉDAISSEUT LOIRE nee nie et 111 18 PER CMEMESE AUBERCHICOURT . Ve Ë © |Craieblanche............... .... de 6 os à 50 33 44 33 5 S } Craie avec silex noirs............ ... de 50 33 à 68 66 18 33 5 D N ————— 62 66 8 £ { calcaire gris marneux avec silex.... de 68 66 à 77 33 8 66 SE ROVER ME ER eine cette ste sat de 77 33à 13933 62 » # = \“Marnes glauconifères. (Tourtia.)..., de 139 33à 14266 3 33 Terrain houiller. 13 99 Epaisseur totale.... « ...:......... .. 136 65 ME DO ESS ÉMERCHICOURT « £ 5 £E cru blanche ........ Rap ie …, de 688 à 5233 45 44 DR € n © ES. de 5233à12408 71 74 BE DICYCSAOT MANDES ser cphece de 124 08 à 128 93 #4 85 ES TONDA Res Res erfean seb ss Calcaire bleu. © 16 59 ÉDAISSEUR LOLAlB sm sw ce a ce ocre se CLSSIUT (11) Les coupes de terrain qui précèdent montrent qu'il y a dans le terrain de craie deux bancs de silex complétement différents ; car l'un d'eux se trouve à la partie supérieure du système nervien et “représentele rabot, tandis que l’autre est compris dans la craie blanche au-dessus de la craie chloritée. Il y a beauceup d’autres forages qui ont rencontré la craie daûs la Flandre ; nous nous contenterons de citer les suivants : vT: der } 2 Profondeur à laquelle 4 3 4 on a trouvé la craie. Pont-à-Marcq (Lannerie près de la rivière). 24" » Thumeries {fabrique de sucre). . . . . . 81 » min ee ei MR ectib eut Lou up 2588 » BARON. Rte CC PS CRUOUREE ST ? Tourcoing { Petite- D DO MAIUIN., .:. TT Salomé { fabrique de sucre).. . . . . . . 18 » Marquillies ! fabrique de HE LOST à OLD D RO AU. 2. dé 108 2 don aie mi La craie chloritée/sénonienne affleure en Belgique : à Nimy- Maizières, près de Mons, où elle repose sur les rabots du système nervien. Elle est caractérisée dans cette localité par un fossile particulier, lostrea sulcata. La même roche se rencontre à Hordain, près Bouchain sur l’Escaut , où elle est exploitée comme pierre de construction sous le nom de pierre d’Hordain. La craie blanche existe à la surface du sol en beaucoup de points des arrondissements de Valenciennes et de Cambrai; on la rencontre surtout sur les flancs des vallées. Souvent elle cesse d'être visible sur les plateaux où elle est recouverte par le limon et aussi par des terrains tertiaires , surtout dans la partie sud de l'arrondissement de Cambrai. La craie sembie être le résultat d'un dépôt qui s'est opéré au * * & Libye 722 (472) milieu d'anciennes mers dont les eaux renfermaient du carbonate de chaux et de la silice en dissolution. L’évaporation de l'eau à donné lieu à la précipitation du calcaire et de la silice dont les éléments se sont groupés en vertu de leur affinité chimique et ont formé les veines ou les rognons de silex intercalés au milieu des banes de craie. Le célèbre professeur de Berlin, M. Ehren- berg , en examinant la poussière de la craie à l’aide d’un puissant microscope , a observé que cette substance était composée en grande partie de débris organisés fossiles appartenant à la classe des infusoires , de sorte que la craie ne serait autre qu'un cime- tière immense de petits animaux dont l'abondance dans les eaux des mers crayeuses était probablement due à quelque circons- tance particulière qui favorisait leur développement. On admet aussi généralement que les silex doivent en partie leur origine à des secrétions d'infusoires siliceux de l’ordre des éponges. Leur tissu organique que le microscope décèle, tend d'ailleurs à confir- mer cette opinion. On trouve dans l'étage crayeux supérieur divers fossiles, parmi lesquels j'ai surtout remarqué le catillus cuvieri, le micraster coranguinum , l'ananchite ovata , Va bélemnite mucronatus. L'en- veloppe de ces fossiles est siliceuse, excepté celle de l’ananchite qui est en calcaire cristallisé. Leur intérieur est rempli de craie. J'ai aussi un échantillon de silex noir dans lequel se trouve empâté un oursin ananchite transformé en craie ; d'où il résulte que cet oursin était déjà plongé depuis un certain temps dans la vase crayeuse quand a eu lieu l'infiltration du suc siliceux qui est venu adhérer à sa surface. La nature poreuse de la craie et la propriété qu'elle a de se fendre à la gelée la fait rechercher en agriculture pour améliorer les sols humides. Le canal de la Lys en transporte en Belgique des quantités considérables qui sont extraites dans les environs de Lille. Une grande partie de cette ville a été construite avec de la craie tirée des carrières de Lezennes. Nos églises et nos plus beaux hôtels en sont formés. Il est vrai que la pierre blanche se | 173 ) prête à tous les genres de moulures; mais elle a peu de solidité ; elle s'écrase et se fend facilement , et ces inconvénients ont déter- miné les architectes à y renoncer. On emploie presqu'exelusive- ment aujourd'hui dans les constructions la craie chloritée d'Hor- dain et d'Avesnes-le-Sec l'arrondissement de Valenciennes) qui est'beaucoup moins gélive que la craie pure et qui présente aussi une plus grande résistance. Ces avantages sont dus sans doute à la présence du sable qui sert de liaison à la pâte calcaire. La pierre d'Hordain coûte 16 fr. le mètre cube sur place, et 40 fr. rendue à Lille. C’est le double de ce que coûte la pierre de même nature, quoique de moins bonne qualité, qu'on extrait à Annappes. Nous ferons connaître dans la partie du mémoire qui traitera de la statistique minérale, la quantité de pierre de construction con- sommée annuellement dans nos environs , ainsi que l'importance des fours à chaux dont les produits sont employés soit pour l'a- mendement des terres fortes , soit pour la fabrication du mortier. Les silex de la craie sont peu abondants Gans les carrières qui avoisinent Lille et sont sans usages importants. On s’en sert quel quefois pour empierrer les chemins vicinaux , décorer le bas des murailles ou faire de petits rochers artificiels dans les jardins d'agrément. Dans certains pays de craie, on n'emploie pas d'autres matériaux pour la construction des grandes routes, et on en fait d'excellentes chaussées. - (La suite paraîtra dans le volume de 1852. — Les planches seront reportées à la fin du Mémoire. ) ARBRES ET ARBRISSEAUX D'EUROPE ET LEURS INSECTES, Par M. 3. MacouanT, Membre résidant. Que né puis-je dire avec La Fontaine : Les arbres parlent peu, Si ce n'est dans mou livre. Les Insectes gâtent les fruits, ils dévastent les forêts ; ils produisent le miel, la cire , la soie. IN FRODUCTION. Lorsqu'en 1848 je fus invité par la Société nationale dessciences, de l'agriculture et des arts , de Lille, à donner aux associés cultivateurs des conférences sur les Insectes nuisibles aux cultures et sur les moyens de s’en préserver (1), je me bornai aux plantes herbacées ; mais je me promis d'étendre mon travail aux Arbres, el je dirigeai particulièrement mes recherches vers cet objet. Dans tout le cours de ma carrière entomologique, j'avais observé sou - vent des dévastations considérables, quelquefois immenses, cau- sées par les Insectes sur les arbres ; j'avais vu dans nos vergers les Pommiers en proie au Paceron lanigère, les Poiriers au Tigre, les Cerisiers aux Charencons, aux Teignes, les Pruniers aux Bom- byx etaux Phalènes; j'avais déploré les ravages causés dans nos bois parles Scolvtes, les Tenthrèdes, les Tordeuses, la Nonne, (1) Ces conférences ont été publiées dans les notices agricoles de la So- ciété de 1848 et 1849. le Cossus, et cette multitude d’autres Insectes qui font quelquefois périr par milliers les arbres de nos forêts. J'avais pris connaissance en même (emps des moyens de pré- servation employés par les hommes qui se sont dévoués à cette utile investigation : en Allemagne, par M. Ratzeburg , le cé- lèbre forestier dont le bel ouvrage {Die forstinsecten) est si hono- rablement connu ; en France, par MM. Audouin, Guérin-Menne- ville, Robert, Michaux et quelques autres qui ont fait d'utiles travaux dans le but de préserver les arbres des Insectes nuisibles. Cependant en voyant les dégats commis par les Insectes sur les Arbres, je n'avais pu méconnaître en même temps les relations curieuses , intéressantes qui existent entre les uns et les autres, rester insensible à ces harmonies ‘ineffables que la Providence manifeste à nos sens pour les transmettre à notre âme; j'avais ad- miré dans les Insectes les rapports qu'ils ont avec les Arbres, par leurs couleurs, leur conformation, leurs instincts, leurs industries dans les différentes phases de leur développement. Ici, je voyais la chenille de la Noctuelle échapper à ses ennemis en se posant sur les Lichens de l'écorce du Frêne, colorés comme elle , se con- fondant avee elle; là, c'était la larve du Charencon qui roule la feuille du Coudrier en cornet , en estompe, qui la plie en valise en y renfermant un œuf, et en pourvoyant ainsi à la sûreté et à la subsistance de sa larve à sa naissance. Là encore c’est le Cynips dont la larve détermine par la succion l’afflux de la sève sur la feuille du Chêne et la formation de galles sous la forme souvent élégante de fleurs et de fruits. De cette double considération des ravages causés par les In- sectes et de toutes les harmonies qui les lient au règne végétal, il résulta dans mon esprit une disposition qui leur était moins mal- veillante que favorable; je me persuadai que leur destination dans l’économie générale de la nature était moins de nuire aux Arbres en restreignant leur multiplication dans les bornes nécessaires au maintien de l'équilibre parmi les êtres, que de prendre leur part au banquet que leur offrent les plantes , d'animer la scène végétale ( 476 | par leurs mouvements, leurs passions, leurs guerres, leursamours. et, répandus à l'infini en faveur de l’exiguité de leurs dimensions, de manifester par toutes les merveilles de leur organisation et de leurs instincts, la Puissance, la Sagesse et la Bonté Divines. Les Insectes ont leur berceau, leur aliment et leur demeure sur toutes les parties des Arbres. Leur organisation dans les diverses phases de leur développement, leurs appétits, leurs instincts sont en harmonie avec les racines, l'écorce, le bois, les feuilles, les fleurs, les fruits. Ils réalisent la fable des hamadryades dont la destinée était liée à celle de ces végétaux. Les racines nourrissent de nombreuses larves souterraines. L'écorce est percée par la trompe des Cigales, des Pucerons, des Gallinsectes qui s'abreuvent de la sève; elle est incisée par la scie des Tenthrèdes qui y déposent leurs œufs à sa surface intérieure. La multitude des Coléoptères et de leurs larves creusent des galeries, se fraient des routes ténébreuses. C'est ainsi que le Scolyte pénètre sous l'écorce du Chêne, de l'Orme, du Hètre, du Pin en choisissant une fissure. Il pratique dans la couche la plus récente des trouées verticales au bord desquelles il dépose ses œufs , et il revient mourir à l’entrée qui reste fermée par son cadavre, afin de prolonger au-delà de la mort même ses soins maternels. Lorsque les larves sont écloses, elles creusent chacune, des sillons transversaux extrêmement rapprochés entre eux. L'aubier et même le bois sont souvent envahis par les Cossus, les Capricornes, les Sirex. Les feuilles, ces organes si importants de la végétation, ces ra- cines aériennes , ces appareils de la respiration, qui ne le cèdent qu'aux fleurs en coloris, en diversité de forme , servent de nout- riture à des myriades d'Insectes. Elles sont surtout le fonds iné- puisable de la subsistance des chenilles, ces innombrables produc- trices de la soie, qui non-seulement la sécrètent et la filent à notre usage comme au leur, mais qui rivalisent d'industrie avee la Chine et Lyon, sinon par la somptuosité des produits, au moins par l'utilité, la convenance avec leurs besoins. L'instinet leur donnant la prescience de l'état en quelque sorte léthargique de ( 477 ) chrysalide, qui doit précéder leur brillante transfiguration , les chenilles pourvoient à leur sûreté future en se filant de mille manières des cocons dont la consistance, la forme . la matière, la position, se modifient à l'infini, En restant circonscrits dans le cadre des chenilles qui vivent sur les Arbres d'Europe, nous trouvons que les cocons dans leur consistance imitent la gaze, le crêpe, la toile, le papier, le feutre, le parchemin , avec toutes les modifications intermédiaires. Leur forme , ordinairement ovoïde , est parfois sphérique , pyriforme , glandiforme , en barillet, en sac, en nacelle, en fourreau, en crosse de pistolet, en hélice ; tantôt c'est un hamac bercé au moyen de deux fils dans un cocon renfermé lui-même dans une feuille roulée en cornet, tantôt c'est un réseau à claire-voie, suspendu par de longs brins de soie à une branche, comme le nid de la mésange penduline, de sorte qu'il est balancé par le moindre vent. La soie est presque toujours la matière principale des cocons ; mais les chenilles y mêlent souvent des molécules de terre, des fragments de feuilles, de mousse; elles se découvrent quelquefois de leurs poils pour en augmenter la solidité. Quelques-unes ies construisent de terre agglutinée, et d’autres, vivant sur les arbres conifères , emploient la résine. Quant à la position que les chenilles choisissent pour leurs co- cons, elles les fixent tantôt sur les branches, tantôt entre des feuilles ; elles les appliquent contre les troncs ou sous les écorces ; elles les déposent à la surface du sol ou elles les enterrent plus ou moins profondément. Quelquefois, réunies en familles nombreuses, elles filent de grandes toiles en commun pour abriter les cocons individuels. Plusieurs vivent en mineuses entre les deux mem- branes des feuilles, et elles n'en rongent que le parenchyme. Quelques Insectes les faconnent en berceaux pour leurs œufs, les roulant, les pliant, les tordant de mille manières. D'autres encore, par la déposition deleurs œufs sur les feuilles, déterminent l'afflux de la sève, et la formation d’excroissances galliformes qui présentent le phénomène singulier de l’ordre, de la régu- 12 ( 178 : lité, de la convenance provenant d'une déviation accidentelle des sucs végétaux. Les fleurs qui charment nos sens par leur velouté, leurs couleurs, leurs formes, leurs parfums, qui parlent à notre esprit par leurs attri- butions importantes, comme organes de la fécondation, par la con - formation deleurs nombreuses parties, dontles modifications infinies stimulent nos études sous le rapport botanique, physiologique , philosophique, qui intéressent notre âme comme emblêmes des vertus et des sentiments qui honorent le plus notre nature : le Lierre, l'Immortelle, la Sensitive, le Lys, la Pensée, la Violette, ja Germandrée, la Marguerite, les fleurs, dis-je, livrent aux In- sectes les trésors de leurs corolles, sans rien perdre de leur fécon- dité. D’innombrables essaims sont pourvus d’une trompe en harmonie avec elles pour humer le doux suc des nectaires ; d'autres armés de brosseset de cuillers, destinées à recueillir le pollen des étamines. C’est ainsi que l’Abeille rassemble son butin, et, de retour à sa ruche, le transforme en cire et en miel pour la construction de ses alvéoles et la subsistance de sa famille. Les fruits, en étendant cette dénomination à toutes les graines qui résultent de la fécondation et qui contiennent les germes de la génération suivante, sont le fonds le plus général de la nourri- ture des être animés; sans eux le règne animal n’existerait pas plus que le végétal lui-même. Aussi la sagesse suprême les a-t- elle prodigués de manière à remplir cette double destination, et autant elle les a protégés, garantis, soigneusement revêlus, comme gage de la conservation des espèces, autant elle les a pré- sentés à l'appétit des animaux par toutes les séductions de la forme, de Ja couleur, de l'odeur et de la saveur. Les Insectes pren- nent une large part à ce vaste banquet; nous ne les trouvons que trop souvent partageant nos goûts, et nous disputant les fruits dont nous sommes le plus friands. Les Guêpes, les Mouches et les Fourmis ravagent nos Reines-claudes , nos Abricots , nos Poires, nos Raisins. Une multitude d'autres déposent leurs œufs sur le germe des fruits, et leurs larves s’y développent au centre. (F0) C’est ainsi que nous trouvons des Pyrales se développant dans la Pomme, la Châtaigne, le Gland (1), une Mouche dans la Cerise (2), le Charencon dans la Noisette (3), le Dacus dans l'Olive (4), la Siphonelle dans la Noix (5). Toujours l'image du ver rongeur qui corrompt le bonheur fondé sur les sens. Les Arbres, dans toutes leurs parties, donnent donc des moyens d'existence aux Insectes ; ils souffrent quelquefois de leur multi- plication excessive, et nous devons chercher les moyens de les en préserver; mais habituellement, ils sont trop puissants pour res- sentir quelque effet de la présence de si petites créatures. Ils sont pour elles ce que le globe est aux hommes, qui s'en partagent les nombreuses parties, s’en approprient les productions, y exercent leurs industries respectives, y remplissent la destination que la Providence leur a assignée. Voyez le Chêne, seulement sous le rapport de ses Insectes, sans parler des autres animaux qui vivent de ses feuilles, de ses glands, de son écorce, de ses racines , quelle multitude de classes, de genres, d'espèces, différant, con- trastant d'organisation, de grandeur, de couleurs, d'habitudes, d'instincts, vivant le plus souvent de sa substance sans lui nuire, mais portant quelquefois la perturbation dans son existence, lorsque des circonstances atmosphériques favorisent des multi- plications excessives. C'est à l'homme, en vertu de l'empire que Dieu lui a donné sur la terre, de protéger les arbres contre ces dévastations , d'autant plus qu'il les y expose souvent lui-même dans ses cultures en fai- sant ses plantations dans des sols, des sites, des expositions, des conditions qui les affaiblissent et les livrent aux offenses de leurs ennemis. (1) Carpocapsa pomonana , splendana, amplana. (2) Ortalis cerasorum. (3) Strophosomus coryli. (4) Dacus oleæ. (5) Siphonella nucis, (.480 } L'homme doit considérer l'arbre comme la plus haute expres- sion de la nature végétale, comme il l’est lui-même, sous le rap- port matériel, de la nature animale. I doit voir en lui l'un des agents les plus puissants pour le nourrir (1), l’abriter et établir sa domination sur la terre. L'arbre est le plus bel ornement du sol, soit par son élévation, son port majestueux, soit par son feuillage, ses fleurs, ses fruits. Il intéresse l'esprit et le cœur par les har- monies qu'il nous présente avec la nature entière. Cependant, ces harmonies que nous voyons, que nous sentons, dont nous éprouvons sans cesse les effets, ne sont pas pour ainsi dire entrées dans le domaine de la science botanique. La physiologie végétale, qui a pénétré si avant dans l’organisation des plantes, est demeurée trop étrangère aux relations qu’elles ont avec la nature entière ; elle s'est réduite trop souvent à classer, à décrire, à approfondir la connaissance des organes ; elle est restée en arrière de la physiologie animale. Et cependant, il y a tant d'ana- logie, tant de ressemblance entre les plantes et les animaux, que la botanique et la zoologie devraient marcher de front; comme cette dernière science, la botanique devrait se produire en trois branches : la systématique, la géographique et la philosophique, et cependant cette dernière lui manque en grande partie encore ; la botanique se livre peu aux généralisations, aux considérations des analogies et des harmonies; elle n’a pas encore proclamé , comme Ja zoologie, « ce fait fondamental que chaque organe dans » chaque végétal a exactement la structure, la position, le volume, » la forme les plus favorables à l’accomplissement de la fonction » qui lui est dévolue, et que le savoir le plus profond sur l'orga- » nisation des plantes, que les raisonnements les plus ingémieux » sur les nécessités de leur vie, ne sauraient rien concevoir qui (1) A la vérité, les arbres contribuent peu à la nourriture des hommes en Europe, à l'exception du Châtaignier ; mais il n’en est pas de même dans les autres parties du monde, où l’Arbre-pain et beaucoup d’autres consti- tuent la principale nourriture des hommes. i81 | » püt ajouter à la perfection de ces œuvres de Ja nature (4). » Il est résulté de cet éloignement de plus en plus prononcé de cet ordre de considérations , que la botanique est devenue froide, aride, abstraite, privée, si je puis m'exprimer ainsi, de sa spiritua- lité ; elle a cessé d'être l’aimable science de J.-J. Rousseau et de Bernardin de Saint-Pierre. Ce dernier, parmi les harmonies de la nature végétale, admettait la coordination aux rayons solaires des formes et des couleurs des fleurs pour en augmenter ou en amor- tir l'intensité suivant la température des différents climats : les formes , par leurs modifications en réverbères et en parasols ; les couleurs par le dégré différent de chaleur que chacune d'elles procure aux plantes ; de sorte que ces charmantes productions qui se dessinent si diversement en couronne , en étoile, en vase, en guirlande, en grelot, en papillon, qui se colorent des nuances les plus vives, les plus suaves, qui ne semblent faites enfin que pour le plaisir des yeux , ont chacune la forme , la couleur qui déterminent la température nécessaire à la fécondation, et elles voilent de leurs grâces l'utilité que leur a donnée la sagesse su- prème. Nous ne croyons pas à cette théorie, toute séduisante qu’elle soit; peut-être que la nature gardera longtemps encore son se- cret; mais il est hors de doute pour nous, que chaque forme , chaque couleur, chaque parfum dans les fleurs a sa raison d'être, son utilité relativement au végétal. Les grands botanistes de nos jours ont signale dans les plantes des phénomènes qui semblent plus ou moins accidentels et qui nous paraissent au contraire conformes à la loi des harmonies : ainsi fous les organes de la fleur sont sujets à se développer d'une manière incomplète, ou même à ne pas se développer du tout, à avorter pour ainsi dire, ce qui cause des altérations no- tables dans la symétrie de la fleur. Ces avortements peuvent ar- river soit accidentellement, soit constamment par suite de la dis- ee dure pp ne 2 ee (4) M. Is. Geoffroy Saint-Hilaire, ( 182 ) position primitive, et de la nature de certains organes dans telle ou telle espèce. Des avortements déterminés d'avance et comme nécessaires se passent quelquefois sous nos yeux pendant la floraison; ainsi plusieurs plantes qui ont un nombre déterminé de carpelles (fruits en germe) au moment où la fleur s'ouvre, n’en conservent plus qu'une partie pendant la maturation des fruits; tel ovaire qui à trois loges au moment où la fleur commence, n'en conserve que deux ou une, parceque les autres ne grossissent pas , et que leurs cloi- sons se détruisent et se soudent avec les membranes voisines (i. Un autre phénomène analogue à celui dont nous venons de parler est celui des métamorphoses, qui a été signalé par le poëte botaniste, le célèbre Gæthe ; il consiste dans la série de transfor- mations des organes floraux qui s’éloignent d'autant plus ou d’au- tant moins de la nature des feuilles qu'ils en sont plus ou moins distants par leur position. Ainsi, on trouve souvent des sépales (folioles du calice) analogues aux feuilles , plus rarement des pé- tales, plus rarement encore des étamines. Dans les fleurs doubles, sétamines deviennent souvent semblables à des pétales, et quel quefois on a vu des carpelles se changer en étamines. Enfin tous ces changements se réalisent à la fois lorsque toutes les parties de la fleur sont transformées en feuilles vertes et épanouies comme elles. Ainsi, dans le sens opposé, les bractées et les sépales se changent quelquefois en pétales , les pétales en étamines, et les étamines en carpelles. Ces métamorphoses el ces avortements, tantôt accidentels , tantôt constants par suite d’une disposition primitive, nous sem- blent attester tout à la fois la loi si étendue de l'unité de compo- sition et celle qui régit les modifications des types, suivant les vues ineffables de la Providence. Dans l’état actuel de la botanique, voici la définition de la fleur et du fruit : La fleur est la réunion des organes sur lesquels (1) Alph. de Candolle. Vegel , 1, p, 159, ( 483 ) naissent les germes des plantes phanérogames et de ceux qui les entourent immédiatement. Elle se compose de feuilles dans un état particulier de transformation, naissant à l'extrémité de la tige ou de ses ramifications , et disposées ordinairement par ver- ticilles réguliers. Le fruit ou carpelle, considéré en lui-même, est une feuille re- pliée sur les bords, et qui se compose de trois parties : la surface ou membrane extérieure, la membrane intérieure et l'intervalle entre ces deux membranes {1}. Cette définition prouve l’état avancé de la botanique systéma- tique; cependant la fleur et le fruit sont autre chose encore que des feuilles transformées. La fleur est le lit nuptial de la plante, entouré de tous les accessoires nécessaires pour l’accomplissement du mystère de la fécondation , offrant en même temps, dans le suc de ses nectaires, un immense banquet aux essaims infinis des Insectes dont la trompe est faite pour le recueillir, ouvrant sur- tout à l'homme une source inépuisable de jouissances par la beauté, la grâce, l’élégance, l'harmonie, la diversité de la forme, l'éclat, la pureté, les nuances, le dessin des couleurs, la suavité, la finesse des parfums. Comment douter que la fleur n'ait reçu cette haute destination en voyant la faveur universelle dont elle jouit près de l’homme, qui seul sait apprécier sa beauté. Le fruit est non-seulement le résultat de toute la végétation, puisqu'il est le moyen par lequel s'opère la reproduction des espèces ; il est destiné à nourrir de son extrême surabondance la plus grande partie des animaux qui, sans lui, n’existeraient pas, ce qui entrai- nerait l'anéantissement des autres ; l’homme y trouve non-seule- ment des aliments substantiels, salubres, savoureux , exquis , mais encore, comme dans les fleurs, les formes, les couleurs les parfums les plus propres à flatter ses sens. Parmi les harmonies que les végétaux, et particulierement les arbres, présentent avec les éléments, nous mentionnerons celle ne qe Mit | ur si ideq een es, savegiant culs (4) Alph, de Candolle, histaire naturelle des végétaux, 1, p. 133 et 172 (484) relative à la lumière: M. Marrey, partant des observations faites par M. W. Herschell sur la température propre aux différents rayons du spectre solaire, s’est assuré que, selon la couleur domi- nante du disque floral, la température de la plante était en rap- port exact avec celle que présentent les mêmes couleurs fournies par le prisme , de sorte que la température de l'atmosphère étant de 12°,22 centigrades, par exemple, celle du Calta œthiopicu est de 12°,78, et il se trouve que les couleurs blanche et bleue sont moins actives que les jaune et rouge. L'arbre s’harmonise avec l'air, surtout par l'action des feuilles qui, sous l'influence du soleil, absorbent l'acide carbonique de l’at- mosphère , retiennent son carbone et exhalent de l’oxigène, tandis que pendant la nuit elles absorbent de l’oxigène et déga- gent de l'acide carbonique, mode de respiration qui rend les arbres favorables à la santé de l’homme, lorsqu'ils sont agglo- mérés en vergers, en forêts. Les harmonies aériennes des arbres se manifestent encore dans les graines des espèces propres aux montagnes, dont la dissémination s'opère à l’aide d’ailes membraneuses ou d’ai- grettes plumeuses que les vents emportent au loin. Dans les es- pèces dioiques, les vents opèrent aussi la fécondation en établis- sant des rapports entre les sexes. L'arbre est en harmonie avec l'eau, l'élément constitutif de toute végétation, qu'il va puiser par ses racines dans les profon- deurs de la terre, par ses feuilles dans l'atmosphère où il l'aspire et la recueille sous la forme de pluie, de neige, de rosée, de brouillard, de vapeur. Les feuilles ont dans ce dessein de larges surfaces pour l'absorber, des canaux ou des aquedues pour l'ame- ner à la base de la tige, et de là aux racines dans les arbres des montagnes, comme ceux des lieux aquatiques ont dans diverses dispositions de leurs feuilles et de leurs rameaux des moyens de l'en éloigner. Les semences des arbres aquatiques sont propres à voguer , el pour cela, elles sont pourvues de carène, de proue relevée en es- ( 485) quif, en pirogue, et elles descendent ainsi le courant des rivieres et des fleuves pour se resemer sur leurs rivages. Les harmonies de l'arbre avec la terre consistent surtout dans la base et le support que l’un trouve en l’autre ; à chaque nature de sol répond un genre de racine qui y puise les éléments appro- priés à la nutrition du végétal. Aïnsi le Chêne enfonce son long pivot , le Peuplier étend ses racines horizontalement , le Pin fixe les siennes dans le sable, le Charme dans l'argile, le Bouleau sur les rochers des montagnes, l’Aune dans les tourbes des marécages. L'arbre emprunte à la terre une partie de sa substance et la lui restitue tant par la décomposition annuelle de son feuillage que par la dissolution de son tronc à sa mort, Il confie sa semence à la terre qui la recoit, la réchauffe, l'hu- mecte, la nourrit et y développe le germe vital qui y est contenu. Enfin l'arbre est la plus belle production de la terre par sa grandeur , son port, son feuillage, ses fleurs , ses fruits; il en cache la nudité, l'aridité ; il en décore la surface de ses plus riches vêtements qu’il diversifie de mille manières : dé sombres forêts de Chênes, de Sapins dans les vastes plaines ; des bouquets de hauts Peupliers dans les îles , de longues rangées de Saules au feuillage glauque bordant les fleuves , de grandes futaies de Bou- leaux affrontant les neiges des régions polaires, des touffes de Palmiers ombrageant les oasis du désert , les Cèdres , les Mélèzes s'élevant sur les flancs du Liban, de l'Hymalaya, de l'Atlas, des Alpes. L'arbre imprime à chaque site son cachet particulier et donne à la terre son charme principal : la variété. L'arbre présente égale- ment des harmonies avec les autres végétaux ; il naît sous l'abri des plantes herbacées auxquelles il prête bientôt à son tour son ombre protectrice ; il offre son tronc aux Mousses , aux Lichens , aux Lianes qui l'étreignent , au Lierre, symbole de l'amitié. Les harmonies de l'arbre avec la nature animale se manifestent particulièrement par les aliments qu’il fournit à un grand nombre de mammifères, d'oiseaux, d'insectes, et par tous les moyens qu'y 186) trouvent ces derniers d'exercer les industries que leur suggère leur instinct maternel, ce qui est en partie l'objet de cet ouvrage. Mais c'est avec l’homme que l'arbre présente les rapports les plus harmonieux, les plus étendus; il intéresse également ses sens, son esprit et son âme ; il lui donne ses fruits, son ombrage, son bois qui fournit des matériaux à la satisfaction de ses besoins, a ses arts, à sa civilisation. L'arbre parle à l'esprit de l’hômme par l'étude de tous les phénomènes, de toutes les lois naturelles qu'il dévoile à ses yeux. Les grands avantages qu'il nous procure, la haute importance qu'il acquiert dans nos grandes agglomérations ont créé la science forestière qui a illustré Duhamel du Monceau, Ratzebourg, et leur a donné des droits à la reconnaissance publique. Enfin l'arbre parle à l'âme, quoiqu'ait dit Lafontaine. Les grandes colonnades, les voûtes élevées, les dômes majestueux que présentent les forêts, agrandissent nos pensées comme les palais de Louis XIV; les hautes pyramides qui se balancent dans les airs et s'élèvent en flèche vers le ciel y dirigent nos désirs; l'arbre qui incline ses rameaux vers le sol nous ramène aux mélancolies terrestres ; l'arbre toujours vert nous entretient de l'éternité ; l'arbre séculaire évoque nos souvenirs, il nous reporte aux temps reculés de sa jeunesse ; comme tous les vieillards, il nous raconte sa vie, son siècle. Avec quelle émotion n’avons-nous pas vu le Chêne du bois de Vincennes sous lequel saint Louis rendait la jus- tice à ses peuples et montrait cette haute sagesse, éclairée par la foi, qui engageait les souverains à le prendre pour arbitre dans leurs différends. Nous avons salué dans la plaine de Lens l'arbre de Grenay, à l'ombre duquel le grand Condé vint se reposer après sa victoire ({). Nous mentionnerons encore le Chêne qui of- frit un refuge à Charles IT après la bataille de Worcester, et qui, pour prix de cette hospitalité, a été reçu dans les cieux en donnant son nm à une constellation ; enfin, le Chêne qui abrite encore la (1) En 1648. (187 ) petite chapelle du hameau de Ranqum, commune de Pouy, où saint Vincént de Paul, enfant, allait prier et préludait à cette charité dont il est devenu l’apôtre. Parmi d’autres arbres célèbres, nous citerons encore le Châtai- gnier du mont Etna, dont la cime colossale peut offrir un abri à cent chevaux, ainsi que l'indique son nom, et qui est âgé de 4,000 ans, d’après la supputation de ses couches annuelles. Qui ne con- nait le Baobab qu'à vu Adanson sur les rivages du Sénégal et dont il fait remonter la naissance aux premiers âges du monde. Le respect qu'ont toujours inspiré les vieux arbres les ont fait tenir lieu chez nos ancêtres de temple de la Justice. Les Celtes, les Gaulois, les Français du moyen-âge portaient les jugements aux Cinq-Chènes, aux Sept-Tilleuls, sous le Bouleau, sous le Noyer, sous l'Orme, devant l’Aubépine (1). On jurait au pied de ces arbres foi et hommage, on y faisait des traités, on y prêtait des serments, on y fixait le point de départ pour les grandes en- treprises militaires; tel était le fameux Ormeau de Gisors, le célèbre Chêne-des-Partisans dans les Vosges. Jusqu'ici nous n'avons considéré les arbres qu'isolés et d’une manière abstraite ; nous n'avons vu que leur beauté individuelle ; mais si nous les examinons dans leurs aggrégations, en grandes plantations et en vastes forêts, dans les masses imposantes qui revêtent le sommet et les flancs des montagnes, qui ombragent les sombres vallées et les bords des eaux, dans les harmonies et les contrastes qui répandent tant de charmes sur les campagnes, ils excitent bien plus encore notre attention; nous voyons en eux un riche manteau jeté sur la nudité de la terre, un trésor toujours renaissant pour les nations, une source intarissable de travail, d'industrie, de bien-être pour le peuple. Un intérêt puissant s'attache donc aux plantations de nos pares, de nos jardins, de nos vergers, des bords de nos routes, de nos rivières, ct bien plus encore à nos bois, à nos forêts. Quels que (3) C’est ainsi que l’on désignait certains jugements. ( 188 } soient l'incurie dont ils sont l'objet, lempressement avec lequel 1ls sont abattus aussitôt qu'ils présentent quelque valeur, la parci- monie qui replante, la cupidité qui défriche, les arbres sont en- core le plus bel ornement de notre France ; il y a encore de belles plantations, de grandes forêts; la sage prévoyance de nos ancêtres nous a dotés de ces ombrages. Nous voyons encore cà et là à l’en- trée des châteaux, à la porte des presbytères, sur les cimetières et les places publiques de nos villages, des arbres de Sully, c'est-à- dire de vieux Chênes, des Tilleuls caverneux qui ont été plantés en exécution de l'ordonnance rendue par Henri IV, à la demande de son ami, afin de multiplier les bienfaits que produisent les plantations. Les arbres fruitiers de nos jardins, de nos espaliers, de nos vergers, méritent bien les soins que nous prenons de les planter, de les cultiver, de les préserver de leurs ennemis. Dans l'utilité et les jouissances que nous présentent leurs fruits, la Providence s’est montrée ingénieuse à les multiplier, à les diversifier, à les répartir à toute l’année, à leur donner des qualités bienfaisantes pendant la saison de leur maturité. Elle les met à notre portée par le peu de hautenr des arbres qui les produisent, elle nous invite à les cueillir par leurs formes gracieuses, leur coloris, leur parfum; lors- qu'ils tombent, c'est sur un moëlleux gazon, pour qu'ils ne se froissent pas. Avec quel plaisir nerevoyons-nous pas, à chaque printemps, la nouvelle évolution des fruits qui, comme une guirlande, se dé- roulent à nos veux, charment tour à tour nos sens, et successive- ment rafraichissent, purifient, calment, animent, réchauffent notre sang par leurs salutaires propriétés. À peine la fraise a-t-elle disparu, qu'elle est remplacée par la groseille, la framboise : la cerise fait la transition avec les fruits à noyau et précède l'abricot, la pèche, la prune; à ceux-ci se mêlent la mure. la figue ; ensuite murissent l’aveline, la noix, l’amande ; enfin. la néfle; le raisin, la poire et la pomme, qui, par leur fa- eulté de se conserver pendant l'hiver, prolongent nos plaisirs jus- (189 qu'au retour des fraises. C’est un enchainement, un cercle complet de jouissances , qui rivalise d'éclat et de parfum avec une couronne de fleurs , et qui nous séduit encore par les formes, le velouté, les teintes nuancées, les odeurs suaves, et surtout les saveurs les plus fines, les plus délicates auxquelles se mêlent tous les degrés du doux et de l'acide. Tous ces bienfaits ont été accordés à l'homme qui, à la sueur de son front, a su les découvrir, les rapporter des diverses con- trées, les cultiver et obtenir par la culture ces modifications, cette diversité, ces perfectionnements dont nous savourons les mer- veilles, qui changent l’âpreté en suavité, la sécheresse en succu- lence, la fadeur en saveur, l'âcreté en douceur, et conquérir ainsi la cerise de Montmorency, la reine-claude, la pêche de Malte, le colmar, le chasselas de Fontainebleau et tant d’autres excel- lentes conquêtes de l’horticulture. Les arbres forestiers que nous avons transplantés dans nos ver- sers, dans nos bosquets, le long des chemins et des cours d'eau, forment une partie considérable de la richesse du sol dans quel- ques-unes de nos provinces, et particulièrement dans la Flandre. Pour s’en faire une idée, il faut gravir le mont Cassel (Castellum morinorum), aux souvenirs romains, trois fois champ de bataille sous les rois Philippe, et jeter les yeux sur le panorama qui s'étend de Dunkerque à Lille. Cette heureuse contrée où les terres arables luttent de fertilité avec les nombreux pâturages , est semblable à une vaste forêt mêlée de petites clairières, et cependant, à l'ex- ception de la forêt de Nieppe, du bois de Clairmarais et de quel- ques bosquets, toutes les plantations qui semblent couvrir la terre sont celles des vergers, dont l’intérieur est planté d'arbres frui- tiers, et le bord, généralement orné d’un ou deux cordons d’ormes. Dans les haies d’Aubépine ou de Pruneliers s'élèvent des Chênes, des Peupliers, des Frênes. Le bord des chemins est planté de Peu- pliers de Hollande (Bois-blancs), dont les racines traçantes raffermissent le sol et en absorbent l'humidité, tandis qu'un large fossé préserve de cet effet les champs riverains. { 490 ) Ces beaux vergers, l'honneur de la terre flamande, qui faisaient parcourir avec {ant de jouissances la route de Lille à Dankerque avant que le chemin de fer eut réduit presqu'à rien la distance et le plaisir, offrent la végétation la plus vigoureuse, le gazon le plus vert, l’ombrage le plus frais. Ce sont tous Champs-Élysées, s'écriait avec joie une jeune personne (1) douée d’un sentiment exquis, venant de Paris habiter la Flandre, dans un temps où ceux de la capitale n'étaient pas encore envahis par la foule et la poussière. Ces vergers sont encore embellis par les bestiaux qui y paissent, et surtout par les belles vaches laitières à la robe fine, luisante, à la poitrine large, à la tête petite, aux jambes délices, au beurre ex- cellent, qui élèvent la race flamande au rang des types les plus renommés. Au centre de ces vergers s'élèvent les bâtiments des fermes, véritables fermes-écoles où brillent la propreté, l'ordre, l’activité, l'économie, l’aisance, la probité, le bonheur domestique. On y retrouve quelques vestiges de la vie patriarchale, ou plutôt, on s'y rappelle la description délicieuse de l'habitation et des mœurs de la famille de Lasthénès, dans les Martyrs (2). (1) M.91 O., rendue orpheline par la hache révolutionnaire , fut adoptée par M.we de B. dont le mari, juge au tribunal de cassation, en fut expulsé pour le crime d'être le frère d'un saint prêtre déporté pour refus de serment. (2) Je possède au pied de ce mont historique une de ces fermes, de médiocre contenance, mais dont les vergers présentent dans une heureuse proportion, les arbres et le gazon, dont les terres arables produisent à l'envi le froment, le lin, le colza, la betterave, le tabac , le houblon, et dont le fermier est un cultivateur modèle. Nul ne règle mieux son asso- lement , ne fait un usage plus judicieux de ses engrais, ne veille plus à ses intérêts , et, chose plus rare, à ceux de son propriétaire. Je n'ai nulle part des étables et écuries mieux aérées, des granges plus remplies , des pâturages plus gras, plus exempts de chardons et de taupinières, des arbres mieux venants, mieux élagués, je voudrais ajouter mieux éche- nillés, si la vérité me le permettait; c'est là son moindre défaut. Aussi , Gantois est-il le paysan le plus instruit de son village, et a-t-il recu le (191) Si les arbres dont nous nous sommes entourés dans nos jardins. dans nos vergers, nous procurent tant d'avantages et de jouis- sances, les forêts nous inspirent un intérêt d'un ordre supérieur ; elles sont pour les nations ce que les premiers sont pour les fa- milles : une ressource, un trésor précieux. Les forêts qui couvraient primitivement tous les pays tempérés et particulièrement les Gaules auxquelles elles donnèrent leur surnom de petit avocat. Connaissant le prix du savoir, il voulut que son fils en acquit autant que lui; il y réussit , et grâce à l'instituteur de la commune et même de M. le curé qui avait reconnu ses heureuses dispo- sitions pour l'étude, le jeune garcon devint le plus savant de toute l’école, il en était en même temps le modèle par sa modestie, sa soumission et sa piété. Un jour, Gantois étant venu me payer son fermage, je lui trouvai l'air bien soucieux, et je lui en demandai la cause. 11] me répondit: Autant j'ai desiré de l'instruction à mon fils , autant je la maudis maintenant. Elle lui a fait mépriser l'état de cultivateur, il a toujours des livres en main, il lit, il écrit, il calcule sans cesse, il fait ce qu'il appelle de la Géométrie. Je ve peux plusle faire travailler à la terre, il n’apprend plus l’agriculture que dans l’ouvrage d'un M. Virgile dont je n'avais jamais entendu parler, etqui, je crois, ne lui apprend rien de nouveau: il n'y est pas question du drainage. Ce n’est encore que le moindre sujet de ma peine; il s’est attaché depuis plusieurs années à une jeune fille qui, ainsi que lui, rem- portait toujours les premiers prix à l’école, qui montrait les mêmes goûts que lui. Je crois qu’elle l’a ensorcelé, et elle fait mon désespoir. Je dis à Gantois : elle a donc séduit votre fils et lui a cs perdre ses principes de morale et de religion ? Je dois dire, me répondit-il , que je n’ai pas le moindre reproche à lui faire sous ce rapport. Elle est aussi sage que belle ; elle est l'exemple du village, elle prodigue à sa mère infirme les soins les plus touchants , elle va veiller au chevet des pauvres malades, en un mot elle a de la raison, de la modestie, de la vertu, de la charité, de la piété, mais elle n'a rier., absolument rien ; si mon fils l'épouse, il n'aura jamais le moyen de me remplacer dans votre ferme, ct c'est cependant le plus grand de mes désirs. Ce qui accroît encore mes regrets , c’est que j'avais arrangé son mariage avec la fille de mon riche voisin, mais quand je lui en ai parlé, il m'a répondu : Mon père , vous voyez là-bas ces deux Ormes si rapprochés que leurs racines et leur couronne se confondent ; ils ne sont pas moins insépa- pables que je ne le suis de Fidélia. Vous nous avez laissés croître ensemble, Si vous nous séparez , nous mourrons ensemble, (192) nom {1}, qui, dans les premiers siècles de la monarchie, eompre- naient encore les deux tiers du territoire français, et qui se sont réduiles successivement au neuvième, c'est-à-dire, à six millions d'hectares , les forêts faisant place à l’agriculture, c'était la barbarie reculant devant la civilisation. Cependant, elles entrent admirablement dans l'économie générale du globe ; maintenues dans une certaine proportion, elles servent la civilisation elle- même, elles font partie de la richesse des peuples ; leur conserva- tion est donc d'utilité publique. Elles sont d’ailleurs la plus belle parure de la terre. Quel charme d’errer dans une forêt en par- courant tantôt sa lisière parfumée de violettes ou de fraises, tantôt ses taillis touffus, ses charmantes clairières, ses futaies aux dômes majestueux, en explorant les productions de cette féconde a _——————— Fidélia avait en effet exercé sur le jeune Gantois un charmeirrésistible. elle avait été l’amie de son enfance , la compagne de ses jeux, son émule dans les succès scolaires; une secrète sympalhie les rapprochait sans cesse ; on les rencontrait souvent ensemble, animés de la même pureté de sentiments, exerçant la bonté de leur cœur, comme Paul et Virginie allant en tremblant demander à l'impitoyable colon la grâce de la pauvre négresse fugitive. 1 L'enfant , l'adolescente était devenue une jeune fille à la fois belle et jolie, à la taille souple et élancée, aux yeux bruns pleins de vivacité et çde douceur, à la physionomie animée par l'esprit etle sentiment, au sourire enchanteur, au doux parler, méme dans cet idiome rocailleux qu'on appelle le flamand qui, malgré sa dégradation, n’en est pas moins fils de la belle langue de Klopstock , de Gæthe et de Schiller. Enfin le père dut céder aux instances , à la persévérance de son fils , et peut-être à l'enchantement que produisait Fidélia sur lui-même; la jeune femme devenue mère de famille continue a mériter l'estime et l'affection qu'inspirait la jeune fille. Son mari tire parti de son instruction, il s'est fait arpenteur, il donne une partie de son temps au percepteur infirme , le greffier l'emploie quand il est surchargé , il est le conseil de tout le village ; cependant il n’est pas riche , il n'est qu'heureux Cette espèce d’idylle s’est produite sous l’ombrage des arbres d'un beau verger et dans l'intérieur d'une humble habitation, avec une innocence, uné pureté de mœurs dignes des bergers de Théocrite, de Virgile et de Gessner. (1) En langue celtique, Gaul signifie bois. Cependant, suivant Cluverius, Gaulois vient du mot celtique Gallen , voyager. LA 193) nature; de gravir ainsi les flancs des collines, de découvrir tout à-coup à ses pieds une vaste plaine avec ses cultures, ses villages, sa rivière serpentant au milieu des prairies émaillées de fleurs. Quel puissant intérêt s'attache aux forêts dans les phénomènes qu'elles ont la mission d'opérer. Elles purifient l'air par leurs gaz vivifiants, améliorent le sol par leur feuillage transformé en hu- mus, modèrent la température en formant des abris contre la violence des vents, des froids, des chaleurs ; elles dirigent les mé- téores, attirent les tempêtes et la foudre en les détournant des plaines cultivées; enfin elles attirent et retiennent les vapeurs atmosphériques sur les montagnes et les condensent en sources ; elles les économisent et en régularisent la distribution en ruisseaux qui descendent par mille détours, se réunissent en rivières, en fleuves , et répandent sur leurs rives la fraîcheur et la fertilité ë tandis que les défrichements sur les montagnes laissent le sol sans résistance contre les pluies, la terre cède sous le choc, des- cend la pente, va envahir la plaine, laisse la montagne chauve pour toujours, et, au lieu de paisibles ruisseaux, les eaux se pre- cipitent en torrents dévastateurs. Protégeons donc les forêts con- tre la cupidité et l'ignorance. Au grand principe que l’une et l’autre mettent en avant, que l’on doit défricher partout où le sol doit produire plus en culture qu’en forêts, opposons non-seule- ment toutes les raisons physiques, mais encore la pénurie du bois, l'intérêt public et l'avenir de nos arrière-neveux qui nous devront de beaux Chênes, de gros Ormes, sans compter leur ombragé. Les forêts présentent encore le phénomène des apparitions spontanées ou plutôt de rotations naturelles d’essences succédant à d'autres essences. Nous citerons la forêt de Trélon couverte ac- tuellement de Chênes , et qui, d’après la tradition locale , l'était autrelois de Hétres, ce qui paraît être confirmé par le nom de Fagne , donné à toutes les forêts dans cette partie de la France, et qui dérive évidemment du nom de fau, fayard, faqus, de cet arbre (1). Ru (1) Observation de M. Meugy , ingénieur des mines. 18 194) C'est peut-être à la même cause qu'il faut attribuer la dispari- tion des Châtaigniers remplacés par les Chênes dans un grand nombre de forêts. Si l'on recherche la cause de ce phénomène, que l’on considère que chaque essence d’arbre tire de la terre des éléments chimiques différents et propres à sa nature. Ces éléments diminuent et s'épuisent avec le temps, et il doit en résulter que l'arbre qui y trouvait le principe de sa vie, cède la place à une autre espèce qui puise à son tour dans le sol d’autres éléments appropriés à sa nature ; mais il faut l’action lente des siècles pour opérer ces transmutations. La prédilection que j'ai toujours eue pour les forêts, fortifiée par mon ardeur entomologique, m'en a fait visiter, explorer un grand nombre. Dès mes jeunes ans, le voisinage de la forêt de Nieppe me la faisait fréquenter avec bonheur. J'en parcourais les longues allées en capturant des Mars, des Tabacs d'Espagne, des Cordons bleus; je pénétrais dans les taillis de Charmes qui ne sont coupés qu'à trente ans; je visitais mon filet, assis au pied du vieux Chêne du Pré à vin (1) dont la circonférence est de près de six mètres; mon excellent père me conduisait au vieux château des comtes de Flandre à La Motte-au-Bois, grande clai- rière au centre de la forêt. La forte végétation , les beaux arbres, les imposantes masses de verdure, tantôt inondées de lumière, tantôt plongées dans l’ombre des nuages, les nuances infinies du feuillage, surtout en automne, le chant des oiseaux, le bourdon- nement des insectes, tout charmait la jeunesse de mes sens, de mon esprit, de mon cœur. Plus tard, j'allais souvent visiter la petite forêt de Phalem- pin (2) près de Lille et du champ de bataille de Mons-en Pevèle (3). C'est un site précieux pour les entomologistes et qui fait pardonner (1) Ancien prieuré dont le nom fait conjecturer que la vigne y élait au- trefois cultivée. (2) On donne encore le nom de forêt à ce bois au milieu duquel se trouvait l’abbaye fondée en 1039. (3) Philippe-le-Bel y remporta une victoire sur les Flamands en 1304. (195) à la plaine lilloise sa pauvreté sous ce rapport. Les petits co- léoptères y abondent surtout, et l’on trouve assez souvent des espèces rares ailleurs. En Artois, je parcourus la forêt de Guines; je vis les Frênes deux fois séculaires des anciens remparts, et près de là le camp du Drap-d'Or, où se déploya toute la magnificence rivale de Fran- çois L.®7, d'Henry VIIL et de Charles-Quint. Je voulus voir aussi les restes de la forêt de Créquy, dont le nom, dérivé de ses Cerisiers , nous parle si glorieusement des croisades , de l’héroïsme, de la chevalerie , de la fidélité. Dans le Hainaut, j'explorai la forêt de Mormal où, dans ses grandes futaies, se trouvait naguère un Chêne dans l’intérieur duquel se trouva l'empreinte du marteau forestier de Phi- lippe IE {1}. De là je pénétrai dans les Ardennes, si célèbres dans l'histoire et dans les romans de chevalerie, dont la vaste forêt de Chênes, de Hêtres, de Bouleaux, n’est qu'un prolongement de l'immense forêt hercynienne des anciens qui couvrait la Ger- manie tout entière. Je prolongeai mes explorations jusque dans les sombres profondeurs de la forêt de Haguenau, dont les Pins atteignent des dimensions si imposantes et répandent un si épais ombrage (2). (1) Cette empreinte se trouve à cinq pouces de profondeur dans le tronc. (2) Je parcourus la forêt de Haguenau dans une circonstance particulière; il s'était commis un meurtre dans la ville et le coupable s'était jeté dans la forêt. Le général Marescot, commandant le génie à l’armée du Rhin, arrivé le lendemain avec son état-major dont je faisais partie, nous invita à monter à cheval pour aller à la recherche du meurtrier. La perquisition fut longue: nous pénétrâmes dans toutes les profondeurs des futaies de pins et nous eùmes le succès désiré , à la grande satisfaction des habitants qui chantèrent les louanges du général. Mes vieux souvenirs me rappellent une autre circonstance qui honore bien plus encore celui qui eut un duel avec Bonaparte au siége de Toulon. | Marescot avait été nommé commandant supérieur de Mayence déclaré en état de siége; ce commandement comprenait un assez grand nombre de villages voisins, sur la rive droite du Rhin, qui, précédemment avaient eté frappés d'une contribution de guerre dont la plus grande partie n’était ( 196 | Parmi les forêts de la France, j'en ai visité quelques-unes dans la Lorraine, dans la Normandie, dans le Nivernais (1) et surtout dans les environs de Paris, celle de Compiègne, de Mont- morency, de Chantilly, de Sénart; j'ai parcouru celle deSt.-Germain avec mon ami M. Lepelletier de St.-Fargeau , dont la mémoire me sera toujours chère; celle de Fontainebleau, avec mon gendre, M. Magon de la Giclais, qui l'inspectait en savant forestier. Il m'a fait admirer les beaux arbres auxquels la tradition ou l'admiration publique a donné des noms : tels que le Charlemagne, situé dans la vallée du Nid de l’Aïgle ; le Clovis, près de la Belle-Croix ; le Samson, près du rocher des Deux-Sœurs ; le Bouquet du Roi, dans la vieille futaie de la Tillaie; le Tonnant, dans celle de la Mare aux Evées. Les forêts qui se sont le plus profondément. gravées dans mes souvenirs sont celles des bords du Rhin, de ce fleuve également beau par son cours tantôt pittoresque, tantôt majestueux, par ses belles villes romaines de Cologne, Mayence, Strasbourg et Bâle, et par l’histoire, les romanesques légendes, poésie dont le temps l’a illustré. Il a en quelque sorte pris part aux événements les plus importants de l’Europe depuis vingt siècles : la conquête des Romains, l'invasion des Francs, Charlemagne, la féodalité pas encore acquittée. Le général, jugeant ce recouvrement inutile, en exempta ces villages en considération des dévastations que la guerre y avait causées. Les habitants voulurent lui témoigner leur reconnaissance pour cet acte d'humanité, et envoyèrent un jour à Mayence des députés qui, après avoir rempli leur mandat, déposèrent à ses pieds une grande cor beille de raisin des côtes de Hocheim et de Kostheim, dont ils le prièrent d'agréer l'hommage; le général s'étant aperçu que la corbeille avait de la pesanteur et ayant fait enlever le raisin, il se trouva au fond une cassette pleine d'or. 11 dit alors aux députés qu'il acceptait le don, qu'il gardaïit le raisin et qu'il leur remettait l'or en leur recommandant d’en faire la dis- tribution aux victimes les plus malheureuses de la guerre. Présent à celte scène, je vis les yeux se mouiller de larmes de gratitude et j'entendis bénir celui qui représentait si bien le caractère francais. (1) 11 y a à Pont-St.-Martin , près de l’église, un Orme dont le tronc fort contourné, à 16 mètres de circonférence, (197) et lé moyen-âge, la renaissance, la découverte de l'imprimerie, les guerres modernes ; chacune de ces phases historiques a laissé sur les rives du fleuve des monuments ou au moins des vestiges, comme les volcans de ses montagnes en s’éteignant ont laissé des cratères, des basaltes et des laves. Dans deux voyages en Suisse j'ai vu également de grandes forêts et de beaux arbres. Je me suis incliné à Fribourg de- vant le tilleul planté en 1476 en mémoire de la bataille libé- ratrice de Morat (1); mais c'est particulièrement dans les en- virons de Genève que j'ai observé les arbres les plus remar- quables. En parcourant la rive septentrionale du lac jusqu’à Villeneuve, j'ai vu dans une riante prairie près de la jolie petite ville de Morges deux Ormes aux dimensions colossales. Chacun d'eux avait à la sortie du sol 17 mètres de circonférence, et sa couronne était d'une très-grande étendue. Dès l'année 1541, ces Ormes étaient d’une grosseur remarquable. L'un d’eux a été renversé en 1824. Un peu plus loin, à Prilly, près de Lausanne, il se trouve au bord d'une fontaine un Tilleul au moins égal en grosseur aux Ormes de Morges. Au treizième siècle, il prêtait déjà un vaste ombrage aux réunions des habitants. Au-delà de Lau- sanne , le village de Lutry, au bord du lac, possède un Orme dont l'ancienneté est inconnue, mais qui, par son admirable dévelop- pement, attire tous les regards. En revenant de Villeneuve à Genève par la rive méridionale du lac, un Châtaignier gigantesque se présente dans lé parc du chà- teau de Neuve-Celle, près de Meillerie; il n’a pas moins de 13 mètres de circonférence à sa base. Dès l’année 1480, il ombra- geait un hermitage ; plus loin, sur les flancs du grand Salève, les ruines de l'antique abbaye de Pomiers sont abritées par des Hêtres d’une grandeur extraordinaire. Non loin de là, à peu de distance du Mont-Blanc et près du col de Serré , un Mélèze excité (1) Il existe un autre tilleul commémoratif de celte bataille, près de Morat, très remarquable par ses dimensions. ( 198 ) l'admiration par ses dimensions imposantes ; il est âgé de 800 ans, suivant la tradition du pays. Après avoir mentionné, trop longuemeut sans doute, les plan- tations et les forêts que nous avons observées, nous revenons aux Insectes qui en forment la population la plus nombreuse, qui naissent, vivent et meurent sur les arbres, et qui y causent quel- quefois des dommages considérables. En les faisant connaître, en décrivant leurs instincts les plus remarquables, nous nous pro- posons d'indiquer les moyens les plus efficaces de préserver les arbres de leurs déprédations ; ces moyens sont préventifs ou cor- rectifs ; ils doivent être quelquefois énergiques pour arrêter de grandes dévastations. Jusqu'ici les plantations , et surtout les forêts, en France , ont été rarement l’objet d’une surveillance active. Sous le rapport des Insectes nuisibles, l'Allemagne, beaucoup plus riche en forêts, nous a devancés par suite de l'intérêt plus sérieux qu'elle avait de les combattre et aussi par l'influence d’un homme supérieur , M. le professeur Ratzeburg, dont les observations, les expériences et les excellents ouvrages ont été appréciés, favorisés, adoptés. C'est en suivant les traces d’un si bon guide que nous allons traiter la même question relativement aux forêts dont il s’est occupé spécialement. Quant à nos plantations, et surtout aux arbres fruitiers, ils ont été en France l'objet de travaux recom- mandables sous ce rapport, et nous n'avons rien à emprunter des étrangers. Tous les arbres que nous cultivons ou qui croissent spontané- ment dans nos forêts servent de berceau et d’aliment à des espèces tantôt fort restreintes , tantôt fort nombreuses, d'Insectes ; ceux qui en sont le moins attaqués sont les arbres d'origine exotique qui ontété le plus souvent importés sans les Insectes qui leur étaient propres : tels sont l’Acacia blanc, le Catalpa, le Liquidam- bar de l'Amérique septentrionale, le Ginkgo, le Kobhlreuteria, le Pawlonia de la Chine ou du Japon. [ls sont seulement en proie aux Insectes qui appartiennent à des arbres qui ont des : 499 } affinités botaniques avec eux. Nous possédons donc ce premier moyen de préserver nos plantations des déprédations des Insectes, moyen, à la vérité, qui n'est guère applicable qu'à nos jardins, et qui consiste à ne planter que des arbres exotiques appartenant même à des genres étrangers à l’Eu- rope ; car si nous ne faisons que choisir des espèces, soit améri- caines , soit asiatiques des genres européens, tels que des Chênes, des Hètres, des Ormes, des Frênes, les Insectes qui ravagent nos espèces indigènes pourront se jeter également sur les étrangères, tandis qu'ils respecteront, plus ou moins, les arbres générique- ment différents. L'expérience est à cét égard d'accord avec le principe théorique. Le Marronnier d'Inde et l'Acacia blanc, pres- qu'aussi répandus que nos arbres indigènes, sont beaucoup moins en proie aux Insectes que ces derniers, et, s’ils ne le sont pas en- tièrement, ne peut-on en trouver la cause dans quelque affinité , pour le Marronnier, avec le Chataignier, pour l’acacia, avec les plantes légumineuses ? Dans le nombre immense des Insectes qui vivent sur les arbres, les uns sont attachés exclusivement à une espèce, d'autres ont été observés sur plusieurs, d’autres encore exercent leur avidité sur toutes. Parmi les premières, nous citerons les Pucerons du Peuplier noir, qui, par la succion, font dilater et contourner en hélices les pétioles des feuilles, de manière à former des loges hermétiquement fermées, dans lesquelles des centaines d'individus vivent en sûreté. Les secondes se composent généralement de ceux qui vivent sur les différentes espèces du même genre ou des genres voisins, tels sont les Chesias (Phalénide) sur les Genêts, les Lobophora , sur les Saules et les Peupliers. Parmi les troisièmes, nous citerons le Hanneton, les Charencons des Conifères , les Scolytes , les Bostriches , le Bombyx des Pins, le Bombyx nonne. Ils sont au nombre des plus nuisibles , et par conséquent de ceux que nous avons le plus à combattre. Afin de ne pas devoir mentionner ces derniers Insectes à l'articl ( 200 ) de chacun des arbres qu'ils attaquent , nous allons exposer les dégâts qu'ils commettent, et les moyens les plus efficaces pour nous y soustraire. Ce sont surtout MM. Ratzebourg, Robert, Mi- chaux que nous consultons sur ce sujet, De tous les Insectes, le plus nuisible aux arbres, est la larve du Hanneton, connue sous le nom de Man ou Ver blanc. Elle est sur- tout funeste dans les bois aux jeunes semis ou plantis, et doit être combattue par tous les moyens qu'indique la science entomologique et l'expérience forestière. L'un de ces moyens est de diminuer je nombre des Hannetons ailés avant leur ponte , et, à cet effet, il faut recourir aux arbres-piége ou d'appat qu'on laisse isolés près des parties de bois nouvelles ou des plantis, de sorte que ces insectes s’y réunissant pour dévorer le feuillage, puissent y être recueillis en grand nombre en secouant ces arbres, le matin avant qu'ils ne puis- sent prendre leur essor. Les Hannetons ne pouvant pas facilement effectuer leur ponte dans les terrains couverts d'herbe ou de mousse, et préférant par- tout la terre nue et fraîchement remuée, il est bon, dans les can- tons infestés par ces insectes , de ne pas labourer le sol des bois à repeupler et de laisser le gazon. L'une des précautions les plus utiles à prendre, c'est d'observer l'année de vol , c'est-à-dire la quatrième année du développement des larves, celle où , après avoir passé peu de temps dans l'état de nymphes , elles arrivent à la forme ailée. Si cette année est abon- dante en Hannetons , il convient de semer en céréales les terrains destinés à être reboisés, afin d’en écarter ces insectes et de les empêcher d'y déposer leurs œufs. Nous apprenons aussi, par l'ob- servation de l’année de vol, à juger de l'abondance et du degré de développement des larves, et du plus ou moins d’hostilité que nous devons opposer à leurs ravages; cette guerre consiste à les rechercher et à les détruire au milieu même des racines qu'elles dévorent , et 1l n'est pas difficile de découvrir leur présence d’après l’altération qu'elles produisent sur le feuillage, et de suivre leur marche souterraine surtout dans les semis ou les plantis en ligne ; ( 201 ) on se sert aussi avec succès des troupeaux de porcs qui en sont très-friands. L'on a aussi indiqué comme un moyen d'en préserver les jeunes arbres , l'emploi du goudron dont l'odeur leur répugne, quelques feuilles séches trempées dans cette substance et placées à portée des racines , suffit, dit-on, pour les en éloigner. Parmi les nombreux Insectes qui attaquent les arbres conifères, nous signalerons le grand Charençon du Pin (Pissodes pini) qui dépose ses œufs le plus souvent à la base près des racines, et dont la larve pénètre sous l'écorce et cause quelquefois des ravages dans les jeunes plantations. Le moyen le plus efficace pour dimi- nuer le nombre de ces Insectes , est de déraciner les souches sail- lantes des vieux Pins abattus ; car, c’est de préférence sur ces souches que les Charencons font leur ponte. L'on se sert aussi avec succès de fagots ou d’écorces de Pins, ou de fosses, pour y attirer ces insectes en grand nombre et les détruire. Un autre Charencon (Pissodes notatus), quoique plus petit, cause aussi des dommages aux Pins. Il placeses œufs sous la base des verticilles inférieurs des jeunes sujets. La larve creuse sous le liber une galerie serpentante qui descend en s’élargissant, et elle produit ainsi un affaiblissement souvent mortel au végétal. Les moyens indiqués contre l'espèce précédente sont aussi em- ployés contre celle-ci, mais ils sont moins efficaces. Les forêts de haute futaie de Conifères ont pour principaux ennemis le Bostrichus typographus et le Scolytus /hylesinus) piniperda. L'un et l’autre, après avoir passé l'hiver à l'état de larve ou de nymphe, prennent, à l’état parfait, leur essor dans le coutant d'avril ou au commencement de mai. C’est alors qu'ils percent les arbres résineux ; ils s’attaquent généralement aux parties supérieures , où de fortes branches se séparent du tronc. Quand ils sont introduits dans l'arbre , le mâle et la femelle se rongent ensemble une plus grande cavité, espèce de chambre nup- { 202 } tiale, à partir de laquelle ils tracent en général, en ligne as- cendante et descendante, plusieurs galeries principales qui sont assez droites. La femelle creuse à droite et à gauche, le long des canaux principaux, de petites excavations dans chacune desquelles elle dépose un œuf. Avant que tous n'aient été pondus {au nombre de 30 à 50 et quelquefois de 100), les larves sortent de ceux déposés les premiers et ils se fraient perpendiculairement aux galeries principales, de petits canaux qui s’élargissent à mesure que les larves croissent ; à l'extrémité de ces canaux secondaires, la larve pénètre dans l'écorce où elle passe à l’état de nymphe; les insectes , arrivés à l’état parfait, s'ouvrent un passage à travers l'écorce en y laissant de petits trous. Il y a quelquefois une seconde génération de suite après la première. Le Scolytus piniperda se distingue du Bostrichus typographus par les particularités suivantes : après la première génération (ter- minée ordinairement à la fin de juillet) il n'en établit pas d'autres, mais il s'insinue de suite dans les pousses des tiges voisines, dont il dévore les tuyaux médullaires. A l'approche de la rude saison , lorsqu'il a abandonné ces mêmes tuyaux , il se perce un chemin autour du col de la racine dans les arbres en estan et dans les souches , et se glisse jusqu'à l'aubier pour y passer l'hiver. II ne vit que sur les Pins. La ponte n'a pas lieu en général et ne saurait en quelque sorte, dans l’ordre de la nature, avoir lieu sur les arbres très-vigoureux, attendu que , si une femelle, à défaut d’un meilleur gîte, s’intro- duit sous l'écorce d’un sujet semblable et y creuse sa galerie, celle-ci, soit immédiatement, soit un peu plus tard, est envahie par la résine, de telle sorte que l’insecte ne peut plus continuer son travail et quelquefois reste englué dans la galerie commencée. C'est seulement sur àes arbres fatigués et d'une végétation faible que la ponte se trouve dans des conditions favorables pour les succès de ces attaques. La nature a donné au Scolyte l'instinct de se préparer de sem- blable gites , même dans des plantations très-vigoureuses. Pendant { 203 ) tout l’été, cet insecte ne peut vivre et ne vit que de la substance médullaire des pousses de l'année ; il s’y introduit au moyen d'un trou pratiqué vers la base, les perfore dans leur longueur, puis en sort pour aller attaquer une autre pousse. Lorsque ces dégats sont répartis sur un fort grand nombre d'arbres, et que quel- ques pousses seulement sur chacun sont attaqués, il n'en résulte pas un mal considérable, mais, indépendamment de ces altérations partielles , les insectes, guidés par leur instinct , s’at- tachent en grand nombre à certaines parties des plantations ou à des individus isolés, dont ils attaquent toutes ou presque toutes les pousses ; celles-ci se dessèchent et tombent au pied de l'arbre, qui, ainsi mutilé, se trouve à la fin de l'hiver dans un état de langueur qui est la première condition pour le succès de la ponte. Aussi , est-ce principalement sous l'écorce de ces arbres que les femelles viennent creuser leurs galeries et déposer leurs œufs. Les larves nées de ceux-ci, en sillonnant toute la circonférence inté’ rieure de la tige et en rongeant le liber, font périr l'arbre. Telle est ‘ la cause immédiate et directe de la mort des sujets attaqués ; la destruction des bourgeons en été l’a préparée , mais ne suffirait pas seule pour l’effectuer. (Vilmorin.) Il y a des arbres parfaitement sains, qui, dans l’espace d’un été,. se sont trouvés complètement envahis. Il n’est pas douteux d’ailleurs que les arbres faibles et d'une végétation chétive ne soient plus facilement attaqués par les insectes. Cependant les Scolytes existant en grande quantité peuvent tuer des arbres bien portants : les premiers qui les attaquent périssent étouffés par la résine; mais il en reste toujours un certain nombre qui appau- vrissent l'arbre; d’autres surviennent qui augmentent le mal et finissent par faire périr le sujet. (Chevandier.) Une plantation d’Epiceas ayantété élaguée en pleine sève et par un temps très-chaud , presque tous ces arbres furent desséchés en peu de jours, et exhalèrent une forte odeur d’éther, ce qui prove- naïtsans doute de la décomposition de la résine.On s'aperçut bientôt après quetousles arbres étaient piqués par les Scolytes.Ilest probable ( 204 } que l'élagage intempestif opéré sur les Epiceas à fait sortir uné assez grande quantité de sève et que cette circonstance, en rendant ces arbres maladifs, a nécessairement facilité la multiplicité dés Scolytes. La sécheresse qui règne en certaines années peut amoindrir la sève des arbres jusqu'au retour des pluies automnales sans les exposer à périr par cette cause ; mais ils deviennent accessibles aux attaques des Scolytes qui peuvent causer leur mort par leur multi- tude; et c’est peut-être ainsi qu'en 1835 tant d'arbres affaiblis par la sécheresse ont été détruits par ces insectes. Le moyen le plus efficace à employer contre les ravages de ces insectes, est de faire abattre et enlever les arbres attaqués, avant leur sortie de l'écorce, ou au moins d'opérer la décortication, afin de mettre obstacle à une nouvelle génération. L'on peut aussi se servir avec quelque succès d'arbres d’appât lorsque de grands dégâts sont à craindre, et il faut être fort attentif à connaitre la présence des Scolvtes et les divers degrés de leur développe- ment (1), pour pouvoir prendre à temps les mesures préserva- trices. (2) (1) On connaît le terme du développement lorsque l'on trouve de la ver- moulure qui indique la sortie de l'insecte. (2) M. Vilmorin a employé chez lui un moyen efficace pour diminuer les ravages des Scolytes ; c’est d'abattre au commencement de l'hiver et de disperser dans les Pinières un certain nombre d'arbres destinés à recevoir la ponte ; celle-ci en effet se concentre presque tout entière dans ces tiges qui présentent les conditions les plus favorables à la réussite du couvain, les insectes se trouvent ainsi réunis, dans un de leurs états d'œufs ou de larves, en nombre immense dans ces arbres qui doivent servir à leur des- truction. Elle a lieu au moyen de l’écorcement des tiges pour toutes celles qui sont en état de fournir du bois d'œuvre, et de la conversion en charbon pour celles dont la dimension est trop faible pour cet usage , aussi bien que des grosses branches qui peuvent recéler aussi des insectes. Le point essentiel pour le succès complet de cette opération est de l’exé- cuter au moment précis où toute la ponte étant terminée, aucune larve n'est encore arrivée à l'état d’insecte parfait, et n’a pu prendre son vol au dehors. Cette époque peut varier , dans chaque localilé , d’une semaine ou deux, selon la température de la fin de l'hiver et du printemps. Dans son { 205 | Des Scolytes de différentes espèces produisent aussi de grands désastres sur beaucoup d'autres arbres forestiers et fruitiers. Ces Coléoptères déposent leurs œufs sous l'écorce de chaque côté d'une galerie verticale quela femelle creuse plus ou moins profondément, chaque larve creuse à son tour une galerie horizontale, et dont le diamètre augmente suivant l'accroissement de la larve. En 1835, plus de 50,000 pieds de chênes, âgés de 35 à 40 ans, sont morts dans la forêt de Vincennes, et leur perte a été attribuée à ces in- sectes ; à la vérité, il faut ajouter que ces petits Coléoptères n’atta- quent que les arbres dépérissants, et ne font que hâter leur mort. Cependant d’heureuses expériences ont été faites récemment par MM. Robert et Michaux, pour guérir les arbres attaqués, particu- lièrement les Ormes et les Pommiers, M. Robert a pensé que l'on ferait périr un grand nombre de ces insectes si on pouvait les attaquer pendant la période de leur accroissement , et il a eu l'idée de pratiquer à des distances convenables, des tranchées longitudi- nales sur le tronc des arbres , afin de couper, à peu près sous un angle droit, beaucoup de galeries transversales de larves ; ces tranchées détruisent toutes celles qui se trouvent sur leur trajet ; celles qui n’y sont pas encore parvenues , arrivées à ces tranchées périssent desséchées par l'air ; enfin les bourrelets séveux qui se forment sur les bords de la coupure, restent longtemps lisses ou peu rugueux, ce qui ne permet pas aux femelles de s’abriter dans des anfractuosités pour y percer leurs galeries de ponte; ils amènent, en outre, une circulation plus active de la sève qui noie la femelle dans sa galerie et s’extravase dans les trous occupés par les larves, ce qui les fait périr étouffées. domaine du département du Loiret, où M. Vilmorin a adopté cette pratique depuis dix ans, des observations très-nombreuses lui ont fait reconnaître que les circonstances dont il vient de parler se présentent habituellement pendant la seconde quinzaine de mai, et les premiers jours de juin ; aussi est-ce pendant cette période, sauf les années exceptionnelles, qu'il faut écorcer les tiges et les perches , brûler lesécorces, et convertir les branches en charbon. { 206 | M. Michaux, de son côté , a fait des expériences pour constater que l'enlèvement de bandes longitudinales d'écorce sur un arbre ne nuisait pas à sa végétation, et il a reconnu que cette opération donnait à l'arbre plus de vigueur, en provoquant des bourrelets dans lesquels la sève circulait plus facilement que sous les écorces couvertes de leurs parties mortes et rugueuses. De plus, M. Robert avait eu une pensée analogue relative- ment aux bourrelets, et elle lui avait été suggérée par l'examen d’un grand nombre d'arbres des Champs-Élysées , rongés par les chevaux des Cosaques, ce qui a produit des bourrelets dans les- quels aucun Scolyte ne s’est établi depuis cette époque. Frappé de ce phénomène de physiologie végétale, il a cherché à le produire pour le traitement de plusieurs Ormes attaqués des insectes, et chez lesquels il ne restait que de très-petites portions d’écorce encore vivante. Il a provoqué, par des incisions, des bourrelets sur les bords de ces portions d’écorce, et il a conservé la vie à des arbres qui seraient morts sans cela. Si les tranchées sont assez rapprochées, on voit l'espace compris entre chacune d'elles , non seulement purgé des larves qui l’infestaient , mais encore occupé par une nouvelle écorce qui participe des bourrelets. Chez des arbres plus jeunes, et dont la circonférence ne dépasse pas quarante-cinq centimètres, M. Robert à opéré une décorti- cation presque complète dans des sujets attaqués sur tous les points par de nombreux Scolytes. Comme sur beaucoup de points ils avaient déjà détruit l'écorce jusqu'au bois, et que, dans peu de temps, ils auraient entièrement cerné le tronc et interrompu la circulation de la sève, il était impossible de conserver les qualités du bois comme bois de charronnage ; on ne devait chercher qu'a sauver l'arbre afin qu'il continuât à donner de l'ombrage. M. Ro- bert, dans cette décortication, n’a cherché qu'à mettre les larves à nu, il a respecté le liber et même une assez notable portion de l'écorce vive dans tous les endroits où les insectes n'avaient pas encore pénétré jusqu'au bois, et il en est résulté unrenouvellement de l'écorce sur tous les points non attaqués, la formation d'un grand ( 207 | nombre de petits bourrelets sur les bords des portions où l'insecte avait touché le bois, et, après un an à peine, ces arbres ont eu toute la surface de leur tronc couverte d'un réseau de bourrelets et de portions d’écorce fraîche, qui permettent une libre circulation de la sève et repoussent les Scolytes par cela même et par leur peu d'épaisseur. Ces procédés qui ne sont pas praticables sur les arbres des forêts, peuvent être employés avec des résultats très-utiles sur les plantations. Le Bombyx du Pin {1}, est l’insecte le plus nuisible aux coni- fères. La chenille peut dévaster des forêts entières de haute futaie, si l’on n'y oppose des moyens de préservation proportionnés aux dangers. Les chenilles qui éclosent au mois d'août se répandent sur le feuillage et lc rongent jusqu'au mois de novembre. Alors, arrivées à la moitié de leur développement, elles se retirent sous la mousse au pied des arbres. Au retour du printemps, elles remon- tent sur les pins et recommencent leurs ravages jusqu’au mois de juin, époque à laquelle elles se filent un cocon très-solide, et passent à l'état de chrysalide. Cette espèce se propage quelquefois au point qu’elle exerce des dévastations immenses et qu’elle exige les moyens de destruction les plus energiques. En Allemagne , on a recours à l'incendie de grandes futaies pour sauver des forêts entières. On rassemble des amas de branchages du côté d'où vient le vent et l’on y met lefeu. Du côté opposé, on fait de larges abattis pour arrêter les flammes et l'on parvient ainsi à détruire le foyer le plus menaçant d’une funeste propagation pour l’année suivante. Quand le danger d’une irruption est moins grand, on se borne à creuser de petits canaux pour isoler les cantons intacts de ceux qui sont attaqués, ces chenilles ne peuvant franchir ces bar- rières (2). ROSE PEN CAES IRAN Tr EE (1) Lasiocampa pini. (2) Il suffit que ces canaux aient un pied de largeur et de profondeur { 208 | Un autre procédé de conservation consiste à former sur les troncs des anneaux enduits de goudron qui otent aux chenilles le moyen de monter sur les pins au printemps. Le plus souvent on peut se borner à recueillir les chenilles, l’hy- ver en les cherchant sous la mousse, le printemps en secouant les Pins à coups de hache. Le Bombyx nonne (1) est aussi l’un des ennemis les plus redou- tables des conifères et même des arbres à feuilles plates, tels que le Chêne, le Hêtre, le Bouleau en demi-futaies. Les chenilles, quelquefois innombrables, éclosent au mois d'avril, et font de grands ravages en procédant de bas en haut, et en rongeant par- tiellement les feuilles (2), et elles passent à l’état de chrysalides au mois de jun. Cette espèce parait dans les forêts par périodes qui durent trois années, de plus en plus abondantes. Les femelles ont l'instinct de déposer leurs œufs daus des parties de la même forêt différentes de celles où elles l'ont fait l’année précédente, ce . qui étend leurs ravages qui ont souvent causé la perte de “bd considérables en Allemagne. Les moyens de préservation consistent principalement à détruire les œufs et les chenilles. Pendant l'automne et l'hyver, la recherche des œufs peut se faire utilement en enlevant les écailles des écorces sous lesquels ils ont été déposés par plaques (3). Lorsque les che- nilles éclosent, elles restent réunies pendant quelques jours, et la recherche en est également nécessaire et facile, en faisant observer qu'elles se trouvent de préférence sur les gros arbres. Lorsqu’elles se sont dispersées sur le feuillage on peut en recueillir de grandes quantités en secouant à coups de hache les branches inférieures. pour barrer le passage. On creuse aussi des canaux et des fosses d’appat. (4) Liparis Monacha, Linn. (2) Elles dévorent les feuilles des pins en en laissant tomber des frag ments à terre, celles des hêtres en n’en rongeant que l'intérieur. (3) Ces œufs se trouvent à différentes hauteurs du tronc surtout sur les Pins, tandis que sur les Epiceas, c’est en général au bas du tronc, parce que plus haul, sans doute, l'écorce est beaucoup trop lisse. Ratzeb. ( 209 Tous les moyens de défense que nous venons d'indiquer contre les insectes nuisibles aux arbres, et ceux que nous signale - rons encore dans le cours de cet ouvrage, sont utiles ; mais l’effi- cacité en est subordonnée à un autre moyen qu'emploie la nature pour maintenir l'équilibre et protéger la végétation sans cesse menacée de destruction : les animaux insectivores et particulie- rement les parasites des insectes, qui se développent dans leurs flancs , s’alimentent de leur substance et les font périr d’épuise- ment. Plusieurs grandes familles sont spécialement chargées de cette importante mission : telles sont surtout les Ichneumonides parmi les Hyménoptères et les Tachinaires parmi les Diptères. Plus les insectes nuisibles à la végétation se multiplient sous l'in- fluence des causes atmosphériques, plus leurs parasites pullulent eux-mêmes par l’aliment qui lear est offert et ils finiraient par en détruire les générations s’ilsne mouraient à leur tour d’inanition. Ce résultat s'opère plus ou moins activement suivant que, pendant le même temps, les générations des parasites dépassent en nombre celles de leurs insectes nourriciers, ou que les individus qu’elles produisent sont également plus nombreux que ceux des généra- tions qui les ont nourris. On a employé en Allemagne un moyen artificiel pour atteindre plus promptement ce but : c’est de transporter dans les forêts in- festées de chenilles des paniers contenant des chrysalides, des che- nilles ou des œufs de papillon, piqués par des Ichneumons; la généra- tion parasite qui en provient ne tarde pas à se répandre et à remplir sa destination. Mais ce moyen est peu pratiqué, même en Allema- ne, où peu de gardes forestiers acquièrent assez d'habitude pour distinguer les chenilles qui portent des parasites de celles qui en sont exemptes. Revenant aux arbres, je dois exposer la classification que j'ai suivie dans mon travail. J'ai cru devoir adopter l’ordre naturel adopté par M° Spach dans son histoire naturelle des végétaux (1), (4) Dans les sites à Buffon, édition Rorel 14 ‘210 ) en substituant cependant la série ascendante à l'inverse. Je me borne à distinguer les arbres par les caractères qui les différencient le plus nettement les uns des autres; je mentionne ce qui inspire de l'intérêt dans chacun d’eux et je termine par la désignation des insectes qui s'y développent avec l'indication de leur manière d'y vivre. Je ne suis pas botaniste, ou je ne le suis qu'autant qu'un ento- mologiste doit l’être pour connaître les plantes habitées par des insectes. Quelque peu horticulteur aussi, j'ai admis dans mon jar- din un assez grand nombre d'arbres et d'arbrisseaux tant exotiques qu'indigènes, sur lesquels j'épie les insectes qui y élisent domi- cile, c’est ainsi, par exemple , que parmi les Conifères, je cultive outre les principales espèces européennes, les Taxodium, les Dacrydium, les Callitris, les Schubertia, les Cryptomeria, les Podocarpus , les Cephalotaxus , les Salisburia, les Phyllocla- dus, les Araucaria, les Cèdres du Liban et de l'Himalaya (1). Le travail que nous avons entrepris a quelques rapports avec la Flore des Insectophiles, par Jacques Brez, entomologiste distin- gué, l’ami de Senebier ; mais cet ouvrage, qui s'étend à tout le règne végétal, a été publié en 1791, c’est-à-dire 60 ans avant le nôtre. Il provoque par cette différence de date une comparaison qui peut offrir quelque intérêt entre cette époque déjà reculée en entomologie et l’époque actuelle. Avant 1791 , trois hommes de génie avaient fondé les trois principales branches de la science: Swammerdam avait créé l'anatomie des insectes ; Réaumur avait répandu de vives lumières sur leurs instincts ; Linnée avait appris à les nommer, à les décrire, à les classer. Ces trois hommes avaient , (1) Dans les autres ordres, outre les genres les plus connus, je cultive les Sophora, Virgilia, Cephalanthus, Benthamia , Poinsiana, Plumbago, Lyndleya, Forsithia, Deerhingia, Clianthus, Budleia, Abelia, Boussin- gaultia, Kadsura, Azara, Pernettia , Maclura , Garria, Escallonia, Wei- gelia , Arundinaria , Bridgesia , Callicarpa , Calophacera, Adamia, Coriaria, Ardesia , Cleyera , Colletia, Corynocarpus , Photinia . Celastrum, etc., etc. (241) été suivis de près par des émules tels que Degeer et Lyonnet. De- puis, les deux premières de ces branches de l’entomologie restèrent assez longtemps stationnaires ; la troisième semblait les avoir ab- sorbées. En 1791, les premiers ouvrages de Fabricius avaient paru et commencé à initier l'esprit et les yeux à l'observation appro- fondie de l’organisation extérieure. Pendant les 60 années qui se sont écoulées depuis, il y a eu progression continue dans cette partie de la science, ainsi que dans le nombre de ses adeptes. Dans l'impossibilité de mentionner ces célébrités sans en former une liste trop nombreuse, nous n'en nommerons qu'une seule, Latreille qui eut le mérite et la gloire d'introduire la méthode naturelle dans la classification des Insectes. (1) Cette nombreuse phalange a porté au plus haut degré l’art de décrire les organes extérieurs des insectes, de reconnaître les plus légères différences qui les dis- tinguent entr'eux , de les classer en groupes fondés sur des carac- tères organiques. Ils ont approfondi cette partie de la science, surtout en dernier lieu, au point qu'on peut à peine supposer qu'ils puissent encore pénétrer plus avant et qu’on pourrait les accuser quelquefois de dépasser les bornes de la science , au moins dans la longueur des descriptions spécifiques et dans la multiplicité des genres. (1) Nous nommons ici les principales notabilités, en commençant par celles que la mort a moissonnées, Panzer, Gyllenhal , Illiger, Paykul , Schœnherr, Erichson , Hübner, Ochsenheimer, Treitschke, Gené, Kirby, Leach, Fallen, Meigen, Wiedemann , Jurine , Huber, Olivier, Godard , Audouin , Dejean, Lepelletier-de-St.-Fargeau, Duponchel; et parmi les , notabilités vivantes : MM. Dumeril , Walckenaer, Audinet Serville, Milne Edwards, Bois Duval, Amyot, Chevrolat, Rambur, Aubé, Lacordaire, Guenée , Mulsant , Al. Lefebvre , Laferté Senectère , Robineau Desvoidy, Lucas, Signoret, Donzel, Bellier de la Chavignerie, Brisout, Graells , Spinola, de Breme, Pictet, Perty, Klug, Gravenhorst, Germar, Fischer, Mannerheim , Muller, Zeller, Freyer, Suffrian , Hering, Schmidt, Nickerl , Mann, Siebold, Wahlberg , Zetterstedt, Staeger, Keferstein , Rosenhauer, Dohrn , Kiesenwetter, Redtenbach , O0. Heer, Schneider, Schaum , Hagen , Kallenbach , Loew, Schiodte, Forster, Friedwaldski, Wesmael, de Selys Longchamp, Morren, Putzeys, Westwood, Hope, Spence, Gray, Walker, Eversman. (212) C’est par la faveur dont jouit cette partie de la science, par l'ar- deur des explorations dans toutes les régions du globe que le nombre des espèces connues est devenu immense, que celui des Coléoptères seuls s'élève à plus de 80,000. Les deux autres branches de l’entomologie, l’anatomie et l'ob- servation des mœurs dans les différentes phases de la vie, qui avaient été peu cultivées, en comparaison de la première, depuis Swammerdam et Réaumur, reprirent la faveur qu'elles ayaient acquise par les travaux de ces hommes célèbres, et qu'elles n’au- raient pas dû perdre. L'anatomie trouva en M. Léon Dufour un émule de l'illustre fondateur de cette science. Il s’éleva jusqu'à l'anatomie com- parée des insectes, comme Cuvier avait fait celle des grands animaux. En même temps M. Straus décrivit celle du Hanneton avec une perfection comparable à celle que Lyonnet avait mise dans celle de la Chenille du Cossus; d’autres encore, Chabrier, Dutrochet, Serres, Hérold, Sprengel, Mac-Leay, Carus, Trevi- ranus, Dugès, ont porté leur scalpel dans les viscères souvent microscopiques des insectes, et consacré leurs veilles à cette étude si importante. L'observation des mœurs et de l'instinct des insectes, qui avait illustré Réaumur, offrit à M. L. Dufour une double gloire à acqué- rir. Au coup d'œil exercé de l’anatomiste, il joignit la patience qui épie le moment où une larve sort de son œuf, qui la nourrit, l'élève à travers mille causes de mort, assiste à son passage à l'état de nymphe et ensuite à l’état parfait, qui lui procure quelquefois la vive jouissance de voir naître un insecte entièrement inattendu et dont le développement était encore inconnu. M. Dufour a été suivi dans cette partie intéressante mais difficile de l’entomologie par MM. Bouché, Ratzeburg, Bremi, Audouin, Guérin-Menne- ville, Fons-Colombe, Goureau, Perris et quelques autres. Le résultat de tous ces travaux pendant les soixante ans qui se sont écoulés depuis la publication de l'ouvrage de #. Brez, a été de faire faire de très grands progrès à l’entomologie et de la porter 913) à un degré aussi élevé que les autres branches des sciences naturelles. Si on se demandait maintenant ce que fera l'entomologie pen- dant les 60 ans qui commencent, je serais porté à croire que les travaux de spécification et de classement se ralentiront à raison de l’extrème faveur dont ils ont été l’objet ; que l'anatomie et l’étude des mœurs iront en progressant; que les œuvres de généralisation prendront plus de place dans le domaine de la science; que les grandes questions que soulève l'entomologie géographique et phi- losophique seront d'autant plus approfondies qu'elles ont plus de matériaux fournis par les travaux de l’entomologie systématique : telle est la considération de la variabilité des espèces sous l'in- fluence des climats et des circonstances extérieures, considération qui appartient à la fois à la géographie et à la philosophie de la science, et qui entrainerait des travaux de réduction dans le nombre des espèces. Telle est aussi la considération de l'harmonie individuelle, loi d'après laquelle la conformation de chaque organe satisfait aux nombreuses conditions voulues par les nécessités de la vie et des fonctions qui sont dévolues à l'individu; telle estencore celle de l'harmonie générale indispensable à l'existence de l’es- pèce et de l'ordre entomologique tout entier. Ces hautes ques- tions, qui seront traitées par les Linnées , les Buffons, les Cuviers a venir feront eclater plus que jamais les grandes vérités reli- gieuses , les attributs ineffables de la Divinité. (244) PHANÉROGAMES. Ces plantes sont pourvues d'organes sexuels visibles. Notre ou- vrage n'ayant pour objet que les arbres d'Europe, nous n'avons pas a nous occuper des Cryptogames qui n’ont pas de sexes distincts et parmi lesquels il ne se trouve qu'un très-petit nombre de végé- taux ligneux tous exotiques , tels que le Cicas revoluta. Les Pha- nérogames sont les plantes les plus élevées en organisation dans l’échelle végétale; ils suivent les Cryptogames dans l’ordre ascen- dant que nous adoptons, et ils forment une longue série progres- sive qui à été considérée diversement suivant le plus ou moins d'importance relative donnée aux différentes parties de l'organi- sation. 1l règne à cet égard une grande divergence d'opinions chez les botanistes : les uns considèrent comme les plantes les plus parfaites, les Composées({), d'autres les Papilionacées, d’autres les Conifères. Parmi les considérations auxquelles on pourrait avoir égard dans l'examen de cette question, il en est une qui, si je ne me trompe, n’a pas été mise en avant : je veux parler des motifs (1) Voici l’opinion de Fries en faveur de cette opinion : 1.° Plus est grand le nombre des degrés de métamorphoses , par lesquelles une plante doit passer avant que son fruit se développe, plus aussi elle est parfaite ; 2,0 plus la métamorphose est grande, plus le végétal est parfait; 3.° les végétaux les plus parfaits ont donc la forme de fleur la plus régulière et la plus harmonieuse ; 4.° ceux-là sont par conséquent plus parfaits, qui non-seulement possèdent tous les organes, mais encore chez qui ceux-ci sont combinés le plus heureusement et le plus régulièrement possible; 5 ° plus la nature a semblé mettre de sollicitude et faire d'efforts dans la formation et le développement de la graine , plus la plante est parfaite; 6.0 les végétaux les plus parfaits sont ceux qui représentent de la manière la plus pure, par la structure, la forme, les rapports numériques et les manifestations vitales, le type de leur section; 7. enfin si la forme typique est le résultat des rapports les plus généraux, il s’en suit que les groupesles plus;parfaits doivent être les plus nombreux et les plus étendus. D'après ces considérations fondamentales , Fries décide que les Composées sont les plantes les plus complètement développées. (245) que l'on peut trouver, pour classer les Phanérogames suivant leur degré d'organisation , dans l'analogie que le règne végétal présente, sous le rapport sexuel, avec le règne animal. Dans l’un et dans l'autre, nous voyons se produire des modifications de même nature,nous voyons l'absence des sexes, leur réunion diversement combinée dans les mêmes sujets, leur séparation plus ou moins intense. Or, dans l'échelle animale, ces différentes modifications sexuelles marquent les degrés d'abaissement ou d’élévation orga- nique. Des Infusoires, des Polypes dénués de sexes, on monte aux Mollusques qui offrent les deux diversement réunis, et puis aux classes où ils sont séparés. La loi de l’analogie ne nous porte- t-elle pas à suivre le même ordre pour l'échelle végétale, c’est-à- dire à monter des plantes Cryptogames aux Phanérogames herma- phrodites et ensuite aux diclines, c’est-à-dire aux Monoïques et aux Dioiques ? Cet ordre me paraît d'autant plus naturel qu'aux caractères sexuels se joignent la plupart de ceux qui indiquent comme eux une organisation avancée, et particulièrement l’en- semble de toutes les parties des arbres forestiers qui présentent le - terme le plus élevé, le plus parfait de la vie végétative. Cette analogie sexuelle entre les plantes et les animaux est aussi étonnante qu'elle est incontestable. La nature si différente des unes et des autres, et surtout l'absence de la locomotion chez les premières, paraît rendre incompatible l'inertie du végétal et l'acte qu'il doit accomplir quelquefois loin de lui. Cependant c’est un fait qui a été connu dès l'antiquité : Théopbraste disciple d’Aris- tote l’a signalé à l'égard du Dattier, en indiquant même le moyen d’er féconder les germes. A la vérité le nombre des plantes Dioiques est peu considérable en comparaison des hermaphrodites ; la na- ture semble avoir eu égard à la difficulté à vaincre, et ne s’en est pas trop rapportée à l'intervention du zéphyr et des vents, chargés de transporter au loin le pollen des fleurs ; mais elle nous montre ainsi tous les êtres vivants des classes supérieures, chacun dans leur ordre, soumis à la même loi pour la transmission de la vie. Une considération que nous regardons comme secondaire ‘ 2116) daus l'ordre naturel des plantes, c’est leur distinction en deux embranchements, d'après le nombre des feuilles séminales ou cotylédons, c’est-à-dire en Monocotylédones et Dicotylédones. Les premières sont évidemment d’un rang inférieur aux secondes, et les fleurs en sont généralement hermaphrodites. Elles doivent suivre immédiatement les Cryptogames. Les Dicotylédones qui sont en nombre beaucoup plus considé- rable se divisent très-bien en trois grandes classes d’après leurs fleurs polypétales, monopétales et apétales ; mais les botanistes sont fort divisés d'opinion sur le rang respectif qu'elles doivent occuper dans l'ordrenaturel. Nous nous permettons d'émettre hum- blement la nôtre. Nous pensons que les Polypétales sont moins avancées en organisation que les Monopétales, parce que la co- rolle, divisée en plusieurs pièces dans les premières, présente les mèmes parties dans les secondes , plus la soudure qui les réunit plus oumoins; quant aux Apétales, comme elles sontleplussouvent monoïques ou dioiques, et qu'elles ne comprennent que des végé- taux ligneux , nous les considérons comme supérieures aux deux autres ordres, malgré l’infériorité des fleurs privées de corolles dans les deux sexes. L'on objectera peut-être à l'importance que nous attachons à la réunion ou à la séparation des sexes, dans la classification natu- relle, qu'il se trouve des arbres Diclines dans les différents ordres de plantes Phanérogames, quel que soit d’ailleurs leur dégré d’élé- vation dans l'échelle végétale : les Monocotylédones présentent les Palmiers, les Dicotylédones Polypétales les Noyers, les Monopé- tales les Frênes, tandis que les Apétales, ordinairement Diclines, comptent quelques plantes à fleurs hermaphrodites. Nous répon- dons qu’à l'exception des Apétales, ce n’est que rarement que des plantes diclines se rencontrent dans les autres ordres, et voici la raison par laquelle il s'en trouve : chacun de ces ordres forme, comme l'échelle végétale tout entière, une série qui comprend plus ou moins de degrés, suivant son étendue. Ainsi les Monoco- tyledones s'étendent des plus humbles Gramens jusqu'aux Pal- ‘ 217 ) miers qui, sur leur tige grèle mais élancée, balancent dans les airs leurs couronnes altières. Ainsi, dans les Apétales, les Aristoloches hermaphrodites, ces faibles Lianes qui rampent autour du tronc des arbres, sont suivies de toute la phalange Dicline des Amen- tacées et des Conifères, qui, des Saules et des Peupliers, s'élève aux Platanes, aux Hêtres pour atteindre les robustes Chênes et les Cèdres incorruptibles, qui dominent le règne végétal comme ils règnent sur les sommets du Liban et de l'Himalaya. Nous croyons donc que la préseuce de Végétaux Diclines dans les ordres inférieurs et intermédiaires, n’affaiblit pas l'importance que nous attachons à la considération sexuelle dans la classifica- tion, mais qu'elle la confirme au contraire en nous offrant les sexes séparés dans les sommités de chaque ordre. ORDRE. MONOCOTYLEDONES. Dans cet ordre l'embryon ne présente qu'un seul cotylédon, ou feuille primaire, roulé en spirale sur lui-même. Ce caractère essentiel est toujours accompagné des suivants : la fleur, généralement sans calice, présente six pétales, trois inté- rieurs alternant avec trois extérieurs; les feuilles ont leurs ner- vures parallèles, non ramifiées. Dans les espèces ligneuses, le tronc est simple, grèle, cylindrique ; le bois est homogène, fibreux, sans couches concentriques et sans liber ; les feuilles sont grandes, groupées au sommet en forme de parasol. Cet ordre de végétaux, supérieur en organisation aux Crypto- games , inférieur aux Dicotylédones, offre une série qui s'élève progressivement des Graminées (Glumacées), aux Palmiers, en formant plusieurs classes plus ou moins nombreuses. Ces plantes nous intéressent particulièrement par leur beauté, où par leur singularité, ou par leur utilité, quelquefois par ces qualités réunies. Sous le rapport de la beauté, il suffit de nommer les Liliacées, pour évoquer à la fois toutes les magnificences , (2418) toutes les grâces du Lis, de la Tulipe, de la Jacinthe, de la Tubé- : reuse, de l’Aloës, du Yucca, et à côté d'eux, ce qui charme nos yeux dans l'Amaryllis, le Narcisse, la Jonquille, l’Iris, le Glayeul, la Tigridie, le Crinium, le Pancratium. Les beautés les plus éclatantes se réunissent ici en un groupe merveilleux, tandis qu'elles se disséminent çà et là dans les autres parties du règne végétal. La singularité organique se concentre de la même manière dans les fleurs des Orchidées qui par les formes les plus fantastiques , les couleurs les plus bizarres, les imitations les plus inattendues des figures animales, nous jètent dans la stupéfaction et nous cher- cherions vainement ailleurs des végétaux plus extraordinaires. Quant à l'utilité, les Monocotylédones ont l'honneur insigne de compter parmi elles les Céréales, la base de la subsistance de l’homme civilisé, le Bananier qui remplit la même destination près du sauvage, dans toute la zone équatoriale (1), le Cocotier, le Dattier, l’Ananas, et tant d’autres qui y prodiguent également leurs pulpes savoureuses ou leurs sucs délicieux. Les Monocotylédones, dont la nature semble essentiellement herbacée, s'élèvent dans une seule famille au rang des Arbres, et ce sont les Palmiers , les princes du règne végétal, comme les ap- pelle Linnée, qui fon& la principale beauté de toutes les régions intertropicales, et dont deux seulement étendent leur domaine jusques sur les rives européennes de la Méditerranée. (1) Le Bananier, figuier d'Adam, est extrêmement productif. La grappe donne jusqu’à 2 à 300 fruits, et pèse assez pour qu'un homme ait de la peine à la porter. D’après l'évaluation faite par M. de Humboldt, un terrain de 100 mètres carrés dans lequel on a planté 40 bananiers rapporte dans un an 4000 livres en poids de substance alimentaire. Ce même terrain semé en blé, ne donnerait que 50 livres de grains ; d’où M. de Humboldt conclut que le produit des bananes est à celui du froment ( sous le rapport de la substance nutritive et du terrain cultivé}, comme 155 est à 1 ,et à celui de la pomme de terre , comme 44 est à #. CLASSE. PALMIERS, Parzwuz. Linn. Les Palmiers, seuls entre les Monocotylédones, sont des arbres. La fleur est régulière, a trois ovaires qui ne contiennent chacun qu'un seul ovule; les graines sont renfermées dans une enveloppe pulpeuse ; les feuilles sont flabelliformes. Peu de noms s'emparent de nos souvenirs et de notre imagina- ton au même degré que celui de ces beaux arbres. Notre pensée nous représente les Palmiers de Jéricho, de l’Idumée, celui qui avoisine la soarce dans l'oasis du désert, ceux des sages de l'Inde, c'est-à-dire des Gymnosophistes qui se promenaient sous leur ombrage, comme Aristote sous les Platanes du Lycée; celui de l’île de Délos, qui datait de l’époque où Apollon y régnait et qui existait encore au temps de Pline, celui que le Calife Abderame avait planté à Cordoue en souvenir de Damas, sa patrie; celui du Jardin des Plantes, dont la vue produisit une impression si pro- fonde sur un Nègre qui retrouvait l'arbre de son pays. Nous ne pouvons pas même oublher les deux Palmiers plantés à la naissance de Paul et de Virginie et qui croissaient comme eux en grâce et en beauté. Nous voyons en eux la végétation qui domine en beaute comme en élévation toute la végétation si admirable des Tropiques et de l'Équateur. Répandus avec profusion sur cette zone dans toute l'étendue du globe, les Palmiers se modifient en une vaste famille appropriée à tous les sites, aux vallées comme aux montagnes, aux bords du Gange comme aux hauteurs des Andes , comme aux rivages des iles de l'Océanie. Dans la multitude des espèces, nous nommerons l’Euterpe co mestible des sages, le Calamus sang dragon, l'Oréadore palmiste, le Doumier de la Thébaïde, le Corypha à parasols, l’Attaléa gigantesque, le Jubéa magnifique. Les palmiers sont destinés à satisfaire à tous les besoins des hommes dans les régions tropicales, (2% ) Sous le rapport comestible, les Palmiers donnent le Sagou, cette fécule substantielle, produite par le tissu moelleux qui remplit l'intérieur du tronc. Les fruits savoureux du Dattier sont une des grandes ressources alimentaires des Arabes ; ceux du Cocotier pré- sentent de précieuses ressources surtout aux Hindoux qui en font usage dans les différents degrés de maturité : les bourgeons des Choux palmistes sont au nombre des mets les plus recherchés au Brésil et aux Antilles; le sucre de l’Aranga remplace celui de Cannes dans les Iles de la mer des Indes ; le beurre de Galam est goûté en Europe comme en Guinée ; l'huile de Palmier est comes- tible en Amérique ; enfin le vin de Palme, qui est la sève extraite par incision,est d’un usage très-répandu dans les Indes, et pétille quelquefois comme le Champagne. Les Palmiers fournissent encore l’Arec que mächent les Indiens combiné avec le Bétel ; la cire pour l'éclairage, que produisent les Palmiers gigantesques des Andes ; les fibres sont utilisées pour la vannerie ; les feuilles remplacent le papier à écrire, et le bois est d’une dureté qui le fait employer pour la charpente. Enfin les Palmiers servent encore les beaux arts comme modèles d'élégance et de grâce ; par la hauteur du tronc et la beauté in- comparable du feuillage, ils élèvent la pensée comme les yeux, au-dessus des choses de la terre ; ils inspirent les grandes actions : ils exaltent l'âme, ils lui montrent le ciel. Enfin, nous rêvons les palmes de la gloire et même celles du martyre pour le triomphe de nos convictions. Les deux Palmiérs qui étendent leur empire jusqu'en Europe, sont le Dattier,la providence de l'Arabe,et le Chamaerops palmiste. Un seul insecte a été observé sur le Dattier : Ce Coléoptère Xylo- phage, Bostrichus dactyliperda , Fab., se trouve souvent dans le fruit tel que nous le recevons, particulièrement de la régence de Tunis. C’est le noyau que ronge l'insecte. Le Chamaerops palmiste nourrit lemême msecte de ses noyaux, suivant l'observation de M. Lucas. C’est dans le tronc du Cocotier à amande amère, de Cavenne et (221 ) des Antilles, que se développent les larves du grand Charençon, Calandra palmarum, Ver du Palmiste, que les Créoles mangent comme un mets très-délicat. Pour le multiplier, les habitants de la Martinique ont coutume de faire des incisions dans l'écorce des jeunes Palmiers pour déterminer ces insectes à y déposer leurs œufs. ORDRE. DICOTYLÉDONES. Cet ordre se distingue du précédent par deux cotylédons opposés. Au Palmier, dont nous n'avons eu qu’un mot à dire, comparons le Chêne et nous verrons deux natures végétales , infiniment diffé- rentes , dérivées de la seule différence des cotylédons , et nous admirerons comme toujours l'unité de composition unie à l'ex- trême diversité de modification. Au tronc simple, grêle et cylindrique , aux grandes feuilles groupées au sommet en forme de parasol, aux racines semblables à des cables et égales entre elles, du premier, s'opposent le tronc conique qui se termine en cime rameuse, la multitude infinie de feuilles attachées aux branches, la racine pivotante et ramifiée du second. Ees Dicotylédones diffèrent encore des précédentes par la composition Gu tronc formé d'une moelle centrale, de couches ligneuses concentriques , d'une écorce complexe; par les feuilles à nervures rameuses ; par les fleurs munies généralement d’une corolle et d’un calice , et organisées d’après le type quinaire et ses multiples. Tandis que les Monocotylédones ne contiennent qu’un seul groupe d'arbres , les Palmiers, les Dicotylédones comprennent tous les autres. C’est sans doute la conséquence de l'organisation plus composée de ces dernières. D'ailleurs , le type en est beau- coup plus multiplié ; elles comprennent les quatre cinquièmes des plantes phanérogames. ( 222 ) Les Insectes qui vivent sur ces végétaux sont en nombre pro- portionné au leur , et surtout à la multiplicité relative des arbres qu'ils présentent, ceux-ci nourrissant infiniment plus d'insectes que les plantes herbacées en raison des moyens d'existence qu'ils leur procurent dans l'épaisseur de leur écorce et de leurs racines , dans leurs fruits, et surtout dans les myriades de feuilles qui leur présentent un fonds inépuisable de subsistance. Les Dicotylédones se divisent en trois grands ordres : les Poly- pétales , les Monopétales et les Apétales. DIVISION. DICOTYLÉDONES POLYPÉTALES. Dans cette division la corolle est formée de pétales libres. Cette phalange immense qui se divise en classes nombreuses, (4) présente un grand nombre d'arbres et d’arbrisseaux indigènes ou naturalisés ; cependant il s’y trouve peu de nos arbres forestiers qui appartiennent généralement à la division des Apétales , mais la plupart de nos arbres fruitiers, cette partie aussi utile qu'agréable de nos richesses végétales. C’est à la classe des Calo- phytes que nous devons nos fruits à noyaux et à pépins ; c'est à celle des Ampélides qu'appartient la Vigne; aux Térébinthinées qu'appartiennent le Noyer, l'Oranger, tous ces sucs, ces jus, ces pulpes qui se diversifient à l'infini pour rafraîchir ou réchauffer notre sang, pour calmer notre soif ou notre faim, et dont les saveurs flattent notre palais plus qu'aucune autre substance. Les Polypétales ne sont pas moins prodigues de belles fleurs que de bons fruits ; c’est dans leurs familles comme dans nos jar- (1) Ces classes sont : les Loranthées , les Cocculinées, les Trisépales, les Polycarpiques , les {Rhéadées , les Hydropeltidées , les Péponifères, les Cistiflores, les Guttifères , les Caryophyllées, les Succulentes , les Calici- flores , les Calycanthinées , les Myrtinées , les Lamprophyllées , les Colom- nifères , les Gruinales , les Ampélidées, les Malpighinées , les Tricoques , les Térébinthinées , les Calophytes. ( 223 ) dins que se réunissent pour nous plaire la charmante tribu des Papilionacées, lesRenoncules, les Anémones, les Roses, les Myrtes, les Spirea , les Marronniers, les Tulipiers , les Magnolia, et tant d’autres de ces délicieuses productions dont les formes gracieuses, les tissus délicats , les couleurs brillantes , les parfums suaves eni- vrent nos sens, qui se groupent en bouquets, en thyrses, en girandoles , en guirlandes , en couronnes pour embellir nos solen- nités, joncher nos temples, ceindre le front de la gloire et de la vertu, et parer jusqu’à nos tombeaux. Ce sont particulièrement ces fleurs et ces fruits qui , conjointe- ment avec le feuillage , donnent la vie aux essaims d'Insectes qui pullulent, qui bourdonnent autour de ces arbres, qui les animent de leur présence et trop souvent les dévastent de leurs dépré- dations. CLASSE. LORANTHÉES, Lonasnraræ. Bart! G. GUI, Viscum, Linn. L'ovaire ne présente qu’une seule loge contenant un seul ovule renversé ; la corolle est épigyne; les étamines sont anté-positives. Cette classe, peu considérable, composée d’arbrisseaux para- sites, n’en comprend qu’un seul indigène, le Gui, Viscum, qui présente un phénomène singulier : c’est un arbrisseau qui vit en parasite sur les arbres, dont la graine apportée par les oiseaux, et restant accrochée contre l'écorce , y insinue ses racines , et se développe aux dépens de la séve du végétal contraint de subir cet hôte nuisible. C’est le plus souvent le Pommier qui le nourrit de sa substance ; ce sont aussi plus ou moins les autres arbres, à l’exception de ceux dont les sucs sont laiteux , tels que le Figuier. C'est sans doute l'étrangeté de sa nature qui a donné lieu au culte superstitieux dont le Gui était l’objet chez les Gaulois. Ils lui attribuaient toutes les vertus et lui rendaient tous les honneurs. C'était celui du Chêne, comme le plus rare, que leurs prêtres re- (22% ) cherchaient , qu'ils coupaient en grande solennité avec une serpe d'or, qu'ils regardaient comme sacré, qu’ils suspendaient dans les temples; et, telleest la force destraditions, la ténacité des cou. tumes , qu'après quinze siècles, et au sein du christianisme , il en reste des vestiges , et qu'indestructible comme la pierre druidique, le Gui l'an neufse répète encore comme un écho lomntain de la voix patriotique de nos ancêtres , de Velléda, de Vercingétorix. Dépossédé de ses honneurs, de toutes ses vertus, le Gui inté- resse encore par les singularités de sa nature, par ses feuilles sans nervures apparentes , par sa sève restant entièrement étrangère à celle de l'arbre nourricier, par sa disposition à s’étaler qui ne connaît pas la loi commune à tous les végétaux ligneux de se diriger vers le ciel. Le seul insecte qui ait été observé sur le Gui est le Longicorne Pogonocherus pilosus, Fab., qui dépose ses œufs sur les tiges desséchées dans lesquelles la larve se nourrit et se développe. CLASSE. OMBELLIFLORES, OumerurLonzÆ. Bartl. L'ovaire présente deux loges , dans chacune desquelles il n'y a qu'un ovule suspendu. Cette classe si considérable ne contient qu’un très-petit nombre de végétaux ligneux. La famille entière des Ombellifères, qui ne présente pas moins de mille espèces, n'en compte pas un seul. Nous n'avons à nous occuper que du Lierre et du Cornouiller. FAMILLE, ARALIACÉES , ArALIACEZÆ. Juss. Les pétales sont au nombre de cinq à seize. Cette famille ne présente qu'un seul arbrisseau indigène, le Lierre ; un autre, l’Angélique épineuse, originaire d'Amérique , qui est naturalisé en Europe. C’est à elle qu'appartient le célèbre Panax Ginseng des Chinois, dont le nom , dérivé de Pa- nacée, fait allusion à toutes les vertus qui lui ont été attribuées. (225 | G. LIERRE , Hepera. Linn. (1). Les pétales sont au nombre de seize. Le Lierre, qui semble chargé par la nature du soin de cacher sous son feuillage toujours vert les troncs rugueux des vieux arbres, les ruines crevassées des monuments, est doué de toute la longévité nécessaire à sa destination. Nous pourrions citer un grand nombre de Lierres remarquables sous ce rapport : la dalle de sept pouces de diamètre provenant d'un Lierre du Titelberg, montagne du Canton de Lucerne{2) ; ceux que M. Laterrade men- tionne à Lormont et à Gradignan dans le vieux chateau d'Ornan ; “celui qu'a vu M. Bory de Saint Vincent dans les environs de Bayeux, ceux qui ornent la promenade del Prato, à Florence, dont le tronc a près d'un pied de diamètre. Les plus anciens que j'aie observés sont ceux qui recouvrent, comme une vaste draperie, les ruines du chateau d'Heidelberg. Ils remontent sans doute à l’é- poque de la dévastation du Palatinat, qui date à peu près de deux siècles. Ils ont substitué la beauté mélancolique de leurs vastes tentures aux beautés de l’art que Frédéric V y avait accumulées, Le Lierre qui sert, en quelque sorte, de linceul aux monuments, ne devrait pas être l'emblème de l’immortalité. Quand il embrasse l'Ormeau, il représente beaücoup mieux l'amour conjugal. Nous rappellerons ce beau passage de Bernardin de Saint-Pierre : Le Lierre, ami des monuments et des tombeaux, le Lierre, dont » on couronnait jadis les grands poètes, qui donnait l’immorta- té, couvre quelquefois de son feuillage les troncs des plus grands arbres. Il est une des plus fortes preuves des compensa- tions végétales de la nature; car je ne me rappelle pas en avoir jamais vu sur les troncs des Pins, des Sapins, ou des arbres dont le feuillage dure toute l’année. Il ne revêt que ceux que l'hyver dépouille. Symbole d’une amitié généreuse, il ne s'attache » qu'aux malheureux; et lorsque la mort même a frappé son pro- = > D 4e OS © eee (1) En vieux français L’hierre , dérivé d’hedera. (2) Le tronc a environ un pied de diamètre dans le bas. 15 ( 226 ) » tecteur, il le rend encore l'honneur des forêts où il ne vit plus ; » il le fait renaître en le décorant de guirlandes de fleurs et de » festons d’une verdure éternelle. » Les Insectes observés sur le Lierre sont : COLÉOPTÈRES. Malachius suturalis. Dej. — Ce Malacoderme se trouve en grand nombre sur les fleurs au printemps. Comme ses congénères, il fait sortir du thorax et de l'abdomen, lorsqu'il est effrayé, deux vési- cules d’un rouge écarlate. Ochina hederæ. Germ.-— Ce Térédile vit également sur les fleurs. Anobium Latreillei. L. Duf.—La larve de ce Serricorne vit dans les branches mortes ; elle se nourrit de la moelle. Xyletinus hederæ. L. Duf. — Ce Térédile se développe dans les branches sèches. La larve habite une galerie simple, ovalaire, creusée dans le liber et n'atteignant jamais le canal médullaire ; elle s’y tient courbée. Aux approches de la transformation, elle se rapporche de l'écorce. Dorcatoma hederæ. Blondel.— La larve de ce Térédile vit éga- lement dans les branches mortes. Hylesinus hederæ. Smidt., — Ce Xylophage vit sous l’écorce. Pogonocherus pilusus. Fab. — Voyez l’article Gui. Grammoptera ruficornis. Fab. — Ce Longicorne se développe dans le bois sec. LÉPIDOPTÈRES. Tortrix dumicolana. Zell.— Ce Platyomide, ainsi que ses congé- nères, a sa chenille couverte de points tuberculeux, surmontés chacun d’un poil. Elle roule en cornet, ou réunit en paquet, par des fils, les feuilles dont elle se nourrit, et s'y change en chrysa- lide sans former de coque, mais après avoir tapissé de soie l'inté- rieur de sa demeure. ({) (1) Ce que je dis des chenilles est généralement extrait des ouvrages de Duponchel , mon ami si regretté. ( 297 ) FAMILLE. CORNACÉES , Convacex. Lindl. Les pétales sont au nombre de quatre. Des Arbrisseaux de cette famille nous ne cultivons et nous n'a- vons observé que l’Aucuba du Japon, le Benthamia du Népaul et les Cornouillers. Ces derniers seuls nous ont paru nourrir des Insectes. G. CORNOUILLER. cornus. Linn. Les quatre pétales sont inonguiculés ; le stigmate est tronqué. Pline signale le Cornouiller cultivé comme nuisible aux abeilles, les fleurs en étant laxatives pour elles. Il recommande de le tenir à l'écart des ruches, et il indique le remède propre à les guérir (1). Plus tard , cet arbre était en faveur, ainsi que le Buis et l’If, pour la facilité avec laquelle il prenait, sous le ciseau, les formes que la fantaisie du jardinier lui imposait. Maintenant il n’est plus cultivé que comme arbre fruitier, et il l’est peu ; son fruit est joli, mais il n'est un peu agréable que pendant un instant fugitif, quand il n'est ni acerbe ni douceâtre. Nous attribuons au Cornouiller sanguin, comme à l’espèce cultivée, le peu d'Insectes qui ont été observés sur l’un et sur l'autre. COLÉOPTÈRES. Leptura rufipes. Linn. — Voyez Hêtre. Cryptocephalus 42 punctatus. Fab. — Cette Chrysoméline se nourrit de feuilles. Elle nüitmême aux bourgeons en les rongeant a mesure qu'ils se développent. HÉMIPTÈRES. Aphis (Vacuna, Amyot) Dryophila. Schr. — Ces petits Insectes "| lise L'une 6 fo dadasilen M (1) Le remède consiste à leur donner des cormes pilées avec du miel. ( 228 ) si vulgaires, dont l’histoire présente l'étrange phénomène d’un accouplement suffisant à la fécondation d'un grand nombre de gé- nérations(1), ont été longtemps considérés comme formant un genre homogène. Des observations récentes ont fait connaître des modi- fications dans la plupart des organes. La trompe plus ou moins longue, atteint dans quelques uns, trois fois la longueur du corps; les antennes varient également dans leurs dimensions et même dans le nombre de leurs articles ; les ailes se modifient dans la disposition de leurs nervures, de manière à présenter une mé- thode de classification pleine de clarté ; à l'extrémité du corps, on remarque, tantôt la présence, tantôt l'absence d’un appendice caudal de forme noduleuse, conique, ou allongée en sabre ; enfin, vers l'extrémité de l'abdomen, paraissent les deux tuyaux (corni- cules) plus ou moins longs, quelquefois réduits à de simples tuber- cules, d’où sort cette liqueur sucrée, principale nourriture des Fourmis, dont les Pucerons sont les Vaches laitières, suivant l’ex- pression de Linnée. LÉPIDOPTÈRES. Argyresthia cornella. Fab. Zell. — Cette Ténéide, dans l’état de chenille, vit dans l’intérieur des feuilles qu’elle roule en cornet, et elle sort de cette demeure lorsqu'elle est parvenue à toute sa grandeur, pour aller se transformer dans la mousse, où elle se file une coque composée de deux tissus, dont l'extérieur, en forme de treillis, laisse apercevoir l’intérieur d’un tissu plus serré (2). Micropteryx aglaella. Dup. Zell. — Ce genre de Ténéides, voi- sin du genre Adela, présente probablement les mêmes habitudes. Les chenilles, dans ce dernier, vivent et se métamorphosent dans des fourreaux portatifs qu’elles se fabriquent avec des parcelles de feuilles. (1)Bonnet a observé neuf générations dans l’espace de trois mois. Depuis, M. Kaltenbach en a compté jusqu'à seize. (2) Nous supposons que cette espèce a le même instinct que l’A. pruniella, à laquelle se rapporte cette observation. (229 ) CLASSE, COCCULINÉES, Coccuznez, Bartl. Les étamines sont hypogynes, en même nombre que les pétales; un ovaire solitaire , ou des ovaires en nombre défini. Cette classe ne comprend que les familles des Berbéridées et des Ménispermées. FAMILLE. BERBÉRIDÉES, BerpéRieÆ. Juss. Les bourses des anthères s'ouvrent par une valvule; l'embryon est rectiligne. F De cette classe et de cette famille nous n’avons à nous occuper que d’une seule espèce, le Berberis commun. G. BERBERIS, Bergeris. Linn. Le calice est ordinairement composé de neuf folioles articulées en trois séries. Le Berberis commun , qui est l’Épine vinette, ou le Vinettier, joint à ses qualités connues une réputation équivoque. Il est ac- cusé par les cultivateurs, lorsqu'il est planté près des Céréales, d'y déterminer l'invasion de la rouille et de la carie. Après avoir rapporté la cause de ce phénomène au pollen de l’arbuste, on l’a attribué à la propagation d’un Cryptogame, l’Aecidium berberi- dis, dont les feuilles du Berberis sont souvent infestées. De nom- breuses expériences n’ont pu encore lever tous les doutes. L'Épine vinette présente une propriété remarquable. Les éta- mines montrent une excitabilité qui rappelle celle de la Sensitive. Quand on touche avec une pointe les filets staminaires, on les voit s’agiter et se jeter sur le pistil avec d'autant plus de vivacité que la température est plus élevée. Les Insectes qui attaquent le Berberis sont : ( 230 ) HYMÉNOPTÈRES. Hylotoma berberidis. Fab. — Cette Tenthrédine fait avec la scie dont elle est pourvue, une incision dans une branche, et y depose un œuf. La fausse chenille qui en provient dévore le feuillage; elle tient souvent le corps replié en S. LÉPIDOPTÈRES. Geometra certata. Zell.— Cette espèce, dans l’état de chenille , est nue et arpenteuse, comme toutes les Phalénides. Cidaria berberadia. B. — La chenille est assez courte et carac- térisée par des lignes longitudinales aux deux extrémités. DIPTÈRES Criochina berberina. Meig. Pflug. — Cette Syrphide se trouve fréquemment sur les fleurs de cet arbrisseau. Tephritis (Trypeta, Meg.) Meigenii. Loew.— La larve se déve- loppe dans le fruit. CLASSE, POLYCARPIEQUES, Porxcarpicæ. Bartl. Les étamines sont hypogynes, en nombre indéfini ; les ovaires distincts, le plus souvent en nombre également indéfini ; autant de styles que d’ovaires;; les pistils sont en nombre indéfini. Cette classe est au nombre des plus remarquables par la beauté des fleurs. Elle comprend plusieurs des végétaux les plus ad- mirables du globe : le Déllenia speciosa, l'arbre le plus magni- fique de la zone équinoxiale, qui joint à la rare beauté du feuillage et des fleurs, la suavité du parfum et la saveur délicieuse des fruits ; les Magnolia qui montrent la même supériorité parmi les arbres de la zone tempérée, ce qui nous permet d’en faire le plus bel ornement de nos jardins. Le Tulipier fait aussi partie de ce beau groupe, et il en est digne, tant par la grandeur de ses fleurs, quepar la forme unique de ses larges feuilles. Les seules plantes ligneuses = » (231) indigènes de cette famille sont les Clématites, dont plusieurs espèces sont aussi au nombre de nos arbrisseaux les plus agréables. FAMILLE. RENONCULACÉES , Ranuncuraceæ. Juss. Les pétales et folioles du calice sont caducs ; les anthères dirigées en dehors ; les feuilles sont munies de stipules. Cette famille présente un grand nombre de plantes remarqua-- bles par la beauté de leurs fleurs. Nous nous bornerons à citer les Adonis, les Thalictrum, les Anémones , les Hépatiques, les Re- noncules, les Clématites. Ces dernières seules sont ligneuses, et à ce titre, doivent nous occuper. G. CLÉMATITE. CLemaus. Linn. Les folioles du calice sont étalées pendant l'épanouissement ; les pétales nuls ; les étamines nombreuses. Les Clématites, qui ont été récemment divisées en plusieurs gen- res(1), présentent en effet un assez grand nombre de modifications importantes qui toutes nous plaisent, les unes par les graines en plumes blanches et soyeuses qui les décorent, les autres par leurs fleurs, douées, tantôt d’une odeur suave, tantôt d’une beauté remarquable, comme celles que Siebold a rapportées récemment du Japon, et formant par la multitude de leurs longs sarments en- tortillés, un lacis impénétrable qui couvre en les ornant les ton- nelles de nos jardins | CLÉMATITE COMMUNE. C. Vitalba, Linn. Les folioles du calice, au nombre de quatre, oblongs, obtus. Cette Clématite des bois, déjà mentionnée par Pline, a reçu des noms populaires qui la signalent sous des rapports bien diffé- rents. Elle est la Barbe à Dieu et le Plaisir du Voyageur, par —<+ (1) Les genres Cheiropsis , Viticella , Viorna . Meclatis , Clematis. ( 232 ) allusion aux touffes blanches, argentées, ondoyantes que forment jusque dans l'hiver la multitude des graines entrelacées. Elle est l'Herbe aux Gueux, la Viorne des Pauvres, dont la sève donne aux mendiants le moyen d’exciter la pitié en déterminant sur les jambes des rougeurs qui simulent les ulcères. Je ne connais que quatre Insectes qui vivent sur cette Clématite. COLÉOPTÈRES. Bostrichus chalcographus. Linn. — La larve de ce Xylophage vit sous les écorces et y creuse des galeries. Læmophlæa clematis. Fab. — Autre Xilophage dont la larve vit dans l’aubier. HÉMIPTÈRES. Coccus clematidis. Linn. — V. Tamarisc. LÉPIDOPTÈRES. Larentia vitalbaria. Dup. — V. Tamarisc. Tinea clematella. Fab. — La chenille est glabre , vermiforme ; ses huit pattes membraneuses intermédiaires sont très-courtes ; le premier segment du corps est couvert d’une plaque cornée. Cette chenille vit et se métamorphose dans un fourreau fusiforme. FAMILLE. MAGNOLIACÉES , MAGNOLIACEZÆ , Juss. Le calice est caduc ; les anthères sont immobiles, linéaires ; les feuilles ont des stipules. Cette famille est peu nombreuse, mais elle occupe par sa beauté un rang considérable dans le règne végétal. Parmi les arbres qui embellissent nos jardins de leur luxe étranger, il n’en est pas qui réunissent tant de magnificence. Au feuillage splendide par son ampleur, son lustre, ses nuances, son élégance, se joignent des fleurs d'une grandeur admirable, d'une blancheur pure et argen- tée, relevée de pourpre, d'azur et d'or, qui se dessinent en coupe { 233 ) charmante, et qui joignent à tous ces enchantements le parfum le plus suave, où se retrouve par un mélange délicieux celui de la rose, de la jonquille et de l’oranger. Outre le type Magnolia, admirablement diversifié en nom- breuses modifications, cette famille comprend les Tulipiers, dont le nom signale la fleur, comme celui des Magnolia est un hommage rendu par Linnée à l’éminent botaniste (1) qui le premier classa les plantes par familles naturelles. Les Tulipiers, seuls de cette famille, nourrissent des Insectes en Europe. G. TULIPIER Liriopenprum. Linn. Les étamines sont plus longues que le pistil ; les anthères sont arquées, dirigées en dehors. Le Tulipier est non seulement remarquable par la beauté de ses fleurs, à laquelle il manque seulement un coloris plus vif, mais encore par la forme presque carrée et très-inusitée de ses feuilles ; il l'est surtout par les grandes dimensions qu'il acquiert dans sa patrie, l'Amérique septentrionale, où son tronc atteint jusqu’à six mètres de circonférence. Les Insectes observés sur ie Tulipier sont : HÉMIPTÈRES. Coccus liriodendri. Linn. — V. Tamarisc. LÉPIDOPTÈRES. Boarmia hortaria. Fab., Smidt, Abbot. — La chenille de cette petite Phalénide, prend, dans l’état de repos, une attitude qui lui donne l'apparence d’un pédoncule de fruit, ou d’une petite branche sèche. Elle se trouve en Europe et en Amérique. Anthitesia salicana. Dup.— Nous avons observé cette Platyo- mide sur le feuillage, paraissant vouloir y déposer ses œufs, Ne | () Pierre Magnol , professeur à l'université de Montpellier. (234) comme sur le Saule. Elle a le deuxième article des palpes très- long et très-velu. Sa chenille est épaisse et parsemée de points verruqueux. Elle vit au milieu de plusieurs feuilles qu'elle réunit ensemble par des fils, et s’y transforme. Tinea. — Le 16 juillet, j'ai trouvé sur le feuillage une chenille de Teigne dans son fourreau ; mais je n’ai pu l’amener jusqu'à l'état ailé. CLASSE. PÉPONIFÈRES , PrponrerRæ, Bertl Les pétales son insérés à la gorge du calice ; l'ovaire est symé- trique, uniloculaire. Des nombreuses familles qui composent cette classe , celle des Grossulariées est la seule qui contienne des arbrisseaux indigènes ; trois autres de ce groupe d'origine exotique nous intéressent en nous procurant par la culture d'excellents fruits ou des fleurs d’une rare beauté, tels que les Melons, les Passiflores et les Cactus. Sous le rapport entomologique ces derniers se recommandent en nourrissant la Cochenille, l’un des insectes devenus le plus utiles à l'industrie par la substance précieuse qu'il fournit à notre luxe. FAMILLE. GROSSULARIÉES , GrossuLariæ. De Cand La corolle à cinq pétales libres; cinq étamines ; l'ovaire est adhérent. Cette famille a été formée du genre ÆRibes, Linn. dont les modifications importantes ont donné lieu à de nombreuses coupes génériques. Outre les trois espèces les plus connues, les Gro- seillers rouge, cassis et épineux qui ont été élevées au rang de genres (1), la même division a été opérée pour le Groseiller de (4) Ce sont les genres Ribes, Bolhryorarpium et Grossularia. ( 235 | Douglas (4), ce bel arbuste des Montagnes Rocheuses ; le G. à fleurs pourpres (2) qui par sa charmante floraison printanière est devenu en peu d'années le premier ornement de nos jardins ; le G. élégant (3) de la Californie, dont les fleurs ont l'apparence et la grâce de celles des Fuchsies. G. GROSEILLER, riBes. Linn. Les fleurs ont cinq pétales très-petits , distants ; les étamines sont insérées à la gorge du calice. Ce genre, tel qu'il est maintenant circonscrit , comprend avec le Groseiller commun un assez grand nombre d'espèces, les unes indigènes , comme les Gr. de Roche, à longues grappes, al- pestre ; d’autres exotiques, tels que les Gr. bicolore , décumbant, du Liban dont les feuilles ont l'odeur de la Reinette. GROSEILLER COMMUN. À. Rubrum. Linn. Les pétales sont cunéiformes; l'ovaire et glabre; les anthères sont réniformes. Le groseiller, si vulgaire et en même temps si agréable par ses grappes purpurines, et ensuite par les mille formes sous lesquelles nous savourons son suc, le Groseiller était inconnu aux anciens et n a commencé à se faire connaître qu'au moyen-âge. Son nom, dérivé de Grossularius , a une étymologie assez incertaine ; sui- .vant Charles Étienne dans son ouvrage De re Hortense , le Gro- seiller est ainsi nommé par les botanistes , parce que les grains de son fruit sont semblables à ceux des figues qui ne sont pas müres, et qui sont appelées Grossi ou Grossuli. Selon Ménage , les Groseilles doivent leur nom à leur grosseur par comparaison aux petites Groseilles rouges que les Normands appellent Grades (4) Cerophyllum Douglassii. (2) Coreosma sanguineum. (3) Robsonia speciosa. ( 236 | ou Gardes (1); opinion qui indique que le nom de Groseiller a été donné primitivement à l'espèce épineuse. C’est à cette espèce que nous rapportons les Insectes du Gro- seiller , quoiqu'ils puissent avoir été également observés sur les autres : COLÉOPTÈRES. Phitobius % tuberculatus. Fab. — Ce Curculionite ronge le feuillage dans l’état adulte comme dans celui de larve. HYMÉNOPTÈRES. Tenthredo (sous-genre Emphytus) Grossulariæ.— Cette Tenthre- dine pratique des incisions dans la tige au moyen de la scie dont elle est munie et y dépose ses œufs ; les fausses chenilles qui en proviennent dévorent le feuillage. Tenthredo ‘sous-genre Macrophya) ribis. Sch. — Ibid. Nematus ribis. Leduc. — La fausse chenille de cette Tenthre- dine dévore quelquefois tout le feuillage. Coryna ribis. Leduc. — Cette Tenthrédine est rare en France. HÉMIPTÈRES. Aphis ribis. Schr.—Ce puceron pullule tellement qu'il fait sou- vent recoquiller toutes les feuilles ; et il attire les fourmis au point qu'elles y établissent quelquefois de petites fourmilières avec de la terre qu'elles apportent an sommet de l’arbuste. LÉPIDOPTÈRES. Vanessa C. album. Linn. -— V. Cerisier Sesia tipuliformis. L. — La chenille de cette Sphyngide ne se nourrit pas des feuilles ; elle est munie de fortes machoires et de deux plaques écailleuses , l'une sur le premier segment du corps, (1) Au mot Gardes , Ménage soupçonne que ce mot a été fait de rubius , (d’où ribes) à cause de la couleur rouge de ce fruit. Rubius, rubicus, rubi- cardus , rubicarda , carda , gardes, ( 237 l'autre sur le dernier; elle vit et se transforme dans l’intérieur des tiges du Groseiller où elle pénètre peu à peu. Atychia grossulariæ. Fab. — La chenille de cette Bombycide n’a pas encore été observée ; mais il est probable qu’elle vit comme celle de la Stygia australis qui en est voisine, et qui vit dans les tiges et les racines. Halia wavaria. Linn. — La chenille de cette Phalénide porte de petites verrues pilifères; elle ronge les feuilles et se métamorphose dans un tissu mince à la surface du sol. Acidalia hastata. Fab. — Cette Phalénide, dans l'état de che- nille, est effilée, sans tubercules ; elle vit dans les feuilles cousues ensemble avec de la soie. Zerene grossularia. B. — La chenille de cette Phalénide vit sur le feuillage. Avant de se transformer elle s’entoure seulement de quelques fils entre des feuilles. Cidaria ribesiaria. B. — V. Berberis. Tortrix ribeana. H. — V. Lierre. Phycis grossulariella. Tr. — La chenille de cette Crambide n’est pas connue. Incurvaria capitella. Zeller. — Cette Tinéide , dans l’état de chenille, vit et se métamorphose dans un tuyau uni, ovale, qu'elle transporte avec elle. DIPTÈRES. Cecidomyia ribesii. Megerle.— Cet auteur a décrit cette espèce sous ce nom sans mentionner sa manière de vivre; mais les larves des Cécidomyies se développent ordinairement dans des espèces de galles. CLASSE CISTIFLORES, Cismrores. Baril. Les pétales et les étamines sont hypogynes ; le pistil est symé- trique. | Cette classe composée de plusieurs familles ne comprend que deux genres d’arbrisseaux indigènes : les Tamariscs et les Cistes. { 238 | FAMILLE. CISTACÉES , Cisraceæ. Lyndt. Les étamines sont en nombre indéfini ; les graines sont nues. De cette famille, le genre Ciste est le seul dont nous ayons à nous occuper. G. CISTE, cisrus. Linn. Les arbustes de ce genre, remarquables par la beauté de leurs fleurs, sont communs dans toutes les régions voisines de la Médi- terranée. Ils étaient connus dès le temps d'Hérodote par la gomme résineuse nommée Ladanum , répandue sur les sommités et sur les jeunes feuilles, et qui est encore recueillie maintenant, surtout dans la Grèce. Les Insectes observés sur les Cistes sont : COLÉOPTÈRES. Bruchus cisti. Lat., Laporte. — La larve de ce Cureulionite vit dans la graine. ORTHOPTÈRES. Gryllus cisti. Linn. — Ce Grillon ronge le feuillage. LÉPIDOPTÈRES. Solenoptera meticulosa. L.— La chenille de cette Noctuélite est glabre, à petite tête globuleuse. Son cocon est peu solide, à peine enfoncé dans la terre. Boarmia rhomboidaria, W. W. — V. Tulipier. Ephyra pupillaria, Hübn. — La chenille de cette Phalénide est lisse, à tête plate et triangulaire ; elle se singularise par sa trans- formation qui s'opère comme chez les Papillons diurnes, c’est-à- dire que sa chrysalide est attachée par la queue et par le milieu du corps, comme celle des Pieris. Nemophora cericinella. Zell. — Les premiers états de cette Tinéide ne sont pas encore connus. (239 | FAMILLE. TAMARISCINÉES , TAMmaRISCINEÆ. Les étamines sont presque toujours en nombre défini ; les styles sont distincts. Le genre Tamarisc est le seul de cette famille sur lequel des Insectes ont été observés. Les Tamarises auxquels nous joignons les Myricaria (Tamarix germanica) embellissent le bord des eaux par l'élégance et la légèreté de leur feuillage. Ils sont -en proie à un assez grand nombre d'Insectes. COLÉOPTÈRES. Apion tamarisci. Dej.— Ce Curculionite ronge le feuillage dans l'état de larve et d’adulte. Coniatus chrysochlora. Lucas. — Ce Curculionite se file une coque globuleuse en réseau qu'il colle aux branches. Cet instinct paraît déterminé par la difficulté de se maintenir sur les branches très flexibles du Tamarisc et sur son feuillage filiforme. Coniatus repandus. Dorh. — Ibid. tamarisci. Fab. — Ibid. Nanodes (Cionus) tamarisci. Dej. — Ce Curculionite dépose ses œufs sur l'ovaire des fleurs; les larves s'y développent et les Insectes parfaits en sortent. Nanophyes pallidulus. Grav.— Ce Curculionite est commun sur le Tamarisc, à Perpignan. stigmaticus. Kiesenw. — Ibid. tamarisci. Sch. — Ibid. Pachybrachys tamarisci. Dej. — V. Saule. Stylosomus tamarisci. Suff. — M. Kiesenwetter a trouvé cette Chrysoméline en grand nombre à Perpignan. HÉMIPTÈRES. Coccus manniparus. Suivant Forskael et Ehrenberg, cet Insecte ( 240 détermine l'écoulement d’une substance gommeuse d’un goût agréable, que les Arabes recueillent soigneusement. LÉPIDOPTÈRES. Opiusa illunaris. Hubn. — La chenille de cette Noctuélite est lisse. Elle se tient collée contre les branches pendant le jour et se renferme dans une coque composée de soie et de terre. Pyralis fovealis. Zell. — La chenille n’a pas été observée. fimbrialis. Zell. — Ibid. Nymphula undalis. Zell. — La chenille de cette Pyralide n'est pas connue. Pionea forficalis. Linn. — La chenille de cette Pyralide, qui vit habituellement sur les Crucifères, se trouve aussi sur le Tamarisc. Elle s’enferme, avant de se transformer, dans une coque en forme de barillet, d'un tissu lisse à l'intérieur et revêtue extérieurement de molécules de terre. Botys ochrealis. H. — La chenille de cette Pyralyde vit et se métamorphose dans l’intérieur des feuilles,qu’elle roule en cornet. Philobia œstimaria. Hubn. — La chenille de cette Phalenide se renferme entre les feuilles et s’enterre avant de se transformer. Boarmia Selenaria. W. W. Zell. — V. Tulipier. ————— rhomboidaria. W. W. Zell. — Ibid. Larentia polygrammaria. B., Zell.— La chenille de cette Phalé- nide est lisse, peu allongée, plissée sur les côtés. Elle se trans- forme dans la terre ou entre des feuilles, suivant la saison. Eupithecia ultimaria. Rambur, Zell. — Cette Phalénide, dans l’état de chenille, est lisse; elle a la tête petite. Elle se transforme dans un tissu léger sous la mousse. Eupithecia tamarisciaria. B. — Ibid. Geometra flaviata. Zell. — V. Berberis. permutataria. Zell. — Ibid. coronata. Zell. — Ibid. Godonela vestimaria. Hubn. — La chenille de cette Phalénide est menue, à petite tête. Elle s’enfonce en terre pour se transformer. Crambus superbellus. Zell. — La chenille de cette Crambide a été observée sur le Tamarisc. Elle vit sur les racines. 241 CLASSE. SUCCULENTES , SUCOULENTEÆ, 2arti. Les étamines sont périgynes : les ovaires sont libres, en nombre défini ; les styles en même nombre que les ovaires. Cette classe est composée de plusieurs familles (4) connues généralement sous le nom de plantes grasses. Elle comprend très peu d’arbrisseaux. FAMILLE. CUNONIACÉES , Cuvoniacezæ. Brow. Les ovaires sont au nombre de deux, opposés et soudés. Les arbrisseaux de pleine terre de cette famille sont les Sérin gas, les Deutzia, les Hydrangea, les Escallonia et les [tea. Nous les cultivons et nous ne les voyons jamais attaqués par les insectes. CLASSE. CALYCANTHINÉES, CALYCANTHINEE, Bartl. Le disque est aréolé; les ovaires sont en nombre indéfini s iusérés au disque. Cette classe comprend la famille des Granatées. FAMILLE. GRANATÉES , GRANATEZ. Don. Les lobes calicmaux sont valvaires : les carpelles connés. G. GRENADIER , PuNIcCA. Linn. Le calice est coriace, colore. Le nom latin de ce genre dérive, soit de Puniceus qui fait allu- sion à la couleur écarlate des fleurs de l'arbre, soit de Malus ne Vo nb LM in ue (1) Les Cunoniacées , les Saxifiagées , les Crassulacées , et les Ficoïdées. 16 1 = Fes punica, terme employé par les Romains pour désigner la Grenade, parce que ce fruit leur parvint de Carthage. L'étymologie du nom français se trouve dans Granatum , autre nom latin de la Gre- nade, dû à la quantité de grains qui en remplit l'intérieur. Nous ne connaissons que deux insectes qui aient été observés sur cet arbre. COLÉOPTÈRE. Nyphona saperdoides. Ziegl. — Ce Longicorne se développe dans le bois. LÉPIDOPTÈRES. Erebia médusa. Fab. — La chenille des Erébies , satyres des contrées alpines, n’est pas encore connue. CLASSE. MYRTINÉES, Msroweæ. Parti. Le tube calicinal est adhérent à l'ovaire. Les pétales sont péri- gynes , ainsi que les étamines. Les ovaires sont opposés et soudés ; le style est unique. Cette classe, composée de plusieurs familles , est presqu'entiè- rement composée de végétaux exotiques. Nous lui devons plusieurs productions utiles, comme le Piment, les clous de Girofle , l'huile Cajéput. FAMILLE. * MYRTACÉES, Myrracez. Juss. Les étamines sont le plus souvent nombreuses ; les anthères courtes. Cette famille contient un grand nombre d'arbres et d'arbris- seaux exotiques, connus sous plusieurs rapports. Tels sont les Eucalyptus de la Nouvelle-Hollande, si remarquables par leur élévation et par l'élégance de leur port et de leur feuillage; les Goyaviers de l'Amérique , si précieux par leurs fruits; les Jam- bosiers de l'Inde, si admirables par leurs fleurs; un seul arbre (243 )| de l'Europe méridionale , le Myrte, se joint à ces beaux végétaux et donne son nom à la famille. G. MYRTE, Myrrus. Linn. Le tube calicinal est globuleux ; les pétales sont ordinairement au pombre de cinq ; les étamines très-nombreuses. Des nombreuses espèces de ce génre , le Myrte commun appar- tient seul à l'Europe; il est l’un des arbres les plus poétiques de l'antiquité. Le Myrte s’associe à tout ce qui est religieux , solennel ou gracieux. Son nom, synonyme des parfums qu'il exhale (1), indique l’origine de la faveur dont il était l’objet. Les Hébreux , dans la fête des Tabernacles, portaient des rameaux où le Myrte se mariait au Palmier et à l'Olivier. Pour les Grecs , il était l'em- blème de la gloire et des plaisirs; il couronnait le front des vain- queurs à Olympie, comme des Grâces, comme de la muse Erato ; il décorait les statues des héros ; il paraissait aux funérailles ainsi qu'aux festins. Consacré à la déesse de la beauté, il se liait aux fictions les plus gracieuses ; Vénus s’était couronnée de Myrte lors du jugement de Pâris ; elle s'était cachée au sortir d'un bain sous le feuillage d’un Myrte pour se dérober aux regards indiscrets des Satyres. Littora siccabat rorantes nuda capillos ; Viderunt Satyri turba proterva Deam. Sensit et apposita texit sua corpora Myrto. OVIDE. Chez les Romains , le Myrte n'était pas moins honoré. Il était, selon Pline , Je premier de tous les arbres qui avaient été plantés sur la place publique de Rome. On avait été le chercher solennel- lement sur le sommet du mont Circé. Deux Myrtes fleurissaient devant le temple de Romulus , l’un patricien , l’autre plébéien , et dans le plus ou moins de vigueur de ces arbres symboliques , on lisait le plus ou moins de prospérité des deux ordres. Lors de l’en- (1) En grec myrrine. | 244 } lèvement des Sabines , les ravisseurs se purifièrent avec des ra- meaux de Myrte, symbole de l’union des époux. Enfin , le Myrte se tressait en couronne pour le front des triomphateurs. Cet arbre prend quelquefois des dimensions considérables. On en voit un à Sassaye, en Sardaigne, qui a près de cinq pieds de circonférence. Cet arbre est peu en proie aux insectes ; les espèces observées sont : HÉMIPTÈRES. Coceus rusci. Linn. — V. Tamarisc. LÉPIDOPTÈRES . Liparis dispar. Linn. — La chenille est légèrement aplatie, munie de tubercules surmontés de poils raides et rayonnants. Elle se métamorphose dans un tissu lâche. La chrysalide est velue. Geometra efflorata. Zeller. — V. Berberis. Tortrix succedanea. Id. — V. Lierre. Micropteryx myrtella. Id. — V. Cornouiller. eximiella. Koll. — Ibid. CLASSE, COLUMNIFÈRES , CocLuumrerRx. Bartl. Les pétales sont hypogynes; plusieurs ovaires. Cette classe est composée de plusieurs familles dont l'une , les Malvacées est très considérable , mais ne comprend pas d’arbres indigènes. Le végétal le plus connu par ses grandes dimensions et sa longévité appartient à cette famille, c’est le Baobab. Celle des Tiliacées est la seule dont nous ayons à nous occuper. FAMILLE. TILIACÉES , Tinacezæ. Juss. Le calice n’est pas persistant ; les anthères ont deux bourses ; les filets sont libres. Cette famille, qui contient un grand nombre de genres et d’es- pèces ne présente d'arbres indigènes que les Tilleuls, 245 G. TILLEUL , Tira. Linn. (1) Les pétales sont au nombre de cinq, concaves, arqués en avant. Ce genre comprend trois espèces indigènes ; les Tilleuls sylves- tres, intermédiaires et à feuilles molles, et plusieurs de l'Amérique, telles que les T. noir, argenté, hétérophylle. Ces arbres ont tant de ressemblance entr'eux , que nous avons lieu de croire que les insectes observés sur l'espèce sylvestre vivent également sr les autres. Ce Tilleul n'est pas un arbre de grande utilité, Son bois est médiocre , ses fleurs sont sans éclat; il ne produit pas de fruits, et cependant il jouit d’une grande faveur, il plaît à tout le monde. C'est l'arbre qui décore la place publique du village et qui a vu de nombreuses générations danser sous son ombrage; c’est l'arbre des promenades publiques des cités, des avenues et des quin- conces des châteaux. Il semble garder l'entrée hospitalière du presbytère et du cimetière. Planté en souvenir de grands événe- ments, il devient monumental , inspire la vénération et entretient le patriotisme. C’est ainsi qu'à Fribourg, je me suis incliné à la vue du Tilleul planté en 1475, en mémoire de la victoire libéra- trice de Morat ; qu'à Grenay, en Artois, j'ai vu avec respect celui sous lequel le grand Condé vint se reposer après la bataille de Lens , en 1648. Le Tilleul doit cet honneur et sa grande popularité à son épais ombrage , à l'ampleur de sa cime et surtout à sa longévité qui se manifeste souvènt par les dimensions colossales du tronc. Nous mentionnerons celui dont parle Ray, qui avait 48 pieds de circon- férence, celui de Millers qui en avait trente, celui de la ville de Neustadt qui en avait vingt-sept; enfin, celui qui existe à Challié près de Melié, département des Deux-Sèvres , et dont le tronc à , dit-on, quinze mètres et demi de circonférence. (2) (1) En grec Philyra , en allemand Linde, en anglais Lime ou Lindentree. (2) L'un des plus beaux Tilleuls que je connaisse est celui qui est situe (246 ) Parmi les honneurs dont jouit le Tilleul , nous citerons eelui d'avoir donné son nom suédois à l'immortel Linnée (1). Les insectes qui vivent sur le Tilleul sont nombreux. COLÉOPTÈRES. Cistela fusca. Fab. — Cet Hétéromère vit sur les fleurs. Fulvipes. Fab. — Ibid. Bostrichus tiliæ. Rosenhauer.— V. Palmier, Cette espèce forme des galeries horizontales dans l'écorce. Apate (Cryphalus) tiliæ. Fab. — Ce Xylophage vit également sous l'écorce. Pogonocherus hispidus. Linn. — V. Gui. Pachyta octomaculata. Fab. - Ce longicorne se développe dans l'auhier. HYMÉNOPTÈRES. Tenthredo tiliæ. Lepell. — V. Groseiller. HÉMIPTÈRES. Miris tiiæ. Linn.— Cette Cimicide vit sur le tronc. dans le verger de la ferme de M. Joye, cultivateur à Lestrem. Agé de 200 ans, il est admirable par l'épaisseur de son tronc , l'ampleur et l'élévation de son immense pyramide , l'épaisseur de son ombrage , la vigueur de sa végétation. Comme il est en vue de la route de Béthune à Estaires, il procura en 1815 à son heureux possesseur, la faveur de donner l'hospitalité au comte d'Artois et au duc de Berry qui, avec la maison du roi, allaient rejoindre Louis XVIII à Gand , en traversant la population dévouée el consternée du pays de Lalleu. Peu d'années après, Charles X s'étant arrêté à Béthune, j'eus l'honneur, en qualité de maire de Lestrem , de lui présenter M. Joye, et il lui dit : Je me rappelle qu'il faisait bien froid, mais que vous aviez fait un bien bon feu, à réchauffer la garde royale tout entière ; il m'a fait sentir toute la chaleur de vos sentiments pour votre roi. Le bon villageois répondit en surmontant le plus grand trouble : Sire , c'était un feu de joie. Le roi reprit en riant et Jui prenant la main : Je suis très-persuadé que ce n'était pas un feu d'artifice. (1) Le nom de famille de Linnée lui vient d'un énorme individu de cette espèce. planté au village de Stégarye, en Smolande. M. Lyndley, l'an des meilleurs botanistes vivants . et notre ancien du Tillet doivent aussi leur nom à cet arbre. ( 247 ) Cimex nassatus. Linn. — Même observation. Aphis tiliæ. Fab.— V. Cornouiller. Dans cette espece, les cor- nicules sont nulles. Coccus tiliæ. Linn. — V. Tamarisc. LEPIDOPTÈRES. Smerinthus tiliæ. Linn. — La chenille de ce Sphyngide est glabre, rugueuse ; la tête est triangulaire ; le corps est rayé obli- quement. Avant de se transformer, elle s'enfonce dans la terre sans former de coque. Lithosia quadra. L. — La chenille de cette Nocturne est munie de tubercules garnies d’aigrettes. Elle se métamorphose dans des coques légères de soie entremêlée de ses poils. Liparis dispar. Linn. — V. Myrte. Orgya antiqua. Linn. — V. Rosier. Leucoma. V. Nigrum. F. — La chenille de cette Liparide se fait remarquer par la longueur de ses pattes membraneuses qui s’allongent encore quand elle marche. Eriogaster lanestris. Linn. — Leschenilles de ce Bombycide vivent en société, et se filent en commun des toiles pour s’abriter. Leur cocon est ovoïde, d’un tissu très-solide. Platypteryx sicula. H. Freyer. — La chenille de ce Bombycide n à que quatorze pattes, les anales étant remplacées par une queue relevée en pointe tronquée et immobile; elle se file une coque à claire voie entre des feuilles à demi roulées. Pygæra bucephala. Linn.— J.es chenilles sont fort longues, demi velues et rayées longitudinalement ; la tête est forte et globuleuse ; elles se réunissent par petits groupes dans leur jeune àge. Avant de se transformer, elles entrent dans la terre sans former de coque. Ptilodontis palpina. —La chenille de cette Notodontide est lisse, atténuée aux deux bouts. Elle ne forme pas de coque et se retire dans la terre. Lophopteryx camelina. Linn. — V. Poirier. ( 248 ) Acronycta Psi. Linn. — La chenille de ce Bombycide porte une pyramide charnue sur le quatrième segment. Elle se transforme dans une coque. Xanthia citrago. Linn. — V. Saule. Ennomos tiliaria, H. —La chenille de cette Phalénide a le corps garni d’excroissances semblables à des bourgeons, et a l'apparence d'une petite branche d'arbre. Elle forme son cocon d’un léger tissu de soie. Ennomos angularia. W. W.— Ibid. Amphidasis prodromaria. Fab. — V. Pommier. Eurymene dolabraria. Linn. — La chenille de cette Phalénide a des tubercules sur le deuxième et le huitième segment. La tête est échancrée en avant. Elle se transforme dans un léger tissu entre des feuilles. Hybernia defoliaria. Linn. — V. Erable. Phæsile psittacaria. B.— La chenille de cette Phalénide n'a pas été décrite. Fidonia piniaria. Linn. — V. Marronier. atomaria. Linn. — [bid. Lyonnetia (Ceroetastis, Zell.)Hippocastanella. Dup.—Dans cette Tinéide, le premier article des antennes recouvre les veux dans l’état de repos, et la tête est surmontée d'une touffe de poils. La chenille vit en mineuse en rongeant le parenchyme entre les deux surfaces de la feuille. Coleophora tiliella. Sch. Zell. — Cette Tinéide a le premier article des antennes garni d’un pinceau de poils. Les ailes infé- rieures sont presque linéaires, frangées, semblables à des plumes- La chenille vit et se métamorphose dans un fourreau portatif. DIPTÈRES. Cecidomyia tiliaria. Brémi.—Ce Némocère en déposant un œuf sur une feuille, détermine la production d'une galle semiorbicu- laire orangée, munie d’un couvercle, et dans laquelle la larve se développe. Quand elle en sort, le couvercle tombe, et forme une ouverture dans la feuille. I se trouve quelquefois dix à douze galles sur une feuille. Cecidomyia clavaria. Réaum.— Je donne ce nom à l'espèce qui produit l’excroissance nommée galle en clous, dont les feuilles de Tilleul sont souvent hérissées. Réaumur n'a vu qu'une seule larve jaunâtre dans chacune. Cecidomyia limbi volvens. Nob. — Je donne ce nom à l'espèce observée par Réaumur sur des feuilles de Tilleul dont les bords se sont épaissis en quelques endroits et roulés vers le dessus. En déroulant ces bords, on découvre les larves qui sont d'un rouge orangé Cecidomyia excavans. Nob.-— Je donne ce nom à l'espèce obser- vée aussi par Réaumur sur des feuilles de Tilleul, qui se creu- sent en cuiller. Le bord de ces feuilles est contourné et épaissi, et forme un rebord eotonneux, blanchätre. Les larves qui s'y trouvent sont blanches. ARACHNIDES. Tetranychus tiliæ. — M. Turpin a fait connaître cet Acarien dont les larves n’ont que deux paires de pattes. CLASSE. AMPÉLEDÉES, AuPeumex. Parti. La corolle est hypogyne ; les pétales sont élargis à la base : les étamines en nombre défini. Cette classe, composée de plusieurs familles, ne comprend que deux arbres très connus à titres fort différents : l’un indigène; l'autre exotique : le premier est la vigne, l’un des plus grands bienfaits que la Providence ait accordés à l’homme, mais dont il abuse au point de perdre la raison, et de se ravaler jusqu’au ni- veau des brutes ; le deuxième est l’Acajou, Swietenia Mahogoni, Lino., cet objet de luxe, devenu si vulgaire, ce superflu, chose si nécessaire ; cet arbre majestueux, l’un des colosses du règne végétal à la cime, vastement étendue, au troncénorme, inal- térable, dont les sauvages se creusent de longues pirogues. 250 | FAMILLE. SARMENTACÉES , SarmEnTAc£#. Vent. Les étamines sont en même nombre que les pétales. L'ovaire est biloculaire. Cette famille qui n'est représentée en Europe que par la vigne cultivée, comprend un assez grand nombre d'arbrisseaux exoti- ques, tels que les Cissus, les Pierisanchus, les Ampelopsis. Is sont généralement au nombre des Lianes si pittoresques par leur feuillage ou leurs fruits, dont les tiges se cramponnent aux arbres qui les avoisinent, et opposent tant d'obstacles aux pas des voya- geurs dans les forêts vierges des régions intertropicales. (Spach\. G. VIGNE. Vinis. Linn. Le calice est petit, à cinq dents ; cinq pétales ; cinq étamines. Outre la vigne cultivée, dont les variétés sont innombrables, plusieurs espèces distinctes ont été découvertes dans l'Inde et l'Amérique, telles sont : la vigne flexueuse, du Japon, l'Hétéro- phylle, de Java, la ferrugineuse des États-Unis. ViGxE CULTIVÉE. V. Vinifera. Linn. (1). Les feuilles sont orbiculaires à trois ou cinq lobes. De tous les arbres, la Vigne est celui qui occupe la plus grande place dans l’histoire ; il est celui dont le produit a le plus d’im- portance , et dont la culture à été l'objet de plus d’études et de travaux. L'histoire de la Vigne remonte aux premiers âges du monde, vers la sortie de l'arche; nous la suivons chez les Hébreux avant leur entrée dans la terre de Chanaan; dans les mythologies égyptienne, grecque, latine qui célèbrent sous les noms d’Osyris, de Dionysius, de Bacchus, le divin voyageur qui répandit la culture et les bien- (4) En grec Ampelos. Oine. ( 251 faits de la Vigne sur l’ancien monde. Nous la retrouvons dans Hésiode , dans Homère et dans toutes les littératures suivantes. Nous voyons surtout dans Pline le long enfantement de l’industrie vinicole en Italie, la rareté du vin à l’origine de Rome, Romulus faisant ses libations avec du lait, Numa défendant (1) d’arroser de vin le bucher des morts ; les femmes mises à mort quand elles en faisaient usage (2); Lucius Papyrius, le général romain, pendant la guerre des Samnites, se contentant de vouer une petite coupe de vin à Jupiter, s’il remportait la victoire; ensuite cette parcimonie se changeant en extrême prodigalité; Lucullus revenu de la Grèce, faisant distribuer plus de cent mille conges (3) de vin au peuple ; César célébrant son troisième consulat par un festin où coulaient à grands flots les vins de Salerne, de Scio, de Metelin, de Mamertin, ce qui ne faisait que préluder aux grandes profu- sions des orgies de l'empire. La culture de la Vigne avait été excitée en [talie par un grand nombre d'hommes d'élite et d'auteurs, tels que Caton et Varron(4), et elle avait reçu un développement immense ; des variétés aussi nombreuses que les sites diversifiaient à l'infini les vins qu’elles produisaient. Les raisins Amminéens convenaient aux coteaux de la Calabre ; les Eugeniens à ceux de Longa-Alba ; les Spioniens au territoire de Ravéhne; les Murgentins à celui de Pompéi, et c’est ainsi qu'avaient pris naissance les vins de Salerne, de Lin- terne, de Siezza, que l’empereur Auguste préférait à tous les autres; (4) Par la loi postumia. (2) Egnatius Mecenius tua la sienne pour l'avoir trouvée buvant du vin au tonneau, et Romulus ne punit pas le mari sévère de cet abus d'autorité. La permission dont jouissaient les Romains de baiser leurs parentes sur la bouche ne tenait, à ce qu'affirme Caton, qu'à un espionnage légal ; c'était, dit-il, pour s'assurer de leur tempérance. Fabius Pictor fait mention d'une matrone que ses parents firent mourir de faim pour avoir crocheté un coffre où éfaient renfermées les clefs de la cave au vin. (3) Le conge était le pied cube des Romains. (4) Nous nommerons encore Valerius Cornelianus , Cornelius, Celsus. Gracinus , Mutianus , Virgile . Pline. ( 252 ) du mont Cécube, de Sarazana, de Tarente, de Sorrente où devait naître le Tasse. La Vigne ne s'était pas moins propagée dans les autres parties de l'empire. Les Gaules, où l'avaient apportée depuis longtemps les Phocéens à Marseille, la reçurent ensuite des Romains, et ces deux origines paraissent se distinguer encore à la manière de la cultiver à hautes ou basses tiges (1). Les Croisés nous rapportèrent plus tard les Vignes de la Pales- tine, de Chypre, d'Alexandrie auxquelles nous devons les vins de Frontignan, de Lunel, de Rivesaltes. | C'est ainsi que la France, grâce à son heureux sol et à son ex cellente culture, est parvenue à produire ses vins si renommés. Aucun arbre n'a autant d'importance que la Vigne dans tous les pays où sa culture est possible. Elle donne une valeur infinie aux coteaux privilégiés , Sauterne , Clos Vougeot , Richebourg , Aï, Johannisberg, Tockaï et tant d’autres lieux chers aux Apicius modernes. Les flancs des montagnes se couvrent de nombreuses terrasses où la terre végétale est péniblement apportée fes ob- tenir cette précieuse production. Parmi les transplantations modernes de la Vigne, nous citerons celle qui a été faite au cap de Bonne-Espérance et à laquelle nous devons le vin de Constance; au Thibet la Vigne a été plantée à la hauteur énorme de 3,600 mètres au-dessus du niveau de la mer (c'est plus haut que le grand Saint-Bernard), et elle y donne d'excellent raisin; en Australie, la nouvelle Galle du Sud est déjà en possession de vignobles d’origine française, qui produi- sent des vins de Bourgogne et de Bordeaux sur les côteaux de Hunter-River. Parmi les particularités que présente cet arbre, nous mention- nerons encore les grandes dimensions que le tronc prend quel- quefois. Selon Strabon , il y avait dans la Margiane des Vignes ———û— (1) Les hautes tiges provenaient des peuples de l'Italie ; les basses des Phocéens. ( 253 | que deux hommes ne pouvaient embrasser. Pline dit que l'on montait sur le toit du temple de Diane à Ephèse par un escalier fait avec une seule Vigne de Chypre; il parle aussi d’un temple de Junon, soutenu sur des colonnes de Vignes. Les grandes portes de la cathédrale de Ravenne , sont dit-on, de bois de Vigne (1), l'abbé Rosier rapporte qu'il existait autrefois aux environs de Besançon une Vigne dont le tronc avait plus de trois pieds d'épais- seur (2). Aux travaux qu'exige la culture de la Vigne , se joignent les soins que nous devons prendre contre les Insectes dont plusieurs espèces exercent de grands ravages. Ces Insectes étaient dejà pour la plupart connus des anciens qui les avaient observés et s'étaient occupés des moyens de se préserver de leurs dévasta- tions. Nous devons un excellent travail sur ce sujet à M. le baron Walckenaer qui a démontré avec sa grande érudition , à travers mille difficultés et particulièrement malgré la différence des noms, l'identité des espèces observées par les anciens et par les mo- dernes. C’est par lui que nous savons que les anciens donnaient le nom d’Ips à l'Eumolpus vitis dans l'état de larve, de Volucra au même Coléoptère dans l’état adulte, de Volvox au Rhynchites Bacchus, larve, de Kantharis au même, adulte, de Melolontha au Lethrus cephalotes, de Gaza au Locusta ephippiger, de Thola, hébreu, (Phtéïre) grec, au Coccus vitis, d'Involvulus, latin (Kampe) grec, au Pyralis fasciana, de Convolvulus au Procris ampelophaga, d'Involvulus au Cochylis roserana et au Tortrix heparana. COLÉOPTÈRES. Agriotes pilosus. Fab. — La larve de ce Sternoxe se développe sous Îes écorces cariées. Agrilus deraso-fasciatus. Ziegl. — La larve de ce Sternoxe, sans doute comme l’Agrilus véridis, vit en société entre l'écorce et le (1) Les planches ont dix pieds de long sur un pied d'épaisseur. (2) M. Spach. ( 254) bois, et se creuse des sillons tortueux, dirigés dans tous les sens. Lorsqu'elle a acquis tout son développement , elle se forme dans le bois une petite cavité où elle passe à l’état de nymphe. Enfin lorsqu'elle prend la forme adulte, elle fait à l'écorce une petite ouverture par laquelle elle s'échappe Agrilus viridis. Fab. — Ibid. Tillus tricolor. Fab. — Ce Térédile vit dans les vieux sarments morts. Tillus unifasciatus. Fab. — Ibib. —— elongatus. Fab. — Ibid. Anobium morio. Fab. — La larve de ce Térédile se développe sous l'écorce. Lethrus cephalotes. Fab. — Ce Lamellicorne est fort nuisible aux Vignes de la Hongrie en coupant les bourgeons, qu'il porte ensuite dans son terrier. Anomala vitis. Fab. — La larve de ce Lamellicorne se nourrit des racines. Anomala juli. Fab. — Ibid. Anaspis maculata. Foure. — La larve de cet Hétéromère se développe dans les sarments morts. Rhynchites betuleti. Linn.—Ce Curculionite contourne les feuil- les en cylindre , et pour exécuter cette manœuvre, il les assouplit en rongeant et affaiblissant le pédicule ; ensuite il dépose un œuf dans l'intérieur de ce cylindre. La larve qui en sort se nourrit de la substance de la feuille demi desséchée et y trouve un aliment qui n'est ni trop sec ni trop humide. Lorsque son développement est terminé comme larve , il quitte sa retraite. Cependant les feuilles desséchées pendent de tous côtés, donnent à la vigne un triste aspect, et sa végétation en est quelquefois très-affectée. Un moyen à employer contre les ravages de cet Insecte consiste à cueillir les feuilles contournées de la vigne et a les brüler pour détruire la larve dans son berceau ; on prévient ainsi une ponte vouvelle, Un autre moyen , c'est de recueillir l'Insecte parfait , et on le peut avec facilité, tant il frappe les yeux par ses couleurs brillantes. : 255 Rhynchites Bacchus. Linn.—Il est moins nombreux et fait moins de tort. Rhynchites viridis. Fab. — Même observation. Magdalis violacea. Germar.— Le développement de ce Charen- conite ne m'est pas connu. Apate sex dentata. Fab. — V. Tilleul. —— sinuata. Fab.— Ibid. Phytæcia vitigera. Mulsant. — La larve de ce Longicorne se développe dans l’aubier. Alticoleracea. Linn. — Cette Chrysoméline à l'état d'adulte fait quelquefois de grands ravages. Elle dépose ses œufs sur les jeunes feuilles. Les larves vivent du parenchyme , se déve- loppent et arrivent au terme de leur croissance au mois de juil- let ; à cette époque , les Vignes attaquées semblent avoir subi l’action du feu ; leurs feuilles sont rouges et desséchées; les grap- pes n'ont plus un seul grain intact; la récolte est anéantie. Les Vignes des environs de Montpellier en ont grandement souffert en 1837; mais le remède est à côté du mal. Lorsque ces Insectes enva- hissent uné vigne en grand nombre, dit M. Cazalis-Allot, et que l'on ne s'oppose pas à leurs ravages , ils n'y reparaissent même plus l’année suivante. On voit au contraire qu'ils prolongent leur séjour dans le vignoble où la chasse leur a été faite régulière- ment. [l parait qu’en diminuant leur nombre , on réduit en plus grand nombre celui des parasites qui leur font la guerre. Altica vitis. Chevr. — Même observation. Chrysomela lurida. Fab — V. Saule. Eumolpus vitis. Linn. — La larve de cette Chrysoméline est très-nuisible ; elle coupe les bourgeons et même les grappes lors- qu'elles commencent à paraître. Elle ronge les feuilles nouvelle- ment développées et les crible de trous. I est utile de les recueillir et de les détruire dans l’état adulte. Cryptocephalus corylé. Fab. — V. Cornouiller. - Bromius vitis. Fab. — La larve de cette Chrysoméline ne m'est pas connue. Graptodera vitis. Chevr. — Même observation. 256 ORTHOPTÈRES. Locusta ephippiger. Fab.— Cette Sauterelle cause quelquefois de grands dégâts dans les Vignes. HÉMIPTÈRES. Cicada hœmatodes. Scop.— Ces Hémiptères, si connus par leur chant monotone, se trouvent souvent dans les Vignes du midi de la France. Apbhis vitis. Linn. — V. Cornouiller. Coccus vitis. Fab.— Ce Gallinsecte est remarquable dans l'état adulte de la femelle, par le nid contonneux plus large que son corps sur lequel elle repose et qui est remplie de ses œufs. Ce coton vient d’un suc sécrété par l'insecte, qui se forme en fila- ments. Les treilles qui sont infestées de ces insectes Janguissent ; les sarments dépérissent , meurent, et le raisin se dessèche sans mûrir. La taille est le meilleur moyen de s’en préserver. Thrips urticæ. Linn. — Cet Hémiptère habite la surface infé- rieure des feuilles. LEPIDOPTÈRES. Deilephila elpenor. L. — La chenille de ce Sphingide a les trois premiers segments du corps rétractiles; elle se métamorphose à la surface du sol dans une coque informe composée de débris de végétaux réunis par des fils. Deilephila celerio. Linn. — Ibid. Procris ampelophaga. Hubn. — Cette Zygénide, dans l’état de chenille , est épaisse, ramassée , garnie de petites aigrettes , lente dans sa marche. Pour se transformer, elle se renferme dans une coque soyeuse d'un tissu léger. Elle a fait quelquefois de grands dégâts dans les vignobles du Piémont. Teras reliquana. Zell. — La chenille de cette Platyomide roule les feuilles en cornet et s’en nourrit. OEnophthira ( Pyralis) pilleriana. W.W. — C'est cette funeste Pyrale de la Vigne qui commet quelquefois d'immenses dégâts Fee \ ( 257 } dans les vignobles , et qui a été l’objet d’un grand nombre de tra- vaux pour y porter remède. La femelle, vers le mois d’août , dé- pose ses œufs, par tas d'environ soixante sur la surface supérieure des feuilles. Les chenilles , de suite après leur éclosion au mois de septembre, cherchent un abri pour y passer l'hiver , sous l'écorce du tronc et de préférence dans les fissures et les fentes des vieux échalas , surtout à la partie inférieure. Au retour du printemps , lorsque la nouvelle végétation se développe, les chenilles sortent de leur retraite, se repandent sur le feuillage, enlacent de leurs innombrables fils les bourgeons, les jeunes feuilles et les fleurs à mesure qu'ils se succèdent , de manière à s’en former un réduit inextricable où elles trouvent à la fois un abri et la nourriture , tandis qu'elles portent ainsi la dévastation dans les vignobles. Elles se transforment ensuite et elles parviennent à l’état adulte pour déposer le germe d’une nouvelle génération. Les principaux moyens qui ont été employés contre ces ravages, consistent à détruire les chenilles et les chrysalides en recher- chant leurs nids ; les papillons, en allumant des feux la nuit dans les vignes (1); les œufs, en cueillant les feuilles qui en con- tiennent. C’est ce dernier moyen, proposé surtout par Andouin , qui présente le plus d'avantages. (2) I a été observé aussi que les Vignes munies d’échalas neufs, c’est-à-dire sans fissures sont toujours beaucoup moins attaquées que les vieux. Du reste, les chenilles s’éloignent peu du lieu de leur naissance, et les dégâts qu'elles commettent individuellement sont fort cir- conscrits. L'un des moyens les plus efficaces pour détruire les jeunes che- nilles est de verser sur chaque cep de l’eau bouillante qui, péné- a —— (1) 200 feux produits par autant de plats munis d'huile et de mèche allumée , placés dans une vigne d’un hectare et demi , ont causé la mort à 30,000 pyrales qui en auraient produit 900,000. (2) 12 journées de 20 à 30 travailleurs ont suffi pour recucillir 40,182,000 œufs. 17 ( 258 ) trant dans toutes les fissures de l'écorce, va brûler ces chenilles jusques dans leurs retraites les plus profondes. Ce procédé , ima- giné par M. Raclet, de Lyon, a été employé en grand par M. Gasparin avec un grand succès et à peu de frais. Tortrix heparana. W. W.— V. Lierre. Tinea vitis H. — V. Clématite. La chenille est connue sous le nom de ver rouge, et produit la maladie nommée pourriture ; elle se nourrit de la substance du grain. Tinea vitisella. Bechst. — V. Clématite. Cochylis roserana. Frohl. — La chenille de cette Tinéïde, dans certains cantons, est presque aussi nuisible que celle de la Pyrale. _ CLASSE. MALPIGHINÉES , AarcriGnez., Barll. Les pétales sont insérés sur un disque hypogyne; les étamines en nombre indéfini. Cette classe, abondante en végétaux de la zone équatoriale, se divise en plusieurs familles, parmi lesquelles nous n'avons à nous occuper que des Acérinées et des Hippocastanées. FAMILLE. ACÉRINÉES , Acenwex. De Cand. Le calice est caduc; le péricarpe contient deux fruits ailés. Cette famille n’est formée que des genres Erable et Negundo. G. ERABLE , Acer. Linn. Les pétales sont au nombre de cinq; les étamines, ordinaire- ment de huit; l'ovaire est en deux lobes; le style est court. Les nombreuses espèces d’Erables, soit indigènes, soit d'origine exotique , diffèrent entr’elles par leur grandeur, leur feuillage , leurs fleurs , leurs fruits, leurs propriétés. Tandis que le Sycomore s'élève au rang des grands arbres forestiers , l'Erable jaspé , re- marquable par son écorce rayée de vert et de blanc, atteint à peine (259 ) la hauteur de trois mètres. Les feuilles prennent une multitude de formes qui donnent souvent leurs noms aux espèces ; il y a l'Erable à feuilles oblongues , lobées , flabelliformes , déchiquetées , cris- pées, marbrées , veloutées, d'Obier, de Platane, de Frêne. Les fleurs sont disposées en grappes , ou en thyrse, ou en corymbes, ou en ombelles. Les ailes membraneuses qui accompagnent leurs fruits et destinées à les disséminer sont tour à tour redressées , convergentes, conniventes , cultriformes , oblongues, rétrécies , horizontales , dévariquées , élargies, arquées. Parmi leurs pro- priétés, nous mentionnerons celle de l'Erable à sucre, du nord de l'Amérique. La sève de cet arbre est si riche de cette substance, que l'extraction en est l’objet d’une mdustrie importante, surtout au Canada. La perforation de chaque arbre donne un produit de quatre livres du sucre; trois personnes peuvent exploiter 250 ar- bres qui en donnent mille livres, et une partie de la population s’y emploie. Ce sucre étant raffiné égale celui de Canne. Ce qu'il y à de plus remarquable dans cette industrie, c’est qu'elle existe dans ces régions depuis plus de deux mille ans, suivant les an- ciennes chroniques des Scandinaves qui avaient des relations avec leurs habitants. » ERABLE CHAMPÈTRE , À. campestris. Linn. Les pétales sont linéaires , spatulées, presqu'aussi longs que les élamines. Cet Érable est connu surtout par ses racines dont les nœuds bizarrement contournés représentent mille figures fantastiques qui font rechercher les objets pour lesquels on les emploie. Cette sorte de beauté était déjà connue des Romains qui en faisaient un objet de luxe. C'est à cette espèce, comme à la plus vulgaire, que nous attri- buons les insectes de l'Erable sans autre désignation, quoique nous soyons convaincu que la plupart d’entr'eux vivent sur le plus grand nombre. ( 260 ) COLÉOPTÈRES. Melolontha acris. Ziegler. — Ce Hanneton n'est pas signalé comme aussi nuisible que le commun. Bradybatus creutzeri. — Ce Curculionite vit sur les fleurs. HYMENOPTÈRES. Cynips acerina. Bremi. — La larve de cette espèce produit les galles de l’Erable. HEMIPTÈRES. Capsus roseus. Fab. — Cette Cimicide suce avec sa trompe la sève des feuilles. LEPIDOPTÈRES. Limenitis aceris.Fab.—CePapillon fréquente les allées sombres des grands bois. Il plane avec une grande légèreté; la chenille a le corps garni d’épines rameuses ; la chrysalide est auriculée en avant ; elle s'attache par l'extrémité de l'abdomen et se suspend la tête en bas. Ptilodontis plumigera. Fab. -— V. Tilleul. Cosmia trapezina. Linn., P. P. — V. Prumier. Acronycta aceris. Linn. — V. Tilleul. Pyralis barbalis. Zell. — V. Tamarisc. cicatricalis. Zell. — Id. Geometra tersata. Zell. — V. Berberis. maculata. id. — Ibid. procellata. Id. — Ibid. omicronaria. id. — Ibid. aversata. Id. — Ibid. reversata. Id. — Ibid. Hibernia aceraria. W.W. — Cette Phalénide a les ailes grandes dans le mâle, très-courtes dans la femelle. La chenille n’a pas de tubercules ; elle s’enterre pour se transformer. Penthina aceriana. Parr.— La chenille de cette Platyomide vit { 261 ) entre des feuilles qu’ellé réunit en paquet par des fils, et elle s y métamorphose. Tortrix lœvigana. W. W. — V. Lierre. cerasana. Zell. — Ibid, ——— hybridana. Id. — Ibid. virgaureanea. id. — Ibid. trauniana. Id. — Ibid. ——- minutuna. I. — Ibid. Argyresthia nitidella. Id. — V. Cornouiller. Coléophora badiipennilla. F. R. Zell. — V. Tilleul. Gracillaria hemidactylella. Zell.—Cette Tinéide a les ailes supe- rieures très-longues et très-étroites, et garnies d’une longue fran- ge à l'extrémité du bord interne. La chenille vit en mineuse,, se creusant des galeries entre les deux épidermes des feuilles, et se nourrissant du parenchyme. Lorsqu'elle est parvenue à une cer- taine grandeur, elle quitte ses galeries pour habiter l'extrémité de ces mêmes feuilles qu’elle roule sur elles-mêmes, et où elle se change en chrysalide. Gracillaria rufipennella. Hubn. Zell. — Ibid. Lyonetia sericopeza. Zell. — V. Tilleul. Lithocolletis accrifoliella. Fab. — La chenille de cette Tinéide n'a que quatorze pattes ; elle vit en mineuse comme les Lyonetia. Lithocolletis delitella. Zell. — Ibid. DIPTÈRES. Cecidomyia pictipennis. Meig. — M. Brémi a obtenu cette espèce de galles de l’Erable produites par le Cinips acerina. I présume que la Cécidomyie provient de larves qui s'étaient développées sur les feuilles. Cecidomyia irregularis. —M. Brémi a observé la larve dans le lobe intermédiaire de la feuille qui était irrégulièrement roulé. Teremyia laticornis. Macq. — V. Robinia. ERABLE SYCOMNORE, À. Pseudo-platanus. Linn. Les pétales sont oblongs, obtus. ( 262 ) ; C’est par une singulière usurpation que cet Erable porte le nom de Sycomore, que les anciens donnaient au figuier d'Égypte ou de Pharaon. Cet arbre forestier, si recommandable pour les qua- lités de son bois, présente plusieurs variétés telles que celle à feuilles panachées, altération tellement invétérée qu’elle se reproduit de graines. Indépendamment des insectes qui, mentionnés à l’article de l'Éra- ble champêtre, peuvent vivre également sur le Sycomore, nous citons les suivants qui ont été observés spécialement sur ce der- nier. " COLÉOPTÈRES. Bostrichus dispar. Hellwig. — Observé par M. Nordlingen sur des parties malades du tronc. Clytus arictis. Fab. — Sous l'écorce de branches mortes. . qu HYMEÉNOPTÈRES. LS € Blastophaga sycomori. Gravenh. — Il détruit les bourgeons. DIPTÈRES. Cecidomyia irregularis.— M. Brémi a observe la larve dans.des mamelons situés sur le lobe intermédiaire de la feuille, qui était irrégulièrement roulé. ERABLE PLANE, À. platanoïides, Linn. Les pétales sont ovales, de la longueur des sépales du calice. Cet Erable à feuilles de Platane nourrit le Longicorne. Saperda scalaris. Fab. — Au sortir de l’œuf, la larve entre dans l'écorce et séjourne ensuite entre l’écorce et le bois jusqu'au mo- ment où elle doit se transformer ; elle creuse une galerie dans la face interne de l'écorce. Arrivée au momént de passer à l'état de nymphe, elle s'enfonce dans l'aubier, y pratique une cellule et s'y retire en fermant l'entrée avec des fibres et des °£nures de bois. ( 263 HÉMIPTÈRES. Aphis aceris. Linn. — V. Cornouiller. Chermes aceris. Id. — V. Coccus, Tamarise. FAMILLE. HIPPOCASTANÉES , Hwrocasranez. De Cand. Le calice est caduc ; l'ovaire a trois loges ; le style indivisé. Cette famille qui ne contient que les genres Marronier, Pavia, Macrothyrse et Calothyrse, appartient entièrement, à l'exception du Marronier d'Inde, à l'Amérique septentrionale. G. MARRONIER, Æscuzus. Linn. Le calice est campanulé, renflé, divisé en cinq lobes; les pé- tales sont au nombre de cinq; les étamines de sept; capsule hé- rissée. MARRONIER D'INDE. Æ. hèppocastanum. Linn. Les pétales sont ondulés, pubescents; les filets sont plus longs que les pétales, très-inégaux. La plus belle conquête végétale que l'Europe ait faite sur l'Asie, cet arbre joint à la grandeur du trone, à l'étendue de la cime, la magnificence du feuillage et de la floraison. Il est admirable sur- “tout lorsqu'isolé, planté au bord d’un ruisseau qui humecte ses racines , s’élevant en ample pyramide, inclinant ses vastes bran- ches jusqu'à terre, et formant une large enceinte, impénétrable au vent, à la pluie, aux rayons du soleil, il étale à nos yeux ses élégantes feuilles digitées, et ses gracieuses girandoles blanches et roses (1), l’on se croit transporté dans l'Inde, au milieu de tout l'éclat de son ciel et de sa nature splendide; cependant, tel est le ——_—__——————_——————————————ZZ (1) Cette description est particulièrement celle d’un Marronier d'Inde, àgé de 50 ans, situé dans mon jardin , à Lestrem. Son tronc a 2 mètres et demi de circonférence. ( 264 ) matérialisme qui soumet tout au calcul du produit, qui n’ouvre les yeux qu'à l'utilité la plus positive, que le Marronier d'Inde provoque, comme la tragédie de Corneille ou de Racine, la ques tion dédaigneuse : A quoi bon? Parce que son bois spongieux n’est bon qu'à faire des voliges et des sabots, et que ses marrons ne sont pas de Lyon, et ne conviennent qu'aux chèvres, il faut l’ex- tirper, le proscrire, le renvoyer sur les flancs de l'Himalaya. C'est tout au plus si l’on daigne jeter un regard préoccupé sur celui du jardin des Tuileries, qui inaugure si admirablement chaque prin- temps. On invoque, pour le réhabiliter, tous les prodiges de la chimie ; on veut que par la vertu du carbonate de soude, chaque Marronnier d'Inde présente l'équivalent d’un champ de Pommes de terre (1). Les Insectes du Marronier sont peu nombreux : COLÉOPTÈRES. Anobium striatum. Fab. — V. Vigne. La larve forme dans le bois des galeries larges et tortueuses. Melolontha hippocastani. Fab. — V. Erable. Bruchus scabrosus. Fab. — V. Ciste. LÉPIDOPTÈRES. Thecla æsculi. Hubn. — La chenille de cette Lycénide est en forme de Cloporte, pubescente, aplatie aux deux bouts, à tête rétractile, à pattes très-courtes. La chrysalide est courte, ru- gueuse, à segments immobiles, attachée par la queue. Zeuzera æsculi. Linn.— La chenille de cette Hépialide vit dans l'intérieur du tronc; elle est cylindrique, avec un large écusson corné sur le premier segment. La chrysalide est longue, cylin- (1) J'ai fait avec un plein succès l'expérience indiquée par M. Flandin ; la substance des marrons étant rapée et réduite en pâle est entièrement dégagée de son amertume, au moyen d'un kilogramme de carbonate de soude sur 100 kilogrammes d’eau, après plusieurs lavages. ( 265 | drique, à deux rangées d’épines; elle se transforme dans le bois où elle a vécu. Bryophila algæ. Fab.—La chenille de ce Bombycite est garnie de tubercules. Quoique vivant ordinairement de lichens, elle a été trouvée par M. Aubé dans l'intérieur d'une branche de Mar- ronnier qu’elle creusait de plus en plus, se nourrissant de la subs- tance médullaire. Acronicta aceris. Linn. — V. Tilleul. Geometra hippocastanata. Zell. — V. Berberis. Anysopteryx æscularia. W.W.— La chenille de cette Phalénide douze pattes au lieu de dix, comme les autres arpenteuses. Elle se renferme dans un léger tissu à la superficie de la terre avant de se transformer. Stanella hippocastanaria. H. — La chenille de cette Phalénide n'est pas connue. Fidonia æscularia. Zeller. — La chenille de cette Phalénide est également inconnue. FAMILLE. SAPINDACÉES , SarNpacez. Juss. Le péricarpe a trois coques ; les graines sont dressées. Cette famille, composée d’un grand nombre de genres et d’es- pèces, est entièrement exotique. Elle comprend quelques arbres connus par leurs propriétés utiles : tels sont les Savoniers, qui en Amérique servent à blanchir le linge ; le Cupania, bois de fer, que les habitants de l’île de France emploient dans leurs construc- tions; le Litchi ponceau, que les Chinois proctament le meilleur de leurs fruits ; la seule espèce acclimatée en France est le Koel- reuteria paniculé, arbre originaire de la Chine, remarquable par son port pittoresque, son feuillage élégant, ses larges panicules de jolies fleurs jaunes et ses légères capsules semblables à celles du Baguenaudier. Jen possède un individu âgé de cinquante ans, qui forme avec un Catalpa le groupe le plus harmonieux. Quoiqu'il attire toujours mes regards, je n’ai jamais observé un insecte qui s’y développe. ( 266 | CLASSE. TRICOQUES, Tricoccz. Parti. Les ovaires sont ordinairement au nombre de trois ; les graines ont une enveloppe ; l'embryon est rectiligne. Cette classe considérable, composée de nombreuses familles, ne contient que peu d'arbres européens, tels que les Fusains, les Houx, les Nerpruns et les Buis. Ils ne nourrissent qu'un petit nombre d'Insectes. FAMILLE, CÉLASTRINÉES , CELASTRINEÆ. Brown. Le calice n’est pas adhérent ; ses lobes sont imbriqués ; les éta- mines sont en même nombre que les pétales et alternes avec eux ; les ovules solitaires dressés ; les graines à expansion caronculaire. Le genre Fusain est le seul de cette famille qui contienne des espèces indigènes, et qui soit attaqué par des insectes. G. FUSAIN. Evoxyuus. Linn. Le calice est petit, de quatre à six lobes ; les pétales et etamines sont de quatre à six; les styles sont nuls ou soudés en un; la cap- sule est à trois et cinq loges. Le Fusain d'Europe, seule espèce dont nous ayons à parler se recommande à des titres bien différents : il plait par ses Jolies graines en bonnet carré ; il sert l’art terrible de la guerre qui fait de son charbon la meilleure poudre à canon ; il fournit au peintre inspiré le fusain qui traduit sur la toile la première pensée du gé- nie. Plus humble chez les Grecs et les Romains, ainsi que l’'indi- que son nom (1), son bois se façonnait en fuseaux pour les femmes. Le Fusain ne nourrit qu'un petit nombre d'insectes. (4) Le nom grec de Fusain était atractos qui se traduit en latin par fusum , d'où le nom français est dérive. (Dict. étymolog. de Ménage.) ( 267 ) COLÉOPTÈRES. Cistela murina. Fab. — V. Tilleul. HÉMIPTÈRES. Aphis evonymi. Fab. — V. Cornouiller. Chermes evonymi. Linn. — V. Vigne. LÉPIDOPTÈRES. Geometra ocellata. Zell. — V. Berberis. Phycis (Nephropteryx. Zell) angustella. H. — V.Groseiller. La chenille vit dans la graine Yponomeuta evonymella. H. — Les chenilles sont glabres, atté- nuées aux deux extrémités. Elles vivent en sociétés nombreuses, sous une toile commune, et s’y changent en chrysalide, chacune dans une coque séparée. FAMILLE. RHAMNÉES, RHamneæ. Brown. Le calice n’est pas adhérent; les étamines sont antépositives, en mème nombre que les pétales. Cette famille se compose des genres Jujubier, Paliure, Nerprun, Céanothe, Phylica et plusieurs autres. Le premier présente une antique célébrité végétale, le Lotos des Lotophages, Jujubier lotus, dont ce peuple africain se nourrissait. Ce n'est que sur les Nerpruns que des Insectes ont été observés. G. NERPRUN. Raamnus. Linn. Les étamines sont courtes ; l'ovaire est inadhérent, à trois ou quatre loges ; les trois ou quatre styles soudés. Ce genre contient un assez grand nombre d'espèces européennes dont les plus connues sont le Nerprun purgatif, la Bourdaine, et l'Alaterne. { 268 | NerPruN BourGÈNE. R. Frangula. Linn. Les pédicelles des fleurs sont de la longueur des calices. Ce Nerprun qui est la Bourdaine si commune dans nos bois, partage avec le Fusain la propriété de fournir le meilleur charbon pour la fabrication de la poudre à canon. C’est à cette espèce, comme à la plus vulgaire, que nous attri- buons la plupart des Insectes qui attaquent les Nerpruns, quoique nous soyons persuadé qu'ils vivent également sur les autres, COLÉOPTÈRES. Otiorhynchus rhamni. Sturm.— La larve de ce Curculionite vit à couvert sous l'écorce. Erirhinus Scirpi. Fab. — V. Peuplier. HÉMIPTÈRES. Aphis rhamni. Fons col. — V. Cornouiller. LÉPIDOPTÈRES. Rhodocera rhamni. Linn. — La chenille de ce papillon est ridée transversalement, convexe en dessus, plate en dessous. Les chry- salides sont pointues aux deux bouts, et attachées à l'extrémité. Lycæna argus. Linn. — V. Baguenaudier. ——— argiolus. Id. — Ibid. Acidalia vetulata. Zell. — V. Groseiller. —— certata. Id. — Ibid. Gracillaria quadrupleta. Zell. — V. Erable NerPRUN PuRGATIF. R. Catharticus. Linn. Les pédicelles des fleurs sont plus longs que les calices. Cette espèce est remarquable par ses vertus médicinales. Ses fruits, son écorce , toute sa substance en sont tellement impré- gnés , que lorsque l'on y greffe des Pruniers et des Cerisiers, leurs fruits contractent les mêmes propriétés. Nous connaissons peu d'insectes qui vivent sur ce Nerprun. ( 269 | COLÉOPTÈRES. Leptura rufipes. Linn. — V, Hêtre. LÉPIDOPTÈRES. Acidalia dubitella. Zell. — V. Groseiller. Lyonetia (ceroclastis. Zell.) Frangultella. Goeze. — V. Tilleul. FAMILLE. AQUIFOLI!ACÉES , Aourouaceæ. Baril. Le calice n’est pas adhérent; ses lobes sont imbriqués; les étamines hypogynes ; les ovules solitaires , suspendus ; les graines sans expansion caronculaire. Les arbres de cette famille sont les Houx, les Prinos et les Némo- panthes. A l'exception du Houx commun. toutes les espèces sont de l'Amérique. G. HOUX, Iex. Linn. Le calice a quatre ou cinq dents; la corolle est de quatre ou cinq parties ; les ovaires à quatre ou cinq loges. Ce genre ne comprend qu'une espèce européenne, mais un assez grand nombre d’Américaines parmi lesquelles nous citerons le Houx, Thé du Paraguay, dont les Créoles font un si grand usage, en lui attribuant des vertus innombrables. Le Houx commun de nos forêts est remarquable par la beauté de son feuillage persistant, de ses baies écarlates ; il décore nos bosquets d’hiver de ses nombreuses variétés. Ses feuilles brillantes attirent notre main , mais les épines qui les hérissent la repous- sent. Aussi le Houx est il l'emblème de l'esprit caustique qui brille et blesse également. Les insectes qui vivent sur le Houx sont : ( 270 } COLÉOPTÈRES. Brachyderes ilicis. Dahl. — La larve de ce Curculionite vit à couvert sous l'écorce. Sitona regensteinensis. Sch. — Même observation. tibialis. Herbst. — Ibid. —— retusus. Marsh. — Ibid. Orchestes ilicis. Fab. — Ibid. Cossonus ilicis. Mac. Leay. — Ibid. Cryptocephalus ilicis. Oliv. — V. Cornouiller. Stylosomus ilicicola.Suffrian.—Ses mœurs ne sont pas connues LÉPIDOPTÈRES. Trichiura ilicis. Rambur. — La chenille de cette Bombycite est marquée de bandes veloutées, entremêlées de longs poils, elle vit en société dans son jeune âge, et s’isole en grandissant ; elle se file une coque très-dure avant de se tranformer. Orthosia ilicis. Guenée. — La chenille de cette Noctuélide est veloutée ; elle se tient cachée pendant le jour, et, avant de se métamorphoser , elle se renferme dans une coque peu consistante, et enfoncée dans la terre. Orthosia ruticilla. Esp. — Ibid. Boarmia ilicicola. Zell. — V. Tulipier. Elachista ilicifoliella. Zell. —Cette Tinéïde etses congénères sont les plus petits des Lépidoptères , et ils sont en même temps parés des couleurs les plus brillantes et de l'éclat des métaux les plus précieux. Ce sont les colibris et les oiseaux-mouches des Lépi- doptères. Leurs chenilles sont mineuses; elles se creusent des galeries en rongeant le parenchyme sans toucher aux deux épi- dermes entre lesquels elles se transforment. DIPTÈRES. Phytomyza aquifolia. Gouraut. — La larve de cette petite Muscide mine également les feuilles dans lesquelles elle creuse une galerie assez vaste, irrégulière, sous l’épiderme supérieur. (271 ) Parvenue à toute sa grandeur, elle a Ja précaution de percer cet épiderme dur et épais d’un petit trou rond, et se change en nym- phe la tête placée à l'entrée du trou. FAMILLE. EUPHORBIACÉES , EurnorgiAcEx. Juss. Les fleurs sont unisexuelles: les étamines subhypogynes ; la capsule a trois coques. Cette nombreuse famille, qui se divise en plusieurs tribus et en une multitude de genres, ne contient qu'un seul arbre indigène, le Buis. La plupart de ces végétaux appartiennent à la zone équa- toriale. Nous leur devons quelques substances utiles , telles que le Caout-Choue, le Ricin , le Tapioca , le Manioc. G. BUIS, Buxus. Linn. Le calice présente quatre folioles inégales ; les étamines ont quatre filets saillants ; l'ovaire est glabre à trois styles. Le Buis commun, dont le bois est le plus dur , le plus dense et le plus pesant des bois de l'Europe, est en même temps très-lent à croître et il jouit d'une grande longévité. On a compté 240 couches annuelles sur une tranche d'environ 45 centimètres de cir- conférence. Quel devait être l'âge du Buis que Haller a vu près de Genève et dont le tronc avait près de deux mètres de circonfé- rence ? (1) Cette lente végétation et la persistance du feuillage a longtemps fait adopter le Buis, comme l'If , pour la décoration des jardins. Docile à prendre toutes les formes, on en faisait de fines bordures pour dessiner les boulingrins ; on le torturait pour lui donner toutes les formes que la fantaisie suggérait; on pous- sait ce genre de luxe horticole jusqu’à étaler cet arbre en vasteslam- bris verts sur lesquels le ciseau taillait en relief de grands sujets D (1) En admettant que les Couches annuelles de ce tronc eussent la même largeur que celles de la tranche » il devait y en avoir environ mille, ((272: ) de peinture dont il fallait chaque printemps reproduire la savante exécution. Nos ancêtres avaient emprunté ce mauvais goût des Romains qui, suivant Pline, se servaient du Buis pour kistorier en verdure. Heureux les arbres d'aujourd'hui. Nous ne leur de- mandons d'autre beauté que celle qu’ils acquièrent naturellement en croissant dans toute leur force et leur liberté, chacun paré de sa grâce native, comme de ses fleurs et de ses fruits. Les anciens employaient le bois de cet arbre comme font les modernes, pour tous les usages qui exigent la dureté, la solidité. Chez les Grecs, on en faisait des cassettes, des boîtes, Pyis , qui portaient son nom ; les bergers de Théocrite façonnaient leurs flûtes mélodieuses du buis que leur fournissaient le Parnasse et l'Olympe. Nous ne connaissons que peu d'insectes qui vivent sur le Buis. COLÉOPTÈRES. Malthinus chelifer. Kies. — M. Kiesenwetter a pris ce Malaco- derme en battant les Buis sur le Mont-Serrat en Catalogne. Peritelus adusticornis. Kies. — Ce Curculionite a été trouvé en grand nombre par M. Kiesenwetter sur les Buis au Mont-Serrat. HÉMIPTÈRES. Psylla buxi. Linn. — La larve de ce Gallinsecte a l’instinct de sucer les jeunes feuilles opposées et de les déterminer ainsi à s’arrondir en deux demi-globes creux qui se réunissent et se fer- ment hermétiquement, servant de berceau à une nombreuse génération. Aphis buxi. Fab. — V. Cornouiller. Coccus buxi , Fons Col. — V. Tamarisc. LÉPIDOPTÈRES Cerastis buxi. B. — La chenille de cette Noctuélite est épaisse, veloutée , et marbrée ; elle se tient cachée sous les feuilles et s’en- ferme dans une coque avant de passer à l’état de chrysalide. ( 273 DIPTÈRES Scatopse buxi. Linn. — Cette Tipulaire vit dans l'épaisseur des buissons. CLASSE. TÉRÉBINTHINEES, MEREBINTHINEÆ, Bartling. : Les pétales et étamines sont en nombre défini ; l'embryon est rectiligne ou curviligne. Cette classe considérable se divise en familles nombreuses, la plupart composées de végétaux exotiques dont plusieurs sont ac- climatés en Europe. Tels sont le Noyer, l’Ailante, le Ptelea, l'Oran- ger. Le premier et le dernier nourrissent seuls des Insectes qui ont été observés. FAMILLE: AURANTIACÉES, AuRANTIACEZÆ. Juss. Les pétales sont hypogvynes, sans onglets ; les ovaires, styles et stigmates réunis. Cette famille est composée non-seulement des Orangers et des Citronniers, mais encore de quelques autres genres d'Arbres de l'Inde tels que les Atalantia , les Triphasia, les Feronia, les Egle, dont plusieurs produisent également des fruits excellents. G. CITRONNIER. Cirrus. Linn. Le calice est cupuliforme , à cinq divisions; les anthères sont _oblongs ; le style cylindrique. Ce genre comprend non-seulement les Citronniers, mais encore les Orangers, les Limoniers, les Cédratiers, les Bigaradiers. C'est- à-dire les Arbres qui réunissent le plus de qualités pour charmer nos sens. La beauté de leurs fruits, la délicieuse suavité de leurs parfums, la saveur exquise de leurs sucs les mettent au premier rang des végétaux qui nous procurent des jouissances. Aussi ont-ils été cultivés depuis une haute antiquité dans toute la zone méri- dionale de l’ancien monde. Originaires de l'Asie orientale, suivant 18 (274) l'opinion la plus accréditée, de l'Afrique et de l'Atlantique selon, quelques auteurs qui voient dans les oranges les célèbres pommes du jardin des Hespérides, ils se sont acclimatés peu à peu sur tout le littoral de la Méditerranée. Dans les vallées de la Pales- tine, les Cédratiers (4) étaient connus dès le temps de Moïse qui, selon l'historien Josephe, avait prescrit l'usage d'en entrelacer des branches aux feuilles du Palmiste et du Saule, pour former les thyrses de la fête des tabernacles. Les Grecs du temps de Théophraste, et les Romains ne connaissaient que les Citronniers, qui provenaient de la Médie , et dont les propriétés salutaires sont exprimées dans ces vers de Virgile : . -..... Animos et olentia Medi Ora foventillo, et senibus medicantur anhilis. Les Arabes paraissent avoir introduit avec eux en Europe les Limoniers si répandus aujourd'hui en Italie, et les Bigaradiers dont le premier individu connu en France date de 1420, et existe encore dans l’orangerie de Versailles sous le nom de Grand-Con- nétable. Un autre, que l’on prétend avoir été planté par saint Dominique, vers l'an 1200, ombrage la cour du couvent de sainte Sabine, à Rome. Enfin, les Orangers ont été apportés de l'Inde par les Portugais comme trophées de leurs glorieuses conquêtes ; nous devons à Vasco de Gama, à Juan de Castro, à saint Fran- cois Xavier les premiers plants des admirables forêts des Cana- ries, de l’Andalousie, d'Hières , de Gênes , de Gaëte, dans les- quelles tous nos sens sont à la fois enivrés de délices. Au feuillage toujours vert et lustré, se joignent simultanément les fleurs et les fruits avec tous leurs enchantements et une abondance prodi- gieuse (2), suffisante pour faire participer le reste de l’Europe aux jouissances qu'ils procurent. (1) Sous le nom de hadar. (2) Un pari ayant été fait au sujet d’un Oranger très-renommé des en- virons de Massa , en Italie, on en compta les fruits dont le nombre s'éleva à près de 30,000. (Revue britannique, septembre 1849, p. 65.) (275 | La zone septentrionale est réduite à ne cultiver les Orangers que dans les serres , à quelques exceptions près qui donnent peu d'espoir de les acclimater. Dans le midi du Devonshire, l'une des localités les moins froides de l'Angleterre, on voit, dans quel- ques jardins, des Orangers qui ont résisté en plein air depuis plus d’un siècle aux hivers les plus rudes de ce pays (4); à Lille, département du Nord, dans les jardins de l’ancienne Intendance, des Orangers en espalier ont existé depuis 1720 jusqu'en 1772, garantis seulement par des paillassons en hiver. Si nous ne possédons ces beaux arbres que sous l'abri des oran- geries, s'ils ne nous donnent que des fruits trop acides, amplement suppléés par ceux de Malteet de Portugal, nous jouissons complé- tement de leurs charmantes fleurs qui par leur pure blancheur et leur parfum exquis sont l'emblème de l'innocence et de la vertu, et, à ce titre, ont le privilége de former la couronne et le bouquet des jeunes fiancées qui vont à l'autel. Ces beaux arbres ne sont attaqués que par un petit nombre d'insectes. COLÉOPTÈRES. Otiorhynchus niger.Germ.-— Ce Curculionite ronge le feuillage pendant la nuit et passe le jour au pied de l'arbre. HÉMIPTÈRES. Aphis aurantü. Fons Col. — V. Cornouiller. Coceus adonidum. Linn.— V.Tamarisce. Cette Cochenille est fort nuisible à l'Oranger, elle attire sur ces arbres les Fourmies avides de la liqueur sucrée qu'il élabore, et dont elles savent provoquer l'émission par le mouvement rapide de leurs antennes. Kermes hesperidum. Linn. — V. Vigne. LÉPIDOPTÈRES. Argynnis euphrosyne.Linn.—Ce papillon diurne qui ne vit que (2) M. Spach , suites à Buffon , (om. 2. { 276) dans les bois et dont le vol est très-rapide et soutenu , provient d'une chenille garnie d’épines velues dont deux seulement sur le premier segment plus longues et toujours inclinées vérs la tête. La chrysalide anguleuse est garnie sur le dos de deux rangées de tubercules, et attachée par la queue. Hesperia actæon. Linn.— Ce papillon a les jambes postérieures armées de deux paires d’ergots et les ailes supérieures sont à demi relevées dans le repos. La chenille a la tête un peu fendue; elle se transforme dans une feuille roulée ou repliée sur elle-mé- me; la chrysalide est enveloppée dans un réseau très-clair. Attacus carpini. Bork. — Les chenilles decette Bombycide sont glabres et garnies de tubercules pilifères ; elles vivent en société dans leur jeune âge et se séparent en grandissant, elles se trans- forment dans des coques d’un tissu très-solide, feutré,; en forme de poire. FAMILLE. CASSUVIÉES , Cassuvxæ, Rob. Br. Les pétales et étamines sont périgynes; les styles au nombre d'un à cinq. Cette famille, composée de plusieurs sections et d'un assez grand nombre de genres (4) ne comprend que très-peu d'espèces européennes. Cependant elle présente de l'intérêt surtout par les substances qu'elle produit. Ses propriétés offrent de singuliers disparates entre les différentes espèces : leurs sucs propres sont tantôt laiteux et caustiques, comme dans le Sumac dont les Chi- nois retirent l’un de leur vernis, tantôt résineux comme dans les Lentisques qui fournissent le mastic et la térébenthine, de Chio, que les dames grecques et musulmanes ont presque tou- jours dans la bouche pour entretenir les dents dans leur blan- (1) Les sections sont les Anacardiées , les Spondiacées et les sumachi- nées ; les principaux genres sont : les Anacardium, Mangifera, Pislacia, Spondias, Rhus, Mauria. (9271) cheur, pour rendre l’haleine agréable et pour exciter l'appétit. D'autres ont des écorces astringentes et fébrifuges. Les Man- guiers et les Mombins, offrent des pulpes à chair succulente d’une saveur délicieuse et célèbres par leurs qualités bienfaisantes. Enfin plusieurs Anacardiers présentent un aliment rafraîchissant très-recherché dans les contrées équatoriales. G. SUMAC, raus. Linn. Les fleurs sont le plus souvent polygames par avortement ; les pétales au nombre de cinq. Des nombreuses espèces de ce genre, nous n'avons à parler que du Sumac des corroyeurs, qui est indigène dans le midi de la France. Dès le temps de Dioscoride , il servait à tanner les cuirs ; il est employé dans la fabrication des maroquins. Les fruits en sont mangés par les Orientaux, comme les Capres. Le seul Insecte observé sur ce Sumac est : COLÉOPTÈRE. Clythra guerini. Bassi. — Cette Chrysoméline se plait sur cet’ arbrisseau en Sicile; la larve porte avec elle un fourreau de ma- üère coriace, en forme de cône. G. PISTACHIER , risracra. Linn. Les fleurs sont dioïques apétales. Ce genre comprend le Lentisque, le Térébinthe et le Pistachier proprement dit, tous trois appartenant au bassin de la Méditer- ranée. PISTACHIER LENTISQUE , P. lentiscus. Linn. Les pétioles sont ailés, carénés ; les drupes lisses, globuleux. C'est de cette espèce que l’on retire le mastic de Chio , en fai- sant des incisions au tronc et aux principales branches. Les Insectes observés sur le Lentisque sont : COLÉOPTERES. Nyphona saperdoïdes. Ziegl. — V. Grenadier. Lachnaia lentisci. Fab. — V. Coudrier. (278 ) LÉPIDOPTÈRES. Eurhipia adulatrix. Hubn.—La chenille de cette Noctuélite est glabre, atténuée postérieurement. Elle fait son cocon de terre, peu solide, et s'enfonce sous la terre. Cependant, à l'époque des mues, elle tapisse de soie la surface inférieure des feuilles pour s'y retenir. blandiatrix. B. D. — ibid. Ophiodes thyrrhæa. L. — V. Chêne. DIPTÈRES. Laphria maroccana. Meig.— M. Lucas a obtenu cet Asilique de larves qui s'étaient développées dans l'intérieur d'une büche de Lentisque, en Algérie. PISTACHIER TÉRÉBINTHE, P. terebinthus. Linn. Les pétioles sont marginées ; les drupes globuleux, rugueux. La térébenthine de Chio qui provieut de cet arbre était en usage, et ses propriétés excitantes étaient reconnues dès Le temps d'Hippocrate. Insectes observés sur le Tér chine HÉMIPTÈRES. Aphis terebinthi. Reaum.— V.Cornouiller. Ce Puceron produit les galles en croissant signalées par Réaumur. LÉPIDOPTÈRES. Eurhipia adulatrix. Hubn. —V. Lentisque. blandiatrix. B. D. — Ibid. PISTAGHIER CULTIVÉ. P. vera. Linn. Les feuilles ont trois ou cinq folioles ; les drupes sont ovoïdes. Cet arbre est originaire de Syrie. Ses fruits, maintenant si con- nus en Europe, ont été apportés pour la première fois à Rome par Vitellius. ( 279 Les seuls Insectes observés sur le Pistachier sont : HÉMIPTÈRE. Aphis pistaciæ. Fab. — V. Cornouiller. LÉPIDOPTÈRES. Eurhipia adulatrix. Hubn. — V. Lentisque. ——— blandiatrix. B. D. — V. Ibid. FAMILLE. JUGLANDÉES , Juczannix. De Cand. Les fleurs sont unisexuelles, apétales ; les mâles en chatons ; les femelles subsolitaires ; l'ovaire est adhérent au calice. Cette famille, outre le genre Noyer qui en est le type, en com- prend plusieurs autres, composés de grands arbres de l'Amérique septentrionale d'Asie et de Java. Le Noyer, commun est seul indigène. G. NOYER , suGLaxs. Linn. Fleurs mâles : Le chaton est imbriqué; le calice squamiforme ; les étamines sont en nombre indéterminé. Femelles : la corolle a quatre ou cinq divisions; les stigmates sont subsessiles, arquées. Ce genre, depuis que Nuttal en a distrait deux autres, les Carya etles Pterocarya , ne comprend plus que le Noyer commun, avec ses nombreuses variétes et deux espèces d'Amérique. Nous n'avons à nous occuper que du premier. Noyer COMMEN, J. regia. Linn. Les chatons sont denses ; les fleurs femelles sont solitaires, ou géminées , ou ternées. Peu de végétaux sont aussi dignes d'intérêt que le Noyer. Il réunit les propriétés que nous recherchons dans les arbres fores- tiers et dans les arbres fruitiers. Par les dimensions qu'il atteint et par les qualités de son bois, il est au rang des plus utiles à la ( 280 } menuiserie, au charronnage. Il était, avant la découverte de l’Amé- rique, le plus recherché pour l’ébénisterie. Sous le rapport de ses fruits, la noix nous intéresse dès notre enfance, en excitant notre friandise, en servant à nos jeux. Ovide y a trouvé le sujet d’un petit poème charmant, dans lequel il l’a célébrée avec toute l’'ardeur d'une verve juvénile, Dans la jeunesse, ce fruit jouit d'une grande popularité; les Romains l'employaient dans les cérémonies nuptiales. Le jeune époux semait des noix en signe d’abondance quand sa femme lui était amenée. Récemment en- core , elles figuraient dans la collation qui devait être donnée à la rosière de Salency ; c'était un emblême, dit M. de Berneaud, de la simplicité de mœurs qu’elle devait garder toute sa vie. C’est l'attrait pour les noix qui a déterminé la prise d'Amiens en 1597, lorsque des sacs déliés et répandus excitèrent l’avidité et détour. nérent la vigilance des gardiens de la ville. Enfin, en tous temps, nous aimons les cerneaux, les noix fraîches, les noix sèches, sans Rs l'huile de noix, à défaut d'huile d'olive. Aussi , le Noyer, originaire de l'Asie, a-t-il été une des plus belles FRE nie de la Grèce, peut-être un des trophées des vic- toires d’Alexandre-le-Grand (1); les Grecs s'en émerveillaient, et en en comparant le fruit à celui du Chêne, ils le nommèrent Dios Balanos, Gland des Dieux, ce qui fut traduit chez les Romains par Jovis glans, Juglans. Nous aimons à voir le Noyer bordant les grands chemins, ou occupant une large place dans les vergers près des autres arbres fruitiers qu'il domine par sa grandeur comme par la valeur de son produit (2). Le Noyer n'est attaquée que par un petit nombre d'Insectes. (1) L'introduction du Noyer paraît remonter au temps où Théophraste, disciple d’Aristote, écrivait son histoire des plantes , 314 ans avant l'ère vulgaire. (2) Nous avons connaissance d'un Noyer qui, sans être très-grand, pro- duit quelques fois 40,000 noix. COLÉOPTÈRES. Mycetochara barbata. Fab. — V. Saule. Pyrochroa coccinea. Fab. — Les larves de cet Hétéromère se développent sous l'écorce. Au printemps, on en trouve qui sont parvenues au terme de Jeur croissance et d’autres qui n’en ont encore atteint que la moitié, d'où l'on peut conclure qu’elles ne se métamorphosent qu'au bout de trois ans. Elles sont aplaties, la tête est munie de fortes mandibules, les deuxième, troisième et quatrième segments portent les pattes; le treizième, ou dernier, est terminé par deux épinés, recourbées en dessus. La nymphe, placée dans la vermoulure, s'y tient la tête en haut, et ne reste que quinze jours dans cet état; elle est à découvert sous l'écorce et laisse apercevoir les organes de l'Insecte parfait. Balaninus nucum. Linn. — La larve de ce Curculionite se nourrit de là noix. Bostrichus bicolor. Hubn. — V. Clematite. Synchita juglandis. Hellw. — La larve de ce Xylophage se dé veloppe sous l'écorce. HÉMIPTÈRES. Aphis juglandis. Frisch. — V. Cornouiller. Les cornicules sont nulles. LÉPIDOPTÈRES. Attacus pyri. Linn. — V. Oranger. Dasychira pudibunda. Linn. — Cette Liparide dont les pattes antérieures sont étendues en avant dans lé repos, a sa chenille garnie de brosses et munie de deux vésicules rétractiles vers l’ex- trémité du dos; elle se transforme dans une coque d’un tissu lâche, entremêlé de poils. Acronycta aceris. Linn. — V. Tilleul. Amphypyra pyramidea. Linn. — V. Chèvrefeuille. DIPTÈRES. Clenophora pectinicornis. Linn, — La larve de cette Tipulaire se developpe dans le hois en partie décomposé du Noyer. Elle (282 ) ronge ce bois de mamière à y former des tuyaux dans lesquels elle passe à l’état de nymphe. Siphonella nucis. Perris. — Cette petite Oscinide, suivant l'ob- servation de M. Perris, s'introduit dans une noix par un trou d'où est sorti un autre insecte (probablement le Balaninus nucum) ; elle y dépose ses œufs; les larves vivent du fruit et s'y dévelop- pent. Leur organisation présente une particularité : Sur le bord antérieur du deuxième segment se trouvent deux appendices laté- raux et assez singuliers ; 1ls sont aplatis, blancs et charnus comme le reste du corps; ils présentent la forme d’une ellipse un peu arrondie et divisée en six lobes étroits, profonds et spatulés ; il y en a trois du côté intérieur, un au sommet et deux extérieurement. Dans l'intérieur de l'ellipse, on aperçoit cinq points diaphanes. En plongeant les larves dans l’eau, pour les rendre translucides, M. Perris a reconnu que des trachées venaient aboutir à ces organes et qu'ils étaient des stygmates d'une forme toute particu- lère ; peut-être même les cinq points diaphanes ne sont-ils que les ouvertures par où l'air s’introduit. CLASSE. CAELCO@PEIWMTES, CaLorzuvTÆ. Les pétales et étamines sont ordinairement périgynes ; les ovai- res le plus souvent solitaires ; les styles libres, en même nombre que les ovaires. Cette belle classe, ainsi que l'exprime son nom, présente plus qu'aucune autre le charme des fleurs, de leurs formes les plus gracieuses, de leurs couleurs les plus brillantes, de leurs parfums les plus suaves ; elle comprend les Rosacées qui tiennent le sceptre de la beauté. A cette qualité supérieure, les Calophytes joignent la bonté de leurs produits ; les Amygdalées nous donnent les fruits à noyaux, les Pomacées les fruits à pépins, ces deux sources de Jouissances alimentaires; de plus, c'est aux Papilonacées que nous devons nos meilleures productions légumineuses. Enfin, les Mimosees, les Cisalpinées nous fournissent des substances utiles, (283) telles que le cachou, la gomme arabique, la casse, le sené, le bois de Campèche. Mais c’est toujours au charme de la floraison que les Calophytes doivent leur principal caractère. Ils pénètrent jus- ques dans les sombres forêts de Pins, de Chênes, de Hètres, privées de fleurs ; le Mérisier, le Sorbier, l’Alisier les égaient par les leurs, et le simple buisson le plus fleuri est l'aimable Aubépine. Toutes ces fleurs offrent leur miel aux insectes armés de trompe. Les essaims de Papillons, de Mouches, d'Abeilles, viennent y bu- tiner en bourdonnant. C’est un aliment préparé pour tous indis- ünctement. Il n’en est pas de même des autres parties de la végétation de chaque espèce, qui servent de berceau et de subsis- tance à d’autres insectes distincts. Nous en aurons un grand nom- bre à signaler, parmi lesquels il y en a de très-nuisibles, particu- lièrement à nos fruits, et auxquels nous devons faire une guerre incessante. FAMILLE. SPIRÉACÉES , Srirraceæ. Loisel. Les ovaires sont en nombre défini, inadhérents, à une seule série el à peu d'ovules. Presque tous les membres de cette famille ont mérité les hon- neurs de la culture. Le genre nombreux des Spirées, les Corchorus, Kerria\, les Gilleonia(1), les Lyndleja et quelques autresdécorent nos jardins de leurs jolies fleurs, et quelques espèces se recom- mandent par des propriétés utiles (2). (1) Spirea trifoliala , Linn. (2) Le Spirea salicifolia tient lieu de thé dans quelques contrées ; on mange en Russie les feuilles et les bourgeons du S. Æamtschatica ; on fait du pain avec les tubercules du $. filipendula ; on emploie comme vulné- raires les fleurs du $. ulmaria , les feuilles du {omentosa, comme émétique, les racines du {rifoliata ; pour tanner les cuirs , on se sert de l'americana; on teint en jaune avec les branches de l’opulifotia, en noir avec les feuilles de l'ulmaria. (284) G. SPIRÉE. SriREa. Linn. Le tube calicinal est campanulé ; le limbe est à lobes etalés. Ce genre est très-remarquable par l’uniformité avec laquelle il présente ses caractères essentiels, malgré la grande diversité qui règne dans toutes les parties de la végétation. Tantôt herbacés, tantôt ligneux, les Spirées modifient la disposition de leurs fleurs dans les formes les plus capricieuses et souvent les plus élégantes. Ce sont d'amples bouquets, de légères corymbes , de larges om- belles, d'épaisses panicules, de longues guirlandes. de gracieuses girandoles ; ici, la Barbe de Chèvre s'étale en touffes floconneu- ses ; là, la Reine des prés domine majestueusement les plantes d’alentour. Le feuillage n'est pas moins varié, et il affecte particulièrement la ressemblance avec celui d’autres végétaux ; ainsi nous culti- vons les Spirées à feuilles d'Orme, de Bouleau, de Saule, d'Obier, de Sorbier, de Charme, de Prunier, d’Airelle, de Germandrée, de Filipendule, de Pigamon, de Millepertuis, et quelques autres. Parmi les Spirées ligneuses, celle à feuilles de Saule est la seule sur laquelle nous ayons obssrvé des insectes. SPIRÉE À FEUILLES DE SAULE. S. Salicifolia. Linn. Les folioles du calice sont ovales, pointues ; les fleurs disposées en panicule. Cette espèce, origmaire de l'Europe orientale, et commune dans tous les jardins , est la seule sur laquelle des insectes aient été observés. COLÉOPTÈRES Asclera cærulea. Linn. -— V. Aubépine. Anoncodes ustulata. Fab.— Ceite OEdémérite vit sur les fleurs. HEMIPTEÈRES. Capsus spinolæ. Meyer — V. Erable. FAMILLE ROSACÉES , Rosacez. Parti. Le tube calicinal est urcéolé ; le limbe foliacé ; le disque charnu ; les ovaires sont très-nombreux ; les étamines en nombre indéter- miné, plurisériées. Cette famille n'est composée que des genres Rosier et Lowea dont le dernier ne contient qu'une espèce qui est asiatique. G. ROSIER. Rosa. Linn. Les feuilles ont de trois à sept folioles. La Rose, type et emblème de la beauté, règne sur toutes les fleurs par la forme, la couleur, le parfum ; tout en elle est gra- cieux, brillant, suave. Tout ce que la délicatesse la plus raffinée peut concevoir de plus exquis, se trouve dans cette production charmante. Aussi, dans tous les temps, dans tous les lieux(1), la Rose est exaltée au-dessus de toutes les autres fleurs. La poésie surtout la célèbre, la glorifie, sans qu'elle perde jamais rien de son prestige. C’est toujours la Rose de Jéricho, chère aux filles de Juda; la Rose des fables persanes, dont les amours avec le rossi- gnol unissent dans la plus haute perfection les enchantements des sons, des couleurs, des parfums. C’est toujours la Rose de la Mytho- logie grecque ; sa corolle est teinte du sang d’Adonis, ou de Vénus elle-même , dont le pied divin, piqué par une épine, laissa couler quelques gouttes. Ce sont encore les Roses de Pæstum qui se tres- saient en guirlandes, en couronnes pour les soupers d'Horace ou de Lucullus; celles qui honorent chaque année la rosière de Sa- lency ; celles que nous effeuillons pieusement sur le passage du saint Sacrement. Emblème de la beauté matérielle et morale, la Rose l’est aussi du plaisir ; elle le représente dans tout ce qu'il offre, non seule- in (1) La Rose appartient à tout l'hémisphère septentrional. ( 286) ment de plus enivrant, mais encore de plus délicat, de plus pur ; elle en est l’image surtout, hélas, par son éclat éphémère; elle personnifie le temps dans sa rapidité, et fleurit mélancoliquement sur la tombe d’Anna qui comme elle a brillé un instant. Et rose, elle a vécu ce que vivent les roses, L'espace d’un matin. Enfin, elle exprime une pensée sévèrement salutaire, lorsque recélant dans son sein une Cantharide brillante mais corrosive, elle représente le plaisir criminel en proie au ver rongeur du remords. Un grand nombre d’autres insectes ont été observés, vivant soit sur l'Eglantier, soit sur le Rosier à cent feuilles et sans doute indifféremment sur toutes les espèces et variétés. COLÉOPTÈRES. Anomala Julii. Fab. —V. Vigne. Anisoplia horticola. Fab. — Ce Lamellicorne se nourrit de feuilles. Sa larve se développe dans la terre comme celle du Han- neton. Anisoplia campestris. Lat. — Ibid. Gnorimus nobilis. Fab. — Ce Lamellicorne vit sur les fleurs. Trichius fasciatus. Fab. — Même observation. gallicus. Dej. — Ibid. Cetonia aurata. Fab. — Ibid. Clitus arietis. Linn. — V. Sycomore. Cryptocephalus labiatus. Linn. HYMÉNOPTÈRES. Pamphilius cynosbati. Fab. — V. Poirier Athalia centifoliæ. Panz. — La fausse chenille de cette Ten- thrédine dévore les feuilles. Athalia rosæ. Linn. — Ibid. Cladius difformis. Lat. — Même observation. Tenthredo cincta. Bouché.—V. Groseiller. La fausse chenille de : 287 ) cette espèce, bien différente des autres, vit de la moelle des ra- meaux et elle s'y transforme. Tenthredo pavida. Linn. — V. Groseiller. e Hylotoma rosarum. Fab.—V. Berberis. Cette espèce fait ses in- cisions et dépose ses œufs sur la branche la plus voisine de la tige principale. Hylotoma ustulata. Fab. — V. Berberis. Dolerus eglanteriæ. Fab.— La fausse chenille de cette Tenthré- dine ronge le feuillage. Cynips rosæ. Linn. — Cette espèce produit les galles connues sous le nom de Bédéguar. Ce sont des excroissances chevelues qui entourent les tiges et qui paraissent composées d’un nombre im- mense de filaments très-serrés dont plusieurs ont leurs extrémi- tés libres et ramifiées. Elles sont habitées par plusieurs larves de Cynips. Cynips Réaumurii. Nob. — Je rapporte à une espèce que je ne connais pas, les galles chauves observées par Réaumur sur le Cynorhodon. | Megachile centuncularis. Linn. Cette Hyménoptère coupe des portions de feuilles en rond et en ovale pour en tapisser sa cellule en forme de dé à coudre, les rondes pour le fond, les ovales pour les parois. Plusieurs cellules sont rangées ensemble bout à bout sous une pierre; chaque cellule est percée dans le fond. La pre- mière qui est construite et le premier œuf pondu sont placés le plus en avant. La Megachile lorsqu'elle éclot, perce sa loge par le bout et s'envole sans obstacle. La cellule qui vient après ren- ferme l'œuf pondu le second et qui n’éclora qu'après l’autre. L'Insecte n'a autre chose à faire qu'à percer la cloison qui le sé- parait de la première cellule, passe à travers cette cellule de- venue vide, et ainsi des autres. HÉMIPTÈRES. Lygæus nassatus. Bouché. — Cette Cimicide, dans l’état de larve, pique les jeunes tiges, en tire la sève, les fait recoquiller et fait quelquefois manquer la floraison. Tettigonia rosæ. Fab. — Cette petite Cicadelle vit également de la sève. Aphrophora spumaria. — V. Weigelia. Aphis rosæ. Fab. —V. Cornouiller. Aspidiotus rosæ. Bouché. — Ce Gallinsecte diffère des Coche- nilles par le corps recouvert d'une matière blanche et laineuse , et par les antennes de 9 articles dans les mâles , de 6 dans les femelles. Il vit sur les vieux troncs qui en paraissent couverts de moisissure, et qui en meurent quelquefois si on n’y porte remède. LÉPIDOPTÈRES. Liparis dispar. Linn. — V. Myrte. Attacus pyri. Linn. — V. Oranger. Orgya antiqua. Linn. — La chenille de cette Bombycide est garnie de poils. Elle se renferme, pour se transformer, dans une coque d’un tissu lâche entremêlé de poils. Lasiocampa quercifolia. Linn. — V. Poirier. Pygæra bucephala. Linn. — V. Tilleul. Gonoptera libatrix. Linn. —V. Saule. Himera pennaria. Linn. — La chenille de cette Phalénide est lisse, sans tubercules ; elle a deux pointes charnues, inclinées en arrière, sur l'avant dernier segment. Elle se transforme dans la terre. Amphidasis betularia. Linn. — V. Pommier. Geometra rusticata. Zell. — V. Berberis. fulvata. Zell. — Ibid. sur l'Églantier. Argyrotoza bergmanniana. Linn. — V. Poirier. Fidonia plumaria. W.N. — V. Marronier. forskaeleana. Linn. — Ibid. —— rosetana. H. — Ibid. Tortrix variegana. Zell. — V. Lierre. roborana, Linn. — Ibid. Teras pauperana. Zell. — V. Vigne. Sur l'Églantier. Aspidia Udmanniana. Linn. —Les chenilles de cette Platyomide ( 289 | sont courtes, munies de points verruqueux surmontés chacun d'un poil. Elles vivent en société et réunissent les jeunes feuilles en paquet où elles trouvent l'abri et la nourriture. Leur métamor- phose a lieu également en société, dans un tissu commun mé- langé de mousse et de feuilles sèches. Aspidia cynosbana. Fab. —Ibid. sur les Églantiers. —— suffusana. Parr. — Ibid. Penthina ocellana. H. — V. Erable. Lyonetia centifoliella. Vonheyd. — V. Tilleul. ————— angusticollella. Id. — Ibid. Incurvaria maculella. Hubn. Zell. — V. Groseiller. Coleophora lusciniæpennella. ‘Xr. Zell. — V. Tilleul. Pterophorus rhododactylus. Linn. — La chenille se suspend comme les Papillons diurnes pour se transformer. DIPTÈRES. Cecidomyia rosæ. Brem. — V. Tilleul. Les deux feuilles supé- rieures et la terminale se plient, se ferment et ne restent un peu ouvertes que près du pétiole, et les bords se courbent irrégulière- ment. Dans chacune de ces feuilles, se trouvent 3 à 5 larves de couleur verte. | Psilomyia rosæ. Meig. — Cette Muscide vit sur la fleur. FAMILLE. DRYADÉES , Drvaneæ. Ven. Les ovaires ne sont pas adhérents; ils sont en nombre ordinaire- ment indéfini, à une seule loge et un seul ovaire. Cette famille, composée en grande partie de végétaux herbacés. tels que les Fraisiers, les Dryades, les Aigremoines, les San- guisorbes, les Pimprenelles, ne présente qu'un seul genre de plantes ligneuses, les Ronces et une espèce de Potentille. Les Ronces offrent quelque intérêt sous le rapport entomolo- gique. 19 : 290 ) \ G. RONCE, Ruaus. Linn. Le calice n’a pas de bractées ; les styles sont continus. Des nombreuses espèces de Ronces qui croissent en Europe, il n'y en à que deux sur lesquelles dés observations entomologi- ques aient été faites : la Ronce commune et le Framboisier; mais il est très-probable que les Insectes qui y trouvent leur subsis- tance et particuhèrement sur la première, la cherchent également sur quelques autres, telles que la Glanduleuse, la Bleuâtre, qui en diffèrent peu. RoxcE FRAMBOISIER. À: Idœus. Linn. Les pétales sont cunéiformes, plus courts que le calice. Le Framboisier, descendu, selon Pline du mont Ida en Italie, et de là dans le reste de l'Europe, semble une Ronce perfectionnée par le climat de la Grèce ou par la culture. Cependant on le trouve indigène sur d'autres montagnes, telles que les Alpes, le Jura, avec la saveur ete parfum qui la placent parmi nos meilleurs fruits rouges. 9 Car US: Cet arbuste a donné lieu , il y a quelques années, à une obser- vation qui est une nouvelle preuve dé la longue durée de la puissance germinatrice de la graine des végétaux. Dans un tumulus celtique découvert dans le Dorsetshire, on trouva dans un cexpueil un sque- lette avec des pièces de monnaie à l'effigie d’Adrien. Au milieu du squelette, à la place qu'avait occupée l'estomac, se trouvaient des petits grains que l'on sema et qui produisirent des Framboisiers. Nous ne connaissons que peu d’Insectes qui attaquent le Fram- boisier. HYMÉNOPTÈRES Cryptus furcatus. Jur. — La fausse chenille de cet'e Tenthré- dine dévore le feuillage: LÉPIDOPTÈRES, Argynnis Daphne. Fab. — V. Oranger. Thecla rubi, Linn. — V. Marronier. (291) Aspidia cynosbana. Fab. — V. Rosier. udmanniana. Dobr. — V. Rosier. RONCE coMMUNE. R. Fruticosus. Linn. Les pétales sont ovales, étalés, plus longs que le calice. La Ronce qui représente si fidèlement la vie humaine avec ses épines,— bifascialum, Fab. — Ibid. Leptura coricea. Fab.—La larve de ce Longicorne se developpe sous l'écorce. Cryptocephalus imperialis. Fab. — V. Cornouiller. — coryli. Fab. — Ibid. 6 punctatus. Fab.— Ibid. —————— lineola. Fab. — Ibid. _——— vittatus. Fab. — Ibid. 6 maculatus. Fab. — Ibid. Homalopus lorey. Suff. — V. Coudrier. Leistes seminigra. Gyll.— La larve ne m'est pas connue. Endomychus coccineus. Fab. — La larve de ce Trimère ne m'est pas connue. Batrisus formicarius. — V. Charme. _——— Deleportei. — Ibid. Bythinus cartesii.Leach.— La larve de ce Trimère ne m est pas connue. Euplectus nanus. Reichenb. — Mème observation bicolor. Denny. — Ibid. Phlegoderus cæcus. — Même observation. dissectus. — [bid. HYMÉNOPTÈRES. — es — Cynips fagi. Linn. — C'est le Cecydomyia fagi. Bremi. Cimbex femorata. Fab. — V. Sorhier. Tenthredo maura. Fab. — V. Groseiller. HÉMIPTÈRES. Aphis fagi. Phegirus. Am.) Linn. — V. Cornouiller. Cette espèce est remarquable par l’épaisse et longue fourrure blanche qui la recouvre ; point de cornicules. Kermes fagi. Lion, —V. Vigne. LÉPIDOPTÈRES. Lithosia quadra.Linn. —V. Saule. 455 ) Lithosia helvola. H. — V. Saule. —-— lurideola. Her. — Ibid. Calligenia rosea. Fab. — La cheniile de cette Lithoside est fort courte, garnie de tubercules surmontés d'aigrettes. Elle vit du lichen du Hêtre et se renferme dans une coque légère entre- mêlée de ses poils. Liparis chrysorrhœæa. Linn. — V. l'Introduction. Leucoma 5 nigrum. Fab. — V. Tilleul. Dasychira pudibunda. Linn. — V. Noyer. Cette espece à commis de grands ravages dans les Vosges en 1848. Orgya antiqua. Linn. — V. Rosier. Colocasia coryli. Fab. — V. Coudrier. Aglia Tau. Linn. Hering. — La chenille de ce Bombycide est armée d'épines dans son jeune âge, et devient mutique après la troisième mue. Elle se transforme dans une coque informe com- posée de mousse et de feuilles sèches , retenues par quelques fils. Limacodes asellus. Fab. — V. Amandier. testudo. G.— Ibid. Harpyia fagi. Linn. — V. Coudrier. Drynobia melagona. Bork — La chenille de ce Bonbycide est lisse. Elle entre dans la terre pour se métamorphoser. velitaris. Esp. — Ibid. \eronyeta Psi. Ochs. —V. Tilleul. Triphœna subsequa. W. W. — La chenille de cette Noctuelle est rase ; elle s’enterre profondément pour se transformer, et se fait une coque de terre peu solide. Geometra brumata. Linn. — V. Berberis. =——— papiliogaria. Id. — Ibid. Dosythea immutaria. Hubn. — V. Spartier. Glyphiptera nebulana. H. — V. Orme. Phibalocera fagana. W. W.— La chenille de cette Platyomide vit dans des feuilles roulées ou repliées sur elles-mêmes et 5’; transforme après avoir tapissé sa retraite d’un tissu de soie assez serre. | 456 ) Halias prasinana. L. — La chenille de cette Platyomide est renflée dans le milieu. Ses dernières pattes débordent l'extrêmite du corps, et par leur divergence figurent une nageoire caudale Elle se transforme dans une coque d'un tissu solide, toujours collée sur le revers d’une feuille, et ayant la forme d'une nacelle renversée. Lobophora hexapteraria.Linn. — V. Saule blanc. Carpocapsa splendana. H. — V. Poirier. Diurnea fagella. Fab. — V. Tremble. Argvresthia fagatella. Moritz. — V. Cornouiller. goedartella. L. Zell. — Ibid. Lyonetia hemargyrella. Koll. Z. — V. Tilleul. IMmeurvaria korneriella. Zell. — V. Groseiller. ———— vetulella. Zett. — Ibid. Micropteryx chrysolepidella. Koll. — V. Cornouiller. Nemophora metacella. Zinck. Z. — V. Prunelier. DIPTÈRES. Cecidomyia tornatella. Bremi. — V. Tilleul. La larve de cette espèce se développe dans une galle cylindrique, surmontée d'un toit conique, sur la surface supérieure des feuilles. Cette galle tombe quand la larve est parvenue. —— fagi. Id. — Ibid. La larve détermine la formation d'une galle en forme de gland , sur la surface supérieure d'une feuille. Cette galle est habitée par une à quatre larves. Elle ne tombe pas comme la précédente. ——. annulipes. Hartig. Brem. — La galle formée par la larve est hémisphérique, également sur la surface supérieure des feuilles. Elle est persistante comme la re, DA G. CHATAIGNIER. casranEa. Linn. CBATAIGNIER COMMUS. C. vulgaris. Linn. Les fleurs monoïques : les mâles en épis, petites, nombreuses, agrégées en tête; les femelles cotonneuses épaisses; enveloppe du fruit épineuse. ( 457 }) Ce bel arbre est conuu depuis l'antiquité comme arbre fruitier, et comme arbre forestier, par l'utilité de son fruit et de son bois. Pline signale déjà la greffe dont on faisait usage pour pro- pager les meilleures variétés du fruit; dans une partie de nos provinces du centre et du midi, il entre pour beaucoup dans la subsistance des populations pauvres ; il paraît sur la table du riche , sous le nom de marron de Lyon ou de Lucques, et réunit l'agréable à l’utile. La qualité du Châtaignier comme bois de charpente est su- jette à controverse; l’on n'est pas d’accord sur sa force, sa solidité, sa durée. On avait cru reconnaître le Châtaignier dans les char- pentes de nos anciens monuments, lorsque Buffon après un mûr examen, a déclaré qu'elles étaient en chêne blanc (à grappe ou pédonculé) variété du Rouvre (4). Le Châtaignier est au nombre des arbres dont la longévité est la plus grande , et qui atteignent les dimensions les plus colossales. Nous pourrions en citer un grand nombre, tels que ceux que nous avons vus à Royat près de Clermont en Auvergne, au Mont-Dore, à Montmorency, à Marly ; celui des environs de Sancerre dont le tronc à dix mètres de circonférence; celui du comté de Glocester qui en à dix-sept. (1) Voici ce qu'il dit à cet égard : « J'ai eu occasion de voir quelques unes de ces charpentes , et j'ai re- connu que ces bois prétendus de Châtaignier étaient de Chêne blanc à gros glands, qui était autrefois bien plus commun qu'il ne l’est aujourd’hui en France, par une raison bien simple : c’est qu'autrefois, avant que la France ne fût aussi peuplée, il existait une quantité bien plus grande de bois en bon terrain, et par conséquent, une bien plus grande quantité de ces Chênes dont le bois ressemble à celui du Châtaignier. Le Châtaignier, continue le grand naturaliste, affecte des terrains parti- euliers , il ne croit point, ou vient mal dans toutes les terres dont le fond est de matière calcaire ; il ya donc de très-grands cantons et des provinces entières où l’on ne voit point de Châtaigniers dans les bois, etnéanmoins on nous montre dans ces mêmes cantons, des charpentes anciennes qu'on prétend être de Châtaignier et qui sont de l'espèce de Chêne dont je viens de parler. » ( 458 Enfin le plus grand de tous les arbres connus est le célèbre Châtaignier qui croit au pied de l'Etna, dans la zone boisée et sur la lave de ce volcan: la cime peut servir d’abri à cent chevaux etil en tire son nom. Son tronc a cinquante-deux mètres de cir- conférence. Le fameux Boabab observé par Adanson en a trente. L'âge présumé de ce vaste Châtaignier est de 4000 ans, il a donc résisté aux cent éruptions connues du volcan dont la première re- monte à l'an 1200 avant notre ère ; il a assisté à toutes les com- motions politiques, aux déchirements, aux invasions, aux guerres dont la Sicile a été en proie: mais aussi il a prêté son ombrage aux bergers de Théocrite chantant les mœurs les plus pures sous le plus beau ciel. Le nombre des insectes observés sur le Châtaignier est peu considérable. COLÉOPTÈRES. Carabus splendens. Fab.—Un bucheron à apporté à M. L. Du- four plusieurs de ces beaux insectes, qu'il avait trouvés dans le creux d'une vieille souche. Malachius elegans. Fab. -— V. Lierre. Melasis flabellicornis. Fab. — V. Aune. É Notoxus mollis. Fab. — M. Nordlingen a retiré cette Trachelide du bois décompose. Brachytarsus varius. Fab. — Y. Charme. Dryophthorus lymexylon. Fab. — Nous ne connaissons pas les premiers états de ce Curculionite. Gnorimus 8 punctatus. Fab. — V. Rosier. Ædemera (Stenoxys) annulata. Germ. — Cet Hetéromère se développe sous l'écorce. Megagnathus mandibularis. Fab. — M. Schlumberger a trouvé ce Xylophage dans un vieux tronc décemposé. Les galeries, prati- quées par cette espèce, ne sont pas simples comme Ratzebourg les décrit, mais souvent à 2-6 bras: l'ouverture est située dans une fente ; la chambre principale, déjà assez élargie dans l'écorce, est approfondie jusqu'à l'aubier, où elle se divise en plusieurs 459 ) branches. Les galeries des larves dont les unes montent, et les au- tres descendent, comme dans les autres espèces, parviennent jus- qu'aux rudiments de l’aubier, où l'insecte adulte continue encore longtemps les ravages de la larve. ( Nordlingen. ) Antbribus albinus. Fab. — La larve de ce Curculionite se dé- veloppe sous l'écorce. Platyrhinus latirostris. Fab. — Ce Curculionite se trouve à l’intérieur des vieux Hêtres. Tropideres niveirostris. Fab. — V. Prunelier. cinctus. Payk. — Ibid. Bostrichus villosus. Gyll. — V. Clématite. Platypus cylindrus. Fab. — Ce Xylophage passe l'état de larve sous l'écorce. Colydium elongatum. Fab. — V. Orme. Callidium sanguineum. Fab. — V. Aubépine. Exocentrus adspersus. Rey. Mulsant. — La larve de ce Longi- corne s'est trouvée dans des pieux. LÉPIDOPTÈRES Leuzera æsculi. Lat. — V. Marronnier. Cossus ligniperda. Linn. — V. Saule. Dasychira pudibunda. Linn. — V. Noyer. Colocasia coryli. Linn. — V. Coudrier. Leucania obsoleta. Linn. — Quoique les chenilles de ces Noc- tuélites vivent sur les graminées, celle de cette espèce vit sur le Hètre. Elle se transforme dans une coque légère. Carpocapsa splendana. Hubn. — V. Poirier. La chenille vit dans l'intérieur des châtaignes. Æcophora tigratella. Costa.— Les larves de ces Tinéides qui vivent sur les Châtaigniers filent leur cocon entre les gerçures des écorces. Ornix luctuosella. Costa. — V. Sorbier. G. CHÈNE. quercus. Linn. Les fleurs mâles sont en épis pendants, lâches, filiformes ; les étamines saillantes ; les fleurs femelles en épis droits. 4 460 | Le genre Chêne est l’un des plus importants du règne végéta., tant par les qualités utiles du bois, que par le nombre des espèces, et leur distribution sur toute la zone tempérée de l'hémisphère septentrional. Plus de cent espèces et des variétés également nom- breuses, présentent le type modifié sous tous les rapports , surtout dans l'Amérique septentrionale. La hauteur est tantôt celle des plus grands arbres, et tantôt celle des plus humbles arbris- seaux(4) : le bois offre tous les degrés de dureté ; l'écorce, toujours riche en tannin, se dilate quelquefois en couche épaisse de liége; les feuilles, caduques ou persistantes, affectent , dans la diversité de leurs formes, celles de lyre, de faulx, de fer de lance; elles sont parfois onduleuses, trilobées, dentées ; elles se dessinent en feuilles de Châtaignier, de Saule, d'Olivier, de Laurier. Les glands sont de saveur douce ou amère, de forme courte ou allongée ; la cupule en est très-diversement couverte d’écailles tour à tour cou- chées, étalées, allongées, chevelues. Les Chênes sont appropriés à tous les sites et à tous les sols de la zone qu'ils occupent sur le globe. Aux terres fraîches, fertiles, argileuses, les Chênes rouvre, blanc, d'Amérique, à feuilles de Châtaignier ; aux marécages, les Chênes en lyre, bicolore, Prinus, aquatique, de marais ; aux sables, le C. Tauzin ; aux landes, les C. pubescent, liége, noir, étoilé, quercitron, à feuilles cendrées, de Catesby, de Banister ; aux terres rocailleuses et aux monta- gnes, les C. Kermès, monticole, laurier. Les insectes propres aux Chênes de l'Europe ont été observés en grand nombre pour l'espèce commune. CHÈNE COMMUX, Quercus robur. Linn. Le gland est oblong, à petite pointe; la coupe (cupule) courte, en forme d'écusson. Le Chêne est le plus bel arbre de l'Europe. Aucun autre ne réunit comme lui l'élévation du tronc à l'ampleur de la cime, à —_—— — + mm (1) Le Chêne à galles. | 461 | l'étendue de ses robustes bras, au pittoresque de sa forme où l'art cherchera toujours le modèle de la grâce unie à la majesté. A la beauté, le Chêne joint la force dont son nom robur est synonyme. Le plus souvent Son front au Caucase pareil , Brave l'effort de la tempête. non seulement son bois présente la contexture la plus serrée, les fibres les plus robustes , les plus élastiques , mais il joint encore la durée à la dureté. Aussi le Chêne est-il le plus utile des arbres de l’Europe, au moins aux grands travaux, aux monuments publics, à la marine. Toutes ces qualités ont donné au Chêne une célébrité de tous les temps. En Europe, avant l’ère de la civilisation, il avait quel- que chose de sacré aux yeux des hommes qui vivaient dans les forêts et trouvaient leur subsistance dans ses fruits. Ovide met le gland au rang des fruits qui faisaient les délices des hommes pendant l’âge d’or : Arbuteos fœtus montanaque fraga legebant Cornaque , et in duris hærentibus mora rubetis, Ét quæ deciderant patulà Jovis arbore glandes. Met. liv. I. Le Chêne tenait lieu de temple, il rendait des oracles, il servait de refuge contre la persécution. Il était l'emblème de la grandeur et il était consacré au maître des dieux. La civilisation en lui en- levant ce prestige reconnaît cependant tous les bienfaits qu’elle lui doit. C'est le Chêne qui donne la durée à nos constructions, à nos monuments, à nos vaisseaux. * Le Chêne, en formant l'essence de la plupart de nos forêts, en fait la principale beauté qui est encore relevée cà et là par des individus que le temps ou la hache ont respectés, et qui ont pris des dimensions colossales. Ainsi, dans la belle forêt de Fontaine- bleau, s'élève près du rocher connu sous le nom du Nid de l’Aigie, | 462 le vieux Charlemagne, qui n'est plus qu'un tronc inerte (1. Naguère encore, j'admirais le Bouquet du roi, le plus bel arbre de la forêt. En Normandie, le Chêne d’Allouville dont le tronc a 10 mètres de circonférence, est àgé de 900 ans. Dans les environs de Saintes, le Chène de Montravail présente plus de 1800 couches annuelles, ce qui porte sa naissance au commencement de l’ère chrétienne (2). Dans les Vosges, la forêt de Parey-saint-Ouen est ornée du Chêne des partisans, qui remonte au règne de Philippe- Auguste (3). Dans la forêt de Tronsac en Berry, il existait du temps de François [.%, un Chêne d’une élévation et d’une grosseur prodi- gieuses. Ce roi, charmé de la beauté de cet arbre, le fit entourer d'une terrasse et d’une barrière, et il venait se délasser sous son ombrage quand il avait chassé dans cette forêt. Nous ne pouvons passer sous silence celui du bois de Vincennes le plus célèbre de France, sous lequel le roi S'-Louis venait rendre justice à son peuple avec cette sagesse inspirée par la reli- . gion, que l'on ne peut comparer qu'à celle de Salomon. Le Chêne est de tous les arbres de l'Europe celui qui nourrit le plus grand nombre d'espèces d'insectes. COLÉOPTÈRES. Dromius 4 maculatus. Fab. — V. Peuplier. 4 notatus. Panz. — Ibid. (1) Sa grosseur était de 8 mètres de circonférence à un mètre de ses racines. (2) On a creusé dans le bois mort de l'intérieur, un salon de 3 à 4 mètres de diamètre sur 3 de hauteur. On y a ménagé un banc taillé dans le bois. On place au besoin une table ronde et 19 convives peuvent s'asseoir autour, enfin une fenêtre et une porte vitrée donnent du jour à cette salle que dé- core une tapisserie vivante de fougères, de lichens , et de mousses. (3) 11 a 13 mètres de circonférence au-dessus du collet, 33 mètres d'élé- vation, et sa couronne en a 95 de diamètre, | 468 } Dromus punctatellus. Duftsch. — V. Peuplier. linearis. Fab. — Ibid. ——— glabratus. Duftseh. — Ibid. ——— fasciatus. Fab. — Ibid. ———— sigma. Rossi. — Ibid. : Velleius dilatatus. Fab. — La larve de ce Brachélvtre sort a nuit et détruit les chenilles processionnaires. Tachyporus cellaris. Fab. — V. Peuplier. Quedius fulgidus. Fab. — La larve de ce Brachélytre se déve- loppe dans les ulcères du Chêne. Diceræa berolinensis. Fab. — V. Aune. Eurythyrea austriaca. Fab. — Ce Sternoxe se tient contre les troncs, sur les bourgeons. Phænops decostigma. Fab. — V. Peuplier. — appendiculata. Fab. — Ibid. Chrysobothris affinis. Fab. — V. Peuplier. -— chrysostigma. Fab. — Ibid. Agrilus viridis. Fab. — V. Vigne. bifasciatus. Oliv. — Ibid. —— quercinus. Ratzeb. — Ibid. ——— biguttaitus. Fab. — Ibid. — angustatus. Fab. — Ibid. Agrypnus varius. Fab.— Ce Sternoxe se trouve dans les vieux troncs. — atomarius. Fab. — Ibid. Athous rhombeus. Oliv. — Même observation. Campylus denticollis. Fab. — Ce Sternoxe ronge les jeunes pousses. ——— linearis. Fab. — Ibid. —————— mesomelas. Fab. — Ibid. Cardiophorus biguttatus. Fab. — V. Hêtre. Corymbitis quercûs. Gyll. — La larve de ce Sternoxe se déve- loppe sous l'écorce. Adrastus limbatus. Fab. — Ce Sternoxe se développe sous l'écorce, ( 464 | Lygistopterus sanguineus. Fab. — La larve de ce Malacoderme vit sous l'écorce et se nourrit de petits insectes. Dyctiopterus aurora. Fab. — La larve de ce Malacoderme se développe sous l'écorce. Tillus unifasciatus. Fab. — V. Vigne. —— ruficollis. Fab. — Ibid. —— elongatus. Fab. — Ibid. Opilus univittatus. Fab. — M. Perris a trouvé ce Serricorne blotti sur des bûches de Chêne. Enoplium sanguinicolle. Fab. — La larve de ce Térédile se dé- veloppe sous l'écorce. — dulce. Ledoux. — Ibid. Hylecætus dermestoïdes. Fab. — V. Orme. Dorcatoma rubens. Koch. — Ce Térédile se développe dans le détritus. Ptinus germanus. Linn. — V. Aubépine. quercûs. Gyll. — Ibid. Catops picipes. Fab. — Ce Clavicorne se développe sous l'écorce. Peltis ferruginea. Fab. — Ibid. —- oblonga. Fab. — Ibid. Silpha 4 punctata. Fab. — Ibid. Thymalus limbatus. Fab. — V. Hêtre. Ips bimaculata. Gyil. — V. Hêtre. Nitidula æstiva. Fab. — V. Hôtre. Abræus parvulus. Fab. — Ce Clavicorne se développe dans le bois décomposé. Megatoma serra. Fab. — La larve de ce Clavicorne vit sous l'écorce et se nourrit de petits insectes. Trinodes hirtus. Fab. — La larve de ce Clavicorne se développe dans l'aubier. Lymexylon navale. Fab. — Ce Serricorne a été observé volti- geant autour d'un Chêne. Il est probable que la larve se de loppe sous l’écorce. (465 Anomala julii. Fab. — V. Vigne. Melolontha fullo. Linn. — V. Érable. Omaloplia variabilis. Fab. — V. Aune. Rhizotrogus æstivus. Oliv. — V. Saule. Osmoderma eremita. Linn, — V. Saule. Anisoplia horticola. Fab. — V. Rosier. Platycerus caraboides. Fab. — V. Hétre. Lucanus cervus. Linn. — La larve de ce Lamellicorne se dé- veloppe dans le bois, quelquefois à une grande profondeur. Avant de passer à l’état de nymphe , elle s’enferme dans une boule oblongue, de la grosseur d’un œuf de pigeon, composée de terre, de petits graviers et de sciure de bois. Lucanus capreolus. Fab. — La larve de ce Lamillicorne se développe dans le bois. Lucanus parallelipipedus. Fab. — Ibid. Eustrophus dermestoides. Fab. — La larve de ce Ténébrionite ne nous est pas connue. Pentaphyllus testaceus. Gyll. — La larve de ce Taxicorne vit sous l'écorce. Heterophaga chrysomelina. Fab. — Même observation. Uloma culinaris. Fab. — V. Hêtre. Hypophlæus castaneus. Lat. — V. Frêne. Cistela ceramboides. Fab. — V. Tilleul. Il se tient sur les som mités du Chêne, Cistela fusca. Panz. — Ibid. fulvipes. Fab. — Ibid Pyrochroa coccinea. Fab. — V. Oranger. ———— rubens. Fab. — Ibid. Mordella fasciata. Fab. — La larve de cette Trachélide vit dans les souches. OEdemera dispar. L. Duf. — V. Châtaignier. Ce célèbre observateur a trouvé les larves au milieu. des fibres décomposées, et humides d’un vieux madrier. Elles se creusent des galeries cylindriques assez Jarges. , 30 (466 | OEdemera seladonica. L. Duf. — Ibid. ruficollis. Id. — Ibid. Asclera cœrulea. Linn. — V. Aubépine. Sparadrus testaceus. Andersch. — Ce Sténélyire se développe sous l'écorce. Hypulus quercinus. Payk. — Mème observation. Salpingus humeralis. Déj. — V. Prunier. ——— fulvipes. Fab. — Ibid. Rhinosimus roboris. Fab. — Ce Sténélytre se développe sous l'écorce. Rhinosimus ruficollis. Panz. — Ibid. Attelabus curculionides: Fab. — V. Bouleau. Apion ilicis. Fab. — V. Tamarisc. Polydrusus cervinus. Fab. — V. Bouleau. flavipes. Gyll. — Ibid. Omias brunnipes. Oliv. — Ce Curculionite ronge les bour- geons. Metallites mollis. Germ. — V. Ronce. Brachyderes quercicola. Duf. — V. Bouleau. Phyllobius argentatus. Linn. — V. Poirier. Acallus quercüs. Linn. — V. Hêtre. parvulus. Fab. — Ibid. — roboris. Id. — Ibid. —— clavuliger. Duf. — Ibid. Orchestes quercüs. Fab. — V. Lonicère. — pilosus. Id. — Ibid. Balaninus glandium. Marsh. — V. Noyer. La larve vit dans glands. Micronyx variegatus. Fab. — La larve de ce Curculionite n'a pas été observée. Ceutorhynchus quercicola. Fab. — V. Bruyère. ———— querceti. Gyll. — Ibid ——— quereus. Sch. — Ibid. —* marginatus. Ulrich. — Ibid. ( 467 ) Dryophthorus lymexylon. Fab. -— V. Châtaignier. Cossonus linearis. Fab. — La larve de ce Cureulionite se dé- veloppe sous l'écorce. Scolytus pygmæus. Fab. — V. l’Introduction. Il a causé en 1835, la mort de 50,000 pieds de chênes de 35 à 40 ans dans le bois de Vincennes. Scolytus pruni. Fab. — Ibid. ——— destructor. Oliv. — Ibid. —-— rugulosus. Fab. — Ibid. Bostrichus dispar. Fab. — V. Clématite. typographus. Fab. — Ibid. laricis. Fab. — Ibid. monographus. Fab. — Ibid. hysterinus. Fab. — Ibid. a - limbatus. Fab. — Ibid. ———— villifrons. Suff. — Ibid. -curvidens, id. — Ibid. ———-— dryographus, id. — Ibid. —- autographus, ullr. — Ibid. —————— limbatus, Fab, — Ibid. pusillus, Gyl. — Ibid. fici. Dej. Platypus cylindrus. Fab. — V. Châtaignier -—-— oxyurus, L. Duf. — Ibid. Apate capucima. Fab. — V, Tilleul. sinuata. Fab. — Ibid. —— 6. dentala. Oliv. —- Ibid. Mycetophagus 4. maculatus. Fab. — V. Peuplier. Cerylon terebrans. Fab. —V. Hêtre. Rhyzophagus erythrocephalus. Fab — Ibid. — variolosus. L. Duf. — Ibid. La larve se de- veloppe dans l’aubier. Bitoma crenata. Fab. — La larve de ce Xylophage se déve- loppe sous l'écorce. ( 468 | Bothrideres contractus. Fab. — V. Hêtre. Teredus nitidus. Fab. — La larve de ce Xylophage se déve- loppe sous l'écorce Colydium cylindricum. Oliv. — V. Orme. elongatum. Fab. — Ibid. Sylvanus unidentatus. Fab. — La larve de ce Xylophage se développe sous l'écorce. ———- bidentatus. Fab. — Ibid. Trogossila caraboides. Fab. — V. Peuplier d'Italie. Biophlœus dermestoides. Fab. — La larve de ce Xylophage se développe sous l'écorce. Læmophlœus monilis. Fab. — V. Hêtre. testaceus. Fab. — Ibid. Brontes flavipes. Fab. — La larve de ce Xylophage se déve- loppe sous l'écorce. Prionus coriarius. Fab. — La larve de ce Longicorne vit dans l’aubier. La larve creuse un trou près de la surface de l'arbre, afin que l’insecte parfait puisse s'échapper plus facilement. Hammaticherus heros. Fab. — Même observation. — miles. Bonn. — Ibid. Callidium sanguineum. Linn. — V. Aubépine. Clytus arcuatus. Fab. — V. Sycomore. La femelle dépose ses œufs dans les fissures des Chênes abattus et non écorcés. Acanthoderus varius. Fab. — La larve de ce Longicorne se développe dans l’aubier. Astynomus œdilis. Linn. — Même observation. Leiopus nebulosus. Linn. — Ibid. Exocentrus balteatus. Fab.— V. Saule. Pogonocherus hispidus. Fab. — V. Gui. Monohammus sutor. Fab. — La larve de ce Longicorne se de- veloppe dans l'aubier. Mesosa nebulosa. Fab. — Même observation. Saperda quercùs. Dahl.—V. Saule. Oberea pupillata. Sch. — V. Bouleau. ( 469 | Homalopus Lorey. Fab. — V. Coudrier. Cryptocephalus bipunctatus. Linn, , Suff, — V. Cornouiller. M. Chevrolat a vu sur des büches des larves de Cryptocephales | rongeant ces büûches et se trainant à la manière des limaçons. Ces larves sont très-abondantes sous les feuilles sèches du Chêne où probablement elles rencontrent de petits morceaux de bois a ronger. Cryptocephalus 6. punctatus. Linn. — V, Cornouiller. — — marginatus. Fab. — Ibid. ———— Hubneri. Fab. — Ibid. -— querceti. Erich. — Tbid. melanopus. Linn. — Ibid. Altica erucæ. Fab. — V. Vigne. HYMÉNOPTÈRES. Cynips quercüs folii. Linn. — V, Rosier. quercüs infera. Linn. — Ibid. pallidus. Fab. — Ibid. —— quercûüs baccarum. Linn. — Ibid. -——— quercüs roboris. Fab. —1bid. ——— quercüs corticis. Linn. — Ibid. —— gregaria. Linn. — Ibid. ——- quercûs petioli. Linn. — Ibid. -— quercûs peduneuli. Fab. — Ibid. ——- quercüs ramuli. Lion. — Ibid. -—— quercüs gemmæ. Linn. — Ibid. quercüs calicis. Linn. — Ibid. Neurotorus Reaumurii. Brem. — Ce genre est voisin des Cy- nips (1). en nid omis pinaigus (1) Nous joignons ici les Cynips non déterminés qui produisent les galles nommées par Réaumur, galles en pomme de Chêne, en grains de groseille, en grelot ou en cloche , en timballe, en grappe de groseiïlles . en houtons d'émail, en pomme, en champignon , en artichaud. La galle appelée bédéguar du rosier se développe quelquefois aussi sur le chéne. ( 470 ) Misocampus stigmatisans. — La larve se développe dans une galle en boule ligneuse qui se produit sur les rameaux. Oryssus coronatus. Lat. — V. Charme. Cimbex nemoralis. Linn. — V. Sorbier. Les coques des nym- phes ont été trouvées dans les nids des chenilles processionnaires. HÉMIPTÈRES. Aradus depressus. Lat. — Cette Cimicide se développe sous l'écorce. Ledra aurita. Linn. — V. Coudrier. Tettigonia quercüs. Fab. — V. Orme. Aphis roboris. Fab. — V. Cornouiller. — (Lachnus. Am.) quercs. Linn. — Ibid. Cette espèce a la trompe trois fois plus longue que le corps. Aphis (Phylloxera. Cel.) quercüs. Fab. — Ibid. Sous les feuilles. Coceus quercüs. Fab. — V. Tamarise. -—— fuseus. Linn. — Ibid. —-- Janatus. Linn. — Ibid. Kermes variegata. OI. — V, Vigne. —- (Camptocecis. Am.) réniformis. Geoff. — Ibid. -—— quercüs. Linn. — Ibid. LÉPIDOPTÈRES. Apatura Iris. Linn. — V. Saule. Thecla quercüs. Linn. — V. Marronier. Smerinthus quereüs. Linn. — V. Tilleul. Sesia vespiformis. Linn. — V. Groseiller. —— nomadæformis. Id. — Ibid. Sur les vieux têtarts de Chêne. Syntomis phægea. Linn. — La chenille de cette Zygenide est velue ; pour se transformer, elle se renferme dans une coque d'un tissu mou. Lithosia quadra. Linn., Bouch. — V. Saule. —--—— complana. Id. — Ibid. ——— rubricollis. Id. — Ibid. ( 47 ) Liparis dispar. Linn. L. — V. Myrte. —- monacha. Linn. — Ibid. -—— chrysorrhæa. Linn: — Ibid. Leucoma V. nigrum. Fab. — V. Tilleul. Arctia lubricipeda. Linn: — V.Orme. Orgia antiqua. Linn. — V. Rosier. gonostigma. Id. — Ibid. Harpyia milhauseri. Fab. — V. Coudrier. Dasychira pudibunda. Linn. — V. Noyer. Lasiocampa otus. Linn. — V. Poirier. betulæfolia. Fab. — Ibid. Cnethocampa processionsa. Linn. — V. Charme. Eriogaster catax. Linn. — V. Tilleul: Bombyx quercüs. Linn. — V. Ronce. ——— quercina. Fab. — Ibid. Attacus cœcigena. Hubn. — V. Oranger. Limacodes testudo. G. — V. Hêtre. asellus. Fab. — Ibid. Dicranura vinula. Linn. — V. Saule. Leiocampa dyctæa. Linn. — V. Saule blanc. Clisiocampa neustria. Linn. — Pommier. Platypteryx lacertula. Linn. — V. Tilleul. Notodonta tritophus. Fab. — V. Saule. Peridea trepida. Fab. — La chenille de cette Noctuélite est lisse, et ressemble un peu à celles des Sphynx dans l’état de repos. Elle se renferme dans une coque lâche entre des feuilles. Drynobia melagona. Bork. — V. Hêtre. ——— velitaris. Esp. — Ibid. Heterodonta argentina. Fab. — La chenille de cette Noctué- lite est brune, et portant des tubercules, ressemble à une jeune branche. Elle se transforme dans une coque molle environnée de mousse, à la superficie de la terre. Chaonia roboris. Fab. — La chenille de cette Noctuélite est lisse et rayée longitudinalement. Elle se transforme dans la terre. (472) Chaonia querna. W, W. — Ibid. ——— dodonea. Id. — Ibid. Pygæra Bucephala. Linn. — V. Tilleul. Clostera curtula. Linn. — V. Saule. Acronycta auricoma. Her. — V. Tilleul. —— —— Psi. Linn. — Ibid. Diphthera Orion. Esp. — V. Sorbier. Cymatophora ridens. Fab. — V. Saule. - octogesima. Hab. — Ibid. or. Fab. — Ibid. —————- flavicornis. Linn. — Ibid. -———— diluta. Fab. — Ibid. - ruficollis. Fab. — Ibid. -————— fluctuosa. Hubn. — Ibid. —————- bipuncta. Bork. — Ibid. Tethea 00. Linn. — La chenille de cette Noctuéhte se trouve à l'extrémité des jeunes branches , où elle vit renfermée entre plusieurs feuilles qu'elle assujettit par des fils. Elle se mé- tamorphose dans un tissu peu solide, à la surface de Re terre. Orthosia miniosa. Fab. — V. Cérisier. stabilis. Guen. — Ibid. —— instabilis. Id. — Ibid. ————— pallida. W. W. — Ibid. —-—— ambigua. Id. — Ibid. ——— munda. Id. — Ibid. Hosporina croceago. Fab. — La chenille de cette Noctuélite est moniliforme; elle s'enfonce dans la terre sans former de coque pour se transformer. Ophiodes lunaris. Fab. — La chenille de cette Noctuélite est rase avec deux tubercules sur le onzième segment, et les pattes anales écartées dans le repos. Elle se renferme dans une coque légère, placée entre des feuilles. Hadena protea. Esp. — La chenille de cette Noctuélite est rase. Elle s’enferme dans un cocon de terre pour se transformer. ( 473 ) Hadena roboris. B. — Même observation. —— convergens. Fab. — Ibid. Xanthia rufina. Linn. — V. Saule. Xylina petrificata. Linn. —V. Chevrefeuille. Egira pulla. W. W. — La chenille de cette Noctuélite est glabre. Elle se métamorphose dans la terre. Agriopis aprilina. Linn. — La chenille de cette Noctuélite est glabre. Elle se cache pendant le jour dans les fissures de l'écorce: elle s’enterre, sans former de coque, pour se transformer. Miselia bimaculosa. Linn. — V. Aubépine. Amphipyra pyramidea. Linn. — La chenille de cette Noctuélite est glabre, avec le onzième segment relevé en pyramide. Elle fait son cocon de soie et le place entre les feuilles. La Pyramidea se glisse souvent après son éclosion , dans les galeries pratiquées dans les troncs par les larves des Cossus et des Hammeticherus heros. Elle se tient, dans ces retraites, la tête tournée vers l'entrée et plongée dans une obscurité complète, sur laquelle tranche la lueur phosphorique et rougeâtre de ses veux. Guenée. Catocala pellex. Hubn. — V. Frêne. ——— sponsa. Linn. — Ibid. —— promissa. Id. — Ibid. ——— conversa. Esp. — Ibid. ——— pacta. Linn. — Ibid. Catephia alchymista. Fab. — La chenille de cette Noctuélite est atténuée antérieurement , munie de tubercules coniques sur le onzième segment ; les pattes anales sont allongées. Elle se file une coque entre des fissures de l'écorce pour se transformer. Pyralis (Pyralida. Zell.) togatulalis. Zell. — V. Tamarisc. Sophronia emortualis. W. W. — La chenille de cette Pyralide n'a que 14 pattes; elle se nourrit des feuilles sèches, et pour se transformer, elle s’enveloppe d’un tissu blanchâtre qu'elle attache a une feuille. Ænnomos quercinaria. Bork. — V. Tilleul. — quercaria. Habn. — Ibid. (474) Himera pennaria. Linn. — V. Rosier. Eurymene dolabraria. Linn. — V. Tilleul. Cblorochroma chloraria. Hubn. — La chenille de cette Phalé- nide est lisse, effilée; la tête est bifurquée : elle se transforme dans un léger réseau entre des feuilles. Chlorochroma viridoria. Hubn. — Ibid. Mniophila corticaria. Hubn. — La chenille de cette Phalénide est courte et tuberculée. Elle se nourrit du Lichen du Chêne, et y cache son cocon qu'elle recouvre des débris du même Lichen. Cheimatobia dilutaria. B.— La chenille de cette Phalénide est glabre. Elle est nuisible en détruisant les bourgeons. Avant de se transformer, elle s'enfonce dans la terre sans former de cocon. Phorodesma bajularia. W. W.— La chenille de cette Phalé- nide est courte ; elle se fabrique avec des débris de feuilles un fourreau qui est ouvert aux deux extrémités, ce qui permet la chenille, quand elle veut changer de place, de faire usage de ses pattes antérieures et postérieures. Elle se transforme dans une coque légère entre des feuilles. Amphidasis prodromaria. Linn. —- V. Pommier. Geometra mensuaria. Zell. — V. Berberis. —— tristala. Id. — Ibid ——— calabraria, Id. — Idid. —— termerata. Id. — Ibid. -—— strigulata. Id. — Ibid. ———- poraria. Id. — Ibid. --— Contaminaria. Id. — Ibid —- gyraria. Id. — Ibid. -—— brumata Id. —Ibid. Ephyra punctaria. Linn. — La larve de cette Phalénide est lisse, à tête plate et triangulaire. Sa transformation, au lieu de se faire dans une coque ou dans la terre, s'opère en plein air comme dans les Papillons diurnes, c'est-à-dire que la chrysalide est attachée par la queue et par le milieu du corps comme celle des Piérides. ( 475 ) Aspilates purpuraria. Linn. — La chenille de cette Phalénide est lisse; elle se renferme dans un léger tissu à la superficie du sol. Boarmia roboraria. W. W.— V. Tulipier. Timandra amataria. Linn. — V. Sapin. Tortrix roborana. Hubn. — V. Lierre. piceana. Linn. — Ibid. ——- xylosteana. Linn. — Ibid. ——- viridana. Linn. — Ibid. -—— splendana. Ratz. — Ibid. ——- prasinana. Zell. — Ibid. —-— quercana. Zell. — Ibid. —-— ferrugana. Zell. — Ibid. —-— favillaceana. Zell. — Ibid. —-— testudinana. Zell. — Ibid. —-— sorbiana. Zell. — Ibid. —-— consimiliana. Zell. — Ibid. —— cristana. Zell. — Ibid. Ptycholoma lecheana. Linn. — V. Bouleau. Glyphiptera literana. Linn. — V. Orme. scabrana. Linn. — Ibid. squamana. Fab. — Ibid. Teras quercinana. Zell. — V. Vigne. —— testaceana. Zell. — Ibid. —— Iinsignana. Zell. — Ibid. —— asperana. Zell. — Ibid. —— literana. Zell. — Ibid. —— ferrugana. Zell. — Ibid. Penthina revayana. Zell. — V. Erable. Sciaphila albulana. Zell. — La chenille de cette Platyomide vit dans une feuille roulée ou en paquet, assujettie par des fils. Elle se transforme dans un tissu solide sous la mousse. Phoxopteris ramana. Frohl. — V. Coudrier. Phibalocera fagana W. W. — V. Hêtre. ( 476 ) Xanthosetia zoegana. Linn. — Les premiers états de cette Pla- tyomide n’ont pas été décrits. Pædisca corticana. Hubn. — La chenille de cette Platyomide a, la peau transparente et couverte de points verruqueux. Elle vit entre des feuilles réunies en paquet, et s’y transforme dans un tissu étroit. Halias quercana. W. W. — V. Hêtre. ——— prasinana. Linn. — Ibid. Carpocapsa amplana. Hubn.— V. Poirier. La chenille vit dans les glands. Crambus roborella. Hubn. — V. Tamarise. Eudorea incertella. Dup. — V. Aubépine. —— cratægella. Hubn — Ibid. ——— quercella. Tr. — Ibid. Diosia roborella. W. W. — La chenille est inconnue. Microptervx sparmannella. Fab. Zell. — V. Cornouiller. fastuosella. Zell. — Ibid. subpurpurella. Haw. — Ibid. semipurpurella. Steph. Zell. — Ibid. purpurella. Haw. Zell. — Ibid. Tinea ocellana. H. — V. Clématite. Phycis roborella. W. W. — V. Groseiller. Coleophora tiliella. Sch. Zell. — V. Tilleul. palliatella. Zinck. — Ibid. ———— ibipennella. Von Heyd. — Ibid. — currucipennella. Zell. — Ibid. Gracillaria franckella. Hubn. — V. Erable. - falconipennella. Hubn. Zell. — Ibid. picipennella. Mann. — Ibid. elongella. Linn. Zell. — Ibid. Coriscium quercetellum. Id. — V. Troëne. Lyonetia subnitella. Fab. Id. — V. Tilleul. ——— immundella. Id. — Ibid. —— complanella. Habn. — Ibid. (ATT ) Lithocolletis roborifoliella. Zell. — V. Erable. ———— quercifohella. Fab. — Ibid. roboris. Zell. — Ibid. scitulella. Id. — Ibid. saportella. Id. — fbid. distentella. Id. — Ibid. iljafoliella. Id. — Ibid. delitella. Id. — Ibid. ————— elatella. Id — Ibid. ———. insignitella. Id. — Ibid. ———— pomonella. Id. — Ibid. manni. Id — Ibid. (1). abrasella. Id — Ibid. tenella. Id — Ibid. messaniella. Id. — Ibid. (2). amyotella. Dup. — Ibid. lautella. Van Heyd. — Ibid. scopariella. Tisch. — [bid. cramerella. Fab. — Ibid. DIPTÈRES Cecidomyia resupinans. Br. — V. Tilleul. Laphria fulvicrus. Linn. — M. L. Duf. a trouvé et Asi- lique sur une souche dans le détritus de laquelle la larve paraissait s'être développée. Pelecocera tricincta. Hoffm. — M. Perris a trouvé cette Svyr- phide sur les feuilles. Adapsilea coarctata. Waga. — Ce Dolichocère, voisin -des Sépédons, a été trouvé sur un buisson de Chêne. CHÈNE TAUZIN. Q. toza. Linn. Parmi les nombreuses variétés du Chêne Rouvre , le Tauzn , (1) La chenille habite quelquefois l’intérieur d'une feuille conjointement avec celle du L. abrasella. (4) Sur le Chêne pubescent qui est une variété du C. commun. (AT8 | qu ne s'en distingue guère que par ses feuilles veloutées en - dessous, nourrit les insectes suivants qui ont été observés dans le département des Landes par M. Perris, à qui l’entomologie doit un si grand nombre d'observations importantes sur le déve- loppement de ces petits animaux. COLÉOPTÈRES. Rhynchites cæruleocephala. Lat. — V. Vigne. Il habite les sommets. Brachyderes lusitanicus. Fab. — V. Bouleau. incanus. Id. — Ibid. Polydrusus ambiguus. Id. — Ibid. Orchestes crinitus. Chev. — V. Lonicère. Sur les feuilles. Hammaticherus velutinus. Dej. — V. Chêne. Cryptocephalus 8 guttatus. Oliv.— V. Cornouiller. — 4 punctatus. Oliv. — Ibid. Sur les drageons. HÉMIPTÈRES. Phytocoris chlorizans. Meig. — V, Poirier. luteicollis. Panz. — Ibid. CHÈNE 4 GALLES. Q. insectoria. Oliv. Les fruits sont à peu près sessiles ; les cupules hémisphériques, cotonneuses, à écailles courtes ; les glands cylindriques, saillants. Ce Chêne, qui n'est qu'un humble arbuste de la Grèce et des rives de la Méditerranée, doit sa réputation et sa valeur à un insecte qui détermine sur le feuillage la production connue sous le nom de noix de galle, analogues à celles qui se développent sur le Chêne Rouvre. HYMÉNOPTÈRES. Diplolepis gallæ tinctoriæ. Oliv. — La propriété tinctoriale de ces galles est connue, et l'on peut se figurer à quel point elles sont abondantes en voyant l’immense consommation d'encre qui se commet chaque jour. (479 CHÊNE VERT OU YEUSE. Q. ile. Linn. Les fruits sont latéraux ; la cupule est à squamules courts : les feuilles sont persistantes. - Les Yeuses, au feuillage persistant, au tronc branchu, tor- tueux, au bois d'une dureté extrême, proportionnée à la lenteur de son accroissement , vivent toujours isolées dans les forêts mé- ridionales et particulièrement sur les montagnes ; elles parvien- nent quelquefois à une longévité qui ajoute encore à ce qu'elles ont de pittoresque et de poétique. On voyait dans l’ancienne Rome une Yeuse dont le tronc avait trois pieds de diamètre et qui formait une cime immense. Peu d'insectes ont été observés sur l’Yeuse. COLÉOPTÈRES. Apion ilicis. Kirby. — V. Tamarisc. canescens. Fab. — Ibid. Orchestes ilicis. Fab. — V. Lonicère. Vesperus xatharti. — M. Mulsant a trouvé ce Longicorne dans une Yeuse creusée par le temps. Cryptocephalus ilicis. Oliv. — V. Cornouiller. HÉMIPTÈRES. Stylosomus ilicola. Suff. — V. Tamarisc. Kermes ilicis. Linn. — V. Vigne. LÉPIDOPTÈRES. Trichiura ilicis. Ramb. — V. Alizier. Lasiocampa betulifolia. Linn, — V. Poirier. Pygera bucephala. Linn. — V. Tilleul. Orthosia ruticella. Esp. — V. Cerisier. = — ilicis. — Ibid. Miselia bimaculosa. Linn. — V. Aubépine. Catocala pellex. Hubn. — V. Frêne. ——— conversa. Esp. — Ibid. Metrocampa margaritaria. Linn. — La chenille de cette Phalé | 480 nide , munie de douze pattes, dont dix seulement servent à la progression, est aplatie en-dessous et ciliée sur les côtés ; elle se forme un cocon mince de soie. CRÈNE LIÉGE. Q. suber. Linn. Les fruits sont latéraux; la maturation est bisannuelle et l'écorce subéreuse. Ce Chêne, à glands doux, très-voisim de l'Yeuse , est remar- quable par son écorce que l'on en détache tous les huit à douze ans et dont les usages sont si nombreux, si connus depuis l’anti- quité.« Nos dames, dit Pline, s’en servent à liéger leurs pianelles et pantouffles en hiver, de sorte que les Grecs , voulant sornetter ces dames empantoufflées, les appellent écorces d'arbres. » (Liv. 16, ch. 8.) Les insectes observés sur le Chêne liége sont : COLÉOPTÈRES. Hammaticherus mirbeckii.. Linn. — V: Chêne Rouvre. LÉPIDOPTÈRES. Geometra margaritaria. Zell. — V. Berberis. contaminaria. Id. — Ibid Tortrix corylana. Zell. — V. Lierre. pronubana. Id. — Ibid. —— splendana. Id. — Ibid. — dumeriliana. Id. — Ibid. —— minusculana. Id. — Ibid. festivana. Id. — Ibid. kockeïlana. Id. — Ibid. penckleriana. Id. — Ibid. Carpocapsa splendana. Zell. — V. Poirier. —— amplana. Id. — Ibid. CHÈNE AU KERMÈS. Q. coccifera. Linn. La cupule est cotonneuse, à squamules ; les fruits sont laté- taux , triannuels. ( 481 ) Ce Chène n’est qu'un arbrisseau touffu, dont les branches tor- tueuses s'étendent capricieusement , et dont la zone se borne aux contrées voisines de la Méditerranée. Il était déjà connu des Ro- mains, grâce à la graine d’écarlate qu'il produit et qui n'est autre chose qu’un insecte. HÉMIPTÈRES. Kermes ilics. Linn. — La femelle se fixe sur le feuillage, lors- qu'elle est adulte ; elle y prend la figure sphérique sans conserver en rien la forme animale ; elle dépose ses œufs sous elle et meurt en les protégeant de sa dépouille. Ce sont ces œufs et les larves qui en proviennent, dont la substance colorée en rouge et connue sous le nom de grains d’écarlate, est employée dans la teinture. Elle était en possession, depuis l'antiquité, de produire exclusive- ment cette belle couleur, et de partager avec la pourpre l'hon- neur de fournir son éclat au luxe et aux grandeurs, lorsque la découverte de l'Amérique a fait connaître la cochenille du Nopal qui l’a reléguée au second rang. LÉPIDOPTÈRES. Orgya trigotephras. B. D. — V. Rosier. FAMILLE. MYRICÉES , Mynicez. Rich. L'oyaire est madhérent ; les ovules sont suspendus. G. GALÉ. Gaze. Lion. GALÉ DES MARAIS. G. uwliginosa. Linn. Les fleurs diciques naissent de bourgeons aphylles : les mâles, à écailles sans appendices et à onglet ; les femelles, à écailles munies d’un onglet ; ovaire recouvert de deux bractées. Cet humble arbuste, rameux , propre aux marais tourbeux , paraît avoir pour mission de purifier l'air qu'on y respire, en ab- sorbant le gaz hydrogène qui y abonde et en exhalant une odeur balsamique, ainsi que l'indique son nom grec. Ses feuilles sont 31 ( 482 ) quelquefois employées au lizu de houblon pour la fabrication de la bière; mais cette infusion est enivrante et cause des vertiges. Quatre insectes ont été signalés jusqu'ici sur le Galé : COLÉOPTÈRES. Orchestes iota. Perris. — V. Lonicère. HEMIPTÈRES. Aphis pistaciæ. Linn. -- V. Cornouiller. Il vit dans une stipule foliacée qui naît à la base des feuilles, atténuée aux deux extré- mités, renflée au milieu, verte lorsqu'elle renferme encore le pu- ceron , rouge après qu'il en est sorti. Coccus myricæ. Linn. — V. Tamarisc. LÉPIDOPTÈRES. Tortrix hastiana, Linn. — V. Lierre. CLASSE. CONIFÈRES , Cowrerx. Bartl. Les fleurs sont unisexuelles; les mâles en chatons; le PREaRIe et l'ovaire nuls; les ovules nus. Ces arbres ou arbrisseaux sont ordinairement résineux ; le bois est dépourvu de trachées, composé de vaisseaux ayant une ou plusieurs séries de points disciformes ; les fleurs sont monoïques ou dioïques ; les mâles portant antérieurement les anthères ; les chatons femelles sont insérés sur des écailles et forment des cônes après la floraison ; le péricarpe est en noyau, quelquefois à pulpe, sans valves, a une seule loge. Les feuilles sont ordinairement persistantes , aciculaires (en aiguille) sans veines ni nervures. Après avoir parcouru la longue série des Amentacées, les Chênes, les Ormes, les Hètres, les Châtaigniers, tous ces nobles végétaux, si élevés dans l’ordre végétal, nous croirions être parvenus au faite de cet ordre , si nous pouvions oublier qu'il existe une autre grande famille également répandue sur le globe entier, dont { 483 ) l'organisme est plus parfait encore et qui compte le Cyprès, le Pin , l'Araucaria, le Sapin , le Mélèze, et enfin le Cèdre , le ma- jestueux dominateur du règne végétal tout entier, devant lequel s'incline le Chêne lui-même. Cette famille, comme la précédente, présente les arbres qui forment les profondes forêts, qui couvrent de vastes régions. Sem- blant dédaigner de plaire, comme les autres végétaux, par le charme des fleurs , ces deux familles possèdent la beauté des for- mes majestueuses, l’élévation des troncs surmontés de hautes cimes pyramidales , des dômes impénétrables aux rayons du soleil. Leur noble destination est de favoriser la civilisation en offrant à l’homme des matériaux pôur élever des cités, pour construire des vaisseaux qui rapprochent les peuples séparés par les Océans. C'est ainsi que des forêts verdoyantes se transforment dans nos ports en forêts de mâts pour porter notre pavillon sur toutes les mers, aborder tous les rivages. Les Conifères, tout entiers à cette grande vocation, abandonnent à d’autres familles plus humbles le soin même de nourrir l'homme de leurs fruits, sans doute parce que le roi de la création n'était pas destiné à vivre dans les forêts. Le pignon de quelques Pins, et le fruit du Ginkgho offrent seuls quelques substances alimen- taires. Îls joignent à la force, à la solidité, communes avec les Amen- tacées, une qualité plus précieuse encore : l'mcorfuptibilité qu'ils doivent particulièrement à leur sève résineuse , et qui a valu, par- ticuhèrement au Cèdre, l'honneur de servir à la construction du temple le plus célèbre du monde, La supériorité des Conifères se manifeste encore dans une plus grande longévité , dans la préro- gative de présenter constamment les sexes de leurs fleurs séparés, souvent même sur des individus différents, ce qui montre, comme dans la série animale, une organisation plus composée, plus avan- cée que dans les familles hermaphrodites. Ils offrent le plus sou- vent encore l’avantage d'avoir leur feuillage persistant. Quelle en est la raison? « Pourquoi, malgré le froid des hivers du Nord , les ( 484 ) » Sapins y restent-ils couverts de verdure? Il est difficile d'en » trouver la cause; mais il est aisé d’en reconnaître la fin. Si les » Bouleaux et les Mélèzes du Nord laissent tomber leurs feuilles à » l’entrée de l'hiver, c’est pour donner des litières aux bêtes des » forêts; et si le Sapin pyramidal conserve les siennes, c’est pour » leur ménager des abris au milieu des neiges. » (1) Les Conifères, appelés à croître, à répandre leurs bienfaits sur tout le globe , ont recu dans tout leur organisme les modifications nécessaires à cette sorte d’universalité; ils sont répartis à toutes les températures , à tous les sites, aux montagnes , aux rochers, aux coteaux, aux vallées, aux plaines, aux eaux, aux neiges, aux glaces, aux sables , aux argiles , aux marnes. Chaque espèce a sa station et elle est organisée pour elle. C’est ainsi que celles qui habitent les montagnes ont leurs graines rendues volatiles par les ailes membraneuses dont elles sont pourvues pour se disséminer dans les airs , tandis que celles destinées à croître près des eaux, sont façonnées en esquif pour voguer. Le Cyprès chauve, qu ombrage les fleuves de l'Amérique septentrionale, est protégé par une ÉSÈcE d’estacade naturelle contre les blocs de glace Lu yien- nent s'y heurter. Sous le rapport entomologique, les Conifères ont leurs ennemis comme les autres arbres, quelquefois mêmes identiques. La larve du Hanneton, la chenille de la Nonne confondent dans leur vora- cité le Pin avec le Chêne, et y commettent les mêmes dévastations. Un grand nombre des espèces particulières qui attaquent les arbres de cette famille, appartiennent à des genres et à des tribus d'insectes qui nuisent à d’autres végétaux, tels sont les Scolytes, les Bostriches , les Hylesines, les Hylurqus, et beaucoup d’autres. FAMILLE. TAXINÉES , Taxex. Rich. Les fleurs femelles sont solitaires, munies d’un involucre. (1) Bernardin de Saint-Pierre, Etudes de la Nature. (485 ) G.IF. Taxus. Tourn. Les fleurs sont dioïques ; les mâles à chatons subglobuleux ; les femelles à chatons situés au sommet de l'axe. L'Tf commun est un arbre de moyenne grandeur; il a le port touffu , pyramidal; ses rameaux sont nombreux, souples , étalés, souvent inclinés avec grâce ; ses feuilles ressemblent à celles du Sapin par leur persistanee, leur vert sombre, leur forme étroite et leur disposition de chaque côté des tiges. L'If croit spontanément dans presque toutes les parties tem- pérées et froides du globe et particulièrement dans les forêts, sur le flanc des montagnes, au fond des vallées, sur le bord des torrents et des lacs. Il y vit ordinairemeut solitaire et non en famille comme la plupart des autres arbres; la graine, sous la forme de baie est appropriée aux eaux, et elle se dissémine en voguant. Cette baie est creusée en grelot. Lorsqu'elle tombe de l'arbre , elle est entraînée d’abord par sa chute, au fond de l’eau ; mais elle revient aussitôt au-dessus au moyen d’un trou que la nature a ménagé en forme d’ombilic au-dessus de sa graine. Il s'y loge une bulle d’air qui la ramène à la surface de l'eau par un mécanisme plus ingénieux que celui de la cloche du plongeur , en ce que dans celle-ci, le vide est en-dessous, et dans la baie de l'F, il est en-dessus. (Bernardin de St.-Pierre, Etudes de laNature.) Cet arbre n’atteint guère que la hauteur de dix mètres , mais il grossit beaucoup plus à proportion. On connaît des Ifs très-remar- quables sous ce rapport: tels sont en France ceux de Castillan dansle Calvados, de Fouillebec près de Pont Audemer; en Norwège, ceux qui recouvrent les tombelles des anciens Scandimaves; en Ecosse, celui de Fortingall, le plus gros que l’on connaisse et sans doute le plus âgé. On lui donne jusqu’à 3,000 ans d'existence, d’après un calcul comparatif : on a compté 280 couches annuelles dans une tranche de 50 centimètres de diamètre, et cet arbre n'a pas moins de 5 mètres de circonférence. Il est donc contemporain d'Homère. Il y a bien longtemps aussi que les hommes ont tiré l'If de ses ( 486 forêts et en ont fait un arbre cultivé. Sous ce rapport, son histoire présente de l'intérêt ; il a été singulièrement en butte à la contra- diction : admis au rang des arbres dignes de culture, les anciens reconnaissaient la beauté de son aspect sévère , la dureté et l’in- corruptibilité de son bois, dont leur ciseau tirait indifféremment dieux, tables ou cuvettes ; ils luiattribuaient des qualités précieuses. D'après Suétone, on conseillait l'usage de ses fruits comme antidote du venin de la vipère. Son bois , réduit en poudre, était recommandé contre l'hydrophobie. Parmi les ‘peuples modernes, les Hanovriens et les Hessois en donnent le feuillage pour nour- riture à leurs bestiaux pendant l'hiver; les Japonnais retirent de l'amande une huile propre aux préparations culinaires. Partout les enfants, comme les petits oiseaux , sont friands de la pulpe de ses fruits qui ressemblent à une cerise coupée en travers. Dans tous les temps l'If a été consacré, conjointement avec le Cyprès, comme emblème de l'immortalité de l’âme, à ombrager les tombeaux. Il à été longtemps aussi employé pour l’ornement des jardins; mais à une certaine époque, le mauvais goût s’en était emparé pour les décorer de sculptures vivantes en donnant à cet arbre les figures d'animaux, de vases , d’obélisques qui lui enle- vaient sa grâce native; le ciseau le torturait pour le rendre gro- tesque et son nom à été donné à ces pyramides de lampions offi- ciels qui illuminent tristement chacune de nos révolutions. Mais la nature a repris ses droits et nos jardins paysagistes ont rendu à J'If la forme pittoresque , l'ampleur de ses rameaux touffus, son aspect sombre, sévère , poétique dont il nous frappe dans ses sau- vages forêts, sur les flancs escarpés de ses montagnes, dans le creux de ses profondes vallées. En regard de ce panégyrique, l'If a été accusé de mille griefs accablants. Suivant Pline, les bourgeons de l'If sont vénéneux et mortels, surtout en Espagne (1); Théophraste considère son () Les bouteilles de bois d'If, que l'on fait dans les Gaules pour porter du vin dans les champs, sont vénéneuses. (Pline. ) (487 feuillage comme nuisible aux chevaux, mais il ne l'est pas aux ruminants. Virgile en éloigne les ruches. Plutarque le craint surtout pendant la floraison. Selon Jules César , les Gau- lois trempaient leurs flèches dans son suc pour les empoisonner , et le chef des Eburoniens, parent d’Arminius , s'en servit pour se donner la mort après sa défaite. Sestius dit que cet arbre est si vénéneux, qu'il fait mourir soudainement tous ceux qui boivent et mangent ou qui s’endorment sous son ombrage , et que le nom même de poison (Toxicum) paraît dériver de celui de l'If (Taxus). Lucrèce fait allusion aux dangereuses propriétés de l'IP, dans les vers suivants : Est etiam magnis Heliconis montibus arbor Floris odore hominum tetro consueta necare. Parmi les modernes, les accusations contre cet arbre ne sont pas moins graves. Suivant Roi, des jardiniers employés à tondre un IF très-touffu, du jardin de Pise, furent atteints de violentes dou- leurs de tête. Bauhin affirme que son ombre seule peut donner la mort. Matthiole prétend que son odeur tue les rats. Le Jésuite Schott assure que ses rameaux, plongés dans l’eau stagnante assoupissent le poisson. Valmont de Bomare rapporte qu’en 1753 plusieurs chevaux périrent au milieu des convulsions, quatre heures après en avoir mangé dans un parc de Bois-le-Duc. (1) Toutes ces qualités malfaisantes, quoique révoquées en doute par d’autres autorités dignes de foi, Haller, Daléchamp , Péna, Gérard, Lobel, ont été accréditées au point qu'une ordonnance royale du 23 octobre 1637, prescrivit son abattage dans les jardins et autour des habitations champêtres. Il fut proscrit même des cimetières dont il était l'ornement le plus conforme aux tristes pensées , aux graves méditations. Telestlesingulier procès dont l'If est le sujet, où l'attaque et la (1) Il dit aussi, qu'un âne mourut subitement au Jardin des Plantes pour avoir brouté les feuilles d’un If, auquel on l'avait attaché. ( 488 | défense sont fondées sur des témoignages également dignes de foi, et qui laisse une grande incertitude dans l'esprit. Si l'accusation reposait sur des faits observés dans des contrées méridionales, et la défense sur des observations faites dans le Nord , on pourrait attribuer les qualités nuisibles ou innocentes de cet arbre à la diffé- rence de température. On sait que l’Aconit sert de poison en Italie et de salade en Suède; mais il n’en est pas de même à l'égard de l'If; les faits allégués contre lui ou en sa faveur appartiennent indifféremment au Nord ou au Midi. J'ai voulu apporter aussi une pièce au procès. Il existe à Les- trem, dans le jardin d’une ferme, une petite salle de verdure de douze vieux [fs (1) très-touffus, dont les robustes branches sont entrelacées et même soudées entre elles et forment une voûte très-basse et épaisse ; j'y restai pendant une heure, et je n'en ressentis pas le moindre effet. Observé sous le rapport entomologique, on pourrait tirer une induction défavorable à cet arbre, en considérant que, seul entre tous ceux de l'Europe, il est réputé ne nourrir aucun Insecte. On pourrait croire à la réalité des sucs , des gaz délétères dont il est soupçonné , en voyant cet éloignement exceptionnel qu'il semble inspirer à ces petits êtres. J'ai fait quelques recherches, particu- lièrement sur l'écorce et sur le feuillage, pour découvrir des traces du séjour de quelque Insecte ; j'ai reconnu que ces parties étaient généralement intactes ; aucune feuille rongée , ou minée ou reco- quillée : pas de Pucerons, pas de Gallinsectes. J'ai bien observé sur la surface inférieure de quelques feuilles de petites aspérités brunes qui sont quelquefois situées de chaque côté de la nervure principale, et qui pourraient renfermer les larves de quelque Céci- (1) Ils ont, à un demi mètre au-dessus du sol, 30 centimètres de dia- mètre, ce qui peut faire présumer qu'ils ont environ 150 ans d'âge , d'après l'appréciation dont j'ai parlé précédemment. Il existe, dans le cimetière, à Willy, département du Calvados , un If qui, dit-on, n’a pas moins de cinq mètres de circonférence. : 489 domyie ou de Cynips ; mais, malgré le secours du microscope, je n'y ai rien découvert, et je soupconne quece sontdes Cryptogames. J'ai vu aussi dans l'aisselle d’un petit rameau plusieurs petits cocons de soie vides qui pouvaient avoir abrité des chrysalides de Teignes ; mais il n'y avait aucune altération dans les feuilles voi- sines. Enfin, j'ai trouvé à la base d’une autre branche une petite toile serrée qui paraissait aussi avoir appartenu à un insecte, mais également sans aucune apparence de feuille rongée. Au surplus, j'ai vu à l’entour du feuillage touffu de l'If, comme des autres arbres toujours verts, voltiger une multitude de petits Insectes et surtout des Tipulaires , qui y cherchent un abri, et aussi de nom- breuses toiles d’Araignées qui attestent combien cet abri est infesté d’ennemis. Le seul Insecte qui a été observé sur l'If, est un Diptère. Cecidomyia Taxi. Nob. — Bremi à observé à l'extrémité des branches des galles semblables à celles de la C. strobulina; seule- ment les petites feuilles centrales de la galle terminale ne sont pas anormales, mais plus petites; de plus, elles ne sont pas serrées, mais lâches, et l'extrémité de la galle est plus saillante et un peu tordue ou repliée. G. GINKGO. Gixkco. Linn. (1). GINKGO À FEUILLES BILOBÉES. G. Biloba. Linn. Les fleurs sont dioïques ; les chatons mâles à nombreuses éta- mines, en forme d'épis, dont l'axe est filiforme; chatons femelles en forme de coupe courte. Cet arbre est au nombre des Conifères dont le feuillage anor- mal, cessant d’être plus ou moins filiforme, se dilate diversement à l'instar de celui des autres arbres, mais sans s’y confondre. Ses feuilles se singularisent comme celles du Platycladus dont les cau- linaires sont planes, étalées , verticillées ; celles des Dammara, — (4) Salisburia adianthifolia, Smith. — Salisb. Ginkgo, Rich. — Noyer du Japon, arbre aux 40 écus. ( 490 ) semblables aux feuilles du Loranthe; celles du Podocarpus à feuilles de Laurier rose ; celles du Gnetum qui se réduisent à des écailles membraneuses. Tous ces végétaux qui croissent aux extrémités de l’Asie ou dans l'Australie, montrent par leur végétation com- bien ils sont étrangers à l’Europe. Les feuilles du Ginkgo se dilatenten éventail, sans nervure principale, mais à nervures lon- gitudinales, parallèles, non divergentes , mais plusieurs fois bifur- quées. (1) Sous le rapport de ia fructification,le Ginkgo se rapproche de celle de l'Tf; le fruit, beaucoup plus grand et allongé, présente également une pulpe rouge et un noyau central qui contient une amande que mangent avec plaisir les Chinois et les Japonais (2). Comme cet arbre est dioïque, et que l’on a longtemps négligé de rapprocher les sexes en France, les premiers fruits qui y ont été produits, l'ont été en 1832, au jardin botanique de Montpellier par les soins de M. Delile qui a fait ce rapprochement par la greffe. C’est un nouvel arbre fruitier dont il a doté son pays. Nous ne connaissons pas d’insecte propre à cet arbre. FAMILLE. CUPRESSINÉES , Curressneæ. Rich. Les fleurs femelles sont dressées, adnées aux écailles des cones. G. GENEVRIER. Junrwerus. Linn. Les fleurs sont dioïques, axillaires ou terminales, solitaires ; les chatons mâles petits, denses, obtus ; les écailles opposées ou verticillées ; chatons femelles ovoïdes, sessiles ; écailles verticil- lées, à petites pointes au dessous du sommet. (4) J'ai compté dix nervures près de leur base, et 240 environ au bord postérieur. (2) Elles ressemblent pour le goût à la graine du pin Pignon. ({ 491 ) GENEVRIER COMMUN. J. communis. Linn. Les chatons mâles sont petits, ovales; écailles portant les éta- mines panachées; chatons femelles à cône aréolé, globuleux, aromatique. Autant l'If a été signalé, à tort ou à raison, comme arbre dange- reux, malfaisant, vénéneux et expulsé du voisinage de l'homme par ordonnance royale, autant le Genèvrier jouit de la faveur publique par toutes les propriétés et les. vertus qui lui ont été attribuées. Pline en présente les baies comme un antidote à une multitude de maladies. Peu s’en faut qu'il n’en fasse une panacée (1) que les dieux opposent à tous les maux physiques qui accablent la triste humanité. Aux yeux des modernes, elle jouit encore d'assez belles attributions , elle est à la fois tonique, sudorifique, diurétique, antiscorbutique; je l'ai vue employer en Allemagne à l’assainisse- ment des appartements en la brûlant dans des cassoiettes ; elle sert aux peuples scandinaves d’assaisonnement aux mets ; les rameaux de cet arbre y décorent les habitations, les embaument de leur odeur aromatique et bienfaisante. Enfin nous lui devons les genièvre- ries qui favorisent l’agriculture dans la Belgique autant que les sucreries le font dans le nord dela France, et la liqueur si vulgaire, le Gin des Ecossais, perfectionnée à Schiedam , mais devenu un fléau par la consommation excessive qu'en a faite l'intempérance. Cet arbre est réduit souvent à la condition d’humble buisson, et brouté par les chèvres, dans les sables, les pierres, les fentes des rochers, dans l’apreté des régions polaires et des sommités alpines ; mais il atteint une moyenne grandeur lorsqu'il croît dans un sol favorable ; il s’élève et s'étend en large pyramide touffue, aux (1) Par exemple, la graine est bonne à l’estomac, à la poitrine , aux maux de côtés; elle mürit la toux et toutes les humeurs intérieures. On l’applique aux fluxions des yeux ; elle sert aux spasmes , aux convulsions , aux sciatiques ; elle repercute les tumeurs, resserre le ventre, guérit les tranchées ; son parfum fait fuir les serpents (Pline). ( 492 ) rameaux Inclinés, et ornés, dans les individus femelles, de mille baies d’un bleu blanchi par un duvet résineux. Le Genèvrier est l'arbre que l’on trouve le plus avant dans le Nord , en Islande et dans l'Ile de Kulgouef, à l'entrée de la me blanche. Les insectes qui vivent sur le Genèvrier sont en petit nombre. COLÉOPTÈRES. Lampyris noctiluca. Fab. Chrysobothris 40 punctata ? Fab. — V. Peuplier. Apion juniperi. Sch.— V. Tamarisce. Hylobius abietis. Linn. — La larve de ce Curculionite, qui fait de grands ravages dans les forêts de Sapins, ronge aussi les feuilles du Genèvrier. Pissodes pini. Ziegl. — V. l'Introduction. ——— jumperi. Ziegl. — Ibid. Hylurgus { Hylastes. Erich. ) juniperi. Ch. — Ce Xylophage se développe sous l'écorce, et y forme des galeries. HYMÉNOPTÈRES. Lophyrus juniperi. Fab. — La fausse chenille de cette Tenthride dévore le feuillage. ———— pini. Lat. — Ibid. HÉMIPTÈRES. Pentatoma juniperina. Fab. — Cette Cimecide suce la sève. Thrips juniperina. Linn. — Il vit sous l'écorce. Aphis juniperi. Deg. — V. Cornouiller. LÉPIDOPTÈRES. Geometra juniperina. Linn. —V. Berberis. Boarmia solieraria. W. W.— V. Tulipier. Larentia phæniceata. Dup. — V. Tamarisc. Corythea juniperaria. Boisd. — La chenille de cette Phalémide est lisse ; elle se renferme dans un léger tissu attaché aux branches avant de se transformer. (493 ) Eupithecia sobrinaria. Boisc. — V. Tamarisc. pusillaria. Id. — Ibid. Rhinosia juniperella. Linn. — La chenille de cette Tinéide vit dans des feuilles roulées, et elle se construit un cocon en forme de nacelle pour s’y abriter dans l’état de nymphe. Chesias juniperata. Zell. — V. Spartier. Areyresthia abdominalis. Zell. — V. Cornouiller. arceutina. Id. — Ibid. præcocella. Id. — Ibid. DIPTÈRES. Cecidomyia ( Lasioptera. Meig. ) juniperi. Deg. Bremi. — V. Tilleul. La larve se développe dans une galle formée d’un bour- geon qui prend la forme d’une corolle ; trois longues feuilles d’une largeur remarquable en enveloppent trois autres rudimentaires atre lesquelles vit la larve. GENÈVRIER FÉTIDE. J. sabina. Linn. Les chatons sont terminaux : les mâles à écailles ( portant les étamines) membraneuses, mutiques ; les femelles inclinés ; écailles { portant les pistils) soudées seulement à leur base ; cônes souvent ovales. Parmi les nombreuses variétés du Genèvrier fétide, la seule que nous ayons à mentionner, est la Sabine , cet arbrisseau touffu, au feuillage de Cyprès, connu par sa saveur âcre et amère, son odeur aromatique et pénétrante, ses propriétés énergiques, utili- sées surtout dans la médecine vétérinaire. Nous ne parlons pas de ses vertus contre les sortiléges, préconisées au moyen-âge, et aujourd'hui encore chez les Cosaques. Le Savinier ne compte qu’un petit nombre d'insectes. LÉPIDOPTÈRES. Xilina sabina. Guen. — V. Chèvrefeuille. Boarmia perversaria. B. D. — V. Tulipier. Corythea sabinaria. B. D. — V. Genèvrier. ( 494 ) Eupithecia helveticaria. Anderregg. — V. Tamarisc. Rhinosia sabinella. B. D. — V. Genèvrier. G. CYPRES , Curressus. Linn. Les fleurs sont monoïques; les chatons mâles obtus, à écailles opposées-croisées; les chatons femelles fort petits, peu nombreux ; les écailles multiflores ; cône subglobuleux. CyYPRÈs COMMUN. C. sempervirens. Linn. Les chatons mâles ellipsoïdes ou oblongs ; les femelles globu- leux ; cônes ombiliqués à la base, bosselés. Cet arbre des tombeaux, emblème de la mort et des regrets qui l’accompagnent, dont le sombre feuillage semble revêtir le deuil de nos âmes , les Grecs le consacraient à Pluton, et leur imagination, gracieuse jusque dans les sujets les plus lugubres, y voyaient le beau Cyparisse ne pouvant survivre à l'objet de ses affections et métamorphosé par Mercure. Le temps a respecté les attributions de cet arbre célèbre, et nous allons encore prier sur la tombe, ombragée de cyprès, des objets de nos regrets (1). Virgile représente les Troyens occupés à pleurer Misène et à lui élever un bücher : à Principio pinguem tædis et robore secto Ingentem struxere pyram : cui frondibus atris Intexunt latera , et ferales ante Cupressus Constituunt. Æneid. 6. Célèbre sous ce triste rapport, cet arbre se recommande sous d’autres encore. Propre à la Grèce, d'où il a été introduit en Italie, son bois incorruptible était employé dans la construction des édifices, des vaisseaux ; il eut même l'honneur d'être choisi pour y graver les lois des douze tables à Athènes. Pline rapporte les nombreuses propriétés médicales qui lui étaient attribuées. (1) Horace dit que le Cyprès est! le seul être qui suive son maître sur la tombe. (495) Sa longévité était reconnue , et le même auteur mentionnne celui dont l’âge remontait à l'origine de Rome et qui vivait encore sous Néron. Le Cyprès était encore employé à l’assainissement de l'air ; les habitants de l’Archipel en faisaient à cet effet de grandes plantations le long des eaux stagnantes: ils les cultivaient aussi pour le produit qu'ils retiraient de leur développement rapide, et ilsles destinaient à la dot de leurs filles, de même que faisaient les anciens habitants de la Flandre, qui, à la naissance des leurs, plantaient-de jeunes Peupliers blancs qui croissaient avec elles et leur procuraient à vingt ans de l’'ombrage et des maris. Les insectes observés sur le cyprès sont peu nombreux. COLÉOPTÈRES . Ancylocheira cupressi. Dej. — La larve de ce Sternoxe doit se développer sous l'écorce. Morimus tristis. Fab. — V. Saule. LÉPIDOPTÈRES. Lasiocampa lineosa. Ad. Der. — V. Poirier. Les chenilles se tiennent toujours pendant lejour, serrées les unes contre les autres , souvent le devant du corps des unes appuyé sur le derrière des autres ; elles s’éparpillent pendant la nuit sur les feuilles, et leur repas fini, elles reviennent à leur poste. Leur cocon est semblable à celui du £. pini. ——— otus. Drury. — Ibid. Xylina lapidea. Hubn. — V. Chèvrefeuille. Geometra cupressaria. Zell. — V. Berberis. ———— cupressata. Id. — Ibid. juniperina. Id. — Ibid. Cerythea cupressaria. Zell. — V. Genévrier. Tortrix cupressana. Dup. — V. Lierre. ——— compressana. Id — Ibid. a d . 496 ) G. SCHUBERTIA. ScaugertiA. Mirb. (1) Les chatons mâles sont fort petits, en grappe allongée ; les cha- tons femelles deux fois plus gros ; cônes subglobuleux , à écailles rhomboïdales. Ce grand arbre est le plus bel ornement du grand fleuve qui arrose la Louisiane , digne de border ses rivages par l’épais- seur de son tronc (2), par l'élévation de sa cîme , par la majesté de son port; il présente surtout d’admirables harmonies avec le sol tourbeux , marécageux de ses bords, avec la rapidité de son cours , avec l’impétuosité des vents qui soulèvent ses flots. Ses racines, prolongées en longs pivots, s’enfoncent bien au-delà du sol humide et léger de sa base; son tronc, en sortant de terre. prend une épaisseur considérable qui diminue subitement à hau- teur d'homme, et qui sert évidemment à fortifier sa base contre la violence des eaux et le choc des glaces qu'elles charrient. Outre ce moyen préservateur, il sort des racines supérieures, à quelque distance de l’arbre , un cercle d'excroissances coniques, creuses, résistantes, qui font l'office d'estacades ou de chasse-glaces. .. Les harmonies aquatiques de ce Cyprès ne se bornent pas à celles que nous venons de signaler. Les graines des cônes sont cannelées en carêne , faconnées en esquif, et elles voguent aussi bien que celles des Pins de nos montagnes volent de leurs ailes membraneuses. | Nous ne connaissons pas les insectes qui vivent sur cet arbre en Amérique, ni même ceux qu'il nourrit depuis qu'il a été natu- ralisé en Europe. FAMILLE, ABIÉTINÉES , Anermez. Baril. Arbres résineux ; fleurs monoïques ou dioiques ; chatons mâles à axe nu, portant immédiatement les étamines ; chatons femelles (1) Cyprès chauve ; Cupressus disticha. Linn. ag (2) 11 y à, dans un faubourg de Mexico, un Cyprès chauve dont le tronc a 118 pieds anglais de circonférence. (497 ) solitaires: écailles très-nombreuses, imbriquées; cônes multiformes, ordinaires, feuilles opposées, sessiles, linéaires. G. PIN. Pinus. Linn. Les fleurs sont monoïques; chatons mâles ovales ou cylindri- ques latéraux, agrégés en épis ; chatons femelles ovoïdes , termi- nant les jeunes rameaux ; cônes compactes , à cellules ou tuber- culeux. Pr PIGNON. P. Pinea. Linn. Les nucules sont grosses, plus longues que l'aile. Cette espèce est cultivée comme arbre fruitier en Orient et dans l'Afrique septentrionale. Ses amandes ont le goût de la noisette. Je ne connais qu'un seul insecte qui ait été observé sur ce Pin. COLÉOPTÈRES. Hylobius pinastri. Sch. —- V. l'introduction. Pin SYLVESTRE. P. sylvestris. — Lin. Les chatons mâles sont ovales (1); les cônes coniques ou oyoïdes, pédonculés. Cette espèce est la plus septentrionale, la plus rustique, la plus utile de toutes celles de l'Europe; elle avance jusque dans les frimats de la Laponie; elle se répand en vastes fôrets; elle couvre le flanc des montagnes ; elle ne se refuse ni aux sables les plus arides , ni aux craies les plus stériles ; elle prodigue partout l'utilité de son bois et de toute sa substance (2), donnant des mâts à nos vaisseaux, des solives à nos édifices, les produits va- (1) Pin du Nord, Pin de Russie, Pin de Riga , Pin de Haguenau , Pin de Genève . Pinasse (dans les Vosges). (2) Le goudron , la térébenthine , le galipot. 32 ® ( 498 ) riés de sa résine à nos industries et jusqu’à des aliments aux bestiaux (1. En France , à peu d'exceptions près, telles que la fôret d'Ha- guenau, le Pin sylvestre ne croit spontanément que sur les mon- tagnes, où il trouve dans la température le degré d’äpreté qui . convient à sa nature. Cependant il se prête a descendre dans nos plaines, à utiliser nos landes, nos bruyères , nos steppes, lorsque nous l'y intro- duisons par semis ou par plantations ; il a couronné de succès les essais qui ont élé faits pour l’introduire dans les parties les plus stériles de nos fôrets. Je citerai celle de Fontainebleau, chére à tant de titres aux sciences naturelles où, grâce à une forte volonté, à une persévérance extrême , les Pins ont été propagés, acclimatés, et où ils présentent, au milieu des roches dont ils couronnent le sommet, des massifs considérables dont la verdure persistante accroîtencore la diversité du paysage et le pittoresque de cette belle nature. Quà Pinus ingens albaque Populus Umbram hospitalem consociare amant Ramis et obliquo laborat Lympha fugax trepidare rivo. Hor., od. 3. Le Pin sylvestre est au nombre des arbres qui nourrissent le plus d'espèces d'insectes, et qui en éprouvent le plus de dommages. Ils ont été l'objet des travaux si connus, si dignes de l’être, de M. Ratzebourg , sous le rapport surtout des moyens de défense qu'il indique contre leurs ravages. COLÉOPTÈRES. Tachyporus cellaris. Fab. Milbert. — V. Peuplier. (1) Les Lapons et les Finlandois se servent des couches intérieures de l'écorce , réduites en poudre , pour nourrir les pores , et en temps de disette , ils en font une sorte de pain pour eux-mêmes. Les brasseurs em- ploient les bourgeons au lieu de houblon. ( 499 ) Lampra rutilans. Fab. — V. Tremble. Phænops appendiculata. Fab. —V. Peuplier, Chrysobothris solieri. Lap. — V. Peuplier. Choleophora mariana. Fab. — Ce Sternoxe se tient dans les souches. Anthaxia 4 punctata. Fab. — V. Saule. Agrilus undatus. Fab. — V. Vigne. Ancylocheira flavo maculata. Fab.— Ce Sternox vitsur les troncs. octoguttata. Fab. — Ibid. Agrypnus atomarius. Fab. — V. Chêne. Limonius Bructeri. Fab.—La larve de ce Sternoxe se développe sous l’écorce. Elodes deflexicollis (Pini) Curtis. — Le développement de ce Malacoderme m'est inconnu. Dasytes pini. Linn. — Même observation. Clerus formicarius. Fab. — Ce Térédile se trouve souvent sur le feuillage. Anobium pini. Erich.— V. Vigne. ———— pusillum. Gyll. — Ibid. Ptinus minutus. Fab. (pinicola, Ulrich.) — V. Aubépine. Catops silphoides. Fal. — V. Chêne. Trouvé sous des buches de Pin. Ips ferrugineus. Fab. — V. Hêtre. Rhizotrogus pini. Fab. — V. Saule. Hypophlœus pini. Lat. — V. Frêne. Calopus serraticornis. Fab.— Ce Sténélytre doit se développer sous l'écorce. Salpingus rufescens. Dej. — V. Prunier. Rhinomacer attelaboides, Fab. — Ce Curculionite doit se dé- velopper sous l'écorce. Brachyderes pini. Chevr. — V. Bouleau. Polydrusus mollis. Gr. — V. Bouleau. Il nuit aux Pins en per- cant les aiguilles de part en part, dans le voisinage du sommet, Il choisit la place où deux aiguilles sont encore réunies dans leur bourgeon. ( 500 ) Hylobius pini. Fab. — V. Saule. La femelle est très-nuisible ; elle dépose ses œufs sur les troncs, les larves pénètrent sous l'écorce, creusent des galeries sinueuses et descendent souvent jusqu'aux dernières extrémités des racines. pinastri. Gyll. — Ibid. Phyllobius pineti. Linn. — V. Poirier. Otiorhynchus pinastri. Herbst. — V. Oranger. Scytropus squamosus. Kiesnw. — Ce Curculionite a été trouvé sur les Pins du Mont Serrat en Catalogne. Pissodes notatus. Fab. — Ce Curculionite cause de grands dégats en déposant ses œufs sur le tronc des jeunes Pins, les larves creusent sous l’écorce et de haut en bas des galeries qui serpentent. ————— pini. Fab. — Ibid. ———— piniphilus. Gyll. — Ibid. Cneorhinus pini. Fab. — V. Coudrier: Magdalis violacea. Burm. — V. Aubépine. Thamnopbhilus violaceus. Fab. — La larve de ce Curculionite doit se développer sous l'écorce carbonarius. Meg. Ibid. barbicornis. Lat. — Ibid. flavipes. Duf. — Ibid. Dryophthorus lymexylon. Fab. — V. Châtaignier. Hylurgus (hylesinus. Nordlinger.) piniperda. Fab. — V. Ge- névrier. Il se rend très-nuisible par les galeries des larves. ater. Fab. — Ibid. affinis. Dej. — Ibid. ligniperda. Fab. — Ibid. palliatus. Gyll. — Ibid. micans. Kug. — Ibid. poligraphus. L. — Ibid. Bostrichus typographus. Fab. — V. l'Introduction. autographus. Kn. — Ibid. stenographus Duft. — Ibid. { 501 } Bostrichus pythiographus. R. — V l'Introduction. bispinus. Meg. — Ibid. | curvidens. Gr.— Ibid. ———— bidens. Fab. — Ibid. ————— pusillus. GyIl. — Ibid. cinereus. Gyll. — Ibid. Lichtensteinii. R. — Ibid. chalcographus. Linn. — Ibid. Apate elongata. Payk. — Ibid. substriata. Id. — V. Tilleul. Spondylus buprestoides. Fab. — Ce Longicorne se développe dans l’Aubier. Callichroma alpina. — Même observation. Callidium ferum. D. — V. Aubépine. rusticum. Fab. — Ibid. — griseum. Id. — Ibid. Astynomus œdilis. Fab. — V. Chêne. Ergates faber. Linn. — Ce Longicorne se développe dans l’aubier. La larve se creuse un trou près de la surface de l'arbre, afin que l'insecte parfait puisse s'échapper plus facilement. Lorsqu'elle est sur le point de se changer ‘en nymphe, elle forme dans les souches de Pin une cavité ellipsoïde ; la nymphe, au moyen des aspérités dont son ahdomen est armé, monte ordi- nairement à la partie antérieure où elle se tient sur le dos. Pour se transformer en insecte parfait, elle se place sur le ventre et met vingt minutes à se dépouiller. Lucas. Rhagium inquisitor. Fab. — V. Aubépine. — bifasciatum. Fab. — Ibid. Nyphona saperdoides. Réal. — V. Figuier. Criocephalum rusticum. Fab. — Même observation. Dysopus pini. Linn. — Ibid. Cryptocephalus pini. Linn. — V. Cornouiller. ——=——— violaceus. Fab. — Ibid. — incanus. Fab. — Ibid. | (502) Cryptocephalus nitens. Linn. Vank. — V. Cornouiller. — abietis. Fab. — Ibid. Scymnus pinicola. Fab. — Ce Trimère vit sur cet arbre. HYMÉNOPTÈRÉS. Xyela longula. Dalm.—La fausse chenille de cette Tenthrédine ronge le feuillage. pusilla. Id. — Ibid. Pampbhilius erythrocephalus. Fab. — V. Poirier. Lophirus pini. K. — V. Genévrier. La fausse chenille ronge les écorces, et y creuse des trous profonds. Elle se fait une coque très-solide qu'elle fixe contre les branches. Tenthredo pini. Fab. — V. Groseiller. Elle est très-nuisible et dévaste de grandes parties de forêts. Elle dépose ses œufs sur les feuilles de l’année, que les fausses chenilles rongent dès leur naissance. Elle se file en même temps une toile d’où sort la partie antérieure du corps. À mesure qu'elle croît, elle agrandit la toile en forme de sac conique ou cylindrique ; puis elle se retire dans la terre pour y passer à l’état de nymphe. Tenthredo campestris. Fab. — Ibid. pratensis. Id. — Ibid. mesomelas. Scop. — Ibid. abietis. Linn. — Ibid. Sirex gigas. Fab.— Cet Urocerate enfonce sa longue tarière dans l’écorce pour y déposer ses œufs. Les larves pénètrent dans l’au- bier; mais, au lieu d'y vivre de la substance ligneuse, ainsi qu'on l’a cru longtemps, elles font la chasse aux Insectes Xylo- phages dans leurs galeries, et s’y rendent aussi utiles qu’elles étaient réputées nuisibles. spectrum. Fab. — Ibid. juvencus. Id. — Ibid. as HÉMIPTÈRES. Lygœus pini. Linn. — Cette Cimicide vit sur l'écorce. ——— Rolandri. Fab. — Ibid. ( 503 ) Psylla pini. Macq. — V. Mélèze. Cette Psylle (Kermés pini Linn..) ressemble à celle du Mélèze. Les femelles déposent également leurs œufs dans des touffes filamenteuses ; mais ces œufs sont jau- nâtres au lieu de rougeàtres, et ils n'ont pas de pédicule. Les indi vidus ailés ont sur les ailes une tache allongée, d'un gris rous- sâtre. | Aphis (Pityaphis. Am.) pini. Linn. — V. Cornouiller. (pinetifex. Am.) pineti. — Ibid. Kermes pini. Linn — V. Vigne. LÉPIDOPTÈRES. Satyrus fauna. Linn. — La chenille de ce Papillon est glabre, épaisse. Elle se creuse une petite cavité dans la terre pour s'y transformer. La chrysalide repose sur le sol sans être at{achée. Lycœna arion. Linn. — V. Baguenaudier. Sphynx pinastri. Id. — V. Troëne. Dasychira abietis. Id. — V. Noyer. Liparis monacha. Id. — V. L'Introduction. Lithosia quadra. Id. — V. Saule. — unita. Fab. — Ibid. Lasiocampa (Bombyx) pini. Linn. — V. Poirier. lobulina. W. W. — Ibid. Cnethocampa pythiocampa. Linn. — V. Charme. Les chenilles sont processionnaires comme celles du Chêne, mais avec une modification singulière. Toutes celles qui proviennent d’une ponte marchent sur un seul rang à la suite les unes des autres, en se touchant si exactement par la tête et la queue, qu’elles paraissent au premier coup-d'œil former une immense chenille de 15 à 20 pieds de longueur. On les croit d’abord immobiles, mais en les regardant attentivement , on voit qu’elles font toutes ensemble et à des intervalles de temps égaux , un mouvement progressif et saccadé d'environ une demi-ligne. À chaque saccade, toutes les têtes et toutes les parties postérieures font, sans se séparer, un petit mouvement à droite. Alors la colonne avance. Après une ( 504 ) petite pose, le même mouvement à gauche, et une nouvelle sac- cade portent la colonne de nouveau en avant. Sion touche la che- nille qui est la première à la file, elle se contracte en s’agitant vive- ment, et la dernière de la file, y en eüt-il 600 , fait au même instant , ainsi que toutes celles qui la précèdent, le même mou- vement. On les croirait frappées d'une commotion électrique. Trachea piniperda. Esp. — La chenille de cette Noctuélite est rase, avec des lignes longitudinales nombreuses; elle s’abrite pendant le jour, et, avant de se transformer , elle se renferme dans une coque de soie , mêlée de débris de feuilles sèches. Diphtera cœnobita. Tr. — V. Sorbier. Luperina piniaria. Linn. — La chenille de cette Noctuélite est épaisse, chargée de points verruqueux. Elle ronge les racines, et s'y creuse quelquefois des galeries. Elle en sort ensuite pour se renfermer dans une coque de terre agglutinée. Dypterygia pinastri. Linn. — La chenille de cette Noctuélite se transforme dans un cocon d’un léger tissu revêtu de mousse. Aventia flexularia. Hubn. — La chenille de cette Phalénide est plate et ciliée sur les côtés; elle se nourrit des lichens du Pin, et se renferme dans une coque d’un tissu lâche , entre des feuilles. Philobia notataria. W. W. — La chenille de cette Phalénide est lisse, à tête cordiforme. Sa transformation a lieu entre des feuilles ou dans la mousse au pied des Pins. — lituraria. Hubn, — Ibid. Timandra pectinaria. W. W. — V. Chêne. Corythæa variaria. B. — V. Genévrier. Eupithecia strobilaria. B. — V. Tamarisc. Geometra cœsiata. Zell. — V. Berberis. ——— strigilata. Id. — Ibid. Tephrosia ambiguaria. Dup. — V. Bouleau. Boarmia secondaria, W. W. — V. Tulipier — abietaria. W. W. — Ibid. Numeria capreolaria. W. W. — La chenille de cette Phalénide est tuberculée, à tête cordiforme ; elle file son cocon entre les feuilles. (505 ) Phasiane palumbaria. W. W. -— La chenille de cétte Phalémide est lisse. Elle forme sa coque d'un léger tissu entre des feuilles. Phasiane artesiaria. W. W. — Ibid. Anaitis coarctaria. B. D. — La chenille de cette Phalénide est lisse, un peu aplatie. Elle se transforme à la surface de la terre, entre des feuilles sèches , sans former de coque. Cidaria tristata. Linn. — V. Berberis. Macaria signaria. Bell. — Cette Phalène a été trouvée par M. Bellier de la Chavignerie, dans les bois de Pins de la Lozère. Fidonia piniaria. Bell. — V. Marronier. Metrocampa fasciaria. Linn. — La chenille de cette Phalénide a le corps aplati en-dessous , et cilié sur les côtés. Elle est mume de douze pattes dont dix seulement servent à la progression. Elle se renferme dans un tissu mince avant de se transformer. Chesias firmiaria. — V. Spartier. Larentia rupestraria. V. — Tamarisc. Tortrix piceana. Linn. — V. Lierre. — dorsovittana. Zell. — Ibid. turionana. Ratz. — Ibid. —— pinivora. Id. — Ibid. Sericoris Zinckenana. Frohl. — Les chenilles de cette Platyo- mide vivent en famille et se tranforment entre des feuilles réunies en paquet. Coccyx zephyrana. Tr. — Les chenilles de cette Platyomide vivent dans l'intérieur des bourgeons , s’y métamorphosent et causent de grands dommages. ——— resinana. Fab. — Ibid. —— turionana. Hubn. — Ibid —— buoliana. Fab. — Ibid. —— strobilana. Hubn. — Ibid. ——— diana. Hubn. — Ibid. ——— janthinana. Dup. — Ibid. Grapholitha cosmophorana. Tr. — V. Ajonc. Ephippiphora pygmæana. Hubn. — La chenille de cette Pla- (506) tyomide vit de feuilles et de bourgeons ; elle se transforme dans un tissu ferme, revêtu de terre. Crambus pinatellus. Tr. — V. Tamarisc. Eudorea ambigualis. Tr. — V. Aubépine. mercurella. Linn. — Ibid. Phycis abietella. W. W. — V. Groseiller. Les chenilles vivent dans des tumeurs résineuses. : Nemophora pilulella. Hub. Zell. — V. Ciste. Tinea sylvestrella. Ratz. — V. Clématite. —— decuriella. Hubn. — Ibid. La chenille ne se nourrit pas des feuilles ou des bourgeons , mais de la partie ligneuse ; elle se loge entre l'écorce et l’aubier , et la blessure qu'elle cause à l'arbre en fait découler la résine qui, en se coagulant forme une tumeur qui trahit la présence de Ja chenille , et dans laquelle elle pratique une cellule pour s'y transformer; cette Fe en forme de tuyau est tapissée de soie. Argyresthia piniarella. Zell. — V. Cornouiller. illuminatella. Fab. — Ibid. fondella. Tisch. — Ibid. gysseliniella. Kuhlw. — Ibid. farinetella. Zell. — [d. rai glahratella. — Id. Coleophora laricella. Hubn — V. Tilleul. Gracillaria picipennella. Mann. Zell. — V. Erable. Cosmopteryx pinicolella. Id — V. Peuplier. DIPTÈRES. Cecidomyia pini. Deg. — V. Tilleul. La larve se développe dans une coque de résine sur les feuilles. brachyptera. Schwag. Ratz. — La larve vit à la base des aiguilles, et se transforme dans la terre. Leucopis griseola. Meig. — La larve de cette Muscide se nourrit des Pucerons du Pin. ‘ 507 ) PIN MARITIME. P. marilima. Lam. Les chatons mâles sont ovales ; les cônes ovoïdes où pyrami- daux, verticillés, sub-sessiles ; feuilles géminées, raides, fort longues. Cette espèce, dont la zone est peu étendue et propre au midi et à l’ouest de la France, y est devenue précieuse, surtout par son introduction dans les landes, les bruyères, les dunes les plus re- belles à la culture. C’est par lui qu'ont été converties en forêts les vastes plages du Bordelais qui désolaient les regards de leur nudité, et dont les sables, faute d'être fixés par la végétation , étendaient au loin leur stérilité par l’action des vents. Sa nature maritime se révèle, suivant Bernardin de St-Pierre , à ses pignons renfermés dans des espèces de petits sabots osseux, crénelés en-dessous, et recouverts en-dessus d’une pièce sem: blable à une écoutille, conformation qui les rend propres à vo- guer,tandis que dans les Pins habitants des montagnes, les pignons sont accompagnés d’une sorte d’aileron qui les rend volatiles. Si le bois de ce Pin est d’une qualité inférieure à celui de l’es- pèce sylvestre, il y a supériorité sous le rapport de la résine que l’industrie modifie en essence de Térébenthine, en goudron, en poix, en colophane, en noir de fumée , et qui, par son abondance, ajoute beaucoup à l'utilité de cet arbre. Les insectes qui vivent sur le Pin maritime ont donné lieu à un ouvrage spécial de M. Ed. Perris, qui doit être inséré dans les annales de la Société entomologique de France. Le talent d'ob- servation qui caractérise l'auteur, sa science physiologique , son expérience dans l’art de suivre le développement des insectes dans les différentes phases de leur existence nous sont garants du suc- cès qu'aura cet ouvrage. Quant à nous, nous nous bornons à mentionner l'es espèces qui ont été signalées sur cet arbre jusqu'à ce Jour. COLÉOPTÈRES. Xantholinus collaris. Erichs. — Ce Brachélytre se développe sous l'écorce. ( 508 }) Lithocaris fuscula. B. D. — Même observation. Omalium concinnum. Marsh. — Même observation. Chalcophora mariana. Fab. — Même observation. Agrilus cyaneus. Oliv. — V. Vigne. Ancylocheira flavomaculata. Fab. — V. Cyprès. La larve s'en- fonce dans le bois. 8. guttata. Linn. — Ibid. Phœnops tarda. Fab. — V. Peuplier. M. Perris a trouvé les larves en grand nombre dans deux tronçons de Pins. Anthaxia morio.Fab.—La larve vit sous l'écorce des Pins morts. Cratonychus brunnipes. Ziegl. — Même observation. Agrypous atomarius. Fab. — V. Chêne. | Athous rufus. Fab. — V. Chêne. La larve se développe près des racines des gros Pins morts. Perris. rhombeus. Oliv. — Ibid. Sous l'écorce. Cardiophorus rugicollis. Fab. — V. Hêtre. Ampedus sanguineus. Fab. — V. Pommier. ——— balteatus. Id. — Ibid. ———— prœustus. Id. — Ibid. — nigerrimus. Dej. — Sur les feuilles des jeunes Pins. Ludius cruciatus. Fab. — Ce Sternoxe se développe sous l'écorce. Anobium molle. Fab. — Sa larve se développe dans les jeunes bourgeons. Perr. — angusticolle. Id. — Sa larve vit dans l'écorce des Pins morts. Hæterius quadratus. Payk. — M. Perris a trouvé ce Clavicorne dans une fourmilière, sous l’écorce d’une souche de Pin maritime. Misolampus scabricollis. Grælls. — Cet Hétéromère vit sous l'écorce des Pins abattus, par groupes de cinq à six individus, en Espagne sur le Guadarrama. Uloma culinaris. Fab. — V. Hêtre. Phtora crenata. Dej. — Cet Hétéromère vit sous l'écorce des souches. Hypophlæus pini. Panz. — V. Frêne. =, ( 509 ) Hypophlœus linearis. Gyÿll. — V. Frêne. Tencbrio curvipes. Fab. — La larve de cet Hétéromère se dé- veloppe sous l'écorce. Xanthoctera carniolica. Gyss. — Même observation. Rhinomacer attelaboides. Sch. — V. Pin sylvestre. Brachyderes lusitanicus. Sch. Lap. — V. Bouleau. Hylobius pinastri. Gyll, — V. l’Introduction. Pissodes notatus. Fab. — V. Pin sylvestre. Thamnophilus carbonarius. Meg. — La larve de ce Curculio- nite se développe dans la moëlle des jeunes branches. Rhyncolus crassirostris. Meg. — La larve de ce Curculionite se développe dans les souches. porcatus. Sch. — Ibid. Sous l'écorce. Mesites pallidipennis. Sch. — Ce Curculionite vit sous l'écorce. Otiorhynchus pinastri. Sch. — V. Oranger. Dryophthorus Lymexylon. Fab. — V. Châtaignier. Hylurgus ligniperda. Fab. — V. Genévrier. Hylastes ater. Id. — Ce Xylophage se développe sous l'écorce. Dendroctonus piniperda. Fab. — Même observation. — minor. Hartig. — La femelle pratique, pour pondre ses œufs, des galeries transversales qui font quelquefois tout le tour du tronc, tandis que celles du D. piniperda les fait longitudinalement. Bostrichus bidens. Fab. — V. Clématite. laricis. Fab. — Ibid. eurygraphus. Erich. — Ibid. pusillus. Gyll. — Ibid. stenographus. Nordl. — Ibid. ———— Lichtensteini. R. — Ibid. Rhyzophagus depressus. Fab. — V. Hêtre. Colydium ruficorne. Oliv. — V. Orme. Spondylis buprestoïdes. Fab. — V. Pin sylvestre. Ergates faber. Fab. — V. Ibid. Rhagium indagator. Fab. — V. Aubépine. (510 ) Rhagium inquisitor. Fab. — Ibid. La larve , observée par M. L. Duf., se développe entre le bois et l'écorce, où elle se creuse des galeries fort irrégulières. Avant de se transformer, elle se construit une loge excavée, relevée dans sou pourtour par une sorte de fascine de fibres enroulées, sur plusieurs couches, et formant un bourrelet épais ; mais pour employer ces fibres , elle doit les assouplir, les humecter, les pétrir et les polir. Criocephalum rusticum. Fab. — V. Pin sylvestre. Sa larve vit dans les souches. Astynomus œdilis. Fab. — V. Chêne. ————— griseus. Fab. — Ibid. Monohammus gallo-provincialis. Oliv. — V. Chêne. Leplura rubro-testacia. Fab. — V. Hêtre. Coccinella 11. punctata. Fab. — La larve de ce Trimère dévore les pucerons du Pin. oblongo guttata. Linn. — Ibid. NEVROPTÈRES. Termes lucifugus. Ross. — Cette espèce niche dans les vieilles souches. HÉMIPTÈRES. Aulacetrus pini. Perris. — Cette Cimicide vit sur les feuilles. Rhyparochromus pini. Linn. — Cette Cimicide vit sous l’écorce. Xylocoris ater. L. Duf, — Même observation. rufipennis. Id. — Ibid. Cicada orni. Linn. — V. Orme. DIPTÈRES. Cecidomyia pini maritimæ. L. Duf. Bremu. — La larve en est remarquable par le cocon qu'elle se fabrique avant de passer à l’état de nymphe. Ce cocon ovale, couché dans la gouttière de la feuille et collé sur ses bords, est formé extérieuremet d’une couche unie de résine, qui est revêtue en dedans d’un tissu serré de soie. L'instinct industrieux qui préside à cette construction ne consiste pas seulement dans la réunion de ces deux substances et dans la (511) forme et l’agencement que la larve sait leur donner , mais encore dans la recherche de la résine, dans la préparation qu'elle lui fait subir pour en diminuer la viscosité et lui donner la ductilité con- venable , et surtout dans l’artifice qu’elle emploie pour fermer extérieurement avec la même substance la porte d'entrée de sa retraite (1). Pachygaster pini. Perr. — V, Orme. Medeterus pini. Id. — La larve de ce Dolichopode se développe sous l'écorce. Xylota pini. Id. — Même observation. Rhychomyia colombina. Meig. — La larve se développe dans les ulcères. Blepharipalpus humeralis. Perr. — Même observation. © Pix D'ALEP. P. halepensis. Mill. Les chatons mâles sont oblongs, cylindracés. Cette espèce, connue aussi sous le nom de Pin de Jérusalem , croît dans les sables les plus arides de l'Atlas. Introduit dans l'Europe méridionale, il y est attaqué par les insectes Xylophages propres aux espèces indigènes et particulièrement par les deux suivants. COLÉOPTÈRES. Hylurgus (hylesinus, Nord) ligniperda. Hubn. Bostrichus cinereus. Hubn. — M. Nordlinger l'a trouvé près de Toulon réuni au précédent. Pix Laricro. P. laricio. Poir. Les chatons mâles sont longs de près d’un pouce, aggrégés au nombre de 6 à 20. Ce Pin, qui se trouve en Corse, dans les Pyrénées, la Calabre, (1) M. L. Dufour, Annales de la Société Entomologique de France, année 1838, page 294. (512) l'Autriche , la Hongrie, la Crimée, est l'espèce qui atteint les di- mensions les plus considérables. Les deux Coléoptères suivants ont éte observés sur ce Conifère. Bostrichus stenographus. Duft. — V. l'Introduction. Dendroctonus piniperda. Fab. — V. Pin maritime. Ce Xylo- phage cause de grands dommages à l'allée des Pins laricio du Jardin des plantes. Les sommités des tiges deviennent d’un jaune feuille morte. Pix Srrogus. P. strobus. Linn. (1). Les chatons mâles sont courts, ovales, aggrégés ; cônes à pé- doncules. Originaire du Canada et des Etats-Unis, il s’y trouve au bord des rivières et dans les marais dont il fait l'ornement par la légè- reté de son feuillage, l'élégance de son port pyramidal et les belles dimensions qu'il y acquiert (2). 1] est en même temps l'arbre le plus utile de l'Amérique septentrionale pour la marine et les ha- bitations. Ce Pin paraît avoir été transporté en France dès le 16.° siècle. Belon en cite un qui existait alors à Fontaiñebleau , et qui atti- rait les regards par sa beauté. | En qualité d'arbre aquatique, il doit contraster avec les autres Pins , qui habitent les sols arides, et présenter des harmonies avec les eaux comme ceux-ci avec les montagnes. En adoptant le sys- tème de Bernardin de St.-Pierre,les feuilles, par exemple, du Pin Sylvestre , appropriées aux terrains en pente, sont fortement sil- lonnées en gouttières de manière à amener l'eau des pluies à la tige cannelée et de la tige aux racines. Dans le Pin strobus, les sillons sont légers, et par leur disposition en panache, les feuilles (1) Pin de Weymouth, Pin du Lord, Pin blanc, en Amérique. Strobus est le nom que les Romains donnaient aux cônes de Pins, et qui a donné liew à celui de Strobiles que les botanistes leur donnent. (2) Michaux en a mesuré un qui avait #8 mètres de haut sur 2 1/2 de dia- mètre. (513) écartent peut-être cette eau du pied de l'arbre. Les cônes du Pin Sylvestre sont arrondis et propres à se disséminer en roulant du haut des montagnes. Ceux du Strobus sont cylindriques et parais sent destinés à naviguer. Les insectes observés sur ce Pin sont : COLÉOPTÈRES. Hylurgus (hylesinus, Nordl) palliatus. Gyll. — V. l'Introduc- tion. — polygraphus. Linn. — Ibid. Bostrichus autographus. Kn. — Ibid. Lichtensteinii. R. — Ibid. Leptura rubro-testacea. Fab. — V. Hêtre. M. Nordlingen a vu plusieurs femelles sur le côté inférieur d’un tronc abattu, attirées sans doute par l'instinct d’y déposer leurs œufs sous J’écorce. Pix CEmBro. P. Cembro. Linn. Les chatons mâles sont ovales, courts, aggrégés en épis ; cha- tons femelles pedonculés ; cônes ovales, plats à la base. Ce Pin, quoique affilié au précédent , en est bien différent sous le rapport des lieux qu'il habite. Il ne se plaît que sur le flanc des hautes montagnes ; il enfonce ses racines dans les anfractuosités des rochers abruptes. Je l'ai vu dans les Alpes au haut des gla- ciers, au pied des neiges éternelles ; il croit également dans les plus âpres régions des monts Carpathes, de l’Oural, du Caucase, où il déploie sa sauvage élégance, son immense pyramide que ne peuvent abattre les ouragans ni les siècles. Le Pin Cembra partage avec le Pin Pignon la propriété d'offrir entre les écailles de ses cônes des amandes d’un goût agréable, ressource alimentaire par laquelle la Pravidence rendu habita- bles à l’homme, les sites les moins accessibles Insectes observés sur le Pin Cembro : COLÉOPTÈRES. Tomicus Cembræ. Heb. — La larve de ce Xylophage, armée 33 (514) de fortes mandibules, vit sous l'écorce et en dévore la substance en y creusant des galeries souvent remarquables par leur nombre et les dessins qu’elle y grave. LÉPIDOPTÈRES. Eudorea Cembrella. Curt. — V. Aubépine. G. SAPIN. Ages. Tourn. (1). Les fleurs sont monoïques et naissent de bourgeons aphylles. Tous les sapins habitent l'hémisphère septentrional ; dans les climats chauds de ces contrées, ils sont confinés aux régions supé- rieures des montagnes. SAPIN EPicEA. Abies picca (2). Mill. Les chatons mâles sont allongés ; les chatons femelles sont ovoï- des ; les cônes allongés ; les feuilles couvrant les rameaux. Comme le Pin Sylvestre, l'Epicea est propre à l’Europe boréale; il en couvre les plaines et les montagnes ; il y prodigue aux be- soins et à l’industrie des hommes tous les bienfaits de son bois (3), de son écorce (4), de ses racines (5), de ses cônes, de ses bourgeons, (1) Ce nom a une étymologie assez compliquée. Sapinus comme abies paraît avoir été formé d’abn, qui se trouve dans Hésychius. Abn , abinos , sapinus, sappinus. Saumaise prétend qu'il y a une différence entre sapi- nus et sappinus, et que ce dernier a été fait, par contraction, de Sapa Pinus : sap pour sapin se trouve dans Perceval : Si tient uve lance de Sap. (2) Abies picca , Mill.; Abies excelsa, de Cand.; Pinus abies, Linn.; Pinus Picea, Dur.; Pinus excelsa , Lamk.; Picea vulgaris, Link. ; Picea pec- tinala, Don.; Pesse, Epicea de Norwège, Sapin de Norwège, Pinesse, Serente, faux Sapin , Sapin rouge, Sapin gentil. (3) Le bois sert non seulement à la marine , à la charpente , mais encore à l’ébénisterie, à la boisselerie. (4) L'écorce sert au tannage , et les couches internes peuvent servir d’ali- ment. (5) Les Lapons font des cordages et des paniers avec ses racines. (515) de sarésine (1). Il se prête à tout, et se dresse fièrement en mât de nos vaisseaux, comme il se débite en jouets d'enfants. Tout grand arbre qu'il est,il permet qu'on le faconne en haïe et en charmille. Loin des régions Scandinaves, l'Epicea paraît encore en recher- cher l’âpreté, en croissant de préférence sur le flanc septentrional des montagnes, telles que les Vosges, le Jura , les Alpes, où il s'élève à 1,800 mètres au-dessus du niveau de la mer. Les insectes que nourrit l'Epicea sont sans doute en grand nombre, mais, comme cet arbre est souvent confondu avec le Sapin, ou nommé de ce nom, les Entomologistes ont dû fréquem- ment considérer comme propres au Sapin les insectes qu'ils obser- vaient sur l’Epicea. Quelques-uns cependant appartiennent spécia- lement à ce dernier Conifère. COLÉOPTÈRES. Bostrichus typographus. — V. l'Introduction. piceæ. Ratz. — Ibid. ———— Jineatus. Fab. — Ibid. Te PICEE- 7 #54 Gnivant M. Riegel, la femelle atta- que l’arbre en commençant par le sommet au uw, . ns Aénose ses œufs en tas dans des espèces de chambres qui sont pourvues de différents enfoncements, mais souvent aussi dilatées en gale- ries qui se répandent en diverses directions. Les chambres, les galeries des larves et les cellules des nymphes se trouvent dans l'écorce, de sorte que l’aubier est à peine effleuré. Mesosa nebulosa. Fab. — Ce Longicorne se développe sous l'écorce et dans l’aubier. HYMÉNOPTÈRES Tenthredo abietis. Linn. — V. Groseiller. Lophyrus piceæ. Fab. — V. Genévrier. HÉMIPTÈRES. Capsus abietis. Linn. — V. Erable. (1) La résine fournit de la poix, de la térébenthine , de la colophane. (546 | Chermes abietis. Linn. — V. Vigne. Coceus abictis. Linn. — V. Tamarisc. LÉPIDOPTÈRES. Liparis monacha. Linn. —V. l'Introduction. Il commet souvent de grands ravages dans les forêts d'Epiceas; il en est le plus grand ennemi en Allemagne , et quoiqu'il soit aussi au nombre des destructeurs du Pin Sylvestre, il est beaucoup plus avide de l'Epicea, au point qu'il épargne le premier lorsque l’un et l’autre sont à sa portée. Elatina cœnobita. Esp. — La chenille de cette Bombycide vit exclusivement sur l'Epicea. Elle se transforme dans une coque d’un tissu solide et s'enfonce un peu dans la terre. Numeria donzelaria. Dup.— La chenille de cette Phalénide est tuberculée et atténuée antérieurement. M. Bellier de la Chavigne- rie l’a élevée sur un petit Epicea en caisse, dans son cabinet. Elle a filé entre quelques feuilles un tissu lâche, dans lequel elle s’est transformée. Tortrix piceæ. Linn. — V. Fierr= mhins -vtanla. H. — V, Orme. Fidonia picearia. Hubn. — V. Marronnier. Phycis abietella, Linn. — V. Groseiller. Coceyx strobiliana. Hubn. — V. Pin. DIPTÈRES. Rhamphomyla gibba. Zett. — Cette Empidie fréquente le feuil- lage des Epiceas dans les forêts de la Scandinavie SAPIN BLANC. À. Alba. Mich. Les cônes sont courts, oblongs,presque cylindriques; les écailles en forme de coins, tronquées au sommet, très entières; ailes ovales,un peu plus courtes que les écailles. Cet arbre de l'Amérique septentrionale, remarquable par son feuillage bleuâtre et sa forme régulièrement pyramidale, n’est guère connu en France que dans les jardins. J'en ai observé un à (517) Sachin (Pas-de-Calais) (4), dont les rameaux de l’année étaient couverts au mois de juillet, d’une espèce de Pucerons verts, à fourrure légère, allongée, blanche.Le jour même de l'observation, il survint une forte pluie d'orage et le lendemain , je n’en revis pas un seul ; ils avaient tous été emportés par l’averse, tandis (1) Lieu plein de charmes pour moi pendant trop peu de temps, et devenu une source intarissable de douleur et de regret. C'est là qu'habi- fait mon bien-aimé fils ; qu’il avait trouvé le bonheur que donne un heureux mariage etla vie agréablement utile des champs; c’est là, qu’une maladie de peu de jours a détruit l'espoir d’un long et doux avenir, fondé sur la jeunesse et la santé. Il se livrait à la culture d’une partie de son domaine, dans le but prin- cipal de faire participer les habitants du canton au progrès de l’art agri- cole, dont il faisait une étude assidue. Il s’occupaitaussiavec zèle del’élève du cheval , qui dans cette partie de l’Artois est favorisée par la qualité des pà- furages. Il voulait coopérer à la réintégration dans sa nature primitivede la race boulonnaise à la fois robuste et énergique , dont le sang fortifie toutes les races dans lesquelles il est introduit par le croisement; il y réussissait et il acquérait des droits à la reconnaissance publique , en suivant l’im- pulsion de son cœur vers tout ce qui est bon et utile. Maire de sa petite commune , il se félicitait de pouvoir se mettre en rap- port avec tous les habitants, connaître leurs besoins , leur venir en aide, les éclairer de ses conseils , entrer dans leurs intérêts, concilier leurs dif- férents, les soulager dans leurs infortunes, de sorte qu'il n’y avait pas de pauvres autour de lui, ou au moins il ne pouvait y en avoir longtemps. Il n’y existait pas davantage de dissensions politiques, cet autre fléau de notre époque , tant on se ralliait avec confiance à ses convictions. Sachin était un oasis où l’on respirait un air doux et pur comme les eaux de la Clarence qui y prennent leur source. Tout le bien que produisaient cette activité, ce zèle, ce dévouement, cette charité, est anéanti ; toutes les promesses de l'avenir , fondées sur la force de l’âge et de la santé, se sont évanouies en peu de jours; il ne reste qu'une tombe, une veuve abimée dans sa douleur, et deux enfants trop jeunes pour connaître leur malheur ; mais cette tombe est celle d’un chrétien qui du céleste séjour (je puise ma confiance dans la miséricorde divine), prie pour tout ce qui lui fut cher ; cette veuve, qui possède à la fois tant de force de caractère et de délicatesse de sentiment, est animée de toutes les généreuses inspirations qu’elle puise dans son sang et dans la mémoire de celui qu’elle pleure ; cesenfants, tout faibles qu'il sont, montrent déjà le germe des vertus que l'éducation maternelle saura développer. LA ( 518 ) que sur des Epiceas contigus à cette Sapinette, des pucerons que J'avais vus également la veille, avaient résisté à la pluie. SAPIN COMMUN. À. vulgaris. Poir (1. Les chatons mâles sont ovales , obtus, rapprochés ; les chatons femelles à écailles portant les pistils ; feuilles d'un vert foncé et luisantes en-dessus , d'un glauque blanchâtre en-dessous. Tandis que l'Epicea , l'arbre de la Norwège, descend vers le Midi, comme les anciens Scandinaves, et ne disparaît entièrement que vers les bords de la Méditerranée, le Sapin commun semble dominer sur le penchant des Pyrénées, des Alpes, d’où il re- monte vers le Nord en pénétrant dans les Vosges , la Forêt noire. Je l'ai vu formant une des zones végétales de la base du Mont- Blanc, au-dessus de celle des Chênes, au-dessous de celle des Mélèzes. C'est là que sur la pente méridionale entre Dolone et Pré Saint-Dizier , s'élève depuis 1,200 ans, le colosse connu sous le nom d’écurie des Chamois , dont le tronc a près de huit mètres de circonférence. Pline fait mention d'un Sapin de sept pieds de diamètre, qui servit à faire le mât d’un vaisseau, sur lequel l'Empereur Galigula, fit apporter d'Egypte à Rome, un obélisque qui fut élevé dans le cirque du mont Vatican. Les anciens employaient le Sapin pour faire des javelots , comme il le paraît par ce passage de Virgile : Cujus apertum, Adversi longa transverberat abiete pectus. Æneid.. (4) Pinus picea, Linn.; Abies picca , Lindl.; Abies pectinata , de Cand.; Abies taxifolia, Desfont.; Abies candicans , Fisch.; Abies excelsa, Link. ; Picca pectinata , Loud. Sapin blanc; S. argenté; S. à feuilles d'If, S, des Vosges, S. de Nor- mandie ; Avet en Catalogne. (519) Les insectes observés sur le Sapin commun sont: COLÉOPTÈRES. Dromius 4. maculatus. Fab. — V. Peuplier, ——— À, notatus. Panz. — Ibid. punctatellus. Duftschn. — Ibid. glabratus. Panz. — Ibid. ———— sigma. Duftsch. — Ibid. Ancylocheira flavo-maculata. Fab. — V. Cyprès. —————— 8 guttata. Fab. — Ibid. Telephorus prolixus. Mæœrkel. — V. Sureau. M. Merkel l'a trouvé en assez grand nombre sur les jeunes Sapins de la Carinthie. Clerus 4. maculatus. Fab. — V. Pin. Sur les troncs. Rhysodes europœus. Dej. — Ce Térédile vit dans le bois décomposé. Anobium abietis. Fab. — V. Vigne. La femelle dépose ses œufs en tas au fond d’une cavité en forme de bourse, sous l'écorce. Lorsque les larves éclosent, elles forment des galeries qui s’agran- dissent et se commaniquent entre elles. abietmum. Gyll. — Ibid. Hybæcetus dermestoides. Fab. — V. Orme. Peltis grossa. Fab. — V. Chêne. —— ferruginea. Id. — Ibid. —— oblonga. Id. — Ibid. Ips. 4 notata. Fab. — V. Hêtre. —— 4 pustulata. Id. — Ibid. —— bimaculata. Gyll. — Ibid. —— 4 guttata. Fab. — Ibid. —— abbreviata. Panz. — Ibid. ; Strongylus luteus. Herbst. — Ce Clavicorne se développe sous l'écorce. Thymalus limbatus. Fab. — V. Hêtre. Engis rufifrons. Fab. — Ibid. Hypoplœus pini. Panz. —-V. Frêne. ( 520 |) Hypophlœus castaneus. Fab. — V. Frêne. Dircœæa discolor. Fab. — V. Hôtre. ——— variegata. Id. — Ibid. ——— lœvigata. Ziegl. — Ibid. ——— ferruginea. Panz. — Ibid. Mycetochara barbata. Linn. — Cet Hélopien vit sous les écorces. - bifoveolata. Duf. — Ibid. Calopus serraticornis. Linn. — V. Pin Sylvestre. Serropalpus barbatus. Fab. — La larve de cet Hétéromere se développe sous l'écorce. Hylobius abietis. Linn. — V. Saule. Pissodes pini. Fab. —V. l'introduction. La larve vit de la seve, du cambium et des sucs que renfefme la partie intérieure de l'écorce. ; Disopus abietis. Suff. — La larve de ce Curculionite n'est pas connue. Rhyncolus crassirostris. Mag. — Même observation. pyrœneus. Duf. — Ibid. Brachyderes incanus. Fab. — V. Bouleau. lusitanicus. Id. — Ibid. Hylurgus ater. Fab. — V. Genévrier. elongatus. Herbn. — Ibid. piniperda. Fab. — Ibid ligniperda. Fab. — Ibid. Hylesinus crenatus. Fab. — V. Lierre. Bostrichus abietis. Ziegl. — V. l’Introduction. typographus. Fab. — Ibid. pusillus. Fab. — Ibid. autographus. Fab. — Ibid. limbatus. Fab. — Ibid dispar. Fab. — Gyll. curvidens. Fab. — Jbid. ————— laricis. Fab.— Ibid. monographus. Fab. — Ibid. a mn (521 ) Bostrichus hysterimus. Duft. — Gil. vilifrons. Duft. — Ibid. dryographus. — Ibid. Hylastes abietis. Erich. — Pin maritime." Cryphalus abietis. Ratz. — La larve de ce Xylophage se déve- loppe sous l’écorce. Rhyzophagus ferrugineus. Panz. — V. Hêtre. Trogossita caraboïdis. Fab. — V. Peuplier d'Italie. Colydium elongatum. Fab. — V. Orme. Isarthron luridum. Fab. — Ce Longicorne se développe dans l'aubier. Callidium rusticum. Fab. — V. Aubépine. variabile. Linn. — Ibid. griseum. Fab. — Ibid. sanguineum. Linn. — Ibid. Ou trouve quelquefois sa larve dans des planches de Sapin. Astynomus œdilis. Fab. — V. Chêne. atomarius. Fab. — Ibid. Monohammus sartor. Fab. — V. Chêne. — sulor. Fab. — Ibid. Rhagium indagator. Fab. — V. Aubépine. — inquisitor. Fab. Ibid. bifasciatum. Fab. — Ibid. Cryptocephalus abietis. Knock. — V. Cornouiller. ————— 4 pustulatus. GYIL — Ibid. Agathidium seminulum. Let. — Ce petit Erotilène se déve- loppe sous l’écorce. — magnum. Duf. — Ibid. Scymnus abietis. Payk. — La larve de ce Trimère dévore les Pucerons. HYMÉNOPTÈRES. Pamphylius abietina. Fab. — V. Poirier. Nematus saxesenii. Ratz. — V. [rene, Dolerus abietis. Zur. — V. Rosier. ( 522 ) Tenthredo abietis. Fab. — V. Groseiller. HÉMIPTÈRES. Aradus dilatatus. E. Duf. — V. Chêne. - ellipticus. L. Duf. — Ibid. Capsus abietis. Fab. — V. Erable. Psylla abietis. Bouche. — V. Buis. Aphis abietis. — V. Cornouiller. Kermes (Elatocecis. Am.) Geoff. — V. Vigne. ——— viridis. Ratzeb. — V. Ibid. — coccineus. Id. — Ibid. LÉPIDOPTÈRES. Bombyx monacha. Linn. — V. l'Introduction. Dasychira abietis. Esp. — V. Noyer. Lasiocampa lobulina. Hubn. — V. Poirier. Geometra montanaria. Zell. — V. Berberis. Timandra pectinaria. W. W. — La chenille de cette Phalénide est renflée en massue dans sa partie antérieure, avec la tête petite et enfoncée sous le premier segment. Elle se renferme, avant de se transformer, dans un léger tissu enveloppé de feuilles. Boarmia abietaria. W. W. — V. Tulipier. Glyphiptera abietana. Hubn. — V. Orme. Tortrix abietina. Ratz. — V. Lierre. ——— abietis. Ratz — Ibid. —-— adjunctana. Zell. — Ibid hercyniana. Zell. — Ibid. Sericoris abietisana. Frey. — La chenille de cette Platyomide vit et se métamorphose entre des feuilles réunies en paquet Coccyx comitana. W. W.— V. Pin sylvestre. —— nanana. Tr. — Ibid. Crambus abietella. W. W. — V. Tamarisc. Eudorea sudeticella. Zell. — V. Aubépine. Phycis terebrella. Zell. — V. Groseiller. abietella. W. W. — Ibid. (523 ) * Tinea sylvestrella. Ratz. — V. Clématite. —— abietella. Id. — Ibid. —— bergiella. Ib. — Ibid. Argyresthia fundella. Zell. — V. Cornouiller. præcocella. Id. — Ibid. argentella. Id. — Ibid. gyssoliniella. Id. — Ibid. illuminatella. Ratz. — Ibid. Gracillaria picipennella. Mann. — V. Erable. DIPTÈRES. Cecidomyia pilosa. Brem. — V. Tilleul. La larve se transforme dans un cocon que l’on trouve en hiver sur les aiguilles des Sapins. G. MÉLÈZE. Larix. Tourn. Les fleurs sont monoïques ; les chatons solitaires, terminant de très-courts ramules latéraux ; les feuilles caduques. Le Mélèze commun, entre tous les arbres, n’est inférieur qu'au Cèdre du Liban en prééminence, sous le rapport de la beauté, du port, de l'élévation, des dimensions, des qualitésidu bois. Il habite de préférence les Alpes dont il forme la zone végétale la plus élevée, à l'exception des Rhododendrons. H en existe dans le Valais, sur la montagne d'Eudzon, un individu que sept hommes peuvent à peine embrasser. À peu de distance du Mont blanc, près du col du Ferré, un autre Mélèze mesure 5 mètres et demi de circonférence, et est réputé de l’âge de 800 ans. Le plus grand arbre qui ait été vu à Rome, selon Pline, était un Mélèze, que Tibère avait fait amener de la Valteline et que Néron employa à la construction de son amphithéâtre. On en fit une poutre qui avait 120 pieds de long sur deux d’équarrissage, ce qui supposait à l'arbre les dimensions les plus colossales que l’on püt concevoir. Son bois est durable au point que les constructions de Venise qui datent de sa fondation, reposent sur des pilotis encore intacts de Mélèze. (524) Malesherbes à vu dans le Valais en 1778, une maison en Melèze, qui avait 240 ans, et dont le bois était encore entièrement sain. Ces maisons se construisent en plaçant des pièces de Mélèze, d'un pied d’équarrissage les unes sur les antres , et, au lieu de tuiles, on couvre les toits avec des planchettes du même bois. Les insectes observés sur le Mélèze ne sont pas nombreux. COLÉOPTÈRES. Agrypaus fasciatus. Fab. — V. Chêne. varius. Fab. — Ibid. Athous undulatus. Payk. — V. Chêne. Calopus serraticornis. Fab. — V. Pin sylvestre. Bostrichus laricis. Ratz. — V. l'Introduction. Cis laricis, Mellié. — V. Bouleau. ; Phalacrus caricis. Mellié Nord. — Ce Clavipalpe passe l'hiver dans les interstices de l'écorce. HYMÉNOPTÈRES. Lophyrus laricis. Jar. — V. Genévrier. HÉMIPTÈRES. Psylla laricis. Macq. — Nous donnons ici l'extrait d’un mé- moire que nous avons publié sur cet insecte en 1819. Les larves quelques jours après leur éclosion, se couvrent d’une substance filamenteuse, blanche. Elles se fixent comme les Cochenilles ; les feuilles sur lesquelles on les observe ne tardent pas à se couder et à jaunir au point sur lequel chacun de ces petits insectes s’est établi, et d'où il tire, au moyen de sa trompe, les sucs_ dont il se nourrit. Au commencement du mois de juin, après avoir changé plusieurs fois de peau en grandissant, une partie de ces petites Psylles n’élaborent plus de substance filamenteuse, et elles se montrent munies de petites enveloppes qui renferment des rudi- ments d'élytres et d'ailes, tandis que d’autres, à peu près aussi nombreuses, restent couvertes de cette espèce de duvet, et sans aucune apparence d'élytres. Quelques jours après, les premières ( 595 se transforment en insectes ailés d'un noir mat, les élytres trans- parentes, avec un large bord vert au côté externe. Après avoir vécu peu de jours, pendant lesquels elles montrent beaucoup de vivacité, elles meurent et disparaissent. Les autres, sans perdre la forme de larves, déposent un assez grand nombre d'œufs rou- geatres et oblongs, en les fixant chacun à l'extrémité d’un pédi- cule dont la base est collée à la feuille, et en les couvrant en partie de leur matière filamenteuse. Ces œufs donnent naissance, au bout de huit à dix jours à de nouvelles larves qui se dispersent bientôt sur le feuillage. Quant aux mères, je crois qu’elles sur- vivent à cette ponte, parce que j'en ai vues qui étaient planes de vie après la dispersion des larves ; que je n'ai jamais trouvé leur dépouille desséchée près des coques d'œufs, comme on vait celles des Cochenilles, etque, parmi les petites Psylles qui se répandent sur le feuillage au mois de juillet, on continue à en voir de grandes, couvertes de duvet, qui sont, selon toute apparence, les mêmes qui ont produit cette génération. On a déjà fait la même observation à l’égard de l'Orthesia urticæ. Je suis persuadé que ces deux sortes d'individus, les uns qui restent aptères, et les autres ailés, sont, les premiers les femelles, et les autres les mâles. Je n'ai jamais trouvé d'œufs dans le corps de ces insectes ailés, à cette époque. Cependant il n’en est pas de même plus tard : au mois d'août, on voit de nouveau des Psylles #ans ailes devenir mères ; mais on voit aussi des individus ailés, entièrement sem- blables à ceux qui avaient paru au mois de mai, se fixer sur les feuilles du Mélèze, et déposer des œufs également pourvus d'un pédicule. À mesure que ces Psylles déposent leurs œufs, leur abdo- ment diminue de longueur, de sorte qu'il est totalement oblitéré à la fin de la ponte. Les œufs remplissent alors tout l’espace qu'il occu- pait, etils sont entièrement recouverts en toit par les élytres et les ailes de l'insecte qui vit immobile pour les garder, et dont la dé- pouille leur sert encore de rempart après la mort. Outre ces indi - vidus ailés dont le sexe n'est pas douteux, on en voit en même temps qui n'en diffèrent que par la légèreté avec laquelle ils | 526 s’échappent lorsqu'on veut les saisir, et qui sont, selon toute ap- prrence, des mâles. Les petites larves, qui tardent peu à éclore, se dispersent au mois de septembre, et, lorsque le feuillage com- mentce à tomber, elles se retirent pour la plupart dans les canne- lures des jeunes branches où elles passent l'hiver. Le: Psylles du Mélèze diffèrent donc, sous ce rapport, des autres espèces connues , dont tous les individus adultes ont des ailes, qui ne produisent qu’une seule génération, et qui ne se fixent jamais à la manière des Gallinsectes. Outre ces différences, leurs antennes au lieu d'être composées de neuf articles allongés , n'en ont que cinq courts, avec les deux soies terminales diver- gentes , caractère essentiel des Psylles ; leurs élytres n’ont point les nervures intermédiaires et internes bifurquées vers l'extrémité; elles ne portent ni les deux tubercules dont la tête est ordinai- rement munie, ni la tarière qui termine l'abdomen des femelles. Enfin les tarses n’offrent qu'un seul article au lieu de deux. L'existence de la Psylle du Mélèze paraît indiquée dans les voyages de Saussure, parlant de l'excellence du miel que produit la célèbre vallée de Chamouni , ce savant dit que l'opinion la plus probable attribue la bonne qualité de cette substance aux Mélèzes. Eneffet, continue-t-il, les feuilles de cet arbre qui est très-com- mun, transsudent en certain temps , une espèce de manne que les abeilles recueilleft avec beaucoup d'empressement. Or cette espèce de manne n est sans doute autre chose que de petits grains blancs, de saveur sucrée, élaborés par les Psylles. Aphis (Laricethus. Am.) laricis. — V. Cornouiller. LÉPIDOPTÈRES. Tinea laricinella. Ratz. — V. Clématite. Coleophora laricella: Hubn. — V. Tilleul. G. CEDRE. cenrus. Juss. (1) Les fleurs sont monoïques ; les chatons mäles solitaires, cylin- (1) En hébreu, Arez; en arabe, Chitram , d'où parait dérivé Cèdre. ( 527 ) driques, à nombreuses étamines ; chatons femelles solitaires ou géminés, cylindriques , à bractées ; feuilles persistantes. Le Cèdre du Liban, ce roi des végétaux, cet emblème de la puissance, se rattache à Salomon , au temple de Jérusalem, à l'Arche d'alliance , au palais de Persépolis, d'Ephèse ; il jouit d’une célébrité à l’abri, comme son bois, de toute altération. Réunissant au plus haut degré les formes, l'élévation, l’am- pleur, la longévité (1), il domine tout le règne végétal, ainsi qu'il régnait sur les cimes du Liban, avant que la hache n'eût presque tout abattu (2). Il ne survivra bientôt à cette des- truction que par son introduction en Europe, trop restreinte encore aux parcs et aux jardins. Tels sont les cèdres plantés en 1469 par Ebérard de Wurtemberg dans la cour du vieux château de Montbeillard, ceux du jardin botanique de Chelsea, qui datent de 1683; celui du lord Pembrock, à Wilton, de Duhamel du Monceau, à Denainvillers, de Baville, plantés par de Malesherbes, le défenseur , l'ami de Louis XVI. Enfin celui du jardin des plantes et son frère jumeau, du parce de . Montigny, près de Meaux , rapportés l’un et l’autre d'Angleterre en 1734 par Bernard de Jussieu dans son chapeau, dont l’un plus célèbre , mais mutilé dans son sommet, présente dix pieds de circonférence 3), à la hauteur de six pieds de terre, tandis que l’autre en mesure vingt-un, et que, dans toute la puissance de sa végétation , il a pris une élévation et une couronne immenses. Si, dans l’espace de 120 ans, si court pour un Cèdre, il a pris de telles dimensions, quel sera son développement, sa majestueuse (1) Pline cite un Cèdre qui fut employé par le roi Demetrius, pour une galère, et qui avait1130 pieds de long, et trois brasses d'épaisseur. Il en existe encore sur le Liban, qui ayant 12 mètres de circonférence peuvent avoir neuf siècles d'existence, d’après l’évauation qui en a été faite. (2) Il n’en reste qu’une petite forêt d’une centaine d'arbres. (3) M. Lesliboudois a vu en Algérie une table de cèdre , formé d’une seule pièce , d’un mètre soixante de diamètre , et on lui a dit qu’il y en avait de doubles en dimensions. : 528 ) beauté dans plusieurs siècles, si Dieu lui prête vie (4) ? Il égalera peut-être ceux qu'a célébrés Salomon, et d’où le prophète Ezéchiel, tirait la comparaison suivante: Ecce Assur quasi Cedrus in Libano, pulcher ramis et frondibus nemorasus, etc. Si l'on calculait l’âge des plus gros Cèdres du Liban, qui ont été mesurés par quelques voyageurs , ceux dont le tronc avait, selon Maundrell et Pockocke, 36 pieds de circonférence, devraient avoir 900 à mille ans. Aucun insecte, à ma connaissance, n'a encore été signalé comme vivant sur cet arbre; seulement j'ai observé un cèdre de mon jardin de Lestrem, dont la tige principale, encore herbacée, mais déjà longue de vingt centimètres , était rongée par une che- nille à son extrémité ; elle y avait filé quelques brins de soie qui paraissent être un commencement de cocon ; l'ayant déposée dans un bocal, j'ai desiré l’élever à l'état ailé ; mais je n’ai pu Y parvenir. (1) Ce Cèdre a été planté dans le pare de Montigny, par M. de Trudaine, intendant-général des finances. Ce domaine élant actuellement au point d’être vendu et le Cèdre d'être abattu, il s’est ouvert une souscription pour en assurer la conservation. Puisse-t-elle être couronnée de succès. 529 ) TABLE ALPHABÉTIQUE DES ARBRES ET ARBRISSEAUX MENTIONNÉS DANS L'OUVRAGE, Pages MARCDUOL 2 TM Nne 316 | Coïignassier.......,414e. us, ITU SES RE Entre 342 | Cornouiller.......... TS otre TER EDP GOOM A. 7.0 eee ele Alkisier COMMUN............:. AO PMÉOHETIEL 20e as M eur ee ed Amandier commun........... 314 | Cyprès commun...... home AMBOHSIOL ue cc acen dem 345 chauve... Dec Aristoloche clématite ......... 375 | Cytiseaubours............... AUBECOMMUN. note 2464 | DADRNO RER CE RS ER Baguenaudier............ "real EFADIO DIANE.. 25... ae Berbéris épine vinette.... 229 SYCOMOTE. ee ide HaHleanes nie ee tRrtoete 429 SyIvesire.. .Lannth ce Bruyère commune............ 243 ÉIGUIen. 2. deecLemet-che RHIS ce "ACT BE EE 0e 2746: Enamboisier.. 3.24. DTSS OR EERP EC 346 | Frêne commun.....:......... GARD"... ina se tipebe SO DU IP E SAINS. ce de rite Gèdre du Liban .....,.....:. DAD AR CALE RER SNL SC UU A SES Cerisier commun......:...... 22% |: Gent DIANC .25...2.:.:e00r Bois de Ste.-Lucie.... 327 De GCORSC NT CE RE dSTADIESS. 2e 326 MONOSPErME. .......... Chalef, Olivier de Bohême..... 377 des teinturiers ......... DHBRNATP- 228 hate cree oise 445 | Genévrier commun...... dos DRAP ne 2e eecre eue 456 SANTE". CRE GhéneCOMMUN . . : ses 260 GEENATIEN: reset Mipales uen . 478 | Groseiller ...... TI Ne Rte KETIMÈS ER Sen ÉARRSD LE EUR Ne Ur NE en OR sine sea sou strate AS O RMÉITE Er ARE ee pelle té (ERA ESA RTE AT HIDPOPhAE ee Mere NÉHSO En ae free BAIN IEHOUS AE D ete D AAC TRE Chèvrefeuille .........°....., D A RARE Se ee ie stone nee EE mile deleis de e platsie els PASS TASMIN . 2. ee ec ac es ETUIS LPS RER TE CR) AE Un 9 (9 HE 0e GORGE Co ser ts (Lane (CSSS SRPRMERRE HE OMIS TAUTICNITOSPE--e eoneleacses 34 378 353 { 530 } LedMe AS LCR 34601 Plalant Er eee PR © 1° Lier See Er een 29m POITIERS CIE 303 EL cs SE CU HE BD") APOTNMIEr > Me et LE TEE 309 Liquidambar................. 418 | Prunier commun............- 317 LORICÉEP RE. 2 NME EC 360 Druneler rec re 318 MArNDOier: :.:.- + eee "02684! Rh0d0ra;:-L Lecce core tree 346 MÉIOZE RS 2 25 sacre een 523 | Robinier faux Acacia ...... ou) OS MICOCOULIET: . . +. stereo e #26 PF INROMAT EE ae en messe 349 MÜrible-c Es: eh Tenues L09AIL ROSE METIER 347 MIVRÉESR EN NAN 2434 RONCO" ; 4 Mers ee ROUEN 391 Néflier aubépine.... ........ 26 HROSIGT PEL este ect 2... 1280 Nerprun Bourgène ......... "4, 2680 |MSADIN DIANC 7... ce Noie purgatif....... SEP NE268 COMMUNE 518 NOVERE M EEE ER Recipes 279 ÉPICeA 15482 200 ARE 514 ONNIET RER En ete nee 366:| Saûle Planc::.. see 381 CANTON ee meer 273 à cinq étamines ........ 393 OTME SE Er reEe SE CEPRRMA € 419 feuilles d'Amandier..... 393 OTHER RER Re 370 fragile..... A En D 392 Palmier Dattier...... FUPERE, 219 marceau.. 22220 RS 295 FawWlonia: 1.1." .... 352 | ——àoreillettes..........7. 396 PÉCRENS ET ar tas ee MNT DOUTDIE.---- 7... ONENISDE Pépin e eones AO 396 à quatre étamines....... 393 ———— blanc......... RE UE 403 viminal:... "to re 393 du\Canadar er rare 407 | Sorbier ..... ge RER 300 d'italies.,e.- me 406 | Spartianthe......... PR A 334 DOTE RER ee HUB IESDAr lien. senc teen A té lc 1 NOM RRErTE 403 | Spirea à feuilles de saule ..... 284 FRA ARE EE RE EE 497 | Sumac des corroyeurs......... 277 —POMPTO entente rene Df1 | Süreau..."" PR eu ET Sd 356 AATICIO ee ee ee GTIT LCTAMATISC TRE ER 239 = MANN PR MAT Uee SU l'EUIEUL.:+. 8 ET 245 STD ALU 1 RAS PU A G192 Pl TONER ee Re 363 2EGylvestres- 2 Ur en #97 | Tülipierk 42.258 60000 233 LOUIS er a Eee GLS) PIVTENCATEMRELTE A Oo À 250 Pistachier cultivé............. 978 | Viorne commun... .. 7... 355 lonthisquet:xs<. ire 277 ODIEL ER Eee CRC À: 8 355 terebinthe::"..". 278) DIWeISOlA terne. nee O 362 ÉTAQUEMINIErNE EN... ht SES" | 'XYIosteuM "ere sen IS OT ! ca | nc Douai | Dœhy Léuvre BE re | Tr 7 { | Y La 2 ki 2 [R " \ J \ f \ { ; : dn 1e 68 \ ? > ripe ire (> Crntin d P À 4 se £ Freitas Varie Boucuarx | CA 5 3 cn Buy Wa 27 f 3 A 6 0” u DU CONTE Him CR CO De à V 7 ru à D'OSTREVANT = Anveux Ÿ'##107% | À STE —— (4 ( f FT : vb { LÉCLUS ET NX l'rèr 22 ; 2 | L Frestte , 3} ; ( 591 ) DOCUMENTS POUR SERVIR A L’HISTOIRE DU COMTÉ D'OSTREVANT, Par M. LE GLay, membre résidant. Cette petite contrée, qui tour à tour appartint à l’Artois, à la Flandre et au Hainaut, n’a jamais été décrite d'une manière un peu complète. Jamais on n’en a fixé positivement les limites ; jamais enfin on n’a donné une chronologie des seigneurs qui por- taient le titre de comtes d'Ostrevant. Les savants auteurs de L'art de vérifier les dates n’y ont pas songé, eux qui énumèrent si complaisamment les seigneurs de diverses localités assez obscures, telles que Acquest, Audechs, Astarac, Bours, Brie, Cerdagne, Corbeil, Douzi, Esquencourt, Fosseux, Goritz, Heinsberg, etc., etc. Certes, la province qui servait d’apanage aux fils aînés des puissants comtes de Hainaut méritait bien autant d'honneur qu'Astarac, Melgueil et Tartigny. Meibomius, dans son curieux mémoire: De pagis veteris Germanie, nomme tous les cantons bel- giques; il n'oublie que l’Ostrebannus. Il y a plus; durant tout le moyen-âge, on ne put parvenir à décider si le comté d’Ostrevant relevait de l'empire ou bien de la France. Je n'ai pas la prétention de remplir ces lacunes et de résoudre toutes ces difficultés. Je veux seulement placer ici sous les yeux du lecteur quelques documents propres à éclaircir l’histoire féo- dale de cette province. On me permettra toutefois quelques ob- servations sur le nom et les limites de l'Ostrevant. Le nom de l'Ostrevant, Pagus Austrobatensis, Se lit pour la première fois dans la vie de sainte Rictrude , abbesse d'Hamage, (53) . qui vivait au VII.C siecle (1). Le Hainaut lui-même ne saurait re- monter plus haut. Le Paqus Ostrobannus est nommé ensuite dans un diplôme de Charles-le-Chauve pour l’abbaye de Marchiennes, sous la date de 877. Eà, on l'indique comme faisant partie du comitatus atrebatensis. Or, le mot comitatus ne peut signifier ici qu'un pagus major, puisque les comtés proprement dits n'exis- taient point encore. Il faut conclure de là que l’Ostrevant était un pagus minor. On s'est évertué beaucoup à rechercher l'origme de ce mot Ostrevant. Le bon Jacques de Guyse, à qui les expédients ne manquent jamais pour se tirer d'affaire, invoque doctement l’au- torité de Tomellus et d’Almeric pour nous apprendre comme quoi en 453, Valamer, roi des Ostrogoths, vint envahir la Pevèle, c'est-à-dire tout le territoire qui s'étend de Cambrai à Lille, et en forma quatre portions, savoir : la Pevèle proprement dite, le pays de la Lys, le Carembaut et l'Ostrevant qui eut ainsi l'hon- neur spécial de tirer son nom des conquérants ostrogoths. Or, il n’est pas bien nécessaire, ce me semble , de se mettre en si grands frais d'érudition historique et de recourir à des conquêtes imaginaires pour trouver cette étymologie topographique. Dé- composez Austrebannus et ses variantes; vous aurez, je crois, ost qui en teuton veut dire l’est (2), puis bannus ou bannum qui signifie canton, territoire. Pagus Ostrebannus est done la même chose que pays de l’est, c'est-à-dire situé à l'orient par _rapport au pagus Atrebatensis dont il était une dépendance. Henschenius, dans ses notes sur la vie de St. Adalbald , adopte une autre origine. Selon lui, le mot Austrebantia, Ostrebannus, signifierait limite de l’Austrasie, parce qu'en effet, dit-il, là se (1) Je ne comprends pas que le P.Wastelain ait pu dire que ce nom est men- tionné dans la vie de sainte Gertrude. Wastelain a voulu parler sans doute de la vie de sainte Rictrude écrite par Hucbald. (») Voyez Kollar, Analecta Vindobonensia, 1, 659, à propos de l'étymologie d’Austria. (533 | terminait le rovaume d’Austrasie. Acta SS. Belgii. IT, 400. Le lecteur jugera si cette opinion du savant jésuite est suffi- samment établie. Au surplus, il serait puéril de s'arrêter plus longtemps sur des discussions de mots qui ne sont ici que fort secondaires. Ons’accorde assez à reconnaitre que l’Ostrevant était circonscrit par les trois rivières de l'Escaut, de la Scarpe et de la Sensée ; de sorte qu'on trouve Douai sur la limite du nord , puis Arleux, Valenciennes, Bouchain et Mortagne sur les autres points extrêmes de son territoire. Il confinait donc au Cambrésis par le sud , à la Flandre par le nord , au Hainaut par l’est et à l’Artois par l’ouest. Carpentier, le continuateur de Ducange, n’admet pas cette délimitation. Il place l'Ostrevant entre la Haine et l'Escaut. C’est y placer, en dépit de toutes les données historiques, Mons, Bavai, Quiévrain et Sebourg. M. Harbaville met dans l'Ostrevant tout le canton de Marquion, Mémorial du Pas-de-Calais, Y, 209. L'esti- mable écrivain n'apporte aucune raison pour justifier cette opi- nion tant soit peu hasardée. L'Ostrevant, limité comme nous venons de le dire, avait une étendue de neuf lieues dans sa plus grande longueur, et de quatre lieues dans sa largeur la plus vaste. {Voir la carte ci-jointe.) M. Meugy, ingénieur des mines, auteur d’un curieux et savant mémoire sur la géologie de la Flandre française , nous fournit des notions précieuses sur la constitution interne du sol de l’Ostre- vant, qui est surtout remarquable par son bassin houiller , l'un des plus riches du nord de la France. Ce qui caractérise la super- ficie du même sol c'est la craie, alternant çà et là avec le sable qui se montre spécialement sur les collines boisées. Nous ne pou- vons que renvoyer à l’utile ouvrage de M. Meugy ceux de nos lecteurs qui voudraient connaître plus spécialement la nature des terres du petit ‘pays qui nous occupe. Je dois signaler comme un fait digne de remarque, le nombre d'abbayes que renfermait ce territoire de l'Ostrevant. C’étaient Anchin, Denain, Hasnon , Marchiennes et Vicogne, auxquels (534) on pourrait ajouter Crespin, Flines, Fontenelle, Saint-Sauve et le Verger , situés sinon dans la même circonscription, du moins dans la même vallée et sur les mêmes limites. On trouverait difficilement en France autant de maisons religieuses établies en pleine campagne, dans un espace aussi restreint. De ces monas- tères de l’Ostrevant , trois existaient avant l'invasion des Nor- mands, savoir : Denain, Hasnon et Marchiennes. Il résulte de di- plômes délivrés par Charles-le-Chauve, en 877, que les deux sexes y étaient admis à l’observance des vœux monastiques. Cres- pin et Saint-Saulve sont aussi antérieurs à l'invasion normande. Les abbayes, soit de l’Ostrevant, soit des environs, étaient toutes placées sur le bord des rivières, de l'Escaut, la Scarpe ou de la Haine , au sein d’une vallée que les eaux recouvraient souvent. Il est facile de voir que l'intention des fondateurs fut tout à la fois d'appliquer les cénobites au desséchement , à l'exploitation de ces terrains jusqu'alors incultes, et de leur ménager , par les ressour- ces de la pêche , des moyens d'alimentation conformes aux pres- criptions de la règle bénédictine. Les documents que je publie ici se rattachent à la grande con- troverse qui eut lieu à la fin du XIII et durant une partie du XIV® siècle, entre les rois de France cet les empereurs , au su- jet de la suzeraineté de l'Ostrevant. Cette question, il est vrai, a été traitée par P. Bonamy , Mémoires de l'Académie des Inscrip- tions . tom. 37, pag. 443 ; mais le docte académicien , qui n’a- vait pardevers lui que des titres favorables aux prétentions de la France, n’a envisagé la matière que sous un seul point de vue. Parmi les actes que je produis ici, il en est un surtout qui plaide vivement et non sans habileté les droits de l'empire sur l'Ostrevant. Ce mémoire, -qui est l’œuvre de Godefroy de Bavai, abbé de Vicogne et conseiller des comtes de Hainaut, mort en 1344 , est coté IT ci-après. (535) Commission donnée par Philippe de Valois, roi de France, à l’évêque de Laon et à Pierre de Cugnières , chevalier , pour avec les députés du comte de Hainaut} informer des parties de l'Ostrevant qui sont tenues du royaume de France. — 1328. Janvier 29, à Paris. Philippe par la grace de Dieu roys de France. A tous ceus qni ces lettres verront salnt. Savoir faisons a touz que nous notre amé et féal Guillaume conte de Haynnau, de Hollande, ete., avons reçue en nostre foy et en notre hommage de l'Ostrevant, qui est et doit estre de notre royaume, si comme nous entendons , à tenir de nous en contée et en noblesse de baronie. Et n’est mie notre entencion que l'ommage dessus dit s'estende de siens au choses dehors de ncstre, royaume, ne face préjudice audit conte ne à ses autres seigneurs. Et à ce et pour ce savoir, nous sommes acordé et encores acordons que quatre preudomes en soient pris, deux de par nous : c’est à savoir nos amés et féaulx conseillers l'évesque de Laon (1) et Pierre de Cugnieres (2), chevaliers, et deux de par le conte, qui la verités des choses dessus dites enquerront : Cest à savoir quelles choses sont de nostre royaume d'Ostrevant, et lesquelles non. El selore la vérité enquise nous devons le devant dit conte retenir en nostre hommage de ce qui sera trouvé estre de nostre royaume. Et se par le rapport véritable de ces quatre preudommes, aucunes choses dudit Ostrevant estoient trouvées estre dehors de nostre dit royaume, nous nous en devons du tout délaisser au raport des diz quatre preudommes. Donné à Paris le xxx jour de janvier l'an de grace mil trois cent vint huit. Orig. en parchemin dont le sceau est perdu. (1) Aubert ou Albert de Roye, évèque de Laon en 1324, mort en 1336. (2) Pierre de Cugnières est connu surtout comme un ardent défenseur des pré- rogatives royales contre la juridiction ecclésiastique. On voit son nom reparaître toujours dans les commissions d’enquête sur l'Ostrevant , jusqu'en 1338 , époque où il est remplacé par un autre commissaire. On pourrait inférer de là que sa mort arriva vers la fin de 1337, IE. Informations que Ostrevant est et estre doit del empire. Li partitions dou royaulme et del empire que chil de Hasnon propo- serent contre mons, de Haynnau le pere ki disoient qu'il estoit en leur cronikes et elle est ossi bien contenue ès autres cronikes autentikes : si est assavoir princhipaument en Sigebert lequel il allègent pour le leur cronike qui est par tout le monde generaus. Li quelle partitions est ès dittes cronikes Sigebert sour le nombre vin xz, au capitle xxvr. Item. Celle meismes partitions est escripte ens le n° partie ystorial de Vinchant, ou xxv° livre, ou capitle xxxv® contenant et allégant les propres paroles Sigebert dont li substance est que les troy fill Loeys, empereur de Romme qui fu fiulz à Charlemaine le grant, après grant descort et grant destruction de leur gens , s’accordèrent et vinrent à Vredun et prist cascuns et amena x hommes de sen conseil et départirent l'empire en trois. Charles li Kaus, qui estoit li mainsnés, eut les royaumes devers occident de le mer d'Occident, de Bretengne jusques à le Muese; et adont et encore emporta et emporte celle partie le nom de Franche, Et à Loeys le second fill , ki estoit li moyen, li regnes devers Orient ; c’est assavoir toute Germenie dusques au Rin, et les autres chités d'outre le Rin avoek les pays appendans, ayans pour avoir des vins, keyrenten par- chou; et Lettaires, qui estoit li ainsnés, con appeloit empereur, eut toute Yttalie et Romme et le Provience avoek le moitet de le partie de France qui est entre l’Escaut et le Rin. Li quelle partie de France mua son nom et fu appiellée Lottheringhe pour le nom del empereur ki avoit nom Lotthaires. (1) (1) Voici les propres paroles de Sigebert , édit. de Miræus , p. 105: « Des- cripto in tres partes regno, fratres ad urbem Galliæ Viridunum conveniunt et inter se pacificantur; et datis et acceptis invicem sacramentis, quisque ad des- criptas sibi partes regni tuendas revertuntur. Karolus accepit Occidentalia regna a Britannico Oceano usque ad Mosam fluvium : in qua parte ex tune et modo nomen Franciæ remansit. Ludovico Orientalia regna cesserunt : omnis scilicet Germania usque ad Rheni fluenta , et aliquæ trans Rhenum civitates, cum adja- centibus pagis, propter vini copiam, Lotharius, qui major natu erat, et imperator apellabatur, omnia Italiæ regna tenuit eum ipsa Roma, necnon et Provinciam et mediam partem Franciæ inter Scaldim et Rhenumw , quæ mutato nomine ab eo (537) Par ces parolles dessus dittes proposèrent chil de Valenchiennes et chil de Hasnon que li Ostrevant et Valenchiennes, au moins dusques al Escaut, estoit dou royaume de France pour chou c'on troeve ës cronikes de Flandres que li Escaut, dou lieu où il sourt dusques en le mer, désoivre ({) l'empire et le conté de Flandres qui est dou royaume ; et li Ostrevant sict entre l’Escaat et l'Escarp vers Flandre; et pour chou doit iestre ly Ostrevant dou royaume, si comme il dient. À chou poet-on respondre par plusieurs raisons. Premiers que si faite limitations de pays et de terres et ceste especialement entre l'em- pire et le royaulme, ne fu mie ne ne puet estre fait si limitéement et au cisiel ke li uns n’euwist aukune cose ens le partie de l’autre, ensi qu'il le tenoient adont , quant li divisions fu faite. Et ce puet apparoir par au- cuns escris où il appert que par enqueste fu trouvet que en Flandre, outre l'Escaut , demorerent de l'empire li Quatre-Mestiers et plusieurs autres terres et decha par devers Mortaigne, quanques il a entre l'Escaut tout en montant à Saint Amand à Hasnon, au Pont à Raisse et au pont à le laigne à Douai, al Escluse, à Sailli en Ostrevant, à Vy en Artois et dusques au Tronk Berengier, ki tout furent anchiennement del empire et encore moult plus avant vers Laon et de là dusques à le Mues:. Et ceste division chi pouvoit-on trouver et savoir par plusieurs anchiennes escri- tures qui sont en aucunes eglizes, comment li enqueste en fu faite. Mais ceste cose a estet muée par succession de temps ; et ens ces termes est estendus li royaulmes em pluiseurs lius que li aucun ont fait au roy hommage par argent qui l'en rechevoient, si comme li sires de Biauvoir. Li aucun par négligence des signeurs del empire, u faveur qu'il avoient au royaulme, si traioient. Si comme au conte d'Artois, n’a mic louc temps que li sires d'Oysien Cambresis, qui adont estoit, rechiut en hom- denominatur Lotharingia. » On voit que l’auteur du factum traduit Sigebert assez littéralement. (5) Ce mot désoivre , déseuvre , signifie séparation, limite; il ne vient pas de dissire, comme paraissent le croire les continuateurs de Ducange; c’est tout simplement l’augmentatif de sévrer qui lui-même dérive de separare. Je regrette de ne pouvoir ici publier un document curieux intitulé: Li bonne del empire déseurée du royaume de Franche, commenchié en le contet de Flandres et de le contet d’Alost, si comme li desoivre doit estre de l'une et de l’autre contet, d'une rivière que on appielle le Dorme. (538) mage Bussy et Baralle dou dit conté. Et li sires de Honnecourt releva se terre dou signeur de Fayoel qui lerendit au conte de Blois, li quelz l'adjousta à sen fief de Guise et encorz aujourdui est Honnecourt des fiés de Bohaing ki est des fiés de Guise, Encore troeve-on en aucane escri- ture que Oisis en Cambresis ct Biaumés farent relevet dou conte de Artois par le dame cui c’estoient , pour chou que li evesques de Cambrai, ki adont estoit biaus clers et preudous , de cui elle les devoit tenir en hommage, le refusa à rechevoir à homme pour chou que ill entendi que elle s'estoit vantée le jour devant de baisier lendemain le plus biel del eveskiet. Item appert ill et trovera on que Balpaumes fu et deust encore iestre del empire; car chil del empire ni doivent ne deveroient payer point de travers et chil de France le paient. Item est-ce notoire cose que li rois de France qui ore est, avant qu'il fust rois, tenait grant tere outre l'Escaut vers Flandres, si comme Bierveliet et ses appendances qui sont tennes dou conte de Flandres des fiés del empire. Et ensi appert clèrement , ‘puisque li empires s'estent et passe outre l'Escaunt desous et deseure, vers Flandres et vers Artois, ce n'est mie marveille se Ostrevant, qui est entre deux et siet entre l’Escant et Escarp , est del empire de Rome, ensi qu'il apparra chi après, par le possession et le maniement des signeurs qui l'ont tenut et des chartres et previléges et libertés des églizes qu'il ont fondées et affrankies, Mais premiers il convient déclarer et solre une moult grant dou- tance que chil de Hasnon proposerent au roy de France et à ses gens, que leur maisons de Hasnon fu rédefiée d’un conte de Flandres et doée de plusieurs biens, et li avoit donnée ses peres, contes de Flandres, et fa confermée dou roy Phelippe de France, sen cousin, comme dou royaume de France, et fa faite l'an del incarnation muxv li chartre. (1) Pour chou que ceste matere chi est trop prolixe, on n'en mettera chi que pau de le substance briefment. Assavoir est que chis Bauduins ki rédefia Hasnon, ki ygist{(2) et li donua celle chartre, déshireta les propres (r) Ce diplôme, inséré dans les preuves du Gall. christ. IT, 84, et dans Miræus , III , 305 , ne se retrouve ni en original ni en copie dans le petit fonds” d'archives qui nous provient d'Hasnon. (2) Bauduin dit de Mons, mort le 17 jniilet 1070, fut inhumé en effet à Hasnon. { 539) hoirs de le conte de Haynnau, enfans au conte Herman de Richaut se feme. Lequelle contesse Richaut, mort le conte Hermant, li dis Bau- duins, hoirs de Flandre, espousa et en eut deux filz ; Ernoel l'ainsnet et Bauduins mainsnet. Et chis Bauduins, pères as dis enfans, avoit à pere le conte Bauduin de Lille, cui feme, mère audit Bauduin le jouene, fu fille Robert roy de France, fill Huon Capet ct suer à Henry, adont roy de France. Lequel roy Henry mort, il luy demora un filz ki Phelippes ot à nom, ({) Et vivant sen pere, pau devant chou qu'il morust, fu par le consentement de sen pere et des royaux, couronnés à roy de l'eage de vi ans ou de mains. Et quant ses peres li rois Henris fu mort, on le délivra par devers le conte de Flandre tantost, cui antain ilavoit espou- sée, mère audit Bauduin de Lille, pere audit Bauduin qui avoit à feme Richaut. Et fa chis Bauduins de Lille fais et estaulis baillius et gouver- nerede, tout le royaulme de France, tant que li jouenes roys eut se eage. Liquels jouenes roys, de l’eage de vu ans ou de mains, avoit estet cou ronnés un peu devant le mort sen pere ki morut , selonce les cronikes, environ l'an m et 1x; et en ce temps et devant grant pieche pour le conté de Haynnau et autres terres de l'empire de Rome que chis contes Bauduins de Lille, gouverneres da royaulme et Bauduins ses filz qui avoit espousée Richaut contesse de Haÿnuau, avoient entrepris sour l'empire. Liemperere Henri de Rome (2) s’en vinten Haynnau et guerria ces contes et chil lui, et vinrent li un contre l’autre , li emperere dechà l'Escaut et li contes de Flandres delà. Et aa dairains li empercres se ne peut bonnement passer l'Escaut à tout sen ost; si envoia le tierch de ses gens par Cambrai et passèrent à L’Esluse et coururent sour les Flamens par derrière, etencacha li empereres le conte outre le Lis et assist Tournay, et prist ét occist le conte Lambert qui y estoit par le conte de Flandres. Et une aultre fois encore après, du tamps Henry l’emperere, fill doudit Henry l’emperere, fist li contes de Flandres dessusdis faire les fossés de Boullonriu (3) ponr le cresmeur que li dis empereres Henris n'entrast en (x) I s'agit du roi Philippe L.er, né en 1053, sacré le 23 mai 1059, du vivant de son père auquel il succéda en 1060. (3) L'empereur Henri IX, ditle Noir, fit effectivement, à plusieurs reprises, la guerre au comte de Flandre, Bauduin de Lille, qui finit en 1056 par repousser tout à fait l’empereur hors des limites du pays. (3) Le Boulenrieu, nommé Debulliens Rivus par Balderic, est une petite (540 ) Flandres, ensi que ses peres avoit fait. Et se s’en douta li contes de Flandres pour chou qu'il werioit Cambrai et avoit empris sour l'empire. Et li empereres Henris dessusdis y vint pour yaus sous courre, Mais après moult de descors et de prochès et de traitiés, li contés de Haynnau, par l’accort de l’emperere, demora à celuy Bauduin qui avoit espouséc le contesse Richaut et as ses hoirs, comme del empire, boutés hors les hoirs Hermant. Or lairons chi atant ; si y revenrons ja et descenderons à le chartre de chiaus de Hasnon. I! sanle par raison qu’elle ne puet nient faire ne prouver que Ostre- vant soit dou royaulme, car elle fu donnée et Hasnons rédefié en tans de guerre del empire et dou royaulme; et li cuens de Flandres et ses filz tenoient Flandres de hiretage et Haynnau avoek l'Ostrevant de forche, par mariage de le veus et tout le royaulme de France en bail et en gouvernance pour le jouene roy Ph. sen neveu. Si pooient escrire et saieler chou qu'il voloient et emprendre sour l'empire et engrangier le royaulme, si comme il fisent à leur pooir; car li chartre de Hasnon fu donnée dou dit Jouene roy de France, Ph. l'an mxv; et li dis roys avoit estet couronnés l'an » et zx. ki adont n'avoit de cage que vi ans ou mains. Ensi sanle il que quant chis roys chi donna se chartre , il ne seut qu'il donna ; car il n'avoit que xt ans au plus, et s’estoit en- core ens le gouvernance dou dit conte qui pooit saieler et saieloit quant qu'il voloit contre l'empire, si comme est dit quil gerria toute se vie. Encore puct on dire contre ceste chartre par moult de poins desquels à présent nous laissons chi à dire le plus grand partie, pour cause de bricftet, dusques en tans et en liu quant permis sera. Mais à présent à savoir est que celle chartre contient coses qui sont à reprendre aperte- went. Premiers elle suppose, si comme il sanle , que chou qu'ill fist et donna à Hasnon qu'il le supplia et pria à soin pere qu'ill lui donna, et ill lui donna de se auctoritet, comme gouverneres dou royaulme. Et cette raison expressément proposèrent chil de Hasnon, quant yl se rivière tellement modifiée par les travaux effectués sur son cours qu’on a peine aujourd'hui a en suivre la trace. Suivant M. Guilmot, le Boulenrieu prend sa source dans les bois de Libercourt, près de Carvin, pour se perdre dans la Scarpe au-dessous de Race. (5H) révelèrent avock chiaus de Valenchiennes, Car yl disent que puisque li contes de Flandres leur donna qui est dou royaulme, ill leur donna cemme chou qui est dou royanlme, mais il ne le conclut mie par droit, Car on trouvera eus ès cronikes de ceste fondation de IHasnon que,comment que li dis Bauduins, fonderes de Hasnon, qui tenoit Haynnan de par se femme Richaut, requisist à sen père qu'ill luy donnast le lieu de Hasnon, et il lui donnast, si ne veult rien chis dons, ce sanle. Car li chevaliers (1) qui estoit adont sires dou lieu et y demoroit ne vot de riens obéir as contes de Flandres dessusdis, tant pour le guerre qui estoit et avoit estct entre l'empire et le royaulme, et Haynnau ct Flandres, comme pour deffendre le lieu dont il estoit sires , lequel yl ne tenoit mie de chiaus de Flandres, qui weria toute se vie pour ce cas, et ne peurent oncques avoir le lieu de Hasnon, vivant ledit chevalier, fors que par fraude. Et quant chil de Flandres l’eurent conquis et mis leur gens ens, li dis che- valiers y revint et le rewaigna et bouta hors les gens de Flandres ct y entra et le tint et possessa, maugret chiaus de Flandres , toute se vie dusques au jour que “li dis chevaliers fa occhis d’un sien chevalier. Meismes et adont y revint le contes de Flandres, comme chis qui estoit contes de Flandres et de Haynnau et gouvernères de France, Si que ensi appert il clèrement que par se forche il eut Hasnon, ne mie par le vertut dou don que ses pères l’en avoit fait; et ossi que par che don qui uulus estoit de droit, on ne puet ne doit conclure que Has- non soit dou royaulme de Franche. Îtem en leditte chartre de Hasnon est teuwe vérités , Si comme il sanie, Car li dis roys Ph. qui donna celle chartre à chiaus de Hasnon raconte comment jadis au commenchement fa fondée Hasnons de plu- sieurs possessions et frankises par Charlon le Kauve, adont roi de France, et se taist et ne recorde mie qu'il fust empereres. Et s'appert par le chartre de Hasnon qu'il ont doudit cmperere et leur registres qu'il ont livres que li dis Charles li Kauls le fist comme empereres | 2), ou second an de seu empire, si comme on puet veir par le datte des lettres. A , (1) Ce chevalier se nommait Witeric ; il est facile de voir que l’auteur du factum parle d’après Tomellus, moine et historien d'Hasnon , dont les récits sont repro- dnits en entier par Jacques de Guise , t. XI de l'édition de M. de Fortia. (2) Ici le bou abbé de Vicogne fait un peu violence à la vérité. Dans le di- plôme qu'il cite, la date porte bien la seconde année de l'empire de Charles-le- ( 542 ) Après il sanle bien que li roys Ph., c'on dist qui donna le chartre, qui estoit encore enfés et gouvernés par le conte de Flandres({), ne seut mie bien qu'il avoit le chartre ne que en luy fist saieler ; car il conferma quanques li coens de Flandres avoit donnet ou donroit chi après à le ditte église de Hasnon, où que che fust, en Flandres, en Ostrevant, en Haynnau et ailleurs, qui n'est maintenant besoins dou dire. Et est ex- presset que en Haynnau decha l'Escaut, sans chou de l’Ostrevant , il avoit donné et donna revenues ou possessions à Haspre, à Bavisiel, à Ber- meraing, à Courières, Fryères et ailleurs encore (2), qui est notoire cose qu'il estoient adont et sont encore ens l'empire avoekes l'Ostrevant. Ensi sanle ill que li ditte chartre ne fait nul préjudisce ne faire puet à chou que Ostrevant ne soit de l'empire. Car elle comprent clerement et à plain chou qui est ens en droit Haynnau et del empire tout ensanle avoek l'Ostrevant, et meismement comme elle fust donnée par le gouverneur dou royaulme de France et par sen fill tenans Flandres et Haynnau et wérians l'empire, si comme dit est. Item sanle il que li ditte chartre soit soupechonneuse par chou meis- mes que chill de Hasnon proposèrent adont ; car il proposèrent que pour seurtet, ens le chartre de tous ces dons deseure dis queli coens Bau- duins avoit fait à Hasnon ne fu mic pendus li siens saiaus, mais li saiaus dou dit puene roy de Franche Philippe tant seulement dont il estoit tuteres. Et il sanle de droit et de raison que li saiaus doudit conte de Flandres , qui donneres estoit, y devoit iestre princhipaulment pendus. Mais il apert bien qu'il faisoient adont leur volentet dou scel de France Chauve ; mais elle indique avant tout l’année de sa royauté en France. Voici les propres termes de cette date: Datum idus julii, indict. X, anno XXXVITI regni D. Caroli regis in Francia et imperii ejus II. V. Miræus , 1, 33. (1) Nos historiens s'accordent assez à dire que le comte de Flandre conserva jusqu’à sa mort, arrivée en 1067, la tutelle du jeune roi, Cependant on lit dans le cartulaire de Saint-Médard de Soissons, 122, un acte de Philippe, de 1065, où il est dit que dès-lors, il n’était plus sous la mainburnie du comte : Exeunte me de Flandrensium comitis Balduini mandiburdio. Ce fait de l'émancipation est, comme on voit, de nature à infirmer un peu aussi les arguments de l’abbé de Vicogne. (a) Ce n’est pas dans la charte royale de Philippe L.®', mais bien dans le di- plôme du comte Bauduin , y annexé , que sont exprimées toutes ces donations de lieux. V. Gall. Christ. Instrum. 83. ( 543 ) en weriant l'empire et l'empereur Henry qui adont regnoit , si qu'il apert par chou qui s'ensuit Premiers par une chartre de l'empereur Henry ki à cel temps estoit , qui restitua les possessions al abbesse et à l’églize de Denaing, que aucunes gens ly avoient empèchiés, c’on appeloit adont le walve de Denaing ; et dient li aucun ke on l'apielle maintenant le Val, quiest entre Denaing et Escaudaing, et le conferma par se chartre donnée à Coulongne l'an de grâce muxix (1); et celle de Hasnon avoit estet donnée l'an mixv, Ensi ne fu elle que iv ans après. Et s'on tronvoit que li ditte pièche de terre ne fust mie en Ostrevant dedens Haynnau, se appert il que adont regnoit en Allemagne li empereur Henris. Îtem sanle il pour confremer tout chou que deseure est dit ens le fondation d’Anchin que Anchis avoekes l'Ostrevant soit del empire; car elle fu fondée del eveske Gérard de Cambrai , Qui li lieus estoit u de cui on le tenoit, qui l’amorti et confrema, et en fin de se lettre (2) il nomme avoek l'incarnation lan dou règne le roy Henri xxvie, Et comment qu'il ne die mie expresséement roy de France ne d'Allemagne, s'estoit chius Henris emperere de Rome au tamps de dont; car adont regnoit en France le roys Philippe devantdis qui confrema Hasnon l'an mixv, si comme dit est. Et chis emperere chi Henry régnoit l’an mexxix, quant Anchins fu fondée. Et règna encore grant pièche après. Et se li evesques de Cambrai tenist lesiége d'Anchin dou royaulme de France, il euwist mis ens se chartre le tamps dou règne le roy Phi- lippe de Franche; mais il y mist le temps de sen signeur l’empereur de cui il le tenoit. Et de nouvei li roys Philippe li Biaus leur a donnet, puis le temps que me sire de Haynnau fist à luy hommage de chon c'on {rouveroit ens l'Ostrevant iestre dou royaume, une chartre(3) par lequelle y] dist qu'il ie == D UN TL CIE (1} Cette charte impériale ne se trouve pas dans le fonds des archives de Denain qui ne renferme aucun titre antérieur au 19. siècle. (2) Ce diplôme, qui existe en original dans le fonds d'Anchin, avait été publié défectueusement par Miræus, I, 163. M. Esca!lier Ja restitué d’après notre original dans son Hist. d’Anchin, 17. Quant à la date du régue impérial, il n’y a pas à s’en prévaloir ; car les évêques de Cambrai ne dataient jamais autrement, (3) Le titre qu’on invoque ici ne se lrouve en original ni dans le fonds d’Anchin ni ailleurs; mais il en existe une copie simple aux archives de a chambre des comptes de Lille. Ce diplôme porte la date de 1286. (544) sout en se especial garde; especialment pour chou qu'il et le roy de Franche tiennent le succession de le conte de Ribeumont ; et li ille d'Anchin estoit, quant elle fu fondée, le conte de Ribeumont. Et pour chou que Ribeumont est dou royaulme , il voelt dire que choula est dou royaume. Mais ce n'est mie raisons; car uns hom a bien terres ou royaulme et ens l'empire ; et especialment en che cas chius de Ribeu- mont tenoit chela dou vesque de Cambrai qui le gréa et confrema comme sires souverains et mist l'an dou regne l'empereur Henry de cui il le tenoit et nient dou roy de France , si comme il appert par deseure. Item, mort le conte marit à Richaud ki rédifyèrent Hasnon et y gisent , il li estoit demourés un freres ki avoit nom Robers li Frizons, pour chou qu'il avoit estet norris en Frise et avoit espousée le contesse de Hollande ki avoit este feme le conte Florent qui adont estoit. Et chius Robers demora baus de Flandres et de Haynnau et wardains de ses deux : neveus hoirs de Flandres et de Haynnau qui estoient desous eage ; mais li peres à se mort les fist hoirs et fist que li noble de Flandres et de Haynnau luy fisent hommage et fist jurer sour sains ledit Robert sen frere qu'il warderoit loyaulment ses neveus et n’enterroit jà en le terre pour déshireter ses neveus. Li quelz contre sen sairement, par l’ainwe des Hollandois et des Flamens, appiella à luy le conte de Flandres. Et si neveut s'en plaindirent au roy de France qui vint en leur aiuwe, et se combatirent à Cassiel encontre Robert le Frizon. et là fu mors Ernoulz li aisnés fiiz Richaud, ki devoit iestre de sen droit contes de Flandres. Et a tant s'en parti li dis roys de Franche. Et Richaulz etses fiulz Bauduins li mainsnès s'en revinrent en Haynnau et reprirent del evesque de Liege, par le congiet del empereur qui adont ne leur pooit aidier j our autres grans guerres qu'ilavoit aillieurs, les allués de Haynnau pour avoir aiuwe contre Robert le Frizon; mais onques ne peurent recouvrer Flandres. Et enfin par pais faisant demora toute Flandres à Robert le Frizon; et Haynnau et tous li Ostrevant, Douays ossi, demora audit Banduin. Mais Robert li Frisons déchuit puissedi par fraude sen neveut et luy fist oblegier Douay, s’il ne prendoit à feme une siene nieche de par se feme, u il paieroit une grandt somme de deniers, si voloit ravoir Douay. Et il se repenti quant il le vit si laide et veut les deniers payer. Mais yl ne peut onques ravoir Douay, et l'ont adiès trespuis tenat li conte de Flandres , sans faire hommage au roy de Allemengne comme incorporet à le contet de Flandres. Et tous li autres Ostrevans demora paisiulement . ( 545 ) as contes de Haynnau comme del empire, si comme il appert par char- tres données pour le fondation et confirmation del églize de Vicongne, données l'an mexxxvin({), et autres plusieurs qui conferment avec le siége de Vicongne, Tilloit, Maisnil d’encosté le Kesnoit, lequelle chartre li roys Philippe li biaus par se force a confremée. Item. Che meismes appert par chartres données dou conte Bauduin de Haynnau a l’églize d’Anchin qui leur confrema Peskencourt et Obre- chicourt l'an wœuxxvii (2). Et par plusieurs autres lettres appert il ossi que li Ostrevant ke li conte de Haynnau tenoient estoit del empire et ne paioit nulz disme, quant on le paioit au royaulme. Mais on le paioit à Cambrai quant on le paioit ens l'empire , si qu'il appert par les registres d'Arras et de Cambrai. Item. Ce appert encore plus clerement quant au temps le contesse Marguerite et ses hoirs des deux mariages furent départit Flandres et Haynnau et demora à chiaus de Haynnau li Ostrevant empais avoek Haynnau et comme de Haynnau, si qu’il puet apparoir clerement par le dit et l’arcort que sains Loeys en fist ; et en fu mesires de Haynnau li peres en possession dusques adont que li roys Philippe li biaus le cons- trainist de venir en se hommage de chou c'on trouveroit yestre dou royaulme. Et non contrestant chou, li roys de France dessusdis con- frema par se force toutes les chartres des églizes de Ostrevant et cons- trainist à payer disme; etencore failli roys qui ore est ; et se boute tous jours avant, ains que li enqueste soit faite. Sera bien besoing mesire qu'il s’avise sour chou, car il voet lever D (1) La charte de fondation de Vicogne qui porte, non la date de 1138, mais celle de 1139 , existe en original à Lille dans le fonds de Vicogne et en copie dans le cartulaire de cette abbaye. Il existe du reste un titre de 1138, émané du comte de Hainaut. Quant à l’acte confirmatif du roi Philippe-le-Bel , 1l est daté de l’an 1300, et s’applique, non pas à la charte du comte Bauduin, mais bien à celle que délivra la comtesse Marguerite au mois de juillet 1266 en faveur de Vicogne. (3) Cette charte , que nous possédons en original dans le fonds d’Anchin , et dont il existe des copies anciennes aux archives de la chambre des comptes, n’a pas.été publiée par M. Escallier. L'habile historien d'Anchin s’est contenté de la mentionner, p. 127. Au surplus, ce titre, par lequel Bauduin déclare n’avoir au- cun droit sur Pecquencourt et Auberchicourt , ne paraît pas être d’un grand poids pour la cause que soutient l'abbé de Vicogne. 35 ( 546) disme dusques au pont Noiron {1} à Valenchiennes pour le profe (paroisse) Saint-Jakeme qui est ens l’Ostrevant. IL. Marguerite, comtesse de Hainaut, voulant accélérer les travaux de l’enquête sur les limites de l’Ostrevant, nomme cinq procureurs et messagers à effet de suivre l’affaire auprès des commissaires principaux. — 1353, juin 18. x Marguerite, contesse de Haynnau, etc., à tous chiaus qui ces pré- sentes lettres veront ou orront salut et congnissance de vérité. Comme nous soiemes entrée en le foy et homaige lige de notre très-redoubté sei goeur le roy de France de le terre de Ostrevant, lequelle il dist estre de sen royaume, en le fourme et manière que nos chiers sires et pères jadis et nos frères, contes de Haynnau de boinne mémoire, fisent à ses prédécesseurs roys de France. Et pour ce aiens accordé entre nous que deux personnes de par nostre dit seigneur le roy et deus de par nous descenderont sur les liux et enqueront diligamment quelles choses de la ditte terre d'Ostrevant sont de sen royaume et quelles non, et des autres liux et choses contensieuses partout ailleurs entre lui et nous, et feront déclaration sour tout ce que il averont trouvé. Et ou cas que aucans descors seroit entre yaulz ou aucune obsecurtez, nos très-chiers et fayalx cousins, messire Jacques de Bourbon (2), conte de Ponthiu, feroit et poroit faire la ditte déclaration seuls et pour le tout. Et cas- cuns de nous tenrons et acumplirons tout ce que insy sera déclaret, insi que plus à plain et est contenu en le dite commission avoec plui- seurs aatres choses. Nous , pour aller avant en le besoingne, selonc le teneur de le ditte commission et pour emplir de point empoint, en tant que de nous est, ce que promis avons, faisons et establissons, avons fait (x) Le pont Noiron ou Néron, s’il fallait en croire Hugues de Toul et son dis- ciple Jacques de Guyse, aurait été bâti du temps d’Auguste par les soins d’un chef romain nommé Néron. Plus tard, sous l’empereur Néron, ce pont, disent tou- jours les mêmes chroniqueurs, fut transporté sur la chaussée qui va de Tournai à Bavai. C’est ce qu'on nomme aujourd’hui Éscaupont, (2) Jacques de Bourbon , fils puiné de Louis I,er, duc de Bourbon , fut gratifié du comté de Ponthieu par lettres du roi Jean , données à Lyon le 7 février 1350. Ce comté était dans les mains des rois d'Angleterre depuis l’an 1279 , époque où il échut à Eléonore de Castille , femme du roi Edouard [.®. SE D Éd SSD ( 547 ) et establit par ces présentes lettres, nos procureurs et mesaiges tant généralz que espécialz pour poursuiwir les choses devant dites par devant les dits commissaires et par devant tous anfres qui à ce seroient commis et qui de ce poroient connoistre, maistre Piere de Braybant, maistre Philippe d’Ath, curet de le Longheville, Willaume de Lesca- terie no recheveur de Haynnau, Jehan le Douch et Symon d’Aligehem. As quelz et à cescun d’yaulz pour le tout avons donné et donnons plain pooir et mandement espécial de yaulz comparoir par devant les dits commissaires et de pourposer el alégier de par nous et ou non de nous, tant par escript que par bouke, toutes manières de raisons tant de droit comme de fait, et ausi de nous défendre et de respondre à toutes manières de raisons contre nous aligiés et pourposées, de jurer, se mes- tiers est, en l’ame de nous toutes manières de sairemens, de tesmoins conduire de par nous et veir conduire contre nous et de aministrer et mettre en manière de procès et veir mettre et ministrer contre nous lettres, privilièges et toutes autres manières de prueves, de veir publica- tion de témoins et de dire contre chiaus qui amené seroïent, tant contre leur dit comme leur persones et de respondre, se aucunes chose estoit dit et proposet contre les noz et de oyr le conclusion faire par les dits commissaires ou par no dit cousin, sur les choses contenues en le dite commission et de oyr droit et sentence définitive et de approuver et émo- logier le sentence ditte et prononchié par les dits commissaires. Et don- nons aussi as dit procureurs et à cascun d’ialz pooir de mettre et substi- tuer pour yaulx et pour cascun d’yaulx autres procureurs 1 ou plusieurs et de rappeler les dis substituts toutes fies que bon leur semblera et gé- néralement de tout ce faire ou nom de nous et par nous ès coses et sur les choses dessus dites que nous feriens faire, poriens ou deviriens, se presentement y estiemes, bien fust que li cose requesist espécial mande. ment et plus grand que sur les choses deseure dittes. Et tous ce qui par nos dit procureurs, l'un d’yaulx ou leur substitut, sera fait ou pro- curet ou nom de nous et pour nous ès coses et sur les coses deeseure dittes, nous avons et arons ferme et aggréable pour nous, nos hoirs et successeurs à tous jours et promettous à payer le jugict sur le obligation de tous nos biens, de nos hoirs et de nos successeurs. Par le tesmoing de ces lettres sayellées de no sayel données au Quesnoy le svine jour de jung, l'an de grace mil cec um. Original en parchemin auquel pend un reste de sceau en cire rouge. (548) IV. Che qui fut traitiés à Cambray entre les gens dou roy et de me dame le comtesse de Haynnau (1). Premiers que me dame li contesse venroit en le hommaige du roy del Ostrevant, comme si prédécesseur conte de Haynnau. Et pour tant que medite dame, comme si prédécesseur dessus dit, tient et main- tient que le dit Ostrevant soit del empire, comme est li dict conté de Haynnau et non dou royaulme, certainnes personnes, deus de par le roy et dens de par ma dame, soyent commis à enquerre sommèrement sur chou, aflin, s'aucune cose estoit trouvée en l'Ostrevant descendant dou royaulme, à che s’estendroit le dit hommaige à teñir dou roy en nobleche de contei et de baronnie, comme à ses prédécesseurs ; et de che qui seroit trouvet del empire, li rois s’en délaisseroit et déporteroit par les quatre dessus dit, sans retourner au roy. Et s'aucune cose d’obscur y entrevenoit u aparoit à Mons'. de Ponthiu , seroit ou nom dou roy et de par luy poissans de déterminer et mettre fin en cest par- tie. Lesquels commis députés d’une part et d'autre doivent yestre tels personnes qui sagement, honnerablement et briesvement, en bonne foi puissent entendre à ches coses, toutes autres mises arriere, pour bien de pais et d'amour nourrir et continuer entre le roy et me ditte dame. Et nient mains, avoec che que dit est del Ostrevant et sanlaulement, doivent les dits commis et députés sur toutes les doubtes et questions ou débas apparans ou apparus entre le roy et me dite dame, ès marches et confins du royaulme et de le dite conté de Haynnau, connoistre, dé- terminer et déclarer, et aussi Mons de Ponthiu, en cas de doubte et d'obscurité comme dessus, C’est assavoir à Solemnes(2), à Faymi (3), à (1) Une note datée du 17 octobre 1354 porte que l’assemblée des commissaires du roi et de ceux de la comtesse de Hainaut est remise à l’octave de Saint-André, même année. On est donc autorisé à donner à la pièce ci-dessus la date du 6 dé- cembre 1354. (2) On agita aussi pendant une partie du 14.° siècle la question de savoir si Solesmes était de France où d'Empire, Une première enquête à cet égard est prescrite par mandement du roi Philippe-le-Bel, du 3 avril 1313 (1314). (3) Fémy, Aisne, arrondissement de Vervins, jadis siége d’une abbaye de bénédietins, était encore uu lieu contentieux entre la France et l'Empire. Par (549) #Saint-Amand, juskes en miliu dou pont d’Escarp à Marchiennes, et à Fenaing, au ponchiel de Semois ct par tout ailleurs ès lius contencieuls, me dite dame demourant en tel estat comme de présent est et a eslel, maintenant sans riens de nouviel entreprendre. Et de rekief que me dite dame venroit en le foi et hommage dou roy de le rente à heritage qu'el a et doit avoir sur le_trésor, tant qu'elle sera ailleurs asseurée souffisamment. Et outres ces coses, demandoit et requéroit me dite dame y estre assés fait à li des arriérages de le dite rente juskes à che tamps que li contes ses frères de bonne mémoire renvoia son hommage. Item des arriérages de celle meisme rente depuis le trespas du dit conte. Item que le maisons d'Osteriche à Paris li soit rendue, Îtem que des frais le dit conte à Buiron-fosse (4) et ailleurs, en che temps ou sierviche dou roy li soit assés fait dont li somme puet y estre au escus, desquels riens n'a été recheu, fort tant seulement par le recheveur de Vermandois environ xx muids de blés et xir bnes que les gens du dit conte prisent desous Vendoel (2) qui point ne sont à des- compter de le dite somme. Double copie du 14° siècle en parchemin. Nora. Je me propose de donner une suite à ce premier travail. Je ferai en sorte d'y établir la chronologie des comtes , puis celle des archidiacres d'Ostrevant. Enfin je retracerai les événements principaux dont ce petit pays a été le théâtre. maudement du 24 octobre 1315, le roi Louis X charge l’évêque de Soissons de s'enquérir de la véritable mouvance de ce lieu. (1) Buronfasse, bourg de Picardie, aujourd’hui département de l'Aisne, près de la Capelle. (2) Vendhuile, près Le Catelet, Aisne. ( 550 } L'AUTOMNE, Traduction du poëme des Sarsows de Thomson, Par M. Mouras, Membre résidant. ARGUMENT. — Exposition du sujet. Dédicace à M. Onslow. Aspect « ,«cam- pagnes au moment où l’on va faire la moisson. Réflexions à l’éloge de l’i dustrie, inspirécs par ce spectacle, La moisson. Episode y relatif. Orage pendant la moisson. Chasse au tir, au lacet. Cruauté de ces amusements. Plaisant récit d’une chasse au renard. Vue d’un verger, fruits d’espalier, vignoble. Description des brouillards très-fréquents dans la dernière partie de l'automne. De là, digression ayant pour but des recherches sur l’origine des sources et des rivières. Considération sur les oiseaux qui dans cette saison changent de pays. Nombre prodigieux de ces oiseaux qui couvrent les iles situées au nord et à l’ouest de V’Ecosse. Coup-d'œil sur cette contrée. Aspect des bois décolorés , flétris. Après une journée douce et uu peu sombre , clair de lune. Météores de l'automne. Le matin, auquel succède un jour calme, pur, jour de soleil tel qu'on en voit ordi- nairement clore cette saison. La récolte étant faite, les habitants de la cam- pagne se livrent à la joie. Le tout se termine par l'éloge d’une vie champêtre et philosophique. Lorsque l’Automne accourt, d'épis le front paré (1), Et que sur plus d’un champ que sa main a doré, Joyeuse, elle sourit, en mon thème rustique, J'ai de nouveau recours à la flûte dorique. Ce que l'hiver glacé prépara dès longtemps, Ce que nous promettait en ses fleurs le printemps, Et du soleil d'été la flamme fécondante, Avec perfection maintenant se présente, Et de toute sa gloire enrichit mon sujet. (1) Voyez plus bas la note au passage concernant la moisson. ù (Note du traducteur.) (551 ) [ci la muse, Onslow, vient nourrir le projet Pour orner, ennoblir le chant qu’elle médite, Pour s'inspirer aussi dans le soin qui l’agite, De dérober ton nom : elle arrête un moment. Ton ardeur au public vouée incessamment. Elle sait tes pensers et tes travaux si dignes ; Le vrai patriotisme et les vertus msignes Qui brillent dans tes yeux et brülent dans ton cœur ; Quand de ton éloquence éprouvant la douceur, Le sénat attentif que captive ta langue Avec ravissement écoute une harangue Qui surpasse la muse en sons harmonieux. Toutefois elle a soif, dans son zèle envieux, D'égaler ton élan pur et patriotique ; De le rivaliser elle-même se pique, Et faible de pouvoir, forte de volonté, Par l'amour du pays quand il est exalté, Son ton s'élève. Alors à joindre elle s'apprête Le feu du patriote à celui du poète, Quand la Vierge brillante amène les beaux jours, Que de l’an la Balance égalise le cours, De l’été qui s'enfuit la flamme dévorante S’éteint au firmament. Sa voüte moins ardente Commence à se vêtir d’un bleu tranquille et pur, Et relevant l'éclat de ce manteau d'azur, Une lumière d’or enveloppe le monde ; Dépourvus des clartés dont le feu nous inonde, De nuages ténus dans l'atmosphère assis, Souvent percant les flancs, des soleils adoucis Tempèrent leurs rayons. Au-dessous des nuées, D'innombrables moissons d’un jaune brun nuées : Se courbent sous le poids d’un opulent trésor, Et debout, en silence, au loin montrent leur or, ( 552 ) Car même des zéphirs les païsibles haleines Ne font pas onduler leurs vagues incertaines. Heureux calme ! Rompant son équilibre enfin L'air cède. Au signal naît une brise soudain , Et l'habit dont le ciel s’embellit et se pare, Mobile vêtement s’entr'ouvre, se sépare, Glisse légèrement. Tantôt l'astre pompeux Illumine les champs d'un éclat radieux, Et tantôt se cachant en des nuages sombres, Sur la terre obscurcie il projète des ombres. Perspective joyeuse et faite pour le cœur, Elle découvre aux yeux le spectacle enchanteur D'un déluge de blés flottants dans l’étendue ! C'est à toi, cependant, industrie assidue, C'est à toi que l’on doit ces précieux bienfaits. Du travail, des sueurs, ce sont là les effets. Aucun de tes efforts ne s'exerce sans peine : Des arts tu n'es pas moins la source souveraine, Le fondement actif de la société, Et de tout ce qu'elle offre en son aménité. Par toi l'esprit humain et grandit et s'élève, Avant toi, faible et nu, de la nature élève, L'homme errant dans les bois et parmi les déserts Subissait les rigueurs des éléments divers ; Le germe heureux dés arts était en lui, sans doute, Tous les matériaux se trouvaient sur sa route; Mais au lieu d'en user il demeurait oisif. Le sommeil de l'esprit retenait inactif Le pouvoir créateur donné par la nature. Par le manque de soins l’avide pourriture Dévorait ce que l'an, dans un autre dessein, Se plaisait à verser de son prodigue sein ; Le barbare toujours étrangér à la joie, ( 593 ) A la chasse suivait les animaux de proie ; En danger d’expirer percé d’un coup mortel, S'il disputait le gland au sanglier cruel. Bien plus à plaindre encore en son sort misérable Lorsque des fiers autans le plus mexorable Amenait à sa suite un hiver rigoureux. Le farouche aquilon sur lui fondait affreux , Et dans le même instant déchaïnait sur sa tête, De grêle, neige ou pluie, une horrible tempête ; Ou de l’eau congelée il enchaïnait le cours ; Sa hutte informe alors était son seul recours, Jusqu'au retour trop lent d'une saison plus chaude : Car de logement sain, agréable, commode, Il n’en connaissait pas. Une triste cloison En ce temps malheureux, tenait lieu de maison. Oh! qu’on devait souffrir! . ... Une douce demeure. De l'amour, de la joie, est l'asile à toute heure. La paix et l'abondance y fixent leur séjour. Là, des êtres chéris se payant de retour, D'affectueux amis, dans leur commune ivresse, Comme en un sanctuaire échangent leur tendresse, Consacrent leur bonheur. Mais l’habitant des bois !.... Du sentiment jamais il ne connut la voix; Même au milieu des siens, il était seul, morose ; L’ennui rembrunissait à ses yeux chaque chose. Ses jours coulaient pesants, sombres, inconsolés. Quelle perte de jours sans bonheur envolés ! Mais à la fin sorti de cette léthargie, Il s’éveille à la voix de l’active industrie ; Son utile flambeau lui prête ses clartés, Elle a développé chez lui ses facultés ; Et lui montre quand l'art doit aider la nature. Ainsi la mécanique, auxiliaire sûre, Remplace avec succès ses trop faibles efforts ; (554 ) Il sait des minéraux extraire les trésors ; Utilise du feu la chaleur dangereuse ; Détourne des torrents la course furieuse ; Dirige à son profit les limpides courants ; Tire même part de l’haleïne des vents : Maintenant la forêt cesse d’être épargnée Et sa vieillesse cède à la forte cognée : Le bois est faconné par l’habile ouvrier ; La pierre cède aux mains qui viennent la tailler ; Et par degrés enfin s'élève un édifice. Chez l'homme il n’est plus rien dont notre orgueil rougisse ; La fourrure grossière et que le sang souillait, A fait place à l’habit chaud, commode, douillet, A la soie éclatante, à l’étoffe moelleuse ; Des mets sains ont garni la table somptueuse; Et chez les conviés sortant de leur langueur, Du fils de Sémélé la riante liqueur Fait jaillir cette heureuse et piquante saillie Qui renouvelle l'âme et qui la vivifie. Mais l'utile progrès ne s'arrêtera pas, L'homme avance toujours et plus ferme en ses pas, Il insiste, il obtient de sa nouvelle audace La pompe, la grandeur, l'élégance, la grâce ; Plus tard sollicité par son ambition Qui fait de nouveaux pas vers la perfection, Le savoir, la science excitent son envie ; La gloire a des attraits pour son âme ravie ; Sur la création il aspire à régner. Vers un centre commun on vient se rallier, La nation alors compose un corps unique Qui veille, qui pourvoye à la chose publique, Et subordonne ainsi les intérêts privés A l'intérêt de tous. Au pouvoir élevés, D'un peuple dont en eux ils offrent l'assemblage, (555 ) Les citoyens élus sont la parfaite image : Et de leurs commettants pour garantir les droits, On les voit établir de sages, saintes lois, Enseigner les devoirs, animer l'industrie, Enchainer tout pouvoir hostile à la patrie, Et dans le noble but de punir l'attentat, Faire asscoir la justice au timon de l’état : Ces maîtres éclairés, par leur rang respectables, Gouvernent le pays, mais ils sont responsables. Jamais ils n’ont nourri dans le fond de leur cœur Cette pensée inique et contraire à l'honneur Qu'une foule innombrable à la glèbe attachée Cèderait sa moisson avec peine arrachée, Et le rayon de miel qu'elle sut recueillir, A des chefs qu'elle-même a bien voulu choisir, Qu'elle a nommés pour elle et non pas pour eux-mêmes. C’est de là qu'ont surgi sous différents emblèmes Les formes qu'on adapte à tout gouvernement Qui naït, se fortifie et marche incessamment A la perfection, civilise le monde En l’unissant ; nombreuse, et polie et féconde, La société crüt, nourrice de tout art; La cité dans l’air monte, elle étale au regard. Les tours et les clochers dont son front se couronne ; Chaque rue en son sein se croise et se sillonne ; Elle attire bientôt par un charme nouveau. Ses enfants ont changé contre un séjour si beau Leurs incultes forêts et ces buissons d’épines Où des ifs enlaçaient leurs puissantes racines. Dès ce moment afflue aux passages publics La foule des marchands, avides de trafics : A leur voix on construit des magasins immenses. La grue est établie ; à de longues distances Des produits étrangers en énormes amas ( 556 ) Chaque rue obstruée embarrasse les pas. C'est ton courant, Tamise, à toi, le roi des fleuves, Que l'homme veut choisir pour ses nobles épreuves ; Fleuve calme à la fois, large, majestueux, Tu deviens le canal de son commerce heureux. Image de ces bois, qui, dépouillés d'ombrage, Des rigoureux hivers ont essuyé l’outrage, Des deux côtés se dresse une forêt de mâts. A côté d'eux la voile, en ses plis délicats, Reçoit la mission de recueillir la brise. Du pesant gouvernail l’aide ensuite est requise. Sous l'effort cadencé de vigoureux rameurs La barque magnifique, aux brillantes couleurs, Le long du vaisseau glisse, et l'agile chaloupe Se joue autour de lui sur les flots que découpe La rame de son aile. A la rive on entend Les cris de l'équipage en hâte s’agitant. Le vaisseau dans ses flancs que le chêne protége, Découvre les canons aux rangs où chacun siége, Foudre de l'Angleterre, effroi du continent, Libre, il frémit, s'élance et vole impatient. Bientôt paraît le dôme avec sa colonnade, De meubles élégants le luxe fait parade ; Est-ce là tout? Oh! non. Plein du feu créateur, Le canevas surpris reproduit chaque fleur ; Et l’art des Phidias, rival de la nature, Fixe les traits de l’homme et sa noble figure ; Il le fait respirer : Sur le marbre amolli, Le ton moelleux des chairs, leur aspect embelli Par l’habile ciseau, sont les œuvres qu’enfante L'imagination hardie et triomphante. Ces prodiges divers, ces précieux bienfaits, Sont dus à l’industrie ; oui, voilà ses effets. ( 557 ) Tout ce qui rend plus douce et plus chère la vie, Nous élève à nos yeux ou flatte notre envie, Est devenu son œuvre. Auprès de l’âtre assis, Ainsi le triste hiver, oublieux des soucis, Heureux, entend la voix de l'ouragan qui tonne : De ses doigts endurcis il tresse la couronne Dont le joyeux printemps doit plus tard se parer. Même sans cet hiver qui vient le préparer, Privé de sa vigueur, l'été dans l'étendue N'offrirait qu'un tableau désolant pour la vue. Il frustrerait par là l’automne en son espoir ; Et ses fertiles mois ne nous feraient pas voir Ce trésor infini de moissons abondantes Frémissant mollement en vagues ondoyantes Qui semblent aujourd'hui solliciter mon chant. Dès que du front des cieux l'aurore se penchant Développe le jour qu'en son sein elle cache, Les moissonneurs ardents préparés à leur tâche, Se présentent en ordre, et chacun prend plaisir, Placé près de l'objet d’un amoureux désir, Par les soins attentifs, l’aide qu'il lui prodigue A lui sauver le poids d’une grande fatigue. Ils s’inclinent ensemble, et leur actif labeur Des gerbes sans relâche augmente l'épaisseur ; Tandis que du hameau la chronique joyeuse Toujours un peu mordante, à la bande rieuse, Inspirant la gaité, sans scandale pourtant, Lui fait à son insu tromper en plaisantant, Avec l'ennui du temps les heures étouffantes, Le maître derrière eux de ses mains diligentes De javelles bâtit, forme des tas nombreux, Et d’un riche tableau rassasiant ses yeux, Dans les émotions où son cœur est en proie, (558 ) I] le sent se remplir et se gonfler "de joie. Cependant les glaneurs dans les champs dispersés, D'épis qui sur le sol demeurent délaissés Composent brin à brin leur récolte chétive : C'est là du dénüment une image bien vive. Opulents laboureurs, devenez généreux : Dépouillez une gerbe et détournez les yeux. Cédez de tant d'épis du moins une poignée ; Que votre gratitude ainsi soit témoignée Au dieu de la moisson si libéral pour vous. De remplir vos greniers il se montra jaloux : Et ces infortunés qui sont pourtant vos frères, En foule sur vos pas étalent leurs misères; Us vont quêter ainsi que les oiseaux du ciel. A votre bienfaisance ils font un humble appel. Songez aussi, songez aux coups de la fortune, Que le faible secours, qu’à la plainte importune, A regret aujourd'hui vous pourriez accorder, Peut-être vos enfants viendront le demander. Aux jours de son bonheur , la jeune Lavinie Eut de nombreux amis; à l'aube de la vie Le sort lui souriait ; il parait son berceau ; Bientôt il démentit un présage aussi beau Et la laissa languir au sein de la misère. Loin de tous ceux à qui sa fortune fut chère, Sans soutien désormais, dans cet état cruel Que sa seule innocence et le secours du ciel, Aux détours d’un vallon, solitude ombragée, Avec sa mère veuve, infirme et d’ans chargée, En une humble chaumière, asile de regrets, Elle se retira ; mais l'ombre des forêts, Et cette solitude et ce séjour agreste La cachaient moins encor que sa vertu modeste. ( 559 ) Ces êtres, de la sorte, échappaient au mépris Qui, comble d'infortune, en est souvent le prix, Aux vœux dont un amant qu'enhardit la richesse Ose exprimer parfois l’orgueilleuse bassesse. La nature prenait soin de les sustenter Comme les gais oiseaux qu'ils entendaient chanter, Ils n'avaient nul souci du jour qui devait suivre, Et de ce que ce jour apporterait pour vivre. Lavinie en fraîcheur brillait comme au matin La rose dont ses pleurs ont humecté le sein ; Pure et sans tache ainsi que le lys des vallées Ou la neige des monts. En son cœur rassemblées, Les touchantes vertus animaient ses beaux veux, Baissant parmi les fleurs leurs regards radieux : Et si parfois sa mère à sa triste mémoire Présentait du passé la douloureuse histoire, Lui rappelait le sort soigneux de les tromper, Qui ne les caressa que pour mieux les frapper , Ces mêmes yeux alors brillaient noyés de larmes. Tel l’astre du soir luit en étalant ses charmes A travers la rosée. Un simple ajustement Qui la parait bien mieux qu’un riche vêtement, Voilait ses purs attraits et sa taille parfaite. Il savait l’embellir d’une grâce secrète. La beauté n'a besoin d’atours ni d’apparat ; Et moins elle est ornée et plus elle a d'éclat. Offrant de la beauté le type et le modèle, Lavinie ignorait pourtant qu'elle était belle. Les forêts renfermaient ce trésor dans leur sein : C'est ainsi que parfois au cœur de l'Apennin Sous l'enceinte de rocs dont l'abri l’environne, Et sans que d’un mortel le regard l'y soupçonne, Un myrte heureux s'élève et charme du désert, Exhale ses parfums sans être découvert. ( 560 } De même en son aurore, échappant a la vue, Lavinie éclatait, ignorée, inconnue. Contrainte cependant par la nécessité, Un jour elle a plié sa douce volonté, Un jour à sa misère elle cherche un remède Et va glaner aux champs que Palémon possède. Libéral, généreux, le riche Palémon Aimait à résider dans ce riant canton. Là, joyeux de la vie et simple et pastorale, Il mélait avec goût l'élégance rurale, Avec tant de bonheur, connue aux temps anciens Et que vantent encor les chants arcadiens ; Aux temps où la coutume, esclave tyrannique, N’asservissait pas l’homme et que pour mode unique Îl suivait librement la nature. Aux tableaux Que l'automne nous montre en ses aspects nouveaux, Palémon souriant, guidait à l'aventure Ses nombreux moissonneurs, lorsque par sa figure La pauvre Lavinie attire son regard. A cette attention, bien loin d’avoir égard, La modeste glaneuse en sa crainte ingénue A l'instant a rougi, tremble et baisse la vue. Palémon est ravi. Néanmoins son ardeur Qui rencontre en chemin la timide pudeur, A perdu la moitié des charmes qu'elle cache. A de honteux désirs cette pudeur l’arrache Et bannit de son cœur la folle passion. Le véritable amour en prend possession. O surprise! .... Malgré le feu qui le dévore, Du monde cependant la voix l’arrête encore. Hé quoi ! Son cœur qui cède à de pareils penchants, Pourrait-il avouer une fille des champs, Glancuse, qu’on y voit quêter sa subsistance ? Son amour combattu lutte avec violence, (561 ) Et bientôt en secret 1] murmure ces mots : « © pitié de songer que pour comble de maux, » Une si délicate et douce créature, » Qui recut la beauté des mains de la nature, » Aux regards tout empreints de sensibilité, » Et de qui l'air si doux annonce la bonté, » Au sort de quelque rustre, en esclave enchaïînée, » Subira les dégoûts d’un indigne hyménée ! » Ah! si j'en juge bien, c'est d’Acaste le sang, » D’Acaste à qui je dois ma fortune et mon rang. » Elle réveille en moi la mémoire chérie » De ce vieillard qui fut mon guide dans la vie. » De ma fortune en lui je vois l’auteur d'abord. » Maintenant cet ami, ce protecteur est mort. » Ses terres, ses maisons, tout a changé de maître, » Et sa famille a fui pour ne plus reparaître. » On m'a dit que sa veuve et sa fille, à l'écart, » En un lieu solitaire et loin de tout regard, » Transfuges du grand monde et d’une pompe vaine » De qui le dur contraste eut aggravé leur peine » Par l’aspect d'un éclat qui fut jadis le leur, » Sous le chaume indigent ont caché leur douleur ; » Qu’elles vivent encor : vainement je les cherche, » Elles ont jusqu'ici bravé toute recherche. ». O trop bizarre idée, en qui pourtant j'ai foi : » Je crois voir à présent sa fille devant moi. » Mais quand l'interrogeant, il apprend d'elle-même Que d’un ami si cher, dont la faveur suprême Le combla de bienfaits, elle est la fille, alors Qui pourrait de son ame exprimer les transports? Les mouvements confus dont il n’est plus le maître, Les violents frissons qui parcourent son être? C'est maintenant qu'il veut conserver son amour. 36 ( 562 | La flamme qu'il.cachait va paraître au grand jour. Pendant qu'il la regarde, à son ivresse en proie, Il pleure de pitié, de tendresse, de joie. Lavinie est troublée à l’aspect de ces pleurs : Mais son teint s’est paré des plus belles couleurs, Lorsqu’enfin éperdu, sans tarder davantage, Palémon de ses vœux ainsi lui fait hommage : « D’Acaste, il est donc vrai, je retrouve dans toi » Les restes précieux. Du cœur suivant la loi, » Comme je t’ai cherchée avec sollicitude, » Afin de te montrer ma vive gratitude ! » Après un si long temps j'ai pu te rencontrer ! » De quel pur sentiment tu viens me pénétrer ! » En toi de mon ami l’image vertueuse » Revit : c'est sa figure aimable-et gracieuse. » Je reconnais son air, mais chez toi seulement » Les traits sont dessinés plus délicatement. » Moins douce du printemps est pour moi la présence » Que toi, l'unique fleur m'offrant la ressemblance . » De la tige qui m'a de ses trésors nourri. » Transfuge du désert dont l'aspect m'a souri, » À quel réduit obscur, à quel antre sauvage » Dois-tu cette beauté qui du ciel est l’image, » Et déploye à mes yeux ses charmes ravissants ? » Quoi ! sur un sol ingrat, des besoins renaissants , » De l'orage et des vents les fureurs déchaînées » N'ont pas flétri l'éclat de tes belles journées ! » Ah! désormais pour toi que leur courroux soit vain ! » Laisse moi t'implanter sur un riche terrain ; » Où de plus doux soleils versent leur influence, » Où de fertiles eaux enfantent l'abondance ! » Ah! sois de mon jardin et la joie et l'orgueil ! » O spectacle indécent, affligeant pour mon œil! ( 563 ) » D'Acaste, dont le cœur plus grand que les richesses » Se trouvait pauvre encore, songeant que ses largesses » Ne pouvaient pas s'étendre à tous les malheureux, » Le père d’un pays ! 6 penser douloureux ! » Je pourrais voir la fille en proie à l'indigence , » Ravir quelques épis pour gage d'existence , » Aux champs qu’il m'a légués. Jette, jette bien loin » Cette ignoble pitance, aliment du besoin ! » À tes rudes travaux souffre que je t’arrache ! » Ce n’est pas pour tes mains qu’est faite cette tâche. » Ces champs, leur possesseur, tout enfin t'appartient. » Un souvenir bien cher que mon cœur entretient » Me dit que je dois tout à ta noble famille. » Tu pareras l'éclat dont ma fortune brille : » Aux biens dont ta maison se plut à me doter, » Pour surcroît de faveur si tu veux ajouter » Le pouvoir précieux et que surtout j'envie » De changer tes destins et d’embellir ta vie. » Le jeune homme se tait : mais ses regards encor Quêtent une réponse ; ils sont pleins du transport De l’ineffable extase où son âme se noie, Goûtant le sentiment de l’ineffable joie Qui s’y peint et l'élève au-dessus d’un mortel. Lavinie est émue à ce touchant appel, Et ne fait pas longtemps attendre sa réplique. Eperdue, elle cède à l’ascendant magique Que tant de bonté vient exercer sur son cœur ; Et le consentement se lit dans sa rougeur. On court en apporter la nouvelle à sa mère, Qui triste, regrettait une fille si chère ; Et déjà redoutant un malheur trop certain, De sa cruelle absence accusait le destin. De ce qui s’est passé la véridique histoire ( 564 ) Lui paraît un vain songe, à peine elle ose y croire : Son être est ranimé par ce bienfait des cieux Un rayon de bonheur a traversé ses yeux Et-vient se réfléchir sur le soir de sa vie : Ses malheurs sont finis : elle est aussi ravie Que le couple charmant, qui béni par l'amour A de nombreux enfants plus tard donna le jour, Postérité comme eux de tous les dons parée, Bonne enfin,et qui fut l’orgueil de la contrée. De l’an trop fréquemment est détruit le labeur. Au sud l’ouragan couve en un calme trompeur. Des bois d'abord à peine il frôle le feuillage. Aux champs tout est paisible : un doux souffle y voyage. Devant lui les épis frissonnent mollement. Cependant le vent croît de moment en moment ; Et l'atmosphère au gré du courant invisible, Dont elle sent la force active, irrésistible, Se précipite et fond sur le monde effrayé.. La forêt a courbé son front humilié : De ses arbres frappés jusque dans leurs racines Déjà de tous côtés comme autant de ruines Les feuilles vont joncher le sol avant le temps. De son sommet pelé qu'assiégent les autans, Le mont brise leur choc auquel il est en butte, Les arrête, les coupe, il met fin à la lutte, Et les lance en torrent sur le riant vallon. Sans défense exposée au puissant tourbillon, Roulant incessamment les vagues agitées D'une mer de moissons par ses coups tourmentées, La plame flotte, et bien qu'il cède sous l'effort , Le souple épi ne peut échapper à son sort ; Soit qu’en l'air il tournoie ou que son tuyau vide, Au regard désolé montre une paille aride. ( 565 | Parfois aussi la pluie à flots impétueux De l’épaisse nuée ombre noire des cieux, En déluge descend, la tempête s'y mêle, Et couvre chaque objet de son ombre nouvelle : Le déluge redouble et les champs d’alentour Par les eaux envahis se dérobent au jour. Le fossé plein déborde et partout le pré nage : D'innombrables courants élancés avec rage, Des monts tombent brisant tout obstacle jaloux. Que dis-je? Dans son lit le fleuve avec courroux Bondit, se précipite, atteint, fait disparaître Les moissons, le bétail, la cabane et son maître, Pèle mêle engloutis ; et de ce que debout Les vents avaient laissé, les flots maîtres de tout Complètent la ruine. Ainsi, plus d'espérance. Ces trésors dont l'automne étalait l'abondance, Trésors du laboureur chèrement achetés, Tout périt. Dans sa fuite à pas précipités, Il gagne une hauteur. Désormais sans ressource. Son œil suit les débris qu’emporte dans sa course Le flot dévastateur : le fruit de ses travaux En cent lieux dispersé, son bœuf qui sous les eaux A rencontré la mort. A l'avenir il songe. Qui peindra la douleur où son âme se plonge, En pensant que l'hiver le surprendra demain Auprès d’' enfants chéris qui manqueront de pain ! Maîtres, montrez alors une âme charitable ! Pourriez vous Gublier la main infatigable Qui vous aide à couler vos jours si mollement ? Ces membres que recouvre un simple vêtement, Tandis qu'enveloppé dans de chaudes fourrures, De la rude saison vous bravez les injures ; Cette table frugale où quelques maigres mets Servent à défrayer vos opulents banquets, ( 566 ) Font pétiller le vin qui brille en votre coupe, Des ris et des plaisirs fixent chez vous la troupe ? N’allez pas exiger avec avidité Ce que les vents jaloux et l'onde ont emporté! .Terminons cette scène : une autre la remplace. J'entends le son du cor, il annonce la chasse, Renforcé par des cris, le bruit d'armes à feu. La muse ici pourrait s’occuper quelque peu A décrire le chien, qui tout-à-coup s’arrête Au milieu de sa course en avançant la tête, De ses naseaux instruits aspire et hume l’air, Et connaît le gibier, averti par le flair. Qui prudent, plein d'adresse, interroge la voie, En silence se glisse et tombe sur sa proie ; Ou les divers oiseaux qui montrent au soleil D'un plumage changeant l’azur et le vermeil, Et dont l’essaim perché parmi le rude chaume, Veille à sa sûreté, se défiant de l’homme. - Dans le piége cruel cependant attirés, Ils cherchent vainement à s'échapper des rêts : Par leurs efforts toujours s'empêtrent davantage ; La lutte les épuise et trahit leur courage. Même aux plaines de l'air qu'on les voit conquérir, Ils ne courent pas moins la chance de périr : Car tandis que montant dans leur essor joyeux, Leur aile ambitieuse allait chercher les cieux, Is descendent atteints, aussi prompts que la foudre ; Ou dispersés, blessés par quelques grains de poudre, Ils tournent en tous sens, au hasard se mouvant, Et s'envolent, toujours balotés par le vent. Mais de pareils sujets t'imposent le silence. O Muse, de tes chants pour garder l'innocence, ( 567 ) Tu te tais à dessein : ton plaisir est de voir Les êtres animés en groupe se mouvoir Autour de toi, brillants et d’ardeur et de vie : Il te ferait horreur ce plaisir qu’on envie, Amusement cruel et qui donne la mort, Affreusement joyeux, que convoite si fort Une aveugle jeunesse, avide, impatiente, Debout pour s’y livrer dès l'aurore naissante : Dans le même moment où de meurtres lassés, Les monstres des forêts qui par la faim pressés Exerçaient leur carnage au milieu des ténèbres , Du moins dès que la nuit de ses voiles funèbres Dégage l'horizon, disparaissent honteux, Et dérobent au jour leurs ravages hideux. I n’agit pas ainsi l’homme en sa tyrannie, I montre sans pudeur sa puissance impunie, Et passe de bien loin, aveugle en sa fureur, Les animaux de proie en leur féroce ardeur : Car c’est par passe-temps qu’il immole, déchire : Et lorsqu'en son éclat le jour vient lui sourire. Sauvages animaux, venez lui reprocher Cette soif que le sang ne saurait étancher ! Vous, le besoin vous presse, et veut une victime : Mais regorgeant de tout s’accoutumer au crime ; Des mains de la nature avec amour bercé, Aimer à voir souffrir l'être qu’on a blessé ; Se plaire dans le sang que l'on vient de répandre, Voilà ce que jamais vous ne pourrez comprendre. Quant au lièvre timide, à fuir accoutumé, De triompher de lui qui peut être charmé ? Lancé du.champ de blé, son séjour ordinaire, Soit qu'il cherche un refuge écarté, solitaire, Dans les jones d’un marais, qu’il trompe le regard { 568 | Pénétrant sous le chaume, ou se cache avec art Sur ces terrains où croit la bruyère, soigneuse De couvrir de feuillage une lande épineuse ; Aux chardons de la plaine, aux touffes de genêts Qu'il livre son salut; de ses rameaux fanés Que la fougère amie a son manteau semblable Paraisse lui promettre un abri favorable , Ou soit que la jachère aussi fauve que lui, Par l'éclat du soleil qui sur sa face a lui, - Le rassure ; qu’il monte en sa course rapide Sur la hauteur d’où coule une source limpide : Rien ne peut le sauver; quoiqu'il se tienne coi, Muet, l'oreille basse et palpitant d’effroi, L'œil constamment ouvert, exacte sentinelle, Et que pour süreté la nature fidèle Voulut placer très haut, afin qu'en son rayon L'animal découvrit un immense horizon : Entre ses pieds velus quoiqu'il cache sa tête, (Car à certain signal à partir il s'apprête) La rosée a pompé les odeurs de son corps, Les exhale bientôt et trahit au dehors Son labyrinthe obseur ; parmi les ouvertures La brise qui gémit avec de longs murmures , En grossissant sa voix accourt lui présager L'orage qui s’avance et le met en danger. Plus proche et plus fréquent le bruit enfin augmente ; Il charge l'air ; le lièvre a bondi d'épouvante. La meute entière arrive, elle ne fait qu'un saut, Et sa tremblante proie est saisie en sursaut. Résonnant des coteaux comme pour une fête , Le cor de l'ennemi proclame la défaite ; Le coursier qui hennit et l'avide chasseur Expriment de concert leur joie avec ardeur. Le tout pour une pauvre et faible créature { 569 ) Qui ne sait que nous fuir, qu'à plaisir on torture. Tableau qui n'offre aux sens du spectateur blessé Qu'ivresse discordante et tumulte insensé. Ornement de ces bois où monarque il commande, Le cerf au front rameux , isolé de sa bande, Est lui-même forcé de conjurer le sort, En butte au même orage. Echappé de son fort, D'abord à sa vitesse imprudent il se fie ; Excité par la peur, bientôt toute sa vie A passé dans ses pieds ; il évite le vent , Et par cette manœuvre , il réussit souvent A détourner de lui l’odorat qui le flaire , Et trompe en son calcul la meute sanguinaire, Ou du moins quelques chiens. Courte déception ! Bien qu’en sa course , au gré de son intention , Il glisse plus léger à travers les campagnes Que Borée effleurant le sommet des montagnes Pénètre les halliers, passe dans les bosquets , S’enfonce dans le cœur des bois les plus épais. La meute cependant qu’en sa course il dépasse Plus lente, mais toujours attachée à sa trace, | Attentive à l'odeur qui sert à l'indiquer, Des massifs protecteurs accourt le débusquer. Chassé de cet asile au secourable ombrage, Pour son salut alors il met tout en usage ; I parcourt de nouveau , rase encor la forêt. Maintenant il soupire, il voit avec regret Aux doux rayons du jour se dorer la clairière Où bien souvent du front en luttant sans colère Avec ses compagnons il venait se heurter, Cette place où souvent l’amour sut l'arrêter. Dans la source du mont qui jaillit écumante, Il veut laver ses flancs que la chaleur tourmente , , ’ ({ 570 ) Y perdre cette odeur qui révèle ses pas : il cherche ses amis, mais ne les trouve pas. Vainement il implore, aucun d’eux ne l’assiste: Son malheur a rendu tout le monde égoïste. Que lui reste-t-il donc? Autrefois vigoureux Ses muscles secondaient ses efforts généreux ; Ils n’ont plus de ressort , et faible, sans haleine , Un sentiment amer, de douleur et de peine S'empare de son cœur. Désormais aux abois , Le désespoir lui fait seul entendre sa voix : Des pleurs, des pleurs brülants mouillent sa noble face , Il gémit : mais les chiens qui précèdent la chasse Fondent sur son beau corps; et de sang altérés Déchirent sa poitrine et ses flancs bigarrés… Mais cela doit suffire. A l’ardente jeunesse Dont le sang enflammé cireule avec vitesse, Si de la chasse il faut accorder le plaisir, Contre le fier lion qui, calme au lieu de fuir, Au fer qu'on lui présente oppose son courage, Qu'elle ose mesurer sa belliqueuse rage ! Oh! non, dans ce danger où chacun craint pour soi, La foule des chasseurs recule avec effroi. Sur l’affreux loup sorti de sa caverne horrible Que, velu comme lui, son ennemi terrible , ’ Ton chien excité coure; au sanglier cruel , Qui de destruction menace tout mortel , Que ton dard acéré lancé d’une main sûre Ouvre en percant le flanc une large blessure ! Cette chasse, 6 Bretons ! ne peut s'offrir à vous. (1) Eh bien, exercez donc votre utile courroux Sur le voleur de nuit (2) qui dans la bergerie (1) On ne connaît en Augleterre ni loups ni sangliers. (Note du traducteur. ) (3) Le renard. (Note du traducteur.) ( 571 ) Fait avec sûreté sa recherche impunie. De son repaire obscur l'avez-vous délogé ? Que par toute la chasse il se trouve assiégé ; Sautez le fossé large et franchissez la haie , Que le marais profond n'ait rien qui vous effraie ; Percez de la forêt le dédale incertain ; Malgré ce vain obstacle ouvrez-vous un chemin ; Courez et plongez-vous au sein des eaux profondes , Guidés par votre instinct , sans redouter les ondes ; Là, montez sur la vague, et qu'âme de ces bords Votre voix triomphante éclate en longs accords, De rochers en-rochers , harmonie entendue Par la voix des échos en tous lieux répandue ; Gravissez les hauteurs et leur sommet boisé , Du raide escarpement , encore plus osé Que chacun de vous glisse, ou parcoure la plaine , Dévore cet espace, et sans reprendre haleine Epuise ses efforts sur les pas du gibier. Car heureux le chasseur qui marche le premier! Suit dans tous ses détours le renard qui l'évite ; De la meute à profit sait mettre le mérite, Et voit enfin saisir l’animal scélérat , Sans se plaindre , souffrant, quoique dans cet état Par la rage des chiens , sous leurs vives morsures , Son corps tout déchiré saigne de cent blessures ; Glorieux celui-là pardessus ses rivaux , Quand le cor vient marquer la fin de leurs travaux Par son bruyant signal ; que ses sons pacifiques Annoncent leur entrée en ces châteaux antiques Dont le renom jamais ne risque de périr ; Que d'emblêmes la chasse a pris soin de couvrir : D'un renard à propos au toit la peau pendue, Aux larges murs de cerf une tête étendue Près de masques anciens inspirant de l’effroi. (572 ) Des veneurs à son ton on reconnaît le roi. Là des faits sur lesquels leur prouesse est fondée , Les Centaures bruyants n'ont pu donner l'idée : Par leurs cors de la nuit le silence est troublé, Et de leurs vieux castels le dôme est ébranlé. Mais au vaste foyer le feu d'abord s’allume ; Du haut des vases pleins à flots la bière écume , Et la table gémit malgré son épaisseur Sous le quartier de bœuf effrayant de grosseur, Et qui maîtresse pièce en garnit l’étendue. On s’arme du couteau dont la main est pourvue ; Les chasseurs affamés ouvrent la brêche , et tous De l'honneur du pays également jaloux , Pour vanter l'Angleterre et sa gloire immortelle Acquièrent en mangeant une force nouvelle ; Ou bien dans leur ardeur assiégent un pâté ; Et si la faim leur laisse un peu de liberté, Ce qui n'arrive guère , ils parlent de la chasse ; De citer ses exploits personne ne se lasse. Satisfaits , la faim dit à la soif sa sœur D'introduire le bow! (1), le bowl qui, possesseur D'un punch brülant , boisson exquise, libérale , Répand autour de lui dans la joyeuse salle Une odeur comparable à la brise de mai Quand elle effleure et flatte en son vol parfumé La bergère éperdue, au sein des fleurs couchée, Languissante d'amour et la tête penchée , A l'instant où l'amant qu'elle ne voyait pas D'un pas furtif arrive et se glisse en ses bras. mm mm (1) Nous avons conservé ce mot que tout francais sait prononcer, ne pouvant employer le mot bo! qui se prononce de même , mais dont l’acception est toute différente. (Note du traducteur.) ( 573 ) A sa brune couleur se faisant reconnaître , D'Octobre (1) la liqueur à son tour va paraître ; Déposée avec soin en des caveaux obscurs , Elle est depuis trente ans renfermée en leurs murs. Elle rougit et brille en voyant la lumière ; Dans son âge elle puise une saveur princière Et ne céderait pas en goût au meilleur vin. Désespoir des buveurs qui réclament en vain , L’adroit wist fait sa ronde exacte, accoutumée , Et circule à travers un torrent de fumée Qui parfume la salle et se mêle en tous sens. Dans le fond du cornet les dés retentissants Désireux de quitter leur prison trop étroite, Vont avec grand fracas s’élançant de la boîte Réveiller le gamon (2). Miss, qu'amuse la gigue (3), Sans beaucoup murmurer supporte la fatigue Que lui font éprouver ses robustes amants. On rejette à la fin ces froids amusements Souvent quittés, repris. Et de nos lords la troupe, Se décide à changer les cartes pour la coupe. Ils s’approchent , un cercle est formé prudemment ; C'est maintenant qu'on boit plus sérieusement. Ici point de raison, d'excuse qui dispense : Un malheureux en vain réclame l'indulgence, Prêt à se trouver mal ; les corps sont inondés Et les bowls sont remplis aussitôt que vidés ; Jusqu'à la table boit, le pavement ruisselle Et se dérobe aux pas du buveur qui chancelle : (:) Très-probablement nne bière fort supérieure aux autres et qu’on sert pour régal. (2) Terme familier qui exprime une espèce de jeu de trictrac très-connu en France. (3) Air de danse aussi très-connu en France. (Note du traducteur.) (574) Dans le même fluide alors chacun nageant, Plus libre vocifère, et de thème changeant, Vingt langues à la fois parlent dans leur ivresse De chevaux et de chiens , d'église et de maîtresse ; Mélent la politique avec le revenant , Vrai désordre qui croît toujours se maintenant. Une pause succède. Un canon qu’on entonne, Retenu trop longtemps soudain éclate et tonne, Par les cœurs ébaudis à l'instant répété. Chaque âme semble avoir un nœud de parenté ; Et l’on donne un plein cours aux transports, au fou rire, Le bruit confus des voix, des pieds tient du délire. La meute cependant arrachée au sommeil Par de longs aboiements accuse son réveil , Et mêle sa musique à celle de la fête. Comme l’on voit souvent la terrible tempête Qui la nuit de la mer bouleversa les flots Faiblir vers le matin , présage de repos, Par degrés de la troupe ainsi s'éteint la joie. Leur langue embarrassée et que la liqueur noie En vain veut soutenir, avide de parler, La pesanteur du mot qu'il faut articuler. A leurs yeux des flambeaux la clarté devient trouble , Chacun semble danser et chacun paraît double. Tel l'astre du jour flotte à travers le brouillard ; Leur pied trébuche, glisse, ils tombent au hasard ; Pipes, verres, journaux , flacons qu’on voit les suivre Tout comme si la table elle-même était ivre , Les couvrent de débris. Par dessous gît souillé Un monceau de vaincus sur le pavé mouillé. Le démon de l’orgie, ami de cette scène, Les yeux pleins de sommeil, se soutenant à peine, Siége à califourchon sur leurs corps immergés ( 575 | Et les tient jusqu’au jour dans l'ivresse plongés. Là peut-être un docteur auguste , vénérable , Abiîme de savoir (1), à panse redoutable Survit, et près de fuir le pénible tableau Qu'étale devant lui son impuissant troupeau , Oppose à cette image un souvenir antique ; Et debout, contemplant d'un air mélancolique Ce groupe de buveurs à ses pieds expiré, S’écrie en soupirant : « Tout a dégénéré. » De la chasse pourtant si le plaisir horrible A tant d’attrait pour nous, qu'un sexe plus sensible Sache s'en abstenir ! Ah ! que jamais sa main Du sang d’un animal ne rougisse son sein ! Courage déplorable! adresse déplacée ! Eh" quoi , voir une femme en cet art exercée Franchir une clôture et guider un coursier, Prendre attirail de chasse, en homme s'habiller ! Cela nous choquerait : nos belles britanniques Y perdraient leur douceur et leurs attraits magiques. Il est si gracieux chez ce sexe enchanteur Son attendrissement à l'aspect du malheur: Au mouvement qu’on fait, au mot que l’on prononce , De lire en sa rougeur une aimable réponse ; Si contre quelque obstacle il s’agit de lutter De le voir soudain fuir au lieu de résister ; Encore plus touchant par sa propre faiblesse, De qui l’aveu tacite en flattant intéresse , Ei porte d'autant plus l’homme à le protéger ! Ab ! que puissent ses yeux prompts à nous engager, D (1) Abyss of drink, abîme de boisson : mais voulant rendre autant que pos- sible toutes les images de Thompson et en même temps ne pas trop choquer le goût français, nous avons préféré cette traduction, (Note du traducteur.) ( 376 ) Ne jamais contempler de spectacle plus triste Que les pleurs des amants à qui son cœur résiste, Assidus à poursuivre un précieux gibier, Qui ruse toutefois, aime à les fouvoyer. Que les femmes , chef-d'œuvre orné par la nature, Adoptent une simple, élégante parure ! Faites pour embellir, pour harmoniser tout , Que leur talent se borne à chanter avec goût Et nous ravir aux sons qu'Amour met dans leur bouche; A faire soupirer le luth que leur main touche; A nous développer la grâce de leurs pas, En figurant la danse et ses brillants ébats ; Sur une riche étoffe, avec la broderie A tracer savamment une image fleurie ; A guider le crayon, en vers mélodieux A nous représenter le langage des dieux ; A prêter par les soins d'une main raffinée Plus de saveur aux fruits que procure l’année ; Des mets que la euisine offre pour aliment A relever le prix par l’assaisonnement ; A revivre, instruisant à marcher sur leurs traces Des enfants qu'on verra reproduire leurs grâces ; A la société donner le meilleur ton ; Rendre un époux heureux en réglant sa maison; Et par la modestie unie à la sagesse, Une finesse adroite et qui jamais ne blesse; Ecarter prudemment tous les soucis du cœur, Féconder les vertus, accroître le bonheur, Diminuer enfin les peines de la vie : Des femmes c’est le lot, le seul digne d'envie. Jeunes gens maintenant rendez vous vers ces lieux Où le rauque ruisseau dans son cours sinueux De hauteur en hauteur tombe dans la vallée : (577) De noisetiers touffus digue toujours peuplée , Et qui retient leur nom en vêtement serré Qui des buissons piquants ne soit pas déchiré , Vous, vierges, hâtez-vous ; les hôtes du feuillage Pour la dernière fois modulent leur ramage. Les noisettes, trésor si doux à vous offrir, Un amant empressé vole les recueillir Sous l’ombrage secret du bois , et s’il rencontre Au sommet d’un rameau leur groupe qui se montre Bruni par le soleil ; vers la terre penché, L'arbre cède à la force un produit recherché ; Ou bien lorsqu'il secoue en son ardeur folâtre Les noisettes que cache une cosse verdâtre ! Elles courent joncher le sol d’un brun brillant. Les cheveux de Mélinde ont cet éclat riant : Mélinde, de beautés le touchant assemblage, Et sans s’en prévaloir moins belle encore que sage : Pour tout dire, au-dessus de mon vulgaire encens. À ces lieux où la joie éclate en longs accents, Dérobons-nous. Courons aux sites où l'Automne Montre de tous côtés l’orgueil de sa couronne ; Entrons dans le verger ; de ses fruits embaumé , Par un esprit vital je me sens ranimé ; Là, des rameaux courbés sous le poids qui les presse , Que la brise empressée avec amour caresse , Que frappe le soleil, silencieusement Une pluie odorante échappe à tout moment ; Sur chaque branche on voit la poire succulente Étaler aux regards sa richesse abondante. La nature savante et qui raffine tout Varia leur famille et nuança leur goût ; D'air et d’eau, de soleil et de terre mélange, Ensemble combiné, mais qui sans cesse change. 37 {578 ) Après leur chute ainsi, pendant les froides nuits, A l’époque où l’année élance ses produits En innombrable amas sur le sol qui verdâtre, De ce nouveau tapis prend la couleur rougeûtre ; Dans les pommes pénètre , en leurs pores errant Un fin acide, frais. de l’autre différent. Du cidre la boisson est par là préparée , Et ménage un piquant à la langue altérée. Ce thême fut le tien, ce fut ta grâce aussi, Heureux Phillips , à toi! qui t'annonças ainsi Le barde de Pomone, et qui, rempli d'audace, Sans souci de la peine , osa sur le Parnasse Le second reproduire en toute liberté La poésie anglaise avec sa majesté. Tu nous appris comment des cuves de Silure Les vins étincelants que leur travail épure Ecument à flots clairs; les uns par leur chaleur Dans les fêtes d'hiver réveillent la vigueur ; Des autres la saveur plus douce et bienfaisante Tempère de l'été la flamme trop cuisante. Durant cette saison , penché vers l'occident , Quand le soleil nous lance un rayon moins ardent, Qu'il rend les jours égaux ; dans tes belles allées Qu'habite le silence et des zéphirs peuplées , Où règne la nature en ses simples appas, Dodington , je m'égare , et j'amuse mes pas. Mon regard à travers différents points de vue Des plaines de Dorset mesure l'étendue, Perspective sans fin ; là, noire de forêts ; Là , riche de moissons qui dorent les guérêts ; Là, blanche de troupeaux ; ta superbe demeure Cependant à mes yeux se dessine à toute heure : Splendide , elle ravit les regards enchantés, (579 ) Et doit à chaque jour de nouvelles beautés. Tantôt quelque statue ou bien quelque colonne. Chaque printemps paré de sa fraîche couronne Rencontre d’autres plants qu’il va faire fleurir ; Des bosquets attendant son souffle pour verdir. Là , tout est plein de toi : c'est le séjour des Muses. Noble chœur des neuf sœurs, c'est là que tu t’amuses A tresser en errant dans de secrets sentiers Pour le vertueux Young et pour lui des lauriers” Là souvent, Dodington , je brigue ton suffrage, A la brise inspirante aussi je rends hommage ; Je médite en chemin le livre que toujours La nature nous ouvre, et fort de ce secours Je m'étudie alors, plein du feu qui m'enflamme, A graver la vertu dans des vers pleins de flamme. Parmi ces espaliers exposés au soleil , Lorsqu'assise je vois l’Automne au front vermeil , Sous cette impression par l'image tracée , Mon thème favori revient à ma pensée. Je contemple la pêche au duvet cotonneux , Par sa couleur la prune au loin frappe mes yeux ; Le rougeâtre brugnon à saveur recherchée ; Sous le large couvert de sa feuille cachée La mielleuse figue ; en nœuds voluptueux La vigne enlace aussi ses tendrons tortueux ; Et sentant du midi les flammes fécondantes, Livre au soleil l’amas de ses grappes pendantes, Sans même désirer un plus heureux climat. Qu'’à présent dans son vol étincelant d'éclat, L'imagination à plaisir se transporte Vers de plus vastes sols, de nature plus forte, Où la vigne aux rayons du plus ardent soleil S'élève et se déploie en un riche appareil, ( 580 ) étend dans le vallon, grimpe sur les collines ; De rochers en rochers enfonce des racines, Y prodigue ses jets, et boit à leur pourtour Les rayons plus puissants que déverse le jour'; Puis courbe ses rameaux qui sous leur poids s’affaissent ; Les fruits à nos regards maintenant a pparaissent A demi sous la feuille. En couleur différents, Îls nous peignent la flamme et brillent transparents, Pour être fécondés. Cependant arrosée, Leur peau s’amollit, gonfle, et pompe la rosée La grappe se remplit d’un jus délicieux. Elle mürit enfin sous le rayon des cieux. Les deux sexes alors parcourent la campagne ; Le jeune homme jaloux d'offrir à sa compagne, Elle à son tour de rendre à son amant aimé Le doux trésor de l'an, que l’an a parfumé. Avec transport tous deux ils parlent de vendange. Bientôt les travailleurs arrivent et tout change. A travers l’horizon qui vous paraît sans fin, Le pays flotte, écume en des torrents de vin : Le raisin que l’on foule et fermente et s’épure, Il va verser partout une allégresse pure, Au fond de chaque coupe. Ainsi le doux clairet, Vermeil comme la lèvre, où penser plein d’attrait, Epuisant sa liqueur, on croit dans son ivresse, Dans un baiser d'amour exhaler sa tendresse ; Le bourgogne flatteur, mais qui sait dominer, Et vif comme l'esprit qu'il nous semble donner, Couronne du repas, le pétillant champagne Que la gaîté réclame et toujours accompagne. Par la froide saison à présent condensés . Des amas de vapeur fondent à flots pressés ; Vapeurs qui dans l’éther jusque-là retenues, (581) De nos faibles regards n'étaient pas aperçues. Déjà d’épais brouillards enveloppent le mont. La hauteur qu'on voyait aux cieux lever le fron , Et dont les vastes flancs épanchaient des rivières : Qui dominaient enfin de leurs têtes altières Des royaumes rivaux par elles divisés, Loin de flatter encor les regards amusés, Par des tableaux divers, s’effacent à la vue Qu'arrête la vapeur sur leur masse étendue. C'est l'œuvre d'une nuit. Tout est sombre, hideux. De là se propageant les brouillards vaporeux Descendent par degrés ; ils absorbent la plaine : Les bois ne montrent plus qu’une image incertaine ; La rivière elle-même en son cours indolent, Roule un flot à la fois plus obscur et plus lent. Et sans force devant l'obstacle qu'ils repoussent, Du soleil à midi les rayons qui s’émoussent Se réfractent au loin. Il paraît renaissant, Multiple, s’élargit, et l’orbe blanchissant Frappe les nations d’effroi; parmi l'air trouble, La grosseur des objets sur la terre redouble. Le berger que de loin nous contemplons errant, À nos regards surpris est devenu géant. Tant qu'enfin des vapeurs les cercles qui grossissent En s’amassant toujours se serrent, s’épaississent : Un brouillard général sur le monde s'assied, Et la confusion partout a mis le pied. Ainsi que des Hébreux l’a chanté le poëte, Lorsque dans son enfance, inhabile, incomplète, La lumière attendait un moteur souverain Qui püût dans le chaos lui frayer un chemin ; Et que l’ordre parmi l’obscurité douteuse Ne pouvait pas régler sa marche hasardeuse, Ces brouillards qu’à présent on distingue fumeux, { 882 | Et qui viennent couvrir les pays montagneux, Mêlés aux flots de pluie et de neiges alpines Dissoutes du soleil, aux cavités voisines Du cœur des grands rochers, vaste réservoir d’eau, Apportent leur tribut. De là naît le ruisseau ; La fontaine en jaillit et joue (1) infatigable ; La rivière, trésor certain, inépuisable, Y puise ses bienfaits. Certains sages ont dit Qu'où l'onde en abondance échappe de son lit, Et fouette à tout moment la rive tourmentée, Par des couches de sable à son tour agitée, Elle soutient la lutte, elle élève ses flots, Et qu'étreinte parmi leurs angles inégaux, Elle dépose alors sa substance saline, Et poursuivant son cours s’adoucit et s’affine. Mais le fluide actif ne s'arrête jamais. Bien qu'il aille au vallon souvent porter le frais, Attiré par le sable au haut de la montagne, Dans sa direction d’abord il l'accompagne, S'écarte de la mer et s’obscurcit aux yeux. Bientôt il a repris son éclat radieux, Et pur aux feux du jour que sa présence étonne, Bondit d'un saut agile, il écume, bouillonne. Les flancs de la montagne et ses points culminants Brillent de ces ruisseaux sans cesse jaillissants. Mais à quoi songent-ils? Quelle est donc cette idée ? Eh quoi, d’un vain désir leur âme possédée, Au sein des monts peut-elle aimer à voyager Quand à rester ailleurs tout doit les engager ? Lorsqu'avec un souris les aimables vallées Leur offrent le repos, un doux lit. Si troublées (x) Joue représente parfaitement le mot plays; mais joue est très-hardi et peut-être ne nous le passera-t-on pas, (Note du traducteur.) { 583 | Par une ambition qui nous trompe toujours, Les ondes aiment tant à détourner leur cours, Aux cavités du mont, de jones embarrassées, Pourquoi donc faire halte, en leur course lassées, Et pourquoi déserter dans leur zèle indiscret Un sable jusques-là pour elle plein d'attrait ? Ce n'est pas tout, les sels agglomérant leur masse, Produit des anciens temps, de ces ruisseaux la passe Doit enfin s’engorger. Sans quoi, comme les monts Qui par de lents degrés effacent les vallons, L’Océan s’infiltrant dans les pores du monde Aurait depuis longtemps de sa grotte profonde Délaissé le séjour, et son courroux nouveau Eût de Deucalion reproduit le fléau. D'où partent, dites-moi, les sources éternelles Qui vont nous enrichir de leurs tributs fidèles, Raffraichissent le globe et ses êtres joyeux ? Et quel est leur principe ? Ah ! sans doute nos yeux Les recherchent en vain. Génie, intelligence, Qu'à l’homme concéda la divine puissance, Pour sonder les secrets de l'abîme profond, Des montagnes à nu découvre-moi le fond ; Déploye à mes regards leur structure cachée ! Que leur charge de pins des Alpes détachée, Les montre sans obstacle, enlève ces grands bois Affreux, que le Taurus, l’Immaüs à la fois Etendent à travers l'immense Tartarie ! Que les flancs de l'Hémus contentent mon envie, Et l’Olympe élevé, si fécond en ruisseaux ! De ces monts dans le nord battus de vents rivaux: Les Doffrines courant par la Scandinavie, Vers tes derniers confins, inculte Laponie, En levant vers le ciel leur face de géant (584 ) Emule de la nue et leur sommet béant ; Et s’arrêtant enfin à la mer glaciale , Du Caucase imposant que sa hauteur signale A ces navigateurs qui s'ouvrent un chemin Parmi la mer Caspienne et les flots de l’Euxin ; De ces rocs (1) que le russe en son erreur profonde Croit pouvoir appeler la ceinture du monde ; Et de ces pâles monts, siège des noirs autans, Que ceignent la tempête avec les ouragans, Et d’où la Sibérie, immense, solitaire, Guide des flots glacés à la plage polaire ; Fonds les tributs neigeux dont chacun est si fier. À l'Atlas qui se penche et menace la mer, Elle-même agitant chaque vague bruyante, Sous la base du mont toujours retentissante, Qui va toucher le ciel et, dit-on, le soutient, Ordonne d’étaler les trésors qu'il contient ! Aux gouffres d’autres monts pressant l’Abyssinie Plonge et fais pénétrer ta recherche infinie ! Creuse ceux de la lune aux sommets recourbés, Cavernes de métaux à nos yeux dérobés, Mais qui brillent au jour ! Par leur taille effrayante, De ces fils de la terre à stature géante, Souveraines encor, que les Andes tendant De la ligne, à ces mers où la foudre en grondant Frappe le pôle austral, de leurs hideux abymes, Pévoilent à mes yeux les profondeurs sublimes (2). O surprenant tableau ! Toute obscurité fuit. Ici, le fleuve enfant m’apparaît dans son lit : (1) Les Monts Riphées. (2) A l'exemple de La Harpe (dans son Cours de littérature) nous avons risqué d'allier ces deux mots qui semblent s'exclure. La Harpe dit de Bourdaloue qu'il est sublime en profondeur comme Bossuet en élévation (Note dy traducteur.) ( 585 ) Ses efforts pour sortir ont frappé mon oreille. De chaque couche, là j'observe la merveille, Je vois les cavités s'ouvrir à chaque instant, À la pluie, à la neige, au brouillard suintant. Je remarque plus haut les divers lits de sable : Succède le gravier caillouteux et friable : La terre exhibe après le terreau mélangé. Je distingue des rocs dont le corps partagé Montre de tous côtés de fréquentes fissures ; Du rocher qui comme eux parmi leurs ouvertures, Laissant passer les eaux qui pénètrent leur sein, Empêchent que leur cours aille se perdre en vain. Par-dessous ces égoûts versant avec constance, J'admire les syphons d'une grandeur immense, Les larges réservoirs que la craie a formés, Où l'argile compacte, en ces lieux renfermés ; C'est de là qu'à longs flots le cristallin liquide S'ouvre parmi le sable un passage rapide , Bouillonne à mi hauteur du rocher escarpé, Ou coule librement de ses pieds échappé. C'est ainsi que d'accord et conspirant ensemble Pour une œuvre diverse et qui sert à l’ensemble, Le soleil agissant , l'air chargé de vapeurs, De leur côté les monts qui par de longs labeurs Attirent les vapeurs dont les masses pressées Sous la forme de pluie arrivent condensées, Et les lancent après sur les champs altérés En fleuves vers la mer dont ils sont désirés, Maintienent leur concours, et leur puissance amie, Du grand tout ici-bas entretient l'harmonie. Lorsque l'automne épand ses dernières lueurs, Pressentant de l’hiver les prochaines rigueurs, L'on voit se rassembler, jouer les hirondelles, { 586 Sous un ciel calme et pur, balancé sur ses ailes, Leur essaim emplumé coupe l'air en tous sens, De cercles répétés : mais glacé, dans leurs sens, L'hiver pénètre et met un terme à cette joie. Elles cherchent alors et trouvent une voie Sous le rocher miné, s'y groupent en amas ; Ou dans quelque caverne à l'abri des frimas ; Mais plutôt {cette idée est encor plus probable Elles vont visiter un ciel plus favorable, Avec d’autres oiseaux qui sont aussi chanceux Ils goûtent la douceur de ces climats heureux, Tant que du gai printemps le sourire renaisse. De vifs trémoussements expriment leur ivresse. Leur innombrable foule occupe en ce moment Les vastes champs de l'air où tout est mouvement. Aux lieux où résignant ses ondes magnifiques, Le Rhin perd son orgueil dans les plaines belgiques , Qu'à la mer en courroux un travail incessant Et de la liberté le zèle tout puissant Sont venus disputer , des cigognes la troupe S'assemble et tient longtemps conseil, avant qu'en groupe Dans les plaines du ciel vers un climat lointain Elles osent tenter un voyage incertain. On 2 choisi la route et des guides fidèles ; La bande s’est préparée et dispose ses ailes, En cercles redoublés leurs bataillons épais Ne se livrent d’abord qu’à de simples essais : La troupe monte enfin au séjour des orages, Dans les vagues de l'air, et se mêle aux nuages. Où l'Océan du nord écume à gros bouillons Et lance avec fureur en vastes tourbillons Son onde environnant les côtes inconnues , ( 587 ) Des îles de Thulé, mélancoliques, nues ; Ou bien où l’Atlantique inonde de ses flots Les Hébrides, souvent l'écueil des matelots : Qui dira des oiseaux quand la saison les presse , Les transmigrations qui s'opèrent sans cesse ! Combien de nations arrivent et s'en vont? Combien dans l'atmosphère où leur marche est de front L'œil voit en les suivant dans leurs lointains voyages De nuages vivants monter dans les nuages ? Ailes qu'on ne saurait compter! l'air empenné (1). La rive d’un seul cri, sauvage, ont resonné. Ici de son troupeau d'une taille exiguë, Et d’un autre bétail de chétive venue , Le berger fait ressource , il cherche à les nourrir De simples aliments que lui viennent offrir Les tertres verdoyants dont l'ile se couronne : Royaume du berger que la mer environne ! Lui-même sur des rocs arides, surplombés , Il recueille des œufs aux oiseaux dérobés, Ou des lacs poissonneux tire sa subsistance ; [l serre le duvet qu'il trouve en abondance Et qui doit composer le lit des luxueux. Sur ces Îles, miroir où se peignent les cieux, Planant, la muse enfin voit la Calédonie À l'aspect romantique, aux tons pleins d'harmonie : Ses monts aériens qui battus par la mer Ondulante à leurs pieds, en recoivent un air Qui subtil, vivifie et retrempe les fibres ; Ses augustes forêts, vierges et toujours libres, ——_———————— (x) Plum-dard air. I nous paraît difficile de rendre d'une manière tout-à-fait satisfaisante la force et la plénitude de sens de cette expression. C'est ici assuré- ment un de ces passages qui sont l’écueil d’un traducteur. (Note du traducteur.) ( 588 ) Que planta la nature et depuis tant de temps ; Ses lacs d'azur peuplés d’un trésor d'habitants, Qui déroulent leurs flots dans l'immense étendue , Et ses vallons , si verts où s'égare la vue Baignés depuis la Tiweed (1) aux transparentes eaux (Qui m'a vu naïtre et dont mes doriques pipeaux Dans mon enfance encore firent gémir la rive, Que ma voix quoique faible attirait attentive, Comme les bords du Jed (2) qui coule dans le but De payer à la Tweed un fidèle tribut). Jusqu'à ces lieux affreux où la tempête gronde, Sous le souffle du nord, en sa rage profonde, D'orca betubium tourmentant les sommets, Terre où les habitants par le malheur formés Apprirent à tenter des choses glorieuses. Ils durent au savoir des clartés précieuses , Lorsque pour se soustraire à la fureur des Goths Il voulut s'envoler aux bords occidentaux ; Race mâle de cœur, indépendante, fière, Sage, et qui s'illustra par sa valeur guerrière : Et toujours au milieu de tant d'âges de sang Opposait aux tyrans un effort renaissant. Je t'en prends pour exemple , infortuné Wallace , Patriote, héros, et chef bouillant d’audace, Qui fus de tes hauis faits si mal récompensé ? Que voulait-on ? défendre un état menacé, Le conserver intact. Hélas ! vaine espérance ! C'est de là qu'irrités dans leur impatience De la limite injuste où l’on les restreignit , Emportés par la gloire, aucun d'eux ne craignit D'aller verser au loin son sang sur chaque terre, (x) Rivière. (3) Ruisseau. (Notes du traducteur.) { 589 ) Toujours la disputant d’une ardeur téméraire. C'est ainsi que partout leur génie a plané, Que leur gloire trompée elle-même a donné Plus de gloire au pays. Tout comme éblouissante Dégageant de leur nord sa face rayonnante , L'aurore boréale à flots précipités Épanche sur l'Europe un torrent de clartés. Ah! n'est-il pas quelqu'un, patriote, que tente Cette gloire plus pure, encor plus éclatante De rendre fortunés dans l'immense avenir Tant d'êtres qui plus tard naîtraient pour le bénir ? Quelque âme généreuse et dont la voix chérie Console d’un seul mot , relève l'industrie ? Au pauvre laboureur donne par sa lecon Le moyen d'obtenir une double moisson? Enseigne à cette main qui cultive la terre Quelles sont les douceurs d'un travail salutaire ; De quel art on se sert et de quel instrument Pour préparer le drap utile au vêtement ; Par quel mystérieux et rare privilége On acquiert un linon aussi blanc que la neige ; Comment avec la rame on triomphe des flots, Loin de rester plongé dans un lâche repos, En spectateurs oisifs, tandis que les Bataves Paraissent sur nos bords qu'ils ont rendus esclaves , Viennent nous dépouiller des trésors poissonneux Qui barrent nos détroits de leur amas nombreux ? Comment naît le commerce à tout donnant la vie ; Comment de chaque port ouvert par le génie On lance en liberté parmi les vastes mers De leurs mobiles bras entourant l’univers, La voile respectée ; à la Grande-Bretagne, Deux sœurs que même nom, même cœur accompagne, Comment on doit régner sur l’humide élément ? (590 ) De ces héros plus d’un existe assurément ; L'œil arrêté sur toi, ton pays te désire, Son espoir, toi qu'il aime et surtout qu'il admire. Argyle, toi le sang de ses premiers héros! Oui, la patrie oublie à ton aspect ses maux ; Mère tendre, elle voit dans une heureuse ivresse Se reproduire en toi sa grâce enchanteresse, Ses attraits, ses vertus, toutes se mélangeant, Sa finesse d'esprit , sous un air engageant, Sa profonde sagesse et son perçant génie, Sa fierté qui s’armant contre la tyrannie Ne transige jamais quand il s’agit d'honneur. A travers les dangers son intrépide cœur, Soit quand elle soutint une terrible guerre, Soit à Tenier montrant sa valeur téméraire : Mais des lauriers de Mars si ton front fut paré, De ses palmes aussi la paix t'a décoré : Car dominante autant que ta vaillante épée, La persuasion de ta bouche échappée Coule à flots éloquents et triomphe au sénat : Tandis que du jeune homme en toi brille l'éclat, Qu’à la maturité de la saison virile, Se joint la profondeur d’une tête sénile. De toi, Forbes, que dire ? en mérite puissant, Loyal, sincère, ami tendre et compatissant, Toi vraiment généreux, noble et grand en silence , Ta patrie a senti ta bénigne influence Dans ces travaux naissants dont tu donnes le plan, Dans leur activité qui recoit ton élan. Rarement elle a pu , trompée en sa tendresse, Rencontrer un ami d’une aussi rare espèce. Mais des bois qui n’ont plus leurs-ombrages flatteurs, Voyez-vous s’étaler les bizarres couleurs ? ( 591 ) Leur voûte s'obseurcit et l'ombre y couvre l'ombre. Le feuillage revêt la teinte brune et sombre , Et de différents tons se trouve nuancé : [ passe d’un vert pâle au noir le plus foncé. La muse aime à revoir ces retraites cachées , Et soupire à l'aspect des feuilles détachées : C'est ici que l'automne offre un dernier tableau. Le calme entoure tout de son léger manteau, Il monte dans l’éther qu'il rase et qu'il caresse, L'éther illimité nous échappant sans cesse. Immobile, en suspens , comme près de mourir, Chaque vague de l'air a cessé de courir. Au loin illuminé dans son cours, le nuage Dégoutte de rosée, imbibe à son passage L'astre éclatant du jour, et sous son voile heureux ; Dissimule sa force et tempère ses feux. Puis il livre le monde à ses clartés paisibles. Ah ! c’est maintenant l'heure où les mortels sensibles : Amans de la sagesse et des plaisirs si purs, Par la nature offerts, doivent quitter nos murs ; Théâtre d’une foule indiscrète et profane Qui jouit de plaisirs que la vertu condamne. S'élever au-dessus d'êtres ignobles, nuls, Fouler aux pieds le vice et ses grossiers calculs : Calmer des passions dont la fougue s’éveille, Et seuls dans ces beaux lieux y prolonger leur veille. Solitaire comme eux sur les jaunâtres prés Que pensif je m'égare, ou parmi les forêts Dont le feuillage attriste, où l'on entend à peine Quelque oiseau hasarder une note incertaine Charmant du bûcheron les pénibles travaux. Pourtant l’un d’eux trahit le secret de ses maux : Veuf, on l'entend pleurer sa fidèle compagne , ( 592 ) À travers le taillis résonne en la campagne Sa plainte douloureuse. En troupes rassemblés Grives, merles, pinsons, tous les chantres aïlés Dont le gosier sans art, sur un mode rustique Animait les échos de sa douce musique, Maintenant dépourvus de sons mélodieux Reposent engourdis sur l'arbre froid comme eux. Leur plumage a perdu sa couleur si brillante : Leur voix est devenue et rauque et discordänte. Que du moins du chasseur le fusil inhumain Ne nous ravisse pas les chants de l'an prochain! Ab! qu'il n'immole pas une race innocente Qui doit avoir le droit d’être un peu confiante : Qu'un meurtre n’aille pas confondre à chaque instant Ces êtres que par terre il voit se débattant ! L'année à son déclin, quoiqu’elle plaise encore, inspire des regrets sur sa fin qu'on déplore. Enlevée au bosquet qui commence à pâlir, La feuille incessamment tombe et fait tressaillir Par son bruit sourd , celui qui dans la solitude Se livre sous l’ombrage aux charmes de l'étude. Fugitive, elle va de tous côtés roulant, Et figure dans l'air des cercles en volant : Mais parmi les rameaux qu’une brise plus forte Vienne à gémir, au gré du souffle qui l'emporte, Court inonder le sol un déluge feuillu : Tant que de la forêt le dôme chevelu Entrelacé, pressé par des torrens de pluie, A chaque coup de vent qu’au hasard il essuie, Lance au loin ses débris en un long sifflement. La verdure des champs, précieux vêtement, A disparu : les fleurs ont dépouillé leur robe; Et dans son lit chacune aux autans se dérobe. ( 593 ) L'arbre même à présent est forcé de céder Jusqu'aux fruits les moins mûrs qu'il parvint à garder ; Et des bois désolés, des vergers, de la plaine La perspective éveille un sentiment de peine. A son charmé si doux venant nous rappeler Dans chaque brise nait et va se révéler Le pouvoir enchanteur de la mélancolie. Aux larmes dont soudain sa paupière est remplie, A sa joue enflammée, à son air abattu, A ses traits attendris, à son cœur combattu Qui, contre les assauts auxquels il est en butte, Fait toujours prévaloir sa vertueuse lutte ; Qui peut la méconnaître ? elle embrase le cœur ; L'imagination s'exalte à sa chaleur, Elle allume en notre âme un foyer de tendresse Et remplit notre sein d'une céleste ivresse. Nous laissons loin de nous le terrestre séjour, Mille pensers alors se produisent au jour ; Tels que l’on n’en voit pas dans un vulgaire rêve, Se pressent pas à pas, se succèdent sans trêve, Et leur docile essaim à l'appel attentif Apparaît aussitôt à l'esprit inventif : Mais avec ces pensers accourent se confondre Toutes les passions faites pour y répondre, Différentes comme eux, s’exaltant aussi fort : La dévotion pure , allant jusqu'au transport; L'amour de la nature, autant qu'il peut s'étendre, Et pour l’homme surtout une affection tendre; L'ambitieux souhait de faire des heureux ; Le désir d'arrachér à ses besoins affreux Le mérite ignoré qui cache sa misère ; Le hardi mouvement d’une âme libre et fière Opposant son mépris à l’orgueil des tyrans ; La fermeté parmi les périls les plus grands ; (594) Cette admiration consacrant la mémoire Du patriote pur qui mourut pour la gloire, Et l'inspire à travers les âges reculés ; Ces généreux instincts dont nos cœurs sont gonflés, Qui veulent la vertu, veulent la renommée ; Le sympathique amour dans une chaîne aimée ; L'amitié de nos maux baume consolateur, Et tous les sentiments nobles enfants du cœur. Oh! qu'on m'emporte donc sous de vastes ombrages, Vers de mystérieux et solennels bocages Desquels le dôme admet à peine un demi jour ; Aux vallons des esprits, fantastique séjour ; Au sein des grottes, lieux réveurs, mélancoliques , En ces antres secrets, que l'on dit prophétiques : Où d’anges la figure , à l’œil épouvanté, Glisse, ou semble glisser parmi l'obscurité ; Et d'insolites voix résonnant dans le vide Viennent frapper l'oreille enthousiaste, avide! Si c'est trop exiger dans mes vœux exaltés, Je vous implore, à vous, douces divinités, Gardiennes des jardins et des lieux de plaisance Que l'Angleterre voit en si grande abondance Orner son riche sol ! daignez guider mes pas Au paradis de Stowe {1) à ces lieux pleins d’appas, Coupés par chaque allée en grandeur infinie. Non , le pérsan Cyrys, au bord de l'Ionie Ne contempla jamais d'aussi riants tableaux ; Tel art inépuisable en prodiges nouveaux , Qu'il dérobe au génie, et tel ardent génie Si bien réglé par l’art, double puissance unie! Au point que de lutter tout près de se lasser (1) Le château du lord vicomte Cobham, (Note du traducteur.) ( 595 ) La nature a grand peur de se voir surpasser. Orgueil de ton pays, à la première aurore, O noble Pitt, c'est toi qu'à cette heure j'implore : Permets-moi de m’asseoir sous tes berceaux ombreux. Que je pénètre aussi dans ce temple fameux (1) Où ton nom qui d'avance est promis à la gloire Plus tard sera gravé par les mains de l’histoire. Lorsque je vois encore , attentif à ta voix, L'automne me sourire en jaunissant les bois ; Pendant que des jardins faisant le tour ensemble, Nous goûtons les beautés que ce séjour rassemble, Et qu'il offre à mon œil son désordre réglé, L’imagination tout à coup a volé, Et m'emporte en idée aux bosquets de l’Attique ; De régler sur le tien son goût , elle se pique, Aux tons de la nature assortit son pinceau. Puis d’ombrages pareils délaisse le tableau ; S'élève en son essor à la nature humaine. Veut-elle combiner une tragique scène ? On la voit, grâce à toi, par un art enchanteur Marquer les mouvements si variés du cœur, A chaque caractère assigner son langage, Des passions surtout offrir la vive image. Grand homme, de ma muse anime les efforts , Par ta mâle éloquence objet de nos transports, Qui charme, persuade, enlève l'auditoire ; Parole dont le feu t’assure la victoire, Et subjugué par toi te livre le sénat ; Quand ton zèle indigné tonne avec tant d'éclat Sur la corruption qui partout l’environne, Et que tu fais si bien chanceler sur son trône. Parmi ces entretiens, landis que nous foulons (s) Le temple de la Vertu dans les jardins de Stowe, (Note du traducteur.) ( 596 } Ton aimable Elysée et ses riants vallons, Un soupir cependant échappe à ma poitrine. Une idée, à Cobham, me peine et me chagrine ; O pitié de songer qu’en un oubli honteux On te laisse aligner des arbres en ces lieux, Plutôt que réunir en escadrons formée , En bataillons nombreux une vaillante armée : Quand le faible ennemi de tout le genre humain, Le Français qui paraît les armes à la main, Réveille chaque peuple et l'appelle à la guerre, Et que pour refréner son ardeur téméraire Et contraindre à rester au fond de leur pays Ces esclaves hautains, ces ravisseurs polis (1); Notre belle jeunesse, en son impatience, N'attend plus désormais que ta rare prudence, Ton ardeur réfléchie et ton habileté. Vers l'occident, le char du soleil trop hâté A raccourci le jour et l'humide soirée, Qui perce et qui descend de la voûte azurée, Incessamment progresse, et ses voiles trompeurs Conduisent sur la terre un amas de vapeurs. A la face des eaux à regret suintantes, Des marais croupissants, des rivières courantes S’attachent les brouillards ; ils nagent tout le long De la plaine obscurcie et du sombre vallon. La lune dans son plein, en dehors du nuage, Pourtant à l'orient découvre son visage. AL AR. I À MR us, AD "© (1) Il est triste de voir ces attaques passionnées £e reproduire chez la plupart des auteurs anglais. Elles ne sont propres qu'à entretenir des sentiments de haine chez deux grandes nations faites pour s’estimer. Les écrivains français ont du moins le mérite d’avoir rarement donné l'exemple de ces sorties violentes et si déplacées que nous avons peut-être eu tort de conserver dans notre version , au surplus littérale : Those spolished rubbers, those ambitions slaves. ( 597 ) Tourné vers le soleil, son disque tacheté Où des monts s'élevant, montrent leur majesté, Où de riants vallons développent leur pente, Où des antres profonds inspirent l'épouvante Comme du télescope armé l'œil peut le voir ; Petite terre enfin, pour mieux le concevoir ; Nous donne la clarté, mais de feux dénuée Du monarque du jour à travers la nuée Qui passe dans les airs, habile à se glisser, Tantôt la lune semble en son cours s’abaisser ; Sublime, dans l'azur tantôt elle remonte. Des rayons qu'elle lance en sa course si prompte Le déluge au loin flotte, ils courent échangés Des monts aériens aux vallons ombragés, Pendant que les rochers, les frémissantes ondes Répètent dans leur sein des clartés vagabondes ; L'air qui blanchit, frappé de ce flot vacillant, D'un éclat argenté peint l'univers brillant. De la lune, pourtant, quand l'éclat qui s'efface, Aux étoiles permet de briller à sa place, > Et montrer leur splendeur dans les plaines des cieux ; Quand, presqu'éteint, son ombre apparaît à nos yeux Et verse une lueur maladive et blanchâtre, Iluminant les cieux d'une flamme rougeàtre. Maint météore arrive, envoyé par le nord. D'abord dans l'air moyen les porte leur essor : Ils convergent ensemble au haut de l'empyrée ; Puis ils glissent vers nous de la voûte azurée, Aussi promptement l'œil les voit y remonter. A chaque instant leurs corps accourent se heurter. Dans la bizarre lutte, ils se croisent, se mêlent: Ils épuisent leurs feux, soudain les renouvellent : D'un torrent de clartés l'éther est inondé. (398) Maintenant de terreurs chacun est obsédé, Chez les témoins du fait, une folle panique, De regard en regard déjà se communique. La peur a tout grossi, tout tient du merveilleux : Ce sont des escadrons qui, rangés dans les cieux , Brandissent fièrement la lance flamboyante. Sur des coursiers de feu d’une taille effrayante, Le signal est donné : l’armée en vient aux mains. On se mêle, on se presse, en efforts plus qu'humains, Les différents partis disputent de vaillance ; Et le sang que l’on voit couler en abondance En théâtre d'horreur change les champs d'azur. De cela l’effroi tire un parti bien plus sûr : Tandis que se répand le bruit de ces merveilles , D'extravagants récits remplissent les oreilles ; De batailles, de sang, voire de tremblements Remuant des cités jusqu’en leurs fondements , Ou d’autres que la flamme engloutit tout entières ; Ou bien c’est la famine, ou d'immenses rivières Qui couvrent un pays de leurs montagnes d'eau ; On parle de tempête ou d’horrible fléau ; De tous les maux auxquels cette vie est sujette , D'empires renversés, dont la chüte était prête , Car le destin d'avance en prononca l'arrêt : Même à leurs yeux soumise au souverain décret, La nature chancelle et marche à sa ruine. Voilà ce que pourtant l'ignorance imagine. Le sage philosophe, esprit spéculatif, Pense tout autrement : il contemple, attentif, Le brillant phénomène ; aidé de la science, Il s'applique à chercher ce qui donne naissance A ces corps lumineux, règle leurs mouvements, Et quels matériaux forment leurs éléments : Recherche en vérités jusqu'ici peu féconde !.… ( 599 } Mais cependant la nuit, ombre immense, profonde. S'abaisse ; enveloppés d’épaisse obscurité , Les vastes cieux, la terre ont perdu leur clarté , Et d'ordre et de beauté l’on cherche en vain la trace, Toute distinction à cette heure s’efface , L'univers est éteint, et la variété Fait place désormais à l’uniformité. Tel est donc ton pouvoir, à divine lumiere , D'animer, créer tout dans la nature entière. En ce triste moment que je plains le destin De celui que la nuit a surpris en chemin ; Il avance, il s'égare au milieu des ténèbres , Mille pâles terreurs, mille pensers funèbres Frappent son esprit : rien ne vient le consoler. . Point de rayon ami qu'il voie au loin trembler, Parti de l’humble chaume ou l’altière demeure. Peut-être impatient, préoccupé de l'heure, Tandis qu'il se dépèche et du pied va toucher Des racines de jonc qui le font trébucher ; Autour de lui s’épand le feu follet bleuâtre, Ou rassemble ses feux sur la mousse verdâtre Et trace un rais de flamme, éblouissant, trompeur. Leurrés par cet éclat, enfant de la vapeur, Que sans cesse elle éteint, sans cesse elle rallume , Cavalier et monture , en un gouffre qui fume , Disparaissent ensemble engloutis à l'instant. Sa femme, ses enfants, de jour en jour pourtant, Accusent son retard, la source de leurs peines, Et gémissent, perdus en conjectures vaines. La nuit, en d’autres temps, de bonheur messager, Le même météore écarte tout danger. Assis sur le cheval, il brille à sa crinière. Et ses utiles feux montrent la fondrière À laquelle conduit un sentier sombre, étroit, { 600 \ Ou près de la rivière, au gué le mènent droit. La longue nuit enfin dans son cours s'est usée. Arrive le matin, tout brillant de rosée, Précurseur du dernier des beaux jours automnaux. Le soleil, des brouillards jusque-là ses rivaux, Elancé dans les cieux, a dispersé la foule, Fondu par ses rayons, le léger glacon coule ; Et sur chaque rameau, chaque brin de gazon, La rosée étincelle, épandue à foison. Indignement volé du fruit de longues veilles, Voyez comme ici gît le peuple des abeilles ! La ruche est enlevée : on use à cet effet Des ombres de la nuit qui cachent tout forfait, Le soufre est sous posé, chargé de les détruire. Ainsi quand parcourant ses cellules de cire Et sans souci livrée à des travaux commvns, Pour braver de l'hiver les besoins importuns, Leur troupe forme aussi des plans de tempérance, Joyeuse cependant de voir en abondance Près d'elle des trésors par ses soins amassés, La puante vapeur s’élance à flots pressés. Le dénoûment est prompt : la race accoutumée A respirer toujours une odeur embaumée, Soudain asphyxiée en ses maisons de miel, Tombe et vient expirer sous le poison cruel. Etait-ce pour cela, tribu laborieuse, Qu’'au printemps reprenant votre tâche soigneuse, On vous voyait pomper le suc de chaque fleur ? Que même de l'été vous braviez la chaleur? Qu'en automne à l'écart visitant maintes plantes, Le soleil vous perçait de ses flèches brûlantes ? Homme cruel, toujours traitée avec courroux, La nature aura-t-elle à se plaindre de vous : { 601 ) Chaque jour lui vaut-il une nouvelle offense ? Quoi ! d’un bienfait la mort est donc la récompense ! Ne valait-il pas mieux à cet utile essaim Emprunter quelque peu de son trésor divin, Et puis lui ménager , pour payer votre dette, Contre les vents d'hiver une douce retraite ; Ou bien quand la saison nous montre ses rigueurs Le régaler du fruit de ses propres labeurs ? Voyez en quel état leur ville désolée, Apparaît aux regards, maintenant dépeuplée ? En différents quartiers, de rares habitants Frappent la vue encor, mutilés, impotents; Ou demi- consumés par le feu qui les mine, Sont là pour attester de l’état la ruine. C'est ainsi que parfois une fière cité, Populeuse, marquant par sa célébrité, Et dont les monuments offrent le témoignage De cette heureuse paix dont les arts sont l'ouvrage; Au moment où la scène amuse son loisir ; Ou bien quand une fête appelle le plaisir, Ou du dieu du sommeil par hasard enchainée, (O Palerme, ce fut, hélas! ta destinée). D'un tremblement de terre, en ce même moment, Eprouve la secousse : un sourd écartement Des fondements l’arrache et la lance enflammée Dans un abime affreux de sôufre et de fumée. Tout acquiert de l'éclat : car maintenant le jour Est plus pompeux, plus chaud, le terrestre séjour, Les cieux sont revêtus de splendeur infinie. Elle règne partout, quelle douce harmonie De la brise paisible à peine soulevant La rosée en vapeurs des plaines s’élevant. Comme à présent les cieux sont clairs et sans nuage ! (602 ) De quel bleu vif et tendre ils nous offrent l’image ! Couleur qui leur est propre, oh! comme à nos regards, Immense de l’éther s’enfle de toutes parts La voüte! en cet azur où domine son trône, Versant de tous côtés l'éclat qui l’environne, Que le soleil est gai! sous l'or de ses rayons Combien la terre est calme ! en lieu sûr des moissons Les trésors renfermés ne craignent plus la pluie, Ni les vents dont l'hiver déchaîne la furie. Cette fois la campagne est ivre de bonheur, Une franche gaîté, celle qui part du cœur, Se peint sur chaque front et bien loin exilée, La troupe des soucis déjà s’est envolée ; La jeunesse exercée à de mâles travaux, Et qui leur doit la force, en ses bonds inégaux , Ne danse pas sans grâce, elle suit la nature, Et par instinct se plie aux lois de la mesure. La beauté du village, aux charmes demi-nus, Jeune, vive, enjouée, aux regards ingénus, Lance plus d’une œillade en son muet langage , Et lorsque du sourire elle approuve, encourage, Vous voyez s’animer d’une invincible ardeur Le bruyant bâtonniste (1) et l’agile lutteur. Le dernier âge brille, et babillant, raconte Ses faits du temps passé dont il faüt tenir compte. . C’est en commun ainsi qu'ils charment leurs moments, Sans songer qu'ennemi de ces amusements, L'astre brillant du jour à sa course fidèle Doit les rendre demain à leur tâche annuelle , (1) Le jeu du bâton connu en Angleterre et dans quelques parties de la France, notamment en Bretagne. Nous avons été forcés d'employer l'expression de bätoniste, populaire en France, à défaut d’un autre qui put rendre le texte. (Note du traducteur.) (603 ) Soumise au temps que rien ne saurait retenir, Et commençant toujours pour ne jamais finir. Ab ! sent-il son bonheur, le mortel vraiment sage, Qui fuyant des partis la turbulente rage , Avec quelques amis, à l'écart retiré, Goûte aux champs les douceurs d’un repos ignoré ! S'il n’a point de palais dont la porte pompeuse, Vomit à chaque instant une foule trompeuse, De protégés rempants , lâches et vils flatteurs , Abusés à leur tour par de vils protecteurs ; D'une robe à longs plis si l'ampleur incommode Ne lui fait pas payer de tribut à la mode, Et s’il n’étale point en de vains ornements Ce qui charme les fous, l'or et les diamants ; Si la terre et les mers, flattant son vœu coupable, D'un luxe d'aliments ne chargent pas sa table, Et si les mets pour plaire à son goût dédaigneux N'empruntent point à l’art un apprêt dangereux ; S'il ne voit pas frémir dans sa coupe brillante Des vins les plus exquis la liqueur enivrante ; Loin d’un lit somptueux , S'il trouve le sommeil , Et si le sombre ennui ne vient point au réveil Ronger ses jours oisifs ; à la trompeuse joie, Idole des mortels, s'il n’est jamais en proie, A cette folle joie, éclatant au dehors, Tandis qu'au fond du cœur habite le remords : C'est qu'il n’y voit que vide, ennuis, peines, supplices. Ah! lui seul de la paix sait goûter les délices : Une vie occupée et sans ambition , Etrangère à l'erreur, à la déception, Qu'engendre un vain espoir, et riche sans mesure Des doux plaisirs du cœur, des dons de la nature. Ne lui doit-il pas tout, les plantes et les fruits? ( 604 } Soit que d'un nouveau souffle échauffant nos produits, Le printemps qui revêt sa ceinture brillante Fasse un heureux appel à l’onde fécondante Que distillent les cieux en limpide trésor, Soit que l'été brûlant teigne de pourpre et d’or La face des vergers ; soit que la pâle automne Achève de mürir les présents de Pomone; Soit que l'hiver glacé fournisse lentement A la sève endormie, un secret aliment. Dans cet ordre constant, qu'il voit et qu'il admire, Il jouit à la fois de tout ce qu'il désire. Tantôt portant ses pas dans un vallon riant, Heureux, il suit de l’œil son troupeau mugissant, Ou ses nombreux moutons hors de la bergerie : Tantôt se dirigeant vers la fraîche prairie, Couché sur l'herbe tendre ou le foin embaumeé, Respirant la santé dans un air parfumé, | Des traits brûlants du jour défendu par l'ombrage, Du ruisseau qui s'enfuit, de l'abeille volage Les murmures confus l'invitent au sommeil, Compagnon d'un cœur pur ; ici, sans appareil La nature a placé ses riches perspectives : Champs et prés décorés des couleurs les plus vives, Bois, grotte sombre, lac au miroir gracieux, Source limpide ; ici, fille auguste des cieux, Brille la vérité, la beauté sans souillure, Une jeunesse mâle, active, de mœurs pure , Endurcie au travail, satisfaite de peu, Et dans sa pauvreté ne formant aucun vœu, La contemplation s'exerce ici sans cesse : Les muses à loisir y chantent leur ivresse. Que d'autres naviguant vers un pays lointan A la fureur des flots s’exposent pour le gain ; ( 605 ) Enfermés pour longtemps dans des prisons flottantes, Qu'ils disputent leur vie aux vagues écumantés ; Que de torrents de sang inondant les cités, Et par le sac enfin, comble de cruautés , Au gré d'un faux honneur où leur orgueil aspire, D’autres mettent leur gloire à ravager, détruire ; Sans pitié pour la vierge et l'enfant au berceau, Qu'ils les plongent tous deux dans le même tombeau, Aux mères pour tout bien ne laissant que des larmes ; Quittant le sol natal qui pour eux est sans charmes, Poussés par l’avarice, ou pressés du besoin, Que d’autres s’exilant, aïllent chercher au loin De nouveaux cieux ; que tel, s’il lui plaît, s’autorise Au sein de nos cités, où la fraude est permise, Où l'outrage est légal, de ce droit des plus forts, Et marche à la fortune, étouffant le remords ; Que tel autre d’un peuple imprudent et volage, Contre l'ordre établi fasse monter la rage, Et de ce mouvement avec art profitant, Parvienne à le placer sous un joug révoltant ; Que ceux qui de nos lois savent tendre le piége Traînent un malheureux à l’antre où Thémis siége, Pour l’égarer ensuite en ce vaste chaos, Ce dédale d’arrêts dont s’arment ses suppôts ; Race dure! et ceux-là qui sous un air aimable Cachert également un cœur impitoyable, Courtisans au grand jour, paradant fièrement , Qui dans l'obscurité cabalent bassement , Se courbant à propos, toujours prêts à sourire, Et pourtant, las du rôle où leur orgueil aspire. Au contraire, celui qui n'est point agité Des passions, écueil de la félicité, Où vient heurter la foule, en une paix profonde Entend gronder de loin les tempêtes du monde, ( 606 ) Eh ! qu'importent à lui des trônes renversés, Des peuples en fureur, des états effacés ? Peuvent-ils avoir droit à sa sollicitude ? I a quitté le monde ; et dans la solitude Errant parmi les fleurs , sous l’ombrage des bois, Partout de la nature il écoute la voix. Curieux , il l’observe et dans chaque Journée Que ramène pour lui la marche de l’année, Il se plaît à la suivre ; épiant tous ses pas, Sous chaque forme, il voit, admire ses appas. Rempli d'amour, les dons que sa main lui dispense, Il les reçoit toujours avec reconnaissance, Et sans demander plus. Sitôt que le printemps Rassérène les cieux et chasse les autans, Qu'il marque le bourgeon déjà prêt à paraître Et féconde en secret le bouton qui veut naître, Contemplant à ses pieds la famille des fleurs, Son œil est ébloui de leurs vives couleurs ; Dans leur riant éclat il n’est rien qu’il n’admire ; De leur suave encens il n’est rien qu’il n'aspire. Désireux dans l'été, loin des rayons du jour Des abris où Zéphir a fixé son séjour, Il aime à reposer sous le feuillage sombre D'arbres pareils à ceux qui balancent leur ombre, Sur le riant Zémus ou la fraîche Tempé. C’est là que je le trouve à relire occupé, Ce que dans ces beaux lieux, amante du génie, La muse à fait entendre en vers pleins d'harmonie. Le livre est quelquefois par lui mis à l'écart ; Sur la plaine fertile il jette un long regard. Plus tard, la scène change à la voix de l'automne, Quand sur le front du bois se flétrit leur couronne , Que leur feuille jaunit sous un tiéde soleil, À son nouveau transport quel transport est pareil , ( 607 ) S'il voit les moissonneurs rangés en longue file Pour leur joyeuse tâche apprêter la faucille (1). Il suit cet heureux groupe, il jouit avec lui , Tant son cœur sympathise avec le cœur d'autrui! Et le rayon mourant dont la plaine se dore Donne à ses chants rêveurs plus d'intérêt encore : Le rude hiver lui-même a pour lui des douceurs. Les autans déchaînés, les rapides fureurs : Du triste sol partout la face désolée, Par un froid rigoureux durcie et congelée ; Tout vient le faire alors méditer avec fruit : Mais son ame s’exalte à l'heure de la nuit, Lorsque le front des cieux qu’un air subtil épure S'allume et resplendit d’une clarté plus pure. Un livre, un ami sûr se partagent son temps Et la sagesse ainsi règle tous ses instants. L'imagination, cependant vagabonde, L'entraîne dans son vol, franchit la terre et l'onde, Et la religion qui l’entretient des cieux , Lui montre ce qu’il vaut, l'agrandit à ses yeux. D'un pur patriotisme il sent brûler la flamme, Le nom d’époux, de père aussi parle à son âme. Ne contemple-t-il pas avec émotion Celle dont pour lui seul la vive affection, Dans un chaste regard se peint avec ivresse ? Ses enfants qui, toujours, si remplis de tendresse Empressés de lui plaire, attachés à ses pas, L’amusent de leurs-jeux, l'enlacent de leurs bras ? A de pareils tableaux sera-t-il insensible : . [l n'agit pas non plus en censeur inflexible. nn re LRO a eg" LUN lHNQUD SNS AL ON SAS 81 4 (1) Par ce passage de Thomson , on voit que sous le ciel froid et nébuleux de l'Angleterre , la moisson se fait à l’époque où la vendange a lieu dans les pays méridionaux, (Note du traducteur.) ( 608 ) Le rire, les bons mots, la danse, les chansons , Près de lui trouvent grâce : il a par les leçons Que l’étude reçoit de la philosophie, Appris que la vertu du plaisir est amie. Telle est la pure vie, inconnue aux cités, Et qui fuit à jamais leurs hôtes détestés ; La nôtre lorsque l'homme en son bonheur suprême , Avait pour compagnons les anges et Dieu même. O nature, 6 pouvoir qu'on rencontre partout, Qui n’a point de limite et qui suffit à tout, Permets-moi de scruter tes œuvres admirables ; Ravis-moi vers les cieux; des astres innombrables, De ces globes dont l'or est semé dans l’azur Laisse-moi contempler l'éclat brillant et pur, Etudier leurs lois, leur marche, leurs distances, Et franchir avec eux des espaces immenses. Guide ma faible vue au sein profond des mers. Que j'y puisse explorer leurs minéraux divers ! Au règne végétal que je remonte ensuite ! De celui-ci qu'après dépassant la limite , Ma recherche s'élève aux êtres animés Que ta puissante main semble avoir mieux formés ; Règne encor plus complexe, et surtout à leur maître Sublime composé, qui laisse reconnaître Un esprit si rapide en ses conceptions, Une âme, le jouet de mille passions ; L'homme en un mot, de qui la curieuse étude Est le plus doux objet de ma sollicitude ; Sujet que l'examen ne saurait épuiser. A la tâche pourtant que je veux m imposer Si je ne puis suffire ; en mes veines glacées Si le sang paresseux m'interdit ces pensées; Si je dois renoncer à ce suprême honneur, { 609 Le seul où j'aspirai, le seul fait pour mou cœur, Auprès des clairs ruisseaux et des fraiches prairies Nourrissant à l'écart mes douces rêveries , Sans autre ambition que je coule mes jours ! O pouvoir enchanteur, que j’adorai toujours. Nature, de qui tout a recu la naissance, — Et qui de tout aussi conserve l'existence Qu'en terminant ce chant , je proclame ta loi, Et que mes pas jamais ne s’éloignent de toi. = <> r—— ( 610 pe reprenne COMPTE-RENDU TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES, DE L'AGRICULTURE ET DES ARTS, DE LILLE, Pendant les années 1849 et 1830, Par M. V.or Dererue, Secrétaire-Général. Séance du 7 février 1851. MESSIEURS , Je pourrais, peut-être, ne plus m'excuser de mon insuffisance à rendre dignement compte de vos travaux. Appelé pour la sixième fois, par vos suffrages , à la place de secrétaire-général de la Société des Sciences, de l'Agriculture et des Arts de Lille, peut-être même me serait-il permis de penser que je mérite un honneur dont vous m'avez si souvent revêtu ; mais non, j'aime mieux croire que je le dois à votre bienveillance, à votre affection; si l’amour-propre y perd quelque chose, en revanche l'amitié y gagne beaucoup , et l'amitié, Messieurs, n'est-elle pas le premier lien des corps savants; n'est-elle pas la vertu dont ils devraient donner l'exemple aux hommes , si ces corps n'avaient plus à les instruire , à les diriger dans les voies du travail et de la morale; s'ils n'avaient plus à leur montrer, surtout dans ces temps de luttes sociales, d’invasion de doctrines dévastatrices et de folles espérances, que la loi du travail est providentielle, générale, et qu'à côté des rudes labeurs de la terre et de l'industrie , il y a d’autres labeurs non moins longs et non moins fatiguants; qu’à | (611 ) côte de l’homme qui creuse le sillon des champs ou qui assouplit le fer à coups de marteau , il y a d’autres hommes qui se livrent aux silencieuses conceptions intellectuelles et ne prennent de repos que lorsque ces conceptions se sont suffisamment épurées en pas- sant et repassant au creuset de la pensée; de la pensée, cette divine alchimie qui , plus réelle que l’art chimérique de la trans- mutation des métaux, rend réellement en or pur les matières sou- mises à son invisible travail, quand ce travail est lent, laborieux, réfléchi. Car loin de moi la prétention d'établir que tous les tra- vaux de l'intelligence humaine produisent cet or pur dont je vous parlais tout à l’heure. Hélas ! le contraire n’a été que trop souvent constaté ; trop souvent l'intelligence humaine s’égare dans les vastes champs dela conception et des systèmes, quand elle n’a pas à ses côtés la raison et la morale pour la diriger, la conduire, la mener à bonne fin. Privé de ces guides aussi sûrs que prévoyants, l'écrivain ressemble au navigateur sans boussole et sans carte , à l'architecte sans compas et sans niveau. Vos travaux sont là, Messieurs, pour témoigner que vous êtes restés dans ces sages limites, pour témoigner que l’étrangeté, le péle-méle et l'utopie si cultivés de nos jours, que le besoin de célérité, que l’impatience du résultat, qui semble être le carac- tère dominant de notre époque, n’ont pu vous faire sortir du cerc.e divin que la main de Dieu a tracé à l'homme et en-dehors duquel il n’y a que mélée et confusion! Vous n’avez pas imité ces esprits impatients, avides, réêveurs, qui se croient armés de la baguette créatrice du bon Perrault, et qui, hélas! n’ont en main que la pioche du démolisseur ! Vous avez senti que le monument du progrès doit s'élever lentement , de l'apport successif que chaque siècle lui amène , et non sortir tout d’un jet du génie d'un seul homme, comme Minerve du cerveau de Jupiter, comme une statue coulée en bronze sort du moule qui reçut et retint la fonte en ébullition. Voici, Messieurs, l'analyse rapide de ce que vous avez apporté de matériaux, en 1849 et en 1850, pour l'édification de ce monu- | 612 ment auquel Dieu viendra en aide , n'en doutons pas, quand il verra partout comme ici, la volonté et les efforts de bien faire. SCIENCES. Si toutes les connaissances humaines se donnent volontiers la main , il ny en à point de plus étroitement unies que la chimie et la physique ; souvent même ces deux sciences se prêtent leurs attirails de guerre, marchent ensemble à la conquête des mêmes phénomènes, et vainqueurs, soumettent leurs découvertes au creuset des calculs mathématiques, précieux moyen d’en verifier le mérite et la valeur. En appelant d’abord votre attention sur ces trois branches des connaissances humaines , nous leur rendons une justice qu'elles obtiennent de tous les corps savants. Les sciences exactes et les sciences naturelles en général , vous ont apporté, Messieurs, pendant ces deux années un riche et large tribut parmi lequel je dois signaler particulièrement : Les Etudes de Chimie organique, de M. Millon , faites en vue des applications physiologiques et médicales. Les Recherches chimiques, de M. Corenwinder , tendant à re- produire à l’état défini et sous forme cristalline, plusieurs combi- naisons binaires de l’iode et du phosphore. Les Analyses chimiques, du même collègue, sur les liquides du corps des cholériques , ayant pour but de rechercher en quelle quantité s'y trouvent l’albumine, l’eau et le sel marin, et ses expériences sur la combinaison de l'iode et du brôme avec l'hy- drogène. Les travaux, de M. Delezenne, sur l'Acoustique et principale- ment sur la formule de la corde vibrante. Les Études sur la Ti rigonométrie, de M. Heegmann , suivies de tables pour la résolution directe du triangle sphérique , avec leur application à la gnomonique et à quelques problèmes d'astronomie usuelle 613 - Les Mémoires de M. Meugy , sur une cause de rupture de cer- tains appareils à vapeur et sur une nouvelle machine destinée à l'extraction de la houille , imaginée par M. Méhu. Les Mémoires de M. Paryse, l’un intitulé : De l'Ostéophyte cos- tal pleurétique ou recherches sur une altération particulière des côtes dans la pleurésie. L'autre sur une nouvelle espèce d'étran- glement interne ; l'étranglement par nœud diverticulaire, et le troisième sur deux espèces nouvelles de hernies : la hernie ingui- nale intra-iliaque , et la hernie inguinale anté-vésicale. L'Ornithologie européenne où Catalogue raisonné des oiseaux observés en Europe, par M. Degland. Le 4.° Supplément aux diptères exotiques nouveaux ou peu con- nus, de M. Macquart ; son ouvrage intitulé : sur les Facultés inte- rieures des animaux invertébrés , et le Catalogue des animaux in- vertébrés du Cabinet d'histoire naturelle de Lille, catalogue qui renferme plus de 8,000 numéros. Les fascicules n.°* 34, 35 et 36, de l'ouvrage de M. Desma- zières , sur les plantes cryptogames de France. La Carte géologique de la Flandre , dressée par M. Meugy. Ce grand travail se compose de deux feuilles , dont l’une com- prend les arrondissements de Dunkerque, Hazebrouck et Lille, et l'autre l'arrondissement de Douai , avec une vingtaine de coupes qui mettent en évidence la structure du sol jusqu'à 150 à 200 mè- tres de profondeur. Les textes explicatifs de cette carte comprennent les applications utiles qu'on peut faire dans la Flandre, de la géologie à l’agri- culture. Et le Mémoire de M. Bachy, sur /a céruse et le blanc de zinc. AGRICULTURE. La aussi , Messieurs , vos travaux ont été nombreux et variés ; et après avoir fourni votre part de force au mouvement ascen- sionnel que l’agriculture a pris depuis dix ans , surtout dans nos 614 | contrées, vous avez su constamment vous tenir à la hauteur de ce mouvement ; vous avez fait plus , vous l'avez souvent provoque par les plus louables efforts , les plus heureuses tentatives , et par vos sympathies les plus vives pour des essais pratiqués dans la voie du progrès et du perfectionnement. Je vais essayer de réunir dans quelques pages toutes les parties de ce vaste réseau qui renferme tout à la fois les principes , les ap- plications , les résultats de Ja science agricole , science qu'on mé- connut si longtemps, que si longtemps on souilla du nom de rou- tne, et qui, sans code et sans annales, se transmettait, pour ainsi dire, par simple tradition orale, comme une sorte d’héri- tage de famille dont un fils absent aurait été privé. “Mais grâce à de courageux efforts, à d'incessants travaux, la aussi la Jumière s'est faite vive et claire, et a chassé de- vant elle les ténèbres qu'entretenaient les erreurs et les pré- jugés. | Vos publications agricoles peuvent revendiquer, Messieurs , et à juste tre, une bonne part des travaux qui ont fait cesser un tel état de choses, qui ont tiré le pays d’une si déplorable si- tuation. Là , le cultivateur a toujours pu puiser aux meilleures sources les bons enseignements et les plus saines doctrines de la science qui découvre, de l'intelligence qui applique et du travail qui re- cueille; il a pu bien plus, depuis deux ans, surtout, il a pu, grâce au concours de MM. Lefebvre , Macquart, Loiset, Bailly, Lestiboudois, Cazeneuve et Le Glay, prévenir, et par conséquent éviter, queiques-uns des maux nombreux qui pèsent partout sur la terre et qui semblent envoyés par la sagesse de Dieu, pour que l’activité, la prévoyance , le courage qu'il a départis à l'homme soient continuellement tenus en éveil. lei doivent être mentionnés particulièrement pour leur portée et leur étendue: la Legislation des portions ménagères ou parts de marais, de M. Legrand, l'Histoire du froment, l'ancienneté de sa culture el son influence sur la destinée des peuples, par M. Le- 615 | febvre ; le Compte rendu, de M. Macquart, sur les travaux du Congrès central d'agriculture, tenu à Paris en 1850. Les expériences de M. Millon sur l’hydratation des blés de la récolte de 1849, sa Notice sur l'association humanitaire, et sesexpeé- riences sur des couches de calcaires phosphatés existantes dans l'arrondissement de Lille. Celles de M. Lecat sur la Culture des pommes de terre, en vue de la soustraire à la maladie régnante et le résultat de fumures diverses appliquées par lui à la culture de ce même tubercule. Dans les rapports que vous avez été appelés à adresser à l'ad- ministration sur des solutions d'un ordre supérieur, se recomman- dent plus particulièrement les travaux suivants, pour lesquels vous avez reçu de vos associés agriculteurs et de votre Commission d'agriculture, le concours éclairé, assidu, qu’ils sont dans l’habi- tude de vous prêter chaque fois que vous faites appel à leur expérience, à leur jugement. Voici la nomenclature de ces travaux : Comptes rendus des expositions des produits ct machines agri- coles qui ont eu lieu à Lille en 1849 et en 1850. (M. Loiset, rap- porteur). | Des impôts sur les boissons et sur le sel (M. Molroguier rap- porteur). Des moyens à employer pour arriver à une statistique exacte des produits agricoles. De l'erportation des os propres à faire en- grais, noir animal, etc. Rapport sur ces bases, des produits de la récolte de 1849, en ble, pommes de terre, etc. — Statistique des bestiaur. Sur la consommation de la viande et l'utilité des droits de douane à l'entrée du bétail étrangvr. Résumé des vœux exprimés tant par la Société de Lille que par les diverses Sociétés du département du Nord, en faveur de l'Agri- culture et du Commerce. Travail agricole dans les écoles primaires {M. Lefebvre, rap- porteur), { 616 } Concours de bestiaux et substitution du poids à la mesure dans la vente des grains M. Cazeneuve, rapporteur). Rouissage des lins (M. Chrestien, rapporteur . Résumé de l'enquête industrielle et agricole tenue dans le dépar- tement du Nord. Rapport sur l'emplacement le plus convenable pour établir une ferme régionale dans le département du Nord: (M. Demesmay, rap- porteur. } A côté de ces questions d’un si haut intérêt, viennent prendre place d'autres questions non moins importantes, sur lesquelles l'autorité supérieure a demandé aussi votre contingent de lumières et d'expérience ; ces dernières sont relatives : Au morcellement de la propriété ; A Ja mise en valeur des terres incultes ; Au défrichement et au déboisement des forêts ; Aux assurances générales : Aux industries pouvant le plus facilement s’allier aux exploita- tons rurales ; À l'amélioration du service sanitaire dans les campagnes ; A la police rurale ; : A l’organisation des gardes-champètres ; A la création des fermes régionales : Aux opérations du drainage ; Aux crédits agricole et foncier : A la maladie des pommes de terre. : Trois questions d'économie politique et sociale, se rattachant par plus d'un lien à cette partie de vos travaux, doivent encore trouver place ici, ce sont : L'ouvrage de M. Loiset sur la consommation de la viande à Lille, de 1812 à 1850. L'étude si importante de la question des caisses de retraite et des caisses de secours mutuels pour les travailleurs , par M. Caze- neuve , et des observations sur le budget de l'État , développées par M. Victor Delerue , à ce point de vue : que les gros budgets sont un des principaux éléments de la fortune publique, ( 617 ) Je terminerai ce qui dans mon travail à rapport à cette partie de vos travaux en vous rappelant l'honneur que vous a fait M. le Ministre du Commerce et de l'Agriculture en choisissant notre société pour y venir traiter les questions agricoles les plus impor- tantes pour nos contrées ; honneur qui doit encore doubler de prix à nos yeux puisque, par la plus délicate attention, c'est dans cette séance solennelle, qu'il a remis à M. Delezenne la récompense des longs et dévoués services qu'il a rendus à la science : l'étoile de la Légion-d'Honneur. Le public nombreux qui -assistait à cette cérémonie est venu, par des applaudissements, prouver au ministre combien son choix avait trouvé de sympathie. C'est là , Messieurs , l’une des belles pages de nos annales. BEAUX - ARTS. Qu'un paysage riche et varié se déroule sans cesse sous les veux du voyageur et non seulement la longueur du chemin qu'il parcourt sera bien vite oubliée ; mais encore il verra avec peine arriver le terme de sa course. Ce qu'éprouve ce voyageur, je le ressens ici en passant des sciences et de l’agriculture aux beaux- arts et aux lettres, dernière station que doit atteindre ma plume. Les beaux-arts et les lettres n’ont pas été moins cultivés que leurs sœurs les sciences et l’agriculture, mais permettez-moi . Messieurs , en leur faveur, de sortir un peu du cercle étroit où j'ai dû me renfermer jusqu'ici, car si le titre d'un ouvrage scienti- fique suffit souvent pour indiquer la matière qu'il traite , il n’en est pas de même des œuvres littéraires. Souvent le nom qu'on leur donne ne fait pas plus connaître ce qu’elles contiennent que le nom que porte un homme n'apprend qui il est ; d'un côte comme de l’autre c'est une connaissance à faire , c'est une cons- cience à sonder. | Ces deux années ont vu s'achever d'importants travaux litte- raires : M. Le Glay a livré au grand jour de la publicité trois ouvrages qui ont dù lui demander un temps d'autant plus consi- ( 618 ) dérable qu'en eux, tout est faits, recherches, citations, analyses et résumés; c’est vous dire qu il ne s'agit pas de ces œuvres dont l'imagination et ses feux follets font tout le mérite, mais bien d'œuvres historiques dans lesquelles l’auteur nous fait pénétrer, en tenant devant nous le flambeau quelquefo's un peu pâle , mais toujours sûr de la vérité. Ces trois ouvrages sont : 1.0 Catalogue descriptif des manuscrits de la Bibliothèque de Lille, vol. in-8.° de XXXVI et 443 pages. 2.9 Cameracum christianum , ou histoire ecclésiastique du dio cèse de Cambray, d'après le Gallia christiana et d’autres ouvrages, avec des additions considérables et une continuation jusqu'à nos jours. Vol. in-4.0 de f.oS LXVIIT et 542 pages. Ce livre est écrit en latin avec le français en regard, pour ceux à qui la langue de la religion, des lois et de la haute philosophie n’est pas familière. Et 3.9 Glossaire topographique de l'ancien Cambrésis, suivi d'un recueil de chartres et diplômes pour servir à la topographie et à l'histoire de cette province, vol. in-8.° de XXIT, LXIX et 211 pages. Quant au vaste tracé du plan , à la marche méthodique de ces ouvrages , aux pages qui leur servent d'introduction, quant au style constamment maintenu dans la chaste austérité que commande le genre historique, tout en laissant place à l'élégance, à la pureté académique, quant à leur mérite, à leur portée philosophique et morale, un juge à la compétence irrécusable a prononce : L'académie des inscriptions et belles-lettres a récompensé leur auteur de la mention la plus honorable. Déjà , depuis plusieurs années , M. Moulas vous avait initiés par la lecture de quelques fragments, à sa traduction en vers fran- cais du poème des saisons de Thomson. Aujourd'hui M. Moulas a terminé cette traduction et en a fait le dépôt dans nos archives. C'est là aussi, Messieurs, un travail considérable, et il à fallu à notre collègue bien du courage et de la persévérance pour mener à bonne fin une traduction qui n'embrasse pas moins de 3,000 vers, ( 619) Traduire ! Je ne sais; mais il y a pour moi dans ce mot quelque chose qui donne le-frisson ! Traduire !! C’est l'alliance de la vie à la mort; c’est attacher sa pensée à la pensée d'un autre; c'est ad- mirer ce qu'il a admiré, repousser ce qu'il a repoussé; c'est voir avec ses yeux, sentir avec son âme; c'est s'enflammer, s'élever, se refroidir et descendre à point nommé; c’est mouiller les ailes de son génie ; c'est attacher un gros boulet aux pieds légers de sa muse. Sachons gré à notre collègue de ne pas s'être arrèté devant ces craintes , et, bien plus , de leur avoir donné complètement tort par sa traduction. M. Le Glay a écrit pour elle une préface qui vient ajouter un nouvel et puissant attrait à l'œuvre de notre collègue. Un ouvrage d'un genre tout-à-fait différent a été publié par votre secrétaire-général , c'est un Recueil de Fables. Dans la fable, en effet , tout est imagination , allusion , allégorie, et la folle du logis y a ses coudées franches ; aussi la voit-on, pour mieux frapper d'estoc et de taille sur les vices, les travers et les ridicu- les, employer depuis l’aiguillon de l'abeille jusqu à la griffe du lion , depuis le fouet de la satire jusqu'à la massue d'Hercule ; ou bien , se faisant follet, se glisser de la chaumière au palais , de la mansarde au boudoir , de la tabagie au Sénat; d'autres fois elle revêt l’armure , le manteau, la toge, le cilice et les haïllons ; c'est un protée, un sylphe , un caméléon. Cet ouvrage a été pour M. Deligne le sujet d'un morceau de littérature qu'il vous a lu sous ce titre modeste : Une Causerie , et dont le souvenir ne peut être sorti de votre mémoire, où ila dû prendre place à côté d'un autre morceau du même collègue sur les Épaves littéraires de M. Bruneel , car la mémoire retient tou- jours bien facilement ce qui est spirituel, agréable, ce qui charme et séduit par la forme et la couleur, par la grâce et l'élé- gance. Toujours entrainé, et heureusement entraîne vers la littéra- ture légère, nous retrouvons ici M. Legrand et les trois com (620 ) positions qu'il vous a lues et que vous ne pouvez avoir ou- bliées. ù Dans l'une, il vous a pris sur sa plume, que cela n’a point allourdi le moins du monde, et vous a conduits à travers un déli- cieux paysage , sous les voûtes froides et silencieuses d’un cloître, asile de la prière et de l'austérité. Là, vous avez assisté au mi- lieu de la nuit, sous les arceaux de la nef sainte, aux chants so- lennels de ces psaumes lamentables dont les notes sont des cris , des soupirs et des pleurs. C'est qu'en effet, l’auteur vous a raconté une nuit passée chez les Trappistes du Mont des Kattes. Dans l'autre , il termine son Odyssée du Bourgeois de Lille , de ce digne citoyen que vous connaissez , que vous aimez tous. C'est sa mort qu'il raconte et les événements qui ont hâté ce terme fa- tal, et miné cette constitution si robuste, si enracinée au sol lil- lois, qu'il n'a pas fallu moins que l'ouragan révolutionnaire de 1848 pour la jeter à bas, [l est mort! mais notre malicieux col- lègue nous apprend qu'il a laissé un fils qui déjà, par plusieurs actes patriotiques , s'est montré le digne continuateur des vertus de son père. Puisse-t-il avoir le même biographe. La dernière composition de M. Legrand échappe à l'analyse , car elle-même n'est qu'une analyse, mais une analyse si spiri- tuelle, si légère , si rapide de l'ouvrage de M. Quérard, intitulé : les Supercheries littéraires dévoilées, qu'on croirait, en la lisant , que ce sont quelques feuilles tombées de ce charmant ouvrage. Vous avez reçu de M. Th. Lestiboudois communication d'une partie de l'important travail dont il s'occupe sur l'Algérie, par suite de la mission scientifique que lui a confiée le Gouvernement relativement à cette possession d'outre-mer; par là déjà vous avez pu apprécier les vastes proportions de l’ensemble de ce grand travail qui comprendra l'Algérie en général, sa position géogra- phique, son climat, la nature de son sol, ses productions, sa colonisation et son avenir. Vous devez aussi à M. Th. Lestiboudois, un Rapport «ur les ( 621 | Productions algériennes envoyées à notre exposition de septembre dernier qui, s’il appartient par son sujet à la série des faits agri- coles, peut trouver ici sa place par la manière dont il est écrit. Enfin, M. Dupuis a déposé dans nos Archives un Mémoire inti- tulé Les Doutes d'un Prince, Conte philosophique, contenant la théorie de la Certitude. L'enchaînement des matières philosophiques rend impossible l'analyse de ce Mémoire ; je me bornerai donc à vous rappeler qu'il a été l'objet d’un Rapport favorable de la part de l’Académie des Sciences morales et politiques (Section de l’Institut). M. Lavainne a déposé pour nos Archives plusieurs grandes Symphonies auxquelles la publicité a rendu l'hommage le plus flatteur. Avant de terminer ce Compte-rendu, je cède à une pensée dou- loureuse, quoique pleine de reconnaissance , je viens vous parler de M. Alphonse Moillet et du don précieux, inestimable, qu'il a fait à Lille, sa ville natale, en lui léguant sa collection d'objets ethnographiques. Vous nommer M. Moillet, c’est vous rappeler un de ces dévoue- ments à la science que la mort seule peut arrêter. Vous entretenir de sa Collection ethnographique, c’est vous montrer toute l’éten- due des richesses confiées à votre garde, car si la ville possède, c'est vous qui administrez. Cette collection si nombreuse, si variée, fruit de tant de soins. de recherches et de sacrifices, sera le digne pendant du Musée Wicar, et rivaux en richesses artistiques, ces deux Musées le seront aussi, par la noble pensée qui a animé leurs auteurs dans le don qu'ils en ont fait. Heureuses rivalités que celles qui contournent ainsi à l'honneur des arts, et de la ville natale! Possesseur d’un certain nombre d'objets ethnographiques de l'Océanie, M. Macquart en a fait don à la ville et ils sont venus prendre un rang distingué dans une Collection dont ils ont encore augmenté les richesses ; c’est un sacrifice dont il faut lui savoir gré, c'est un bon exemple qui trouvera des imitateurs. ( 622 | Si les admissions dans notre Compagnie sont toujours vivement recherchées, elles sont toujours aussi appuyées des titres les plus recommandables. Vous avez admis pendant le cours de ces deux années, au nom- bre de vos membres résidants, | MM. Jules DEuiGxe , littérateur à Lille, MorroGurer, directeur des Contributions indirectes du départe- ment du Nord, M. Lauy, après quelques années d'absence, est revenu prendre place parmi nous; espérons qu'il ne tardera pas à payer aux Sciences physiques son tribut accoutumé. Vous avez augmenté vos membres correspondants de MM. Emile Jauer, agriculteur à Chateau-Gonthier, Laxpouzy , professeur à l'Ecole de Médecine de Rheims, Duraxp FARDEL , docteur en médecine à Paris, JEANRON, peintre à Paris, JusserAND, docteur en médecine à Paris, Deviie , naturaliste à Paris, Juces GuéRIN, docteur en médecine à Paris, et membre de l’Aca- démie de Médecine, MEersmanx, docteur en médecine à Bruges, et membre de l’Aca- démie Royale de Bruxelles, | Zaxpuycx, docteur en médecine à Dunkerque, Le Conran DE Gourcy , agronome à Paris, Et ne REUME, capitaine d'artillerie à Bruxelles. Enfin de nouveaux associés agriculteurs sont venus grossir les rangs de cette portion si utile de notre Compagnie : MM. LALLEMAND, cultivateur et maire à Erquinghem-le-Sec, Corniece , cultivateur à Marcq-en-Barœul. { 023 } Si, déjà, je n'avais atteint, et même dépassé les limites posées à mon compte-rendu, je vous entretiendrais de vos travaux non publiés, travaux modestes, journaliers, qui se passent dans l’inté- rieur de vos séances, et dont les auteurs restent trop souvent inconnus. Vous avez senti, Messieurs, qu'il y avait là une lacune à com- bler, un vide à remplir, une justice à rendre, une peine à récom- penser, et vous avez décidé qu’à l'avenir le compte-rendu que le secrétaire-général doit vous présenter chaque année, se tairait sur les travaux publiés dans vos mémoires, et qu'il mentionnerait seulement les travaux , les discussions, les communications qui n'ont pu y trouver place. C’est là de la bonne et équitable justice, car ceux là seuls qui ne sont pas mis sous les yeux du lecteur ont droit d'y prendre place, pour les autres travaux, c'est de l’his- toire racontée deux fois. C'est donc sur ces bases nouvelles et équitables que les pro- chains comptes-rendus devront être établis. Puissent-ils trouver un interprète qui leur donne la lumière, la couleur, la justice qui leur sont dues. ( 624 ) LA SOCIÉTÉ À REÇU EN HOMMAGE PENDANT 1851. De M. Macquart, M. R. 3 numéros des Annales de la Société Entomologique de France , comprenant son mémoire sur les in- sectes diptères. De M. Lamy, M. R. Thèse de chimie et de physique. De M. Lavainne, M. R. Sa composition intitulée l’Orage, chœur pour quatre voix d'hommes. De M. Heegmann : Un herbier. De M. Vincent, M. C. Un opuscule faisant suite à d’autres ouvrages. De M. Geherel M. C. Un rapport sur un projet de défriche- ment de la Campine par l'artillerie montée. . De M. Delarue, M. C. Une notice sur A. P. De Candolle. Du D." Villeneuve, M. C. Une médaille à l'effigie de Pariset. De M. Blanquart-Evrard, plusieurs livraisons de son album photographique. De la famille Moillet : Un exemplaire in-folio, Dictionnaire de Trévoux. De la famille de M. Albert Scheppers : Un herbier très-com- plet de nos contrées. De M. Durant : Un denier en argent de la ville de Gand ; — Monnaies de billon de Philippe-le-Bel (double parisis); — 8 jetons de l’ancienne église de Saint-Étienne à Lille. La Société a recu les publications des Sociétés, ses correspon- dantes, dont les noms suivent : Amiens, Académie. ——— Société des Antiquaires de Picardie. Angers, Société industrielle. Bayeux , Berlin , Besançon , Bordeaux , Bruxelles, Caen, Châlons-s-Marne. Compiègne , Dijon , Douai , Genève , Lille, Lyon, ” Metz, Mulhouse , Nantes, Nimes, Paris, Rouen, Saint-Omer. Toulouse , Valenciennes, Versailles , ( 625) Académie royale des Sciences. Académie des Sciences. Académie. Académie royale des Sciences. Société Nationale. Société de Physique. Société d'Horticulture. Société de Médecine. Conseil central de Salubrité. Académie des Sciences. Société des Sciences. Société Industrielle. Société Académique. Académie du Gard, Société centrale d'Agriculture. Société centrale d'Horticulture. Académie. Société d'Agriculture. Académie des Jeux Floraux. Société des Antiquaires du Midi. Académie Royale. Société d'Agriculture. Société des Sciences. 40 (62%) E RR ATA. (Supplément à l'errata de l'examen de lu théorie musicale des Grecs.) Page 39, ligne 32, après 4 , ajoutez : de l’aigu aa grave. Page %6, ligne avant-dernière, après savoir, ajoutez la note : Ptolémée, (liv. 2 chap. ref) réduit les nuances usilées de son temps au chromatique dur, au dialonique ditonié, au diatonique dur, au diatonique tonié, et au diatonique mou, purs ou mélangés. Le mélange consiste en ce que, parmi les tétracordes d’une même gamme, les uns appartiennent à une nuance, les autres à une autre. On remar- quera que l'exharmonique est exelu , et que le seul chromatique admis est celui qui est mesuré par les proportions 5/6, 12/r1, 29/21, et qui approche, par conséqueut, du din- tonique mou, 8/7, 10 9, 21/0, Page 59, ligne 19, après prononcé, ajoutez : du moins dans quelques-unes de leurs parles, Page 81, ligne ;, en remontant, au lieu de mi, lisez : mi . Page 83, ligne dernière, après Wallis, ajoutez : édition in-4.0, chap. 10. Page 53, ligne première, au l'eu de Sirabon, lisez : Suidas. Page 87, ligne 9, après Vitruve, ajoutez la note : Liv. 5. chap. 4. Vitruve cite un endroit d’Aristoxène , aujourd'hui perdu; celui où cel auteur donnait son diagramme , ou son échelle musicale. La double octave, suivant lui, est toute l’étendue que la voix peut avoir, lorsqu'on ne la force pas trop. Dans ce qui nous reste des écrits d’Aristoxène (Liv. Ier. page 2), il est dit à propos des intervalles musicaux, que leur limite habituelle, pour la voix et les instrumeuts, est de deux octaves et nne quinte; mais qu'en réunissant les petites flûtes et les instru- ments à sons graves, ou les voix d'hommes etles voix d'enfants, dont le diapason est fort différent (bien que confondu, selon toute apparence, dans.la notation), on pourrait arriver à un intervalle de 3 octaves, ou même de 4. Page 89, ligne dernière, au lieu de vie d'Agis. Lisez : vies d'Agis et de Cléomènes, suivant la traduction de Dacier. IL est assez probable que cette harmonie devait son nom à la préférence que lui donnaient les Lacédémoniens , Le plus célébre des peuples d'origine dorienne. Athénée (livre 14, page 624 de l'édition de.Lyon , 1$97), attribue aussi aux Doriens l'invention de l'harmonie dorienne. Page 97, ligne 4, après forme de l’octave, ajoutez la note : Ce passage doit être modifié et complété. Les définitions de Ptolémée offrent plusieurs contradictions, comme le remarque M. Vincent (p. 88 n° ). Voici, je crois, le véritable système de l’auteur grec : Si on examine attentivement les tableaux placés à la suite des chapitres rt et 15 du liv. » , et, surtout, les longueurs des cordes de ses 7 tons, on se convainera que les dif- lérentes formes d’octave qu'il assigne à ces mêmes tons, dans le texte du chap. Fr doivent s'entendre d'octaves disposées entre deux cordes communes à tous, savoir : la nète disjointe et l’hypate moyenne de son échelle fixe. Or, en prenant ces cordes, comme ( 627 précédemment, pour des m1, on trouvera que les 7 gawmes diatoniques auxquelles elles appartiennent en commun , sont précisément les gamines majeures de SOU, SE, dore, nt: fu, que Ptolémée donne respectivement à ses tous hypodorien, hypophrygien, hypolydien, dor'en, phrygien, lrdien, mixo!'ydien. 1 eu résulte que les mèses des mêmes tons se placent sur mi, fa*, sol*, la, si, do * , ré bien que le même chap. r1° ne laisse pas supposer ces dièses ou lensions inusitées : c'est qu'il faut prendre la position des mëses sur les cordes de l'échelle fixe comme une simple approximation, et les dièses comme un indice du déplacement général des tons. Tei, le ton dorien se confond avec le ton naturel de cette échelle. La préférence de Ptolémée pour le mode majeur, le ton dorien et le genre diatonique, est partout bien marquée. Il est clair que la série des mèses ne pourrait plus se traduire par les notes ci-dessus, si on cessait de prendre les 7 formes d’octave dans le genre diatonique ; que les mèses varie raient encore, dans de certaines limites, par le changement de nuance du diatonique ; enfin, que les intervalles que ces mèses laissent entr’elles sont des tons et des demi-tons égaux à ceux de la gamme génératrice ; mais que l’ordre des tons y est renversé; de sorte que, de toutes les nuances énumérées par Ptolémée, celle du diatonique ditonié est la seule qui se reproduise exactement. Ptolémée, après de semblables réflexions, sans doute, a Jugé convenable d'abandonner la fixité des » rordes communes, pour ébtenir la fixité des mèses dans les différentes nuances. Il les laisse telles qu'elles sont dans le diatonique ditonié ; de sorte qu’en définitive, leurs longueurs sont mesurées par 160, 106 40/6», 94 49/60 3 90; 80, 71 7/60, 67 30/60, ou des nombres proportionnels à ceux-ci. Les mèses ainsi déterminées, il rattache à chacune d'elles tontes les autres cordes du ton suivant les proportions du canon harmonique. Ce ne sont pas là les tons de l'église : Rousseau (au mot modes) se trompe. Manuel Bryenne approuve la disposition des tons de Ptolémée. 11 se borne à y ajouter un 8.° ton, l'hypermixolydien, à l'octave aiguë de l’hypodorien , c’est-à-dire sur un 7 : ses mèses forment aussi une gamme diatonique ditoniée; et les gammes de ses différents tons sont aussi semblables, relativement aux mèses, comme on peut s’en assurer en lisant le détail de ses opérations (liv. 3, sect. 1re.) Il conserve d’ailleurs la variété des genres, des nuances et des deux systèmes. Si on y ajoute le déplacement de la tonique, ou ses différentes espèces de mélodie, on trouvera dans sa méthode une complication plus théorique, vraisemblablement, que pratique. | 628 ) TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE VOLUME. Expériences et observalions sur le RÉ de la gamme, par M. Dele- zenne , M. R. (if) . s ï Examen de la théorie musicale des Mat par \i. Alphonse Heegmann , M. R.. Errata au même ouvrage . Sur la production directe des hydracides, à Yaïde 1 corps poreux, par M. B.ir Corenwinder, M.R. Note sur lagermination , id. id. . Essai de géologie pratique sur la Flandre ae 5 M. Meugy: M.R. (suite ). Les arbres et arbrisscaux d'Europe et leurs insectes par x. Vs Macquart, M. R. Documents pour servir à l'histoire du comté de l'Ostrevant. par M. Le Glay , M. R.. L’Automue, traduction du poëme des cu de ETS par M. Moulas, M. R.. €) MR. signifie membre résidant. Lille, — Jmp. de [,. Danel. DISTRIBUTION SOLENNELLE DES PRIMES ET MÉDAILLES. DIMANCHE, 7 SEPTEMBRE 1851, LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES, DE L'AGRI- GRICULTURE ET DES ARTS, DE LILLE, À TENU SA SÉANCE PUBLIQUE ANNUELLE, DANS LES SALONS DE LA MAIRIE. M. Le Prérer a ouvert la séance à midi, par une brillante allocution que nous regrettons de ne pouvoir reproduire dans ce recueil. M. Lecran», président de la Société, a prononcé le discours suivant : Messieurs , Dans ce siècle de tiédeur et de scepticisme, au milieu des débris de tant de choses qui furent les objets de notre vénération et de notre culte, un sentiment semble avoir persisté puissant et vivace, c'est la foi en la science. A tous les degrés de l'échelle sociale, depuis le plus humble par- ticulier , qui vient consulter l'homme spécial pour le soin de sa per- sonne ou de ses biens , jusqu’au chef du gouvernement , qui l'em- — Il — ploie pour les besoins les plus importants du pays, nous voyons pro- fesser partout le respect le plus profond pour le savoir, fruit de l'étude et de l'expérience. Faut-il nous étonner de cette disposition des esprits? N'est-elle pas le résultat nécessaire des merveilles accomplies sous nos yeux par la science depuis quelques années ? Les prodiges ont toujours eu le privilége de ramener à la foi les cœurs les plus incré- dules : Et quel temps fut jamais plus fertile en miracles! A peine | homme a-t-il dompté la vapeur, cette ame du monde ma- tériel (1), à l’aide de laquelle il transporte, avec une rapidité qui tend chaque jour à s’accroître, les personnes et les choses , à peine a-tl rapproché les peuples, qu'un agent plus subtil vient , avec l'instan- tanéité de la pensée , les mettre en rapport ; à ce nouvel élément de transmission, rien ne peut faire obstacle, pas même l’immensité des mers; le fil électrique descendra dans les abimes et rétablira les communications d’un rivage à l’autre, de Calais à Douvres, bientôt de Toulon à Alger, et, sans doute, ensuite, du Hâvre à New-York. Maître des agents chimiques qui fixent les rayons du soleil, homme force la lumière à dessiner les objets extérieurs et les œuvres des grands artistes; 1l les reproduit et les vulgarise par des procédés in- génieux , dont nous devons faire honneur à l'un de nos compatriotes. Là n'est pas encore le dernier mot de la photographie. La lumière qui dessine, apportera sans doute bientôt au tableau la couleur qui lui donne la vie. L'homme a trouvé le remède que n'osait espérer Hippocrate, re- gardant comme une œuvre divine de calmer la souffrance du pa- (1) M. Jules Janin. met 0 Mer tient (1), il a trouvé l’éthérisation qui endort les douleurs les plus vives, et laisse à la main de l'opérateur sa liberté d'action pour le travail terrible, mais salutaire qu'il poursuit. Le microscope lui découvre le monde des infiniments petits, et le télescope le rapproche des astres, ces géants de l'espace. Qu'a-t-il besoin d’ailleurs de ces instruments perfectionnés? La connaissance qu'il a des lois immuables de la nature lui fait deviner , par ses calculs, l'heure précise où une nouvelle planète apparaîtra à l'ho- rizon (2). e L'homme a de tout temps aimé à porter les yeux vers les champs de l'infini pour en connaître les secrets : ce n’est pas en vain, peut- être, que Dieu, suivant la belle expression du poëte, lui donna un front sublime , et voulut qu'il regardät le ciel, et qu'il élevät le visage vers les astres (3). Les Titans n'avaient d'autres moyens d’escalader le ciel que d’en- tasser Pélion sur Ossa, l'homme de nos jours , non moins indiseret , non moins impatient de satisfaire cette curiosité qui le consume, se livre sans hésiter à de fragiles machines qui le transportent dans les planes de l'air. | Il reproduit impunément l'expérience si fatale au fils de Dédale. Sans doute, sauf quelques faits nouveaux d'appréciation hygro- métrique, il n'est rien résulté de bien utile pour la science de ces tentatives hardies ; mais qui oserait dire qu'elles ne sont pas le pré- lude providentiel de quelque découverte sérieuse ? Et durant cette période, ce ne sont pas seulement les sciences physiques qui ont progressé , les sciences naturelles, morales, indus- (:) Opus est divinum sedare dolorem. (Hipp.) (2) Planète Leverrier. (3) Os homini sublime dedit , cæœlunique tueri Jussit, et erectos ad sidera tollere vulius. (Horat.) — IN — trielles, économiques , les arts ont marché du même pas, ont opéré les mêmes merveilles aux yeux du monde ébloui. Il serait intéressant de rechercher les causes qui ont entravé autre- fois le complet développement de la science. Aux époques où des découvertes, importantes pour le temps où elles ont été faites, promettaient un progrès immédiat, la science encore renfermée dans une sorte de sanctuaire, était le patrimoine de castes qui, loin dela vulgariser, s’en servaient comme d’un moyen de domination; plus tard, surprise par le génie aventureux de quel- qu'adepte du grand œuvre , elle fut exclusivement employée à la re- cherche de ces secrets fameux, décevantes chimères du moyen-âge; le savant n’était plus qu’un astrologue ou un magicien absorbé dans les calculs de la cabale. La religion, mal entendue, s’effraya à son tour de la hardiesse avec laquelle des esprits audacieux sondaient les secrets de la nature et levaient le voile mystérieux dont Dieu semblait avoir voulu cou- vrir l'œuvre de ses mains. On crut voir, notamment dans la démonstration des lois immuables du monde, une attaque contre la divinité elle-même, contre les saintes écritures. La théorie du mouvement de la terre autour du so- leil immobile fut considérée comme un démenti donné à la Genèse, et après une rétractation humiliante , Galilée expia par'trois ans de prison L’inexeusable tort d’avoir trop tôt raison. Quand enfin la science sortit de ces épreuves pour s'épurer au contact des hommes de génie, observateurs sagaces et libres des lois de la nature, loin de s'épanouir sous la déduction logique des faits expérimentés, elle rencontra un nouvel obstacle dans cet esprit de synthèse dont les Descartes et les Newton ne surent pas toujours eux-mêmes entièrement se garantir ; on l'emprisonna dans ce qu'on appelait alors un système, méthode à priori, dans laquellele progrès — Y — réel, coudoyé par l'erreur, courait risque de s'éteindre étouffé sous la règle d'une formule trop absolue. Nous avons pu reconnaître, depuis, ailleurs que dans l'étude de la science , l'inconvénient de l'esprit de système, le danger de ces méthodes tranchantes, lits de Procuste où l’on nous jette, sans tenir un compte suffisant des faits, des mœurs, des habitudes. Pour être accepté, tout ce qui vient de l’homme doit être longuement éprouvé au creuset de l'expérience. Il n'apporte que sa pierre à l’édifice com- mencé avant lui par d'autres et qu'après lui d'autres continueront. Du cerveau seul de Jupiter peut sortir Minerve tout armée. Le public n'était alors compté pour rien; il n'existait guère. Et quand quelques bourgeois s’occupaient de la science et des savants, c'était pour bafouer sur le théâtre les grotesques parodies qu’en don- naient les auteurs comiques, sous les formes les plus ridicules. Comment la science aurait-elle pu fleurir sur ce champ ingrat que lui laissait le monde, comment, dans cestristes conditions, aurait- elle pu, surtout, se concilier les sympathies si fécondes du peuple ? Tout est heureusement bien changé ! La science, brisant les obstacles, se dérobe à la tyrannie des intérêts qui l'avaient accaparée ; des esprits indépendants et libres la propagent à travers tous les périls ; des méthodes nouvelles, basées sur l’observation des faits, dégagent nettement la vérité des formules de l’école ; les interprètes de la religion eux-mêmes, éclairés par les lumières nouvelles, entraînés par l’évidence, comprennent et démontrent que, loin d'atteindre les vérités révélées, les découvertes de la science leur donnent une éclatante consécration, et que le génie de l’homme ne fait que prouver la puissance de Dieu dont il émane , à qui il doit rapporter tout ce qu'il est. Déjà Rabelais avait reconnu cette vérité en disant que les sciences élargissaient la connaissance de Dieu et de ses créations..... Aussi Cuvier, reculant en apparence l'âge du monde, na-t-il point le sort de Galilée, et le vautour de Prométhée cesse de planer sur Francklin, cet autre ravisseur du feu céleste, ce libérateur de d — VI — FAmérique dont un vers fameux (4), que je demande la permission de traduire , a signalé la double gloire : 1} prit la foudre aux cieux et le sceptre aux tyrans. Mais ce qui a encore favorisé cet élan de [a science, indépendam- ment des causes que nous venons de déduire, c'est le mouvement incroyable opéré dans les esprits depuis cinquante années, c'est l'émancipation des idées et des conditions, ce sont les luttes conti- . nuelles dans lesquelles on l’a fait intervenir comme auxiliaire, c’est surtout la facilité avec laquelle, dans notre siècle trop exclusivement voué au culte de l'utile, elle a pu procéder immédiatement et sur une large échelle à l'application d'expériences tentées jusque-là, timidement , dans le silence du cabinet. Le temps est loin où le savant mourait de faim ou de désespoir, n'ayant pour oreiller que le manuscrit dépositaire du merveilleux secret, travail de sa vie entière, vainement offert à l'expérimenta tion ; il est aujourd'hui sollicité par des intérêts de toute espèce. Le monde, — livré jadis par le démon à de vaines disputes, — est devenu un vaste laboratoire où la science expérimente à son aise, non plus in anima vili, mais sur les parties les plus saines du corps social ; où le gouvernement lui abandonne ses services les plus essen- tiels ; où l'industrie lui ouvre ses ateliers ; où l’agriculture Jui fournit ses champs; où les arts eux-mêmes, sans croire déroger à leur origine céleste, s'empressent de lui demander ses procédés de durée et de reproduction; où rien ne lui manque enfin, ni capitaux, ni encouragements, pas même les martyrs qui viennent soumettre leur personne aux épreuves les plus dangereuses... Comment ne serait-il pas sorti des résultats immenses de cette admirable et complète alliance de la théorie et de la pratique? Comment ces résultats, propagés par les mille voix de la presse . (1) Eripuit cœlo fulmen sceptramque tyrannis. — NI — n'auraient-ils pas inspiré aux masses cette confiance dont nous nous félicitions en commençant ? Cette confiance, Messieurs, les sociétés savantes des départements ont pour principale mission de l’entretenir au milieu des intérêts qu'elles sauvegardent, et l'on rendra à la Société des Sciences, de l'Agriculture et des Arts de Lille, cette justice, qu'elle comprend bien et qu'elle remplit fidèlement son mandat. Vous en avez tout récemment donné une preuve éclatante à l’occa- sion du projet de loi sur la représentation de l'agriculture. Il s'en est fallu de bien peu que l'on n’enlevât à votre patronage l'agriculture qui vous doit tant. Votre crime, c'était de n'être pas exclusivement agricole; votre crime, c'était de vous occuper, aussi, des sciences , des lettres, des Vous avez protesté vivement contre cet ostracisme de la science , prononcé par des hommes qui, comme les juges d’Aristide , se fati- guaient sans doute d'entendre dire qu’elle était utile... et malgré une première défaite, vous avez fini par l'emporter : le triomphe du bon sens peut être retardé , mais sa cause n'est jamais complétement perdue en France. Vous n'en avez pas moins été frappés de ces effrayants symptômes de défiance qui surgissent du sommet des pouvoirs publics contre la science; déjà, une première fois , dans une occasion plus solennelle encore, n'avait-on pas recommandé — de haut — pour la plus im- portante des fonctions politiques de ce temps, le choix d'hommes , pris de préférence en dehors des classes savantes et lettrées? N'était-ce pas le cas de reproduire le mot de Rivarol, et, à ceux qui croient que les hommes d'esprit ont toujours perdu la France, de répondre avec le malin journaliste : Que ne la sauviez-vous alors..…....? Triste aberration, oubli cruel des conditions de notre siècle et de notre gouvernement. A la rigueur, les monarchies peuvent subsister en entretenant OONARER l'ignorance. Il suffit que la main qui tient le gouvernail soit habile ; mais dans les républiques où le pouvoir, en définitive, appartient au plus grand nombre, il faut que le plus grand nombre soit éclairé S'il en était autrement, nous tomberions dans la pire de toutes les tyrannies , dans la tyrannie de l'ignorance. Notre première République avait mieux compris sa raison d’être. Elle appelait à elle, dans ses conseils, dans ses assemblées, les savants et les hommes de lettres; elle encourageait les décou- vertes, pendant la bataille de Fleurus un aérostat s’éleva dans les airs, monté par un officier qui observait, pour les indiquer à Jour- dan, les mouvements de l'ennemi; le télégraphe aérien inaugura son utile application en apprenant à la Convention la prise de Condésurles Autrichiens et en reportant à l’armée du Nord le décret disant qu’elle avait bien mérité de la patrie. Malgré la bravoure des chefs et des soldats, malgré le courage compromettant des proconsuls qui, la hâche du bourreau sur la tête des généraux , leur demandaient impérieusement le triomphe ou la vie; croyez-vous que le patriotisme seul eût décidé du gain des ba- tailles , si les savants travaux de Carnot, si ses plans laborieusement conçus n'avaient organisé d'avance la victoire ? Au milieu de ses préoccupations, la Républiqne créait Institut, l'école polytechnique, elle protégeait les arts; quant aux poëtes , loin de suivre le conseil de Platon, de les chasser en les couronnant de fleurs, elle leur demandait,ces chants inspirés qui, enflammant le saint enthousiasme de nos jeunes conscrits, leur donnait une ardeur qui étonnait et défiait les vieilles bandes ennemies. Dans la circonstance à laquelle tout à l'heure je faisais allusion, vous aviez d'autant plus le droit de parler haut et ferme, au nom de la science, que, tout en faisant une large part aux idées spéculatives , aux choses d'imagination, aux arts et aux lettres qui consolent l’homme et adoucissent ses mœurs, vous avez cependant été conduits par votre position dans un centre industriel et agricole si important, à rechercher surtout le côté pratique de la science. Dans vos savants travaux le mécanicien s'attache à améliorer les machines des ateliers, les instruments du labourage ; Le chimiste analyse les substances destinées à l’engrais des terres: Le naturaliste indique les insectes et les plantes nuisibles ; Le géologue enseigne les propriétés du sous-sol, fait connaître , avec certitude, le point d'où peut jaillir la source, l'endroit où le creusement découvrira le gisement de roches favorables aux amen- dements, la direction à donner aux travaux de drainage qui, par un écoulement intelligent, ameublissent les terres trop plastiques. Signaler ici la carte géologique d’un de nos collègues, c’est parler du service le plus grand peut-être que la science puisse rendre à notre Flandre française. Le médecin rappelle les règles trop méconnues de l'hygiène des campagnes ; Le vétérinaire ne se borne pas aux soins qui conservent la santé des bestiaux ; poussant plus loin ses utiles préoccupations, il cherche les moyens d'assurer aux populations la viande à bon marché, par une meilleure méthode de dépécement ; L'architecte applique ses conceptions à l'amélioration des habita- tions , à l'assainissement des étables ; : L'agronome enfin , plus directement entrainé à l'étude des choses de la terre, élève ses observations combinées à la hauteur de la science et vient, par des expériences personnelles , rassurer nos timides cul- tivateurs sur le danger des méthodes nouvelles: illeur montrel’avan- tage des travaux modérés des vaches, l’économie des semisen ligne, les améliorations qu’apporte le drainage dans certains terrains. Tout dansvos communications intimes, dansles conférences que vous tenez, dans les publications que vous échangez avec les académies savantes de l'Europe , porte ce cachet d'utilité. Vos musées ne sont pas de stériles dépôts qu'un gardien jaloux semble craindre d'ouvrir à la curiosité publique. Comme la science, vous voulezpopulariser les beaux-arts, et d’ac- cord avec l'administration municipale, toujours prête à vous secon- — X — der dans votre généreuse mission, vous ouvrez tout grands vos cartons de Raphaël, présent de Wicar, aux graveurs envoyés par M. de Luynes, ce Mécènes de l'époque, et vous confiez vos autres chefs-d'œuvre aux procédés photographiques si merveilleux de votre compatriote Blan- quard-Évrard. Et la collection Moillet , classée par vos soins, suivant les règles de la science ethnologique , vient offrir un champ nouveau à l'étude des races humaines et de la géographie. Certes, Messieurs, je suis loin de garantir que dans cette marche utilitaire de la science, l’art et la poésie n'auront pas laissé quelques lambeaux de leur parure aux buissons du chemin. Déjà le touriste se plaint de ce parcours, à heure fixe, en ligne droite, qui enlève au voyage le charme de l’imprévu ; le paysagiste blasphème contre la monotone fécondité d’un sol qui n'offre plus la moindre lande en repoussoir; le chantre d'une nature de convention cherche vainement pour la couronne romantique de Cérès les coque- licots et les bluets arrachés de nos champs, comme herbes malfai- santes, par le classique sarcloir ; Tous demapdent où est le pittoresque et ce que sont devenus les villageois des idylles de Theocrite ou de Virgile, et les bergers et bergères des bords de Lignon. Soyons glorieux de leur montrer, en réponse, cette rustique cohorte des travailleurs des champs qui font, je ne crains pas de le dire , le plus bel ornement de cette solennité ! Bénissons ces fronts hälés par le soleil, ces tailles courbées par le travail de la terre, ces rides précoces amenées par les soucis de l'économie ! Bénissons ces rudes garçons de charrue, ces bergers vigilants, ces filles de ferme! nous ne leur devons pas seulement la fécondité de nos campagnes , l'élément essentiel de notre existence, à nous autres gens des villes, nous leur devons encore des exemples incessants de la pratique des vertus modestes, — les plus rares de toutes, — des exemples de fidélité, de probité, de courage , de dévouement à leurs maitres. Car, qu'on ne s'y trompe pas ! si nous avons vanté la science, si nous avons félicité notre siècle d'avoir foi en elle, si nous avons énuméré les avantages matériels qui naissent de son culte, à Dieu ne plaise que nous la mettions au-dessus de la morale, sans laquelle pour nous il n'y a ni science vraie, ni utilité réelle. Le beau, a dit Platon, est La splendeur du vrai; mais le bon, loin d’exclure le beau en est le cachet essentiel. Périsse la science, si elle devait étouffer les bons instincts, si l’homme devait sortir de ses bras le cœur desséché comme lorsqu'il s'échappe des étreintes d’un vampire! C'est parce que vous avez été pénétrés de cette salutaire pensée, Messieurs , que vous avez voulu donner une place dans votre pro- gramme à l'éloge d’un homme dont vous connaissez peu les œuvres artistiques , malheureusement dispersées, mais dont vous avez appris à estimer le nom, honoré dans le pays par l'acte de bienfaisance auquel il se rattache. Je veux parler de Ruyssen. Un de vos collègues, conduit par la curiosité, visita l’été dernier le couvent des Trappistes du Mont-des-Kattes ; à son retour, il vous raconta ses impressions, il vous dit l'émotion qu'il avait éprouvée en assistant aux exercices religieux, l'admiration dont il avait été saisi à la vue des résultats agricoles de ces modestes pères qui avaient, en peu d'années , transformé le sol le plus ingrat en une terre fertile, et appelé l'instruction et l’aisance au milieu d'une population qui croupissait avant eux, dans l'ignorance et la misère ; enfin, il vous rapporta l'épitaphe inscrite sur le tombeau du fondateur de cette maison ; elle portait le nom de Nicolas-Joseph Ruyssen , qui, de son vivant, avait été peintre et professeur des filles du roi d'Angleterre Georges LL. La qualité de Ruyssen, enfant du Nord, le mérite artistique que ui supposait la haute confiance d’un monarque, l'importance de l’éta- blissement créé par ses soins, tout se réunissait pour appeler votre attention sur l'homme que le hasard vous avait révélé, et vous avez er voulu qu'un concours public fit connaître au pays sa vie et ses ou- yrages. Deux concurrents se sont présentés pour la médaille offerte à l'au- teur du meilleur mémoire, et s’ils n’ont pas complétement atteint le but que vous vous étiez proposé, au moins les intéressants détails biographiques qu'ils ont donnés, joints aux renseignements que votre rapporteur a puisés à des sources étrangères au concours, Vous ont mis à même d'ajouter un nom glorieux à la galerie que vous avez ouverte aux artistes du Nord, galerie inaugurée par Wicar et où n'a pas tardé à le suivre le sculpteur Roland. Nicolas Ruyssen, fils d’un modeste jardinier d'Hazebrouck, gardait, à l’âge de treize ans, les vaches d’un cultivateur de Morbecque, vil lage de la Flandre, où M. le prince de Montmorency-Robecq avait une résidence d'été. C’est une remarque, Messieurs, justifiée par bien des exemples, que cette profonde solitude dans laquelle on laisse un enfant, d'ail leurs heureusement doué, doit merveilleusement développer ses dis positions naturelles, et le pousser à des idées qu'une volonté ferme finit par rendre des réalités. Que de rêves brillants sur la splendeur de la tiare, les prestiges du théâtre, la gloire et les dangers des voyages durent nourrir Fisolement de Félix Peretti, de Shakespeare, de Jamerai Duval , pâtres dans leur enfance comme Ruyssen? Pour lui, ce qui occupait surtout sa pensée, c'était le clocher de l'église qui faisait étinceler son coq de cuivre au soleil , le vieux pom- mier dont le feuillage frissonnait au vent, et la vache paisible qui se couchait sous l'abri de son branchage touffu à l'heure où l'ombre est plus agréable aux troupeaux (1), et il dessinait tout cela avec de la craie ou du charbon. Le hasard fit tomber ses dessins dans les mains d’un officier de la maison qui présenta le Jeune artiste au prince. Ce dernier, homme (1) Pecori jam gratior umbra est. (Virg.) XI — bienveillant, amateur éclairé des arts, reconnut d'un coup-d'œæil l'aptitude remarquable de Ruyssen ; il se hâta de l'enlever à ses vaches et il l’envoya apprendre l’art du dessin à Saint-Omer, puis enfin se perfectionner à Paris, dans l'atelier du peintre Simon, pendant six années. Ce n’était pas assez pour le prince de Robecq, heureux de voir s'épanouir complétement le talent qu'il avait su devi- ner, il assigna à son protégé une pension de 1,200 livres, à l’aide de laquelle ce dernier put fréquenter l'école française des Beaux-Arts à Rome, où il connut David et notre Wicar, où il se lia d’une étroite amitié avec le célèbre sculpteur Flaxman. Il ne reste que peu de traces des ouvrages de Ruyssen durant la période qui a précédé la révolution. Un beau portrait du prince de Robecq, premier gage d'une recon- naissance sans bornes, et un tableau de David tenant la tête de Goliath, qu'il donna à M. de la Bazèque , neveu du prince , sont les seuls morceaux capitaux de cette époque. Ruyssen revint en France en 1791. Ce n’était plus le petit paysan gauche, au jargon mi-français, mi-flamand , qu’on retrouve dans le journal de son voyage à Rome, c'était un homme aux manières déjà élégantes, qui devait acquérir dans la noble maison où il était reçu comme ami, ces formes distinguées qui firent dire plus tard de lui que c'était un vrai gentilhomme; il voulut suivre en Belgique ses bien- faiteurs qui fuyaient la révolution française , il s'établit au château de Reninghelst près d'Ypres, chez le comte de la Bazèque. Les esquisses encore existantes de deux tableaux, malheureusement détruits, font foi des rapports vraiment intimes qui régnaient entre l'artiste et la famille de Robecq. La première représente l’arrivée du peintre au château, où il reçoit l'accueil le plus flatteur de tous les habitants ; la seconde représente la famille de Robecq visitant le peintre dans son atelier. Les figures de ces scènes d'intérieur sont groupées avec un art parfait. Les tableaux, disons-nous, ont été détruits au moins dans leur en- semble, car on assure que les têtes des personnages, découpées sur — XIV — la toile, sont conservées par ceux qu’elles intéressent ; la famille, dit- on , n'aurait pas reculé par une mutilation volontaire devant le sen- timent qui animait la mauvaise mère du jugement de Salomon. Si on s’en rapporte à une autre version, on devrait attribuer la lacë - ration des tableaux aux troupes de Vandamme, qui, après la bataille d'Hondschoote, firent irruption dans le château. La Belgique bientôt ne parut plus un lieu assez sûr aux amis de Ruyssen ; ils passèrent en Hollande, puis en Angleterre. Ruyssen les suivit partout ; fils du peuple , il n'avait pourtant rien à craindre de la révolution. La protection de l’Etat pouvait remplacer pour l'artiste le patronage des grands seigneurs ; il crut, et personne ne lui fera un crime de ce sentiment , il crut que sa patrie était désor- mais la terre qui offrait un asile à d'anciens protecteurs qui pou- vaient avoir besoin de ses services. On sait à quelles cruelles privations furent exposés les émigrés, qui ne trouvaient ni dans leurs talents ni dans les ressources de leur esprit les moyens d'assurer leur existence ; Ruyssen lui-même fut un instant soumis à de tristes épreuves , mais il eut le bonheur de ren- contrer un compatriote établi à Londres et qui le produisit dans le monde. Il donna des lecons de dessin à l’aide d’une méthode, sinon inventée par lui, du moins introduite pour la première fois dans le pays et par laquelle il traçait les figures avec une rectitude ana- tomique. Ce procédé fit fortune; on ne parla bientôt plus que de Ruyssen, et il devint tellement à la mode que le roi Georges HI Jui confia l'éducation artistique de ses filles. Nous avons dit que Ruyssen était d’une grande distinction de ma- nières; 1] gagna l'affection de toute la famille Royale, à tel point que la reine fit faire pour lui son portrait par Willam Buckley, et que les princesses , ses filles, lui donnèrent différents ouvrages en tapisserie, travaillés de leurs mains. La première pensée de Ruyssen, devenu riche, fut de venir en aide a la famille de Robecq, qui ne refusa pas ses secours. \ RÉ RC de à EX à Ainsi, quand la patrie était en proie aux divisions, sur la terre d’exil, la main du fils du jardinier dans la main du grand seigneur consacrait, de la manière la plus touchante, le dogme saint de la fraternité. Ruyssen paraissait désormais fixé en Angleterre, où sa réputation ne faisait que s’accroitre et, avec sa réputation, sa fortune; mais on le vit regagner la France, en 1810, poursuivi par une idée qu'il n'avait pu réaliser qu'imparfaitement en Angleterre, celle de rendre libéralement le bien qu’on lui avait fait; son cœur débordait de re- connaissance pour ses bienfaiteurs , envers lesquels il ne se croyait pas encore quitte , pour son beau pays, sa Flandre chérie qui avait souri à ses premiers essais. Dans sa naïveté, il voulut d’abord trouver un enfant pauvre, heureusement doué pour le dessin, et dont il püût faire un autre lui- même. Ses recherches ayant été vaines , il ouvrit une école de dessin pour amener le goût des arts ; nouvelle déception. Il se demanda alors s’il ne ferait pas une action également sainte en assurant l'ims- truction à tant de pauvres familles qui en étaient dépourvues. Toujours artiste , malgré son extrême dévotion , il tournait volon- tiers les yeux vers ces magnifiques montagnes, où, à l'aube de sa vie, son génie s'était inspiré. Il acheta à cet effet l'ancienne maison des moines Antonins , située sur le sommet du mont des Kattes ; 1l y installa des frères de la doctrine chrétienne, qui commencèrent heu- reusement son œuvre ; mais l'extrême pauvreté du pays appelait des améliorations matérielles préalables; bien que déjà détaché de la terre , par sa vie ascétique, avant de se donner à Dieu, il comprit qu'il fallait tirer parti du sol ingrat de la montagne, qu'il fallait ap- prendre aux habitants quelles ressources procure le travail, quelles miraculeuses transformations des soins répétés peuvent apporter à des terres en apparence stériles. Ruyssen traita avec les Trappistes de la maison du Gard, près Amiens ; il leur abandonna les constructions et les terres, et, retire — ANT -— dans une sorte d'ermitage, sur le flanc de la montagne , il ne songea plus qu'à Dieu, qui le recut dans son sein le 17 mai 1826. Il était âgé de 69 ans. 73 Ruyssen mourut sans avoir pu jouir complétement du bien qu'il avait fait, mais son œuvre lui a survécu. Si les toiles assez nombreuses dues à son pinceau, plus correct qu’élégant , sont dispersées ou détruites; si sa méthode si sûre de dessin a disparu avec les élèves qu’elle a formés, si l’auréole de l'ar- tiste enfin a pâli avec le temps, il y a quelque chose qui ne s’effacera jamais , c’est la gloire de l’enfant du peuple qui sut s'élever par son mérite, c'est la reconnaissance qu'il témoigna toute sa vie pour ses bienfaiteurs, c’est son amour éclairé pour son pays qui le porta à le doter d’un établissement fondé sur le travail et la prière. Vous me pardonnerez cette digression, Messieurs , j'ai cru que quelques détails sur la vie de Ruyssen résumeraient heureusement la pensée qui me dominait. s Ruyssen n'est-il pas le type dans lequel on rencontre la foi dans la science et dans l’art, avec les vertus qui complètent le savant et l'artiste ? c'est en s'appuyant sur ces solides soutiens qu'il est arrivé à la fortune , à la gloire. Es Ayons donc foi en la science; aimons-là, cultivons-là pour le bien qu’elle nous procure et pour le bien qu'elle nous permet de faire. La science , d’ailleurs , contribue à rendre l’homme meilleur, elle le conduit de progrès en progrès à cette perfectibilité qui est essen- tiellement dans sa nature, et qui, si nous en croyons un ingénieux écrivain (4), peut ouvrir pour nous, dans l'avenir, cet âge d’or qu'une fiction désespérante avait jusqu'ici relégué en arrière dans les siècles écoulés. (1) M. Villemain. —"ÂMIE Après ce discours, M. DELERUE, Secrétaire-général, chargé de proclamer les noms des lauréats étrangers à l’agriculture, s’est exprimé en ces termes : Actes de courage. Messieurs , Trois jeunes gens, Hector Haurecogur, de Lille, Victor d'Har- NAUT, de Mons-en-Pevèle, et Henri Gurarp, de Wambrechies, se sont distingués par des actes de dévouement au-dessus de leur âge; ils ont tous trois, enfants eux-mêmes, sauvé la vie à des enfants prêts à périr dans l’eau. Touché de ces jeunes dévouements, le Gouvernement à destiné à leurs auteurs des Livrets de la caisse des retraites pour la vieil- lesse; et pour donner à la remise de ces Livrets la solennité que mérite les actions qu’il récompense, sans les payer, l’adminis- tration a demandé l'intermédiaire de notre Société, qui s’est em- pressée d’ouvrir sa séance sous d’aussi nobles auspices. $ 1. LITTÉRATURE, SCIENCES ET ARTS. La Société, qui se réserve de récompenser, en dehors de son programme, les auteurs de productions de toute espèce, dignes de son suffrage, n’a pas cru pouvoir faire un meilleur usage de son droit d'initiative qu’en accordant une MÉDAILLE D’oR à M. Bzan- quarT-Evrarp, de Lille, pour les progrès qu'il a fait faire à la photographie sur verre et sur papier. ?9 — XVII — En promettant une Mépxize p'or de la valeur de 200 fr. à l’auteur du meilleur travail sur la Vie et les ouvrages de Nicolas- Joseph Ruyssen, peintre d’histoire, fondateur de la maison des Trappistes du mont des Kattes, la Société n'avait pas seulement pour but de connaître la vie de notre compatriote, mais de s’édifier sur le mérite de ses tableaux et sur l'importance des travaux agricoles qu’il aurait entrepris ou inspirés. . La lacune reconnue dans les Mémoires des concurrents, à ce double point de vue de l’artet de l’agriculture, ne permet pas à Ja Société de décerner la récompense promise; toutefois, l'intérêt que présentent, bien qu’à un degré différent, les notices biogra- phiques sur Ruyssen, l’a déterminée à accorder une méparzre D'ARGENT à M. Rouziëre aîné, de Lille: Et une MENTION HoNoRABLE à M. Edouard SCHEERCOUSSE, d'Hazebrouck. La Société avait promis une MÉDAILLE D'or pour chacune des questions suivantes : Quelle a été l’origine des arts dans les Pays-Bas et dans la partie du Nord de la France qui forme aujourd’hui le dépar- tement du Nord ? Quelle influence les Ecoles d'Italie ontexercée sur celle de la Flandre avant la conquête de Louis XIV? Faire l'histoire des sciences physiques et mathématiques de la contrée qui forme aujourd’hui le département du Nord. Topographie médicale de Lille et de ses cantons. Aucun mémoire sur ces sujets n'a été présenté. Logements des onvriers. . Durtez, ouvrier serrurier, quai de la Basse-Deüle, 53, a trouvé sa chambre fort sale à son entrée, il y a un an; il a lui-même ME = blanchi le plafond à la chaux, puis à la colle, il a peint à l'huile les boiseries, il a construit deux lits en fer ; aussi ce logement est-il d’une propreté irréprochable. Duriez aime à y rester longtemps ; il occupe les loisirs que lui laisse son état à mouler, à empailler. La propreté du logement exige la propreté du corps, celle’ des vêtements et des habitudes d'ordre, aussi toute la famille est-elle proprement vêtue; le ménage ne fait pas de dettes bien que le salaire soit restreint. La santé, la moralité gagnent beaucoup à ces habitudes que la Société des Sciences serait heureuse de voir s'étendre dans toutes les familles d'ouvriers. La Société décerne une MÉDAILLE D'ARGENT à DURIEZ, pour la bonne tenue de son logement. S 11. AGRICULTURE, La parole est donnée à M. J. Leregvre, Secrétaire de la Com- mission d’Agrieulture, qui proclame les résultats des différents Concours ouverts en faveur de l’économie agricole. Messieurs, La Société vient de décerner une récompense .aux perfeetion- nements apportés à une découverte qui permet de reproduire en un instant les objets avec une fidélité merveilleuse. Elle a couronné des mémoires qui retracent la vie d’un com- patriote qui fut un artiste habile et un philantrope éclairé. Elle vient de signaler à l'attention des ouvriers de la ville ce qu’à fait un ouvrier comme eux, pour rendre son habitation saine et agréable. Fidèle aussi au but de son institution, la Société s’est occupée activement depuis sa dernière réunion solennelle de tous les intérêts agricoles , ainsi elle a défendu, pied à pied, la culture de la betterave, si intimement liée à la richesse de nos contrées, es LE elle à sollicité des modifications à la loi sur l'expertise des tabaes, elle a réclamé l'honneur de continuer à représenter l’arrondisse- ment, alors que des esprits prévenus, méconnaissant les heureuses applications de la science à la pratique des champs, voulaient exclure les Sociétés savantes de la représentation agricole; elle a mis entre les mains de l’Administration une Méthode facile pour connaitre d’une manière précise les ressources alimentaires du pays. L'amélioration notable dans l’ensemble des bêtes bovines, cons- iatée dans le dernier Concours de bestiaux , prouve que les conseils de la Société sont écoutés. Enfin, elle a inscrit dans son programme pour 4854, de nom- breux sujets de primes, qui ont été largement disputés. Cela prouve le zèle et l’émulation qui règne dans nos campagnes. C'est d’un bon augure, Messieurs, car aujourd’hui, comme toujours, le sol est la véritable mamelle de l'Etat. C'est dans les travaux des champs qu’il faut chercher la solu- uon de l’important problème de fournir une nourriture abondante; celui d'employer les bras que les fluctuations trop HAIDÉCRE de l'industrie des villes laissent inoccupés. . Servir les progrès de l’agriculture, c’est donc travailler au lisse être physique de la population et assurer notre richesse nationale ; e’est aussi seconder un puissant moyen de moralisation. Bientôt, en effet, la Société va couronner des vertus modestes qui, sans elle, seraient restées ignorées, elle aime à les proclamer dans cette enceinte, afin de montrer qu'avec une bonne conduite en parvient toujours à s’assurer une vie honorable et utile dans quelque sphère que l’on soit né, et remplir ainsi dignement le rôle que la Société doit attendre de tout homme qu’elle protége. Abeilles. La Société avait inscrit dans son programme une PRIME DE 150 Fr. à décerner à l’agrieulteur qui présenterait le meilleur ensemble RARE — des expériences comparatives faites sur plusieurs systèmes de ruches. Sept concurrents se sont présentés, et malgré les soins apportés dans leurs opérations, malgré les progrès que la Société est heureuse de constater dans le développement de cette partie de l'économie rurale, elle n’a pas cru devoir accorder la prime; mais pour récompenser les résultats obtenus, la Société décerne : à M. Rocs, préposé de l'octroi et cultivateur à Lesquin, une * PRIME de 100 FR.; à M. HenneseLce, à Moulins-Lille, qui a suivi de près son compétiteur, une PRIME DE 50 FR. Instruments aratoîires. La Société décerne : à M. Fiquer, maréehal à Wambrechies, inventeur d’un hache- paille d’une grande simplicité, d’une parfaite solidité, tenant moins’ de place et d’un prix moins élevé que ceux déjà mis en usage, UNE MÉDAILLE D'ARGENT ; « à M. Pierre-Antoine GLortaN, cultivateur à Wavrin, pour un semoir dont ilest l'inventeur, une MENTION HONORABLE. Association pour l'acquisition de semoirs, Désirant faire naître chez les petits cultivateurs l'habitude de l'association, et voulant propager la méthode des semis en ligne, la Société accorde la somme DE 145 FR., pour avoir fait en com- mun l’acquisition d’un Semoir pendant l’année 4851, aux quatre cultivateurs dont les noms suivent : M. Auguste Lezre, cultivateur à Wicres; M. Germain Binaun,, id. M. Félix Lez, id. M. Félix Riccaup, id. oh VS Semis en lignes. ra La Société décerne, pour avoir semé en lignes plus du tiers des terres formant leur exploitation, et pour avoir introduit cette mé- thode dans les communes de Fromelles et de Wavrin : à M. Alexandre Benin, cultivateur à Fromelles, une MÉDAILLE D'ARGENT ; à M. Püierre-Antoine GzoriAn, cultivateur à Wavrin, une MÉDAILLE D'ARGENT. Calture fourragéère du Maïs, La Société décerne 5 à M. Auguste Coustenogze, cultivateur à Radinghem, une MÉDAILLE D'ARGENT, pour avoir introduit dans ses assolements le mais quarantain comme culture fourragère et en avoir semé sur une étendue de plus de 20 ares ; à M. Dusus, de Moulins-Lille, une MÉDAILLE D'ARGENT, pour sa culture du maïs quarantain, pour ses diverses espèces de blé anglais, enfin pour ses essais comparatifs des semis à la volée et en ligne, et dont il a fait connaître le résultat favorable à cette der- nière méthode. Emploi des Vaches pour les travaux agricoles. Depuis trois ans la Société a engagé les cullivateurs dont l’ex- ploitation ne dépasse pas 5 hectares, a utiliser leurs vaches pour le travail des terres. Ses conseils ont été écoutés dans diverses parties de l’arrondissement, et l'expérience a confirmé les prévi- sions de la théorie, à savoir que les vaches bien nourries, soumises à un travail modéré, sont moins exposées aux maladies et four- nissent autant de lait que dans la stabulation permanente. La Société décerne des PRIMES DE 50 FR. à chacun des culti- — XX — vateurs ci-dessous dénommés pour avoir introdait, depuis l’année 1850, le travail des vaches dans leurs petites exploitations : M. Charles THéry, cultivateur, à Ennetières ; M. Jean-Louis LEDEz, id. à Cysoing; M. Denis DouTreziGNE, id. à Wattrelos; M. Louis DELEFOSSE, . id. à Gondecourt ; M. Constant FRuLEUx, id. à Radinghem ; M. Ernest Luraux, id. au Maisnil ; M. Edouard DELENEUVILLE, id. à Gondecourt. Constructions rurales. Voulant encourager la bonne construction des étables, la Société a promis des MÉDAILLES D'OR OU D'ARGENT aux cultivateurs qui, dans l'établissement de nouvelles étables, rempliraient les pres- criptions d’aération et de ventilation indiquées dans son pro- gramme. Elle accorde, pour avoir satisfait à ces conditions : à M. DELERUYELLE, cultivateur à Annappes, une MÉDAILLE D'AR- GENT ; Autre |: à M. Marquanr-Couvreur, cultivateur, à Gondecourt, une MÉDAILLE DE BRONZE Cl UNE PRIME DE 30 FRANCS: Exploitation la mieux tenue. Afin de récompenser, sur les diverses parties de l'arrondissement, les exploitations présentant les meilleures conditions sous tous les rapports, la Société a inscrit dans son programme une MÉDAILLE D'or de la valeur de 200 FR. à la ferme la mieux tenue, ayant une étendue de 15 hectares au moins. En 1851 les cantons de Pont-à- Mareq ei de Seclin devaient seuls concourir. La Société décerne la méparze n’or à M. CozLærre, à Allennes- lez Marais, dont l'exploitation de 48 hectares se recommande pa — XXN — de belles étables, de beaux bestiaux, un assolement bien entendu, une comptabilité régulière. | Elle accorde aussi une MÉDAILLE DE BRONZE et Une MENTION HONORABLE à M. Rasser, cultivateur à Avelin, pour la beauté de ses vaches, pour son mode particulier d'élevage des veaux et pour le nombre de bestiaux entretenus sur son exploitation. Exploitation peu étendue. Il est plus avantageux aux petits cultivateurs de réunir dans le foyer domestique tous les bras valides, que de chercher des occupations dans les grandes villes et.de confier à des étrangers le travail des champs ; l’esprit de famille, la moralité gagnent aussi à des habitudes de cette nature. La Société, désirant encourager ces habitudes, accorde à chacun des cultivateurs dont les noms suivent, une PRIME DE 35 FR. Pour avoir travaillé les terres de leur exploitation avec le seul concours de leurs femmes et de leurs enfants, sans domestiques ni auxiliaires étrangers : MM. Auguste Deraxnoy, cultivateur-maraîcher, à Lompret ; Philippe Macrer, cultivateur à Marquillies ; Honoré Faco, cultivateur, à Thumeries. Chemins communaux. L'amélioration des chemins communaux est intimement liée aux progrès de l’agriculture; elle intéresse l’approvisionnement des divers marchés qui se tiennent dans l’arrondissement de Lille; aussi la Société décerne : à M. Vazzois, maire de Mons-en-Pévèle, une MÉDAILLE D’AR- GeNT, grand module, pour avoir, par son zèle et son initiative, fait construire dans sa commune plus de 12,000 mètres de route pavée. — XXY — Bibliothèques rurales. Afin de seconder les efforts de M. le maire d'Erquinghem-le-Sec et d'augmenter les livres qui doivent servir à l'instruction de ses administrés, la Société fait don à cette commune des ouvrages dont les noms suivent : La Maison des champs, par Pfluger, 4 vol. in-8.° ; Dictionnaire d'agriculture, de François de Neufchâteau, 2 v. in-8.°: De la taille des arbres fruitiers, par Puvis; Simples notions sur l’agriculture, par Barrau ; Guide de l'agriculteur, par Debeauvoys ; Comptabilité agricole en partie simple, par De Grange ; De l'assainissement des terres et du drainage, par Navelle; Guide des cultivateurs, par Dezeimeris ; De la culture du Maïs, par Lelieux ; Petit traité des prairies artificielles, par Robert Parent ; Rudiment agricole, par De Travanet ; Choix des vaches laitières, par Magne ; Veillées villageoises, par Neveu ; Eléments populaires de chimie agricole, par Lhéritier ; Le parfait Fermier, par Chaptal ; Des fumiers considérés comme engrais, par Girardin. Bonne conduite et dévouement, Les habitants de la commune d’Allennes-les-Marais ont porté à la connaissance de M. le Préfet et de la Société des Sciences, le zèle et le dévouement dont le nommé Barthélemi Pozcer, culti- vateur en cette commune, a fait preuve depuis plus de trente ans, et spécialement en 4846-47, pendant la durée de l’épizootie des bêtes bovines. La Société est heureuse de s'associer à ce concert d’éloges et accorde une MÉDAILLE D'HONNEUR, EN ARGENT, au sieur PoLrer, pour son dévouement et sa conduite désintéressée. — XXHL — Le programme indiquait aussi des primes de différentes valeurs pour les sujets suivanis : Manuel élémentaire d'agriculture ; Assèchement des terres humides par le drainage ; Assolements ; Expériences sur le chaulage ; sur les engrais organiques et MNÉT AU ; Prairies artificielles ; Comptabilité agricole ; Arboriculture. Aucune de ces primes n’a été disputée; la Société espère être plus heureuse l’annnée prochaine. AGENTS AGRICOLES. Pour avoir introduit des semoirs et avoir propagé les bonnes méthodes dans leurs communes, la Sociéié décerne : à Louis Barcceux, maitre delabour chez M." veuve Delangre, à Englos, une MÉDAILLE D'ARGENT ; à François Donparne, maitre de labour chez M. veuve Fortry, à Escobecque, une MÉDAILLE D'ARGENT. Bergers. Voulant encourager la fidélité et la bonne conduite des bergers, valets de charrue, servantes de ferme, journaliers agheele la Société décerne : Une Houlette d'argent et une Prime de 30 fr. à Thomas Lerepure, berger depuis 24 ans chez M. Bouchery, à Chéreng; Une Médaille d'argent et une Prime de 95 fr. à Joseph HerrenGr, berger depuis 43 ans chez M. Vallois, à Mons-en- Pevéle. — XXVI — Valets de charrue. La Société décerne : 1.9 Des épis d'argent et une prime de 30 fr. à Joseph Durrez, valet de ferme depuis 60 ans, chez M."° veuve Taftin, à Aubers. 2.9 Une fourche d'honneur et une prime de 25 fr.à Jean- Baptiste Lemame, depuis 55 ans valet de ferme, chez M. Dujardin, à Bersée. 3.° Une médaille d'argent et une prime de 20 fr. à Fidèle LeGranD, depuis 50 ans valet de ferme, chez M. Despature, à Marquette. 4.0 Une médaille d'argent et une prime de 20 fr. à Gabriel Levar, depuis 45 ans valet de ferme, chez M. Idesbald Chombart. à Wicres. 5.9 Une médaille d'argent et une prime de20 fr. à Jean- François Brice, depuis 45 ans valet iles ferme, chez M. Lambelin, à Ennevelin.. 6.° Une médaille d'argent et une ue de 20 fr. à Hilaire Duexnin, depuis 44 ans valet de ferme, chez M. Chombart, à Marquillies. 7.° Une médaille d'argent et une prime de 20 fr. à Au- guste Lapsous, depuis 43 ans valet de ferme, chez M."e veuve Ducatillon, à Leers. 8.° Une médaille d'argent et une prime de 20 fr. à Joseph Darrois, depuis 41 ans valet de ferme, chez M." veuv Béghin, à Fromelles. Journaliers, La Société décerne : 1° Un piquet d'honneur et une prime de 30 fr. à Adrien AV EIL — CaTez, pour 52 ans de services chez M. Hellin, cultivateur à Marcq-en-Barœul. 2.9 Une bèche d'honneur et une prime de 95 fr. à Julien Montreux, pour 48 ans de services chez M. veuve Louis Crépeaux, à Bauvin. 3.° Une médaille d'argent et une prime de 20 fr. à Jean- Baptiste MarcæanD, pour 46 ans de services chez M. veuve Louis Cochet, à Gondecourt. 4.° Une médaille d'argent et une prime de 20 fr. à Valé- rien Desgrens , pour #1 ans de services chez M."° veuve Aimable Marquant, à Gondecourt. 5.° Une médaille d'argent et une prime de 20 fr. à. Camille Goswan, pour 44 ans de services chez M. Jean Gadenne, cultivateur à Hem. 6.° Une médaille d'argent et une prime de 20 fr. à Fran- çois Dupurrs, pour 40 ans de services chez M. Boïdin, à Fournes. 7. Une médaille d'argent et une prime de 20 fr. à Fran- cois DEsBrEens, pour 40 ans de services chez M. Jean-Baptiste Rose, eultivateur à Gondecourt. 8.° Une médaille d'argent et une prime de 20 fr. à Pierre Hsspez, pour 39 ans de services dans la ferme de M. veuve Delannoy, à Leers. Servanies de ferme, La Société décerne : 1.° Une médaille d'argent et une prime de 30 fr. à Alexan- drine Despnvoy, depuis 50 ans chez M. Brulois, à Flers. 2.9 Une médaille d'argent et une prime de 95 fr. à Séraphine Levar, depuis 49 ans chez M. Idesbald Chombart, à Wicres. 3.° Une médaille d'argent etune prime de 20 fr. à Amélie Cocer, depuis 35 ans chez M.° veuve Lemaire, à Mons-en- Pévèle, rl © © |) ce 4.° Une médaille d'argent et une prime de 20 fr. à Angé- lique Wicmor, depuis 26 ans chez M." veuve Marchant, à Gondecourt. S HN. CONCOURS DÉPARTEMENTAL DE BESTIAUX. 1.° Reproduction. TAUREAUX. Race pure de Durham. Point de prime. à M. Lamseuin, de Lesquin, une PRIME DE 200 FR., pour un taureau de race croisée de Durham. Race Hollandaise ou Flamande. 4.7 Prime DE 200 rR., à M. RerCKEBUSE, de Saint-Sylvestre- Cappel. Q.me ïid. 400 rR., à M. Lecar, de Bondues. VACHES OU GÉNISSES. 4.7 Prime DE 450 FR., à M. LeLowG, de Verlinghem. 2.me ïjd. 400 rr., à M. Lepers, de Loos. 3. id. 80 rr., à M. Gruyecce, d'Houplin. MÉDAILLE DE BRONZE lt MENTION HONORABLE. à M. Bernarn, de Roost-Warendin, pour une très-belle vache croisée de Durham, âgée de plus de quatre ans. BÉLIERS. 4. Prise pe 80 rR., à M. Craunorez, de Morbecque. 2. id, 40 rR., à M. Lamis, de Vieux-Berquin. MENTION HONORABLE, à M. Dusus, de Verlinghem. — XXX — Espèce Poreine. 4.7 Prime DE 80 FR., à M. Dunivaux, de Sainghin-en-Mélan- iois, pour un porc anglo-chinois. MENTION HONORABLE, à M. Cornizce, de Marcq-en-Barœul, pour un pore anglo-chinois. 2.° Engraissement. VEAUX. A.7e Prime DE 80 FR., à M. Deroupaix, d'Annœullin. id 50 Fr., à M. Derexoncourr, de Templeuve. 50 Fr, à M. Berxarn, d'Auchy. Dee eine 20 rr., à M. Montel, de Bersée. 9 ,me Lt PORCS. Prix D'HONNEUR DE 400 FR., à M. L. MAsQuELIER, de Saint- André, pour les nombreux pores qu’il a présentés. A. Prime DE 80 FR., à M. MonTarexe, de Thumesnil. ame id. 60 FR., à M. Connie, de Saint-André. MENTION HONORABLE, à M. LEzaIRE, de Croix. Le Président, Prerre LEGRAND. Le Secrétaire-Général, Vicror DELERUE. … Le Secrétaire de la Commission d'Agriculture, J. LEFEBVRE. :0 JUN 188 Lille, — Imp. de Leleux. | che ro. a eg ra DM fai ronon zou sk péri a ñ “Al un UE si . FR ÉPesRerer bras + 4 bei 1$ æ\ SR deb e pe ne an tbe Lu